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Full text of "Oeuvres de P. Corneille"

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LES 

GRANDS  ÉCRIVAINS 

DE  LA  FRANCE 

NOUVELLES     ÉDITIONS 


•UBLIERS    SODS    LA    DIRECTION 

DE  M.  AD.  REGNIER 

Membre  de  l'Institut 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2011  with  funding  from 

University  of  Toronto 


http://www.archive.org/details/oeuvresdepcornei10corn 


OEUVRES 


DE 


P.    CORNEILLE 


TOME      X 


PARIS,    IMPRIMERIE     DE     CH.     LAHURF.     ET    < 

Rue    de    Fleuras,     9 


MARg  9  1974 


OEUVRES  HARl2J973 


DE 


P.  CORNEILLE 


NOUVELLE  EDITION 

KEVUE     SUR     LES     PLUS     ANCIENNES     IMPRESSIONS 
ET    LES    AUTOGRAPHES 

ET    AUGMENTÉE 

de  morceaux  inédits,  des  variantes,  de  notices,  de  notes,  d'un  lexique  des  mots 
et  locutions  remarquables,  d'un  portrait,  d'un   lac-simile,  etc. 


PAR  M.  CH.  MARTY-LA VEAUX 


TOME    DIXIEME 


PARIS 


LIBRAIRIE   DE   L.    HACHETTE   ET   Q 

BOULEVARD      S  AI  JS  T-  GE  H  M  AI  N 
l862 


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POÉSIES  DIVERSES 


Corneille,  x 


NOTICE. 


En  préparant  cette  nouvelle  édition  des  Poésies  diverses  de 
Corneille  nous  nous  sommes  appliqué  d'abord  à  déterminer 
l'époque  précise  à  laquelle  chacune  d'elles  a  été  composée,  ou 
tout  au  moins  publiée  pour  la  première  fois,  afin  de  pouvoir, 
quel  qu'en  fût  d'ailleurs  le  sujet,  suivre  en  les  classant  l'ordre 
des  années;  ensuite  à  recueillir  les  pièces  qui  jusqu'ici  n'avaient 
pas  encore  été  réunies  aux  OEuvres  de  notre  poète  ;  enfin,  sou- 
mettant à  un  examen  approfondi  tant  celles  qui  s'y  trouvaient 
déjà  que  d'autres  qu'on  a,  dans  ces  derniers  temps,  proposé 
d'y  joindre,  nous  nous  sommes  attaché  à  exclure  ce  qui  ne  nous 
paraissait  pas  bien  authentique,  en  ayant  soin  toutefois  de  mettre 
sous  les  yeux  du  lecteur  celles  des  pièces,  soit  douteuses,  soit 
même  faussement  attribuées  à  Corneille ,  qui  donnent  lieu 
à  de  curieux  problèmes,  et  méritent,  au  moins  à  ce  titre,  de 
prendre  place  dans  un  Appendice,  où  l'on  trouvera  aussi  les 
documents  trop  étendus  pour  entrer  dans  la  courte  notice  qui 
précède  chaque  opuscule. 

Ces  notices  partielles,  qui  font  connaître  la  date  de  la  pièce, 
l'occasion  qui  lui  a  donné  naissance,  la  forme  sous  laquelle  elle 
a  d'abord  paru,  pourraient  suffire  à  la  rigueur;  toutefois  il  ne 
sera  peut-être  pas  inutile  d'indiquer  ici  nos  sources  princi- 
pales, et  de  décrire  les  recueils  successifs  et  divers  qui  ont  servi 
à  composer  l'ensemble  de  celui  que  nous  présentons  au  public. 

Les  OEuvres  diverses  de  Pierre  Corneille  publiées  en  1738 
par  l'abbé  Granet,  et  qui  forment  la  première  édition  collec- 
tive des  poésies  mêlées  de  notre  auteur,  contiennent  en  outre 
des  ouvrages  d'un  tout  autre  caractère.  Elles  se  composent  de 
quatre  parties,  qui,  pour  n'être  pas  séparées  par  des  titres  par- 
ticuliers, n'en  sont  pas  moins  fort  distinctes.  La  première  ren- 


4  POESIES   DIVERSES. 

ferme  des  poèmes  de  tout  genre ,  très- variés  de  sujet  et  de 
ton,  et  dont  la  seule  unité,  le  seul  lien  est  d'être  adressés  au 
Roi;  ensuite  viennent  les  Poésies  diverses  proprement  dites; 
puis  les  Louanges  de  la  sainte  Vierge,  et  la  Traduction  de  plu- 
sieurs psaumes,  que  nous  avons  donnée,  dans  notre  tome  IX, 
d'une  manière  plus  complète  et  plus  fidèle,  et  dans  l'ordre 
même  adopté  par  Corneille1;  enfin  les  Arguments  et  Préfaces 
de  quelques  pièces  de  théâtre,  qui,  dans  notre  édition,  ont  pris 
leur  place  naturelle  en  tête  de  chacun  des  ouvrages  auxquels 
ils  se  rapportent.  Pour  les  Poésies  diverses ,  nous  avions  donc 
seulement  à  puiser  dans  les  deux  premières  parties  du  recueil 
de  Granet,  que  les  derniers  éditeurs  ont  maintenues  séparées, 
en  se  contentant  de  faire  passer  au  second  rang  celle  que  Gra- 
net avait  placée  la  première ,  sauf  un  très-petit  nombre  de 
pièces  qu'ils  en  ont  retirées  parce  qu'elles  ne  pouvaient  être 
rangées  sous  le  titre  fastueux  de  Poèmes  sur  les  victoires  du 
Roi,  qu'ils  avaient  jugé  à  propos  de  lui  donner.  Nous  avons 
trouvé  préférable  de  faire  disparaître  cette  division  arbitraire, 
et  de  suivre ,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  dit,  un  ordre  pu- 
rement chronologique. 

Passons  maintenant  en  revue  les  diverses  parties  constitu- 
tives, quelque  peu  importantes,  du  recueil  de  Granet  et  du 
nôtre  ;  cherchons  quels  sont  les  poèmes  dont  il  a  ignoré 
l'existence,  quels  sont  ceux  qu'il  connaissait  et  qu'il  a  écartés 
sciemment  ;  essayons  de  découvrir  ses  principes  de  critique  et 
indiquons  en  même  temps  ceux  qui  nous  ont  guidé. 

Les  pièces  les  plus  anciennes,  et  par  conséquent  les  pre- 
mières dans  notre  recueil  de  Poésies  diverses,  sont  celles  qui 
ont  été  publiées  par  Corneille  lui-même,  sous  le  titre  de  Mé- 
langes poétiques,  et  qui  portent  les  numéros  I  à  XIV,  XVI  et 
XVII.  Elles  ont  paru  à  la  suite  de  Clitandre,  premier  ouvrage 
que  notre  poète  ait  fait  imprimer.  Elles  commencent,  à  la 
page  121  du  volume  contenant  l'édition  originale  de  cette 
tragi-comédie,  par  un  frontispice  qui,  bien  que  le  nom  de 
Corneille  ne  figure  pas  sur  le  premier  titre2,  porte  néanmoins  : 

i.  Voyez  ce  que  nous  avons  dit  au  tome  IX,  p.  61,  de  cette  partie 
de  la  publication  de  Granet. 
2.  Voyez  tome  I,  p.  257. 


NOTICE.  5 

Meslanges  poétiques  du  mesme,  et,  au-dessous,  l'adresse  de 
François  Targa,  et  le  millésime  M. DC. XXXII.  Granet  consi- 
dère ces  pièces  comme  «  composées  vraisemblablement  avant 
l'année  16251,  »  parce  qu'il  fixe  à  cette  date  la  première  repré- 
sentation de  Mélite,  jouée  seulement,  suivant  nous,  en  1629^; 
mais  bien  que  la  pièce  IX  soit  assurément  antérieure  à  cette 
comédie,  que,  suivant  l'expression  de  Thomas,  son  frère  avait 
faite  précisément  pour  «  l'employer3,  »  il  est  certain  néan- 
moins, quelle  que  soit  d'ailleurs  la  date  adoptée  pour  la 
premiè  -e  représentation  de  Mélite,  que  deux  des  pièces  des 
Mélanges  poétiques  sont  postérieures,  non-seulement  à  la  pre- 
mière représentation  de  cet  ouvrage ,  mais  encore  à  celle  de 
Clitandre.  Ces  deux  pièces,  numérotées  XVI  et  XVII,  ont  été 
composées  pour  une  fête  donnée  le  16  mars  i632,  c'est-à-dire 
huit  jours  après  la  date  du  privilège  de  Clitandre  et  quatre  jours 
seulement  avant  celle  de  l'Achevé  d'imprimer  du  volume 4. 

L'abbé  Granet  avait  cru  devoir  tronquer  les  Mélanges  poé- 
tiques. «  Je  n'ai  pas  fait  difficulté,  dit-il,  de  supprimer  des  plai- 
santeries d'un  goût  peu  délicat,  et  divers  traits  d'une  galanterie 
trop  libre5.  »  Ainsi  il  a  fait  disparaître  les  discours  de  V  Ivrogne 
et  du  Joueur ,  qui  terminent  la  pièce  VII ,  et  le  numéro  IX 
tout  entier,  qui  comprend  les  Êpigrammes  d?  Audoenus  (Owen). 
Les  éditeurs  modernes,  tout  en  complétant  les  Mélanges  poé- 
tiques, ont  omis  cependant ,  dans  le  numéro  XI ,  la  troisième 
épigramme,  qui  est,  nous  l'avouons,  fort  peu  claire  et  dont 
d'ailleurs  l'original  ne  se  trouve  pas  dans  le  recueil  latin 
d'Owen.  Comme  elle  est  toutefois  incontestablement  de  Cor- 
neille, nous  l'avons  jointe  aux  autres,  afin  de  suivre  jusqu'au 
bout  le  plan  que  nous  nous  sommes  imposé  de  donner  une 
édition  aussi  fidèle  et  aussi  complète  qu'il  est  possible. 

Non-seulement  nous  avons  placé  les  dernières  les  deux  pièces 
des  Mélanges  poétiques  (nos  numéros  XVI  et  XVII)  dont  nous 
sommes  parvenu  à  fixer  la  date  si  rapprochée  de  celle  de 
l'Achevé  d'imprimer  du  volume  qui  les  contient  à  la  suite  de 

1.  Œuvres  diverses,  Préface,  folio  v,  recto. 

2.  Voyez  tome  I,  p.  129  et  i3o. 

3.  Voyez  tomel,  p.  126.  —  4*  Voyez  tome  I,  p.  257. 
5.   Œuvres  diverses.  Préface,  folio  iv,  recto. 


6  POÉSIES    DIVERSES. 

Clitandre ,  mais,  pour  nous  conformer  exactement  à  l'ordre 
chronologique,  nous  avons  dû  faire  passer  avant  elles  un  qua- 
train composé  à  l'occasion  de  la  tragi-comédie  de  Ligdamon 
et  Lidias,  représentée  en  1629  et  publiée  en  i63i,  quatrain 
adressé  à  Scudéry  par  Corneille,  qui  avait  négligé  d'insérer  ces 
vers  dans  les  Mélanges.  Quoique  réunis  aujourd'hui  pour  la 
première  fois  aux  Œuvres  de  notre  poète,  ils  étaient  pourtant, 
suivant  toute  apparence,  bien  connus  de  Granet,  qui  a  écarté 
systématiquement  presque  toutes  les  pièces  analogues  :  «  Je 
me  suis  abstenu,  dit-il,  de  grossir  ce  recueil  des  vers  que 
M.  Corneille,  suivant  l'usage  de  ces  temps-là,  a  adressés  à  divers 
poètes  dramatiques,  et  d'autres  auteurs,  depuis  i63o  jusqu'en 
1660,  et  qui  ont  été  imprimés  au  commencement  de  leurs  ou- 
vrages, dont  ils  contiennent  l'éloge.  Ces  vers,  faits  ordinaire- 
ment avec  précipitation,  m'ont  paru  froids  et  peu  intéressants. 
Je  n'ai  imprimé  que  deux  ou  trois  pièces  de  ce  genre  pour  en 
faire  connoître  le  caractère1.  »  Une  donne  en  effet  que  les  opus- 
cules qui,  dans  notre  édition,  occupent  le  XXXIe,  le  XXXIIe  et 
le  LXXe  rang  ;  les  éditeurs  qui  nous  ont  précédé  y  ont  ajouté 
les  numéros  XVIII  et  XLV,  et  nous  y  joignons  à  notre  tour 
les  pièces  XV,  XIX,  XXI,  XXXV,  XXXVI,  XL,  XLI  et  XLII. 
Dans  son  édition  de  Corneille,  M.  Lefèvre  avait  fait  une  série 
intitulée  :  Poésies  latines,  qui  n'était  composée  que  de  trois 
articles  ;  encore,  pour  parvenir  à  la  former,  avait-il  été  obligé 
de  séparer  de  leur  texte  français  les  pièces  qui  figurent  dans 
notre  recueil  sous  les  numéros  LXXII  et  LXXX,  et  qui,  pu- 
bliées à  la  fois  en  vers  français  et  en  vers  latins,  devaient  de 
toute  nécessité  demeurer  rapprochées.  Ces  deux  pièces  latines 
une  fois  remises  à  leur  place,  il  n'en  restait  plus  qu'une  seule, 
la  XXe  de  notre  recueil,  qu'à  l'exemple  de  Granet  nous  avons 
cru  devoir  placer  à  son  rang  chronologique  parmi  les  poésies 
françaises.  Cette  pièce  de  vers  dans  laquelle  notre  auteur  fait 
un  éloge  délicat  de  Louis  XIII  et  de  Richelieu,  tout  en  semblant 
s'en  défendre,  et  qui  est  très -intéressante  pour  l'histoire  des 
ouvrages  de  Corneille,  n'a  pas  été  étudiée  par  les  éditeurs  avec 
tout  le  soin  qu'elle  mérite  ;  nous  exprimons  ce  reproche  avec 
d'autant  plus  de  liberté  que  nous  n'en  sommes  pas  nous-même 

1.    Œuvres  diverses,  folio  vu,  verso. 


NOTICE.  7 

exempt.  D'après  le  témoignage  unanime  des  historiens  du 
théâtre,  et  des  meilleurs  biographes  de  Corneille,  nous  avons 
indiqué  la  Place  Royale  comme  ayant  été  représentée  en  i635'; 
mais  il  est  évident  que  cette  date  est  fausse,  puisqu'il  est  ques- 
tion de  cette  comédie  dans  cette  pièce  de  vers  tirée  d'un  re- 
cueil dont  l'Achevé  d'imprimer,  fort  tardif,  est  du  14  août  1634. 
Cette  erreur  en  fait  pressentir  une  autre,  dont  il  est  difficile  au 
reste  de  bien  apprécier  l'étendue.  La  Galerie  du  Palais  et  la 
Suivante  sont  partout  attribuées  à  cette  année  i634,  réduite 
aujourd'hui  pour  nous  à  sept  mois  et  demi  par  la  date  du 
privilège  dont  nous  venons  de  parler.  Si  l'on  considère  que 
les  vers  de  Corneille  se  trouvent  à  peu  près  au  milieu  de  ce 
volume,  qui,  comme  nous  le  verrons  2,  s'imprima  lentement, 
au  fur  et  à  mesure  que  les  manuscrits  arrivaient,  cet  espace 
de  temps  se  trouve  encore  réduit.  Il  est  dès  lors  permis  de 
s'étonner  que  Corneille  ait  ainsi  fait  représenter  trois  pièces 
coup  sur  coup,  et  l'on  peut  avec  beaucoup  de  vraisemblance 
reporter  tout  au  moins  la  Galerie  du  Palais  à  l'année  i633. 

C'est  au  commencement  de  cette  même  année  i633  que 
M.  Edouard  Fournier  place  une  pièce  de  six  stances,  fort 
agréablement  tournée,  mais  que  nous  n'avons  point  recueillie, 
même  dans  V  Appendice  y  car  rien  n'indique  qu'elle  puisse  être 
de  notre  poète.  L'infatigable  chercheur,  qui  la  publie  aux 
pages  vu  et  vin  des  Notes  sur  la  vie  de  Corneille ,  si  souvent 
citées  par  nous,  ne  dit  ni  d'où  il  la  tire,  ni  par  quelles  circon- 
stances elle  est  parvenue  à  sa  connaissance;  et  nos  investiga- 
tions personnelles  n'ont  pu  suppléer  à  ce  défaut  de  tout 
renseignement.  Ces  stances,  qui,  selon  M.  Éd.  Fournier,  au- 
raient été  écrites  pour  un  des  concours  annuels  qui  existaient 
à  Rouen  depuis  le  onzième  siècle,  sous  le  nom  de  Puy  ou  de 
Palinod,  et  dans  lesquels  on  récompensait  par  une  fleur  ou  par 
une  étoile  d'argent  l'auteur  de  la  meilleure  pièce  composée  en 
l'honneur  de  l'immaculée  conception  de  la  Vierge,  ne  sont 
indiquées  dans  aucun  des  ouvrages  qui  parlent  de  cette 
institution3,  ouvrages  où  l'on  a  toutefois  grand  soin  de  men- 

i.  Voyez  tome  II,  p.  219. 

2.  Voyez  ci-après,  p.  65,  la  Notice  de  la  pièce  XX. 

3.  Voyez  Rapport  sur  les  livres  et  autres  objets  relatifs  à  l'Académie 


8  POÉSIES  DIVERSES. 

tionner  les  succès  d'Antoine  et  de  Thomas  Corneille ,  frères  de 
notre  poète  ;  enfin  le  manuscrit  intitulé  :  les  Trois  siècles  pâli- 
nodiques,  conservé  dans  la  bibliothèque  de  Caen,  ne  fait  con- 
naître non  plus,  ni  à  l'année  i633,  ni  à  aucune  autre  date1,  la 
pièce  attribuée  sans  preuve  à  Pierre  Corneille  par  M.  Edouard 
Fournier. 

Nous  avons  dû  au  contraire  admettre  dans  les  OEuvres  de 
notre  poète  une  autre  pièce  qui  se  rattache  à  l'histoire  du  Puy 
de  Palinod  de  Rouen,  le  Remercîment  de  Corneille  pour  Jac- 
queline Pascal,  lorsqu'elle  remporta  le  prix  de  poésie.  Ce 
remercîment,  bien  qu'il  eût  paru  longtemps  avant  la  dernière 
édition  de  M.  Lefèvre ,  a  été  réuni  pour  la  première  fois  aux 
Œuvres  de  notre  poêle  dans  l'édition  publiée  en  i856  à  l'im- 
primerie Lahure;  mais  dans  cette  édition  de  i856,  dépourvue 
de  tous  commentaires,  il  n'est  pas  entouré  des  renseignements 
indispensables,  si  accessibles  à  tous  aujourd'hui,  grâce  aux 
recherches  de  M.  Cousin. 

Après  que  Jacqueline  Pascal  eut  obtenu  de  Richelieu  la  grâce 
de  son  père  en  représentant,  à  l'âge  de  treize  ans,  à  la  grande 
satisfaction  du  Cardinal ,  un  rôle  assez  important  dans  V Amour 
tyrannique  de  Scudéry,  Etienne  Pascal,  rappelé  de  l'exil  auquel 
il  s'était  condamné,  fut  envoyé  à  Rouen  comme  intendant  de 
Normandie.  «  M.  Corneille,  dit  Gilberte  Pascal  dans  sa  Vie  de 
Jacqueline,  publiée  pour  la  première  fois  par  M.  Cousin,  ne 
manqua  pas  de  venir  nous  voir;  il  étoit  ravi  de  voiries  choses 
que  faisoit  ma  sœur,  et  il  la  pria  de  faire  des  vers  sur  la  con- 
ception de  la  Vierge,  qui  est  le  jour  qu'on  donne  les  prix.  Elle 
fit  des  stances,  et  on  lui  en  porta  le  prix  avec  des  trompettes 
et  des  tambours  en  grande  cérémonie.  Elle  recevoit  cela  avec 

des  Palinods,  achetés  à  la  vente  de  M.  Licquet,  et  Notice  sur  cette  asso- 
ciation; présentés  à  l'Académie de  Rouen....  le  22  novembre  i833 

par  A.  G.  Ballin (Précis....  des  travaux  de  l'Académie  pendant  Van- 
née i834j  tome  XXXVI,  p.  197  et  suivantes.) —  Suite  à  la  notice..., 
tome  XL,  p.  296  et  suivantes.  —  Deuxième  suite  à  la  notice. .., 
tome  XLV,  p.  227  et  suivantes.  —  Des  Puy  s  de  Palinods  en  géné- 
ral ,  etc.,  par  Bottée  de  Toulmon,  Revue  française,  juin  i838,  p.  102 
et  suivantes. 

1.  Notre  confrère  M.  Eugène  Châtel ,  archiviste  du  Calvados,  a 
bien  voulu  se  charger  de  cette  vérification, 


NOTICE.  9 

une  indifférence  admirable;  et  elle  étoit  même  si  simple,  que, 
quoiqu'elle  eût  alors  quinze  ans,  elle  avoit  toujours  des 
poupées  qu'elle  habilloit  et  désbabilloit  avec  autant  de  plaisir 
que  si  elle  n'eût  eu  que  dix  ans1.  »  A  la  séance  du  mois  de 
décembre  1640,  quand  M.  de  Nonant ,  lieutenant  de  Roi  au 
ducbé  d'Alençon,  président  ou,  comme  on  disait  alors,  prince 
du  Puy,  proclama  la  victoire  de  Jacqueline,  la  petite  fille  n'était 
pas  présente;  mais  Corneille,  qui  l'avait  engagée  à  concourir, 
n'avait  eu  garde  de  manquer  la  séance,  et  tout  heureux  du 
succès  de  sa  jeune  protégée,  il  improvisa  le  Remerciaient  qu'on 
lira  plus  loin  (voyez  pièce  XXIV,  p.  81). 

Cette  pièce  se  trouve  à  la  page  663  du  manuscrit  des  Mé- 
moires de  Marguerite  Périer*.  On  rencontre  d'abord,  à  la  page 
que  nous  venons  d'indiquer  et  à  la  suivante,  les  vers  de  Jac- 
queline Pascal,  intitulés  :  Sur  la  conception  de  la  Vierge  pour 
les  palinods  de  Cannée  1640,  qui  remportèrent  le  prix  de  la 
Tour,  Stances;  ensuite  la  pièce  de  Corneille,  dont  voici  le 
titre  complet  :  Remerciment  fait  sur-le-champ  par  Mr  Cor- 
neille lorsque  le  prix  fut  adjugé  aux  stances  précédentes  ; 
et  enfin,  avec  la  date  de  décembre  1641,  une  seconde  pièce 
de  Jacqueline  Pascal ,  répondant  cette  fois  en  son  propre 
nom,  intitulée  :  Remerciment  pour  le  prix  des  stances  Vannée 
suivante. 

Le  Remerciment  de  Corneille  signalé  en  1842  par  M.  Sainte- 
Beuve  dans  son  Histoire  de  Port-Royal*  a  été  publié  par  M.  Cou- 
sin dans  le  Bulletin  du  bibliophile  (6e  série,  1 843- 184 4 5 
p.  273),  et  presque  simultanément  dans  la  Bibliothèque  de 
CÉcole  des  chartes  (ire  série,  tome  V,  p.  33o),  où  l'on  trouve 
aussi  les  deux  pièces  de  Jacqueline  Pascal  dont  nous  venons 
de  parler.  On  peut  consulter  encore  à  ce  sujet  Y  Histoire  de  la 
vie  et  des  ouvrages  de  P.  Corneille  par  M.  J.  Tascbereau.  ie  édi- 
tion, p.  106  et  3 17,  et  les  Mémoires  de  t Académie  de  Rouen, 
tome  XXXVI,  p.  197,  et  tome  L,  p.  293. 

Nous  trouvons  dans  les  Œuvres  diverses  publiées  par  Granet 
trois  pièces  composées  pour  la  Guirlande  de  Julie,  à  l'occasion 

1.  Bibliothèque  de  V Ecole  des  chartes,  ire  série,  tome  V,  p.  3o8. 

2.  Bibliothèque  impériale,  fonds  français  12988. 

3.  Tome  II,  p.  469,  2e  édition. 


io  POÉSIES  DIVERSES. 

desquelles  l'éditeur  reproduit  dans  sa  Préface *  le  passage 
suivant  du  Huetiana 2  :  «  Jamais  l'amour  n'a  inventé  de  ga- 
lanterie plus  ingénieuse,  plus  polie  et  plus  nouvelle  que  la 
guirlande  de  Julie,  dont  le  duc  de  Montausier  régala  Julie 
d'Angennes  un  premier  jour  de  l'an,  lorsqu'il  la  recherchoit 
en  mariage.  Il  fit  peindre  séparément  en  miniature  toutes  les 
plus  belles  fleurs  par  un  excellent  peintre  (Robert),  sur  des 
morceaux  de  vélin  de  même  grandeur.  Il  fit  ménager  au 
bas  de  chaque  figure  assez  d'espace  pour  y  faire  écrire  un 
madrigal  sur  le  sujet  de  fleur  qui  y  étoit  peinte,  et  à  la 
louange  de  Julie.  Il  pria  les  beaux  esprits  de  ce  temps-là,  qui 
presque  tous  étoient  de  ses  amis,  de  se  charger  de  la  composi- 
tion de  ces  pièces,  après  s'en  être  réservé  la  meilleure  partie. 
Il  fit  écrire  au  bas  de  chaque  fleur  son  madrigal  par  un  homme 
qui  avoit  beaucoup  de  réputation  pour  la  beauté  de  son  écri- 
ture (Jarry).  Il  fit  ensuite  relier  tout  cela  magnifiquement 
(par  le  Gascon).  Il  en  fit  faire  deux  exemplaires  tout  pareils, 
et  fit  enfermer  chacun  dans  un  sac  de  peau  d'Espagne.  Voilà 
le  présent  que  Julie  trouva  à  son  réveil  sur  sa  toilette  le  pre- 
mier jour  de  l'année  i633  ou  i634.  » 

Tout  est  exact  dans  ce  récit,  excepté  l'année  à  laquelle  Huet 
place  le  présent  du  duc  de  Montausier.  Le  frontispice  du  ma- 
nuscrit composé  d'une  guirlande,  au  milieu  de  laquelle  on  lit  : 
La  Guirlande  de  Julie,  pour  Mademoiselle  de  Rambouillet 
Julie -Lutine  d '  Angennes ,  porte  la  date  de  1641.  Cette  date 
concorde  parfaitement  avec  le  témoignage  de  Tallemant  des 
Réaux,  qui  nous  apprend  que  Montausier  envoya  ce  présent 
à  Mlle  de  Rambouillet  a  trois  ou  quatre  ans  avant  que  de 
l'épouser3.  »  Leur  mariage  ayant  eu  lieu  le  i5  juillet  164$, 
cette  indication  nous  reporte  bien  à  l'année  1641. 

Le  recueil  de  Sercy,  dont  nous  aurons  à  parler  tout  à 
l'heure  plus  longuement,  et  dans  la  seconde  partie  duquel  la 
Guirlande  de  Julie  a  paru  pour  la  première  fois  en  i653, 
marque  trois  pièces  comme  étant  de  Corneille  :  la  Tulipe ,  la 
Fleur  d! orange  et  V Immortelle  blanche.  Granet,  qui  a  mis  ces 
pièces  dans  son  recueil,  et  qui  les  classe,  non  suivant  l'époque 

1.  Folio  v.  —  2.  Paris,  1722,  p.  io3. 
3.   Historiettes t  tome  II,  p.  528. 


NOTICE.  ii 

où  elles  ont  été  composées,  mais  d'après  l'année  où  Sercy  les  a 
imprimées,  les  reproduit  sans  y  rien  ajouter,  et  la  plupart  des 
éditeurs  ont  suivi  son  exemple.  M.  Taschereau  est  d'avis  d'en 
attribuer  trois  autres  à  Corneille.  «  Ce  dernier,  dit-il,  porta 
la  parole  au  nom  du  lis,  de  la  tulipe,  de  l'hyacinthe,  de  la 
fleur  d'orange,  de  la  fleur  de  grenade  et  de  l'immortelle 
blanche1.  »  —  «  Granet,  ajoute-t-il  en  note2,  n'attribue  à  Cor- 
neille que  la  Tulipe,  la  Fleur  cV orange  et  P  Immortelle  blanche. 
S'il  eût  lu  la  Guirlande  de  Julie  attentivement,  il  se  serait 
aperçu  que  les  trois  autres  pièces  portent  la  même  signature  C,  et 
il  eût  senti  qu'il  y  avait  les  mêmes  raisons  pour  les  regarder 
comme  sorties  également  de  la  plume  de  Corneille.  Des  édi- 
teurs de  la  Guirlande,  et  notamment  M.  Nodier,  sont  plus 
conséquents  dans  leur  erreur  en  les  attribuant  toutes  six  au 
même  auteur,  Conrart.  »  Conformément  à  cette  opinion,  l'édi- 
teur des  Œuvres  complètes  de  Corneille,  publiées  à  l'imprimerie 
Lahure,  n'a  pas  hésité  à  admettre  les  trois  pièces  jusque-là 
repoussées.  Quant  à  nous,  déterminé  moins  par  l'exemple  de 
Granet  que  par  celui  de  Sercy,  qui  était  probablement  guidé 
par  des  renseignements  positifs  lorsqu'il  n'attribuait  à  Corneille 
que  trois  des  six  pièces  signées  C.  dans  le  manuscrit  original, 
nous  n'osons  être  plus  décisif  que  lui ,  et  nous  nous  conten- 
tons de  renvoyer  à  Y  Appendice  les  trois  pièces  qui  sont  l'objet 
du  litige. 

Le  Presbytère  d'B.énouville,  que  l'ordre  chronologique  amène 
après  la  Guirlande  de  Julie,  est  un  agréable  petit  poème  qu'on 
voit  volontiers  figurer  parmi  les  GEuvres  de  Corneille.  Peut-être 
est-ce  là  le  motif  qui  l'y  a  fait  admettre  si  facilement.  Examinons 
cependant  la  manière  dont  il  s'y  est  introduit ,  et  voyons  s'il 
y  a  lieu  de  l'y  maintenir.  En  i834,  M.  Emm.  Gaillard  publia 
dans  le  Précis  analytique  des  travaux  de  V Académie  de  Rouen 
(p.  164-169)  un  mémoire  intitulé  :  Nouveaux  détails  sur  Pierre 
Corneille  recueillis  dans  V année  où  Rouen  érige  une  statue  à 
ce  grand  poêle.  Ce  mémoire  commence  ainsi  :  «  Corneille 
naquit  un  samedi  et  mourut  un  dimanche.  Il  vécut  cinquante- 

1.  Histoire  de  la  vie  et  des  ouvrages  de  P.  Corneille,  deuxième  édi- 
tion, p.  107  et  108. 

2.  Page  3 18. 


ia  POÉSIES   DIVERSES. 

six  ans  à  Rouen,  y  élevant  six  enfants,  y  soignant  sa  vieille 
mère,  et  passant  ses  étés  à  Hénouville  jusqu'à  l'époque  de 
son  mariage.  M.  l'abbé  Antoine  Legendre,  curé  d'Hénouville, 
était  son  ami  intime.  C'était  dans  un  presbytère  que  Corneille 
venait  jouir  des  beaux  jours.  Ils  allaient  ensemble  voir  cette  vue 
ravissante  de  la  Seine,  que  nous  admirons  tant  des  hauteurs 
d'Hénouville.  L'abbé  Legendre  lui  parlait  de  la  Manière  de  bien 
cultiver  les  arbres  fruitiers,  car  ce  physicien,  né  au  Vaudreuil, 
a  contribué  à  l'édition  de  ce  livre  très-estimé,  s'il  n'en  a  été 
l'auteur;  et  Corneille  faisait  pour  lui  la  description  en  vers  du 
presbytère  d'Hénouville,  ouvrage  que  le  père  de  la  tragédie 
fit  imprimer  à  Rouen  en  1642,  sous  le  format  in-12.  Alors  Cor- 
neille avait  trente- six  ans,  et  était  marié  depuis  deux  ans;  il 
ne  pouvait  plus  songer  à  passer  ses  vacances  chez  un  prêtre, 
où  une  jeune  femme  et  des  petits  enfants  auraient  mal  figuré.» 

Ce  petit  récit  est  sinon  contredit,  au  moins  gêné  par  une 
étude  récente  de  M.  Gosselin ,  qui  de  son  côté  déclare  tout 
aussi  affirmativement  que  Corneille  passa  pendant  toute  sa 
jeunesse  la  belle  saison  dans  une  maison  acquise  par  son  père 
le  16  juin  1608  à  Petit-Couronne,  «  C'est  là  indubitablement , 
dit-il,  que  l'auteur  du  Cid  vint  s'inspirer;  c'est  là,  sous  ces 
grands  arbres  de  la  forêt,  que,  tout  jeune  homme,  il  alla  rêver 
à  sa  chère  Mélite;  et  c'est  là  aussi,  en  présence  de  ces  côtes  si 
belles  et  si  pittoresques  qui  longent  la  Seine  de  Rouen  à  la 
Rouille,  qu'il  médita  les  œuvres  immortelles  qui  devaient  por- 
ter son  nom  si  haut  et  si  loin  l.  »  On  voit  que  M.  Gosselin  re- 
vendique pour  Petit- Couronne  l'honneur  que  M.  Gaillard  attri- 
buait à  Hénouville  ;  il  ne  peut  pas  se  dire  bien  sûr,  lui  non  plus, 
du  détail  des  faits,  mais  la  possession  continue  par  Corneille  de 
la  maison  de  campagne  que  son  père  avait  achetée,  donne  au 
moins  une  certaine  vraisemblance  à  sa  conjecture. 

Du  reste,  que  Corneille  ait  passé  tous  ses  étés  à  Hénouville, 
ou  qu'il  y  ait  seulement  visité  parfois  son  ami,  il  demeure  très- 
possible,  dans  les  deux  cas,  qu'il  soit  l'auteur  du  petit  poëme 
qui  nous  occupe  ;  mais  nous  tenions  à  montrer  que  les  rensei- 

1.  Pierre  Corneille  {le père) et  sa  maison  de  campagne.  Extrait  de 

la  Revue  de  Normandie  des  3i  mai  et  3o  juin    1864.  —   Rouen,  imp. 
deE.  Cagniard,  p.  3o. 


NOTICE.  i3 

gnements  fournis  par  M.  Gaillard,  qui  sont  le  point  de  départ 
de  l'attribution  du  Presbytère  cïHénoiwille  à  Corneille,  sont 
loin  d'être  à  l'abri  de  toute  critique  et  exacts  de  tout  point. 
Le  Presbytère  d'Hénouville  est  demeuré  fort  longtemps  sans 
attirer  d'une  façon  sérieuse  l'attention  des  amis  de  Corneille. 
M.  Taschereau,  qui  connaissait  bien  le  mémoire  de  M.  Gail- 
lard, qui  s'est  trouvé  en  dissentiment  avec  lui  au  sujet 
de  la  qualification  de  gentilhomme  ordinaire  du  Roi,  donnée  à 
Corneille,  qui  même  a  relevé  en  plaisantant  la  phrase  assez 
singulière  par  laquelle  commence  le  mémoire  de  M.  Gaillard  ', 
n'a  pas  dans  son  édition  de  i855  dit  un  seul  mot  du  Presbytère 
d'Hénouville,  soit  pour  l'admettre,  soit  pour  l'écarter  comme 
un  ouvrage  attribué  faussement  au  poète  dont  il  a  écrit  la  vie 
avec  une  sollicitude  si  constante  et  si  éclairée.  Plus  hardi, 
Lefèvre  admet  sans  hésiter,  dans  l'édition  de  i854  des  OEuvres 
de  Corneille,  le  Presbytère  d'Hénouville.  Nous  devons  ajouter 
que  dans  un  précédent  travail  nous  avons  accepté  cette  attri- 
bution de  confiance2,  et  qu'elle  a  été  adoptée  plus  tard  par 
des  juges  fort  compétents,  MM.  Brunet3  et  Fournier4.  Toute- 
fois, en  examinant  aujourd'hui  les  choses  de  plus  près,  nous 
nous  sentons  disposé  à  être  beaucoup  moins  afïirmatif.  Cette 
pièce  n'est  pas  signée,  même  d'une  simple  initiale;  le  libraire 
Eoullenger,  chez  qui  elle  a  paru,  n'a  jamais,  à  notre  connais- 
sance, rien  publié  de  Corneille  ;  enfin  un  indice ,  insuffisant  à 
coup  sûr  pour  décider  la  question,  mais  qui  ne  doit  peut-être 
pas  non  plus  être  entièrement  négligé,  nous  porterait  à  croire 
que  le  Presbytère  d'Hénouville ,  composé  par  quelque  poète 
normand,  ami  commun  de  Legendre  et  de  Corneille,  est  adressé 
à  ce  dernier.  Dans  Mélite ,  et  probablement  aussi  dans  un 
dialogue  qu'on  trouvera  ci-après,  p.  5o,  Tircis  est  le  nom 
poétique  que  Corneille  s'est  choisi  lui-même  :  or  le  Presbytère 
d'Hénouville  est  adressé  «  à  Tircis.  »  Nous  n'avons  pas  voulu, 


i.  Histoire  de  la  vie  et  des  ouvrages  de   P.  Corneille,  2e  édition, 
p.  277. 

2.  De  la  langue  de  Corneille,  1861,  in-8°,  p.  4$. 

3.  Manuel  du  libraire,  dernière  édition,  tome  II,  p.  286. 

4.  Notice  sur  la  vie  de  Corneille,  en  tête  de  Corneille  à  la  butte  Saint- 
Roch,  p.  lxxi  et  lxxii. 


14  POÉSIES   DIVERSES. 

malgré  nos  doutes,  rejeter  cette  jolie  pièce,  admise  déjà  deux 
fois  dans  les  Œuvres  de  notre  poëte  ;  mais  Y  Appendice  nous 
a  paru  le  seul  endroit  où  elle  pût  figurer. 

C'est  aussi  à  V Appendice  que  nous  avons  placé  une  Êpi- 
tophe  de  Richelieu,  écrite  de  la  main  même  de  Corneille  au  dos 
d'un  brouillon  d'acte  dont  nous  aurons  à  parler  plus  loin  et 
qui  a  été  découvert  dans  les  archives  du  parlement  de  Nor- 
mandie, par  M.  Gosselin,  grenier  à  la  cour  impériale  de  Rouen. 
Ces  vers  ont  été  publiés  en  1857  par  M.  Taschereau1,  qui  les 
attribue  à  Corneille.  Nous  ne  pensons  pas  qu'il  en  soit  l'auteur: 
nous  croyons  qu'il  s'est  contenté  d'écrire  au  dos  d'un  brouil- 
lon une  épitaphe  ou  plutôt  une  épigramme  qu'on  venait  de  lui 
réciter  et  qui  lui  paraissait  piquante.  Ce  qui  semble  confirmer 
cette  opinion,  c'est  que  cette  épitaphe  a  paru,  en  1693,  dans 
le  Tableau  de  la  vie  et  du  gouvernement  de  Messieurs  les  cardi- 
naux Richelieu  et  Mazarin  et  de  Monsieur  Colbert,  représenté 
en  diverses  Satyres  et  Poésies  ingénieuses.,..  A  Cologne ,  chez 
Pierre  Marteau,  in-8°,  p.  55,  et  que  l'auteur  de  ce  recueil 
n'a  certes  pas  été  la  chercher  sur  le  dossier  du  greffe  de 
Rouen  ;  il  faudrait  donc  croire,  si  Corneille  en  était  l'auteur, 
qu'il  en  aurait  distribué  des  copies,  ce  qui,  dans  sa  position 
à  l'égard  de  Richelieu,  ne  paraît  nullement  vraisemblable. 
Ajoutons  que,  dans  le  livre  de  1693  que  nous  venons  de  citer, 
on  trouve,  à  la  suite  de  l'épitaphe  écrite  par  Corneille  sur  le 
dossier  de  Rouen,  une  autre  épigramme  où  une  pensée  fort 
analogue  est  exprimée  sous  une  forme  presque  identique. 

Pour  ce  qui  est  du  classement  chronologique  des  pièces, 
nous  en  avons  déplacé  un  grand  nombre ,  et  presque  toujours 
il  nous  a  suffi,  afin  de  justifier  le  nouvel  ordre,  de  signaler 
brièvement,  dans  les  notices  partielles,  les  faits  que  nous  a 
révélés  une  étude  plus  attentive  des  éditions  originales  de  cer- 
tains recueils2,  ou  les  erreurs  matérielles  échappées  à  quel- 


1.   OEuvres  complètes  de  P.  Corneille,  tome  I,  p.  xx. 

1.  C'est  ainsi  que  la  plupart  des  pièces  du  recueil  de  Sercy  se 
trouvent  déplacées  par  la  connaissance  des  premières  éditions  des 
cinq  volumes  de  la  collection,  qui  datent  de  i653-i66o,  et  non 
de  1 660-1 665,  comme  l'avait  cru  Granet,  ni  même  de  1660,  comme 
l'avait  pensé  Lefèvre.  Voyez  ci-après,  p.  16  et  suivantes. 


NOTICE.  i5 

ques-uns  de  nos  devanciers1.  Toutefois  il  est  un  petit  poëme 
au  sujet  duquel  il  convient  d'entrer  dans  quelques  détails  qui 
seront  mieux  à  leur  place  ici. 

M.  Ludovic  Lalanne  a  découvert  dans  le  portefeuille  217  du 
recueil  manuscrit  des  Godefroy  de  la  bibliothèque  de  l'Institut 
un  sonnet  fort  curieux  de  Corneille,  qu'il  a  publié  dans  le  nu- 
méro du  26  mars  i853  de  V  Athenœum  français.  Dans  ce  son- 
net, notre  poëte  se  plaint  au  Roi  de  ce  qu'on  veut  lui  enlever 
les  privilèges  qui  lui  avaient  été  conférés  par  les  lettres  de 
noblesse  accordées  à  son  père2.  Il  était  fort  naturel  de  sup- 
poser que  cette  fière  supplique  était  postérieure  à  l'édit  célèbre 
du  mois  de  septembre  1664,  par  lequel  Louis  XIV  révo- 
quait toutes  les  lettres  de  noblesse  accordées  depuis  le  ier  jan- 
vier i634  :  M.  Lalanne,  dans  la  petite  notice  qui  accompagnait 
sa  découverte,  et  M.  Taschereau,  dans  son  Histoire  de  la  vie  et 
des  ouvrages  de  Corneille 3,  ont  tous  deux  adopté  cette  opinion  ; 
mais  quelques  vers  de  Boisrobert  prouvent  qu'elle  n'est  pas 
exacte  et  que  les  plaintes  de  Corneille  remontaient  à  une  épo- 
que beaucoup  plus  reculée.  La  réclamation  de  Boisrobert, 
adressée  à  Seguier,  est  intitulée  :  A  Monseigneur  le  Chancelier. 
En  voici  l'argument  :  //  lui  veut  rendre  ses  lettres  d* anoblisse- 
ment s'' il  ne  le  fait  distinguer  des  autres  nouveaux  anoblis  sur 
lesquels  on  a  mis  des  taxes.  Après  avoir  exposé  ses  propres 
doléances,  Boisrobert  ajoute  : 

J'apprends  que  l'illustre  Corneille 
Souffre  une  disgrâce  pareille. 
Penses-tu  que  les  bons  auteurs 
Soient  un  gibier  à  collecteurs  ? 
Distingue-nous  de  la  canaille 
Qui  pour  s'affranchir  de  la  taille 
A  beaux  deniers  ont  acheté 
Cette  nouvelle  qualité. 

Voyons  maintenant  de  quelle  époque  datent  ces  vers  ;  ils  se 

1.  Le  Sonnet  à  M.  de  Campion,  par  exemple,  que  Lefèvre  date  de 
1647  et  place  en  conséquence,  n'est  réellement  que  de  1657.  Voyez 
ci-après,  p.  137  et  i38. 

2.  Voyez  ci-après,  pièce  XLIV,  p.  i35,  et  tome  III,  p.  i5  et  16. 

3.  Pages  199  et  200,  2e  édition. 


i6  POÉSIES    DIVERSES. 

trouvent  dans  la  seconde  partie  des  Épures  de  Boisrobert i,  dont 
voici  le  titre  exact  et  complet  :  Les  Epistres  en  vers  et  autres 
œuvres  poétiques  de  MT  de  Bois-Robert-Metel,  Conseiller  d'Estat 
ordinaire,  Abbé  de  Chastillon  sur  Seine,  à  Paris,  chez  Augus- 
tin Courbé...,  M.DC.LIX,  in-8°.  L'Achevé  d'imprimer  de  ce 
volume  est  du  «  10.  iour  de  May  i65g.  »  On  voit  par  là  que 
le  sonnet  de  Corneille  est  au  moins  de  cinq  ans  plus  ancien 
qu'on  ne  Fa  pensé;  mais  comme  il  existe  une  déclaration  du 
3o  décembre  i656  sur  les  nouveaux  anoblis,  il  est  probable 
que  les  deux  réclamations  poétiques  de  Corneille  et  de  Bois- 
robert furent  rédigées  l'année  suivante  et  doivent  être  placées 
en  1657.  Plus  tard,  la  Fontaine  en  fit  une  du  même  genre; 
mais,  comme  le  remarque  M.  Walckenaer,  elle  est  nécessaire- 
ment postérieure  au  20  avril  16622. 

Le  sonnet  A  Monseigneur  le  Duc  de  Guise  (pièce  LXVI, 
p.  182),  que  tous  nos  prédécesseurs  ont  placé  à  1640,  et  que, 
par  des  motifs  exposés  dans  la  notice  qui  le  précède,  nous  avons 
transporté  à  l'année  1664,  fournit  encore  un  exemple  des 
changements  considérables  qui  étaient  à  faire  dans  le  classe- 
ment des  Poésies  diverses. 

Nous  avons  dit  plus  haut  que  nous  reviendrions  sur  le  re- 
cueil de  Sercy;  nous  allons  en  donner  une  description  dé- 
taillée. Il  renferme  un  grand  nombre  de  petites  pièces  signées 
Corneille;  et  pour  juger  de  leur  degré  d'authenticité  et  les 
classer  suivant  leur  date  avec  autant  d'exactitude  qu'il  est 
possible,  il  importe  de  bien  connaître  cette  collection,  sou- 
vent réimprimée,  qu'on  ne  cite  pas  d'ordinaire  d'après  les 
éditions  originales,  et  qu'on  n'a  pas  encore  examinée  d'assez 
près.  Ces  éditions  originales  sont  rares  ;  néanmoins  on  les 
trouve  toutes  à  la  Bibliothèque  impériale,  et  c'est  d'après 
les  exemplaires  de  cet  établissement  que  nous  allons  les  dé- 
crire. Le  recueil  se  compose  de  cinq  parties ,  chacune  en 
un  volume  in- 12.  La  première  contient  le  privilège,  accordé 
pour  neuf  ans  et  daté  du  «  19.  iour  de  Ianuier  i653  ;  »  on 
lit  à  la  fin  :  «  Acheué  d'imprimer  le  24.  Mars  i653.  »  Ce  vo- 

1.  Pages  ii3  et  114, 

2.  Histoire  de  la  vie  et  des  ouvrages  de  J.  la  Fontaine,  3e  édition, 
p.  106. 


NOTICE.  17 

lume  porte  le  titre  suivant  dont  nous  conservons  la  disposition 
matérielle  : 

Poésies  choisies 

de  messieurs 

Corneille.  De  Montereuil. 

Bensserade.  Vignier. 

De  Scudery.  Chevreau. 

Boisrobert.  Malleville. 

Sarrasin.  Tristan. 

Desmarests.  Testu. 

Bertaud.  Maucroy. 

S.  Laurent.  De  Prade. 

Colletet.  Girard. 

La  Mesnardiere.  De  l'Age. 

Et  plusieurs  autres. 

A.  Paris, 

Chez  Charles  de  Sercy,  au  Palais,  dans  la  Salle 

Dauphine,  à  la  Bonne-Foy  couronnée. 

M.DC.LIII. 

Avec  Privilège  du  Roy. 

L'Achevé  d'imprimer  de  la  seconde  partie  est  du  ri*.  Aoust 
[653  ;  »  celui  de  la  troisième,  du  «  6.  Feurier  i656;  »  celui  delà 
quatrième,  du  12.  Ianuier  i658;  »  entin  celui  de  la  cinquième 
et  dernière,  du  «  18.  Aoust  1660.» 

Le  plus  ordinairement  les  pièces  qui  composent  ce  recueil 
sont  signées  en  toutes  lettres  ;  il  n'est  pas  rare  néanmoins 
qu'elles  le  soient  seulement  d'initiales  ;  parfois  elles  sont  ano- 
nymes ;  enfin  il  arrive  qu'une  pièce  anonyme  dans  le  recueil 
est  signée  à  la  table  des  matières.  Mais  il  n'est  pas  à  croire 
qu'à  moins  de  motifs  tout  particuliers,  les  pièces  de  Cor- 
neille ,  dont  le  nom  figure  le  premier  sur  le  titre,  aient  été 
insérées  dans  le  recueil  sans  porter  de  nom,  ou  même  qu'on  ne 
les  ait  signées  que  de  la  simple  initiale  C. 

Examinons  maintenant  quelle  est  sa  part  dans  cette  multitude 
de  poésies  en  général  assez  médiocres. 

Dans  le  premier  volume,  publié,  comme  nous  l'avons  dit, 
en  i653,  nous  trouvons  (p.  235-238)  la  pièce  XXXIV  et 
Corneille,  x  2 


,8  POÉSIES   DIVERSES. 

(p.  399-402)  les  pièces  XXXVII-XXXIX  de  notre  édition  des 
Poésies  diverses  ;  elles  sont  signées  en  toutes  lettres  et  ne  peu- 
vent donner  lieu  à  aucun  doute.  A  ces  quatre  pièces  incontes- 
tables, M.  Paul  Lacroix  voudrait  ajouter  un  sonnet  qui,  ano- 
nyme dans  le  recueil,  est  signé  C.  à  la  table  des  pièces. 
Suivant  M.  Lacroix,  ce  sonnet  «  date  sans  doute  de  l'époque  où 
le  grand  poète,  victime  de  la  jalousie  littéraire  de  Richelieu, 
cessa  d'être  un  des  cinq  auteurs  du  Palais-Cardinal  et  se  retira 
de  la  cour,  où  il  n'avait  fait  que  passer  en  se  sentant  mal  à 

l'aise  dans  le  rôle  de  courtisan Il  faut  choisir  entre  Cottin, 

Chevreau  et  Corneille  ;  nous  n'hésitons  pas  après  avoir  lu  ces 
beaux  vers  cornéliens1.  »  Quant  à  nous,  nous  l'avouons,  nous 
ne  sommes  nullement  convaincu  ;  les  vers  sont  assez  beaux  en 
effet,  mais  n'ont  rien,  à  notre  avis,  de  vraiment  cornélien  ;  et 
si  nous  éprouvons  quelque  embarras  à  les  abandonner  à  Cottin, 
nous  n'en  ressentons  aucun  à  les  renvoyer  à  Chevreau.  Nous 
recueillons  d'ailleurs  la  pièce  à  Y  Appendice  (n°  VI,  p.  3f>4)» 
afin  que  le  lecteur  puisse  se  prononcer  suivant  son  impression, 
car  il  est  à  peu  près  impossible  d'invoquer,  en  pareille  circon- 
stance, de  véritables  preuves. 

La  seconde  partie  du  recueil  de  Sercy  ne  contient  de  Cor- 
neille que  les  pièces  XXV-XXVII  de  notre  édition  des  Poésies 
diverses,  qui  font  partie  de  la  Guirlande  de  Julie  ;  et  nous  ve- 
nons de  dire  (p.  11)  que  c'est  précisément  le  témoignage  de 
Sercy  qui  nous  a  engagé  à  porter  le  nombre  des  pièces  com- 
posées par  notre  poète,  pour  cette  circonstance,  à  trois  seu- 
lement, et  non  à  six,  comme  l'ont  fait  certains  éditeurs. 

La  troisième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy,  publiée 
pour  la  première  fois  le  6  février  i656,  comme  nous  l'avons 
dit  plus  haut,  et  non  en  1662,  comme  le  pense  M.  Lacroix  -, 
ne  contient  le  nom  de  Corneille  ni  sur  le  titre,  ni  à  la  fin  de» 
pièces,  ni  dans  la  table;  on  n'y  voit  figurer  non  plus  ni  le  nom 
de  Cottin,  ni  celui  de  Chevreau,  ni  aucun  autre  nom  commen- 
çant par  un  C,  si  ce  n'est,  à  la  fin  d'un  sonnet  en  bouts-rimés, 
celui  d'un  certain  Cebret;  mais  dans  ce  volume,  dont  le  titre 
ne  porte  aucun  nom  entier  commençant  par  unC,  il  y  a  deux 

I.  Revue  des  provinces,  i5mars  1864,  tome  II,  p.  477  et  47^- 
a.  Revue  des  provinces,  tome  II,  p.  478. 


NOTICE.  19 

sonnets  signés  de  cette  lettre  :  l'un,  que  nous  n'avons  nulle 
envie  d'attribuer  à  notre  poëte ,  parle  d'un  linot  envolé  qui 
rentre  en  cage  de  peur  de  faire  pleurer  sa  maîtresse  ;  l'autre, 
d'un  genre  fort  différent,  qui  ne  se  trouve  point  dans  la  pre- 
mière édition,  mais  qui  paraît  dans  la  réimpression  de  i658, 
a  été  signalé  avec  beaucoup  de  vraisemblance  par  M.  Lacroix 
comme  étant  de  Corneille  ;  on  le  trouvera,  également  dans 
V Appendice  sous  le  n°  VI  :  nous  avions  même  grande  en- 
vie de  l'admettre  dans  les  OEuvres  ;  toutefois,  quoiqu'il  nous 
ait  paru  non-seulement  égal,  mais  même  supérieur  à  beaucoup 
de  morceaux  contenus  dans  les  Poésies  diverses,  et  qui  sont 
incontestablement  de  Corneille  ;  bien  qu'il  soit  en  rapport 
avec  la  disposition  d'esprit  de  notre  poëte  à  cette  époque, 
et  que  nous  y  ayons  trouvé  deux  vers  qui  sont  comme  un  sou- 
venir de  la  pièce  intitulée  :  la  Poésie  à  la  Peinture;  quoique 
nous  reconnaissions  enfin  qu'il  est  naturel  que  notre  auteur 
n'ait  point  voulu  signer  en  toutes  lettres  une  œuvre  si  person- 
nelle, et,  comme  on  le  dirait  aujourd'hui,  si  intime,  nous 
aimons  mieux  être  accusé  d'une  réserve  exagérée  que  de  cou- 
rir le  risque  d'introduire  à  tort  dans  les  OEuvres  de  Corneille 
une  pièce  après  tout  encore  douteuse,  et  nous  nous  conten- 
tons, en  la  renvoyant  à  V Appendice,  comme  c'est  en  pareil  cas 
notre  coutume,  de  la  recommander  d'une  manière  toute  parti- 
culière à  l'attention  des  lecteurs. 

Dans  la  quatrième  partie,  non-seulement  Corneille  n'est  pas 
nommé,  mais  il  n'y  a  même  aucune  pièce  qu'on  ait  eu  l'idée 
de  lui  attribuer. 

La  cinquième  partie,  au  contraire,  ne  contient  pas  moins  de 
dix-neuf  pièces  signées  Corneille,  et  que  jusqu'ici  les  éditeurs 
ont  toutes  attribuées  à  Pierre.  Granet,  il  est  vrai,  en  a  sup- 
primé quelques-unes;  mais  ce  n'était  point  parce  qu'il  doutait 
de  leur  authenticité  :  c'était,  ainsi  qu'il  le  déclare  lui-même, 
parce  qu'elles  renferment  «  divers  traits  d'une  galanterie  trop 
libre1.  »  Remarquons  cependant  que  dans  le  recueil  de  Sercy 
le  nom  de  Corneille  n'est  jamais  accompagné  de  prénom,  ni  des 
désignations  d'aîné  ou  de  jeune,  et  qu'on  est  en  droit  de  ^e 
demander  si  un  certain  nombre  des  pièces  suivies  de  cette 

[ .  Œuvres  diverses,  préface,  folio  iv,  recto. 


20 


POÉSIES   DIVERSES. 


signature  n'appartiennent  pas  à  Thomas  Corneille  :  le  témoi- 
gnage de  Conrart,  et  plus  encore  une  lecture  attentive  et  réflé- 
chie, nous  le  prouvent  quant  à  l'une  d'elles,  que  nous  avons 
placée  dans  \  Appendice  sous  le  numéro  XI,  et  que  Granet  et 
tous  les  autres  éditeurs  de  Corneille  n'avaient  pas  manqué 
d'accepter  de  confiance.  Dans   les  dix-huit  qui  restent,  il  en 
est  bon  nombre  que  nous  serions  fort  tenté  de  laisser  aussi  à 
Thomas,  ne  fût-ce  qu'à  cause  de  leur  faiblesse;  mais  il  faut  se 
garder  en  ces  matières  de  se  laisser  entraîner,  sans  preuves 
positives,  à  ses   prédilections  ou  à  ses  répugnances,  et  nous 
sommes  obligé  de  tout  recevoir,  sous  bénéfice  d'inventaire  tou- 
tefois, et  en  signalant  au  lecteur  ce  danger  jusqu'ici  inaperçu. 
INous  n'avons  pas  voulu  néanmoins  augmenter,  comme  à  plai- 
sir,  le  nombre  de  ces  pièces  litigieuses  à  partager  entre  les 
deux   frères  :  ainsi  nous  laissons   à  Thomas  deux  sonnets  sur 
sa  tragédie  de  Timocrate ,  qui  portent  seulement  le  nom  de 
Corneille,  et  que  M.Lacroix  attribue  à  Pierre1.  Du  reste,  non- 
seulement  il  est  possible  que  parmi  les  pièces  que  nous  attri- 
buons à  Pierre,  certaines  soient  de  Thomas,   mais  encore  il 
peut  arriver  qu'elles  ne  soient  ni  de  l'un  ni  de  l'autre.  Nous 
prouverons  dans  Y  Appendice  2  qu'une  pièce  que  nous  y  avons 
rejetée,  qui  est  attribuée  à  l'auteur  du  Cid  dans  les  éditions 
les  plus  récentes  de  ses  Œuvres,  et  qui  est  signée  de  lui  dans 
plusieurs  recueils  formés  de  son  temps,  est  en  réalité  de  Fléchier. 
Une  épigramme  dirigée  contre  d'Aubignac,  que  M.  Lacroix 
regarde  comme  étant  de  Corneille,  dont  elle  porte  en  effet  la 
signature  dans  un  recueil,  est  considérée,  avec  bien  plus  de 
vraisemblance,  comme  appartenant  à  Cottin,  par  un  écrivain 
fort  au  courant  des  faits  de  ce  genre,  Tallemant  des  Réaux, 
qui  en  citant  les  épigrammes  faites  contre  d'Aubignac  en  faveur 
de  notre  poète,  évite  prudemment  dans  la  plupart  des  cas  les 
attributions  formelles ,  et  se  contente  de  dire  que  telle  petite 
pièce  est  de  Corneille  ou  de   «  quelque  corneillien3.  »   Une 
autre  épigramme  des  plus  médiocres,  signée  Corneille  dans  un 
recueil  de  Cbamoudry,  se  trouve  dans  les  Œuvres  de  Saint  - 

i.   Voyez  X Appendice,  n°  IX. 

a.  No  XII. 

3.   Voyez  V Appendice,  n°  XIII. 


NOTICE,  21 

Amant1.  Il  y  avait  alors  en  ce  genre,  non- seulement  de  fré- 
quentes méprises,  mais  des  fraudes  volontaires  et  calculées. 
«Les  pièces....  qui  sont  rapportées  ici,  dit  le  P.  Bouhours  dans 
son  Recueil  de  vers  choisis 2,  ne  se  donnent  qu'à  leurs  véri- 
tables auteurs,  ou  du  moins  qu'à  ceux  qui  passent  constamment 
pour  les  avoir  faites  ;  car  on  feroit  scrupule  d'imposer  au  public, 
à  l'exemple  de  certaines  gens  qui,  après  avoir  fait  faire  des 
pièces  par  je  ne  sais  quel  auteur  à  gages ,  les  mettent  sur  la 
tête  de  quelque  écrivain  célèbre,  pour  grossir  et  vendre  plus 
cher  le  volume  de  ses  œuvres.  » 

En  cherchant  à  éclaircir  cette  partie  difficile  de  notre  tâche, 
nous  comprenions  le  ravissement  avec  lequel  Madelon,  dans 
les  Précieuses  ridicules3,  se  promet  de  voir  venir  chez  elle 
«  tous  ces  Messieurs  du  Recueil  des  pièces  choisies.  »  —  «  Par  le 
moyen  de  ces  visites  spirituelles,  on  est  instruit,  ajoute-t-elle, 
de  cent  choses  qu'il  faut  savoir  de  nécessité,  et  qui  sont  de 
l'essence  du  bel  esprit.  On  apprend  par  là  chaque  jour  les 
petites  nouvelles  galantes,  les  jolis  commerces  de  prose  ou  de 
vers.  On  sait  à  point  nommé,  un  tel  a  composé  la  plus  jolie 
pièce  du  monde  sur  un  tel  sujet  ;  celui-ci  a  fait  un  madrigal 
sur  une  jouissance  ;  celui-là  a  composé  des  stances  sur  une 
infidélité;  Monsieur  un  tel  écrivit  hier  au  soir  un  sixain  à  Ma- 
demoiselle une  telle,  dont  elle  lui  a  envoyé  la  réponse  ce  matin 
sur  les  huit  heures.  »  Tel  est  à  peu  près  le  commentaire  qui 
nous  manque  et  que  nous  ne  pouvons  suppléer  que  bien  im- 
parfaitement; toutefois  nous  avons  fait  quelques  petites  décou- 
vertes de  nature  à  nous  mériter  l'approbation  de  Madelon  ; 
ainsi,  par  exemple,  nous  avons  pu  indiquer  le  jour  et  presque 
l'heure  où  Corneille  a  composé  le  Sonnet  perdu  au  jeu  qui  se 
trouve  dans  la  cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy. 
Comme  on  le  pense  bien,  de  tels  hasards  ne  sont  pas  fré- 
quents, mais  par  bonheur  aussi  ils  ne  sont  guère  néces- 
saires, et  nous  nous  estimerons  fort  heureux  si  nous  parve- 
nons à  ranger  plus  exactement  d'après  leurs  dates  les  Poésies 
diverses   de   Corneille,   à  en  rejeter  ce  qui  pouvait  choquer 

i.  Voyez  Y  Appendice^  n°  VIII. 

2.  Avertissement,  folio  3.  —  L'Achevé  d'imprimer  de  ce  Recueil 
du  P.  Bouhours  est  du  «  premier  jour  de  juin  i6p3.  » 

3.  Scène  x. 


J.l 


POÉSIES   DIVERSES. 


une   critique    éclairée,    et   surtout  à   les   compléter   soit  par 
nos  propres    recherches1,  soit    en  faisant  dans  les  matériaux 

i .  Nous  prions  le  lecteur  de  vouloir  bien  accorder  une  attention 
toute  particulière  à  la  pièce  XVII  de  Y  Appendice,  qui  nous  paraît  in- 
téressante et  vraiment  digne  de  Corneille. 

Outre  les  pièces,  bien  authentiques,  signalées  par  MM.  P.  Lacroix 
et  Fournit  r,  dont  les  recherches  nous  ont  été  si  utiles,  et  classées  par 
nous,  à  leur  rang  chronologique,  dans  les  OEuvresde  Corneille;  outre 
celles  qui  nous  ont  paru  ne  point  appartenir  à  notre  auteur  et  que 
nous  avons  renvoyées  à  Y  Appendice,  il  en  est  un  certain  nombre  qui, 
à  notre  avis,  ne  pouvaient,  à  aucun  titre,  figurer  dans  notre  recueil. 
Telles  sont  : 

i°  La  pièce  sur  l'immaculée  conception  de  la  Vierge  dont  nous 
avons  parlé  plus  haut  (p.  7  et  8). 

20  Deux  quatrains  publiés  en  i655  dans  un  Recueil  de  Chamou- 
dry  et  intitulés ,  l'un  :  A  M.  P.  en  lui  donnant  un  livre  de  f  Imitation 
de  Jésus;  lautre  :  A  une  dame  en  lui  envoyant  le  livre  de  V Imitation 
de  J.  C.  Ces  deux  quatrains  sont  anonymes.  M.  P.  Lacroix  *  les 
considère  comme  des  envois  d'auteur  ;  mais  il  nous  paraît  beau- 
coup plus  naturel  de  les  mettre  au  nombre  de  ces  petites  pièces  ga- 
lantes qu'on  joignait  alors  à  tout  présent  fait  à  une  dame  :  voyez, 
par  exemple  (ci-après,  pièce  IV,  p.  3s),  celle  dont  Corneille  accom- 
uagne  l'envoi  d'un  nœud  de  rubans. 

3°  Une  épigramme  qui  porte  le  nom  de  Corneille  dans  le  Songe 
du  Resveur ,  à  Paris,  chez  Guillaume  de  Luyne,  libraire-Iuré ,  au 
Palais,  M.DC.LV,  1  vol.  petit  in-12  **.  Ce  Songe  est  une  réplique  à 
la  Pompe  funèbre  de  Scarron,  réplique  où  les  divers  écrivains  attaqués 
dans  cet  ouvrage  sont  censés  répondre  chacun  par  une  épigramme 
évidemment  supposée. 

4°  Une  Ode  sur  la  paix  et  le  mariage,  Paris,  Guillaume  de  Luyne, 
1660,  in-40  de  27  pages,  au  sujet  de  laquelle  M.  P.  Lacroix  s'ex- 
prime ainsi  :  «  Cette  ode  anonyme  pourrait  être  signée  Corneille, 
sans  faire  tort  à  l'auteur  du  Cid  et  de  Cinna;  j'ajouterai  qu'elle  a  été 
imprimée  à  Rouen  par  Laurent  Maurry,  et  mise  en  vente  chez  Guil- 
laume de  Luyne,  le  libraire  et  l'imprimeur  ordinaires  de  Corneille***.  » 
Ces  raisons  ne  nous  ont  pas  paru  suffisantes,  et  il  nous  a  semblé  au 
contraire  qu'un  poète  aussi  célèbre  que  Corneille  l'était  en  166c  ne 


*  Bulletin  du  bouquiniste,  Ier  février  1864,  p.  54- 

**  Ibidem,  i5  août  i863,  p.  6g5. 

***  Ibidem,  1e1  novembre  1864,  p.  5po. 


NOTICE.  i3 

amassés  par  MM.  P.  Lacroix  et  Fournier  un  choix  prudent  et 
discret. 


pouvait  avoir  aucune  raison  de  ne  pas  signer  une  pièce  de  vers  publiée 
dans  une  semblable  circonstance. 

5°  Un  sonnet  sur  le  crime  de  lèze-majesté  divine,  commu  à  Notre- 
Dame  le  dimanche  3  aoust  1670,  sur  les  neuf  heures  du  matin,  par  le 
nommé  Sarrazin,  natif  de  Caen,  sonnet  transcrit  par  M.  P.  Lacroix 
comme  étant  de  Corneille,  mais  dont  il  déclare  ne  plus  se  rappeler 
la  source*. 

6°  Enfin  une  longue  pièce  de  vers,  tirée  des  manuscrits  de  Tral- 
lage,  et  considérée  un  instant  par  MM.  Ed.  Thierry  et  P.  Lacroix 
comme  ayant  été  composée  pour  le  Roi,  par  Corneille,  deux  années 
avant  la  mort  du  poète,  à  la  sollicitation  de  Mme  de  Maintenon  ; 
pièce  de  vers  qui  en  réalité  ne  rappelle  en  rien  la  manière  de  Cor- 
neille, et  qu'après  réflexion  ses  deux  éditeurs  n'entreprendraient 
certes  pas  de  défendre**. 


Bulletin  du  bouquiniste,  i5  octobre  1864,  p.  55o,. 
Revue  des  provinces,  i5  mars  1864,  tome  II,  p.  480-486. 


24  POÉSIES    DIVERSES. 


AU   LECTEUR1. 


Quelques-unes  de  ces  pièces  te  déplairont;  sache  aussi 
que  je  ne  les  justifie  pas  toutes,  et  que  je  ne  les  donne 
qu'à  l'importunité  du  libraire  pour  grossir  son  livre.  Je 
ne  crois  pas  cette  tragi-comédie  si  mauvaise  que  je  me 
tienne  obligé  de  te  récompenser  par  trois  ou  quatre  bons 
sonnets. 


i.  Cet  avis  au  Lecteur  a  paru  en  tête  des  pièces  T  à  XIV,  XVI 
et  XVII,  réunies  à  la  suite  du  Clitandre  de  Corneille.  Il  se  trouve 
au  verso  du  titre,  qui  est  :  Meslanges  poétiques  du  mesme.  A  Paris, 
chez  François  Targa,  etc.  L'Achevé  d'imprimer  du  volume  dont  ces 
pièces  font  partie  est  daté  du  20  mars  i63*2.  Voyez  la  Notice  des 
Poésies  diverses,  ci-dessus,  p.  4-^- 


POÉSIES    DIVERSES.  a5 


A    MONSIEUR    D.    L.    T. 

Nous  ignorons  quel  est  le  personnage  à  qui  cette  épître  est  adres- 
sée; le  vers  27  nous  apprend  que  c'est  un  ami  de  Corneille,  et  les 
vers  71  et  72  semblent  indiquer  qu'il  est  poëte.  Nous  ne  le  voyons 
pas  figurer  parmi  les  auteurs  des  Hommages  adressés  à  Corneille  au 
sujet  de  la  Veuve  (voyez  tome  I,  p.  379-393).  Il  est  bien  probable 
que  la  pièce  qu'on  va  lire  n'est  pas  la  plus  ancienne  de  celles  qui  com- 
posent les  Mélanges.  Les  travers  poétiques  qui  y  sont  agréablement 
raillés  se  font  remarquer  dans  l'ode  suivante,  qui  a  dû  être  écrite 
auparavant.  Il  semble  que  la  présente  épître  aurait  dû  être  rapprochée 
de  la  chanson  qui  porte  le  numéro  XTV,  avec  laquelle  elle  a  plus 
d'une  analogie.  Toutefois,  en  l'absence  de  renseignements  certains, 
nous  avons  cru  devoir  respecter  l'ordre  suivi  par  Corneille. 

Enfin  échappé  du  danger 

Où  mon  sort  me  voulut  plonger, 

L'expérience  indubitable 

Me  fait  tenir  pour  véritable 

Que  Ton  commence  d'être  heureux  5 

Quand  on  cesse  d'être  amoureux. 

Lorsque  notre  âme  s'est  purgée 

De  cette  sottise  enragée 

Dont  le  fantasque  mouvement 

Bricole 1  notre  entendement,  1  o 

Crois-moi  qu'un  homme  de  ta  sorte , 

Libre  des  soucis  qu'elle  apporte , 

Ne  voit  plus  loger  avec  lui 

1 .  C'est-à-dire  :  amuse  et  trompe;  au  propre  :  conduit  obliquement» 
Voyez  tome  IV,  p.  322,  note  2,  et  le  Lexique, 


«6  POÉSIES   DIVERSES. 

Le  soin,  le  chagrin  ni  l'ennui. 

Pour  moi ,  qui  dans  un  long  servage  i  5 

A  mes  dépens  me  *  suis  fait  sage . 

Je  ne  veux  point  d'autres  motifs 

Pour  te  servir  de  lénitifs , 

Et  ne  sais  point  d'autre  remède 

A  la  douleur  qui  te  possède ,  2  o 

Qu'écrivant  la  félicité 

Qu'on  goûte  dans  la  liberté , 

Te  faire  une  si  bonne  envie 

Des  douceurs  dune  telle  vie, 

Qu'enfin  tu  puisses  à  ton  tour  2  5 

Envoyer  au  diable  l'amour. 

Je  meure,  ami,  c'est  un  grand  charme 

D'être  insusceptible  d'alarme , 

De  n'espérer  ni  craindre  rien , 

De  se  plaire  en  tout  entretien ,  3  o 

D'être  maître  de  ses  pensées , 

Sans  les  avoir  toujours  dressées 

Vers  une  beauté  qui  souvent 

Nous  estime  moins  que  du  vent , 

Et  pense  qu'il  n'est  point  d'hommage  3  5 

Que  l'on  ne  doive  à  son  visage. 

Tu  t'en  peux  bien  fier  à  moi  : 

J'ai  passé  par  là  comme  toi; 

J'ai  fait  autrefois  de  la  bête  ; 

J'avois  des  Philis  à  la  tête  :  4  » 

J'épiois  les  occasions  ; 

J'épiloguois  mes  passions; 

Je  paraphrasois  un  visage  ; 

Je  me  mettois  à  tout  usage , 

1.  La  première   édition    ( i632 )   donne   la  leçon  impossible  je, 
pour  me. 


POÉSIES   DIVERSES.  27 

Debout ,  tête  une ,  à  genoux  ,  4  5 

Triste ,  gaillard ,  rêveur,  jaloux  ; 

Je  courois,  je  faisois  la  grue 

Tout  un  jour  au  bout  d'une  rue  : 

Soleils ,  flambeaux ,  attraits ,  appas , 

Pleurs,  désespoirs ,  tourments  ,  trépas ,  5o 

Tout  ce  petit  meuble  de  bouche 

Dont  un  amoureux  s'escarmouche  , 

Je  savois  bien  m'en  escrimer  *. 

Par  là  je  m'appris  à  rimer; 

Par  là  je  fis  sans  autre  chose  5  5 

Un  sot  en  vers  d'un  sot  en  prose  ; 

Et  Dieu  sait  alors  si  les  feux , 

Les  flammes ,  les  soupirs ,  les  vœux , 

Et  tout  ce  menu  badinage , 

Servoit 2  de  rime  et  de  remplage  * .  60 

1.  Corneille  a  donné  de  curieux  échantillons  de  ces  «  discours 
de  livre,  »  comme  il  les  appelle,  dans  Mèlite  (tome  I,  p.  146  et  147, 
vers  61-78)  et  dans  la  Veuve  (tome  I,  p.  412?  vers  25o-266).  On 
trouve  aussi  dans  la  comédie,  ou  plutôt  dans  le  dialogue  intitulé 
Climène,  publié  par  la  Fontaine  en  1671,  une  satire  fort  délicate  des 
poésies  galantes  du  dix-septième  siècle  : 

ÉRATO. 

Mais  n'est-ce  point  assez  célébré  notre  belle? 
Quand  j'aurai  dit  les  jeux,  les  ris  et  la  séquelle  , 
Les  grâces,  les  amours  :  voilà  fait  à  peu  près. 

APOLLON. 

Vous  pourrez  dire  encor  les  charmes,  les  attraits, 
Les  appas. 

ÉRATO. 

Et  puis  quoi  ? 

APOLLON. 

Cent  et  cent  mille  choses. 
Je  ne  vous  ai  conté  ni  les  lis  ni  les  roses  : 
On  n'a  qu'à  retourner  seulement  ces  mots-là. 

Voyez  encore  ci-après,  p.  3o,  note  2,  et  p.  33,  note  1. 

2 .  On  lit  ainsi  servoit,  au  singulier,  dans  l'édition  originale. 

3.  Remplissage. 


POESIES   DIVERSES. 

Mais  à  la  fin  hors  de  mes  fers, 

Après  beaucoup  de  maux  soufferts , 

Ce  qu'à  présent  je  te  conseille , 

C'est  de  pratiquer  la  pareille , 

Et  de  montrer  à  ce  bel  œil ,  6  5 

Qui  n'a  pour  toi  que  de  l'orgueil , 

Qu'un  cœur  si  généreux  et  brave 

N'est  pas  né  pour  vivre  en  esclave. 

Puis ,  quand  nous  nous  verrons  un  jour, 

Sans  soin  tous  deux,  et  sans  amour,  70 

Nous  ferons  de  notre  martyre 

A  communs  frais  une  satire  ; 

Nous  incaguerons1  les  beautés; 

Nous  rirons  de  leurs  cruautés  ; 

A  couvert  de  leurs  artifices ,  7  5 

Nous  pasquinerons  leurs  malices2; 

Impénétrables  à  leurs  traits  , 

Nous  ferons  nargue  à  leurs  attraits  ; 

Et  toute  tristesse  bannie , 

Sur  une  table  bien  garnie,  80 

Entre  les  verres  et  les  pots 

Nous  dirons  le  mot  à  propos. 

On  nous  orra  conter  merveilles 

En  préconisant  les  bouteilles  ; 

Nous  rimerons  au  cabaret  8  5 

En  faveur  du  blanc  et  clairet , 

Où  quand  nous  aurons  fait  ripaille, 

Notre  main  contre  la  muraille, 

Avec  un  morceau  de  charbon 


1.  Incaguer,  défier,  braver. 

2.  Nous  ferons  des  satires  sur  elles.  Voyez  le  Lexique  pour  tous 
ces  mots. 


POESIES    DIVERSES.  29 

Paranymphera  '  le  jambon  2.  90 

Ami,  c'est  ainsi  qu'il  faut  vivre, 

C'est  le  chemin  qu'il  nous  faut  suivre , 

Pour  goûter  de  notre  printemps 

Les  véritables  passe-temps. 

Prends  donc ,  comme  moi ,  pour  devise ,  9  5 

Que  l'amour  n'est  qu'une  sottise. 

1.  Paranympher ,  louer,  célébrer.  On  appelait  paranymphe  le  dis- 
cours solennel  qui  se  prononçait,  dans  la  Faculté  de  théologie  et 
dans  celle  de  médecine,  à  la  fin  de  chaque  licence.  Voyez  le  Lexique. 

2.  Cette  façon  de  donner  à  ses  chansons  bachiques  une  certaine 
publicité  paraît  avoir  été  alors  d'un  usage  assez  général.  Tout  le 
monde  se  rappelle  ces  vers  de  Y  Art  poétique  de  Boileau  (chant  I, 
vers  21-26)  : 

Ainsi  tel  autrefois  qu'on  vit  avec  Faret 
Charbonner  de  ses  vers  les  murs  d'un  cabaret, 
S'en  va  mal  à  propos  d'une  voix  insolente 
Chanter  cîu  peuple  hébreu  la  fuite  triomphante  ; 
Et  poursuivant  Moïse  au  travers  des  déserts, 
Court  avec  Pharaon  se  noyer  dans  les  mers. 


3o  POÉSIES   DIVERSES. 


Il 


ODE    SUR    UN    PROMPT    AMOUR1 


O  Dieux!  qu'elle  sait  bien  surprendre  ! 

Mon  cœur,  adore  ta  prison, 

Et  n'écoute  plus  ta  raison  2 

Qui  fait  mine  de  te  défendre  5 

Accepte  une  si  douce  loi.  5 

Voir  Amynte  et  rester  à  soi 

Sont  deux  choses  incompatibles  : 

Devant  une  telle  beauté  , 

C'est  à  faire  à  des  insensibles 

De  conserver  leur  liberté.  1  o 

Ses  yeux ,  d'un  pouvoir  plus  suprême 

Que  n'est  l'autorité  des  rois  , 

Interdisent  à  notre  choix 

De  disposer  plus  de  nous-même. 

Ravi  que  j'en  fus  à  l'abord  ,  1 5 


1.  Voyez   ci-dessus,   p.   25,  la  fin  de  la  notice  qui  précède   la 
pièce  I. 

2.  Boileau  critique  ces  idées  et  ces  expressions  dans  le  second  chant 
de  Y  Art  poétique  (vers  45-52),  où  il  parle  de  ces   «  vains  auteurs  » 

qui 

...  ne  savent  jamais  que  se  charger  de  chaînes > 
Que  bénir  leur  martyre,  adorer  leur  prison , 
Et  faire  quereller  les  sens  et  la  raison. 

Mais  comme  c'est  là  un  lieu  commun  poétique  fort  rebattu ,  il  n'est 
guère  probable  que  ce  soit  Corneille  que  Boileau  ait  eu  particuliè- 
rement en  vue  dans  ce  passage. 


POÉSIES    DIVERSES.  3i 

Je  ne  pus1  faire  aucun  effort 

A  me  retenir  en  balance  ; 

Et  je  sentis  un  changement 

Par  une  douce  violence , 

Que  j'eusse  fait  par  jugement.  <*  o 

Regards  brillants ,  clartés  divines , 

Qui  m'avez  tellement  surpris; 

OEillades  qui  sur  les  esprits 

Exercez  si  bien  vos  rapines  ; 

Tyrans  secrets ,  auteurs  puissants  2  5 

D'un  esclavage  où  je  consens  ; 

Chers  ennemis  de  ma  franchise , 

Beaux  yeux  ,  mes  aimables  vainqueurs, 

Dites-moi  qui  vous  autorise 

A  dérober  ainsi  les  cœurs.  3o 

Que  ce  larcin  m'est  favorable  ! 

Que  j'ai  sujet  d'appréhender, 

La  conjurant  de  le  garder, 

Qu'elle  me  soit  inexorable  ! 

Amour,  si  jamais  ses  dédains  3  5 

La  portent  à  ce  que  je  crains, 

Fais  qu'elle  se  puisse  méprendre  ; 

Et  qu'aveuglée ,  au  lieu  du  mien 

Qu'elle  aura  dessein  de  me  rendre , 

Amynte  me  donne  le  sien  !  4  o 

1.   Je  ne  peux,  dans   l'édition  originale  j   mais   c'est   évidemment 
pour  je  ne  peus,  c'est-à-dire  :  je  ne  pus. 


32  POESIES   DIVERSES. 


111 


A  MONSEIGNEUR    LE    CARDIJNAL    DE    RICHELIEU. 

SONNET. 

Puisqu'un  d'Amboise1  et  vous  d'un  succès  admirable 

Rendez  également  nos  peuples  réjouis, 

Souffrez  que  je  compare  à  vos  faits  inouïs 

Ceux  de  ce  grand  prélat,  sans  vous  incomparable. 

Il  porta  comme  vous  la  pourpre  vénérable  5 

De  qui  le  saint  éclat  rend  nos  yeux  éblouis  ; 
Il  veilla  comme  vous  d'un  soin  infatigable  ; 
Il  fut  ainsi  que  vous  le  cœur  d'un  roi  Louis. 

Il  passa  comme  vous  les  monts  à  main  armée  ; 

Il  sut  ainsi  que  vous  convertir  en  fumée  i  o 

L'orgueil  des  ennemis ,  et  rabattre  leurs  coups  : 

Un  seul  point  de  vous  deux  forme  la  différence  : 
C'est  qu'il  fut  autrefois  légat  du  pape  en  France2, 
Et  la  France  en  voudroit  un  envoyé  de  vous. 

i .  Le  cardinal  Georges  d'Amboise,  premier  ministre  de  Louis  XII. 
2.  Ce  fut  le  pape  Alexandre  VI  qui  nomma  le  cardinal  d'Amboise 
son  légat  en  France. 


POESIES    DIVERSES.  33 


IV 


SONNET    POUR    M.    D.    V., 
Envoyant  un  galand  à  M.  L.  C.  D.  L. 

On  ne  sait  quelles  sont  les  personnes  désignées  par  ces  initiales. 
L'auteur  d'un  opuscule  intitulé  et  la  belle  de  Ludre,  1648-172 5,  essai 
biographique,  Nancy,  Maubon,  1861 ,  in-8°,  »  a  voulu  y  voir  M.  de 
Vivonne  et  la  comtesse  de  Ludre;  mais  il  n'a  pas  remarqué  que  ce 
sonnet  a  été  publié  dès  i632,  et  que  la  comtesse  n'est  née  qu'en  1648. 
—  Un  galand  signifie  ici  un  nœud  de  ruban.  Voyez  tome  II,  p.  7, 
note  5  ;  p.  93,  vers  iao4  ;  et  le  Lexique. 

Au  point  où  me  réduit  la  distance  des  lieux, 
Souffrez  que  ce  galand  vous  porte  mes  hommages, 
Gomme  si  ses  couleurs  étoient  autant  d'images 
De  celle  qu'en  mon  cœur  je  conserve  le  mieux. 

Parez-en  ce  beau  sein ,  ce  chef-d'œuvre  des  cieux,  5 

Cette  honte  des  lis,  cet  aimant1  des  courages, 

1.  Corneille,  quelques  années  plus  tard,  critiquait  agréablement 
dans  la  Veuve  (tomel,  p.  4°9>  vers  200-204)  une  galanterie  toute 
semblable  : 

Il  m'aborde  en  tremblant  avec  ce  compliment  : 

«  Vous  m'attirez  à  vous  ainsi  que  fait  l'aimant.  » 

(Il  pensoit  m'avoir  dit  le  meilleur  mot  du  monde.) 

Entendant  ce  haut  style,  aussitôt  je  seconde, 

Et  réponds  brusquement  sans  beaucoup  m'émouvoir  : 

«  Vous  êtes  donc  de  fer,  à  ce  que  je  puis  voir.  d 

Mlle  de  Scudérv,  dans  une  lettre  du  28  septembre  1657,  par  laquelle 
elle  invite  un  de  ses  amis  à  une  réunion  dans  laquelle  il  doit  trou- 
ver deux  jeunes  beautés,  l'une  brune  et  l'autre  blonde,  se  moque 
aussi  d'une    comparaison   du   même    genre   (Manuscrits    de  Conrart, 

CoRNF.IJ.iE.    X  3 


34  POÉSIES    DIVERSES. 

Ce  beau  sein  où  nature  a  mis  tant  d'avantages 
Qu'il  dérobe  le  cœur  en  surprenaut  les  yeux. 

Il  va  mourir  d'amour  sur  cette  gorge  nue  ; 

Il  en  pâlit  déjà ,  sa  vigueur  diminue ,  i  o 

Et  finit  languissante  en  des  traits  effacés. 

Hélas!  que  de  mortels  lui  vont  porter  envie, 
Et  voudroient  en  langueur  finir  ainsi  leur  vie, 
S'ils  pouvoient  en  mourant  être  si  bien  placés  ! 

tome  IX,  p.  902  et  o.o3)  :  «  Je  vous  laisse  à  penser,  dit-elle,  combien 
vous  serez  désiré,  et  si  les  galants  qui  s'y  trouveront  ne  scroient  pas 
bien  aises  que  ce  fut  encore  la  mode  de  dire  : 

Comme  Ton  voit  le  fer  entre  deux  calamités. 

Mais  comme  nous  ne  sommes  plus  aux  siècles  des  comparaisons,  el 
que  celle-là  est  trop  aisée,  il  faudra  que  les  galants  s'en  passent.  »  — 
Voyez  encore  une  comparaison  analogue  tirée  de  VA&trèe  et  citée 
par  nous  au  tome  IV,  dans  la  note  5  de  la  page  353. 


POESIES   DIVERSES.  35 


MADRIGAL 

Pour  un  masque  donnant  une  boîte  de  cerises  confites 
à  une  damoiselle. 

Allez  voir  ce  jeune  soleil, 
Cerises,  je  vous  en  avoue; 
Montrez-lui  votre  teint  vermeil 
Un  peu  moins  que  sa  lèvre  ,  un  peu  plus  que  sa  joue  ; 

Montrez-lui  votre  rouge  teint,  5 

Où  la  nature  a  peint, 
Comme  sur  une  vive  image  , 
La  cruauté  de  son  courage. 
Après,  en  ma  faveur,  dans  le  contentement 

Que  vous  aurez  si  la  belle  vous  touche,  10 

Dites-lui  secrètement , 
Approchant  de  sa  bouche  : 
«  Philis ,  notre  beauté 
Ne  porte  les  couleurs  que  de  la  cruauté; 
Mais  ce  qui  la  conserve  et  la  fait  être  aimée  ,  i  5 

Ce  n'est  que  la  douceur  qu'elle  tient  enfermée  ; 
Ainsi  doncque  soyez,  vous, 
Belle  et  douce  comme  nous.  » 


36  POÉSIES  DIVERSES. 


VI 

ÉPITAlPHE   de  didon, 

Traduit1  du  latin  d'Ausone  :  infelix  dido,  etc.*. 

Misérable  Didon,  pauvre  amante  séduite, 

i .  A  cette  époque  épitaphe  était  habituellement  du  masculin.  Voyez 
tome  IV,  p.  i5,  note  i  ;  p.  3io,  vers  38 1;  et  le  Lexique.  —  Granet  a 
mis  ici  :  épitaphe  traduite,  et  il  a  été  imité  en  cela  par  tous  les  édi- 
teurs qui  l'ont  suivi. 

2.       Infelix  Dido,  nulli  bene  nupta  marito  : 

Hoc  pereunte  fugis,  hoc  fugiente  péris. 

(Ausone.  épitaphe  xxx.) 

Cette  épitaphe  d'Ausone  a  donné  lieu  à  un  fort  grand  nombre 
d'imitations.  Voici  un  distique  de  Leibnitz  qui  n'est  pas  sans  rapport 
avec  la  seconde  pièce  de  Corneille  : 

Quel  mari  qu'ait  Didon,  son  malheur  la  poursuit  : 
Elle  fuit  quand  l'un  meurt,  et  meurt  quand  l'autre  fuit. 

La  pièce  la  plus  connue  est  la  suivante,  dont  on  ignore  l'auteur,  et 
que  le  P.  Bouhours  rapporte  dans  la  Manière  de  bien  penser  dans  les 
ouvrages  de  Pesprit,  seconde  édition,  Paris,  1691,  in-12,  p.  55  : 

Pauvre  Didon,  où  t'a  réduite 
De  tes  maris  le  triste  sort  ? 
L'un,  en  mourant,  cause  ta  fuite; 
L'autre,  en  fuyant ,  cause  ta  mort. 

L'abbé  Desfontaines,  qui,  dans  son  Discours  sur  la  traduction  des 
poètes  en  tête  de  sa  traduction  de  Virgile,  critique  cette  imitation, 
propose  de  la  remplacer  par  celle-ci,  dont  il  est  l'auteur  : 

Hélas  !  que  tes  époux  te  causent  de  malheurs , 
Didon  :  l'un  meurt,  tu  fuis  ;  l'autre  fuit,  et  tu  meurs. 

Enfin  Souchay  cite  une  traduction  qui  diffère  très-peu  de  celle  de 
Desfontaines  : 

Didon,  tes  deux  maris  te  comblent  de  douleurs  : 
Le  premier  meurt,  tu  fuis;  le  second  fuit,  tu  meurs. 


POÉSIES    DIVERSES.  37 

Dedans  tes  deux  maris  je  plains  ton  mauvais  sort , 
Puisque  la  mort  de  l'un  est  cause  de  ta  fuite , 
Et  la  fuite  de  l'autre  est  cause  de  ta  mort. 

AUTREMENT. 

Quel  malheur  en  maris,  pauvre  Didon  ,  te  suit! 

Tu  t'enfuis  quand  l'un  meurt,  tu  meurs  quand  l'autre  fuit. 


18  POÉSIES    DIVERSES 


VII 


MASCARADE    DES    ENFANTS    GATES1, 


l'officier2. 
Une  ambition  déréglée 
Dont  mon  âme  s'est  aveuglée, 
Plus  forte  que  mon  intérêt, 
Pour  donner  un  arrêt  en  cornes3, 
A  tellemept  passé  les  bornes  5 

Qu'elle  n'a  point  trouvé  d'arrêt. 

Ce  vain  honneur,  et  cette  pompe 

De  qui  le  faux  éclat  nous  trompe, 

M'a  fait  engager  tout  mon  bien  ; 

Et  pour  être  monsieur  et  maître,  i  o 

Je  crains  fort  à  la  fin  de  n'être 

Ni  maître  ni  monsieur  de  rien. 

Pressé  de  créanciers  avides , 

Mes  coffres  sont  tellement  vides 

Qu'étant  au  bout  de  mon  latin,  i  5 

Ma  robe  a  gagné  la  pelade4, 

1.  Corneille  joue  sur  le  double  sens  du  mot  gâtés.  Les  enfants 
gâtés  de  la  mascarade  sont,  comme  on  le  verra,  des  gens  ruinés. 

2.  L'officier  de  justice.  Il  n'y  avait  pas  jusqu'au?;  sergents  et  aux 
bedeaux  auxquels  on  ne  donnât  ce  titre  :  voyez  le  Dictionnaire  de 
Furetière. 

3.  En  bonnet  à  cornes,  comme  en  portaient  les  docteurs  et  les  huis- 
siers. Voyez  encore  le  Dictionnaire  de  Furetière  (1690),  au  mot  Corne. 

4.  Ma  robe  s'est  pelée,  s'est  usée.  Pelade  signifie  proprement  une 
maladie  qui  fait  tomber  le  poil. 


POÉSIES   DIVERSES.  3^ 

Et  ma  bourse,  encor  plus  malade, 
Se  voit  bien  proche  de  sa  fin. 


Ainsi  mes  affaires  gâtées , 

Voyant  mes  terres  décrétées ,  a  o 

Gages,  profits,  droits  arrêtés. 

Et  ma  finance  au  bas  réduite, 

Je  mène  ici  sous  ma  conduite 

La  troupe  des  Enfants  gâtés. 

LE    GENTILHOMME. 

Il  faut  qu'en  dépit  de  mon  sang  2  5 

Je  lui  cède  le  premier  rang. 
En  \ain  ma  noblesse  me  flatte  : 
En  ces  lieux  par  où  nous  allons , 
On  respecte  mal  l'écarlate 

Qui  ne  va  point  jusqu'aux  talons*  ;  3o 

Et  celle  qui  souvent  accompagne  nos  bottes, 

Tombant  dans  le  mépris , 
Près  de  celle  qu'on  traîne  aux  crottes2, 

Perd  son  lustre  et  son  prix. 

Trop  d'or  sur  mes  habits  en  a  vidé  ma  bourse  ;  3  5 

La  meute  de  mes  chiens 

N'a  chassé  que  mes  biens, 
Qui  dessus  mes  chevaux  se  sauvoient  à  la  course; 
Et  mes  oiseaux,  au  bout  d'un  an  ou  deux, 

M'ont  fait  léger  comme  eux.  4<> 

Voilà,  sans  rechercher  tant  de  contes  frivoles, 
Tout  ce  qui  m'a  gâté  déduit  en  trois  paroles; 


1.  Comme  les  robes  des  cardinaux,  des  présidents,  des  conseil- 
lers. 

a.  C'est-à-dire  en  comparaison  de  celles  dont  sont  faites  les  robes 
dont  il  vient  d'être  parlé,  qui  traînent  jusqu'à  terre. 


40  POESIES    DIVERSES. 

Et  pour  un  cavalier,  c'est  bien  bourré1  des  vers 
A  tort  et  à  travers. 

LE    PLAIDEUR. 

Les  procès  m'ont  gâté,  Messieurs;  je  m'en  repens  :       4  5 
C'est,  dans  mon  déplaisir,  tout  ce  que  j'en  puis  dire; 
Car  je  crains  tellement  de  payer  des  dépens, 
Que  même  au  mardi  gras  je  n'ose  plus  médire. 

l'amoureux. 

J'ai  fait  ce  qu'il  a  fallu  faire  ; 

Mais  le  bal ,  les  collations ,  5  o 

Les  présents,  les  discrétions2 

N'ont  point  avancé  mon  affaire. 

J'ai  corrompu  trente  valets , 

Afin  de  rendre  mes  poulets; 

J'ai  donné  mille  sérénades  :  5  5 

On  persiste  à  me  dédaigner; 

Et  deux  misérables  œillades , 

C'est  tout  ce  que  j'ai  pu  gagner. 

Quoi  que  m'ait  promis  l'espérance, 

A  la  fin  il  ne  m'est  resté  6o 

Que  l'incommode  vanité 

D'une  sotte  persévérance  ; 

Ma  profusion  sans  effet 

N'a  servi  qu'à  gâter  mon  fait 

Et  dissiper  mon  héritage  :  6  5 

Quel  malheur  me  va  poursuivant  ! 

i.  Tel  est  le  texte  de  l'édition  originale.  Granet  a  remplacé  le  par- 
ticipe par  l'infinitif  bourrer.  . —  Bourrer  des  vers  ,  c'est  faire  des  vers 
avec  de  la  bourre,  du  remplissage.  Voyez  le  Lexique  de  Malherbe,  au 
mot  Bourre. 

i.  «  Au  jeu  on  appelle  discrétion  ce  qu'on  laisse  à  la  volonté  du 
perdant.  C'est  un  moyen  de  faire  un  présent  déguisé  à  une  femme 
de  jouer  contre  elle  une  discrétion.  »  (  Dictionnaire  de  Furetière.  ) 
Voyez  le  Lexique. 


POÉSIES   DIVERSES.  41 

O  Dieux!  j'ai  mangé  mon  partage 
Sans  avoir  vécu  que  de  vent1  ! 

l'ivrogne. 
N'est-ce  pas  une  chose  étrange 
Que  pour  trotter  dedans  la  fange,  7  o 

Je  fasse  faux  bond  au  clairet, 
Et  que  cette  troupe  brouillonne 
M'arrache  de  ce  cabaret 
Pour  vous  produire  ma  personne? 

Je  violente  mon  humeur  7  5 

D'abandonner  ce  lieu  charmeur; 

Toutefois  je  n'ose  me2  plaindre, 

Etant  déjà  si  fort  gâté 

Que  je  m'achèverois  de  peindre 

Pour  peu  que  j'en  aurois  ta  té  ;  80 

Outre  que  mes  eaux  sont  si  basses, 

A  force  de  vider  les  tasses , 

Qu'il  faut  renoncer  au  métier, 

Ne  pouvant  plus  laisser  en  gage, 

Au  malheureux  cabaretier,  8  5 

Que  les  rubis  de  mon  visage. 

Mais  encor  suis-je  plus  heureux 

Que  tant  de  fous  et  d'amoureux 

Qui  se  sont  perdus  par  leurs  grippes3; 

Car  bien  que  je  sois  bas  d'aloi ,  90 

Mon  argent ,  serré  dans  mes  tripes , 

N'est  point  sorti  hors  de  chez  moi. 

1.  Cette  pièce  se  termine  ici  clans  l'édition  de  Granet;  la  fin,  telle 
qu'on  la  lit  dans  l'édition  de  i63'3,  n'a  été  réunie  aux  OEuvres  de 
Corneille  qu'en   18 17,  dans  l'édition  d'Ant.-Aug.  Renouard. 

2.  Ce  mot  manque  dans  l'édition  originale. 

3.  Grippe,  fantaisie,  goût  capricieux. 


42  POESIES   DIVERSES. 

LE    JOUEUR. 

Attaqué  d'une  forte  et  rude  maladie , 

Depuis  le  jour  des  Rois , 
Les  os,  par  sa  chaleur  à  mon  dam  trop  hardie,  95 

M'en  sont  tombés  des  doigts. 

Bien  que  du  seul  revers  de  ce  mal  si  funeste 

Je  fusse  assez  gâté, 
Pour  avoir  fait  encore  à  prime  *  trop  de  reste  2 

Il  ne  m'est  rien  resté.  100 

Dames,  à  cela  près,  faisons  en  assurance 

La  bête  en  quelque  lieu , 
Et  je  promets  moi-même,  à  faute  de  finance, 

De  me  mettre  au  milieu. 

1.  Sorte  de  jeu  de  cartes  alors  fort  à  la  mode.  Voyez  le  Lexique. 
—  Dans  la  strophe  suivante,  la  bête  est  le  nom  d'un  autre  jeu  de 
cartes. 

2.  Les  mots  fait  trop  de  reste  rappellent  les  locutions  bien  connues  : 
a  jouer  de  son  reste,  coucher  de  son  reste,  »  pour  dire  faire  un  der- 
nier effort,  un  coup  de  désespoir. 


POÉSIES   DIVERSES.  ,\i 


VIII 


STANCES 


Sur  une  absence  en  temps  de  pluie. 

Depuis  qu'un  malheureux  adieu 
Rendit  vers  vous  ma  flamme  criminelle, 
Tout  l'univers ,  prenant  votre  querelle  , 

Contre  moi  conspire  en  ce  lieu. 

Ayant  osé  me  séparer  5 

Du  beau  soleil  qui  luit  seul  à  mon  âme, 
Pour  le  venger,  l'autre,  cachant  sa  flamme, 

Refuse  de  plus  m'éclairer. 

L'air,  qui  ne  voit  plus  ce  flambeau, 
En  témoignant  ses  regrets  par  ses  larmes ,  i  o 

M'apprend  assez  qu'éloigné  de  vos  charmes 

Mes  yeux  se  doivent  fondre  en  eau. 

Je  vous  jure ,  mon  cher  souci, 
Qu'étant  réduit  à  voir  l'air  qui  distille , 
Si  j'ai  le  cœur  prisonnier  à  la  ville,  i  5 

Mon  corps  ne  l'est  pas  moins  ici. 


4'i  POÉSIES   DIVERSES. 


IX 


SONNET. 


Suivant  Thomas  Corneille,  notre  poëte  a  écrit  sa  comédie  de  Mé- 
lite pour  employer  ce  sonnet,  «  qu'il  avoit  fait  pour  une  demoiselle 
qu'il  aimoit.  »  Voyez  ce  que  nous  avons  dit  à  ce  sujet  dans  la  Notice 
de  Mélïte  (tome  I,  p.  126  et  suivantes).  Ce  sonnet,  imprimé  pour  la 
première  fois  en  i632,  à  la  suite  de  Clitandre,  à  une  époque  où  Mé- 
lite, déjà  représentée  depuis  plusieurs  années,  n'avait  pas  encore  paru, 
figure  à  la  scène  iv  de  l'acte  II  de  cette  comédie  :  voyez  tome  I, 
p.  171,  vers  481-494. 

Après  l'œil  de  Mélite  il  n'est  rien  d'admirable; 
Il  n'est  rien  de  solide  après  ma  loyauté  : 
Mon  feu  ,  comme  son  teint ,  se  rend  incomparable , 
Et  je  suis  en  amour  ce  qu'elle  est  en  beauté. 

Quoi  que  puisse  à  mes  sens  offrir  la  nouveauté,  5 

Mon  cœur  à  tous  ses  traits  demeure  invulnérable  ; 

Et  quoiqu'elle  ait*  au  sien  la  même  cruauté, 

Ma  foi  pour  ses  rigueurs  n'en  est  pas  moins  durable. 

C'est  donc  avec  raison  que  mon  extrême  ardeur 
Trouve  chez  cette  belle  une  extrême  froideur,  1  o 

Et  que  sans  être  aimé ,  je  brûle  pour  Mélite  ; 

Car  de  ce  que  les  Dieux,  nous  envoyant  au  jour, 
Donnèrent  pour  nous  deux  d'amour  et  de  mérite, 
Elle  a  tout  le  mérite,  et  moi  j'ai  tout  l'amour. 

1.  Dans  Mélite  on  lit  :  «  et  bien  qu'elle  ait,  »  pour  :  «  et  quoiqu'elle 
ait.  » 


POESIES    DIVERSES.  45 


X 


MADRIGAL. 


Je  suis  blessé  profondément  : 
Amour,  et  ma  maîtresse  , 
Qui  de  vous  deux  me  blesse? 
Un  aveugle  n'a  point  l'adresse 
De  porter  dans  le  cœur  ses  coups  si  justement; 
Et  Philis  n'a  point  de  flèches 
Pour  faire  de  telles  brèches  : 
Mon  mal  n'est  point  l'effet  ni  de  ses  seuls  regards , 
Ni  des  traits  qu'un  aveugle  tire; 
Mais  ia  mauvaise  avecque  lui  conspire , 
Et  lui  prête  ses  yeux  pour  adresser  ses  dards. 


/16  POÉSIES    DIVERSES. 


XI 


EPIGRAMMES 


Traduites  du  latin  d'Audoënus. 

Ces  sept  épigrammes,  imprimées  en  i632  à  la  suite  de  Clitandrc, 
n'ont  point  été  recueillies  par  Granet  ;  et  même  la  troisième ,  bien 
peu  digne  en  effet  d'être  conservée,  n'avait  pas  été  réimprimée  de- 
puis l'édition  originale.  Nous  avons  joint  en  note  à  chaque  pièce  le 
texte  latin  de  John  Owen,  dont  le  nom  se  traduit  d'ordinaire  en  latin 
par  Audoënus,  comme  le  nom  français  Ouen ,  auquel  il  répond.  Ce 
poète,  né  à  la  fin  du  seizième  siècle  dans  le  pays  de  Galles,  était 
mort  en  1622,  dix  ans  avant  le  temps  où  Corneille  publiait  cet  essai 
de  traduction.  Nous  avons  d'Owen  dix  livres  d'épigrammes;  trois 
livres  avaient  paru  dès  1606  ;  mais  les  éditions  complètes  sont  dues 
aux  Elzévirs  :  la  première  est  de  Leyde,  1628.  Les  épigrammes, 
imitées  plutôt  que  traduites  par  Corneille,  sont  toutes  dans  les  trois 
premiers  livres,  à  l'exception  de  la  troisième ,  dont  nous  n'avons  pu 
découvrir  la  source,  et  que  Corneille  a  peut-être  imitée  de  quelque 
petite  pièce  latine  manuscrite  attribuée  à  Owen. 

Jane ,  toute  la  journée , 

Dit  que  le  joug  d'hy menée 

Est  le  plus  âpre  de  tous  ; 

Mais  la  pauvre  créature 

Tout  le  long  de  la  nuit  jure  5 

Qu'il  n'en  est  point  de  si  doux  * . 


I.  In  Ajakam. 

Conjugio  esse  jugum  non  intolcrantius  itl/um, 


POESIES    DIVERSES.  kl 

Les  huguenotes  de  Paris 

Disent  qu'il  leur  faut  deux  maris; 

Qu'autrement  il  n'est  en  nature 

De  moyen  par  où  ,  sans  pécher. 

On  puisse ,  suivant  l'Ecriture ,  5 

Se  mettre  deux  en  une  chair  * . 


Madame,  dedans  sa  maison, 

Quinze  jours  avant  la  saison , 

Entend  du  coucou  le  ramage. 

«  Mais  c'est  un  homme  qu'elle  prend 

Pour  ce  bel  oiseau  de  passage ,  »  5 

Ce  dit  Monsieur,  qui  la  reprend. 

Pour  moi  plus  outre  je  n'enfonce , 

Mais  je  vous  laisse  à  deviner 

D'une  si  naïve  réponse 

Ce  que  l'on  peut  s'imaginer  2.  .  10 


Depuis  que  l'hiver  est  venu , 

Je  plains  le  froid  qu'Amour  endure , 


Nil  aliud  toto  clamât  Alana  die; 
Post  tôt  cla.nores  et  jurgia  ,  nocte  fatetur 
Conjugio  nullum  suavius  esse  jugum. 

(Lib.  I,  epigr.  xxx.) 

1.  In   Paujlam,  atheam. 

Vir  ducat  ne  duas ,  an  nubat  virgo  duobus  , 
Quseritur.  H  a  ne  lit  cm  solvere  Paula  volens  : 

«  Una  vins,  inquit ,  magis  apta  duobus;  in  una 
Consistent  aliter  quomodo  carne  duo?  » 

(Lib.  I,  epigr.  cxlv.) 

2.  Voyez  ci-dessus  les  dernières  ligue.-,  de  la  notice. 


48  POÉSIES   DIVERSES. 

Sans  songer  que  plus  il  est  nu , 

Et  tant  moins  il  craint  la  froidure  V 


Dans  les  divers  succès  de  la  fin  de  leur  vie , 
Le  prodigue  et  l'avare  ont  de  quoi  m'étonner  ; 
Car  l'un  ne  donne  rien  qu'après  qu'elle  est  ravie, 
Et  l'autre  après  sa  mort  n'a  plus  rien  à  donner2. 


Catin ,  ce  gentil  visage , 

Epousant  un  huguenot, 

Le  soir  de  son  inariage 

Disoit  à  ce  pauvre  sot  : 

«  De  peur  que  la  différence  5 

En  fait  de  religion , 

Rompant  notre  intelligence , 

Nous  mette  en  division  , 

Laisse-moi  mon  franc  arbitre  ; 

Et  du  reste  de  la  foi ,  10 


NUDUS   AMOR. 

Quœ  villis  natura  feras  et  gramme  campas 

Ornât ,  aves  pluma  ,  vellere  vestit  oves; 
Denique  frigidulo  quodcumque  sub  aère  nasci 

Contigit ,  innata  veste  vel  arte  tegit  : 
Vestïvit  nudum  cur  omnia  preeter  Amorem? 

Quo  nudus  magis  est,  hoc  minus  alget  Amor . 

(Lib.  II,  epigr.  lxxxviii.) 

In    PROD1GUM    ET    PARCUM. 

Hic  nisi  post  mortem  veteri  nil  donat  amico; 
llle  nihilj  quod  post  funera  do  net ,  habet. 

(Lib.  III,  epigr.  lxv.) 


POÉSIES   DIVERSES.  49 

Je  veux  avoir  le  chapitre  ', 
Si  j'en  dispute  avec  toi 2.  » 


Lorsque  nous  sommes  mal,  la  plus  grande  maison 
Ne  nous  peut  contenir,  faute  d'assez  d'espace; 
Mais  sitôt  que  Philis  revient  à  la  raison , 
Le  lit  le  plus  étroit  a  pour  nous  trop  de  place  *. 

1.  Avoir  le  chapitre^  être  chapitré,  c'est-à-dire  corrigé,  réprimandé. 

2.  In  Langam. 

Langa,  Lutliera.no  nubens  papana  marito, 

Ansam  ut  dissidii  tolleret  ornais,  ait: 
«  Jurgia  ne  pacem  perturbent  ulla  futuram, 

Tu  mihi  sis  facilis,  non  ero  dura  tibi  : 
Arbitra  libertatem  mihi  credito,  eritque 

De  reliaua  tecum  lis  mihi  nulla  fide.  » 

(Lib.  II,  epigr.  xlvii.) 

3.  Conjtjges. 

Discordes  nos  tota  domus  non  continet  ambos, 
Concordes  lectus  nos  tamen  unus  habet. 

(Lib.  III,  epigr.  cxxiv.) 


Corneille,  x 


5o  POÉSIES    DIVERSES. 


XII 


DIALOGUE. 

Il  faut  se  rappeler  que  Tirsis  '  est  le  nom  que  Corneille  s'est  choisi 
lorsqu'il  a  mis  au  théâtre  l'aventure  qui  fait  le  sujet  de  Mélite.  Il 
n'est  peut-être  pas  trop  hasardé  de  supposer  qu'il  a  écrit  ces  vers 
lorsqu'il  a  obtenu  de  Mlle  Milet  l'aveu  qu'il  n'osait  espérer.  Ce 
dialogue  n'a  pu,  comme  le  sonnet  que  nous  avons  vu  plus  haut 
(p.  44)»  entrer  textuellement  dans  la  comédie;  mais  Corneille  semble 
se  l'être  rappelé  en  écrivant  la  scène  iv  de  l'acte  V,  où  Tircis  et  Mé- 
lite s'entretiennent  seuls;  on  y  retrouve  (vers  i635)  ces  mots  que 
le  poète  tenait  à  conserver  et  qui  font  ici  l'effet  d'un  refrain  :  «  Tu 
t'en  peux  assurer.  »  Faut-il  croire  que  ce  soient  là  les  propres  pa- 
roles de  Mlle  Milet?... 

TIRSIS,  CALISTE. 

TIRSIS. 

Galiste  ,  mon  plus  cher  souci , 
Prends  pitié  de  F  ardeur  qui  me  dévore  lame. 

CALISTE. 

Tirsis,  ne  vois-tu  pas  aussi 
Que  mon  cœur  embrasé  brûle  de  même  flamme? 

TIRSIS. 

Je  n'ose  l'espérer.  5 

CALISTE. 

Tu  t'en  peux  assurer. 

TIRSIS. 

Mais  mon  peu  de  mérite 
Défend  un  si  haut  point  à  ma  présomption. 

i.  Dans  l'édition  de  i632  ce  nom  est  écrit  par  un  c  au  troisième 
vers;  partout  ailleurs,  par  une  s. 


POESIES    DIVERSES. 

CALISTE. 

Mais  cette  récompense  est  plutôt  trop  petite 
Pour  tant  d1  affection. 


I  o 


TIRSIS. 

Je  croirai ,  puisque  tu  le  veux  , 
Que  maintenant  mon  mal  aucunement1  te  touche. 

CALISTE. 

La  mort  seule  éteindra  mes  feux  , 
Et  j'en  ai  plus  au  cœur  mille  fois  qu'en  la  bouche. 

TIRSIS. 

Je  n'ose  l'espérer.  i  5 

CALISTE. 

Tu  t'en  peux  assurer. 

TIRSIS. 

Hélas  !  que  ton  courage 
M'apprête  de  rigueurs  à  souffrir  sous  ta  loi  ! 

CALISTE. 

Ce  que  j'ai  de  rigueurs,  j'en  réserve  l'usage 

Pour  tout  autre  que  toi.  20 

TIRSIS. 

Si  quelqu'un  plus  riche  ou  plus  beau  , 
Et  mieux  fourni  d'appas ,  à  te  servir  se  range  ? 

CALISTE. 

J'élirois  plutôt  le  tombeau , 
Que  ma  volage  humeur  se  dispensât 2  au  change. 

TIRSIS. 

Je  n'ose  F  espérer.  *  5 

CALISTE. 

Tu  t'en  peux  assurer. 

1.  Aucunement,  en  quelque  manière,  jusqu'à  un  certain  point. 
Voyez  le  Lexique. 

2.  Voyez  tome  I,  p.  208,  note  2;  tome  II,  p.  201,  vers  i443  ;  et 
ie  Lexique.  —  Se  disposât ,  dans  les  Œuvres  diverses,  publiées  par  Gra- 
net,  et  dans  toutes  les  éditions  suivantes. 


52  POÉSIES   DIVERSES. 

TIRSIS. 

Mais  pourrois-tu,  ma  belle, 
Dédaigner  un  amant  qui  vaudroit  mieux  que  moi  ? 

CALISTE. 

Pourrois-je  préférer  à  ton  amour  fidèle 

Une  incertaine  foi  ?  3  o 

TIRSIS. 

Si  la  rigueur  de  tes  parents 
A  quelque  autre  parti  plus  sortable  t'engage? 

CAL1STE. 

Les  saints  devoirs  que  je  leur  rends 
Jamais  dessus  ma  foi  n'auront  cet  avantage. 

TIRSIS. 

Je  n'ose  l'espérer.  3  5 

CALISTE. 

Tu  t'en  peux  assurer. 

TIRSIS. 

Quoi  ?  parents ,  ni  richesses , 
Ni  grandeurs  ne  pourront  ébranler  tes  esprits  ? 

CALISTE. 

Tout  cela ,  mis  auprès  de  tes  chastes  caresses , 

Perd  son  lustre  et  son  prix.  4*> 


POÉSIES    DIVERSES.  53 


XIII 


CHANSON. 


Voyez  ci-après,  p.  74,  75  et  78,  les  vers  4-12  et  89-98  de  V Excuse 
à  driste,  et  la  note  de  la  page  78. 

Toi  qui  près  d'un  beau  visage 
Ne  veux  que  feindre  l'amour. 
Tu  pourrois  bien  quelque  jour 
Eprouver  à  ton  dommage 
Que  souvent  la  fiction  5 

s.  ch,„6,  ,„*„;., 

Tu  dupes  son  innocence  ; 

Mais  enfin  ta  liberté 

Se  doit  à  cette  beauté 

Pour  réparer  ton  offense  ;  1  o 

Car  souvent  la  fiction 

Se  change  en  affection. 

Bien  que  ton  cœur  désavoue 

Ce  que  ta  langue  lui  dit, 

C'est  en  vain  qu'il  la  dédit  :  1  5 

L'amour  ainsi  ne  se  joue; 

Et  souvent  la  fiction 

Se  change  en  affection. 

Sache  enfin  que  cette  flamme 

Que  tu  veux  feindre  au  dehors ,  a  © 

Par  des  inconnus  ressorts 


:>/,  POESIES   DIVERSES. 

Entrera  bien  dans  ton  à  me; 
Car  souvent  la  fiction 
Se  change  en  affection. 

Tirsis  auprès  d'Hippolyte  2  5 

Pensoit  bien  garder  son  cœur  ; 
Mais  ce  bel  objet  vainqueur 
Le  fit  rendre  à  son  mérite , 

Changeant  en  affection, 

Malgré  lui,  sa  fiction.  3« 


POÉSIES    DIVERSES.  55 


XIV 


CHANSON. 


Voyez  la  courte  notice  de  la  piècp  précédente.  Voyez  aussi  la  fin 
de  celle  de  la  pièce  I,  ci-dessus,  p.  a5. 

Si  je  perds  bien  des  maîtresses, 

J'en  fais  encor  plus  souvent, 

Et  mes  vœux  et  mes  promesses 

Ne  sont  que  feintes  caresses  , 

Et  mes  vœux  et  mes  promesses  5 

Ne  sont  jamais  que  du  vent. 

Quand  je  vois  un  beau  visage , 

Soudain  je  me  fais  de  feu  ; 

Mais  longtemps  lui  faire  hommage  , 

Ce  n'est  pas  bien  mon  usage;  i  o 

Mais  longtemps  lui  faire  hommage , 

Ce  n'est  pas  bien  là  mon  jeu. 

J'entre  bien  en  complaisance 

Tant  que  dure  une  heure  ou  deux  ; 

Mais  en  perdant  sa  présence  i  5 

Adieu  toute  souvenance  ; 

Mais  en  perdant  sa  présence 

Adieu  soudain  tous  mes  feux. 

Plus  inconstant  que  la  lune , 

Je  ne  veux  jamais  d'arrêt  :  20 

La  blonde  comme  la  brune 


56  POÉSIES   DIVERSES. 

En  moins  de  rien  m'importune; 
La  blonde  comme  la  brune 
En  moins  de  rien  me  déplaît. 

Si  je  feins  un  peu  de  braise  ',  a  5 

Alors  que  l'humeur  m'en  prend  , 

Qu'on  me  chasse  ou  qu'on  me  baise, 

Qu'on  soit  facile  on  mauvaise , 

Qu'on  me  chasse  ou  qu'on  me  baise, 

Tout  m'est  fort  indifférent.  io 

Mon  usage  est  si  commode , 

On  le  trouve  si  charmant , 

Que  qui  ne  suit  ma  méthode 

N'est  pas  bien  homme  à  la  mode, 

Que  qui  ne  suit  ma  méthode  3  5 

Passe  pour  un  Allemand. 

i.   D'ardeur,  de  flamme.  Voyez  le  Lexique. 


POÉSIES   DIVERSES.  57 


XV 

A    MONSIEUR    DE     SCUDÉRY 

[sur  son  ligdamon  et  lidus]. 

Ce  quatrain  se  lit,  signé  du  nom  de  Corneille,  au  verso  du  onzième 
feuillet  de  Ligdamon  et  Lidias  ou  la  Ressemblance,  tragi-comédie  de 
Scudéry,  représentée,  suivant  les  frères  Parfait,  en  1629,  et  publiée 
à  Paris,  chez  François  Targa,  en  i63i.  L'Achevé  d'imprimer  est  du 
18  septembre  i63i.  Ces  vers  sont  les  premiers  de  notre  poète  qui 
aient  été  imprimés.  Signalés  par  les  frères  Parfait  dans  leur  Histoire 
du  Théâtre  françois  (tome  IV,  p.  443) ,  ils  ont  été  remis  en  lumière 
par  M.  Ed.  Tricotel  dans  le  Bulletin  du  bouquiniste  du  Ier  août  1859. 
C'est  la  première  fois  qu'ils  sont  recueillis  dans  les  OEuvres  de  Cor- 
neille. 

Encor  que  Ligdamon,  en  dépeignant  Silvie, 
Lui  donne  assez  d'appas  pour  charmer  l'univers, 
Sa  beauté  toutefois,  dont  la  France  est  ravie, 
Ne  me  toucheroit  point  sans  celle  de  tes  vers. 


58  POESIES   DIVERSES. 


XVI 


RECIT 

POUR    LE    BALLET    DU    CHATEAU    DE    BICETRE. 

Au  commencement  du  dix-septième  siècle  il  n'était  question  parmi 
le  peuple  de  Paris  que  des  apparitions  qui  avaient  lieu  au  château 
de  Bicêtre  alors  en  ruine.  Louis  XIII  résolut  de  le  faire  abattre,  ce 
que  du  Breul  nous  raconte  en  ces  termes  dans  le  Théâtre  des  antiqui- 

tez  de  Paris A  Paris,  par  la  Société  des  Imprimeurs,  M. DC. XXXIX, 

in- 4°,  p.  87  :  «  Du  Château  de  Vicestres.  L'an  ifi32  ce  château  fut  en- 
tièrement rasé  jusques  aux  fondements,  et  de  la  grande  place  où  il 
étoit,  on  desseigna  y  faire  un  lieu  pour  y  loger  et  recevoir  les  soldats 
estropiés  aux  guerres  pour  le  service  du  Roi,  et  dès  lors  on  commença 
la  clôture  de  murailles,  avec  quatre  pavillons  aux  quatre  coins,  où  on 
y  fit  bâtir  une  chapelle,  qui  fut  bénite  par  l'archevêque  de  Paris.  » 

On  comprend  qu'au  moment  où  le  Roi  était  occupé  de  ce  projet  le 
château  de  Bicêtre  était  un  sujet  de  ballet  tout  à  fait  de  circonstance. 
Il  fut  dansé  le  7  mars  16 32, et  la  Gazette  de  France  en  fît  un  compte 
rendu  que  nous  avons  cru  devoir  reproduire  dans  notre  Appendice, 
parce  qu'il  fait  bien  comprendre  les  vers  de  Corneille  et  explique 
à  quel  endroit  ils  se  plaçaient  dans  le  ballet. 

Le  récit  de  Corneille  est  le  morceau  que  le  sieur  Justice  chantait 
avec  accompagnement  de  luth  (voyez  ci-après  Y  Appendice).  La  pu- 
blication de  cette  pièce  de  vers  a  suivi  de  fort  près  le  moment  où 
elle  fut  chantée,  car  elle  occupe  le  huitième  rang  parmi  celles  qu'on 
trouve  dans  les  Mélanges  à  la  suite  de  Clitandre ,  dont  l'Achevé  d'im- 
primer est,  comme  nous  l'avons  dit,  du  20  mars  i632.  Jusqu'ici 
les  éditeurs  de  Corneille  n'avaient  donné  aucun  renseignement  sur 
le  Ballet  du  chasteau  de  Bissestre,  et  n'en  avaient  pas  même  indiqué 
la  date. 

Toi,  dont  la  course  journalière 
Nous  ôte  le  passé,  nous  promet  l'avenir, 


POÉSIES   DIVERSES.  59 

Soleil,  père  des  temps  comme  de  la  lumière , 

Qui  vois  tout  naître  et  tout  finir, 

Depuis  que  tu  fais  tout  paroître  5 

As-tu  rien  vu  d'égal  au  château  de  Bissestre? 

Tcutes  ces  pompeuses  machines 
Qu'autrefois  on  flattoit  de  titres  orgueilleux , 
Pourroient-elles  garder  auprès  de  ces  ruines 


I  o 


i  b 


Le  nom  d'ouvrages  merveilleux? 
Et  toi ,  qui  les  faisois  paroître , 
Qu'y  voy ois-tu  d'égal  au  château  de  Bissestre2? 

Ces  tours  qui  semblent  désolées  , 
Et  ces  vieux  monuments  qu'on  laisse  à  l'abandon , 
C'est  ce  qui  fait  périr  le  nom  des  Mausolées1, 

Et  des  palais  d'Apollidon2, 

Puisque  tu  les  fis  tous  paroître 
Sans  y  voir  rien  d'égal  au  château  de  Bissestre. 

Cache- toi  donc  plus  tard  sous    l'onde, 
Sur  ce  nouveau  miracle  arrête  ton  flambeau  ;  2  o 

Et  sans  aller  sitôt  apprendre  à  l'autre  monde 

Ce  que  le  nôtre  a  de  plus  beau , 

Sois  longtemps  à  faire  paroître 
Que  rien  n'est  comparable  au  château  de  Bissestre. 

1.  Mausolée,  magnifique  tombeau  élevé  par  Àrtémise  en  l'honneur 
de  son  époux  Mausole,  roi  de  Carie. 

2.  Château  magique   construit  par  l'enchanteur  Apollidon.  11  est 
décrit  au  Ier  chapitre  du  IIe  livre  de  VAmadis  de  Gaule. 


ô'o  POÉSIES   DIVERSES 


XVII 

POUR  MONSIEUR  L.  C:  D.  F., 

Représentant  un   diable  au  même  ballet. 

ÉPIGRAMME. 

Voyez  sur  le  ballet  du  cbâteau  de  Bicêtrela  notice  qui  est  en  tête  de 
la  pièce  précédente.  Les  initiales  qui  se  trouvent  dans  le  titre  ci-dessus 
désignent  évidemment  le  comte  de  Fiesque,  qui  paraissait  plusieurs  fois 
dans  le  ballet  et  représentait  sans  doute  ce  «  démon  qui  sortoit  tout 
en  feu  delà  plus  haute  de  ses  fenêtres,  »  et  dont  la  Gazette  a  oublié  de 
nous  dire  le  nom.  Cette  épigramme  a  été  imprimée  pour  la  première 
fois  à  la  suite  de  Clitanc/re,  immédiatement  après  la  pièce  précédente. 

Quand  je  vois ,  ma  Philis ,  ta  beauté  sans  seconde  , 
Moi  qui  tente  un  chacun,  je  m'y  laisse  tenter  ; 
Et  mes  désirs  brûlants  de  perdre  tout  le  monde 
Se  changent  aussitôt  à  ceux  de  l'augmenter. 


POESIES    DIVERSES.  61 


XVIII 


A    MONSIEUR    DE    SCUDERY, 


SUR    SON    TROMPEUR  PUNI. 


MADRIGAL. 


Ces  vers  se  lisent,  signés  du  nom  de  Corneille,  au  verso  du  dou- 
zième feuillet  du  volume  intitulé  :  le  Trompeur  puny  ou  l 'Histoire 
Septentrionale ,  tragi-comédie  par  Monsieur  de  Scudery,  à  Paris , 
chez  Billaine M.DC. XXXIII.  L'Achevé  d'imprimer  est  du  4  jan- 
vier i633.  Suivant  les  frères  Parfait,  la  pièce  a  été  représentée  en  i63i. 
Ce  madrigal  a  été  réuni  aux  Œuvres  de  Corneille  dans  le  tome  XII 
(p.  43]  de  l'édition  de  M.  Lefèvre  dent  la  publication  a  été  achevée 
en  i855. 

Ton  Cléonte ,  par  son  trépas , 
Jette  un  puissant  appas  ' 
A  la  supercherie , 
Vu  l'éclat  infini 
Qu'il  reçoit  de  ta  plume  après  sa  tromperie.  5 

Chacun  voudra  tromper  pour  être  ainsi  puni  ; 
Et  quoiqu'il  en  perde  la  vie , 
On  portera  toujours  envie 
A  l'heur  qui  suit  son  mauvais  sort, 
Puisqu'il  ne  vivroit  plus  s'il  ne  fût  ainsi  mort.  io 

i.  Voyez  tome  I,  p.  148,  note  3. 


62  POÉSIES   DIVERSES. 

XIX 

POUR    LA  SOEUR  VALEUREUSE  DE  MONSIEUR    MARESCHAL. 

Ces  vers  se  trouvent,  signés  du  nom  de  Corneille,  aux  feuil- 
lets 5  verso  et  6  recto  de  la  Sœur  valeureuse  ou  F  Aveugle  amante  , 
tragi-comédie  dédiée  a  Monseigneur   le  Duc  de  Vandosme,  par  le 

SrMareschal,à  Paris,  chez  A nt hoirie  de  Sommaville M. DC. XXXIII, 

in-8°.  Signalés  déjà  par  les  frères  Parfait  dans  leur  Histoire  du 
Théâtre  francois  (tome  V,  p.  6),  ils  ont  été  recueillis  par  M.  Edouard 
Fournier  dans  les  Notes  sur  la  vie  de  Corneille  (p.  xcvi)  qui  précèdent 
Corneille  à  la  butte  Saint-Roch.  Ils  figurent  ici  pour  la  première  fois 
dans  les  OEuvres  de  notre  poète. 

Rendez-vous,  amants  et  guerriers, 

Craignez  ses  attraits  et  ses  armes  : 

Sa  valeur,  égale  à  ses  charmes , 

Unit  les  myrtes  aux  lauriers. 

Miracle  d'amour  et  de  guerre ,  5 

Tu  vas  dompter  toute  la  terre. 
A  l'éclat  de  tes  yeux  on  voit  de  toutes  parts 
Mille  cœurs  à  l'envi  voler  sous  ta  puissance  ; 
Et  s'il  est  un  mortel  rebelle  à  tes  regards, 
Ton  bras  soudain  le  range  à  ton  obéissance.  i  o 

Telle  contre  le  roi  d'Arger 

Courut  autrefois  Bradamante  ', 

A  la  quête  de  son  Roger  ; 

Telle ,  mais  avec  moins  d'adresse , 

i .  Au  commencement  du  dix-septième  siècle  on  disait  indifférem- 
ment Arger  ou  Alger;  on  trouve  les  deux  formes  dans  Malherbe  :  la 
première  au  tome  I,  p.  3i5;  la  seconde  au  tome  IV,  p.  202.  — 
Voyez  dans  le  XXXVe  chant  du  Roland  furieux  de  FArioste  le  combat 
de  Bradamante  contre  Rodoinont,  roi  d'Alger  [d'Arger). 


POESIES   DIVERSES.  63 

Vénus  s'arma  contre  la  Grèce1  ;  1 5 

Telle  contre  son  fils2,  pour  le  roi  des  Latins, 
Camille  dans  le  choc  se  jetoit  animée, 
Et  telle  du  cerveau  du  maître  des  destins, 
Son  mari*  fit  sortir  Minerve  toute  armée. 

i.  Dans  le  Ve  livre  de  V Iliade,  Vénus,  voulant  protéger  Enée,  est 
blessée  à  la  main  par  Diomède. 

2.  Contre  Enée,  fils  de  Vénus.  —  Voyez  le  XIe  chant  de  Y  Enéide 
de  Virgile. 

3.  Vulcain,  mari  de  Vénus. 


64  POÉSIES    DIVERSES. 


XX 


P.  CORNEL1I  ROTHOMAGENSIS ,  AD  1LLUSTRISSIMJ  FRAN- 
CISCO, ARCHIEPISCOPI,  NORMANDE  PRIMATIS,  IWVI- 
TATIONEM,  QUA  GLORIOSISSIMUM  REGEM,  EMINENTTS- 
SIMUMQUE  CARDINALEM-DUCEM  VERSIRUS  CELERRARE 
JUSSUS    EST, 

EXCUSATJO. 

Dans  un  excellent  mémoire  intitulé  :  Louis  XIII  et  sa  cour  aux 
eaux  de  Forges*,  M.  F.  Bouquet  raconte  en  grand  détail  le  séjour  du 
Roi  dans  cette  localité  depuis  le  mercredi  i5  juin  i633  jusqu'au  di- 
manche 3  juillet  de  la  même  année  :  «  Forges,  dit-il  en  résumant 
son  travail ,  avait  vu  se  rendre  auprès  du  Roi  et  de  la  Reine  l'il- 
lustre cardinal,  des  ambassadeurs  étrangers,  les  plus  hauts  dignitaires 
de  l'Etat,  tous  les  représentants  de  l'autorité  souveraine  dans  la  pro- 
vince de  Normandie,  la  noblesse  des  environs  et  les  corps  de  cavalerie 
et  d'infanterie  attachés  au  service  de  Leurs  Majestés  et  du  Cardinal. 
Il  avait  eu  un  théâtre5,  des  comédiens  illustres,  enfin  tout  l'éclat  et 
tout  le  mouvement  inséparables  d'un  voyage  de  la  cour,  même  dans 
une  aussi  modeste  bourgade.  »  M.  Bouquet  suppose  avec  beaucoup 
de  vraisemblance  que  l'archevêque  de  Rouen  ne  dut  pas  manquer 
d'aller  aussi  présenter  ses  devoirs  au  Roi,  et  que  ce  fut  en  cette  cir- 
constance qu'il  engagea  Corneille  à  célébrer  dans  ses  vers  Louis  XIII 
et  Richelieu.  S'il  en  est  ainsi,  notre  poëte  ne  répondit  pas  immédia- 
tement et  ne  satisfit  qu'un  peu  plus  tard  au  désir  du  prélat,  en  parais- 

i.  Il  s'agit  ici  de  François  de  Harlay  de  Champvallon,  arche- 
vêque de  Rouen  du  8  octobre  i6i5  au  27  décembre  i65i,  oncle 
et  prédécesseur  de  François  de  Harlay  de  Champvallon  dont  Cor- 
neille parle  dans  la  dédicace  de  Y  Imitation  de  Jésus- Chris  t.  Voyez 
tome  VIII,  p.  3. 

a.  Revue  des  Sociétés  savantes  des  départements ,  2e  série,  tome  I, 
i85g,  1"  semestre,  p.  611-642. 

3.  Voyez  tome  II,  p.  218,  note  2. 


POÉSIES    DIVERSES.  65 

saut  s'excuser  de  ne  le  pouvoir  faire.  Quoi  qu'il  en  soit,  cette  pièce 
de  vers  latins  est  assurément  postérieure  au  24  septembre  i633, 
date  de  la  prise  de  Nancy,  dont  il  est  question  au  vers  54.  Elle  a 
été  publiée  en  i634,  et  forme  les  pages  248-251  d'un  recueil  intitulé. 
Epinicia  M  us  arum  Eminentissimo  Cardinali  Duci  de  Richelieu,  Pan- 
sus, apud  Sebastianum  Cramoisy....  M.DC.XXXIV,  in-4°-  Ce  recueil 
latin  est  habituellement  relié  à  la  suite  d'un  recueil  français  intitulé  : 
les  Sacrifices  des  Muses  au  grand  Cardinal  de  Richelieu ,  à  Paris ,  chez 
Sebastien  Cramoisy....  M.DCXXXV.  Le  tout  correspond  à  un  autre 
volume  semblable  de  disposition  et  d'aspect,  publié  chez  le  même 
libraire  et  intitulé,  pour  la  première  partie  :  le  Parnasse  royal,  où 
les  immortelles  actions  du  tres-chrestien  et  très-victorieux  Monarque 
Louis  XIII  sont  publiées  par  les  plus  célèbres  Esprits  de  ce  temps...,  et 
pour  la  seconde  :  Palmes  regue  invictissimo  Ludovico  XIII,  régi  ckristianis- 
sirao,  a  prsecipuis  nostri  sévi  poetis  in  trophseum  erectse.  Comme  dans  le 
volume  dont  nous  avons  parlé  d'abord,  le  titre  de  la  première  partie 
porte  pour  date  M.DCXXXV,  et  celui  de  la  seconde  M.DC.XXXIV. 
Le  privilège  de  ces  volumesaété  accordé  à  Boisrobert  le  23  avril  ifi33, 
et  transporté  à  Cramoisy  le  10  mai  ;  toutefois  l'Achevé  d'imprimer 
n'est  que  du  14  août  i634;  mais  cela  se  trouve  fort  bien  expliqué  par 
les  avis  de  l'imprimeur  au  lecteur,  qui  nous  apprennent  que  les  re- 
cueils se  formaient  pour  ainsi  dire  au  fur  et  à  mesure  de  l'impres- 
sion, et  qu'on  mettait  les  pièces  entre  les  mains  des  compositeurs 
aussitôt  qu'elles  arrivaient,  sans  observer  aucun  ordre  '.  —  Ces  vers 
latins  de  Corneille  sont  fort  curieux  pour  l'histoire  de  ses  premiers 
ouvragt  s  ;  nous  y  trouvons  même  un  peu  tardivement  le  moyen  de 
rectifier  une  légère  erreur  que  les  divers  éditeurs  de  Corneille  avaient 
commise  quant  à  la  date  de  la  Galerie  du  Palais,  erreur  dans  laquelle 
nous  étions  nous- même  tombé  à  leur  exemple2.  —  Au  bas  des  pages, 
nous  donnons,  selon  notre  coutume,  la  traduction  française. 

Neustriacae  lux  aima  plagae  ,  quo  nostra  superbit 

Bienfaisante  lumière  de  la  plage   neustrienne,  toi    dont    s'enor- 


1.  «  Ne  mirere»  lector,  si  nullam  hic  nec  rerum,  nec  temporum, 
«  nec  personarum  servatam  seriem  vides;  nain  ut  singula  in  manus 
«  nostra  s  venere,  ea  praelo  subjocimus.  » 

2.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  fi  et  7. 
Corwf.il  le.  x 


66  POÉSIES   DIVERSES. 

Infula ,  et  Aonii  laurus  opaca  jugi  * , 
Heroum  ad  laudes ,  dignosque  Marone  triumphos 

Parce,  precor,  tenuem  sollicitare  chelyn. 
Non  ingrata  canit,  sed  et  impar  fortibus  ausis,  5 

Quae  canat ,  exiguis  viribus  apta  legit. 
Ad  scenam  teneros  deducere  gaudet  amores, 

Et  vêtus  insuetis  drama  novare  jocis. 
Régnât  in  undanti  non  tristis  musa  theatro, 

Atque  bilarem  populum  taedia  nosse  vetat.  10 

Hanc  doctique  rudesque  ,  hanc  mollis  et  aulicus2,  et  jani 

Exeso  mitis  Zoïlus  ungue  stupet. 
Nil  tamen  hic  fortes  opus  alte  intendere  nervos, 

Nostraque  nil  duri  scena  laboris  eget. 
Vulgare  eloquium ,  sed  quo  improvisus  amator  i  5 

gueillit  notre  mitre  épiscopale  et  l'épais  laurier  du  mont  d'Aonie, 
épargne,  je  t'en  prie,  mon  faible  luth,  et  ne  le  sollicite  pas  de  célébrer 
les  louanges  des  héros  et  des  triomphes  dignes  d'un  Virgile.  Ses 
chants  ne  sont  pas  sans  charme  ;  mais  ne  pouvant  suffire  aux  entre- 
prises audacieuses  ,  il  choisit  ce  qui  convient  à  ses  modestes  forces. 
Il  se  plaît  à  introduire  sur  la  scène  les  tendres  amours,  et  à  renou 
vêler  l'ancienne  poésie  dramatique  par  des  jeux  inaccoutumés.  Ma 
muse  enjouée  règne  au  théâtre  où  ondoie  la  foule;  égayant  le  peuple 
elle  l'empêche  de  connaître  l'ennui.  Les  doctes  et  les  iguorants,  et  le 
courtisan  délicat,  tous,  jusqu'au  Zoïle  adouci,  qui  se  ronge  les  ongles 
en  silence,  l'écoutent  avec  étonnement.  Mais  ici  il  n'est  pas  besoin  de 
tendre  forlement  les  cordes,  et  notre  scène  n'exige  pas  un  dur  labeur. 
Le  style  est  familier,  mais  tel  qu'il  suffit   à   l'amant  improvisé  pour 


i.  François  de  Harlay  était  fort  instruit.  On  raconte  qu'il  prêcha 
un  jour  en  grec  à  Paris  chez  les  Franciscains.  Il  avait  composé  di- 
vers ouvrages,  parmi  lesquels  on  compte  quelques  poèmes.  Voyez 
le  Gallia  christiana,  tome  XI,  colonnes  108  et  109. 

1.  Corneille  a  dit  de  même  dans  Y  Excuse  à  Arlste  (vers  47)  • 

Je  satisfais  ensemble  et  peuple  et  courtisans. 


POÉSIES    DIVERSES.  67 

Occurrens  domina?  fundere  vota  velit*. 
Obvius  hoc  blandum  compellet  amicus  amicum2; 

Hoc  subitum  excipiat  laeta  puella  procum  3. 
Ars  artem  fugisse  mihi  est,  et  sponte  fluentes 

Ad  numéros  facilis  pleraque  rhythmus  obit.  2  o 

Nec,  solis  addicta  jocis  risuque  movendo, 

Semper  in  exiguo  carminé  \>ena  jacet  : 
Sœpius  et  grandes  soccis  miscere  cothurnos, 

Et  simul  oppositis  docta  placere  modis. 
In  lacrimas  natam  pater  \  aut  levis  egit  amator  25 

Saepius  6,  aut  lusu  saeviit  ira  proci6; 
Atque  ubi  pêne  latus  venalis  pergula  rumpit , 

offrir  ses  vœux  à  la  dame  qu'il  rencontre,  à  l'ami  qui  interpelle  un 
aimable  ami  survenant,  à  la  jeune-fille  qui  accueille  avec  joie  un  pré- 
tendant inattendu.  Pour  moi  l'art  consiste  à  éviter  l'art;  et  la  plupart 
du  temps,  mes  vers  coulant  comme  d'eux-mêmes,  le  rhythme  vient 
sans  peine  seconder  la  pensée.  Toutefois  ma  veine  n'est  pas  seulement 
consacrée  aux  jeux  et  à  exciter  le  rire;  elle  ne  se  borne  pas  toujours  à 
ces  humbles  accords  :  souvent  elle  sait  joindre  le  haut  cothurne  au 
brodequin,  et  plaire  en  même  temps  par  des  tons  opposés.  Parfois  un 
père  arrache  des  pleurs  à  sa  fille,  ou  un  amant  léger  à  son  amante, 
ou  bien  encore  un  prétendant  se  livre  à   une  plaisante  fureur.   Au 

1 .  Voyez  la  scène  ou  Tircis  est  présenté  par  Eraste  à  Mélite  dans 
la  pièce  de  ce  nom  (acte  I,  scène  n). 

2.  Voyez  la  rencontre  de  Lysandre  et  de  Dorimant  dans  la  Ga- 
lerie du  Palais  (acte  1,  scène  vu),  et  celle  d'Alidor  et  de  Cléandre 
dans  la  Place  Royale  (acte  I,  scène  iv). 

3.  Voyez  dans  Mélite  la  scène  vin  de  l'acte  II,  entre  Tircis  et  Mé- 
lite, et  dans  la  Place  Royale  la  scène  vu  de  l'acte  II,  où  Cléandre  ren- 
contre Phylis  avec  Lvsis. 

4.  Voyez  dans  la  Galerie  du  Palais  la  scène  x  de  l'acte  IV,  dans 
laquelle  Pleirante  intime  à  Gélidée  l'ordre  d'épouser  Dorimant,  et  le 
monologue  de  Célidée  qui  forme  la  scène  suivante. 

5.  Voyez  dans  la  Galerie  du  Palais  la  scène  v  et  la  scène  x  de 
l'acte  III. 

6.  Voyez  à  la  lin  de  l'acte  IV  de  Mélite  et  au  commencement  de 
l'acte  V  les  fureurs  co  niques  d'Éraste. 


68  POESIES   DIVERSES. 

Hic  aliquid  dignurn  laude,  Ly sandre  ,  furis1  ; 
Nec  minus  Angelicae  dolor  et  suspiria  spretse2, 

Quam  placuere  tui,  Phylli  jocosa  ,  sales8;  3o 

Et  quorum  in  patulos  solvis  lata  ora  cachinnos , 

Multa  his  Angelica  lacrima  flente  cadit. 
Sed  tamen  hic  scena  est ,  et  gestu  et  voce  juvamur, 

Forsitan  et  mancum  Roscius4  implet  opus. 
Tollit  si  qua  jacent ,  et  toto  corpore  prodest,  3  5 

Forsan  et  inde  ignis  versibus ,  inde  lepos. 
Vix  sonat  a  magno  divulsa  camœna  theatro , 

Blaesaque  nii  proprio  sustinet  ore  loqui. 
Hi  mihi  sunt  fines,  nec  me  quaesiveris  extra  : 

Carminibus  ponent  clausa  theatra  modum  ;  4  o 

moment  même  où  les  marchands  de  la  Galerie  font  éclater  de  rire 
les  spectateurs,  tu  t'abandonnes,  Lysandre,  à  un  courroux  qui  fait 
quelque  honneur  au  poète.  La  douleur  et  les  soupirs  d'Angélique  dé- 
daignée n'ont  pas  moins  plu  quêtes  brocards,  maligne  Phylis;  et  ceux 
que  tu  fais  rire  à  gorge  déployée  ne  peuvent  retenir  leurs  larmes 
en  voyant  pleurer  Angélique .  Mais  du  moins  la  scène  est  là  :  le 
geste,  la  diction  nous  viennent  en  aide,  et  Roscius  peut  complé- 
ter l'œuvre  imparfaite.  Il  relève  au  besoin  ce  qui  languit;  toute  sa 
personne  contribue  au  succès,  et  de  là  peut-être  le  feu  de  mes  vers, 
de  là  leur  grâce.  Arrachée  à  son  grand  théâtre,  c'est  à  peine  si  ma 
muse  parvient  à  se  faire  entendre;  elle  bégaye  et  ne  se  risque  point  à 
parler  par  sa  propre  bouche.  Là  sont  mes  limites,  ne  me  cherchez 
pas  en  dehors  :  le  théâtre  fermé,  il  ne  faut  plus  attendre  de  vers  de 

1.  Voyez  le  monologue  de  Lysandre,  qui  forme  la  scène  1  de 
l'acte  V  de  la  Galerie  du  Palais  et  succède  immédiatement  à  la  dis- 
pute de  la  Lingère  et  du  Mercier. 

2.  Voyez  diverses  scènes  de  la  Place  Royale,  entre  autres  les  scè- 
nes 1,  11  et  ni  de  l'acte  II. 

3.  Voyez  le  rôle  de  Phylis  dans  la  Place  Royale,  dès  la  première 
scène. 

4.  Allusion  flatteuse  au  talent  avec  lequel  Mondory  remplissait 
les  principaux  rôles  <!ans  ces  premières  pièces  de  Corneille.  Voyez 
tome  1,  p.  i3o,   i3i  et  268. 


POÉSIES    DIVERSES.  69 

Nec,  Lodoïce,  tuos  ausim  temerare  triumphos, 

RicHELiuMve  humili  dedecorare  lyra. 
iiegis  ad  adventum  fusos  Rliea  protinus  Anglos 

Tundere  spumantes  libéra  vidit  aquas. 
Victa  sibi  nullo  Rupella1  cruore  madendum  45 

Mirata  est,  iram  vicerat  ille  prius  : 
Victores  dominum,  victi  sensere  parentem2, 

Mœnibus  admisit  cum  benesuada  famés. 
Quem  sprevit  socium,  dominum  tulit  inde  Sabaudus, 

Quique  fide  pGtuit  cedere  ,  cessit  agris  ;  5  o 

Cessit  et  obsesso  pugnax  a  Gazale  Iberus , 

Jamque  suo  servit  Mantua  lœta  duci. 
Arx  quoque  totius  non  impar  viribus  orbis , 

moi;  et  je  n'oserais,  Louis,  ni  profaner  tes  triomphes,  ni  déshonorer 
Richelieu  en  le  célébrant  sur  mon  humble  lyre. 

A  l'arrivée  du  Roi  Rhé  libre  vit  aussitôt  les  Anglais  mis  en  fuite 
fendre  les  flots  écumeux.  Vaincue,  la  Rochelle  s'étonna  de  n'avoir 
pas  à  ruisseler  de  sang  ;  mais  déjà  il  avait  dompté  sa  colère  :  les 
vainqueurs  trouvèrent  en  lui  un  maître,  les  vaincus  un  père,  quand 
la  faim,  bonne  conseillère,  lui  ouvrit  les  portes.  La  Savoie,  pour 
avoir  méprisé  son  alliance ,  subit  sa  domination  ,  et  le  prince  qui 
avait  osé  déserter  la  bonne  foi  fut  contraint  de  déserter  aussi  son 
territoire.  Le  belliqueux  Ibère  se  retira  de  Cazal  assiégé,  etdéjàMan- 
toue  se  réjouit  d'obéir  à  son  duc.  Enfin  une  place  capable  de  résister 

1.  Sur  cette  victoire  et  sur  celles  auxquelles  il  est  fait  allusion  dans 
le  morceau  suivant  jusqu'au  vers  54  inclusivement,  voyez  ci-après 
dans  les  Triomphes  de  Louis  le  Juste,  p.  108-110,  les  inscriptions  qui 
ont  pour  titre  :  la  Rochelle  ;  le  pas  de  Suze  forcé  ;  Cazal  ;  la  protection  de 
Manloue  ;  Nancy . 

2.  Dans  les  Triomphes  de  Louis  le  Juste  (vers  36;  voyez  ci-après, 
p.  106)  Corneille  s'est  rappelé  ce  vers  et  l'a  ainsi  traduit  : 

Et  père  des  vaincus,  et  maître  des  vainqueurs. 

Et   dans   les   Victoires  du  Roi    en    l'année   1667,  il   a   dit    (vers  3n 
et  3 12)  : 

Il  entre,  mais  d'un  air  qui  ravit  tous  les  cœurs, 
En  père  des  vaincus,  en  maître  des  vainqueurs. 


7o  POESIES   DIVERSES. 

Nanceium,  viso  vix  bene  Rege,  patet. 
Richelius  tanto  ingentes  sub  principe  curas  5  5 

Explîcat ,  et  tantis  pars  bona  rébus  adest  ; 
Nec  pretiosam  animam  Lodoïci  impendere  palmis , 

Aut  patriae  dubitet  postposuisse  bonis. 
Tempora  rimatur,  pavidum  ruitui  us  in  liostem  , 

Et  ruit,  et  solo  nomine  ssepe  domat.  60 

Nestora  Richelius,  Rex  vincere  possit  Achillem  i . 

Haec  levibus  metris  credere ,  auaie  nefas  ! 
Tanta  canant  quorum  praecordia  Cynthius  urget 

Plenior,  et  mentem  grandior  sestus  agit  : 
Sit  satis  ad  nostros  plausisse  utrumque  lepores  ;  6  5 

Forsitan  et  nomen  novit  uterque  meum. 
Laudibus  apta  minus,  curis  fuit  apta  levandis 

aux  forces  du  monde  entier,  Nancy,  aperçoit  à  peine  le  Roi  qu'elle 
ouvre  ses  portes.  Richelieu ,  sous  un  tel  prince,  dénoue  les  plus 
grandes  difficultés  :  il  est  pour  sa  bonne  part  dans  de  si  belles  choses, 
et  n'hésite  pas  à  consacrer  à  la  gloire  de  Louis  sa  précieuse  existence, 
à  laquelle  il  préfère  le  bien  de  la  patrie.  Prêt  a  s'élancer  sur  un 
ennemi  tremblant,  il  cherche  l'occasion  favorable,  s'élance  enfin,  et 
le  dompte  souvent  par  le  seul  prestige  de  son  nom.  Richelieu  eût  pu 
l'emporter  sur  Nestor;  le  Roi,  sur  Achille.  Confier  de  tels  sujets  à 
une  muse  légère,  quel  crime!  Qu'ils  les  chantent,  ceux  qu'Apollon 
dévore  d'une  flamme  plus  \  ive  et  dont  un  sublime  transport  agite 
l'esprit.  Qu'il  nous  suffise  que  ces  deux  héros  aient  applaudi  à  nos 
jeux  :  peut-être  connaissent-ils  mon  nom  l'un  et  l'autre.  Peu  propre 
à  célébrer  leurs  louanges ,  Melpomène  du   moins  l'a  été   à   calmer 


1.  C  est  ici  un  des  lieux  communs  habituels  des  compliments 
adressés  à  Richelieu  et  à  Louis  XIII.  On  lit  à  la  page  76  des  Sacrifices 
des  Muses ,  dans  une  pièce  de  vers  de  Faret  intitulée  :  Pour  Monsei- 
gneur le  cardinal-duc  de  Richelieu,  ode  : 

L'un  pèse  tout  exactement, 
L'autre  exécute  en  un  moment  ; 
L'un  sait  plus  que  Nestor,  l'autre  fait  plus  qu'Achille. 


POÉSIES   DIVERSES.  71 

Melpomene  ,  et  longos  sit  ;  precor,  apta  dies. 
Hos  gestit  versare  modos  \  hic  nescia  vinci 

Nostra  coronato  vertice  laurus  ovat  :  7  o 

Me  pauci  hic  fecere  parem,  nullusque  secundum1, 

Nec  spernenda  fuit  gloria  pone  sequi. 
Desipiat  nota  forsan  qui  primus  in  arte , 

Ultimus  ignotis  artibus  esse  velit. 
Suspicio  vates ,  et  carmina  pronus  adoro  7  5 

Materiam  queis  Rex,  Richeliusvc  dédit; 
Sed  neque  Godœis 2  accédât  musa  tropaeis , 

Nec  Capellanum  *  fas  mihi  velle  sequi , 

leurs  soucis,  et  plaise  à  Dieu  qu'elle  le  soit  de  longs  jours  encore! 
Voilà  les  chants  qu'elle  aime  à  méditer  :  là  triomphe,  sans  crain- 
dre la  défaite ,  le  laurier  qui  ceint  mon  front  ;  là  peu  d'hommes 
m'ont  atteint,  nul  ne  m'a  dépassé ,  et  me  suivre  de  près  n'a  point 
semblé  une  gloire  à  mépriser.  Il  est  insensé  celui  qui,  premier,  s'il 
peut  l'être,  dans  un  art  qu'il  connaît,  se  résigne  à  être  le  dernier  dans 
un  art  inconnu.  J'admire  les  poètes,,  et  j'adore  humblement  les  vers 
dont  le  Roi  ou  Richelieu  ont  fourni  la  matière;  mais  ma  muse  se 
garde  d'approcher  des  trophées  de  Godeau  ;  et  il  ne  m'est  pas  per- 
mis de  vouloir  suivre  Chapelain,  pour  ne  rien  dire  des  autres  dont  la 

1.  Corneille  a  encore  traduit  ce  vers  dans  Y  Excuse  à  Arlste  (vers  5  2 
et  53);  mais  si,  comme  tout  porte  à  le  croire,  cette  pièce  de  vers 
n'a  été  composée  qu'après  le  succès  du  Cid,  notre  poète  était  alors 
beaucoup  mieux  fondé  à  dire  : 

Je  ne  dois  qu'à  moi  seul  toute  ma  renommée, 
Et  pense  toutefois  n'avoir  point  de  rival 
A  qui  je  fasse  tort  en  le  traitant  d'égal. 

2.  Antoine  Godeau,  né  le  24  septembre  i6o5,  mort  le  21  avril  1672, 
nommé  évêque  de  Grasse  le  21  juin  i636,  était  alors  connu  par  le 
discours  qu'il  avait  placé  en  tête  des  OEuvres  de  Malherbe  (v oyez  l'édi- 
tion de  M.  Lud.  Lalanne,  tome  I,  p.  xcii),  par  la  préface  du  Dia- 
logue des  causes  de  la  corruption  de  C  éloquence,  traduit  par  Giry,  et 
surtout  par  ses  OEuvres  chrétiennes,  publiées  en  i633.  Il  avait  com- 
posé aussi  un  grand  nombre  de  poésies  diverses,  et  entre  autres  une 
Ode  au  Roi,  qui  forme  les  pages  i-i3  du  Parnasse  royal. 

3.  Jean  Chapelain,  né  le  4  décembre  i5o,5,  mort  en  1674,  n'avait 


72  POESIES    DIVERSES. 

Ut  taceam  reliquos  quorum  sonat  undique  fania 

Non  minor,  et  grandi  pectore  vena  salit.  80 

Hos  ego  sperarim  '  nequicquam  aequare  canendo  : 

Hos  sua  perpetuum,  me  mea  palma  juvet. 
Tu  modo,  quem  meritis  dudum  minor  infula  cingit, 

Neastriacœ,  praesul ,  gloria  luxque  plagse, 
Heroum  ad  laudes ,  dignosque  Marone  ti  iumphos  8  5 

Parce,  precor,  tenuem  sollicitare  chelyn. 

renommée,  non  moindre,  retentit  de  toutes  parts,  et  chez  qui  la  veine 
poétique  jaillit  dans  un  grand  cœur.  En  vain  j'espérerais  les  égaler 
par  mes  chants  :  qu'ils  soient  à  jamais  contents  des  palmes  qu'ils  ont 
rempoitées,et  moi  des  miennes.  Pour  toi,  dont  la  tête  est  ceinte  d'une 
mitre  qui  depuis  longtemps  déjà  n'égale  plus  ton  mérite,  prélat,  gloire 
et  lumière  de  la  plage  neustrienne,  épargne,  je  t'en  prie,  mon  faible 
luth,  et  ne  le  sollicite  pas  de  célébrer  les  louanges  des  héros  et  des 
triomphes  dignes  d'un  Virgile. 

encore  publié  que  la  lettre  qui  parut  en  1623  en  tête  de  Y Adone  du 
cavalier  Marin,  et  quelques  poésies.  Il  avait  composé  une  Ode  a  Mon- 
seigneur le  cardinal-duc  de  Richelieu^  publiée  d'abord  à  Paris,  chez 
Iean  Camusat,  M. DC. XXXIII,  in-folio,  et  ensuite  aux  pages  1-18  du 
volume  intitulé  les  Sacrifices  des  Muses. 

1.  On  peut  voir  que  Corneille  n'a  aucun  égard  au  conseil  que 
donnent  nos  prosodies  latines,  qui  veulent  qu'on  évite  de  placer  après 
une  finale  brève  un  mot  commençant  par  sp,  st,  et  généralement  par 
deux  consonnes  dont  la  seconde  n'est  pas  une  liquide.  Il  y  a  dans 
cette  pièce  quatre  exemples  de  cette  licence,  aux  vers  12,  29,  44  et  81 . 
Voyez  la  Nouvelle  Prosodie  latine  de  M.  L.  Quicberat,  chapitre  v, 
règle  n ,  5°.  Au  reste,  les  poètes  latins  du  dix-septième  siècle  ne  te- 
naient en  général  nul  compte  de  cette  règle.  On  verra  d'assez  nom- 
breux exemples  de  la  même  licence  dans  les  pièces  du  P.  de  la  Rue, 
de  Santeul,  etc.,  que  nous  donnerons  dans  la  suite  de  ce  volume. 


POÉSIES   DIVERSES.  73 


XXI 

POUR   "LHIPPOLYTE  DE    MONSIEUR    DF    LA    PINELIERE. 

Cette  petite  pièce,  signée  Corneille,  se  trouve  au  verso  du  dix- 
huitième  feuillet  d'Hippolyte,  tragédie  par  de  la  Pineliere,  Angeuin, 
à  Paris,  chez  Antoine  de  Sommaville,  au  Palais....  M  DC.XXXV.  Ces 
vers  sont  reproduits  dans  la  Bibliothèque  dramatique  de  M .  de  Soleinne 
(supplément  au  tome  1,  p.  3o,,  n°  201)  et  dans  les  notes  sur  la  vie  de 
Corneille  (p.  xcvn  et  xcviii)  par  M.  Edouard  Fournier.  C'est  la  pre- 
mière fois  qu'ils  sont  réunis  aux  OEuvres  de  Corneille.  Nous  avons  eu 
occasion  de  parler  de  YHippoljte  de  la  Pineliere  dans  la  Notice  de 
la  Galerie  du  Palais  (tome  II,  p.  4). 

Phèdre ,  si  ton  chasseur  avoit  autant  de  charmes 
Qu'en  donne  à  son  visage  un  si  docte  pinceau , 
Ta  passion  fut  juste  et  mérite  des  larmes 
Pour  plaindre  le  malheur  qui  le  met  au  tombeau. 

Et  si  tu  parus  lors  avec  autant  de  grâce  => 

Qu'en  ces  vers  éclatants  qui  te  rendent  le  jour, 
Estime  qui  voudra  son  courage  de  glace, 
Sa  froideur  fut  un  crime,  et  non  pas  ton  amour. 

Aussi,  quoi  qu'on  ait  dit  du  courroux  de  Thésée, 

Sa  mort  n'est  pas  l'effet  de  son  ressentiment,  10 

Mais  les  Dieux  l'ont  puni  pour  t'avoir  méprisée, 

Et  fait  de  son  trépas  un  juste  châtiment. 


74  POÉSIES   DIVERSES. 


XXII 


EXCUSE    A    ARISTE1 


S'il  faut  en  croire  un  adversaire  de  notre  poète,  Cortieille  disait 
qu'il  avait  composé  cette  pièce  <c  plus  de  trois  ans  »  avant  le  moment 
où  commença  la  querelle  du  Cid ,  c'est-à-dire  en  même  temps  à  peu 
près  que  la  pièce  XX.  Il  est  certain  du  moins  qu'elle  n'a  été  publiée 
qu'après  le  succès  du  Cid ,  au  commencement  de  1637,  et  qu'elle  a 
servi  de  prétexte  à  la  longue  dispute  littéraire  à  laquelle  cet  ouvrage 
a  donné  lieu.  Voyez  ce  qui  est  dit  au  tome  III,  p.  19  et  suivantes; 
et  dans  le  même  volume,  p.  37,  58,  5g  et  71,  plusieurs  pièces  de 
vers  de  divers  auteurs  également  relatives  au  Cid  ;  voyez  surtout  au 
tome  II,  p.  118,  le  sixain  que  Corneille  a  placé  dans  YÉpitre  dédi- 
catoire  de  la  Suivante  vers  l'époque  où  il  écrivait  V Excuse  à  Arisle. 
Un  volume  de  la  Bibliothèque  impériale  portant  le  n°  Y  5665  con- 
tient des  exemplaires  de  deux  éditions  différentes  de  cet  opuscule, 
imprimées  toutes  deux  en  italique;  l'une  de  ces  deux  éditions,  ornée 
d'un  fleuron,  est  des  plus  défectueuses;  on  y  lit  par  exemple  au 
vers  i5  :  laisse,  au  lieu  de  leurre,  et  au  vers  35  :  m'ait,  au  lieu  de  met. 
L' Excuse  à  triste  occupe  en  outre  les  pages  97-100  du  tome  III  du 
Recueil  de  Poésies  chrestiennes  et  diverses,  dédié  à  Monseigneur  le  Prince 
de  Conty,  par  M.  de  la  Fontaine ,  à  Paris ,  chez  Pierre  le  Petit , 
M.DC.LXXI,  in-12. 

Ce  n'est  donc  pas  assez,  et  de  la  part  des  Muses , 
Ariste,  c'est  en  vers  qu'il  vous  faut  des  excuses; 
Et  la  mienne  pour  vous  n'en  plaint  pas  la  façon  : 
Cent  vers  lui  coûtent  moins  que  deux  mots  de  chanson; 
Son  feu  ne  peut  agir  quand  il  faut  qu'il  s  applique  2         5 


1.  Voyez  sur  Ariste,  tome  III,  p.  29-3 1. 

1.   S'explique,  dans  les  OFuivres  diverses  publiées  par  Granet.  Cette 
leçon  fautive  a  été  reproduite  dans  toutes  lea  éditions  postérieures. 


POÉSIES   DIVERSES.  75 

Sur  les  fantasques  airs  d'un  rêveur  de  musique  * , 

Et  que  pour  donner  lieu  de  paroître  à  sa  voix  , 

De  sa  bigearre2  quinte  il  se  fasse  des  lois8; 

Qu'il  ait  sur  chaque  ton  ses  rimes  ajustées , 

Sur  chaque  tremblement  ses  syllabes  comptées ,  1  o 

Et  qu'une  froide  pointe  à  la  fin  d'un  couplet 

En  dépit  de  Phébus  donne  à  l'art  un  soufflet  : 

Enfin  cette  prison  déplaît  à  son  génie; 

Il  ne  peut  rendre  hommage  à  cette  tyrannie  ; 

Il  ne  se  leurre  point  d'animer  de  beaux  chants  ,  i  5 

Et  veut  pour  se  produire  avoir  la  clef  des  champs. 

C'est  lorsqu'il  court  d'haleine4,  et  qu'en  pleine 6  carrière. 

Quittant  souvent  la  terre  en  quittant  la  barrière , 

Puis,  d'un  vol  élevé  se  cachant  dans  les  cieux , 

Il  rit  du  désespoir  de  tous  ses  envieux.  2  o 

Ce  trait  est  un  peu  vain ,  Ariste  ,  je  l'avoue; 

Mais  faut-il  s'étonner  d'un  poëte  qui  se  loue? 

Le  Parnasse,  autrefois  dans  la  France  adoré, 

Faisoit  pour  ses  mignons  un  autre  âge  doré, 

Notre  fortune  enfloit  du  prix  de  nos  caprices ,  2  5 

Et  c'étoit  une  Manque6  à  de  bons  bénéfices  ; 

1.  M.  Corneille  avoit  été  prié  de  composer  des  paroles  pour  être 
mises  en  musique  ;  mais  il  ne  voulut  pas  se  donner  cette  peine.  {Note 
de  Granet.} 

2.  C'est-à-dire  bizarre.  Bigearre  est  l'orthographe  de  l'édition  ori- 
ginale. 

3.  C'est-à-dire  qu'il  se  conforme  aux  accords  du  musicien.  Cor- 
neille, au  lieu  de  se  servir  du  terme  général ,  emploie  le  nom  d'un 
accord  particulier. 

4.  //  court  d'haleine,  il  court  sans  perdre  haleine,  tout  d'une  haleine. 

5.  Plaine,  dans  l'édition  originale;  mais  le  sens  ne  demande  point 
que  cette  orthographe  soit  conservée. 

6.  a  Sorte  de  jeu  de  hasard  auquel  on  joue  avec  un  livre  où  il  y 
a  des  feuillets  noirs  et  des  feuillets  blancs.  *•  (Richelet ,  Dictionnaire 
françois,  1680.)  — .On  lit  banque,  mais  à  tort,  dans  un  grand  nom- 
bre d'éditions  modernes. 


76  POÉSIES   DIVERSES. 

Mais  elle  est  épuisée ,  et  les  vers  à  présent 

Aux  meilleurs  du  métier  n'apportant1  que  du  vent, 

Chacun  s'en  donne  à  l'aise ,  et  souvent  se  dispense 2 

A  prendre  par  ses  mains  toute  sa  récompense.  3<> 

Nous  nous  aimons  un  peu ,  c'est  notre  foible  à  tous  : 

Le  prix  que  nous  valons ,  qui  le  sait  mieux  que  nous  ? 

Et  puis  la  mode  en  est,  et  la  cour  l'autorise. 

Nous  parlons  de  nous-même  avec  toute  franchise  ; 

La  fausse  humilité  ne  met  plus  en  crédit.  3  *; 

Je  sais  ce  que  je  vaux ,  et  crois  ce  qu'on  m'en  dit. 

Pour  me  faire  admirer  je  ne  fais  point  de  ligue  : 

J'ai  peu  de  voix  pour  moi ,  mais  je  les  ai  sans  brigue  ; 

Et  mon  ambition ,  pour  faire  plus  de  bruit , 

Ne  les  va  point  quêter  de  réduit  en  réduit;  4  <» 

Mon  travail  sans  appui  monte  sur  le  théâtre  : 

Chacun  en  liberté  l'y  blâme  ou  l'idolâtre; 

Là  ,  sans  que  mes  amis  prêchent  leurs  sentiments, 

J'arrache  quelquefois  trop  d'applaudissements8  ; 

Là,  content  du  succès  que  le  mérite  donne,  4  5 

Par  d'illustres  avis  je  n'éblouis  personne  : 

Je  satisfais  ensemble  et  peuple  et  courtisans , 

Et  mes  vers  en  tous  lieux  sont  mes  seuls  partisans  ; 

Par  leur  seule  beauté  ma  plume  est  estimée  : 

Je  ne  dois  qu'à  moi  seul  toute  ma  renommée,  5o 

Et  pense  toutefois  n'avoir  point  de  rival 

A  qui  je  fasse  tort  en  le  traitant  d'égal  *. 

Mais  insensiblement  je  baille 6  ici  le  change , 


1.  N"' 'apportant  a  été  remplace  par  n'apportent  dans  l'édition  avec 
fleuron,  dans  le  Recueil et  dans  les  OEuvres  diverses  de  iy38. 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  5i,  vers  24  et  note  2. 

3.  Leurs  applaudissements,  dans  les  OEuvres  diverses,  et  depuis  dans 
toutes  les  éditions. 

4.  Voyez  ci-dessus,  p.  71,  note  1. 

5.  Je  donne,  dans  le  Recueil  et  dans  l'édition  de  Granet. 


POESIES    DIVERSES.  77 

Et  mon  esprit  s'égare  en  sa  propre  louange  ; 

Sa  douceur  me  séduit ,  je  m'en  laisse  abuser,  s  5 

Et  me  vante  moi-même,  au  lieu  de  m'excuser. 

Revenons  aux  chansons  que  l'amitié  demande  : 

J'ai  brûlé  fort  longtemps  d'une  amour  assez  grande  , 

Et  que  jusqu'au  tombeau  je  dois  bien  estimer, 

Puisque  ce  fut  par  là  que  j'appris  à  rimer.  60 

Mon  bonheur  commença  quand  mon  âme  fut  prise  : 

Je  gagnai  de  la  gloire  en  perdant  ma  franchise. 

Charmé  de  deux  beaux  yeux,  mon  vers  charma  la  cour; 

Et  ce  que  j'ai  de  nom  je  le  dois  à  l'amour*. 

J'adorai  donc  Philis;  et  la  secrète  estime  6  5 

Que  ce  divin  esprit  faisoit  de  notre  rime 

Me  fit  devenir  poëte  aussitôt  qu'amoureux  : 

Elle  eut  mes  premiers  vers ,  elle  eut  mes  derniers  feux 2  ; 

Et  bien  que  maintenant  cette  belle  inhumaine 

Traite  mon  souvenir  avec  un  peu  de  haine,  70 

Je  me  trouve  toujours  en  état  de  l'aimer*, 

Je  me  sens  tout  ému  quand  je  l'entends  nommer, 

Et  par  le  doux  effet  d'une  prompte  tendresse 

Mon  cœur  sans  mon  aveu  reconnoît  sa  maîtresse. 

Après  beaucoup  de  vœux  et  de  submissions  7  5 

Un  malheur  rompt  le  cours  de  nos  affections  ; 

Mais ,  toute  mon  amour  en  elle  consommée , 

Je  ne  vois  rien  d'aimable  après  l'avoir  aimée  : 

Aussi  n'aimai-je3  plus,  et  nul  objet  vainqueur 

N'a  possédé  depuis  ma  veine  ni  mon  cœur.  80 

Vous  le  dirai-je,  ami?  tant  qu'ont  duré  nos  flammes, 


1.  Voyez  tome  I,  p.  125  et  suivantes. 

2.  Elle  eut  mes  premiers  feuxt  dans  les  OEuvres  diverses  de  1738  et 
dans  toutes  les  éditions  complètes  de  Corneille  publiées  depuis. 

3.  Au  temps  de  Corneille  on  écrivait  ainsi,  de  la  même  manière, 
les  deux  formes  aimé-je  et  aimai-je.  La  seconde  nous  paraît  ici  pré- 
férable nour  le  sens. 


78  POÉSIES   DIVERSES. 

Ma  muse  également  chatouilloit  nos  deux  âmes  ; 

Elle  avoit  sur  la  mienne  un  absolu  pouvoir, 

J'aimois  à  le  décrire ,  elle  à  le  recevoir. 

Une  voix  ravissante  ,  ainsi  que  son  visage ,  8  5 

La  faisoit  appeler  le  phénix  de  notre  âge; 

Et  souvent  de  sa  part  je  me  suis  vu  presser 

Pour  avoir  de  ma  main  de  quoi  mieux  l'exercer. 

Jugez  vous-même,  Ariste,  à  cette  douce  amorce, 

Si  mon  génie  étoit  pour  épargner  sa  force  :  9  »> 

Cependant  mon  amour,  le  père  de  mes  vers, 

Le  fils  du  plus  bel  œil  qui  fût  en  l'univers , 

A  qui  désobéir  c'étoit  pour  moi  des  crimes, 

Jamais  en  sa  faveur  n'en  put  tirer  deux  rimes  : 

Tant  mon  esprit  alors,  contre  moi  révolté,  95 

En  haine  des  chansons  sembloit  m' avoir  quitté; 

Tant  ma  veine  se  trouve  aux  airs  mal  assortie , 

Tant  avec  la  musique  elle  a  d'antipathie  *, 

Tant  alors  de  bon  cœur  elle  renonce  au  jour. 

Et  l'amitié  voudroit  ce  que  n'a  pu  l'amour  !  100 

N'y  pensez  plus,  Ariste;  une  telle  injustice 

Exposeroit  ma  muse  à  son  plus  grand  supplice. 

Laissez-la,  toujours  libre ,  agir  suivant  son  choix, 

Céder  à  son  caprice,  et  s'en  faire  des  lois. 

1 .  Corneille  a  pourtant  publié  à  la  suite  de  Clitandre  deux  chan- 
sons ,  composées  probablement  à  la  demande  de  celle  qui  inspira 
Mélite  (voyez  ci-dessus,  p.  53  et  55);  et  une  troisième  dans  le  recueil 
de  Sercy.  On  trouvera  encore  ci-après  un  sixain  Pour  la  Reine,  mis 
en  chant  par  Lambert,  et  un  Madrigal  mis  en  musique  par  Blondel  ;  mais 
dans  ces  deux  dernières  pièces  Corneille  n'a  pas  eu  à  se  préoccuper 
du  musicien,  qui  a  composé  ses  airs  sur  des  vers  faits  d'avance. 


POESIES   DIVERSES.  79 


XXIII 


RONDEAU. 


Ce  rondeau  a  paru  en  1637,  d'abord  seul,  en  un  feuillet  in-4°. 
Nous  ne  connaissons  de  cette  rare  édition  qu'un  exemplaire  relié  dans 
un  recueil  in-i  2  de  la  bibliothèque  de  l'Arsenal  portant  le  n°  9809. B.L. 
Ces  vers  furent  réimprimés  plus  tard  à  la  suite  des  deux  éditions  de 
V Excuse  à  triste  dont  nous  avons  parlé  dans  la  notice  précédente.  Ils 
répondent  à  une  pièce  anonyme,  intitulée  P  A  ut  heur  du  vray  Cld  es- 
pagnol à  son  traducteur  françois,  qui  fut  attribuée  à  Mairet  par  Cor- 
neille. Clavcret  s'est  vanté  d'avoir  engagé  notre  poète  à  ne  pas  publier 
ce  rondeau,  que  Granet  regarde  à  tort  comme  dirigé  contre  Scudéry. 
Voyez  les  pages  21  et  22  du  tome  III. 

Qu'il  fasse  mieux ,  ce  jeune  jouvencel , 

A  qui  le  Cid  donne  tant  de  martel , 

Que  d'entasser  injure  sur  injure  , 

Rimer  de  rage  une  lourde  imposture , 

Et  se  cacher  ainsi  qu'un  criminel.  5 

Chacun  connoit  son  jaloux  naturel , 
Le  montre  au  doigt  comme  un  fou  solennel 
Et  ne  croit  pas ,  en  sa  bonne  écriture, 
Qu'il  fasse  mieux. 

Paris  entier,  ayant  lu  *  son  cartel ,  1  o 

L'envoie  au  diable ,  et  sa  muse  au  bordel  ; 
Moi,  j'ai  pitié  des  peines  qu'il  endure  ; 
Et  comme  ami  je  le  prie  et  conjure , 

1.  Il  y  a  vu,  au  lieu  de  lu,  dans  les  OEuvres  diverses  et  dans  toutes 
ies  éditions  modernes. 


80  POESIES   DIVERSES. 

S'il  veut  ternir  un  ouvrage  immortel, 

Qu'il  fasse  mieux.  i  5 

Omnibus  irwideas  ,  livide;  nemo  tibi* . 

i.  a  Que  tu  portes,  jaloux,  envie  à  tous,  et  personne  à  toi.  »  C'est 
le  second  et  dtrnier  vers  de  la  xoe  épigramme  du  livre  I  de  Martial. 
—  Selon  toute  apparence,  c'est  ici  à  peu  près  que  devraient  se 
placer,  suivant  Tordre  chronologique,  les  six  vers  que  Corneille  adresse 
à  Pellisson  pour  Foucquet  dans  la  lettre  xxii.  Voyez  ci-après  les 
Lettres,  à  la  sviite  des  Poésies  diverses  et  des  OEuvres  diverses  en  prose. 


POESIES   DIVERSES.  81 


XXIV 


REMERC1JVIENT    FAIT    SUR-LE-CHAMP 
PAR  MONSIEUR  DE   CORNEILLE. 

Ces  vers  ont  été  improvisés  à  la  séance  de  décembre  1640  du  Puy 
de  Palinod  de  Rouen,  pour  remercier  l'assemblée  du  prix  qu'elle 
venait  de  décerner  à  une  pièce  que  Jacqueline  Pascal  avait  composée 
par  le  conseil  de  Corneille.  Voyez  ci- dessus,  p.  7-9. 

Pour  une  jeune  muse  absente , 
Prince1,  je  prendrai  soin  de  vous  remercier; 
Et  son  âge  et  son  sexe  ont  de  quoi  convier 
A  porter  jusqu'au  ciel  sa  gloire  encor  naissante. 
De  nos  poètes  fameux  les  plus  hardis  projets  5 

Ont  manqué  bien  souvent  d'assez  justes  sujets 

Pour  voir  leurs  muses  couronnées  ; 

Mais  c'en  est  un  beau  aujourd'hui2  : 

Une  fille  de  douze  années3 
A  seule  de  son  sexe  eu  des  prix  sur  ce  Puy* .  1  <» 

1.  Jacques  le  Conte,  marquis  de  Nonant,  lieutenant  pour  le  Roi  en 
ses  pays  et  duché  d'Alençon,  président  du  Puy  (princeps). 

2.  Tel  est  le  texte  du  manuscrit.  Voyez  un  autre  hiatus,  ci-après, 
p,  i3i,  vers  g. 

3.  Jacqueline  Pascal,  née  le  4  octobre  1625,  avait  alors  quinze  ans 
accomplis,  ainsi  que  nous  l'avons  vu  plus  haut;  mais  Corneille  a  pu 
se  tromper  facilement  sur  son  âge,  car  Gilberte  Pascal  nous  dit  que 
lorsque  Jacqueline  joua  devant  le  Cardinal,  «  étant  de  fort  petite  taille, 
et  ayant  le  visage  fort  jeune,  elle  ne  paroissoit  pas  avoir  plus  de  huit 
ans,  quoiqu'elle  en  eût  treize.  »  {Bibliothèque  de  l'École  des  chartes, 
tome  V,  p.  307.) 

4.  Il  y  a  dans  le  manuscrit  pays,  qui  n'a  point  de  sens  et  ne  fait 
pas  le  vers. 

CORJS'RILLE.    x  6 


82  POÉSIES   DIVERSES. 


XXY 


LA.     TULIPE. 


MADKIGAL. 


AU     SOLEIL. 


Cette  pièce  et  les  deux  suivantes  ont  été  composées  en  1641  par 
Corneille  pour  la  Guirlande  de  Julie,  offerte  par  M.  de  Montausier  à 
sa  future,  Julie  d'Angenne.  Voyez  ci-dessus,  p.  9-11  et  p.  18,  les  dé- 
tails donnés  dans  la  Notice  sur  ce  recueil  ;  et  ci-après,  dans  1! 'Appen- 
dice, trois  autres  pièces  du  même  manuscrit  qui  ont  été  attribuées 
également,  avec  quelque  vraisemblance,  à  Corneille.  Dans  l'édition 
de  la  Guirlande  de  Julie  publiée  par  M.  Livet,  d'après  le  manuscrit 
de  1641  {Précieux  et  Précieuses,  p.  393-432),  le  titre  de  cette  pièce 
est  la  Tulipe  au  soleil,  madrigal. 

Bel  astre  à  qui  je  dois  mon  être  et  ma  beauté , 

Ajoute  l'immortalité 
A  l'éclat  nompareil  dont  je  suis  embellie; 
Empêche  que  le  temps  n'efface  mes  couleurs  : 
Pour  trône  donne-moi  le  beau  front  de  Julie;  5 

Et  si  cet  heureux  sort  à  ma  gloire  s'allie , 

Je  serai  la  reine  des  fleurs. 


POÉSIES   DIVERSES.  83 


XXVI 


LA.    FLEUR    D  ORANGE. 


MADBIGAL. 


Du  palais  d'émeraude  où  la  riche  nature 

M'a  fait  naître  et  régner  avecque  majesté, 

Je  viens  pour  adorer  la  divine  beauté 

Dont  le  soleil  n'est  rien  qu'une  foible  peinture. 

Si  je  n'ai  point  l'éclat  ni  les  vives  couleurs  5 

Qui  font  l'orgueil  des  autres  fleurs , 
Par  mes  odeurs  je  suis  plus  accomplie, 
Et  par  ma  pureté  plus  digne  de  Julie. 
Je  ne  suis  point  sujette  au  fragile  destin 

De  ces  belles  infortunées  i  o 

Qui  meurent  dès  quelles  sont  nées , 
Et  de  qui  les  appas  ne  durent  qu'un  matin. 
Mon  sort  est  plus  heureux,  et  le  ciel  favorable 
Conserve  ma  fraîcheur1,  et  la  rend  plus  durable. 
Ainsi ,  charmant  objet ,  rare  présent  des  cieux  ,  i  5 

Pour  mériter  l'honneur  de  plaire  à  vos  beaux  yeux, 

J'ai  la  pompe  de  ma  naissance  ; 
Je  suis  en  bonne  odeur  en  tout  temps ,  en  tous  lieux  ; 

Mes  beautés  ont  de  la  constance  , 
Et  ma  pure  blancheur  marque  mon  innocence.  20 

J'ose  donc  me  vanter,  en  vous  offrant  mes  vœux, 
De  vous  faire  moi  seule  une  riche  couronne, 

Bien  plus  digne  de  vos  cheveux 

1.   Franchise,  dans  les  Poésies  choisies  publiées  chezSerey.        Fraî- 
cheur, dans  l'édition  de  M.  Livtt. 


84  POÉSIES   DIVERSES. 

Que  les  plus  belles  fleurs  que  Zéphire  vous  donne; 
Mais  si  vous  m'accusez  de  trop  d'ambition ,  2  5 

Et  d'aspirer  plus  haut  que  je  ne  devrois  faire, 

Condamnez  ma  présomption, 

Et  me  traitez  en  téméraire  ; 
Punissez,  j'y  consens,  mon  superbe  dessein 

Par  une  sévère  défense  3  o 

De  m'élever  plus  haut  que  jusqu'à  votre  sein , 
Et  ma  punition  sera  ma  récompense. 


POÉSIES    DIVERSES.  85 


XXVII 


L  IMMORTELLE    BLANCHE. 


MADRIGAL. 


Donnez-moi  vos  couleurs,  tulipes,  anémones; 
OEillets,  roses,  jasmins,  donnez-moi  vos  odeurs. 
Des  contraires  saisons  le  froid  ni  les  ardeurs 

Ne  respectent  que  les  couronnes 

Que  l'on  compose  de  mes  fleurs.  5 

Ne  vous  vantez  donc  point  d'être  aimables  ni  belles  : 
On  ne  peut  nommer  beau  ce  qu'efface  le  temps  ; 
Pour  couronner  les  beautés  éternelles , 

Et  pour  rendre  leurs  yeux  contents, 

Il  ne  faut  point  être  mortelles.  i  o 

Si  vous  voulez  affranchir  du  trépas 

Vos  brillants  mais  frêles  appas, 

Souffrez  que  j'en  sois  embellie  ; 
Et  si  je  leur  fais  part  de  mon  éternité, 
Je  les  rendrai  pareils  aux  appas  de  Julie,  i  5 

Et  dignes  de  parer  sa  divine  beauté. 


86  POÉSIES   DIVERSES. 


XXVIII 


VERS    SUR    LE    CA.RDINAL    DE    RICHELIEU. 

Ce  quatrain  fut  composé  à  l'occasion  de  la  mort  du  cardinal  de 
Richelieu,  qui  eut  lieu  le  4  décembre  1642.  Pellisson  racontant  les 
différends  qui  s'étaient  élevés  à  propos  du  C'id  entre  Richelieu  et 
notre  poëte,  a  publié  le  premier  ces  quatre  vers  dans  sa  Relation  conte- 
nant rhistoire  de  C  Académie  françoise,  qui  parut  en  i653.  «  Corneille 
les  lit,  dit-il  (p.  218  et  219),  après  la  mort  du  Cardinal,  qu'il  consi- 
déroit  d'un  côté  comme  son  bienfaiteur,  et  de  l'autre  comme  son 
ennemi.  »  Dans  les  OEuvres  diverses  de  1738  (p.  148)  ce  quatrain  fut 
imprimé  avec  le  titre  qu'il  porte  ici.  —  Voyez  dans  V Appendice  une 
épitaphe  de  Richelieu,  attribuée  par  M.  Taschereau  à  Corneille. 

Qu'on  parle  mal  ou  bien  du  fameux  Cardinal , 
Ma  prose  ni  mes  vers  n'en  diront  jamais  rien  : 
11  m'a  fait  trop  de  bien  pour  en  dire  du  mal , 
Il  m'a  fait  trop  de  mal  pour  en  dire  du  bien. 


POESIES    DIVERSES. 


XXIX 

SUR    LA    MORT    DU    ROI    LOUIS    XIII. 

SONNET. 

Ce  sonnet,  composé  à  l'occasion  de  la  mort  de  Louis  XIII,  qui  ar- 
riva le  14  mai  i643,  n'a  pas  été  imprimé  du  vivant  de  Corneille,  et 
s'est  conservé  imparfaitement  dans  la  mémoire  de  ses  contemporains 
ou  dans  des  copies  peu  exactes.  Nous  le  donnons  d'après  une  tran- 
scription de  la  main  de  Gaignières1,  signée  P.  Corneille,  qui  nous 
a  été  obligeamment  signalée  par  M.  Ludovic  Lalanne2.  Gaignières 
étant  mort  en  mars  171 5,  ce  texte  est  le  plus  ancien  de  ceux  que 
nous  possédons.  Nous  le  faisons  suivre  de  cinq  autres  rédactions 
classées  d'après  le  rapport  qu'elles  ont  avec  celle  qui  nous  sert  de  type. 

Sous  ce  marbre  repose  un  monarque  sans  vice , 
Dont  la  seule  bonté  déplut  aux  bons  François, 
Et  qui  pour  tout  péché  ne  fit  qu'un  mauvais  choix  , 
Dont  il  fut  trop  longtemps  innocemment  complice. 

L'ambition,  l'orgueil,  l'audace,  l'avarice,  5 

Saisis  de  son  pouvoir,  nous  donnèrent  des  lois , 
Et  bien  qu'il  fût  en  soi  le  plus  juste  des  rois, 
Son  règne  fut  pourtant  celui  de  l'injustice. 

Vainqueur  de  toutes  parts ,  esclave  dans  sa  cour, 

Son  tyran  et  le  nôtre  à  peine  perd  le  jour  ,  1  o 

Que  jusque  dans  la  tombe  il  le  force  à  le  suivre . 

1.  Sur  Gaignières,  voyez  le  tome  VIII  des  Lettres  de  Mme  de 
Sévigné,  p.  i53,  note  1. 

2.  Elle  se  trouve  à  la  Bibliothèque  impériale,  fonds  Gaignières  1001 , 
Mélanges,  pièces  galantes,  satiriques,  etc.,  p.  14. 


88  POÉSIES   DIVERSES. 

Jamais  de  tels  malheurs  furent-ils  entendus  ? 
Après  trente-trois  ans  sur  le  trône  perdus , 
Commençant  à  régner,  il  a  cessé  de  vivre  *. 


VARIANTES. 


Texte  de  Voltaire  dans  les  notes  sur  F  Épitre  dédicatoire  ^/'Horace. 

Sous  ce  marbre  repose  un  monarque  sans  vice, 
Dont  la  seule  bonté  déplut  aux  bons  François, 
Ses  erreurs,  ses  écarts  vinrent  d'un  mauvais  choix, 
Dont  il  fut  trop  longtemps  innocemment  complice. 

L'ambition,  l'orgueil,  la  haine,  l'avarice, 
Armés  de  son  pouvoir,  nous  donnèrent  des  lois; 
Et  bien  qu'il  fût  en  soi  le  plus  juste  des  rois, 
Son  règne  fut  toujours  celui  de  l'injustice. 

Fier  vainqueur  au  dehors,  vil  esclave  en  sa  cour, 

Son  tyran  et  le  nôtre  à  peine  perd  le  jour, 

Que  jusque  dans  sa  tombe  il  le  force  à  le  suivre  ; 

Et  par  cet  ascendant  ses  projets  confondus, 
Après  trente-trois  ans  sur  le  trône  perdus, 
Commençant  à  régner,  il  a  cessé  de  vivre. 


Sonnet.  Epitaphe  de  Louis  XIII.   Feuillet  ajouté  à  certains  exem- 
plaires des  OEuvres  diverses  de  1738.  Ce  feuillet  porte  au  verso  le  Placet 


1.  A  la  suite  de  notre  pièce  XXIX  devrait  se  placer,  d'après 
l'ordre  chronologique,  la  pièce  intitulée  :  J  la  Reine  régente,  sonnet, 
que  l'abbé  Granet  a  publiée  à  la  page  149  des  OEuvres  diverses;  mais 
comme  elle  est  extraite  de  la  dédicace  àePolyeucte,  nous  y  renvoyons 
le  lecteur  (/oyez  tome  III,  p.  47^),  et  nous  nous  contentons  de  la 
rappeler  ici  à  sa  date,  qui  nous  est  donnée  par  l'Achevé  d'imprimer 
de  Poljeucte  (20  octobre  i643). 


POÉSIES   DIVERSES.  89 

au  Roi  sur   le  retardement    de    sa  pension.   Ce    texte  et  le  suivant  se 
trouvent  à  la  Bibliothèque  impériale. 

Sous  ce  tombeau  repose  un  roi  qui  fut  sans  vice, 
Dont  la  seule  bonté  fit  tort  aux  bons  François, 
Et  qui  pour  tout  péché  ne  fit  qu'un  mauvais  choix  , 
Dont  il  fut  à  la  fois  et  victime  et  complice. 

L'ambition,  l'orgueil,  la  fraude,  l'avarice, 
Saisis  de  son  pouvoir,  nous  donnèrent  des  lois  ; 
Et  bien  qu'il  fût  en  soi  le  plus  juste  des  rois, 
Son  règne  fut  pourtant  celui  de  l'injustice. 

Craint  de  tout  l'univers,  esclave  dans  sa  cour, 

Son  tyran  et  le  nôtre  à  peine  sort  du  jour, 

Que  jusque  dans  sa  tombe  il  le  force  à  le  suivre. 

Jamais  de  tels  malheurs  furent- ils  entendus? 
Après  trente-trois  ans  sur  le  trône  perdus, 
Commençant     régnei ,  il  a  cessé  de  vivre. 


Sonnet  sur  la  mort  de  Louis  XIII.  Feuillet  imprimé,  différent  du 
précédent ,  ajouté  à  d'autres  exemplaires  du  même  ouvrage ,  et  ne 
contenant  que  le  sonnet. 

Sous  ce  marbre  repose  un  monarque  françois, 
Que  ne  sauroit  l'envie  accuser  d'aucun  vice; 
Il  fut  et  le  plus  juste  et  le  meilleur  des  rois, 
Son  règne  fut  pourtant  celui  de  l'injustice. 

L'ambition,  l'orgueil,  l'intérêt,  l'avarice, 
Revêtus  de  son  nom,  nous  donnèrent  des  lois  ; 
Sage  en  tout,  il  ne  fit  jamais  qu'un  mauvais  choix, 
Dont  longtemps  nous  et  lui  portâmes  le  supplice. 

Vainqueur  de  toutes  parts,  esclave  dans  sa  cour, 
Son  tyran  et  le  nôtre  à  peine  sort  du  jour, 
Que  jusque  dans  la  tombe  il  le  force  à  le  suivre. 

Jamais  pareils  malheurs  furent-ils  entendus? 


9o  POÉSIES   DIVERSES. 

Après  trente-trois  ans  sur  le  trône  perdus, 
Commençant  à  régner,  il  a  cessé  de  vivre. 


Épitaphe  sur  Louis  XIII.  Copie,  signée  P.  Corneille,  occupant  les 
pages  211  et  212  du  «  second  recueil  »  d'un  manuscrit  in-40  de  la 
bibliothèque  de  l'Arsenal  portant  le  n°  i35  des  Belles- Lettres. 

Sous  ce  marbre  repose  un  monarque  françois, 
Que  ne  sauroit  l'envie  accuser  d'aucun  vice; 
Il  fut  et  le  meilleur  et  le  plus  grand  des  rois, 
Son  règne  fut  pourtant  celui  de  l'injustice. 

Sage  en  tout,  il  ne  fit  jamais  qu'un  mauvais  choix, 
Dont  longtemps  nous  et  lui  portâmes  le  supplice; 
L'ambition,  l'orgueil,  l'intérêt,  l'avarice, 
Revêtus  de  son  nom,  nous  donnèrent  des  lois. 

Vainqueur  de  toute  parts  {sic),  esclave  dans  sa  cour, 
Son  tyran  et  le  nôtre  à  peine  sort  du  jour, 
Que  dans  la  tombe  même  il  le  force  à  le  suivre. 

Jamais  pareils  malheurs  furent-ils  entendus  ? 
Après  trente  et  trois  ans  sur  le  trône  perdus, 
Commençant  à  régner,  il  a  cessé  de  vivre. 


«  Sonnet  sur  la  mort  de  Louis  XIII,  qu'on  assure  être  de  P.  Cor- 
neille et  n'avoir  jamais  paru.  »  Les  Nouveaux  Amusemens  du  cœur 
et  de  V esprit,  ouvrage  périodique,  [par  Philippe  de  Prétot] ,  à  la 
Haye,  chés  Zacharie  Chastelain,  etc.,  1737-1745,  tome  XIV,  p.  33o. 

Sous  ce  marbre  repose  un  monarque  françois, 
Que  ne  sauroit  l'envie  accuser  d'aucun  vice  ; 
Il  fut  et  le  plus  juste  et  le  meilleur  des  rois, 
Son  règne  fut  pourtant  celui  de  l'injustice. 

Sage  en  tout,  il  ne  fit  jamais  qu'un  mauvais  choix, 
Dont  longtemps  nous  et  lui  portâmes  le  supplice  ; 


POÉSIES   DIVERSES.  91 

L'ambition,  l'orgueil,  l'intérêt,  l'avarice, 
Revêtus  de  son  nom,  nous  donnèrent  des  lois. 

Vainqueur  de  toute  part,  esclave  dans  sa  cour, 
Son  tyran  et  le  nôtre  à  peine  sort  du  jour, 
Que  dans  la  tombe  même  il  l'oblige  à  le  suivre. 

Jamais  pareils  malheurs  furent-ils  entendus  ? 
Après  trente-trois  ans  sur  le  trône  perdus, 
Commençant  à  régner,  il  a  cessé  de  vivre. 


9»  POÉSIES    DIVERSES. 


XXX 

A    MONSEIGNEUR    MONSEIGNEUR    l'ÉMINENTISSIME 
CARDINAL  MAZARIN. 

REMERCIMENT. 

Naudé  nous  fait  connaître  la  nature  de  la  libéralité  qui  a  donné 
lieu  à  ce  Remerciment.  Après  avoir  parlé  longuement  des  calomnies 
débitées  par  les  pamphlétaires  contre  Mazarin  :  «  Ces  mêmes  écri- 
vains, ajoute-t-il1,  ne  disent-ils  pas  effrontément  que  le  Cardinal  n'a 
jamais  fait  de  bien  aux  hommes  de  lettres,  et  néanmoins  Balzac,  Cor- 
neille—  l'ont  remercié  publiquement  :  le  premier  de  ce  qu'il  lui  fai- 
soit  payer  ponctuellement  une  pension  de  deux  mille  livres,  et  l'autre 
de  ce  qu'il  lui  en  avoit  donné  une  de  cent  pistoles ,  de  laquelle  voilà 
comme  il  parle  en  son  Remerciment  publié  l'an  i643  chez  Sommaville 
et  Courbé.  »  Naudé  rapporte  ensuite  les  vers  9-16  de  notre  pièce  XXX. 
Ce  n'est  pas  en  1643,  comme  il  le  dit,  mais,  ce  qui  est  bien  peu 
différent,  au  mois  de  février  1644  2>  °iue  \e  Remerciment  parut,  chez 
les  libraires  qu'il  indique,  à  la  suite  de  la  dédicace  de  l'édition  origi- 
nale in-4°  de  la  Mort  de  Pompée.  Il  y  est  intitulé  :  A  Son  Emincnce. 
Remerciment.  Dans  l'édition  in- 12  qui  fut  publiée  la  même  année,  il 
porte  le  titre  que  nous  avons  reproduit,  et  il  est  suivi  de  l'avis  de 
Corneille  qu'on  va  lire  et  de  la  traduction  en  vers  latins,  que  nous 
reproduisons  également.  Cette  traduction  est  signée  A.  R.;  Granet, 
qui  a  changé  l'R  en  B,  l'attribue  à  Adrien  Blondin.  Il  ne  peut  y 
avoir  aucun  doute  sur  le  véritable  nom  de  son  auteur,  car  dans  le 

1 .  Jugement  de  tout  ce  qui  a  été  Imprimé  contre  le  cardinal  Mazarin 
depuis  le  sixième  janvier  jusques  à  la  déclaration  du  premier  avril  mil  six 
cent  quarante-neuf  [sans  lieu  ni  date),  in-40.  Cet  ouvrage  de  Gabriel 
Naudé,  bibliothécaire  de  Mazarin,  est  en  forme  de  dialogue,  et  il  est 
connu  sous  le  nom  de  Mascurat ,  l'un  des  interlocuteurs.  C'est 
M.  Edouard  Fournier  qui  nous  a  signalé ,  avec  son  obligeance  habi- 
tuelle, le  curieux  passage  que  nous  en  extrayons. 

2.  Voyez  tome  IV,  p.  10. 


POÉSIES   DIVERSES.  93 

recueil  intitulé  Elogia  lulii  Mazarini  Cardinalis Parisiis,  excudebat 

Antonius  Vitré ,  Régis  et  Cleri  gallicani  typographus ,  M.DC.LXVI, 
in-fol.,  recueil  composé  de  trois  séries,  la  première  latine,  la  seconde 
italienne  et  la  dernière  française,  on  trouve  aux  pages  5i-53  de 
la  première  de  ces  séries  la  pièce  de  vers  latins  imitée  de  Corneille, 
avec  cette  signature  :  Abrahamus  Remius,  Poeta  Regius.  Le  véri- 
table nom  de  ce  poète  latin,  alors  célèbre,  était  Abraham  Ravaud; 
né  le  6  mars  1600  dans  le  village  de  Remy  en  Beauvaisis,  il  en  avait 
pris  le  nom  ;  il  mourut  à  Paris  le  Ier  décembre  1646-  Le  Remercî- 
mcnt  de  Corneille  a  été  inséré  aux  pages  5~7  de  la  troisième  série 
des  Elogia  et  dans  le  Recueil  de  poésies  chrestiennes  et  diverses,  dédié 
à  Monseigneur  le  prince  de  Conty,  par  M.  de  la  Fontaine,  à  Paris, 
chez  Pierre  le  Petit,  1671,  3  vol.  in-12  (tome  III,  p.  87-89).  Ces 
éditions  contiennent  des  changements  qu'on  trouvera  indiqués  en 
note.  Voltaire  a  fait  des  remarques  sur  ce  Remer ciment ^  si  l'on  peut 
appeler  remarques  une  continuelle  déclamation  contre  Corneille  au 
sujet  des  louanges  qu'il  adresse  à  Mazarin. 

Au  Lecteur.  Ayant  dédié  ce  poème  à  Mr  le  cardinal 
Mazarin,  j'ai  cru  à  propos  de  joindre  à  l'épître  le 
remercîment  que  je  présentai  il  y  a  trois  mois  à  Son 
Éminence,  pour  une  libéralité  dont  elle  me  surprit.  Cette 
pièce,  quoique  faite  à  la  hâte,  a  eu  le  bonheur  de  plaire 
assez  à  un  homme  savant  pour  ne  dédaigner  pas  de 
perdre  une  heure  à  donner  une  meilleure  forme  à  mes 
pensées  ,  et  les  faire  passer  dans  cette  langue  illustre  qui 
sert  de  truchement  à  tous  les  savants  de  l'Europe.  Je  te 
donne  ici  l'un  et  l'autre ,  afin  que  lu  voies  et  ma  gloire 
et  ma  honte.  Il  m'est  extrêmement  glorieux  qu'un  esprit 
de  cette  trempe  ait  assez  considéré  mon  ouvrage  pour  le 
vouloir  traduire;  mais  il  m'est  presque  aussi  honteux  de 
voir  ses  expressions  tellement  au-dessus  des  miennes, 
qu'il  semble  que  ce  soit  un  maître  qui  ait  voulu  mettre 
en  lustre1  les  petits  efforts  de  son  écolier.   C'est  une 

1.   En  lumière ,  dans  les  OEuvres  diverses  (p.  i52)  et  dans  les  édi- 
tions postérieures.  • 


94  POÉSIES  DIVERSES. 

honte  toutefois  qui  m'est  très-avantageuse;  et  si  j'en  rou- 
gis, c'est  de  me  voir  infiniment  son  redevable.  L'obli- 
gation que  je  lui  en  ai  est  d'autant  plus  grande  qu'il  m'a 
fait  cet  honneur  sans  que  j'aye  celui  de  le  connoître,  ni 
d'être  connu  de  lui.  Un  de  ses  amis  m'a  dit  son  nom; 
mais  comme  il  ne  l'a  pas  voulu  mettre  au-dessous  de 
ses  vers  quand  il  les  a  fait  imprimer ,  je  te  l'indiquerai 
seulement  par  les  deux  premières  lettres,  de  peur  de  fâ- 
cher sa  modestie ,  à  laquelle  je  ne  veux  ni  déplaire  ,  ni 
consentir  tout  à  fait  * . 

Non ,  tu  n'es  point  ingrate,  ô  maîtresse  du  monde, 

Qui  de  ce  grand  pouvoir  sur  la  terre  et  sur  l'onde, 

Malgré  l'effort  des  temps ,  retiens  sur  nos  autels 

Le  souverain  empire  et  des  droits  immortels. 

Si  de  tes  vieux  héros  j'anime  la  mémoire2,  5 

Tu  relèves  mon  nom  sur  l'aile  de  leur  gloire  ; 

Et  ton  noble  génie ,  en  mes  vers  mal  tracé , 

G  R  ATI  ARUM    ACTIO    EMINENTISSIMO    CARDINALI    JULIO    MAZARINO  ? 

Ex  gallico  Cornel'd. 

Roma  caput  mundi,  quse  quondam  vindice  ferro, 

Qua  terrse  pelagusque  patent,  fatalia  victis 

Jura  dabas  populis  ,  et  nunc,  sed  sanctior,  orbem 

Religione  Deum  et  vera  pietate  gubernas, 

Non  te  ingrata  uieae  cepere  oblivia  musse, 

Nec  labor  irritus  est,  nam  si  mea  carmina  crescunt 

In  laudes  fœcunda  tuas,  gentisque  latinœ 

Heroas  veterumque  ducum  celebramus  honorem, 

i .   Cet  avis  au  Lecteur  continue   ainsi  :  a  Au  reste,  si  je  voulois 

faire  ici »    La  suite  est  comme  dans   l'avis   en  u'te   de  Pompée  : 

voyez  tome  IV,  p.  14. 

a.   Granet  a  mis  :  j'aime  encor  la  mémoire 


POÉSIES   DIVERSES.  95 

Par  ton  nouveau  héros  m'en  a  récompensé. 

C'est  toi,  grand  cardinal,  âme1  au-dessus  de  l'homme, 

Rare  don  qu'à  la  France  ont  fait  le  ciel  et  Rome ,  i  o 

C'est  toi ,  dis-je ,  ô  héros ,  ô  cœur  vraiment  romain  , 

Dont  Rome  en  ma  faveur  vient  d'emprunter  la  main . 

Mon  bonheur  n'a  point  eu  de  douteuse  apparence2  : 

Tes  dons  ont  devancé  même  mon  espérance; 

Et  ton  cœur  généreux  m'a  surpris  d'un  bienfait  i  ô 

Qui  ne  m'a  pas  coûté  seulement  un  souhait. 

La  grâce  en  affoiblit 3  quand  il  faut  qu'on  l'attende  : 

Tel  pense  l'acheter  alors  qu'il  la  demande  ; 

Et  c'est  je  ne  sais  quoi  d'abaissement  secret 

Où  quiconque  a  du  cœur  ne  consent  qu'à  regret.  20 

C'est  un  terme  honteux  que  celui  de  prière  : 

Par  virtute  suis  patribus  novus  emicat  héros, 
Maxima  qui  tenui  pro  munere  dona  refundit. 
Te  duce,  magne  héros,  quo  nil  suhlimius  sether 
Francigenis,  et  nil  melius  dédit  Itala  tellus, 
Juli,  purpurea  flamen  dignissime  palla, 
Te  duce,  Roma  suos,  largo  in  me  prodiga  fœtu, 
Fudit  opes,  nec  in  ancipiti  fortuna  pependit  : 
Spem  merces  oblata  prseit;  Charitesque  profusa 
Occurrere  manu;  quodque  est  mirabile,  munus 
Non  optare  licet,  tu  me  auri  pondère  sponte 
Obruis,  et  votis  potior  non  ante  cupitis. 
Gratia  quœ  petitur  subito  evolat,  et  prece  emaci 
Qui  prior  ambit  opes,  tacitum  sub  pectore  vulnus 
Sentit,  et  invitas  concesso  munere  gaudet; 
Nam  pudor  est,  verba  et  vultum  prseferre  precantis. 

1.  On  lit  ici  dans  le  Recueil  de  1671,  dans  les  OEuvres  diverses 
de  1738  et  dans  toutes  les  éditions  postérieures  :  homme,  au  lieu  de  âme. 

2.  Var.  Mon  honneur  n'a  point  eu  de  douteuse  apparence. 

(Elogia,  Recueil  et  OEuvres  diverses.) 

3.  Affoiblit  est  pris  dans  le  sens  neutre,  comme  se  prend  le  simple 
foiblir.  Voyez  le  Lexique.  —  Le  Recueil,  les  OEuvres  diverses,  et  toutes 
les  éditions  postérieures  portent  .  La  grâce  s'affaiblit. 


96  POÉSIES   DIVERSES. 

Tu  me  l'as  épargné ,  tu  m'as  fait  grâce  entière. 

Ainsi  l'honneur  se  mêle  au  bien  que  je  reçois. 

Qui  donne  comme  toi  donne  plus  d'une  fois. 

Son  don  marque  une  estime  et  plus  pure  et  plus  pleine , 

Il  attache  les  cœurs  d'une  plus  forte  chaîne  : 

Et  prenant  *  nouveau  prix  de  la  main  qui  le  fait , 

Sa  façon  de  bien  faire  est  un  second  bienfait 2. 

Ainsi  le  grand  Auguste  autrefois  dans  ta  ville 
Aimoit  à  prévenir  l'attente  de  Virgile  :  3o 

Lui  que  j'ai  fait  revivre ,  et  qui  revit  en  toi, 
En  usoit  envers  lui  comme  tu  fais  vers  moi. 

Certes,  dans  la  chaleur  que  le  ciel  nous  inspire, 
Nos  vers  disent  souvent  plus  qu'ils  ne  pensent  dire  ; 
Et  ce  feu  qui  sans  nous  pousse  les  plus  heureux  3  5 

Ne  nous  explique  pas  tout  ce  qu'il  fait  para  eux. 

At  tu,  dum  pleno  spargis  tua  prsemia  cornu 
Magnificus,  parcis  precibus,  votumque  remittis. 
Sic  donis  accedit  honos,  et  munere  in  uno 
Munera  bina  latent,  cum  se  ultro  gratia  profert. 
Hinc  amor  arctior  est,  nam  blanda  sine  arte  voluntas 
Dat  pretium  donis,  et  munera  munere  crescunt. 

Sic  quondam  Augustus,  vestrae  alter  Romulus  urbis, 
Mittere  gaudebat  dona  insperata  Maroni  ; 
Et  quem  nostra  in  te  redivivum  carrnina  fingunt, 
Virgilium  excepit,  quo  me  dignaris  honore. 

Et  cerle  ille  augur  qui  nos  inspirât  Apollo, 
Obscuris  vera  involvens,  plus  carminé  promit 
Interdum,  quam  verba  sonant;  motuque  latenti 
Ssepe  alio  vatem,  quam  quo  velit,  abripit  ardor. 

i.    a  En  prenant,  »  mais  à  tort,  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dans 
quelques  autres. 

?..   Corneille  avait  déjà  dit  dans  le  Menteur ,  acte  I,  scène  i,  vers  90  : 

La  façon  de  donner  vaut  mieux  que  ce  qu'on  donne. 
3.    Pour,  mais  à  tort,  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dans  quelques 
autres. 


POÉSIES    DIVERSES.  <J7 

Quand  jai  peint  un  Horace,  un  Auguste,  un  Pompée, 

Assez  heureusement  ma  muse  s'est  trompée , 

Puisque ,  sans  le  savoir,  avecque  leur  portrait 

Elle  droit  du  tien  un  admirable  trait.  40 

Leurs  plus  hautes  vertus  qu'étale  mon  ouvrage 

N'y  font  que  prendre  un  rang  pour  former  ton  image. 

Quand  j'aurai  peint  encor  tous  ces  vieux  conquérants, 

Les  Scipions  vainqueurs  ,  et  les  Gâtons  mourants , 

Les  Pauls,  les  Fabiens,  alors  de  tous  ensemble  4  5 

On  en  verra  sortir  un  tout  qui  te  ressemble  ; 

Et  l'on  rassemblera  de  leur  pompeux  débris 

Ton  «âme  et  ton  courage ,  épais  dans  mes  écrits. 

Souffre  donc  que  pour  guide  au  travail  qui  me  reste 
J'ajoute  ton  exemple  à  cette  ardeur  céleste ,  5<. 

Et  que  de  tes  vertus  le  portrait  sans  égal 
S'achève  de  ma  main  sur  son  original  ; 
Que  j'étudie  *  en  toi  ces  sentiments  illustres 


Cum  cecini  laudes  Pompeï  aut  robur  Horati, 
Augustique  pios  morts,  domitumque  furorem, 
Musa  quidem  erravit  ;  nam  dura  putat,  inscia  fati, 
Romanos  pinxisse  duces,  tua  facta,  tuamque 
Exprimit  effigiem  :  veterum  décora  alta  Quiritum 
Per  tôt  sparsa  viros,  tôt  nobilitata  tropaeis, 
Ad  te  unum  redeunt  ;  tua  in  illis  vivit  imago. 
Nec  tamen  hic  finis;  nam  cum  celebrabo  Catonum 
Funera,  Scipiadumque  decus,  Paulosijue  sagaces, 
Et  cunctatores  Fabios,  tua  gloria  surget 
Gonflata  ex  illis,  sed  erit  magis  inclyta  virtus. 
Sit  mihi  fas  igitur  sub  te  renovare  laborem, 
Adque  tui  exemplar  proceres  formare  lalinos, 
Et  divina  tua?  sécréta  recluderc  mentis, 
Versuque  arcanos  generoso  expromere  sensus 


1.  Granet  a  mis  :  «  Quand  j'étudie.  » 

CoKJSKU.l.E.     X 


98  POESIES   DIVERSES. 

Qu'a  conservés  '  ton  sang  à  travers  tant  de  lustres, 

Et  que  le  ciel  propice  et  les  destins  amis  5  5 

De  tes  fameux  Romains  en  ton  âme  ont  transmis. 

Alors  de  tes  couleurs  peignant  leurs  aventures, 

J'en  porterai  si  haut  les  brillantes  peintures. 

Que  ta  Rome  elle-même ,  admirant  mes  travaux , 

N'en  reconnoîtra  plus  les  vieux  originaux,  60 

Et  se  plaindra  de  moi  de  voir  sur  eux  gravées 

Les  vertus  qu'à  toi  seul  elle  avoit  réservées, 

Cependant  qu'à  l'éclat  de  tes  propres  clartés 

Tu  te  reccnnoîtras  sous  des  noms  empruntés. 

Mais  ne  te  lasse  point  d'illuminer  mon  àme,  6  5 

Ni  de  prêter  ta  vie  à  conduire  ma  flamme  ; 
Et  de  ces  grands  soucis  que  tu  prends  pour  mon  roi, 
Daigne  encor  quelquefois  descendre  jusqu'à  moi. 
Délasse  en  mes  écrits  ta  noble  inquiétude  ; 

Quos  tibi  nascenti  Charités,  urbisque  Quirini 
Fata,  et  sanguis  avum  stellis  transfudit  amicis. 
Tune  splendore  novo  afflatus,  longo  ordine  pingam 
Romulidas,  operique  tuos  adhibebo  colores. 
Materiara  superabit  opus  ;  talique  cothurno 
Assurgam,  ut  nostros  Roma  admirata  labores, 
Eloquii  stupeat  vires,  neque  prisca  suorum 
Ora  recognoscat  :  quin  et  fortasse  queretur, 
Me  ducibus  latiis  illas  adscribere  laudes 
Quas  solus  vera  ingenii  virtute  mereris. 
Interea  proprio  late  splendore  refulgens, 
Saepe  tuas  alio  cernes  sub  nomine  dotes. 

Ne  tamen,  o  divine  héros,  ne  subtrahe  lumen, 
Vive  diu,  prœsensque  meis  illabere  cœptis. 
Subduc  te  regni  excubiis,  quas  nocte  dieque 
Irrequietus  agis,  paulumque  abrumpe  labores 
Assiduos,  nostroque  in  carminé  dilue  curas  ; 

1.  Dans  les  éditions  données  par  Corneille,  dans  les  Elogia  et  dans 
le  Recueil,  le  participe  est  au  singulier,  sans  accord. 


POÉSIES   DIVERSES.  99 

Et  tandis  que  sur  elle  appliquant  mon  étude ,  7  o 

J'emploierai  pour  te  peindre1  et  pour  te  divertir 

Les  talents  que  le  ciel  ma  voulu  départir, 

Recois ,  avec  les  vœux  de  mon  obéissance  , 

Ces  vers  précipités  par  ma  reconnoissance. 

L'impatient  transport  de  mon  ressentiment  7  5 

N'a  pu  pour  les  polir  m'accorder  un  moment. 

S'ils  ont  moins  de  douceur,  ils  en  ont  plus  de  zèle  : 

Leur  rudesse  est  le  sceau  d'une  ardeur  plus  fidèle; 

Et  ta  bonté  verra  dans  leur  témérité , 

Avec  moins  d'ornement,  plus  de  sincérité.  80 

Cumque  tuas  veneror  Charités,  et  musa  requirit 
Quae  placeant,  magnseque  parent  solatia  menti, 
Accipe  prœcipiti  mea  cannina  condita  vena . 
Carmina  perpetui  testes,  et  pignora  cultus  : 
Imper fecta  quidem,  nec  enim  tua  dona  sinebant 
Esse  diu  immemorem,  ars  nostro  successit  amori. 
Et  si  lingua  rudis,  latet  imis  sensibus  ardor; 
Nostraque  plus  fidei  quam  fastus  verba  reeondunt  ; 
Nam  quo  musa  magis  caret  arte,  minusque  leporis 
Invenies,  magis  est  pura  et  sincera  voluntas. 

1.    Pour  te  plaire,   dans   les  OEm-res  diverses  et  dans   les  éditions 
postérieures. 


* 


IW 


ioo  POESIES    DIVERSES. 


XXXJ 

A     MAÎTRE    ADAM1,     MENUISIER    DE    NEVERS, 

SUR    SES  CHEVILLES. 
SONNET. 

Cette  pièce,  signée  Corneille,  se  trouve  dans  le  volume  intitulé  les 
C houilles  de  Me  Adamy  menuisier  de  Neuers ,  a  Paris .  chez  Toussainct 
Quinet....  M.DC.XLIV.  Auec  priuilege  du  Roy,  in-4°.  Le  privilège 
porte  :  «  donné  à  Paris,  le  16.  iour  d'Auril  l'an  de  grâce  mil  six  cens 
quarante  quatre,  »  et  est  suivi  de  la  mention  :  «  Acheué  d'Imprimer 
pour  la  première  fois  le  2 5  May  i644-  B  Les  vers  de  Corneille  oc- 
cupent la  onzième  page  d'un  recueil  qui  n'en  a  pas  moins  de  cent,  et 
qui  est  intitulé  :  approbation  du  Parnasse  sur  les  Cheuilles  de  Maistre 
Adam  Billaut,  menuisier  de  Neuers. 

Le  dieu  de  Pythagore  et  sa  métempsycose 
Jetants  lame  d'Orphée  en  un  poëte  françois  : 
«  Par  quel  crime,  dit-elle  ,  ai-je  offensé  vos  lois  , 
Digne  du  triste  sort  que  leur  rigueur  m'impose? 

«  Les  vers  font  bruit  en  France  ;  on  les  loue  ,  on  en  cause  : 
Les  miens  en  un  moment  auront  toutes  les  voix  ; 
Mais  j'y  verrai  mon  homme  à  toute  heure  aux  abois, 
Si  pour  gagner  du  pain  il  ne  sait  autre  chose.  » 

«  Nous  savons,  dirent-ils,  le  pourvoir  d'un  métier  : 


j.  Le  privilège  le  nomme  «Adam  Billault,  Maistre  Menuisier  de 
la  ville  d<j  Neuers.  »  Au  quatorzième  vers  Corneille  a  écrit  Billot,  afin 
de  rendre  la  rime  plus  exacte  pour  l'œil. 


lÉ 


POESIES    DIVERSES.  101 

U  sera  fameux  poëte  et  fameux  menuisier,  T  ,, 

Afin  qu'un  peu  de  bien  suive  beaucoup  d  estime.  » 

A  ce  nouveau  parti  l'âme  les  prit  au  mot , 
Et  s' assurant  bien  plus  au  rabot  qu'à  la  rime, 
Elle  entra  dans  le  corps  de  maître  Adam  Billot. 


ioi  POÉSIES   DIVERSES. 


XXXII 

A  MONSIEUR  DE  BOISROBERT,   ABBÉ  DE  CHATILLON, 

SUR  SES  ÉPITRES. 

Ces  vers,  signés  Corneille,  sont  imprimés  au  recto  du  sixième 
feuillet  du  volume  intitulé  :  les  Epistres  du  sieur  de  Bois-Robei  t-Metel, 
abbé  de  Chastillon^...  à  Paris,  chez  Cardin  Besongne,  M. DC. XL VII, 
in-4°.  L'Achevé  d'imprimer  est  du  «  vingt- et-uniesme  Iuillet  1646.  » 
Bois -Robert,  qui  en  ir>5o.  publia  une  seconde  partie  in-8°  de  ses  Épîtres, 
nous  apprend  dans  Y  Avis  qu'il  place  en  tête,  que  ces  hommages  poé- 
tiques étaient  passés  de  mode  ;  après  avoir  annoncé  une  nouvelle 
édition  de  la  première  partie  de  son  recueil,  il  ajoute  :  «  Ceux  qui 
n'ont  point  vu  la  belle  préface  de  feu  M.  Mascaron  la  trouveront  dans 
cette  seconde  impression,  plus  correcte  que  la  première;  ils  y  trouve- 
ront aussi  les  vers  que  Messieurs  de  Corneille,  Ménard,  Ménage  et 
Sarrazin  me  donnèrent  quand  je  mis  ce  premier  volume  en  lumière. 
J'ai  trouvé  à  propos  de  ne  les  pas  mettre  à  la  tête  du  second ,  tant 
parce  qu'ils  n'y  eussent  pas  été  nouveaux  comme  tout  le  reste,  qu'à 
cause  qu'ils  eussent  blessé  ma  modestie,  et  la  coutume,  qui  ne  les  y 
souffre  plus.  » 

Que  tes  entretiens  sont  charmants  ! 

Que  leur  douceur  est  infinie  ! 
Que  la  facilité  de  ton  heureux  génie 
Fait  de  honte  à  l'éclat  des  plus  beaux  ornements! 
Leur  grâce  naturelle  aura  plus  tT  idolâtres  5 

Que  n'en  a  jamais  eu  le  fast*  de  nos  théâtres. 
Le  temps  respectera  tant  de  naïveté  ; 


1.  Voyez  tome  IV,  p.  7.5,  vers  n55;  torne  VIII,  p.    47^,    vers 
4390;  et  le  Lexique. 


POÉSIES    DIVERSES.  io5 

Et  pour  un  seul  endroit  où  tu  me  donnes  place1. 

Tu  m'assures  bien  mieux  de  l'immortalité 

Que  Cinne*,  Rodogune^  et  le  Ciel,  et  Y  Horace.  m 

1.  Voici  ce  passage  qui  assure  mieux  Corneille  de  l'immortalité 
que  tous  ses  chefs-d'œuvre.  L'épître  xxx  de  Boisrobert  est  adressée 
à  un  «Monsieur  Gineste.  »  L'auteur,  comme  nous  le  dit  le  sommaire, 
«  lui  parle  avantageusement  des  belles  lettres  qu'il  a  reçues  de  lui  ;  » 
et  pour  le  convaincre  de  son  talent  il  lui  dit  (p.  i55)  : 

Seul  tu  feins  d'ignorer  le  prix 

Des  épîtres  que  tu  m'écris.... 

Souffre  après  tout  que  je  te  die 

Qu'en  Bourgongne  et  qu'en  Normandie 

Sommeze  et  Corneille  ont  trouvé 

Ce  style  fort  et  relevé, 

Et  ce  seroit  n'être  pas  sage 

Que  chercher  meilleur  témoignage. 

Voyez  ci-dessus,  p.  i5,  un  passage  de  la  seconde  partie  des  Épitres 
de  Boisrobert  où  il  est  question  de  Corneille. 

2.  Granet  dans  les  OEuvres  diverses  (p.  164),  et  tous  les  éditeurs 
après  lui,  ont  imprimé  Cinna,  au  lieu  de  Cinne. 


io4  POESIES   DIVERSES. 


XXXIII 


LES    TRIOMPHES     DE    LOUIS    LE    JUSTE. 

Le  graveur  Valdor  entreprit  peu  après  la  mort  de  Louis  XIII  et 
publia  en  1649  un  grand  ouvrage  à  figures  dont  le  titre,  fort  étendu, 
fera  bien  connaître  la  nature  et  le  contenu  : 

Les  triomphes  de  Louis  le  Iuste  XIII,  du  nom ,  Roy  de  France  et  de 
Nauarre.  Contenans  les  plus  grandes  actions  ou  sa  Maiesté  s'est  trouuée 
en  personne,  représentées  en  Figures  JEnigmatiques  exposées  par  i>n 
Poème  Héroïque  de  Charles  Beys,  et  accompagnées  de  vers  François 
sous  chaque  Figure,  composez  par  P.  de  Corneille.  Avec  les  portraits 
des  rois,  princes  et  généraux  d'armées,  qui  ont  assisté  ou  seruy  ce  Belli- 
queux Louis  le  Iuste  Combattant  ;  Et  leurs  Deuises  et  Expositions  en 
forme  d'Eloges  par  Henry  Estienne,  Escuyer,  sieur  des  Fossez,  Poète  et 
Interprète  du  Roy  es  Langues  Grecque  et  Latine.  Ensemble  le  plan  des 
villes,  sièges  et  batailles,  auec  vn  Abrégé  de  la  Vie  de  ce  Grand  Mo- 
narque, par  René  Barry,  Conseiller  du  Roy  et  Historiographe  de  sa 
Maiesté.  Le  tout  traduit  en  Latin  par  le  R.  P.  Nicolai,  Docteur  en 
Sorbonne  de  la  Faculté  de  Paris ,  et  premier  Régent  du  grand  Conuent 
des  Iacobins.  Ouurcge  entre vris  et  finy  par  lean  Valdor,  Liégeois, 
Calcographe  du  Roy.  Le  tout  par  commandement  de  leurs  Maies tez. 
A  Paris,  En  l'Imprimerie  Royale,  Par  Antoine  Estiene,...  M.DC.XL1X. 
A.vec  privilège  de  sa  Majesté.  (In-fol.).  —  Le  privilège  est  daté  du 
«  22.  iour  de  May,  l'an  de  grâce  1649.  » 

En   tête   de    l'ouvrage  on   trouve  des  lettres  du  roi  Louis  XIV, 
écrites  aux  divers  auteurs  pour  les  engager  à  s'occuper  de  ce  travail 
Voici  celle  qui  est  adressée  à  Corneille  : 

Lettre  du  Roi  pour  les  épigrammes . 

«  Monsieur  de  Corneille,  comme  je  n'ai  point  de  vie  plus  illustre 
à  imiter  que  celle  du  feu  Roi,  mon  très-honoré  seigneur  et  père,  je 
n'ai  point  aussi  un  plus  grand  désir  que  de  voir  en  un  abrégé  ses 
glorieuses  actions  dignement  représentées,  ni  un  plus  grand  soin  que 


POÉSIES   DIVERSES.  io5 

d'y  faire  travailler  promptement  ;  et  comme  j'ai  cru  que  pour  rendre 
cet  ouvrage  parfait,  je  devois  vous  en  laisser  l'expression,  et  à  Val- 
dor  les  desseins,  et  que  j'ai  vu,  par  ce  qu'il  a  fait,  que  son  invention 
avoit  répondu  à  mon  attente,  je  juge,  par  ce  que  vous  avez  accou- 
tumé de  faire,  que  vous  réussirez  en  cette  entreprise,  et  que  pour 
éterniser  la  mémoire  de  votre  Roi,  vous  prendrez  plaisir  d'éterniser 
le  zèle  que  vous  avez  pour  sa  gloire.  C'est  ce  qui  m'a  obligé  de  vous 
faire  cette  lettre  par  l'avis  de  la  Reine  régente,  Madame  ma  mère,  et 
de  vous  assurer  que  vous  ne  sauriez  me  donner  des  preu\es  de  votre 
affection  plus  agréables  que  celle  que  j'en  attends  sur  ce  sujet.  Ce- 
pendant je  prie  Dieu  qu'il  vous  ait,  Monsieur  de  Corneille,  en  sa 
sainte  garde. 

«  Écrit  à  Fontainebleau,  ce  14  octobre  164 5. 

«  Signé  :  LOUIS;  et  plus  bas  :  de  GuenÉgaud. 
«  Et  au-dessus  est  écrit  : 

«   A  Monsr  de  Corneille.  » 

Il  y  a  au  département  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  impériale 
(fonds  français  664^,  p-  124)  une  copie  de  la  lettre  de  cachet  du 
Roy  escrite  à  Monsieur  Corneille ,  qui  présente  quelques  légères  va- 
riantes inutiles  à  mentionner.  Dans  cette  copie  la  date,  antérieure 
de  plus  d'un  an,  est  du  «  4e  iour  d'octobre  i644-  8 

Cette  copie  est  précédée  (p.  120),  dans  le  Recueil  manuscrit  que 
nous  venons  de  citer,  d'une  lettre,  signée  Thonier,  qui  a  été  repro- 
duite par  M.  Taschereau  dans  la  seconde  édition  de  son  Histoire  de 
la  vie  et  des  ouvrages  de  P.  Corneille  (p.  3^4),  et  qui  commence  ainsi  : 

«  Du  5e  octobre,  à  Fontainebleau. 
«  Monsieur, 

«  Voici  la  copie  de  la  lettre  que  vous  avez  désirée  ;  j'adresse  l'ori- 
ginal à  M.  Valdor.  pour  lui  donner  le  moyen  d'obliger  doublement 
M.  de  Corneille.  Comme  elle  est  un  effet  de  sa  sollicitation,  elle  est 
une  preuve  de  son  estime,  et  il  croit  qu'avec  l'approbation  du  Roi 
ce  fameux  auteur  se  surmontera  pour  rendre  son  entreprise  plus 
illustre.  Je  vous  supplie  de  lui  faire  rendre  mon  paquet  et  de  par- 
donner la  peine  que  je  vous  donne.  La  maladie  de  S.  E.  nous  tiendra 
en  ce  lieu  plus  longtemps  qu'on  ne  voudrait,  etc.  » 

Les  épigrammes  de  Corneille,  comme  on  les  appelle  en  tête  de  la 


tofi  POESIES   DIVERSES. 

lettre  du  Roi,  se  trouvent,  ainsi  que  l'indique  le  titre  que  nous  avons 
reproduit,  au-dessous  des  figures  énigmatiques  de  Valdor.  Elles  sont 
intitulées  dans  les  OEuvres  diverses publiées  par  Granet  (p.  170-176)  : 
Fers  mis  au-dessous  des  estampes  (jui  représentent  les  glorieuses  actions  de 
Louis  XIII;  et  dans  l'édition  de  Lefèvre:  Inscriptions. 

Les  titres  que  nous  donnons  à  chacune  de  ces  petites  pièces  sont 
ceux  qu'elles  portent  au  bas  de  chaque  gravure  dans  le  volume  où 
elles  ont  paru  pour  la  première  fois.  Les  éditeurs  précédents  les  ont 
rarement  reproduits,  et  ont  d'ordinaire  préféré  les  intitulés  plus  dé- 
veloppés des  diverses  parties  du  poëme  héroïque  de  Charles  Beys  qui 
se  trouvent  en  regard  de  chaque  gravure. 

CAEN*. 

Le  château  révolté  donne  à  Gaen  mille  alarmes; 
Mais  sitôt  que  Louis  y  fait  briller  ses  armes, 
Sa  présence  reprend  le  cœur  de  ses  guerriers  ; 

Et  leur  révolte  ainsi  ne  semble  être  conçue 

» 

Que  par  l'ambition  de  jouir  de  sa  vue,  5 

Et  de  le  couronner  de  ses  premiers  lauriers. 

PONT-DE-CÉ2. 

Que  sert  de  disputer  le  passage  de  Loire  ? 

Le  sang  sur  la  discorde  emporte  la  victoire; 

Notre  mauvais  destin  cède  à  son  doux  effort  ; 

Et  les  canons,  quittants  leurs  usages  farouches,  1  o 

Ne  servent  plus  ici  que  d'éclatantes  bouches8, 

Pour  rendre  grâce  au  ciel  de  cet  heureux  accord. 


1.  Ce  fut  le  7  juillet  1620  que  le  Roi  quitta  Paris  pour  soumettre 
la  Normandie.  La  ville  de  Rouen  ouvrit  d'elle-même  ses  portes,  et 
Caen  se  rendit  après  une  faible  résistance. 

2.  Louis  XIII  attaqua  le  Pont-de-Cé  le  7  août  1620. 

3.  Touches,  dans  l'édition  originale;  mais  ce  texte  gravé  contient 
beaucoup  de  fautes.  La  traduction  latine  ne  laisse  aucun  doute  sur 
la  vraie  leçon;  on  y  lit  :  altitonis  resonantia  vocibus  or  a. 


POÉSIES    DIVERSES.  107 

LE    RÉTABLISSEMENT    DES    ECCLESIASTIQUES    EN    BEARN  *  . 

Sa  valeur  en  ce  lieu  n'a  point  cherché  sa  gloire  : 

Il  prend  l'honneur  du  ciel  pour  but  de  sa  victoire, 

Et  la  religion  combat  l'impiété.  x  5 

Il  tient  dessous  ses  pieds  l'hérésie  étouffée  : 

Les  temples  sont  ses  forts  ;  et  son  plus  beau  trophée 

Est  un  présent  qu'il  fait  à  la  Divinité. 

saumur  2. 

En  vain  contre  le  Roi  vous  opposez,  vos  armes  : 
Sa  Majesté  brillante  avec  de  si  doux  charmes  20 

Peut  mettre  en  un  moment  vos  desseins  à  l'envers. 
Ne  vous  enquêtez  pas  si  ses  troupes  sont  fortes  : 
Encore  que  vos  cœurs  ne  lui  soient  pas  ouverts, 
D'un  seul  trait  de  ses  yeux  il  ouvrira  vos  portes. 

LA    RÉDUCTION    DE    SAINT-JEAN     d'aNGÉLI*. 

Soubise,  ouvre  les  yeux  :  ce  foudre  que  tu  crains         2  5 

N'est  plus  entre  ses  mains; 
Sa  clémence  l'arrache  à  sa  juste  colère; 
Et  de  quoi  que  ton  crime  ose  l'entretenir, 
Tes  soupirs  ont  trouvé  le  secret  de  lui  plaire  ; 
Et  quand  il  voit  tes  pleurs,  il  oublie  à  punir.  3o 

1.  Un  édit  d'octobre  1620  ordonne  la  restitution  des  Liens  ecclé- 
siastiques usurpés  en  Béarn  par  les  protestants. 

2.  Le  Roi,  au  commencement  de  la  guerre  contre  les  calvinistes, 
s'empara  par  surprise  de  Saumur,  où  commandait  du  Plessis  Mor- 
nay,  au  mois  de  mai  de  1621. 

3.  Le  siège  commença  le  3  juin  1621,  et  la  place  se  rendit  le  jS 
(selon  d'autres  le  a3)  du  même  mois. 


io8  POESIES   DIVERSES. 


ENTRÉE    DES    VILLES    REBELLES*. 

Tel  entrant  ce  grand  roi  dans  ses  villes  rebelles 

De  ces  cœurs  révoltés  fait  des  sujets  fidèles; 

Un  profond  repentir  désarme  ses  rigueurs  ; 

Et  quoique  le  soldat  soupire  après  la  proie, 

Il  l'apaise2,  il  l'arrête,  et  se  montre  avec  joie  3  5 

Et  père  des  vaincus,  et  maître  des  vainqueurs8. 

PUNITION    DES    VILLES    REBELLES*. 

Enfin  aux  châtiments  il  se  laisse  forcer  : 

Qui  pardonne  aisément  invite  à  l'offenser6, 

Et  le  trop  de  bonté  jette  une  amorce  au  crime. 

Une  juste  rigueur  doit  régner  à  son  tour  ;  4  b 

Et  qui  veut  affermir  un  trône  légitime 

Doit  semer  la  terreur  aussi  bien  que  l'amour  '. 

1 .  Le  titre  de  la  partie  du  poëme  de  Beys  qui  correspond  à  cette 
inscription  est  .  Entrée  dans  les  villes  rebelles.  —  Au  printemps  de 
1622,  «  le  Roi  laissa  quelques  troupes  devant  la  Rochelle  et  marcha 
sur  Royan,  dont  le  port  fermait  l'entrée  de  la  Gironde;  il  s'en  em- 
para et  s'avança  en  Guienne  ;  Tonneins  fit  une  résistance  désespérée  ; 
Sainte-Foix  se  rendit;  Negrepelisse  (petite  ville  du  Quercy)fut  prise 
d'assaut  et  incendiée  :  tout  y  fut  massacré,  même  les  femmes  et  les 
enfants;  partout  les  protestants  se  défendaient  avec  fureur;  partout 
se  renouvelaient  les  résistances  et  même  les  cruautés  de  la  guerre  des 
Albigeois.  »  (Histoire  des  Français  par  Théophile  Lavallée  (i83o,), 
tome  III,  p.  57.) 

2.  //  apaise,  dans  l'édition  originale  ;  mais  c'est  encore  là  une  faute 
évidente. 

3.  Ici  Corneille  se  traduit  lui-même.  Voyez  plus  haut,  p.  69, 
vers  47  et  note  2 . 

4.  Voyez  ci-dessus  la  note  1. 

5.  Corneille  répète  ici  un  vers  de  Cinna  (acte  IV,  scène  11,  vers 
11 60;  voyez  tome  III,  p.  436). 

6.  Les  idées  exprimées  dans  ce  sixain  rappellent  ce  qui  se  passa  à 
Negrepelisse,  Les  habitants  avaient  égorgé  pendant  la  nuit  un  ba- 
taillon de  troupes  du  Roi  logées  dans  leurs  murs.  Louis  XIII  mar- 


POÉSIES   DIVERSES.  io<j 


RIE 


Va,  fier  tyran  des  mers,  mon  prince  te  l'ordonne, 

Prends  toi-même  le  soin  de  conduire  Bellone 

Au  secours  du  parti  qu'elle  veut  épouser.  45 

Calme  les  flots  mutins,  dissipe  les  tempêtes; 

Obéis  ;  et  par  là  fais  voir  que  tu  t'apprêtes 

Au  joug  que  dans  un  an2  il  le  doit  imposer. 


la  digue  8, 


Vois  Eole  et  Neptune  à  l'envi  faire  hommage 

A  ce  prodigieux  ouvrage, 
Rochelle,  et  crains  enfin  le  plus  puissant  des  rois. 

Ta  fureur  est  bien  sans  seconde 
De  t' obstiner  encore  à  rejeter  des  lois 

Que  reçoivent  le  vent  et  Tonde. 


cha  contre  eux  pour  les  punir.  Après  la  plus  vive  résistance,  se 
voyant  sur  le  point  d'être  forcés  par  un  assaut  général,  ils  lui  deman- 
dèrent grâce,  et  il  paraissait  enclin  à  leur  pardonner;  mais  l'animo- 
sité  de  l'armée  royale  était  à  son  comble,  et  le  prince  de  Condé  triom- 
pha des  généreuses  dispositions  du  Roi  en  ouvrant  un  bréviaire  et 
lui  montrant  que  dans  les  leçons  de  l'office  du  jour  Samuel  repro- 
chait à  Saùl  d'avoir  épargné  les  Amalécites. 

1.  C'est  bien  là  le  titre  exact  de  cette  inscription.  Il  s'agit  de  l'île 
de  Rié  (ou  Riez)  en  Poitou,  et  non  de  l'île  de  Rhé;  ce  qui  n'a  pas  em- 
pêché Granet  de  mettre  dans  les  OEuvres  diverses  :  Défaite  dans  Vue 
de  Rhé ,  en  quoi  il  a  été  imité  par  tous  les  éditeurs  de  Corneille.  Ce 
fut  le  16  avril  1622  que  le  Roi  passa  à  la  iête  de  ses  gardes,  vers  le 
milieu  de  la  nuit,  dans  l'île  de  Rié,  d'où  il  chassa  M.  de  Soubise, 
après  lui  avoir  fait  perdre  près  de  quatre  mille  hommes. 

2.  Le  mot  an  manque  dans  l'édition  originale;  il  y  a  dans  le  latin  : 
alium  in  annum. 

3.  Sur  les  travaux  du  siège  de  la  Rochelle  et  particulièrement  sur 
la  fameuse  digue,  voyez  les  Mémoires  de  Richelieu,  années  1627  et 
162S,  et  dans  le  Malherbe  de  M.  Lalanne  (tome  IV,  p.  66  et  67),  une 
lettre  de  Malherbe  à  son  cousin  du  Bouillon,  du  28  décembre  1627. 


no  POÉSIES   DIVERSES. 


LA    ROCHELLE* 


Ici  l'audace  impie  en  son  trône  parut,  5  5 

Ici  fut  T arrogance  à  soi-même  funeste  : 
Un  excès  de  valeur  brisa  ce  qu'elle  fut  ; 
Un  excès  de  clémence  en  sauva  ce  qui  reste. 


LE    PAS    DE    SUZE2. 


L'orgueil  de  tant  de  forts  sous  mon  roi  s'humilie  • 

Suze  ouvre  enfin  la  porte  au  bonheur  d'Italie,  60 

Dont  elle  voit  qu'il  tient  les  intérêts  si  chers; 

Et  pleine  de  l'exemple  affreux  de  la  Rochelle  : 

«  Ouvrons  à  ce  grand  prince,  ouvrons-lui  tôt,  dit-elle  ; 

Qui  dompte  l'Océan  ne  craint  pas  nos  rochers.  » 

cazal  8 . 
Lorsque  Mars  se  prépare  à  tout  couvrir  de  morts,         6  5 

1.  La  Rochelle  se  soumit  le  28  octobre  1628;  le  Roi  y  fit  son 
entrée  le  Ier  novembre. 

2.  Le  6  mars  1629  Louis  XIII  força  en  personne  les  trois  barri- 
cades du  pas  de  Suze,  défendues  par  le  duc  de  Savoie. 

3.  Les  Espagnols  pressaient  vivement  Casai,  et  les  Français  vou- 
laient secourir  la  place.  Mazarin,  envoyé  du  pape,  lit  si  bien  auprès 
des  chefs  des  deux  armées  qu'il  les  détermina  à  conclure  une  trêve  de 
six  semaines,  le  2  septembre  i63o.  A  l'expiration  de  cette  trêve,  il  de- 
manda une  prolongation.  Les  Français  refusèrent  d'abord,  et  le  26  oc- 
tobre ils  marchèrent  au  combat.  Mazarin  ne  se  décourage  pas  et  re- 
nouvelle ses  instances  dans  les  deux  camps.  Ayant  persuadé  le  général 
espagnol ,  il  pousse  son  cheval  à  toute  bride  entre  les  deux  armées, 
et  sans  être  effrayé  des  balles  qui  sifflaient  autour  de  lui,  il  ciie 
en  agitant  son  chapeau  :  «  La  paix!  la  paix!  »  et  allant  trouver  le 
maréchal  de  Schomberg,  qui  coin  mandait  les  Français,  il  le  décide 
à  accepter  le  traité.  Naudé  dit  à  ce  sujet  :  «  Les  almanachs  de 
M.DC.XXXI  représentèrent  le  seigneur  Giulio  à  cheval,  faisant 
signe  avec  son  chapeau  à  deux  puissantes  armées  qui  s'alloient  cho- 
quer, de  mettre  bas  les  armes,   pour  rece\oir  la  paix  qu'il  venoit  de 


POÉSIES   DIVERSES.  ni 

Un  illustre  Romain1  étouffe  ses  discords 

En  dépit  des  fureurs  en  deux  camps  allumées. 

En  ce  moment  à  craindre  il  remplit  nos  souhaits  ; 

Et  se  montrant  tout  seul  plus  fort  que  deux  armées, 

Dans  le  champ  de  bataille  il  fait  naître  la  paix.  7  o 


LA    PROTECTION    DE    MANTOUE2. 

Lorsqu'aux  pieds  de  mon  roi  tu  mets  ton  jeune  prince8, 


leur  négocier.  Je  me  souviens  fort  bien  qu'il  y  a  voit  autant  de  presse 
à  voir  ces  almanachs  du  Mazarin  sous  le  cimetière  Saint-Innocent  *, 
qu'il  y  en  eut  en  i643  ou  44  pour  voir  sur  ces  mêmes  planches  le 
furieux  combat  rendu  à  Borne  par  quinze  ou  seize  François,  contre 
l'ambassadeur  et  toute  la  faction  d'Espagne,  et  qu'il  y  en  eut  encore 
cette  année  pour  voir  ces  larges  bandes  remplies  des  différents  por- 
traits de  M.  de  Bruxelles (Broussel).  »  (Mascurat,  if>49?  P-  65.  — Sur 
cet  ouvrage,  voyez  ci-dessus,  p.  92,  note  1.)  —  Les  Espagnols  levèrent 
le  siège  de  Casai  et  évacuèrent  le  Montferrat  (fin  d'octobre  i63o). 

1.  Mazarin,  originaire  de  Sicile,  est  né  le  14  juillet  1602,  selon 
les  uns  à  Piscina  dans  les  Abbruzzes,  selon  d'autres  à  Borne.  Les 
lettres  de  naturalisation  qui  lui  furent  données  en  i63o,  le  font  naître 
à  Rome. 

2.  Vincent  II  de  Gonzague,  duc  de  Mantoue,  étant  mort  sans 
postérité,  en  1627,  eut  pour  successeur  son  plus  proche  parent 
Charles  Ier  de  Gonzague,  qui  possédait  en  France  les  duchés  de  Ne- 
vers  et  de  Bhétel,  et  dont  Louis  XIII  soutint  les  droits  contre  l'em- 
pereur Ferdinand  II.  En  juillet  i63o,  les  Impériaux  prirent  Mantoue, 
qu'ils  abandonnèrent  pendant  trois  jours  à  un  affreux  pillage.  A  l'in- 
vasion de  l'Allemagne  par  Gustave- Adolphe,  la  fortune  changea,  et 
l'Empereur  traita  avec  Charles  Ier  de  Gonzague,  qui  rentra  en  pos- 
session de  sa  capitale  le  20  septembre  i63i. 

3 .  Les  mots  «  ton  jeune  prince  »  ne  pourraient  pas  s'appliquer  au 
duc  Charles  Ier,  mais  seulement  à  son  fils,  qui,  à  la  mort  de  Vincent  II, 
avait  pris  possession,  avant  l'arrivée  de  son  père,  des  duchés  de  Man- 
toue et  de  Montferrat,  ou  à  son  petit-fils  Charles  II,  qui  n'était 
âgé  que  de  sept  ans,  lorsqu'il  succéda  a  son  grand-père  le  25  sep- 
tembre 1637,  et  qui  régnait  à  Mantoue  lorsque  Corneille  écrivit  ces 
vers.  La  vue  de  la  gravure  nous  prouve  qu'il  s'agit  de  ce  dernier. 

*    Voyez  tome  II,  p.  442>  note  3. 


lia  POESIES   DIVERSES. 

Manto1,  tu  ne  vois  point  soupirer  ta  province 

Dans  l'attente  d'un  bien  qu'on  espère  et  qui  fuit; 

Et  de  sa  main  à  peine  a-t-il  tari  tes  larmes, 

Que  sa  France  en  la  tienne  aussitôt  met  ses  armes ,      7  j 

Que  la  gloire  couronne ,  et  la  victoire  suit. 

la  paix  d'aletz2. 

Que  ce  fut  un  spectacle ,  Aletz ,  doux  à  tes  yeux , 
Quand  tu  vis  à  ses  pieds  ces  peuples  factieux 
Trouver  plus  de  bonté  qu'ils  n'avoient  eu  d'audace  ! 
Apprenez  de  mon  prince,  ô  monarques  vainqueurs,     80 
Que  c'est  peu  fait  à  vous  de  reprendre  une  place , 
Si  vous  ne  trouvez  l'art  de  regagner  les  cœurs. 

PAIX    ACCORDÉE     AUX    CHEFS    DES    REBELLES*. 

La  Paix  voit  ce  pardon  d'un  œil  indifférent , 
Et  ne  veut  rien  devoir  au  parti  qui  se  rend  , 

1.  On  voit  figurer  dans  la  gravure  la  nymphe  à  qui ,  si  nous  en 
croyons  Virgile,  la  ville  de  Mantoue  devait  son  nom.  Manto  était 
mère  d'Ocnus,  fondateur  de  Mantoue. 

Fatïdicœ  Mantus  et  Tusci  pZUus  amnls, 

Qui  muros,  matrisque  dédit  tibi,  Mantaa,  nomen. 

[Enéide,  livre  X,  vers  199  et  200.) 

2.  Le  9  juin  1629  Louis  XIII  assiégea  la  ville  d'Alais  dans  les 
Cévennes.  Elle  capitula  dès  le  16  du  même  mois. 

3.  L'édit  de  pacification  fut  rendu  à  Nîmes  le  27  juin  1629.  Ce 
fut  la  dernière  paix  de  religion.  On  laissa  aux  protestants  la  liberté 
du  culte,  mais  on  leur  enleva  leurs  places  de  sûreté,  et  ils  cessèrent 
de  former  comme  un  Etat  dans  l'Etat.  —  Ces  vers  ont  quelque  obs- 
curité; la  vue  de  la  gravure  ne  la  dissipe  pas.  Elle  représente  la  Paix 
appuyée  sur  un  tronc  d'arbre  et  regardant  en  effet  avec  indifférence 
les  chefs  des  rehelles  prosternés  aux  pieds  du  Roi.  Les  vers  latins, 
qui  sont  d'ordinaire  la  traduction  des  vers  français,  s'en  éloignent 
ici  beaucoup;  les  voici  : 

Imbelle  veslrum  crimen;  et  pareil  puis 


POESIES   DIVERSES.  n3 

Déjà  par  la  victoire  assez  bien  établie;  8  5 

Et  la  noble  fierté  qui  l'oblige  à  punir 
Ne  dissimule  ici  le  crime  qu'on  oublie 
Que  pour  ne  perdre  pas  la  gloire  d'obéir. 

NANCY1. 

Troie  auprès  de  ses  murs  l'espace  de  dix  ans 

Vit  contre  elle  les  Dieux  et  les  Grecs  combattants ,       9  o 

Et  s'arma  sans  trembler  contre  la  destinée. 

Grand  Roi,  l'on  avouera  que  l'éclat  de  tes  yeux 

T'a  fait  plus  remporter  d'honneur,  cette  journée , 

Que  la  fable  en  dix  ans  n'en  fit  avoir  aux  Dieux. 

REPRISE    DE    CORBIE2. 

Prends  Corbie ,  Espagnol ,  prends-la ,  que  nous  importe  ? 

Tu  la  rends  à  mon  roi  plus  puissante  et  plus  forte 

Avant  qu'il  en  ait  pu  concevoir  quelque  ennui. 

Ton  bonheur  sert  au  sien,  et  ta  gloire  à  sa  gloire  ; 

Et  s'il  t'a,  par  pitié ,  permis  une  victoire, 

Ta  victoire  elle-même  a  travaillé  pour  lui.  1  00 


Princeps,  fugatos  undique  amplexus  reos. 
Idem  sibi  semper,  expandit  sinum 
Vobis  faventem.  Pectus  hnic  vestrum  date, 
Proceres,  regendum  :  causa  si  tanturn  dédit 
Audere  iniqua,  justa  quid  deinceps  dabit  ? 

1.  Nancy,  capitale  de  la  Lorraine,  se  rendit  le  24  septembre  i633 
à  l'armée  royale  qui  l'assiégeait,  et  Louis  XIII  y  fit  son  entrée  le 
lendemain . 

2.  Corbie,  ville  de  Picardie,  qui  avait  été  prise  par  les  Espagnols 
le  i5  août  i636,  fut  reprise  le  14  novembre  suivant. 


Corneille,  x 


i  j  4  POESIES   DIVERSES. 


HESDIN1. 


A.  peine  de  Hesdin  les  murs  sont  renversés , 

Que  sur  l'affreux  débris  des  bastions  forcés 

Tu  recois  le  bâton  de  la  main  de  ton  maître , 

Généreux  maréchal  :  c'est  de  quoi  nous  ravir, 

De  le  voir  aussi  prompt  à  te  bien  reconnoître  i  o  5 

Que  ta  haute  valeur  fut  prompte  à  le  servir. 


LA  PROTECTION  DE  PORTUGAL  ET  DE  CATALOGNE 


2 


Que  le  ciel  vous  fut  doux ,  lorsque  dans  votre  effroi 

Il  vous  sollicita  de  courir  à  mon  roi 

Pour  voir  contre  vos  murs  la  liberté  renaître 8  ! 

Le  succès  à  l'instant  suivit  votre  désir.  1 1  o 

Peuples ,  qui  recherchez  ou  protecteur  ou  maître , 

Par  cet  heureux  exemple  apprenez  à  choisir*. 

i.  Le  3o  juin  i63g,  Hesdin,  ville  de  l'Artois,  se  rendit  au  Roi,  qui 
donna  sur  la  brèche  le  bâton  de  maréchal  à  M.  de  la  Meilleraie. 

2.  En  1640  le  Portugal  secoua  le  joug  de  l'Espagne,  appela  au 
trône  Jean  de  Bragance,  qui  régna  sous  le  nom  de  Jean  IV,  et  fît 
alliance  avec  la  France.  Dans  le  même  temps  les  Catalans  se  révoltè- 
rent et  chassèrent  les  garnisons  espagnoles  ;  puis,  Tannée  suivante,  ils 
firent  un  traité  avec  Louis  XIII,  par  lequel  ils  déclarèrent  leur  pro- 
vince réunie  à  la  France,  sous  la  seule  condition  de  garder  ses  libertés. 

3.  Emicet  ut  vestris  libertas  ohvuta  mûris,  dit  le  latin.  —  Contre 
paraît  avoir  ici,  comme  souvent  alors,  le  sens  de  près  de ,  à  coté  de, 
comme  dans  ce  passage  de  la  Critique  de  l'École  des  femmes  de  Molière 
(scène  v)  :  «  Dorilas ,  contre  qui  j'étois ,  a  été  de  mon  avis.  »  Dans 
ce  cas  contre  vos  murs  équivaudrait  à  peu  près  à  sous  vos  murs,  au  pied 
de  vos  murs.  Granet  a  remplacé  contre  par  entre. 

4-  On  est  frappé  du  singulier  rapport  de  forme  que  ce  vers  pré- 
sente avec  le  dernier  du  Menteur  (tome  IV,  p.  a3())  : 

Par  un  si  rare  exemple  apprenez  à  mentir. 


POÉSIES    DIVERSES.  n5 


PERPIGNAN  * 


x  i5 


Illustre  boulevard  des  frontières  d'Espagne, 
Perpignan  ,  sa  plus  belle  et  dernière  campagne , 
Tout  mourant,  contre  toi  nous  le  voyons  s'armer: 
Tout  mourant,  il  te  force,  et  fait  dire  à  l'envie 
Qu'un  si  grand  conquérant  n'eût  jamais  pu  fermer 
Par  un  plus  digne  exploit  une  si  belle  vie. 

i,  Louis  XIII  alla  joindre  son  armée  au  camp  devant  Perpignan, 
mais  il  ne  resta  pas  jusqu'à  la  lin  du  sié^e.  La  place  capitula  le 
29  août  i642-  Le  Roi  mourut  moins  d'un  an  après,  le  14  mai  jfi43. 


n6  POÉSIES   DIVERSES. 


XXXIV 


LA.     POESIE    A.    LA    PEINTURE, 

EN    FAVEUR    DE    l' ACADEMIE    DES    PEINTRES    ILLUSTRES. 

Les  artistes  qui  formèrent  l'Académie  de  peinture  se  réunirent  pour 
la  première  fois  le  Ier  février  1648,  et  rédigèrent  alors  des  statuts  que 
le  Roi  autorisa  par  des  lettres  patentes  (voyez  Mémoires  inédits  sur  la 
vie  et  les  ouvrages  des  membres  de  P Académie  de  peinture,  1 854»  in -8°, 
tome  I,  p.  17).  Le  Brun  était  le  véritable  fondateur  de  cette  acadé- 
mie, et,  d'après  M.  Edouard  Fournier,  Corneille  n'a  écrit  les  vers 
qui  suivent  que  pour  remercier  le  peintre  du  portrait  qu'en  1647 
il  avait  fait  pour  le  poète  (  voyez  Corneille  à  la  butte  Saint-Rock, 
p.  lxxiii  et  lxxiv,  et  notre  Notice  biographique).  Cette  pièce  a  paru 
d'abord  dans  la  première  partie  des  Poésies  choisies,  publiée  en  i653 
par  Sercy;  elle  occupe  les  pages  235-238  du  volume.  Elle  se  trouve 

dans  le  tome  III  (p.  93-96)  du  Recueil  de  poésies  chrestiennes dédié 

à  Monseigneur  de  Conty  par  M.  de  la  Fontaine,  Paris,  le  Petit,  1 671;  enfin 
elle  a  été  recueillie  par  Granet  dans  les  OEuvres  diverses  (p.  182-186). 

Enfin  tu  m'as  suivie  ,  et  ces  vastes  montagnes 

Qui  du  Rhône  et  du  Pô  séparent  les  campagnes 

IN'ont  eu  remparts  si  forts  ni  si  haut  élevés  * 

Que  ton  vol,  chère  sœur,  après  moi  n'ait  bravés; 

Enfin  ce  vieux  témoin  de  toutes  nos  merveilles  ,  5 

Toujours  pour  toi  tout  d'yeux,  et  pour  moi  tout  d'oreilles, 

Le  Tibre  voit  la  Seine,  autrefois  son  appui, 

Partager  tes  trésors  et  les  miens  avec  lui  : 

Tu  me  rejoins  enfin ,  et  courant  sur  mes  traces, 


1.  Var.   N'ont  eu  remparts  si  forts  et  si  liaut  élevés. 

[Recueil.) 


POÉSIES    DIVERSES.  117 

En  cet  heureux  séjour  du  mérite  et  des  grâces,  1  0 

Tu  viens,  à  mon  exemple,  enrichir  ces  beaux  lieux 

De  tout  ce  que  ton  art  a  de  plus  précieux. 

Oh  !  qu'ils  te  fourniront  de  brillantes  matières  ! 

Que  d'illustres  objets  à  toutes  tes  lumières  ! 

Prépare  des  pinceaux ,  prépare  des  efforts  1  5 

Pour  toutes  les  beautés  de  l'esprit  et  du  corps, 

Pour  tous  les  dons  du  ciel,  pour  tous  les  avantages 

Que  la  nature  et  lui  sèment  sur  les  visages; 

Prépares-en  enfin  pour  toutes  les  vertus, 

Sous  qui  nous  puissions  voir  les  vices  abattus.  2  o 

Sans  te  gêner  l'idée  après  leur  caractère, 

Pour  les  bien  exprimer  tu  n'auras  qu'à  portraire  : 

La  France  en  est  féconde ,  et  tes  nobles  travaux 

En  trouveront  chez  elle  assez  d'originaux; 

Mais  n'en  prépare  point  pour  la  plus  signalée1,  2  5 

Qu'on  a  depuis  longtemps  de  la  cour  exilée , 

Pour  celle  qui  départ  le  solide  renom  : 

Hélas  !  j'en  ai  moi-même  oublié  jusqu'au  nom  , 

Tant  je  vois  rarement  mes  plus  fameux  ouvrages 

Pouvoir  s'enorgueillir  de  ses  moindres  suffrages.  3  < 

Ronsard,  qu'elle  flattoit  à  son  commencement , 

La  crut  avec  son  roi  couchée  au  monument; 

Il  en  perdit  l'haleine2,  et  sa  muse  malade 

En  laissa  de  ses  mains  tomber  la  Franciade 3 . 


1.  Voyez  les  derniers  vers  de  la  pièce. 

2.  Dans  l'édition  de  Lefèvre  :  «  Il  en  perdit  haleine.  » 

3.  Poëme  épique  dont  le  héros  est  Francus  ou  Francion,  fils 
d'Hector  et  d'Andromaque.  «.  Ronsard  l'entreprit  encore  jeune,  sous 
le  règne  de  Henri  II,  afin  qu'on  ne  pût  reprocher  à  la  France  de 
manquer  d'un  poëme  épique.  Charles  IX  le  soutint  vivement  dans 
cette  résolution;  mais  après  la  mort  de  ce  prince,  comme  l'état  des 
finances  ne  permettait  plus  les  gratifications,  le  poëme  en  souffrit 
beaucoup  et  demeura,  inachevé.  Il  devait  avoir  vingt- quatre  chants 
comme  l' Iliade ,  et  tel  qu'il  nous  reste,  il  n'en  a  que  quatre.  »  (Ta- 


n8  POESIES   DIVERSES. 

Maynard  Ta  chaque  jour  criée  à  haute  voix  :  3  5 

Il  n'est  porte  où  pour  elle  il  n'ait  frappé  cent  fois; 

Mais  sans  en  voir  l'image  en  aucun  lieu  gravée, 

Il  est  mort  la  cherchant,  et  ne  Ta  point  trouvée1. 

J'en  fais  souvent  reproche  à  ce  climat  heureux;      [reux  ; 

Je  m'eu  plains2  aux  plus  grands  comme  aux  plus  géné- 

Pour  trop  m'en  plaindre  en  vain  je  deviens  ridicule, 

Et  l'on  ne  m'entend  pas ,  ou  Ton  le  dissimule. 

Qu'aujourd'hui  la  valeur  sait  mal  se  secourir  ! 

Que  je  vois  de  grands  noms  en  danger  de  mourir  ! 

Que  de  gloire  à  l'oubli  malgré  le  ciel  se  livre  ,  4  5 

Quand  il  m'a  tant  donné  de  quoi  la  faire  vivre  ! 

Le  siècle  a  des  héros,  il  en  a  même  assez 

Pour  en  faire  rougir  tous  les  siècles  passés; 

Il  a  plus  d'un  César,  il  a  plus  d'un  Achille  ; 

Mais  il  n'a  qu'un  Mécène  ,  et  n'aura  qu'un  Virgile  3 :     5o 

Rare  exemple ,  et  trop  grand  pour  ne  pas  éclater, 

Rare  exemple,  et  si  grand  qu'on  n'ose  l'imiter4. 

bleau....  de  la  poésie  française  au   seizième  siècle....    par  M.  Sainte- 
Beuve,  tome  II,  p.  180.) 

1.  Ici  Corneille  semble  faire  allusion  au  quatrain  bien  connu  que 
Maynard  avait  placé  sur  la  porte  de  son  cabinet  : 

Las  d'espérer  et  de  me  plaindre 
Des  Muses,  des  grands  et  du  sort, 
C'est  ici  que  j'attends  la  mort, 
Sans  la  désirer  ni  la  craindre. 

"X.  Ainsi  dans  l'édition  originale  des  Poésies  choisies;  on  trouve 
dans  les  éditions  suivantes  et  dans  toutes  les  autres  réimpressions  : 
«  Je  me  plains,  »  qui  nous  paraît  beaucoup  moins  bon. 

3.  Le  Mécène  est  Mazarin,  qui,  comme  l'on  sait,  demanda  à  Mé- 
nage la  liste  des  savants  et  des  hommes  de  lettres  qui  méritaient  des 
encouragements.  Le  Virgile  est  sans  doute  Chapelain,  qui  terminait 
alors  son  épopée  de  la  Pucellet  à  laquelle  il  a,  dit- on,  travaillé  trente 
ans,  et  qui  parut  en  if»56. 

4.  Ainsi  dans  la  première  édition;  a  qu'on  ne  l'ose  imiter  %  dans 
toutes  les  autres. 


POÉSIES   DIVERSES.  119 

Cette  haute  vertu  va  toutefois  renaître  : 

A  quelques  traits  déjà  je  crois  la  reconnaître* . 

Chère  et  divine  sœur,  prépare  tes  crayons  :  5  5 

J'en  vois  de  temps  en  temps  briller  quelques  rayons; 

Les  Sophocles  nouveaux  dont  j'honore2  la  France 

En  ont  déjà  senti  quelque  douce  influence  ; 

Mais  ce  ne  sont  enfin  que  rayons  inconstants , 

Qui  vont  de  l'un  à  l'autre,  et  qui  n'ont  que  leur  temps; 

Et  ces  heureux  hasards  des  fruits  de  mon  étude 

Laissent  tout  l'avenir  dedans  l'incertitude. 

Tire 8  avec  ton  pouvoir  leur  éclat  vagabond  ; 

Fais-les  servir  d'ébauche  à  ton  savoir  profond  ; 

Et  mêlant  à  ces  traits  l'effort  de  ton  génie ,  6  5 

Fais  revoir  en  portrait  cette  illustre  bannie. 

Peins  bien  toute  sa  pompe  et  toutes  ses  beautés , 

Son  empire  absolu  dessus  les  volontés; 

Fais-lui  donner  du  lustre  aux  plus  brillantes  marques 

Dont  se  pare  le  chef  des  plus  dignes  monarques  ;  7  o 

Fais  partir  de  nos  mains  à  ses  commandements 

Tout  ce  que  nous  avons  d'éternels  monuments  ; 

Fais-lui  distribuer  la  plus  durable  gloire; 

Mets  l'histoire  à  ses  pieds,  et  toute  la  mémoire; 

Mets  en  ses  yeux  l'éclat  d'une  divinité  ;  7  5 

Mets  en  ses  mains  le  sceau  de  l'immortalité , 

Et  rappelle  si  bien  un  juste  amour  pour  elle, 

1.  Ce  mot  est  imprimé  ainsi,  par  un  a  [reconnaistre)>  dans  toutes 
les  éditions  anciennes.  En  iy38  Granet  a  mis  reconnaître,  et  a  été 
imité  par  tous  les  éditeurs  qui  depuis  ont  publié  cette  pièce. 

2.  Ainsi  dans  les  Poésies  choisies  de  Sercy,  On  lit  s'honore  dans  le 
Recueil  de  1671,  dans  les  Œuvres  diverses  rie  1788,  et  dans  toutes  les 
éditions  suivantes. 

3.  Tirer  est  ici  dans  le  sens  de  portraire,  figurer,  représenter;  on 
disait  :  «  tirer  une  personne,  une  figure,  etc.  :  »  voyez  ci-dessus,  p.  97, 
vers  40.  Cette  expression  ne  se  trouve  que  dans  la  première  édition 
des  Poésies  choisies;  dans  les  suivantes  on  a  remplacé  tire  par  fixe. 


i'2o  POESIES    DIVERSES. 

Quà  son  tour  en  ces  lieux  cet  amour  la  rappelle  , 

Et  que  les  cœurs ,  plongés  dans  le  ravissement , 

N'en  puissent  plus  souffrir  ce  long  bannissement.  80 

Mais  que  dis -je?  tu  vas  rappeler  cette  reine 

Avec  bien  plus  de  gloire,  et  beaucoup  moins  de  peine. 

Ce  que  je  n'ai  pu  faire  avec  toutes  mes  voix  , 

Quoique  j'aye  eu  pour  moi  jusqu'à  celle  des  rois, 

Quoique  toute  leur  cour,  de  mes  douceurs  charmée,     8  5 

Ait  par  delà  mes  vœux  enflé  ma  renommée, 

Un  coup  d'œil  le  va  faire  ,  et  ton  art  plus  charmant 

Pour  un  si  grand  effet  ne  veut  qu'un  seul  moment. 

Je  vois,  je  vois  déjà  dans  ton  académie, 

Par  de  royales  mains  en  ces  lieux  affermie ,  90 

Tes  Zeuxis  renaissants,  tes  Apelles  nouveaux, 

Étaler  à  l'envi  des  chefs-d'œuvre  s  si  beaux , 

Qu'un  violent  amour  pour  des  choses  si  rares 

Transforme  en  généreux  les  cœurs  les  plus  avares , 

Et  les  précipitant  à  d'inouïs  efforts,  9  5 

Fait  dérouiller  les  clefs  des  plus  secrets  trésors. 

Je  les  vois  effacer  ces  chefs-d'œuvres1  antiques, 

Dont  jadis  les  seuls  rois ,  les  seules  républiques , 

Les  seuls  peuples  entiers  pouvoient  faire  le  prix , 

Et  pour  qui  l'on  traitoit  les  talents  de  mépris 2;  1  00 

Je  vois  le  Potosi*  te  venir  rendre  hommage, 

1 .  Ce  mot  composé  est  écrit  chef -d'oeuvres  dans  les  éditions  impri- 
mées du  vivant  de  Corneille,  aussi  bien  au  vers  92  que  dans  celui-ci. 
Il  y  a  là,  pour  le  temps,  une  irrégularité  quant  au  premier  élément, 
mais  non  pas  quant  au  second  :  on  mettait  autrefois  au  pluriel  aussi 
bien  œuvres  que  chefs.  C'est  encore  l'orthographe  de  l'Académie  dans 
la  quatrième  édition  de  son  Dictionnaire  (1762). 

2.  C'est-à-dire  auprès  desquels  les  talents  d'or  et  d'argent  étaient 
considérés  comme  peu  de  chose,  comme  ne  pouvant  suffire  à  les 
payer.  Talent  est  pris  ici  dans  le  sens  antique,  et  désigne  un  poids, 
une  somme  d'or  ou  d'argent. 

3.  La  riche  mine  d'argent  de  l'ancien  Pérou. 


POESIES    DIVERSES.  121 

Je  vois  se  déborder  le  Pactole  et  le  Tage1, 

Je  les  vois  à  grands  flots  se  répandre  sur  toi. 

N'accusons  plus  le  siècle  :  enfin  je  la  revoi , 

Je  la  revois  enfin  cette  belle  inconnue ,  1  o  5 

Et  par  toi  rappelée ,  et  pour  toi  revenue. 

Oui,  désormais  le  siècle  a  tout  son  ornement, 

Puisqu'enfin  tu  lui  rends  en  cet  heureux  moment 

Cette  haute  vertu,  cette  illustre  bannie, 

Cette  source  de  gloire  en  torrents  infinie ,  110 

Cette  reine  des  cœurs ,  cette  divinité  : 

J'ai  retrouvé  son  nom ,  la  Libéralité. 

1.  Le  Tage  était  autrefois,  aussi  bien  que  le  Pactole,  fameux  par 
l'or  qu'on  trouvait  dans  son  sable. 

Quidquid  Tagus  expiait  auri , 

a  dit  Lucain  au  livre  VII  de  la  Pharsale,  vers  7 55. 


122  POESIES   DIVERSES. 


XXXV 

A    SAINT    BERNARD  , 

SUR    LA    TRADUCTION    DE    SES  EPITItES, 

Par  le  R.  P.  dom  Gabriel  de  Sainte-Geme. 

SONNET. 

Ce  sonnet,  signé  Corneille,  se  trouve  en  tête  d'un  volume  inti- 
tulé :  «  les  Lettres  de  sainct  Bernard,  premier  abbé  de  Clervaux,  doc- 
teur de  F  Eglise;  traduites  par  le  R.  P.  Dom  Gabriel  de  sainct  Malachie  ', 
Religieux  Fueillent  de  F  Ordre  de  Cisteaux.  Dédiées  à  Monseigneur  le 
Mareschal de  l'Hospital,  à  Paris,  chez  Gaspar  Meturas,  M.DC.XLIX, 
in-4°.  L'Achevé  d'imprimer  est  du  a3  août.  On  trouve  d'abord  dans 
ce  volume  neuf  feuillets  non  ehiffrés,  puis  huit  pages  numérotées,  et 
c'est  au  recto  du  premier  feuillet  d'une  nouvelle  série  non  chiffrée 
que  figure  le  sonnet  de  Corneille.  Il  est  réuni  ici  pour  la  première 
fois  aux  OEuvres  de  Corneille.  M.  Paul  Lacroix  l'a  inséré  dans  le 
n°  du  i5  août  i863  du  Bulletin  du  bouquiniste ,  d'après  une  copie  qui 
lui  a  été  adressée  de  Dôle  et  qui  ne  contenait  point  le  titre  de  la 
pièce.  Il  pensait  que  les  bibliothèques  publiques  de  Paris  ne  possé- 
daient point  l'ouvrage  de  dom  Gabriel  ;  nous  en  avons  trouvé,  à  la 
Bibliothèque  impériale ,  un  exemplaire  qui  porte  le  chiffre  d'inven- 
taire C2043. 

Du  cloître  et  de  la  cour  précieuse  clarté, 
Mais  du  cloître  sans  tache,  et  dune  cour  sans  crimes, 
Aussi  ferme  soutien  des  ordres  légitimes 
Qu'implacable  ennemi  de  la  fausse  équité; 

1.  L'auteur  de  ce  livre  est,  comme  on  l'a"  vu,  nommé  dom  Gabriel 
de  Sainte-Geme  par  ceux  qui  s'adressent  à  lui  ;  mais  il  se  nomme 
toujours  lui-même,  soit  sur  le  titre,  soit  en  signant  la  dédicace,  Gabriel 
de  Saint-Malachie,  qui  est  probablement  son  nom  de  religion. 


POESIES    DIVERSES.  \i\ 

Toi  qui  jusqu'à  nos  rois  portas  la  vérité  ,  5 

Qui  n'eus  dans  leurs  conseils  que  de  justes  maximes , 
Et  fis,  par  un  conseil  rentré  dans  les  abîmes1, 
Dans  les  raisons  d'Etat  régner  la  sainteté  : 

Aujourd'hui  que  la  France,  entendant  tes  oracles, 
Voit  tous  ses  cœurs  charmés  par  de  si  grands  miracles,  i  o 
Fais-en  suivre  l'exemple  à  toute  heure ,  en  tout  lieu  ; 

Et  rendant  à  nos  jours  ce  qu'aux  tiens  on  admire, 
Une  seconde  fois  accorde  en  cet  empire 
La  sagesse  du  monde  avec  celle  de  Dieu. 

i.  C'est-à-dire  par  un  conseil,  une  sagesse,  qui  a  disparu  de  ce 
monde,  qui  est  rentré  dans  les  saints  abîmes,  les  saintes  profondeurs 
d'où  il  était  sorti . 


124  POÉSIES    DIVERSES. 


xxxv  r 

A  MONSIEUR    D'ASSOUCY, 

SUR    SON  OI'IDE  EN  BELLE   HUMEUR. 

Ce  sonnet,  signé  Corneille,  a  été  publié  au  verso  du  troisième 
feuillet  de  r  Ovide  en  belle  humeur  de  Mr  d'Assoucy,,..  à  Paris ,  chez 
Charles  de  Sercy....  M.DC.L,  in-4°-  L'Achevé  d'imprimer  est  du 
«  2  5.  de  Février  i65o.  »  Ces  vers,  recueillis  par  M.  Edouard  Four- 
nier  dans  ses  Notes  sur  la  vie  de  Corneille  (p.  xci),  sont  ici  réunis  pour 
la  première  fois  aux  OEuvres  de  ce  poète.  A  l'époque  où  Corneille 
écrivait  ce  compliment,  d'Assoucy  venait  de  composer  la  musique 
d'Andromède.  Voyez  tome  V,  p.  252  et  2  53. 

Que  doit  penser  Ovide,  et  que  nous  peut-il  dire, 
Quand  tu  prends  tant  de  peine  à  le  défigurer, 
Que  ce  qu'il  écrivit  pour  se  faire  admirer, 
Grâces  à  d'Assoucy  sert  à  nous  faire  rire? 

Il  y  trouve  la  gloire  où  son  travail  aspire  ;  5 

Tu  ne  prends  tant  de  soins  que  pour  mieux  l'honorer  : 
De  tant  d'attraits  nouveaux  tu  le  viens  de  parer, 
Que  moins  il  se  ressemble,  et  plus  chacun  l'admire. 

Sa  plume  osa  beaucoup ,  et  plantes ,  animaux , 

Fleuves ,  hommes ,  rochers ,  éléments  et  métaux ,  1  o 

Par  elle  ont  vu  changer  leurs  êtres  et  leurs  causes. 

La  tienne ,  plus  hardie ,  a  plus  encore  osé , 
Puisque  le  grand  auteur  de  ces  métamorphoses 
Lui-même  enfin  par  elle  est  métamorphosé. 


POESIES    DIVERSES.  ia5 


SUR  LA  CONTESTATION    ENTRE    LE    SONNET    D  URANIE 

ET    DE    JOB. 


XXXVII 


SONNET. 


La  querelle  littéraire  qui  s'éleva  au  sujet  du  sonnet  d'Uranie  par 
Voiture  et  de  celui  de  Job  par  Benserade  commença  dans  les  pre- 
miers jours  de  l'hiver  de  1649  et  continua  jusqu'en  i65o.  Elle  a  donné 
lieu  à  un  grand  nombre  de  pièces,  qui  ont  été  recueillies  en  ifi53 
dans  la  première  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy,  où  les  trois 
morceaux  qui  suivent  ont  paru  avec  la  signature  de  Corneille  (p.  399- 
402)  '.  En  publiant  toute  cette  petite  polémique  poétique,  Sercy,  dans 
un  avis  intitulé  :  Le  Libraire  au  Lecteur  (p.  3y4),  annonce  que  s'il  n'a 
pas  imprimé  les  sonnets  mêmes  qui  font  l'objet  du  débat,  «  c'est  qu'ils 
sont  si  communs,  et  qu'ils  ont  été  mis  au  jour  en  tant  d'endroits, 
qu'il  n'y  a  personne  qui  ne  les  sache,  ou  ne  les  ait  vus.  »  Aujour- 
d'hui qu'on  ne  les  a  plus  sous  la  main,  nous  avons  juge  utile  de  les 
placer  dans  Y  Appendice.  Les  personnes  qui  voudront  connaître  tout 
le  détail  de  cette  contestation  peuvent  consulter,  outre  les  Poésies 
choisies  de  Sercy,  YHistoire  de  la  guerre  des  Uranins  et  des  Jobelins 
(tomel,  p.  116  et  suivantes  des  Mémoires  de  littérature  [par  Sal- 
lengre],  la  Haye,  171 5),  et  surtout  YHistoire  de  deux  sonnets,  par 
M.  Eugène  de  Beaurepaire  {Revue  de  Rouen,  20e  année,  p.  129  et 
suivantes).  Des  trois  petites  pièces  de  Corneille,  Sallengre  paraît 
n'avoir  connu  que  la  seconde  (notre  numéro  XXXVIII). 

Demeurez  en  repos ,  frondeurs  et  mazarins , 
Vous  ne  méritez  pas  de  partager  la  France  : 

1 .  On  trouve  aussi  une  copie  de  ces  trois  pièces  de  poésie  de  Cor- 
neille dans  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  impériale  (fonds  français, 
n°  12680);  dans  cette  copie  les  pièces  XXXVII  et  XXXIX  de  notre 
édition  sont  signées.  Corneille,  la  pièce  XXXVIII  est  anonyme. 


126  POÉSIES    DIVERSES. 

Laissez-en  tout  l'honneur  aux  partis  d'importance 
Qui  mettent  sur  les  rangs  de  *  plus  nobles  mutins. 

Nos  Uranins  ligués  contre  nos  Jobelins  5 

Portent  bien  au  combat  une  autre  véhémence  ; 
Et  s'il  doit  s'achever  de  même  qu'il  commence, 
Ce  sont  Guelfes  nouveaux ,  et  nouveaux  Gibelins. 

Vaine  démangeaison  de  la  guerre  civile , 

Qui  partagiez  naguère  et  la  cour  et  la  ville ,  i  o 

Et  dont  la  paix  éteint  les  cuisantes  ardeurs2, 

Que  vous  avez  de  peine  à  demeurer  oisive , 

Puisqu'au  même  moment  qu'on  voit  bas  les  frondeurs , 

Pour  deux  méchants  sonnets  on  demande1:  «  Qui  vive?  » 

i.  Des,  dans  la  copie  manuscrite  mentionnée  plus  haut  (p.  ia5, 
note  i). 

2.  L'accommodement  conclu  à  Rueil  le  n  mars  1649  avait  apaisé 
pour  un  temps  les  troubles  de  la  Fronde,  sans  qu'aucun  des  partis 
eût  satisfaction. 

3.  Vous  demandez,  dans  la  copie  manuscrite. 


POÉSIES    DIVERSES.  127 


XXXVIII 


SONNET. 


Ce  sonnet  est  anonyme  dans  la  copie  manuscrite  de  la  Biblio- 
thèque impériale  (voyez  p.  ia5,  note  i). 

Deux  sonnets  partagent  la  ville, 
Deux  sonnets  partagent  la  cour, 
Et  semblent  vouloir  à  leur  tour 
Rallumer  la  guerre  civile. 

Le  plus  sot  et  le  plus  habile  5 

En  mettent  leur  avis  au  jour, 
Et  ce  qu'on  a  pour  eux  d'amour 
A  plus  d'un  échauffe  la  bile. 

Chacun  en  parle  hautement , 

Suivant  son  petit  jugement;  i  o 

Et  s'il  y  faut  mêler  le  nôtre , 

L'un1  est  sans  doute  mieux  rêvé, 
Mieux  conduit ,  et  mieux  achevé  ; 
Mais  je  voudrois  avoir  fait  l'autre. 

I.  Celui  de  Voiture,  que  notre  poète  dans  l'épigramme  suivante 
nomme  «  un  auteur  plus  poli.  » 


iï8  POESIES   DIVERSES. 


XXXIX 


EPIGRAMME. 


Ami ,  veux-tu  savoir,  touchant  ces  deux  sonnets 

Qui  partagent  nos  cabinets , 

Ce  qu'on  peut  dire  avec  justice? 
L'un  nous  fait  voir  plus  d'art,  et  l'autre  un  feu  plus  vif*; 
L'un  est  le  mieux  peigné  ,  l'autre  est  le  plus  naïf;  5 

L'un  sent  un  long  effort ,  et  l'autre  un  prompt  caprice  ; 
Enfin  l'un  est  mieux  fait ,  et  l'autre  est2  plus  joli  ; 

Et  pour  te  dire  tout  en  somme, 

L'un  part  d'un  auteur  plus  poli, 

Et  l'autre  d'un  plus  galant  homme3.  10 

i .  Tel  est  le  texte  des  Poésies  choisies  et  de  la  copie  manuscrite  que 
nous  avons  plusieurs  fois  citée.  On  lit  :  et  Vautre  plus  de  vif,  dans  les 
OEuvres  diverses  publiées  par  Granet  et  dans  les  éditions  suivantes. 

i.  Le  mot  est  manque  dans  un  grand  nombre  d'éditions  récentes. 

3.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  Voiture,  que  l'opposition  de  ces  deux 
épithètes  eût  blessé  à  bon  droit,  éîait  mort  en  1648.  Benserade  vécut 
jusqu'en  1691. 


POESIES   DIVERSES.  ia< 


XL 


A    MADEMOISELLE    DE    COSNARD    DE    SES. 

La  pièce  de  vers  suivante  se  trouve  en  tête  de  la  pièce  intitulée 
les  Chastes  martirs,  Tragédie  chrestienne  par  Mademoiselle  Cosnard , 
à  Paris,  chez  Nicolas  et  lean  de  la  Coste,  au  mont  S.  Hilaire  à  PEscu 

de  Bretagne M.DC.L.,  avec  privilège  du  Roy.  L'ouvrage  dont  nous 

venons  de  reproduire  le  titre  forme  un  volume  in~4°  de  cinq  feuillets 
non  chiffrés  et  de  quatre-vingt-quinze  pages.  Le  premier  feuillet  est 
occupé  par  le  titre  ;  le  second  contient  la  dédicace,  adressée  à  la 
Reine  régente  et  signée  :  Marthe  Cosnard  de  Ses  ;  le  troisième  feuillet 
présente  au  recto  les  vers  de  Corneille  qu'on  va  lire,  et,  au  verso, 
un  compliment  adressé  par  M.  de  Saint-Nicolas,  maître  des  eaux  et 
forêts  à  Vire,  à  Mlle  Cosnard;  il  se  termine  ainsi  : 

Votre  art  qui  va  jusqu'à  l'excès 
Mérite  bien  qu'on  vous  appelle 
Quelque  jour  la  vierge  de  Sais, 
Puisqu'Orléans  a  sa  pucelle. 

Les  feuillets  4  et  5  renferment  l'avis  au  Lecteur  et  les  noms  des 
personnages.  Il  s'en  faut  néanmoins  que  les  exemplaires  de  cette 
tragédie  se  rencontrent  d'ordinaire  dans  l'état  que  nous  venons  d'in- 
diquer. Tous  ceux  que  nous  avons  vus  à  Paris,  dans  les  bibliothèques 
publiques  et  dans  les  ventes,  ne  contiennent  ni  le  second  ni  le  troi- 
sième feuillet,  occupés  par  la  dédicace  et  les  vers.  Je  savais  que  ces 
curieuses  particularités  se  trouvaient  dans  l'exemplaire  qui  figure  au 
Catalogue  de  M.  de  Soleinne  sous  le  n°  1249,  mais  j'ignorais  ce  que 
cet  exemplaire  était  devenu.  M.  Albert  de  la  Fizelière,  rédacteur  en 
chef  de  F  Union  des  Arts,  a  eu  l'obligeance  de  me  le  signaler.  Il  fait 
aujourd'hui  partie  de  la  précieuse  bibliothèque  de  M.  Léon  de  la 
Sicotière,  avocat  d'Alençon,  qui  a  bien  voulu  nous  en  envoyer  une 
description  très-complète,  avec  une  copie  fort  exacte  des  vers  de  Cor- 
neille. —  Si  nous  cherchons  quels  sont  les  motifs  qui  ont  pu  amener 
notre  poète  à  adresser  ces  vers  à  Mlle  Cosnard,  nous  sommes  obligé, 

Corneille,  x  9 


i*o  POÉSIES  DIVERSES. 

en  l'absence  de  tout  renseignement  biographique,  de  faire  simplement 
observer  que  Mlle  Cosnard  était  de  Sées,  qu'elle  recevait  les  compli- 
ments d'un  maître  des  eaux  et  forêts  de  Vire,  et  qu'elle  imitait  dans 
sa  pièce  Agathonphlle,  roman  de  Jean-Pierre  Camus,  ancien  évêque 
de  Belley,  retiré  alors  à  l'abbaye  d'Aunay,  près  de  Caen,  où  il  exer- 
çait les  fonctions  de  vicaire  général  du  diocèse  de  Rouen.  C'est,  ce 
nous  semble,  plus  qu'il  n'en  faut  pour  expliquer  un  peu  l'intérêt  que 
son  ouvrage  inspirait  à  Corneille. 

Que  tes  Chastes  martyrs  vont  te  faire  d'amants , 

Que  parmi  leurs  travaux  tu  sèmes  d'ornements, 

Et  que  ton  coup  d'essai ,  si  digne  de  mémoire , 

Doit  enhardir  ta  plume  à  redoubler  ta  gloire  ! 

Poursuis ,  divin  esprit ,  continue  à  charmer,  5 

Entretiens  ce  beau  feu  que  tu  viens  d'allumer; 

Bientôt  à  cet  effort  fais  succéder  un  autre 

Qui  couronne  ton  sexe ,  et  fasse  honte  au  nôtre  : 

Des  Muses  nous  prenons  le  génie  et  la  loi , 

Qui  ne  sont  après  tout  que  fdles  comme  toi .  i  o 

Je  te  dis  de  leur  part  que  dessus  le  Parnasse , 

Au  milieu  de  leur  chœur  *  elles  te  gardent  place , 

Et  que  tes  premiers  vers  ont  assez  de  douceur, 

Pour  faire  la  dixième  entr  2  ces  doctes  sœurs. 

Moi-même  pour  me  faire  admirer  sur  la  scène,  i  5 

Je  te  voudrai  pour  guide  au  lieu  de  Melpomèiie  ; 

Et  chacun  après  moi,  pour  boire  en  leur  vallon, 

Préférera  ton  aide  au  secours  d'Apollon. 

Ne  te  lasse  donc  point  d'enfanter  des  merveilles , 

De  prêter  ton  exemple  à  conduire  nos  veilles ,  2  o 

Et  d'aplanir  à  ceux  qui  l'auront  imité 

Les  illustres  chemins  à  l'immortalité. 

1 .   L'édition  originale  porte  cœur. 


POESIES    DIVERSES.  i3i 


XL! 


A    MONSIEUR    DE    LOY ,    PROFESSEUR    EJN    L  UNIVERSITÉ 

DE    PARIS, 

SUR  SON  PANÉGYRIQUE  DE  MONSEIGNEUR  LE  PREMIER  PRESIDENT 
DE  BELLIEVRE. 

Le  panégyrique  de  Pompone  de  Bellièvre,  dont  il  est  question  ici, 
a  été  composé  à  l'occasion  de  son  entrée  en  fonctions  comme  premier 
président,  en  remplacement  de  Mathieu  Mole,  le  22  août  i653.  Un 
exemplaire  de  cet  ouvrage  est  conservé  à  la  Bibliothèque  impériale 
sous  la  marque  Ln27i470.  11  a  pour  titre  :  Illustrissimo  viro  Pomponio 
de  Bellièvre,  régi  a  consiliis  et  primo  in  principe  Galliarum  oenatu  prœsidi 
inaugurato,  Panegyricus  in  colleg.  marchiano  Parisiensis  Academix  dic- 
tus.  Parisiis,apud  Dionysium  Langlaeum,  M.DC.LIII.  Il  se  compose 
de  32  pages  in-4°  A  la  suite  viennent  deux  feuillets  non  chiffrés,  con- 
tenant des  compliments  en  vers.  Le  suivant ,  signé  De  Corneille 
occupe  le  verso  du  premier  de  ces  feuillets.  M.  P.  Lacroix,  qui  a  der- 
nièrement attiré  l'attention  sur  ces  vers1,  avait  rencontré  ces  deux 
feuillets  isolés,  et  n'avait  pas  indiqué  l'ouvrage  auquel  ils  se  rattachent. 

Pourquoi  s'étonner  que  de  Loy 
Réussisse  avec  avantage , 
Traçant  en  ce  divin  ouvrage 
L'appui  de  notre  jeune  roi  ? 

Dans  cette  vivante  peinture ,  5 

L'art  le  dispute  à  la  nature , 
La  copie  à  l'original  ; 
Mais  l'ayant  prise  sur  son  àme, 
Où  il2  étoit  gravé  d'un  burin  tout  de  flamme, 

Il  n'y  pouvoit  réussir  mal,  1  o 

1.  Bulletin  du  bouquiniste  du  Ier  septembre  i863,  p.  5oi  et  5o2. 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  81,  note  2. 


i3a  POÉSIES    DIVERSES. 


XLII 


POUR     MONSIEUR    DASSOUCY, 

SUR    SES    AIRS. 

Ces  sept  vers,  signés  Corneille,  occupent  le  recto  du  troisième 
feuillet  d'un  recueil ,  inconnu  jusqu'ici ,  intitulé  :  Airs  à  quatre  par- 
ties du  Sieur  Dassoucy,  à  Paris,  par  Robert  Ballard,  seul  Imprimeur 
du  Roy  pour  la  Musique.  Auec  Priuilege  de  Sa  Maiesté,  i653,  in-8° 
oblong.  Ce  recueil,  tel  qu'il  se  trouve  à  la  Bibliothèque  impériale, 
n'est  pas  complet  :  il  ne  contient  qu'une  seule  des  quatre  parties,  la 
«  taille.  »  Le  privilège  mentionné  sur  le  titre  n'est  autre  chose  qu'un 
extrait  du  privilège  général  accordé  pour  la  musique  à  Ballard,  le 
24  octobre  i63o,,  et  il  n'est  pas  accompagné  d'un  achevé  d'imprimer 
indiquant  la  date  précise  du  volume.  Nous  sommes  redevables  à 
M.  Ravenel,  conservateur  sous-directeur  de  la  Bibliothèque  impériale, 
de  cette  petite  pièce  de  Corneille,  qui  jusqu'ici  n'avait  été  signalée 
par  personne.  Trois  ans  plus  tôt  notre  poète  avait  ^dressé  pour  l'Ovide 
en  belle  humeur  un  sonnet  à  Dassoucy  ' ,  qui ,  à  cette  époque,  avait 
déjà  fait  la  musique  d' Andromède  (voyez  tome  V,  p.  25  2  et  253). 

Cet  auteur  a  quelque  génie , 

Ses  airs  me  semblent  assez  doux. 

Beaux  esprits ,  mais  un  peu  jaloux , 

Divins  enfants  de  l'harmonie, 

Ne  vous  en  mettez  en  courroux  :  5 

Apollon  aussi  bien  que  vous 

Ne  les  peut  ouïr  sans  envie. 

1.  Voyez  ci-dessus,  p.  124. 


POESIES    DIVERSES.  i33 


XLIII 


EPITAPHE 

SUR    LA    MORT    DE    DAMOISELLE    ELISABETH    RANQUET, 

Femme   de  Nicolas  du    Chevreul ,    écuyer,   sieur  d'Esturville. 

SONNET. 

Elisabeth  Ranquet,  née  à  Paris  le  23  juin  1618,  et  inhumée  le 
7  avril  i654  dans  l'église  de  Briquebec,  s'est  fait  connaître  par  sa  vertu 
et  sa  piété.  Sa  mère  se  nommait  Marguerite  Loret,  et  l'on  pourrait 
supposer  qu'elle  était  parente  à  quelque  degré  de  l'auteur  de  la  Muse 
historique,  et  que  ce  fut  par  lui  que  Corneille  la  connut  et  fut  porté  à 
écrire  son  épitaphe;  mais  il  n'est  pas  besoin  de  recourir  à  cette  in- 
terprétation, car  nous  lisons  dans  la  Vie  de  Demoiselle  Elisabeth  Ran- 
quet, à  Paris,  chez  Charles  Savreux ,  M.DC.LV,  in-12  :  «  Madame 
de  Mercœur....  aimoit  singulièrement  cette  famille;...  elle  désira 
que  son  petit-fils  Monseigneur  de  Mercœur,  et  sa  petite-fille  Made- 
moiselle de  Vandosme  donnassent  le  nom  à  notre  sainte.  »  On  doit 
penser  que  ce  fut  sur  l'invitation  de  ces  illustres  protecteurs  de  notre 
poète  que  la  pièce  qu'on  va  lire  fut  composée.  Elle  parut  d'abord , 
signée  Corneille,  au  verso  du  quatrième  feuillet  de  la  biographie  que 
nous  venons  de  citer  et  dont  l'Achevé  d'imprimer  est  du  10  mai  i655  ; 
elle  fut  ensuite  réimprimée  en  tête  de  quelques  exemplaires  à'OEdipe 
(voyez  tome  VI,  p.  1 10),  et  reparut  enfin  en  1660,  à  la  page  10  de  la 
seconde  édition  de  la  Vie  de  damoiselle  Ranquet.  Dans  la  première,  le 
titre,  interverti,  est  ainsi  rédigé  :  Sur  la  mort  de  Damoiselle  Elisabeth 
Ranquet —  Epitaphe.  Le  mot  sonnet  n'y  figure  pas. 

Ne  verse  point  de  pleurs  sur  cette  sépulture, 
Passant  :  ce  lit  funèbre  est  un  lit  précieux, 
Où  gît  d'un  corps  tout  pur  la  cendre  toute  pure; 
Mais  le  zèle  du  cœur  vit  encore  en  ces  lieux. 


i*4  POESIES   DIVERSES. 

Avant  que  de  payer  le  droit  à  la  nature,  5 

Son  âme ,  s'élevant  au  delà  de  ses  yeux  * , 

Avoit  au  Créateur  uni  la  créature; 

Et  marchant  sur  la  terre  elle  étoit  dans  les  cieux. 

Les  pauvres  bien  mieux  quelle  ont  senti  sa  richesse  : 
L'humilité,  la  peine  étoient2  son  allégresse;  10 

Et  son  dernier  soupir  fut  un  soupir  d'amour. 

Passant,  qu'à  son  exemple  un  beau  feu  te  transporte, 

Et  loin  de  la  pleurer  d'avoir  perdu  le  jour, 

Crois  qu'on  ne  meurt  jamais  quand  on  meurt  de  la  sorte. 

t.  Var.  Son  âme,  s'élevant  au-dessus  de  ses  yeux.  (i655) 
i.  On  lit  étoit  dans  l'édition  de  i655. 


POESIES   DIVERSES.  ,35 


XLIV 


SONNET. 


[Au  Roi,  pour  obtenir  la  confirmation  des  lettres  de  noblesse 
accordées  à  son  père.] 

Ce  sonnet,  découvert  par  M.  Ludovic  Lalanne  à  la  bibliothèque 
de  l'Institut,  a  été  adressé  à  Louis  XIV  par  Corneille,  pour  obtenir 
la  confirmation  des  lettres  de  noblesse  accordées  en  1637  a  son  père 
par  le  roi  Louis  XIII  après  le  succès  du  Cid.  Cette  requête  paraît 
avoir  été  composée  en  1667,  à  l'occasion  de  la  Déclaration  du  Boy, 
du  trentième  Décembre  i656,  pour  la  recherche  des  Usurpateurs  de  No- 
blesse. Des  déclarations  semblables  furent  rendues  en  février  1661,  en 
juin  1664  ;  puis  en  septembre  1664  un  édit  «  portant  révocation  des 
lettres  de  noblesse  accordées  depuis  le  Ier  janvier  i634-  t>  Cet  édit, 
daté  de  Vincennes,  contient  la  restriction  suivante  :  «  Nous  réser- 
vant toutefois  de  confirmer  ceux  qui  pour  services  signalés  dans  nos 
armées ,  et  autres  emplois  importants ,  ont  obtenu  ledit  titre  de  no- 
blesse. »  Voyez  ci-dessus  la  Notice  des  Poésies  diverses,  p.  1 5  et  16, 
et  au  tome  I  la  Notice  biographique  sur  Corneille. 

La  noblesse,  grand  Roi,  manquoit  à  ma  naissance; 
Ton  père  en  a  daigné  gratifier  mes  vers , 
Et  mes  vers  anoblis  ont  couru  l'univers 
Avecque  plus  de  pompe  et  de  magnificence. 

Ce  fut  là,  de  son  temps,  toute  leur  récompense,  5 

Dont  même  il  honora  tant  de  sujets  divers, 
Que  sur  ce  long  abus  tes  yeux  enfin  ouverts 
De  ce  mélange  impur  ont  su  purger  la  France. 

Par  cet  illustre  soin  mes  vers  déshonorés 


■  36  POÉSIES    DIVERSES. 

Perdront  ce  noble  orgueil  dont  tu  les  vois  parés,  i  o 

Si  dans  mon  premier  rang  ton  ordre  me  ravale. 

Grand  Roi,  ne  souffre  pas  qu'il  ait  tout  son  effet, 
Et  qu'aujourd'hui  ta  main ,  pour  moi  si  libérale, 
Reprenne  le  seul  don  que  ton  père  m'a  fait. 


POESIES   DIVERSES.  i°>7 


XLV 


A  MONSIEUR    DE    CAMPION , 

SUR  LES  HOMMES  ILLUSTRES. 
SONNET. 

Ce  sonnet  se  lit,  signé  Corneille,  au  recto  du  treizième  feuillet 
du  volume  intitulé  :  les  Hommes  illustres  de  Mr  de  Campion ,  tome 
premier,  première  partie,  imprimé  à  Rouen  par  L.  Maurry  pour  Au- 
gustin Courbé,  Marchand  Libraire  au  Palais,  à  Paris....  M.DC.LVII, 
in-4°-  Le  privilège  a  été  donné  «  à  Paris  le  neufîéme  jour  de  Dé- 
cembre, l'an  de  grâce  mil  six  cens  cinquante-six.  »  On  lit  à  la  suite  : 
«  Acheué  d'imprimer  pour  la  première  fois  à  Rouen  par  L.  Maurry, 
le  quinzième  iour  de  Ianuier  1657.  »  L'ouvrage  en  tète  duquel  figu- 
rent ces  vers  n'a  pas  été  achevé;  mais  Campion  a  publié  encore 
en  i65y  un  volume  in-12  anonyme  intitulé:  Recueil  de  lettres  qui 
peuvent  seruir  à.  l'histoire  et  diuerses  poésies,  à  Rouen,  aux  dépens 
de  l'autheur,  par  Laurens  Maurry....  M.DC.LVII;  on  y  lit,  à  la 
page  266,  la  pièce  suivante  : 

Pour  Monsieur  de  Corneille. 

SONNET. 

L'on  peut  dire,  sans  avoir  tort, 
Que  Corneille  est  incomparable  : 
Tout  ce  qu'il  fait  est  admirable, 
Chacun  en  demeure  d'accord. 

La  savante  reine  du  Nord, 
De  qui  l'esprit  est  adorable, 
Faisant  un  jugement  semblable, 
Le  soutient  et  l'estime  fort. 

L'antiquité,  que  l'on  nous  vante, 


i38  POÉSIES   DIVERSES. 

N'eut  point  de  plume  si  charmante 
Ni  d'auteur  qui  pût  l'égaler  : 

Nos  nouveaux  ne  paroissent  guère, 
Et  sitôt  qu'il  a  su  parler, 
Ils  ont  tous  appris  à  se  taire. 

Il  est  probable  que  ces  vers ,  assez  intéressants  en  ce  qu'ils  consta- 
tent la  bienveillance  de  Christine  à  l'égard  de  Corneille,  furent 
écrits  avant  ceux  qu'on  va  lire,  et  que  notre  poëte  crut  devoir  rendre 
à  Campion  compliment  pour  compliment  et  sonnet  pour  sonnet. 
Bien  que  celui  de  Corneille  ait  été  publié  en  1808  dans  le  Magasin 
encyclopédique  (tome  IV,  p.  100),  en  i843,  par  M.  Léon  de  Du- 
ranville,  dans  la  Revue  de  Rouen  (premier  semestre,  cahier  d'avril, 
p.  222),  et  le  22  juin  1846  dans  F  Impartial  de  Rouen,  il  a  été  réuni 
pour  la  première  fois  aux  OEuvres  complètes  dans  l'édition  de  Le- 
fèvre,  terminée  en  i855  (tome  XII,  p.  59),  où  il  porte  à  tort  la  date 
de  1647.  —  Alexandre  de  Campion,  poëte  et  diplomate,  né  à  Rouen 
en  16 10,  mourut  vers  1670.  Voyez  sur  lui  le  Manuel  du  bibliographe 
normand,  par  Ed.  Frère,  tome  I,  p.  173  et  174. 

Invincible  ennemi  des  rigueurs  *  de  la  Parque , 
Qui  fais,  quand  tu  le  veux,  revivre  les  héros, 
Et  de  qui  les  écrits  sont  d'illustres  dépôts 
Où  luit  de  leur  vertu  la  plus  brillante  marque, 

Notre  France  aux  chrétiens  donne  en  toi  leur  Plutarque,  5 
Et  les  nobles  emplois  de  ton  savant  repos , 
Traçant  leurs  grands  portraits,  offrent  à  tous  propos 
De  fidèles  miroirs  aux  soins  d'un  vrai  monarque. 

J'ai  quelque  art  d'arracher  les  grands  noms  du  tombeau, 
De  leur  rendre  un  destin  plus  durable  et  plus  beau,  1  o 
De  faire  qu'après  moi  l'avenir  s'en  souvienne  ; 

1.  On  lit  erreurs,  mais  à  tort,  dans  l'édition  de  Lefèvre. 


POÉSIES    DIVERSES.  i39 

Le  mien  *  semble  avoir  droit  à  l'immortalité  ; 
Mais  ma  gloire  est  autant  au-dessous  de  la  tienne, 
Que  la  fable  en  effet  cède  à  la  vérité. 

i .  Mon  nom ,  dans  l'édition  de  Lefèvre  ;  mais  rien  n'autorise  une 
pareille  leçon.  Voyez  l' Avertissement  de  notre  tome  I,  p.  11. 


140  POÉSIES   DIVERSES. 


XLVI 


SONNET    PERDU    AU    JEU. 

Une  lettre  de  Corneille  à  l'abbé  de  Pure,  écrite  de  Rouen  le  9  juil- 
let i658,  et  qu'on  trouvera  plus  loin,  nous  donne  la  date  exacte  de  ces 
vers  ;  nous  y  lisons  en  post-scriptum  :  «  Monsieur,  je  vous  envoie  un 
méchant  sonnet  que  je  perdis  hier  au  jeu  contre  une  femme  dont  le 
visage  et  la  voix  valent  bien  quelque  chose.  C'est  une  bagatelle  que 
j'ai  brouillée  ce  matin.  Vous  en  aurez  la  première  copie.  Il  y  a  un 
peu  de  vanité  d'auteur  dans  les  six  derniers  vers.  »  Ce  sonnet  a  paru 
pour  la  première  fois  à  la  page  91  des  Poésies  choisies....  publiées  par 
Sercy,  cinquième  partie,  1660. 

Je  chéris  ma  défaite,  et  mon  destin  m'est  doux, 
Beauté,  charme  puissant  des  yeux  et  des  oreilles  ; 
Et  je  n'ai  point  regret  qu'une  heure  auprès  de  vous 
Me  coûte  en  votre  absence  et  des  soins  et  des  veilles. 

Se  voir  ainsi  vaincu  par  vos  rares  merveilles,  5 

C'est  un  malheur  commode  à  faire  cent  jaloux  ; 

Et  le  cœur  ne  soupire,  en  des  pertes  pareilles, 

Que  pour  baiser  la  main  qui  fait  de  si  grands  coups  * . 

Recevez  de  la  mienne,  après  votre  victoire, 
Ce  que  pourroit  un  roi  tenir  à  quelque  gloire ,  1  o 

Ce  que  les  plus  beaux  yeux  n'ont  jamais  dédaigné. 
Je  vous  en  rends,  Iris,  un  juste  et  prompt  hommage. 

Hélas  !  contentez-vous  de  me  l'avoir  gagné, 
Sans  me  dérober  davantage. 

1,  Des  si  grands  coups,  dans  l'édition  de  Granet. 


POÉSIES    DIVERSES.  141 


XLVH 

SUR    LE    DÉPART    DE    MADAME    LA    MARQUISE 
DE    B.    A.    T. 

«  Cette  pièce,  dit  Granet  (OEuvres  diverses,  p.  194)»  avoit  déjà  paru 
en  feuille  volante,  in-4%  mais  sans  date  d'année.  »  Nous  ne  l'avons 
pas  trouvée  en  cet  état,  mais  nous  la  rencontrons,  sous  ce  titre  :  Sur 
le  départ  de  Mademoiselle  la  marquise  de  C.  A.  B,,  aux  pages  47  et  48 
d'un  Petit  Recueil  de  poésies  choisies  non  encore  Imprimées ,  à  Amsterdam, 
M.DC.LXj  petit  in-8°.  Par  malheur,  l'exemplaire  de  la  bibliothèque 
de  l'Arsenal  (n°  7312  Belles-Lettres),  le  seul  de  ce  Recueil  que  nous 
connaissions,  saute  de  la  page  48,  qui  s'arrête  au  vers  32  et  à  la  ré- 
clame Ce  cœur,  à  la  page  Sy,  bien  que  d'ailleurs  il  n'y  ait  point  d'in- 
terruption dans  les  signatures  typographiques.  Nous  avons  trouvé  la 
pièce  entière,  sous  le  titre  que  nous  lui  donnons  ici,  à  la  page  79  de 
la  cinquième  partie  des  Poésies  choisies  publiée  par  Sercy  en  1660. 
Elle  se  lit  également  dans  le  recueil  manuscrit  de  Conrart  (tome  IX, 
p.  911),  où  elle  est  intitulée  :  Sur  le  départ  d'Iris.  Ce  poème  est  signé  : 
Cobneille  l'aisné.  Conrart  a  écrit  en  marge  la  note  suivante,  qui 
nous  en  donne  la  date  et  nous  fait  connaître  à  qui  il  était  adressé  : 
«  i658.  C'est  une  jeune  comédienne  fort  belle,  nommée  la  Du- 
parc,  autrement  la  Marquise.  »  Enfin  une  copie  ancienne  ,  fort  dé- 
fectueuse ,  mais  qui  fournit  un  certain  nombre  de  variantes  que  nous 
indiquons  en  note,  est  contenue  dans  le  portefeuille  217  des  ma- 
nuscrits des  Godefroy  conservés  à  la  bibliothèque  de  l'Institut.  Elle 
est  intitulée  :  Sur  le  départ  de  Mademoiselle  du  Parc ,  par  le  Sr  Cor- 
neille. On  a  beaucoup  disserté  sur  le  surnom  de  Marquise  donné  à 
la  du  Parc.  Une  découverte  récente,  faite  par  M.  Brouchoud,  avocat 
à  la  Cour  impériale  de  Lyon,  et  qui  m'a  été  obligeamment  commu- 
niquée par  M.  Soulié,  futur  éditeur  de  Molière,  établit  que,  dès  i653, 
ce  surnom  appartenait  assez  officiellement  à  la  du  Parc  pour  qu'elle 
le  prît  en  signant  son  acte  de  mariage  ;  en  effet,  cet  acte,  que  M.  Soulié 
publiera  sans  doute  dans  son  entier,  constate  que  «  Monsieur  René 
de  Berthelot  et  damoiselle  de  Gorla  »  ont  reçu  la  bénédiction  nup- 


i4a  POÉSIES   DIVERSES. 

tiale  en  l'église  Sainte-Croix  le  î3  février  i653,  et  il  est  signé  :  Mar- 
quise de  Gorla,  et  :  René  Berthelot,  dit  du  Parc.  Dans  l'acte  de 
décès  de  la  célèbre  comédienne,  qui  nous  a  été  communiqué  par 
M.  P.  Mesnard,  l'éditeur  de  Racine  dans  notre  collection,  le  mot  Mar- 
quise figure  comme  une  sorte  de  prénom  :  la  défunte  y  est  appelée 
«  Marquise  Thérèse  de  Gorle,  veuve  de  l'acteur  du  Parc,  âgée  d'en- 
viron trente-cinq  ans.  »  La  du  Parc  appartenait,  ainsi  que  son  mari, 
à  la  troupe  de  Molière,  qui  vint  s'établir  à  Rouen  vers  les  fêtes  de 
Pâques  de  i658;  elle  jouait  également  bien  les  deux  genres,  dansait 
à  ravir,  et  se  faisait  surtout  remarquer  par  sa  noblesse  et  sa  distinc- 
tion. Robinet  nous  dit  que 

Chacun  étoit  enchanté 

Alors  qu'avec  un  port  de  reine 
Elle  paroissoit  sur  la  scène. 

Ce  fut  au  mois  d'octobre  que  la  troupe  de  Molière ,  et  la  du  Parc 
avec  elle,  quitta  Rouen,  pour  venir  s'établir  à  Paris,  et  ce  départ  nous 
donne  la  date  précise  de  l'élégie  de  Corneille.  A  peine  arrivée  à 
Paris,  la  troupe  de  Molière  représenta  le  24,  au  Louvre,  Nicomèd'e 
devant  le  Roi.  Il  est  probable  que  la  du  Parc,  si  célèbre  par  sa 
beauté,  joua  un  rôle  dans  la  pièce,  car  Lagrange  fait  remarquer 
qu'a  on  fut  surtout  fort  satisfait  de  l'agrément  et  du  jeu  des  femmes  » 
(tome  V,  p.  498)  Nous  verrons  bientôt  Corneille  lui  adresser  un 
madrigal  à  l'occasion  d'un  rôle  heureusement  rempli  par  elle  dans 
une  pièce  de  Gilbert  (voyez  ci-après,  p.  i54).  Mais  lorsque  Racine 
eut  enlevé  en  1667  la  du  Parc  à  la  troupe  du  Palais-Royal,  pour  lui 
faire  représenter  Andromaque  à  l'Hôtel  de  Bourgogne,  il  est  probable 
que  Corneille  partagea  le  mécontentement  de  Molière;  et  quand, 
dans  sa  lettre  en  vers  du  i5  décembre  1668,  Robinet  nous  montre 
au  convoi  de  la  jeune  actrice 

....  Les  poètes  de  thêâtr 
Dont  l'un,  le  plus  intéressé, 
Étoit  à  demi  trépassé..., 

il  est  bien   probable  qu'il  veut  parler  de  Racine,  et  il  parait  foi 
douteux  que  Corneille  ait  assisté  à  cette  triste  cérémonie. 

Allez,  belle  Marquise,  allez  en  d'autres  lieux  ' 

1.  Var.  Allez,  charmante  Iris,  allez  en  d'autres  lieux. 

{Manuscrits  de  Conrart.) 


POÉSIES    DIVERSES.  143 

Semer  les  doux  périls  qui  naissent  de  vos  yeux  *. 

Vous  trouverez  partout  les  âmes  toutes  prêtes 

A  recevoir  vos  lois  et  grossir  vos  conquêtes2, 

Et  les  cœurs  à  l'envi  se  jetant  dans  vos  fers  5 

Ne  feront  point  de  vœux  qui  ne  vous  soient  offerts* , 

Mais  ne  pensez  pas  tant  aux  glorieuses  peines* 

De  ces  nouveaux  captifs  qui  vont  prendre  vos  chaînes, 

Que  vous  teniez  vos  soins  tout  à  fait  dispensés 

De  faire  un  peu  de  grâce  à  ceux  que  vous  laissez.  1  o 

Apprenez  à  leur  noble  et  chère  servitude 

L'art  de  vivre  sans  vous  et  sans  inquiétude; 

Et  si  sans  faire  un  crime  on  peut  vous  en  prier, 

Marquise,  apprenez-moi  l'art  de  vous  oublier. 

En  vain  de  tout  mon  cœur  la  triste  prévoyance  1  5 

A  voulu  faire  essai  des  maux  de  votre  absence6  : 
Quand  j'ai  cru  le  soustraire  à  des  yeux  si  charmants, 
Je  l'ai  livré  moi-même  à  de  nouveaux  tourments. 
Il  a  fait  quelques  jours  le  mutin  et  le  brave, 
Mais  il  revient  à  vous,  et  revient  plus  esclave,  20 

Et  reporte  à  vos  pieds  le  tyrannique  effet 
De  ce  tourment  nouveau  que  lui-même  il  s'est  fait'. 

1.  Var.  Semer  les  doux  plaisirs  qui  naissent  de  vos  yeux. 

Vous  trouverez  partout  des  âmes  toutes  prêtes. 

[Manuscrits  des  Godefroy .) 

2.  Var.  A  recevoir  vos  lois,  à  grossir  vos  conquêtes. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

3.  Var.  Les  cœurs  iront  en  foule  au-devant  de  vos  fers  ; 

Et  s'ils  font  quelques  vœux,  ils  vous  seront  offerts. 

(Manuscrits  de  Conrart,  des  Godefroy,  et  Petit  Recueil.) 

4.  Var.  Mais  ne  songez  pas  tant  aux  glorieuses  peines. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 

5.  Var.  S'est  fait  un  avant-goût  des  maux  de  votre  absence. 

(Manuscrits  de  Conrart,  des  Godefroy,  et  Petit  Recueil.  ) 

6.  Var.  De  ce  tourment  nouveau  que  lui-même  s'est  fait. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 
Var.  De  ce  nouveau  tourment  que  lui-même  il  s'est  fait. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 


144  POÉSIES    DIVERSES. 

Vengez-vous  du  rebelle,  et  faites-vous  justice  '  ; 
Vous  devez  un  mépris  du  moins  à  son  caprice  : 
Avoir  un  si  long  temps  des  sentiments  si  vains2,  a  s 

C'est  assez  mériter  l'honneur  de  vos  dédains. 

Quelle  bonté  superbe3,  ou  quelle  indifférence 
A  sa  rébellion  ôte  le  nom  d'offense*  ? 
Quoi?  vous  me  revoyez  sans  vous  plaindre  de  rien? 
Je  trouve6  même  accueil  avec  même  entretien?  3o 

Hélas  !  et  j'espérois  que  votre  humeur  altière 
M'ouvriroit  les  chemins  à  la  révolte  entière  ; 
Ce  cœur,  que  la  raison  ne  peut  plus  secourir', 
Cherchoit  dans  votre  orgueil  une  aide  à  se  guérir  '  ; 

i.  Var.  Vengez- vous  d'un  rebelle,  et  faites- vous  justice. 

(Manuscrits  des  Godefroy .) 
Var.  Vengez-vous  du  rebelle,  et  faites-nous  justice. 

(Petit  Recueil.  ) 
Mais  nous  est  une  faute,  et  non  une  véritable  variante. 
Var.  Vengez-vous,  belle  Iris,  faites-vous-en  justice. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

2.  Var.  Avoir  eu  si  longtemps  des  sentiments  si  vains. 

(Manuscrits  de  Conrart,  des   Godefroy,  et  Petit  Recueil.) 

3.  Suprême,  dans  les  Manuscrits  des  Godefroy,  et  plus  loin,  au 
vers  29,  me  renvoyez,  mais  ce  sont  des  fautes  évidentes.  Il  y  en  a 
d'autres,  encore  plus  grossières,  que  nous  n'avons  point  relevées.  Cette 
copie  semble  avoir  été  faite  d'après  un  original  manuscrit  difficile  a 
lire  et  péniblement  déchiffré. 

4-  Var.  A  ma  rébellion  ôte  le  nom  d'offense. 

(Petit  Recueil.) 
Var.  A  ma  fuite  obstinée  ôte  le  nom  d'offense. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
Var.  De  la  rébellion  ne  fait  point  une  offense. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 
5.  Je  treuve,  dans  les  Manuscrits  des  Godefroy . 
6\  Var.  Mon  cœur,  que  la  raison  ne  peut  plus  secourir. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

7.  Var.  Cherchoit  dans  votre  orgueil  un  aide  à  le  guérir. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 


POÉSIES    DIVERSES.  i45 

Mais  vous  lui  refusez  un  moment  de  colère  *  ;  3  S 

Vous  m'enviez  le  bien  d'avoir  pu  vous  déplaire  ; 

Vous  dédaignez  de  voir  quels  sont  mes  attentats2, 

Et  m'en  punissez  mieux  ne  m'en  punissant  pas. 

Une  heure  de  grimace  ou  froide  ou  sérieuse3, 

Un  ton  de  voix  trop  rude  ou  trop  impérieuse,  4  o 

Un  sourcil  trop  sévère,  une  ombre  de  fierté, 

M'eût  peut-être  à  vos  yeux  rendu  ma  liberté4 . 

J'aime,  mais  en  aimant  je  n'ai  point  la  bassesse6 
D'aimer  jusqu'aux  mépris6  de  l'objet  qui  me  blesse  ; 
Ma  flamme  se  dissipe  à  la  moindre  rigueur7  :  ^5 

Non  qu'enfin  mon  amour  prétende  cœur  pour  cœur; 
Je  vois  mes  cheveux  gris  :  je  sais  que  les  années 
Laissent  peu  de  mérite  aux  âmes  les  mieux  nées  ; 
Que  les  plus  beaux  talents  des  plus  rares  esprits , 

1.  Var.  Mais  vous  me  refusez  un  moment  de  colère; 

Vous  m'enviez  le  bien  d'avoir  su  vous  déplaire. 

[Manuscrits  de  Conrart.^ 

2.  Var.  Et  dédaignant  de  voir  quels  sont  mes  attentats, 

Vous  m'en  punissez  mieux  ne  m'en  punissant  pas. 

(Manuscrits  de  Conrart  et  des  Godefroy.< 

3.  Var.  Une  heure  de  grimace  un  peu  trop  sérieuse, 

Un  son  de  voix  trop  rude  ou  trop  impérieuse, 
Un  tour  d'œil  trop  sévère,  une  ombre  de  fierté. 

[Manuscrits  de  Conrart.) 

4.  La  liberté ,  dans  les  Manuscrits  des  Godefroy,  dans  les  OEuvres 
diverses  et  dans  les  éditions  postérieures. 

5.  Var.  J'aime,  mais  en  aimant  je  n'ai  pas  la  bassesse. 

[Manuscrits  des  Godefroj.) 

6.  Dans  les  Manuscrits  de  Conrart  et  dans  ceux  des  Godefroy  il  y 
a  le  singulier  :  «  au   mépris.  » 

7.  Var.  Ma  flamme  s'amortit  à  la  moindre  froideur  : 

Non  pas  que  mon  amour  prétende  cœur  pour  cœur; 
Je  sais  que  j'ai  quelque  âge,  et  qu'un  peu  trop  d'années 
Laisse  peu  de  mérite  aux  âmes  les  mieux  nées. 

[Manuscrits  de  Conrart 

CoHKETLI-F.     X  ÎO 


146  POÉSIES   DIVERSES. 

Quand  les  corps  sont  usés,  perdent  bien  de  leur  prix 4;  5  o 
Que  si  dans  mes  beaux  jours  je  parus  supportable, 
J'ai  trop  longtemps  aimé  pour  être  encore  aimable, 
Et  que  d'un  front  ridé  les  replis  jaunissants2 
Mêlent  un  triste  charme  aux  plus  dignes  encens8. 

i.  «  Dans  l'édition  in- 4°  ces  deux  vers  étoient  ainsi  tournés  : 

Que  les  plus  beaux  esprits,  que  les  plus  embrasés, 
Sont  de  méchants  ragoûts,  quand  les  corps  sont  usés.  » 

(Note  de  Granet.) 

—  Dans  les  Manuscrits  de  Conrart  et  des  Godefroy  le  premier  de  ces 
vers  est  ainsi  rédigé  : 

Que  les  plus  grands  esprits  et  les  mieux  embrasés  ; 

le  second  est  comme  dans  l'in-4°  cité  par  Granet.  Disons  seulement, 
pour  ne  rien  omettre,  qu'au  lieu  de  corps,  le  copiste  des  manuscrits 
Godefroy  avait  mis  loys,  et  qu'on  a  successivement  écrit  au-dessus  de 
ce  mot  d'abord  leurs,  puis  corps. 

a.  Var.  Ah!  que  d'un  front  ridé  les  replis  jaunissants. 

(Manuscrits  des  Godefroy .) 

—  F'ontenelle  a  dit,  non  sans  apparence,  qu'en  écrivant  Pulchérie, 
Corneille  «  s'est  dépeint  lui-même ,  avec  bien  de  la  force,  dans  Mar- 
tian,  qui  est  un  vieillard  amoureux  »  (voyez  tome  VII,  p.  3y4);  mais 
personne  n'a  remarqué  qu'on  retrouve  dans  Sertorius  les  idées  expri- 
mées ici,  et  que  levers  qui  précède  a  même  été  répété  textuellement. 
Lorsque  Viriate  révèle  à  Thamire  l'amour  qu'elle  éprouve  pour  Ser- 
torius, celle-ci  lui  répond  : 

Il  est  assez  nouveau  qu'un  homme  de  son  âge 
Ait  des  charmes  si  forts  pour  un  jeune  courage, 
Et  que  d'un  front  ridé  les  replis  jaunissants 
Trouvent  l'heureux  secret  de  captiver  les  sens. 

(Sertorius,  acte  II,  scène  i,  vers  397-400.) 
3.  Var.  Mêlent  un  triste  charme  aux  plus  fameux  encens. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 
Granet  donne  ainsi  ce  vers  : 

Mêlent  un  triste  charme  au  prix  de  mon  encens. 

Il  a  voulu  sans  doute  éviter  l'emploi  cYencens  au  pluriel,  regardé  de 
son  temps  comme  fautif  par  les  grammairiens,  mais  très-familier  à 
Corneille,  ainsi  qu'on  le  verra  dans  le  Lexique.  Tous  les  éditeurs  de 
Corneille  ont  suivi  le  texte  de  Granet.  Un  scrupule  analogue  à  celui 
de  Granet  a  porté  à  écrire  dans  la  copie  des  Godefroy  le  mot  accents 
au-dessus  à* encens. 


POÉSIES   DIVERSES.  147 

Je  connois  mes  défauts;  mais  après  tout,  je  pense1      5  5 

Etre  pour  vous  encore  un  captif  d'importance  ; 

Car  vous  aimez  la  gloire,  et  vous  savez  qu'un  roi 

Ne  vous  en  peut  jamais  assurer  tant  que  moi. 

Il  est  plus  en  ma  main  qu'en  celle  d'un  monarque 

De  vous  faire  égaler  l'amante  de  Pétrarque,  60 

Et  mieux  que  tous  les  rois  je  puis  faire  douter 

De  sa  Laure  ou  de  vous  qui  le  doit  emporter2. 

Aussi,  je  le  vois  trop,  vous  aimez  à  me  plaire, 
Vous  vous  rendez  pour  moi  facile  à  satisfaire  ; 
Votre  âme  de  mes  feux  tire  un  plaisir  secret,  6  5 

Et  vous  me  perdriez  sans  doute  avec  regret*. 

Marquise,  dites  donc  ce  qu'il  faut  que  je  fasse  : 
Vous  rattachez  mes  fers  quand  la  saison  vous  chasse; 
Je  vous  avois  quittée,  et  vous  me  rappelez 
Dans  le  cruel  instant  que  vous  vous  en  allez.  70 

Rigoureuse  faveur,  qui  force  à  disparoître 
Ce  calme  étudié  que  je  faisois  renaître  *, 
Et  qui  ne  rétablit  votre  absolu  pouvoir 
Que  pour  me  condamner  à  languir  sans  vous  voir  ! 

Payez,  payez  mes  feux  d'une  plus  foible  estime ,       7  5 
Traitez-les  d'inconstants  ;  nommez  ma  fuite  un  crime  ; 

1.  Var.  Je  sais  tous  mes  défauts;  mais  après  tout,  je  pense. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

2.  Les  vers  59-62  ne  se  trouvent  pas  dans  la  copie  des  Godefroy. 

3.  Var.  Et  vous  me  perdriez  avec  quelque  regret. 

Dites-moi  donc,  Iris,  ce  qu'il  faut  que  je  fasse. 
(Manuscrits  de  Conrart.) 

Var.  Et  vous  me  perdriez  peut-être  avec  regret. 

(^Manuscrits  des  Godefroy.) 

4»  Var.  Ce  calme  étudié  que  je  voyois  renaître, 

Et  ne  vous  rétablit  dans  tout  votre  pouvoir. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
Var.  Le  calme  étudié  que  j'avois  fait  renaître. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 


i4$  POÉSIES    DIVERSES 

Prêtez-moi,  par  pitié,  quelque  injuste  courroux  ; 

Renvoyez  mes  soupirs  qui  volent  après  vous  : 

Faites-moi  présumer  qu'il  en  est  quelques  autres 

A  qui  jusqu'en  ces  lieux  vous  renvoyez  des  vôtres1,      80 

Qu'en  faveur  d'un  rival  vous  allez  me  trahir 2  : 

J'en  ai,  vous  le  savez,  que  je  ne  puis  haïr1. 

Négligez-moi  pour  eux,  mais  dites  en  vous-même  : 

«  Moins  il  me  veut  aimer,  plus  il  fait  voir  qu'il  m'aime4, 

Et  m'aime  d'autant  plus  que  son  cœur  enflammé  8  5 

N'ose  même  aspirer  au  bonheur  d'être  aimé  ; 

Je  fais  tous  ses  plaisirs,  j'ai  toutes  ses  pensées, 

Sans  que  le  moindre  espoir  les  aye6  intéressées. 

Puissé-je  malgré  vous  y  penser  un  peu  moins, 
M' échapper  quelques  jours  vers  quelques  autres  soins6, 
Trouver  quelques  plaisirs  ailleurs  qu'en  votre  idée, 
En  voir  toute  mon  âme  un  peu  moins  obsédée  ; 
Et  vous  de  qui  je  n'ose  attendre  jamais  rien  ', 
Ne  ressentir  jamais  un  mal  pareil  au  mien  !  » 

Ainsi  parla  Cléandre,  et  ses  maux  se  passèrent8,        9  5 

1.  Var.  A  qui  jusqu'en  ces  lieux  vous  renvoyez  les  vôtres. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 
1.  Var.   Croire  qu'à  mes  rivaux  vous  allez  me  trahir. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
Var.  Croire  qu'à  mes  rivaux  vous  me  voulez  trahir. 

(Manuscrits  des  Godefroy.) 
3.  D'abord  son  frère  Thomas  Corneille  (voyez  Y  Appendice),  ensuite 
son  ami  Molière. 

4-  Var.  Moins  il  me  veut  aimer,  plus  je  connois  qu'il  m'aime. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
5.   H  y  a  ajt  dans  les  Manuscrits  de  Conrart,  et  ait  dans  ceux  des 
Godefroy. 

(S.  Var.  M'échapper  un  moment  vers  quelques  autres  soins. 

(Manuscrits  de  Conrart,') 

7.  Var.  Et  vous  de  qui  jamais  je  n'ose  attendre  rien. 

(Ibidem.) 

8.  Var.       Ainsi  parla  Cléandre,  et  ses  tourments  passèrent. 

(Ibidem.) 


POÉSIES    DIVERSES.  149 

Son  feu  s'évanouit,  ses  déplaisirs  cessèrent  ; 

Il  vécut  sans  la  dame,  et  vécut  sans  ennui4, 

Gomme  la  dame  ailleurs  se  divertit  sans  lui  : 

Heureux  en  son  amour,  si  l'ardeur  qui  l'anime 

N'en  conçoit  les  tourments  que  pour  s'en  plaindre  en  rime, 

Et  si  d'un  feu  si  beau  la  céleste  vigueur2 

Peut  enflammer  ses  vers  sans  échauffer  son  cœur 3  ! 

1.  Var.   Il  vécut  sans  Iris,  et  vécut  saas  ennui, 

Comme  la  belle  ailleurs  se  divertit  sans  lui. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

2.  Var.  Et  si  d'un  si  beau  feu  la  céleste  rigueur. 

[Manuscrits  des  Godefroy.) 

3.  Les  quatre  derniers  vers  manquent  dans  les  Manuscrits  de  Con- 
rart. —  L'ordre  chronologique  amènerait  ici  les  Vers  présentés  à 
Monseigneur  le  Procureur  général  Fouccjuct^  surintendant  des  finances  > 
que  Granet  a  publiés  aux  pages  178- 181  des  OEuvres  diverses.  Nous 
nous  contentons  de  rappeler  cette  pièce,  imprimée  en  entier  aux 
pages  121  et  suivantes  du  tome  VI,  en  tête  A'OEdipe,  dont,  comme 
nous  l'avons  dit,  l'Achevé  d'imprimer  est  du  26  mars  1659. 


i5o  POESIES   DIVERSES. 


XLVIII 


MADRIGAL. 


Les  pièces  XLVIII  et  XLIX  ont  été  imprimées  pour  la  première 
fois  sous  ce  titre  et  dans  cet  ordre  à  la  page  94  de  la  cinquième 
partie  des  Poésies  choisies,  publiée  en  ififio.  Elles  avaient  été  compo- 
sées vers  la  fin  de  1659.  En  effet,  dans  le  recueil  manuscrit  de  Conrart, 
conservé  à  la  bibliothèque  de  l'Arsenal  (tome  IX,  p.  859),  elles  sont 
précédées  de  la  lettre  suivante  : 

«  A  Rouen,  le  16  décembre  165g. 

a  L'incomparable  Sapho  est  suppliée  de  mander  son  avis  à  l'illustre 
Aspasie, touchant  deux  épigratnmes  faits1  pour  une  belle  dame  de  sa 
connoissance,  qui,  par  un  accès  d'estime,  avoit  baisé  la  main  gauche 
de  l'auteur.  Il  y  a  partage  pour  juger  lequel  est  le  plus  galant:  l'un 
a  plus  d'effort  de  pensée,  et  l'autre  a  quelque  chose  de  plus  simple 
et  plus  naturel.  » 

Immédiatement  après  cette  lettre  le  recueil  de  Conrart  nous  pré- 
sente, sous  le  titre  dCépigramme,  la  pièce  qui  commence  par  : 

Je  ne  veux  plus  devoir  à  des  gens  comme  vous. 

Puis  sous  cette  rubrique  :  Autre  sur  le  même  sujet,  celle  dont  le  pre- 
mier vers  est  : 

Mes  deux  mains  à  l'envi  disputent  de  leur  gloire. 

Enfin  on  trouve  à  la  page  8(So  une  Réponse  de  Vincomparable  Sapho  à 
la  seconde  épigramme  de  M.  Corneille,  réponse  qui  n'est  pas  dans 
le  recueil  de  Sercy.  Granet,  qui  donne  à  la  page  208,  sous  le  titre 
de  Madrigal  à  Mademoiselle  Serment ,  la  pièce  commençant  par  : 
«  Mes  deux  mains  à  l'envi...,  v  intitule  la  réponse,  imprimée  par  lui 
pour  la  première  fois  :  Réponse  de  Mademoiselle  Serment.  M.  Paul  La- 
croix, qui  a  publié  tout  récemment  dans  le   Bulletin  du  bibliophile 

1.  Ce  mot  était  encore  quelquefois  masculin.  Voyez  tome  IV, 
p.  i34,  note  1,  et  le  Lexique. 


POÉSIES    DIVERSES.  i5i 

(n°  du  i5  octobre  1864,  8e  année,  p.  556)  la  lettre  que  nous  avons 
reproduite  plus  haut,  dit  qu'elle  «  fut  probablement  écrite  par  Cor- 
neille lui-même  à  Mlle  de  Scudéry,  »  et  que  «l'illustre  Aspasie.... 
n'était  autre  chose  que  Ninon  de  Lenclos.  »  Deux  de  ces  trois  asser- 
tions paraissent  bien  hasardées ,  mais  je  crois  qu'il  est  certain  que 
*  l'incomparable  Sapho  »  est  en  effet  Mlle  de  Scudéry,  et  alors  il  de- 
vient très- probable  qu'elle  est  aussi  l'auteur  de  la  réponse  portant  le 
nom  de  Sapho.  Ce  qui  ajoute  encore  à  cette  vraisemblance,  c'est  que 
dans  une  Lettre  de  Sapho  au  Mage  de  Sidon,  datée  du  21  octobre  i658, 
qui  se  trouve  à  la  page  863  du  tome  IX  des  Manuscrits  de  Conrart  y  on 
lit  :  «  Allez,  allez,  vendez  vos  coquilles  à  d'autres  qu'à  ceux  qui  vien- 
nent du  Mont-Saint-Michel.  »  Ceci  explique  et  complète  cette  expres- 
sion proverbiale  qui  forme  le  dernier  vers  de  la  Réponse  : 

Vendez  vos  coquilles  à  d'autres. 

Pour  ne  pas  allonger  outre  mesure  cette  notice  déjà  trop  étendue, 
nous  renvoyons  à  Y  Appendice  quelques  détails  sur  Mlle  Serment  et 
!a  Réponse  de  P  incomparable  Sapho. 

Mes  deux  mains  à  l'envi  disputent  de  leur  gloire , 

Et  dans  leurs  sentiments  jaloux 

Je  ne  sais  ce  que  j'en  dois  croire. 

Philis,  je  m'en  rapporte  à  vous; 

Réglez  mon  avis1  par  le  vôtre.  5 

Vous  savez  leurs  honneurs  divers  : 
La  droite  a  mis  au  jour  un  million  de  vers; 
Mais  votre  belle  bouche  a  daigné  baiser  l'autre. 
Adorable  Phiiis ,  peut-on  mieux  décider 

Que  la  droite  lui  doit  céder  ?  1  o 

1.  Ainsi  dans  les  Poésies  choisies  et  dans  les  Manuscrits  de  Conrart, 
Amour,  dans  les  OEuvres  diverses  publiées  par  Granet,  et  dans  les 
éditions  postérieures. 


i5a  POESIES    DIVERSES. 


XLIX 

AUTRE    SUR    LE    MEME    SUJET. 
Voyez  la  notice  en  tête  de  la  pièce  précédente. 

Je  ne  veux  plus  devoir  à  des  gens  comme  vous  : 

Je  vous  trouve  ,  Phi  lis  ,  trop  rude  créancière. 

Pour  un  baiser  prêté,  qui  m'a  fait  cent  jaloux, 

Vous  avez  retenu  mon  âme  prisonnière. 

Jl  fait  mauvais  garder  un  si  dangereux  prêt; 

J'aime  mieux  vous  le  rendre  avec  double  intérêt, 

Et  m'acquitter  ainsi  mieux  que  je  ne  mérite; 

Mais  à  de  tels  paiements *  je  n'ose  me  fier , 

Vous  accroîtrez  la  dette  en  vous  laissant  payer, 

Et  doublerez  mes  fers  si  par  là  je  m'acquitte.  i  o 

Le  péril  en  est  grand,  courons-y  toutefois  , 

Une  prison  si  belle  est  trop  digne  d'envie  ; 

Puissé-je  vous  devoir  plus  que  je  ne  vous  dois, 

En  peine  d'y  languir  le  reste  de  ma  vie  ! 

i.  Ce  mot  est  imprimé  payments  dans  le  recueil  de  Sercy,  et  écrit 
pafmens  dans  les  Manuscrits  de  Conrart,  afin  qu'on  voie  bien  qu'il 
ne  compte  que  pour  deux  syllabes. 


POÉSIES    DIVERSES.  «53 


AIR    DF.    M.    LAMBERT1    POl  R    LA    REINE. 


Le  mariage  de  Marie-Thérèse  d'Autriche  avec  Louis  XIV  fut  cé- 
lébré le  9  juin  ifific,  à  Saint-Jeau-de-Luz  (voyez  tome  VI,  p.  264, 
note  1).  Ce  sixain,  signé  M.  de  Corbeille,  a  été  imprimé  pour  la 
première  fois  dans  le  Recueil  des  plus  beaux  vers  qui  ont  esté  mis  en 
citant,  Auec  le  Nom  des  AutJieurs  tant  des  Airs  que  des  Paroles,  à  Paris, 
chez  Charles  de  Sercv,  M.DC.LXI,  in-12,  p.  89.  L'Achevé  d'impri- 
mer est  du  18  juin  1661.  Ce  Recueil  ne  contient  que  les  vers,  et  non  la 
musique;  nous  Favons  vainement  cherchée  dans  les  Airs  à  une,  II.  111 . 
et  IV.  parties  avec  la  basse-continue  composez  par  Monsieur  Lambert , 
maistre  de  la  musique  de  la  chambre  du  Roy,  à  Paris,  par  Christophe 
Ballard,  M.DC.LXXIX.  in-folio. 

C'est  trop  faire  languir  de  si  justes  désirs  , 

Reine,  venez  assurer  nos  plaisirs 
Par  Féclat  de  votre  présence; 
Venez  nous  rendre  heureux  sous  vos  augustes  lois, 

Et  recevez  tous  les  cœurs  de  la  France  5 

Avec  celui  du  plus  grand  de  ses  rois. 

1.  C'est  le  célèbre  musicien  dont  Boileau  parle  dans  sa  IIIe  satire, 
la  Fontaine  dans  la  fable  v  du  livre  XI,  et  Tallemant  des  Réau\  dans 
ses  Historiettes ,  tome  VI,  p.  193-199.  Il  était  né  en  1610  et  mourui 
en    1696. 


1 54  POÉSIES    DIVERSES. 


LI 

POUR    UNE    DAME 

QUI  REPRÉSENTAIT  LA  NUIT  EN  LA  COMÉDIE  WENDYM10TS 
MADRIGAL. 

Le  registre  de  la  Grange  constate  que  le  2  5  juin  1660  la  troupe 
de  Molière  reprit  lss  Amours  de  Diane  et  d?  Endymion,  de  Gilbert  ' ,  qui, 
suivant  les  frères  Parfait  (Histoire  du  Théâtre  françois,  tome  VIII, 
p.  2o5  et  suivantes),  avaient  été  représentés  d'abord  en  1657,  à  l'Hô- 
tel de  Bourgogne.  M.  Taschereau  pense  que  Corneille  assista  à  cette 
reprise,  où  Mlle  du  Parc  représentait  la  Nuit,  tandis  qu'une  beauté 
plus  mure,  Madeleine  Béjart  peut-être,  jouait  Diane  ou  la  Lune2. 
Cette  conjecture  parait  très-fondée.  Ce  madrigal  a  été  publié  pour  la 
première  fois  à  la  page  82  delà  cinquième  partie  des  Poésies  choisies. 

Si  la  Lune  et  la  Nuit  sont  bien  représentées , 

Endymion  n'étoit  qu'un  sot  : 

Il  devoit  dès  le  premier  mot 
Renvoyer  à  leur  ciel  Jes  cornes  argentées. 
Ténébreuse  déesse ,  un  œil  bien  éclairé  5 

Dans  tes  obscurités  eût  cherché  sa  fortune  ; 
Et  je  n'en  connois  point  qui  n'eût  tôt  préféré 
Les  ombres  de  la  Nuit  aux  clartés  de  la  Lune. 

1.  Sur  Gilbert,  voyez  tome  IV,  p.  399  et  note  1. 

2.  Histoire  de  la  vie  et  des  OEuvres  de  P.  Corneille,  2e  édition, 
p.   f73. 


POÉSIES   DIVERSES.  i55 


LU 


JALOUSIE. 

Ces  vers,  signés  Corneille,  ont  été  publiés  pour  la  première  fois 
dans  les  Poésies  choisies....  cinquième  partie,  p.  j3.  Nous  n'en  pou- 
vons déterminer  l'époque,  non  plus  que  celles  des  pièces  LIII-LXIV, 
toutes  signées  de  la  même  manière.  Nous  ferons  seulement  remar- 
quer que  ces  opuscules  sont  nécessairement  antérieurs  à  l'Achevé 
d'imprimer  de  la  première  édition  de  cette  cinquième  partie,  daté, 
ainsi  que  nous  l'avons  déjà  dit,  du  18  août  1660.  Le  nom  de  Philis 
désigne  probablement  ici  la  même  personne  que  dans  les  pièces 
XLVIII  et  XLIX.  Granet,  qui  considère  ces  deux  madrigaux  comme 
adressés  à  Mlle  Serment,  ne  s'est  point  prononcé  sur  la  présente  pièce, 
qu'il  donne  aux  pages  191-193  des  OEuvres  diverses. 

N'aimez  plus  tant ,  Philis  ,  à  vous  voir  adorée  : 

Le  plus  ardent  amour  n'a  pas  grande  durée; 

Les  nœuds  les  plus  serrés  sont  le  plus  tôt  rompus  ; 

A  force  d'aimer  trop ,  souvent  on  n'aime  plus , 

Et  ces  liens  si  forts  ont  des  lois  si  sévères  5 

Que  toutes  leurs  douceurs  en  deviennent  a  mères. 

Je  sais  qu'il  vous  est  doux  d'asservir  tous  nos  soins  ; 
Mais  qui  se  donne  entier  n'en  exige  pas  moins  : 
Sans  réserve  il  se  rend,  sans  réserve  il  se  livre , 
Hors  de  votre  présence  il  doute  s'il  peut  vivre;  t  o 

Mais  il  veut  la  pareille ,  et  son  attachement 
Prend  compte  de  chaque  heure  et  de  chaque  moment. 

C'est  un  esclave  fier  qui  veut  régler  son  maître , 
Un  censeur  complaisant  qui  cherche  à  trop  connoître , 
Un  tyran  déguisé  qui  s'attache  à  vos  pas ,  1  5 

Un  dangereux  Argus  qui  voit  ce  qui  n'est  pas. 


i56  POÉSIES   DIVERSES. 

Sans  cesse  il  importune  ,  et  sans  cesse  il  assiège , 

Importun  par  devoir,  fâcheux  par  privilège, 

Ardent  à  vous  servir  jusqu'à  vous  en  lasser, 

Mais  au  reste  un  peu  tendre  et  facile  à  blesser.  2  o 

Le  plus  léger  chagrin  d'une  humeur  inégale  , 

Le  moindre  égarement  d'un  mauvais  intervalle , 

Un  souris  par  mégarde  à  ses  yeux  dérobé , 

Un  coup  d'œil  par  hasard  sur  un  autre  tombé  , 

Le  plus  foible  dehors  de  cette  complaisance  2  5 

Que  se  permet  pour  tous  la  même  indifférence  : 

Tout  cela  fait  pour  lui  de  grands  crimes  d'Etat* 

Et  plus  l'amour  est  fort ,  plus  il  est  délicat. 

Vous  avez  vu ,  Philis  ,  comme  il  brise  sa  chaîne 
Sitôt  qu'auprès  de  vous  quelque  chose  le  gêne;  3o 

Et  comme  vos  bontés  ne  sont  qu'un  foible  appui 
Contre  un  murmure  sourd  qui  s'épand  jusqu'à  lui. 
Que  ce  soit  vérité,  que  ce  soit  calomnie, 
Pour  vous  voir  en  coupable  il  suffit  qu'on  le  die; 
Et  lorsqu'une  imposture  a  quelque  fondement  3  5 

Sur  un  peu  d'imprudence,  ou  sur  trop  d'enjouement, 
Tout  ce  qu'il  sait  de  vous  et  de  votre  innocence 
N'ose  le  révolter  contre  cette  apparence, 
Et  souffre  qu'elle  expose  à  cent  fausses  clartés 
Votre  humeur  sociable  et  vos  civilités.  40 

Sa  raison  au  dedans  vous  fait  en  vain  justice, 
Sa  raison  au  dehors  respecte  son  caprice  ; 
La  peur  de  sembler  dupe  aux  yeux  de  quelques  fous 
Etouffe  cette  voix  qui  parle  trop  pour  vous. 
La  part  qu'il  prend  sur  lui  de  votre  renommée  4  5 

Forme  un  sombre  dépit  de  vous  avoir  aimée  ; 
Et  comme  il  n'est  plus  temps  d'en  faire  un  désaveu  , 
Il  fait  gloire  partout  d'éteindre  un  si  beau  feu  : 
Du  moins  s'il  ne  l'éteint ,  il  l'empêche  de  luire , 
Et  brave  le  pouvoir  qu'il  ne  sauroit  détruire.  5o 


POÉSIES    DIVERSES.  i5? 

Voilà  ce  que  produit  le  don  de  trop  charmer. 
Pour  garder  vos  amants,  faites-vous  moins  aimer: 
Un  amour  médiocre  est  souvent  plus  traitable; 
Mais  pourriez-vous,  Philis,  vous  rendre  moins  aimable? 
Pensez-y,  je  vous  prie,  et  n'oubliez  jamais,                    5  5 
Quand  on  vous  aimera,  que  1' Amour  est  doux,  mais1 

r.  Ces  mots,  imprimés  ainsi  en  capitales  dans  les  Poésies  choisies, 
font- ils  allusion  au  début  de  quelque  poésie  alors  en  vogue?  c'est  ce 
que  nous  n'avons  pu  éclain  ir. 


i58  POÉSIES   DIVERSES. 


lui 

BAGATELLE. 

Ces  vers  sont  imprimés  à  la  page  y 5  de  la  cinquième  partie  des 
Poésies  choisies.  Cette  pièce  et  les  deux  suivantes  n'ont  pas  été  repro- 
duites par  Granet. 

Quoi  ?  sitôt  que  j'en  veux  rabattre , 

Vous  vous  faites  tenir  à  quatre , 

Et  quand  j'en  devrois  enrager, 

Votre  ordre  ne  se  peut  changer  : 

11  faut  vous  en  faire  cinquante.  5 

Ma  foi,  le  nombre  m'épouvante; 

En  vieux  garçon  de  cinquante  ans 

N'en  fait  guère  en  beaucoup  de  temps  , 

Et  ne  va  pas  tout  dune  haleine 

A  la  benoîte  cinquantaine.  i  o 

Encor,  pour  être  votre  lait , 

Il  faut  qu'ils  soient  doux  comme  lait, 

Qu'ils  aillent  droit  comme  une  quille , 

Qu'ils  n'aient  point  de  fausse  cheville , 

Que  tout  y  soit  bien  ajusté,  1 5 

Que  rien  n'y  penche  d'un  côté, 

Rien  n'y  soit  de  mauvaise  mise , 

Rien  n'y  sente  la  barbe  grise. 

Voilà  bien  des  conditions 

Pour  mes  pauvres  inventions.  20 

Le  temps  les  a  presque  épuisées , 

Les  vieux  travaux  les  ont  usées  : 

Gomment  pourront-elles  trouver 

Le  secret  de  bien  achever? 


POÉSIES   DIVERSES  i59 

Devenez  un  peu  complaisante  ,  1 5 

Et  daignez  vous  passer  à  trente  : 
Vous  serez  servie  à  souhait , 
Et  je  vous  dirai  haut  et  net 
Que  je  craindrai  fort  peu  la  honte 
De  vous  fournir  mal  votre  conte  * .  3  o 

Mais  je  vaux  moins  qu'un  quinola2, 
Si  je  n'en  fais  vingt  par  delà. 
Tenir  à  demi  sa  parole , 
C'est  une  méchante  bricole*  : 
On  doit  s'efforcer  jusqu'au  bout,  s  5 

Et  ne  rien  faire,  ou  faire  tout. 
Il  faut  donc  que  je  m'évertue , 
Que  je  me  débatte  et  remue, 
Que  je  pousse  de  tout  mon  mieux , 
Dussé-je  en  crever  à  vos  yeux  :  40 

Aux  grands  coups  on  voit  les  grands  hommes. 

Voyons,  de  grâce,  où  nous  en  sommes  : 
Si  je  compte  bien  par  mes  doigts, 
Je  passe  les  quarante  et  trois; 
Encor  six,  vous  n'auriez  que  dire.,  45 

Et  vous  commencez  à  sourire 
De  voir  mon  reste  de  vertu , 
Sans  vous  avoir  rien  rabattu  , 
Ni  tourné  la  tête  en  arrière , 
Toucher  au  bout  de  la  carrière.  5o 

En  faut-il  encor?  je  le  veux, 
Voilà  jusqu'à  cinquante-deux  : 
Plaignez-vous ,  en  cette  aventure , 
De  n'avoir  pas  bonne  mesure. 

1.  Voyez  tome  I,  p.  i5o,  note  1. 

2.  Homme  à  gages  chargé  de  conduire  une  dame.  Voyez  le  Lexique. 

3.  Bricole,  tour,  détour,  tromperie.  Voyez  le  Lexique, 


160  POESIES   DIVERSES. 


LIV 


STANCES. 


Ces  vers,  probablement  composés  a  la  suite  de  quelque  ballet  ou 
mascarade,  dont  nous  n'avons  pu  connaître  ni  la  date  ni  le  sujet, 
sont  imprimés  à  la  pa&e  77  de  la  cinquième  partie  di  s  Poésies  choisies. 

J'ai  vu  la  peste  en  raccourci  : 
Et  s'il  faut  en  parler  sans  feindre, 
Lorsque1  la  peste  est  faite  ainsi, 
Peste  !  que  la  peste  est  à  craindre  ! 

De  cœurs  qui  n'en  sauroient  guérir  5 

Elle  est  partout  accompagnée , 
Et  dût-on  cent  fois  en  mourir, 
Mille  voudroient  l'avoir  gagnée. 

L'ardeur  dont  ils  sont  emportés , 

En  ce  péril  leur  persuade  1  o 

Qu'avoir  la  peste  à  ses  côtés, 

Ce  n'est  point  être  trop  malade. 

Aussi  faut-il  leur  accorder 

Qu'on  auroit  du  bonheur  de  reste, 

Pour  peu  qu'on  se  pût  hasarder  1 5 

Au  beau  milieu  de  cette  peste. 

La  mort  seroit  douce  à  ce  prix  ; 

1.  Puisque,  mais  à  tort,  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dans  quelques 
autres. 


POÉSIES   DIVERSES.  161 

Mais  c'est  un  malheur  à  se  pendre, 

Qu'on  ne  meurt  pas  d'en  être  pris, 

Mais  faute  de  la  pouvoir  prendre.  2  o 

L'ardeur  qu'elle  fait  naître  au  sein 
N'y  fait  même  un  mal  incurable , 
Que  parce  qu'elle  prend  soudain, 
Et  quelle  est  toujours  imprenable. 

Aussi  chacun  y  perd  son  temps  ;  2  5 

L'un  en  gémit,  l'autre  en  déteste; 
Et  ce  que  font  les  plus  contents, 
C'est  de  pester  contre  la  peste. 


<'0RJ»EiLI,E.     X  I  1 


i62  POÉSIES  DIVERSES. 


LV 


SONNET. 


Ces  vers  sont  imprimés  a  la  page   78  de  la  cinquième  partie   des 
Poésies  choisies. 

Vous  aimez  que  je  me  range 
Auprès  de  vous  chaque  jour, 
Et  m'ordonnez  que  je  change 
En  amitié  mon  amour. 

Cette  méchante  bricole1  5 

Vous  fait  beaucoup  hasarder, 
Et  je  vous  trouve  bien  folle 
Si  vous  me  pensez  garder. 

Une  passion  si  belle 

N'est  pas  une  bagatelle  1  o 

Dont  on  se  joue  à  son  gré; 

Et  F  amour  qui  vous  rebute 
Ne  sauroit  choir  d'un  degré, 
Qu'il  ne  meure  de  sa  chute. 

1 .  Ce  méchant  détour,  ce  moyen  détourné  de  vous  débarrasser  de 
moi.  Voyez  le  Lexique. 


POÉSIES    DIVERSES.  i63 


LVI 


SONNET. 


Ce  sonnet  a  été  imprimé  pour  la  première  fois  à  la  page  87  de  la 
cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy .  Il  y  suit  immédiate- 
ment les  pièces  XLVII  et  LI  de  la  présente  édition  des  Poésies  diverses 
e\.Y  Elégie  renvoyée  à  Y Appendice ,  toutes  trois  adressées  à  la  du  Parc, 
soit  sous  le  nom  de  la  Marquise,  soit  sous  celui  d'Iris. 

Je  vous  estime,  Iris,  et  crois  pouvoir  sans  crime 
Permettre  à  mon  respect  un  aveu  si  charmant  : 

Il  est  vrai  qu'à  chaque  moment 

Je  songe  que  je  vous  estime. 

Cette  agréable  idée,  où  ma  raison  s'abîme,  5 

Tyrannise  mes  sens  jusqu'à  l'accablement  ; 

Mais  pour  vouloir  fuir  ce  tourment 

La  cause  en  est  trop  légitime. 

Aussi  quelque  désordre  où  mon  cœur  soit  plongé, 

Bien  loin  de  faire  effort  à  l'en  voir  dégagé,  10 

Entretenir  sa  peine  est  toute  mon  étude. 

J'en  aime  le  chagrin,  le  trouble  m'en  est  doux. 
Hélas  !  que  ne  m'estimez-vous 
Avec  la  même  inquiétude  ! 


164  POÉSIES   DIVERSES. 


LV1I 


SOJVWEX. 


Ce  sonnet  a  été  publié  d'abord  à  la  page  88  de  la  cinquième  partie 
des  Poésies  choisies  de  Sercy. 

D'un  accueil  si  flatteur,  et  qui  veut  que  j'espère, 
Vous  payez  ma  visite  alors  que  je  vous  voi, 
Que  souvent  à  Terreur  j'abandonne  ma  foi, 
Et  crois  seul  avoir  droit  d'aspirer  à  vous  plaire. 

Mais  si  j'y  trouve  alors  de  quoi  me  satisfaire,  b 

Ces  charmes  attirants,  ces  doux  je  ne  sais  quoi, 
Sont  des  biens  pour  tout  autre  aussi  bien  que  pour  moi; 
Et  c'est  dont  un  beau  feu  ne  se  contente  guère. 

D'une  ardeur  réciproque  il  veut  d'autres  témoins, 

Un  mutuel  échange  et  de  vœux  et  de  soins,  i  o 

Un  transport  de  tendresse  à  nul  autre  semblable. 

C'est  là  ce  qui  remplit  un  cœur  fort  amoureux  : 
Le  mien  le  sent  pour  vous  ;  le  vôtre  en  est  capable. 
Helas  !  si  vous  vouliez,  que  je  serois  heureux  ! 


POÉSIES   DIVERSES.  ifi5 


LVIII 


STANCES. 


Ces  stances,  publiées  pour  la  première  fois  à  la  page  89  de  la 
cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy,  et  réimprimées  aux 
pages  2o5  et  206  des  OEuvres  diverses ,  sont  adressées ,  ainsi  que  les 
pièces  XLVII ,  LI  et  LVI ,  à  la  du  Parc ,  qui ,  comme  nous  l'avons 
dit,  était  connue  sous  le  nom  de  la  Marquise,  et  désignée  parfois  par 
Corneille  sous  celui  d'Iris.  Un  critique  ingénieux,  M.  Edouard  Four- 
nier,  les  a  fort  spirituellement  encadrées  dans  une  anecdote  char- 
mante (voyez  ses  Notes  sur  la  vie  de  Corneille,  p.  ciii-cvn).  Regar- 
dant la  dernière  stance  comme  ajoutée  après  coup ,  et  se  fiant  trop  à 
une  tradition  fort  contestable,  il  a  cru  que  cette  pièce  avait  été  com- 
posée pour  Mme  de  Motteville  en  réponse  aux  railleries  d'une  jeune 
marquise;  mais  le  lien  très-naturel  et  très-étroit  qui  unit  ces  stances 
aux  autres  pièces  adressées  à  la  du  Parc  ne  permet  pas  d'admettre 
cette  explication. 

Marquise,  si  mon  visage 
A  quelques  traits  un  peu  vieux, 
Souvenez-vous  qu'à  mon  âge 
Vous  ne  vaudrez  guère  mieux. 

Le  temps  aux  plus  belles  choses  5 

Se  plaît  à  faire  un  affront, 
Et  saura  faner  vos  roses 
Comme  il  a  ridé  mon  front. 

Le  même  cours  des  planètes 

Règle  nos  jours  et  nos  nuits  :  1  o 

On  m'a  vu  ce  que  vous  êtes  ; 

Vous  serez  ce  que  je  suis. 


66  POESIES    DIVERSES. 

Cependant  j'ai  quelques  charmes 

Qui  sont  assez  éclatants 

Pour  n'avoir  pas  trop  d'alarmes  i  5 

De  ces  ravages  du  temps. 

Vous  en  avez  qu'on  adore, 

Mais  ceux  que  vous  méprisez 

Pourroient  bien  durer  encore 

Quand  ceux-là  seront  usés.  ao 

Ils  pourront  sauver  la  gloire 
Des  yeux  qui  me  semblent  doux, 
Et  dans  mille  ans  faire  croire 
Ce  qu'il  me  plaira  de  vous. 

Chez  cette  race  nouvelle  *  a 

Où  j'aurai  quelque  crédit, 
Vous  ne  passerez  pour  belle 
Qu'autant  que  je  l'aurai  dit. 

Pensez-y,  belle  Marquise  : 

Quoiqu'un  grison  fasse  effroi,  3o 

Il  vaut  bien  qu'on  le  courtise, 

Quand  il  est  fait  comme  moi. 


POESIES    DIVERSES.  167 


ux 


SONNET. 


Ce  sonnet,  inséré  par  Granet  dans  les  OEuvres  diverses  (p.  207),  a 
été  publié  pour  la  première  fois  à  la  page  90  de  la  cinquième  partie 
des  Poésies  choisies  de  Sercy.  La  page  91  est  occupée  par  le  Sonnet 
perdu  au  jeu,  que  sa  date,  exactement  déterminée,  nous  a  permis  de 
placer  plus  haut,  p.  140. 

Usez  moins  avec  moi  du  droit  de  tout  charmer  : 
Vous  me  perdrez  bientôt,  si  vous  n'y  prenez  garde. 
J'aime  bien  à  vous  voir,  quoi  qu  enfin  j'y  hasarde  ; 
Mais  je  n'aime  pas  bien  qu'on  me  force  d'aimer. 

Cependant  mon  repos  a  de  quoi  s'alarmer  :  5 

Je  sens  je  ne  sais  quoi  dès  que  je  vous  regarde  ; 
Je  souffre  avec  chagrin  tout  ce  qui  m'en  retarde  ; 
Et  c'est  déjà  sans  doute  un  peu  plus  qu'estimer  * . 

Ne  vous  y  trompez  pas  :  l'honneur  de  ma  défaite 
N'assure  point  d'esclave  à  la  maio  qui  l'a  faite;  10 

Je  sais  l'art  d'échapper  aux  charmes  les  plus  forts  ; 

Et  quand  ils  m'ont  réduit  à  ne  me  plus  défendre2, 
Savez- vous ,  belle  Iris ,  ce  que  je  fais  alors  ? 
Je  m'enfuis,  de  peur  de  me  rendre. 

1 .  Ce  vers  semble  faire  allusion  à  la  pièce  LVI. 

2.  a  A  ne  plus  me  défendre,  »  dans  le  texte  de  Granet,  et,  par 
suite,  dans  toutes  les  éditions  postérieures. 


68  POÉSIES   DIVERSES. 


LX 


CHAJVSON. 


Cette  chanson  a  paru  pour  la  première  fois  à  la  page  92  de  la 
cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy.  Les  pièces  LX-LXTV 
ne  se  trouvent  pas  dans  les  OEuvres  diverses  publiées  par  Granet  ;  elles 
sont  au  nombre  de  celles  qu'il  a  considérées  comme  étant  or  d'une 
galanterie  trop  libre.  »  Voyez  la  Notice,  p.  19. 

Vos  beaux  yeux  sur  ma  franchise 

N'adressent  pas  bien  leurs  coups  : 

Tête  chauve  et  barbe  grise 

Ne  sont  pas  viande  pour  vous. 

Quand  j'aurois  l'heur  de  vous  plaire  ,  5 

Ce  seroit  perdre  du  temps  : 

Iris ,  que  pourriez-vous  faire 

D'un  galant  de  cinquante  ans  ? 

Ce  qui  vous  rend  adorable 

N'est  propre  qu'à  m'alarmer.  :  o 

Je  vous  trouve  trop  aimable , 

Et  crains  de  vous  trop  aimer  : 

Mon  cœur  à  prendre  est  facile , 

Mes  vœux  sont  des  plus  constants  ', 

Mais  c'est  un  meuble  inutile  1  5 

Qu'un  galant  de  cinquante  ans. 

Si  l'armure  n'est  complète , 

Si  tout  ne  va  comme  il  faut, 

Il  vaut  mieux  faire  retraite 

Que  d'entreprendre  un  assaut  :  10 


POÉSIES    DIVERSES.  169 

L'amour  ne  rend  point  la  place 
A  de  mauvais  combattants , 
Et  rit  de  la  vaine  audace 
Des  galants  de  cinquante  ans. 


170  POESIES   DIVERSES. 


LXI 


STANCES. 


Ces  stances  ont  été  publiées  pour  la  première  fois  à  la  page  93  de 
la  cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy.  La  page  94  est 
occupée  par  deux  madrigaux  dont  nous  avons  pu  déterminer  la  date 
et  que  nous  avons  placés  plus  haut,  p.  i5o-i52.  On  ne  sait  pas  qui 
Corneille  désigne  sous  le  nom  de  Caliste. 

Caliste,  lorsque  je  vous  voi, 
Dirai-je  que  je  vous  admire? 
C'est  vous  dire  bien  peu  pour  moi , 
Et  peut-être  c'est  trop  vous  dire. 

Je  m'expliquerois  un  peu  mieux  5 

Pour  un  moindre  rang  que  le  vôtre  : 
Vous  êtes  belle ,  j'ai  des  yeux, 
Et  je  suis  nomme  comme  un  autre. 

Que  n'êtes-vous,  à  votre  tour, 

Caliste ,  comme  une  autre  femme  !  1  o 

Je  serois  pour  vous  tout  d'amour, 

Si  vous  n'étiez  point  si  grand' dame. 

Votre  grade 4  hors  du  commun 

Incommode  fort  qui  vous  aime  , 

Et  sous  le  respect  importun  1  5 

Un  beau  feu  s'éteint  de  lui-même. 


1 .   Votre  rang,  comme  il  est  dit  ci-dessus  au  vers  6.  Voyez  tome  I, 
p.  4X9>  note  1»  et  le  Lexique. 


POÉSIES   DIVERSES.  i7i 

J'aime  un  peu  l'indiscrétion 

Quand  je  veux  faire  des  maîtresses  ; 

Et  quand  j'ai  de  la  passion  y 

J'ai  grand  amour  pour  les  caresses.  20 

Mais  si  j'osois  me  hasarder 
Avec  vous  au  moindre  pillage , 
Vous  me  feriez  bien  regarder 
Le  grand  chemin  de  mon  village. 

J'aime  donc  mieux  laisser  mourir  2  5 

L'ardeur  qui  seroit  maltraitée , 
Que  de  prétendre  à  conquérir 
Ce  qui  n'est  point  de  ma  portée. 


172  POÉSIES   DIVERSES. 


LXII 


STANCES. 


Ces  stances  ont  paru  pour  Ja  première  fois  à  la  page  0,5  de  la 
cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy.  Nous  ignorons  quelle 
est  la  personne  désignée  par  le  nom  àHAminte. 

Que  vous  sert-il  de  me  charmer  ? 

Aminte ,  je  ne  puis  aimer 

Où  je  ne  vois  rien  à  prétendre  : 
Je  sens  naître  et  mourir  ma  flamme  à  votre  aspect  ; 
Et  si  pour  la  beauté  j'ai  toujours  l'âme  tendre,  5 

Jamais  pour  la  vertu  je  n'ai  que  du  respect. 

Vous  me  recevez  sans  mépris , 

Je  vous  parle,  je  vous  écris  , 

Je  vous  vois  quand  j'en  ai  l'envie: 
Ces  bonheurs  sont  pour  moi  des  bonheurs  superflus  ;    r  o 
Et  si  quelque  autre  y  trouve  une  assez  douce  vie , 
Il  me  faut  pour  aimer  quelque  chose  de  plus. 

Le  plus  grand  amour  sans  faveur, 

Pour  un  homme  de  mon  humeur, 

Est  un  assez  triste  partage  :  i  5 

Je  cède  à  mes  rivaux  cet  inutile  bien, 
Et  qui  me  donne  un  cœur,  sans  donner  davantage , 
M'obligeroit  bien  plus  de  ne  me  donner  rien. 

Je  suis  de  ces  amants  grossiers 

Qui  n'aiment  pas  fort  volontiers  2  o 

Sans  aucun  prix  de  leurs  services , 
Et  veux ,  pour  m'en  payer,  un  peu  mieux  qu'un  regard  ; 
Et  l'union  d'esprits  est  pour  moi  sans  délices , 
Si  les  charmes  des  sens  n'y  prennent  quelque  part. 


POÉSIES   DIVERSES.  173 


LXI11 


EP1GKAIYIMK. 


Cette  épigramme  a  été  publiée  pour  la  première  fois  à  la  page  96 
de  la  cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy.  Le  nom  de 
Philis  désigne-t-il  encore  ici  Mlle  Serment,  comme,  d'après  Granet, 
dans  les  pièces  XLYIII  et  XL1X? 

Qu'on  te  flatte,  qu'on  te  baise, 

Tu  ne  t'effarouches  point , 

Philis,  et  le  dernier  point 

Est  le  seul  qui  te  déplaise. 

Cette  amitié  de  milieu  5 

Te  semble  être  selon  Dieu , 

Et  du  ciel  t' ouvrir  la  porte  ; 

Mais  détrompe-toi  l'esprit  : 

Quiconque  aime  de  la  sorte 

Se  donne  au  diable  à  crédit.  1  o 


174  POÉSIES    DIVERSES. 


LXIV 


HONDEAU. 


Ce  rondeau  a  été  imprimé  également  pour  la  première  fois  à  la 
page  96  de  la  cinquième  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy. 

Je  pense,  à  vous  voir  tant  d'attraits , 
Qu  Amour  vous  a  formée  exprès 
Pour  faire  que  sa  fête  on  chomme i  ; 
Car  vous  en  avez  une  somme 
Bien  dangereuse  à  voir  de  près.  5 

Vous  êtes  belle  plus  que  très  , 
Et  vous  avez  le  teint  si  frais , 
Qu'il  n'est  rien  d'égal  (au  moins  comme 
Je  pense)  à  vous. 

Vos  yeux ,  par  des  ressorts  secrets,  1  o 

Tiennent  mille  cœurs  dans  vos  rets; 
Qui  s'en  défend  est  habile  homme  : 
Pour  moi  qu'un  si  beau  feu  consomme, 
Nuit  et  jour,  percé  de  vos  traits , 

Je  pense  à  vous.  1  5 

1.   Chomme ,  chôme.  Nous  reproduisons  l'orthographe  de  la  pre- 
mière édition. 


POÉSIES   DIVERSES.  i  75 


LVX 

REMERC1ME1NT    PRÉSENTA    AU    ROI 

en  l'année  i663. 

Louis  XIV  créa  des  pensions  pour  soixante-deux  savants  de  l'Eu- 
rope à  partir  du  ier  janvier  i663.  Deux  listes  avaient  été  dressées 
pour  préparer  ce  travail.  Dans  l'une,  qui  est  de  Chapelain,  Corneille 
est  ainsi  désigné  :  ce  Corneille  (Pierre).  Est  un  prodige  d'esprit  et  l'or- 
nement du  théâtre  françois.  Il  a  de  la  doctrine  et  du  sens,  lequel  paroît 
néanmoins  plus  dans  tout  le  détail  de  ses  pièces  que  dans  le  gros,  où 
très-souvent  le  dessein  est  faux,  à  les  faire  tomber  parmi  les  plus 
communes,  si  ce  défaut  d'art  général  n'étoit  récompensé  amplement 
par  l'excellence  du  particulier,  qui  ne  sauroit  être  plus  exquis  dans 
l'exécution  des  parties.  Hors  du  théâtre,  on  ne  sait  s'il  réussiroit  en 
prose  et  en  vers,  agissant  de  son  chef;  car  il  a  peu  d'expérience  du 
monde,  et  ne  voit  guère  rien  hors  de  son  métier.  Les  paraphrases 
sur  Y  Imitation  de  Jésus-  Christ  sont  très-belles,  mais  c'est  plus  tra- 
duction qu'invention.  »  (Continuation  des  Mémoires  de  littérature — 
de  M.  de  Salengre,  Paris,  1726,  tome  II,  p.  48  et  49«)  L'autre 
liste,  qui  est  de  Costar,  renferme  ce  jugement  beaucoup  plus  concis  : 
t  Corneille.  Le  premier  poète  du  monde  pour  le  théâtre.  »  [Ibidem, 
p.  320.)  Il  est  confirmé  par  celui  de  la  liste  définitive  qui  porte: 
«  Au  sieur  Pierre  Corneille,  premier  poète  dramatique  du  monde, 
deux  mille  livres.  t>  (Pièces  intéressantes  et  peu  connues  pour  servir  à 
ridstoire  [par  de  la  Place],  1781,  tome  I,  p.  198.)  Il  est  probable 
que  Corneille  ne  tarda  guère  à  adresser  au  Roi  le  Remercimmt  qu'on 
va  lire  :  nous  le  trouvons  aux  pages  276-279  des  Délices  de  la  poésie 
galante  des  plus  célèbre?  Autheurs  du  Temps,  dont  l'Achevé  d'imprimer 
est  du  2  5  septembre  i663*  ;  mais  le  P.  Tournemine  nous  apprend, 

1 .  On  lit  aussi  cette  pièce  aux  pages  36  et  suivantes  de  la  pre- 
mière partie  de  l'édition  des  Délices  de  1666.  Cette  édition  de  1666 
nous  a  paru  en  tout  conforme  à  celle  de  i663. 


i"j6  POÉSIES   DIVERSES. 

dans  sa  Défense  du  grand  Corneille  ',  qu'il  a  laissa  passer  un  an  sans 
demander  le  brevet  {de  sa  pension),  et  sans  remercier  {le  ministre).  Je 
le  sais ,  dit-il ,  de  l'abbé  Gallois ,  à  qui  le  ministre  en  avoit  fait  des 
reproches,  et  qui  conduisit  Corneille  à  l'hôtel  Colbert.  »  Ces  vers 
furent  d'abord  imprimés  à  part  (Paris,  M.DC.LXIII ,  sans  nom  de 
libraire  ni  d'imprimeur,  7  pages  in-40)  '.  nous  devons  à  l'obligeance 
de  M.  le  comte  de  Lurde  la  communication  de  cette  édition  originale. 
Ils  furent  ensuite  réimprimés  en  1667  et  en  1669,  à  la  suite  du  Poème 
sur  les  Victoires  du  Roi.  Dans  l'impression  de  i663  et  dans  les  Délices 
de  la  poésie  galante,  ils  sont  intitulés  :  Remercîment  au  Roy;  dans  celle 
de  1667,  que  nous  suivons,  ils  ont  le  titre  que  nous  avons  adopté; 
nous  n'avons  pu  voir  la  réimpression  de  1669.  Nous  donnons  en 
note  les  variantes  de  l'édition  in-40  et  des  Délices.  —  On  peut  com- 
parer à  cette  pièce  de  Corneille  celle  que  Molière  composa  à  la  même 
occasion,  et  qui  parut  également  à  Paris  en  i663,  7  pages  in-40  (chez 
Guillaume  de  Luyne  et  Gabriel  Quinet). 

Ainsi  du  Dieu  vivant  la  bonté  surprenante 

Verse ,  quand  il  lui  plaît ,  sa  grâce  prévenante  ; 

Ainsi  du  haut  des  cieux  il  aime  à  départir 

Des  biens  dont  notre  espoir  n'osoit  nous  avertir. 

Comme  ses2  moindres  dons  excèdent  le  mérite,  5 

Cette  même  bonté  seule  l'en  sollicite  ', 

Il  ne  consulte  qu'elle,  et  maître  qu'il  en  est, 

Sans  devoir  à  personne,  il  donne  à  qui  lui  plaît. 

Telles  sont  les  faveurs  que  ta  main  nous  partage , 
Grand  Roi ,  du  Roi  des  rois  la  plus  parfaite  image  :      1  o 
Tel  est  l'épanchement  de  tes  nouveaux  bienfaits; 
Il  prévient  l'espérance3,  il  surprend  les  souhaits, 
Il  passe  le  mérite ,  et  ta  bonté  suprême 

1 .  Page  xxxm  de  l'édition  de  Granet,  qui  a  placé  cette  Défense  en 
tète  des  OEuvres  diverses. 

2.  On  a  imprimé  à  tort  ces  dans  les  Délices. 

3.  Corneille  a  déjà  dit  précédemment  dans  son  Remercîment  a  Ma- 
zarin,  p.  g5,  vers  14  : 

Tes  dons  ont  devancé  même  mon  espérance. 


POÉSIKS  DIVERSES.  i77 

Pour  faire  des  heureux  les  choisit  d'elle-même. 
Elle  m'a  mis  du  *  nombre ,  et  me  force  à  rougir  i  5 

De  ne  me  voir  qu'un  zèle  incapable  d'agir. 
Son  excès  dans  mon  cœur  fait  des  troubles  étranges. 
Je  sais  que  je  te  dois  des  vœux  et  des  louanges , 
Que  ne  t'en  pas  offrir  c'est  te  les  dérober2  ; 
Mais  si  j'y  fais  effort,  je  cherche  à  succomber,  20 

Et  le  plus  beau  succès  que  ma  muse  en  obtienne 
Profanera  ta  gloire  et  détruira  la  mienne. 
Je  veux  bien  l'immoler  toute  entière  à  mon  roi  ; 
Mais  si  je  n'en  ai  plus,  je  ne  puis  rien  pour  toi  *  ; 
Et  j'en  dois  prendre  soin  ,  pour  éviter  le  crime  2  5 

D'employer  à  te  peindre  un  pinceau  sans  estime. 
Il  n'est  dans  tous  les  arts  secret  plus  excellent 
Que  d'y  voir  sa  portée  et  choisir  son  talent 4  : 
Pour  moi  qui  de  louer  n'eus  jamais  la  méthode, 
J'ignore  encor  le  tour  du  sonnet  et  de  l'ode.  ?o 

Mon  génie  au  théâtre  a  voulu  m'attacher  ; 
Il  en  a  fait  mon  fort ,  il  sait  m'y  retrancher 6  ; 
Partout  ailleurs  je  rampe,  et  ne  suis  plus  moi-même  : 
Mais  là  j'ai  quelque  nom,  là  quelquefois  on  m'aime6; 
Là  ce  même  génie  ose  de  temps  en  temps  3  5 

1.  On  lit  au,  pour  du,  dans  les  Délices. 

2.  Var.  Que  ne  t'en  pas  donner  c'est  te  les  dérober.  {Délices.) 

3.  Dans  les  Délices  : 

Mais  si  je  n'en  ai  plus,  je  n'ai  plus  rien  pour  toi , 

leçon  très -probablement  fautive;  et  au  vers  suivant  :  Et  je  dois,  va- 
riante tout  à  fait  inadmissible. 

4.  Oranet  donne  ainsi  ce  vers,  peut-être  d'après  l'édition  de  1669  : 

Que  de  savoir  connoître  et  choisir  son  talent. 

5.  Granet  et  tous  les  éditeurs  qui  l'ont  suivi  ont  imprimé  :  mon 
sort,  qui  est  une  faute  évidente,  etye  dois  m  y  retrancher ,  qui  se  trouve 
peut-être  dans  l'édition  de  1669. 

fi.  Voyez  ci-dessus,  pièce  XX,  p.  65-72  passim. 

CoRNETiXE      X  12 


178  POESIES    DIVERSES. 

Tracer  de  ton  portrait  quelques  traits  éclatants. 

Par  eux  de  Y  Andromède  il  sut  ouvrir  la  scène  *  ; 

On  y  vit  le  Soleil  instruire  Melpomène2, 

Et  lui  dire  qu'un  jour  Alexandre  et  César 

Sembleroient  des  vaincus  attachés  à  ton  char 3  :  4«> 

Ton  front  le  promettoit ,  et  tes  premiers  miracles 

Ont  rempli  hautement  la  foi  de  mes  oracles. 

A  peine  tu  parois  les  armes  à  la  main, 

Que  tu  ternis  les  noms  du  Grec  et  du  Romain  * . 

Tout  tremble  ,  tout  fléchit  sous  tes  jeunes  années;       46 

Tu  portes  en  toi  seul  toutes  les  destinées; 

Rien  n'est  en  sûreté  s'il  ne  vit  sous  ta  loi  : 

On  t'offre,  ou  pour  mieux  dire,  on  prend  la  paix  de  toi  ; 

Et  ceux  qui  se  font  craindre  aux  deux  bouts  de  la  terre  , 

Pour  ne  te  craindre  plus  renoncent  à  la  guerre.  5  o 

Ton  hymen  est  le  sceau  de  cette  illustre  paix  ' . 
Sur  ces  grands  coups  d'Etat  *  tout  parle ,  et  je  me  tais  ; 
Et  sans  me  hasarder  à  ces  nobles  amorces , 
J'attends  l'occasion  qui  s'arrête  à  mes  forces. 
Je  la  trouve ,  et  j'en  prends  le  glorieux  emploi,  5  5 

Afin  d'ouvrir  ma  scène  encore  un  coup  pour  toi  : 

1.  Vak.   Par  ceux  de  Y  Andromède  il  sut  ouvrir  la  scène.  [Délices.) 
1.  Var.  On  y  vit*  le  Soleil  prédire  à  Melpomène 

Que  nous  verrions  un  jour  Alexandre  et  César 
Ainsi  que  des  vaincus  attachés  à  ton  char. 

(Édition  de  i663  et  Délices.) 

3.  Voyez  tome  V,  p.  317,  note  4« 

4.  D'Alexandre  et  de  César,  qui  viennent  d'être  nommés  au  vers  3g. 

5.  Voyez  tome  VI,  p.  254,  note  1. 

6.  Ainsi  dans  l'édition  in-4°,  dans  les  Délices  et  dans  l'édition 
de  1667.  On  lit  incidents,  au  lieu  de  coups  d'Etat,  dans  les  OEuvres  di- 
verses et  dans  toutes  les  éditions  suivantes.  Granet  est  sans  doute  l'au- 
teur de  ce  changement. 

*  Granet  dit  par  erreur  que  l'édition  in-40  porte  :  «  On  y  voit.  » 
Cette  leçon  ou  plutôt  cette  faute  ne  s'y  trouve  pas,  mais  elle  est  dans 
les  deux  éditions  des  Délices. 


POÉSIES    DIVERSES.  179 

J'y  mets  la  Toison  d'or;  mais  avant  qu'on  la  voie , 
La  Paix  vient  elle-même  y  préparer  la  joie  ; 
L'Hymen  l'y  fait  descendre;  et  de  Mars  en  courroux 
Par  ta  digne  moitié  j'y  romps  les  derniers  coups  *.        60 

On  te  voyoit  dès  lors  à  toi  seul  comparable 
Faire  éclater  partout  ta  conduite  adorable , 
Remplir  les  bons  d'amour,  et  les  méchants  d'effroi 2 . 
Jusque-là  toutefois  tout  n'étoit  pas  à  toi; 
Et  quelques  doux  effets  qu'eût  produits  ta  victoire3,     6  5 
Les  conseils  du  grand  Jule*  avoient  part  à  ta  gloire. 

Maintenant  qu'on  te  voit  en6  digne  potentat 
Réunir  en  ta  main  les  rênes  de  l'Etat , 
Que  tu  gouvernes  seul ,  et  que  par  ta  prudence 
Tu  rappelles  des  rois  l'auguste  indépendance ,  7  o 

Il  est  temps  que  d'un  air  encor  plus  élevé 
Je  peigne  en  ta  personne  un  monarque  achevé  ; 
Que  j'en  laisse  un  modèle  aux  rois  qu'on  verra  naître , 
Et  qu'en  toi  pour  régner  je  leur  présente  un  maître. 

C'est  là  que  je  saurai  fortement  exprimer  7  5 

L'art  de  te  faire  craindre  et  de  te  faire  aimer; 
Cet  accès  libre  à  tous,  cet  accueil  favorable , 
Qu'ainsi  qu'au*  plus  heureux  tu  fais  au  misérable. 

1.  Y  oyez  le  Prologue  de  la  Toison  cTor,  tome  VI,  p.  a53  et  sui- 
vantes. 

2.  Ce  vers  se  trouve  dans  le  Cid,  acte  I,  scène  m,  vers  176.  Voyez 
au  tome  III,  p.  11 4- 

3.  Il  y  &  produit,  sans  accord,  dans  les  anciennes  éditions,  y  com- 
pris celle  de  Granet,  où  on  lit  quelque ,  sans  s  :  «  quelque  doux  ef- 
fets »  :  voyez  tome  I,  p.  2o5,  note  3,  et  le  Lexique.  —  Les  Délices 
donnent  :  «  la  victoire,  »  pour  «ta  vio-toire.  » 

4.  Jules,  cardinal  deMazarin,  mort  le  9  mars  1661. 

5.  On  lit  ici,  dans  les  deux  éditions  des  Délices  :  un,  au  lieu  de 
en,  et  au  vers  suivant  :  «  la  rêne,  »  pour  «  les  rênes,  »  mais  ce  sont 
des  fautes  évidentes.   . 

fS.  Aux,  dans  les  deux  éditions  des  Délices. 


i8o  POESIES    DIVERSES. 

Je  te  peindrai  vaillant,  juste  ,  bon,  libéral , 

Invincible  en  la  guerre,  en  la  paix  sans  égal1  :  80 

Je  peindrai  cette  ardeur  constante  et  magnanime 

De  retrancher  le  luxe  et  d'extirper  le  crime2  ; 

Ce  soin  toujours  actif  pour  les  nobles  projets  , 

Toujours  infatigable  au  bien  de  tes  sujets; 

Ce  choix  de  serviteurs  fidèles  ,  intrépides ,  8  5 

Qui  soulagent  tes  soins ,  mais  sur  qui  tu  présides , 

Et  dont  tout  le  pouvoir,  qui  fait  tant  de  jaloux, 

N'est  qu'un  écoulement  de  tes  ordres  sur  nous. 

Je  rendrai  de  ton  nom  l'univers  idolâtre  : 

Mais  pour  ce  grand  chef-d'œuvre,  il  faut  un  grand  théâtre. 

Ouvre-moi  donc ,  grand  Roi ,  ce  prodige  des  arts 
Que  n'égala  jamais  la  pompe  des  Césars  , 
Ce  merveilleux  salon3  où  ta  magnificence 
Fait  briller  un  rayon  de  sa  toute-puissance  ; 
Et  peut-être,  animé  par  tes4  yeux  de  plus  près,  95 

J'y  ferai  plus  encor  que  je  ne  te  promets. 
Parle,  et  je  reprendrai  ma  vigueur  épuisée  , 


1.  On  lit  dans  les  OEuvres  diverses  publiées  par  Granet  et  dans 
toutes  les  éditions  suivantes  : 

Invincible  à  la  guerre ,  à  la  paix  sans  égal. 

2.  Var.  De  retrancher  le  luxe  et  de  punir  le  crime.  {Délices.) 

—  Corneille  fait  ici  allusion  d'une  part,  à  l'ordonnance  de  juin  i663, 
contre  le  luxe  des  habits,  carrosses  et  ornements,  qui  renouvelait  les 
déclarations  de  novembre  i656  et  de  novembre  1660;  et  d'autre  part, 
à  l'édit  de  mars  1667,  portant  création  d'un  lieutenant  de  police  de 
Paris  :  le  premier  lieutenant  nommé  fut  la  Reynie. 

3.  Il  s'agit  ici  du  «  grand  et  superbe  salon  que  le  Roi  conçut  et 
fit  faire  fixe  et  permanent  pour  les  divers  spectacles,  »  salon  dont  nous 
avons  donné  la  description,  par  l'abbé  de  Pure,  tome  VII,  p.  280  et 
suivante.,  dans  la  Notice  de  Psyché. 

4.  On  lit  ici  à  tort,  dans  les  Délices  :  a  les  »,  pour  a  les  »,  et  au  vers 
suivant  :  «je  ferai»,  pour  «  j'y  ferai  \>  ,  leçon  un  peu  moins  mau- 
vaise, mais  cependant  peu  probable. 


POÉSIES   DIVERSES.  181 

Jusques  à  démentir  les  ans  qui  l'ont  usée. 
Vois  comme  elle  renaît  dès  que  je  pense  à  toi , 
Gomme  elle  s'applaudit  d'espérer  en  mon  roi  *  ;  100 

Le  plus  pénible  effort  n'a  rien  qui  la  rebute  : 
Commande,  et  j 'entreprends  ;  ordonne,  et  j'exécute. 

i.  Var.  Comme  elle  s'applaudit  d'espérer  en  son  roi.  [Délices.) 


182  POÉSIES    DIVERSES. 


LXVI 

A     MONSEIGNEUR     LE    DUC     DE    GUISE, 

SUR   LA    MORT  DE  MONSEIGNEUR   SON   ONCLE. 
SONNET. 

Ce  sonnet  est  adressé  à  Louis- Joseph ,  né  en  i65o  ,  mort  en  1671 , 
fils  unique  de  Louis  de  Lorraine ,  duc  de  Joyeuse  et  d'Angoulème, 
mort  en  1664*  Louis-Joseph  hérita  du  titre  de  son  oncle,  Henri  II 
duc  de  Guise,  qui  mourut  sans  enfants  le  2  juin  1664.  H  est  le  seul 
duc  de  Guise  qui  ait  succédé  à  un  oncle,  et  par  conséquent  le  titre 
même  ,  tel  que  nous  l'avons  reproduit ,  suffit  pour  nous  apprendre  à 
qui  le  sonnet  s'adresse.  Ce  titre  se  trouve  en  tête  d'un  exemplaire 
in-folio,  d'un  seul  feuillet,  signé  Corneille,  et  probablement  unique 
aujourd'hui,  qui  portait  le  n°  326  dans  le  catalogue  déjà  cité  au 
tome  IX,  p.  6o5,  note  2.  Cet  exemplaire  appartient  actuellement  à 
M.  Cousin,  qui  nous  l'a  très-obligeamment  communiqué.  Le  même 
intitulé  se  rencontre  aussi  en  tête  de  deux  copies  :  l'une ,  assez  dé- 
fectueuse ,  conservée  à  la  bibliothèque  de  l'Institut  dans  le  porte- 
feuille 217  des  manuscrits  des  Godefroy;  l'autre,  plus  correcte,  occu- 
pant la  page  344  du  manuscrit  i5,244  ^u  fonds  français  de  la 
Bibliothèque  impériale,  et  qui  nous  a  été  indiquée  par  M.  Edouard 
Fournier.  Granet  et  les  éditeurs  qui  l'ont  suivi  n'ont  mis  d'autre 
titre  que  les  mots  :  A  Monseigneur  de  Guise,  et,  ne  tenant  aucun 
compte  du  titre  original,  ont  supposé  que  le  sonnet  était  adressé, 
non  à  un  neveu,  mais  à  un  fils,  a  Ce  sonnet,  dit  Granet,  est  adressé 
à  Henri  de  Lorraine ,  IIe  du  nom ,  duc  de  Guise,  fils  de  Charles  de 
Lorraine  duc  de  Guise,  mort  en  1640.  Il  fut  composé  la  même  année 
par  Corneille.  »  Une  lettre  de  Mézerai,  dont  l'original  fait  partie 
d'une  collection  de  pièces  autographes  conservées  à  la  Bibliothèque 
impériale  de  Saint-Pétersbourg,  lettre  dont  le  texte  a  été  publié  par 
M.  Edouard  Guardet  sous  ce  titre  :  Un  courrier  de  Paris  en  1664, 
d'abord  dans  la  Revue  française  (5e  année,  tome  XVII,  i85g  ,  p.  568 
et  56g),  et  ensuite  en  tirage  à  part,  nous  parle,  sous  la  date  du  <r  jeudi 


POÉSIES   DIVERSES.  i83 

10e  de  juillet  1664»  °  d'un  sonnet  composé  par  Corneille  au  sujet  de 
la  mort  de  cet  Henri  II  de  Lorraine.  Il  nous  paraît  à  peu  près  certain 
que  ce  sonnet  est  celui  qui  va  suivre,  et  que  c'est  bien  en  1664  qu'il  a 
été  composé.  Voici  du  reste  le  passage  de  Mézerai  :  a  Feu  M.  de  Guise 
ayant  fort  aimé  les  belles-lettres,  et  lui-même  composé  l'bistoire  de  son 
entreprise  de  Naples,  et  fait  quantité  de  fort  beaux  vers,  les  poètes 
se  sont  exercés  à  lui  dresser  des  éloges  et  des  épitaphes;  j'ai  joint  à 
ce  mémoire  un  sonnet  de  l'incomparable  M.  Corneille,  et  moi- 
même,  bien  que  je  ne  sois  pas  poète,  néanmoins  excité  par  le  sou- 
venir de  l'affection  que  ce  prince  a  eu  la  bonté  de  me  témoigner, 
comme  j'ai  su  qu'on  vouloit  faire  un  recueil  de  ces  pièces,  je  me 
suis  senti  ému  d'un  grain  de  folie  poétique  et  ai  rimé  le  sonnet  que 
voici ,  une  nuit  que  je  ne  pouvois  dormir  :  Aux  poètes,  sur  les  pièces 
qu'ils  ont  faites  à  V honneur  de  M.  de  Guise ,  c'est  pour  mettre  à  la  tête 
du  Recueil.  »  Après  avoir  copié  son  sonnet ,  que  nous  jugeons  inutile 
de  reproduire ,  Mézerai  ajoute  :  «  C'est  assurément  avoir  bien  de 
l'effronterie  de  joindre  un  si  méchant  sonnet  à  celui  de  M.  de  Cor- 
neille ;  mais  les  poètes  ont  des  suivants  ,  et  l'on  m'a  assuré  que  le 
sens  en  étoit  bon  et  l'air  assez  poétique.  »  Toutes  les  recherches  que 
nous  avons  faites  pour  trouver  quelque  trace  du  Recueil  dont  il  est 
question  ici  sont  restées  sans  résultat. 

Tallemant  des  Réaux,  dans  ses  Historiettes  (tome  VII,  p.  254),  nous 
apprend  que  notre  poète  était  un  des  commensaux  de  la  maison  : 
«  Corneille,  dit-il,  a  trouvé  moyen  d'avoir  une  chambre  à  l'hôtel 
de  Guise.  »  Ce  témoignage  est  corroboré  par  celui  de  l'abbé  d'Au- 
bignac.  Attribuant  à  Corneille  la  Défense  de  la  Sophonishe ,  qui  est 
réellement  de  Donneau  de  Visé  (voyez  tome  VI,  p.  457-459),  il 
s'exprime  de  la  sorte  dans  un  de  ses  plus  violents  pamphlets  :  <r  Da- 
vantage, cette  Défense  est  dédiée  à  M.  le  Duc  de  Guise,  et  il  n'y  avoit 
que  vous  capable  de  lui  présenter  un  amas  d'ignorances ,  d'injures 
et  de  mensonges;  c'est  un  grand  prince  dont  la  naissance  et  l'érudi- 
tion, peu  commune  à  ceux  de  sa  qualité,  méritent  bien  qu'il  soit 
l'objet  des  veilles  et  des  ouvrages  des  plus  savants;  mais  vous  avez 
été  bien  peu  judicieux  de  payer  en  si  mauvaise  monnoie  le  couvert 
el  la  table  dont  il  vous  honore.  »  {Deux  Dissertations  concernant  le 
poème  dramatique.,,.  Paris,  du  Brueil,  i663,  p.  nj  et  118.) 

Croissez,  jeune  héros;  notre  douleur  profonde 
N'a  que  ce  doux  espoir  qui  la  puisse  affoiblir; 


184  POÉSIES   DIVERSES. 

Croissez ,  et  hâtez-vous  de  faire  voir  au  monde 
Que  le  plus  noble  sang  peut  encor  s'ennoblir. 

Croissez  pour  voir  sous  vous  trembler  la  terre  et  Fonde  : 
Un  grand  prince  vous  laisse  un  grand  nom  à  remplir  ; 
Et  ce  que  se  promit  sa  valeur  sans  seconde, 
C'est  par  vous  que  le  ciel  réserve  à  l'accomplir. 

Vos  aïeux  vous  diront  par  d'illustres  exemples 

Comme  il  faut  mériter  des  sceptres  et  des  temples  ;      i  o 

Vous  ne  verrez  que  gloire  et  que  vertus  en  tous. 

Sur  des  pas  si  fameux  suivez  l'ordre  céleste  ; 
Et  de  tant  de  héros  qui  revivent  en  vous 
Egalez  le  dernier,  vous  passerez  le  reste. 


POESIES   DIVERSES  i85 


LXVII 


AU    ROI, 

POUR    LE    RETARDEMENT    DU    PAYEMENT    DE    SA    PENSION. 

Cette  pièce  se  trou-ve  dans  quelques  exemplaires  des  OEuvres  di- 
verses de  P.  Corneille,  publiées  en  1738  par  l'abbé  Granet,  sur  le 
feuillet  intercalaire  où  figure  le  Sonnet  sur  la  mort  de  Louis  XIII 
(voyez  ci-dessus,  p.  88  et  89).  Nous  empruntons  à  M.  Taschereau 
la  note  suivante,  qui  permet  de  classer  ce  sixain  à  sa  véritable  place  : 
«  Le  chevalier  de  Cailly ,  plus  connu  sous  le  nom  anagrammatique 
de  d'Aceilly,  nous  a,  par  une  petite  pièce  de  son  recueil,  fait  con- 
naître la  cause  et  la  date  de  ce  retard  : 

Aux  poètes ,  en  i665,  sur  le  reculement  de  leurs  pensions  assignées  sur 
le  même  fonds  que  les  bâtiments  du  Louvre. 

Tant  pour  vous  que  pour  ses  maçons 

Le  Louvre  n'a  qu'un  même  fonds; 

Mais  ils  ont  le  pas  aux  recettes. 

N'en  soyez  pas  tant  effrayés  : 

On  satisfera  les  poètes 

Quand  les  maçons  seront  payés.  » 

(Histoire   de  la  vie  et  des  ouvrages  de  P.  Corneille,  seconde  édition, 
p.  363,  note  40 

Grand  Roi,  dont  nous  voyons  la  générosité 
Montrer  pour  le  Parnasse  un  excès  de  bonté, 

Que  n'ont  jamais  eu  tous  les  autres , 
Puissiez-vous  dans  cent  ans  donner  encor  des  lois , 
Et  puissent  tous  vos  ans  être  de  quinze  mois  5 

Gomme  vos  commis  font  les  nôtres  ! 


186  POÉSIES   DIVERSES. 


LXVIII 

AU    ROI, 

SUR  SON  RETOUR  DE  FLANDRE. 

L'édition  originale,  en  quatre  pages  in-40,  ne  porte  ni  adresse  ni 
nom  de  libraire  ;  seulement  on  lit  à  la  fin  la  mention  :  «  Avec  per- 
mission, »  la  date  de  1667  et  la  signature  de  Corneille.  L'exemplaire 
que  nous  en  avons  vu  figurait,  sous  le  n°  324,  dans  le  catalogue  de 
vente  dont  nous  avons  déjà  parlé  (tome  IX,  p.  606,  note  2,  et  ci- 
dessus,  p.  182);  il  a  été  acheté  par  M.  Victor  Cousin,  qui  a  bien 
voulu  nous  permettre  de  le  collationner.  —  Ces  vers  ont  été  réim- 
primés dans  le  cours  de  la  même  année  1667,  et  aussi,  suivant  Gra- 
net,  en  1669,  avec  le  poëme  sur  les  Victoires  du  Roi,  in-12;  nous 
n'avons  pas  vu  cette  dernière  édition. 

Le  Roi  rentra  à  Paris  à  la  fin  du  mois  d'août  1667.  On  peut  voir 
dans  la  pièce  suivante  et  dans  les  notes  qui  l'accompagnent  le  récit 
de  ses  opérations  militaires. 

Tu  reviens ,  ô  mon  Roi ,  tout  couvert  de  lauriers  ; 
Les  palmes  à  la  main  tu  nous  rends  nos  guerriers  ; 
Et  tes  peuples,  surpris  et  charmés  de  leur  gloire, 
Mêlent  un  peu  d'envie  à  leurs  chants  de  victoire. 

Ils  voudroient  avoir  vu  comme  eux  aux  champs  de  Mars 
Ton  auguste  fierté  guider  tes  étendards  ; 
Avoir  dompté  comme  eux  l'Espagne  en  sa  milice , 
Réduit  comme  eux  la  Flandre  à  te  faire  justice; 
Et  su  mieux  prendre  part  à  tant  de  murs  forcés 
Que  p?r  des  feux  de  joie  et  des  vœux  exaucés.  1  o 

Nos  muses  à  leur  tour,  de  même  ardeur  saisies , 
Vont  redoubler  pour  toi  leurs  nobles  jalousies, 
Et  ta  France  en  va  voir  les  merveilleux  efforts 
Déployer  à  Tenvi  leurs  plus  rares  trésors. 


POÉSIES   DIVERSES.  187 

Elles  diront  quels  soins,  quels  rudes  exercices,  1  5 

Quels  travaux  assidus  étoient  lors  tes  délices, 

Quels  secours  aux  blessés  prodiguoit  ta  bonté  * , 

Quels  exemples  donnoit  ton  intrépidité , 

Quels  rapides  succès  ont  accru  ton  empire , 

Et  le  diront  bien  mieux  que  je  ne  le  puis  dire.  20 

C'est  à  moi  de  m'en  taire ,  et  ne  pas  avilir 

L'honneur  de  ces  lauriers  que  tu  viens  de  cueillir 

De  mon  génie  usé  la  chaleur  amortie 

A  leur  gloire  immortelle  est  trop  mal  assortie, 

Et  défigureroit  tes  grandes  actions  a  5 

Par  l'indigne  attentat  de  ses  expressions. 

Que  ne  peuvent,  grand  Roi ,  tes  hautes  destinées 
Me  rendre  la  vigueur  de  mes  jeunes  années  ! 
Qu'ainsi  qu'au  temps  du  Cid  je  ferois  de  jaloux! 
Mais  j'ai  beau  rappeler  un  souvenir  si  doux,  3o 

Ma  veine,  qui  charmoit  alors  tant  de  balustres2, 
N'est  plus  qu'un  vieux  torrent  qu'ont  tari  douze  lustres8; 
Et  ce  seroit  en  vain  qu'aux  miracles  du  temps 
Je  voudrois  opposer  l'acquis  de  quarante  ans. 
Au  bout  d'une  carrière  et  si  longue  et  si  rude,  3  5 

On  a  trop  peu  d'haleine  et  trop  de  lassitude  : 
A  force  de  vieillir  un  auteur  perd  son  rang  ; 
On  croit  ses  vers  glacés  par  la  froideur  du  sang; 
Leur  dureté  rebute ,  et  leur  poids  incommode, 
Et  la  seule  tendresse  est  toujours  à  la  mode.  40 

Ce  dégoût  toutefois  ni  ma  propre  langueur 
Ne  me  font  pas  encor  tout  à  fait  perdre  cœur  ; 
Et  dès  que  je  vois  jour  sur  la  scène  à  te  peindre, 
Il  rallume  aussitôt  ce  feu  prêt  à  s'éteindre. 

1.  Var.  Dans  l'édition  de  1667  in-40  ce  vers  vient  après  le  suivant. 

2.  Voyez  tome  IX,  p.  64,  note  ?. 

3.  Corneille,  né,  comme  on   sait,  le  6  juin  1606,  venait  effective- 
ment d'entrer  dans  sa  soixante  et  unième  année. 


188  POÉSIES   DIVERSES. 

Mais  comme  au  vif  éclat  de  tes  faits  inouïs  4  5 

Soudain  mes  foibles  yeux  demeurent  éblouis, 
J'y  porte,  au  lieu  de  toi,  ces  héros  dont  la  gloire 
Semble  épuiser  la  fable  et  confondre  l'histoire; 
Et  m'en  faisant  un  voile  entre  la  tienne  et  moi , 
J'assure  mes  regards  pour  aller  jusqu'à  toi.  5o 

Ainsi  de  ta  splendeur  mon  idée  enrichie 
En  applique  à  leur  front  la  clarté  réfléchie , 
Et  forme  tous  leurs  traits  sur  les  moindres1  des  tiens, 
Quand  je  veux  faire  honneur  aux  siècles  anciens. 
Sur  mon  théâtre  ainsi  tes  vertus  ébauchées  5  5 

Sèment  ton  grand  portrait  par  pièces  détachées  ; 
Les  plus  sages  des  rois ,  comme  les  plus  vaillants, 
Y  reçoivent  de  toi  leurs  plus  dignes  brillants. 
J'emprunte ,  pour  en  faire  une  pompeuse  image , 
Un  peu  de  ta  conduite,  un  peu  de  ton  courage,  60 

Et  j'étudie  en  toi  ce  grand  art  de  régner, 
Qu'à  la  postérité2  je  leur  fais  enseigner3. 

C'est  tout  ce  que  des  ans  me  peut  souffrir  la  glace; 
Mais  j'ai  d'autres  moi-même  à  servir  en  ma  place: 
Deux  fils  dans  ton  armée*,  et  dont  l'unique  emploi      6  5 

1.  Le  moindre,  dans  les  OEwres  diverses  publiées  par  Granet  et  dans 
les  éditions  suivantes. 

2.  Leur  postérité,  dans  les  OEuvres  diverses  publiées  par  Granet  et 
dans  les  éditions  suivantes. 

3.  Corneille  avait  déjà  exprimé  les  mêmes  idées  dans  son  Remer- 
ciment  à  Mazarin.  Voyez  ci-dessus,  p.  96-98,  pièce  XXX,  vers  33-64. 

4.  Pierre  Corneille  ,  qui  fut  capitaine  de  chevau-légers  et  gen- 
tilhomme de  la  maison  du  Roi,  né  le  7  septembre  1643  ,  était  entré 
au  service  à  l'âge  de  vingt  et  un  ans,  dès  1664,  ainsi  que  Corneille 
lui-même  nous  l'apprend  en  octobre  1676  par  ces  vers  de  l'épître 
An  Roi  sur  Cinna  (voyez  ci-après)  : 

Je  sers  depuis  douze  ans,  mais  c'est  par  d'autres  bras 
Que  je  verse  pour  toi  du  sang  dans  nos  combats. 

Le  second  fils  de  Corneille,  dont  nous  ne  connaissons  ni  le  prénom 
ni  la  date  de  naissance,  était,  en   1661  ,  entré  comme  page  chez  la 


POESIES    DIVERSES.  189 

Est  d  y  porter  du  sang  à  répandre  pour  toi  *. 

Tous  deux  ils  tâcheront,  dans  l'ardeur  de  te  plaire, 

D'aller  plus  loin  pour  toi  que  le  nom  de  leur  père  ; 

Tous  deux,  impatients  de  le  mieux  signaler, 

Ils  brûleront  d  agir,  quand  je  tremble  à  parler;  70 

Et  ce  feu  qui  sans  cesse  eux  et  moi  nous  consume 

Suppléera  par  l'épée  au  défaut  de  ma  plume. 

Pardonne ,  grand  vainqueur,  à  cet  emportement  : 
Le  sang  prend  malgré  nous  quelquefois  son  moment  ; 
D'un  père  pour  ses  fils  l'amour  est  légitime  ;  7  5 

Et  j'ai  droit  pour  les  miens  de  garder  quelque  estime, 
Après  qu'en  leur  faveur  toi-même  as  bien  voulu 
M'assurer  que  l'abord  ne  t'en  a  point  déplu. 

Le  plus  jeune  a  trop  tôt  reçu  d'heureuses  marques 
D'avoir  suivi  les  pas  du  plus  grand  des  monarques;       80 
Mais  s'il  a  peu  servi ,  si  le  feu  des  mousquets 
Arrêta  dès  Douai  ses  plus  ardents  souhaits , 
Il  fait  gloire  du  lieu  que  perça  leur  tempête  : 
Ceux  qu'elle  atteint  au  pied  ne  cachent  pas  leur  tête2; 

duchesse  de  Nemours  (voyez  ci-après ,  lettre  XXV)  ;  il  était  lieute- 
nant de  cavalerie  lorsqu'il  mourut.  Voyez  ci-dessous,  note  2. 
1.  Var.  Des  fils  qui  de  leur  sang  cherchent  à  t'acheter 
Ces  succès  qu'à  l'envi  d'autres  vont  exalter. 

(Edition  originale.) 

1.  Le  second  fils  de  Corneille,  dont  nous  venons  de  parler  (p.  188, 
note  4),  fut  blessé  au  pied  pendant  le  siège  de  Douai,  qui  se  ter- 
mina, au  bout  de  quelques  jours,  par  la  prise  de  la  ville,  le  6  juil- 
let. Robinet,  dans  une  Lettre  en  vers  à  Madame  ,  du  3o  juillet  1667  , 
nous  raconte  à  ce  sujet  l'anecdote  suivante,  aujourd'hui  fort  con- 
nue, que  M.  Floquet  a  le  premier  signalée  à  l'attention  du  public  : 

Vous  connoissez  assez  l'aîné  des  deux  Corneilles  , 
Qui  pour  vos  chers  plaisirs  produit  tant  de  merveilles. 
Hé  bien  !  cet  homme-là  ,  malgré  son  Apollon, 
Fut  naguère  cité  devant  cette  police , 

Ainsi  qu'un  petit  violon  , 
Et  réduit ,  en  un  mot ,  à  se  trouver  en  lice 

Pour"  quelques  pailles  seulement 


190  POÉSIES   DIVERSES. 

Sur  eux  à  ta  fortune  ils  laissent  tout  pouvoir,  8  5 

Qu'un  trop  vigilant  commissaire 

Rencontra  fortuitement 

Tout  devant  sa  porte  cochère. 

Oh  !  jugez  un  peu  quel  affront! 
Corneille ,  en  son  cothurne  ,  étoit  au  double  mont 

Quand  il  fut  cité  de  la  sorte  ; 
Et  de  peur  qu'une  amende  honnîl  tous  ses  lauriers , 

Prenant  sa  muse  pour  escorte , 
Il  vint ,  comme  le  vent ,  au  lieu  des  plaidoyers  ; 

Mais  il  plaida  si  bien  sa  cause, 

Soi  t  en  beaux  vers  ou  franche  prose , 
Qu'en  termes  gracieux  la  police  lui  dit  : 

«  La  paille  tourne  à  votre  gloire. 

Allez,  grand  Corneille  ,  il  suffit.  » 
Mais  de  la  paille  il  faut  vous  raconter  l'histoire , 

Afin  que  vous  sachiez  comment 
Elle  étoit  à  sa  gloire  en  cet  événement. 
Sachez  donc  qu'un  des  fils  de  ce  grand  personnage 
Se  mêle  ,  comme  lui ,  de  cueillir  des  lauriers  , 

Mais  de  ceux  qu'aiment  les  guerriers , 
Et  qu'on  va  moissonner  au  milieu  du  carnage. 
Or  ce  jeune  cadet,  à  Douai  faisant  voir 
Qu'il  sait  des  mieux  remplir  le  belliqueux  devoir  , 
D'un  mousquet  espagnol  au  talon  reçut  niche  , 
Et  niche  qui  le  fit  aller  à  cloche-pié , 
Si  bien  qu'en  ce  moment ,  étant  estropié  , 
Il  fallut,  quoiqu'il  dît  sur  ce  cas  cent  fois  briche , 

Toute  sa  bravoure  cesser, 
Et  venir  à  Paris  pour  se  faire  panser. 
Or  ce  fut  un  brancard  qui  dans  cette  aventure  , 
Lui  servit  de  voiture  , 

Étant  de  paille  bien  garni  ; 

Et  comme  il  entra  chez  son  père , 

Il  s'en  fit  un  peu  de  litière. 

Voilà  tout  le  récit  fini. 

Nous  avons  vainement  cherché  aux  Archives  de  l'Empire  et  dans 
celles  de  la  Préfecture  de  police  quelques  traces  des  poursuites  diri- 
gées contre  Corneille.  Nous  remarquerons  seulement  qu'elles  avaient 
lieu  en  vertu  de  l'article  19  d'un  arrêt  du  parlement  de  Paris  du 
11  avril  i663,  faisant  «  inhibition  et  défense  à  toutes  personnes  de 
quelque  état  et  condition  qu'elles  soient,  de  jeter,  faire  ou  souffrir 
jeter  dans  les  rues  aucunes  immondices,  cendres  de  lessive,  paille, 
gravois,  terreaux,  tuileaux,  ardoises,  raclures  de  cheminées,  fumiers 
ni  quelqu'autres  ordures  que  ce  soit  :  sur  la  peine  de  huit  livres  d'à- 


POÉSIES    DIVERSES.  191 

Et1  s'offrent  tous  entiers  aux  hasards  du  devoir. 

De  nouveau  je  m'emporte.  Encore  un  coup,  pardonne 
Ce  doux  égarement  que  le  sang  me  redcnne  ; 
Sa  flatteuse  surprise  aisément  nous  séduit: 
La  pente  est  naturelle,  avec  joie  on  la  suit  :  90 

Elle  fait  une  aimable  et  prompte  violence, 
Dont  pour  me  garantir  je  n'ai  que  le  silence. 

Grand  Roi,  qui  vois  assez  combien  j'en  suis  confus, 
Souffre  que  je  t'admire,  et  ne  te  parle  plus. 

mende ,  payables  sans  déport ,  savoir  :  moitié  aux  entrepreneurs  du 
nettoiement  desdites  rues,  et  l'autre  moitié  aux  dénonciateurs.  »  {Col- 
lection officielle  des  ordonnances  de  police  de  1800  à  184 4  imprimée  par 
ordre  de  M.  G.  Delessert,  préfet  de  police,  Paris,  P.  Dupont,  i845, 
tome  IV,  Appendice ,  p.  i3.)  Le  second  fils  de  Corneille  mourut 
en  1674,  au  siège  de  Grave,  dans  une  sortie  qu'il  tenta  à  la  tête  de 
sa  compagnie.  Voyez  ci-après  la  dernière  des  Lettres  de  notre  auteur. 
1,  Ils,  dans  les  Poésies  diverses  de  1738  et  dans  les  éditions  sui- 
vantes. 


192  POESIES   DIVERSES. 


LXIX 

POËME  SUR  LES  VICTOIRES   DU  ROI,  TRADUIT  DE    LATUN 
EN    FRANÇOIS    PAR    P.    CORNEILLE. 

C'est  sous  ce  titre  que  ce  poëme  a  paru  pour  la  première  fois.  On 
lit  sur  le  frontispice  de  l'exemplaire  de  la  Bibliothèque  impériale  :  A 
Paris,  chez  Thomas  Iolly,  au  Palais,  en  la  Salle  des  Merciers,  à  la  Palme 
et  aux  Armes  d" Hollande .  M.DC.LXVII.  Avec  Privilège  du  Roy  ;  mais 
on  peut  le  rencontrer  avec  d'autres  adresses,  car  c'est  à  Guillaume  de 
Luyne  que  le  privilège  a  été  «  donné  à  Paris,  le  vingt-huitième  No- 
vembre 1667,  »  et  il  en  a  fait  part  «  aux  sieurs  Iolly  et  Billaine.  » 
L'  «.  Achevé  d'imprimer  pour  la  première  fois  »  est  du  «  quinzième 
Décembre  1667.  »  Le  volume,  de  petitformat  in-8°,  contient  38  pages 
et  un  feuillet  de  privilège. 

A  la  page  3  se  trouve  l'avis  de  Corneille  au  Lecteur. 

A  la  page  4  commence,  sous  le  titre  de  Régi  Epinicion,  le  poëme  latin 
du  P.  de  la  Rue,  dont  celui  de  Corneille  est  une  traduction. 

A  la  page  5  commence,en  regard,  la  traduction  de  Corneille  sous 
ce  titre  :  les  Victoires  du  Roy  en  Vannée  1667. 

A  la  page  3o  :  Traductions  et  imitations  de  V  Epigramme  Latine  de 
Monsieur  de  Montmor.... 

A  la  page  3i  :  Au  Roy9  sur  son  retour  de  Flandre. 

A  la  page  35  :  Remerciment  présenté  au  Roy  en  Vannée  i663. 

Granet  (OEuvres  diverses,  p.  11)  mentionne  une  réimpression 
de  1669  (in-12)  ;  et  la  Bibliothèque  des  écrivains  de  la  compagnie  de  Jésus 
(ire  série,  p.  65o,),  une  édition  portant  le  titre  latin  :  de  Victoriis  Ré- 
gis Christianissimi  Ludovici  XIV.  Poema  a  Clarissimo  viro  Petro  Corneille 
versibus  gallicis  redditum.  Purisiis,  apud  Sebastianum  Mabre  Cramoisy, 
1667,  in-8°.  On  retrouve  plus  tard  notre  poëme  LXIX  aux  pages  19-29 
des  ldyllia  du  P.  de  la  Rue  (Rouen  ,  1669)  et  aux  pages  99-108  de 
ses  Carmina  (Paris,  1688).  Dans  le  premier  de  ces  recueils  les  vers  de 
Corneille  sont  intitulés  :  les  Victoires  du  Roy  en  Vannée  M.DC.LXVII. 
De  la  traduction  de  M.  Corneille;  dans  le  second  :  les  Victoires  du  Roy 


POÉSIES  DIVERSES.  i93 

en  Flandre.  De  la  traduction  de  P.  Corneille.  Ils  suivent,  dans  l'un  et 
dans  l'autre,  ie  texte  latin  du  P.  de  la  Rue,  ayant  pour  titre  :  Régi 
post  Belgicam  expeditionem  (dans  l'édition  de  1688  :  Ludovico  magno 
post  expeditionem  Belgicam)  anni  M.DC.LXVII.  Epinicium.  Le  volume 
des  Idyllia  commence  par  une  sorte  d'épître  dédicatoire  en  vers  latins, 
intitulée  :  Ad  clarissimum  virum  P.  Cornelium ,  tragicorum  principcm, 
et  datée  :  Rothomagi  kal.  jun.  M.DC.LXIX.  On  trouve  à  la  page  5i  : 
Ad  clarissimum  virum  Petrum  Cornelium  in  obi  tu  Caroli  ûlii.  Nous  don- 
nons ces  deux  pièces  de  vers,  ci-après,  dans  Y  Appendice.  Elles  sont 
reproduites   dans  les   Carmina  de    1688,  aux  pages  146  et  161. 

Au  sujet  de  ces  poèmes  de  Corneille  et  du  P.  de  la  Rue  sur  les 
victoires  de  1667,  nous  lisons  dans  un  Éloge  de  ce  dernier,  extrait 
d'une  lettre  écrite  de  Paris  le  6  juin  1725,  et  inséré  dans  le  Mercure 
de  juin  de  cette  même  année  (le  P.  de  la  Rue,  né  en  1643,  mourut 
en  1725)  :  «  Il  fit  en  1607  un  poème  sur  les  conquêtes  du  Roi,  que  le 
fameux  P.  Corneille  se  fît  un  honneur  de  traduire  en  vers  françois. 
Il  dit  même  à  Sa  Majesté,  en  lui  présentant  sa  traduction,  qu'elle 
n'égaloit  point  l'original  du  jeune  jésuite,  qu'il  lui  nomma.  Ce  fut 
là  le  commencement  de  cette  estime  dont  le  feu  Roi  honora  depuis  le 
P.  de  la  Rue.  » 


AU    LECTEUR. 

Quelque  favorable  accueil  que  Sa  Majesté  ait  daigné 
faire  à  cet  ouvrage,  et  quelques  applaudissements  que  la 
cour  lui  ait  prodigués,  je  n'en  dois  pas  faire  grande  va- 
nité, puisque  je  n'en  suis  que  le  traducteur.  Mais  dans 
une  si  belle  occasion  de  faire  éclater  la  gloire  du  Roi,  je 
n'ai  point  considéré  la  mienne  :  mon  zèle  est  plus  fort 
que  mon  ambition;  et  pourvu  que  je  puisse  satisfaire  en 
quelque  sorte  aux  devoirs  d'un  sujet  fidèle  et  passionné,  il 
m'importe  peu  du  reste.  Le  public  m'aura  du  moins 
l'obligation  d'avoir  déterré  ce  trésor,  qui,  sans  moi,  se- 
roit  demeuré  enseveli  sous  la  poussière  d'un  collège;  et 
j'ai  été  bien  aise  de  pouvoir  donner  par  là  quelque  mar- 
que de  reconnoissànce  aux  soins  que  les  pères  jésuites  ont 
Corneille,  x  i3 


,94  POESIES   DIVERSES. 

pris  d'instruire  ma  jeunesse  et  celle  de  mes  enfants,  et  à 
1  amitié  particulière  dont  m'honore  l'auteur  de  ce  pané- 
gyrique. Je  ne  l'ai  pas  traduit  si  fidèlement,  que  je  ne  me 
sois  enhardi  plus  d'une  fois  à  étendre  ou  resserrer  ses 
pensées  :  comme  les  grâces  des  deux  langues  sont  diffé- 
rentes, j'ai  cru  à  propos  de  prendre  cette  liberté,  afin 
que  ce  qui  étoit  excellent  en  latin  ne  devînt  pas  insup- 
portable1 en  françois.  Vous  en  jugerez,  et  ne  serez  pas 
fâché  que  j'y  aye  fait  joindre  quelques  autres  pièces,  que 
vous  avez  déjà  vues,  sur  le  même  sujet2.  L'amour  naturel 
que  nous  avons  tous  pour  les  productions  de  notre  esprit 
m'a  fait  espérer  qu'elles  se  pourroient  ainsi  conserver 
l'une  par  l'autre,  ou  périr  un  peu  plus  tard. 


LES    VICTOIRES    DU    ROI    EN    l' ANNÉE     1667. 

Mânes  des  grands  Bourbons,  brillants  foudres  de  guerre. 

Qui  fûtes  et  l'exemple  et  l'effroi  de  la  terre , 

Et  qu'un  climat  fécond  en  glorieux  exploits 

Pour  le  soutien  des  lis  vit  sortir  de  ses  rois, 

Ne  sovez  point  jaloux  qu'un  roi  de  votre  race  ï 

Égale  tout  d'un  coup  votre  plus  noble  audace. 

REGI     EPINICION. 

Illustres  animse,  Divum  genus,  inclyta  bello 
Nomina,  Borbonidae,  grandi  quos  Gallia  partu, 
\  ictores  populoruni,  et  regum  exenipla,  creavit: 
Si  nunc  magnanimi  decus  iiumortale  nepotis 
Surgit  in  immensum,  et  vestris  se  laudibus  aequat, 
Non  tamen  invidiae  vobis  locus,  ille  parentum 

i .  Si  insupportable ,  mais  a  tort ,  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dan* 
quelques  autres. 

2.  Voyez  ci-dessus  vp.  17a  et  186)  les  pièces  LXY  et  LXVÏIT, 
et  la  notice  qui  précède  le  présent  avis  au  Lecteur. 


POÉSIES    DIVERSES.  19$ 

Vos  grands  noms  dans  le  sien  revivent  aujourd'hui  : 

Toutes  les  fois  qu'il  vainc,  vous  triomphez  en  lui; 

Et  ces  hautes  vertus  que  de  vous  il  hérite 

Vous  donnent  votre  part  aux  encens  qu'il  mérite.  1  o 

C'est  par  cette  valeur  qu'il  tient  de  votre  sang 
Que  le  lion  belgique  *  a  vu  percer  son  flanc  ; 
Il  en  frémit  de  rage,  et  devenu  timide, 
Il  met  bas  cet  orgueil  contre  vous  intrépide, 
Comme  si  sa  fierté,  qui  vous  sut  résister,  1  5 

Attendoit  ce  héros  pour  se  laisser  dompter! 
Aussi  cette  fierté  ,  par  le  nombre  alarmée  , 
Voit  en  un  chef  si  grand  encor  plus  d'une  armée , 
Dont  par  le  seul  aspect  ce  vieil  orgueil  brisé 
Court  au-devant  du  joug  si  longtemps  refusé.  2  o 

De  là  ces  feux  de  joie  et  ces  chants  de  victoire 
Qui  font  briller  partout  et  retentir  sa  gloire  ; 
Et  bien  que  la  déesse  aux  cent  voix  et  cent  yeux 
L'ait  publiée  en  terre  et  fait  redire  aux  cieux , 
Qu'il  ne  soit  pas  besoin  d'aucune  autre  trompette  ,       1 5 

Quando  refert  factis  animisque  et  robore  dotes  ; 
Vestraque,  dum  vincit,  pars  est  quoque  magna  triumphi. 

Belgicus  hos  animos  et  inexsuperabile  robur 
Nequicquam  infrendens  sensit  Léo  ;  quique  priores 
Luserat  ante  minas,  vestrisque  interritus  armis 
Obluctari  ultro  gaudebat  et  obvius  ire, 
Ille  ducum  seriem  egregiam  collectaque  cernens 
Agmina,  et  immensam  Lodoici  in  pectore  gentem, 
Horret  ad  aspectum,  nec  jam  ausus  sistere  contra, 
Indociles  iras  et  colla  ferocia  subdit. 

Laetior  hinc  regni  faciès,  hinc  festa  per  urbes 
Pompa;  triumphales  hinc  templa  per  omnia  cantus; 
Et  quariquam  cum  fama  voiat,  cura  maximus  orbis 
Solvitur  in  plausus,  et  plausibus  accinit  sether, 

i.   Le  lion  est,  comme  on   sait,  l'emblème  héraldique  de  la  Bel- 
gique. Aujourd'hui  lé  mot  belgique  n'est  plus  adjectif.  Voyez,  le  Lexique. 


196  POÉSIES   DIVERSES. 

Le  cœur  paroît  ingrat  quand  la  bouche  est  muette, 
Et  d'un  nom  que  partout  la  vertu  fait  voier 
C'est  crime  de  se  taire  où  tout  semble  parler. 

Mais  n'attends  pas,  grand  Roi,  que  mes  ardeurs  sincères 
Appellent  au  secours  l'Apollon  de  nos  pères  :  3  o 

A  mes  foibles  efforts  daigne  servir  d'appui , 
Et  tu  me  tiendras  lieu  des  Muses  et  de  lui. 
Toi  seul  y  peux  suffire ,  et  dans  toutes  les  âmes 
Allumer  de  toi  seul  les  plus  célestes  flammes, 
Tel  qu'épand  le  soleil  sa  lumière  sur  nous ,  3  5 

Unique  dans  le  monde,  et  qui  suffit  a  tous  * . 

Par  l'ordre  de  son  roi,  les  armes  de  la  France 
De  la  triste  Hongrie  avoient  pris  la  défense  , 
Sauvé  du  Turc  vainqueur  un  peuple  gémissant, 
Fait  trembler  son  Asie  et  rougir  son  croissant2;  40 

Par  son  ordre  on  voyoit  d'invincibles  courages , 

Nil  praecone  opus  est,  sceius  est  tamen  alta  silere 
Victoris  décora,  indictamque  relinquere  laudeni. 

At  neque  Castalias  mihi  cura  vocare  sorores, 
Nec  veteri  fuerit  praecordia  pandere  Phœbo. 
Tu  mihi,  tu  regum  Rex  optime,  maxime  regum, 
Numen  eris,  Lodoice,  mihique  in  carmina  sacrum 
Ardorem,  et  dignos  cœptis  ingentilms  ignés 
Adjicies,  magnus  lucis  pater,  unicus  uni 
Qui  satis  es  mundo,  nec  sis  quoque  pluribus  impar. 

Jam  procul  hungaricos  tutatus  milite  fines, 
Lunigeras  acies  Lodoicus  et  impia  signa 
Fuderat,  extremasque  Asiae  tremefecerat  oras. 


1.  Traduction  des  devises  de  Louis  XIV  :  unicus  uni  et  nec 
pluribus  impar  ,  insérées  textuellement  dans  les  vers  du  P.  de  la 
Rue. 

2.  Le  ier  août  1664,  les  Allemands,  commandés  par  Montecu- 
culli ,  remportèrent  sur  les  Turcs  la  victoire  décisive  de  Saint-Go- 
thard  ,  à  laquelle  six  mille  Français ,  sous  les  ordres  de  la  Feuillade  , 
prirent  une  très-grande  part. 


POÉSIES    DIVERSES.  197 

D'Alger  et  de  Tunis  arrêter  les  pillages1, 

Affranchir  nos  vaisseaux  de  ces  tyrans  des  mers, 

Et  leur  faire  à  leur  tour  appréhender  nos  fers. 

L'Anglois  même  avoit  vu  jusque  dans  l'Amérique  4  5 

Ce  que  c'est  qu'avec  nous  rompre  la  foi  publique , 

Et  sur  terre  et  sur  mer  reçu  le  digne  prix 

De  l'infidélité  qui  nous  avoit  surpris2. 

Enfin  du  grand  Louis  aux  trois  parts  de  la  terre 

Le  nom  se  faisoit  craindre  à  l'égal  du  tonnerre.  5o 

L'Espagnol  s'en  émeut,  et  gêné  de  remords, 

Après  de  tels  succès  il  craint  pour  tous  ses  bords  : 

L'injure  d'une  paix  à  la  fraude  enchaînée3, 

Les  dures  pactions  d'un  royal  hyménée4, 

Jam  quoque  et  infestum  Libycis  praedonibus  aequor 
Solverat,  et  priscis  America  incognita  saeclis, 
Fœderis  immemores  Anglos,  opibusque  féroces, 
Et  sociis  Gallum  méditantes  pellere  terris, 
Viderai  ejectos  laceris  fluitare  per  undas 
Puppibus,  aut  csesis  insternere  littora  turmis. 
His  super  attonitum  dolor  anxius  urit  Iberum, 
Ingentesque  premunt  curse  :  quippe  ultima  longe 
Terrarum,  et  Phœbo  sub  utroque  jacentia  cernens 
Régna  metu  trepidare,  pari  quoque  corda  moveri 
Sentit  et  ipse  metu,  quoties  probrosa  recursat 
Fraus  innexa  toro,  rigidseque  injuria  pacis, 

1.  Le  duc  de  Beaufort  battit  deux  fois  la^flotte  des  corsaires  bar- 
baresques,  et  s'empara,  le  22  juillet  1664,  de  Gigeri  dans  la  régence 
d'Alger. 

2.  Le  26  janvier  1666,  Louis  XIV  déclare,  à  titre  d'allié  des  Hol- 
landais, la  guerre  à  l'Angleterre.  Le  20  avril  les  Français  battent  les 
Anglais  dans  l'île  de  Saint-Christophe  (une  des  Antilles),  et  le  9  mai 
M.  de  la  Barre  défait  la  flotte  anglaise  qui  tenait  l'île  bloquée.  Cette 
guerre  se  termine  par  la  paix  signée  à  Bréda  le  3i  juillet  1667. 

3.  La  paix  des  Pyrénées,  conclue  le  7  novembre  1659. 

4-  Allusion  à  la  renonciation  de  Marie-Thérèse  à  tous  biens  et 
successions  de  Leurs  Majestés  catholiques,  renonciation  qui  n'avait 
été  stipulée  que  sous  condition  d'une  dot   de  cinq  cent  mille  écus 


198  POESIES   DIVERSES. 

Tremblent  sous  les  raisons  et  la  facilité  5  5 

Qu'aura  de  s'en  venger  un  roi  si  redouté. 

Louis  s'en  aperçoit,  et  tandis  qu'il  s'apprête 
A  joindre  à  tant  de  droits  celui  de  la  conquête, 
Pour  éblouir  l'Espagne  et  son  raisonnement, 
Il  tourne  ses  apprêts  en  divertissement1 :  60 

Il  s'en  fait  un  plaisir,  où  par  un  long  prélude 
L'image  de  la  guerre  en  affermit  l'étude , 
Et  ses  passe-temps  même  instruisant  ses  soldats 
Préparent  un  triomphe  où  l'on  ne  pense  pas. 
Il  se  met  à  leur  tête  aux  plus  ardentes  plaines ,  6  5 

Fait  en  se  promenant  leçon  aux  capitaines , 
Se  délasse  à  courir  de  quartier  en  quartier, 

Junctaque  crudeli  regum  connubia  pacto. 

Hune  adeo  suspensum  animi,  rebusque  timentem 
Agnovit  Lodoicus,  et  ardua  mente  volutans 
Consilia,  invictis  ut  conjugis  ultor  in  armis 
Hannonios  tractus  brabantinosque  reposcat. 
Ne  tamen,  ut  quondam,  solito  sibi  callidus  astu 
Consuleret,  Martemque  dolo  prseverteret  hostis, 
Objicit  insuetas  Hispanis  artibus  artes, 
Occultumque  struit  belli  sub  imagine  bellum. 
Ergo  viros  ad  signa  vocat  :  concurritur,  oti  2 
Emicat  impatiens  et  corripit  arma  juventus. 
Ipse  palatinas  acies  praetoriaque  inter 
Vexilla,  et  lituum  sonitus,  fremitusque  tubarum, 

dont  les  trois  termes  fixés  par  le  contrat  étaient  plus  qu'échus,  ce  qui 
faisait  dire  :  «  Point  de  payement,  point  de  renonciation.  » 

1.  Il  s'agit  ici  des  revues  et  exercices  militaires  de  l'an  1666  et  du 
commencement  de  l'an  1667,  auxquels  Corneille  a  aussi  fait  allusion 
dans  sa  tragédie  à* Attila  (acte  II,  scène  v),  qui  est,  comme  le  poëme 
des  Victoires,  de  l'année  1667.  Voyez  tome  VII,  p.  i3i  et  i3ï. 

2.  L'édition  de  1667,  que  nous  suivons,  et  celle  de  1669  donnent 
ici  omnis;  mais  nous  n'hésitons  pas  à  y  substituer  la  leçon  de  1688  : 
oti  pour  otii  ;  l'adjectif  impatiens  du  vers  suivant  a  besoin  d'être  dé- 
terminé par  un  régime. 


POÉSIES    DIVERSES.  i99 

Endurcit  et  soi-même  et  les  siens  au  métier, 

Les  forme  à  ce  qu'il  faut  que  chacun  cherche  ou  craigne, 

Et  par  de  feints  combats  apprend  l'art  qu'il  enseigne.  7  o 

Il  leur  montre  à  doubler  leurs  files  et  leurs  rangs, 
A  changer  tôt  de  face  aux  ordres  différents , 
Tourner  à  droite,  à  gauche,  attaquer  et  défendre, 
Enfoncer,  soutenir,  caracoler,  surprendre; 
Tantôt  marcher  en  corps,  et  tantôt  défiler,  7  5 

Pousser  à  toute  bride,  attendre,  reculer, 
Tirer  à  coups  perdus ,  et  par  toute  l'armée 
Faire  l'oreille  au  bruit  et  l'œil  à  la  fumée. 
Ce  héros  va  plus  outre  ;  il  leur  montre  à  camper  : 
A  la  tente,  à  la  hutte  on  les  voit  s'occuper.  80 

Sa  présence  aux  travaux  mêle  de  si  doux  charmes , 
Qu'ils  apprennent  sans  peine  à  dormir  sous  les  armes  ; 
Et  comme  s'ils  étoient  en  pays  dangereux, 
L'ombre  de  Saint-Germain  est  un  bivouac  pour  eux  * . 

Sole'sub  ardenti,  planisque  in  vallibus,  héros 
Informat  résides  animos,  discitque  docendo 
Durum  opus,  et  ficto  mentem  certamine  pascit. 

Nunc  jubet  effusis  aciem  decurrere  campis, 
Nunc  stare,  aut  junctis  gïomeratam  incedere  turmis  ; 
Nunc  spatiis  mixtos  équités  concordibus  ire, 
Aut  flexos  sinuare  orbes,  gradibusve  repressis 
Exsultare  solo,  aut  subitos  obvertere  vultus; 
Mox  quoque  direptis  per  prona,  per  alta  volare 
Ensibus,  aut  certas  tubuiis  explodere  mortes, 
Prsecipitesque  rapi,  cursuque  lacessere  nimbos. 
Inde  locum  fossis  munire,  et  eingere  vallo 
Castroruin  juvat  in  morem  .  juvat  addere  castris 
Excubias,  vigilesque  solo  traducere  noctes, 
Aut  duro  tenues  in  cespite  carpere  somnos. 

1.  Au  sujet  d'un  de  ces  campements,  nous  lisons  dans  la  Gazette 
du  23  avril  1667  :  «  Le  Roi,  qui  par  un  continuel  exercice  entre- 
tient ses  troupes  en  un  état  qui  les  puisse  rendre  capables  de  servir 


aoo  POÉSIES   DIVERSES. 

Achève,  grand  Monarque,  achève,  et  pars  sans  crainte  : 
Si  tu  t'es  fait  un  jeu  de  cette  guerre  feinte, 
Accoutumé  par  elle  à  la  poussière ,  au  feu  , 
La  véritable  ailleurs  ne  te  sera  qu'un  jeu. 
Tes  guerriers  t'y  suivront  sans  y  voir  rien  de  rude  , 
Combattront  par  plaisir,  vaincront  par  habitude  ;  9  u 

Et  la  Victoire ,  instruite  à  prendre  ici  ta  loi , 
Dans  les  champs  ennemis  n'obéira  qu'à  toi. 

L'Espagne  cependant,  qui  voit  des  Pyrénées 
Donner  ce  grand  spectacle  aux  dames  étonnées , 
Loin  de  craindre  pour  soi,  regarde  avec  mépris,  95 

Dans  un  camp  si  pompeux  ,  des  guerriers  si  bien  mis, 
Tant  d'habits,  comme  au  bal,  chargés  de  broderie, 
Et  parmi  des  calons  tant  de  galanterie. 
«  Quoi?  l'on  se  joue  en  France,  et  ce  roi  si  puissant 
Croit  m'effrayer,  dit-elle,  en  se  divertissant?  »  100 

Macte  istis,  Lodoice,  animis,  perge  omine  tanto 
Et  tibi,  et  optatas  Gallis  portendere  lauros. 
Nunc  veteres  pompas  ludorum  in  praelia  mutas, 
Et  rigidum  inducis  laeta  in  spectacula  Martem  : 
Mox  quoque  cum  fines  Morinos,  et  Nervia  vero 
Mœnia  Marte  petes,  fortemque  urgebis  Iberum, 
Sic  bellum  tibi  ludus  erit,  facilesque  sequetur, 
Quo  tuleris  te  cumque,  cornes  victoria  nutus. 

Audiit  ex  alto  Pyrenes  vertice  festos 
Ludentum  strepitus,  pompamque  Hispania  vidit  ; 
Defixisque  oculis  mirata,  tôt  horrida  pilis 
Agmina,  tôt  cris  tas  galeis  fluitare  cornantes, 
Tôt  rutilis  phaleras  vestesque  nitere  lapillis, 
Tôt  laetos  in  equis  juvenes  :  «  Et  luditur,  inquit; 
Haec  sibi  depositis  Gallus  facit  otia  curis.  » 

Sa  Majesté  dans  les  occasions,  ayant  donné  les  ordres  nécessaires 
pour  les  faire  camper  dans  la  plaine  d'Ouilles,  entre  Maisons  et  ce 
château  (de  Saint -Germain-en-Laye),  s'y  rendit  hier,  accompagné  de 
quantité  de  seigneurs.  » 


POESIES   DIVERSES.  201 

11  est  vrai  qu'il  se  joue  ,  Espagne,  et  tu  devines  ; 
Mais  tu  mettras  au  jeu  plus  que  tu  l'imagines1, 
Et  de  ton  dernier  vol  si  tu  ne  te  repens2, 
Tu  ne  verras  finir  ce  jeu  qu'à  tes  dépens. 

Son  père  et  son  aïeul  t'ont  fait  voir  que  sa  France  8 
Sait  trop,  quand  il  lui  plaît,  dompter  ton  arrogance  : 
Tant  d'escadrons  rompus,  tant  de  murs  emportés, 
T'ont  réduite  souvent  au  secours  des  traités. 
Ces  disgrâces  alors  te  donnoient  peu  d'alarmes, 
Tes  conseils  réparoient  la  honte  de  tes  armes  ;  no 

Mais  le  ciel  réservoit  à  notre  auguste  roi 
D'avoir  plus  de  conduite  et  plus  de  cœur  que  toi. 

Rien  plus  ne  le  retarde ,  et  déjà  ses  trompettes 
Aux  confins  de  l'Artois  lui  servent  d'interprètes4: 

Luditur,  at  magnos  parient  hsec  otia  motus  ; 
Nec  vanum,  ludi  pars  magna,  fatebere  ludum. 

Saepe  manu  virtus  quid  Gallica  posset  et  armis, 
Te  Justus,  Justique  parens  ter  maximus  olim 
Henricus  doeuere  :  tamen  licet  hactenus  aequo 
Te  non  Marte  parem  clades  non  una  probasset, 
Jamdudum  instantem  potuisti  avertere  casum, 
Consilio  melior.  Lodoico  scilicet  uni 
Laus  fuit  hsec  servanda,  et  magnis  débita  fatis, 
Consilioque  manuque  tuos  contundere  fastus. 

Nec  mora,  jam  litui,  jam  rauco  tympana  pulsu 
Insonuere  :  volât  spe  fervidus,  arvaque  Gallus 

1.  VAR.Mais  tu  mettras  au  jeu  plus  que  tu  n'imagines. 

(Caroli   de    la    Rue    ldyllia ,  1669.    —  OEuvres   diverses   publiées  par 
Granet.) 

2.  Var.  Et  de  ce  dernier  vol  si  tu  ne  te  repens. 

[Rusei  Carmina,  1688.) 

3.  Var.  Son  père  et  son  aïeul  t'ont  fait  voir  que  la  France. 

[Carmina,  1688.) 

4.  Le  Roi  partit  de  Saint-Germain  avec  la  Reine  le  16  mai  1667 
et  arriva  le  20  à  Amiens.  Voyez  la  Relation  de  la  guerre  de  Flandres  en 
l'année  1667,  à  Paris,  chez.  Claude  Barbin,  M.DC.LXVIII.  Le  pri- 


202  POÉSIES    DIVERSES. 

C'est  de  là,  c'est  par  là  qu'il  s'explique  assez  haut.      1 1  5 

Il  entre  dans  la  Flandre  et  rase  le  Hainaut. 

Le  François  court  et  vole,  une  mâle  assurance 

Le  fait  à  chaque  pas  triompher  par  avance; 

Le  désordre  est  partout,  et  l'approche  du  Roi 

Remplit  l'air  de  clameurs  et  la  terre  d'effroi.  120 

Jusqu'au  fond  du  climat f  ses  lions  en  rugissent , 

Leur  vue  en  étincelle,  et  leurs  crins  s'en  hérissent; 

Les  antres  et  les  bois ,  par  de  longs  hurlements, 

Servent  d'affreux  échos  à  leurs  rugissements; 

Et  les  fleuves  mal  sûrs  dans  leurs  grottes  profondes   1  2  f> 

Hâtent  vers  l'Océan  la  fuite  de  leurs  ondes; 

Incertains  de  la  marche,  ils  tremblent  tous  pour  eux. 

Songe  encor,  songe,  Espagne,  à  mépriser  nos  jeux  ! 

Ainsi,  quand  le  courroux  du  maître  de  la  terre 
Pour  en  punir  l'orgueil  prépare  son  tonnerre ,  1  3  o 

Qu'un  orage  imprévu  qui  roule  dans  les  airs 
Se  fait  connoître  au  bruit  et  voir  par  les  éclairs, 

Flandrica,  et  Hannonias  ruit  improvisus  in  arces. 
Jamque  adeo  ingenti  fremere  undique  visa  tumultu 
Belgica,  jam  patrii  circum  rugire  leones, 
Arrectisque  horrere  jubis  :  simul  alta  fragore 
Misceri  nemora,  et  tristes  ululare  cavernse, 
Flandrigenumque  procul  Scaldis  regnator  aquarum 
In  mare  praecipites  urgere  fugacior  undas. 
I  modo,  regales,  Hispania,  despice  ludos. 
Sic,  trifîdos  ignés  et  ineluctabile  telum 
Si  quando  iratus  mundi  arbiter,  humida  rumpens 
Nubila,  subjectas  hominum  molitur  in  arces, 

vilége  nous  apprend  que  cet  ouvrage  est  «  de  la  composition  du  sieur 
de  Vandeuvres.  » 

1.  Climat,  dans  le  sens  de  région,  contrée.  —  Ce  qui  est  dit  ici 
des  lions  se  rapporte  encore  aux  armes  de  la  Flandre,  au  «  lionbel- 
gique,  »  comme  Corneille  s'est  exprimé  plus  haut  (vers  la).  Dans 
les  vers  latins  du  P.  de  la  Rue,  il  y  a  patrii leones. 


POÉSIES   DIVERSES.  *oT 

Ces  foudres,  dont  la  route  est  pour  nous  inconnue, 

Paroissent  quelque  temps  se  jouer  dans  la  nue  , 

Et  ce  feu  qui  s'échappe  et  brille  à  tout  moment1,        i  3  5 

Semble  prêter  aux  cieux  un  nouvel  ornement  ; 

Mais  enfin  le  coup  tombe;  et  ce  moment  horrible , 

A  force  de  tarder  devenu  plus  terrible  , 

Etale  aux  yeux  surpris  des  hommes  écrasés, 

Une  plaine  fumante ,  et  des  rochers  brisés.  140 

Telle  on  voit  le  Flamand  présumer  ta  venue, 
Grand  Roi  !  Pour  fuir  ta  foudre  il  cherche  à  fuir  ta  vue, 
Et  de  tes  justes  lois  ignorant  la  douceur, 
Il  abandonne  aux  tiens  des  murs  sans  défenseur2. 
La  Bassée,  Armentière,  aussitôt  sont  désertes8;         145 

Ipse  prius  tremulis  densa  in  caligine  ludit 
Fulguribus,  volucrique  polum  circumvolat  auro; 
Mox  rutilum  per  iter,  rapidisque  micantia  flammis 
Erumpit  spatia,  et  magno  ruit  impete  fulmen; 
Vim  tamen  haud  minuit  splendor,  nec  inania  jactat 
Murmura  :  gens  longe  tremit  omnis,  et  ardua  fumant 
Silvarum,  ac  subito  dissultant  saxa  fragore. 

Talis  ades,  talem  te  prœcipit  omne  timetque 
Vulgus,  et  insueta  fugiunt  formidine  cives. 
Passim  solse  arces,  passim  indefensa  patescunt 
Oppida  :  tuque  adeo,  Bassœa,  ingentibus  olim, 
Mœnia  du  m  starent,  repetita  laboribus  ;  et  tu 
Dives  agro,  dives  pecorum,  Armentaria,  cultu; 

1.  Var.  Et  ce  feu  qui  s'échappe  et  brille  à  tous  moments, 

Semble  prêter  au  ciel  de  nouveaux  ornements. 

(Idyllia,  i6ric).  —  OEuvres  diverses.) 

2.  Var.  Il  abandonne  aux  tiens  ses  murs  sans  défenseur. 

(Carmina,  1688.) 

3.  On  lit   dans   la    Gazette    du    4    ïinn     l^7>    sous   la   rubrique 
d'Arras,  le  3o  mai  16*67  :  a  Le  12  de  ce  mois,  les  sieurs  d'Artagnan 

et  des  Fourneaux   arrivèrent   ici Le  lendemain    ils  décampèrent 

avant  le  jour,  et  marchèrent  du  côte  d'Armentières  pour  favoriser  les 
troupes  commandées  de  ce  côté-là,  avec  ordre  de  se  saisir  de  cette 


204  POÉSIES    DIVERSES. 

Charleroi4,  qui  t'attend  ,  mais  à  portes  ouvertes , 

A  ibrts  démantelés,  à  travaux  démolis2, 

Sur  le  nom  de  son  roi3  laisse  arborer  tes  lis. 

C'est  là  le  prompt  effet  de  la  frayeur  commune; 

C'est  ce  que  font  sans  toi  ton  nom  et  ta  fortune.  i  5o 

Heureux  tous  nos  Flamands,  si  l'exemple  suivi 

Eût  partout  à  tes  droits  fait  justice  à  l'envi  ! 

Furne  n'auroit  point  vu  ses  portes  enfoncées; 

Bergue  n'auroit  point  vu  ses  murailles  forcées4  ; 

Tu  quoque  tu  Garli  de  nomine  dicta,  novoque 

Arx  fabricata  opère,  et  valido  molimine  structa  : 

Te,  quanquam  aggeribus  vallatam  et  flumine  circum 

Defensam  gemino  tela  omnia  et  omnia  contra 

Fulmina  Gallorum,  uil  fulminis  indiga  telive 

Una  nec  aspecti  Régis  fortuna  subegit. 

Atque  utinam  hune  morem  et  vestra  hsec  exempla  secutse 

Cessissent  reliquat,  nec  justa  in  sceptra  rebelles 

Indignum  hoc  propria  nomen  sibi  clade  parassent. 

At  procul  ejectos  vallis  Furnensibus  hostes, 

Et  domita  video  fractos  exesdere  Berga. 

place  :  ce  qu'ils  exécutèrent  le  24,  sans  aucune  résistance  de  la 
garnison,  qui  étoit  de  soixante  hommes,  lesquels  se  sauvèrent,  à  la 
réserve  de  leur  commandant,  qui  fut  fait  prisonnier  :  les  Espagnols 
ayant  commencé  de  la  démolir,  ainsi  que  la  Bassée,  Condé,  Saint- 
Guilhain,  et  plusieurs  autres  places,  qu'ils  ont  abandonnées  pour 
s'appliquer  mieux  à  la  défense  des  plus  importantes.  » 

1.  Charleroi  se  rendit  à  Turenne  le  2  juin. 

2.  «  Avec  des  mines  il  [Castel Rodrigo,  qui  commandait  à  Ckarleroi) 
fit  sauter  tout  le  corps  de  la  place,  et  on  la  trouva  mieux  rasée  que 
peut-être  jamais  forteresse  l'ait  été,  à  l'exception  toutefois  des  dehors 
qui  demeurèrent  entiers,  et  qui  parurent  encore  si  beaux  aux  yeux 
du  Roi  qu'il  vouloit  la  faire  rétablir.  »  {Relation  de  la  guerre  de  Flan- 
dres, p.  33.) 

3.  Charleroi  devait  son  nom  à  Charles  II,  roi  d'Espagne,  frère 
de  Marie- Thérèse. 

4.  Bergues-Saint-Vinox,  en  flamand  Berghen,  fut  pris  le  6  juin 
1667,  et  Furnes  seulement  le  12.  La  Rue  et  Corneille  suivent  assez 
bien  l'ordre  des  temps,  non  pourtant,  on  le  voit,  au  point  d'encourir 


POÉSIES   DIVERSES.  2o5 

Et  Tournai ,  de  tout  temps  tout  françois  dans  le  cœur, 

T'eût  reçu  comme  maître,  et  non  comme  vainqueur1; 

Les  Muses 2  à  Douai  n'aur oient  point  pris  les  armes 

Pour  coûter  à  son  peuple  et  du  sang  et  des  larmes; 

Courtrai,  sans  en  verser,  eût  changé  de  destin; 

Ce  refuge  orgueilleux  de  l'Espagnol  mutin ,  1 60 

Alost,  n'eût  point  fourni  de  matière  à  ta  gloire; 

Audenarde  jamais  n'eût  pleuré  ta  victoire. 

Que  dirai-je  de  Lisle3,  où  tant  et  tant  de  tours , 

De  forts  ,  de  bastions  n'ont  tenu  que  dix  jours4  ? 

Ces  murs  si  rechantés,  dont  la  noble  ruine  i65 

Tornacique  arces,  Musisque  dicata  Duaci 
Mœnia,  et  antiquis  Curtracum  nobile  bellis; 
Aldenaram,  cultœque  caput  regionis  Alostum 
Borbonium  eversis  victorem  admittere  portis. 
Insuper  et  victo  captif um  flumine  Lisam, 
Mœrentemque  Sabin  nequicquam,  injectaque  Scaldi 
Vincula,  perruptosque  aditus,  et  in  intima  facto 

le  reproche  de  Boileau,  qui  a  précisément  en  vue  les  poètes  qui  chan- 
tèrent les  victoires  de  1667  et  1668,  lorsqu'il  dit  dans  Y  Art  poétique 
(chant  II,  vers  73  et  suivants)  : 

Loin  ces  rimeurs  craintifs  dont  l'esprit  phlegmatique 
Garde  dans  ses  fureurs  un  ordre  didactique  ; 
Qui  chantant  d'un  héros  les  progrès  éclatants, 
Maigres  historiens,  suivront  l'ordre  des  temps. 
Ils  n'osent  un  moment  perdre  un  sujet  de  vue: 
Pour  prendre  Dole,  il  faut  que  Lille  soit  rendue; 
Et  que  leur  vers  exact  ainsi  que  Mézerai, 
Ait  déjà  fait  tomber  les  remparts  de  Courtrai. 

1.  Tournai  fut  pris  le  26  juin  1667.  Douai  se  rendit  le  6  juillet  ; 
Courtrai,  le  18;  Audenarde,  ou  plutôt  Otidenarde,  le  3i  ;  Alost,  le 
lendemain  Ier  août. 

2.  Il  y  avait  à  Douai  une  célèbre  université,  fondée  en  1572  par 
Philippe  II,  roi  d'Espagne.  Cet  endroit  est  plus  clair  dans  le  P.  de 
la  Rue,  qui  dit  :  Musisque  dicata  Duaci  Mœnia, 

3.  Telle  est  l'orthographe  des  Idyllïa  et  des  Carmin  a  ;  l'édition  de 
1667  porte  :  Vis  le. 

4.  Lille  se  rendit  au  Roi  en  personne  le  27  août  18^7 . 


206  POÉSIES   DIVERSES. 

De  tant  de  nations  flatte  encor  l'origine , 

Ces  remparts  que  la  Grèce  et  tant  de  dieux  ligués 

En  deux  lustres  à  peine  ont  pu  voir  subjugués , 

Eurent  moins  de  défense ,  cl  l'art  en  leur  structure 

Avoit  moins  secouru  l'effort  de  la  nature  ;  170 

Et  ton  bras  en  dix  jours  a  plus  fait  à  nos  yeux 

Que  la  fable  en  dix  ans  n'a  fait  faire  à  ses  dieux. 

Ainsi ,  par  des  succès  que  nous  n'osions  attendre  , 
Ton  Etat  voit  sa  borne  au  milieu  de  la  Flandre; 
Et  la  Flandre,  qui  craint  de  plus  grands  changements, 
Voit  ses  fleuves  captifs1  diviser  ses  Flamands. 
C'est  là  ton  pur  ouvrage ,  et  ce  qu'en  vain  ta  France 
Elle-même  a  tenté  sous  une  autre  puissance2; 
Ce  que  sembloit  le  ciel  défendre  à  nos  souhaits, 
Ce  qu'on  n'a  jamais  vu  ,  qu'on  ne  verra  jamais,  180 

Ce  que  tout  l'avenir  à  peine  voudra  croire.... 

Limite  divisos  per  mille  pericula  Belgas. 
Teque  adeo  denos  vix  expugnanda  per  annos, 
Ilios  utquondam,  Superum  labor,  acribus  intus 
Fœta  viris  pariter,  largoque  interrita  cinctu 
Insula,  te  decimus  transmissam  in  Gallica  vidit 
Jura  dies,  et  plura  ingens  hic  pra;stitit  héros 
Quam  potuit  junctis  afiingere  fahula  Divis. 

Hsec  rerum  séries,  nullique  parata  priorum 
Gloria,  nec  seris  aequanda  nepotibus  olim  : 
Indomitum  Flandros  genus,  et  fîrmissima  claustris 
Oppida,  quse  nec  opum  *vis  magna,  operumve  ducumve, 
Nec  proa\i  domuere,  nec  excita  finibus  omnis 
Gallia  adhuc,  non  mille  rates,  non  mille  carinae, 
Frsenare  imperiis,  armisque  metuque  subacta 
Praecipiti  ad  nutum  sibi  posse  adjungere  bello, 
Herois  labor  ille  fuit.  Sed  nec  mihi  cuncta 

1 .  Le  P.  de  la  Rue  a  nommé  un  peu  plus  haut  la  Sambre  et  l'Es- 
caut [Sabis,  Scaldis), 

2.  Philippe  le  Bel  conquit  le  comté  de  Flandre,  puis  le  perdit.  Voyez 
aussi  ce  qui  est  dit  plus  loin  de  Philippe  Auguste,  aux  vers  a53-a58. 


POÉSIES   DIVERSES.  207 

Mais  de  quel  front  osé-je  ébaucher  tant  de  gloire , 

Moi  dont  le  style  foible  et  le  vers  mal  suivi 

Ne  sauroient  même  atteindre  à  ceux  qui  t'ont  servi? 

Souffre-moi  toutefois  de  tacher  à  portraire  185 

D'un  roi  tout  merveilleux  l'incomparable  frère1: 
Sa  libéralité  pareille  à  sa  valeur; 
A  l'espoir  du  combat  ce  qu'il  sent  de  chaleur; 
Ce  que  lui  fait  oser  l'inexorable  envie 
D'affronter  les  périls  au  mépris  de  sa  vie ,  190 

Lorsque  de  sa  grandeur  il  peut  se  démêler, 
Et  trompe  autour  de  lui  tant  d'yeux  pour  v  voler. 
Les  tristes  champs  de  Bruge  en  rendront  témoignage  : 
Ce  fut  là  que  pour  suite  il  n'eut  que  son  courage  ; 
Il  fuyoit  tous  les  siens  pour  courir  sur  tes  pas ,  1 9  5 

Marcin  2  ;  et  ta  déroute  eût  signalé  son  bras, 

Fas  canere,  aut  meiitas  procerum  decurrere  laudes, 
Nec  magnos  modulis  aequare  jacentibus  ausus. 

Nam  quid  ego  egregiam  virtutem  et  digna  Philippi 
Cœpta  loquar?  Quid  prima  inter  discrimina,  lucis 
Contemptorem  animum?  Quid  apertam  in  dona,  paremque 
Muneribusque  armisque  manum  ?  tum  si  qua  voearent 
Praelia,  si  qua  sonum  procul  auribus  sera  dédissent, 
Quam  stare  indocilis,  quam  se  subducere  tardis 
Callidus  agminibus  sociorum,  avidusque  negata 
Protinus  effraeno  tentare  pericula  cursu  ? 
Talis  in  effusas  Brugensi  limite  turmas 
Infestum  per  iter  sese  incomitatus  agebat, 
Victrici  impatiens  sibi  tempora  cingere  lauro  ; 
Cinxissetque  adeo,  tantse  nisi  cladis  honorem 
Victoremque  tibi  tantum,  Marcine,  negassent , 

1.  Philippe  d'Orléans,  chef  de  la  seconde  maison  d'Orléans-Bour- 
bon, frère  unique  de  Louis  XIV,  né  en  1640  à  Saint-Germain-en- 
Laye,  mort  en  1701. 

1 .  Le  comte  de  Marsin  et  le  prince  de  Ligne,  qui  venaient  au  secours 
de  Lille,  furent  battus  par  Créquy  et  Bellefonds. 


ao8  POESIES    DIVERSES. 

Si  le  destin  jaloux,  qui  Favoit  arrêtée, 

Pour  en  croître  F  affront  ne  l'eût  précipitée, 

Et  sur  ton  nom  fameux  déployé  sa  rigueur 

Jusques  à  t'envier  un  si  noble  vainqueur.  a  ou 

Anguien*  le  suit  de  près,  et  n'est  pas  moins  avide 
De  ces  occasions  où  Fhonneur  sert  de  guide. 
L'Escaut  épouvanté  voit  ses  premiers  efforts 
Le  couronner  de  gloire  au  travers  de  cent  morts, 
Donner  sur  l'embuscade,  en  pousser  la  retraite,         205 
Triompher  des  périls  où  sa  valeur  le  jette , 
Et  montrer  dans  un  cœur  aussi  haut  que  son  rang 
De  F  illustre  Gondé  le  véritable  sang. 

Saint-Paul ,  de  qui  Fardeur  prévient  ce  qu'on  espère , 
De  son  côté  Dunois,  et  Condé  par  sa  mère2,  2  10 

A  Fun  et  l'autre  nom  répond  si  dignement, 

Et  conjuratam  properassent  fata  ruinam. 

Quid  memorem  reliquos  ?  pulchraeque  cupidine  famae 
Flagrantem  assidue,  et  non  inferiora  sequentem 
Enguineum,  fervens  et  inexsaturabile  pectus? 
Ut  belli  exsultans  fremitu,  rapidumque  fatigans 
Alipedem,  mediis  in  csedibus,  asperaque  inter 
Tela,  necem  stricto  Belgasque  lacesseret  ense? 
Ut  fractœ  fugerent  acies,  dextraque  tonantem 
Fulminea,  procul  arma  super  lateque  jacentum 
Corporaque  et  calido  spumantes  sanguine  cristas, 
Bellicus  immissis  impelleret  ardor  habenis, 
Et  patrem  soboles  invictum  invicta  referret? 

Quid  nunc  ut  paribus  Longa\illaea  propago 


1.  Henri-Jules,  duc  d'Enghien,  né  en  1646,  mort  en  1709,  fils  du 
grand  Condé. 

1.  Charles-Paris  d'Orléans,  né  en  1649,  d'abord  comte  de  Saint- 
Paul  et  en  1671  duc  de  Longueville,  fut  tué  au  passage  du  Rhin 
en  1672  (voyez  pièce  LXXXI,  vers  346-3 5o).  Il  était  fils  de  la  cé- 
lèbre duchesse  de  Longueville,  sœur  du  grand  Condé.  Par  son  père 
il  descendait  du  fameux  Dunois,  bâtard  d'Orléans. 


POÉSIES    DIVERSES.  209 

Que  des  plus  vaillants  même  il  est  l'étonnement. 
Des  armes  qu'il  arrache  aux  mains  qui  le  combattent 
Il  commence  un  trophée  où  ses  vertus  éclatent; 
Et  pour  forcer  la  Flandre  à  prendre  un  joug  plus  doux, 
Les  pals  les  plus  serrés  font  passage  à  ses  coups1. 

Mais  où  va  m1  emporter  un  zèle  téméraire? 
A.  quoi  m'expose  t-il  ?  et  que  prétends-je  faire, 
Lorsque  tant  de  grands  noms  ,  tant  d'illustres  exploits  , 
Tant  de  héros  enfin  s'offrent  tous  à  la  fois?  220 

Magnanimes  guerriers,  dont  les  hautes  merveilles 
Lasseroient  tout  l'effort  des  plus  savantes  veilles, 
Bien  que  votre  valeur  étonne  l'univers, 
Quelle  mette  vos  noms  au-dessus  de  mes  vers , 
Vos  miracles  pourtant  ne  sont  point  des  miracles  :      225 
L'exemple  de  Louis  vous  lève  tous  obstacles. 
Marchez  dessus  ses  pas ,  fixez  sur  lui  vos  yeux , 
Vous  n'avez  qu'à  le  voir,  qu'à  le  suivre  en  tous  lieux , 
Qu'à  laisser  faire  en  vous  l'ardeur  qu'il  vous  inspire , 
Pour  vous  faire  admirer  plus  qu'on  ne  vous  admire.  230 

Cette  ardeur,  qui  des  chefs  passe  aux  moindres  soldats, 
Anime  tous  les  cœurs ,  fait  agir  tous  les  bras  : 
Tout  est  beau,  tout  est  doux  sous  de  si  grands  auspices, 

Carolus  incensus  stimulis,  et  utroque  parentum 
Sanguine,  spem  gestis,  sensu  prseverterit  annos, 
Exsequar?  utque  manu  prostrato  ex  hoste  tropaea 
Vi  raperet,  raptisque  viam  sibi  rumperet  armis? 

Sed  neque  tôt  procerum  virtus  insueta  ducumve, 
Sive  senum  labor  et  Martis  constantior  usus, 
Seu  juvenum  Lodoici  animis  audacia  certet. 
Scilicet  ex  illo  vigor  omnibus,  omnibus  idem 

I.  On  lit  dans  la  Relation  (p.  210  et  21 1),  à  la  date  du  23  août  :  a  11 
v  eut  quelques  volontaires  blessés entre  autres  le  comte  de  Saint- 
Paul  au  bras....  mais....  assez  légèrement.  3 

Corneille,  x  i4 


2io  POESIES   DIVERSES. 

La  peine  a  ses  plaisirs ,  la  mort  a  ses  délices  *  ; 

Et  de  tant  de  travaux  qu'il  aime  à  partager,  235 

On  n'en  voit  que  la  gloire  et  non  pas  le  danger. 

Il  n'est  pas  de  ces  rois  qui  loin  du  bruit  des  armes, 
Sous  des  lambris  dorés  donnent  ordre  aux  alarmes, 
Et  traçant  en  repos  d'ambitieux  projets , 
Prodiguent,  à  couvert,  le  sang  de  leurs  sujets.  240 

Il  veut  de  sa  main  propre  enfler  sa  renommée , 
Voir  de  ses  propres  yeux  l'état  de  son  armée  , 
Se  fait  à  tout  son  camp  reconnoître  à  la  voix , 
Visite  la  tranchée,  y  fait  suivre  ses  lois. 
S'il  faut  des  assiégés  repousser  les  sorties,  245 

S'il  faut  livrer  assaut  aux  places  investies , 
Il  montre  à  voir  la  mort ,  à  la  braver  de  près , 
A  mépriser  partout  la  grêle  des  mousquets , 
Et  lui-même  essuyant  leur  plus  noire  tempête, 

Impetus,  una  omnis  simili  succenditur  igné 
Miles,  et  in  médias  tanto  mit  auspice  mortes. 

Nempe  alii,  castris  procul  armorumque  tumultu, 
Secessu  in  placido  atque  aulse  penetralibus  aureis 
Bella  gérant  reges  ,  lentique  ingloria  ducant 
Otia,  pugnarum  docti  describere  leges, 
Et  sedare  suas  alieno  sanguine  rixas. 
Juverit  hoc  alios.  Tibi  famam  extendere  factis, 
Exemplo  résides  urgere,  offerre  pruinis 
Ardorique  caput,  rigido  sudare  sub  sere, 
Insomnes  vigilare  inter  tentoria  noctes, 
Aut  vallum  lustrare  in  equo;  tum,  sicubi  portis 
Ingruit,  aut  subitis  petitur  conatibus  hostis, 
Crebra  licet  cœdes,  licet  undique  plurima  telis 
Affluât,  et  volucri  mors  grandine  verberet  aures, 
Impavidum  volitare,  animos  accendere  dictis, 

1.    Voltaire  a  dit  au  IVe  chant  de  la  Henriade,  vers  128  : 
La  peine  a  ses  plaisirs,  le  péril  à  ses  charmes. 


POESIES   DIVERSES.  211 

Par  ses  propres  périls  achète  sa  conquête.  25o 

Tel  le  grand  saint  Louis ,  la  tige  des  Bourbons , 
Lui-même  du  Soi  dan  '  forçoit  les  bataillons. 
Tel  son  aïeul  Philippe  acquit  le  nom  d'Auguste 
Dans  les  fameux  hasards  d'une  guerre  aussi  juste; 
Avec  le  même  front ,  avec  la  même  ardeur  2  5  5 

Il  terrassa  d'Othon2  la  superbe  grandeur, 
Couvrit  devant  ses  yeux  la  Flandre  de  ruines, 
Et  du  sang  allemand  fit  ruisseler  Bovines. 

Tel  enfin,  grand  Monarque,  aux  campagnes  d'Yvry, 
Tel  en  mille  autres  lieux  l'invincible  Henry, 
De  la  Ligue  obstinée  enfonçant  les  cohortes, 
Te  conquit  de  sa  main  le  sceptre  que  tu  portes3. 

Vous,  ses  premiers  sujets,  qu'attache  à  son  côté 
La  splendeur  de  la  race  ou  de  la  dignité , 
Vous ,  dignes  commandants  ,  vous ,  dextres  aguerries, 
Troupes  aux  champs  de  Mars  dès  le  berceau  nourries , 

Mercarique  tuas  proprio  discrimine  lauros  : 
Hic  tibi  mos  fuerit,  Lodoice.  His  artibus  omne 
Borbonidum  genus  :  et  geoeris  caput,  additus  aris, 
Bisque  Arabum  quondam  domitor,  Lodoicus,  et  ingens 
Augusti  titulo  ac  belli  virtute  Philippus 
Floruit.  His  oculis,  hoc  vu'tu ,  hoc  impete  fertur 
Suetus  in  adversas  aciem  deducere  gentes, 
Oppida  dum  quateret  Flandrorum,  aut  sanguine  tinctus, 
Illustres  faceret  Germana  clade  Bovinas. 

Vos  mihi  nunc,  Franci  proceres,  assuetaque  régi 
Pectora,  vos  omni  fortes  ex  ordine  turmse, 

1 .  Ainsi  dans  les  éditions  originales.  On  Irouve  dans  le  Dictionnaire 
françois-anglois  de  Cotgrave,  publié  en  161 1,  les  trois  formes  :  Sol- 
dan,  souldan  et  Soudan.  Granet  a  mis  Soudan. 

1.  Othon  IV,  de  Brunswick,  empereur  d'Allemagne,  vaincu  par  Phi 
lippe  Auguste  à  Bouvines  (entre  Lille  et  Tournai),  le  27  juillet  12 14 

3.  Ces  quatre  vers  sur  Henri  IV  sont  une  addition  de  Corneille. 
Il  n'est  pas  ici  parlé  de  lui  dans  la  pièce  latine. 


212  POÉSIES   DIVERSES. 

Dites-moi  de  quels  yeux  vous  vîtes  ce  grand  roi , 

Après  avoir  rangé  tant  de  murs  sous  sa  loi , 

Descendre  parmi  vous  de  son  char  de  victoire, 

Pour  vous  donner  à  tous  votre  part  à  sa  gloire.  270 

De  quels  yeux  vîtes-vous  sou  auguste  fierté 

Unir  tant  de  tendresse  à  tant  de  majesté , 

Honorer  la  valeur,  estimer  le  service , 

Aux  belles  actions  rendre  prompte  justice  , 

Secourir  les  blessés,  consoler  les  mourants ,  275 

Et  pour  vous  applaudir  passer  dans  tous  vos  rangs? 

Parlez ,  nouveaux  François ,  qui  venez  de  connoître 
Quel  est  votre  bonheur  d'avoir  changé  de  maître  : 
Vous  qui  ne  voyiez  plus  vos  princes  qu'en  portrait , 
Sujets  en  apparence,  esclaves  en  effet,  280 

Pouvez-vous  regretter  ces  démarches  pompeuses, 
Ces  fastueux  dehors  ,  ces  grandeurs  sourcilleuses  , 
Ces  gouverneurs  enfin  envoyés  de  si  loin , 

Dicite,  quis  menti  sensus  fuit,  aut  quibus  illum 
Spectastis  victorem  oculis,  cum  culmine  ab  alto 
Cederet  immixtus  turbœ,  communibus  omnes 
Vocibus  affari,  atque  operum  laudare  laborem, 
Vulneraque  et  sœvos  dictis  mulcere  dolores, 
Officiis  certare,  alios  et  vincere  lœtus? 

Vos  modo  feJices,  tanto  victore  subacti, 
Flandrigense,  quibus  ipsa  minus  victoria  clade 
Profuerat,  longamque  ferent  haec  bella  salutem. 
En  erit  ut,  vestras  postquam  Bellona  per  urbes 
Sœviit,  et  patrio  longum  satiata  cruore  est, 
Curarum  expertem  liceat  decurrere  vitam, 
Et  sperare  aditus,  et  principis  ora  tueri. 

Non  ita  quos  vobis  peregrino  e  littore  mittit 
Hispanus  dominos  :  non  hanc  sibi  fîngere  mores 
Ad  speciem  soliti,  similesque  capescere  ritus  ; 
At  secum  assidue  veterum  décora  alta  parentum 
Et  grandes  titulos  magni  versare  sub  umbra 


POÉSIES   DIVERSES.  2ii 

Tous-puissants  en  parade,  impuissants  au  besoin  , 
Qui  ne  montrant  jamais  qu'un  œil  farouche  et  sombre 
A  peine  vous  jugeoient  dignes  de  voir  leur  ombre  ? 

Nos  rois  n'exigent  point  cet  odieux  respect  : 
Chacun  peut  chaque  jour  jouir  de  leur  aspect  ; 
On  leur  parle ,  on  reçoit  d'eux-mêmes  le  salaire 
Des  services  rendus ,  ou  du  zèle  à  leur  plaire  ;  290 

Et  l'amoureux  attrait  qui  règne  en  leurs  bontés 
Leur  gagne  d'un  coup  d'œil  toutes  les  volontés. 

Pourriez-vous  en  vouloir1  une  plus  sûre  marque, 
Belges  ?  Vous  le  voyez ,  cet  illustre  monarque  , 
A  vos  temples  ouverts  conduire  ses  vainqueurs  295 

Pour  y  bénir  le  ciel  de  vos  propres  bonheurs 2. 
Est-il  environné  de  ces  pompes  cruelles 
Dont  à  Rome  éclatoient  les  victoires  nouvelles , 
Quand  tout  autour  d'un  char  elle  voyoit  traînés 

Nominis  ;  aut  sese  communi  prodere  luci 
Sicubi  contigerit,  truculento  incedere  vultu, 
Cuncta  supercilio  suspendere,  torva  tueri, 
Et  populo  praebere  sui  spectacula  gressus. 

Sed  rigor  hic  tandem  tumidique  ferocia  fastus 
Régis  ad  aspectum  tenues  vanescit  in  auras. 
Hune  adeo  effuso  devicta  per  oppida  plausu 
Saepe  incedentem  vidistis,  et  ordine  longo 
Ad  sacra  ducentem  victrices  templa  catervas. 
Non  illum,  laurisque  gravem  Tyrioque  superbum 
Murice,  purpurei  compta  cervice  jugales 
Quadrijugo  in  curru  duxere,  nec  agmina  pone 
Captiva  implexis  visa  hic  evincta  catenis 
Horrendos  inter  ferri  reptare  sonores. 

1 .  Dans  les  OEuvres  diverses  :  «  Pourriez-vous  en  avoir.  » 

2.  «  Le  Roi....  marcha  dès  le  dimanche(28  août)  après  midi,  n'ayant 
fait  que  passer  au  travers  de  Lille,  et  n'y  étant  demeuré  qu'autan  £ 
de  temps  qu'il  en  fallut  pour  chanter  le  Te  Deum.  »  (/ielatiort, 
p.  i37.) 


214  POESIES   DIVERSES. 

Des  peuples  soupirants  et  des  rois  enchaînés,  3oo 

Qu'elle  admiroît  l'amas  des  afireux  brigandages   [nages, 

D'où  tiroient  leurs  grands  noms  ses  plus  grands  person- 

Et  des  fleuves  domptés  les  simulacres  vains 

Qui  sous  des  flots  de  bronze  adoroient  ses  Romains  ? 

Il  n'y  fait  point  porter  les  dépouilles  des  villes  ,  3  o  5 

Comme  ses  Marius  ,  ses  Métels,  ses  Emiles1, 

Et  ce  reste  insolent  d'avides  conquérants, 

Grands  héros  dans  ses  murs,  partout  ailleurs  tyrans. 

Il  entre  avec  éclat ,  mais  votre  populace 
Ne  voit  point  sur  son  front  de  fast 2  ui  de  menace  ;     5  i  o 
Il  entre ,  mais  d'un  air  qui  ravit  tous  les  cœurs , 
En  père  des  vaincus  ,  en  maître  des  vainqueurs8. 
Peuples ,  repentez-vous  de  votre  résistance  ; 
Il  ramène  en  vos  murs  la  joie  et  l'abondance  ; 

Non  titulos,  captasque  urbes,  non  diruta  ferro 
Mœnia,  non  victis  mœrentia  flumina  ripis, 
Fusaque  squalenti  rerum  simulacra  métallo  ; 
At  neque  praedam  oculis  ingentem,  aurîque  talenta, 
Spiculaque,  et  cîypeos,  ensesque,  aggestaque  signa, 
Et  rigidis  appensa  ducum  spolia  aurea  truncis, 
Ostentare  labor.  Veteres  hsec  pompa  Metellos, 
Hsec  Paulos  deceat,  Mariosve,  et  quotquot  iniquo 
Roma  duces  plausu  celsa  ad  Capitolia  duxit, 
Prsedatrix  populorum.  Alio  se  more  videndum, 
Cultu  alio  gentis  decuit  prœbere  parent em. 
Ergo  animos  placido  visus  sibi  subdere  vultu, 
Indignaque  novos  formidine  solvere  cives. 

1.  Var.  Comme  les  Marius,  les  Métels,  les  Emiles. 

(Ruœi  Carmina,  1688.) 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  102,  vers  6;  tome IV,  p.  75,  vers  n55; 
tome  VIII,  p.  473,  vers  4390  ;  et  le  Lexique. 

3.  Ce  n'est  pas  ici  la  traduction  du  latin  du  P.  de  la  Rue,  c'est  la 
reproduction  presque  textuelle  d'un  vers  des  Triomphes  de  Louis  le 
Juste,  qui,  ainsi  que  nous  l'avons  remarqué  ci-dessus,  p.  108,  note  3, 
était  lui-même  un  souvenir  d'un  vers  latin  de  Corneille. 


POÉSIES    DIVERSES.  ai5 

Votre  défaite  en  chasse  un  sort  plus  rigoureux  :  3  1  5 

Si  vous  aviez  vaincu  ,  vous  seriez  moins  heureux. 

On  m'en  croit,  on  l'aborde ,  on  lui  porte  des  plaintes  ; 
Il  écoute ,  il  prononce,  il  fait  des  lois  plus  saintes  ; 
Chacun  reste  charmé  d'un  si  facile  accès , 
Chacun  des  maux  passés  goûte  le  doux  succès1,  3îo 

Jure  avec  l'Espagnol  un  éternel  divorce , 
Et  porte  avec  amour  un  joug  reçu  par  force. 

C'est  ainsi  que  la  terre ,  au  retour  du  printemps2, 

Undique  festivo  frémit  omnis  Belgica  pubes 
Murmuve  :  composito  pars  labra  natantia  risu, 
Pars  lœtos  oculorum  ignés,  et  utrinque  fluentem 
Erecta  cervice  comam;  pars  ardua  frontis 
Miratur  décora,  et  cultu  sub  simplice  laudat 
Regales  habitus,  majestatemque  serenam; 
Cuncti  animum  flecti  facilem  plebisque  patentem 
Questibus,  et  recta  librantem  singula  lance, 
Et  memorant  ultro,  et  tanto  sibi  vindice  gaudent. 
Sic,  ubi  post  longas  hiemes  insanaque  Cauri 

1.  Le  succès,  l'issue.  Voyez  le  Lexique. 

2.  Les  onze  vers  latins  qui  correspondent  aux  vers  3  2 3-3 3  2  se 
trouvent  aux  pages  S  et  6  du  tome  III  de  la  troisième  édition  des 
OEuvres  de  Santeul  publiée  en  1729.  Ils  sont  intitulés  :  In  h.«c 
verba  S.  Augustini  Deum  alloquentis  :  <k  Quis  mihi  dabit  acquies- 
ce cere  in  te?  Quis  mihi  dabit  ut  venias  in  cor  meum,  et  inebries 
«  illud,  ut  obliviscar  mala  mea,  et  unum  bonum  meum  amplectar  te?  » 
[Augustini  Confesslones ,  lib.  I,  cap.  v.)  Ensuite  viennent  les  vers 
français  avec  ce  titre  :  Sur  la  conversion  de  S.  Augustin  .  Sur  ces  pa- 
roles de  S.  Augustin  (au  premier  livre  de  ses  Confessions,  chapitre  v), 
traduction  par  Pierre  Corneille  :  «  Qui  me  fera  la  grâce,  Seigneur, 
de  me  reposer  en  vous?  Qui  me  fera  la  grâce  de  vous  voir  venir  dans 
mon  cœur,  et  l'enivrer  du  vin  céleste  de  votre  amour?  afin  que  je 
perde  le  souvenir  de  mes  maux,  et  que  je  vous  embrasse  de  toutes 
les  puissances  de  mon  âme,  comme  mon  seul  et  unique  bien.  »  —  San- 
teul est-il  le  véritable  auteur  des  onze  vers  latins,  et  le  P.  de  la  Rue  les 
a-t-il  insérés  plus  tard  dans  son  poème,  ou  bien,  ce  qui  est  beaucoup 
plus  vraisemblable,  a-t-011  trouvé  dans  les  papiers  de  Scnteul  un 
simple  rapprochement  entre  ces  vers  du  P.  de  la  Rue  et  le  passage 


216  POÉSIES    DIVERSES. 

Des  grâces  du  soleil  se  défend  quelque  temps , 

De  ses  premiers  rayons  refuit  les  avantages,  325 

Et  pour  les  repousser  élève  cent  nuages  : 

Le  soleil  plus  puissant  dissipe  ces  vapeurs , 

S'empare  de  son  sein,  y  fait  naître  des  fleurs, 

Y  fait  germer  des  fruits ,  et  la  terre ,  à  leur  vue 

Se  trouvant  enrichie  aussitôt  que  vaincue,  3  3o 

Ouvre  à  ce  conquérant  jusques  au  fond  du  cœur, 

Et  pleine  de  ses  dons ,  adore  son  vainqueur. 

Poursuis,  grand  Roi,  poursuis  :  c'est  par  là  qu'on  sas- 
Un  respect  immortel  chez  la  race  future  ;  [sure 
C'est  par  là  que  le  ciel  prépare  ton  Dauphin  3  3  5 

Flamina,  et  excussos  gelidis  e  nubibus  imbres, 
Sol  nostrum  radiis  afflat  propioribus  orbem, 
Ipsa  licet  primo  tellus  animata  calore 
jEstuet  in  nebulas,  reducique  obsistere  Phcebo, 
Et  lucem  undanti  tentet  prohibere  vapore, 
Sol  tamen  obstructas  densa  caligine  nubes 
Discutit  erumpens,  et  amico  lumine  vernas 
Undique  spargit  opes  :  donis  tum  victa  recludit 
Terra  sinus,  et  amat  quos  ante  refugerat  ignés, 
Victoremque  volens,  vel  dum  superatur,  adorât. 
Perge,  âge,  sic  victas,  regum  fortissime,  gentes 
Adjicere  imperio,  sic  magnum  in  sœcula  nomen 
Mittere,  sic  teneram  virtutis  imagine  prolem 

de  saint  Augustin,  rapprochement  qui  a  causé  cette  confusion  ?  Cela 
demeure  incertain  et  n'importe  guère  d'ailleurs  pour  l'histoire  du 
texte  de  Corneille.  Contentons-nous  de  signaler  ici  les  différences 
que  présentent  dans  l'édition  de  Santeul  les  dix  vers  de  notre  poëte, 
différences  qui,  comme  on  va  le  voir,  sont  plutôt  des  fautes  que  des 
variantes.  On  lit  au  vers  325  :  revoit,  u  lieu  de  refait;  au  vers  326  :  ses 
nuages,  au  lieu  décent  nuages;  au  vers  27  :  ses  vapeurs,  au  lieu  de  ces 
vapeurs;  au  vers  329  :  les  fruits,  au  lieu  de  des  fruits;  enfin  au  vers  33o  : 
se  voyant  aussi-tôt  enrichie.,  au  lieu  de  se  trouvant  enrichie  aussitôt.  Les 
vers  latins  offrent  quelques  différences  du  même  genre,  qu'il  n'entre 
point  dans  notre  plan  de  relever. 


POÉSIES    DIVERSES.  217 

A  remplir  hautement  son  illustre  destin  : 

Il  y  répond  sans  peine,  et  son  jeune  courage 

Accuse  incessamment  la  paresse  de  l'âge  ; 

Toute  son  àme  vole  après  tes  étendards , 

Brûle  de  partager  ta  gloire  et  tes  hasards,  340 

D'aller  ainsi  que  toi  de  conquête  en  conquête  4 . 

Conservez,  justes  cieux ,  et  Tune  et  l'autre  tête; 
Modérez  mieux  l'ardeur  d'un  roi  si  généreux  : 
Faites-le  souvenir  qu'il  fait  seul  tous  nos  vœux , 
Que  tout  notre  destin  s'attache  à  sa  personne,  345 

Qu'il  feroit  d'un  faux  pas  chanceler  sa  couronne; 
Et  puisque  ses  périls  nous  forcent  de  trembler, 
Du  moins  n'en  souffrez  point  qui  nous  puisse  accabler. 

Excolere,  inque  alias  crescentem  accendere  lauros. 
Ipse  in  cuncta  puer  jam  nunc  cornes  ire  pericla , 
Et  propriis  Belgas  tibi  subdere  miles  in  armis 
Gestiret  :  pudor  est,  castris  dum  tota  juventus 
Emicat,  imbelli  lentum  nutricis  in  umbra 
Indecores  ludos,  et  inania  ludere  bella; 
Necdum  sequas  animis  vires,  annosque  morantes 
Increpat.  Ah  quantus  Martis  quondam  ibit  in  artes, 
Quantus  honos  tibi,  Galle,  tibi  quot,  Ibère,  Iabor<  s, 
Cum  firmata  parem  genitori  hune  fecerit  aetas, 
Gallicaque  immensis  implebit  fata  triumphis  ! 

Vos  superi  prolemque  patri  prolique  parentem 
Servate  interea  ;  neve  hune,  dum  jura  tuetur, 
Et  pleno  invadit  leti  discrimina  passu, 
Invida  sors  nobis,  aut  bellicus  auferat  ardor. 

Carolus  de  la  Rue  ,  Soc.  Jesu. 

1.  Voyez  les  portraits  de  Louis  XIV  et  du  Dauphin  faits  en  1667 
par  Corneille,  sous  les  noms  deMérovee  et  de  son  fils,  dans  la  tragédie 
déjà  citée  tfAtiila,  tome  VII,  p.  i3i  et  i32. 


2i8  POESIES   DIVERSES. 


LXX 


TRADUCTIONS  ET  IMITATIONS 

DE   L'ÉPIGRAMME    LATINE   DE    M.  DE  MONTMOR, 
Premier  maître  des  requêtes   de  l'hôtel    du  Roi. 

Henri-Louis  Habert,  sieur  de  Montmor,  conseiller  du  Roi  en  ses 
conseils,  et  maître  des  requêtes  de  son  hôtel,  n'est  connu,  malgré  sa 
qualité  d'académicien,  que  par  quelques  épigrammes  qui  se  sont  con- 
servées dans  les  recueils  du  temps,  et  par  une  bonne  préface  latine 
placée  par  lui  en  tête  de  l'édition  des  OEuvres  de  Gassendi  son  ami, 
qu'il  prit  soin  de  publier  en  1 65 8.  —  La  traduction  et  les  imitations  de 
Corneille  ont  été  imprimées  en  1667  et  en  1669  à  la  suite  du  Poème 
sur  les  victoires  du  Roi  qu'on  vient  de  lire;  il  est  probable  qu'elles 
ont  paru  pour  la  première  fois  dans  cette  édition  de  1667,  et  que 
ce  n'est  pas  à  elles,  mais  seulement  aux  pièces  intitulées  :  Au  Roi 
sur  son  retour  de  Flandre  et  Remerciment présenté  au  Roi  en  Cannée  i663 
que  s'appliquent  ces  mots  de  l'avis  au  Lecteur  de  Corneille  .  «  Vous 
ne  serez  pas  fâché  que  j'y  aye  fait  joindre  quelques  autres  pièces 
que  vous  avez  déjà  vues.  »  La  traduction  et  les  imitations  de  Cor- 
neille sont  précédées  de  l'épigramme  latine  qui  y  a  donné  lieu  : 

Fulminât  attonitas  Scaldis  Lodoicus  ad  arces, 

Intrepidusque  hostes  terret  ubique  suos  : 
Dum  tamen  augustum  caput  objectare  periclis 

Non  tïmet,  heu!  populos  terret  et  ille  suos. 


TRADUCTION. 

Sur  l'Escaut  étonné  tu  lances  la  tempête  , 
Grand  Prince ,  et  fais  trembler  partout  tes  ennemis  ; 
Mais  quand  tu  ne  crains  pas  d'y  hasarder  ta  tète  , 
Tu  fais  trembler  aussi  ceux  que  Dieu  t'a  soumis. 


POÉSIES    DIVERSES.  219 


IMITATION. 


Tes  glorieux  périls  remplissent  tes  projets, 

Grand  Roi  ;  mais  tu  fais  peur  aux  deux  partis  ensemble  ; 

Et  si  devant  tes  pas  toute  l'Espagne  tremble , 

Ces  périls  où  tu  cours  font  trembler  tes  sujets. 


AUTRE. 


Ton  courage,  grand  Roi,  que  la  gloire  accompagne, 
Jette  les  deux  partis  dans  un  pareil  effroi  ; 
Et  si,  quand  tu  parois,  tu  fais  trembler  l'Espagne, 
Les  lieux  où  tu  parois  nous  font  trembler  pour  toi. 


AUTRE. 


Et  l'Espagne  et  les  tiens,  grand  Prince,  à  te  voir  faire, 
De  pareilles  frayeurs  se  laissent  accabler  : 
L'Espagne  à  ton  aspect  tremble  à  son  ordinaire  , 
Les  tiens  par  tes  périls  apprennent  à  trembler. 


22o  POESIES   DIVERSES. 


LXXl 

Al]     R.    P.     DELIDEL,     DE    LA    COMPAGNIE    DE    JÉSUS, 

SUR   SON   TRAITÉ   DE   LA    THÉOLOGIE  DES  SAINTS. 

Cette  ode  commence  au  verso  du  troisième  feuillet  de  la  Théo- 
logie des  saints,  ou  sont  représentez  les  misteres  et  les  merueilles  de  la 
grâce,  par  le  R.  P.  Claude  Delidel   de   la  Compagnie  de  Jésus,    à 

Paris ,  chez  Iean  Henault M.DC.LXVI1I.  Auec  Approbation  et  Priui- 

lege  du  Roy,  in-4°.  Le  privilège  est  du  «  dernier  iour  de  Nouem- 
bre  1666,  »  l'Achevé  d'imprimer  du  «  seizième  Ianuier  1668.  »  Ces 
vers  ont  été  recueillis  par  l'abbé  Granet  dans  les  OEuvres  diverses 
(p.  216-218)1.  Le  P.  Claude  Delidel  (de  Lidel  ou  de  Lidelle),  né  à 
Moulins,  était  entré  dans  la  Compagnie  de  Jésus  en  161 1,  à  l'âge  de 
dix-huit  ans.  Il  professa  la  rhétorique  pendant  vingt  ans,  fut  à  deux 
reprises  recteur  du  collège  d'Alençon,  et  mourut  à  Rouen  le  19  mars 
1671.  Il  avait  été,  comme  l'ode  même  nous  l'apprend,  un  des  maî- 
tres de  Corneille. 

Toi  qui  nous  apprends  de  la  grâce 

Quelle  est  la  force  et  la  douceur, 

Gomme  elle  descend  dans  un  cœur , 

Gomme  elle  agit ,  comme  elle  passe , 

Docte  écrivain  ,  dont  l'œil  perçant  5 

Va  jusqu'au  sein  du  Tout-Puissant 

Pénétrer  ce  profond  abîme  , 

Que  les  hommes  te  vont  devoir  ! 

Et  que  le  prix  en  est  ineffable  et  sublime, 

De  ces  biens  que  par  là  tu  mets  en  leur  pouvoir!  1  o 

1.  C'est  par  une  erreur,  que  nous  nous  empressons  de  reconnaître, 
que  nous  avons  mentionné  cette  ode,  dans  notre  Avertissement  (tomeT, 
p.  xn),  parmi  les  morceaux  de  Corneille  nouvellement  mis  en  lumière 


POÉSIES    DIVERSES.  221 

Oui ,  tant  que  durera  ta  course, 

Tu  peux ,  mortel ,  à  pleines  mains 

Puiser  des  bonheurs  souverains 

En  cette  inépuisable  source. 

Un  guide  si  bien  éclairé  :  5 

Te  conduit  d'un  pas  assuré 

Au  vivant  soleil  qui  Y  éclaire  : 

Suis,  mais  avec  zèle,  avec  foi, 
Suis  ,  dis-je,  tu  verras  tout  ce  qu'il  te  faut  faire; 
Et  si  tu  ne  le  fais,  il  ne  tiendra  qu'à  toi.  20 

Tu  pèches,  mais  un  Dieu  pardonne  ; 

Et  pour  mériter  ce  pardon, 

Il  te  '  fait  ce  précieux  don  : 

Il  n'en  est  avare  à  personne. 

Reçois  avec  humilité  ,  2  5 

Conserve  avec  fidélité 

Ce  grand  appui  de  ta  foiblesse  : 

Avec  lui  ton  vouloir  peut  tout  ; 
Sans  lui  tu  n'es  qu'ordure,  impuissance ,  bassesse. 
Fais-en  un  bon  usage,  et  la  gloire  est  au  bout.  3o 

C'en  est  la  digne  récompense  ; 

Mais  aussi,  tu  le  dois  savoir, 

Cet  usage  est  en  ton  pouvoir , 

Il  dépend  de  ta  vigilance  : 

Tu  peux  t'endormir,  t'arrêter  ;  3  5 

Tu  peux  même  le  rejeter , 

Ce  don  sans  qui  ta  perte  est  sûre , 

Et  n'en  tireras  aucun  fruit, 
Si  tu  défères  plus  aux  sens ,  à  la  nature , 
Qu  aux  mouvements  sacrés  qu'en  ton  àmc  il  produit.  40 

1.   Dans  l'édition  originale,  en  tête  de  la  Théologie  des  saints,  on 
lit  ici  se,  au  lieu  de  te,  ce  qui  est  une  faute  évidente. 


222  POESIES  DIVERSES. 

J'en  connois  par  toi  l'efficace , 

Savant  et  pieux  écrivain , 

Qui  jadis  de  ta  propre  main 

M'as  élevé  sur  le  Parnasse. 

C'étoit  trop  peu  pour  ta  bonté  4  5 

Que  ma  jeunesse  eût  profité 

Des  leçons  que  tu  m'as  données  : 

Tu  portes  plus  loin  ton  amour , 
Et  tu  veux  qu'aujourd'hui  mes  dernières  années 
De  tes  instructions  profitent  à  leur  tour.  5o 

Je  fus  *  ton  disciple ,  et  peut-être 

Que  l'heureux  éclat  de  mes  vers 

Eblouit  assez  l'univers 

Pour  faire  peu  de  honte  au  maître. 

Par  une  plus  sainte  leçon  5  5 

Tu  m' apprends  de  quelle  façon 

Au  vice  on  doit  faire  la  guerre. 

Puissé-je  en  user  encor  mieux  ! 
Et  comme  je  te  dois  ma  gloire  sur  la  terre  , 
Puissé-je  te  devoir  un  jour  celle  des  cieux  !  6  c 

Par  son  très-obligé  disciple , 

Pierre  de  Corneille. 
Quod  scribo  et placeo,  si  placeo ,  omne  tuum  est%. 

1.  Je  suis,  dans  l'édition  de  Granet,  et,  par  suite,  dans  toutes  les 
éditions  modernes. 

2.  Allusion  à  ce  vers  bien  connu  qui  termine  l'ode  111  du  livre  IV 
d'Horace  : 

Quod  spiro  et  placeo,  si  placeo,  tuum  est. 

Corneille  a  déjà  cité  à  la  fin  de  VÉpitre  dédicatoire  d' Horace  (tome  III, 
p.  261)  ce  vers,  précédé  de  trois  autres,  dont  un  est  de  lui. 


POÉSIES   DIVERSES.  223 


LXXII 


AU  ROI,  SUR  SA1  CONQUETE  DE  LA  FRANCHE-COMTÉ. 

La  Bibliothèque  impériale  possède  deux  éditions  séparées  et  une 
copie  manuscrite  de  cette  pièce.  L'une  des  éditions,  de  format  in-40, 
est  sans  lieu  ni  date;  elle  se  trouve  dans  le  recueil  Thoisy,  iu-fol., 
tome  IX,  en  regard  de  la  pièce  latine  de  Santeul;  l'autre  forme  huit 
pages  in-8°,  et  est  terminée  par  l'adresse  suivante:  A  Rouen,  de  l'Imp. 
de  L.  Maury,  1668.  Dans  les  deux  éditions  ces  vers  sont  signés  P.  Cor- 
neille. Dans  la  seconde,  ils  sont  suivis  de  la  pièce  latine,  égale- 
ment signée  de  notre  poète,  que  nous  reproduisons  plus  bas  ;  puis 
des  imitations  latines  que  nous  donnons  après;  et  enfin  des  vers 
qu'on  lira  sous  le  numéro  suivant  (voyez  la  notice  qui  les  précède). 
La  copie  manuscrite  (intitulée  :  sur  la  Prise  de  la  Franche  Comté) 
se  trouve  au  folio  63  verso  d'un  volume  qui  porte  le  n°  i5,2  44  du 
fonds  français.  Ces  stances  au  Bol  se  rencontrent  aussi,  à  la  suite  du 
Poème  sur  les  victoires  du  Roi,  dans  l'édition  de  166g,  que  cite  Granet 
et  que  nous  n'avons  pu  examiner.  Ces  stances,  la  traduction  latine 
par  P.  Corneille  et  la  pièce  latine  du  P.  de  la  Rue  se  retrouvent 
aux  pages  84-87  des  Idyllia  de  ce  dernier,  publiés  en  1669,  et  que 
nous  avons  déjà  cités  et  décrits  (voyez  ci-dessus,  p.  192  et  193). 
On  y  lit  aussi  les  deux  odes  en  strophes  alcaïques ,  signées  de  deux 
jésuites,  publiées  d'abord  dans  l'édition  originale  in-8°.  Les  Car- 
mina  de  de  la  Rue  (1688),  que  nous  avons  aussi  mentionnés  plus 
haut,  omettent  la  traduction  latine  de  Corneille  et  ne  donnent  (au 
livre  IV,  p.  212  et  21 3)  que  ses  vers  français,  en  regard  de  la  version 
latine  du  P.  de  la  Rue.  Quant  à  la  pièce  de  Santeul,  nous  la  revoyons 
dans  la  troisième  édition2  de  ses  OEuvres. 

Quelle  rapidité  de  conquête  en  conquête , 

1.  La,  dans  l'édition  in-40  et  dans  les  Idyllia  du  P.  de  la  Rue. 

2.  /.  B.  SantoliiVictorïm  Operum  omnium  editio  tertia,  1729,  tome  I, 


224  POESIES   DIVERSES. 

En  dépit  des  hivers,  guide  tes  étendards  ? 

Et  quel  dieu  dans  tes  yeux  tient  cette  foudre  prête 

Qui  fait  tomber  les  murs  d'un  seul  de  tes  regards? 

A  peine  tu  parois ,  qu'une  province  entière  5 

Rend  hommage  à  tes  lis  et  justice  à  tes  droits; 
Et  ta  course  en  neuf1  jours  achève  une  carrière 
Que  Ton  verroit  coûter  un  siècle  à  d'autres  rois  2. 

En  vain  pour  t' applaudir  ma  muse  impatiente , 
Attendant  ton  retour ,  prête  l'oreille  au  bruit  :  i  o 

Ta  vitesse  l'accable ,  et  sa  plus  haute  attente 
Ne  peut  imaginer  ce  que  ton  bras  produit. 

Mon  génie ,  étonné  de  ne  pouvoir  te  suivre 3, 
En  perd  haleine  et  force  ;  et  mon  zèle  confus , 

p.  8-10.  On  y  lit  la  note  survante  :  «  La  rapidité  de  cette  conquête 
engagea  Pierre  Corneille,  pour  marquer  à  Louis  XIV  que  sa  plume  ne 
pouvoit  pas  suivre  ses  victoires,  à  faire  vingt  vers,  qui  ont  été  mis 
en  latin  par  M.  de  Santeul.  »  Une  autre  note  donne  une  rapide  bio- 
graphie de  Corneille,  et  vante  «  son  mérite  extraordinaire  et  son 
génie  supérieur.  » 

i.  Dans  son  texte  latin  Corneille  a  écrit  ter  terni dies  (vers  8). 

De  la  Rue  dans  ses  deux  éditions  et  Santeul  dans  la  sienne  ont  mis 
sept  dans  le  texte  français  de  Corneille  et  ont  traduit  ce  nombre  sept; 
les  deux  autres  jésuites  y  ont  substitué  le  nombre  huit.  La  conquête 
de  la  Franche-Comté  fut  en  réalité  l'affaire  de  quelques  jours.  Le 
5  février  1668  le  prince  de  Condé  se  présenta  devant  Besançon,  dont 
il  reçut  les  clefs  le  y.  Salins  se  soumit  le  même  jour.  Le  Roi  assiégea 
Dole  le  io,  le  prit  le  i4;  les  châteaux  de  Joux  et  de  Sainte-Anne  se 
rendirent  peu  après;  en  moins  de  dix-sept  jours,  toute  la  Franche- 
Comté  fut  subjuguée. 

2.  Vak.  Que  nous  verrions  coûter  un  siècle  à  d'autres  rois. 

{Copie  manuscrite  de  la  Bibliothèque  impériale.) 

3.  Var.  Mon  génie,  étonné  de  ne  te  pouvoir  suivre. 

[Copie  manuscrite  de  la  Bibliothèque  impériale.) 


POÉSIES  DIVERSES.  225 

Bien  qu'il  t'ait  consacré  ce  qui  me  reste  à  vivre1,  i  5 

S'épouvante,  t'admire,  et  n'ose  rien  de  plus. 

Je  rougis  de  me  taire  et  d'avoir  tant  à  dire  ; 
Mais  c'est  le  seul  parti  que  je  puisse  choisir  : 
Grand  Roi ,  pour  me  donner  quelque  loisir  d'écrire , 
Daigne  prendre  pour  vaincre  un  peu  plus  de  loisir  2  !    ao 


idem  latine' 


Quis  te  per  médias  hiemes,  Rex  maxime,  turbo, 
Quisve  triumphandi  praescius  ardor  agit? 

Quis  deus  in  sacra  fulmen  tibi  fronte  ministrurn , 
Quis  dédit  ut  nutu  mœnia  tacta  ruant  ? 

Venisti ,  et  populos  provincia  territa  subdit ,  5 

Qui  tua  suspiciant  lilia ,  jura  probent  ; 

Quodque  alio  absolvant  vix  intégra  sœcula  rege , 
Hoc  tibi  ter  terni  dant  potuisse  dies. 

Ecce  avida  famam  properans  dum  dévorât  aure , 

Et  quaerit  reduci  quae  tibi  Musa  canat ,  i  o 

Prœcipiti  obruitur  cursu  victoris ,  et  alta 
Spe  licet  arripiat  plurima ,  plura  videt. 

Impar  tôt  rerum  sub  pondère  déficit  ipse 

i.  Dans  l'édition  de  Santeul  :  «  ce  qui  lui  reste  à  vivre.  » 
a.  Boileau  se  rappelait  sans  doute  ces  vers,  lorsqu'il  commençait 
ainsi  sa  huitième  épître,  composée  en  1675  : 

Grand  Roi,  cesse  de  vaincre,  ou  je  cesse  d'écrire. 

3.  Ce  titre  est  celui  des  éditions  originales.  De  la  Rue  y  ajoute  dans 
ses  Idyllia  :  a.  Ah  eodem  auctore  P.  Cornelio.  » 

CoRNKLLI,E.   X  l5 


226  POESIES   DIVERSES. 

Spiritus ,  et  vires  mole  premente  cadunt  ; 
Quique  tibi  reliquos  vates  devoverat  annos,  i  5 

Haeret ,  et  insueto  cuncta  pavore  stupet  ' . 

Turpe  silere  quidem ,  seges  est  ubi  tanta  loquendi  ; 

Turpius  indigno  carminé  tanta  loqui; 
Carmina  quippe  moram  poscunt  :  vel  parce  tacenti, 

Victor,  vincendi  vel  tibi  sume  moras.  20 


IDEM. 


Quis  te,  facta  novis  cumulantem  ingentia  factis, 
Per  médias  hiemes  belli  rapit  ardor?  et  altae 
Fulmina  quis  fronti  Deus  indidit,  omnia  solo 
Protinus  ut  nutu  dent  mœnia  sponte  ruinam  ? 

Venisti,  et  positis  circum  undique  Sequanus  armis 
Jura  probat  supplex,  et  lilia  promis  adorât  ; 
Longaque  septenis  superas  emensa  diebus, 
Quse  spatia  haud  alius  per  saecula  compleat  héros. 

Nequicquam  sonitus  et  prima?  murmura  famae 
Musa  bibit,  grandesque  avida  spe  praecipit  ausus, 
In  laudes  arrecta  tuas  ;  sed  enim  impete  rerum 
Obruitur,  tantisque  stupet  spem  cedere  factis. 

Ipse  adeo  immensis  animus  progressibus  impar 
Nititur  incassum,  et  cursu  defessus  anhelat; 
Ac  reliquos  quamvis  tibi  dudum  addixerit  annos, 
Haeret  inexpletum  admirans,  nullusque  stupori 

Est  modus;  et  pudor  est  décora  inter  tanta  silere, 
Et  laudare  timor.  Tu  vati,  maxime  regum, 

X.  Voyez  ci-dessus,  p.  72,  note  1. 


POÉSIES  DIVERSES.  227 

Débita  ne  spatium  quondam  in  prœconia  desit, 
Longius  in  taies  spatium  tibi  sume  triumpbos. 

Car.  de  la  Rue,  Soc.  Jesu. 


IDEM. 


Quis  te  per  altas  ardor  agit  nives, 
Laurisque  lauros  accumulât  novas  ? 
Frons  unde  primo  fulminantis 
Ictu  oculi  labefactat  arces? 

Venisti,  et  armis  aspera  gens  tuis 
Jurique  cedit.  Saecla  per  intégra 
Vix  frangat  alter,  quos  diebus 
Ris  quatuor  domitos  triumphas. 

Musam  volentem  carminé  prosequi 
Cursu  fatigas,  obruis  impetu  : 

Quœ  fa  ma,  quœ  spes  fingere  audet, 
Insolitis  superantur  ausis. 

Mens  nutat  impar  gressibus,  et  licet 
Vit»  sacrarit  quod  reliquum  est  super, 
Rerum  eloqui  molem  laborat, 
Et  tacito  célébrât  stupore. 

Cum  tanta  laudum  luxuriat  seges, 
Silere  turpe  est.  Si  fïdibus  jubés 
iEquare  palmas,  lentiore 
Mœnia  verte  inimica  ferro. 

I.  Tourné,  Soc.  Jesu. 


IDEM. 


Quo  te  bellandi  rapit  impetus?  obruis  hostes 
Contemnens  duras  hiemes,  cumulasque  triumphos 


228  POESIES   DIVERSES. 

Die  quibus  auspiciis?  quo  fulmine?  die  quibus  armis, 
Quisve  deus  pugnat  tecum,  et  comitatur  euutem? 

Te  spectante,  cadunt,  vel  solo  exterrita  nutu , 
Mœnia,  teque  probant  Dominum,  et  tua  jura  cadendo. 
Septima  lux  palmam  asseruit,  quam  vindice  ferro 
Non  alii  obtineant  etiam  per  ssecula  reges. 

Jam  dudum  in  plausus  mea  musa  erumpere  gestit  ; 
Te  reducem  exspectans,  avidas  frustra  applioat  aures  : 
Prœcipiti  cursu  antevolas,  fallisque  parantem 
Dicere  multa,  animum  longe  superantibus  actis  ; 

Nec  jam  te  capit  illa,  tuis  et  laudibus  impar 
Insolitum  miratur,  et  obstupefacta  récusât 
Arduum  opus,  vatemque  negato  carminé  fraudât. 
Quid  faciam  ?  pudor  est  décora  inter  tanta  silere, 

Sed  laudare  labor  :  nostro  succurre  labori, 
Maxime  Rex,  mihi  quo  liceat  tua  scribere  facta, 
Da  spatium  vati,  cursusque  morare  secundos. 

Santolius,    Victorinus. 


IDEM. 


Quis  tua.  tôt  cumulans  invito  frigore  lauros , 

Ardor  agit  vexilla  ?  quis  et  Deus  oppida  nutu 

Dat  tibi  fulmineo  perrumpere  fortius  ictu? 

Venisti,  et  justis  fera  gens  se  subjicit  armis, 

Conficis  et  velox  quod  nec  per  saecula  possit 

Rex  alius.  Mea  te  affectans  celebrare  Tbalia, 

Dum  redeas,  avidam  famae  frustra  applicat  aurem  : 

Antevolas,  summa  et  factis  prseverteris  ausa. 

Tam  rapidum  adinirans  animus  mihi  concidit ,  et  mens 

Fida  licet  reliquos  tibi  sponte  sacraverit  annos, 


POÉSIES    DIVERSES.  229 

Te  sancto  stupet  usque  metu,  nilque  amplius  audet. 
Tôt  memoranda  pudet  premere,  et,  Rex  magne,  necesse  est. 
Ni  mihi  des  spatium,  ac  céleri  minus  impete  vincas. 

Carolus  du  Perier. 


IDEM    ALIO    CARMINE. 

Quis  tuum,  lectis  tibi  tôt  per  altas 
Et  nives  palmis,  agit  ardor  agmen  ? 
Quis  Deus  nutu  quatere  addit,  instar 
Fulminis,  arces? 

Te  simul  videre,  tibi  féroces 
Sequani  parent;  rapidusque  subdis 
Ipse  quae  longis  neque  subdat  annis 
Oppida  Mavors. 

Musa  te,  donec  remees,  sonare 
Gestiens,  frustra  bibit  aure  famam; 
Assequi  nec  fas  tua  tôt  sagaci 
Praelia  sensu. 

Gressibus  mi  mens  stupet  aegra  tantis; 
Ac  licet  totum  tibi  me  dicarit, 
Te  pavens  spectat,  mea  nil  et  ultra 
Pieris  audet, 

Digna  tôt  fatu  pudor  est  silere,  et, 
Magne  Rex,  cogar:  brève  fac  anhelse 
Otium  Musse,  celeresque  pualum 
Siste  triumphos. 

Carolus  du  Perier. 


23o  POÉSIES    DIVERSES. 


IDEM. 

Quis  te,  quis  ardor  magnanimos  rapit, 
Princeps,  in  ausus;  et  viridi  jubet 
Frontem,  vel  invitis  pruina? 
Frigoribus,  redimire  lauro? 

Quod  numen  in  te  fulminis  afbitrum 
Nutu  vel  uno  mœnia  diruit? 
Venis,  repentinaque,  supplex 
Jura  probat,  domitus  ruina 

Burgundus;  et  quod  vix  aliis  daret 
Invicta  virtus  curriculum  integris 
Implere  sœclis,  bis  quaternis 
Solibus  es,  Lodoïce,  niensus. 

Frustra  parantem  prœlia  me  loqui 
Urbesque  victas,  obruit  impetus, 
Cursusque  inoffensus  triumphi, 

Spemque  avidam  tua  gesta  vincunt. 

Victoris  impar  mens  mea  passibus, 
Quanquam  fugacis  quod  superest  mihi 
Vitœ  tibi  ultro  consecrarim, 
Attonito  stupet  ore  cursum. 

Silere  turpe  est  ;  perpetuum  tamen 
Silere  cogis  :  vincere  tam  cito 
Ni  desinas,  lentisque  lentus 
Victor  agas  celebranda  Musis. 

Rob.  Riguez1,  Soc,  Jesu. 

i.  Le  P.  Robert  Riguez  est  l'éditeur  du  Velleius  Paterculus,  dans 
la  collection  ad  usum  Delpltbù  (1676,  in-4°).  On  a  de  lui  d'autres  vers 
intitulés  :  Ludovico  Borhonïo  princlpi  Condxo,  Gallici  exercitus  in  Ger- 
marùa  imperatori,  in-folio,  2  ff. 


POÉSIES    DIVERSES.  »3 


LXXHI 


SDR  LE  CANAL    DU    LANGUEDOC,    POUR    LA    JONCTION 
DES    DEUX    MERS. 


IMITATION. 

Ce  titre  est  celui  que  Granet  a  donné  à  cette  pièce  à  la  page  43  des 
OEuvres  diverses.  Lorsqu'en  1668  elle  a  paru  pour  la  première  fois  à 
la  page  8  de  l'édition  originale  des  vers  intitulés  :  Au  Roy,  sur  sa  con- 
queste  de  la  Franche- Comté  (voyez  ci-dessus,  p.  228,  notice),  elle  sui- 
vait la  pièce  latine  que  nous  donnons  en  note  !  et  était  seulement  in- 
titulée :  Imitation.  Elle  parut  de  nouveau,  en  1669,  à  la  suite  de  la 
seconde  édition  des  Victoires  du  Roi  (notre  pièce  LXIX);  et  encore, 
en  1681,  dans  la  Relation  de  L'Etat  du  canal  royal  de  communication 
des  mers  en  Languedoc,  avec  la  vérification  qui  en  a  été  faite  par  ordre 
de  Sa  Majesté,  Beziers,  Henri  Martel,  1681,  in-8°.  La  pièce  latine 
a  sans  doute  été  composée  en  1666,  époque  où  le  canal  fut  décrété. 
On  trouve  dans  un  manuscrit  de  l'Arsenal  qui  porte  le  n°  HF  191  bis 
et  la  date  de  1689  (voyez  ci-après  la  Notice  de  la  pièce  LXXXVII) 
une  assez  mauvaise  copie  intitulée  :  Vers  latins  et  francois  sur  le  canal 
de  la  jonction  des  deux  mers  F  Océan  et  la  Méditerranée. 

La  Garonne  et  TÀtax  dans  leurs  grottes  profondes 

I.  IN    JUNCTIONEM    UTRIUSQUE    MARIS    EPIGRAPHE. 

Ne  daret  optanti  dudum  oscula  grata  Garumnœ 
Mitis  Atax,  et  aquis  per  mutua  jura  refusis 
Exuvias  utriusque  maris  concluderet  uno 
Flumine,  et  hesperium  pelagus  misceret  eoo, 
Obstabat  Natura,  suis  obnoxia  semper 
Legibus,  œternos  non  ausa  revellere  fines  ; 
Sed  Divum  Lodoïcus  amor,  dispendia  longi 
Circuitus,  victrice  manu  ,  jussuque  potenti 
Amputât  :  obsequitur  supplex  Natura,  superbi 


232  POÉSIES   DIVERSES. 

Soupiroient  de  tout  temps  pour  voir  unir  leurs  ondes  \ 

Et  faire  ainsi  couler  par  un  heureux  penchant 

Les  trésors  de  l'aurore  aux  rives  du  couchant  ; 

Mais  à  des  vœux  si  doux ,  à  des  flammes  si  belles  ,  5 

La  Nature ,  attachée  à  ses  lois  éternelles , 

Pour  obstacle  invincible  opposoit  fièrement 

Des  monts  et  des  rochers  l1  affreux  enchaînement. 

France ,  ton  grand  Roi  parle ,  et  ces  rochers  se  fendent , 

La  terre  ouvre  son  sein,  les  plus  hauts  monts  descendent  : 

Tout  cède  ;  et  Feau  qui  suit  les  passages  ouverts 

Le  fait  voir  tout-puissant  sur  la  terre  et  les  mers. 

Decrescunt  montes,  ul troque  incilia  replet 
Unda  sequax,  refluoque  aperit  commercia  cursu. 
Sic  praestant  elementa  fidem,  promptoque  futurum 
Obsequio  agnoscunt  terrseque  marisque  potentem. 

I,  Parisot,  in  Senatu  tolosano  causarum  patronus. 
Granet  a  placé  après  la  pièce  de  notre  auteur  une 

TRADUCTION  DES  VERS  DE  CORNEILLE,  PAR  LE   P.  CLERIC  *,  JESUITE. 

Dudum  mitis  Atax  antrisque  Garumna  profundis 
Ardebant  thalamo  lymphas  sooiare  jugali, 
Scilicet  ut  junctis  tandem  féliciter  undis 
Littus  ad  occiduum  gaza?  veherentur  eose  ; 
Talibus  at  votis  ac  talibus  ignibus  obstans, 
jEternamque  sequens  legem,  Natura  superbis 
Fluctibus  objecit  magnos  longo  ordine  montes, 
Immensosque  operi  scopulos,  rupesque  cavanaSs. 
Gallia  !  vix  jussit  Lodoix,  et  saxa  dehiscunt, 
Terra  sinus  aperit,  procumbunt  vertice  montes, 
Cedunt  cuncta,  subit  defossos  unda  cauales, 
Terrarumque  simul  monstrat  mariumque  potentem. 

j  .  Lîi  copie  del'Arsenal  donne  :  «  pour  marier  leurs  ondes.  » 

*  Le  P.  Pierre  Cleric,  né  à  Béziers  en  1622,  mort  à  Toulouse  en 
174°»  professa  pendant  vingt-deux  ans  la  rhétorique  dans  cette  der- 
nière ville.  Il  est  auteur  de  divers  ouvrages  en  prose  et  en  vers  cou- 
ronnés par  l'Académie  des  Jeux  Floraux. 


POÉSIES   DIVERSES.  2Î3 


LXXIV 


AIR    DE  M     BLONDEL. 

Cette  pièce  est  imprimée  à  la  page  275  du  Recueil  des  plus  beaux 
vers  qui  ont  esté  mis  en  chant,  auec  le  nom  des  aut heurs,  seconde  et 
nouvelle  Partie,  dans  laquelle  sont  compris  les  Airs  de  Versailles,  à 
Paris,  chez  Monsieur  Ballard....  et  chez  Pierre  Bienfait,  M.DC.LXVIH, 
in-12.  Elle  est  signée  :  M.  de  Corneille.  L'Achevé  d'imprimer  du 
volume  est  du  a  5  Iuin  1668;  »  mais  il  est  probable  que  la  pièce, 
adressée  à  Iris,  c'est-à-dire,  suivant  toute  apparence,  à  la  du  Parc 
(voyez  ci-dessus,  p.  141)»  a  été  composée  beaucoup  plus  tôt.  Elle 
figure  ici  pour  la  première  fois  dans  les  OEuvres  de  Corneille.  Elle  a 
été  signalée  par  M.  P.  Lacroix  dans  la  Revue  des  province»,  tome  II, 
p.  479  et  489. 

Mes  soupirs  vous  ont  dit  plus  de  cent  fois  le  jour 
Que  je  mourois  pour  vous  d'amour. 

Que  me  sert,  belle  Iris,  de  parler  davantage? 

S'ils  vous  ont  dit  mon  mal,  pouvez-vous  l'ignorer? 

Hélas  !  si  vous  vouliez  un  moment  soupirer,  5 

Que  j'entendrois  bien1  ce  langage! 

1.   Mieux,  mais  par  erreur,  dans  le  texte  de  M.  P.  Lacroix. 


^34  POÉSIES   DIVERSES. 


LXXV 


DÉFENSE    DES    FABLES    DANS    LA    POÉSIE. 

IMITATION    DU    LATI3Î. 

Cette  pièce  est  imitée  fort  librement  d'un  petit  poëme  latin  de  Jean- 
Baptiste  Santeul,  que  nous  donnons,  comme  d'ordinaire,  au  bas  des 
pages.  Il  avait  été  composé  à  l'occasion  de  la  fameuse  dispute  sur 
l'emploi  de  la  fable,  que  les  uns  permettaient  aux  poètes  chrétiens, 
tandis  que  d'autres  le  condamnaient.  Dans  cette  dispute,  où  inter- 
vinrent, entre  autres,  Pellisson  et  Bossuet,  et  qui,  renouvelée  vingt 
ans  plus  tard  par  les  remercîments  à  la  Quintinie,  intitulés  Pomonay 
fut  close  par  l'amende  honorable,  très-élégante  et  très-spirituelle, 
adressée  par  le  chanoine  de  Saint- Victor  à  l'évêque  de  Meaux,  San- 
teul eut  pour  adversaire  son  propre  frère,  Claude,  plus  âgé  que  Jean- 
Baptiste  de  près  de  deux  ans,  qui  répondit  par  des  vers  «  aussi  latins 
que  chrétiens1,  »  à  la  pièce  que  Corneille  a  imitée.  Les  vers  de  Claude, 
comme  ceux  de  Jean-Baptiste,  parurent  en  1670;  mais  une  note  de 
l'édition  des  OEuures  de  Santeul  publiée  en  1729  nous  apprend 
(tome  II,  p.  167)  que  Claude  envoya  les  siens,  le  24  août  1669,  à 
l'abbé  de  Chavigny,  depuis  évêque  deTroyes.  Ceux  de  Jean -Baptiste, 
adressés  à  Pierre  de  Bellièvre,  sont  donc  antérieurs  à  cette  date. 

On  voyait  figurer  sous  le  n°  328,  dans  le  catalogue  de  vente  que 

1 .  Voici  l'avertissement  dont  le  poëme  de  Jean-Baptiste  est  pré- 
cédé :  a  Lis  erat  apud  litteratos  utrum  adhuc  liceret  figmentis  paga- 
«  norum  et  fabulis  uti.  Qui  îllas  proscribere  volunthis  utuntur  ferme 
«  rationibus  :  primo  quod  aniles  fabula?  sint  omnes  ;  deinde  quod  a 
«  moribus  Christianis  abhorreant  ;  postremo  quod  natura  per  se  cam- 
«  pus  satis  sit  patens  in  quo  exsultare  possit  poetica  absque  fabularum 
«  ope.  In  novos  fabularum  accusatoi  es  juvénile  scripsi  carmen;  sed 
«  meus  frater  eonsultior  hoc  christiano  nec  minus  latino  carminé  me 
«  desipuisse  hactenus  monet,  ut,  abjurato  Apolline  cum  Musis,  ad 
«  sanctiora  scribendi  argumenta  invitet.  Non  enim  patent  Anollïni 
«  sacrata  Chrlsto  pectora  :  sanctus  Paulinus  ad  Ausonium.  » 


POESIES    DIVERSES.  s35 

nous  avons  plus  d'une  fois  cité  (voyez  tome  IX,  p.  6o5,  note  3,  et 
ci-dessus,  p.  186),  un  exemplaire  de  l'édition  originale  in-4°,  sans 
lieu  ni  date,  delà  traduction  de  notre  poète  ;  c'est  une  pièce  de  quatre 
pages  intitulée  :  Défense  des  fables  dans  la  poésie,  imitation  du  latin 
de  Mr  de  Santeuil,  signée  :  P.  Corneille  ,  et  contenant  de  curieuses 
variantes,  que  nous  signalons  en  note.  Elle  a  été  acquise  par  M.  Cousin. 
La  bibliothèque  de  l'Arsenal  possède,  sous  le  n°  3578,  A,  un  autre 

B. 

exemplaire  de  cette  rare  et  curieuse  édition.  Nous  suivons  pour  les  vers 
de  Corneille  le  texte  publié  à  la  suite  des  vers  latins  de  Santeul(iy29), 
texte  qui,  du  reste,  ne  diffère  point  de  celui  de  Granet  (1738). 

Qu'on  fait  d'injure  à  l'art  de  lui  voler  la  fable  ! 
C'est  interdire  aux  vers  ce  qu'ils  ont  d'agréable  *, 
Anéantir  leur  pompe ,  éteindre  leur  vigueur, 
Et  hasarder  la  Muse  à  sécher  de  langueur. 

O  vous  qui  prétendez  qu'à  force  d'injustices  5 

Le  vieil  usage  cède  à  de  nouveaux  caprices , 
Donnez-nous  par  pitié  du  moins  quelques  beautés 

AD    ILLUSTRISSIMUM    VIRUM    D.     P.     BELLEVR^EUM  % 
PRO    DEFENSIONE    FABULARUM. 

Ergo  sacra  novae  mutabunt  carmina  leges, 

Et  suus  antiquis  praeripietur  honos? 
Tôt  vatum  monumenta,  tôt  et  décora  alta  peribunt  ? 

Musarum  tôt  opes  auferet  una  dies? 
Ah  !  tantum  prohibe  facinus,  pater  optime  vatum  ; 

Non  alla  fueris  tu  mihi  lege  deus. 
Vos  tantum  prohibete  nefas,  prohihete,  Camœnse; 

Non  alia  dicam  vos  ratione  deas. 

1.   Var.  (édit.  in-40)  : 

C'est  interdire  aux  vers  ce  qu'ils  ont  d'admirable. 

2  Pierre  de  Bellièvre,  marquis  de  Grignon,  abbé  de  Saint-Vincent 
de  Metz,  conseiller  d'honneur  au  parlement  de  Paris,  et  frère  du 
premier  président  (voyez  ci-dessus,  p.  i3i,  notice),  était  né  en  161  r, 
et  mourut  le  26  janvier  i683.  C'était  le  principal  protecteur  de  San- 
teul,  qui  lui  dédia,  en  1670,  le  premier  recueil  de  ses  poésies. 


*36  POÉSIES   DIVERSES. 

Qui  puissent  remplacer  ce  que  vous  nous  ôtez  ; 

Et  ne  nous  livrez  pas  aux  tons  mélancoliques 

D'un  style  estropié  par  de  vaines  critiques.  i  o 

Quoi?  bannir  des  enfers  Proserpine  et  Pluton? 
Dire  toujours  le  diable  ,  et  jamais  Alecton? 
Sacrifier  Hécate  et  Diane  à  la  Lune , 
Et  dans  son  propre  sein  noyer  le  vieux  Neptune  ? 
Un  berger  chantera  ses  déplaisirs  secrets  i  5 

Sans  que  la1  triste  Echo  répète  ses  regrets? 
Les  bois  autour  de  lui  n'auront  point  de  drvades? 
L'air  sera  sans  zéphyrs ,  les  fleuves  sans  naïades , 
Et  par  nos  délicats  les  faunes  assommés 
Rentreront  au  néant  dont  on  les  a  formés2  ?  20 

Pourras- tu,  dieu  des  vers,  endurer  ce  blasphème, 

Ecquis  erit  vestros  posthac  qui  curet  honores, 

Irrita  si  nullam  numina  fertis  opem? 
Non  ita  :  tôt  veterum  prseclara  inventa  manebunt. 

Et  quod  sacravit  fabula  prisca  melos. 
Numen  habent  Musse,  vos  fontes  numen  habetis, 

Sunt  etiam  et  silvis  arbori  busqué  deœ. 
Et  nemora,  et  montes,  vallesque,  et  inhospita  saxa, 

Ipsaque  cum  rivis  flumina  numen  habent. 
Nuper  multa  gemens  in  littore  flebat  Amyntas, 

Et  fato  raptum  ssepe  vocabat  Hylam. 
Flebant  et  rupes,  fontesque  et  littora  flebant; 

Flere  etiam  visa  est  conscia  nympha  loei  ; 
Et  montes  doluisse,  annosaque  robora  circum 

Corticibus  ruptis  ingemuisse  ferunt. 
Quid  non  Piérides,  quid  non  finxere  poetae? 

1.  Il  n'y  a  la  que  dans  l'édition  in -4°.  Toutes  les  autres  portent  /e, 
niais  c'est  une  faute  évidente. 

2..  Voyez  dans  le  IIIe  chant  de  Y  Art  poétique  de  Boileau  (vers  i63 
et  suivants)  un  assez  long  passage  où  l'auteur  paraît  se  souvenir  des 
vers  de  Santeul  et  de  Corneille  et  défend  la  même  opinion.  Le  vers 
232  de  Boileau  :  a  D'ôter  à  Pan  sa  flûte,  0  rappelle  notre  49e  :  f<  Otez 
Pan  et  sa  flûte.  » 


POÉSIES    DIVERSES  237 

Toi  qui  fis  tous  ces  dieux ,  qui  fis  Jupiter  même? 
Pourras-tu  respecter  ces  nouveaux  souverains 
Jusqu'à  laisser  périr  l'ouvrage  de  tes  mains? 

O  digne  de  périr,  si  jamais  tu  l'endures  !  2  5 

D'un  si  mortel  affront  sauve  tes  créatures  ; 
Confonds  leurs  ennemis,  insulte  à  leurs  tyrans; 
Fais-nous,  en  dépit  d'eux,  garder  nos  premiers  rangs  ; 
Et  retirant  ton  feu  de  leurs  veines  glacées  , 
Laisse  leurs  vers  sans  force,  et  leurs  rimes  forcées.      3o 

«  La  fable  en  nos  écrits ,  disent-ils ,  n'est  pas  bien  ; 
La  gloire  des  païens  déshonore  un  chrétien.  » 
L'Eglise  toutefois ,  que  l'Esprit  saint  gouverne , 
Dans  ses  hymnes  sacrés  nous  chante  encor  l'Averne , 
Et  par  le  vieil  abus  le  Tartare  inventé  3  5 

N'y  déshonore  point  un  Dieu  ressuscité1. 

Vidimus  arguta  mœnia  structa  lyra. 
Vidimus  auritas  motare  cacumina  quercus, 

Et  cursus  amiies  sustinuisse  suos. 
Dant  vates  vultus  varios  variosque  colores, 

Eque  solo  ducunt  quse  super  astra  ferant. 
Surda  voeant,  immota  movent,  mentem  omnibus  addunt  : 

Artis  opus  summum,  mille  placere  modis. 
Obscuris  vera  involvunt,  celantque  docendo, 

Sublustri  et  nebula  splendidiora  tegunt. 
Sol  veluti,  rutilis  quando  fulgoribus  ardet, 

Nubibus  obvolvi,  qua  videalur,  amat; 
Maxima  sunt  plerumque  tegit  quse  fabula,  et  illis 

E  tenebris  fulget  pulchrius  orta  dies. 
Lector  amat  veros  dubia  sub  imagine  sensus, 

Qusesitasque  diu  cernere  gaudet  opes. 
Quin  etiam  humanis  divina  affingimus  ora, 

i .  Voyez  au  tome  IX  la  traduction  des  Hymnes  du  Bréviaire  ro- 
main ,  que  Corneille  a  publiée  la  même  année  que  cette  Défense  des 
fables,  c'est-à-dire  en  1670.  On  lit  dans  une  hymne  des  matines  du  di- 
manche (p.  45 1)  :  A 'verni  ignibus  ;  et  dans  l'hymne  des  vêpres  du  temps 


238  POÉSIES   DIVERSES. 

Ces  rigides  censeurs  ont-ils  plus  d'esprit  qu'elle , 
Et  font-ils  dans  l'Eglise  une  Eglise  nouvelle  4  ? 

Quittons  cet  avantage ,  et  ne  confondons  pas 
Avec  des  droits  si  saints  de  profanes  appas.  40 

L'œil  se  peut-il  fixer  sur  la  vérité  nue  ? 
Elle  a  trop  de  brillant  pour  arrêter  la  vue  ; 
Et  telle  qu'un  éclair  qui  ne  fait  qu'éblouir, 
Elle  échappe  aussitôt  qu'on  présume  en  jouir. 
La  fable,  qui  la  couvre,  allume  ,  presse,  irrite  *  45 

L'ingénieuse  ardeur  d'en  voir  tout  le  mérite  : 
L'art  d'en  montrer  le  prix  consiste  à  le  cacher, 
Et  sa  beauté  redouble  à  se  faire  chercher. 

Otez  Pan  et  sa  flûte ,  adieu  les  pâturages  ; 

Et  sunt  quse  proprio  nomine  sponte  carent. 
Ignein  Mulciberum,  Cererem  frumenta  vocabo, 

Et  pluvium,  in  terras  dum  cadit  unda,  Jovem 
Si  Venetas  describam  arces,  molimine  magno 

Non  hommes  dicam,  sed  posuisse  deos. 
Illic  Adriacis  surgat  Neptunus  ab  undis, 

Atque  novae  admirans  hsereat  urbis  opus. 
Quod  si  bella  canam,  Jani  Mars  limina  vellat, 

Et  bellatores  ducat  in  arma  deos. 
Mulciber  JEtnaeis  reeoquat  fornacibus  arma, 

Thracibus,  aut  rigidis  arma  tremenda  Getis. 
Tuni  scelerum  inventrix  lacera  Discordia  palla 

Advocet  infernas  ex  Acheronte  deas. 
Mox  amnes  trepidare,  imis  pal  1ère  sub  antris, 

de  la  passion  (p.  5 10)  :  prœdam  Tartari.  Il  est  à  remarquer  que  dans  ces 
deux  passages  Corneille  a  évité  en  français  les  mots  mythologiques. 
1.  Var.  (édit.  in-4°): 

Et  leur  mépris  pour  nous  va-t-il  jusqu'à  son  zèle  ? 

a.  Var.  (édit.  in-4fl)  : 

La  fable  qui  la  couvre  attache  et  facilite 
A  son  éclat  moins  vif  l'effet  de  son  mérite  :• 
L'art  de  le  faire  voir  consiste  a  le  cacher. 


POÉSIES   DIVERSES.  *39 

Otez  Pomone  et  Flore,  adieu  les  jardinages;  5o 

Des  roses  et  des  lis  le  plus  superbe  éclat1, 

Sans  la  fable ,  en  nos  vers ,  n'aura  rien  que  de  plat. 

Qu'on  y  peigne  en  savant  une  plante  nourrie 

Des  impures  vapeurs  d'une  terre  pourrie, 

Le  portrait  plaira-t-il,  s'il  n'a  pour  agrément  5  5 

Les  larmes  d'une  amante  ou  le  sang  d'un  amant? 

Qu'aura  de  beau  ia  guerre,  à  moins  qu'on  y  crayonne 
Ici  le  char  de  Mars,  là  celui  de  Bellone; 
Que  la  Victoire  vole ,  et  que  les  grands  exploits 
Soient  portés  en  tous  lieux  par  la  Nymphe  à  cent  voix? 

Qu'ont  la  terre  et  la  mer,  si  l'on  n'ose  décrire 
Ce  qu'il  faut  de  tritons  à  pousser  un  navire , 
Cet  empire  qu'Eole  a  sur  les  tourbillons , 
Bacchus  sur  les  coteaux ,  Cérès  sur  les  sillons  ? 

Dum  Bellona  furens  impia  bella  movet. 
Si  décora  haec  tollas,  sine  vi,  sine  pondère  carmen 

Lectori  fesso  taedia  mille  feret. 
Quid  memorem  flores?  Si  numina  floribus  absunt, 

Cur  pallent  violse,  cur,  hyacinthe,  rubes? 
Cur  sibi  cognatos  anémone  dépérit  Euros? 

Unde  color  cal  tins,  et  color  un  de  rosis? 
Non  his  terra  putris  det  ftaribus  unde  rubescant, 

Sed  pueri  aut  Veneris  sanguine  tingat  Amor. 
Vos  sine  Pomona  nusquam  florebitis  horti, 

Et  mœsti,  nisi  Pan  pascat,  abite,  grèges. 
Sunt  haec  magna  quidem  veterum  mysteria  vatum, 

Temporibus  seris  quse  violare  nefas. 
Ergo  tui,  Relevrœe,  canam  si  gaudia  ruris, 

Alloquar  et  nymphaSj  silvicolasque  deos  ; 
Et  Charités  aderunt,  zonis  de  more  solutis, 

i.  Var.  (édit.  in-4°)  : 

L'anémone,  le  lis,  la  tulipe  et  l'œillet, 

Sans  la  fable,  en  nos  vers,  n'auront  rien  que  de  laid. 


a4o  POESIES   DIVERSES. 

Tous  ces  vieux  ornements  ,  traitez-les  d'antiquailles  :   6  5 
Moi,  si  je  peins  jamais  Saint-Germain  ou  Versailles4, 
Les  nymphes,  malgré  vous,  danseront  tout  autour; 
Cent  demi-dieux  follets  leur  parleront  d'amour; 
Du  satyre  caché  les  brusques  échappées 
Dans  les  bras  des  sylvains  feront  fuir  les  napées  ;  7  o 

Et  si  je  fais  ballet  pour  l'un  de  ces  beaux  lieux 2, 
J'y  ferai,  malgré  vous,  trépigner  tous  les  Dieux. 

Vous  donc,  encore  un  coup,  troupe  docte  et  choisie, 
Qui  nous  forgez  des  lois  à  votre  fantaisie  , 
Puissiez-vous  à  jamais  adorer  cette  erreur  7  5 

Qui  pour  tant  de  beautés  inspire  tant  d'horreur, 

Alterno  terram  concutientque  pede. 
Illuc  pastores,  illuc  mihi  rustica  turba, 

Et  pariter  veniant  dique  deœque  loci. 
Fauni  cum  satyris  clavam  thyrsumque  relinquant, 

Tympana  cum  sistris  œraque  puisa  sonent  : 
Pampmea  incomptos  redimiti  fronde  capillos, 

Lascivis  célèbrent  orgia  laeta  modis. 
Jam  madidi  vino  média  inter  pocula,  libent 

Et  tibi,  magna  Pales,  et  tibi,  Bàcche  pater. 
Mœnades  hic  ululent  sparsis  sine  lege  capillis, 

Et  fuget  attonitos  turba  proterva  viros. 
Tum  lector  gaudebit,  amat  nam  mille  figuras, 

Se  quoque  festivis  credet  adesse  clioris. 
Quin  etiam  arridens  jam  tum  mihi  plaudit  Apollo, 

Plaudit  Apollinei  docta  caterva  chori  ; 

1 .  Corneille  a  substitué  «  Saint-Germain  ou  Versailles  »  à  la  maison 
de  campagne  de  Bellièvre,  dont  parle  Santeul.  —  Lefèvre  et  plusieurs 
autres  éditeurs  ont  imprimé  : 

Moi,  si  jamais  je  peins  Saint-Germain  et  Versailles. 

2.  Va«.  (édit.  in-4°)  : 

Je  dirai  plus  encor,  sans  dire  pourtant  rien 
Qui  ne  soit  avoué  par  un  roi  très-chrétien. 


POESIES   DIVERSES.  241 

Nous  laisser  à  jamais  ces  charmes  en  partage , 

Qui  portent  les  grands  noms  au  delà  de  notre  âge; 

Et  si  le  vôtre  atteint  quelque  postérité , 

Puisse-t-il  n'y  traîner  qu'un  vers  décrédité  !  80 

Et  nymphse  properant  alacres  ambire  poetain, 

Et  viridi  lauro  tempora  nostra  tegunt. 
Ruris  et  ipse  mihi  dominus  quoque  plaudit  amico 

Numine,  et  incœptis  annuit  usque  meis. 
Exulet  ergo  procul  sacris  gens  in  vida  Musis, 

Et  placuisse  tibi  sit,  Belevrœe,  satis. 


CoRNKfhU?..    x  if> 


2li*  POÉSIES   DIVERSES. 


LXXVI 


SUR    LA    POMPE  DU     PONT    NOTRE-DAME. 

TRADUCTION    PAR    PIERRE    CORNEILLE. 

Cette  pièce  et  la  suivante  sont  des  traductions  de  deux  des  inscrip- 
tions latines  composées  par  Santeul  pour  les  fontaines  de  Paris.  Elles 
ont  été  plusieurs  fois  imprimées  en  feuilles  volantes  in~4°et  en  in-12, 
ordinairement  sans  date  ;  mais  l'édition  des  OEuvres  de  Santeul  publiée 
en  1729  rapporte  à  l'année  1670  les  variantes  latines,  empruntées  pro- 
bablement au  texte  primitif.  Nous  reproduisons  à  la  suite  des  vers  de 
Corneille  les  inscriptions  latines,  et  trois  imitations  françaises  de 
la  première  des  deux,  qui  sont  imprimées,  après  le  texte  latin,  au 
tome  III  de  l'édition  de  Santeul  (p.  35  et  36)  que  nous  venons  de 
mentionner. 

Que  le  dieu  de  la  Seine  a  d'amour  pour  Paris  ! 

Dès  qu'il  en  peut  baiser  les  rivages  chéris, 

De  ses  flots  suspendus  la  descente  plus  douce 

Laisse  douter  aux  yeux  s'il  avance  ou  rebrousse  : 

Lui-même  à  son  canal  il  dérobe  ses  eaux,  5 

Qu'il  y  fait  rejaillir  par  de  secrètes  veines, 

Et  le  plaisir  qu'il  prend  à  voir  des  lieux  si  beaux, 

De  grand  fleuve  qu'il  est,  le1  transforme  en  fontaines. 

IN    SEQUAN3L    FONTES    EX    IPSO    FLUVIO    EDUCTOS. 

Sequana  cum  primum  reginœ  2  allabitur  urbi , 
Tardât  précipites  ambitiosus  aquas. 

1.  Dans  l'édition  de  Santeul  il  y  a,  par  une  erreur  éTidente,  se, 
au  lieu  de  le. 

2.  Dans  l'édition  de  1670  :  patisinœ ,  qui  est  plus  conforme  à  la 
traduction  de  Corneille,  tandis  que  régime  l'est  davantage  à  celle  de 
Charpentier. 


POÉSIES    DIVERSES.  243 

Captus  amore  loci ,  cursum  obliviscitur,  anceps 
Quo  fluat ,  et  dulces  nectit  in  urbe  moras. 

Hinc  varios  implens  fluctu  subeunte  canales, 
Fons  fieri  gaudet,  qui  modo  flumen  erat. 

TRADUCTION    PAR    DU    PERIER. 

Eprise  d'un  lieu  si  charmant 

Je  coule  bien  plus  lentement; 
Je  m'arrête  partout,  et  mon  onde  incertaine 

Semble  même  oublier  son  cours  : 
Ainsi  ces  longs  canaux ,  où  je  coule  sans  peine , 

Font  qu'après  mille  détours  , 
De  fleuve  que  j'étois,  je  me  change  en  fontaine. 

AUTRE    PAR    CHARPENTIER    DE    i/aCADEMIE    FRANÇOISE. 

Aussitôt  que  la  Seine  en  sa  course  tranquille 
Joint  les  superbes  murs  de  la  royale  ville, 
Pour  ces  lieux  fortunés  elle  brûle  d'amour  : 
Elle  arrête  ses  flots ,  elle  avance  avec  peine , 
Et  par  mille  canaux  se  transforme  en  fontaine , 
Pour  ne  sortir  jamais  d'un  si  charmant  séjour. 

AUTRE. 

Aussitôt  que  la  Seine ,  après  ses  longs  détours , 
Baigne  enfin  de  Paris  le  superbe  rivage , 
Fière  du  beau  séjour  qui  lui  tombe  en  partage, 
De  son  onde  rapide  elle  suspend  le  cours  : 
L'éclat  du  lieu  l'enchante  et  la  rend  incertaine 
Où  pour  n'en  point  sortir  doivent  couler  ses  eaux  ; 
Enfin  s'ouvrant  le  sein  de  cent  vastes  canaux , 
Elle  y  coule ,  et  de  fleuve  elle  devient  fontaine. 


244  POESIES    DIVERSES. 


LXXVII 

POUR    LA    FONTAINE    DES  QUATRE-NATIONS, 
VIS-A-VIS    LE    LOUVRE. 

TRADUCTION    PAR    PIERRE    CORNEILLE. 

Ces  vers,  qu'on  trouve  dans  les  différentes  éditions  de  Santeul,  se 
lisent  aux  pages  4°  et  41  du  tome  ILT  de  celle  de  172g.  —  Voyez  la 
notice  en  tête  de  la  pièce  précédente. 

C'est  trop  gémir,  Nymphes  de  Seine, 
Sous  le  poids  des  bateaux  qui  cachent  votre  lit, 
Et  qui  ne  vous  laissoient  entrevoir  qu'avec  peine 
Ce  chef-d'œuvre  étonnant  dont  Paris  s'embellit, 

Dont  la  France  s'enorgueillit.  5 

Par  une  route  aisée,  aussi  bien  qu'imprévue, 
Plus  haut  que  le  rivage  un  roi  vous  fait  monter  : 

Qu'avez-vous  plus  à  souhaiter? 
Nymphes,  ouvrez  les  yeux,  tout  le  Louvre  est  en  vue. 

INSCRIPTION    DE    SANTEUL. 

Sequanides  flebant  imo  sub  gurgite  Nymphae , 
Cum  premerent  d  eusse  pigra  fluenta  rates  ; 

Ingentem  Luparam  nec  jam  aspectare  potestas , 
Tarpeii  cedat  cui  domus  alta  Jovis. 

Hue  alacres,  Rex  ipse  vocat,  succedite,  Nymphae  : 
Hinc  Lupara  adverso  litlore  tota  patet. 


POÉSIES    DIVERSES.  a/,5 


LXXVIil 


TRADUCTION    EN    VERS    FRANÇOIS    DE    LA    THÉBAÏDE 

DE    STACE. 

Plusieurs  témoignages  pourraient  faire  croire  que  cet  ouvrage  n'a 
jamais  paru;  en  effet,  on  lit  dans  le  Mercure  galant  d'octobre  1684, 
qui  contient  une  notice  nécrologique  sur  Corneille  :  «  On  a  trouvé 
dans  son  cabinet  quelques  ouvrages  qu'on  donnera  au  public.  Ce 
recueil  sera  composé  des  deux  premiers  livres  de  Stace  qu'il  a  mis 
en  vers,  et  de  plusieurs  pièces  sur  divers  sujets.  »  L'abbé  Bordelon 
ne  se  prononce  pas  d'une  façon  moins  explicite  à  ce  sujet  dans  ses 
Diversités  curieuses  (neuvième  partie,  p.  447)  :  «  H  a  aussi,  dit-il,  tra- 
duit quelques  livres  de  la  Thêbaïde  de  Stace  en  vers  françois,  mais  ils 
n'ont  point  encore  été  imprimés.  »  Malgré  des  assertions  si  formelles, 
la  publication  de  cet  ouvrage  ne  saurait  être  considérée  comme  un 
fait  douteux.  A  l'affirmation  de  Fontenelle,  qui  dit  positivement  que 
Corneille  «  a  traduit  en  vers  et  publié  les  deux  premiers  livres  de  la 
Thêbaïde* ,  »  se  joignent  d'autres  preuves,  qui  nous  permettent  en  outre 
de  fixer  la  date  de  l'impression.  Elle  se  place  entre  la  fin  de  1670  et 
le  mois  d'avril  1672.  Nous  avons  vu2  que  le  privilège  de  Tite  et 
Bérénice,  daté  du  «  dernier  jour  de  décembre  l'an  de  grâce  mil  six 
cens  soixante-dix,  »  était  commun  à  cette  tragédie  et  à  la  a  traduction 
en  vers  françois  de  la  Thêbaïde  de  Stace  ;  »  Corneille  cède  son  droit 
au  libraire  «  pour  la  Comédie  de  Tite  et  Bérénice  seulement.  »  Les 
Observations  de  Monsieur  Ménage  sur  la  langue  françoise ,  dont  l'Achevé 
d'imprimer  est  du  «  7  Avril  1672,  »  contiennent,  non  dans  le  corps 
de  l'ouvrage,  mais  à  la  fin,  dans  les  «  Additions  et  changemens,  »  les 
trois  seuls  vers  qui  nous  soientrestés  de  ce  poème,  dont  nous  n'avons 
ainsi,  comme  pour  certains  ouvrages  de  l'antiquité,  que  deux  courts 
fragments  conservés  par  un  grammairien5.  La  place  qu'ont  ces  cita- 

1.  OEuvres  de  M.  de  Fontenelle ,  1742?  tome  III,  p.  124. 

2.  Tome  VII,  p.  194. 

3.  Le  premier  passage  se  trouve  à  la  page   4^2>  Ie  second  à  la 


î/,6  POÉSIES    DIVERSES. 

tions  à  l'extrémité  du  volume,  parmi  les  additions  et  changemens , 
nous  porte  à  croire,  comme  nous  l'avons  dit  dans  Y  Avertissement  de 
notre  tome  I  (p.  xiii),  que  la  traduction  de  Corneille  ne  parut  que 
vers  la  fin  de  l'impression  des  Observations  de  Ménage. 

L'abbé  Granet,  qui  a  fait  tous  ses  efforts  pour  retrouver  cette  tra- 
duction, a  eu  recours  à  un  moyen  qui  aurait  dû,  à  ce  qu'il  semble, 
être  couronné  de  succès  :  «  M.  Ménage,  dit-il  vers  la  fin  de  la  préface 
des  OEuvres  diverses,  ayant  donné  sa  bibliothèque  aux  RR.  PP.  Jé- 
suites de  la  maison  professe  de  Paris,  je  crus  qu'on  pourroit  trouver 
cet  ouvrage  parmi  ses  livres.  Je  me  suis  adressé  au  R.  P.  Tourne- 
mine,  dont  la  politesse  égale  la  délicatesse  d'esprit  et  le  profond  sa- 
voir. Il  s'est  donné  la  peine  de  faire  des  recherches,  mais  elles  ont  été 
inutiles.  »  Il  en  a  été  de  même  de  toutes  celles  qui  ont  été  entreprises 
plus  tard1.  Fontenelle  nous  parle  également  des  vains  efforts  qu'on 
faisait  pour  découvrir  cette  traduction  des  deux  premiers  livres  de  la 
Thébaïde.  «  Ils  ont  échappé,  dit-il2,  à  toutes  les  recherches  qu'on  a 
faites  depuis  quelque  temps  pour  en  retrouver  quelque  exemplaire.  » 

Dont  autrefois  le  Sphinx,  ce  monstrueux  oiseau, 
Avoit  pour  son  repaire  envahi  le  coupeau3. 

(M.  Corneille,  dans  sa  Thébaïde,  livre  II,  p.  65.) 

Où  qu'il  jette  la  vue,  il  voit  briller  des  armes 4 . 

(Thébaïde,  p.  68.) 

page  465  des  Observations  :  l'un  est  cité  à  propos  de  la  locution  oit 
que;  l'autre  pour  le  genre  du  mot  sphinx.  On  voit  que  Ménage  indique 
le  chiffre  des  pages  du  poëme  de  Corneille,  ce  qui  prouve  qu'il 
avait  sous  les  yeux  un  exemplaire  imprimé;  car,  sans  cela,  il  eût  évi- 
demment averti  qu'il  tirait  ses  citations  d'un  manuscrit. 
i.  Voyez  tome  I,  avertissement,  p.  xin  et  xiv. 

2.  OEuvres  de  M.  Fontenelle,  ij42>  tome  III,  p.  124. 

3.  Le  coupeau,  le  sommet.  —  Ces  deux  vers  faisaient  partie  de  la 
version  de  ce  passage  de  la  Thébaïde  (vers  5 5 5-5 5 7)  : 

Petit  [Tydeus)  ardua  dira? 
Sphingos,  et  abscisis  infringens  cautibus  uncas 
Exsuperat  juga  dira  manus. 

4-  Ce  vers,  qui,  d'après  l'indication  de  Ménage,  se  lisait  trois 
pages  plus  loin  que  le  précédent,  ne  répond  exactement,  dans  la 
suite  du  livre  II,  à  aucun  endroit  de  Stace  ;  mais  il  pouvait  avoir  sa 


POÉSIES    DIVERSES.  u/l7 


LXXIX 


SUR    LE    DEPART    DU     ROI. 

Ces  vers  se  trouvent  (voyez  tome  VIT,  p.  217,  note  1)  dans  la 
première  scène  du  second  acte  de  Tite  et  Bérénice.  C'est  Santeul  qui, 
en  1672,  leur  donna  le  titre  qu'on  vient  de  lire,  les  fit  imprimer 
dans  le  format  in-40,  et  en  mit  à  la  suite  une  traduction  latine  in- 
titulée dans  cette  édition  :  Régi  iter  meditanti,  et  dans  les  suivantes  : 
Rex  iter  méditons ,  que  nous  avons  reproduite  dans  la  note  à  laquelle 
nous  venons  de  renvoyer.  Dans  cette  note  nous  remarquions  que  les 
vers  7  et  8  avaient  été  modifiés;  outre  ces  deux  variantes  des  éditions 
collectives  de  Santeul,  l'édition  originale1,  que  nous  suivons  ici, 
en  présente  deux  autres,  plus  considérables  encore,  pour  les  vers  5 
et  6.  La  pièce  française  et  la  pièce  latine  ont  été  publiées  dans  les 
divers  recueils  de  Santeul  (7.  B.  Santolii  Victorini  Opéra  poetica , 
Parisiis,  1694,  p.  211;  Parisiis^  Billiot,  1729,  tome  III,  p.  9),  et 
aussi  dans  les  OEuvres  diverses  de  Pierre  Corneille,  Paris,  1738,  p.  45. 
Mais  les  éditeurs  des  OEuvres  complètes,  et  Lefèvre  en  particulier, 
ne  les  ont  pas  recueillies,  et  n'ont  même  pas  indiqué  en  note  à  la 
suite  des  vers  de  Tite  et  Bérénice  l'usage  qu'on  en  avait  fait. 

Mon  nom  par  la  victoire  est  si  bien  affermi , 
Qu'on  me  croit  dans  la  paix  un  lion  endormi  : 

place  dans  le  passage  qui  précédait  l'érection  du  trophée  de  Tydée 
(voyez  vers  707  et  suivants).  N'était  la  page  marquée  par  Ménage  , 
on  pourrait  supposer  que  c'était  un  fragment  de  la  traduction  de 
cette  phrase  (qui  est  aux  vers  55o  et  suivants)  : 

Quos  ubi  plures 
Quam  ratus  innumeris  videt  excursare  latebris, 

totumque  sub  armis 

Collucere  iter.... 

1.  L'édition  originale  est  à  la  Bibliothèque  impériale;  elle  est  rap- 
pelée dans  le  Catalogue  imprimé  de  l'histoire  de  France,  tome  II, 
p.  2 4°  1  première  colonne. 


248  POÉSIES  DIVERSES. 

Mon  réveil  incertain  du  monde  fait  l'étude , 
Mon  repos  en  tous  lieux  jette  l'inquiétude; 
Tandis  que  dans  ma  cour  tout  prévient  mes  désirs, 
Que  mon  ombre  à  sa  suite  enchaîne  les  plaisirs, 
Pour  envoyer  l'effroi  sur  l'un  et  l'autre  pôle , 
Je  n'ai  qu'à  faire  un  pas  et  hausser  ma  parole1. 

i.  Dans  Tite  et  Bérénice  les  quatre  derniers  vers  sont  ainsi  : 

Et  tandis  qu'en  ma  cour  les  aimables  loisirs 
Ménagent  l'heureux  choix  des  jeux  et  des  plaisirs  , 
Pour  envoyer  l'effroi  sous  l'un  et  l'autre  pôle, 
Te  n'ai  qu'à  faire  un  pas  et  hausser  la  parole. 


POÉSIES    DIVERSES.  249 


LXXX 

VERS  PRÉSENTÉS  AU  ROI  A  SON  RETOUR   DE    LA   GUERRE 
D'HOLLANDE1,    LE    1    AOÛT    1672. 

Le  titre  qu'on  vient  de  lire  est  celui  qu'on  trouve  à  la  page  46  des 
OEuvres  choisies,  en  tête  de  la  pièce  latine  suivante  de  Corneille  et  de 
la  traduction  française  qui  en  a  été  faite  par  le  poète  même.  Suivant 
Granet,  ces  vers  ont  été  imprimés  «  la  même  année,  in-12,  en  feuille 
volante.  »  Nous  n'avons  pas  vu  cette  édition,  mais  nous  en  connaissons 
une  autre,  également  de  1672.  Elle  fait  partie  d'un  petit  recueil  qui 
figurait  sous  le  n°  327  d'un  catalogue  de  vente  que  nous  avons  déjà 
souvent  cité  (voyez  tome  IX,  p.  60 5,  note  2,  et  ci-dessus,  p.  182,  186 
et  235);  ce  recueil,  qui  appartient  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque 
impériale,  est  intitulé:  A  la  gloire  de  Louis  le  Grand,  conquérant  de  la 
Hollande,  par  Mrs  Corneille,  Montauban,  Quinault,  et  autres  ,  à  Paris, 

chez  Olivier  de  Varennes,  et  Pierre  Bienfaict M.DC.LXXII,  in-4°, 

12  pages.  A  la  page  4  se  trouve  la  pièce  latine,  et  à  la  page  5  la  pièce 
française.  La  page  3  est  occupée  par  un  distique  latin,  suivi  de  son 
explication  française,  qui,  bien  qu'anonymes,  comme  le  sont  du  reste 
aussi  les  pièces  des  pages  4  et  5,  peuvent  être  attribués  avec  vraisem- 
blance à  Corneille,  puisqu'ils  sont  en  tête  du  recueil,  dans  le  titre 
duquel  le  nom  de  notre  poète  figure  le  premier.  On  les  trouvera  à 
Y  Appendice.  La  page  6  est  occupée  par  une  pièce  signée  :  Montauban. 

REGI, 
PRO   RESTITUTA  APUD  BATAVOS  CATHOLICA   FIDE. 

Quid  mirum  rapido  tibi  si  Victoria  cursu 
Tôt  populos  subdit  facilis ,  tôt  mœnia  pandit  ? 
Vix  sua  cuique  dies  urbi ,  nec  pluribus  horis 

1 .  C'est  la  campagne  illustrée  par  le  fameux  passage  du  Rhin ,  et 
dans  laquelle  Louis  XIV  avait  commandé  en  personne  un  de  ses  trois 
corps  d'armée,  ayant  sous  lui  Turenne.  Voyez  la  pièce  suivante. 


*5o  POESIES   DIVERSES. 

Castra  locas,  quam  justa  vides  tibi  crescere  régna. 

Nempe  Deus ,  Deus  ille ,  sui  de  culmine  cœli  5 

Quem  trahis  in  partes ,  cui  sub  te  militât  omnis 
In  Batavos  effusa  phalanx ,  Deus  ille  tremendum 
Ponere  cui  properas  communi  ex  hoste  tropaeum , 
Ipse  tibi  frangitque  obices,  arcetque  pericla 
Fidus ,  et  œterna  tecum  mercede  paciscens,  i  o 

Pra?via  pro  reduce  appendit  miracula  cultu. 

Jamque  fidem  exceduut ,  jam  lassis  viribus  impar 
Sub  te  fama  gémit,  rerumque  interrita  custos 
Te  pavet  historia  ,  it  tantorum  conscius  ordo 
Fatorum,  ac  merito  eventu  spem  votaque  vincit.  1  5 

Perge  modo ,  et  pulsum  victor  redde  omnibus  aris  , 
Victis  redde  Deum ,  fac  regnet  et  ipse ,  tibique 
Quantum  exempla  praeire  dédit,  tantum  et  sua  cunctas 
Et  belli  et  pacis  pra3eat  tibi  gloria  curas. 

Interea  totus  dum  te  unum  suspicit  orbis ,  2  o 

Dum  Musœ  fortemque  animum,  mentemque  profundam, 
Tôt  regnandi  artes  certatim  ad  sidéra  tollent, 
Fas  mihi  sit  tacuisse  semel,  Rex  magne,  Deique 
Nil  nisi  in  invicto  mirari  principe  donum. 

AU    ROI, 

SUR    LE  RÉTABLISSEMENT  DE  LA  FOI   CATHOLIQUE  EN   SES  CONQUETES 

DE  HOLLANDE. 

Tes  victoires,  grand  Roi ,  si  pleines  et  si  promptes, 
N'ont  rien  qui  me  surprenne  en  leur  rapide  cours , 
Ni  tout  ce  vaste  effroi  des  peuples  que  tu  domptes , 
Qui  t'ouvre  plus  de  murs  que  tu  n'y  perds  de  jours. 

C'est  l'effet ,  c'est  le  prix  des  soins  dont  tu  travailles       5 
A  ranimer  la  foi  qui  s'y  laisse  étouffer  : 


POESIES    DIVERSES.  a5r 

Tu  fais  de  tes  soldats  ceux  du  Dieu  des  batailles1, 
Et  dès  qu'ils  ont  vaincu  ,  tu  le2  fais  triompher. 

Tu  prends  ses  intérêts ,  il  brise  tous  obstacles  ; 

Tu  rétablis  son  culte ,  il  se  fait  ton  appui  ;  i  o 

Sur  ton  zèle  intrépide  il  répand  ses  miracles , 

Et  prête  leur 3  secours  à  qui  combat  pour  lui. 

Ils  font  de  jour  en  jour  nouvelle  peine  à  croire , 
Ils  vont  de  marche  en  marche  au  delà  des  projets , 
Lassent  la  renommée ,  épouvantent  l'histoire  ,  x  5 

Préviennent  l'espérance,  et  passent  les  souhaits*. 

Poursuis,  digne  Monarque,  et  rends-lui  tous  ses  temples  : 
Fais-lui  d'heureux  sujets  de  ceux  qu'il  t'a  soumis; 
Et  comme  il  met  ta  gloire  au-dessus  des  exemples , 
Mets  la  sienne  au-dessus  de  tous  ses  ennemis.  i  o 

Mille  autres  à  l'envi  peindront  ce  grand  courage , 
Ce  grand  art  de  régner  qui  te  suit  en  tout  lieu  : 
Je  leur  en  laisse  entre  eux  disputer  l'avantage , 
Et  ne  veux  qu'admirer  en  toi  le  don  de  Dieu. 

1.  Granet  donne  ici,  probablement  d'après  l'édition  in-12,  que 
nous  n'avons  pu  voir  : 

Tu  mets  de  leur  parti  le  maître  des  batailles. 

2.  Granet  donne  les  ,  évidemment  par  erreur. 

3.  Son,  dans  l'édition  de  Granet. 

4.  Corneille  a  dit  plus  haut  (p.    176,  vers  12),  en  parlant  de 
«  l'épanchement  »  des  bienfaits  du  Roi  : 

Il  prévient  l'espérance ,  il  surprend  les  souhaits. 


ioi  POESIES    DIVERSES. 


LXXXI 

LES    VICTOIRES    DU    ROI 

SUR  LES  ÉTATS  DE  HOLLANDE,  EN  l' ANNEE  M.DC.LXXII1. 

Par  P.  Corneille. 
[Traduit  du  latin  du  P.  de  la  Rue.] 

Le  poëme  de  Corneille  a  été  imprimé  en  même  temps  que  celui  du 
P.  de  la  Rue,  dont  il  est  la  traduction,  et  que  nous  donnons  au  bas 
des  pages.  Ces  deux  ouvrages  ont  paru  à  Paris  en  1672,  chez  Guil- 
laume de  Luyne  et  Simon  Bénard ,  dans  le  format  in-folio,  et  sous 
les  titres  que  nous  leur  conservons  ici.  Cette  édition  se  trouve  dans 
la  plupart  des  bibliothèques  publiques  de  Paris.  Chacun  des  deux 
poèmes ,  ayant  un  frontispice  distinct  et  une  pagination  particulière, 
forme  en  lui-même  un  tout  complet.  Le  poëme  latin,  signé  :  C.  de  la 
Rue,  s.  J.,  a  dix-huit  pages;  le  poëme  français,  signé  :  P.  Corneille, 
en  a  dix-neuf.  Le  frontispice  de  chacun  d'eux  est  orné  d'une  vignette 
de  Chauveau,  représentant  deux  fleuves  appuyés  sur  la  même  urne. 
Assis  sur  des  trophées  d'armes,  entourés  de  drapeaux,  ils  élèvent  la 
main  au-dessus  des  yeux  afin  de  pouvoir  regarder  le  soleil  dont  l'éclat 
les  éblouit.  Le  bas  de  la  vignette  est  entouré  des  écussons  des  pays 
vaincus.  Au  commencement  de  chacun  des  deux  poèmes,  en  tête  de 
la  troisième  page,  est  un  passage  du  Rhin,  également  de  Chauveau. 
Le  Roi  y  tient  à  la  main  le  bâton,  signe  du  commandement.  Dans 
une  gloire  on  voit  les  «  ombres  redoutables,  »  dont  parle  Corneille 
(p.  266  et  267,  vers  225-240),  qui  élèvent  les  bras  en  signe  d'éton- 
nement.  Au-dessous  des  nuages  de  cette  gloire,  on  aperçoit  quatre 
vents  qui  soufflent  avec  violence  (p.  272,  \ers  283  et  note  2).  Granet 
cite  une  autre  édition  in- 8°,  qui  a  été  publiée  dans  la  même  année , 
chez  les  mêmes  libraires,  avec  la  pièce  latine  du  P.  de  la  Rue.  11  a 
aussi  paru  à  Grenoble,  en  1673,  une  édition  in-12,  qui  figure  sous 
le  n°  780  dans  le  Catalogue  Longueman2. 

1.  Voyez  ci-dessus,  p.  249,  note  1. 

2.  C'est  à  l'obligeance  de  M.  Taschereau  que  nous  devons  ce  der- 
nier renseignement. 


POÉSIES    DIVERSES.  *53 

Les  douceurs  de  la  paix  ,  et  la  pleine  abondance 

Dont  ses  tranquilles  soins  comblent  toute  la  France , 

Suspendoient  le  courroux  du  plus  grand  de  ses  rois. 

Ce  courroux  sûr  de  vaincre ,  et  vainqueur  tant  de  fois , 

Vous  l'aviez  éprouvé,  Flandre,  Hainaut,  Lorraine1  ;      5 

L'Espagne  et  sa  lenteur  n'en  respiroient  qu'à  peine; 

Et  ce  triomphe  heureux  sur  tant  de  nations 

Sembloit  mettre  une  borne  aux  grandes  actions. 

Mais  une  si  facile  et  si  prompte  victoire 

Pour  le  victorieux  n'a  point  assez  de  gloire  :  1  o 

Amoureux  des  périls  et  du  pénible  honneur, 

Il  ne  sauroit  goûter  ce  rapide  bonheur; 

Il  ne  sauroit  tenir  pour  illustres  conquêtes 

Des  murs  qui  trébuchoient  sans  écraser  de  têtes , 

Des  forts  avant  l'attaque  entre  ses  mains  remis ,  1 5 

Ni  des  peuples  tremblants  pour  justes  ennemis. 

LUDOVICO    MAGNO 
POST    EXPEDITIONEM    BATAVICAM    EPINICITJM  > 

[Auctore  Carolo  Ru^eo,  Societatis  Jesu]. 

Pacificus  labor,  et  longae  cornes  aurea  pacis 
Copia,  victrices  Lodoici  mulserat  iras  : 
Mille  triumphatae  suadebant  otia  gentes  ; 
Et  Lothari,  et  Belgœ,  et  frustra  cunctator  Iberus. 
Non  tamen  illa,  licet  geminum  celebrata  per  orbem, 
Laudis  inexpletum  satiabat  gloria  pectus  ; 
Jamque  adeo  facilis  vilescunt  prsemia  belli  ; 
Victoremque  piget  quod  Martem  prœvenit  hostis 
Obsequio  ,  quod  prsecipites  in  vincula  turmœ, 
Totque  suis  ultro  veniant  cum  civibus  urbes. 

i.  Voyez  plus  haut,  p.  192-217,  le  poëme  où  Corneille  célèbre  la 
rapide  conquête  que  Louis  XIV  fit  de  la  Flandre  en  1667.  Le  der- 
nier mot  du  vers  rappelle  la  campagne  de  1670,  qui  dépouilla  de  ses 
États  le  duc  de  Lorraine. 


254  POÉSIES   DIVERSES. 

Au  moindre  souvenir  qui  peigne1  à  sa  vaillance 
Chez  tant  d'autres  vainqueurs  la  fortune  en  balance, 
Les  triomphes  sanglants  et  longtemps  disputés , 
Il  voit  avec  dédain  ceux  qu'il  a  remportés  :  2  o 

Sa  gloire  ,  inconsolable  après  ces  hauts  exemples , 
Brûle  d'en  faire  voir  d'égaux  ou  de  plus  amples  ; 
Et  jalouse  du  sang  versé  par  ces2  guerriers , 
Se  reproche  le  peu  que  coûtent  ses  lauriers. 

Pardonne,  grand  Monarque,  à  ton  destin  propice  :  1 5 
Il  va  de  ses  faveurs  corriger  l'injustice, 
Et  t'offre  un  ennemi  fier,  intrépide,  heureux, 
Puissant,  opiniâtre,  et  tel  que  tu  le  veux. 
Sa  fureur  se  fait  craindre  aux  deux  bouts  de  la  terre  : 
Au  levant,  au  couchant  elle  a  porté  la  guerre;  3o 

L'une  et  l'autre  Java3,  la  Chine  et  le  Japon 

Tum  si  quando  animo  prise»  virtutis  imago 
Incidit,  et  veterum  pervolvens  acta  parentum 
Qusesitas  per  multa  videt  discrimina  lauros, 
Errantemque  diu  média  inter  prselia  Martem, 
Uritur  exemplis  tacite,  heroumque  periclis 
Invidet,  et  partes  secum  fastidit  honores. 

Ergo  âge,  tam  lsetis  ultra  ne  irascere  fatis  : 
En  fortuna  tibi,  quantum  appetis,  annuit  hostein. 
Ille,  pererrato  jam  formidabilis  orbi? 
Contemptor  superum  Batavus,  quem  Seres,  et  Indi, 
Extremique  hominum  Japones,  quem  dives  adorât 


1.  L'édition  des  poésies  latines  du  P.  de  la  Rue  intitulée  Car- 
mina  (1688)  donne  :  ce  qui  peint.  » 

2.  Il  y  a  ses,  par  erreur,  dans  le  texte  de  Granet. 

3.  C'est-à-dire  l'île  de  Java  et  une  autre  île  de  la  Sonde,  Bali, 
nommée  aussi  quelquefois  la  petite  Java.  La  compagnie  des  Indes 
orientales,  fondée  par  les  Hollandais  au  commencement  du  dix-sep- 
tième siècle,  avait  fait  diverses  conquêtes  en  Orient;  elle  possédait 
jusqu'à  deux  cents  vaisseaux  et  commerçait  avec  des  pays  fermés,  ou 
peu  s'en  faut,  au  reste  de  l'Europe,  tels  que  la  Chine  et  le  Japon. 


POESIES   DIVERSES.  a55 

Frémissent  à  sa  vue  et  tremblent  à  son  nom  : 

C'est  ce  jaloux  ingrat,  cet  insolent  Batave, 

Qui  te  doit  ce  qu'il  est1  et  hautement  te  brave; 

Il  te  déchire,  il  arme,  il  brigue  contre  toi,  3  5 

Comme  s'il  n'aspiroit  qu'à  te  faire  la  loi. 

Ne  le  regarde  point  dans  sa  basse  origine , 
Confiné  par  mépris  aux  bords  de  la  marine  2  : 
S'il  n'y  fit  autrefois  la  guerre  qu'aux  poissons , 
S'il  n'y  connut  le  fer  que  par  ses  hameçons ,  4  o 

Sa  fierté,  maintenant  au-dessus  de  la  roue3, 
Méconnoît  ses  aïeux  qui  rampoient  dans  la  boue. 
C'est  un  peuple  ennobli  par  cent  fameux  exploits, 
Qui  ne  veut  adorer  ni  vivre  qu'à  son  choix  ; 
Un  peuple  qui  ne  souffre  autels  ni  diadèmes,  45 

Qui  veut  borner  les  rois  et  les  régler  eux-mêmes; 
Un  peuple  enflé  d'orgueil  et  gorgé  de  butin , 
Que  son  bras  a  rendu  maître  de  son  destin  ; 
Pirate  universel ,  et  pour  gloire  nouvelle 

Africa,  cui  rutilas  America  expendit  arenas, 
Cujus  et  ipse  jugum  placido  subit  sequore  Nereus, 
Ille  tibi  probris  jamdudum  infestus  et  armis 
Imminet,  ille  Dei  dono  tibi  debitus  hostis. 
Nec  te  bumiles  ortus,  generisque  infamia  primi 
Avocet  incepto  :  fuerint  huic  rustica  cura? 
Quondam  opéra,  et  durœ  piscosis  amnibus  artes; 
Arma  modo,  et  rigidos  intentans  undique  fasces, 
Imperium  in  magnum  terra  grassatur  et  undis; 
Nec  jam  no  vit  avos  ,  audax  et  ludere  regum 
In  capita,  et  belli  pacisque  imponere  leges , 

1.  Allusion  à  la  guerre  de  1666,  où  la  France  s'était  alliée  avec  la 
Hollande  contre  l'Angleterre,  et  qui  s'était  terminée  par  la  paix  de 
Bréda. 

2.  «  Le  mot  de  marine,  dit  Richelet  (1(179},  se  prend  quelquefois  au 
même  sens  que  celui  de  mer.  » 

3.  Au-dessus,  c'est-à-dire  au  haut,  de  la  roue  de  Fortune. 


256  POESIES    DIVERSES. 

Associé  d'Espagne,  et  non  plus  son  rebelle.  5o 

Sur  ce  digne  ennemi  venge  le  ciel  et  toi  : 
Venge  l'honneur  du  sceptre,  et  les  droits  de  la  foi. 
Tant  d'illustres  fureurs ,  tant  d'attentats  célèbres 
L'ont  fait  assez  gémir  chez  lui  dans  les  ténèbres  : 
Romps  les  fers  qu'elle  y  traîne ,  et  rends-lui  le  plein  jour; 
Règne,  et  fais-y  régner  le  vrai  culte  à  son  tour1. 

Ce  grand  prince  m'écoute ,  et  son  ardeur  guerrière 
Le  jette  avidement  dans  cette  âpre  carrière , 
La  juge  avantageuse  à  montrer  ce  qu'il  est; 
Et  plus  la  course  est  rude,  et  plus  elle  lui  plaît.  60 

11  s'oppose  déjà  des  troupes  formidables, 
Des  Ostendes ,  trois  ans  à  tout  autre  imprenables2, 
Des  fleuves  teints  de  sang ,  des  champs  semés  de  corps  7 
Cent  périls  éclatants  et  mille  affreuses  morts  ; 
Car  enfin  d'un  tel  peuple  ,  à  lui  rendre  justice,  6  5 

Après  une  si  longue  et  si  dure  milice , 
Après  un  siècle  entier  perdu  pour  le  dompter3, 

Hispano  socius,  nec  tantum  impune  rebellis. 
Exorere  o  tandem  spretis  pro  regibus  ultor  ; 
Rumpe  moras,  Lodoice.  Vides  ut  puisa  tôt  annos 
Relligio,  trepidisque  fides  mala  tuta  latebris, 
Regalem  implorant  solvenda  in  vincula  dextram. 

Nulla  mora  in  Magno  :  placet  hic,  quia  durior,  hostis. 
Jamque  sibi  immensas  acies,  jamque  horrida  centum 
Praelia,  difficilesque  aditus,  largaque  rubentes 
Caede  virum  fluvios,  et  inhospita  littora  fingit 
Scilicet,  exsultatque  fremens.  Nam  quid  sibi  quisquam, 
Et  studia  expendens,  et  opes,  et  robora  gentis, 


1.  Voyez  la  pièce  précédente. 

2.  En    1604,   les   Espagnols,   commandés  par  Spinola ,    prirent 
Ostende  après  un  siège  de  trois  ans. 

3.  La  vive  opposition  des  Pays-Bas  au  gouvernement  espagnol, 
suivie  bientôt  de  l'insurrection  qui  les  affranchit,  avait  commencé 


POÉSIES   DIVERSES.  257 

Quelle  plus  foible  image  ose  se  présenter? 

Des  orageux  reflux  d'une  mer  écumeuse, 

Des  trois  canaux  du  Rhin  ,  de  l'Yssel ,  de  la  Meuse ,     7  o 

De  ce  climat  jadis  si  fatal  aux  Romains, 

Et  qui  défie  encor  tous  les  efforts  humains, 

De  ces  flots  suspendus  où  Fart  soutient  des  rives 

Pour  noyer  les  vainqueurs  dans  les  plaines  captives , 

De  cent  bouches  partout  si  prêtes  à  tonner,  7  5 

Qui  peut  se  former  l'ombre  et  ne  pas  s  étonner? 

Si  ce  peuple  au  secours  attire  l'Allemagne, 

S'il  joint  le  Mein  au  Tage,  et  l'Empire  à  l'Espagne  , 

S'il  fait  au  Dannemarc  craindre  pour  ses  deux  mers , 

Si  contre  nous  enfin  il  ligue  l'univers ,  8  o 

Que  sera-ce  ?  Mon  roi  n'en  conçoit  point  d'alarmes  : 

Plus  l'orage  grossit,  plus  il  y  voit  de  charmes  ; 

Informetve  animo  levius,  speretve  futurum? 
Quis  vaga  tergemini  non  horreat  ostia  Rheni, 
iEquoreosque  Mosœ  freraitus,  Vahalimque  sonantem , 
Nomina  tôt  nuribus  quondam  exsecrata  Latinis  ? 
Adde  Isalam  vallis  defensum,  adde  œnea  mille 
Hostis  in  occursum  tormenta  tonantia  ripis; 
Tôt  validas  urbes,  tôt  propugnacula  passim 
Obvia,  tôt  riguis  arva  intercisa  fluentis, 
Totque  lacus  tantosque.  Adde  et  frœnata  per  artem 
jflïquora,  luctantesque  ad  versa  in  claustra  procellas, 
Rumpendosque  obices,  refluique  pericula  ponti. 
Quid  si  prœlerea  vicino  emota  tumultu 
Conjurata  ruât  Germania,  si  metus  acres 
Idem  agitet  Danos,  Batavum  si  fraudibus  orbis 
Excitus  in  Gallos  socialibus  ingruat  armis? 
At  neque  sic  Lodoici  alacer  deferveat  ardor  : 
Ignescit  magis,  idem  animo  nosse  omnia  promptus 


vers  le  milieu  du  seizième  siècle,  et  ce  ne  fut  qu'en  1648  que  l'Es- 
pagne reconnut  les  Provinces-Unies  pour  Etats  souverains. 

Corneille,   x  11 


a58  POÉSIES    DIVERSES. 

Son  ardeur  s'en  redouble1,  au  lieu  de  s'arrêter; 

Il  veut  tout  reconnoître  et  tout  exécuter, 

Et  présentant  le  front  à  toute  la  tempête,  «  5 

Agir  également  du  bras  et  de  la  tête. 

La  même  ardeur  de  gloire  emporte  ses  sujets  : 

Chacun  veut  avoir  part  à  ses  nobles  projets; 

Chacun  s'arme ,  et  la  France ,  en  guerriers  si  féconde  , 

Jamais  sous  ses  drapeaux  ne  rangea  tant  de  monde.     90 

L'Anglois  couvre  pour  nous  la  mer  de  cent  vaisseaux  ; 
Cologne  après  Munster  nous  prête  ses  vassaux  : 
Ces  prélats2,  pour  marcher  contre  des  sacrilèges, 
De  leur  sacré  repos  quittent  les  privilèges , 
Et  pour  les  intérêts  d'un  Dieu  leur  souverain  9  5 

Se  joignent  à  nos  lis ,  le  tonnerre  à  la  main. 

Cependant  la  Hollande  entend  la  Renommée 
Publier  notre  marche  et  vanter  notre  armée. 

Et  praestare  manu.  Simul  undique  buccina  Martem 
Increpuit,  simul  agminibus  coït  ultima  junctis 
Gallia,  quot  fœto  bellatrix  patria  nusquam 
Fuderat  ante  sinu  ;  ratibus  simul  sequora  centum 
Anglusque  Francusque  tegunt;  ruit  Itala  pubes, 
Helvetiusque  ferox,  Bavarisque  Colonia  signis, 
Et  sacros  acuens  jamdudum  Wesphalus  enses  ; 
Nec  bene  collecta?  terraque  manque  rapinse 
Unius  in  Francœ  cessissent  prsemia  gentis  : 
Tôt  populos  inter  communis  prseda  jacere 
Debuit  occidui  populator  et  orbis  Eoi. 

Interea  Batavas  crebrescit  fama  per  urbes, 
Et  propius  belli  fragor  intonat.  Ocius  omnes 


j .  Dans  l'édition  de  1688  du  P.  de  la  Rue  :  «  en  redouble.  » 
2.  Maximilien  de  Bavière,  évêque  de  Cologne,  et  Christophe-Ber- 
nard van  Galen,    évêque  de  Munster,    alliés   de  la   France  dans  la 
guerre  contre  la  Hollande.  Voyez  sur  ce  dernier  les  Lettres  de  Mme  de 
Sèvigne\  tome  I,  p.  486,  note  8,  et  tome  III,  p    122,  note  4- 


POESIES    DIVERSES.  a59 

Le  nautonier  brutal  et  l'artisan  sans  cœur 

Déjà  de  sa  défaite  osent  se  faire  honneur  :  io<> 

Cette  âme  du  parti,  cet  Amstredam ' ,  qu'on  nomme 

Le  magasin  du  monde  et  l'émule  de  Rome, 

Pour  se  flatter  d'un  sort  à  ce  grand  sort  égal , 

S'imagine  à  sa  porte  un  second  Annibal  ; 

S'y  figure  un  Pyrrhus ,  un  Jugurthe ,  un  Persée ;         m5 

Et  sur  ces  rois  vaincus  promenant  sa  pensée, 

S'applique  tous  ces  temps  où  les  moindres  bourgeois 

Dans  Rome  avec  mépris  regardoient  tous  les  rois  : 

Comme  si  son  trafic  et  des  armes  vénales 

Lui  pouvoient  faire  un  cœur  et  des  forces  égales.        i  i  <> 

Voyons,  il  en  est  temps,  fameux  républicains, 
Nouveaux  enfants  de  Mars,  rivaux  des  vieux  Romains, 
Tyrans  de  tant  de  mers ,  voyons  de  quelle  audace 
Vous  détachez  du  toit  l'arme t  et  la  cuirasse, 
Et  rendez  le  tranchant  à  ces  glaives  rouilles  i  i  6 

Que  du  sang  espagnol  vos  pères  ont  souillés. 

Incaluere  animis,  operumque  ignobile  vulgus 
Perpétua  m  tanto  sperat  sibi  nomen  ab  hoste. 
Imprimis  rerum  il  la  potens,  validisque  superba 
Classibus,  et  magnae,  si  Dis  placet,  œmula  Romse 
Curia,  prisca  sequens  latise  vestigia  laudis, 
Porsennam  ad  muros  iteruni,  Pyrrhique  elephantos, 
Annibalisque  minas,  et  divitis  agmina  Persei, 
Tôt  regum  clades,  et  tôt  fœcunda  triumphis 
Sarcla  putat  spatiis  iterum  volvenda  remensis  : 
Démens,  quse  Latii  viresque  animosque  senatus 
Mercatu  simulet  turpi,  et  venalibus  armis. 
Quin  agite,  jEneadis  suppar  genus,  et  nova  Marti  s 
Progenies,  belli  ferratos  rumpite  postes, 
Tela  focis  rapite,  et  galeas  ensesque  parentum 
[nduite,  Austriacœ  scabros  rubigine  cœdis. 

i.   Ce  nom  est  écrit  ainsi  dans  l'édition  originale;  Amsterdam,  dans 
celles  du  P.  de  la  Rue  et  de  Granet. 


260  POÉSIES   DIVERSES. 

Juste  ciel!  me  trompé-jeP  ou  si  déjà  la  guerre 
Sur  les  deux  bords  du  Rhin  fait  bruire  son  tonnerre? 
Condé  presse  Vesel',  tandis  qu'avec  mon  roi 
Le  généreux  Philippe2  assiège  et  bat  Orsoi  \  120 

Ce  monarque  avec  lui  devant  Rhimbergue  tonne , 
Et  Turenne  promet  Buric  à  sa  couronne. 
Quatre  sièges  ensemble ,  où  les  moindres  remparts 
Ont  bravé  si  longtemps  nos  modernes  Césars , 
Où  tout  défend  l'abord  (qui  l'auroit  osé  croire?),         1  2  5 
Mon  prince  ne  s'en  fait  qu'une  seule  victoire8. 
Sous  tant  de  bras  unis  il  a  peur  d'accabler, 
Et  les  divise  exprès  pour  faire  moins  trembler; 
Il  s'afFoiblit  exprès  pour  laisser  du  courage  ; 
Pour  faire  plus  d'éclat  il  prend  moins  d'avantage  \      1  3o 
Et  n'envoyant  partout  que  des  partis  égaux , 
Il  cherche  à  voir  partout  répondre  à  ses  assauts. 

Ludimur?  an  geruino  Rheni  de  littore  clamor 
Insonuit  ?  Jam  Vesaliœ  furit  acer  in  arces 
CoNDiEus,  jam  Buricio  Turennius  instat, 
Jam  simul  Orsoyam  Lodoix  cum  fratre  Philippo 
Rhimbergamque  premunt  :  quippe  uni  insistere  lentum  est 
Ignavumque  operi;  numéro  neve  obruat  hostes, 
Partiturque  aciem,  et  curas  divisus  in  omnes 
Fit  minor,  ut  paribus  sese  hosti  accommodet  armis, 
jEquior  et  veniat,  nec  jam  sine  sanguine,  palma. 

1.  «  Orsoi  se  rend  au  Roi  le  3  juin,  pendant  que  M.  de  Turenne 
prenoit  Burich.  Monsieur  le  Prince  prend  Vesel  le  4  ;  Rhimberg  (JRhein- 
herg)  se  rend  au  Roi  le  6  ;  Emeric  à  Monsieur  le  Prince  le  7.  »  (Abrège 
chronologique  du  président  Hénault.) 

2.  Philippe,  duc  d'Orléans,  frère  de  Louis  XIV. 

3.  «  Quelle  fut  la  surprise  de  tout  le  monde  lorsque  l'on  apprit  qu'il 
Louis  XIV)  avoit  mis  le  siège  devant  quatre    fortes  villes  en  même 

temps,  et  que,  sans  qu'il  eût  fait  ni  lignes  de  circonvallation  ni  de 
contrevallation,  ces  quatre  villes  s'étoient  rendues  à  discrétion  au  pre- 
mier jour  de  tranchée?  »  (Racine,  Précis  historique  des  campagnes  de 
Louis  XIV.) 


POESIES    DIVERSES.  261 

Que  te  sert,  ô  grand  Roi,  cette  noble  contrainte? 
Partager  tes  drapeaux,  c'est  partager  la  crainte, 
L'épandre  en  plus  de  lieux ,  et  faire  sous  tes  lois         1  3  5 
Tomber  plus  de  remparts  et.  de  peuple  à  la  fois. 
Pour  t'affoiblir  ainsi,  tu  n'en  deviens  pas  moindre; 
Ta  fortune  partout  sait  Fart  de  te  rejoindre  : 
L'effet  est  sûr  au  bras  dès  que  ton  cœur  résout  ; 
Tu  ne  bats  qu'une  place,  et  tes  soins  vont  partout  :    140 
Partout  on  croit  te  voir,  partout  on  t'appréhende, 
Et  tes  ordres  font  tout,  quelque  chef  qui  commande. 

Ainsi  tes  pavillons  à  peine  sont  plantés , 
A  peine  vers  les  murs  les  canons1  sont  pointés, 
Que  l'habitant  s'effraye ,  et  le  soldat  s'étonne  :  145 

Un  bastion  le  couvre,  et  le  cœur  l'abandonne; 
Et  le  front  menaçant  de  tant  de  boulevarts , 
De  tant  d'épaisses  tours  qui  flanquent  ses  remparts , 
Tant  de  foudres  d'airain,  tant  de  masses  de  pierre  , 
Tant  de  munitions  et  de  bouche  et  de  guerre ,  1  5  o 

Tant  de  larges  fossés  qui  nous  ferment  le  pas, 
Pour  tenir  quatre  jours  ne  lui  suffisent  pas. 
L'épouvante  domine  ,  et  la  molle  prudence 
Court  au-devant  du  joug  avec  impatience 

Parce  tamen,  Lodoice  :  etiam  divisus,  ubique 
Magnus  es,  et  spatio  dura  distrahis  arma,  timorem 
Distrahis  in  plures,  atque  omnibus  ingruis  absens. 
Aspice,  vix  arces  fulserunt  signa  sub  ipsas, 
Primaque  vicino  steterunt  tentoria  campo  , 
Jamque  timor  cives  quatit  intus,  et  ipse  fatiscit 
Clausus  adhuc  miles.  Non  illi  patria  virtus, 
Aut  Cereris  vis  ampla,  aut  belli  immensa  supellex, 
Aut  vigor,  aut  numerus;  non  vivo  condita  saxo 
Mœnia,  non  plenis  undantia  flumina  fossis 
Dant  animos,  acuuntve  :  novo  juvat  obvia  ferre 

1 .    «  Tes  canons,  »  dans  les  éditions  du  P.  de  la  Rue  et  de  Granet 


i6t.  POÉSIES    DIVERSES. 

Se  donne  à  des  vainqueurs  que  rien  n'a  signalés,         i  S  5 
tët  leur  ouvre  des  murs  qu'ils  n'ont  pas  ébranlés. 

Misérables  !  quels  lieux  cacheront  vos  misères 
Où  vous  ne  trouviez  pas  les  ombres  de  vos  pères  , 
Qui  morts  pour  la  patrie  et  pour  la  liberté 
Feront  un  long  reproche  à  votre  lâcheté?  1 60 

Cette  noble  valeur  autrefois  si  connue , 
Cette  digne  fierté,  qu'est-elle  devenue? 
Quand  sur  terre  et  sur  mer  vos  combats  obstinés 
Brisoient  les  rudes  fers  à  vos  mains  destinés , 
Quand  vos  braves  Nassaus,  quand  Guillaume  et  Maurice  , 
Quand  Henri  vous  guidoit  dans  cette  illustre  lice1, 
Quand  du  sceptre  danois  vous  paroissiez  l'appui  % 
N'aviez-vous  que  les  cœurs  et3  les  bras  d'aujourd'hui? 

Colla  jugo  ;  juvat  énerves  in  vincula  dextras, 
Necdum  tentatos  victori  pandere  muros. 

Quo  fugitis,  Batavi?  non  est  satis  apta  triumpho 
Materies,  quatuor,  totidem  nec  solibus,  urbes 
Hostis  in  imperium  peregrinaque  cedere  jura? 
Reza  quid,  et  vacuo  patet  insuper  Embrica  vallo? 
Proh  pudor  !  Egregios  cineres,  albentiaque  ossa, 
Proque  focis  quondam,  pro  libertate  cadentum 
Magnorum  tuniulos  pedibus  pulsatis  avorum, 
Hac  quacumque  fuga  est.  At  quo  gens  Martia  vobis, 
Auriaci  proceres,  vanseque  superbia  mentis 
Quonam  abiit?  quonam  ille  mari  tam  nobilis  ardor, 
Et  nuper  Dani  servatrix  dextera  sceptri  ? 
Nil  agimus  monitis  :  casus  malaque  omnia  contra 

i.  Guillaume  Ier  de  Nassau,  dit  le  Taciturne,  né  en  1 533,  assassiné 
en  i584  »  Maurice,  son  fils  aîné,  né  en  1667,  mort  en  1625  ;  Frédéric- 
Henri  de  Nassau,  son  autre  fils,  né  en  i584,  mort  en  1647,  qui  lut- 
tèrent tous*  trois  héroïquement  et  avec  une  rare  habileté  contre  les 
Espagnols. 

2.  En  16 58,  la  Hollande  avait  envoyé  une  flotte  au  secours  des 
Danois,  et  les  avait  soutenus  victorieusement  contre  Charles-Gustave, 
roi  de  Suède. 

3.  Que,  au  lieu  de  et,  dans  l'édition  de  Granet. 


POÉSIES    DIVERSES.  a63 


Mais  n'en  réveillons  point  la  mémoire  importune  : 
Vous  n'êtes  pas  les  seuls ,  l'habitude  est  commune. 
Et  l'usage  n'est  plus  d'attendre  sans  effroi 


Des  François  animés  par  l'aspect  de  leur  roi. 

Il  en  rougit  pour  vous ,  et  lui-même  il  a  honte 

D'accepter  des  sujets  que  le  seul  effroi  dompte; 

Et  vainqueur  malgré  lui  sans  avoir  combattu  ,  175 

Il  se  plaint  du  bonheur  qui  prévient  sa  vertu. 

Peuples,  l'abattement  que  vous  faites  connoître 
Ne  fait  pas  bien  sa  cour  à  votre  nouveau  maître  : 
Il  veut  des  ennemis ,  et  non  pas  des  fuyards 
Que  saisit  l'épouvante  à  nos  premiers  regards  ;  180 

Il  aime  qu'on  lui  fasse  acheter  la  victoire  : 
La  disputer  si  mal ,  c'est  envier  sa  gloire; 
Et  ce  tas  de  captifs ,  cet  amas  de  drapeaux 
Ne  font  qu'embarrasser  ses  projets  les  plus  beaux. 

Console-t'en,  mon  Prince  :  il  s'ouvre  une  autre  voie 
A  te  combler  de  gloire  aussi  bien  que  de  joie  ; 
Si  ce  peuple  à  l'effroi  se  laisse  trop  dompter , 
Ses  fleuves  ont  des  flots  à  moins  s'épouvanter. 

Hactenus  esse  viros  licuit,  fortesque  videri  : 
Nunc  alio  res  versa,  neque  est  ignavia  probro  ; 
Ducitur  in  morem  populis,  ubi  gallicus  ensis 
Imminet,  et  Gallos  urget  prœsentia  Régis. 

Ipse  autem  attonitus  eoeptis  atque  omine  belli 
Fortunam  incusat,  quod  tam  pernicibus  alis 
Antevolet  virtutem,  et  votis  prœlia  desint. 
Nam  neque  captivi  peditumque  equitumque  ducumque 
Mille  grèges,  neque  rapta  placent  Mavortia  signa, 
Exuviae  indecores.  Hostem,  non  \ilia  qua?rit 
Servitia,  infamem  censeri  digna  sub  liastam  ; 
Nec  prœdœ  sitis,  at  laudum  generosa  cupido 
Hos  illum  in  fines,  atque  hœc  in  bella  voeavit. 

Ergo  tibi  alterius  via  laudis,  et  altéra,  Magne, 
Àlea  pertentanda  :   fuga  tibi  cessit  inermi 


v 


264  POÉSIES    DIVERSES. 

Us  ont  fait  aux  Romains  assez  de  résistance 

Pour  en  espérer  une  en  faveur  de  la  France1  ;  r  90 

Et  ces  bords  où  jamais  l'aigle  ne  fit  la  loi 

S'oseront  quelque  temps  défendre  contre  toi. 

A  ce  nouveau  projet  le  monarque  s'enflamme  , 

Il  l'examine  ,  tâte ,  et  résout  en  son  âme  ; 

Et  tout  impatient  d'en  recueillir  le  fruit ,  195 

Il  part  dans  le  silence  et  l'ombre  de  la  nuit. 

Des  guerriers  qu'il  choisit  l'escadron  intrépide 

Glorieux  d'un  tel  choix,  et  ravi  d'un  tel  guide, 

Marche  incertain  des  lieux  où  l'on  veut  son  emploi , 

Mais  assuré  de  vaincre  où  l'emploiera  son  roi.  200 

Le  jour  à  peine  luit  que  le  Rhin  se  rencontre  : 
Tholus  frappe  les  yeux2  ;  le  fort  de  Skeink  se  montre; 

Degener  Hollandus;  sed  non  sic  flumina  cèdent, 
Romanis  ut  quondam,  et  nunc  impervia  Francis  : 
Hic  labor,  hoc  decus  est.  Stimulis  ille  acribus  intus 
Accensus,  tacitumque  alto  sub  pectore  versans 
Consilium,  et  placidse  subducens  membra  quieti, 
Lecta  virum  capita  et  primam  rapit  agmina  secuni 
Sub  noctem,  dux  ipse  operis,  sociusque  pericli. 
Incedunt  densi  ordinibus  per  opaca  viarum, 
Incerti  quo  jussa  trahant,  sed  vincere  cerli, 
In  quoscumque  trahant  casus.  Et  jam  nova  cœlo 
Cœperat  ire  dies,  dubiaque  albescere  luce, 
Insula  cura  Batavum,  et  bifidis  apparuit  ingens 
Rhenus  aquis,  vacuasque  acies  insedit  arenas 
Tholusium  contra  et  Skinki  meraorabile  vallum. 


1.  Le  P.  de  la  Rue  et  Granet  ont  mis  :  (f  ta  France,  »  au  lieu 
de  :   «  la  France,  »  qui  est  le  texte  de  l'édition  originale. 

2.  «  Des  gens  du  pays  informèrent le  prince  de  Coudé,  que  la  sé- 
cheresse de  la  saison  avait  formé  un  gué  sur  un  bras  du  Rhin,  auprès 
d'une  vieille  tourelle  qui  sert  de  bureau  de  péage,  qu'on  nomme 
Toll-huys,  «  la  maison  du  péage,  »  dans  laquelle  il  y  avait  dix-sept  sol- 
dats. Le  Roi  fît  sonder  ce  gué  par   le  comte  de  Guiche.  Il  n'y  avait 


POÉSIES    DIVERSES.  a65 

On  s'apprête  au  passage,  on  dresse  les  pontons; 

Vers  la  rive  opposée  on  pointe  les  canons. 

La  frayeur  que  répand  cette  troupe  guerrière  a  o  5 

Prend  les  devants  sur  elle ,  et  passe  la  première  ; 

Le  tumulte  à  sa  suite  et  la  confusion 4 

Entraînent  le  désordre  et  la  division. 

La  Discorde  effarée  à  ces  monstres  préside , 

S'empare  au  fort  de  Skeink  des  cœurs  qu'elle  intimide,  2  1  o 

Et  d'un  cor  enroué  fait  sonner  en  ces  lieux 

La  fureur  des  François  et  le  courroux  des  cieux , 

Nec  mora,  pars  manibus  glebas  et  grandia  ligna 
Provisamque  struem  ponti,  pars  aerea  plaustris 
Fulmina  convolvunt.  Lacero  simul  horror  amictu, 
Et  pavor,  et  rigidos  vellens  Discordia  crines 
Prœvolat,  et  Skinki  summas  evadit  in  arces. 
Inde  cavo  stridens  per  propugnacula  cornu, 
Intima  jam  patriœ  labentem  in  viscera  Francum, 
Ultores  Superos  invictaque  fata  ferentem, 


qu'environ  vingt  pas  à  nager  au  milieu  de  ce  bras  du  fleuve,  selon 
ce  que  dit  dans  ses  lettres  Pellisson,  témoin  oculaire,  et  ce  que  m'ont 
confirmé  les  habitants.  Cet  espace  n'était  rien,  parce  que  plusieurs 
chevaux  de  front  rompaient  le  fil  de  l'eau  très-peu  rapide.  L'abord 
était  aisé;  il  n'y  avait  de  l'autre  côté  de  l'eau  que  quatre  à  cinq  ca- 
valiers et  deux  faibles  régiments  d'infanterie  sans  canon  [onze  à 
douze  cents  hommes,  infanterie  et  cavalerie,  dit  M.  Rousset  dans  son 
Histoire  de  Louvois,  tome  I,  p.  35g).  L'artillerie  française  les  foudroyait 

en  flanc L'opinion  commune  était  que  toute  l'armée  avait  passé  ce 

fleuve  à  la  nage,  en  présence  d'une  armée  retranchée,  et  malgré  l'ar- 
tillerie d'une  forteresse  imprenable,  appelée  le  Tholus.  »  (Voltaire, 
Siècle  de  Louis  XIV ,  chapitre  x.)  —  Le  fort  de  Skink  ou  Schenk 
est  situé  à  la  pointe  de  l'île  de  Bétau  ou  Bétuwen,  à  l'endroit  où  le 
Rhin  se  divise  en  deux  bras,  dont  l'un  prend  le  nom  de  Wahal  et 
l'autre  garde  pendant  quelque  temps  celui  de  Rhin.  Voyez  plus  bas 
le  vers  218. 

1 .  L'édition  de  Granet  donne  ainsi  ce  vers  : 

Le  tumulte  à  la  suite  et  sa  confusion. 


266  POÉSIES    DIVERSES. 

Leur  étale  des  fers,  et  la  mort  préparée, 

Et  des  autels  brisés  la  vengeance  assurée. 

La  vague  au  pied  des  murs  à  peine  ose  frapper,         1 r  5 

Que  le  fleuve  alarmé  ne  sait  où  s'échapper  ; 

Sur  le  point  de  se  fendre ,  il  se  retient ,  et  doute 

Ou  du  Rhin  ou  du  Vhal  s'il  doit  prendre  la  route. 

Les  tremblements  de  l'île  ouvrant  jusqu'aux  enfers 
(Ecoute ,  Renommée,  et  répète  mes  vers  ),  220 

Le  grand  nom  de  Louis  et  son  illustre  vie 
Aux  champs  Elysiens  font  descendre  l'Envie , 
Qui  pénètre  à  tel  point  les  mânes  des  héros, 
Que  pour  s'en  éclaircir  ils  quittent  leur  repos. 
On  voit  errer  partout  ces  ombres  redoutables  225 

Qu'arrêtèrent  jadis  ces  bords  impénétrables  : 
Drusus1  marche  à  leur  tête  ,  et  se  poste  au  fossé 
Que  pour  joindre  l'Yssel  au  Rhin  il  a  tracé; 

Et  letum  ante  oculos,  et  ferrum,  et  vincula,  et  ignés 
Occinit.  jEthereas  it  raucus  clangor  in  auras, 
Insula  quo  longe  tremit  omnis,  et  omnibus  horrens 
Pressit  corda  gelu  :  stupet  hinc  atque  in  de  refusum 
Flumen,  et  allapsi  nota  ad  divortia  fluctus 
Haerent  ambigui  quo  sit  fuga  tutior  amne, 
Quos  teneant  cursus,  Rhenum  Vahalimne  sequantur. 

Quin  et  inaccessos  fines  lsetumque  pererrans 
Elysium,  et  clausos  seterna  nocte  recessus, 
Insignes  ea  fama  animas  atque  invidus  ardor 
Elicit  in  lucem.  Volitant  exsanguia  ripis 
Heroum  simulacra,  impacatique  Sicambri, 
Cœsareumque  genus,  nomenque  insigne  Nerones, 
Effossor  Drusus  fluviorum ,  et  squalidus  ora 


1 .  Drusus  Nero  (fils  de  Tiberius  Nero  et  de  Livie,  frère  puîné  de 
l'empereur  Tibère),  né  Tan  38  avant  J.  C,  mort  l'an  9  après  l'ère 
chrétienne ,  fit  creuser  le  canal  connu  sous   le  nom   de  Fossa  Dru- 


POÉSIES   DIVERSES.  267 

Varus  *  le  suit  tout  pâle ,  et  semble  dans  ces  plaines 
Chercher  le  reste  affreux  des  légions  romaines;  î3o 

Son  vengeur  après  lui,  le  grand  Germanicus2, 
Vient  voir  comme  on  vaincra  ceux  qu'il  n'a  pas  vaincus; 
Le  fameux  Jean  d'Autriche8,  et  le  cruel  Tolède4, 
Sous  qui  des  maux  si  grands  crûrent  par  leur  remède  ; 
L'invincible  Farnèse6,  et  les  vaillants  Nassaus  •,         235 
Fiers  d'avoir  tant  livré,  tant  soutenu  d'assauts, 
Reprennent  tous  leur  part  au  jour  qui  nous  éclaire, 
Pour  voir  faire  à  mon  roi  ce  qu'eux  tous  n'ont  pu  faire , 
Eux-mêmes  s'en  convaincre,  et  d'un  regard  jaloux 
Admirer  un  héros  qui  les  efface  tous.  240 

Varus,  et  ultrici  fervens  Germanicus  ira. 
Tu  quoque  sanguineas  quatiens,  Albane,  secures, 
Tu  Farnesi,  atque  Austriadum  tu  gloria,  Jane, 
Nassaviique  :  omnes,  dum  sors  et  vita  sinebat, 
His  olim  insignes  terrarum  in  fînibus,  omnes 
Nunc  unum  in  juvenem  defixi  obtutibus  haerent, 
Miranturque  suas  coram  decrescere  laudes7. 

1.  P.  Quintilius  Varus,  gouverneur  de  la  Germanie,  partie  frontière 
de  la  Gaule  belgique,  fut  attiré  dans  une  embuscade  par  Arminius, 
chef  des  Chérusques,  dans  la  forêt  de  Teutoburg,  et  y  périt  avec  trois 
légions  Tan  9  avant  J.  C. 

2.  Tiberius  Drusus  Nero  Germanicus  (fils  de  Drusus  Nero),  né 
l'an  16  avant  J.  C  ,  vainquit  Arminius  en  l'an  16  de  l'ère  chré- 
tienne, et  reprit  les  aigles  de  Varus  Une  autre  campagne  eût  été 
nécessaire  pour  achever  la  guerre  et  la  défaite  des  Germains;  mais 
l'empereur  Tibère  envia  cette  gloire  à  son  neveu. 

3.  Don  Juan  d'Autriche,  fils  naturel  de  Charles-Quint,  né  en  i545, 
mort  en  i5y8,  gouverneur,  en  1676,  des  Pays-Bas  révoltés. 

4.  Ferdinand  Alvarez  de  Tolède,  duc  d'Albe,  né  en  i5o8,  mort 
en  i582,  lieutenant  de  Philippe  II  dans  les  Pays-Bas, de  i566  à  i5y3, 
tristement  célèbre  par  l'établissement  du  conseil  de  sang. 

5.  Alexandre,  troisième  duc  de  Farnèse,  fut  appelé  dans  les  Pays- 
Bas  par  Philippe  II,  en   1577,  et  y  succéda  à  dpn  Juan  d'Autriche 

6.  Voyez  ci-dessus,  p.  26a,  note  1. 

7.  Ce  vers  manque  dans  l'édition  du  P.  de  la  Rué  de  1688. 


268  POÉSIES    DIVERSES. 

11  range  cependant  ses  troupes  au  rivage  , 
Mesure  de  ses  yeux  Tholus  et  le  passage , 
Et  voit  de  ces  héros  ibères  '  et  romains 
Voltiger  tout  autour  les  simulacres  vains. 
Cette  vue  en  son  sein  jette  une  ardeur  nouvelle  245 

D'emporter  une  gloire  et  si  haute  et  si  belle , 
Que  devant  ces  témoins  à  le  voir  empressés 
Elle  ait  de  quoi  ternir 2  tous  les  siècles  passés  : 
«  Nous  n'avons  plus,  dit-il ,  affaire  à  cesBataves 
De  qui  les  corps  massifs  n'ont  que  des  cœurs  d'esclaves  ; 
Non,  ce  n'est  plus  contre  eux  qu'il  nous  faut  éprouver, 
C'est  Rome  et  les  Césars  que  nous  allons  braver. 
De  vos  ponts  commencés  abandonnez  l'ouvrage , 
François;  ce  n'est  qu'un  fleuve ,  il  faut  passer  à  nage, 
Et  laisser ,  en  dépit  des  fureurs  de  son  cours ,  2  5  5 

Aux  autres  nations  un  si  tardif  secours. 
Prenez  pour  le  triomphe  une  plus  courte  voie  : 
C'est  Dieu  que  vous  servez,  c'est  moi  qui  vous  envoie; 

Ut  stetit,  et  validos  famoso  in  littore  Magnus 
Explicuit  cuneos,  Rhenumque  immensa  fluentem 
In  spatia,  et  rapido  surgentem  murmure  vidit, 
Continuo  ingentes  umbrse,  circumflua  turba, 
Heroumque  altrix  menti  sese  obtulit  setas, 
Et  mentem  subitus  calor  insilit  :  ardet  inausum 
Moliri  facinus,  veterumque  lacessere  famam 
iEmulus,  et  priscis  unum  se  opponere  saeclis. 
Ergo  pares  gaudens  tandem  delapsus  in  hostes, 
Nec  fore  cum  Batavis,  sed  Roma  et  Csesare  bellum  : 
«  Ite,  ait,  inceptum,  Franci,  dimittite  pontem  ; 
Hoc  egeant  alise  tardo  molimine  gentes  : 
Certa  mibi  vobisque  via  est,  hac  qua  via  cum  que 
Esse  potest  ferro  ;  tumidos  pervadite  fluctus, 

1 .   ibères ,  espagnols. 

•>..  Tenir,  dans  l'édition  de  Lefèvre  ;  c'est  une  faute  toute  matérielle, 
qui  produit  cependant  un  faux  sens. 


POÉSIES    DIVERSES.  269 

Allez ,  et  faites  voir  à  ces  flots  ennemis 

Quels  intérêts  le  ciel  en  vos  mains  a  remis.  »  260 

G  étoit  assez  en  dire  à  de  si  grands  courages  : 
Des  barques  et  des  ponts  on  hait  les  avantages  ; 
On  demande  ,  on  s'efForce  à  passer  des  premiers1 . 
Grammont  2  ouvre  le  fleuve  à  ces  bouillants  guerriers  ; 

Ite  :  fugax  Batavus  inimicaque  sentiet  unda 
Meque,  Deurnque  ducem.  »  Nec  plura  effatus,  el  ingens 
Laetantum  exoritur  clamor,  primique  petentum 
Laudem  aditus.  Reliquos  fortis  Grammontius  anteit 
Agmen  agens  equitum,  loricatosque  maniplos. 
Hune  et  Borbonidas  referens  ab  origine  reges 

1.  Le  passage  du  Rhin  eut  lieu  le  12  juin.  —  Le  récit  qu'en  fait 
Boileau  dans  sa  IVe  épître  adressée  au  Roi  (vers  97-112)  a  beau- 
coup de  ressemblance  a^ec  celui-ci,  et  l'on  y  voit  figurer  la  plupart 
des  mêmes  noms  : 

Ils  marchent  droit  au  fleuve,  où  Louis  en  personne, 
Déjà  prêt  à  passer,  instruit,  dispose,  ordonne. 
Par  son  ordre  Grammont  le  premier  dans  les  flots 
S'avance  soutenu  des  regards  du  héros  : 
Son  coursier  écumant  sous  un  maître  intrépide, 
Nage  tout  orgueilleux  de  la  main  qui  le  guide 
Revel  le  suit  de  près  :  sous  ce  chef  redouté 
Marche  des  cuirassiers  l'escadron  indompté. 
Mais  déjà  devant  eux  une  chaleur  guerrière 
Emporte  loin  du  bord  le  bouillant  Lesdiguière , 
Vivonne,  Nantouillet,  et  Coislin,  et  Salart  : 
Chacun  d'eux  au  péril  veut  la  première  part. 
Vendôme,  que  soutient  l'orgueil  de  sa  naissance, 
Au  même  instant  dans  l'onde  impatient  s'élance. 
La  Salle,  Beringhen,  Nogent,  d'Ambre,  Cavois 
Fendent  les  flots  tremblants  sous  un  si  noble  poids. 

2.  Armand  de  Gramont,  comte  de  Guiche,  fils  aîné  du  maréchal 
de  Gramont,  lieutenant  général  du  corps  d'armée  de  Monsieur  le 
Prince,  né  en  i638,  mort  en  1678.  Voyez  ci-dessus,  p.  264,  note  2. 
Il  reçut,  dit  la  Gazette  du  22  juin,  neuf  coups  tant  dans  la  main  que 
dans  ses  habits  et  son  épée.  Le  comte  de  Guiche  a  écrit  une  relation 
du  passage  du  Rhin,  qui  se  trouve  au  tome  LVII  (p.  io5-ii8<  de  la 
2e  série  des  Mémoires  de  la  collection  Petitot. 


270  POÉSIES   DIVERSES. 

Vendôme1,  d'un  grand  roi  race  toute  héroïque2,         265 
Vivonne8,  la  terreur  des  galères  d'Afrique, 
Briole4,  Chavigny6,  Nogent6,  et  Nantouillet7, 
Sous  divers  ascendants 8  montrent  même  souhait . 

Vendocinus,  Libycaeque  Vivonius  arbiter  undae, 
SuBisiusque,  CoESLiivusque,  et  Salleus,  et  tu 
Thermiade,  SALLARTusque ,  et  Chavinius  audax, 
Et  Brïolus,  REVELUsque,  et  Lesdigueria  proies 
Saesius,  adversamque  haud  emersurus  in  oram 
Nogentus  sequitur;  tum  Najjtulietus,  et  ardens 

1 .  Le  chevalier  de  Vendôme,  arrière-petit-fils  de  Henri  IV,  et  frère 
du  duc,  qui  servait  aussi  dans  l'armée  de  Flandre.  Il  «  avoit  traversé 
Je  Rhin  à  cheval,...  se  mêla,  l'épée  à  la  main,  parmi  les  ennemis,... 
gagna  un  drapeau  et  un  étendard,  qu'il  apporta  au  Roi,  qui  l'accueillit 
selon  que  le  méritoit  un  exploit  si  beau  et  d'un  prince  qui  n'a  pas 
encore  dix-sept  ans.  »  [Gazette  du  29  juin.) 

3.   Dans  l'édition  de  1688  du  P.  de  la  Rue  :  «  tout  héroïque.  » 

3.  Louis-Victor  de  Rochechouart,  duc  de  Mortemart  et  de  Vivonne, 
général  des  galères  de  France  depuis  1669,  nommé  maréchal  de  France 
en  1675,  mort  au  mois  de  septembre  1688.  Il  fut  blessé  au  passage 
du  Rhin.  Voyez  les  Lettres  de  Mme  de  Sévïgné,  tome  III,  p.  111 
et  i45. 

4-  Le  comte  deBriord,  souvent  appelé  Briole  ou  Briolle,  fut  pre- 
mier écuyer  de  Monsieur  le  Duc,  ambassadeur  à  Turin  en  1697,  à 
la  Haye  en  1699.  Il  est  nommé  dans  la  relation  du  comte  deGuiche. 

5.  La  Gazette  (29  juin)  rapporte  que  le  comte  de  Guiche,  qui  se 
jeta  le  premier  dans  le  fleuve,  fut  suivi  immédiatement  du  duc  de 
Coislin,  des  comtes  de  Saulx,  —  de  Nogent,  des  marquis  de  Cha- 
vigny,  de  Guitry,  etc.  Le  marquis  de  Chavigny,  fils  du  secrétaire 
d'État,  fut  brigadier  des  armées  du  Roi  et  mourut  en  171 8. 

6.  Armand  de  Bautru,  comte  de  Nogent,  lieutenant  général  au 
gouvernement  d'Auvergne,  maréchal  de  camp  des  armées  du  Roi  et 
maître  de  la  garde-robe.  Il  fut  tué  au  passage  du  Rhin,  comme  il  est 
dit  ci-après,  vers  3oi-3o4-  "Voyez  sur  lui  les  Lettres  de  Mme  de 
Sévignê,  tome  I,  p.  4o3  et  4°4  ;  et  tome  III,  p.  109  et  m. 

7.  François  du  Prat,  descendant  du  chancelier,  fils  cadet  du  mar- 
quis de  Nantouillet. 

8.  C'est-à-dire  sous  des  astres  divers,  avec  des  chance*,  des  desti- 
nées diverses.  \J ascendant ,  en  terme  d'astrologie,  est  l'horoscope. 


POÉSIES   DIVERSES.  271 

De  Termes1,  et  Coaslin2,  et  Soubise8,  et  la  Salle*, 

Et  de  Saulx6,  et  Revel*,  ont  une  ardeur  égale  ;         270 

Et  Guitry7,  que  la  Parque  attend  sur  l'autre  bord , 

Sallart8  et  Beringhem  9  font  un  pareil  effort. 

Je  n'achèverois  point  si  je  voulois  ne  taire 

Ni  pas  un  commandant ,  ni  pas  un  volontaire  : 

L'histoire  en  prendra  soin  ,  et  sa  fidélité  2  7  5 

Berenghenus,  et  exanimes  mox  inter  acervos 
Guitrius  hostiii  victor  sternendus  arena. 
Inde  alii  centum,  atque  alii,  quos  œmula  virtus 
Excitât.  Olli  alacres,  quanquam  refugique  tremiscant 

1.  Roger  de  Pardaillan  de  Gondrin,  marquis  de  Termes.  Il  fut 
blessé  au  passage  du  Rhin.  Voyez  les  Lettres  de  Mme  de  Sécigné, 
tome  III,  p.  ni  et  i45. 

2.  Armand  de  Cambout,  duc  de  Coislin,  mort  le  16  septembre  170a, 
âgé  de  soixante-sept  ans.  Il  fut  blessé  à  la  main  au  passage  du  Rhin. 
Voyez  ci-dessus,  p.  270,  note  5. 

3.  François  de  Rohan ,  fils  puîné  d'Hercule  de  Rohan,  duc  de 
Montbazon.  Il  traversa  le  Rhin  à  la  nage,  dit  Moréri,  à  la  tête  des 
gendarmes  de  la  garde. 

4.  Le  marquis  de  la  Salle  ayant  passé  le  Rhin  un  des  premiers,  fut 
blessé  de  cinq  coups  par  les  cuirassiers,  qui  s'étant  jetés  à  Feau  pré- 
cipitamment après  lui,  le  prirent  pour  un  Hollandais. 

5.  François-Emmanuel,  comte  de  Sault,  arrière-petit-fils  du  con- 
nétable de  Lesdiguières,  fut  blessé  au  bras,  au  passage  du  Rhin,  et 
eut  un  cheval  tué  sous  lui.  Il  mourut  en   1681. 

6.  Charles- Amédée  de  Broglio,  comte  de  Revel,  colonel  des  cui- 
rassiers, frère  du  premier  maréchal  de  Broglie.  Il  fut  blessé  de  trois 
coups  d'épée  dans  l'action  qui  suivit  le  passage  du  Rhin.  Voyez  sur 
lui  les  Lettres  de  Mme  de  Sévigné ,  tome  HI ,  p.  1 1 1 ,  et  tome  IX , 
p.  172  et  173. 

7.  Guy  de  Chaumont  de  Guitry,  pour  qui  le  Roi  avait  créé  la 
charge  de  grand  maître  de  la  garde-robe.  Voyez  ci-après ,  vers  345. 

8.  La  Gazette  (22  juin)  dit  que  dans  le  premier  passage,  à  la  suite 
du  comte  de  Guiche,  les  seules  personnes  de  qualité  qui  périrent 
furent  le  comte  de  Nogent  et  le  chevalier  de  Salart.  Voyez  aussi  le 
Mercure  galant  de  1673,  tome  II,  p.  3o2. 

9.  Le  marquis  de  Beringhen,  premier  écuyer  du  Roi  et  colonel  du 
régiment  Dauphin.  Voyez  le  Mercure,  p.  3o4« 


272  POÉSIES   DIVERSES. 

Les  consacrera  mieux  à  l'immortalité. 

De  la  maison  du  Roi  l'escadre  ambitieuse 

Fend  après  tant  de  chefs  la  vague  impétueuse , 

Suit  l'exemple  avec  joie  ;  et  peut-être  ,  grand  Roi , 

Avois-je  là  quelqu'un  qui  te  servoit  pour  moi l  :  2K0 

Tu  le  sais,  il  suffit.  Ces  guerriers  intrépides 

Percent  des  flots  grondants  les  montagnes  liquides. 

La  tourmente  et  les  vents  font  horreur  aux  coursiers  2  ; 

Mais  cette  horreur  en  vain  résiste  aux  cavaliers  : 

Chacun  pousse  le  sien  au  travers  de  Forage*,  285 

Le  péril  redoublé  redouble  le  courage  •, 

Le  gué  manque,  et  leurs  pieds  semblent  à  pas  perdus 

Chercher  encor  le  fond  qu'ils  ne  retrouvent  plus8; 

Ils  battent  l'eau  de  rage ,  et  malgré  la  tempête 

Qui  bondit  sur  leur  croupe  et  mugit  sur  leur  tête ,      2  g  o 

L'impérieux  éclat  de  leurs  hennissements 

Veut  imposer  silence  à  ses  mugissements  : 

Alipedes,  ventoque  tumens  immugiat  unda, 
Invadunt  fluvium.  Strictis  laeva  instat  habenis, 
Dexte^a  sublato  micat  ense,  nec  usus  in  armis 
Est  super.  At  collum  qua  thorax  pressior  ambit, 
Ignivomos  texere  tubos,  nitrataque  flammae 
Semina,  ne  madido  vanescant  uda  liquore, 
Implicuere  comis  et  summo  in  vertice  gestant. 
Jam  sola  deseruere,  et  jam  vacua  omnia  nutant 
Sub  pedibus;  timido  lym plias  ruit  ungula  pulsu, 
Incertusque  jubas  sonipes  quatit,  et  caput  alto 
Arduus  hinnitu  :  vix  illum  fraena  coercent 


1.  Un  de  ses  fils  :  voyez  ci-dessus,  p.  188,  note  4,  et  p.  189,  note  2. 

2.  «  Il  faisoit  ce  jour-là  un  vent  fort  impétueux,  qui,  agitant  les 
faux  du  Rhin,  en  rendoit  l'aspect  beaucoup  plus  terrible.  »  (Racine, 
Précis  historique  des  campagnes  de  Louis  XIV.} 

3.  «  Le  terrain  venant  à  manquer  sous  les  pieds  de  leurs  chevaux, 
ils  les  font  nager,  et  approchent  avec  une  audace  que  la  présence  du 
Roi  pou  voit  seule  leur  inspirer.  »  (Ibidem.) 


POÉSIES   DIVERSES.  27} 

Le  gué  renaît  sous  eux;  à  leurs  crins  qu'ils  secouent, 
Des  restes  du  péril  on  diroit  qu'ils  se  jouent, 
Ravis  de  voir  qu'enfin  leur  pied  mieux  affermi,  295 

Victorieux  des  flots,  n'a  plus  qu'un  ennemi. 

Tout  à  coup  il  se  montre  ,  et  de  ses  embuscades 
Il  fait  pleuvoir  sur  eux  cent  et  cent  mousquetades  ; 
Le  plomb  vole,  l'air  siffle ,  et  les  plus  avancés 
Chancellent  sous  les  coups  dont  ils  sont  traversés.       3 00 
Nogent,  qui  flotte  encor  dans  les  gouffres  de  l'onde , 
Eu  reçoit  dans  la  tête  une  atteinte  profonde1  : 
Il  tombe ,  l'onde  achève ,  et  l'éloignant  du  bord , 
S'accorde  avec  le  feu  pour  cette  double  mort. 

Que  vois-je  ?les  chevaux,  que  leur  sang  effarouche,  3  o  5 
Bouleversent  leur  charge,  et  n'ont  ni  frein  ni  bouche, 
El  le  fleuve  grossit  son  tribut  pour  Thétis 
De  leurs  maîtres  et  d'eux  pêle-mêle  engloutis. 
Le  mourant  qui  se  noie  à  son  voisin  s'attache, 

Frendentem,  et  patulis  ructantem  naribus  undas. 
His  adeo  incensis  numéro  plausuque  sequentum 
Ripa  recedebat  longe,  mediumque  tenebant 
Infraenum  cursu  vastaque  voragine  flumen. 

Ecce  autem  e  laiebris  acies  inimica  repente 
Cum  sonitu  erumpens  et  barbarico  ululatu, 
Adversum  obvallat  numeroso  milite  littus. 
Mox,  patriam  ulcisci  quando  pudor  ultimus  urget, 
Prœcipitant  in  aquas,  et  certa  in  vulnera  proni, 
Sulphureum  excutinnt  cannis  feralibus  imbrem. 
Fit  fragor,  ignito  stridens  it  limite  plumbum 
Nogenti  in  frontem  :  mit  ille,  haustusque  fluento, 
Morte  périt  gemina.  Paribus  cadit  undique  fatis 
Turba  frequens,  mixtique  viris,  passi nique  soluti 
Per  medios  rapiuntur  equi  ;  spumantia  fervent 
Cserula,  et  emotis  exœstuat  amnis  arenis  : 


1.  Voyez  ci-dessus,  p.  270,  note  6. 

Corneille,  x  18 


274  POÉSIES    DIVERSES. 

Et  l'entraîne  après  lui  sous  le  flot  qui  le  cache.  3  1  « 

Quel  spectacle  d'effroi ,  grand  Dieu  !  si  toutefois 
Quelque  chose  pouvoit  effrayer  des  François. 

Rien  n'étonne  :  on  fait  halte  * ,  et  toute  la  surprise 
N'obtient  de  ces  grands  cœurs  qu'un  moment  de  remise, 
Attendant  qu'on  les  joigne,  et  qu'un  gros  qui  les  suit  3  1  5 
Enfle  leur  bataillon,  que  l'œil  du  Roi  conduit. 
Le  bataillon  grossi  gagne  l'autre  rivage, 
Fond  sur  ces  faux  vaillants ,  leur  fait  perdre  courage , 
Les  pousse ,  perce ,  écarte  ,  et  maître  de  leur  bord , 
Leur  porte  à  coups  pressés  l'épouvante  et  la  mort.      320 

Tel  est  sur  tes  François  l'effet  de  ta  présence , 
Grand  Monarque  ;  tels  sont  les  fruits  de  ta  prudence , 
Qui  par  de 2  feints  combats  prit  soin  de  les  former 
A  tout  ce  que  la  guerre  a  d'affreux  ou  d'amer3. 

Horrendum  !  scirent  si  quicquam  horrescere  Galli. 

Ast  illi  capti  insidiis  subsistere  primum, 
Dura  coëat  latis  dispersum  fluctibus  agmen. 
Tum  certi  inter  se,  collectoque  impete,  leti 
Mille  minas  inter  volucrisque  tonitrua  flanimae, 
Deproperare  viam,  et  cseco  vada  sternere  cursu. 
Instigant  studiis  socii,  et  spectator  adurget 
Magnus.  Hic  irato  luctantes  aspicit  amni, 
Agnoscitque  suos  ;  et  quas  ipse  indidit  artes, 
Quos  animos,  quas  ante  manus  in  bella,  per  aestus 
Perque  hiemes,  fictis  toties  formavit  in  armis. 


1.  Dans  l'édition  originale,  imprimée  avec  beaucoup  de  soin,  mais 
dans  une  orthographe  particulière,  il  y  a  ici  alte,  ce  qui  indique  que 
ce  mot  ne  se  prononçait  pas  comme  aujourd'hui.  On  était  loin  d'ail- 
leurs d'être  d'accord  sur  son  origine ,  comme  nous  l'apprenons  par 
Furetière,  et  c'est  sans  doute  ce  qui  en  rendait  la  prononciation  et 
l'orthographe  incertaines.  Au  reste,  les  éditions  du  P.  de  la  Rue  et  de 
Granet  portent  également  alte.  Voyez  le  Lexique. 

a.   Des,  dans  les  OEuvres  diverses  et  dans  les  éditions  suivantes. 

3.  Voyez  ci- dessus,  p.  198,  note  1. 


POESIES   DIVERSES.  a75 

Tu  les  faisois  dès  lors  à  ce  qu'on  leur  voit  faire  ;         3a  5 
Et  l'espoir  d'un  grand  nom  ni  celui  du  salaire 
Ne  font  point  cette  ardeur  qui  règne  en  leurs  esprits  : 
Tu  les  vois,  c'est  leur  joie ,  et  leur  gloire,  et  leur  prix. 

Tandis  que  l'escadron,  fier  de  cette  déroute, 
Mêle  au  sang  hollandois  les  eaux  dont  il  dégoutte ,      3  2  o 
De  honte  et  de  dépit  les  mânes  disparus 
De  ces  bords  asservis  qu'en  vain  ils  ont  courus , 
Y  laissent  à  mon  roi ,  pour  éternel  trophée , 
Leurs  noms  ensevelis  et  leur  gloire  étouffée. 

Mais  qu'entends-je?  et  d'où  part  cette  grêle  de  coups  ? 
Généreuse  noblesse,  où  vous  emportez-vous? 
La  troupe  qu'à  passer  vous  voyez  empressée 
A  courir  les  fuyards  s'est  toute  dispersée  ; 
Et  vous  donnerez  seuls  dans  ce  retranchement 
Où  l'embûche  est  dressée  à  votre  emportement  :  340 

A  peine  y  serez- vous  cinquante  contre  mille; 
Le  vent  s'est  abattu ,  le  Rhin  s'est  fait  docile , 
Mille  autres  vont  passer,  et  vous  suivre  à  l'envi  \ 

Nunc  usu  probat,  et  vero  discrimine  gaudet. 
Ilicet  haud  telis  et  adacto  saucius  igné 
Terga  dédit  Batavus  :  cunctantem  audacia  victrix 
Expulit.  Incurrunt  juvenes,  ausoque  potiti 
Perrumpunt  aditum,  atque  alto  se  gurgite  tollunt 
Manantes  rivis,  nec  segnius  arma  frementes. 

Quœ  nunc  prima  loquar?  Famamne  remota  petentem 
Terrarum,  et  plena  fluviorum  effracta  sonantem 
Claustra  tuba?  refugosne  sua  in  penetralia  Mânes, 
Nudatos  titulis  et  priscae  laudis  honore? 
An  magis  immensam  bellantum  ex  ordine  gentem , 
Totaque  sub  signis  ducibusque  natantia  castra, 
Jam  docili  Rheno,  jam  languescentibus  undis? 
An  potius  cseca  insidias  in  valle  parantem, 
Arboribus  tutum  dubiisque  anfractibus  hostem, 
Mille  viros  :  hue  immissis  erumpere  frenis 


276  POÉSIES   DIVERSES. 

Mais  je  donne  un  avis  que  je  vois  mal  suivi. 

Guitry  tombe  par  terre1.  O  ciel,  quel  coup  de  foudre  ! 

Je  te  vois ,  Longueville  ,  étendu  sur  la  poudre 2  ; 

Avec  toi  tout  l'éclat  de  tes  premiers  exploits 

Laisse  périr  le  nom  et  le  sang  des  Dunois8, 

Et  ces  dignes  aïeux  qui  te  voy oient4  les  suivre 

Perdent  et  la  douceur  et  l'espoir  de  revivre.  3  5o 

Nobilium  impavidam,  turma  licet  impare,  pubem; 
Scrutarique  vêpres  gladio,  palisque  revulsis 
Cominus  extremos  Batavum  stimulare  furores? 
Audio  displosos  inimicse  grandinis  ictus, 
Pugnantumque  minas,  suspiriaque  œgra  cadentum. 
Tene  etiam  in  mediis,  Longavill^ee,  jacentem, 
Tecum  atavos,  tecum,  ah!  nomen  Dunense  sepultum 
Aspicio?  Tene  angustis  in  rébus  iniquo 
Congressos  numéro  proceres,  juveniliaque  ausa 
Sustentantem  animis  video,  Cond^ee?  feraque 
Strage  virum  longse  redimentem  tsedia  pacis? 
Qua  mis,  impulsos  repetito  vulnere  csedis 
Obstantum  cuneos;  qua  non  ruis,  ignea  vultus 


i.  Voyez  ci-dessus,  p.  271,  vers  271,  et  note  7.  «  Il  a  vécu  une 
heure  après  sa  blessure.  »  (Mercure galant,  1673,  tome  II,  p.  307.) 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  208,  note  2.  —  «  M.  de  Longueville  avoit 
forcé  la  barrière,  où  il  s'étoit  présenté  le  premier;  il  a  été  aussi  le 
premier  tué  sur-le-champ.  »  [Lettres  de  Mme  de  Sévigné,  tome  III, 
p.  109.)  —  «  Vous  verrez  dans  toutes  {les  relations)  que  M.  de  Lon- 
gueville est  cause  de  sa  mort  et  de  celle  des  autres.  »  (Ibidem,  p.  117.) 
—  a  II  n'y  aurait  eu  personne  de  tué  dans  cette  journée,  sans  l'impru- 
dence du  jeune  duc  de  Longueville.  On  dit  qu'ayant  la  tête  pleine 
des  fumées  du  vin,  il  tira  un  coup  de  pistolet  sur  les  ennemis  qui  de- 
mandaient la  vie  à  genoux,  en  leur  criant  :  «  Point  de  quartier  pour 
«  cette  canaille  !  »  Il  tua  d'un  coup  un  de  leurs  officiers.  L'infanterie 
hollandaise  désespérée  reprit  à  l'instant  ses  armes,  et  fit  une  décharge 
dont  le  duc  de  Longueville  fut  tué.  »  (Voltaire,  Siècle  de  Louis  XIV 
chapitre  x.) 

3.  Voyez  ci-dessus,  p.  208,  fin  de  la  note  2. 

4    Qui  te  voyenty  mais  à  tort,  dans  l'édition  de  Lefèvre. 


POÉSIES    DIVERSES.  a75 

Condé  va  te  venger,  Condé  dont  les  regards 

Portent  toute  Nortlinghe  et  Lens1  aux  champs  de  Mars; 

Il  ranime  ,  il  soutient  cette  ardente  noblesse 

Que  trop  de  cœur  épuise  ou  de  force  ou  d'adresse  ; 

Et  son  juste  courroux  ,  par  de  sanglants  effets,  35  5 

Dissipe  les  chagrins  d'une  trop  longue  paix. 

L'ennemi  qui  recule,  et  ne  bat  qu'en  retraite, 

Remet  au  plomb  volant  à  venger  sa  défaite  : 

On  l'enfonce.  Arrêtez,  héros  !  où  courez-vous? 

Hasarder  votre  sang,  c'est  les  exposer  tous  :  36 o 

C'est  hasarder  Enguien,  votre  unique  espérance2, 

Enguien,  qui  sur  vos  pas  à  pas  égaux  s'avance. 

Tous  les  cœurs  vont  trembler  à  votre  seul  aspect  ; 

Mais  le  plomb  n'a  point  d'yeux,  et  vole  sans  respect  : 

Fulgura  semotos  etiam  sine  vulnere  csedunt  3  : 

Multa  oculis  Norlinga  et  Lentia  multa  recursat. 

Nec  jam  audent  conferre  manum,  tantum  eminus  imbrem 

Fatiferum  ingeminant.  Ah  !  ne  te  ferrea  lsedat 

Tempestas!  neu  te,  neu  tecum  passibus  sequis 

Currentem  Enguinettm  tantis  immitte  periclis. 

Heu  scelus  !  infami  violatur  pervia  glande 

Lseva  manus.  Victas,  Batavi,  ne  plangite  ripas, 

Concisasque  acies,  et  csede  natantia  rura  : 

Borbonio  maduit  tellus  captiva  cruore. 

i.  Nordlingen  en  Bavière,  Lens  aujourd'hui  dans  le  Pas-de- 
Calais,  lieux  illustrés  par  deux  victoires  du  grand  Condé,  en  1645 
et  1648. 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  208,  note  1.  Le  duc  d'Enghien  était  fils 
unique  du  grand  Condé. 

Enguien,  de  son  hymen  le  seul  et  digne  fruit, 
Par  lui  dès  son  enfance  à  la  victoire  instruit. 

(Boileau,  Épitre  IV,  vers  i35  et  t36.) 

3.  Au  lieu  de  ces  trois  vers  :  Qua  mis,  etc.,  qui  n'ont  pas  été  ren- 
dus par  Corneille,  on  lit  simplement  dans  l'édition  de  1688  : 

Qua  ruis,  exanimes  fugiunt  sine  vulnere  turmœ. 


278  POÉSIES    DIVERSES. 

Votre  gauche1  Téprouve.  Allez,  Hollande  ingrate,      3  65 
Plaignez-vous  d'un  malheur  où  tant  de  gloire  éclate  ; 
Plaignez-vous  à  ce  prix  de  recevoir  nos  fers  : 
Trois  gouttes  d'un  tel  sang  valent  tout  l'univers. 
Oui ,  de  votre  malheur  la  gloire  est  sans  seconde  , 
D'avoir  rougi  vos  champs  du  premier  sang  du  monde  : 
Les  plus  heureux  climats  en  vont  être  jaloux  ; 
Et  quoi  que  vous  perdiez,  nous  percions  plus  que  vous. 

La  Hollande  applaudit  à  ce  coup  téméraire  ; 
Le  François  indigné  redouble  sa  colère; 
Contre  elle  Knosembourg2  ne  dure  qu'une  nuit;         375 
Arnheim3,  qui  l'ose  attendre,  en  deux  jours  est  réduit; 
Et  ce  fort  merveilleux  sous  qui  l'onde  asservie 
Arrêta  si  longtemps  toute  la  Batavie , 
Qui  de  tous  ses  vaillants  onze  mois  fut  recueil, 

Hoc  vinci  decuit  pretio,  cladisque  pudorem 
Eluit  hic  vestro  commixtus  sanguine  sanguis. 

Non  impune  tamen,  nec  erit  sine  vindice  vulnus. 
Crudescunt  ira?  Francorum,  et  promptius  arces 
ltur  in  adversas.  Vix  Knozemburgica  noctem, 
Vix  lucem  geminam  Arnhem  uni  ;  vix  detinet  unam 
Ille  olim  Batavae  scopulus  virtutis,  et  unus 
Undecimum  in  mensem  belli  mora,  Skinkius  agger. 

1 .  Votre  main  gauche,  Iseva  manus,  comme  le  dit  le  P.  de  la  Rue.  — 
«  Monsieur  le  Prince,  dit  le  Mercure  galant  (au  tome  cité,  p.  296),  a  été 
blessé  au  poignet  gauche.  »  —  «  Un  capitaine  de  cavalerie,  nommé 
Ossembrœk,  qui  ne  s'était  point  enfui  avec  les  autres,  court  au  prince 
de  Condé,  qui  montait  alors  à  cheval  en  sortant  de  la  rivière,  et  lui 
appuie  son  pistolet  à  la  tête.  Le  prince  par  un  mouvement  détourna  le 
coup,  qui  lui  fracassa  le  poignet.  Condé  ne  reçut  jamais  que  cette 
blessure  dans  toutes  ses  campagnes.  »  (Voltaire,  Siècle  de  Louis  XIV ', 
chapitre  x.) 

2 .  Fort  situé  sur  le  Wahal ,  vis-à-vis  de  Nimègue  ;  il  fut  pris  par 
Turenne  le  17  juin. 

3.  Ville  considérable  du  duché  de  Gueldre  ,  prise  par  Turenne  le 
14  juin. 


POÉSIES    DIVERSES.  279 

L'inaccessible  Skeink,  coûte  à  peine  un  coup  d'oeil1.  38 o 

Que  peut  Orange2  ici  pour  essai 3  de  ses  armes, 
Que  dérober  sa  gloire  aux  communes  alarmes, 
Se  séparer  d'un  peuple  indigne  d'être  à  lui, 
Et  dédaigner  des  murs  qui  veulent  notre  appui  ? 
La  rive  de  l' Yssel  si  bien  fortifiée ,  3  8  5 

Par  ce  juste  mépris  à  nos  mains  confiée, 
Ne  trouve  parmi  nous  que  des  admirateurs 
De  ses  retranchements  et  de  ses  déserteurs. 

Yssel  trop  redouté ,  qu'ont  servi  tes  menaces? 
L'ombre  de  nos  drapeaux  semble  charmer  tes  places  :  390 
Loin  d'y  craindre  le  joug,  on  s'en  fait  un  plaisir; 
Et  sur  tes  bords  tremblants  nous  n'avons  qu'à  choisir. 

Ipse  fugam  Auriacus,  ne  tergo  inopinus  inliœrens 
Praeripiat  victor,  versis  prius  occupât  armis  4, 
Hostiies  etiam  ante  minas  :  déserta  patescunt 
Munimenta  Isalse,  et  fragili  congestus  arena 
Cespitibusque  labor  Gallo  fît  Indus  inermi. 

Hinc  Isalse  impositas  idem  rapit  impetus  urbes, 
Kempenque  Zwolamque  ;  jugum  Daventria  felix 

1.  Voyez  ci-dessus,  p.  264,  note  2.  Skink,  pris  en  i636  par  les 
Hollandais,  après  un  long  siège,  fut  assiégé  par  nos  troupes  le  18  juin 
1672,  et  pris  le  21.  Boileau  ne  manque  pas  de  faire  allusion  à  ce  fait 
dans  sa  IVe  épître  (vers  147  et  148)  : 

Bientôt  on  eût  vu  Skink  dans  mes  vers  emporté 
De  ses  fameux  remparts  démentir  la  fierté. 

2.  Guillaume  d'Orange,  qui  fut  depuis  roi  d'Angleterre,  le  petit- 
fils  de  Henri  de  Nassau  nommé  plus  haut,  p.  262,  vers  166.  Il  avait  été 
d'abord  capitaine  général  des  forces  néerlandaises;  puis  le  peuple, 
poussé  à  bout  par  les  dures  conditions  que  voulait  lui  imposer 
Louis  XIV,  le  proclama  stathouder  de  Hollande. 

3.  H  y  a  essais,  au  pluriel,  dans  les  Œuvres  diverses  de  1788. 

4.  Ici  encore  il  y  a  un  vers  de  moins  dans  l'édition  de  1688,  qui 
donne  seulement  : 

Ipse  fugam  Auriacus  versis  simul  occupât  armis. 


280  POÉSIES  DIVERSES. 

Ces  troupes  qu'un  beau  zèle  à  nos  destins  allie 

Font  dans  l'Ouver-Yssel  régner  la  Westphalie; 

Et  Grolle ,  Swol ,  Kempen  montrent  à  Déventer  *       3  9  5 

Qu'il  doit  craindre  à  son  tour  les  bombes  de  Munster. 

Louis  porte  à  Doësbourg 2  sa  majesté  suprême , 
Et  fait  battre  Zutphen 3  par  un  autre  lui-même  ; 
L'un  ouvre,  l'autre  traite,  et  soudain  s'en  dédit  : 
De  ce  manque  de  foi  Philippe  le  punit,  400 

Jette  ses  murs  par  terre ,  et  le  force  à  lui  rendre 
Ce  qu'une  folle  audace  en  vain  tâche  à  défendre. 
Ces  colosses  de  chair  robustes  et  pesants 
Admirent  tant  de  cœur  en  de  si  jeunes  ans 4  : 
D'un  héros  dont  jamais  ils  n'ont  vu  le  visage  40  5 

En  cet  illustre  frère  ils  pensent  voir  l'image, 
L'adorent  en  sa  place,  et  recevant  sa  loi, 

Pastorale  subit,  Grollseque  exterrita  casu 
Wesphalicum  avertit  tectis  flagrantibus  ignem. 

Fulminât  ante  alios  Lodoicus,  et  édita  Druso 
Mœnia  Dosburgi  proprio  dum  numine  terret, 
Lectam  aciem  tradens  et  prospéra  fata  Philippo, 
Zutplianise  quassat  fraterno  numine  muros. 

His  ille  auspiciis  commissoque  agmine  lœtus, 
Nutantem  inque  ipsa  jam  deditione  rebellem 
Castigat  populum.  Mirantur  inertia  vulgi 
Pectora  robustis  nequicquam  obducta  lacertis, 
Tantum  animi,  tantas  tam  pulchro  in  corpore  vires, 
Tarn  vigiles  juveni  cœpta  ad  castrensia  curas  ; 

1.  Grolle,  aujourd'hui  dans  la  Gueldre,  Zwol  et  Kempen,  dans 
l'Over-Yssel  ou  Yssel  supérieur,  furent  pris  presque  simultanément 
par  les  troupes  de  l'évêque  de  Munster  (en  Westphalie),  qui  s'empa- 
rèrent de  Deventer  le  21  juin. 

2.  Cette  ville  de  la  Gueldre  fut  prise  le  21  juin. 

3.  Zutphen,  autre  ville  de  la  Gueldre,  fut  pris  le  25  par  Monsieur, 
frère  du  Roi. 

4.  Le  duc  d'Orléans  était  né  en  1640,  et  par  conséquent  avait  déjà 
trente-deux  ans. 


POÉSIES   DIVERSES.  281 

Reconnoissent  en  lui  le  sang  d'un  si  grand  roi. 

Ainsi ,  lorsque  le  Rhin ,  maître  de  tant  de  villes  , 
Fier  de  tant  de  climats  qu'il  a  rendus  fertiles ,  410 

Enflé  des  eaux  de  source  et  des  eaux  de  tribut , 
Approche  de  la  mer  que  sa  course  a  pour  but, 
Pour  s'acquérir  l'honneur  d'enrichir  plus  de  monde  , 
Il  prête  au  Vhal1,  son  frère  ,  une  part  de  son  onde; 
Le  Vhal ,  qui  porte  ailleurs  cet  éclat  emprunté ,  415 

En  soutient  à  grand  bruit  toute  la  majesté, 
Avec  pareil  orgueil  précipite  sa  course , 
Montre  aux  mêmes  effets  qu'il  vient  de  même  source  , 
Qu'il  a  part  aux  grandeurs  de  son  être  divin , 
Et  sous  un  autre  nom  fait  adorer  le  Rhin.  420 

Qu'il  m'est  honteux,  grand  Roi,  de  ne  pouvoir  te  suivre 
Dans  Nimègue  qu'on  rend2,  dans  Utrecht  qu'on  te  livre 3, 
Et  de  manquer  d'haleine  alors  qu'on  voit  la  foi 
Sortir  de  ses  cachots ,  triompher  avec  toi , 
Et  de  ses  droits  sacrés  par  ton  bras  ressaisie,  425 

Heroumque  genus,  Regemque  in  fratre  pavescunt. 

Sic  postquam  anfractu  vario  centumque  volutus 
Urbibus,  extremum  properat  jam  Rhenus  in  orbem , 
Nativisque  tumens  et  vectigalibus  undis 
Germanum  in  Vahalim  diviso  gurgite  fluctus 
Exonérât  :  sonat  ille  vadis,  fratrisque  timenda 
Majestate  ferox,  fremitumque  imitatus  et  iras, 
Communes  probat  seternis  e  fontibus  ortus, 
Et  Divum  Deus  ipse  refert,  aliisque  colendum 
Ostentat  populis  alio  sub  nomme  Rhenum. 

Nec  satis  est  animos  passim  trepidare  labantes 
Inque  novos  mores  nrbes  transire  coactas  : 
Sub  juga  jam  totis  ultro  regionibus  itur. 
Cessit  et  Austrini  latus  sequoris,  ardua  cessit 
Neumagus,  et  magnse  Trajeetum  nobile  gentis 

1.  lie  Wabal.  —  ?..  Le  9  juillet.  —  3.  Le  20  juin. 


282  POÉSIES    DIVERSES. 

Chez  tes  nouveaux  sujets  détrôner  l'hérésie  ! 

La  Victoire  s'attache  à  marcher  sur  tes  pas , 

Et  ton  nom  seul  consterne  aux  lieux  où  tu  n'es  pas. 

Amstredam  '  et  la  Haye  en  redoutent  l'insulte  : 

L'un  t'oppose  ses  eaux2,  l'autre  est  toute  en  tumulte; 

La  noire  politique  a  de 8  secrets  ressorts 

Pour  y  forcer  le  peuple  aux  plus  injustes  morts; 

Les  meilleurs  citoyens  aux  mutins  sont  en  butte k  : 

L'ambition  ordonne ,  et  la  rage  exécute  ; 

Et  qui  n'ose  souscrire  à  leurs  sanglants  arrêts,  435 

Qui  s'en  fait  un  scrupule,  est  dans  tes  intérêts  : 

Sous  ce  cruel  prétexte  on  pille ,  on  assassine  ; 

Chaque  ville  travaille  à  sa  propre  ruine  ; 

Chacun  veut  d'autres  chefs  pour  calmer  ses  terreurs. 

Tota  adeo  cum  gente  caput.  Micat  eruta  fracto 

Carcere  relligio,  festaque  per  oppida  pompa 

Fœda  situ  longo  patrum  delubra  revisens 

Expiât  :  erepta  fugiunt  mendacia  larva. 

Francum  urbes,  Francum  arva  sonant,  Francum  alta  volutant 

Littora.  Discordi  convellitur  Haga  tumultu  ; 

Et  vinci  impatiens,  prodi  se  curia  jactat. 

Nulla  fides  :  Gallus  jam  quisque  nocensque  putatur, 

Ni  furat  in  proceres,  et  vulgi  exempla  secutus 

Sese  odiis  turpique  probet  formidine  civein  ; 

Nec  furiis  modus  :  ipsa  manu  subvertere  claustra 

Admissoque  lubet  sola  naufraga  mergere  ponto  ; 

Et  miseris  ea  visa  salus.  Labor  omnibus,  aurum 

Defodere,  inque  alios  subvectum  avertere  fines  ; 

1.  Ici  l'édition  du  P.  de  la  Rue  (1688)  porte,  comme  l'édition  in- 
folio  :  Amstredam. 

1.  Le  peuple  d'Amsterdam  força  ses  magistrats  d'ouvrir  les  écluses 
et  de  percer  les  digues  qui  empêchaient  la  mer  de  se  répandre  dans 
les  campagnes. 

3.  Des,  dans  les  OEuvres  diverses  et  dans  les  éditions  suivantes. 

4.  Le  grand  pensionnaire  Jean  de  Witt  et  son  frère  Corneille 
furent  massacrés  par  la  populace,  à  la  Haye,  le  2a  août  167a. 


POÉSIES    DIVERSES.  28* 

Laisse-les  ,  grand  vainqueur,  punir  à  leurs  fureurs,    440 

Laisse  leur  barbarie  arbitre  de  la  peine 

D'un  peuple  qui  ne  vaut  ni  tes  soins  ni  ta  haine  ; 

Et  tandis  qu'on  s'acharne  à  s'entre-déchirer, 

Pour  quelque  mois  ou  deux  laisse-moi  respirer. 

Et  servire  levé  est,  dum  ne  victoris  in  usus 

Tôt  captiva  cadant  aggestse  pondéra  gaza?  : 

Tanta  famés  auri,  verœque  oblivio  laudis. 

At  non  idem  animus  tamen  omnibus,  aut  furor  idem  : 

Sunt  qui  fraude  suis  quserunt  solatia  rébus. 

Ergo  pacem  alii  verbis  et  supplice  cultu, 

Victoris  fusi  ante  pedes,  veniamque  precantur 

Exosi  veniam,  legesque  eludere  certi  : 

Bella  alii,  sociasque  aquilas,  fœdusque  minantur, 

Martis  inexperti,  peregrino  at  Marte  féroces. 

Nec  regem  latuere  doli  :  fallacia  gentis 
Vota,  levesque  minas,  paci  belloque  paratus 
Despicit,  et  :  «  Venise  sic  nomine  luditis,  inquit? 
Nec  venia,  Batavi,  nec  vos  dignabimur  ira. 
Nam  quid  iners  ultra,  socii,  nos  detinet  hostis? 
Parcamus  ferro.  Franca  cecidisse  superbum  est 
Regalique  manu  :  proprio  ruât  ipse  furore, 
Verîat  et  imbellem  scelerata  in  viscera  dextram, 
Hostibus  baud  aliis,  alioque  haud  funere  dignus.  » 
Dixit,  et  excitum  Stygiis  e  faucibus  agmen 
Civilesque  trabens  secum  Discordia  pestes, 
Infaustas  populat,  quibus  héros  abstinet,  oras. 
Hic  patriae  fines,  votisque  vocantia  régna 
Securus  rerum  spoliisque  revisit  onustus. 
[ntremuit  tellus,  abeuntique  alta  Genapi 
Culmina,  et  irrigui  princeps  Bommelia  tractus, 
Et  Vordum,  et  Gravia,  et  Crepicordi  nobile  vallum 
Se  simul  advolvere,  et  iter  strsvere  ruina. 

Tu  f  tamen  ignavam  ne  sperne  evertere  gentem. 

1.  «  Les  {quatorze)  vers  suivants  ont  été  supprimés  dans  la  sixième 
édition  des  Poésies  du  P.  de  la  Rue,  faite  à  Anvers  en  i6g3.  »  {Note 
de  Granet.)  —  Ils    manquent  déjà  dans  celle  qui  a  été  faite  à  Paris 


284  POÉSIES   DIVERSES. 

Non  alio,  Lodoice,  datum  est  tibi  vincere  fato. 
Credo  equidem  :  deceant  alios  ea  prselia  reges, 
Ipse  ubi  cum  victis  partitur  victor  honorem  ; 
Certa  tibi  laus  tota.  Cadunt,  quoscumque  lacessis, 
Indecores  ;  tibique  in  partem  titulumque  triumphi 
Non  fusae  veniunt  acies,  non  eruta  tantum 
Oppida;  fracta  etiam  virtus,  deletaque  fama 
Nominis,  et  victae  si  quae  sit  gloria  genti, 
His  quoque  victor  ovas  spoliis  ;  nec  se  tibi  quicquam 
Subducit,  toto  vinci  quod  possit  in  hoste. 
Haec  tua  sors  :  tali  tibi  se  victoria  lege 
Despondit  famulam  ;  si  talia  bella  récusas, 
Stat  tibi  perpétuée  decus  inviolabile  pacis. 

en  1688.  Au  reste,  Corneille  n'a  traduit  ni  ces  vers  retranchés  plus  tard 
par  l'auteur,  ni  les  trente  précédents.  Il  les  a  remplacés  par  quelques 
traits  rapides  et  par  la  prière  adressée  au  Roi  de  ie  laisser  respirer. 


POÉSIES   DIVERSES.  285 


LXXXII 


SUR    LA    PRISE    DE    MASTR1C. 


SONNET. 


Maestricht  fut  pris  le  Ier  juillet  1673.  Le  rédacteur  du  Mercure 
galant  (1674»  tome  VI,  p.  37),  après  avoir  inséré  trois  sonnets,  les 
deux  premiers  de  Boyer  et  le  troisième  anonyme,  et  une  chanson, 
sur  ce  sujet,  ajoute  :  «  On  me  vient  d'apporter  encore  un  sonnet  sur 
la  prise  de  Mastric ,  que  je  crois,  Madame,  que  vous  serez  bien  aise 
d'avoir,  puisqu'il  est  du  grand  Corneille  :  il  a  plu  et  à  la  cour  et  à 
la  ville,  et  je  ne  doute  pas  que  votre  province  ne  soit  du  même  sen- 
timent. »  A  la  page  38  du  même  volume  on  trouve  le  sonnet  qu'on 
va  lire,  et  à  la  page  43  un  Madrigal  de  Mlle  de  Scudery  sur  la  prise 
de  Mastric, 

Grand  Roi,  Mastric  est  pris,  et  pris  en  treize  jours1  ! 
Ce  miracle  étoit  sûr  à  ta  haute  conduite, 
Et  n'a  rien  d'étonnant  que  cette  heureuse  suite 
Qui  de  tes  grands  destins  enfle  le  juste  cours. 

La  Hollande ,  qui  voit  du  reste  de  ses  tours  5 

Ses  amis  consternés,  et  sa  fortune  en  fuite, 
N'aspire  qu'à  baiser  la  main  qui  Ta  détruite , 
Et  fait  de  tes  bontés  son  unique  recours. 


1.   «  Jamais  ville ne  fit  d'abord  une  résistance  plus  vigoureuse, 

ni  un  feu  plus  continuel  et  plus  terrible.  On  y  épuisa  de  part  et  d'autre 
toutes  les  finesses  du  métier.  Mais  que  peuvent  la  force  et  l'industrie 
contre  une  armée  de  François  animés  par  la  présence  de  leur  roi? 
Cette  ville  si  bien  défendue ,  mieux  attaquée  encore,  tint  à  peine 
treize  jours.  »  (Racine,  Précis  historique  des  campagnes  de  Louis  XIV ï) 


286  POESIES   DIVERSES. 

Une  clef  qu'on  te  rend  t'ouvre  quatre  provinces  ; 

Tu  ne  prends  qu'une  place,  et  fais  trembler  cent  princes 

De  l'Escaut  jusqu'à  l'Ebre  en  rejaillit  l'effroi. 

Tout  s'alarme;  et  l'Empire  à  tel  point  se  ménage, 
Qu'à  son  aigle  lui-même  il  ferme  le  passage 
Dès  que  son  vol  jaloux  ose  tourner  vers  toi. 


POESIES   DIVERSES  287 


LXXXIII 

AU    ROI  , 

SUR  SA  LIBÉRALITÉ  ENVERS  LES  MARCHANDS  DE  LA  VILLE  DE  PARIS. 

[Traduit  du  latin  de  Santeul.] 

On   lit  dans  les  Mémoires  secrets de    Bachaumont    (tome    V, 

p.  62  et  63)  :  «  Au  commencement  de  1674?  Louis  XIV  fît  demander 
au  corps  de  la  mercerie  un  secours  d'argent.  On  proposa  à  ce  corps 
en  récompense  le  premier  rang  parmi  les  six  corps,  le  droit  de 
donner  tous  les  ans  plusieurs  sujets  au  consulat,  et  l'affranchissement 
d'une  espèce  de  servitude  à  laquelle  son  commerce  étoit  assujetti  de- 
puis quelques  années.     < 

«  Le  corps  chargea  les  gardes  en  charge  '  d'offrir  au  Roi  cinquante 
mille  livres,  et  d'accepter  l'affranchissement  de  la  servitude  du  com- 
merce, mais  de  déclarer  que  content  de  son  rang  entre  les  six  corps 
et  de  l'usage  établi  pour  le  consulat,  il  prioit  qu'il  n'y  fût  rien  changé . 

«  Peu  de  temps  après,  M.  de  Colbèrt  annonça  aux  gardes  en 
charge,  etc.,  que  le  Roi,  content  du  zèle  que  le  corps  avoit  témoigné 
pour  son  service,  leur  rendoit  les  cinquante  mille  livres,  et  leur  don- 
noit  deux  mille  écus  pour  faire  prier  Dieu  pour  Sa  Majesté,  décorer 
leur  chapelle,  et  boire  à  sa  santé. 

<t  En  conséquence,  les  gardes  firent  célébrer  dans  l'église  du  Sé- 
pulchre2  les  prières  de  quarante  heures  pour  S.  M.  et  pour  la  pros- 
périté de  ses  armes.  Cela  se  lit  avec  la  plus  grande  solennité. 

«  Tous  les  jours  il  y  eut  au  bureau  une  table  de  vingt  couverts,  à 
laquelle  dînèrent  les  prélats  qui  avoient  officié  et  les  prêtres  de  leur 

1.  «  On  appelle,  dans  les  six  corps  des  marchands,  les  maîtres 
et  gardes,  ceux  qui  sont  élus  de  ces  corps  pour  être  jurés  et  faire 
observer  par  les  autres  les  statuts  et  règlements  de  chacune  de  ces 
communautés.  0  (Dictionnaire  de  Furetière.) 

2.  L'église  collégiale  du  Sépulcre  était  située  rue  Saint-Martin,  près 
de  la  rue  Saint-Merry. 


288  POESIES   DIVERSES. 

suite.  On  manda  toutes  les  pauvres  familles  des  marchands,  auxquelles 
on  distribua  des  aumônes. 

«  Enfin,  pour  remplir  entièrement  les  vues  du  Roi,  ils  firent  dé- 
corer la  chapelle  des  merciers  par  un  tableau  du  célèbre  le  Brun, 
qui  se  voit  au  retable  du  maître  autel  du  Sépulchre  '. 

«  Le  dernier  jour  des  quarante  heures  on  apprit  que  la  citadelle 
de  Besançon  s'étoit  rendue  le  a 2  mai.  Dans  les  réjouissances  publi- 
ques pour  cet  événement,  on  fit  un  grand  feu  de  joie  devant  la  porte 
du  bureau  et  de  chacun  des  gardes  en  charge ,  chez  lesquels  il  y  eut 
jusqu'à  deux  heures  après  minuit  table  ouverte  pour  les  honnêtes 
gens.  Au  dehors  on  distribua  des  bouteilles  de  vin  à  tous  ceux  qui 
en  voulurent  ;  on  ne  laissoit  passer  personne  sans  le  faire  boire  à  la 
santé  du  Roi.  » 

«  Ces  fêtes  furent  répétées  pour  la  prise  de  Dôle,  rendue  le  6  juin. 
Il  y  eut  de  plus  au  bureau  une  grande  collation,  à  laquelle  M.  le  lieu- 
tenant général  de  police,  M.  le  procureur  du  Roi  et  les  anciens  gardes 
furent  invités. 

a  Pour  transmettre  les  témoignages  publics  de  leurs  sentiments 
pour  S.  M.,  les  marchands  merciers  prièrent  M.  de  Santeuil  de 
faire  un  poème  sur  ce  sujet,  et  M.  Corneille  voulut  bien  le  tra- 
duire. j> 

Le  poème  de  Santeul,  traduit  par  Corneille,  est  l'explication  d'un 
emblème  gravé  par  F.  Chauveau,  et  représentant  un  soleil  qui  résout 
en  pluie  les  vapeurs  qu'il  a  tirées  de  la  terre,  avec  cette  devise  :  Ma- 
gno  cum  fœnore  reddit.  Les  vers  latins,  imprimés  en  1674  dans  le 
format  in-folio,  chez  Pierre  le  Petit,  sont  signés  :  Santolius,  Victori- 
nusj  et  la  traduction  française  qui  les  accompagne  :  P.  Corneille. 
La  bibliothèque  Mazarine  possède  un  exemplaire  de  cette  édition 
sous  la  marque  Gij4>  A9.  On  conserve  à  la  Bibliothèque  impériale 
un  exemplaire  d'une  édition  in-8°  des  mêmes  poèmes,  portant  la  même 
adresse  et  la  même  date,  mais  dans  lequel  ils  sont  tous  deux  ano- 
nymes ;  on  trouve  aussi  dans  le  même  établissement  une  autre  pièce 

1.  a  Le  tableau   qui  représente   la  résurrection  de  Jésus -Christ  est 

un  des  plus  beaux  du  célèbre  le  Brun En  peignant  Jésus-Christ 

sortant  du  tombeau,  il  représenta  Colbert,  le  protecteur  du  commerce 
et  des  arts,  tenant  un  des  coins  du  linceul.  »  (Millin,  Antiquités  natio- 
nales, tome  III,  §  xxvii,  p.  9  et  10.  Eglise  du  Saint-Sépulcre,  dépar- 
tement et  district  de  Paris,  section  des  Lombards .) 


POÉSIES    DIVERSES.  289 

de  même  titre,  de  format  identique,  d'apparence  extérieure  complète- 
ment semblable,  dans  laquelle  le  poëme  de  Santeul,  signé  à  la  fin,  au 
lieu  d'être  suivi  de  la  traduction  de  Corneille,  est  accompagné  en 
regard  de  chaque  page  d'une  traduction  en  vers  français  signée  :  Du 
Perier.  Une  épître  de  ce  traducteur  nous  apprend  qu'il  était  ap- 
puyé par  Santeul,  et  que  ses  vers  avaient  failli  être  choisis  de  préfé- 
rence à  ceux  de  Corneille,  pour  accompagner  la  pièce  latine  dans 
l'édition  officielle  des  merciers  : 

Santeuil,  dont  les  heureux  efforts 
Du  cygne  *  que  le  Mince  éleva  sur  ses  bords 

Imitant  la  voix  plus  qu'humaine, 

Enchantent  les  peuples  de  Seine 

Par  de  mélodieux  accords, 
Si  je  puis,  d'un  accent  aussi  doux  que  sublime, 
Justifier  le  choix  que  tu  fis  de  ma  rime, 
Pour  faire  entendre  à  tes  marchands, 
Si  peu  touchés  de  tes  vers  si  touchants, 

Ce  que  de  ton  roi  magnanime 

Tu  nous  racontes  dans  tes  chants  ; 

Si  cet  admirable  tragique  2 

Dont  on  m'a  préféré  la  voix 

Même  après  l'aveu  de  ton  choix, 

M'entend  d'un  ton  plus  héroïque 

Faire  parler  le  grand  Louis, 

Et  de  ses  combats  inouïs 

Sur  tes  vers  retraçant  l'histoire, 

Les  garantir  de  l'onde  noire, 

Que  mes  sens  seront  réjouis 

D'une  si  fameuse  victoire  ! 
Que  si  Louis  daigne  encor  m'écouter, 

Moi  qui  n'écris  que  pour  la  gloire, 

Savantes  filles  de  Mémoire  , 

Qu'aurai-je  plus  à  souhaiter? 

Les  deux  poëmes  de  Santeul  et  de  Corneille,  recueillis  par  les 
éditeurs  de  Santeul,  en.  1729,  au  tome  I  de  ses  OEuvres  (p.  36-44)»  «** 
par  Granet  en  1738,  dans  les  OEuvres  diverses  (p.  82-91),  furent  réim- 
primés avec  un  grand  luxe  en  17 70,  sous  le  titre  de  Poëme  à  la  louange 
de  Louis  XIV ,  présenté  par  les  gardes  des  marchands  merciers  de  la 
ville  de  Paris.  Cette  édition,  que  nous  n'avons   pu  trouver,  est  pré- 

I.  Virgile.  {Note  de  du  Périer.)  —  2.  Corneille.  (Note  du  même.) 
Corneille,  x  19 


290  POÉSIES    DIVERSES. 

cédée  d'une  ample  notice  historique  qui  raconte,  tout  au  long,  d'après 
le  registre  des  délibérations  du  bureau  de  la  mercerie,  les  faits  que 
nous  venons  de  rapporter  d'après  l'analyse  rédigée  par  Bachaumont 
sous  la  date  du  23  janvier  1770. 

Chantez  y  peuple  * ,  chantez  la  valeur  libérale  7 
La  bonté  de  Louis  à  son  grand  cœur  égale  : 
Du  trône ,  d'où  ses  soins  insultent  les  remparts , 
Forcent  les  bastions ,  brisent  les  boulevarts , 
Il  vous  tend  cette  main  qui  lance  le  tonnerre  ;  5 

Et  quand  vous  lui  portez  des  secours  pour  la  guerre , 
Qu'à  tout  donner  pour  lui  vous  vous  montrez  tous  prêts, 
Il  vous  rend  et  vos  dons  et  d'heureux  intérêts 2 . 

Ainsi  quand  du  soleil  la  course  rayonnante 
Fait  rouler  dans  les  cieux  sa  pompe  dominante ,  1  o 

REGI  , 

PRO  SUA  ERGA   URBIS  MERCATORES  AMPLIORIS  ORDtNIS  MUNIFICENTIA5. 

Non4  frustra  est  tanto  quod  ferveat  undique  plausu 
Urbs  omnis,  Isetique  novum  per  compita  cives 
Festum  agitent  :  solio  nuper  vos  magnus  ab  alto 
Respexit  Lodoicus,  et  inter  Martia  signa 
Nunc  bellator,  opes  castris  Martique  dicatas, 
Quas  ultro  fertis,  magno  cum  foenore  reddix. 

Sic  ubi  sidereos  lustrât  sol  aureus  orbes, 
Cœlestesque  plagas  et  lucida  régna  pererrat, 

1.  Peuple  est  ici  au  singulier,  mais  il  est  au  pluriel  dans  le  vers  3o. 

2.  Traduction  de  la  devise  qui  surmonte  l'emblème,  et  qui  est  tex- 
tuellement répétée  et  imprimée  en  capitales  en  deux  endroits  du  texte 
de  Santeul,  où  l'on  trouve  aussi  imprimés  en  capitales  ces  mots  qui 
expriment  encore  la  même  idée  :  Meliori  mtjnere  ditat. 

3.  Ainsi  dans  l'édition  in-folio;  toutes  les  autres  éditions  portent  : 
Régis, pro,  etc....  encomium,à  l'exception  des  Œuvres  de  Santeul, où  on 
lit  :  R?gi,  pro,  etc....  encomium. 

4.  Dans  l'édition  in-folio  la  lettre  qui  commence  ce  mot  est  une 
initiale  ornée  traversée  d'une  balance  avec  cette  devise:  JEquum  sequa 
probat. 


POÉSIES    DIVERSES.  291 

Qu'en  maître  souverain  de  ce  brillant  séjour 
Il  règle  les  saisons  et  dispense  le  jour, 
Il  ne  dédaigne  point  d'épandre  ses  lumières 
Sur  les  sables  déserts  et  les  tristes  bruyères , 
Et  sans  que  pour  régner  il  veuille  aucun  appui ,  1  5 

Il  aime  à  voir  l'amour  que  la  terre  a  pour  lui  : 
La  terre  qui  l'adore  exhale  des  nuages 
Qui  du  milieu  des  airs  lui  rendent  ses  hommages; 
Mais  il  n'attire  à  lui  cette  semence  d'eaux 
Que  pour  la  distiller  en  de  féconds  ruisseaux ,  2  o 

Et  de  tous  les  présents  que  lui  fait  la  nature 
Il  n'en  reçoit  aucun  sans  rendre  avec  usure. 
O  vous,  célèbre  corps ,  à  qui  de  l'univers 
Tous  les  bords  sont  connus  et  tous  les  ports  ouverts  *  ; 
Vous  par  qui  les  trésors  des  plus  heureuses  plages 
Viennent  de  notre  France  enrichir  les  rivages , 

Nil  telluris  egens,  patrio  cum  solus  Olympo 
Jam  valeat  sese  asserere,  et  regnare  per  astra, 
Ille  tamen  stériles  non  dedignatur  arenas 
Respicere,  et  campos  radiis  recreare  jacentes  ; 
Quod  si  forte  novo  tellus  afflata  calore 
In  tenuem  exhalet  nebulam,  imbriferumque  vaporem 
(Grata  quidem,  supero  sed  inania  munera  soli), 
Excipit  hune  primum,  radioque  humente  tepentis 
Semina  cogit  aquœ,  nutritque,  fovetque  propinquam 
Desuper  irradians  nubem  ;  quam  deinde  refundit 
Prodigus,  et  terras  meltori  munere  ditat. 

O  fortunati  tanto  sub  principe  cives  ! 
Optima  pars  urbis,  gemino  gens  nota  sub  axe, 
Quorum  nominibus  sese  ultima  littora,  et  omnes 
Undique  se  portus,  sese  maria  omnia  paudunt , 

1 .  Traduction  de  ces  mots  du  poëme  de  Santeul  :  gemino  gens  nota 
sub  axe,  qui  sont  la  reproduction  textuelle  de  la  devise  du  corps  des 
merciers,  dont  l'écusson  est  gravé  à  la  fin  des  vers  de  Corneille  dans 
l'édition  in-folio. 


292  POÉSIES    DIVERSES. 

Oyez  ce  qu'au  milieu  du  bruit  de  cent  canons 

Votre  grand  Roi  prononce  en  faveur  de  vos  dons, 

Ce  qu'en  votre  faveur  la  Muse  me  révèle: 

«  Peuples ,  dit  ce  héros ,  je  connois  votre  zèle,  3o 

J'en  aime  les  efforts,  et  dans  tout  l'avenir 

J'en  saurai  conserver  l'amoureux  souvenir. 

Vous  n'avez  que  trop  vu  ce  qu'ose  l'Allemagne , 

Ce  que  fait  la  Hollande  ,  et  qu'a  tramé  l'Espagne , 

Ce  que  leur  union  attente  contre  moi.  3  5 

Plus  l'attentat  est  grand  ,  plus  grande  est  votre  foi, 

Et  vous  n'attendez  point  que  je  vous  fasse  dire 

Comme  il  faut  soutenir  ma  gloire  et  mon  empire  : 

Vous  courez  au-devant ,  et  prodiguez  vos  biens 

Pour  en  mettre  en  mes  mains  les  plus  aisés  moyens.     40 

C'est  votre  seul  devoir  qui  pour  moi  s'intéresse  , 

C'est  votre  pur  amour  qui  pour  moi  vous  en  presse  : 

Je  le  vois  avec  joie.  »  A  ces  mots  ce  vainqueur, 

Sur  son  peuple  en  vrai  père  épanchant  son  grand  cœur, 

Per  vos,  dicam  equidem,  spoliis  Orientis  onusta, 
Barbaricisque  superba  opibur.,  jam  Gallica  puppis 
Post  tôt  vota  redux  Francis  allabitur  oris. 
Hue  omnes,  bue  ferte  pedem  :  Rex  ipse,  tubarum 
Clangores  inter  medios  bellique  tumultus  , 
Alloquitur;  vos  o  memores  mihi  dicite  Musse, 
Vos,  audistis  enim,  regales  dicite  vati 
Affatus  :  a  Vestri  non  muneris  immemor,  inquit, 
O  cives,  dum  saevit  atrox  conjunctus  Ibero 
Germanus,  Batavique  traces  sua  fœdera  jactant  ; 
Pro  décore  imperii,  pro  majestate  tuenda, 
Omnes  thesauros,  omnes  effundere  gazas, 
Certatim  vobis  fuit  omnibus  una  voluntas, 
Idem  animus  :  sensus  agnosco  hoc  munere  vestros. 
Hoc  vestrum  officium  velit,  et  mea  gloria  poscat. 
Muneris  id  quodeumque,  et  vestri  pignus  amoris 
Accipio  lsetus.  »  Régis  quam  provida  cura  ! 


POÉSIES   DIVERSES.  29^ 

Fait  prendre  ces  présents1,  qu'un  léger  intervalle  4  5 

Renvoie  accompagnés  de  sa  bonté  royale. 

«  C'est  assez,  poursuit-il,  d'avoir  vu  votre  amour; 

La  tendresse  du  mien  veut  agir  à  son  tour. 

Pour  rendre  cette  guerre  à  ses  auteurs  funeste, 

Sujets  dignes  de  moi ,  j'ai  des  trésors  de  reste;  5o 

J'en  ai  de  plus  sûrs  même  et  de  beaucoup  plus  grands 

Que  ceux  que  vous  m'offrez ,  que  ceux  que  je  vous  rends: 

J'ai  le  fond  de  vos  cœurs ,  et  c'est  de  quoi  suffire 

Aux  plus  rares  exploits  où  mon  courage  aspire  : 

C'est  aux  ordres  d'un  roi  ce  qui  donne  le  poids;  5  5 

C'est  là  qu'est  le  trésor,  qu'est  la  force  des  rois. 

Reprenez  ces  présents  dont  l'offre  m'est  si  chère  : 

Si  je  les  ai  reçus,  c'est  en  dépositaire, 

Et  je  saurai  sans  eux  dissiper  les  complots 

Ille  quidetn,  secum  belli  dum  fata  volutat, 
Urbis  amore  suœ  victus,  pectusque  paternum 
In  populum  accipiens,  Colberto  credidit  ingens 
Jamjam  pensandum  regali  munere  munus. 
Depositum  vocat:  «  Hac  dextra,  his  victricibus  armis 
Bellandum  est,  inquit;  sat  erit  mihi  Martia  virtus 
Qua  conjuratas  triplici  sub  fœdere  gentes 
Protinus  abrumpam,  meque  in  mea  jura  reponam. 
Quas  populus  sibi  quserit  opes,  qua  s  anxia  cura, 
Et  quas  mille  artes,  terraque  marique  petitas, 
Accumulant,  vester,  tanti  in  dispendia  belli, 


1 .  Il  est  dit  dans  les  vers  latins  imités  par  Corneille  que  le  Roi 
confia  ces  présents  à  Colbert;  et  une  note  de  l'édition  de  Santeul,  de 
1729,  fait  remarquer  qu'il  s'agit  de  Charles  Colbert,  marquis  de 
Croissy,  qui  était  frère  du  célèbre  Colbert,  et  qui  fut  ministre  et  se- 
crétaire d'Etat  en  1679.  Le  nom  de  Colbert  se  trouve  plus  loin,  et 
cette  fois  dans  Corneille  (vers  78)  aussi  bien  que  dans  Santeul;  là  les 
qualifications  qui  l'accompagnent  ne  peuvent  guère  convenir,  ce  nous 
semble,  qu'au  grand  Colbert  (Jean-Baptiste),  contrôleur  général  des 
finances. 


294  POÉSIES    DIVERSES. 

Que  la  triple  alliance1  oppose  à  mon  repos.  60 

Ce  fruit  de  vos  travaux  destiné  pour  la  guerre, 
Ces  tributs  que  vous  font  et  la  mer  et  la  terre , 
Votre  amour,  votre  ardeur  à  servir  mes  desseins, 
Les  rend  assez  à  moi  tant  qu'ils  sont  en  vos  mains. 
Mes  troupes,  par  moi-même  au  péril  animées,  6  5 

Renverseront  sans  eux  les  murs  et  les  armées  : 
J'en  ai  la  certitude;  et  de  vous  je  ne  veux 
Aucun  autre  secours  que  celui  de  vos  vœux. 
Offrez-les  sans  relâche  au  grand  dieu  des  batailles , 
Tandis  que  mes  canons  foudroieront  les  murailles,       70 
Et  devant  ses  autels ,  prosternés  à  genoux , 
Invoquez-le  pour  moi2,  je  combattrai  pour  vous.  » 
Là  se  tait  le  monarque ,  et  sûr  de  ses  conquêtes , 
Aux  triomphes  nouveaux  il  tient  ses  armes  prêtes. 
Cet  éclat  surprenant  de  magnanimité  7  5 

Par  la  nymphe  à  cent  voix  3  en  tous  lieux  est  porté. 
Que  de  ravissements  suivent  cette  nouvelle  ! 

Communes  mihi  fecit  amor  :  jam  ponite  curas, 
Quae  populos,  eadem  reges  opulentia  ditat. 
Unum  oro  :  dum  me  implicitum  fera  bella  tenebunt, 
Multa  implorantes  suspensi  hserebitis  aris  ; 
Ille  deus  bellorum,  unus  qui  praesidet  armis, 
Hostiles  deus  ille  dabit  perrumpere  turmas.  » 

Conticuit,  rigidisque  héros  se  involvit  in  armis, 
Securus  fatorum,  et  jam  prœnuncia  fama 
Ibat  per  populos,  et  splendida  munera  Régis 
Vulgabat;  lœtis  cives  rumoribus  acti 
Confusos  urbis  strepitus  prona  aure  bibebant, 
Cum  pulchro  accensus  patrise  Colbertus  amore, 


1.  L'empereur  d'Allemagne   et   le   roi   d'Espagne   s'étaient   alliés 
contre  la  France  avec  la  Hollande  au  mois  d'août  1673. 
1 .  Voyez  la  notice  en  tête  de  cette  pièce. 
3.  La  Renommée. 


POESIES   DIVERSES.  29$ 

Colbert  y  met  le  comble  en  ministre  fidèle  : 

Ce  grand  homme ,  sous  lui  maître  de  ses  trésors , 

Mande  par  ordre  exprès  ce  grand  et  nombreux  corps,  80 

Le  force  d'admirer  des  bontés  sans  mesure , 

Et  remet  en  ses  mains  ces  dons  avec  usure. 

De  là  ces  doux  transports ,  ces  prompts  frémissements 
Qui  poussent  jusqu'au  ciel  mille  applaudissements, 
Ces  vœux  si  redoublés  qui  hâtent  sa  victoire ,  8  5 

Ces  titres  par  avance  élevés  à  sa  gloire  * . 
On  voit  Paris  en  foule  accourir  aux  autels , 
Implorer  le  grand  Maître  et  tous  les  Immortels  : 
Ses  temples  sont  ornés  ;  des  lumières  sans  nombre 
Y  redoublent  le  jour,  y  font  des  nuits  sans  ombre.      90 

Colbertus,  gaz»  cui  crédita  cura  tuendae, 
Conscius  ingentis  facti  (sic  jussa  ferebant) , 
Congestas  tôt  opes  populorum  inopinaque  dona, 
Ingens  depositum,  magno  cum  foenore  reddit. 

Hinc  subiti  plausus,  hinc  publica  gaudia  vulgi, 
Undique  lsetitise  fremitus,  votisque  triumphos 
Accélérant  victoris,  et  amplam  inscribere  certant 
Nobilibus  titulis  et  belli  insignibus  urbem. 
Templa  adeunt,  onerantque  aras  et  fronde  coronant. 
Aspiceres  populos  concursu  accedere  magno, 
Et  manibus  passis  omnes  exposcere  divos, 
Omnes  cœlicolas  :  appensi  altaribus  ignés 
Dant  lucem  late,  et  largo  loca  lumine  complent. 
Ipse  aderat  mitra  effulgens,  et  vestibus  aureus, 
Longe  omnes  supra,  média  inter  vota  sacerdos  : 
Hic  ille  est  magnis  quem  Rex  prœfecerat  aris 

i.  Il  s'agit  sans  doute  dans  ce  vers   des  inscriptions  improvisées 
dans  les  réjouissances  dont  a  parlé  Bachaumont.  Du  Périer  dit  ici  : 

Et  d'une  sainte  ardeur  nos  muses  échauffées 

Sur  plus  d'un  arc  pompeux  vont  graver  ses  trophées. 

L'inscription  de  la  porte  Saint-Martin,  qui  fait  face  à  la  rue  Saint- 
Martin,  est  relative  aux  victoires  de  1674. 


296  POESIES   DIVERSES. 

Son  prélat1  donne  l'ordre,  et  par  un  saint  emploi 
Répond  aux  dignités  dont  l'honore  son  roi. 

L'effet  suit  tant  de  vœux  :  les  plus  puissantes  villes 
Semblent  n'avoir  pour  nous  que  des  remparts  fragiles  ; 
On  les  perce ,  on  les  brise ,  on  écrase  leurs  forts 2 :        9  fi 
Il  y  pleut  mille  feux ,  il  y  pleut  mille  morts. 
Les  fleuves,  les  rochers  ne  sont  que  vains  obstacles; 
Notre  camp  à  toute  heure  est  fertile  en  miracles  ; 
Et  l'exemple  d'un  roi  qui  se  mêle  aux  dangers , 
Enflant  le  cœur  aux  siens,  l'abat  aux  étrangers.  100 

Bezançon  voit  bientôt  sa  citadelle  en  poudre3; 
Dole  avertit  Salins4  de  ce  que  peut  sa  foudre; 

Rarl-eus,  titulisque  novis,  et  honoribus  auctus. 

Audivere  omnes  superi,  qui  prsesidet  armis 
Audiit  ipse  Pater,  dexter  jam  vota  secundat. 
Ecce  ruunt  magnae  concussis  mœnibus  urbes, 
Rumpunturque  obices  :  de  collibus  intonat  altis 
Mille  neces  et  mille  ferens  incendia  fulmen. 
Luctus  ubique  et  ubique  fragor  :  jam  gallica  castra 
Montis  inaccessas  prœruptis  rupibus  arces 
Invadunt,  Rex  ipse  subit  discrimina  Martis. 
Unde  pavor  victis,  victoribus  inde  furores. 
Jam  superant  fossas,  non  agger  ab  aggere  tutus, 
Non  juga,  non  amnes,  non  propugnacula  tardant. 
Obstupuere  cavis  maie  tuti  turribus  hostes, 
Suppliciter  tenduntque  manus,  veniamque  precati 
Disjectis  gaudent  victorem  admittere  mûris. 
I,  nunc  antiquas  jacta,  Vesontio,  turres, 
Et  tua  nequicquam  celsœ  capita  ardua  rupis, 
Et  GrjEum,  et  Dolam,  et  salibus  loca  fœta  Salinas, 

1.  François  de  Harlay,  dont  il  est  parlé  au  tome  VIII,  p.  3.  Il  fut 
d'abord  archevêque  de  Rouen,  puis  archevêque  de  Paris  de  1671  à  1695. 

2.  «  Les  forts,  »  dans  les  OEuvres  diverses  de  1738  et  dans  les  édi- 
tions suivantes. 

3.  Besançon  se  rendit  au  Roi  le  i5  mai  1674. 

4.  Dôle  se  rendit  au  Roi   le  i\  juin,  et  Salins   fut  pris  le  au  du 


POÉSIES   DIVERSES  297 

Et  toute  la  Comté,  pour  la  seconde  fois1, 
Rentre  sous  l1  heureux  joug  du  plus  juste  des  rois. 
Mais  ce  n'est  encor  rien  ;  et  tant  de  murs  par  terre      i  o  5 
N'étalent  aux  regards  que  l'essai  d'une  guerre 
Où  le  manque  de  foi ,  qu'il  commence  à  punir, 
Voit  le  prélude  affreux  d'un  plus  rude  avenir. 
Généreux  citoyens  de  cette  immense  ville , 
A  qui  par  ce  grand  roi  tout  commerce  est  facile  ,         no 
Vous  qui  ne  trouvez  point  de  bords  si  peu  connus 
Où  son  illustre  nom  ne  vous  ait  prévenus, 
Si  vous  n'exposez  point  de  sang  pour  sa  victoire , 
Vos  cœurs,  vos  dons,  vos  vœux  ont  du  moins  cette  gloire 
Que  votre  exemple  montre  au  reste  des  sujets 
Comme  il  faut  d'un  tel  prince  appuyer  les  projets. 
Plus  à  ses  ennemis  il  fait  craindre  ses  armes, 

Et  bis  capta  tuas  jacta,  Burgundia,  vires. 
Exigua  ingentis  sunt  hsec  prseludia  belli. 

Felices  populi,  régi  jam  plaudite  vestro, 
Vosque  parisiaci  nova  per  commercia  cives, 
Quo  victor  pénétrât  fama  et  velocibus  armis, 
Ultra  Indos,  Arabesque,  et  arenivagos  Garamantas, 
Quo  vos,  ingentem  benefacti  extendite  famam. 
Nec  vos  officio  pigeât  certasse  priores  : 
Si  belli  expertes  non  diro  occurritis  hosti, 
Saltem  animis,  vestrisque  opibus,  votisque  favetis. 
Hostibus  incussit  terrorem  armatus,  inermis 
Conciliare  animos,  vos  devincire  merendo 
Gestiet,  et  bello  quondam  perfunctus  et  armis 
Ditabit  populos,  defendet  legibus  urbes, 

même  mois  par  la  Feuillade.  Gray,  dont  Corneille  ne  dit  rien,  mais 
dont  il  est  question  dans  les  vers  de  Santeul  et  dans  ceux  de  du  Pé- 
rier,  avait  été  pris  par  le  duc   de  Navailles  le  28  février. 

1.  La  Franche -Comté,  conquise  une  première  fois,  par  le  Roi  eu 
personne,  au  commencement  de  1668,  avait  été  rendue  la  même 
année,  à  la  paix  d'Aix-la-Chapelle. 


120 


298  POÉSIES    DIVERSES. 

Plus  la  paix  qu'il  souhaite  aura  pour  vous  de  charmes. 

Ce  sera ,  peuple  ,  alors  que  par  d'autres  vertus 

Ses  lois  triompheront  des  vices  abattus; 

Chaque  jour,  chaque  instant  lui  fournira  matière 

A  déployer  sur  vous  sa  bonté  toute  entière  ; 

Les  malheurs  que  la  guerre  aura  trop  fait  durer, 

Cette  même  bonté  saura  les  réparer. 

Pour  augure  certain ,  pour  assuré  présage ,  125 

Dans  ces  dons  qu'il  vous  rend  il  vous  en  donne  un  gage  ; 

Et  si  jamais  le  ciel  remplit  ce  doux  souhait, 

Vous  voyez  son  amour,  vous  en  verrez  l'effet. 

Présenté  par  les  gardes  des  marchands  de  la  ville  de  Paris. 

Et  res  afflictas  per  tôt  discrimina  belli 
Restituet  bonus,  et  fata  ad  meliora  vocabit  : 
Hœc  certa  auguria,  et  longae  laeta  omina  pacis 
Augustus  Princeps  augusto  hoc  munere  firmat. 

Santouus,   Victorlnus. 

Offerebant  amplioris  Mercaturae  Praefecti  et  Custodes. 


POÉSIES   DIVERSES.  299 


LXXXIV 

A.U     ROI , 

SUR    SON    DÉPART    POUR    LARMÉE ,    EN    1 676  ' . 

L'édition  originale  de  cette  pièce  n'est  point  signée.  Elle  forme 
quatre  pages  in~4°,  imprimées  en  italique  avec  fleurons  et  lettres 
ornées  ;  à  la  suite  vient  la  pièce  latine  signée  :  Johannes  Lucas  ,  So- 
cietatïs  Jesu2,  dont  celle-ci  est  imitée  et  que  nous  reproduisons  au 
bas  des  pages;  elle  est  aussi  de  quatre  pages  et  est  imprimée  en  ca- 
ractères romains;  elle  porte  à  la  fin  l'adresse  suivante  :  Ex  offîci/ia 
Simonis  Benard,  via  jacobsea.  On  trouve  un  exemplaire  de  cette  édi- 
tion à  la  Bibliothèque  impériale,  département  des  imprimés,  Recueil 
Thoisy,  matières  historiques ,  in-folio,  tomeX.  Granet  a  publié  ces  deux 
pièces  dans  les  OEuvres  diverses,  p.  92-96. 

Le  printemps  a  changé  la  face  de  la  terre  ; 

Il  ramène  avec  lui  la  saison  de  la  guerre , 

Et  nos  champs  reverdis  font  renaître ,  grand  Roi , 

REGI, 
AD    EXERCITUM    INEUNTE    VERE    PROFICÏSCENTI,    ODE. 

Frugiferis  rediere  sua  vice  gramina  campis, 
Dudumque  fixa  postibus 
Deripere  arma  jubet 

1.  Le  Roi  partit  de  Saint-Germain,  pour  aller  commander  l'ar- 
mée de  Flandre,  le  16  avril  1676. 

2.  Le  P.  Lucas  était  né  en  i65o,  dans  la  province  de  Normandie. 
Il  professa  la  rhétorique,  puis  la  théologie  au  collège  Louis-le-Grand. 
On  a  imprimé  de  lui,  outre  cette  ode  imitée  par  Corneille  et  des 
discours  latins,  un  poème  en  deux  livres,  intitulé  :  Actio  oratoria  seu 
de  gestu  et  voce  (1675),  qui  fait  partie  des  Poemata  didascalica  publiés 
par  le  P.  Oudin. 


3oo  POÉSIES    DIVERSES. 

En  ton  cœur  martial  des  soins  clignes  de  toi. 

La  trompette  a  sonné  :  ton  armée  intrépide,  5 

Prête  à  marcher,  te  demande  pour  guide, 
Et  tous  ses  escadrons ,  sur  ta  frontière  épars , 
Ambitionnent  tes  regards. 

Joins  ta  présence  et  tes  destins  propices 
Au  zèle  impatient  qui  presse  leurs  efforts  \  i  o 

Daigne  servir  de  tête  et  d'âme  à  ce  grand  corps , 

Et  sous  tes  illustres  auspices 
Ses  bras  feront  pleuvoir  d'inévitables  morts. 
Que  je  plains  votre  aveugle  et  folle  confiance, 
Obstinés  ennemis  de  nos  plus  doux  souhaits ,  i  5 

Qu'enorgueillit  une  triple  alliance1 
Jusques  à  dédaigner  les  bontés  de  la  France! 
Que  de  pleurs,  que  de  sang,  que  de  cuisants  regrets 

Vous  va  coûter  ce  refus  de  la  paix  ! 

Ver,  bona  tempestas  bello.  Nunc,  maxime  regum, 
Permitte  dignis  pectora 
Sollic  itudinibus . 
Ut  litui  strepuere,  coït  procul  excita  pubes, 
Audere  quidlibet  ferox, 
Auspice  te,  duce  te. 
Posceris  :  en  pendent  centum  tibi  mille  tuorum 
Exsertae  in  ictus  dexterse. 
His  caput,  his  animam, 
Fortunamque  tuam,  et  présentes  adjice  divos. 
Ades,  volabunt  ilicet 
Tela  ministra  necis, 
Grandinis  in  morem  ;  et  nutus  haud  tarda  regentis 
Audire,  quod  minaberis 
Cumque,  simul  ferient. 
O  multum  nobis  dolituri  pace  negata, 
Nunc  insolentes  Austrii 

I.  Celle  de  l'Empire,  de  l'Espagne  et  de  la  Hollande  :  voyez  ci- 
dessus,  p.  294,  note  1. 


POESIES    DIVERSES.  toi 

Son  vengeur  à  partir  s'apprête,  20 

Cent  lauriers  lui  ceignent  la  tête  , 
Cent  lauriers  que  sa  main  elle-même  a  cueillis 
Sur  autant  de  vos  murs  foudroyés  par  ses  lis. 
Bellone ,  qui  l'attend  au  sortir  de  son  Louvre , 
Veut  tracer  à  ses  pas  la  carrière  qu'elle  ouvre  :  2  5 

Son  zèle ,  impatient  d'arborer  ce  grand  nom , 
Pour  conduire  son  char  s'empare  du  timon. 
D'un  prompt  et  sûr  triomphe  écoutez  le  prélude, 

Et  par  quels  vœux  poussés  tous  à  la  fois 
De  ses  heureux  sujets  la  noble  inquiétude  3<> 

Hâte  ses  glorieux  exploits. 
«  Pars,  grand  Monarque,  et  vole  aux  justes  avantages 
Que  te  promet  l'ardeur  de  tant  de  grands  courages  :  » 

C'est  ce  que  dit  toute  sa  cour. 
«  Pars,  grand  Monarque,  et  vole  aux  conquêtes  nouvelles 
Dont  te  répond  l'amour  de  tant  de  cœurs  fidèles  s  » 

Fœdere  tergemino, 
Mox  aderit  vindex.  Olli  pro  casside  laurus, 
Centena  quam  nuper  dabant 
Oppida  capta  manu. 
Non  ut  Threïeio  tunica  est  adamantina  Marti  : 
Hune  una  magnse  protegit 
Martia  vis  anima?. 
Nulla  mora  est  :  addicta  tibi,  Lodoice,  jugales 
Bellona  jungit  igneos 
Ante  fores  Luparae  ; 
Teque  jubet  medio  sublimem  insistere  curru  ; 
Et  ambit  aurigae  locum  , 
Ce  d  ère  lœta  suo. 
Jam  tenso  temone  rotae  crepat  orbita  primae  : 
«  I,  perge,  terror  Austriae, 
Praesidiumque  tuis  :  » 
Clamât  venturis  praeludens  aula  triumphis. 
«  I,  perge,  sed  nostri  memor, 
Ut  citius  redeas  :  » 


302  poésies  DIVERSES. 

C'est  ce  que  dit  tout  Paris  à  son  tour. 
Il  part,  et  la  Frayeur,  chez  les  siens  inconnue, 
Annonce  en  même  temps  parmi  vous  sa  venue. 
La  Victoire  le  suit  dans  une  majesté  40 

Dont  l'inexorable  fierté 

Semble  du  ciel  autorisée 
A  venger  le  mépris  d'une  paix  refusée 

Avec  tant  de  témérité  ; 

Et  commençant  par  un  miracle ,  4  5 

Bellone  fait  partout  retentir  cet  oracle  : 
«  Ennemis  de  la  paix ,  vous  la  voudrez  trop  tard  : 
Le  ciel  ne  peut  aimer  ceux  qui  troublent  la  terre  ; 

Et  je  vous  le  dis  de  sa  part , 
La  guerre  punira  ceux  qui  veulent  la  guerre.  »  5o 

L'Anglois  avec  chaleur  souscrit  à  cet  arrêt  ; 
Au  belliqueux  Suédois  également  il  plaît  ; 
Le  Danois  en  frémit,  Brandebourg  s'en  alarme1  ; 

Aulse  non  unquam  discors  Lutetia  clamât. 
Haec  inter,  Euris  ocior 
Per  tremefacta  sola 
It  currus;  Pavor  antevolat  ;  Victoria,  pacis 
Ultura  contemptum  decus, 
Pone  fremens  sequitur. 
Quaque  via  est,  Bellona  truci  sic  intonat  ore  : 
«  Belli  ferent  dispendia 
Quos  fera  bella  juvant  ; 
Et  foedus  sanxisse  volent.  »  Laetum  accipit  oinen 
Sequester  Anglus  fœderis  ; 
Accipit  Hermioni 
Et  levibus  Danis  infensa  Suecia  ;  miles 

1.  C'était  par  la  médiation  de  Charles  II,  roi  d'Angleterre,  que  les 
lentes  négociations  de  Nimègue  s'étaient  ouvertes  en  1675.  Char- 
les XI,  roi  de  Suède,  allié  de  Louis  XIV,  combattait  contre  les  Da- 
nois, unis  aux  Hollandais,  et  avait  envoyé  Tannée  précédente  (1675) 
une  armée  dans  le  Brandebourg,  dont  l'Electeur,  rompant  le  traité 


POÉSIES    DIVERSES.  3o3 

Et  pour  nos  François  c'est  un  charme 
Qui  laisse  leur  esprit  d'autant  plus  satisfait  5  5 

Que  c'est  à  leur  valeur  d'en  faire  voir  l'effet. 
Déjà  le  Rhin  pâlit ,  la  Meuse  s'épouvante  ; 
Et  l'Escaut,  dont  le  front  jaune  et  cicatrisé 
Porte  empreints  les  grands  coups  dont  il  s'est  vu  brisé , 
Craint  une  plaie  encor  plus  étonnante,  60 

Et  cache  au  plus  creux  de  ses  eaux 

Sa  tête  de  nouveau  tremblante 

Pour  le  reste  de  ses  roseaux. 

Hoc  noster  omen  accipit, 
Quod  dabit  ipse  ratum. 
Et  jain  Mosa  tremit,  jain  pallet  Rhenus,  et  alto, 
Qua  parte  nec  noster  fluit, 
Gurgite  Scaldis  amat 
Occuluisse  caput,  non  uno  vulnere  quassum  , 
Et  ante  vulsis  haud  semel 
Depile  arundinibus. 

qu'il  avait  conclu  avec  Turenne  en  1673,  s'était  de  nouveau,  dès  1674, 
déclaré  contre  la  France. 


*o4  POESIES   DIVERSES. 


LXXXV 

VERS    PRÉSENTÉS    AU    ROI 

SUR    SA    CAMPAGNE    DE    1676. 

Granet,  dans  les  OEuvres  diverses,  p.  97,  dit  que  ces  vers  furent 
imprimés  la  même  année  (1676),  dans  le  format  in-  4°,  chez  Guil- 
laume de  Luyne. 

Ennemis  de  mon  roi,  Flandre,  Espagne,  Allemagne, 
Qui  croyiez  que  Bouchain  dût  finir  sa  campagne1, 
Et  n'avanciez  vers  lui  que  pour  voir  comme  il  faut 
Régler  Tordre  d'un  siège  ou  livrer  un  assaut , 
Ne  vous  fatiguez  plus  d'études  inutiles  5 

A  prendre  ses  leçons  quand  il  vous  prend  des  villes  ; 
N'y  perdez  plus  de  temps  :  ses  François  aujourd'hui 
Sont  les  disciples  seuls  qui  soient  dignes  de  lui, 
Et  nul  autre  n'a  droit  à  ces  nobles  audaces 
D'embrasser  son  exemple  et  marcher  sur  ses  traces.     10 

Lassés  de  toujours  perdre,  et  fiers  de  son  retour2, 
Vous  vous  étiez  promis  de  vaincre  à  votre  tour  ; 
Vous  aviez  espéré  de  voir  par  son  absence 
Nos  troupes  sans  vigueur,  et  nos  murs  sans  défense  , 
Mais  vous  n'aviez  pas  su  qu'un  courage  si  grand  i  5 

De  loin  comme  de  près  sur  les  siens  se  répand  ; 
De  loin  comme  de  près  sa  prudence  les  guide  ; 
De  loin  comme  de  près  son  destin  y  préside. 

i.   Bouchain  fut  pris  par  xYIonsieur,  frère  du  Roi,  le  n  mai  1676. 

2.  Le  Roi  était  revenu  à  Saint-Germain  le  8  juillet  1676.  Nous 
avons  dit  plus  haut  (p.  299,  note  1)  qu'il  en  était  parti,  pour  aller  en 
Flandre,  le  16  avril. 


POESIES   DIVERSES.  3o5 

Les  rois  savent  agir  tout  autrement  que  nous  : 

Souvent  sans  être  en  vue  ils  frappent  les  grands  coups.  2  o 

Dieu  lui-même,  ce  Dieu  dont  ils  sont  les  images, 

De  son  trône  en  repos  fait  partir  les  orages, 

Et  jouit  dans  le  ciel  de  sa  gloire  et  de  soi , 

Tandis  que  sur  la  terre  il  remplit  tout  d'effroi. 

Mon  prince  en  use  ainsi  :  ses  fêtes  de  Versailles  *         2  5 

Lui  servent  de  prélude  à  gagner  des  batailles, 

Et  d'un  plaisir  pompeux  l'éclat  rejaillissant 

Dissipe  vos  projets  en  le  divertissant. 

Muses,  l'aviez-vous  cru,  vous  qui  faites  les  vaines 
De  prévoir  l'avenir  des  fortunes  humaines,  3o 

D'en  percer  le  plus  sombre  et  le  plus  épineux  ? 
Aviez-vous  deviné  que  ce  parc  lumineux, 
Ces  belles  nuits  sans  ombre,  avec  leurs  jours  d'applique2, 
Préparoient  à  vos  chants  un  objet  héroïque  ? 


1 .  Il  existe  une  relation  fort  détaillée  de  ces  fêtes  sous  le  titre  sui- 
vant :  les  Divertissemens  de  Versailles  donnez  par  le  Roy  à  toute  sa 
Cour,  au  retour  de  la  conqueste  de  la  Franche- Comté,  en  l'année  i6j4> 
aux  pages  3qi-458  d'un  Recueil  de  descriptions  de  peintures  et  d^autres 
ouvrages  faits  pour  le  Roy  (par  Félibien),  à  Paris ,  chez  la  veuve 
Sébastien  Mabre-Cramoisy,  M  DCLXXXIX,  in-12.  Celte  relation 
est  divisée  en  six  journées,  comprenant  les  4?  n?  19  et  28  juillet  et 
les  18  et  3i  août  1674*  Les  cinq  premières  journées  se  terminèrent 
par  des  représentations  dramatiques,  dans  lesquelles  on  joua,  entre 
autres  ouvrages,  VAlceste  de  Quinault,  le  Malade  imaginaire  de  Mo- 
lière, et  Ylphigénie  de  Racine;  le  18  août  il  y  eut  après  le  spectacle 
un  grand  feu  d'artifice  sur  le  canal;  enfin  le  3i  août  le  sieur  Viga- 
rani  en  illumina  tous  les  bords.  «  Ce  qui  donnoit  tant  de  jour  à  ces 
superbes  décorations  pendant  une  nuit  si  obscure,  dit  Félibien,  c'est 
qu'il  y  avoit  plus  de  vingt  mille  lumières,  sans  compter  plus  de  quatre 
mille  autres  feux  qui  éclairoient  les  fontaines  et  les  parterres  du  petit 
parc.  s  (Page  458.) 

2.  On  appelle  applique  tout  ouvrage  par  lequel  on  applique,  on 
enchâsse  une  chose  sur  une  autre.  «  Les  jours  d'applique  »  sont  des 
jours  artificiels  produits  par  des  appareils  d'illumination.  Voyez  le 
Lexique, 

COKNEIIXE.    X  20 


3o6  POESIES   DIVERSES. 

Dans  ces  délassements  où  tant  d'art  a  paru ,  3  5 

Voyez-vous  Aire  prise1,  et  Mastricht  secouru? 

C'étoit  là  toutefois,  c'étoit  1  heureuse  suite 

Qu'y  destinoit  dès  lors  son  auguste  conduite. 

Dans  ce  brillant  amas  de  feux  et  de  beautés, 

Sa  grande  àme  s'ouvroit  à  ses  propres  clartés  :  4  o 

Au  milieu  de  sa  cour  au  spectacle  empressée, 

La  guerre  s'emparoit  de  toute  sa  pensée  ; 

Et  ce  qui  ne  sembloit  que  nous  illuminer 

Lui  montroit  des  remparts  ailleurs  à  fulminer. 

J'en  prends  Aire  à  témoin,  et  les  mers  de  Sicile2,         45 

L'esprit  de  liberté  qui  règne  en  toute  l'île, 

L'âme  du  grand  Ruiter,  et  ses  vaisseaux  froisses , 

Sous  l'abri  de  Sardaigne  à  peine  ramassés  *. 

Votre  orgueil  s'en  console,  ennemis  de  la  France, 
A  revoir  Philisbourg  sous  votre  obéissance  :  5o 

L'Empereur  et  l'Empire,  unis  à  l'investir, 
Enfin  au  bout  d'un  an  ont  su  l'assujettir4  ; 
Mais  l'effort  d'une  ligue  en  guerriers  si  féconde 
Devoit  y  consumer  moins  de  temps  et  de  monde. 
Il  falloit ,  en  dépit  des  plus  hardis  secours  ,  5  5 

Gomme  notre  Gondé,  le  prendre  en  onze  jours6; 

1.  Aire  fut  prise  le  3i  juillet  1676  par  le  maréchal  d'Humières, 
pendant  que  le  prince  d'Orange  assiégeait  Maestricht,  qui  fut  dégagé 
le  26  août  par  le  maréchal  de  Schomherg. 

2.  Dans  le  combat  du  2  juin,  le  maréchal  de  Vivonne,  qui  avait 
battu  dès  le  25  mars  sept  mille  Espagnols  près  de  Messine,  acheva  de 
détruire  dans  la  Méditerranée  la  flotte  espagnole  et  hollandaise. 

3.  Duquesne  battit  deux  fois  la  flotte  hollandaise  commandée  par 
Ruyter,  qui  mourut  à  Syracuse,  des  suites  d'une  blessure  reçue  dans 
le  combat  du  22  avril. 

4.  Philisbourg,  investi  depuis  la  fin  de  mars,  capitula  le  9  sep- 
tembre, et  se  rendit  le  17,  après  soixante-dix  jours  de  tranchée  ou- 
verte. 

5.  Le  grand  Condé,  alors  duc  d'Enghien,  avait  pris  Philisbourg 
en  septembre  i644- 


POÉSIES    DIVERSES.  3o7 

Et  vous  déshonorez  vos  belles  destinées 

Quand  l'œuvre  d'onze  jours  vous  coûte  des  années. 

Cependant  à  vos  yeux,  et  dans  le  même  été, 
Aire,  Condé1,  Bouchain  n'ont  presque  rien  coûté;       6<> 
Et  Mastricht  voit  tourner  vos  desseins  en  fumée , 
Quand  ce  qu'il  vous  en  coûte  auroit  fait  une  armée. 
Ainsi ,  bien  que  la  prise  ait  suivi  le  blocus , 
Que  devant  Philisbourg  nous  paroissions  vaincus  , 
Si  pour  rendre  à  vos  lois  cette  place  fameuse  6  5 

Le  Rhin  vous  favorise  au  refus  de  la  Meuse2, 
Si  pour  d'autres  exploits  il  anime  vos  bras , 
Pour  un  peu  de  bonheur  ne  nous  insultez  pas  ; 
Et  surtout  gardez-vous  de  le  croire  si  ferme, 
Que  vous  vous  dispensiez  de  trembler  pour  Palerme3,  7  « 
Pour  Ypre  ,  pour  Cambray,  Saint-Omer,  Luxembourg  : 
Tremblez  même  déjà  pour  votre  Philisbourg. 
Le  nom  seul  de  mon  roi  vous  est  partout  à  craindre  : 
A  triompher  de  vous  cessez  de  le  contraindre  ; 
Et  jusques  à  la  paix,  qu'il  vous  offre  en  héros ,  7  5 

Craignez  sa  vigilance,  et  même  son  repos. 

1.  Condé,  investi  le   17  avril  par  le  maréchal  de  Créquy,  fut  pris 
dans  la  nuit  du  2 5  au  26. 

2.  La  ville  de  Maestricht  est,  comme  l'on  sait,  située  sur  la  Meuse, 
d'où  elle  tire  son  nom  ;  Philisbourg  est  près  du  Rhin 

3.  Le  duc  de  Vivonne  brûla  en  1676  la  flotte  hollandaise  en  vue 
de  Palerme.  Cambrai  se  rendit  au  Roi  le  5  mai  1677;  Saint-Omer  à 
Monsieur,  le  20  du  même  mois;  et  Ypres  au  Roi,  le  25  mars  1678 
Le  traité  de  Nimègue  conclu  la  même  année  (1678)  assura  à  la 
France  la  possession  de  ces  trois  places.  Luxembourg  fut  pris  par  le 
maréchal  de  Créquy  en  1684;  Philisbourg  ne  fut  repris  qu'en  if>88, 
par  le  Dauphin. 


3o8  POÉSIES    DIVERSES. 


LXXXVI 

PI.ACET    AU    ROI. 

Ce  placet,  que  Granet  publie  dans  les  OEuvres  diverses  (p.  102), 
comme  «  imprimé  d'après  un  manuscrit,  »  avait  déjà  paru  dans  le 
premier  volume  du  Mercure  galant  de  1677  (p.  53  et  54  de  la  2e  édi- 
tion.) Voyez  la  notice  de  la  pièce  suivante,  les  vers  5 1  et  52  de  celte 
pièce,  et  la  note  qui  se  rapporte  au  vers  52. 

Plaise  au  Roi  ne  plus  oublier 
Qu'il  m'a  depuis  quatre  ans  promis  un  bénéfice , 
Et  qu'il  avoit  chargé  le  feu  Père  Ferrier 

De  choisir  un  moment  propice 
Qui  pût  me  donner  lieu  de  l'en  remercier.  5 

Le  Père  est  mort1  ;  mais  j'ose  croire 

Que  si  toujours  Sa  Majesté 2 

Avoit  pour  moi  même  bonté , 
Le  Père  de  la  Chaise8  auroit  plus  de  mémoire, 

Et  le  feroit  mieux  souvenir  1  o 

Qu'un  grand  roi  ne  promet  que  ce  qu'il  veut  tenir. 

1.  Le  P.  Ferrier  mourut  à  la  fin  de  1674.  Voyez  la  note  3. 

2.  Dans  le  Mereure  galant,  seconde  édition  : 

Que  si  pour  moi  Sa  Majesté 
Avoit  encor  même  bonté. 

3.  On  lit  dans  la  Gazette,  sous  la  rubrique  du  2  mars  1675  :  a  Le 
P.  de  la  Chese,  religieux  d'une  piété  singulière,  a  été  choisi  pour 
être  confesseur  du  Roi.  »  —  «  A  peine  établi  à  la  cour,  dit  M.  R.  de 
Chantelauze,  le  P.  de  la  Chaize  fut  chargé  par  le  Roi  de  la  feuille 
des  bénéfices,  ainsi  que  l'avait  été  son  prédécesseur  le  P.  Ferrier, 
le  premier  confesseur  du  roi  de  France  qui  ait  été  investi  d'une  si 
haute  fonction.  »  {Le  Père  de  la  Chaize,  Paris,  Durand,  1859,  in-8°.) 


POÉSIES    DIVERSES.  3o9 


LXXXVII 


AU     ROI  , 


SUR    CINNA,   POMPEE,  HORACE,   SERTORWS,    0ED1PE ,  RODOGUNE,    QU'IL  A   FAIT 
REPRÉSENTER  DE  SUITE  DEVANT  LUI  A  VERSAILLES,  EN  OCTOBRE  1676. 

On  lit  dans  le  premier  volume  du  Mercure  galant  de  1677,  après 
un  éloge  de  Ylsis  de  Quinault  représentée  pour  la  première  fois  à 
Saint-Germain  le  5  janvier  1677  :  «  Les  beautés  de  cet  opéra  n'ont 
point  fait  perdre  au  Roi  et  à  toute  la  cour  le  souvenir  des  inimitables 
tragédies  de  M.  de  Corneille  l'aîné,  qui  furent  représentées  à  Versailles 
pendant  l'automne  dernier.  Je  vous  envoie  la  copie  que  vous  m'avez 
demandée  des  vers  que  fit  *  cet  illustre  auteur  pour  en  remercier  Sa 
Majesté.  »  Ensuite  vient,  sous  ce  simple  titre  :  Au  Roi,  la  pièce  qu'on 
va  lire;  puis  les  réflexions  que  voici2  :  «  Ces  vers,  dit  la  Duchesse  en 
interrompant  la  lecture  du  Chevalier,  sont  d'une  netteté  admirable,  et 
je  préfère  de  beaucoup  ces  sortes  d'expressions,  faciles  et  naturelles, 
au  style  pompeux  qui  approche  fort  du  galimatias.  —  Je  suis  de 
votre  sentiment,  reprit  la  Marquise;  mais  j'avoue  que  je  n'entends 
point  les  deux  derniers  vers  qu'on  nous  vient  de  lire ,  n'y  trouvant 
aucune  liaison  avec  ceux  qui  les  précèdent.  —  Vous  n'avez  donc  pas 
vu ,  lui  dit  une  dame  qui  étoit  auprès  d'elle ,  un  placet  que  M.  de 
Corneille  présenta  au  Roi,  il  y  a  quelques  mois,  et  dont  tant  de  gens 
prirent  copie?  Je  vais  vous  le  dire,  afin  qu'il  serve  d'explication  à  ce 

1.  Dans  la  seconde  édition  du  Mercure  (p.  45  et  46)  cette  phrase 
commence  ainsi  :  «  Je  vous  envoie  les  vers  que  fît,  etc.;  »  et  elle  est 
suivie  de  celle-ci  :  a  II  y  a  longtemps  que  vous  me  les  demandez,  et 
je  n'en  avois  pu  jusqu'ici  recouvrer  aucune  copie.  » 

a.  Dans  la  seconde  édition  du  Mercure  (p.  5i)  ces  réflexions  sont 
ainsi  amenées  :  «  Avouez,  Madame,  que  ce  remerciement  est  très-in- 
génieusement tourné,  et  que  c'est  avec  beaucoup  de  justice  qu'il  a  eu 
l'approbation  de  tous  ceux  qui  ont  vu  ces  vers. —  Ils  sont  d'une  net- 
teté admirable,  dit  la  Duchesse,  etc.  »  La  fin  de  la  phrase  suivante 
est  :  «  ....  aucune  liaison  avec  tous  les  autres.  » 


3io  POÉSIES   DIVERSES. 

que  vous  n'entendez  pas.  Quoiqu'il  n'y  ait  point  de  pensées,  il  y  a  je 
ne  sais  quoi  d'aisé  qui  l'a  fait  estimer  de  tout  le  monde.  »  Après  cet 
éloge  on  lit  dans  le  Mercure  le  placet  que  nous  avons  reproduit  sous 
le  numéro  précédent,  et  l'article  se  termine  ainsi  :  «  J'avois  déjà  vu 
ce  placet,  dit  la  Duchesse,  et  je  voudrois  que  Monsieur  le  Chevalier  le 
donnât  à  son  ami  pour  le  mettre  dans  son  Mercure,  car  le  grand 
Corneille  sera  toujours  inimitable,  et  les  moindres  choses  de  lui  sont 
à  conserver.  » 

Nous  connaissons  de  cette  pièce  sur  Cinna,  etc.,  deux  copies  ma- 
nuscrites anciennes,  qui  se  rapprochent  fort  du  texte  du  Mercure.  La 
première  occupe  les  pages  146-149  d'un  volume  de  la  bibliothèque 
de  l'Arsenal,  numéroté  HF  191  bis.  Ce  volume,  composé  de  divers 
morceaux  des  poètes  du  dix-septième  siècle,  se  termine  par  cette 
note  :  «.  Acheué  ce  12  feurier  à  1.  heure  après  minuit  1689.  »  L'a- 
mateur qui  formait  ce  recueil  écrivait  à  la  fin  de  la  pièce  de  Cor- 
neille la  remarque  suivante ,  naïf  témoignage  du  peu  de  respect 
qu'on  avait  alors  pour  le  texte  de  nos  écrivains  illustres  :  «  Ces 
deux  derniers  vers  ne  me  plaisent  pas,  et  la  chute  en  est  tout  à  fait 
désagréable  et  ne  sera  point  entendue  dans  cinquante  ans  d'ici  sans 
commentaire.  Si  je  fais  imprimer  quelque  jour  cette  excellente  épître, 
je  tâcherai  de  la  terminer  un  peu  plus  noblement,  ou,  au  pis  aller, 
je  la  laisserai  telle  qu'elle  est.  »  —  La  seconde  de  ces  anciennes 
copies  est  sur  les  folios  3i  et  32  du  volume  1000   de  la  collection 

Gaignières^  conservée  à  la  Bibliothèque  impériale.  Ce  volume  a  pour 
titre  :  Pièces  diverses,  Règne  de  Louis  XIV.  —  Lorsque  l'abbé  Borde- 
Ion  publia  cette  épître  au  Roi  dans  ses  Diversitez  curieuses  en  plusieurs 
lettres  (à  Amsterdam,  chez  André  de  Hoogenhuysen,  M.DC.XCIX, 
in-12,  lettre  xxxvi,  tome  II,  p.  1  et  suivantes),  elle  était  un  peu  ou- 
bliée, si  nous  en  jugeons  du  moins  par  les  premiers  mots  de  la  lettre 
où  il  l'a  insérée  :  «  Monsieur,  quand  vous  me  demandez  les  vers 
que  fit  M.  de  Corneille  pour  remercier  le  Roi  des  bontés  qu'il 
avoit  de  demander  qu'on  rejouât  encore  en  présence  de  Sa  Majesté 
ses  tragédies ,  et  dans  quel  temps  ces  vers  furent  faits ,  pensez- vous 
qu'il  soit  facile  de  vous  contenter  là-dessus?  Que  cela  soit  dit  en 
passant,  sans  prétendre  faire  beaucoup  valoir  mes  soins  pour  vous 
obéir....  J'ai  enfin  trouvé  ces  vers,  les  voici;  ils  furent  faits  en  1677.  » 
—  Dans  ces  différents  textes ,  comme  dans  le  Mercure ,  les  vers  de 
Corneille  sont  simplement  intitulés  :  Au  Roi.  En  1738,  Granet  les 
publia  aux  pages    100-102    des    OEuvres   diverses,  sous  le  titre  que 


POESIES    DIVERSES.  3n 

nous  avons  reproduit  et  avec  cette  note  :  «  Imprimés  d'après  un 
manuscrit  ;  »  mais  il  ne  nous  dit  pas  quel  est  ce  manuscrit.  Ce  texte, 
assez  différent  de  ceux  dont  nous  avons  parlé,  est  le  plus  complet,  et 
à  bien  des  égards  le  meilleur.  Il  a  servi  de  base  au  nôtre;  nous  nous 
en  sommes  écarté  en  un  seul  endroit  (voyez  la  note  du  vers  20). 

Est-il  vrai ,  grand  Monarque,  et  puis-je  me  vanter* 

Que  tu  prennes  plaisir  à  me  ressusciter, 

Qu'au  bout  de  quarante  ans  Cinna,  Pompée,  Horace 

Reviennent  à  la  mode  et  retrouvent  leur  place , 

Et  que  l'heureux  brillant  de  mes  jeunes  rivaux  5 

N'ôte  point  leur  vieux  lustre  à  mes  premiers  travaux2? 

Achève  :  les  derniers  n'ont  rien  qui  dégénère, 
Rien  qui  les  fasse  croire  enfants  d'un  autre  père  : 
Ce  sont  des  malheureux  étouffés  au  berceau , 
Qu'un  seul  de  tes  regards  tireroit  du  tombeau 3.  1  o 

On  voit  Sertorius ,  OEdipe  et  Rodogune 
Rétablis  par  ton  choix  dans  toute  leur  fortune*; 
Et  ce  choix  montrer  oit  quOtkon  et  Suréna 
Ne  sont  pas  des  cadets  indignes  de  Cinna. 
Sophonisbe  à  son  tour,  Attila  ,  Pulchérie  1  5 

Reprendroient  pour  te  plaire  une  seconde  vie  ; 

1 .  Tel  est  le  texte,  non  pas  seulement  de  Granet,  mais  aussi  des 
deux  éditions  du  Mercure.  Nos  autres  sources  donnent  :  «  et  me 
puis-je  vanter.  » 

2.  Var.  N'ôte  point  le  vieux  lustre  à  mes  premiers  travaux? 

(Mercure,  Manuscrits  de  Gaignières,  de  V Arsenal,  et  Bordelon.) 

3.  Var.  Qu'un  seul  de  tes  regards  peut  tirer  du  tombeau. 

(Manuscrit  de  Gaignières.} 

4.  Var.  Déjà  Sertorius,  OEdipe,  Rodogune 

Sont  remis  par  ton  cboix  dans  toute  leur  fortune. 

—  Cette  variante  est  commune  au  Mercure,  aux  deux  manuscrits  et  au 
texte  de  Bordelon.  Seulement,  au  premier  vers,  le  manuscrit  de 
Gaignières  porte  :  oc  OEdipe  et  Rodogune;  »  et  au  second,  le  manu- 
scrit de  Gaignières  et  la  seconde  édition  du  Mercure  ont  :  rentrés,  au 
lieu  de  :  remis. 


3i2  POÉSIES    DIVERSES. 

Agésilas  en  foule  auroit  des  spectateurs, 

Et  Bérénice  enfin  trouveroit  des  acteurs1. 

Le  peuple ,  je  l'avoue,  et  la  cour  les  dégradent  : 

J'affaiblis2,  ou  du  moins  ils  se  le  persuadent;  20 

Pour  bien  écrire  encor  j'ai  trop  longtemps  écrit , 

Et  les  rides  du  front  passent  jusqu'à  l'esprit 3  ; 

Mais  contre  cet  abus  que  j'aurois  de  suffrages4, 

Si  tu  donnois  les  tiens  à  mes  derniers  ouvrages6  ! 

Que  de  tant  de  bonté  l'impérieuse  loi6  25 

Ramèneroit  bientôt  et  peuple  et  cour  vers  moi  ! 

«  Tel  Sophocle  à  cent  ans  charmoit  encore  Athènes , 
Tel  bouillonnoit  encor  son  vieux  sang  dans  ses  veines7, 
Diroient-ils  à  lenvi ,  lorsque  OEdipe  aux  abois 
De  ses  juges  pour  lui  gagna  toutes  les  voix8.  »  3o 

1.  Ces  quatre  vers  (i5-i8)  manquent  dans  le  manuscrit  de  l'Ar- 
senal, dans  les  Diversités  de  Bordelon,  et  dans  la  première  édition 
du  Mercure  (ils  sont  dans  la  seconde).  —  Corneille  attribuait  aux  ac- 
teurs le  peu  de  succès  de  Tite  et  Bérénice.  Voyez  tome  VII,  p.  190 
et  191. 

2.  Granetmet  iciy'e  faiblis;  mais  comme  nous  avons  trouvé  partout 
f  affoiblis ,  nous  avons  cru  devoir  conserver  cette  expression,  que  nous 
avons  déjà  vue  dans  le  sens  neutre  (ci-dessus,  p.  95,  vers  17). 

3.  Montaigne  avait  dit  dans  ses  Essais  (livre  III,  chapitre  11): 
<r  Elle  (la  vieillesse)  nous  attache  plus  de  rides  en  l'esprit  qu'au  vi- 
sage. » 

4.  Vàr.  Mais  contre  un  tel  abus  que  j'aurois  de  suffrages. 

(ire  édition  du  Mercure,  Manuscrit  de  V Arsenal,  et  Bordelon.) 

5.  Var.  Si  tu  donnois  le  tien  à  mes  derniers  ouvrages  ! 

(Mercure,  Manuscrit  de  Gaignières ,  et  Bordelon.) 

6.  Var.  Que  de  cette  bonté  l'impérieuse  loi. 

(Mercure,  Manuscrit  de  t  Arsenal,  et  Bordelon.) 

7.  Var.  Diroient-ils  à  l'envi,  tel  encor  dans  ses  veines 

Bouillonnoit  son  vieux  sang,  lorsqu'OEdipe  aux  abois. 
(2e  édition  du  Mercure,  et  Manuscrit  de  Gaignières.) 

8.  Var.  De  cent  peuples  pour  lui  gagna  toutes  les  voix. 

(ire  édition  du  Mercure,  Manuscrit  de  V Arsenal,  et  Bordelon.) 

—  On  rapporte   que  Sophocle  étant  devenu  vieux,  ses  fils  voulurent 


POÉSIES   DIVERSES.  3i3 

Je  n'irai  pas  si  loin  ;  et  si  mes  quinze  lustres  * 

Font  encor  quelque  peine  aux  modernes  illustres2, 

S'il  en  est  de  fâcheux  jusqu'à  s'en  chagriner, 

Je  n'aurai  pas  longtemps  à  les  importuner. 

Quoi  que  je  m'en  promette,  ils  n'en  ont  rien  à  craindre5: 

C'est  le  dernier  éclat  d'un  feu  prêt  à  s'éteindre  ; 

Sur  le  point  d'expirer  il  tâche  d'éblouir, 

Et  ne  frappe  les  yeux  que  pour  s'évanouir. 

Souffre,  quoi  qu'il  en  soit,  que  mon  âme  ravie 

Te  consacre  le  peu  qui  me  reste  de  vie  :  4  o 

L'offre  n'est  pas  bien  grande,  et  le  moindre  moment 

Peut  dispenser  mes  vœux  de  l'accomplissement. 

Préviens  ce  dur  moment  par  des  ordres  propices  ; 

Compte  mes  bons  désirs  comme  autant  de  services4. 

Je  sers  depuis  douze  ans  ,  mais  c'est  par  d'autres  bras 
Que  je  verse  pour  toi  du  sang  dans  nos  combats  6  : 

le  faire  interdire,  et  qu'il  lui  suffit,  pour  gagner  contre  eux  sa  cause, 
de  lire  aux  juges  un  des  beaux  morceaux  de  son  OEdipe  à  Colone. 

1.  Si  cette  pièce,  comme  on  pourrait  le  supposer  d'après  le  titre 
qui  lui  est  donné  dans  les  OEuvres  diverses  de  1788,  a  été  écrite  au 
mois  d'octobre  1676,  Corneille,  né  le  6  juin  1606,  était  loin  encore 
d'avoir  quinze  lustres  :  il  n'avait  achevé  le  quatorzième  que  depuis 
quelques  mois  ;  nous  l'avons  du  reste,  même  dans  ses  écrits  en  prose, 
trouvé  assez  peu  exact  en  fait  de  dates. 

2.  Racine,  en  1676,  avait  déjà  fait  représenter  tous  les  chefs- 
d'œuvre  antérieurs  à  Phèdre,  qui  est  de  1677.  lph'igénic  est  de  1674. 

3.  Var.  Quoi  que  je  me  promette,  ils  n'en  ont  rien  à  craindre. 
(2e  édition  du  Mercure,  et  Manuscrits  de  Gaignières  et  de  V Arsenal.) 

4.  Ces  quatre  vers  (4i-44) :  (<  L'offre  n'est  pas  bien  grande,  etc.,  » 
manquent  dans  la  première  édition  du  Mercure,  dans  le  manuscrit  de 
l'Arsenal  et  dans  les  Diversités  de  Bordelon.  On  les  trouve  dans  la 
seconde  édition  du  Mercure  et  dans  le  manuscrit  de  Gaignières,  avec 
cette  variante  au  dernier  vers  : 

Compte  mes  bons  désirs  pour  autant  de  services. 

5.  Var.  Que  je  verse  pour  toi  du  sang  dans  les  combats. 

[Mercure,  Manuscrit  de  F  Arsenal,  et  Bordelon.) 


3i4  POÉSIES   DIVERSES. 

J'en  pleure  encore  un  fils1,  et  tremblerai  pour  l'autre  2, 

Tant  que  Mars  troublera  ton  repos  et  le  nôtre  ; 

Mes  frayeurs  cesseront  enfin  par  cette  paix 

Qui  fait  de  tant  d'Etats  les  plus  ardents  souhaits.  5o 

Cependant,  s'il  est  vrai  que  mon  service  plaise8, 

Sire ,  un  bon  mot ,  de  grâce ,  au  Père  de  la  Chaise  * . 

i.  Le  second  fils  de  Corneille  fut  tué  en  1674  au  siège  de  Grave. 
Voyez  ci-dessus,  p.  188,  note  4>  et  p.  189,  note  2. 

2.  Le  fils  aîné  de  Corneille,  Pierre  Corneille,  capitaine  de  cava- 
lerie. Voyez  p.  188,  note  4- 

3.  Var.  Cependant,  s'il  est  vrai  que  mon  zèle  te  plaise. 

(Mercure,  Manuscrits  de  Gaignières ,  de  V Arsenal,  et  Bordelon.) 

4.  Louis  XIV  finit  par  faire  droit  aux  réclamations  réitérées  du  poëte. 
On  lit  dans  la  Gazette  du  27  avril  1680:  ce  Pierre  Corneille,  qui  a 
fait,  il  y  a  quarante  ans,  des  tragédies  qu'on  représente  encore  tous 
les  ans  devant  le  Roi,  a  obtenu  de  Sa  Majesté  une  abbaye  pour  un  de 
ses  enfants.  *  Dans  les  Bénéfices  de  nomination  royale  du  diocèse  de 
Tours,  par  ordre  alfabetique ,  avec  le  nom  de  ceux  qui  les  possèdent 
au  mois  d'avril  1694,  liste  qui  fait  partie  du  Tableau  des  provinces 
de  France,  première  partie,  mai  1694  (à  Paris,  chez  Estienne  Ducas- 
tin,  1694,  in-8°),  nous  trouvons  des  détails  plus  précis  sur  ce  point. 
A  l'article  de  l'abbaye  d'Aiguevive,  bénéfice  de  trois  mille  livres,  à 
deux  lieues  au  sud  de  Montrichard,dans  la  paroisse  de  Faverole,nous 
voyons  figurer  l'abbé  Corneille  avec  cette  mention  :  «  Thomas  Cor- 
neille, fils  de  Pierre  Corneille ,  connu  par  plusieurs  excellentes 
pièces  de  théâtre  qu'il  a  faites.  Le  Roi  le  nomma  le  20  avril  1680, 
par  la  démission  de  l'abbé  Bernin.  »  Le  Callia  christiana  (tome  XIV, 
col.  821)  nomme  aussi  le  fils  de  Corneille  dans  la  liste  des  abbés 
d'Aiguevive  :  Thomas  Corneille  legitur  a  Rege  creatus  abbas  20  apri- 
lis  1680.   Filius  erat  is  Pétri,  francicos  inter  vates  celebratissimi. 


POÉSIES   DIVERSES.  3i5 


LXXXVIH 

VERSION    DE    L'ODE    A    MONSIEUR    PELL1SSON. 

Cette  pièce  a  été  imprimée  in-4°,  sans  date  d'année,  comme  nous 
l'apprend  Granet  dans  la  note  de  la  page  220  des  Œuvres  diverses. 
Nous  voyons  par  les  vers  71-88  qu'au  moment  où  l'ode  latine  a  été 
écrite,  Pellisson  remplissait  déjà  les  fonctions  d'historiographe  de 
France,  auxquelles  il  ne  fut  promu  qu'au  commencement  de  1670, 
et  qui ,  en  1677,  passèrent  à  Racine  et  à  Boileau.  En  outre,  le  titre 
de  cette  ode  latine  nous  montre  que  Pellisson  avait  la  double  charge 
de  secrétaire  du  Roi  et  de  maître  des  requêtes.  Il  avait  acheté  la 
première  dès  i652,  mais  il  n'eut  la  seconde  qu'en  1671.  Enfin  les 
vers  23-26  nous  portent,  ce  semble,  à  une  époque  encore  postérieure, 
c'est-à-dire  à  celle  où  il  se  trouvait  chargé  de  l'administration  de  la 
caisse  des  conversions,  que  le  Roi  lui  confia  au  mois  de  novem- 
bre 1676.  On  ignore  quel  est  l'auteur  des  vers  latins;  dans  la  réim- 
pression de  Granet  ils  précèdent  la  pièce  de  Corneille  ;  il  en  était 
probablement  de  même  dans  l'édition  originale.  Voyez  sur  les  rap- 
ports antérieurs  de  notre  poète  avec  Pellisson  la  Notice  à?OEdipe  , 
tome  VI,  p.  io3. 

Non,  je  ne  serai  pas,  illustre  Pellisson, 
Ingrat  à  tes  bienfaits,  injuste  à  ton  beau  nom  : 
Dans  mes  chants,  dans  mes  vers  il  trouvera  sa  place, 
Et  tes  bienfaits  dans  moi  ne  perdront  pas  leur  grâce. 

CLARISSIMO    VIRO    D.    PELLISSONIO, 

REGI    CHRISTIANISSIMO    A    SECRETIORIBUS    CONSILIIS,    SUPPLICUM 
EIBELLORUM    MAGISTRO. 

Nec  te  silebo,  carminé  non  meo 
Indictus  ibis,  digne  perennibus 
yEvum  Pelissoni  per  omne 
Laudibus  eloquhsque  ferri  ; 


3i6  POÉSIES    DIVERSES. 

Je  sais  bien  que  ce  nom,  par  la  gloire  porté ,  5 

A  déjà  pris  l'essor  vers  l'immortalité, 

Et  que  pour  le  placer  avec  quelque  avantage  , 

Il  faudroit  mettre  l'or  et  le  marbre  en  usage  ; 

Mais  ne  pouvant  dresser  de  plus  beaux  monuments  , 

Approuve  dans  mes  vers  ces  justes  sentiments.  i  o 

C'est  toi,  grand  Pellisson,  qui  malgré  la  licence 
Ramènes  dans  nos  jours  le  siècle  d'innocence  : 
Par  toi  nous  retrouvons  la  candeur  ,  la  bonté, 
Et  du  monde  naissant  la  sainte  probité. 
Que  la  justice  armée  et  les  lois  souveraines  i  5 

Contiennent  les  mortels  par  la  crainte  des  peines  , 
De  peur  que  le  forfait  et  le  crime  indompté 
N'entraîne  le  désordre  avec  l'impunité  : 
Ni  la  rigueur  des  lois  ni  l'austère  justice 
Ne  te  retiendront  pas  sur  le  penchant  du  vice  ;  2  o 

L'amour  de  la  vertu  fait  cet  effet  dans  toi , 
Elle  seule  te  guide,  elle  est  seule  ta  loi. 
Au  milieu  de  la  cour  ton  âme  bienfaisante 

Sculptis  superbo  marmore  et  aureis 
Alte  columnis,  auree  seeculo 
Vir  decolori,  et  concolorum 
Effigies  rediviva  morum. 

Quse  condiderunt  jura  securibus 
Armata  gentes,  sceptraque  provida, 
Secura  ne  pœnse  nocendi 
In  vetitum  rueret  libido, 

Passim  scelestas  contineant  manus; 
Dent  prurienti  frsena  licentise; 
Te  fraudis  osorem  nefandse, 
Te  sceleris  dédit  abstinenlem, 

Quse  reetitudo  est  visceribus  piis 
Innata.  Gaudes  officiis  prior 


POÉSIES    DIVERSES.  3i7 

Verse  indifféremment  sa  faveur  obligeante  ; 

Et  bien  loin  d'enchérir  ou  vendre  les  bienfaits  ,  1 5 

Tu  préviens,  en  donnant ,  les  vœux  et  les  souhaits  '. 

Ces  mortels  dont  l'éclat  emporte  notre  estime 

N'ont  souvent  pour  vertu  que  d'être  exempts  de  crime  ; 

Mais  ta  vertu  ,  qui  suit  des  sentiments  plus  hauts  , 

Ne  borne  pas  ta  gloire  à  vivre  sans  défauts  :  3  o 

En  mille  beaux  projets  ,  en  mille  biens  féconde , 

Ta  solide  vertu  se  fait  voir  dans  le  monde; 

Et  sans  les  faux  appas  d'un  éclat  emprunté , 

Elle  porte  à  nos  yeux  sa  charmante  beauté. 

En  vain,  pour  ébranler  ta  fidèle  constance,  3  5 

On  vit  fondre  sur  toi  la  force  et  la  puissance  ; 
En  vain  dans  la  Bastille  on  t'accabla  de  fers2; 
En  vain  on  te  flatta  sur  mille  appas  divers  : 

Certare  promptis  :  nil  moraris, 
Immeritus  meritusve  poscat. 

Omnis  reatus  esto  aliis  satis 
Expers  honestas  ;  non  tibi  :  sit  nisi 
Omni  decoro  compta  virtus, 
Omni  etiam  specie  decori. 

Jus  ergo  contra  fasque  perurgeant 
Dirum  minantis  jura  potentise, 
Carcer,  catense,  sœviensque 
Suppliciis  miseros  in  artus 

Immane  tortor  ;  pelliciens  suis 
Accédât  et  spes  credula  fascinis  : 

i.  Voyez  ce  qui  est  dit  de  ces  vers  dans  la  notice  de  la  pièce. 

2.  Rien  n'est  plus  connu  que  la  détention  de  Pellisson  à  la  Bastille, 
lors  du  procès  de  Foucquet,  dont  il  était  le  premier  commis,  et  que 
son  inaltérable  dévouement  pour  son  bienfaiteur.  Pellisson  avait  été 
mis  à  la  Bastille  en  septembre  i66ï,  et  n'en  sortit  qu'à  la  fin  du 
mois  de  janvier  1666. 


3i8  POÉSIES   DIVERSES. 

Ton  grand  cœur ,  inflexible  aux  rigueurs ,  aux  caresses , 

Triompha  de  la  force ,  et  se  rit  des  promesses  ;  40 

Et  comme  un  grand  rocher  par  l'orage  insulté 

Des  flots  audacieux  méprise  la  fierté , 

Et  sans  craindre  le  bruit  qui  gronde  sur  sa  tête, 

Voit  briser  à  ses  pieds  l'effort  de  la  tempête, 

C'est  ainsi ,  Pellisson  ,  que  dans  l'adversité  4  5 

Ton  intrépide  cœur  garda  sa  fermeté , 

Et  que  ton  amitié ,  constante  et  généreuse , 

Du  milieu  des  dangers  sortit  victorieuse. 

Mais  c'est  par  ce  revers  que  le  plus  grand  des  rois 

Sembloit  te  préparer  aux  plus  nobles  emplois  ,  5  o 

Et  qu'admirant  dans  toi  l'esprit  et  le  courage, 

De  la  Bastille  au  Louvre  il  te  fit  un  passage , 

Où  ta  fidélité ,  dans  son  plus  grand  éclat , 

Conserve  le  dépôt  des  secrets  de  l'Etat1. 

Te  vis  nec  auri  blanda,  saevi 
Nec  moveat  metuenda  ferri. 

Stares,  sonanti  littore  qualiter 
Immota  rupes  mole  stat  ardua, 
Fluctus  retundens  :  sic  et  olim 
Te  populi  stupuere  stantem. 

Defuncta  duris  quando  laboribus 
Tandem  triumphavit  tua  pertinax 
Constantia,  absque  ulla  pudoris 
Vel  fidei  violatione. 

Sic  et  probari  debuerat  fides 
Ac  fortitudo,  judice  principe, 
Usus  in  arcanos  vocanda 

Ad  penitos  Luparae  recessus. 

1,  Traduction  poétique  du  titre  de  secrétaire  du  Roi.  Voyez  la 
notice  de  la  pièce. 


POÉSIES   DIVERSES.  3ig 

De  moi  * ,  je  ne  veux  point ,  comme  le  bas  vulgaire ,       5  5 

De  tes  divers  emplois  pénétrer  le  mystère  : 

Je  ne  m'introduis  point  dans  le  palais  des  grands^ 

Et  me  fais  un  secret  de  ce  que  j'y  comprends; 

Mais  je  te  vois  alors  comme  un  autre  Moïse , 

Quand  le  peuple  de  Dieu ,  par  sa  seule  entremise,        60 

Sur  le  mont  de  Sina 2  reçut  la  sainte  loi 

A  travers  les  carreaux ,  la  terreur  et  l1  effroi. 

De  sa  haute  faveur  les  tribus  étonnées 

Au  pied  du  sacré  mont  demeuroient  prosternées , 

Pendant  que  ce  prophète ,  élevé  dans  ce  lieu ,  6  5 

Dans  un  nuage  épais  parloit  avec  son  Dieu  , 

Sacris  latescens  quid  penetralibus 
Volvas,  opinari  temeraria 
Plebs  ausit;  occultata  regum 
Mirer  ego,  sileamque  cautus. 

Sic  quando  Moses  colloquiis  Dei, 
Caliginoso  culmine  conditus, 
Gauderet,  ac  voces  arnicas 
Auribus  exciperet  beatis , 

Dignationem  numinis,  et  viri 
Vix  mussitantes  Abramidum  tribus 
Sortem  stupebant  insolentem  : 
Ille  homines  rediens  ad  imos, 

Fœtos  superni  luminis  et  Dei 

1 .  De  moi,  «  quant  à  moi,  pour  moi.  »  Voyez  le  Lexique.  —  Lefèvre 
et  quelques  autres  éditeurs  ont  mis  :  Pour  moi. 

2.  Des  deux  formes  bibliques  Sina  et  Sinaï,  Racine   a  employé, 
comme  ici  Corneille,  la  première  au  vers  4  à'At  Italie  : 

....  La  fameuse  journée 
Où  sur  le  mont  Sina  la  loi  nous  fut  donnée  ; 

et  la  seconde  dans  le  premier  chœur  de  la  même  pièce  : 

O  mont  de  Sinaï,  conserve  la  mémoire. 


32o  POÉSIES    DIVERSES. 

Et  qu'il  puisoit  à  fonds  dans  le  sein  de  sa  gloire 

Le  merveilleux  projet  de  sa  divine  histoire: 

Monument  éternel,  où  la  postérité 

Viendra  dans  tous  les  temps  chercher  la  vérité.  7o 

Mais  puisqu'un  même  sort  te  donne  dans  la  France 

Du  plus  grand  des  héros  l'illustre  confidence  , 

Et  que  par  sa  faveur  tu  vois  jusques  au  fonds 

Des  secrets  de  l'Etat  les  abîmes  profonds , 

Ne  donneras-tu  pas ,  après  tes  doctes  veilles ,  7  5 

De  ce  grand  conquérant  les  faits  et  les  merveilles  ? 

Et  d'un  style  éloquent  ne  décriras- tu  pas 

Ses  conseils,  ses  exploits,  ses  sièges,  ses  combats1? 

Le  monde  attend  de  toi  ce  merveilleux  ouvrage , 

Seul  digne  des  appas  de  ton  divin  langage  :  80 

Les  faits  de  ce  grand  roi  perdroient  de  leur  beauté , 

Si  tu  n'en  soutenois  l'auguste  majesté; 

Et  sa  gloire  après  nous  ne  seroit  pas  entière , 

Sensus  reportans,  dia  volumina 
Condebat,  œternos  in  annos 
Eximiœ  monumenta  genti. 

Tu  nonne  mentis  cum  tibi  regiae 
Sit  particeps  mens,  scriniaque  abditi 
Ingressa  veri,  tandem  aperta 
Luce  frui  dabis  alta  tanti 

Commenta  Régis,  consilia,  et  pii 
Mavortis  artes,  fortia  praelia, 
Ludosque  fortunae  maligna? 
Auspicio  meliore  cassos? 

1.  Louis  XIV  avait  voulu  que  Pellisson  l'accompagnât  dans  sa 
première  expédition  en  Franche-Comté  (1668).  Pellisson  écrivit  la 
relation  de  cette  conquête,  et  le  Roi  en  fut  si  content  qu'il  chargea 
l'auteur  d'écrire  l'histoire  de  son  règne  et  lui  assigna  une  pension 
de  six  mille  francs. 


POÉSIES    DIVERSES.  32i 

Si  tout  autre  que  toi  traitoit  eette  matière. 

Poursuis  donc,  Pellisson,  cet  auguste  projet,  8ft 

Et  ne  t'étonne  point  par  l'éclat  du  sujet  : 

Ton  seul  art  peut  donner  dune  main  immortelle 

Au  plus  grand  de  nos  rois  une  gloire  éternelle. 

Exspectat  orbis.  Te  sine  principis 
Splendescat  ingens  gloria  maximi 
Non  nota,  cultu  non  décente 
Materise  pretiositatem. 


fjORIVEILLE.    x  ai 


$22  POESIES    DIVERSES. 


LXXXIX 

SUR    LES    VICTOIRES    DU     ROI  , 

EN    L'ANNÉE  1677. 

Cette  pièce  a  été  imprimée  deux  fois  la  même  année  (1677),  en 
deux  feuillets  in-4°,  sans  date.  Elle  n'est  pas  signée  dans  ces  éditions. 
L'une,  qui  ne  porte  ni  indication  de  lieu  ni  date,  est  imprimée  avec 
fleuron  et  lettre  ornée;  la  Bibliothèque  impériale  en  possède  un 
exemplaire.  On  lit  pour  adresse  à  la  fin  de  l'autre  :  A  Paris,  chez 
Guillaume  de  Luyne  ,  libraire  juré  au  Palais....  Avec  permission.  Celle-ci 
se  trouve  à  la  bibliothèque  de  l'Arsenal.  Ces  vers  ont  été  réimprimés 
dans  le  Mercure  galant  de  juillet  1677  (p.  166-172).  Le  titre  y  est  le 
même  que  dans  les  éditions  originales,  à  l'exception  des  mots  en  l'an- 
née 1677,  qui  ont  été  supprimés.  La  pièce  est  précédée  de  ce  petit 
préambule  :  «  Venons  aux  vers  que  Mr  de  Corneille  l'aîné  a  présen- 
tés au  Roi  sur  ses  conquêtes.  Je  pourrois  me  dispenser  de  vous  les 
envoyer,  parce  qu'ils  sont  imprimés;  mais  comme  ils  ne  le  sont 
qu'en  feuille  volante,  il  est  bon  de  vous  donner  lieu  de  les  conserver; 
et  d'ailleurs  si  le  mot  de  parélie  a  embarrassé  quelqu'une  de  vos 
dames  de  province,  vous  leur  en  ferez  voir  l'explication  dans  le 
changement  des  deux  vers  où  ce  mot  étoit  employé1.  »  Dans  les 
OEuvres  diverses  de  1738,  cette  pièce  se  trouve  aux  p.  io3-io5. 

Je  vous  Pavois  bien  dit,  ennemis  de  la  France, 

Que  pour  vous  la  victoire  auroit  peu  de  constance , 

Et  que  de  Philisbourg  à  vos  armes  rendu 

Le  pénible  succès  vous  seroit  cher  vendu  2. 

A.  peine  la  campagne  aux  zéphyrs  est  ouverte,  S 

1.  Voyez  ci-après  les  vers  21  et  a2,  et  la  note  et  la  variante  qui  s'y 
rapportent. 

2.  Voyez  ci  dessus,  p.  3o6  et  307,  vers  63-72. 


POESIES    DIVERSES.  M 

Et  trois  villes  déjà  réparent  notre  perte*  : 
Trois  villes  dont  la  moindre  eût  pu  faire  un  Etat, 
Lorsque  chaque  province  avoit  son  potentat  ; 
Trois  villes  qui  pouvoient  tenir  autant  d'années, 
Si  le  ciel  à  Louis  ne  les  eût  destinées  ;  i  o 

Et  comme  si  leur  prise  étoit  trop  peu  pour  nous , 
Mont-Cassel  vous  apprend  ce  que  pèsent  nos  coups2. 
Louis  n'a  qu'à  paroître ,  et  vos  murailles  tombent; 
Il  n'a  qu'à  donner  l'ordre,  et  vos  héros  succombent, 
Et  tandis  que  sa  gloire  arrête  en  d'autres  lieux  i  S 

L'honneur  de  sa  présence  et  l'effort  de  ses  yeux, 
L'ange  de  qui  le  bras  soutient  son  diadème 
Vous  terrasse  pour  lui  par  un  autre  lui-même5; 
Et  Dieu,  pour  lui  donner  un  ferme  et  digne  appui, 
Ne  fait  qu'un  conquérant  de  Philippe  et  de  lui.  20 

Ainsi  quand  le  soleil  fait  naître  un  parélie*, 
La  splendeur  qu'il  lui  prête  à  la  sienne  s'allie; 
Leur  hauteur  est  égale ,  et  leur  éclat  pareil  ; 
Nous  voyons  deux  soleils  qui  ne  sont  qu'un  soleil  : 
Sous  un  double  dehors  il  est  toujours  unique  ,  2  5 

Seul  maître  des  rayons  qu'à  l'autre  il  communique; 


1.  Louis  XIV  partit  de  Saint-Germain  le  28  février;  le  17  mars, 
Valenciennes  fut  prise;  le  5  avril,  Cambrai  se  rendit  au  Roi;  le  20, 
Saint-Omer  fut  pris  par  Monsieur,  frère  du  Roi. 

2.  Le  11  avril  le  prince  d'Orange,  ayant  voulu  secourir  Saint-Omer, 
perdit  la  bataille  de  Cassel.  L'armée  française  était  commandée  par 
Monsieur,  ayant  sous  lui  les  maréchaux  rl'Humières  et  de  Luxembourg. 

3.  Cet  hémistiche  :  «  par  un  autre  lui-même,  »  a  été  déjà  appli- 
qué au  même  prince  dans  une  pièce  précédente.  Voyez  ci-dessus, 
p.  280,  vers  398. 

4.  Image  du  soleil  réfléchi  dans  une  nuée. 
Var.  Ainsi  quand  le  soleil  sur  un  épais  nuage, 

Pour  se  faire  un  second,  imprime  son  image. 

(Mercure.) 

—  Voyez  ci-dessus,  p.  322,  les  dernières  lignes  de  la  notice. 


3a4  POESIES    DIVERSES. 

Et  ce  brillant  portrait  qu'illuminent  ses  soins 
Ne  brilleroit  pas  tant,  s'il  lui  ressembloit  moins. 

Mais  c'est  assez,  grand  Roi,  c'est  assez  de  conquêtes: 
Laisse  à  d'autres  saisons  celles  où  tu  t'apprêtes.  3o 

Quelque  juste  bonheur  qui  suive  tes  projets , 
Nous  envions  ta  vue  à  tes  nouveaux  sujets. 
Ils  bravent  tes  drapeaux,  tes  canons  les  foudroient, 
Et  pour  tout  châtiment  tu  les  vois ,  ils  te  voient  : 
Quel  prix  de  leur  défaite1!  et  que  tant  de  bonté  3  5 

Rarement  accompagne  un  vainqueur  irrité  ! 
Pour  nous,  qui  ne  mettons  notre  bien  qu'en  ta  vue  , 
Venge-nous  du  long  temps  que  nous  l'avons  perdue  : 
Du  vol  qu'ils  nous  en  font  viens  nous  faire  raison  ; 
Ramène  nos  soleils  dessus  notre  horizon.  40 

Quand  on  vient  d'entasser  victoire  sur  victoire , 
Un  moment  de  repos  fait  mieux  goûter  la  gloire  ; 
Et  je  te  le  redis,  nous  devenons  jaloux 
De  ces  mêmes  bonheurs  qui  t' éloignent  de  nous. 
S'il  faut  combattre  encor,  tu  peux,  de  ton  Versailles,  45 
Forcer  des  bastions  et  gagner  des  batailles  ; 
Et  tes  pareils ,  pour  vaincre  en  ces  nobles  hasards, 
N'ont  pas  toujours  besoin  d'y  porter  leurs  regards. 

C'est  de  ton  cabinet  qu'il  faut  que  tu  contemples 
Quel  fruit  tes  ennemis  tirent  de  tes  exemples,  5o 

Et  par  quel  long  tissu  d'illustres  actions 
Ils  sauront  profiter  de  tes  instructions. 

Passez ,  héros ,  passez ,  venez  courir  nos  plaines  ; 
Egalez  en  six  mois  l'effet  de  six  semaines  : 
Vous  seriez  assez  forts  pour  en  venir  à  bout ,  5  5 

Si  vous  ne  trouviez  pas  notre  grand  roi  partout. 
Partout  vous  trouverez  son  âme  et  son  ouvrage , 


1 .  Corneille  a  déjà  exprimé ,  mais  avec   plus  d'exagération ,  une 
idée  analogue.  Voyez  p.  106,  vers  4-6- 


POÉSIES    DIVERSES.  325 

Des  chefs  faits  de  sa  main  ,  formés  sur  son  courage  * , 

Pleins  de  sa  haute  idée ,  intrépides ,  vaillants , 

Jamais  presque  assaillis,  toujours  presque  assaillants;  60 

Partout  de  vrais  François ,  soldats  dès  leur  enfance , 

Attachés  au  devoir,  prompts  à  l'obéissance; 

Partout  enfin  des  cœurs  qui  savent  aujourd'hui 

Le  faire  partout  craindre,  et  ne  craindre  que  lui. 

Sur  le  zèle,  grand  Roi ,  de  ces  âmes  guerrières  6  5 

Tu  peux  te  reposer  du  soin  de  tes  frontières, 
Attendant  que  leur  bras ,  vainqueur  de  tes  Flamands , 
Mêle  un  nouveau  triomphe  à  tes  délassements  ; 
Qu'il  réduise  à  la  paix  la  Hollande  et  l'Espagne, 
Que  par  un  coup  de  maître  il  ferme  ta  campagne ,        7  o 
Et  que  l'aigle  jaloux  n'en  puisse  remporter 
Que  le  sort  des  lions  que  tu  viens  de  dompter2, 

1 .  On  lit ,  mais  à  tort ,  formés  de  son  courage ,  dans  l'édition  de 
Lefèvre  et  dans  quelques  autres. 

2 .  L'aigle  désigne  l'Empire  ;  et  les  lions  la  Hollande  et  l'Espagne  : 
la  Hollande  a  pour  armes  un  lion,  et  le  lion  fait  partie  des  armes 
d'Espagne. 


3*6  POESIES   DIVERSES. 


XG 


AU    ROI  , 

SUR    LA    PAIX    DE    1678. 

Cette  pièce  est  relative  à  la  paix  de  Nimègue,  et  principalement  au 
traité  avec  l'Espagne,  signé  le  17  septembre  1678,  et  par  lequel  a  Sa 
Majesté  Très-Chrétienne,  rendant  quelques  villes  et  places  qui  lui 
avaient  été  cédées  en  1668  ,  retient  en  échange  toute  la  Franche- 
Comté,  Valenciennes,  Bouchain  ,  etc.  »  Le  rédacteur  du  Mercure  ga- 
lant, rendant  compte  dans  le  numéro  de  novembre  1678  (p.  180)  de 
la  réception  de  l'abbé  Colbert  à  l'Académie  française,  qui  avait  eu 
lieu,  dit-il,  le  «  dernier  jour  de  l'autre  mois  »  (3i  octobre  1678),  et 
parlant  des  diverses  lectures  qu'on  y  avait  faites  (c'était  Racine  qui 
avait  répondu  au  récipiendaire),  termine  ainsi  :  «  D'autres  vers  de 
M.  de  Corneille  l'aîné  sur  la  paix  furent  écoutés  avec  beaucoup  de 
plaisir.  On  y  remarqua  de  ces  grands  traits  de  maître  qui  l'ont  si  sou- 
vent fait  admirer  et  qui  le  rendent  un  des  premiers  hommes  de  son 
siècle.  »  C'est  très-probablement  de  ces  vers-ci  qu'il  veut  parler. 
L'édition  originale,  publiée  l'année  même,  n'est  ni  datée  ni  signée; 
elle  forme  quatre  pages  in- 4%  avec  fleuron  et  lettre  ornée.  L'adresse, 
qui  se  trouve  à  la  fin,  porte  :  De  V Imprimerie  de  Pierre  le  Petit,  Imp. 
ord.  du  Roy  et  de  F Académie  Françoise.  La  Bibliothèque  impériale 
en  possède  un  exemplaire.  Le  Mercure  galant  a  inséré  ces  vers  en 
mars  1079,  aux  pages  76  et  suivantes.  Après  avoir  raconté  les  fêtes 
célébrées  à  Toulouse  et  à  Agde  pour  la  paix,  le  rédacteur  s'exprime 
ainsi  :  «  Je  ne  puis  mieux  finir  cet  article  que  par  les  vers  que  l'in- 
comparable M.  de  Corneille  l'aîné  a  présentés  à  Sa  Majesté  sur  la 
gloire  qu'elle  s'est  acquise  par  ce  qui  donne  lieu  à  toutes  ces  réjouis- 
sances. Il  n'est  point  besoin  de  vous  dire  qu'ils  ont  été  admirés  de  toute 
la  cour.  Vous  savez  qu'il  ne  part  rien  que  d'achevé  de  la  plume  de 
ce  grand  homme.  »  Le  texte  des  vers  de  Corneille,  tels  que  les  donne 
le  Mercure,  où  ils  sont  intitulés  simplement  :  Au  Roi,  sur  la  Paix,  et 


POESIES   DIVERSES.  3i7 

le  texte  de  Granet  (OEuvres  diverses,  p.  106-109)  ne  diffèrent  de  l'édi- 
tion originale  que  par  une  seule  variante  (au  vers  11). 

Ce  n'étoit  pas  assez,  grand  Roi,  que  la  victoire 

A  te  suivre  en  tous  lieux  mît  sa  plus  haute  gloire  : 

Il  falloit,  pour  fermer  ces  grands  événements, 

Que  la  paix  se  tînt  prête  à  tes  commandements. 

A  peine  parles-tu ,  que  son  obéissance  5 

Convainc  tout  l'univers  de  ta  toute-puissance  , 

Et  le  soumet  si  bien  à  tout  ce  qu'il  te  plaît , 

Qu'au  plus  fort  de  Forage  un  plein  calme  renaît. 

Une  ligue  obstinée  aux  fureurs  de  la  guerre 
Mutinoit  contre  toi  jusques  à  l'Angleterre1  :  1  o 

Ses  2  projets  tout  à  coup  se  sont  évanouis  ; 
Et  pour  toute  raison,  ainsi  le  veut  Louis3. 
Ce  n'est  point  une  paix  que  l'impuissance  arrache , 
Et  dont  l'indignité  sous  de  faux  jours  se  cache  : 
Pour  la  donner  à  tous  ne  consulter  que  toi ,  i  5 

C'est  la  résoudre  en  maître,  et  l'imposer  en  roi  ; 
Et  c'est  comme  un  tribut  que  tes  vaincus  te  rendent , 
Sitôt  que  par  pitié  tes  bontés  le  commandent. 

Prodige  !  ton  seul  ordre  achève  en  un  moment 
Ce  qu'en  sept  ans  Nimègue  a  tenté  vainement 4 :  20 

1.  Les  dernières  conquêtes  de  Louis  XIV  avaient  excité  une  grande 
fermentation  dans  le  parlement  d'Angleterre,  qui  força  Charles  II  à 
redemander  les  troupes  anglaises  qui  avaient  été  au  service  de  la 
France  dès  les  commencements  de  la  guerre. 

2.  Il  y  a  ces  dans  le  texte  du  Mercure  et  dans  celui  de  Granet. 

3.  C'est  comme  une  traduction  du  vers  bien  connu,  de  Juvénal 
(satire  IV,  vers  223  )  : 

Hoc  volo,  sic  jubeo,  sit  pro  ratione  voluntas, 

4.  Dans  le  Recueil  de  tous  les  actes ,  mémoires  et  lettres  qui  ont  servi 
pour  la  négociation  de  la  paix,  avec  les  traitez,  qui  ont  esté  conclus  à 
Nimegue  (à  Paris,  chez  F.  Léonard,  M.DC.LXXVIII,  in-4°),  la  pre- 
mière pièce  est  intitulée  :  Projet  des  conditions  de  la  paix  du  9  avril  1678, 
et  la  dernière  est  le  traité  de  la  paix  entre  la  France  et  l'Espagne  dont 


3<i8  POÉSIES   DIVERSES. 

Ce  que  des  députés  la  fameuse  assemblée , 
D'intérêts  opposés  trop  souvent  accablée  , 
Ce  que  nespéroit  plus  aucun  médiateur, 
Tu  le  fais  par  toi-même,  et  le  fais  de  hauteur. 

On  l'admire  avec  joie ,  et  loin  de  t'en  dédire ,  2  5 

Tes  plus  fiers  ennemis  s'empressent  d'y  souscrire  : 
Un  zèle  impatient  de  t'avoir  pour  soutien 
Réduit  leur  politique  à  ne  contester  rien. 
Ils  ont  vu  tout  possible  à  tes  ardeurs  guerrières , 
Et  sûrs  que  ta  justice  y  mettra  des  barrières  ,  3o 

Qu'elle  se  défendra  de  rien  garder  du  leur, 
Ils  la  font  seule  arbitre  entre  eux  et  ta  valeur. 

Qu'il  t'épargne  de  sang,  Espagne  !  il  te  veut  rendre 
Des  villes  qu'il  faudroit  tout  un  siècle  à  reprendre  : 
Il  en  est  en  Hainaut ,  en  Flandre ,  que  son  choix ,  3  5 

En  t' imposant  la  paix  ,  remettra  sous  tes  lois1; 
Mais  au  commun  repos  s'il  fait  ce  sacrifice , 
En  tous  tes  alliés  il  veut  même  justice  , 
Et  qu'aux  lois  qu'il  se  fait  leurs  intérêts  soumis 
Ne  laissent  aucun  lieu  de  plainte  à  ses  amis2.  40 

O  vous  qu'il  menaçoit ,  et  qui  vous  teniez  prêtes 

nous  avons  parlé  au  commencement  de  la  notice.  Il  y  avait  eu  des 
négociations  en  1673,  mais  à  Cologne.  Il  existe  aussi  un  traité  du 
Ier  novembre  1671,  conclu  entre  Louis  XIV  et  l'empereur  Léopold, 
pour  alliance  et  sûreté  mutuelle.  En  remontant  jusque-là,  nous  avons 
bien  les  sept  ans,  et  il  est  naturel  qu'un  poëte  ne  se  soit  pas  préoc- 
cupé du  lieu  où  les  négociations  ont  commencé,  et  n'ait  songé  qu'à 
celui  où  elles  se  sont  terminées  d'une  manière  si  éclatante. 

1.  L'article  v  du  traité  du  17  septembre,  conclu  entre  Charles  II, 
roi  d'Espagne,  et  Louis  XIV,  promet  de  remettre  entre  les  mains  du 
roi  catholique  la  ville  et  duché  de  Limbourg,  le  pays  d'Outremeuse, 
la  ville  et  citadelle  de  Gand ,  etc.  L'article  vi  stipule  que  Charleroi , 
Binche ,  Ath ,  Oudenarde  et  Courtrai  demeureront  également  à 
l'Espagne. 

a.  Le  Roi  fit  rendre  à  la  Suède,  notre  alliée,  tout  ce  que  l'électeur 
de  Brandebourg  et  le  roi  de  Danemark  lui  avaient  pris. 


POÉSIES    DIVERSES.  ^ 

A  l'infaillible  honneur  d'être  de  ses  conquêtes , 
Places  dignes  de  lui,  Mons,  Namur,  plaignez-vous  : 
La  paix  vous  ôte  un  maître  à  préférer  à  tous; 
Et  Louis  au  vieux  joug  vous  laisse  condamnées,  45 

Quand  vous  vous  promettiez  nos  bonnes  destinées. 

Heureux ,  au  prix  de  vous ,  Ypres  et  Saint-Omer  *  ! 
Ils  ont  eu  comme  vous  de  quoi  les  alarmer  ; 
Ils  ont  vu  comme  vous  leur  campagne  fumante 
Faire  passer  chez  eux  la  faim  et  l'épouvante  ;  5  o 

Mais  pour  cinq  ou  six  jours  que  ces  maux  ont  duré, 
Ils  ont  mon  roi  pour  maître,  et  tout  est  réparé. 

Ainsi  fait  le  bonheur  de  l'Egypte  inondée 
Du  Nil  impétueux  la  fureur  débordée  ; 
Ainsi  les  mêmes  flots  qu'elle  fait  regorger  5  5 

Enrichissent  les  champs  qu'il  vient  de  ravager. 

Consolez-vous  pourtant,  places  qu'il  abandonne, 
Qu'il  semble  dédaigner  d'unir  à  sa  couronne  : 
Charles2,  dont  vous  aurez  à  recevoir  les  lois, 
Voudra  d'un  si  grand  maître  apprendre  l'art  des  rois,  60 
Et  vous  verrez  l'effort  de  sa  plus  noble  étude 
S'attacher  à  le  suivre  avec  exactitude. 

Magnanime  Dauphin ,  n'en  soyez  point  jaloux 
Si  jamais  on  le  voit  s'élever  jusqu'à  vous. 
Il  pourra  faire  un  jour  ce  que  déjà  vous  faites ,  6  5 

Etre  un  jour  en  vertus  ce  que  déjà  vous  êtes  ; 
Mais  exprimer  au  vif  ce  grand  roi  tout  entier, 
C'est  ce  qu'on  ne  verra  qu'en  son  digne  héritier  : 
Le  privilège  est  grand,  et  vous  serez  l'unique 
A  qui  du  juste  ciel  le  choix  le  communique.  70 

J'allois  vous  oublier,  Bataves  généreux  , 


1.  Ypres,  Saint-Omer  et  bien  d'autres  villes  de  la  Flandre  (voyez 
la  notice  en  tête  de  la  pièce)  restèrent  à  la  France. 

2.  Charles  II,  roi  d'Espagne. 


33o  POESIES   DIVERSES. 

Vous  qui  sans  liberté  ne  sauriez  vivre  heureux , 

Et  que  l'illustre  horreur  d'un  avenir  funeste 

A  fait  de  l'alliance  ébranler  tout  le  reste. 

En  ce  grand  coup  d'Etat  si  longtemps  balancé,  7  5 

Si  tout  ce  reste  suit ,  vous  avez  commencé  *  ; 

Et  Louis,  qui  jamais  n'en  perdra  la  mémoire, 

Se  promet  de  vous  rendre  à  toute  votre  gloire  ; 

De  rétablir  chez  vous  l'entière  liberté , 

Mais  ferme ,  mais  durable  à  la  postérité ,  8  o 

Et  telle  qu'en  dépit  de  leurs  destins  sévères 

Vos  aïeux  opprimés  l'acquirent  à  vos  pères. 

M'en  désavoueras-tu  ,  grand  Roi,  si  je  le  dis? 

Me  pardonneras-tu  si  par  là  je  finis? 

Mille  autres  te  diront  que  pour  ce  bien  suprême ,     8  5 
Vainqueur  de  toutes  parts,  tu  t'es  vaincu  toi-même; 
Ils  diront  à  l'envi  les  bonheurs  que  la  paix 
Va  faire  à  gros  ruisseaux  pleuvoir  sur  tes  sujets  ; 
Ils  diront  les  vertus  que  vont  faire  renaître 
L'observance  des  lois  et  l'exemple  du  maître;  90 

Le  rétablissement  du  commerce  en  tous  lieux , 
L'abondance  partout  répandue  à  nos  yeux, 
Le  nouveau  siècle  d'or  qu'assure  ton  empire, 
Et  le  diront  bien  mieux  que  je  ne  le  puis  dire. 

Moi ,  pour  qui  ce  beau  siècle  est  arrivé  si  tard  9  5 

Que  je  n'y  dois  prétendre  ou  point  ou  peu  de  part  ; 
Moi,  qui  ne  le  puis  voir  qu'avec  un  œil  d'envie 
Quand  il  faut  que  je  songe  à  sortir  de  la  vie , 
Je  n'ose  en  ébaucher  le  merveilleux  portrait, 
De  crainte  d'en  sortir  avec  trop  de  regret.  1 00 

1 .  lie  premier  traité  conclu  à  Nimègue  fut  celui  de  la  France  avec 
la  Hollande:  il  fut  signé  le  10  août  1678. 


POÉSIES   DIVERSES  33i 


XGI 


INSCRIPTION   POUR    L  ARSENAL    DE    RREST. 
Traduction. 

Nous  devons  à  l'obligeance  de  M.  Julien  Travers,  bibliothécaire 
de  la  ville  de  Caen,  l'indication  d'un  feuillet  in-8°,  contenu  dans  un 
volume  in-4°  de  Mélanges  qui  appartient  à  la  Bibliothèque  de  Caen. 
Ce  feuillet,  intitulé  :  Inscription  pour  V Arcenal  de  Brest ,  présente  la 
pièce  française  de  notre  poète,  signée  :  P.  Corneille  ,  traduite  des 
vers  de  Santeul  que  nous  donnons  en  note  ',  et  cinq  pièces  latines. 
C'est  probablement  d'après  une  autre  édition  que  Granet  a  reproduit 
dans  les  OEuvres  diverses  (p.  227)  ces  vers  de  Corneille,  car  il  dit  en 
parlant  de  cette  inscription  qu'elle  fut  «  imprimée  d'abord  en  feuille 
volante  in- 4°,  sans  date  d'année,  et  réimprimée  dans  les  OEuvres  de 
Santeul.  »  Ce  poète  avait  publié  sur  ce  même  sujet  tout  un  petit 
recueil,  dans  le  format  in-4°,  dont  voici  la  description  :  Un  feuillet 
non  chiffré,  imprimé  seulement  au  recto,  porte  pour  titre  :  Inscriptions 
pour  F  Arcenal  de  Brest;  suivent  les  inscriptions  latines  de  Santeul, 
numérotées  1-8,  signées  :  Santolius,  Victorinus,  datées,  en  français: 
Du  6  septembre  1679.  Ensuite  vient  la  Réponse  à  la  critique  des  Inscrip- 
tions faites  pour  C Arcenal  de  Brest,  en  dix-huit  pages,  où  Santeul  dit  à 
son  censeur  anonyme  (p.  1 4)  :  «  Nos  épigrammes  ne  sont  pas  si  malheu- 
reuses qu'elles  n'ayent  été  jugées  dignes  d'être  traduites  par  de  grands 

1.    Quae  pela  go  sese  arx  aperit  metuenda  Britanno, 
Classibus  armandis,  omnique  accommoda  bello, 
Prœdonuui  terror,  francis  tutela  carinis, 
TEternse  regni  excubiae,  domus  hospita  Martis, 
Magni  opus  est  Lodoici.  Hune  omnes  omnibus  undis 
Agnoscant  venti  dominum,  et  maria  alta  tremiscant. 

L'édition  in~4°du  petit  recueil  de  Santeul  porte  au  dernier  vers  :  auras, 
au  lieu  de  venti. —  Ce  sixain  est  la  septième  des  neuf  inscriptions  de 
Santeul.  Il  dit,  dans  sa  Réponse  à  la  critique,  déjà  citée,  que  c'est 
celle-là  et  la  sixième  qu'il  estime  les  plus  belles. 


ïïi  POESIES   DIVERSES. 

poètes,  dont  voici  la  traduction.  Ils  ont  pris  tous  la  septième  pour 
leur  modèle.  »  Il  donne  ensuite,  sous  le  titre  de  Première  traduction , 
mais  sans  nom  d'auteur,  la  version  de  Corneille,  et  successivement 
les  trois  autres  que  nous  renvoyons  en  note1.  Enfin,  continuant  à 
faire  contre  son  censeur  l'apologie  de  la  langue  latine  pour  les  in- 
scriptions, il  s'exprime  ainsi  :  «  C'est  en  vain  qu'il  crie  au  secours, 
et  qu'il  réveille  le  grand  Corneille,  qui  dort  dans  le  sein  de  la  gloire. 
Il  est  bien  plus  grand  prophète  que  lui,  car  ce  grand  personnage, 
dont  le  théâtre  françois  est  encore  si  paré,  me  dit  très-souvent  qu'il 
sera  un  jour  habillé  à  la  vieille  mode  (p.  16).  »  Au  tome  III  (p.  53 
et  suivantes)   de  l'édition  des   Œuvres  de  Santeul  publiée  en  1729, 

I.  SECONDE    TRADUCTION. 

Ce  chef-d'œuvre  élevé  sur  le  bord  de  ces  eaux, 
De  qui  le  seul  aspect  rassure  nos  vaisseaux  , 
Ce  riche  magasin  d'équipage  de  guerre, 
Cet  amas  surprenant  d'armements  inouïs , 

C'est  l'ouvrage  du  grand  Louis, 
Redouté  sur  la  mer  autant  que  sur  la  terre. 

TROISIÈME   TRADUCTION. 

Ces  longs  murs  que  tu  vois  s'étendre  sur  ces  mers, 
Fournir  à  nos  vaisseaux  tant  d'armements  divers, 
Effrayer  le  corsaire,  assurer  nos  pilotes, 
Sur  l'empire  françois  veiller  de  toutes  parts 

Pour  la  défense  de  nos  flottes, 
Sont  l'ouvrage  étonnant  du  plus  grand  des  héros. 

Qu'à  l'envi  les  vents  et  les  flots 
Le  reconnoissent  tous  pour  leur  dieu  tutélaire, 
Et  que  tout  l'Océan  le  craigne  et  le  révère. 

QUATRIÈME   TRADUCTION. 

Cet  arsenal ,  terrible  à  la  mer  britannique , 

Qui  sous  un  monarque  héroïque 
Voit  à  nos  armements  tout  l'Océan  soumis, 

L'effroi  des  vaisseaux  ennemis  , 

Des  vaisseaux  françois  l'assurance  , 
D'un  empire  éternel  l'éternelle  défense  ; 
Ce  fort  où  Mars  toujours  a  les  armes  en  main  , 
Est  de  Louis  le  Grand  le  redoutable  ouvrage  : 
Les  vents  reconnoîtront  ici  leur  souverain, 
Les  mers  craindront  ici  le  maître  de  l'orage. 


POESIES   DIVERSES,  333 

que  nous  avons  citée  souvent,  on  a  joint  une  neuvième  épigramme 
latine  aux  huit  que  Santeul  avait  publiées,  et  l'on  a  reproduit  les 
quatre  imitations  françaises  à  la  suite  de  la  septième  inscription,  sans 
y  ajouter  les  noms  des  auteurs.  Les  quatre  pièces  françaises  n'en 
figurent  pas  moins  d'ailleurs  à  leur  place  dans  la  réponse  imprimée 
aux  pages  57-71. 

Colbert  avait  commencé  dès  i663  à  faire  construire  à  Brest  les 
bâtiments  nécessaires  à  un  arsenal  maritime.  Les  travaux  furent  com- 
plétés en  1681  par  l'achèvement  des  magasins  et  des  ateliers  de  l'ar- 
tillerie du  côté  de  Recouvrance,  la  construction  du  bassin  de  radoub 
et  de  l'hôtel  de  l'Intendance  du  côté  de  Brest.  La  France  posséda 
alors  un  arsenal  qui,  quoique  loin  encore  du  degré  d'étendue  et  de 
magnificence  où  il  est  parvenu  depuis,  était  le  premier  de  l'Europe. 
Le  Roi  voulut  en  consacrer  l'époque  par  une  médaille ,  sur  laquelle 
on  voit,  à  l'entrée  du  port  de  Brest,  le  dieu  Portunus,  appuyé  sur 
un  dauphin  et  tenant  en  main  une  clef  avec  cette  légende  :  Tutela 
classium,  et  pour  exergue  :  Bresti portus  et  navale  l. 

Palais  digne  de  Mars,  qui  fournis  pour  armer 
Cent  bataillons  sur  terre  et  cent  vaisseaux  sur  mer , 
De  l'empire  des  lis  foudroyant  corps  de  garde2, 
Que  jamais  sans  pâlir  corsaire  ne  regarde, 

De  Louis ,  le  plus  grand  des  rois,  5 

Vous  êtes  l'immortel  ouvrage. 
Vents ,  c'est  ici  qu'il  faut  lui  rendre 3  hommage  ; 
Mers,  c'est  d'ici  qu'il  faut,  prendre  ses  lois*. 

1.  Voyez  les  antiquités  de  la  Bretagne ,  par  le  chevalier  de  Frémin- 
ville.  Finistère  (i83a,  1  vol.  in-8°),  p.  182  et  suivantes. 

2.  Var.  De  l'empire  François  foudroyant  corps  de  garde. 

{Réponse  à  la  critique,  tant  dans  l'édition  originale 
que  dans  la  réimpression  de  1729.) 

3.  «  Qu'il  lui  faut  rendre,  »  dans  les  Œuvres  diverses  de  1738. 

4.  On  lit,  mais  à  tort,  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dans  quelques 
autres  :  «  Mers,  c'est  ici.  » 


33A  POÉSIES   DIVERSES. 


XGH 

A    MONSEIGNEUR, 

SUR   SON  MARIAGE. 

Le  mariage  de  Louis  Dauphin  (voyez  tome  IX,  p.  63,  note  2)  avec 
Marie-Anne-Christine-Victoire,  princesse  de  Bavière,  eut  lieu  le 
7  mars  1680.  La  deuxième  partie  du  Mercure  galant  de  ce  même  mois 
est  entièrement  occupée  par  la  relation  des  réjouissances  qui  furent 
célébrées  à  cette  occasion.  On  y  trouve  les  vers  de  Corneille  (p.  261 
et  suivantes).  Ils  y  sont  précédés  de  ce  préambule  :  «  Mr  de  Corneille 
l'aîné,  qui  a  toujours  marqué  son  zèle  à  Sa  Majesté  par  les  ouvrages 
que  nous  avons  vus  de  lui  sur  ses  diverses  campagnes,  a  été  le  premier 
qui  ait  écrit  sur  le  mariage  de  Monseigneur.  Vous  avez  peut-être  déjà 
vu  les  vers  qu'il  a  faits  sur  ce  sujet,  puisqu'il  les  alla  présenter  au 
Roi  et  à  ce  jeune  prince  sitôt  que  le  mariage  fut  déclaré.  Ils  sont  si 
beaux  qu'on  pourroit  trouver  cette  relation  imparfaite,  s'ils  n'y 
étoient  pas  employés  :  les  voici.  »  Ils  furent  aussi  imprimés  in-4°, 
sans  lieu  ni  date,  avec  la  signature  P.  C;  la  Bibliothèque  impériale 
possède  un  exemplaire  de  cette  édition.  Granet  les  donne  aux 
pages  1 10- 114  des  OEuvres  diverses. 

Prince ,  l'appui  des  lis ,  et  l'amour  de  la  France , 
Toi,  dont  au  berceau  même  elle  admira  l'enfance  *, 
Et  pour  qui  tous  nos  vœux  s'efïbrçoient  d'obtenir 
Du  souverain  des  rois  un  si  bel  avenir, 
Aujourd'hui  qu'elle  voit  tes  vertus  éclatantes  5 

Répondre  à  nos  souhaits  ,  et  passer  nos  attentes  , 
Quel  supplice  pour  moi ,  que  l'âge  a  tout  usé  , 
De  n'avoir  à  l'offrir  qu'un  esprit  épuise  ! 

D'autres  y  suppléeront2,  et  tout  notre  Parnasse 

1.  Voyez  tome  IX,  p.  64,  note  1. 

2.  Il  y  a  sur  ce  sujet  un  assez  grand  nombre  de  poésies  françaises 


POESIES   DIVERSES.  335 

Va  s'animer  pour  toi  de  ce  que  j'eus  d'audace ,  10 

Quand  sur  les  bords  du  Rhin ,  pleins  de  sang  et  d'effroi, 
Je  fis  suivre  à  mes  vers  notre  invincible  roi 4. 

Ce  cours  impétueux  de  rapides  conquêtes , 
Qui  jeta  sous  ses  lois  tant  de  murs  et  de  têtes , 
Sembloit  nous  envier  dès  lors  le  doux  loisir  i  5 

D'écrire  les  succès2  qu'il  lui  plaisoit  choisir  : 
Je  m'en  plaignis  dès  lors 8  ;  et  quoi  que  leur  histoire 
A  qui  les  écriroit  dût  promettre  de  gloire , 
Je  pardonnai  sans  peine  au  déclin  de  mes  ans , 
Qui  ne  m'en  laissoient  pins  la  force  ni  le  temps  :  20 

J'eus  même  quelque  joie  à  voir  leur  impuissance 
D'un  devoir  si  pressant  m'assurer  la  dispense; 
Et  sans  plus  attenter  aux  miracles  divers 
Qui  portent  son  grand  nom  au  bout  de  l'univers, 
J'espérai  dignement  terminer  ma  carrière  ,  2 5 

Si  j'en  pouvois  tracer  quelque  ébauche  grossière 
Qui  servît  d'un  modèle  à  la  postérité, 
De  valeur,  de  prudence  et  d'intrépidité. 
Mais  comme  je  tremblois  de  n'y  pouvoir  suffire , 
Il  se  lassa  de  vaincre,  et  je  cessai  d'écrire4  ;  3o 

Et  ma  plume ,  attachée  à  suivre  ses  hauts  faits, 
Ainsi  que  ce  héros  acheva  par  la  paix  6 . 

La  paix,  ce  grand  chef-d'œuvre,  où  sa  bonté  suprême 

dans  la  deuxième  partie  du  Mercure  de  mars  1680  (p.  27 2 -2 87 ).  Le 
catalogue  des  livres  relatifs  à  l'histoire  de  France  de  la  Bibliothèque 
impériale  indique  en  outre  (tome  II,  p.  2  54)  ^a  Conjouissance  du  Da- 
nube avec  la  Marne ,  anonyme,  deux  pièces  latines  de  Lenglet,  une  de 
Fleury,  et  un  épithalame  latin  du  collège  des  Jésuites. 

1 .  Voyez  ci-dessus,  p.  a5a.  —  2,  Le  succès,  dans  les  Œuvres  diverses. 

3.  Voyez  ci-dessus,  p.  224,  vers  9-12. 

4-  Voyez  ci-dessus,  p.  225,  vers  19  et  20,  et  note  2.  Corneille 
semble  faire  allusion  ici  à  un  vers  que,  suivant  toute  apparence,  il 
avait  inspiré  à  Boileau. 

6.  Voyez  ci-dessus,  p.  3a6  et  suivantes. 


S36  POÉSIES    DIVERSES 

Pour  triomphe  dernier  triompha  de  lui-même , 

Il  la  fit,  mais  en  maître  :  il  en  dicta  les  lois;  3  5 

Il  rendit,  il  garda  des  places  à  son  choix  : 

Toujours  grand,  toujours  juste,  et  parmi  les  alarmes 

Que  répandoit  partout  le  bonheur  de  ses  armes  , 

Loin  de  se  prévaloir  de  leurs  brillants  succès , 

De  cette  bonté  seule  il  en  crut  tout  l'excès  ,  40 

Et  l'éclat  surprenant  d'un  vainqueur  si  modeste 

De  mon  feu  presque  éteint  consuma  l'heureux  reste. 

Ne  t'offense  donc  point  si  je  t'offre  aujourd'hui 
Un  génie  épuisé ,  mais  épuisé  pour  lui  : 
Tu  dois  y  prendre  part;  son  trône,  sa  couronne,  45 

Cet  amas  de  lauriers  qui  partout  l'environne, 
Tant  de  peuples  réduits  à  rentrer  sous  sa  loi , 
Sont  autant  de  dépôts  qu'il  conserve  pour  toi  ; 
Et  mes  vers,  à  ses  pas  enchaînant  la  victoire, 
Préparoient  pour  ta  tête  un  rayon  de  sa  gloire.  5o 

Quelle  gloire  pour  toi  d'être  choisi  des  cieux 
Pour  digne  successeur  de  tous  nos  demi-dieux  ! 
Quelle  faveur  du  ciel ,  de  l'être  à  double  titre 
D'un  roi  que  tant  d'Etats  ont  pris  pour  seul  arbitre, 
Et  d'avoir  des  vertus  prêtes  à  soutenir  5  5 

Celles  qui  le  font  craindre  et  qui  le  font  bénir  î 
C'est  de  tes  jeunes  ans  ce  que  ta  France  espère 
Quand  elle  admire  en  toi  l'image  d'un  tel  père. 

N'aspire  pas  pourtant  à  ses  travaux  guerriers  : 
Où  trouverois-tu1,  Prince,  à  cueillir  des  lauriers,         60 
Des  peuples  à  dompter,  et  des  murs  à  détruire? 
Vois- tu  des  ennemis  en  état  de  te  nuire  ? 
Son  bras  ou  sa  bonté  2  les  a  tous  désarmés  : 

1 .  Granet,  dans  les  Œuvres  diverses,  a  mis  :  Où  trouveras-tu. 

1.  Ainsi  dans  le  Mercure.  On  lit  à  tort  dans  l'édition  in- 4°  :  valeur, 
au  Heu  de  bonté ,  et  cette  leçon  fautive  a  été  adoptée  par  Granet  et 
tous  les  éditeurs  suivants. 


POÉSIES    DIVERSES.  337 

S'ils  ont  tremblé  sous  l'un,  l'autre  les  a  charmés. 
Quelques  lieux  qu'il  te  plaise  honorer  de  ta  vue ,  6  5 

Un  respect  amoureux  y  prévient  ta  venue  ; 
Tous  les  murs  sont  ouverts,  tous  les  cœurs  sont  soumis, 
Et  de  tous  ses  vaincus  il  t'a  fait  des  amis. 

A  nos  vœux  les  plus  doux  si  tu  veux  satisfaire , 
Vois  moins  ce  qu'il  a  fait  que  ce  qu'il  aime  à  faire  :        7  0 
La  paix  a  ses  vertus,  et  tu  dois  y  régler 
Cette  ardeur  de  lui  plaire  et  de  lui  ressembler. 
Vois  quelle  est  sa  justice ,  et  quelle  vigilance 
Par  son  ordre  en  ces  lieux  ramène  l'abondance1, 
Rétablit  le  commerce  ,  et  quels  heureux  projets  7  5 

Des  charges  de  l'Etat  soulagent  ses  sujets2; 
Par  quelle  inexorable  et  propice  tendresse 
Il  sauve  des  duels  le  sang  de  sa  noblesse  8  ; 
Comme  il  punit  le  crime 4,  et  par  quelle  terreur 
Dans  les  cœurs  les  plus  durs  il  en  verse  l'horreur.         80 
Partout  de  ses  vertus  tu  verras  quelque  marque , 
Quelque  exemple  partout  à  faire  un  vrai  monarque. 

Mais  sais-tu  quel  salaire  il  s'en  promet  de  toi? 


1.  En  décembre  1672  il  avait  paru  un  édit,  «  portant  règlement 
sur  la  juridiction  des  prévôts  et  échevins  »  de  la  ville  de  Paris,  édit 
dont  un  des  principaux  objets  était  d'assurer  les  «  provisions  néces- 
saires à  la  subsistance  du  grand  nombre  de  ses  habitants.  » 

2.  La  grande  Ordonnance  du  commerce  est  du  mois  de  mars  1673; 
le  même  mois  de  la  même  année  il  avait  été  publié  un  règlement  gé- 
néral pour  les  tailles.  Deux  actes  postérieurs  intéressant  le  commerce 
sont  le  règlement  pour  la  Compagnie  des  Indes  orientales  de  sep- 
tembre 1675,  et  les  lettres  patentes  portant  confirmation  de  la  Com- 
pagnie du  Sénégal. 

3.  Au  mois  d'août  1679,  Louis  XIV  rendit  un  «  édit  contenant 
règlement  général  pour  la  répression  du  duel.  »  Beaucoup  d'articles 
de  cet  édit  sont  la  répétition  presque  textuelle  de  celui  de  septem- 
bre i65i. 

4.  L'ordonnance  criminelle  fut  rendue  à  Saint-Germain-en-Laye, 
au  mois  d'août  1670.  —  Voyez  aussi  ci-dessus,  p.  180,  note  2. 

Corneille,  x  22 


338  POÉSIES   DIVERSES. 

Une  postérité  digne  d'un  si  grand  roi, 

Qui  fasse  aimer  ses  lois  chez  la  race  future ,  8  5 

Et  les  donne  pour  règle  à  toute  la  nature. 

C'est  sur  ce  digne  espoir  de  sa  tendre  amitié 
Qu'il  t'a  choisi  lui-même  une  illustre  moitié. 
Ses  ancêtres  ont  su  de  plus  d'une  manière 
Unir  le  sang  de  France  à  celui  de  Bavière;  90 

Et  l'heureuse  beauté  qui  t'attend  pour  mari 
Descend  ainsi  que  toi  de  notre  grand  Henri  : 
Vous  en  tirez  tous  deux  votre  auguste  origine , 
L'un  par  Louis  le  Juste ,  et  l'autre  par  Christine , 
En  degré  tout  pareil  * .  Ses  aïeux  paternels  9  5 

Firent  avec  les  tiens  ligue  pour  nos  autels , 
Joignirent  leurs  drapeaux  contre  le  fier  insulte  2 
Que  Luther  et  sa  secte  osoient  faire  au  vrai  culte  ; 
Et  Prague  du  dernier  vit  les  fameux  exploits 
De  Rome  dans  ses  murs  faire  accepter  les  lois  3.  100 

Ils  ont  assez  donné  de  Césars  à  l'Empire, 
Pour  en  donner  encor,  s'il  en  falloit  élire  4  ; 

1.  Le  père  de  la  Dauphine  était  Ferdinand  Marie,  électeur  de  Ba- 
vière, et  sa  mère  Henriette-Adélaïde  de  Savoie,  fille  du  duc  Victor- 
Amédée  et  de  Christine  de  France,  dont  les  parents  étaient  Henri  IV 
et  Marie  de  Médicis.  —  Le  grand-père  paternel  de  la  Dauphine, 
Maximilien  I,  premier  électeur  de  Bavière,  avait  aussi  épousé  (en 
premières  noces)  une  petite-fille  de  France,  Elisabeth,  fille  de  Charles 
duc  de  Lorraine  et  de  Claude  de  France. 

2.  A  cette  époque  ce  mot  était  encore  quelquefois  masculin.  Voyez 
le  Lexique. 

3.  Maximilien  I  remporta  le  8  novembre  1620  une  victoire  com- 
plète sur  l'armée  de  Frédéric ,  roi  de  Bohême ,  sous  les  murs  de 
Prague,  s'empara  de  la  ville,  et  réduisit  en  peu  de  jours  la  Bohème 
sous  l'obéissance  de  l'Empereur. 

4.  La  maison  de  Bavière  avait  donné  deux  empereurs  à  l'Alle- 
magne :  Louis  V  au  commencement  du  quatorzième  siècle,  et  Roberi 
dans  les  dix  premières  années  du  quinzième.  La  prédiction  de  Cor- 
neille, «  pour  en  donner  encore,  »  faillit  s'accomplir  au  dix-huitième. 
Charles- Albert  se  fit  couronner  empereur  à  Francfort,  en  1742»  sous 


POESIES    DIVERSES.  3*9 

Et  notre  grand  monarque  est  assez  redouté 
Pour  faire  encor  voler  l'aigle  de  leur  côté. 

Quel  besoin  toutefois  de  vanter  leur  noblesse  i  o  5 

Pour  assurer  ton  cœur  à  leur1  jeune  princesse, 
Comme  si  ses  vertus  et  l'éclat  de  ses  yeux 
A  son  mérite  seul  ne  l'assuroient  pas  mieux? 

La  grandeur  de  son  âme  et  son  esprit  sublime 
S'élèvent  au-dessus  de  la  plus  haute  estime  ;  no 

Son  accueil ,  ses  bontés  ont  de  quoi  tout  charmer  ; 
Et  tu  n'auras  enfin  qu'à  la  voir  pour  l'aimer. 

Vois  bénir  en  tous  lieux  l'hymen  qui  te  l'amène 
Des  rives  du  Danube  aux  rives  de  la  Seine  : 
Vois-le  suivi  partout  des  Grâces  et  des  Jeux  ;  u5 

Vois  la  France  à  l'envi  lui  porter  tous  ses  vœux. 

Je  t'en  peindrois  ici  la  pompeuse  allégresse  ; 
Mais  pour  s'y  hasarder  il  faut  de  la  jeunesse  : 
De  quel  front  oserois-je,  avec  mes  cheveux  gris, 
Ranger  autour  de  toi  les  Amours  et  les  Ris  ?  120 

Ce  sont  de  petits  dieux,  enjoués ,  mais  timides, 
Qui  s'épouvanteroient  dès  qu'ils  verroient  mes  rides  ; 
Et  ne  me  point  mêler  à  leur  galant  aspect , 
C'est  te  marquer  mon  zèle  avec  plus  de  respect. 

le  nom  de  Charles  VII;  mais,  vaincu  par  l'Autriche,  il  fut  forcé  de 
renoncer  à  l'Empire. 

1.   La*  dans  les  OEuvrcs  diverses. 


Fl\     DES    POESIES     DIVERSES. 


APPENDICE. 


i 

(Voyez  les  pièces  XVI  et   XVII,  p.   5 8-60.) 

RELATION  DU  BALLET  DU  CHATEAU  DE  BISSESTRE  , 

Extraite  de  la  Gazette  du  12  mars  i632  (p.  104-106). 

a  II  se  peut  voir  si  nous  engendrons  ici  mélancolie  par  le  ballet 
que  le  comte  de  Soissons  dansa  dimanche  dernier  au  Louvre ,  à  l'Ar- 
senal, et  en  la  maison  de  ville  ,  avec  une  telle  affluer) ce  de  peuple 
que  dans  le  Louvre  seul  il  n'y  avoit  guère  moins  de  quatre  mille 
spectateurs,  la  plupart  personnes  de  remarque. 

«  Le  sujet  fut  le  château  de  Bissestre  (que  vous  savez  être  une 
vieille  masure  à  demie-lieue  de  cette  ville)  et  les  personnes  ,  les  ani- 
maux et  les  esprits  auxquels  il  sert  de  rendez-vous  jour  et  nuit. 

«  Le  jour  étoit  figuré  par  un  grand  tableau  où  ce  château  étoit 
peint  ayant  le  soleil  sur  son  horizon,  et  autour  de  son  faîte  des  grues, 
faisans,  faucons  et  autres  oiseaux  ,  comme  au  bas  toute  sorte  de  bêtes 
à  quatre  pieds. 

«  D'où  ,  après  que  le  sieur  Justice  eut  de  sa  voix  dextrement  jointe 
à  celle  du  luth,  représenté  le  sujet  du  ballet,  sortirent  premièrement 
Thôte,  l'hôtesse  et  son  valet  que  représentoient  (pour  suivre  le  plai- 
sant ordre  du  ballet  et  non  celui  des  dignités  qui  n'est  que  trouble- 
fête  )  les  sieurs  de  Belleville ,  de  la  Barre  et  de  Liencourt ,  aussi  bien 
que  tout  le  reste  si  richement  vêtus  qu'on  ne  les  eût  pas  pris  pour  tels 
sans  leurs  postures  où  rien  n'étoit  oublié ,  et  sans  le  petit  mantelet, 
que  l'hôte  donna  à  garder  à  sa  femme,  enchaperonnée  à  la  négligence, 
et  les  entonnoirs  dont  l'habit  de  ce  gentil  valet  étoit  passementé. 

«  Puis  vinrent  danser  deux  gueux,  vêtus  de  riches  lambeaux,  que 
représentoient  le  comte  de  Fiasque  et  le  sieur  Parade. 


Mi  POESIES   DIVERSES. 

t  Suivoientle  comte  de  Soissons ,  le  duc  d'Aluy,  les  sieurs  de  Lien- 
court  ,  de  la  Barre  et  Marandé,  qui  représentoient  cinq  paysans  ivres, 
vêtus  de  sayons  de  satin  blanc  passeinentés  d'argent ,  la  serpette  à  la 
ceinture ,  mais  avec  une  telle  adresse ,  qu'encore  que  le  premier  se 
voulût  faire  méconnoître  dans  la  foule  des  autres ,  toute  l'assistance 
lui  donna  le  prix  du  ballet ,  et  le  jugea  véritablement  sien  ,  non  tant 
pour  sa  dépense,  qui  fut  grande,  comme  pour  y  avoir  le  mieux  fait. 

«  Trois  Bohèmes  parurent  incontinent  après ,  que  représentèrent 
les  comtes  de  Maurever,  de  Saults  et  de  Fiasque. 

«  Deux  braves,  qui  furent  les  comtes  de  Maurever  et  de  Mata,  y 
vinrent  ensuite  prendre  la  mesure  de  leur  courage  à  celle  de  leur 
épée ,  vêtus  de  satin  gris  chamarré  d'argent ,  qui  dansèrent  l'épée 
nue,  le  fourreau  leur  pendant  au  baudrier. 

«  Deux  damoiselles  masquées  y  allèrent  présenter  un  autre  combat, 
sous  la  conduite  d'un  messager  d'amour,  garni  déchausses  à  culotte, 
et  d'un  manteau  de  satin  qui  avoit  de  la  peine  à  atteindre  jusques 
aux  coudes  ,  où  le  baron  de  la  Ferté ,  le  marquis  de  Beuvron  et  le 
sieur  Enaut  dansèrent. 

«  Deux  écoliers,  que  représentoient  le  marquis  de  Gèvreet  le  sieur 
de  Saint-Germain  Beaupré ,  y  vinrent  ensuite  jouer  une  partie  du 
quartier  et  friper  l'autre. 

«  Puis  un  Espagnol  y  fît  la  roue ,  encore  qu'il  fût  vêtu  en  pèle- 
rin, le  roquet  sur  les  épaules,  et  la  petite  boîte  de  fer-blanc  à  sa 
ceinture,  servi  de  son  valet,  qui  avoit  le  bissac  sur  le  dos,  la  gui- 
tare en  main,  et  passoit  par  humilité  en  dansant  sous  les  caprioles 
de  son  maître.  Ils  furent  représentés  par  les  sieurs  de  Verpré  et 
Saintot.  ' 

«  Deux  hiboux  et  quatre  corneilles  en  leur  vraie  forme,  sous  laquelle 
étoient  cachés  autant  d'enfants  ,  y  vinrent  après  danser  leur  branle 
et  annoncer  la  nuit. 

«  Lors  parut  un  autre  tableau  au  lieu  du  premier,  où  le  même  châ- 
teau de  Bissestre  étoit  ombragé  d'une  nuit  qui  n'avoit  point  d'autre 
clarté  que  celle  d'un  démon  qui  sortoit  tout  en  feu  de  la  plus  haute 
de  ses  fenêtres. 

«  Le  sieur  de  Moulinié ,  vêtu  de  gaze  noire  parsemée  d'étoiles ,  fit 
l'ouverture  de  cette  nuit  par  un  chant  lugubre  ,  auquel  succéda  un 
excellent  concert  de  luths. 

«  Puis  se  présente  un  magicien  avec  la  sotane  de  satin  incarnat,  la 
robe  de  satin  noir  couverte  de  passement  d'argent ,  tenant  en  sa  main 


APPENDICE.  343 

une  baguette  d'ébène  garnie  d'un  bout  d'argent,  dont  il  frappoit  en 
dansant  son  livre  de  magie:  c'étoit  le  sieur  Marais. 

«  A  ses  charmes  sautent  en  place  quatre  lutins  vêtus  de  satin  noir 
et  coiffés  de  plumes  noires  et  grises,  que  dansèrent  les  ducs  de  Lon- 
gueville  et  de  Candale,  le  baron  du  Vigean ,  et  le  comte  de  Saint- 
Germain  Beaupré. 

«  Cinq  fantômes  leur  succédèrent,  tous  couverts  de  lames  d'or  cou- 
pées en  olipeaux ,  dont  le  cliquetis  n'étoit  point  si  effroyable  qu'il 
n'y  eût  des  dames  en  la  troupe  qui  témoignoient  par  leur  conten- 
tement ce  que  d'autres,  moins  scrupuleuses,  dirent  tout  haut,  qu'elles 
ne  s'en  pourroient  fuir  devant  ces  fantômes;  car  c'étoit  encore  le 
comte  de  Soissons  ,  le  duc  d'Aluy,  et  le  sieur  de  Liencourt,  avec  les 
sieurs  de  Marandé  et  la  Barre. 

«  Trois  faux  monnoyeurs  se  mettent  après  sur  les  rangs,  ayant  leurs 
habits  chamarrés  de  pièces  fausses  et  les  rnains  garnies  de  cisailles  , 
tenailles  et  marteaux  ,  exerçants  leur  métier  en  trop  bonne  compa- 
gnie pour  ne  vouloir  pas  être  pris,  comme  ils  furent  par  trois  ar- 
chers vêtus  de  satin  vert  sous  leur  casaque  :  où  dansèrent  les  ducs 
de  Longueville  et  de  Candale  ,  le  baron  du  Vigean ,  les  comtes  de 
Fiasque  et  de  Mata ,  et  le  sieur  Parade. 

a  Ils  furent  bientôt  suivis  du  même  sieur  Parade  et  Enaut,  repré- 
sentants le  juge  et  son  greffier,  vêtus  de  satin  noir  et  la  toque  en  tête. 

«  Trois  sergents  finirent  les  entrées ,  représentés  par  les  comtes 
de  Mata  et  de  Fiasque  ,  et  par  le  sieur  Parade. 

«  Puis  la  musique  du  Roi  se  fit  entendre,  laquelle  fut  fermée  par  le 
grand  ballet  dansé  aux  pieds  de  Sa  Majesté  ,  qui  rejoignant  en  un 
corps  tant  de  pièces  détachées ,  et  faisant  à  son  aspect  reconnoître 
pour  gens  d'honneur  ceux  qui  paroissoient  naguère  plongés  dans  une 
cloaque  de  vices ,  signilioit  combien  la  vertu  de  ce  monarque  est  ef- 
ficacieuse ,  puisque  le  vice  ne  peut  subsister  devant  lui ,  et  qu'à  son 
abord  les  diables  mêmes  cessent  de  l'être. 

a  Ce  ballet  (après  lequel  le  comte  de  Soissons  mena  danser  la  Reine; 
le  duc  de  Longueville  ,  la  princesse  de  Condé  ;  et  le  reste  des  sei- 
gneurs, les  autres  dames  de  la  cour)  fit  aussi  juger  quelle  étoit  la 
disposition  de  ces  princes  d'avoir  pu  danser  depuis  les  huitheuresdu 
dimanche  au  soir,  septième  du  courant,  qu'ils  commencèrent,  jus- 
ques  au  lendemain  matin,  pareille  heure,  que  leur  fut  faite  la  colla- 
tion en  la  maison  de  ville,  où  ils  finirent.  Et  comme  la  fortune  aux 
grands  desseins  se  fait  volontiers  de  la  partie ,  il  s'y  rencontra  plus 


Wt  POÉSIES  DIVERSES. 

d'accidents  qu'on  n'en  vouloit  représenter ,  car  il  y  eut  une  enseigne 
et  autres  choses  perdues  jusques  à  la  valeur  de  quinze  mille  écus. 
Une  comtesse  y  accoucha.  Pour  faire  place,  il  fallut  employer  quelques 
descendants  de  hallebardes  et  des  feintes  qui  n'étoient  pas  du  ballet.  » 


II 

(Voyez  les  pièces  XXV-XXVII,  p..  82-85.) 

TROIS  PIECES  DE  LA  GUIRLANDE  DE  JULIE , 

Signées  C.  et  attribuées  par  plusieurs  éditeurs  à  Corneille. 
LE  LIS. 

MADRIGAL. 

Un  divin  oracle  autrefois 

A  dit  que  ma  pompe  et  ma  gloire 

Sur  celle  du  plus  grand  des  rois 

Pouvoit  emporter  la  victoire  ; 

Mais  si  j'obtiens,  selon  mes  vœux  ,  5 

De  pouvoir  parer  v  os  cheveux  , 

Je  dois ,  ô  Julie  adorable  , 

Toute  autre  gloire  abandonner  ; 

Car  nul  honneur  n'est  comparable 

A  celui  de  vous  couronner.  10 


L'HYACINTHE. 

MADRIGAL. 


D'un  éternel  bonheur  ma  disgrâce  est  suivie  , 
Je  n'ai  plus  rien  en  moi  qui  marque  mon  ennui. 
Autrefois  un  soleil  me  fit  perdre  la  vie  ; 
Mais  un  autre  soleil  me  la  rend  aujourd'hui. 


LA  FLEUR  DE  GRENADE. 

MADRIGAL. 

Dans  l'empire  fameux  de  Flore  et  de  Pomone 
Mon  père  a  mille  enfants  qui  portent  la  couronne  ; 


APPENDICE.  >,. 

Mais  préférant  mon  sort  au  leur, 

J'ai  mieux  aimé  demeurer  fleur, 
Avec  le  vif  éclat  dont  je  suis  embellie ,  5 

Afin  de  m'offrir  vierge  à  la  chaste  Julie. 
O  perte  favorable  !  ô  change  précieux  ! 

Je  quitte  ma  gloire  mortelle 
Pour  l'immortel  honneur  de  parer  cette  belle, 
Et  le  destin  des  rois  pour  le  destin  des  Dieux.  10 


III 

(Voyez  la  Notice,  p.  n-14.) 
LE  PRESBYTÈRE  D'HÉNOUVILLE. 

A    TIRCIS. 

Cette  pièce  a  paru  pour  la  première  fois  avec  l'adresse  suivante  : 
A  Rouen,  chez  lean  le  Boullenger,  M.DC.XXXXII,  en  une  brochure 
in-40  de  douze  pages ,  dont  le  seul  exemplaire  connu  appartient  à  la 
bibliothèque  de  Rouen,  où  il  fait  partie  d'un  recueil  intitulé  :  Poésies 
diverses  7  qui  est  numéroté  0744»  Nous  avons  expliqué  assez  lon- 
guement dans  la  Notice^  pour  n'avoir  plus  à  y  revenir  ici,  les  motifs 
qui  nous  ont  porté  à  rejeter  à  Y  Appendice  cette  épître ,  attribuée 
par  plusieurs  éditeurs  à  Corneille.  Si  elle  avait  été  admise  dans  les 
Poésies  diverses  ,  l'ordre  chronologique  l'aurait  fait  placer  après  la 
pièce  XXVII. 

Enfin  j'ai  vu  Timandre ,  et  mon  âme  étonnée 

Repasse  avec  plaisir  l'agréable  journée 

Où  mille  beaux  objets ,  l'un  de  l'autre  suivis , 

Rendirent  tous  mes  sens  également  ravis  ; 

J'ai  vu  ce  lieu  fameux ,  dont  l'art  et  la  nature  5 

Disputent  à  l'envi  l'excellente  structure  ; 

J'ai  vu  les  raretés  de  ce  charmant  séjour, 

Pour  qui  même  les  rois  concevroient  de  l'amour  ; 

Et  cependant ,  Tircis ,  je  trouve  mes  pensées 

Pour  t'en  faire  un  portrait  si  fort  embarrassées,  10 

Qu'encor  que  ce  tableau  fût  déjà  médité  , 

J'ai  peine  à  contenter  ta  curiosité. 

Entre  tant  de  beautés  où  mon  esprit  s'amuse  , 

Je  travaillée  donner  un  bon  ordre  à  la  Muse, 


346  POÉSIES   DIVERSES. 

Et  de  tant  de  sujets  qui  s'offrent  à  la  fois ,  1 5 

La  plume  comme  l'œil  fait  à  peine  le  choix. 

Sur  le  bord  d'un  vallon  flanqué  de  deux  collines  , 
Dont  la  beauté  fait  honte  aux  montagnes  voisines  , 
La  maison  de  Timandre  en  situation 

A  de  quoi  lui  donner  un  peu  d'ambition  :  20 

Il  est  vrai  qu'à  mon  goût  il  en  est  peu  d'égales 
Et  peu  que  la  nature  ait  faites  ses  rivales. 
Ce  n'est  pas  qu'elle  soit  superbe  en  bâtiments  : 
L'or  n'est  point  profané  dans  ses  assortiments  ; 
Le  cinabre  et  le  jaspe  ,  et  l'ambre,  et  le  porphyre,  a5 

Ne  font  point  les  beautés  que  j'y  trouve  à  décrire. 
Tout  ce  vain  apparat  d'un  faste  ambitieux 
Dégoûte  plus  souvent  qu'il  n'est  délicieux. 
Si  dans  la  symétrie  et  dans  l'architecture 

L'œil  ne  rencontre  rien  qui  lui  fasse  d'injure  ,  3o 

Il  est  aisé  de  voir  qu'en  sa  perfection 
Timandre  s'est  réglé  sur  sa  condition. 

Dès  le  premier  abord  l'entrée  est  magnifique  ; 
La  porte  en  sa  façon  n'a  rien  qui  soit  rustique  ; 
L'ouverture  de  front  présente  un  colombier,  35 

Dont  la  fécondité  prodigue  son  gibier. 
A  main  droite ,  la  salle  en  diverses  peintures 
Fait  voir  en  même  temps  diverses  aventures  , 
Et  la  croisée  ouverte  apporte  du  jardin 

Les  parfums  excellents  du  myrte  et  du  jasmin.  4° 

De  suite  la  cuisine  et  les  autres  offices 
Vous  offrent  à  l'envi  leurs  différents  services. 
De  ce  même  côté  s'avance  un  escalier, 
Dont  le  contournernent ,  qui  n'a  rien  de  grossier , 
Vous  oblige  de  voir  des  chambres  de  campagne  ,  4^ 

Où ,  sans  profusion  ,  ce  qui  les  accompagne  , 
Dans  les  proportions  de  leur  ameublement , 
Donne  aux  plus  délicats  du  divertissement. 
La  noix.de  l'escalier,  qui  renferme  un  horloge*, 
Tire  des  curieux  ,  en  passant ,  son  éloge.  5o 

Mais  pendant  que  vos  yeux  remarquent  la  maison  , 
Trente  petits  voleurs ,  retenus  en  prison , 


1 .  «  Horxoge.  Les  Normands  le  font  masculin.  La  rue  du  gros  horloge.  Et 
c'est  aussi  de  ce  genre  que  le  font  les  Gascons  et  les  Provençaux.  Il  est  fémi- 
nin. »  [Observations  de  Monsieur  Ménage  sur  la  langue  Jrancoise .  Segonde 
édition,  Paris,  Barbin,  M.DC.LXXV,  in- 12,  p.  i5i  et  i5î.) 


APPENDICE.  Vl7 

De  mille  accents  divers  vous  frappent  les  oreilles  ; 

Et  comme  disputant  à  qui  fera  merveilles , 

Dégoisant  leurs  ennuis  ,  ces  charmants  prisonniers  55 

A  donner  du  plaisir  ne  sont  pas  les  derniers  ; 

Mais  leurs  tons  si  mignards ,  loin  d'obtenir  leur  grâce  , 

Les  font  mieux  resserrer  en  ce  petit  espace , 

Et  ces  musiciens  si  pleins  d'activité 

Semblent  former  complot  contre  leur  liberté.  Ho 

Après  cette  douceur  ,  et  sortant  de  la  salle 
Pour  voiries  raretés  que  le  jardin  étale, 
L'on  diroit  que  les  fleurs  empruntent  du  soleil 
Le  gracieux  émail  de  cet  arc  sans  pareil , 

Ou  qu'elles  ont  dessein  d'en  être  les  figures,  <iï 

Et  de  pourtraire  au  vif  toutes  ses  bigarrures, 
Tant  la  vivacité  du  divers  coloris 
Forme  naïvement  les  beautés  de  l'iris. 
Là  l'on  voit  s'accorder  Flore  avecque  Pomone  , 
La  poire  pendre  à  l'arbre  auprès  de  l'anémone  ;  70 

Mais  l'on  a  de  la  peine  a  n'être  pas  surpris 
De  ce  nombre  infini  de  tulipes  de  prix  , 
Dont  le  parterre  entier  fait  au  premier  rencontre 
A  l'œil  du  curieux  une  superbe  montre. 

La  rose  cependant  dispute  avec  l'œillet ,  75 

Le  lis  passe  en  blancheur  et  la  neige  et  le  lait; 
L'iris ,  le  martagon  ,  avec  la  giroflée 
Que  la  trop  grande  ardeur  n'a  point  encor  brûlée , 
Le  thym  ,  la  marjolaine  et  l'odeur  du  muguet , 
Tout  cela  vous  fournit  de  quoi  faire  un  bouquet  ;  80 

Et  pour  mêler  encor  l'utile  au  délectable , 
L'on  y  trouve  de  quoi  s'occuper  à  la  table. 
L'on  ne  voit  point  ailleurs  d'asperge  ou  d'artichaut 
Où  la  comparaison  ne  montre  du  défaut. 

En  sortant  du  jardin,  l'on  entre,  dès  la  porte,  85 

Dans  l'admiration  de  l'innombrable  sorte 
Des  curiosités  qu'enferme  un  grand  fruitier. 
Entrant,  à  la  main  droite  on  découvre  un  vivier, 
Dont  l'eau,  sans  avoir  pris  d'un  lieu  plus  haut  sa  course  , 
Dedans  son  propre  fond  sort  d'une  vive  source  :  90 

La  carpe  et  le  mulet,  l'anguille  et  le  barbeau  , 
Coulant  innocemment  leur  vie  au  fond  de  l'eau , 
Sont  prêts  à  la  donner  au  jour  d'une  visite  , 
Quand  Timandre  est  surpris  par  des  gens  de  mérite. 
D'abord  qu'on  va  paroître ,  aussitôt  le  plongeon  96 


3/,8  POÉSIES   DIVERSES. 

S'enfonce  dedans  l'eau  ,  touché  du  moindre  son  ; 

Mais  si  vous  surprenez  la  tremblante  sarcelle , 

Elle  gagne  soudain  sa  niche  à  tire-d'aile  ; 

Et  la  tortue  encor,  dont  l'œil  est  vigilant, 

Prend  la  fuite  aussitôt  à  pas  tardif  et  lent.  ioo 

C'est  un  plaisir  de  voir  les  soins  de  la  nature 
Fournir  dans  cet  étang  diverse  nourriture 
A  tous  ces  animaux  d'espèce  si  divers, 
Dont  les  noms  que  j'ignore  échapperont  mes  vers. 

De  là  s'offre  à  vos  yeux  une  barrière  verte ,  io5 

De  qui  la  balustrade  aux  gens  d'honneur  ouverte  , 
Timandre  en  son  fruitier  leur  partage  à  loisir 
Les  divertissements  auxquels  il  prend  plaisir. 
Là  la  pomme  et  la  poire,  et  la  guigne  et  la  prune  , 
D'une  bonté  de  goût  en  ce  lieu  seul  commune ,  1 10 

Font  peine  à  bien  juger  quel  est  de  meilleure  eau, 
Ou  bien  le  fruit  à  pierre  ',  ou  le  fruit  au  couteau. 
Mais  ainsi  qu'au  jardin  ,  en  ce  fruitier  encore 
L'on  remarque  d'accord  Pomone  avecque  Flore , 
Et  l'on  voit  naître  ici  de  toutes  les  couleurs ,  1 1 5 

Dans  le  nouveau  printemps  ,  un  million  de  fleurs , 
Dont  la  confusion  toute  rare  et  diverse 
Joint  à  celles  d'ici  les  tulipes  de  Perse  ; 
Et  ces  riches  bouquets  sont  si  bien  compassés 
Qu'entre  quatre  pieds  d'arbre  ils  se  trouvent  placés.  120 

Ici  l'ordre  est  gardé  de  la  mathématique  : 
Tant  d'arbres  en  leur  plant  n'ont  point  de  ligne  oblique  ; 
Leurs  pieds  bien  cultivés  et  leur  bois  clair  et  frais 
Preuvent  les  soins  du  maître  ,  et  qu'il  y  fait  des  frais. 

De  ces  arbres  si  beaux  l'épaisse  chevelure  12  5 

Conserve  la  fraîcheur  d'une  molle  verdure, 
Où  divers  animaux,  que  je  ne  connois  pas, 
Treuvent  à  se  cacher  ,  ou  prendre  leur  repas. 
Ici  le  paon  de  mer,  deçà  la  macquerole, 
Et  la  poule  barbare  en  cet  autre  lieu  vole;  i3o 

L'on  voit  en  cet  endroit  courir  le  chevalier , 
De  cet  autre  s'enfuir  le  timide  plouvier2; 
En  ce  lieu  la  perdrix,  dessous  l'herbe  cachée, 

1.  Le  fruit  a  noyau. 

2.  On  dit  et  on  écrit  aujourd'hui  pluvier.  Ces  deux  formes  pluvier  et  plou- 
vicr  se  trouvent  dans  le  Trésor  de  Nicot  en  1606,  et  dans  le  Dictionnaire 
français-anglais  de  Cotgrave  en  161 1. 


APi'KNDICE.  M^ 

Se  dérobe  à  votre  œil ,  se  sentant  approchée  ; 

Bref,  de  ces  raretés  le  plus  grand  partisan  i35 

Satisfait  son  génie  ,  y  treuvant  le  faisan. 

Ainsi  de  tous  côtés  cette  petite  place 

Fourniroit  au  besoin  les  plaisirs  de  la  chasse. 

Mais  surtout  l'excellence  et  le  coup  de  l'ami , 

C'est  de  trouver  un  lièvre  en  son  gîte  endormi  :  140 

A  peine  y  sauroit-on  faire  une  pourmenade , 

Qu'on  n'en  pousse  quelqu'un  devers  la  palissade  , 

Où  par  divers  endroits  pratiqués  à  dessein , 

Aisément  du  chasseur  il  échappe  la  main. 

C'est  où  Flore  et  Pomone  entretiennent  Diane  ,  145 

Qui  se  vient  délasser  dedans  cette  garenne  *. 

Enfin  ce  lieu  charmant ,  si  fertile  en  beautés  , 

A  de  quoi  contenter  ces  trois  divinités. 

Pas  à  pas  on  se  rend  près  d'une  autre  barrière, 
En  façon  ,  en  couleur ,  semblable  à  la  première ,  1  5o 

Où  de  chaque  côté  la  verdure  au  niveau 
Fait  d'excellents  tapis  de  charme  et  de  fouteau2. 
Mais  cette  salle  verte  est  bien  plus  accomplie 
Par  les  charmes  puissants  d'une  muse  polie 
Qui  dessus  une  porte  a  fait  graver  au  net ,  i55 

Ou  peut-être  Apollon  lui-même,  ce  sonnet  : 

Vois  à  loisir  ce  lieu  champêtre  ; 

Les  jours  y  coulent  sans  ennuis  : 

Tâche ,  si  tu  peux ,  de  connoître 

Tant  d'herbes  ,  de  fleurs  et  de  fruits.  160 

Ces  animaux  que  tu  poursuis  , 
Ces  oiseaux  que  tu  vois  paroître , 
Dans  ce  bel  enclos  sont  réduits 
Par  les  soins  et  l'art  de  son  maître. 

Jette  après  la  vue  au  dehors  ,  i65 

Et  voyant  avec  quels  efforts 
La  nature  à  l'envi  le  pare  , 

1.  Ce  mot  est  bien  imprimé  ainsi  garenne,  mais  on  le  prononçait  alors  très- 
souvent  garanne.  Richelet  met  dans  son  Dictionnaire  :  «  Garanne,  gaienne. 
s.  f.  On  dit  garenne,  et  non  pas  garanne  ;  voiez  Garenne.  —  Garannier,  ga~ 
rennier,  on  dit  l'un  et.  l'autre,  mais  garannier  est  présentement  plus  en  usage 
que  garennier.  »  On  voit  combien  la  prononciation  de  ces  mots  était  encore 
incertaine  vers  1680. 

2.  De  hètrc. 


35o  POÉSIES   DIVERSES. 

Demande  à  tes  yeux  enchantés 

S'il  pouvoit  en  un  lieu  plus  rare 

Assembler  tant  de  raretés.  170 

Cette  porte  ,  en  effet ,  et  deux  grandes  croisées 
Cachent  des  nouveautés  à  peindre  malaisées. 
Avant  que  les  ouvrir  ,  Timandre  prend  le  soin 
De  faire  retourner  ses  hôtes  de  plus  loin  : 
Lors,  ouvrant  les  châssis,  l'on  voit  deux  perspectives  ,       175 
D'où  les  prés ,  les  forêts ,  les  montagnes ,  les  rives  , 
Les  bocages  touffus  ,  les  pentes  ,  les  vallons , 
Les  collines  par  onde  en  forme  de  sillons; 
Les  tours  et  les  retours  de  l'agréable  Seine 
Qui  coule  en  serpentant  dans  cette  large  plaine ,  r  80 

Les  vaisseaux  qu'elle  porte  en  son  vaste  canal , 
Son  onde  qui  paroît  un  liquide  cristal  : 
Toutes  ces  raretés  presque  inimaginables , 
Et  dont  la  vérité  passe  toutes  les  *  fables  , 
Sont  les  riches  couleurs  qui  sur  le  naturel  i85 

Font  en  terre  un  crayon  du  séjour  immortel. 

En  sortant  de  ce  parc ,  cette  vue  éloignée 
Devient  à  petits  pas  si  doucement  bornée  , 
Que  la  croupe  du  mont  n'étale  rien  d'affreux  , 
Ni  rien  qui  fasse  peine  à  reposer  les  yeux.  lyo 

Pour  de  là  vous  conduire  à  trois  coups  d'arquebuse, 
Timandre  sait  user  d'une  obligeante  ruse  ; 
Et  le  prétexte  adroit  de  la  fraîcheur  du  bois 
Doit  bientôt  enchanter  votre  œil  une  autre  fois. 

Par  une  verte  allée  où  l'épais  du  feuillage  ip5 

Attire  mille  oiseaux  à  dire  leur  ramage  , 
Presque  insensiblement  sur  un  tertre  élevé  , 
Dont  le  pied  quelquefois  par  la  Seine  est  lavé  , 
L'œil  vous  fait  un  présent  de  la  plus  riche  vue 
Dont  puisse  être  jamais  une  place  pourvue.  200 

Tout  ce  que  l'on  a  vu  jusqu'ici  de  charmant , 
Cet  agréable  lieu  le  montre  éminemment  : 
Par  des  charmes  plus  forts  que  ceux  de  la  Méduse  , 
En  un  moment  le  sens  si  doucement  s'abuse , 
Que  les  autres  privés  de  toutes  fonctions  ,  f.oh 

I  'œil  peut  admirer  seul  tant  de  perfections; 
Et  d'autant  que  la  vue  est  bien  inoins  égarée , 

I,    Il  y  a  ses  dans  l'édition  originale,  mais  cette  leçon  n'a  pas  de  sers. 


APPENDICE.  35i 

L'estime  qu'on  en  fait  est  bien  plus  assurée. 

La  Seine  en  divers  lieux  bat  le  pied  des  rochers  ; 

L'œil  en  se  promenant'  découvre  huit  clochers  %  210 

Dont  les  noms  par  hasard  terminés  tous  en  ville 

Semblent  servir  de  rime  à  celui  d'Hénouville. 

Il  me  semble  ,  Tircis ,  d'un  second  Hélicon 

Où  l'on  va  recueillir  les  faveurs  d'Apollon , 

Puisqu'au  pied  de  ce  mont  ceux  qu'échauffe  sa  veine  ,       2i5 

Pour  éteindre  leur  soif,  rencontrent  la  fontaine 

Qui  leur  va  prodiguant  ses  salutaires  eaux 

Pour  exciter  leur  verve  à  dire  mots  nouveaux. 

Mais  quand  l'heure  avertit  de  faire  la  retraite  , 
Ce  qui  rend  de  nouveau  l'âme  plus  satisfaite  220 

Est  que  la  même  porte  offre  à  lire  ,  au  retour, 
Cet  autre  beau  sonnet,  digne  à  jamais  du  jour: 

L'art  n'a  point  fait  ce  que  tu  vois  , 

Et  la  nature  toute  nue 

Etale  ici  tout  à  la  fois  223 

Ses  plus  doux  charmes  à  ta  vue. 

Vois  la  campagne,  en  deux  endroits , 

S'ouvrir  à  la  Seine  épandue  ; 

Vois  les  montagnes  et  les  bois 

En  borner  la  vaste  étendue;  25o 

Et  puis  ,  faisant  comparaison 
Des  raretés  de  la  maison 
Où  ton  âme  s'est  divertie, 

Dis  tout  haut  qu'un  lieu  si  charmant 

Méritoit  bien  à  sa  sortie  2  35 

Ce  merveilleux  assortiment. 

C'est  ainsi,  cher  Tircis,  que  vit  le  grand  Timandre 
Dont  tu  vois  le  renom  en  tous  lieux  se  répandre  : 
Loin  du  bruit  de  la  cour,  vivant  sous  d'autres  lois, 
Sans  perdre  la  faveur  qu'il  a  près  de  nos  rois  ,  240 

r.  Il  y  a  bien  ici  promenant,  quoiqu'il  y  ait  plus  haut,  vers  r4i>  ponrmenade. 

2.  Une  note  manuscrite  récente,  qui  se  trouve  sur  l'exemplaire  de  la 
bibliothèque  de  Rouen,  désigne  ainsi  ces  huit  clochers:  Bardouville ,  Yville, 
Anneville,  Berville,  Ambourville,  Barneville,  Bocherville,  Saint-Pierre  de  Man- 
neville.  Ce  dernier  nom  est  accompagné  d'un  point  d'interrogation  qui  indique 
sans  doute  que  la  personne  qui  a  écrit  cette  note  n'était  pas  bien  certaine  de 
cette  dernière  attribution 


152  POESIES   DIVERSES. 

Il  quitte  pour  un  temps  l'intrigue  des  affaires. 
Pour  goûter  le  bonheur  des  pâtres  solitaires. 
C'est  ce  qui  me  fera  partout  dans  l'univers 
Publier  hautement  son  mérite  en  mes  vers. 


IV 

(Vojez  la  pièce  XXVIII,  p.  86.) 
ÉPITAPHE  DE  RICHELIEU, 

Attribuée  à   Corneille  par  M.   Taschcreau 

La  Sorbonne  est  heureuse  et  riche  ' 

D'avoir  eu  gratis  un  bien  , 
Pour  lequel  la  maison  d'Autriche 
Eût  donné  la  moitié  du  sien. 


V 

(Voyez  les  pièces  XXXV1I-XXX1X,  p.  125-128.) 
SONNETS  D'URANIE  ET  DE  JOB. 

SONNET    D'URANIE  , 
Par  Voiture. 

Il  faut  finir  mes  jours  en  l'amour  d'Uranie  : 
L'absence  ni  le  temps  ne  m'en  sauroient  guérir, 

1.  Le  premier  vers  est  ainsi  donné  dans  le  Tableau  de  la  vie  et  du  gouver- 
nement de  Messieurs  les  cardinaux  Richelieu  et  Mazarin  : 

Sorbonne  heureuse  et  riche. 

Le  quatrième  y  est  aussi  rédigé  différemment  : 

Pour  qui  la  maison  d'Autriche. 

Ou  trouve  dans  cet  ouvrage  l'autre  épitaphe  que  voici  • 

Ecoutez,  Messieurs  de  Sorbonne. 
Puisque  vous  avez  Richelieu  , 
Votre  fortune  est  belle  et  bonn»  ; 
Gardez-le  bien,  au  nom  de  Dieu 


APPENDICE.  355 

Et  je  ne  \  ois  plus  rien  qui  me  pût  secourir, 
Ni  qui  sût  rappeler  ma  liberté  bannie. 

Dès  longtemps  je  connois  sa  rigueur  infinie  ;  5 

Mais  pensant  aux  beautés  pour  qui  je  dois  périr, 
Je  bénis  mon  martyre,  et  content  de  mourir, 
Je  n'ose  murmurer  contre  sa  tyrannie  ! 

Quelquefois  ma  raison  ,  par  de  foibles  discours  , 

M'incite  à  la  révolte  et  me  promet  secours  ;  ro 

Mais  lorsqu'à  mon  besoin  je  me  veux  servir  d'elle, 

Après  beaucoup  de  peine  et  d'efforts  impuissants , 
Elle  dit  qu'Uranie  est  seule  aimable  et  belle  , 
Et  m'y  rengage  plus  que  ne  font  tous  mes  sens. 


SONNET     DE     JOB  , 
Par  Benserade. 

Job,  de  mille  tourments  atteint, 
Vous  rendra  sa  douleur  connue; 
Mais  raisonnablement  il  craint 
Que  vous  n'en  soyez  pas  émue. 

Vous  verrez  sa  misère  nue  :  5 

Il  s'est  lui-même  ici  dépeint  ; 

Accoutumez-vous  à  la  vue 

D'un  homme  qui  souffre  et  se  plaint. 

Quoiqu'il  eût  d'extrêmes  souffrances, 

On  voit  aller  des  patiences  io 

Plus  loin  que  la  sienne  n'alla. 

Il  eut  des  peines  incroyables; 
Il  s'en  plaignit ,  il  en  parla  : 
J'en  connois  de  plus  misérables. 


Corneille,  x 


35/f  POÉSIES   DIVEKSES. 

VI 

(Voyez  la  Notice,   p.    18    et  19.) 

DEUX  SONNETS,  SIGNÉS  C, 

Publiés  dans  les  Poésies  choisies,  chez  Sercy,  et  attribués 
par  M.  P.  Lacroix  à  Pierre  Corneille. 

Sonnet  publié  à  la  page  3o4  de  la  première  partie  des  Poésies  choisies, 

en  i653. 

Une  troupe  servile ,  inconstante  ,  folâtre  , 
Au  service  d' autrui  passe  ses  plus  beaux  jours , 
Et  croit  avoir  grand'part  à  la  splendeur  des  cours , 
Où  l'on  voit  que  le  luxe  a  doré  jusqu'au  plâtre. 

Mais  la  vertu  n'est  là  que  vertu  de  théâtre  :  5 

Le  vice  y  tient  l'empire  et  porte  ie  velours  ; 
Les  fourbes  sont  adroits;  les  bons,  des  esprits  lourds  *  ; 
Enfin  pour  s'avancer  il  faut  être  idolâtre. 

Pour  moi,  je  m'en  retire,  instruit  à  mes  dépens 

Que  de  vivre  en  esclave  est  un  malheur  extrême  10 

Qu'accompagnent  toujours  mille  soucis  flottants. 

Aux  autres  j'ai  vécu  ;  je  veux  vivre  à  moi-même, 
Sans  avoir  de  mes  faits  l'univers  pour  témoin  : 
Si  j'ai  moins  de  désirs  ,  je  n'ai  pas  tant  de  soin. 


Sonnet  imprimé  à  la  page  365  de  la  réimpression,  de  i658,  de  la 
troisième  partie  des  Poésies  choisies,  publiées  d'abord  en  i656. 

Que  me  sert  qu'on  m'écoute  avec  tant  de  transports  ? 
Bien  loin  de  s'avancer ,  ma  fortune  recule  , 
Et  si2  d'aller  plus  outre  on  fait  un  tel  scrupule 
Qu'Apollon  est  le  seul  qui  m'ouvre  ses  trésors. 

I.   L'édition  originale  porte  sourds,  au  lieu  de  lourds. 

1.   Si  a  ici  le  sens  de  pourtant  ■  il  exprime  une  opposition  et  non  uu  doute. 


APPENDICE.  355 

Cependant  mon  esprit  s'use  ainsi  que  mon  corps;  5 

En  vain  pour  me  flatter  je  me  le  dissimule  : 
Je  deviendrai  bientôt  muet  ou  ridicule  ', 
Et  ma  force  s'épuise  en  continus  efforts. 

Pour  tout  fruit  d'une  vie  en  travail  consumée, 

Il  ne  me  va  rester  qu'un  peu  de  renommée ,  10 

Qu'un  souvenir  flatteur  d'avoir  fait  quelque  bruit. 

O  d'un  métier  si  noble  indignités  étranges, 
Qu'un  siècle  à  nos  labeurs  prodigue  de  louanges 
N'assure  que  du  vent  au  repos  qui  les  suit  ! 


VII 

VERS  IMITÉS  DE  LUCAIN  ET  D'HORACE , 

Et  attribués  à  Pierre   Corneille. 

Tout  le  monde  connaît  ces  vers  de  Brébeuf  :     * 

C'est  de  lui  que  nous  vient  cet  art  ingénieux 
De  peindre  la  parole  et  de  parler  aux  yeux  , 
Et  par  les  traits  divers  de  figures  tracées 
Donner  de  la  couleur  et  du  corps  aux  pensées. 

C'est  une  excellente  paraphrase  de  ce  passage  de  laPharsale  (livre  III, 
vers  220  et  221)  : 

Phœnices  primi,  famœ  si  creditur,  ausi 
Mansuram  rudibus  vocem  signare  figuris. 

Notre  poëte,  si  passionné  pour  Lucain,  admirait  fort  en  cet  endroit 
son  traducteur,  qui,  comme  nous  l'avons  remarqué  ailleurs  (tome  IV, 
p.  i3,  note  3),  avait  publié  en  i653  les  premiers  livres  de  sa  Pharsale. 
A  en  croire  Coste2,  a  M.  Corneille  disoit  qu'il  auroit  donné  deux 

1 .  Ces  deux  vers  rappellent  les  suivants,  qu'on  lit  dans  la  pièce  intitulée  :  la 
Poésie  à  la  Peinture  (ci-dessus,  p.  118,  vers  41  et  42)  : 

Pour  trop  m'en  plaindre  en  vain  je  deviens  ridicule  , 
Et  l'on  ne  m'entend  pas,  ou  l'on  le  dissimule. 

2.  Apologie  de  la  Bruyère,   1701,  in-12,  p.  177. 


356  POÉSIES   DIVERSES. 

de  ses  meilleures  pièces  pour  ces  quatre  vers.  »  Coste  n'ajoute  rien 
à  ce  que  nous  venons  de  rapporter,  mais  Bruzen  de  la  Marlinière 
continue  et  complète  cette  anecdote.  Après  avoir  parlé  des  vers  de 
Brébeuf  :  «  On  ne  sera  pas  fâché,  ajoute-t-il1,  que  je  dise  à  cette 
occasion  ce  qui  arriva  au  fameux  Corneille,  après  avoir  lu  les  quatre 
vers  que  Brébeuf  a  faits  sur  l'art  d'écrire  inventé  par  les  Tyriens.  Il 
voulut  les  égaler  par  quatre  autres  que  nous  donnerons  ici  : 

C'est  d'elle  que  nous  vient  le  fameux  art  d'écrire, 
Cet  art  ingénieux  de  parler  sans  rien  dire , 
Et  par  les  traits  divers  que  notre  main  conduit 
D'attacher  au  papier  la  parole  qui  fuit.  » 

Voilà  de  jolis  vers,  dont  l'ingénieuse  souplesse  nous  paraît  toutefois, 
autant  qu'il  est  permis  de  se  prononcer  en  pareille  matière,  bien 
peu  dans  le  goût  de  Corneille,  et  où  nous  sommes  fort  tenté  de  voir 
l'effort  heureux  de  quelque  versificateur  du  commencement  du  dix- 
huitième  siècle. 

Nous  ne  croyons  guère  non  plus  à  l'authenticité  des  quatre  vers 
contenus  dans  une  autre  anecdote  que  nous  allons  rapporter.  «  M.  Cor- 
neille avoit  un  abord  sombre,  parlant  peu  avec  des  gens  qu'il  ne 
connoissoit  pas  de  longue  main,  peu  de  brillant  avec  eux;  mais  lors- 
qu'il étoit  excité  par  une  société  qui  lui  étoit  familière,  et  qu'elle 
étoit  composée  de  véritables  gens  d'esprit,  il  retrouvoit  alors  cette 
vive  imagination  qu'il  paroissoit  avoir  laissée  dans  son  cabinet.  L'on 
ne  voyoit  plus  le  même  homme  :  c'étoit  un  génie  du  premier  ordre, 
capable  d'imposer  infiniment  par  ses  réflexions,  et  de  faire  un  im- 
promptu admirable  sur  le  sujet  de  la  conversation  ou  de  la  première 
matière  que  l'on  agitoit.  Dans  un  de  ces  entretiens  dont  je  parie ,  un 
ami  lui  récitant  ces  vers  d'Horace  fode  xvm  du  livre  II,  vers  i5 
et  16)  : 

Truditur  dies  die, 
Novseque  pergunt  interire  lunée t 

il  leur  donna  ce  sens  dans  le  moment  : 

Chaque  instant  chasse  l'autre,  et  lui-même  a  son  tour 
Cède  à  celui  qui  va  le  suivre  : 


i.    Nouveau  recueil  des  Epigrammalistes   francois ,    1720,  in- 12,    tome    l, 
p.  104  et  io5. 


APPENDICE.  357 

Nous  ne  pouvons  pus  vivre  un  jour 
Sans  avoir  moins  d'un  jour  a  vivre.  » 

[Ana  ou  Bigarrures  calotiues,  Paris,  1780,  etc.,  quatrième  partie, 
p.  9  et  10.) 

Ces  vers ,  qu'il  ne  faut  accepter  comme  étant  de  Corneille  que  sous 
bénéfice  d'inventaire,  ont  été  réunis  par  M.  Edouard  Fournier  dans 
une  note  d'un  article  de  la  Revue  des  provinces  intitulé  :  Deux  lettres 
inédites  de  P.  Corneille,  tome  VI,   i5  février  l865,  p.  3s3  et  3î4« 


VIII 

\ 

Voyez  la  Notice,  p.  20  et  21.) 

ÉPIGRAMMES  ATTRIBUÉES  A  CORNEILLE. 

La  bibliothèque  de  l'Arsenal  possède  un  recueil,  relié  en  un  vo- 
lume in-12,  divisé  en  trois  parties  et  portant  le  n°  y3o6B,  dont  la 
composition  est  assez  singulière.  On  trouve  d'abord  :  Poésies  choi- 
sies..., première  partie ,  quatriesme  édition,  reueue ,  corrigée  et  aug- 
mentée. Au-dessous  de  ce  titre  est  un  fleuron  avec  cette  mention  : 
Iouxte  la  copie  imprimée,  et  ensuite  l'adresse  et  la  date  :  A  Paris,  chez 
Charles  de  Sercy,  M.DC.LV.  Ce  n'est  là  qu'une  réimpression  de 
la  première  partie  des  Poésies  choisies  de  Sercy,  publiée  pour  la  pre- 
mière fois  en  i653,  et  que  nous  avons  longuement  décrite  dans  la 
Notice  (p.  17  et  18).  Bien  qu'en  i655  la  seconde  partie  des  Poésies 
de  Sercy  eût  déjà  paru,  nous  trouvons  au  lieu  d'elle,  dans  le  vo- 
lume de  l'Arsenal,  à  la  suite  de  la  première,  un  Recueil  de  diverses 
poésies  des  plus  célèbres  autheurs  de  ce  temps,  seconde  partie,  reueu, 
corrigé  et  augmenté,  avec  la  mention  :  Iouxte  la  copie  imprimée,  l'adresse 

suivante:  A  Paris,  chez  Louis  Chamoudry et  la  date  de  M.DC.LV. 

Enfin  vient  le  Nouveau  recueil  de  poésies  des  plus  célèbres  autheurs 
du  temps,  troisième  partie,  reueue,  corrigée  et  augmentée ,  avec  même 
mention,  même  adresse  et  même  date  qu'au  recueil  précédent.  La 
pagination  continue  de  la  seconde  partie  à  la  troisième.  En  tête  du 
second  recueil ,  le  titre  et  quatre  feuillets  imprimés  en  italique  ne 
comptent'  point  dans  la  pagination  :  c'est  au  recto  du  premier  de  ces 


558  POÉSIES    DIVERSES. 

feuillets  qu'on  lit  la  pièce  suivante,  qui  a  été  recueillie  par  M.  Paul 
Lacroix  dans  le  Bulletin  du  bouquiniste  (8e  année,  Ier  semestre,  p.  5?.). 

D'un  Poète  écrivain,  qui  détaché  des  occupations  de  sa  plume,  pour  vaquer 
à  celles  de  la  guerre,  dit  qu'il  coupe  sa  plume  avecque  son  épée. 

ÉPIGRAMME    DE    MONSIEUR    CORNEILLE. 

Ce  petit  fanfaron  à  l'œillade  échappée 
S'estime  grand  auteur  et  n'est  qu'un  animal, 
Dit  qu'il  coupe  sa  plume  avecque  son  épée  : 
Je  ne  m'étonne  pas  s'il  en  écrit  si  mal. 

Bien  loin  de  pouvoir  être  attribuée  à  Corneille,  cette  pièce  paraît 
dirigée  contre  un  de  ses  partisans  ;  en  effet,  nous  lisons  à  la  fin  du 
pamphlet  intitulé  :  le  Souhait  du  Cid  en  faueur  de  Scuderi.  Vne  paire 
de  lunettes  pour  faire  mieux  ses  ohseruations,  cette  conclusion  que  nous 
avons  déjà  rapportée  (tome  111,  p,  16)  :  «  On  me  connoîtra  assez  si 
je  dis  que  je  suis  celui  qui  ne  taille  point  sa  plume  qu'avec  le  tran- 
chant de  son  épée,  qui  hait  ceux  qui  n'aiment  pas  Chimène,  et  ho- 
nore infiniment  celle  qui  Ta  autorisée  par  son  jugement,  procurant 
à  son  auteur  la  noblesse  qu'il  n'avoit  pas  de  naissance.  » 

Du  reste  M.  Edouard  Fournier  nous  a  fait  remarquer  que  la  ré- 
ponse qui  est  la  pointe  de  cette  épigramme  se  trouve  déjà  mention- 
née dans  les  Historiettes  de  Tallemant  des  Réaux,  et  que  l'épigramme 
elle-même  figurait  dès  1649  dans  les  OEuvres  de  Saint- Amant.  Voici 
le  passage  de  Tallemant  des  Réaux  :  a  D'Audiguier,  auteur  de  Lisan- 
dre  et  Caliste,  disoit  à  Théophile  qu'il  ne  tailloit  sa  plume  qu'avec 
son  épée  :  «  Je  ne  m'étonne  donc  pas,  lui  dit  Théophile,  que 
«  vous  écriviez  si  mal.  »  [Historiettes,  tome  VII,  p.  4^1.) 

Quant  à  l'épigramme,  elle  figure  à  la  page  127  de  la  troisième 
partie  (in-40)  des  OEuvres  de  Saint-Amant  publiée  en  1649;  elle  y 
porte  pour  titre  :  Epigramme  sur  un  écrivain  de  Gascogne  ;  les  vers  2 
et  3  y  sont  ainsi  rédigés  : 

Qui  fait  le  grand  auteur  et  n'est  qu'un  animal, 
Dit  qu'il  tranche  sa  plume  avecque  son  épée. 

Nous  ne  terminerons  pas  cet  article  sans  mentionner  une  autre 
épigramme,  que  nous  croyons  avoir  déjà  rencontrée  dans  quelque 
recueil  avec  la  signature  de  son  véritable  auteur,  mais  qui  est  attri- 


APPENDICE.  359 

buée  en  ces  termes  à  Corneille  par  Guyot  de  Pitaval  dans  sa  Biblio- 
thèque de  cour,  de  ville  et  de  campagne x  :  «  Un  poëte  de  la  même  classe 
(un poète  médiocre)  avoit  le  talent  de  la  déclamation,  ses  vers  dans  sa 
bouche  imposoient;  le  grand  Corneille  lui  envoya  ce  quatrain  : 

Tes  vers  sont  beaux  quand  tu  les  dis, 
Us  ne  sont  rien  quand  je  les  lis  ; 
Tu  ne  peux  pas  toujours  les  dire  : 
Fais-en  donc  que  je  puisse  lire. 

C'est  encore  à  l'inépuisable  obligeance  de  M.  Edouard  Fournier  que 
nous  devons  cette  communication. 


IX 

(Voyez  la  Notice,  p.  20.) 
DEUX  SONNETS  POUR  TLMOCRATE2. 

Endymion5  est  mort  :  cet  illustre  champêtre 
Est  déjà  descendu  dedans  le  monument. 
Chacun  est  demeuré  dans  un  étonnement 
De  Tavoir  vu  mourir  presque  aussitôt  que  naître. 

Tous  les  grands  spectateurs  qui  le  virent  paroîtie  5 

Disent  que  le  Soleil  fît  mourir  cet  amant  ; 
Mais  ils  se  sont  trompés ,  et  dedans  un  moment 
Vous  connoîtrez  celui  qui  Ta  fait  cesser  d'être. 

Non,  Apollon  n'est  point  le  sujet  de  sa  mort , 

Et  ce  n'est  point  par  lui  qu'il  a  fini  son  sort  :  10 

L'auteur  de  son  trépas  assez  souvent  éclate. 


1.  Nouvelle  édition,  Paris,  Théodore  le  Gras,  1746,  7  vol.  in-12,  tome  I, 
p.  241. 

2.  Tl  s'agit  ici  de  la  tragédie  de  Timocrate ,  de  Thomas  Corneille,  jouée, 
suivant  les  frères  Parfait,  en  novembre  i656,  au  théâtre  du  Marais. 

3.  Les  Amours  de  Diane  et  d' Endymion  ,  par  Gilbert.  Yoyez  ci-dessus  la 
notice  qui  est  en  tête  de  la  pièce  LI,  p.  i54.  Les  frères  Parfait,  comme  nous 
l'avons  dit,  en  fixent  la  première  représentation  à  l'année  1657,  mais  il  semble 
évident  qu'elle  est  un  peu  antérieure. 


}6o  POÉSIES   DIVERSES. 

Qu'ils  sachent  que  celui  qui  lui  perça  le  cœur, 

Et  qui  d'Endymion  est  demeuré  vainqueur, 

N'est  point  l'astre  du  jour  :  c'est  le  grand  Timocrate, 


Déplorables  jaloux,  dont  les  noires  envies, 
De  Don  Sanche  et  Pompée  étalent  les  appas , 
Et  vantant  Nicomède,  Horace  et  Venceslas* , 
Veulent  dans  Timocrate  en  trouver  des  copies, 

Le  chimérique  orgueil  de  vos  antipathies  5 

En  croit  par  là  servir  les  surprenants  éclats , 
Comme  si  c'étoit  peu  d'égaler  de  tels  pas, 
Et  former  un  beau  tout  de  ces  nobles  parties  ! 

Apprenez  qu'élever  de  pompeux  bâtiments 

Sur  un  brillant  amas  d'illustres  fondements  10 

Porte  un  nom  au-dessus  de  la  gloire  commune. 

De  semblables  larcins  sont  de  grands  coups  de  l'art, 
Et  quand  dans  ce  chef-d'œuvre  on  n'auroit  d'autre  part , 
C'est  beaucoup  d'assembler  tant  de  beautés  en  une. 

Ces  deux  sonnets  se  trouvent  dans  les  Muses  illustres  de  MM.  Mal- 
herbe, Théophile  et  Ce ,  publiées  par  François  Colletet,  Paris, 
Chamoudry,  i658,  in-12,  p.  148  et  suivantes.  Ils  sont  anonymes 
dans  le  recueil;  mais  on  lit  à  la  table  :  Deux  sonnets  pour  Timocrate. 
Corneille.  M.  Paul  Lacroix  les  attribue  à  Pierre2;  nous  les  croyons 
plutôt  de  Thomas. 


1.  Venceslas,  -tragédie  de  Rotrou,  représentée  en  1648. 

2.  Bulletin  du  bouquiniste  (8e  année,  iep  semestre,  p.  53). 


APPENDICE.  36i 

X 

(Voyez  les  pièces   XL VIII  et  XLIX,    p.    i5o-i5-2.) 
NOTE   SUR  MADEMOISELLE  SERMENT, 

ET   RÉPONSE  DE   L'iNCOMPÀRABLE  SAPHO. 

La  Biographie  du  Dauphiné  de  M.  Ad.  Rochas  nous  apprend 
(tome  II,  p.  4QI)  que  Louise-Anastasie  Serment  était  née  à  Grenoble 
vers  1642;  elle  n'aurait  donc  guère  eu  que  dix-sept  ans  au  moment 
où,  suivant  l'abbé  Granet,  Corneille  lui  adressait  les  deux  madrigaux 
auxquels  nous  venons  de  renvoyer  le  lecteur.  En  cette  circonstance 
encore  les  doucereux  furent  pour  Corneille  de  dangereux  rivaux.  S'il 
faut  en  croire  le  poète  Pavillon ,  Mlle  Serment  fut  un  peu  plus  que 
l'amie  de  Quinault1;  et  Mau croix ,  tout  en  la  traitant  de  prude2, 
essayait  de  se  faire  agréer  par  elle,  et  de  la  détourner  de  l'attachement 
qu'elle  avait  pour  Corneille  ;  les  stances  que  voici  en  font  foi 

Cloris  ,  je  vous  le  dis  toujours  , 
Ces  faiseurs  de  pièces  tragiques  , 
Ces  chantres  de  gens  héroïques 
Ne  chantent  pas  bien  les  amours. 

De  beaux  mots  leurs  œuvres  sont  pleines  ;  5 

Ils  sont  sages  comme  Catons  , 
Ils  sont  discrets  pour  les  Hélènes, 
Et  muets  pour  les  Jeannetons. 

Tout  ce  qu'on  nomme  bagatelle 

Déplaît  à  ces  rares  esprits  :  10 

On  diroit  qu'ils  sont  en  querelle 

Avec  les  Grâces  et  les  Ris. 

Pour  moi  qui  hais  la  muse  austère 
Et  la  gravité  de  ses  tons, 

1.  Voyez  Maucroix,  OEuvres  diverses  publiées  par  M.  Louis  Paris,  i854, 
in-12,  p.  209. 

2.  Voyez  Y  Histoire  de  V  Académie  francoise,  par  Pellisson  et  d'Olivet.  édi- 
tion de  M.  Livet,  tome  II,  p.  162. 


562  POÉSIES    DIVERSES. 

Je  vous  ai  choisi  ma  bergère  1 5 

Pour  le  sujet  de  mes  chansons. 

M.  Louis  Paris  donne  à  cette  jolie  petite  pièce  la  date  de  mai  i685. 
«  Ce  doit  être  certainement  une  erreur ,  dit  M.  Edouard  Fournier 
(  Notes  sur  la  vie  de  Corneille  ,  p.  xxxm  ).  Mlle  Serment  aurait  eu 
alors  plus  que  la  quarantaine ,  et  Maucroix  ne  lui  eût  pas  parlé  sur 
ce  ton.  »  Corneille  d'ailleurs  n'existait  plus  à  cette  époque,  et  il 
faudrait  se  mettre  en  quête  de  quelque  nouvel  adorateur  tragique. 
Mlle  Serment  n'arriva  pas  à  la  vieillesse  ;  elle  mourut  à  Paris 
vers  1692  ,  quand  elle  commençait  à  recevoir  un  peu  moins  d'a- 
gréables billets  et  de  poésies  galantes. 

RÉPONSE   DE   L'INCOMPARABLE    SAPUO. 

Si  vous  parlez  sincèrement 
Lorsque  vous  préférez  la  main  gauche  à  la  droite, 
De  votre  jugement  je  suis  mal  satisfaite  : 
Le  baiser  le  plus  doux  ne  dure  qu'un  moment  * 
Un  million  de  vers  dure  éternellement, 
Quand  ils  sont  beaux  comme  les  vôtres  ; 

Mais  vous  parlez  comme  un  amant, 

Et  peut-être  comme  un  normand: 

Vendez  vos  coquilles  à  d'autres. 


XI 

(Voyez  la  Notice,  p.  19  et  20  ;  et  la  pièce  XL VII , 
p.  141  et  suivantes.) 

ÉLÉGIE. 

Cette  pièce,  signée  simplement  Corneille  dans  les  Poésies  choisies 
de  1660  (p.  83),  figure  dans  le  recueil  manuscrit  de  Conrart  (tome  IX, 
p.  9 15-917)  à  la  suite  de  la  pièce  Sur  le  départ  d'Iris;  elle  y  est  intitulée  : 
Déclaration  d'amour  à  Iris ,  et  on  lit  en  marge  :  «  C'est  la  mesme  co- 
médienne pour  qui  Corneille  l'aisné  a  fait  une  autre  elegie  qui  com- 
mence : 

Allez,  charmante  Iris ,  etc.  » 

Celle-ci  est  signée  :  Corneille  le  cadet,  et  il  n'est  pas  possible  de 


APPENDICE.  $(53 

douter  de  l'exactitude  de  cette  attribution  quand  on  remarque  la 
différence  de  ton  qui  existe  entre  la  pièce  de  vers  Sur  le  départ  de 
Madame  la  marquise  de  B.  A.  T.  et  celle  qui  nous  occupe  actuellement. 
Dans   la  première  Corneille,  le  Corneille  du   Cid  et  de  Y  Excuse  à 

Ariste,  dit  (vers  57  et  58)  : 

. . .  Vous  aimez  la  gloire ,  et  vous  savez  qu'un  roi 
Ne  vous  en  peut  jamais  assurer  tant  que  moi; 

tandis  que  l'auteur  de  l'élégie  qu'on  va  lire  se  regarde  comme  un 
captif  indigne  des  chaînes  d'Iris  : 

Iris,  je  vais  parler,  c'est  trop  de  violence. 

Il  est  temps  que  mon  feu  se  dérobe  au  silence  , , 

Et  qu'il  fasse  échapper  au  respect  qui  me  nuit 

L'aveu  du  triste  état  où  vous  m'avez  réduit. 

Depuis  le  jour  fatal  que  pour  vous  je  soupire,  5 

Mes  yeux  se  sont  cent  fois  chargés  de  vous  le  dire , 

Et  cent  fois,  si  mon  mal  vous  pouvoit  émouvoir  , 

Leur  mourante  langueur  vous  l'auroit  fait  savoir. 

Mais  les  vôtres ,  partout  certains  de  leur  victoire , 

D'une  obscure  conquête  estiment  peu  la  gloire  ,  10 

Et  veulent ,  pour  daigner  en  faire  part  au  cœur, 

Que  l'éclat  du  triomphe  en  apporte  au  vainqueur. 

C'est  par  là  que  jaloux  de  l'orgueil  qui  l'inspire  , 

Ce  cœur  n'a  point  sur  moi  reconnu  son  empire  ; 

Que  mettant  ma  défaite  au-dessous  de  ses  soins  ,  i5 

Il  en  a  récusé  mes  soupirs  pour  témoins  , 

Et  craint  de  s'exposer }  s'il  avouoit  mes  peines , 

A  rougir  d'un  captif  indigne  de  vos  chaînes  2. 

Je  le  confesse  ,  Iris,  il  n'est  point  parmi  nous 
De  mérite  assez  haut  pour  aller  jusqu'à  vous.  20 

A  voir  ce  que  je  suis,  tout  mon  espoir  chancelle; 
Mais  le  peu  que  je  vaux  ne  vous  rend  pas  moins  belle  : 
J'ai  des  yeux  comme  un  autre  à  me  laisser  charmer; 
J'ai  comme  un  autre  un  cœur  ardent  à  s'enflammer; 
Et  dans  les  doux  appas  ,  dont  vous  êtes  pourvue  ,  2  5 


t.   Var.    [1  faut  qu'enfin  mon  feu  se  dérobe  au  silence, 
Et  qu'il  fasse  échapper  au  respect  qui  lui  nuit. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
2.  Var.  A  rougir  du  captif  qui  languit  dans  vos  chaînes. 

(Manuscrits  dp  Conrart.) 


564  POÉSIES  DIVERSES 

J'ai  dû  brûler  pour  vous  ,  puisque  je  vous  ai  vue. 

Oui,  de  votre  beauté  l'éclat  impérieux 
Touche  aussitôt  le  cœur  qu'il  vient  frapper  les  yeux  ; 
Ce  n'est  point  un  brillant  dont  la  fausse  lumière 
Ne  fasse  qu'éblouir  au  moment  qu'elle  éclaire  ;  3u 

Ce  n'est  point  un  effort  de  charmes  impuissants 
Qui  prennent  pour  appui  la  surprise  des  sens  : 
Quoi  qu'en  nous1  leur  rapport  vante  d'un  prix  extrême, 
La  raison  convaincue  y  souscrit  elle-même , 
Et  sans  appréhender  de  le  voir  démenti,  35 

Par  son  propre  suffrage  affermit  leur  parti2. 

Alors  que  ne  peut  point  sur  les  plus  belles  âmes  8 
Ce  vif  amas  d'attraits,  cette  source  de  flammes , 
Ces  beaux  yeux  qui  portant  le  jour  de  toutes  parts 
Font  autant  de  captifs  qu'ils  lancent  de  regards  !  4° 

Alors  que  ne  peut  point  ce  pompeux  assemblage 
Des  traits  les  plus  perçants  dont  brille  un  beau  visage, 
Et  qui  dessus  le  vôtre  étalent  hautement 
Ce  qu'ailleurs  cent  beautés  font  voir  de  plus  charmant  ! 
Aussi  que  leur  adresse  aux  dons  de  la  nature  45 

Ajoute  encor  de  l'art  la  plus  douce  imposture, 
Que  de  lis  empruntés  leur  visage  soit  peint , 
On  les  verra  pâlir  auprès  de  votre  teint , 
Ce  teint  dont  la  blancheur ,  sans  être  mendiée  , 
Passe  en  vivacité  la  plus  étudiée,  5o 

Et  pare  avec  orgueil  le  plus  brillant  séjour 
Où  les  Grâces  jamais  aieut  attiré  l'amour. 
C'est  là  ,  c'est  en  vous  seule  ,  Iris  ,  que  l'on  doit  croire 
Qu'aimant  à  triompher  ,  il  triomphe  avec  gloire  , 
Et  qu'il  trouve  aussitôt  de  quoi  s'assujettir  55 

Quiconque  de  ses  traits  s'étoit  pu  garantir4. 
Pour  moi  ,  je  l'avouerai  ,  comme  aucune  surprise 
N'avoit  jusques  ici  fait  trembler  ma  franchise, 


i .  Plusieurs  éditions  récentes  portent  vous,  au  lieu  de  nous.  Cette  modifica- 
tion, qui  n'est  pas  indispensable,  donne  cependant  un  sens  plus  clair,  et  pour- 
rait être  acceptée. 

2.  Var.  Par  son  propre  suffrage  affermit  son  parti. 

(.Manuscrits  de  Conrart.) 

3.  Ce  vers  et  les  trois  suivants  manquent  dans  les  manuscrits  de  Con- 
rart. 

4-  Var.  Quiconque  de  ses  traits  se  voudroit  garantir. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 


APPENDICE.  m 

Permettant  à  mes  yeux  Theur  de  vous  regarder  ', 

Mon  cœur  trop  imprudent  ne  crut  rien  hasarder.  fSo 

Ainsi  de  vos  beautés,  qu'on  vantoit  sans  pareilles. 

Je  voulus  à  loisir  contempler  les  merveilles  ; 

Ainsi  j'examinai  tous  ces  riches  trésors 

Que  prodigua  le  ciel  à  former  votre  corps , 

Ce  corps  noblement  fier,  cette  taille  divine8,  65 

Qui  par  sa  majesté  marque  son  origine, 

Seule  égale  à  soi-même,  et  tellement  à  vous, 

Que  la  formant  unique  ,  il  s'en  montra  jaloux. 

De  tant  d'appas  divers  mon  âme  possédée 

Se  plut  d'en  conserver  la  précieuse  idée  :  70 

Je  l'admirai  sans  cesse  ,  et  de  mon  souvenir , 

Ne  croyant  qu'admirer  ,  j'eus  peur  de  la  bannir. 

Mais  de  ce  sentiment  la  flatteuse  imposture 

N'empêcha  pas  le  mal  pour  cacher  la  blessure  j 

Et  ce  soin  d'admirer  qui  dure  plus  d'un  jour,  yS 

S'il  n'est  amour  déjà,  devient  bientôt  amour. 

Un  je  ne  sais  quel  trouble  où  je  me  vis  réduire 

De  cette  vérité  sut  assez  tôt  m'instruire  : 

Par  d'inquiets  transports  me  sentant  émouvoir, 

J'en  connus  le  sujet  quand  j'osai  vous  revoir.  80 

A  prendre  ce  dessein  mon  âme  toute  émue 

Eut  peine  à  soutenir  l'éclat  de  votre  vue  ; 

Mon  cœur  en  fut  surpris  d'un  doux  saisissement 

Qui  me  fit  découvrir  que  j'allois  être  amant  : 

Un  désordre  confus  m'expliqua  son  martyre  ;  85 

Je  voulus  vous  parler,  et  ne  sus  que  vous  dire  ; 

Je  rougis ,  je  pâlis,  et  d'un  tacite  aveu  : 

s  Si  je  n'aime  point ,  dis  je ,  hélas  !  qu'il  s'en  faut  peu  !   t 

Soudain  ,  le  pourrez-vous  apprendre  sans  colère  ? 
Je  jugeai  la  révolte  un  parti  nécessaire  ;  90 

Et  je  n'épargnai  rien  dans  cette  extrémité 
Pour  soulever  mon  cœur  contre  votre  beauté. 
L'ardeur  de  dégager  ma  franchise  asservie 
Me  fit  prendre  les  yeux  de  la  plus  noire  envie8: 

f.   Var.  En  souffrant  à  mes  yeux  l'heur  de  vous  regarder, 
Mon  cœur  trop  imprudent  n'y  crut  rien  hasarder. 
(Manuscrits  de  Conrart.) 

2.  Var.  Ce  port  et  noble  et  fier,  cette  taille  divine. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
j.  Noble  envie ,  dans  les  Poésies  choisies;  mais  c'est  une  faute  évidente. 


366  POÉSIES    DIVERSES. 

Je  ne  m'attachai  plus  qu'à  chercher  des  défauts  95 

Qui  détruisant  ma  flamme  adoucissent  mes  maux; 
Mais  las  !  cette  recherche  un  peu  trop  téméraire  * 
Produisit  à  sa  cause  un  effet  bien  contraire  ; 
Et  vos  attraits  par  elle  à  mes  sens  mieux  offerts2, 
Au  lieu  de  les  briser  redoublèrent  mes  fers.  100 

Plus  je  vous  contemplai ,  plus  je  connus  de  charmes3, 
Contre  qui  ma  raison  me  refusa  des  armes  ; 
Et  sans  cesse  l'amour  ,  par  de  vives  clartés, 
Me  découvrit  en  vous  de  nouvelles  beautés. 
Tout  ce  que  vous  faisiez  étoit  inséparable  io5 

De  ce  je  ne  sais  quoi  sans  qui  rien  n'est  aimable; 
Tout  ce  que  vous  disiez  avoit  cet  air  charmant 
Qui  des  plus  nobles  cœurs  triomphe  en  un  moment. 
J'en  connus  le  pouvoir,  j'en  ressentis  l'atteinte4; 
Contraint  de  vous  aimer,  j'aimai  cette  contrainte  ;  1 10 

Et  je  n'aspirai  plus ,  par  mille  vœux  offerts , 
Qu'à  vous  faire  avouer  la  gloire  de  mes  fers8. 
Y  consentirez-vous  ,  belle  Iris  ?  et  pourrai-je 
Promettre  à  mes  désirs  ce  charmant  privilège  ? 
Je  ne  demande  point  que  sensible  à  mon  feu  1 15 

L'assurance  du  vôtre  en  couronne  l'aveu  ; 
Je  ne  demande  point  qu'à  mes  vœux  favorable 
Vous  vous  montriez  amante  en  vous  montrant  aimable  , 
Et  que  par  un  transport  qui  n'examine  rien  , 
Le  don  de  votre  cœur  suive  l'offre  du  mien  :  120 

Quoi  qu'on  ait  fait  pour  vous  et  de  grand  et  d'insigne  , 
C'est  un  prix  glorieux  dont  on  n'est  jamais  digne, 
Et  que  ma  passion  me  faisant  désirer  , 
L'excès  de  mes  défauts  me  défend  d'espérer. 
Permettez  seulement ,  pour  flatter  mon  martyre,  12S 

Que  vous  osant  aimer,  j'ose  aussi  vous  le  dire; 
Qu'à  vos  pieds  mon  respect  apporte  chaque  jour 

1     Var.  Mais  las!  cette  recherche  et  vaine  et  témëraiie. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

2.  Var..   Et  vos  attraits  par  elle  à  mes  yeux  mieux,  offerts. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 

3.  Var.  Plus  je  vous  observai,  plus  je  connus  de  charmes. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
^.   Var.  J'en  sentis  les  effets,  j'en  éprouvai  l'atteinte. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 
5.    Vau.  Qu'a  vous  voir  avouer  la  gloire  de  mes  fers. 

(Manuscrits  de  Conrart.) 


APPENDICE.  367 

Les  serments  redoublés  d'un  immuable  amour  ; 

Que  là ,  par  son  ardeur  ,  je  vous  fasse  connoître 

Qu'étant  pur  et  sincère  il  doit  toujours  s'accroître  ;  i3o 

Que  ce  n'est  point  l'effet  d'un  aveugle  appétit 

Que  le  désir  fit  naître  et  que  l'espoir  nourrit  ; 

Et  qu'aimant  par  raison  d'un  amour  véritable 

Ce  que  jamais  le  ciel  forma  de  plus  aimable  , 

Le  temps  dessus  mon  coeur  n'aura  rien  d'assez  fort  i35 

Pour  en  bannir  les  traits  que  par  ceux  de  la  mort  ' . 


XII 

(Voyez  la  Notice  ,  p.  20.) 

PLAINTE  DE   LA   FRANCE   A    ROME 

sur  l'assassinat  de  son  ambassadeur. 

ÉLÉGIE. 

C'est  sous  ce  titre  et  avec  la  signature  en  toutes  lettres  de  Fléchier 
que  parut  pour  la  première  fois  la  pièce  suivante,  qui  dans  ces  der- 
niers temps  a  été  généralement  attribuée  à  Corneille  a.  Cette  édition 
originale  n'a  ni  frontispice,  ni  adresse,  ni  date;  mais  imprimée  avec 
soin  et  même  avec  luxe,  et  formant  sept  pages  in-40,  elle  a  tous 
les  caractères  d'une  publication  officielle ,  et  est  ornée  de  fleurons  de 
l'Imprimerie  royale,  ce  qui  ne  laisse  aucun  doute  sur  son  origine. 
Dès  i663,  elle  paraissait,  avec  la  signature  de  Fléchier,  aux  pages  217 
et  suivantes  du  recueil  intitulé  :  les  Délices  de  la  poésie  galante,  dont 
nous  avons  déjà  eu  occasion  de  parler  (voyez  ci-dessus,  p.  175). 
M.  Parrelle  5,  qui  ne  connaissait  point  ces  premières  impressions, 
donne  cette  élégie  comme  oc  extraite  d'un  Recueil  de  pièces  en  prose 
et  en  poésie  imprimé  en  Hollande  en  1664.  »  Il  veut  sans  doute 
parler  d'un  Recueil  de  quelques  pièces  nouvelles  et  galantes  tant  en 
prose  qu'en  vers....  à  Cologne,  chez  Pierre  du  Marteau,  1664,  in- 12. 

1.  Var.  Pour  en  chasser  les  traits  que  par  ceux  de  la  mort. 

(Manuscrits  de  Courent.) 

2.  Nous  devons  nous  accuser  ici  d'avoir  partagé  l'erreur  commune  dans  un 
passage  de  la  note  1  de  la  page  1  du  tome  VIII. 

3.  Œuvres  de  Corneille,  édition  Lefèvre  (i855),  tome  XII,  p.  101,  note  I. 


368  POESIES    DIVERSES. 

On  y  trouve  en  effet,  aux  pages  i6y  et  suivantes,  la  Plainte  de  la 
France  à  Borne ,  par  Monsieur  Corneille.  Elégie1.  Mais  ces  impressions 
sans  autorité  ne  peuvent  prévaloir  contre  l'édition  originale  et  offi- 
cielle dont  nous  venons  de  parler.  Cette  pièce  devers  a  d'ailleurs  tou- 
jours figuré  dans  les  OEuvres  complètes  de  Fléchier  ;  on  la  trouve  à  la 
page  i5i  de  la  première  partie  du  tome  V  de  l'édition  publiée  à  Nîmes 
en  1782,  et  à  la  pa^e  i?5  du  tome  IX  de  l'édition  publiée  à  Paris 
en  1828.  Ce  n'est  au  contraire  que  depuis  peu  de  temps  qu'elle  fait 
partie  des  éditions  de  Corneille.  L'abbé  Granet  s'est  gardé  de  l'ad- 
mettre dans  ses  OEuvres  diverses ,  et  je  la  trouve  pour  la  première 
fois,  en  1817,  dans  l'édition  des  OEuvres  complètes  donnée  par  Ant.- 
Aug.  Renouard.  Si  du  reste  on  examine  de  près  le  style  de  ce  mor- 
ceau, on  remarque  que  la  facilité  élégante  avec  laquelle  il  est  écrit 
n'a  aucun  rapport  avec  la  manière  plus  large ,  plus  éloquente  ,  mais 
moins  dégagée  et  moins  vive,  et,  pour  tout  dire  en  un  mot,  moins 
moderne,  que  nous  observons  chez  notre  poète.  —  Nous  reprodui- 
sons le  texte  qui  a  été  attribué  à  Corneille  par  ses  derniers  éditeurs; 
il  diffère  notablement  de  celui  de  l'impression  originale  (in-40)  et  des 
éditions  de  Fléchier,  et  il  a  dix  vers  de  moins  à  la  fin. 

Cette  Plainte  de  la  France  a  pour  objet  l'attentat  des  Corses  de  la 
garde  d'Alexandre  VII,  qui,  le  20  août  1662,  tirèrent  sur  le  carrosse 
du  duc  de  Créqui,  ambassadeur  de  France,  dont  ils  tuèrent  un  page 
et  blessèrent  plusieurs  domestiques.  Le  pape  offrit  à  ce  sujet  toute 
espèce  de  réparation  ,  et  cette  injure  fut  oubliée  à  la  condition  que 
des  excuses  seraient  faites  par  le  cardinal  Chigi,  neveu  du  saint-père, 
qui  vint  en  effet  les  porter  au  Roi  en  1664»  et  qu'une  pyramide  éle- 
vée à  Rome  constaterait  la  réparation  accordée. 

Lorsque  sous  le  plus  juste  et  le  plus  grand  des  princes 

L'abondance  et  la  paix  régnent  dans  mes  provinces  , 

Rome  ,  par  quel  destin  tes  Romains  irrités 

Arrêtent-ils  le  cours  de  mes  prospérités  ? 

Après  avoir  gagné  victoire  sur  victoire ,  5 

Et  porté  ma  valeur  au  comble  de  la  gloire , 

Après  avoir  contraint  par  mes  illustres  faits 

Mes  rivaux  orgueilleux  à  recevoir  la  paix  , 

J'espérois  d'établir  une  sainte  alliance , 

D'unir  les  intérêts  de  Rome  et  de  la  France,  10 

1 .   Bibliothèque  impériale,  Y  6121. 


APPENDICE.  369 

Et  de  porter  bien  loin  ,  par  mes  rares  exploits , 

La  gloire  de  mes  lis  et  celle  de  la  croix. 

Mon  monarque ,  chargé  de  lauriers  et  de  palmes , 

Voyoit  tous  ses  Etats  et  ses  provinces  calmes , 

Et  disposant  son  bras  à  quelque  saint  emploi ,  i5 

Ne  vouloit  plus  combattre  et  vaincre  que  pour  toi. 

Il  t'offroit  son  pouvoir  et  sa  valeur  extrême  ; 

Mais  tu  veux  l'obliger  à  te  vaincre  toi-même  , 

Et  par  un  attentat  et  lâche  et  criminel , 

Tu  fais  de  ses  faveurs  un  mépris  solennel  :  20 

On  voit  régner  le  crime  avec  la  violence  , 

Où  doit  régner  la  paix  avecque  le  silence  ; 

On  voit  les  assassins  courir  avec  ardeur 

Jusqu'au  palais  sacré  de  mon  ambassadeur, 

Porter  de  tous  côtés  leur  fureur  vagabonde,  1 5 

Et  violer  les  droits  les  plus  sacrés  du  monde. 

Je  savois  bien  que  Rome  élevoit  dans  son  sein 

Des  peuples  adonnés  au  culte  souverain, 

Des  héros  dans  la  paix  ,  des  savants  politiques  , 

Experts  à  démêler  les  affaires  publiques ,  3o 

A  conseiller  les  rois  ,  à  régler  les  États  ; 

Mais  je  ne  savois  pas  que  Rome  eût  des  soldats. 

Lorsque  Mars  désoloit  nos  campagnes  fertiles , 

Tu  maintenois  tes  champs  et  tes  peuples  tranquilles  : 

Tout  le  monde,  agité  de  tant  de  mouvements,  35 

Suivoit  le  triste  cours  de  ses  dérèglements  ; 

Toi  seule  ,  dans  le  port  ,  à  l'abri  de  l'orage , 

Tu  voyois  les  écueils  où  nous  faisions  naufrage  ; 

Des  princes  irrités  modérant  le  courroux  ? 

Tu  disposois  le  ciel  à  devenir  plus  doux  ;  4° 

Et  sans  prendre  intérêt  aux  passions  d'un  autre  , 

Tu  gardois  ton  repos  et  tu  pensois  au  nôtre. 

Tu  voyois  à  regret  cent  exploits  inhumains , 

Et  tu  levois  au  ciel  tes  innocentes  mains  ; 

Tu  recourois  aux  vœux  quand  nous  courions  aux  armes  :      45 

Nous  répandions  du  sang ,  tu  répandois  des  larmes  ; 

Et  plaignant  le  malheur  du  reste  des  mortels  , 

Tu  soupirois  pour  eux  au  pied  de  tes  autels. 

Tu  demandois  au  ciel  cette  paix  fortunée , 

Et  tu  me  la  ravis  dès  qu'il  me  l'a  donnée.  îo 

A  peine  ai-je  fini  mes  glorieux  travaux  , 

Que  tu  veux  m'engager  à  des  combats  nouveaux 

Reine  de  l'univers,  arbitre  de  la  terre , 

Corbeille,  x  24 


37o  POÉSIES   DIVERSES. 

Tu  me  prêchois  la  paix  au  milieu  de  la  guerre; 

J'ai  suivi  tes  conseils  et  tes  justes  souhaits  ,  55 

Et  tu  me  fais  la  guerre  au  milieu  de  la  paix. 

Détruisant  les  erreurs  et  punissant  les  crimes, 

J'ai  soutenu  l'honneur  de  tes  saintes  maximes; 

J'ai  remis  autrefois,  en  dépit  des  tyrans, 

Dans  leur  trône  sacré  tes  pontifes  errants  ;  60 

Et  faisant  triompher  d'une  égale  vaillance  , 

Ou  la  France  dans  Rome  ,  ou  Rome  dans  la  France  , 

J'ai  conservé  tes  droits  et  maintenu  ta  foi , 

Et  tu  prends  aujourd'hui  les  armes  contre  moi  ! 

Quel  intérêt  t'engage  à  devenir  si  fière?  65 

Te  reste-t-il  encor  quelque  vertu  guerrière  ? 

Crois-tu  donc  être  encore  au  siècle  des  Césars  , 

Où  parmi  les  fureurs  de  Bellone  et  de  Mars, 

Jalouse  de  la  gloire  et  du  pouvoir  suprême  , 

Tu  foulois  à  tes  pieds  et  sceptre  et  diadème  ?  70 

Dans  ce  fameux  état  où  le  ciel  t'avoit  mis 

Tu  ne  demandois  plus  que  de  grands  ennemis  ; 

Et  portant  ton  orgueil  sur  la  terre  et  sur  l'onde , 

Tu  bravois  le  destin  des  puissances  du  monde , 

Et  tu  faisois  marcher  sous  tes  injustes  lois  yS 

Un  simple  citoyen  sur  la  tête  des  rois. 

Ton  destin  ne  t'offroit  que  d'illustres  conquêtes , 

Ta  foudre  ne  tomboit  que  sur  de  grandes  têtes, 

Et  tu  montrois  en  pompe  aux  peuples  étonnés 

Des  souverains  captifs  et  des  rois  enchaînés.  80 

Mais  quelques  grands  exploits  que  l'histoire  renomme, 

Tu  n'es  plus  cette  fière  et  cette  grande  Rome  : 

Ton  empire  n'est  plus  ce  qu'il  fut  autrefois  , 

Et  ce  n'est  plus  un  siècle  à  se  moquer  des  rois  ; 

On  ne  redoute  plus  l'orgueil  du  Capitole  ,  85 

Qui  fut  jadis  si  craint  de  l'un  à  l'autre  pôle  ; 

Et  les  peuples  ,  instruits  de  tes  douces  vertus , 

Adorent  ta  grandeur ,  mais  ne  la  craignent  plus. 

Que  si  le  ciel  t'inspire  encor  quelque  vaillance  , 

Va  dresser  tes  autels  jusqu'aux  champs  de  Bisanee  ;    ,  90 

Anime  tes  Romains  à  quelque  effort  puissant , 

Et  va  planter  ta  croix  où  règne  le  croissant. 

Remplis  les  premiers  rangs  dune  sainte  entreprise , 

Et  voyons  marcher  Rome  au  secours  de  Venise. 

Pour  tes  sacrés  autels  toi-même  combattant,  gS 

Commence  ces  exploits  que  tu  nous  prêches  tant; 


APPENDICE.  37i 

Ou  laisse-moi  jouir  clans  la  paix  où  nous  sommes 

D'un  repos  que  je  viens  de  procurer  aux  hommes. 

J'ai  vu  de  tous  côtés  mes  ennemis  vaincus, 

Et  je  suis  aujourd'hui  ce  qu'autrefois  tu  fus.  ioo 

Les  lois  de  mon  Etat  sont  aussi  souveraines  ; 

Mes  lis  vont  aussi  loin  quêtes  aigles  romaines  ; 

Et  pour  punir  le  crime  et  l'orgueil  des  humains, 

Mes  François  aujourd'hui  valent  les  vieux  Romains. 

L'invincible  Louis  ,  sous  qui  le  monde  tremble  ,  io5 

Ne  vaut-il  pas  lui  seul  tous  les  héros  ensemble  ? 

La  victoire,  sous  lui  ne  se  lassant  jamais, 

Lui  fournit  des  sujets  de  vaincre  dans  la  paix. 

Dans  ce  comble  d'honneur  où  lui  seul  peut  atteindre, 

Tout  désarmé  qu'il  est ,  il  sait  se  faire  craindre;  no 

Il  dompte  ses  rivaux  et  sert  ses  alliés , 

Voit ,  même  dans  la  paix ,  des  rois  humiliés. 

Il  auroit  su  venger  tant  de  lois  violées  , 

Et  tu  verrois  déjà  tes  plaines  désolées , 

Tu  verrois  et  tes  chefs  et  tes  peuples  soumis  ;  n5 

Mais  tu  n'as  pas  pour  lui  d'assez  grands  ennemis  ; 

Et  dans  le  mouvement  de  gloire  qui  le  presse  , 

Tu  tiens  ta  sûreté  de  ta  seule  foiblesse. 

Que  n'es-tu  dans  le  temps  où  tes  héros  guerriers 

Eussent  pu  lui  fournir  des  moissons  de  lauriers  !  1 20 

Pour  arrêter  sur  toi  ses  forces  occupées  , 

Où  sont  tes  Scipions,  tes  Jules,  tes  Pompées? 

Tu  le  verrois  courir  au  milieu  des  hasards , 

Affronter  tes  héros  ,  et  vaincre  tes  Césars , 

Et  par  une  conduite  aussi  juste  que  brave  ,  125 

Affranchir  de  tes  fers  tout  l'univers  esclave. 

Mais  puisque  ta  fureur  ne  peut  se  contenir  , 

Après  tant  de  mépris  il  faudra  te  punir  : 

La  gloire  des  héros  n'est  jamais  assez  pure, 

Et  le  trône  jaloux  ne  souffre  point  d'injure.  i3o 

Ne  te  flatte  plus  tant  sur  ton  divin  pouvoir  : 

On  peut  mêler  la  force  avecque  le  devoir. 

Des  monarques  pieux ,  des  princes  magnanimes 

Ont  révéré  tes  lois  en  punissant  tes  crimes  ; 

Ils  ont  eu  le  secret  de  partager  leurs  cœurs,  i35 

D'être  tes  ennemis  et  tes  adorateurs , 

De  soutenir  leur  rang  ,  et  sauver  leur  franchise, 

En  se  vengeant  de  toi ,  mais  non  pas  de  l'Eglise  ; 

Ils  ont  su  réprimer  ton  orgueil  obstiné 


372  POÉSIES   DIVERSES. 

Sans  choquer  le  pouvoir  que  le  ciel  t'a  donné,  140 

Et  séparer  enfin,  dans  une  juste  guerre, 

Les  intérêts  du  ciel  d'avec  ceux  de  la  terre. 

Sur  l'exemple  fameux  de  ces  rois  sans  pareils 

Inspire  à  mon  héros  ces  fidèles  conseils. 

Prince,  dont  la  valeur  et  la  sagesse  est  rare,  i^S 

Ménage  ta  couronne  avecque  ta  tiare  ; 

Donne  aux  siècles  futurs  un  exemple  immortel; 

Garde  les  droits  du  trône  et  les  droits  de  l'autel  ; 

Qu'à  ton  ressentiment  la  piété  s'unisse. 

Louis,  fais  grâce  à  Rome  en  te  faisant  justice;  i5o 

Pense  aux  sacrés  devoirs  d'un  monarque  chrétien  ; 

Fais  agir  ton  pouvoir ,  mais  révère  le  sien  ; 

Et  mêlant  au  courroux  le  respect  et  la  crainte , 

Punis  Rome  l'injuste,  et  conserve  la  sainte. 


XIII 

(Voyez,  la  Notice,  p.  ao.) 
VERS   DE   CORNEILLE, 

DE     SES    AMIS    ET    DE     SES     PARTISANS 

contre  l'abbé  d'Aubignac*. 

r°  Mlle  des  Jardins  (depuis  Mme  de  Villedieu),  Pabbé  d'Aubignac 
et  Pierre   Corneille. 

(Extrait  des  Historiettes  de  Tallemant  des  Réaux ,  tome  Vil , 
p.  25o-a55.) 

a  Elle  [Mlle  des  Jardins)  fit  une  pièce  de  théâtre  qu'on  appela 
Manlius,  où  Manlius  Torquatus  ne  fait  point  couper  la  tête  à  son 
fils.  Quoi  qu'en  dise  l'abbé  d'Aubignac,  son  précepteur,  je  ne  crois 
pas  que  cela  se  puisse  soutenir.  Cette  pièce  réussit  médiocrement. 
Une  autre,  appelée  Nitétis,  réussit  encore  moins.  Or  Corneille  dit 
quelque  chose  contre  Manlius,  qui  choqua  cet  abbé,  qui  prit  feu  sur- 
le-champ,  car  il  est  tout  de  soufre.  Il  critique  aussitôt  les  ouvrages 
de  Corneille;  on  imprime  de  part  et  d'autre.  Pour  sa  critique,   pa- 

I.  Voyez  dans  le  tome  VI  la  Notice  àrOEdi[>e,  p.  1 1  1  et  112;  celle  de  Ser- 
torius,  p.  356,  et  surtout  celle  de  Sophonïsbe ,  p.  457-4^9. 


APPENDICE.  373 

tience,  car  il  en  sait  plus  que  personne;  mais  le  diable  le  poussa  de 
mettre  au  jour  son  roman  allégorique  de  la  philosophie  des  Stoï- 
ciens. Il  est  intitulé  :  Macarise,  reine  des  îles  Fortunées 

«  L'abbé  d'Aubignac  a  fait  mettre  son  portrait  au  devant  du  livre, 
avec  ces  quatre  vers,  qui  apparemment  sont  de  son  frère.  Il  a  l'hon- 
neur d'en  faire  aussi  mal  qu'un  autre  pour  le  moins  : 

Il  a  mille  vertus,  il  connoît  les  beaux-arts , 
Il  étouffe  l'envie  à  ses  pieds  abattue  ; 
Et  Rome  à  son  mérite ,  au  siècle  des  Césars , 
Au  lieu  de  cette  image  eût  dressé  sa  statue. 

«  Corneille,  ou  quelque  corneiliien,  a  fait  cet  autre  quatrain  pour 
mettre  à  la  place  du  premier  : 

Il  a  mille  vertus,  ce  pitoyable  auteur, 
Et  deux  mille  secrets  pour  apprendre  à  déplaire  ; 
Quiconque  veut  s'instruire  au  grand  art  de  mal  faire 
N'a  qu'à  prendre  leçon  d'un  si  rare  docteur. 

«  Corneille  fit  encore  le  madrigal  qui  suit  : 

ÉPIGRAMME. 

Cette  foule  d'approbateurs' 
Qui  met  à  si  haut  prix  ta  docte  allégorie, 

Comme  elle  a  ton  œuvre  enchérie , 

Epouvante  les  acheteurs. 
Tu  crois  que  le  papier  et  l'encre  qu'il  t'en  coûte 
De  l'immortalité  t'ouvrent  la  grande  route, 
Et  que  tant  de  grands  noms  feront  vivre  ton  nom  ; 

Mais  n'en  déplaise  à  ta  doctrine  , 

Plus  on  étaye  une  maison, 

Plus  elle  est  près  de  sa  ruine*. 

a  Celle-ci  est  de  Cottin  : 

Ce  roman  sans  exemple  en  nos  mains  est  tombé  ; 
Mais  j'en  trouve  l'auteur  difficile  à  connoître  : 

i.  Tallemant  a  raconté  un  peu  plus  haut  dans  un  long  passage  que  nous 
avons  supprimé,  comme  peu  utile  à  notre  objet,  que  la  moitié  du  premier 
volume  était  occupée  par  les  éloges  des  amis  de  d'Aubignac. 

2.  «  Tl  y  a  au  bas  du  quatrain  Acheman;  c'est  quelque  nom  retourné.  » 
(Note  de  Tallemant.)  —  On  voit  que  l'auteur  des  Historiettes  contredit  lui- 
même  dans  cette  note,  postérieure,  il  est  vrai,  à  son  texte,  l'assertion  qui  at- 
tribue cette  épigramme  à  Corneille. 


374  POÉSIES   DIVERSES. 

Si  j'en  crois  ses  amis,  c'est  un  savant  abbé; 

Si  j'en  crois  ses  écrits,  ce  n'est  qu'un  pauvre  prêtre'. 

«  Cependant  son  livre  ne  se  vend  point  ;  quand  il  seroit  moins  dés- 
agréable, ii  auroit  de  la  peine  à  en  avoir  le  débit,  car  les  libraires  ne 
sont  pas  pour  lui.  Ils  disent  une  plaisante  chose  :  Corneille,  dans  un 
in-folio  qu'il  a  fait  imprimer  depuis  cette  querelle,  s'est  tait  mettre 
en  taille-douce,  foulant  l'Envie  sous  ses  pieds.  Ils  disent  que  cette 
Envie  a  le  visage  de  l'abbé  d'Aubignac2.  Cependant  Corneille,  d'as- 
sez bonne  foi,  reconnoît  dans  de  certains  discours  au  devant  de  ses 
pièces  les  fautes  qu'il  a  faites  ;  mais  j'aimerois  mieux  qu'il  eût  tâché 
de  faire  disparoître  celles  qui  étoient  les  plus  aisées  à  corriger.  En 
vérité  il  a  plus  d'avarice  que  d'ambition,  et  pourvu  qu'il  en  tire  bien 
de  l'argent,  il  ne  se  tourmente  guère  du  reste.  L'abbé  s'opiniâtre,  et 
est  si  fou  que  de  faire  imprimer  les  autres  volumes,  à  ses  dépens 
s'entend,  car,  quand  il  le  voudroit,  je  ne  crois  pas  que  personne  les 
imprimât  pour  rien.  On  dit  qu'il  pourroit  bien  apprendre  aux  fous 
un  nouveau  moyen  de  se  ruiner;  car  il  y  a  plusieurs  volumes,  et 
cela  coûtera  bon.  Il  fit  et  fit  faire  quantité  d'épigrammes  contre  Cor- 
neille, qui  toutes  ne  valoient  rien;  on  n'a  pas  daigné  en  prendre 
copie3....  ï 

i.  Cette  épigramme  figure  à  la  page  20  d'un  recueil  intitulé  :  les  Plaisirs 
de  la  poésie  galante ,  gaillarde  et  amoureuse  petit  volume  in- 12,  dont  le 
frontispice  gravé  ne  porte  ni  adresse  ni  date,  et  qui  est  catalogué  à  la  biblio- 
thèque de  l'Arsenal  sous  le  n°    9262.  Dans  ce  recueil   l'épi  gramme  qui  nous 

B 

occupe  est  signée  CoRNETL,LE,et  sur  cette  autorité  M  Paul  Lacroix  la  lui  a  attri- 
buée dans  le  Bulletin  du  bouquiniste  du  Ier  décembre  i863,  p.  694.  11  n'a 
pas  remarqué  que  Tallemant  la  donne  comme  étant  de  Cottiu.  Elle  a  peut- 
être  été  signée  d'abord  de  l'initiale  C,  et  il  aura  suffi  de  la  mauvaise  intelli- 
gence de  d'Aubignac  et  de  Corneille  pour  la  faire  attribuer  à  ce  dernier. 

2.  Ce  frontispice  se  trouve  en  tête  de  l'édition  publiée  en  i663,  en  2  vol. 
in-folio.  M.  Taschereau  dit  avec  beaucoup  de  raison,  à  propos  de  ce  passage 
des  Historiettes  :  a  II  est  évident  que  Tallemant  n'avait  pas  vu  ce  frontispice, 
et  qu'il  se  bornait  à  enregistrer  ce  qu'il  avait  entendu  dire.  Il  ne  l'avait  pas 
vu,  car  il  y  place  en  pied  Corneille,  lequel  n'y  figure  qu'en  buste,  et  c'est  la 
Muse  de  la  tragédie  qui  écrase  l'Envie,  à  laquelle  le  graveur  a  donné  en  effet 
des  traits  masculins.  Ces  traits  étaienl-ils  bien  ceux  de  d'Aubignac,  de  qui  il 
ne  nous  reste  que  deux  portraits  dissemblables?  Tallemant  ne  s'est  pas  mis  à 
même  de  pouvoir  nous  le  garantir,  et  nous  ne  sommes  pas  en  mesure  d'éclair- 
cir  aujourd'hui  ce  qu'il  n'a  pas  v<riné.  » 

3.  Ici  vient  le  morceau  relatif  à  Othon  que  nous  avons  reproduit  dans  la 
Notice  sur  cette  pièce,  tome  VI,  p.  567  et  568;  puis  un  autre  passage  repro- 
duit ci-dessus,  p.  1 83. 


APPENDICE.  575 

«  Voici  la  seule  supportable  d'entre  ces  volumes  d'épigrammes  que 
l'abbé  d'Aubignac  et  son  Académie  des  Allégories  ont  composés  contre 
Corneille  : 

Pauvre  ignorant ,  que  tu  t'abuses 
Quand  tu  nous  dis  si  hardiment 
Que  toujours  le  poète  normand 
Avecque  lui  mène  les  Muses  ! 
Il  en  seroit  un  foible  appui 
S'il  falloit  qu'il  les  eût  portées; 
Et  s'il  les  traînoit  après  lui , 
Hélas  !  qu'elles  seroient  crottées  ! 

«  Quelqu'un  des  corneilliens  a  fait  celle-ci  : 

Qu'ils  étoient  fous  ces  vieux  stoïques 

De  se  piquer  d'être  apathiques  ! 

Ils  manquoient  bien  de  sens  commun. 

Ceux-ci  sont  d'une  autre  nature; 

Et  comme  pourceaux  d'Epicure, 

Tous  grondent  quand  on  en  touche  un  ! . 

a  Les  épigrammes  qui  suivent  sont  de  Richelet  : 

Hédelin,  c'est  à  tort  que  tu  te  plains  de  moi; 

N'ai-je  pas  loué  ton  ouvrage  ? 

Pouvois-je  plus  faire  pour  toi 

Que  de  rendre  un  faux  témoignage  2  ? 
Je  me  voulois  venger  de  l'aveugle  cynique5 

Qui  toujours  égratigne  et  pique  , 

Et  mord  comme  un  chien  enragé  ; 
Mais  il  n'est  pas  besoin  que  je  le  satirise, 

Il  fait  imprimer  Macarise  : 

Ne  suis-je  pas  assez  vengé? 

Du  critique  Hédelin  le  savoir  est  extrême; 
C'est  un  rare  génie,  un  merveilleux  esprit. 
Cent  fois  confidemment  il  me  l'a  dit  lui-même, 
Et  le  grand  Pelletier4  l'a  mille  fois  écrit. 

i .  Le  roman  de  l'abbé  d'Aubignac  est  :  de  la  Philosophie  des  Stoïciens.  (Note 
de  Tallemant.) 

i.  Richelet  est  un  des  approbateurs  de  l'ouvrage  de  l'abbé.  {Note  de  Talle- 
mant.) 

3.  11  ne  voit  quasi  goutte.  (Note  de  Tallemant.) 

4..  Pierre  de  Pelletier,  auteur  de  sonnets,  ridiculisé  par  Boileau 


376  POÉSIES  DIVERSES. 

D'une  autre  façon. 

Le  célèbre  Hédelin  est  un  homme  d'esprit; 
il  fait  de  bons  romans,  on  les  lit,  on  les  aime  : 
Cent  fois  confidemment  il  me  l'a  dit  lui-même, 
Et  le  grand  Pelletier  l'a  mille  fois  écrit.   » 


20  Seconde  dissertation  concernant  le  poème  dramatique ,   en  forme   de 

remarques  sur  la  tragédie  de  M.  Corneille  intitulée  Sertorius (Par 

d'Aubignac.) 

(Extrait  du  Recueil  de  Dissertations t  publié  par  Granet ,  Paris,  1740» 

tome  I,  p.  281-283.) 

«  J'étois  près  de  finir  cette  lettre,  ou  plutôt  cette  longue  disserta- 
tion, et  je  méditois  le  dernier  compliment,  qui  doit,  Madame,  vous 
assurer  de  mes  respects  lorsque  l'on  m'a  mis  entre  les  mains  une 
épigramme  et  un  sonnet  de  M.  Corneille,  avec  une  lettre  et  une  dé- 
fense en  prose1,  servant  de  réponse  aux  observations  que  vous  m'a- 
viez demandées  sur  la  Sophonisbe.  Je  prends  la  liberté  de  vous  les 
envoyer,  pour  vous  montrer  combien  l'esprit  de  M.  Corneille  est 
usé,  ou  combien  la  passion  en  a  malheureusement  dissipé  la  force  et 
les  lumières;  car  ce  sont  les  plus  méchants  vers  que  vous  ayez  jamais 
vus,  et  la  prose  la  plus  languissante,  la  plus  impropre  et  la  plus  impure 
qui  soit  jamais  sortie  de  sa  plume;  et  je  n'y  reconnois  rien  de  lui  que 
sa  colère.  Ce  ne  sont  que  des  injures  et  des  impostures  forgées  à 
plaisir,  et  de  mauvaises  paroles  qui  scandalisent  tous  les  gens  d'hon- 
neur ;  il  y  mêle  le  comique  avec  le  tragique  ;  il  fait  le  plaisant  et  le 
héros  parnassien  ;  il  feint  de  ne  pas  savoir  que  les  lettres  que  j'ai  pris 
la  liberté  de  vous  envoyer  par  votre  ordre  soient  de  ma  façon,  afin 
de  me  pouvoir  dire  toutes  ses  injures  à  couvert.  Mais  après  les  té- 
moignages de  tant  de  personnes  d'honneur,  qui  l'en  assurèrent  dès 
le  commencement,  après  les  emportements  qu'il  a  fait  paroître  contre 
moi,  et  après  avoir  lu  mes  remarques  sur  la  boutique  du  libraire 
avant  qu'elles  fussent  achevées  d'imprimer,  dans  une  connoissance 
certaine  de  mon  nom,  c'est  un  mauvais  prétexte  pour  se  déchaîner 
en  paroles  indignes  de  l'innocence  et  de  la  générosité  des  Muses;  et 

I.  La  lettre  et  la  défense  sont  de  Douneau  de  Visé  (voyez  tome  VII,  p.  4^7 
et  suivantes),  mais  nous  ne  savons  de  quel  sonnet  ni  de  quelle  épigramme  d'Au- 
bignac veut  parler. 


APPENDICE.  377 

quand  il  me  nomme  dans  cette  réponse  en  alléguant  ma  pratique, 
c'est  pour  faire  retomber  sur  moi  les  orages  de  sa  bile ,  en  feignant 
de  les  avoir  préparés  contre  un  autre    » 


XIV 

QUATRAIN  POUR  LE  CHRIST    DE  SAINT-ROCH 
A   PARIS. 

Ce  quatrain  a  paru  pour  la  première  fois  parmi  les  Poésies  diverses 
de  Corneille,  à  la  page  106  du  tome  XII  des  OEuvres  de  ce  poëte, 
publié  par  Lefèvre  en  i855,  et,  à  partir  de  cette  époque,  il  a  été  in- 
variablement reproduit  dans  toutes  les  réimpressions  qui  en  ont  été 
faites.  Tâchons  de  savoir  d'où  il  est  tiré,  et  de  quelle  manière  il  a 
passé  dans  les  OEuvres  de  notre  auteur. 

M.  Alexis  Socard,  auteur  de  plusieurs  ouvrages  sur  les  livres  po- 
pulaires publiés  à  Troyes  à  partir  du  seizième  siècle,  possède  un 
exemplaire  de  Y  Imitation  de  Jésus-Christ  traduite  et  paraphrasée  en 
vers  franc  ois  par  P.  Corneille.  Imprimé  à  Rouen,  par  L.  Maury,  pour 
Robert  Ballard,  i658,  in~4°.  On  lit  sur  le  titre  de  cet  exemplaire  :  ex 
libris  Pétri  Delarivey  ;  ce  Pierre  de  Larivey  est  probablement  de  la 
même  famille  que  le  fécond  auteur  dramatique  champenois  du  même 
nom,  mort,  vers  1612.  Au  verso  du  titre  on  lit  :  Sonnet  inédit  de 
P.  Corneille  adressé  à  M.  Alexandre  de  Campion,  gentilhomme  bas  nor- 
mand, auteur  de  la  Vie  de  plusieurs  hommes  illustres,  ouvrage  resté 
presque  inconnu.  Cet  intitulé  est  suivi  d'une  fort  mauvaise  copie  du 
sonnet  que  nous  avons  reproduit  (p.  i37-i3g)  d'après  l'original,  puis 
d'un  Quatrain  du  même  auteur  adressé  au  Christ  de  V église  Saint-Roch. 
C'est  là  probablement  que  P.  Villiers,  auteur  du  Manuel  du  voyageur 
à  Paris ,  ou  Paris  ancien  et  moderne^  trouva  ce  quatrain,  que  je  lis 
dans  l'édition  de  1806  de  cet  ouvrage,  qui,  suivant  la  France  lit- 
téraire de  M.  Quérard,  a  paru  pour  la  première  fois  en  1804  ou  i8o5. 
Il  y  est  précédé  de  ce  préambule  peu  explicite  :  «  Ce  fut,  dit-on, 
pour  le  Christ  peint  dans  l'église  Saint-Roch  qu'il  (Corneille)  com- 
posa ce  quatrain  peu  connu.  »  M.  Edouard  Fournier  inséra  dans 
le  journal  le  Théâtre  le  quatrain  qu'il  avait   trouvé   dans  l'ouvrage 


378  POÉSIES  DIVERSES. 

de  Villiers.  Peu  de  temps  après,  le  22  juin  1845,  F  Impartial  de  Rouen 
le  publiait  à  son  tour,  non,  comme  on  pourrait  le  croire,  d'après 
de  Villiers  ou  M.  Edouard  Fournier,  mais  d'après  la  copie  manu- 
scrite de  Troyes .  Ce  qui  le  prouve,  c'est  que  F  Impartial  donne,  en  même 
temps  que  le  quatrain,  le  sonnet  à  Campion,  et  qu'il  reproduit  une 
faute  des  plus  singulières  :  Anglais^  pour  emplois,  qui  se  trouve  au  vers  6 
dans  la  copie  de  Troyes.  Enfin  c'est  à  F  Impartial  que  Lefèvre  em- 
prunte le  quatrain  ,  sans  se  préoccuper  de  son  origine.  Quant  à  nous, 
nous  n'avons  pas  cru  devoir  le  laisser  dans  les  OEuvres  de  Corneille, 
et  nous  le  rangeons  parmi  les  pièces  dont  l'authenticité  ne  nous  paraît 
pas  bien  démontrée. 

Pécheur,  tu  vois  ici  le  Dieu  qui  t'a  fait  naître; 
Sa  mort  est  ton  ouvrage  et  devient  ton  appui  : 
Dans  cet  excès  d'amour  tu  dois  au  moins  connoître 
Que  s'il  est  mort  pour  toi,  tu  dois  vivre  pour  lui. 


XV 

(Voyez  la  notice  de  la  pièce  LX1X ,  p.  iy3.) 
ÉPÎTRE  DÉDICATOIRE  DU  P.  DE  LA  RUE  A  CORNEILLE, 

ET  VERS  SUR  LA  MORT  DE  CHARLES  CORNEILLE,    SON  TROISIÈME   FILS. 

1°  Ad  clarissimum  virum  P.  Corneliumf  tragicorum  principem*. 

Ite,  meœ,  junctis  modo  cantibus,  ite,  Camœnae  : 

Quserite  quo  vester  sese  ferat  auspice  vates 

Per  populos,  longeque  adeat  ventura  nepotum 

Ssecula,  et  extremum  non  ultra  inglorius  orbem. 

Ne  tamen  assiduo  procerum  terere  atria  gressu,  5 

Neu  molles  captare  aditus,  precibusve  superbas 

I .  Cette  pièce,  qui  parut  d'abord  en  tête  des  Idyllia  du  P.  de  la  Rue , 
en  1669,  fut  réimprimée  dans  ses  Carmina  en  1688  (voyez  ci-après,  p.  383, 
note  1),  à  la  fin  (p.  146)  du  livre  II,  qui  a  pour  titre  :  Panegyricus.  Elle 
est  intitulée  dans  ce  second  recueil  :  Pet.ro  Cornelio,  tragicorum  principi,  de- 
dreatio  Idylliorum.  anno  M .DC.LXIX.  —  Nous  publions  ces  vers  avec  les 
retouches  de  1688,  qui  les  ont  améliorés  en  divers  endroits,  et  nous  indiquons 
en  note  les  variantes  de  la  première  édition. 


APPENDICE.  379 

Expugnare  fores  vobis  labor  :  hsec  mala  Musis 

Hospitia,  lise  latiis  infesta?  inoribus  aedes; 

Has  fugite,  et  pulchro  fastus  contemnite  fastu. 

Vos  neque  splendor  opum,  Tyrii  neque  muricis  ardor,         10 

Lubriea  nec  vanae  seducaut  fulgura  pompae  : 

Immortale  decus  petimus.  Juvat  astra  volatu 

Quaerere  inoffenso,  et  cœtus  fugisse  profanos. 

Tu  mihi,  Castalise  tu  numen  et  arbiter  aulse, 
Cokni'li,  dux  esto  vise  ;  tu  densa  reclude  1 5 

Nubila,  tu  dignis  prsesens  allabere  curis. 
Scilicet  bumanae  vicisse  oblivia  sortis 
Jamdudum,  et  rutiiis  elapsus  ad  sethera  pennis 
Sub  pedibus  nimbos,  ac  desidis  otia  terras, 
Indecoresque  procul  caneris  liquisse  tumultus.  ao 

At  non  Dœdalei  dédit  boc  tibi  muneris  usus, 
Nec  fragiles  tibi  cera  humeris  attexuit  alas  : 
Ipsa  novo  applaudens  cessit  tibi !  munere  Fa  nia 
Remigiumque  tubamque,  tuo  quo  plenius  ore 
Gallicus  ad  geminos  lionor  increbresceret  axes.  2  5 

Hanc  adeo,  qua  te  toties  regalia  fata 
Magnanimosque  duces  populi  stupuere  canentem, 
Hanc  nostris  inflare,  tua  in  prseconia,  Musis 
Jam  liceat  ;  neque  enim  cantu  leviore  décorum  est 
Dicere  quantum  altrix  tibi  Gallia,  saecula  quantum,  3o 

Et  mores  hominuni,  atque  omnis  tibi  debeat  aetas. 

Scilicet  exesa  divina  Tragœdia  palla, 
Annorumque  situ  et  ruga  deformi*  anili, 
Squalebat  tristi  noctis  demersa  baratbro  ; 

Aut  fescennina  cingens  sibi  tempora  larva ,  35 

Vulgabat  stolidi  sese  ad  ludibria  vulgi. 
Tu  senio  effœtos  juvenili  lumine  vultus 
lnduere,  et  doctis  redivivum  in  membra  vigorem 
Fundere  carminibus;  tu  spargere  floribus  ora  , 
Tu  castum  potuisti  oculis  afflare  pudorein.  4° 

Hinc  siaml  effrœnis  compressa  licentia  scense, 
Ingenui  venere  sales,  et  digna  severis 
Auribus  innocuo  condita  lepore  voluptas. 
Hinc  regum  audaci  penetrare  in  limina  gressu 
Cœpit,  et  augustas  beroum  pascere  mentes.  q5 

Ipse  sonis  etiam  gravibus  magnaque  profundos 
Voce  vocans  mânes  imis  excire  sepulchris 

1.  Dans  les  Idyllia  (1669)  :  «  tibi  cessit.  » 


i8o  POÉSIES    DIVERSES 

Ausus,  et  setherei  revocare  in  luminis  auras. 

Vidimus  Elysio  faciles  prodire  recessu 

Insignes  animas,  et  sponte  patentia  Ditis  5u 

Ostia  ;  nec  priscos  iterum  sibi  sumere  vultus, 

Nec  veteres  iterum  puduit  renovare  querelas. 

Ipsa  feras  artes  implacatumque  rigorem 
Medea  ;  ipse  parens  fratrum  conjuxque  parentis 
Œdipus,  incestos  orbi  confessus  amores,  55 

Expendit  propriis  fatorum  crimina  pœnis. 
Rursus,  tergeminœ  fumantem  sanguine  csedis, 
Germanum  in  pectus  tulit  asper  Horatius  ensem  ; 
Rursus  et  imbelli  tabescere  nescia  fletu, 

Dilectosque  viri  cineres1  patriseque  jacentis  60 

Tristes  relliquias  digno  complexa  dolore , 
Romanum  explicuit  fortis  Cornelia  robur. 
Tuque,  o  tu  victor  generi  socer,  ultor  et  idem  2, 
Juli,  acies  rumpens  pharias  et  inhospita  Magno 
Mœnia,  sacrilegae  poscentem  prœmia  caedis  65 

Semivirum  immerita  spoliasti  luce  tyrannum. 
Tu  quoque  privatos,  Auguste,  domare  furores 
Visus,  et  ingratum  parcendo  frangere  Cinnam. 
At  quis  felicem  gemina  post  funera  proie  5 
Mauritium,  et  dubiae  miserum  discrimine  prolis  70 

Inde  Phocam,  hinc  stricto  juvenes  pendere  sub  ictu 
Non  stupuit?  Quis  non,  Italis  memorabile  probris 
Sertori  exilium  miratus,  et  aspera  Galbae 
Consilia,  et  spreti  non  longum  crimen  Othonis4  ? 


1 .  Dans  les  Idyllia  :  «  Dilectos  Magni  cineres.  » 
a.  Dans  les  Idyllia  : 

Tuque,  o  tu,  Magnum,  Juli,  par  unus  in  hostem, 
Maxime,  bellatricem  animam,  geminaîque  capacem 
Fortunse ,  pharii  servasti  funere  régis. 

3.  Dans  les  Idyllia  : 

At  quis,  inexpleto  properatae  laudis  amore , 
Pompeium,  Hispanas  meditantem  exsciudere  lauros, 
In  veteres  armis  juvenilibus  ire  eohortes 
Non  stupuit?  Quis  non,  etc. 

ù..  Dans  les  Idyllia  : 

et  aspera  flecti 

Pectora  felicis  rabiem  contemnere  Syllae  ? 

On   voit  que  le  P.  de  la   Rue,  en  modifiant  ce  passage,  a  ajouté  à  la  mention 
du  Sertorius  de  Corneille,  celle  de  V Iléraclius  et  de  YQthon. 


APPENDICE.  38i 

Quis  non  et  miseros  Sophonisbae  agnovit  amores  yS 

Sidoniosque  animos,  latii  cum  prseda  triumphi 
Barbara  Romuleos  calcaret  fœmina  fastus , 
Et  claram  raperet  sponsi  de  munere  mortem? 

Caetera  quid  meniorem  quae  per  te  reddita  vitae 
Agmina,  se  in  lucem  plausumque  dedere  theatri?  80 

Et  nunc  par  reliquos  vitse  lucisque  cupido 
Sollicitât  mânes.  Video  Cocytia  circuin 
Flumina,  turbam  atris  nequicquam  effervere  ripis 
Ingentem,  exsanguesque  diu  tibi  tendere  palmas. 
Imprirms  sa? vos  in  vincula  ducere  Persas ,  85 

Bactraque  adhuc,  summisque  Asise  de  finibus  Indos 
Gestit  Alexander.  Libycae  tum  gloria  gentis, 
Annibal ,  antiquos  volvit  sub  mente  labores, 
Et  Trebiam,  et  Cannas ,  et  adacti  opprobria  leti , 
Torvus  adhuc,  ut  quondam,  Italas  cum  verteret  arces  90 

Victor,  et  admenso  clades  expenderet  auro. 
Aspicis  et  geminos,  Tyria3  duo  funera  prolis, 
Scipiadas,  Mariosque ,  invictaque  nomina  Brutos , 
Secretisque  piis  dicentem  jura  Catonem, 

Protinus  effuso  properare  ad  littora  gressu.  95 

Quam  vellent  Stygise  pariter  te  vindice  noctis 
Exsolvi  tenebris,  superasque  invisere  sedes, 
Qua  licet1,  et  grandi  tecum  prodire  cothurno  ! 

Nec  tamen  aut  meritis  devincta  minoribus  aetas 
Nostra  tibi,  aut  seros  aetas  visura  nepotes,  100 

Utraque  cum  pulchras  per  te  formetur  in  artes , 
Et  gravibus  discat  majorum  insistere  factis. 
Nec  mihi  quisquam  alio  mentes  assurgere  versu2 
Altius ,  aut  rigidae  citius  fastigia  jactet 

Scandere  virtutis.  Duros  bine  fîngere  mores,  io5 

Hinc  licet  offîciis  urbanae  assuescere  vitae  ; 
Hinc  legum  quid  jura  velint,  quae  cura  tuendae 
Sit  patriae,  quid  casta  fides,  quid  sancta  parentum 
Relligio,  sanguisque,  et  regum  gratia  poscat; 
Atque  palatinse  patet  anceps  aléa  sortis.  1  10 

Tum  vanosque  metus  purgare,  modumque  dolori 
Ponere  ;  tum  tictis  animum  tentare  periclis 
Per  ludum,  inque  omnes  fati  durare  procellas 
Discimus  exemplis,  et  vitam  impendere  famse. 

1.  Dans  les  Idyllia:  a  Dum  licet.  v 

2 .  Les  Idyllia  ont  cultu,  au  lieu  de  versu. 


382  POESIES   DIVERSES. 

Quirl,  quam  malta  mis  débet  jam  Gallia  curis,  n5 

Expediam  ?  tanto  quantum  se  jactat  alumno , 

Et  reliquas  inter  caput  effert  unica  gentes  ? 

Nam  quid  deinde  tuis  conferre  laboribus  ausit 

Attica  simplicitas  ?  quid  liianti  invecta  cothuriio 

Et  tumido  incedens  hispana  tragœdia  passa?  f  iao 

Qaid  vénères  italae,  fractique  loqaacior  oris 

Mollities?  quid,  romulei  *  laus  una  theatri , 

Annaeus,  veteri  eoncretam  frigore  venam  , 

Et  vacaa  ostentet  clamosœ  jnrgia  scense  ? 

His  reram  fines  melias,  penitasqae  latentes  ia5 

Vestigare  vias;  his  prsepetis  omine  pennae 

Aat  fibris  oviam  casas  aperire  futuros 

Fas  fuerit;  fas  artilici  spirantia  cœlo 

Mollins,  aut  vivis  aequare  coloribus  ora. 

Seecla  tibi  magna  dudum  tellure  sepulta  i3o 

Carminibus  reparare,  novseque  refandere  laci, 

Hae  tibi  sant  artes,  Cornelt  ;  hinc  nominis  ibit 

Falgor  in  immensum,  et  cœlo  se  Gallia  tollet. 
Hac  ta  conspicaa  famae  sublimis  ab  arce 

Splendidas  in  radiis,  tenaes  ne  despice  Musas.  i35 

Forte  equidem  indoctse  moveant  fastidia  plebis , 

Autteneras  lacèrent  peregrinis  cantibus  aures  ; 

At  non  incomptse  venient  tibi ,  quas  tua  nuper 

Laurus  inassuetae  velavit  frondis  honore  , 

Quas2  patrio  insignes  voluisti  incedere  cultu3.  140 

His  adeo  tenera?  si  laus  et  gratia  formée 

Ulla,  décor  per  te  venit  omnis  ;  et  omnibus  sequum  est , 

Qua  poterunt,  numeris  méritas  tibi  solvere  grates. 

Id  patere ,  lias  memori  tibi  sese  addicere  cultu 4 

iEternumque  tuo  sibi  nomme  condere  nome».  i45 

Qualis  ubi  lento  média  inter  gramina  lapsu 
Tenuis  adhuc  hedera  ,  et  frondosis  abdita  silvis, 
Serpit  humi  nilens  :  soiido  si  robore  quercus 
Alta,  ingens,  superas  ramis  educta  sub  auras, 
Aut  vêtus  occurrat  Parnassi  gloria  lauras  ,  1 5o 

1 .  Dans  les  Idyllia  :  «  Quid  jam  latii  laus  una  theatri.  » 

2.  Les  Idyllia  ont  Et ,  au  lieu  de  Quas. 

3.  Il  s'agit  i«:i  de  la  traduction  faite  par  Corneille  des  vers  latins  du  P.  de 
la  Rue  sur  les  Victoires  de  1667  :  voyez  ci-dessus,  p.   192  et  suivantes. 

4.  Dans  les  Idyllia  : 

Id  patere,  et  memori  tibi  sese  addicere  mente. 


APPENDICE.  383 

Tum  levibus  fibris,  et  morsu  tortilis  unco 
Subrepit  sensim ,  ac  lato  se  cortice  fuadit , 
Surama  petens.  Non  illam  hiemes ,  nec  acuta  revellant 
Prselia  ventorum  ;  sociam  neque  respuit  arbos. 
At  licet  excelso  nemus  una  cacumine  vincat,  i55 

Excipit  amplexus  bumiles ,  annosaque  stringi 
Brachia ,  et  implexis  gaudet  florere  corymbis  ; 
Abjectasque  prius  fert  secum  ad  sidéra  frondes. 
Rotliomagi  Kal.  jun.  M.DG.  LXIX. 


2°  Ad  clarissimum  virum  Petruin  Cornelium,  in  obitu  Caroli  filii  : 
Symbolum  '.Parelius  in  pluviam  difflucns  ;  lemma  :  Par  si  durasset  '. 

Nequicquam  varios  imitando  fîngere  soles 

Nitimur  imprudens  bominum  genus,  aurea  quanquam 

Pigmenta,  et  croceos  operi  miscemus  honores. 

Hic  solem  labor,  hoc  lucis  decorisque  parentem 

Lucis  opns  petit  ;  humanae  nil  indiget  artis,  5 

Et  radios  habet  ipse,  suos  habet  ipse  colores. 

Aspicis  ut  nitidam  toto  legit  aère  nubem , 
Cui  proprios  credat  transfuso  lumine  vultus  ? 
Illa  sinu  levi ,  quem  densius  agmen  opacat 
Nimborum ,  et  cseca  spleudentem  terminât  umbra ,  \  o 

Excipit,  illapsos  atque  in  se  colligit  ignés. 
Urget  opus  Titan,  jamque  œmula  lumina  velîet, 
Et  quos  pingit  adhuc,  pictos  jam  cernere  vultus. 
Sic  placet  illa  tamen,  nec  degener  ardet  imago , 
Imperfecta  licet  :  quippe  liane  nova  forma,  decusque  i5 

Lucis  inoffensse,  et  radii  jam  mille  coronant. 

Dum  Phœbus  sibi  plaudit,  et  haec  miracula  terris 
Ostentat ,  nimio  flammarum  ardore  subactus 

i.  Charles  Corneille,  troisième  Gis  de  Pierre  Corneille,  mourut  en  1667,  à 
l'âge  de  quatorze  ans.  Dans  les  Idyllia  de  1669,  ces  vers  se  trouvent  à  la 
page  5i,  parmi  les  Emhlemala  heroica  ;  en  regard  est  une  gravure  représen- 
tant un  parhélie  et  eutourée  d'un  encadrement  au  haut  duquel  on  lit  cette  de- 
vise répétée  au  vers  24  et  au  dernier  vers  :  par  si  durasset.  Dans  l'édition 
de  1688,  intitulée  :  Caroli  Rusei  e  societate  Je.su  Carminum  libri  quatuor, 
editio  quinta,  cette  pièce  est  à  la  page  161  et  fait  partie  du  livre  III,  intitulé  : 
Symbolicus y  elle  a  pour  titre  :  Petro  Cornelio,  tragicorum  principi,  in  obitu 
Caroli  ji iii.  Parelius  di/Huens.  Nous  suivons,  comme  pour  la  pièce  précédente, 
le  texte  de  1688. 


384  POÉSIES   DIVERSES. 

Non  exspectatos  solvit  se  nimbus  in  imbres, 

Nec  finem  egregio  sinit  iraposuisse  labori.  ao 

Liquitur  in  pluviam  color  omnis,  et  aurea  sensim 

Forma  simul  volucres  fugiens  vanescit  in  auras1. 

Sic  Phœbum  tenuis  necdum  perfecta  reliquit, 
Qua?  Phœbo  fuerat  par,  si  durasskt,  imago. 

Te  quoque,  magnorum  vates  ter  maxime  vatum,  26 

Gallia  quem  dudum  atque  immensus  suspicit  orbis, 
Te  quoque  turba  ingens  nequicquam  a?quare  canendo 
Aggreditur,  capitique  pares  imponere  lauros. 
Namque  nefas  animis  mortalibus  avia  longe 
Pindi  adyta ,  el  sacros  tecum  penetrare  recessus  :  3o 

Tanta  tibi  atque  tuae  debetur  gloria  genti. 
Et  si  saecla  sibi  similem  ventura  reservant , 
Ille,  erit  ille  tuus  tandem  ;  aut  si  fata  récusant , 
Nullus  erit,  Corneli,  atque  haec  tecum  inclita  fama 
Ibit  in  Elysium ,  et  grandem  comitabitur  umbram.  35 

Tu  Carlum  tanti  gaudebas  nominis  olim 
Venturum  in  partem  :  doctas  tam  promptus  in  artes , 
Tarn  docilis,  tanto  Musarum  ardebat  amore. 
Nec  minus  et  puero  mens  vivida  ,  et  inditus  ignis , 
Et  firma  in  levibus  jam  tum  constantia  cœptis.  40 

Non  ego  te,  Corneli,  alium  florentibus  annis 
Crediderim,  aut  de  te  plura  exspectasse  parentes. 
Quid  tu  autem,  cum  te  spirantem  in  proie  videbas 
Ipse  auctor  décorum?  Quid,  cum  sensusque  viriles 
Mirabare,  et  nil  puérile  sonantia  verba?  4^ 

Hune  nempe  assiduo  cultu  studioque  fovebas 
Sedulus,  hune  Pindi  juga  nota  viamque  docebas  , 
Teque  ipsum  ardebas  dulci  transfundere  nato. 
Ille  audax  animi  duros  insistere  calles 

Tentabat,  sensimque  augusto  adrepere  monti  :  5o 

Et  dulces  oculi*,  et  formosae  gratia  frontis, 
Credo  equidem,  teneros  Phœbi  meruisset  amores. 

At  tu  venturos  dum  spe  jam  prœcipis  annos, 
Magnarum  admirans  tam  lseta  exordia  laudum, 
Non  fuit  ingenio  par  corpus,  et  ardua  mentis  55 

i.   Dans  les  Idyllia  (1669)  : 

Forma  simul   fugit,  atque  levés  vanescit  îa  auras. 

Au  vers  suivant,  les  Idyllia  ont  relinguet. 
2.   Dans  les  Idyllia  :  «  moites  oculi.  » 


APPENDICE.  $85 

Haud  incœpta  tulit ,  majoraque  viribus  ausa. 

Pefecit  sensim  vigor1,  et  se  tabida  pestis 

Infudit  venis,  lentoque  ardore  peredit. 

Ecce  jacet  lecto  moriens,  nec  lactea  morum 

Simplicitas,  primae  nec  forma  décora  juventae,  fin 

Sed  neque  opes  animi  et  carse  suspiria  matris , 

Proh  dolor!  immites  possunt  avertere  Parcas. 

Circum  funereo  gemitu  domus  omnis,  et  ipse 

Spes  intercisas  ereptaque  gaudia  mœret 

Infeiix  pater.  Ah!  flecti  si  numina  possent,  f>5 

Qui  superant  nato  ipse  volens  impenderet  annos. 

Sed  périt.  Heu  !  periit  magni  jam  patris  imago  ; 

Et  patri  fuerat  par,  si  dtjrasset,  imago. 


XVI 

(Voyez  ci-dessus  la  pièce  LXXX  ,   p.  249.) 
SUR   LES  CONQUÊTES  DU  ROI  [EN    i6722j. 

Una  dies  Lotharos,  Burgundos  hebdomas  una, 
Una  domat  Batavos  luna;  quid  annus  erit? 

EXPLICATION. 

Prendre  dans  un  jour  la  Lorraine , 

La  Comté  dans  une  semaine , 

Et  savoir  réduire  en  un  mois 

La  Hollande  aux  derniers  abois  : 
Quand  après  de  tels  coups  on  suit  sa  destinée , 
Pour  conquérir  l'Europe  il  ne  faut  qu'une  année. 

t .  Ce  vers,  dans  les  Idyllia,  commence  ainsi  :  «  Nec  mora  defecit  vigor.  » 
2.  M.  Paul  Lacroix  a   appelé  l'attention  sur  ces  vers  dans  le  Bulletin  du 

houquiniste  du  Ier  mai  1864,   p.  254.  Sa   transcription  du  second  vers  latin 

porte  par  erreur  :  quid  erit  annus? 


COENEILLE.     X  »5 


'*86  POÉSIES    DIVERSES. 

XVII 

VERS   ANONYMES, 

PUBLIÉS  DANS  LE  MERCURE  DE    1677, 

et  qui  paraissent  devoir  être  attribués  à  Corneille. 

Comme  on  va  le  voir,  le  rédacteur  du  Mercure,  Donneau  de  Visé, 
annonce  ces  vers  avec  une  pompe  qui  serait  fort  déplacée  s'il  était 
question  d'un  poète  ordinaire;  la  pièce  d'ailleurs  justifie,  surtout 
dans  sa  première  partie,  les  éloges  que  le  journaliste  lui  donne.  Nous 
n'avons  pas  besoin  de  chercher  beaucoup  pour  deviner  quel  est  le 
grand  poète  dont  veut  parler  le  Mercure.  N'avons-nous  pas  vu  de 
Visé,  dès  i663,  se  déclarer  le  défenseur  de  Corneille1?  N'a-t-il  pas 
inséré  dans  son  recueil  périodique  un  grand  nombre  de  petits  poèmes 
de  notre  auteur,  encore  inédits  ou  publiés  seulement  en  feuilles  vo- 
lantes2? Enfin,  au  commencement  de  l'année  où  il  a  fait  paraître  les 
vers  qu'on  va  lire,  n'a-t-il  pas  dit  formellement  en  parlant  de  Cor- 
neille :  «  Les  moindres  choses  de  lui  sont  à  conserver5?  »  Voilà  déjà 
des  indices  ;  voyons  si  la  pièce  même  les  confirme.  Ces  vers  sont  adres- 
sés à  Iris;  Iris,  nous  le  savons,  est  la  même  que  la  Marquise  ou  la 
du  Parc 4.  Dans  les  diverses  poésies  qui  lui  sont  adressées,  notre 
poète  ne  manque  presque  jamais  de  déplorer  la  différence  d'âge  qui 
le  sépare  d'elle,  et  cela  se  comprend  :  elle  avait  environ  vingt-sept 
ans  de  moins  que  lui8.  Ici  encore  le  premier  vers  est: 

Je  suis  vieux,  belle  Iris,  c'est  un  mal  incurable; 

et  un  peu  plus  bas  le  poète  parle  de  sa  décrépitude.  C'est  là ,  suivant 
nous ,  le  dernier  opuscule  adressé  par  Corneille  à  la  du  Parc.  Une 
seule  chose  pourrait  surprendre,  c'est  de  ne  le  voir  paraître  que  neuf 
ans  après  la  mort  de  celle  qui  l'a  inspiré;  mais  ces  vers  touchaient 
à  la  vie  privée  du  poète,  aux  préoccupations  de  son  âge  déjà  avancé  : 
c'est  ce  qui  les  lui  aura  fait  garder  en  portefeuille,  et  ce  qui  l'aura 

1 .  Voyez  tome  VI  ,  p.  4-^7  et  suivantes. 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  285,  3o8 ,  $09,  322  et  334- 

3.  Voyez  ci-dessus,  p.  3 10. 

4.  Voyez  ci-dessus,  p    141  et  142. 

5.  El  Je  mourut  en  décembre  1668,  à  l'âge  d'environ  trente-cinq  ans  (voyez, 
ri-dessus,  p.   142);  elle  était  donc  née  vers  i633. 


APPENDICE.  *87 

engagé,  en  les  accordant  aux  sollicitations  de  Donneau  de  Visé,  à 
exiger  que  du  moins  ils  parussent  sans  signature.  Du  reste,  il  eût  été 
difficile  d'en  désigner  plus  clairement  l'auteur  qu'en  le  comparant, 
comme  fait  le  Mercure  à  la  suite  des  vers,  au  Martian  de  Pulc/iérie , 
vieillard  amoureux  ,  dans  lequel,  suivant  Fontenelle ,  Corneille  s'est 
dépeint  lui-même  *  ?  Aussi  est-ce  avec  quelque  confiance  que  nous 
présentons  au  lecteur ,  comme  appartenant  à  notre  poète ,  ces  vers 
inaperçus  et  oubliés. 


Extrait  du  Mercure  de  mai  1677  (p.  96  et  suivantes). 

'(.  Quittons  un  moment  cette  matière,  et  pour  vous  délasser  de  la 
guerre,  passons  au  chapitre  de  l'amour.  Voici  des  vers  qu'il  a  fait 
faire  :  ils  ont  un  tour  noble  qui  marque  les  privilèges  de  leur  source, 
et  vous  n'en  avez  jamais  trouvé  de  bons,  si  vous  n'êtes  contente  de 
ceux-ci  : 

Je  suis  vieux,  belle  Iris,  c'est  un  mal  incurable  ; 

De  jour  en  jour  il  croît,  d'heure  en  heure  il  accable: 

La  mort  seule  en  guérit;  mais  si  de  jour  en  jour 

Il  me  rend  plus  mal  propre  à  grossir  votre  cour, 

Je  tire  enfin  ce  fruit  de  ma  décrépitude,  5 

Que  je  vous  vois  sans  trouble  et  sans  inquiétude, 

Sans  battement  de  cœur,  et  que  ma  liberté 

Près  de  tous  vos  attraits  est  toute  en  sûreté. 

Tel  est  l'heureux  secours  que  reçoit  des  années 

Une  àme  dont  vos  lois  régloient  les  destinées.  10 

Non  que  je  sois  encor  bien  désaccoutumé 

Des  douceurs  que  prodigue  un  cœur  vraiment  charmé; 

A  ce  tribut  flatteur  la  bienséance  oblige  : 

Le  mérite  l'impose,  et  la  beauté  l'exige  ; 

Nul  âge  n'en  dispense,  et  fût-on  aux  abois,  r5 

Il  faut  en  fuir  la  vue,  ou  lui  payer  ses  droits  ; 

Mais  ne  me  rangez  point,  alors  que  j'en  soupire, 

Parmi  les  soupirants  dont  il  vous  plaît  de  rire. 

Écoutez  mes  soupirs  sans  les  compter  à  rien. 

Te  suis  de  ces  mourants  qui  se  portent  fort  bien  2  :  ao 

1.  Voyez  tome  VII,  p.  874. 

2.  Il  y  a  là  comme  un  souvenir  agréablement  détourné  de  f-e  vers  si  connu 
du  Menteur  (acte  IV,  scène  n,  vers  1164)  *. 

Les  gens  que  vous  tuez  se  portent  assez  bien. 


i88  POESIES    DIVERSES.    APPENDICE. 

Je  vis  auprès  de  vous  dans  une  paix  profonde, 

Et  doute,  quand  j'en  sors,  si  vous  êtes  au  monde. 

Pardonnez-moi  ce  mot  qui  sent  le  révolté  ; 

Avec  le  cœur  peut-être  il  est  mal  concerté, 

Vos  regards  ont  pour  moi  toujours  le  même  charme,  ■» 5 

M'offrent  mêmes  périls,  me  donnent  même  alarme, 

Et  je  n'espérerois  aucune  guérison, 

Si  l'âge  étoit  chez  vous  mon  seul  contre-poison. 

Mais  grâces  au  bonheur  de  ma  triste  aventure, 

A  peine  ai-je  loisir  d'y  sentir  ma  blessure  ;  3o 

Grâces  à  vingt  amants  dont  chez  vous  on  se  rit, 

Dès  que  votre  œil  m'y  blesse,  un  autre  œil  m'y  guérit. 

Souffrez  que  je  m'en  flatte  et  qu'à  mon  tour  je  cède 

Au  chagrinant  rival  qui  comme  eux  vous  obsède, 

Qui  leur  fait  presque  à  tous  déserter  votre  cour,  35 

Et  n'ose  vous  parler  ni  d'hymen  ni  d'amour. 

Vous  le  dites  du  moins,  et  voulez  qu'on  le  croie, 

Et  mon  reste  d'amour  vous  en  croit  avec  joie: 

Je  fais  plus,  je  le  vois  sans  en  être  jaloux. 

A  votre  tour,  m'en  croyez-vous?  4° 

«  Que  pensez-vous,  Madame,  de  cette  galanterie?  L'auteur  qui 
prétend  que  ses  vieilles  années  lui  ont  acquis  l'avantage  d'aimer 
si  commodément,  et  qui  s'explique  d'une  manière  si  agréable,  ne 
mérite-t-il  pas  d'être  particulièrement  considéré  de  la  dame?  11  est 
rare  de  pouvoir  conserver  dans  un  âge  aussi  avancé  que  celui  qu'il  se 
donne  le  feu  d'esprit  qu'il  fait  paroître  encore  dans  ces  vers  ;  et  le 
vieux  Martian,que  vous  avez  tant  admiré  dans  l'admirable  Pulckérie 
du  grand  Corneille,  n'auroit  pas  parlé  plus  galamment,  s'il  avoit  voulu 
s'éloigner  du  sérieux.  » 


OEUVRES  DIVERSES 

EN   PROSE 


NOTICE. 


Dans  l'édition  de  Lefèvre,  les  OEuvres  diverses  en  prose  sont 
beaucoup  plus  volumineuses  que  dans  la  nôtre;  mais  cela 
tient  à  ce  qu'on  y  a  introduit  un  grand  nombre  de  morceaux 
qui  nous  ont  paru  avoir  une  place  plus  naturelle  ailleurs.  On  y 
trouve  les  trois  Discours  sur  le  théâtre,  que  nous  avons,  à  l'exem- 
ple de  Corneille,  joints  à  ses  œuvres  dramatiques,  et  qui  sont  pla- 
cés avant  sa  première  pièce  (tome  I,  p.  i3-i2^);  les  avis  au  Lec- 
teur des  diverses  éditions  du  théâtre,  que  nous  avons  réunis  au 
commencement  du  tome  I  ;  les  préfaces  partielles  des  publi- 
cations successives  de  V  Imitation,  que  nous  avons,  en  les  com- 
plétant, rassemblées  en  tête  de  cet  ouvrage  (voyez  tome  VIII, 
p.  8-28);  les  lettres,  dont  nous  avons  fait  un  groupe  à  part, 
fort  augmenté,  qui  forme  aujourd'hui  pour  la  première  fois 
une  correspondance  suivie  de  Corneille  et  des  personnes  avec 
lesquelles  il  s'est  trouvé  en  rapport;  enfin  un  extrait  de  V His- 
toire de  V  Académie  française  de  Pellisson,  contenant  des  frag- 
ments de  lettres  de  Corneille  que  nous  avons  détachés  de  cette 
histoire  pour  les  mettre  à  leur  date  et  à  leur  rang  dans  la  série 
générale  de  la  correspondance  de  notre  poète. 

Ces  morceaux  écartés,  il  ne  reste  plus  dans  les  OEuvres  diverses 
en  prose  que  le  Discours  à  t  Académie  et  la  Réponse  de  Corneille 
aux  Observations  de  Scudéry  sur  le  Cid. 

Nous  y  joignons  VÉpitaphe  latine  de  dom  Jean  Goulu,  géné- 
ral des  Feuillants  * ,  découverte  par  nous,  ainsi  que  nous  l'indi- 
quions dans  notre  Avertissement  (tome  I,  p.  xi). 

Nous  avons,  suivant  notre  usage,  rangé  ces  trois  morceaux 

1.  La  congrégation  des  Feuillants  élait  une  branche  de  l'ordre  de 
Cîteaux . 


i92  OEUVRES    DIVERSES   EN    PROSE. 

dans  Tordre  chronologique  ;  nous  allons  dire  un  mot  de  chacun 
d'eux. 

A  la  page  xiii  du  tome  1  des  Œuvres  complètes  de  P.  Cor- 
neille, dont  deux  volumes  ont  paru  en  1857,  dans  la  Biblio- 
thèque elzévirienne,  chez  le  libraire  P.  Jannet,  M.  Taschereau 
s'exprime  ainsi  :  «  Le  Trésor  chronologique  et  historique  par  le 
R.  P.  dom  Pierre  de  Saint-Romuald,  dans  sa  troisième  partie, 
publiée  en  1647,  nous  fournit,  aux  pages  899-900,  le  rensei- 
gnement que  voici  :  «  Achevons  cette  année  (1629)  par  l'aché- 
a  vement  de  la  vie  des  deux  plus  grands  ornements  de  notre 
«  congrégation,  je  veux  dire  de  dom  Jean  de  Saint-François, 
«  premier  assistant  de  notre  Père  général,  et  de  dom  Sens  de 
a  Sainte-Catherine,  premier  visiteur.  Celui-là  naquit  à  Paris 
«  l'an  1576,  le  a5  août,  fête  de  saint  Louis.  Son  père  s'appeloit 
«  Nicolas  Goulu,  et  étoit  professeur  du  Roi  en  langue  grecque  ; 
«  et  sa  mère  se  nommoit  Magdelaine  Daurat,  et  étoit  fille  de 
«  feu  M.  Daurat,  poète,  et  aussi  professeur  du  Roi  en  la  même 
«  langue,  de  qui  Ronsard  se  vante  d'avoir  été  le  nourrisson.... 
«  Il  (Jean  Goulu)  repose  à  Paris  dans  le  chœur  de  notre  monas- 
«  tère  de  Saint-Bernard  ' ,  sous  une  tombe  de  marbre  noir  que  la 
œ  bénéficence  de  M.  et  de  Mme  de  Vendôme  lui  ont  fait  faire, 
«  et  où  se  voit  un  bel  épitaphe 2  en  prose  latine  du  style  du  sieur 
«  Corneille.  » 

A  ce  témoignage  contemporain ,  si  curieux ,  recueilli  par 
M.  Taschereau  au  sujet  de  cette  épitaphe,  nous  pouvons  en 
ajouter  un  autre,  qui  nous  est  transmis  par  Goujet.  On  lit  dans 
sa  Bibliothèque  française  (tome  XVII,  p.  i63)  :  «  On  voit  par 
les  lettres  manuscrites  de  Chapelain  que  M.  Corneille  avoit 
fait  en  latin  l'épi taphe  du  R.  P.  dom  Jean  Goulu,  religieux 
feuillant,  mort  en  1620,  qu'il  en  fit  confidence  à  Chapelain, 
son  ami,  et  que  Balzac,  qui  en  ignoroit  l'auteur,  fit  des  vers 


1.  Dans  Y  Éloge  du  P.  Goulu  (en  latin  Gulonius),  publié  en  1629 
(in-40),  et  réimprimé  dans  la  Bibllotheca  scriptorum  sacri  ordinis  cis- 
terciensis,  opère  et  studio  R.  D.  Caroli  de  Visch,  Cologne,  i656,  on  lit 
ce  qui  suit  :  «  Corpus  defuncti  in  odeo  B.  Bernardi  ad  portam  Hono- 
«  rianam  suburbanse  aedis  conditum  est,  Epiphaniorum  die  solemni.  » 

S.  Voyez  tome  IV,  p.  i57  note  1;  et  p.  3 10,  vers  38 1. 


NOTICE.  îy; 

contre  cette  épitaphe.  Je  ne  sais  pas  si  c'est  celle  qu'on  lit 
aux  Feuillants  et  que  M.  Piganiol  de  la  Force  a  fait  imprimer 
dans  sa  Description  de  Paris*.  Chapelain  conseille  à  M.  Cor- 
neille de  ne  point  se  plaindre  des  vers  de  Balzac,  de  peur  de 
rompre  avec  lui  une  amitié  dont  l'un  et  l'autre  se  faisoienl 
honneur.  » 

Nous  aurions  vivement  souhaité  de  pouvoir  vérifier  dans  le 
manuscrit  même  de  Chapelain  les  faits  indiqués  ici  ;  mais  une 
note  marginale  nous  apprend  que  les  lettres  dont  il  s'agit  sont 
du  20  juillet  et  du  ^5  août  1642,  et  par  malheur  la  pré- 
cieuse copie  autographe  de  cette  correspondance  que  possède 
M.  Sainte-Beuve,  et  qu'il  communique  si  libéralement  aux  tra- 
vailleurs, est  incomplète,  comme  l'a  dit  M.  Taschereau2,  et 
le  volume  qui  manque  est  précisément  celui  qui  contient  les 
années  1 64 1  à  i658. 

Le  passage  de  Goujet  que  nous  venons  de  rapporter  indique 
où  l'on  peut  rencontrer  le  texte  de  Corneille  qui  a  échappé  à 
M.  Taschereau;  il  est  vrai  que  Goujet  ne  parait  pas  certain  que 
l'épitaphe  reproduite  par  Piganiol  de  la  Force  soit  celle  dont 
Corneille  est  Fauteur,  mais  on  ne  voit  point  sur  quoi  peut  être 
fondé  ce  doute.  Millin  ne  Fa  pas  un  instant  partagé ,  et  dans 
ses  Antiquités*  il  attribue  sans  hésiter  cette  épitaphe  à  Cor- 
neille. Elle  se  trouvait  sur  une  tombe  de  marbre  noir,  placée 
dans  le  chœur  des  religieux  des  Feuillants  de  la  rue  Saint- 
Honoré.  On  ne  sait  aujourd'hui  ce  qu'a  pu  devenir  ce  marbre 
tumulaire;  quant  aux  restes  du  P.  Goulu,  ils  sont  déposés  aux 
catacombes  dans  l'ossuaire  de  la  paroisse  Saint-Sauveur 4. 

M.  Taschereau  s'était  posé  une  question  à  laquelle,  réduit 
aux  éléments  dont  il  disposait,  il  lui  était  difficile  de  répondre 
avec  quelque  sûreté.  «  Le  monument,  dit-il,  fut-il  élevé  immé- 
diatement après  cette  mort  {de  Goulu)  et  alors  que  Corneille 
n'avait  fait  que  Mélite,  ou  bien  monument  et  épitaphe  sont-ils 
d'une  date  un  peu  postérieure  et  du  temps  où  Corneille  avait 

1.  Tome  II,  p.  379  et  38o. 

2.  Histoire  de  la  vie  et  des  ouvrages  de  Corneille,  seconde  édition, 

p.  VII. 

3.  Tome  I,  §  v,  p.  4o-43. 

4.  Voyez  les  Catacombes  de  Paris,  1862,  p.    119 


i94  OEUVRES   DIVERSES   EN   PROSE. 

acquis  un  plus  grand  renom?  Nous  penchons  de  ce  dernier 
côté.»  L'extrait  des  lettres  de  Chapelain  que  nous  avons  men- 
tionné semble  confirmer  l'hypothèse  de  M.  Taschereau,  et  tout 
porte  à  croire  que  ce  ne  fut  guère  avant  l'année  1642,  dont  ces 
lettres  sont  datées,  que  Corneille  composa  Tépitaphe  qui  nous  oc- 
cupe. Nous  en  publions  le  texte  d'après  une  brochure  de  1 1  pages 
in-folio,  intitulée  :  Epitaphium  in  œde  san-benedictina  Parisiis 
appendendum,  Nicolaus  Gulonius,  mortalitalis  maiorumque  me- 
mor,  piis  illorum  Manibus  designabat,  anno  CDDCL.  Ce  recueil 
se  compose  des  épitaphes  de  neuf  membres  de  la  famille  de  Nico- 
las Goulu,  suivies  de  la  sienne;  on  y  trouve  aussi  un  Éloge  de  Jean 
Goulu  et  un  Avis  {pionitum)  sur  ses  ouvrages.  L'exemplaire  de 
ce  recueil  que  possède  la  Bibliothèque  impériale  porte  sur  le 
titre  la  mention  manuscrite  suivante  :  auctore  Goulu  Hieronymi 
F.  Nicolai  nepote.  Il  est  bien  probable  toutefois  que  la  part  de 
Nicolas  et  de  Jérôme  Goulu  dans  ce  travail  n'a  pas  été  bien 
considérable,  qu'ils  n'ont  guère  fait  que  mettre  en  ordre,  com- 
pléter et  annoter  les  éloges  et  les  épitaphes  des  divers  membres 
de  leur  famille,  mais  qu'ils  se  seraient  bien  gardés  de  substituer 
un  travail  de  leur  façon  à  une  inscription  faite  par  Corneille 
sur  l'ordre  du  duc  et  de  la  duchesse  de  Vendôme.  Si  nous 
avons  préféré  ce  texte  à  ceux  de  Piganiol  de  la  Force  et  de 
Millin,  c'est  parce  qu'il  a  un  caractère  plus  officiel,  qu'il  est 
évidemment  plus  correct,  que  la  disposition  en  est  meilleure, 
et  qu'il  est  accompagné  d'éclaircissements  précieux  et  certains. 

Nous  avons  revu  le  texte  de  la  Lettre  apologétique  du  sieur 
Corneille^  au  sujet  du  Cid,  sur  les  deux  éditions  de  1637,  et 
nous  avons  rendu  à  cette  pièce  son  véritable  intitulé ,  auquel, 
comme  nous  l'avons  dit ,  les  éditeurs  modernes  ont  substi- 
tué arbitrairement  celui  de  Lettre  contenant  la  réponse  de 
Corneille,  etc. 

Enfin  nous  donnons  aussi  le  Discours  à  l'Académie ,  avec 
son  titre  complet,  tel  qu'il  a  été  publié  chez  Jean-Baptiste  Coi- 
gnard,  dans  le  Recueil  des  harangues  prononcées  par  Messieurs 
de  f  Académie  françoise,  dans  leurs  réceptions ,  et  en  d'autres 
occasions  différentes,  depuis  î establissement  de  l  Académie  jus- 
qu'à présent,  pour  la  première  fois  en  1698,  dans  le  format 


NOTICE.  395 

in-40  (p.  !i-i3),  et  pour  la  seconde  en  17 14,  dans  le  format 
in- 12.  La  révision  que  nous  en  avons  faite  nous  a  permis  de 
faire  disparaître  quelques  rajeunissements  de  l'abbé  Granet, 
que  nous  signalons  en  note,  et  que  les  éditeurs  qui  lui  ont  suc- 
cédé n'avaient  pas  manqué  de  reproduire. 


îg(y  OEUVRES   DIVERSES    EN   PROSE. 


EPITAPHE    DE    DOM    JEAN    GOULU,     GENERAL 


DES    FEUILLANTS1. 


S  ta  quisquis  es,  et  perlege. 

R.   P.   Ioan.  GOVLV, 

PARISIIS    NATVS,    VBIQVE     NOTVS. 

PIETATE,   PROBITATE,  ERVDITIONE,  ELOQVVTfONE, 

AD  INVIDIAM  VSQVE  MIRABILIS, 

VIXIT  HEV,   IMO  VIVIT  : 

Qvippe  dignum  laude  virum  fama  vetat  mori. 

A  militia  forensi  Fuliensem  ingressus,  scriptis  suis 

Impugnatam  fidei  veritatem2, 

Impetita  Monarchiae  iura  8, 

TRADUCTION    DE    l'ÉPITAPHE    DU    P.     GOULU. 

Arrête,  qui  que  tu  sois,  et  lis  cette  épitaphe.  Le  R.  P.  Jean  Goulu, 
né  à  Paris,  connu  partout,  admirable  par  sa  piété,  sa  probité,  sou 
savoir,  son  élocution,  au  point  d'exciter  l'envie,  a  vécu,  hélas!  ou 
plutôt  il  vit  encore,  car  la  renommée  empêche  un  homme  digue  de 

I.  Voyez  la  Notice  des  OEuvres  en  prose,  p.  392-394- 
a.  Réponse  au  livre  de  M.  du  Moulin:  de  la  Vocation  des  pasteurs. 
[Note  de  r  édition  originale .) 

3.  Vindiciœ  theologise  iberopoliticse .  (Note  de  Sédition  originale.)  — 
Le  titre  complet  de  cet  ouvrage  est  :  Vindicise  theologise  iberopoKticte 
ad  catholicum  regem  Hispuniarum ,  etc.,  Philippin w  /F,  contra  pseudo- 
theologi  admonitoris  calumnias.  Cet  ouvrage,   publié  en  1626,  dans  le 


OEUVRES    DIVERSES   EN   PROSE.  397 

Periclitantem  sanctorum  memoriam1, 

Mirum  quantum  ab  iniuria  temporû  vindicauerit, 

Simulque  adulteratam  eloquentiae  puritatem2 

Reuocauerit,  conseruauerit,  illustrauerit. 
Tandem  vniuerso  ordini  postquam  bis  praefuit 


3 


louange  de  mourir.  Entré  dans  la  milice  des  Feuillants,  au  sortir  de 
celle  du  barreau,  il  a  su  défendre  merveilleusement  contre  l'injure 
des  temps  la  vérité  de  la  foi  attaquée,  les  droits  de  la  monarchie  cou- 
testés,  la  mémoire  des  saints,  qu'il  voyait  en  péril,  et  en  même  temps 
rappeler,  conserver,  illustrer  la  pureté  altérée  de  l'éloquence.  Enfin, 
après  qu'il  eut  été  deux  fois  à  la  tête  de  tout  son  ordre  et  qu'il  l'eut 
servi  par  son  exemple  non  moins  que  par    son  gouvernement,  on 

format  in-8°,  sans  mention  de  ville,  répond  à  l'Avis  d'un  théologien 
sans  passion  sur  plusieurs  libelles  imprimés  depuis  peu  en  Allemaigne,  pu- 
blié la  même  année,  attribué  à  Mathieu  de  Morgues  et  dont  la  Biblio- 
thèque impériale  possède  quatre  éditions  différentes. 

i.  La  Vie  du  B.  Fr.  de  Sales,  évéque  de  Genève.  [Note  de  V édition 
originale.)  —  Cette  vie  de  saint  François  de  Sales  est  de  i6a4-  Fran- 
çois de  Sales  avait  été  béatifié  en  1601  ;  il  ne  fut  canonisé  qu'en  i665. 

2.  Lettres  de  Phyllarque  à  Aj'iste,  [Note  de  l'édition  originale.)  —  Ce 
fut  probablement  à  cause  de  cet  éloge  des  lettres  de  Phyllarque  (pseu- 
donyme du  P.  Goulu)  que  Balzac,  contre  qui  ces  lettres  étaient  di- 
rigées, fit  des  vers  latins  contre  l'épitaphe,  dont  il  ignorait  l'auteur 
(voyez  tome  III,  p.  29-31,  et  ci-dessus,  p.  392  et  393). 

3.  Malgré  ce  passage  de  l'épitaphe,  qui,  ce  semble,  ne  devrait  laisser 
aucun  doute,  voici  ce  que  nous  lisons  dans  une  note  du  Dictionnaire 
deBayle  (Amsterdam,  1734,  tome  III,  p.  86):  «  Ceux  qui  ont  dit 
qu'il  (Goulu)  eut  deux  fois  le  généralat,  n'avoient  pas  consulté  son 
Éloge*,  dans  la  seconde  édition  de  son  Saint  Denis  V  Ârèopagite.  Cet 
éloge  nous  apprend  que  depuis  son  noviciat  il  eut  toujours  quelque 
charge  dans  l'ordre,  et  qu'enfin  il  fut  élevé  à  la  première,  qu'il  exerça 
pendant  six  ans,  après  quoi  il  fut  donné  pour  conseiller  et  pour  as- 
sesseur à  celui  qui  lui  succéda  **,  j> 

T  ?  Éloge  que  nous  avons  cité  plus  haut,  p.  39a,  note  1 . 
*  Nous  avons  vu  plus  haut  dans  la  Notice  (p.  392)  que  dom  Pierre 
de  Saint-Romuald  désignait  le  P.  Goulu  par  le  titre  de  «  premier  as- 
sistant .de  notre  Père  général.  )> 


398  OEUVRES   DIVERSES   EN   PROSE, 

ExempJoque  non  minus  quam  imperio  profuit, 

Vix  dicas 

Dignitate  functusne  prius  an  defunctus  sit ■ . 

Magnatum  amicitias  vt  meruerit,  vt  tenuerit, 

Vel  hoc  marmor  testabitur,  quod 

ILLVSTRISSIMI  PRINCIPES, 
(LËSAR  BORBONIVS2,  ET  FRANCISCA 

LOTHARINGA,    CHARISSIMT     CONIVGES, 

Duces  Vindocin.  Stapens.  Bcllefort.  Mercœrei,  Ponthie- 
urae,  etc. 

Bene  merenti  mœrentes  posuere. 
ObiitannoM.DC.XXIX,  die  V.  Ianuarii,  œtatis  suseLJII. 

Ora  pro  eo. 

aurait  peine  à  dire  ce  qu'il  a  achevé  le  plus  tôt,  de  sa  charge  ou  de 
sa  vie.  A  quel  point  il  a  su  mériter  et  garder  l'amitié  des  grands,  ce 
marbre  même  en  témoignera,  que  les  très-illustres  princes  César  de 
Bourbon  et  Françoise  de  Lorraine  ,  très-chers  époux ,  duc  et  du- 
chesse de  Vendôme,  d'Étampes,  de  Mercœur,  de  Penthièvre,  etc.,  ont 
élevé  au  digne  objet  de  leurs  regrets.  Il  mourut  l'an  M.DC.XXIX, 
le  5  de  janvier,  dans  la  53e  année  de  son  âge.  Prie  pour  lui. 

i.  Il  semble  qu'on  devrait  pouvoir  conclure  de  ces  mots  que  dom 
Goulu  était  mort  en  sortant  de  charge.  Si  son  généra lat  se  terminait 
avec  l'année  1628,  il  n'y  aurait  survécu  que  de  cinq  jours.  Mais 
voyez  ce  qui  est  dit  dans  la  note  précédente. 

2.  César,  duc  de  Vendôme,  lils  naturel  légitimé  d'Henri  IV,  ce  qui 
explique  assez,  ce  semble,  le  surnom  de  Bourbon  qui  choquait  fort 
Piganiol  de  la  Force.  «  Quelque  accoutumé  que  je  sois,  dit-il,  à  voir 
que  nos  historiens,  même  les  plus  habiles,  se  méprennent  tous  les 
jours  dans  les  surnoms  des  princes  de  la  maison  royale,  j'avoue 


OEUVRES    DIVERSES   EN   PROSE.  U)$ 

II 

LETTRE    APOLOGÉTIQUE    DU    SIEUR    CORNEILLE, 

Contenant  sa  réponse  aux  Observations  faites  par  le  sieur  Scudérv 

sur  le  Cid  ' . 

Monsieur  , 

Il  ne  vous  suffit  pas  que  votre  libelle  me  déchire  en  pu- 
blic :  vos  lettres  me  viennent  quereller  jusque  dans  mon 
cabinet,  et  vous  m'envoyez-  d'injustes  accusations,  lorsque 
vous  me  devez  pour  le  moins  des  excuses.  Je  n'ai  point 
fait  la  pièce  qui  vous  pique  2  ;  je  l'ai  reçue  de  Paris  avec 
une  lettre  qui  m'a  appris  le  nom  de  son  auteur;  il  l'adresse 
à  un  de  nos  amis ,  qui  vous  en  pourra  donner  plus  de 
lumière.  Pour  moi ,  bien  que  je  n'aye  guère  de  jugement, 
si  Ion  s'en  rapporte  à  vous,  je  n'en  ai  pas  si  peu  que 
d'offenser  une  personne  de  si  haute  condition  3,  dont 
je  n'ai  pas  l'honneur  d'être  connu,  et  de  craindre  moins 
ses  ressentiments  que  les  vôtres.  Tout  ce  que  je  vous 
puis  dire ,  c'est  que  je  ne  doute  ni  de  votre  noblesse,  ni 
de  votre  vaillance,  et  qu'aux  choses  de  cette  nature,  où  je 


cependant  que  j'ai  été  fort  surpris  que  l'auteur  de  l'épitaphe  qu'on 
vient  de  lire  ait  donné  à  César  duc  de  Vendôme  le  surnom  de  Bour- 
bon, qui  n'a  jamais  été  le  sien,  et  aussi  qu'il  n'a  jamais  porté.  » 

i.  Voyez  sur  les  Observations  de  Scudéry,  sur  la  Lettre  apologé- 
tique, et  sur  les  réponses  auxquelles  ces  deux  ouvrages  ont  donné 
lieu,  tome  III,  p.  22-29,  et  ci-dessus,  p.  74-80.  —  Dans  l'une  des 
éditions  de  1637,  il  y  a,  nous  l'avons  dit,  dans  le  titre  :  apologitique, 
pour  apologétique. 

2.  On  prétend  qu'il  s'agit  ici  d'une  pièce  intitulé  :  la  Défense  du 
Cid;  nous  n'avons  pu  nous  la  procurer.  Voyez  tome  III ,  p.  24 
et  23. 

3.  Cette  personne  est  inconnue.  Voyez  tome  III,  p.  25. 


,oo  OEUVRES   DIVERSES    EJN    PROSE. 

n'ai  point  d'intérêt,  je  crois  le  monde  sur  sa  parole:  ne 
mêlons  point  de  pareilles  difficultés  parmi  nos  différends. 
Il  n'est  pas  question  de  savoir  de  combien  vous  êtes 
noble  ou  plus  vaillant  que  moi,  pour  juger  de  combien 
le  Ciel  est  meilleur  que  l'Amant  libéral i.  Les  bons  es- 
prits trouvent  que  vous  avez  fait  un  haut  chef-d'œuvre 
de  doctrine  et  de  raisonnement  en  vos  Observations .  La 
modestie  et  la  générosité  que  vous  y  témoignez  leur  sem- 
blent des  pièces  rares,  et  surtout  votre  procédé  merveil- 
leusement sincère  et  cordial  vers  un  ami.  Vous  protestez 
de  ne  me  dire  point  d'injures2 ,  et  lorsqu  incontinent  après 
vous  m'accusez  d'ignorance  en  mon  métier 3,  et  de  manque 
de  jugement  en  la  conduite  de  mon  chef-d'œuvre ,  vous 
appelez  cela  des  civilités  d'auteur?  Je  n'aurois  besoin  que 
du  texte  de  votre  libelle,  et  des  contradictions  qui  s'y 
rencontrent,  pour  vous  convaincre  de  l'un  et  de  l'autre 
de  ces  défauts,  et  imprimer  sur  votre  casaque  le  quatrain 
outrageux  *  que  vous  avez  voulu  attacher  à  la  mienne ., 

i.  Les  frères  Parfait  rendent  compte  de  cette  pièce  de  Scudéry 
sous  l'année  i636,  un  peu  avant  de  parler  du  C'id  (Histoire  du  Théâtre 
françois,  tome  V,  p.  238-24°)  •  Voyez  aussi  tome  III,  p.  23  et  24. 

2.  De  ne  point  dire  d'injures,  dans  les  éditions  modernes.  —  «  J'at- 
taque le  Cid,  et  non  pas  son  auteur;  j'en  veux  à  son  ouvrage,  et  non 
point  à  sa  personne  ;  et  comme  les  combats  et  la  civilité  ne  sont  pas 
incompatibles ,  je  veux  baiser  le  fleuret  dont  je  prétends  lui  porter 
une  botte  franebe;  je  ne  fais  ni  une  satire,  ni  un  libelle  diffamatoire, 
mais  de  simples  observations ,  et  hors  les  paroles  qui  seront  de  l'es- 
sence de  mon  sujet,  il  ne  m'en  échappera  pas  une  où  l'on  remarque 
de  l'aigreur.  Je  le  prie  d'en  user  avec  la  même  retenue  s'il  me  ré- 
pond. »  {Observations  sur  le  Cid,  édit.  en  96  pages,  p.  5.) 

3.  En  mon  entier,  dans  les  éditions  modernes. 
i .    Voici  ce  quatrain  : 

Sous  cette  casaque  noire 

Repose  paisiblement 

L'auteur  d'heureuse  mémoire,  i 

Attendant  le  jugement. 

[Observations  sur  le  Cid,  p.  Si.) 


LETTRE    APOLOGÉTIQUE.  401 

si  le  même  texte  ne  me  faisoit  voir  que  l'éloge  d'auteur 
d heureuse  mémoire  ne  vous  peut  être  propre,  en  réappre- 
nant que  vous  manquez  aussi  de  cette  partie,  quand  vous 
vous  êtes  écrié  :  O  raison  de  [auditeur,  que  faisiez- vous*? 
En  faisant  cette  magnifique  saillie  ,  ne  vous  êtes-vous  pas 
souvenu  que  le  Cid  a  été  représenté  trois  fois  au  Lou- 
vre, et  deux  fois  à  l'hôtel  de  Richelieu?  Quand  vous 
avez  traité  la  pauvre  Ghimène  d'impudique  2,  de  prosti- 
tuée3, de  parricide*,  de  monstre5,  ne  vous  êtes-vous 
pas  souvenu  que  la  Reine,  les  princesses  et  les  plus  ver- 
tueuses dames  de  la  cour  et  de  Paris  l'ont  reçue  et  ca- 
ressée  en  fille  d'honneur?  Quand  vous  m'avez  reproche 
mes  vanités,  et  nommé  le  comte  de  Gormas  un  capitan 
de  comédie6,  vous  ne  vous  êtes  pas  souvenu  que  vous 
avez  mis  un  A  qui  lit1 ,  au  devant  de  Ligdamon6,  ni  des 
autres  chaleurs  poétiques  et  militaires  qui  font  rire  le 
lecteur  presque  dans  tous  vos  livres.  Pour  me  faire  croire 
ignorant,  vous  avez  tâché  d'imposer  aux  simples,  et 
avez  avancé  des  maximes  de  théâtre  de  votre  seule  auto- 
rité, dont  toutefois,  quand  elles  seroient  vraies,    vous 

1.  a  O  jugement  de  l'auteur,  à  quoi  songez-vous?  O  raison  de 
l'auditeur,  qu'êtes-vous  devenue?  »  {Observations  de  Scudéry,  p.  5a.) 

2.  «  Un  roi  caresse  cette  impudique.  »  [Ibidem,  p.    25.) 

3.  «  Elle  lui  dit  cent  choses  dignes  d'une  prostituée.»    [Ibidem  , 

P.  $9  ) 

4.  ((  Tout  cela  11'empèehe  pas  qu'elle  ne  se  rende  parricide,  en  se 
résolvant  d'épouser  le  meurtrier  de  son  père.  »  [Ibidem,  p.  12.) 

5.  <r  Cette  fil  le,  mais  plutôt  ce  monstre »  [Ibidem,]*.  3o.) 

(S.  «  Il  seroit  à  souhaiter  pour  lui  qu'il  eût  corrigé  de  cette  sorte  tout 
ce  qu'il  fait  dire  à  ce  comte  de  Gormas,  afin  que  d'un  capitan  ridicule 
il  eût  fait  un  honnête  homme,  tout  ce  qu'il  dit  étant  plus  digne  d'un 
fanfaron  que  d'une  personne  de  valeur  et  de  qualité.  Et  pour  ne  vous 
donner  pas  la  peine  d'aller  vous  en  écîaircir  dans  son  livre,  voyez  en 
quels  termes  il  fait  parler  ce  capitaine  Fracasse.  »  (Ibidem,  p.  34.) 

7.  Sorte  d'avis  au  lecteur 

8.  Sur  Ligdamon,  voyez  ci-dessus,  p-  Sy. 

Corneille,  x  26 


402  OEUVRES   DIVERSES   EJN   PROSE. 

ne  pourriez  tirer  les  conséquences  cornues  que  vous  en 
tirez  :  vous  vous  êtes  fait  tout  blanc  d'Aristote,  et  d'au- 
tres auteurs  que  vous  ne  lûtes  et  n'entendîtes  peut-être 
jamais ,  et  qui  vous  manquent  tous  de  garantie  '  ;  vous 
avez  fait  le  censeur  moral,  pour  m' imputer  de  mauvais 
exemples;  vous  avez  épluché  [les  vers  de  ma  pièce2], 
jusques  à  en  accuser  un  de  manque  de  césure*  :  si  vous 
eussiez  su  les  termes  du  métier  dont  vous  vous  mêlez4, 
vous  eussiez  dit  qu'il  manquoit  de  repos  en  l'hémistiche. 
Vous  m'avez  voulu  faire  passer  pour  simple  traducteur6, 
sous  ombre  de  soixante  et  douze  vers  que  vous  marquez  * 

1.  Scudéry  répondit  à  cette  accusation  en  publiant  la  Preuve  des 
passages  alléguez  dans  les  Observations  sur  le  Cid.  Voyez  notre 
tome  III,  p.  37. 

2.  Les  mots  entre  crochets  manquent  dans  les  deux  éditions  de  1637; 
ils  ont  été  suppléés  par  les  éditeurs  de  Corneille. 

3.  «  Parlons-en  mieux,  le  Roi  fait  honneur  à  votre  âge. 

La  césure  manque  à  ce  vers.  » 

(Observations  sur  le  Cid,  p.  68  et  69.) 

4.  Ces  mots  :  «c  dont  vous  vous  mêlez,  »  manquent  dans  les  édi- 
tions modernes. 

5.  Sur  les  rapprochements  entre  Guillem  de  Castro  et  Corneille 
par  lesquels  Scudéry  termine  ses  Observations  (p.  8i-g3),  voyez  notre 
tome  II],  p.  199,  note  2.  Ces  rapprochements  sont  précédés  de  cette 
sorte  d'introduction  :  «  Le  Cid  est  une  comédie  espagnole,  dont 
presque  tout  l'ordre,  scène  pour  scène,  et  toutes  les  pensées  de  la 
françoise  sont  tirées;  et  cependant  ni  Mondory,  ni  les  affiches,  ni 
l'impression  n'ont  appelé  ce  poème  ni  traduction,  ni  paraphrase ,  ni 
seulement  imitation  ;  mais  bien  en  ont-ils  parlé  comme  d'une  chose 
qui  seroit  purement  à  celui  qui  n'en  est  que  le  traducteur,  et  lui- 
même  a  dit,  comme  un  autre  a  déjà  remarqué  : 

Qu'il  ne  doit  qu'à  lui  seul  toute  sa  renommée  *.  » 

6.  Scudéry  cite  plus  de  soixante  et  douze  vers  françois,  et  encore 
plus  d'espagnols.  Corneille  ne  compte  peut-être  que  ceux  des  vers 
eités  qu'il  regarde  vraiment  comme  des  imitations 

*  Excuse  à  Ariste,  vers  5o,  ci-dessus,  p.  76. 


LETTRE  APOLOGÉTIQUE.  4o3 

sur  un  ouvrage  de  deux  mille1,  et  que  ceux  qui  s'y 
connoissent  n'appelleront  jamais  de  simples  traductions; 
vous  avez  déclamé  contre  moi,  pour  avoir  tu  le  nom 
de  Fauteur  espagnol,  bien  que  vous  ne  l'ayez  appris 
que  de  moi,  et  que  vous  sachiez  fort  bien  que  je  ne 
l'ai  celé  à  personne,  et  que  même  j'en  ai  porté  l'ori- 
ginal en  sa  langue  à  Monseigneur  le  Cardinal ,  votre 
maître  et  le  mien;  enfin  vous  m'avez  voulu  arracher 
en  un  jour  ce  que  près  de  trente  ans  d'étude  m'ont 
acquis2  ;  il  n'a  pas  tenu  à  vous  que  du  premier  lieu,  où 
beaucoup  d'honnêtes  gens  me  placent,  je  ne  sois  des- 
cendu au-dessous  de  Claveret 3  ;  et  pour  réparer  des  of- 
fenses si  sensibles,  vous  croyez  faire  assez  de  m'exhor- 
ter  à  vous  répondre  sans  outrages4,  pour  nous  repentir 
après  tous  deux  de  nos  folies,  et  de  me  mander  impé- 
rieusement que  malgré  nos  gaillardises  passées,  je  sois 
encore  votre  ami,  afin  que  vous  soyez  encore  le  mien, 
comme  si  votre  amitié  me  devoit  être  fort  précieuse 
après  cette  incartade,  et  que  je  dusse  prendre  garde  seu- 
lement au  peu  de  mal  que  vous  m'avez  fait,  et  non  pas 
à  celui  que  vous  m'avez  voulu  faire.  Vous  vous  plaignez5 
d'une  Lettre  à  triste*,   où  je  ne  vous  ai  point  fait  de 

i.  Le  C'idy  sous  sa  forme  dernière  et  définitive,  a  1840  vers;  un 
peu  plus  dans  les  premières  éditions  (i63j-i6S6). 

7.  Il  y  a  ici  une  exagération  qui  a  été  vivement  relevée  dans  la 
Lettre  du  sieur  Claveret  au  sieur  Corneille.  Voyez  notre  tomel,  p.  i3o. 

3 .  Ce  fut  cette  phrase  qui  attira  à  Corneille  les  pamphlets  de  Cla- 
veret. Voyez  tome  III,  p.  26  et  suivantes. 

4.  Voyez  ci-dessus  la  fin  de  la  note  2,  p.  400.  Du  reste  ici  déjà, 
et  surtout  dans  les  phrases  qui  vont  suivre,  Corneille  répond  princi- 
palement aux  lettres  qui  le  venaient  quereller  jusque  dans  son  cabi- 
net (voyez  le  commencement  de  la  Lettre  apologétique),  et  que  nous 
ne  connaissons  que  par  ce  qu'il  nous  en  dit. 

5.  Dans  la  réimpression  (de  1637)  :  «  Vous  vous  plaigniez.  » 

6.  C'est  l' Excuse  à  Ariste.  Voyez  ci-dessus,  p.  74-  Voici  en  quels 
termes    Scudérv    fait  allusion  à  V Excuse   à  Ariste  dans  ses   Observa- 


Ao4  OEUVRES    DIVERSES  EN   PROSE. 

tort  de  vous  traiter  d'égal,  puisqu  en  vous  montrant 
mon  envieux1  vous  vous  confessez  moindre,  quoique 
vous  nommiez  folies  les  travers 2  d'auteur  où  vous  vouj» 
êtes  laissé  emporter,  et  que  le  repentir  que  vous  en  faites 
paroître  marque  la  honte  que  vous  en  avez8.  Ce  n'est  pas 
assez  de  dire  :  «  Soyez  encore  mon  ami,  »  pour  recevoir 
une  amitié  si  indignement  violée  :  je  ne  suis  point  homme 
d'éclaircissement*;  vous  êtes  en   sûreté   de  ce  côté-là. 

lions  (p .  4)  >  «  Quand  j'ai  vu.. . .  qu'il  se  déifîoit  d'autorité  privée,  qu'il 
parloit  de  lui ,  comme  nous  avons  accoutumé  de  parler  des  autres  ; 
qu'il  faisoit  même  imprimer  les  sentiments  avantageux  qu'il  a  de  soi, 
et  qu'il  semble  faire  croire  qu'il  fait  beaucoup  d'honneur  aux  plus 
grands  esprits  de  son  siècle  de  leur  présenter  la  main  gauche,  j'ai  cru 
que  je  ne  pouvois  sans  injustice  et  sans  lâcheté  abandonner  la  cause 
commune.  » 

i.  Tel  est  le  texte  des  éditions  originales.  On  y  a  substitué  daiks 
les  éditions  modernes  :  «  moins  envieux.  » 

2.  Il  n'y  a  point  travers,  mais  travées,  dans  les  éditions  originales. 
Ce  mot  paraît  bien  être  le  résultat  d'une  mauvaise  lecture  des  impri- 
meurs. Mais  nous  devons  dire  que  travers,  donné  par  toutes  les  édi- 
tions modernes,  ne  se  trouve  avec  l'acception  qu'il  aurait  ici  dans 
aucun  des  dictionnaires  du  temps.  Richelet  (1679)  lui  attribue,  dans 
la  conversation  familière,  le  sens  de  disgrâce,  accident,  malheur.  Nicot, 
au  commencement  du  siècle,  Furetière  et  l'Académie ,  à  la  fin,  ne 
mentionnent  de  ce  terme,  pris  substantivement,  aucun  emploi  figuré. 
Toutefois  nous  en  trouvons  deux  exemples  de  la  Bruyère:  un  pre- 
mier au  chapitre  des  Grands,  n°  53  :  «  travers  d'esprit;  $  un  second 
dans  ce  passage  que  cite  le  Dictionnaire  de  Trévoux,  et  où  le  sens  du 
mot  serait,  ce  semble,  assez  voisin  de  celui  qu'il  aurait  ici  dans  Cor- 
neille :  «  Je  ne  suis  point  d'humeur  à  essuyer  vos  travers.  » 

3.  Ceci  répond  encore  aux  lettres  particulières  de  Scudéry,  et  non 
à  ses  Observations . 

4.  On  a  cru  que  par  ces  mots  Corneille  déclarait  qu'il  ne  se  battrait 
pas,  et  on  a  voulu  en  conclure  qu'il  avait  peur  de  Scudérv.  Cet  en- 
droit est  tout  simplement  une  allusion  à  ce  passage  des  Observation* 

p.  45  et  46)»  qui  est  relatifs  la  scène  1  de  l'acte  II,  entre  don  Arias 
et  le  Comte  :  «  L'auteur  me  permettra  de  lui  dire  qu'on  voit  bien 
qu'il  n'est  pas  homme  d'éclaircissement  ni  de  procédé.  Quand  deuv 
grands  ont  querelle  et  que  l'un  est  offensé  à  l'honneur,  ce  sont  des 
oiseaux  qu'on  ne  laisse  point  aller  sur  leur  foi.  » 


LETTRE    APOLOGÉTIQUE.  ',<»» 

Traitez-moi  dorénavant  en  inconnu,  comme  je  vous  veux 
laisser  pour  tel  que  vous  êtes,  maintenant  que  je  vous 
connois;  mais  vous  n'aurez  pas  sujet  de  vous  plaindre, 
quand  je  prendrai  le  même  droit  sur  vos  ouvrages  que 
vous  avez  pris  sur  les  miens  ' .  Si  un  volume  &  Observations 
ne  vous  suffit,  faites-en  encore  cinquante  :  tant  que  vous 
ne  m'attaquerez  pas  avec  des  raisons  plus  solides,  vous 
ne  me  mettrez  point  en  nécessité  de  me  défendre,  et  de 
ma  part  je  verrai,  avec  mes  amis,  si  ce  que  votre  libelle 
vous  a  laissé  de  réputation  vaut  que2  j'achève  de  la  rui- 
ner. Quand  vous  me  demanderez  mon  amitié  avec  des 
termes  plus  civils ,  j'ai  assez  de  bonté  pour  ne  vous  la 
refuser  pas,  et  me  taire  des  défauts  de  votre  esprit  que 
vous  étalez  dans  vos  livres.  Jusque-là,  je  suis  assez  glo- 
rieux pour  vous  dire  de  porte  à  porte  que  je  ne  vous 
crains  ni  ne  vous  aime.  Après  tout,  pour  vous  parler 
sérieusement,  et  vous  montrer  que  je  ne  suis  pas  si  piqué 
que  vous  pourriez  vous  imaginer,  il  ne  tiendra  pas*  à 
moi  que  nous  ne  reprenions  la  bonne  intelligence  du 
passé  que  vous  souhaitez.  Mais  après  une  offense  si 
publique,  il  y  faut  un  peu  plus  de  cérémonie  :  je  ne 
vous  la  rendrai  pas  malaisée,  et  donnerai  tous  mes  inté- 
rêts à  qui  que4  vous  voudrez  de  vos  amis;  et  je  m'assure 
que  si  un  homme  se  pouvoit  faire  satisfaction  du  tort 
qu'il  s'est  fait,   il  vous  condamneroit  à   vous   la   faire  à 


i.  Dans  ses  Observations  (p.  94)  Scudérv  avait  paru  contester  ce 
droit  à  Corneille  :  «  Au  reste ,  on  m'a  dit  qu'il  prétend  en  ses 
réponses  examiner  les  œuvres  des  autres,  au  lieu  de  tâcher  de  jus- 
tifier les  siennes.  » 

2.  Les  éditeurs  modernes  ont  mis  :  «  vaut  la  peine  que.  » 

3.  Les  deux  éditions  de  1687  portent,  évidemment  par  erreur: 
«  qu'il  ne  tiendra  pas.  9 

4.  Les  éditeurs  modernes  ont  supprimé  que  après  qui;  à  la  ligne 
suivante  ils  ont  ajouté,  après  satisfaction  ;  «  à  lui-même,  s 


4o6  OEUVRES    DIVERSES  EN  PROSE. 

vous-même,  plutôt  qu'à  moi  qui  ne  vous  en  demande 
point,  et  à  qui  la  lecture  de  vos  Observations  n'a  donné ' 
aucun  mouvement  que  de  compassion.  Et  certes  on  me 
blâmeroit  avec  justice  si  je  vous  voulois  du  mal2  pour  une 
chose  qui  a  été  l'accomplissement  de  ma  gloire,  et  dont 
le  Cid  a  reçu  cet  avantage,  que  de  tant  de  beaux  poëmes 
qui  ont  paru  jusqu'à  présent,  il  a  été  le  seul  dont  l'éclat 
ait  pu  obliger  l'envie  à  prendre  la  plume.  Je  me  contente 
pour  toute  apologie  de  ce  que  vous  avouez  qu'il  a  eu 
l'approbation  des  savants  et  de  la  cours.  Cet  éloge  véri- 
table, par  où  vous  commencez  vos  censures,  détruit  tout 
ce  que  vous  pouvez  dire  après.  Il  suffit  qu'ayez  fait  une 
folie  à  m'attaquer*,  sans  que  j'en  fasse  une  à  vous  ré- 

i.  «r  Ne  m'a  donné,  »  mais  à  tort,  dans  une  des  éditions  de  1637. 

2.  «  Si  je  vous  voulois  mal,  »  dans  les  éditions  modernes. 

3.  a  Que  cette  vapeur  grossière,  qui  se  forme  dans  le  parterre,  ait 
pu  s'élever  jusqu'aux  galeries ,  et  qu'un  fantôme  ait  abusé  le  savoir 
comme  l'ignorance,  et  la  cour  aussi  bien  que  le  bourgeois,  j'avoue  que 
ce  prodige  m'étonne,  et  que  ce  n'est  qu'en  ce  bizarre  événement  que 
je  trouve  le  Cid  merveilleux,  »  [Observations  sur  le  Cid,  p.  i  et  2.) 

4.  Nous  devons  prévenir  le  lecteur  que  les  mots  «  à  m'attaquer  » 
sont  une  correction,  à  nos  yeux  indubitable,  qui  nous  a  été  suggérée 
par  M.  Rossignol  de  l'Institut.  Les  deux  éditions  originales,  faites 
du  reste  l'une  sur  l'autre  *,  portent  :  «  folie  Amatrique,  »  avec  un  A  ca- 
pital, que  méritait  bien  cette  forme  étrange.  Le  sens  que  nous  donne 
cette  correction  est  très-satisfaisant  ;  l'opposition  :  à  m'attaquer,  à  vous 
répondre,  forme  un  tour  symétrique,  fort  naturel;  et  pour  s'expliquer 
la  faute  d'impression,  il  suffit  de  se  rappeler  que  dans  l'écriture  du 
dix-septième  siècle  les  signes  orthographiques,  tels  que  les  accents  et 
l'apostrophe,  sont  souvent  omis,  et  les  doublements  de  consonnes  né- 
gligés. Si  nous  supposons  que  Corneille  eût  écrit  :  a  mataquer  **,  et 
que  IV  finale  fût  mal  ou  peu  marquée,  la  seule  erreur  de  lecture 

*  Voyez  tome  III,  p.  24  et  note  2. 

**  Le  mot  est  réellement  imprimé  par  un  seul  t,  un  peu  plus  haut, 
dans  les  impressions  de  1687  :  «  vous  nem'ataquerés  »  (voyez  p.  4o5, 
ligne  7  de  la  présente  édition).  Les  imprimeurs  ont  négligé  l'accent 
dans  les  mots  «  de  porte  a  porte  »  (ci- dessus ,  p.  4o5,  ligne  i5);  et 
ils  ont  multiplié  les  fautes  de  tout  genre. 


LETTRE    APOLOGÉTIQUE.  407 

pondre  comme  vous  m'y  conviez;  et  puisque  les  plus 
courtes  sont  les  meilleures ,  je  ne  ferai  point  revivre  la 
vôtre  par  la  mienne.  Résistez  aux  tentations  de  ces  gail- 
lardises qui  font  rire  le  public  à  vos  dépens,  et  continuez  à 
vouloir  être  mon  ami,  afin  que  je  me  puisse  dire  le  vôtre. 

Corneille. 


III 

DISCOURS  PRONONCÉ  PAR  MONSIEUR  CORNEILLE,  AVOCAT 


GÉNÉRAL  A  LA   TARLE    DE    MARRRE   DE    NORMANDIE1 


LE  22.  JANVIER  l647?  LORSQU'IL  FUT  REÇU  [a 
L  ACADÉMIE  FRANÇOISE]  A  LA  PLACE  DE  MONSIEUR 
MAYNARD2. 

Messieurs  , 
S'il  est  vrai  que  ce  soit  un  avantage ,  pour  dépeindre 

commise  par  l'imprimeur  a  été  de  prendre  pour  ri  un  a  peu  lisible. 
Ajoutons  qu'il  y  a  deux  cents  ans  les  auteurs  ne  voyaient  guère 
d'épreuves  ou  ne  s'acquittaient  que  bien  légèrement  de  cette  partie  de 
leur  tâche.  —  Le  mot  Âmatrique  a  fort  chagriné  les  éditeurs  et  les 
commentateurs  de  Corneille.  Plusieurs  se  sont  contentés  de  n'en 
point  parler;  d'autres,  moins  sages,  ont  tenté  de  l'expliquer.  «  Ce 
mot  paraît  emprunté  du  grec  <â[X£Tp^  {sic),  démesurée,  t>  dit  timidement 
M.  Parrelle.  - —  «  Amatrique,  sans  mesure,  désordonné;  probable- 
ment du  grec  dfaexpoç,  •»  avance  d'un  ton  un  peu  plus  assuré  M.Gode- 
froy.  »  (Lexique  compare  de  la  langue  de  Corneille,  etc.,  tome  I, 
p.  35.)  Mais  à'piexpoç  aurait  fait  tout  au  plus  amétrique ,  qui  lui-même 
n'a  peut-être  jamais  existé ,  bien  qu'on  trouve  amétrie  opposé  à  sy- 
métrie dans  quelques  traités  techniques*.  Enfin,  il  est  des  éditeurs 
parmi  lesquels  on  peut  compter  Voltaire,  qui,  par  prudence,  ont  tout 
simplement  supprimé  le  mot  embarrassant. 

1.  Sur  la  table  de  Normandie  et  sur  les  fonctions   que  Corneille 
y  remplissait,  voyez  au  tome  I  la  Notice  biographique. 

2.  Pellisson  raconte,  dans  sa  Relation  contenant  l'histoire  de  V  Aca- 

*   «  Santé  est  Symmétrie,  et  maladie,   son  contraire,  Amétrie.  » 
(Traicté  de  la coqueluche....  par  maistre  Tean  Suau,  i586,  p.  7.) 


4o8  OEUVRES   DIVERSES    EN   PROSE. 

les  passions,  que  de  les  ressentir,  et  que  l'esprit  trouve 
avec  plus  de  facilité  des  couleurs  pour  ce  qui  le  touche 

demie  franc oise  (p.  36o  et  suivantes),  les  faits  qui  précédèrent  l'entrée 
de  Corneille  dans  cette  compagnie.  Après  avoir  parlé  de  M.  de  Sa- 
lomon,  avocat  général  au  grand  conseil,  qui,  ainsi  que  le  portaient 
les  registres  à  la  date  du  12  août  i644>  fut  nommé  à  cette  époque 
en  remplacement  de  M.  Bourbon  ,  il  ajoute  :  «  11  fut  préféré  à 
M.  Corneille,  qui  avoit  demandé  la  même  place.  Le  protecteur  fit 
dire  à  l'Académie  qu'il  lui  laissoit  la  liberté  du  choix,  et  vous  jugerez 
par  la  suite  qu'elle  se  détermina  de  cette  sorte,  pour  cette  raison  que 
M.  Corneille  faisant  son  séjour  à  la  province,  ne  pou  voit  presque 
jamais  se  trouver  aux  assemblées  et  faire  la  fonction  d'académicien. 

«  Je  dis  que  vous  le  jugerez  par  la  suite  ;  car  depuis,  M.  Faret  étant 
mcrt,  on  proposa  d'un  côté  le  même  M.  Corneille,  et  de  l'autre 
M.  du  Ryer,  et  ce  dernier  fut  préféré.  Or  le  registre*  en  cet  endroit 
fait  mention  de  la  résolution  que  l'Académie  avoit  prise  de  préférer 
toujours  entre  deux  personnes,  dont  l'une  et  l'autre  auroient  les  qua- 
lités nécessaires,  celle  qui  feroit  sa  résidence  à  Paris. 

«  M.  Corneille  fut  pourtant  reçu  ensuite,  au  lieu  de  M.  Maynard, 
parce  qu'il  fit  dire  à  la  Compagnie  qu'il  avoit  disposé  ses  affaires  de 
telle  sorte  qu'il  pourroit  passer  une  partie  de  l'année  à  Paris. 

«  M.  deBalesdens  avoit  été  proposé  aussi;  et  comme  il  avoit  l'hon- 
neur d'être  à  Monsieur  le  Chancelier,  l'Académie  eut  ce  respect  pour  son 
protecteur  de  députer  vers  lui  cinq  des  académiciens  pour  savoir  si  ces 
deux  propositions  lui  étoient  également  agréables.  Monsieur  le  Chan- 
celier** témoigna  qu'il  vouloit  laisser  une  entière  liberté  à  la  Compa- 
gnie; mais  lorsqu'elle  commençoit  à  délibérer  sur  ce  sujet,  M.  l'abbé 
de  Cerisy  lui  présenta  une  lettre  de  M.  de  Balesdens***,  pleine  de 
beaucoup  de  civilités  pour  elle  et  pour  M.  Corneille,  qu'il  prioit  la 
Compagnie  de  vouloir  préférer  à  lui,  protestant  qu'il  lui  déféroit  cet 
honneur,  comuie  lui  étant  dû  par  toutes  sortes  de  raisons.  La  lettre 
fut  lue  et  louée  par  l'assemblée,  et  depuis  il  fut  reçu  en  la  première 
place  vacante,  qui  fut  celle  de  M.  de  Malleville.  »  Dans  la  seconde 
édition  de  l'ouvrage  de  Pellisson  une  grande  partie  de  ces  détails  a 
été  supprimée;  le  dernier  paragraphe  a  seul  été  conservé.  Il  est 
probable  que  c'est  à  la  demande  de  Corneille  que  ce  changement  a 
été  fait  (voyez  tome  VI,  p.  io3). 

*  Du  21  novembre  1646.  (Note  de  Pellisson.) 
**  Registres,  22  janvier  1647.  (Note  du  même.) 
***  Cette   lettre  a   été   imprimée,  Paris,    1647,  in-8°.    {Note  de 
M.  Livet. 


DISCOURS    A    L'ACADÉMIE.  409 

que  pour  les  idées  qu'il  emprunte  de  sou  imagination, 
j'avoue  qu'il  faut  que  je  condamne  tous  les  applaudisse- 
ments qu'ont  reçus  '  jusques  ici  mes  ouvrages,  et  que  c'est 
injustement  qu'on  m'attribue  quelque  adresse  à  décrire 
les  mouvements  de  l'âme,  puisque  dans  la  joie  la  plus 
sensible  dont  je  sois  capable,  je  ne  trouve  point  de  pa- 
roles qui  vous  en  puissent  faire  concevoir  la  moindre 
partie.  Ainsi  je  vois  ma  réputation  prête  à  être  détruite 
par  la  gloire  même  qui  la  devoit  achever,  puisqu'elle  me 
jette  dans  la  nécessité  de  vous  montrer  mon  foible  ;  et 2 
prenant  possession  des  grâces  qu'il  vous  a  plu  me  faire, 
je  ne  me  dois  regarder  que  comme  un  de  ces  indignes 
mignons  de  la  fortune,  que  son  caprice  n'élève  au  plus 
haut  de  sa  roue3  sans  aucun  mérite,  que  pour  mettre  plus 
en  vue  les  taches  de  la  fange  dont  elle  les  a  tirés.  Et 
certes,  voyant  cette  honte  inévitable  dans  l'honneur  que 
je  reçois,  j'aurois  de  la  peine  à  m'en  consoler,  si  je  ne 
considérois  que  vous  rappellerez,  aisément  en  votre  mé- 
moire ce  que  vous  savez  mieux  que  moi,  que  la  joie  n'est 
qu'un  épanouissement  du  cœur,  et,  si  j'ose  me  servir 
d'un  terme  dont  la  dévotion  s'est  saisie,  une  certaine  li- 
quéfaction intérieure,  qui  sépanchant  dans  l'homme  tout 
entier,  relâche  toutes  les  puissances  de  son  âme  :  de 
sorte  qu'au  lieu  que  les  autres  passions  y  excitent  des 
orages  et  des  tempêtes,  dont  les  éclats  sortent  au  dehors 
avec  impétuosité  et  violence,  celle-ci  n'y  produit  qu'une 
langueur,  qui  tient  quelque  chose  de  l'extase,  et  qui  se 
contentant  de  se  mêler  et  de  se  rendre  visible  dans  tous 
les  traits  extérieurs,  laisse  l'esprit  dans  l'impuissance  de 

1.  Il  y  a  reçu,  sans  accord,  dans  les  éditions  de  1698  et  de  1714» 
ainsi  que  dans  les  OEuvres  diverses. 

2.  Et  manque  dans  le  texte  de  Granet,  qui  ne  met  qu'une  virgule 
après  foible,  et  met  deux  points  après  faire. 

3.  «  De  la  roue,  »  dans  Granet. 


4io  OEUVRES    DIVERSES   EN   PROSE. 

l'exprimer.  (Test  ce  qu'ont  bien  reconnu  nos  grands 
maîtres  du  théâtre,  qui  n'ont  jamais  amené  leurs  héros 
jusques  à  la  félicité  qu'ils  leur  ont  fait  espérer,  qu'ils  ne 
se  soient  arrêtés  là  tout  aussitôt,  sans  faire  des  efforts 
inutiles  à  représenter  leur  satisfaction ,  dont  ils  savoient 
bien  qu'ils  ne  pouvoient  venir  à  bout. 

Vous  êtes  trop  équitables  pour  exiger  de  leur  écolier 
une  chose  dont  leurs  exemples  n'ont  pu  l'instruire,  et 
vous  aurez  même  assez  de  bonté  pour  suppléer  à  ce 
défaut,  et  juger  de  la  grandeur  de  ma  joie  par  celle 
de  l'honneur  que  vous  m'avez  fait  en  me  donnant  une 
place  dans  votre  illustre  Compagnie.  Et  véritablement, 
Messieurs,  quand  je  n'aurois  pas  une  connoissance  par- 
ticulière du  mérite  de  ceux  qui  la  composent*,  quand  je 
n'aurois  pas  tous  les  jours  entre  mes1  mains  les  admi- 
rables chefs-d'œuvres 2  qui  partent  des  vôtres;  quand  je  ne 
saurois  enfin  autre  chose  de  vous,  sinon  que  vous  êtes  le 
choix  de  ce  grand  génie  qui  n'a  fait  que  des  miracles,  feu 
Monsieur  le  cardinal  de  Richelieu,  je  serois  l'homme  du 
monde  le  plus  dépourvu  de  sens  commun  si  je  n'avois  pas 
pour  vous  une  estime  et  une  vénération  toutes  extraordi- 
naires, et  si  je  ne  voyois  pas  que3  de  la  même  main  dont 
ce  grand  homme  sapoit  les  fondements  de  la  monar- 
chie d'Espagne,  il  a  daigné  jeter  ceux  de  votre  établis- 
sement, et  confier  à  vos  soins  la  pureté  d'une  langue  qu'il 
vouloit faire  entendre  et  dominer  par  toute  l'Europe.  Vous 
m'avez  fait  part  de  cette  gloire,  et  j'en  tire  encore  cet 


i.   Les ,  dans  les  éditions  modernes. 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  120,  note  1. 

3.  Nous  donnons  le  texte  de  l'exemplaire  de  1698  qui  est  à  la  Bi- 
bliothèque impcriaie;  celui  de  l'Institut  porte  :  «  toute  extraordi- 
naire, quand  je  vois  que.  »  Cette  dernière  leçon  est  celle  de  Granet  ; 
seulement  il  a  changé  a  toute  extraordinaire  »  en  «  toujours  extraor- 
dinaire. » 


DISCOURS    A    L'ACADÉMIE.  /,m 

avantage,  qu'il  est  impossible  que  de  vos  savantes  assem- 
blées ,  où  vous  me  faites  l'honneur  de  me  recevoir,  je  ne 
remporte  les  belles  teintures  et  les  parfaites  connoissan- 
ces  qui  donnant  une  meilleure  forme  à  ces  heureux  ta- 
lents dont  la  nature  m'a  favorisé,  mettront  en  un  plus 
haut  degré  ma  réputation ,  et  feront  remarquer  aux  plus 
grossiers  même,  dans  la  continuation  de  mes  petits  tra- 
vaux, combien  il  s'y  sera  coulé  du  vôtre,  et  quels  nou- 
veaux ornements  le  bonheur  de  votre  communication  y 
aura   semés.   Oserai-je  vous  dire   toutefois,    Messieurs, 
parmi  cet  excès  d'honneur  et  ces  avantages  infaillibles, 
que  ce  n'est  pas  de  vous  que  j'attends  ni  les  plus  grands 
honneurs  ni  les  plus  grands  avantages  ?  Vous  vous  éton- 
nerez sans  doute  d'une  civilité  si  étrange;  mais  bien  loin 
de  vous  en  offenser,  vous  demeurerez  d'accord  avec  moi 
de   cette  vérité,  quand  je  vous  aurai  nommé  Monsei- 
gneur le  Chancelier1,  et  que  je  vous  aurai  dit  que  c'est 
de  lui  que  j'espère  et  ces  honneurs  et  ces  avantages  dont 
je  vous  parle.  Puisqu'il  a  bien  voulu  être  le  protecteur 
d'un    corps   si  fameux  et   qu'on  peut  dire  en  quelque 
sorte  n'être  que  d'esprit,  en  devenir  un  des  membres, 
c'est  devenir  en  même  temps  une  de  ses  créatures;  et 
puisque  par   l'entrée   que  vous  m'y  donnez  je  trouve  et 
plus  d'occasions  et  plus  de  facilité  de  lui  rendre  mes  de- 
voirs plus  souvent,  j'ai  quelque  droit  de  me  promettre 
qu'étant  illuminé   de  plus  près,  je  pourrai  répandre  à 
l'avenir  dans  tous  mes  ouvrages,  avec  plus  d'éclat  et  de 
vigueur,  les  lumières  que  j'aurai  reçues  de  sa  présence. 
Comme  c'est  un  bien  que  je  devrai  entièrement  à  la  fa- 
veur de  vos  suffrages,  je  vous  conjure  de  croire  que  je  ne 
manquerai  jamais   de    reconnoissance  envers  ceux   qui 
me  l'ont  procuré,  et  qu'encore  qu'il  soit  très-vrai  que 

I.   Pierre  Seguier.  Voyez  tome  V,  p.  141»  note  i. 


\xi  ŒUVRES   DIVERSES    EN    PROSE. 

vous  ne  pouviez  donner  cette  place  à  personne  qui  se  sen- 
tît plus  incapable  de  la  remplir,  il  n'est  pas  moins  vrai 
que  vous  ne  la  pouviez*  donnera  personne  ni  qui  l'eût 
plus  ardemment  souhaitée,  ni  qui  s'en  tînt  votre  redevable 
en  un  plus  haut  point,  ni  qui  eût  enfin  plus  de  passion 
de  contribuer  de  tous  ses  soins  et  de  toutes  ses  forces  au 
service  d'une  compagnie  si  célèbre,  à  qui  j'aurai  des 
obligations  éternelles  de  m' avoir  fait  tant  d'honneurs 
sans  les  mériter. 

I.   Pourriez,  dans  les   CEuvres  diverses  et  dans  toutes   les  éditions 
suivantes. 


LETTRES 


NOTICE. 


Nous  ne  possédons  que  fort  peu  de  lettres  de  Corneille,  et 
ses  éditeurs,  non-seulement  ne  connaissaient  pas  toutes  celles 
qui  nous  restent,  mais  diminuaient  encore  en  apparence  ce 
nombre,  déjà  si  restreint,  en  les  dispersant  en  divers  endroits. 

Lefèvre  a  eu  le  premier  l'idée  de  faire  entrer  dans  les  OEuvres 
de  Corneille  les  fragments  de  ses  lettres  renfermés  dans  la 
Relation  contenant  Vhistoire  de  V Académie,  par  Pellisson;  mais 
au  lieu  de  les  en  extraire,  il  a  donné  en  entier,  sous  le  titre 
de  Récit  de  la  conduite  tenue  par  t  Académie  dans  la  discussion 
qui  £  éleva  entre  Corneille  et  Scudéry  a  V  occasion  du  Cid,  le 
morceau  dans  lequel  elles  se  trouvaient,  et  il  l'a  placé  dans 
une  série  intitulée  :  Pièces  concernant  le  Cid.  Il  a  agi  de  même 
pour  les  quatre  lettres  relatives  à  Y  Imitation  de  Jésus-Christ, 
et  les  a  mises  en  tête  de  cet  ouvrage.  Après  ces  éliminations 
la  collection  des  lettres  formant  la  correspondance  proprement 
dite  ne  se  composait  plus  que  de  neuf  pièces. 

Quant  à  nous,  il  nous  a  paru  préférable  de  mettre  en- 
semble toutes  les  lettres  et  de  suivre,  comme  dans  les  Poé- 
sies diverses,  un  ordre  purement  chronologique.  Après  avoir, 
pour  des  motifs  que  nous  exposerons  tout  à  l'heure,  rejeté  la 
première  des  neuf  lettres  de  l'édition  de  Lefèvre,  nous  joignons 
aux  huit  qui  restent  les  six  fragments  contenus  dans  V Histoire 
de  r Académie  francoise  de  Pellisson,  les  quatre  lettres  relatives 
à  Y  Imitation  de  Jésus-Christ,  enfin  quatre  autres  lettres,  non 
recueillies  jusqu'à  présent ,  que  nous  avons  annoncées  dans 
notre  Avertissement  (tome  I,  p.  xn),  ce  qui  porte  à  vingt-deux 
les  pièces  que  nous  avons  réunies.  Mais  nous  n'avons  pas 
voulu  nous  borner  à  rassembler  les  lettres  écrites  par  Cor- 
neille; nous  avons  essayé  pour  la  première  fois  de  reformer 


4i6  LETTRES. 

sa  correspondance,  autant  qu'il  était  possible  de  le  faire,  en 
ajoutant  à  ses  lettres  ce  que  nous  avons  pu  recouvrer  de 
celles  qui  lui  ont  été  adressées  ,  et  nous  avons  classé  les 
unes  et  les  autres,  suivant  leurs  dates,  en  une  seule  et  même 
série,  en  ayant  soin  toutefois,  comme  dans  le  reste  de  notre 
édition  ,  de  faire  imprimer  en  plus  petits  caractères  tout  ce 
qui  n'est  point  de  Corneille.  Parfois  ses  correspondants  rap- 
pellent les  termes  mêmes  dont  il  s'est  servi,  ou  du  moins  nous 
font  connaître  en  substance  quelqu'une  de  ses  lettres  aujour- 
d'hui perdue  ;  lors  même  qu'ils  se  montrent  moins  explicites, 
leur  témoignage  a  encore  son  prix.  Ce  recueil  tout  nouveau, 
qui  dans  son  ensemble  contient  ou  mentionne  trente  et  une 
lettres,  nous  présente  avec  quelque  intérêt  les  préoccupations 
successives  de  Corneille  ;  on  apprend  là,  pour  certains  mo- 
ments de  sa  vie,  ses  espérances,  ses  inquiétudes,  ses  mé- 
comptes; on  pénétre  dans  divers  secrets  de  son  intimité,  dans 
le  détail  de  quelques-unes  de  ses  affaires  ;  on  voit  quels  étaient 
ceux  de  ses  contemporains  avec  lesquels  il  se  trouvait  le  plus 
fréquemment  en  rapport;  bien  des  choses  s'éclaircissent  par 
l'ordre  chronologique;  les  lacunes  les  plus  considérables  qui 
séparaient  les  unes  des  autres  les  lettres  jusqu'ici  recueillies 
se  trouvent  en  partie  comblées,  et  l'on  peut  dans  cet  essai 
de  restitution  de  la  correspondance  étudier  avec  quelque  suite 
l'époque  la  plus  active,  et  la  mieux  remplie,  de  la  carrière  du 
poète. 

Pour  éviter  de  multiplier  et  d'allonger  les  notes  outre  me- 
sure, soit  au  bas  des  pages,  soit  en  tète  de  chacune  des  let- 
tres, nous  les  passerons  successivement  en  revue  dans  cette 
notice  préliminaire  ;  nous  dirons  où  chacune  d'elles  a  été 
publiée  pour  la  première  fois;  et  lorsque  la  pièce  autographe 
existe  encore,  nous  aurons  soin  de  la  décrire,  d'en  faire  l'his- 
toire en  quelques  mots,  et  d'indiquer  à  quelle  collection  pu- 
blique ou  particulière  elle  appartient.  Nous  allons  examiner 
d'abord  les  lettres  de  Corneille  dans  l'ordre  même  où  elles  se 
présentent;  nous  parlerons  ensuite  de  celles  de  ses  correspon- 
dants, aq  sujet  desquelles  nous  aurons  à  entrer  dans  beaucoup 
moins  de  détails  et  qui  ne  nous  arrêteront  qu'un  instant. 

Dans  l'édition  des  OEuvres  complètes  de  Corneille  publiée 
par  Leièvre,  la  première  des  lettres  est  adressée  à  Rotrou  el 


NOTICE.  417 

datée  du  14  juillet  16^7  i.  Nous  aurions  également  commencé 
notre  recueil  par  cette  pièce  si  elle  nous  avait  paru  présenter 
le  degré  d'authenticité  nécessaire;  mais,  comme  nous  l'avons 
déjà  fait  pressentir  2,  nous  avons  de  sérieux  motifs  de  la  croire 
supposée.  Cette  lettre,  qui  se  trouve  dans  le  fonds  additionnel 
des  manuscrits  du  British  Muséum,  où  elle  porte  le  n°  21 154, 
n'appartient  que  depuis  peu  d'années  à  cet  établissement.  Elle 
ne  s'y  trouvait  pas  à  l'époque  où  elle  fut  publiée  pour  la  pre- 
mière fois  par  Lefèvre,  dont  l'édition,  commencée  en  1854,  fut 
achevée  l'année  suivante.  En  i856  elle  faisait  encore  partie 
de  la  collection  de  M.  Belward  Ray 3,  qui  fut  vendue  à  cette 
époque  chez  M.  Christie,  commissaire-priseur  très-connu  à  Lon- 
dres. Cette  lettre  fut  achetée  par  un  amateur  français,  moyen- 
nant vingt  livres  (cinq  cents  francs)  ;  mais  il  ne  se  montra  pas 
longtemps  satisfait  de  son  emplette  :  peu  de  temps  après  l'avoir 
rapportée  en  France,  il  la  renvoya  comme  n'étant  pas  de  la 
main  de  Corneille4,  et  le  British  Muséum  l'acquit  alors  moyen- 
nant trois  livres  (  soixante-quinze  francs).  Lne  note  de  sir 
F.  Madden,  conservateur  des  manuscrits  du  British  Muséum,  la 
considère  comme  écrite  par  Thomas  sous  la  dictée  de  Pierre  '.  En 
effet,  au  premier  aspect  l'écriture  de  cette  lettre  présente  la  plus 
grande  conformité  avec  celle  de  Thomas  Corneille;  mais  si  l'on 
rapproche  les  dates,  on  voit  que  la  lettre  est  du  1 4  juillet  1637, 
et  que  si  elle  était  de  la  main  de  Thomas  Corneille,  celui-ci, 

1.  Édition  de  Lefèvre,  tome  XII,  p.  397  et  3o,8. 

2.  Voyez  tome  III,  p.  248,  et  ci-dessus,  p.  41^. 

3.  Voici  le  titre  du  catalogue  de  M.  Ray  et  la  transcription  de 
l'article  relatif  à  cette  lettre;  c'est  à  M.  Rathery,  de  la  Bibliothèque 
impériale,  que  nous  devons  ce  document  bibliographique  et  la  plu- 
part de  ceux  qui  sont  rapportés  dans  cette  notice  :  Catalogue  of  the 
interesting  and  valuable  collection  of  autograpli  letters  and  other  ma- 
nuscripts,  of  the  late  H.  Belward  Ray,  esq.t  deceased;  which  mil  be 
sold  by  auction,  by  Messrs  Christie  and  Manson  at  their  great  room,  8, 
Ring  street,  S t-J 'âmes' 's  square ,  on  Wednesday ,  July  a3,  i856,  and  threc 
following  days. —  N°  799.  Corneille  (Pierre,  called  le  grand),  letter  in 
french,  entirely  autographt  relatingto  the  Cid.  Fine  spécimen,  excessivelj 
rare;  but  few  letters  are  knomi  to  exist.  Rouen,   14  July  1637. 

4-  Voyez  le  Bulletin  du  bibliophile  de  janvier  1857,  p,  28. 
j.   Probably  front  the  dictation  ofhis  brother. 

Corneille,  x 


4i8  LETTRES. 

né  le  10  août  i6a5,  n'eût  eu  que  onze  ans  et  onze  mois  au  mo- 
ment où  il  l'aurait  écrite.  Il  n'y  aurait  certes  rien  de  surprenant 
à  ce  qu'il  eût  pu  dès  lors  écrire  sous  la  dictée  de  son  frère;  mais 
son  écriture,  nécessairement  enfantine,  s'écarterait  sensiblement 
de  celle  que  nous  lui  connaissons  dans  la  maturité  de  son  âge. 
Une  autre  preuve,  du  reste,  bien  autrement  convaincante,  éta- 
blit que  cette  lettre  ne  peut  émaner  ni  de  Pierre,  ni  de  Thomas, 
ni  d'aucun  de  leurs  contemporains  :  l'original  contient  un  mot 
tout  récent,  le  mot  influencer.  Recueilli,  je  pense,  pour  la  pre- 
mière fois  en  1801,  dans  la  Néologie  de  Mercier,  qui  l'appuie 
d'un  passage  extrait  de  la  Constitution  (T Angleterre,  publiée  en 
177 1  par  le  publiciste  genevois  Delolme,  ce  verbe  n'est  admis 
qu'en  i835  dans  le  Dictionnaire  de  F  Académie,  et  dix  ans  plus 
tard  M.  Francis  Wey  le  déclare  «  encore  bien  vert  pour  la  belle 
littérature1.  »  Voici  la  phrase  de  la  lettre  attribuée  à  Corneille 
dans  laquelle  il  se  trouve  :  «  J'ai  bonne  raison,  je  vous  assure, 
mon  ami,  de  craindre  que  cet  aréopage  ne  se  laisse  influencer 
par  celui  qui  les  a  fait  (si?)  ce  qui  (sic)  sont.  »  Il  est  vrai  que 
ceux  qui  ont  reproduit  cette  lettre  ont  modifié  ce  passage  de  fa- 
çon à  faire  disparaître  le  terrible  mot;  Lefèvre  a  mis  :  «  Je  vous 
avoue,  mon  ami,  que  je  dois  peu  compter  sur  la  justice  de  l'a- 
réopage placé  sous  F  influence  de  celui  qui  les  a  faits  ce  qu'ils 
sont;  »  et  M.  Edouard  Fournier  :  «  J'ai  bonne  raison,  je  vous 
assure,  mon  ami,  de  craindre  que  cet  aréopage  ne  se  laisse  di- 
riger par  celui  qui  les  a  faits  ce  qui  (sic)  sont 2.  »  Quant  à  nous, 
le  désir  d'augmenter  d'une  pièce  le  recueil  des  lettres  de  Cor- 
neille ne  saurait  nous  porter  à  y  laisser  un  écrit  si  évidemment 
supposé.  Nous  nous  sommes  contenté  de  le  conserver  en  appen- 
dice avec  ses  diverses  variantes. 

Cette  lettre  écartée,  l'ordre  chronologique  appelle  tout  d'a- 
bord les  six  fragments  extraits  de  la  Relation  contenant  l'histoire 
de  F  Académie  françoisepa.r  Pcllisson,  que  nous  avons  mentionnés 
plus  haut3.  Nous  les  avons  donnés  d'après  l'édition  originale  pu- 


1.  Ren  arques  sur  la  langue  française,  Paris,  F.  Didot,  i845,  tome  l, 
p.   141. 

2.  Notes  sur  la    vie  de    Corneille  en    tête   de    Corneille  à  la   butte 
Saint-Rock,  p.  cxv. 

3.  Page  41  S.  —  Ce  sont  les  nos  1-0'  de  notre  recueil. 


NOTICE.  4i9 

bliée  en  i653;  nous  aurions  bien  voulu  pouvoir  les  collationner, 
et  surtout  les  compléter  d'après  les  originaux,  mais  on  ignore  ce 
que  sont  devenus  les  papiers  que  Pellisson  avait  alors  sous  les 
yeux,  et  même  les  registres  académiques  d'après  lesquels  il  a  en 
grande  partie  rédigé  son  ouvrage.  De  tant  de  matériaux  impor- 
tants, il  ne  reste  que  le  manuscrit  des  Sentiments  de  V Acadé- 
mie française  sur  la  tragi-comédie  du  Cid,  conservé  actuelle- 
ment, comme  nous  l'avons  dit1,  à  la  Bibliothèque  impériale. 

Nous  rencontrons  ensuite  une  longue  lettre  de  Corneille'2, 
restée  jusqu'ici  en  grande  partie  inédite;  elle  traite  d'affaires,  et 
le  poète  s'y  montre  plaideur  fort  ardent,  et  très-entendu  ;  l'auto- 
graphe en  a  été  trouvé  dans  les  combles  du  Palais  de  la  cour 
impériale  de  Rouen,  le  24  octobre  i853.  M.  Taschereau,  qui 
l'a  signalé  à  l'attention  des  amis  de  Corneille,  en  a  donné  deux 
curieux  extraits,  aux  pages  xix  et  xx  du  tome  I  de  ses 
Œuvres  complètes  de  P.  Corneille,  publié  en  1857  chez  le 
libraire  Jannet;  mais  cette  édition  n'ayant  pas  été  achevée,  cette 
lettre  n'avait  pas  encore  été  publiée  en  son  entier.  M.  Louis 
Passy,  qui  s'est  longtemps  occupé  de  Thomas  Corneille  et  pré- 
pare un  choix  de  ses  OEuvres  pour  la  Collection  des  grands 
écrivains,  nous  a  communiqué  une  excellente  copie  de  cette 
lettre,  actuellement  déposée  aux  archives  de  la  préfecture  de 
la  Seine-Inférieure,  et  M.  Charles  de  Beaurepaire,  qui  dirige 
ces  archives,  a  bien  voulu  la  collationner  de  nouveau  et  l'éclair- 
cir  par  quelques  notes. 

La  lettre  à  d'Argenson3,  imprimée  pour  la  première  fois 
dans  les  Mémoires  de  Sallengre4,  recueillie  dans  les  OEuvres 
diverses  publiées  par  Granet  en  1738  8,  et  reproduite  depuis 
dans  toutes  les  éditions  des  OEuvres  complètes,  existe  en  auto- 
graphe dans  une  des  vitrines  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque 
impériale6:  ce  précieux  original  nous  a  permis  de  rectifier  de 

1.  Tome  III,  p.  34,  note  1. 

2.  N°  7  de  notre  recueil.  —  3.  N°  1 1  de  notre  recueil. 

4.  Mémoires  de  littérature  et  d'histoire ,  Paris,  1731  ,  tome  X, 
•2e  partie,  p.  439. 

*>.  Pages  ifii-ifi3. 

fi.  Avant  d'être  placée  sous  les  yeux  du  public,  cette  lettre  faisait 
partie  de  la  collection  Baluze,  7e  armoire,  Ier  paquet,  art.  4»  n°  3. 
On  lit  sûr  la  liasse  qui  la  contenait  .  «  Mr  d'Argenson.  Lettres  origi- 


4<2o  LETTRES. 

nombreuses  erreurs.  On  trouve  dans  la  Galerie  française  un 
fac-similé  de  deux  fragments  de  cette  lettre. 

Les  deux  lettres  à  M.  de  Zuylichem  ■  ont  été  imprimées 
d'après  les  copies  des  autographes ,  faites  exprès  pour  notre 
édition  et  plusieurs  fois  collationnées  avec  le  plus  grand  soin. 
Avant  1825  elles  n'étaient  pas  encore  sorties  du  pays  de  celui 
à  qui  Corneille  les  avait  adressées.  Elles  appartenaient  à  un 
Hollandais  de  distinction  et  faisaient  partie  d'une  précieuse 
collection  formée  par  sa  famille.  Elle  fut  vendue  au  mois  de 
mai  1825,  et  un  exemplaire  annoté  du  catalogue  de  vente2 
nous  apprend  que  son  possesseur  se  nommait  Synestein,  et  que 
les  deux  lettres  de  Corneille  furent  acquises  par  M.  Thorpe,  au 
prix,  assez  élevé  pour  le  temps,  de  sept  livres,  dix-sept  schel- 
iings  et  six  pence  (près  de  deux  cents  francs).  Trente  et  un 
ans  plus  tard,  nous  retrouvons  ces  deux  lettres,  sous  le  n°  800, 
dans  le  Catalogue  de  M.  Belward  Ray,  à  côté  de  la  lettre  à 
Rotrou  dont  nous  avons  parlé  plus  haut;  mais,'  par  une  con- 
fusion singulière ,  tandis  que  dans  ce  catalogue  la  lettre  à 
Rotrou  était  à  tort  considérée  comme  écrite  par  Pierre  Cor- 
neille, les  deux  lettres  à  M.  de  Zuylichem  y  étaient  attribuées 

nales  de  Mrs  de  Balzac  et  Pierre  Corneille  à  Mr  d'Argenson ,  inten- 
dant de  justice  en  Xaintonge,  et  ensuite  ambassadeur  de  France  à 
Venise.  Ces  lettres  ont  été  données  à  la  bibliothèque  du  Roi  par 
Mr  le  marquis  d'Argenson,  son  petit-fils,  et  ministre  des  affaires 
étrangères.  »  On  ne  comprend  guère  comment  cette  lettre  pouvait 
faire  partie  de  la  collection  Baluze,  tout  en  ayant  été  donnée  à  la 
bibliothèque  du  Roi  par  le  marquis  d'Argenson.  Les  lettres  de  Bal- 
zac n'ont  d'autre  rapport  avec  celle  de  Corneille  que  de  s'adresser 
à  la  même  personne.  Sallengre  les  a  publiées  dans  son  recueil,  immé- 
diatement avant  celle  de  notre  poète. 

1.  Nos  12  et  14  de  notre  recueil. 

2.  En  voici  la  description  :  A  Catalogue  of  a  invaluable  and  highlr 

interesting  collection  of  unpublished  manuscripts ,  historical  documents 

the  entïre  property  of  a  gentleman  of  the  higkest  considération  in  Hol- 
land,by  whose  family  they  hâve  been  accumulated  and  preserved;  which 
<vill  be  sold  by  auction  by  Mr  Sotheby,  at  his  house,  n°  3,  Wellington 
street,  Strand,  on  Monday  5  May  3o,  1825,  and  six  folio win g  days  (Sun- 
day  excepted),  in- 8°,  n°  117.  Two  letters  of  considérable  length.  froiv 
the  celebrated  Corneille  to  M.  de  Zulichen,  Roma  (sic,  lisez  :  Rouen), 
i<S49-l65o,  one  containing  a  copy  of  latin  verses  (Frcnch). 


NOTICE.  421 

h  Thomas1.  Elles  lurent  acquises  par  le  Britisk  Muséum,  et 
inscrites  au  fonds  additionnel  sous  le  n°  2i5i4;  la  première 
se  trouve  dans  le  même  volume  que  la  lettre  à  Rotrou  ;  la 
seconde  figure  dans  les  montres 2.  La  première  a  été  imprimée 
d'abord  dans  la  livraison  de  septembre  1859  (p.  148  et  149)  de 
la  Revue  indépendante  de  Londres,  où  elle  fait  partie  d'un  compte 
rendu  des  deux  premiers  volumes  des  Œuvres  de  Corneille  de 
l'édition  de  M.  Taschereau.  Les  deux  lettres  ont  été  signalées 
ensuite  et  promises  par  nous  dans  notre  Avertissement1 ',  et 
elles  viennent  d'être  publiées  au  mois  de  février  i865  par 
M.  Edouard  Fournier4. 

La  lettre  pour  M.  Dubuisson  s  n'est  qu'un  billet  inscrit  sur  le 
feuillet  de  garde  d'un  volume  appartenant  à  la  bibliothèque 
Sainte-Geneviève  ;  il  provient  de  l'abbaye ,  car  on  lit  sur  le 
frontispice:  Ex  libris  Stœ  Genovefae,  i?34.  Il  porte  la  mar- 
que S  et  a  pour  titre  :  De  mineralium  natura  in  universum ,  ubi 

no  * 

prœsertim    de  aqua    minerali   font i s   Escarleiarum ,  vu/go    des 

Escharlis,  prope  Montargium,  cujus  vires  in  usum  medicum  ex- 
penduntur.  Opéra  et  studio  M.  Pauli  Dubé ,  doctoris  medici 
Montisargi.  —  Parisiis,  apud  Franciscum  Piot ,  prope  fontem 
Sancti  Bencdicti,  M.D.C.XLIX,  cum  approbatione.  L'envoi  du 
livre  de  Dubé,  annoncé  par  Corneille  dans  ce  billet,  avait  lieu 
peu  de  temps  après  la  publication  :  le  billet  de  Corneille  est 
du  25  août  et  l'approbation  du  i?>  juin. 

C'est  encore  à  la  bibliothèque  Sainte-Geneviève  qu'on  trouve 

I.  N°  800.  Corneille  [Thomas).  Two  long  and  interesting  letters,  in 
french,  entirely  autographe  to  M.  de  Zuylichem,  secretary  to  the  Prince 
of  Orange.  Fine  spécimens ,  with  seals  and  floss  silk.  Very  scarce.  Rouen, 
i649-5o. 

1.  Saloon.  Frame  VI.  Elle  est  ainsi  décrite,  sous  le  n°  55,  clans  le 
livret  du  Briùsh  Muséum,  intitulé  :  A  guide  to  the  autograph  letters, 
page  7  :  «  Pierre  Corneille  [b.  1606 — d.  1684.]  Letter  in  French, 
to  [Constantin  Huygens]  Monsieur  de  Zuylichem ,  denying  the 
adyantage  of  prefixing  an  argument  to  any  drama  ;  dated  Rouen , 
28th  May  i65o.  Holograph.  Purchased  in  i856.  » 

3.  Tome  I,  p.  xn. 

4-  Deux  lettres  inédites  de  P.  Corneille  à  Huyghens  de  Zuylichem. 
Revue  des  provinces,  tome  VI,  p.  3s2-33o,  et  tirage  à  part. 

5 .  N°  1 3  de  notre  recueil . 


422  LETTRES. 

les  quatre  lettres  de  Corneille  au  P.  Boulart1.  M.  Célestin 
Port,  qui  les  a  publiées  le  premier  dans  la  Bibliothèque  de 
V École  des  chartes  (tome  III,  3e  série,  p.  348-36o),  les  a  décou- 
vertes dans  un  portefeuille  intitulé  :  Recueil  de  pièces  pour 
prouver  que  Thomas  a  Kempis  est  V auteur  de  /'Imitation.  C'est 
une  collection  de  lettres,  toutes  autographes,  adressées  au 
P.  Boulart,  et  de  brochures  relatives  à  la  discussion  engagée 
entre  les  religieux  bénédictins  et  les  chanoines  réguliers  de 
Sainte-Geneviève. 

Le  billet  à  Pellisson  2  a  été  publié  pour  la  première  fois  dans 
les  Œuvres  diverses  (p.  219  et  220)  sous  ce  titre  et  avec  cette 
note  de  l'abbé  Granet  :  «  Copié  sur  l'original  de  Corneille.  » 
Il  se  trouvait  alors  dans  la  bibliothèque  des  Jésuites  du  collège 
Louis-le-Grand  ;  il  passa  depuis  dans  la  collection  de  M.  Pa- 
rison3,  et  fut  acheté  à  sa  vente  par  M.  Chambry,  à  qui  il 
appartient  aujourd'hui,  et  qui  nous  a  permis  fort  obligeamment 
d'en  vérifier  le  texte.  Le  fac-similé  en  a  été  publié  en  1840 
dans  P  Iconographie  française. 

La  première  des  lettres  à  l'abbé  de  Pure  *,  entièrement  iné- 
dite, a  été  copiée  sur  l'original  conservé  au  British  Muséum, 
fonds  Egerton,  n°  18,  in-folio5;  les  quatre  suivantes 6  appartien- 
nent à  la  Bibliothèque  impériale,  qui  possède  une  grande  partie 
des  papiers  de  cet  abbé. 

11  est  probable  que  la  lettre  à  Saint-Evremond7  existe  encore 
dans  quelque  collection  particulière,  mais  nous  n'avons  pu  avoir 

1.  Nos  i5-i8  de  notre  recueil. 

2.  N°  51  de  notre  recueil. 

3.  Voyez  la  Notice  de  M.  Brunet  sur  M.  Parison  en  tête  du  Cata- 
logue de  sa  bibliothèque,  p.  xu. 

4.  N°  22  de  notre  recueil. 

5.  Le  fonds  Egerton  se  compose  :  r°  des  manuscrits  donnés  en  1825, 
au  British  Muséum,  par  François-Henry  Egerton,  huitième  comte  de 
Bridgewater;  20  des  nouvelles  acquisitions  de  manuscrits  faites  an- 
nuellement à  l'aide  des  intérêts  produits  par  une  somme  de  cinq  mille 
livres  sterling  trois  pour  cent,  laissée  par  le  donateur  au  même  éta- 
blissement. La  lettre  de  Corneille  ne  provient  pas  de  la  collection 
primitive  ;  elle  a  été  achetée  sur  le  revenu  de  la  rente. 

6.  Nos  23,  24,  26  et  27  de  notre  recueil. 

7.  N°  29  de  notre  recueil. 


NOTICE.  423 

à  ce  sujet  aucun  renseignement.  Nous  avons  donc  suivi  le  texte 
des  Œuvres  de  Saint-Evremond  1,  réimprimé  par  Granet  dans 
les  Œuvres  diverses  de  Pierre  Corneille  2. 

Enfin  la  dernière  et  si  douloureuse  lettre  de  Corneille,  adres- 
sée à  Colbert3,  appartient  à  la  Bibliothèque  impériale.  Décou- 
verte par  M.  Lacabane,  dans  la  collection  généalogique  de 
Chérin  de  Barbimont,  elle  en  a  été  extraite  pour  être  pla- 
cée dans  un  recueil  de  lettres  originales.  M.  Floquet  l'a  pu- 
bliée pour  la  première  fois,  en  i835,  dans  les  Mémoires  de 
P  Académie  de  Rouen,  et  elle  a  été  reproduite  depuis  dans 
toutes  les  éditions  de  Corneille. 

Un  mot  maintenant  sur  les  lettres  adressées  à  Corneille. 
Nous  n'en  connaissons  aucune  en  autographe  :  elles  devaient 
exister  parmi  les  papiers  de  notre  poète,  dont  une  grande  partie 
fut  brûlée  par  lui  quelque  temps  avant  sa  mort,  et  dont  l'autre, 
qu'il  avait  conservée  à  dessein,  ne  nous  est  point  parvenue. 
Nous  avons  donc  été  forcé ,  la  plupart  du  temps ,  de  nous  bor- 
ner à  recueillir  dans  les  œuvres  des  contemporains  de  Cor- 
neille, celles  des  lettres  écrites  par  eux  à  notre  auteur  qu'ils 
avaient  jugées  dignes  de  l'impression.  Telle  est  la  source  des 
lettres  de  Sarrau ,  de  Balzac ,  de  Gilles  Boileau  et  de  Saint- 
Evremond  4. 

Nous  nous  arrêterons  un  instant  à  la  première  de  ces  lettres, 
adressée  à  Corneille  par  le  conseiller  Sarrau,  car  elle  nous 
permettra  de  rectifier  les  dates  erronées  des  premières  repré- 
sentations de  plusieurs  des  chefs-d'œuvre  de  notre  poëte,  qui 
semblent  avoir  été  jusqu'ici,  même  dans  la  présente  édition, 
vieillis   mal   à  propos   de   quelques   années.    Cette  lettre  de 

i.  Amsterdam,  1725,  tome  II,  p.  334  et  suivantes. 

2.  Pages  210-21  a. 

3.  N°  3i  de  notre  recueil. 

4.  La  plupart  de  ces  lettres,  connues  des  biographes  de  Corneille, 
avaient  été  réimprimées  par  eux  en  note  ou  comme  pièces  justifica- 
tives. Les  lettres  de  Gilles  Boileau  cependant  n'avaient  pas  encore  été 
recueillies  ;  mais  elles  ne  pouvaient  nous  échapper,  car  M.  Louis  Passy 
nous  les  avait  indiquées,  MM.  Taschereau  et  P.  Lacroix  nous  en 
avaient  parlé  à  leur  tour ,  et  tout  récemment  dans  la  Revue  des  pro- 
vinces (vol.  VI,  p.  327),  M.  Edouard  Fournier  les  recommandait 
obligeamment  à  notre  attention. 


4^4  LETTRES. 

Sarrau  est  du  1 1  décembre  1649. 1,  et  il  est  impossible  de  croire 
que  la  date  en  ait  été  altérée  lors  de  l'impression  du  recueil 
posthume  où  elle  se  trouve,  puisqu'il  y  est  question,  comme 
d'un  fait  tout  récent,  de  la  mort  de  Richelieu,  arrivée  le  4  du 
même  mois.  Eh  bien  !  à  ce  moment  Sarrau  écrit  à  notre  poëte  : 
«  Ce  que  je  désire  principalement  c'est  de  savoir....  si,  à  vos  trois 
excellentes  et  divines  pièces,  vous  projetez  d'en  ajouter  une  qua- 
trième. »  Et  plus  loin  :  «  J'ai  entendu  dire  vaguement  que 
vous  travailliez  à  un  certain  poëme  sacré.  Ecrivez-moi,  je 
vous  prie ,  s'il  est  bien  avancé,  ou  même  achevé.  »  Ces  trois 
«  divines  pièces,  qui  hésiterait  à  les  reconnaître? c'est  le  Cid,  Ho- 
race et  Cinna;  et  ce  poëme  chrétien,  ce  quatrième  chef-d'œuvre, 
qui  devait  égaler  et  même  surpasser  les  trois  autres,  n'est-ce  pas 
évidemment  Polyeucte?  Dans  ce  cas,  la  première  représenta- 
tion de  cette  pièce,  placée  par  tous  les  historiens  du  théâtre  à 
la  fin  de  1640,  ne  serait  que  du  commencement  de  1643,  et  le 
privilège  prudemment  sollicité  dès  l'apparition  de  l'ouvrage,  et 
obtenu,  comme  nous  l'avons  vu,  le  3o  janvier,  aurait  été  mis  en 
réserve  jusqu'au  20  octobre  164'i,  date  de  l'Achevé  d'impri- 
mer9. Mais  ce  n'est  là  qu'une  des  nombreuses  rectifications 
que  la  lettre  de  Sarrau  nous  amène  à  faire;  elle  nous  force  à 
changer  également  la  date  de  1641,  adoptée  pour  Pompée, 
ainsi  que  celle  de  1642,  assignée  au  Menteur.  Corneille,  si 
avare  de  renseignements  sur  ses  ouvrages,  nous  apprend  tou- 
tefois que  ces  pièces  si  différentes  sont  «  parties  toutes  deux 
de  la  même  main,  dans  le  même  hiver3.  »  Mais  quel  est  cet 
hiver  dont  il  parle?  Est-ce  la  fin  de  celui  de  1642-1643,  dont 
le  commencement,  nous  venons  de  le  voir,  a  été  occupé  par  les 
derniers  soins  à  donner  à  Polyeucte?  Est-ce,  et  à  certains 
égards  cela  semblerait  plus  probable,  celui  de  1643-1644? 
Dans  ce  cas,  la  publication  aurait  suivi  la  représentation 
d'assez  près,  car  le  privilège  obtenu  pour  les  deux  pièces,  le 
11  janvier  1644,  a  été  mis  à  profit,  quant  à  Pompée ,  le  16  fé- 
vrier, et  pour  le  Menteur,  le  dernier  octobre,  ainsi  que  le 
constatent  les  «  Achevé  d'imprimer.  »  Mais  si  c'est  à  cette  der- 

1.  Prid.  Id.  decemb.  Voyez  ci-après,  p.  44° • 

2.  Voyez  notre  tome  III,  p.  4^8. 

3.  Voyez  notre  tome  IV,  p.  i3o. 


NOTICK.  /,2r> 

nière  opinion  qu'on  s'arrête,  il  faut  changer  nécessairement  la 
date  de  1643,  généralement  adoptée  pour  la  Suite  du  Menteur; 
et  peut-être  celle  de  1644?  qu'on  donne  kRodogune,  sera-t-elle 
à  son  tour  un  peu  prématurée.  Comment  ces  réflexions  n'ont- 
elles  pas  été  faites  plus  tôt,  puisque  la  lettre  de  Sarrau  a  été 
jointe  par  MM.  Taschereau  et  Guizot  à  leurs  études  sur  Cor- 
neille? Je  m'en  étonne,  et  je  regrette  pour  ma  part  de  les  pré- 
senter si  tardivement;  mais  c'est  un  exemple  de  plus  du  soin 
avec  lequel  il  faut  examiner  les  documents,  même  les  plus 
connus,  pour  en  extraire  tout  ce  qu'ils  peuvent  donner. 

A  la  différence  de  celles  dont  nous  venons  de  parler,  les 
lettres  adressées  à  Corneille  par  Chapelain  ne  sont  point  tirées 
d'un  recueil  imprimé;  elles  proviennent  du  manuscrit  de  sa 
correspondance  inédite  que  possède  M.  Sainte-Beuve,  et  d'où 
M.  Taschereau  les  a  pour  la  première  fois  extraites,  afin  de  les 
insérer  en  i855  dans  V Histoire  de  la  vie  et  des  ouvrages  de 
P.  Corneille.  «  Malheureusement,  dit-il  dans  X Avertissement 
de  cette  seconde  édition1,  cette  précieuse  copie  autographe  est 
incomplète  d'un  volume  (164 1  à  16 58),  qu'il  serait  bien  re- 
grettable d'avoir  à  considérer  comme  perdu  pour  toujours.  » 
Nous  rappelions,  dans  ï Intermédiaire  du  1 5  janvier  1864,  que 
dans  sa  Bibliothèque  française  Gouget  cite  des  lettres  de  Cha- 
pelain de  1642,  1643  et  i652.  Dans  le  nombre  se  trouvent 
deux  lettres  à  Corneille,  que  M.  Edouard  Fournier  a  rappelées 
a  son  tour  dans  la  Revue  des  provinces  du  i5  février  i865; 
nous  avons  eu  l'occasion  d'en  donner  une  brève  analyse2;  mais 
nous  avons  le  regret  de  ne  pouvoir  les  joindre  à  ce  recueil  par 
lequel  nous  terminons  les  OEuvres  de  Corneille,  recueil  assu- 
rément bien  incomplet,  et  qui  cependant  paraîtra  déjà  riche, 
nous  l'espérons,  à  qui  prendra  la  peine  de  le  comparer  à  ceux 
qui  l'ont  précédé. 

1.  Page  vit.  —  a.   Ci-dessus,  p.  399.  et  3Q3. 


LETTRES. 


DE    CORNEILLE    A    BOISROBERT  \ 


Rouen2,   i3  juin  1637. 

Pellisson  ne  donne  par  malheur  que  des  extraits  de  cette  lettre  ; 
il  en  rapporte  la  première  partie  sous  forme  indirecte,  et  raconte  que 
pressé  par  les  lettres  de  Boisrobert  de  consentir  à  ce  que  l'Acadé- 
mie examinât  le  Cid,  Corneille,  «  qui  voyoit  bien  qu'après  la  gloire 
qu'il  s'étoit  acquise,  il  y  avoit  vraisemblablement  en  cette  dispute 
beaucoup  plus  à  perdre  qu'à  gagner  pour  lui ,  se  tenoit  toujours  sur 
le  compliment  et  répondoit  :  » 

Que  cette  occupation  n'étoit  pas  digne  de  l'Acadé- 
mie. Qu'un  libelle  qui  ne  méritoit  point  de  réponse  *  ne 
méritoit  point  son  jugement.  Que  la  conséquence  en  se- 
roit  dangereuse ,    parce  qu'elle    autoriseroit    l'envie   à 


1.  Relation  contenant  F  histoire  de  F  Académie  françoise ,  p.  191-193. 
—  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  418 et  419;  et,  pour  le  détail  des  faits 
auxquels  se  rattachent  les  fragments  de  lettres  I-VI,  voyez  tome  III, 

p.    22-36. 

2.  Voyez,  pour  le  lieu  d'où  était  datée  cette  lettre,  la  Relation  con- 
tenant l'histoire  de  F  Académie  françoise ,  p.    217. 

3.  Les  Observations  sur  le  Cid  par  Scudéry,  auxquelles  Corneille 
répliqua  par  la  Lettre  apologétique,  qu'il  considérait  avec  raison  comme 
n'étant  point  une  réponse  en  forme.  Voyez  ci-dessus,  p.  399-407,  et 
ci-après',  p.  43 1. 


4a8  LETTRES. 

importuner  ces  Messieurs,  et  qu'aussitôt  qu'il  auroit 
paru  quelque  chose  de  beau  sur  le  théâtre,  les  moindres 
poètes  se  croiroieut  bien  fondés  à  faire  un  procès  à  son 

auteur  par-devant  leur  Compagnie 

Messieurs  de  l'Académie  peuvent  faire  ce  qu'il  leur 
plaira  ;  puisque  vous  m'écrivez  que  Monseigneur  seroit 
bien  aise  d'en  voir  leur  jugement ,  et  que  cela  doit  diver- 
tir Son  Eminence,  je  n'ai  rien  à  dire  *. 


2.     DE    CORNEILLE    A    BOISROBERT  2. 

i5  novembre  1637. 

J'attends,  avec  beaucoup  d'impatience,  les  sentiments 
de  l'Académie,  afin  d'apprendre  ce  que  doresenavant 
je  dois  suivre  ;  jusque-là  je  ne  puis  travailler  qu'avec 
défiance,  et  n'ose  employer  un  mot  en  sûreté. 


3.    DE    CORNEILLE    A    BOISJIOBERT3. 

3  décembre  1637. 

Je  me  prépare  à  n'avoir  rien  à  répondre  à  l'Académie 
que  par  des  remercîments.... 

1.  Pellisson  nous  apprend  (p.  io,3)  que  ces  dernières  paroles,  échap- 
pées à  Corneille  dans  sa  lettre,  suffirent,  «  suivant  l'opinion  du  Cardi- 
nal, pour  fonder  la  jurisdictionde  l'Académie,  »  qui,  le  16  juin  1637, 
commença  à  s'occuper  du  Cidy  et  livra  son  travail  à  l'imprimeur 
environ  cinq  mois  plus  tard. 

2.  Relation  contenant  F  histoire  de  P  Académie  françoise,  p.  207. 

3.  Ibidem. 


LETTRES.  429 

4- 

«  Lorsque  les  Sentiments  sur  le  Ciel  étoient  presque  achevés  d'im- 
primer, dit  Pellisson1,  (Corneille)  ayant  su  par  quelque  moyen  que  ce 
jugement  ne  lui  seroit  pas  aussi  favorable  qu'il  eût  espéré,  il  ne  put 

s'empêcher  d'en  témoigner  quelque  ressentiment,  écrivant  par  une 

lettre,  dont  je  n'ai  vu  qu'une  copie  sans  date  et  sans  suscription  :  » 

Je  me  résous ,  puisque  vous  le  voulez,  à  me  laisser 
condamner  par  votre  illustre  Académie;  si  elle  ne  touche 
qu'à  une  moitié  du  Cid,  l'autre  me  demeurera  toute  en- 
tière. Mais  je  vous  supplie  de  considérer  qu'elle  procède 
contre  moi  avec  tant  de  violence,  et  qu'elle  emploie  une 
autorité  si  souveraine  pour  me  fermer  la  bouche ,  que 
ceux  qui  sauront  son  procédé  auront  sujet  d'estimer  que 
je  ne  serois  point  coupable  si  l'on  m'avoit  permis  de  me 

montrer  innocent 2 

Après  tout ,  voici  quelle  est  ma  satisfaction  :  je  me  pro- 
mets que  ce  fameux  ouvrage ,  auquel  tant  de  beaux 
esprits  travaillent  depuis  six    mois ,   pourra   bien   être 

1.  Relation  contenant  P histoire  de  l'Académie  françoise,  p.  207-210. 
—  a  Cette  lettre,  ajoute  Pellisson,  a  été  désavouée  par  M.  Cor- 
neille, qui  a  toujours  protesté  qu'il  ne  l'avoit  jamais  écrite  :  ainsi  il 
faut  que  quelque  autre  se  soit  diverti  à  lui  prêter  sa  plume  et  l'écrire 
en  son  nom.  »  Malgré  cette  assertion,  qu'on  chercherait  vainement 
dans  les  premières  éditions  de  l'ouvrage  de  Pellisson ,  mais  que  je 
trouve  à  la  page  i33  des  éditions  publiées  par  Coignard  en  1700 
e  I70i;qued'01ivet  a  d'ailleurs  supprimée,  et  que,  chose  plus  étrange, 
M.  Livet  a  oublié  de  rétablir,  au  moins  en  note,  nous  penchons  fort 
à  croire  que  la  lettre  est  de  Corneille.  S'il  en  eût  été  autrement,  Pel- 
lisson ne  l'eût  assurément  pas  admise  dans  son  Histoire,  et  c'est  bien 
probablement  par  un  simple  sentiment  de  convenance  qu'il  a  cru 
utile  d'accompagner  cet  écrit  d'une  protestation  un  peu  tardive,  qui, 
au  temps  où  elle  a  paru,  n'a  sans  doute  trompé  personne. 

2.  Pellisson  nous  donne  ainsi  (p.  209)  l'analyse  de  la  portion  de  la 
lettre  qu'il  supprime:  «  Il  se  plaignoit  ensuite,  comme  si  on  eût  refusé 
d'écouter  la  justification  qu'il  vouloit  faire  de  sa  pièce  de  vive  voix, 
pt  en  présence  de  ses  juges,  de  quoi  pourtant  je  n'ai  trouvé  aucune 


4*o  LETTRES. 

estimé  le  sentiment  de  l'Académie  françoise ,  mais  peut- 
être  que  ce  ne  sera  point  le  sentiment  du  reste  de  Paris  ; 
au  moins  j'ai  mon  compte  devant  elle,  et  je  ne  sais  si 
elle  peut  attendre  le  sien.  J'ai  fait  le  Ciel  pour  me  diver- 
tir, et  pour  le  divertissement  des  honnêtes  gens ,  qui  se 
plaisent  à  la  comédie.  J'ai  remporté  le  témoignage  de 
l'excellence  de  ma  pièce  par  le  grand  nombre  de  ses  re- 
présentations,  par  la  foule  extraordinaire  des  personnes 
qui  y  sont  venues ,  et  par  les  acclamations  générales 
qu'on  lui  a  faites.  Toute  la  faveur  que  peut  espérer  le 
sentiment  de  l'Académie  est  d'aller  aussi  loin  ;  je  ne  crains 

pas  qu'il  me  surpasse 

Le  Cid  sera  toujours  beau  ,  et  gardera  sa  réputation 
d'être  la  plus  belle  pièce  qui  ait  paru  sur  le  théâtre  ,  jus- 
ques  à  ce  qu'il  en  vienne  une  autre  qui  ne  lasse  point  les 
spectateurs  à  la  trentième  fois 


5.  - 


DE    CORNEILLE    A    BOISROBERT 


Rouen,  23  décembre  1637. 


«  Lorsqu'il  eut  vu  les  Sentiments  de  U  Académie  ,  je  trouve  ,  dit 
Pellisson  (p.  211),  qu'il  écrivit  une  lettre  à  M.  de  Boisrobert  du 
23  décembre  1637,  aans  laquelle,  après  l'avoir  remercié  du  soin  qu'il 
avoit  pris  de  lui  faire  toucher  les  libéralités  de  Monseigneur,  c'est-à- 
dire  de  le  faire  payer  de  sa  pension ,  et  après  lui  avoir  donné  quel- 
ques ordres  pour  lui  faire  tenir  cet  argent  à  Rouen,  »  il  disoit  : 

Au  reste  ,  je  vous  prie  de  croire  que  je  ne  me  scanda- 
lise point  du  tout  de  ce  que  vous  avez  montré,  et  même 

trace,  ni  dans  les  registres,  ni   dans  la  mémoire  des  académiciens 
que  j'ai  consultés.  » 

1.   Relation  contenant  ["histoire  de  L'Académie  françoise,  p.  2ii-2i5. 


LETTRES.  43i 

donné  ma  lettre  à  Messieurs  de  l'Académie.  Si  je  vous 
en  avoisprié,  je  ne  puis  m'en  prendre  qu'à  moi;  néan- 
moins si  j'ai  bonne  mémoire ,  je  pense  vous  avoir  prié 
seulement  par  cette  lettre  de  les  assurer  de  mon  très- 
humble  service,  comme  je  vous  en  prie  encore,  nonob- 
stant leurs  Sentiments.  Tout  ce  qui  m'a  fâché,  c'est  que 
Messieurs  de  l'Académie  s' étant  résolus  de  juger  de  ce 
différend  avant  qu'ils  sussent  si  j'y  consentais  ou  non, 
et  leurs  Sentiments  étants  déjà  sous  la  presse ,  à  ce  que 
vous  m'avez  écrit,  avant  que  vous  eussiez  reçu  ce  témoi- 
gnage de  moi,  ils  ont  voulu  fonder  là-dessus  leur  juge- 
ment ,  et  donner  à  croire  que  ce  qu'ils  en  ont  fait  n'a 

été  que  pour  m'obliger,  et  même  à  ma  prière 

Je  m'étois  résolu  d'y  répondre,  parce  que  d'ordinaire 
le  silence  d'un  auteur  qu'on  attaque  est  pris  pour  une 
marque  du  mépris  qu'il  fait  de  ses  censeurs  :  j'en  avois 
ainsi  usé  envers  M.  de  Scudery  *,  mais  je  ne  croyois  pas 
qu  il  fût  bien  séant  d'en  faire  de  même  envers  Messieurs 
de  l'Académie,  et  je  m'étois  persuadé  qu'un  si  illustre 
corps  méritoit  bien  que  je  lui  rendisse  compte  des  rai- 
sons sur  lesquelles  j'avois  fondé  la  conduite  et  le  choix 
de  mon  dessein;  et  pour  cela  je  forçois  extrêmement  mon 
humeur,  qui  n'est  pas  d'écrire  en  ce  genre,  et  d'éventer 
les  secrets  de  plaire  que  je  puis  avoir  trouvés  dans  mon 
art.  Je  m'étois  confirmé  en  cette  résolution  par  l'assu- 
rance que  vous  m'aviez  donnée  que  Monseigneur  en 
seroit  bien  aise ,  et  me  proposois  d'adresser  l'épître  dé- 
dicatoire  à  Son  Eminence ,  après  lui  en  avoir  demandé 
la  permission.  Mais  maintenant  que  vous  me  conseillez 
de  n'y  répondre  point,  vu  les  personnes  qui  s'en  sont 
mêlées ,  il  ne  me  faut  point  d'interprète  pour  entendre 
cela;  je  suis  un  peu  plus  de  ce  monde  qu'Héliodore,  qui 

i.  Voyez  ci-dessus,  p.  427,  note  3. 


43a  LETTRES. 

aima  mieux  perdre  son  évêché  que  son  livre1,  et  j'aime 
mieux  les  bonnes  grâces  de  mon  maître  que  toutes  les 
réputations  de  la  terre  :  je  me  tairai  donc  ,  non  point  par 

mépris,  mais  par  respect 

Je2  vous  conjure  de  ne  montrer  point  ma  lettre  à  Mon- 
seigneur, si  vous  jugez  qu'il  me  soit  échappé  quelque 
mot  qui  puisse  être  mal  reçu  de  Son  Eminence. 


63. 


«  M.  Corneille....  a  toujours  cru,  dit  Pellisson,  que  le  Cardinal  et 
une  autre  personne  de  grande  qualité  avoient  suscité  cette  persécu- 
tion contre  le  Cid,  témoin  ces  paroles  qu'il  écrivit  à  un  de  ses  amis 
et  des  miens,  lorsqu'ayant  publié  Y Horace*,  il  courut  un  bruit  qu'on 
feroit  encore  des  observations  et  un  nouveau  jugement  sur  cette 
pièce  :  » 

Horace  fut  condamné  par  les  duumvirs,  mais  il  fut 
absous  par  le  peuple. 

i.  Héliodore  d'Émèse  en  Phénicie,  évêque  de  Tricca  en  Thessalie, 
contemporain  de  Théodose  et  de  ses  fils,  est  surtout  connu  par  son 
roman  intitulé  :  les  Ethiopïqiies  ou  les  Amours  de  Thêagène  et  de  Chari- 
clée.  Nieéphore  prétend  que,  n'ayant  voulu  ni  supprimer  ni  désavouer 
cet  ouvrage,  Héliodore  fut  déposé;  mais  Socrate  le  scolastique  et 
Photius  ne  parlent  de  rien  de  semblable. 

2.  Dans  la  Relation  de  Pellisson,  ce  dernier  paragraphe  est  précédé 
de  ces  mots  :  a  Cette  lettre  contenoit  encore  beaucoup  d'autres  choses 
sur  la  même  matière,  et  au  bas  il  avoit  ajouté  par  apostille.  » 

3.  Relation  contenant  F  histoire  de  l'Académie  françoise,  p.  217  et  218. 
4-  L'Achevé  d'imprimer  d'Horace  est,  comme  nous  l'avons  déjà 

dit  (tome  III,  p.  2 53),  du  i5  janvier  1641- 


LETTRES.  433 

7.  DE   CORNEILLE    A   MONSIEUR   GOUJON,    AVOCAT 

AU    CONSEIL    PRIVÉ    DU    ROI1. 

Monsieur  , 

Je  vous  envoie  les  pièces  de  mon  oncle  de  Sainte-Marie 2, 
pour  vous  supplier  de  les  faire  vérifier  par-devant  les 
commissaires  à  ce  députés.  Elles  sont  au  nombre  de 
quatre,  à  savoir  :  une  copie  de  la  vente  que  le  Roi  a 
faite  du  total  des  quatrièmes8  de  Conches  à  M.  Jean  Le- 
telier,  grand  rapporteur  de  France4,  avec  sa  quittance 
de  finance  de  Tan  i554,  avec  deux  contrats  d'acquisition 
que  mon  grand-père5  a  fait  d'Octavian  Costantin ,  qui 
jouissoit   au  nom  de  ses  héritiers  de  partie  de  ladite 


1.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  419.  —  «  Le  Conseil  privé,  autrement 
Conseil  des  parties,  que  dans  l'usage  ordinaire  on  appelle  simplement 
le  Conseil,  et  dont  les  conseillers  se  nomment  conseillers  d'Etat  :  c'est 
un  conseil  qui  se  tient  dans  la  salle  du  conseil  par  M.  le  chancelier  ou 
le  garde  des  sceaux  et  les  jours  qu'il  lui  plaît;  et  quoique  le  Roi  n'y 
assiste  pas,  le  fauteuil  de  Sa  Majesté  y  est  toujours  placé  et  demeure 
vide.  »  [Dictionnaire  de  Trévoux.) 

2.  Antoine  Corneille,  présumé  né  en  1^77,  curé  de  Sainte- 
Marie-des- Champs,  arrondissement  d'Yvetot,  l'aîné  des  oncles  de 
Pierre  Corneille.  Une  note,  adressée  par  M.  Ch.  de  Beaurepaire  a 
M.  Taschereau,  et  tirée  des  registres  de  la  fabrique  de  Sainte- 
Marie-des-Champs,  prouve  qu'Antoine  Corneille  en  était  curé  dès 
16 14  ;  il  mourut  dans  l'exercice  des  mêmes  fonctions  en  janvier 
1648. 

3.  «  Nom  d'un  droit  que  le  Roi  lève  dans  la  province  de  Norman- 
die sur  le  vin,  le  cidre  et  les  autres  liqueurs  qu'on  y  boit.  Dans  les 
autres  provinces  on  ne  paye  que  le  huitième  ;  mais  en  Normandie  on 
paye  le  quatrième.  »  {Dictionnaire  de  Trévoux.)  Ce  droit  avait  été  éta- 
bli au  commencement  du  quatorzième  siècle. 

4-  «  Grand  rapporteur,  est  une  charge  du  sceau.  Il  y  a  deux  grands 
rapporteurs  en  la  grande  chancellerie  :  ce  sont  des  offices  qui  ne 
peuvent  être  possédés  que  par  des  conseillers  du  grand  conseil.  » 
[Dictionnaire  de  Furetière.) 

5.  Pierre  Corneille,  référendaire  à  la  chancellerie  du  Parlement 
Cokjseille.  x  28 


434  LETTRES. 

rente,  et  un  extrait  de  la  chambre  des  comptes1.  Pour 
vous  éclaircir  ceci,  afin  que  vous  en  puissiez  rendre  compte, 
vous  saurez  que  après  que  ledit  sieur  Letelier  eut  acquis 
le  total  de  la  propriété  desdits  quatrièmes,  ils  furent 
réunis  à  la  recette  des  aides  et  rebaillés  au  profit  du 
fermier  général,  et  par  ce  moyen  le  prix  de  son  acqui- 
sition, qui  étoit  de  sept  mil  neuf  cents  quatre-vingt-trois 
livres  six  sols  huit  deniers ,  fut  converti  en  798*-  6S  8d  de 
rente  sur  lesdits  quatrièmes  à  la  raison  du  denier  dix, 
ce  qui  se  justifie  par  les  extraits  des  comptes  que  je  pro- 
duis. Ce  Jean  Letelier  a  eu  cinq  héritiers,  deux  desquels 
ont  vendu  leurs  parts  à  un  nommé  Pierre  Costantin; 
ce  Pierre  Costantin  a  laissé  deux  fils,  Pierre  et  Oc- 
tavian.  Octavian  se  constituant  en  rente  envers  feu  mon 
grand-père  en  Tan  i584,  lui  a  hypothéqué  spéciale- 
ment quarante-quatre  écus  cinquante- six  sols  huit  de- 
niers de  rente,  qu'il  avoit  à  prendre  sur  lesdits  qua- 
trièmes ,  et  consenti  qu'il  en  jouît  et  baillât  quittance 
en  sa  place,  ce  qu'il  a  toujours  fait  depuis.  Nous  ne  sa- 
vons qu'est  devenu  cet  Octavian  Costantin,  qui  a  mangé 
son  bien ,  et  est  mort  sans  biens  et  sans  héritiers.  Je  sais 
qu'à  la  rigueur  on  nous  peut  demander  le  droit  de  Pierre 
son  père  et  ses  partages  avec  son  frère;  mais  nous  n'en 
sommes  point  saisis.  Ce  que  j'ai  pu  faire  pour  y  suppléer, 
c'a  été  de  prendre  des  extraits  en  la  chambre  pour  véri- 
fier qu'il  en  jouissoit  avant  le  payement  et  délégation 
qu'il  en  a  faite  à  mon  grand-père ,  et  que  nous  en  avons 
toujours  depuis  [joui]2.  Pour  cet  effet  j'en  ai  levé  cinq 

extraits,  que  vous  trouverez  enmême l'un  de  cinq  cents 

quatre-vingt  et  un ,  et  celui  de  quatre-vingt-deux  (Octa- 

1.  Ici  le  mot  compte  est  orthographié  de  la  sorte,  mais  dans  tout 
le  reste  de  la  lettre  il  est  écrit  conte. 

a.  Ce  dernier  mot  manque  dans  l'autographe,  ainsi  qu'un  autre 
après  même,  à  la  phrase  suivante. 


LETTRES.  435 

vian  Costantin  est  employé  pour  cette  partie),  un  autre 
de  quatre-vingt-sept,  qui  est  la  première  année  dont  les 
comptes  se  sont  rendus  depuis  que  nous  en  jouissons, 
ceux  de  1 584, 1 585  et  i586  n'étant  pas  rendus.  En  celui-là 
vous  n'y  trouvez  plus  Octavian  Costantin1,  et  quoique 
on  n'y  mette  pas  que  ma  grandmère,  qui  y  est  employée, 
en  jouit  en  son  nom,  si  est-ce  qu'étant  employée  pour 
deux  quittances  et  en  deux  qualités,  l'une  comme  tutrice 
des  enfants  de  Nicolas  Letelier,  et  l'autre  comme  tutrice 
des  enfants  de  son  mari  et  d'elle,  il  est  aisé  de  voir  que 
celle  qu'elle  a  baillée  au  nom  de  ses  enfants  étoit  au 
droit  de  Costantin ,  vu  que  la  partie  des  enfants  de  ce 
Nicolas  Letelier  employée  aux  comptes  précédents  sous 
le  nom  de  mon  grand-père  leur  tuteur  ne  peut  être  si 
forte ,  n'étant  accrue  que  de  la  moitié  ou  du  tiers  de  la 
part  d'un  autre  Letelier,  curé  de  Louviers ,  qui  ne  se 
trouve  plus  en  ce  compte-ci  ;  j'y  ai  fait  ajouter  l'extrait 
de  160 5,  qui  est  quand  mon  oncle  est  devenu  majeur 
et  a  reçu  sa  part,  et  celui  de  163*3,  qui  est  le  dernier 
compte  rendu  à  la  chambre  pour  montrer  qu'il  en  a 
toujours  joui  au  droit  de  Costantin,  y  étant  spécialement 
employé  audit  nom,  où  vous  remarquerez,  s'il  vous  plaît, 
qu'encore  que  dans  ce  compte  les  autres  parties  varient, 
celle-ci  n'a  jamais  varié  et  est  toujours  de  la  même 
quantité.  On  peut  dire  que  la  rente  ne  nous  est  qu'en- 
gagée, et  que  Costantin  en  est  le  véritable  propriétaire, 
et  que  par  conséquent  nous  n'avons  pas  qualité  pour  la 
faire  vérifier  sous  notre  nom  ;  mais  à  cela  on  peut  dire  que 
nous  étant  spécialement  déléguée,  en  ayant  joui  soixante 
ans ,  et  Octavian  Costantin  étant  mort  sans  héritiers , 
nous  tenons  lieu  de  véritables  propriétaires,  et  que  le 


1.  Ici  et  en  quelques  autres  endroits  il  y  a  Constantin,  et  non  Cos- 
tantin. 


436  LETTRES. 

Roi  est  hors  d'intérêt,  ne  lui  important  pas  qui  il  paye. 
Je  vous  envoie  un  état  de  la  façon  dont  la  rente  se  paye 
maintenant  pour  vous  donner  lumière  là  dedans,  afin 
que  vous  puissiez  voir  au  greffe  de  la  commission  si  ceux 
qui  jouissent  des  restes  de  la  rente  ont  rien  vérifié  qui 
nous   puisse  servir.  Il  y  a  des  héritiers    de  Telier  qui 
doivent  avoir  fait  vérifier  la  pièce  de  l'aliénation  totale, 
dont  je  ne  représente  que  la  copie*,  il  y  a  encore  un 
M.  Darey  qui  est  héritier  de   Pierre   Gostantin,   frère 
d'Octavian,  qui  aura  fait  vérifier  le  droit  de  Pierre  Cos- 
tantin,  leur  père  commun.  Que  si  pour  prouver  le  droit 
dudit  Costantin,  il  est  besoin  de  lever  des  extraits  de  la 
chambre  des  comptes  de  Paris,  où  se  sont  rendus  les 
comptes  de  Normandie  au  précédant  Tannée  i58o4,  je 
vous  supplie  de  les  lever,  la  partie  étant  assez  considé- 
rable pour  ne  la  vouloir  pas  perdre.  Le  plus  court  seroit 
de  donner  quelque  chose  à  ceux  qui  font  lesdites  vérifi- 
cations. On  m'a  dit  qu'il  y  a  un  nommé  M.  Nicolas,  qui 
est  procureur  du  Roi  de  la  commission,  qui  fait  tout;  il 
vaudroit  mieux  lui  donner  double  taxe  et  qu'il  ne  nous 
fit  point  de  peine.  On  m'a  dit  aussi  qu'il  y  a  un  certain 
M.  de  Courcelles,  que  nous  avons  vu  à  Rouen2,  grand 
ami  de  D.  Robert  de  Sainte-Marie,  feuillant,  qui  y  peut 
beaucoup  -,  il  demeure  à  la  rue  Jean  Pain-Mollet,  près  des 
coches',  si  vous  jugez  qu'il  en  soit  besoin,  je  lui  en  écrirai. 
Pour  l'argent  qu'il  faudra  débourser,  je  donnerai  ordre 
à  Courbé3  qu'il  vous  en  baille.  Mon  oncle  le  procureur 


i«   C'est  en    cette   année    t58o  qu'a  été    établie   la  chambre  des 
comptes  de  Normandie. 

2.  Corneille  avait  d'abord  écrit  ici  ;  il  a  effacé  ce  mot  pour  le  rem- 
placer par  «  Boucn. 

3.  Sans  doute  le  libraire  Augustin  Courbé,  chez  qui   la  tragédie 
d'Horace  avait  paru  au  mois  de  janvier  de  cette  même  année  i64T 
Voyez  au  tome  III,  p.  253,  note  a. 


LETTRES.  457 

vous  prie  aussi  de  lui  faire  vérifier  une  petite  partie,  qui 
n'est  que  de  neuf  livres,  dont  on  ne  paye  que  la  moitié. 
Il  vous  en  écrit  et  vous  envoie  ses  titres;  c'est  pourquoi 
je  me  dispense  de  vous  en  entretenir.  Obligez-moi  de 
dresser  leurs  requêtes,  l'une  sous  le  nom  de  M.  Antoine 
Corneille,  prêtre,  curé  de  Sainte-Marie1;  et  l'autre  de 
M.  François  Corneille,  procureur  au  Parlement2.  Si  vous 
jugez  que  mon  nom  soit  assez  considérable  pour  rendre 
l'affaire  plus  aisée,  vous  pouvez  dire  qu'ils  me  les  ont 
données  comme  à  leur  héritier.  J'ai  vu  ici  Monsieur  votre 
père,  que  j'ai  trouvé  fort  mélancolique;  je  n'ai  pu  en 
savoir  la  cause.  Je  pense  vous  avoir  m*andé  que  je  me 
sens  des  bénédictions  du  mariage,  et  tire  maintenant  à 
coup  perdu  aussi  bien  que  vous  3 . 

Je  suis  votre  très-humble  et  très-affectionné  serviteur, 

Corneille. 
A  Rouen,  ce  ier  de  juillet  1641. 

Mettez,  s'il  vous  plaît,  le  port  du  sac  en  articles  de 
frais,  et  me  mandez  sitôt  que  vous  l'aurez  reçu,  afin  que 
je  n'en  sois  point  en  peine. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  Goujon,  avocat 
au  conseil  privé  du  Roi,  à  Paris4. 

1.  Voyez  ci-dessus,  p.  433,  note  2. 

2.  François  Corneille,  quatrième  oncle  de  Corneille,  baptisé  le 
10  juillet  161 1. 

3.  Le  10  janvier  1642  ,  la  femme  de  Corneille  mettait  au  monde 
sa  fille  Marie,  l'aînée  des  enfants  de  notre  poète. 

4«  L'ordre  chronologique  amènerait  ici  deux  lettres  de  Chapelain 
à  Corneille  des  20  juillet  et  2  5  août  1642  ;  mais  le  texte  en  est  perdu. 
Nous  ne  les  connaissons  que  par  l'analyse  qu'en  a  donnée  Goujet  et 
que  nous  avons  reproduite  dans  la  Notice  des  OEuPres  diverses  en 
prose  .-voyez  ci-dessus,  p.  392  et  3o,3. 


438  LETTRES. 

8.    DE    CLAUDE  SA.RRAU  A  CORNEILLE1. 

CLAUDIUS    SARRAVIUS    PETRO    CORNELIO  ,    SOTHOMAGUM. 

Tantum  debeo  Menagio  nostro  quantum  persolvere  difficile  est, 
quod  me  impulerit  ut  ad  te  scriberem  ,  dum  fîdei  meae  epistolam 
suam  et  aliquot  Balsacii  carmina  committeret  quse  ad  te  allegarem  ; 
is  enim  ego,  prœstantissime  Corneli,  qui  cura  amicitiam  tuam  auro 
gemmisque  contra  caram  habeam,  tam  bellam  te  compellandi  occa- 
sionem  insuper  habere  non  debuerim.  Ut  valeas  tu  cum  tuis  Musis 
scire  imprimis  desidero,  et  utrum  tribus  eximiis  et  divinis  tuis  dra- 
matis2  quartum  adjungere  mediteris.  Sed  prsesertim  excitandae  sunt 

CLAUDE    SARRAU    A   PIERRE    CORNEILLE,    A   ROUEN. 

Je  ne  sais  si  je  pourrai  jamais  m'acquitter  envers  notre  Ménage  de 
m'avoir  poussé  à  vous  écrire  en  confiant  à  mes  soins  sa  lettre  et  quel- 
ques vers  de  Balzac  pour  que  je  vous  les  envoie;  car  tel  que  je 
suis,  illustre  Corneille,  et  tenant  votre  amitié  aussi  précieuse  que 
l'or  et  les  pierreries,  je  n'ai  pas  dû  négliger  une  si  belle  occasion  de 
m'adresser  à  vous.  Ce  que  je  désire  principalement,  c'est  de  savoir 
comment  vous  -vous  portez,  vous  et  vos  Muses,  et  si  à  vos  trois  excel- 
lentes et  divines  pièces  vous  projetez  d'en  ajouter  une  quatrième.  Mais 
il  faut  surtout  engager  ces  déesses  à  composer  quelque  poème,  digne 

i.  Cette  lettre,  dont  nous  donnons  la  traduction  au-dessous  du 
latin,  se  trouve  aux  pages  65  et  66  du  recueil  intitulé  :  Claudiï 
Sarruvii,  scnatorls parisiensis,  epistolee,  opus  postkumum....  C13I3CLIV 
(Orange,  in-8°).  Elle  est  réimprimée,  sans  changement,  dans  l'édition 
des  lettres  de  Sarrau  publiée  par  Burmann,  à  Utrecht,  en  1697.  — 
Claude  Sarrau,  après  avoir  fait  ses  études  de  droit  à  Rouen,  remplit 
successivement  à  Paris  et  à  Rouen  les  fonctions  de  conseiller  au  par- 
lement. C'était  un  des  protégés  de  Christine  de  Suède,  qui  lui  écrivait 
souvent  et  lui  donnait  le  titre  d'ami.  Ses  lettres  sont  dédiées  à  cette 
reine.  Il  entretenait  correspondance  sur  des  matières  d'érudition  avec 
les  savants  les  plus  distingués  de  la  France  et  des  Pays-Bas.  Tallemant 
des  Réaux  raconte  de  lui  plusieurs  anecdotes.  Voyez  ses  Historiettes  7 
tome  VII,  p.  5i,  19.9  et  4^4-  U  mourut  le  3o  mai  i65i. 

2.  Il  semble  évident  que  ces  trois  pièces  sont  le  Cid,  Horace  et 
Ci/ma,  et  que  le  poème  sacré  dont  Sarrau  parle  quelques  lignes  plus 
loin  est  Polyeucte.  S'il  en  est  ainsi,  cela  modifie  les  dates  de  représen- 


LETTRES.  4^9 

illse  tuse  divse,  ut  aliquod  carnien  te  seque  dignum  pangant  super 
magni  Panis  *  obitu. 

Multis  ille  quidem  flebilis  occldit; 
Nullï  flebilïor  quant  tibi%9  Corneli. 

Ille  tamen  volens  nolens  Apollinari  laurea  caput  tuum  redimivisset , 
si  perennasset  diutius.  Operum  saltem  tuorum  insignem  laudatorem 
amisisti;  sed  non  eget  virtus  tua  ullius  prseconio,  quippe  quae  per 
imiversum  terrarum  orbem, 

Qua  sol  exoritur,  quo  sol  se  gurgite  mer  gît, 

latissime  simul  cum  gloria  tua  diffusa,  tôt  admiratores  nacta  est  quot 
vivunt  eruditi  etcandidi.  In  tanto  igitur  argumento  silere  te  posse  vix 
credam.  Istud  tamen  omne  fuerit  tui  arbitrii  :  invito  non  si  va  in  Par- 
nasso*.  Inaudivi  nescio  quid  de  aliquo  tuo  poemate  sacro,  quod  an 

de  vous  et  d'elles ,  sur  la  mort  du  grand  Pan.  Regrettable  pour  tant 
d'autres,  il  ne  l'est  pour  personne  plus  que  pour  vous,  Corneille.  Bon 
gré  mal  gré,  s'il  eût  vécu  plus  longtemps,  il  auroit  couronné  votre  tête 
du  laurier  d'Apollon.  Vous  perdez  tout  au  moins  un  illustre  approba- 
teur de  vos  œuvres ,  mais  votre  mérite  n'a  besoin  des  éloges  de  per- 
sonne :  répandu  au  loin,  avec  votre  gloire,  il  a  rencontré  dans  le 
monde  entier,  du  point  où  le  soleil  se  lève  jusqu'à  celui  où  il  se  plonge 
dans  l'Océan,  autant  d'admirateurs  qu'il  y  a  d'hommes  instruits  et  sin- 
cères. J'ai  donc  peine  à  croire  que  vous  vous  taisiez  sur  un  si  grand 
sujet.  Toutefois  à  vous  de  voir  ce  que  vous  devez  faire  :  on  ne  monte 
pas  au  Parnasse  contre  son  gré.  J'ai  entendu  dire  vaguement  que 

tation  généralement  adoptées  pour  Poljeucte,  Pompée  et  le  Menteur. 
Voyez  ci-dessus  la  Notice  des  lettres,  p.  423-425. 

i.  Le  grand  Pan  n'est  autre  ici  que  Richelieu,  mort  le  4  décembre 
1642,  et  dont  Corneille  se  montra  fort  peu  disposé  a  faire  l'éloge 
funèbre.  Voyez  ci-dessus,  p.  86  et  87. — Malherbe  désigne  le  Cardinal 
par  le  même  nom,  dans  une  lettre  à  Racan  du  10  septembre  i6a5. 
Voyez  le  Malherbe  de  M.  Lalanne,  tome  IV,  p.  19. 

2.  Allusion  à  ces  vers  si  connus  de  l'ode  d'Horace  à  Virgile  sur 
la  mort  de  Quintilius  (livre  I,  ode  xxiv,  vers  9  et  10)  : 

Multis  ille  bonis  flebilis  occidit  ; 
Nulli  flebilior  quam  tibi,  Virg'di. 

3.  Proverbe  italien. 


440  LETTRES. 

uffectum  an  perfectum  sit,  quseso,  rescribe,  meque  meritorum  tuorum 
assertorem,  si  ullo  egeres,  fortem  crede  bon  unique.  Vale,  et  me,  ut  fa- 
eere  te  scio,diligereperge.  Lut.  Par.  prid.  Id.  decemb.CI3I3C.XLII. 

vous  travailliez  à  un  certain  poëme  sacré.  Écrivez-moi,  je  vous  prie, 
s'il  est  bien  avancé  ou  même  achevé,  et  croyez  que  si  vous  aviez  besoin 
d'un  défenseur  de  vos  mérites,  vous  en  trouveriez  un  bon  et  zélé  en 
moi.  Portez-vous  bien,  et  continuez  à  me  chérir,  comme  je  sais  que 
vous  le  faites.  Paris,  le  12  décembre  1642. 


9.    DE    BALZAC    A    CORNEILLE  l. 

Monsieur, 

J'ai  senti  un  notable  soulagement  depuis  l'arrivée  de  votre  paquet, 
et  je  crie  miracle  dès  le  commencement  de  ma  lettre.  Votre  Clnna^ 
guérit  les  malades  :  il  fait  que  les  paralytiques  battent  des  mains;  il 
rend  la  parole  à  un  muet,  ce  seroit  trop  peu  de  dire  à  un  enrhumé. 
En  effet,  j'avois  perdu  la  parole  avec  la  voix  ;  et  puisque  je  les  re- 
couvre l'une  et  l'autre  par  votre  moyen,  il  est  bien  juste  que  je  les 
emploie  toutes  deux  à  votre  gloire,  et  à  dire  sans  cesse  :  La  belle  chose  ! 
Vous  avez  peur  néanmoins  d'être  de  ceux  qui  sont  accablés  par  la 
majesté  des  sujets  qu'ils  traitent,  et  ne  pensez  pas  avoir  apporté  assez 
de  force  pour  soutenir  la  grandeur  romaine5.  Quoique  cette  modestie 
me  plaise,  elle  ne  me  persuade  pas,  et  je  m'y  oppose  pour  l'intérêt 
de  la  vérité.  Vous  êtes  trop  subtil  examinateur  d'une  composition 
universellement  approuvée,  et  s'il  étoit  vrai  qu'en  quelqu'une  de  ses 
parties  vous  eussiez  senti  quelque  foiblesse,  ce  seroit  un  secret  entre 
vos  Muses  et  vous,  car  je  vous  assure  que  personne  ne  l'a  reconnue. 

1 .  Cette  lettre  est  extraite  du  recueil  intitulé  :  les  OEuvres  de  Mon- 
sieur de  Balzac,  divisées  en  deux  tomes,  à  Paris,  chez  Louis  Billaine 

M.DC.LXV,  in-fol.,  tome  I,  p.  675  et  676. 

2.  Corneille  avait  sans  doute  adressé  en  toute  hâte  à  Balzac  un 
exemplaire  de  bonnes  feuilles  du  Cinna,  car  l'Achevé  d'imprimer  de 
cette  pièce  est  du  18  janvier,  et  dans  ce  remercîment,  qui  est  du  17, 
Balzac  dit  qu'il  admire  Emilie  «  depuis  quinze  jours.  » 

3.  Corneille  ne  parle  pas  de  cette  crainte  dans  les  préliminaires  de 
Cinna.  C'est  donc  dans  la  lettre  à  Balzac  qui  accompagnait  cette 
pièce  qu'il  en  était  question. 


LETTRES.  44i 

La  foiblesse  seroit  de  notre  expression,  et  non  pas  de  votre  pensée; 
elle  viendroit  du  défaut  des  instruments,  et  non  pas  de  la  faute  de 
l'ouvrier  :  il  faudroit  en  accuser  l'incapacité  de  notre  langue.  Vous 
nous  faites  voir  Rome  tout  ce  qu'elle  peut  être  à  Paris,  et  ne  l'avez 
point  brisée  en  la  remuant.  Ce  n'est  point  une  Rome  de  Cassiodore, 
et  aussi  déchirée  qu'elle  étoit  au  siècle  des  Théodorics  :  c'est  une 
Rome  de  Tite  Live ,  et  aussi  pompeuse  qu'elle  étoit  au  temps  des 
premiers  Césars.  Vous  avez  même  trouvé  ce  qu'elle  avoit  perdu  dans 
les  ruines  de  la  République  :  cette  noble  et  magnanime  fierté;  et  il 
se  voit  bien  quelques  passables  traducteurs  de  ses  paroles  et  de  ses 
locutions,  mais  vous  êtes  le  vrai  et  le  fidèle  interprète  de  son  esprit 
et  de  son  courage.  Je  dis  plus,  Monsieur,  vous  êtes  souvent 
son  pédagogue,  et  l'avertissez  de  la  bienséance  quand  elle  ne  s'en 
souvient  pas.  Vous  êtes  le  réformateur  du  vieux  temps,  s'il  a  besoin 
d'embellissement  ou  d'appui.  Aux  endroits  où  Rome  est  de  brique, 
vous  la  rebâtissez  de  marbre.  Quand  vous  trouvez  du  vide,  vous  le 
remplissez  d'un  chef-d'œuvre;  et  je  prends  garde  que  ce  que  vous 
prêtez  à  l'histoire  est  toujours  meilleur  que  ce  que  vous  empruntez 
d'elle.  La  femme  d'Horace,  et  la  maîtresse  de  Cinna,  qui  sont  vos 
deux  véritables  enfantements  et  les  deux  pures  créatures  de  votre 
esprit,  ne  sont-elles  pas  aussi  les  principaux  ornements  de  vos  deux 
poèmes?  et  qu'est-ce  que  la  saine  antiquité  a  produit  de  vigoureux  et 
de  ferme  dans  le  sexe  foible,  qui  soit  comparable  à  ces  nouvelles 
héroïnes  que  vous  avez  mises  au  monde,  à  ces  Romaines  de  votre 
façon?  Je  ne  m'ennuie  point,  depuis  quinze  jours,  de  considérer 
celle  que  j'ai  reçue  la  dernière.  Je  l'ai  fait  admirer  à  tous  les  habiles 
de  notre  province  :  nos  orateurs  et  nos  poètes  en  disent  merveilles  ; 
mais  un  docteur  de  mes  voisins,  qui  se  met  d'ordinaire  sur  le  haut 
style,  en  parle  certes  d'une  étrange  sorte,  et  il  n'y  a  point  de  mal 
que  vous  sachiez  jusques  où  vous  avez  porté  son  esprit.  Il  se  conten- 
toit  le  premier  jour  de  dire  que  votre  Emilie  étoit  la  rivale  de  Caton 
et  de  Brutus,  dans  la  passion  de  la  liberté.  A  cette  heure  il  va  bien 
plus  loin.  Tantôt  il  la  nomme  la  Possédée  du  Démon  de  la  Répu- 
blique ;  et  quelquefois  la  belle,  la  raisonnable,  la  sainte  et  l'adorable 
Furie.  Voilà  d'étranges  paroles  sur  le  sujet  de  votre  Romaine,  mais 
elles  ne  sont  pas  sans  fondement.  Elle  inspire  en  effet  toute  la  con- 
juration ,  et  donne  chaleur  au  parti  par  le  feu  qu'elle  jette  dans 
l'âme  du  chef.  Elle  entreprend  en  se  vengeant  de  venger  toute  la 
terre  ;  elle  veut  sacrifiera  son  père  une  victime  qui  seroit  trop  grande 


44*  LETTRES. 

pour  Jupiter  même.  C'est  à  mon  gré  une  personne  si  excellente,  que 
je  pense  dire  peu  à  son  avantage,  de  dire  que  vous  êtes  beaucoup 
plus  heureux  en  votre  race  que  Pompée  n'a  été  en  la  sienne,  et  que 
votre  fille  Emilie  vaut  sans  comparaison  davantage  que  Cinna  son 
petit-fils.  Si  cettui-ci  même  a  plus  de  vertu  que  n'a  cru  Sénèque  *,  c'est 
pour  être  tombé  entre  vos  mains,  et  à  cause  que  vous  avez  pris  soin 
de  lui.  Il  vous  est  obligé  de  son  mérite,  comme  à  Auguste  de  sa 
dignité.  L'Empereur  le  fît  consul,  et  vous  l'avez  fait  honnête  homme  ; 
mais  vous  l'avez  pu  faire  par  les  lois  d'un  art  qui  polit  et  orne  la 
vérité,  qui  permet  de  favoriser  en  imitant,  qui  quelquefois  se  propose 
le  semblable  et  quelquefois  le  meilleur.  J'en  dirois  trop  si  j'en  disois 
davantage.  Je  ne  veux  pas  commencer  une  dissertation,  je  veux  finir 
une  lettre,  et  conclure  par  les  protestations  ordinaires,  mais  très-sin- 
cères et  très- véritables,  que  je  suis, 

Monsieur, 

Votre,  etc. 


De  Balzac. 


Le  xvii  janvier  m.dcxliii. 


ÎO.    DE    BALZAC    A    CORNEILLE3. 

Monsieur, 

J'aurois  grand  dessein  de  vous  faire  un  magnifique  remerciement, 
digne  des  honnêtetés  de  votre  lettre ,  digne  du  rang  que  vous  m'avez 
donné  parmi  les  poètes  latins,  et  de  ce  trop  favorable 

Tibi  carminé  ab  omni 

Cedeturf  jurlque  tuo  natura  relinquet 
Quis  vatum  esse  velis* 

Mais  quelle  apparence  de  disputer  de  civilité  avec  vous,  qui  êtes  à 
Rouen  quand  vous  n'êtes  pas  à  Paris,  c'est-à-dire  qui  changez  une 
cour  pour  une  autre  cour  et  ne  sortez  jamais  du  grand  monde?  Je 

i.  Sénèque  l'a  nommé  :  stolidi  ingenii  vlrum.  Voyez  notre  tome  III 
p.  373. 

2.  Extrait  du  tome  I,  p.  692  et  6g3  du  recueil  décrit  ci-dessus, 
p.  44o,  note  1. 

3.  «  Tout  genre  de  poésie  te  cédera  le  premier  rang,  et  la  nature 
te  laissera  décider  qui  tu  veux  être  parmi  les  poètes.  »  On  voit,  par 
ce  que  dit  Balzac,  que  ces  vers  sont  de  Corneille. 


LETTRES.  443 

vous  dirai  donc,  sans  prétendre  à  la  gloire  que  votre  lettre  m'a  déjà 
ravie,  que  je  reçois  a  beaucoup  d'honneur  les  quatre  noms  de  guerre 
qu'elle  me  donne,  et  le  premier  aussi  bien  que  les  trois  autres.  Quoique 
le  caractère  de  Stace  ne  soit  pas  celui  sur  lequel  je  voudrois  me 
former,  son  esprit  n'est  pas  de  ceux  dont  j'estime  la  ressemblance 
vicieuse.  Je  ne  suis  pas  si  délicat  que  ces  Messieurs  de  delà  les  monts, 
et  j'ai  toujours  blâmé  le  caprice  du  gentilhomme  vénitien  *  qui,  pour 
se  réconcilier  avec  Virgile,  brûla  les  Silves  qu'il  avoit  composées  en 
sa  jeunesse,  parce  qu'elles  venoient  du  plan  de  celles  de  Stace.  Il  ne 
voulut  pas  même  que  la  postérité  ignorât  sa  mauvaise  humeur,  dont 
il  a  conservé  la  mémoire  dans  une  épigramme  qui  commence  ainsi  : 

Has}  Vulcane,  dicat  silvas  t'ibi  villicus  Acmon  : 

Tu  sacr'is  Mas  ignibus  ure,  pater. 
Crescebant  ducta  e  Stati  propagine  silvis, 

Jamque  erat  ipsa  bonis  frugibus  timbra  nocens. 

Peut-être  que  ce  qui  fut  un  effet  de  cruauté  en  la  personne  du  gen- 
tilhomme de  Venise,  seroit  en  moi  une  action  de  justice,  si  je  con- 
damnois  mes  vers  au  même  supplice  qu'il  fit  les  siens.  Et  en  vérité, 
j'ai  tant  de  peur  qu'ils  ne  soient  pas  bons,  que  si  notre  maître  M.  Mé- 
nage ne  me  jure  encore  une  fois  que  mon  appréhension  est  mal 
fondée,  et  ne  confirme  de  nouveau  son  serment  par  le  témoignage  de 
nos  autres  maîtres,  Monsieur  Bourbon2,  Monsieur  l'ambassadeur  de 
Suède5,  etc.,  je  croirai  que  vous  et  lui  me  jouez  en  me  louant.  Je 
m'imaginerai  que  vous  avez  dessein  de  prendre  votre  plaisir  du  jar- 
gon d'un  versificateur  de  province, 

Qui  linguam  violare  Rémi  temerarius  audet, 
Somniat  et  Tuscum  Tiberim  et  Saturnia  régna, 
Accola  Santonici  Oceani,  viridisque  Carentss 
Potator,  procul  a  doctis,  vêtus  exsul}  amicis. 

1 .  André  Navagero.  L' épigramme  citée  par  Balzac  se  trouve  dans  le 
volume  intitulé  :  Andréa:  Naugerii,  patricii  veneti,  orationes  dusc  carmi- 
naque  non  nulla,  Venise,  i53o. 

2.  Nicolas  Bourbon,  né  à  Bar-sur-Aube  en  i5y4,  mort  en  1644, 
professeur  de  rhétorique  dans  plusieurs  collèges  de  Paris,  membre  de 
l'Académie  française,  et  père  de  l'Oratoire.  Voyez  la  notice  que  lui 
consacre  Pellisson  dans  son  Histoire  de  l'Académie. 

3.  Hugo  Grotius.  Voyez  tome  I,  p.  102,  note  2.  Il  fit  son  entrée 
solennelle  à  Paris,  en  qualité  d'ambassadeur  de  la  reine  de  Suède,  le 
2  mars  i635;  il  demanda  son  rappel  en  i645. 


444  LETTRES. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  n'est  point  de  passe-temps  qui  ne  doive  être 
permis  dans  la  république  des  belles-lettres  à  deux  personnes  qui  ont 
tant  mérité  d'elle  que  M.  Ménage  et  vous;  et  en  matière  de  raillerie, 
il  faut  bien  souffrir  quelque  cbose  de  l'historien  de  Mamurra1  et  du 
père  de  la  comédie2.  Je  veux  dire  par  ce  dernier  mot,  que  vous  serez. 
Aristophane  quand  il  vous  plaira,  comme  vous  êtes  déjà  Sophocle,  Mais 
quand  vous  devriez  toujours  rire  à  mes  dépens,  je  ne  veux  jamais 
m'offenser  de  votre  joie.  La  guerre  que  vous  me  ferez,  au  lieu  de  me 
blesser,  me  chatouillera.  Vous  ne  sauriez  être  pour  moi  que  doux  et 
agréable  persécuteur  ;  et  bien  ou  mal  traité  de  vous,  je  ne  sauroisêtre, 
Monsieur, 

Que  votre,  etc. 

De  Balzac. 
Du  x  février  m.dc.xliii. 


II.  DE  CORNEILLE  A  VOYER  d'aRGENSON \ 

Monsieur  , 
Votre  lettre  m'a  surpris  en4  deux  façons  :  Tune,  par 

i .  L'écrit  de  Ménage  dont  il  est  ici  question  est  un  des  principaux 
opuscules  dirigés  contre  le  parasite  Montmaur;  il  est  intitulé  :  Vit  a 
Garg'dii  Mamurrse  parasitopsedagogi ,  scriptore  Marco  Licinio.  L'épître 
dédicatoire  est  datée  d'Angers,  le  3o  octobre  i636;  il  n'est  pas  cer- 
tain toutefois  qu'elle  ait  été  publiée  à  cette  époque,  mais  on  la  trouve 
dans  le  recueil  contre  Montmaur  qu'Adrien  de  Valois  fit  publier  en 
1643.  On  peut  voir  l'éloge  que  Balzac  fait  de  cette  œuvre  de  Mé- 
nage dans  la  dédicace  du  Barbon,  qui  lui  est  adressée. 

2.  Un  passage  d'une  des  lettres  précédentes  nous  porte  à  croire 
qu'il  y  avait  alors  fort  peu  de  temps  que  le  Menteur  avait  été  repré- 
senté pour  la  première  fois.  Voyez  la  Notice  des  lettres,  p.  424- 

3.  Voyez  la  Notice,  p.  4*9*  Cette  lettre  était  fermée  à  l'aide  d'un 
cachet  en  cire  rouge  fixé  sur  un  cordon  de  soie  jaune.  Ce  cachet 
porte  les  armoiries  de  Corneille.  —  René  de  Vover,  comte  d'Argen- 
son,mort  en  1700.  Au  moment  où  Corneille  lui  écrivait,  il  était  con- 
seiller du  Roi  au  parlement  de  Normandie,  et  intendant  en  Sain- 
tonge;  en  i65i,  lors  de  la  mort  de  son  père,  ambassadeur  à  Venise, 
il  lui  succéda  dans  ses  fonctions.  Voyez  Journal  et  mémoires  du  marquis 
d'Argenson,  publiés  par  E.  J.  B.  Rathery,  tome  I,  p.  1-4. 

4.  De y  dans  les  OEuvres  diverses  et  dans  les  éditions  suivantes. 


LETTRES.  445 

les  témoignages  de  votre  souvenir,  que  je  n'avois  garde 
d'attendre,   sachant  bien   que  je  ne  les  méritois  pas; 
l'autre,  par  l'honneur  que  vous  faites  à  nos  Muses,   je 
ne  dirai  pas  de  leur  donner  vos  loisirs ,  car  je  sais  que 
vous  n'en  avez  point ,  mais  de  dérober  quelques  heures 
aux  grandes  affaires  qui  vous  accablent ,  pour  vous  dé- 
lasser en  leur  conversation.  Trouvez  donc  bon  que  je  vous 
remercie  très-humblement  du  premier,  et  me  réjouisse 
infiniment  de  l'autre.   Ce  n'est  pas  vous  que  j'en  dois 
congratuler  :  c'est  le  Parnasse  entier,  que  vous  élevez  au 
dernier  point  de  sa  gloire  ,  par  la  dignité  des  choses  dont 
vous  faites  voir  qu'il  est  capable1.  Il  est  trop  vrai  que 
communément  la  poésie  ne  trouve  pas  bien  ses  grâces 
dans  les  matières  de  dévotion  ;  mais  j'avois  toujours  cru 
que  ce  défaut  provenoit  plutôt  du  peu  d'application  de 
notre  esprit  que  de  sa  propre  insuffisance,  et  m'étois  per- 
suadé que  d'autant  plus  que  les  passions  pour  Dieu  sont 
plus  élevées  et  plus  justes  que  celles  qu'on  prend  pour 
les  créatures ,  d'autant  plus  un  esprit  qui  en  seroit  bien 
touché  pourroit  faire  des  poussées2  plus  hardies  et  plus 
enflammées  en  ce  genre  d'écrire ,  et  m'étois  fortifié  sur 
ce  sentiment*  par  la  nature  de  la  poésie  même,  qui  a  les 
passions  pour  son  principal  objet,  n'étant  pas  vraisem- 


1.  Les  écrits  de  dévotion  de  Voyer  d'Argenson  «  remplissent  les 
nos  20  à  27  des  Papiers  <T Argenson.  Plusieurs  ont  été  imprimés.  On 
y  remarque  des  traités  théologiques,  des  oraisons,  des  litanies,  des 
poèmes  plus  ou  moins  étendus,  tels  que  l'Art  cT aimer  Dieu,  les  Exer- 
cices spirituels  de  saint  Ignace,  le  Poème  du  Sauveur,  en  vingt-sept 
chants  ou  récits;  des  projets  d'établissements  charitables,  des  statuts 
de  confréries,  etc.,  etc.  (Note  de  M.  Ratlicry  dans  le  Journal  du  mar- 
quis d? Argenson,  tome  I,  p.  3,  note  1.) 

2.  Pensées,  au  lieu  de  poussées,  dans  les  OEuvres  diverses  et  dans 
les  éditions  suivantes. 

3.  Ici  Sallengre  et  tous  les  autres  éditeurs  ont  coupé  mal  à  propos 
la  phrase  :  «  Je  m'étois  fortifié  dans  ce  sentiment.  » 


446  LETTRES. 

blable  que  l'excellence  de  leur  principe  les  doive  faire 
languir.  Mais  qu'on  pût  apprivoiser  avec  elle  la  partie  la 
plus  sublime  et  la  plus  farouche  de  la  théologie,  mettre 
saint  Thomas  en  rime,  et  trouver  des  termes  éloquents 
et  mesurés  pour  exprimer  des  idées  que  l'esprit  a  peine 
à  concevoir  que  par  abstraction ,  et  en  captivant  ses 
sens  ,  qui  ne  les  peuvent  souffrir  sans  répugnance  et 
sans  rébellion,  c'est  ce  que  je  ne  me  serois  jamais  ima- 
giné faisable ,  et  dont  toutefois  vous  me  venez  de  dé- 
tromper * . 

Pour  vous  en  dire  mon  sentiment  en  particulier,  je 
vous  confesse  que  cet  échantillon  m'a  jeté  dans  une  ad- 
miration si  haute ,  que  je  ne  rencontre  point  de  paroles 
pour  m'expliquer  là-dessus,  qui  me  satisfassent.  Tout  ce 
que  je  vous  puis  dire  sincèrement,  c'est  que  vous  me  lais- 
sez dans  une  grande2  impatience  d'en  voir  d'autres  frag- 
ments, puisque  votre  peu  de  loisir  nous  défend  d'en  es- 
pérer autre  chose,  et  que  je  m'y  promets3  des  ornements 
d'autant  plus  grands ,  que  vous  étant  débarrassé  dans 
celui-ci  de  toutee  qu'il  y  a4  de  plus  épineux  dans  ce  grand 
dessein ,  vous  allez  tomber  dans  de  vastes  campagnes  , 
où  la  poésie,  étant  en  pleine  liberté,  trouve  lieu  de  se 
parer  de  tous  ses  ornements ,  et  de  nous  étaler  toutes  ses 
grâces.  Cependant ,  pour  ce  premier  chapitre  que  vous 
m'avez  envoyé,  dispensez-moi  derechef  de  vous  dire 
autre  chose  sinon  que  je  souscris  à  tout6  ce  que  vous 


1.  «   Vous  venez  me   détromper,  »  dans  les  OEuvres  diverses  et 
dans  les  éditions  suivantes. 

2.  Ce  mot  manque  dans  les  OEuvres  diverses  et  dans  les  éditions 
suivantes. 

3.  Ici  la  phrase  est  encore  coupée  dans  les  éditions  :  «  Je  m'y  pro- 
mets  » 

4.  Le  mot  a  manque  dans  l'original. 

5.  Sallengre  et  les  éditeurs  suivants,  trouvant  sans  doute  cette  pé- 


LETTRES.  447 

en  aura  dit  M.  de  Balzac.  Gomme  il  a  des  connois- 
sances  très-achevées,  et  une  franchise  incorruptible,  je 
sais  qu'il  vous  en  aura  dit  la  vérité ,  et  tout  ensemble 
d'excellentes  choses.  Il  n'appartient  qu'à  lui  de  trouver 
des  termes  dignes  des  vertus  et  des  perfections 4  qui  sont 
hors  du  commun.  Vous  vous  pouvez  reposer  sur  son  té- 
moignage, qui  a  autrefois  été2  le  plus  ferme  appui  du 
Cidau.  milieu  de  la3  persécution,  et  dont,  avec  une  gé- 
nérosité qui  lui  est  toute  particulière,  il  a  fait  une  il- 
lustre apologie,  en  faisant  des  compliments  à  son  per- 


sécuteur \ 


Je  n'ajouterai  donc  rien  à  ce  que  je  sais  qu'il  vous  en 
a  dit,  et  me  défendrai  seulement,  pour  achever  cette 
lettre ,  des  civilités  par  où  vous  commencez  la  vôtre.  Je 
veux  bien  croire  que  Cinna  et  Polyeucte  ont  été  assez 
heureux  pour  vous  divertir  ;  mais  je  ne  m'abuserai  jamais 
jusques  à  m'imaginer  qu'ils  ayent  pu  servir  de  quelque 
modèle  ou  à  la  force  de  vos  vers ,  ou  à  la  piété  de  vos 
sentiments.  J'en  appelle  derechef  à  M.  de  Balzac,  et6  je 
ne  doute  aucunement  qu'il  ne  soutienne  avec  moi  que  le 
plan  de  ce  merveilleux  ouvrage  est  dressé  par  un  génie 
tout  à  vous,  et  qui,  n'empruntant  rien  de  personne,  se 
doit6  nommer  à  très-juste  titre  ccùtoSioocxto;  7 .  J'espérerai 


riode  un  peu  lourde,  l'ont  ainsi  dégagée  :  «  Cependant,  pour  ce  premier 

chapitre  que  vous  m'avez  envoyé,  je  ne  puis  que  souscrire  à  tout » 

i .  Corneille  avait  d'abord  écrit  par  erreur  :  expressions.  Il  a  effacé 
ce  mot. 

2.  Qui  a  été  autrefois,  dans  toutes  les  éditions. 

3.  Sa,  mais  à  tort,  dans  toutes  les  éditions. 
4<   Voyez  tome  III,  p.  44  et  suivantes. 

5.  Ici  encore  les  éditeurs  on  supprimé  le  mot  et  pour  couper  la 
phrase. 

6.  Corneille  avait  d'abord  écrit  peut,  qu'il  a  remplacé  par  doit. 
7     a  Instruit  par  lui-même.  » 


448  LETTRES. 

que  vous  m'honorerez  non-seulement  de1  ce  que  vous 
ajouterez  à  ce  grand  coup  d'essai,  mais  aussi  de  cette 
paraphrase  de  Jérémie,  dont  vous  voulez  vous  défier2 
injustement,  puisque  M.  de  Balzac  est  pour  elle3.  Je 
vous  la  demande  avec  passion*,  et  demeure  de  tout 
mon   cœur, 

Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-obligé6  serviteur, 

Corneille. 
A  Rouen,  ce  18  de  mai  1646. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  d'Argenson,  con- 
seiller du  Roi  en  son  parlement  de  Normandie  et  inten- 
dant de  sa  justice  en  Xaintonge.  A  Xaintes. 


12.    —    DE    CORNEILLE    A    MONSIEUR    DE    ZUYLICHEM    . 

Monsieur  , 

Je  ne  sais  ce  que  vous  direz  de  moi  d'avoir  attendu  si 
longtemps  à  vous  remercier  de  votre  souvenir  et  du  pré- 
sent que  vous  m'avez  fait  de  ces  précieux  Moments  dont 

1.   Le  mot  de  manque. 

a.  Corneille  avait  d'abord  écrit  :  dont  vous  vous  défiez.  Sallengre  et 
les  éditeurs  qui  lui  ont  succédé  ont  suivi  cette  leçon. 

3.  Première  rédaction  :  «  pour  vous.   » 

4.  Première  rédaction  :  ce  avec  affection.  » 

5.  Très-obéissant,  dans  toutes  les  éditions. 

6.  Voyez  la  Notice  des  lettres,  p.  4?o  et  4?-i.  Cette  lettre  est  scel- 
lée du  même  cachet  que  la  précédente.  En  tête  de  la  lettre  On  lit  : 
«  R.  3o  mars  1649.  »  Cette  date,  probablement  écrite  par  M.  de  Zuy- 
lichem,  est  celle  de  la  réponse  qu'il  fit  à  la  lettre  de  Corneille. — 
Sur  Constantin  Huygbens,  seigneur  de  Zuylichem,  voyez  tome  IV, 
p.  1 33,  note  1. 


LETTRES.  449 

vous  avez  enrichi  le  public  * .  Ce  n'est  pas  que  je  ne  sois 
très-sensible  aux  obligations  de  cette  nature ,  et  à  la 
gloire  qui  me  vient  d'une  main  si  savante  à  la  distribuer: 
votre  présent  m'a  été  très-cher  et  par2  sa  propre  valeur, 
et  parce  qu'il  vient  de  vous,  et  par  l'estime  que  vous  y 
témoignez  pour  mon  bon  ami  Lucain3;  mais  j'avois  honte 
de  vous  en  rendre  grâces  sans  m'en  revancher  en  quel- 
que sorte ,  et  j'espérois  que  cet  hiver  me  mettroit  en  état 
d'accompagner  mes  remercîments  de  quelque  pièce  de 
théâtre  qui  du  moins  eût  été  considérable  pour  sa  nou- 
veauté. Les  désordres  de  notre  France  ne  me  l'ont  pas 
permis,  et  ont  resserré  dans  mon  cabinet  ce  que  je  me 
préparois  à  lui  donner4;  si  bien  que  pour  ne  paroître  pas 
devant  vous5  tout  à  fait  les  mains  vides,  je  me  trouve  ré- 
duit à  vous  envoyer  deux  recueils  de  mes  ouvrages  qui 
n'ont  rien  de  nouveau  que  l'impression6.  Je  crois  toute- 
fois que  le  premier  n'a  pas  eu  assez  de  réputation  pour 
aller  jusqu'à  vous7.  Ce  sont  les  péchés  de  ma  jeunesse  et 
les  coups  d'essai  d'une  muse  de  province  qui  se  laissoit 

i.  Il  s'agit  ici  du  recueil  de  vers  latins  intitulé  :  Momenta  desultoria, 
publié  pour  la  première  fois  par  Zuylichem  en  1644?  et  dont  nous 
avons  déjà  parlé  précédemment  tome  IV,  p.  i35,  note  I, 

2.  Corneille  avait  d'abord  écrit  ici  V estime,  puis  il  a  effacé  ce  mot 
pour  ajouter,  avant  de  le  mettre,  deux  membres  de  phrase. 

3.  Une  pièce  des  Momenta  desultoria  (voyez  ci-dessus,  note  1  , 
composée  en  i633,  est  intitulée  :  Ad  R.  Honerdum  in  suprema  curia 
scnatorem,  de  Virgilio  et  Lucano  inter  pocula  collatis,  animi  autem  gra- 
tta hoc  illi  a  me  et  aliis  prsclato. 

4-  Voyez  la  Notice  &  Andromède,  tome  V,  p.  248-25 1. 

5.  Corneille,  après  avoir  d'abord  écrit  :  «  pour  ne  paroitre  pas 
ingrat ,  1»  a  effacé  ingrat,  et  a  ajouté  ff  devant  vous  »  dans  l'inter- 
ligne. 

6 .  Corneille  veut  parler  du  recueil  en  deux  parties  intitulé  :  OEuvres 
de  Corneille,  publié  en  1648,  et  qui  comprend  toutes  les  pièces  de 
notre  poète  jusqu'à  la  Suite  du  Menteur  inclusivement. 

7.  Ce  volume  comprend  les  premières  pièces  depuis  Mélite  jus- 
qu'à F  Illusion  comique,  inclusivement. 

Corneille,  x  >9 


45o  LETTRES. 

conduire  aux  lumières  purement  naturelles,  et  n'avoit 
pas  encore  fait  réflexion  qu'il  y  avoit  un  art  de  la  tragé- 
die, et  qu'Aristote  en  avoit  laissé  des  préceptes1.  Vous 
n'y  trouverez  rien  de  supportable  qu'une  Méfiée ,  qui 
véritablement  a  pris  quelque  chose  d'assez  bon  à  celle 
de  Sénèque,  et  ne  l'a  pas2  tellement  défigurée  qu'il  ne  lui 
reste  une  partie  de  ses  grâces  : 

Hanc,  si  fas  veterum  videre  nœvos', 
Graiis  Euripides  dédit  trementem, 
Nec  digna  prece  supplicem  Creonti  : 
Anmeus  Latio ,  malam  et  tremendam 
Jasoni  nimis ,  et  nimis  Creusa?  : 
Nos  Gallis  tumidam ,  atque  sic  furentem  ; 

i.   Voyez  V Examen  de  Mélîte,  tome  I,  p.  i37  et  j38. 

2 .  Il  y  a  pris,  au  lieu  de  pas,  dans  l'édition  de  la  Revue  indépendante. 

3.  Versus,  au  lieu  de  nsevos^  dans  la  Revue  indépendante.  —  «  Cette 
femme,  s'il  est  permis  de  voir  les  taches  des  anciens,  Euripide 
l'a  présentée  aux  Grecs,  tremblante  et  adressant  à  Créon  d'in- 
dignes prières  ;  Sénèque  aux  Latins ,  cruelle  et  terrible  à  l'excès 
pour  Jason,  pour  Creuse.  Nous,  nous  l'avons  offerte  aux  Français, 
gonflée  d'orgueil,  emportée  par  la  fureur;  tandis  qu'elle  se  répand 
en  invectives,  reprochant  ses  nombreux  attentats  ou  plutôt  les  nom- 
breux bienfaits  de  son  criminel  amour,  il  ne  faut  ni  farouche  empor- 
tement dans  ses  menaces  ni  crainte  non  plus  de  la  vengeance  qu'on 
lui  prépare.  Ma  Médée  ne  doit  rien  au  poète  grec,  mais  infiniment 
au  latin  :  ces  poisons,  ces  lamentations,  ces  cruels  élans  de  l'épouse 
abandonnée,  balancés  par  l'amour  maternel,  tant  de  sentiments  qu'elle 
revêt  et  dépouille  tour  à  tour,  qui  font  la  douleur  de  la  mère  et 
l'audace  de  l'épouse ,  tous  ces  mouvements  dignes  du  cothurne  tra- 
gique, que  tous  admirent  sur  la  scène,  jeunes  et  vieux.  C'est  là,  là 
seulement  ce  que  je  lui  ai  pris;  voilà  ce  que,  d'une  veine  facile  et 
abondante,  dans  de  doux  vers,  qui  toutefois  n'ont  rien  de  bas,  mon 
style  industrieux,  souvent,  hélas  !  trop  peu  sûr  interprète,  a  détourné 
à  notre  usage.  J'y  ai  ajouté  bien  des  choses  de  mon  fonds,  mais  qui 
soutiendraient  mal  la  comparaison  avec  mes  habiles  larcins,  mes 
emprunts  retravaillés.  Cette  Médée,  vieille  ainsi  tout  à  la  fois  et  nou- 
velle, une  nombreuse  assemblée  l'a  reçue  avec  un  murmure  favorable; 
lisez-la,  et  peut-être  la  goûterez-vous.  » 


LETTRES.  451 

Et  per  crimina  tanta  dum  recurrit, 
Multiplex  scelus ,  aut  magis  scelesti 
Multiplex  meritum  exprobrans  amoris, 
Ferox  spiritus  absit  a  minaci, 
Parata3  metus  absit  ultionis. 
Haec  Graio  nihil,  at  nimis  nimiscjue 
Débet  Ausonio ,  venena ,  planctus, 
Diros  conjugis  impetus  relictae, 
Materna  in  pietate  fluctuantes , 
Quotquot  induit,  exuitve  motus, 
Qua  mater  doluit  vel  ausit  uxor, 
Et  quicquid  tragicum  sonans  cothurnum 
In  scena  juvenis  stupet  senexque. 
Id  solum1  facili  ac  fluente  vena  , 
Leni  carminé ,  nec  tamen  jacenti , 
Interpres  malefidus  inde  nostros 
Detorsit  stylus  artifex  ad  usus  : 
Addidit  sua  multa,  sed  recoctis 
Nunquam  non  maie  comparanda  furtis. 
Hanc  sic  et  veterem  simul  novamque 
Frequens  murmure  non  malo  probavit 
Cœtus ,  banc  lege,  forsan  et  probabis. 

Vous  voyez,  Monsieur,  quelle  peine  je  prends  à  me 
décréditer  auprès  de  vous  ,  puisque  ,  au  mauvais  françois 
que  je  vous  envoie,  j'ose  joindre  cette  écbappée  en  une 
langue  qu'il  y  a  trente  ans  que  j'ai  oubliée2.  Aussi  ai-je 
grand  intérêt  que  vous  me  connoissiez  tout  entier,  et  que 
vous  rabattiez  un  peu  de  cette  trop8  bonne  opinion  pour 

i.   Totum,  dans  la  Revue  indépendante. 

•2.  Corneille  continuait,  quoiqu'il  en  dise,  à  écrire  de  temps  à  autre 
en  latin.  Voyez  dans  les  Poésies  diverses  les  pièces  XX,  LXXII  et 
LXXX  ;  dans  les  OEuvres  diverses  en  prose  la  pièce  I;  et  ci-dessus 
la  seconde  lettre  de  Balzac,  p.  44 2  et  443. 

3.  Ce  mot  a  été  passé  dans  l'édition  de  M.  Fournier. 


452  LETTRES. 

moi,  dont  vos  deux  épigrammes  4  vous  accusent,  afin 
que  je  la  puisse  remplir  quand  vous  l'aurez  mise  à  son 
juste  point;  mais  en  vous  demandant  cette  diminution 
d'estime,  je  ne  consens  pas  que  vous  me  fassiez  rien 
perdre  de  la  part  qu'il  vous  a  plu  me  donner  en  vos 
bonnes  grâces  :  ma  plus  haute  ambition  est  de  m'y  con- 
server, et  je  mimputerois  à  un  bonheur  extraordinaire 
une  occasion  qui  me  donnât  lieu  de  vous  faire  connoître 
par  les  effets  que  je  suis  véritablement, 
Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-obligé  serviteur, 

Corneille. 
A  Rouen,  ce  6  de  mars  1649. 

Suscription  :  Monsieur,  Monsieur  de  Zuylichem,  con- 
seiller et  secrétaire  des  commandements  de  Monseigneur 
le  prince  d'Aurange  à  la  Haye. 


l3.    DE    CORNEILLE    A    MONSIEUR    DUBDISSON2. 

Monsieur  , 

Vous  recevrez  le  livre  de  M.  Dubés,  mon  parent  et 
allié,  qu'il  vous  envoie  avec  les  protestations  d'employer 
ses  soins  pour  Mme  de  Hanelay,  ainsi  qu'il  m'a  écrit. 
Pour  moi,  je  n'ai  rien  à  vous  envoyer  que  la  continua- 
tion de  mes  affections  à  votre  service,   qui   ne   sont  pas 


i.   Les  deux  pièces  de  vers  de  M.  de  Zuylichein  en  l'honneur  du 
Menteur,  Voyez  tome  IV,  p.   i35  et  ï36\ 

2,  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  421. 

3.  Voyez  sur  ce  livre  la  Notice,    à  l'endroit  cité. 


LETTRES.  /»53 


si  bien  écrites  ici  que  dans  mon  cœur,  car  je  suis  plus 
de  cœur  que  de  bouche, 

Monsieur, 

Votre  très-humble  serviteur, 

Corneille. 
De  Nemours,  ce  25  août  1649. 

Suscription   :  Pour  M.  Dubuisson  *. 


ï4-    DE    CORNEILLE     A    MONSIEUR    DE    ZUYLICHEM8. 

Monsieur  , 

Voulez-vous  bien  recevoir  la  même  excuse  deux  fois, 
et  que  je  vous  die  encore  que  je  vous  aurois  plus  tôt  fait 
réponse  si  j'avois  pu  me  résoudre  à  me  présenter  devant 
vous  les  mains  vides.  Vous  seriez  quitte  de  mes  impor- 
tunités  à  trop  bon  marché  si  je  ne  vous  persécutais  que 
par  les  civilités  d'une  lettre  et  par  les  remercîments  que 
je  vous  dois  de  la  part  que  vous  me  donnez  en  votre 
estime  et  en  votre  bienveillance.  Quoique  tous  vos  mo- 
ments soient  précieux,  permettez  que  j'en  dérobe  quel- 
ques-uns à  vos  grands  emplois  pour  vous  délasser  en  la 
lecture  d'une  comédie  que  je  vous  envoie3.  C'est  une 

1 .  Cette  suscription  ,  ou  plutôt  cette  inscription ,  et  le  billet  se 
trouvent,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  sur  le  feuillet  de  garde  du  livre 
de  Dubé. 

2.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  42°  et  42I«  Cette  lettre  est 
scellée  du  même  cachet  que  les  lettres  11  et  12.  M.  de  Zuylichem  a 
écrit  en  tète  :  «  R.  3  juin  i65o.  »  — Voyez  ci-dessus,  p.  448,  note  6. 

3.  Cette  pièce  est  Don  Sanche,  dédiée  par  Corneille  à  M.  de  Zuy- 
lichem. On  retrouvera  dans  la  dédicace  (tome  V,  p.  204  et  sui- 
vantes) le  développement  d'une  partie  des  idées  exprimées  ici. 


454  LETTRES. 

nouveauté  qui  pourra  sembl or  monstrueuse,  et  donnera 
lieu  de  soutenir  que  faire  une  comédie  entre  des  per- 
sonnes illustres  n'est  autre  chose  que 

Humano  capiti  cervic cm  jungere  equinam1. 

Je  suis  pourtant  assez  hardi  pour  la  vouloir  justifier 
auprès  de  vous,  ou  du  moins  pour  en  faire  les  mines; 
car,  à  ne  rien  déguiser,  je  sais  bien  que  je  parle  le  lan- 
gage d'Aristote  dans  le  mauvais  discours  que  je  vous  en 
fais,  mais  je  ne  sais  pas  si  je  l'entends  bien,  ni  si  les  con- 
séquences que  j'en  tire  sont  justes.  Dans  cette  incerti- 
tude 2  j'ai  voulu  seulement  éblouir  les  peuples  par  l'au- 
torité de  votre  nom,  et  comme  ils  savent  qu'on  ne  vous 
peut  surprendre ,  j'ai  cru  qu'ils  se  persuaderont  aisé- 
ment que  toutes  mes  raisons  sont  de  mise,  quand  ils 
verront  que  j'ose  vous  en  faire  le  juge.  Vous  m'appren- 
drez quand  il  vous  plaira  si  j'ai  bien  rencontré,  et  je 
serai  aussi  prêt  à  exécuter  ce  que  vous  en  ordonnerez 
que  vous  me  voyez  l'être  touchant  les  arguments  que 
vous  demandez  à  nos  poëmes.  Nous  nous  en  sommes  dis- 
pensés depuis  quelque  temps,  et  avons  cru  que  nous 
ne  devions  pas  davantage  aux  lecteurs  qu'aux  spectateurs 
que  nous  convions  à  leur  représentation  sans  leur  en 
donner  aucune  lumière.  Ce  n'est  pas  qu'il  n'y  aye  des 
pièces  d'une  espèce  si  intriquée3  qu'il  échappe  beaucoup 

i.  «  Joindre  à  une  tête  d'homme  un  cou  de  cheval.  »  Allusion  au 
début  de  Y  Ai  t  poétique  d'Horace  : 

Humano  capiti  cervicem  pictor  equinam 
Jungere  si  velit.... 

2.  Ces  trois  mots  sont  ajoutés  dans  l'interligne. 

3.  Il  y  a  intriguée  dans  l'édition  de  M.  Edouard  Fournier  5  mais 
l'autographe  porte  bien  intriquée,  et  cette  forme  ne  doit  pas  sur- 
prendre, car  nous  avons  trouvé  souvent  intrique  dans  les  préfaces  et 
examens  de  Corneille.  Voyez  le  Lexique. 


LETTRES.  455 

de  choses  à  la  première  représentation  et  à  la  première 
lecture  faute  d'un  tel  secours,  mais  nous  avons  estimé 
cela  avantageux  pour  ceux  qui  les  voient  et  pour  ceux 
qui  les  lisent,  puisqu'il  est  cause  que  l'ouvrage  a  pour 
eux  la  grâce  de  la  nouveauté ,  plus  d'une  fois  leur  lais- 
sant à  la  première  le  plaisir  entier  de  la  surprise  que  font 
les  événements,  et  réservant  pour  l'autre  celui  que  leur 
donne  l'intelligence  de  ce  qu'ils  n'ont  pas  bien  compris 
à  l'abord.  Vous  me  direz  qu'il  ne  les  faudra  donc  voir 
ou  lire  tout  au  plus  que  ces  deux  fois,  et  j'en  suis  d'ac- 
cord avec  vous  pour  les  poëmes  dont  toute  la  grâce 
consiste  en  cette  nouveauté  et  en  cette  surprise;  mais 
pour  ceux  qui  ont  quelque  chose  de  plus  solide,  il  est  à 
présumer  qu'ils  donneront  la  même  satisfaction  à  toutes 
les  lectures  qu'on  en  voudra  faire ,  qu'ils  auroient  don- 
née à  la  première  ,  où  Ton  auroit  été  préparé  par  un  ar- 
gument. J'avoue  que  nous  en  voyons  presque  au-devant 
de  tous  ceux  que  nous  ont  laissé1  nos  anciens,  mais  je 
m'imagine  que  nous  en  avons  l'obligation  à  leurs  inter- 
prètes ou  à  leurs  scoliastes  plutôt  qu'à  eux-mêmes. 
Parmi  les  Grecs  il  y  en  a  quelques-uns  dont  Aristophane 
le  grammairien  est  nommé  l'auteur,  quelques-uns  tirés 
de  la  bibliothèque  d'Apollodorus2.  La  plupart  même  des 
comédies  d'Aristophane  n'en  ont  que  de  latins.  Ceux  de 
Plaute  paroissent  être  de  son  style,  mais  j'ai  toutefois 
bien  de  la  peine  à  croire  qu'ils  soient  de  lui ,  et  ses  pro- 
logues semblent  m'autoriser  à  ce  doute.  Il  ne  les  intro- 


i.  Il  y  a  laissé,  sans  accord,  dans  l'original. 

2.  Le  grammairien  grec  Aristophane,  disciple  d'Aristarque,  floris- 
sait  à  Alexandrie  au  commencement  du  second  siècle  avant  Jésus- 
Christ.  —  Apollodore  vivait  au  milieu  du  même  siècle.  Sa  Biblio- 
thèque, contenant  l'histoire  des  dieux  et  des  héros,  pourrait  bien 
n'être  qu'un  abrégé  d'un  ouvrage  plus  considérable  composé  par 
lui. 


/,56  LETTRES. 

duit  que  pour  conter  le  sujet  de  sa  comédie  et  le  leur 
fait  dire  souvent  en  termes  exprès  : 

Nunc  argumentant  eloquar  hujus  comœdix  l . 

Pourquoi  donc  auroit-il  encore  fait  des  arguments 
dont  il  n'avoit  pas  besoin  et  qui  souvent  sont  si  obscurs, 
que  des  esprits  médiocres  ont  besoin  de  lire  toute  la 
comédie  pour  les  entendre,  au  lieu  qu'ils  devroient  faire 
entendre  la  comédie  ?  Au  regard  de  Térence,  je  n'en  vois 
que  dans  ses  commentaires,  où  le  nom  de  leurs  auteurs 
ne  manque  jamais,  et  dans  les  impressions  de  Plantin2, 
je  n'y  en  trouve  aucun.  Les  tragédies  de  Sénèque  ne  me 
convainquent  pas  davantage  :  on  en  voit  presque  autant 
de  différents  arguments  que  de  différentes  éditions  ,  et 
s'il  y  en  a  quelques-uns  de  sa  façon  dans  une  diversité  si 
grande,  je  n1ai  encore  su  le  deviner.  Voilà,  Monsieur, 
sur  quoi  nous  nous  étions  enhardis  à  les  retrancher  et  à 
prendre  cette  maxime,  qu'une  pièce  de  théâtre  est  fort  mal 
faite  quand  elle  ne  porte  point  toutes  ses  lumières  elle- 
même,  et  qu'elle  a  besoin  d'un  faux  jour  qui  vienne 
d'ailleurs.  Depuis  quelque  temps,  j'ai  jeté  au-devant  des 
miennes  le  texte  des  auteurs  dont  j'en  ai  tiré  les  sujets, 
mais  ce  n'a  été  que  pour  faire  démêler  l'histoire  d'avec 
la  fable;  et  si  j'avertis  quelquefois  de  quelques  circon- 
stances de  mon  invention,  ce  n'est  que  pour  conduire 
mes  lecteurs  jusqu'au  premier  vers  sans  leur  donner  la 
connoissance  des  épisodes.    C'est   ainsi   que  d'ordinaire 

i.  «Je  vais  maintenant  dire  le  sujet  de  cette  comédie.  »  —  Ce 
vers  ne  se  trouve  textuellement  dans  aucun  prologue  de  Plaute ,  mais 
il  ressemble  fort  au  5ie  du  prologue  de  V Amphitryon  : 

Post  argumenlum  hujus  eloquar  tragœdiee. 

a.  Célèbre  imprimeur  du  seizième  siècle,  né  à  Tours,  établi  à  An- 
vers. Son  Térence,  revu  par  Antoine  Dolet,  et  réimprimé  plusieurs 
fois,  est  de  l'an  i565. 


LETTRES.  457 

en  use  Plante,  et  y  ajoute  quelquefois  l'événement  par 
où  sa  fable  se  termine.  J'en  ai  fait  de  même  en  cette  co- 
médie, et  pour  vous  satisfaire  davantage,  j'ai  rappelé  le 
nom  tf argument  que  nous  avions  banni1.  Je  n'ai  pas 
cité  mon  auteur  ;  et  si  vous  me  pressez  là-dessus ,  je 
vous  dirai  ingénument  que  je  l'ai  pris  d'un  vieil  ma- 
nuscrit espagnol  que  personne  n'a  jamais  vu,  et  dont  je 
ne  saurois  rien  moy-même  si  le  dieu  de  la  poésie  ne  me 
l'avoit  révélé  ;  mais  insensiblement,  en  vous  rendant 
compte  de  notre  usage  touchant  les  arguments  de  nos 
poëmes,  j'oublie  à  vous  demander  pardon  d'avoir  abusé 
de  l'honneur  de  votre  amitié,  dont  j'ai  fait  parade  en 
public.  C'est  un  sentiment  de  vanité  que  vous  trouverez, 
juste  quand  vous  considérerez  que  je  n'en  pouvois  faire 
un  secret  sans  me  priver  du  plus  grand  avantage  que  les 
Muses  m'ayent  fait  recevoir,  puisqu'elles  ne  m'ont  en- 
core rien  procuré  de  plus  glorieux  que  le  droit  de  me 
pouvoir  dire  avec  votre  aveu , 
Monsieur, 

Votre  très-humble  et  obéissant  serviteur, 

Corneille. 
A  Rouen,  ce  28  de  mai  i65o. 

Suscription  :  A  Monsieur.  Monsieur  de  Zuylichem , 
conseiller  et  secrétaire  de  Monseigneur  le  prince  d'Orange 
à  la  Haye. 

1.  Corneille  a  mis  en  effet  un  exposé  du  sujet,  avec  le  titre  à? Ar- 
gument, en  tête  de  Don  S  anche  et  en  tête  d' Andromède,  qui,  quoique  an- 
térieure à  Don  Sanche,  ne  fut,  paraît-il,  imprimée  qu'après  ;  mais  il  n'a 
pas  étendu  au  delà  la  concession  faite  à  M.  de  Zuylichem  :  Nicomède, 
qui  vient  après  Don  Sanche,  n'a  pas  d'argument,  non  plus  que  les  tra- 
gédies suivantes.  Parmi  les  pièces  précédentes,  les  trois  premières 
{Milite,  Clitandre  ,  la  Veuve)  sont  les  seules  qui  aient  des  sommaires 
intitulés  :  Arguments. 


/|58  LETTRES. 

l5.  DE  CORNEILLE  AU  REVEREND  PKRE  BOULA.RT1. 

A  Rouen,  la  veille  de  Pâques  i65s* 8. 
Mon  révérend  Père, 

Je  reçus  votre  paquet  mercredi  dernier,  et  avois  résolu 
de  différer  à  vous  en  remercier  après  les  fêtes,  d'autant 
que  les  dévotions  ordinaires  de  la  semaine  sainte,  et  les 
embarras  où  je  suis  maintenant  comme  marguillier  de 

i.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  421  et  422.  M.  Célestin Port,  qui 
a  le  premier  publié  ces  lettres  de  Corneille,  a  extrait  du  Gallia  chris- 
ùaita,  tome  VIT,  et  de  la  Vie  du  révérend  père  Charles  Faure,  abbé  de 
Sainte-Geneviève  de  Paris,  oit  l'on  voit  l'histoire  des  chanoines  réguliers 
de  la  congrégation  de  France,  dont  il  a  été  le  premier  supérieur  général 
(Paris,  J.  Anisson,  K>98,  in-4°j,  quelques  renseignements  sur  le  cor- 
respondant de  notre  poète.  Il  prit  l'habit  en  1620,  à  Saint-Vincent 
de  Senlis,  et  prononça  ses  vœux  l'année  suivante.  Il  fut  au  nombre 
des  religieux  qui  vinrent  établir  la  réforme  à  Sainte-Geneviève,  et, 
dès  l'année  164°*  il  fut  élu  général  de  l'ordre,  partagea  ces  fonctions 
avec  le  R.  P.  Faure,  et  les  lui  abandonna  de  nouveau  tout  entières 
le  3o  avril  i643;  deux  ans  après  il  fut  nommé,  parle  P.  François 
Blanchart,  abbé  coadjuteur.  I!  occupait  cette  dignité  au  moment 
où  Corneille  lui  écrivait  les  lettres  qu'on  va  lire.  La  Vie  du 
R.  P.  Charles  Faure  nous  le  présente  comme  un  «  homme  d'une 
admirable  candeur  et  d'une  très- parfaite  sincérité.  »  Tout  porte  à 
croire  qu'il  conserva  toujours  ses  bonnes  relations  avec  notre  poète, 
et  nous  avons  pu  conjecturer  avec  beaucoup  de  vraisemblance  que  ce 
fut  ce  savant  religieux  qui  l'engagea  de  1660  à  i665  à  entreprendre 
la  traduction  des  Hymnes  de  sainte  Geneviève.  Voyez  tome  IX,  p.  616. 
Après  avoir  examiné  avec  soin  les  lettres  autographes  de  Corneille 
au  P.  Boulart  et  les  différents  documents  où  il  est  question  de  ce 
religieux  ,  nous  nous  sommes  convaincu  que  son  nom  doit  bien  être 
écrit  ainsi,  et  non  Bouiard,  comme  Corneille  l'a  écrit  une  seule  fois 
dans  la  suscription  de  la  lettre  18,  et  comme  nous  l'avons  imprimé 
deux  fois  (tome  VIII,  p.  10  et  11),  d'après  M.  Célestin  Port.  On 
ne  pouvait  du  reste  hésiter  qu'entre  ces  deux  formes  ;  quant  à 
Boulaud,  c'est  une  coquille  de  l'édition  Lcfèvre  (tomeX,  p.  5i2),  qui 
de  là  s'est  répanuue  dans  quelques  autres. 

2.  Le  3o  mars.  En  i652,  Pâques  tombait  au  3i  de  ce  mois. 


LETTRES.  459 

ma  paroisse,  qui  dois  rendre  compte  de  mon*  adminis- 
tration dans  deux  ou  trois  jours2,  ne  me  donnent  point 
le  loisir  de  lire  aucune  chose  de  ce  que  vous  m'envoyez. 
Mais  ayant  rejeté  les  yeux  sur  votre  lettre,  j'ai  vu  qu'elle 
étoit  datée  du  7  du  courant,  et  que  ce  seroit  reculer  trop 
loin  à  vous  faire  savoir  que  je  l'ai  reçue.  Vous  avez 
eu  peur  de  me  faire  coûter  du  port  par  le  messager,  et 
votre  paquet  a  été  dix-huit  jours  à  venir  de  Paris  à  Rouen 
pour  me  faire  cette  épargne.  Je  vous  supplie  de  n'avoir 
plus  cette  circonspection,  et  de  croire  ques  la  voie  du 
messager  n'est  pas  si  onéreuse  qu'on  n'en  soit  bien  ré- 
compensé par  la  promptitude.  Je  vous  fais  cette  prière 
d'autant  que  je  prévois  bien  que  ce  paquet  ne  sera  pas 
la  dernière  faveur  que  je  recevrai  de  vous.  Je  vous  de- 
mande donc  encore  une  huitaine  pour  le  lire,  et  vous  en 
mander  ma  pensée  ,  en  vous  envoyant  l'opuscule  du 
P.  Heserus4,  qui  vous  est  venu  d'Allemagne.  En  atten- 
dant, je  vous  dirai  que  je  travaille  à  la  continuation  de 
ma  version,  et  que  sitôt  que  nous  pourrons  avoir  quel- 
que calme,  j'en  donnerai  une  seconde  partie  au  public, 
avec  la  première  fort  corrigée  en  beaucoup  d'endroits. 
C'est  ce  qui  me  fait  vous  prier  de  deux  choses  :  l'une 6 , 
de  me  donner  avis  de  ce  que  vous  et  vos  amis  jugerez 
à  propos  de  corriger  dans  cette  première ,  soit  pour 
la  bassesse  de  l'expression ,  soit  pour  la  fidélité  que  je 
dois  au  texte  de  l'auteur,  car  je  suis  de  ceux  qui  ne  se 

i.  Corneille  avait  mis  d'abord  «quidoit  rendre  compte  de  son, etc.  » 

2.  En  effet,  le  compte  de  Corneille  en  qualité  de  «  trésorier  en 
charge  de  la  paroisse  de  Saint-Sauveur,  »  dont  nous  parlons  dans 
la  Notice  biographique  en  tête  du  tome  I,  est  «  pour  l'année  com- 
mençant à  Pâques  i65i,  et  finissant  à  pareil  jour  i65a.  » 

3.  Ici  Corneille  avait  écrit  le  mot  si,  puis  il  l'a  effacé. 

4-  Il  est  question  plus  au  long  dans  la  lettre  suivante  de  cet  opus- 
cule intitulé  :   Lexicon  Germanico-Thomœum . 

5.   Il  y  avait  ici  :  «  que  si  vous  trouvez.  »  Ces  mots  sont  effaces. 


/,6o  LETTRES. 

tiennent  pas  impeccables,  et  qu'un  avis  particulier  oblige 
autant  qu'une  censure  publique  offense;  l'autre  est  rie 
vouloir  contribuer  quelque  chose  à  un1  embellissement 
que  je  prépare  à  ce  travail  :  c'est  que  je  me  suis  résolu 
de  mettre  îles  tailles-douces  au  devant  de  cbaque  cha- 
pitre, et  en  ai  déjà  fait  graver  onze  que  je  vous  envoie, 
afin  que  vous  puissiez  connoître  mieux  l'ordre  du  dessein, 
qui  est  de  choisir  un  exemple  dans  la  Vie  des  Saints  ou 
dans  la  Bible,  et  l'appliquer  sur  une  sentence  tirée  du 
chapitre  où  doit  être  mise  l'image2.  On  m'en  grave  encore 
deux  ou  trois  ;  mais  comme  je  ne  suis  pas  fort  savant  en 
ces  histoires,  je  mendie  des  sujets  chez  tous  les  religieux 
de  ma  connoissance.  Entre  autres,  j'ai  besoin  que  vous 
m'en  donniez  de  vos  saints,  parce  que,  dans  celles  que 
je  vous  envoie,  vous  en  trouverez  trois  de  l'habit  de 
Saint-Benoît8,  et  on  pourroit  prendre  cela  pour  une  dé- 
claration tacite  d'être  du 4  parti  des  bénédictins  dans  votre 
querelle.  Vous  m'obligerez  donc  fort  de  m'en  donner 
quelques-uns  de  votre  habit,  et,  s'il  se  peut,  même  de 
Thomas  a  Kempis5,  pour  appliquer  aux  chapitres  qui  me 
manquent  encore  de  cette  première  partie,  ou  aux  cinq 
derniers  du  premier  livre  et  aux  douze  du  second,  qui 

i.  Corneille  avait  commencé  à  écrire  P embellissement  :  «  l'e;  »  puis 
il  a  corrigé. 

2.  Corneille  avait  écrit  :  «  la  taille;  »  puis  il  y  a  substitué  : 
«  l'image.  »  —  Voyez  pour  ces  sentences  le  rve  avis  au  Lecteur  de 
l' Imitation  (tome  VIII,  p.  21-23)  et  la  première  note  de  chacun  des 
chapitres  de  cet  ouvrage. 

3.  Voyez  au  tome  VIII  (notes  i  des  pages  6/h  114,  3ioj  trois 
emblèmes  tirés  de  la  vie  de  saint  Benoit;  dans  le  premier  des  trois 
figurent  avec  lui  ses  disciples  saint  Maur  et  saint  Placide. 

4-  Première  rédaction  :  «  de  prendre  le.  » 

5.  L'emblème  du  chapitre  xxn  du  livre  I  de  Y  Imitation,  donné  sans 
doute  par  le  P.  Boulart,  représente  Thomas  a  Kempis  convertissant 
plusieurs  séculiers  par  la  lecture  d'une  sentence.  Voyez  tome  VTTI , 
p.  1  3o,  note  r . 


LETTRES.  461 

composeront  la  seconde  partie.  Je  n'ai  point  encore 
d'exemples,  au  reste,  pour  le  sixième  chapitre,  De  inordi- 
nat'is  affection/bus^  ni  pour  les  X,  XI,  XII,  XIV  et  XIX. 
Le  reste  des  vingt  premiers  est  rempli  ;  mais  il  faut,  s1]"! 
vous  plaît,  que  ce  ne  soit  pas  une  simple  image  de  saint, 
mais  une  action  qui  parle,  et  qui  soit  belle  à  peindre.  Le1 
soin  que  j'avois  de  conserver  ma  neutralité  entre  les  deux 
partis  m'avoit  fait  adresser  déjà  à  vos  pères  de  Saint-Lô2 
pour  cela;  mais  je  n'en  ai  pas  eu  de  satisfaction.  Si  vous 
daigniez  prendre  la  peine  d'y  songer  (et  il  me  semble  que 
vous  y  avez  quelque  intérêt),  et  que  vous  voulussiez  rem- 
plir ces  cinq  places  vacantes,  il  faudroit,  s'il  vous  plaît, 
m'en  envoyer  les  sujets  dans  dix  ou  douze  jours.  Pour  les 
chapitres  qui  feront  la  seconde  partie,  je  n'ai  rien  qui 
presse;  mais  comme  je  ferois  ajouter  déjà  ces  images  à 
la  première  partie,  si  j'avois  ma  vingtaine  fournie  ,  je 
cherche  de  tous  côtés  à  trouver  de  quoi  l'achever.  Excusez 
l'incivilité  de  ma  prière:  j'aurai  l'honneur  de  vous  écrire 
plus  au  long  dans  huit  ou  dix  jours.  Cependant,  obligez- 
moi  de  croire  que  si  les  raisons  de  vos  adversaires  m'ont 
fait  douter  si  T.  a  K.8  étoit  l'auteur  de  ce  que  je  tra- 
duis ,  du  moins  ils  ne  m'ont  point  encore  persuadé 
que  Jean  Gersen  aye  jamais  été  au  monde4.  J'ai  grande 
obligation  au  P.  Souply,  dont  l'épître  me  donne  autant 
de  confusion  pour  moi  que  je  dois  d'admiration  à  la 
beauté  de  ses  vers.  Nous  avons  ici  une  famille  de  ce 
nom-là  ;  je  voudrois  qu'il  en  fût,  afin  de  me  pouvoir 
vanter   de  l'avoir  pour  compatriote.  A  la  première  im- 

1 .  Ici  la  phrase  devait  d'abord  commencer  autrement  :  «  Je  m'  »  ; 
probablement  :  «  Je  m'étois  adressé.  » 

2.  Le  prieuré  de  Saint-Lô  de  Rouen,  récemment  réiormé  par  des 
chanoines  réguliers  venus  de  Paris 

3.  Thomas  a  Kempis.  On  trouvera  presque  toujours  ce  nom  abrège 
dans  les  lettres  suivantes,  où  il  revient  souvent. 

4.  Voyez  tome  VIII,  p.  10. 


ii67.  LTTTRES. 

pression  que  je  ferai  faire,  je  lui  demanderai  la  permis- 
sion de  me  parer  de  son  travail,  et  des  éloges  qu'il  me 
donne  sans  les  mériter.  Je  pensois  ne  vous  écrire  que  deux 
lignes  à  la  dérobée,  et  à  peine  puis-je  trouver  place  pour 
vous  dire  que  je  suis, 

Mon  révérend  Père , 

Votre  très-humble  et  très-obligé  serviteur, 

Corneille. 
Suscription  :  Au  R.  P.,  le  R.  P.  Boulait.  A  Paris. 


l6.    DE    CORNEILLE    AU    REVEREND    PÈRE    ROULART. 

Mon  révérend  Père  , 

Vous  me  trouverez  un  peu  paresseux  à  vous  remer- 
cier du  soin  que  vous  avez  pris  de  m'envoyer  des  sujets 
pour  mes  tailles-douces  ;  mais  je  voulois  vous  renvoyer  le 
Lexicon  Germanico-Thomaeum  du  P.  Heserus  ;  j'ai  voulu 
attendre  que  j'eusse  eu  le  loisir  de  l'extraire.  A  mon  petit 
sens,  ce  livret  ne  fait  pas  assez  pour  votre  parti ,  parce 
qu'il  ne  vous  vendique*  pas  assez  l'ouvrage  contentieux. 
C'est  un  Allemand  qui  l'a  fait  ;  et  le  zèle  qu'il  a  pour  son 
pays  lui  faisant  faire  effort  pour  montrer  sa  phrase  alle- 
mande, laisse  à  vos  adversaires  l'avantage  des  mots  qu'ils 
prétendent  italiens,  comme  cortte/itare,  bassare2,  etc. Quoi- 
qu'il dise  à  la  fin  que  cent  phrases  allemandes  doivent 
l'emporter  sur  treize  mots  italiens,  c'est  toujours  recon- 

i.  Dans  le  sens  du  latin  vindicare,  ancien  terme  de  droit  qui  a  le 
même  sens  que  revendiquer,  réclamer  comme  son  propre  bien. 

2.  Mots  employés  dans  V Imitation,  dans  le  sens  de  contenter  et  d'a- 
baisser :  le  premier  au  livre  III,  chapitre  xi,  verset  5,  et  chapitre  xxn, 
verset  5;  le  second  au  même  livre,  chapitre  xlvi,  verset  a. 


LETTRES.  463 

noître  qu'il  y  a  treize  mots  italiens,  et  laisser  la  chose 
douteuse.  Je  ne  sais  pas  F  allemand,  et  par  conséquent 
je  ne  puis  pas  juger  de  la  conformité  du  style  de  notre 
auteur  avec  la  grammaire  de  son  pays;  mais  je  crois 
qu'il  vous  seroit  plus  avantageux  de  prétendre  que  son 
latin  sentiroitle  flamand  ou,  pour  mieux  dire,  le  wallon, 
que  non  pas  l'allemand.  Il  ne  cite  pas  une  phrase  pour 
allemande  que  je  ne  prétende  françoise,  et  les  mots  que 
les  Italiens  prétendent  leur  appartenir  ont  aussi  l'air  en- 
tièrement françois  ' .  Ainsi  vous  pourriez  prétendre  que 
Thomas  a  Kempis  auroit  pris  la  phrase  et  les  mots 
des  Wallons2,  dont  son  monastère  étoit  très-proche8,  et 
qu'il  s'y  seroit  mêlé  aussi  quelque  chose  de  flamand.  En 
son  temps,  la  Flandre  étoit  sous  la  souveraineté  de 
France  ;  on  y  parloit  françois,  on  y  plaidoit  en  françois, 
et  on  s'y  servoit  de  nos  ordonnances ,  qui  sont  pleines 
de  ce 4  latin  grossier.  Et  peut-être  a-ce  été  la  cause  qu'on 
a  attribué  ce  livre,  en  son  commencement,  à  deux  Fran- 
çois, saint  Bernard  et  Jean  Gerson,  dont  le  premier,  à  ce 
qu'on  m'a  dit  (car  je  ne  le  lis  pas  souvent),  se  sert  aussi  de 
grosse  vestire6,  et  de  mots  semblables.  M.  Carré  touche 
cet  argument  dans  l'ouvrage  que  vous  m'avez  envoyé, 
mais  il  ne  fait  que  l'effleurer  et  ne  l'approfondit  pas. 
Du  reste,  ce  dernier  travail  est  très-pressant,  et  il  ne  s'est 
rien  fait  de  plus  fort  dans  la  querelle.  Celui  qui  a  fait  la 
petite  Apologie*  françoise  me  semble  y  avoir  aussi  fort 

i.  Voyez  tome  VIII,  p.  14. —  2.  Corneille  a  écrit  qui  et  l'a  raturé. 

3.  Thomas  a  Kempis,  qui  fut  sous-prieur  de  son  ordre,  vécut  dans 
le  monastère  du  mont  Sainte-Agnès,  près  de  Zwoll,  en  Hollande.  — 
On  lit  ici  parmi,  raturé. 

4.  Ici  Corneille  avait  commencé  à  écrire  le  mot  «  mauvais  »  : 
mauu. 

5.  Ces  mots  sont  au  livre  I  de  V  Imitation,  chapitre  xxv,  verset  8. 

6.  Corneille  veut  probablement  parler  de  l'ouvrage  intitulé  :  Apo- 
logie pour  Thomas  a  Kempis ,  chanoine  régulier  de  Saint- Augustin.... par 


464  LETTRES. 

bien  réussi;  mais  il  faut  être  instruit  déjà1  :  autrement  on 
ne  comprendra  pas  toute  la  force  des  raisonnements 
qu'il  a  réduits  en  abrégé,  et  dont  il  fait  comme  une  réca- 
pitulation, Je  vous  demande  pardon  si  je  vous  débite 
avec  tant  de  franchise  ma  pensée  sur  les  présents  que 
vous  m'avez  faits  :  vous  me  lavez  ordonné,  et  je  vous 
obéis.  La  sentence  que  vous  avez  obtenue  vous  est  aussi 
fort  avantageuse,  en  ce  que  un  des  quatre  manuscrits  dont 
il  est  question,  et  le  seul  qui  n'étoit  point  au  pouvoir  de 
vos  parties,  a  été  produit  au  procès.  Il  est  vrai  que  je 
douterois  fort  si  ce  jugement  est  de  la  compétence  du 
Palais,  et2  en  croirois  plus  volontiers  une  décision  de 
Sorbonne.  Vous  voyez  par  là  que  si  j'étois  obligé  de 
choisir  un  auteur  et  d'entrer  en  la  querelle,  je  me  ran- 
gerois  plutôt  du  côté  de  T.  a  K.8  que  de  J.  G.*,  quoique 
les  pères  bénédictins  ayent  formé  des  arguments  contre 
ce  premier  qui  peuvent  en  faire  douter*,  et  je  connois  des5 
personnes  savantes  qu'ils  ont  persuadées  que  ce  n'est 
point  lui.  Mais  autre  chose  est  de  faire  douter  de  celui 
qui  est  en  possession,  autre  chose  d'en  établir  un  autre 
en  sa  place;  et  les  mêmes  qui  croient  que  Th.  a  Kempis 
n'est  pas  l'auteur  du  livre  contesté  demandent  qu'on  leur 
montre  que  J.  Gersen  aye  été  au  monde.  Pour  moi,  qui  ne 
prends  intérêt  ni  pour  le  pays  ni  pour  l'habit,  j'ai  besoin 
de  me  tenir  neutre,  et  poursuivre  comme  j'ai  commencé, 
afin  que  ma  traduction  puisse  être  bien  reçue  de  tout  le 
monde.  Quoique  la  cause  de  J.  Gersen  me  semble  jusqu'ici 

un  chanoine  régulier  de  V ordre  de  S.  Augustin,  de  la  congrégation  de 
France.  Seconde  édition.  —  A  Paris,  chez  Claude  Cramoisy,  M.DC.LI, 
in-8°,  34  pages. 

1.  Corneille  avait  écrit  ici  :  de  la  querelle,  puis  il  l'a  effacé. 

2.  Corneille  avait  d'abord  écrit  :  oc    m'en,  »    probablement  potu 
mettre  :  «  m'en  rapporterois.  » 

3.  Thomas  a  Kempis.  —  4    Jean  Gersen. 
1.   Première  rédaction  :  «  des  gens.  » 


LETTRES.  465 

assez  mal  fondée,  puisque  son  existence  est  révoquée  en 
doute,  elle  a  fait  l'opinion  à  la  mode,  et  il  y  a  eu  des  doc- 
teurs qui  m'ont  refusé  leur  approbation  si  j'y  mettois  le 
nom  de  T.  a  K.  Il  y  a  même  quelque  raison  particulière, 
que  je  ne  vous  puis  écrire  et  que  je  vous  dirai  quand  j'aurai 
l'honneur  de  vous  voir,  qui  m  obligea  m'attacher  à  cette 
neutralité,  du  moins  jusqu'à  ce  que  l'ouvrage  soit  achevé. 
Entre  ci  et  là,  les  choses  pourront  changer  de  face,  et 
la  vérité  plus  connue.  Cependant  vous  m'obligerez  fort 
de  me  faire  part  de  ce  qui  s'écrira  pour  votre  parti.  J'ai 
un  frère  de  votre  habit  * ,  et,  sans  cela,  j'y  penche  plus  que 
de  l'autre.  J'oubliois  à  vous  remercier  de  vos  sujets  pour 
mes  tailles-douces  •  les  premiers  me  semblèrent  un  peu 
nus,  et  n'avoir  pas  de  quoi  satisfaire  le  peintre  ;  les  au- 
tres sont  fort  beaux,  et  je  crois  que  je  me  servirai  pres- 
que de  tous,  à  la  réserve  de  ceux  qui  sont  pour  les  cha- 
pitres pour  qui  j'en  ai  déjà  fait  graver2.  Quand  il  vous  en 
tombera  quelques  autres  dans  la  pensée  pour  la  suite, 
où  je  travaille  à  présent,  je  tiendrai  à  grande  faveur 
que  vous  m'en  fassiez  part  :  vous  ne  trouverez  point  la 
place  occupée.  Cependant  obligez-moi  de  croire  que  je 
suis  de  tout  mon  cœur, 

Mon  révérend  Père, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 

A  Rouen,  ce  12  d'avril  i652. 

J'ai  remis  le  livret  du  P.  Heserus  entre  les  mains  du 

1.  Antoine  Corneille,  baptisé  le  10  juillet  1611,  lauréat  du  Puy 
de  la  Conception  (voyez  ci-dessus,  p.  7  et  suivantes),  chanoine 
régulier  au  Mont-aux-Malades,  prés  de  Rouen. 

2.  Corneille  avait  terminé  rette  phrase  par  a  d'autres,  »  qu'il  a 
effacé. 

CORWEILLE.    X  3o 


466  LETTRES. 

révérend   père  prieur  de  Saint-Lô1,  pour  vous  le  ren- 
voyer. 

Suscription  :  Au  R.  P.,  le  R.  P.  Boulart,  assistant 
du  T.  R.  P.  général  des  Chanoines  réguliers  abbé  de 
Sainte  Geneviefve.  A  Paris. 


17.  DE    CORNEILLE    AU    REVEREND    PERE    ROHLART. 

Mon  révérend  Père  , 

Je  vous  remercie  de  ce  que  vous  m'avez  fait  voir  de 
nouveau  pour  la  défense  de  Th.  a  K.,  et  vous  renvoie  ce 
que  vous  m'ordonnez,  que  je  remettrai  avec  la  présente 
entre  les  mains  du  père  prieur  de  Saint-Lô  ;  et  puisque 
vous  voulez  aussi  que  je  vous  en  dise  ma  pensée,  la  voici  : 

Les  Septuaginta  palmœ  du  P.  Heserus2  ne  vous  font  ni 
bien  ni  mal  :  ce  sont  des  éloges  de  l'ouvrage,  et  non  pas 
des  arguments  pour  en  connoître  l'auteur. 

J'avois  vu  déjà  les  deux  lettres  de  M.  Chifflet3;  elles 
enfoncent  plus  avant ,  et  comme  elles  portent  une  re- 
cherche exacte  des  manuscrits  de  Flandre,  son  témoi- 
gnage vous  est  assez  avantageux. 

La  lettre  du  P.  Petau  est  de  fort  grand  poids,  et  fort 

1.  Voyez  ci-dessus,  p.  461»  note  2. 

2 .  Septuaginta  palmœ  seu  sacer  panegyricus  in  laudem  librorum  IV 
Thomœ  a  Kempis.  ..  de  Imitatione  Christi,   ex  hominum  piorum  elo- 

giis  LXX  concinnatus  a  Georgio  Hesero,    societ.    Iesu Ingolsta- 

dii^   in  ederiana  typographia,   excudebat  Johannes   Ostermayr,   t65i, 
in-12. 

3.  Fn  "voici  le  titre  :  Copie  de  deux  lettres  escrites  par  Monsieur  Phi- 
lippe Chiflet ,  abbé  de  Balerne,  à  un  de  ses  amis  touchant  le  véritable 
mit  heur  des  livres  de  l'Imitation  de  Jésus-Christ.  Avec  un  advis  sur  le 
factum  des  Bénédictins  (sans  lieu  ni  date),  in -8°. 


LETTRES.  467 

propre  à  opposer  à  celle  du  P.  Sirmond1,  dont  les  gersé- 
nistes  se  fortifient.  C'est  un  homme  docte,  et2  en  réputa- 
tion de  grand  antiquaire,  et  qui  donne  son  témoignage 
après  avoir  examiné  les  raisons  et  connu  Fauteur  du  ger- 
sénisme,  l'abbé  Caiétan*,  pour  un  fourbe,  et  maître  à 
faire  des  suppositions  en  faveur  de  son  ordre. 

Les  témoignages  de  Monsieur  de  Grâce*  et  de  M.  Ar~ 
nauld  ne  sont  pas  de  si  haute  conséquence,  d'autant  qu'ils 
ne  font  que  dire  leur  opinion  comme  en  passant  ;  le  pre- 
mier l'attribuant  simplement  à  T.  K.,  sans  savoir  même 
si  cela  lui  étoit  disputé;  et  l'autre  >  comme  ayant  appris 
d'un  des  vôtres  que  Jean  Gersen  n'en  étoit  pas  l'auteur,  et 
se  tenant  comme  satisfait  de  ses  raisons.  Ce  sont  deux 
opinions  de  modernes,  qui  seront  bonnes  à  ajouter  au 
Centumvirale  judicium  du  P.  Heserus. 

Bolandus6  et  ce  témoignage  que  vous  avez  fait  venir 
de  Flandre  ne  sont  que  la  même  chose,  et'  l'un  sert  de 
preuve  à  l'autre  et  aux  lettres  de  M.  Chifflet. 

Le  témoignage  du  jésuite  Théophilus  Renaudus  est 
très -élégant  et  bien  couché  ;  mais  comme  il  se  fonde 


1.  Des  deux  savants  jésuites  ici  nommés,  l'un,  le  P.  Petau,  mourut 
l'année  même  où  Corneille  écrivait  cette  lettre;  l'autre,  le  P.  Sirmond, 
était  mort  l'année  précédente  (i65i). 

2.  Corneille  avait  écrit  immédiatement  après  et  la  première  lettre 
du  mot  grand;  il  l'a  modifiée  pour  ajouter  :   «  en  réputation  de.  » 

3.  Le  bénédictin  Constantin  Caiétan,  qui  avait  donné  une  édition 
de  F Imitation.  Voyez  notre  tome  VIII,  p.  xxiii. 

4.  Du  célèbre  Godeau,  qui  fut  no  mmé  évêque  de  Grasse  en  i636, 
et  devint  plus  tard  évêque  de  Vence.  Il  mourut  en  1672. 

5.  Bolland,  Bollandus,  jésuite  d'Anvers,  mort  en  i665.  C'est  lui 
qui  a  commencé  le  recueil  des  Vies  des  saints  connu  sous  le  nom  des 
Acta  sanctorum  des  Bollandistes. 

6.  Corneille  avait  écrit  ici  conf,  probablement  pour  commencer  le 
mot  confirment;  puis  il  a  effacé  ce  commencement  de  mot  et  y  a 
substitué  le  mot  servent,  qu'il  a  raturé  à  son  tour. 


468  LETTRES. 

particulièrement  sur  ce  qu'il  a  appris  de  M.  Naudé1,  il 
ne  persuadera  que  ceux  que  ledit  sieur  Naudé  aura 
déjà  persuadés,  si  ce  n'est  par  le  témoignage  qu'il  rend 
contre  l'abbé  Caiétan,  pareil  à  celui  du  P.  Petau,  et  d'au- 
tant plus  considérable  que  demeurant  de  son  temps  à 
Rome,  il  le  connoissoit  encore  mieux  que  le  P.  Petau. 

Voilà,  mon  révérend  Père,  ce  que  vous  avez  voulu 
que  je  vous  mandasse  touchant  ces  papiers  que  je  vous 
renvoie,  et  vous  prie  que  si  vous  pouvez  avoir  encore  un 
exemplaire  de  Dioptra  Heseri ,  que  vous  me  mandez 
avoir  reçu  d'Allemagne,  vous  m'en  fassiez  part;  mais 
tant  que  vous  n'en  aurez  qu'un,  ne  me  l'envoyez  point, 
s'il  vous  plaît;  car  je  crains  de  n'être  pas  assez  obéis- 
sant pour  vous  le  renvoyer  comme  je  fais  ceux-ci,  à  la 
réserve  de  ceux  que  vous  voulez  que  je  garde. 

J'ai  vu  le  Thomas  vindicatus  du  R.  P.  Fronteau,  que 
j'estime  très-fort  ;  mais  si  je  ne  me  trompe,  il  ne  répond 
point  aux  mots  dont  je  vous  parlois  dans  ma  dernière.  Il 
justifie  bien  que  les  façons  de  parler  de  V Imitation  de 
Jésus-Christ  sont  les  mêmes  que  celles  des  autres  livres 
de  Th.  a  Kempis ,  ce  que  M.  Carré  a  fait  encore  plus  au 
long;  mais  il  ne  touche  qu'au  mot  de  leviter  ;  pour  les 
autres,  bassare,  grosse  vestire,  sentimenta,  sententiare  2 , 
contentare ,  etc.,  il  n'en  dit  rien  du  tout  ;  et  je  ne  vois 
pas  de  moyen  de  faire  passer  ces  mots-là  pour  allemands4, 

i.  Gabriel  Naudé,  qui  fut  médecin  de  Louis  XIII,  puis  bibliothé- 
caire du  cardinal  Mazarin.  Il  mourut  en  i653.  Voyez  ci-après  la 
note  4  de  la  page  469. 

2.  Sentimenta  se  lit  au  livre  IV,  chapitre  xvn,  verset  2  deV  Imitation; 
sententiare  est  au  chapitre  l  du  livre  III,  verset  7.  Nous  avons  déjà 
parlé  des  autres  mots  que  Corneille  cite  ici. 

3.  Corneille  avait  écrit  :  a  pas  un  mot;  »  il  y  a  substitué  :  «  rien  du 
tout,  »  dans  l'interligne. 

4.  Il  y  avait  d'abord  :  «  de  faire  ces  mots -là  allemands.  »  Corneille 
a  modifié  et  complété  l'expression  par  des  additions  dans  l'interligne. 


LETTRES.  469 

si  bien  qu'il  faut  les  avouer  italiens,  à  moins  que  vous 
disiez  que  Th.  a  K.  les  a  pris  de  la  langue  françoise,  qui 
se  parloit  en  son  monastère  ou  aux  environs,  aussi  bien 
que  la  flamande1.  Cela  ne  fait  rien  contre  Th.  a  Rempis: 
au  contraire,  je  crois  qu'il  lui  peut  servir,  à  cause  de  la 
quantité  d'autres  façons  de  parler  qui  sont  purement 
françoises,  et2  égaleroient  bien  le  nombre  des  allemandes. 
Au  reste,  je  ne  crois  pas  que  les  Pères  bénédictins 
puissent  prendre  aucun  avantage  de  ce  que  je  continue- 
rai à  ne  mettre  aucun  nom  d'auteur3  à  ma  traduction. 
Ils  en  ont  eu,  à  la  vérité,  de  ce  qu'on  n'en  a  point  mis 
à  l'impression  royale 4,  parce  que  c'étoit  beaucoup  faire 
que  d'ôter  dès  l'abord  Th.  a  K.  de  la  possession  où  il 
étoit  avant  qu'il  y  eût  contestation  formée  ;  mais  à 
présent  qu'il  y  a  querelle  et  procès,  et  qu'après  la  sen- 
tence des  requêtes5  leur  appel  met  encore  la  chose  en 
doute,  les  particuliers  qui  n'ont  point  d'intérêt  à  la  chose 

1.  Voyez  ci-dessus,  p.  463  et  la  note  3. 

2.  Au  lieu  de  et,  Corneille  avait  d'abord  écrit  q,  sans  doute  pour 
commencer  le  mot  qui;  puis  il  a  effacé  cette  lettre. 

3.  Première  rédaction  :  «  aucun  auteur.  » 

4.  Cette  édition  avait  été  l'occasion  de  toute  la  querelle.  «  Les  bé- 
nédictins, dit  M.  Célestin  Port  dans  sa  notice  sur  les  Lettres  de  Cor- 
neille au  P.  Boulart,  s'appuyant  sur  la  prétention  récente  de  l'abbé 
Caiétan,  sollicitèrent  le  cardinal  de  Richelieu  de  faire  inscrire  au 
titre  le  nom  de  Jean  Gersen,  leur  confrère,  abbé  prétendu  de  Verceil, 
qu'ils  assuroient  être  le  véritable  auteur.  Le  Cardinal  y  consentit, 
mais  demanda  le  témoignage  authentique  d'une  personne  publique  et 
d'autorité.  Avis  reçu,  les  PP.  Placide  et  Jean,  procureurs  en  cour  de 
Rome  pour  la  Congrégation  de  Saint-Maur,  s'adressèrent  au  cardinal 
de  Bagny,  et  le  prièrent  de  se  porter  garant  pour  eux;  mais  celui-ci 
voulut  voir  l'affaire  de  près.  Naudé,  pour  lors  ce  son  domestique,  » 
et  Fioravante  Martinelli,  choisis  pour  examiner  les  manuscrits,  les 
trouvèrent  chargés  de  falsifications  évidentes.  Les  procureurs  des  bé- 
nédictins furent  appelés  au  Palais;  ils  avouèrent  qu'on  les  avoi 
trompés.  »  L'édition  royale  parut  en  i64°i  mais  sans  nom  d'auteur. 

5.  Voyez  tome  VIII,  p.  xi  ;  et  ci-après,  p.  471,  note  1. 


470  LETTRES. 

doivent  du  moins  attendre  que  l'arrêt  qui  interviendra 
leur  apprenne  ce  qu'il  en  faut  croire.  Vous  me  permet- 
trez donc  de  continuer  comme  j'ai  commencé,  et  me  ferez 
la  grâce  de  croire  que  je  n'en  suis  pas  moins, 
Mon  révérend  Père, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 
A  Rouen,  ce  i3  d'avril  i652. 

J'oubliois  à  vous  dire  que  je  ne  suis  point  encore  pressé 
d'images  pour  le  second1  livre,  ne  faisant  que  d'ache- 
ver la  traduction  de  ce  qui  restoit  du  premier,  où  je 
crois  avoir  été  un  peu  au  de  là  de  ce  que  vous  avez  pu 
voir. 

Suscription  :  Au  R.  P.,  le  R.  P.  Boulart,  assistant 
du  T.  R.  P.  général  des  chanoines  réguliers.  A  Sainte 
Geneviefve.  A  Paris. 


l8.    DE    CORNEILLE    AU    REVÉREJND    PERE    BOULART. 

A  Rouen,  ce  10  de  juin  i656. 
Mon  très-révérend  Père  , 

J'espérois  de  jour  en  jour  aller  à  Paris,  suivant  ce  que 
vous  a  dit  M.  Ballard2,  et  là  vous  remercier  de  vive  voix 
de  celle  qui  {sic)  vous  a  plu  m'écrire;  mais  quelque  affaire 

i.  Second  est  écrit  en  chiffre  :  «  le  2.  liure.  » 

1.  Peut-être  s'agit-il  ici  de  l'imprimeur  Robert  Ballard  :  voyez  ci- 
dessus,  p.  i3a.  Corneille  avait  pour  ami  un  chartreux  nommé  Lau- 
reus  Ballard  (voyez  tome  VIII,  p.  xvi);  mais  si  c'était  de  ce  religieux 
qu'il  fat  question  ici,  notre  poëte  ne  se  servirait  point ,  en  parlant 
de  lui,  du  mot  Monsieur. 


LETTRES.  471 

m'ayant  obligé  de  remettre  ce  voyage,  trouvez  bon  que 
je  me  serve  de  ma  plume  pour  m'acquitter  en  quelque 
sorte  de  ce  que  je  vous  dois.  Vous  ne  m'avez  aucune 
obligation  du  témoignage  que  j'ai  rendu  à  la  vérité,  je 
n'ai  point  fait  le  juge  en  votre  affaire,  ni  ajouté  mon  sen- 
timent au  jugement  que  vous  avez  emporté  :  j'en  ai  fait 
seulement  un  récit  fidèle ,  pour  en  rafraîchir  la  mémoire 
à  ceux  qui  le  savent  et  l'apprendre  à  ceux  qui  ne  le  savent 
pas.  Si  j'avois  mis  le  nom  de  Th.  a  Rempis  à  la  tête 
du  livre,  je  me  fusse  déclaré  partial;  et  comme  cet  au- 
teur m'apprend  qu'il  faut  chercher  la  paix  et  dedans 
et  dehors,  j'ai  été  bien  aise  de  la  conserver  avec  les 
Pères  bénédictins,  et  d'être  en  pouvoir  de  leur  dire  que, 
quand  ils  auront  eu  un  jugement  à  leur  avantage,  j'en 
ferai  le  même  récit  au  public  pour  eux  :  comme  j'ai  fait 
pour  vous1.  J'ai  été  assez  heureux  pour  conserver  la  paix 
en  mon  particulier  avec  les  deux  partis  opposés  sur  les 
questions  de  la  grâce.  Tous  deux  prétendent  que  l'au- 
teur soit  de  leur  opinion,  et  tous  deux  m'ont  avoué  que 
ma  traduction  est  fidèle,  et  veulent  qu'elle  tombe  dans 
leur  sens.  Je  ne  sais  pas  assez  de  théologie  pour  péné- 
trer dans  leurs  différends ,  que  même  je  ne  comprends 
pas;  mais  je  crois  savoir  assez  de  latin  pour  rendre  le 
sens  d'un  auteur  dont  le  style  n'est  pas  fort  obscur,  et 
heureusement  je  n'ai  déplu  à  aucun  de  ces  deux  partis, 
parmi  lesquels  il  s'est  mêlé  tant  d'aigreur.  J'ai  tâché  de 
faire  la  même  chose  pour  votre  différend  entre  les  Pères 
de  Saint-Benoît  ;  bien  que  je  voie  un  peu  plus  clair  dans 

1.  Corneille,  faisant  allusion  à  l'arrêt  du  Parlement  du  12  fé- 
vrier i65a,  avait  dit  dans  son  avis  au  Lecteur  :  «  Messieurs  des  re- 
quêtes du  parlement  de  Paris  ont  prononcé  en  faveur  de  Thomas 
Kempis;  et  nous  pouvons  nous  en  tenir  à  leur  jugement,  jusqu'à  ce 
que  l'autre  parti  en  ait  fait  donner  un  contraire.  »  Voyez  tome  VIII, 
p.  xi  et  p.  12. 


47*  LETTRES. 

cette  question  que  dans  l'autre,  et  que  je  ne  vous  en  ave 
pas  celé  mon  sentiment,  je  n'ai  voulu  rien  dire  de  moi- 
même,  et  m'arrête  au  récit  du  jugement  célèbre  qui  a 
assoupi  cette  guerre.  J'ai  cru  vous  satisfaire  et  ne  les  pas 
mécontenter.  Voilà,  mon  révérend  Père,  ce  qui  m'a  re- 
tenu pour  le  regard  de  l'inscription,  qui  ne  vous  est  pas 
de  grande  importance  et  les  eût  puissamment  désobligés  : 
j'ai  des  parents  et  des  amis  parmi  eux,  à  qui  j'ai  été  bien 
aise  de  ne  rendre  pas  ce  déplaisir ,  ayant  trouvé  cette 
voie  d'acquitter  ma  conscience  envers  la  vérité. 

Pour  le  manuscrit  de  Thomas  a  Rempis,  vous  me  fîtes 
la  faveur  de  me  le  faire  voir,  il  y  a  tantôt  deux  ans, 
quand  je  passai  pour  aller  à  Bourbon;  vous  me  donnâtes 
aussi  le  livre  de  la  contestation,  qui  est  fort  bien  fait. 
Vos  Pères  de  Saint-Lô 4  m'en  ont  fait  voir  un  autre  en 
latin,  intitulé  :  Triumphus  Thomœ  a  Kempis,  fait  par  un 
religieux  deNevers  et  imprimé  là,  qui  n'est  presque  que  la 
répétition  de  ce  qui  a  été  déjà  dit  en  françois  dans  l'autre  ; 
il  ne  laisse  pas  d'être  fait  avec  beaucoup  desprit.  Je  crois 
que  vous  faites  bien  de  ne  faire  rien  imprimer  davan- 
tage :  il  est  bon  de  se  reposer  après  la  bataille  gagnée,  et 
il  semble2  que  vous  n'avez  plus  rien  à  faire,  puisque 
le  champ  vous  est  demeuré,  surtout  pour  ce  qui  regarde 
les  écrits  de  M.  Naudé,  qui  étoit  sans  doute  très-savant, 
mais  qui  mêloit  plus  de  doctrine  que  d'agrément  dans 
ses  ouvrages.  Le  livret  de  M.  de  Launoy  ne  mérite  pas 
de  réponse. 

Je  vous  rends  grâce  de  ce  que  vous  m'avez  envoyé  de 
la  façon  du  R.  P.  Fronteau  :  c'est  un  grand  homme  en 
tout,  et  ce  n'est  pas  avoir  peu  fait  d'effet  sur  moi  que  de 


i.  Voyez  ci-dessus,  p.  46 1>  note  2. 

2.  Dans    son    excellent  texte,  M.  Célestin   Port    donne  :  «  il  me 
semble;  »  mais  il  y  a  bien  :  «  il  semble,  »  dans  l'autographe. 


LETTRES.  /»7i 

n'avoir  obligé  à  lire  son  oraison  funèbre1  toute  entière, 
moi  qui  ai  une  aversion  naturelle  contre  les  panégy- 
riques, et  qui  n'ai  jamais  pu  lire  plus  de  quatre  pages 
d'aucun  qui  soit  tombé  sous  ma  main;  je  n'en  excepte 
pas  même  celui  de  Pline  second.  Le  papier  me  manque  : 
trouvez  bon  que  j'emploie  ce  qui  m'en  reste  ici  à  vous 
assurer  que  je  serai  toujours, 

Mon  très-révérend  Père, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 

Suscription.  Au  T.  R.  P.,  le  T.  R.  P.  Roulard2,  cha- 
noine régulier  de  Saint  Augustin,  assistant  du  T.  R.  P. 
abbé  de  Sainte  Geneviefve.  A  Paris. 


19. DE  GILLES  BOILEAU   A  MONSIEUR  DE  CORNEILLE8. 

Monsieur  , 
Je  crois  que  vous  avez  regretté  avec  toute  la  France  la  mort  de 

1.  Oratio  funebris  in  obitum  Matthsei  Mole...,  inter  solemnia  quœ  il- 
lius  mémorise  celebraverunt  abbas  et  canonici  regulares  Sanctœ-Geno- 
vefee  parisiensis  pronunciata  a  F.  J.  Frontone..,.  die  januar.  28.  A.  D. 
i656.  Par/siis,  ex  ofjîcina  cramosiana ,  ifi56,  in-^°. 

2.  Corneille  n'a  écrit  ainsi  ce  nom,  Boulard  par  un  d,  que  dans 
cet  endroit. 

3.  Cette  lettre  est  tirée  du  recueil  qui  a  pour  titre  :  les  OEuvres 
posthumes  de  défunt  Monsieur  B .  de  l 'Académie  françoise,  contrôleur  de 
l' 'argenterie  du  Roy.  A  Paris,  chez  Claude  Barbin,  M.DC.LXX,  in-12, 
p.  113-117.  Voyez  la  Notice,  p.  4^3,  note  4-  —  Gilles  Boileau,  né  à 
Paris  en  i63i,  mort  en  1669,  était  le  frère  aîné  de  notre  illustre 
poëte,  Nicolas  Boileau  Despréaux.  Il  avait  traduit  du  grec  en  fran- 
çais le  Tableau  de  Cébès  (i653),  le  Manuel d'Épictète  (i655);  plus  tard 
(1668)  il  traduisit  encore  Diogène  de  Laërte. 


474  LETTRES. 

Monsieur  le  premier  président4;  mais  peut-être  avec  tout  cela  ne 
l'avez-vous  pas  regretté  autant  que  vous  deviez;  du  moins  je  suis 
bien  assuré  que  vous  y  avez  perdu  plus  que  vous  ne  pensez.  La  der- 
nière conversation  que  j'eus  l'honneur  d'avoir  avec  lui  ne  fut  que 
de  vous  ;  et  comme  je  lui  dis  que  vous  aviez  envie  de  le  saluer,  il  me 
témoigna  qu'il  en  seroit  ravi,  et  me  donna  charge  même  de  vous 
mander  l'estime  particulière  qu'il  faisoit  de  vous,  et  le  plaisir  qu'il 
auroit  à  vous  pouvoir  rendre  service.  Si  la  mort  ne  l'eût  point 
prévenu,  il  n'auroit  pas  manqué  de  vous  en  donner  de  meilleures 
preuves  :  il  étoit  en  assez  belle  posture  pour  cela,  et  en  avoit  tout  à  fait 
la  volonté.  Quoique  vous  ayez  remporté  tout  seul  tout  l'honneur  de 
notre  siècle,  et  que  vous  ayez  reçu  des  louanges  de  toute  la  terre,  il 
me  semble  que  ce  ne  vous  doit  pas  être  un  petit  sujet  de  joie  d'avoir 
en  particulier  l'approbation  du  plus  galant  homme  et  du  plus  bel 
esprit  de  notre  temps.  Je  fais  imprimer  un  recueil  de  toutes  les 
pièces  qui  ont  été  faites  sur  sa  mort.  Monseigneur  de  Vence,  Mon- 
sieur de  Gombaut,  Monsieur  de  Bois-Robert,  et  tous  nos  autres 
illustres  amis  m'ont  déjà  donné  des  vers.  Je  crois  que  vous,  Mon- 
sieur, à  qui  cent  vers  coûtent  moins  qu'un  couplet  de  chanson*,  ne 
refuserez  pas  un  madrigal  ou  une  épigramme.  Pardonnez-moi,  Mon- 
sieur, la  liberté  que  je  prends.  Permittit  sibi  qusedam  et  contra  bonum 
morem  magna  pietas*. 

Je  suis, 

Monsieur, 

Votre,  etc. 

Gilles  Boileau. 
Ce  io  avril  1657. 

1.  Pompone  de  Bellièvre.  Voyez  ci-dessus,  p.  i3i.  Gilles  Boileau 
le  nomme  vers  la  iin  de  la  lettre  suivante.  Il  était  mort  au  mois  de 
mars  1647. 

2.  Allusion   au  quatrième  vers  de  Y  Excuse  à  Ariste   (ci-dessus, 

P-  74): 

Cent  vers  lui  coûtent  moins  que  deux  mots  de  chanson. 

3.  «  La  grande  piété  se  permet  quelque  chose  même  contre  le  bon 
usage.  » 


LETTRES.  475 


20. —  DE  GILLES  BOILEAU  A  MONSIEUR  DE  CORNEILLE1. 

Monsieur, 

Ou  vous  ne  vous  souvenez  plus  de  ce  que  vous  avez  fait,  ou  vous 
avez  envie  de  me  railler.  Pour  votre  honneur  je  veux  bien  plutôt 
croire  l'un  que  l'autre  :  j'aime  mieux  me  faire  un  petit  tort  que  d'en 
faire  un  si  grand  à  votre  mémoire.  J'ai  eu  le  plaisir  de  lire  plus 
d'une  fois  en  ma  vie  les  pièces  que  vous  avez  données  au  public,  et 
je  ne  suis  pas  si  peu  connoissant  aux  choses  que  je  n'aye  très-bien 
reconnu  que  vous  possédez  admirablement  le  talent  de  louer  et  de 
blâmer  tout  ce  que  vous  voulez.  Je  n'ignore  pas  que  comme  la  mé- 
disance est  indigne  de  tout  honnête  homme,  vous  n'en  soyez  aussi 
incapable.  Mais  pour  la  raillerie  qui  chatouille  et  qui  pique  sans 
égratigner,  je  sais  qu'elle  règne  dans  la  plupart  de  vos  comédies,  que 
vous  vous  en  servez  fort  ingénieusement,  et  que  vous  êtes  trop  jaloux 
de  votre  réputation  pour  y  renoncer.  Mais,  Monsieur,  il  ne  s'agit 
point  ici  de  cela.  Je  ne  vous  demande  que  des  louanges.  Vous  dites 
que  vous  n'y  excellez  pas  et  que  vous  ne  vous  en  mêlez  plus2.  Depuis 
quel  temps  avez-vous  renoncé  à  un  métier  qui  vous  a  fait  ce  que 
vous  êtes  ?  Ne  sont-ce  pas  les  louanges  que  vous  avez  données  aux 
Pompées,  aux  Césars  et  à  tous  vos  autres  héros,  qui  vous  ont  attiré 
celles  de  toute  la  terre  ?  Y  en  a-t-il  de  plus  fines  et  de  plus  délicates 
dans  toute  l'antiquité?  Vos  ouvrages  n'en  sont-ils  pas  tout  remplis, 
et  n'en  avez-vous  pas  fait  des  leçons  publiques  à  toute  la  France? 
Qu'est-il  besoin  que  j'aille  chercher  des  exemples  si  loin  ?  Ne  vous 
souvient-il  plus  de  tant  et  tant  de  fameuses  épitres  liminaires,  où  vous 
prodiguez  les  louanges  avec  tant  d'abondance,  et  où  vous  vous  exer- 
cez souvent   sur  des  sujets  dont  toute  autre  éloquence  que  la  vôtre 

1 .  Cette  lettre  est  tirée  du  même  recueil  que  la  précédente  ;  elle 
en  occupe  les  pages  11 8-1 25. 

2.  Corneille  a  souvent  fait  des  protestations  du  même  genre,  au 
milieu  même  de  ses  pièces  laudatives  : 

Laudibus  apta  minus Melpomene 

(Voyez  ci-dessus,  p.  70  et  71,  vers  67  et  68. ) 

Pour  moi  qui  de  louer  n'eus  jamais  la  méthode. 

(Voyez  ci-dessus,  p.  177,  vers  29.) 


',76  LETTRES. 

seroit  incapable1  ?  Avez- vous  oublié  ces  beaux  vers  où  vous  remercie/ 
Monsieur  le  cardinal  Mazarin2?  Avez-vous  perdu  la  mémoire  de  votre 
sonnet  pour  la  Reine3,  et  de  ces  deux  autres  que  vous  avez  faits  sur  la 
mortde  deux  personnes  de  qualité,  où  il  est  parlé  de  phénix,  si  je  ne 
me  trompe4?  Que  pourrez-vous  dire  après  la  lettre  à  AristeB,  où  vous 
vous  louez  si  bien  vous-même?  Mais  que  nedira-t-on  point  quand 
on  lira  votre  sonnet  pour  maître  Adam  Billot6  ?  Monsieur  de  Bellièvre 
ne  méritoit-il  pas  bien  que  vous  prissiez  la  même  peine  pour  lui,  que 
celle  que  vous  aviez  prise  pour  le  menuisier  de  Nevers?  Je  vois  bien, 
Monsieur,  ce  que  c'est  ;  vous  ne  versez  pas  vos  grâces  tous  les  jours: 
elles  sont  chères  et  précieuses.  Il  faut  ***.  Croyez-moi  pourtant.  Ce 
silence  que  vous  affectez  vous  sied  fort  mal.  Les  gens  qui  parlent 
aussi  bien  que  vous  ne  doivent  jamais  craindre  de  parler.  Faites, 
Monsieur,  tout  ce  qu'il  vous  plaira  ;  mais  si  vous  étiez  jaloux  de  votre 
honneur  et  de  votre  réputation  au  point  que  vous  le  dites,  je  suis 
assuré  que  vous  feriez  ce  que  je  désire.  Je  suis, 

Monsieur, 

Votre,  etc. 

Gilles  Boileau. 
Ce  29  avril  1657. 

1.  C'est  ici,  suivant  toute  apparence,  une  allusion  à  la  dédicace  de 
Cinna  à  Montauron,  si  souvent  reprochée  à  Corneille.  Voyez  tome  III, 
p.  369  et  suivantes. 

2.  A  Monseigneur  Monseigneur  Pérninentissime  cardinal  Mazarin. 
Remerciment  :  ci-dessus,  p.  92  et  suivantes. 

3.  C'est  le  sonnet  qui  se  trouve  dans  la  dédicace  de  Polyeucte  à  la 
Reine.  Voyez  tome  III,  p.  4j3. 

4.  Ce  passage  nous  fait  connaître  l'existence  de  deux  sonnets  qui 
ne  nous  sont  point  parvenus. 

5.  L' Excuse  à  Ariste,  ci-dessus,  p.  74  et  suivantes. 

6.  Voyez  ci-dessus,  p.  100.  La  manière  dont  le  nom  de  Bidault 
est  imprimé  ici  montre  que  Corneille  n'était  pas  le  seul  a  employer 
cette  forme,  que  nous  avons  vue  au  dernier  vers  de  son  sonnet. 


LETTRES.  A7 


*  j 1 


21.   DE    CORNEILLE    A    PELLISSON1. 


Ce  vendredi2. 

En  matière  d'amour  je  suis  fort  inégal  : 
J'en  écris  assez  bien  ,  et  le  fais  assez  mal; 
J'ai  la  plume  féconde ,  et  la  bouche  stérile, 
Bon  galant  au  théâtre ,  et  fort  mauvais  en  ville  ; 
Et  Ton  peut  rarement  mécouter  sans  ennui , 
Que  quand  je  me  produis  par  la  bouche  d'autrui. 

Voilà,  Monsieur,  une  petite  peinture  que  je  fis  de 
moi-même  il  y  a  vingt  ans3.  Je  ne  vaux  guère  mieux  à 
présent.  Quoi  qu'il  en  soit,  Monseigneur  le  Surintendant 
a  voulu  avoir  ces  six  vers  ;  et  je  ne  suis  pas  fâché  de 
lui  avoir  fait  voir  que  j'ai  toujours  eu  assez  d'esprit  pour 
connoîtremes  défauts,  malgré  l'amour-propre  qui  semble 
être  attaché  à  notre  métier.  J'obéis  donc  sans  répu- 
gnance aux  ordres  qu'il  lui  a  plu  m'en  donner ,  et  vous 
supplie  de  me  ménager  un  moment  d'audience  pour 
prendre  congé  de  lui ,  puisqu'il  a  voulu  que  je  l'impor- 
tunasse encore  une  fois.  Il  me  témoigna,  dimanche  der- 
nier, assez  de  bonté  pour  me  faire  espérer  qu'il  ne  dé- 
daigneroit  pas  de  prendre  quelque  soin  de  moi  ;  et  je  ne 
doute  point  que  tôt  ou  tard  elle  n'aye  son  effet,  princi- 

i.  Voyez  sur  la  source  de  cette  lettre  la  iVoft  ce,  p.  422. —  SurPellisson 
et  sur  ses  rapportsavee  notre  poëte,  voyez  tome  VI,  p.  io3,  et  ci-dessus., 
p.  3i5-32i.  Les  six  vers  rapportés  au  début  de  cette  lettre  doivent 
avoir  été  composés  peu  après  le  Rondeau  sur  le  Cid,  vers  l'année  i638, 
ainsi  que  nous  l'avons  indiqué  ci-dessus,  p.  80,  dans  une  note  où  par 
erreur  nous  désignons  cette  lettre  sous  le  chiffre  22,  au  lieu  de  21. 

2.  Granet  et  les  éditeurs  suivants  ont  supprimé  cette  date,  et  ont 
placé  ce  billet  dans  les  OE  livres  diverses. 

3.  Dans  Granet  :  «  près  de  vingt,  ans;  »  et  à  la  ligne  suivante  : 
Monsieur,  pour  Mgr,  qui  est  dans  l'original,  où  le  mot  Surintendant 
est  aussi  remplacé  par  une  abréviation,  de  même  qu'à  la  première 
ligne  de  la  prose  il  y  a  Mr,  pour  Monsieur. 


478  LETTRES. 

paiement  quand  vous  prendrez  la  peine  de  l'en  taire  sou- 
venir. Je  me  promets  cela  de  la  généreuse  amitié  dont 
vous  m'honorez,  et  suis  à  vous  de  tout  mon  cœur. 

Corneille. 


22.  DE    CORNEILLE    A    l'aBBÉ    DE    PURE1. 

A  Rouen,  ce  9  juillet  i658. 
Monsieur  , 

L'inquiétude  dont  vous  m'écrivez  n'est  pas  une  petite 
marque  de  votre  amitié,  et  me  fait  bien  voir  que  j'ai  eu 
raison  d'y  prendre  une  entière  confiance.  Je  me  suis 
enhardi  de  vous  écrire  en  faveur  d'un  de  mes  parents 


1.  Voyez  sur  cette  lettre  inédite  la  Notice,  p.  422.  Les  frères 
Corneille  étaient  en  correspondance  suivie  avec  l'abbé  de  Pure 
et  quel  que  fût  celui  qui  tînt  la  plume,  il  écrivait  en  général  au 
nom  de  tous  deux.  Dans  les  lettres  de  Thomas,  on  en  trouve  une 
datée  de  Rouen,  du  «  19  de  mai  i658,  »  et  adressée  à  cet  abbé  pour 
le  remercier  de  la  quatrième  partie  de  sa  Précieuse;  cette  lettre  ren- 
ferme un  passage  intéressant  sur  ce  que  Pierre  Corneille  disait  de  ce 
roman  :  a  Si  la  haute  estime  que  j'ai  pour  tout  ce  qui  part  de  vous, 
et  la  satisfaction  que  j'ai  reçue  de  la  lecture  de  vos  trois  premières 
parties  de  la  Précieuse^  m'en  firent  d'abord  attendre  une  entière  de 
cette  conclusion,  mon  frère,  qui  l'avoit  lie  et  admirée,  m'en  fut  un 
garant  assuré  pour  en  tenir  le  jugement  moins  suspect  que  la  mo- 
destie avec  laquelle  vous  me  préparez  à  souffrir  des  défauts  qu'il  n'y 
a  pu  remarquer.  C'est  par  lui  que  je  sais  déjà  avec  quelle  délicatesse 
et  de  termes  et  de  pensées  vous  continuez  à  examiner  les  questions 
les  plus  subtiles  de  l'amour,  surtout  en  voulant  établir  l'union  pure 
des  esprits  exempts  de  la  foiblesse  qui  nous  impose  la  nécessité  du 
mariage.  11  avoue  qu'il  n'en  connoît  pas  tout  le  fin,  et  il  se  persuade 
que  l'interruption  d'Eulalie,  qui  se  plaint  de  voir  employer  son  nom 
dans  un  roman,  n'est  pas  le  seul  endroit  qui  ait  ses  secrets  réservés. 
Mais  il  trouve  tant  de  liberté  d'esprit  dans  la  manière  agréable  dont 
vous  traitez  vos  idées  les  plus  mystérieuses,  qu'il  voit  partout  sujet 
d'admirer  l'heureuse  fécondité  de  votre  génie,  et   me  busse  dans  la 


LETTRES.  479 

qui  porte  même  nom  que  moi  et  est  mon  cousin  germain. 
Il  a  été  lâchement  outragé  par  le  fils  de  M.  du  Mesnil 
Haudrey ,  son  voisin  au  pays ,  qui  est  premier  capitaine 


certitude  que  je  n'y  rencontrerai  rien  qui  ne  me  satisfasse  pleinement, 
si  j'en  excepte  la  première  page,  qui  me  défend  d'espérer  une  plus 
ample  suite  d'un  ouvrage  si  galant,  après  cette  quatrième  partie.  »  — 
L'abbé  de  Pure,  dont  Corneille,  on  vient  de  le  voir,  faisaitgrandcas,  a 
porté  sur  notre  poète  dans  ce  roman  de  la  Précieuse  un  jugement  par- 
faitement motivé  et  exprimé  en  fort  bons  termes.  Il  mérite  d'être 
conservé  comme  un  des  rares  témoignages  du  goût  littéraire,  à  cer- 
tains égards  fort  délicat,  de  cet  abbé  si  sévèrement  jugé;  il  se  rattache 
d'ailleurs  de  très-près  à  notre  sujet,  et  nous  pensons  qu'on  nous  saura 
gré  de  le  donner  ici.  ce  II  ne  reste  plus,  reprit  Philonime,  qu'à  vous 
demander  quelle  est  la  poésie  que  vous  aimez.  Aimez -vous...? 
—  Je  vais  vous  interrompre  et  m 'interroger  moi-même  :  ne  vouliez 
vous  point  me  demander  quel  étoit  le  poète  que  j'aimois?  — ■  C'est 
cela  même ,  répondit  Philonime.  —  J'avoue ,  continua  Eulalie ,  que 
par-dessus  tout  et  hors  de  pair,  je  mets  Corneille.  Je  ne  puis  parler 
de  cet  homme  sans  respect,  sans  vénération,  et  quand  je  devrois  m'é- 
riger  en  diseuse  de  grands  mots,  il  faut  cfue  vous  me  permettiez  de 
m'acquitter  d'une  partie  de  ce  que  je  crois  lui  devoir.  Le  théâtre  n'a 
jamais  rien  vu  ni  montré  de  si  beau  que  ses  ouvrages,  l'esprit,  la 
conduite,  le  travail,  les  vers,  et  surtout  les  sentiments  honnêtes  et  les 
mouvements  de  la  droite  raison,  y  brillent  avec  tant  d'éclat  et  de 
douceur  tout  ensemble,  que  cela  me  paroît  au  delà  de  tous  les 
exemples,  et  au-dessus  de  toute  imitation.  Mon  Dieu!  poursuivit-elle, 
que  dira-t-on  de  ma  présomption  d'entreprendre  de  si  mal  louer  un 
si  grand  homme  ?  mais  il  faut  que  je  me  satisfasse  aux  dépens  de  tout 
ce  qui  m'entend.  Corneille,  au  dire  même  des  grands  hommes,  a  une 
chose  qui  lui  appartient  à  lui  seul,  qui  lui  est  propre,  et  d  où  personne 
n'a  pu  encore  approcher  :  c'est  qu'il  n'y  a  rien  de  si  divers,  de  si 
changeant  dans  toutes  ses  pièces,  qu'il  n'unisse  par  des  traits  si  adroits 
et  si  bien  ajustés  qu'il  semble  que  la  suite  soit  naturelle  et  sans  art, 
et  que  les  événements  supposés  sont  confondus  avec  les  véritables. 
Jamais  le  vers  ne  le  fait  éloigner  de  la  -chose  ;  jamais  la  rime  ne 
l'oblige  d'extravaguer  ;  jamais  les  grands  mots  ne  sont  violemment 
appliqués  :  tout  y  paroît  naturel  et  lié,  plutôt  par  l'ordre  des  choses 
que  de  l'ouvrage,  et  par  l'enchaînure  des  sujets  que  par  les  soins  de 
l'esprit;  mais  après  lui  j'aurois  peine  à  dire  du  bien  ou  du  mal  de 
tous  les  autres.  »  {La  Preticuse,  ou  le  Mystère  des  ruelles,  dédiée  à  telle 
qui  n'y  pense  pas,  i656,  tome  I,  p.  357~36o.) 


48o  LETTRES. 

au  régiment  de  Grammont,  et  par  conséquent  tire  sa 
plus  forte  recommandation  de  l'hôtel  de  Grammont.  Je 
sais  le  pouvoir  que  vous  y  avez,  et  comme  j'ai  cru  qu'il  y 
auroit  quelque  incivilité  de  vous  prier  de  solliciter  contre 
un  gentilhomme  qui  est  créature  de  Monsieur  le  Maré- 
chal, je  vous  ai  écrit  seulement  pour  vous  prier1  d'affoi- 
hlir  le  secours  qu'il  pourroit  tirer  de  ce  côté-là  ,  et  de 
faire  en  sorte,  s'il  se  peut,  que2  l'affaire  s'accommode  par 
votre  moyen3.  Ils  étoient  d'accord  pour  les  intérêts  ci- 
vils et  ses  parties  ont  voulu  longtemps  remettre  à  moi 
seul  la  satisfaction  d'honneur;  je  n'ai  pas  voulu  m'en 
charger  seul,  et  ai  fait  en  sorte  qu'ils  ont  nommé  un 
gentilhomme  de  leurs  amis,  à  l'avis  duquel  j'ai  passé  pour 
pacifier  les  choses.  On  nous  a  dédit  l'un  et  l'autre  à  cause 
que  nous  avons  trouvé  à  propos  que  l'offensant  deman- 
dât pardon  à  l'offensé,  bien  que  nous  en  ayons  exténué  la 
manière  pour  la  rendre  la  plus  douce  qu'il  a  été  possible; 
et  je  m'assure  que  si  Monsieur  le  Maréchal 4  étoit  en 
France,  et  qu'il  en  daignât  être  seul  juge,  il  la  régleroit 
en  une  forme  plus  avantageuse  pour  nous  que  nous  ne  la 
demandons.  L'outrage  est  grand,  et  intéresse  toute  notre 
famille.  Mon  parent  en  poursuit  la  réparation  au  con- 
seil ,  et  outre  la  ruine  qu'un  si  long  procès  leur  appor- 
tera ,  il  a  à  craindre  qu'ils  ne  se  rencontrent.  Ils  sont 
tous  deux  gens  de  cœur  et  de  main,  et  de  plus,  proches 
voisins,  ce  qui  augmente  le  danger.  J'avois  donc  donné 
une  lettre  à  ce6  parent  pour  vous,  et  l'avois  adressé  chez 

i .  Ces  mots  :  «  pour  vous  prier,  »  sont  écrits  dans  l'interligne. 

2 .  Ici  Corneille  a  écrit  qu'il;  puis  il  a  effacé  ces  deux  mots. 

3.  Ici  Corneille  a  mis  je  vous. 

4.  Antoine  III,  comte,  puis  maréchal  de  Guiche,  puis  maréchal 
de  Gramont,  mourut  en  1678,  âgé  de  soixante-quatorze  ans.  Au 
moment  où  Corneille  écrivait,  le  maréchal  de  Gramont  était  en  Alle- 
magne, en  qualité  d'ambassadeur,  avec  M.  de  Lionne. 

5.  Corneille  a  substitué  ce  à  /non,  qu'il  avait  écrit  d'abord. 


LETTRES.  481 

M.  Lamy,  où  il  n'a  pu  vous  rencontrer;  ce  n'est  pas  sans 
doute  celui  dont  M.  Lucas1  vous  a  donné  avis  et  à  qui 
vous  avez  rendu  visite,  puisqu'il  ne  vous  a  point  rendu 
de  lettres  de  ma  part.  Je  n'ai  point  eu  des  siennes2  depuis 
quinze  jours;  il  me  mandoit  que  quelque  assiduité  qu'il 
eût  rendue  au  Palais,  il  n'avoitpu  vous  trouver;  que  sa 
femme  lui  avoit  mandé  que  ses  parties  étant  retournées , 
l'avoient  fait  de  nouveau  rechercher  d'accord  par  l'en- 
tremise d'un  capucin  qui  prêchoit  l'octave  en  leur  quar- 
tier, et  qui  est  frère  de  ma  femme  ;  qu'il  attendoit  dans 
deux  jours  quel  effet  auroit  produit  sa  médiation,  et 
m'en  donneroit  avis  :  depuis  ce  temps-là  je  n'ai  eu  au- 
cunes nouvelles  ni  de  lui ,  ni  du  capucin  mon  beau- 
frère  3;  et  je  le  crois  retourné  au  pays.  Néanmoins,  puisque 
vous  avez  déjà  pris  tant  de  peine  en  ma  considération, 
achevez4,  s'il  vous  plaît,  et  prenez  encore  celle6  de  l'en- 
voyer chercher  à  son  hôtellerie,  et  m'en  faites  savoir  des 
nouvelles.  Il  loge  au  Paon,  tout  contre  la  poste  de  Rouen, 
où  vous  envoyez  vos  lettres ,  et  comme  je  vous  l'ai  déjà 
dit,  il  porte  même  nom  que  moi,  et  je  regarde  son 
affaire  comme  si  c'étoit  la  mienne.  Je  n'en  ai  écrit  qu'à 
M.  de  Boisrobert  et  à  vous;  mais  si  elle  ne  s'accorde, 
j'en  importunerai  tous  mes  amis,  et  irai  moi-même  la 
solliciter,  si  mes  affaires  et  ma  santé  me  le  permettent. 
J'abuse  bien  de  votre  bonté;  mais  aussi  j'y  prends  une 
confiance  parfaite. 

Mon  frère  vous  salue,  et  travaille  avec  assez  de  cha- 


t  .  Riche  marchand  de  Rouen,  frère  du  P.  Lucas  (voyez  ci-dessus, 
p.  299,  note  2),  et  père  du  célèbre  voyageur  Paul  Lucas.  Voyez  Notes 
sur  la  vie  de  Corneille,  par  M.  Edouard  Fournier,  p.  xxvni. 

2.  Première  rédaction  :  «  de  ses  lettres.  t> 

3.  Première  rédaction  :  a  qui  est  mon  beau-frère.  » 

4.  Ici  Corneille  avait  écrit  prenez;  il  a  ensuite  effacé  ce  mot. 

5.  Première  rédaction  :  a  prenez  la  peine.  » 

Coknetli.e.  x  3i 


482  LETTRES. 

grin.  Il  ne  donnera  qu'une  pièce  cette  année1.  Pour  moi, 
la  paresse  me  semble  un  métier  bien  doux,  et  les  petits 
efforts  que  je  fais  pour  m'en  réveiller  s'arrêtent  à  la  cor- 
rection de  mes  ouvrages.  C'en  sera  fait  dans  deux  mois, 
si  quelque  nouveau  dessein  ne  l'interrompt.  J'en  voudrais 
avoir  trouvé  un2,  Je  suis  de  tout  mon  cœur 

Votre  très-humble  et   rès-obligé  serviteur, 

Corneille. 
Monsieur, 

Je  vous  envoie  un  méchant  sonnet  que  je  perdis  hier 
au  jeu  contre  une  femme  dont  le  visage  et  la  voix  valent 
bien  quelque  chose8.  C'est  une  bagatelle,  que  j'ai  brouil- 
lée4 ce  matin.  Vous  en  aurez  la  première  copie.  Il  y  a  un 
peu  de  vanité  d'auteur  dans  les  six  derniers  vers. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  l'abbé  de  Pure. 
A  Paris. 


23.     DE    CORNEILLE    A.    l'aBBÉ   DE  PURE5. 

A  Rouen,  ce  1 2  de  mars  1659. 
Monsieur, 

Quelque  pleine  satisfaction  que  vous  ayez  reçue  de  la 

1 .  Les  frères  Parfait  mentionnent  à  la  fin  de  Tannée  1 658  (tome  VIII, 
p.  243  et  suivantes)  la  Mort  de  Commode,  tragédie  de  M.  Corneille  de 
Lisle,  représentée  sur  le  théâtre  du  Marais. 

2.  Ce  dessein  ou  sujet,  Corneille  le  trouva  dans  YOEdipe,  qui  fut, 
comme  il  nous  l'a  appris  lui-même,  «  un  ouvrage  de  deux  mois,  » 
et  qu'on  représenta  le  vendredi  24  janvier  i65g.  Voyez  tome  VI, 
p.  104  et  io5,  et  la  lettre  suivante. 

3.  Voyez  ci-dessus,  p.  140.  La  personne  qui  a  gagné  ce  sonnet,  et 
qui  y  est  désignée  sous  le  nom  d'Iris,  paraît  être  la  du  Parc. 

4.  On  lit  ici  le  mot  à  sous  une  rature. 

5.  L'original  autographe  de  cette  lettre  se  trouve  à  la  Bibliothèque 
impériale,  fonds  français,  n°  j  2763,  Lettres  originales,  tome  II,  fol.  i55 
et  i56. 


LETTRES.  483 

nouvelle  représentation  d'OEdipe*,  je  puis  vous  assurer 

qu'elle  n'égale  point  celle  que  j'ai  eue  à  lire  votre  lettre, 

soit  que  je  la  regarde  comme  un  gage  de  votre  amitié  , 

soit  que  je  la  considère  comme  une  pièce  d  éloquence 

remplie  2  des  plus  belles  et  des  plus  nobles  expressions 

que  la  langue  puisse  souffrir.  En  vérité,  Monsieur,  quelque 

approbation  qu'aye  emportée8  notre  nouvelle  Jocaste, 

elle  n'a  point  fait  faire  tant  de  ha  !  ha  !  dans  l'Hôtel  de 

Bourgogne  que  votre  lettre  dans  mon  cabinet;  mon  frère 

et  moi  les  avons  redoublés  à  toutes  les  lignes  ,  et  y  avons 

trouvé  de  continuels  sujets  d'admiration.  Je  suis  ravi  que 

Mlle  de  Beauchâteau*  aye  si  bien  réussi  ;  votre  lettre  n'est 

pas  la  seule  que  j'en  ai  vue  :  ou  a  mandé  du  Marais  à  mon 

frère   qu'elle  avoit  étouffé  les  applaudissements  qu'on 

donnoit  à  ses  compagnons6,  pour  attirer  tout  à  elle  ;  et 

M.  Floridor6  me  confirme  tout  ce  que  vous  m'en  avez 

mandé.  Je  n'en  suis  point  surpris ,  et  il  n'est  rien  arrivé 

que  je  ne  lui  aye  prédit  à  elle-même ,  en  lui  disant  adieu, 

quand  je  sus  l'étude  qu'elle  faisoit  de  ce  rôle.  Je  souhaite 

i,    Voyez  ci-dessus,  p.  482,  note  2. 

2.  Corneille  avait  écrit  le  mot  pleine;  il  l'a  effacé  et  l'a  remplacé 
par  remplie. 

3.  Première  rédaction  :  «  reçue.  » 

4-  Madeleine  Dubouget,  femme  de  François  Chatelet,  dit  Beauchà- 
leau.  Elle  avait  créé  le  rôle  de  l'Infante  dans  le  Cid  (voyez  tome  III , 
p.  i5),  et  avait  joué  Camille  dans  Horace  (\oyez  tome  III,  p.  202), 
puis  Erixe  dans  Sophonisbe  (voyez  tome  VI,  p.  4^2).  Elle  figure, 
en  1674,  en  tête  du  tableau  des  noms  des  acteurs  et  actrices  qui  com- 
posent présentement  la  troupe  royale ,  par  ordre  d'ancienneté,  dans  le 
Théâtre-François  de  Chapuzeau  (p.   184). 

5.  A  ses  compagnes,  dans  les  éditions  modernes,  ce  qui  est  un  éloge 
beaucoup  moins  étendu. 

6.  Le  comédien  Floridor  ,  qui  très-probablement  jouait  le  rôle 
d'Œdipe,  et  qui,  en  sa  qualité  de  chef  de  troupe,  complimenta  le 
Roi  lorsqu'il  vint  voir  cette  pièce.  Voyez  à  ce  sujet  tome  VI, 
p  107-109;  et  sur  Floridor  et  les  pièces  qu'il  a  jouées,  tome  II, 
p.  427,. notes  2  et  3;  tome  W,  p.   126;  et  tome  VI,  p.  4^2. 


484  LETTRES. 

seulement  pouvoir  trouver  un  sujet  assez  beau  pour  la 
faire  paroître  dans  toute  sa  force  ;  je  crois  qu'elle  pren- 
droit  bien  autant  de  soin  pour  faire  réussir  un  original 
qu'elle  en  a  fait  à  remplir  la  place  de  la  malade1.  Je  suis 
marri  de  la  difficulté  que  rencontre  M.  Bois[robert]2.  A 
ne  vous  rien[cach]er3,  je  ne  suis  point  fâché  d[e  n'être] 

point  à  Paris  en  ce  rencontre  où  je  me dans  la  nécessité 

de  désobliger  un  des  deux.  Le  poste  où  est  son  opposant 
est  si  considérable ,  que  je  crains  pour  lui  qu'il  ne  fasse 
venir  bien  des  voix.  Je  souhaite  d'apprendre  bientôt  qu'il 
se  soit  relâché,  et  que  notre  ami  ait  eu  ce  qu'il  demande, 
avec  l'agrément  de  tout  le  monde.  Je  suis  de  tout  mon 
cœur, 

Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-affectionné  serviteur, 

Corneille. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  l'abbé  de  Pure, 
à  Paris. 


i .  On  ne  sait  point  quelle  était  cette  malade. 

2.  Deux  déchirures  qui  se  sont  faites  dans  le  second  feuillet  de  la 
lettre,  lorsqu'on  l'a  découverte,  empêchent  de  lire  la  fin  de  ce  nom 
et  quelques  mots  dont  nous  allons  parler  dans  la  note  suivante. 

3.  Les  mots  ou  portions  de  mots  entre  crochets  sont  des  restitu- 
tions. Dans  le  premier  endroit  les  éditeurs  ont  mis  celer;  mais  nous 
croyons  qu'il  y  a  un  peu  trop  d'espace  pour  lire  ainsi,  et  nous  pré- 
férons cacher.  La  lacune  que  nous  avons  laissée  est  comblée  par  les 
éditeurs  au  moyen  du  mot  verrois ,  qui  convient  bien  pour  le  sens , 
mais  qui  n'est  assurément  pas  celui  que  Corneille  avait  écrit,  Les 
deux  premières  syllabes  du  mot  qui  manque  commençaient  chacune 
par  une  lettre  à  queue  descendante,  peut-être  jugerois. 


LETTRES.  485 

24.     I>E    CORNEILLE    A    L'ABBÉ    DE    PURE1. 

A  Rouen,  ce  2  5  d'août  1660. 
Monsieur, 

Un  petit  séjour  aux  champs,  et  un  peu  d'indisposition 
à2  la  ville,  m'ont  empêché  de  vous  remercier  plus  tôt  du 
dernier  présent  que  vous  m'avez  fait.  Je  ne  suis  pas  as- 
sez récent  de  mon  latin  pour  me  vanter  d'entendre  tous 
les  mots  choisis3  dont  vous  avez  semé  cet  ouvrage  ;  mais 
je  me  connois  assez  en  ce  genre  de  poésie  pour  assurer 
qu'il  y  a  des  strophes  dignes  d'Horace.  Il  y  en  a  quel- 
ques-unes où  vous  avez  un  peu  trop  négligé  le  tour  du 
vers  ,  qui  n'a  pas  assez  de  facilité  ;  mais ,  à  tout  prendre, 
c'est  un  très-beau  travail ,  et  un  dessein  tout  à  fait  beau 
de  vous  écarter  de  la  route  des  autres.  Si  vous  l'eussiez 
exécuté  en  françois ,  il  auroit  eu  une  vogue  merveil- 
leuse. Le  latin  lui  ôtera  sans  doute  quelque  chose;  il  est 
si  recherché  qu'il  n'est  pas  intelligible  à  ceux  qui  n'y 
savent  que  le  plain-chant  *,  il  m'échappe  en  quelques  lieux, 
et  je  m'assure  que u  quelques-uns  des  lecteurs  en  sau- 
ront encore  moins  que  moi.  Cependant  trouvez  bon  que 
je  vous  rende  de  très-humbles  grâces,  et  de  l'exemplaire 
que  vous  m'en  avez  envové ,  et  de  la  manière  dont  vous 
y  avez  parlé  de  moi 6 . 

1.  L'original  autographe  de  cette  lettre  se  trouve  aux  folios  157 
et  i58  du  recueil  indiqué  page  482,  note  5.  On  a  plusieurs  lettres 
de  Thomas,  qui,  par  leurs  dates,  se  placent  entre  celle-ci  et  la  pré- 
cédente (n°  23).  Dans  l'une  d'elles,  du  4  avril  i65(),  on  lit  :  «  Mon 
frère  vous  assure  de  ses  services  et  a  donné  charge  à  M.  Courbé  de 
vous  porter  son  OEdlpe.  » 

2.  En,  dans  les  éditions  modernes. 

3.  Première  rédaction  :  «  recherchés.  » 

4.  Première  rédaction  :  «  que  vous  aurez x> 

5.  Nous  n'avons  pu  voir  ce  recueil  de  poésies  latines  de  l'abbé  de 
Pure  ;  nous  ne  l'avons  même  trouvé  mentionné  dans  aucune  des  di- 
verses listes  de  ses  ouvrages  que  renferment  les  bibliographies.  Les 


486  LETTRES. 

Je  suis  à  la  fin  d'un  travail  fort  pénible  sur  une  ma- 
tière fort  délicate.  J'ai  traité  en  trois  préfaces  les  prin- 
cipales questions  de  l'art  poétique  sur  mes  trois  volumes 
de  comédies1.  J'y  ai  fait  quelques  explications  nouvelles 
d'Aristote  ,  et  avancé  quelques  propositions  et  quelques 
maximes  inconnues  à  nos  anciens.  J'y  réfute  celles2  sur 
lesquelles  l'Académie  a  fondé  la  condamnation  du  Cid, 
et  ne  suis  pas  d'accord  avec  M.  d'Aubignac  de  tout  le 
bien  même  qu'il  a  dit  de  moi.  Quand  cela  paroîtra,  je  ne 
doute  point  qu'il  ne  donne  matière  aux  critiques  :  prenez 
un  peu  ma  protection.  Ma  première  préface  examine  si 
l'utilité  ou  le  plaisir  est 3  le  but  de  la  poésie  dramatique  ; 
de  quelles  utilités4  elle  est  capable,  et  quelles  en  sont  les 
parties,  tant  intégrales,  comme  le  sujet  et  les  mœurs, 
que  de  quantité,  comme  le  prologue,  l'épisode  et 
l'exode.  Dans  la  seconde  ,  je  traite  des  conditions  du  su- 
jet de  la  belle  tragédie  ;  de  quelle  qualité  doivent  être  les 
incidents6  qui  la  composent,  et  les  personnes  qu'on  y  in- 
troduit, afin  d'exciter  la  pitié  et  la  crainte;  comment  se 
fait  la  purgation  des  passions  par  cette  pitié  et  cette  crainte, 


lettres  adressées  à  l'abbé  de  Pure  que  possède  la  Bibliothèque  impé- 
riale, et  dont  les  quatre  autographes  de  Corneille  que  nous  reprodui- 
sons ici  sous  les  nos  23,  24,  26  et  27,  ont  autrefois  fait  partie,  ne 
nous  ont  fourni  non  plus  aucun  renseignement  précis  à  ce  sujet.  Nous 
avons  seulement  recueilli  la  mention  suivante  dans  une  lettre  signée 
Delacoste,  et  datée  de  Rouen  le  18  juillet  1660  :  «  Je  suis  persuadé 
que  votre  latin  ne  ressemble  pas  au  mien,  mais  cela  n'empêche  pas 
que  je  n'attende  avec  impatience  celui  que  vous  me  devez  envoyer. 
Les  illustres  frères  (Pierre  et  Thomas  Corneille)  et  l'incomparable  Bré- 
beuf  en  ont  autant  que  moi.  »  (Fonds  français,  n°   15209,  folio  74 

verso 0 

1.  Voyez  les  trois  Discours  sur  le  théâtre,  tome  I,  p.  i3-i22. 

2.  Corneille  avait  d'abord  écrit  les. 

3.  Corneille  avait  d'abord  écrit  sont. 

4.  Toutes  les  éditions  donnent  :  «  de  quelle  utilité,  »  au  singulier. 

5.  Première  rédaction  :  «  des  incidents.  » 


LETTRES.  4«7 

et  des  moyens  de  tra  iter  les  choses  selon  le  vraisemblable 
ou  le  nécessaire.  Je  parle,  en  la  troisième,  des  trois  uni- 
tés :  d'action1,  de  jour  et  de  lieu.  Je  crois  qu'après  cela 
il  n'y  a  plus  guère  de  question  d'importance  à  remuer, 
et  que  ce  qui  reste  n'est  que  la  broderie  qu'y  peuvent 
ajouter  la  rhétorique  ,  la  morale  et  la  politique. 

En  ne  pensant  vous  faire  qu'un  remercîment ,  je  vous 
rends  insensiblement  compte  de  mon  dessein.  L'exécu- 
tion en  demandoit  une  plus  longue  étude  que  mon  loisir 
ne  m'a  pu 2  permettre.  Vous  n'y  trouverez  pas  grande  élo- 
cution  ni  grande  doctrine;  mais,  avec  tout  cela,  j'avoue 
que  ces  trois  préfaces  m'ont  plus  coûté  que  n'auroient 
fait  trois  pièces  de  théâtre.  J'oubliois  à  vous  dire  que  je 
ne  prends  d'exemples  modernes  que  chez  moi  ;  et  bien 
que  je  contredise  quelquefois  M.  d'Aubignac  et  Mes- 
sieurs de  Y  Académie ,  je  ne  les  nomme  jamais ,  et  ne  parle 
non  plus  d'eux  que  s'ils  n'avoient  point  parlé  de  moi 8. 
J'y  fais  aussi  une  censure  de  chacun  de  mes  poèmes  en 
particulier,  où4  je  ne  m'épargne  pas.  Derechef,  prépa- 
rez-vous à  être  de  mes  protecteurs  ,  et  croyez  que  je  suis 
toujours, 

Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  l'abbé  de  Pure, 
à  Paris. 

i.  Corneille  avait  écrit  «  de  jour»  en  premier,  puis  il  a  effacé 
ces  deux  mots. 

2.  N'a  pu,  dans  toutes  les  éditions. 

3.  Corneille  avait  commencé  la  phrase  suivante  en  écrivant  Dere- 
chef\  puis  il  a  effacé  ce  mot. 

4.  Et,  dans  toutes  les  éditions 


488  LETTRES. 

25.  DE    CHAPELAIN    A    CORNEILLE1. 

3o  mars  1661. 
Monsieur  , 

Aussitôt  que  mon  indisposition  m'a  permis  de  sortir,  j'ai  vu  Ma- 
dame la  duchesse  de  Nemours  sur  le  dessein  de  lui  faire  agréer  un 
de  vos  fils  pour  page2,  et  de  la  plus  adroite  manière  que  j'ai  pu,  je 
lui  ai  proposé  ce  que  vous  souhaitiez  d'elle.  Votre  mérite  et  sa  con- 
noissance  m'ont  facilité  la  négociation.  Elle  m'a  même  fait  l'honneur 
d'y  considérer  mon  entremise  et  la  part  que  je  prends  en  vos  intérêts. 
Sa  réponse  a  été  qu'elle  seroit  bien  aise  de  vous  donner  cette  marque 
de  sa  bienveillance,  et  du  cas  qu'elle  fait  de  votre  personne,  lorsqu'il 
y  auroit  une  place  vacante  pour  cela;  qu'on  l'avoit  prévenue  pour  la 
première;  que  néanmoins  il  ne  seroit  pas  impossible  qu'elle  n'en 
demeurât  la  maîtresse,  et  qu'en  ce  cas  je  vous  pouvois  assurer  que 
cette  place  seroit  pour  votre  fils;  mais  que  si  elle  étoit  obligée  de 
tenir  sa  parole,  la  première  d'après  seroit  pour  lui  5.  Je  suis  d'avis, 

1.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  42^.  M.  Taschereau  a  publié 
cette  lettre  à  la  page  177  de  la  seconde  édition  de  son  Histoire  de  la 
vie  et  des  ouvrages  de  P.  Corneille. 

2.  Son  second  fils,  tué  au  siège  de  Grave  :  voyez  ci-dessus,  p.  188, 
note  4,  et  p.  189,  note  2. 

3.  Le  succès,  comme  le  remarque  M.  Taschereau,  fut  plus  prompt 
que  Chapelain  lui-même  n'avait  osé  l'espérer.  Nous  l'apprenons  par 
la  Muse  historique  de  Loret  du  3o  avril  suivant.  Sa  lettre  de  ce  jour- 
là,  intitulée:  Equivocante,  à  cause  d'un  jeu  de  mots,  qu'il  a  le  bon 
goût  de  ne  pas  défendre,  commence  ainsi  : 

ï  Princesse,  vous  faites  la  grâce 
Aux  sieurs  courtisans  du  Parnasse 
D'avoir  de  l'estime  pour  eux, 
Témoin  cet  instinct  généreux 
Qui  vous  a  fait  prendre  pour  page 
Un  jouvenceau  de  Rotomage  * , 
Parce  qu'il  est  le  noble  enfant 
De  Corneille,  esprit  triomphant, 
Qui  par  les  beaux  vers  de  sa  veine 
A  surpassé  sur  notre  scène 
Les  poètes  'es  mieux  sensés, 

*  Rouen.  (Note  de  Loret.) 


LETTRES.  489 

Monsieur,  que  vous  lui  écriviez  une  lettre  fort  respectueuse  et  fort 
pleine  de  gratitude  pour  la  faveur  qu'elle  vous  fait,  afin  de  l'en  faire 
souvenir  et  d'engager  toujours  la  chose.  Cependant  il  sera  bon  de  la 
tenir  secrète,  car  on  ne  sait  ce  qui  peut  arriver,  et  il  faut  traiter  dé- 
licatement avec  cette  princesse,  de  l'humeur  dont  nous  la  connois- 
sons.  Vous  me  pourrez  envoyer  la  lettre,  que  j'accompagnerai  de 
mes  offices  en  la  lui  rendant  5  et  un  peu  mieux  que  si  c'étoit  pour 
moi-même.  Je  vous  suis  au  reste  obligé  de  m'a  voir  offert  cette  occa- 
sion de  vous  témoigner  que  je  suis  véritablement, 

Monsieur, 

Votre,  etc. 

Chapelain. 

Suscriptïon  :  À  Monsieur  Corneille  l'aîné,  à  Rouen. 


26.    DE    CORNEILLE    A    l'aBBÉ    DE  PURE1. 

A  Rouen,  ce  3  de  novembre  1661. 
Monsieur, 

A  quoi  pensez-vous  de  me  donner  une  joie  imparfaite, 
et  de  me  rendre  compte  de  la  moitié  dune  pièce  si  rare, 
pour  m'en  faire  attendre  en  vain  l'achèvement  ?  Pensez- 


Tant  les  présents  que  les  passés. 
Je  n'entre  point  en  compétence 
Avec  sa  sublime  science; 
Mais  sans  faire  ici  l'important, 
Je  vous  ai  présenté  pourtant, 
En  vous  dédiant  mes  ouvrages, 
Mille  fois  plus  que  lui  des  pages 
Depuis  pour  le  moins  douze  hivers, 
Mais  c'étaient  des  pages  de  vers. 
Si  l'équivoque  est  un  peu  plate, 
Et  non  pas  fine  et  délicate, 
Excusez  le  peu  qu'elle  vaut, 
Et  lisez  ceci  bas  ou  haut.  » 

1.  L'autographe  de  cette  lettre  se  trouve  aux  folios  i5o,  et  160  du 
recueil  indiqué  page  482,  note  5. 


490  LETTRES. 

vous  que  ce  que  vous  me  mandez  de  trois  actes  ne  me 
rende  pas  curieux,  voire  impatient  de  savoir  des  nou 
velles  des  trois  qui  restent1  ?  C'est  ce  qui  a  différé  ma  ré 
ponse,  et  la  prière  que  j'ai  à  vous  faire  de  ne  vous  con- 
tenter pas  du  bruit  que  les  comédiens  font  de  mes  deux 
actes2,  mais  d'en  juger  vous-même  et  m'en  mander  votre 
sentiment,  tandis  qu'il  y  a  encore  lieu  à  la  correction. 
J'ai  prié  Mlle  des  OEillets3,  qui  en  est  saisie,  de  vous  les 
montrer  quand  vous  voudrez;  et  cependant  je  veux  bien 
vous  prévenir  un  peu  en  ma  faveur,  et  vous  dire  que  si 
le  reste  suit  du  même  air4,  je  ne  crois  pas  avoir  rien  écrit 
de  mieux.  Mes  deux  héroïnes  ont  le  même  caractère  de 
vouloir  épouser  par  ambition  un  homme  pour  qui  elles 
n'ont  aucun  amour,  et  le  dire  à  lui-même  ;  et  toutefois  je 
crois  que  cette  ressemblance  se  trouvera  si  diversifiée  par 
la  manière  de  l'exprimer,  que  beaucoup  ne  s'en 6  aper- 
cevront pas.  Elles  s'offrent  toutes  deux  à  lui  sans  blesser 
la  pudeur  du  sexe  ni  démentir  la  fierté  de  leur  rang.  Les 

i.  «  De  ceux  qui  restent,  »  dans  toutes  les  éditions  ;  mais  il  y  a  bien 
dans  l'autographe  :  «des  trois  qui  restent,  »  soit  que  Corneille  ait,  ce 
qui  semble  fort  probable ,  écrit  la  seconde  fois  trois  ,  pour  deux  ; 
soit  que  de  Pure  ait  composé  une  pièce  avec  prologue  qu'on  ait  pu 
considérer  comme  étant  en  six  actes.  Il  est  du  reste  à  peu  près  certain 
que  cet  ouvrage  n'a  jamais  été  représenté  ni  même  imprimé,  car  de  Pure 
n'est  connu  comme  auteur  dramatique  que  par  sa  tragédie  à'Ostorius, 
publiée  en  1659  chez  Guillaume  de  Luyne,  et  dont  les  frères  Parfait 
rendent  compte  dans  leur  Histoire  du  Théâtre  franc  ois  (tome  VIII, 
l>.  2 8 3  et  suivantes). 

2.  Les  deux  premiers  actes  de  Sertorius ,  tragédie  de  Pierre  Cor- 
neille représentée  à  la  fin  de  février  1662.  Voyez  tome  VI,  p.  353 
et  suivantes. 

3.  Actrice  de  l'Hôtel  de  Bourgogne  (voyez  tome  VI,  p.  355),  qui 
joua  plus  tard  avec  un  grand  succès  le  rôle  de  Sophonisbe  (voyez 
tome  VI,  p.  452).  Elle  mourut  le  25  octobre  1670,  à  l'âge  de  qua- 
rante-neuf ans. 

4-    «  Du  même  art,  »  dans  toutes  les  éditions. 
5.   L'j,  au  lieu  de  s'en,  dans  toutes  les  éditions. 


LETTRES.  491 

vers  en  sont  assez,  forts  et  assez  nettovés,  et  la  nou- 
veauté de  ce  caractère  pourra  ne  déplaire  pas,  si  elle  est 
bien  soutenue  par  le  reste  de  l'action.  Je  vous  ai  déjà 
parlé  de  Tune,  qui  étoit  femme  de  Pompée.  Sylla  le  força 
de  la  répudier  pour  épouser  Emilia,  fille  de  sa  femme 
et  d'Emilius  Scaurus,  son  premier  mari.  Plutarque  et 
Appian  la  nomment  Antistie,  fille  du  préteur  Autistius. 
Un  évêque  espagnol,  nommé  Joannes  Gerundensis,  la 
nomme  Aristie,  et  son  père  Aristius  * .  Je  ne  doute  point 
qu'il  ne  se  méprenne  ;  mais  à  cause  que  le  mot  est  plus 
doux,  je  m'en  suis  servi,  et  vous  en  demande  votre  avis 
et  celui  de  nos  savants  amis.  Aristie  a  plus  de  douceur, 
mais  il  sent  plus  le  roman.  Antistie  est  plus  dur  aux 
oreilles,  mais  il  sent  plus  l'histoire  et  a  plus  de  majesté. 
Quicl  juris*?  J'espère  dans  trois  ou  quatre  jours  avoir 
achevé  le  troisième  acte.  J'y  fais  un  entretien  de  Pompée 
avec  Sertorius  que  les  deux  premiers  préparent  assez, 
mais  je  ne  sais  si  on  en  pourra  souffrir  la  longueur.  Il 
est  de  deux  cent  cinquante-deux  vers3.  Il  me  semble  que 
deux  hommes  tels  qu'eux,  généraux  de  deux  armées 
ennemies,  ne  peuvent  achever  en  deux  mots  une  confé- 
rence si  attendue  durant  une  trêve4.  On  a  souffert  Ginna 
et  Maxime,  qui  en  ont  consumé  davantage  à  consulter 
avec  Auguste.  Les  vers  de  ceux-ci  me  semblent  bien 
aussi  forts  et  plus  pointilleux ,  ce  qui  aide  souvent  au 
théâtre,  où  les  picoteries  soutiennent  et  réveillent  l'atten- 

[.  Voyez  tome  VI,  p.  358,  note  2. 

2.  Formule  usitée  dans  la  langue  du  droit,  qui  répond  tout  sim- 
plement ici  à  :  «  Qu'en  pensez-vous?  qu'en  jugez-vous?  » 

3.  Voyez  tome  VI,  p.  3g5,  à  la  fin  de  la  note  1. 

4-  Tout  ce  passage  a  été  fort  mal  donné  par  les  éditeurs  de  Cor- 
neille ;  voici  leur  texte  :  «  Il  me  semble  que  deux  hommes  belli- 
queux  ne  peuvent  achever  en  deux  mots  une  conférence  si  long- 
temps attendue,  v  Ils  ont  supprimé  les  mots  :  «  durant  une  trêve,  » 
qui  étaient  un  peu  difficiles  à  lire. 


49*  LETTRES. 

tion  de  l'auditeur.  Mon  autre  héroïne  n'est  pas  si  histo- 
rique qu'Aristie,  mais  elle  ne  laisse  pas  d'avoir  son  fon- 
dement en  l'histoire1 .  Je  la  fais  fille  de  ce  Viriatus  qui 
défit  tant  de  fois  les  Romains  en  Espagne2,  et  fut  enfin 
défait  douze  ou  quinze  ans  avant  la  venue  de  Sertorius, 
qui  fut  particulièrement  assisté  par  les  Lusitaniens ,  qui 
étoient  les  compatriotes  de  ce  grand  capitaine,  que  j'en 
fais  roi,  bien  que  l'histoire  n'en  fasse  qu'un  chef  de  bri- 
gands ,  qui  enfin  combattit  en  corps  d'armée.  J'ai  plus 
besoin  de  grâce  pour  Sylla,  qui  mourut  et  se  démit  de 
sa  puissance  avant  la3  mort  de  Sertorius;  mais  sa  vie  est 
d'un4  tel  ornement  à  mon  ouvrage  pour  justifier  les  armes 
de  Sertorius,  que  je  ne  puis  m' empêcher  de  le  ressusci- 
ter. Mon  auteur  moderne,  Joannes  Gerundensis,  le  fait 
vivre  après  Sertorius  ;  mais  il  se  trompe  aussi  bien  qu'au 
nom  d'Aristie.  Je  ne  demande  point  votre  avis  sur  ce 
dernier  point,  car  quand  ce  seroit  une  faute,  je  mêla 
pardonne,  ignosco  egomet  mi.  Adieu,  notre  ami  :  aimez- 
moi  toujours,  s'il  vous  plaît,  et  me  tenez  pour 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  l'abbé  de  Pure, 
à  Paris. 


i.  Voyez  tome  VI,  p.  35g. 

2.  Voyez  tome  VI,  p.  36o. 

3.  Première  rédaction  :  «  un  peu  avant  la.  » 
4*  Première  rédaction  :  «  il  sert  d'un.  » 


LETTRES.  493 

27.    DE    CORNEILLE    A    l'aBBE   DE  PURE1. 

A  Rouen,  ce  »5  d'avril  [1662]. 
Monsieur, 

L'estime  et  l'amitié  que  j'ai  depuis  quelque  temps 
pour  Mlle  Marotte  2  me  fait  vous  avoir  une  obligation 
très-singulière  de  la  joie  que  vous  m'avez  donnée  en 
m'apprenant  son  succès  et  les  merveilles  de  son  début. 
Je  l'avois  vue  ici  représenter  Amalasonte1 ,  et  en  avois 
conçu  une  assez  haute  opinion  pour  en  dire  beaucoup 
de  bien  à  M.  de  Guise  *  quand  il  fut  question,  vers  la  mi-ca- 
rême, de  la  faire  entrer  au  Marais;  mais  ce  que  vous  m'en 
mandez  passe  mes  plus  douces  espérances,  et  va  si  loin, 
que  mes  amis,  à  qui  j'ai  fait  part  de  votre  lettre,  veulent 
mal  gré  que  vous  en  aviez  un  peu  le  cœur  navré  quand 
vous  m'avez  écrit5.  Puisque  MM.  Boyer  et  Quinault  sont 

1.  L'autographe  de  cette  lettre  se  trouve  aux  folios  i53  et  i54  du 
recueil  indiqué  page  482,  note  5. 

2 .  Marotte  Beaupré,  très-jolie  actrice,  nièce  de  la  Beaupré,  de  l'«  ex- 
cellente comédienne,  qui  a  joué  dans  les  commencements  de  la  grande 
réputation  de  M.  Corneille,  »  dit  Segrais  dans  ses  Mémoires-anecdotes . 
Voyez  sur  la  demoiselle  Marotte  et  sur  sa  tante  un  long  article  dans 
Molière  et  sa  troupe,  par  H.  A.  Soleirol  (p.  70-75).  L'auteur,  faute 
d'avoir  connu  la  lettre  de  Corneille,  fixe  par  conjecture  l'entrée  de 
Marotte  au  théâtre  du  Marais  à  Pâques  1639. 

3.  Tragédie  de  Quinault,  représentée  pour  la  première  fois  à  Paris 
en  1657,  et  jouée,  à  ce  qu'il  paraît,  à  Rouen,  en  i658,  par  la  troupe 
de  Molière,  dont  Marotte  faisait  alors  partie. 

4.  Henri  II  de  Lorraine,  duc  de  Guise,  mort  le  2  juin  ï664-  Voyez, 
ci-dessus,  p.  182-184. 

5 .  Cette  rédaction  un  peu  obscure  est  bien  la  reproduction  exacte 
du  texte  autographe.  Corneille  avait  d'abord  écrit  que  avant  mal  gré, 
et  moi  après;  mais  il  a  soigneusement  effacé  ces  deux  mots,  qui  d'ail- 
leurs n'expliqueraient  rien.  Les  éditeurs  ont  mis  tout  à  fait  arbitrai- 
rement :  «  Mes  amis,  à  qui  j'ai  fait  part  de  votre  lettre,  veulent  la  lui 
communiquer  malgré  que  vous  en  aviez  un  peu  le  cœur  navré.  »  Sur 
quoi  M.  Parrelle  dit  en  note  :  «  Cette  locution  ne  serait  pas  reçue 
aujourd'hui.  » 


494  LETTRES. 

convaincus  de  son  mérite,  je  vous  conjure  de  les  obli- 
ger à  me  montrer  bon  exemple;  car  outre  que  je  serai 
bien  aise  d'avoir  quelquefois  mon  tour  à  l'Hôtel,  ainsi 
qu'eux,  et  que  je  ne  puis  manquer  d'amitié  à  la  reine 
Viriate1,  à  qui  j'ai  tant  d'obligation,  le  déménagement 
que  je  prépare  pour  me  transporter  à  Paris2  me  donne 
tant  d'affaires,  que  je  ne  sais  si  j'aurai  assez  de  liberté 
d'esprit  pour  mettre  quelque  chose  cette  année  sur  le 
théâtre*.  Ainsi,  si  ces  Messieurs  ne  les  secourent,  ainsi 
que  moi,  il  n'y  a  pas  d'apparence  que  le  Marais  se  réta- 
blisse; et  quand  la  machine  *,  qui  est  aux  abois,  sera  tout 
à  fait  défunte ,  je  trouve  que  ce  théâtre  ne  sera  pas  en 
trop6  bonne  posture.  Je  ne  renonce  pas  aux  acteurs6  qui  le 
soutiennent  ;  mais  aussi  je  ne  veux  point  tourner  le  dos  tout 
à  fait  à  Messieurs  de  l'Hôtel7,  dont  je  n'ai  aucun  lieu  de 
me  plaindre,  et  où  il  n'y  a  rien  à  craindre  quand  une  pièce 
est  bonne.  Ils  aspirent  tous  à  y  entrer,  et  ils  ne  sont  pas 

i .  Probablement  Mlle  des  OEillcts.  Voyez  ci-dessus,  p.  49° >  note  3  ; 
et  tome  VI,  p.  355. 

2.  Corneille,  au  commencement  du  mois  d'octobre,  n'était  pas 
encore  établi  à  Paris.  Voyez  les  premières  lignes  de  la  lettre  suivante. 

3.  Sophonisbe,  la  première  des  pièces  de  Corneille  représentée  après 
qu'il  eut  écrit  cette  lettre,  ne  fut  jouée  qu'au  mois  de  janvier  i663. 

4-  La  Toison  d'or  de  Corneille,  jouée  au  théâtre  du  Marais  au 
mois  de  février  1661  ,  fut  rejouée  l'année  suivante  jusque  vers  la  fin 
de  février.  Voyez  tome  VI,  p.  225-227. 

5.  Ce  mot  trop  manque  dans  toutes  les  éditions. 

6.  Première  rédaction  :  «  je  trouve  que  ces  Messieurs  ne  seront 
pas  en  trop  bonne  posture.  Je  ne  renonce  pas  à  eux.  » 

7.  Tallemaut  des  Réaux  a  remarqué  avec  quel  soin  Corneille 
s'est  appliqué  à  maintenir  les  deux  troupes  (voyez  notre  tome  I , 
p.  258).  —  Notre  poêle  avait  à  se  louer,  non-seulement  de  la  ma- 
nière dont  les  comédiens  de  l'Hôtel  jouaient  ses  pièces,  mais  du  res- 
pect et  de  l'admiration  que  certains  d'entre  eux  lui  témoignaient 
publiquement.  Voici  en  quels  termes  s'exprime,  en  tête  d'une  tragi- 
comédie  intitulée  :  le  Festin  de  pierre  ou  le  Fils  criminel,  publiée  a 
Amsterdam  en  1660,  le  sieur  de  Villiers ,  qui  était,  ainsi  qu'il  le 


LETTRES.  /,95 

assez  injustes  pour  exiger  de  moi  un  attachement  qu'ils 
ne  me  voudraient  pas  promettre.  Quelques-uns ,  à  ce 
qu'on  m'a  dit,  ont  pensé  passer  au  Palais-Royal.  Je 
ne  sais  pas  ce  qui  les  a  retenus  au  Marais;  mais  je  sais 
bien  que  ce  n'a  pas  été  pour  l'amour  de  moi  qu'ils  y 
sont  demeurés.  J'appris  hier  que  le  pauvre  Magnon1  est 

déclare  lui-même  dans  l'avis  au  Lecteur,  «  un  des  comédiens  de  la 
seule  troupe  royale,  et  seule  entrenue  par  Sa  Majesté.  » 

A  Monsieur  de  Corneille,  à  ses  heures  perdues. 

«  Monsieur,  si  vous  jugez  de  moi  comme  vous  devez,  vous  ne 
croirez  jamais  que  je  me  puisse  persuader  qu'il  y  ait  rien  de  bon 
goût  dans  ce  Festin.  Ce  n'est  point  du  tout  dans  cette  créance  que  je 
vous  dédie  cette  pièce,  c'est  un  hommage  que  je  vous  dois  et  que  je 
vous  rends,  non  pas  en  qualité  de  votre  confrère  en  Apollon,  comme 
vous  avez  voulu  dire  par  raillerie,  mais  en  celle  d'un  rimailleur,  qui 
ne  devoit  rien  mettre  au  théâtre  sans  votre  aveu....  D'abord  que  l'on 
entonnera  dans  le  Palais  :  «  Yoilà  le  Festin  de  pierre  ou  le  Fils  cri- 
«  minel,  »  mille  personnes  qui  ne  voudroient  pas  faire  un  pas  pour 
prendre  part  à  ce  Festin  dans  l'Hôtel  de  Bourgogne,  en  attendant 
leur  rapporteur  ou  leur  avocat,  verront  au  moins,  à  l'ouverture  de 
ce  livret,  de  quelle  façon  je  vous  honore,  et  qu'en  vous  seul  je  ré- 
vère plus  qu'Aristote,  plus  que  Sénèque,  plus  que  Sophocle,  plus 
qu'Euripide,  plus  que  Térence,  plus  qu'Horace,  plus  que  Plaute,  et 
généralement  plus  que  tous  ceux  qui  se  sont  mêlés  de  donner  des 
règles  à  notre  théâtre.  » 

I.  Nous  lisons  dans  la  Muse  historique  de  Loret  du  29  avril  1662  : 

Magnon,  esprit  tout  plein  de  feu, 
Fut  assassiné  depuis  peu, 
C'est-à-dire  l'autre  semaine, 
Vers,  dit-on,  la  Samaritaine. 

Ce  Magnon  était  un  poète  tragique ,  qui  avait  eu  un  instant  l'inten- 
tion de  traiter  le  sujet  de  Stilicon,  puis  s'était  retiré  devant  Thomas 
Corneille,  qui  nous  a  appris  ce  fait  en  ces  termes  dans  une  lettre  du 
Ier  décembre  ir>5g,  adressée  à  l'abb?  de  Pure  :  «  Je  ne  saurois  assez 
vous  remercier  du  soin  que  vous  vous  êtes  donné  de  voir  M.  Ma- 
gnon en  ma  faveur.  Je  vous  l'aurois  néanmoins  épargné,  si  j'eusse 
prévu  que  M.  de  la  Coste  eût  dû  vous  écrire  sur  le  bruit  qui  couroit 
d'un  double  Stilicon.  J'en  ai  assez  bien  jugé  pour  avoir  toujours  cru 
que  c'étoit  une  fausse  alarme,  et  vous  m'auriez  rendu  un  mauvais 


\96  LETTRES. 

mort  de  ses  blessures.  Je  le  plains,  et  suis  de  tout  mon 
cœur, 

Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 

Suscription  :  A  Monsieur,  Monsieur  l'abbé  de  Pure , 
à  Paris. 


28.    DE    CHAPELAIN    A    CORNEILLE1. 

4  octobre  1662. 
Monsieur, 

Vous  tardez  trop  à  venir  vous  établir  à  Paris2,  et  je  ne  saurois 
plus  vous  attendre  pour  vous  remercier  de  bouche  du  présent  exquis 
que  votre  jeune  page5  m'a  fait  de  votre  part.  La  beauté  de  Sertorius, 
qui  m'a  paru  encore  plus  grande  sur  le  papier  que  sur  le  théâtre, 
me  sollicite  trop  puissamment  de  vous  en  témoigner  ma  reconnois- 
sance  4.  Elle  est  proportionnée  au  mérite  de  la  pièce,  c'est-à-dire 
qu'elle  est  extrême,  jusques  à  m'ôter  le  moyen  de  l'exprimer.  Mais 
vous,  Monsieur,  qui  entrez  si  bien  dans  le  cœur  de  vos  personnages, 
vous  n'aurez  pas  de  peine  à  entrer  dans  le  mien,  et  vous  vous  direz 

office  auprès  de  M.  Magnon,  si  vous  lui  aviez  laissé  croire  que  j'eusse 
besoin  de  l'assurance  qu'il  me  donne  pour  n'appréhender  pas  le 
péril  de  la  contrefaçon.  Je  reçois  sa  lettre  comme  une  civilité  obli- 
geante ,  et  je  lui  ferois  tort  si ,  doutant  qu'il  fût  capable  de  se  man- 
quer à  soi-même ,  je  me  persuadois  que  la  considération  de  mes 
intérêts  eût  contribué  quelque  chose  à  l'éloigner  d'une  entreprise 
qu'on  lui  a  faussement  imputée.  » 

1.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  425.  — M.  Taschereau  a  publié 
nette  lettre  aux  pages  i83  et  184  de  la  seconde  édition  de  son  His- 
toire de  la  vie  et  des  ouvrages  de  P.  Corneille, 

2.  Voyez  ci-dessus,  p.  494  et  note  2» 

3.  Son  second  fils,  page  de  la  duchesse  de  Nemours.  Voyez  ci- 
dessus,  p.  488. 

4  •  Chapelain  devait  en  effet  avoir  reçu  depuis  un  certain  temps  déjà 
le  volume  de  Sertorius,,  dont  l'Achevé  d'imprimer  est  du  8  juillet  1662. 


LETTRES.  497 

pour  moi  ce  que  je  ne  vous  puis  assez  bien  dire.  Vous  penserez, 
s'il  vous  plaît,  la  même  chose  de  Conrart,  à  qui  j'ai  envoyé  le  même 
régal  en  votre  nom,  et  qui  vous  en  auroit  rendu  ses  grâces  lui-même 
s'il  avoit  les  mains  assez  libres  et  s'il  en  disposoit  aussi  bien  que  de 
son  esprit1.  Il  m'a  fait  conjurer  de  ne  vous  laisser  pas  ignorer  sa 
gratitude,  et  vous  la  croirez  aisément  d'un  aussi  homme  d'honneur 
et  autant  votre  admirateur  que  lui.  Il  vous  le  dira  de  sa  propre 
bouche  quand  vous  serez  tous  deux  ici.  C'est  de  quoi  je  ne  le  presse 
pas  moins  que  vous,  vous  y  souhaitant  également  pour  ma  joie;  car 
je  ne  suis  pas  moins  touché  de  votre  vertu  que  de  la  sienne,  ni  ne 
suis  pas  plus  son  ami  que  je  ne  suis, 

Monsieur, 

Votre,  etc. 

Chapelain. 


29. DE    CORNEILLE 

A     MONSIEUR    DE    SAINT-ÉVREMOND2. 

[1666.] 

Monsieur  , 

L'obligation  que  je  vous  ai  est  d'une  nature  à  ne  pou- 
voir jamais  vous  en  remercier  dignement3;  et  dans  la 
confusion  où  j'en  suis4,  je  m'obstiuerois  encore  dans  le  si- 
lence ,  si  je  n'avois  peur  qu'il  ne  passât  auprès  de  vous 
pour  ingratitude.  Bien  que  les  suffrages  de  l'importance 

j.  Valentin  Conrart,  l'un  des  premiers  académiciens  ,  mort  le 
?.3  septembre  1675.  «  Mille  raisons,  dit  d'Olivet,  peuvent  mettre  ob- 
stacle à  la  fécondité  des  meilleures  plumes;  et  une  partie  tout  au  moins 
de  ces  raisons  avoit  lieu  à  l'égard  de  M.  Conrart ,  qui  fut  horrible- 
ment goutteux  les  trente  dernières  années  de  sa  vie.  »  (  Histoire  de 
ï Académie  française,  édition  de  M.  Livet,  tome  II,  p.  141  •) 

a.   Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  422  et  4^3. 

3.  Corneille  adressa  cette  lettre  à  Saint-Évremond  pour  le  remer- 
cier de  l'éloge  qu'il  avait  fait  de  Sophonisbe  dans  sa  Dissertation  sur 
/'Alexandre  de  Racine.  On  trouvera  le  morceau  dont  il  est  question  ici 
dans  notre  tome  VI,  p.  4^7>  note  *• 

1    Je  suis,  dans  les  OEuvres  diverses  et  les  éditions  suivantes. 

Corneille,  x  3  t. 


498  LETTRES. 

du  vôtre  nous  doivent  toujours  être  très-précieux,  il  y  a 
des  conjonctures  qui  en  augmentent  infiniment  le  prix. 
Vous  m'honorez  de  votre  estime  en  un  temps  où  il  semble 
qu'il  y  ait  un  parti  fait  pour  ne  m'en  laisser  aucune.  Vous 
me  soutenez,  quand  on  se  persuade  qu'on  m'a  abattu1; 
et  vous  me  consolez  glorieusement  de  la  délicatesse  Je 
notre  siècle ,  quand  vous  daignez  m' attribuer  le  bon  goût 
de  l'antiquité.  C'est  un  merveilleux  avantage  pour  un 
homme  qui  ne  peut  douter  que  la  postérité  ne  veuille 
bien  s'en  rapporter  à  vous.  Aussi  je  vous  avoue,  après 
cela,  aue  je  pense  avoir  quelque  droit  de  traiter  de  ridi- 
cules ces  vains  trophées  qu'on  établit  sur  le  débris  ima- 
ginaire2 des  miens,  et  de  regarder  avec  pitié  ces  opi- 
niâtres entêtements  qu'on  avoit  pour  les  anciens  héros 
refondus  à  notre  mode. 

Me  voulez- vous  bien  permettre  d'ajouter  ici  que  vous 
m'avez  pris  par  mon  foible  ,  et  que  ma  Sophonisbe,  pour 
qui  vous  montrez  tant  de  tendresse,  a  la  meilleure  part 
de  la  mienne?  Que  vous  flattez  agréablement  mes  senti- 
ments, quand  vous  confirmez  ce  que  j'ai  avancé  touchant 
la  part  que  l'amour  doit  avoir  dans  les  belles  tragédies, 
et  la  fidélité  avec  laquelle  nous  devons  conserver  à  ces 
vieux  illustres  ces  caractères  de  leur  temps,  de  leur  na- 
tion et  de  leur  humeur!  J'ai  cru  jusques  ici  que  l'amour 
étoit  une  passion  trop  chargée  de  foiblesse  pour  être  la 
dominante  dans  une  pièce  héroïque;  j'aime  qu'elle  y 
serve  d'ornement,  et  non  pas  de  corps,  et  que  les  grandes 
âmes  ne  la  laissent  agir  qu'autant  qu'elle  est  compatible 
avec  de  plus  nobles  impressions.  Nos  doucereux  et  nos 
enjoués  sont  de  contraire  avis  ;  mais  vous  vous  déclarez 


i.  «  Qu'on  m'a  battu,  »  clans  les  mêmes  impressions. 
2.   et  Les  débris  imaginaires,  »  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dans 
quelques  autres. 


LETTRES.  499 

du  mien  :  n'est-ce  pas  assez  pour  vous  en  être  redevable 
au  dernier  point ,  et  me  dire  toute  ma  vie, 
Monsieur , 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Corneille. 


3o.    DE    SAÏNT-ÉVREMOND  A    CORNEILLE1. 

Monsieur, 

Je  ne  doute  pas  que  vous  ne  fussiez  le  plus  reconnoissant  homme 
du  monde  d'une  grâce  qu'on  vous  feroit,  puisque  vous  vous  sentez 
obligé  d'une  justice  qu'on  vous  rend.  Si  vous  aviez  à  remercier  tous 
ceux  qui  ont  les  mêmes  sentiments  que  moi  de  vos  ouvrages,  vous 
devriez  des  remercîments  à  tous  ceux  qui  s'y  connoissent.  Je  vous 
puis  répondre  que  jamais  réputation  n'a  été  si  bien  établie  que  la 
votre  en  Angleterre  et  en  Hollande.  Les  Anglois,  assez  disposés  natu- 
rellement à  estimer  ce  qui  leur  appartient,  renoncent  à  cette  opinion 
souvent  bien  fondée,  et  croient  faire  honneur  à  leur  Ben  Johnson 2 
de  le  nommer  le  Corneille  de  l'Angleterre.  M.  Waller5,  un  des  plus 

i.  Cette  lettre  est  tirée  du  même  recueil  que  la  précédente.  Elle 
parvint  à  Corneille  par  l'intermédiaire  du  comte  de  Lionne,  à  qui 
Saint-Evremond  s'adresse  en  ces  termes:  «  Je  suis  fort  obligé  à  Mon- 
sieur Corneille  de  l'honneur  qu'il  me  fait.  Sa  lettre  est  admirable,  et 
je  ne  sais  s'il  écrit  mieux  en  vers  qu'en  prose.  Je  vous  supplié  de  lui 
rendre  ma  réponse,  et  de  l'assurer  que  personne  au  monde  n'a  tant 
dVstime  pour  tout  ce  qui  vient  de  lui,  que  moi.  » 

i.  Ben  ou  Benjamin  Jonson,  célèbre  auteur  dramatique  anglais, 
né  à  Londres  en  1 574  >  mort  en  1637. 

3.  Edmond  Waller,  poëte  anglais,  né  en  ifio5,  mort  le  21  octobre 
1687.  Réfugié  pendant  quelque  temps  en  France,  il  habita  Rouen, 
où  il  put  connaître  Corneille;  il  faisait  partie,  dans  les  dernières 
années  de  sa  vie,  du  petit  cercle  tout  français  formé  à  Londres  par 
les  duchesses  de  Bouillon  et  de  Mazarin.  La  Fontaine  ,  dans  une 
lettre  à  Saint-Evremond,  datée  du  18  décembre  1687,  fait  en  ces 
termes  l'éloge  du  poëte  anglais  : 

Cet  homme  sut  en  quatre  arts  exceller  : 
Amour  et  vers,  sagesse  et  beau  parler 


5oo  LETTRES. 

beaux  esprits  du  siècle,  attend  toujours  vos  pièces  nouvelles,  et 
ne  manque  pas  d'en  traduire  un  acte  ou  deux  en  vers  anglois  pour 
sa  satisfaction  particulière.  Vous  êtes  le  seul  de  notre  nation  dont 
les  sentiments  ayent  l'avantage  de  toucher  les  siens.  Il  demeure  d'ac- 
cord qu'on  parle  et  qu'on  écrit  bien  en  France  :  il  n'v  a  que  vous, 
dit-il,  de  tous  les  François  qui  sache  penser.  M.  Vossius*,  le  plus 
grand  admirateur  de  la  Grèce,  qui  ne  sauroit  souffrir  la  moindre  com- 
paraison des  Latins  aux  Grecs,  vous  préfère  à  Sophocle  et  à  Euripide. 
Après  des  suffrages  si  avantageux,  vous  me  surprenez  de  dire  que 
votre  réputation  est  attaquée  en  France.  Seroit-il  arrivé  du  bon  goût 
comme  des  modes,  qui  commencent  à  s'établir  chez  les  étrangers, 
quand  elles  se  passent  à  Paris  ?  Je  ne  m'étonnerois  point  qu'on  prît 
quelque  dégoût  pour  les  vieux  héros,  quand  on  en  voit  un  jeune  qui 
efface  toute  leur  gloire2.  Mais  si  on  se  plaît  encore  à  les  voir  repré- 
senter sur  nos  théâtres,  comment  peut-on  ne  pas  admirer  ceux  qui 
viennent  de  vous?  Je  crois  que  l'influence  du  mauvais  goût  s'en  va 
passer;  et  la  première  pièce  que  vous  donnerez  au  public  fera  voir, 
par  le  retour  de  ses  applaudissements,  le  recouvrement  du  bon  sens 
et  le  rétablissement  de  la  raison.  Je  ne  finirai  pas  sans  vous  rendre 
grâces  très-humbles  de  l'honneur  que  vous  m'avez  fait.  Je  me  trou- 
verais indigne  des  louanges  que  vous  donnez  à  mon  jugement  ;  mais 
comme  il  s'occupe  le  plus  souvent  à  bien  connoître  la  beauté  de  vos 
ouvrages,  je  confonds  nos  intérêts ,  et  me  laisse  aller  avec  plaisir  à 
une  vanité  mêlée  avec  la  justice  que  je  vous  rends. 

I.  Isaac  Vossius,  né  à  Leyde  en  1618,  bibliothécaire  de  Christine 
de  Suède,  disgracié  par  l'influence  de  Saumaise,  fit  partie  de  la  société 
de  la  duchesse  de  Mazarin,  comme  le  prouvent  ces  vers  de  Saint- 
Evremond  : 

Qu'est  devenu  le  temps  heureux 
Où  la  raison  d'accord  avec  vos  plus  doux  vœux, 
Où  les  discours  sensés  de  la  philosophie 
Partageoient  les  plaisirs  de  votre  belle  vie  ? 
Vossius  apportoit  un  traité  de  la  Chine, 
Où  cette  nation  paroît  plus  que  divine. 

(Epitre  à  Madame  la  duchesse  de  Mazarin  sur  la  bassette.) 

Nommé  par  Charles  II,  en  1673,  chanoine  de  Windsor,  il  mourut 
en  1689. 

a.  Allusion  aux  victoires  de  Louis  XIV. 


LETTRES.  5oi 

3r.     DE    CORNEILLE     A    COLBERT1. 

[1678V] 
Monseigneur  , 

Dans  le  malheur  qui  m'accable  ,  depuis  quatre  ans ,  de 
n'avoir  plus  de  part  aux  gratifications  dont  Sa  Majesté 
honore  les  gens  de  lettres,  je  ne  puis  avoir  un  plus  juste 
et  plus  favorable  recours  qu'à  vous,  Monseigneur,  à  qui 
je  suis  entièrement  redevable  de  celle  que  j'y  avois.  Je 
ne  l'ai  jamais  méritée,  mais  du  moins  j'ai  tâché  à  ne 
m'en  rendre  pas  tout  à  fait  indigne  par  l'emploi  que  j'en 
ai  fait.  Je  ne  l'ai  point  appliquée  à  mes  besoins  particu- 
liers ,  mais  à  entretenir  deux  fils  dans  les  armées  de  Sa 
Majesté,  dont  l'un  a  été  tué  pour  son  service  au  siège  de 
Grave;  l'autre  sert  depuis  quatorze  ans,  et  est  mainte- 
nant capitaine  de  chevau-légers1.  Ainsi,  Monseigneur,  le 
retranchement  de  cette  faveur  ,  à  laquelle  vous  m'aviez 
accoutumé,  ne  peut  qu'il  ne  me  soit  sensible  au  dernier 
point,  non  pour  mon  intérêt  domestique,  bien  que  ce 
soit  le  seul  avantage  que  j'ay  e  reçu  de  cinquante  années  de 
travail ,  mais  parce  que  c'étoit  une  glorieuse  marque  de 
l'estime  qu'il  a  plu  au  Roi  faire  du  talent  que  Dieu  m'a 
donné ,  et  que  cette  disgrâce  me  met  hors  d'état  de  faire 
encore  longtemps  subsister  ce  fils  dans  le  service  où  il  a 
consumé  la  plupart  de  mon  peu  de  bien  pour  remplir 
avec  honneur  le  poste  qu'il  y  occupe.  J'ose  espérer,  Mon- 
seigneur,  que  vous  aurez  la  bouté  de  me  rendre  votre 


i.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  423.  —  Cette  lettre  se  trouve  aux 
folios  i5i  et  i5s  du  recueil  indiqué  page  482,  note  5. 

2.  Pour  cette  date,  voyez  la  note  suivante. 

3.  Voyez  ci- dessus,  p.  188,  note  4-  —  C'est,  comme  l'a  remarqué 
M.  Edouard  Fournier,  la  date  bien  certaine  de  1664,  pour  l'entrée  du 
fils  aîné  de  Corneille  au  service,  qui  fixe  à  l'année  1678  la  présente 
lettre,  qu'on  avait  regardée  comme  postérieure  à  cette  époque. 


5o2  LETTRES. 

protection,  et  de  ne  pas  laisser  détruire  votre  ouvrage. 
Que  si  je  suis  assez,  malheureux  pour  me  tromper  daus 
cette  espérance,  et  demeurer  exclu  de  ces  grâces  qui  me 
sont  si  précieuses  et  si  nécessaires,  je  vous  demande  cette 
justice  de  croire  que  la  continuation  de  cette  mauvaise 
influence  n'afîbiblira  en  aucune  manière  ni  mon  zèle 
pour  le  service  du  Roi,  ni  les  sentiments  de  reconnois- 
sance  que  je  vous  dois  pour4  le  passé,  et  que,  jusqu'au 
dernier  soupir,  je  ferai  gloire  d'être,  avec  toute  la  pas- 
sion et  le  respect  possible, 
Monseigneur  , 

Votre  très-humble,  très-obéissant 
et  très-obligé  serviteur, 

Corneille. 

i.   Par,  dans  l'édition  de  Lefèvre  et  dans  quelques  autres. 


APPENDICE  DES  LETTRES. 


DE    CORNEILLE    A    ROTROU1. 


A2  Rouen,  ce  14  juillet  1637. 

La  raison,  mon  cher  ami,  n'a  jamais  eu  d'empire5 ni  sur  les  fous4, 
ni  sur  les  sots,  et  voilà  juste  pourquoi  elle  peut  être  d'usage  quelque 
peu  pour8  les  gens  sensés;  ayant  l'approbation  de  ceux-ci  et  la  vôtre, 
qui  est  tout  ce  que  je  souhaite,  je  ne  dois  donc  éprouver6  aucune 
peine  des  extravagances  que  débitent  les  premiers.  L'envie  peut  en- 
core aller  7  se  joindre  à  eux  sans  que  j'aye  pour  cela  un  moindre 
souci8.  Si  le  Cid  est  jugé  par  l'Académie,  et  s'il  est  jugé  avec  impar- 
tialité, quel  que  soit  son  jugement,  je  ne  dois  voir  en  cette  intention 
qu'une  entreprise  qui  m'honore9;  mais  j'ai  bonne  raison,  je  vous 
assure,  mon  ami,  de  craindre  que  cet  aréopage  ne  se  laisse  in- 
fluencer par  celui  qui  les  a  fait  (sic)  ce  qui  (sic)  sont ,0.  Ne  croyez  pas 


1.  Voyez  ci-dessus  la  Notice,  p.  416-418.  Cette  lettre  a  été  publiée  très- 
exactement,  en  janvier  1857,  dans  le  Bulletin  du  bibliophile,  p.  28  et  29. 
•2.  Ce  mot  A  a  été  supprimé  devant  Rouen  par  Lefèvre. 

3.  «  N'a  point  d'empire.  »  (Lefèvre.) 

4.  «  N'a  jamais  eu  d'énergie  ni  sur  les  forts,  »  en  tète  du  Corneille  a  lu 
butte  Saint-Rock  de  M.  Edouard  Fournier,  p.  cxv. 

5.  «  Et  voilà  tout  juste  pourquoi  elle  est  d'usage  quelque  peu  parmi.  » 
[Lefèvre.) 

6.  a  Leur  suffrage  et  le  vôtre,  qui  est  ce  que  je  souhaite  le  plus,  ne  me 
permet  pas  d'éprouver.  »  (Lefèvre.) 

7.  «  L'envie  peut  aller,  si  elle  veut.  »  (Lefèvre.) 

8.  «  Le  moindre  souci.  »  (M.  Fournier.)  —  «  Sans  que  j'en  aye  aucun 
souci.  »  (Lefèvre.) 

9.  «  Le  Cid  doit  être  jugé  par  l'Académie-,  et  si  ce  jugement,  tel  qu'il  soit, 
se  fait  sans  partialité,  je  n'aurai  pas  à  me  plaindre  d'une  entreprise  dontl'in- 
teution  m'honore.  »  (Lefèvre.) 

10.  a  Ne  se  laisse  diriger  par  celui  qui  les  a  faits  ce  qui  sont.  »  (M.  Four- 
nier.) —  «  M-iis  je  vous  avoue,  mon  ami,  que  je  dois  peu  compter  sur  la  jus- 


5o4  APPENDICE  DES   LETTRES. 

que  '  Chapelain  et  Sirmon  a  se  dédisent  :  ils  sont  trop  près  de  leur 
maître  pour  penser  autrement  que  lui.  Enfin  je  vous  promets  que  je 
suis5  moins  occupé  de  ma  pièce  que  d'apprendre  ce  que  vous  faites4. 
M.  Jourdy  m'a  conté5  les  plus  belles  choses  de  son  voyage  de  Dreux, 
et  me  donne  grande  6  envie  de  venir  vous  voir  dans  votre  belle 
famille,  mais  c'est  un  plaisir  que  je  ne  saurai  avoir  encore7  de  long- 
temps8, vu  que  je  veux  vous  montrer  une  nouvelle  pièce  qui  est  loin 
d'être  finie.  Adieu,  mon  cher  ami  ;  mandez-moi  de  vos  nouvelles9 
plus  souvent,  et  croyez  que  vous  me  comblez  de  joie  quand  je  reçois 
des  vôtres. 

CoRNETM/E. 

Suscription  :  A  Monsieur  J.  de  Rotrou,  à  Dreux. 

tice  de  l'aréopage  placé  sous  l'influence  de  celui  qui  les  a  faits  ce  qu'ils  sont.  » 
{Lefèvre.) 

I.  Lefèvre  ajoute  ici  Messieurs. 

i.  Serizay,  Chapelain  et  Sirmond  avaient  été  chargés  de  rédiger  les  Senti- 
ments de  V Académie  sur  le  Cid.  Voyez  tome  III,  p.  35  et  36. 

3.  M.  Fournier  ajoute  ici  encore. 

4.  «  Ils  sont  trop  près  du  maître.  Au  surplus  je  m'inquiète  peu  de  toutes 
ces  choses.  »  [Lefèvre.) 

5.  «  Raconté.  »  {Lefèvre.') 

6.  Grande  manque  dans  le  texte  de  M.  Fournier. 

7.  Encore  manque  également  dans  le  texte  de  M.  Fournier. 

8.  «   de  ce  qu'il  a  vu  à  Dreux.  J'aurois  intention  d'aller  voir  votre  belle 

famille  ;  mais  je  ne  l'espère  pas  de  sitôt.  [Lefèvre.) 

9.  «  Des  nouvelles.  »  (M.  Fournier.)  —  C'est  à  peine  si  cette  correction  rend 
supportable  cette  dernière  phrase,  encore  singulièrement  gauche.  Lefèvre  a  en- 
tièrement modifié  le  passage  précédent  et  a  remplacé  tout  ceci  par  des  points. 
Voici  son  texte  :  «  Je  suis  occupé  d'une  nouvelle  pièce  que  je  veux  vous  mon- 
trer et  qui  est  bien  loin  d'être  terminée.  ...  


P.  Corneille.  » 


TABLE 

ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 

DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE 


TABLE 


ALPHABETIQUE  ET  ANALYTIQUE 


DES  OEUVRES  DE  CORNEILLE. 


N.  B.  Les  chiffres  romains  indiquent  les  tomes;  les  chiffres  arabes  qui  les 
suivent  ou  qui  sont  précédés  d'un  point  et  virgule  marquent  les  pages  ;  les 
chiffres  arabes  qui  sont  précédés  d'une  virgule  après  un  autre  chiffre  arabe , 
les  vers. 


Ajete,  Ajetès  ,  roi  de  Colchos , 
personnage  de  la  Toison  d'or, 
VI,  221-349. 

Aaron,  IX,  24,  3i5 ;  317,  69  et 
83. 

Aeigaïl,  femme  de  Nabal,  IX, 
32,4^5;  34>48">- ;  36,  5ai. 

Abraham,  I,  90;  IX,  i59,  22; 
225,  38;  23g,  4;  3n,  1  ;  55y, 
11;  600,  435,  —  Le  sacrifice 
d'Abraham,  VIII,  449. 

Abraham  (saint),  VIII,  44°- 

Absyrte,  fils  d'Aœte  ,  person- 
nage de  la  Toison  d'or,  VI, 
221-349. 

Académie  Françoise (1').  Ses  Sen- 
timents sur  le  Cad;  Corneille  ne 
l'a  point,  dit-il,  choisie  pour 
arbitre,  III,  83-85.  —  Frag- 
ments de  lettres  de  Corneille  à 
Bois-Robert  au  sujet  de  l'exa- 
men du  Cid  par  l'Académie 
françoise,  X,  427~432.  —  Il 
avait  l'intention  de  répondre  à 
la  critique  de  l'Académie,  mais 
Bois-Rôbert  lui  a  conseillé  de  ne 


point  le  faire,  X,  43 1.  —  Cor- 
neille réfute  les  maximes  sur 
lesquelles  l'Académie  fondait  la 
condamnation  du  Cid,  X,  486. 
—  Discours  de  réception  de 
Corneille,  X,  ^oy-^n. —  Ri- 
chelieu confie  aux  soins  de 
l'Académie  la  pureté  d'une 
langue  qu'il  veut  faire  en- 
tendre et  dominer  par  toute 
l'Europe,  X,  4IO« 

Acaste,  roi  d'Iolcos,  II,  346, 
102  et  108  et  121  ;  347,  x^6 
(var.);  366,  5i6;  384  (var.). 

Acaste,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  la  Veuve,  I,  490 
(var.). 

Accurse,  jurisconsulte,  IV,  i58, 
328. 

Acheron  (1'),  II,  35o,  210. 

Achillas,  lieutenant  général  des 
armées  du  roi  d'Egypte,  per- 
sonnage de  Pompée,  IV,  i-ii5. 

Achille,  I,  28;  3i-33;  37;  VI, 
122,  41  ;  X,  70,  61  ;  118,  49* 

Achorée,  écuyer  de    Cléopatre, 


r>o8     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


personnage  de  Pompée ,  IV, 
i-ii5;I,  io3  et  104  ;  II,  337. 

Acte  (le  premier)  doit  contenir 
les  semences  de  tout  ce  qui 
doit  arriver,  1 ,  42  et  43-  — 
Actes  d'un  poëme  dramatique, 
I,  107. 

Action  (1'),  dans  un  poème  dra- 
matique, doit  avoir  une  juste 
grandeur,  I,  29. 

Action  {Discours  des  trois  unités 
d'),  de  jour  et  de  lieu,  I,  98-1  22 . 

Actium  (la  bataille  d'),  I,  89. 

Adam,  le  premier  homme,  VIII, 
198;  467,  4°5;  IX,  35,  5o4; 
519,  6.  —  Le  vieil  Adam,  le 
vieil  homme,  VIII,  439,  3654  > 
449,  3877. 

Adam  Billault.  Voyez  Btllault. 

Adonis,  II,  372,  642;  VII, 
36o,  1871. 

Adraste  ,  personnage  de  l'Illu- 
sion, II,  4^1-527. 

Adrian  (saint),  VIII,  496 • 

tEgée,  roi  d'Athènes,  personnage 
de  Médée  ,  II,  327-419.  —  Il 
est   mentionné  dans    OEdipe , 

VI,    I90,    l322. 

jEmon,  fils  deCréon,  VI,  141, 
182;  142,  191;  i43,  212  et 
224;  ï45j  265;  146,  278  et 
282  et  288;  i5a  ,  4°2;  i55, 
482;   157,  529  et  533;    160, 

Grt',   174,  95°;    l94>    1410; 

210,  1799.  Voyez  Hémon. 
jEole,  VII,  33i,  ii34- 
jEson,   père    de  Jason,  II,  345, 

97;  VI,  247. 
^Ethra,  fille  dePitthéus,  II,  335. 
AÉttcs,  général  romain,  VII,  1 1 5, 

180;  117,  214;  118,  264;  i39, 

739;  i5o, 1040;  i54,  1106. 
Africain  (F),  surnom  de  Scipion, 

V,  542,  678. 

Africains  (les\  II.  45o,  327; 
III,    i36,    543;'  i63,    1084; 

VI,  482,  221  et  226. 
Afrique  (1'),  I,  g3  ;  II,  389,  976  ; 

III,  i36  (var.);  4o3,  401  ;  IV, 


5o, 565;  55,  685;  81,  1 3 1 4 ; 
97,  1705; V,  143 ;  i52;  568, 
1299;  VI,  359  ;  43o,  i58i; 
VII,  464;  481,  211  ;  482,  222; 
54o,  1609;  X,  270,  266. 

Agamemnon,  I,  20;  112;  V,  406. 

Agamemnon,  tragédie  de  Sénèque, 
IV,  i83. 

Agathon,  poète  grec.  Sa  tragédie 
intitulée  la  Fleur,  I,  14. 

Agénor,  prince ,  amant  de  Psy- 
ché, personnage  de  Psyché, 
VII,  277-370. 

Agésïlas  ,  tragédie  de  Corneille, 
VII,  1-95.  —  L'auteur  de- 
mande au  Roi  de  la  faire  re- 
présenter devant  lui ,  X ,  3 1 2  , 

7- 

Agésïlas,  roi  de  Sparte,  person- 
nage principal  de  la  pièce  de 
ce  nom,  VII,  1-95. 

Aglante,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  la  Veuve,  I,  4oiî 
53.  —  Personnage  de  la  Co- 
médie des  Tuileries,  II,  3o3- 
325. 

Aglante,  nymphe,  personnage 
d'Andromède,  V,  243-3g6. 

Aglatide,  fille  de  Lysander,  per- 
sonnage d' A gésilas ,  VII,  1-95. 

Aglaure,  sœur  de  Psyché,  per- 
sonnage de  Psyché,  VII,  277- 
370. 

Agnès  (sainte),  V,  89  1639. 

Agnition,  reconnaissance,  grand 
ornement  dans  les  tragédies, 
L71. 

Agrippa,  VI,  585,   237. 

Agrippe  ,    Agrippa ,    III ,    4°3  , 

394- 
Aiguillon    (  la    duchesse    d'  ). 

Voyez    Combalet  (dame  de). 
Aire  (la  ville  d'),  X,  3o6,  36  et 

45  ;  307,  60. 
Airs  (les)  de  musique  de  d'As- 

soucy,  X,  i32. 
Ajax,I,  28;  III,  274. 
Ajax,  tragédie  de  Sophocle,   1, 

28;  (>6  ;  102  ;  1 19  ;  II,  1 1 . 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


509 


Alains  (les),  VII,  ni,    52. 

Alais.  Voyez  Aletz. 

Alarcon  (don  Juan  d"),  auteur 
de  la  comédie  intitulée  la  Ver- 
dad  sospechosa,  IV,  i3j;  i38. 
—  Parallèle  de  cette  comédie 
et  du  Menteur  de  Corneille , 
IV,  241-272. 

Albain  (!'),  Curiace  ,  III ,  332  , 
n36. 

Albains  i^les),  III,  335,  1217. 

Albanie  (!'),  VI,  247;  271, 
374. 

Albe  (la  ville  d'),  III,  279  ;  282  ; 
184,  29  et  3o ;  285,  55; 
286,  80  et  88  ;  290,  195  ;  292, 
229;  293,  267;  297,  366; 
298,  371  et  391;  399,  409  ; 
3o2,  4^5;  3o3,  5o2  ;  3o5, 
539  et  546  ;  3o6,  557  et  ^65  ; 
309,  63o  et  646;  3io,  666; 
323,  955  et  974;  324,  994  et 
997;  33o,  1094  et  1095;  33i, 
1119;  332,  1128;  334,  1177; 
337,  1253;  348  (var.)  ;  353, 
i638  ;  355,  1699  ;  356,  1743  ; 
358  (var.). 

Albe  (le  duc  d').  Voyez  Tolède. 

Albiane  ,  dame  d'honneur  de 
Camille,  personnage  à'Othon, 
VI,  564-657. 

Albin  ,  un  des  complices  de 
Cinna,  III,  4^1,  i49°- 

Albin,  confident  de  Félix,  per- 
sonnage de  Polyeucte ,  III, 
463-570. 

Albin,  centenier  romain,  per- 
sonnage de  Sophonisbe  ,  VI , 
447-549. 

Albin  ,  ami  d'Othon  ,  person- 
nage ftOthon,  VI,  564-657. 

Albin,  confident  de  Domitian, 
personnage  de  Tite  et  Béré- 
nice, VII,  183-276. 

Alcandre,  roi  d'Ecosse,  person- 
nage de  Clitandre,  I,  255-369. 
Alcandre,  nom    d'homme  men- 
tionné dans  la   Veuve,  I,  393; 
424,  48.3. 


Alcandre  ,  magicien  ,  person- 
nage de  F  Illusion,  II,  421-527. 

Alciat,  jurisconsulte,  IV,  i58, 
328. 

Alcibiade,  I,  88. 

Alcide,  Hercule,  I,  226,  i3g6; 
349,  i3o3;  VI,  211,  1822 

Alcidon,  personnage  de  la  Veuve, 
I,  37i-5oo;  43. 

Alcidor  ,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  ta  Galerie  du  Pa- 
lais, II,  47»  535. 

Alcippe, personnage  du  Menteur, 
IV,  117-273;  3o5,  290;  32i, 
604 ;  322,  629. 

Alcmène,  mère  d'Hercule,  IV; 
i56,  294  (var.). 

Alcméon \,  tragédie  d'Astydamas, 
I,  67. 

Alcméon,  personnage  de  la  tra- 
gédie de  ce  nom,  I,  77. 

Alecton,    furie,  I,    226,    i3g3  ; 

23l,    I467;     232,     I489;    359, 

i537;V,376,  i3a8; VI,5aa, 

1206  ;  X,  236,  12. 
Aletz  (la  ville  d'),  X,  112. 
Alexandre  le  Grand,  I,  88  ;  89  ; 

IV,  411;  V,    3i7,   53;  656; 

X,  178,  39. 

Alexandre,  adversaire  de  Démé- 
trius  Nicanor,  IV,  4ï8. 

Alexandre  VII  (  Fabio  Chigi , 
pape  de  i655  à  i665  sous  le 
nom  d').  Dédicace  que  lui 
adresse  Corneille  de  sa  tra- 
duction de  Y  Imitation,  VIII, 
1-7.  —  Son  recueil  de  vers 
latins,  VIII,  4.  —  Négocia- 
teur à  Munster  pour  le  pape 
Innocent  X,  son  prédécesseur. 
VIII,  6. 

Alexandrie,  ville  d'Egypte,  IV, 
20;  ai;  22;  26;  38,  289; 
81,  i32i;  VIII,  428. 

Alexandrin  ,  citoyen  d'Alexan- 
drie, IV,  41 4;  VII,  460. 

Alexandrins  (vers),  V,  309  et 
3io. 

Alexis  (saint),  VIII,  34- 


5io     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Alger  (la   ville    d'),    IV,   235, 

171 2;    X,    197,    4^«    Voyez 

Arger. 
Alidor  ,    personnage  de  la  Place 

Royale,  II,  2i5-3oi. 
Alindor  ,  nom  d'homme   men- 
tionné dans  la  Veuve,  I,  4°8, 

181. 
Allemagne  (F),   IV,   i32;    148, 

i54  et  161;    187,    861;  293, 

104 ;    X,   267,   77;  292,  33; 

3o4,  1;  468. 
Alonse   (don) ,    personnage   du 

Cid,  III,  1-241. 
Alost    (la   place    d') ,    X,    2o5, 

161. 
Alpes  (les),  I,  90. 
Alphonse  (don),  roi  de  Castille, 

V,  412. 
Althee,  mère  de  Méléagre,  II, 

390,  989. 
Alvar    de   Lune    (don).  Voyez 

Lune  (don  Alvnr  de). 
Amalasonte, tragédie  de  Quinault, 

x,  493. 

Aman,  VIII,  572;  IX,  4i,6i3; 
42,  642. 

s/ niant  libéral  ( /'  ),  comédie  de 
Scudéry,  X,  400. 

Amarante  ,  personnage  de  la 
Suivante,  II,   Ii3-2i4. 

'A(j.apxr)|jia.  Signification  de  ce 
mot  dans  Aristote,  I,   $7. 

Amathonte  (la  reine  d'),  Vénus, 
V,  329,  332. 

Amboise  (Georges  d'),  cardinal, 
X,  32,  1. 

Amkroise  (saint),  IX,  127.  —  Le 
sujet  de  Théodore  est  tiré  de 
son  second  livre  des  Vierges, 
V,  9  ;  1 1 .  —  Extrait  de  ce  se- 
cond livre,  V,  108-111. 

Amérique  (F),  X,  197,  45. 

Aminte,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  Mélite ,  I,  i49> 
ii3,  —  dans  la  Galerie  du 
Palais,  II,  57,  734  et  735; 
—  dans  des  stances,  X,  172, 
i.  Vovez  Amynte. 


Ammon  (l'oracle  d'),  V,  294  ;  299. 

Ammon  ,  personnage  d'Andro- 
mède ,  V,  243-396;  I,  io3 
et  io4- 

Amour  (F)  dans  la  tragédie , 
I,  24. 

Amour  (le  dieu),  I,  147,  77; 
i5o,  i43;  55i,  i52  ;  iÔ2, 
176  (var.);  i53,  197;  162, 
345;  220,  1286;  II,  147, 
401;  i63  (var.);  i75,  941; 
191,  i25o;  202  (var.);  272, 
941;  286,  1221;  3oo;  i5o3; 
320,  256  ;  324,  352  ;  343,  44; 
447»  247;  5i3,  1473;  IV,  464, 
83o  et  83i  et  842;  V,  329, 
333;  356,  882;  X,  47,  2; 
174,  2.  —  L'Amour  ,  person- 
nage de  la  Toison  d 'or ,  VI,  221- 
349.  —  Personnage  de  Psyché, 
VII,  277-370. 

Amours  (les),  X,  339,  I2°*  — 
Quatre  amours,  personnages  du 
prologue  de  la  Toison  d'or,  VI, 

252-265. 

Amphion,   roi  de   Thèbes,    IV, 

171,  555. 
Amphitryon,  comédie  de  Plaute, 

V,  4o5. 
Amsterdam  (la  ville  d'),  X,  259, 

101  ;  282,  429. 
Amyntas,   personnage    de    Théo- 
dore, non  marqué  dans  la  liste 

des  acteurs,  V,  77,  1367;  78. 

—  Personnage  à'Héraclius  ,  V, 
ii3-24i;  I,  n5. 
Amynte,   nom   de   femme  dans 

une    ode,   X,    3o,    6.    Voyez 

Aminte. 
'Àvayxoôbv.    Diverses    acceptions 

de  ce  mot,  I,  94. 
Ananias,  VIII,  643. 
Anajnte,  Ananias,  IX,  i47- 
Anapestiques  (vers),  V,  3 10. 
Anchise,  père   d'Enée,  II,  372, 

642;  VII,  36o,  1871. 
Andalousie  (F),  III,  i39   (var.); 

140,  614;  V,  428,  217. 
André  (saint),    VIII,  289;  347- 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


bu 


Andricnne  (/'),  comédie  de  Té- 
rence,  I,  46;  n5;  II,  i3. 

Andromède ,  tragédie  de  Corneille, 
V,  243-396;  I,  47;  75  ;  io3; 
116  et  117;  273  ;  III,  278  ;X, 
178,  37.  —  Dessein  de  la  pièce, 
V,  258-278.  —  Examen,  V, 
299-312.  —  Adromède  est  re- 
présentée sur  le  théâtre  royal 
de  Bourbon,  VI,  268.  —  La 
représentation  de  cette  tragé- 
die a  été  un  des  plus  beaux 
spectacles  que  la  France  ait 
vus,  V,  292.  —  Les  machines 
font  le  nœud  et  le  dénoùment 
de  cette  pièce,  V,  297;  3o5. — 
La  beauté  de  la  représentation 
y  supplée  au  manque  des  beaux 
vers,  V,  298.  —  Corneille  ex- 
plique et  justifie  l'emploi  qu'il 
a  fait  dans  Andromède  de  vers 
de  diverses  mesures,  V,  3o8- 

3l2. 

Andromède,  fille  de  Céphée  et 
de  Cassiope,  personnage  prin- 
cipal de  la  pièce   de  ce  nom, 

V,  243-396;  I,  i5;  75. 
Angélique  ,    personnage    de    la 

Place  Royale,  II,  2i5-3oi;  X, 

68,  29  et  32 
Angenine  (Julie  d"). Voyez  Julie 

de  Rambouillet. 
Anges    gardiens    (les     saints). 

Hymnes  pour  leur    fête,   IX, 

563-565. 
Angleterre  (F),  II,  96,  i45o  ; 

VI,  264,229;  X,  327, 10;  499 
Anglois,  les  Anglois,  II,   434  j 

X,  69,  43;  197,  45;  258,  91; 
3o2,  5i;  499- 

Anglois  (1'),  la  langue  anglaise, 
III,  82 

Anguien.  Voyez  Enghien. 

Anne  d'Autriche,  femme  de 
Louis  XIII,  V,  319,  85  ;  VI, 
258,  90;  260  et  261;  265;  319, 
85;  X,  401.  —  Épître  dédica- 
catoire,  à  elle  adressée,  de  la 
tragédie  de  Polyeucte,  III,  417- 


474*  —  La  première  année  de 
sa  régence,  III,  473.  —  Son- 
net en  son  honneur,  III,  473; 

X,  476. 

Annibal,  IV,  70,  1004  ;  V,  5o3; 
5o6  ;  5i2,  22;  5i3,  35  et  41; 
5i4,  72;  523,  276;  524,  294; 
525,  3io;  532,  444  et  446; 
537,  574;  538,  578  et  584  et 
589;  55 1,  911;  552,  91 5;  553, 
952;  563,  iiSg;  564,  1175; 
568,  1297;  587,  1727;  IV, 
480,  174  et  177;  5i6,  1868; 
X,  259,  104. 

Antigone  ,  fille  d'OEdipe  ,  VI , 
140,  146  et  i53;  141,  161; 
159,  574. 

Antigone,  tragédie  grecque,  I,  68. 

Antioche,  ville  de  Syrie,  V,  16; 
20,  g5;  24,  17^;  IX,  55o. 

Antiochus,  fils  de  Démétrius 
Nicanor  et  de  Cléopatre,  per- 
sonnage de  Rodogune,W ,  3gj- 
5n  ;  I,  27;  60;  63;  70;  79; 

89î  99;  272- 
Antiochus,   frère  de    Démétrius 

Nicanor,  IV,  4l8;  424  î    43i, 

53;  4^9,  222;  44o>  4^3  ;  45o, 

491;  4^1?  507;  452,  541. 

Antiochus,  roi  de  Syrie,  V,  5o, 
746;  525,  3o2;  539,  6o5;  55i, 
9o5;  568,  i3oo;  578,  i524- 

Antiphon,  personnage  de  l'Eu- 
nuque de  Térence,  I,  102. 

Antistie,  VI,  358;  X,  491- Voyez 
Aristie. 

Antistius,  préteur  romain,  père 
de  la  précédente,  X,  491. 

Antoine  (Marc),  I,  89;  III,  392, 
171;  410,  584;  4n,  598;  427, 
993;  434,  Ii34;  449,  i45o; 
457,  i658;  VI,  439,  1807.— 
Personnage  de  Pompée ,  IV, 
i-ii5. 

Antoine  (Marc),  tragédie  de  Mai- 
ret,  VI,  463. 

Antoine  (saint),  VIII,  100;  242. 

Aonie  (J'),  X,  66,  2. 

Aparté,!,  m.  —   Aversion  de 


5i2     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Corneille  pour  les  a  parte,  I, 
396;  II,  123;  IV,  137. 

Apelle,  X,  120,  91. 

apocalypse  (/').  Passage  traduit, 
VIII,  229,  1094-1096.  — 
Allusion  à  un  passage,  VIII, 
570,  6404  et  suiv. 

Apollidon,  enchanteur,  X,  59, 
16. 

Afoliodorus  ,  Appolîodore.  Sa 
Bibliothèque,  X,  455. 

Apollon,  I,  76;  II,  522,  i663; 
III,  290,  193;  473;  V,  267; 
VI,  i55,  486;  i59,  592;  VII, 
362,  1913;  X,  70,  63;  i3o, 
18;  i32,  6;  196,  3o  ;  439.  — 
Apollon  dans  VOreste  d'Euri- 
pide, I,  106. 

Apollonius  Rhodius,  poëte  grec, 
VI,  249. 

Apôtres  et  évangélistes.  Hym- 
nes en  leur  honneur,  IX,  573- 
58o. 

Appian  Alexandrin,  Appien  d'A- 
lexandrie, VII,  460;  X,  491. 
—  Extrait  de  son  livre  des 
Guerres  de  Syrie,  contenant  le 
sujet  de  Rodogune,  IV,  4J4~ 
4i8;  420. 

Apparitions  dans  la  tragédie,  I, 
75  et  76. 

Aquitaine  (F),  VIII,  592. 

Arabe  (un  auteur),  Averroès,  V, 
409. 

Aragon  (P),  I,  44;  Ir>1  ;  III,  81; 
n5,  197;  i36,  54o;  i45, 
706;  V,  411  ;  41a;  415  ;  4i8; 
419,  3;  42°>  36;  434»  356; 
438,  459;  444,  609;  446, 
663;  4^3,  1084;  4^5,  1109; 
466,  ii23;  468,  1196;  473, 
ï334  ;  4j5,  1376  et  1389  »  482, 
i55o;  483,  1572  ;  489,  1712; 
492>  l79°\  494,  i8a3;  VI, 
364. 

Aragonois  (les),  V,  4i3. 

Arar  (P),  la  Saône,  VII,  117, 
228;  162,  l3l2. 

Araspe,  capitaine  des  gardes  de 


Prusias ,  personnage  de  Nico- 
■   mède,  V,  495-5g3. 

Arbaze,  personnage  de  la  Comé- 
die des  Tuileries,  II,  3o3-325. 

Arcadius,  empereur,  père  de 
Pulchérie,  VII,  376;  38i,  i3. 

Arcas,  frère  d'Aristie,  person- 
nage de  SertoriuSf  VI,  35 1- 
445. 

Archers,  dans  Clitandre,  I,  255- 
369. 

Ardabure,  général  romain,  VII, 
382,  34. 

Ardaric,  roi  des  Gépides ,  per- 
sonnage à" Attila,  VII,  97- 
181. 

Ardents.  Hymnes  de  sainte  Ge- 
neviève pour  le  miracle  des 
Ardents,  IX,  63i-636. 

Aréobinde,  général  romain,  VII, 
382,  3i  ;  385,  97. 

Argenis  (P)  de  Barclay,  I,  90. 

Argenson     (Voyer    d').    Voyez 

Vo  YER . 

Arger,X,62,  11.  Voyez  Alger. 
Argo  (le  navire),  VI,  247;  33o. 
Argonautes  (les),  II,  362,  434; 

VI,    245;  247;    249;   252. 

Argos,  ville  de  Grèce,  V,  296  ; 

vi,  144, 229;  157, 540. 

Argus,  X,  i55,  16. 

Artas  (don),  personnage  du  Cid, 
III,  1-241. 

Arimant,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  Clitandre,  I,  265; 
36o,  i547- 

Aristandre,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  Mèlite,  I,  201, 
963. 

Artste  [Excuse  a) ,  X,  74-78;  4°3: 

474. 

Aristie,  nommé  par  d'autres 
Antistie ,  femme  de  Pompée, 
personnage  de  Sertorius ,  VI, 
35i-445;  X,  491. 

Aristius,  père  de  la  précédente, 
X,  491. 

Aristius  (Quintus),  frère  d'Aris- 
tie, VI,  Î64;  432. 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


5i3 


Aristophane,  II,  12;  V,  3o8. 

Aristophane  le  grammairien,  X, 
455. 

Aristote,  I,  3;  13-17;  21-23 
27;  29;  3l-42;  44;  47;  48 
5o;  52;  54-56;  58;  60;  61 
63;65;68-73;75;77;  8o-83 

85;  91-94;  96;  Iof;  io4;  106 

107;  109;  111;  n3;  117;  II 
119;   121;  432  ;  III,  83;  84 
85;  91  ;94;  273;  275  ;  479 
IV,  280;  281;   417;   V,    i3 
146;    147;    i5i;    309;   4o5 
407;  409;  5o8;  VI,  127  ;  i3o 
363  ;  461;  468;  X,  402;  45o 
454;  486.  —  Sa  Poétique,  III, 
85.  —  Les  préceptes  qu'il  nous 
a  laissés  de  la  poétique  sont 
de  tous  les  temps  et   de  tous 
les  peuples,  III,  85. 

Armédon,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  le  Menteur,  IV; 
174,  6o3  ;  208,  1252  et  1256; 
220,  i452  et  14^7. 

Arménie  (1'),  I,  273;  III,  47^; 
478;  479;  486;  5oi,  3i4;IV, 
463,  8i5  ;  V,  5c6  ;  5io;  5i4, 
63;  5i8,  172;  327,  347;  535, 
Ô23;  543,  706;  546,  764  et 
770  et  779;  549,  847;  548, 
875;  55i,  910;  567,  1252; 
574,  1411;  578,  1497;  584, 
i655;  587,  1712;  Vil,  462; 
466,  84;  496,  809;  526, 1549. 

Arménien,  III,  479;  494?  ï^o; 
IV,  441,  284. 

Armentière  (la  ville  d'),  X,  2o3, 
i45. 

Arnauld,  X,  467. 

Arnheim  (le  fort  d'),  X,  278, 
376. 

Arnoul  (saint),  VIII,  392. 

Aronte,  personnage  de  la  Gale- 
rie du  Palais,  II,  1-112. 

Arrie,  VI,  626,  1190. 

Arsace,  roi  des  Parthes,  V,  533, 
467  (var.). 

Arsidas,  éphore  de  Lacédémone, 
VII,  78,.  1707;  91,  2007. 

Corneille,  x 


Arsinoé,  seconde  femme  de  Pru- 
sias,  personnage  de  Nicomède, 

v,  495-593. 

ARTABASE,roi  d'Arménie,  VII, 
462;  465,  38;  494,  747  et 
763;  497,  839. 

Artois  (1'),  X,  201,  114. 

Asdrubal,  VI,  465;  472;  484, 
262;  5o8,  868;  526,  1291; 
532,  1439;  548,  1790. 

Asie  (1'),  II,  336;  344,  56;  III, 
4o3,  401;  428,  997  ;  IV,  423; 
435,  i36;  437,  176;  V,  5i3, 
48;  526, 3i6;  539,  608;  55i, 
917;  563,  u55;  568,  1299; 
577,  1492;  591,  i8o3;  VI, 
481,  216;  546,  1747;  VII, 
4o,  766;  495,  769;  X,  196, 
40. 

Aspar,  amant  d'Irène,  person- 
nage de  Pulchérie,  VII,  371- 
453. 

Asphalte,  personnage  de  la  Co- 
médie des  Tuileries ,  II,  3o3- 
325. 

Assoucy  (d').  Sonnet  que  lui 
adresse  Corneille  sur  son  Ovide 
en  belle  humeur,  X,  124.  — 
Vers  sur  ses  Airs,  X,  i32. 

Assuérus,  IX,  39,  572;  41,  617 
et  622  et  623. 

Assyriens  (les),  IX,  36,  523. 

Astérodie,  mère  d'Absyrte,  VI, 
249. 

Astrée  (/'),  roman  de  d'Urfé, 
IV,  354,  1238. 

Asturies  (les),  III,  96. 

Astyanax  ,  personnage  de  la 
Troade  de  Sénèque,  I,  99;  IV, 
283. 

Astydamas,  poète  grec,  I,  6y. 

Atax  (1'),  rivière  de  la  Gaule, 
l'Aude,  X,  23i. 

ATHAMAS,roideThèbes,  VI,  a45. 

Athénaïs  ,   femme  de  Théodose, 

II,  VII,  383,  44. 
Athènes,  I,  54;  77;    112;    II, 
335;    346,    n4;    367,    52i  ; 
370,    609;    4o°»   1229;    4°3 

33 


5i4  TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


(var.);    VI,    i34;    i4o>    I42; 
146,   273;   149,  35o  et   353; 

i76>     977;    2l6>     1942;    X, 
3i2,  27. 

Atlas  ,  changé  en  rocher,  V, 
375,  i3o8. 

Atrée,  I,  20;  78  ;  V,  3i6,  25.  — 
Personnage  du  Thyeste  de  Sé- 
nèque,  IV,  283. 

Attale  ,  roi  de  Pergame,  III, 
428,  995;  VI,  546,  1751. 

Attale,  fils  de  Prusias  et  d'Ar- 
sinoé ,  personnage  de  Nico- 
mède,  V,  495-593. 

Atticus,  soldat  romain,  person- 
'  nage  à'Othcn,  VI,  564-657. 

Attila,  roi  des  Huns,  tragédie  de 
Corneille;  VII,  97-181.  — 
L'auteur  demande  au  Roi  de 
la  faire  représenter  devant  lui, 
X,  3n,  i5. 

Attila,  roi  des  Huns  ,  person- 
nage principal  de  la  pièce  de 
ce  nom,  VII,  97-181. 

Aubignac  (l'abbé  d'),  VI,  4^3; 
X,  486;  487.  —  Vers  de  Cor- 
neille, de  ses  amis  et  de  ses  par- 
tisans contre  l'abbé  d' Aubi- 
gnac ,  X,  372-377. 

Audenabde  (la  ville  d'),  Oude- 

narde,  X,  2o5,  162. 
Audoënus,  traduction   latine  du 

nom  d'Owen,   X,  46.  Voyez 

Owen. 
Aufide,   tribun    de    l'armée  de 

Sertorius,  personnage  de  Ser- 

torius,  VI,  35i-445. 
Auguste  (l'empereur),  I,  89;  VI, 

47,  649;  48,  680;  614,  879  ; 

616,  946;  X,  96,  29;  97,  37; 

442J491-    —   Personnage    de 

Cinna,    III,   35g-462  ;  I,    26  ; 

3o;   44;  45;  47  5  61;  69575; 

87; io5  ;  118;  120;  272. 
Auguste,  titre  des  empereurs  ro- 
mains, VII,  385,  102. 
Augustin  (saint) ,  V,  11  ;  VIII , 

70;  IX,  127.   —  Il  déclame 

contre  certaines  comédies,  V,  9. 


Aurange  (le  prince  d').  Voyez 
Orange. 

Aurore  (1'),  déesse,  II,  68,  942; 
449,  298;  VI,  293,  903  et  910. 

Authentiques  (les),  extraits  som- 
maires des  Novelles ,  dans  .le 
Code  de  Justinien,  IV,  i58, 
326. 

Aventin  (le  mont),  III,  290, 
1925  V,  579,  i55c;  VI,  419, 
i332. 

AVERNE    (1'),     IX,      521,     7;   591, 

19  ;X,  237,  34- 
Averroès.  Il  définit    la  tragédie 

a  un  art  de  louer,  »  V,  4°9- 
Avignon    (la  ville   d'),    II,    96, 

i45o. 
Ayala  (don   Garcie    d'),    comte 

de  Fuensalida,  usurpateur  du 

trône  d'Aragon,  V ,  411. 
Azarie,  Azarias,  IX,  147. 


B 


Babylone  (la  ville  de),  VIII, 
444;  457;  IX,  107,  9. 

Bacchus,  X,  239,  64. 

Balde,  jurisconsulte,  IV,  i58, 
328. 

Ballard,  X,  470. 

Balzac  (de),  1,  5i;  IV,  i33  ; 
X,  438;  447.  —  Sa  lettre 
à  Scudéry  au  sujet  du  Cidy 
III,  83;  84.  —  Ce  qui  part 
de  sa  plume  regarde  toute  la 
postérité,  III,  84.  —  Lettres 
qu'il  écrit  à  Corneille,  X,  44°~ 
442;  442-444. 

Baptiste.  Voyez  Jean- Baptiste 
(saint). 

Barbares  (les),  IX,  53o,  21. 

Barcée,  dame  d'honneur  d'É- 
ryxe,  personnage  de  Sopho- 
nisbe,  Vl,   447~^49' 

Barclay,  I,  90. 

Barlaam,  VIII,  452. 

Babonius  (les  Annales  de),  III, 
475;  V,  144;  i53. 


DES   OEUVRES  DE   CORNEILLE. 


5i5 


Bartole,  jurisconsulte,  IV,  142, 

14. 
Basile  (saint),  VIII,  6o5. 
Bassée  (la  place  de  la),  X,  2o3, 

i45. 
Bastille  (la),  X,  3 17,  37;3i8,52. 
Bataves  (les),   VII,    246,    1099  ; 

X,    25o,    7;    255,    33;    268, 

249;  3a9>  71- 

Batavie  (la),  X,  278,  378. 

Baume  fia  Sainte-). Voyez  Sainte- 
Bal  me  (la). 

Bavière  (la),  X,338,  90. 

Béarn  (le),  III,  82;  X,   107. 

Beauchateau  (Mlle  de),  comé- 
dienne, X,  483. 

Beaulieu.  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve , 
I,  392  et  393. 

Belges  (les;,  X,   21 3,  294. 

Belgique  (la),  X,  195,  12. 

Béllnde,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  la  Veuve,  I,  416, 
3s5  ;  492  -,  1820. 

Bellecour  (la  place) ,  à  Lyon, 
IV,  345,  1087;  36i,  i387; 
368,  i5oo. 

Bellièvre  (  de  Pompon e  de  ) , 
premier  président  du  parle- 
ment de  Paris,  X,  i3i.  —  Sa 
mort,  X,  473  et  474- 

Bellone,  X,  109,  44 >  23>9,  58; 
3oi,  24;  3o2,  46* 

Bénévent,  VI,  20;  22,  18. 

Béni  (Paul),  littérateur  et  cri- 
tique italien,  I,  53. 

Ben  Johnson,  nommé  le  Corneille 
de  l'Angleterre,  X,  499- 

Benoît  (saint),  VIII,  64;  114; 
319;  X,  460;  471. 

Benoît  (l'ordre  de  Saint-).  Voyez 
Saint-Benoît. 

Benserade,  VI,  463.  —  Sa  tra- 
gédie intitulée  la  Mort  <&A- 
chille  et  la  Dispute  de  ses 
armes,  I,  28. 

Bérénice,  reine  d'une  partie  de 
la  Judée,  personnage  de  Tite 
et  Bérénice,   VU,   183-276. 


Bergues  (la  ville  de),  X,  204, 
i54. 

Beringhen  (le  marquis  de),  X, 
271,  272. 

Bernard  (saint),  VIII,  592. — 
Il  a  été  regai  dé  comme  l'auteur 
de  V Imitation,  VIII,  l5;  X, 
463 .  —  Sonnet  de  Corneille  sur 
une  traduction  de  ses  Èpitres, 
X,  122  et  123. 

Bersabée  ,  aimée  du   roi   David, 

m,  481;  vin,  54. 

Béthanie  (le  bourg  de),  VIII, 
434,  3563. 

Bethléem  (la  ville  de), IX,  5o 2,  1. 

Bethsabée.  Voyez  Bersabée. 

Béthulie  (la  ville  de),  IX,  36, 
524;  37,  541  et  552. 

Bezançon  (la  ville  de),  X,  296, 
101. 

Bible  (la),  III,  48o;  VIII,  3i, 
3i;  X,  460.  —  Passage  traduit 
de  V Exode,  VIII ,  262  ,  67-70. 
—  Passage  traduit  du  livre  des 
Rois,  VIII,  263,  75-78.  —  Al- 
lusion à  un  passage  du  cha- 
pitre vu  deMichée,  VIII,  481, 
45 5 o. Voyez  Apocalypse,  IsaÏe. 

Bicêtre  (le  château  de),  X,  58; 
60.  Vo^ez  Bissestre. 

Billault  (Adam),  menuisier  de 
Ne  vers.  Sonnet  que  lui  adresse 
Corneille  sur  ses  Chevilles,  X, 
100  et  101  ;  476. 

Billot.  Voyez  Billault. 

Biondo  (Flavio).  Voyez  Blon- 
dus  (Flavius) 

Bissestre,  Bissètre  (le  château 
de),  lieu  de  rendez-vous  pour 
un  duel,  II,  189,  i2o5;  X, 
59,  6  et  12  et  18  et  24.  Voyez 
Bicêtre. 

Bithynie  (la),  V,  5io;  512,28; 
5 14,  64  ;  527,  348;  533,  468  ; 
541,  65i ;  542,  700;  574 1 
1412;  587,  1711;  588,  1732. 

Blanche  ,  personnage  de  Don 
Sancke  d'Aragon,  V,  397-494* 

Blondel,  musicien,  X,  233. 


5i6     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Blondus  (Flavius),  auteur  d'une 
Histoire  de  la  décadence  de 
l'Empire  romain,  VI,  7. 

Bocchar,  lieutenant  de  Svphax, 
personnage  de  Soplwùsbe,  VI, 
447-549. 

Boéce,  VIII,  395. 

Boileau  (Gilles),  frère  de  Boileau 
Despréaux.  Lettresqu'il  adresse 
à  Corneille,  X,  473  et  474; 
475  et  476. 

Bois-Robert  (François  le  Métel 
de),  VI,  462; X,  474;  48 1  ;  484. 

—  Son  hommage  à  Corneille  au 
sujet  de  la  Veuve,  I,  384.  — 
Vers  que  lui  adresse  Corneille 
sur  ses  Epitres,  X,  102  et  io3. 

—  Fragments  de  diverses  let- 
tres que  lui  écrit  Corneille  au 
sujet  du  Cid,  X,  427  432.  — 
Il  conseille  à  Corneille  de  ne 
pas  repondre  aux  Sentiments  de 
l'académie  sur  le  Cid,  X,  43l. 

Bolandus,  X,  467. 

Bonaventure  (saint),  auteur  des 
Louange-s  de  la  Vierge ,  tra- 
duites  par   Corneille,    IX,  5. 

Bordeaux  (la  ville  de),  II,  434; 
444,  192. 

Borée,  VI,  248;  262;  337, 
1946;  342,  2074 

Bouchain  (la  ville  de),  X,  3o4, 
2  ;  307,  60. 

Boulart  (le  R.  P.),  assistant  du 
général  des  chanoines  réguliers 
de  la  congrégation  de  France. 
Lettres  à  lui  adressées  par 
Corneille,  X,  458-462;  462- 
466;  466-470;  470-473. 

Bourbon,  nom  de  lieu,  X,  472. 

Bourbon  (  le  théâtre  royal  de). 
Andromède  y  est  représentée, 
V,  258. 

Bourrons  (les),  V,  3i8,  60;  X, 
194,  1  ;  211,  25i. 

Bourbon  (Nicolas),  X,  443. 

Bourgogne  (l'Hôtel  de),  II,  32, 
25o;  X,  483;  494. 

Bourguignon  ,     Bourguignons  , 


VII,  ni,  52;  160,  1269;  161, 
1281. 

Bovines,  Bouvines  (la  bataille 
de),  X,  211,  258. 

Boyer,  X,  493. 

Bradamante,  personnage  du  Ro- 
land furieux,  X,  62,  12. 

Brandebourg  (l'électorat  de), 
X, 3o2,  53. 

Brest  (inscription  pour  l'arsenal 
de),  X,  33i-333. 

Bretagne  (la),  II ,  438  ,  69  ;  492, 
1089. 

Briole  ou  Briord  (le  comte  de), 
X,  270,  267. 

Broglie  (Charles-Amédée  de). 
Voyez  Revel  (Charles-Amé- 
dée de  Broglio,  comte  de). 

Bruge  la  ville  de),  X,  207,  ig3. 

Bruno  (saint),  VIII,  67. 

Brute,  Brutus,  III,  396,  265  ; 
4o5,  438;  414,  667;  421,  829 
et  842  ;  436,  1169  ;  566,  1703  ; 
VI,  36o;  38i  (var.);X,  441. 

Bruxelles  (la  ville  de),  III,  473  ; 

VIII,  17. 

Bubierça,  village  d'Espagne,  V, 
4n;  4J3. 

Bucéphale,  II,  497,  1162. 

Buchanan  (Georges),  I,  102.  — 
A  fait  une  tragédie  de  l'his- 
toire de  Jephté,  et  une  autre 
de  la  mort  de  saint  Jean- 
Baptiste,  III,  480. 

Burgos,  ville  d'Espagne,  V,  429, 
263  ;  446,  662. 

Buric  (la  place  de),  X,  260,  122. 

Bttrnel.  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve, 
1,  3go. 

Buscon,  héros  du  roman  espa- 
gnol de  ce  nom,  II,  444>  i85. 

Byzance  (la  ville  de),  V,  182, 
602  ;  192,844  ;VH>  4i3,  812. 


Cadès,  IX ,  125. 
Cadmus,  1 ,  78. 


DES  OEUVRES   DE    CORNEILLE. 


5f7 


Caen  (la  ville  de),  X,  106. 
Caiétan  (l'abbé) ,  X,  467;  4^8. 
Caire   (  le   grand) ,  en   Egypte  , 

II,  456,  45o. 
Calais  ,  argonaute  ailé,    fils   de 

Borée  et  d'Orithye,   II,  362. 

—    Personnage   de    la    Toison 

d'or,  VI,  221-349. 
Calicut,  ville  de  l'Hindoustan, 

II,  470,  688. 
Caltgule,    Caligula,    VI,    621, 

io63. 
Caliste,   personnage  de  Clitan- 

dre  ,    I,     255-369-    —    Nom 

de  femme,  X,  5o-52;   170,  1 

et  10. 
Calliope,  V„  317,  42- 
Calphurnie,  Calpurnie,  femme 

de  César,  VI,  44,   417;    45, 

422  ;  67,  965. 
Cambray  (la  ville  de),  X,  307, 

71- 

Camille  ,  sœur  d'Horace  ,  per- 
sonnage à! Horace,  III,  243- 
358;  I,  3o;  85;  86;  IV, 
424. 

Camille,  nièce  de  Galba ,  per- 
sonnage (Y  O  thon  ,  VI ,  564- 
657. 

Camille  ,  nom  d'une  Romaine 
mentionnée  dans  Tite  et  Béré- 
nice, VII,  240,  972. 

Camille,  personnage  de  Y  Enéide, 
X,  63,  17. 

Camfion  (de).  Sonnet  que  lui 
adresse  Corneille  sur  ses 
Hommes  illustres,  X,  137- 
139. 

Cannes,  en  Italie,  V,  924. 

Canon  (de).  Son  hommage  à 
Corneille  au  sujet  de  la  Veuve, 
I,  389. 

Cantiques  traduits  par  Corneille. 
Voyez  tome  IX,  p.  641. 

Capitule  (le),  III,  3g4 .  23o  ; 
45o,  1482;  V,  55i,  920;  VI, 
491,  444;  5i2,  978;  533, 
i45o;  53g,  i593;  646,  i63i; 
656,  1822. 


Capiton  ,     nom     d'un    Romain 
mentionné  dans   Othon  ,    VI , 
577,  52. 
CAPPADocE(la),  V,  512,28;  533, 

467  ;  542,  700. 
Carbon,   VI,    366,    26;    424, 

i455. 
Carloman,  VIII,  98. 
Carlos  ,  cavalier   inconnu  ,    qui 
se    trouve    être    don    Sanche , 
roi    d'Aragon ,    V,    397-494. 
Voyez  Sanche  (don). 

Carmel  (le),  IX,  567,  6. 

Carré,  X,  463;  468. 

Carthage,  V,  542,  676;  55 1, 
9o5;  568,  i3oo;  578,  i524; 
VI,  465;  474,  39;  47$  >  48 
et  53  ;  479,  i58  et  164  et  168  ; 
480,  181  ;  482,  224;  484,  264 
et  268;  485,  296;  486,  3i6  et 
33o  ;  487,  33g  et  347  et  364; 
488,  377;  490,  433;  498, 
6^9;  499>  654;  5oo,  688; 
5i5,  1049;  517,  1102;  520, 
n58;  522,  1206  et  1207; 
523  ,  1222  et  1242;  524, 
1258;  526,  1284  et  1286; 
532,  i438;  533,  i445;  536, 
i533;  548,  1792. 

Carthaginois  ,  Carthaginoise  , 
VI,  465;  497,  599;  524, 
1247;  546,  1756. 

Casal.  Voyez  Cazal. 

Cassel.  Voyez  Mont-Cassel. 

Cassie,  Cassius,  III,  396,  265; 
41 4)  669.  Voyez  Cassius. 

Cassiodore,  X,  44  ! 

Cassiope,  reine  d'Ethiopie,  per- 
sonnage à? Andromède,  V,  243- 
396. 

Cassius,  VII,  465,  36.  Voyez 
Cassie. 

Castelvetro,  critique  italien,  I, 
34;  35. 

Castillans  (les),  III,  i85,  1559. 

Castille  (la),  III,  g5;  104;  110, 
89;  n3,  i53;  n5,  198;  129, 
421;  i36  (var.);  140,  618; 
i44  (var.)  ;    168,    178;   170, 


5i8     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


1210;  V,  412;  4i3;  416;  418 
4i9>  95  42«»  17;  422,  80 
4^5,  i54;  427,  an";  428 
226;  441,  545;  465,  1109 
466,  n38etn45;  468,1184 
470,  1242;  490,  1741  ;  491, 
1758  ;  493,  1804. 

Castor  ,  argonaute  ,  II ,  362  , 
439. 

Castro  (don  Guillen  de),  poëte 
espagnol ,  auteur  des  Moce- 
dades  del  Cid ,   III,    80;    82; 

87;  94;  96î  98;  99;  IV>  !4 
(var.);  i3i;  i32;  X,  4°3. 
—  Extrait  de  sa  comédie  in- 
titulée Enganarse  enganando  , 
III,  82.  —  Passages  des  Mo- 
cedades  del  Cid  imités  par 
Corneille  et  signalés  par  lui , 
III,  199-207. 

Catalaïud,  Catalayud  ,  ville 
d'Aragon,  V,  411;  VI,    364- 

Catalogne  (la),  X,   114. 

Catherine  (sainte)  ,  VIII,   266. 

Catherine  de  Sienne  (sainte)  , 
VIII,  368. 

Catin  ,  nom  de  femme  ,  X  , 
48,    1. 

Caton,  IV,  i5;  47,  476;  97, 
1706;  V,  141  ;  VI,  601,  608  ; 
X,  97,  44;  441. 

Cazal  (la  place  de),  X,  69,  5i  ; 
110. 

Cécile  (sainte),  VIII,    209. 

Cédar,  IX,  181,  18. 

Céladon,  personnage  de  VAs- 
trée ,  I,  406,  127;  IV,  354, 
1240. 

CÉlidan,  personnage  de  la  Veuve, 

I,  371-500;  43;  II,  120. 
Célidée,  personnage  de  la  Ga- 
lerie du  Palais,   II,    1-112.  — 
Nom  de  femme  mentionné  dans 
la  Veuve,  I,  408,  182. 

Célie,  personnage  de  la  Suivante, 

II,  11 3-2 14.  —  Nom  de  femme 
mentionné  dans  la  Veuve,  I, 
4o8,  181. 

Celsus,  tribun  du  parti  de  Pom 


pée,  personnage  de  Sertorius, 
VI,  35i-445. 

Celtirères  (les),  VI,  38o,  417- 

Céphale,  aimé  de  l'Aurore,  II , 
449,  3oo. 

Céphalie  ,  nymphe,  personnage 
d'Andromède,  V,  243-396. 

Céphée,  roi  d'Ethiopie,  person- 
nage à' Andromède,  V,  243- 
396. 

Cépion,  nom  d'un  Romain  men- 
tionné dans  Cinna,  III,   438, 

I203. 

Cerbère,  I,  226,  1399. 

Céréal,  Céréalis,  général  ro- 
main, VII,  246,  1102. 

Cérès,  III,  5o2,  1419;  X,  239, 
64. 

César  (Jules) ,  1 ,  88-90  ;  III , 
402,  378;  4°4>  427  et  43o; 
4o5,  449;  410,  584;  4i !  » 
5g4  et  597  et  600;  4J4>  664 
et  665  et  668;  421,  842  ; 
453,  i548;  497,  228;  IV, 
412;  V,  317,  53;  VI,  36i; 
X,  118,  49;  178,  39.  —  Ses 
Commentaires,  1 ,  90  ;  IV,  21. 
—  Personnage  de  Pompée,  IV, 
n-i5;  I,  26;  io3;   III,  483; 

484- 
César,  titre,  V,  17,  11;  84, 
i534;  200,  io38;  VI,  582, 
162;  601,  608;  619,  1019; 
637,  1419;  VII,  204,  89; 
212,  3oi  ;  216,  390;  382, 
32;  4°4>  583;  425,  1091; 
43o,   1227;  452,  1752. 

CÉSARS,     LES    CÉSARS,     III,    543, 

1190;  IV,  81,  i324  ;  VI, 
597,  53i ;  VII,  126,  427; 
i5»2,  1082;  159,  1245;  218, 
433;  243,  1037;  275,  1751  ; 
443,  i534eti546;  IX,  607, 
7;  X,  180,  92;  260,  124; 
268,  252  ;  441  ;  475. 

Césars  (les),  les  empereurs  d'Al- 
lemagne, X,  338,  101. 

César  ion,  fils  de  César  et  de 
Cléopatre,  IV,  21. 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


Jiy 


Chaise  (le  P.  de  la),  jésuite, 
confesseur  de  Louis  XIV,  X, 
3o8,  9  ;  3i4  ,  52. 

Chalciope  ,  fille  d'Aaete  ,  veuve 
de  Phryxus ,  personnage  de 
la   Toison  d'or,  VI,   221-349- 

Chansons  de  Corneille,  X,  53  ; 
55;  168. 

Chapelain.  X,  71,  78.  — Let- 
tres qu'il  adresse  à  Corneille, 
X,  488  et  489;  496«t  497- 

Charente  (la),  X,  443. 

Chariglee,  personnage  du  roman 
grec  d'Héliodore ,  V,  296; 
3o4- 

Charlemagne,    III,    81;  VIII, 

98. 

Charleroi  (la  ville  de),  X,  204, 
146. 

Charles  II ,  roi  d'Espagne  ,  X , 
329,  59. 

Gharles-Quint,  VIII,  140. 

CHARMroN ,  dame  d'honneur  de 
Cléopatre,  personnage  de  Pom- 
pée, IV,  i-ii5;  I,  io3;  III, 
483;  484. 

Charon  ,  nocher  des  enfers ,  I , 
222,  1327;  223,  i333;  229, 
1440;  23i,    1471  ;   II,  4i3  , 

^  i473;  VII,  352. 

Chartreuse  (la),  VIII ,  67. 

Chartreux  (l'ordre  des) ,  VIII, 
171,  2617;  470. 

Chastes  martyrs  (les),  tragédie  de 
Mlle   Cosnard ,   X,  i3o,  1. 

Chavigny  (le  marquis  de),  X, 
270,  267. 

Chersonèse  Taurique  (la),  VI, 
247. 

Chérubins  (les),  IX,   127,  7. 

Chevreul  (Nicolas  du),  sieur 
d'Esturville,  X,  i33. 

Chevreul  (Mme  du).  Voyez 
Ranquet    (Elisabeth) . 

Chifflet  (Philippe),  X,  466;  467. 

Chigi  (Fabio).  Voyez  Alexan- 
dre VII. 

Chimène,  personnage  du  Cid, 
III,  1-241;  I,  27;  38;  57;  60; 


69;  70;    n5;    120;   IV,   144 

(var.)  ;  X,  401. 
Chine  (la) ,  II ,  456  ,  443  ;  X  , 

254,  3i. 
Choeur   (le),   dans   la  tragédie 

ancienne,    VI,     i32.    —    Le 

chœur  dans  Jndromède,  Y,  243- 

396. 
Chrêmes,   personnage   de  l'An- 

drienne   de   Térence,I,  102; 

II,  433. 

Christ  de  Saint-Roch  (quatrain 
pour  le),  attribué  à  P.  Cor- 
neille, X,  377. 

CHRiSTrNE  de  France,  duchesse  de 
Savoie,  fille  de  Henri  IV,  X, 
338,  94. 

Chrysante  ,  personnage  de  la 
Veuve,  I,  37i-5oo.  —  Per- 
sonnage de  la  Galerie  du  Pa- 
lais, II,  1-112. 

Chrysolite,  nom  de  femme 
mentionné  dans  la  Veuve,  I, 
416,  325  et  339;  492>  1820. 
Voyez    Crisolite. 

Cid,  en  arabe  seigneur,  III,  170, 
1222  et  1223  et  1225  ;  187, 
1587;  189,  i636;  197,  1827. 

Cid  (le),  tragédie  de  Corneille, 

III,  1-241  ;  I,  4  ;  24  ;  25  ;  43  ; 
48;  57;  59;  60  ;  62;  68  ;  70;  84; 
96;  101;  112;  n3;  Ii5;  120, 
272;  277;  279;  483;  IV,  i3i; 
l32  ;  144  (var.);  420  ;  VI,  3ll; 
463  ;  VII,  107  ;  X,  79,  2  ;  io3, 
10;  187,  29;  447;  486. — Exa- 
men de  la  pièce,  III,  91-102. 

—  Ecrits  en  faveur  du  Cid  at- 
tribués à  Corneille,  III,  53-76. 

—  Succès  du  Cirf,  III,  77;  86; 
91.  —  Deux  romances  espa- 
gnols sur  le  Cid ,  111,  82  ;  87 - 
90.  —  Le  Cid  traduit  en  ita- 
lien, en  flamand  et  en  anglais, 
III,  82.  —  Corneille  nie  «  qu'il 
ait  convenu  de  juges  touchant 
son  mérite,  »  III,  80.  —  C'est 
celui  de  ses  ouvrages  réguliers 
où    il   s'est    donné  le  plus  de 


5-2o  TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


licence,  III,  91.  —  Critique 
des  vers,  III,  38 1.  —  Lettre 
apologétique  de  Corneille  en 
réponse  aux  Observations  de 
Scudéry  sur  le  Cid,  X,  3g6- 
407.  —  Représenté  trois  fois 
au  Louvre,  et  deux  fois  à 
l'hôtel  de  Richelieu,  X,  401. 
—  Fragments  de  lettres  de 
Corneille  à  Bois-Robert  au  sujet 
de  l'examen  du  Cid  par  l'Aca- 
démie française,  X,  427-432. — 
Corneille  a  remporté  le  témoi- 
gnage de  l'excellence  de  sa 
pièce  par  le  grand  nombre  de 
ses  représentations ,  par  la 
foule  extraordinaire  des  per- 
sonnes qui  y  sont  venues,  et 
par  les  acclamations  qu'on  lui 
a  faites,  X,  43o. 

Cid  (le)  ,  personnage  principal 
de  la  tragédie  de  ce  nom. 
Voyez  Rodrigue  (don).  — 
Deux  chroniques  du  Cid,  III, 
80. 

Cinna,  partisan  de  Marius,  VI, 
424,  i455. 

Cinna ,  tragédie  de  Corneille, 
III,  359-462;  I,  44;  45;  47; 
61;  68;  84;  87;  102;  io5; 109  ; 
n3;  n5;  118;  120;  272;  IV, 

i3o;  421  ;  V,  298;  X,  io3, 

10;  3ii,  14  ;  447*  — Examen 
de  la  pièce,  III,  379-382.  — 
Ses  vers  ont  quelque  chose  de 
plus  achevé  que  ceux  d'//o- 
race,  III,  38 1.  —  Représenté 
à  Versailles  en  octobre  1676, 
X,  309;  3n,  3.  —  Loué  par 
Balzac,  X,  44°-442. 

Cinna,  chef  de  la  conjuration 
contre  Auguste ,  personnage 
principal  de  la  tragédie  de 
Cinna,  III,  359-462  ;  I,  26; 
3o;  44;  45;  69;  75;  87;  io5; 
III,  370;  379;  38i;  VI,  122, 
36;  X,  441  et  442;  491. 

Circé,  VI,  33 1,  1794  et  1796  et 
1797  ;  34o,  2oa5j  246. 


Cîteaux  (l'ordre  de),  VIII,  171, 
2617. 

Cithéron  (le),  montagne  de 
Béotie,  VI,  144,  236;  176, 
991;  189,  1307;   207,  1739. 

Civilis,  chef  des  Bataves,  VII, 
246,  1099;  258,  i386. 

Claire  (sainte),  VIII,  673. 

Clarice,  personnage  de  la  Veuve, 
I,  37i-5oo.  —  Personnage  du 
Menteur,  IX,  117-273;  3o5, 
289  ;  320,  6o3  ;  371,  i553. 

Clarimond,  personnage  de  la 
Suivante,  II,  Ii3-2i4« 

Clarine,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  la  Suivante,  II, 
i5i,  47°  et  471  >  —  dans  la 
Place  Royale,  II ,  23g,  3o6  ; 
240,  317;  242,  343;  247, 
461;  264,  781.  —  Nom  d'un 
rôle  de  femme  dans  le  Ve  acte 
de  r Illusion,  II,  5o7-5i8. 

Claude,  empereur  romain,  VI, 
597,  5io;  621,  1064  et  1067  ; 
VII,   254,  i3o3. 

Claveret,  X,  4°3.  —  Ses  hom- 
mages à  Corneille  au  sujet  de 
la  Veuve,  I,  385  et  386. 

Cléandre  ,  personnage  de  la 
Place  Royale,  II,  2l5-3oi.  — 
Personnage  de  la  Suite  du  Men- 
teur ,  IV,  275-395.  — Nom 
d'homme,  dans  les  vers  sur  le 
Départ  de  la  marquise,  X,  148, 
95. 

Cléante,  personnage  de  la  Gale- 
rie du  Palais,  II,  1-112.  — 
Confident  d'OEdipe,  person- 
nage à'OEdipe,  VI,  101-219. 
—  Nom  d'homme  mentionné 
dans  Théodore,  V,   40,  527. 

Cléobule,  personnage  de  Théo- 
dore, V, i-iii. 

Cléomène  ,  amant  de  Psyché, 
personnage  de  Psyché,  VII, 
277-370. 

Cléon,  personnage  de  Clitandre, 
I,  255-369.  —  Personnage  de 
la  Suivante,  II,   n3-2i4«  — 


DES  OEUVRES    DE   CORNETLLE. 


JH 


Domestique  de  Félix,  person- 
nage de  Polyeucte,  III ,  463- 
570. 

Cléon,  orateur  grec,  natif  d'Ha- 
licarnasse,  personnage  iïAgé- 
silas,  VI,  1-95. 

Cleone,  personnage  de  Médée, 
II,  327-4 r 9.  —  Personnage  de 
Nicomède,  V,  49^~5g3. 

Cléonice,  personnage  de  la  Co- 
médie des  Tuileries,  II,  325- 
3o3. 

Cléonte,  personnage  d'une  tra- 
gi-comédie de  Scudéry,  X, 
61,  1. 

Cleopatre,  sœur  de  Ptolomée, 
personnage  de  Pompée,  IV,  1- 
n5;  II,  337;  III,  483;  IV, 
416; 420. 

Cleopatre,  reine  de  Syrie,  veuve 
de  Démétrius  Nicanor,  per- 
sonnage de  Rodogune,  IV,  397- 
5n;  I,  19;  32;  39;  60;  61; 
64;  69;  79;  99;  100;  io3;  ni; 
118  ;  121. 

Cleopatre,  tragédie  de  Benserade, 
VI,  463. 

Clerïc  (Pierre),  jésuite.  Sa  tra- 
duction en  vers  latins  des  vers 
français  de  Corneille  sur  le 
canal  du  Languedoc,  X,  232. 

Climène  ,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  la  Suite  du  Men- 
teur,   IV,     359,    i346;     386, 

^1873;  388  (var.). 

Clindor,  personnage  de  f Illu- 
sion, II,  421-527. 

Clitandre,  tragédie  de  Corneille, 
I,  255-369-  —  Examen  de  la 
pièce,  I,  270-273. 

Clitandre,  personnage  princi- 
pal de  la  pièce  de  ce  nom,  I, 
255-369. 

Cliton,  personnage  de  Mélite,  I, 
123-253.  —  Personnage  du 
Menteur,  IV,  117-273;  —  de 
la  Suite  du  Menteur,  IV,  275- 

395. 
Cloris,  personnage  de  Mélite,  I, 


123-253;  3g4 ;  44°,  932.  — 
Nom  de  femme  mentionné  dans 
la  Galerie  du  Palais,  II,  20, 
63;  76,  1092. 

Clothon,  uwe  des  Parques,  I, 
23i  (var.);  II,  410  (var.). 

Clyte,  nom  d'homme  mentionné 
dans  Andromède ,  V  ,  390, 
i652  *,  391,  1680. 

Clytemnestre,  I,  i5;  20;  67; 
77;  78;  80;  106;  112;  III, 
274;  V,  406;  VI,  461. 

Code  (le),  IV,  142,  9  ;  i58, 
3a6. 

Coëffeteatj.  Son  Histoire  ro- 
maine, III,  478. 

Coislin  (Armand  de  Cambout, 
duc  de),  X,  271,  269. 

Colbert,  X,  295,  78.  —  Lettre  à 
lui  adressée  par  Corneille ,  X , 
5oi  et  5o2. 

Colchos,  I,  106  ;  II,  336;  343, 
35;    363,    45i;    VI,    246; 

247;  248;  252;  265,  240; 
285,  695  ;  291,  870;  294, 
926;  295,  942;  3io,  1294; 
317,  1459;  345,  2i34;  348, 
2212. 

Collardeau  (Julien).  Son  hom- 
mage à  Corneille  au  sujet  de 
la  Veuve,  I,  386. 

Cologne  (la  ville  de),  X,  258, 
92. 

Combalet  (  Marie  -Madeleine  de 
Vignerot,  marquise  du  Roure, 
dame  de),  plus  tard  duchesse 
d'Aiguillon,  nièce  du  cardinal 
de  Richelieu.  Epître  dédica- 
toire,  à  elle  adressée,  de  la  tra- 
gédie du  Cid,  III,  77. 

Combat  spirituel  (  le  livre  du  )  , 
VIII,  i3. 

Comédie.  Sa  définition,  I,  23  ; 
377.  —  Sa  conclusion,  I,  27. 

—  Comédie  héroïque,  I,   25. 

—  Actions  de  la  comédie,  I, 
96.  —  En  quoi  la  comédie 
diffère  de  la  tragédie,  I,  25.  — 
Ce  qu'elle  a  de  commun  avec 


522     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


elle  et  en  quoi  elle  lui  ressem- 
ble, I,  26  ;  29.  —  Défense  de 
la  comédie,  VII,  105-107. 
Voyez  Théâtre  (éloge  du). 

CoMEDTENS,     II,     5l9;    III,     IOO. 

—  Il  s'en  établit  une  nouvelle 
troupe  à  Paris,  I,  i38. 

Commentaires  (les)  de  César  .Voyez 
César  (Jules). 

Complies  (les)  traduites  en  vers 
français  par  Corneille ,  IX , 
323-34i- 

Comte  (le),  personnage  du  Cid. 
Voyez  Gomès  (don),  comte  de 
Gormas. 

Comte  (Noël  le),  mythologiste , 
VI,  248. 

Conches  (la  ville  de),  X,  433. 

Condé  (la  ville  de),  X,  307,  60. 

Condé  (la  maison  de),  X,  208, 
210. 

Condé  (le  grand),  X,  208,  208; 
260,  119;  277,  35i;  3o6, 
56.  - —  Épître  dédicatoire,  à 
lui  adressée,  de  la  tragédie  de 
Rodogune,  IV,  4n-4I3- 

Confesseur.  Hymne  pour  un 
confesseur,  IX,  587  et  588.  — 
Hymne  pour  un  confesseur 
pontife,  IX,  589  et  590.  — 
Hymne  pour  un  confesseur  non 
pontife,  IX,  590-592. 

Conrart,  X,  497- 

Constance,  associé  à  l'empire  par 
Honorius,  VII,  118,  242. 

Constantin.  Voyez  Costantin. 

Constantin,  empereur  romain,  I, 
71  ;  V,  164,  188. 

CoNSTANTiNE,  veuve  de  l'empe- 
reur Maurice,  V,  14^;  i5î; 
23g;  240. 

CONSTANTINOPLE,  T,   120;    l38;  V, 

i56;  VII,  38o. 
Conti  (Noël).  Voyez  Comte  (Noël 

Je). 
Corbîe  (la  ville  de),  X,  n3. 
Corbtjlon,  général  romain,  VII, 

200;  204,  80  et  89;  218,  4!$; 

228,  682. 


Cordoue  (la  ville  de),  IV,  i3i. 
Corbus  ,    vieux    Romain    men- 
tionné dans  Pompée,   IV,   89, 

1499- 
Coeinthe  (la  ville  de),  I,  21;  42; 
46;  106;  II,  335;  34o;  341, 
3;  342,  26;  346,  106;  353, 
264  et  266;  371,  618;  373, 
667  ;  399,  I2o5;  411»  i44°  ; 
IV,  423;  VI,  i34;  i45,  261; 
148,  34i;  149,  353;  i5i, 
399;  2o3,  i633;   204,   1661  ; 

205,  i683  et  1687  et   1688  ; 

206,  1700;  208,  1755. 
Corinthiennes  (chœur   de),    II, 

333. 
Corneille  (Pierre).  Etant  de- 
meuré provincial,  ce  n'est  pas 
merveille  si  son  élocution  en 
conserve  quelquefois  le  carac- 
tère, 1,2.  —  Il  ne  pouvait 
sentir,  quand  il  écrivait  M  élite, 
que  la  rudesse  de  son  pavs,  et 
était  tellement  inconnu  qu'il  lui 
était  avantageux  de  taire  son 
nom,I,  i35.  —  Sa  façon  d'écrire 
est  simple  et  familière,  I,  i35. 
— Beaucoup  de  ses  amis  lui  ont 
toujours  conseillé  de  ne  rien 
mettre   sous  la  presse,  I,  i35. 

—  Il  fait  un  voyage  à  Paris  pour 
voir  le  succès  de  Mélite,  I, 
270.  —  Dieu  l'a  fait  naître 
mauvais  courtisan,  et  il  a 
trouvé  dans  la  cour  plus  de 
louanges  que  de  bienfaits,  I,  2. 

—  Il  étoit  absent  de  Paris  pen- 
dant l'impression  de  V Illusion  et 
n'a  pu  en  corriger  les  épreuves, 
II,  43 1 .  — 11  est  encore  en  pro- 
vince lorsqu'il  compose  Ho 
race,  III,  259.  —  Il  a  inventé 
les  machines  tf  Andromède,  V, 
297.  —  Il  a  fait  réciter,  avant 
Nicomède,  quarante  mille  vers 
sur  le  théâtre,  V,  5oi;  5o5.  — 
Il  s'aperçoit  qu'après  vingt  an- 
nées de  travail,  il  devient  trop 
vieux   pour    être   encore    à   la 


DES    OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


523 


mode,   VI,    5.  —  Il  laisse    le 
théâtre    français    en    meilleur 
état  qu'il  ne  l'a  trouvé,  et   du 
côté  de   l'art  et   du   côlé  des 
mœurs,  VI,  5.   —  Son  ortho- 
graphe, VIII,  16.  —  Ses  inno- 
vations orthographiques,  I,  5- 
12.  —  Il  remercie  le  cardinal 
Mazarin  de  la  pension  qu'il  lui 
a    donnée,   X,    92.    —   Il  de- 
mande à  Louis  XIV  la  confir- 
mation des  lettres  de  noblesse 
accordées  à  son  père,  X,    i35. 
—   Il  le  remercie  de   la   pen- 
sion qu'il  lui  a    accordée,  X, 
175.    —  Il  se  plaint  du  retard 
du  payement  de  cette  pension, 
X,  i85.  —  Il  le  remercie  d'a- 
voir   fait     représenter    devant 
lui,    en    octobre     1676,    plu- 
sieurs   de   ses    chefs-d'œuvre , 
X,  309,  —  Son  hommage  poé- 
tique  à    son  ancien  maître    le 
P.  Delidel,  jésuite,  X,  222.  — 
Son  discours  lorsqu'il  fut  reçu 
à     l'Académie    française,     X, 
407.  —  Il  désire  qu'un  de  ses 
fils  entre  comme  page  chez,  la 
duchesse  de  Nemours,  X,  488. 
—  Pour  diverses  relations,  lit- 
téraires et  autres,  de  Corneille, 
et  les  occasions  qui  ont  donné 
lieu  à  certains  de  ses  ouvrages, 
voyez  les   articles    Académie, 
Bois  -  Robert  ,       Foucquet  , 
Guise,  Hariay  (de),  Julie  de 
Rambouillet  ,     Louis     XIII , 
Louis  XIV,  Mazarin,  Pascal 
(Jacqueline) ,  Richelieu,  Scu- 
déry. 

Corneille  (Mme),  femme  du 
précédent,  X,  481. 

Corneille  (Pierre),  fils  aîné  des 
précédents,  capitaine  dans  l'ar- 
mée du  Roi,  X,  188  et  189, 
64-78;  272,  280;  3i4,  47  ; 
5oi. 

Corneille  (A7.),  second  fils  du 
poëte,  X,  272,  280.  —  Blessé 


au   pied  pendant    le   siège   de 
Douai  en   1667,   X,   188-190, 
64-86.    —    Tué  au    siège  de 
Grave  en  1674,  X,    3i4,  47; 
5oi. 
Corneille    (Charles)  ,    troisième 
fils  du  poëte,  mort  en  1667,  à 
l'âge    de   quatorze   ans.    Vers 
du  P.  de  la  Rue  sur  sa  mort, 
X,  383. 
Corneille   (  Thomas  )  ,    fils    du 
poëte.  Son  père  demande  pour 
lui    un    bénéfice  au    Roi,   X, 
3o8  ;  3i4,  52. 
Corneille  (Thomas),    frère    du 

poëte,  X,  481;  483. 
Corneille  (Antoine),    frère    du 
poëte,    chanoine   régulier    au 
Mont-aux-Malades,  X,  465. 
Corneille   (Pierre),    grand-père 
du    poëte,    référendaire    à    la 
chancellerie  du  Parlement,  X, 
433-435. 
Corneille  (Mme),  femme  du  pré- 
cédent, X,  435. 
Corneille    (Antoine),    oncle    du 
poëte,  curé   de  Sainte-Marie- 
des-Champs,    X,    433;    435; 
437. 
Corneille  (François),    oncle  du 
poëte,    procureur    au    Parle- 
ment, X,  436  et  437. 
Corneille,    cousin  germain    du 
poëte,  outragé  par   du  Mesnil 
Haudrey,^X,  479  et  4 80. 
Corneille  (Mme),  femme  du  pré- 
cédent, X,  481. 
Cornélte,    femme    de    Pompée, 
personnage   de   la  tragédie  de 
Pompée,  IV,  i-ii5  ;  I,   118. 
Cosnard  (Marthe).  Vers  que  lui 
adresse  Corneille,   X,    129    et 
i3o. 
Cosses  (les),  les    Cossus,  famille 

romaine,  III,  4^2,  i536. 
Costantin   (Octavian),   X,   433- 

435. 
Costantin     (Pierre),  X,     434; 
436. 


5*4  TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


Cotys,  roi  de  Paphlagonie,  per- 
sonnage à'Agésilas,  VII,  1-95. 

Courbé,  X,  436. 

Cour  celles  (de),  X,  436. 

Courtrai  (la  ville  de),  X,  2o5, 
159. 

Crasse  (le  jeune),  le  jeune  Cras- 
sus,  IV,  68,  990;  69,  ioi3; 
70,  io33. 

Crassus,  père  du  précédent,  VI, 
614,  883;  VII,  462;  464, 
29;  466,  83;  493,  7i3  ;  494, 
764  ;  5oo,  904  et  go5  ;  5i3, 
1221  ;  526,  i547- 

Cratès,  sénateur  de  Lacédémone, 

_  yn,  78,  T707;  91, 2007. 

Créon,  roi  de  Corinthe,  person- 
nage de  la  Médêe  de  Corneille, 
II,  327-419;  I,  ai;  106.  — 
Créon  dans  la  Médée  d'Euri- 
pide, X,  450. 

Créon,  frère  de  Jocaste,  VI,  194, 
1410. 

Cresphonte,  personnage  de  la 
tragédie  grecque  de  ce  nom, 
1,67. 

Crète  (l'île  de),  VI,  164,  695. 

CriÉtheus,  père  d'vEson,  VI,  247. 

Creuse,  fille  de  Créon,  person- 
nage de  Médée,  II,  327-419; 
I,  4^  ;  106  ;  X,  45o. 

Crisolite,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  M  élite  y  I,  147, 
69.    Voyez  Chrysolite. 

Crispe,  gendre  de  l'empereur 
Phocas ,  personnage  d'Héra- 
clius,  V,  11 3-24i. 

Crispe,   fils  de    Constantin,    I, 

71' 

Crispe  (  la  mort  de  )  tragédie 
italienne    de    Ghirardelli ,    I , 

71- 

Criton,    personnage    de    YAn- 

drienne  de  Térence,  I,  11 5. 
Croix -du -Tiroir  (la),  carrefour 

de  Paris,  II,  76,  1084. 
Curiace,    gentilhomme    d'Albe. 

personnage  d'Horace,  III,  243- 

358;  I,  65;  85;  86;  IV,  424. 


Cybèle,  la  bonne  déesse,  III, 
552,  1419. 

Cydippe,  Néréide ,  personnage 
d' Andromède,  V,  243-396. 

Cydippe,  sœur  de  Psyché,  per- 
sonnage de  Psyché,  VII,  277- 
370. 

Cymodoce,  Néréide,  personnage 
d'Andromède,  V,  243-396. 

Cyrte,  capitale  du  royaume  de 
Syphax,  VI,  472;  483,  261  ; 
487,  358;  489,  391;  490, 
416;  5i6,  1066  et  1073;  519, 
n33. 

Cythère,  V,  33 1,  372. 


D 


Damas  (la  ville  de),  II,  4^7, 
455. 

Damaste,  brigand  tué  par  Thésée, 
VI,  164,  696. 

Damiette  (la  ville  de),  IV,  20. 

Damis,  nom  d'un  esclave  dans 
Agésilas,  VII,  53,  1102;  78, 
1705. 

Damon,  personnage  de  la  Sui- 
vante, II,  11 3- 2 14. 

Damon  ,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  Mélite ,  I,  201, 
963. 

Danaé,  mère  de  Persée,  V,  3i4; 
375,  1298. 

Danemark  (le),  X,  257,  79. 

Daniel  (le  prophète),  VIII, 
188. 

Danois  (les),  X,   3o2,  53, 

Danube  (le),  VI,  249;  X,  339, 
114. 

Daphné,  aimée  d'Apollon,  V, 
356,  881. 

Daphné,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  Clitandre,  I,  265  ; 
36o,  i548  ;  —  mentionné  dans 
le  Menteur,  IV,  i83,  783. 

Daphnis,  nom  de  femme,  per- 
sonnage de  la  Suivante,  II,  1 13- 
214.    —   Mentionné    dans   la 


DES   OEUVRES    DE   CORNEILLE. 


Veuve ,  I,  4*4>  29%t  —  dans 
la  Galerie  du  Palais,  II,  20, 
58;  35,  325  ;  40,  4°7- 

Darey,  X,  436. 

Dauphin  (le).  Voyez  Louis, Dau- 
phin, fils  de  Louis  XIV. 

Dauphlne  (la),  femme  du  fils  de 
Louis  XIV.  Voyez  Marie- 
Anne- Christine -Victoire  de 
Bavière . 

David,  roi  de  Judée,  III,  481; 
VIII,  54;  i33,  i836;  166, 
25o8;  226,  1019;  333;  4IO> 
422,  3335;  4^5;  586,  i53;  IX, 
32,  459;  33,  466  et  471;  34, 
485  et  491;  499,  3;  5io,  9. 
Voyez  Psaumes.  —  La  maison 
de  David,  IX,  i59,  7.  — 
Les  enfants  de  David,  IX,  i85, 
20. 

Davus  dans  le  Phormion  de  Té- 
rence ,  1 ,  46  i  —  dans  YAn- 
drienne,  II,  i3  et  i4- 

Décie  (l'empereur),  III,  486; 
495, 174  et  179; 499, 270; 5oo, 
302;  5oi,  307;  526,846;  535, 
1017  et  1021  et  io3o  et  io38; 
540,  ii25;  543,  1208;  552, 
1400  et  1 414»  556,  1484;  56 1, 
1576.  Voyez  Décius. 

Déctus,  III,  476  ;  479-  Voyez 
Décie. 

Décoration  du  théâtre  ,  décora- 
tions, I,  40;  120. 

Dédicace.  Hymnes  pour  la  dé- 
dicace d'une  église,  IX,  598- 
602. 

Dédicaces  :  de  M  élite ,  à  M.  de 
Liancour,  I,  i34  et  i35;  — 
de  Clitandre,  au  duc  de  Lou- 
gueville,  I,  26g  et  260;  —  de 
la  Veuve,  à  Mme  de  la  Mai- 
sonfort,  I,  375  et  376  ;  —  de 
la  Galerie  du  Palais^  à  Mme  de 
Liancour,  II,  10  et  11;  —  du 
Çid,  à  Mme  de  Combalet,  III, 
77  et  78;  —  &  Horace,  au  car- 
dinal de  Richelieu,  III,  258- 
26 1  ;  —  de  Cinna ,  à  M .  de  Mon- 


toron ,  III,  369-372;  —  de 
Polyeucte,  à  la  Reine  régente, 

III,  471-474j  —  de  Pompée, 
au  cardinal  Mazarin,  IV,  11- 
i3;  —  de  Rodogune,  au  grand 
Condé,  IV  4n-4I3;  —  d'Hé- 
raclius,  au  chancelier  Seguier, 
V,  141  -i43  ;  —  de  Don  Sanche 
d'Aragon,  à  M.  de  Zuylichem, 

V,  4°4-410  >  —  &OEdipe,k 
Foucquet,  VI,  1 21-124. 

Delidel  (le  R.  P.),  jésuite.  Vers 
que  lui  adresse  Corneille,  son 
ancien  élève,  sur  sa  Théologie 
des  saints,  X,  220-222. 

Delphes  (la  ville  de),  II,   335; 

VI,  139,  127;  149,  355;  i83, 
1  i5i;  184,  1173. 

Démétrius  Nicanor,  roi  de  Sy- 
rie, IV,  4i5  ;  4*8;  42°;  4^4  ; 
4^8.  Voyez  Nicakor. 

Dénouement  du  poëme  drama- 
tique, I,  75  ;  io5. 

Denys  le  Milésien,  VI,  248. 

Desmarets  (J.),  auteur  d'une  tra- 
duction en  vers  du  Combat 
spirituel,  VIII,  i3. 

Desoeillets  (Mlle),  comédienne. 
Voyez  Œillets  (des). 

Destin  (le),  V,  269;  364,  io36 
et  1048;  3g3,  1716;  VII,  347, 
1548;  356,  1763;  362,  1929; 
363,  i942- 

Deventer  (la  place  de),  X,  280, 
395. 

Dialogue,  X,  5o-52. 

Diane,  déesse,  I,  67;  412,   257; 

IV,  417;  VI,  249;  X,  236,  i3. 
Diction,  I,  /\0. 

Didon.  Son  épitaphe,  X,  36  et 

Didon,  tragédie  de  Scudéry,  VI, 
462. 

Didyme,  personnage  de  Théo- 
dore, V,  1-1 11. 

Diègue  (don) ,  personnage  du 
Cid,  III,  1-241. 

Digeste  (\e) ,  IV,  i58,  327;  219, 
1443. 


5^6     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Digue  (la)  de  la  Rochelle,  X, 
109. 

Dioclétiajv  ,  empereur  romain, 
V,  17,  35. 

Dion,  historien  grec,  VII,  197. 

Dircé,  princesse  de  Thèhes,  fille 
de  Laïus  et  de  Jocaste,  per- 
sonnage à'OEdipe,  VI,  101- 
219;  I,  71. 

Discorde  (la),  X  ,  265  ,  209.  — 
Personnage  du  prologue  de  la 
Toison  d'or,  VI,  252-265. 

Discours  généraux  dans  le  poëme 
dramatique,  I,  18. 

Distïque  latin  sur  les  conquêtes 
de  Louis  XIV  en  1672,  attri- 
bué à  Corneille,  X,  385. 

Doesbourg  (la  ville  de),  X,  280, 

397- 

Dole  (la  ville  de),  X,  296,  102. 

Domitia,  fille  de  l'empereur  Pho- 
cas,  V,  143  ;  i52. 

Domitian,  frère  de  Tite  et  amant 
de  Domitie ,  personnage  de 
Tite  et  Bérénice,  VII,  i83- 
276. 

Domitie,  fille  de  Corbulon,  per- 
sonnage de  Tite  et  Bérénice, 
Vil,  i83-276. 

Don  Sanche.  Voy.  Sanche  (don). 

Dorante,  personnage  de  /' Illu- 
sion, II,  421-527.  —  Person- 
nage principal  de  la  comédie 
du  Menteur,  IV,  117-273;  I, 
100.  —  Personnage  principal 
de  la  Suite  du  Menteur,  IV, 
275-395;  280;  282;  283;  285; 
286  ;  3o4,  270  ;  I,  19. 

Doraste,  personnage  de  la  Veuve; 
I,  37i-5oo.  —  Personnage 
de  la  Place  Royale,  II,  21 5- 
3oi. 

Dorimant  ,  personnage  de  la 
Galerie  du  Palais,  II,  1-112. 

Doris,  personnage  de  la  Veuve, 
I,  3^;  i-5oo.  —  Doris,  nom  de 
femme,   I,   149,  112. 

Dorise,  personnage  de  Clitandre, 
I,  255-369. 


Douai  (la  ville  de),  X,  189,  82, 
2o5,  157. 

Drusus  Nero,  frère  de  l'empe- 
reur Tibère,  X,  266,  227. 

Dubé  ,  parent  de  Corneille ,  X, 
452. 

Dubuisson.  Lettre  à  lui  adressée 
par  Corneille,  X,  452  et  453. 

DUNKER  QUE.  Voyez  DuNQUERQUE . 

Dunois,  X,  208,  210;  276,  348. 

Dunquerque  (la  ville  de),  IV, 
412. 

Dymas,  confident  d'OEdipe,  per- 
sonnage d' Œdipe,  VI,  101- 
219. 

E 

E.  Ses  trois  prononciations  ,  I, 
6  ;  9  ;  —  e  féminin  ,1,9;  —  e 
masculin,  I,  9  ;  —  e  simple, 
!>  9;  —  e  aigu,  I,  10;  —  e 
grave,  I,  10. 

Ebre(I'),  X,  286,  11. 

Echion  ,  fils  de  Mercure,  VI, 
343,  2093. 

Écho,  V,  33i,  384;  X,  236,  16. 

Ecosse  (1'),  I,  274. 

ÉDEN(l'),  IX,  i3,   io3. 

Eduige,  sœur  de  Pertharite,  per- 
sonnage de  Pertharite,  VI,  1- 
100  ;  17. 

Egée,  roi  d'Athènes,  personnage 
de  Médée,  I,  46  ;  107.  Voyez 
jEgée. 

Egée  (la  mer),  V,  539,  607. 

Egisthe,  I,    20  ;  81  ;  III,  274. 

Église    (Y),   X,   237     33;    238, 

,  38 

Égnace,  Énatius,  nom  d'un  Ro- 
main mentionné  dans  Cinna, 
111,438,  i2o5. 

Egypte  (F),  II,  456,   448;  III, 
552,    i423;IV,   11;   19;  21 
22;  23;  26;  28,  3o;  33,  148 
35,  212;  42,  366;   44>  4°4 

47,  47°;  48,  5i2;  5i,  582 
52,  609;  55,  664;  60,  797 
77,  1208  ;  85,  1421  ;  89, 1507 


DES  ŒUVRES    DE   CORNEILLE. 


527 


p5,  i658;  ioo,  1784;  416  ; 
420;  4a3  ;  441,  279;  V,  17, 
6;  ai,  n3;  24,  Ï7S;  26,  210; 
54,  83g;  86,  i576;  VII,  2o5, 
101  ;  VIII,  4^3,  3949;  IX, 
3io;  3n,  3  ;  X,  329,  53. 

Egyptiens  (les),  IV,  20;  26. 

Electre,  fille  d'Agamemnon, 
personnage  des  tragédies  de 
Sophocle  et  d'Euripide,  I,  69  ; 
80;  106. 

Electre,  tragédie  d'Euripide,  IV, 
417  ,  V,  i5r  ;  —  tragédie  de 
Sophocle,  IV,  417;  V,  i5i. 

Eleusine    (Gérés),     III,     552, 

Elide  (1'),  VI,  190,  i3i2. 

Élie  (le  prophète),  VIII,  635. 

Elisabeth  de  Hongrie  (sainte"), 
VIII,  i63;545. 

Elfinice,  fille  deLysander,  per- 
sonnage ftAgésilas,  VII,  8-95. 

Elvire,  personnage  du  Cid,  III, 
1-241  ;  I,  n5. 

Elvire,  princesse  d'Aragon,  per- 
sonnage de  Don  Sanche  d'Ara- 

,  gon,  V,  397-494. 

Elysiens  (les  champs),  I,  222, 
i3i2 ;  X,  266,  222. 

Elzeviers,  IV,  i34;  V",  410. 

Emaus  (les  pèlerins  d'),  VIII, 
.  664. 

Emiles  (les),  famille  illustre  de 
Rome,  X,  214,  3o6. 

Emilia.  Voyez,  Emilie. 

Emilie  ,  fille  de  C.  Toranius, 
personnage  de  Cinna,  III,  359- 
462;  I,  3o;  45;  47;  69;  87; 
io5;  109;  118;  120;  X,  441- 

Emilie,  fille  de  la  femme  de 
Sylla,  VI,  358;  375,  265  et 
269;  377,  333;  4°6,  1022; 
407,  1048;  4Jo>  n37;432, 
i636; X,  491. 

Emilius  Scaurus,  X,  491» 

Empire  (F)  d'Allemagne,  X,  257, 
78  ;  286,  12. 

Encelade,  un  des  Titans,  II, 
5l2,  i438. 


Endymion,  X,  i54,  2. 

Énée,  III,   324,  991  ;  VI,  122, 

,  4i  ;  X,  63,  16. 

Enéide  (1'),  V,  317,  44. 

Enghien  (Henri-Jules  duc  d'), 
fils  du  grand  Condé,  X,  208, 
201  ;  277,  36i  et  362. 

Entrées  des  acteurs  sur  la  scène, 
I,  108  et  109. 

Envie  (1'),  X,  266,  222.  —  Per- 
sonnage du  prologue  de  la 
Toison  d'or,  VI,  252-265. 

Éole,  I,  75  ;  X,  109,  49;  239, 
63.  Voyez  vEole,  —  Person- 
nage   à? Andromède ,    V,    243- 

,   3g6. 

Éphese  (la  ville  d'),  Vil,  8;  9, 
1;   48,  970;    52,    iii4;   56, 

.   "89;  79,  1733. 

Ephyre,  Néréide ,  personnage 
R  Andromède,  V,  243-3g6> 

'E7uetma.  Traduction  de  ce  mot, 

,  I,  34. 

Epigrammes,  X,  46-49;  60;  129; 
173.  —  Epigrammes  attribuées 
à  Corneille,  X,  357~35o. 

Episode,  I,  40  et  41;  47-  —  Épi- 
sodes détachés,  I,  4§- 

Episodiques  (personnages),  I, 
47  et  48. 

Epitaphes  :  de  Didon,  X,  36  ;  — 
d'Elisabeth   Ranquet,  X,  i33. 

Eraste,  personnage  de  Mélite,  I, 
123-253;  271;  394;  397.  — 
Nom  d'homme  mentionné  dans 
l'argument  de  Clitandre ,  I , 
265.  —  Personnage  de  /' Illu- 
sion ,  II,  42I"^27-  —  Nom 
d'un  serviteur  d'Auguste  dans 
Cinna,  III,  433,  Iioi. 

Eriphyle,  femme  d'Amphiaraùs, 

!>  77- 

Ermite,  II,  3i2  et  3i3. 

Eryce  ,  V,  33i,  372.  —  La 
déesse  d'Eryce  ,  Vénus,  V, 
329,  328. 

Eryxe,  reine  de  Gétulie,  person- 
nage de  Sophonisbe ,  VI,  447" 
549. 


528     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET  ANALYTIQUE 


Escaut  (1'),  X,  208,  2o3  ;   218, 

1  ;  286,  11  ;  3o3,  58. 
Eschyle,  I,    66-,  112;    V,  404  ; 
.  VI,  461. 
Eson,   père    de  Jason  ,    I,  106. 

Voyez  ^Eson. 
Espagne  (1'),  I,  89;  90;  III,  118, 

240;  123,    333;    186,    i56o; 

IV,  43,    393;    55,   685;  ï3i, 

285;  3i5,  475  (var.)  ;  V,  407; 

VI,  23o;  264,  229;  35g;  36i; 

364;  367,  58;  370,  i33;384, 

409;  387,    591  ;   408,    1090; 

417,   1291;  49-5,  1482  ;  43i, 

1602;    465;  47^ ;   4i;    526, 

1282;    63o,   1267;    X,    n5; 

186,    7;    198,    59;    200,  g3; 

201,    101  ;    202,     128;    219; 

253,  6;    256,    5o;    257,  78; 

292,34;  3o4,    1;   325,   69; 

328,  33;   4IO;492-  —  Paix 

avec  l'Espagne,    I,     47*    — 

Point  d'Espagne,  II,  23,  109. 

—  La  cour  d'Espagne  ,  VIII, 

432. 
Espagnes    (les),   VI,   388,  622; 

419,  i33o. 
Espagnol  ,  les  Espagnols  ,  I , 

107;  III,  82;  87;  95;  98; 

99  ;  IV,  i3i  ;  i32  ;  i38;  279; 

V,3io;4i4;  VI,  358;  36o; 

387;  420,  1369;  X,  197,  5i; 

2o5,  l6o;  2l5,  321. 

Espagnol  (F),  la  langue  espa- 
gnole, III,  94;  IV,  i32; 
i37. 

Esther,  IX,  38,  571;  4°,  601; 
41,  621  et  625  ;  42>  63i. 

Esturville  (Nicolas  du  Che- 
vreul,  sieur  d'),  X,  i33. 

Esturville  (Mme  d').  Voyez 
Ranquet   (Elisabeth). 

Etéocle,  VI,  i59,  575. 

Ethiopie  (1'),  II,  448,  267  ;  V, 
273;  296;  3oi;  3o2;  3o3;3i4; 
VIII,  5i;  IX,  107,  i5.  — 
La  reine  d'Ethiopie,  VIII  , 
5i. 

Ethiopiens  (les),  V,  296;  3o3. 


Éthra,  personnage  des  Sup- 
pliantes d'Euripide,  I,  112. 
Voyez  jEthra. 

Etienne  (saint),    martyr,    VIII, 

i   191- 
Etienne  (saint), pape,  VIII,  620. 

Eudoxe,  fille  de  Léontine,  per- 
sonnage à'Héraclius^  V,  n3- 
241. 

Eudoxe,  mère  de  Pulchérie,  VI, 
384,  88. 

EUMÉNIDES  (les),  I,    225,  l363. 

Eunuque    (/') ,    de    Térence  ,    II 

102. 
Euphorbe,  affranchi  de  Maxime, 

personnage  de  Cinna,  III,  359- 

462;  I,  47. 

EUPHRATE  (1'),   VII,    462. 

Euripide,  I,  35;  44et4^;  ^',  77 
et  78  ;  106  et  107  ;  112  ;  II , 
isz;  333  ;  335  ;  IV,  417;  424  > 
V,  i5i;  3o8;  408;  VI,  461; 
X,  4^o;  5oo. 

Europe  (V),  I,  5;  II,  45o,  325; 
III,  4o3,  401;  IV,  411;  V, 
142;  VI,  257,  75  et  76;  481, 
216;  VII,   495,   769;  X,  93, 

4ii 
Eurydamas  ,  un  des  argonautes, 

vi,  343, 2093. 

Eurydice,  fille  d'Artabase,  roi 
d'Arménie,  personnage  de  Su- 
véna,  VII,  455-534- 

Eustache  (saint),  VIII,  362. 

Evandre  ,  affranchi  de  Cinna, 
personnage  de  Cinna,  III,  35g- 
,  462. 

Evangélistes  (Apôtres  et).  Hym- 
nes pour  eux  ,  IX,   573-58o. 

Évangile  (F),  111,  481. 

Eve,  VIII,  198.  —  Les  enfants 
d'Eve,  IX,  339. 

Excuse  :  à  l'archevêque  de 
Rouen,  X,  64-72;  — à  Ariste, 

X,  74-78  ;  476. 
Exode,  ce   qui  se  récite  après  le 
dernier  chant    du    chœur ,  I, 
4o  et  41 .  —  H  répond  à  notre 
cinquième  acte,  I,  48. 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


529 


Exode  (F).  Voyez  Bible. 

E\i  père,     personnage     d'Héra- 

clius,  V,  1 13-241  ;  I,  79. 
Ezéchias  (le  roi),  VIII,  y5-,  ftj. 
Ezéchiel,  IX,  46,  702 


Fabian,   domestique  de  Sévère, 

personnage  de  Polyeucte,   III, 

463-570. 
Fabien  s    (les),    les    Fabius,    III, 

452,  i536. 
Fabius,  X,  97,  45. 
Fables     clans   la   poésie     (Défense 

des),  X,  234-24i- 
Farnèse  (^Alexandre  duc  de),  X, 

267,  235. 
Fauste    femme   de    Constantin , 

I,7i. 
Faustin  (saint),  VIII,  659. 

Félix  ,  gouverneur  d'Arménie  , 
personnage  de  PolyeucU ,  III , 
463-070;  1,64;  273; V,  12 et  1 3. 

Félix,  affranchi  de  l'empereur 
Claude,  VI,  597,  5io. 

Félix,  nom  d'homme  mentionné 
dans  la  tragédie  d'Hén clius, 
V,  i83,  642  et  645. 

Fernand  (don),  premier  roi  de 
Castille,  personnage  du  Cid, 
III,   1-241;  38;  96;  120. 

Fernand  (don),  roi  d'Aragon, 
V,  411;  466, 11 26; 490, 1732  ; 
492. 

Ferrier  (le  P.),  jésuite,  con- 
fesseur de  Louis  XIV,  X, 
3o8,  3. 

Feuillants.  Voyez  Goulu  (dom 
Jean). 

Fictions  de  théâtre,  I,  rai. 

Fiérabras,  II,  464,  390. 

FiESQiiE  (le  comte  de),  X,  60. 

Flamands  (les),  X,  2o3,  i4T  > 
204,  i5i;  206,  176;  325,  67. 

Flamand  (le),  la  langue  flamande, 
III,  82. 

Flamininus.  Voyez  Flaminius, 

CoîiAUILLE.     X 


Flaminius,  mieux  Flamininus, 
ambassadeur  de  Rome  en  Bi- 
thynie,  personnage  de  Nico- 
mède,  V,  49^-593;  I,  n5. 

Flaminius,  père  du  précédent, 
V,  3o9. 

Flandre  (la),  IV,  4i3  ;  X,  186, 
8;  202,  116  ;  206,  174  et  175  ; 
209,  2i5;  an,  257;  253,  5; 
3o4 ,  1  ;  328 ,  35  ;  463  ;  466  : 
467. 

Flavian  ,  soldat  de  l'armée 
d'Albe,  personnage  d'Horace, 
III,  243-358. 

Flavian,  confident  de  Tite,  per- 
sonnage de  Tite  et  Bérénice, 
VII,  i83-276. 

Flavie,  fille  de  Marcelle,  per- 
sonnage de  Théodure,  ne  pa- 
raissant pas  sur  la  scène,  Y, 
i-iii. 

Flavie  ,  amie  de  Plautine,  per- 
sonnage d'Othon,  Y  1,5  64-657. 

Flavie,  dame  d'honneur  d'Ho- 
norie ,  personnage  d'Attila  , 
VU,  97-181. 

Fleur  {la) ,  tragédie  d' Agathon , 
I,  14. 

Florame  ,  personnage  de  la  Sui- 
vante, II,  11 3- 2 14. 

Florange  ,  personnage  de  la 
Veuve,  ne  paraissant  pas  sur 
la  scène,  I,  37i-5oo.  —  Nom 
d'homme  mentionné  dans  la 
Suite  du  Menteur,  IV,  3 1 2 .  4 1 2 . 

Flore,  déesse,  II,  27,  170;  VI, 
293,  9°4;  VII,  338,  1309  ; 
X,  23g, 5o. 

Florence  (la  ville  de),  IV,  292, 

79;  293>  96- 
Florice,  personnage  de  la  Gale- 

rie  du  Palais ,  II,  1-112. 

Floridan,  fils  du  roi  d'Ecosse, 
personnage  de  Clitandre ,  T  , 
255-36g. 

Floridor,  X,  483. 

Florilame,  nom  d'homme,  per- 
sonnage du  Ve  acte  de  F  Illu- 
sion, ne  paraissant   pas  sur  la 

34 


Y\o     TABLE  ALPHABÉTIQUE    ET   ANALYTIQUE 


scène  ,  II,  5<>7-5i8;   524-527 

(var.). 

Florine,  personnage  de  la  Comé- 
die des  Tuileries,  II,  3o3-355. 

Flobise,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  la  Suivante,  II, 
120;  i45,  366;  211,  1637. 

Foucquet  (Nicolas),  surinten- 
dant des  finances,  X,  477-  — 
Épître  à  lui  adressée  en  tête  de 
la  tragédie  d'OEd/pe,  VI,  121- 
124.  —  Il  a  proposé  à  Corneille 
trois  sujets  pour  le  théâtre, 
dont  il  lui  a  laissé  le  choix, 
VI,  124;  128  et  129. 

France  (la),  I,  89;  i34;  III,  7f  ; 
81,  280;  473  ;  474;  IV,  11  ; 
i44,  74;  145,  79;  285,  412  ; 
V,  292  ;  3 10;  3 16, 6  ;  VI,  254  ; 
463;  VII,  104  ;  108  ;  114,  i42 
et  149  et  157  ;  120,  3i3  ;  i34, 
622;VIII,343;IX,63;X,  32, 
i3  et  14;  57,  3;  75,  23;  g5, 
10;  100,  5;  112,  75;  117,  23; 
119,  57;  123,  9;  125,  2;  i35, 
8;  i38,  5;  i53,  5;  186,  3i, 
194  ;  196,  37;  200,  99;  201, 
io5;  206,  177;  244,  5;  253, 
2;  258,  89;  264,  190;  291, 
26;  3oo ,  17;  3o6,  49  '■>  32o, 
71  ;  322,  1  ;  334,  1  ;  336,  57  ; 
338,  90  ;33g,  n5  ;  449;  4fi3  ; 
473;  475  ;  4^o;  5oo.  — La 
France,  personnage  du  pro- 
logue de  la  Toison    d'or,     VI, 

2Ô2-265. 

Franche-Comté   (la),   X,    223; 

297,  io3. 
Franciade  (la) ,  poème  épique  de 

Ronsard,  X,  117,  34- 
François,    Françoise,    Français, 

Française,  IV,    19.  ;  VIII,  i5  ; 

19.    — '.A   la.    françoise,   III, 

280  ;  IV,  i32. 
François  (les),  les  Français,  II, 

43i;   III,  81;  V,  319,  81; 

404  ;  VII,  5  ;  1 1 2,  96  ;  IX,  65  ; 

X,  202,  117;  212,   277;  263, 

172;  265, 212 ;  268,  254;  274» 


3i2  et  3ai  ;  278,  374;  3o3, 
54;3o4,7;  325,  61;  45o;5oo. 

François  (le) ,  la  langue  fran- 
çaise, III,  82;  IV,  12;  i32. 

François  d'Assise  (saint),  VIII, 
T07;  356  ;  5?i,  5373  ;  533. 

François  de  Paule  (saint),  VIII, 
422. 

François  Xavier  (saint),  VIII, 
338. 

Francs  (les),  Vil,  ni,  52;  118, 
259;  127,  458;  129,  507  et 
520;  i3o,  536;  i34,  619; 
181,  1779  ;  382,  i3. 

Frayeub  (la),  X,  3o2,  38. 

Fronteau  (le  R.  P.).  Son  Tho- 
mas vindicatus,  X,  4^8.  —  Son 
Oraison  funèbre  de  Matthieu 
Mole,  X,  472  et  473. 

Fuensalida  (le comte  de).  Voyez 
Ayala  (don  Garcie  d'). 

Fulvdz,  confidente  d'Emilie,  per- 
sonnage de  China,  III,  359- 
462. 

Furtes  (les),  I,  296,  353.  — 
Furies  vengeresses  données  à 
Oreste,  I,  20. 

Furne  (la  ville  de),  X,  204,  i53. 


Gabaonites    (les") ,    VIII ,    455  , 

3998. 
Gabriel    (l'ange),    IX,    8,    i3; 

497,  *7î  56l>9- 
Gainas,  général  goth,  VII,  116, 

199- 
Galas  ,    général    de    l'empereur 

Ferdinand  III,  IV,  159,  336. 
Galaite  (la),   province  de  l'Asie 

Mineure,  V,  542,  699. 
Galba,  empereur  de  Rome,  per- 
sonnage   cVOthon,   VI,    564- 

657;  VII,  272,  1686. 
Galerie  du  Palais  (la),  comédie  de 

Corneille,  II,    1-112;    10-12. 

—  Examen  de  la   pièce ,    II , 

ii-i5. 


DES   OEUVRES  DE   CORNEILLE. 


53 1 


Galilée  (la),  IX,  577,  7. 

Gange  (le),  IV,  53,  622  et  625. 

Garcie  (don),  usurpateur  du 
trône  d'Aragon,  V,  4*3;  422> 
82;  445,  65o;  446,  678;  466, 
n3o;  473,  i333;  481,  i538 
et  i544- 

Garibalde,  duc  de  Turin,  per- 
sonnage de  Pertharitc ,  VI,  1- 
100. 

Garomne  (la),  la  Garonne,  VII, 
117,  228  ;  X,  23i. 

Gascon.  Voyez  Matamore. 

Gaule  (la),  VI,  58?,  i54;  VII, 
110,  46;  119,  79;  117,  232; 
144,  875;  145,  901. 

Gaules  (les),  I,  90  ;  IV,  43,  3g3. 

Gaulois  (les),  VII,  246,  1100 

Gautier  -  Garguille  (  Hugues 
Guéru  ,    dit) ,   comédien  ,    II, 

^  443,  181. 

Gènes.  Point  de  Gênes,  II.  23, 
109. 

Geneviève  (sainte),  IX,  619,  2. 
—  Hymnes  de  sainte  Geneviève, 
traduites  en  vers  français  par 
Corneille,  IX,  619-636. 

Geôlier  (un),  personnage  de 
Clitandre,  I,  255-369-  —  Per- 
sonnage de  l'Illusion,  II,  421- 
527. 

Gépidf.s  (les),  VII,  io3;  108. 

GÉraste,  personnage  de  la  Sui- 
vante, II,  n3-2i4. 

Germain  d'Auxerre  (saint),  ap- 
pelé un  saint  prélat,  IX,  619,7. 

Germanicus  (  Tiberius  Urusus 
Nero),  X,   267,  23i. 

Germanie  (la),  \I,  582,  i54- 

Géron,  personnage  de  la  Veuve, 
l,  37i-5oo. 

Géronte,  personnage  de  Clitan- 
dre, I,  255-369.  —  Personnage 
de  l'Illusion,  II,  42lI"527.  — 
Personnage  du  Menteur,  IV, 
it 7-273.  —  Nom  d'homme 
mentionné  dans  M  élite ,  I,  201, 
963. 

Gersen  (.Jean)  a  été  regardé  par 


quelques-uns  comme  l'auteur 

de   Y  Imitation,    VIII,    12;   18; 

X,  461  ;  464;   467. 
Gerson    (  Jean  )    a   été    regarde 

comme  l'auteur  de  Y  Imitation  , 

VIII,  i5;  X,  463. 
Gerujndensis   (Joannes),    évêque 

espagnol,  X,  491  et  492. 
Gervais  (saint),  IX,  283. 
GÉTui,iE(la),VI,472;  545,  1723. 
Gétuliens  (les),  VI,  476,  92. 
Ghirardelli     (Jean  -  Baptiste") , 

poëte  italien,  I,  71. 
Ghisi,   pour    Chigi,    VIII,     6. 

Voyez  Chigi. 
Gibelins  (les),  X,  126,  8. 
Gilbert,  poëte  français.  Analyse 

de  sa  Bodogune,  IV,  5o9-5n. 
Girard  (le  frère),  convers  de  l'or- 
dre des  Chartreux,  VIII,  470. 
Gironne  ,   ville  d'Espagne  ,  VI, 

358. 
Glabrion,  un    des  complices  de 

Cinna,  III,  45i,  1489. 
Glabrion,  mentionné  dans  Ser- 

torius,  VI,  407,  io55. 
Glauque,   dieu   marin,    person- 
nage  de    la    Toison    d'or,    VI, 

221-349- 
Glycère,   personnage   de  l  An 

drienne    de  Térence ,    I,   n5; 

II,   14. 
Godeau  (Antoine),  X,  71,  77. 
Goldoni,  poëte  italien.  Note  sur 

sa  pièce  intitulée  il  Bugiardo  , 

IV,  272  et  273. 
Goliath,  VIII,  333. 
Gombaut  (de),  X,  474- 
Gomès  (don),  comte  de  Gormas, 

personnage  du  Cid,  III,  1-24 1  ; 

I,  60;  10 1  ;  X,  401. 
Gondebaut,  allié  d'Aétius,  men- 
tionné dans  /ittila  ,  VII,  n 5, 

*79- 
Gorgone,  V,  295;  3oi. 
Gormas    (le   comte  de).    Vove/ 

Gomès  (don 
Goth,  les  Goths,  VII,  116,  202- 

149,  1012  ;  382,  27. 


y$i     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Goujon,  avocat  au  conseil  privé 
du  Roi.  Lettre  à  lui  adressée 
par  Corneille,  X,  433-437. 

Goujon,  père    du  précédent,  X, 

437. 
Goulu    (dom  Jean),  général  des 
Feuillants.      Epitaphe      latine 
composée  en  son  honneur  par 
Corneille,  X,  3g6. 
Grâce  (Monsieur  de),  l'évêque  de 

Grasse,  X,  467. 
Grâces  (les),   I,   147,    75;   VI, 
293,902  et  908;  X,  339,  n5. 
Grammont  (le  maréchal  de),  X, 

480. 
Grammont  (l'hôtel  de),  X,  480. 
Grammont  (le  régiment  de),  X, 

AZo. 
G  r  amont  (Armand  de),  comte  de 

Guiche,  X,  269,  264. 
Grand   Seigneur   (le),  II,  448? 

271. 
Grasse.  Voyez  Grâce. 
Gratian,    mentionné   dans    Pul- 

cherie,  VII,  38s,  3l. 
Grave  (le   siège   de).  Un   fils  de 

Corneille  y  est  tué,  X,  Soi. 
Grec,  les  Grecs,  I,  107;  262; II, 
12;  118;  III,  408,  542;  IV, 
2S2  ;  V,  296  ,  3io  ;  4o4  j  VI, 
249;  271,  379  ;  289,  816;  325, 
i655;346,  2151^11,  5;  11, 
45;  45,  898;  47,  95i;  56, 
1208;  45o;  IX,  53o,  ai;  X, 
45c;  455  ;  5oo. 
Grèce  (la),  II,  336;  362,  438; 
369,  566;  371,  621  ;  III,  552, 
1420;  IV,  437,  176;  V,  3o4; 
VI,  i37,  55;  i38,  78;  i65, 
729;  268, 294;  271, 366  ;  272, 
3g4  et  401  et  419;  275,  478; 
276,  522;  284,670;  291,  862 
et  877  ;  3oi,  io53  ;  3o5,  1188; 
3io,  1296;  337,  1961;  344, 
•2109;  347,  2i58;  VU,  23, 
356;  27,  441  et  458:  46,  goÔet 
93o;  48,966;  56,  n85etii94; 
07,  i2i9;8o,  1742;  92,  2040; 
X,  63,  i5;  206,  167;  5oo. 


Grenade,  III,  11 5,  197;  i36, 
538;  i45,  706;  170,  1226. 

Grenouilles  (/es) ,  comédie  d'A- 
ristophane, II,  12  ;  V,  3o8. 

Grimoald,  comte  de  Bénévent, 
personnage  de  Pertharîte,  VI, 
1-100;  I,  272. 

GROLLE(laplacede  ),  X,  280,  395. 

Grotius  (Hugo),  ambassadeur  de 
Suède,  I,  102;  X,  443. —  H  a 
mis  sur  la  scène  la  Passion  de 
Jésus-Christ  et  l'histoire  de 
Joseph,  III,  480. 

GuADALQUIVIR   (le),  III,   98 

Guarini.  Voyez  Pastor  fido. 

Guelfes  (les),  X,  126,  8. 

Guêpes  (les),  comédie  d'Aristo- 
phane, II,  11. 

Guérente.  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve , 
I,  38o  et  38i. 

Guérin  (Bobert).  Voyez  Guil- 
laume (Gros-). 

Guéru  (Hugues) .  Voyez  Gautier- 
Garguille. 

Guiche.  Voyez  Gramont. 

Guillaume  (Robert  Guérin,  dit 
Gros-), comédien, II,  443, 181. 

Guillaume  (saint),  duc  d'Aqui- 
taine, VIII,  592. 

Guillen  de  Castro  (don). Voyez 
Castro  (don  Guillen  de). 

Guise  (Henri  II  duc  de),  X, 
493.  Sonnet  adressé  après  sa 
mort  à  son  neveu  par  Cor- 
neille, X, 182-184. 

Guise  (Louis- Joseph  duc  de), 
neveu  du  précédent.  Sonnet 
que  lui  adresse  Corneille  sur 
la  mort  de  son  oncle,  X,  182- 
184. 

Guitry  (Guy  de  Chaumont  de), 
tué  au  passage  du  Rhin,  X, 
271,   271  ;  276,   345. 

GlNDEBERT,     VI,    22,    32;    23,    4T 

et  59;  24,  79;  91,  1639. 
Gusman  (don  Lope  de),  person- 
nage de  Doit  Sanche  a I  Aragon , 

v,  397-494. 


DES    OEUVRES   DE    CORNEILLE. 


5i! 


GustylAH  d'Alfarache,  héros  d'un 
roman  espagnol  ,  mentionné 
dans  P Illusion,  II,  444,  186. 


H 


Hainaut  rie),  X,  202,  116  ;  253, 
5;  328',  35. 

Halicarnasse,  VII,  8;  52,  1096. 

Hanelay  (Mme  de),  X,  4^2. 

Hannon,  VI,  5i6,  1068. 

Harangues,  déplacées  à  la  fin 
d'une  pièce,  III,  279. 

Hardy,  poète  dramatique,  I,  137; 
VI,  462.  —  Sa  veine  est  plus 
féconde  que  polie,  I,  i38. 

Harlay  de  Champvaixgn  (Fran- 
çois de),  archevêque  de  Rouen. 
Vers  latins  faits  par  Corneille 
à  son  invitation,  X,  64-72. 

Harlw  de  Champvallon  (Fran- 
çois), neveu  du  précédent,  ar- 
chevêque de  Rouen  de  i65i  à 
1671,  puis  archevêque  de  Pa- 
ris, X,  296,  91.  —  Il  décide 
Corneille  à  dédier  au  pape 
Alexandre  VII  sa  traduction  de 
Y  Imitation^  VIII,  3. 

Harpies  (les),  VI,  248;  327, 
1725. 

Haye  (la  ville  de  la),  X,  282, 
429;  452;  457. 

HÉBREU  ,      les     HÉBREUX  ,      VIII , 

262,  63;  453,   3g49;  IX,  45, 
681. 

HÉCATE,  X,  236,    l3. 

Hécatompyle,  capitale  des  Par- 

thes,  VII,  463,  6. 
Heinsius    (Daniel),  I,  34;  102; 

IH,479;48o;iV,i33;y,4o9. 
Hélène,  femme   de   Ménélas,  I, 

106. 
Hélène,  tragédie    d'Euripide,    I, 

45;  77;  IV,  417;  V,  i5i. 
Héltodore,   évêque   de    Tricca, 

auteur  du  roman  de  Théagène 

et  Ghariclée,  V,  296;    3o4-  — 

Il  aime. mieux  perdre  son  évê- 


ché  que  son  livre,  X,  43 1  et 
432. 

Héliodorus,  envoyé  pour  piller 
le  temple  de  Jérusalem,  VIII, 
404. 

H  elle,  tragédie  grecque,  I,  67. 

Hellespont  (1'),  V,  539,  607. 

Hémon,  fils  de  Créon,  person- 
nage de  YJntigone  de  Sopho- 
cle, I,  68.  Voyez  JEmqn 

Hénouville  (le  presbytère  (T),  épî- 
tre  attribuée  à  P.  Corneille, 
X,  345-352. 

Henri  IV,  roi  de  France,  V,  3 18, 
61;  X,  211,  260;  338,  92. 

Héraclius,  empereur  d'Orient  tra- 
gédie de  Corneille,  V,  n3- 
241  ;  I,  47  ;  63  ;  68  ;  93  ;  io5  ; 
n5;  119;  121;  272;  273; 
II,  337;  III,  382;  IV,  417.  — 
Examen  de  la  pièce,  V,  148- 
i54-  —  Applaudissements  qui 
en  ont  suivi  les  représenta- 
tions, V,  141.  —  Sa  représen- 
tation fatigue  et  il  l'a  fallu 
voir  plus  d'une  fois  pour  en 
remporter  une  entière  intelli- 
gence, V,  i54- 

Héraclius,  fils  de  l'empereur 
Maurice,  personnage  princi- 
pal de  la  pièce  de  ce  nom,  V, 
ii3-24i  ;  I,  59  ;  60;  63  ;  69  ; 
76;  79;  V,  5o8. 

Hurcule,  IV,  4i6;  V,  3i6,  25; 
VI,  147,  3o6;  VII,  11,  5o; 
44,  856;  45,  876.  —  Les  co- 
lonnes d'Hercule,  III,  285,  5i. 

Herminie,  dame  d'honneur  de 
Sophonisbe ,  personnage  de 
Sophonisbe,  VI,  447_549- 

Hermione,  fille  de  Ménélas  et 
d'Hélène,  I,  106. 

Hérode  ,  roi  de  Judée ,  IX , 
5oi,  1.  —  Personnage  de  la 
tragédie  de  Herodes  infanti- 
cida,  de  Heinsius,  III,  481. — 
Personnage  de  la  tragédie  de 
Mariane,  de  Tristan,  I,  48. 

Hesdin  (la  ville  de),  X,  11 4- 


534     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET  ANALYTIQUE 


Heserus  (le  P.).  Son  Lexïcon 
Germanico-Thomœum,  X,  4^9  > 
462  ;  4^5.  —  Ses  Septuaginta 
palmée,  X,  4^6-  —  Son  Cen- 
tumvirale  judicium,  X,  4° 7-  — 
Dioptra  Heseri,  X,  46$. 

Hexamètres  (vers),  V,  3og  et  3 10. 

Hiérico  (la  ville  de),  IX,  125. 

Hiérusalem,  VIII,   4'72>    43^4- 

Voyez  JÉRUSALEM. 

Hippolyte,  fils  de  Thésée, I,  72; 
II,  5s5  (var.). 

Hippolyte ,  tragédie  de  la  Pine- 
lière,  X,  73. 

Hippolyte,  nom  de  femme,  per- 
sonnage de  la  Galerie  du  Pa- 
lais, II,  1-112  ;  11;  12.  — 
Nom  d'un  rôle  de  femme  dans 
le  Ve  acte  de  /' Illusion,  II,  607- 
5 18.  —  Nom  de  femme,  men- 
tionné dans  M  élite ,  I,  149, 
Ii3; —  dans  Clitandre,  I,  265; 
275,  2;  276  (var.);  281,  too; 
287,  199;  —  dans  le  Menteur, 
IV,  i83,  783;  —  dans  une 
chanson,  X,  54,  25. 

Hirtius,  historien,  IV,  22. 

Hollande  (la),  IV,  i33;  X,  252; 
258,  97  ;  278,  365  et  373  ; 
285,  5;  292,  34;  325,  69; 
499.  —  Toile  de  Hollande, 
II,  ai. 

Hollandots  (imprimeurs),  I,  5. 

HoLOFERNE,  HoLOPHERNE  ,  VIII, 

485;   IX,    36,    528;   37,  536 

et  55i. 
Homère,  I,  32;  33;  VI,  122,  42. 
Homme-Dieu  (1'),  IX,  18,  2o5. 
Hommes    illustres   (les)   de    Cam- 

pion,  X,  137. 
Hongrie  (la),  X,  196,  38. 
Honorte,  sœur  de  l'empeur  Va- 

lentinian,  personnage  d'Attila, 

VII,  97-181. 
Horace,  poëte  latin,  I,  16;   19; 

25  ;  3i-33  ;  36  ;   37  ;  5o  ;  78  ; 

79;  97;  io7;  "7»  2Ô1  5  n> 

119;  433;  III,  86;  100;  101; 
•260;  a6i;  *73;  374-,  376;  277; 


IV,  i3i  ;  280;  281;  V,  404; 
406;  5o4;  VI,  5;  468;  VII, 
5  ;  X,  485.  —  Fausse  citation, 
I,  3.  —  Horace  confondu  avec 
Perse,  V,  3i2  (var  ).  —  Vers 
imités  d'Horace,  attribués  à 
Corneille,  X,  356. 

Horace,  tragédie  de  Corneille, 
III,  243-358;  I,  4;  85;  97; 

98;  116;  n8;  122;  iv,  424; 

V,  14  ;  X,  io3,  10.  —  Examen 
de  la  pièce,  III,  273-280  — 
Sa  chute,  III,  274  (voyez  la 
note).  —  Le  Ve  acte  est  cause 
du  peu  de  satisfaction  que  laisse 
cette  tragédie,  III,  279.  — 
Les  vers  d' Horace  ont  quelque 
chose  de  plus  net  et  de  moins 
guindé  pour  les  pensées  que 
ceux  du  Cid,  III,  281.  —  Ho- 
race représenté  à  Versailles  en 
octobre  1676,  X,  3og;  3 11,  3. 

Horace,  personnage  principal  de 
la  pièce  de  ce  nom  ;  III,  243- 
358;  I,  65;  109;  VI,  122,  34; 
X,  97,  37;  432;  441. 

Horace  (le  vieil),  père  du  pré- 
cédent ,  personnage  d' Horace, 
III,  243-358. 

Horaces  (les),  adversaires  des 
Curiaces,  I,  85  ;  86;  III,  279. 

Horaces  (les),  autre  titre  de  la 
tragédie  d'Horace,  VI,  4^4- 

Hôtel  de  Bourgogne  (1').  Voyez 
Bourgogne. 

Huns  (les),  VI,  3o,  25i;  VII, 
108  ;  382,  27. 

Hyarbée,  capitale  de  la  Gétulie, 

VI,  491,  455;  494,  543. 
Hymen  (le  dieu),  1,  248  (var.). 
Hyménée   (F),  II,  3a4>  352.  — 

Personnage  du  prologue  de  la 
Toison  d'or,  VI,  252-265. 
Hymnes  pour  chaque  jour  de  la 
semaine,  traduites  en  vers  fran- 
çais par  Corneille,  IX,  449~ 
488  —  Hymnes  propres  du 
temps,  IX,  489-541.  —  Hymnes 
propres  des   saints,    IX,  542- 


DES  ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


535 


572.  —  Hymnes  du  commun 
des  saints,  IX,  573-602.  — 
Hymnes  de  saint  Victor,  IX, 
607-612.  —  Hymnes  de  sainte 
Geneviève,  IX,  619-636. 
Hypsipyle  ,  reine  de  Lemnos , 
mentionnée  dans  Médée,  II, 
342,  9  et  25;  343,  34  — Per- 
sonnage de  la  Toison  d'or,  VI, 
221-349- 


I 


I  consonnes,  distingués  des  i 
voyelles,  I,  6. 

I.  Son  emploi,  I,  6. 

Iambiques  (vers),  V,  309  et  3io. 

Ibères  (les),  X,  69,  5i. 

Icélus,  nom  d'esclavage  de  Mar- 
tian,  personnage  à' O thon,  VI, 
596,  492. 

Icile  ,  un  des  complices  de  Cinna, 
III,  45i,  1490. 

Idye,  fille  de  l'Océan,  VI,  249. 

Ignace  (saint)  ,martyr ,  VIII,  2 1 3 . 

Ignace  de  Loyola  (saint),  VIII, 
3io. 

Ildione,  sœur  de  Mérouée,  roi 
de  France, personnage  d1 'Attila, 
VII,  97-181. 

Ilergètes  (les),  peuple  de  l'Es- 
pagne tarraconaise,  VI,  42  5, 
i485. 

Iliade  (F),  V,  3 17,  44- 

Illusion  (1'),  comédie  de  Corneille, 
II,  421-527.  —  Examen  de  la 
pièce,  II,  4^2  et  433.  —  Son 
succès  au  théâtre,  II ,  43 1  et 
432.  —  L'auteur,  absent  de 
Paris,  n'a  pu  en  corriger  les 
épreuves,  II,  43 1-  —  Elle  se 
soutient  encore  au  théâtre  après 
trente  ans,  II,  433. 

Illyriens  (les),  VI,  643,  1539. 

Imitation  de  Jésus-Christ  (F),  X, 
468. —  Traduite  en  vers  fran- 
çais par  Corneille,  VIII,  29- 
687.  —  Auteurs  présumés  de 
Y/mitarion,  VIII,     T2-t5;  X, 


460-472.  —  Mise  en  vers  latins 
par  Thomas  Mesler ,  bénédic- 
tin (1649) ,  VIII,  17. 

Imitations.  Voyez  Traductions. 

Inde  (1'),  IX,  2i5,  n. 

Indes  (les),  V,  i32  ;  VIII,  4^2. 

Indibilis,  prince  des  Ilergètes, 
mentionné  dans  Sertorius,  VI, 
38i,  43"î. 

Infante  (F),  personnage  du  Cid. 
Voyez  Urraque  (dona). 

Infortiat  (F),  IV,  i58,  327. 

Infortune.  Aristote  ne  veut  pas 
qu'un  homme  tout  à  fait  in- 
nocent y  tombe  ;  il  ne  veut 
pas  non  plus  qu'un  très-mé- 
chant y  tombe,  I,  63. 

Innocents  (les  saints).  Tragédie 
d'Kcinsius  sur  leur  martyre, 
III,  480. 

Ino,  VI,  245. 

Inscriptions  ,  mises  au-dessous 
des  estampes  qui  représentent 
les  glorieuses  actions  de  Louis 
XIII,  X,  io4-ii5;  — de  deux 
fontaines    de  Paris,  X,    242- 

244> 
Ion,  tragédie  d'Euripide,  I,  77. 
Iphicrate,  vieillard  de  Corinthe, 

personnage  d'OEdijoe,  VI,  101- 

219. 
Iphigénte  ,  fille  d'Agamemnon  , 

I,  67;  IV,  417. 
Iphigénie  in  Tauris,  tragédie  d'Eu- 
ripide, I,    4^;   77;  I22»  IV> 

417;  V,  i5i. 
Iphite  ,    argonaute  ,    personnage 

de  la   Toison  d'or,  VI,    221- 

349. 

Irène,  sœur  de  Léon,  person- 
nage de  Pulchérie,  VII,  371- 
453. 

Iris,  personnage  de  la  Toisond'or, 
VI,  221-349- 

Iris,  nom  de  femme,  désignant 
probablement  la  comédienne 
du  Parc,  X,  140,  12;  i63,  1; 
167,  i3;  168,  7;  233,  3.  — 
Élégie  sur   son    départ  qui  a 


536'  TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


été  attribuée  à  Pierre  Corneille, 
mais  est  de  Thomas,  X,  363. 
—  Derniers  vers  de  Corneille 
à  Iris,  X,  387. 

Isabelle,  personnage  de  l'Illu- 
sion, II,  421-527  —  Person- 
nage du  Menteur,  IV,  117-273. 

Isabelle,  reine  de  Castille,  per- 
sonnage de  Don  Sancke  d? Ara- 
gon,!, 44;  V,  397-494. 

Isaïe,  Vin,  5 1  ;  75;  457.  —  Pas- 
sage de  lui  traduit  par  Cor- 
neille, VIII,  269,  191. 

Islande  (1'),  II,  457,  462. 

Ismène,  fille  d'OEdipe,  VI,  140, 
146  et  i53;  141,  1.6 1.;  15g, 
574- 

Israël,  IX,  24,  3o6  et  3i2;  27, 
355  et  371;  95,  24;  107,  3; 
119,  14;  123;  i45,  57;  i83, 
i3;  i85,  7;  192;  197,  20; 
207,  27;  219,  29;  225,  34; 
23o  ;  235,  29;  237,  18;  238; 
3n,  7;  333,  i3;  557,  10.  — 
Les  fils  ou  enfants  d'Israël 
VIII,  444;  454,  3995;  263, 
72;  IX,  i5o;  317,  81.  — Les 
trois  enfants  d' Israël  dans  la 
fournaise,  VIII,  444.  —  La 
maison  d'Israël,  IX,  3i5,  65; 
3 16.  —  Le  sang  d'Israël,  IX, 
i85,  14.  —  I^  Seigneur  Dieu 
d'Israël,  IX,  i56;  i93,  3. 

Issel.  Voyez  Yssel. 

Isthme  de  Corinthe(I'),  II,  353, 
271. 

Italie  (F),  II,  199,  i4o5;  3i4, 
76;  III,  339,  1307;  389,  109; 
45o,  1470;  458,  1678;  IV, 
43,  3g3 ;  71,  io65  ;  194, 
1029;  291,  48;  3i5,  47^ 
(var.);  346,  1097;  V,  3i6,  6; 
587,  1728;  VI,  6i,978;375, 
266;  377,  334;  4IO>  n38; 
463;  VII,  117,  233;  X,  110, 
60. 

Italien,  les  Italiens,  1,  107; 
VIII,  i3;  18;  X,  463.  —  Ils 
affectent  l'agnition,  I,  71. 


Italien  (1') ,  la  langue  italienne, 
111,82. 

Ivry.  Voyez  Yvry. 

Txion,  I,  3i;  225,  i359;  II  ? 
409,  1387;  4i5,  i524;VII, 
353,  1669;  357,  1779. 


J.  Son  emploi,  I,  6. 

Jaca  ,  forteresse  d'Aragon ,  V  , 
4i3. 

Jacob,  IX,  18,  191;  26,  352; 
67,  3  ;  123;  170;  171,  4  ; 
218;  23i,  3;  3i3,  28.  —  Le 
Dieu  de  Jacob,  IX,  3i2.  — 
Les  fils  de  Jacob,  IX,  i5i, 
5i;  235,  22.  —  La  maison  de 
Jacob,  IX,  3io  ;  3n,  4- 

Jacobin  (religieux),  VIII,  3 13. 

Jacques  (saint),  ermite,  VIII, 
524. 

Jaffa,  ville  de  la  Palestine,  V, 
3oi. 

Jane,  nom  de  femme,  X,  46,  1. 

Janus  (les  portes  de),  III,  4°9> 
554. 

Japon  (le),  II,  448,267;  X,  254, 
3i. 

Jason,  chef  des  argonautes,  I, 
20;  X,  45o.  —  Personnage  de 
la  tragédie  de  Méclée,  II,  327- 
419  ;  I,  46;  106  ;  IV,  423.  — 
Personnage  de  la  Toison  d'or, 
VI,  221-349-  —  Personnage 
do  la  Médee  de  Sénèque,  I, 
21;  IV,  282. 

Jason,  jurisconsulte,  IV,  i58, 
328.' 

Java,  X,  254,  3i. 

Jean  (saint)  l'évangéliste,  VIII, 
382,  2535  ;  IX,  ,47,  735.  — 
Passages  de  son  Evangile  tra- 
duits par  Corneille,  VIII,  178, 
43-49;  214,  760;  395,  2776- 
2778;  680,  2o83-2o86. 

Jean-Baptiste  (saint)  ,  VIII  , 
529.    —  Sa   mort  sujet  d'une 


DES   ŒUVRES   DE   CORNEH.Î.E. 


5Î7 


tragédie  de  Buclianan,  LU, 
480.  —  Hymnes  pour  la  nati- 
vité   de  saint   Jean-Baptiste  , 

IX,  543-548. 

Jean-Calybite     (saint),    VIII, 

399- 

Jean  d'Autriche,  don  Juan,  X, 
267,  233. 

Jean  Pain-Mollet  (la  rue),  à 
Rouen,  X,  436. 

Jephté.  Son  histoire  mise  en  tra- 
gédie par  Buclianan,  III ,  480. 

Jérémie,  X,  448. 

Jébtco.  Voyez  HraRico. 

Jérôme  (saint),  VIII,  48. 

Jérusalem,  V,  3oa  ;  VIII,  5i 
472,  4364  ;  IX,  is3  ;  i55 
184;     187;     194;     197,     5 

217,  1  ;   264;   271,  87;    272 
598,i. 

Jesse,  IX,  28,  375. 

Jésus-Chrtst,  III,  476;  479; 
480  ;  VIII,  1;  16  ;  22  ;  27;  29  ; 
3o,  5;  48,  3o8;  82,  884;  90, 
1026  et  note  2;  n5,  1491; 
i45,  2o85  ;  148,  2i55  ;  169, 
2568  ;  177,22;  179,  67;  181, 
117;  184,  i83  ;  209,  664; 
210,  680  et  687;  2i3,  751  et 
note  1  ;  2i5,  784  et  794  ;  216, 
804  ;  217,  832  et  839  et  840  ; 

218,  854  et  855  ;  232,  1142  ; 
237, titre  et  i253;238,  1282; 
239,  1293  ;  240,  i3i2  ;  242, 
i348  et  i358  ;  249,  i5n  ; 
25o,  i52i  ;  253,  1601  ;  255, 
i63g;  259,  titre  et  note  1; 
281,  436  ;  283,  479  ;  289; 
295,  745;  3i3;  328;  35i, 
titre  et  note  1;  368;  371;  384; 
412;    4i5;    434,    3563;   475; 

477;  479,  45i4;  5o3;  537, 
5686;  552,  6042;  553,  titre 
et  note  1;  557,  6026  ;  558; 
58o,  titre  et  note  ij  5go , 
546:  594,  319;  599;  611, 
682  ;  616,  784;  625,  titre  et 
note  3;  643,  titre;  653,  i544; 
654;  659,  titre;    664,  titre   et 


note  1;  673,  titre;  677,  titre; 
IX,  8,  12  ;  17,  178;  19,  228; 
27,  358;  33,  477  ;  161;  i63; 
177;  187;  189;  199;  209,  223, 
23;  227;  229:  239  ;  241  ; 
289;  291;  299;  319;  3ai,  18; 
335,  10;  337;  339;  341;  45i, 
34;  463,  18;  464»  22  ;  466, 
18;  468;  18;  472,  18;  473, 
4;  475,  20;  480,  18;  481, 
22  ;  484,  18  ;  493,  4;  494,  1; 
496,  3;  5oo,  11  et  12;  5oi, 
2;  5o6,  7;  5o8,  1;  5i6,  4; 
5i8,  21;  528,  29;  529,  i5  ; 
538,  6;  549,  17;  553,  i3  ; 
556,  titre  et  1;  558 ,  1  ;  56o  , 
2o;56i,i;565,22;  570,  29; 
576,  11  et  17;  585,  17;  590, 
21  ;  5g3,  1  ;  625,  22. 

Jeux  (les),  VI,  293,  902  ;  X, 
339,  n5, 

Jor,  VIII,  78;  79,  822;  227, 
io5i.  —  Passage  de  lui  tra- 
duit par  Corneille,  VIII,  227, 
io5i-io54-  —  Le  livre  de 
Job,  VIII,  636,  1172.  —  Le 
sonnet  de  Job,  X,  La 5. 

Jobelins  (les),  partisans  du  son- 
net de  Job,  X,  126,  5. 

Jocaste,  reine  de  Thèbes,  femme 
et  mère  d'OEdipe,  personnage 
d'OEdipe ,  VI,  10 1 -219;  I, 
62;  VI,  25o;  X,  483. 

Jodelet,  comédien,  IV,  3o4, 
281;  333,  826. 

Joël,  IX,  53o,  3i. 

Jopfé,  ville  de  Syrie,  V,  3oi; 
3o2_ 

Josaphat,  roi  des  Indes,  VIII, 
452. 

Joseph,  fils  de  Jacob,  VIII,  202; 
274.  Son  histoire  mise  en 

tragédie  par  Grotius,  III,  480. 

Joseph  (saint),  VIII,  52 1. 

Josèphe,  historien,  IV,  4!8; 
420 

Josué,  VIII,  454,  3995. 

Jour  (unité  de).  Voyez  Unité  de 
temps  ou  de  jour 


r>38     TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET   ANALYTIQUE 


Jourdain  (le),  IX,  3n,  n  ;  3i3, 

Jovite  (saint),  VIII,  65g. 

Juan  (don)  d'Autriche.  Voyez 
Jean  d'Autriche. 

Juba,  roi  de  Mauritanie,  IV,  47» 
473;  56,686. 

Juda,  IX,  117,  33. 

Judée  (la),  VII,  200;  242,  ioi5  ; 
269,  1640;  IX,  175,  3;  235, 
21  ;  5n,  5  ;  383,  44* 

Judith,  VIII,  485;  IX,  36,  522 
et  53i  ;  37,  55i. 

Jugurthe,  Jugurtba,X,  259,  io5. 

Juif,  les  Juifs,  VIII,  4^4»  3563; 
462,  4i5i;  475;  ÏX>  4i,  619; 
53o,  25;  53i,  11;  553,  n, 

Jule,  Jules  César,  VI,  614,  879. 

Julie,  dame  romaine,  personnage 
d' Horace,  III,  243-358  ;  1, 109. 

Julie,  fille  d'Auguste ,  mentionnée 
dans  Cinna,  III,  4I2>  638  ; 
455,  1589. 

Julie  de  Rambouillet.  Sa  Guir- 
lande, X,  10;  82-85.  —  Trois 
autres  pièces  de  sa  Guirlande 
attribuées  à  Corneille,  X,  344  j 
345. 

Junon,  II,  372,  640.  —  Person- 
nage d'Andromède,  V,'243-396. 
—  Personnage  de  la  Toison 
d'or,  VI,  221-349- 

Jupiter,  I,  75  ;  II,  386,  925  ; 
448,  276  ;  IV,  70,  1039  ;  IX, 
610,  17;  X,  237,  22;  442-  — 
Personnage  à? Andromède  ,  V  , 
243-396.  —  Personnage  de  la 
Toison  a"or,  VI,  221-349-  — 
Personnage  de  Psyché,  VII , 
277-370. 

Justin  (saint),  VIII,  298. 

Justin,  historien  latin,  IV,  4I7~ 
419  ;  V,  5o5.  — Extrait  de  son 
trente-quatrième  livre,  conte- 
nant le  sujet  de  Nicomède,  V, 
5o2  et  5o3. 

Justine,  fille  de  Martian,  per- 
sonnage de  Pulchérie ,  VII, 
371-453. 


Juvénal,  poète  latin,  V,  41 5. 
Juvenel  (de),  auteur  du   roman 
de  Dom  Pelage,  V,  4i4- 


K 


Kempen   (la  place  de),  X,  280, 

395. 
Knosembourg    (le   fort    de),   X, 

278,  375. 


L  double  supprimée  dans  cer- 
tains mots,  I,  11  et  12.  —  Deux 
prononciations  pour  la  double 
//,  I,  11. 

Lacus,  préfet  du  prétoire,  per- 
sonnage d'Othon,  VI,  564-657. 

L/elie,  Lélius,  III,  261.  Voyez 
Léltus. 

Laïus,  pèred'OEdipe,I,  62;  VI, 
127;  128;  i3o;  i34;  i38, 106; 
i53,  434;  i58,  548;  159,  58i 
et  591;  172,  877  et  899;  178, 
ioi5  ;  181,  io83  ;  184,  1186; 
187,  1245;  191,  i35i  ;  193, 
1394  et  i3g6  et  i4<>4;  195, 
1434;  196,  1470  ;  197,  1492 
et  i5o2 ;  198,  1526; i99,i55o 
et  i554  ;  200,  i582  ;  201, 
1602;  211,  1814;  212,  i85o; 
219,  2004. 

Lambert,  musicien,  X,  i53. 

Lamboy  ,  général  de  l'empereur 
Ferdinand  III,  IV,  iSg,  336. 

Lamy,  X,  481. 

Laodice,  reine  d'Arménie  ,  per- 
sonnage de  Nicomède,  V,  495- 
593. 

Laonice,  personnage  de  Rodo- 
gune,  IV,  397-5 11  ;  I,  ni; 
121  ;  V,  148. 

Lare  (don  Manrique  de),  per- 
sonnage de  Don  Sanche  d'Ara- 
gon, v,  397-494. 


DES  ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


5'ig 


Latin  (le),  la  langue  latine,  IV, 
i5;  VIII,  i4;  19. 

Latins  (les),!,  262  :  II,  117  ;IV, 
i3i;  IX,  53o,  21;  X,  63, 
16;  5oo. 

Latines  (  œuvres  )  de  Corneille  : 
excuse  à  l'archevêque  de 
Rouen,  X,  64-72  ;  —  traduc- 
tion en  vers  latins  de  ses  pro- 
pres stances  sur  la  conquête 
de  la  Franche-Comté,  X,  2  25; 

—  vers  latins  présentés  au  Roi 
à  son  retour  de  la  guerre 
d'Hollande,  en  1672,  X,  249; 

—  distique  latin  sur  les  con- 
quêtes de  1672  ,  attribué  à 
Corneille ,  X,  385  ;  —  épita- 
phe  latine  du  P.  Goulu ,  X, 
396. 

Latinus,  roi  des  Latins,  X,  63, 

16. 
Latium  (le),  X,  45o. 
Launoy  (de),  X,  4?2- 
Laure    de    Noves,  X,    147,    60 

et  62. 
Laurens  (saint),  VIII,  220;  222, 

935. 
Laurens     de  Suniano    (le   P.), 

VIII,  323. 
Lazare  (le),  saint   Lazare,  VIII, 

434,  3566. 
Lazarille  de  Tormes,  héros  d'un 

roman     espagnol,     II,    444  > 

i85. 
Lélius,    lieutenant    de  Scipion, 

consul    de    Rome,  personnage 

de    Sophonisbe,    VI,   447"549* 

Voyez  LyELIE 

Lemnos  (l'île  de),  II,  34^,  25; 
343,  33;  VI,  248;  252;  294, 
940  ;  295,  943  :  3io,  1295  et 
i3o3;  317,  1458; 345>  2i34; 
348,  2206. 

Lenas,  un  des  complices  de 
Cinna,  III,  4^i,  i49°- 

Lens  (la  bataille  de),  X,  27,352. 

Léon,  amant  de  Pulchéhe,  per- 
sonnage de  Pulchérie  7  Vil  , 
371-453. 


Personnage  de  Pom- 


Léonce,  nom  du  fils  de  la  gou- 
vernante d'Héraclius  et  de 
Martian  ,  et  nom  supposé  de 
Martian,  V,  n3-a4i. 

Léonor,  personnage  du  Ciel,  III, 
1-241;  483  ;  I,  n5. 

Léonor,  reine  d'Aragon,  person- 
nage de  Don  Sanche  d'jragon, 

y,  397-494  ;I,  44. 

Léontine,  dame  de  Constantino- 
ple,  personnage  à'Héraclius , 
V,  ii3-24i  ;  I,  119;  121. 

Léopold  Ier,  empereur  d'Allema- 
gne, X,  3o6,  5i. 

Léotychïde,  fils  d'Agis  ,  roi  de 
Sparte,  VII,  47,  961. 

Lépide,   un    des    triumvirs,  II, 
4n,  598;    437,     1202;    4^7, 
i658. 
pée,  IV,  i-ii5 

Lépide,  tribun  romain ,  person- 
nage de  Sophonisbe  ,  VI,  447~ 

549. 

Letelier  (Jean),  grand  rappor- 
teur de  France,  X,  433  et  434; 
436. 

Letelier,  curé  de  Louviers,  X, 
435. 

Letelier  (Nicolas),  X,  435. 

Léthé  (le  fleuve),  I,  222  (var.). 

Leuco-^Ethiopes,  peuples  d'Afri- 
que, V,  3o4. 

Leuctres,  en  Réotie,  I,  55  ;  V, 
4o6. 

Levant  (le),  VII,  204,  88. 

Leyden  (la  ville  de),  Leyde,  IV, 
i34. 

Liaison  des  scènes  ,1,3;  101  et 
suiv. 

Liancour  (Roger  du  Plessis  de). 
Epître  dédieatoire,à  lui  adres- 
sée, de  la  comédie  de  Mêlite.^ 
I,  i34. 

Liancour  (Jeanne  de  Schom- 
berg  ,  dame  de  ) ,  femme  du 
précédent.  Epître  dédicatoire, 
à  elle  adressée,  de  la  Galerie  du 
Palais,  II,  10. 

Liban  (le),  IX,  125. 


:V,o     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Libraire  m  Palais  (le),  per- 
sonnage de  la  Galerie  du  Pa- 
lais, II,  I-II2. 

Lieu   (unité  de).   Voyez    Unité 

de  lieu. 
Ligdamon,  personnage  d'une  tr;i- 

gi-comédie  de  Scudéry,X ,  57, 

I.  Voyez  Lygdamon. 
Ligdamon    et     Lidias ,     tragi-co- 
médie de  Scudcry,X,  $7  ;  401 . 

Ligue  (la),  X,  211,  261. 
Lille  (la  ville  de),  X,  2o5,  i63. 
Lingère  du  Palais  (la),  person- 
nage   de    la  Galerie  du  Palais, 

II,  1-112. 

LrRioPE,  nymplie,  personnage 
d'Andromède,  V,  243-396. 

Lisis,  personnage  de  Mêlite ,  I, 
123-253. 

LiSTOR,  personnage  de  la  Veuve, 
I.  37i-5oo. 

!  ive  (Tite),  III,  258;  VI,  464; 
466;  X,  441.  —  Extrait  du 
livre  Ier  (chapitres  xxîii-xxvi) 
de  son  Histoire  romaine,  conte- 
nant le  sujet  de  la  tragédie 
d'Horace,  III,  262-272. 

Lïvie,  impératrice,  personnage 
de  Cinna,  III,  359-462;  I,  44; 

47-       v 
Loire  (la),    VII,    117,    226;  X, 

106,  7. 
Lombardie  (la),  VI,  22,  3i  ;  23, 

63;  32,  3oo;  99,  i83i. 
Lombards  (les),  VI,  1;  6;  20, 
Longueville  (Henri  II  duc  de), 

VIII,  6.  —  Épitre  dédicatoire, 

à  lui  adressée,  de  la  tragédie 

de  Clitandre,  I,  259. 
Longueville  (le  duc  de),  fils  du 

précédent,  tué  au    passage  du 

Rhin,  X,  27,  346. Voyez  Saint- 

Paul. 
Longueville   (la   duchesse   de), 

VILI,  6;  X,  208,  210. 
Lope,    IV,    279.     Voyez    Vega 

(Lope  de). 
Lope  de  Gusman  (don).    Vovez 

Gi'sman  (don  Lope  de) 


Lobraine  (la),  X,  253,  5. 
Lothaire     (l'empereur) ,    VIII  , 

237. 
Louanges  de  la  sainte  Vierge  (les) 

de  saint  Bonaventure,  traduites 

en  vers  français  par  Corneille, 

IX  i-53. 
Louis  (saint),    roi    de    France, 

VIII,  343;  X,  211,  25i. 
Louis  XI,  roi   de  France,  VIII, 

422. 
Louis   XII,   roi   de  France,  X, 

32,  8. 
Louis  XIII ,  roi    de    France,  II, 

522,  1657  ;  III,  472  ;  IV,  412; 

V,  3 18,  61  ;  X,  32,  8  ;  64;  69, 
41;  70,  57;  i35,  2;  338,  94; 
433;  4^5;  436>  —  Sonnet  de 
Corneille  sur  sa  mort,  X,  87 
et  88.  —  Pièce  de  vers  intitulée 
les  Triomphes  de  Louis  le  Juste, 
X,  io4-n5. 

Louis  XIV,  roi  de  France,  I,  47; 
III,  472  ;  IV,  11;  12  ;  V,  3i6, 
3o;  319,  79;  VI,  123,  67; 
126;  IX,  63  et  64;  71  ;  X, 
i53,  6  ;  232,  9;  3i8,  49  ;  32o, 
76;  323,  10  et  i3  ;  327,  12  ; 
328,  43;  33o,  77;  333,  5; 
335,  12;  339,  io3;  5oi;  5o2. 
—  Il  a  fait  recevoir  à  Corneille, 
au  sujet  d'OEdipe,  de  véritables 
et  solides  marques  de  son  ap- 
probation, VI,  126;  129.  — 
La  tragédie  d' "Andromède  a  été 
entreprise  par  son  commande- 
ment, V,  259.  —  La  Toison 
d'or  a  été  composée  pour  la 
réjouissance  publique  célébrée 
à   l'occasion  de    son   mariage, 

VI,  23o;  253  et  254;  262, 
174  et  175.  —  Vers  sur  lui  ou 
adressés  à  lui  par  Corneille  : 
pour  obtenir  la  confirmation 
des  lettres  de  noblesse  accor- 
dées à  son  père,  X,  i35  et 
i36;  —  pour  le  remercier  de 
la  pension  accordée  au  poète 
en  i663,  X,  175-181  ;  —  pour 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


>/,! 


le  rétablissement  du  payement 
de  cette  pension ,  X,  i85;  — 
sur  son  retour  de  Flandre,  X, 
1 86- 191  ;  —  sur  les  victoires 
de  1667,  X,  192-217;  218  et 
219;  —  sur  la  conquête  de  la 
Franche- Comté,  X,  223-226; 

—  sur  son  départ  pour  l'ar- 
mée en  167a,  X,  247  et  248  ; 

—  à  son  retour  de  la  guerre 
d'Hollande  en  1672,  X,  249- 
25 1  ;  —  sur  les  victoires  rem- 
portées en  Hollande  en  1672, 
X,  262-283;  —  sur  la  prise 
de  Mastricht,  X,  285  et  286; 

—  sur  sa  libéralité  envers  les 
marchands  de  la  ville  de  Pa- 
ris, X,  287-298;  —  sur  son 
départ  pour  l'armée  en  1676, 
X,  299~3o3;  —  sur  sa  campa- 
gne de  1676, X,  3o4-3o7  ;  — 
placet  pour  obtenir  un  béné- 
fice à  son  fils  Thomas,  X, 
3o8  ;  —  sur  C'inna ,  Pompée  , 
Horace,  etc.,  qu'il  a  fait  re- 
présenter devant  lui  à  Ver- 
sailles, X,  3o9-3i4;  —  sur 
ses  victoires  en  1677,  X,  322- 
325;  —  sur  la  paix  de  1678, 
X,  326-33o. 

Louis,  Dauphin, fils  deLouis  XIV, 
IX,  64;  71  ;  X,  216,  335;  329, 
63.  —  Vers  sur  son  mariage, 

x,  334-339. 

Louviers,  X,  435. 

Louvre  (le),  X,  244»  9J  3oi, 
24;  3i8,  52  ;  401. 

Loy  (de),  professeur  en  l'Uni- 
versité de  Paris.  Vers  que  lui 
adresse  Corneille  sur  son  pa- 
négyrique dePomponede  Bel- 
lièvre,  X,  1 3 1 . 

Luc  (saint) .  Passages  de  son  Evan- 
gile traduits,  VIII,  n3,  i454~ 
1457; 176,  1;  241,  i34i-i346; 
628,  1017  et  1018;  679,  2062- 
2064. 

Lucain,  poëte  latin,  II,  339; 
TTT,  87;  IV,    12;  14;  i5;   21- 


22;  2.3;  >4;  i3i;  i3v>.;  X,  449 
—  Epitaphe  de  Pompée  ,  tirée 
du  livre  IX,  vers  190-214,  de 
sa  Pharsale,  IV,  15-17. — Pas" 
sages  de  la  Pharsale  imités  par 
Corneille  dans  la  tragédie  de 
Pompée,  et  signalés  par  lui,  IV, 
103-109.  —  Vers  imités  de 
Lucain,  attribués  à  Corneille, 
X,  355. 

Lucas  (Jean),  jésuite.  Imitation 
par  Corneille  de  ses  vers  la- 
tins sur  le  départ  du  Roi  pour 
l'armée  en  1672,  X,  299, 
3o3. 

Lucas,  X,  481. 

Lucie  (sainte),  VIII,  477. 

Luciffr,  VIII,  57.  Voyez  Phos- 
phore. 

Lucrèce,  personnage  du  Men- 
teur, IV,  117-273  ;  I,  98;  IV, 
i38  ;  275-395,  282  ;  3o5  ,  293  ; 
320, 6o3;324,675 ;  371, i553. 

Lune  (don  Alvare  de),  person- 
nage de  Don  Sanche  d  Aragon, 
V,  397. 

Lusitanie  (la),  VI,  364  ;  387, 
6025424,  i465  ;  441»  i83o; 
601,  607;  621,  io85. 

Lusitaniens  ^les),  VI,  359;  368, 
78;  X,  492. 

Luther,  X,  338,  98. 

Luxembourg  (la  ville  de),  X, 
307,  71. 

Lycante,  personnage  de  la  Place 
Royale,  II,  2i5-3oi.  — Per- 
sonnage de  Théodore,  V,  1- 
iii. 

Lycas,  personnage  de  la  Veuve, 
I,  37i-5oo.  -  -  Personnage  du 
Menteur,  IV,  117-273. 

Lycaste,  personnage  de  Clitan- 
dre,  I,  255-369. 

Lycus,  VI,  194,  41 1  • 

Lygdamon ,  tragi-comédie  di 
Scudéry,  X,  4QI-  Voyez  L'ig- 
damon. 

Lyon  (la  ville  de),  I,  120;  IV, 
288;    289,  4;    292,    81;  293, 


542     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


io3;  3i4,  449»  356,  1267; 
168,  1507;  VII,  246,  1097. 

Lysander,  fameux  capitaine  de 
Sparte,  personnage  d' 'A g  es  lias , 
VII,  i-95. 

Lysandre,  personnage  de  la  Ga- 
lerie du  Palais,  II,  1-112;  X, 
68,  28.  —  Nom  d  homme  men- 
tionné dans  la  Veuve,  I,  4°8, 
182. 

Lysarque  ,  personnage  de  Cli- 
tandre,  I,  255-369- 

Lyse,  personnage  de  la  Suite  du 
Menteur y  IV,  275-395. —  Per- 
sonnage de  P Illusion,  II,  421- 
527. 

Lysis,  nom  d'homme,  person- 
nage de  la  Place  Royale,  II, 
2i5-3oi. 


M 


Macédoine  (  la  )  ,  III  ,  4^4  » 
n33. 

Macédoniens  (les),  III,  4°8, 
54i. 

Macer  (Clodius),  Romain  men- 
tionné dans  Olhon,  VI,   577, 

52. 

Mackabées    (le   livre    des),    IV, 

418;  42°« 
Machabées  (la  mère  des),  VIII, 

491- 

Machine  (  la  )  comme  dénoue- 
ment de  la  tragédie,  I,  io5 
et  106. 

Madelaine  (la).  Voyez  Made- 
leine (sainte  Marie-). 

Madeleine  (sainte  Marie-),  VIII, 
61;  90;  2i3,  758;  IX,  553, 
2;  554,  21;  555,  4- —  Ap- 
pelée seulement  la  sainte  pé- 
cheresse, VIII ,  644,  1334. 
—  Hymnes  pour  sa  fête,  IX , 
552-556. 

Madrid  (la  ville  de),  III,  473. 

Madrigaux,  X,  35;  45;  61;  82; 
83;  85;   i5o;  i52;  i54. 


Maestricht.  Voyez  Masteic. 

Magdebourg  (la  ville  de),  VIII, 
618. 

Magnon,  poète  tragique.  Sa  mort, 
X,  495  et  496. 

Maihet  (Jean),  poëte  drama- 
tique, VI,  460;  463  et  464; 
466.  —  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve, 
I,  38o. 

Maisonfort  (Elisabeth  d'Estam- 
pes,  baronne  de  la).  Épître 
dédicatoire,  à  elle  adressée, 
de  la  comédie  de  la  Veuve,  I, 
375. 

Malachie  (saint),  VIII,  61 3. 

Malherbe,  I,  i36. 

Mandane  ,  sœur  de  Spitridate  , 
personnage  d'Age'silas,  VII, 
1-95. 

Mandane,  mentionnée  dans  Su- 
réna,  VII,  47^,  277  et  286; 
476,  317  et  329;  477,  344; 
495>  775;  499»  872;  507, 
1070;  5io,  1142;  5i6,  1283; 
519,  1374  ;  523,  1470  et  1473 
et  i483;  5s4  ,  i492  et  i5o6; 
529,  1621  ;  533,  1705. 

Mandonius  ,  frère  d'Indibilis , 
prince  des  Ilergètes ,  men- 
tionné dans  Sertorius,  VI,  38 1, 
43 1. 

Manlie  ,  Manlius  ,  III ,  566  , 
1703. 

Manlius  ,  Romain  mentionné 
dans  Sertorius,  VI,  43g,  1807. 

Manrique  de  Lare  ^don) .  Voyez 

Lare  (don  Manrique  de). 
Manto,  nymphe,  X,  112,  72. 
Mantoue  (  la  ville  de) ,  X  ,  69 , 

52. 

Marais  (le),  quartier  de  Paris, 
II,  57,  738;  76,  io85. 

Marais  (le  théâtre  royal  du),  VI, 
23o;  X,  483;  4g3';  494;  495. 

Marais  (la  troupe  de  comédiens 
du),  IV,  286;  388  (var.).  — 
Elle  représente  OEdipe,  VI , 
a3o. 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


54  i 


Marbeuf  Kde).  Son  hommage  à 
Corneille  au  sujet  de  la  Veuve., 
I,  389. 

Marcel.  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve, 
I,  391. 

Marcel  ,  un  des  conjurés  de 
Cinnn,  III,  45 1 ,  ï49°- 

Marcelle  (sainte),  VIII,  48. 

Marcelle,  femme  de  Valens, 
gouverneur  d'Antioche ,  per- 
sonnage de  Théodose ,  V,  1- 
iii. 

Marcellin  ,  frère  de  Marcelle 
dans  ThéodosCjV,  18,22  et  39. 

Marcellin,  auteur  d'une  chroni- 
que,  VII,    104. 

Marcin  (le  comte  de) ,  X  ,  207, 
196. 

Mardochée,  VIII,  572;  IX,  41, 
618. 

Mareschal.  Vers  de  Corneille 
sur  sa  tragi-comédie  de  la 
Sœur  valeureuse,  X,   62  et  63. 

Mariage  (le)  n'est  point  un 
achèvement  nécessaire  pour  la 
tragédie  heureuse ,  ni  même 
pour    la    comédie,    I,    26    et 

M ariana,  historien  espagnol,  III, 
81.  —  Extrait  de  son  Histoire 
d 'Espagne »,  III,  79. 

Mariane,  femme  du  roi  Hérode, 
III,  480. 

Marlane  (/a),  tragédie  de  Tristan, 
I,  48;  VI,  462. 

Marie  (la  vierge) ,  IX,  161;  i63; 
167;  175;  177;  179;  187; 
191;  201;  211;  227;  a3i;  241; 
339.  Voyez  Vierge  (la  sainte). 

Marie  (sainte),  nièce  de  saint 
Abraham,   VIII,  440. 

Marie- Anne-Christine- Victoire 
de  Bavière,  femme  du  Dau- 
phin fils  de  Louis  XIV ,  X , 
338,  88. 

Marie-Thérèse,  reine  de  France. 
—  Corneille  lui  dédie  sa  tra- 
duction de  l'Office  de  la  sainte 


Vierge,  [X,  63-65;  71. —  Vers 

que  lui  adresse  Corneille,  X, 

i53. 
Marin    (le   cavalier),    II,    22, 

100. 
Marius,    III,    410,    583;    VI, 

364;    366,    26    et    27;    386, 

5?°;    399,    856;    X,    214, 

3o6. 
Marius    (le   jeune),    VI,    424, 

i455. 
Marotte  (Mlle),  comédienne,  X, 

493. 

Mars,  II,  342,  25;  36i,  416, 
372  ,  641  ;  447,  243  ;  449, 
281;  III,  114,  179  ;  167, 
n58;  IV,  45o,  489;  59,  744; 
V,  159,  63;  VI,  528,  i346; 
VII,  3 19,  819  ;  X,  110,  65  ; 
179,  59;  186,  5;  211,  266; 
239,  58;  259,  112;  277,  352; 
3i4,  48;  333,  1.  —  Per- 
sonnage du  prologue  de  la 
Toison  cTor,  VI,  252-265; 
246. 

Marsln  (le  comte  de).  Voyez, 
Marcin. 

Martian,  fils  de  l'empereur  Pho- 
cas ,  personnage  d'Héraclius  , 
V,  n3-24i;  1,63;  76;  n5; 
V,  5o8. 

Martian  ,  affranchi  de  Galba  , 
personnage  ROthon,  VI,  564- 
657. 

Martian,  ministre  sous  Théodose 
le  jeune,  personnage  de  Pul- 
chérie,  VII,  371-453. 

Martie,  Marcia  ,  femme  di- 
vorcée de  Titus,  VII,  2o5, 
n5. 

Martyr.  Hymnes  pour  un  mar- 
tyr, lX,'58o-582.  —  Martyrs 
bannis  de  notre  théâtre,  I,  59. 
—  Hymnes  pour  plusieurs 
martyrs,  IX,  583-587 

Mascarade  des  enfants  gâtés,  X , 

38. 

Massinissi.,  roi  deNumidie>  per- 
sonnage   de    Sophumsbe,    VI  , 


544  TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


447-549-  —  Personnage  de  la 
Sophonisbe  de  Mairet,  VT,46o. 

Mastric,Mastricht,  X,  3o6,36; 
307,  61. —  Vers  de  Corneille 
sur  la  prise  de  cette  ville,  X  , 
285  et  286. 

Matamoke  ,  capitaine  gascon  , 
personnage  de  ï Illusion  ,  II  , 
421-527. 

Mathilde  (sainte),  mère  de  l'em- 
pereur Othon,  VIII,  668. 

Matthieu  (saint),  VIII,  2  5g.  — 
Passages  de  son  Évangile  tra- 
duits en  vers  par  Corneille, 
VIII,  258,  1695  et  1696  ;  5oi, 
4977  5  S?1'  6419-6430;  58i, 
53-56;  592,  280-282;  612, 
688-690. 

Maur  (saint),  VIII,  64. 

Maures  (les),  III,  96;  97;  98  ;  V, 
412;  4r4-  — Les  Maures  dans 
le  Cid,  I,  43  ;  96  ;  10 1.  Voyez 
More. 

Maurice  ,  empereur  d'Orient , 
père  o"Héraciius,  V,  ii3-24i  ; 
I,  93  ;  VIII  ,  464. 

Maxime  ,  un  des  deux  chefs  de 
la  conjuration  contre  Auguste, 
personnage  de  Ci/ma,  III,  359- 
462;  I,  3o;  44;  47;  X,  491. 

MAxrMiLiEN  Ier  de  Bavière,  X, 
338,  99. 

Maximin  (l'empereur),  VIII,  266. 

Mayerne   Turquet   (Loys    de), 

auteur  d'une   Histoire   générale 

a 

a" Espagne,  III,  81. 

Maynard,  X,  118,  35.— P.  Cor- 
neille le  remplace  à  l'Acadé- 
mie française,  X,  4°7- 

Mazaruv  (le  cardinal),  X,  179, 
66  ;  476- —  Épître  dédicatoire, 
à  lui  adressée,  delà  tragédie  de 
Pompée,  IV,  ii-i3. —  Remer- 
cîment  en  vers  que  lui  adresse 
Corneille,  X,  92-99. 

Mécène,  III,  4°3,  3g4  ;  449? 
1461  ;  X,  118,  5o. 

Medef  ,  fille  d'Aaete,  amante 
rie  Jason,  ï,  r5;  ->o;  3t;  37; 67; 


78;  106  et  107;  III,  273;  1\  , 
416.  —  Personnage  principal 
de  la  tragédie  de  Corneille,  II, 
327-419.  —  Personnage  de  la 
Toison  a"or  VI,  221-349*  — 
Personnage  de  la  Médée  de  Sé- 
nèque  ,  IV,  282. 
Médée ,  tragédie  de  Corneille,  II, 
327-419  ;  I,  46; IV,  i3l; 423. 

—  Examen  de   la  pièce ,    II , 
333-339. 

Médée,  tragédie  de  Sénèque,  1, 2 1  ; 

II,  333;  IV,  i3o;  X,  45o.  — 

Tragédie  d'Euripide,  II,  333; 

X,  45o- 
Mèdes  (les),  VI  ,2  44- 
Medor  ,    personnage    du  Roland 

furieux,  II,  248,  487. 
Médus,  fils  de  Médée,  VI,  244. 
Méduse,  V,  275;  2g5;  3oi;35s; 

375,  i3o3;  392    1684* 
Mégare  ,     fille     d'honneur     de 

Dircc  ,    personnage  ftOEdipe  , 

VI,    101-219. 
Mégate,  nom  de  femme,  II,  3ai, 

274  ;  325,  386. 
Mégère,  I,  23 1,  1467;  II,  35 1, 

217;  IV,  457,  679;  VII,  353, 

1667. 
Mégères  (les),  I,  225,  i36o. 
Mein  (le),  X,  257,  78. 
MelchisÉdech,  IX  ,  212  ;  2l3,  18. 
Méltsse,   personnage  de  la  Suite 

du  Menteur,  IV,  275-395  ;    I, 

19;  120. 
Mélite,  nom  de  femme,  X  ,  44  > 

1  et  11. 
Mélite,  comédie  de  Corneille,  I, 

i23-i53;  19;  28;  261  et  262; 

270-272;   394   et   3g5;  397; 

446,  93i;  II,    10.  —  Examen 

de   cette   pièce,    I,    137-14*  • 

—  Le  peu  de  bruit  qu'elle  fait 
à  son  arrivée  à  Paris,  I,    i34 

—  N'est  pas  dans   les  règles , 
I,  137.  —  Son  succès  surpre 
nant ,  I ,   i38.  —  L'auteur  faii 
un  voyage  à  Paris  pour  voir  l< 
succès  de  cet  ouvrage,  I,  270. 


DES   ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


545 


Meute,  personnage  principal  de 
la  comédie  de  ce  nom  ,  I,  123- 
253. 

Mélitène  ,    capitale    d'Arménie, 

III,  476;  486;  5i4;  601  ;  522, 
757. 

MELroMÈJNE,  I,   47»  ^1  7l,  68; 

i3o,  16;  178,38.  —  Personnage 

&  Andromède  y  V,  243-396 . 
Mélusine  (la  fée),  IV,  159,  353. 
Memnon  ,   fils  de  l'Aurore ,    II , 

449,  3oo. 
Memphis  (la  ville  de';,   IV,   29, 

36;  43o,  38. 
Ménage,  X,  438;  444. 
Ménale,  nom  d'homme,  V,  391, 

1680. 

MÉnÉLAS,    I,    28;     35;    IOÔ;     II, 

4o5,  i324;  IV,  4^4- 
Menteur   (/e),    comédie  de  Cor- 
neille,   IV,    117-273;    I,   32; 
36;43;  84;  99;  I2°;  n>  433; 

IV,  279;  282;  284;  285;  3o4 
et  3o5;  388  (var.).  —  Examen 
de  la  pièce,  IV,  137  et  i38. 

Mercier  du  Palais  (le),  person- 
nage de  la  Galerie  du  Palais, 
II,  1-112. 

Mercure,  I,  75  et  76;  597, 
365  ;  VI,  246.  —  Personnage 
d1 Andromède,  V,  243-3g6. 

Merope  dans  Cresphonte,  I,  67. 

Mérouée  ,  roi  de  France ,  VII . 
108;  160,  1273;  161,  1279; 
175,  1639;  181,  1778. 

Mesler  (le  R.  P.  Thomas),  bé- 
nédictin, a  mis  Y  Imitation  en 
vers  latins  (1649),  VIII,  17. 

Mesnil  Haudrey  (du),  X,  479. 

Mesnil  Haudrey  (du),  fils  du 
recèdent,  outrage  un  cousin 
de  Corneille,  X,  479. 

Messie  (le),  III,  477  ;  IX,  546, 
9  ;  571,    10. 

Métamorphosera)  d'Ovide,  1,74- 

Métels  (les),  les  Métellus,  III , 
452,  i536;  X,  214,  3o6. 

Métrobate,  V,  522,  24^  et  247  ; 
526,  33 1  ;  554,  964;  557, 
Corneille,     x 


1040;  565,  1219;  566,  1240; 

567,  1257;  58o,  i566;  586, 

1706. 
Metz  (l'évêché  de),  VIII,  392. 
Meuse  (la),  II,  436;  X,  257,  70; 

3o3,  57  ;  307,  66. 
Mexique  (le),  II,  45o,  3 10. 
Mézétulle,  lieutenant  de  Massi- 

nisse ,    personnage  de   Sopho- 

nisbe,  VI,  447~^49- 
Mtap6v.  Sens  de  ce  mot,  1 ,  55. 
Michée    (le    prophète).    Voyez 

Bible. 
Michel  (saint).  Hymnes  pour  son 

apparition  et  pour  sa  dédicace, 

IX,  559-562. 

Milan  (la  ville  de),  VI,  20;  22, 
32;  24,  g3;  25,  io3  et  io5; 
32,  284;  33,  3n;  35,  38i , 
67,  1097;  88,  i56i;  91,  1641; 
97,  1777;  99,  1823  et  i83oet 
i832. 

Milésien  (Denys  le),  VI ,    248. 

Minerve,  X,  63,  19. 

Minos,  I,  i3g;  225,  1373. 

Minotaure  (lej,  VI,  164,695. 

Minturnus.  Citation  de  son  traité 
du  Poète,  III,  479- 

MlSAÈL,    IX,    l47,    69. 

Mithradate,  VII,  498,  857; 
5oo,  904  et  go5  ;  522  ,  i44^  ; 
53o,  1644* 

MlTHRIDATE,  VI,  370,    l5o. 

Mitrane,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  Pulchérie ,  VII, 
382,  35. 

Moab,  IX,  27,  355. 

Moeurs  (les)  dans  la  tragédie 
IV,  282.  —  Conditions  des 
mœurs,  I,  3i.  —  Elles  doivent 
être  convenables ,  1 ,  36.  — 
Elles  doivent  être  semblables, 
1 ,  37.  —  Égalité  dans  les 
mœurs,  I,  37.  —  La  tragédie 
se  peut  faire  sans  mœurs,  I,  38. 

Mogor  (le  grand),  le  grand  Mo 
gol,  II,  447,  227. 

Moïse,  VIII,  262,  67;  263,  79, 
265,    n5;    354,    19^7;    4^4? 
35 


546     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


3980;  583,  83;  IX,  24,  3ia; 

45,  681;  X,  319,    59.  Voyez 

Bible. 
Mole    (Matthieu) ,    Son   Oraison 

funèbre,  par  le    P.   Fronteau, 

X,  472  et  473. 
Moncade  (don   Raymond    de), 

personnage     de     Don    Sancke 

d'Aragon,  V,  397-494- 
Monologues,   I,    4^-  —  Pièces 

où  Corneille  n'en  a  pas  mis, 

I,  273. 

Mons,  ville  de  Flandre,  X,  328, 
43. 

Montagne,  Montaigne ,  Fauteur 
des  Essais,  II,  217  ;  V,  i47« 
—  Extrait  du  livre  I  (chapi- 
tre xin)  de  ses  Essais,  conte- 
nant le  sujet  de  la  tragédie  de 
Cinna,  III,  376-078. 

Montagne  (le  sieur  de  la),  faux 
nom  de  Clindor  dans  l'Illusion, 

II,  445,  2o5;  456,  442;  492> 
1090. 

Montaigne,  l'auteur  des  Essais. 
Voyez  Montagne. 

Montausier  (Julie  de).  Voyez 
Julie  de  Rambouillet. 

Mont-Cassel  (la  place  de),  X, 
323,  12. 

Mont-Chrestien,  écrivain  fran- 
çais, VI,  463;  466. 

Montmor  (Henri-Louis  Habert 
de).  Traductions  et  imitations 
de  son  épigramme  latine  sur 
les  victoires  de  Louis  XIV  en 
1667,  X,  218  et  219. 

Montoron  ou  Montauron  (Pierre 
du  Puget,  seigneur  de),  pre- 
mier président  des  finances  au 
bureau  de  Montauban.—  Epî- 
tre  dédicatoire,  à  lui  adressée, 
de  la  tragédie  de  Cinna,  III, 
369-372. 

Mopse,V1,  343,  2093. 

More  (le),  les  Mores,  III,  i36, 
539;  i3g  (var.);  140,  610; 
i63,  1075;  i65,  no5;  168, 
11 78;  170,1217  ;  17a,  1276  ; 


173,  1286;  174,  i3io;  179, 
1414;  i83,  1477;  184,  i523  ; 
i85,i559;  197,1823^,296; 
422,  79;  427,214;  428,   23o; 

463,  1090;  465,  ni4;  486, 
1624;  VII,  275,  1755.  Voyez 
Maures. 

Mort  de  Pompée  (/a),  titre  donné 
d'abord  à  la  tragédie  de  Pom- 
pée, IV,  27  (var.);  III,  87. 

Mosander,  III,  475 • 

Moucheurs  de  chandelles,  au 
théâtre,  III,  100. 

Mucian,  Mucien ,  général  romain , 

VII,  246,  1097. 

Munster  (la  ville  de),  X,  258, 
92;  280,  396. —  Part  prise  par 
Fabio  Chigi,  depuis  pape  sous 
le  nom  d'Alexandre  VII , 
aux  négociations  de  Munster, 

VIII,  5. 

Murène,  Muréna,  nom  d'un  Ro- 
main mentionné  dans  Cinna, 
III,  438,  i2o3. 

Muse,  les  Muses,  III,  372  ;  VI, 
i2i,3; 123,  62;  125; X,  74, 
1  ; i3o,  9; 196,  32;  2o5, 157; 
25o,  21  ;  3o5,  29;  438  ;  44 !  ; 
445  ;  457- 

Musique  (la)  retranchée  de  nos 
poëmes  dramatiques,  I,  40  • 

Mycènes  (la  ville  de),  VI,  144. 
229. 

Mysie  (la),  province  de  l'Asie 
Mineure.  V,  i63,  173. 

Mysis,  personnage  de  V Andricnne 
de  Térence,  II,  14. 


N 


Nabal,  IX,  33,  465;  34,  484. 
Nabuchodonosor,  VIII,  3o6. 
Namur  (la  ville  de),  X,  328,  43. 
Nancy  (la  ville  de),  X,  70,  54  ; 

n3. 
Nantouillet  (François  du  Prat, 

fils  cadet  du  marquis  de),  X, 

270,   267. 


DES   GEILVRES   DE  CORNEILLF.. 


547 


Narcisse,  affranchi  de  l'empereur 
Claude,   VI,   597,    507;   621, 
1069. 
Narration  dans  le    poëme  dra 
matique,   III,  38 1;   484;    IV, 
24;  422-424;    V,    148;    i5o; 
VI,  i3i. 
Narsingue,  ancien   royaume  de 
la    presqu'île    occidentale    de 
l'Hindoustan,  II,  47°>  688. 
Nassau  (Guillaume  Ier  de),  dit  le 
Taciturne,  X,  262,   i65  ;  267, 
235. 
Nassau  (Maurice  de),  fils  aîné  du 
précédent,  X,  262,  i65;    267, 
235. 
Nassau  (Frédéric-Henri  de),  frère 
du    précédent,    X,    262,    166; 
267,  235. 
Natalie  (sainte),  VIII,  496. 
Naudé  (Gabriel),  X,  468;  472« 
Naugerius,    André  Navagero. 
Citation  d'une  de  ses  épigrain- 
mes  latines,  X,  443. 
Navarre  (la),  III,  81. 
Navarrois  (les),  III,  i85,  i55g. 
Néarque  ,     seigneur    arménien, 
ami  de  Polyeucte,  personnage 
de  Polyeucte,  III,  4°3-570. 
Nécessaire  (le),  III,  379;  V,  3 06. 
—  Discours  de  la  tragédie  et  des 
moyens   de  la    traiter   selon    le 
vraisemblable  ouïe  nécessaire,  1, 
52-97. 
Nemours  (la  ville  de),  X,  453. 
Nemours  (la  duchesse  de)  promet 
de  prendre  pour  page  un  fils 
de  Corneille,  X,  488  et  489. 
Nephélé,  femme  d'Athamas,  VI, 

245. 
Neptune,  II,  344>  ^7;  IV,  59, 
745;  VI,  247;  285,  701;  294, 
918  et  920  ;  295,  948  ;  X,  109, 
49;  236,  14.  —  Personnage 
d'Andromède^  V,  243-3g6. 
Nerée,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  Andromède,  Y  , 
266;  271;  351,764;  372,  12 18 
et  1227. 


Néréides  (les),  V,  260;  267;  268; 
272;  3o3;  3i4;  322,  i38. 

Nérine,  personnage  de  Mèdée, 
II,  327-419.  —  Personnage 
d'OEdipe,  VI,  101-219. 

Néron,  empereur  romain,  VI, 
J77,  54;  583,  196;  596,481 
600,  596;6oi,  606  ;  6i3,  863 
6i5, 9095616,947;  617,978 
621,  1064  et  1072  et  1081 
VII,  204,  85;  2o5,  g5;  218, 
417;  228,  681;  267,  1579. 

Nertobrige,  ville  d'Aragon,  VI, 
364. 

Nesse,  le  centaure  Nessus,  II, 
390,  986. 

Nestor,  II,  362,  44°  ;  X,  70,  61 . 

Neufbourg  (le  château  de),  ap- 
partenant au  marquis  de  Sour- 
deac,  VI,  23o. 

Nevers  (la  ville  de),  X,  100;  472; 

.476. 

Nicandre,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  OEdipe,  VI,  161, 
652;  196,  1470  et  1476. 

Nicanor  (Démétrius),  IV,  41 4  ; 
4i5;  428;  43o,  26;  4^9, 229; 
449,  464;  453,  553.  Voyez  Dé- 
métrius Nicanor. 

Nicolas,  procureur  du  Roi,  X, 
436. 

JYicomède,  tragédie  de  Corneille, 
V,495-593;I;  64;  68;  80;  84; 
93;  97;  n5;  272;  273  (var.). 
—  Examen  de  la  pièce,  V,  5o5- 
509.  —  Elle  est  d'une  consti- 
tution assez  extraordinaire,  V, 
5oi. —  La  représentation  n'en 
a  point  déplu,  V,  5o4;  507.  — 
Ce  ne  sont  pas  les  moindres 
vers  qui  sont  partis  de  la  main 
de  Corneille,  V,  5o4;  507. 

Nicomède,  fils  aîné  de  Prusias, 
personnage  principal  de  la  tra- 
gédie de  ce  nom,  V,  495-593; 
I,  59  et  60;  69;  75;  272. 

NicoMÉpiE ,  ville  de  Bithynie , 
V,  5io, 

Nil  (le),  IV,  53,  620;  85,  i4i4j 


548     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


VI,  643,  i54i  ;  IX,  107,  i5  ; 

x,  329, 54. 

Nimègue  (la  ville  de),  X,  281, 
422.  —  La  paix  de  Nimègue, 
X,  326-33o;  327, 20;  336.  — 
Allusion  aux  vers  sur  la  paix 
de  Nimègue,  X,    335,    3i   et 

32. 

Nise,  nom  de  femme  mentionné 
dans  Médèe,  II,  397,  11 55; 
4o4,  i3oi. 

Noé,VIII,  583,  77;IX,i4,i3i; 
i5,  139;  44,  671. 

Noeud  (le)  du  poème  dramati- 
que, I,  104. 

Nogent  (Armand  de  Bautru 
comte  de),  tué  au  passage  du 
Rhin,  X,  270,  267;  273,  3oi. 

Norbert  (saint),  VIII,  5i2. 

Norique  (la),  VII,  108. 

NoRLINGHEN,  NoRTLINGHE,  Nord- 

lingen,  ville  de  Bavière,   IV, 
412;  X,  277,  352. 
Normandie  (la),  II,  26,  146  ;  X, 

64,  407;  436. 
Notre-Dame  (la pompe  du  pont), 

X,  242. 
Nourrice  (la)  de  Mélite,  I,  123- 
2  53. — La  nourrice  de  Clarice, 
dans  la  fleuve,  I,  37i-5oo. — 
Le  personnage  de  nourrice  re- 
présenté sous  le  masque  par 
un  homme,  II,  14. 
Nues    (les) ,     comédie    d'Aristo- 
phane, II,  11. 
Nugne,    pauvre  pêcheur,    men- 
tionné dans  Don  Sanche,  1, 10 1  ; 
V,  492,  1781;  493,  1797. 
Numide,  les  Numides,  VI,  5o4, 

774;  538,  1578. 
Numidie   (la),   VI,    472;   5i5, 

io58  ;  524;  i2Ôo. 
Nyiee  ,     nom    d'homme     men- 
tionné   dans   Andromède,    V  , 
390,  i652. 
Nymphidius,  préfet  de  Rome  sous 
Néron,  VI,  577,  47;  582,  157. 


O 


Occident  (1'),  III,  33g,  i3o8. 

Océan  (1'),  IV,  4i3  ;  VI,  249. 

Octar,  capitaine  des  gardes  d'At- 
tila, personnage  &  Attila,  VII, 
97-181. 

Octave-César-Auguste.  Voyez 
Auguste. 

Octavian  ,  personnage  d'He'ra- 
clius,  non  marqué  dans  la  liste 
des  acteurs,  V,  23o,  1703. 

Octavie,  femme  de  Néron,  VII, 
204,  84- 

Ode,  X,  3o  et  3i. 

OEdipe  ,  tragédie  de  Corneille , 
VI,  101-219;  I,  59;  67;  74; 
116;  122;  273;  III,  278;  X, 
482.  —  Examen  de  la  pièce, 
VI,  128-132.  —  Le  sujet  a 
été  proposé,  avec  deux  autres, 
par  Foucquet,  VI,  124;  128 
et  129.  —  Est  un  ouvrage  de 
deux  mois,  VI,  128.  —  Les  au- 
diteurs de  Corneille  avouent 
qu'il  n'a  fait  aucune  pièce  où 
il  se  trouve  tant  d'art  qu'en 
celle-ci ,  VI ,  128.  —  Représenté 
à  Versailles  en  octobre  1676, 
X,  309;  3n,  11. 

OEdipe  (les)  de  Sophocle  et  de 
Sénèque,  I,  42  >  ÎH,  86;  VI, 
129;  25o;  X,  3i2,  29. 

OEdipe,  fils  et  mari  de  Jocaste, 
I,  56;  62  ;  V,  146.  —  Person- 
nage principal  de  la  pièce  de  ce 
nom,  VI,  101-219  ;  I,  43  ;  70. 

Œillets     (Mlle    des),     comé- 
dienne, X,  49° • 
Office  de  la  sainte  Vierge  (1'),  tra- 
duit en  vers  français  par  Cor- 
neille, IX,  55-24i. 
Oïlée,  argonaute,  VI,  343,  2093, 
Olives  (le  jardin  des),  VIII,  412; 

558 
Oracles,  III,  278  ;  V,  298;  307  ; 
V[,  127;  i3o. 


DES  ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


549 


Orange  (Guillaume  prince d'),X, 

279,  38i. 
Orange  (Henri-Frédéric    prince 

d'),  IV,  i33;X,452;  457. 
Oreb  (le mont),  IX,  19,  21 3. 
Oreste,  fils  d'Agamemnon,  I,  i5; 

20;  67;  77;  80  et  81;  106;  III, 

274;  V,  406;  VI,  461;  VII, 

394,  325. 
Oreste ,  tragédie    d'Euripide,    I, 

35;  IV,  424. 
Orient  (1'),  III,  283,    49;  339, 

i3o8;  VII,  2o5,  97;  38o. 
Orithye  ,  mère  de  Zéthès   et  de 

Calais,   VI,   248;  252  ;  342  , 

2o83. 
Orléans  (Philippe  duc  d'),  frère 

de  Louis  XIV .  Voyez  Philippe  . 
Ormène,  dame  d'honneur  d'Eu- 
rydice, personnage  de  Suréna, 

VII,  455-534. 

Orode,  roi  des  Parthes,  person- 
nage de  Suréna,  VII,  455-534- 

Oronte,  ambassadeur  de  Phraa- 
tes,  roi  des  Parthes,  person- 
nage de  Rodogune^  IV,  397-5 1 1 . 

Oronte,  nom  d'homme,  men- 
tionné dans  la  Veuve,  I,  4°8, 
182. 

Orphée,  argonaute,  personnage 
de  la  Toison  d'or,  VI,  221-349; 
II,  362,  44°  >  X,  100,  2. 

Orphise,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  le  Menteur,  IV, 
174,  6o3  ;  176,  653;  220, 
i453  et  1457  et  1461;  222, 
i486;  229,  i638.  —  Person- 
nage de  la  Comédie  des  Tuile- 
ries, II,  3o3-325. 

Orsoi  (la  place  d'),  X,  260,  120. 

Orthographe  (l')  de  Corneille, 

VIII,  16.  —Ses  innovations  en 

l'orthographe,  I,  5-12. 
Osca,  ville  d'Espagne,  VI,  373, 

218. 
Osiris,  dieu   égyptien,    IV,  61, 

800. 
Ostende  (la  ville  d'),  X,  256,  62. 
Ostte  (la  ville  d'),  VII,  2l5,  355. 


Ostrogoths  (les),  VII,  io3;  108. 

Othon,  empereur  romain,  VII, 
243,  10405272,  1686.  —  Per- 
sonnage principal  de  la  pièce 
de  ce  nom,  VI,   564-657. 

Othon,  tragédie  de  Corneille,  VI, 
564-657.  —  Ses  amis  l'assurent 
que  cette  pièce  égale  ou  passe  la 
meilleure  des  siennes,  VI,  571. 
On  n'a  point  vu  de  lui  de  vers 
qu'il  ait  travaillés  avec  plus  de 
soin,  VI,  571.  —  Othon  n'est 
pas  indigne  de  Cinna.  Cor- 
neille demande  au  Roi  de  le 
faire  représenter  devant  lui,  X, 
3n,  i3  et  14. 

Othon  d'empereur) ,  père  de 
sainte  Mathilde,  VIII,  668  — 

Othon  IV,  empereur  d'Allema- 
gne, X,  211,  256. 

Oudenarde  (la  ville  d').  Voyez 
Audenarde. 

Ouver-Yssel  (1') ,  X  ,  280 ,  3 94. 

Ouville  (Antoine  le  Métel,  sieur 
d'  ) .  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve,  I, 

384- 

Ovide,  I,  74;  V,  259;  294-296; 
299  et  3oo;  3o2  et  3o3  ;  VI, 
249;  X,  124,  1  ;  —  Extrait  du 
quatrième  et  du  cinquième  livre 
de  ses  Métamorphoses,  conte- 
nant le  sujet  d'Andromède,  V, 
292-294. 

Owen  (John).  Traduction  par 
Corneille  de  sept  de  ses  épi- 
grammes  latines,  X,  46-49- 


Pachome  (saint),  VIII,  195. 

Pacius  (Jules),  cité  par  Corneille, 
1,34. 

Pacorus,  fils  d'Orode,  person- 
nage de  Suréna,  VII,  455- 
534. 

Pactole  (le),  X,  121,  102. 

Page  (un),   personnage  de  Vlllu- 


55o     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


iion,  II,  42I5  ^27. —  Person- 
nage du  Cid,  III,  104-198.  — 
Personnage  cl1 Héraclius  ,  V , 
1  i3-24i.  —  Personnage  d'An- 
dromède, V,  243-896. —  Per- 
sonnage tiOEdipe,  VI,  101- 
219.  —  Personnage  de  Sopho- 
nisbe,  VI,  447~549« 

Paix  (la),  personnage  du  prolo- 
gue de  la  Toison  d'or,  VI,  252- 
265. 

Paix  (la)  de  1659  ,  VI,  253  et 
254.  —  La  paix  de  Nimègue. 
Voyez  Nimègue. 

Palacio  confuso  (et),  comédie  es- 
pagnole, V,  414. 

Palais  de  justice  (le),  II,  4° , 
412  et  4i5;  76,  1086;  444» 
184;  X,  464;  481.  Voyez  Gale- 
rie du  Palais  (la). 

Palais  Cardinal  (le),  IV,  171, 
56o. 

Palais-Royal  (le),  IV,  171 ,  56o 
(var.).  —  Le  théâtre  du  Palais- 
Royal,  X,  495. 

Palerme  (la  ville  de),  X,  307, 
70. 

Palestine  (la),  V,  3oi. 

Palinod  (le  Puy  de)  de  Rouen; 
X,  81. 

Pallas,  VI,  597,  507;  621, 
1069.  —  Personnage  de  la 
Toison  d'or,  VI,   221-349- 

Palmis,  sœur  de  Suréna,  person- 
nage de  Suréna,  VII,  4^5- 
534. 

Pamphile,  personnage  de  fJn- 
drienne  de  Térence,  I,  ii5. 

Pan,  X,  238,  49. 

Pan  (le  grand),  nom  sous  le- 
quel est  désigné  Richelieu,  X , 
439. 

Panthée ,  tragédie  de  Tristan, 
VI,  462. 

Paon  (l'hôtellerie  du),  à  Rouen, 
X,  481. 

Pafhe  (la  reine  de),  Vénus,  V, 
329,  332. 

Paphlagonie  (la),  VII,  8. 


Paraclet  (le  Saint-Esprit),  IX, 
526,  5;  528,  27;  53i,  35. 

Paradis  céleste  (le),  IX,  14, 
ia3. 

Paradis  terrestre  (le),  IX,  i3, 
112. 

Parc  (Thérèse  du),  comédienne. 
Vers  de  Corneille  sur  elle  ou 
adressés  à  elle,  X,  141 -149; 
i54;  i63  ;  i65  et  166  ;  233 

Paris  (la  ville  de),  I,  89;  90, 
117;  120;  i35;  i38;  1425398; 
401,  49;  II,  16;  20,  64  ;  24, 
m;  53,  655;  96,  i45o;  126; 
224;  280,  1091  ;  43i;  442> 
169;  52i,  i636  et  i65o;  522, 
1681  ;  IV,  137;  140;  142, 
16  ;  i44>  60  et  67  et  71  et  72  ; 
i56,  298;  171,  557;  173, 
578;  187,  866;  293,  93;  3o2, 
236;  3o4,  269;  3o6,  3i3 ; 
3n,  393;  362,  i395;  382, 
1761  ;  412  ;  V,  4i5  ;  VI,  124  ; 
IX,  626,  2;  633,  8;  X,  47» 
7;  242,  1  ;  244,  4;  287;  295, 
87;  3o2,  37;  399;  43o;  437; 
44i  ;  442;  459;  473;  482; 
492;  494;  496;  5oo. 

Pâbis,  fils  de  Priam,  V,  i5i. 

Parisot.  Imitation  par  Cor- 
neille de  ses  vers  sur  le  canal 
du  Languedoc,  X,  23 1. 

Parlement  (le)  de  Paris.  Juge- 
ment de  Messieurs  des  re- 
quêtes en  faveur  de  Thomas  a 
Kempis,  VIII,  12. 

Parnasse  (le),  II,  522,  1661; 
VI,  122,  25;  X,  75,  23; 
i3o,  11;  i85,  2;  222,  44  ; 
335,  9;  439;  445. 

IlapoBo;.  Sens  de  ce  mot,  I,  41- 

Parque  (la),  les  Parques,  I,  220, 
1285;  23i,  1469;  II,  447» 
237;  387,  927;  410,  1399; 

m,  335,   1196;  iv,  499, 

1647;  VI,  171,  860;  VII, 

365,  1995;  X,  i38,  1;  271, 
271. 

Parthe,  les  Parthes,  III,  4°8, 


DES  ŒUVRES  DE   CORNEILLE. 


55 


543;  IV, 397;  418;  4M;  428; 
429,  4;  43o,  27  et  var.  ; 
432,  65;  439,  217;  440,  a5i 
et  262  ;  441,  271  et  283  ;  447» 
409;  4^4»  838;  472,  io5o; 
493,  1527;  494,  i553  ;  4g5, 
1573  ;  VII,  460  ;  462;  464, 
3o  ;  466,  61  et  70;  497,  835. 

Parties  du  poème  dramatique, 
I,  i3-5i. 

Pascal  (Jacqueline)  remporte  un 
prix  de  poésie,  X,  81. 

Pastor  fido  [il)  de  Guarini,  I,  3. 

Pathmos,  IX,  47,  735. 

Patrobe,    affranchi    de    Néron, 

VI,  597, 507. 

Pau  (la  ville  de),  X,  385. 

Paul  (saint),  VIII,  85,  95o  ;  94; 

100;  208,    654;   2$5,    i63a; 

445,  37;  643  ;  IX,  i63,  791; 

227;  472,  12;  548. — Passage 

traduit,  VIII,   208,  653-657. 
—    Hymne    pour  la    fête    de 

saint  Pierre  et  de  saint  Paul, 

IX,  548-55o. 
Paul  Diacre,  auteur  des  Gestes 

des  Lombards,  VI,  6;  17. 
Pauls   (les),    famille  illustre   de 

Rome,  111,452,  i536;X,  97, 

45. 
Paulin,  personnage  de  Théodore, 

V,  i-iii. 
Pauline,  fille  de  Félix  et  femme 

de    Polyeucte,  personnage   de 

Poljeucte,ll\,  463-570;  V,  i3. 
Pausanias,  roi  de  Lacédémone, 

VII,  57,  I2i3. 

Pavie  (la  ville  de),  VI,  22,  32; 

33,  307  ;  35,  38o  et  38i;  67, 

1097  >  99»  x832  et  1840. 
Pêcheur   (le),   dans  Don  Sancke 

d'Aragon.  Voyez  Nugne. 
Pégase,  V,  268;  2g5;  3oi;  358. 
Pelage  (Dom)  ,    roman  de    Juve- 

nel,  V,  4*4- 
Pelée,  argonaute,  personnage  de 

la    Toison   d'or,  VI,  221 -349- 
Pélias,   frère  d'oison,  VI,  247. 

Vovez  Pélte. 


Pélie,  tyran  d'Iolcos,  II,   343, 

45  ;  344>  62  ;  357,  333  ;  36i, 
4o3;  364,  48i;38o,  809;  VI, 
285,  702.  Voyez  Pélias. 
Pellisson  (ode  à),  X,  3i5,  1; 
3i6,  11  ;  3i8,  45  ;  3ai,  85. 
—  Corneille  l'invite  à  écrire 
l'histoire  de  Louis  XIV,  X, 
3  20  et  32i. — Lettre  à  lui  adres- 
sée par  Corneille ,  X ,  477  et 

Pélusium,  ville  d'Egypte,  aujour- 
d'hui Damiette,  IV,  19. 

Pennafiel  (comte  de),  V,  429? 
263  ;  446,  662. 

Périandre,  nom  d'homme,  IV, 
194,  1026. 

Périer  (Charles  du).  Sa  double 
traduction  en  vers  latins  des 
vers  français  de  Corneille  sur 
la  conquête  de  la  Franche- 
Comté,  X,  228  et  229. 

Périphète,  brigand  immolé  par 
Thésée,  VI,  164,  696. 

Pérou  (le),  IV,  i32. 

Pérouse  (la  ville  de),  III,  435, 
n36. 

Perpenna,  lieutenant  de  Serto- 
rius,  personnage  de  Sertorius, 

VI,  35i-445. 

Perpignan  (la  ville  de),  X,  11 5, 

114. 
Persan,  Persane,  Persans,  III, 
408,  543;  VII,  i5,  114  ;  37, 
688;   56,    1195  et  1207;  74, 
1627;  86,  1743  ;  86,  1878  et 

1894. 

Perse,  poète  latin,  VI,  3ia. 

Perse  (la),  II,  447»  227>  45°> 
3n  ;  III,  5oo,  288;  54i, 
1128  ;  V,  210,  I25i  ;  VII,  27, 
45;;  48,  967;  66,  1448;  80, 
1742;  86,  1894;  87,  1922; 
382,  36.  —  La  cour  de  Perse, 

VII,  46,  933. 

Perse,  les  Perses,  III,  478  ;  495, 
176;  5oi,  3o4;  V,  145  ;  VII, 
11,  46;  18,  245;  26,  412; 
45,  898  ;  46,  906. 


i>52     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


Persée,  fils  de  Jupiter  et  de  Da- 
naé,  X,  25g,  io5.  — Person- 
nage d' Andromède  ,  V,  243- 
396. 

Perses,  roi  de  la  Chersonèse 
Taurique,  VI,  247;  267,  246 
et  253  et  263  ;  269,  309  ;  348, 
2202. 

Pertharite,  roi  des  Lombards, tra- 
gédie de  Corneille,  VI,  1-100; 
I,  272  et  273. — Examen  de  la 
pièce,  VI,  17  et  18.  —  Mau- 
vaise réputation  que  le  public 
lui  a  faite,  VI,  5.  —  Son 
malheureux  succès,  III,  276; 
VI,  17;  128. 

Pertharite,  roi  des  Lombards, 
personnage  principal  de  la 
pièce  de  ce  nom,  VI,  1-100  ;  7. 

Petites-Maisons  (les),  hospice  de 
fous  à  Paris,  IV,  3oo,  214. 

Petit- Val  (Raphaël  du).  Son 
hommage  à  Corneille  au  sujet 
de  la  Veuve,  I,  386  et  387. 

PÉTRARQUE,  X,    l47,  60. 

Peugé,  île  à  l'embouchure  du 
Danube,  VI,  249. 

PhjEA  (la  laie),  immolée  par 
Thésée,  VI,  164,  697. 

Ph^dime,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  OEdipe,  VI,  i35, 
10;  171,  858;  190,  1319. 

Phaéton,  I,  75;    II,   390,  991; 

vu,  347, 2169. 

Pharaon,  VIII,  202; IX,  517, 11. 

Pharnabaze,  satrape  d'une  par- 
tie de  l'Asie  Mineure,  VII, 
27,  437. 

Pharsale,  I,  89;  IV,  27  et  4; 
3o,  58  ;  32,  120  ;  37,  246; 
42,  368;  44?  4oï;  56,  689; 

62,  829  ;  79,  1269  ;  81,  i3ii; 

85,  1422598,  1710;  99,  1738. 
Phase  (le),  II,  342,   25  ;  379; 

777  ;  V,  283;  292  ;  33o. 
Phébus  (le  dieu),  V,  356,  881; 

X,  75,  12. 
Phèdre,  femme  de  Thésée,  II, 

525  (var.);  X,  73,  I. 


Phéniciennes  (les),  tragédie  d'Eu- 
ripide, II,  11. 

Philandre,  personnage  de  Mé- 
lite,\,  123-253;  440>932. 

Philène,  nom  d'homme  dans  la 
Comédie  des  Tuileries,  II,  323, 
329  ;  324,  355. 

Philippe  (saint),  VIII,  5i. 

Philippe,  affranchi  de  Pompée, 
personnage  de  la  tragédie  de 
Pompée,  IV,  i-ii5. 

Philippe  duc  d'Orléans,  frère  de 
Louis  XIV,  X,  260,  120,280 
et    281,    398-408;    323,  20. 

Philippe  Auguste,  roi  de  France, 
X,  211,  253. 

Philis,  nom  de  femme,  I,  4OI> 
53;  X,  26,  40;  35,  i3;  45,  6; 
49,  3;  60,  1;  77^  65;  i5i,  4 
et  9;  i52,  2;  i55,  1  ;  i56, 
29;  157,  54;  173,  3.  Voyez 
Phylis. 

Philisbourg,  IV,  412  »  X,  3o6, 
5o  ;  307,  64  et  72  ;  322,  3. 

Philiste,  personnage  de  la  Veuve, 
I,  37i-5oo.  —  Personnage  du 
Menteur,  IV,  117-273;  I,  43. 
—  Personnage  de  la  Suite  du 
Menteur,  IV,  275-395. 

Philoctète,  tragédie  de  Sophocle, 
I,  66. 

Philon,  ministre  d'État,  confi- 
dent de  Bérénice,  personnage 
de  Tite  et  Bérénice,  VII,  i83- 
276. 

Phinée,  prince  d'Ethiopie,  per- 
sonnage d'Andromède,  V,  243- 
396  ;  I,  io3. 

Phinée  et  les  Harpies,  VI,  248. 

Phlégéthon,    I,   23o,  i465  ;  II, 

3g°>  992- 
Phocas,  empereur  d'Orient,  VIII, 

464. — Personnage  d,Héraclius, 

V,  11 3-241,  I,  61  ;    64  ;    69  ; 

76;  79  ;  93;  "5;  119;  12 f  ; 

272. 
Phocide   (la),    VI,    184,    1181; 

195,  i43o  et  1439. 
Phorbas  ,    personnage    ftAndro- 


DES    OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


>53 


mède,  non  marqué  clans  la  liste 
«les  acteurs,  X,  275. 
Phorbas,  vieillard  thébain,  per- 
sonnage  (VOEdipe,    VI,    101- 

Phormion  (le) ,  comédie  de  Té- 
rence,  I,  46. 

Phosphore,  Lucifer,  l'étoile  du 
matin,  IX,  452,  9. 

Photin,  eunuque,  chef  du  con- 
seil d'Egypte,  personnage  de 
Pompée,  IV,  i-ii5. 

Phraates,  roi  des  Parthes,  IV, 
428. 

Phradate,  fils  d'Orode,  roi  des 
Parthes,  VII,  498,  856  et  858  ; 
522,  i44^j  ^23,  1470 et  1474; 
536,  1645. 

Phryxus,  VI,  245;  247;  252; 
267,  245;  268,  296;  272, 
393;  275,  481  et  482  et  5oi  ; 
276,  5i2;  277,  535. 

Phylis,  personnage  de  la  Place 
Royale,  II,  2l5-3oi. 

Phylis,  nom  de  femme,  X,  68, 
3o.  Voyez  Philis. 

Pïerre  (saint),  VIII,  123  ;  289; 
382,  2535;  53o,  5555;IX,  i63; 
227;  53o,  29. — Hymnes  pour 
la  fête  de  saint  Pierre  et  de 
saint  Paul,  IX,  548-55o.  — 
Hymne  pour  la  Chaire  Saint- 
Pierre,  IX,  55o  et  55 1.  — 
Hymne  pour  le  jour  de  saint 
Pierre  aux  Liens,  IX,  55 1  et 
552. 

PiERRE(saint),célestin,VIII,  378. 

Pilate,  VIII,  475.  Voyez  Ponce 
Pilate. 

Pill  astre.  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve,  I, 
388. 

Pinelière  (de  la).  Vers  de  Cor- 
neille sur  sa  tragédie  à'Hippo- 
lyte,  X,  73. 

Pison,  fils  adoptif  de  l'empereur 
Galba,  VI,  582,  166;  584, 
23o  ;  585,  23g  et  240;  598, 
543;  .602,    635;    6o3,    665; 


6o5,  703  ;  607,  755;  608. 
758  et  763  et  767;  614,  883  et 
893  ;  61 5,  906  et  912  et  933  ; 
616,  944  et  958;  617,  973  ; 
618,  986  et  995  ;  620,  1047; 
621,  io5g  et  1076;  622, 
1086  et  nu;  623,  1140; 
625,  n58;  628,  1225;  629, 
12.57;  63o,  1271;  63i,  1289 
et  i3oi  et  i3o2  ;  633,  i349 
et  i35i  et  i353  ;  634,  i357  5 
636,  1400;  637,  1414  el 
i433;  641,  i5oi  ;  642,  i5ii  ; 
645,  l582  ;  646,  1627;  647, 
1646  ;  65i,  1728. 

Pitthéus,  roi  de  Trézène,  II, 
335. 

Place  (la),  la  place  Royale,  IV, 
i5o,  198. 

Place  Royale  (la),  à  Paris,  I, 
120;  II,  224;  233,  178;  IV, 
i38;  i5i,  199. 

Place  Royale  (la),  comédie  de 
Corneille,  II,  2i5-3oi.  — 
Examen  de  la  pièce,  II,   221- 

223. 

Placide  ,  fils  du  gouverneur 
d'Antioche  ,  personnage  de 
Théodore,  V,  1-111  ;  I,  62. 

Placide  (saint),  VIII,  64. 

Placidie,  tante  de  Pulchérie,VII, 
384,  88. 

Plaisir  (genre  de)  que  donne 
la  poésie  dramatique,  I,  i3. 

Plaisirs  (les)  personnifiés,  VI, 
293,  902. 

Plantin,  imprimeur,  X,  456. 

Platon,  I,  58. 

Plaute,  I,  45;  96;  i38;  377; 
IV,  283;  V,  404;  X,  455; 
457. 

Plaute  ,  un  des  complices  de 
Cinna,  III,  45i,  i49°- 

Plautine,  fille  de  Vinius,  per- 
sonnage à'Othon ,  VI,  565- 
657. 

Plautine,  confidente  deDomitie, 
personnage  de  The  et  Rérénice, 
VII,  183-276 


554     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET  ANALYTIQUE 


Pleirante,  personnage  de  la  Ga- 
lerie du  Palais,  II,  1-112. 
Pline  l'ancien,  V,  3o2;3o4. 
Pline  le  jeune,  X,  47$. 
Plutarque,    IV,  20  et  21  ;   VI, 

36i;    VII,    5;    460;  X,    i38, 

5;  491. 
Pluton,     I,     226,     i394  ;    227, 

1402;  234,  i532  et  i538; 

II,  414,  1498;  IV,  47,  47$_; 

V,  269;  272;  376,  i33o;X, 

236,  11. 
Pô  (le),  II,  436,  34;  VI,  43i, 

i6o3;  VII,  117,  236;  X, 

116,  2. 
Poème    dramatique    (Discours    de 

futilité    et  des    parties  du),  I, 

i3-5i. 

Poésie  dramatique.  Son  but,  I, 
i3  ;  16  et  17. 

Poète  (le)  est  excusable  quand  il 
pèche  contre  un  autre  art  que 
le  sien,  I,  91.  —  Son  but  est 
de  plaire  selon  les  règles  de 
son  art,  I,  g5. 

Pointes  dans  le  style,  I,  270; 
397;  II,  14. 

Poitiers  (la  ville  de),  I,  /fî  ;  IV, 
144,  58  et  60  ;  149,  170;  162, 
3g3;  174,  593;  180,  720; 
184,  807;  193,  987;  201, 
n33;  219,  i443  ;  220,  1449 
et  i456  (var.)  et  i458;  221 
(var.j;  238,  1783;  291,  36; 
294,  i34  ;  3o5,  298;  309, 
368  ;  32i,  610. 

Polémon,  roi  de  Cilicie,  men- 
tionné dans  Tite  et  Bérénice, 
VII,  216,  38i;  245,  1073. 

Polémon,  personnage  de  la  Sui- 
vante, II,  ii3-2i4- 

Polimas,  personnage  de  la  Veuve, 
I,  37i-5oo.  Voyez  Polymas. 

Pollux, argonaute,  personnage  de 
Médée,  II,  327-419  ;  I,  4fS  IV, 
4^3. 

Polyee,  roi  de  Corinthe,  VI, 
204,  i665  et  1672. 

Polyclète,  affranchi  d'Auguste, 


personnage     de    Cinna  ,    III , 
359-462. 
Polyclète,  affranchi  de  Néron, 

VI,  597, 507. 

Polyeucte,  martyr,  tragédie  chré- 
tienne de  Corneille,  III,  4^3- 
570;  I,  62;  84;  118;  122; 
273  ;  II,  337;  III,  278;  IV, 
20;  24;  i3o  ;  V,  12  ;  X,  447- 
—  Examen  de  la  pièce,  III, 
478-485.  —  Le  style  n'en  est 
pas  si  fort  et  si  majestueux 
que  celui  de  Cinna  et  de  Pom- 
pée ,  mais  il  a  quelque  chose 
de  plus  touchant,  III,  481. 

Polyeucte,  seigneur  arménien, 
gendre  de  Félix,  personnage 
principal  de  Polyeucte ,  III, 
463-570  ;  I,  59;  64  ;  V,  i3. — 
Abrégé  de  son  martyre,  écrit 
par  Siméon  Métaphraste,  et 
rapporté  par  Surius,  III,  474" 
478. 

Polymas,  personnage  de  la  Place 
Royale,  II,  2i5-3oi.  Voyez 
Polimas. 

Polynice  ,  fils  d'OEdipe ,  VI , 
159,  575. 

Polyxène  ,  personnage  de  la 
Troade  de  Sénèque,  I,  99;  IV, 
283. 

Pomone,  X,  23g,  5o. 

Pompée,  I,  89;  III,  384;  395, 
238;  409,  563  et  566;  411, 
5g4;  429,  io3o;  453,  i546  ; 
V,  3i7,  53;  VI,  614,  884  ;X, 
97,  37;  442;  475;  491.  — - 
Personnage  de  la  tragédie  de  ce 
nom,  VI,  122  ,  36.  —  Pompée 
donne  son  nom  à  une  des  tra- 
gédies de  Corneille,  mais  ne 
paraît  pas  sur  la  scène,  IV,  1- 
11 5.  —  Personnage  de  Serto- 
rius,  VI,  35i-445;  4^6. 

Pompée,  tragédie  de  Corneille, 
IV,  i-ii5;  I,  26;  84;  97; 
io3;  112;  118;  122;  273;  II, 
339;  III,  481;  483;  IV,  i3o- 
i32.  —  Examen  de    la  pièce, 


DES   ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


•  IV,  19-35.  —  Explication  du 
titre,  IV,  ai  et  22. —  Les  vers  de 
Pompée  sont  les  plus  pompeux 
que  Corneille  ait  jamais  faits, 
l\  ,  24.  —  Pompée  représenté 
à  Versailles  en  octobre  1676, 
X,  309;  3n,  3. 

Pompée  [la  Mort  de),  tragédie,  la 
même  que  Pompée.  Voyez  ce 
mot. 

Pompée  (Sextus).  Voyez  Sexte. 

Pompées  (les  jeunesu  les  fils  de 
Pompée,  IV,  56,  686. 

Pompone,  un  des  complices  de 
Cinna,  III,  45 1,  1490. 

Ponce  Pilate,  IX,  75.  Voyez 
Pilate. 

Pont  (le),  province  de  l'Asie  Mi- 
neure, IV,  62,  840;  V,  533, 
468;  542,  699;  572,  1377; 
574,  i43o. 

Pont-de-Cé  (le),  X,  106. 

Poppée  ,  femme  d'Othon ,  VI, 
583,  191  et  193;  5g5,  480; 
621,  1081;  623,  1118. 

Poppée,  mentionnée  dans  Tite  et 
Bérénice,  VII,  204,  84- 

Portugal  (le),  III,  i36,  54i  ; 
VI,  364;  X,  114. 

Potosi  (le),  X,  120,  101 

Prague,  X,  338,  99. 

PrÉ-AUX-ClERCS  (Je), IV,  171,558. 

Prévôt  (un)  dans  Cli tondre,  I, 
3i4;  3i8  (var  );  349;  356. 

Pridamant,  personnage  de  V Illu- 
sion, II,  42I_^27. 

Priscus,  nommé  par  d'autres 
Crispus,  gendre  de  l'empereur 
Phocas,  V,  i43.  Voyez  Crispe. 

Procope,  général  romain,  VII, 
382,  3i;  385,  97;  393,  3so  ; 
394,  349  ;446,  i595. 

Prgcule,  soldat  de  l'armée  de 
Rome,  personnage  à'Horace, 
HI,  243-358. 

Procule,  un  des  complices  de 
Cinna,  III,  45 1,  1489. 

Progné,  I,  78. 

Prologue,  I,  4°;  4T;  4aî  44-  — 


Prologue  des  pièces  de  ma- 
chines, I,  46  et  47-  —  Prolo- 
gue A' Andromède,  V,  3i5- 
319.  —  Prologue  de  la  Toison 
d'or,  VI,  253-265.  —  Prolo- 
gue, nom  d'un  personnage,  I, 
45. 

Prométhée,  II,  409,  i386. 

Prononciation  de  nos  e,  I,  7;  9; 

—  de  la  double  II,  I,  1 1  •  — 
de  nos  f,  I,  7  et  8. 

Proserpine,  I,  227,  1404  ;  23o, 
i45i;  VII,  358,  1818  ;  X, 
236,  11. 

Pkotatiques  (personnages),  1, 46. 

Prusias  ,  roi  de  Bithynie,  per- 
sonnage de  Nicomède,  V,  495- 
5g3  ;  I,  61;  64;  69;  80;  n5. 

Psaumes  de  David,  traduits  en 
vers  français  par  Corneille. 
Voyez  tome  IX,  p.  639  et  640. 

—  Passages  de  psaumes,  tra- 
duits par  Corneille,  VIII,  129, 
1771-1775;  i33,  i838et  1839; 
226;  227;  242,  i35oet  i35i; 
4a3,  3338-3340. 

Psaumes  pénitentiaux  (les  sept), 
traduits  en  vers  français  par 
Corneille,  IX,  245-299. 

Psyché ,  tragédie-ballet  de  Cor- 
neille, VII,  277-370. 

Psyché,  V,  356,  882. — Person- 
nage de  la  pièce  de  ce  nom, 
Vit,  277-370. 

Ptolomée  XI  ou  Aulétès,  IV, 
32,  i34- 

Ptolomée,  XII  roi  d'Egypte,  fils 
du  précédent,  personnage  de 
Pompée,  IV,  i-n5;  19;  21  et 
22;  23  ;  I,  26. 

Pulchérie  ,  fille  de  l'empereur 
Maurice,  personnages  d'Héra- 
clius,  V,  ii3-24i;  I,  63;  n5, 
119; 121. 

Pulchérie  ,  comédie  héroïque  de 
Corneille,  VII,  37i-453.  — 
L'auteur  demande  au  Roi  de  la 
faire  représenter  devant  lui,  X, 
3i 1,  i5. 


')56  TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


Pulchérte,  impératrice  d'Orient, 
personnage  de  la  pièce  de  ce 
nom,  VII,  371-453. 

Pitre  (l'abbé  de).  Lettres  à  lui 
adressées  par  Corneille,  X , 
478-482;   482-484;  485-487; 

489-492  ;  493"496-. 
Purgation  des    passions,  I,  23; 

52  et  suiv.;  V,  5o8  ;  X,  486. 

Puteanus  (Erycus,  Erycius),  en 
français  Henri  Dupuis,  en  fla- 
mand van  de  Putte,  VI,  6;  17. 
—  Extrait  de  son  Histoire  de 
l'invasion  de  l'Italie  par  les  Bar- 
bares (livre  II,  n°  i5),  conte- 
nant le  sujet  de  Pertharite,  VI, 
14-16. 

Puy  de  Palinod  (le)  de  Rouen , 
X,  8r,  10. 

Pylade,  I,  106;  VII,  394,  325. 

Pymante,  personnage  de  Clitan- 
dre,  I,  255-369. 

Pyrandre,  nom  d'homme,  IV, 
207,  i25o;  208,  i25i;  219, 
1446»  220,  i447  et  x457- 

Pyrénées  (les),  III,  285,  48;  VI, 
38i  (45o);  43o,  1594;  X,  200, 
93. 

Pyrrhus,  X,  259,  io5.  —  Per- 
sonnage de  la  Troade  de  Sénè- 
que,  IV,  283. 

Pythagore, X,  100, 1. 

Pythias,  personnage  de  F  Eunu- 
que de  Térence,  I,  102. 

Python  (le  serpent),  II,  3go, 
987. 


Quatrains,  X,  36;  47;  49;  57; 
60;  86;  218;  219.  —  Quatrain 
pour  le  Christ  de  Saint-Roch, 
attribué  à  Corneille,  X,  377. 

Qutntilian,  Quintilien,  auteur 
des  Déclamations,  II,  122. 

QuATRE-NATiONs(la  fontaine  des), 
à  Paris,  X,  244. 

Quinault,  X,  493. 


Quirinal     le  mont),     V,    579 
i55o. 


R 


Rahab  (la  ville  de),  IX,   107,  9. 

Raimont  (saint),  VIII,  432. 

Rambouillet.  Voyez  Julie. 

Ramire  (don),  en  possession  du 
trône  d'Aragon,  V,  4i3. 

Ranquet  (Elisabeth).  Son  épi- 
taphe  par  Corneille,  X,  i33 
et   i34- 

Raphaël  (l'ange),  IX,  562,   14. 

fPoc6u[xoç.  Sens  de  ce  mot,  I,  33 
et  34. 

Ravaud  (Abraham) ,  dit  Remius. 
Sa  traduction  en  vers  latins 
du  Rcmerciment  de  Corneille  au 
cardinal  Mazarin,  X,  94-99« 

Raymond  de  Moncade  (don). 
Voyez  Moncade  (don  Ray- 
mond de). 

Récit,  I,  78.  Voyez  Narration. 

—  L'action  préférable  au  récit, 
I,  262.  —  Récit  pour  le  ballet 
du  château  de  Bicêtre,  X,  58. 

Reconnaissance  dans  le  poëme 
dramatique,  I,  70.  Voyez 
Agnition. 

Reine,  d'Aragon  (la),  personnage 
de  Don  Sanche.  Voyez  Léonor  . 

Reine  de  Castille  (la),  person- 
nage de  Don  Sanche.  Voyez 
Isabelle. 

Remercîments  :  au  Puy  de  Pali- 
nod  de  Rouen,  X,  81;  —  au 
cardinal  Mazarin,  X,  92-99  ; 

—  au  Roi  pour  la  pension  ac- 
cordée au  poëte  en  i663,  X, 
i75-i8i. 

Remius  (Abrahamus).  Voyez  Ra- 
vaud (Abraham). 

Rémus,  X,  443. 

Renaudot.  Il  fait,  dans  un  nu- 
méro extraordinaire  de  la  Ga- 
zette, le  récit  de  la  tragédie 
d'Andromède,  V,    277, 


DES   ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


557 


Renaudus  (Theophilus),  jésuite, 

Rennes  (la  ville  de),  II,  4^9,  97. 
Renommée  (la),  X,  258,  97  ;  266, 

220. 
Représentation.    Sa    durée,    I, 

3o. 
Revel  (Charles- Amédée  de  Bro- 

glio,  comte  de),  X,  271,  270. 
Rhadamante,  II,  4*3,  147^. 
Rhé  (l'île  de),  X,  69,  43. 
Rhimbergue    (la  place   de)j    X, 

260,  121. 
Rhin  (le),  II,  436,  34;  III,  285, 
5o;  VII,  246,  1101  ;  X,  307, 
66;  335,  11;  257,  70;  260, 
118;  264,  201;  266,  218  et 
228;  275,  342;  281,  4°9  et 
420;  3o3,  57. — Allusion  aux 
vers  sur  le  passage  du  Rhin, 
X,  335,  11  et  12. 
Rhône    (le),    I,    90;    VI,    419, 

i338;  X,  116,  2. 
Riche   (la  mort    du    mauvais) , 

VIII,  562. 
Richelieu  (le  cardinal  de),   V, 
142  ;  X,  69,  42  ;  70,  55  et  61  ; 
71,  76;  87;  4o3;  410;  428. — 
Épître  dédicatoire,  à  lui  adres- 
sée, de  la   tragédie   d'Horace, 
III,  258-261. —  Corneille  lui 
dit   qu'il  tient  de  lui  tout  ce 
qu'il  est,  III,    258; — qu'il  a 
l'honneur  d'être  à  Son  Emi- 
nence,  III,  25g.  —  Sonnet  en 
son  honneur,  X,  32.  —  Qua- 
train sur  lui,  X,  86.  —  Epi- 
taphe  du  cardinal,  attribuée  à 
Corneille,  X,  35  2.  — Corneille, 
pour  lui  être  agréable,  veut  ré- 
pondre aux  Sentiment  s  de  l'Aca- 
démie sur  le  Cid,  X,  43 1.  —  Il 
est    désigné    sous   le   nom   de 
grand  Pan,  X,  4^9- 
Richelieu  (l'hôtel  de),  X,  401. 
Rié  (l'île  de),  X,   109. 
Ris  (les),  X,  33g,  120. 
Robert  (dom)  de  Sainte-Marie, 
feuillant,  X,  436. 


Robortel,  commentateur  de  la 
Poétique  d'Aristote,  I,  33;  59; 
III,  86. 
Rochelle  (la  ville  de  la),  X,  69, 

45  ;   109,   5i;  110. 
Rocboi,  III,  473;  IV,  412. 
Rodelinde  ,  femme   de  Pertha- 
rite,  personnage  de  Pertharite, 
VI,  1-100;  III,  276. 
Rodogune,  princesse  des  Partîtes, 
tragédie  de  Corneille,  IV,  397- 
5ll;  411;  416;   I,  27;  60;  62; 
63;68;70;8o;97;99;ii3;ii5; 
116;    121;   272  ;  III,  382;  V, 
144;  148;    i53;  298;  X,    io3, 
10.   —    Examen    de  la   pièce, 
IV,   418-427.  —   Explication 
du  titre.    IV,   416.  —  L'au- 
teur est  porté  à  préférer  Rodo- 
gune  à  ses  autres  tragédies,  IV, 
420.  —  Rodogune  représentée 
à   Versailles  en  octobre  1676, 
X,  309;  3n,  11. 
Rodogune,  sœur  de  Phraates,  roi 
des  Parthes,  personnage  de  la 
tragédie  de  ce  nom,  IV,  397- 
5n;  I,  19;  39;  63;  69. 

Rodogune,   tragédie  de    Gilbert, 

IV,  5o9-5ii. 
Rodomont,  roi  d'Alger,  person- 
nage   du    Roland  furieux ,    X, 

62,  11.  —  Au  figuré,  II,  464 

(var.). 
Rodrigue   (don) ,  surnommé   le 

Cid ,  personnage  principal  de 

la  tragédie  du  Cid,  III,  1-24 1  ; 

I,   27  et  28;  57;   60;  62;  65; 

96  ;  VI,  122,  34. 
Rogeb  ,    personnage   du   Roland 

furieux,  X,  62,  l3. 
Roi  de  CoRiNTHE(le),  personnage 

de  Médée.  Voyez  Créon. 
Roi   (le) ,    personnage    du    Cid. 

Voyez  Fernand  (don),  roi  de 

Castille. 
Rois  (le  livre  des).  Voyez  Bible. 
Roland,  neveu  de  Charlemagne. 

HI,8i. 
Romain,  III,  258;  280;  284,  î5 


558     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


302,481  et483;  3o8,  6oi;324, 
978;  334,  1181;  339,  1317; 
344,  i4i3;  354,  i685;  566, 
1701;  IV,  20;  26;  34,  193; 
85,  i4i5  et  1416;  96,  1659; 

V,  56,  9o5;  5i8,  i56;  5ig, 
192;  520,  2o5  et  218;  524, 
296;  527,  353;  539,  5g4 ; 
55o,  876;  556,  1010;  589, 
1764;  VI,  362;  366,  45;  384, 
5o3 ;  385,  526;  386,  571; 
398,  833  et  842;  4°2»  943; 
4o3,  963  ;  4L3,  n85  et  1194; 
416,  1242;  42Ii  i383;  429, 
i555;  43i,  1624; 436,  1715; 
469;  5i2,  983;  517,  1097; 
534,  i483;  587,  287;  626, 

1184;  VII,  m,  475  229, 
689  ;  466,  70. 
RoMAiJVE,  Romaines,  III,  427, 
978;  494,  i5o;  284,  24et  25; 
286,  72  et  84  ;  3o8,  601  ;  324, 
984;  IV,  69,  992;  98,  1725; 

VI,  374,  238;  387,  583;  3g6, 
790;  398,  822;  464;  VII, 
23o,  727;  271,  1671. 

Romains  (les),  III,  292,  238; 
294,  285;  297,  354;  327, 
io5o;  332,  1128;  347,  i49°; 
348,  i4g5  ;  388,  80;  389,  89; 
3gi,  i56;  393,  187;  394, 
227;  3g6,  269;  4o3,  398; 
408,  544;  411,  599;  428> 
1000;  437,  1187;  444,  i359; 
453,  i546;  4g5,  176;  544, 
1209;  IV,  20;  26;  3o,  5g;  35, 
212;  48,  5i2;  62,  828;  73, 
iif2;  75,  1167;  89,  i5ai; 
p5,  i638;  V,  5o3;  5o4;  5o6; 

JO7  ;    5l2,     19;    5l3,    49  i    ^22, 

253  ;  524,  289  et  293  ;  539, 
6o3  et  618;  542,  674;  55i, 
914;  567,  i25o;  568,  1^89; 
571,  i36i;  576,  1472;  578, 
i5t5;  588,  1738;  592,  1825; 
5g3,  i854;  VI, 359;  367,  55; 
373,  219;  376,  296;  377, 
338  et  34o;  38o,  420;  384, 
517;   387,    &75;    389,    647; 


400,    881;    4°2,    934>    42°» 
i358  ;  43 1,  1 619  ;  44i >  i83i 
443,  1879;   444,   i9°4;    yl 
464;  465;  473,   5;   474,   18 
475,  45;  481,  198;  482,  222 
483,    253;     485,    3o2;    487 
352;  49°,    438;    495,   557 
Soi,  5i4;  5o8,  869  et    888 
510,932;     5n,    952;    5i2 
973;    5i3,  ioo5 ;   5i6,  1084 
517, 11 00;  5i8, 11 21  et  11 29 
524,   1247;  528,   i345;   532 
i435 ;  54i,  1623; 542,  i653 
543,  1666; 546,    1742;   583 
2o3  ;    587,    295  ;  596,   5o2 
65o,  1268;  656,  i8ii;VII,5 
n5,  181;  116, 196;  117,  216 
118,247;  139,739; 140,752 
24i,  999;   244,   io55;   247 
1129;   4°8,    118;  49°,  670 
494,  745  et  750  et  757  et  764 
5oi,    923;    5i3,  1219;   517 
i3o8;  522, i443; 527, i568 
X,  214,  3o4;  257,   71;   259 
112;  264,  189;  492. 

Roman  (le).  Il  n'a  point  les  con- 
traintes du  théâtre ,  1 ,  84  et 
85. 

Romances  espagnols  sur  le  Cid, 
III,  87-90. 

Rome,  I,  89;  118;  120;  i38;  III, 
280;  282;  284,  20  et  33;  285, 
68;  286,73  et  80  et  88  ;  290, 
195  ;  292,  229  et  232  et  236  et 
239;  293,  256;295,332;  297, 
347;  298,  371  et  383  et  387; 
399,  /\02  ;  3o2,  466  et  467  et 
480  ; 3o3, 498  ;  3o6, 565  ;  309, 
63o  et  646;  3io,  666;  324, 
988  et  994  et  997  et  1000; 
323,  ioi4;  326,  1024;  328, 
1062  et  io65  ;  33o,  1091  et 
1 100  et  1101;  332,  n32  et 
1140  etn43;  334,  1177  et 
1180;  335,  1217;  336,  1220; 
337,  1258;  339,  i3oo  et  i3oi 
et  i3o2  et  i3o3  et  i3o4;  348, 
1499  et  1507  et  i5n;  349, 
1626  et  i532;35i,  i58g  ;  352, 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


559 


i63o;353,  i655  ;  354,  1684; 
355,  1700  et  1706;  356,  1728 
et  1743  ;  357,  1755;  358  (var.); 
38o;  384;  389,  no;  392,  i65 
et  178;  393,  196;  394,226; 
396,  259  ;  3g6,  368  ;  4°3,  400; 

404,  421  et  422;  4°5>  4^i  et 

461;  406,  470  et  481;  4°7> 

502  ;  4°8,  522  et  526;  4°9, 
549  et  565  ;  4IO>  570  et  589; 
41 1,599  et  606  ;  4ia>  623;  4i3, 

65i  et  655  ;  4i4,  ^72  et  686; 
4i5,  6g5  ;  4ID>  7X8  et  720; 
417,  743  ;  418,  7545421,  847; 
423,  886;  428  (var.);  429, 
io5o;  436,  1 165  et  1173  ;  437, 
1186;  438,  1221;  442»  i3o5; 
45i,  i5i2;  452,  i5i8;  4^2> 

1765;  494,  l55;  4g5,  169 
et  181;  496,  2o3  ;  497»  228; 
5o5,  390;  5io,  5i3;  548, 
i3o4;  552,  1420  et  1423  ;  IV, 
11  et  12;  3o,  59et7o;32,  i33; 
34,  178  et  193  et  201;  39, 
291;  43,  389;  48,  5o5  ;  5i, 
577;  56,  694;  61,  811;  62, 
838;  64,  883;  65,  923;  66, 
93o;  67,  964;  69,  1018;  70, 
1037;  71,  io56:  73,  1107; 
74, 1122; 75,  1174;  80,  1278 
et  1299  et  i3o6  ;  81,  i3i7  ;  84, 

1407;  97»  l699  et  I7°°l  99> 
1748;  23i,  i658;  292,70; 
294,  140;  309,  364;  39,  524, 
677;  V,  34,  376;  39,  3o5; 
46,  664;  55,  871;  56  go3  ; 

89»  i^39;  95,  i759»  3o2, 

503  ;  5o6 ;  5o8  ;  5i2 ,  24;  5i3, 
57  et  58  ;  5i8,  i55  et  157; 
519,  175  ;  523,  270  et  276; 
524,  297;  526,  3i5  et  323; 
527,  343  et  346  et  354;  536, 
53i  ;  537,  557  et  56o  et  567  ; 
539,  610;  54o,  627  (var.)  et 
643;  54i»  646  et  660;  542, 
fi79>  543,  7°4;  544,  743; 
545,  755,  546,  766;  547? 
800;  55o,  877  et  887;  55 1, 
903  et  908  ;  55a ,  926  et  927, 


553,  956  ;  554 ,  981  et  983  et 
989  ;  556,  1028  et  io3i  ;  563 
n56;  564,  1182;  568,  1277; 
568,  1295  et  1298;  569,  i3o9 
et  i322;  572,  1283  et  1287; 
573, 1392  ;  574,  i42o  et  i427  ; 

575,  i432  et  1439  et  i456; 

576,  1464;  578,  i5o5;  579, 
i545  ;  582,  1602  et  i6io;583, 
1616  et  1627;  587,  1715  et 
1725;  589,  1749  ;  590,  1772e! 
1787  ;  VI,  35g;  366,  32  et  46; 
367,  49;  370,  i5i;  375,  166 
et  175  ;  375,  288  ;  377,  345  ; 
379,  374;  38o ,  421;  38i, 
444;  384,  5o6;  386,  56g; 
388,  63i  ;  389,  646;  3g6, 
783;  400,  873  et  894;  4oit 
922;  4°2,  927  et  929  et  g36 
et  940;  4o9,no5;4io,  1139; 
411,  n5o;  4i3,  1193;  419, 
i32i  et  i324  et  i338;  42°> 
1357  et  1362;  424>  1464  ; 
43i,  i6ioet  1618;  432, 1640; 
44 rj  1840  ;  442,  1857  et  1862  ; 
444,  1900;  445,  1912  ;  464; 
465;  472;  479,  i57  et  160; 
480,  173  et  176  et  186;  484, 
264  ;  487,  34i ;  499, 669  ; 5oo, 
674  et  688  et  698;  5oi,  716; 
5n,  970;  5i4,  1022;  5i5, 
1049;  52o,  1157;  526,  1289; 
528,  1324  ;  533,  i445  et  1467; 
537,  i54i  ;  538,  1577;  541, 
i63i  ;  544,  1691;  574;  577, 
47  ;  58o,  122  ;  585,  232  ;  600, 
602;  601,  609;  602,  65o  et 
65i;  612,  849  et  853;  6i3, 
871  et  874;  614,895  et  898; 
6i5,  go5  et  906  ;  617,  973  et 
975;  618,  994;  620,  1048; 
621,  1060;  63o,  1267;  VII, 
m,  79;  114.  149;  ir8,  248 
et  255;  120,  3i2;  124,  399; 
125,  4<>9;  J34>  634  et  635; 
139,  745;  i5o,  1026;  169, 
i475;  181,  1778;  200;  2o5, 
n4;  207;  164;  210,  249;  214, 
344;  2i5, 364;  317,  411;  218, 


56o     TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


434  ;2  2i,5io;2  22,  536;  229, 
687;  23i,  744;  235,  844;  236, 
860;  241,  983  et  988  et  989  et 
993;  243,  io34;  244»  io52  et 
io65  ;  245, 1078  et  1089  ;  25o, 
i2o5;  25i,  1209;  256,  i332 
258,  1397  ;  2^2>  I45i  ;  264 
i5oi ;  268,  1611; 169,  2640 
271, 1672  ;  272,  1687  et  x^97 
273,  1711  et  17205274,  1743 
275, 1751  et  1762;  418,  934 
465,  36;  /\66,  70  et  75;  498 
85o;  499,  870;  5oo,  894 
5i3,  1221;  X,  95,  10  et  12 
98,  59;  2i3,  298;  259,  102 
et  108;  268,  252;  338,  100 
441;  4^8.  —  Les  deuxRomes 
VH,  116,  193. 

Romule,  Romulus,  III,  285,  52 
357,  1756. 

Rondeaux,  X,  79  et  80;  174. 

Ronsard,  I,  i36;  X,  117,  3i. 

Roscius,  comédien  romain,  dési- 
gnant l'acteur  Mondory,  X, 
68,  34. 

Rosélie,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  la  Veuve  ,  I,  408, 
182. 

Rosidor,  personnage  de  Clitan- 
dre,  I,  255-369. 

Rosine  ,  personnage  du  Ve  acte 
de  F  Illusion,  ne  paraissant  pas 
sur  la  scène,  II,  434  (var0; 
5o7~5i8;  520  (var.);  524-527 
(var.). 

Rotrou  (Jean).  Son  hommage  à 
Corneille  au  sujet  de  la  Veuve, 
I,  38i-383.  —  Lettre  apo- 
cryphe de  Corneille  à  lui,  X, 
5o3  et  5o4. 

Rouen  (la  ville  de),  I,  117;  X, 
437;  438;  442;  448;  4^2; 
457-459;  465;  47°;  478; 
481;  482;  485;  489;  493. 
—  L'archevêque  de  Rouen. 
Voyez     Harlay    de    Champ - 

VALLON 

Rouge  (la  mer;,  IX  ,  5t6,  3. 
Rue     (le     P.    de    la),    jésuite. 


Traduction  par  Corneille  de 
ses  vers  latins  :  sur  les  vic- 
toires de  1667,  X,  192-217; 
—  sur  les  victoires  de  1672, 
X,  252-284. —  Traduction  en 
vers  latins  par  le  P.  de  la 
Rue  des  vers  français  de  Cor- 
neille sur  la  conquête  de  la 
Franche -Comté,  X,  226.  — 
Son  épître  dédicatoire  à  Cor- 
neille, X,  378-383.  —  Ses 
vers  sur  la  mort  de  Charles 
Corneille ,  troisième  fils  du 
poète,  X,  383-385. 

Rufus  (Virginius),  commandant 
en  Germanie,  VI,   6i3  ,  865. 

Ruiter,  amiral  hollandais,  X, 
3o6,  47. 

Rutile  ,  un  des  complices  de 
Cinna,  III,  4^1,  1489. 

Rutile  ,  soldat  romain  ,  per- 
sonnage ai  O thon ,  VI ,  564- 
657. 

Piyer  (Pierre  du).  Ses  hommages 
à  Corneille  au  sujet  de  la 
Veuve,  I,  383;  384. 


S  (suppression  de  P),  1,8.  —  S 
se  change  en  z  après  é,  1,  10» 

—  Emploi  de  la  grande  f\  ses 
quatre  prononciations,  I,  6;  8. 

—  Emploi  de  la  petite  s,  I,  8. 
Saeaoth,  IX,  127,  8. 

Sabine,  femme  d'Horace  et  sœur 
de  Curiace ,  personnage  d'Ho- 
race, [II,  243-358  ;  I,  4;  86; 
IV,  424;  X  441. 

Sabine,  personnage  du  Menteur, 
IV,  117-273. 

Sabine,  nom  d'une  Romaine 
mentionné  dans  Tite  et  Béré- 
nice, VIL  240,  972. 

Saint-Benoît  (Tordre  de\  VIII, 
98. 

Saint-Evremond.     Lettre  à    lui 


HES  OEUVRES    DE   CORNEILLE, 


r)6i 


a  dressée  par  Corneille,  X, 
497-499-  —  Sa  réponse,  X, 
499   et  5°0* 

Saint-Germain-en-Laye,  I,  2y3; 
X,  199,  84;  240,  66. 

Saint-Germain  (le  faubourg),  II, 
57,  736;  443,  176. 

Saint-Innocent  (secrétaire  Je), 
II,  442,  173. 

Saint-Jean-d'Angéli  (  la  ville 
de),  X,  107. 

Saint-Lô  de  Rouen  (le  prieuré 
de),  X,  461  ;  466  ;  472. 

Saint-Malachie  (clom  Gabriel 
de),  traducteur  des  Epures  de 
saint  Bernard,  X,  122. 

Saint-Omer  (la  ville  de),  X,  307, 
71;  329,  47. 

Saint-Paul  (Cbarîes-Paris  d'Or- 
léans, comte  de),  plus  tard  duc 
de  Longueviîle,  X,  208,  209. 
Voyez  Longueville. 

Saint-Roch  (quatrain  pour  le 
Christ  de),  attribué  à  Cor- 
neille, X,  377. 

Saints.  Hymnes  pour  la  fête  de 
tous  les  saints,  IX  ,  568-572. 

Sainte.  Hymnes  pour  une  sainti- 
ni  vierge  ni  martyre,  IX,  5 96- 

59B. 
Sainte-Baume  (la),  VIII,  61. 
Sainte-Geme  (dom  Gabriel  de), 

traducteur  d<  s  Épitres  de  saint 

Bernard,  X,  122. 
Sainte-Marie  -  des-Champs  ,   où 

était  curé  un  oncle   de   Cor- 
neille, X,  433  ;  4^7. 
Saintks.  Voyez  Xaintes. 
Saintonge.    Voyez   Xaintonge. 
Salart  (le  chevalier  de),X,  271, 

272. 
Salins  (la  ville  de),  X,  296,  102. 
Salle  (le  marquis  de  la),  X,  271, 

269. 
Salmonée,  VI,  247. 
S\lomon,  VIII,  584,  94;  IX,  3o, 

425. 
Salvidien,    Romain    mentionné 

dans  Cinna,  111,437,  1202. 
Cornftu.e,  X 


Samaritaine    (la)  de  l'Évangile, 

VIII,  280. 

Samaritaine  (fontaine  de  la),  à 
Paris,  II,  443,   178. 

Samuel,  VIII,  261;  263,  74. 

Sanche  fi"1  Aragon  (Don),  comédie 
héroïque  de  Corneille,  V,  397- 
494;  I,  25  ;  44;  101  ;  116  et 
117;  272. — Examen  de  laipièce, 
V,  414.416.  —  Corneille  ex- 
plique et  défend  le  titre  de  co- 
médie héroïque  qu'il  lui  a  donné, 
V,  4°4-4 IO-  —  D°n  Sanche 
eut  d'abord  grand  éclat  sur  le 
théâtre,  mais  le  refus  d'un  il- 
lustre suffrage  dissipa  les  ap- 
plaudissements qu'il  avait  re- 
çus à  Paris  ;  il  lut  relégué  dans 
les  provinces ,  où  il  conserva 
son  premier  lustre,    V,  4i5. 

—  Corneille  envoie  cette  pièce 
à  M.  de  Zuylichem  ,  X  ,  453- 

,  457. 

Sanche  (don) ,  personnage  prin- 
cipal de  Don  Sanche  d'Aragon, 
où  il  figure  sous  le  nom  de 
Carlos,  V,  397-494;  I?  loi. 

Sanche  (don) ,  personnage  du 
Ciel,  III,  1-241  ;  I,  96;  11 5. 

Santeul  (Jean-Bci ptiste) ,  cha- 
noine de  Saint- Victor.  Ses 
Hymnes  de  saint  Victor  tra- 
duites en  vers    par  Corneille, 

IX,  607-612. —  Sa  traduction 
en  vers  latins  :  des  vers  français 
de  Corneille,  sur  la  conquête 
de  la  Franche-Comté,  X,  227; 

—  d'un  passage  de  Tite  et  Bé- 
rénice^ appliqué  au  départ  du 
Roi  pour  l'armée,  en  1672,  X, 
247*  —  Imitation  par  Cor- 
neille :  de  sa  Défense  des  fables 
dans  la  poésie  ,   X,     234-241; 

—  de  deux  inscriptions  latines 
pour  deux  fontaines  de  Paris, 

X,  242-244;  —  de  ses  vers 
latins  sur  la  libéralité  du  Roi 
envers  les  marchands  de  Pa- 
ris, X,    287-298;  —   de   son 

36 


J62     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


inscription   pour  l'Arsenal   de 
Brest,  X,  33i-333. 
S  antillane  (marquis  de),  V,  429, 

262  ;  44^i  662. 
Saragosse  (la  ville  de),  V,  41 3. 
Sardaigne  (la),  3o6,  48. 
Sarrasins  (les),  VIII,  673. 
Sarrau    (Claude),  conseiller  du 
Roi  en  sa  cour  de  parlement. 
Lettre  latine  qu'il  écrit  à  Cor- 
neille, X,  438-44° • 
Satan,  II,  472,  740. 
Saul,  VIII,  328. 
Sault  (François-Emmanuel  com- 
te de),  X,  271,  270. 
Satjmur  (la  ville  de),  X,  107. 
Savoie  (la),  X,  69,  49- 
Sayavèdre  ,  personnage   du   ro- 
man espagnol  intitulé  Gusman 
(TAlfarache,  II,  444,  186. 
Scaltger  (Jules-César),  II,  117. 
Scéoase,  paysan  de  Leuctres ,  I, 

55;  V,4o6. 
Scènes  (liaison  des),  I,  3;  101  et 
suiv.  —  Nombre    des  scènes, 
I,  108. 
Schenk    (le    fort     de).    Voyez 

Skeink. 
Scipion  ,  le  premier  Africain,  V, 
53g  ,  604  ;  542,  675  ;  VI,  468, 
472;    484?  262;    487,   353; 
497,    602;    5oo ,   689;    5i2, 
987;  5i4,    1024;  520,  1149; 
532,  1420;  534,  1499;  536, 
i5i8;  544,  1690;  547,  1777 
et  1785  ;  548, 1806;  549, i8i5. 
—  Personnage    de  la    Sopho- 
nisbe  de  Mairet,  VI,  460. 
Scipion  Émilien,  III,  260. 
Scipion,  père   de  Cornélie,  IV, 

69>  991- 
Scipion  (Métellus),  IV,  56,  686. 
Scipions  (les),  IV,  70,   io35;  X, 

97'  44-  m 

Sciron,  brigand  tué  par  Thésée, 
VI,  164,  697. 

Scuoéry  (Georges  de),  VI,  462; 
X,  43 1.  —  Son  homni  âge  à  Cor- 
neille, au  sujet  delà  Veuve,  I, 


379.  —  Vers  que  lui  adresse 
Corneille  sur  ses  tragi-comé- 
dies de  Ligdamon  et  Lidias  et 
du  Trompeur  puni,  X,  57  ;  61 . 
—  Lettre  apologétique  de  Cor- 
neille en  réponse  à  ses  Obser- 
vations sur  le  Cid ,  X  ,  399 
407. 

Scudéry  (Mlle  de),  X,  i5i. 

Scythe  (le),  les  Scythes.  II,  38o, 
812;  III,  54i,  1 128;  VI,  247; 
270,  33i  ;  VIII,    275,    1755. 

Scythie  (la),  II,  369,  577;  385, 
90i;VI,  273,  437;  348,  2202. 

Seguier  (Pierre),  chancelier  de 
France.  Epître  dédicatoire, 
à  lui  adressée,  de  la  tragédie 
d' Héraclius ,  V,  141-143.  — 
Obligations  que  lui  a  Cor- 
neille, V,  141  et  142.  —  Les 
Muses  ont  trouvé  chez  lui  la 
même  protection  qu'elles  ren- 
contraient chez  Richelieu,  V, 
142.  —  Protecteur  de  l'Aca- 
démie française,  X,  411» 

Seine  (la),  1,  90;  II,  436,  34; 
III,  98 -,473;  VI,  259,  i25; 
263,  209;  VII,  117;  226;  X, 
116,  7;  242,  1;  244,  1;  339, 
114. 

Séleucie,  ville  de  Syrie,  IV, 
428;  VII,  462,  463,  6. 

Séleucus,  fils  de  Démétrius  Ni- 
canor  et  de  Cléopatre ,  per- 
sonnage de  Rodogune,ÏV,  397- 
Sll;  423;  425;  426;  I,  79  ; 
80,  99,  100. 

Séméi  injurie  David,  VIII,  410. 

Semiramis,  VII,  439,  i45o  et 
i45i. 

Sémire,  personnage  de  Pststrée, 

iv,  354, 1243. 

Sénèque  le  philosophe,  V,  141. 
—  Extrait  du  livre  I  (cha- 
pitre ix  )  de  son  traité  de  La 
Clémence  ,  contenant  le  sujet 
de  la  tragédie  de  Cinna,  III, 
373-375. —  Allusion  à  un  pas- 
sage  de   ses    lettres,  faite  par 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


565 


l'auteur   de    l' Imitation,  VIII, 
n5,  1476-1478. 

Senèque,  poëte  tragique,  I,  21 
42  ;  99;    107;    II;   121  ;  333 
334;  338;  III,  274;  IV,  i3o 
i3i ;    282;  V,  3io;  VI,  129, 
249;  25o;X,45o;  456. 

Sentences  morales  dans  lepoëme 
dramatique,  I,  18. 

Sentiments  dans  le  poëme  dra- 
matique, I,  39. 

Sentiments  de  /' Académie  fran- 
çaise sur  le  Cid,  X,  43 1- 

Septime  ,  tribun  romain  à  la 
solde  du  roi  d'Egypte,  person- 
nage de  Pompée,  IV,  i-ii5. 

Sérail  (le),  II,  448,  270. 

Séraphins  (les),  IX,  127,  7. 

Serment  (Mlle),  X,  i5o,  1 5 1,173. 

Sertorius ,  tragédie  de  Corneille, 
VI,  35 1-445;  466.  —  N'a  point 
déplu ,  V 1 ,  3  5  8 .  —  Représentée 
à  Versailles  en  octobre  1676, 
X,  3o9  ;  3ii,  11.  —  Cor- 
neille demande  à  l'abbé  de  Pure 
son  sentiment  sur  cette  tragé- 
die, X,  490-492. —  Louanges 
que  lui  donne  Chapelain,  X, 
496  et  497. 

Sertoritjs,  général  du  parti  de 
Marius  en  Espagne,  person- 
nage principal  de  la  pièce  de 
ce  nom, VI,  35i~445;  X,  491- 

Serviliens  (les),  illustre  famille 
de  Rome,  III,  452,  i535. 

Servilitjs  Cjepio  (Quintus),  VI, 
36o  ;  38i,  439. 

Sévère,  chevalier  romain,  favori 
de  l'empereur  Décie  ,  person- 
nage de  Poljeucte  ,  III,  463- 
570  ;  I,  61. 

Séville,  I,  120;  III,8o;  97598; 
104  ;  140,  617;   V,   422,  79; 

428,    2  25. 

Sexte,  Sextus  Pompée,  III,  435, 

n35. 
Sicile  (la),  I,  90  ;  III,  412,  633. 

—  Les  mers  de  Sicile,  X,  3o6, 

45. 


SlDON,  VIII,   269,   191. 

Sigismond,  roi  des  Bourguignons, 

VII,  160,  1270;  i6i,  i3i2. 
Sillace,  lieutenant  d'Orode, per- 
sonnage de  Suréna,  VII,  455- 

534. 
S'dves  (les)  de  Stace,  X,  443. 
Silvie,  personnage  d'une  tragi- 
comédie  de  Scudéry,X,  57,  1. 
Siméon.  Son    cantique,  IX,  23g, 

337. 
Siméon  Métaphraste.  Son  récit 

du  martyre  de  saint  Polyeucte, 

III,  474-478. 
Siméon  Stylite  (saint),  VIII,  466 . 
Simon  le  Cyrénéen,  VIII,    553. 
Simon  le  lépreux,  VIII,  90. 
Simon  ,     personnage     de     YAn- 

drienne   de  Térence,    I,  n5; 

II,  i3. 
Sina  (le  mont  de\Sinaï,X,  3i9, 

61. 
Singibar,  un  des  chefs  des  alliés 

d'Attila,  VII,  11 5,  179. 
Sinnis,  brigand  tué  par  Thésée, 

VI,  164,  697. 
Sion,  IX,  67,  8;  io3,  14  ;   107, 

17;  117,  3i; 119, 1;  123; 125; 

i85,  6  et   26;  187,   195;  38; 

200;  206;   207,   21;   211;  9; 

217,   2;    225,    35;   23i  ,    16; 

265,  74;    269,  54;  271,  67; 

295  ;  334;  601,  18. —  Dieu  de 

Sion,  IX,  157,  2.  —  Les  filles 

de),   IX,    i55.  —   Les  fils  de 

Sion,  IX,  i5i,  7. 
Sirènes  (deux),   personnages  de 

la  Toison  d'or,  VI,  2  20-349« 
Sirmond  (le  P.),  X,  4^7- 
Sisyphe,  II,  383,  876. 
Sixte,  II  (le  pape),  VIII,    222, 

o36. 
Skeink     (le    fort    de),    Schenk, 

X,  264,  202;   265,  210;   279, 

38o. 
Sœur  valeureuse  (/a),  tragi-come 

die  de  Mareschal,  X,  62. 
Soleil  (le),  II,  353,   261;   383, 

876;  396,  1124;  449,  296.— 


S64      TABLE   ALPHABÉTIQUE    ET  ANALYTIQUE 


Personnage  d'Andromède,  V, 
a43-396.  —  Personnage  de  la 
Toison  d'or,  VI,  22 1-349- 

Solyme,  Jérusalem,  VII,  2o5, 
ïoo;  236,  860,  245,  1088. 

Songes  ,  dans  la  tragédie ,  III , 
278. 

SONNETS,  I,  171;  III,  473;   X,   32J 

33 ,  44 >  87 ;  100;  122;  124  et 
125  ;  127; i33  ;i35;  137;  140; 
162-164;  167;  285.  — Son- 
nets attribués  à  Corneille,  X, 
354  ;  359  et  36o. 

Sophi  de  Perse  (le  grand),  II, 
447,  227. 

Sophocle,  poète  tragique,  I,  28; 
42;  66;  78580  et  81;  102; 
119;  II,  11;  III,  274;  IV,  416 
et  417;  Y,  i5i  ;  VI,  129;  461  ; 
X,  119,  57;  3i2,  27;  5oo. 

Sophonisbe,  tragédie  de  Corneille, 
VI,  447-549;  X,  195.— L'au- 
teur demande  au  Roi  de  la 
faire  représenter  devant  lui,  X, 
3n,  i5. 

Sophonisbe,  fille  d'Asdrubal  et 
reine  de  Numidie,  personnage 
de  la  pièce  de  ce   nom,  VI, 

447-549- 
Soplwnïàhe ,  tragédie  de  Mairet, 

VI,  460;  463;  466. 
Sophonisbe ,  tragédie    de    Mont- 

Chrestien,  VI,  463. 
Sophonisbe,  tragédie  du  Trissin, 

VI,  463. 

SoRBONNE  (la),  X,  464. 

Sorties  des  acteurs,  I,  108. 

Sosie,  personnage  de  V  Andrienne 
de  Térence,  I,  46;  II,  i3. 

Sostrate,  nom  d'homme  men- 
tionné dans  OEdipe,  VI,  171, 
858. 

Soubise  (François  de  Rohan  de), 
X,  271,  269. 

Souplv  (le  P.),  X,  461. 

Sourdeac  (le  marquis  de).  OEdipe 
représenté  chez  lui,  VI,  23o. 

Sparte,  VI,  157,  54o;  VII,  8; 
10;  3o;  i3,  98;   19,    258;  37, 


697;  52,  1076;  56,  n85;  67, 
1466  et  1475  ;  79,  1733;  86, 
1875;  94,  2082. 

Sphinx  (le),  VI,  i44>  233  ;  i54, 
449;  161,  633;  179,  1059;  X, 
246,  1. 

Spitridate,  grand  seigneur  per- 
san ,  personnage  d' 'Agêsilas , 
VII,  i-95. 

Stace,  X,  443.  —  Fragments  de 
traduction  de  sa  Thébaïde,  par 
Corneille,  X,  245  et  246. 

Stances,  X,  43;  160;  i65;  170; 
172.  —  Dans  les  pièces  de 
théâtre  :  à  quels  sentiments 
elles  conviennent,  V,  3 10.  — 
Dans  la  Veuve,  I,  420~4225 
454-456.—  Dans  la  Galerie  du 
Palais,  II,  70-72.  —  Dans  la 
Suivante,  II,  146  et  147;  ï8o 
et  181;  212-214.  —  Dans  la 
Place  Royale,  II,  232  et  233; 
262;  267  et  268;  299-301.  — - 
Dans  Médée,   II,   398    et  399. 

—  Dans  le  Cid,  III,  321-324; 
186  et  187.  —  Dans  Polyeucte, 
III,  539-542.  —  Dans  la  Suite 
du  Menteur,   IV,   337  et  338. 

—  Dans  Héraclius,  V,  222  et 
2  23.  —  Dans  Andromède,  V, 
329-33i;  338;  339-34i;  353- 
355;  35g;  36i;  376;  377  et 
3785393-396. —  Dans  OEdipe, 
VI,   168  et    169;  280  et  281. 

—  Dans  la  Toison  d'or,  VI, 
293  et  294;  3i8-32o;  342  et 
343.  —  Sur  les  vers  de  stances 
d1 Andromède ,  V,  3o8-3i2.  — 
Les  stances  du  Cid  inexcusa- 
bles, V,  3n. 

Stéphanie,  personnage  de  Théo- 
dore, V,  1-1 1 1 :. 

Stéphonius  (le  P.  ,  jésuite,,  au- 
teur de  tragédies,  I,  72. 

Stilicon,  VII,  116,  199. 

Stratonice,  confidente  de  Pau- 
line, personnage  de  Poljeucle, 
-      III,  463-570. 

Stylite.  Voyez.  Siméon   (saint). 


DES   OEUVRES    DE  CORNEILLE. 


565 


Stybus,  roi  d'Albanie,  VI,  247; 
267,  263  et  264;  271,  375. 

Styx  (le),  I,  222,  c 3 1 5  ;  223 
(var.);  VII,  345,  i4y3. 

Suède  (la) ,  X ,  443  • 

Suédois  (les),  X,  3o2,  52. 

Suite  du  Menteur  (ta),  comédie 
de  Corneiile,  IV,  275-395;  I, 
19,  120;  273  —  Examen  de 
la  pièce,  IV,  285  et  286.  —  A 
été  moins  heureuse  au  théâtre 
que  le  Menteur,  IV,  279. 

Suivante  (la),  comédie  de  Cor- 
neille, II,  n3-2i4;  I,  84.  — 
Examen  de  la  pièce,  II,  120- 
125. 

Sujets  du  poëme  dramatique. 
S'ils  viennent  de  la  fortune  ou 
de  l'art,  I,  i5.  —  S'il  est  per- 
mis de  changer  ceux  qui  sont 
empruntés  de  l'histoire  ou  de 
la  fable,  I,  77. 

Sulpitie,  nom  d'une  Romaine 
mentionnée  dans  Tite  et  Béré- 
nice, VII,  240,  971. 

Suppliantes  (les),  tragédie  d'Eu- 
ripide, I,  112. 

Suréna,  général  des  Parthes,  tra- 
gédie de  Corneille,  VII,  455- 
534-  —  N'est  pas  indigne  de 
Cinna.  Corneille  demande  au 
Roi  de  le  faire  représenter  de- 
vant lui,  X,  3n,  i3. 

Suréna  ,  lieutenant  d'Orode ,  et 
général  de  son  armée  contre 
Crassus,  personnage  de  Suréna, 

vu,  455-534. 

Surius,  auteur  des  Pies  des  Saints, 

III,  4745  478..   . 
Suso  (Henri\  religieux  jacobin, 

VIII,  3i3. 
Suze  (le  pas  de),  X,  110. 
Swol  (la  place  de),  Zwol,  X,  280, 

395. 
Sylla,  III,  402,  377;  4IO>  583; 

4M,  664;  438,  1227;  VI,  358; 

359;  36o;  36i;  362;  364;  366, 

27  et  44;  370,  i3a;  376,  3o4; 

377,    334  et   346;   387,    601, 


389,  636;  396,  787;  397,  809; 
398,  832;  399,  856  et  867; 
400,  886  et  894;  4Q1,  9°4  ; 
4o3,  958;  4°4>  982;  4°6, io32 
et  1039  ;  4°7>  1048  et  1067; 
408,  1070  et  1078  ;  409,  1104 
410,  1137;  420,  1371;  423, 
1425  et  1434;  424>  i446  et 
i453;  429,  1567;  43o,  i584; 
432,  i63i  et  1637  et  i645; 
442,  1859;  X,  491. 

Sylvandre,  personnage  de  t As- 
trée,  IV,  353,  1235. 

Sylvérie,  nom  de  femme  men- 
tionné dans  l'Illusion,  II,  438, 
72. 

Sympathie  (poudre  de),  IV,  204, 
1182. 

Syphax,  roi  de  Numidie,  person- 
nage de  Sophonisbe,  VI,  447" 

549- 
Syrie  (la),  I,  273;  IV,4i5;4i6, 

420;  423;  428;  43o,  24;  43i> 
56  (var.);  440,  248;  494>  i54a; 
5o4,  1764;  5o6  (var.);  V,  17, 
3;  92,  1692;  94,  1705;  3o2; 
VI,  58i,  i&s;  VII,  218,  418. 
Syriens  (les),  IV,  448,  43o;  494, 
i553;  49^,  i573. 


Tabenne  (l'île  de),  VIII,  195. 

Table  de  marbre  de  Normandie. 
P.  Corneille  y  est  avocat  géné- 
ral, X,  407- 

Tacite,  I,  25;  76.  —  Le  sujet 
â'Othon  tiré  de  ses  Histoires, 
VI,  57i. 

Tage  (le),  II,  436,  34  ;  IV,  53 , 
622  et  625;  VI,  259,  125; 
419,  i333;  42°>  i36i  ;  IX, 
2i5,  11;  X,  121,  102;  257, 
78. 

Tantale,  VII,  353,  1669. 

Tarquins  (les),  III,  409,  56 1. 

Tartare,  nom  de  peuple,  II, 
470,  687. 


566     TABLE  ALPHABÉTIQUE    ET   ANALYTIQUE 


TAKTARE(le),  aux  enfers,  X  237, 
35. 

Télégonus,  personnage  de  la  tra- 
gédie grecque  d'Ulysse  blessé, 
1,67. 

Temps  (unité  de).  Voyez  Unité 
de  temps  ou  de  jour. 

Tenare  (le),  1 ,  223  (var.). 

Téhence  ,  poëte  comique  latin  , 

I,  46;  96  ;  n5  ;  i38  ;  II,  i3  et 
14  ;  119;  III,    260;  IV,   283; 
423;  X,  45 fi. —  Traduction  de 
Térence    dite  de   Port-Royal 
VII,  106. 

Térèse.  Voyez  Thérèse. 

Terme,  statue,  V,  12. 

Termes  (Roger  de  Pardaillan  de 

Gondrin,  marquis  de),  X,  271, 

269. 
Terre  (la),  II,  385,  905. 
Terre  promise  (la),  VIII,  4^3, 

3p5i 
Testament    (  l'Ancien  )  ,  IX  ;  5 , 

II,  65. 

Testament  (le  Nouveau),  IX,  5; 

11,  65. 
Teucer,  personnage  de  XAjax  de 

Sophocle,  I,  28. 
Thabor  (le),  IX,  556,  2. 
Thaïs  (sainte),  VIII,  428. 
Thamire,    dame   d'honneur    de 

Viriate,  personnage  de  Serto- 

rius,  VI,  35i~445. 
Théagène  ,      nom      d'un      rôle 

d'homme  dans  le  Ve  acte  de 

/' 'Illusion,  II,    5o9~5i8;    524- 

527  (var.). 
Théagène,   lieutenant  de  Nico- 

mède,  V,  5i2,  3i. 
ThÉante,  personnage  de  la  Sui- 
vante, II,  n3-2i4;  260,702. 
ThéAtre   (éloge    du),    II,    522 

et  523. 
Thèbàide  (la),  tragédie  de  Sénè- 

que,  VI,  25o. 
Thébaïde.  (la)  de  Stace.  Fragments 

de  traduction  par  Corneille, 

X,  245  et  246. 
Thébains  (les),  VI,    i45,    263; 


166,  746;  174,  935;  207 , 
1723  et  i635;  212,  i853,  219, 

1996- 
Thèbes  ,  ville  de  Béotie ,  1 ,  112; 

IV,  437,  179;  438,  i95  ;  V, 
146;  VI,  i34  ;  i4°  ■>  ï42  ; 
149,  353;  i5o,  38i ;  176, 
977;  245. 

Thémis,  II,  488  (var.). 
Théodore,  vierge  et  martyre,  tra-. 
gédie  chrétienne  de  Corneille, 

V,  i-iii;I,  62;  64;  84;  98; 
273. —  Examende  la  pièce,  V, 
10-14.  —  Sa  représentation  n'a 
pas  un  grand  éclat,  V,  8;  10. 

—  Son  mauvais  succès  est  im- 
puté à  l'idée  de  la  prostitution, 
V,  8;  9  et  10.  —  N'a  pas  été 
rétablie  à  Paris  depuis  sa  dis- 
grâce ,  mais  les  troupes  de 
province  l'y  ont  fait  assez  pas- 
sablement   réussir,    IV,    286. 

—  Corneille  ne  croit  pas  avoir 
fait  d'acte  où  les  diverses  pas- 
sions soient  ménagées  avec  plus 
d'adresse  que  dans  le  quatrième 
de  Théodore,  et  qui  donne  plus 
de  lieu  à  faire  voir  tout  le  ta- 
lent d'un  grand  acteur,  V,  1 1 . 

Théodore,  princesse  d'Antioche, 
personnage  principal  de  la 
pièce  de  ce  nom,  V,    i-iii. 

Théodoric,  roi  des  Ostrogoths, 
VII,  120,  3n,  169,  1476. 

Théodorics  (les),  X,  441- 

Théodose  Ier,  dit  le  Grand,  em- 
pereur d'Orient,  V,  164,  188; 
VII,  116,  190;  118,  262; 
128,  481;  VII;  38i,  i3;  383, 
42;  385,  n5;  389,  198;  438, 
1418;  443,    i534. 

Théodose  II,  fils  d'Arcadius,  em- 
pereur d'Orient ,  VII  ,  116, 
2o5 ;  376;  38o,  4°3>  554; 
404,  602;  429,  1197. 

Théodote,  ministre  de  Ptolomée. 
IV,  21. 

Théophile,  poëte  français,  I , 
i36. 


DES   OEUVRES   DE   CORNEILLE. 


567 


Thérèse  (sainte)  ,  IX,   566,  3; 

567,  3.    —  Hymnes   pour  sa 

fête,  IX,  566-568. 
Thésée,  fils  d'Egée,  I,  77;  112; 

122;  II,  335,  525  (var.);  X, 

73,  9. —  Personnage  (YOFdipe, 

VI,  101;  219. 

THESSALIE(la),I,  46;  II,   343,46; 

357,  334;  36o,  391;  365, 
482;  367,  533;  379,  779; 
IV,  5o,  566;  59,  757;  71, 
1066;  VI,  247  ;  252. 

Thétis,  Thétys,  I,  244  ('var-)> 
277  (var.);  X,  273,  307. 

Theudas,  personnage  de  Médée, 
II,  327-419. 

Thierri,  roi  des  Visigoths,  VII, 
n5,  179. 

Thionville  (la  ville  de),  III,  473  ; 
IV, 412. 

Tholus  (la  forteresse  de) ,  X,264, 
202;  268,  242. 

Thomas  d'Aquin  (saint),  VIII  , 
38;  X,  446. 

Thomas  a  Kempis,  X,  4^0.  —  Il 
est  considéré  par  plusieurs 
comme  l'auteur  de  Y  Imitation^ 
VIII,  12;  18;  i3o;  X,  461; 
464;  4«5;  466;  467,  4^8;  469; 
471.  —  Messieurs  des  requê- 
tes du  parlement  de  Paris  se 
sont  prononcés  en  sa  faveur, 
VIII,  12. 

Thorismond.      Voyez     Torris- 

MOND, 

Thrace  (le),  II,  375  (var.);  VI, 
248. 

Thyeste,  frère  d'Atrée,  I,  20;  56; 
57-78. 

Thyeste,  tragédie  de  Scnèque,  I, 
21;  IV,  283. 

Tibère,  empereur  romain,  suc- 
cesseur d'Auguste,  VI ,  585  , 
237  ;  621,  io63. 

Tibère,  empereur  d'Orient,  V, 
i43;  i5i;  i6g,  58,  164,  186. 

Tibre  (le),  III,  4^4i  H»;  44ri 
1290;  IV,  84, 1414;  VI,  397, 
8i5;  4*9?  i333;  43r,  1604; 


VII,  117,  236;  X,  116,  7; 
443. 

Tigeixïn  ,  favori  de  Néron,  VI , 
609,  780. 

Timagène,  gouverneur  de  Sé- 
leucus  et  d'Antiochus ,  per- 
sonnage de  Rodogune,  IV,  397- 
5n. 

Timante  ,  personnage  &  Andro- 
mède, v,  243-396. 

Tircis,  Tirsis,  personnage  de 
Mélite,!,  123-253;  19;  395. 
Voyez  I,  147,  note  4(«)« 

Tirésie  ,  Tirésias  ,  devin  ,  VI , 
127;  i3o;  i5i,  3g4 ;  i56, 
5o6  ;  i58,  549;  i59,  589; 
170,  829;  178,  1026;  182, 
1099;  l88,  1277;  I9°5 l3*7i 
*97,  x493. 

Tirsîs,  nom  d'homme,  X,  5o-52; 

54,  a5.  Voyez  Tikcis. 

Tisiphone,  I,  226,  i393  ;  a3i, 
1467. 

Titans  (les),  I,  226,  1401  ;  II, 
5i2,  1437  ;  IV,  28,  24. 

Tile  et  Bérénice  ,  comédie  hé- 
roïque de  Corneille,  VII,  1 83- 
276.  —  L'auteur  demande  au 
Roi  de  faire  représenter  cette 
pièce  devant  lui,  X,  3 12,  18. 

Tite,  Titus,  empereur  de  Rome 
et  amant  de  Bérénice,  person 
nage  de  Tite  et  Bérénice,  VII. 
183-276. 

Tite  Ltve.  Voyez  Live  (Tite). 

Tithon,  amant  de  l'Aurore,  II, 

449>  299- 
Titres  des  pièces  de  théâtre,  II, 

11;  12. 

Titye,  géant,  II,  ^iSf  i524; 
VII,  357,  1779. 

Toison  d'or  (la),  tragédie  de  Cor- 
neille, vi,  221-349;  1,  47; 

273;  V,  3n;  X,  179,  57.  — 
Desseins  de  la  pièce,  VI,  23o- 
244»  —  Examen  ,  VI,  245- 
25o. 
Tolède  (la  ville  de),  III,  170, 
1226. 


568     TABLE  ALPHABETIQUE    ET   ANALYTIQUE 


Tolède  (Ferdinand  Alvarez  de), 
duc  d'Albe,  X,  267,  233. 

Torelli  (Jacques)  a  exécuté  les 
desseins  des  machines  iV An- 
dromède, V, 277;  297. 

Tormes.    Voyez    Lazarili/e    de 

ToBMES. 

Tobbismond  ,  Thorismond,  fils 
de  Théodoric ,  roi  des  Visi- 
goths,  VII,  162,  i3ii. 

ToURAINE(ia ),  II,  4^4- 

Tournai  (la  ville  de),  X,  2o5, 
i55. 

Toubné,  jésuite.  Sa  traduction 
en  vers  latins  des  vers  français 
de  Corneille  sur  la  conquête 
de  la  Franche-Conîté,  X,  227. 

Tours  (la  ville  de),  IV,  i63,  432. 

Trachiniennes  [les) ,  tragédie  de 
Sophocle,  II,  11  ;  IV,  416. 

Traductions  :  de  V Imitation  de 
Jésus  -  Christ ,  VIII;  —  des 
Louanges  de  la  sainte  Vierge, 
IX,  1-53;  —  de  l'Office  de  la 
sainte  Vierge,  IX,  55- 241;  — 
des  sept  Psaumes  pénitentiaux, 
IX,  243-299;  —  des  Vêpres 
et  Complies  des  dimanches, 
IX,  3oi-34i  ;  —  des  Hymnes 
du  Bréviaire  romain,  IX,  447~ 
636  ;  —  des  Hymnes  de  saint 
Victor,  IX,  6o3-6i2;  —  des 
Hymnes  de  sainte  Geneviève, 

IX,  6i3-637. 
Traductions  et  imitations  :  de 

sept  épigrammes  lalines  d'O- 
wen,  X,  46-49;  —  des  vers 
latinsxdu  P.  de  la  Rue  sur  les 
victoires  de  1667,  X,  172-217  ; 
—  d'une  épigramme  latine  de 
Montmor  sur  les  mêmes  vic- 
toires, X,  218  et  219  —  Tra- 
duction en  latin,  faite  par  Cor- 
neille lui-même,  de  ses  stances 
sur  la  conquête  de  la  Franche- 
Comté,  X,  225. —  Imitation: 
d'une  pièce  latine  de  J.  Pari- 
sot  sur  le  canal  de  Languedoc, 

X,  23 1:  —  des  vers  latins  de 


Santeul  sur  la  défense  des  fa- 
bles dans  la  poésie,  X,  234- 
241  ;  —  de  deux  inscriptions 
latines  du  même  pour  deux 
fontaines  de  Paris,  X,  242- 
244  ;  —  de  deux  passages  de 
la  Thébaïde  de  Stace,  X,  245 
et  246; —  de  ses  propres  vers 
latins  présentés  au  Roi  à  son 
retour  de  la  guerre  d'Hol- 
lanue  en  [672,  X,  25o;  — 
des  vers  latins  du  P.  de  la 
Rue  sur  les  victoires  de  1672, 
X,  252-284;  —  des  vers  la- 
tins de  Santeul  sur  la  libéra- 
lité du  Roi  envers  les  mar- 
chands de  Paris,  X,  287-298  : 

—  des  vers  latins  du  P.  Lucas 
sur  le  départ  du  Roi  pour  l'ar- 
mée en  1672.  X,  299~3o3 ;  — 
d'une  ode  latine  à  Pellisson 
par  un  auteur  inconnu,  X, 
3i5-32i;  —  de  l'inscription 
sur  l'Arsenal  de  Brest  par  San- 
teul, X,  33i-333.  —  Imita- 
tion attribuée  à  Corneille  d'un 
distique  latin  sur  les  victoires 
de  1672,  X,  385. 

Tragédie  [Discours  de  la),  I, 
52-97.  —  Ce  que  demande  la 
dignité  de  la  tragédie,  I,  24. 

—  Tragédies  parfaites,  I,  66. 

—  Quatre  sortes  de  tragédie, 
1 ,  67.  —  Les  tragédies  an- 
ciennes arrêtées  autour  de  peu 
de   familles,     I,     73.     Voyez 

C^OMEDIE. 

Transylvanie  (la).  II,  4^0,  3i4« 

Trasimène  (le  lac  de),  V,  525, 
3o8  ;  539  ,  620. 

Trébie  (la),  V,  55i,  924. 

Trézène  (la  ville  de),  VI,  190, 
i32i.  Voyez  Tboezène. 

Tbicin  (le),  le  Trissin,  poëte  ita- 
lien, VI,  463  ;  466. 

Trinité  la  sainte),  IX,  52,  823 

Tristan,  poëte  dramatique,  I, 
49  (var.);  VI,  462. 

Tritons,  V,  267.  —  Deux   Tri- 


DES    OEUVRAS    DE   CORNEILLE. 


569 


tons,  personnages  de  (a  Toison 

d'or,  VI,  220-349. 
Troade  (/a),  tragédie  de  Sénèque, 

1,99;  IV,  283. 
TrochaÏques   vers,  V,  3 10. 
Troezène  (la  ville  de),  II,  335. 

Voyez  Tbézène. 
Troie  (la  ville  de),   I,  112;  IV, 

437,  171  et  179;  438,  i95;V, 

i5i  ;  X,  n3,  89. 
Trompeur  puni  (lé),  tragi-comédie 

de  Scudéry,  X,  61. 
Tryphon,  nom  que  prend  Dio- 

dotus  en  usurpant  le  trône  de 

Syrie,  IV,  418;  43o,  3o  ;  43i, 

43  et  57  ;  45o,  491;  452,  528  ; 

453,548. 
Tutleries  (les  ,  à  Paris,  I,  120  ; 

II,  3io,  32i,  293;  IV,  i38  ; 

141,  5  ;  212,  i333;  216,  14*7; 

234,  1698;  237,  1765. 
Tuileries  (le  IIIe  acte  de  lu  Comé- 
die des, ,  par  les  cinq  auteurs 
II,  3o3-325. 

Tulle  ,  Tullus  Hostilius ,  roi  de 

Rome,   personnage   d'Horace, 

II,  243-358. 
Tunis    (la   ville  de  ),    X,    197, 

42. 
Turc     (le    grand),    II,    471, 

726. 
Turcs  (les),  X,  196,  39. 
Tubdétans  (les) ,    peuple  de    la 

Bitique,  VI,  38o,  417* 
Turenne  (le  vicomte  de),  X,  260, 

122. 
Turin  (la  ville  de),  VI,  20. 
Tubpilian,    nom    d'un    Romain 

mentionné   dans    Otkon  ,    VI , 

577,  52. 
Turquie  (la),   IV,    ig5,    io5o  ; 

235,  1710. 

Tyndare,  père  de  Clytenmestre 

et  d'Hélène,  I,  106. 
Tyr  (la  ville  de),  VI,  481,  2i3; 

IV,  101,  53;  107,  14. 
Tybiens  (les),  VI,  482,  221. 
Tyro,   fille  de  Salmonée,   VI, 

247. 


I 


U.  Son  emploi  ,  I,  6.  —  U  con- 
sonnes distingués  des  u  voyel- 
les, I,  6. 

Udo,  évêque  de  Magdebourg, 
VIII,  618. 

Ulysse,  I,  28,  37.  —  Person- 
nage de  la  Troade  de  Sénè- 
que, IV,  283. 

Ulysse  blessé,  tragédie  de  Chéré- 
mon,  I,  67. 

Unité  d'action,  I,  98-122;  i38; 
378;II,  118;  221;  III,  275  ; 
481;  IV,  22;    i38;  V,    i3  et 

if 

Unité  de  lieu,  I,  3;  84;  98-1 22; 
377;  378;  3g4;  II,  i3;  n8; 
123;  223;III,97;98-ioi;  276; 
379;  481  ;  482;  IV,  20;  137; 
421  ;  V,  i3  ;  l53  ;  3o5  ;  416; 
VI,  362. 

Unité  de  temps  ou  de  jour,  1, 
3;  84;  98-122;  140;  1415262; 
270;  377  et  378;  II,  14;  118; 
119;  124;  432;  433;  III,  96; 
97;  276;  379;  481;  482;lV,ao; 
21  ;  i38;  V,  i3;  i53  ;  416. 

Unulphe,  seigneur  lombard ,  per- 
sonnage de  Pertharite ,  VI ,  1- 
100. 

Uranie  (le   sonnet   d'),  X,  125. 

Uranins  (les)  ,  partisans  du  son- 
net d'Uranie,  X,  126,  5. 

Urgande  (la  fée),  IV,  i59, 
353. 

Urraque  (dona),  infante  de  Cas- 
tille,  personnage  du  Cid ,  III, 
1-241;  277;  483;I,  4;  38;  48; 
n5  ;  120. 

Utilité  du  poème  dramatique, 
I,  i3-5i. 

Utique  (la  ville  d'),  VI,  53o, 
1397;  ^9,  i584« 

Utrecht  la  ville  d'),  X,  281. 
422. 


57o     TABLE  ALPHABÉTIQUE   ET   ANALYTIQUE 


V.  Son  emploi,  I,  6. 

Vacéens  (les),  peuple  de  l'Espa- 
gne tarraconaise  ,  VI ,  425, 
i485. 

Valamir,  roi  des  Ostrogoths, 
personnage  &  Attila,  VII,  97- 
181. 

Valens  ,  gouverneur  d'Antioche, 
personnage    de    Théodore ,  V ' 
i-lll;  I,  64;  273. 

Valentinian  III,  empereur  ro- 
main, VII,  io3 ;  108;  116, 
209. 

Valère  ,  chevalier  romain  ,  per- 
sonnage d'Horace,  III,  243- 
358. 

Valerius  Flaccus,  poëte  latin, 
VI,  245;   249. 

Valladolid  (la  ville  de),  V,  418. 

Vandale,  les  Vandales,  VII, 
116  ,  202  ;  382,  i3. 

Varron,  nom  d'un  Romain  men- 
tionné dans  Othon,  VI,  577,  52. 

Varus  (P.  Quintilius),  X,  267, 
229. 

Vastht,  femme  d'Assuérus,  IX, 
39,  575. 

Vega  (Lope  de),  poëte  espagnol, 
IV,  i32;  i33. — Corneille  lui 
attribue  la  comédie  d'Alarcon 
intitulée  la  Verdad  sospechosa, 
IV,  i3i.  —  11  rectifie  cette  er- 
reur, IV,  137.  —  Sa  comédie 
intitulée  Amor  sin  saber  n  auien, 
IV,  279.  Voyez  Vègue. 

Vègue  (Lope  de),  IV,  137.  — 
Corneille  a  imité  une  de  ses 
comédies  dans  la  Suite  du 
Menteur,  IV,  285;  391-395. 
Voyez  Vega. 

Velleius  Paterculus,  IV,  i5. 
—  Portraits  de  Pompée  et  de 
Jules  César,  tirés  du  livre  II 
(chapitres  xxix  et  xli)  de  son 
Histoire  romaine,  IV,  17-19. 


Vence  (Monseigeur  de),  X,  473. 

Vendôme  (César  duc  de),  fils  na- 
turel légitimé  de  Henri  IV,  X, 
398. 

Vendôme  (Françoise  deLorraine, 
duchesse  de),  femme  du  pré- 
cédent, X,  398. 

Vendôme  (le  chevalier  de),  X, 
270,  265. 

Veneurs,  dans  Clitandre,  I,  2Ô5- 
36g, 

Venise,  IV,  298,   187;  X,  443. 

Vents,  personnages  d'Andromè- 
de, v,  243-396. 

Vents  (quatre)  ,  personnages  de 
la  Toison  d'or,  VI,  220-349. 

Vénus,  1,75;  i47,73;  4i2,258; 
II,  27,  170;  372,  641  ;  VI, 
293,  900  et  910  ;  328  ;  X,  63, 
i5.  —  Personnage  d'Andro- 
mède ,  V,  243-396.  —  Per- 
sonnage de  Psyché,  VII,  277- 
370. 

Vèfris  des  dimanches,  traduites 
en  vers  françois  par  Corneille, 
IX,  3o4~32i. 

Verdier  (Antoine  du),  auteur 
des  Diverses  leçons,  IV,  6.  — 
Extrait  de  cet  ouvrage  ,  relatif 
au  sujet  de  Pertharite ,  VI,  8- 

14. 
Vers  des  pièces  de  théâtre.  Leur 
nombre,  I,  3o.  —  Vers  de  di- 
verses mesures  dans  Andro- 
mède. Corneille  en  explique  et 
en  justifie  l'emploi  ,  V  ,  3o8- 

3l2. 

Versailles,  X,  240,  66. —  Fêtes 
de  juillet  et  août  1674,  X,  3o5, 
25;  324,  45. 

Vert  (Jean  de),  Jean  de  Wert, 
général  de  l'empereur  Ferdi- 
nand III,  IV  «  159,  336. 

Vesf.lle  (la  place  de),  X,  260, 
119. 

Vespasian  (1  empereur),  VII, 
2o5,  98;  206,  i38. 

Vestales  en  Ecosse,  I  ,  36 1  , 
1570. 


DES  ŒUVRES   DE   CORNEILLE. 


57. 


Vésuve   (le),    VII,    247,    ma; 

256,  i345;  271,  1661. 
Veuve  {la),  comédie  de  Corneille, 

I,  37i-5oo;  43;  120;  123. — Le 
Ve  acte  de  la  Veuve,  I,  28.  — 
Examen  de  la  pièce,  I,  394-397. 

Vhal  (le),    le  Wahal,  X,   266, 

218;  281,  414  et  4*5. 
Victoire  (la),  V,  3 18,   62;  X, 

239,  59;   282,  427>  3o2,  40. 

—  Personnage  du  prologue  de 

la  Toison   d'or,  VI,    252-265. 
Victor  (saint),  IX,  607,  5;  611, 

II.  —  Hymnes  de  Santeul  en 
l'honneur  de  saint  Victor,  tra- 
duites en  vers  françois  par 
Corneille,  IX,  607-612. 

Victorius,  Pierre  Vettori,  criti- 
que du  seizième  siècle,  cité  par 
Corneille,  I,  34. 

Vie  des  Saints  (la) ,  X,  460. 

Vieillard  (le)  de  Corinthe  dans 
YOEdipe  de  Sophocle  et  dans 
celui  de  Sénèque,  I,  42. 

Vierge  (la  sainte),  VIII,  22; 
176;  368;  521  ;  628;  IX, 
562,  17;  568,  3;  570,  3.  — 
Ses  Louanges^  IX,  1-53.  —  Son 
Office,  IX,  55-24i;  175:  221, 
12  et  17;  227;  241.  —  Can- 
tique de  la  sainte  Vierge,  IX, 
2  23-2  25.  —  Antienne  de  la 
sainte  Vierge,  IX,  339. 

Vierges.  Hymnes  pour  les  vier- 
ges, ix,  593-595, 

Villeneuve.  Son  hommage  à 
Corneille  au  sujet  de  la  Veuve, 
I,  388. 

Vinius,  consul,  personnage  d'O- 
thon,  VI,  564-657- 

Virgile,  I,  377;  II,  118;  IV, 
12;  VI,  122,  42;  X,  66,  3; 
72,  85;  96,  3o;  118,  5o;  443. 

Virginian,  III,  45 1,  1489. 

Viriate,  reine  de  Lusitanie,  per- 
sonnage de  Sertorius,  VI,  35 1- 
445;  X,  491  et  492;  494. 

Viriatus,  père  de  la  précédente, 
VI,  359;  38i,  435  ;  X,    492. 


Visigoth,  les   Visigoths,    VII, 

m,  48;  160,  1278. 
Vitalian  (saint),  VIII,  87. 

VlTELLÎUS,  VII.   243,    104i;    272, 

1686. 

Vivonne  (Louis- Victor  de  Ro- 
chechouart,  duc  de  Mortemart 
et  de),  X,  270,  266. 

Vizir  (le  grand),  II,  470  ,  686. 

Vléda,  Bléda,  frère  d'Attila, 
VII,    121,    342;    123,    375. 

Voille.  Son  hommage  à  Cor- 
neille au  sujet  de  la  Veuve, 
I,  392. 

Vossius  (Isaac),  X,  5oo. 

Voyer  d'Argenson  (de),  conseil- 
ler du  Roi  au  parlement  de 
Normandie.  Lettre  à  lui  adres- 
sée par  Corneille,  X,  444" 
448. 

Vraisemblable  (le),  V,  3o6.  - — 
Ce  que  c'est,  I,  14.  —  Discours 
de  la  tragédie  et  des  moyens  de 
la  traiter  selon  le  vraisemblable, 
I,  52-97. 

Vraisemblance  (la),  III,  379;  V, 
146  et  147. 

Vulcain,  II,  36i,  4i3;390,  994; 
VII ,  322  ,  902  ;  X,  63 ,  19; 
443. 

W 

Wahal  (le).  Voyez  Vhal. 

Waller  (Edmond) ,  poète  an- 
glais, X,  499  et  5oo. 

Wallons  (les),  X,  4^3. 

Wert  (Jean  de).  Voyez  Vert 
(Jean  de). 

Westphalie  (la),  X,  280,  394. 


X 


Xaintes  (la  ville  de),  X,  448. 
Xaintonge  (la),  X,  448. 
Xanthias,   personnage   des  Gre- 
nouilles d'Aristophane,  V,  3o8. 
Xénoclès,  lieutenant  d'Agésilas, 


572     TABLE  DES  OEUVRES  DE   CORNEILLE. 


personnage    d'Jgésitos  ,    Vil , 
i-95. 
Xiphilin,  abréviateur  de  Dion 
Extrait  de  son  ouvrage,  conte- 
nant le  sujet  de  Tite  et  Bérénice, 
VII,  197. 


Ypre,  Ypres,  X,  307,  71; 329, 

47- 
Yssei.  (1') ,  X,    257,    70;    266, 

228  ;  279,38^et389;  280,  394. 

Vvry  (la  bataille  d'),   X,    211, 

259. 


Zacharie.  Son  cantique  traduit, 

IX,  157-161. 
Zachée,  6oo,  4^4;  654- 
Zénobie,  reine  de  Palmyre,  VII, 

439,  i45o. 
Zenon  ,    agent    d'Arsinoé ,    dans 

Nicomède ,  V,  554,   9^4  j  557, 

1040;  565,  1219;  567,  1257; 

58o,  i566;  586,  1706. 


Zéphire,  le  Zéphire,  V,  33 1 , 
371;  X,  84,  24.  —  Le  Zéphire, 
personnage  de  Psyché,  VIII, 
277-370. 

Zéphirs,  VII,  322  ;  333,  1214  ; 
357,  1781  ;  3b2,  1912. 

Zéthès  ,  argonaute  ailé ,  fils  de 
Borée  et  d'Oritlrye,  II,  362, 
43g.  —  Personnage  de  la  Toi- 
son d'or,  VI,    221-349- 

Zeuxis,  X,   120,  91. 

Zoïle,  X,  66,  12. 

Zuifaeten  (  l'abbaye  impériale 
de),  VIII,   17. 

Zutphen  (la  ville  deJ,X,  280,  398. 

Ztjylichem  (Constantin  Huyghens 
de),  IV,  i33.  —  Sonépigramme 
latine  sur  le  Menteur,  IV,  i35. 
—  Son  épigranime  française  sur 
la  niême  pièce,  IV,  i36. —  Epî- 
tre  dédicatoire ,  à  lui  adressée, 
de  Don  S  anche  d'Aragon,  V, 
4o4-4IO«  Lettres  à  lui  adres- 
sées par  Corneille,  X ,  44&~ 
452  ;  453-457. 

Zwol  (la  place  de).  Voyez 
Swol. 


FIN    DE    LA    TABLE    ALPHABÉTIQUE    ET     ANALYTIQUE 
DES    OEUVRES     DE    CORNEILLE. 


TABLE  DES  POESIES  DIVERSES 

RANGEES    SULVANT    L'ORDRE    ALPHABÉTIQUE 
DU    PREMIER    VERS  DE  CHAQUE  PIÈCE. 


Ainsi  du  Dieu  vivant  la  bonté  surprenante. 176 

Allez,  belle  marquise,  allez  en  d'autres  lieux 142 

Allez  voir  ce  jeune  soleil 35 

Ami,  veux-tu  savoir,  touchant  ces  deux  sonnets .  .  128 

Après  l'œil  de  Mélite  il  n'est  rien  d'admirable 44 

Au  point  où  me  réduit  la  distance  des  lieux 33 

Bel  astre  à  qui  je  dois  mon  être  et  ma  beauté 82 

Caliste,  lorsque  je  vous  voi 170 

Caliste,  mon  plus  cher  souci 5o 

Ce  n'est  donc  pas  assez,  et  de  la  part  des  Muses 74 

Ce  n'étoit  pas  assez,  grand  Roi,  que  la  victoire 326 

C'est  trop  faire  languir  de  si  justes  désirs 1 53 

C'est  trop  gémir,  Nymphes  de  Seine 244 

Cet  auteur  a  quelque  génie i32 

Chantez,  peuple,  chantez  la  valeur  libérale 290^ 

Croissez,  jeune  héros  ;  notre  douleur  profonde i83 

Demeurez  en  repos,  frondeurs  et  mazarins 125 

Depuis  qu'un  malheureux  adieu „ 43 

Deux  sonnets  partagent  la  ville 127 

Donnez-moi  vos  couleurs,  tulipes,  anémones 85 

Dont  autrefois  le  Sphinx,  ce  monstrueux  oiseau 246 

Du  cloître  et  de  la  cour  précieuse  clarté 122 


574  TABLE  ALPHABÉTIQUE 

Du  palais  d'émeraude  où  la  riche  nature 83 

D'un  accueil  si  flatteur,  et  qui  veut  que  j'espère 164 

Encor  que  Ligdamon,   eR  dépeignant  Silvie 57 

Enfin  échappé  du  danger 26 

Enfin  tu  m'as  suivie,  et  ces  vastes  montagnes 116 

Ennemis  de  mon  roi,  Flandre,  Espagne,  Allemagne.  .  .    3o4 

Est-il  vrai,  grand  Monarque,  et  puis-je  me  vanter 3n 

Grand  Roi,  dont  nous  voyons  la  générosité .  i85 

Grand  Roi,  Mastric  est  pris,  et  pris  en  treize  jours.  . .    2  85 

Invincible  ennemi  des  rigueurs  de  la  Parque i38 

J'ai  vu  la  peste  en  raccourci 160 

Jane,  toute  la  journée 46 

Je  chéris  ma  défaite,  et  mon  destin  m'est  doux 140 

Je  ne  veux  plus  devoir  à  des  gens  comme  vous i52 

Je  pense  ,  à  vous  voir  tant  d'attraits 174 

Je  suis  blessé  profondément 4^ 

Je  vous  estime,  Iris,  et  crois  pouvoir  sans  crime    i63 

Je  vous  l'avois  bien  dit,  ennemis  de  la  France 3  0.2 

La  Garonne  et  l'Atax  dans  leurs  grottes  profondes. 23 1 

La  noblesse,  grand  Roi,  manquoit  à  ma  naissance. .       i35 

Le  château  révolté  donne  à  Caen  mille  alarmes 106 

Le  dieu  de  Pythagore  et  sa  métempsycose 100 

Le  printemps  a  changé  la  face  de  la  terre 299 

Les  douceurs  de  la  paix  et  la  pleine  abondance 253 

Mânes  des  grands  Bourbons,  brillants  foudres  de  guerre 194 

Marquise ,  si  mon  visage i65 

Mes  deux  mains  à  l'envi  disputent  de  leur  gloire ,  i5i 

Mes  soupirs  vous  ont  dit  plus  de  cent  fois  le  jour 233 

Misérable  Didon  ,  pauvre  amante  séduite 36 

Mon  nom  par  la  victoire  est  si  bien  affermi .  .    .  .  247 

N'aimez  plus  tant ,  Philis,  à  vous  voir  adorée i55 

Neustriacse  lux  aima  plagse ,  quo  nostra  superbit 65 

Ne  verse  point  de  pleurs  sur  cette  sépulture i33 

Non,  je  ne  serai  pas  ,  illustre  Pkllisson 3i5 

Non,  tu  n'es  point  ingrate,  ô  maîtresse  du  monde.  ...    94 

O  Dieux!  qu'elle  sait  bien  surprendre 3o 

Palais  digne  de  Mars,  qui  fournis  pour  armer 333 

Phèdre,  si  ton  chasseur  avoit  autant  de  charmes 73 

Plaise  au  Roi  ne  plus  oublier 3o8 

Pourquoi  s'étonner  que  de  Loy i3t 

Pour  une  jeune  muse  absente 81 


DES  POÉSIES   DIVERSES.  575 

Prince,  l'appui  des  lis ,  et  l'amour  de  la  France 334 

Puisqu'un  d'Amboise  et  vous  d'un  succès  admirable.  .......  32 

Quand  je  vois,  ma  Philis ,  ta  beauté  sans  seconde 60 

Que  doit  penser  Ovide,  et  que  nous  peut-il  dire 124 

Que  le  dieu  de  la  Seine  a  d'amour  pour  Paris 242 

Quelle  rapidité  de  conquête  en  conquête 223 

Que  tes  Chastes  martyrs  vont  te  faire  d'amants. ...  i3o 

Que  tes  entretiens  sont  charmants 102 

Que  vous  sert-il  de  me  charmer.  . , 172 

Qitld  mirum  rapido  tibi  si  Victoria  cursu 249 

Qu'il  fasse  mieux  ,  ce  jeune  jouvencel 79 

Quoi  ?  sitôt  que  j'en  veux  rabattre i58 

Qu'on  fait  d'injure  à  l'art  de  lui  voler  la  fable 235 

Qu'on  parle  mal  ou  bien  du  fameux  Cardinal 86 

Qu'on  te  flatte  ,  qu'on  te  baise 173 

Rendez-vous  ,  amants  et  guerriers .  .  62 

Si  je  perds  bien  des  maîtresses 55 

Si  la  Lune  et  la  Nuit  sont  bien  représentées i54 

Sous  ce  marbre  repose  un  monarque  sans  vice 87 

Sur  l'Escaut  étonné  tu  lances  la  tempête. .  .  218 

Toi ,  dont  la  course  journalière ...  58 

Toi  qui  nous  apprends  de  la  grâce 220 

Toi  qui  près  d'un  beau  visage 53 

Ton  Ciéonte,  par  son  trépas 61 

Tu  reviens  ,  ô  mon  Roi ,  tout  couvert  de  lauriers. .    186 

Une  ambition  déréglée 38 

Usez  moins  avec  moi  du  droit  de  tout  charmer. 167 

Vos  beaux  yeux  sur  ma  franchise 168 

Vous  aimez  que  je  me  range 162 


FIJV    DE    LA    TABLE    ALPHABETIQUE    DES    POESIES    DIVERSES. 


TABLE  DES  MATIERES 

CONTENUES  DANS  LE  DIXIÈME  VOLUME. 

POÉSIES  DIVERSES. 

Notice 3 

Au  lecteur 24 

I.  A  Monsieur  D.  L.  T a5 

II.  Ode  sur  un  prompt  amour 3o 

III.  A  Monseigneur  le  cardinal  de  Richelieu.  Sonnet 32 

IV.  Sonnet  pour  M.   D.   V.,  envoyant  un  galand   à  M.  L. 

C.  D.  L : 33 

V.  Madrigal  pour  un  masque  donnant  une  boîte   de  cerises 

confites  à  une  damoiselle 35 

VI.  Epitaphe  de  Didon.   Traduit  du  latin  d'Ausone  :  In f dix 

Dido,  etc 36 

VII.  Mascarade  des  enfants  gâtés. ...... 38 

VIII.  Stances  sur  une  absence  en  temps  de  pluie 43 

IX.  Sonnet 44 

X.  Madrigal 4^ 

XI.  Épigrammes  traduites  du  latin  d'Audoènus 4^ 

XII.  Dialogue. 5o 

XIII.  Chanson 53 

XIV.  Chanson 55 

COEKEILLE.    X  %7 


578  TABLE   DES   MATIÈRES. 

XV.  A  Monsieur  de  Scudéry  [sur  son  Ligdamon  et  Lidias] $j 

XVI.  Récit  pour  le  ballet  du  château  de  Bicêtre 58 

XVII.  Pour  Monsieur  L.  C.  D.  F.,  représentant  un  diable  au 

même  ballet.  Épigrammc 60 

XVIII.  A   Monsieur    de    Scudéry,    sur    son    Trompeur  puni. 

Madrigal 61 

XIX.  Pour  la  Sœur  valeureuse  de  Monsieur  Marescîial 62 

XX.  P.  Cornel'à  rothomagensis,  ad  illustrissimi  Francisci^  archie- 

piscopi,  Normanise  primates,  invitationcm,  qua  gloriosis- 
simum  regem,  eminentissimumque  cardinalem-ducem  ver- 
sibus  celebrare  j tissus  est,  excusatio 64 

XXI.  Pour  YHippolyte  de  Monsieur  de  la  Pinelière 73 

XXII.  Excuse  à  Ariste 74 

XXIII.  Rondeau 79 

XXIV.  Remercîment  fait  sur-le-champ  par  Monsieur  de  Cor- 

neille         81 

XXV.  La  Tulipe.  Madrigal.  Au  Soleil 82 

XXVI.  La  Fleur  d'orange.  Madrigal 83 

XXVII.  L'Immortelle  blanche.  Madrigal 85 

XXVIII.  Vers  sur  le  cardinal  de  Richelieu 86 

XXIX.  Sur  la  mort  du  roi  Louis  XIII.   Sonnet 87 

XXX.  A  Monseigneur  Monseigneur  l'éminentissime  cardinal 

Mazarin.  Remercîment a 92 

XXXI.  A  maître  Adam,  menuisier  de  Nevers,  sur  ses  Chevilles. 

Sonnet 100 

XXXII.  A  Monsieur  de  Boisrobert,  abbé  de  Châtillon,  sur  ses 

Épitres 102 

XXXIII.  Les  Triomphes  de  Louis  le  Juste 104 

XXXIV.  La  Poésie  à  la  Peinture  ,  en  faveur  de  l'Académie  des 

peintres  illustres 116 

XXXV.  A  saint  Bernard,  sur  la  traduction  de  ses  Épitres,  par 

le  R.  P.  dom  Gabriel  de  Sainte-Geme.  Sonnet.  ...      122 

XXXVT.  A  Monsieur  d'Assoucy,  sur  son  Ovide  en  belle  humeur.     124 

XXXVII.  Sur  la  contestation  entre  le  sonnet  d'Uranie  et  de 

Job.  Sonnet 1 25 


TABLE   DES    MATIÈRES.  579 

XXXVIII.  Sonnet I2? 

XXXIX.  Épigramme ï 28 

XL.  A  Mademoiselle  de  Cosnard  de  Ses 1 29 

XLI.  A  Monsieur  de  Loy,  professeur  en  l'Université  de  Paris, 
sur  son  panégyrique  de  Monseigneur  le  premier  pré- 
sident de  Bellièvre i3i 

XLII.  Pour  Monsieur  d'Assoucy,  sur  ses  Airs i32 

XLIII.  Epitaphe  sur  la  mort  de  damoiselïe  Elisabeth  Ran- 
quet ,  femme  de  Nicolas  du  Chevreul ,  écuyer,  sieur 

d'Esturville.  Sonnet , i33 

XLIV.  Sonnet.  [Au  Roi,  pour  obtenir  la  confirmation  des  lettres 

de  noblesse  accordées  à  son  père.] i35 

XLV.  A    Monsieur   de    Campion  ,   sur    les    Hommes    illustres. 

Sonnet. < 137 

XLVI.  Sonnet  perdu  au  jeu. 140 

XLYII.  Sur  le  départ  de  Madame  la  marquise  de  B.  A.  T. . .  141 

XLVIII.  Madrigal .., .... i5o 

XLIX.  Autre  sur  le  même  sujet. ..., i5a 

L.  Air  de  M.  Lambert  pour  la  Reine i53 

LI.  Pour  une   dame  qui  représentoit  la  Nuit  en   la  comédie 

dCEndymion,  Madrigal , i54 

LU.  Jalousie „ 1 55 

LUI.  Bagatelle , i58 

LIV.  Stances « , 160 

LV.  Sonnet ,  162 

LVI.  Sonnet . . . i63 

LVII.  Sonnet. , . . . 164 

LVIII.  Stances i65 

LIX.  Sonnet , . 167 

LX.  Chanson 168 

LXI.  Stances * 170 

LXII.  Stances. .  .    172 

LXIII.  Epigramme 173 

LXIV.  Rondeau , 174 

LXV.  Remerciment  présenté  au  Roi  en  Tannée  i663 17$ 


58o  TABLE   DES  MATIÈRES. 

LXVI.  A  Monseigneur  le  due  de  Guise,  sur  la  mort  de  Mon- 
seigneur son  oncle.  Sonnet 182 

LXV1I.  Au  Roi,  pour  le  retardement   du  payement    de   sa 

pension i85 

LXVIII.  Au  Roi,  sur  son  retour  de  Flandre 186 

LXIX.  Poëme  sur  les  victoires  du  Roi ,  traduit  de  latin  en 

françois  par  P.  Corneille 192 

LXX.  Traductions  et  imitations  de  l'épigramme  latine  de 
M.  de  Montmor,  premier  maître  des  requêtes  de 
l'hôtel  du  Roi , , 218 

LXXI.  Au  R.  P.  Delidel,  de  la  Compagnie  de  Jésus,  sur  son 

traité  de  la  Théologie  des  saints 220 

LXXII.  Au  Roi,  sur  sa  conquête  de  la  Franche-Comté 2  23 

LXXIII.  Sur  le  canal   du  Languedoc  5  pour   la  jonction  des 

deux  mers.  Imitation 23 1 

LXXIV.  Air  de  M*  Blondel 233 

LXXV.  Défense  des  fables  dans  la  poésie.  Imitation  du  latin.     2  34 

LXXVI.  Sur  la  pompe  du  pont  Notre-Dame.  Traduction  par 

Pierre  Corneille.  , 242 

LXXVII.  Pour  la  fontaine   des  Quatre-Nations ,  vis-à-vis  le 

Louvre.  Traduction  par  Pierre  Corneille 244 

LXXVIII.  Traduction  en    vers    françois    de    la    Thébaïde  de 

Stace 245 

LXXIX.  Sur  le  départ  du  Roi 247 

LXXX.  Vers  présentés  au  Roi  à  son  retour  de  la  guerre  d'Hol- 
lande, le  2  août  1672 , 249 

LXXXI.  Les  victoires  du  Roi,  sur  les  Etats  de  Hollande,  en 
l'année  M.DC.LXXII.  Par  P.  Corneille.  [Traduit 
du  latin  du  P.  de  la  Rue.] 252 

LXXXII.  Sur  la  prise  de  Mastric.  Sonnet , 285 

LXXXIII.  Au  Roi,  sur  sa  libéralité  envers  les  marchands  de 

la  ville  de  Paris.  [Traduit  du  latin  de  Santeul.]  .      287 

LXXXIV.  Au  Roi,  sur  son  départ  pour  l'armée,  en  1676.. ..      299 

LXXXV.  Vers  présentés  au  Roi  sur  sa  campagne  de  1676. .  . .     3o4 

LXXXVI.  Placet  au  Roi, , 3o8 


TABLE  DES    MATIÈRES.  58i 

LXXXVII.  Au  Roi,   sur   Cinna,   Pompée,   Horace,   Sertorius , 
OEdipe ,    Rodogune,    qu'il   a    fait   représenter   de 

suite  devant  lui  à  Versailles,  en  octobre  1676. .  .  309 

LXXXVIII.  Version  de  l'ode  à  Monsieur  Pellisson 3i5 

LXXXIX.  Sur  les  victoires  du  Roi,  en  l'année  1677 322 

XC.  Au  Roi,  sur  la  paix  de  1678 3  26 

XCI.  Inscription  pour  l'Arsenal  de  Brest.  Traduction 33 1 

XCII.  A  Monseigneur,  sur  son  mariage 334 

APPENDICE    DES    POESIES    DIVERSES. 

I.  Relation  du  ballet  du  château  de  Bissestre 341 

II.  Trois  pièces  de  la  Guirlande  de  Julie 344 

III.  Le  Presbytère  d'Hénouville »...  345 

IV.  Epitaphe  de  Richelieu 352 

V.  Sonnets  d'Uranie  et  de  Job 352 

VI.  Deux  sonnets  signés  G ....  , 354 

VII.  Vers  imités  de  Lucain  et  d'Horace 355 

VIII.  Epigrammes  attribuées  à  Corneille 357 

IX.  Deux  sonnets  pour  Timocrate 35o. 

X.  Note  sur  Mademoiselle  Serment 36i 

XI.  Élégie 362 

XII.  Plainte  de  la  France  à  Rome  sur  l'assassinat  de  son  am- 

bassadeur. Elégie r 367 

XIII.  Vers  de  Corneille,  de  ses  amis  et  de  ses  partisans  contre 

l'abbé   d'Aubignac 372 

XIV.  Quatrain  pour  le  Christ  de  Saint-Roch  à  Paris..  « 377 

XV.  Epître   dédicatoire  du  P.  de   la  Rue  à  Corneille,  et  vers 

sur  la  mort  de  Charles  Corneille,  son  troisième  fils. . .  378 

XVI.  Sur  les  conquêtes  du  Roi  [en  1672] 385 

XVII.  Vers  anonymes,  publiés  dans  le  Mercure  de  1677 386* 


582  TABLE   DES   MATIERES. 


OEUVRES  DIVERSES  EN  PROSE, 


Notice 3o.  i 

I.  Epitaplie  de  dom  Jean  Goulu,  général  des  Feuillants..  . . .      3q6 

II.  Lettre  apologétique  du  sieur  Corneille,  contenant  sa  réponse 

aux  Observations  faites  par  le  sieur  Scudéry  sur  le  Cid. .      399 

III.  Discours  prononcé  par  Monsieur  Corneille,  avocat  général 

à  la  table  de  marbre  de  Normandie,  le  22.  Janvier  1647, 
lorsqu'il  fut  reçu  [à  l'Académie  françoise]  à  la  place  de 
Monsieur  Maynard 4°7 


LETTRES. 

Notice . 4^ 

i-3.  De  Corneille  à  Boisrobert 427 

4.  De  Corneille  à** 429 

5.  De  Corneille  à  Boisrobert. , 43o 

6.  De  Corneille  à** 4^2 

7.  De  Corneille  à  Monsieur  Goujon,  avocat  au  conseil  privé  du 

Roi 433 

8.  De  Claude  Sarrau  à  Corneille 438 

9-10.  De  Balzac  à  Corneille 44° 

1 1 .  De  Corneille  à  Voyer  d'Argenson 444 

12.  De  Corneille  à  Monsieur  de  Zuylicbem 448 

i3.  De  Corneille  à  Monsieur  Dubuisson , 4^2 

14.  De  Corneille  à  Monsieur  de  Zuylichem 453 

i5-i8.  De  Corneille  au  révérend  Père  Boulart 4^8 

19-20.  De  Gilles  Boileau  à  Monsieur  de  Corneille 473 

ai.  De  Corneille  à  Pellison 477 

22-24.  De  Corneille  à  l'abbé  de  Pure 478 

25.  De  Chapelain  à  Corneille. 488 

26-27.  De  Corneille  à  l'abbé  de  Pure 489 


TABLE  DES   MATIERES.  583 

o>.8.  De  Chapelain  à  Corneille. 49^ 

29.  De  Corneille  à  Monsieur  de  Saint-Evremond 497 

30.  De  Saint-Evremond  à  Corneille 499 

3 1 .  De  Corneille  à  Colbert.  .  , 5oi 


APPENDICE    DES    LETTRES. 

De  Corneille  à  Rotrou ■ 5o3 

Table   alphabétique  et  analytique  des   OEtjvres  de  Cor- 
neille   , 5o5 

Table  des  Poésies  diverses  ,  rangées   suivant  l'ordre  al- 
phabétique DU   PREMIER   VERS   DE   CHAQUE  PIECE. 6j3 


FIN    DE    LA    TABLE    DES    MATIERES. 


IMPRIMERIE  GÉNÉRALE  DE  CH.  LAHURE 

Rue  de  Fleurus ,  9,  à  Paris 


La  Bibliothèque 
Université  dtOttawa 
Echéance 


The  Library 
University  of  Ottawa 
Date  Due 


a39003  002372^22b 


CE  PQ    174  1 

1862  V010 
CGO   CORNEILLE» 
ACC#  1400929 


a 


OEUVRES  DE