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LES
GRANDS ÉCRIVAINS
DE LA FRANCE
NOUVELLES ÉDITIONS
•UBLIERS SODS LA DIRECTION
DE M. AD. REGNIER
Membre de l'Institut
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in 2011 with funding from
University of Toronto
http://www.archive.org/details/oeuvresdepcornei10corn
OEUVRES
DE
P. CORNEILLE
TOME X
PARIS, IMPRIMERIE DE CH. LAHURF. ET <
Rue de Fleuras, 9
MARg 9 1974
OEUVRES HARl2J973
DE
P. CORNEILLE
NOUVELLE EDITION
KEVUE SUR LES PLUS ANCIENNES IMPRESSIONS
ET LES AUTOGRAPHES
ET AUGMENTÉE
de morceaux inédits, des variantes, de notices, de notes, d'un lexique des mots
et locutions remarquables, d'un portrait, d'un lac-simile, etc.
PAR M. CH. MARTY-LA VEAUX
TOME DIXIEME
PARIS
LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET Q
BOULEVARD S AI JS T- GE H M AI N
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POÉSIES DIVERSES
Corneille, x
NOTICE.
En préparant cette nouvelle édition des Poésies diverses de
Corneille nous nous sommes appliqué d'abord à déterminer
l'époque précise à laquelle chacune d'elles a été composée, ou
tout au moins publiée pour la première fois, afin de pouvoir,
quel qu'en fût d'ailleurs le sujet, suivre en les classant l'ordre
des années; ensuite à recueillir les pièces qui jusqu'ici n'avaient
pas encore été réunies aux OEuvres de notre poète ; enfin, sou-
mettant à un examen approfondi tant celles qui s'y trouvaient
déjà que d'autres qu'on a, dans ces derniers temps, proposé
d'y joindre, nous nous sommes attaché à exclure ce qui ne nous
paraissait pas bien authentique, en ayant soin toutefois de mettre
sous les yeux du lecteur celles des pièces, soit douteuses, soit
même faussement attribuées à Corneille , qui donnent lieu
à de curieux problèmes, et méritent, au moins à ce titre, de
prendre place dans un Appendice, où l'on trouvera aussi les
documents trop étendus pour entrer dans la courte notice qui
précède chaque opuscule.
Ces notices partielles, qui font connaître la date de la pièce,
l'occasion qui lui a donné naissance, la forme sous laquelle elle
a d'abord paru, pourraient suffire à la rigueur; toutefois il ne
sera peut-être pas inutile d'indiquer ici nos sources princi-
pales, et de décrire les recueils successifs et divers qui ont servi
à composer l'ensemble de celui que nous présentons au public.
Les OEuvres diverses de Pierre Corneille publiées en 1738
par l'abbé Granet, et qui forment la première édition collec-
tive des poésies mêlées de notre auteur, contiennent en outre
des ouvrages d'un tout autre caractère. Elles se composent de
quatre parties, qui, pour n'être pas séparées par des titres par-
ticuliers, n'en sont pas moins fort distinctes. La première ren-
4 POESIES DIVERSES.
ferme des poèmes de tout genre , très- variés de sujet et de
ton, et dont la seule unité, le seul lien est d'être adressés au
Roi; ensuite viennent les Poésies diverses proprement dites;
puis les Louanges de la sainte Vierge, et la Traduction de plu-
sieurs psaumes, que nous avons donnée, dans notre tome IX,
d'une manière plus complète et plus fidèle, et dans l'ordre
même adopté par Corneille1; enfin les Arguments et Préfaces
de quelques pièces de théâtre, qui, dans notre édition, ont pris
leur place naturelle en tête de chacun des ouvrages auxquels
ils se rapportent. Pour les Poésies diverses , nous avions donc
seulement à puiser dans les deux premières parties du recueil
de Granet, que les derniers éditeurs ont maintenues séparées,
en se contentant de faire passer au second rang celle que Gra-
net avait placée la première , sauf un très-petit nombre de
pièces qu'ils en ont retirées parce qu'elles ne pouvaient être
rangées sous le titre fastueux de Poèmes sur les victoires du
Roi, qu'ils avaient jugé à propos de lui donner. Nous avons
trouvé préférable de faire disparaître cette division arbitraire,
et de suivre , ainsi que nous l'avons déjà dit, un ordre pu-
rement chronologique.
Passons maintenant en revue les diverses parties constitu-
tives, quelque peu importantes, du recueil de Granet et du
nôtre ; cherchons quels sont les poèmes dont il a ignoré
l'existence, quels sont ceux qu'il connaissait et qu'il a écartés
sciemment ; essayons de découvrir ses principes de critique et
indiquons en même temps ceux qui nous ont guidé.
Les pièces les plus anciennes, et par conséquent les pre-
mières dans notre recueil de Poésies diverses, sont celles qui
ont été publiées par Corneille lui-même, sous le titre de Mé-
langes poétiques, et qui portent les numéros I à XIV, XVI et
XVII. Elles ont paru à la suite de Clitandre, premier ouvrage
que notre poète ait fait imprimer. Elles commencent, à la
page 121 du volume contenant l'édition originale de cette
tragi-comédie, par un frontispice qui, bien que le nom de
Corneille ne figure pas sur le premier titre2, porte néanmoins :
i. Voyez ce que nous avons dit au tome IX, p. 61, de cette partie
de la publication de Granet.
2. Voyez tome I, p. 257.
NOTICE. 5
Meslanges poétiques du mesme, et, au-dessous, l'adresse de
François Targa, et le millésime M. DC. XXXII. Granet consi-
dère ces pièces comme « composées vraisemblablement avant
l'année 16251, » parce qu'il fixe à cette date la première repré-
sentation de Mélite, jouée seulement, suivant nous, en 1629^;
mais bien que la pièce IX soit assurément antérieure à cette
comédie, que, suivant l'expression de Thomas, son frère avait
faite précisément pour « l'employer3, » il est certain néan-
moins, quelle que soit d'ailleurs la date adoptée pour la
premiè -e représentation de Mélite, que deux des pièces des
Mélanges poétiques sont postérieures, non-seulement à la pre-
mière représentation de cet ouvrage , mais encore à celle de
Clitandre. Ces deux pièces, numérotées XVI et XVII, ont été
composées pour une fête donnée le 16 mars i632, c'est-à-dire
huit jours après la date du privilège de Clitandre et quatre jours
seulement avant celle de l'Achevé d'imprimer du volume 4.
L'abbé Granet avait cru devoir tronquer les Mélanges poé-
tiques. « Je n'ai pas fait difficulté, dit-il, de supprimer des plai-
santeries d'un goût peu délicat, et divers traits d'une galanterie
trop libre5. » Ainsi il a fait disparaître les discours de V Ivrogne
et du Joueur , qui terminent la pièce VII , et le numéro IX
tout entier, qui comprend les Êpigrammes d? Audoenus (Owen).
Les éditeurs modernes, tout en complétant les Mélanges poé-
tiques, ont omis cependant , dans le numéro XI , la troisième
épigramme, qui est, nous l'avouons, fort peu claire et dont
d'ailleurs l'original ne se trouve pas dans le recueil latin
d'Owen. Comme elle est toutefois incontestablement de Cor-
neille, nous l'avons jointe aux autres, afin de suivre jusqu'au
bout le plan que nous nous sommes imposé de donner une
édition aussi fidèle et aussi complète qu'il est possible.
Non-seulement nous avons placé les dernières les deux pièces
des Mélanges poétiques (nos numéros XVI et XVII) dont nous
sommes parvenu à fixer la date si rapprochée de celle de
l'Achevé d'imprimer du volume qui les contient à la suite de
1. Œuvres diverses, Préface, folio v, recto.
2. Voyez tome I, p. 129 et i3o.
3. Voyez tomel, p. 126. — 4* Voyez tome I, p. 257.
5. Œuvres diverses. Préface, folio iv, recto.
6 POÉSIES DIVERSES.
Clitandre , mais, pour nous conformer exactement à l'ordre
chronologique, nous avons dû faire passer avant elles un qua-
train composé à l'occasion de la tragi-comédie de Ligdamon
et Lidias, représentée en 1629 et publiée en i63i, quatrain
adressé à Scudéry par Corneille, qui avait négligé d'insérer ces
vers dans les Mélanges. Quoique réunis aujourd'hui pour la
première fois aux Œuvres de notre poète, ils étaient pourtant,
suivant toute apparence, bien connus de Granet, qui a écarté
systématiquement presque toutes les pièces analogues : « Je
me suis abstenu, dit-il, de grossir ce recueil des vers que
M. Corneille, suivant l'usage de ces temps-là, a adressés à divers
poètes dramatiques, et d'autres auteurs, depuis i63o jusqu'en
1660, et qui ont été imprimés au commencement de leurs ou-
vrages, dont ils contiennent l'éloge. Ces vers, faits ordinaire-
ment avec précipitation, m'ont paru froids et peu intéressants.
Je n'ai imprimé que deux ou trois pièces de ce genre pour en
faire connoître le caractère1. » Une donne en effet que les opus-
cules qui, dans notre édition, occupent le XXXIe, le XXXIIe et
le LXXe rang ; les éditeurs qui nous ont précédé y ont ajouté
les numéros XVIII et XLV, et nous y joignons à notre tour
les pièces XV, XIX, XXI, XXXV, XXXVI, XL, XLI et XLII.
Dans son édition de Corneille, M. Lefèvre avait fait une série
intitulée : Poésies latines, qui n'était composée que de trois
articles ; encore, pour parvenir à la former, avait-il été obligé
de séparer de leur texte français les pièces qui figurent dans
notre recueil sous les numéros LXXII et LXXX, et qui, pu-
bliées à la fois en vers français et en vers latins, devaient de
toute nécessité demeurer rapprochées. Ces deux pièces latines
une fois remises à leur place, il n'en restait plus qu'une seule,
la XXe de notre recueil, qu'à l'exemple de Granet nous avons
cru devoir placer à son rang chronologique parmi les poésies
françaises. Cette pièce de vers dans laquelle notre auteur fait
un éloge délicat de Louis XIII et de Richelieu, tout en semblant
s'en défendre, et qui est très -intéressante pour l'histoire des
ouvrages de Corneille, n'a pas été étudiée par les éditeurs avec
tout le soin qu'elle mérite ; nous exprimons ce reproche avec
d'autant plus de liberté que nous n'en sommes pas nous-même
1. Œuvres diverses, folio vu, verso.
NOTICE. 7
exempt. D'après le témoignage unanime des historiens du
théâtre, et des meilleurs biographes de Corneille, nous avons
indiqué la Place Royale comme ayant été représentée en i635';
mais il est évident que cette date est fausse, puisqu'il est ques-
tion de cette comédie dans cette pièce de vers tirée d'un re-
cueil dont l'Achevé d'imprimer, fort tardif, est du 14 août 1634.
Cette erreur en fait pressentir une autre, dont il est difficile au
reste de bien apprécier l'étendue. La Galerie du Palais et la
Suivante sont partout attribuées à cette année i634, réduite
aujourd'hui pour nous à sept mois et demi par la date du
privilège dont nous venons de parler. Si l'on considère que
les vers de Corneille se trouvent à peu près au milieu de ce
volume, qui, comme nous le verrons 2, s'imprima lentement,
au fur et à mesure que les manuscrits arrivaient, cet espace
de temps se trouve encore réduit. Il est dès lors permis de
s'étonner que Corneille ait ainsi fait représenter trois pièces
coup sur coup, et l'on peut avec beaucoup de vraisemblance
reporter tout au moins la Galerie du Palais à l'année i633.
C'est au commencement de cette même année i633 que
M. Edouard Fournier place une pièce de six stances, fort
agréablement tournée, mais que nous n'avons point recueillie,
même dans V Appendice y car rien n'indique qu'elle puisse être
de notre poète. L'infatigable chercheur, qui la publie aux
pages vu et vin des Notes sur la vie de Corneille , si souvent
citées par nous, ne dit ni d'où il la tire, ni par quelles circon-
stances elle est parvenue à sa connaissance; et nos investiga-
tions personnelles n'ont pu suppléer à ce défaut de tout
renseignement. Ces stances, qui, selon M. Éd. Fournier, au-
raient été écrites pour un des concours annuels qui existaient
à Rouen depuis le onzième siècle, sous le nom de Puy ou de
Palinod, et dans lesquels on récompensait par une fleur ou par
une étoile d'argent l'auteur de la meilleure pièce composée en
l'honneur de l'immaculée conception de la Vierge, ne sont
indiquées dans aucun des ouvrages qui parlent de cette
institution3, ouvrages où l'on a toutefois grand soin de men-
i. Voyez tome II, p. 219.
2. Voyez ci-après, p. 65, la Notice de la pièce XX.
3. Voyez Rapport sur les livres et autres objets relatifs à l'Académie
8 POÉSIES DIVERSES.
tionner les succès d'Antoine et de Thomas Corneille , frères de
notre poète ; enfin le manuscrit intitulé : les Trois siècles pâli-
nodiques, conservé dans la bibliothèque de Caen, ne fait con-
naître non plus, ni à l'année i633, ni à aucune autre date1, la
pièce attribuée sans preuve à Pierre Corneille par M. Edouard
Fournier.
Nous avons dû au contraire admettre dans les OEuvres de
notre poète une autre pièce qui se rattache à l'histoire du Puy
de Palinod de Rouen, le Remercîment de Corneille pour Jac-
queline Pascal, lorsqu'elle remporta le prix de poésie. Ce
remercîment, bien qu'il eût paru longtemps avant la dernière
édition de M. Lefèvre , a été réuni pour la première fois aux
Œuvres de notre poêle dans l'édition publiée en i856 à l'im-
primerie Lahure; mais dans cette édition de i856, dépourvue
de tous commentaires, il n'est pas entouré des renseignements
indispensables, si accessibles à tous aujourd'hui, grâce aux
recherches de M. Cousin.
Après que Jacqueline Pascal eut obtenu de Richelieu la grâce
de son père en représentant, à l'âge de treize ans, à la grande
satisfaction du Cardinal , un rôle assez important dans V Amour
tyrannique de Scudéry, Etienne Pascal, rappelé de l'exil auquel
il s'était condamné, fut envoyé à Rouen comme intendant de
Normandie. « M. Corneille, dit Gilberte Pascal dans sa Vie de
Jacqueline, publiée pour la première fois par M. Cousin, ne
manqua pas de venir nous voir; il étoit ravi de voiries choses
que faisoit ma sœur, et il la pria de faire des vers sur la con-
ception de la Vierge, qui est le jour qu'on donne les prix. Elle
fit des stances, et on lui en porta le prix avec des trompettes
et des tambours en grande cérémonie. Elle recevoit cela avec
des Palinods, achetés à la vente de M. Licquet, et Notice sur cette asso-
ciation; présentés à l'Académie de Rouen.... le 22 novembre i833
par A. G. Ballin (Précis.... des travaux de l'Académie pendant Van-
née i834j tome XXXVI, p. 197 et suivantes.) — Suite à la notice...,
tome XL, p. 296 et suivantes. — Deuxième suite à la notice. ..,
tome XLV, p. 227 et suivantes. — Des Puy s de Palinods en géné-
ral , etc., par Bottée de Toulmon, Revue française, juin i838, p. 102
et suivantes.
1. Notre confrère M. Eugène Châtel , archiviste du Calvados, a
bien voulu se charger de cette vérification,
NOTICE. 9
une indifférence admirable; et elle étoit même si simple, que,
quoiqu'elle eût alors quinze ans, elle avoit toujours des
poupées qu'elle habilloit et désbabilloit avec autant de plaisir
que si elle n'eût eu que dix ans1. » A la séance du mois de
décembre 1640, quand M. de Nonant , lieutenant de Roi au
ducbé d'Alençon, président ou, comme on disait alors, prince
du Puy, proclama la victoire de Jacqueline, la petite fille n'était
pas présente; mais Corneille, qui l'avait engagée à concourir,
n'avait eu garde de manquer la séance, et tout heureux du
succès de sa jeune protégée, il improvisa le Remerciaient qu'on
lira plus loin (voyez pièce XXIV, p. 81).
Cette pièce se trouve à la page 663 du manuscrit des Mé-
moires de Marguerite Périer*. On rencontre d'abord, à la page
que nous venons d'indiquer et à la suivante, les vers de Jac-
queline Pascal, intitulés : Sur la conception de la Vierge pour
les palinods de Cannée 1640, qui remportèrent le prix de la
Tour, Stances; ensuite la pièce de Corneille, dont voici le
titre complet : Remerciment fait sur-le-champ par Mr Cor-
neille lorsque le prix fut adjugé aux stances précédentes ;
et enfin, avec la date de décembre 1641, une seconde pièce
de Jacqueline Pascal , répondant cette fois en son propre
nom, intitulée : Remerciment pour le prix des stances Vannée
suivante.
Le Remerciment de Corneille signalé en 1842 par M. Sainte-
Beuve dans son Histoire de Port-Royal* a été publié par M. Cou-
sin dans le Bulletin du bibliophile (6e série, 1 843- 184 4 5
p. 273), et presque simultanément dans la Bibliothèque de
CÉcole des chartes (ire série, tome V, p. 33o), où l'on trouve
aussi les deux pièces de Jacqueline Pascal dont nous venons
de parler. On peut consulter encore à ce sujet Y Histoire de la
vie et des ouvrages de P. Corneille par M. J. Tascbereau. ie édi-
tion, p. 106 et 3 17, et les Mémoires de t Académie de Rouen,
tome XXXVI, p. 197, et tome L, p. 293.
Nous trouvons dans les Œuvres diverses publiées par Granet
trois pièces composées pour la Guirlande de Julie, à l'occasion
1. Bibliothèque de V Ecole des chartes, ire série, tome V, p. 3o8.
2. Bibliothèque impériale, fonds français 12988.
3. Tome II, p. 469, 2e édition.
io POÉSIES DIVERSES.
desquelles l'éditeur reproduit dans sa Préface * le passage
suivant du Huetiana 2 : « Jamais l'amour n'a inventé de ga-
lanterie plus ingénieuse, plus polie et plus nouvelle que la
guirlande de Julie, dont le duc de Montausier régala Julie
d'Angennes un premier jour de l'an, lorsqu'il la recherchoit
en mariage. Il fit peindre séparément en miniature toutes les
plus belles fleurs par un excellent peintre (Robert), sur des
morceaux de vélin de même grandeur. Il fit ménager au
bas de chaque figure assez d'espace pour y faire écrire un
madrigal sur le sujet de fleur qui y étoit peinte, et à la
louange de Julie. Il pria les beaux esprits de ce temps-là, qui
presque tous étoient de ses amis, de se charger de la composi-
tion de ces pièces, après s'en être réservé la meilleure partie.
Il fit écrire au bas de chaque fleur son madrigal par un homme
qui avoit beaucoup de réputation pour la beauté de son écri-
ture (Jarry). Il fit ensuite relier tout cela magnifiquement
(par le Gascon). Il en fit faire deux exemplaires tout pareils,
et fit enfermer chacun dans un sac de peau d'Espagne. Voilà
le présent que Julie trouva à son réveil sur sa toilette le pre-
mier jour de l'année i633 ou i634. »
Tout est exact dans ce récit, excepté l'année à laquelle Huet
place le présent du duc de Montausier. Le frontispice du ma-
nuscrit composé d'une guirlande, au milieu de laquelle on lit :
La Guirlande de Julie, pour Mademoiselle de Rambouillet
Julie -Lutine d ' Angennes , porte la date de 1641. Cette date
concorde parfaitement avec le témoignage de Tallemant des
Réaux, qui nous apprend que Montausier envoya ce présent
à Mlle de Rambouillet a trois ou quatre ans avant que de
l'épouser3. » Leur mariage ayant eu lieu le i5 juillet 164$,
cette indication nous reporte bien à l'année 1641.
Le recueil de Sercy, dont nous aurons à parler tout à
l'heure plus longuement, et dans la seconde partie duquel la
Guirlande de Julie a paru pour la première fois en i653,
marque trois pièces comme étant de Corneille : la Tulipe , la
Fleur d! orange et V Immortelle blanche. Granet, qui a mis ces
pièces dans son recueil, et qui les classe, non suivant l'époque
1. Folio v. — 2. Paris, 1722, p. io3.
3. Historiettes t tome II, p. 528.
NOTICE. ii
où elles ont été composées, mais d'après l'année où Sercy les a
imprimées, les reproduit sans y rien ajouter, et la plupart des
éditeurs ont suivi son exemple. M. Taschereau est d'avis d'en
attribuer trois autres à Corneille. « Ce dernier, dit-il, porta
la parole au nom du lis, de la tulipe, de l'hyacinthe, de la
fleur d'orange, de la fleur de grenade et de l'immortelle
blanche1. » — « Granet, ajoute-t-il en note2, n'attribue à Cor-
neille que la Tulipe, la Fleur cV orange et P Immortelle blanche.
S'il eût lu la Guirlande de Julie attentivement, il se serait
aperçu que les trois autres pièces portent la même signature C, et
il eût senti qu'il y avait les mêmes raisons pour les regarder
comme sorties également de la plume de Corneille. Des édi-
teurs de la Guirlande, et notamment M. Nodier, sont plus
conséquents dans leur erreur en les attribuant toutes six au
même auteur, Conrart. » Conformément à cette opinion, l'édi-
teur des Œuvres complètes de Corneille, publiées à l'imprimerie
Lahure, n'a pas hésité à admettre les trois pièces jusque-là
repoussées. Quant à nous, déterminé moins par l'exemple de
Granet que par celui de Sercy, qui était probablement guidé
par des renseignements positifs lorsqu'il n'attribuait à Corneille
que trois des six pièces signées C. dans le manuscrit original,
nous n'osons être plus décisif que lui , et nous nous conten-
tons de renvoyer à Y Appendice les trois pièces qui sont l'objet
du litige.
Le Presbytère d'B.énouville, que l'ordre chronologique amène
après la Guirlande de Julie, est un agréable petit poème qu'on
voit volontiers figurer parmi les GEuvres de Corneille. Peut-être
est-ce là le motif qui l'y a fait admettre si facilement. Examinons
cependant la manière dont il s'y est introduit , et voyons s'il
y a lieu de l'y maintenir. En i834, M. Emm. Gaillard publia
dans le Précis analytique des travaux de V Académie de Rouen
(p. 164-169) un mémoire intitulé : Nouveaux détails sur Pierre
Corneille recueillis dans V année où Rouen érige une statue à
ce grand poêle. Ce mémoire commence ainsi : « Corneille
naquit un samedi et mourut un dimanche. Il vécut cinquante-
1. Histoire de la vie et des ouvrages de P. Corneille, deuxième édi-
tion, p. 107 et 108.
2. Page 3 18.
ia POÉSIES DIVERSES.
six ans à Rouen, y élevant six enfants, y soignant sa vieille
mère, et passant ses étés à Hénouville jusqu'à l'époque de
son mariage. M. l'abbé Antoine Legendre, curé d'Hénouville,
était son ami intime. C'était dans un presbytère que Corneille
venait jouir des beaux jours. Ils allaient ensemble voir cette vue
ravissante de la Seine, que nous admirons tant des hauteurs
d'Hénouville. L'abbé Legendre lui parlait de la Manière de bien
cultiver les arbres fruitiers, car ce physicien, né au Vaudreuil,
a contribué à l'édition de ce livre très-estimé, s'il n'en a été
l'auteur; et Corneille faisait pour lui la description en vers du
presbytère d'Hénouville, ouvrage que le père de la tragédie
fit imprimer à Rouen en 1642, sous le format in-12. Alors Cor-
neille avait trente- six ans, et était marié depuis deux ans; il
ne pouvait plus songer à passer ses vacances chez un prêtre,
où une jeune femme et des petits enfants auraient mal figuré.»
Ce petit récit est sinon contredit, au moins gêné par une
étude récente de M. Gosselin , qui de son côté déclare tout
aussi affirmativement que Corneille passa pendant toute sa
jeunesse la belle saison dans une maison acquise par son père
le 16 juin 1608 à Petit-Couronne, « C'est là indubitablement ,
dit-il, que l'auteur du Cid vint s'inspirer; c'est là, sous ces
grands arbres de la forêt, que, tout jeune homme, il alla rêver
à sa chère Mélite; et c'est là aussi, en présence de ces côtes si
belles et si pittoresques qui longent la Seine de Rouen à la
Rouille, qu'il médita les œuvres immortelles qui devaient por-
ter son nom si haut et si loin l. » On voit que M. Gosselin re-
vendique pour Petit- Couronne l'honneur que M. Gaillard attri-
buait à Hénouville ; il ne peut pas se dire bien sûr, lui non plus,
du détail des faits, mais la possession continue par Corneille de
la maison de campagne que son père avait achetée, donne au
moins une certaine vraisemblance à sa conjecture.
Du reste, que Corneille ait passé tous ses étés à Hénouville,
ou qu'il y ait seulement visité parfois son ami, il demeure très-
possible, dans les deux cas, qu'il soit l'auteur du petit poëme
qui nous occupe ; mais nous tenions à montrer que les rensei-
1. Pierre Corneille {le père) et sa maison de campagne. Extrait de
la Revue de Normandie des 3i mai et 3o juin 1864. — Rouen, imp.
deE. Cagniard, p. 3o.
NOTICE. i3
gnements fournis par M. Gaillard, qui sont le point de départ
de l'attribution du Presbytère cïHénoiwille à Corneille, sont
loin d'être à l'abri de toute critique et exacts de tout point.
Le Presbytère d'Hénouville est demeuré fort longtemps sans
attirer d'une façon sérieuse l'attention des amis de Corneille.
M. Taschereau, qui connaissait bien le mémoire de M. Gail-
lard, qui s'est trouvé en dissentiment avec lui au sujet
de la qualification de gentilhomme ordinaire du Roi, donnée à
Corneille, qui même a relevé en plaisantant la phrase assez
singulière par laquelle commence le mémoire de M. Gaillard ',
n'a pas dans son édition de i855 dit un seul mot du Presbytère
d'Hénouville, soit pour l'admettre, soit pour l'écarter comme
un ouvrage attribué faussement au poète dont il a écrit la vie
avec une sollicitude si constante et si éclairée. Plus hardi,
Lefèvre admet sans hésiter, dans l'édition de i854 des OEuvres
de Corneille, le Presbytère d'Hénouville. Nous devons ajouter
que dans un précédent travail nous avons accepté cette attri-
bution de confiance2, et qu'elle a été adoptée plus tard par
des juges fort compétents, MM. Brunet3 et Fournier4. Toute-
fois, en examinant aujourd'hui les choses de plus près, nous
nous sentons disposé à être beaucoup moins afïirmatif. Cette
pièce n'est pas signée, même d'une simple initiale; le libraire
Eoullenger, chez qui elle a paru, n'a jamais, à notre connais-
sance, rien publié de Corneille ; enfin un indice , insuffisant à
coup sûr pour décider la question, mais qui ne doit peut-être
pas non plus être entièrement négligé, nous porterait à croire
que le Presbytère d'Hénouville , composé par quelque poète
normand, ami commun de Legendre et de Corneille, est adressé
à ce dernier. Dans Mélite , et probablement aussi dans un
dialogue qu'on trouvera ci-après, p. 5o, Tircis est le nom
poétique que Corneille s'est choisi lui-même : or le Presbytère
d'Hénouville est adressé « à Tircis. » Nous n'avons pas voulu,
i. Histoire de la vie et des ouvrages de P. Corneille, 2e édition,
p. 277.
2. De la langue de Corneille, 1861, in-8°, p. 4$.
3. Manuel du libraire, dernière édition, tome II, p. 286.
4. Notice sur la vie de Corneille, en tête de Corneille à la butte Saint-
Roch, p. lxxi et lxxii.
14 POÉSIES DIVERSES.
malgré nos doutes, rejeter cette jolie pièce, admise déjà deux
fois dans les Œuvres de notre poëte ; mais Y Appendice nous
a paru le seul endroit où elle pût figurer.
C'est aussi à V Appendice que nous avons placé une Êpi-
tophe de Richelieu, écrite de la main même de Corneille au dos
d'un brouillon d'acte dont nous aurons à parler plus loin et
qui a été découvert dans les archives du parlement de Nor-
mandie, par M. Gosselin, grenier à la cour impériale de Rouen.
Ces vers ont été publiés en 1857 par M. Taschereau1, qui les
attribue à Corneille. Nous ne pensons pas qu'il en soit l'auteur:
nous croyons qu'il s'est contenté d'écrire au dos d'un brouil-
lon une épitaphe ou plutôt une épigramme qu'on venait de lui
réciter et qui lui paraissait piquante. Ce qui semble confirmer
cette opinion, c'est que cette épitaphe a paru, en 1693, dans
le Tableau de la vie et du gouvernement de Messieurs les cardi-
naux Richelieu et Mazarin et de Monsieur Colbert, représenté
en diverses Satyres et Poésies ingénieuses.,.. A Cologne , chez
Pierre Marteau, in-8°, p. 55, et que l'auteur de ce recueil
n'a certes pas été la chercher sur le dossier du greffe de
Rouen ; il faudrait donc croire, si Corneille en était l'auteur,
qu'il en aurait distribué des copies, ce qui, dans sa position
à l'égard de Richelieu, ne paraît nullement vraisemblable.
Ajoutons que, dans le livre de 1693 que nous venons de citer,
on trouve, à la suite de l'épitaphe écrite par Corneille sur le
dossier de Rouen, une autre épigramme où une pensée fort
analogue est exprimée sous une forme presque identique.
Pour ce qui est du classement chronologique des pièces,
nous en avons déplacé un grand nombre , et presque toujours
il nous a suffi, afin de justifier le nouvel ordre, de signaler
brièvement, dans les notices partielles, les faits que nous a
révélés une étude plus attentive des éditions originales de cer-
tains recueils2, ou les erreurs matérielles échappées à quel-
1. OEuvres complètes de P. Corneille, tome I, p. xx.
1. C'est ainsi que la plupart des pièces du recueil de Sercy se
trouvent déplacées par la connaissance des premières éditions des
cinq volumes de la collection, qui datent de i653-i66o, et non
de 1 660-1 665, comme l'avait cru Granet, ni même de 1660, comme
l'avait pensé Lefèvre. Voyez ci-après, p. 16 et suivantes.
NOTICE. i5
ques-uns de nos devanciers1. Toutefois il est un petit poëme
au sujet duquel il convient d'entrer dans quelques détails qui
seront mieux à leur place ici.
M. Ludovic Lalanne a découvert dans le portefeuille 217 du
recueil manuscrit des Godefroy de la bibliothèque de l'Institut
un sonnet fort curieux de Corneille, qu'il a publié dans le nu-
méro du 26 mars i853 de V Athenœum français. Dans ce son-
net, notre poëte se plaint au Roi de ce qu'on veut lui enlever
les privilèges qui lui avaient été conférés par les lettres de
noblesse accordées à son père2. Il était fort naturel de sup-
poser que cette fière supplique était postérieure à l'édit célèbre
du mois de septembre 1664, par lequel Louis XIV révo-
quait toutes les lettres de noblesse accordées depuis le ier jan-
vier i634 : M. Lalanne, dans la petite notice qui accompagnait
sa découverte, et M. Taschereau, dans son Histoire de la vie et
des ouvrages de Corneille 3, ont tous deux adopté cette opinion ;
mais quelques vers de Boisrobert prouvent qu'elle n'est pas
exacte et que les plaintes de Corneille remontaient à une épo-
que beaucoup plus reculée. La réclamation de Boisrobert,
adressée à Seguier, est intitulée : A Monseigneur le Chancelier.
En voici l'argument : // lui veut rendre ses lettres d* anoblisse-
ment s'' il ne le fait distinguer des autres nouveaux anoblis sur
lesquels on a mis des taxes. Après avoir exposé ses propres
doléances, Boisrobert ajoute :
J'apprends que l'illustre Corneille
Souffre une disgrâce pareille.
Penses-tu que les bons auteurs
Soient un gibier à collecteurs ?
Distingue-nous de la canaille
Qui pour s'affranchir de la taille
A beaux deniers ont acheté
Cette nouvelle qualité.
Voyons maintenant de quelle époque datent ces vers ; ils se
1. Le Sonnet à M. de Campion, par exemple, que Lefèvre date de
1647 et place en conséquence, n'est réellement que de 1657. Voyez
ci-après, p. 137 et i38.
2. Voyez ci-après, pièce XLIV, p. i35, et tome III, p. i5 et 16.
3. Pages 199 et 200, 2e édition.
i6 POÉSIES DIVERSES.
trouvent dans la seconde partie des Épures de Boisrobert i, dont
voici le titre exact et complet : Les Epistres en vers et autres
œuvres poétiques de MT de Bois-Robert-Metel, Conseiller d'Estat
ordinaire, Abbé de Chastillon sur Seine, à Paris, chez Augus-
tin Courbé..., M.DC.LIX, in-8°. L'Achevé d'imprimer de ce
volume est du « 10. iour de May i65g. » On voit par là que
le sonnet de Corneille est au moins de cinq ans plus ancien
qu'on ne Fa pensé; mais comme il existe une déclaration du
3o décembre i656 sur les nouveaux anoblis, il est probable
que les deux réclamations poétiques de Corneille et de Bois-
robert furent rédigées l'année suivante et doivent être placées
en 1657. Plus tard, la Fontaine en fit une du même genre;
mais, comme le remarque M. Walckenaer, elle est nécessaire-
ment postérieure au 20 avril 16622.
Le sonnet A Monseigneur le Duc de Guise (pièce LXVI,
p. 182), que tous nos prédécesseurs ont placé à 1640, et que,
par des motifs exposés dans la notice qui le précède, nous avons
transporté à l'année 1664, fournit encore un exemple des
changements considérables qui étaient à faire dans le classe-
ment des Poésies diverses.
Nous avons dit plus haut que nous reviendrions sur le re-
cueil de Sercy; nous allons en donner une description dé-
taillée. Il renferme un grand nombre de petites pièces signées
Corneille; et pour juger de leur degré d'authenticité et les
classer suivant leur date avec autant d'exactitude qu'il est
possible, il importe de bien connaître cette collection, sou-
vent réimprimée, qu'on ne cite pas d'ordinaire d'après les
éditions originales, et qu'on n'a pas encore examinée d'assez
près. Ces éditions originales sont rares ; néanmoins on les
trouve toutes à la Bibliothèque impériale, et c'est d'après
les exemplaires de cet établissement que nous allons les dé-
crire. Le recueil se compose de cinq parties , chacune en
un volume in- 12. La première contient le privilège, accordé
pour neuf ans et daté du « 19. iour de Ianuier i653 ; » on
lit à la fin : « Acheué d'imprimer le 24. Mars i653. » Ce vo-
1. Pages ii3 et 114,
2. Histoire de la vie et des ouvrages de J. la Fontaine, 3e édition,
p. 106.
NOTICE. 17
lume porte le titre suivant dont nous conservons la disposition
matérielle :
Poésies choisies
de messieurs
Corneille. De Montereuil.
Bensserade. Vignier.
De Scudery. Chevreau.
Boisrobert. Malleville.
Sarrasin. Tristan.
Desmarests. Testu.
Bertaud. Maucroy.
S. Laurent. De Prade.
Colletet. Girard.
La Mesnardiere. De l'Age.
Et plusieurs autres.
A. Paris,
Chez Charles de Sercy, au Palais, dans la Salle
Dauphine, à la Bonne-Foy couronnée.
M.DC.LIII.
Avec Privilège du Roy.
L'Achevé d'imprimer de la seconde partie est du ri*. Aoust
[653 ; » celui de la troisième, du « 6. Feurier i656; » celui delà
quatrième, du 12. Ianuier i658; » entin celui de la cinquième
et dernière, du « 18. Aoust 1660.»
Le plus ordinairement les pièces qui composent ce recueil
sont signées en toutes lettres ; il n'est pas rare néanmoins
qu'elles le soient seulement d'initiales ; parfois elles sont ano-
nymes ; enfin il arrive qu'une pièce anonyme dans le recueil
est signée à la table des matières. Mais il n'est pas à croire
qu'à moins de motifs tout particuliers, les pièces de Cor-
neille , dont le nom figure le premier sur le titre, aient été
insérées dans le recueil sans porter de nom, ou même qu'on ne
les ait signées que de la simple initiale C.
Examinons maintenant quelle est sa part dans cette multitude
de poésies en général assez médiocres.
Dans le premier volume, publié, comme nous l'avons dit,
en i653, nous trouvons (p. 235-238) la pièce XXXIV et
Corneille, x 2
,8 POÉSIES DIVERSES.
(p. 399-402) les pièces XXXVII-XXXIX de notre édition des
Poésies diverses ; elles sont signées en toutes lettres et ne peu-
vent donner lieu à aucun doute. A ces quatre pièces incontes-
tables, M. Paul Lacroix voudrait ajouter un sonnet qui, ano-
nyme dans le recueil, est signé C. à la table des pièces.
Suivant M. Lacroix, ce sonnet « date sans doute de l'époque où
le grand poète, victime de la jalousie littéraire de Richelieu,
cessa d'être un des cinq auteurs du Palais-Cardinal et se retira
de la cour, où il n'avait fait que passer en se sentant mal à
l'aise dans le rôle de courtisan Il faut choisir entre Cottin,
Chevreau et Corneille ; nous n'hésitons pas après avoir lu ces
beaux vers cornéliens1. » Quant à nous, nous l'avouons, nous
ne sommes nullement convaincu ; les vers sont assez beaux en
effet, mais n'ont rien, à notre avis, de vraiment cornélien ; et
si nous éprouvons quelque embarras à les abandonner à Cottin,
nous n'en ressentons aucun à les renvoyer à Chevreau. Nous
recueillons d'ailleurs la pièce à Y Appendice (n° VI, p. 3f>4)»
afin que le lecteur puisse se prononcer suivant son impression,
car il est à peu près impossible d'invoquer, en pareille circon-
stance, de véritables preuves.
La seconde partie du recueil de Sercy ne contient de Cor-
neille que les pièces XXV-XXVII de notre édition des Poésies
diverses, qui font partie de la Guirlande de Julie ; et nous ve-
nons de dire (p. 11) que c'est précisément le témoignage de
Sercy qui nous a engagé à porter le nombre des pièces com-
posées par notre poète, pour cette circonstance, à trois seu-
lement, et non à six, comme l'ont fait certains éditeurs.
La troisième partie des Poésies choisies de Sercy, publiée
pour la première fois le 6 février i656, comme nous l'avons
dit plus haut, et non en 1662, comme le pense M. Lacroix -,
ne contient le nom de Corneille ni sur le titre, ni à la fin de»
pièces, ni dans la table; on n'y voit figurer non plus ni le nom
de Cottin, ni celui de Chevreau, ni aucun autre nom commen-
çant par un C, si ce n'est, à la fin d'un sonnet en bouts-rimés,
celui d'un certain Cebret; mais dans ce volume, dont le titre
ne porte aucun nom entier commençant par unC, il y a deux
I. Revue des provinces, i5mars 1864, tome II, p. 477 et 47^-
a. Revue des provinces, tome II, p. 478.
NOTICE. 19
sonnets signés de cette lettre : l'un, que nous n'avons nulle
envie d'attribuer à notre poëte , parle d'un linot envolé qui
rentre en cage de peur de faire pleurer sa maîtresse ; l'autre,
d'un genre fort différent, qui ne se trouve point dans la pre-
mière édition, mais qui paraît dans la réimpression de i658,
a été signalé avec beaucoup de vraisemblance par M. Lacroix
comme étant de Corneille ; on le trouvera, également dans
V Appendice sous le n° VI : nous avions même grande en-
vie de l'admettre dans les OEuvres ; toutefois, quoiqu'il nous
ait paru non-seulement égal, mais même supérieur à beaucoup
de morceaux contenus dans les Poésies diverses, et qui sont
incontestablement de Corneille ; bien qu'il soit en rapport
avec la disposition d'esprit de notre poëte à cette époque,
et que nous y ayons trouvé deux vers qui sont comme un sou-
venir de la pièce intitulée : la Poésie à la Peinture; quoique
nous reconnaissions enfin qu'il est naturel que notre auteur
n'ait point voulu signer en toutes lettres une œuvre si person-
nelle, et, comme on le dirait aujourd'hui, si intime, nous
aimons mieux être accusé d'une réserve exagérée que de cou-
rir le risque d'introduire à tort dans les OEuvres de Corneille
une pièce après tout encore douteuse, et nous nous conten-
tons, en la renvoyant à V Appendice, comme c'est en pareil cas
notre coutume, de la recommander d'une manière toute parti-
culière à l'attention des lecteurs.
Dans la quatrième partie, non-seulement Corneille n'est pas
nommé, mais il n'y a même aucune pièce qu'on ait eu l'idée
de lui attribuer.
La cinquième partie, au contraire, ne contient pas moins de
dix-neuf pièces signées Corneille, et que jusqu'ici les éditeurs
ont toutes attribuées à Pierre. Granet, il est vrai, en a sup-
primé quelques-unes; mais ce n'était point parce qu'il doutait
de leur authenticité : c'était, ainsi qu'il le déclare lui-même,
parce qu'elles renferment « divers traits d'une galanterie trop
libre1. » Remarquons cependant que dans le recueil de Sercy
le nom de Corneille n'est jamais accompagné de prénom, ni des
désignations d'aîné ou de jeune, et qu'on est en droit de ^e
demander si un certain nombre des pièces suivies de cette
[ . Œuvres diverses, préface, folio iv, recto.
20
POÉSIES DIVERSES.
signature n'appartiennent pas à Thomas Corneille : le témoi-
gnage de Conrart, et plus encore une lecture attentive et réflé-
chie, nous le prouvent quant à l'une d'elles, que nous avons
placée dans \ Appendice sous le numéro XI, et que Granet et
tous les autres éditeurs de Corneille n'avaient pas manqué
d'accepter de confiance. Dans les dix-huit qui restent, il en
est bon nombre que nous serions fort tenté de laisser aussi à
Thomas, ne fût-ce qu'à cause de leur faiblesse; mais il faut se
garder en ces matières de se laisser entraîner, sans preuves
positives, à ses prédilections ou à ses répugnances, et nous
sommes obligé de tout recevoir, sous bénéfice d'inventaire tou-
tefois, et en signalant au lecteur ce danger jusqu'ici inaperçu.
INous n'avons pas voulu néanmoins augmenter, comme à plai-
sir, le nombre de ces pièces litigieuses à partager entre les
deux frères : ainsi nous laissons à Thomas deux sonnets sur
sa tragédie de Timocrate , qui portent seulement le nom de
Corneille, et que M.Lacroix attribue à Pierre1. Du reste, non-
seulement il est possible que parmi les pièces que nous attri-
buons à Pierre, certaines soient de Thomas, mais encore il
peut arriver qu'elles ne soient ni de l'un ni de l'autre. Nous
prouverons dans Y Appendice 2 qu'une pièce que nous y avons
rejetée, qui est attribuée à l'auteur du Cid dans les éditions
les plus récentes de ses Œuvres, et qui est signée de lui dans
plusieurs recueils formés de son temps, est en réalité de Fléchier.
Une épigramme dirigée contre d'Aubignac, que M. Lacroix
regarde comme étant de Corneille, dont elle porte en effet la
signature dans un recueil, est considérée, avec bien plus de
vraisemblance, comme appartenant à Cottin, par un écrivain
fort au courant des faits de ce genre, Tallemant des Réaux,
qui en citant les épigrammes faites contre d'Aubignac en faveur
de notre poète, évite prudemment dans la plupart des cas les
attributions formelles , et se contente de dire que telle petite
pièce est de Corneille ou de « quelque corneillien3. » Une
autre épigramme des plus médiocres, signée Corneille dans un
recueil de Cbamoudry, se trouve dans les Œuvres de Saint -
i. Voyez X Appendice, n° IX.
a. No XII.
3. Voyez V Appendice, n° XIII.
NOTICE, 21
Amant1. Il y avait alors en ce genre, non- seulement de fré-
quentes méprises, mais des fraudes volontaires et calculées.
«Les pièces.... qui sont rapportées ici, dit le P. Bouhours dans
son Recueil de vers choisis 2, ne se donnent qu'à leurs véri-
tables auteurs, ou du moins qu'à ceux qui passent constamment
pour les avoir faites ; car on feroit scrupule d'imposer au public,
à l'exemple de certaines gens qui, après avoir fait faire des
pièces par je ne sais quel auteur à gages , les mettent sur la
tête de quelque écrivain célèbre, pour grossir et vendre plus
cher le volume de ses œuvres. »
En cherchant à éclaircir cette partie difficile de notre tâche,
nous comprenions le ravissement avec lequel Madelon, dans
les Précieuses ridicules3, se promet de voir venir chez elle
« tous ces Messieurs du Recueil des pièces choisies. » — « Par le
moyen de ces visites spirituelles, on est instruit, ajoute-t-elle,
de cent choses qu'il faut savoir de nécessité, et qui sont de
l'essence du bel esprit. On apprend par là chaque jour les
petites nouvelles galantes, les jolis commerces de prose ou de
vers. On sait à point nommé, un tel a composé la plus jolie
pièce du monde sur un tel sujet ; celui-ci a fait un madrigal
sur une jouissance ; celui-là a composé des stances sur une
infidélité; Monsieur un tel écrivit hier au soir un sixain à Ma-
demoiselle une telle, dont elle lui a envoyé la réponse ce matin
sur les huit heures. » Tel est à peu près le commentaire qui
nous manque et que nous ne pouvons suppléer que bien im-
parfaitement; toutefois nous avons fait quelques petites décou-
vertes de nature à nous mériter l'approbation de Madelon ;
ainsi, par exemple, nous avons pu indiquer le jour et presque
l'heure où Corneille a composé le Sonnet perdu au jeu qui se
trouve dans la cinquième partie des Poésies choisies de Sercy.
Comme on le pense bien, de tels hasards ne sont pas fré-
quents, mais par bonheur aussi ils ne sont guère néces-
saires, et nous nous estimerons fort heureux si nous parve-
nons à ranger plus exactement d'après leurs dates les Poésies
diverses de Corneille, à en rejeter ce qui pouvait choquer
i. Voyez Y Appendice^ n° VIII.
2. Avertissement, folio 3. — L'Achevé d'imprimer de ce Recueil
du P. Bouhours est du « premier jour de juin i6p3. »
3. Scène x.
J.l
POÉSIES DIVERSES.
une critique éclairée, et surtout à les compléter soit par
nos propres recherches1, soit en faisant dans les matériaux
i . Nous prions le lecteur de vouloir bien accorder une attention
toute particulière à la pièce XVII de Y Appendice, qui nous paraît in-
téressante et vraiment digne de Corneille.
Outre les pièces, bien authentiques, signalées par MM. P. Lacroix
et Fournit r, dont les recherches nous ont été si utiles, et classées par
nous, à leur rang chronologique, dans les OEuvresde Corneille; outre
celles qui nous ont paru ne point appartenir à notre auteur et que
nous avons renvoyées à Y Appendice, il en est un certain nombre qui,
à notre avis, ne pouvaient, à aucun titre, figurer dans notre recueil.
Telles sont :
i° La pièce sur l'immaculée conception de la Vierge dont nous
avons parlé plus haut (p. 7 et 8).
20 Deux quatrains publiés en i655 dans un Recueil de Chamou-
dry et intitulés , l'un : A M. P. en lui donnant un livre de f Imitation
de Jésus; lautre : A une dame en lui envoyant le livre de V Imitation
de J. C. Ces deux quatrains sont anonymes. M. P. Lacroix * les
considère comme des envois d'auteur ; mais il nous paraît beau-
coup plus naturel de les mettre au nombre de ces petites pièces ga-
lantes qu'on joignait alors à tout présent fait à une dame : voyez,
par exemple (ci-après, pièce IV, p. 3s), celle dont Corneille accom-
uagne l'envoi d'un nœud de rubans.
3° Une épigramme qui porte le nom de Corneille dans le Songe
du Resveur , à Paris, chez Guillaume de Luyne, libraire-Iuré , au
Palais, M.DC.LV, 1 vol. petit in-12 **. Ce Songe est une réplique à
la Pompe funèbre de Scarron, réplique où les divers écrivains attaqués
dans cet ouvrage sont censés répondre chacun par une épigramme
évidemment supposée.
4° Une Ode sur la paix et le mariage, Paris, Guillaume de Luyne,
1660, in-40 de 27 pages, au sujet de laquelle M. P. Lacroix s'ex-
prime ainsi : « Cette ode anonyme pourrait être signée Corneille,
sans faire tort à l'auteur du Cid et de Cinna; j'ajouterai qu'elle a été
imprimée à Rouen par Laurent Maurry, et mise en vente chez Guil-
laume de Luyne, le libraire et l'imprimeur ordinaires de Corneille***. »
Ces raisons ne nous ont pas paru suffisantes, et il nous a semblé au
contraire qu'un poète aussi célèbre que Corneille l'était en 166c ne
* Bulletin du bouquiniste, Ier février 1864, p. 54-
** Ibidem, i5 août i863, p. 6g5.
*** Ibidem, 1e1 novembre 1864, p. 5po.
NOTICE. i3
amassés par MM. P. Lacroix et Fournier un choix prudent et
discret.
pouvait avoir aucune raison de ne pas signer une pièce de vers publiée
dans une semblable circonstance.
5° Un sonnet sur le crime de lèze-majesté divine, commu à Notre-
Dame le dimanche 3 aoust 1670, sur les neuf heures du matin, par le
nommé Sarrazin, natif de Caen, sonnet transcrit par M. P. Lacroix
comme étant de Corneille, mais dont il déclare ne plus se rappeler
la source*.
6° Enfin une longue pièce de vers, tirée des manuscrits de Tral-
lage, et considérée un instant par MM. Ed. Thierry et P. Lacroix
comme ayant été composée pour le Roi, par Corneille, deux années
avant la mort du poète, à la sollicitation de Mme de Maintenon ;
pièce de vers qui en réalité ne rappelle en rien la manière de Cor-
neille, et qu'après réflexion ses deux éditeurs n'entreprendraient
certes pas de défendre**.
Bulletin du bouquiniste, i5 octobre 1864, p. 55o,.
Revue des provinces, i5 mars 1864, tome II, p. 480-486.
24 POÉSIES DIVERSES.
AU LECTEUR1.
Quelques-unes de ces pièces te déplairont; sache aussi
que je ne les justifie pas toutes, et que je ne les donne
qu'à l'importunité du libraire pour grossir son livre. Je
ne crois pas cette tragi-comédie si mauvaise que je me
tienne obligé de te récompenser par trois ou quatre bons
sonnets.
i. Cet avis au Lecteur a paru en tête des pièces T à XIV, XVI
et XVII, réunies à la suite du Clitandre de Corneille. Il se trouve
au verso du titre, qui est : Meslanges poétiques du mesme. A Paris,
chez François Targa, etc. L'Achevé d'imprimer du volume dont ces
pièces font partie est daté du 20 mars i63*2. Voyez la Notice des
Poésies diverses, ci-dessus, p. 4-^-
POÉSIES DIVERSES. a5
A MONSIEUR D. L. T.
Nous ignorons quel est le personnage à qui cette épître est adres-
sée; le vers 27 nous apprend que c'est un ami de Corneille, et les
vers 71 et 72 semblent indiquer qu'il est poëte. Nous ne le voyons
pas figurer parmi les auteurs des Hommages adressés à Corneille au
sujet de la Veuve (voyez tome I, p. 379-393). Il est bien probable
que la pièce qu'on va lire n'est pas la plus ancienne de celles qui com-
posent les Mélanges. Les travers poétiques qui y sont agréablement
raillés se font remarquer dans l'ode suivante, qui a dû être écrite
auparavant. Il semble que la présente épître aurait dû être rapprochée
de la chanson qui porte le numéro XTV, avec laquelle elle a plus
d'une analogie. Toutefois, en l'absence de renseignements certains,
nous avons cru devoir respecter l'ordre suivi par Corneille.
Enfin échappé du danger
Où mon sort me voulut plonger,
L'expérience indubitable
Me fait tenir pour véritable
Que Ton commence d'être heureux 5
Quand on cesse d'être amoureux.
Lorsque notre âme s'est purgée
De cette sottise enragée
Dont le fantasque mouvement
Bricole 1 notre entendement, 1 o
Crois-moi qu'un homme de ta sorte ,
Libre des soucis qu'elle apporte ,
Ne voit plus loger avec lui
1 . C'est-à-dire : amuse et trompe; au propre : conduit obliquement»
Voyez tome IV, p. 322, note 2, et le Lexique,
«6 POÉSIES DIVERSES.
Le soin, le chagrin ni l'ennui.
Pour moi , qui dans un long servage i 5
A mes dépens me * suis fait sage .
Je ne veux point d'autres motifs
Pour te servir de lénitifs ,
Et ne sais point d'autre remède
A la douleur qui te possède , 2 o
Qu'écrivant la félicité
Qu'on goûte dans la liberté ,
Te faire une si bonne envie
Des douceurs dune telle vie,
Qu'enfin tu puisses à ton tour 2 5
Envoyer au diable l'amour.
Je meure, ami, c'est un grand charme
D'être insusceptible d'alarme ,
De n'espérer ni craindre rien ,
De se plaire en tout entretien , 3 o
D'être maître de ses pensées ,
Sans les avoir toujours dressées
Vers une beauté qui souvent
Nous estime moins que du vent ,
Et pense qu'il n'est point d'hommage 3 5
Que l'on ne doive à son visage.
Tu t'en peux bien fier à moi :
J'ai passé par là comme toi;
J'ai fait autrefois de la bête ;
J'avois des Philis à la tête : 4 »
J'épiois les occasions ;
J'épiloguois mes passions;
Je paraphrasois un visage ;
Je me mettois à tout usage ,
1. La première édition ( i632 ) donne la leçon impossible je,
pour me.
POÉSIES DIVERSES. 27
Debout , tête une , à genoux , 4 5
Triste , gaillard , rêveur, jaloux ;
Je courois, je faisois la grue
Tout un jour au bout d'une rue :
Soleils , flambeaux , attraits , appas ,
Pleurs, désespoirs , tourments , trépas , 5o
Tout ce petit meuble de bouche
Dont un amoureux s'escarmouche ,
Je savois bien m'en escrimer *.
Par là je m'appris à rimer;
Par là je fis sans autre chose 5 5
Un sot en vers d'un sot en prose ;
Et Dieu sait alors si les feux ,
Les flammes , les soupirs , les vœux ,
Et tout ce menu badinage ,
Servoit 2 de rime et de remplage * . 60
1. Corneille a donné de curieux échantillons de ces « discours
de livre, » comme il les appelle, dans Mèlite (tome I, p. 146 et 147,
vers 61-78) et dans la Veuve (tome I, p. 412? vers 25o-266). On
trouve aussi dans la comédie, ou plutôt dans le dialogue intitulé
Climène, publié par la Fontaine en 1671, une satire fort délicate des
poésies galantes du dix-septième siècle :
ÉRATO.
Mais n'est-ce point assez célébré notre belle?
Quand j'aurai dit les jeux, les ris et la séquelle ,
Les grâces, les amours : voilà fait à peu près.
APOLLON.
Vous pourrez dire encor les charmes, les attraits,
Les appas.
ÉRATO.
Et puis quoi ?
APOLLON.
Cent et cent mille choses.
Je ne vous ai conté ni les lis ni les roses :
On n'a qu'à retourner seulement ces mots-là.
Voyez encore ci-après, p. 3o, note 2, et p. 33, note 1.
2 . On lit ainsi servoit, au singulier, dans l'édition originale.
3. Remplissage.
POESIES DIVERSES.
Mais à la fin hors de mes fers,
Après beaucoup de maux soufferts ,
Ce qu'à présent je te conseille ,
C'est de pratiquer la pareille ,
Et de montrer à ce bel œil , 6 5
Qui n'a pour toi que de l'orgueil ,
Qu'un cœur si généreux et brave
N'est pas né pour vivre en esclave.
Puis , quand nous nous verrons un jour,
Sans soin tous deux, et sans amour, 70
Nous ferons de notre martyre
A communs frais une satire ;
Nous incaguerons1 les beautés;
Nous rirons de leurs cruautés ;
A couvert de leurs artifices , 7 5
Nous pasquinerons leurs malices2;
Impénétrables à leurs traits ,
Nous ferons nargue à leurs attraits ;
Et toute tristesse bannie ,
Sur une table bien garnie, 80
Entre les verres et les pots
Nous dirons le mot à propos.
On nous orra conter merveilles
En préconisant les bouteilles ;
Nous rimerons au cabaret 8 5
En faveur du blanc et clairet ,
Où quand nous aurons fait ripaille,
Notre main contre la muraille,
Avec un morceau de charbon
1. Incaguer, défier, braver.
2. Nous ferons des satires sur elles. Voyez le Lexique pour tous
ces mots.
POESIES DIVERSES. 29
Paranymphera ' le jambon 2. 90
Ami, c'est ainsi qu'il faut vivre,
C'est le chemin qu'il nous faut suivre ,
Pour goûter de notre printemps
Les véritables passe-temps.
Prends donc , comme moi , pour devise , 9 5
Que l'amour n'est qu'une sottise.
1. Paranympher , louer, célébrer. On appelait paranymphe le dis-
cours solennel qui se prononçait, dans la Faculté de théologie et
dans celle de médecine, à la fin de chaque licence. Voyez le Lexique.
2. Cette façon de donner à ses chansons bachiques une certaine
publicité paraît avoir été alors d'un usage assez général. Tout le
monde se rappelle ces vers de Y Art poétique de Boileau (chant I,
vers 21-26) :
Ainsi tel autrefois qu'on vit avec Faret
Charbonner de ses vers les murs d'un cabaret,
S'en va mal à propos d'une voix insolente
Chanter cîu peuple hébreu la fuite triomphante ;
Et poursuivant Moïse au travers des déserts,
Court avec Pharaon se noyer dans les mers.
3o POÉSIES DIVERSES.
Il
ODE SUR UN PROMPT AMOUR1
O Dieux! qu'elle sait bien surprendre !
Mon cœur, adore ta prison,
Et n'écoute plus ta raison 2
Qui fait mine de te défendre 5
Accepte une si douce loi. 5
Voir Amynte et rester à soi
Sont deux choses incompatibles :
Devant une telle beauté ,
C'est à faire à des insensibles
De conserver leur liberté. 1 o
Ses yeux , d'un pouvoir plus suprême
Que n'est l'autorité des rois ,
Interdisent à notre choix
De disposer plus de nous-même.
Ravi que j'en fus à l'abord , 1 5
1. Voyez ci-dessus, p. 25, la fin de la notice qui précède la
pièce I.
2. Boileau critique ces idées et ces expressions dans le second chant
de Y Art poétique (vers 45-52), où il parle de ces « vains auteurs »
qui
... ne savent jamais que se charger de chaînes >
Que bénir leur martyre, adorer leur prison ,
Et faire quereller les sens et la raison.
Mais comme c'est là un lieu commun poétique fort rebattu , il n'est
guère probable que ce soit Corneille que Boileau ait eu particuliè-
rement en vue dans ce passage.
POÉSIES DIVERSES. 3i
Je ne pus1 faire aucun effort
A me retenir en balance ;
Et je sentis un changement
Par une douce violence ,
Que j'eusse fait par jugement. <* o
Regards brillants , clartés divines ,
Qui m'avez tellement surpris;
OEillades qui sur les esprits
Exercez si bien vos rapines ;
Tyrans secrets , auteurs puissants 2 5
D'un esclavage où je consens ;
Chers ennemis de ma franchise ,
Beaux yeux , mes aimables vainqueurs,
Dites-moi qui vous autorise
A dérober ainsi les cœurs. 3o
Que ce larcin m'est favorable !
Que j'ai sujet d'appréhender,
La conjurant de le garder,
Qu'elle me soit inexorable !
Amour, si jamais ses dédains 3 5
La portent à ce que je crains,
Fais qu'elle se puisse méprendre ;
Et qu'aveuglée , au lieu du mien
Qu'elle aura dessein de me rendre ,
Amynte me donne le sien ! 4 o
1. Je ne peux, dans l'édition originale j mais c'est évidemment
pour je ne peus, c'est-à-dire : je ne pus.
32 POESIES DIVERSES.
111
A MONSEIGNEUR LE CARDIJNAL DE RICHELIEU.
SONNET.
Puisqu'un d'Amboise1 et vous d'un succès admirable
Rendez également nos peuples réjouis,
Souffrez que je compare à vos faits inouïs
Ceux de ce grand prélat, sans vous incomparable.
Il porta comme vous la pourpre vénérable 5
De qui le saint éclat rend nos yeux éblouis ;
Il veilla comme vous d'un soin infatigable ;
Il fut ainsi que vous le cœur d'un roi Louis.
Il passa comme vous les monts à main armée ;
Il sut ainsi que vous convertir en fumée i o
L'orgueil des ennemis , et rabattre leurs coups :
Un seul point de vous deux forme la différence :
C'est qu'il fut autrefois légat du pape en France2,
Et la France en voudroit un envoyé de vous.
i . Le cardinal Georges d'Amboise, premier ministre de Louis XII.
2. Ce fut le pape Alexandre VI qui nomma le cardinal d'Amboise
son légat en France.
POESIES DIVERSES. 33
IV
SONNET POUR M. D. V.,
Envoyant un galand à M. L. C. D. L.
On ne sait quelles sont les personnes désignées par ces initiales.
L'auteur d'un opuscule intitulé et la belle de Ludre, 1648-172 5, essai
biographique, Nancy, Maubon, 1861 , in-8°, » a voulu y voir M. de
Vivonne et la comtesse de Ludre; mais il n'a pas remarqué que ce
sonnet a été publié dès i632, et que la comtesse n'est née qu'en 1648.
— Un galand signifie ici un nœud de ruban. Voyez tome II, p. 7,
note 5 ; p. 93, vers iao4 ; et le Lexique.
Au point où me réduit la distance des lieux,
Souffrez que ce galand vous porte mes hommages,
Gomme si ses couleurs étoient autant d'images
De celle qu'en mon cœur je conserve le mieux.
Parez-en ce beau sein , ce chef-d'œuvre des cieux, 5
Cette honte des lis, cet aimant1 des courages,
1. Corneille, quelques années plus tard, critiquait agréablement
dans la Veuve (tomel, p. 4°9> vers 200-204) une galanterie toute
semblable :
Il m'aborde en tremblant avec ce compliment :
« Vous m'attirez à vous ainsi que fait l'aimant. »
(Il pensoit m'avoir dit le meilleur mot du monde.)
Entendant ce haut style, aussitôt je seconde,
Et réponds brusquement sans beaucoup m'émouvoir :
« Vous êtes donc de fer, à ce que je puis voir. d
Mlle de Scudérv, dans une lettre du 28 septembre 1657, par laquelle
elle invite un de ses amis à une réunion dans laquelle il doit trou-
ver deux jeunes beautés, l'une brune et l'autre blonde, se moque
aussi d'une comparaison du même genre (Manuscrits de Conrart,
CoRNF.IJ.iE. X 3
34 POÉSIES DIVERSES.
Ce beau sein où nature a mis tant d'avantages
Qu'il dérobe le cœur en surprenaut les yeux.
Il va mourir d'amour sur cette gorge nue ;
Il en pâlit déjà , sa vigueur diminue , i o
Et finit languissante en des traits effacés.
Hélas! que de mortels lui vont porter envie,
Et voudroient en langueur finir ainsi leur vie,
S'ils pouvoient en mourant être si bien placés !
tome IX, p. 902 et o.o3) : « Je vous laisse à penser, dit-elle, combien
vous serez désiré, et si les galants qui s'y trouveront ne scroient pas
bien aises que ce fut encore la mode de dire :
Comme Ton voit le fer entre deux calamités.
Mais comme nous ne sommes plus aux siècles des comparaisons, el
que celle-là est trop aisée, il faudra que les galants s'en passent. » —
Voyez encore une comparaison analogue tirée de VA&trèe et citée
par nous au tome IV, dans la note 5 de la page 353.
POESIES DIVERSES. 35
MADRIGAL
Pour un masque donnant une boîte de cerises confites
à une damoiselle.
Allez voir ce jeune soleil,
Cerises, je vous en avoue;
Montrez-lui votre teint vermeil
Un peu moins que sa lèvre , un peu plus que sa joue ;
Montrez-lui votre rouge teint, 5
Où la nature a peint,
Comme sur une vive image ,
La cruauté de son courage.
Après, en ma faveur, dans le contentement
Que vous aurez si la belle vous touche, 10
Dites-lui secrètement ,
Approchant de sa bouche :
« Philis , notre beauté
Ne porte les couleurs que de la cruauté;
Mais ce qui la conserve et la fait être aimée , i 5
Ce n'est que la douceur qu'elle tient enfermée ;
Ainsi doncque soyez, vous,
Belle et douce comme nous. »
36 POÉSIES DIVERSES.
VI
ÉPITAlPHE de didon,
Traduit1 du latin d'Ausone : infelix dido, etc.*.
Misérable Didon, pauvre amante séduite,
i . A cette époque épitaphe était habituellement du masculin. Voyez
tome IV, p. i5, note i ; p. 3io, vers 38 1; et le Lexique. — Granet a
mis ici : épitaphe traduite, et il a été imité en cela par tous les édi-
teurs qui l'ont suivi.
2. Infelix Dido, nulli bene nupta marito :
Hoc pereunte fugis, hoc fugiente péris.
(Ausone. épitaphe xxx.)
Cette épitaphe d'Ausone a donné lieu à un fort grand nombre
d'imitations. Voici un distique de Leibnitz qui n'est pas sans rapport
avec la seconde pièce de Corneille :
Quel mari qu'ait Didon, son malheur la poursuit :
Elle fuit quand l'un meurt, et meurt quand l'autre fuit.
La pièce la plus connue est la suivante, dont on ignore l'auteur, et
que le P. Bouhours rapporte dans la Manière de bien penser dans les
ouvrages de Pesprit, seconde édition, Paris, 1691, in-12, p. 55 :
Pauvre Didon, où t'a réduite
De tes maris le triste sort ?
L'un, en mourant, cause ta fuite;
L'autre, en fuyant , cause ta mort.
L'abbé Desfontaines, qui, dans son Discours sur la traduction des
poètes en tête de sa traduction de Virgile, critique cette imitation,
propose de la remplacer par celle-ci, dont il est l'auteur :
Hélas ! que tes époux te causent de malheurs ,
Didon : l'un meurt, tu fuis ; l'autre fuit, et tu meurs.
Enfin Souchay cite une traduction qui diffère très-peu de celle de
Desfontaines :
Didon, tes deux maris te comblent de douleurs :
Le premier meurt, tu fuis; le second fuit, tu meurs.
POÉSIES DIVERSES. 37
Dedans tes deux maris je plains ton mauvais sort ,
Puisque la mort de l'un est cause de ta fuite ,
Et la fuite de l'autre est cause de ta mort.
AUTREMENT.
Quel malheur en maris, pauvre Didon , te suit!
Tu t'enfuis quand l'un meurt, tu meurs quand l'autre fuit.
18 POÉSIES DIVERSES
VII
MASCARADE DES ENFANTS GATES1,
l'officier2.
Une ambition déréglée
Dont mon âme s'est aveuglée,
Plus forte que mon intérêt,
Pour donner un arrêt en cornes3,
A tellemept passé les bornes 5
Qu'elle n'a point trouvé d'arrêt.
Ce vain honneur, et cette pompe
De qui le faux éclat nous trompe,
M'a fait engager tout mon bien ;
Et pour être monsieur et maître, i o
Je crains fort à la fin de n'être
Ni maître ni monsieur de rien.
Pressé de créanciers avides ,
Mes coffres sont tellement vides
Qu'étant au bout de mon latin, i 5
Ma robe a gagné la pelade4,
1. Corneille joue sur le double sens du mot gâtés. Les enfants
gâtés de la mascarade sont, comme on le verra, des gens ruinés.
2. L'officier de justice. Il n'y avait pas jusqu'au?; sergents et aux
bedeaux auxquels on ne donnât ce titre : voyez le Dictionnaire de
Furetière.
3. En bonnet à cornes, comme en portaient les docteurs et les huis-
siers. Voyez encore le Dictionnaire de Furetière (1690), au mot Corne.
4. Ma robe s'est pelée, s'est usée. Pelade signifie proprement une
maladie qui fait tomber le poil.
POÉSIES DIVERSES. 3^
Et ma bourse, encor plus malade,
Se voit bien proche de sa fin.
Ainsi mes affaires gâtées ,
Voyant mes terres décrétées , a o
Gages, profits, droits arrêtés.
Et ma finance au bas réduite,
Je mène ici sous ma conduite
La troupe des Enfants gâtés.
LE GENTILHOMME.
Il faut qu'en dépit de mon sang 2 5
Je lui cède le premier rang.
En \ain ma noblesse me flatte :
En ces lieux par où nous allons ,
On respecte mal l'écarlate
Qui ne va point jusqu'aux talons* ; 3o
Et celle qui souvent accompagne nos bottes,
Tombant dans le mépris ,
Près de celle qu'on traîne aux crottes2,
Perd son lustre et son prix.
Trop d'or sur mes habits en a vidé ma bourse ; 3 5
La meute de mes chiens
N'a chassé que mes biens,
Qui dessus mes chevaux se sauvoient à la course;
Et mes oiseaux, au bout d'un an ou deux,
M'ont fait léger comme eux. 4<>
Voilà, sans rechercher tant de contes frivoles,
Tout ce qui m'a gâté déduit en trois paroles;
1. Comme les robes des cardinaux, des présidents, des conseil-
lers.
a. C'est-à-dire en comparaison de celles dont sont faites les robes
dont il vient d'être parlé, qui traînent jusqu'à terre.
40 POESIES DIVERSES.
Et pour un cavalier, c'est bien bourré1 des vers
A tort et à travers.
LE PLAIDEUR.
Les procès m'ont gâté, Messieurs; je m'en repens : 4 5
C'est, dans mon déplaisir, tout ce que j'en puis dire;
Car je crains tellement de payer des dépens,
Que même au mardi gras je n'ose plus médire.
l'amoureux.
J'ai fait ce qu'il a fallu faire ;
Mais le bal , les collations , 5 o
Les présents, les discrétions2
N'ont point avancé mon affaire.
J'ai corrompu trente valets ,
Afin de rendre mes poulets;
J'ai donné mille sérénades : 5 5
On persiste à me dédaigner;
Et deux misérables œillades ,
C'est tout ce que j'ai pu gagner.
Quoi que m'ait promis l'espérance,
A la fin il ne m'est resté 6o
Que l'incommode vanité
D'une sotte persévérance ;
Ma profusion sans effet
N'a servi qu'à gâter mon fait
Et dissiper mon héritage : 6 5
Quel malheur me va poursuivant !
i. Tel est le texte de l'édition originale. Granet a remplacé le par-
ticipe par l'infinitif bourrer. . — Bourrer des vers , c'est faire des vers
avec de la bourre, du remplissage. Voyez le Lexique de Malherbe, au
mot Bourre.
i. « Au jeu on appelle discrétion ce qu'on laisse à la volonté du
perdant. C'est un moyen de faire un présent déguisé à une femme
de jouer contre elle une discrétion. » ( Dictionnaire de Furetière. )
Voyez le Lexique.
POÉSIES DIVERSES. 41
O Dieux! j'ai mangé mon partage
Sans avoir vécu que de vent1 !
l'ivrogne.
N'est-ce pas une chose étrange
Que pour trotter dedans la fange, 7 o
Je fasse faux bond au clairet,
Et que cette troupe brouillonne
M'arrache de ce cabaret
Pour vous produire ma personne?
Je violente mon humeur 7 5
D'abandonner ce lieu charmeur;
Toutefois je n'ose me2 plaindre,
Etant déjà si fort gâté
Que je m'achèverois de peindre
Pour peu que j'en aurois ta té ; 80
Outre que mes eaux sont si basses,
A force de vider les tasses ,
Qu'il faut renoncer au métier,
Ne pouvant plus laisser en gage,
Au malheureux cabaretier, 8 5
Que les rubis de mon visage.
Mais encor suis-je plus heureux
Que tant de fous et d'amoureux
Qui se sont perdus par leurs grippes3;
Car bien que je sois bas d'aloi , 90
Mon argent , serré dans mes tripes ,
N'est point sorti hors de chez moi.
1. Cette pièce se termine ici clans l'édition de Granet; la fin, telle
qu'on la lit dans l'édition de i63'3, n'a été réunie aux OEuvres de
Corneille qu'en 18 17, dans l'édition d'Ant.-Aug. Renouard.
2. Ce mot manque dans l'édition originale.
3. Grippe, fantaisie, goût capricieux.
42 POESIES DIVERSES.
LE JOUEUR.
Attaqué d'une forte et rude maladie ,
Depuis le jour des Rois ,
Les os, par sa chaleur à mon dam trop hardie, 95
M'en sont tombés des doigts.
Bien que du seul revers de ce mal si funeste
Je fusse assez gâté,
Pour avoir fait encore à prime * trop de reste 2
Il ne m'est rien resté. 100
Dames, à cela près, faisons en assurance
La bête en quelque lieu ,
Et je promets moi-même, à faute de finance,
De me mettre au milieu.
1. Sorte de jeu de cartes alors fort à la mode. Voyez le Lexique.
— Dans la strophe suivante, la bête est le nom d'un autre jeu de
cartes.
2. Les mots fait trop de reste rappellent les locutions bien connues :
a jouer de son reste, coucher de son reste, » pour dire faire un der-
nier effort, un coup de désespoir.
POÉSIES DIVERSES. ,\i
VIII
STANCES
Sur une absence en temps de pluie.
Depuis qu'un malheureux adieu
Rendit vers vous ma flamme criminelle,
Tout l'univers , prenant votre querelle ,
Contre moi conspire en ce lieu.
Ayant osé me séparer 5
Du beau soleil qui luit seul à mon âme,
Pour le venger, l'autre, cachant sa flamme,
Refuse de plus m'éclairer.
L'air, qui ne voit plus ce flambeau,
En témoignant ses regrets par ses larmes , i o
M'apprend assez qu'éloigné de vos charmes
Mes yeux se doivent fondre en eau.
Je vous jure , mon cher souci,
Qu'étant réduit à voir l'air qui distille ,
Si j'ai le cœur prisonnier à la ville, i 5
Mon corps ne l'est pas moins ici.
4'i POÉSIES DIVERSES.
IX
SONNET.
Suivant Thomas Corneille, notre poëte a écrit sa comédie de Mé-
lite pour employer ce sonnet, « qu'il avoit fait pour une demoiselle
qu'il aimoit. » Voyez ce que nous avons dit à ce sujet dans la Notice
de Mélïte (tome I, p. 126 et suivantes). Ce sonnet, imprimé pour la
première fois en i632, à la suite de Clitandre, à une époque où Mé-
lite, déjà représentée depuis plusieurs années, n'avait pas encore paru,
figure à la scène iv de l'acte II de cette comédie : voyez tome I,
p. 171, vers 481-494.
Après l'œil de Mélite il n'est rien d'admirable;
Il n'est rien de solide après ma loyauté :
Mon feu , comme son teint , se rend incomparable ,
Et je suis en amour ce qu'elle est en beauté.
Quoi que puisse à mes sens offrir la nouveauté, 5
Mon cœur à tous ses traits demeure invulnérable ;
Et quoiqu'elle ait* au sien la même cruauté,
Ma foi pour ses rigueurs n'en est pas moins durable.
C'est donc avec raison que mon extrême ardeur
Trouve chez cette belle une extrême froideur, 1 o
Et que sans être aimé , je brûle pour Mélite ;
Car de ce que les Dieux, nous envoyant au jour,
Donnèrent pour nous deux d'amour et de mérite,
Elle a tout le mérite, et moi j'ai tout l'amour.
1. Dans Mélite on lit : « et bien qu'elle ait, » pour : « et quoiqu'elle
ait. »
POESIES DIVERSES. 45
X
MADRIGAL.
Je suis blessé profondément :
Amour, et ma maîtresse ,
Qui de vous deux me blesse?
Un aveugle n'a point l'adresse
De porter dans le cœur ses coups si justement;
Et Philis n'a point de flèches
Pour faire de telles brèches :
Mon mal n'est point l'effet ni de ses seuls regards ,
Ni des traits qu'un aveugle tire;
Mais ia mauvaise avecque lui conspire ,
Et lui prête ses yeux pour adresser ses dards.
/16 POÉSIES DIVERSES.
XI
EPIGRAMMES
Traduites du latin d'Audoënus.
Ces sept épigrammes, imprimées en i632 à la suite de Clitandrc,
n'ont point été recueillies par Granet ; et même la troisième , bien
peu digne en effet d'être conservée, n'avait pas été réimprimée de-
puis l'édition originale. Nous avons joint en note à chaque pièce le
texte latin de John Owen, dont le nom se traduit d'ordinaire en latin
par Audoënus, comme le nom français Ouen , auquel il répond. Ce
poète, né à la fin du seizième siècle dans le pays de Galles, était
mort en 1622, dix ans avant le temps où Corneille publiait cet essai
de traduction. Nous avons d'Owen dix livres d'épigrammes; trois
livres avaient paru dès 1606 ; mais les éditions complètes sont dues
aux Elzévirs : la première est de Leyde, 1628. Les épigrammes,
imitées plutôt que traduites par Corneille, sont toutes dans les trois
premiers livres, à l'exception de la troisième , dont nous n'avons pu
découvrir la source, et que Corneille a peut-être imitée de quelque
petite pièce latine manuscrite attribuée à Owen.
Jane , toute la journée ,
Dit que le joug d'hy menée
Est le plus âpre de tous ;
Mais la pauvre créature
Tout le long de la nuit jure 5
Qu'il n'en est point de si doux * .
I. In Ajakam.
Conjugio esse jugum non intolcrantius itl/um,
POESIES DIVERSES. kl
Les huguenotes de Paris
Disent qu'il leur faut deux maris;
Qu'autrement il n'est en nature
De moyen par où , sans pécher.
On puisse , suivant l'Ecriture , 5
Se mettre deux en une chair * .
Madame, dedans sa maison,
Quinze jours avant la saison ,
Entend du coucou le ramage.
« Mais c'est un homme qu'elle prend
Pour ce bel oiseau de passage , » 5
Ce dit Monsieur, qui la reprend.
Pour moi plus outre je n'enfonce ,
Mais je vous laisse à deviner
D'une si naïve réponse
Ce que l'on peut s'imaginer 2. . 10
Depuis que l'hiver est venu ,
Je plains le froid qu'Amour endure ,
Nil aliud toto clamât Alana die;
Post tôt cla.nores et jurgia , nocte fatetur
Conjugio nullum suavius esse jugum.
(Lib. I, epigr. xxx.)
1. In Paujlam, atheam.
Vir ducat ne duas , an nubat virgo duobus ,
Quseritur. H a ne lit cm solvere Paula volens :
« Una vins, inquit , magis apta duobus; in una
Consistent aliter quomodo carne duo? »
(Lib. I, epigr. cxlv.)
2. Voyez ci-dessus les dernières ligue.-, de la notice.
48 POÉSIES DIVERSES.
Sans songer que plus il est nu ,
Et tant moins il craint la froidure V
Dans les divers succès de la fin de leur vie ,
Le prodigue et l'avare ont de quoi m'étonner ;
Car l'un ne donne rien qu'après qu'elle est ravie,
Et l'autre après sa mort n'a plus rien à donner2.
Catin , ce gentil visage ,
Epousant un huguenot,
Le soir de son inariage
Disoit à ce pauvre sot :
« De peur que la différence 5
En fait de religion ,
Rompant notre intelligence ,
Nous mette en division ,
Laisse-moi mon franc arbitre ;
Et du reste de la foi , 10
NUDUS AMOR.
Quœ villis natura feras et gramme campas
Ornât , aves pluma , vellere vestit oves;
Denique frigidulo quodcumque sub aère nasci
Contigit , innata veste vel arte tegit :
Vestïvit nudum cur omnia preeter Amorem?
Quo nudus magis est, hoc minus alget Amor .
(Lib. II, epigr. lxxxviii.)
In PROD1GUM ET PARCUM.
Hic nisi post mortem veteri nil donat amico;
llle nihilj quod post funera do net , habet.
(Lib. III, epigr. lxv.)
POÉSIES DIVERSES. 49
Je veux avoir le chapitre ',
Si j'en dispute avec toi 2. »
Lorsque nous sommes mal, la plus grande maison
Ne nous peut contenir, faute d'assez d'espace;
Mais sitôt que Philis revient à la raison ,
Le lit le plus étroit a pour nous trop de place *.
1. Avoir le chapitre^ être chapitré, c'est-à-dire corrigé, réprimandé.
2. In Langam.
Langa, Lutliera.no nubens papana marito,
Ansam ut dissidii tolleret ornais, ait:
« Jurgia ne pacem perturbent ulla futuram,
Tu mihi sis facilis, non ero dura tibi :
Arbitra libertatem mihi credito, eritque
De reliaua tecum lis mihi nulla fide. »
(Lib. II, epigr. xlvii.)
3. Conjtjges.
Discordes nos tota domus non continet ambos,
Concordes lectus nos tamen unus habet.
(Lib. III, epigr. cxxiv.)
Corneille, x
5o POÉSIES DIVERSES.
XII
DIALOGUE.
Il faut se rappeler que Tirsis ' est le nom que Corneille s'est choisi
lorsqu'il a mis au théâtre l'aventure qui fait le sujet de Mélite. Il
n'est peut-être pas trop hasardé de supposer qu'il a écrit ces vers
lorsqu'il a obtenu de Mlle Milet l'aveu qu'il n'osait espérer. Ce
dialogue n'a pu, comme le sonnet que nous avons vu plus haut
(p. 44)» entrer textuellement dans la comédie; mais Corneille semble
se l'être rappelé en écrivant la scène iv de l'acte V, où Tircis et Mé-
lite s'entretiennent seuls; on y retrouve (vers i635) ces mots que
le poète tenait à conserver et qui font ici l'effet d'un refrain : « Tu
t'en peux assurer. » Faut-il croire que ce soient là les propres pa-
roles de Mlle Milet?...
TIRSIS, CALISTE.
TIRSIS.
Galiste , mon plus cher souci ,
Prends pitié de F ardeur qui me dévore lame.
CALISTE.
Tirsis, ne vois-tu pas aussi
Que mon cœur embrasé brûle de même flamme?
TIRSIS.
Je n'ose l'espérer. 5
CALISTE.
Tu t'en peux assurer.
TIRSIS.
Mais mon peu de mérite
Défend un si haut point à ma présomption.
i. Dans l'édition de i632 ce nom est écrit par un c au troisième
vers; partout ailleurs, par une s.
POESIES DIVERSES.
CALISTE.
Mais cette récompense est plutôt trop petite
Pour tant d1 affection.
I o
TIRSIS.
Je croirai , puisque tu le veux ,
Que maintenant mon mal aucunement1 te touche.
CALISTE.
La mort seule éteindra mes feux ,
Et j'en ai plus au cœur mille fois qu'en la bouche.
TIRSIS.
Je n'ose l'espérer. i 5
CALISTE.
Tu t'en peux assurer.
TIRSIS.
Hélas ! que ton courage
M'apprête de rigueurs à souffrir sous ta loi !
CALISTE.
Ce que j'ai de rigueurs, j'en réserve l'usage
Pour tout autre que toi. 20
TIRSIS.
Si quelqu'un plus riche ou plus beau ,
Et mieux fourni d'appas , à te servir se range ?
CALISTE.
J'élirois plutôt le tombeau ,
Que ma volage humeur se dispensât 2 au change.
TIRSIS.
Je n'ose F espérer. * 5
CALISTE.
Tu t'en peux assurer.
1. Aucunement, en quelque manière, jusqu'à un certain point.
Voyez le Lexique.
2. Voyez tome I, p. 208, note 2; tome II, p. 201, vers i443 ; et
ie Lexique. — Se disposât , dans les Œuvres diverses, publiées par Gra-
net, et dans toutes les éditions suivantes.
52 POÉSIES DIVERSES.
TIRSIS.
Mais pourrois-tu, ma belle,
Dédaigner un amant qui vaudroit mieux que moi ?
CALISTE.
Pourrois-je préférer à ton amour fidèle
Une incertaine foi ? 3 o
TIRSIS.
Si la rigueur de tes parents
A quelque autre parti plus sortable t'engage?
CAL1STE.
Les saints devoirs que je leur rends
Jamais dessus ma foi n'auront cet avantage.
TIRSIS.
Je n'ose l'espérer. 3 5
CALISTE.
Tu t'en peux assurer.
TIRSIS.
Quoi ? parents , ni richesses ,
Ni grandeurs ne pourront ébranler tes esprits ?
CALISTE.
Tout cela , mis auprès de tes chastes caresses ,
Perd son lustre et son prix. 4*>
POÉSIES DIVERSES. 53
XIII
CHANSON.
Voyez ci-après, p. 74, 75 et 78, les vers 4-12 et 89-98 de V Excuse
à driste, et la note de la page 78.
Toi qui près d'un beau visage
Ne veux que feindre l'amour.
Tu pourrois bien quelque jour
Eprouver à ton dommage
Que souvent la fiction 5
s. ch,„6, ,„*„;.,
Tu dupes son innocence ;
Mais enfin ta liberté
Se doit à cette beauté
Pour réparer ton offense ; 1 o
Car souvent la fiction
Se change en affection.
Bien que ton cœur désavoue
Ce que ta langue lui dit,
C'est en vain qu'il la dédit : 1 5
L'amour ainsi ne se joue;
Et souvent la fiction
Se change en affection.
Sache enfin que cette flamme
Que tu veux feindre au dehors , a ©
Par des inconnus ressorts
:>/, POESIES DIVERSES.
Entrera bien dans ton à me;
Car souvent la fiction
Se change en affection.
Tirsis auprès d'Hippolyte 2 5
Pensoit bien garder son cœur ;
Mais ce bel objet vainqueur
Le fit rendre à son mérite ,
Changeant en affection,
Malgré lui, sa fiction. 3«
POÉSIES DIVERSES. 55
XIV
CHANSON.
Voyez la courte notice de la piècp précédente. Voyez aussi la fin
de celle de la pièce I, ci-dessus, p. a5.
Si je perds bien des maîtresses,
J'en fais encor plus souvent,
Et mes vœux et mes promesses
Ne sont que feintes caresses ,
Et mes vœux et mes promesses 5
Ne sont jamais que du vent.
Quand je vois un beau visage ,
Soudain je me fais de feu ;
Mais longtemps lui faire hommage ,
Ce n'est pas bien mon usage; i o
Mais longtemps lui faire hommage ,
Ce n'est pas bien là mon jeu.
J'entre bien en complaisance
Tant que dure une heure ou deux ;
Mais en perdant sa présence i 5
Adieu toute souvenance ;
Mais en perdant sa présence
Adieu soudain tous mes feux.
Plus inconstant que la lune ,
Je ne veux jamais d'arrêt : 20
La blonde comme la brune
56 POÉSIES DIVERSES.
En moins de rien m'importune;
La blonde comme la brune
En moins de rien me déplaît.
Si je feins un peu de braise ', a 5
Alors que l'humeur m'en prend ,
Qu'on me chasse ou qu'on me baise,
Qu'on soit facile on mauvaise ,
Qu'on me chasse ou qu'on me baise,
Tout m'est fort indifférent. io
Mon usage est si commode ,
On le trouve si charmant ,
Que qui ne suit ma méthode
N'est pas bien homme à la mode,
Que qui ne suit ma méthode 3 5
Passe pour un Allemand.
i. D'ardeur, de flamme. Voyez le Lexique.
POÉSIES DIVERSES. 57
XV
A MONSIEUR DE SCUDÉRY
[sur son ligdamon et lidus].
Ce quatrain se lit, signé du nom de Corneille, au verso du onzième
feuillet de Ligdamon et Lidias ou la Ressemblance, tragi-comédie de
Scudéry, représentée, suivant les frères Parfait, en 1629, et publiée
à Paris, chez François Targa, en i63i. L'Achevé d'imprimer est du
18 septembre i63i. Ces vers sont les premiers de notre poète qui
aient été imprimés. Signalés par les frères Parfait dans leur Histoire
du Théâtre françois (tome IV, p. 443) , ils ont été remis en lumière
par M. Ed. Tricotel dans le Bulletin du bouquiniste du Ier août 1859.
C'est la première fois qu'ils sont recueillis dans les OEuvres de Cor-
neille.
Encor que Ligdamon, en dépeignant Silvie,
Lui donne assez d'appas pour charmer l'univers,
Sa beauté toutefois, dont la France est ravie,
Ne me toucheroit point sans celle de tes vers.
58 POESIES DIVERSES.
XVI
RECIT
POUR LE BALLET DU CHATEAU DE BICETRE.
Au commencement du dix-septième siècle il n'était question parmi
le peuple de Paris que des apparitions qui avaient lieu au château
de Bicêtre alors en ruine. Louis XIII résolut de le faire abattre, ce
que du Breul nous raconte en ces termes dans le Théâtre des antiqui-
tez de Paris A Paris, par la Société des Imprimeurs, M. DC. XXXIX,
in- 4°, p. 87 : « Du Château de Vicestres. L'an ifi32 ce château fut en-
tièrement rasé jusques aux fondements, et de la grande place où il
étoit, on desseigna y faire un lieu pour y loger et recevoir les soldats
estropiés aux guerres pour le service du Roi, et dès lors on commença
la clôture de murailles, avec quatre pavillons aux quatre coins, où on
y fit bâtir une chapelle, qui fut bénite par l'archevêque de Paris. »
On comprend qu'au moment où le Roi était occupé de ce projet le
château de Bicêtre était un sujet de ballet tout à fait de circonstance.
Il fut dansé le 7 mars 16 32, et la Gazette de France en fît un compte
rendu que nous avons cru devoir reproduire dans notre Appendice,
parce qu'il fait bien comprendre les vers de Corneille et explique
à quel endroit ils se plaçaient dans le ballet.
Le récit de Corneille est le morceau que le sieur Justice chantait
avec accompagnement de luth (voyez ci-après Y Appendice). La pu-
blication de cette pièce de vers a suivi de fort près le moment où
elle fut chantée, car elle occupe le huitième rang parmi celles qu'on
trouve dans les Mélanges à la suite de Clitandre , dont l'Achevé d'im-
primer est, comme nous l'avons dit, du 20 mars i632. Jusqu'ici
les éditeurs de Corneille n'avaient donné aucun renseignement sur
le Ballet du chasteau de Bissestre, et n'en avaient pas même indiqué
la date.
Toi, dont la course journalière
Nous ôte le passé, nous promet l'avenir,
POÉSIES DIVERSES. 59
Soleil, père des temps comme de la lumière ,
Qui vois tout naître et tout finir,
Depuis que tu fais tout paroître 5
As-tu rien vu d'égal au château de Bissestre?
Tcutes ces pompeuses machines
Qu'autrefois on flattoit de titres orgueilleux ,
Pourroient-elles garder auprès de ces ruines
I o
i b
Le nom d'ouvrages merveilleux?
Et toi , qui les faisois paroître ,
Qu'y voy ois-tu d'égal au château de Bissestre2?
Ces tours qui semblent désolées ,
Et ces vieux monuments qu'on laisse à l'abandon ,
C'est ce qui fait périr le nom des Mausolées1,
Et des palais d'Apollidon2,
Puisque tu les fis tous paroître
Sans y voir rien d'égal au château de Bissestre.
Cache- toi donc plus tard sous l'onde,
Sur ce nouveau miracle arrête ton flambeau ; 2 o
Et sans aller sitôt apprendre à l'autre monde
Ce que le nôtre a de plus beau ,
Sois longtemps à faire paroître
Que rien n'est comparable au château de Bissestre.
1. Mausolée, magnifique tombeau élevé par Àrtémise en l'honneur
de son époux Mausole, roi de Carie.
2. Château magique construit par l'enchanteur Apollidon. 11 est
décrit au Ier chapitre du IIe livre de VAmadis de Gaule.
ô'o POÉSIES DIVERSES
XVII
POUR MONSIEUR L. C: D. F.,
Représentant un diable au même ballet.
ÉPIGRAMME.
Voyez sur le ballet du cbâteau de Bicêtrela notice qui est en tête de
la pièce précédente. Les initiales qui se trouvent dans le titre ci-dessus
désignent évidemment le comte de Fiesque, qui paraissait plusieurs fois
dans le ballet et représentait sans doute ce « démon qui sortoit tout
en feu delà plus haute de ses fenêtres, » et dont la Gazette a oublié de
nous dire le nom. Cette épigramme a été imprimée pour la première
fois à la suite de Clitanc/re, immédiatement après la pièce précédente.
Quand je vois , ma Philis , ta beauté sans seconde ,
Moi qui tente un chacun, je m'y laisse tenter ;
Et mes désirs brûlants de perdre tout le monde
Se changent aussitôt à ceux de l'augmenter.
POESIES DIVERSES. 61
XVIII
A MONSIEUR DE SCUDERY,
SUR SON TROMPEUR PUNI.
MADRIGAL.
Ces vers se lisent, signés du nom de Corneille, au verso du dou-
zième feuillet du volume intitulé : le Trompeur puny ou l 'Histoire
Septentrionale , tragi-comédie par Monsieur de Scudery, à Paris ,
chez Billaine M.DC. XXXIII. L'Achevé d'imprimer est du 4 jan-
vier i633. Suivant les frères Parfait, la pièce a été représentée en i63i.
Ce madrigal a été réuni aux Œuvres de Corneille dans le tome XII
(p. 43] de l'édition de M. Lefèvre dent la publication a été achevée
en i855.
Ton Cléonte , par son trépas ,
Jette un puissant appas '
A la supercherie ,
Vu l'éclat infini
Qu'il reçoit de ta plume après sa tromperie. 5
Chacun voudra tromper pour être ainsi puni ;
Et quoiqu'il en perde la vie ,
On portera toujours envie
A l'heur qui suit son mauvais sort,
Puisqu'il ne vivroit plus s'il ne fût ainsi mort. io
i. Voyez tome I, p. 148, note 3.
62 POÉSIES DIVERSES.
XIX
POUR LA SOEUR VALEUREUSE DE MONSIEUR MARESCHAL.
Ces vers se trouvent, signés du nom de Corneille, aux feuil-
lets 5 verso et 6 recto de la Sœur valeureuse ou F Aveugle amante ,
tragi-comédie dédiée a Monseigneur le Duc de Vandosme, par le
SrMareschal,à Paris, chez A nt hoirie de Sommaville M. DC. XXXIII,
in-8°. Signalés déjà par les frères Parfait dans leur Histoire du
Théâtre francois (tome V, p. 6), ils ont été recueillis par M. Edouard
Fournier dans les Notes sur la vie de Corneille (p. xcvi) qui précèdent
Corneille à la butte Saint-Roch. Ils figurent ici pour la première fois
dans les OEuvres de notre poète.
Rendez-vous, amants et guerriers,
Craignez ses attraits et ses armes :
Sa valeur, égale à ses charmes ,
Unit les myrtes aux lauriers.
Miracle d'amour et de guerre , 5
Tu vas dompter toute la terre.
A l'éclat de tes yeux on voit de toutes parts
Mille cœurs à l'envi voler sous ta puissance ;
Et s'il est un mortel rebelle à tes regards,
Ton bras soudain le range à ton obéissance. i o
Telle contre le roi d'Arger
Courut autrefois Bradamante ',
A la quête de son Roger ;
Telle , mais avec moins d'adresse ,
i . Au commencement du dix-septième siècle on disait indifférem-
ment Arger ou Alger; on trouve les deux formes dans Malherbe : la
première au tome I, p. 3i5; la seconde au tome IV, p. 202. —
Voyez dans le XXXVe chant du Roland furieux de FArioste le combat
de Bradamante contre Rodoinont, roi d'Alger [d'Arger).
POESIES DIVERSES. 63
Vénus s'arma contre la Grèce1 ; 1 5
Telle contre son fils2, pour le roi des Latins,
Camille dans le choc se jetoit animée,
Et telle du cerveau du maître des destins,
Son mari* fit sortir Minerve toute armée.
i. Dans le Ve livre de V Iliade, Vénus, voulant protéger Enée, est
blessée à la main par Diomède.
2. Contre Enée, fils de Vénus. — Voyez le XIe chant de Y Enéide
de Virgile.
3. Vulcain, mari de Vénus.
64 POÉSIES DIVERSES.
XX
P. CORNEL1I ROTHOMAGENSIS , AD 1LLUSTRISSIMJ FRAN-
CISCO, ARCHIEPISCOPI, NORMANDE PRIMATIS, IWVI-
TATIONEM, QUA GLORIOSISSIMUM REGEM, EMINENTTS-
SIMUMQUE CARDINALEM-DUCEM VERSIRUS CELERRARE
JUSSUS EST,
EXCUSATJO.
Dans un excellent mémoire intitulé : Louis XIII et sa cour aux
eaux de Forges*, M. F. Bouquet raconte en grand détail le séjour du
Roi dans cette localité depuis le mercredi i5 juin i633 jusqu'au di-
manche 3 juillet de la même année : « Forges, dit-il en résumant
son travail , avait vu se rendre auprès du Roi et de la Reine l'il-
lustre cardinal, des ambassadeurs étrangers, les plus hauts dignitaires
de l'Etat, tous les représentants de l'autorité souveraine dans la pro-
vince de Normandie, la noblesse des environs et les corps de cavalerie
et d'infanterie attachés au service de Leurs Majestés et du Cardinal.
Il avait eu un théâtre5, des comédiens illustres, enfin tout l'éclat et
tout le mouvement inséparables d'un voyage de la cour, même dans
une aussi modeste bourgade. » M. Bouquet suppose avec beaucoup
de vraisemblance que l'archevêque de Rouen ne dut pas manquer
d'aller aussi présenter ses devoirs au Roi, et que ce fut en cette cir-
constance qu'il engagea Corneille à célébrer dans ses vers Louis XIII
et Richelieu. S'il en est ainsi, notre poëte ne répondit pas immédia-
tement et ne satisfit qu'un peu plus tard au désir du prélat, en parais-
i. Il s'agit ici de François de Harlay de Champvallon, arche-
vêque de Rouen du 8 octobre i6i5 au 27 décembre i65i, oncle
et prédécesseur de François de Harlay de Champvallon dont Cor-
neille parle dans la dédicace de Y Imitation de Jésus- Chris t. Voyez
tome VIII, p. 3.
a. Revue des Sociétés savantes des départements , 2e série, tome I,
i85g, 1" semestre, p. 611-642.
3. Voyez tome II, p. 218, note 2.
POÉSIES DIVERSES. 65
saut s'excuser de ne le pouvoir faire. Quoi qu'il en soit, cette pièce
de vers latins est assurément postérieure au 24 septembre i633,
date de la prise de Nancy, dont il est question au vers 54. Elle a
été publiée en i634, et forme les pages 248-251 d'un recueil intitulé.
Epinicia M us arum Eminentissimo Cardinali Duci de Richelieu, Pan-
sus, apud Sebastianum Cramoisy.... M.DC.XXXIV, in-4°- Ce recueil
latin est habituellement relié à la suite d'un recueil français intitulé :
les Sacrifices des Muses au grand Cardinal de Richelieu , à Paris , chez
Sebastien Cramoisy.... M.DCXXXV. Le tout correspond à un autre
volume semblable de disposition et d'aspect, publié chez le même
libraire et intitulé, pour la première partie : le Parnasse royal, où
les immortelles actions du tres-chrestien et très-victorieux Monarque
Louis XIII sont publiées par les plus célèbres Esprits de ce temps..., et
pour la seconde : Palmes regue invictissimo Ludovico XIII, régi ckristianis-
sirao, a prsecipuis nostri sévi poetis in trophseum erectse. Comme dans le
volume dont nous avons parlé d'abord, le titre de la première partie
porte pour date M.DCXXXV, et celui de la seconde M.DC.XXXIV.
Le privilège de ces volumesaété accordé à Boisrobert le 23 avril ifi33,
et transporté à Cramoisy le 10 mai ; toutefois l'Achevé d'imprimer
n'est que du 14 août i634; mais cela se trouve fort bien expliqué par
les avis de l'imprimeur au lecteur, qui nous apprennent que les re-
cueils se formaient pour ainsi dire au fur et à mesure de l'impres-
sion, et qu'on mettait les pièces entre les mains des compositeurs
aussitôt qu'elles arrivaient, sans observer aucun ordre '. — Ces vers
latins de Corneille sont fort curieux pour l'histoire de ses premiers
ouvragt s ; nous y trouvons même un peu tardivement le moyen de
rectifier une légère erreur que les divers éditeurs de Corneille avaient
commise quant à la date de la Galerie du Palais, erreur dans laquelle
nous étions nous- même tombé à leur exemple2. — Au bas des pages,
nous donnons, selon notre coutume, la traduction française.
Neustriacae lux aima plagae , quo nostra superbit
Bienfaisante lumière de la plage neustrienne, toi dont s'enor-
1. « Ne mirere» lector, si nullam hic nec rerum, nec temporum,
« nec personarum servatam seriem vides; nain ut singula in manus
« nostra s venere, ea praelo subjocimus. »
2. Voyez ci-dessus la Notice, p. fi et 7.
Corwf.il le. x
66 POÉSIES DIVERSES.
Infula , et Aonii laurus opaca jugi * ,
Heroum ad laudes , dignosque Marone triumphos
Parce, precor, tenuem sollicitare chelyn.
Non ingrata canit, sed et impar fortibus ausis, 5
Quae canat , exiguis viribus apta legit.
Ad scenam teneros deducere gaudet amores,
Et vêtus insuetis drama novare jocis.
Régnât in undanti non tristis musa theatro,
Atque bilarem populum taedia nosse vetat. 10
Hanc doctique rudesque , hanc mollis et aulicus2, et jani
Exeso mitis Zoïlus ungue stupet.
Nil tamen hic fortes opus alte intendere nervos,
Nostraque nil duri scena laboris eget.
Vulgare eloquium , sed quo improvisus amator i 5
gueillit notre mitre épiscopale et l'épais laurier du mont d'Aonie,
épargne, je t'en prie, mon faible luth, et ne le sollicite pas de célébrer
les louanges des héros et des triomphes dignes d'un Virgile. Ses
chants ne sont pas sans charme ; mais ne pouvant suffire aux entre-
prises audacieuses , il choisit ce qui convient à ses modestes forces.
Il se plaît à introduire sur la scène les tendres amours, et à renou
vêler l'ancienne poésie dramatique par des jeux inaccoutumés. Ma
muse enjouée règne au théâtre où ondoie la foule; égayant le peuple
elle l'empêche de connaître l'ennui. Les doctes et les iguorants, et le
courtisan délicat, tous, jusqu'au Zoïle adouci, qui se ronge les ongles
en silence, l'écoutent avec étonnement. Mais ici il n'est pas besoin de
tendre forlement les cordes, et notre scène n'exige pas un dur labeur.
Le style est familier, mais tel qu'il suffit à l'amant improvisé pour
i. François de Harlay était fort instruit. On raconte qu'il prêcha
un jour en grec à Paris chez les Franciscains. Il avait composé di-
vers ouvrages, parmi lesquels on compte quelques poèmes. Voyez
le Gallia christiana, tome XI, colonnes 108 et 109.
1. Corneille a dit de même dans Y Excuse à Arlste (vers 47) •
Je satisfais ensemble et peuple et courtisans.
POÉSIES DIVERSES. 67
Occurrens domina? fundere vota velit*.
Obvius hoc blandum compellet amicus amicum2;
Hoc subitum excipiat laeta puella procum 3.
Ars artem fugisse mihi est, et sponte fluentes
Ad numéros facilis pleraque rhythmus obit. 2 o
Nec, solis addicta jocis risuque movendo,
Semper in exiguo carminé \>ena jacet :
Sœpius et grandes soccis miscere cothurnos,
Et simul oppositis docta placere modis.
In lacrimas natam pater \ aut levis egit amator 25
Saepius 6, aut lusu saeviit ira proci6;
Atque ubi pêne latus venalis pergula rumpit ,
offrir ses vœux à la dame qu'il rencontre, à l'ami qui interpelle un
aimable ami survenant, à la jeune-fille qui accueille avec joie un pré-
tendant inattendu. Pour moi l'art consiste à éviter l'art; et la plupart
du temps, mes vers coulant comme d'eux-mêmes, le rhythme vient
sans peine seconder la pensée. Toutefois ma veine n'est pas seulement
consacrée aux jeux et à exciter le rire; elle ne se borne pas toujours à
ces humbles accords : souvent elle sait joindre le haut cothurne au
brodequin, et plaire en même temps par des tons opposés. Parfois un
père arrache des pleurs à sa fille, ou un amant léger à son amante,
ou bien encore un prétendant se livre à une plaisante fureur. Au
1 . Voyez la scène ou Tircis est présenté par Eraste à Mélite dans
la pièce de ce nom (acte I, scène n).
2. Voyez la rencontre de Lysandre et de Dorimant dans la Ga-
lerie du Palais (acte 1, scène vu), et celle d'Alidor et de Cléandre
dans la Place Royale (acte I, scène iv).
3. Voyez dans Mélite la scène vin de l'acte II, entre Tircis et Mé-
lite, et dans la Place Royale la scène vu de l'acte II, où Cléandre ren-
contre Phylis avec Lvsis.
4. Voyez dans la Galerie du Palais la scène x de l'acte IV, dans
laquelle Pleirante intime à Gélidée l'ordre d'épouser Dorimant, et le
monologue de Célidée qui forme la scène suivante.
5. Voyez dans la Galerie du Palais la scène v et la scène x de
l'acte III.
6. Voyez à la lin de l'acte IV de Mélite et au commencement de
l'acte V les fureurs co niques d'Éraste.
68 POESIES DIVERSES.
Hic aliquid dignurn laude, Ly sandre , furis1 ;
Nec minus Angelicae dolor et suspiria spretse2,
Quam placuere tui, Phylli jocosa , sales8; 3o
Et quorum in patulos solvis lata ora cachinnos ,
Multa his Angelica lacrima flente cadit.
Sed tamen hic scena est , et gestu et voce juvamur,
Forsitan et mancum Roscius4 implet opus.
Tollit si qua jacent , et toto corpore prodest, 3 5
Forsan et inde ignis versibus , inde lepos.
Vix sonat a magno divulsa camœna theatro ,
Blaesaque nii proprio sustinet ore loqui.
Hi mihi sunt fines, nec me quaesiveris extra :
Carminibus ponent clausa theatra modum ; 4 o
moment même où les marchands de la Galerie font éclater de rire
les spectateurs, tu t'abandonnes, Lysandre, à un courroux qui fait
quelque honneur au poète. La douleur et les soupirs d'Angélique dé-
daignée n'ont pas moins plu quêtes brocards, maligne Phylis; et ceux
que tu fais rire à gorge déployée ne peuvent retenir leurs larmes
en voyant pleurer Angélique . Mais du moins la scène est là : le
geste, la diction nous viennent en aide, et Roscius peut complé-
ter l'œuvre imparfaite. Il relève au besoin ce qui languit; toute sa
personne contribue au succès, et de là peut-être le feu de mes vers,
de là leur grâce. Arrachée à son grand théâtre, c'est à peine si ma
muse parvient à se faire entendre; elle bégaye et ne se risque point à
parler par sa propre bouche. Là sont mes limites, ne me cherchez
pas en dehors : le théâtre fermé, il ne faut plus attendre de vers de
1. Voyez le monologue de Lysandre, qui forme la scène 1 de
l'acte V de la Galerie du Palais et succède immédiatement à la dis-
pute de la Lingère et du Mercier.
2. Voyez diverses scènes de la Place Royale, entre autres les scè-
nes 1, 11 et ni de l'acte II.
3. Voyez le rôle de Phylis dans la Place Royale, dès la première
scène.
4. Allusion flatteuse au talent avec lequel Mondory remplissait
les principaux rôles <!ans ces premières pièces de Corneille. Voyez
tome 1, p. i3o, i3i et 268.
POÉSIES DIVERSES. 69
Nec, Lodoïce, tuos ausim temerare triumphos,
RicHELiuMve humili dedecorare lyra.
iiegis ad adventum fusos Rliea protinus Anglos
Tundere spumantes libéra vidit aquas.
Victa sibi nullo Rupella1 cruore madendum 45
Mirata est, iram vicerat ille prius :
Victores dominum, victi sensere parentem2,
Mœnibus admisit cum benesuada famés.
Quem sprevit socium, dominum tulit inde Sabaudus,
Quique fide pGtuit cedere , cessit agris ; 5 o
Cessit et obsesso pugnax a Gazale Iberus ,
Jamque suo servit Mantua lœta duci.
Arx quoque totius non impar viribus orbis ,
moi; et je n'oserais, Louis, ni profaner tes triomphes, ni déshonorer
Richelieu en le célébrant sur mon humble lyre.
A l'arrivée du Roi Rhé libre vit aussitôt les Anglais mis en fuite
fendre les flots écumeux. Vaincue, la Rochelle s'étonna de n'avoir
pas à ruisseler de sang ; mais déjà il avait dompté sa colère : les
vainqueurs trouvèrent en lui un maître, les vaincus un père, quand
la faim, bonne conseillère, lui ouvrit les portes. La Savoie, pour
avoir méprisé son alliance , subit sa domination , et le prince qui
avait osé déserter la bonne foi fut contraint de déserter aussi son
territoire. Le belliqueux Ibère se retira de Cazal assiégé, etdéjàMan-
toue se réjouit d'obéir à son duc. Enfin une place capable de résister
1. Sur cette victoire et sur celles auxquelles il est fait allusion dans
le morceau suivant jusqu'au vers 54 inclusivement, voyez ci-après
dans les Triomphes de Louis le Juste, p. 108-110, les inscriptions qui
ont pour titre : la Rochelle ; le pas de Suze forcé ; Cazal ; la protection de
Manloue ; Nancy .
2. Dans les Triomphes de Louis le Juste (vers 36; voyez ci-après,
p. 106) Corneille s'est rappelé ce vers et l'a ainsi traduit :
Et père des vaincus, et maître des vainqueurs.
Et dans les Victoires du Roi en l'année 1667, il a dit (vers 3n
et 3 12) :
Il entre, mais d'un air qui ravit tous les cœurs,
En père des vaincus, en maître des vainqueurs.
7o POESIES DIVERSES.
Nanceium, viso vix bene Rege, patet.
Richelius tanto ingentes sub principe curas 5 5
Explîcat , et tantis pars bona rébus adest ;
Nec pretiosam animam Lodoïci impendere palmis ,
Aut patriae dubitet postposuisse bonis.
Tempora rimatur, pavidum ruitui us in liostem ,
Et ruit, et solo nomine ssepe domat. 60
Nestora Richelius, Rex vincere possit Achillem i .
Haec levibus metris credere , auaie nefas !
Tanta canant quorum praecordia Cynthius urget
Plenior, et mentem grandior sestus agit :
Sit satis ad nostros plausisse utrumque lepores ; 6 5
Forsitan et nomen novit uterque meum.
Laudibus apta minus, curis fuit apta levandis
aux forces du monde entier, Nancy, aperçoit à peine le Roi qu'elle
ouvre ses portes. Richelieu , sous un tel prince, dénoue les plus
grandes difficultés : il est pour sa bonne part dans de si belles choses,
et n'hésite pas à consacrer à la gloire de Louis sa précieuse existence,
à laquelle il préfère le bien de la patrie. Prêt a s'élancer sur un
ennemi tremblant, il cherche l'occasion favorable, s'élance enfin, et
le dompte souvent par le seul prestige de son nom. Richelieu eût pu
l'emporter sur Nestor; le Roi, sur Achille. Confier de tels sujets à
une muse légère, quel crime! Qu'ils les chantent, ceux qu'Apollon
dévore d'une flamme plus \ ive et dont un sublime transport agite
l'esprit. Qu'il nous suffise que ces deux héros aient applaudi à nos
jeux : peut-être connaissent-ils mon nom l'un et l'autre. Peu propre
à célébrer leurs louanges , Melpomène du moins l'a été à calmer
1. C est ici un des lieux communs habituels des compliments
adressés à Richelieu et à Louis XIII. On lit à la page 76 des Sacrifices
des Muses , dans une pièce de vers de Faret intitulée : Pour Monsei-
gneur le cardinal-duc de Richelieu, ode :
L'un pèse tout exactement,
L'autre exécute en un moment ;
L'un sait plus que Nestor, l'autre fait plus qu'Achille.
POÉSIES DIVERSES. 71
Melpomene , et longos sit ; precor, apta dies.
Hos gestit versare modos \ hic nescia vinci
Nostra coronato vertice laurus ovat : 7 o
Me pauci hic fecere parem, nullusque secundum1,
Nec spernenda fuit gloria pone sequi.
Desipiat nota forsan qui primus in arte ,
Ultimus ignotis artibus esse velit.
Suspicio vates , et carmina pronus adoro 7 5
Materiam queis Rex, Richeliusvc dédit;
Sed neque Godœis 2 accédât musa tropaeis ,
Nec Capellanum * fas mihi velle sequi ,
leurs soucis, et plaise à Dieu qu'elle le soit de longs jours encore!
Voilà les chants qu'elle aime à méditer : là triomphe, sans crain-
dre la défaite , le laurier qui ceint mon front ; là peu d'hommes
m'ont atteint, nul ne m'a dépassé , et me suivre de près n'a point
semblé une gloire à mépriser. Il est insensé celui qui, premier, s'il
peut l'être, dans un art qu'il connaît, se résigne à être le dernier dans
un art inconnu. J'admire les poètes,, et j'adore humblement les vers
dont le Roi ou Richelieu ont fourni la matière; mais ma muse se
garde d'approcher des trophées de Godeau ; et il ne m'est pas per-
mis de vouloir suivre Chapelain, pour ne rien dire des autres dont la
1. Corneille a encore traduit ce vers dans Y Excuse à Arlste (vers 5 2
et 53); mais si, comme tout porte à le croire, cette pièce de vers
n'a été composée qu'après le succès du Cid, notre poète était alors
beaucoup mieux fondé à dire :
Je ne dois qu'à moi seul toute ma renommée,
Et pense toutefois n'avoir point de rival
A qui je fasse tort en le traitant d'égal.
2. Antoine Godeau, né le 24 septembre i6o5, mort le 21 avril 1672,
nommé évêque de Grasse le 21 juin i636, était alors connu par le
discours qu'il avait placé en tête des OEuvres de Malherbe (v oyez l'édi-
tion de M. Lud. Lalanne, tome I, p. xcii), par la préface du Dia-
logue des causes de la corruption de C éloquence, traduit par Giry, et
surtout par ses OEuvres chrétiennes, publiées en i633. Il avait com-
posé aussi un grand nombre de poésies diverses, et entre autres une
Ode au Roi, qui forme les pages i-i3 du Parnasse royal.
3. Jean Chapelain, né le 4 décembre i5o,5, mort en 1674, n'avait
72 POESIES DIVERSES.
Ut taceam reliquos quorum sonat undique fania
Non minor, et grandi pectore vena salit. 80
Hos ego sperarim ' nequicquam aequare canendo :
Hos sua perpetuum, me mea palma juvet.
Tu modo, quem meritis dudum minor infula cingit,
Neastriacœ, praesul , gloria luxque plagse,
Heroum ad laudes , dignosque Marone ti iumphos 8 5
Parce, precor, tenuem sollicitare chelyn.
renommée, non moindre, retentit de toutes parts, et chez qui la veine
poétique jaillit dans un grand cœur. En vain j'espérerais les égaler
par mes chants : qu'ils soient à jamais contents des palmes qu'ils ont
rempoitées,et moi des miennes. Pour toi, dont la tête est ceinte d'une
mitre qui depuis longtemps déjà n'égale plus ton mérite, prélat, gloire
et lumière de la plage neustrienne, épargne, je t'en prie, mon faible
luth, et ne le sollicite pas de célébrer les louanges des héros et des
triomphes dignes d'un Virgile.
encore publié que la lettre qui parut en 1623 en tête de Y Adone du
cavalier Marin, et quelques poésies. Il avait composé une Ode a Mon-
seigneur le cardinal-duc de Richelieu^ publiée d'abord à Paris, chez
Iean Camusat, M. DC. XXXIII, in-folio, et ensuite aux pages 1-18 du
volume intitulé les Sacrifices des Muses.
1. On peut voir que Corneille n'a aucun égard au conseil que
donnent nos prosodies latines, qui veulent qu'on évite de placer après
une finale brève un mot commençant par sp, st, et généralement par
deux consonnes dont la seconde n'est pas une liquide. Il y a dans
cette pièce quatre exemples de cette licence, aux vers 12, 29, 44 et 81 .
Voyez la Nouvelle Prosodie latine de M. L. Quicberat, chapitre v,
règle n , 5°. Au reste, les poètes latins du dix-septième siècle ne te-
naient en général nul compte de cette règle. On verra d'assez nom-
breux exemples de la même licence dans les pièces du P. de la Rue,
de Santeul, etc., que nous donnerons dans la suite de ce volume.
POÉSIES DIVERSES. 73
XXI
POUR "LHIPPOLYTE DE MONSIEUR DF LA PINELIERE.
Cette petite pièce, signée Corneille, se trouve au verso du dix-
huitième feuillet d'Hippolyte, tragédie par de la Pineliere, Angeuin,
à Paris, chez Antoine de Sommaville, au Palais.... M DC.XXXV. Ces
vers sont reproduits dans la Bibliothèque dramatique de M . de Soleinne
(supplément au tome 1, p. 3o,, n° 201) et dans les notes sur la vie de
Corneille (p. xcvn et xcviii) par M. Edouard Fournier. C'est la pre-
mière fois qu'ils sont réunis aux OEuvres de Corneille. Nous avons eu
occasion de parler de YHippoljte de la Pineliere dans la Notice de
la Galerie du Palais (tome II, p. 4).
Phèdre , si ton chasseur avoit autant de charmes
Qu'en donne à son visage un si docte pinceau ,
Ta passion fut juste et mérite des larmes
Pour plaindre le malheur qui le met au tombeau.
Et si tu parus lors avec autant de grâce =>
Qu'en ces vers éclatants qui te rendent le jour,
Estime qui voudra son courage de glace,
Sa froideur fut un crime, et non pas ton amour.
Aussi, quoi qu'on ait dit du courroux de Thésée,
Sa mort n'est pas l'effet de son ressentiment, 10
Mais les Dieux l'ont puni pour t'avoir méprisée,
Et fait de son trépas un juste châtiment.
74 POÉSIES DIVERSES.
XXII
EXCUSE A ARISTE1
S'il faut en croire un adversaire de notre poète, Cortieille disait
qu'il avait composé cette pièce <c plus de trois ans » avant le moment
où commença la querelle du Cid , c'est-à-dire en même temps à peu
près que la pièce XX. Il est certain du moins qu'elle n'a été publiée
qu'après le succès du Cid , au commencement de 1637, et qu'elle a
servi de prétexte à la longue dispute littéraire à laquelle cet ouvrage
a donné lieu. Voyez ce qui est dit au tome III, p. 19 et suivantes;
et dans le même volume, p. 37, 58, 5g et 71, plusieurs pièces de
vers de divers auteurs également relatives au Cid ; voyez surtout au
tome II, p. 118, le sixain que Corneille a placé dans YÉpitre dédi-
catoire de la Suivante vers l'époque où il écrivait V Excuse à Arisle.
Un volume de la Bibliothèque impériale portant le n° Y 5665 con-
tient des exemplaires de deux éditions différentes de cet opuscule,
imprimées toutes deux en italique; l'une de ces deux éditions, ornée
d'un fleuron, est des plus défectueuses; on y lit par exemple au
vers i5 : laisse, au lieu de leurre, et au vers 35 : m'ait, au lieu de met.
L' Excuse à triste occupe en outre les pages 97-100 du tome III du
Recueil de Poésies chrestiennes et diverses, dédié à Monseigneur le Prince
de Conty, par M. de la Fontaine , à Paris , chez Pierre le Petit ,
M.DC.LXXI, in-12.
Ce n'est donc pas assez, et de la part des Muses ,
Ariste, c'est en vers qu'il vous faut des excuses;
Et la mienne pour vous n'en plaint pas la façon :
Cent vers lui coûtent moins que deux mots de chanson;
Son feu ne peut agir quand il faut qu'il s applique 2 5
1. Voyez sur Ariste, tome III, p. 29-3 1.
1. S'explique, dans les OFuivres diverses publiées par Granet. Cette
leçon fautive a été reproduite dans toutes lea éditions postérieures.
POÉSIES DIVERSES. 75
Sur les fantasques airs d'un rêveur de musique * ,
Et que pour donner lieu de paroître à sa voix ,
De sa bigearre2 quinte il se fasse des lois8;
Qu'il ait sur chaque ton ses rimes ajustées ,
Sur chaque tremblement ses syllabes comptées , 1 o
Et qu'une froide pointe à la fin d'un couplet
En dépit de Phébus donne à l'art un soufflet :
Enfin cette prison déplaît à son génie;
Il ne peut rendre hommage à cette tyrannie ;
Il ne se leurre point d'animer de beaux chants , i 5
Et veut pour se produire avoir la clef des champs.
C'est lorsqu'il court d'haleine4, et qu'en pleine 6 carrière.
Quittant souvent la terre en quittant la barrière ,
Puis, d'un vol élevé se cachant dans les cieux ,
Il rit du désespoir de tous ses envieux. 2 o
Ce trait est un peu vain , Ariste , je l'avoue;
Mais faut-il s'étonner d'un poëte qui se loue?
Le Parnasse, autrefois dans la France adoré,
Faisoit pour ses mignons un autre âge doré,
Notre fortune enfloit du prix de nos caprices , 2 5
Et c'étoit une Manque6 à de bons bénéfices ;
1. M. Corneille avoit été prié de composer des paroles pour être
mises en musique ; mais il ne voulut pas se donner cette peine. {Note
de Granet.}
2. C'est-à-dire bizarre. Bigearre est l'orthographe de l'édition ori-
ginale.
3. C'est-à-dire qu'il se conforme aux accords du musicien. Cor-
neille, au lieu de se servir du terme général , emploie le nom d'un
accord particulier.
4. // court d'haleine, il court sans perdre haleine, tout d'une haleine.
5. Plaine, dans l'édition originale; mais le sens ne demande point
que cette orthographe soit conservée.
6. a Sorte de jeu de hasard auquel on joue avec un livre où il y
a des feuillets noirs et des feuillets blancs. *• (Richelet , Dictionnaire
françois, 1680.) — .On lit banque, mais à tort, dans un grand nom-
bre d'éditions modernes.
76 POÉSIES DIVERSES.
Mais elle est épuisée , et les vers à présent
Aux meilleurs du métier n'apportant1 que du vent,
Chacun s'en donne à l'aise , et souvent se dispense 2
A prendre par ses mains toute sa récompense. 3<>
Nous nous aimons un peu , c'est notre foible à tous :
Le prix que nous valons , qui le sait mieux que nous ?
Et puis la mode en est, et la cour l'autorise.
Nous parlons de nous-même avec toute franchise ;
La fausse humilité ne met plus en crédit. 3 *;
Je sais ce que je vaux , et crois ce qu'on m'en dit.
Pour me faire admirer je ne fais point de ligue :
J'ai peu de voix pour moi , mais je les ai sans brigue ;
Et mon ambition , pour faire plus de bruit ,
Ne les va point quêter de réduit en réduit; 4 <»
Mon travail sans appui monte sur le théâtre :
Chacun en liberté l'y blâme ou l'idolâtre;
Là , sans que mes amis prêchent leurs sentiments,
J'arrache quelquefois trop d'applaudissements8 ;
Là, content du succès que le mérite donne, 4 5
Par d'illustres avis je n'éblouis personne :
Je satisfais ensemble et peuple et courtisans ,
Et mes vers en tous lieux sont mes seuls partisans ;
Par leur seule beauté ma plume est estimée :
Je ne dois qu'à moi seul toute ma renommée, 5o
Et pense toutefois n'avoir point de rival
A qui je fasse tort en le traitant d'égal *.
Mais insensiblement je baille 6 ici le change ,
1. N"' 'apportant a été remplace par n'apportent dans l'édition avec
fleuron, dans le Recueil et dans les OEuvres diverses de iy38.
2. Voyez ci-dessus, p. 5i, vers 24 et note 2.
3. Leurs applaudissements, dans les OEuvres diverses, et depuis dans
toutes les éditions.
4. Voyez ci-dessus, p. 71, note 1.
5. Je donne, dans le Recueil et dans l'édition de Granet.
POESIES DIVERSES. 77
Et mon esprit s'égare en sa propre louange ;
Sa douceur me séduit , je m'en laisse abuser, s 5
Et me vante moi-même, au lieu de m'excuser.
Revenons aux chansons que l'amitié demande :
J'ai brûlé fort longtemps d'une amour assez grande ,
Et que jusqu'au tombeau je dois bien estimer,
Puisque ce fut par là que j'appris à rimer. 60
Mon bonheur commença quand mon âme fut prise :
Je gagnai de la gloire en perdant ma franchise.
Charmé de deux beaux yeux, mon vers charma la cour;
Et ce que j'ai de nom je le dois à l'amour*.
J'adorai donc Philis; et la secrète estime 6 5
Que ce divin esprit faisoit de notre rime
Me fit devenir poëte aussitôt qu'amoureux :
Elle eut mes premiers vers , elle eut mes derniers feux 2 ;
Et bien que maintenant cette belle inhumaine
Traite mon souvenir avec un peu de haine, 70
Je me trouve toujours en état de l'aimer*,
Je me sens tout ému quand je l'entends nommer,
Et par le doux effet d'une prompte tendresse
Mon cœur sans mon aveu reconnoît sa maîtresse.
Après beaucoup de vœux et de submissions 7 5
Un malheur rompt le cours de nos affections ;
Mais , toute mon amour en elle consommée ,
Je ne vois rien d'aimable après l'avoir aimée :
Aussi n'aimai-je3 plus, et nul objet vainqueur
N'a possédé depuis ma veine ni mon cœur. 80
Vous le dirai-je, ami? tant qu'ont duré nos flammes,
1. Voyez tome I, p. 125 et suivantes.
2. Elle eut mes premiers feuxt dans les OEuvres diverses de 1738 et
dans toutes les éditions complètes de Corneille publiées depuis.
3. Au temps de Corneille on écrivait ainsi, de la même manière,
les deux formes aimé-je et aimai-je. La seconde nous paraît ici pré-
férable nour le sens.
78 POÉSIES DIVERSES.
Ma muse également chatouilloit nos deux âmes ;
Elle avoit sur la mienne un absolu pouvoir,
J'aimois à le décrire , elle à le recevoir.
Une voix ravissante , ainsi que son visage , 8 5
La faisoit appeler le phénix de notre âge;
Et souvent de sa part je me suis vu presser
Pour avoir de ma main de quoi mieux l'exercer.
Jugez vous-même, Ariste, à cette douce amorce,
Si mon génie étoit pour épargner sa force : 9 »>
Cependant mon amour, le père de mes vers,
Le fils du plus bel œil qui fût en l'univers ,
A qui désobéir c'étoit pour moi des crimes,
Jamais en sa faveur n'en put tirer deux rimes :
Tant mon esprit alors, contre moi révolté, 95
En haine des chansons sembloit m' avoir quitté;
Tant ma veine se trouve aux airs mal assortie ,
Tant avec la musique elle a d'antipathie *,
Tant alors de bon cœur elle renonce au jour.
Et l'amitié voudroit ce que n'a pu l'amour ! 100
N'y pensez plus, Ariste; une telle injustice
Exposeroit ma muse à son plus grand supplice.
Laissez-la, toujours libre , agir suivant son choix,
Céder à son caprice, et s'en faire des lois.
1 . Corneille a pourtant publié à la suite de Clitandre deux chan-
sons , composées probablement à la demande de celle qui inspira
Mélite (voyez ci-dessus, p. 53 et 55); et une troisième dans le recueil
de Sercy. On trouvera encore ci-après un sixain Pour la Reine, mis
en chant par Lambert, et un Madrigal mis en musique par Blondel ; mais
dans ces deux dernières pièces Corneille n'a pas eu à se préoccuper
du musicien, qui a composé ses airs sur des vers faits d'avance.
POESIES DIVERSES. 79
XXIII
RONDEAU.
Ce rondeau a paru en 1637, d'abord seul, en un feuillet in-4°.
Nous ne connaissons de cette rare édition qu'un exemplaire relié dans
un recueil in-i 2 de la bibliothèque de l'Arsenal portant le n° 9809. B.L.
Ces vers furent réimprimés plus tard à la suite des deux éditions de
V Excuse à triste dont nous avons parlé dans la notice précédente. Ils
répondent à une pièce anonyme, intitulée P A ut heur du vray Cld es-
pagnol à son traducteur françois, qui fut attribuée à Mairet par Cor-
neille. Clavcret s'est vanté d'avoir engagé notre poète à ne pas publier
ce rondeau, que Granet regarde à tort comme dirigé contre Scudéry.
Voyez les pages 21 et 22 du tome III.
Qu'il fasse mieux , ce jeune jouvencel ,
A qui le Cid donne tant de martel ,
Que d'entasser injure sur injure ,
Rimer de rage une lourde imposture ,
Et se cacher ainsi qu'un criminel. 5
Chacun connoit son jaloux naturel ,
Le montre au doigt comme un fou solennel
Et ne croit pas , en sa bonne écriture,
Qu'il fasse mieux.
Paris entier, ayant lu * son cartel , 1 o
L'envoie au diable , et sa muse au bordel ;
Moi, j'ai pitié des peines qu'il endure ;
Et comme ami je le prie et conjure ,
1. Il y a vu, au lieu de lu, dans les OEuvres diverses et dans toutes
ies éditions modernes.
80 POESIES DIVERSES.
S'il veut ternir un ouvrage immortel,
Qu'il fasse mieux. i 5
Omnibus irwideas , livide; nemo tibi* .
i. a Que tu portes, jaloux, envie à tous, et personne à toi. » C'est
le second et dtrnier vers de la xoe épigramme du livre I de Martial.
— Selon toute apparence, c'est ici à peu près que devraient se
placer, suivant Tordre chronologique, les six vers que Corneille adresse
à Pellisson pour Foucquet dans la lettre xxii. Voyez ci-après les
Lettres, à la sviite des Poésies diverses et des OEuvres diverses en prose.
POESIES DIVERSES. 81
XXIV
REMERC1JVIENT FAIT SUR-LE-CHAMP
PAR MONSIEUR DE CORNEILLE.
Ces vers ont été improvisés à la séance de décembre 1640 du Puy
de Palinod de Rouen, pour remercier l'assemblée du prix qu'elle
venait de décerner à une pièce que Jacqueline Pascal avait composée
par le conseil de Corneille. Voyez ci- dessus, p. 7-9.
Pour une jeune muse absente ,
Prince1, je prendrai soin de vous remercier;
Et son âge et son sexe ont de quoi convier
A porter jusqu'au ciel sa gloire encor naissante.
De nos poètes fameux les plus hardis projets 5
Ont manqué bien souvent d'assez justes sujets
Pour voir leurs muses couronnées ;
Mais c'en est un beau aujourd'hui2 :
Une fille de douze années3
A seule de son sexe eu des prix sur ce Puy* . 1 <»
1. Jacques le Conte, marquis de Nonant, lieutenant pour le Roi en
ses pays et duché d'Alençon, président du Puy (princeps).
2. Tel est le texte du manuscrit. Voyez un autre hiatus, ci-après,
p, i3i, vers g.
3. Jacqueline Pascal, née le 4 octobre 1625, avait alors quinze ans
accomplis, ainsi que nous l'avons vu plus haut; mais Corneille a pu
se tromper facilement sur son âge, car Gilberte Pascal nous dit que
lorsque Jacqueline joua devant le Cardinal, « étant de fort petite taille,
et ayant le visage fort jeune, elle ne paroissoit pas avoir plus de huit
ans, quoiqu'elle en eût treize. » {Bibliothèque de l'École des chartes,
tome V, p. 307.)
4. Il y a dans le manuscrit pays, qui n'a point de sens et ne fait
pas le vers.
CORJS'RILLE. x 6
82 POÉSIES DIVERSES.
XXY
LA. TULIPE.
MADKIGAL.
AU SOLEIL.
Cette pièce et les deux suivantes ont été composées en 1641 par
Corneille pour la Guirlande de Julie, offerte par M. de Montausier à
sa future, Julie d'Angenne. Voyez ci-dessus, p. 9-11 et p. 18, les dé-
tails donnés dans la Notice sur ce recueil ; et ci-après, dans 1! 'Appen-
dice, trois autres pièces du même manuscrit qui ont été attribuées
également, avec quelque vraisemblance, à Corneille. Dans l'édition
de la Guirlande de Julie publiée par M. Livet, d'après le manuscrit
de 1641 {Précieux et Précieuses, p. 393-432), le titre de cette pièce
est la Tulipe au soleil, madrigal.
Bel astre à qui je dois mon être et ma beauté ,
Ajoute l'immortalité
A l'éclat nompareil dont je suis embellie;
Empêche que le temps n'efface mes couleurs :
Pour trône donne-moi le beau front de Julie; 5
Et si cet heureux sort à ma gloire s'allie ,
Je serai la reine des fleurs.
POÉSIES DIVERSES. 83
XXVI
LA. FLEUR D ORANGE.
MADBIGAL.
Du palais d'émeraude où la riche nature
M'a fait naître et régner avecque majesté,
Je viens pour adorer la divine beauté
Dont le soleil n'est rien qu'une foible peinture.
Si je n'ai point l'éclat ni les vives couleurs 5
Qui font l'orgueil des autres fleurs ,
Par mes odeurs je suis plus accomplie,
Et par ma pureté plus digne de Julie.
Je ne suis point sujette au fragile destin
De ces belles infortunées i o
Qui meurent dès quelles sont nées ,
Et de qui les appas ne durent qu'un matin.
Mon sort est plus heureux, et le ciel favorable
Conserve ma fraîcheur1, et la rend plus durable.
Ainsi , charmant objet , rare présent des cieux , i 5
Pour mériter l'honneur de plaire à vos beaux yeux,
J'ai la pompe de ma naissance ;
Je suis en bonne odeur en tout temps , en tous lieux ;
Mes beautés ont de la constance ,
Et ma pure blancheur marque mon innocence. 20
J'ose donc me vanter, en vous offrant mes vœux,
De vous faire moi seule une riche couronne,
Bien plus digne de vos cheveux
1. Franchise, dans les Poésies choisies publiées chezSerey. Fraî-
cheur, dans l'édition de M. Livtt.
84 POÉSIES DIVERSES.
Que les plus belles fleurs que Zéphire vous donne;
Mais si vous m'accusez de trop d'ambition , 2 5
Et d'aspirer plus haut que je ne devrois faire,
Condamnez ma présomption,
Et me traitez en téméraire ;
Punissez, j'y consens, mon superbe dessein
Par une sévère défense 3 o
De m'élever plus haut que jusqu'à votre sein ,
Et ma punition sera ma récompense.
POÉSIES DIVERSES. 85
XXVII
L IMMORTELLE BLANCHE.
MADRIGAL.
Donnez-moi vos couleurs, tulipes, anémones;
OEillets, roses, jasmins, donnez-moi vos odeurs.
Des contraires saisons le froid ni les ardeurs
Ne respectent que les couronnes
Que l'on compose de mes fleurs. 5
Ne vous vantez donc point d'être aimables ni belles :
On ne peut nommer beau ce qu'efface le temps ;
Pour couronner les beautés éternelles ,
Et pour rendre leurs yeux contents,
Il ne faut point être mortelles. i o
Si vous voulez affranchir du trépas
Vos brillants mais frêles appas,
Souffrez que j'en sois embellie ;
Et si je leur fais part de mon éternité,
Je les rendrai pareils aux appas de Julie, i 5
Et dignes de parer sa divine beauté.
86 POÉSIES DIVERSES.
XXVIII
VERS SUR LE CA.RDINAL DE RICHELIEU.
Ce quatrain fut composé à l'occasion de la mort du cardinal de
Richelieu, qui eut lieu le 4 décembre 1642. Pellisson racontant les
différends qui s'étaient élevés à propos du C'id entre Richelieu et
notre poëte, a publié le premier ces quatre vers dans sa Relation conte-
nant rhistoire de C Académie françoise, qui parut en i653. « Corneille
les lit, dit-il (p. 218 et 219), après la mort du Cardinal, qu'il consi-
déroit d'un côté comme son bienfaiteur, et de l'autre comme son
ennemi. » Dans les OEuvres diverses de 1738 (p. 148) ce quatrain fut
imprimé avec le titre qu'il porte ici. — Voyez dans V Appendice une
épitaphe de Richelieu, attribuée par M. Taschereau à Corneille.
Qu'on parle mal ou bien du fameux Cardinal ,
Ma prose ni mes vers n'en diront jamais rien :
11 m'a fait trop de bien pour en dire du mal ,
Il m'a fait trop de mal pour en dire du bien.
POESIES DIVERSES.
XXIX
SUR LA MORT DU ROI LOUIS XIII.
SONNET.
Ce sonnet, composé à l'occasion de la mort de Louis XIII, qui ar-
riva le 14 mai i643, n'a pas été imprimé du vivant de Corneille, et
s'est conservé imparfaitement dans la mémoire de ses contemporains
ou dans des copies peu exactes. Nous le donnons d'après une tran-
scription de la main de Gaignières1, signée P. Corneille, qui nous
a été obligeamment signalée par M. Ludovic Lalanne2. Gaignières
étant mort en mars 171 5, ce texte est le plus ancien de ceux que
nous possédons. Nous le faisons suivre de cinq autres rédactions
classées d'après le rapport qu'elles ont avec celle qui nous sert de type.
Sous ce marbre repose un monarque sans vice ,
Dont la seule bonté déplut aux bons François,
Et qui pour tout péché ne fit qu'un mauvais choix ,
Dont il fut trop longtemps innocemment complice.
L'ambition, l'orgueil, l'audace, l'avarice, 5
Saisis de son pouvoir, nous donnèrent des lois ,
Et bien qu'il fût en soi le plus juste des rois,
Son règne fut pourtant celui de l'injustice.
Vainqueur de toutes parts , esclave dans sa cour,
Son tyran et le nôtre à peine perd le jour , 1 o
Que jusque dans la tombe il le force à le suivre .
1. Sur Gaignières, voyez le tome VIII des Lettres de Mme de
Sévigné, p. i53, note 1.
2. Elle se trouve à la Bibliothèque impériale, fonds Gaignières 1001 ,
Mélanges, pièces galantes, satiriques, etc., p. 14.
88 POÉSIES DIVERSES.
Jamais de tels malheurs furent-ils entendus ?
Après trente-trois ans sur le trône perdus ,
Commençant à régner, il a cessé de vivre *.
VARIANTES.
Texte de Voltaire dans les notes sur F Épitre dédicatoire ^/'Horace.
Sous ce marbre repose un monarque sans vice,
Dont la seule bonté déplut aux bons François,
Ses erreurs, ses écarts vinrent d'un mauvais choix,
Dont il fut trop longtemps innocemment complice.
L'ambition, l'orgueil, la haine, l'avarice,
Armés de son pouvoir, nous donnèrent des lois;
Et bien qu'il fût en soi le plus juste des rois,
Son règne fut toujours celui de l'injustice.
Fier vainqueur au dehors, vil esclave en sa cour,
Son tyran et le nôtre à peine perd le jour,
Que jusque dans sa tombe il le force à le suivre ;
Et par cet ascendant ses projets confondus,
Après trente-trois ans sur le trône perdus,
Commençant à régner, il a cessé de vivre.
Sonnet. Epitaphe de Louis XIII. Feuillet ajouté à certains exem-
plaires des OEuvres diverses de 1738. Ce feuillet porte au verso le Placet
1. A la suite de notre pièce XXIX devrait se placer, d'après
l'ordre chronologique, la pièce intitulée : J la Reine régente, sonnet,
que l'abbé Granet a publiée à la page 149 des OEuvres diverses; mais
comme elle est extraite de la dédicace àePolyeucte, nous y renvoyons
le lecteur (/oyez tome III, p. 47^), et nous nous contentons de la
rappeler ici à sa date, qui nous est donnée par l'Achevé d'imprimer
de Poljeucte (20 octobre i643).
POÉSIES DIVERSES. 89
au Roi sur le retardement de sa pension. Ce texte et le suivant se
trouvent à la Bibliothèque impériale.
Sous ce tombeau repose un roi qui fut sans vice,
Dont la seule bonté fit tort aux bons François,
Et qui pour tout péché ne fit qu'un mauvais choix ,
Dont il fut à la fois et victime et complice.
L'ambition, l'orgueil, la fraude, l'avarice,
Saisis de son pouvoir, nous donnèrent des lois ;
Et bien qu'il fût en soi le plus juste des rois,
Son règne fut pourtant celui de l'injustice.
Craint de tout l'univers, esclave dans sa cour,
Son tyran et le nôtre à peine sort du jour,
Que jusque dans sa tombe il le force à le suivre.
Jamais de tels malheurs furent- ils entendus?
Après trente-trois ans sur le trône perdus,
Commençant régnei , il a cessé de vivre.
Sonnet sur la mort de Louis XIII. Feuillet imprimé, différent du
précédent , ajouté à d'autres exemplaires du même ouvrage , et ne
contenant que le sonnet.
Sous ce marbre repose un monarque françois,
Que ne sauroit l'envie accuser d'aucun vice;
Il fut et le plus juste et le meilleur des rois,
Son règne fut pourtant celui de l'injustice.
L'ambition, l'orgueil, l'intérêt, l'avarice,
Revêtus de son nom, nous donnèrent des lois ;
Sage en tout, il ne fit jamais qu'un mauvais choix,
Dont longtemps nous et lui portâmes le supplice.
Vainqueur de toutes parts, esclave dans sa cour,
Son tyran et le nôtre à peine sort du jour,
Que jusque dans la tombe il le force à le suivre.
Jamais pareils malheurs furent-ils entendus?
9o POÉSIES DIVERSES.
Après trente-trois ans sur le trône perdus,
Commençant à régner, il a cessé de vivre.
Épitaphe sur Louis XIII. Copie, signée P. Corneille, occupant les
pages 211 et 212 du « second recueil » d'un manuscrit in-40 de la
bibliothèque de l'Arsenal portant le n° i35 des Belles- Lettres.
Sous ce marbre repose un monarque françois,
Que ne sauroit l'envie accuser d'aucun vice;
Il fut et le meilleur et le plus grand des rois,
Son règne fut pourtant celui de l'injustice.
Sage en tout, il ne fit jamais qu'un mauvais choix,
Dont longtemps nous et lui portâmes le supplice;
L'ambition, l'orgueil, l'intérêt, l'avarice,
Revêtus de son nom, nous donnèrent des lois.
Vainqueur de toute parts {sic), esclave dans sa cour,
Son tyran et le nôtre à peine sort du jour,
Que dans la tombe même il le force à le suivre.
Jamais pareils malheurs furent-ils entendus ?
Après trente et trois ans sur le trône perdus,
Commençant à régner, il a cessé de vivre.
« Sonnet sur la mort de Louis XIII, qu'on assure être de P. Cor-
neille et n'avoir jamais paru. » Les Nouveaux Amusemens du cœur
et de V esprit, ouvrage périodique, [par Philippe de Prétot] , à la
Haye, chés Zacharie Chastelain, etc., 1737-1745, tome XIV, p. 33o.
Sous ce marbre repose un monarque françois,
Que ne sauroit l'envie accuser d'aucun vice ;
Il fut et le plus juste et le meilleur des rois,
Son règne fut pourtant celui de l'injustice.
Sage en tout, il ne fit jamais qu'un mauvais choix,
Dont longtemps nous et lui portâmes le supplice ;
POÉSIES DIVERSES. 91
L'ambition, l'orgueil, l'intérêt, l'avarice,
Revêtus de son nom, nous donnèrent des lois.
Vainqueur de toute part, esclave dans sa cour,
Son tyran et le nôtre à peine sort du jour,
Que dans la tombe même il l'oblige à le suivre.
Jamais pareils malheurs furent-ils entendus ?
Après trente-trois ans sur le trône perdus,
Commençant à régner, il a cessé de vivre.
9» POÉSIES DIVERSES.
XXX
A MONSEIGNEUR MONSEIGNEUR l'ÉMINENTISSIME
CARDINAL MAZARIN.
REMERCIMENT.
Naudé nous fait connaître la nature de la libéralité qui a donné
lieu à ce Remerciment. Après avoir parlé longuement des calomnies
débitées par les pamphlétaires contre Mazarin : « Ces mêmes écri-
vains, ajoute-t-il1, ne disent-ils pas effrontément que le Cardinal n'a
jamais fait de bien aux hommes de lettres, et néanmoins Balzac, Cor-
neille— l'ont remercié publiquement : le premier de ce qu'il lui fai-
soit payer ponctuellement une pension de deux mille livres, et l'autre
de ce qu'il lui en avoit donné une de cent pistoles , de laquelle voilà
comme il parle en son Remerciment publié l'an i643 chez Sommaville
et Courbé. » Naudé rapporte ensuite les vers 9-16 de notre pièce XXX.
Ce n'est pas en 1643, comme il le dit, mais, ce qui est bien peu
différent, au mois de février 1644 2> °iue \e Remerciment parut, chez
les libraires qu'il indique, à la suite de la dédicace de l'édition origi-
nale in-4° de la Mort de Pompée. Il y est intitulé : A Son Emincnce.
Remerciment. Dans l'édition in- 12 qui fut publiée la même année, il
porte le titre que nous avons reproduit, et il est suivi de l'avis de
Corneille qu'on va lire et de la traduction en vers latins, que nous
reproduisons également. Cette traduction est signée A. R.; Granet,
qui a changé l'R en B, l'attribue à Adrien Blondin. Il ne peut y
avoir aucun doute sur le véritable nom de son auteur, car dans le
1 . Jugement de tout ce qui a été Imprimé contre le cardinal Mazarin
depuis le sixième janvier jusques à la déclaration du premier avril mil six
cent quarante-neuf [sans lieu ni date), in-40. Cet ouvrage de Gabriel
Naudé, bibliothécaire de Mazarin, est en forme de dialogue, et il est
connu sous le nom de Mascurat , l'un des interlocuteurs. C'est
M. Edouard Fournier qui nous a signalé , avec son obligeance habi-
tuelle, le curieux passage que nous en extrayons.
2. Voyez tome IV, p. 10.
POÉSIES DIVERSES. 93
recueil intitulé Elogia lulii Mazarini Cardinalis Parisiis, excudebat
Antonius Vitré , Régis et Cleri gallicani typographus , M.DC.LXVI,
in-fol., recueil composé de trois séries, la première latine, la seconde
italienne et la dernière française, on trouve aux pages 5i-53 de
la première de ces séries la pièce de vers latins imitée de Corneille,
avec cette signature : Abrahamus Remius, Poeta Regius. Le véri-
table nom de ce poète latin, alors célèbre, était Abraham Ravaud;
né le 6 mars 1600 dans le village de Remy en Beauvaisis, il en avait
pris le nom ; il mourut à Paris le Ier décembre 1646- Le Remercî-
mcnt de Corneille a été inséré aux pages 5~7 de la troisième série
des Elogia et dans le Recueil de poésies chrestiennes et diverses, dédié
à Monseigneur le prince de Conty, par M. de la Fontaine, à Paris,
chez Pierre le Petit, 1671, 3 vol. in-12 (tome III, p. 87-89). Ces
éditions contiennent des changements qu'on trouvera indiqués en
note. Voltaire a fait des remarques sur ce Remer ciment ^ si l'on peut
appeler remarques une continuelle déclamation contre Corneille au
sujet des louanges qu'il adresse à Mazarin.
Au Lecteur. Ayant dédié ce poème à Mr le cardinal
Mazarin, j'ai cru à propos de joindre à l'épître le
remercîment que je présentai il y a trois mois à Son
Éminence, pour une libéralité dont elle me surprit. Cette
pièce, quoique faite à la hâte, a eu le bonheur de plaire
assez à un homme savant pour ne dédaigner pas de
perdre une heure à donner une meilleure forme à mes
pensées , et les faire passer dans cette langue illustre qui
sert de truchement à tous les savants de l'Europe. Je te
donne ici l'un et l'autre , afin que lu voies et ma gloire
et ma honte. Il m'est extrêmement glorieux qu'un esprit
de cette trempe ait assez considéré mon ouvrage pour le
vouloir traduire; mais il m'est presque aussi honteux de
voir ses expressions tellement au-dessus des miennes,
qu'il semble que ce soit un maître qui ait voulu mettre
en lustre1 les petits efforts de son écolier. C'est une
1. En lumière , dans les OEuvres diverses (p. i52) et dans les édi-
tions postérieures. •
94 POÉSIES DIVERSES.
honte toutefois qui m'est très-avantageuse; et si j'en rou-
gis, c'est de me voir infiniment son redevable. L'obli-
gation que je lui en ai est d'autant plus grande qu'il m'a
fait cet honneur sans que j'aye celui de le connoître, ni
d'être connu de lui. Un de ses amis m'a dit son nom;
mais comme il ne l'a pas voulu mettre au-dessous de
ses vers quand il les a fait imprimer , je te l'indiquerai
seulement par les deux premières lettres, de peur de fâ-
cher sa modestie , à laquelle je ne veux ni déplaire , ni
consentir tout à fait * .
Non , tu n'es point ingrate, ô maîtresse du monde,
Qui de ce grand pouvoir sur la terre et sur l'onde,
Malgré l'effort des temps , retiens sur nos autels
Le souverain empire et des droits immortels.
Si de tes vieux héros j'anime la mémoire2, 5
Tu relèves mon nom sur l'aile de leur gloire ;
Et ton noble génie , en mes vers mal tracé ,
G R ATI ARUM ACTIO EMINENTISSIMO CARDINALI JULIO MAZARINO ?
Ex gallico Cornel'd.
Roma caput mundi, quse quondam vindice ferro,
Qua terrse pelagusque patent, fatalia victis
Jura dabas populis , et nunc, sed sanctior, orbem
Religione Deum et vera pietate gubernas,
Non te ingrata uieae cepere oblivia musse,
Nec labor irritus est, nam si mea carmina crescunt
In laudes fœcunda tuas, gentisque latinœ
Heroas veterumque ducum celebramus honorem,
i . Cet avis au Lecteur continue ainsi : a Au reste, si je voulois
faire ici » La suite est comme dans l'avis en u'te de Pompée :
voyez tome IV, p. 14.
a. Granet a mis : j'aime encor la mémoire
POÉSIES DIVERSES. 95
Par ton nouveau héros m'en a récompensé.
C'est toi, grand cardinal, âme1 au-dessus de l'homme,
Rare don qu'à la France ont fait le ciel et Rome , i o
C'est toi , dis-je , ô héros , ô cœur vraiment romain ,
Dont Rome en ma faveur vient d'emprunter la main .
Mon bonheur n'a point eu de douteuse apparence2 :
Tes dons ont devancé même mon espérance;
Et ton cœur généreux m'a surpris d'un bienfait i ô
Qui ne m'a pas coûté seulement un souhait.
La grâce en affoiblit 3 quand il faut qu'on l'attende :
Tel pense l'acheter alors qu'il la demande ;
Et c'est je ne sais quoi d'abaissement secret
Où quiconque a du cœur ne consent qu'à regret. 20
C'est un terme honteux que celui de prière :
Par virtute suis patribus novus emicat héros,
Maxima qui tenui pro munere dona refundit.
Te duce, magne héros, quo nil suhlimius sether
Francigenis, et nil melius dédit Itala tellus,
Juli, purpurea flamen dignissime palla,
Te duce, Roma suos, largo in me prodiga fœtu,
Fudit opes, nec in ancipiti fortuna pependit :
Spem merces oblata prseit; Charitesque profusa
Occurrere manu; quodque est mirabile, munus
Non optare licet, tu me auri pondère sponte
Obruis, et votis potior non ante cupitis.
Gratia quœ petitur subito evolat, et prece emaci
Qui prior ambit opes, tacitum sub pectore vulnus
Sentit, et invitas concesso munere gaudet;
Nam pudor est, verba et vultum prseferre precantis.
1. On lit ici dans le Recueil de 1671, dans les OEuvres diverses
de 1738 et dans toutes les éditions postérieures : homme, au lieu de âme.
2. Var. Mon honneur n'a point eu de douteuse apparence.
(Elogia, Recueil et OEuvres diverses.)
3. Affoiblit est pris dans le sens neutre, comme se prend le simple
foiblir. Voyez le Lexique. — Le Recueil, les OEuvres diverses, et toutes
les éditions postérieures portent . La grâce s'affaiblit.
96 POÉSIES DIVERSES.
Tu me l'as épargné , tu m'as fait grâce entière.
Ainsi l'honneur se mêle au bien que je reçois.
Qui donne comme toi donne plus d'une fois.
Son don marque une estime et plus pure et plus pleine ,
Il attache les cœurs d'une plus forte chaîne :
Et prenant * nouveau prix de la main qui le fait ,
Sa façon de bien faire est un second bienfait 2.
Ainsi le grand Auguste autrefois dans ta ville
Aimoit à prévenir l'attente de Virgile : 3o
Lui que j'ai fait revivre , et qui revit en toi,
En usoit envers lui comme tu fais vers moi.
Certes, dans la chaleur que le ciel nous inspire,
Nos vers disent souvent plus qu'ils ne pensent dire ;
Et ce feu qui sans nous pousse les plus heureux 3 5
Ne nous explique pas tout ce qu'il fait para eux.
At tu, dum pleno spargis tua prsemia cornu
Magnificus, parcis precibus, votumque remittis.
Sic donis accedit honos, et munere in uno
Munera bina latent, cum se ultro gratia profert.
Hinc amor arctior est, nam blanda sine arte voluntas
Dat pretium donis, et munera munere crescunt.
Sic quondam Augustus, vestrae alter Romulus urbis,
Mittere gaudebat dona insperata Maroni ;
Et quem nostra in te redivivum carrnina fingunt,
Virgilium excepit, quo me dignaris honore.
Et cerle ille augur qui nos inspirât Apollo,
Obscuris vera involvens, plus carminé promit
Interdum, quam verba sonant; motuque latenti
Ssepe alio vatem, quam quo velit, abripit ardor.
i. a En prenant, » mais à tort, dans l'édition de Lefèvre et dans
quelques autres.
?.. Corneille avait déjà dit dans le Menteur , acte I, scène i, vers 90 :
La façon de donner vaut mieux que ce qu'on donne.
3. Pour, mais à tort, dans l'édition de Lefèvre et dans quelques
autres.
POÉSIES DIVERSES. <J7
Quand jai peint un Horace, un Auguste, un Pompée,
Assez heureusement ma muse s'est trompée ,
Puisque , sans le savoir, avecque leur portrait
Elle droit du tien un admirable trait. 40
Leurs plus hautes vertus qu'étale mon ouvrage
N'y font que prendre un rang pour former ton image.
Quand j'aurai peint encor tous ces vieux conquérants,
Les Scipions vainqueurs , et les Gâtons mourants ,
Les Pauls, les Fabiens, alors de tous ensemble 4 5
On en verra sortir un tout qui te ressemble ;
Et l'on rassemblera de leur pompeux débris
Ton «âme et ton courage , épais dans mes écrits.
Souffre donc que pour guide au travail qui me reste
J'ajoute ton exemple à cette ardeur céleste , 5<.
Et que de tes vertus le portrait sans égal
S'achève de ma main sur son original ;
Que j'étudie * en toi ces sentiments illustres
Cum cecini laudes Pompeï aut robur Horati,
Augustique pios morts, domitumque furorem,
Musa quidem erravit ; nam dura putat, inscia fati,
Romanos pinxisse duces, tua facta, tuamque
Exprimit effigiem : veterum décora alta Quiritum
Per tôt sparsa viros, tôt nobilitata tropaeis,
Ad te unum redeunt ; tua in illis vivit imago.
Nec tamen hic finis; nam cum celebrabo Catonum
Funera, Scipiadumque decus, Paulosijue sagaces,
Et cunctatores Fabios, tua gloria surget
Gonflata ex illis, sed erit magis inclyta virtus.
Sit mihi fas igitur sub te renovare laborem,
Adque tui exemplar proceres formare lalinos,
Et divina tua? sécréta recluderc mentis,
Versuque arcanos generoso expromere sensus
1. Granet a mis : « Quand j'étudie. »
CoKJSKU.l.E. X
98 POESIES DIVERSES.
Qu'a conservés ' ton sang à travers tant de lustres,
Et que le ciel propice et les destins amis 5 5
De tes fameux Romains en ton âme ont transmis.
Alors de tes couleurs peignant leurs aventures,
J'en porterai si haut les brillantes peintures.
Que ta Rome elle-même , admirant mes travaux ,
N'en reconnoîtra plus les vieux originaux, 60
Et se plaindra de moi de voir sur eux gravées
Les vertus qu'à toi seul elle avoit réservées,
Cependant qu'à l'éclat de tes propres clartés
Tu te reccnnoîtras sous des noms empruntés.
Mais ne te lasse point d'illuminer mon àme, 6 5
Ni de prêter ta vie à conduire ma flamme ;
Et de ces grands soucis que tu prends pour mon roi,
Daigne encor quelquefois descendre jusqu'à moi.
Délasse en mes écrits ta noble inquiétude ;
Quos tibi nascenti Charités, urbisque Quirini
Fata, et sanguis avum stellis transfudit amicis.
Tune splendore novo afflatus, longo ordine pingam
Romulidas, operique tuos adhibebo colores.
Materiara superabit opus ; talique cothurno
Assurgam, ut nostros Roma admirata labores,
Eloquii stupeat vires, neque prisca suorum
Ora recognoscat : quin et fortasse queretur,
Me ducibus latiis illas adscribere laudes
Quas solus vera ingenii virtute mereris.
Interea proprio late splendore refulgens,
Saepe tuas alio cernes sub nomine dotes.
Ne tamen, o divine héros, ne subtrahe lumen,
Vive diu, prœsensque meis illabere cœptis.
Subduc te regni excubiis, quas nocte dieque
Irrequietus agis, paulumque abrumpe labores
Assiduos, nostroque in carminé dilue curas ;
1. Dans les éditions données par Corneille, dans les Elogia et dans
le Recueil, le participe est au singulier, sans accord.
POÉSIES DIVERSES. 99
Et tandis que sur elle appliquant mon étude , 7 o
J'emploierai pour te peindre1 et pour te divertir
Les talents que le ciel ma voulu départir,
Recois , avec les vœux de mon obéissance ,
Ces vers précipités par ma reconnoissance.
L'impatient transport de mon ressentiment 7 5
N'a pu pour les polir m'accorder un moment.
S'ils ont moins de douceur, ils en ont plus de zèle :
Leur rudesse est le sceau d'une ardeur plus fidèle;
Et ta bonté verra dans leur témérité ,
Avec moins d'ornement, plus de sincérité. 80
Cumque tuas veneror Charités, et musa requirit
Quae placeant, magnseque parent solatia menti,
Accipe prœcipiti mea cannina condita vena .
Carmina perpetui testes, et pignora cultus :
Imper fecta quidem, nec enim tua dona sinebant
Esse diu immemorem, ars nostro successit amori.
Et si lingua rudis, latet imis sensibus ardor;
Nostraque plus fidei quam fastus verba reeondunt ;
Nam quo musa magis caret arte, minusque leporis
Invenies, magis est pura et sincera voluntas.
1. Pour te plaire, dans les OEm-res diverses et dans les éditions
postérieures.
*
IW
ioo POESIES DIVERSES.
XXXJ
A MAÎTRE ADAM1, MENUISIER DE NEVERS,
SUR SES CHEVILLES.
SONNET.
Cette pièce, signée Corneille, se trouve dans le volume intitulé les
C houilles de Me Adamy menuisier de Neuers , a Paris . chez Toussainct
Quinet.... M.DC.XLIV. Auec priuilege du Roy, in-4°. Le privilège
porte : « donné à Paris, le 16. iour d'Auril l'an de grâce mil six cens
quarante quatre, » et est suivi de la mention : « Acheué d'Imprimer
pour la première fois le 2 5 May i644- B Les vers de Corneille oc-
cupent la onzième page d'un recueil qui n'en a pas moins de cent, et
qui est intitulé : approbation du Parnasse sur les Cheuilles de Maistre
Adam Billaut, menuisier de Neuers.
Le dieu de Pythagore et sa métempsycose
Jetants lame d'Orphée en un poëte françois :
« Par quel crime, dit-elle , ai-je offensé vos lois ,
Digne du triste sort que leur rigueur m'impose?
« Les vers font bruit en France ; on les loue , on en cause :
Les miens en un moment auront toutes les voix ;
Mais j'y verrai mon homme à toute heure aux abois,
Si pour gagner du pain il ne sait autre chose. »
« Nous savons, dirent-ils, le pourvoir d'un métier :
j. Le privilège le nomme «Adam Billault, Maistre Menuisier de
la ville d<j Neuers. » Au quatorzième vers Corneille a écrit Billot, afin
de rendre la rime plus exacte pour l'œil.
lÉ
POESIES DIVERSES. 101
U sera fameux poëte et fameux menuisier, T ,,
Afin qu'un peu de bien suive beaucoup d estime. »
A ce nouveau parti l'âme les prit au mot ,
Et s' assurant bien plus au rabot qu'à la rime,
Elle entra dans le corps de maître Adam Billot.
ioi POÉSIES DIVERSES.
XXXII
A MONSIEUR DE BOISROBERT, ABBÉ DE CHATILLON,
SUR SES ÉPITRES.
Ces vers, signés Corneille, sont imprimés au recto du sixième
feuillet du volume intitulé : les Epistres du sieur de Bois-Robei t-Metel,
abbé de Chastillon^... à Paris, chez Cardin Besongne, M. DC. XL VII,
in-4°. L'Achevé d'imprimer est du « vingt- et-uniesme Iuillet 1646. »
Bois -Robert, qui en ir>5o. publia une seconde partie in-8° de ses Épîtres,
nous apprend dans Y Avis qu'il place en tête, que ces hommages poé-
tiques étaient passés de mode ; après avoir annoncé une nouvelle
édition de la première partie de son recueil, il ajoute : « Ceux qui
n'ont point vu la belle préface de feu M. Mascaron la trouveront dans
cette seconde impression, plus correcte que la première; ils y trouve-
ront aussi les vers que Messieurs de Corneille, Ménard, Ménage et
Sarrazin me donnèrent quand je mis ce premier volume en lumière.
J'ai trouvé à propos de ne les pas mettre à la tête du second , tant
parce qu'ils n'y eussent pas été nouveaux comme tout le reste, qu'à
cause qu'ils eussent blessé ma modestie, et la coutume, qui ne les y
souffre plus. »
Que tes entretiens sont charmants !
Que leur douceur est infinie !
Que la facilité de ton heureux génie
Fait de honte à l'éclat des plus beaux ornements!
Leur grâce naturelle aura plus tT idolâtres 5
Que n'en a jamais eu le fast* de nos théâtres.
Le temps respectera tant de naïveté ;
1. Voyez tome IV, p. 7.5, vers n55; torne VIII, p. 47^, vers
4390; et le Lexique.
POÉSIES DIVERSES. io5
Et pour un seul endroit où tu me donnes place1.
Tu m'assures bien mieux de l'immortalité
Que Cinne*, Rodogune^ et le Ciel, et Y Horace. m
1. Voici ce passage qui assure mieux Corneille de l'immortalité
que tous ses chefs-d'œuvre. L'épître xxx de Boisrobert est adressée
à un «Monsieur Gineste. » L'auteur, comme nous le dit le sommaire,
« lui parle avantageusement des belles lettres qu'il a reçues de lui ; »
et pour le convaincre de son talent il lui dit (p. i55) :
Seul tu feins d'ignorer le prix
Des épîtres que tu m'écris....
Souffre après tout que je te die
Qu'en Bourgongne et qu'en Normandie
Sommeze et Corneille ont trouvé
Ce style fort et relevé,
Et ce seroit n'être pas sage
Que chercher meilleur témoignage.
Voyez ci-dessus, p. i5, un passage de la seconde partie des Épitres
de Boisrobert où il est question de Corneille.
2. Granet dans les OEuvres diverses (p. 164), et tous les éditeurs
après lui, ont imprimé Cinna, au lieu de Cinne.
io4 POESIES DIVERSES.
XXXIII
LES TRIOMPHES DE LOUIS LE JUSTE.
Le graveur Valdor entreprit peu après la mort de Louis XIII et
publia en 1649 un grand ouvrage à figures dont le titre, fort étendu,
fera bien connaître la nature et le contenu :
Les triomphes de Louis le Iuste XIII, du nom , Roy de France et de
Nauarre. Contenans les plus grandes actions ou sa Maiesté s'est trouuée
en personne, représentées en Figures JEnigmatiques exposées par i>n
Poème Héroïque de Charles Beys, et accompagnées de vers François
sous chaque Figure, composez par P. de Corneille. Avec les portraits
des rois, princes et généraux d'armées, qui ont assisté ou seruy ce Belli-
queux Louis le Iuste Combattant ; Et leurs Deuises et Expositions en
forme d'Eloges par Henry Estienne, Escuyer, sieur des Fossez, Poète et
Interprète du Roy es Langues Grecque et Latine. Ensemble le plan des
villes, sièges et batailles, auec vn Abrégé de la Vie de ce Grand Mo-
narque, par René Barry, Conseiller du Roy et Historiographe de sa
Maiesté. Le tout traduit en Latin par le R. P. Nicolai, Docteur en
Sorbonne de la Faculté de Paris , et premier Régent du grand Conuent
des Iacobins. Ouurcge entre vris et finy par lean Valdor, Liégeois,
Calcographe du Roy. Le tout par commandement de leurs Maies tez.
A Paris, En l'Imprimerie Royale, Par Antoine Estiene,... M.DC.XL1X.
A.vec privilège de sa Majesté. (In-fol.). — Le privilège est daté du
« 22. iour de May, l'an de grâce 1649. »
En tête de l'ouvrage on trouve des lettres du roi Louis XIV,
écrites aux divers auteurs pour les engager à s'occuper de ce travail
Voici celle qui est adressée à Corneille :
Lettre du Roi pour les épigrammes .
« Monsieur de Corneille, comme je n'ai point de vie plus illustre
à imiter que celle du feu Roi, mon très-honoré seigneur et père, je
n'ai point aussi un plus grand désir que de voir en un abrégé ses
glorieuses actions dignement représentées, ni un plus grand soin que
POÉSIES DIVERSES. io5
d'y faire travailler promptement ; et comme j'ai cru que pour rendre
cet ouvrage parfait, je devois vous en laisser l'expression, et à Val-
dor les desseins, et que j'ai vu, par ce qu'il a fait, que son invention
avoit répondu à mon attente, je juge, par ce que vous avez accou-
tumé de faire, que vous réussirez en cette entreprise, et que pour
éterniser la mémoire de votre Roi, vous prendrez plaisir d'éterniser
le zèle que vous avez pour sa gloire. C'est ce qui m'a obligé de vous
faire cette lettre par l'avis de la Reine régente, Madame ma mère, et
de vous assurer que vous ne sauriez me donner des preu\es de votre
affection plus agréables que celle que j'en attends sur ce sujet. Ce-
pendant je prie Dieu qu'il vous ait, Monsieur de Corneille, en sa
sainte garde.
« Écrit à Fontainebleau, ce 14 octobre 164 5.
« Signé : LOUIS; et plus bas : de GuenÉgaud.
« Et au-dessus est écrit :
« A Monsr de Corneille. »
Il y a au département des manuscrits de la Bibliothèque impériale
(fonds français 664^, p- 124) une copie de la lettre de cachet du
Roy escrite à Monsieur Corneille , qui présente quelques légères va-
riantes inutiles à mentionner. Dans cette copie la date, antérieure
de plus d'un an, est du « 4e iour d'octobre i644- 8
Cette copie est précédée (p. 120), dans le Recueil manuscrit que
nous venons de citer, d'une lettre, signée Thonier, qui a été repro-
duite par M. Taschereau dans la seconde édition de son Histoire de
la vie et des ouvrages de P. Corneille (p. 3^4), et qui commence ainsi :
« Du 5e octobre, à Fontainebleau.
« Monsieur,
« Voici la copie de la lettre que vous avez désirée ; j'adresse l'ori-
ginal à M. Valdor. pour lui donner le moyen d'obliger doublement
M. de Corneille. Comme elle est un effet de sa sollicitation, elle est
une preuve de son estime, et il croit qu'avec l'approbation du Roi
ce fameux auteur se surmontera pour rendre son entreprise plus
illustre. Je vous supplie de lui faire rendre mon paquet et de par-
donner la peine que je vous donne. La maladie de S. E. nous tiendra
en ce lieu plus longtemps qu'on ne voudrait, etc. »
Les épigrammes de Corneille, comme on les appelle en tête de la
tofi POESIES DIVERSES.
lettre du Roi, se trouvent, ainsi que l'indique le titre que nous avons
reproduit, au-dessous des figures énigmatiques de Valdor. Elles sont
intitulées dans les OEuvres diverses publiées par Granet (p. 170-176) :
Fers mis au-dessous des estampes (jui représentent les glorieuses actions de
Louis XIII; et dans l'édition de Lefèvre: Inscriptions.
Les titres que nous donnons à chacune de ces petites pièces sont
ceux qu'elles portent au bas de chaque gravure dans le volume où
elles ont paru pour la première fois. Les éditeurs précédents les ont
rarement reproduits, et ont d'ordinaire préféré les intitulés plus dé-
veloppés des diverses parties du poëme héroïque de Charles Beys qui
se trouvent en regard de chaque gravure.
CAEN*.
Le château révolté donne à Gaen mille alarmes;
Mais sitôt que Louis y fait briller ses armes,
Sa présence reprend le cœur de ses guerriers ;
Et leur révolte ainsi ne semble être conçue
»
Que par l'ambition de jouir de sa vue, 5
Et de le couronner de ses premiers lauriers.
PONT-DE-CÉ2.
Que sert de disputer le passage de Loire ?
Le sang sur la discorde emporte la victoire;
Notre mauvais destin cède à son doux effort ;
Et les canons, quittants leurs usages farouches, 1 o
Ne servent plus ici que d'éclatantes bouches8,
Pour rendre grâce au ciel de cet heureux accord.
1. Ce fut le 7 juillet 1620 que le Roi quitta Paris pour soumettre
la Normandie. La ville de Rouen ouvrit d'elle-même ses portes, et
Caen se rendit après une faible résistance.
2. Louis XIII attaqua le Pont-de-Cé le 7 août 1620.
3. Touches, dans l'édition originale; mais ce texte gravé contient
beaucoup de fautes. La traduction latine ne laisse aucun doute sur
la vraie leçon; on y lit : altitonis resonantia vocibus or a.
POÉSIES DIVERSES. 107
LE RÉTABLISSEMENT DES ECCLESIASTIQUES EN BEARN * .
Sa valeur en ce lieu n'a point cherché sa gloire :
Il prend l'honneur du ciel pour but de sa victoire,
Et la religion combat l'impiété. x 5
Il tient dessous ses pieds l'hérésie étouffée :
Les temples sont ses forts ; et son plus beau trophée
Est un présent qu'il fait à la Divinité.
saumur 2.
En vain contre le Roi vous opposez, vos armes :
Sa Majesté brillante avec de si doux charmes 20
Peut mettre en un moment vos desseins à l'envers.
Ne vous enquêtez pas si ses troupes sont fortes :
Encore que vos cœurs ne lui soient pas ouverts,
D'un seul trait de ses yeux il ouvrira vos portes.
LA RÉDUCTION DE SAINT-JEAN d'aNGÉLI*.
Soubise, ouvre les yeux : ce foudre que tu crains 2 5
N'est plus entre ses mains;
Sa clémence l'arrache à sa juste colère;
Et de quoi que ton crime ose l'entretenir,
Tes soupirs ont trouvé le secret de lui plaire ;
Et quand il voit tes pleurs, il oublie à punir. 3o
1. Un édit d'octobre 1620 ordonne la restitution des Liens ecclé-
siastiques usurpés en Béarn par les protestants.
2. Le Roi, au commencement de la guerre contre les calvinistes,
s'empara par surprise de Saumur, où commandait du Plessis Mor-
nay, au mois de mai de 1621.
3. Le siège commença le 3 juin 1621, et la place se rendit le jS
(selon d'autres le a3) du même mois.
io8 POESIES DIVERSES.
ENTRÉE DES VILLES REBELLES*.
Tel entrant ce grand roi dans ses villes rebelles
De ces cœurs révoltés fait des sujets fidèles;
Un profond repentir désarme ses rigueurs ;
Et quoique le soldat soupire après la proie,
Il l'apaise2, il l'arrête, et se montre avec joie 3 5
Et père des vaincus, et maître des vainqueurs8.
PUNITION DES VILLES REBELLES*.
Enfin aux châtiments il se laisse forcer :
Qui pardonne aisément invite à l'offenser6,
Et le trop de bonté jette une amorce au crime.
Une juste rigueur doit régner à son tour ; 4 b
Et qui veut affermir un trône légitime
Doit semer la terreur aussi bien que l'amour '.
1 . Le titre de la partie du poëme de Beys qui correspond à cette
inscription est . Entrée dans les villes rebelles. — Au printemps de
1622, « le Roi laissa quelques troupes devant la Rochelle et marcha
sur Royan, dont le port fermait l'entrée de la Gironde; il s'en em-
para et s'avança en Guienne ; Tonneins fit une résistance désespérée ;
Sainte-Foix se rendit; Negrepelisse (petite ville du Quercy)fut prise
d'assaut et incendiée : tout y fut massacré, même les femmes et les
enfants; partout les protestants se défendaient avec fureur; partout
se renouvelaient les résistances et même les cruautés de la guerre des
Albigeois. » (Histoire des Français par Théophile Lavallée (i83o,),
tome III, p. 57.)
2. // apaise, dans l'édition originale ; mais c'est encore là une faute
évidente.
3. Ici Corneille se traduit lui-même. Voyez plus haut, p. 69,
vers 47 et note 2 .
4. Voyez ci-dessus la note 1.
5. Corneille répète ici un vers de Cinna (acte IV, scène 11, vers
11 60; voyez tome III, p. 436).
6. Les idées exprimées dans ce sixain rappellent ce qui se passa à
Negrepelisse, Les habitants avaient égorgé pendant la nuit un ba-
taillon de troupes du Roi logées dans leurs murs. Louis XIII mar-
POÉSIES DIVERSES. io<j
RIE
Va, fier tyran des mers, mon prince te l'ordonne,
Prends toi-même le soin de conduire Bellone
Au secours du parti qu'elle veut épouser. 45
Calme les flots mutins, dissipe les tempêtes;
Obéis ; et par là fais voir que tu t'apprêtes
Au joug que dans un an2 il le doit imposer.
la digue 8,
Vois Eole et Neptune à l'envi faire hommage
A ce prodigieux ouvrage,
Rochelle, et crains enfin le plus puissant des rois.
Ta fureur est bien sans seconde
De t' obstiner encore à rejeter des lois
Que reçoivent le vent et Tonde.
cha contre eux pour les punir. Après la plus vive résistance, se
voyant sur le point d'être forcés par un assaut général, ils lui deman-
dèrent grâce, et il paraissait enclin à leur pardonner; mais l'animo-
sité de l'armée royale était à son comble, et le prince de Condé triom-
pha des généreuses dispositions du Roi en ouvrant un bréviaire et
lui montrant que dans les leçons de l'office du jour Samuel repro-
chait à Saùl d'avoir épargné les Amalécites.
1. C'est bien là le titre exact de cette inscription. Il s'agit de l'île
de Rié (ou Riez) en Poitou, et non de l'île de Rhé; ce qui n'a pas em-
pêché Granet de mettre dans les OEuvres diverses : Défaite dans Vue
de Rhé , en quoi il a été imité par tous les éditeurs de Corneille. Ce
fut le 16 avril 1622 que le Roi passa à la iête de ses gardes, vers le
milieu de la nuit, dans l'île de Rié, d'où il chassa M. de Soubise,
après lui avoir fait perdre près de quatre mille hommes.
2. Le mot an manque dans l'édition originale; il y a dans le latin :
alium in annum.
3. Sur les travaux du siège de la Rochelle et particulièrement sur
la fameuse digue, voyez les Mémoires de Richelieu, années 1627 et
162S, et dans le Malherbe de M. Lalanne (tome IV, p. 66 et 67), une
lettre de Malherbe à son cousin du Bouillon, du 28 décembre 1627.
no POÉSIES DIVERSES.
LA ROCHELLE*
Ici l'audace impie en son trône parut, 5 5
Ici fut T arrogance à soi-même funeste :
Un excès de valeur brisa ce qu'elle fut ;
Un excès de clémence en sauva ce qui reste.
LE PAS DE SUZE2.
L'orgueil de tant de forts sous mon roi s'humilie •
Suze ouvre enfin la porte au bonheur d'Italie, 60
Dont elle voit qu'il tient les intérêts si chers;
Et pleine de l'exemple affreux de la Rochelle :
« Ouvrons à ce grand prince, ouvrons-lui tôt, dit-elle ;
Qui dompte l'Océan ne craint pas nos rochers. »
cazal 8 .
Lorsque Mars se prépare à tout couvrir de morts, 6 5
1. La Rochelle se soumit le 28 octobre 1628; le Roi y fit son
entrée le Ier novembre.
2. Le 6 mars 1629 Louis XIII força en personne les trois barri-
cades du pas de Suze, défendues par le duc de Savoie.
3. Les Espagnols pressaient vivement Casai, et les Français vou-
laient secourir la place. Mazarin, envoyé du pape, lit si bien auprès
des chefs des deux armées qu'il les détermina à conclure une trêve de
six semaines, le 2 septembre i63o. A l'expiration de cette trêve, il de-
manda une prolongation. Les Français refusèrent d'abord, et le 26 oc-
tobre ils marchèrent au combat. Mazarin ne se décourage pas et re-
nouvelle ses instances dans les deux camps. Ayant persuadé le général
espagnol , il pousse son cheval à toute bride entre les deux armées,
et sans être effrayé des balles qui sifflaient autour de lui, il ciie
en agitant son chapeau : « La paix! la paix! » et allant trouver le
maréchal de Schomberg, qui coin mandait les Français, il le décide
à accepter le traité. Naudé dit à ce sujet : « Les almanachs de
M.DC.XXXI représentèrent le seigneur Giulio à cheval, faisant
signe avec son chapeau à deux puissantes armées qui s'alloient cho-
quer, de mettre bas les armes, pour rece\oir la paix qu'il venoit de
POÉSIES DIVERSES. ni
Un illustre Romain1 étouffe ses discords
En dépit des fureurs en deux camps allumées.
En ce moment à craindre il remplit nos souhaits ;
Et se montrant tout seul plus fort que deux armées,
Dans le champ de bataille il fait naître la paix. 7 o
LA PROTECTION DE MANTOUE2.
Lorsqu'aux pieds de mon roi tu mets ton jeune prince8,
leur négocier. Je me souviens fort bien qu'il y a voit autant de presse
à voir ces almanachs du Mazarin sous le cimetière Saint-Innocent *,
qu'il y en eut en i643 ou 44 pour voir sur ces mêmes planches le
furieux combat rendu à Borne par quinze ou seize François, contre
l'ambassadeur et toute la faction d'Espagne, et qu'il y en eut encore
cette année pour voir ces larges bandes remplies des différents por-
traits de M. de Bruxelles (Broussel). » (Mascurat, if>49? P- 65. — Sur
cet ouvrage, voyez ci-dessus, p. 92, note 1.) — Les Espagnols levèrent
le siège de Casai et évacuèrent le Montferrat (fin d'octobre i63o).
1. Mazarin, originaire de Sicile, est né le 14 juillet 1602, selon
les uns à Piscina dans les Abbruzzes, selon d'autres à Borne. Les
lettres de naturalisation qui lui furent données en i63o, le font naître
à Rome.
2. Vincent II de Gonzague, duc de Mantoue, étant mort sans
postérité, en 1627, eut pour successeur son plus proche parent
Charles Ier de Gonzague, qui possédait en France les duchés de Ne-
vers et de Bhétel, et dont Louis XIII soutint les droits contre l'em-
pereur Ferdinand II. En juillet i63o, les Impériaux prirent Mantoue,
qu'ils abandonnèrent pendant trois jours à un affreux pillage. A l'in-
vasion de l'Allemagne par Gustave- Adolphe, la fortune changea, et
l'Empereur traita avec Charles Ier de Gonzague, qui rentra en pos-
session de sa capitale le 20 septembre i63i.
3 . Les mots « ton jeune prince » ne pourraient pas s'appliquer au
duc Charles Ier, mais seulement à son fils, qui, à la mort de Vincent II,
avait pris possession, avant l'arrivée de son père, des duchés de Man-
toue et de Montferrat, ou à son petit-fils Charles II, qui n'était
âgé que de sept ans, lorsqu'il succéda a son grand-père le 25 sep-
tembre 1637, et qui régnait à Mantoue lorsque Corneille écrivit ces
vers. La vue de la gravure nous prouve qu'il s'agit de ce dernier.
* Voyez tome II, p. 442> note 3.
lia POESIES DIVERSES.
Manto1, tu ne vois point soupirer ta province
Dans l'attente d'un bien qu'on espère et qui fuit;
Et de sa main à peine a-t-il tari tes larmes,
Que sa France en la tienne aussitôt met ses armes , 7 j
Que la gloire couronne , et la victoire suit.
la paix d'aletz2.
Que ce fut un spectacle , Aletz , doux à tes yeux ,
Quand tu vis à ses pieds ces peuples factieux
Trouver plus de bonté qu'ils n'avoient eu d'audace !
Apprenez de mon prince, ô monarques vainqueurs, 80
Que c'est peu fait à vous de reprendre une place ,
Si vous ne trouvez l'art de regagner les cœurs.
PAIX ACCORDÉE AUX CHEFS DES REBELLES*.
La Paix voit ce pardon d'un œil indifférent ,
Et ne veut rien devoir au parti qui se rend ,
1. On voit figurer dans la gravure la nymphe à qui , si nous en
croyons Virgile, la ville de Mantoue devait son nom. Manto était
mère d'Ocnus, fondateur de Mantoue.
Fatïdicœ Mantus et Tusci pZUus amnls,
Qui muros, matrisque dédit tibi, Mantaa, nomen.
[Enéide, livre X, vers 199 et 200.)
2. Le 9 juin 1629 Louis XIII assiégea la ville d'Alais dans les
Cévennes. Elle capitula dès le 16 du même mois.
3. L'édit de pacification fut rendu à Nîmes le 27 juin 1629. Ce
fut la dernière paix de religion. On laissa aux protestants la liberté
du culte, mais on leur enleva leurs places de sûreté, et ils cessèrent
de former comme un Etat dans l'Etat. — Ces vers ont quelque obs-
curité; la vue de la gravure ne la dissipe pas. Elle représente la Paix
appuyée sur un tronc d'arbre et regardant en effet avec indifférence
les chefs des rehelles prosternés aux pieds du Roi. Les vers latins,
qui sont d'ordinaire la traduction des vers français, s'en éloignent
ici beaucoup; les voici :
Imbelle veslrum crimen; et pareil puis
POESIES DIVERSES. n3
Déjà par la victoire assez bien établie; 8 5
Et la noble fierté qui l'oblige à punir
Ne dissimule ici le crime qu'on oublie
Que pour ne perdre pas la gloire d'obéir.
NANCY1.
Troie auprès de ses murs l'espace de dix ans
Vit contre elle les Dieux et les Grecs combattants , 9 o
Et s'arma sans trembler contre la destinée.
Grand Roi, l'on avouera que l'éclat de tes yeux
T'a fait plus remporter d'honneur, cette journée ,
Que la fable en dix ans n'en fit avoir aux Dieux.
REPRISE DE CORBIE2.
Prends Corbie , Espagnol , prends-la , que nous importe ?
Tu la rends à mon roi plus puissante et plus forte
Avant qu'il en ait pu concevoir quelque ennui.
Ton bonheur sert au sien, et ta gloire à sa gloire ;
Et s'il t'a, par pitié , permis une victoire,
Ta victoire elle-même a travaillé pour lui. 1 00
Princeps, fugatos undique amplexus reos.
Idem sibi semper, expandit sinum
Vobis faventem. Pectus hnic vestrum date,
Proceres, regendum : causa si tanturn dédit
Audere iniqua, justa quid deinceps dabit ?
1. Nancy, capitale de la Lorraine, se rendit le 24 septembre i633
à l'armée royale qui l'assiégeait, et Louis XIII y fit son entrée le
lendemain .
2. Corbie, ville de Picardie, qui avait été prise par les Espagnols
le i5 août i636, fut reprise le 14 novembre suivant.
Corneille, x
i j 4 POESIES DIVERSES.
HESDIN1.
A. peine de Hesdin les murs sont renversés ,
Que sur l'affreux débris des bastions forcés
Tu recois le bâton de la main de ton maître ,
Généreux maréchal : c'est de quoi nous ravir,
De le voir aussi prompt à te bien reconnoître i o 5
Que ta haute valeur fut prompte à le servir.
LA PROTECTION DE PORTUGAL ET DE CATALOGNE
2
Que le ciel vous fut doux , lorsque dans votre effroi
Il vous sollicita de courir à mon roi
Pour voir contre vos murs la liberté renaître 8 !
Le succès à l'instant suivit votre désir. 1 1 o
Peuples , qui recherchez ou protecteur ou maître ,
Par cet heureux exemple apprenez à choisir*.
i. Le 3o juin i63g, Hesdin, ville de l'Artois, se rendit au Roi, qui
donna sur la brèche le bâton de maréchal à M. de la Meilleraie.
2. En 1640 le Portugal secoua le joug de l'Espagne, appela au
trône Jean de Bragance, qui régna sous le nom de Jean IV, et fît
alliance avec la France. Dans le même temps les Catalans se révoltè-
rent et chassèrent les garnisons espagnoles ; puis, Tannée suivante, ils
firent un traité avec Louis XIII, par lequel ils déclarèrent leur pro-
vince réunie à la France, sous la seule condition de garder ses libertés.
3. Emicet ut vestris libertas ohvuta mûris, dit le latin. — Contre
paraît avoir ici, comme souvent alors, le sens de près de , à coté de,
comme dans ce passage de la Critique de l'École des femmes de Molière
(scène v) : « Dorilas , contre qui j'étois , a été de mon avis. » Dans
ce cas contre vos murs équivaudrait à peu près à sous vos murs, au pied
de vos murs. Granet a remplacé contre par entre.
4- On est frappé du singulier rapport de forme que ce vers pré-
sente avec le dernier du Menteur (tome IV, p. a3()) :
Par un si rare exemple apprenez à mentir.
POÉSIES DIVERSES. n5
PERPIGNAN *
x i5
Illustre boulevard des frontières d'Espagne,
Perpignan , sa plus belle et dernière campagne ,
Tout mourant, contre toi nous le voyons s'armer:
Tout mourant, il te force, et fait dire à l'envie
Qu'un si grand conquérant n'eût jamais pu fermer
Par un plus digne exploit une si belle vie.
i, Louis XIII alla joindre son armée au camp devant Perpignan,
mais il ne resta pas jusqu'à la lin du sié^e. La place capitula le
29 août i642- Le Roi mourut moins d'un an après, le 14 mai jfi43.
n6 POÉSIES DIVERSES.
XXXIV
LA. POESIE A. LA PEINTURE,
EN FAVEUR DE l' ACADEMIE DES PEINTRES ILLUSTRES.
Les artistes qui formèrent l'Académie de peinture se réunirent pour
la première fois le Ier février 1648, et rédigèrent alors des statuts que
le Roi autorisa par des lettres patentes (voyez Mémoires inédits sur la
vie et les ouvrages des membres de P Académie de peinture, 1 854» in -8°,
tome I, p. 17). Le Brun était le véritable fondateur de cette acadé-
mie, et, d'après M. Edouard Fournier, Corneille n'a écrit les vers
qui suivent que pour remercier le peintre du portrait qu'en 1647
il avait fait pour le poète ( voyez Corneille à la butte Saint-Rock,
p. lxxiii et lxxiv, et notre Notice biographique). Cette pièce a paru
d'abord dans la première partie des Poésies choisies, publiée en i653
par Sercy; elle occupe les pages 235-238 du volume. Elle se trouve
dans le tome III (p. 93-96) du Recueil de poésies chrestiennes dédié
à Monseigneur de Conty par M. de la Fontaine, Paris, le Petit, 1 671; enfin
elle a été recueillie par Granet dans les OEuvres diverses (p. 182-186).
Enfin tu m'as suivie , et ces vastes montagnes
Qui du Rhône et du Pô séparent les campagnes
IN'ont eu remparts si forts ni si haut élevés *
Que ton vol, chère sœur, après moi n'ait bravés;
Enfin ce vieux témoin de toutes nos merveilles , 5
Toujours pour toi tout d'yeux, et pour moi tout d'oreilles,
Le Tibre voit la Seine, autrefois son appui,
Partager tes trésors et les miens avec lui :
Tu me rejoins enfin , et courant sur mes traces,
1. Var. N'ont eu remparts si forts et si liaut élevés.
[Recueil.)
POÉSIES DIVERSES. 117
En cet heureux séjour du mérite et des grâces, 1 0
Tu viens, à mon exemple, enrichir ces beaux lieux
De tout ce que ton art a de plus précieux.
Oh ! qu'ils te fourniront de brillantes matières !
Que d'illustres objets à toutes tes lumières !
Prépare des pinceaux , prépare des efforts 1 5
Pour toutes les beautés de l'esprit et du corps,
Pour tous les dons du ciel, pour tous les avantages
Que la nature et lui sèment sur les visages;
Prépares-en enfin pour toutes les vertus,
Sous qui nous puissions voir les vices abattus. 2 o
Sans te gêner l'idée après leur caractère,
Pour les bien exprimer tu n'auras qu'à portraire :
La France en est féconde , et tes nobles travaux
En trouveront chez elle assez d'originaux;
Mais n'en prépare point pour la plus signalée1, 2 5
Qu'on a depuis longtemps de la cour exilée ,
Pour celle qui départ le solide renom :
Hélas ! j'en ai moi-même oublié jusqu'au nom ,
Tant je vois rarement mes plus fameux ouvrages
Pouvoir s'enorgueillir de ses moindres suffrages. 3 <
Ronsard, qu'elle flattoit à son commencement ,
La crut avec son roi couchée au monument;
Il en perdit l'haleine2, et sa muse malade
En laissa de ses mains tomber la Franciade 3 .
1. Voyez les derniers vers de la pièce.
2. Dans l'édition de Lefèvre : « Il en perdit haleine. »
3. Poëme épique dont le héros est Francus ou Francion, fils
d'Hector et d'Andromaque. «. Ronsard l'entreprit encore jeune, sous
le règne de Henri II, afin qu'on ne pût reprocher à la France de
manquer d'un poëme épique. Charles IX le soutint vivement dans
cette résolution; mais après la mort de ce prince, comme l'état des
finances ne permettait plus les gratifications, le poëme en souffrit
beaucoup et demeura, inachevé. Il devait avoir vingt- quatre chants
comme l' Iliade , et tel qu'il nous reste, il n'en a que quatre. » (Ta-
n8 POESIES DIVERSES.
Maynard Ta chaque jour criée à haute voix : 3 5
Il n'est porte où pour elle il n'ait frappé cent fois;
Mais sans en voir l'image en aucun lieu gravée,
Il est mort la cherchant, et ne Ta point trouvée1.
J'en fais souvent reproche à ce climat heureux; [reux ;
Je m'eu plains2 aux plus grands comme aux plus géné-
Pour trop m'en plaindre en vain je deviens ridicule,
Et l'on ne m'entend pas , ou Ton le dissimule.
Qu'aujourd'hui la valeur sait mal se secourir !
Que je vois de grands noms en danger de mourir !
Que de gloire à l'oubli malgré le ciel se livre , 4 5
Quand il m'a tant donné de quoi la faire vivre !
Le siècle a des héros, il en a même assez
Pour en faire rougir tous les siècles passés;
Il a plus d'un César, il a plus d'un Achille ;
Mais il n'a qu'un Mécène , et n'aura qu'un Virgile 3 : 5o
Rare exemple , et trop grand pour ne pas éclater,
Rare exemple, et si grand qu'on n'ose l'imiter4.
bleau.... de la poésie française au seizième siècle.... par M. Sainte-
Beuve, tome II, p. 180.)
1. Ici Corneille semble faire allusion au quatrain bien connu que
Maynard avait placé sur la porte de son cabinet :
Las d'espérer et de me plaindre
Des Muses, des grands et du sort,
C'est ici que j'attends la mort,
Sans la désirer ni la craindre.
"X. Ainsi dans l'édition originale des Poésies choisies; on trouve
dans les éditions suivantes et dans toutes les autres réimpressions :
« Je me plains, » qui nous paraît beaucoup moins bon.
3. Le Mécène est Mazarin, qui, comme l'on sait, demanda à Mé-
nage la liste des savants et des hommes de lettres qui méritaient des
encouragements. Le Virgile est sans doute Chapelain, qui terminait
alors son épopée de la Pucellet à laquelle il a, dit- on, travaillé trente
ans, et qui parut en if»56.
4. Ainsi dans la première édition; a qu'on ne l'ose imiter % dans
toutes les autres.
POÉSIES DIVERSES. 119
Cette haute vertu va toutefois renaître :
A quelques traits déjà je crois la reconnaître* .
Chère et divine sœur, prépare tes crayons : 5 5
J'en vois de temps en temps briller quelques rayons;
Les Sophocles nouveaux dont j'honore2 la France
En ont déjà senti quelque douce influence ;
Mais ce ne sont enfin que rayons inconstants ,
Qui vont de l'un à l'autre, et qui n'ont que leur temps;
Et ces heureux hasards des fruits de mon étude
Laissent tout l'avenir dedans l'incertitude.
Tire 8 avec ton pouvoir leur éclat vagabond ;
Fais-les servir d'ébauche à ton savoir profond ;
Et mêlant à ces traits l'effort de ton génie , 6 5
Fais revoir en portrait cette illustre bannie.
Peins bien toute sa pompe et toutes ses beautés ,
Son empire absolu dessus les volontés;
Fais-lui donner du lustre aux plus brillantes marques
Dont se pare le chef des plus dignes monarques ; 7 o
Fais partir de nos mains à ses commandements
Tout ce que nous avons d'éternels monuments ;
Fais-lui distribuer la plus durable gloire;
Mets l'histoire à ses pieds, et toute la mémoire;
Mets en ses yeux l'éclat d'une divinité ; 7 5
Mets en ses mains le sceau de l'immortalité ,
Et rappelle si bien un juste amour pour elle,
1. Ce mot est imprimé ainsi, par un a [reconnaistre)> dans toutes
les éditions anciennes. En iy38 Granet a mis reconnaître, et a été
imité par tous les éditeurs qui depuis ont publié cette pièce.
2. Ainsi dans les Poésies choisies de Sercy, On lit s'honore dans le
Recueil de 1671, dans les Œuvres diverses rie 1788, et dans toutes les
éditions suivantes.
3. Tirer est ici dans le sens de portraire, figurer, représenter; on
disait : « tirer une personne, une figure, etc. : » voyez ci-dessus, p. 97,
vers 40. Cette expression ne se trouve que dans la première édition
des Poésies choisies; dans les suivantes on a remplacé tire par fixe.
i'2o POESIES DIVERSES.
Quà son tour en ces lieux cet amour la rappelle ,
Et que les cœurs , plongés dans le ravissement ,
N'en puissent plus souffrir ce long bannissement. 80
Mais que dis -je? tu vas rappeler cette reine
Avec bien plus de gloire, et beaucoup moins de peine.
Ce que je n'ai pu faire avec toutes mes voix ,
Quoique j'aye eu pour moi jusqu'à celle des rois,
Quoique toute leur cour, de mes douceurs charmée, 8 5
Ait par delà mes vœux enflé ma renommée,
Un coup d'œil le va faire , et ton art plus charmant
Pour un si grand effet ne veut qu'un seul moment.
Je vois, je vois déjà dans ton académie,
Par de royales mains en ces lieux affermie , 90
Tes Zeuxis renaissants, tes Apelles nouveaux,
Étaler à l'envi des chefs-d'œuvre s si beaux ,
Qu'un violent amour pour des choses si rares
Transforme en généreux les cœurs les plus avares ,
Et les précipitant à d'inouïs efforts, 9 5
Fait dérouiller les clefs des plus secrets trésors.
Je les vois effacer ces chefs-d'œuvres1 antiques,
Dont jadis les seuls rois , les seules républiques ,
Les seuls peuples entiers pouvoient faire le prix ,
Et pour qui l'on traitoit les talents de mépris 2; 1 00
Je vois le Potosi* te venir rendre hommage,
1 . Ce mot composé est écrit chef -d'oeuvres dans les éditions impri-
mées du vivant de Corneille, aussi bien au vers 92 que dans celui-ci.
Il y a là, pour le temps, une irrégularité quant au premier élément,
mais non pas quant au second : on mettait autrefois au pluriel aussi
bien œuvres que chefs. C'est encore l'orthographe de l'Académie dans
la quatrième édition de son Dictionnaire (1762).
2. C'est-à-dire auprès desquels les talents d'or et d'argent étaient
considérés comme peu de chose, comme ne pouvant suffire à les
payer. Talent est pris ici dans le sens antique, et désigne un poids,
une somme d'or ou d'argent.
3. La riche mine d'argent de l'ancien Pérou.
POESIES DIVERSES. 121
Je vois se déborder le Pactole et le Tage1,
Je les vois à grands flots se répandre sur toi.
N'accusons plus le siècle : enfin je la revoi ,
Je la revois enfin cette belle inconnue , 1 o 5
Et par toi rappelée , et pour toi revenue.
Oui, désormais le siècle a tout son ornement,
Puisqu'enfin tu lui rends en cet heureux moment
Cette haute vertu, cette illustre bannie,
Cette source de gloire en torrents infinie , 110
Cette reine des cœurs , cette divinité :
J'ai retrouvé son nom , la Libéralité.
1. Le Tage était autrefois, aussi bien que le Pactole, fameux par
l'or qu'on trouvait dans son sable.
Quidquid Tagus expiait auri ,
a dit Lucain au livre VII de la Pharsale, vers 7 55.
122 POESIES DIVERSES.
XXXV
A SAINT BERNARD ,
SUR LA TRADUCTION DE SES EPITItES,
Par le R. P. dom Gabriel de Sainte-Geme.
SONNET.
Ce sonnet, signé Corneille, se trouve en tête d'un volume inti-
tulé : « les Lettres de sainct Bernard, premier abbé de Clervaux, doc-
teur de F Eglise; traduites par le R. P. Dom Gabriel de sainct Malachie ',
Religieux Fueillent de F Ordre de Cisteaux. Dédiées à Monseigneur le
Mareschal de l'Hospital, à Paris, chez Gaspar Meturas, M.DC.XLIX,
in-4°. L'Achevé d'imprimer est du a3 août. On trouve d'abord dans
ce volume neuf feuillets non ehiffrés, puis huit pages numérotées, et
c'est au recto du premier feuillet d'une nouvelle série non chiffrée
que figure le sonnet de Corneille. Il est réuni ici pour la première
fois aux OEuvres de Corneille. M. Paul Lacroix l'a inséré dans le
n° du i5 août i863 du Bulletin du bouquiniste , d'après une copie qui
lui a été adressée de Dôle et qui ne contenait point le titre de la
pièce. Il pensait que les bibliothèques publiques de Paris ne possé-
daient point l'ouvrage de dom Gabriel ; nous en avons trouvé, à la
Bibliothèque impériale , un exemplaire qui porte le chiffre d'inven-
taire C2043.
Du cloître et de la cour précieuse clarté,
Mais du cloître sans tache, et dune cour sans crimes,
Aussi ferme soutien des ordres légitimes
Qu'implacable ennemi de la fausse équité;
1. L'auteur de ce livre est, comme on l'a" vu, nommé dom Gabriel
de Sainte-Geme par ceux qui s'adressent à lui ; mais il se nomme
toujours lui-même, soit sur le titre, soit en signant la dédicace, Gabriel
de Saint-Malachie, qui est probablement son nom de religion.
POESIES DIVERSES. \i\
Toi qui jusqu'à nos rois portas la vérité , 5
Qui n'eus dans leurs conseils que de justes maximes ,
Et fis, par un conseil rentré dans les abîmes1,
Dans les raisons d'Etat régner la sainteté :
Aujourd'hui que la France, entendant tes oracles,
Voit tous ses cœurs charmés par de si grands miracles, i o
Fais-en suivre l'exemple à toute heure , en tout lieu ;
Et rendant à nos jours ce qu'aux tiens on admire,
Une seconde fois accorde en cet empire
La sagesse du monde avec celle de Dieu.
i. C'est-à-dire par un conseil, une sagesse, qui a disparu de ce
monde, qui est rentré dans les saints abîmes, les saintes profondeurs
d'où il était sorti .
124 POÉSIES DIVERSES.
xxxv r
A MONSIEUR D'ASSOUCY,
SUR SON OI'IDE EN BELLE HUMEUR.
Ce sonnet, signé Corneille, a été publié au verso du troisième
feuillet de r Ovide en belle humeur de Mr d'Assoucy,,.. à Paris , chez
Charles de Sercy.... M.DC.L, in-4°- L'Achevé d'imprimer est du
« 2 5. de Février i65o. » Ces vers, recueillis par M. Edouard Four-
nier dans ses Notes sur la vie de Corneille (p. xci), sont ici réunis pour
la première fois aux OEuvres de ce poète. A l'époque où Corneille
écrivait ce compliment, d'Assoucy venait de composer la musique
d'Andromède. Voyez tome V, p. 252 et 2 53.
Que doit penser Ovide, et que nous peut-il dire,
Quand tu prends tant de peine à le défigurer,
Que ce qu'il écrivit pour se faire admirer,
Grâces à d'Assoucy sert à nous faire rire?
Il y trouve la gloire où son travail aspire ; 5
Tu ne prends tant de soins que pour mieux l'honorer :
De tant d'attraits nouveaux tu le viens de parer,
Que moins il se ressemble, et plus chacun l'admire.
Sa plume osa beaucoup , et plantes , animaux ,
Fleuves , hommes , rochers , éléments et métaux , 1 o
Par elle ont vu changer leurs êtres et leurs causes.
La tienne , plus hardie , a plus encore osé ,
Puisque le grand auteur de ces métamorphoses
Lui-même enfin par elle est métamorphosé.
POESIES DIVERSES. ia5
SUR LA CONTESTATION ENTRE LE SONNET D URANIE
ET DE JOB.
XXXVII
SONNET.
La querelle littéraire qui s'éleva au sujet du sonnet d'Uranie par
Voiture et de celui de Job par Benserade commença dans les pre-
miers jours de l'hiver de 1649 et continua jusqu'en i65o. Elle a donné
lieu à un grand nombre de pièces, qui ont été recueillies en ifi53
dans la première partie des Poésies choisies de Sercy, où les trois
morceaux qui suivent ont paru avec la signature de Corneille (p. 399-
402) '. En publiant toute cette petite polémique poétique, Sercy, dans
un avis intitulé : Le Libraire au Lecteur (p. 3y4), annonce que s'il n'a
pas imprimé les sonnets mêmes qui font l'objet du débat, « c'est qu'ils
sont si communs, et qu'ils ont été mis au jour en tant d'endroits,
qu'il n'y a personne qui ne les sache, ou ne les ait vus. » Aujour-
d'hui qu'on ne les a plus sous la main, nous avons juge utile de les
placer dans Y Appendice. Les personnes qui voudront connaître tout
le détail de cette contestation peuvent consulter, outre les Poésies
choisies de Sercy, YHistoire de la guerre des Uranins et des Jobelins
(tomel, p. 116 et suivantes des Mémoires de littérature [par Sal-
lengre], la Haye, 171 5), et surtout YHistoire de deux sonnets, par
M. Eugène de Beaurepaire {Revue de Rouen, 20e année, p. 129 et
suivantes). Des trois petites pièces de Corneille, Sallengre paraît
n'avoir connu que la seconde (notre numéro XXXVIII).
Demeurez en repos , frondeurs et mazarins ,
Vous ne méritez pas de partager la France :
1 . On trouve aussi une copie de ces trois pièces de poésie de Cor-
neille dans un manuscrit de la Bibliothèque impériale (fonds français,
n° 12680); dans cette copie les pièces XXXVII et XXXIX de notre
édition sont signées. Corneille, la pièce XXXVIII est anonyme.
126 POÉSIES DIVERSES.
Laissez-en tout l'honneur aux partis d'importance
Qui mettent sur les rangs de * plus nobles mutins.
Nos Uranins ligués contre nos Jobelins 5
Portent bien au combat une autre véhémence ;
Et s'il doit s'achever de même qu'il commence,
Ce sont Guelfes nouveaux , et nouveaux Gibelins.
Vaine démangeaison de la guerre civile ,
Qui partagiez naguère et la cour et la ville , i o
Et dont la paix éteint les cuisantes ardeurs2,
Que vous avez de peine à demeurer oisive ,
Puisqu'au même moment qu'on voit bas les frondeurs ,
Pour deux méchants sonnets on demande1: « Qui vive? »
i. Des, dans la copie manuscrite mentionnée plus haut (p. ia5,
note i).
2. L'accommodement conclu à Rueil le n mars 1649 avait apaisé
pour un temps les troubles de la Fronde, sans qu'aucun des partis
eût satisfaction.
3. Vous demandez, dans la copie manuscrite.
POÉSIES DIVERSES. 127
XXXVIII
SONNET.
Ce sonnet est anonyme dans la copie manuscrite de la Biblio-
thèque impériale (voyez p. ia5, note i).
Deux sonnets partagent la ville,
Deux sonnets partagent la cour,
Et semblent vouloir à leur tour
Rallumer la guerre civile.
Le plus sot et le plus habile 5
En mettent leur avis au jour,
Et ce qu'on a pour eux d'amour
A plus d'un échauffe la bile.
Chacun en parle hautement ,
Suivant son petit jugement; i o
Et s'il y faut mêler le nôtre ,
L'un1 est sans doute mieux rêvé,
Mieux conduit , et mieux achevé ;
Mais je voudrois avoir fait l'autre.
I. Celui de Voiture, que notre poète dans l'épigramme suivante
nomme « un auteur plus poli. »
iï8 POESIES DIVERSES.
XXXIX
EPIGRAMME.
Ami , veux-tu savoir, touchant ces deux sonnets
Qui partagent nos cabinets ,
Ce qu'on peut dire avec justice?
L'un nous fait voir plus d'art, et l'autre un feu plus vif*;
L'un est le mieux peigné , l'autre est le plus naïf; 5
L'un sent un long effort , et l'autre un prompt caprice ;
Enfin l'un est mieux fait , et l'autre est2 plus joli ;
Et pour te dire tout en somme,
L'un part d'un auteur plus poli,
Et l'autre d'un plus galant homme3. 10
i . Tel est le texte des Poésies choisies et de la copie manuscrite que
nous avons plusieurs fois citée. On lit : et Vautre plus de vif, dans les
OEuvres diverses publiées par Granet et dans les éditions suivantes.
i. Le mot est manque dans un grand nombre d'éditions récentes.
3. Il ne faut pas oublier que Voiture, que l'opposition de ces deux
épithètes eût blessé à bon droit, éîait mort en 1648. Benserade vécut
jusqu'en 1691.
POESIES DIVERSES. ia<
XL
A MADEMOISELLE DE COSNARD DE SES.
La pièce de vers suivante se trouve en tête de la pièce intitulée
les Chastes martirs, Tragédie chrestienne par Mademoiselle Cosnard ,
à Paris, chez Nicolas et lean de la Coste, au mont S. Hilaire à PEscu
de Bretagne M.DC.L., avec privilège du Roy. L'ouvrage dont nous
venons de reproduire le titre forme un volume in~4° de cinq feuillets
non chiffrés et de quatre-vingt-quinze pages. Le premier feuillet est
occupé par le titre ; le second contient la dédicace, adressée à la
Reine régente et signée : Marthe Cosnard de Ses ; le troisième feuillet
présente au recto les vers de Corneille qu'on va lire, et, au verso,
un compliment adressé par M. de Saint-Nicolas, maître des eaux et
forêts à Vire, à Mlle Cosnard; il se termine ainsi :
Votre art qui va jusqu'à l'excès
Mérite bien qu'on vous appelle
Quelque jour la vierge de Sais,
Puisqu'Orléans a sa pucelle.
Les feuillets 4 et 5 renferment l'avis au Lecteur et les noms des
personnages. Il s'en faut néanmoins que les exemplaires de cette
tragédie se rencontrent d'ordinaire dans l'état que nous venons d'in-
diquer. Tous ceux que nous avons vus à Paris, dans les bibliothèques
publiques et dans les ventes, ne contiennent ni le second ni le troi-
sième feuillet, occupés par la dédicace et les vers. Je savais que ces
curieuses particularités se trouvaient dans l'exemplaire qui figure au
Catalogue de M. de Soleinne sous le n° 1249, mais j'ignorais ce que
cet exemplaire était devenu. M. Albert de la Fizelière, rédacteur en
chef de F Union des Arts, a eu l'obligeance de me le signaler. Il fait
aujourd'hui partie de la précieuse bibliothèque de M. Léon de la
Sicotière, avocat d'Alençon, qui a bien voulu nous en envoyer une
description très-complète, avec une copie fort exacte des vers de Cor-
neille. — Si nous cherchons quels sont les motifs qui ont pu amener
notre poète à adresser ces vers à Mlle Cosnard, nous sommes obligé,
Corneille, x 9
i*o POÉSIES DIVERSES.
en l'absence de tout renseignement biographique, de faire simplement
observer que Mlle Cosnard était de Sées, qu'elle recevait les compli-
ments d'un maître des eaux et forêts de Vire, et qu'elle imitait dans
sa pièce Agathonphlle, roman de Jean-Pierre Camus, ancien évêque
de Belley, retiré alors à l'abbaye d'Aunay, près de Caen, où il exer-
çait les fonctions de vicaire général du diocèse de Rouen. C'est, ce
nous semble, plus qu'il n'en faut pour expliquer un peu l'intérêt que
son ouvrage inspirait à Corneille.
Que tes Chastes martyrs vont te faire d'amants ,
Que parmi leurs travaux tu sèmes d'ornements,
Et que ton coup d'essai , si digne de mémoire ,
Doit enhardir ta plume à redoubler ta gloire !
Poursuis , divin esprit , continue à charmer, 5
Entretiens ce beau feu que tu viens d'allumer;
Bientôt à cet effort fais succéder un autre
Qui couronne ton sexe , et fasse honte au nôtre :
Des Muses nous prenons le génie et la loi ,
Qui ne sont après tout que fdles comme toi . i o
Je te dis de leur part que dessus le Parnasse ,
Au milieu de leur chœur * elles te gardent place ,
Et que tes premiers vers ont assez de douceur,
Pour faire la dixième entr 2 ces doctes sœurs.
Moi-même pour me faire admirer sur la scène, i 5
Je te voudrai pour guide au lieu de Melpomèiie ;
Et chacun après moi, pour boire en leur vallon,
Préférera ton aide au secours d'Apollon.
Ne te lasse donc point d'enfanter des merveilles ,
De prêter ton exemple à conduire nos veilles , 2 o
Et d'aplanir à ceux qui l'auront imité
Les illustres chemins à l'immortalité.
1 . L'édition originale porte cœur.
POESIES DIVERSES. i3i
XL!
A MONSIEUR DE LOY , PROFESSEUR EJN L UNIVERSITÉ
DE PARIS,
SUR SON PANÉGYRIQUE DE MONSEIGNEUR LE PREMIER PRESIDENT
DE BELLIEVRE.
Le panégyrique de Pompone de Bellièvre, dont il est question ici,
a été composé à l'occasion de son entrée en fonctions comme premier
président, en remplacement de Mathieu Mole, le 22 août i653. Un
exemplaire de cet ouvrage est conservé à la Bibliothèque impériale
sous la marque Ln27i470. 11 a pour titre : Illustrissimo viro Pomponio
de Bellièvre, régi a consiliis et primo in principe Galliarum oenatu prœsidi
inaugurato, Panegyricus in colleg. marchiano Parisiensis Academix dic-
tus. Parisiis,apud Dionysium Langlaeum, M.DC.LIII. Il se compose
de 32 pages in-4° A la suite viennent deux feuillets non chiffrés, con-
tenant des compliments en vers. Le suivant , signé De Corneille
occupe le verso du premier de ces feuillets. M. P. Lacroix, qui a der-
nièrement attiré l'attention sur ces vers1, avait rencontré ces deux
feuillets isolés, et n'avait pas indiqué l'ouvrage auquel ils se rattachent.
Pourquoi s'étonner que de Loy
Réussisse avec avantage ,
Traçant en ce divin ouvrage
L'appui de notre jeune roi ?
Dans cette vivante peinture , 5
L'art le dispute à la nature ,
La copie à l'original ;
Mais l'ayant prise sur son àme,
Où il2 étoit gravé d'un burin tout de flamme,
Il n'y pouvoit réussir mal, 1 o
1. Bulletin du bouquiniste du Ier septembre i863, p. 5oi et 5o2.
2. Voyez ci-dessus, p. 81, note 2.
i3a POÉSIES DIVERSES.
XLII
POUR MONSIEUR DASSOUCY,
SUR SES AIRS.
Ces sept vers, signés Corneille, occupent le recto du troisième
feuillet d'un recueil , inconnu jusqu'ici , intitulé : Airs à quatre par-
ties du Sieur Dassoucy, à Paris, par Robert Ballard, seul Imprimeur
du Roy pour la Musique. Auec Priuilege de Sa Maiesté, i653, in-8°
oblong. Ce recueil, tel qu'il se trouve à la Bibliothèque impériale,
n'est pas complet : il ne contient qu'une seule des quatre parties, la
« taille. » Le privilège mentionné sur le titre n'est autre chose qu'un
extrait du privilège général accordé pour la musique à Ballard, le
24 octobre i63o,, et il n'est pas accompagné d'un achevé d'imprimer
indiquant la date précise du volume. Nous sommes redevables à
M. Ravenel, conservateur sous-directeur de la Bibliothèque impériale,
de cette petite pièce de Corneille, qui jusqu'ici n'avait été signalée
par personne. Trois ans plus tôt notre poète avait ^dressé pour l'Ovide
en belle humeur un sonnet à Dassoucy ' , qui , à cette époque, avait
déjà fait la musique d' Andromède (voyez tome V, p. 25 2 et 253).
Cet auteur a quelque génie ,
Ses airs me semblent assez doux.
Beaux esprits , mais un peu jaloux ,
Divins enfants de l'harmonie,
Ne vous en mettez en courroux : 5
Apollon aussi bien que vous
Ne les peut ouïr sans envie.
1. Voyez ci-dessus, p. 124.
POESIES DIVERSES. i33
XLIII
EPITAPHE
SUR LA MORT DE DAMOISELLE ELISABETH RANQUET,
Femme de Nicolas du Chevreul , écuyer, sieur d'Esturville.
SONNET.
Elisabeth Ranquet, née à Paris le 23 juin 1618, et inhumée le
7 avril i654 dans l'église de Briquebec, s'est fait connaître par sa vertu
et sa piété. Sa mère se nommait Marguerite Loret, et l'on pourrait
supposer qu'elle était parente à quelque degré de l'auteur de la Muse
historique, et que ce fut par lui que Corneille la connut et fut porté à
écrire son épitaphe; mais il n'est pas besoin de recourir à cette in-
terprétation, car nous lisons dans la Vie de Demoiselle Elisabeth Ran-
quet, à Paris, chez Charles Savreux , M.DC.LV, in-12 : « Madame
de Mercœur.... aimoit singulièrement cette famille;... elle désira
que son petit-fils Monseigneur de Mercœur, et sa petite-fille Made-
moiselle de Vandosme donnassent le nom à notre sainte. » On doit
penser que ce fut sur l'invitation de ces illustres protecteurs de notre
poète que la pièce qu'on va lire fut composée. Elle parut d'abord ,
signée Corneille, au verso du quatrième feuillet de la biographie que
nous venons de citer et dont l'Achevé d'imprimer est du 10 mai i655 ;
elle fut ensuite réimprimée en tête de quelques exemplaires à'OEdipe
(voyez tome VI, p. 1 10), et reparut enfin en 1660, à la page 10 de la
seconde édition de la Vie de damoiselle Ranquet. Dans la première, le
titre, interverti, est ainsi rédigé : Sur la mort de Damoiselle Elisabeth
Ranquet — Epitaphe. Le mot sonnet n'y figure pas.
Ne verse point de pleurs sur cette sépulture,
Passant : ce lit funèbre est un lit précieux,
Où gît d'un corps tout pur la cendre toute pure;
Mais le zèle du cœur vit encore en ces lieux.
i*4 POESIES DIVERSES.
Avant que de payer le droit à la nature, 5
Son âme , s'élevant au delà de ses yeux * ,
Avoit au Créateur uni la créature;
Et marchant sur la terre elle étoit dans les cieux.
Les pauvres bien mieux quelle ont senti sa richesse :
L'humilité, la peine étoient2 son allégresse; 10
Et son dernier soupir fut un soupir d'amour.
Passant, qu'à son exemple un beau feu te transporte,
Et loin de la pleurer d'avoir perdu le jour,
Crois qu'on ne meurt jamais quand on meurt de la sorte.
t. Var. Son âme, s'élevant au-dessus de ses yeux. (i655)
i. On lit étoit dans l'édition de i655.
POESIES DIVERSES. ,35
XLIV
SONNET.
[Au Roi, pour obtenir la confirmation des lettres de noblesse
accordées à son père.]
Ce sonnet, découvert par M. Ludovic Lalanne à la bibliothèque
de l'Institut, a été adressé à Louis XIV par Corneille, pour obtenir
la confirmation des lettres de noblesse accordées en 1637 a son père
par le roi Louis XIII après le succès du Cid. Cette requête paraît
avoir été composée en 1667, à l'occasion de la Déclaration du Boy,
du trentième Décembre i656, pour la recherche des Usurpateurs de No-
blesse. Des déclarations semblables furent rendues en février 1661, en
juin 1664 ; puis en septembre 1664 un édit « portant révocation des
lettres de noblesse accordées depuis le Ier janvier i634- t> Cet édit,
daté de Vincennes, contient la restriction suivante : « Nous réser-
vant toutefois de confirmer ceux qui pour services signalés dans nos
armées , et autres emplois importants , ont obtenu ledit titre de no-
blesse. » Voyez ci-dessus la Notice des Poésies diverses, p. 1 5 et 16,
et au tome I la Notice biographique sur Corneille.
La noblesse, grand Roi, manquoit à ma naissance;
Ton père en a daigné gratifier mes vers ,
Et mes vers anoblis ont couru l'univers
Avecque plus de pompe et de magnificence.
Ce fut là, de son temps, toute leur récompense, 5
Dont même il honora tant de sujets divers,
Que sur ce long abus tes yeux enfin ouverts
De ce mélange impur ont su purger la France.
Par cet illustre soin mes vers déshonorés
■ 36 POÉSIES DIVERSES.
Perdront ce noble orgueil dont tu les vois parés, i o
Si dans mon premier rang ton ordre me ravale.
Grand Roi, ne souffre pas qu'il ait tout son effet,
Et qu'aujourd'hui ta main , pour moi si libérale,
Reprenne le seul don que ton père m'a fait.
POESIES DIVERSES. i°>7
XLV
A MONSIEUR DE CAMPION ,
SUR LES HOMMES ILLUSTRES.
SONNET.
Ce sonnet se lit, signé Corneille, au recto du treizième feuillet
du volume intitulé : les Hommes illustres de Mr de Campion , tome
premier, première partie, imprimé à Rouen par L. Maurry pour Au-
gustin Courbé, Marchand Libraire au Palais, à Paris.... M.DC.LVII,
in-4°- Le privilège a été donné « à Paris le neufîéme jour de Dé-
cembre, l'an de grâce mil six cens cinquante-six. » On lit à la suite :
« Acheué d'imprimer pour la première fois à Rouen par L. Maurry,
le quinzième iour de Ianuier 1657. » L'ouvrage en tète duquel figu-
rent ces vers n'a pas été achevé; mais Campion a publié encore
en i65y un volume in-12 anonyme intitulé: Recueil de lettres qui
peuvent seruir à. l'histoire et diuerses poésies, à Rouen, aux dépens
de l'autheur, par Laurens Maurry.... M.DC.LVII; on y lit, à la
page 266, la pièce suivante :
Pour Monsieur de Corneille.
SONNET.
L'on peut dire, sans avoir tort,
Que Corneille est incomparable :
Tout ce qu'il fait est admirable,
Chacun en demeure d'accord.
La savante reine du Nord,
De qui l'esprit est adorable,
Faisant un jugement semblable,
Le soutient et l'estime fort.
L'antiquité, que l'on nous vante,
i38 POÉSIES DIVERSES.
N'eut point de plume si charmante
Ni d'auteur qui pût l'égaler :
Nos nouveaux ne paroissent guère,
Et sitôt qu'il a su parler,
Ils ont tous appris à se taire.
Il est probable que ces vers , assez intéressants en ce qu'ils consta-
tent la bienveillance de Christine à l'égard de Corneille, furent
écrits avant ceux qu'on va lire, et que notre poëte crut devoir rendre
à Campion compliment pour compliment et sonnet pour sonnet.
Bien que celui de Corneille ait été publié en 1808 dans le Magasin
encyclopédique (tome IV, p. 100), en i843, par M. Léon de Du-
ranville, dans la Revue de Rouen (premier semestre, cahier d'avril,
p. 222), et le 22 juin 1846 dans F Impartial de Rouen, il a été réuni
pour la première fois aux OEuvres complètes dans l'édition de Le-
fèvre, terminée en i855 (tome XII, p. 59), où il porte à tort la date
de 1647. — Alexandre de Campion, poëte et diplomate, né à Rouen
en 16 10, mourut vers 1670. Voyez sur lui le Manuel du bibliographe
normand, par Ed. Frère, tome I, p. 173 et 174.
Invincible ennemi des rigueurs * de la Parque ,
Qui fais, quand tu le veux, revivre les héros,
Et de qui les écrits sont d'illustres dépôts
Où luit de leur vertu la plus brillante marque,
Notre France aux chrétiens donne en toi leur Plutarque, 5
Et les nobles emplois de ton savant repos ,
Traçant leurs grands portraits, offrent à tous propos
De fidèles miroirs aux soins d'un vrai monarque.
J'ai quelque art d'arracher les grands noms du tombeau,
De leur rendre un destin plus durable et plus beau, 1 o
De faire qu'après moi l'avenir s'en souvienne ;
1. On lit erreurs, mais à tort, dans l'édition de Lefèvre.
POÉSIES DIVERSES. i39
Le mien * semble avoir droit à l'immortalité ;
Mais ma gloire est autant au-dessous de la tienne,
Que la fable en effet cède à la vérité.
i . Mon nom , dans l'édition de Lefèvre ; mais rien n'autorise une
pareille leçon. Voyez l' Avertissement de notre tome I, p. 11.
140 POÉSIES DIVERSES.
XLVI
SONNET PERDU AU JEU.
Une lettre de Corneille à l'abbé de Pure, écrite de Rouen le 9 juil-
let i658, et qu'on trouvera plus loin, nous donne la date exacte de ces
vers ; nous y lisons en post-scriptum : « Monsieur, je vous envoie un
méchant sonnet que je perdis hier au jeu contre une femme dont le
visage et la voix valent bien quelque chose. C'est une bagatelle que
j'ai brouillée ce matin. Vous en aurez la première copie. Il y a un
peu de vanité d'auteur dans les six derniers vers. » Ce sonnet a paru
pour la première fois à la page 91 des Poésies choisies.... publiées par
Sercy, cinquième partie, 1660.
Je chéris ma défaite, et mon destin m'est doux,
Beauté, charme puissant des yeux et des oreilles ;
Et je n'ai point regret qu'une heure auprès de vous
Me coûte en votre absence et des soins et des veilles.
Se voir ainsi vaincu par vos rares merveilles, 5
C'est un malheur commode à faire cent jaloux ;
Et le cœur ne soupire, en des pertes pareilles,
Que pour baiser la main qui fait de si grands coups * .
Recevez de la mienne, après votre victoire,
Ce que pourroit un roi tenir à quelque gloire , 1 o
Ce que les plus beaux yeux n'ont jamais dédaigné.
Je vous en rends, Iris, un juste et prompt hommage.
Hélas ! contentez-vous de me l'avoir gagné,
Sans me dérober davantage.
1, Des si grands coups, dans l'édition de Granet.
POÉSIES DIVERSES. 141
XLVH
SUR LE DÉPART DE MADAME LA MARQUISE
DE B. A. T.
« Cette pièce, dit Granet (OEuvres diverses, p. 194)» avoit déjà paru
en feuille volante, in-4% mais sans date d'année. » Nous ne l'avons
pas trouvée en cet état, mais nous la rencontrons, sous ce titre : Sur
le départ de Mademoiselle la marquise de C. A. B,, aux pages 47 et 48
d'un Petit Recueil de poésies choisies non encore Imprimées , à Amsterdam,
M.DC.LXj petit in-8°. Par malheur, l'exemplaire de la bibliothèque
de l'Arsenal (n° 7312 Belles-Lettres), le seul de ce Recueil que nous
connaissions, saute de la page 48, qui s'arrête au vers 32 et à la ré-
clame Ce cœur, à la page Sy, bien que d'ailleurs il n'y ait point d'in-
terruption dans les signatures typographiques. Nous avons trouvé la
pièce entière, sous le titre que nous lui donnons ici, à la page 79 de
la cinquième partie des Poésies choisies publiée par Sercy en 1660.
Elle se lit également dans le recueil manuscrit de Conrart (tome IX,
p. 911), où elle est intitulée : Sur le départ d'Iris. Ce poème est signé :
Cobneille l'aisné. Conrart a écrit en marge la note suivante, qui
nous en donne la date et nous fait connaître à qui il était adressé :
« i658. C'est une jeune comédienne fort belle, nommée la Du-
parc, autrement la Marquise. » Enfin une copie ancienne , fort dé-
fectueuse , mais qui fournit un certain nombre de variantes que nous
indiquons en note, est contenue dans le portefeuille 217 des ma-
nuscrits des Godefroy conservés à la bibliothèque de l'Institut. Elle
est intitulée : Sur le départ de Mademoiselle du Parc , par le Sr Cor-
neille. On a beaucoup disserté sur le surnom de Marquise donné à
la du Parc. Une découverte récente, faite par M. Brouchoud, avocat
à la Cour impériale de Lyon, et qui m'a été obligeamment commu-
niquée par M. Soulié, futur éditeur de Molière, établit que, dès i653,
ce surnom appartenait assez officiellement à la du Parc pour qu'elle
le prît en signant son acte de mariage ; en effet, cet acte, que M. Soulié
publiera sans doute dans son entier, constate que « Monsieur René
de Berthelot et damoiselle de Gorla » ont reçu la bénédiction nup-
i4a POÉSIES DIVERSES.
tiale en l'église Sainte-Croix le î3 février i653, et il est signé : Mar-
quise de Gorla, et : René Berthelot, dit du Parc. Dans l'acte de
décès de la célèbre comédienne, qui nous a été communiqué par
M. P. Mesnard, l'éditeur de Racine dans notre collection, le mot Mar-
quise figure comme une sorte de prénom : la défunte y est appelée
« Marquise Thérèse de Gorle, veuve de l'acteur du Parc, âgée d'en-
viron trente-cinq ans. » La du Parc appartenait, ainsi que son mari,
à la troupe de Molière, qui vint s'établir à Rouen vers les fêtes de
Pâques de i658; elle jouait également bien les deux genres, dansait
à ravir, et se faisait surtout remarquer par sa noblesse et sa distinc-
tion. Robinet nous dit que
Chacun étoit enchanté
Alors qu'avec un port de reine
Elle paroissoit sur la scène.
Ce fut au mois d'octobre que la troupe de Molière , et la du Parc
avec elle, quitta Rouen, pour venir s'établir à Paris, et ce départ nous
donne la date précise de l'élégie de Corneille. A peine arrivée à
Paris, la troupe de Molière représenta le 24, au Louvre, Nicomèd'e
devant le Roi. Il est probable que la du Parc, si célèbre par sa
beauté, joua un rôle dans la pièce, car Lagrange fait remarquer
qu'a on fut surtout fort satisfait de l'agrément et du jeu des femmes »
(tome V, p. 498) Nous verrons bientôt Corneille lui adresser un
madrigal à l'occasion d'un rôle heureusement rempli par elle dans
une pièce de Gilbert (voyez ci-après, p. i54). Mais lorsque Racine
eut enlevé en 1667 la du Parc à la troupe du Palais-Royal, pour lui
faire représenter Andromaque à l'Hôtel de Bourgogne, il est probable
que Corneille partagea le mécontentement de Molière; et quand,
dans sa lettre en vers du i5 décembre 1668, Robinet nous montre
au convoi de la jeune actrice
.... Les poètes de thêâtr
Dont l'un, le plus intéressé,
Étoit à demi trépassé...,
il est bien probable qu'il veut parler de Racine, et il parait foi
douteux que Corneille ait assisté à cette triste cérémonie.
Allez, belle Marquise, allez en d'autres lieux '
1. Var. Allez, charmante Iris, allez en d'autres lieux.
{Manuscrits de Conrart.)
POÉSIES DIVERSES. 143
Semer les doux périls qui naissent de vos yeux *.
Vous trouverez partout les âmes toutes prêtes
A recevoir vos lois et grossir vos conquêtes2,
Et les cœurs à l'envi se jetant dans vos fers 5
Ne feront point de vœux qui ne vous soient offerts* ,
Mais ne pensez pas tant aux glorieuses peines*
De ces nouveaux captifs qui vont prendre vos chaînes,
Que vous teniez vos soins tout à fait dispensés
De faire un peu de grâce à ceux que vous laissez. 1 o
Apprenez à leur noble et chère servitude
L'art de vivre sans vous et sans inquiétude;
Et si sans faire un crime on peut vous en prier,
Marquise, apprenez-moi l'art de vous oublier.
En vain de tout mon cœur la triste prévoyance 1 5
A voulu faire essai des maux de votre absence6 :
Quand j'ai cru le soustraire à des yeux si charmants,
Je l'ai livré moi-même à de nouveaux tourments.
Il a fait quelques jours le mutin et le brave,
Mais il revient à vous, et revient plus esclave, 20
Et reporte à vos pieds le tyrannique effet
De ce tourment nouveau que lui-même il s'est fait'.
1. Var. Semer les doux plaisirs qui naissent de vos yeux.
Vous trouverez partout des âmes toutes prêtes.
[Manuscrits des Godefroy .)
2. Var. A recevoir vos lois, à grossir vos conquêtes.
(Manuscrits de Conrart.)
3. Var. Les cœurs iront en foule au-devant de vos fers ;
Et s'ils font quelques vœux, ils vous seront offerts.
(Manuscrits de Conrart, des Godefroy, et Petit Recueil.)
4. Var. Mais ne songez pas tant aux glorieuses peines.
(Manuscrits des Godefroy.)
5. Var. S'est fait un avant-goût des maux de votre absence.
(Manuscrits de Conrart, des Godefroy, et Petit Recueil. )
6. Var. De ce tourment nouveau que lui-même s'est fait.
(Manuscrits des Godefroy.)
Var. De ce nouveau tourment que lui-même il s'est fait.
(Manuscrits de Conrart.)
144 POÉSIES DIVERSES.
Vengez-vous du rebelle, et faites-vous justice ' ;
Vous devez un mépris du moins à son caprice :
Avoir un si long temps des sentiments si vains2, a s
C'est assez mériter l'honneur de vos dédains.
Quelle bonté superbe3, ou quelle indifférence
A sa rébellion ôte le nom d'offense* ?
Quoi? vous me revoyez sans vous plaindre de rien?
Je trouve6 même accueil avec même entretien? 3o
Hélas ! et j'espérois que votre humeur altière
M'ouvriroit les chemins à la révolte entière ;
Ce cœur, que la raison ne peut plus secourir',
Cherchoit dans votre orgueil une aide à se guérir ' ;
i. Var. Vengez- vous d'un rebelle, et faites- vous justice.
(Manuscrits des Godefroy .)
Var. Vengez-vous du rebelle, et faites-nous justice.
(Petit Recueil. )
Mais nous est une faute, et non une véritable variante.
Var. Vengez-vous, belle Iris, faites-vous-en justice.
(Manuscrits de Conrart.)
2. Var. Avoir eu si longtemps des sentiments si vains.
(Manuscrits de Conrart, des Godefroy, et Petit Recueil.)
3. Suprême, dans les Manuscrits des Godefroy, et plus loin, au
vers 29, me renvoyez, mais ce sont des fautes évidentes. Il y en a
d'autres, encore plus grossières, que nous n'avons point relevées. Cette
copie semble avoir été faite d'après un original manuscrit difficile a
lire et péniblement déchiffré.
4- Var. A ma rébellion ôte le nom d'offense.
(Petit Recueil.)
Var. A ma fuite obstinée ôte le nom d'offense.
(Manuscrits de Conrart.)
Var. De la rébellion ne fait point une offense.
(Manuscrits des Godefroy.)
5. Je treuve, dans les Manuscrits des Godefroy .
6\ Var. Mon cœur, que la raison ne peut plus secourir.
(Manuscrits de Conrart.)
7. Var. Cherchoit dans votre orgueil un aide à le guérir.
(Manuscrits des Godefroy.)
POÉSIES DIVERSES. i45
Mais vous lui refusez un moment de colère * ; 3 S
Vous m'enviez le bien d'avoir pu vous déplaire ;
Vous dédaignez de voir quels sont mes attentats2,
Et m'en punissez mieux ne m'en punissant pas.
Une heure de grimace ou froide ou sérieuse3,
Un ton de voix trop rude ou trop impérieuse, 4 o
Un sourcil trop sévère, une ombre de fierté,
M'eût peut-être à vos yeux rendu ma liberté4 .
J'aime, mais en aimant je n'ai point la bassesse6
D'aimer jusqu'aux mépris6 de l'objet qui me blesse ;
Ma flamme se dissipe à la moindre rigueur7 : ^5
Non qu'enfin mon amour prétende cœur pour cœur;
Je vois mes cheveux gris : je sais que les années
Laissent peu de mérite aux âmes les mieux nées ;
Que les plus beaux talents des plus rares esprits ,
1. Var. Mais vous me refusez un moment de colère;
Vous m'enviez le bien d'avoir su vous déplaire.
[Manuscrits de Conrart.^
2. Var. Et dédaignant de voir quels sont mes attentats,
Vous m'en punissez mieux ne m'en punissant pas.
(Manuscrits de Conrart et des Godefroy.<
3. Var. Une heure de grimace un peu trop sérieuse,
Un son de voix trop rude ou trop impérieuse,
Un tour d'œil trop sévère, une ombre de fierté.
[Manuscrits de Conrart.)
4. La liberté , dans les Manuscrits des Godefroy, dans les OEuvres
diverses et dans les éditions postérieures.
5. Var. J'aime, mais en aimant je n'ai pas la bassesse.
[Manuscrits des Godefroj.)
6. Dans les Manuscrits de Conrart et dans ceux des Godefroy il y
a le singulier : « au mépris. »
7. Var. Ma flamme s'amortit à la moindre froideur :
Non pas que mon amour prétende cœur pour cœur;
Je sais que j'ai quelque âge, et qu'un peu trop d'années
Laisse peu de mérite aux âmes les mieux nées.
[Manuscrits de Conrart
CoHKETLI-F. X ÎO
146 POÉSIES DIVERSES.
Quand les corps sont usés, perdent bien de leur prix 4; 5 o
Que si dans mes beaux jours je parus supportable,
J'ai trop longtemps aimé pour être encore aimable,
Et que d'un front ridé les replis jaunissants2
Mêlent un triste charme aux plus dignes encens8.
i. « Dans l'édition in- 4° ces deux vers étoient ainsi tournés :
Que les plus beaux esprits, que les plus embrasés,
Sont de méchants ragoûts, quand les corps sont usés. »
(Note de Granet.)
— Dans les Manuscrits de Conrart et des Godefroy le premier de ces
vers est ainsi rédigé :
Que les plus grands esprits et les mieux embrasés ;
le second est comme dans l'in-4° cité par Granet. Disons seulement,
pour ne rien omettre, qu'au lieu de corps, le copiste des manuscrits
Godefroy avait mis loys, et qu'on a successivement écrit au-dessus de
ce mot d'abord leurs, puis corps.
a. Var. Ah! que d'un front ridé les replis jaunissants.
(Manuscrits des Godefroy .)
— F'ontenelle a dit, non sans apparence, qu'en écrivant Pulchérie,
Corneille « s'est dépeint lui-même , avec bien de la force, dans Mar-
tian, qui est un vieillard amoureux » (voyez tome VII, p. 3y4); mais
personne n'a remarqué qu'on retrouve dans Sertorius les idées expri-
mées ici, et que levers qui précède a même été répété textuellement.
Lorsque Viriate révèle à Thamire l'amour qu'elle éprouve pour Ser-
torius, celle-ci lui répond :
Il est assez nouveau qu'un homme de son âge
Ait des charmes si forts pour un jeune courage,
Et que d'un front ridé les replis jaunissants
Trouvent l'heureux secret de captiver les sens.
(Sertorius, acte II, scène i, vers 397-400.)
3. Var. Mêlent un triste charme aux plus fameux encens.
(Manuscrits des Godefroy.)
Granet donne ainsi ce vers :
Mêlent un triste charme au prix de mon encens.
Il a voulu sans doute éviter l'emploi cYencens au pluriel, regardé de
son temps comme fautif par les grammairiens, mais très-familier à
Corneille, ainsi qu'on le verra dans le Lexique. Tous les éditeurs de
Corneille ont suivi le texte de Granet. Un scrupule analogue à celui
de Granet a porté à écrire dans la copie des Godefroy le mot accents
au-dessus à* encens.
POÉSIES DIVERSES. 147
Je connois mes défauts; mais après tout, je pense1 5 5
Etre pour vous encore un captif d'importance ;
Car vous aimez la gloire, et vous savez qu'un roi
Ne vous en peut jamais assurer tant que moi.
Il est plus en ma main qu'en celle d'un monarque
De vous faire égaler l'amante de Pétrarque, 60
Et mieux que tous les rois je puis faire douter
De sa Laure ou de vous qui le doit emporter2.
Aussi, je le vois trop, vous aimez à me plaire,
Vous vous rendez pour moi facile à satisfaire ;
Votre âme de mes feux tire un plaisir secret, 6 5
Et vous me perdriez sans doute avec regret*.
Marquise, dites donc ce qu'il faut que je fasse :
Vous rattachez mes fers quand la saison vous chasse;
Je vous avois quittée, et vous me rappelez
Dans le cruel instant que vous vous en allez. 70
Rigoureuse faveur, qui force à disparoître
Ce calme étudié que je faisois renaître *,
Et qui ne rétablit votre absolu pouvoir
Que pour me condamner à languir sans vous voir !
Payez, payez mes feux d'une plus foible estime , 7 5
Traitez-les d'inconstants ; nommez ma fuite un crime ;
1. Var. Je sais tous mes défauts; mais après tout, je pense.
(Manuscrits de Conrart.)
2. Les vers 59-62 ne se trouvent pas dans la copie des Godefroy.
3. Var. Et vous me perdriez avec quelque regret.
Dites-moi donc, Iris, ce qu'il faut que je fasse.
(Manuscrits de Conrart.)
Var. Et vous me perdriez peut-être avec regret.
(^Manuscrits des Godefroy.)
4» Var. Ce calme étudié que je voyois renaître,
Et ne vous rétablit dans tout votre pouvoir.
(Manuscrits de Conrart.)
Var. Le calme étudié que j'avois fait renaître.
(Manuscrits des Godefroy.)
i4$ POÉSIES DIVERSES
Prêtez-moi, par pitié, quelque injuste courroux ;
Renvoyez mes soupirs qui volent après vous :
Faites-moi présumer qu'il en est quelques autres
A qui jusqu'en ces lieux vous renvoyez des vôtres1, 80
Qu'en faveur d'un rival vous allez me trahir 2 :
J'en ai, vous le savez, que je ne puis haïr1.
Négligez-moi pour eux, mais dites en vous-même :
« Moins il me veut aimer, plus il fait voir qu'il m'aime4,
Et m'aime d'autant plus que son cœur enflammé 8 5
N'ose même aspirer au bonheur d'être aimé ;
Je fais tous ses plaisirs, j'ai toutes ses pensées,
Sans que le moindre espoir les aye6 intéressées.
Puissé-je malgré vous y penser un peu moins,
M' échapper quelques jours vers quelques autres soins6,
Trouver quelques plaisirs ailleurs qu'en votre idée,
En voir toute mon âme un peu moins obsédée ;
Et vous de qui je n'ose attendre jamais rien ',
Ne ressentir jamais un mal pareil au mien ! »
Ainsi parla Cléandre, et ses maux se passèrent8, 9 5
1. Var. A qui jusqu'en ces lieux vous renvoyez les vôtres.
(Manuscrits des Godefroy.)
1. Var. Croire qu'à mes rivaux vous allez me trahir.
(Manuscrits de Conrart.)
Var. Croire qu'à mes rivaux vous me voulez trahir.
(Manuscrits des Godefroy.)
3. D'abord son frère Thomas Corneille (voyez Y Appendice), ensuite
son ami Molière.
4- Var. Moins il me veut aimer, plus je connois qu'il m'aime.
(Manuscrits de Conrart.)
5. H y a ajt dans les Manuscrits de Conrart, et ait dans ceux des
Godefroy.
(S. Var. M'échapper un moment vers quelques autres soins.
(Manuscrits de Conrart,')
7. Var. Et vous de qui jamais je n'ose attendre rien.
(Ibidem.)
8. Var. Ainsi parla Cléandre, et ses tourments passèrent.
(Ibidem.)
POÉSIES DIVERSES. 149
Son feu s'évanouit, ses déplaisirs cessèrent ;
Il vécut sans la dame, et vécut sans ennui4,
Gomme la dame ailleurs se divertit sans lui :
Heureux en son amour, si l'ardeur qui l'anime
N'en conçoit les tourments que pour s'en plaindre en rime,
Et si d'un feu si beau la céleste vigueur2
Peut enflammer ses vers sans échauffer son cœur 3 !
1. Var. Il vécut sans Iris, et vécut saas ennui,
Comme la belle ailleurs se divertit sans lui.
(Manuscrits de Conrart.)
2. Var. Et si d'un si beau feu la céleste rigueur.
[Manuscrits des Godefroy.)
3. Les quatre derniers vers manquent dans les Manuscrits de Con-
rart. — L'ordre chronologique amènerait ici les Vers présentés à
Monseigneur le Procureur général Fouccjuct^ surintendant des finances >
que Granet a publiés aux pages 178- 181 des OEuvres diverses. Nous
nous contentons de rappeler cette pièce, imprimée en entier aux
pages 121 et suivantes du tome VI, en tête A'OEdipe, dont, comme
nous l'avons dit, l'Achevé d'imprimer est du 26 mars 1659.
i5o POESIES DIVERSES.
XLVIII
MADRIGAL.
Les pièces XLVIII et XLIX ont été imprimées pour la première
fois sous ce titre et dans cet ordre à la page 94 de la cinquième
partie des Poésies choisies, publiée en ififio. Elles avaient été compo-
sées vers la fin de 1659. En effet, dans le recueil manuscrit de Conrart,
conservé à la bibliothèque de l'Arsenal (tome IX, p. 859), elles sont
précédées de la lettre suivante :
« A Rouen, le 16 décembre 165g.
a L'incomparable Sapho est suppliée de mander son avis à l'illustre
Aspasie, touchant deux épigratnmes faits1 pour une belle dame de sa
connoissance, qui, par un accès d'estime, avoit baisé la main gauche
de l'auteur. Il y a partage pour juger lequel est le plus galant: l'un
a plus d'effort de pensée, et l'autre a quelque chose de plus simple
et plus naturel. »
Immédiatement après cette lettre le recueil de Conrart nous pré-
sente, sous le titre dCépigramme, la pièce qui commence par :
Je ne veux plus devoir à des gens comme vous.
Puis sous cette rubrique : Autre sur le même sujet, celle dont le pre-
mier vers est :
Mes deux mains à l'envi disputent de leur gloire.
Enfin on trouve à la page 8(So une Réponse de Vincomparable Sapho à
la seconde épigramme de M. Corneille, réponse qui n'est pas dans
le recueil de Sercy. Granet, qui donne à la page 208, sous le titre
de Madrigal à Mademoiselle Serment , la pièce commençant par :
« Mes deux mains à l'envi..., v intitule la réponse, imprimée par lui
pour la première fois : Réponse de Mademoiselle Serment. M. Paul La-
croix, qui a publié tout récemment dans le Bulletin du bibliophile
1. Ce mot était encore quelquefois masculin. Voyez tome IV,
p. i34, note 1, et le Lexique.
POÉSIES DIVERSES. i5i
(n° du i5 octobre 1864, 8e année, p. 556) la lettre que nous avons
reproduite plus haut, dit qu'elle « fut probablement écrite par Cor-
neille lui-même à Mlle de Scudéry, » et que «l'illustre Aspasie....
n'était autre chose que Ninon de Lenclos. » Deux de ces trois asser-
tions paraissent bien hasardées , mais je crois qu'il est certain que
* l'incomparable Sapho » est en effet Mlle de Scudéry, et alors il de-
vient très- probable qu'elle est aussi l'auteur de la réponse portant le
nom de Sapho. Ce qui ajoute encore à cette vraisemblance, c'est que
dans une Lettre de Sapho au Mage de Sidon, datée du 21 octobre i658,
qui se trouve à la page 863 du tome IX des Manuscrits de Conrart y on
lit : « Allez, allez, vendez vos coquilles à d'autres qu'à ceux qui vien-
nent du Mont-Saint-Michel. » Ceci explique et complète cette expres-
sion proverbiale qui forme le dernier vers de la Réponse :
Vendez vos coquilles à d'autres.
Pour ne pas allonger outre mesure cette notice déjà trop étendue,
nous renvoyons à Y Appendice quelques détails sur Mlle Serment et
!a Réponse de P incomparable Sapho.
Mes deux mains à l'envi disputent de leur gloire ,
Et dans leurs sentiments jaloux
Je ne sais ce que j'en dois croire.
Philis, je m'en rapporte à vous;
Réglez mon avis1 par le vôtre. 5
Vous savez leurs honneurs divers :
La droite a mis au jour un million de vers;
Mais votre belle bouche a daigné baiser l'autre.
Adorable Phiiis , peut-on mieux décider
Que la droite lui doit céder ? 1 o
1. Ainsi dans les Poésies choisies et dans les Manuscrits de Conrart,
Amour, dans les OEuvres diverses publiées par Granet, et dans les
éditions postérieures.
i5a POESIES DIVERSES.
XLIX
AUTRE SUR LE MEME SUJET.
Voyez la notice en tête de la pièce précédente.
Je ne veux plus devoir à des gens comme vous :
Je vous trouve , Phi lis , trop rude créancière.
Pour un baiser prêté, qui m'a fait cent jaloux,
Vous avez retenu mon âme prisonnière.
Jl fait mauvais garder un si dangereux prêt;
J'aime mieux vous le rendre avec double intérêt,
Et m'acquitter ainsi mieux que je ne mérite;
Mais à de tels paiements * je n'ose me fier ,
Vous accroîtrez la dette en vous laissant payer,
Et doublerez mes fers si par là je m'acquitte. i o
Le péril en est grand, courons-y toutefois ,
Une prison si belle est trop digne d'envie ;
Puissé-je vous devoir plus que je ne vous dois,
En peine d'y languir le reste de ma vie !
i. Ce mot est imprimé payments dans le recueil de Sercy, et écrit
pafmens dans les Manuscrits de Conrart, afin qu'on voie bien qu'il
ne compte que pour deux syllabes.
POÉSIES DIVERSES. «53
AIR DF. M. LAMBERT1 POl R LA REINE.
Le mariage de Marie-Thérèse d'Autriche avec Louis XIV fut cé-
lébré le 9 juin ifific, à Saint-Jeau-de-Luz (voyez tome VI, p. 264,
note 1). Ce sixain, signé M. de Corbeille, a été imprimé pour la
première fois dans le Recueil des plus beaux vers qui ont esté mis en
citant, Auec le Nom des AutJieurs tant des Airs que des Paroles, à Paris,
chez Charles de Sercv, M.DC.LXI, in-12, p. 89. L'Achevé d'impri-
mer est du 18 juin 1661. Ce Recueil ne contient que les vers, et non la
musique; nous Favons vainement cherchée dans les Airs à une, II. 111 .
et IV. parties avec la basse-continue composez par Monsieur Lambert ,
maistre de la musique de la chambre du Roy, à Paris, par Christophe
Ballard, M.DC.LXXIX. in-folio.
C'est trop faire languir de si justes désirs ,
Reine, venez assurer nos plaisirs
Par Féclat de votre présence;
Venez nous rendre heureux sous vos augustes lois,
Et recevez tous les cœurs de la France 5
Avec celui du plus grand de ses rois.
1. C'est le célèbre musicien dont Boileau parle dans sa IIIe satire,
la Fontaine dans la fable v du livre XI, et Tallemant des Réau\ dans
ses Historiettes , tome VI, p. 193-199. Il était né en 1610 et mourui
en 1696.
1 54 POÉSIES DIVERSES.
LI
POUR UNE DAME
QUI REPRÉSENTAIT LA NUIT EN LA COMÉDIE WENDYM10TS
MADRIGAL.
Le registre de la Grange constate que le 2 5 juin 1660 la troupe
de Molière reprit lss Amours de Diane et d? Endymion, de Gilbert ' , qui,
suivant les frères Parfait (Histoire du Théâtre françois, tome VIII,
p. 2o5 et suivantes), avaient été représentés d'abord en 1657, à l'Hô-
tel de Bourgogne. M. Taschereau pense que Corneille assista à cette
reprise, où Mlle du Parc représentait la Nuit, tandis qu'une beauté
plus mure, Madeleine Béjart peut-être, jouait Diane ou la Lune2.
Cette conjecture parait très-fondée. Ce madrigal a été publié pour la
première fois à la page 82 delà cinquième partie des Poésies choisies.
Si la Lune et la Nuit sont bien représentées ,
Endymion n'étoit qu'un sot :
Il devoit dès le premier mot
Renvoyer à leur ciel Jes cornes argentées.
Ténébreuse déesse , un œil bien éclairé 5
Dans tes obscurités eût cherché sa fortune ;
Et je n'en connois point qui n'eût tôt préféré
Les ombres de la Nuit aux clartés de la Lune.
1. Sur Gilbert, voyez tome IV, p. 399 et note 1.
2. Histoire de la vie et des OEuvres de P. Corneille, 2e édition,
p. f73.
POÉSIES DIVERSES. i55
LU
JALOUSIE.
Ces vers, signés Corneille, ont été publiés pour la première fois
dans les Poésies choisies.... cinquième partie, p. j3. Nous n'en pou-
vons déterminer l'époque, non plus que celles des pièces LIII-LXIV,
toutes signées de la même manière. Nous ferons seulement remar-
quer que ces opuscules sont nécessairement antérieurs à l'Achevé
d'imprimer de la première édition de cette cinquième partie, daté,
ainsi que nous l'avons déjà dit, du 18 août 1660. Le nom de Philis
désigne probablement ici la même personne que dans les pièces
XLVIII et XLIX. Granet, qui considère ces deux madrigaux comme
adressés à Mlle Serment, ne s'est point prononcé sur la présente pièce,
qu'il donne aux pages 191-193 des OEuvres diverses.
N'aimez plus tant , Philis , à vous voir adorée :
Le plus ardent amour n'a pas grande durée;
Les nœuds les plus serrés sont le plus tôt rompus ;
A force d'aimer trop , souvent on n'aime plus ,
Et ces liens si forts ont des lois si sévères 5
Que toutes leurs douceurs en deviennent a mères.
Je sais qu'il vous est doux d'asservir tous nos soins ;
Mais qui se donne entier n'en exige pas moins :
Sans réserve il se rend, sans réserve il se livre ,
Hors de votre présence il doute s'il peut vivre; t o
Mais il veut la pareille , et son attachement
Prend compte de chaque heure et de chaque moment.
C'est un esclave fier qui veut régler son maître ,
Un censeur complaisant qui cherche à trop connoître ,
Un tyran déguisé qui s'attache à vos pas , 1 5
Un dangereux Argus qui voit ce qui n'est pas.
i56 POÉSIES DIVERSES.
Sans cesse il importune , et sans cesse il assiège ,
Importun par devoir, fâcheux par privilège,
Ardent à vous servir jusqu'à vous en lasser,
Mais au reste un peu tendre et facile à blesser. 2 o
Le plus léger chagrin d'une humeur inégale ,
Le moindre égarement d'un mauvais intervalle ,
Un souris par mégarde à ses yeux dérobé ,
Un coup d'œil par hasard sur un autre tombé ,
Le plus foible dehors de cette complaisance 2 5
Que se permet pour tous la même indifférence :
Tout cela fait pour lui de grands crimes d'Etat*
Et plus l'amour est fort , plus il est délicat.
Vous avez vu , Philis , comme il brise sa chaîne
Sitôt qu'auprès de vous quelque chose le gêne; 3o
Et comme vos bontés ne sont qu'un foible appui
Contre un murmure sourd qui s'épand jusqu'à lui.
Que ce soit vérité, que ce soit calomnie,
Pour vous voir en coupable il suffit qu'on le die;
Et lorsqu'une imposture a quelque fondement 3 5
Sur un peu d'imprudence, ou sur trop d'enjouement,
Tout ce qu'il sait de vous et de votre innocence
N'ose le révolter contre cette apparence,
Et souffre qu'elle expose à cent fausses clartés
Votre humeur sociable et vos civilités. 40
Sa raison au dedans vous fait en vain justice,
Sa raison au dehors respecte son caprice ;
La peur de sembler dupe aux yeux de quelques fous
Etouffe cette voix qui parle trop pour vous.
La part qu'il prend sur lui de votre renommée 4 5
Forme un sombre dépit de vous avoir aimée ;
Et comme il n'est plus temps d'en faire un désaveu ,
Il fait gloire partout d'éteindre un si beau feu :
Du moins s'il ne l'éteint , il l'empêche de luire ,
Et brave le pouvoir qu'il ne sauroit détruire. 5o
POÉSIES DIVERSES. i5?
Voilà ce que produit le don de trop charmer.
Pour garder vos amants, faites-vous moins aimer:
Un amour médiocre est souvent plus traitable;
Mais pourriez-vous, Philis, vous rendre moins aimable?
Pensez-y, je vous prie, et n'oubliez jamais, 5 5
Quand on vous aimera, que 1' Amour est doux, mais1
r. Ces mots, imprimés ainsi en capitales dans les Poésies choisies,
font- ils allusion au début de quelque poésie alors en vogue? c'est ce
que nous n'avons pu éclain ir.
i58 POÉSIES DIVERSES.
lui
BAGATELLE.
Ces vers sont imprimés à la page y 5 de la cinquième partie des
Poésies choisies. Cette pièce et les deux suivantes n'ont pas été repro-
duites par Granet.
Quoi ? sitôt que j'en veux rabattre ,
Vous vous faites tenir à quatre ,
Et quand j'en devrois enrager,
Votre ordre ne se peut changer :
11 faut vous en faire cinquante. 5
Ma foi, le nombre m'épouvante;
En vieux garçon de cinquante ans
N'en fait guère en beaucoup de temps ,
Et ne va pas tout dune haleine
A la benoîte cinquantaine. i o
Encor, pour être votre lait ,
Il faut qu'ils soient doux comme lait,
Qu'ils aillent droit comme une quille ,
Qu'ils n'aient point de fausse cheville ,
Que tout y soit bien ajusté, 1 5
Que rien n'y penche d'un côté,
Rien n'y soit de mauvaise mise ,
Rien n'y sente la barbe grise.
Voilà bien des conditions
Pour mes pauvres inventions. 20
Le temps les a presque épuisées ,
Les vieux travaux les ont usées :
Gomment pourront-elles trouver
Le secret de bien achever?
POÉSIES DIVERSES i59
Devenez un peu complaisante , 1 5
Et daignez vous passer à trente :
Vous serez servie à souhait ,
Et je vous dirai haut et net
Que je craindrai fort peu la honte
De vous fournir mal votre conte * . 3 o
Mais je vaux moins qu'un quinola2,
Si je n'en fais vingt par delà.
Tenir à demi sa parole ,
C'est une méchante bricole* :
On doit s'efforcer jusqu'au bout, s 5
Et ne rien faire, ou faire tout.
Il faut donc que je m'évertue ,
Que je me débatte et remue,
Que je pousse de tout mon mieux ,
Dussé-je en crever à vos yeux : 40
Aux grands coups on voit les grands hommes.
Voyons, de grâce, où nous en sommes :
Si je compte bien par mes doigts,
Je passe les quarante et trois;
Encor six, vous n'auriez que dire., 45
Et vous commencez à sourire
De voir mon reste de vertu ,
Sans vous avoir rien rabattu ,
Ni tourné la tête en arrière ,
Toucher au bout de la carrière. 5o
En faut-il encor? je le veux,
Voilà jusqu'à cinquante-deux :
Plaignez-vous , en cette aventure ,
De n'avoir pas bonne mesure.
1. Voyez tome I, p. i5o, note 1.
2. Homme à gages chargé de conduire une dame. Voyez le Lexique.
3. Bricole, tour, détour, tromperie. Voyez le Lexique,
160 POESIES DIVERSES.
LIV
STANCES.
Ces vers, probablement composés a la suite de quelque ballet ou
mascarade, dont nous n'avons pu connaître ni la date ni le sujet,
sont imprimés à la pa&e 77 de la cinquième partie di s Poésies choisies.
J'ai vu la peste en raccourci :
Et s'il faut en parler sans feindre,
Lorsque1 la peste est faite ainsi,
Peste ! que la peste est à craindre !
De cœurs qui n'en sauroient guérir 5
Elle est partout accompagnée ,
Et dût-on cent fois en mourir,
Mille voudroient l'avoir gagnée.
L'ardeur dont ils sont emportés ,
En ce péril leur persuade 1 o
Qu'avoir la peste à ses côtés,
Ce n'est point être trop malade.
Aussi faut-il leur accorder
Qu'on auroit du bonheur de reste,
Pour peu qu'on se pût hasarder 1 5
Au beau milieu de cette peste.
La mort seroit douce à ce prix ;
1. Puisque, mais à tort, dans l'édition de Lefèvre et dans quelques
autres.
POÉSIES DIVERSES. 161
Mais c'est un malheur à se pendre,
Qu'on ne meurt pas d'en être pris,
Mais faute de la pouvoir prendre. 2 o
L'ardeur qu'elle fait naître au sein
N'y fait même un mal incurable ,
Que parce qu'elle prend soudain,
Et quelle est toujours imprenable.
Aussi chacun y perd son temps ; 2 5
L'un en gémit, l'autre en déteste;
Et ce que font les plus contents,
C'est de pester contre la peste.
<'0RJ»EiLI,E. X I 1
i62 POÉSIES DIVERSES.
LV
SONNET.
Ces vers sont imprimés a la page 78 de la cinquième partie des
Poésies choisies.
Vous aimez que je me range
Auprès de vous chaque jour,
Et m'ordonnez que je change
En amitié mon amour.
Cette méchante bricole1 5
Vous fait beaucoup hasarder,
Et je vous trouve bien folle
Si vous me pensez garder.
Une passion si belle
N'est pas une bagatelle 1 o
Dont on se joue à son gré;
Et F amour qui vous rebute
Ne sauroit choir d'un degré,
Qu'il ne meure de sa chute.
1 . Ce méchant détour, ce moyen détourné de vous débarrasser de
moi. Voyez le Lexique.
POÉSIES DIVERSES. i63
LVI
SONNET.
Ce sonnet a été imprimé pour la première fois à la page 87 de la
cinquième partie des Poésies choisies de Sercy . Il y suit immédiate-
ment les pièces XLVII et LI de la présente édition des Poésies diverses
e\.Y Elégie renvoyée à Y Appendice , toutes trois adressées à la du Parc,
soit sous le nom de la Marquise, soit sous celui d'Iris.
Je vous estime, Iris, et crois pouvoir sans crime
Permettre à mon respect un aveu si charmant :
Il est vrai qu'à chaque moment
Je songe que je vous estime.
Cette agréable idée, où ma raison s'abîme, 5
Tyrannise mes sens jusqu'à l'accablement ;
Mais pour vouloir fuir ce tourment
La cause en est trop légitime.
Aussi quelque désordre où mon cœur soit plongé,
Bien loin de faire effort à l'en voir dégagé, 10
Entretenir sa peine est toute mon étude.
J'en aime le chagrin, le trouble m'en est doux.
Hélas ! que ne m'estimez-vous
Avec la même inquiétude !
164 POÉSIES DIVERSES.
LV1I
SOJVWEX.
Ce sonnet a été publié d'abord à la page 88 de la cinquième partie
des Poésies choisies de Sercy.
D'un accueil si flatteur, et qui veut que j'espère,
Vous payez ma visite alors que je vous voi,
Que souvent à Terreur j'abandonne ma foi,
Et crois seul avoir droit d'aspirer à vous plaire.
Mais si j'y trouve alors de quoi me satisfaire, b
Ces charmes attirants, ces doux je ne sais quoi,
Sont des biens pour tout autre aussi bien que pour moi;
Et c'est dont un beau feu ne se contente guère.
D'une ardeur réciproque il veut d'autres témoins,
Un mutuel échange et de vœux et de soins, i o
Un transport de tendresse à nul autre semblable.
C'est là ce qui remplit un cœur fort amoureux :
Le mien le sent pour vous ; le vôtre en est capable.
Helas ! si vous vouliez, que je serois heureux !
POÉSIES DIVERSES. ifi5
LVIII
STANCES.
Ces stances, publiées pour la première fois à la page 89 de la
cinquième partie des Poésies choisies de Sercy, et réimprimées aux
pages 2o5 et 206 des OEuvres diverses , sont adressées , ainsi que les
pièces XLVII , LI et LVI , à la du Parc , qui , comme nous l'avons
dit, était connue sous le nom de la Marquise, et désignée parfois par
Corneille sous celui d'Iris. Un critique ingénieux, M. Edouard Four-
nier, les a fort spirituellement encadrées dans une anecdote char-
mante (voyez ses Notes sur la vie de Corneille, p. ciii-cvn). Regar-
dant la dernière stance comme ajoutée après coup , et se fiant trop à
une tradition fort contestable, il a cru que cette pièce avait été com-
posée pour Mme de Motteville en réponse aux railleries d'une jeune
marquise; mais le lien très-naturel et très-étroit qui unit ces stances
aux autres pièces adressées à la du Parc ne permet pas d'admettre
cette explication.
Marquise, si mon visage
A quelques traits un peu vieux,
Souvenez-vous qu'à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux.
Le temps aux plus belles choses 5
Se plaît à faire un affront,
Et saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front.
Le même cours des planètes
Règle nos jours et nos nuits : 1 o
On m'a vu ce que vous êtes ;
Vous serez ce que je suis.
66 POESIES DIVERSES.
Cependant j'ai quelques charmes
Qui sont assez éclatants
Pour n'avoir pas trop d'alarmes i 5
De ces ravages du temps.
Vous en avez qu'on adore,
Mais ceux que vous méprisez
Pourroient bien durer encore
Quand ceux-là seront usés. ao
Ils pourront sauver la gloire
Des yeux qui me semblent doux,
Et dans mille ans faire croire
Ce qu'il me plaira de vous.
Chez cette race nouvelle * a
Où j'aurai quelque crédit,
Vous ne passerez pour belle
Qu'autant que je l'aurai dit.
Pensez-y, belle Marquise :
Quoiqu'un grison fasse effroi, 3o
Il vaut bien qu'on le courtise,
Quand il est fait comme moi.
POESIES DIVERSES. 167
ux
SONNET.
Ce sonnet, inséré par Granet dans les OEuvres diverses (p. 207), a
été publié pour la première fois à la page 90 de la cinquième partie
des Poésies choisies de Sercy. La page 91 est occupée par le Sonnet
perdu au jeu, que sa date, exactement déterminée, nous a permis de
placer plus haut, p. 140.
Usez moins avec moi du droit de tout charmer :
Vous me perdrez bientôt, si vous n'y prenez garde.
J'aime bien à vous voir, quoi qu enfin j'y hasarde ;
Mais je n'aime pas bien qu'on me force d'aimer.
Cependant mon repos a de quoi s'alarmer : 5
Je sens je ne sais quoi dès que je vous regarde ;
Je souffre avec chagrin tout ce qui m'en retarde ;
Et c'est déjà sans doute un peu plus qu'estimer * .
Ne vous y trompez pas : l'honneur de ma défaite
N'assure point d'esclave à la maio qui l'a faite; 10
Je sais l'art d'échapper aux charmes les plus forts ;
Et quand ils m'ont réduit à ne me plus défendre2,
Savez- vous , belle Iris , ce que je fais alors ?
Je m'enfuis, de peur de me rendre.
1 . Ce vers semble faire allusion à la pièce LVI.
2. a A ne plus me défendre, » dans le texte de Granet, et, par
suite, dans toutes les éditions postérieures.
68 POÉSIES DIVERSES.
LX
CHAJVSON.
Cette chanson a paru pour la première fois à la page 92 de la
cinquième partie des Poésies choisies de Sercy. Les pièces LX-LXTV
ne se trouvent pas dans les OEuvres diverses publiées par Granet ; elles
sont au nombre de celles qu'il a considérées comme étant or d'une
galanterie trop libre. » Voyez la Notice, p. 19.
Vos beaux yeux sur ma franchise
N'adressent pas bien leurs coups :
Tête chauve et barbe grise
Ne sont pas viande pour vous.
Quand j'aurois l'heur de vous plaire , 5
Ce seroit perdre du temps :
Iris , que pourriez-vous faire
D'un galant de cinquante ans ?
Ce qui vous rend adorable
N'est propre qu'à m'alarmer. : o
Je vous trouve trop aimable ,
Et crains de vous trop aimer :
Mon cœur à prendre est facile ,
Mes vœux sont des plus constants ',
Mais c'est un meuble inutile 1 5
Qu'un galant de cinquante ans.
Si l'armure n'est complète ,
Si tout ne va comme il faut,
Il vaut mieux faire retraite
Que d'entreprendre un assaut : 10
POÉSIES DIVERSES. 169
L'amour ne rend point la place
A de mauvais combattants ,
Et rit de la vaine audace
Des galants de cinquante ans.
170 POESIES DIVERSES.
LXI
STANCES.
Ces stances ont été publiées pour la première fois à la page 93 de
la cinquième partie des Poésies choisies de Sercy. La page 94 est
occupée par deux madrigaux dont nous avons pu déterminer la date
et que nous avons placés plus haut, p. i5o-i52. On ne sait pas qui
Corneille désigne sous le nom de Caliste.
Caliste, lorsque je vous voi,
Dirai-je que je vous admire?
C'est vous dire bien peu pour moi ,
Et peut-être c'est trop vous dire.
Je m'expliquerois un peu mieux 5
Pour un moindre rang que le vôtre :
Vous êtes belle , j'ai des yeux,
Et je suis nomme comme un autre.
Que n'êtes-vous, à votre tour,
Caliste , comme une autre femme ! 1 o
Je serois pour vous tout d'amour,
Si vous n'étiez point si grand' dame.
Votre grade 4 hors du commun
Incommode fort qui vous aime ,
Et sous le respect importun 1 5
Un beau feu s'éteint de lui-même.
1 . Votre rang, comme il est dit ci-dessus au vers 6. Voyez tome I,
p. 4X9> note 1» et le Lexique.
POÉSIES DIVERSES. i7i
J'aime un peu l'indiscrétion
Quand je veux faire des maîtresses ;
Et quand j'ai de la passion y
J'ai grand amour pour les caresses. 20
Mais si j'osois me hasarder
Avec vous au moindre pillage ,
Vous me feriez bien regarder
Le grand chemin de mon village.
J'aime donc mieux laisser mourir 2 5
L'ardeur qui seroit maltraitée ,
Que de prétendre à conquérir
Ce qui n'est point de ma portée.
172 POÉSIES DIVERSES.
LXII
STANCES.
Ces stances ont paru pour Ja première fois à la page 0,5 de la
cinquième partie des Poésies choisies de Sercy. Nous ignorons quelle
est la personne désignée par le nom àHAminte.
Que vous sert-il de me charmer ?
Aminte , je ne puis aimer
Où je ne vois rien à prétendre :
Je sens naître et mourir ma flamme à votre aspect ;
Et si pour la beauté j'ai toujours l'âme tendre, 5
Jamais pour la vertu je n'ai que du respect.
Vous me recevez sans mépris ,
Je vous parle, je vous écris ,
Je vous vois quand j'en ai l'envie:
Ces bonheurs sont pour moi des bonheurs superflus ; r o
Et si quelque autre y trouve une assez douce vie ,
Il me faut pour aimer quelque chose de plus.
Le plus grand amour sans faveur,
Pour un homme de mon humeur,
Est un assez triste partage : i 5
Je cède à mes rivaux cet inutile bien,
Et qui me donne un cœur, sans donner davantage ,
M'obligeroit bien plus de ne me donner rien.
Je suis de ces amants grossiers
Qui n'aiment pas fort volontiers 2 o
Sans aucun prix de leurs services ,
Et veux , pour m'en payer, un peu mieux qu'un regard ;
Et l'union d'esprits est pour moi sans délices ,
Si les charmes des sens n'y prennent quelque part.
POÉSIES DIVERSES. 173
LXI11
EP1GKAIYIMK.
Cette épigramme a été publiée pour la première fois à la page 96
de la cinquième partie des Poésies choisies de Sercy. Le nom de
Philis désigne-t-il encore ici Mlle Serment, comme, d'après Granet,
dans les pièces XLYIII et XL1X?
Qu'on te flatte, qu'on te baise,
Tu ne t'effarouches point ,
Philis, et le dernier point
Est le seul qui te déplaise.
Cette amitié de milieu 5
Te semble être selon Dieu ,
Et du ciel t' ouvrir la porte ;
Mais détrompe-toi l'esprit :
Quiconque aime de la sorte
Se donne au diable à crédit. 1 o
174 POÉSIES DIVERSES.
LXIV
HONDEAU.
Ce rondeau a été imprimé également pour la première fois à la
page 96 de la cinquième partie des Poésies choisies de Sercy.
Je pense, à vous voir tant d'attraits ,
Qu Amour vous a formée exprès
Pour faire que sa fête on chomme i ;
Car vous en avez une somme
Bien dangereuse à voir de près. 5
Vous êtes belle plus que très ,
Et vous avez le teint si frais ,
Qu'il n'est rien d'égal (au moins comme
Je pense) à vous.
Vos yeux , par des ressorts secrets, 1 o
Tiennent mille cœurs dans vos rets;
Qui s'en défend est habile homme :
Pour moi qu'un si beau feu consomme,
Nuit et jour, percé de vos traits ,
Je pense à vous. 1 5
1. Chomme , chôme. Nous reproduisons l'orthographe de la pre-
mière édition.
POÉSIES DIVERSES. i 75
LVX
REMERC1ME1NT PRÉSENTA AU ROI
en l'année i663.
Louis XIV créa des pensions pour soixante-deux savants de l'Eu-
rope à partir du ier janvier i663. Deux listes avaient été dressées
pour préparer ce travail. Dans l'une, qui est de Chapelain, Corneille
est ainsi désigné : ce Corneille (Pierre). Est un prodige d'esprit et l'or-
nement du théâtre françois. Il a de la doctrine et du sens, lequel paroît
néanmoins plus dans tout le détail de ses pièces que dans le gros, où
très-souvent le dessein est faux, à les faire tomber parmi les plus
communes, si ce défaut d'art général n'étoit récompensé amplement
par l'excellence du particulier, qui ne sauroit être plus exquis dans
l'exécution des parties. Hors du théâtre, on ne sait s'il réussiroit en
prose et en vers, agissant de son chef; car il a peu d'expérience du
monde, et ne voit guère rien hors de son métier. Les paraphrases
sur Y Imitation de Jésus- Christ sont très-belles, mais c'est plus tra-
duction qu'invention. » (Continuation des Mémoires de littérature —
de M. de Salengre, Paris, 1726, tome II, p. 48 et 49«) L'autre
liste, qui est de Costar, renferme ce jugement beaucoup plus concis :
t Corneille. Le premier poète du monde pour le théâtre. » [Ibidem,
p. 320.) Il est confirmé par celui de la liste définitive qui porte:
« Au sieur Pierre Corneille, premier poète dramatique du monde,
deux mille livres. t> (Pièces intéressantes et peu connues pour servir à
ridstoire [par de la Place], 1781, tome I, p. 198.) Il est probable
que Corneille ne tarda guère à adresser au Roi le Remercimmt qu'on
va lire : nous le trouvons aux pages 276-279 des Délices de la poésie
galante des plus célèbre? Autheurs du Temps, dont l'Achevé d'imprimer
est du 2 5 septembre i663* ; mais le P. Tournemine nous apprend,
1 . On lit aussi cette pièce aux pages 36 et suivantes de la pre-
mière partie de l'édition des Délices de 1666. Cette édition de 1666
nous a paru en tout conforme à celle de i663.
i"j6 POÉSIES DIVERSES.
dans sa Défense du grand Corneille ', qu'il a laissa passer un an sans
demander le brevet {de sa pension), et sans remercier {le ministre). Je
le sais , dit-il , de l'abbé Gallois , à qui le ministre en avoit fait des
reproches, et qui conduisit Corneille à l'hôtel Colbert. » Ces vers
furent d'abord imprimés à part (Paris, M.DC.LXIII , sans nom de
libraire ni d'imprimeur, 7 pages in-40) '. nous devons à l'obligeance
de M. le comte de Lurde la communication de cette édition originale.
Ils furent ensuite réimprimés en 1667 et en 1669, à la suite du Poème
sur les Victoires du Roi. Dans l'impression de i663 et dans les Délices
de la poésie galante, ils sont intitulés : Remercîment au Roy; dans celle
de 1667, que nous suivons, ils ont le titre que nous avons adopté;
nous n'avons pu voir la réimpression de 1669. Nous donnons en
note les variantes de l'édition in-40 et des Délices. — On peut com-
parer à cette pièce de Corneille celle que Molière composa à la même
occasion, et qui parut également à Paris en i663, 7 pages in-40 (chez
Guillaume de Luyne et Gabriel Quinet).
Ainsi du Dieu vivant la bonté surprenante
Verse , quand il lui plaît , sa grâce prévenante ;
Ainsi du haut des cieux il aime à départir
Des biens dont notre espoir n'osoit nous avertir.
Comme ses2 moindres dons excèdent le mérite, 5
Cette même bonté seule l'en sollicite ',
Il ne consulte qu'elle, et maître qu'il en est,
Sans devoir à personne, il donne à qui lui plaît.
Telles sont les faveurs que ta main nous partage ,
Grand Roi , du Roi des rois la plus parfaite image : 1 o
Tel est l'épanchement de tes nouveaux bienfaits;
Il prévient l'espérance3, il surprend les souhaits,
Il passe le mérite , et ta bonté suprême
1 . Page xxxm de l'édition de Granet, qui a placé cette Défense en
tète des OEuvres diverses.
2. On a imprimé à tort ces dans les Délices.
3. Corneille a déjà dit précédemment dans son Remercîment a Ma-
zarin, p. g5, vers 14 :
Tes dons ont devancé même mon espérance.
POÉSIKS DIVERSES. i77
Pour faire des heureux les choisit d'elle-même.
Elle m'a mis du * nombre , et me force à rougir i 5
De ne me voir qu'un zèle incapable d'agir.
Son excès dans mon cœur fait des troubles étranges.
Je sais que je te dois des vœux et des louanges ,
Que ne t'en pas offrir c'est te les dérober2 ;
Mais si j'y fais effort, je cherche à succomber, 20
Et le plus beau succès que ma muse en obtienne
Profanera ta gloire et détruira la mienne.
Je veux bien l'immoler toute entière à mon roi ;
Mais si je n'en ai plus, je ne puis rien pour toi * ;
Et j'en dois prendre soin , pour éviter le crime 2 5
D'employer à te peindre un pinceau sans estime.
Il n'est dans tous les arts secret plus excellent
Que d'y voir sa portée et choisir son talent 4 :
Pour moi qui de louer n'eus jamais la méthode,
J'ignore encor le tour du sonnet et de l'ode. ?o
Mon génie au théâtre a voulu m'attacher ;
Il en a fait mon fort , il sait m'y retrancher 6 ;
Partout ailleurs je rampe, et ne suis plus moi-même :
Mais là j'ai quelque nom, là quelquefois on m'aime6;
Là ce même génie ose de temps en temps 3 5
1. On lit au, pour du, dans les Délices.
2. Var. Que ne t'en pas donner c'est te les dérober. {Délices.)
3. Dans les Délices :
Mais si je n'en ai plus, je n'ai plus rien pour toi ,
leçon très -probablement fautive; et au vers suivant : Et je dois, va-
riante tout à fait inadmissible.
4. Oranet donne ainsi ce vers, peut-être d'après l'édition de 1669 :
Que de savoir connoître et choisir son talent.
5. Granet et tous les éditeurs qui l'ont suivi ont imprimé : mon
sort, qui est une faute évidente, etye dois m y retrancher , qui se trouve
peut-être dans l'édition de 1669.
fi. Voyez ci-dessus, pièce XX, p. 65-72 passim.
CoRNETiXE X 12
178 POESIES DIVERSES.
Tracer de ton portrait quelques traits éclatants.
Par eux de Y Andromède il sut ouvrir la scène * ;
On y vit le Soleil instruire Melpomène2,
Et lui dire qu'un jour Alexandre et César
Sembleroient des vaincus attachés à ton char 3 : 4«>
Ton front le promettoit , et tes premiers miracles
Ont rempli hautement la foi de mes oracles.
A peine tu parois les armes à la main,
Que tu ternis les noms du Grec et du Romain * .
Tout tremble , tout fléchit sous tes jeunes années; 46
Tu portes en toi seul toutes les destinées;
Rien n'est en sûreté s'il ne vit sous ta loi :
On t'offre, ou pour mieux dire, on prend la paix de toi ;
Et ceux qui se font craindre aux deux bouts de la terre ,
Pour ne te craindre plus renoncent à la guerre. 5 o
Ton hymen est le sceau de cette illustre paix ' .
Sur ces grands coups d'Etat * tout parle , et je me tais ;
Et sans me hasarder à ces nobles amorces ,
J'attends l'occasion qui s'arrête à mes forces.
Je la trouve , et j'en prends le glorieux emploi, 5 5
Afin d'ouvrir ma scène encore un coup pour toi :
1. Vak. Par ceux de Y Andromède il sut ouvrir la scène. [Délices.)
1. Var. On y vit* le Soleil prédire à Melpomène
Que nous verrions un jour Alexandre et César
Ainsi que des vaincus attachés à ton char.
(Édition de i663 et Délices.)
3. Voyez tome V, p. 317, note 4«
4. D'Alexandre et de César, qui viennent d'être nommés au vers 3g.
5. Voyez tome VI, p. 254, note 1.
6. Ainsi dans l'édition in-4°, dans les Délices et dans l'édition
de 1667. On lit incidents, au lieu de coups d'Etat, dans les OEuvres di-
verses et dans toutes les éditions suivantes. Granet est sans doute l'au-
teur de ce changement.
* Granet dit par erreur que l'édition in-40 porte : « On y voit. »
Cette leçon ou plutôt cette faute ne s'y trouve pas, mais elle est dans
les deux éditions des Délices.
POÉSIES DIVERSES. 179
J'y mets la Toison d'or; mais avant qu'on la voie ,
La Paix vient elle-même y préparer la joie ;
L'Hymen l'y fait descendre; et de Mars en courroux
Par ta digne moitié j'y romps les derniers coups *. 60
On te voyoit dès lors à toi seul comparable
Faire éclater partout ta conduite adorable ,
Remplir les bons d'amour, et les méchants d'effroi 2 .
Jusque-là toutefois tout n'étoit pas à toi;
Et quelques doux effets qu'eût produits ta victoire3, 6 5
Les conseils du grand Jule* avoient part à ta gloire.
Maintenant qu'on te voit en6 digne potentat
Réunir en ta main les rênes de l'Etat ,
Que tu gouvernes seul , et que par ta prudence
Tu rappelles des rois l'auguste indépendance , 7 o
Il est temps que d'un air encor plus élevé
Je peigne en ta personne un monarque achevé ;
Que j'en laisse un modèle aux rois qu'on verra naître ,
Et qu'en toi pour régner je leur présente un maître.
C'est là que je saurai fortement exprimer 7 5
L'art de te faire craindre et de te faire aimer;
Cet accès libre à tous, cet accueil favorable ,
Qu'ainsi qu'au* plus heureux tu fais au misérable.
1. Y oyez le Prologue de la Toison cTor, tome VI, p. a53 et sui-
vantes.
2. Ce vers se trouve dans le Cid, acte I, scène m, vers 176. Voyez
au tome III, p. 11 4-
3. Il y & produit, sans accord, dans les anciennes éditions, y com-
pris celle de Granet, où on lit quelque , sans s : « quelque doux ef-
fets » : voyez tome I, p. 2o5, note 3, et le Lexique. — Les Délices
donnent : « la victoire, » pour «ta vio-toire. »
4. Jules, cardinal deMazarin, mort le 9 mars 1661.
5. On lit ici, dans les deux éditions des Délices : un, au lieu de
en, et au vers suivant : « la rêne, » pour « les rênes, » mais ce sont
des fautes évidentes. .
fS. Aux, dans les deux éditions des Délices.
i8o POESIES DIVERSES.
Je te peindrai vaillant, juste , bon, libéral ,
Invincible en la guerre, en la paix sans égal1 : 80
Je peindrai cette ardeur constante et magnanime
De retrancher le luxe et d'extirper le crime2 ;
Ce soin toujours actif pour les nobles projets ,
Toujours infatigable au bien de tes sujets;
Ce choix de serviteurs fidèles , intrépides , 8 5
Qui soulagent tes soins , mais sur qui tu présides ,
Et dont tout le pouvoir, qui fait tant de jaloux,
N'est qu'un écoulement de tes ordres sur nous.
Je rendrai de ton nom l'univers idolâtre :
Mais pour ce grand chef-d'œuvre, il faut un grand théâtre.
Ouvre-moi donc , grand Roi , ce prodige des arts
Que n'égala jamais la pompe des Césars ,
Ce merveilleux salon3 où ta magnificence
Fait briller un rayon de sa toute-puissance ;
Et peut-être, animé par tes4 yeux de plus près, 95
J'y ferai plus encor que je ne te promets.
Parle, et je reprendrai ma vigueur épuisée ,
1. On lit dans les OEuvres diverses publiées par Granet et dans
toutes les éditions suivantes :
Invincible à la guerre , à la paix sans égal.
2. Var. De retrancher le luxe et de punir le crime. {Délices.)
— Corneille fait ici allusion d'une part, à l'ordonnance de juin i663,
contre le luxe des habits, carrosses et ornements, qui renouvelait les
déclarations de novembre i656 et de novembre 1660; et d'autre part,
à l'édit de mars 1667, portant création d'un lieutenant de police de
Paris : le premier lieutenant nommé fut la Reynie.
3. Il s'agit ici du « grand et superbe salon que le Roi conçut et
fit faire fixe et permanent pour les divers spectacles, » salon dont nous
avons donné la description, par l'abbé de Pure, tome VII, p. 280 et
suivante., dans la Notice de Psyché.
4. On lit ici à tort, dans les Délices : a les », pour a les », et au vers
suivant : «je ferai», pour « j'y ferai \> , leçon un peu moins mau-
vaise, mais cependant peu probable.
POÉSIES DIVERSES. 181
Jusques à démentir les ans qui l'ont usée.
Vois comme elle renaît dès que je pense à toi ,
Gomme elle s'applaudit d'espérer en mon roi * ; 100
Le plus pénible effort n'a rien qui la rebute :
Commande, et j 'entreprends ; ordonne, et j'exécute.
i. Var. Comme elle s'applaudit d'espérer en son roi. [Délices.)
182 POÉSIES DIVERSES.
LXVI
A MONSEIGNEUR LE DUC DE GUISE,
SUR LA MORT DE MONSEIGNEUR SON ONCLE.
SONNET.
Ce sonnet est adressé à Louis- Joseph , né en i65o , mort en 1671 ,
fils unique de Louis de Lorraine , duc de Joyeuse et d'Angoulème,
mort en 1664* Louis-Joseph hérita du titre de son oncle, Henri II
duc de Guise, qui mourut sans enfants le 2 juin 1664. H est le seul
duc de Guise qui ait succédé à un oncle, et par conséquent le titre
même , tel que nous l'avons reproduit , suffit pour nous apprendre à
qui le sonnet s'adresse. Ce titre se trouve en tête d'un exemplaire
in-folio, d'un seul feuillet, signé Corneille, et probablement unique
aujourd'hui, qui portait le n° 326 dans le catalogue déjà cité au
tome IX, p. 6o5, note 2. Cet exemplaire appartient actuellement à
M. Cousin, qui nous l'a très-obligeamment communiqué. Le même
intitulé se rencontre aussi en tête de deux copies : l'une , assez dé-
fectueuse , conservée à la bibliothèque de l'Institut dans le porte-
feuille 217 des manuscrits des Godefroy; l'autre, plus correcte, occu-
pant la page 344 du manuscrit i5,244 ^u fonds français de la
Bibliothèque impériale, et qui nous a été indiquée par M. Edouard
Fournier. Granet et les éditeurs qui l'ont suivi n'ont mis d'autre
titre que les mots : A Monseigneur de Guise, et, ne tenant aucun
compte du titre original, ont supposé que le sonnet était adressé,
non à un neveu, mais à un fils, a Ce sonnet, dit Granet, est adressé
à Henri de Lorraine , IIe du nom , duc de Guise, fils de Charles de
Lorraine duc de Guise, mort en 1640. Il fut composé la même année
par Corneille. » Une lettre de Mézerai, dont l'original fait partie
d'une collection de pièces autographes conservées à la Bibliothèque
impériale de Saint-Pétersbourg, lettre dont le texte a été publié par
M. Edouard Guardet sous ce titre : Un courrier de Paris en 1664,
d'abord dans la Revue française (5e année, tome XVII, i85g , p. 568
et 56g), et ensuite en tirage à part, nous parle, sous la date du <r jeudi
POÉSIES DIVERSES. i83
10e de juillet 1664» ° d'un sonnet composé par Corneille au sujet de
la mort de cet Henri II de Lorraine. Il nous paraît à peu près certain
que ce sonnet est celui qui va suivre, et que c'est bien en 1664 qu'il a
été composé. Voici du reste le passage de Mézerai : a Feu M. de Guise
ayant fort aimé les belles-lettres, et lui-même composé l'bistoire de son
entreprise de Naples, et fait quantité de fort beaux vers, les poètes
se sont exercés à lui dresser des éloges et des épitaphes; j'ai joint à
ce mémoire un sonnet de l'incomparable M. Corneille, et moi-
même, bien que je ne sois pas poète, néanmoins excité par le sou-
venir de l'affection que ce prince a eu la bonté de me témoigner,
comme j'ai su qu'on vouloit faire un recueil de ces pièces, je me
suis senti ému d'un grain de folie poétique et ai rimé le sonnet que
voici , une nuit que je ne pouvois dormir : Aux poètes, sur les pièces
qu'ils ont faites à V honneur de M. de Guise , c'est pour mettre à la tête
du Recueil. » Après avoir copié son sonnet , que nous jugeons inutile
de reproduire , Mézerai ajoute : « C'est assurément avoir bien de
l'effronterie de joindre un si méchant sonnet à celui de M. de Cor-
neille ; mais les poètes ont des suivants , et l'on m'a assuré que le
sens en étoit bon et l'air assez poétique. » Toutes les recherches que
nous avons faites pour trouver quelque trace du Recueil dont il est
question ici sont restées sans résultat.
Tallemant des Réaux, dans ses Historiettes (tome VII, p. 254), nous
apprend que notre poète était un des commensaux de la maison :
« Corneille, dit-il, a trouvé moyen d'avoir une chambre à l'hôtel
de Guise. » Ce témoignage est corroboré par celui de l'abbé d'Au-
bignac. Attribuant à Corneille la Défense de la Sophonishe , qui est
réellement de Donneau de Visé (voyez tome VI, p. 457-459), il
s'exprime de la sorte dans un de ses plus violents pamphlets : <r Da-
vantage, cette Défense est dédiée à M. le Duc de Guise, et il n'y avoit
que vous capable de lui présenter un amas d'ignorances , d'injures
et de mensonges; c'est un grand prince dont la naissance et l'érudi-
tion, peu commune à ceux de sa qualité, méritent bien qu'il soit
l'objet des veilles et des ouvrages des plus savants; mais vous avez
été bien peu judicieux de payer en si mauvaise monnoie le couvert
el la table dont il vous honore. » {Deux Dissertations concernant le
poème dramatique.,,. Paris, du Brueil, i663, p. nj et 118.)
Croissez, jeune héros; notre douleur profonde
N'a que ce doux espoir qui la puisse affoiblir;
184 POÉSIES DIVERSES.
Croissez , et hâtez-vous de faire voir au monde
Que le plus noble sang peut encor s'ennoblir.
Croissez pour voir sous vous trembler la terre et Fonde :
Un grand prince vous laisse un grand nom à remplir ;
Et ce que se promit sa valeur sans seconde,
C'est par vous que le ciel réserve à l'accomplir.
Vos aïeux vous diront par d'illustres exemples
Comme il faut mériter des sceptres et des temples ; i o
Vous ne verrez que gloire et que vertus en tous.
Sur des pas si fameux suivez l'ordre céleste ;
Et de tant de héros qui revivent en vous
Egalez le dernier, vous passerez le reste.
POESIES DIVERSES i85
LXVII
AU ROI,
POUR LE RETARDEMENT DU PAYEMENT DE SA PENSION.
Cette pièce se trou-ve dans quelques exemplaires des OEuvres di-
verses de P. Corneille, publiées en 1738 par l'abbé Granet, sur le
feuillet intercalaire où figure le Sonnet sur la mort de Louis XIII
(voyez ci-dessus, p. 88 et 89). Nous empruntons à M. Taschereau
la note suivante, qui permet de classer ce sixain à sa véritable place :
« Le chevalier de Cailly , plus connu sous le nom anagrammatique
de d'Aceilly, nous a, par une petite pièce de son recueil, fait con-
naître la cause et la date de ce retard :
Aux poètes , en i665, sur le reculement de leurs pensions assignées sur
le même fonds que les bâtiments du Louvre.
Tant pour vous que pour ses maçons
Le Louvre n'a qu'un même fonds;
Mais ils ont le pas aux recettes.
N'en soyez pas tant effrayés :
On satisfera les poètes
Quand les maçons seront payés. »
(Histoire de la vie et des ouvrages de P. Corneille, seconde édition,
p. 363, note 40
Grand Roi, dont nous voyons la générosité
Montrer pour le Parnasse un excès de bonté,
Que n'ont jamais eu tous les autres ,
Puissiez-vous dans cent ans donner encor des lois ,
Et puissent tous vos ans être de quinze mois 5
Gomme vos commis font les nôtres !
186 POÉSIES DIVERSES.
LXVIII
AU ROI,
SUR SON RETOUR DE FLANDRE.
L'édition originale, en quatre pages in-40, ne porte ni adresse ni
nom de libraire ; seulement on lit à la fin la mention : « Avec per-
mission, » la date de 1667 et la signature de Corneille. L'exemplaire
que nous en avons vu figurait, sous le n° 324, dans le catalogue de
vente dont nous avons déjà parlé (tome IX, p. 606, note 2, et ci-
dessus, p. 182); il a été acheté par M. Victor Cousin, qui a bien
voulu nous permettre de le collationner. — Ces vers ont été réim-
primés dans le cours de la même année 1667, et aussi, suivant Gra-
net, en 1669, avec le poëme sur les Victoires du Roi, in-12; nous
n'avons pas vu cette dernière édition.
Le Roi rentra à Paris à la fin du mois d'août 1667. On peut voir
dans la pièce suivante et dans les notes qui l'accompagnent le récit
de ses opérations militaires.
Tu reviens , ô mon Roi , tout couvert de lauriers ;
Les palmes à la main tu nous rends nos guerriers ;
Et tes peuples, surpris et charmés de leur gloire,
Mêlent un peu d'envie à leurs chants de victoire.
Ils voudroient avoir vu comme eux aux champs de Mars
Ton auguste fierté guider tes étendards ;
Avoir dompté comme eux l'Espagne en sa milice ,
Réduit comme eux la Flandre à te faire justice;
Et su mieux prendre part à tant de murs forcés
Que p?r des feux de joie et des vœux exaucés. 1 o
Nos muses à leur tour, de même ardeur saisies ,
Vont redoubler pour toi leurs nobles jalousies,
Et ta France en va voir les merveilleux efforts
Déployer à Tenvi leurs plus rares trésors.
POÉSIES DIVERSES. 187
Elles diront quels soins, quels rudes exercices, 1 5
Quels travaux assidus étoient lors tes délices,
Quels secours aux blessés prodiguoit ta bonté * ,
Quels exemples donnoit ton intrépidité ,
Quels rapides succès ont accru ton empire ,
Et le diront bien mieux que je ne le puis dire. 20
C'est à moi de m'en taire , et ne pas avilir
L'honneur de ces lauriers que tu viens de cueillir
De mon génie usé la chaleur amortie
A leur gloire immortelle est trop mal assortie,
Et défigureroit tes grandes actions a 5
Par l'indigne attentat de ses expressions.
Que ne peuvent, grand Roi , tes hautes destinées
Me rendre la vigueur de mes jeunes années !
Qu'ainsi qu'au temps du Cid je ferois de jaloux!
Mais j'ai beau rappeler un souvenir si doux, 3o
Ma veine, qui charmoit alors tant de balustres2,
N'est plus qu'un vieux torrent qu'ont tari douze lustres8;
Et ce seroit en vain qu'aux miracles du temps
Je voudrois opposer l'acquis de quarante ans.
Au bout d'une carrière et si longue et si rude, 3 5
On a trop peu d'haleine et trop de lassitude :
A force de vieillir un auteur perd son rang ;
On croit ses vers glacés par la froideur du sang;
Leur dureté rebute , et leur poids incommode,
Et la seule tendresse est toujours à la mode. 40
Ce dégoût toutefois ni ma propre langueur
Ne me font pas encor tout à fait perdre cœur ;
Et dès que je vois jour sur la scène à te peindre,
Il rallume aussitôt ce feu prêt à s'éteindre.
1. Var. Dans l'édition de 1667 in-40 ce vers vient après le suivant.
2. Voyez tome IX, p. 64, note ?.
3. Corneille, né, comme on sait, le 6 juin 1606, venait effective-
ment d'entrer dans sa soixante et unième année.
188 POÉSIES DIVERSES.
Mais comme au vif éclat de tes faits inouïs 4 5
Soudain mes foibles yeux demeurent éblouis,
J'y porte, au lieu de toi, ces héros dont la gloire
Semble épuiser la fable et confondre l'histoire;
Et m'en faisant un voile entre la tienne et moi ,
J'assure mes regards pour aller jusqu'à toi. 5o
Ainsi de ta splendeur mon idée enrichie
En applique à leur front la clarté réfléchie ,
Et forme tous leurs traits sur les moindres1 des tiens,
Quand je veux faire honneur aux siècles anciens.
Sur mon théâtre ainsi tes vertus ébauchées 5 5
Sèment ton grand portrait par pièces détachées ;
Les plus sages des rois , comme les plus vaillants,
Y reçoivent de toi leurs plus dignes brillants.
J'emprunte , pour en faire une pompeuse image ,
Un peu de ta conduite, un peu de ton courage, 60
Et j'étudie en toi ce grand art de régner,
Qu'à la postérité2 je leur fais enseigner3.
C'est tout ce que des ans me peut souffrir la glace;
Mais j'ai d'autres moi-même à servir en ma place:
Deux fils dans ton armée*, et dont l'unique emploi 6 5
1. Le moindre, dans les OEwres diverses publiées par Granet et dans
les éditions suivantes.
2. Leur postérité, dans les OEuvres diverses publiées par Granet et
dans les éditions suivantes.
3. Corneille avait déjà exprimé les mêmes idées dans son Remer-
ciment à Mazarin. Voyez ci-dessus, p. 96-98, pièce XXX, vers 33-64.
4. Pierre Corneille , qui fut capitaine de chevau-légers et gen-
tilhomme de la maison du Roi, né le 7 septembre 1643 , était entré
au service à l'âge de vingt et un ans, dès 1664, ainsi que Corneille
lui-même nous l'apprend en octobre 1676 par ces vers de l'épître
An Roi sur Cinna (voyez ci-après) :
Je sers depuis douze ans, mais c'est par d'autres bras
Que je verse pour toi du sang dans nos combats.
Le second fils de Corneille, dont nous ne connaissons ni le prénom
ni la date de naissance, était, en 1661 , entré comme page chez la
POESIES DIVERSES. 189
Est d y porter du sang à répandre pour toi *.
Tous deux ils tâcheront, dans l'ardeur de te plaire,
D'aller plus loin pour toi que le nom de leur père ;
Tous deux, impatients de le mieux signaler,
Ils brûleront d agir, quand je tremble à parler; 70
Et ce feu qui sans cesse eux et moi nous consume
Suppléera par l'épée au défaut de ma plume.
Pardonne , grand vainqueur, à cet emportement :
Le sang prend malgré nous quelquefois son moment ;
D'un père pour ses fils l'amour est légitime ; 7 5
Et j'ai droit pour les miens de garder quelque estime,
Après qu'en leur faveur toi-même as bien voulu
M'assurer que l'abord ne t'en a point déplu.
Le plus jeune a trop tôt reçu d'heureuses marques
D'avoir suivi les pas du plus grand des monarques; 80
Mais s'il a peu servi , si le feu des mousquets
Arrêta dès Douai ses plus ardents souhaits ,
Il fait gloire du lieu que perça leur tempête :
Ceux qu'elle atteint au pied ne cachent pas leur tête2;
duchesse de Nemours (voyez ci-après , lettre XXV) ; il était lieute-
nant de cavalerie lorsqu'il mourut. Voyez ci-dessous, note 2.
1. Var. Des fils qui de leur sang cherchent à t'acheter
Ces succès qu'à l'envi d'autres vont exalter.
(Edition originale.)
1. Le second fils de Corneille, dont nous venons de parler (p. 188,
note 4), fut blessé au pied pendant le siège de Douai, qui se ter-
mina, au bout de quelques jours, par la prise de la ville, le 6 juil-
let. Robinet, dans une Lettre en vers à Madame , du 3o juillet 1667 ,
nous raconte à ce sujet l'anecdote suivante, aujourd'hui fort con-
nue, que M. Floquet a le premier signalée à l'attention du public :
Vous connoissez assez l'aîné des deux Corneilles ,
Qui pour vos chers plaisirs produit tant de merveilles.
Hé bien ! cet homme-là , malgré son Apollon,
Fut naguère cité devant cette police ,
Ainsi qu'un petit violon ,
Et réduit , en un mot , à se trouver en lice
Pour" quelques pailles seulement
190 POÉSIES DIVERSES.
Sur eux à ta fortune ils laissent tout pouvoir, 8 5
Qu'un trop vigilant commissaire
Rencontra fortuitement
Tout devant sa porte cochère.
Oh ! jugez un peu quel affront!
Corneille , en son cothurne , étoit au double mont
Quand il fut cité de la sorte ;
Et de peur qu'une amende honnîl tous ses lauriers ,
Prenant sa muse pour escorte ,
Il vint , comme le vent , au lieu des plaidoyers ;
Mais il plaida si bien sa cause,
Soi t en beaux vers ou franche prose ,
Qu'en termes gracieux la police lui dit :
« La paille tourne à votre gloire.
Allez, grand Corneille , il suffit. »
Mais de la paille il faut vous raconter l'histoire ,
Afin que vous sachiez comment
Elle étoit à sa gloire en cet événement.
Sachez donc qu'un des fils de ce grand personnage
Se mêle , comme lui , de cueillir des lauriers ,
Mais de ceux qu'aiment les guerriers ,
Et qu'on va moissonner au milieu du carnage.
Or ce jeune cadet, à Douai faisant voir
Qu'il sait des mieux remplir le belliqueux devoir ,
D'un mousquet espagnol au talon reçut niche ,
Et niche qui le fit aller à cloche-pié ,
Si bien qu'en ce moment , étant estropié ,
Il fallut, quoiqu'il dît sur ce cas cent fois briche ,
Toute sa bravoure cesser,
Et venir à Paris pour se faire panser.
Or ce fut un brancard qui dans cette aventure ,
Lui servit de voiture ,
Étant de paille bien garni ;
Et comme il entra chez son père ,
Il s'en fit un peu de litière.
Voilà tout le récit fini.
Nous avons vainement cherché aux Archives de l'Empire et dans
celles de la Préfecture de police quelques traces des poursuites diri-
gées contre Corneille. Nous remarquerons seulement qu'elles avaient
lieu en vertu de l'article 19 d'un arrêt du parlement de Paris du
11 avril i663, faisant « inhibition et défense à toutes personnes de
quelque état et condition qu'elles soient, de jeter, faire ou souffrir
jeter dans les rues aucunes immondices, cendres de lessive, paille,
gravois, terreaux, tuileaux, ardoises, raclures de cheminées, fumiers
ni quelqu'autres ordures que ce soit : sur la peine de huit livres d'à-
POÉSIES DIVERSES. 191
Et1 s'offrent tous entiers aux hasards du devoir.
De nouveau je m'emporte. Encore un coup, pardonne
Ce doux égarement que le sang me redcnne ;
Sa flatteuse surprise aisément nous séduit:
La pente est naturelle, avec joie on la suit : 90
Elle fait une aimable et prompte violence,
Dont pour me garantir je n'ai que le silence.
Grand Roi, qui vois assez combien j'en suis confus,
Souffre que je t'admire, et ne te parle plus.
mende , payables sans déport , savoir : moitié aux entrepreneurs du
nettoiement desdites rues, et l'autre moitié aux dénonciateurs. » {Col-
lection officielle des ordonnances de police de 1800 à 184 4 imprimée par
ordre de M. G. Delessert, préfet de police, Paris, P. Dupont, i845,
tome IV, Appendice , p. i3.) Le second fils de Corneille mourut
en 1674, au siège de Grave, dans une sortie qu'il tenta à la tête de
sa compagnie. Voyez ci-après la dernière des Lettres de notre auteur.
1, Ils, dans les Poésies diverses de 1738 et dans les éditions sui-
vantes.
192 POESIES DIVERSES.
LXIX
POËME SUR LES VICTOIRES DU ROI, TRADUIT DE LATUN
EN FRANÇOIS PAR P. CORNEILLE.
C'est sous ce titre que ce poëme a paru pour la première fois. On
lit sur le frontispice de l'exemplaire de la Bibliothèque impériale : A
Paris, chez Thomas Iolly, au Palais, en la Salle des Merciers, à la Palme
et aux Armes d" Hollande . M.DC.LXVII. Avec Privilège du Roy ; mais
on peut le rencontrer avec d'autres adresses, car c'est à Guillaume de
Luyne que le privilège a été « donné à Paris, le vingt-huitième No-
vembre 1667, » et il en a fait part « aux sieurs Iolly et Billaine. »
L' «. Achevé d'imprimer pour la première fois » est du « quinzième
Décembre 1667. » Le volume, de petitformat in-8°, contient 38 pages
et un feuillet de privilège.
A la page 3 se trouve l'avis de Corneille au Lecteur.
A la page 4 commence, sous le titre de Régi Epinicion, le poëme latin
du P. de la Rue, dont celui de Corneille est une traduction.
A la page 5 commence,en regard, la traduction de Corneille sous
ce titre : les Victoires du Roy en Vannée 1667.
A la page 3o : Traductions et imitations de V Epigramme Latine de
Monsieur de Montmor....
A la page 3i : Au Roy9 sur son retour de Flandre.
A la page 35 : Remerciment présenté au Roy en Vannée i663.
Granet (OEuvres diverses, p. 11) mentionne une réimpression
de 1669 (in-12) ; et la Bibliothèque des écrivains de la compagnie de Jésus
(ire série, p. 65o,), une édition portant le titre latin : de Victoriis Ré-
gis Christianissimi Ludovici XIV. Poema a Clarissimo viro Petro Corneille
versibus gallicis redditum. Purisiis, apud Sebastianum Mabre Cramoisy,
1667, in-8°. On retrouve plus tard notre poëme LXIX aux pages 19-29
des ldyllia du P. de la Rue (Rouen , 1669) et aux pages 99-108 de
ses Carmina (Paris, 1688). Dans le premier de ces recueils les vers de
Corneille sont intitulés : les Victoires du Roy en Vannée M.DC.LXVII.
De la traduction de M. Corneille; dans le second : les Victoires du Roy
POÉSIES DIVERSES. i93
en Flandre. De la traduction de P. Corneille. Ils suivent, dans l'un et
dans l'autre, ie texte latin du P. de la Rue, ayant pour titre : Régi
post Belgicam expeditionem (dans l'édition de 1688 : Ludovico magno
post expeditionem Belgicam) anni M.DC.LXVII. Epinicium. Le volume
des Idyllia commence par une sorte d'épître dédicatoire en vers latins,
intitulée : Ad clarissimum virum P. Cornelium , tragicorum principcm,
et datée : Rothomagi kal. jun. M.DC.LXIX. On trouve à la page 5i :
Ad clarissimum virum Petrum Cornelium in obi tu Caroli ûlii. Nous don-
nons ces deux pièces de vers, ci-après, dans Y Appendice. Elles sont
reproduites dans les Carmina de 1688, aux pages 146 et 161.
Au sujet de ces poèmes de Corneille et du P. de la Rue sur les
victoires de 1667, nous lisons dans un Éloge de ce dernier, extrait
d'une lettre écrite de Paris le 6 juin 1725, et inséré dans le Mercure
de juin de cette même année (le P. de la Rue, né en 1643, mourut
en 1725) : « Il fit en 1607 un poème sur les conquêtes du Roi, que le
fameux P. Corneille se fît un honneur de traduire en vers françois.
Il dit même à Sa Majesté, en lui présentant sa traduction, qu'elle
n'égaloit point l'original du jeune jésuite, qu'il lui nomma. Ce fut
là le commencement de cette estime dont le feu Roi honora depuis le
P. de la Rue. »
AU LECTEUR.
Quelque favorable accueil que Sa Majesté ait daigné
faire à cet ouvrage, et quelques applaudissements que la
cour lui ait prodigués, je n'en dois pas faire grande va-
nité, puisque je n'en suis que le traducteur. Mais dans
une si belle occasion de faire éclater la gloire du Roi, je
n'ai point considéré la mienne : mon zèle est plus fort
que mon ambition; et pourvu que je puisse satisfaire en
quelque sorte aux devoirs d'un sujet fidèle et passionné, il
m'importe peu du reste. Le public m'aura du moins
l'obligation d'avoir déterré ce trésor, qui, sans moi, se-
roit demeuré enseveli sous la poussière d'un collège; et
j'ai été bien aise de pouvoir donner par là quelque mar-
que de reconnoissànce aux soins que les pères jésuites ont
Corneille, x i3
,94 POESIES DIVERSES.
pris d'instruire ma jeunesse et celle de mes enfants, et à
1 amitié particulière dont m'honore l'auteur de ce pané-
gyrique. Je ne l'ai pas traduit si fidèlement, que je ne me
sois enhardi plus d'une fois à étendre ou resserrer ses
pensées : comme les grâces des deux langues sont diffé-
rentes, j'ai cru à propos de prendre cette liberté, afin
que ce qui étoit excellent en latin ne devînt pas insup-
portable1 en françois. Vous en jugerez, et ne serez pas
fâché que j'y aye fait joindre quelques autres pièces, que
vous avez déjà vues, sur le même sujet2. L'amour naturel
que nous avons tous pour les productions de notre esprit
m'a fait espérer qu'elles se pourroient ainsi conserver
l'une par l'autre, ou périr un peu plus tard.
LES VICTOIRES DU ROI EN l' ANNÉE 1667.
Mânes des grands Bourbons, brillants foudres de guerre.
Qui fûtes et l'exemple et l'effroi de la terre ,
Et qu'un climat fécond en glorieux exploits
Pour le soutien des lis vit sortir de ses rois,
Ne sovez point jaloux qu'un roi de votre race ï
Égale tout d'un coup votre plus noble audace.
REGI EPINICION.
Illustres animse, Divum genus, inclyta bello
Nomina, Borbonidae, grandi quos Gallia partu,
\ ictores populoruni, et regum exenipla, creavit:
Si nunc magnanimi decus iiumortale nepotis
Surgit in immensum, et vestris se laudibus aequat,
Non tamen invidiae vobis locus, ille parentum
i . Si insupportable , mais a tort , dans l'édition de Lefèvre et dan*
quelques autres.
2. Voyez ci-dessus vp. 17a et 186) les pièces LXY et LXVÏIT,
et la notice qui précède le présent avis au Lecteur.
POÉSIES DIVERSES. 19$
Vos grands noms dans le sien revivent aujourd'hui :
Toutes les fois qu'il vainc, vous triomphez en lui;
Et ces hautes vertus que de vous il hérite
Vous donnent votre part aux encens qu'il mérite. 1 o
C'est par cette valeur qu'il tient de votre sang
Que le lion belgique * a vu percer son flanc ;
Il en frémit de rage, et devenu timide,
Il met bas cet orgueil contre vous intrépide,
Comme si sa fierté, qui vous sut résister, 1 5
Attendoit ce héros pour se laisser dompter!
Aussi cette fierté , par le nombre alarmée ,
Voit en un chef si grand encor plus d'une armée ,
Dont par le seul aspect ce vieil orgueil brisé
Court au-devant du joug si longtemps refusé. 2 o
De là ces feux de joie et ces chants de victoire
Qui font briller partout et retentir sa gloire ;
Et bien que la déesse aux cent voix et cent yeux
L'ait publiée en terre et fait redire aux cieux ,
Qu'il ne soit pas besoin d'aucune autre trompette , 1 5
Quando refert factis animisque et robore dotes ;
Vestraque, dum vincit, pars est quoque magna triumphi.
Belgicus hos animos et inexsuperabile robur
Nequicquam infrendens sensit Léo ; quique priores
Luserat ante minas, vestrisque interritus armis
Obluctari ultro gaudebat et obvius ire,
Ille ducum seriem egregiam collectaque cernens
Agmina, et immensam Lodoici in pectore gentem,
Horret ad aspectum, nec jam ausus sistere contra,
Indociles iras et colla ferocia subdit.
Laetior hinc regni faciès, hinc festa per urbes
Pompa; triumphales hinc templa per omnia cantus;
Et quariquam cum fama voiat, cura maximus orbis
Solvitur in plausus, et plausibus accinit sether,
i. Le lion est, comme on sait, l'emblème héraldique de la Bel-
gique. Aujourd'hui lé mot belgique n'est plus adjectif. Voyez, le Lexique.
196 POÉSIES DIVERSES.
Le cœur paroît ingrat quand la bouche est muette,
Et d'un nom que partout la vertu fait voier
C'est crime de se taire où tout semble parler.
Mais n'attends pas, grand Roi, que mes ardeurs sincères
Appellent au secours l'Apollon de nos pères : 3 o
A mes foibles efforts daigne servir d'appui ,
Et tu me tiendras lieu des Muses et de lui.
Toi seul y peux suffire , et dans toutes les âmes
Allumer de toi seul les plus célestes flammes,
Tel qu'épand le soleil sa lumière sur nous , 3 5
Unique dans le monde, et qui suffit a tous * .
Par l'ordre de son roi, les armes de la France
De la triste Hongrie avoient pris la défense ,
Sauvé du Turc vainqueur un peuple gémissant,
Fait trembler son Asie et rougir son croissant2; 40
Par son ordre on voyoit d'invincibles courages ,
Nil praecone opus est, sceius est tamen alta silere
Victoris décora, indictamque relinquere laudeni.
At neque Castalias mihi cura vocare sorores,
Nec veteri fuerit praecordia pandere Phœbo.
Tu mihi, tu regum Rex optime, maxime regum,
Numen eris, Lodoice, mihique in carmina sacrum
Ardorem, et dignos cœptis ingentilms ignés
Adjicies, magnus lucis pater, unicus uni
Qui satis es mundo, nec sis quoque pluribus impar.
Jam procul hungaricos tutatus milite fines,
Lunigeras acies Lodoicus et impia signa
Fuderat, extremasque Asiae tremefecerat oras.
1. Traduction des devises de Louis XIV : unicus uni et nec
pluribus impar , insérées textuellement dans les vers du P. de la
Rue.
2. Le ier août 1664, les Allemands, commandés par Montecu-
culli , remportèrent sur les Turcs la victoire décisive de Saint-Go-
thard , à laquelle six mille Français , sous les ordres de la Feuillade ,
prirent une très-grande part.
POÉSIES DIVERSES. 197
D'Alger et de Tunis arrêter les pillages1,
Affranchir nos vaisseaux de ces tyrans des mers,
Et leur faire à leur tour appréhender nos fers.
L'Anglois même avoit vu jusque dans l'Amérique 4 5
Ce que c'est qu'avec nous rompre la foi publique ,
Et sur terre et sur mer reçu le digne prix
De l'infidélité qui nous avoit surpris2.
Enfin du grand Louis aux trois parts de la terre
Le nom se faisoit craindre à l'égal du tonnerre. 5o
L'Espagnol s'en émeut, et gêné de remords,
Après de tels succès il craint pour tous ses bords :
L'injure d'une paix à la fraude enchaînée3,
Les dures pactions d'un royal hyménée4,
Jam quoque et infestum Libycis praedonibus aequor
Solverat, et priscis America incognita saeclis,
Fœderis immemores Anglos, opibusque féroces,
Et sociis Gallum méditantes pellere terris,
Viderai ejectos laceris fluitare per undas
Puppibus, aut csesis insternere littora turmis.
His super attonitum dolor anxius urit Iberum,
Ingentesque premunt curse : quippe ultima longe
Terrarum, et Phœbo sub utroque jacentia cernens
Régna metu trepidare, pari quoque corda moveri
Sentit et ipse metu, quoties probrosa recursat
Fraus innexa toro, rigidseque injuria pacis,
1. Le duc de Beaufort battit deux fois la^flotte des corsaires bar-
baresques, et s'empara, le 22 juillet 1664, de Gigeri dans la régence
d'Alger.
2. Le 26 janvier 1666, Louis XIV déclare, à titre d'allié des Hol-
landais, la guerre à l'Angleterre. Le 20 avril les Français battent les
Anglais dans l'île de Saint-Christophe (une des Antilles), et le 9 mai
M. de la Barre défait la flotte anglaise qui tenait l'île bloquée. Cette
guerre se termine par la paix signée à Bréda le 3i juillet 1667.
3. La paix des Pyrénées, conclue le 7 novembre 1659.
4- Allusion à la renonciation de Marie-Thérèse à tous biens et
successions de Leurs Majestés catholiques, renonciation qui n'avait
été stipulée que sous condition d'une dot de cinq cent mille écus
198 POESIES DIVERSES.
Tremblent sous les raisons et la facilité 5 5
Qu'aura de s'en venger un roi si redouté.
Louis s'en aperçoit, et tandis qu'il s'apprête
A joindre à tant de droits celui de la conquête,
Pour éblouir l'Espagne et son raisonnement,
Il tourne ses apprêts en divertissement1 : 60
Il s'en fait un plaisir, où par un long prélude
L'image de la guerre en affermit l'étude ,
Et ses passe-temps même instruisant ses soldats
Préparent un triomphe où l'on ne pense pas.
Il se met à leur tête aux plus ardentes plaines , 6 5
Fait en se promenant leçon aux capitaines ,
Se délasse à courir de quartier en quartier,
Junctaque crudeli regum connubia pacto.
Hune adeo suspensum animi, rebusque timentem
Agnovit Lodoicus, et ardua mente volutans
Consilia, invictis ut conjugis ultor in armis
Hannonios tractus brabantinosque reposcat.
Ne tamen, ut quondam, solito sibi callidus astu
Consuleret, Martemque dolo prseverteret hostis,
Objicit insuetas Hispanis artibus artes,
Occultumque struit belli sub imagine bellum.
Ergo viros ad signa vocat : concurritur, oti 2
Emicat impatiens et corripit arma juventus.
Ipse palatinas acies praetoriaque inter
Vexilla, et lituum sonitus, fremitusque tubarum,
dont les trois termes fixés par le contrat étaient plus qu'échus, ce qui
faisait dire : « Point de payement, point de renonciation. »
1. Il s'agit ici des revues et exercices militaires de l'an 1666 et du
commencement de l'an 1667, auxquels Corneille a aussi fait allusion
dans sa tragédie à* Attila (acte II, scène v), qui est, comme le poëme
des Victoires, de l'année 1667. Voyez tome VII, p. i3i et i3ï.
2. L'édition de 1667, que nous suivons, et celle de 1669 donnent
ici omnis; mais nous n'hésitons pas à y substituer la leçon de 1688 :
oti pour otii ; l'adjectif impatiens du vers suivant a besoin d'être dé-
terminé par un régime.
POÉSIES DIVERSES. i99
Endurcit et soi-même et les siens au métier,
Les forme à ce qu'il faut que chacun cherche ou craigne,
Et par de feints combats apprend l'art qu'il enseigne. 7 o
Il leur montre à doubler leurs files et leurs rangs,
A changer tôt de face aux ordres différents ,
Tourner à droite, à gauche, attaquer et défendre,
Enfoncer, soutenir, caracoler, surprendre;
Tantôt marcher en corps, et tantôt défiler, 7 5
Pousser à toute bride, attendre, reculer,
Tirer à coups perdus , et par toute l'armée
Faire l'oreille au bruit et l'œil à la fumée.
Ce héros va plus outre ; il leur montre à camper :
A la tente, à la hutte on les voit s'occuper. 80
Sa présence aux travaux mêle de si doux charmes ,
Qu'ils apprennent sans peine à dormir sous les armes ;
Et comme s'ils étoient en pays dangereux,
L'ombre de Saint-Germain est un bivouac pour eux * .
Sole'sub ardenti, planisque in vallibus, héros
Informat résides animos, discitque docendo
Durum opus, et ficto mentem certamine pascit.
Nunc jubet effusis aciem decurrere campis,
Nunc stare, aut junctis gïomeratam incedere turmis ;
Nunc spatiis mixtos équités concordibus ire,
Aut flexos sinuare orbes, gradibusve repressis
Exsultare solo, aut subitos obvertere vultus;
Mox quoque direptis per prona, per alta volare
Ensibus, aut certas tubuiis explodere mortes,
Prsecipitesque rapi, cursuque lacessere nimbos.
Inde locum fossis munire, et eingere vallo
Castroruin juvat in morem . juvat addere castris
Excubias, vigilesque solo traducere noctes,
Aut duro tenues in cespite carpere somnos.
1. Au sujet d'un de ces campements, nous lisons dans la Gazette
du 23 avril 1667 : « Le Roi, qui par un continuel exercice entre-
tient ses troupes en un état qui les puisse rendre capables de servir
aoo POÉSIES DIVERSES.
Achève, grand Monarque, achève, et pars sans crainte :
Si tu t'es fait un jeu de cette guerre feinte,
Accoutumé par elle à la poussière , au feu ,
La véritable ailleurs ne te sera qu'un jeu.
Tes guerriers t'y suivront sans y voir rien de rude ,
Combattront par plaisir, vaincront par habitude ; 9 u
Et la Victoire , instruite à prendre ici ta loi ,
Dans les champs ennemis n'obéira qu'à toi.
L'Espagne cependant, qui voit des Pyrénées
Donner ce grand spectacle aux dames étonnées ,
Loin de craindre pour soi, regarde avec mépris, 95
Dans un camp si pompeux , des guerriers si bien mis,
Tant d'habits, comme au bal, chargés de broderie,
Et parmi des calons tant de galanterie.
« Quoi? l'on se joue en France, et ce roi si puissant
Croit m'effrayer, dit-elle, en se divertissant? » 100
Macte istis, Lodoice, animis, perge omine tanto
Et tibi, et optatas Gallis portendere lauros.
Nunc veteres pompas ludorum in praelia mutas,
Et rigidum inducis laeta in spectacula Martem :
Mox quoque cum fines Morinos, et Nervia vero
Mœnia Marte petes, fortemque urgebis Iberum,
Sic bellum tibi ludus erit, facilesque sequetur,
Quo tuleris te cumque, cornes victoria nutus.
Audiit ex alto Pyrenes vertice festos
Ludentum strepitus, pompamque Hispania vidit ;
Defixisque oculis mirata, tôt horrida pilis
Agmina, tôt cris tas galeis fluitare cornantes,
Tôt rutilis phaleras vestesque nitere lapillis,
Tôt laetos in equis juvenes : « Et luditur, inquit;
Haec sibi depositis Gallus facit otia curis. »
Sa Majesté dans les occasions, ayant donné les ordres nécessaires
pour les faire camper dans la plaine d'Ouilles, entre Maisons et ce
château (de Saint -Germain-en-Laye), s'y rendit hier, accompagné de
quantité de seigneurs. »
POESIES DIVERSES. 201
11 est vrai qu'il se joue , Espagne, et tu devines ;
Mais tu mettras au jeu plus que tu l'imagines1,
Et de ton dernier vol si tu ne te repens2,
Tu ne verras finir ce jeu qu'à tes dépens.
Son père et son aïeul t'ont fait voir que sa France 8
Sait trop, quand il lui plaît, dompter ton arrogance :
Tant d'escadrons rompus, tant de murs emportés,
T'ont réduite souvent au secours des traités.
Ces disgrâces alors te donnoient peu d'alarmes,
Tes conseils réparoient la honte de tes armes ; no
Mais le ciel réservoit à notre auguste roi
D'avoir plus de conduite et plus de cœur que toi.
Rien plus ne le retarde , et déjà ses trompettes
Aux confins de l'Artois lui servent d'interprètes4:
Luditur, at magnos parient hsec otia motus ;
Nec vanum, ludi pars magna, fatebere ludum.
Saepe manu virtus quid Gallica posset et armis,
Te Justus, Justique parens ter maximus olim
Henricus doeuere : tamen licet hactenus aequo
Te non Marte parem clades non una probasset,
Jamdudum instantem potuisti avertere casum,
Consilio melior. Lodoico scilicet uni
Laus fuit hsec servanda, et magnis débita fatis,
Consilioque manuque tuos contundere fastus.
Nec mora, jam litui, jam rauco tympana pulsu
Insonuere : volât spe fervidus, arvaque Gallus
1. VAR.Mais tu mettras au jeu plus que tu n'imagines.
(Caroli de la Rue ldyllia , 1669. — OEuvres diverses publiées par
Granet.)
2. Var. Et de ce dernier vol si tu ne te repens.
[Rusei Carmina, 1688.)
3. Var. Son père et son aïeul t'ont fait voir que la France.
[Carmina, 1688.)
4. Le Roi partit de Saint-Germain avec la Reine le 16 mai 1667
et arriva le 20 à Amiens. Voyez la Relation de la guerre de Flandres en
l'année 1667, à Paris, chez. Claude Barbin, M.DC.LXVIII. Le pri-
202 POÉSIES DIVERSES.
C'est de là, c'est par là qu'il s'explique assez haut. 1 1 5
Il entre dans la Flandre et rase le Hainaut.
Le François court et vole, une mâle assurance
Le fait à chaque pas triompher par avance;
Le désordre est partout, et l'approche du Roi
Remplit l'air de clameurs et la terre d'effroi. 120
Jusqu'au fond du climat f ses lions en rugissent ,
Leur vue en étincelle, et leurs crins s'en hérissent;
Les antres et les bois , par de longs hurlements,
Servent d'affreux échos à leurs rugissements;
Et les fleuves mal sûrs dans leurs grottes profondes 1 2 f>
Hâtent vers l'Océan la fuite de leurs ondes;
Incertains de la marche, ils tremblent tous pour eux.
Songe encor, songe, Espagne, à mépriser nos jeux !
Ainsi, quand le courroux du maître de la terre
Pour en punir l'orgueil prépare son tonnerre , 1 3 o
Qu'un orage imprévu qui roule dans les airs
Se fait connoître au bruit et voir par les éclairs,
Flandrica, et Hannonias ruit improvisus in arces.
Jamque adeo ingenti fremere undique visa tumultu
Belgica, jam patrii circum rugire leones,
Arrectisque horrere jubis : simul alta fragore
Misceri nemora, et tristes ululare cavernse,
Flandrigenumque procul Scaldis regnator aquarum
In mare praecipites urgere fugacior undas.
I modo, regales, Hispania, despice ludos.
Sic, trifîdos ignés et ineluctabile telum
Si quando iratus mundi arbiter, humida rumpens
Nubila, subjectas hominum molitur in arces,
vilége nous apprend que cet ouvrage est « de la composition du sieur
de Vandeuvres. »
1. Climat, dans le sens de région, contrée. — Ce qui est dit ici
des lions se rapporte encore aux armes de la Flandre, au « lionbel-
gique, » comme Corneille s'est exprimé plus haut (vers la). Dans
les vers latins du P. de la Rue, il y a patrii leones.
POÉSIES DIVERSES. *oT
Ces foudres, dont la route est pour nous inconnue,
Paroissent quelque temps se jouer dans la nue ,
Et ce feu qui s'échappe et brille à tout moment1, i 3 5
Semble prêter aux cieux un nouvel ornement ;
Mais enfin le coup tombe; et ce moment horrible ,
A force de tarder devenu plus terrible ,
Etale aux yeux surpris des hommes écrasés,
Une plaine fumante , et des rochers brisés. 140
Telle on voit le Flamand présumer ta venue,
Grand Roi ! Pour fuir ta foudre il cherche à fuir ta vue,
Et de tes justes lois ignorant la douceur,
Il abandonne aux tiens des murs sans défenseur2.
La Bassée, Armentière, aussitôt sont désertes8; 145
Ipse prius tremulis densa in caligine ludit
Fulguribus, volucrique polum circumvolat auro;
Mox rutilum per iter, rapidisque micantia flammis
Erumpit spatia, et magno ruit impete fulmen;
Vim tamen haud minuit splendor, nec inania jactat
Murmura : gens longe tremit omnis, et ardua fumant
Silvarum, ac subito dissultant saxa fragore.
Talis ades, talem te prœcipit omne timetque
Vulgus, et insueta fugiunt formidine cives.
Passim solse arces, passim indefensa patescunt
Oppida : tuque adeo, Bassœa, ingentibus olim,
Mœnia du m starent, repetita laboribus ; et tu
Dives agro, dives pecorum, Armentaria, cultu;
1. Var. Et ce feu qui s'échappe et brille à tous moments,
Semble prêter au ciel de nouveaux ornements.
(Idyllia, i6ric). — OEuvres diverses.)
2. Var. Il abandonne aux tiens ses murs sans défenseur.
(Carmina, 1688.)
3. On lit dans la Gazette du 4 ïinn l^7> sous la rubrique
d'Arras, le 3o mai 16*67 : a Le 12 de ce mois, les sieurs d'Artagnan
et des Fourneaux arrivèrent ici Le lendemain ils décampèrent
avant le jour, et marchèrent du côte d'Armentières pour favoriser les
troupes commandées de ce côté-là, avec ordre de se saisir de cette
204 POÉSIES DIVERSES.
Charleroi4, qui t'attend , mais à portes ouvertes ,
A ibrts démantelés, à travaux démolis2,
Sur le nom de son roi3 laisse arborer tes lis.
C'est là le prompt effet de la frayeur commune;
C'est ce que font sans toi ton nom et ta fortune. i 5o
Heureux tous nos Flamands, si l'exemple suivi
Eût partout à tes droits fait justice à l'envi !
Furne n'auroit point vu ses portes enfoncées;
Bergue n'auroit point vu ses murailles forcées4 ;
Tu quoque tu Garli de nomine dicta, novoque
Arx fabricata opère, et valido molimine structa :
Te, quanquam aggeribus vallatam et flumine circum
Defensam gemino tela omnia et omnia contra
Fulmina Gallorum, uil fulminis indiga telive
Una nec aspecti Régis fortuna subegit.
Atque utinam hune morem et vestra hsec exempla secutse
Cessissent reliquat, nec justa in sceptra rebelles
Indignum hoc propria nomen sibi clade parassent.
At procul ejectos vallis Furnensibus hostes,
Et domita video fractos exesdere Berga.
place : ce qu'ils exécutèrent le 24, sans aucune résistance de la
garnison, qui étoit de soixante hommes, lesquels se sauvèrent, à la
réserve de leur commandant, qui fut fait prisonnier : les Espagnols
ayant commencé de la démolir, ainsi que la Bassée, Condé, Saint-
Guilhain, et plusieurs autres places, qu'ils ont abandonnées pour
s'appliquer mieux à la défense des plus importantes. »
1. Charleroi se rendit à Turenne le 2 juin.
2. « Avec des mines il [Castel Rodrigo, qui commandait à Ckarleroi)
fit sauter tout le corps de la place, et on la trouva mieux rasée que
peut-être jamais forteresse l'ait été, à l'exception toutefois des dehors
qui demeurèrent entiers, et qui parurent encore si beaux aux yeux
du Roi qu'il vouloit la faire rétablir. » {Relation de la guerre de Flan-
dres, p. 33.)
3. Charleroi devait son nom à Charles II, roi d'Espagne, frère
de Marie- Thérèse.
4. Bergues-Saint-Vinox, en flamand Berghen, fut pris le 6 juin
1667, et Furnes seulement le 12. La Rue et Corneille suivent assez
bien l'ordre des temps, non pourtant, on le voit, au point d'encourir
POÉSIES DIVERSES. 2o5
Et Tournai , de tout temps tout françois dans le cœur,
T'eût reçu comme maître, et non comme vainqueur1;
Les Muses 2 à Douai n'aur oient point pris les armes
Pour coûter à son peuple et du sang et des larmes;
Courtrai, sans en verser, eût changé de destin;
Ce refuge orgueilleux de l'Espagnol mutin , 1 60
Alost, n'eût point fourni de matière à ta gloire;
Audenarde jamais n'eût pleuré ta victoire.
Que dirai-je de Lisle3, où tant et tant de tours ,
De forts , de bastions n'ont tenu que dix jours4 ?
Ces murs si rechantés, dont la noble ruine i65
Tornacique arces, Musisque dicata Duaci
Mœnia, et antiquis Curtracum nobile bellis;
Aldenaram, cultœque caput regionis Alostum
Borbonium eversis victorem admittere portis.
Insuper et victo captif um flumine Lisam,
Mœrentemque Sabin nequicquam, injectaque Scaldi
Vincula, perruptosque aditus, et in intima facto
le reproche de Boileau, qui a précisément en vue les poètes qui chan-
tèrent les victoires de 1667 et 1668, lorsqu'il dit dans Y Art poétique
(chant II, vers 73 et suivants) :
Loin ces rimeurs craintifs dont l'esprit phlegmatique
Garde dans ses fureurs un ordre didactique ;
Qui chantant d'un héros les progrès éclatants,
Maigres historiens, suivront l'ordre des temps.
Ils n'osent un moment perdre un sujet de vue:
Pour prendre Dole, il faut que Lille soit rendue;
Et que leur vers exact ainsi que Mézerai,
Ait déjà fait tomber les remparts de Courtrai.
1. Tournai fut pris le 26 juin 1667. Douai se rendit le 6 juillet ;
Courtrai, le 18; Audenarde, ou plutôt Otidenarde, le 3i ; Alost, le
lendemain Ier août.
2. Il y avait à Douai une célèbre université, fondée en 1572 par
Philippe II, roi d'Espagne. Cet endroit est plus clair dans le P. de
la Rue, qui dit : Musisque dicata Duaci Mœnia,
3. Telle est l'orthographe des Idyllïa et des Carmin a ; l'édition de
1667 porte : Vis le.
4. Lille se rendit au Roi en personne le 27 août 18^7 .
206 POÉSIES DIVERSES.
De tant de nations flatte encor l'origine ,
Ces remparts que la Grèce et tant de dieux ligués
En deux lustres à peine ont pu voir subjugués ,
Eurent moins de défense , cl l'art en leur structure
Avoit moins secouru l'effort de la nature ; 170
Et ton bras en dix jours a plus fait à nos yeux
Que la fable en dix ans n'a fait faire à ses dieux.
Ainsi , par des succès que nous n'osions attendre ,
Ton Etat voit sa borne au milieu de la Flandre;
Et la Flandre, qui craint de plus grands changements,
Voit ses fleuves captifs1 diviser ses Flamands.
C'est là ton pur ouvrage , et ce qu'en vain ta France
Elle-même a tenté sous une autre puissance2;
Ce que sembloit le ciel défendre à nos souhaits,
Ce qu'on n'a jamais vu , qu'on ne verra jamais, 180
Ce que tout l'avenir à peine voudra croire....
Limite divisos per mille pericula Belgas.
Teque adeo denos vix expugnanda per annos,
Ilios utquondam, Superum labor, acribus intus
Fœta viris pariter, largoque interrita cinctu
Insula, te decimus transmissam in Gallica vidit
Jura dies, et plura ingens hic pra;stitit héros
Quam potuit junctis afiingere fahula Divis.
Hsec rerum séries, nullique parata priorum
Gloria, nec seris aequanda nepotibus olim :
Indomitum Flandros genus, et fîrmissima claustris
Oppida, quse nec opum *vis magna, operumve ducumve,
Nec proa\i domuere, nec excita finibus omnis
Gallia adhuc, non mille rates, non mille carinae,
Frsenare imperiis, armisque metuque subacta
Praecipiti ad nutum sibi posse adjungere bello,
Herois labor ille fuit. Sed nec mihi cuncta
1 . Le P. de la Rue a nommé un peu plus haut la Sambre et l'Es-
caut [Sabis, Scaldis),
2. Philippe le Bel conquit le comté de Flandre, puis le perdit. Voyez
aussi ce qui est dit plus loin de Philippe Auguste, aux vers a53-a58.
POÉSIES DIVERSES. 207
Mais de quel front osé-je ébaucher tant de gloire ,
Moi dont le style foible et le vers mal suivi
Ne sauroient même atteindre à ceux qui t'ont servi?
Souffre-moi toutefois de tacher à portraire 185
D'un roi tout merveilleux l'incomparable frère1:
Sa libéralité pareille à sa valeur;
A l'espoir du combat ce qu'il sent de chaleur;
Ce que lui fait oser l'inexorable envie
D'affronter les périls au mépris de sa vie , 190
Lorsque de sa grandeur il peut se démêler,
Et trompe autour de lui tant d'yeux pour v voler.
Les tristes champs de Bruge en rendront témoignage :
Ce fut là que pour suite il n'eut que son courage ;
Il fuyoit tous les siens pour courir sur tes pas , 1 9 5
Marcin 2 ; et ta déroute eût signalé son bras,
Fas canere, aut meiitas procerum decurrere laudes,
Nec magnos modulis aequare jacentibus ausus.
Nam quid ego egregiam virtutem et digna Philippi
Cœpta loquar? Quid prima inter discrimina, lucis
Contemptorem animum? Quid apertam in dona, paremque
Muneribusque armisque manum ? tum si qua voearent
Praelia, si qua sonum procul auribus sera dédissent,
Quam stare indocilis, quam se subducere tardis
Callidus agminibus sociorum, avidusque negata
Protinus effraeno tentare pericula cursu ?
Talis in effusas Brugensi limite turmas
Infestum per iter sese incomitatus agebat,
Victrici impatiens sibi tempora cingere lauro ;
Cinxissetque adeo, tantse nisi cladis honorem
Victoremque tibi tantum, Marcine, negassent ,
1. Philippe d'Orléans, chef de la seconde maison d'Orléans-Bour-
bon, frère unique de Louis XIV, né en 1640 à Saint-Germain-en-
Laye, mort en 1701.
1 . Le comte de Marsin et le prince de Ligne, qui venaient au secours
de Lille, furent battus par Créquy et Bellefonds.
ao8 POESIES DIVERSES.
Si le destin jaloux, qui Favoit arrêtée,
Pour en croître F affront ne l'eût précipitée,
Et sur ton nom fameux déployé sa rigueur
Jusques à t'envier un si noble vainqueur. a ou
Anguien* le suit de près, et n'est pas moins avide
De ces occasions où Fhonneur sert de guide.
L'Escaut épouvanté voit ses premiers efforts
Le couronner de gloire au travers de cent morts,
Donner sur l'embuscade, en pousser la retraite, 205
Triompher des périls où sa valeur le jette ,
Et montrer dans un cœur aussi haut que son rang
De F illustre Gondé le véritable sang.
Saint-Paul , de qui Fardeur prévient ce qu'on espère ,
De son côté Dunois, et Condé par sa mère2, 2 10
A Fun et l'autre nom répond si dignement,
Et conjuratam properassent fata ruinam.
Quid memorem reliquos ? pulchraeque cupidine famae
Flagrantem assidue, et non inferiora sequentem
Enguineum, fervens et inexsaturabile pectus?
Ut belli exsultans fremitu, rapidumque fatigans
Alipedem, mediis in csedibus, asperaque inter
Tela, necem stricto Belgasque lacesseret ense?
Ut fractœ fugerent acies, dextraque tonantem
Fulminea, procul arma super lateque jacentum
Corporaque et calido spumantes sanguine cristas,
Bellicus immissis impelleret ardor habenis,
Et patrem soboles invictum invicta referret?
Quid nunc ut paribus Longa\illaea propago
1. Henri-Jules, duc d'Enghien, né en 1646, mort en 1709, fils du
grand Condé.
1. Charles-Paris d'Orléans, né en 1649, d'abord comte de Saint-
Paul et en 1671 duc de Longueville, fut tué au passage du Rhin
en 1672 (voyez pièce LXXXI, vers 346-3 5o). Il était fils de la cé-
lèbre duchesse de Longueville, sœur du grand Condé. Par son père
il descendait du fameux Dunois, bâtard d'Orléans.
POÉSIES DIVERSES. 209
Que des plus vaillants même il est l'étonnement.
Des armes qu'il arrache aux mains qui le combattent
Il commence un trophée où ses vertus éclatent;
Et pour forcer la Flandre à prendre un joug plus doux,
Les pals les plus serrés font passage à ses coups1.
Mais où va m1 emporter un zèle téméraire?
A. quoi m'expose t-il ? et que prétends-je faire,
Lorsque tant de grands noms , tant d'illustres exploits ,
Tant de héros enfin s'offrent tous à la fois? 220
Magnanimes guerriers, dont les hautes merveilles
Lasseroient tout l'effort des plus savantes veilles,
Bien que votre valeur étonne l'univers,
Quelle mette vos noms au-dessus de mes vers ,
Vos miracles pourtant ne sont point des miracles : 225
L'exemple de Louis vous lève tous obstacles.
Marchez dessus ses pas , fixez sur lui vos yeux ,
Vous n'avez qu'à le voir, qu'à le suivre en tous lieux ,
Qu'à laisser faire en vous l'ardeur qu'il vous inspire ,
Pour vous faire admirer plus qu'on ne vous admire. 230
Cette ardeur, qui des chefs passe aux moindres soldats,
Anime tous les cœurs , fait agir tous les bras :
Tout est beau, tout est doux sous de si grands auspices,
Carolus incensus stimulis, et utroque parentum
Sanguine, spem gestis, sensu prseverterit annos,
Exsequar? utque manu prostrato ex hoste tropaea
Vi raperet, raptisque viam sibi rumperet armis?
Sed neque tôt procerum virtus insueta ducumve,
Sive senum labor et Martis constantior usus,
Seu juvenum Lodoici animis audacia certet.
Scilicet ex illo vigor omnibus, omnibus idem
I. On lit dans la Relation (p. 210 et 21 1), à la date du 23 août : a 11
v eut quelques volontaires blessés entre autres le comte de Saint-
Paul au bras.... mais.... assez légèrement. 3
Corneille, x i4
2io POESIES DIVERSES.
La peine a ses plaisirs , la mort a ses délices * ;
Et de tant de travaux qu'il aime à partager, 235
On n'en voit que la gloire et non pas le danger.
Il n'est pas de ces rois qui loin du bruit des armes,
Sous des lambris dorés donnent ordre aux alarmes,
Et traçant en repos d'ambitieux projets ,
Prodiguent, à couvert, le sang de leurs sujets. 240
Il veut de sa main propre enfler sa renommée ,
Voir de ses propres yeux l'état de son armée ,
Se fait à tout son camp reconnoître à la voix ,
Visite la tranchée, y fait suivre ses lois.
S'il faut des assiégés repousser les sorties, 245
S'il faut livrer assaut aux places investies ,
Il montre à voir la mort , à la braver de près ,
A mépriser partout la grêle des mousquets ,
Et lui-même essuyant leur plus noire tempête,
Impetus, una omnis simili succenditur igné
Miles, et in médias tanto mit auspice mortes.
Nempe alii, castris procul armorumque tumultu,
Secessu in placido atque aulse penetralibus aureis
Bella gérant reges , lentique ingloria ducant
Otia, pugnarum docti describere leges,
Et sedare suas alieno sanguine rixas.
Juverit hoc alios. Tibi famam extendere factis,
Exemplo résides urgere, offerre pruinis
Ardorique caput, rigido sudare sub sere,
Insomnes vigilare inter tentoria noctes,
Aut vallum lustrare in equo; tum, sicubi portis
Ingruit, aut subitis petitur conatibus hostis,
Crebra licet cœdes, licet undique plurima telis
Affluât, et volucri mors grandine verberet aures,
Impavidum volitare, animos accendere dictis,
1. Voltaire a dit au IVe chant de la Henriade, vers 128 :
La peine a ses plaisirs, le péril à ses charmes.
POESIES DIVERSES. 211
Par ses propres périls achète sa conquête. 25o
Tel le grand saint Louis , la tige des Bourbons ,
Lui-même du Soi dan ' forçoit les bataillons.
Tel son aïeul Philippe acquit le nom d'Auguste
Dans les fameux hasards d'une guerre aussi juste;
Avec le même front , avec la même ardeur 2 5 5
Il terrassa d'Othon2 la superbe grandeur,
Couvrit devant ses yeux la Flandre de ruines,
Et du sang allemand fit ruisseler Bovines.
Tel enfin, grand Monarque, aux campagnes d'Yvry,
Tel en mille autres lieux l'invincible Henry,
De la Ligue obstinée enfonçant les cohortes,
Te conquit de sa main le sceptre que tu portes3.
Vous, ses premiers sujets, qu'attache à son côté
La splendeur de la race ou de la dignité ,
Vous , dignes commandants , vous , dextres aguerries,
Troupes aux champs de Mars dès le berceau nourries ,
Mercarique tuas proprio discrimine lauros :
Hic tibi mos fuerit, Lodoice. His artibus omne
Borbonidum genus : et geoeris caput, additus aris,
Bisque Arabum quondam domitor, Lodoicus, et ingens
Augusti titulo ac belli virtute Philippus
Floruit. His oculis, hoc vu'tu , hoc impete fertur
Suetus in adversas aciem deducere gentes,
Oppida dum quateret Flandrorum, aut sanguine tinctus,
Illustres faceret Germana clade Bovinas.
Vos mihi nunc, Franci proceres, assuetaque régi
Pectora, vos omni fortes ex ordine turmse,
1 . Ainsi dans les éditions originales. On Irouve dans le Dictionnaire
françois-anglois de Cotgrave, publié en 161 1, les trois formes : Sol-
dan, souldan et Soudan. Granet a mis Soudan.
1. Othon IV, de Brunswick, empereur d'Allemagne, vaincu par Phi
lippe Auguste à Bouvines (entre Lille et Tournai), le 27 juillet 12 14
3. Ces quatre vers sur Henri IV sont une addition de Corneille.
Il n'est pas ici parlé de lui dans la pièce latine.
212 POÉSIES DIVERSES.
Dites-moi de quels yeux vous vîtes ce grand roi ,
Après avoir rangé tant de murs sous sa loi ,
Descendre parmi vous de son char de victoire,
Pour vous donner à tous votre part à sa gloire. 270
De quels yeux vîtes-vous sou auguste fierté
Unir tant de tendresse à tant de majesté ,
Honorer la valeur, estimer le service ,
Aux belles actions rendre prompte justice ,
Secourir les blessés, consoler les mourants , 275
Et pour vous applaudir passer dans tous vos rangs?
Parlez , nouveaux François , qui venez de connoître
Quel est votre bonheur d'avoir changé de maître :
Vous qui ne voyiez plus vos princes qu'en portrait ,
Sujets en apparence, esclaves en effet, 280
Pouvez-vous regretter ces démarches pompeuses,
Ces fastueux dehors , ces grandeurs sourcilleuses ,
Ces gouverneurs enfin envoyés de si loin ,
Dicite, quis menti sensus fuit, aut quibus illum
Spectastis victorem oculis, cum culmine ab alto
Cederet immixtus turbœ, communibus omnes
Vocibus affari, atque operum laudare laborem,
Vulneraque et sœvos dictis mulcere dolores,
Officiis certare, alios et vincere lœtus?
Vos modo feJices, tanto victore subacti,
Flandrigense, quibus ipsa minus victoria clade
Profuerat, longamque ferent haec bella salutem.
En erit ut, vestras postquam Bellona per urbes
Sœviit, et patrio longum satiata cruore est,
Curarum expertem liceat decurrere vitam,
Et sperare aditus, et principis ora tueri.
Non ita quos vobis peregrino e littore mittit
Hispanus dominos : non hanc sibi fîngere mores
Ad speciem soliti, similesque capescere ritus ;
At secum assidue veterum décora alta parentum
Et grandes titulos magni versare sub umbra
POÉSIES DIVERSES. 2ii
Tous-puissants en parade, impuissants au besoin ,
Qui ne montrant jamais qu'un œil farouche et sombre
A peine vous jugeoient dignes de voir leur ombre ?
Nos rois n'exigent point cet odieux respect :
Chacun peut chaque jour jouir de leur aspect ;
On leur parle , on reçoit d'eux-mêmes le salaire
Des services rendus , ou du zèle à leur plaire ; 290
Et l'amoureux attrait qui règne en leurs bontés
Leur gagne d'un coup d'œil toutes les volontés.
Pourriez-vous en vouloir1 une plus sûre marque,
Belges ? Vous le voyez , cet illustre monarque ,
A vos temples ouverts conduire ses vainqueurs 295
Pour y bénir le ciel de vos propres bonheurs 2.
Est-il environné de ces pompes cruelles
Dont à Rome éclatoient les victoires nouvelles ,
Quand tout autour d'un char elle voyoit traînés
Nominis ; aut sese communi prodere luci
Sicubi contigerit, truculento incedere vultu,
Cuncta supercilio suspendere, torva tueri,
Et populo praebere sui spectacula gressus.
Sed rigor hic tandem tumidique ferocia fastus
Régis ad aspectum tenues vanescit in auras.
Hune adeo effuso devicta per oppida plausu
Saepe incedentem vidistis, et ordine longo
Ad sacra ducentem victrices templa catervas.
Non illum, laurisque gravem Tyrioque superbum
Murice, purpurei compta cervice jugales
Quadrijugo in curru duxere, nec agmina pone
Captiva implexis visa hic evincta catenis
Horrendos inter ferri reptare sonores.
1 . Dans les OEuvres diverses : « Pourriez-vous en avoir. »
2. « Le Roi.... marcha dès le dimanche(28 août) après midi, n'ayant
fait que passer au travers de Lille, et n'y étant demeuré qu'autan £
de temps qu'il en fallut pour chanter le Te Deum. » (/ielatiort,
p. i37.)
214 POESIES DIVERSES.
Des peuples soupirants et des rois enchaînés, 3oo
Qu'elle admiroît l'amas des afireux brigandages [nages,
D'où tiroient leurs grands noms ses plus grands person-
Et des fleuves domptés les simulacres vains
Qui sous des flots de bronze adoroient ses Romains ?
Il n'y fait point porter les dépouilles des villes , 3 o 5
Comme ses Marius , ses Métels, ses Emiles1,
Et ce reste insolent d'avides conquérants,
Grands héros dans ses murs, partout ailleurs tyrans.
Il entre avec éclat , mais votre populace
Ne voit point sur son front de fast 2 ui de menace ; 5 i o
Il entre , mais d'un air qui ravit tous les cœurs ,
En père des vaincus , en maître des vainqueurs8.
Peuples , repentez-vous de votre résistance ;
Il ramène en vos murs la joie et l'abondance ;
Non titulos, captasque urbes, non diruta ferro
Mœnia, non victis mœrentia flumina ripis,
Fusaque squalenti rerum simulacra métallo ;
At neque praedam oculis ingentem, aurîque talenta,
Spiculaque, et cîypeos, ensesque, aggestaque signa,
Et rigidis appensa ducum spolia aurea truncis,
Ostentare labor. Veteres hsec pompa Metellos,
Hsec Paulos deceat, Mariosve, et quotquot iniquo
Roma duces plausu celsa ad Capitolia duxit,
Prsedatrix populorum. Alio se more videndum,
Cultu alio gentis decuit prœbere parent em.
Ergo animos placido visus sibi subdere vultu,
Indignaque novos formidine solvere cives.
1. Var. Comme les Marius, les Métels, les Emiles.
(Ruœi Carmina, 1688.)
2. Voyez ci-dessus, p. 102, vers 6; tome IV, p. 75, vers n55;
tome VIII, p. 473, vers 4390 ; et le Lexique.
3. Ce n'est pas ici la traduction du latin du P. de la Rue, c'est la
reproduction presque textuelle d'un vers des Triomphes de Louis le
Juste, qui, ainsi que nous l'avons remarqué ci-dessus, p. 108, note 3,
était lui-même un souvenir d'un vers latin de Corneille.
POÉSIES DIVERSES. ai5
Votre défaite en chasse un sort plus rigoureux : 3 1 5
Si vous aviez vaincu , vous seriez moins heureux.
On m'en croit, on l'aborde , on lui porte des plaintes ;
Il écoute , il prononce, il fait des lois plus saintes ;
Chacun reste charmé d'un si facile accès ,
Chacun des maux passés goûte le doux succès1, 3îo
Jure avec l'Espagnol un éternel divorce ,
Et porte avec amour un joug reçu par force.
C'est ainsi que la terre , au retour du printemps2,
Undique festivo frémit omnis Belgica pubes
Murmuve : composito pars labra natantia risu,
Pars lœtos oculorum ignés, et utrinque fluentem
Erecta cervice comam; pars ardua frontis
Miratur décora, et cultu sub simplice laudat
Regales habitus, majestatemque serenam;
Cuncti animum flecti facilem plebisque patentem
Questibus, et recta librantem singula lance,
Et memorant ultro, et tanto sibi vindice gaudent.
Sic, ubi post longas hiemes insanaque Cauri
1. Le succès, l'issue. Voyez le Lexique.
2. Les onze vers latins qui correspondent aux vers 3 2 3-3 3 2 se
trouvent aux pages S et 6 du tome III de la troisième édition des
OEuvres de Santeul publiée en 1729. Ils sont intitulés : In h.«c
verba S. Augustini Deum alloquentis : <k Quis mihi dabit acquies-
ce cere in te? Quis mihi dabit ut venias in cor meum, et inebries
« illud, ut obliviscar mala mea, et unum bonum meum amplectar te? »
[Augustini Confesslones , lib. I, cap. v.) Ensuite viennent les vers
français avec ce titre : Sur la conversion de S. Augustin . Sur ces pa-
roles de S. Augustin (au premier livre de ses Confessions, chapitre v),
traduction par Pierre Corneille : « Qui me fera la grâce, Seigneur,
de me reposer en vous? Qui me fera la grâce de vous voir venir dans
mon cœur, et l'enivrer du vin céleste de votre amour? afin que je
perde le souvenir de mes maux, et que je vous embrasse de toutes
les puissances de mon âme, comme mon seul et unique bien. » — San-
teul est-il le véritable auteur des onze vers latins, et le P. de la Rue les
a-t-il insérés plus tard dans son poème, ou bien, ce qui est beaucoup
plus vraisemblable, a-t-011 trouvé dans les papiers de Scnteul un
simple rapprochement entre ces vers du P. de la Rue et le passage
216 POÉSIES DIVERSES.
Des grâces du soleil se défend quelque temps ,
De ses premiers rayons refuit les avantages, 325
Et pour les repousser élève cent nuages :
Le soleil plus puissant dissipe ces vapeurs ,
S'empare de son sein, y fait naître des fleurs,
Y fait germer des fruits , et la terre , à leur vue
Se trouvant enrichie aussitôt que vaincue, 3 3o
Ouvre à ce conquérant jusques au fond du cœur,
Et pleine de ses dons , adore son vainqueur.
Poursuis, grand Roi, poursuis : c'est par là qu'on sas-
Un respect immortel chez la race future ; [sure
C'est par là que le ciel prépare ton Dauphin 3 3 5
Flamina, et excussos gelidis e nubibus imbres,
Sol nostrum radiis afflat propioribus orbem,
Ipsa licet primo tellus animata calore
jEstuet in nebulas, reducique obsistere Phcebo,
Et lucem undanti tentet prohibere vapore,
Sol tamen obstructas densa caligine nubes
Discutit erumpens, et amico lumine vernas
Undique spargit opes : donis tum victa recludit
Terra sinus, et amat quos ante refugerat ignés,
Victoremque volens, vel dum superatur, adorât.
Perge, âge, sic victas, regum fortissime, gentes
Adjicere imperio, sic magnum in sœcula nomen
Mittere, sic teneram virtutis imagine prolem
de saint Augustin, rapprochement qui a causé cette confusion ? Cela
demeure incertain et n'importe guère d'ailleurs pour l'histoire du
texte de Corneille. Contentons-nous de signaler ici les différences
que présentent dans l'édition de Santeul les dix vers de notre poëte,
différences qui, comme on va le voir, sont plutôt des fautes que des
variantes. On lit au vers 325 : revoit, u lieu de refait; au vers 326 : ses
nuages, au lieu décent nuages; au vers 27 : ses vapeurs, au lieu de ces
vapeurs; au vers 329 : les fruits, au lieu de des fruits; enfin au vers 33o :
se voyant aussi-tôt enrichie., au lieu de se trouvant enrichie aussitôt. Les
vers latins offrent quelques différences du même genre, qu'il n'entre
point dans notre plan de relever.
POÉSIES DIVERSES. 217
A remplir hautement son illustre destin :
Il y répond sans peine, et son jeune courage
Accuse incessamment la paresse de l'âge ;
Toute son àme vole après tes étendards ,
Brûle de partager ta gloire et tes hasards, 340
D'aller ainsi que toi de conquête en conquête 4 .
Conservez, justes cieux , et Tune et l'autre tête;
Modérez mieux l'ardeur d'un roi si généreux :
Faites-le souvenir qu'il fait seul tous nos vœux ,
Que tout notre destin s'attache à sa personne, 345
Qu'il feroit d'un faux pas chanceler sa couronne;
Et puisque ses périls nous forcent de trembler,
Du moins n'en souffrez point qui nous puisse accabler.
Excolere, inque alias crescentem accendere lauros.
Ipse in cuncta puer jam nunc cornes ire pericla ,
Et propriis Belgas tibi subdere miles in armis
Gestiret : pudor est, castris dum tota juventus
Emicat, imbelli lentum nutricis in umbra
Indecores ludos, et inania ludere bella;
Necdum sequas animis vires, annosque morantes
Increpat. Ah quantus Martis quondam ibit in artes,
Quantus honos tibi, Galle, tibi quot, Ibère, Iabor< s,
Cum firmata parem genitori hune fecerit aetas,
Gallicaque immensis implebit fata triumphis !
Vos superi prolemque patri prolique parentem
Servate interea ; neve hune, dum jura tuetur,
Et pleno invadit leti discrimina passu,
Invida sors nobis, aut bellicus auferat ardor.
Carolus de la Rue , Soc. Jesu.
1. Voyez les portraits de Louis XIV et du Dauphin faits en 1667
par Corneille, sous les noms deMérovee et de son fils, dans la tragédie
déjà citée tfAtiila, tome VII, p. i3i et i32.
2i8 POESIES DIVERSES.
LXX
TRADUCTIONS ET IMITATIONS
DE L'ÉPIGRAMME LATINE DE M. DE MONTMOR,
Premier maître des requêtes de l'hôtel du Roi.
Henri-Louis Habert, sieur de Montmor, conseiller du Roi en ses
conseils, et maître des requêtes de son hôtel, n'est connu, malgré sa
qualité d'académicien, que par quelques épigrammes qui se sont con-
servées dans les recueils du temps, et par une bonne préface latine
placée par lui en tête de l'édition des OEuvres de Gassendi son ami,
qu'il prit soin de publier en 1 65 8. — La traduction et les imitations de
Corneille ont été imprimées en 1667 et en 1669 à la suite du Poème
sur les victoires du Roi qu'on vient de lire; il est probable qu'elles
ont paru pour la première fois dans cette édition de 1667, et que
ce n'est pas à elles, mais seulement aux pièces intitulées : Au Roi
sur son retour de Flandre et Remerciment présenté au Roi en Cannée i663
que s'appliquent ces mots de l'avis au Lecteur de Corneille . « Vous
ne serez pas fâché que j'y aye fait joindre quelques autres pièces
que vous avez déjà vues. » La traduction et les imitations de Cor-
neille sont précédées de l'épigramme latine qui y a donné lieu :
Fulminât attonitas Scaldis Lodoicus ad arces,
Intrepidusque hostes terret ubique suos :
Dum tamen augustum caput objectare periclis
Non tïmet, heu! populos terret et ille suos.
TRADUCTION.
Sur l'Escaut étonné tu lances la tempête ,
Grand Prince , et fais trembler partout tes ennemis ;
Mais quand tu ne crains pas d'y hasarder ta tète ,
Tu fais trembler aussi ceux que Dieu t'a soumis.
POÉSIES DIVERSES. 219
IMITATION.
Tes glorieux périls remplissent tes projets,
Grand Roi ; mais tu fais peur aux deux partis ensemble ;
Et si devant tes pas toute l'Espagne tremble ,
Ces périls où tu cours font trembler tes sujets.
AUTRE.
Ton courage, grand Roi, que la gloire accompagne,
Jette les deux partis dans un pareil effroi ;
Et si, quand tu parois, tu fais trembler l'Espagne,
Les lieux où tu parois nous font trembler pour toi.
AUTRE.
Et l'Espagne et les tiens, grand Prince, à te voir faire,
De pareilles frayeurs se laissent accabler :
L'Espagne à ton aspect tremble à son ordinaire ,
Les tiens par tes périls apprennent à trembler.
22o POESIES DIVERSES.
LXXl
Al] R. P. DELIDEL, DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS,
SUR SON TRAITÉ DE LA THÉOLOGIE DES SAINTS.
Cette ode commence au verso du troisième feuillet de la Théo-
logie des saints, ou sont représentez les misteres et les merueilles de la
grâce, par le R. P. Claude Delidel de la Compagnie de Jésus, à
Paris , chez Iean Henault M.DC.LXVI1I. Auec Approbation et Priui-
lege du Roy, in-4°. Le privilège est du « dernier iour de Nouem-
bre 1666, » l'Achevé d'imprimer du « seizième Ianuier 1668. » Ces
vers ont été recueillis par l'abbé Granet dans les OEuvres diverses
(p. 216-218)1. Le P. Claude Delidel (de Lidel ou de Lidelle), né à
Moulins, était entré dans la Compagnie de Jésus en 161 1, à l'âge de
dix-huit ans. Il professa la rhétorique pendant vingt ans, fut à deux
reprises recteur du collège d'Alençon, et mourut à Rouen le 19 mars
1671. Il avait été, comme l'ode même nous l'apprend, un des maî-
tres de Corneille.
Toi qui nous apprends de la grâce
Quelle est la force et la douceur,
Gomme elle descend dans un cœur ,
Gomme elle agit , comme elle passe ,
Docte écrivain , dont l'œil perçant 5
Va jusqu'au sein du Tout-Puissant
Pénétrer ce profond abîme ,
Que les hommes te vont devoir !
Et que le prix en est ineffable et sublime,
De ces biens que par là tu mets en leur pouvoir! 1 o
1. C'est par une erreur, que nous nous empressons de reconnaître,
que nous avons mentionné cette ode, dans notre Avertissement (tomeT,
p. xn), parmi les morceaux de Corneille nouvellement mis en lumière
POÉSIES DIVERSES. 221
Oui , tant que durera ta course,
Tu peux , mortel , à pleines mains
Puiser des bonheurs souverains
En cette inépuisable source.
Un guide si bien éclairé : 5
Te conduit d'un pas assuré
Au vivant soleil qui Y éclaire :
Suis, mais avec zèle, avec foi,
Suis , dis-je, tu verras tout ce qu'il te faut faire;
Et si tu ne le fais, il ne tiendra qu'à toi. 20
Tu pèches, mais un Dieu pardonne ;
Et pour mériter ce pardon,
Il te ' fait ce précieux don :
Il n'en est avare à personne.
Reçois avec humilité , 2 5
Conserve avec fidélité
Ce grand appui de ta foiblesse :
Avec lui ton vouloir peut tout ;
Sans lui tu n'es qu'ordure, impuissance , bassesse.
Fais-en un bon usage, et la gloire est au bout. 3o
C'en est la digne récompense ;
Mais aussi, tu le dois savoir,
Cet usage est en ton pouvoir ,
Il dépend de ta vigilance :
Tu peux t'endormir, t'arrêter ; 3 5
Tu peux même le rejeter ,
Ce don sans qui ta perte est sûre ,
Et n'en tireras aucun fruit,
Si tu défères plus aux sens , à la nature ,
Qu aux mouvements sacrés qu'en ton àmc il produit. 40
1. Dans l'édition originale, en tête de la Théologie des saints, on
lit ici se, au lieu de te, ce qui est une faute évidente.
222 POESIES DIVERSES.
J'en connois par toi l'efficace ,
Savant et pieux écrivain ,
Qui jadis de ta propre main
M'as élevé sur le Parnasse.
C'étoit trop peu pour ta bonté 4 5
Que ma jeunesse eût profité
Des leçons que tu m'as données :
Tu portes plus loin ton amour ,
Et tu veux qu'aujourd'hui mes dernières années
De tes instructions profitent à leur tour. 5o
Je fus * ton disciple , et peut-être
Que l'heureux éclat de mes vers
Eblouit assez l'univers
Pour faire peu de honte au maître.
Par une plus sainte leçon 5 5
Tu m' apprends de quelle façon
Au vice on doit faire la guerre.
Puissé-je en user encor mieux !
Et comme je te dois ma gloire sur la terre ,
Puissé-je te devoir un jour celle des cieux ! 6 c
Par son très-obligé disciple ,
Pierre de Corneille.
Quod scribo et placeo, si placeo , omne tuum est%.
1. Je suis, dans l'édition de Granet, et, par suite, dans toutes les
éditions modernes.
2. Allusion à ce vers bien connu qui termine l'ode 111 du livre IV
d'Horace :
Quod spiro et placeo, si placeo, tuum est.
Corneille a déjà cité à la fin de VÉpitre dédicatoire d' Horace (tome III,
p. 261) ce vers, précédé de trois autres, dont un est de lui.
POÉSIES DIVERSES. 223
LXXII
AU ROI, SUR SA1 CONQUETE DE LA FRANCHE-COMTÉ.
La Bibliothèque impériale possède deux éditions séparées et une
copie manuscrite de cette pièce. L'une des éditions, de format in-40,
est sans lieu ni date; elle se trouve dans le recueil Thoisy, iu-fol.,
tome IX, en regard de la pièce latine de Santeul; l'autre forme huit
pages in-8°, et est terminée par l'adresse suivante: A Rouen, de l'Imp.
de L. Maury, 1668. Dans les deux éditions ces vers sont signés P. Cor-
neille. Dans la seconde, ils sont suivis de la pièce latine, égale-
ment signée de notre poète, que nous reproduisons plus bas ; puis
des imitations latines que nous donnons après; et enfin des vers
qu'on lira sous le numéro suivant (voyez la notice qui les précède).
La copie manuscrite (intitulée : sur la Prise de la Franche Comté)
se trouve au folio 63 verso d'un volume qui porte le n° i5,2 44 du
fonds français. Ces stances au Bol se rencontrent aussi, à la suite du
Poème sur les victoires du Roi, dans l'édition de 166g, que cite Granet
et que nous n'avons pu examiner. Ces stances, la traduction latine
par P. Corneille et la pièce latine du P. de la Rue se retrouvent
aux pages 84-87 des Idyllia de ce dernier, publiés en 1669, et que
nous avons déjà cités et décrits (voyez ci-dessus, p. 192 et 193).
On y lit aussi les deux odes en strophes alcaïques , signées de deux
jésuites, publiées d'abord dans l'édition originale in-8°. Les Car-
mina de de la Rue (1688), que nous avons aussi mentionnés plus
haut, omettent la traduction latine de Corneille et ne donnent (au
livre IV, p. 212 et 21 3) que ses vers français, en regard de la version
latine du P. de la Rue. Quant à la pièce de Santeul, nous la revoyons
dans la troisième édition2 de ses OEuvres.
Quelle rapidité de conquête en conquête ,
1. La, dans l'édition in-40 et dans les Idyllia du P. de la Rue.
2. /. B. SantoliiVictorïm Operum omnium editio tertia, 1729, tome I,
224 POESIES DIVERSES.
En dépit des hivers, guide tes étendards ?
Et quel dieu dans tes yeux tient cette foudre prête
Qui fait tomber les murs d'un seul de tes regards?
A peine tu parois , qu'une province entière 5
Rend hommage à tes lis et justice à tes droits;
Et ta course en neuf1 jours achève une carrière
Que Ton verroit coûter un siècle à d'autres rois 2.
En vain pour t' applaudir ma muse impatiente ,
Attendant ton retour , prête l'oreille au bruit : i o
Ta vitesse l'accable , et sa plus haute attente
Ne peut imaginer ce que ton bras produit.
Mon génie , étonné de ne pouvoir te suivre 3,
En perd haleine et force ; et mon zèle confus ,
p. 8-10. On y lit la note survante : « La rapidité de cette conquête
engagea Pierre Corneille, pour marquer à Louis XIV que sa plume ne
pouvoit pas suivre ses victoires, à faire vingt vers, qui ont été mis
en latin par M. de Santeul. » Une autre note donne une rapide bio-
graphie de Corneille, et vante « son mérite extraordinaire et son
génie supérieur. »
i. Dans son texte latin Corneille a écrit ter terni dies (vers 8).
De la Rue dans ses deux éditions et Santeul dans la sienne ont mis
sept dans le texte français de Corneille et ont traduit ce nombre sept;
les deux autres jésuites y ont substitué le nombre huit. La conquête
de la Franche-Comté fut en réalité l'affaire de quelques jours. Le
5 février 1668 le prince de Condé se présenta devant Besançon, dont
il reçut les clefs le y. Salins se soumit le même jour. Le Roi assiégea
Dole le io, le prit le i4; les châteaux de Joux et de Sainte-Anne se
rendirent peu après; en moins de dix-sept jours, toute la Franche-
Comté fut subjuguée.
2. Vak. Que nous verrions coûter un siècle à d'autres rois.
{Copie manuscrite de la Bibliothèque impériale.)
3. Var. Mon génie, étonné de ne te pouvoir suivre.
[Copie manuscrite de la Bibliothèque impériale.)
POÉSIES DIVERSES. 225
Bien qu'il t'ait consacré ce qui me reste à vivre1, i 5
S'épouvante, t'admire, et n'ose rien de plus.
Je rougis de me taire et d'avoir tant à dire ;
Mais c'est le seul parti que je puisse choisir :
Grand Roi , pour me donner quelque loisir d'écrire ,
Daigne prendre pour vaincre un peu plus de loisir 2 ! ao
idem latine'
Quis te per médias hiemes, Rex maxime, turbo,
Quisve triumphandi praescius ardor agit?
Quis deus in sacra fulmen tibi fronte ministrurn ,
Quis dédit ut nutu mœnia tacta ruant ?
Venisti , et populos provincia territa subdit , 5
Qui tua suspiciant lilia , jura probent ;
Quodque alio absolvant vix intégra sœcula rege ,
Hoc tibi ter terni dant potuisse dies.
Ecce avida famam properans dum dévorât aure ,
Et quaerit reduci quae tibi Musa canat , i o
Prœcipiti obruitur cursu victoris , et alta
Spe licet arripiat plurima , plura videt.
Impar tôt rerum sub pondère déficit ipse
i. Dans l'édition de Santeul : « ce qui lui reste à vivre. »
a. Boileau se rappelait sans doute ces vers, lorsqu'il commençait
ainsi sa huitième épître, composée en 1675 :
Grand Roi, cesse de vaincre, ou je cesse d'écrire.
3. Ce titre est celui des éditions originales. De la Rue y ajoute dans
ses Idyllia : a. Ah eodem auctore P. Cornelio. »
CoRNKLLI,E. X l5
226 POESIES DIVERSES.
Spiritus , et vires mole premente cadunt ;
Quique tibi reliquos vates devoverat annos, i 5
Haeret , et insueto cuncta pavore stupet ' .
Turpe silere quidem , seges est ubi tanta loquendi ;
Turpius indigno carminé tanta loqui;
Carmina quippe moram poscunt : vel parce tacenti,
Victor, vincendi vel tibi sume moras. 20
IDEM.
Quis te, facta novis cumulantem ingentia factis,
Per médias hiemes belli rapit ardor? et altae
Fulmina quis fronti Deus indidit, omnia solo
Protinus ut nutu dent mœnia sponte ruinam ?
Venisti, et positis circum undique Sequanus armis
Jura probat supplex, et lilia promis adorât ;
Longaque septenis superas emensa diebus,
Quse spatia haud alius per saecula compleat héros.
Nequicquam sonitus et prima? murmura famae
Musa bibit, grandesque avida spe praecipit ausus,
In laudes arrecta tuas ; sed enim impete rerum
Obruitur, tantisque stupet spem cedere factis.
Ipse adeo immensis animus progressibus impar
Nititur incassum, et cursu defessus anhelat;
Ac reliquos quamvis tibi dudum addixerit annos,
Haeret inexpletum admirans, nullusque stupori
Est modus; et pudor est décora inter tanta silere,
Et laudare timor. Tu vati, maxime regum,
X. Voyez ci-dessus, p. 72, note 1.
POÉSIES DIVERSES. 227
Débita ne spatium quondam in prœconia desit,
Longius in taies spatium tibi sume triumpbos.
Car. de la Rue, Soc. Jesu.
IDEM.
Quis te per altas ardor agit nives,
Laurisque lauros accumulât novas ?
Frons unde primo fulminantis
Ictu oculi labefactat arces?
Venisti, et armis aspera gens tuis
Jurique cedit. Saecla per intégra
Vix frangat alter, quos diebus
Ris quatuor domitos triumphas.
Musam volentem carminé prosequi
Cursu fatigas, obruis impetu :
Quœ fa ma, quœ spes fingere audet,
Insolitis superantur ausis.
Mens nutat impar gressibus, et licet
Vit» sacrarit quod reliquum est super,
Rerum eloqui molem laborat,
Et tacito célébrât stupore.
Cum tanta laudum luxuriat seges,
Silere turpe est. Si fïdibus jubés
iEquare palmas, lentiore
Mœnia verte inimica ferro.
I. Tourné, Soc. Jesu.
IDEM.
Quo te bellandi rapit impetus? obruis hostes
Contemnens duras hiemes, cumulasque triumphos
228 POESIES DIVERSES.
Die quibus auspiciis? quo fulmine? die quibus armis,
Quisve deus pugnat tecum, et comitatur euutem?
Te spectante, cadunt, vel solo exterrita nutu ,
Mœnia, teque probant Dominum, et tua jura cadendo.
Septima lux palmam asseruit, quam vindice ferro
Non alii obtineant etiam per ssecula reges.
Jam dudum in plausus mea musa erumpere gestit ;
Te reducem exspectans, avidas frustra applioat aures :
Prœcipiti cursu antevolas, fallisque parantem
Dicere multa, animum longe superantibus actis ;
Nec jam te capit illa, tuis et laudibus impar
Insolitum miratur, et obstupefacta récusât
Arduum opus, vatemque negato carminé fraudât.
Quid faciam ? pudor est décora inter tanta silere,
Sed laudare labor : nostro succurre labori,
Maxime Rex, mihi quo liceat tua scribere facta,
Da spatium vati, cursusque morare secundos.
Santolius, Victorinus.
IDEM.
Quis tua. tôt cumulans invito frigore lauros ,
Ardor agit vexilla ? quis et Deus oppida nutu
Dat tibi fulmineo perrumpere fortius ictu?
Venisti, et justis fera gens se subjicit armis,
Conficis et velox quod nec per saecula possit
Rex alius. Mea te affectans celebrare Tbalia,
Dum redeas, avidam famae frustra applicat aurem :
Antevolas, summa et factis prseverteris ausa.
Tam rapidum adinirans animus mihi concidit , et mens
Fida licet reliquos tibi sponte sacraverit annos,
POÉSIES DIVERSES. 229
Te sancto stupet usque metu, nilque amplius audet.
Tôt memoranda pudet premere, et, Rex magne, necesse est.
Ni mihi des spatium, ac céleri minus impete vincas.
Carolus du Perier.
IDEM ALIO CARMINE.
Quis tuum, lectis tibi tôt per altas
Et nives palmis, agit ardor agmen ?
Quis Deus nutu quatere addit, instar
Fulminis, arces?
Te simul videre, tibi féroces
Sequani parent; rapidusque subdis
Ipse quae longis neque subdat annis
Oppida Mavors.
Musa te, donec remees, sonare
Gestiens, frustra bibit aure famam;
Assequi nec fas tua tôt sagaci
Praelia sensu.
Gressibus mi mens stupet aegra tantis;
Ac licet totum tibi me dicarit,
Te pavens spectat, mea nil et ultra
Pieris audet,
Digna tôt fatu pudor est silere, et,
Magne Rex, cogar: brève fac anhelse
Otium Musse, celeresque pualum
Siste triumphos.
Carolus du Perier.
23o POÉSIES DIVERSES.
IDEM.
Quis te, quis ardor magnanimos rapit,
Princeps, in ausus; et viridi jubet
Frontem, vel invitis pruina?
Frigoribus, redimire lauro?
Quod numen in te fulminis afbitrum
Nutu vel uno mœnia diruit?
Venis, repentinaque, supplex
Jura probat, domitus ruina
Burgundus; et quod vix aliis daret
Invicta virtus curriculum integris
Implere sœclis, bis quaternis
Solibus es, Lodoïce, niensus.
Frustra parantem prœlia me loqui
Urbesque victas, obruit impetus,
Cursusque inoffensus triumphi,
Spemque avidam tua gesta vincunt.
Victoris impar mens mea passibus,
Quanquam fugacis quod superest mihi
Vitœ tibi ultro consecrarim,
Attonito stupet ore cursum.
Silere turpe est ; perpetuum tamen
Silere cogis : vincere tam cito
Ni desinas, lentisque lentus
Victor agas celebranda Musis.
Rob. Riguez1, Soc, Jesu.
i. Le P. Robert Riguez est l'éditeur du Velleius Paterculus, dans
la collection ad usum Delpltbù (1676, in-4°). On a de lui d'autres vers
intitulés : Ludovico Borhonïo princlpi Condxo, Gallici exercitus in Ger-
marùa imperatori, in-folio, 2 ff.
POÉSIES DIVERSES. »3
LXXHI
SDR LE CANAL DU LANGUEDOC, POUR LA JONCTION
DES DEUX MERS.
IMITATION.
Ce titre est celui que Granet a donné à cette pièce à la page 43 des
OEuvres diverses. Lorsqu'en 1668 elle a paru pour la première fois à
la page 8 de l'édition originale des vers intitulés : Au Roy, sur sa con-
queste de la Franche- Comté (voyez ci-dessus, p. 228, notice), elle sui-
vait la pièce latine que nous donnons en note ! et était seulement in-
titulée : Imitation. Elle parut de nouveau, en 1669, à la suite de la
seconde édition des Victoires du Roi (notre pièce LXIX); et encore,
en 1681, dans la Relation de L'Etat du canal royal de communication
des mers en Languedoc, avec la vérification qui en a été faite par ordre
de Sa Majesté, Beziers, Henri Martel, 1681, in-8°. La pièce latine
a sans doute été composée en 1666, époque où le canal fut décrété.
On trouve dans un manuscrit de l'Arsenal qui porte le n° HF 191 bis
et la date de 1689 (voyez ci-après la Notice de la pièce LXXXVII)
une assez mauvaise copie intitulée : Vers latins et francois sur le canal
de la jonction des deux mers F Océan et la Méditerranée.
La Garonne et TÀtax dans leurs grottes profondes
I. IN JUNCTIONEM UTRIUSQUE MARIS EPIGRAPHE.
Ne daret optanti dudum oscula grata Garumnœ
Mitis Atax, et aquis per mutua jura refusis
Exuvias utriusque maris concluderet uno
Flumine, et hesperium pelagus misceret eoo,
Obstabat Natura, suis obnoxia semper
Legibus, œternos non ausa revellere fines ;
Sed Divum Lodoïcus amor, dispendia longi
Circuitus, victrice manu , jussuque potenti
Amputât : obsequitur supplex Natura, superbi
232 POÉSIES DIVERSES.
Soupiroient de tout temps pour voir unir leurs ondes \
Et faire ainsi couler par un heureux penchant
Les trésors de l'aurore aux rives du couchant ;
Mais à des vœux si doux , à des flammes si belles , 5
La Nature , attachée à ses lois éternelles ,
Pour obstacle invincible opposoit fièrement
Des monts et des rochers l1 affreux enchaînement.
France , ton grand Roi parle , et ces rochers se fendent ,
La terre ouvre son sein, les plus hauts monts descendent :
Tout cède ; et Feau qui suit les passages ouverts
Le fait voir tout-puissant sur la terre et les mers.
Decrescunt montes, ul troque incilia replet
Unda sequax, refluoque aperit commercia cursu.
Sic praestant elementa fidem, promptoque futurum
Obsequio agnoscunt terrseque marisque potentem.
I, Parisot, in Senatu tolosano causarum patronus.
Granet a placé après la pièce de notre auteur une
TRADUCTION DES VERS DE CORNEILLE, PAR LE P. CLERIC *, JESUITE.
Dudum mitis Atax antrisque Garumna profundis
Ardebant thalamo lymphas sooiare jugali,
Scilicet ut junctis tandem féliciter undis
Littus ad occiduum gaza? veherentur eose ;
Talibus at votis ac talibus ignibus obstans,
jEternamque sequens legem, Natura superbis
Fluctibus objecit magnos longo ordine montes,
Immensosque operi scopulos, rupesque cavanaSs.
Gallia ! vix jussit Lodoix, et saxa dehiscunt,
Terra sinus aperit, procumbunt vertice montes,
Cedunt cuncta, subit defossos unda cauales,
Terrarumque simul monstrat mariumque potentem.
j . Lîi copie del'Arsenal donne : « pour marier leurs ondes. »
* Le P. Pierre Cleric, né à Béziers en 1622, mort à Toulouse en
174°» professa pendant vingt-deux ans la rhétorique dans cette der-
nière ville. Il est auteur de divers ouvrages en prose et en vers cou-
ronnés par l'Académie des Jeux Floraux.
POÉSIES DIVERSES. 2Î3
LXXIV
AIR DE M BLONDEL.
Cette pièce est imprimée à la page 275 du Recueil des plus beaux
vers qui ont esté mis en chant, auec le nom des aut heurs, seconde et
nouvelle Partie, dans laquelle sont compris les Airs de Versailles, à
Paris, chez Monsieur Ballard.... et chez Pierre Bienfait, M.DC.LXVIH,
in-12. Elle est signée : M. de Corneille. L'Achevé d'imprimer du
volume est du a 5 Iuin 1668; » mais il est probable que la pièce,
adressée à Iris, c'est-à-dire, suivant toute apparence, à la du Parc
(voyez ci-dessus, p. 141)» a été composée beaucoup plus tôt. Elle
figure ici pour la première fois dans les OEuvres de Corneille. Elle a
été signalée par M. P. Lacroix dans la Revue des province», tome II,
p. 479 et 489.
Mes soupirs vous ont dit plus de cent fois le jour
Que je mourois pour vous d'amour.
Que me sert, belle Iris, de parler davantage?
S'ils vous ont dit mon mal, pouvez-vous l'ignorer?
Hélas ! si vous vouliez un moment soupirer, 5
Que j'entendrois bien1 ce langage!
1. Mieux, mais par erreur, dans le texte de M. P. Lacroix.
^34 POÉSIES DIVERSES.
LXXV
DÉFENSE DES FABLES DANS LA POÉSIE.
IMITATION DU LATI3Î.
Cette pièce est imitée fort librement d'un petit poëme latin de Jean-
Baptiste Santeul, que nous donnons, comme d'ordinaire, au bas des
pages. Il avait été composé à l'occasion de la fameuse dispute sur
l'emploi de la fable, que les uns permettaient aux poètes chrétiens,
tandis que d'autres le condamnaient. Dans cette dispute, où inter-
vinrent, entre autres, Pellisson et Bossuet, et qui, renouvelée vingt
ans plus tard par les remercîments à la Quintinie, intitulés Pomonay
fut close par l'amende honorable, très-élégante et très-spirituelle,
adressée par le chanoine de Saint- Victor à l'évêque de Meaux, San-
teul eut pour adversaire son propre frère, Claude, plus âgé que Jean-
Baptiste de près de deux ans, qui répondit par des vers « aussi latins
que chrétiens1, » à la pièce que Corneille a imitée. Les vers de Claude,
comme ceux de Jean-Baptiste, parurent en 1670; mais une note de
l'édition des OEuures de Santeul publiée en 1729 nous apprend
(tome II, p. 167) que Claude envoya les siens, le 24 août 1669, à
l'abbé de Chavigny, depuis évêque deTroyes. Ceux de Jean -Baptiste,
adressés à Pierre de Bellièvre, sont donc antérieurs à cette date.
On voyait figurer sous le n° 328, dans le catalogue de vente que
1 . Voici l'avertissement dont le poëme de Jean-Baptiste est pré-
cédé : a Lis erat apud litteratos utrum adhuc liceret figmentis paga-
« norum et fabulis uti. Qui îllas proscribere volunthis utuntur ferme
« rationibus : primo quod aniles fabula? sint omnes ; deinde quod a
« moribus Christianis abhorreant ; postremo quod natura per se cam-
« pus satis sit patens in quo exsultare possit poetica absque fabularum
« ope. In novos fabularum accusatoi es juvénile scripsi carmen; sed
« meus frater eonsultior hoc christiano nec minus latino carminé me
« desipuisse hactenus monet, ut, abjurato Apolline cum Musis, ad
« sanctiora scribendi argumenta invitet. Non enim patent Anollïni
« sacrata Chrlsto pectora : sanctus Paulinus ad Ausonium. »
POESIES DIVERSES. s35
nous avons plus d'une fois cité (voyez tome IX, p. 6o5, note 3, et
ci-dessus, p. 186), un exemplaire de l'édition originale in-4°, sans
lieu ni date, delà traduction de notre poète ; c'est une pièce de quatre
pages intitulée : Défense des fables dans la poésie, imitation du latin
de Mr de Santeuil, signée : P. Corneille , et contenant de curieuses
variantes, que nous signalons en note. Elle a été acquise par M. Cousin.
La bibliothèque de l'Arsenal possède, sous le n° 3578, A, un autre
B.
exemplaire de cette rare et curieuse édition. Nous suivons pour les vers
de Corneille le texte publié à la suite des vers latins de Santeul(iy29),
texte qui, du reste, ne diffère point de celui de Granet (1738).
Qu'on fait d'injure à l'art de lui voler la fable !
C'est interdire aux vers ce qu'ils ont d'agréable *,
Anéantir leur pompe , éteindre leur vigueur,
Et hasarder la Muse à sécher de langueur.
O vous qui prétendez qu'à force d'injustices 5
Le vieil usage cède à de nouveaux caprices ,
Donnez-nous par pitié du moins quelques beautés
AD ILLUSTRISSIMUM VIRUM D. P. BELLEVR^EUM %
PRO DEFENSIONE FABULARUM.
Ergo sacra novae mutabunt carmina leges,
Et suus antiquis praeripietur honos?
Tôt vatum monumenta, tôt et décora alta peribunt ?
Musarum tôt opes auferet una dies?
Ah ! tantum prohibe facinus, pater optime vatum ;
Non alla fueris tu mihi lege deus.
Vos tantum prohibete nefas, prohihete, Camœnse;
Non alia dicam vos ratione deas.
1. Var. (édit. in-40) :
C'est interdire aux vers ce qu'ils ont d'admirable.
2 Pierre de Bellièvre, marquis de Grignon, abbé de Saint-Vincent
de Metz, conseiller d'honneur au parlement de Paris, et frère du
premier président (voyez ci-dessus, p. i3i, notice), était né en 161 r,
et mourut le 26 janvier i683. C'était le principal protecteur de San-
teul, qui lui dédia, en 1670, le premier recueil de ses poésies.
*36 POÉSIES DIVERSES.
Qui puissent remplacer ce que vous nous ôtez ;
Et ne nous livrez pas aux tons mélancoliques
D'un style estropié par de vaines critiques. i o
Quoi? bannir des enfers Proserpine et Pluton?
Dire toujours le diable , et jamais Alecton?
Sacrifier Hécate et Diane à la Lune ,
Et dans son propre sein noyer le vieux Neptune ?
Un berger chantera ses déplaisirs secrets i 5
Sans que la1 triste Echo répète ses regrets?
Les bois autour de lui n'auront point de drvades?
L'air sera sans zéphyrs , les fleuves sans naïades ,
Et par nos délicats les faunes assommés
Rentreront au néant dont on les a formés2 ? 20
Pourras- tu, dieu des vers, endurer ce blasphème,
Ecquis erit vestros posthac qui curet honores,
Irrita si nullam numina fertis opem?
Non ita : tôt veterum prseclara inventa manebunt.
Et quod sacravit fabula prisca melos.
Numen habent Musse, vos fontes numen habetis,
Sunt etiam et silvis arbori busqué deœ.
Et nemora, et montes, vallesque, et inhospita saxa,
Ipsaque cum rivis flumina numen habent.
Nuper multa gemens in littore flebat Amyntas,
Et fato raptum ssepe vocabat Hylam.
Flebant et rupes, fontesque et littora flebant;
Flere etiam visa est conscia nympha loei ;
Et montes doluisse, annosaque robora circum
Corticibus ruptis ingemuisse ferunt.
Quid non Piérides, quid non finxere poetae?
1. Il n'y a la que dans l'édition in -4°. Toutes les autres portent /e,
niais c'est une faute évidente.
2.. Voyez dans le IIIe chant de Y Art poétique de Boileau (vers i63
et suivants) un assez long passage où l'auteur paraît se souvenir des
vers de Santeul et de Corneille et défend la même opinion. Le vers
232 de Boileau : a D'ôter à Pan sa flûte, 0 rappelle notre 49e : f< Otez
Pan et sa flûte. »
POÉSIES DIVERSES 237
Toi qui fis tous ces dieux , qui fis Jupiter même?
Pourras-tu respecter ces nouveaux souverains
Jusqu'à laisser périr l'ouvrage de tes mains?
O digne de périr, si jamais tu l'endures ! 2 5
D'un si mortel affront sauve tes créatures ;
Confonds leurs ennemis, insulte à leurs tyrans;
Fais-nous, en dépit d'eux, garder nos premiers rangs ;
Et retirant ton feu de leurs veines glacées ,
Laisse leurs vers sans force, et leurs rimes forcées. 3o
« La fable en nos écrits , disent-ils , n'est pas bien ;
La gloire des païens déshonore un chrétien. »
L'Eglise toutefois , que l'Esprit saint gouverne ,
Dans ses hymnes sacrés nous chante encor l'Averne ,
Et par le vieil abus le Tartare inventé 3 5
N'y déshonore point un Dieu ressuscité1.
Vidimus arguta mœnia structa lyra.
Vidimus auritas motare cacumina quercus,
Et cursus amiies sustinuisse suos.
Dant vates vultus varios variosque colores,
Eque solo ducunt quse super astra ferant.
Surda voeant, immota movent, mentem omnibus addunt :
Artis opus summum, mille placere modis.
Obscuris vera involvunt, celantque docendo,
Sublustri et nebula splendidiora tegunt.
Sol veluti, rutilis quando fulgoribus ardet,
Nubibus obvolvi, qua videalur, amat;
Maxima sunt plerumque tegit quse fabula, et illis
E tenebris fulget pulchrius orta dies.
Lector amat veros dubia sub imagine sensus,
Qusesitasque diu cernere gaudet opes.
Quin etiam humanis divina affingimus ora,
i . Voyez au tome IX la traduction des Hymnes du Bréviaire ro-
main , que Corneille a publiée la même année que cette Défense des
fables, c'est-à-dire en 1670. On lit dans une hymne des matines du di-
manche (p. 45 1) : A 'verni ignibus ; et dans l'hymne des vêpres du temps
238 POÉSIES DIVERSES.
Ces rigides censeurs ont-ils plus d'esprit qu'elle ,
Et font-ils dans l'Eglise une Eglise nouvelle 4 ?
Quittons cet avantage , et ne confondons pas
Avec des droits si saints de profanes appas. 40
L'œil se peut-il fixer sur la vérité nue ?
Elle a trop de brillant pour arrêter la vue ;
Et telle qu'un éclair qui ne fait qu'éblouir,
Elle échappe aussitôt qu'on présume en jouir.
La fable, qui la couvre, allume , presse, irrite * 45
L'ingénieuse ardeur d'en voir tout le mérite :
L'art d'en montrer le prix consiste à le cacher,
Et sa beauté redouble à se faire chercher.
Otez Pan et sa flûte , adieu les pâturages ;
Et sunt quse proprio nomine sponte carent.
Ignein Mulciberum, Cererem frumenta vocabo,
Et pluvium, in terras dum cadit unda, Jovem
Si Venetas describam arces, molimine magno
Non hommes dicam, sed posuisse deos.
Illic Adriacis surgat Neptunus ab undis,
Atque novae admirans hsereat urbis opus.
Quod si bella canam, Jani Mars limina vellat,
Et bellatores ducat in arma deos.
Mulciber JEtnaeis reeoquat fornacibus arma,
Thracibus, aut rigidis arma tremenda Getis.
Tuni scelerum inventrix lacera Discordia palla
Advocet infernas ex Acheronte deas.
Mox amnes trepidare, imis pal 1ère sub antris,
de la passion (p. 5 10) : prœdam Tartari. Il est à remarquer que dans ces
deux passages Corneille a évité en français les mots mythologiques.
1. Var. (édit. in-4°):
Et leur mépris pour nous va-t-il jusqu'à son zèle ?
a. Var. (édit. in-4fl) :
La fable qui la couvre attache et facilite
A son éclat moins vif l'effet de son mérite :•
L'art de le faire voir consiste a le cacher.
POÉSIES DIVERSES. *39
Otez Pomone et Flore, adieu les jardinages; 5o
Des roses et des lis le plus superbe éclat1,
Sans la fable , en nos vers , n'aura rien que de plat.
Qu'on y peigne en savant une plante nourrie
Des impures vapeurs d'une terre pourrie,
Le portrait plaira-t-il, s'il n'a pour agrément 5 5
Les larmes d'une amante ou le sang d'un amant?
Qu'aura de beau ia guerre, à moins qu'on y crayonne
Ici le char de Mars, là celui de Bellone;
Que la Victoire vole , et que les grands exploits
Soient portés en tous lieux par la Nymphe à cent voix?
Qu'ont la terre et la mer, si l'on n'ose décrire
Ce qu'il faut de tritons à pousser un navire ,
Cet empire qu'Eole a sur les tourbillons ,
Bacchus sur les coteaux , Cérès sur les sillons ?
Dum Bellona furens impia bella movet.
Si décora haec tollas, sine vi, sine pondère carmen
Lectori fesso taedia mille feret.
Quid memorem flores? Si numina floribus absunt,
Cur pallent violse, cur, hyacinthe, rubes?
Cur sibi cognatos anémone dépérit Euros?
Unde color cal tins, et color un de rosis?
Non his terra putris det ftaribus unde rubescant,
Sed pueri aut Veneris sanguine tingat Amor.
Vos sine Pomona nusquam florebitis horti,
Et mœsti, nisi Pan pascat, abite, grèges.
Sunt haec magna quidem veterum mysteria vatum,
Temporibus seris quse violare nefas.
Ergo tui, Relevrœe, canam si gaudia ruris,
Alloquar et nymphaSj silvicolasque deos ;
Et Charités aderunt, zonis de more solutis,
i. Var. (édit. in-4°) :
L'anémone, le lis, la tulipe et l'œillet,
Sans la fable, en nos vers, n'auront rien que de laid.
a4o POESIES DIVERSES.
Tous ces vieux ornements , traitez-les d'antiquailles : 6 5
Moi, si je peins jamais Saint-Germain ou Versailles4,
Les nymphes, malgré vous, danseront tout autour;
Cent demi-dieux follets leur parleront d'amour;
Du satyre caché les brusques échappées
Dans les bras des sylvains feront fuir les napées ; 7 o
Et si je fais ballet pour l'un de ces beaux lieux 2,
J'y ferai, malgré vous, trépigner tous les Dieux.
Vous donc, encore un coup, troupe docte et choisie,
Qui nous forgez des lois à votre fantaisie ,
Puissiez-vous à jamais adorer cette erreur 7 5
Qui pour tant de beautés inspire tant d'horreur,
Alterno terram concutientque pede.
Illuc pastores, illuc mihi rustica turba,
Et pariter veniant dique deœque loci.
Fauni cum satyris clavam thyrsumque relinquant,
Tympana cum sistris œraque puisa sonent :
Pampmea incomptos redimiti fronde capillos,
Lascivis célèbrent orgia laeta modis.
Jam madidi vino média inter pocula, libent
Et tibi, magna Pales, et tibi, Bàcche pater.
Mœnades hic ululent sparsis sine lege capillis,
Et fuget attonitos turba proterva viros.
Tum lector gaudebit, amat nam mille figuras,
Se quoque festivis credet adesse clioris.
Quin etiam arridens jam tum mihi plaudit Apollo,
Plaudit Apollinei docta caterva chori ;
1 . Corneille a substitué « Saint-Germain ou Versailles » à la maison
de campagne de Bellièvre, dont parle Santeul. — Lefèvre et plusieurs
autres éditeurs ont imprimé :
Moi, si jamais je peins Saint-Germain et Versailles.
2. Va«. (édit. in-4°) :
Je dirai plus encor, sans dire pourtant rien
Qui ne soit avoué par un roi très-chrétien.
POESIES DIVERSES. 241
Nous laisser à jamais ces charmes en partage ,
Qui portent les grands noms au delà de notre âge;
Et si le vôtre atteint quelque postérité ,
Puisse-t-il n'y traîner qu'un vers décrédité ! 80
Et nymphse properant alacres ambire poetain,
Et viridi lauro tempora nostra tegunt.
Ruris et ipse mihi dominus quoque plaudit amico
Numine, et incœptis annuit usque meis.
Exulet ergo procul sacris gens in vida Musis,
Et placuisse tibi sit, Belevrœe, satis.
CoRNKfhU?.. x if>
2li* POÉSIES DIVERSES.
LXXVI
SUR LA POMPE DU PONT NOTRE-DAME.
TRADUCTION PAR PIERRE CORNEILLE.
Cette pièce et la suivante sont des traductions de deux des inscrip-
tions latines composées par Santeul pour les fontaines de Paris. Elles
ont été plusieurs fois imprimées en feuilles volantes in~4°et en in-12,
ordinairement sans date ; mais l'édition des OEuvres de Santeul publiée
en 1729 rapporte à l'année 1670 les variantes latines, empruntées pro-
bablement au texte primitif. Nous reproduisons à la suite des vers de
Corneille les inscriptions latines, et trois imitations françaises de
la première des deux, qui sont imprimées, après le texte latin, au
tome III de l'édition de Santeul (p. 35 et 36) que nous venons de
mentionner.
Que le dieu de la Seine a d'amour pour Paris !
Dès qu'il en peut baiser les rivages chéris,
De ses flots suspendus la descente plus douce
Laisse douter aux yeux s'il avance ou rebrousse :
Lui-même à son canal il dérobe ses eaux, 5
Qu'il y fait rejaillir par de secrètes veines,
Et le plaisir qu'il prend à voir des lieux si beaux,
De grand fleuve qu'il est, le1 transforme en fontaines.
IN SEQUAN3L FONTES EX IPSO FLUVIO EDUCTOS.
Sequana cum primum reginœ 2 allabitur urbi ,
Tardât précipites ambitiosus aquas.
1. Dans l'édition de Santeul il y a, par une erreur éTidente, se,
au lieu de le.
2. Dans l'édition de 1670 : patisinœ , qui est plus conforme à la
traduction de Corneille, tandis que régime l'est davantage à celle de
Charpentier.
POÉSIES DIVERSES. 243
Captus amore loci , cursum obliviscitur, anceps
Quo fluat , et dulces nectit in urbe moras.
Hinc varios implens fluctu subeunte canales,
Fons fieri gaudet, qui modo flumen erat.
TRADUCTION PAR DU PERIER.
Eprise d'un lieu si charmant
Je coule bien plus lentement;
Je m'arrête partout, et mon onde incertaine
Semble même oublier son cours :
Ainsi ces longs canaux , où je coule sans peine ,
Font qu'après mille détours ,
De fleuve que j'étois, je me change en fontaine.
AUTRE PAR CHARPENTIER DE i/aCADEMIE FRANÇOISE.
Aussitôt que la Seine en sa course tranquille
Joint les superbes murs de la royale ville,
Pour ces lieux fortunés elle brûle d'amour :
Elle arrête ses flots , elle avance avec peine ,
Et par mille canaux se transforme en fontaine ,
Pour ne sortir jamais d'un si charmant séjour.
AUTRE.
Aussitôt que la Seine , après ses longs détours ,
Baigne enfin de Paris le superbe rivage ,
Fière du beau séjour qui lui tombe en partage,
De son onde rapide elle suspend le cours :
L'éclat du lieu l'enchante et la rend incertaine
Où pour n'en point sortir doivent couler ses eaux ;
Enfin s'ouvrant le sein de cent vastes canaux ,
Elle y coule , et de fleuve elle devient fontaine.
244 POESIES DIVERSES.
LXXVII
POUR LA FONTAINE DES QUATRE-NATIONS,
VIS-A-VIS LE LOUVRE.
TRADUCTION PAR PIERRE CORNEILLE.
Ces vers, qu'on trouve dans les différentes éditions de Santeul, se
lisent aux pages 4° et 41 du tome ILT de celle de 172g. — Voyez la
notice en tête de la pièce précédente.
C'est trop gémir, Nymphes de Seine,
Sous le poids des bateaux qui cachent votre lit,
Et qui ne vous laissoient entrevoir qu'avec peine
Ce chef-d'œuvre étonnant dont Paris s'embellit,
Dont la France s'enorgueillit. 5
Par une route aisée, aussi bien qu'imprévue,
Plus haut que le rivage un roi vous fait monter :
Qu'avez-vous plus à souhaiter?
Nymphes, ouvrez les yeux, tout le Louvre est en vue.
INSCRIPTION DE SANTEUL.
Sequanides flebant imo sub gurgite Nymphae ,
Cum premerent d eusse pigra fluenta rates ;
Ingentem Luparam nec jam aspectare potestas ,
Tarpeii cedat cui domus alta Jovis.
Hue alacres, Rex ipse vocat, succedite, Nymphae :
Hinc Lupara adverso litlore tota patet.
POÉSIES DIVERSES. a/,5
LXXVIil
TRADUCTION EN VERS FRANÇOIS DE LA THÉBAÏDE
DE STACE.
Plusieurs témoignages pourraient faire croire que cet ouvrage n'a
jamais paru; en effet, on lit dans le Mercure galant d'octobre 1684,
qui contient une notice nécrologique sur Corneille : « On a trouvé
dans son cabinet quelques ouvrages qu'on donnera au public. Ce
recueil sera composé des deux premiers livres de Stace qu'il a mis
en vers, et de plusieurs pièces sur divers sujets. » L'abbé Bordelon
ne se prononce pas d'une façon moins explicite à ce sujet dans ses
Diversités curieuses (neuvième partie, p. 447) : « H a aussi, dit-il, tra-
duit quelques livres de la Thêbaïde de Stace en vers françois, mais ils
n'ont point encore été imprimés. » Malgré des assertions si formelles,
la publication de cet ouvrage ne saurait être considérée comme un
fait douteux. A l'affirmation de Fontenelle, qui dit positivement que
Corneille « a traduit en vers et publié les deux premiers livres de la
Thêbaïde* , » se joignent d'autres preuves, qui nous permettent en outre
de fixer la date de l'impression. Elle se place entre la fin de 1670 et
le mois d'avril 1672. Nous avons vu2 que le privilège de Tite et
Bérénice, daté du « dernier jour de décembre l'an de grâce mil six
cens soixante-dix, » était commun à cette tragédie et à la a traduction
en vers françois de la Thêbaïde de Stace ; » Corneille cède son droit
au libraire « pour la Comédie de Tite et Bérénice seulement. » Les
Observations de Monsieur Ménage sur la langue françoise , dont l'Achevé
d'imprimer est du « 7 Avril 1672, » contiennent, non dans le corps
de l'ouvrage, mais à la fin, dans les « Additions et changemens, » les
trois seuls vers qui nous soientrestés de ce poème, dont nous n'avons
ainsi, comme pour certains ouvrages de l'antiquité, que deux courts
fragments conservés par un grammairien5. La place qu'ont ces cita-
1. OEuvres de M. de Fontenelle , 1742? tome III, p. 124.
2. Tome VII, p. 194.
3. Le premier passage se trouve à la page 4^2> Ie second à la
î/,6 POÉSIES DIVERSES.
tions à l'extrémité du volume, parmi les additions et changemens ,
nous porte à croire, comme nous l'avons dit dans Y Avertissement de
notre tome I (p. xiii), que la traduction de Corneille ne parut que
vers la fin de l'impression des Observations de Ménage.
L'abbé Granet, qui a fait tous ses efforts pour retrouver cette tra-
duction, a eu recours à un moyen qui aurait dû, à ce qu'il semble,
être couronné de succès : « M. Ménage, dit-il vers la fin de la préface
des OEuvres diverses, ayant donné sa bibliothèque aux RR. PP. Jé-
suites de la maison professe de Paris, je crus qu'on pourroit trouver
cet ouvrage parmi ses livres. Je me suis adressé au R. P. Tourne-
mine, dont la politesse égale la délicatesse d'esprit et le profond sa-
voir. Il s'est donné la peine de faire des recherches, mais elles ont été
inutiles. » Il en a été de même de toutes celles qui ont été entreprises
plus tard1. Fontenelle nous parle également des vains efforts qu'on
faisait pour découvrir cette traduction des deux premiers livres de la
Thébaïde. « Ils ont échappé, dit-il2, à toutes les recherches qu'on a
faites depuis quelque temps pour en retrouver quelque exemplaire. »
Dont autrefois le Sphinx, ce monstrueux oiseau,
Avoit pour son repaire envahi le coupeau3.
(M. Corneille, dans sa Thébaïde, livre II, p. 65.)
Où qu'il jette la vue, il voit briller des armes 4 .
(Thébaïde, p. 68.)
page 465 des Observations : l'un est cité à propos de la locution oit
que; l'autre pour le genre du mot sphinx. On voit que Ménage indique
le chiffre des pages du poëme de Corneille, ce qui prouve qu'il
avait sous les yeux un exemplaire imprimé; car, sans cela, il eût évi-
demment averti qu'il tirait ses citations d'un manuscrit.
i. Voyez tome I, avertissement, p. xin et xiv.
2. OEuvres de M. Fontenelle, ij42> tome III, p. 124.
3. Le coupeau, le sommet. — Ces deux vers faisaient partie de la
version de ce passage de la Thébaïde (vers 5 5 5-5 5 7) :
Petit [Tydeus) ardua dira?
Sphingos, et abscisis infringens cautibus uncas
Exsuperat juga dira manus.
4- Ce vers, qui, d'après l'indication de Ménage, se lisait trois
pages plus loin que le précédent, ne répond exactement, dans la
suite du livre II, à aucun endroit de Stace ; mais il pouvait avoir sa
POÉSIES DIVERSES. u/l7
LXXIX
SUR LE DEPART DU ROI.
Ces vers se trouvent (voyez tome VIT, p. 217, note 1) dans la
première scène du second acte de Tite et Bérénice. C'est Santeul qui,
en 1672, leur donna le titre qu'on vient de lire, les fit imprimer
dans le format in-40, et en mit à la suite une traduction latine in-
titulée dans cette édition : Régi iter meditanti, et dans les suivantes :
Rex iter méditons , que nous avons reproduite dans la note à laquelle
nous venons de renvoyer. Dans cette note nous remarquions que les
vers 7 et 8 avaient été modifiés; outre ces deux variantes des éditions
collectives de Santeul, l'édition originale1, que nous suivons ici,
en présente deux autres, plus considérables encore, pour les vers 5
et 6. La pièce française et la pièce latine ont été publiées dans les
divers recueils de Santeul (7. B. Santolii Victorini Opéra poetica ,
Parisiis, 1694, p. 211; Parisiis^ Billiot, 1729, tome III, p. 9), et
aussi dans les OEuvres diverses de Pierre Corneille, Paris, 1738, p. 45.
Mais les éditeurs des OEuvres complètes, et Lefèvre en particulier,
ne les ont pas recueillies, et n'ont même pas indiqué en note à la
suite des vers de Tite et Bérénice l'usage qu'on en avait fait.
Mon nom par la victoire est si bien affermi ,
Qu'on me croit dans la paix un lion endormi :
place dans le passage qui précédait l'érection du trophée de Tydée
(voyez vers 707 et suivants). N'était la page marquée par Ménage ,
on pourrait supposer que c'était un fragment de la traduction de
cette phrase (qui est aux vers 55o et suivants) :
Quos ubi plures
Quam ratus innumeris videt excursare latebris,
totumque sub armis
Collucere iter....
1. L'édition originale est à la Bibliothèque impériale; elle est rap-
pelée dans le Catalogue imprimé de l'histoire de France, tome II,
p. 2 4° 1 première colonne.
248 POÉSIES DIVERSES.
Mon réveil incertain du monde fait l'étude ,
Mon repos en tous lieux jette l'inquiétude;
Tandis que dans ma cour tout prévient mes désirs,
Que mon ombre à sa suite enchaîne les plaisirs,
Pour envoyer l'effroi sur l'un et l'autre pôle ,
Je n'ai qu'à faire un pas et hausser ma parole1.
i. Dans Tite et Bérénice les quatre derniers vers sont ainsi :
Et tandis qu'en ma cour les aimables loisirs
Ménagent l'heureux choix des jeux et des plaisirs ,
Pour envoyer l'effroi sous l'un et l'autre pôle,
Te n'ai qu'à faire un pas et hausser la parole.
POÉSIES DIVERSES. 249
LXXX
VERS PRÉSENTÉS AU ROI A SON RETOUR DE LA GUERRE
D'HOLLANDE1, LE 1 AOÛT 1672.
Le titre qu'on vient de lire est celui qu'on trouve à la page 46 des
OEuvres choisies, en tête de la pièce latine suivante de Corneille et de
la traduction française qui en a été faite par le poète même. Suivant
Granet, ces vers ont été imprimés « la même année, in-12, en feuille
volante. » Nous n'avons pas vu cette édition, mais nous en connaissons
une autre, également de 1672. Elle fait partie d'un petit recueil qui
figurait sous le n° 327 d'un catalogue de vente que nous avons déjà
souvent cité (voyez tome IX, p. 60 5, note 2, et ci-dessus, p. 182, 186
et 235); ce recueil, qui appartient aujourd'hui à la Bibliothèque
impériale, est intitulé: A la gloire de Louis le Grand, conquérant de la
Hollande, par Mrs Corneille, Montauban, Quinault, et autres , à Paris,
chez Olivier de Varennes, et Pierre Bienfaict M.DC.LXXII, in-4°,
12 pages. A la page 4 se trouve la pièce latine, et à la page 5 la pièce
française. La page 3 est occupée par un distique latin, suivi de son
explication française, qui, bien qu'anonymes, comme le sont du reste
aussi les pièces des pages 4 et 5, peuvent être attribués avec vraisem-
blance à Corneille, puisqu'ils sont en tête du recueil, dans le titre
duquel le nom de notre poète figure le premier. On les trouvera à
Y Appendice. La page 6 est occupée par une pièce signée : Montauban.
REGI,
PRO RESTITUTA APUD BATAVOS CATHOLICA FIDE.
Quid mirum rapido tibi si Victoria cursu
Tôt populos subdit facilis , tôt mœnia pandit ?
Vix sua cuique dies urbi , nec pluribus horis
1 . C'est la campagne illustrée par le fameux passage du Rhin , et
dans laquelle Louis XIV avait commandé en personne un de ses trois
corps d'armée, ayant sous lui Turenne. Voyez la pièce suivante.
*5o POESIES DIVERSES.
Castra locas, quam justa vides tibi crescere régna.
Nempe Deus , Deus ille , sui de culmine cœli 5
Quem trahis in partes , cui sub te militât omnis
In Batavos effusa phalanx , Deus ille tremendum
Ponere cui properas communi ex hoste tropaeum ,
Ipse tibi frangitque obices, arcetque pericla
Fidus , et œterna tecum mercede paciscens, i o
Pra?via pro reduce appendit miracula cultu.
Jamque fidem exceduut , jam lassis viribus impar
Sub te fama gémit, rerumque interrita custos
Te pavet historia , it tantorum conscius ordo
Fatorum, ac merito eventu spem votaque vincit. 1 5
Perge modo , et pulsum victor redde omnibus aris ,
Victis redde Deum , fac regnet et ipse , tibique
Quantum exempla praeire dédit, tantum et sua cunctas
Et belli et pacis pra3eat tibi gloria curas.
Interea totus dum te unum suspicit orbis , 2 o
Dum Musœ fortemque animum, mentemque profundam,
Tôt regnandi artes certatim ad sidéra tollent,
Fas mihi sit tacuisse semel, Rex magne, Deique
Nil nisi in invicto mirari principe donum.
AU ROI,
SUR LE RÉTABLISSEMENT DE LA FOI CATHOLIQUE EN SES CONQUETES
DE HOLLANDE.
Tes victoires, grand Roi , si pleines et si promptes,
N'ont rien qui me surprenne en leur rapide cours ,
Ni tout ce vaste effroi des peuples que tu domptes ,
Qui t'ouvre plus de murs que tu n'y perds de jours.
C'est l'effet , c'est le prix des soins dont tu travailles 5
A ranimer la foi qui s'y laisse étouffer :
POESIES DIVERSES. a5r
Tu fais de tes soldats ceux du Dieu des batailles1,
Et dès qu'ils ont vaincu , tu le2 fais triompher.
Tu prends ses intérêts , il brise tous obstacles ;
Tu rétablis son culte , il se fait ton appui ; i o
Sur ton zèle intrépide il répand ses miracles ,
Et prête leur 3 secours à qui combat pour lui.
Ils font de jour en jour nouvelle peine à croire ,
Ils vont de marche en marche au delà des projets ,
Lassent la renommée , épouvantent l'histoire , x 5
Préviennent l'espérance, et passent les souhaits*.
Poursuis, digne Monarque, et rends-lui tous ses temples :
Fais-lui d'heureux sujets de ceux qu'il t'a soumis;
Et comme il met ta gloire au-dessus des exemples ,
Mets la sienne au-dessus de tous ses ennemis. i o
Mille autres à l'envi peindront ce grand courage ,
Ce grand art de régner qui te suit en tout lieu :
Je leur en laisse entre eux disputer l'avantage ,
Et ne veux qu'admirer en toi le don de Dieu.
1. Granet donne ici, probablement d'après l'édition in-12, que
nous n'avons pu voir :
Tu mets de leur parti le maître des batailles.
2. Granet donne les , évidemment par erreur.
3. Son, dans l'édition de Granet.
4. Corneille a dit plus haut (p. 176, vers 12), en parlant de
« l'épanchement » des bienfaits du Roi :
Il prévient l'espérance , il surprend les souhaits.
ioi POESIES DIVERSES.
LXXXI
LES VICTOIRES DU ROI
SUR LES ÉTATS DE HOLLANDE, EN l' ANNEE M.DC.LXXII1.
Par P. Corneille.
[Traduit du latin du P. de la Rue.]
Le poëme de Corneille a été imprimé en même temps que celui du
P. de la Rue, dont il est la traduction, et que nous donnons au bas
des pages. Ces deux ouvrages ont paru à Paris en 1672, chez Guil-
laume de Luyne et Simon Bénard , dans le format in-folio, et sous
les titres que nous leur conservons ici. Cette édition se trouve dans
la plupart des bibliothèques publiques de Paris. Chacun des deux
poèmes , ayant un frontispice distinct et une pagination particulière,
forme en lui-même un tout complet. Le poëme latin, signé : C. de la
Rue, s. J., a dix-huit pages; le poëme français, signé : P. Corneille,
en a dix-neuf. Le frontispice de chacun d'eux est orné d'une vignette
de Chauveau, représentant deux fleuves appuyés sur la même urne.
Assis sur des trophées d'armes, entourés de drapeaux, ils élèvent la
main au-dessus des yeux afin de pouvoir regarder le soleil dont l'éclat
les éblouit. Le bas de la vignette est entouré des écussons des pays
vaincus. Au commencement de chacun des deux poèmes, en tête de
la troisième page, est un passage du Rhin, également de Chauveau.
Le Roi y tient à la main le bâton, signe du commandement. Dans
une gloire on voit les « ombres redoutables, » dont parle Corneille
(p. 266 et 267, vers 225-240), qui élèvent les bras en signe d'éton-
nement. Au-dessous des nuages de cette gloire, on aperçoit quatre
vents qui soufflent avec violence (p. 272, \ers 283 et note 2). Granet
cite une autre édition in- 8°, qui a été publiée dans la même année ,
chez les mêmes libraires, avec la pièce latine du P. de la Rue. 11 a
aussi paru à Grenoble, en 1673, une édition in-12, qui figure sous
le n° 780 dans le Catalogue Longueman2.
1. Voyez ci-dessus, p. 249, note 1.
2. C'est à l'obligeance de M. Taschereau que nous devons ce der-
nier renseignement.
POÉSIES DIVERSES. *53
Les douceurs de la paix , et la pleine abondance
Dont ses tranquilles soins comblent toute la France ,
Suspendoient le courroux du plus grand de ses rois.
Ce courroux sûr de vaincre , et vainqueur tant de fois ,
Vous l'aviez éprouvé, Flandre, Hainaut, Lorraine1 ; 5
L'Espagne et sa lenteur n'en respiroient qu'à peine;
Et ce triomphe heureux sur tant de nations
Sembloit mettre une borne aux grandes actions.
Mais une si facile et si prompte victoire
Pour le victorieux n'a point assez de gloire : 1 o
Amoureux des périls et du pénible honneur,
Il ne sauroit goûter ce rapide bonheur;
Il ne sauroit tenir pour illustres conquêtes
Des murs qui trébuchoient sans écraser de têtes ,
Des forts avant l'attaque entre ses mains remis , 1 5
Ni des peuples tremblants pour justes ennemis.
LUDOVICO MAGNO
POST EXPEDITIONEM BATAVICAM EPINICITJM >
[Auctore Carolo Ru^eo, Societatis Jesu].
Pacificus labor, et longae cornes aurea pacis
Copia, victrices Lodoici mulserat iras :
Mille triumphatae suadebant otia gentes ;
Et Lothari, et Belgœ, et frustra cunctator Iberus.
Non tamen illa, licet geminum celebrata per orbem,
Laudis inexpletum satiabat gloria pectus ;
Jamque adeo facilis vilescunt prsemia belli ;
Victoremque piget quod Martem prœvenit hostis
Obsequio , quod prsecipites in vincula turmœ,
Totque suis ultro veniant cum civibus urbes.
i. Voyez plus haut, p. 192-217, le poëme où Corneille célèbre la
rapide conquête que Louis XIV fit de la Flandre en 1667. Le der-
nier mot du vers rappelle la campagne de 1670, qui dépouilla de ses
États le duc de Lorraine.
254 POÉSIES DIVERSES.
Au moindre souvenir qui peigne1 à sa vaillance
Chez tant d'autres vainqueurs la fortune en balance,
Les triomphes sanglants et longtemps disputés ,
Il voit avec dédain ceux qu'il a remportés : 2 o
Sa gloire , inconsolable après ces hauts exemples ,
Brûle d'en faire voir d'égaux ou de plus amples ;
Et jalouse du sang versé par ces2 guerriers ,
Se reproche le peu que coûtent ses lauriers.
Pardonne, grand Monarque, à ton destin propice : 1 5
Il va de ses faveurs corriger l'injustice,
Et t'offre un ennemi fier, intrépide, heureux,
Puissant, opiniâtre, et tel que tu le veux.
Sa fureur se fait craindre aux deux bouts de la terre :
Au levant, au couchant elle a porté la guerre; 3o
L'une et l'autre Java3, la Chine et le Japon
Tum si quando animo prise» virtutis imago
Incidit, et veterum pervolvens acta parentum
Qusesitas per multa videt discrimina lauros,
Errantemque diu média inter prselia Martem,
Uritur exemplis tacite, heroumque periclis
Invidet, et partes secum fastidit honores.
Ergo âge, tam lsetis ultra ne irascere fatis :
En fortuna tibi, quantum appetis, annuit hostein.
Ille, pererrato jam formidabilis orbi?
Contemptor superum Batavus, quem Seres, et Indi,
Extremique hominum Japones, quem dives adorât
1. L'édition des poésies latines du P. de la Rue intitulée Car-
mina (1688) donne : ce qui peint. »
2. Il y a ses, par erreur, dans le texte de Granet.
3. C'est-à-dire l'île de Java et une autre île de la Sonde, Bali,
nommée aussi quelquefois la petite Java. La compagnie des Indes
orientales, fondée par les Hollandais au commencement du dix-sep-
tième siècle, avait fait diverses conquêtes en Orient; elle possédait
jusqu'à deux cents vaisseaux et commerçait avec des pays fermés, ou
peu s'en faut, au reste de l'Europe, tels que la Chine et le Japon.
POESIES DIVERSES. a55
Frémissent à sa vue et tremblent à son nom :
C'est ce jaloux ingrat, cet insolent Batave,
Qui te doit ce qu'il est1 et hautement te brave;
Il te déchire, il arme, il brigue contre toi, 3 5
Comme s'il n'aspiroit qu'à te faire la loi.
Ne le regarde point dans sa basse origine ,
Confiné par mépris aux bords de la marine 2 :
S'il n'y fit autrefois la guerre qu'aux poissons ,
S'il n'y connut le fer que par ses hameçons , 4 o
Sa fierté, maintenant au-dessus de la roue3,
Méconnoît ses aïeux qui rampoient dans la boue.
C'est un peuple ennobli par cent fameux exploits,
Qui ne veut adorer ni vivre qu'à son choix ;
Un peuple qui ne souffre autels ni diadèmes, 45
Qui veut borner les rois et les régler eux-mêmes;
Un peuple enflé d'orgueil et gorgé de butin ,
Que son bras a rendu maître de son destin ;
Pirate universel , et pour gloire nouvelle
Africa, cui rutilas America expendit arenas,
Cujus et ipse jugum placido subit sequore Nereus,
Ille tibi probris jamdudum infestus et armis
Imminet, ille Dei dono tibi debitus hostis.
Nec te bumiles ortus, generisque infamia primi
Avocet incepto : fuerint huic rustica cura?
Quondam opéra, et durœ piscosis amnibus artes;
Arma modo, et rigidos intentans undique fasces,
Imperium in magnum terra grassatur et undis;
Nec jam no vit avos , audax et ludere regum
In capita, et belli pacisque imponere leges ,
1. Allusion à la guerre de 1666, où la France s'était alliée avec la
Hollande contre l'Angleterre, et qui s'était terminée par la paix de
Bréda.
2. « Le mot de marine, dit Richelet (1(179}, se prend quelquefois au
même sens que celui de mer. »
3. Au-dessus, c'est-à-dire au haut, de la roue de Fortune.
256 POESIES DIVERSES.
Associé d'Espagne, et non plus son rebelle. 5o
Sur ce digne ennemi venge le ciel et toi :
Venge l'honneur du sceptre, et les droits de la foi.
Tant d'illustres fureurs , tant d'attentats célèbres
L'ont fait assez gémir chez lui dans les ténèbres :
Romps les fers qu'elle y traîne , et rends-lui le plein jour;
Règne, et fais-y régner le vrai culte à son tour1.
Ce grand prince m'écoute , et son ardeur guerrière
Le jette avidement dans cette âpre carrière ,
La juge avantageuse à montrer ce qu'il est;
Et plus la course est rude, et plus elle lui plaît. 60
11 s'oppose déjà des troupes formidables,
Des Ostendes , trois ans à tout autre imprenables2,
Des fleuves teints de sang , des champs semés de corps 7
Cent périls éclatants et mille affreuses morts ;
Car enfin d'un tel peuple , à lui rendre justice, 6 5
Après une si longue et si dure milice ,
Après un siècle entier perdu pour le dompter3,
Hispano socius, nec tantum impune rebellis.
Exorere o tandem spretis pro regibus ultor ;
Rumpe moras, Lodoice. Vides ut puisa tôt annos
Relligio, trepidisque fides mala tuta latebris,
Regalem implorant solvenda in vincula dextram.
Nulla mora in Magno : placet hic, quia durior, hostis.
Jamque sibi immensas acies, jamque horrida centum
Praelia, difficilesque aditus, largaque rubentes
Caede virum fluvios, et inhospita littora fingit
Scilicet, exsultatque fremens. Nam quid sibi quisquam,
Et studia expendens, et opes, et robora gentis,
1. Voyez la pièce précédente.
2. En 1604, les Espagnols, commandés par Spinola , prirent
Ostende après un siège de trois ans.
3. La vive opposition des Pays-Bas au gouvernement espagnol,
suivie bientôt de l'insurrection qui les affranchit, avait commencé
POÉSIES DIVERSES. 257
Quelle plus foible image ose se présenter?
Des orageux reflux d'une mer écumeuse,
Des trois canaux du Rhin , de l'Yssel , de la Meuse , 7 o
De ce climat jadis si fatal aux Romains,
Et qui défie encor tous les efforts humains,
De ces flots suspendus où Fart soutient des rives
Pour noyer les vainqueurs dans les plaines captives ,
De cent bouches partout si prêtes à tonner, 7 5
Qui peut se former l'ombre et ne pas s étonner?
Si ce peuple au secours attire l'Allemagne,
S'il joint le Mein au Tage, et l'Empire à l'Espagne ,
S'il fait au Dannemarc craindre pour ses deux mers ,
Si contre nous enfin il ligue l'univers , 8 o
Que sera-ce ? Mon roi n'en conçoit point d'alarmes :
Plus l'orage grossit, plus il y voit de charmes ;
Informetve animo levius, speretve futurum?
Quis vaga tergemini non horreat ostia Rheni,
iEquoreosque Mosœ freraitus, Vahalimque sonantem ,
Nomina tôt nuribus quondam exsecrata Latinis ?
Adde Isalam vallis defensum, adde œnea mille
Hostis in occursum tormenta tonantia ripis;
Tôt validas urbes, tôt propugnacula passim
Obvia, tôt riguis arva intercisa fluentis,
Totque lacus tantosque. Adde et frœnata per artem
jflïquora, luctantesque ad versa in claustra procellas,
Rumpendosque obices, refluique pericula ponti.
Quid si prœlerea vicino emota tumultu
Conjurata ruât Germania, si metus acres
Idem agitet Danos, Batavum si fraudibus orbis
Excitus in Gallos socialibus ingruat armis?
At neque sic Lodoici alacer deferveat ardor :
Ignescit magis, idem animo nosse omnia promptus
vers le milieu du seizième siècle, et ce ne fut qu'en 1648 que l'Es-
pagne reconnut les Provinces-Unies pour Etats souverains.
Corneille, x 11
a58 POÉSIES DIVERSES.
Son ardeur s'en redouble1, au lieu de s'arrêter;
Il veut tout reconnoître et tout exécuter,
Et présentant le front à toute la tempête, « 5
Agir également du bras et de la tête.
La même ardeur de gloire emporte ses sujets :
Chacun veut avoir part à ses nobles projets;
Chacun s'arme , et la France , en guerriers si féconde ,
Jamais sous ses drapeaux ne rangea tant de monde. 90
L'Anglois couvre pour nous la mer de cent vaisseaux ;
Cologne après Munster nous prête ses vassaux :
Ces prélats2, pour marcher contre des sacrilèges,
De leur sacré repos quittent les privilèges ,
Et pour les intérêts d'un Dieu leur souverain 9 5
Se joignent à nos lis , le tonnerre à la main.
Cependant la Hollande entend la Renommée
Publier notre marche et vanter notre armée.
Et praestare manu. Simul undique buccina Martem
Increpuit, simul agminibus coït ultima junctis
Gallia, quot fœto bellatrix patria nusquam
Fuderat ante sinu ; ratibus simul sequora centum
Anglusque Francusque tegunt; ruit Itala pubes,
Helvetiusque ferox, Bavarisque Colonia signis,
Et sacros acuens jamdudum Wesphalus enses ;
Nec bene collecta? terraque manque rapinse
Unius in Francœ cessissent prsemia gentis :
Tôt populos inter communis prseda jacere
Debuit occidui populator et orbis Eoi.
Interea Batavas crebrescit fama per urbes,
Et propius belli fragor intonat. Ocius omnes
j . Dans l'édition de 1688 du P. de la Rue : « en redouble. »
2. Maximilien de Bavière, évêque de Cologne, et Christophe-Ber-
nard van Galen, évêque de Munster, alliés de la France dans la
guerre contre la Hollande. Voyez sur ce dernier les Lettres de Mme de
Sèvigne\ tome I, p. 486, note 8, et tome III, p 122, note 4-
POESIES DIVERSES. a59
Le nautonier brutal et l'artisan sans cœur
Déjà de sa défaite osent se faire honneur : io<>
Cette âme du parti, cet Amstredam ' , qu'on nomme
Le magasin du monde et l'émule de Rome,
Pour se flatter d'un sort à ce grand sort égal ,
S'imagine à sa porte un second Annibal ;
S'y figure un Pyrrhus , un Jugurthe , un Persée ; m5
Et sur ces rois vaincus promenant sa pensée,
S'applique tous ces temps où les moindres bourgeois
Dans Rome avec mépris regardoient tous les rois :
Comme si son trafic et des armes vénales
Lui pouvoient faire un cœur et des forces égales. i i <>
Voyons, il en est temps, fameux républicains,
Nouveaux enfants de Mars, rivaux des vieux Romains,
Tyrans de tant de mers , voyons de quelle audace
Vous détachez du toit l'arme t et la cuirasse,
Et rendez le tranchant à ces glaives rouilles i i 6
Que du sang espagnol vos pères ont souillés.
Incaluere animis, operumque ignobile vulgus
Perpétua m tanto sperat sibi nomen ab hoste.
Imprimis rerum il la potens, validisque superba
Classibus, et magnae, si Dis placet, œmula Romse
Curia, prisca sequens latise vestigia laudis,
Porsennam ad muros iteruni, Pyrrhique elephantos,
Annibalisque minas, et divitis agmina Persei,
Tôt regum clades, et tôt fœcunda triumphis
Sarcla putat spatiis iterum volvenda remensis :
Démens, quse Latii viresque animosque senatus
Mercatu simulet turpi, et venalibus armis.
Quin agite, jEneadis suppar genus, et nova Marti s
Progenies, belli ferratos rumpite postes,
Tela focis rapite, et galeas ensesque parentum
[nduite, Austriacœ scabros rubigine cœdis.
i. Ce nom est écrit ainsi dans l'édition originale; Amsterdam, dans
celles du P. de la Rue et de Granet.
260 POÉSIES DIVERSES.
Juste ciel! me trompé-jeP ou si déjà la guerre
Sur les deux bords du Rhin fait bruire son tonnerre?
Condé presse Vesel', tandis qu'avec mon roi
Le généreux Philippe2 assiège et bat Orsoi \ 120
Ce monarque avec lui devant Rhimbergue tonne ,
Et Turenne promet Buric à sa couronne.
Quatre sièges ensemble , où les moindres remparts
Ont bravé si longtemps nos modernes Césars ,
Où tout défend l'abord (qui l'auroit osé croire?), 1 2 5
Mon prince ne s'en fait qu'une seule victoire8.
Sous tant de bras unis il a peur d'accabler,
Et les divise exprès pour faire moins trembler;
Il s'afFoiblit exprès pour laisser du courage ;
Pour faire plus d'éclat il prend moins d'avantage \ 1 3o
Et n'envoyant partout que des partis égaux ,
Il cherche à voir partout répondre à ses assauts.
Ludimur? an geruino Rheni de littore clamor
Insonuit ? Jam Vesaliœ furit acer in arces
CoNDiEus, jam Buricio Turennius instat,
Jam simul Orsoyam Lodoix cum fratre Philippo
Rhimbergamque premunt : quippe uni insistere lentum est
Ignavumque operi; numéro neve obruat hostes,
Partiturque aciem, et curas divisus in omnes
Fit minor, ut paribus sese hosti accommodet armis,
jEquior et veniat, nec jam sine sanguine, palma.
1. « Orsoi se rend au Roi le 3 juin, pendant que M. de Turenne
prenoit Burich. Monsieur le Prince prend Vesel le 4 ; Rhimberg (JRhein-
herg) se rend au Roi le 6 ; Emeric à Monsieur le Prince le 7. » (Abrège
chronologique du président Hénault.)
2. Philippe, duc d'Orléans, frère de Louis XIV.
3. « Quelle fut la surprise de tout le monde lorsque l'on apprit qu'il
Louis XIV) avoit mis le siège devant quatre fortes villes en même
temps, et que, sans qu'il eût fait ni lignes de circonvallation ni de
contrevallation, ces quatre villes s'étoient rendues à discrétion au pre-
mier jour de tranchée? » (Racine, Précis historique des campagnes de
Louis XIV.)
POESIES DIVERSES. 261
Que te sert, ô grand Roi, cette noble contrainte?
Partager tes drapeaux, c'est partager la crainte,
L'épandre en plus de lieux , et faire sous tes lois 1 3 5
Tomber plus de remparts et. de peuple à la fois.
Pour t'affoiblir ainsi, tu n'en deviens pas moindre;
Ta fortune partout sait Fart de te rejoindre :
L'effet est sûr au bras dès que ton cœur résout ;
Tu ne bats qu'une place, et tes soins vont partout : 140
Partout on croit te voir, partout on t'appréhende,
Et tes ordres font tout, quelque chef qui commande.
Ainsi tes pavillons à peine sont plantés ,
A peine vers les murs les canons1 sont pointés,
Que l'habitant s'effraye , et le soldat s'étonne : 145
Un bastion le couvre, et le cœur l'abandonne;
Et le front menaçant de tant de boulevarts ,
De tant d'épaisses tours qui flanquent ses remparts ,
Tant de foudres d'airain, tant de masses de pierre ,
Tant de munitions et de bouche et de guerre , 1 5 o
Tant de larges fossés qui nous ferment le pas,
Pour tenir quatre jours ne lui suffisent pas.
L'épouvante domine , et la molle prudence
Court au-devant du joug avec impatience
Parce tamen, Lodoice : etiam divisus, ubique
Magnus es, et spatio dura distrahis arma, timorem
Distrahis in plures, atque omnibus ingruis absens.
Aspice, vix arces fulserunt signa sub ipsas,
Primaque vicino steterunt tentoria campo ,
Jamque timor cives quatit intus, et ipse fatiscit
Clausus adhuc miles. Non illi patria virtus,
Aut Cereris vis ampla, aut belli immensa supellex,
Aut vigor, aut numerus; non vivo condita saxo
Mœnia, non plenis undantia flumina fossis
Dant animos, acuuntve : novo juvat obvia ferre
1 . « Tes canons, » dans les éditions du P. de la Rue et de Granet
i6t. POÉSIES DIVERSES.
Se donne à des vainqueurs que rien n'a signalés, i S 5
tët leur ouvre des murs qu'ils n'ont pas ébranlés.
Misérables ! quels lieux cacheront vos misères
Où vous ne trouviez pas les ombres de vos pères ,
Qui morts pour la patrie et pour la liberté
Feront un long reproche à votre lâcheté? 1 60
Cette noble valeur autrefois si connue ,
Cette digne fierté, qu'est-elle devenue?
Quand sur terre et sur mer vos combats obstinés
Brisoient les rudes fers à vos mains destinés ,
Quand vos braves Nassaus, quand Guillaume et Maurice ,
Quand Henri vous guidoit dans cette illustre lice1,
Quand du sceptre danois vous paroissiez l'appui %
N'aviez-vous que les cœurs et3 les bras d'aujourd'hui?
Colla jugo ; juvat énerves in vincula dextras,
Necdum tentatos victori pandere muros.
Quo fugitis, Batavi? non est satis apta triumpho
Materies, quatuor, totidem nec solibus, urbes
Hostis in imperium peregrinaque cedere jura?
Reza quid, et vacuo patet insuper Embrica vallo?
Proh pudor ! Egregios cineres, albentiaque ossa,
Proque focis quondam, pro libertate cadentum
Magnorum tuniulos pedibus pulsatis avorum,
Hac quacumque fuga est. At quo gens Martia vobis,
Auriaci proceres, vanseque superbia mentis
Quonam abiit? quonam ille mari tam nobilis ardor,
Et nuper Dani servatrix dextera sceptri ?
Nil agimus monitis : casus malaque omnia contra
i. Guillaume Ier de Nassau, dit le Taciturne, né en 1 533, assassiné
en i584 » Maurice, son fils aîné, né en 1667, mort en 1625 ; Frédéric-
Henri de Nassau, son autre fils, né en i584, mort en 1647, qui lut-
tèrent tous* trois héroïquement et avec une rare habileté contre les
Espagnols.
2. En 16 58, la Hollande avait envoyé une flotte au secours des
Danois, et les avait soutenus victorieusement contre Charles-Gustave,
roi de Suède.
3. Que, au lieu de et, dans l'édition de Granet.
POÉSIES DIVERSES. a63
Mais n'en réveillons point la mémoire importune :
Vous n'êtes pas les seuls , l'habitude est commune.
Et l'usage n'est plus d'attendre sans effroi
Des François animés par l'aspect de leur roi.
Il en rougit pour vous , et lui-même il a honte
D'accepter des sujets que le seul effroi dompte;
Et vainqueur malgré lui sans avoir combattu , 175
Il se plaint du bonheur qui prévient sa vertu.
Peuples, l'abattement que vous faites connoître
Ne fait pas bien sa cour à votre nouveau maître :
Il veut des ennemis , et non pas des fuyards
Que saisit l'épouvante à nos premiers regards ; 180
Il aime qu'on lui fasse acheter la victoire :
La disputer si mal , c'est envier sa gloire;
Et ce tas de captifs , cet amas de drapeaux
Ne font qu'embarrasser ses projets les plus beaux.
Console-t'en, mon Prince : il s'ouvre une autre voie
A te combler de gloire aussi bien que de joie ;
Si ce peuple à l'effroi se laisse trop dompter ,
Ses fleuves ont des flots à moins s'épouvanter.
Hactenus esse viros licuit, fortesque videri :
Nunc alio res versa, neque est ignavia probro ;
Ducitur in morem populis, ubi gallicus ensis
Imminet, et Gallos urget prœsentia Régis.
Ipse autem attonitus eoeptis atque omine belli
Fortunam incusat, quod tam pernicibus alis
Antevolet virtutem, et votis prœlia desint.
Nam neque captivi peditumque equitumque ducumque
Mille grèges, neque rapta placent Mavortia signa,
Exuviae indecores. Hostem, non \ilia qua?rit
Servitia, infamem censeri digna sub liastam ;
Nec prœdœ sitis, at laudum generosa cupido
Hos illum in fines, atque hœc in bella voeavit.
Ergo tibi alterius via laudis, et altéra, Magne,
Àlea pertentanda : fuga tibi cessit inermi
v
264 POÉSIES DIVERSES.
Us ont fait aux Romains assez de résistance
Pour en espérer une en faveur de la France1 ; r 90
Et ces bords où jamais l'aigle ne fit la loi
S'oseront quelque temps défendre contre toi.
A ce nouveau projet le monarque s'enflamme ,
Il l'examine , tâte , et résout en son âme ;
Et tout impatient d'en recueillir le fruit , 195
Il part dans le silence et l'ombre de la nuit.
Des guerriers qu'il choisit l'escadron intrépide
Glorieux d'un tel choix, et ravi d'un tel guide,
Marche incertain des lieux où l'on veut son emploi ,
Mais assuré de vaincre où l'emploiera son roi. 200
Le jour à peine luit que le Rhin se rencontre :
Tholus frappe les yeux2 ; le fort de Skeink se montre;
Degener Hollandus; sed non sic flumina cèdent,
Romanis ut quondam, et nunc impervia Francis :
Hic labor, hoc decus est. Stimulis ille acribus intus
Accensus, tacitumque alto sub pectore versans
Consilium, et placidse subducens membra quieti,
Lecta virum capita et primam rapit agmina secuni
Sub noctem, dux ipse operis, sociusque pericli.
Incedunt densi ordinibus per opaca viarum,
Incerti quo jussa trahant, sed vincere cerli,
In quoscumque trahant casus. Et jam nova cœlo
Cœperat ire dies, dubiaque albescere luce,
Insula cura Batavum, et bifidis apparuit ingens
Rhenus aquis, vacuasque acies insedit arenas
Tholusium contra et Skinki meraorabile vallum.
1. Le P. de la Rue et Granet ont mis : (f ta France, » au lieu
de : « la France, » qui est le texte de l'édition originale.
2. « Des gens du pays informèrent le prince de Coudé, que la sé-
cheresse de la saison avait formé un gué sur un bras du Rhin, auprès
d'une vieille tourelle qui sert de bureau de péage, qu'on nomme
Toll-huys, « la maison du péage, » dans laquelle il y avait dix-sept sol-
dats. Le Roi fît sonder ce gué par le comte de Guiche. Il n'y avait
POÉSIES DIVERSES. a65
On s'apprête au passage, on dresse les pontons;
Vers la rive opposée on pointe les canons.
La frayeur que répand cette troupe guerrière a o 5
Prend les devants sur elle , et passe la première ;
Le tumulte à sa suite et la confusion 4
Entraînent le désordre et la division.
La Discorde effarée à ces monstres préside ,
S'empare au fort de Skeink des cœurs qu'elle intimide, 2 1 o
Et d'un cor enroué fait sonner en ces lieux
La fureur des François et le courroux des cieux ,
Nec mora, pars manibus glebas et grandia ligna
Provisamque struem ponti, pars aerea plaustris
Fulmina convolvunt. Lacero simul horror amictu,
Et pavor, et rigidos vellens Discordia crines
Prœvolat, et Skinki summas evadit in arces.
Inde cavo stridens per propugnacula cornu,
Intima jam patriœ labentem in viscera Francum,
Ultores Superos invictaque fata ferentem,
qu'environ vingt pas à nager au milieu de ce bras du fleuve, selon
ce que dit dans ses lettres Pellisson, témoin oculaire, et ce que m'ont
confirmé les habitants. Cet espace n'était rien, parce que plusieurs
chevaux de front rompaient le fil de l'eau très-peu rapide. L'abord
était aisé; il n'y avait de l'autre côté de l'eau que quatre à cinq ca-
valiers et deux faibles régiments d'infanterie sans canon [onze à
douze cents hommes, infanterie et cavalerie, dit M. Rousset dans son
Histoire de Louvois, tome I, p. 35g). L'artillerie française les foudroyait
en flanc L'opinion commune était que toute l'armée avait passé ce
fleuve à la nage, en présence d'une armée retranchée, et malgré l'ar-
tillerie d'une forteresse imprenable, appelée le Tholus. » (Voltaire,
Siècle de Louis XIV , chapitre x.) — Le fort de Skink ou Schenk
est situé à la pointe de l'île de Bétau ou Bétuwen, à l'endroit où le
Rhin se divise en deux bras, dont l'un prend le nom de Wahal et
l'autre garde pendant quelque temps celui de Rhin. Voyez plus bas
le vers 218.
1 . L'édition de Granet donne ainsi ce vers :
Le tumulte à la suite et sa confusion.
266 POÉSIES DIVERSES.
Leur étale des fers, et la mort préparée,
Et des autels brisés la vengeance assurée.
La vague au pied des murs à peine ose frapper, 1 r 5
Que le fleuve alarmé ne sait où s'échapper ;
Sur le point de se fendre , il se retient , et doute
Ou du Rhin ou du Vhal s'il doit prendre la route.
Les tremblements de l'île ouvrant jusqu'aux enfers
(Ecoute , Renommée, et répète mes vers ), 220
Le grand nom de Louis et son illustre vie
Aux champs Elysiens font descendre l'Envie ,
Qui pénètre à tel point les mânes des héros,
Que pour s'en éclaircir ils quittent leur repos.
On voit errer partout ces ombres redoutables 225
Qu'arrêtèrent jadis ces bords impénétrables :
Drusus1 marche à leur tête , et se poste au fossé
Que pour joindre l'Yssel au Rhin il a tracé;
Et letum ante oculos, et ferrum, et vincula, et ignés
Occinit. jEthereas it raucus clangor in auras,
Insula quo longe tremit omnis, et omnibus horrens
Pressit corda gelu : stupet hinc atque in de refusum
Flumen, et allapsi nota ad divortia fluctus
Haerent ambigui quo sit fuga tutior amne,
Quos teneant cursus, Rhenum Vahalimne sequantur.
Quin et inaccessos fines lsetumque pererrans
Elysium, et clausos seterna nocte recessus,
Insignes ea fama animas atque invidus ardor
Elicit in lucem. Volitant exsanguia ripis
Heroum simulacra, impacatique Sicambri,
Cœsareumque genus, nomenque insigne Nerones,
Effossor Drusus fluviorum , et squalidus ora
1 . Drusus Nero (fils de Tiberius Nero et de Livie, frère puîné de
l'empereur Tibère), né Tan 38 avant J. C, mort l'an 9 après l'ère
chrétienne , fit creuser le canal connu sous le nom de Fossa Dru-
POÉSIES DIVERSES. 267
Varus * le suit tout pâle , et semble dans ces plaines
Chercher le reste affreux des légions romaines; î3o
Son vengeur après lui, le grand Germanicus2,
Vient voir comme on vaincra ceux qu'il n'a pas vaincus;
Le fameux Jean d'Autriche8, et le cruel Tolède4,
Sous qui des maux si grands crûrent par leur remède ;
L'invincible Farnèse6, et les vaillants Nassaus •, 235
Fiers d'avoir tant livré, tant soutenu d'assauts,
Reprennent tous leur part au jour qui nous éclaire,
Pour voir faire à mon roi ce qu'eux tous n'ont pu faire ,
Eux-mêmes s'en convaincre, et d'un regard jaloux
Admirer un héros qui les efface tous. 240
Varus, et ultrici fervens Germanicus ira.
Tu quoque sanguineas quatiens, Albane, secures,
Tu Farnesi, atque Austriadum tu gloria, Jane,
Nassaviique : omnes, dum sors et vita sinebat,
His olim insignes terrarum in fînibus, omnes
Nunc unum in juvenem defixi obtutibus haerent,
Miranturque suas coram decrescere laudes7.
1. P. Quintilius Varus, gouverneur de la Germanie, partie frontière
de la Gaule belgique, fut attiré dans une embuscade par Arminius,
chef des Chérusques, dans la forêt de Teutoburg, et y périt avec trois
légions Tan 9 avant J. C.
2. Tiberius Drusus Nero Germanicus (fils de Drusus Nero), né
l'an 16 avant J. C , vainquit Arminius en l'an 16 de l'ère chré-
tienne, et reprit les aigles de Varus Une autre campagne eût été
nécessaire pour achever la guerre et la défaite des Germains; mais
l'empereur Tibère envia cette gloire à son neveu.
3. Don Juan d'Autriche, fils naturel de Charles-Quint, né en i545,
mort en i5y8, gouverneur, en 1676, des Pays-Bas révoltés.
4. Ferdinand Alvarez de Tolède, duc d'Albe, né en i5o8, mort
en i582, lieutenant de Philippe II dans les Pays-Bas, de i566 à i5y3,
tristement célèbre par l'établissement du conseil de sang.
5. Alexandre, troisième duc de Farnèse, fut appelé dans les Pays-
Bas par Philippe II, en 1577, et y succéda à dpn Juan d'Autriche
6. Voyez ci-dessus, p. 26a, note 1.
7. Ce vers manque dans l'édition du P. de la Rué de 1688.
268 POÉSIES DIVERSES.
11 range cependant ses troupes au rivage ,
Mesure de ses yeux Tholus et le passage ,
Et voit de ces héros ibères ' et romains
Voltiger tout autour les simulacres vains.
Cette vue en son sein jette une ardeur nouvelle 245
D'emporter une gloire et si haute et si belle ,
Que devant ces témoins à le voir empressés
Elle ait de quoi ternir 2 tous les siècles passés :
« Nous n'avons plus, dit-il , affaire à cesBataves
De qui les corps massifs n'ont que des cœurs d'esclaves ;
Non, ce n'est plus contre eux qu'il nous faut éprouver,
C'est Rome et les Césars que nous allons braver.
De vos ponts commencés abandonnez l'ouvrage ,
François; ce n'est qu'un fleuve , il faut passer à nage,
Et laisser , en dépit des fureurs de son cours , 2 5 5
Aux autres nations un si tardif secours.
Prenez pour le triomphe une plus courte voie :
C'est Dieu que vous servez, c'est moi qui vous envoie;
Ut stetit, et validos famoso in littore Magnus
Explicuit cuneos, Rhenumque immensa fluentem
In spatia, et rapido surgentem murmure vidit,
Continuo ingentes umbrse, circumflua turba,
Heroumque altrix menti sese obtulit setas,
Et mentem subitus calor insilit : ardet inausum
Moliri facinus, veterumque lacessere famam
iEmulus, et priscis unum se opponere saeclis.
Ergo pares gaudens tandem delapsus in hostes,
Nec fore cum Batavis, sed Roma et Csesare bellum :
« Ite, ait, inceptum, Franci, dimittite pontem ;
Hoc egeant alise tardo molimine gentes :
Certa mibi vobisque via est, hac qua via cum que
Esse potest ferro ; tumidos pervadite fluctus,
1 . ibères , espagnols.
•>.. Tenir, dans l'édition de Lefèvre ; c'est une faute toute matérielle,
qui produit cependant un faux sens.
POÉSIES DIVERSES. 269
Allez , et faites voir à ces flots ennemis
Quels intérêts le ciel en vos mains a remis. » 260
G étoit assez en dire à de si grands courages :
Des barques et des ponts on hait les avantages ;
On demande , on s'efForce à passer des premiers1 .
Grammont 2 ouvre le fleuve à ces bouillants guerriers ;
Ite : fugax Batavus inimicaque sentiet unda
Meque, Deurnque ducem. » Nec plura effatus, el ingens
Laetantum exoritur clamor, primique petentum
Laudem aditus. Reliquos fortis Grammontius anteit
Agmen agens equitum, loricatosque maniplos.
Hune et Borbonidas referens ab origine reges
1. Le passage du Rhin eut lieu le 12 juin. — Le récit qu'en fait
Boileau dans sa IVe épître adressée au Roi (vers 97-112) a beau-
coup de ressemblance a^ec celui-ci, et l'on y voit figurer la plupart
des mêmes noms :
Ils marchent droit au fleuve, où Louis en personne,
Déjà prêt à passer, instruit, dispose, ordonne.
Par son ordre Grammont le premier dans les flots
S'avance soutenu des regards du héros :
Son coursier écumant sous un maître intrépide,
Nage tout orgueilleux de la main qui le guide
Revel le suit de près : sous ce chef redouté
Marche des cuirassiers l'escadron indompté.
Mais déjà devant eux une chaleur guerrière
Emporte loin du bord le bouillant Lesdiguière ,
Vivonne, Nantouillet, et Coislin, et Salart :
Chacun d'eux au péril veut la première part.
Vendôme, que soutient l'orgueil de sa naissance,
Au même instant dans l'onde impatient s'élance.
La Salle, Beringhen, Nogent, d'Ambre, Cavois
Fendent les flots tremblants sous un si noble poids.
2. Armand de Gramont, comte de Guiche, fils aîné du maréchal
de Gramont, lieutenant général du corps d'armée de Monsieur le
Prince, né en i638, mort en 1678. Voyez ci-dessus, p. 264, note 2.
Il reçut, dit la Gazette du 22 juin, neuf coups tant dans la main que
dans ses habits et son épée. Le comte de Guiche a écrit une relation
du passage du Rhin, qui se trouve au tome LVII (p. io5-ii8< de la
2e série des Mémoires de la collection Petitot.
270 POÉSIES DIVERSES.
Vendôme1, d'un grand roi race toute héroïque2, 265
Vivonne8, la terreur des galères d'Afrique,
Briole4, Chavigny6, Nogent6, et Nantouillet7,
Sous divers ascendants 8 montrent même souhait .
Vendocinus, Libycaeque Vivonius arbiter undae,
SuBisiusque, CoESLiivusque, et Salleus, et tu
Thermiade, SALLARTusque , et Chavinius audax,
Et Brïolus, REVELUsque, et Lesdigueria proies
Saesius, adversamque haud emersurus in oram
Nogentus sequitur; tum Najjtulietus, et ardens
1 . Le chevalier de Vendôme, arrière-petit-fils de Henri IV, et frère
du duc, qui servait aussi dans l'armée de Flandre. Il « avoit traversé
Je Rhin à cheval,... se mêla, l'épée à la main, parmi les ennemis,...
gagna un drapeau et un étendard, qu'il apporta au Roi, qui l'accueillit
selon que le méritoit un exploit si beau et d'un prince qui n'a pas
encore dix-sept ans. » [Gazette du 29 juin.)
3. Dans l'édition de 1688 du P. de la Rue : « tout héroïque. »
3. Louis-Victor de Rochechouart, duc de Mortemart et de Vivonne,
général des galères de France depuis 1669, nommé maréchal de France
en 1675, mort au mois de septembre 1688. Il fut blessé au passage
du Rhin. Voyez les Lettres de Mme de Sévïgné, tome III, p. 111
et i45.
4- Le comte deBriord, souvent appelé Briole ou Briolle, fut pre-
mier écuyer de Monsieur le Duc, ambassadeur à Turin en 1697, à
la Haye en 1699. Il est nommé dans la relation du comte deGuiche.
5. La Gazette (29 juin) rapporte que le comte de Guiche, qui se
jeta le premier dans le fleuve, fut suivi immédiatement du duc de
Coislin, des comtes de Saulx, — de Nogent, des marquis de Cha-
vigny, de Guitry, etc. Le marquis de Chavigny, fils du secrétaire
d'État, fut brigadier des armées du Roi et mourut en 171 8.
6. Armand de Bautru, comte de Nogent, lieutenant général au
gouvernement d'Auvergne, maréchal de camp des armées du Roi et
maître de la garde-robe. Il fut tué au passage du Rhin, comme il est
dit ci-après, vers 3oi-3o4- "Voyez sur lui les Lettres de Mme de
Sévignê, tome I, p. 4o3 et 4°4 ; et tome III, p. 109 et m.
7. François du Prat, descendant du chancelier, fils cadet du mar-
quis de Nantouillet.
8. C'est-à-dire sous des astres divers, avec des chance*, des desti-
nées diverses. \J ascendant , en terme d'astrologie, est l'horoscope.
POÉSIES DIVERSES. 271
De Termes1, et Coaslin2, et Soubise8, et la Salle*,
Et de Saulx6, et Revel*, ont une ardeur égale ; 270
Et Guitry7, que la Parque attend sur l'autre bord ,
Sallart8 et Beringhem 9 font un pareil effort.
Je n'achèverois point si je voulois ne taire
Ni pas un commandant , ni pas un volontaire :
L'histoire en prendra soin , et sa fidélité 2 7 5
Berenghenus, et exanimes mox inter acervos
Guitrius hostiii victor sternendus arena.
Inde alii centum, atque alii, quos œmula virtus
Excitât. Olli alacres, quanquam refugique tremiscant
1. Roger de Pardaillan de Gondrin, marquis de Termes. Il fut
blessé au passage du Rhin. Voyez les Lettres de Mme de Sécigné,
tome III, p. ni et i45.
2. Armand de Cambout, duc de Coislin, mort le 16 septembre 170a,
âgé de soixante-sept ans. Il fut blessé à la main au passage du Rhin.
Voyez ci-dessus, p. 270, note 5.
3. François de Rohan , fils puîné d'Hercule de Rohan, duc de
Montbazon. Il traversa le Rhin à la nage, dit Moréri, à la tête des
gendarmes de la garde.
4. Le marquis de la Salle ayant passé le Rhin un des premiers, fut
blessé de cinq coups par les cuirassiers, qui s'étant jetés à Feau pré-
cipitamment après lui, le prirent pour un Hollandais.
5. François-Emmanuel, comte de Sault, arrière-petit-fils du con-
nétable de Lesdiguières, fut blessé au bras, au passage du Rhin, et
eut un cheval tué sous lui. Il mourut en 1681.
6. Charles- Amédée de Broglio, comte de Revel, colonel des cui-
rassiers, frère du premier maréchal de Broglie. Il fut blessé de trois
coups d'épée dans l'action qui suivit le passage du Rhin. Voyez sur
lui les Lettres de Mme de Sévigné , tome HI , p. 1 1 1 , et tome IX ,
p. 172 et 173.
7. Guy de Chaumont de Guitry, pour qui le Roi avait créé la
charge de grand maître de la garde-robe. Voyez ci-après , vers 345.
8. La Gazette (22 juin) dit que dans le premier passage, à la suite
du comte de Guiche, les seules personnes de qualité qui périrent
furent le comte de Nogent et le chevalier de Salart. Voyez aussi le
Mercure galant de 1673, tome II, p. 3o2.
9. Le marquis de Beringhen, premier écuyer du Roi et colonel du
régiment Dauphin. Voyez le Mercure, p. 3o4«
272 POÉSIES DIVERSES.
Les consacrera mieux à l'immortalité.
De la maison du Roi l'escadre ambitieuse
Fend après tant de chefs la vague impétueuse ,
Suit l'exemple avec joie ; et peut-être , grand Roi ,
Avois-je là quelqu'un qui te servoit pour moi l : 2K0
Tu le sais, il suffit. Ces guerriers intrépides
Percent des flots grondants les montagnes liquides.
La tourmente et les vents font horreur aux coursiers 2 ;
Mais cette horreur en vain résiste aux cavaliers :
Chacun pousse le sien au travers de Forage*, 285
Le péril redoublé redouble le courage •,
Le gué manque, et leurs pieds semblent à pas perdus
Chercher encor le fond qu'ils ne retrouvent plus8;
Ils battent l'eau de rage , et malgré la tempête
Qui bondit sur leur croupe et mugit sur leur tête , 2 g o
L'impérieux éclat de leurs hennissements
Veut imposer silence à ses mugissements :
Alipedes, ventoque tumens immugiat unda,
Invadunt fluvium. Strictis laeva instat habenis,
Dexte^a sublato micat ense, nec usus in armis
Est super. At collum qua thorax pressior ambit,
Ignivomos texere tubos, nitrataque flammae
Semina, ne madido vanescant uda liquore,
Implicuere comis et summo in vertice gestant.
Jam sola deseruere, et jam vacua omnia nutant
Sub pedibus; timido lym plias ruit ungula pulsu,
Incertusque jubas sonipes quatit, et caput alto
Arduus hinnitu : vix illum fraena coercent
1. Un de ses fils : voyez ci-dessus, p. 188, note 4, et p. 189, note 2.
2. « Il faisoit ce jour-là un vent fort impétueux, qui, agitant les
faux du Rhin, en rendoit l'aspect beaucoup plus terrible. » (Racine,
Précis historique des campagnes de Louis XIV.}
3. « Le terrain venant à manquer sous les pieds de leurs chevaux,
ils les font nager, et approchent avec une audace que la présence du
Roi pou voit seule leur inspirer. » (Ibidem.)
POÉSIES DIVERSES. 27}
Le gué renaît sous eux; à leurs crins qu'ils secouent,
Des restes du péril on diroit qu'ils se jouent,
Ravis de voir qu'enfin leur pied mieux affermi, 295
Victorieux des flots, n'a plus qu'un ennemi.
Tout à coup il se montre , et de ses embuscades
Il fait pleuvoir sur eux cent et cent mousquetades ;
Le plomb vole, l'air siffle , et les plus avancés
Chancellent sous les coups dont ils sont traversés. 3 00
Nogent, qui flotte encor dans les gouffres de l'onde ,
Eu reçoit dans la tête une atteinte profonde1 :
Il tombe , l'onde achève , et l'éloignant du bord ,
S'accorde avec le feu pour cette double mort.
Que vois-je ?les chevaux, que leur sang effarouche, 3 o 5
Bouleversent leur charge, et n'ont ni frein ni bouche,
El le fleuve grossit son tribut pour Thétis
De leurs maîtres et d'eux pêle-mêle engloutis.
Le mourant qui se noie à son voisin s'attache,
Frendentem, et patulis ructantem naribus undas.
His adeo incensis numéro plausuque sequentum
Ripa recedebat longe, mediumque tenebant
Infraenum cursu vastaque voragine flumen.
Ecce autem e laiebris acies inimica repente
Cum sonitu erumpens et barbarico ululatu,
Adversum obvallat numeroso milite littus.
Mox, patriam ulcisci quando pudor ultimus urget,
Prœcipitant in aquas, et certa in vulnera proni,
Sulphureum excutinnt cannis feralibus imbrem.
Fit fragor, ignito stridens it limite plumbum
Nogenti in frontem : mit ille, haustusque fluento,
Morte périt gemina. Paribus cadit undique fatis
Turba frequens, mixtique viris, passi nique soluti
Per medios rapiuntur equi ; spumantia fervent
Cserula, et emotis exœstuat amnis arenis :
1. Voyez ci-dessus, p. 270, note 6.
Corneille, x 18
274 POÉSIES DIVERSES.
Et l'entraîne après lui sous le flot qui le cache. 3 1 «
Quel spectacle d'effroi , grand Dieu ! si toutefois
Quelque chose pouvoit effrayer des François.
Rien n'étonne : on fait halte * , et toute la surprise
N'obtient de ces grands cœurs qu'un moment de remise,
Attendant qu'on les joigne, et qu'un gros qui les suit 3 1 5
Enfle leur bataillon, que l'œil du Roi conduit.
Le bataillon grossi gagne l'autre rivage,
Fond sur ces faux vaillants , leur fait perdre courage ,
Les pousse , perce , écarte , et maître de leur bord ,
Leur porte à coups pressés l'épouvante et la mort. 320
Tel est sur tes François l'effet de ta présence ,
Grand Monarque ; tels sont les fruits de ta prudence ,
Qui par de 2 feints combats prit soin de les former
A tout ce que la guerre a d'affreux ou d'amer3.
Horrendum ! scirent si quicquam horrescere Galli.
Ast illi capti insidiis subsistere primum,
Dura coëat latis dispersum fluctibus agmen.
Tum certi inter se, collectoque impete, leti
Mille minas inter volucrisque tonitrua flanimae,
Deproperare viam, et cseco vada sternere cursu.
Instigant studiis socii, et spectator adurget
Magnus. Hic irato luctantes aspicit amni,
Agnoscitque suos ; et quas ipse indidit artes,
Quos animos, quas ante manus in bella, per aestus
Perque hiemes, fictis toties formavit in armis.
1. Dans l'édition originale, imprimée avec beaucoup de soin, mais
dans une orthographe particulière, il y a ici alte, ce qui indique que
ce mot ne se prononçait pas comme aujourd'hui. On était loin d'ail-
leurs d'être d'accord sur son origine , comme nous l'apprenons par
Furetière, et c'est sans doute ce qui en rendait la prononciation et
l'orthographe incertaines. Au reste, les éditions du P. de la Rue et de
Granet portent également alte. Voyez le Lexique.
a. Des, dans les OEuvres diverses et dans les éditions suivantes.
3. Voyez ci- dessus, p. 198, note 1.
POESIES DIVERSES. a75
Tu les faisois dès lors à ce qu'on leur voit faire ; 3a 5
Et l'espoir d'un grand nom ni celui du salaire
Ne font point cette ardeur qui règne en leurs esprits :
Tu les vois, c'est leur joie , et leur gloire, et leur prix.
Tandis que l'escadron, fier de cette déroute,
Mêle au sang hollandois les eaux dont il dégoutte , 3 2 o
De honte et de dépit les mânes disparus
De ces bords asservis qu'en vain ils ont courus ,
Y laissent à mon roi , pour éternel trophée ,
Leurs noms ensevelis et leur gloire étouffée.
Mais qu'entends-je? et d'où part cette grêle de coups ?
Généreuse noblesse, où vous emportez-vous?
La troupe qu'à passer vous voyez empressée
A courir les fuyards s'est toute dispersée ;
Et vous donnerez seuls dans ce retranchement
Où l'embûche est dressée à votre emportement : 340
A peine y serez- vous cinquante contre mille;
Le vent s'est abattu , le Rhin s'est fait docile ,
Mille autres vont passer, et vous suivre à l'envi \
Nunc usu probat, et vero discrimine gaudet.
Ilicet haud telis et adacto saucius igné
Terga dédit Batavus : cunctantem audacia victrix
Expulit. Incurrunt juvenes, ausoque potiti
Perrumpunt aditum, atque alto se gurgite tollunt
Manantes rivis, nec segnius arma frementes.
Quœ nunc prima loquar? Famamne remota petentem
Terrarum, et plena fluviorum effracta sonantem
Claustra tuba? refugosne sua in penetralia Mânes,
Nudatos titulis et priscae laudis honore?
An magis immensam bellantum ex ordine gentem ,
Totaque sub signis ducibusque natantia castra,
Jam docili Rheno, jam languescentibus undis?
An potius cseca insidias in valle parantem,
Arboribus tutum dubiisque anfractibus hostem,
Mille viros : hue immissis erumpere frenis
276 POÉSIES DIVERSES.
Mais je donne un avis que je vois mal suivi.
Guitry tombe par terre1. O ciel, quel coup de foudre !
Je te vois , Longueville , étendu sur la poudre 2 ;
Avec toi tout l'éclat de tes premiers exploits
Laisse périr le nom et le sang des Dunois8,
Et ces dignes aïeux qui te voy oient4 les suivre
Perdent et la douceur et l'espoir de revivre. 3 5o
Nobilium impavidam, turma licet impare, pubem;
Scrutarique vêpres gladio, palisque revulsis
Cominus extremos Batavum stimulare furores?
Audio displosos inimicse grandinis ictus,
Pugnantumque minas, suspiriaque œgra cadentum.
Tene etiam in mediis, Longavill^ee, jacentem,
Tecum atavos, tecum, ah! nomen Dunense sepultum
Aspicio? Tene angustis in rébus iniquo
Congressos numéro proceres, juveniliaque ausa
Sustentantem animis video, Cond^ee? feraque
Strage virum longse redimentem tsedia pacis?
Qua mis, impulsos repetito vulnere csedis
Obstantum cuneos; qua non ruis, ignea vultus
i. Voyez ci-dessus, p. 271, vers 271, et note 7. « Il a vécu une
heure après sa blessure. » (Mercure galant, 1673, tome II, p. 307.)
2. Voyez ci-dessus, p. 208, note 2. — « M. de Longueville avoit
forcé la barrière, où il s'étoit présenté le premier; il a été aussi le
premier tué sur-le-champ. » [Lettres de Mme de Sévigné, tome III,
p. 109.) — « Vous verrez dans toutes {les relations) que M. de Lon-
gueville est cause de sa mort et de celle des autres. » (Ibidem, p. 117.)
— a II n'y aurait eu personne de tué dans cette journée, sans l'impru-
dence du jeune duc de Longueville. On dit qu'ayant la tête pleine
des fumées du vin, il tira un coup de pistolet sur les ennemis qui de-
mandaient la vie à genoux, en leur criant : « Point de quartier pour
« cette canaille ! » Il tua d'un coup un de leurs officiers. L'infanterie
hollandaise désespérée reprit à l'instant ses armes, et fit une décharge
dont le duc de Longueville fut tué. » (Voltaire, Siècle de Louis XIV
chapitre x.)
3. Voyez ci-dessus, p. 208, fin de la note 2.
4 Qui te voyenty mais à tort, dans l'édition de Lefèvre.
POÉSIES DIVERSES. a75
Condé va te venger, Condé dont les regards
Portent toute Nortlinghe et Lens1 aux champs de Mars;
Il ranime , il soutient cette ardente noblesse
Que trop de cœur épuise ou de force ou d'adresse ;
Et son juste courroux , par de sanglants effets, 35 5
Dissipe les chagrins d'une trop longue paix.
L'ennemi qui recule, et ne bat qu'en retraite,
Remet au plomb volant à venger sa défaite :
On l'enfonce. Arrêtez, héros ! où courez-vous?
Hasarder votre sang, c'est les exposer tous : 36 o
C'est hasarder Enguien, votre unique espérance2,
Enguien, qui sur vos pas à pas égaux s'avance.
Tous les cœurs vont trembler à votre seul aspect ;
Mais le plomb n'a point d'yeux, et vole sans respect :
Fulgura semotos etiam sine vulnere csedunt 3 :
Multa oculis Norlinga et Lentia multa recursat.
Nec jam audent conferre manum, tantum eminus imbrem
Fatiferum ingeminant. Ah ! ne te ferrea lsedat
Tempestas! neu te, neu tecum passibus sequis
Currentem Enguinettm tantis immitte periclis.
Heu scelus ! infami violatur pervia glande
Lseva manus. Victas, Batavi, ne plangite ripas,
Concisasque acies, et csede natantia rura :
Borbonio maduit tellus captiva cruore.
i. Nordlingen en Bavière, Lens aujourd'hui dans le Pas-de-
Calais, lieux illustrés par deux victoires du grand Condé, en 1645
et 1648.
2. Voyez ci-dessus, p. 208, note 1. Le duc d'Enghien était fils
unique du grand Condé.
Enguien, de son hymen le seul et digne fruit,
Par lui dès son enfance à la victoire instruit.
(Boileau, Épitre IV, vers i35 et t36.)
3. Au lieu de ces trois vers : Qua mis, etc., qui n'ont pas été ren-
dus par Corneille, on lit simplement dans l'édition de 1688 :
Qua ruis, exanimes fugiunt sine vulnere turmœ.
278 POÉSIES DIVERSES.
Votre gauche1 Téprouve. Allez, Hollande ingrate, 3 65
Plaignez-vous d'un malheur où tant de gloire éclate ;
Plaignez-vous à ce prix de recevoir nos fers :
Trois gouttes d'un tel sang valent tout l'univers.
Oui , de votre malheur la gloire est sans seconde ,
D'avoir rougi vos champs du premier sang du monde :
Les plus heureux climats en vont être jaloux ;
Et quoi que vous perdiez, nous percions plus que vous.
La Hollande applaudit à ce coup téméraire ;
Le François indigné redouble sa colère;
Contre elle Knosembourg2 ne dure qu'une nuit; 375
Arnheim3, qui l'ose attendre, en deux jours est réduit;
Et ce fort merveilleux sous qui l'onde asservie
Arrêta si longtemps toute la Batavie ,
Qui de tous ses vaillants onze mois fut recueil,
Hoc vinci decuit pretio, cladisque pudorem
Eluit hic vestro commixtus sanguine sanguis.
Non impune tamen, nec erit sine vindice vulnus.
Crudescunt ira? Francorum, et promptius arces
ltur in adversas. Vix Knozemburgica noctem,
Vix lucem geminam Arnhem uni ; vix detinet unam
Ille olim Batavae scopulus virtutis, et unus
Undecimum in mensem belli mora, Skinkius agger.
1 . Votre main gauche, Iseva manus, comme le dit le P. de la Rue. —
« Monsieur le Prince, dit le Mercure galant (au tome cité, p. 296), a été
blessé au poignet gauche. » — « Un capitaine de cavalerie, nommé
Ossembrœk, qui ne s'était point enfui avec les autres, court au prince
de Condé, qui montait alors à cheval en sortant de la rivière, et lui
appuie son pistolet à la tête. Le prince par un mouvement détourna le
coup, qui lui fracassa le poignet. Condé ne reçut jamais que cette
blessure dans toutes ses campagnes. » (Voltaire, Siècle de Louis XIV ',
chapitre x.)
2 . Fort situé sur le Wahal , vis-à-vis de Nimègue ; il fut pris par
Turenne le 17 juin.
3. Ville considérable du duché de Gueldre , prise par Turenne le
14 juin.
POÉSIES DIVERSES. 279
L'inaccessible Skeink, coûte à peine un coup d'oeil1. 38 o
Que peut Orange2 ici pour essai 3 de ses armes,
Que dérober sa gloire aux communes alarmes,
Se séparer d'un peuple indigne d'être à lui,
Et dédaigner des murs qui veulent notre appui ?
La rive de l' Yssel si bien fortifiée , 3 8 5
Par ce juste mépris à nos mains confiée,
Ne trouve parmi nous que des admirateurs
De ses retranchements et de ses déserteurs.
Yssel trop redouté , qu'ont servi tes menaces?
L'ombre de nos drapeaux semble charmer tes places : 390
Loin d'y craindre le joug, on s'en fait un plaisir;
Et sur tes bords tremblants nous n'avons qu'à choisir.
Ipse fugam Auriacus, ne tergo inopinus inliœrens
Praeripiat victor, versis prius occupât armis 4,
Hostiies etiam ante minas : déserta patescunt
Munimenta Isalse, et fragili congestus arena
Cespitibusque labor Gallo fît Indus inermi.
Hinc Isalse impositas idem rapit impetus urbes,
Kempenque Zwolamque ; jugum Daventria felix
1. Voyez ci-dessus, p. 264, note 2. Skink, pris en i636 par les
Hollandais, après un long siège, fut assiégé par nos troupes le 18 juin
1672, et pris le 21. Boileau ne manque pas de faire allusion à ce fait
dans sa IVe épître (vers 147 et 148) :
Bientôt on eût vu Skink dans mes vers emporté
De ses fameux remparts démentir la fierté.
2. Guillaume d'Orange, qui fut depuis roi d'Angleterre, le petit-
fils de Henri de Nassau nommé plus haut, p. 262, vers 166. Il avait été
d'abord capitaine général des forces néerlandaises; puis le peuple,
poussé à bout par les dures conditions que voulait lui imposer
Louis XIV, le proclama stathouder de Hollande.
3. H y a essais, au pluriel, dans les Œuvres diverses de 1788.
4. Ici encore il y a un vers de moins dans l'édition de 1688, qui
donne seulement :
Ipse fugam Auriacus versis simul occupât armis.
280 POÉSIES DIVERSES.
Ces troupes qu'un beau zèle à nos destins allie
Font dans l'Ouver-Yssel régner la Westphalie;
Et Grolle , Swol , Kempen montrent à Déventer * 3 9 5
Qu'il doit craindre à son tour les bombes de Munster.
Louis porte à Doësbourg 2 sa majesté suprême ,
Et fait battre Zutphen 3 par un autre lui-même ;
L'un ouvre, l'autre traite, et soudain s'en dédit :
De ce manque de foi Philippe le punit, 400
Jette ses murs par terre , et le force à lui rendre
Ce qu'une folle audace en vain tâche à défendre.
Ces colosses de chair robustes et pesants
Admirent tant de cœur en de si jeunes ans 4 :
D'un héros dont jamais ils n'ont vu le visage 40 5
En cet illustre frère ils pensent voir l'image,
L'adorent en sa place, et recevant sa loi,
Pastorale subit, Grollseque exterrita casu
Wesphalicum avertit tectis flagrantibus ignem.
Fulminât ante alios Lodoicus, et édita Druso
Mœnia Dosburgi proprio dum numine terret,
Lectam aciem tradens et prospéra fata Philippo,
Zutplianise quassat fraterno numine muros.
His ille auspiciis commissoque agmine lœtus,
Nutantem inque ipsa jam deditione rebellem
Castigat populum. Mirantur inertia vulgi
Pectora robustis nequicquam obducta lacertis,
Tantum animi, tantas tam pulchro in corpore vires,
Tarn vigiles juveni cœpta ad castrensia curas ;
1. Grolle, aujourd'hui dans la Gueldre, Zwol et Kempen, dans
l'Over-Yssel ou Yssel supérieur, furent pris presque simultanément
par les troupes de l'évêque de Munster (en Westphalie), qui s'empa-
rèrent de Deventer le 21 juin.
2. Cette ville de la Gueldre fut prise le 21 juin.
3. Zutphen, autre ville de la Gueldre, fut pris le 25 par Monsieur,
frère du Roi.
4. Le duc d'Orléans était né en 1640, et par conséquent avait déjà
trente-deux ans.
POÉSIES DIVERSES. 281
Reconnoissent en lui le sang d'un si grand roi.
Ainsi , lorsque le Rhin , maître de tant de villes ,
Fier de tant de climats qu'il a rendus fertiles , 410
Enflé des eaux de source et des eaux de tribut ,
Approche de la mer que sa course a pour but,
Pour s'acquérir l'honneur d'enrichir plus de monde ,
Il prête au Vhal1, son frère , une part de son onde;
Le Vhal , qui porte ailleurs cet éclat emprunté , 415
En soutient à grand bruit toute la majesté,
Avec pareil orgueil précipite sa course ,
Montre aux mêmes effets qu'il vient de même source ,
Qu'il a part aux grandeurs de son être divin ,
Et sous un autre nom fait adorer le Rhin. 420
Qu'il m'est honteux, grand Roi, de ne pouvoir te suivre
Dans Nimègue qu'on rend2, dans Utrecht qu'on te livre 3,
Et de manquer d'haleine alors qu'on voit la foi
Sortir de ses cachots , triompher avec toi ,
Et de ses droits sacrés par ton bras ressaisie, 425
Heroumque genus, Regemque in fratre pavescunt.
Sic postquam anfractu vario centumque volutus
Urbibus, extremum properat jam Rhenus in orbem ,
Nativisque tumens et vectigalibus undis
Germanum in Vahalim diviso gurgite fluctus
Exonérât : sonat ille vadis, fratrisque timenda
Majestate ferox, fremitumque imitatus et iras,
Communes probat seternis e fontibus ortus,
Et Divum Deus ipse refert, aliisque colendum
Ostentat populis alio sub nomme Rhenum.
Nec satis est animos passim trepidare labantes
Inque novos mores nrbes transire coactas :
Sub juga jam totis ultro regionibus itur.
Cessit et Austrini latus sequoris, ardua cessit
Neumagus, et magnse Trajeetum nobile gentis
1. lie Wabal. — ?.. Le 9 juillet. — 3. Le 20 juin.
282 POÉSIES DIVERSES.
Chez tes nouveaux sujets détrôner l'hérésie !
La Victoire s'attache à marcher sur tes pas ,
Et ton nom seul consterne aux lieux où tu n'es pas.
Amstredam ' et la Haye en redoutent l'insulte :
L'un t'oppose ses eaux2, l'autre est toute en tumulte;
La noire politique a de 8 secrets ressorts
Pour y forcer le peuple aux plus injustes morts;
Les meilleurs citoyens aux mutins sont en butte k :
L'ambition ordonne , et la rage exécute ;
Et qui n'ose souscrire à leurs sanglants arrêts, 435
Qui s'en fait un scrupule, est dans tes intérêts :
Sous ce cruel prétexte on pille , on assassine ;
Chaque ville travaille à sa propre ruine ;
Chacun veut d'autres chefs pour calmer ses terreurs.
Tota adeo cum gente caput. Micat eruta fracto
Carcere relligio, festaque per oppida pompa
Fœda situ longo patrum delubra revisens
Expiât : erepta fugiunt mendacia larva.
Francum urbes, Francum arva sonant, Francum alta volutant
Littora. Discordi convellitur Haga tumultu ;
Et vinci impatiens, prodi se curia jactat.
Nulla fides : Gallus jam quisque nocensque putatur,
Ni furat in proceres, et vulgi exempla secutus
Sese odiis turpique probet formidine civein ;
Nec furiis modus : ipsa manu subvertere claustra
Admissoque lubet sola naufraga mergere ponto ;
Et miseris ea visa salus. Labor omnibus, aurum
Defodere, inque alios subvectum avertere fines ;
1. Ici l'édition du P. de la Rue (1688) porte, comme l'édition in-
folio : Amstredam.
1. Le peuple d'Amsterdam força ses magistrats d'ouvrir les écluses
et de percer les digues qui empêchaient la mer de se répandre dans
les campagnes.
3. Des, dans les OEuvres diverses et dans les éditions suivantes.
4. Le grand pensionnaire Jean de Witt et son frère Corneille
furent massacrés par la populace, à la Haye, le 2a août 167a.
POÉSIES DIVERSES. 28*
Laisse-les , grand vainqueur, punir à leurs fureurs, 440
Laisse leur barbarie arbitre de la peine
D'un peuple qui ne vaut ni tes soins ni ta haine ;
Et tandis qu'on s'acharne à s'entre-déchirer,
Pour quelque mois ou deux laisse-moi respirer.
Et servire levé est, dum ne victoris in usus
Tôt captiva cadant aggestse pondéra gaza? :
Tanta famés auri, verœque oblivio laudis.
At non idem animus tamen omnibus, aut furor idem :
Sunt qui fraude suis quserunt solatia rébus.
Ergo pacem alii verbis et supplice cultu,
Victoris fusi ante pedes, veniamque precantur
Exosi veniam, legesque eludere certi :
Bella alii, sociasque aquilas, fœdusque minantur,
Martis inexperti, peregrino at Marte féroces.
Nec regem latuere doli : fallacia gentis
Vota, levesque minas, paci belloque paratus
Despicit, et : « Venise sic nomine luditis, inquit?
Nec venia, Batavi, nec vos dignabimur ira.
Nam quid iners ultra, socii, nos detinet hostis?
Parcamus ferro. Franca cecidisse superbum est
Regalique manu : proprio ruât ipse furore,
Verîat et imbellem scelerata in viscera dextram,
Hostibus baud aliis, alioque haud funere dignus. »
Dixit, et excitum Stygiis e faucibus agmen
Civilesque trabens secum Discordia pestes,
Infaustas populat, quibus héros abstinet, oras.
Hic patriae fines, votisque vocantia régna
Securus rerum spoliisque revisit onustus.
[ntremuit tellus, abeuntique alta Genapi
Culmina, et irrigui princeps Bommelia tractus,
Et Vordum, et Gravia, et Crepicordi nobile vallum
Se simul advolvere, et iter strsvere ruina.
Tu f tamen ignavam ne sperne evertere gentem.
1. « Les {quatorze) vers suivants ont été supprimés dans la sixième
édition des Poésies du P. de la Rue, faite à Anvers en i6g3. » {Note
de Granet.) — Ils manquent déjà dans celle qui a été faite à Paris
284 POÉSIES DIVERSES.
Non alio, Lodoice, datum est tibi vincere fato.
Credo equidem : deceant alios ea prselia reges,
Ipse ubi cum victis partitur victor honorem ;
Certa tibi laus tota. Cadunt, quoscumque lacessis,
Indecores ; tibique in partem titulumque triumphi
Non fusae veniunt acies, non eruta tantum
Oppida; fracta etiam virtus, deletaque fama
Nominis, et victae si quae sit gloria genti,
His quoque victor ovas spoliis ; nec se tibi quicquam
Subducit, toto vinci quod possit in hoste.
Haec tua sors : tali tibi se victoria lege
Despondit famulam ; si talia bella récusas,
Stat tibi perpétuée decus inviolabile pacis.
en 1688. Au reste, Corneille n'a traduit ni ces vers retranchés plus tard
par l'auteur, ni les trente précédents. Il les a remplacés par quelques
traits rapides et par la prière adressée au Roi de ie laisser respirer.
POÉSIES DIVERSES. 285
LXXXII
SUR LA PRISE DE MASTR1C.
SONNET.
Maestricht fut pris le Ier juillet 1673. Le rédacteur du Mercure
galant (1674» tome VI, p. 37), après avoir inséré trois sonnets, les
deux premiers de Boyer et le troisième anonyme, et une chanson,
sur ce sujet, ajoute : « On me vient d'apporter encore un sonnet sur
la prise de Mastric , que je crois, Madame, que vous serez bien aise
d'avoir, puisqu'il est du grand Corneille : il a plu et à la cour et à
la ville, et je ne doute pas que votre province ne soit du même sen-
timent. » A la page 38 du même volume on trouve le sonnet qu'on
va lire, et à la page 43 un Madrigal de Mlle de Scudery sur la prise
de Mastric,
Grand Roi, Mastric est pris, et pris en treize jours1 !
Ce miracle étoit sûr à ta haute conduite,
Et n'a rien d'étonnant que cette heureuse suite
Qui de tes grands destins enfle le juste cours.
La Hollande , qui voit du reste de ses tours 5
Ses amis consternés, et sa fortune en fuite,
N'aspire qu'à baiser la main qui Ta détruite ,
Et fait de tes bontés son unique recours.
1. « Jamais ville ne fit d'abord une résistance plus vigoureuse,
ni un feu plus continuel et plus terrible. On y épuisa de part et d'autre
toutes les finesses du métier. Mais que peuvent la force et l'industrie
contre une armée de François animés par la présence de leur roi?
Cette ville si bien défendue , mieux attaquée encore, tint à peine
treize jours. » (Racine, Précis historique des campagnes de Louis XIV ï)
286 POESIES DIVERSES.
Une clef qu'on te rend t'ouvre quatre provinces ;
Tu ne prends qu'une place, et fais trembler cent princes
De l'Escaut jusqu'à l'Ebre en rejaillit l'effroi.
Tout s'alarme; et l'Empire à tel point se ménage,
Qu'à son aigle lui-même il ferme le passage
Dès que son vol jaloux ose tourner vers toi.
POESIES DIVERSES 287
LXXXIII
AU ROI ,
SUR SA LIBÉRALITÉ ENVERS LES MARCHANDS DE LA VILLE DE PARIS.
[Traduit du latin de Santeul.]
On lit dans les Mémoires secrets de Bachaumont (tome V,
p. 62 et 63) : « Au commencement de 1674? Louis XIV fît demander
au corps de la mercerie un secours d'argent. On proposa à ce corps
en récompense le premier rang parmi les six corps, le droit de
donner tous les ans plusieurs sujets au consulat, et l'affranchissement
d'une espèce de servitude à laquelle son commerce étoit assujetti de-
puis quelques années. <
« Le corps chargea les gardes en charge ' d'offrir au Roi cinquante
mille livres, et d'accepter l'affranchissement de la servitude du com-
merce, mais de déclarer que content de son rang entre les six corps
et de l'usage établi pour le consulat, il prioit qu'il n'y fût rien changé .
« Peu de temps après, M. de Colbèrt annonça aux gardes en
charge, etc., que le Roi, content du zèle que le corps avoit témoigné
pour son service, leur rendoit les cinquante mille livres, et leur don-
noit deux mille écus pour faire prier Dieu pour Sa Majesté, décorer
leur chapelle, et boire à sa santé.
<t En conséquence, les gardes firent célébrer dans l'église du Sé-
pulchre2 les prières de quarante heures pour S. M. et pour la pros-
périté de ses armes. Cela se lit avec la plus grande solennité.
« Tous les jours il y eut au bureau une table de vingt couverts, à
laquelle dînèrent les prélats qui avoient officié et les prêtres de leur
1. « On appelle, dans les six corps des marchands, les maîtres
et gardes, ceux qui sont élus de ces corps pour être jurés et faire
observer par les autres les statuts et règlements de chacune de ces
communautés. 0 (Dictionnaire de Furetière.)
2. L'église collégiale du Sépulcre était située rue Saint-Martin, près
de la rue Saint-Merry.
288 POESIES DIVERSES.
suite. On manda toutes les pauvres familles des marchands, auxquelles
on distribua des aumônes.
« Enfin, pour remplir entièrement les vues du Roi, ils firent dé-
corer la chapelle des merciers par un tableau du célèbre le Brun,
qui se voit au retable du maître autel du Sépulchre '.
« Le dernier jour des quarante heures on apprit que la citadelle
de Besançon s'étoit rendue le a 2 mai. Dans les réjouissances publi-
ques pour cet événement, on fit un grand feu de joie devant la porte
du bureau et de chacun des gardes en charge , chez lesquels il y eut
jusqu'à deux heures après minuit table ouverte pour les honnêtes
gens. Au dehors on distribua des bouteilles de vin à tous ceux qui
en voulurent ; on ne laissoit passer personne sans le faire boire à la
santé du Roi. »
« Ces fêtes furent répétées pour la prise de Dôle, rendue le 6 juin.
Il y eut de plus au bureau une grande collation, à laquelle M. le lieu-
tenant général de police, M. le procureur du Roi et les anciens gardes
furent invités.
a Pour transmettre les témoignages publics de leurs sentiments
pour S. M., les marchands merciers prièrent M. de Santeuil de
faire un poème sur ce sujet, et M. Corneille voulut bien le tra-
duire. j>
Le poème de Santeul, traduit par Corneille, est l'explication d'un
emblème gravé par F. Chauveau, et représentant un soleil qui résout
en pluie les vapeurs qu'il a tirées de la terre, avec cette devise : Ma-
gno cum fœnore reddit. Les vers latins, imprimés en 1674 dans le
format in-folio, chez Pierre le Petit, sont signés : Santolius, Victori-
nusj et la traduction française qui les accompagne : P. Corneille.
La bibliothèque Mazarine possède un exemplaire de cette édition
sous la marque Gij4> A9. On conserve à la Bibliothèque impériale
un exemplaire d'une édition in-8° des mêmes poèmes, portant la même
adresse et la même date, mais dans lequel ils sont tous deux ano-
nymes ; on trouve aussi dans le même établissement une autre pièce
1. a Le tableau qui représente la résurrection de Jésus -Christ est
un des plus beaux du célèbre le Brun En peignant Jésus-Christ
sortant du tombeau, il représenta Colbert, le protecteur du commerce
et des arts, tenant un des coins du linceul. » (Millin, Antiquités natio-
nales, tome III, § xxvii, p. 9 et 10. Eglise du Saint-Sépulcre, dépar-
tement et district de Paris, section des Lombards .)
POÉSIES DIVERSES. 289
de même titre, de format identique, d'apparence extérieure complète-
ment semblable, dans laquelle le poëme de Santeul, signé à la fin, au
lieu d'être suivi de la traduction de Corneille, est accompagné en
regard de chaque page d'une traduction en vers français signée : Du
Perier. Une épître de ce traducteur nous apprend qu'il était ap-
puyé par Santeul, et que ses vers avaient failli être choisis de préfé-
rence à ceux de Corneille, pour accompagner la pièce latine dans
l'édition officielle des merciers :
Santeuil, dont les heureux efforts
Du cygne * que le Mince éleva sur ses bords
Imitant la voix plus qu'humaine,
Enchantent les peuples de Seine
Par de mélodieux accords,
Si je puis, d'un accent aussi doux que sublime,
Justifier le choix que tu fis de ma rime,
Pour faire entendre à tes marchands,
Si peu touchés de tes vers si touchants,
Ce que de ton roi magnanime
Tu nous racontes dans tes chants ;
Si cet admirable tragique 2
Dont on m'a préféré la voix
Même après l'aveu de ton choix,
M'entend d'un ton plus héroïque
Faire parler le grand Louis,
Et de ses combats inouïs
Sur tes vers retraçant l'histoire,
Les garantir de l'onde noire,
Que mes sens seront réjouis
D'une si fameuse victoire !
Que si Louis daigne encor m'écouter,
Moi qui n'écris que pour la gloire,
Savantes filles de Mémoire ,
Qu'aurai-je plus à souhaiter?
Les deux poëmes de Santeul et de Corneille, recueillis par les
éditeurs de Santeul, en. 1729, au tome I de ses OEuvres (p. 36-44)» «**
par Granet en 1738, dans les OEuvres diverses (p. 82-91), furent réim-
primés avec un grand luxe en 17 70, sous le titre de Poëme à la louange
de Louis XIV , présenté par les gardes des marchands merciers de la
ville de Paris. Cette édition, que nous n'avons pu trouver, est pré-
I. Virgile. {Note de du Périer.) — 2. Corneille. (Note du même.)
Corneille, x 19
290 POÉSIES DIVERSES.
cédée d'une ample notice historique qui raconte, tout au long, d'après
le registre des délibérations du bureau de la mercerie, les faits que
nous venons de rapporter d'après l'analyse rédigée par Bachaumont
sous la date du 23 janvier 1770.
Chantez y peuple * , chantez la valeur libérale 7
La bonté de Louis à son grand cœur égale :
Du trône , d'où ses soins insultent les remparts ,
Forcent les bastions , brisent les boulevarts ,
Il vous tend cette main qui lance le tonnerre ; 5
Et quand vous lui portez des secours pour la guerre ,
Qu'à tout donner pour lui vous vous montrez tous prêts,
Il vous rend et vos dons et d'heureux intérêts 2 .
Ainsi quand du soleil la course rayonnante
Fait rouler dans les cieux sa pompe dominante , 1 o
REGI ,
PRO SUA ERGA URBIS MERCATORES AMPLIORIS ORDtNIS MUNIFICENTIA5.
Non4 frustra est tanto quod ferveat undique plausu
Urbs omnis, Isetique novum per compita cives
Festum agitent : solio nuper vos magnus ab alto
Respexit Lodoicus, et inter Martia signa
Nunc bellator, opes castris Martique dicatas,
Quas ultro fertis, magno cum foenore reddix.
Sic ubi sidereos lustrât sol aureus orbes,
Cœlestesque plagas et lucida régna pererrat,
1. Peuple est ici au singulier, mais il est au pluriel dans le vers 3o.
2. Traduction de la devise qui surmonte l'emblème, et qui est tex-
tuellement répétée et imprimée en capitales en deux endroits du texte
de Santeul, où l'on trouve aussi imprimés en capitales ces mots qui
expriment encore la même idée : Meliori mtjnere ditat.
3. Ainsi dans l'édition in-folio; toutes les autres éditions portent :
Régis, pro, etc.... encomium,à l'exception des Œuvres de Santeul, où on
lit : R?gi, pro, etc.... encomium.
4. Dans l'édition in-folio la lettre qui commence ce mot est une
initiale ornée traversée d'une balance avec cette devise: JEquum sequa
probat.
POÉSIES DIVERSES. 291
Qu'en maître souverain de ce brillant séjour
Il règle les saisons et dispense le jour,
Il ne dédaigne point d'épandre ses lumières
Sur les sables déserts et les tristes bruyères ,
Et sans que pour régner il veuille aucun appui , 1 5
Il aime à voir l'amour que la terre a pour lui :
La terre qui l'adore exhale des nuages
Qui du milieu des airs lui rendent ses hommages;
Mais il n'attire à lui cette semence d'eaux
Que pour la distiller en de féconds ruisseaux , 2 o
Et de tous les présents que lui fait la nature
Il n'en reçoit aucun sans rendre avec usure.
O vous, célèbre corps , à qui de l'univers
Tous les bords sont connus et tous les ports ouverts * ;
Vous par qui les trésors des plus heureuses plages
Viennent de notre France enrichir les rivages ,
Nil telluris egens, patrio cum solus Olympo
Jam valeat sese asserere, et regnare per astra,
Ille tamen stériles non dedignatur arenas
Respicere, et campos radiis recreare jacentes ;
Quod si forte novo tellus afflata calore
In tenuem exhalet nebulam, imbriferumque vaporem
(Grata quidem, supero sed inania munera soli),
Excipit hune primum, radioque humente tepentis
Semina cogit aquœ, nutritque, fovetque propinquam
Desuper irradians nubem ; quam deinde refundit
Prodigus, et terras meltori munere ditat.
O fortunati tanto sub principe cives !
Optima pars urbis, gemino gens nota sub axe,
Quorum nominibus sese ultima littora, et omnes
Undique se portus, sese maria omnia paudunt ,
1 . Traduction de ces mots du poëme de Santeul : gemino gens nota
sub axe, qui sont la reproduction textuelle de la devise du corps des
merciers, dont l'écusson est gravé à la fin des vers de Corneille dans
l'édition in-folio.
292 POÉSIES DIVERSES.
Oyez ce qu'au milieu du bruit de cent canons
Votre grand Roi prononce en faveur de vos dons,
Ce qu'en votre faveur la Muse me révèle:
« Peuples , dit ce héros , je connois votre zèle, 3o
J'en aime les efforts, et dans tout l'avenir
J'en saurai conserver l'amoureux souvenir.
Vous n'avez que trop vu ce qu'ose l'Allemagne ,
Ce que fait la Hollande , et qu'a tramé l'Espagne ,
Ce que leur union attente contre moi. 3 5
Plus l'attentat est grand , plus grande est votre foi,
Et vous n'attendez point que je vous fasse dire
Comme il faut soutenir ma gloire et mon empire :
Vous courez au-devant , et prodiguez vos biens
Pour en mettre en mes mains les plus aisés moyens. 40
C'est votre seul devoir qui pour moi s'intéresse ,
C'est votre pur amour qui pour moi vous en presse :
Je le vois avec joie. » A ces mots ce vainqueur,
Sur son peuple en vrai père épanchant son grand cœur,
Per vos, dicam equidem, spoliis Orientis onusta,
Barbaricisque superba opibur., jam Gallica puppis
Post tôt vota redux Francis allabitur oris.
Hue omnes, bue ferte pedem : Rex ipse, tubarum
Clangores inter medios bellique tumultus ,
Alloquitur; vos o memores mihi dicite Musse,
Vos, audistis enim, regales dicite vati
Affatus : a Vestri non muneris immemor, inquit,
O cives, dum saevit atrox conjunctus Ibero
Germanus, Batavique traces sua fœdera jactant ;
Pro décore imperii, pro majestate tuenda,
Omnes thesauros, omnes effundere gazas,
Certatim vobis fuit omnibus una voluntas,
Idem animus : sensus agnosco hoc munere vestros.
Hoc vestrum officium velit, et mea gloria poscat.
Muneris id quodeumque, et vestri pignus amoris
Accipio lsetus. » Régis quam provida cura !
POÉSIES DIVERSES. 29^
Fait prendre ces présents1, qu'un léger intervalle 4 5
Renvoie accompagnés de sa bonté royale.
« C'est assez, poursuit-il, d'avoir vu votre amour;
La tendresse du mien veut agir à son tour.
Pour rendre cette guerre à ses auteurs funeste,
Sujets dignes de moi , j'ai des trésors de reste; 5o
J'en ai de plus sûrs même et de beaucoup plus grands
Que ceux que vous m'offrez , que ceux que je vous rends:
J'ai le fond de vos cœurs , et c'est de quoi suffire
Aux plus rares exploits où mon courage aspire :
C'est aux ordres d'un roi ce qui donne le poids; 5 5
C'est là qu'est le trésor, qu'est la force des rois.
Reprenez ces présents dont l'offre m'est si chère :
Si je les ai reçus, c'est en dépositaire,
Et je saurai sans eux dissiper les complots
Ille quidetn, secum belli dum fata volutat,
Urbis amore suœ victus, pectusque paternum
In populum accipiens, Colberto credidit ingens
Jamjam pensandum regali munere munus.
Depositum vocat: « Hac dextra, his victricibus armis
Bellandum est, inquit; sat erit mihi Martia virtus
Qua conjuratas triplici sub fœdere gentes
Protinus abrumpam, meque in mea jura reponam.
Quas populus sibi quserit opes, qua s anxia cura,
Et quas mille artes, terraque marique petitas,
Accumulant, vester, tanti in dispendia belli,
1 . Il est dit dans les vers latins imités par Corneille que le Roi
confia ces présents à Colbert; et une note de l'édition de Santeul, de
1729, fait remarquer qu'il s'agit de Charles Colbert, marquis de
Croissy, qui était frère du célèbre Colbert, et qui fut ministre et se-
crétaire d'Etat en 1679. Le nom de Colbert se trouve plus loin, et
cette fois dans Corneille (vers 78) aussi bien que dans Santeul; là les
qualifications qui l'accompagnent ne peuvent guère convenir, ce nous
semble, qu'au grand Colbert (Jean-Baptiste), contrôleur général des
finances.
294 POÉSIES DIVERSES.
Que la triple alliance1 oppose à mon repos. 60
Ce fruit de vos travaux destiné pour la guerre,
Ces tributs que vous font et la mer et la terre ,
Votre amour, votre ardeur à servir mes desseins,
Les rend assez à moi tant qu'ils sont en vos mains.
Mes troupes, par moi-même au péril animées, 6 5
Renverseront sans eux les murs et les armées :
J'en ai la certitude; et de vous je ne veux
Aucun autre secours que celui de vos vœux.
Offrez-les sans relâche au grand dieu des batailles ,
Tandis que mes canons foudroieront les murailles, 70
Et devant ses autels , prosternés à genoux ,
Invoquez-le pour moi2, je combattrai pour vous. »
Là se tait le monarque , et sûr de ses conquêtes ,
Aux triomphes nouveaux il tient ses armes prêtes.
Cet éclat surprenant de magnanimité 7 5
Par la nymphe à cent voix 3 en tous lieux est porté.
Que de ravissements suivent cette nouvelle !
Communes mihi fecit amor : jam ponite curas,
Quae populos, eadem reges opulentia ditat.
Unum oro : dum me implicitum fera bella tenebunt,
Multa implorantes suspensi hserebitis aris ;
Ille deus bellorum, unus qui praesidet armis,
Hostiles deus ille dabit perrumpere turmas. »
Conticuit, rigidisque héros se involvit in armis,
Securus fatorum, et jam prœnuncia fama
Ibat per populos, et splendida munera Régis
Vulgabat; lœtis cives rumoribus acti
Confusos urbis strepitus prona aure bibebant,
Cum pulchro accensus patrise Colbertus amore,
1. L'empereur d'Allemagne et le roi d'Espagne s'étaient alliés
contre la France avec la Hollande au mois d'août 1673.
1 . Voyez la notice en tête de cette pièce.
3. La Renommée.
POESIES DIVERSES. 29$
Colbert y met le comble en ministre fidèle :
Ce grand homme , sous lui maître de ses trésors ,
Mande par ordre exprès ce grand et nombreux corps, 80
Le force d'admirer des bontés sans mesure ,
Et remet en ses mains ces dons avec usure.
De là ces doux transports , ces prompts frémissements
Qui poussent jusqu'au ciel mille applaudissements,
Ces vœux si redoublés qui hâtent sa victoire , 8 5
Ces titres par avance élevés à sa gloire * .
On voit Paris en foule accourir aux autels ,
Implorer le grand Maître et tous les Immortels :
Ses temples sont ornés ; des lumières sans nombre
Y redoublent le jour, y font des nuits sans ombre. 90
Colbertus, gaz» cui crédita cura tuendae,
Conscius ingentis facti (sic jussa ferebant) ,
Congestas tôt opes populorum inopinaque dona,
Ingens depositum, magno cum foenore reddit.
Hinc subiti plausus, hinc publica gaudia vulgi,
Undique lsetitise fremitus, votisque triumphos
Accélérant victoris, et amplam inscribere certant
Nobilibus titulis et belli insignibus urbem.
Templa adeunt, onerantque aras et fronde coronant.
Aspiceres populos concursu accedere magno,
Et manibus passis omnes exposcere divos,
Omnes cœlicolas : appensi altaribus ignés
Dant lucem late, et largo loca lumine complent.
Ipse aderat mitra effulgens, et vestibus aureus,
Longe omnes supra, média inter vota sacerdos :
Hic ille est magnis quem Rex prœfecerat aris
i. Il s'agit sans doute dans ce vers des inscriptions improvisées
dans les réjouissances dont a parlé Bachaumont. Du Périer dit ici :
Et d'une sainte ardeur nos muses échauffées
Sur plus d'un arc pompeux vont graver ses trophées.
L'inscription de la porte Saint-Martin, qui fait face à la rue Saint-
Martin, est relative aux victoires de 1674.
296 POESIES DIVERSES.
Son prélat1 donne l'ordre, et par un saint emploi
Répond aux dignités dont l'honore son roi.
L'effet suit tant de vœux : les plus puissantes villes
Semblent n'avoir pour nous que des remparts fragiles ;
On les perce , on les brise , on écrase leurs forts 2 : 9 fi
Il y pleut mille feux , il y pleut mille morts.
Les fleuves, les rochers ne sont que vains obstacles;
Notre camp à toute heure est fertile en miracles ;
Et l'exemple d'un roi qui se mêle aux dangers ,
Enflant le cœur aux siens, l'abat aux étrangers. 100
Bezançon voit bientôt sa citadelle en poudre3;
Dole avertit Salins4 de ce que peut sa foudre;
Rarl-eus, titulisque novis, et honoribus auctus.
Audivere omnes superi, qui prsesidet armis
Audiit ipse Pater, dexter jam vota secundat.
Ecce ruunt magnae concussis mœnibus urbes,
Rumpunturque obices : de collibus intonat altis
Mille neces et mille ferens incendia fulmen.
Luctus ubique et ubique fragor : jam gallica castra
Montis inaccessas prœruptis rupibus arces
Invadunt, Rex ipse subit discrimina Martis.
Unde pavor victis, victoribus inde furores.
Jam superant fossas, non agger ab aggere tutus,
Non juga, non amnes, non propugnacula tardant.
Obstupuere cavis maie tuti turribus hostes,
Suppliciter tenduntque manus, veniamque precati
Disjectis gaudent victorem admittere mûris.
I, nunc antiquas jacta, Vesontio, turres,
Et tua nequicquam celsœ capita ardua rupis,
Et GrjEum, et Dolam, et salibus loca fœta Salinas,
1. François de Harlay, dont il est parlé au tome VIII, p. 3. Il fut
d'abord archevêque de Rouen, puis archevêque de Paris de 1671 à 1695.
2. « Les forts, » dans les OEuvres diverses de 1738 et dans les édi-
tions suivantes.
3. Besançon se rendit au Roi le i5 mai 1674.
4. Dôle se rendit au Roi le i\ juin, et Salins fut pris le au du
POÉSIES DIVERSES 297
Et toute la Comté, pour la seconde fois1,
Rentre sous l1 heureux joug du plus juste des rois.
Mais ce n'est encor rien ; et tant de murs par terre i o 5
N'étalent aux regards que l'essai d'une guerre
Où le manque de foi , qu'il commence à punir,
Voit le prélude affreux d'un plus rude avenir.
Généreux citoyens de cette immense ville ,
A qui par ce grand roi tout commerce est facile , no
Vous qui ne trouvez point de bords si peu connus
Où son illustre nom ne vous ait prévenus,
Si vous n'exposez point de sang pour sa victoire ,
Vos cœurs, vos dons, vos vœux ont du moins cette gloire
Que votre exemple montre au reste des sujets
Comme il faut d'un tel prince appuyer les projets.
Plus à ses ennemis il fait craindre ses armes,
Et bis capta tuas jacta, Burgundia, vires.
Exigua ingentis sunt hsec prseludia belli.
Felices populi, régi jam plaudite vestro,
Vosque parisiaci nova per commercia cives,
Quo victor pénétrât fama et velocibus armis,
Ultra Indos, Arabesque, et arenivagos Garamantas,
Quo vos, ingentem benefacti extendite famam.
Nec vos officio pigeât certasse priores :
Si belli expertes non diro occurritis hosti,
Saltem animis, vestrisque opibus, votisque favetis.
Hostibus incussit terrorem armatus, inermis
Conciliare animos, vos devincire merendo
Gestiet, et bello quondam perfunctus et armis
Ditabit populos, defendet legibus urbes,
même mois par la Feuillade. Gray, dont Corneille ne dit rien, mais
dont il est question dans les vers de Santeul et dans ceux de du Pé-
rier, avait été pris par le duc de Navailles le 28 février.
1. La Franche -Comté, conquise une première fois, par le Roi eu
personne, au commencement de 1668, avait été rendue la même
année, à la paix d'Aix-la-Chapelle.
120
298 POÉSIES DIVERSES.
Plus la paix qu'il souhaite aura pour vous de charmes.
Ce sera , peuple , alors que par d'autres vertus
Ses lois triompheront des vices abattus;
Chaque jour, chaque instant lui fournira matière
A déployer sur vous sa bonté toute entière ;
Les malheurs que la guerre aura trop fait durer,
Cette même bonté saura les réparer.
Pour augure certain , pour assuré présage , 125
Dans ces dons qu'il vous rend il vous en donne un gage ;
Et si jamais le ciel remplit ce doux souhait,
Vous voyez son amour, vous en verrez l'effet.
Présenté par les gardes des marchands de la ville de Paris.
Et res afflictas per tôt discrimina belli
Restituet bonus, et fata ad meliora vocabit :
Hœc certa auguria, et longae laeta omina pacis
Augustus Princeps augusto hoc munere firmat.
Santouus, Victorlnus.
Offerebant amplioris Mercaturae Praefecti et Custodes.
POÉSIES DIVERSES. 299
LXXXIV
A.U ROI ,
SUR SON DÉPART POUR LARMÉE , EN 1 676 ' .
L'édition originale de cette pièce n'est point signée. Elle forme
quatre pages in~4°, imprimées en italique avec fleurons et lettres
ornées ; à la suite vient la pièce latine signée : Johannes Lucas , So-
cietatïs Jesu2, dont celle-ci est imitée et que nous reproduisons au
bas des pages; elle est aussi de quatre pages et est imprimée en ca-
ractères romains; elle porte à la fin l'adresse suivante : Ex offîci/ia
Simonis Benard, via jacobsea. On trouve un exemplaire de cette édi-
tion à la Bibliothèque impériale, département des imprimés, Recueil
Thoisy, matières historiques , in-folio, tomeX. Granet a publié ces deux
pièces dans les OEuvres diverses, p. 92-96.
Le printemps a changé la face de la terre ;
Il ramène avec lui la saison de la guerre ,
Et nos champs reverdis font renaître , grand Roi ,
REGI,
AD EXERCITUM INEUNTE VERE PROFICÏSCENTI, ODE.
Frugiferis rediere sua vice gramina campis,
Dudumque fixa postibus
Deripere arma jubet
1. Le Roi partit de Saint-Germain, pour aller commander l'ar-
mée de Flandre, le 16 avril 1676.
2. Le P. Lucas était né en i65o, dans la province de Normandie.
Il professa la rhétorique, puis la théologie au collège Louis-le-Grand.
On a imprimé de lui, outre cette ode imitée par Corneille et des
discours latins, un poème en deux livres, intitulé : Actio oratoria seu
de gestu et voce (1675), qui fait partie des Poemata didascalica publiés
par le P. Oudin.
3oo POÉSIES DIVERSES.
En ton cœur martial des soins clignes de toi.
La trompette a sonné : ton armée intrépide, 5
Prête à marcher, te demande pour guide,
Et tous ses escadrons , sur ta frontière épars ,
Ambitionnent tes regards.
Joins ta présence et tes destins propices
Au zèle impatient qui presse leurs efforts \ i o
Daigne servir de tête et d'âme à ce grand corps ,
Et sous tes illustres auspices
Ses bras feront pleuvoir d'inévitables morts.
Que je plains votre aveugle et folle confiance,
Obstinés ennemis de nos plus doux souhaits , i 5
Qu'enorgueillit une triple alliance1
Jusques à dédaigner les bontés de la France!
Que de pleurs, que de sang, que de cuisants regrets
Vous va coûter ce refus de la paix !
Ver, bona tempestas bello. Nunc, maxime regum,
Permitte dignis pectora
Sollic itudinibus .
Ut litui strepuere, coït procul excita pubes,
Audere quidlibet ferox,
Auspice te, duce te.
Posceris : en pendent centum tibi mille tuorum
Exsertae in ictus dexterse.
His caput, his animam,
Fortunamque tuam, et présentes adjice divos.
Ades, volabunt ilicet
Tela ministra necis,
Grandinis in morem ; et nutus haud tarda regentis
Audire, quod minaberis
Cumque, simul ferient.
O multum nobis dolituri pace negata,
Nunc insolentes Austrii
I. Celle de l'Empire, de l'Espagne et de la Hollande : voyez ci-
dessus, p. 294, note 1.
POESIES DIVERSES. toi
Son vengeur à partir s'apprête, 20
Cent lauriers lui ceignent la tête ,
Cent lauriers que sa main elle-même a cueillis
Sur autant de vos murs foudroyés par ses lis.
Bellone , qui l'attend au sortir de son Louvre ,
Veut tracer à ses pas la carrière qu'elle ouvre : 2 5
Son zèle , impatient d'arborer ce grand nom ,
Pour conduire son char s'empare du timon.
D'un prompt et sûr triomphe écoutez le prélude,
Et par quels vœux poussés tous à la fois
De ses heureux sujets la noble inquiétude 3<>
Hâte ses glorieux exploits.
« Pars, grand Monarque, et vole aux justes avantages
Que te promet l'ardeur de tant de grands courages : »
C'est ce que dit toute sa cour.
« Pars, grand Monarque, et vole aux conquêtes nouvelles
Dont te répond l'amour de tant de cœurs fidèles s »
Fœdere tergemino,
Mox aderit vindex. Olli pro casside laurus,
Centena quam nuper dabant
Oppida capta manu.
Non ut Threïeio tunica est adamantina Marti :
Hune una magnse protegit
Martia vis anima?.
Nulla mora est : addicta tibi, Lodoice, jugales
Bellona jungit igneos
Ante fores Luparae ;
Teque jubet medio sublimem insistere curru ;
Et ambit aurigae locum ,
Ce d ère lœta suo.
Jam tenso temone rotae crepat orbita primae :
« I, perge, terror Austriae,
Praesidiumque tuis : »
Clamât venturis praeludens aula triumphis.
« I, perge, sed nostri memor,
Ut citius redeas : »
302 poésies DIVERSES.
C'est ce que dit tout Paris à son tour.
Il part, et la Frayeur, chez les siens inconnue,
Annonce en même temps parmi vous sa venue.
La Victoire le suit dans une majesté 40
Dont l'inexorable fierté
Semble du ciel autorisée
A venger le mépris d'une paix refusée
Avec tant de témérité ;
Et commençant par un miracle , 4 5
Bellone fait partout retentir cet oracle :
« Ennemis de la paix , vous la voudrez trop tard :
Le ciel ne peut aimer ceux qui troublent la terre ;
Et je vous le dis de sa part ,
La guerre punira ceux qui veulent la guerre. » 5o
L'Anglois avec chaleur souscrit à cet arrêt ;
Au belliqueux Suédois également il plaît ;
Le Danois en frémit, Brandebourg s'en alarme1 ;
Aulse non unquam discors Lutetia clamât.
Haec inter, Euris ocior
Per tremefacta sola
It currus; Pavor antevolat ; Victoria, pacis
Ultura contemptum decus,
Pone fremens sequitur.
Quaque via est, Bellona truci sic intonat ore :
« Belli ferent dispendia
Quos fera bella juvant ;
Et foedus sanxisse volent. » Laetum accipit oinen
Sequester Anglus fœderis ;
Accipit Hermioni
Et levibus Danis infensa Suecia ; miles
1. C'était par la médiation de Charles II, roi d'Angleterre, que les
lentes négociations de Nimègue s'étaient ouvertes en 1675. Char-
les XI, roi de Suède, allié de Louis XIV, combattait contre les Da-
nois, unis aux Hollandais, et avait envoyé Tannée précédente (1675)
une armée dans le Brandebourg, dont l'Electeur, rompant le traité
POÉSIES DIVERSES. 3o3
Et pour nos François c'est un charme
Qui laisse leur esprit d'autant plus satisfait 5 5
Que c'est à leur valeur d'en faire voir l'effet.
Déjà le Rhin pâlit , la Meuse s'épouvante ;
Et l'Escaut, dont le front jaune et cicatrisé
Porte empreints les grands coups dont il s'est vu brisé ,
Craint une plaie encor plus étonnante, 60
Et cache au plus creux de ses eaux
Sa tête de nouveau tremblante
Pour le reste de ses roseaux.
Hoc noster omen accipit,
Quod dabit ipse ratum.
Et jain Mosa tremit, jain pallet Rhenus, et alto,
Qua parte nec noster fluit,
Gurgite Scaldis amat
Occuluisse caput, non uno vulnere quassum ,
Et ante vulsis haud semel
Depile arundinibus.
qu'il avait conclu avec Turenne en 1673, s'était de nouveau, dès 1674,
déclaré contre la France.
*o4 POESIES DIVERSES.
LXXXV
VERS PRÉSENTÉS AU ROI
SUR SA CAMPAGNE DE 1676.
Granet, dans les OEuvres diverses, p. 97, dit que ces vers furent
imprimés la même année (1676), dans le format in- 4°, chez Guil-
laume de Luyne.
Ennemis de mon roi, Flandre, Espagne, Allemagne,
Qui croyiez que Bouchain dût finir sa campagne1,
Et n'avanciez vers lui que pour voir comme il faut
Régler Tordre d'un siège ou livrer un assaut ,
Ne vous fatiguez plus d'études inutiles 5
A prendre ses leçons quand il vous prend des villes ;
N'y perdez plus de temps : ses François aujourd'hui
Sont les disciples seuls qui soient dignes de lui,
Et nul autre n'a droit à ces nobles audaces
D'embrasser son exemple et marcher sur ses traces. 10
Lassés de toujours perdre, et fiers de son retour2,
Vous vous étiez promis de vaincre à votre tour ;
Vous aviez espéré de voir par son absence
Nos troupes sans vigueur, et nos murs sans défense ,
Mais vous n'aviez pas su qu'un courage si grand i 5
De loin comme de près sur les siens se répand ;
De loin comme de près sa prudence les guide ;
De loin comme de près son destin y préside.
i. Bouchain fut pris par xYIonsieur, frère du Roi, le n mai 1676.
2. Le Roi était revenu à Saint-Germain le 8 juillet 1676. Nous
avons dit plus haut (p. 299, note 1) qu'il en était parti, pour aller en
Flandre, le 16 avril.
POESIES DIVERSES. 3o5
Les rois savent agir tout autrement que nous :
Souvent sans être en vue ils frappent les grands coups. 2 o
Dieu lui-même, ce Dieu dont ils sont les images,
De son trône en repos fait partir les orages,
Et jouit dans le ciel de sa gloire et de soi ,
Tandis que sur la terre il remplit tout d'effroi.
Mon prince en use ainsi : ses fêtes de Versailles * 2 5
Lui servent de prélude à gagner des batailles,
Et d'un plaisir pompeux l'éclat rejaillissant
Dissipe vos projets en le divertissant.
Muses, l'aviez-vous cru, vous qui faites les vaines
De prévoir l'avenir des fortunes humaines, 3o
D'en percer le plus sombre et le plus épineux ?
Aviez-vous deviné que ce parc lumineux,
Ces belles nuits sans ombre, avec leurs jours d'applique2,
Préparoient à vos chants un objet héroïque ?
1 . Il existe une relation fort détaillée de ces fêtes sous le titre sui-
vant : les Divertissemens de Versailles donnez par le Roy à toute sa
Cour, au retour de la conqueste de la Franche- Comté, en l'année i6j4>
aux pages 3qi-458 d'un Recueil de descriptions de peintures et d^autres
ouvrages faits pour le Roy (par Félibien), à Paris , chez la veuve
Sébastien Mabre-Cramoisy, M DCLXXXIX, in-12. Celte relation
est divisée en six journées, comprenant les 4? n? 19 et 28 juillet et
les 18 et 3i août 1674* Les cinq premières journées se terminèrent
par des représentations dramatiques, dans lesquelles on joua, entre
autres ouvrages, VAlceste de Quinault, le Malade imaginaire de Mo-
lière, et Ylphigénie de Racine; le 18 août il y eut après le spectacle
un grand feu d'artifice sur le canal; enfin le 3i août le sieur Viga-
rani en illumina tous les bords. « Ce qui donnoit tant de jour à ces
superbes décorations pendant une nuit si obscure, dit Félibien, c'est
qu'il y avoit plus de vingt mille lumières, sans compter plus de quatre
mille autres feux qui éclairoient les fontaines et les parterres du petit
parc. s (Page 458.)
2. On appelle applique tout ouvrage par lequel on applique, on
enchâsse une chose sur une autre. « Les jours d'applique » sont des
jours artificiels produits par des appareils d'illumination. Voyez le
Lexique,
COKNEIIXE. X 20
3o6 POESIES DIVERSES.
Dans ces délassements où tant d'art a paru , 3 5
Voyez-vous Aire prise1, et Mastricht secouru?
C'étoit là toutefois, c'étoit 1 heureuse suite
Qu'y destinoit dès lors son auguste conduite.
Dans ce brillant amas de feux et de beautés,
Sa grande àme s'ouvroit à ses propres clartés : 4 o
Au milieu de sa cour au spectacle empressée,
La guerre s'emparoit de toute sa pensée ;
Et ce qui ne sembloit que nous illuminer
Lui montroit des remparts ailleurs à fulminer.
J'en prends Aire à témoin, et les mers de Sicile2, 45
L'esprit de liberté qui règne en toute l'île,
L'âme du grand Ruiter, et ses vaisseaux froisses ,
Sous l'abri de Sardaigne à peine ramassés *.
Votre orgueil s'en console, ennemis de la France,
A revoir Philisbourg sous votre obéissance : 5o
L'Empereur et l'Empire, unis à l'investir,
Enfin au bout d'un an ont su l'assujettir4 ;
Mais l'effort d'une ligue en guerriers si féconde
Devoit y consumer moins de temps et de monde.
Il falloit , en dépit des plus hardis secours , 5 5
Gomme notre Gondé, le prendre en onze jours6;
1. Aire fut prise le 3i juillet 1676 par le maréchal d'Humières,
pendant que le prince d'Orange assiégeait Maestricht, qui fut dégagé
le 26 août par le maréchal de Schomherg.
2. Dans le combat du 2 juin, le maréchal de Vivonne, qui avait
battu dès le 25 mars sept mille Espagnols près de Messine, acheva de
détruire dans la Méditerranée la flotte espagnole et hollandaise.
3. Duquesne battit deux fois la flotte hollandaise commandée par
Ruyter, qui mourut à Syracuse, des suites d'une blessure reçue dans
le combat du 22 avril.
4. Philisbourg, investi depuis la fin de mars, capitula le 9 sep-
tembre, et se rendit le 17, après soixante-dix jours de tranchée ou-
verte.
5. Le grand Condé, alors duc d'Enghien, avait pris Philisbourg
en septembre i644-
POÉSIES DIVERSES. 3o7
Et vous déshonorez vos belles destinées
Quand l'œuvre d'onze jours vous coûte des années.
Cependant à vos yeux, et dans le même été,
Aire, Condé1, Bouchain n'ont presque rien coûté; 6<>
Et Mastricht voit tourner vos desseins en fumée ,
Quand ce qu'il vous en coûte auroit fait une armée.
Ainsi , bien que la prise ait suivi le blocus ,
Que devant Philisbourg nous paroissions vaincus ,
Si pour rendre à vos lois cette place fameuse 6 5
Le Rhin vous favorise au refus de la Meuse2,
Si pour d'autres exploits il anime vos bras ,
Pour un peu de bonheur ne nous insultez pas ;
Et surtout gardez-vous de le croire si ferme,
Que vous vous dispensiez de trembler pour Palerme3, 7 «
Pour Ypre , pour Cambray, Saint-Omer, Luxembourg :
Tremblez même déjà pour votre Philisbourg.
Le nom seul de mon roi vous est partout à craindre :
A triompher de vous cessez de le contraindre ;
Et jusques à la paix, qu'il vous offre en héros , 7 5
Craignez sa vigilance, et même son repos.
1. Condé, investi le 17 avril par le maréchal de Créquy, fut pris
dans la nuit du 2 5 au 26.
2. La ville de Maestricht est, comme l'on sait, située sur la Meuse,
d'où elle tire son nom ; Philisbourg est près du Rhin
3. Le duc de Vivonne brûla en 1676 la flotte hollandaise en vue
de Palerme. Cambrai se rendit au Roi le 5 mai 1677; Saint-Omer à
Monsieur, le 20 du même mois; et Ypres au Roi, le 25 mars 1678
Le traité de Nimègue conclu la même année (1678) assura à la
France la possession de ces trois places. Luxembourg fut pris par le
maréchal de Créquy en 1684; Philisbourg ne fut repris qu'en if>88,
par le Dauphin.
3o8 POÉSIES DIVERSES.
LXXXVI
PI.ACET AU ROI.
Ce placet, que Granet publie dans les OEuvres diverses (p. 102),
comme « imprimé d'après un manuscrit, » avait déjà paru dans le
premier volume du Mercure galant de 1677 (p. 53 et 54 de la 2e édi-
tion.) Voyez la notice de la pièce suivante, les vers 5 1 et 52 de celte
pièce, et la note qui se rapporte au vers 52.
Plaise au Roi ne plus oublier
Qu'il m'a depuis quatre ans promis un bénéfice ,
Et qu'il avoit chargé le feu Père Ferrier
De choisir un moment propice
Qui pût me donner lieu de l'en remercier. 5
Le Père est mort1 ; mais j'ose croire
Que si toujours Sa Majesté 2
Avoit pour moi même bonté ,
Le Père de la Chaise8 auroit plus de mémoire,
Et le feroit mieux souvenir 1 o
Qu'un grand roi ne promet que ce qu'il veut tenir.
1. Le P. Ferrier mourut à la fin de 1674. Voyez la note 3.
2. Dans le Mereure galant, seconde édition :
Que si pour moi Sa Majesté
Avoit encor même bonté.
3. On lit dans la Gazette, sous la rubrique du 2 mars 1675 : a Le
P. de la Chese, religieux d'une piété singulière, a été choisi pour
être confesseur du Roi. » — « A peine établi à la cour, dit M. R. de
Chantelauze, le P. de la Chaize fut chargé par le Roi de la feuille
des bénéfices, ainsi que l'avait été son prédécesseur le P. Ferrier,
le premier confesseur du roi de France qui ait été investi d'une si
haute fonction. » {Le Père de la Chaize, Paris, Durand, 1859, in-8°.)
POÉSIES DIVERSES. 3o9
LXXXVII
AU ROI ,
SUR CINNA, POMPEE, HORACE, SERTORWS, 0ED1PE , RODOGUNE, QU'IL A FAIT
REPRÉSENTER DE SUITE DEVANT LUI A VERSAILLES, EN OCTOBRE 1676.
On lit dans le premier volume du Mercure galant de 1677, après
un éloge de Ylsis de Quinault représentée pour la première fois à
Saint-Germain le 5 janvier 1677 : « Les beautés de cet opéra n'ont
point fait perdre au Roi et à toute la cour le souvenir des inimitables
tragédies de M. de Corneille l'aîné, qui furent représentées à Versailles
pendant l'automne dernier. Je vous envoie la copie que vous m'avez
demandée des vers que fit * cet illustre auteur pour en remercier Sa
Majesté. » Ensuite vient, sous ce simple titre : Au Roi, la pièce qu'on
va lire; puis les réflexions que voici2 : « Ces vers, dit la Duchesse en
interrompant la lecture du Chevalier, sont d'une netteté admirable, et
je préfère de beaucoup ces sortes d'expressions, faciles et naturelles,
au style pompeux qui approche fort du galimatias. — Je suis de
votre sentiment, reprit la Marquise; mais j'avoue que je n'entends
point les deux derniers vers qu'on nous vient de lire , n'y trouvant
aucune liaison avec ceux qui les précèdent. — Vous n'avez donc pas
vu , lui dit une dame qui étoit auprès d'elle , un placet que M. de
Corneille présenta au Roi, il y a quelques mois, et dont tant de gens
prirent copie? Je vais vous le dire, afin qu'il serve d'explication à ce
1. Dans la seconde édition du Mercure (p. 45 et 46) cette phrase
commence ainsi : « Je vous envoie les vers que fît, etc.; » et elle est
suivie de celle-ci : a II y a longtemps que vous me les demandez, et
je n'en avois pu jusqu'ici recouvrer aucune copie. »
a. Dans la seconde édition du Mercure (p. 5i) ces réflexions sont
ainsi amenées : « Avouez, Madame, que ce remerciement est très-in-
génieusement tourné, et que c'est avec beaucoup de justice qu'il a eu
l'approbation de tous ceux qui ont vu ces vers. — Ils sont d'une net-
teté admirable, dit la Duchesse, etc. » La fin de la phrase suivante
est : « .... aucune liaison avec tous les autres. »
3io POÉSIES DIVERSES.
que vous n'entendez pas. Quoiqu'il n'y ait point de pensées, il y a je
ne sais quoi d'aisé qui l'a fait estimer de tout le monde. » Après cet
éloge on lit dans le Mercure le placet que nous avons reproduit sous
le numéro précédent, et l'article se termine ainsi : « J'avois déjà vu
ce placet, dit la Duchesse, et je voudrois que Monsieur le Chevalier le
donnât à son ami pour le mettre dans son Mercure, car le grand
Corneille sera toujours inimitable, et les moindres choses de lui sont
à conserver. »
Nous connaissons de cette pièce sur Cinna, etc., deux copies ma-
nuscrites anciennes, qui se rapprochent fort du texte du Mercure. La
première occupe les pages 146-149 d'un volume de la bibliothèque
de l'Arsenal, numéroté HF 191 bis. Ce volume, composé de divers
morceaux des poètes du dix-septième siècle, se termine par cette
note : «. Acheué ce 12 feurier à 1. heure après minuit 1689. » L'a-
mateur qui formait ce recueil écrivait à la fin de la pièce de Cor-
neille la remarque suivante , naïf témoignage du peu de respect
qu'on avait alors pour le texte de nos écrivains illustres : « Ces
deux derniers vers ne me plaisent pas, et la chute en est tout à fait
désagréable et ne sera point entendue dans cinquante ans d'ici sans
commentaire. Si je fais imprimer quelque jour cette excellente épître,
je tâcherai de la terminer un peu plus noblement, ou, au pis aller,
je la laisserai telle qu'elle est. » — La seconde de ces anciennes
copies est sur les folios 3i et 32 du volume 1000 de la collection
Gaignières^ conservée à la Bibliothèque impériale. Ce volume a pour
titre : Pièces diverses, Règne de Louis XIV. — Lorsque l'abbé Borde-
Ion publia cette épître au Roi dans ses Diversitez curieuses en plusieurs
lettres (à Amsterdam, chez André de Hoogenhuysen, M.DC.XCIX,
in-12, lettre xxxvi, tome II, p. 1 et suivantes), elle était un peu ou-
bliée, si nous en jugeons du moins par les premiers mots de la lettre
où il l'a insérée : « Monsieur, quand vous me demandez les vers
que fit M. de Corneille pour remercier le Roi des bontés qu'il
avoit de demander qu'on rejouât encore en présence de Sa Majesté
ses tragédies , et dans quel temps ces vers furent faits , pensez- vous
qu'il soit facile de vous contenter là-dessus? Que cela soit dit en
passant, sans prétendre faire beaucoup valoir mes soins pour vous
obéir.... J'ai enfin trouvé ces vers, les voici; ils furent faits en 1677. »
— Dans ces différents textes , comme dans le Mercure , les vers de
Corneille sont simplement intitulés : Au Roi. En 1738, Granet les
publia aux pages 100-102 des OEuvres diverses, sous le titre que
POESIES DIVERSES. 3n
nous avons reproduit et avec cette note : « Imprimés d'après un
manuscrit ; » mais il ne nous dit pas quel est ce manuscrit. Ce texte,
assez différent de ceux dont nous avons parlé, est le plus complet, et
à bien des égards le meilleur. Il a servi de base au nôtre; nous nous
en sommes écarté en un seul endroit (voyez la note du vers 20).
Est-il vrai , grand Monarque, et puis-je me vanter*
Que tu prennes plaisir à me ressusciter,
Qu'au bout de quarante ans Cinna, Pompée, Horace
Reviennent à la mode et retrouvent leur place ,
Et que l'heureux brillant de mes jeunes rivaux 5
N'ôte point leur vieux lustre à mes premiers travaux2?
Achève : les derniers n'ont rien qui dégénère,
Rien qui les fasse croire enfants d'un autre père :
Ce sont des malheureux étouffés au berceau ,
Qu'un seul de tes regards tireroit du tombeau 3. 1 o
On voit Sertorius , OEdipe et Rodogune
Rétablis par ton choix dans toute leur fortune*;
Et ce choix montrer oit quOtkon et Suréna
Ne sont pas des cadets indignes de Cinna.
Sophonisbe à son tour, Attila , Pulchérie 1 5
Reprendroient pour te plaire une seconde vie ;
1 . Tel est le texte, non pas seulement de Granet, mais aussi des
deux éditions du Mercure. Nos autres sources donnent : « et me
puis-je vanter. »
2. Var. N'ôte point le vieux lustre à mes premiers travaux?
(Mercure, Manuscrits de Gaignières, de V Arsenal, et Bordelon.)
3. Var. Qu'un seul de tes regards peut tirer du tombeau.
(Manuscrit de Gaignières.}
4. Var. Déjà Sertorius, OEdipe, Rodogune
Sont remis par ton cboix dans toute leur fortune.
— Cette variante est commune au Mercure, aux deux manuscrits et au
texte de Bordelon. Seulement, au premier vers, le manuscrit de
Gaignières porte : oc OEdipe et Rodogune; » et au second, le manu-
scrit de Gaignières et la seconde édition du Mercure ont : rentrés, au
lieu de : remis.
3i2 POÉSIES DIVERSES.
Agésilas en foule auroit des spectateurs,
Et Bérénice enfin trouveroit des acteurs1.
Le peuple , je l'avoue, et la cour les dégradent :
J'affaiblis2, ou du moins ils se le persuadent; 20
Pour bien écrire encor j'ai trop longtemps écrit ,
Et les rides du front passent jusqu'à l'esprit 3 ;
Mais contre cet abus que j'aurois de suffrages4,
Si tu donnois les tiens à mes derniers ouvrages6 !
Que de tant de bonté l'impérieuse loi6 25
Ramèneroit bientôt et peuple et cour vers moi !
« Tel Sophocle à cent ans charmoit encore Athènes ,
Tel bouillonnoit encor son vieux sang dans ses veines7,
Diroient-ils à lenvi , lorsque OEdipe aux abois
De ses juges pour lui gagna toutes les voix8. » 3o
1. Ces quatre vers (i5-i8) manquent dans le manuscrit de l'Ar-
senal, dans les Diversités de Bordelon, et dans la première édition
du Mercure (ils sont dans la seconde). — Corneille attribuait aux ac-
teurs le peu de succès de Tite et Bérénice. Voyez tome VII, p. 190
et 191.
2. Granetmet iciy'e faiblis; mais comme nous avons trouvé partout
f affoiblis , nous avons cru devoir conserver cette expression, que nous
avons déjà vue dans le sens neutre (ci-dessus, p. 95, vers 17).
3. Montaigne avait dit dans ses Essais (livre III, chapitre 11):
<r Elle (la vieillesse) nous attache plus de rides en l'esprit qu'au vi-
sage. »
4. Vàr. Mais contre un tel abus que j'aurois de suffrages.
(ire édition du Mercure, Manuscrit de V Arsenal, et Bordelon.)
5. Var. Si tu donnois le tien à mes derniers ouvrages !
(Mercure, Manuscrit de Gaignières , et Bordelon.)
6. Var. Que de cette bonté l'impérieuse loi.
(Mercure, Manuscrit de t Arsenal, et Bordelon.)
7. Var. Diroient-ils à l'envi, tel encor dans ses veines
Bouillonnoit son vieux sang, lorsqu'OEdipe aux abois.
(2e édition du Mercure, et Manuscrit de Gaignières.)
8. Var. De cent peuples pour lui gagna toutes les voix.
(ire édition du Mercure, Manuscrit de V Arsenal, et Bordelon.)
— On rapporte que Sophocle étant devenu vieux, ses fils voulurent
POÉSIES DIVERSES. 3i3
Je n'irai pas si loin ; et si mes quinze lustres *
Font encor quelque peine aux modernes illustres2,
S'il en est de fâcheux jusqu'à s'en chagriner,
Je n'aurai pas longtemps à les importuner.
Quoi que je m'en promette, ils n'en ont rien à craindre5:
C'est le dernier éclat d'un feu prêt à s'éteindre ;
Sur le point d'expirer il tâche d'éblouir,
Et ne frappe les yeux que pour s'évanouir.
Souffre, quoi qu'il en soit, que mon âme ravie
Te consacre le peu qui me reste de vie : 4 o
L'offre n'est pas bien grande, et le moindre moment
Peut dispenser mes vœux de l'accomplissement.
Préviens ce dur moment par des ordres propices ;
Compte mes bons désirs comme autant de services4.
Je sers depuis douze ans , mais c'est par d'autres bras
Que je verse pour toi du sang dans nos combats 6 :
le faire interdire, et qu'il lui suffit, pour gagner contre eux sa cause,
de lire aux juges un des beaux morceaux de son OEdipe à Colone.
1. Si cette pièce, comme on pourrait le supposer d'après le titre
qui lui est donné dans les OEuvres diverses de 1788, a été écrite au
mois d'octobre 1676, Corneille, né le 6 juin 1606, était loin encore
d'avoir quinze lustres : il n'avait achevé le quatorzième que depuis
quelques mois ; nous l'avons du reste, même dans ses écrits en prose,
trouvé assez peu exact en fait de dates.
2. Racine, en 1676, avait déjà fait représenter tous les chefs-
d'œuvre antérieurs à Phèdre, qui est de 1677. lph'igénic est de 1674.
3. Var. Quoi que je me promette, ils n'en ont rien à craindre.
(2e édition du Mercure, et Manuscrits de Gaignières et de V Arsenal.)
4. Ces quatre vers (4i-44) : (< L'offre n'est pas bien grande, etc., »
manquent dans la première édition du Mercure, dans le manuscrit de
l'Arsenal et dans les Diversités de Bordelon. On les trouve dans la
seconde édition du Mercure et dans le manuscrit de Gaignières, avec
cette variante au dernier vers :
Compte mes bons désirs pour autant de services.
5. Var. Que je verse pour toi du sang dans les combats.
[Mercure, Manuscrit de F Arsenal, et Bordelon.)
3i4 POÉSIES DIVERSES.
J'en pleure encore un fils1, et tremblerai pour l'autre 2,
Tant que Mars troublera ton repos et le nôtre ;
Mes frayeurs cesseront enfin par cette paix
Qui fait de tant d'Etats les plus ardents souhaits. 5o
Cependant, s'il est vrai que mon service plaise8,
Sire , un bon mot , de grâce , au Père de la Chaise * .
i. Le second fils de Corneille fut tué en 1674 au siège de Grave.
Voyez ci-dessus, p. 188, note 4> et p. 189, note 2.
2. Le fils aîné de Corneille, Pierre Corneille, capitaine de cava-
lerie. Voyez p. 188, note 4-
3. Var. Cependant, s'il est vrai que mon zèle te plaise.
(Mercure, Manuscrits de Gaignières , de V Arsenal, et Bordelon.)
4. Louis XIV finit par faire droit aux réclamations réitérées du poëte.
On lit dans la Gazette du 27 avril 1680: ce Pierre Corneille, qui a
fait, il y a quarante ans, des tragédies qu'on représente encore tous
les ans devant le Roi, a obtenu de Sa Majesté une abbaye pour un de
ses enfants. * Dans les Bénéfices de nomination royale du diocèse de
Tours, par ordre alfabetique , avec le nom de ceux qui les possèdent
au mois d'avril 1694, liste qui fait partie du Tableau des provinces
de France, première partie, mai 1694 (à Paris, chez Estienne Ducas-
tin, 1694, in-8°), nous trouvons des détails plus précis sur ce point.
A l'article de l'abbaye d'Aiguevive, bénéfice de trois mille livres, à
deux lieues au sud de Montrichard,dans la paroisse de Faverole,nous
voyons figurer l'abbé Corneille avec cette mention : « Thomas Cor-
neille, fils de Pierre Corneille , connu par plusieurs excellentes
pièces de théâtre qu'il a faites. Le Roi le nomma le 20 avril 1680,
par la démission de l'abbé Bernin. » Le Callia christiana (tome XIV,
col. 821) nomme aussi le fils de Corneille dans la liste des abbés
d'Aiguevive : Thomas Corneille legitur a Rege creatus abbas 20 apri-
lis 1680. Filius erat is Pétri, francicos inter vates celebratissimi.
POÉSIES DIVERSES. 3i5
LXXXVIH
VERSION DE L'ODE A MONSIEUR PELL1SSON.
Cette pièce a été imprimée in-4°, sans date d'année, comme nous
l'apprend Granet dans la note de la page 220 des Œuvres diverses.
Nous voyons par les vers 71-88 qu'au moment où l'ode latine a été
écrite, Pellisson remplissait déjà les fonctions d'historiographe de
France, auxquelles il ne fut promu qu'au commencement de 1670,
et qui , en 1677, passèrent à Racine et à Boileau. En outre, le titre
de cette ode latine nous montre que Pellisson avait la double charge
de secrétaire du Roi et de maître des requêtes. Il avait acheté la
première dès i652, mais il n'eut la seconde qu'en 1671. Enfin les
vers 23-26 nous portent, ce semble, à une époque encore postérieure,
c'est-à-dire à celle où il se trouvait chargé de l'administration de la
caisse des conversions, que le Roi lui confia au mois de novem-
bre 1676. On ignore quel est l'auteur des vers latins; dans la réim-
pression de Granet ils précèdent la pièce de Corneille ; il en était
probablement de même dans l'édition originale. Voyez sur les rap-
ports antérieurs de notre poète avec Pellisson la Notice à?OEdipe ,
tome VI, p. io3.
Non, je ne serai pas, illustre Pellisson,
Ingrat à tes bienfaits, injuste à ton beau nom :
Dans mes chants, dans mes vers il trouvera sa place,
Et tes bienfaits dans moi ne perdront pas leur grâce.
CLARISSIMO VIRO D. PELLISSONIO,
REGI CHRISTIANISSIMO A SECRETIORIBUS CONSILIIS, SUPPLICUM
EIBELLORUM MAGISTRO.
Nec te silebo, carminé non meo
Indictus ibis, digne perennibus
yEvum Pelissoni per omne
Laudibus eloquhsque ferri ;
3i6 POÉSIES DIVERSES.
Je sais bien que ce nom, par la gloire porté , 5
A déjà pris l'essor vers l'immortalité,
Et que pour le placer avec quelque avantage ,
Il faudroit mettre l'or et le marbre en usage ;
Mais ne pouvant dresser de plus beaux monuments ,
Approuve dans mes vers ces justes sentiments. i o
C'est toi, grand Pellisson, qui malgré la licence
Ramènes dans nos jours le siècle d'innocence :
Par toi nous retrouvons la candeur , la bonté,
Et du monde naissant la sainte probité.
Que la justice armée et les lois souveraines i 5
Contiennent les mortels par la crainte des peines ,
De peur que le forfait et le crime indompté
N'entraîne le désordre avec l'impunité :
Ni la rigueur des lois ni l'austère justice
Ne te retiendront pas sur le penchant du vice ; 2 o
L'amour de la vertu fait cet effet dans toi ,
Elle seule te guide, elle est seule ta loi.
Au milieu de la cour ton âme bienfaisante
Sculptis superbo marmore et aureis
Alte columnis, auree seeculo
Vir decolori, et concolorum
Effigies rediviva morum.
Quse condiderunt jura securibus
Armata gentes, sceptraque provida,
Secura ne pœnse nocendi
In vetitum rueret libido,
Passim scelestas contineant manus;
Dent prurienti frsena licentise;
Te fraudis osorem nefandse,
Te sceleris dédit abstinenlem,
Quse reetitudo est visceribus piis
Innata. Gaudes officiis prior
POÉSIES DIVERSES. 3i7
Verse indifféremment sa faveur obligeante ;
Et bien loin d'enchérir ou vendre les bienfaits , 1 5
Tu préviens, en donnant , les vœux et les souhaits '.
Ces mortels dont l'éclat emporte notre estime
N'ont souvent pour vertu que d'être exempts de crime ;
Mais ta vertu , qui suit des sentiments plus hauts ,
Ne borne pas ta gloire à vivre sans défauts : 3 o
En mille beaux projets , en mille biens féconde ,
Ta solide vertu se fait voir dans le monde;
Et sans les faux appas d'un éclat emprunté ,
Elle porte à nos yeux sa charmante beauté.
En vain, pour ébranler ta fidèle constance, 3 5
On vit fondre sur toi la force et la puissance ;
En vain dans la Bastille on t'accabla de fers2;
En vain on te flatta sur mille appas divers :
Certare promptis : nil moraris,
Immeritus meritusve poscat.
Omnis reatus esto aliis satis
Expers honestas ; non tibi : sit nisi
Omni decoro compta virtus,
Omni etiam specie decori.
Jus ergo contra fasque perurgeant
Dirum minantis jura potentise,
Carcer, catense, sœviensque
Suppliciis miseros in artus
Immane tortor ; pelliciens suis
Accédât et spes credula fascinis :
i. Voyez ce qui est dit de ces vers dans la notice de la pièce.
2. Rien n'est plus connu que la détention de Pellisson à la Bastille,
lors du procès de Foucquet, dont il était le premier commis, et que
son inaltérable dévouement pour son bienfaiteur. Pellisson avait été
mis à la Bastille en septembre i66ï, et n'en sortit qu'à la fin du
mois de janvier 1666.
3i8 POÉSIES DIVERSES.
Ton grand cœur , inflexible aux rigueurs , aux caresses ,
Triompha de la force , et se rit des promesses ; 40
Et comme un grand rocher par l'orage insulté
Des flots audacieux méprise la fierté ,
Et sans craindre le bruit qui gronde sur sa tête,
Voit briser à ses pieds l'effort de la tempête,
C'est ainsi , Pellisson , que dans l'adversité 4 5
Ton intrépide cœur garda sa fermeté ,
Et que ton amitié , constante et généreuse ,
Du milieu des dangers sortit victorieuse.
Mais c'est par ce revers que le plus grand des rois
Sembloit te préparer aux plus nobles emplois , 5 o
Et qu'admirant dans toi l'esprit et le courage,
De la Bastille au Louvre il te fit un passage ,
Où ta fidélité , dans son plus grand éclat ,
Conserve le dépôt des secrets de l'Etat1.
Te vis nec auri blanda, saevi
Nec moveat metuenda ferri.
Stares, sonanti littore qualiter
Immota rupes mole stat ardua,
Fluctus retundens : sic et olim
Te populi stupuere stantem.
Defuncta duris quando laboribus
Tandem triumphavit tua pertinax
Constantia, absque ulla pudoris
Vel fidei violatione.
Sic et probari debuerat fides
Ac fortitudo, judice principe,
Usus in arcanos vocanda
Ad penitos Luparae recessus.
1, Traduction poétique du titre de secrétaire du Roi. Voyez la
notice de la pièce.
POÉSIES DIVERSES. 3ig
De moi * , je ne veux point , comme le bas vulgaire , 5 5
De tes divers emplois pénétrer le mystère :
Je ne m'introduis point dans le palais des grands^
Et me fais un secret de ce que j'y comprends;
Mais je te vois alors comme un autre Moïse ,
Quand le peuple de Dieu , par sa seule entremise, 60
Sur le mont de Sina 2 reçut la sainte loi
A travers les carreaux , la terreur et l1 effroi.
De sa haute faveur les tribus étonnées
Au pied du sacré mont demeuroient prosternées ,
Pendant que ce prophète , élevé dans ce lieu , 6 5
Dans un nuage épais parloit avec son Dieu ,
Sacris latescens quid penetralibus
Volvas, opinari temeraria
Plebs ausit; occultata regum
Mirer ego, sileamque cautus.
Sic quando Moses colloquiis Dei,
Caliginoso culmine conditus,
Gauderet, ac voces arnicas
Auribus exciperet beatis ,
Dignationem numinis, et viri
Vix mussitantes Abramidum tribus
Sortem stupebant insolentem :
Ille homines rediens ad imos,
Fœtos superni luminis et Dei
1 . De moi, « quant à moi, pour moi. » Voyez le Lexique. — Lefèvre
et quelques autres éditeurs ont mis : Pour moi.
2. Des deux formes bibliques Sina et Sinaï, Racine a employé,
comme ici Corneille, la première au vers 4 à'At Italie :
.... La fameuse journée
Où sur le mont Sina la loi nous fut donnée ;
et la seconde dans le premier chœur de la même pièce :
O mont de Sinaï, conserve la mémoire.
32o POÉSIES DIVERSES.
Et qu'il puisoit à fonds dans le sein de sa gloire
Le merveilleux projet de sa divine histoire:
Monument éternel, où la postérité
Viendra dans tous les temps chercher la vérité. 7o
Mais puisqu'un même sort te donne dans la France
Du plus grand des héros l'illustre confidence ,
Et que par sa faveur tu vois jusques au fonds
Des secrets de l'Etat les abîmes profonds ,
Ne donneras-tu pas , après tes doctes veilles , 7 5
De ce grand conquérant les faits et les merveilles ?
Et d'un style éloquent ne décriras- tu pas
Ses conseils, ses exploits, ses sièges, ses combats1?
Le monde attend de toi ce merveilleux ouvrage ,
Seul digne des appas de ton divin langage : 80
Les faits de ce grand roi perdroient de leur beauté ,
Si tu n'en soutenois l'auguste majesté;
Et sa gloire après nous ne seroit pas entière ,
Sensus reportans, dia volumina
Condebat, œternos in annos
Eximiœ monumenta genti.
Tu nonne mentis cum tibi regiae
Sit particeps mens, scriniaque abditi
Ingressa veri, tandem aperta
Luce frui dabis alta tanti
Commenta Régis, consilia, et pii
Mavortis artes, fortia praelia,
Ludosque fortunae maligna?
Auspicio meliore cassos?
1. Louis XIV avait voulu que Pellisson l'accompagnât dans sa
première expédition en Franche-Comté (1668). Pellisson écrivit la
relation de cette conquête, et le Roi en fut si content qu'il chargea
l'auteur d'écrire l'histoire de son règne et lui assigna une pension
de six mille francs.
POÉSIES DIVERSES. 32i
Si tout autre que toi traitoit eette matière.
Poursuis donc, Pellisson, cet auguste projet, 8ft
Et ne t'étonne point par l'éclat du sujet :
Ton seul art peut donner dune main immortelle
Au plus grand de nos rois une gloire éternelle.
Exspectat orbis. Te sine principis
Splendescat ingens gloria maximi
Non nota, cultu non décente
Materise pretiositatem.
fjORIVEILLE. x ai
$22 POESIES DIVERSES.
LXXXIX
SUR LES VICTOIRES DU ROI ,
EN L'ANNÉE 1677.
Cette pièce a été imprimée deux fois la même année (1677), en
deux feuillets in-4°, sans date. Elle n'est pas signée dans ces éditions.
L'une, qui ne porte ni indication de lieu ni date, est imprimée avec
fleuron et lettre ornée; la Bibliothèque impériale en possède un
exemplaire. On lit pour adresse à la fin de l'autre : A Paris, chez
Guillaume de Luyne , libraire juré au Palais.... Avec permission. Celle-ci
se trouve à la bibliothèque de l'Arsenal. Ces vers ont été réimprimés
dans le Mercure galant de juillet 1677 (p. 166-172). Le titre y est le
même que dans les éditions originales, à l'exception des mots en l'an-
née 1677, qui ont été supprimés. La pièce est précédée de ce petit
préambule : « Venons aux vers que Mr de Corneille l'aîné a présen-
tés au Roi sur ses conquêtes. Je pourrois me dispenser de vous les
envoyer, parce qu'ils sont imprimés; mais comme ils ne le sont
qu'en feuille volante, il est bon de vous donner lieu de les conserver;
et d'ailleurs si le mot de parélie a embarrassé quelqu'une de vos
dames de province, vous leur en ferez voir l'explication dans le
changement des deux vers où ce mot étoit employé1. » Dans les
OEuvres diverses de 1738, cette pièce se trouve aux p. io3-io5.
Je vous Pavois bien dit, ennemis de la France,
Que pour vous la victoire auroit peu de constance ,
Et que de Philisbourg à vos armes rendu
Le pénible succès vous seroit cher vendu 2.
A. peine la campagne aux zéphyrs est ouverte, S
1. Voyez ci-après les vers 21 et a2, et la note et la variante qui s'y
rapportent.
2. Voyez ci dessus, p. 3o6 et 307, vers 63-72.
POESIES DIVERSES. M
Et trois villes déjà réparent notre perte* :
Trois villes dont la moindre eût pu faire un Etat,
Lorsque chaque province avoit son potentat ;
Trois villes qui pouvoient tenir autant d'années,
Si le ciel à Louis ne les eût destinées ; i o
Et comme si leur prise étoit trop peu pour nous ,
Mont-Cassel vous apprend ce que pèsent nos coups2.
Louis n'a qu'à paroître , et vos murailles tombent;
Il n'a qu'à donner l'ordre, et vos héros succombent,
Et tandis que sa gloire arrête en d'autres lieux i S
L'honneur de sa présence et l'effort de ses yeux,
L'ange de qui le bras soutient son diadème
Vous terrasse pour lui par un autre lui-même5;
Et Dieu, pour lui donner un ferme et digne appui,
Ne fait qu'un conquérant de Philippe et de lui. 20
Ainsi quand le soleil fait naître un parélie*,
La splendeur qu'il lui prête à la sienne s'allie;
Leur hauteur est égale , et leur éclat pareil ;
Nous voyons deux soleils qui ne sont qu'un soleil :
Sous un double dehors il est toujours unique , 2 5
Seul maître des rayons qu'à l'autre il communique;
1. Louis XIV partit de Saint-Germain le 28 février; le 17 mars,
Valenciennes fut prise; le 5 avril, Cambrai se rendit au Roi; le 20,
Saint-Omer fut pris par Monsieur, frère du Roi.
2. Le 11 avril le prince d'Orange, ayant voulu secourir Saint-Omer,
perdit la bataille de Cassel. L'armée française était commandée par
Monsieur, ayant sous lui les maréchaux rl'Humières et de Luxembourg.
3. Cet hémistiche : « par un autre lui-même, » a été déjà appli-
qué au même prince dans une pièce précédente. Voyez ci-dessus,
p. 280, vers 398.
4. Image du soleil réfléchi dans une nuée.
Var. Ainsi quand le soleil sur un épais nuage,
Pour se faire un second, imprime son image.
(Mercure.)
— Voyez ci-dessus, p. 322, les dernières lignes de la notice.
3a4 POESIES DIVERSES.
Et ce brillant portrait qu'illuminent ses soins
Ne brilleroit pas tant, s'il lui ressembloit moins.
Mais c'est assez, grand Roi, c'est assez de conquêtes:
Laisse à d'autres saisons celles où tu t'apprêtes. 3o
Quelque juste bonheur qui suive tes projets ,
Nous envions ta vue à tes nouveaux sujets.
Ils bravent tes drapeaux, tes canons les foudroient,
Et pour tout châtiment tu les vois , ils te voient :
Quel prix de leur défaite1! et que tant de bonté 3 5
Rarement accompagne un vainqueur irrité !
Pour nous, qui ne mettons notre bien qu'en ta vue ,
Venge-nous du long temps que nous l'avons perdue :
Du vol qu'ils nous en font viens nous faire raison ;
Ramène nos soleils dessus notre horizon. 40
Quand on vient d'entasser victoire sur victoire ,
Un moment de repos fait mieux goûter la gloire ;
Et je te le redis, nous devenons jaloux
De ces mêmes bonheurs qui t' éloignent de nous.
S'il faut combattre encor, tu peux, de ton Versailles, 45
Forcer des bastions et gagner des batailles ;
Et tes pareils , pour vaincre en ces nobles hasards,
N'ont pas toujours besoin d'y porter leurs regards.
C'est de ton cabinet qu'il faut que tu contemples
Quel fruit tes ennemis tirent de tes exemples, 5o
Et par quel long tissu d'illustres actions
Ils sauront profiter de tes instructions.
Passez , héros , passez , venez courir nos plaines ;
Egalez en six mois l'effet de six semaines :
Vous seriez assez forts pour en venir à bout , 5 5
Si vous ne trouviez pas notre grand roi partout.
Partout vous trouverez son âme et son ouvrage ,
1 . Corneille a déjà exprimé , mais avec plus d'exagération , une
idée analogue. Voyez p. 106, vers 4-6-
POÉSIES DIVERSES. 325
Des chefs faits de sa main , formés sur son courage * ,
Pleins de sa haute idée , intrépides , vaillants ,
Jamais presque assaillis, toujours presque assaillants; 60
Partout de vrais François , soldats dès leur enfance ,
Attachés au devoir, prompts à l'obéissance;
Partout enfin des cœurs qui savent aujourd'hui
Le faire partout craindre, et ne craindre que lui.
Sur le zèle, grand Roi , de ces âmes guerrières 6 5
Tu peux te reposer du soin de tes frontières,
Attendant que leur bras , vainqueur de tes Flamands ,
Mêle un nouveau triomphe à tes délassements ;
Qu'il réduise à la paix la Hollande et l'Espagne,
Que par un coup de maître il ferme ta campagne , 7 o
Et que l'aigle jaloux n'en puisse remporter
Que le sort des lions que tu viens de dompter2,
1 . On lit , mais à tort , formés de son courage , dans l'édition de
Lefèvre et dans quelques autres.
2 . L'aigle désigne l'Empire ; et les lions la Hollande et l'Espagne :
la Hollande a pour armes un lion, et le lion fait partie des armes
d'Espagne.
3*6 POESIES DIVERSES.
XG
AU ROI ,
SUR LA PAIX DE 1678.
Cette pièce est relative à la paix de Nimègue, et principalement au
traité avec l'Espagne, signé le 17 septembre 1678, et par lequel a Sa
Majesté Très-Chrétienne, rendant quelques villes et places qui lui
avaient été cédées en 1668 , retient en échange toute la Franche-
Comté, Valenciennes, Bouchain , etc. » Le rédacteur du Mercure ga-
lant, rendant compte dans le numéro de novembre 1678 (p. 180) de
la réception de l'abbé Colbert à l'Académie française, qui avait eu
lieu, dit-il, le « dernier jour de l'autre mois » (3i octobre 1678), et
parlant des diverses lectures qu'on y avait faites (c'était Racine qui
avait répondu au récipiendaire), termine ainsi : « D'autres vers de
M. de Corneille l'aîné sur la paix furent écoutés avec beaucoup de
plaisir. On y remarqua de ces grands traits de maître qui l'ont si sou-
vent fait admirer et qui le rendent un des premiers hommes de son
siècle. » C'est très-probablement de ces vers-ci qu'il veut parler.
L'édition originale, publiée l'année même, n'est ni datée ni signée;
elle forme quatre pages in- 4% avec fleuron et lettre ornée. L'adresse,
qui se trouve à la fin, porte : De V Imprimerie de Pierre le Petit, Imp.
ord. du Roy et de F Académie Françoise. La Bibliothèque impériale
en possède un exemplaire. Le Mercure galant a inséré ces vers en
mars 1079, aux pages 76 et suivantes. Après avoir raconté les fêtes
célébrées à Toulouse et à Agde pour la paix, le rédacteur s'exprime
ainsi : « Je ne puis mieux finir cet article que par les vers que l'in-
comparable M. de Corneille l'aîné a présentés à Sa Majesté sur la
gloire qu'elle s'est acquise par ce qui donne lieu à toutes ces réjouis-
sances. Il n'est point besoin de vous dire qu'ils ont été admirés de toute
la cour. Vous savez qu'il ne part rien que d'achevé de la plume de
ce grand homme. » Le texte des vers de Corneille, tels que les donne
le Mercure, où ils sont intitulés simplement : Au Roi, sur la Paix, et
POESIES DIVERSES. 3i7
le texte de Granet (OEuvres diverses, p. 106-109) ne diffèrent de l'édi-
tion originale que par une seule variante (au vers 11).
Ce n'étoit pas assez, grand Roi, que la victoire
A te suivre en tous lieux mît sa plus haute gloire :
Il falloit, pour fermer ces grands événements,
Que la paix se tînt prête à tes commandements.
A peine parles-tu , que son obéissance 5
Convainc tout l'univers de ta toute-puissance ,
Et le soumet si bien à tout ce qu'il te plaît ,
Qu'au plus fort de Forage un plein calme renaît.
Une ligue obstinée aux fureurs de la guerre
Mutinoit contre toi jusques à l'Angleterre1 : 1 o
Ses 2 projets tout à coup se sont évanouis ;
Et pour toute raison, ainsi le veut Louis3.
Ce n'est point une paix que l'impuissance arrache ,
Et dont l'indignité sous de faux jours se cache :
Pour la donner à tous ne consulter que toi , i 5
C'est la résoudre en maître, et l'imposer en roi ;
Et c'est comme un tribut que tes vaincus te rendent ,
Sitôt que par pitié tes bontés le commandent.
Prodige ! ton seul ordre achève en un moment
Ce qu'en sept ans Nimègue a tenté vainement 4 : 20
1. Les dernières conquêtes de Louis XIV avaient excité une grande
fermentation dans le parlement d'Angleterre, qui força Charles II à
redemander les troupes anglaises qui avaient été au service de la
France dès les commencements de la guerre.
2. Il y a ces dans le texte du Mercure et dans celui de Granet.
3. C'est comme une traduction du vers bien connu, de Juvénal
(satire IV, vers 223 ) :
Hoc volo, sic jubeo, sit pro ratione voluntas,
4. Dans le Recueil de tous les actes , mémoires et lettres qui ont servi
pour la négociation de la paix, avec les traitez, qui ont esté conclus à
Nimegue (à Paris, chez F. Léonard, M.DC.LXXVIII, in-4°), la pre-
mière pièce est intitulée : Projet des conditions de la paix du 9 avril 1678,
et la dernière est le traité de la paix entre la France et l'Espagne dont
3<i8 POÉSIES DIVERSES.
Ce que des députés la fameuse assemblée ,
D'intérêts opposés trop souvent accablée ,
Ce que nespéroit plus aucun médiateur,
Tu le fais par toi-même, et le fais de hauteur.
On l'admire avec joie , et loin de t'en dédire , 2 5
Tes plus fiers ennemis s'empressent d'y souscrire :
Un zèle impatient de t'avoir pour soutien
Réduit leur politique à ne contester rien.
Ils ont vu tout possible à tes ardeurs guerrières ,
Et sûrs que ta justice y mettra des barrières , 3o
Qu'elle se défendra de rien garder du leur,
Ils la font seule arbitre entre eux et ta valeur.
Qu'il t'épargne de sang, Espagne ! il te veut rendre
Des villes qu'il faudroit tout un siècle à reprendre :
Il en est en Hainaut , en Flandre , que son choix , 3 5
En t' imposant la paix , remettra sous tes lois1;
Mais au commun repos s'il fait ce sacrifice ,
En tous tes alliés il veut même justice ,
Et qu'aux lois qu'il se fait leurs intérêts soumis
Ne laissent aucun lieu de plainte à ses amis2. 40
O vous qu'il menaçoit , et qui vous teniez prêtes
nous avons parlé au commencement de la notice. Il y avait eu des
négociations en 1673, mais à Cologne. Il existe aussi un traité du
Ier novembre 1671, conclu entre Louis XIV et l'empereur Léopold,
pour alliance et sûreté mutuelle. En remontant jusque-là, nous avons
bien les sept ans, et il est naturel qu'un poëte ne se soit pas préoc-
cupé du lieu où les négociations ont commencé, et n'ait songé qu'à
celui où elles se sont terminées d'une manière si éclatante.
1. L'article v du traité du 17 septembre, conclu entre Charles II,
roi d'Espagne, et Louis XIV, promet de remettre entre les mains du
roi catholique la ville et duché de Limbourg, le pays d'Outremeuse,
la ville et citadelle de Gand , etc. L'article vi stipule que Charleroi ,
Binche , Ath , Oudenarde et Courtrai demeureront également à
l'Espagne.
a. Le Roi fit rendre à la Suède, notre alliée, tout ce que l'électeur
de Brandebourg et le roi de Danemark lui avaient pris.
POÉSIES DIVERSES. ^
A l'infaillible honneur d'être de ses conquêtes ,
Places dignes de lui, Mons, Namur, plaignez-vous :
La paix vous ôte un maître à préférer à tous;
Et Louis au vieux joug vous laisse condamnées, 45
Quand vous vous promettiez nos bonnes destinées.
Heureux , au prix de vous , Ypres et Saint-Omer * !
Ils ont eu comme vous de quoi les alarmer ;
Ils ont vu comme vous leur campagne fumante
Faire passer chez eux la faim et l'épouvante ; 5 o
Mais pour cinq ou six jours que ces maux ont duré,
Ils ont mon roi pour maître, et tout est réparé.
Ainsi fait le bonheur de l'Egypte inondée
Du Nil impétueux la fureur débordée ;
Ainsi les mêmes flots qu'elle fait regorger 5 5
Enrichissent les champs qu'il vient de ravager.
Consolez-vous pourtant, places qu'il abandonne,
Qu'il semble dédaigner d'unir à sa couronne :
Charles2, dont vous aurez à recevoir les lois,
Voudra d'un si grand maître apprendre l'art des rois, 60
Et vous verrez l'effort de sa plus noble étude
S'attacher à le suivre avec exactitude.
Magnanime Dauphin , n'en soyez point jaloux
Si jamais on le voit s'élever jusqu'à vous.
Il pourra faire un jour ce que déjà vous faites , 6 5
Etre un jour en vertus ce que déjà vous êtes ;
Mais exprimer au vif ce grand roi tout entier,
C'est ce qu'on ne verra qu'en son digne héritier :
Le privilège est grand, et vous serez l'unique
A qui du juste ciel le choix le communique. 70
J'allois vous oublier, Bataves généreux ,
1. Ypres, Saint-Omer et bien d'autres villes de la Flandre (voyez
la notice en tête de la pièce) restèrent à la France.
2. Charles II, roi d'Espagne.
33o POESIES DIVERSES.
Vous qui sans liberté ne sauriez vivre heureux ,
Et que l'illustre horreur d'un avenir funeste
A fait de l'alliance ébranler tout le reste.
En ce grand coup d'Etat si longtemps balancé, 7 5
Si tout ce reste suit , vous avez commencé * ;
Et Louis, qui jamais n'en perdra la mémoire,
Se promet de vous rendre à toute votre gloire ;
De rétablir chez vous l'entière liberté ,
Mais ferme , mais durable à la postérité , 8 o
Et telle qu'en dépit de leurs destins sévères
Vos aïeux opprimés l'acquirent à vos pères.
M'en désavoueras-tu , grand Roi, si je le dis?
Me pardonneras-tu si par là je finis?
Mille autres te diront que pour ce bien suprême , 8 5
Vainqueur de toutes parts, tu t'es vaincu toi-même;
Ils diront à l'envi les bonheurs que la paix
Va faire à gros ruisseaux pleuvoir sur tes sujets ;
Ils diront les vertus que vont faire renaître
L'observance des lois et l'exemple du maître; 90
Le rétablissement du commerce en tous lieux ,
L'abondance partout répandue à nos yeux,
Le nouveau siècle d'or qu'assure ton empire,
Et le diront bien mieux que je ne le puis dire.
Moi , pour qui ce beau siècle est arrivé si tard 9 5
Que je n'y dois prétendre ou point ou peu de part ;
Moi, qui ne le puis voir qu'avec un œil d'envie
Quand il faut que je songe à sortir de la vie ,
Je n'ose en ébaucher le merveilleux portrait,
De crainte d'en sortir avec trop de regret. 1 00
1 . lie premier traité conclu à Nimègue fut celui de la France avec
la Hollande: il fut signé le 10 août 1678.
POÉSIES DIVERSES 33i
XGI
INSCRIPTION POUR L ARSENAL DE RREST.
Traduction.
Nous devons à l'obligeance de M. Julien Travers, bibliothécaire
de la ville de Caen, l'indication d'un feuillet in-8°, contenu dans un
volume in-4° de Mélanges qui appartient à la Bibliothèque de Caen.
Ce feuillet, intitulé : Inscription pour V Arcenal de Brest , présente la
pièce française de notre poète, signée : P. Corneille , traduite des
vers de Santeul que nous donnons en note ', et cinq pièces latines.
C'est probablement d'après une autre édition que Granet a reproduit
dans les OEuvres diverses (p. 227) ces vers de Corneille, car il dit en
parlant de cette inscription qu'elle fut « imprimée d'abord en feuille
volante in- 4°, sans date d'année, et réimprimée dans les OEuvres de
Santeul. » Ce poète avait publié sur ce même sujet tout un petit
recueil, dans le format in-4°, dont voici la description : Un feuillet
non chiffré, imprimé seulement au recto, porte pour titre : Inscriptions
pour F Arcenal de Brest; suivent les inscriptions latines de Santeul,
numérotées 1-8, signées : Santolius, Victorinus, datées, en français:
Du 6 septembre 1679. Ensuite vient la Réponse à la critique des Inscrip-
tions faites pour C Arcenal de Brest, en dix-huit pages, où Santeul dit à
son censeur anonyme (p. 1 4) : « Nos épigrammes ne sont pas si malheu-
reuses qu'elles n'ayent été jugées dignes d'être traduites par de grands
1. Quae pela go sese arx aperit metuenda Britanno,
Classibus armandis, omnique accommoda bello,
Prœdonuui terror, francis tutela carinis,
TEternse regni excubiae, domus hospita Martis,
Magni opus est Lodoici. Hune omnes omnibus undis
Agnoscant venti dominum, et maria alta tremiscant.
L'édition in~4°du petit recueil de Santeul porte au dernier vers : auras,
au lieu de venti. — Ce sixain est la septième des neuf inscriptions de
Santeul. Il dit, dans sa Réponse à la critique, déjà citée, que c'est
celle-là et la sixième qu'il estime les plus belles.
ïïi POESIES DIVERSES.
poètes, dont voici la traduction. Ils ont pris tous la septième pour
leur modèle. » Il donne ensuite, sous le titre de Première traduction ,
mais sans nom d'auteur, la version de Corneille, et successivement
les trois autres que nous renvoyons en note1. Enfin, continuant à
faire contre son censeur l'apologie de la langue latine pour les in-
scriptions, il s'exprime ainsi : « C'est en vain qu'il crie au secours,
et qu'il réveille le grand Corneille, qui dort dans le sein de la gloire.
Il est bien plus grand prophète que lui, car ce grand personnage,
dont le théâtre françois est encore si paré, me dit très-souvent qu'il
sera un jour habillé à la vieille mode (p. 16). » Au tome III (p. 53
et suivantes) de l'édition des Œuvres de Santeul publiée en 1729,
I. SECONDE TRADUCTION.
Ce chef-d'œuvre élevé sur le bord de ces eaux,
De qui le seul aspect rassure nos vaisseaux ,
Ce riche magasin d'équipage de guerre,
Cet amas surprenant d'armements inouïs ,
C'est l'ouvrage du grand Louis,
Redouté sur la mer autant que sur la terre.
TROISIÈME TRADUCTION.
Ces longs murs que tu vois s'étendre sur ces mers,
Fournir à nos vaisseaux tant d'armements divers,
Effrayer le corsaire, assurer nos pilotes,
Sur l'empire françois veiller de toutes parts
Pour la défense de nos flottes,
Sont l'ouvrage étonnant du plus grand des héros.
Qu'à l'envi les vents et les flots
Le reconnoissent tous pour leur dieu tutélaire,
Et que tout l'Océan le craigne et le révère.
QUATRIÈME TRADUCTION.
Cet arsenal , terrible à la mer britannique ,
Qui sous un monarque héroïque
Voit à nos armements tout l'Océan soumis,
L'effroi des vaisseaux ennemis ,
Des vaisseaux françois l'assurance ,
D'un empire éternel l'éternelle défense ;
Ce fort où Mars toujours a les armes en main ,
Est de Louis le Grand le redoutable ouvrage :
Les vents reconnoîtront ici leur souverain,
Les mers craindront ici le maître de l'orage.
POESIES DIVERSES, 333
que nous avons citée souvent, on a joint une neuvième épigramme
latine aux huit que Santeul avait publiées, et l'on a reproduit les
quatre imitations françaises à la suite de la septième inscription, sans
y ajouter les noms des auteurs. Les quatre pièces françaises n'en
figurent pas moins d'ailleurs à leur place dans la réponse imprimée
aux pages 57-71.
Colbert avait commencé dès i663 à faire construire à Brest les
bâtiments nécessaires à un arsenal maritime. Les travaux furent com-
plétés en 1681 par l'achèvement des magasins et des ateliers de l'ar-
tillerie du côté de Recouvrance, la construction du bassin de radoub
et de l'hôtel de l'Intendance du côté de Brest. La France posséda
alors un arsenal qui, quoique loin encore du degré d'étendue et de
magnificence où il est parvenu depuis, était le premier de l'Europe.
Le Roi voulut en consacrer l'époque par une médaille , sur laquelle
on voit, à l'entrée du port de Brest, le dieu Portunus, appuyé sur
un dauphin et tenant en main une clef avec cette légende : Tutela
classium, et pour exergue : Bresti portus et navale l.
Palais digne de Mars, qui fournis pour armer
Cent bataillons sur terre et cent vaisseaux sur mer ,
De l'empire des lis foudroyant corps de garde2,
Que jamais sans pâlir corsaire ne regarde,
De Louis , le plus grand des rois, 5
Vous êtes l'immortel ouvrage.
Vents , c'est ici qu'il faut lui rendre 3 hommage ;
Mers, c'est d'ici qu'il faut, prendre ses lois*.
1. Voyez les antiquités de la Bretagne , par le chevalier de Frémin-
ville. Finistère (i83a, 1 vol. in-8°), p. 182 et suivantes.
2. Var. De l'empire François foudroyant corps de garde.
{Réponse à la critique, tant dans l'édition originale
que dans la réimpression de 1729.)
3. « Qu'il lui faut rendre, » dans les Œuvres diverses de 1738.
4. On lit, mais à tort, dans l'édition de Lefèvre et dans quelques
autres : « Mers, c'est ici. »
33A POÉSIES DIVERSES.
XGH
A MONSEIGNEUR,
SUR SON MARIAGE.
Le mariage de Louis Dauphin (voyez tome IX, p. 63, note 2) avec
Marie-Anne-Christine-Victoire, princesse de Bavière, eut lieu le
7 mars 1680. La deuxième partie du Mercure galant de ce même mois
est entièrement occupée par la relation des réjouissances qui furent
célébrées à cette occasion. On y trouve les vers de Corneille (p. 261
et suivantes). Ils y sont précédés de ce préambule : « Mr de Corneille
l'aîné, qui a toujours marqué son zèle à Sa Majesté par les ouvrages
que nous avons vus de lui sur ses diverses campagnes, a été le premier
qui ait écrit sur le mariage de Monseigneur. Vous avez peut-être déjà
vu les vers qu'il a faits sur ce sujet, puisqu'il les alla présenter au
Roi et à ce jeune prince sitôt que le mariage fut déclaré. Ils sont si
beaux qu'on pourroit trouver cette relation imparfaite, s'ils n'y
étoient pas employés : les voici. » Ils furent aussi imprimés in-4°,
sans lieu ni date, avec la signature P. C; la Bibliothèque impériale
possède un exemplaire de cette édition. Granet les donne aux
pages 1 10- 114 des OEuvres diverses.
Prince , l'appui des lis , et l'amour de la France ,
Toi, dont au berceau même elle admira l'enfance *,
Et pour qui tous nos vœux s'efïbrçoient d'obtenir
Du souverain des rois un si bel avenir,
Aujourd'hui qu'elle voit tes vertus éclatantes 5
Répondre à nos souhaits , et passer nos attentes ,
Quel supplice pour moi , que l'âge a tout usé ,
De n'avoir à l'offrir qu'un esprit épuise !
D'autres y suppléeront2, et tout notre Parnasse
1. Voyez tome IX, p. 64, note 1.
2. Il y a sur ce sujet un assez grand nombre de poésies françaises
POESIES DIVERSES. 335
Va s'animer pour toi de ce que j'eus d'audace , 10
Quand sur les bords du Rhin , pleins de sang et d'effroi,
Je fis suivre à mes vers notre invincible roi 4.
Ce cours impétueux de rapides conquêtes ,
Qui jeta sous ses lois tant de murs et de têtes ,
Sembloit nous envier dès lors le doux loisir i 5
D'écrire les succès2 qu'il lui plaisoit choisir :
Je m'en plaignis dès lors 8 ; et quoi que leur histoire
A qui les écriroit dût promettre de gloire ,
Je pardonnai sans peine au déclin de mes ans ,
Qui ne m'en laissoient pins la force ni le temps : 20
J'eus même quelque joie à voir leur impuissance
D'un devoir si pressant m'assurer la dispense;
Et sans plus attenter aux miracles divers
Qui portent son grand nom au bout de l'univers,
J'espérai dignement terminer ma carrière , 2 5
Si j'en pouvois tracer quelque ébauche grossière
Qui servît d'un modèle à la postérité,
De valeur, de prudence et d'intrépidité.
Mais comme je tremblois de n'y pouvoir suffire ,
Il se lassa de vaincre, et je cessai d'écrire4 ; 3o
Et ma plume , attachée à suivre ses hauts faits,
Ainsi que ce héros acheva par la paix 6 .
La paix, ce grand chef-d'œuvre, où sa bonté suprême
dans la deuxième partie du Mercure de mars 1680 (p. 27 2 -2 87 ). Le
catalogue des livres relatifs à l'histoire de France de la Bibliothèque
impériale indique en outre (tome II, p. 2 54) ^a Conjouissance du Da-
nube avec la Marne , anonyme, deux pièces latines de Lenglet, une de
Fleury, et un épithalame latin du collège des Jésuites.
1 . Voyez ci-dessus, p. a5a. — 2, Le succès, dans les Œuvres diverses.
3. Voyez ci-dessus, p. 224, vers 9-12.
4- Voyez ci-dessus, p. 225, vers 19 et 20, et note 2. Corneille
semble faire allusion ici à un vers que, suivant toute apparence, il
avait inspiré à Boileau.
6. Voyez ci-dessus, p. 3a6 et suivantes.
S36 POÉSIES DIVERSES
Pour triomphe dernier triompha de lui-même ,
Il la fit, mais en maître : il en dicta les lois; 3 5
Il rendit, il garda des places à son choix :
Toujours grand, toujours juste, et parmi les alarmes
Que répandoit partout le bonheur de ses armes ,
Loin de se prévaloir de leurs brillants succès ,
De cette bonté seule il en crut tout l'excès , 40
Et l'éclat surprenant d'un vainqueur si modeste
De mon feu presque éteint consuma l'heureux reste.
Ne t'offense donc point si je t'offre aujourd'hui
Un génie épuisé , mais épuisé pour lui :
Tu dois y prendre part; son trône, sa couronne, 45
Cet amas de lauriers qui partout l'environne,
Tant de peuples réduits à rentrer sous sa loi ,
Sont autant de dépôts qu'il conserve pour toi ;
Et mes vers, à ses pas enchaînant la victoire,
Préparoient pour ta tête un rayon de sa gloire. 5o
Quelle gloire pour toi d'être choisi des cieux
Pour digne successeur de tous nos demi-dieux !
Quelle faveur du ciel , de l'être à double titre
D'un roi que tant d'Etats ont pris pour seul arbitre,
Et d'avoir des vertus prêtes à soutenir 5 5
Celles qui le font craindre et qui le font bénir î
C'est de tes jeunes ans ce que ta France espère
Quand elle admire en toi l'image d'un tel père.
N'aspire pas pourtant à ses travaux guerriers :
Où trouverois-tu1, Prince, à cueillir des lauriers, 60
Des peuples à dompter, et des murs à détruire?
Vois- tu des ennemis en état de te nuire ?
Son bras ou sa bonté 2 les a tous désarmés :
1 . Granet, dans les Œuvres diverses, a mis : Où trouveras-tu.
1. Ainsi dans le Mercure. On lit à tort dans l'édition in- 4° : valeur,
au Heu de bonté , et cette leçon fautive a été adoptée par Granet et
tous les éditeurs suivants.
POÉSIES DIVERSES. 337
S'ils ont tremblé sous l'un, l'autre les a charmés.
Quelques lieux qu'il te plaise honorer de ta vue , 6 5
Un respect amoureux y prévient ta venue ;
Tous les murs sont ouverts, tous les cœurs sont soumis,
Et de tous ses vaincus il t'a fait des amis.
A nos vœux les plus doux si tu veux satisfaire ,
Vois moins ce qu'il a fait que ce qu'il aime à faire : 7 0
La paix a ses vertus, et tu dois y régler
Cette ardeur de lui plaire et de lui ressembler.
Vois quelle est sa justice , et quelle vigilance
Par son ordre en ces lieux ramène l'abondance1,
Rétablit le commerce , et quels heureux projets 7 5
Des charges de l'Etat soulagent ses sujets2;
Par quelle inexorable et propice tendresse
Il sauve des duels le sang de sa noblesse 8 ;
Comme il punit le crime 4, et par quelle terreur
Dans les cœurs les plus durs il en verse l'horreur. 80
Partout de ses vertus tu verras quelque marque ,
Quelque exemple partout à faire un vrai monarque.
Mais sais-tu quel salaire il s'en promet de toi?
1. En décembre 1672 il avait paru un édit, « portant règlement
sur la juridiction des prévôts et échevins » de la ville de Paris, édit
dont un des principaux objets était d'assurer les « provisions néces-
saires à la subsistance du grand nombre de ses habitants. »
2. La grande Ordonnance du commerce est du mois de mars 1673;
le même mois de la même année il avait été publié un règlement gé-
néral pour les tailles. Deux actes postérieurs intéressant le commerce
sont le règlement pour la Compagnie des Indes orientales de sep-
tembre 1675, et les lettres patentes portant confirmation de la Com-
pagnie du Sénégal.
3. Au mois d'août 1679, Louis XIV rendit un « édit contenant
règlement général pour la répression du duel. » Beaucoup d'articles
de cet édit sont la répétition presque textuelle de celui de septem-
bre i65i.
4. L'ordonnance criminelle fut rendue à Saint-Germain-en-Laye,
au mois d'août 1670. — Voyez aussi ci-dessus, p. 180, note 2.
Corneille, x 22
338 POÉSIES DIVERSES.
Une postérité digne d'un si grand roi,
Qui fasse aimer ses lois chez la race future , 8 5
Et les donne pour règle à toute la nature.
C'est sur ce digne espoir de sa tendre amitié
Qu'il t'a choisi lui-même une illustre moitié.
Ses ancêtres ont su de plus d'une manière
Unir le sang de France à celui de Bavière; 90
Et l'heureuse beauté qui t'attend pour mari
Descend ainsi que toi de notre grand Henri :
Vous en tirez tous deux votre auguste origine ,
L'un par Louis le Juste , et l'autre par Christine ,
En degré tout pareil * . Ses aïeux paternels 9 5
Firent avec les tiens ligue pour nos autels ,
Joignirent leurs drapeaux contre le fier insulte 2
Que Luther et sa secte osoient faire au vrai culte ;
Et Prague du dernier vit les fameux exploits
De Rome dans ses murs faire accepter les lois 3. 100
Ils ont assez donné de Césars à l'Empire,
Pour en donner encor, s'il en falloit élire 4 ;
1. Le père de la Dauphine était Ferdinand Marie, électeur de Ba-
vière, et sa mère Henriette-Adélaïde de Savoie, fille du duc Victor-
Amédée et de Christine de France, dont les parents étaient Henri IV
et Marie de Médicis. — Le grand-père paternel de la Dauphine,
Maximilien I, premier électeur de Bavière, avait aussi épousé (en
premières noces) une petite-fille de France, Elisabeth, fille de Charles
duc de Lorraine et de Claude de France.
2. A cette époque ce mot était encore quelquefois masculin. Voyez
le Lexique.
3. Maximilien I remporta le 8 novembre 1620 une victoire com-
plète sur l'armée de Frédéric , roi de Bohême , sous les murs de
Prague, s'empara de la ville, et réduisit en peu de jours la Bohème
sous l'obéissance de l'Empereur.
4. La maison de Bavière avait donné deux empereurs à l'Alle-
magne : Louis V au commencement du quatorzième siècle, et Roberi
dans les dix premières années du quinzième. La prédiction de Cor-
neille, « pour en donner encore, » faillit s'accomplir au dix-huitième.
Charles- Albert se fit couronner empereur à Francfort, en 1742» sous
POESIES DIVERSES. 3*9
Et notre grand monarque est assez redouté
Pour faire encor voler l'aigle de leur côté.
Quel besoin toutefois de vanter leur noblesse i o 5
Pour assurer ton cœur à leur1 jeune princesse,
Comme si ses vertus et l'éclat de ses yeux
A son mérite seul ne l'assuroient pas mieux?
La grandeur de son âme et son esprit sublime
S'élèvent au-dessus de la plus haute estime ; no
Son accueil , ses bontés ont de quoi tout charmer ;
Et tu n'auras enfin qu'à la voir pour l'aimer.
Vois bénir en tous lieux l'hymen qui te l'amène
Des rives du Danube aux rives de la Seine :
Vois-le suivi partout des Grâces et des Jeux ; u5
Vois la France à l'envi lui porter tous ses vœux.
Je t'en peindrois ici la pompeuse allégresse ;
Mais pour s'y hasarder il faut de la jeunesse :
De quel front oserois-je, avec mes cheveux gris,
Ranger autour de toi les Amours et les Ris ? 120
Ce sont de petits dieux, enjoués , mais timides,
Qui s'épouvanteroient dès qu'ils verroient mes rides ;
Et ne me point mêler à leur galant aspect ,
C'est te marquer mon zèle avec plus de respect.
le nom de Charles VII; mais, vaincu par l'Autriche, il fut forcé de
renoncer à l'Empire.
1. La* dans les OEuvrcs diverses.
Fl\ DES POESIES DIVERSES.
APPENDICE.
i
(Voyez les pièces XVI et XVII, p. 5 8-60.)
RELATION DU BALLET DU CHATEAU DE BISSESTRE ,
Extraite de la Gazette du 12 mars i632 (p. 104-106).
a II se peut voir si nous engendrons ici mélancolie par le ballet
que le comte de Soissons dansa dimanche dernier au Louvre , à l'Ar-
senal, et en la maison de ville , avec une telle affluer) ce de peuple
que dans le Louvre seul il n'y avoit guère moins de quatre mille
spectateurs, la plupart personnes de remarque.
« Le sujet fut le château de Bissestre (que vous savez être une
vieille masure à demie-lieue de cette ville) et les personnes , les ani-
maux et les esprits auxquels il sert de rendez-vous jour et nuit.
« Le jour étoit figuré par un grand tableau où ce château étoit
peint ayant le soleil sur son horizon, et autour de son faîte des grues,
faisans, faucons et autres oiseaux , comme au bas toute sorte de bêtes
à quatre pieds.
« D'où , après que le sieur Justice eut de sa voix dextrement jointe
à celle du luth, représenté le sujet du ballet, sortirent premièrement
Thôte, l'hôtesse et son valet que représentoient (pour suivre le plai-
sant ordre du ballet et non celui des dignités qui n'est que trouble-
fête ) les sieurs de Belleville , de la Barre et de Liencourt , aussi bien
que tout le reste si richement vêtus qu'on ne les eût pas pris pour tels
sans leurs postures où rien n'étoit oublié , et sans le petit mantelet,
que l'hôte donna à garder à sa femme, enchaperonnée à la négligence,
et les entonnoirs dont l'habit de ce gentil valet étoit passementé.
« Puis vinrent danser deux gueux, vêtus de riches lambeaux, que
représentoient le comte de Fiasque et le sieur Parade.
Mi POESIES DIVERSES.
t Suivoientle comte de Soissons , le duc d'Aluy, les sieurs de Lien-
court , de la Barre et Marandé, qui représentoient cinq paysans ivres,
vêtus de sayons de satin blanc passeinentés d'argent , la serpette à la
ceinture , mais avec une telle adresse , qu'encore que le premier se
voulût faire méconnoître dans la foule des autres , toute l'assistance
lui donna le prix du ballet , et le jugea véritablement sien , non tant
pour sa dépense, qui fut grande, comme pour y avoir le mieux fait.
« Trois Bohèmes parurent incontinent après , que représentèrent
les comtes de Maurever, de Saults et de Fiasque.
« Deux braves, qui furent les comtes de Maurever et de Mata, y
vinrent ensuite prendre la mesure de leur courage à celle de leur
épée , vêtus de satin gris chamarré d'argent , qui dansèrent l'épée
nue, le fourreau leur pendant au baudrier.
« Deux damoiselles masquées y allèrent présenter un autre combat,
sous la conduite d'un messager d'amour, garni déchausses à culotte,
et d'un manteau de satin qui avoit de la peine à atteindre jusques
aux coudes , où le baron de la Ferté , le marquis de Beuvron et le
sieur Enaut dansèrent.
« Deux écoliers, que représentoient le marquis de Gèvreet le sieur
de Saint-Germain Beaupré , y vinrent ensuite jouer une partie du
quartier et friper l'autre.
« Puis un Espagnol y fît la roue , encore qu'il fût vêtu en pèle-
rin, le roquet sur les épaules, et la petite boîte de fer-blanc à sa
ceinture, servi de son valet, qui avoit le bissac sur le dos, la gui-
tare en main, et passoit par humilité en dansant sous les caprioles
de son maître. Ils furent représentés par les sieurs de Verpré et
Saintot. '
« Deux hiboux et quatre corneilles en leur vraie forme, sous laquelle
étoient cachés autant d'enfants , y vinrent après danser leur branle
et annoncer la nuit.
« Lors parut un autre tableau au lieu du premier, où le même châ-
teau de Bissestre étoit ombragé d'une nuit qui n'avoit point d'autre
clarté que celle d'un démon qui sortoit tout en feu de la plus haute
de ses fenêtres.
« Le sieur de Moulinié , vêtu de gaze noire parsemée d'étoiles , fit
l'ouverture de cette nuit par un chant lugubre , auquel succéda un
excellent concert de luths.
« Puis se présente un magicien avec la sotane de satin incarnat, la
robe de satin noir couverte de passement d'argent , tenant en sa main
APPENDICE. 343
une baguette d'ébène garnie d'un bout d'argent, dont il frappoit en
dansant son livre de magie: c'étoit le sieur Marais.
« A ses charmes sautent en place quatre lutins vêtus de satin noir
et coiffés de plumes noires et grises, que dansèrent les ducs de Lon-
gueville et de Candale, le baron du Vigean , et le comte de Saint-
Germain Beaupré.
« Cinq fantômes leur succédèrent, tous couverts de lames d'or cou-
pées en olipeaux , dont le cliquetis n'étoit point si effroyable qu'il
n'y eût des dames en la troupe qui témoignoient par leur conten-
tement ce que d'autres, moins scrupuleuses, dirent tout haut, qu'elles
ne s'en pourroient fuir devant ces fantômes; car c'étoit encore le
comte de Soissons , le duc d'Aluy, et le sieur de Liencourt, avec les
sieurs de Marandé et la Barre.
« Trois faux monnoyeurs se mettent après sur les rangs, ayant leurs
habits chamarrés de pièces fausses et les rnains garnies de cisailles ,
tenailles et marteaux , exerçants leur métier en trop bonne compa-
gnie pour ne vouloir pas être pris, comme ils furent par trois ar-
chers vêtus de satin vert sous leur casaque : où dansèrent les ducs
de Longueville et de Candale , le baron du Vigean , les comtes de
Fiasque et de Mata , et le sieur Parade.
a Ils furent bientôt suivis du même sieur Parade et Enaut, repré-
sentants le juge et son greffier, vêtus de satin noir et la toque en tête.
« Trois sergents finirent les entrées , représentés par les comtes
de Mata et de Fiasque , et par le sieur Parade.
« Puis la musique du Roi se fit entendre, laquelle fut fermée par le
grand ballet dansé aux pieds de Sa Majesté , qui rejoignant en un
corps tant de pièces détachées , et faisant à son aspect reconnoître
pour gens d'honneur ceux qui paroissoient naguère plongés dans une
cloaque de vices , signilioit combien la vertu de ce monarque est ef-
ficacieuse , puisque le vice ne peut subsister devant lui , et qu'à son
abord les diables mêmes cessent de l'être.
a Ce ballet (après lequel le comte de Soissons mena danser la Reine;
le duc de Longueville , la princesse de Condé ; et le reste des sei-
gneurs, les autres dames de la cour) fit aussi juger quelle étoit la
disposition de ces princes d'avoir pu danser depuis les huitheuresdu
dimanche au soir, septième du courant, qu'ils commencèrent, jus-
ques au lendemain matin, pareille heure, que leur fut faite la colla-
tion en la maison de ville, où ils finirent. Et comme la fortune aux
grands desseins se fait volontiers de la partie , il s'y rencontra plus
Wt POÉSIES DIVERSES.
d'accidents qu'on n'en vouloit représenter , car il y eut une enseigne
et autres choses perdues jusques à la valeur de quinze mille écus.
Une comtesse y accoucha. Pour faire place, il fallut employer quelques
descendants de hallebardes et des feintes qui n'étoient pas du ballet. »
II
(Voyez les pièces XXV-XXVII, p.. 82-85.)
TROIS PIECES DE LA GUIRLANDE DE JULIE ,
Signées C. et attribuées par plusieurs éditeurs à Corneille.
LE LIS.
MADRIGAL.
Un divin oracle autrefois
A dit que ma pompe et ma gloire
Sur celle du plus grand des rois
Pouvoit emporter la victoire ;
Mais si j'obtiens, selon mes vœux , 5
De pouvoir parer v os cheveux ,
Je dois , ô Julie adorable ,
Toute autre gloire abandonner ;
Car nul honneur n'est comparable
A celui de vous couronner. 10
L'HYACINTHE.
MADRIGAL.
D'un éternel bonheur ma disgrâce est suivie ,
Je n'ai plus rien en moi qui marque mon ennui.
Autrefois un soleil me fit perdre la vie ;
Mais un autre soleil me la rend aujourd'hui.
LA FLEUR DE GRENADE.
MADRIGAL.
Dans l'empire fameux de Flore et de Pomone
Mon père a mille enfants qui portent la couronne ;
APPENDICE. >,.
Mais préférant mon sort au leur,
J'ai mieux aimé demeurer fleur,
Avec le vif éclat dont je suis embellie , 5
Afin de m'offrir vierge à la chaste Julie.
O perte favorable ! ô change précieux !
Je quitte ma gloire mortelle
Pour l'immortel honneur de parer cette belle,
Et le destin des rois pour le destin des Dieux. 10
III
(Voyez la Notice, p. n-14.)
LE PRESBYTÈRE D'HÉNOUVILLE.
A TIRCIS.
Cette pièce a paru pour la première fois avec l'adresse suivante :
A Rouen, chez lean le Boullenger, M.DC.XXXXII, en une brochure
in-40 de douze pages , dont le seul exemplaire connu appartient à la
bibliothèque de Rouen, où il fait partie d'un recueil intitulé : Poésies
diverses 7 qui est numéroté 0744» Nous avons expliqué assez lon-
guement dans la Notice^ pour n'avoir plus à y revenir ici, les motifs
qui nous ont porté à rejeter à Y Appendice cette épître , attribuée
par plusieurs éditeurs à Corneille. Si elle avait été admise dans les
Poésies diverses , l'ordre chronologique l'aurait fait placer après la
pièce XXVII.
Enfin j'ai vu Timandre , et mon âme étonnée
Repasse avec plaisir l'agréable journée
Où mille beaux objets , l'un de l'autre suivis ,
Rendirent tous mes sens également ravis ;
J'ai vu ce lieu fameux , dont l'art et la nature 5
Disputent à l'envi l'excellente structure ;
J'ai vu les raretés de ce charmant séjour,
Pour qui même les rois concevroient de l'amour ;
Et cependant , Tircis , je trouve mes pensées
Pour t'en faire un portrait si fort embarrassées, 10
Qu'encor que ce tableau fût déjà médité ,
J'ai peine à contenter ta curiosité.
Entre tant de beautés où mon esprit s'amuse ,
Je travaillée donner un bon ordre à la Muse,
346 POÉSIES DIVERSES.
Et de tant de sujets qui s'offrent à la fois , 1 5
La plume comme l'œil fait à peine le choix.
Sur le bord d'un vallon flanqué de deux collines ,
Dont la beauté fait honte aux montagnes voisines ,
La maison de Timandre en situation
A de quoi lui donner un peu d'ambition : 20
Il est vrai qu'à mon goût il en est peu d'égales
Et peu que la nature ait faites ses rivales.
Ce n'est pas qu'elle soit superbe en bâtiments :
L'or n'est point profané dans ses assortiments ;
Le cinabre et le jaspe , et l'ambre, et le porphyre, a5
Ne font point les beautés que j'y trouve à décrire.
Tout ce vain apparat d'un faste ambitieux
Dégoûte plus souvent qu'il n'est délicieux.
Si dans la symétrie et dans l'architecture
L'œil ne rencontre rien qui lui fasse d'injure , 3o
Il est aisé de voir qu'en sa perfection
Timandre s'est réglé sur sa condition.
Dès le premier abord l'entrée est magnifique ;
La porte en sa façon n'a rien qui soit rustique ;
L'ouverture de front présente un colombier, 35
Dont la fécondité prodigue son gibier.
A main droite , la salle en diverses peintures
Fait voir en même temps diverses aventures ,
Et la croisée ouverte apporte du jardin
Les parfums excellents du myrte et du jasmin. 4°
De suite la cuisine et les autres offices
Vous offrent à l'envi leurs différents services.
De ce même côté s'avance un escalier,
Dont le contournernent , qui n'a rien de grossier ,
Vous oblige de voir des chambres de campagne , 4^
Où , sans profusion , ce qui les accompagne ,
Dans les proportions de leur ameublement ,
Donne aux plus délicats du divertissement.
La noix.de l'escalier, qui renferme un horloge*,
Tire des curieux , en passant , son éloge. 5o
Mais pendant que vos yeux remarquent la maison ,
Trente petits voleurs , retenus en prison ,
1 . « Horxoge. Les Normands le font masculin. La rue du gros horloge. Et
c'est aussi de ce genre que le font les Gascons et les Provençaux. Il est fémi-
nin. » [Observations de Monsieur Ménage sur la langue Jrancoise . Segonde
édition, Paris, Barbin, M.DC.LXXV, in- 12, p. i5i et i5î.)
APPENDICE. Vl7
De mille accents divers vous frappent les oreilles ;
Et comme disputant à qui fera merveilles ,
Dégoisant leurs ennuis , ces charmants prisonniers 55
A donner du plaisir ne sont pas les derniers ;
Mais leurs tons si mignards , loin d'obtenir leur grâce ,
Les font mieux resserrer en ce petit espace ,
Et ces musiciens si pleins d'activité
Semblent former complot contre leur liberté. Ho
Après cette douceur , et sortant de la salle
Pour voiries raretés que le jardin étale,
L'on diroit que les fleurs empruntent du soleil
Le gracieux émail de cet arc sans pareil ,
Ou qu'elles ont dessein d'en être les figures, <iï
Et de pourtraire au vif toutes ses bigarrures,
Tant la vivacité du divers coloris
Forme naïvement les beautés de l'iris.
Là l'on voit s'accorder Flore avecque Pomone ,
La poire pendre à l'arbre auprès de l'anémone ; 70
Mais l'on a de la peine a n'être pas surpris
De ce nombre infini de tulipes de prix ,
Dont le parterre entier fait au premier rencontre
A l'œil du curieux une superbe montre.
La rose cependant dispute avec l'œillet , 75
Le lis passe en blancheur et la neige et le lait;
L'iris , le martagon , avec la giroflée
Que la trop grande ardeur n'a point encor brûlée ,
Le thym , la marjolaine et l'odeur du muguet ,
Tout cela vous fournit de quoi faire un bouquet ; 80
Et pour mêler encor l'utile au délectable ,
L'on y trouve de quoi s'occuper à la table.
L'on ne voit point ailleurs d'asperge ou d'artichaut
Où la comparaison ne montre du défaut.
En sortant du jardin, l'on entre, dès la porte, 85
Dans l'admiration de l'innombrable sorte
Des curiosités qu'enferme un grand fruitier.
Entrant, à la main droite on découvre un vivier,
Dont l'eau, sans avoir pris d'un lieu plus haut sa course ,
Dedans son propre fond sort d'une vive source : 90
La carpe et le mulet, l'anguille et le barbeau ,
Coulant innocemment leur vie au fond de l'eau ,
Sont prêts à la donner au jour d'une visite ,
Quand Timandre est surpris par des gens de mérite.
D'abord qu'on va paroître , aussitôt le plongeon 96
3/,8 POÉSIES DIVERSES.
S'enfonce dedans l'eau , touché du moindre son ;
Mais si vous surprenez la tremblante sarcelle ,
Elle gagne soudain sa niche à tire-d'aile ;
Et la tortue encor, dont l'œil est vigilant,
Prend la fuite aussitôt à pas tardif et lent. ioo
C'est un plaisir de voir les soins de la nature
Fournir dans cet étang diverse nourriture
A tous ces animaux d'espèce si divers,
Dont les noms que j'ignore échapperont mes vers.
De là s'offre à vos yeux une barrière verte , io5
De qui la balustrade aux gens d'honneur ouverte ,
Timandre en son fruitier leur partage à loisir
Les divertissements auxquels il prend plaisir.
Là la pomme et la poire, et la guigne et la prune ,
D'une bonté de goût en ce lieu seul commune , 1 10
Font peine à bien juger quel est de meilleure eau,
Ou bien le fruit à pierre ', ou le fruit au couteau.
Mais ainsi qu'au jardin , en ce fruitier encore
L'on remarque d'accord Pomone avecque Flore ,
Et l'on voit naître ici de toutes les couleurs , 1 1 5
Dans le nouveau printemps , un million de fleurs ,
Dont la confusion toute rare et diverse
Joint à celles d'ici les tulipes de Perse ;
Et ces riches bouquets sont si bien compassés
Qu'entre quatre pieds d'arbre ils se trouvent placés. 120
Ici l'ordre est gardé de la mathématique :
Tant d'arbres en leur plant n'ont point de ligne oblique ;
Leurs pieds bien cultivés et leur bois clair et frais
Preuvent les soins du maître , et qu'il y fait des frais.
De ces arbres si beaux l'épaisse chevelure 12 5
Conserve la fraîcheur d'une molle verdure,
Où divers animaux, que je ne connois pas,
Treuvent à se cacher , ou prendre leur repas.
Ici le paon de mer, deçà la macquerole,
Et la poule barbare en cet autre lieu vole; i3o
L'on voit en cet endroit courir le chevalier ,
De cet autre s'enfuir le timide plouvier2;
En ce lieu la perdrix, dessous l'herbe cachée,
1. Le fruit a noyau.
2. On dit et on écrit aujourd'hui pluvier. Ces deux formes pluvier et plou-
vicr se trouvent dans le Trésor de Nicot en 1606, et dans le Dictionnaire
français-anglais de Cotgrave en 161 1.
APi'KNDICE. M^
Se dérobe à votre œil , se sentant approchée ;
Bref, de ces raretés le plus grand partisan i35
Satisfait son génie , y treuvant le faisan.
Ainsi de tous côtés cette petite place
Fourniroit au besoin les plaisirs de la chasse.
Mais surtout l'excellence et le coup de l'ami ,
C'est de trouver un lièvre en son gîte endormi : 140
A peine y sauroit-on faire une pourmenade ,
Qu'on n'en pousse quelqu'un devers la palissade ,
Où par divers endroits pratiqués à dessein ,
Aisément du chasseur il échappe la main.
C'est où Flore et Pomone entretiennent Diane , 145
Qui se vient délasser dedans cette garenne *.
Enfin ce lieu charmant , si fertile en beautés ,
A de quoi contenter ces trois divinités.
Pas à pas on se rend près d'une autre barrière,
En façon , en couleur , semblable à la première , 1 5o
Où de chaque côté la verdure au niveau
Fait d'excellents tapis de charme et de fouteau2.
Mais cette salle verte est bien plus accomplie
Par les charmes puissants d'une muse polie
Qui dessus une porte a fait graver au net , i55
Ou peut-être Apollon lui-même, ce sonnet :
Vois à loisir ce lieu champêtre ;
Les jours y coulent sans ennuis :
Tâche , si tu peux , de connoître
Tant d'herbes , de fleurs et de fruits. 160
Ces animaux que tu poursuis ,
Ces oiseaux que tu vois paroître ,
Dans ce bel enclos sont réduits
Par les soins et l'art de son maître.
Jette après la vue au dehors , i65
Et voyant avec quels efforts
La nature à l'envi le pare ,
1. Ce mot est bien imprimé ainsi garenne, mais on le prononçait alors très-
souvent garanne. Richelet met dans son Dictionnaire : « Garanne, gaienne.
s. f. On dit garenne, et non pas garanne ; voiez Garenne. — Garannier, ga~
rennier, on dit l'un et. l'autre, mais garannier est présentement plus en usage
que garennier. » On voit combien la prononciation de ces mots était encore
incertaine vers 1680.
2. De hètrc.
35o POÉSIES DIVERSES.
Demande à tes yeux enchantés
S'il pouvoit en un lieu plus rare
Assembler tant de raretés. 170
Cette porte , en effet , et deux grandes croisées
Cachent des nouveautés à peindre malaisées.
Avant que les ouvrir , Timandre prend le soin
De faire retourner ses hôtes de plus loin :
Lors, ouvrant les châssis, l'on voit deux perspectives , 175
D'où les prés , les forêts , les montagnes , les rives ,
Les bocages touffus , les pentes , les vallons ,
Les collines par onde en forme de sillons;
Les tours et les retours de l'agréable Seine
Qui coule en serpentant dans cette large plaine , r 80
Les vaisseaux qu'elle porte en son vaste canal ,
Son onde qui paroît un liquide cristal :
Toutes ces raretés presque inimaginables ,
Et dont la vérité passe toutes les * fables ,
Sont les riches couleurs qui sur le naturel i85
Font en terre un crayon du séjour immortel.
En sortant de ce parc , cette vue éloignée
Devient à petits pas si doucement bornée ,
Que la croupe du mont n'étale rien d'affreux ,
Ni rien qui fasse peine à reposer les yeux. lyo
Pour de là vous conduire à trois coups d'arquebuse,
Timandre sait user d'une obligeante ruse ;
Et le prétexte adroit de la fraîcheur du bois
Doit bientôt enchanter votre œil une autre fois.
Par une verte allée où l'épais du feuillage ip5
Attire mille oiseaux à dire leur ramage ,
Presque insensiblement sur un tertre élevé ,
Dont le pied quelquefois par la Seine est lavé ,
L'œil vous fait un présent de la plus riche vue
Dont puisse être jamais une place pourvue. 200
Tout ce que l'on a vu jusqu'ici de charmant ,
Cet agréable lieu le montre éminemment :
Par des charmes plus forts que ceux de la Méduse ,
En un moment le sens si doucement s'abuse ,
Que les autres privés de toutes fonctions , f.oh
I 'œil peut admirer seul tant de perfections;
Et d'autant que la vue est bien inoins égarée ,
I, Il y a ses dans l'édition originale, mais cette leçon n'a pas de sers.
APPENDICE. 35i
L'estime qu'on en fait est bien plus assurée.
La Seine en divers lieux bat le pied des rochers ;
L'œil en se promenant' découvre huit clochers % 210
Dont les noms par hasard terminés tous en ville
Semblent servir de rime à celui d'Hénouville.
Il me semble , Tircis , d'un second Hélicon
Où l'on va recueillir les faveurs d'Apollon ,
Puisqu'au pied de ce mont ceux qu'échauffe sa veine , 2i5
Pour éteindre leur soif, rencontrent la fontaine
Qui leur va prodiguant ses salutaires eaux
Pour exciter leur verve à dire mots nouveaux.
Mais quand l'heure avertit de faire la retraite ,
Ce qui rend de nouveau l'âme plus satisfaite 220
Est que la même porte offre à lire , au retour,
Cet autre beau sonnet, digne à jamais du jour:
L'art n'a point fait ce que tu vois ,
Et la nature toute nue
Etale ici tout à la fois 223
Ses plus doux charmes à ta vue.
Vois la campagne, en deux endroits ,
S'ouvrir à la Seine épandue ;
Vois les montagnes et les bois
En borner la vaste étendue; 25o
Et puis , faisant comparaison
Des raretés de la maison
Où ton âme s'est divertie,
Dis tout haut qu'un lieu si charmant
Méritoit bien à sa sortie 2 35
Ce merveilleux assortiment.
C'est ainsi, cher Tircis, que vit le grand Timandre
Dont tu vois le renom en tous lieux se répandre :
Loin du bruit de la cour, vivant sous d'autres lois,
Sans perdre la faveur qu'il a près de nos rois , 240
r. Il y a bien ici promenant, quoiqu'il y ait plus haut, vers r4i> ponrmenade.
2. Une note manuscrite récente, qui se trouve sur l'exemplaire de la
bibliothèque de Rouen, désigne ainsi ces huit clochers: Bardouville , Yville,
Anneville, Berville, Ambourville, Barneville, Bocherville, Saint-Pierre de Man-
neville. Ce dernier nom est accompagné d'un point d'interrogation qui indique
sans doute que la personne qui a écrit cette note n'était pas bien certaine de
cette dernière attribution
152 POESIES DIVERSES.
Il quitte pour un temps l'intrigue des affaires.
Pour goûter le bonheur des pâtres solitaires.
C'est ce qui me fera partout dans l'univers
Publier hautement son mérite en mes vers.
IV
(Vojez la pièce XXVIII, p. 86.)
ÉPITAPHE DE RICHELIEU,
Attribuée à Corneille par M. Taschcreau
La Sorbonne est heureuse et riche '
D'avoir eu gratis un bien ,
Pour lequel la maison d'Autriche
Eût donné la moitié du sien.
V
(Voyez les pièces XXXV1I-XXX1X, p. 125-128.)
SONNETS D'URANIE ET DE JOB.
SONNET D'URANIE ,
Par Voiture.
Il faut finir mes jours en l'amour d'Uranie :
L'absence ni le temps ne m'en sauroient guérir,
1. Le premier vers est ainsi donné dans le Tableau de la vie et du gouver-
nement de Messieurs les cardinaux Richelieu et Mazarin :
Sorbonne heureuse et riche.
Le quatrième y est aussi rédigé différemment :
Pour qui la maison d'Autriche.
Ou trouve dans cet ouvrage l'autre épitaphe que voici •
Ecoutez, Messieurs de Sorbonne.
Puisque vous avez Richelieu ,
Votre fortune est belle et bonn» ;
Gardez-le bien, au nom de Dieu
APPENDICE. 355
Et je ne \ ois plus rien qui me pût secourir,
Ni qui sût rappeler ma liberté bannie.
Dès longtemps je connois sa rigueur infinie ; 5
Mais pensant aux beautés pour qui je dois périr,
Je bénis mon martyre, et content de mourir,
Je n'ose murmurer contre sa tyrannie !
Quelquefois ma raison , par de foibles discours ,
M'incite à la révolte et me promet secours ; ro
Mais lorsqu'à mon besoin je me veux servir d'elle,
Après beaucoup de peine et d'efforts impuissants ,
Elle dit qu'Uranie est seule aimable et belle ,
Et m'y rengage plus que ne font tous mes sens.
SONNET DE JOB ,
Par Benserade.
Job, de mille tourments atteint,
Vous rendra sa douleur connue;
Mais raisonnablement il craint
Que vous n'en soyez pas émue.
Vous verrez sa misère nue : 5
Il s'est lui-même ici dépeint ;
Accoutumez-vous à la vue
D'un homme qui souffre et se plaint.
Quoiqu'il eût d'extrêmes souffrances,
On voit aller des patiences io
Plus loin que la sienne n'alla.
Il eut des peines incroyables;
Il s'en plaignit , il en parla :
J'en connois de plus misérables.
Corneille, x
35/f POÉSIES DIVEKSES.
VI
(Voyez la Notice, p. 18 et 19.)
DEUX SONNETS, SIGNÉS C,
Publiés dans les Poésies choisies, chez Sercy, et attribués
par M. P. Lacroix à Pierre Corneille.
Sonnet publié à la page 3o4 de la première partie des Poésies choisies,
en i653.
Une troupe servile , inconstante , folâtre ,
Au service d' autrui passe ses plus beaux jours ,
Et croit avoir grand'part à la splendeur des cours ,
Où l'on voit que le luxe a doré jusqu'au plâtre.
Mais la vertu n'est là que vertu de théâtre : 5
Le vice y tient l'empire et porte ie velours ;
Les fourbes sont adroits; les bons, des esprits lourds * ;
Enfin pour s'avancer il faut être idolâtre.
Pour moi, je m'en retire, instruit à mes dépens
Que de vivre en esclave est un malheur extrême 10
Qu'accompagnent toujours mille soucis flottants.
Aux autres j'ai vécu ; je veux vivre à moi-même,
Sans avoir de mes faits l'univers pour témoin :
Si j'ai moins de désirs , je n'ai pas tant de soin.
Sonnet imprimé à la page 365 de la réimpression, de i658, de la
troisième partie des Poésies choisies, publiées d'abord en i656.
Que me sert qu'on m'écoute avec tant de transports ?
Bien loin de s'avancer , ma fortune recule ,
Et si2 d'aller plus outre on fait un tel scrupule
Qu'Apollon est le seul qui m'ouvre ses trésors.
I. L'édition originale porte sourds, au lieu de lourds.
1. Si a ici le sens de pourtant ■ il exprime une opposition et non uu doute.
APPENDICE. 355
Cependant mon esprit s'use ainsi que mon corps; 5
En vain pour me flatter je me le dissimule :
Je deviendrai bientôt muet ou ridicule ',
Et ma force s'épuise en continus efforts.
Pour tout fruit d'une vie en travail consumée,
Il ne me va rester qu'un peu de renommée , 10
Qu'un souvenir flatteur d'avoir fait quelque bruit.
O d'un métier si noble indignités étranges,
Qu'un siècle à nos labeurs prodigue de louanges
N'assure que du vent au repos qui les suit !
VII
VERS IMITÉS DE LUCAIN ET D'HORACE ,
Et attribués à Pierre Corneille.
Tout le monde connaît ces vers de Brébeuf : *
C'est de lui que nous vient cet art ingénieux
De peindre la parole et de parler aux yeux ,
Et par les traits divers de figures tracées
Donner de la couleur et du corps aux pensées.
C'est une excellente paraphrase de ce passage de laPharsale (livre III,
vers 220 et 221) :
Phœnices primi, famœ si creditur, ausi
Mansuram rudibus vocem signare figuris.
Notre poëte, si passionné pour Lucain, admirait fort en cet endroit
son traducteur, qui, comme nous l'avons remarqué ailleurs (tome IV,
p. i3, note 3), avait publié en i653 les premiers livres de sa Pharsale.
A en croire Coste2, a M. Corneille disoit qu'il auroit donné deux
1 . Ces deux vers rappellent les suivants, qu'on lit dans la pièce intitulée : la
Poésie à la Peinture (ci-dessus, p. 118, vers 41 et 42) :
Pour trop m'en plaindre en vain je deviens ridicule ,
Et l'on ne m'entend pas, ou l'on le dissimule.
2. Apologie de la Bruyère, 1701, in-12, p. 177.
356 POÉSIES DIVERSES.
de ses meilleures pièces pour ces quatre vers. » Coste n'ajoute rien
à ce que nous venons de rapporter, mais Bruzen de la Marlinière
continue et complète cette anecdote. Après avoir parlé des vers de
Brébeuf : « On ne sera pas fâché, ajoute-t-il1, que je dise à cette
occasion ce qui arriva au fameux Corneille, après avoir lu les quatre
vers que Brébeuf a faits sur l'art d'écrire inventé par les Tyriens. Il
voulut les égaler par quatre autres que nous donnerons ici :
C'est d'elle que nous vient le fameux art d'écrire,
Cet art ingénieux de parler sans rien dire ,
Et par les traits divers que notre main conduit
D'attacher au papier la parole qui fuit. »
Voilà de jolis vers, dont l'ingénieuse souplesse nous paraît toutefois,
autant qu'il est permis de se prononcer en pareille matière, bien
peu dans le goût de Corneille, et où nous sommes fort tenté de voir
l'effort heureux de quelque versificateur du commencement du dix-
huitième siècle.
Nous ne croyons guère non plus à l'authenticité des quatre vers
contenus dans une autre anecdote que nous allons rapporter. « M. Cor-
neille avoit un abord sombre, parlant peu avec des gens qu'il ne
connoissoit pas de longue main, peu de brillant avec eux; mais lors-
qu'il étoit excité par une société qui lui étoit familière, et qu'elle
étoit composée de véritables gens d'esprit, il retrouvoit alors cette
vive imagination qu'il paroissoit avoir laissée dans son cabinet. L'on
ne voyoit plus le même homme : c'étoit un génie du premier ordre,
capable d'imposer infiniment par ses réflexions, et de faire un im-
promptu admirable sur le sujet de la conversation ou de la première
matière que l'on agitoit. Dans un de ces entretiens dont je parie , un
ami lui récitant ces vers d'Horace fode xvm du livre II, vers i5
et 16) :
Truditur dies die,
Novseque pergunt interire lunée t
il leur donna ce sens dans le moment :
Chaque instant chasse l'autre, et lui-même a son tour
Cède à celui qui va le suivre :
i. Nouveau recueil des Epigrammalistes francois , 1720, in- 12, tome l,
p. 104 et io5.
APPENDICE. 357
Nous ne pouvons pus vivre un jour
Sans avoir moins d'un jour a vivre. »
[Ana ou Bigarrures calotiues, Paris, 1780, etc., quatrième partie,
p. 9 et 10.)
Ces vers , qu'il ne faut accepter comme étant de Corneille que sous
bénéfice d'inventaire, ont été réunis par M. Edouard Fournier dans
une note d'un article de la Revue des provinces intitulé : Deux lettres
inédites de P. Corneille, tome VI, i5 février l865, p. 3s3 et 3î4«
VIII
\
Voyez la Notice, p. 20 et 21.)
ÉPIGRAMMES ATTRIBUÉES A CORNEILLE.
La bibliothèque de l'Arsenal possède un recueil, relié en un vo-
lume in-12, divisé en trois parties et portant le n° y3o6B, dont la
composition est assez singulière. On trouve d'abord : Poésies choi-
sies..., première partie , quatriesme édition, reueue , corrigée et aug-
mentée. Au-dessous de ce titre est un fleuron avec cette mention :
Iouxte la copie imprimée, et ensuite l'adresse et la date : A Paris, chez
Charles de Sercy, M.DC.LV. Ce n'est là qu'une réimpression de
la première partie des Poésies choisies de Sercy, publiée pour la pre-
mière fois en i653, et que nous avons longuement décrite dans la
Notice (p. 17 et 18). Bien qu'en i655 la seconde partie des Poésies
de Sercy eût déjà paru, nous trouvons au lieu d'elle, dans le vo-
lume de l'Arsenal, à la suite de la première, un Recueil de diverses
poésies des plus célèbres autheurs de ce temps, seconde partie, reueu,
corrigé et augmenté, avec la mention : Iouxte la copie imprimée, l'adresse
suivante: A Paris, chez Louis Chamoudry et la date de M.DC.LV.
Enfin vient le Nouveau recueil de poésies des plus célèbres autheurs
du temps, troisième partie, reueue, corrigée et augmentée , avec même
mention, même adresse et même date qu'au recueil précédent. La
pagination continue de la seconde partie à la troisième. En tête du
second recueil , le titre et quatre feuillets imprimés en italique ne
comptent' point dans la pagination : c'est au recto du premier de ces
558 POÉSIES DIVERSES.
feuillets qu'on lit la pièce suivante, qui a été recueillie par M. Paul
Lacroix dans le Bulletin du bouquiniste (8e année, Ier semestre, p. 5?.).
D'un Poète écrivain, qui détaché des occupations de sa plume, pour vaquer
à celles de la guerre, dit qu'il coupe sa plume avecque son épée.
ÉPIGRAMME DE MONSIEUR CORNEILLE.
Ce petit fanfaron à l'œillade échappée
S'estime grand auteur et n'est qu'un animal,
Dit qu'il coupe sa plume avecque son épée :
Je ne m'étonne pas s'il en écrit si mal.
Bien loin de pouvoir être attribuée à Corneille, cette pièce paraît
dirigée contre un de ses partisans ; en effet, nous lisons à la fin du
pamphlet intitulé : le Souhait du Cid en faueur de Scuderi. Vne paire
de lunettes pour faire mieux ses ohseruations, cette conclusion que nous
avons déjà rapportée (tome 111, p, 16) : « On me connoîtra assez si
je dis que je suis celui qui ne taille point sa plume qu'avec le tran-
chant de son épée, qui hait ceux qui n'aiment pas Chimène, et ho-
nore infiniment celle qui Ta autorisée par son jugement, procurant
à son auteur la noblesse qu'il n'avoit pas de naissance. »
Du reste M. Edouard Fournier nous a fait remarquer que la ré-
ponse qui est la pointe de cette épigramme se trouve déjà mention-
née dans les Historiettes de Tallemant des Réaux, et que l'épigramme
elle-même figurait dès 1649 dans les OEuvres de Saint- Amant. Voici
le passage de Tallemant des Réaux : a D'Audiguier, auteur de Lisan-
dre et Caliste, disoit à Théophile qu'il ne tailloit sa plume qu'avec
son épée : « Je ne m'étonne donc pas, lui dit Théophile, que
« vous écriviez si mal. » [Historiettes, tome VII, p. 4^1.)
Quant à l'épigramme, elle figure à la page 127 de la troisième
partie (in-40) des OEuvres de Saint-Amant publiée en 1649; elle y
porte pour titre : Epigramme sur un écrivain de Gascogne ; les vers 2
et 3 y sont ainsi rédigés :
Qui fait le grand auteur et n'est qu'un animal,
Dit qu'il tranche sa plume avecque son épée.
Nous ne terminerons pas cet article sans mentionner une autre
épigramme, que nous croyons avoir déjà rencontrée dans quelque
recueil avec la signature de son véritable auteur, mais qui est attri-
APPENDICE. 359
buée en ces termes à Corneille par Guyot de Pitaval dans sa Biblio-
thèque de cour, de ville et de campagne x : « Un poëte de la même classe
(un poète médiocre) avoit le talent de la déclamation, ses vers dans sa
bouche imposoient; le grand Corneille lui envoya ce quatrain :
Tes vers sont beaux quand tu les dis,
Us ne sont rien quand je les lis ;
Tu ne peux pas toujours les dire :
Fais-en donc que je puisse lire.
C'est encore à l'inépuisable obligeance de M. Edouard Fournier que
nous devons cette communication.
IX
(Voyez la Notice, p. 20.)
DEUX SONNETS POUR TLMOCRATE2.
Endymion5 est mort : cet illustre champêtre
Est déjà descendu dedans le monument.
Chacun est demeuré dans un étonnement
De Tavoir vu mourir presque aussitôt que naître.
Tous les grands spectateurs qui le virent paroîtie 5
Disent que le Soleil fît mourir cet amant ;
Mais ils se sont trompés , et dedans un moment
Vous connoîtrez celui qui Ta fait cesser d'être.
Non, Apollon n'est point le sujet de sa mort ,
Et ce n'est point par lui qu'il a fini son sort : 10
L'auteur de son trépas assez souvent éclate.
1. Nouvelle édition, Paris, Théodore le Gras, 1746, 7 vol. in-12, tome I,
p. 241.
2. Tl s'agit ici de la tragédie de Timocrate , de Thomas Corneille, jouée,
suivant les frères Parfait, en novembre i656, au théâtre du Marais.
3. Les Amours de Diane et d' Endymion , par Gilbert. Yoyez ci-dessus la
notice qui est en tête de la pièce LI, p. i54. Les frères Parfait, comme nous
l'avons dit, en fixent la première représentation à l'année 1657, mais il semble
évident qu'elle est un peu antérieure.
}6o POÉSIES DIVERSES.
Qu'ils sachent que celui qui lui perça le cœur,
Et qui d'Endymion est demeuré vainqueur,
N'est point l'astre du jour : c'est le grand Timocrate,
Déplorables jaloux, dont les noires envies,
De Don Sanche et Pompée étalent les appas ,
Et vantant Nicomède, Horace et Venceslas* ,
Veulent dans Timocrate en trouver des copies,
Le chimérique orgueil de vos antipathies 5
En croit par là servir les surprenants éclats ,
Comme si c'étoit peu d'égaler de tels pas,
Et former un beau tout de ces nobles parties !
Apprenez qu'élever de pompeux bâtiments
Sur un brillant amas d'illustres fondements 10
Porte un nom au-dessus de la gloire commune.
De semblables larcins sont de grands coups de l'art,
Et quand dans ce chef-d'œuvre on n'auroit d'autre part ,
C'est beaucoup d'assembler tant de beautés en une.
Ces deux sonnets se trouvent dans les Muses illustres de MM. Mal-
herbe, Théophile et Ce , publiées par François Colletet, Paris,
Chamoudry, i658, in-12, p. 148 et suivantes. Ils sont anonymes
dans le recueil; mais on lit à la table : Deux sonnets pour Timocrate.
Corneille. M. Paul Lacroix les attribue à Pierre2; nous les croyons
plutôt de Thomas.
1. Venceslas, -tragédie de Rotrou, représentée en 1648.
2. Bulletin du bouquiniste (8e année, iep semestre, p. 53).
APPENDICE. 36i
X
(Voyez les pièces XL VIII et XLIX, p. i5o-i5-2.)
NOTE SUR MADEMOISELLE SERMENT,
ET RÉPONSE DE L'iNCOMPÀRABLE SAPHO.
La Biographie du Dauphiné de M. Ad. Rochas nous apprend
(tome II, p. 4QI) que Louise-Anastasie Serment était née à Grenoble
vers 1642; elle n'aurait donc guère eu que dix-sept ans au moment
où, suivant l'abbé Granet, Corneille lui adressait les deux madrigaux
auxquels nous venons de renvoyer le lecteur. En cette circonstance
encore les doucereux furent pour Corneille de dangereux rivaux. S'il
faut en croire le poète Pavillon , Mlle Serment fut un peu plus que
l'amie de Quinault1; et Mau croix , tout en la traitant de prude2,
essayait de se faire agréer par elle, et de la détourner de l'attachement
qu'elle avait pour Corneille ; les stances que voici en font foi
Cloris , je vous le dis toujours ,
Ces faiseurs de pièces tragiques ,
Ces chantres de gens héroïques
Ne chantent pas bien les amours.
De beaux mots leurs œuvres sont pleines ; 5
Ils sont sages comme Catons ,
Ils sont discrets pour les Hélènes,
Et muets pour les Jeannetons.
Tout ce qu'on nomme bagatelle
Déplaît à ces rares esprits : 10
On diroit qu'ils sont en querelle
Avec les Grâces et les Ris.
Pour moi qui hais la muse austère
Et la gravité de ses tons,
1. Voyez Maucroix, OEuvres diverses publiées par M. Louis Paris, i854,
in-12, p. 209.
2. Voyez Y Histoire de V Académie francoise, par Pellisson et d'Olivet. édi-
tion de M. Livet, tome II, p. 162.
562 POÉSIES DIVERSES.
Je vous ai choisi ma bergère 1 5
Pour le sujet de mes chansons.
M. Louis Paris donne à cette jolie petite pièce la date de mai i685.
« Ce doit être certainement une erreur , dit M. Edouard Fournier
( Notes sur la vie de Corneille , p. xxxm ). Mlle Serment aurait eu
alors plus que la quarantaine , et Maucroix ne lui eût pas parlé sur
ce ton. » Corneille d'ailleurs n'existait plus à cette époque, et il
faudrait se mettre en quête de quelque nouvel adorateur tragique.
Mlle Serment n'arriva pas à la vieillesse ; elle mourut à Paris
vers 1692 , quand elle commençait à recevoir un peu moins d'a-
gréables billets et de poésies galantes.
RÉPONSE DE L'INCOMPARABLE SAPUO.
Si vous parlez sincèrement
Lorsque vous préférez la main gauche à la droite,
De votre jugement je suis mal satisfaite :
Le baiser le plus doux ne dure qu'un moment *
Un million de vers dure éternellement,
Quand ils sont beaux comme les vôtres ;
Mais vous parlez comme un amant,
Et peut-être comme un normand:
Vendez vos coquilles à d'autres.
XI
(Voyez la Notice, p. 19 et 20 ; et la pièce XL VII ,
p. 141 et suivantes.)
ÉLÉGIE.
Cette pièce, signée simplement Corneille dans les Poésies choisies
de 1660 (p. 83), figure dans le recueil manuscrit de Conrart (tome IX,
p. 9 15-917) à la suite de la pièce Sur le départ d'Iris; elle y est intitulée :
Déclaration d'amour à Iris , et on lit en marge : « C'est la mesme co-
médienne pour qui Corneille l'aisné a fait une autre elegie qui com-
mence :
Allez, charmante Iris , etc. »
Celle-ci est signée : Corneille le cadet, et il n'est pas possible de
APPENDICE. $(53
douter de l'exactitude de cette attribution quand on remarque la
différence de ton qui existe entre la pièce de vers Sur le départ de
Madame la marquise de B. A. T. et celle qui nous occupe actuellement.
Dans la première Corneille, le Corneille du Cid et de Y Excuse à
Ariste, dit (vers 57 et 58) :
. . . Vous aimez la gloire , et vous savez qu'un roi
Ne vous en peut jamais assurer tant que moi;
tandis que l'auteur de l'élégie qu'on va lire se regarde comme un
captif indigne des chaînes d'Iris :
Iris, je vais parler, c'est trop de violence.
Il est temps que mon feu se dérobe au silence , ,
Et qu'il fasse échapper au respect qui me nuit
L'aveu du triste état où vous m'avez réduit.
Depuis le jour fatal que pour vous je soupire, 5
Mes yeux se sont cent fois chargés de vous le dire ,
Et cent fois, si mon mal vous pouvoit émouvoir ,
Leur mourante langueur vous l'auroit fait savoir.
Mais les vôtres , partout certains de leur victoire ,
D'une obscure conquête estiment peu la gloire , 10
Et veulent , pour daigner en faire part au cœur,
Que l'éclat du triomphe en apporte au vainqueur.
C'est par là que jaloux de l'orgueil qui l'inspire ,
Ce cœur n'a point sur moi reconnu son empire ;
Que mettant ma défaite au-dessous de ses soins , i5
Il en a récusé mes soupirs pour témoins ,
Et craint de s'exposer } s'il avouoit mes peines ,
A rougir d'un captif indigne de vos chaînes 2.
Je le confesse , Iris, il n'est point parmi nous
De mérite assez haut pour aller jusqu'à vous. 20
A voir ce que je suis, tout mon espoir chancelle;
Mais le peu que je vaux ne vous rend pas moins belle :
J'ai des yeux comme un autre à me laisser charmer;
J'ai comme un autre un cœur ardent à s'enflammer;
Et dans les doux appas , dont vous êtes pourvue , 2 5
t. Var. [1 faut qu'enfin mon feu se dérobe au silence,
Et qu'il fasse échapper au respect qui lui nuit.
(Manuscrits de Conrart.)
2. Var. A rougir du captif qui languit dans vos chaînes.
(Manuscrits dp Conrart.)
564 POÉSIES DIVERSES
J'ai dû brûler pour vous , puisque je vous ai vue.
Oui, de votre beauté l'éclat impérieux
Touche aussitôt le cœur qu'il vient frapper les yeux ;
Ce n'est point un brillant dont la fausse lumière
Ne fasse qu'éblouir au moment qu'elle éclaire ; 3u
Ce n'est point un effort de charmes impuissants
Qui prennent pour appui la surprise des sens :
Quoi qu'en nous1 leur rapport vante d'un prix extrême,
La raison convaincue y souscrit elle-même ,
Et sans appréhender de le voir démenti, 35
Par son propre suffrage affermit leur parti2.
Alors que ne peut point sur les plus belles âmes 8
Ce vif amas d'attraits, cette source de flammes ,
Ces beaux yeux qui portant le jour de toutes parts
Font autant de captifs qu'ils lancent de regards ! 4°
Alors que ne peut point ce pompeux assemblage
Des traits les plus perçants dont brille un beau visage,
Et qui dessus le vôtre étalent hautement
Ce qu'ailleurs cent beautés font voir de plus charmant !
Aussi que leur adresse aux dons de la nature 45
Ajoute encor de l'art la plus douce imposture,
Que de lis empruntés leur visage soit peint ,
On les verra pâlir auprès de votre teint ,
Ce teint dont la blancheur , sans être mendiée ,
Passe en vivacité la plus étudiée, 5o
Et pare avec orgueil le plus brillant séjour
Où les Grâces jamais aieut attiré l'amour.
C'est là , c'est en vous seule , Iris , que l'on doit croire
Qu'aimant à triompher , il triomphe avec gloire ,
Et qu'il trouve aussitôt de quoi s'assujettir 55
Quiconque de ses traits s'étoit pu garantir4.
Pour moi , je l'avouerai , comme aucune surprise
N'avoit jusques ici fait trembler ma franchise,
i . Plusieurs éditions récentes portent vous, au lieu de nous. Cette modifica-
tion, qui n'est pas indispensable, donne cependant un sens plus clair, et pour-
rait être acceptée.
2. Var. Par son propre suffrage affermit son parti.
(.Manuscrits de Conrart.)
3. Ce vers et les trois suivants manquent dans les manuscrits de Con-
rart.
4- Var. Quiconque de ses traits se voudroit garantir.
(Manuscrits de Conrart.)
APPENDICE. m
Permettant à mes yeux Theur de vous regarder ',
Mon cœur trop imprudent ne crut rien hasarder. fSo
Ainsi de vos beautés, qu'on vantoit sans pareilles.
Je voulus à loisir contempler les merveilles ;
Ainsi j'examinai tous ces riches trésors
Que prodigua le ciel à former votre corps ,
Ce corps noblement fier, cette taille divine8, 65
Qui par sa majesté marque son origine,
Seule égale à soi-même, et tellement à vous,
Que la formant unique , il s'en montra jaloux.
De tant d'appas divers mon âme possédée
Se plut d'en conserver la précieuse idée : 70
Je l'admirai sans cesse , et de mon souvenir ,
Ne croyant qu'admirer , j'eus peur de la bannir.
Mais de ce sentiment la flatteuse imposture
N'empêcha pas le mal pour cacher la blessure j
Et ce soin d'admirer qui dure plus d'un jour, yS
S'il n'est amour déjà, devient bientôt amour.
Un je ne sais quel trouble où je me vis réduire
De cette vérité sut assez tôt m'instruire :
Par d'inquiets transports me sentant émouvoir,
J'en connus le sujet quand j'osai vous revoir. 80
A prendre ce dessein mon âme toute émue
Eut peine à soutenir l'éclat de votre vue ;
Mon cœur en fut surpris d'un doux saisissement
Qui me fit découvrir que j'allois être amant :
Un désordre confus m'expliqua son martyre ; 85
Je voulus vous parler, et ne sus que vous dire ;
Je rougis , je pâlis, et d'un tacite aveu :
s Si je n'aime point , dis je , hélas ! qu'il s'en faut peu ! t
Soudain , le pourrez-vous apprendre sans colère ?
Je jugeai la révolte un parti nécessaire ; 90
Et je n'épargnai rien dans cette extrémité
Pour soulever mon cœur contre votre beauté.
L'ardeur de dégager ma franchise asservie
Me fit prendre les yeux de la plus noire envie8:
f. Var. En souffrant à mes yeux l'heur de vous regarder,
Mon cœur trop imprudent n'y crut rien hasarder.
(Manuscrits de Conrart.)
2. Var. Ce port et noble et fier, cette taille divine.
(Manuscrits de Conrart.)
j. Noble envie , dans les Poésies choisies; mais c'est une faute évidente.
366 POÉSIES DIVERSES.
Je ne m'attachai plus qu'à chercher des défauts 95
Qui détruisant ma flamme adoucissent mes maux;
Mais las ! cette recherche un peu trop téméraire *
Produisit à sa cause un effet bien contraire ;
Et vos attraits par elle à mes sens mieux offerts2,
Au lieu de les briser redoublèrent mes fers. 100
Plus je vous contemplai , plus je connus de charmes3,
Contre qui ma raison me refusa des armes ;
Et sans cesse l'amour , par de vives clartés,
Me découvrit en vous de nouvelles beautés.
Tout ce que vous faisiez étoit inséparable io5
De ce je ne sais quoi sans qui rien n'est aimable;
Tout ce que vous disiez avoit cet air charmant
Qui des plus nobles cœurs triomphe en un moment.
J'en connus le pouvoir, j'en ressentis l'atteinte4;
Contraint de vous aimer, j'aimai cette contrainte ; 1 10
Et je n'aspirai plus , par mille vœux offerts ,
Qu'à vous faire avouer la gloire de mes fers8.
Y consentirez-vous , belle Iris ? et pourrai-je
Promettre à mes désirs ce charmant privilège ?
Je ne demande point que sensible à mon feu 1 15
L'assurance du vôtre en couronne l'aveu ;
Je ne demande point qu'à mes vœux favorable
Vous vous montriez amante en vous montrant aimable ,
Et que par un transport qui n'examine rien ,
Le don de votre cœur suive l'offre du mien : 120
Quoi qu'on ait fait pour vous et de grand et d'insigne ,
C'est un prix glorieux dont on n'est jamais digne,
Et que ma passion me faisant désirer ,
L'excès de mes défauts me défend d'espérer.
Permettez seulement , pour flatter mon martyre, 12S
Que vous osant aimer, j'ose aussi vous le dire;
Qu'à vos pieds mon respect apporte chaque jour
1 Var. Mais las! cette recherche et vaine et témëraiie.
(Manuscrits de Conrart.)
2. Var.. Et vos attraits par elle à mes yeux mieux, offerts.
(Manuscrits de Conrart.)
3. Var. Plus je vous observai, plus je connus de charmes.
(Manuscrits de Conrart.)
^. Var. J'en sentis les effets, j'en éprouvai l'atteinte.
(Manuscrits de Conrart.)
5. Vau. Qu'a vous voir avouer la gloire de mes fers.
(Manuscrits de Conrart.)
APPENDICE. 367
Les serments redoublés d'un immuable amour ;
Que là , par son ardeur , je vous fasse connoître
Qu'étant pur et sincère il doit toujours s'accroître ; i3o
Que ce n'est point l'effet d'un aveugle appétit
Que le désir fit naître et que l'espoir nourrit ;
Et qu'aimant par raison d'un amour véritable
Ce que jamais le ciel forma de plus aimable ,
Le temps dessus mon coeur n'aura rien d'assez fort i35
Pour en bannir les traits que par ceux de la mort ' .
XII
(Voyez la Notice , p. 20.)
PLAINTE DE LA FRANCE A ROME
sur l'assassinat de son ambassadeur.
ÉLÉGIE.
C'est sous ce titre et avec la signature en toutes lettres de Fléchier
que parut pour la première fois la pièce suivante, qui dans ces der-
niers temps a été généralement attribuée à Corneille a. Cette édition
originale n'a ni frontispice, ni adresse, ni date; mais imprimée avec
soin et même avec luxe, et formant sept pages in-40, elle a tous
les caractères d'une publication officielle , et est ornée de fleurons de
l'Imprimerie royale, ce qui ne laisse aucun doute sur son origine.
Dès i663, elle paraissait, avec la signature de Fléchier, aux pages 217
et suivantes du recueil intitulé : les Délices de la poésie galante, dont
nous avons déjà eu occasion de parler (voyez ci-dessus, p. 175).
M. Parrelle 5, qui ne connaissait point ces premières impressions,
donne cette élégie comme oc extraite d'un Recueil de pièces en prose
et en poésie imprimé en Hollande en 1664. » Il veut sans doute
parler d'un Recueil de quelques pièces nouvelles et galantes tant en
prose qu'en vers.... à Cologne, chez Pierre du Marteau, 1664, in- 12.
1. Var. Pour en chasser les traits que par ceux de la mort.
(Manuscrits de Courent.)
2. Nous devons nous accuser ici d'avoir partagé l'erreur commune dans un
passage de la note 1 de la page 1 du tome VIII.
3. Œuvres de Corneille, édition Lefèvre (i855), tome XII, p. 101, note I.
368 POESIES DIVERSES.
On y trouve en effet, aux pages i6y et suivantes, la Plainte de la
France à Borne , par Monsieur Corneille. Elégie1. Mais ces impressions
sans autorité ne peuvent prévaloir contre l'édition originale et offi-
cielle dont nous venons de parler. Cette pièce devers a d'ailleurs tou-
jours figuré dans les OEuvres complètes de Fléchier ; on la trouve à la
page i5i de la première partie du tome V de l'édition publiée à Nîmes
en 1782, et à la pa^e i?5 du tome IX de l'édition publiée à Paris
en 1828. Ce n'est au contraire que depuis peu de temps qu'elle fait
partie des éditions de Corneille. L'abbé Granet s'est gardé de l'ad-
mettre dans ses OEuvres diverses , et je la trouve pour la première
fois, en 1817, dans l'édition des OEuvres complètes donnée par Ant.-
Aug. Renouard. Si du reste on examine de près le style de ce mor-
ceau, on remarque que la facilité élégante avec laquelle il est écrit
n'a aucun rapport avec la manière plus large , plus éloquente , mais
moins dégagée et moins vive, et, pour tout dire en un mot, moins
moderne, que nous observons chez notre poète. — Nous reprodui-
sons le texte qui a été attribué à Corneille par ses derniers éditeurs;
il diffère notablement de celui de l'impression originale (in-40) et des
éditions de Fléchier, et il a dix vers de moins à la fin.
Cette Plainte de la France a pour objet l'attentat des Corses de la
garde d'Alexandre VII, qui, le 20 août 1662, tirèrent sur le carrosse
du duc de Créqui, ambassadeur de France, dont ils tuèrent un page
et blessèrent plusieurs domestiques. Le pape offrit à ce sujet toute
espèce de réparation , et cette injure fut oubliée à la condition que
des excuses seraient faites par le cardinal Chigi, neveu du saint-père,
qui vint en effet les porter au Roi en 1664» et qu'une pyramide éle-
vée à Rome constaterait la réparation accordée.
Lorsque sous le plus juste et le plus grand des princes
L'abondance et la paix régnent dans mes provinces ,
Rome , par quel destin tes Romains irrités
Arrêtent-ils le cours de mes prospérités ?
Après avoir gagné victoire sur victoire , 5
Et porté ma valeur au comble de la gloire ,
Après avoir contraint par mes illustres faits
Mes rivaux orgueilleux à recevoir la paix ,
J'espérois d'établir une sainte alliance ,
D'unir les intérêts de Rome et de la France, 10
1 . Bibliothèque impériale, Y 6121.
APPENDICE. 369
Et de porter bien loin , par mes rares exploits ,
La gloire de mes lis et celle de la croix.
Mon monarque , chargé de lauriers et de palmes ,
Voyoit tous ses Etats et ses provinces calmes ,
Et disposant son bras à quelque saint emploi , i5
Ne vouloit plus combattre et vaincre que pour toi.
Il t'offroit son pouvoir et sa valeur extrême ;
Mais tu veux l'obliger à te vaincre toi-même ,
Et par un attentat et lâche et criminel ,
Tu fais de ses faveurs un mépris solennel : 20
On voit régner le crime avec la violence ,
Où doit régner la paix avecque le silence ;
On voit les assassins courir avec ardeur
Jusqu'au palais sacré de mon ambassadeur,
Porter de tous côtés leur fureur vagabonde, 1 5
Et violer les droits les plus sacrés du monde.
Je savois bien que Rome élevoit dans son sein
Des peuples adonnés au culte souverain,
Des héros dans la paix , des savants politiques ,
Experts à démêler les affaires publiques , 3o
A conseiller les rois , à régler les États ;
Mais je ne savois pas que Rome eût des soldats.
Lorsque Mars désoloit nos campagnes fertiles ,
Tu maintenois tes champs et tes peuples tranquilles :
Tout le monde, agité de tant de mouvements, 35
Suivoit le triste cours de ses dérèglements ;
Toi seule , dans le port , à l'abri de l'orage ,
Tu voyois les écueils où nous faisions naufrage ;
Des princes irrités modérant le courroux ?
Tu disposois le ciel à devenir plus doux ; 4°
Et sans prendre intérêt aux passions d'un autre ,
Tu gardois ton repos et tu pensois au nôtre.
Tu voyois à regret cent exploits inhumains ,
Et tu levois au ciel tes innocentes mains ;
Tu recourois aux vœux quand nous courions aux armes : 45
Nous répandions du sang , tu répandois des larmes ;
Et plaignant le malheur du reste des mortels ,
Tu soupirois pour eux au pied de tes autels.
Tu demandois au ciel cette paix fortunée ,
Et tu me la ravis dès qu'il me l'a donnée. îo
A peine ai-je fini mes glorieux travaux ,
Que tu veux m'engager à des combats nouveaux
Reine de l'univers, arbitre de la terre ,
Corbeille, x 24
37o POÉSIES DIVERSES.
Tu me prêchois la paix au milieu de la guerre;
J'ai suivi tes conseils et tes justes souhaits , 55
Et tu me fais la guerre au milieu de la paix.
Détruisant les erreurs et punissant les crimes,
J'ai soutenu l'honneur de tes saintes maximes;
J'ai remis autrefois, en dépit des tyrans,
Dans leur trône sacré tes pontifes errants ; 60
Et faisant triompher d'une égale vaillance ,
Ou la France dans Rome , ou Rome dans la France ,
J'ai conservé tes droits et maintenu ta foi ,
Et tu prends aujourd'hui les armes contre moi !
Quel intérêt t'engage à devenir si fière? 65
Te reste-t-il encor quelque vertu guerrière ?
Crois-tu donc être encore au siècle des Césars ,
Où parmi les fureurs de Bellone et de Mars,
Jalouse de la gloire et du pouvoir suprême ,
Tu foulois à tes pieds et sceptre et diadème ? 70
Dans ce fameux état où le ciel t'avoit mis
Tu ne demandois plus que de grands ennemis ;
Et portant ton orgueil sur la terre et sur l'onde ,
Tu bravois le destin des puissances du monde ,
Et tu faisois marcher sous tes injustes lois yS
Un simple citoyen sur la tête des rois.
Ton destin ne t'offroit que d'illustres conquêtes ,
Ta foudre ne tomboit que sur de grandes têtes,
Et tu montrois en pompe aux peuples étonnés
Des souverains captifs et des rois enchaînés. 80
Mais quelques grands exploits que l'histoire renomme,
Tu n'es plus cette fière et cette grande Rome :
Ton empire n'est plus ce qu'il fut autrefois ,
Et ce n'est plus un siècle à se moquer des rois ;
On ne redoute plus l'orgueil du Capitole , 85
Qui fut jadis si craint de l'un à l'autre pôle ;
Et les peuples , instruits de tes douces vertus ,
Adorent ta grandeur , mais ne la craignent plus.
Que si le ciel t'inspire encor quelque vaillance ,
Va dresser tes autels jusqu'aux champs de Bisanee ; , 90
Anime tes Romains à quelque effort puissant ,
Et va planter ta croix où règne le croissant.
Remplis les premiers rangs dune sainte entreprise ,
Et voyons marcher Rome au secours de Venise.
Pour tes sacrés autels toi-même combattant, gS
Commence ces exploits que tu nous prêches tant;
APPENDICE. 37i
Ou laisse-moi jouir clans la paix où nous sommes
D'un repos que je viens de procurer aux hommes.
J'ai vu de tous côtés mes ennemis vaincus,
Et je suis aujourd'hui ce qu'autrefois tu fus. ioo
Les lois de mon Etat sont aussi souveraines ;
Mes lis vont aussi loin quêtes aigles romaines ;
Et pour punir le crime et l'orgueil des humains,
Mes François aujourd'hui valent les vieux Romains.
L'invincible Louis , sous qui le monde tremble , io5
Ne vaut-il pas lui seul tous les héros ensemble ?
La victoire, sous lui ne se lassant jamais,
Lui fournit des sujets de vaincre dans la paix.
Dans ce comble d'honneur où lui seul peut atteindre,
Tout désarmé qu'il est , il sait se faire craindre; no
Il dompte ses rivaux et sert ses alliés ,
Voit , même dans la paix , des rois humiliés.
Il auroit su venger tant de lois violées ,
Et tu verrois déjà tes plaines désolées ,
Tu verrois et tes chefs et tes peuples soumis ; n5
Mais tu n'as pas pour lui d'assez grands ennemis ;
Et dans le mouvement de gloire qui le presse ,
Tu tiens ta sûreté de ta seule foiblesse.
Que n'es-tu dans le temps où tes héros guerriers
Eussent pu lui fournir des moissons de lauriers ! 1 20
Pour arrêter sur toi ses forces occupées ,
Où sont tes Scipions, tes Jules, tes Pompées?
Tu le verrois courir au milieu des hasards ,
Affronter tes héros , et vaincre tes Césars ,
Et par une conduite aussi juste que brave , 125
Affranchir de tes fers tout l'univers esclave.
Mais puisque ta fureur ne peut se contenir ,
Après tant de mépris il faudra te punir :
La gloire des héros n'est jamais assez pure,
Et le trône jaloux ne souffre point d'injure. i3o
Ne te flatte plus tant sur ton divin pouvoir :
On peut mêler la force avecque le devoir.
Des monarques pieux , des princes magnanimes
Ont révéré tes lois en punissant tes crimes ;
Ils ont eu le secret de partager leurs cœurs, i35
D'être tes ennemis et tes adorateurs ,
De soutenir leur rang , et sauver leur franchise,
En se vengeant de toi , mais non pas de l'Eglise ;
Ils ont su réprimer ton orgueil obstiné
372 POÉSIES DIVERSES.
Sans choquer le pouvoir que le ciel t'a donné, 140
Et séparer enfin, dans une juste guerre,
Les intérêts du ciel d'avec ceux de la terre.
Sur l'exemple fameux de ces rois sans pareils
Inspire à mon héros ces fidèles conseils.
Prince, dont la valeur et la sagesse est rare, i^S
Ménage ta couronne avecque ta tiare ;
Donne aux siècles futurs un exemple immortel;
Garde les droits du trône et les droits de l'autel ;
Qu'à ton ressentiment la piété s'unisse.
Louis, fais grâce à Rome en te faisant justice; i5o
Pense aux sacrés devoirs d'un monarque chrétien ;
Fais agir ton pouvoir , mais révère le sien ;
Et mêlant au courroux le respect et la crainte ,
Punis Rome l'injuste, et conserve la sainte.
XIII
(Voyez, la Notice, p. ao.)
VERS DE CORNEILLE,
DE SES AMIS ET DE SES PARTISANS
contre l'abbé d'Aubignac*.
r° Mlle des Jardins (depuis Mme de Villedieu), Pabbé d'Aubignac
et Pierre Corneille.
(Extrait des Historiettes de Tallemant des Réaux , tome Vil ,
p. 25o-a55.)
a Elle [Mlle des Jardins) fit une pièce de théâtre qu'on appela
Manlius, où Manlius Torquatus ne fait point couper la tête à son
fils. Quoi qu'en dise l'abbé d'Aubignac, son précepteur, je ne crois
pas que cela se puisse soutenir. Cette pièce réussit médiocrement.
Une autre, appelée Nitétis, réussit encore moins. Or Corneille dit
quelque chose contre Manlius, qui choqua cet abbé, qui prit feu sur-
le-champ, car il est tout de soufre. Il critique aussitôt les ouvrages
de Corneille; on imprime de part et d'autre. Pour sa critique, pa-
I. Voyez dans le tome VI la Notice àrOEdi[>e, p. 1 1 1 et 112; celle de Ser-
torius, p. 356, et surtout celle de Sophonïsbe , p. 457-4^9.
APPENDICE. 373
tience, car il en sait plus que personne; mais le diable le poussa de
mettre au jour son roman allégorique de la philosophie des Stoï-
ciens. Il est intitulé : Macarise, reine des îles Fortunées
« L'abbé d'Aubignac a fait mettre son portrait au devant du livre,
avec ces quatre vers, qui apparemment sont de son frère. Il a l'hon-
neur d'en faire aussi mal qu'un autre pour le moins :
Il a mille vertus, il connoît les beaux-arts ,
Il étouffe l'envie à ses pieds abattue ;
Et Rome à son mérite , au siècle des Césars ,
Au lieu de cette image eût dressé sa statue.
« Corneille, ou quelque corneiliien, a fait cet autre quatrain pour
mettre à la place du premier :
Il a mille vertus, ce pitoyable auteur,
Et deux mille secrets pour apprendre à déplaire ;
Quiconque veut s'instruire au grand art de mal faire
N'a qu'à prendre leçon d'un si rare docteur.
« Corneille fit encore le madrigal qui suit :
ÉPIGRAMME.
Cette foule d'approbateurs'
Qui met à si haut prix ta docte allégorie,
Comme elle a ton œuvre enchérie ,
Epouvante les acheteurs.
Tu crois que le papier et l'encre qu'il t'en coûte
De l'immortalité t'ouvrent la grande route,
Et que tant de grands noms feront vivre ton nom ;
Mais n'en déplaise à ta doctrine ,
Plus on étaye une maison,
Plus elle est près de sa ruine*.
a Celle-ci est de Cottin :
Ce roman sans exemple en nos mains est tombé ;
Mais j'en trouve l'auteur difficile à connoître :
i. Tallemant a raconté un peu plus haut dans un long passage que nous
avons supprimé, comme peu utile à notre objet, que la moitié du premier
volume était occupée par les éloges des amis de d'Aubignac.
2. « Tl y a au bas du quatrain Acheman; c'est quelque nom retourné. »
(Note de Tallemant.) — On voit que l'auteur des Historiettes contredit lui-
même dans cette note, postérieure, il est vrai, à son texte, l'assertion qui at-
tribue cette épigramme à Corneille.
374 POÉSIES DIVERSES.
Si j'en crois ses amis, c'est un savant abbé;
Si j'en crois ses écrits, ce n'est qu'un pauvre prêtre'.
« Cependant son livre ne se vend point ; quand il seroit moins dés-
agréable, ii auroit de la peine à en avoir le débit, car les libraires ne
sont pas pour lui. Ils disent une plaisante chose : Corneille, dans un
in-folio qu'il a fait imprimer depuis cette querelle, s'est tait mettre
en taille-douce, foulant l'Envie sous ses pieds. Ils disent que cette
Envie a le visage de l'abbé d'Aubignac2. Cependant Corneille, d'as-
sez bonne foi, reconnoît dans de certains discours au devant de ses
pièces les fautes qu'il a faites ; mais j'aimerois mieux qu'il eût tâché
de faire disparoître celles qui étoient les plus aisées à corriger. En
vérité il a plus d'avarice que d'ambition, et pourvu qu'il en tire bien
de l'argent, il ne se tourmente guère du reste. L'abbé s'opiniâtre, et
est si fou que de faire imprimer les autres volumes, à ses dépens
s'entend, car, quand il le voudroit, je ne crois pas que personne les
imprimât pour rien. On dit qu'il pourroit bien apprendre aux fous
un nouveau moyen de se ruiner; car il y a plusieurs volumes, et
cela coûtera bon. Il fit et fit faire quantité d'épigrammes contre Cor-
neille, qui toutes ne valoient rien; on n'a pas daigné en prendre
copie3.... ï
i. Cette épigramme figure à la page 20 d'un recueil intitulé : les Plaisirs
de la poésie galante , gaillarde et amoureuse petit volume in- 12, dont le
frontispice gravé ne porte ni adresse ni date, et qui est catalogué à la biblio-
thèque de l'Arsenal sous le n° 9262. Dans ce recueil l'épi gramme qui nous
B
occupe est signée CoRNETL,LE,et sur cette autorité M Paul Lacroix la lui a attri-
buée dans le Bulletin du bouquiniste du Ier décembre i863, p. 694. 11 n'a
pas remarqué que Tallemant la donne comme étant de Cottiu. Elle a peut-
être été signée d'abord de l'initiale C, et il aura suffi de la mauvaise intelli-
gence de d'Aubignac et de Corneille pour la faire attribuer à ce dernier.
2. Ce frontispice se trouve en tête de l'édition publiée en i663, en 2 vol.
in-folio. M. Taschereau dit avec beaucoup de raison, à propos de ce passage
des Historiettes : a II est évident que Tallemant n'avait pas vu ce frontispice,
et qu'il se bornait à enregistrer ce qu'il avait entendu dire. Il ne l'avait pas
vu, car il y place en pied Corneille, lequel n'y figure qu'en buste, et c'est la
Muse de la tragédie qui écrase l'Envie, à laquelle le graveur a donné en effet
des traits masculins. Ces traits étaienl-ils bien ceux de d'Aubignac, de qui il
ne nous reste que deux portraits dissemblables? Tallemant ne s'est pas mis à
même de pouvoir nous le garantir, et nous ne sommes pas en mesure d'éclair-
cir aujourd'hui ce qu'il n'a pas v<riné. »
3. Ici vient le morceau relatif à Othon que nous avons reproduit dans la
Notice sur cette pièce, tome VI, p. 567 et 568; puis un autre passage repro-
duit ci-dessus, p. 1 83.
APPENDICE. 575
« Voici la seule supportable d'entre ces volumes d'épigrammes que
l'abbé d'Aubignac et son Académie des Allégories ont composés contre
Corneille :
Pauvre ignorant , que tu t'abuses
Quand tu nous dis si hardiment
Que toujours le poète normand
Avecque lui mène les Muses !
Il en seroit un foible appui
S'il falloit qu'il les eût portées;
Et s'il les traînoit après lui ,
Hélas ! qu'elles seroient crottées !
« Quelqu'un des corneilliens a fait celle-ci :
Qu'ils étoient fous ces vieux stoïques
De se piquer d'être apathiques !
Ils manquoient bien de sens commun.
Ceux-ci sont d'une autre nature;
Et comme pourceaux d'Epicure,
Tous grondent quand on en touche un ! .
a Les épigrammes qui suivent sont de Richelet :
Hédelin, c'est à tort que tu te plains de moi;
N'ai-je pas loué ton ouvrage ?
Pouvois-je plus faire pour toi
Que de rendre un faux témoignage 2 ?
Je me voulois venger de l'aveugle cynique5
Qui toujours égratigne et pique ,
Et mord comme un chien enragé ;
Mais il n'est pas besoin que je le satirise,
Il fait imprimer Macarise :
Ne suis-je pas assez vengé?
Du critique Hédelin le savoir est extrême;
C'est un rare génie, un merveilleux esprit.
Cent fois confidemment il me l'a dit lui-même,
Et le grand Pelletier4 l'a mille fois écrit.
i . Le roman de l'abbé d'Aubignac est : de la Philosophie des Stoïciens. (Note
de Tallemant.)
i. Richelet est un des approbateurs de l'ouvrage de l'abbé. {Note de Talle-
mant.)
3. 11 ne voit quasi goutte. (Note de Tallemant.)
4.. Pierre de Pelletier, auteur de sonnets, ridiculisé par Boileau
376 POÉSIES DIVERSES.
D'une autre façon.
Le célèbre Hédelin est un homme d'esprit;
il fait de bons romans, on les lit, on les aime :
Cent fois confidemment il me l'a dit lui-même,
Et le grand Pelletier l'a mille fois écrit. »
20 Seconde dissertation concernant le poème dramatique , en forme de
remarques sur la tragédie de M. Corneille intitulée Sertorius (Par
d'Aubignac.)
(Extrait du Recueil de Dissertations t publié par Granet , Paris, 1740»
tome I, p. 281-283.)
« J'étois près de finir cette lettre, ou plutôt cette longue disserta-
tion, et je méditois le dernier compliment, qui doit, Madame, vous
assurer de mes respects lorsque l'on m'a mis entre les mains une
épigramme et un sonnet de M. Corneille, avec une lettre et une dé-
fense en prose1, servant de réponse aux observations que vous m'a-
viez demandées sur la Sophonisbe. Je prends la liberté de vous les
envoyer, pour vous montrer combien l'esprit de M. Corneille est
usé, ou combien la passion en a malheureusement dissipé la force et
les lumières; car ce sont les plus méchants vers que vous ayez jamais
vus, et la prose la plus languissante, la plus impropre et la plus impure
qui soit jamais sortie de sa plume; et je n'y reconnois rien de lui que
sa colère. Ce ne sont que des injures et des impostures forgées à
plaisir, et de mauvaises paroles qui scandalisent tous les gens d'hon-
neur ; il y mêle le comique avec le tragique ; il fait le plaisant et le
héros parnassien ; il feint de ne pas savoir que les lettres que j'ai pris
la liberté de vous envoyer par votre ordre soient de ma façon, afin
de me pouvoir dire toutes ses injures à couvert. Mais après les té-
moignages de tant de personnes d'honneur, qui l'en assurèrent dès
le commencement, après les emportements qu'il a fait paroître contre
moi, et après avoir lu mes remarques sur la boutique du libraire
avant qu'elles fussent achevées d'imprimer, dans une connoissance
certaine de mon nom, c'est un mauvais prétexte pour se déchaîner
en paroles indignes de l'innocence et de la générosité des Muses; et
I. La lettre et la défense sont de Douneau de Visé (voyez tome VII, p. 4^7
et suivantes), mais nous ne savons de quel sonnet ni de quelle épigramme d'Au-
bignac veut parler.
APPENDICE. 377
quand il me nomme dans cette réponse en alléguant ma pratique,
c'est pour faire retomber sur moi les orages de sa bile , en feignant
de les avoir préparés contre un autre »
XIV
QUATRAIN POUR LE CHRIST DE SAINT-ROCH
A PARIS.
Ce quatrain a paru pour la première fois parmi les Poésies diverses
de Corneille, à la page 106 du tome XII des OEuvres de ce poëte,
publié par Lefèvre en i855, et, à partir de cette époque, il a été in-
variablement reproduit dans toutes les réimpressions qui en ont été
faites. Tâchons de savoir d'où il est tiré, et de quelle manière il a
passé dans les OEuvres de notre auteur.
M. Alexis Socard, auteur de plusieurs ouvrages sur les livres po-
pulaires publiés à Troyes à partir du seizième siècle, possède un
exemplaire de Y Imitation de Jésus-Christ traduite et paraphrasée en
vers franc ois par P. Corneille. Imprimé à Rouen, par L. Maury, pour
Robert Ballard, i658, in~4°. On lit sur le titre de cet exemplaire : ex
libris Pétri Delarivey ; ce Pierre de Larivey est probablement de la
même famille que le fécond auteur dramatique champenois du même
nom, mort, vers 1612. Au verso du titre on lit : Sonnet inédit de
P. Corneille adressé à M. Alexandre de Campion, gentilhomme bas nor-
mand, auteur de la Vie de plusieurs hommes illustres, ouvrage resté
presque inconnu. Cet intitulé est suivi d'une fort mauvaise copie du
sonnet que nous avons reproduit (p. i37-i3g) d'après l'original, puis
d'un Quatrain du même auteur adressé au Christ de V église Saint-Roch.
C'est là probablement que P. Villiers, auteur du Manuel du voyageur
à Paris , ou Paris ancien et moderne^ trouva ce quatrain, que je lis
dans l'édition de 1806 de cet ouvrage, qui, suivant la France lit-
téraire de M. Quérard, a paru pour la première fois en 1804 ou i8o5.
Il y est précédé de ce préambule peu explicite : « Ce fut, dit-on,
pour le Christ peint dans l'église Saint-Roch qu'il (Corneille) com-
posa ce quatrain peu connu. » M. Edouard Fournier inséra dans
le journal le Théâtre le quatrain qu'il avait trouvé dans l'ouvrage
378 POÉSIES DIVERSES.
de Villiers. Peu de temps après, le 22 juin 1845, F Impartial de Rouen
le publiait à son tour, non, comme on pourrait le croire, d'après
de Villiers ou M. Edouard Fournier, mais d'après la copie manu-
scrite de Troyes . Ce qui le prouve, c'est que F Impartial donne, en même
temps que le quatrain, le sonnet à Campion, et qu'il reproduit une
faute des plus singulières : Anglais^ pour emplois, qui se trouve au vers 6
dans la copie de Troyes. Enfin c'est à F Impartial que Lefèvre em-
prunte le quatrain , sans se préoccuper de son origine. Quant à nous,
nous n'avons pas cru devoir le laisser dans les OEuvres de Corneille,
et nous le rangeons parmi les pièces dont l'authenticité ne nous paraît
pas bien démontrée.
Pécheur, tu vois ici le Dieu qui t'a fait naître;
Sa mort est ton ouvrage et devient ton appui :
Dans cet excès d'amour tu dois au moins connoître
Que s'il est mort pour toi, tu dois vivre pour lui.
XV
(Voyez la notice de la pièce LX1X , p. iy3.)
ÉPÎTRE DÉDICATOIRE DU P. DE LA RUE A CORNEILLE,
ET VERS SUR LA MORT DE CHARLES CORNEILLE, SON TROISIÈME FILS.
1° Ad clarissimum virum P. Corneliumf tragicorum principem*.
Ite, meœ, junctis modo cantibus, ite, Camœnae :
Quserite quo vester sese ferat auspice vates
Per populos, longeque adeat ventura nepotum
Ssecula, et extremum non ultra inglorius orbem.
Ne tamen assiduo procerum terere atria gressu, 5
Neu molles captare aditus, precibusve superbas
I . Cette pièce, qui parut d'abord en tête des Idyllia du P. de la Rue ,
en 1669, fut réimprimée dans ses Carmina en 1688 (voyez ci-après, p. 383,
note 1), à la fin (p. 146) du livre II, qui a pour titre : Panegyricus. Elle
est intitulée dans ce second recueil : Pet.ro Cornelio, tragicorum principi, de-
dreatio Idylliorum. anno M .DC.LXIX. — Nous publions ces vers avec les
retouches de 1688, qui les ont améliorés en divers endroits, et nous indiquons
en note les variantes de la première édition.
APPENDICE. 379
Expugnare fores vobis labor : hsec mala Musis
Hospitia, lise latiis infesta? inoribus aedes;
Has fugite, et pulchro fastus contemnite fastu.
Vos neque splendor opum, Tyrii neque muricis ardor, 10
Lubriea nec vanae seducaut fulgura pompae :
Immortale decus petimus. Juvat astra volatu
Quaerere inoffenso, et cœtus fugisse profanos.
Tu mihi, Castalise tu numen et arbiter aulse,
Cokni'li, dux esto vise ; tu densa reclude 1 5
Nubila, tu dignis prsesens allabere curis.
Scilicet bumanae vicisse oblivia sortis
Jamdudum, et rutiiis elapsus ad sethera pennis
Sub pedibus nimbos, ac desidis otia terras,
Indecoresque procul caneris liquisse tumultus. ao
At non Dœdalei dédit boc tibi muneris usus,
Nec fragiles tibi cera humeris attexuit alas :
Ipsa novo applaudens cessit tibi ! munere Fa nia
Remigiumque tubamque, tuo quo plenius ore
Gallicus ad geminos lionor increbresceret axes. 2 5
Hanc adeo, qua te toties regalia fata
Magnanimosque duces populi stupuere canentem,
Hanc nostris inflare, tua in prseconia, Musis
Jam liceat ; neque enim cantu leviore décorum est
Dicere quantum altrix tibi Gallia, saecula quantum, 3o
Et mores hominuni, atque omnis tibi debeat aetas.
Scilicet exesa divina Tragœdia palla,
Annorumque situ et ruga deformi* anili,
Squalebat tristi noctis demersa baratbro ;
Aut fescennina cingens sibi tempora larva , 35
Vulgabat stolidi sese ad ludibria vulgi.
Tu senio effœtos juvenili lumine vultus
lnduere, et doctis redivivum in membra vigorem
Fundere carminibus; tu spargere floribus ora ,
Tu castum potuisti oculis afflare pudorein. 4°
Hinc siaml effrœnis compressa licentia scense,
Ingenui venere sales, et digna severis
Auribus innocuo condita lepore voluptas.
Hinc regum audaci penetrare in limina gressu
Cœpit, et augustas beroum pascere mentes. q5
Ipse sonis etiam gravibus magnaque profundos
Voce vocans mânes imis excire sepulchris
1. Dans les Idyllia (1669) : « tibi cessit. »
i8o POÉSIES DIVERSES
Ausus, et setherei revocare in luminis auras.
Vidimus Elysio faciles prodire recessu
Insignes animas, et sponte patentia Ditis 5u
Ostia ; nec priscos iterum sibi sumere vultus,
Nec veteres iterum puduit renovare querelas.
Ipsa feras artes implacatumque rigorem
Medea ; ipse parens fratrum conjuxque parentis
Œdipus, incestos orbi confessus amores, 55
Expendit propriis fatorum crimina pœnis.
Rursus, tergeminœ fumantem sanguine csedis,
Germanum in pectus tulit asper Horatius ensem ;
Rursus et imbelli tabescere nescia fletu,
Dilectosque viri cineres1 patriseque jacentis 60
Tristes relliquias digno complexa dolore ,
Romanum explicuit fortis Cornelia robur.
Tuque, o tu victor generi socer, ultor et idem 2,
Juli, acies rumpens pharias et inhospita Magno
Mœnia, sacrilegae poscentem prœmia caedis 65
Semivirum immerita spoliasti luce tyrannum.
Tu quoque privatos, Auguste, domare furores
Visus, et ingratum parcendo frangere Cinnam.
At quis felicem gemina post funera proie 5
Mauritium, et dubiae miserum discrimine prolis 70
Inde Phocam, hinc stricto juvenes pendere sub ictu
Non stupuit? Quis non, Italis memorabile probris
Sertori exilium miratus, et aspera Galbae
Consilia, et spreti non longum crimen Othonis4 ?
1 . Dans les Idyllia : « Dilectos Magni cineres. »
a. Dans les Idyllia :
Tuque, o tu, Magnum, Juli, par unus in hostem,
Maxime, bellatricem animam, geminaîque capacem
Fortunse , pharii servasti funere régis.
3. Dans les Idyllia :
At quis, inexpleto properatae laudis amore ,
Pompeium, Hispanas meditantem exsciudere lauros,
In veteres armis juvenilibus ire eohortes
Non stupuit? Quis non, etc.
ù.. Dans les Idyllia :
et aspera flecti
Pectora felicis rabiem contemnere Syllae ?
On voit que le P. de la Rue, en modifiant ce passage, a ajouté à la mention
du Sertorius de Corneille, celle de V Iléraclius et de YQthon.
APPENDICE. 38i
Quis non et miseros Sophonisbae agnovit amores yS
Sidoniosque animos, latii cum prseda triumphi
Barbara Romuleos calcaret fœmina fastus ,
Et claram raperet sponsi de munere mortem?
Caetera quid meniorem quae per te reddita vitae
Agmina, se in lucem plausumque dedere theatri? 80
Et nunc par reliquos vitse lucisque cupido
Sollicitât mânes. Video Cocytia circuin
Flumina, turbam atris nequicquam effervere ripis
Ingentem, exsanguesque diu tibi tendere palmas.
Imprirms sa? vos in vincula ducere Persas , 85
Bactraque adhuc, summisque Asise de finibus Indos
Gestit Alexander. Libycae tum gloria gentis,
Annibal , antiquos volvit sub mente labores,
Et Trebiam, et Cannas , et adacti opprobria leti ,
Torvus adhuc, ut quondam, Italas cum verteret arces 90
Victor, et admenso clades expenderet auro.
Aspicis et geminos, Tyria3 duo funera prolis,
Scipiadas, Mariosque , invictaque nomina Brutos ,
Secretisque piis dicentem jura Catonem,
Protinus effuso properare ad littora gressu. 95
Quam vellent Stygise pariter te vindice noctis
Exsolvi tenebris, superasque invisere sedes,
Qua licet1, et grandi tecum prodire cothurno !
Nec tamen aut meritis devincta minoribus aetas
Nostra tibi, aut seros aetas visura nepotes, 100
Utraque cum pulchras per te formetur in artes ,
Et gravibus discat majorum insistere factis.
Nec mihi quisquam alio mentes assurgere versu2
Altius , aut rigidae citius fastigia jactet
Scandere virtutis. Duros bine fîngere mores, io5
Hinc licet offîciis urbanae assuescere vitae ;
Hinc legum quid jura velint, quae cura tuendae
Sit patriae, quid casta fides, quid sancta parentum
Relligio, sanguisque, et regum gratia poscat;
Atque palatinse patet anceps aléa sortis. 1 10
Tum vanosque metus purgare, modumque dolori
Ponere ; tum tictis animum tentare periclis
Per ludum, inque omnes fati durare procellas
Discimus exemplis, et vitam impendere famse.
1. Dans les Idyllia: a Dum licet. v
2 . Les Idyllia ont cultu, au lieu de versu.
382 POESIES DIVERSES.
Quirl, quam malta mis débet jam Gallia curis, n5
Expediam ? tanto quantum se jactat alumno ,
Et reliquas inter caput effert unica gentes ?
Nam quid deinde tuis conferre laboribus ausit
Attica simplicitas ? quid liianti invecta cothuriio
Et tumido incedens hispana tragœdia passa? f iao
Qaid vénères italae, fractique loqaacior oris
Mollities? quid, romulei * laus una theatri ,
Annaeus, veteri eoncretam frigore venam ,
Et vacaa ostentet clamosœ jnrgia scense ?
His reram fines melias, penitasqae latentes ia5
Vestigare vias; his prsepetis omine pennae
Aat fibris oviam casas aperire futuros
Fas fuerit; fas artilici spirantia cœlo
Mollins, aut vivis aequare coloribus ora.
Seecla tibi magna dudum tellure sepulta i3o
Carminibus reparare, novseque refandere laci,
Hae tibi sant artes, Cornelt ; hinc nominis ibit
Falgor in immensum, et cœlo se Gallia tollet.
Hac ta conspicaa famae sublimis ab arce
Splendidas in radiis, tenaes ne despice Musas. i35
Forte equidem indoctse moveant fastidia plebis ,
Autteneras lacèrent peregrinis cantibus aures ;
At non incomptse venient tibi , quas tua nuper
Laurus inassuetae velavit frondis honore ,
Quas2 patrio insignes voluisti incedere cultu3. 140
His adeo tenera? si laus et gratia formée
Ulla, décor per te venit omnis ; et omnibus sequum est ,
Qua poterunt, numeris méritas tibi solvere grates.
Id patere , lias memori tibi sese addicere cultu 4
iEternumque tuo sibi nomme condere nome». i45
Qualis ubi lento média inter gramina lapsu
Tenuis adhuc hedera , et frondosis abdita silvis,
Serpit humi nilens : soiido si robore quercus
Alta, ingens, superas ramis educta sub auras,
Aut vêtus occurrat Parnassi gloria lauras , 1 5o
1 . Dans les Idyllia : « Quid jam latii laus una theatri. »
2. Les Idyllia ont Et , au lieu de Quas.
3. Il s'agit i«:i de la traduction faite par Corneille des vers latins du P. de
la Rue sur les Victoires de 1667 : voyez ci-dessus, p. 192 et suivantes.
4. Dans les Idyllia :
Id patere, et memori tibi sese addicere mente.
APPENDICE. 383
Tum levibus fibris, et morsu tortilis unco
Subrepit sensim , ac lato se cortice fuadit ,
Surama petens. Non illam hiemes , nec acuta revellant
Prselia ventorum ; sociam neque respuit arbos.
At licet excelso nemus una cacumine vincat, i55
Excipit amplexus bumiles , annosaque stringi
Brachia , et implexis gaudet florere corymbis ;
Abjectasque prius fert secum ad sidéra frondes.
Rotliomagi Kal. jun. M.DG. LXIX.
2° Ad clarissimum virum Petruin Cornelium, in obitu Caroli filii :
Symbolum '.Parelius in pluviam difflucns ; lemma : Par si durasset '.
Nequicquam varios imitando fîngere soles
Nitimur imprudens bominum genus, aurea quanquam
Pigmenta, et croceos operi miscemus honores.
Hic solem labor, hoc lucis decorisque parentem
Lucis opns petit ; humanae nil indiget artis, 5
Et radios habet ipse, suos habet ipse colores.
Aspicis ut nitidam toto legit aère nubem ,
Cui proprios credat transfuso lumine vultus ?
Illa sinu levi , quem densius agmen opacat
Nimborum , et cseca spleudentem terminât umbra , \ o
Excipit, illapsos atque in se colligit ignés.
Urget opus Titan, jamque œmula lumina velîet,
Et quos pingit adhuc, pictos jam cernere vultus.
Sic placet illa tamen, nec degener ardet imago ,
Imperfecta licet : quippe liane nova forma, decusque i5
Lucis inoffensse, et radii jam mille coronant.
Dum Phœbus sibi plaudit, et haec miracula terris
Ostentat , nimio flammarum ardore subactus
i. Charles Corneille, troisième Gis de Pierre Corneille, mourut en 1667, à
l'âge de quatorze ans. Dans les Idyllia de 1669, ces vers se trouvent à la
page 5i, parmi les Emhlemala heroica ; en regard est une gravure représen-
tant un parhélie et eutourée d'un encadrement au haut duquel on lit cette de-
vise répétée au vers 24 et au dernier vers : par si durasset. Dans l'édition
de 1688, intitulée : Caroli Rusei e societate Je.su Carminum libri quatuor,
editio quinta, cette pièce est à la page 161 et fait partie du livre III, intitulé :
Symbolicus y elle a pour titre : Petro Cornelio, tragicorum principi, in obitu
Caroli ji iii. Parelius di/Huens. Nous suivons, comme pour la pièce précédente,
le texte de 1688.
384 POÉSIES DIVERSES.
Non exspectatos solvit se nimbus in imbres,
Nec finem egregio sinit iraposuisse labori. ao
Liquitur in pluviam color omnis, et aurea sensim
Forma simul volucres fugiens vanescit in auras1.
Sic Phœbum tenuis necdum perfecta reliquit,
Qua? Phœbo fuerat par, si durasskt, imago.
Te quoque, magnorum vates ter maxime vatum, 26
Gallia quem dudum atque immensus suspicit orbis,
Te quoque turba ingens nequicquam a?quare canendo
Aggreditur, capitique pares imponere lauros.
Namque nefas animis mortalibus avia longe
Pindi adyta , el sacros tecum penetrare recessus : 3o
Tanta tibi atque tuae debetur gloria genti.
Et si saecla sibi similem ventura reservant ,
Ille, erit ille tuus tandem ; aut si fata récusant ,
Nullus erit, Corneli, atque haec tecum inclita fama
Ibit in Elysium , et grandem comitabitur umbram. 35
Tu Carlum tanti gaudebas nominis olim
Venturum in partem : doctas tam promptus in artes ,
Tarn docilis, tanto Musarum ardebat amore.
Nec minus et puero mens vivida , et inditus ignis ,
Et firma in levibus jam tum constantia cœptis. 40
Non ego te, Corneli, alium florentibus annis
Crediderim, aut de te plura exspectasse parentes.
Quid tu autem, cum te spirantem in proie videbas
Ipse auctor décorum? Quid, cum sensusque viriles
Mirabare, et nil puérile sonantia verba? 4^
Hune nempe assiduo cultu studioque fovebas
Sedulus, hune Pindi juga nota viamque docebas ,
Teque ipsum ardebas dulci transfundere nato.
Ille audax animi duros insistere calles
Tentabat, sensimque augusto adrepere monti : 5o
Et dulces oculi*, et formosae gratia frontis,
Credo equidem, teneros Phœbi meruisset amores.
At tu venturos dum spe jam prœcipis annos,
Magnarum admirans tam lseta exordia laudum,
Non fuit ingenio par corpus, et ardua mentis 55
i. Dans les Idyllia (1669) :
Forma simul fugit, atque levés vanescit îa auras.
Au vers suivant, les Idyllia ont relinguet.
2. Dans les Idyllia : « moites oculi. »
APPENDICE. $85
Haud incœpta tulit , majoraque viribus ausa.
Pefecit sensim vigor1, et se tabida pestis
Infudit venis, lentoque ardore peredit.
Ecce jacet lecto moriens, nec lactea morum
Simplicitas, primae nec forma décora juventae, fin
Sed neque opes animi et carse suspiria matris ,
Proh dolor! immites possunt avertere Parcas.
Circum funereo gemitu domus omnis, et ipse
Spes intercisas ereptaque gaudia mœret
Infeiix pater. Ah! flecti si numina possent, f>5
Qui superant nato ipse volens impenderet annos.
Sed périt. Heu ! periit magni jam patris imago ;
Et patri fuerat par, si dtjrasset, imago.
XVI
(Voyez ci-dessus la pièce LXXX , p. 249.)
SUR LES CONQUÊTES DU ROI [EN i6722j.
Una dies Lotharos, Burgundos hebdomas una,
Una domat Batavos luna; quid annus erit?
EXPLICATION.
Prendre dans un jour la Lorraine ,
La Comté dans une semaine ,
Et savoir réduire en un mois
La Hollande aux derniers abois :
Quand après de tels coups on suit sa destinée ,
Pour conquérir l'Europe il ne faut qu'une année.
t . Ce vers, dans les Idyllia, commence ainsi : « Nec mora defecit vigor. »
2. M. Paul Lacroix a appelé l'attention sur ces vers dans le Bulletin du
houquiniste du Ier mai 1864, p. 254. Sa transcription du second vers latin
porte par erreur : quid erit annus?
COENEILLE. X »5
'*86 POÉSIES DIVERSES.
XVII
VERS ANONYMES,
PUBLIÉS DANS LE MERCURE DE 1677,
et qui paraissent devoir être attribués à Corneille.
Comme on va le voir, le rédacteur du Mercure, Donneau de Visé,
annonce ces vers avec une pompe qui serait fort déplacée s'il était
question d'un poète ordinaire; la pièce d'ailleurs justifie, surtout
dans sa première partie, les éloges que le journaliste lui donne. Nous
n'avons pas besoin de chercher beaucoup pour deviner quel est le
grand poète dont veut parler le Mercure. N'avons-nous pas vu de
Visé, dès i663, se déclarer le défenseur de Corneille1? N'a-t-il pas
inséré dans son recueil périodique un grand nombre de petits poèmes
de notre auteur, encore inédits ou publiés seulement en feuilles vo-
lantes2? Enfin, au commencement de l'année où il a fait paraître les
vers qu'on va lire, n'a-t-il pas dit formellement en parlant de Cor-
neille : « Les moindres choses de lui sont à conserver5? » Voilà déjà
des indices ; voyons si la pièce même les confirme. Ces vers sont adres-
sés à Iris; Iris, nous le savons, est la même que la Marquise ou la
du Parc 4. Dans les diverses poésies qui lui sont adressées, notre
poète ne manque presque jamais de déplorer la différence d'âge qui
le sépare d'elle, et cela se comprend : elle avait environ vingt-sept
ans de moins que lui8. Ici encore le premier vers est:
Je suis vieux, belle Iris, c'est un mal incurable;
et un peu plus bas le poète parle de sa décrépitude. C'est là , suivant
nous , le dernier opuscule adressé par Corneille à la du Parc. Une
seule chose pourrait surprendre, c'est de ne le voir paraître que neuf
ans après la mort de celle qui l'a inspiré; mais ces vers touchaient
à la vie privée du poète, aux préoccupations de son âge déjà avancé :
c'est ce qui les lui aura fait garder en portefeuille, et ce qui l'aura
1 . Voyez tome VI , p. 4-^7 et suivantes.
2. Voyez ci-dessus, p. 285, 3o8 , $09, 322 et 334-
3. Voyez ci-dessus, p. 3 10.
4. Voyez ci-dessus, p 141 et 142.
5. El Je mourut en décembre 1668, à l'âge d'environ trente-cinq ans (voyez,
ri-dessus, p. 142); elle était donc née vers i633.
APPENDICE. *87
engagé, en les accordant aux sollicitations de Donneau de Visé, à
exiger que du moins ils parussent sans signature. Du reste, il eût été
difficile d'en désigner plus clairement l'auteur qu'en le comparant,
comme fait le Mercure à la suite des vers, au Martian de Pulc/iérie ,
vieillard amoureux , dans lequel, suivant Fontenelle , Corneille s'est
dépeint lui-même * ? Aussi est-ce avec quelque confiance que nous
présentons au lecteur , comme appartenant à notre poète , ces vers
inaperçus et oubliés.
Extrait du Mercure de mai 1677 (p. 96 et suivantes).
'(. Quittons un moment cette matière, et pour vous délasser de la
guerre, passons au chapitre de l'amour. Voici des vers qu'il a fait
faire : ils ont un tour noble qui marque les privilèges de leur source,
et vous n'en avez jamais trouvé de bons, si vous n'êtes contente de
ceux-ci :
Je suis vieux, belle Iris, c'est un mal incurable ;
De jour en jour il croît, d'heure en heure il accable:
La mort seule en guérit; mais si de jour en jour
Il me rend plus mal propre à grossir votre cour,
Je tire enfin ce fruit de ma décrépitude, 5
Que je vous vois sans trouble et sans inquiétude,
Sans battement de cœur, et que ma liberté
Près de tous vos attraits est toute en sûreté.
Tel est l'heureux secours que reçoit des années
Une àme dont vos lois régloient les destinées. 10
Non que je sois encor bien désaccoutumé
Des douceurs que prodigue un cœur vraiment charmé;
A ce tribut flatteur la bienséance oblige :
Le mérite l'impose, et la beauté l'exige ;
Nul âge n'en dispense, et fût-on aux abois, r5
Il faut en fuir la vue, ou lui payer ses droits ;
Mais ne me rangez point, alors que j'en soupire,
Parmi les soupirants dont il vous plaît de rire.
Écoutez mes soupirs sans les compter à rien.
Te suis de ces mourants qui se portent fort bien 2 : ao
1. Voyez tome VII, p. 874.
2. Il y a là comme un souvenir agréablement détourné de f-e vers si connu
du Menteur (acte IV, scène n, vers 1164) *.
Les gens que vous tuez se portent assez bien.
i88 POESIES DIVERSES. APPENDICE.
Je vis auprès de vous dans une paix profonde,
Et doute, quand j'en sors, si vous êtes au monde.
Pardonnez-moi ce mot qui sent le révolté ;
Avec le cœur peut-être il est mal concerté,
Vos regards ont pour moi toujours le même charme, ■» 5
M'offrent mêmes périls, me donnent même alarme,
Et je n'espérerois aucune guérison,
Si l'âge étoit chez vous mon seul contre-poison.
Mais grâces au bonheur de ma triste aventure,
A peine ai-je loisir d'y sentir ma blessure ; 3o
Grâces à vingt amants dont chez vous on se rit,
Dès que votre œil m'y blesse, un autre œil m'y guérit.
Souffrez que je m'en flatte et qu'à mon tour je cède
Au chagrinant rival qui comme eux vous obsède,
Qui leur fait presque à tous déserter votre cour, 35
Et n'ose vous parler ni d'hymen ni d'amour.
Vous le dites du moins, et voulez qu'on le croie,
Et mon reste d'amour vous en croit avec joie:
Je fais plus, je le vois sans en être jaloux.
A votre tour, m'en croyez-vous? 4°
« Que pensez-vous, Madame, de cette galanterie? L'auteur qui
prétend que ses vieilles années lui ont acquis l'avantage d'aimer
si commodément, et qui s'explique d'une manière si agréable, ne
mérite-t-il pas d'être particulièrement considéré de la dame? 11 est
rare de pouvoir conserver dans un âge aussi avancé que celui qu'il se
donne le feu d'esprit qu'il fait paroître encore dans ces vers ; et le
vieux Martian,que vous avez tant admiré dans l'admirable Pulckérie
du grand Corneille, n'auroit pas parlé plus galamment, s'il avoit voulu
s'éloigner du sérieux. »
OEUVRES DIVERSES
EN PROSE
NOTICE.
Dans l'édition de Lefèvre, les OEuvres diverses en prose sont
beaucoup plus volumineuses que dans la nôtre; mais cela
tient à ce qu'on y a introduit un grand nombre de morceaux
qui nous ont paru avoir une place plus naturelle ailleurs. On y
trouve les trois Discours sur le théâtre, que nous avons, à l'exem-
ple de Corneille, joints à ses œuvres dramatiques, et qui sont pla-
cés avant sa première pièce (tome I, p. i3-i2^); les avis au Lec-
teur des diverses éditions du théâtre, que nous avons réunis au
commencement du tome I ; les préfaces partielles des publi-
cations successives de V Imitation, que nous avons, en les com-
plétant, rassemblées en tête de cet ouvrage (voyez tome VIII,
p. 8-28); les lettres, dont nous avons fait un groupe à part,
fort augmenté, qui forme aujourd'hui pour la première fois
une correspondance suivie de Corneille et des personnes avec
lesquelles il s'est trouvé en rapport; enfin un extrait de V His-
toire de V Académie française de Pellisson, contenant des frag-
ments de lettres de Corneille que nous avons détachés de cette
histoire pour les mettre à leur date et à leur rang dans la série
générale de la correspondance de notre poète.
Ces morceaux écartés, il ne reste plus dans les OEuvres diverses
en prose que le Discours à t Académie et la Réponse de Corneille
aux Observations de Scudéry sur le Cid.
Nous y joignons VÉpitaphe latine de dom Jean Goulu, géné-
ral des Feuillants * , découverte par nous, ainsi que nous l'indi-
quions dans notre Avertissement (tome I, p. xi).
Nous avons, suivant notre usage, rangé ces trois morceaux
1. La congrégation des Feuillants élait une branche de l'ordre de
Cîteaux .
i92 OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
dans Tordre chronologique ; nous allons dire un mot de chacun
d'eux.
A la page xiii du tome 1 des Œuvres complètes de P. Cor-
neille, dont deux volumes ont paru en 1857, dans la Biblio-
thèque elzévirienne, chez le libraire P. Jannet, M. Taschereau
s'exprime ainsi : « Le Trésor chronologique et historique par le
R. P. dom Pierre de Saint-Romuald, dans sa troisième partie,
publiée en 1647, nous fournit, aux pages 899-900, le rensei-
gnement que voici : « Achevons cette année (1629) par l'aché-
a vement de la vie des deux plus grands ornements de notre
« congrégation, je veux dire de dom Jean de Saint-François,
« premier assistant de notre Père général, et de dom Sens de
a Sainte-Catherine, premier visiteur. Celui-là naquit à Paris
« l'an 1576, le a5 août, fête de saint Louis. Son père s'appeloit
« Nicolas Goulu, et étoit professeur du Roi en langue grecque ;
« et sa mère se nommoit Magdelaine Daurat, et étoit fille de
« feu M. Daurat, poète, et aussi professeur du Roi en la même
« langue, de qui Ronsard se vante d'avoir été le nourrisson....
« Il (Jean Goulu) repose à Paris dans le chœur de notre monas-
« tère de Saint-Bernard ' , sous une tombe de marbre noir que la
œ bénéficence de M. et de Mme de Vendôme lui ont fait faire,
« et où se voit un bel épitaphe 2 en prose latine du style du sieur
« Corneille. »
A ce témoignage contemporain , si curieux , recueilli par
M. Taschereau au sujet de cette épitaphe, nous pouvons en
ajouter un autre, qui nous est transmis par Goujet. On lit dans
sa Bibliothèque française (tome XVII, p. i63) : « On voit par
les lettres manuscrites de Chapelain que M. Corneille avoit
fait en latin l'épi taphe du R. P. dom Jean Goulu, religieux
feuillant, mort en 1620, qu'il en fit confidence à Chapelain,
son ami, et que Balzac, qui en ignoroit l'auteur, fit des vers
1. Dans Y Éloge du P. Goulu (en latin Gulonius), publié en 1629
(in-40), et réimprimé dans la Bibllotheca scriptorum sacri ordinis cis-
terciensis, opère et studio R. D. Caroli de Visch, Cologne, i656, on lit
ce qui suit : « Corpus defuncti in odeo B. Bernardi ad portam Hono-
« rianam suburbanse aedis conditum est, Epiphaniorum die solemni. »
S. Voyez tome IV, p. i57 note 1; et p. 3 10, vers 38 1.
NOTICE. îy;
contre cette épitaphe. Je ne sais pas si c'est celle qu'on lit
aux Feuillants et que M. Piganiol de la Force a fait imprimer
dans sa Description de Paris*. Chapelain conseille à M. Cor-
neille de ne point se plaindre des vers de Balzac, de peur de
rompre avec lui une amitié dont l'un et l'autre se faisoienl
honneur. »
Nous aurions vivement souhaité de pouvoir vérifier dans le
manuscrit même de Chapelain les faits indiqués ici ; mais une
note marginale nous apprend que les lettres dont il s'agit sont
du 20 juillet et du ^5 août 1642, et par malheur la pré-
cieuse copie autographe de cette correspondance que possède
M. Sainte-Beuve, et qu'il communique si libéralement aux tra-
vailleurs, est incomplète, comme l'a dit M. Taschereau2, et
le volume qui manque est précisément celui qui contient les
années 1 64 1 à i658.
Le passage de Goujet que nous venons de rapporter indique
où l'on peut rencontrer le texte de Corneille qui a échappé à
M. Taschereau; il est vrai que Goujet ne parait pas certain que
l'épitaphe reproduite par Piganiol de la Force soit celle dont
Corneille est Fauteur, mais on ne voit point sur quoi peut être
fondé ce doute. Millin ne Fa pas un instant partagé , et dans
ses Antiquités* il attribue sans hésiter cette épitaphe à Cor-
neille. Elle se trouvait sur une tombe de marbre noir, placée
dans le chœur des religieux des Feuillants de la rue Saint-
Honoré. On ne sait aujourd'hui ce qu'a pu devenir ce marbre
tumulaire; quant aux restes du P. Goulu, ils sont déposés aux
catacombes dans l'ossuaire de la paroisse Saint-Sauveur 4.
M. Taschereau s'était posé une question à laquelle, réduit
aux éléments dont il disposait, il lui était difficile de répondre
avec quelque sûreté. « Le monument, dit-il, fut-il élevé immé-
diatement après cette mort {de Goulu) et alors que Corneille
n'avait fait que Mélite, ou bien monument et épitaphe sont-ils
d'une date un peu postérieure et du temps où Corneille avait
1. Tome II, p. 379 et 38o.
2. Histoire de la vie et des ouvrages de Corneille, seconde édition,
p. VII.
3. Tome I, § v, p. 4o-43.
4. Voyez les Catacombes de Paris, 1862, p. 119
i94 OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
acquis un plus grand renom? Nous penchons de ce dernier
côté.» L'extrait des lettres de Chapelain que nous avons men-
tionné semble confirmer l'hypothèse de M. Taschereau, et tout
porte à croire que ce ne fut guère avant l'année 1642, dont ces
lettres sont datées, que Corneille composa Tépitaphe qui nous oc-
cupe. Nous en publions le texte d'après une brochure de 1 1 pages
in-folio, intitulée : Epitaphium in œde san-benedictina Parisiis
appendendum, Nicolaus Gulonius, mortalitalis maiorumque me-
mor, piis illorum Manibus designabat, anno CDDCL. Ce recueil
se compose des épitaphes de neuf membres de la famille de Nico-
las Goulu, suivies de la sienne; on y trouve aussi un Éloge de Jean
Goulu et un Avis {pionitum) sur ses ouvrages. L'exemplaire de
ce recueil que possède la Bibliothèque impériale porte sur le
titre la mention manuscrite suivante : auctore Goulu Hieronymi
F. Nicolai nepote. Il est bien probable toutefois que la part de
Nicolas et de Jérôme Goulu dans ce travail n'a pas été bien
considérable, qu'ils n'ont guère fait que mettre en ordre, com-
pléter et annoter les éloges et les épitaphes des divers membres
de leur famille, mais qu'ils se seraient bien gardés de substituer
un travail de leur façon à une inscription faite par Corneille
sur l'ordre du duc et de la duchesse de Vendôme. Si nous
avons préféré ce texte à ceux de Piganiol de la Force et de
Millin, c'est parce qu'il a un caractère plus officiel, qu'il est
évidemment plus correct, que la disposition en est meilleure,
et qu'il est accompagné d'éclaircissements précieux et certains.
Nous avons revu le texte de la Lettre apologétique du sieur
Corneille^ au sujet du Cid, sur les deux éditions de 1637, et
nous avons rendu à cette pièce son véritable intitulé , auquel,
comme nous l'avons dit , les éditeurs modernes ont substi-
tué arbitrairement celui de Lettre contenant la réponse de
Corneille, etc.
Enfin nous donnons aussi le Discours à l'Académie , avec
son titre complet, tel qu'il a été publié chez Jean-Baptiste Coi-
gnard, dans le Recueil des harangues prononcées par Messieurs
de f Académie françoise, dans leurs réceptions , et en d'autres
occasions différentes, depuis î establissement de l Académie jus-
qu'à présent, pour la première fois en 1698, dans le format
NOTICE. 395
in-40 (p. !i-i3), et pour la seconde en 17 14, dans le format
in- 12. La révision que nous en avons faite nous a permis de
faire disparaître quelques rajeunissements de l'abbé Granet,
que nous signalons en note, et que les éditeurs qui lui ont suc-
cédé n'avaient pas manqué de reproduire.
îg(y OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
EPITAPHE DE DOM JEAN GOULU, GENERAL
DES FEUILLANTS1.
S ta quisquis es, et perlege.
R. P. Ioan. GOVLV,
PARISIIS NATVS, VBIQVE NOTVS.
PIETATE, PROBITATE, ERVDITIONE, ELOQVVTfONE,
AD INVIDIAM VSQVE MIRABILIS,
VIXIT HEV, IMO VIVIT :
Qvippe dignum laude virum fama vetat mori.
A militia forensi Fuliensem ingressus, scriptis suis
Impugnatam fidei veritatem2,
Impetita Monarchiae iura 8,
TRADUCTION DE l'ÉPITAPHE DU P. GOULU.
Arrête, qui que tu sois, et lis cette épitaphe. Le R. P. Jean Goulu,
né à Paris, connu partout, admirable par sa piété, sa probité, sou
savoir, son élocution, au point d'exciter l'envie, a vécu, hélas! ou
plutôt il vit encore, car la renommée empêche un homme digue de
I. Voyez la Notice des OEuvres en prose, p. 392-394-
a. Réponse au livre de M. du Moulin: de la Vocation des pasteurs.
[Note de r édition originale .)
3. Vindiciœ theologise iberopoliticse . (Note de Sédition originale.) —
Le titre complet de cet ouvrage est : Vindicise theologise iberopoKticte
ad catholicum regem Hispuniarum , etc., Philippin w /F, contra pseudo-
theologi admonitoris calumnias. Cet ouvrage, publié en 1626, dans le
OEUVRES DIVERSES EN PROSE. 397
Periclitantem sanctorum memoriam1,
Mirum quantum ab iniuria temporû vindicauerit,
Simulque adulteratam eloquentiae puritatem2
Reuocauerit, conseruauerit, illustrauerit.
Tandem vniuerso ordini postquam bis praefuit
3
louange de mourir. Entré dans la milice des Feuillants, au sortir de
celle du barreau, il a su défendre merveilleusement contre l'injure
des temps la vérité de la foi attaquée, les droits de la monarchie cou-
testés, la mémoire des saints, qu'il voyait en péril, et en même temps
rappeler, conserver, illustrer la pureté altérée de l'éloquence. Enfin,
après qu'il eut été deux fois à la tête de tout son ordre et qu'il l'eut
servi par son exemple non moins que par son gouvernement, on
format in-8°, sans mention de ville, répond à l'Avis d'un théologien
sans passion sur plusieurs libelles imprimés depuis peu en Allemaigne, pu-
blié la même année, attribué à Mathieu de Morgues et dont la Biblio-
thèque impériale possède quatre éditions différentes.
i. La Vie du B. Fr. de Sales, évéque de Genève. [Note de V édition
originale.) — Cette vie de saint François de Sales est de i6a4- Fran-
çois de Sales avait été béatifié en 1601 ; il ne fut canonisé qu'en i665.
2. Lettres de Phyllarque à Aj'iste, [Note de l'édition originale.) — Ce
fut probablement à cause de cet éloge des lettres de Phyllarque (pseu-
donyme du P. Goulu) que Balzac, contre qui ces lettres étaient di-
rigées, fit des vers latins contre l'épitaphe, dont il ignorait l'auteur
(voyez tome III, p. 29-31, et ci-dessus, p. 392 et 393).
3. Malgré ce passage de l'épitaphe, qui, ce semble, ne devrait laisser
aucun doute, voici ce que nous lisons dans une note du Dictionnaire
deBayle (Amsterdam, 1734, tome III, p. 86): « Ceux qui ont dit
qu'il (Goulu) eut deux fois le généralat, n'avoient pas consulté son
Éloge*, dans la seconde édition de son Saint Denis V Ârèopagite. Cet
éloge nous apprend que depuis son noviciat il eut toujours quelque
charge dans l'ordre, et qu'enfin il fut élevé à la première, qu'il exerça
pendant six ans, après quoi il fut donné pour conseiller et pour as-
sesseur à celui qui lui succéda **, j>
T ? Éloge que nous avons cité plus haut, p. 39a, note 1 .
* Nous avons vu plus haut dans la Notice (p. 392) que dom Pierre
de Saint-Romuald désignait le P. Goulu par le titre de « premier as-
sistant .de notre Père général. )>
398 OEUVRES DIVERSES EN PROSE,
ExempJoque non minus quam imperio profuit,
Vix dicas
Dignitate functusne prius an defunctus sit ■ .
Magnatum amicitias vt meruerit, vt tenuerit,
Vel hoc marmor testabitur, quod
ILLVSTRISSIMI PRINCIPES,
(LËSAR BORBONIVS2, ET FRANCISCA
LOTHARINGA, CHARISSIMT CONIVGES,
Duces Vindocin. Stapens. Bcllefort. Mercœrei, Ponthie-
urae, etc.
Bene merenti mœrentes posuere.
ObiitannoM.DC.XXIX, die V. Ianuarii, œtatis suseLJII.
Ora pro eo.
aurait peine à dire ce qu'il a achevé le plus tôt, de sa charge ou de
sa vie. A quel point il a su mériter et garder l'amitié des grands, ce
marbre même en témoignera, que les très-illustres princes César de
Bourbon et Françoise de Lorraine , très-chers époux , duc et du-
chesse de Vendôme, d'Étampes, de Mercœur, de Penthièvre, etc., ont
élevé au digne objet de leurs regrets. Il mourut l'an M.DC.XXIX,
le 5 de janvier, dans la 53e année de son âge. Prie pour lui.
i. Il semble qu'on devrait pouvoir conclure de ces mots que dom
Goulu était mort en sortant de charge. Si son généra lat se terminait
avec l'année 1628, il n'y aurait survécu que de cinq jours. Mais
voyez ce qui est dit dans la note précédente.
2. César, duc de Vendôme, lils naturel légitimé d'Henri IV, ce qui
explique assez, ce semble, le surnom de Bourbon qui choquait fort
Piganiol de la Force. « Quelque accoutumé que je sois, dit-il, à voir
que nos historiens, même les plus habiles, se méprennent tous les
jours dans les surnoms des princes de la maison royale, j'avoue
OEUVRES DIVERSES EN PROSE. U)$
II
LETTRE APOLOGÉTIQUE DU SIEUR CORNEILLE,
Contenant sa réponse aux Observations faites par le sieur Scudérv
sur le Cid ' .
Monsieur ,
Il ne vous suffit pas que votre libelle me déchire en pu-
blic : vos lettres me viennent quereller jusque dans mon
cabinet, et vous m'envoyez- d'injustes accusations, lorsque
vous me devez pour le moins des excuses. Je n'ai point
fait la pièce qui vous pique 2 ; je l'ai reçue de Paris avec
une lettre qui m'a appris le nom de son auteur; il l'adresse
à un de nos amis , qui vous en pourra donner plus de
lumière. Pour moi , bien que je n'aye guère de jugement,
si Ion s'en rapporte à vous, je n'en ai pas si peu que
d'offenser une personne de si haute condition 3, dont
je n'ai pas l'honneur d'être connu, et de craindre moins
ses ressentiments que les vôtres. Tout ce que je vous
puis dire , c'est que je ne doute ni de votre noblesse, ni
de votre vaillance, et qu'aux choses de cette nature, où je
cependant que j'ai été fort surpris que l'auteur de l'épitaphe qu'on
vient de lire ait donné à César duc de Vendôme le surnom de Bour-
bon, qui n'a jamais été le sien, et aussi qu'il n'a jamais porté. »
i. Voyez sur les Observations de Scudéry, sur la Lettre apologé-
tique, et sur les réponses auxquelles ces deux ouvrages ont donné
lieu, tome III, p. 22-29, et ci-dessus, p. 74-80. — Dans l'une des
éditions de 1637, il y a, nous l'avons dit, dans le titre : apologitique,
pour apologétique.
2. On prétend qu'il s'agit ici d'une pièce intitulé : la Défense du
Cid; nous n'avons pu nous la procurer. Voyez tome III , p. 24
et 23.
3. Cette personne est inconnue. Voyez tome III, p. 25.
,oo OEUVRES DIVERSES EJN PROSE.
n'ai point d'intérêt, je crois le monde sur sa parole: ne
mêlons point de pareilles difficultés parmi nos différends.
Il n'est pas question de savoir de combien vous êtes
noble ou plus vaillant que moi, pour juger de combien
le Ciel est meilleur que l'Amant libéral i. Les bons es-
prits trouvent que vous avez fait un haut chef-d'œuvre
de doctrine et de raisonnement en vos Observations . La
modestie et la générosité que vous y témoignez leur sem-
blent des pièces rares, et surtout votre procédé merveil-
leusement sincère et cordial vers un ami. Vous protestez
de ne me dire point d'injures2 , et lorsqu incontinent après
vous m'accusez d'ignorance en mon métier 3, et de manque
de jugement en la conduite de mon chef-d'œuvre , vous
appelez cela des civilités d'auteur? Je n'aurois besoin que
du texte de votre libelle, et des contradictions qui s'y
rencontrent, pour vous convaincre de l'un et de l'autre
de ces défauts, et imprimer sur votre casaque le quatrain
outrageux * que vous avez voulu attacher à la mienne .,
i. Les frères Parfait rendent compte de cette pièce de Scudéry
sous l'année i636, un peu avant de parler du C'id (Histoire du Théâtre
françois, tome V, p. 238-24°) • Voyez aussi tome III, p. 23 et 24.
2. De ne point dire d'injures, dans les éditions modernes. — « J'at-
taque le Cid, et non pas son auteur; j'en veux à son ouvrage, et non
point à sa personne ; et comme les combats et la civilité ne sont pas
incompatibles , je veux baiser le fleuret dont je prétends lui porter
une botte franebe; je ne fais ni une satire, ni un libelle diffamatoire,
mais de simples observations , et hors les paroles qui seront de l'es-
sence de mon sujet, il ne m'en échappera pas une où l'on remarque
de l'aigreur. Je le prie d'en user avec la même retenue s'il me ré-
pond. » {Observations sur le Cid, édit. en 96 pages, p. 5.)
3. En mon entier, dans les éditions modernes.
i . Voici ce quatrain :
Sous cette casaque noire
Repose paisiblement
L'auteur d'heureuse mémoire, i
Attendant le jugement.
[Observations sur le Cid, p. Si.)
LETTRE APOLOGÉTIQUE. 401
si le même texte ne me faisoit voir que l'éloge d'auteur
d heureuse mémoire ne vous peut être propre, en réappre-
nant que vous manquez aussi de cette partie, quand vous
vous êtes écrié : O raison de [auditeur, que faisiez- vous*?
En faisant cette magnifique saillie , ne vous êtes-vous pas
souvenu que le Cid a été représenté trois fois au Lou-
vre, et deux fois à l'hôtel de Richelieu? Quand vous
avez traité la pauvre Ghimène d'impudique 2, de prosti-
tuée3, de parricide*, de monstre5, ne vous êtes-vous
pas souvenu que la Reine, les princesses et les plus ver-
tueuses dames de la cour et de Paris l'ont reçue et ca-
ressée en fille d'honneur? Quand vous m'avez reproche
mes vanités, et nommé le comte de Gormas un capitan
de comédie6, vous ne vous êtes pas souvenu que vous
avez mis un A qui lit1 , au devant de Ligdamon6, ni des
autres chaleurs poétiques et militaires qui font rire le
lecteur presque dans tous vos livres. Pour me faire croire
ignorant, vous avez tâché d'imposer aux simples, et
avez avancé des maximes de théâtre de votre seule auto-
rité, dont toutefois, quand elles seroient vraies, vous
1. a O jugement de l'auteur, à quoi songez-vous? O raison de
l'auditeur, qu'êtes-vous devenue? » {Observations de Scudéry, p. 5a.)
2. « Un roi caresse cette impudique. » [Ibidem, p. 25.)
3. « Elle lui dit cent choses dignes d'une prostituée.» [Ibidem ,
P. $9 )
4. (( Tout cela 11'empèehe pas qu'elle ne se rende parricide, en se
résolvant d'épouser le meurtrier de son père. » [Ibidem, p. 12.)
5. <r Cette fil le, mais plutôt ce monstre » [Ibidem,]*. 3o.)
(S. « Il seroit à souhaiter pour lui qu'il eût corrigé de cette sorte tout
ce qu'il fait dire à ce comte de Gormas, afin que d'un capitan ridicule
il eût fait un honnête homme, tout ce qu'il dit étant plus digne d'un
fanfaron que d'une personne de valeur et de qualité. Et pour ne vous
donner pas la peine d'aller vous en écîaircir dans son livre, voyez en
quels termes il fait parler ce capitaine Fracasse. » (Ibidem, p. 34.)
7. Sorte d'avis au lecteur
8. Sur Ligdamon, voyez ci-dessus, p- Sy.
Corneille, x 26
402 OEUVRES DIVERSES EJN PROSE.
ne pourriez tirer les conséquences cornues que vous en
tirez : vous vous êtes fait tout blanc d'Aristote, et d'au-
tres auteurs que vous ne lûtes et n'entendîtes peut-être
jamais , et qui vous manquent tous de garantie ' ; vous
avez fait le censeur moral, pour m' imputer de mauvais
exemples; vous avez épluché [les vers de ma pièce2],
jusques à en accuser un de manque de césure* : si vous
eussiez su les termes du métier dont vous vous mêlez4,
vous eussiez dit qu'il manquoit de repos en l'hémistiche.
Vous m'avez voulu faire passer pour simple traducteur6,
sous ombre de soixante et douze vers que vous marquez *
1. Scudéry répondit à cette accusation en publiant la Preuve des
passages alléguez dans les Observations sur le Cid. Voyez notre
tome III, p. 37.
2. Les mots entre crochets manquent dans les deux éditions de 1637;
ils ont été suppléés par les éditeurs de Corneille.
3. « Parlons-en mieux, le Roi fait honneur à votre âge.
La césure manque à ce vers. »
(Observations sur le Cid, p. 68 et 69.)
4. Ces mots : «c dont vous vous mêlez, » manquent dans les édi-
tions modernes.
5. Sur les rapprochements entre Guillem de Castro et Corneille
par lesquels Scudéry termine ses Observations (p. 8i-g3), voyez notre
tome II], p. 199, note 2. Ces rapprochements sont précédés de cette
sorte d'introduction : « Le Cid est une comédie espagnole, dont
presque tout l'ordre, scène pour scène, et toutes les pensées de la
françoise sont tirées; et cependant ni Mondory, ni les affiches, ni
l'impression n'ont appelé ce poème ni traduction, ni paraphrase , ni
seulement imitation ; mais bien en ont-ils parlé comme d'une chose
qui seroit purement à celui qui n'en est que le traducteur, et lui-
même a dit, comme un autre a déjà remarqué :
Qu'il ne doit qu'à lui seul toute sa renommée *. »
6. Scudéry cite plus de soixante et douze vers françois, et encore
plus d'espagnols. Corneille ne compte peut-être que ceux des vers
eités qu'il regarde vraiment comme des imitations
* Excuse à Ariste, vers 5o, ci-dessus, p. 76.
LETTRE APOLOGÉTIQUE. 4o3
sur un ouvrage de deux mille1, et que ceux qui s'y
connoissent n'appelleront jamais de simples traductions;
vous avez déclamé contre moi, pour avoir tu le nom
de Fauteur espagnol, bien que vous ne l'ayez appris
que de moi, et que vous sachiez fort bien que je ne
l'ai celé à personne, et que même j'en ai porté l'ori-
ginal en sa langue à Monseigneur le Cardinal , votre
maître et le mien; enfin vous m'avez voulu arracher
en un jour ce que près de trente ans d'étude m'ont
acquis2 ; il n'a pas tenu à vous que du premier lieu, où
beaucoup d'honnêtes gens me placent, je ne sois des-
cendu au-dessous de Claveret 3 ; et pour réparer des of-
fenses si sensibles, vous croyez faire assez de m'exhor-
ter à vous répondre sans outrages4, pour nous repentir
après tous deux de nos folies, et de me mander impé-
rieusement que malgré nos gaillardises passées, je sois
encore votre ami, afin que vous soyez encore le mien,
comme si votre amitié me devoit être fort précieuse
après cette incartade, et que je dusse prendre garde seu-
lement au peu de mal que vous m'avez fait, et non pas
à celui que vous m'avez voulu faire. Vous vous plaignez5
d'une Lettre à triste*, où je ne vous ai point fait de
i. Le C'idy sous sa forme dernière et définitive, a 1840 vers; un
peu plus dans les premières éditions (i63j-i6S6).
7. Il y a ici une exagération qui a été vivement relevée dans la
Lettre du sieur Claveret au sieur Corneille. Voyez notre tomel, p. i3o.
3 . Ce fut cette phrase qui attira à Corneille les pamphlets de Cla-
veret. Voyez tome III, p. 26 et suivantes.
4. Voyez ci-dessus la fin de la note 2, p. 400. Du reste ici déjà,
et surtout dans les phrases qui vont suivre, Corneille répond princi-
palement aux lettres qui le venaient quereller jusque dans son cabi-
net (voyez le commencement de la Lettre apologétique), et que nous
ne connaissons que par ce qu'il nous en dit.
5. Dans la réimpression (de 1637) : « Vous vous plaigniez. »
6. C'est l' Excuse à Ariste. Voyez ci-dessus, p. 74- Voici en quels
termes Scudérv fait allusion à V Excuse à Ariste dans ses Observa-
Ao4 OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
tort de vous traiter d'égal, puisqu en vous montrant
mon envieux1 vous vous confessez moindre, quoique
vous nommiez folies les travers 2 d'auteur où vous vouj»
êtes laissé emporter, et que le repentir que vous en faites
paroître marque la honte que vous en avez8. Ce n'est pas
assez de dire : « Soyez encore mon ami, » pour recevoir
une amitié si indignement violée : je ne suis point homme
d'éclaircissement*; vous êtes en sûreté de ce côté-là.
lions (p . 4) > « Quand j'ai vu.. . . qu'il se déifîoit d'autorité privée, qu'il
parloit de lui , comme nous avons accoutumé de parler des autres ;
qu'il faisoit même imprimer les sentiments avantageux qu'il a de soi,
et qu'il semble faire croire qu'il fait beaucoup d'honneur aux plus
grands esprits de son siècle de leur présenter la main gauche, j'ai cru
que je ne pouvois sans injustice et sans lâcheté abandonner la cause
commune. »
i. Tel est le texte des éditions originales. On y a substitué daiks
les éditions modernes : « moins envieux. »
2. Il n'y a point travers, mais travées, dans les éditions originales.
Ce mot paraît bien être le résultat d'une mauvaise lecture des impri-
meurs. Mais nous devons dire que travers, donné par toutes les édi-
tions modernes, ne se trouve avec l'acception qu'il aurait ici dans
aucun des dictionnaires du temps. Richelet (1679) lui attribue, dans
la conversation familière, le sens de disgrâce, accident, malheur. Nicot,
au commencement du siècle, Furetière et l'Académie , à la fin, ne
mentionnent de ce terme, pris substantivement, aucun emploi figuré.
Toutefois nous en trouvons deux exemples de la Bruyère: un pre-
mier au chapitre des Grands, n° 53 : « travers d'esprit; $ un second
dans ce passage que cite le Dictionnaire de Trévoux, et où le sens du
mot serait, ce semble, assez voisin de celui qu'il aurait ici dans Cor-
neille : « Je ne suis point d'humeur à essuyer vos travers. »
3. Ceci répond encore aux lettres particulières de Scudéry, et non
à ses Observations .
4. On a cru que par ces mots Corneille déclarait qu'il ne se battrait
pas, et on a voulu en conclure qu'il avait peur de Scudérv. Cet en-
droit est tout simplement une allusion à ce passage des Observation*
p. 45 et 46)» qui est relatifs la scène 1 de l'acte II, entre don Arias
et le Comte : « L'auteur me permettra de lui dire qu'on voit bien
qu'il n'est pas homme d'éclaircissement ni de procédé. Quand deuv
grands ont querelle et que l'un est offensé à l'honneur, ce sont des
oiseaux qu'on ne laisse point aller sur leur foi. »
LETTRE APOLOGÉTIQUE. ',<»»
Traitez-moi dorénavant en inconnu, comme je vous veux
laisser pour tel que vous êtes, maintenant que je vous
connois; mais vous n'aurez pas sujet de vous plaindre,
quand je prendrai le même droit sur vos ouvrages que
vous avez pris sur les miens ' . Si un volume & Observations
ne vous suffit, faites-en encore cinquante : tant que vous
ne m'attaquerez pas avec des raisons plus solides, vous
ne me mettrez point en nécessité de me défendre, et de
ma part je verrai, avec mes amis, si ce que votre libelle
vous a laissé de réputation vaut que2 j'achève de la rui-
ner. Quand vous me demanderez mon amitié avec des
termes plus civils , j'ai assez de bonté pour ne vous la
refuser pas, et me taire des défauts de votre esprit que
vous étalez dans vos livres. Jusque-là, je suis assez glo-
rieux pour vous dire de porte à porte que je ne vous
crains ni ne vous aime. Après tout, pour vous parler
sérieusement, et vous montrer que je ne suis pas si piqué
que vous pourriez vous imaginer, il ne tiendra pas* à
moi que nous ne reprenions la bonne intelligence du
passé que vous souhaitez. Mais après une offense si
publique, il y faut un peu plus de cérémonie : je ne
vous la rendrai pas malaisée, et donnerai tous mes inté-
rêts à qui que4 vous voudrez de vos amis; et je m'assure
que si un homme se pouvoit faire satisfaction du tort
qu'il s'est fait, il vous condamneroit à vous la faire à
i. Dans ses Observations (p. 94) Scudérv avait paru contester ce
droit à Corneille : « Au reste , on m'a dit qu'il prétend en ses
réponses examiner les œuvres des autres, au lieu de tâcher de jus-
tifier les siennes. »
2. Les éditeurs modernes ont mis : « vaut la peine que. »
3. Les deux éditions de 1687 portent, évidemment par erreur:
« qu'il ne tiendra pas. 9
4. Les éditeurs modernes ont supprimé que après qui; à la ligne
suivante ils ont ajouté, après satisfaction ; « à lui-même, s
4o6 OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
vous-même, plutôt qu'à moi qui ne vous en demande
point, et à qui la lecture de vos Observations n'a donné '
aucun mouvement que de compassion. Et certes on me
blâmeroit avec justice si je vous voulois du mal2 pour une
chose qui a été l'accomplissement de ma gloire, et dont
le Cid a reçu cet avantage, que de tant de beaux poëmes
qui ont paru jusqu'à présent, il a été le seul dont l'éclat
ait pu obliger l'envie à prendre la plume. Je me contente
pour toute apologie de ce que vous avouez qu'il a eu
l'approbation des savants et de la cours. Cet éloge véri-
table, par où vous commencez vos censures, détruit tout
ce que vous pouvez dire après. Il suffit qu'ayez fait une
folie à m'attaquer*, sans que j'en fasse une à vous ré-
i. «r Ne m'a donné, » mais à tort, dans une des éditions de 1637.
2. « Si je vous voulois mal, » dans les éditions modernes.
3. a Que cette vapeur grossière, qui se forme dans le parterre, ait
pu s'élever jusqu'aux galeries , et qu'un fantôme ait abusé le savoir
comme l'ignorance, et la cour aussi bien que le bourgeois, j'avoue que
ce prodige m'étonne, et que ce n'est qu'en ce bizarre événement que
je trouve le Cid merveilleux, » [Observations sur le Cid, p. i et 2.)
4. Nous devons prévenir le lecteur que les mots « à m'attaquer »
sont une correction, à nos yeux indubitable, qui nous a été suggérée
par M. Rossignol de l'Institut. Les deux éditions originales, faites
du reste l'une sur l'autre *, portent : « folie Amatrique, » avec un A ca-
pital, que méritait bien cette forme étrange. Le sens que nous donne
cette correction est très-satisfaisant ; l'opposition : à m'attaquer, à vous
répondre, forme un tour symétrique, fort naturel; et pour s'expliquer
la faute d'impression, il suffit de se rappeler que dans l'écriture du
dix-septième siècle les signes orthographiques, tels que les accents et
l'apostrophe, sont souvent omis, et les doublements de consonnes né-
gligés. Si nous supposons que Corneille eût écrit : a mataquer **, et
que IV finale fût mal ou peu marquée, la seule erreur de lecture
* Voyez tome III, p. 24 et note 2.
** Le mot est réellement imprimé par un seul t, un peu plus haut,
dans les impressions de 1687 : « vous nem'ataquerés » (voyez p. 4o5,
ligne 7 de la présente édition). Les imprimeurs ont négligé l'accent
dans les mots « de porte a porte » (ci- dessus , p. 4o5, ligne i5); et
ils ont multiplié les fautes de tout genre.
LETTRE APOLOGÉTIQUE. 407
pondre comme vous m'y conviez; et puisque les plus
courtes sont les meilleures , je ne ferai point revivre la
vôtre par la mienne. Résistez aux tentations de ces gail-
lardises qui font rire le public à vos dépens, et continuez à
vouloir être mon ami, afin que je me puisse dire le vôtre.
Corneille.
III
DISCOURS PRONONCÉ PAR MONSIEUR CORNEILLE, AVOCAT
GÉNÉRAL A LA TARLE DE MARRRE DE NORMANDIE1
LE 22. JANVIER l647? LORSQU'IL FUT REÇU [a
L ACADÉMIE FRANÇOISE] A LA PLACE DE MONSIEUR
MAYNARD2.
Messieurs ,
S'il est vrai que ce soit un avantage , pour dépeindre
commise par l'imprimeur a été de prendre pour ri un a peu lisible.
Ajoutons qu'il y a deux cents ans les auteurs ne voyaient guère
d'épreuves ou ne s'acquittaient que bien légèrement de cette partie de
leur tâche. — Le mot Âmatrique a fort chagriné les éditeurs et les
commentateurs de Corneille. Plusieurs se sont contentés de n'en
point parler; d'autres, moins sages, ont tenté de l'expliquer. « Ce
mot paraît emprunté du grec <â[X£Tp^ {sic), démesurée, t> dit timidement
M. Parrelle. - — « Amatrique, sans mesure, désordonné; probable-
ment du grec dfaexpoç, •» avance d'un ton un peu plus assuré M.Gode-
froy. » (Lexique compare de la langue de Corneille, etc., tome I,
p. 35.) Mais à'piexpoç aurait fait tout au plus amétrique , qui lui-même
n'a peut-être jamais existé , bien qu'on trouve amétrie opposé à sy-
métrie dans quelques traités techniques*. Enfin, il est des éditeurs
parmi lesquels on peut compter Voltaire, qui, par prudence, ont tout
simplement supprimé le mot embarrassant.
1. Sur la table de Normandie et sur les fonctions que Corneille
y remplissait, voyez au tome I la Notice biographique.
2. Pellisson raconte, dans sa Relation contenant l'histoire de V Aca-
* « Santé est Symmétrie, et maladie, son contraire, Amétrie. »
(Traicté de la coqueluche.... par maistre Tean Suau, i586, p. 7.)
4o8 OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
les passions, que de les ressentir, et que l'esprit trouve
avec plus de facilité des couleurs pour ce qui le touche
demie franc oise (p. 36o et suivantes), les faits qui précédèrent l'entrée
de Corneille dans cette compagnie. Après avoir parlé de M. de Sa-
lomon, avocat général au grand conseil, qui, ainsi que le portaient
les registres à la date du 12 août i644> fut nommé à cette époque
en remplacement de M. Bourbon , il ajoute : « 11 fut préféré à
M. Corneille, qui avoit demandé la même place. Le protecteur fit
dire à l'Académie qu'il lui laissoit la liberté du choix, et vous jugerez
par la suite qu'elle se détermina de cette sorte, pour cette raison que
M. Corneille faisant son séjour à la province, ne pou voit presque
jamais se trouver aux assemblées et faire la fonction d'académicien.
« Je dis que vous le jugerez par la suite ; car depuis, M. Faret étant
mcrt, on proposa d'un côté le même M. Corneille, et de l'autre
M. du Ryer, et ce dernier fut préféré. Or le registre* en cet endroit
fait mention de la résolution que l'Académie avoit prise de préférer
toujours entre deux personnes, dont l'une et l'autre auroient les qua-
lités nécessaires, celle qui feroit sa résidence à Paris.
« M. Corneille fut pourtant reçu ensuite, au lieu de M. Maynard,
parce qu'il fit dire à la Compagnie qu'il avoit disposé ses affaires de
telle sorte qu'il pourroit passer une partie de l'année à Paris.
« M. deBalesdens avoit été proposé aussi; et comme il avoit l'hon-
neur d'être à Monsieur le Chancelier, l'Académie eut ce respect pour son
protecteur de députer vers lui cinq des académiciens pour savoir si ces
deux propositions lui étoient également agréables. Monsieur le Chan-
celier** témoigna qu'il vouloit laisser une entière liberté à la Compa-
gnie; mais lorsqu'elle commençoit à délibérer sur ce sujet, M. l'abbé
de Cerisy lui présenta une lettre de M. de Balesdens***, pleine de
beaucoup de civilités pour elle et pour M. Corneille, qu'il prioit la
Compagnie de vouloir préférer à lui, protestant qu'il lui déféroit cet
honneur, comuie lui étant dû par toutes sortes de raisons. La lettre
fut lue et louée par l'assemblée, et depuis il fut reçu en la première
place vacante, qui fut celle de M. de Malleville. » Dans la seconde
édition de l'ouvrage de Pellisson une grande partie de ces détails a
été supprimée; le dernier paragraphe a seul été conservé. Il est
probable que c'est à la demande de Corneille que ce changement a
été fait (voyez tome VI, p. io3).
* Du 21 novembre 1646. (Note de Pellisson.)
** Registres, 22 janvier 1647. (Note du même.)
*** Cette lettre a été imprimée, Paris, 1647, in-8°. {Note de
M. Livet.
DISCOURS A L'ACADÉMIE. 409
que pour les idées qu'il emprunte de sou imagination,
j'avoue qu'il faut que je condamne tous les applaudisse-
ments qu'ont reçus ' jusques ici mes ouvrages, et que c'est
injustement qu'on m'attribue quelque adresse à décrire
les mouvements de l'âme, puisque dans la joie la plus
sensible dont je sois capable, je ne trouve point de pa-
roles qui vous en puissent faire concevoir la moindre
partie. Ainsi je vois ma réputation prête à être détruite
par la gloire même qui la devoit achever, puisqu'elle me
jette dans la nécessité de vous montrer mon foible ; et 2
prenant possession des grâces qu'il vous a plu me faire,
je ne me dois regarder que comme un de ces indignes
mignons de la fortune, que son caprice n'élève au plus
haut de sa roue3 sans aucun mérite, que pour mettre plus
en vue les taches de la fange dont elle les a tirés. Et
certes, voyant cette honte inévitable dans l'honneur que
je reçois, j'aurois de la peine à m'en consoler, si je ne
considérois que vous rappellerez, aisément en votre mé-
moire ce que vous savez mieux que moi, que la joie n'est
qu'un épanouissement du cœur, et, si j'ose me servir
d'un terme dont la dévotion s'est saisie, une certaine li-
quéfaction intérieure, qui sépanchant dans l'homme tout
entier, relâche toutes les puissances de son âme : de
sorte qu'au lieu que les autres passions y excitent des
orages et des tempêtes, dont les éclats sortent au dehors
avec impétuosité et violence, celle-ci n'y produit qu'une
langueur, qui tient quelque chose de l'extase, et qui se
contentant de se mêler et de se rendre visible dans tous
les traits extérieurs, laisse l'esprit dans l'impuissance de
1. Il y a reçu, sans accord, dans les éditions de 1698 et de 1714»
ainsi que dans les OEuvres diverses.
2. Et manque dans le texte de Granet, qui ne met qu'une virgule
après foible, et met deux points après faire.
3. « De la roue, » dans Granet.
4io OEUVRES DIVERSES EN PROSE.
l'exprimer. (Test ce qu'ont bien reconnu nos grands
maîtres du théâtre, qui n'ont jamais amené leurs héros
jusques à la félicité qu'ils leur ont fait espérer, qu'ils ne
se soient arrêtés là tout aussitôt, sans faire des efforts
inutiles à représenter leur satisfaction , dont ils savoient
bien qu'ils ne pouvoient venir à bout.
Vous êtes trop équitables pour exiger de leur écolier
une chose dont leurs exemples n'ont pu l'instruire, et
vous aurez même assez de bonté pour suppléer à ce
défaut, et juger de la grandeur de ma joie par celle
de l'honneur que vous m'avez fait en me donnant une
place dans votre illustre Compagnie. Et véritablement,
Messieurs, quand je n'aurois pas une connoissance par-
ticulière du mérite de ceux qui la composent*, quand je
n'aurois pas tous les jours entre mes1 mains les admi-
rables chefs-d'œuvres 2 qui partent des vôtres; quand je ne
saurois enfin autre chose de vous, sinon que vous êtes le
choix de ce grand génie qui n'a fait que des miracles, feu
Monsieur le cardinal de Richelieu, je serois l'homme du
monde le plus dépourvu de sens commun si je n'avois pas
pour vous une estime et une vénération toutes extraordi-
naires, et si je ne voyois pas que3 de la même main dont
ce grand homme sapoit les fondements de la monar-
chie d'Espagne, il a daigné jeter ceux de votre établis-
sement, et confier à vos soins la pureté d'une langue qu'il
vouloit faire entendre et dominer par toute l'Europe. Vous
m'avez fait part de cette gloire, et j'en tire encore cet
i. Les , dans les éditions modernes.
2. Voyez ci-dessus, p. 120, note 1.
3. Nous donnons le texte de l'exemplaire de 1698 qui est à la Bi-
bliothèque impcriaie; celui de l'Institut porte : « toute extraordi-
naire, quand je vois que. » Cette dernière leçon est celle de Granet ;
seulement il a changé a toute extraordinaire » en « toujours extraor-
dinaire. »
DISCOURS A L'ACADÉMIE. /,m
avantage, qu'il est impossible que de vos savantes assem-
blées , où vous me faites l'honneur de me recevoir, je ne
remporte les belles teintures et les parfaites connoissan-
ces qui donnant une meilleure forme à ces heureux ta-
lents dont la nature m'a favorisé, mettront en un plus
haut degré ma réputation , et feront remarquer aux plus
grossiers même, dans la continuation de mes petits tra-
vaux, combien il s'y sera coulé du vôtre, et quels nou-
veaux ornements le bonheur de votre communication y
aura semés. Oserai-je vous dire toutefois, Messieurs,
parmi cet excès d'honneur et ces avantages infaillibles,
que ce n'est pas de vous que j'attends ni les plus grands
honneurs ni les plus grands avantages ? Vous vous éton-
nerez sans doute d'une civilité si étrange; mais bien loin
de vous en offenser, vous demeurerez d'accord avec moi
de cette vérité, quand je vous aurai nommé Monsei-
gneur le Chancelier1, et que je vous aurai dit que c'est
de lui que j'espère et ces honneurs et ces avantages dont
je vous parle. Puisqu'il a bien voulu être le protecteur
d'un corps si fameux et qu'on peut dire en quelque
sorte n'être que d'esprit, en devenir un des membres,
c'est devenir en même temps une de ses créatures; et
puisque par l'entrée que vous m'y donnez je trouve et
plus d'occasions et plus de facilité de lui rendre mes de-
voirs plus souvent, j'ai quelque droit de me promettre
qu'étant illuminé de plus près, je pourrai répandre à
l'avenir dans tous mes ouvrages, avec plus d'éclat et de
vigueur, les lumières que j'aurai reçues de sa présence.
Comme c'est un bien que je devrai entièrement à la fa-
veur de vos suffrages, je vous conjure de croire que je ne
manquerai jamais de reconnoissance envers ceux qui
me l'ont procuré, et qu'encore qu'il soit très-vrai que
I. Pierre Seguier. Voyez tome V, p. 141» note i.
\xi ŒUVRES DIVERSES EN PROSE.
vous ne pouviez donner cette place à personne qui se sen-
tît plus incapable de la remplir, il n'est pas moins vrai
que vous ne la pouviez* donnera personne ni qui l'eût
plus ardemment souhaitée, ni qui s'en tînt votre redevable
en un plus haut point, ni qui eût enfin plus de passion
de contribuer de tous ses soins et de toutes ses forces au
service d'une compagnie si célèbre, à qui j'aurai des
obligations éternelles de m' avoir fait tant d'honneurs
sans les mériter.
I. Pourriez, dans les CEuvres diverses et dans toutes les éditions
suivantes.
LETTRES
NOTICE.
Nous ne possédons que fort peu de lettres de Corneille, et
ses éditeurs, non-seulement ne connaissaient pas toutes celles
qui nous restent, mais diminuaient encore en apparence ce
nombre, déjà si restreint, en les dispersant en divers endroits.
Lefèvre a eu le premier l'idée de faire entrer dans les OEuvres
de Corneille les fragments de ses lettres renfermés dans la
Relation contenant Vhistoire de V Académie, par Pellisson; mais
au lieu de les en extraire, il a donné en entier, sous le titre
de Récit de la conduite tenue par t Académie dans la discussion
qui £ éleva entre Corneille et Scudéry a V occasion du Cid, le
morceau dans lequel elles se trouvaient, et il l'a placé dans
une série intitulée : Pièces concernant le Cid. Il a agi de même
pour les quatre lettres relatives à Y Imitation de Jésus-Christ,
et les a mises en tête de cet ouvrage. Après ces éliminations
la collection des lettres formant la correspondance proprement
dite ne se composait plus que de neuf pièces.
Quant à nous, il nous a paru préférable de mettre en-
semble toutes les lettres et de suivre, comme dans les Poé-
sies diverses, un ordre purement chronologique. Après avoir,
pour des motifs que nous exposerons tout à l'heure, rejeté la
première des neuf lettres de l'édition de Lefèvre, nous joignons
aux huit qui restent les six fragments contenus dans V Histoire
de r Académie francoise de Pellisson, les quatre lettres relatives
à Y Imitation de Jésus-Christ, enfin quatre autres lettres, non
recueillies jusqu'à présent , que nous avons annoncées dans
notre Avertissement (tome I, p. xn), ce qui porte à vingt-deux
les pièces que nous avons réunies. Mais nous n'avons pas
voulu nous borner à rassembler les lettres écrites par Cor-
neille; nous avons essayé pour la première fois de reformer
4i6 LETTRES.
sa correspondance, autant qu'il était possible de le faire, en
ajoutant à ses lettres ce que nous avons pu recouvrer de
celles qui lui ont été adressées , et nous avons classé les
unes et les autres, suivant leurs dates, en une seule et même
série, en ayant soin toutefois, comme dans le reste de notre
édition , de faire imprimer en plus petits caractères tout ce
qui n'est point de Corneille. Parfois ses correspondants rap-
pellent les termes mêmes dont il s'est servi, ou du moins nous
font connaître en substance quelqu'une de ses lettres aujour-
d'hui perdue ; lors même qu'ils se montrent moins explicites,
leur témoignage a encore son prix. Ce recueil tout nouveau,
qui dans son ensemble contient ou mentionne trente et une
lettres, nous présente avec quelque intérêt les préoccupations
successives de Corneille ; on apprend là, pour certains mo-
ments de sa vie, ses espérances, ses inquiétudes, ses mé-
comptes; on pénétre dans divers secrets de son intimité, dans
le détail de quelques-unes de ses affaires ; on voit quels étaient
ceux de ses contemporains avec lesquels il se trouvait le plus
fréquemment en rapport; bien des choses s'éclaircissent par
l'ordre chronologique; les lacunes les plus considérables qui
séparaient les unes des autres les lettres jusqu'ici recueillies
se trouvent en partie comblées, et l'on peut dans cet essai
de restitution de la correspondance étudier avec quelque suite
l'époque la plus active, et la mieux remplie, de la carrière du
poète.
Pour éviter de multiplier et d'allonger les notes outre me-
sure, soit au bas des pages, soit en tète de chacune des let-
tres, nous les passerons successivement en revue dans cette
notice préliminaire ; nous dirons où chacune d'elles a été
publiée pour la première fois; et lorsque la pièce autographe
existe encore, nous aurons soin de la décrire, d'en faire l'his-
toire en quelques mots, et d'indiquer à quelle collection pu-
blique ou particulière elle appartient. Nous allons examiner
d'abord les lettres de Corneille dans l'ordre même où elles se
présentent; nous parlerons ensuite de celles de ses correspon-
dants, aq sujet desquelles nous aurons à entrer dans beaucoup
moins de détails et qui ne nous arrêteront qu'un instant.
Dans l'édition des OEuvres complètes de Corneille publiée
par Leièvre, la première des lettres est adressée à Rotrou el
NOTICE. 417
datée du 14 juillet 16^7 i. Nous aurions également commencé
notre recueil par cette pièce si elle nous avait paru présenter
le degré d'authenticité nécessaire; mais, comme nous l'avons
déjà fait pressentir 2, nous avons de sérieux motifs de la croire
supposée. Cette lettre, qui se trouve dans le fonds additionnel
des manuscrits du British Muséum, où elle porte le n° 21 154,
n'appartient que depuis peu d'années à cet établissement. Elle
ne s'y trouvait pas à l'époque où elle fut publiée pour la pre-
mière fois par Lefèvre, dont l'édition, commencée en 1854, fut
achevée l'année suivante. En i856 elle faisait encore partie
de la collection de M. Belward Ray 3, qui fut vendue à cette
époque chez M. Christie, commissaire-priseur très-connu à Lon-
dres. Cette lettre fut achetée par un amateur français, moyen-
nant vingt livres (cinq cents francs) ; mais il ne se montra pas
longtemps satisfait de son emplette : peu de temps après l'avoir
rapportée en France, il la renvoya comme n'étant pas de la
main de Corneille4, et le British Muséum l'acquit alors moyen-
nant trois livres ( soixante-quinze francs). Lne note de sir
F. Madden, conservateur des manuscrits du British Muséum, la
considère comme écrite par Thomas sous la dictée de Pierre '. En
effet, au premier aspect l'écriture de cette lettre présente la plus
grande conformité avec celle de Thomas Corneille; mais si l'on
rapproche les dates, on voit que la lettre est du 1 4 juillet 1637,
et que si elle était de la main de Thomas Corneille, celui-ci,
1. Édition de Lefèvre, tome XII, p. 397 et 3o,8.
2. Voyez tome III, p. 248, et ci-dessus, p. 41^.
3. Voici le titre du catalogue de M. Ray et la transcription de
l'article relatif à cette lettre; c'est à M. Rathery, de la Bibliothèque
impériale, que nous devons ce document bibliographique et la plu-
part de ceux qui sont rapportés dans cette notice : Catalogue of the
interesting and valuable collection of autograpli letters and other ma-
nuscripts, of the late H. Belward Ray, esq.t deceased; which mil be
sold by auction, by Messrs Christie and Manson at their great room, 8,
Ring street, S t-J 'âmes' 's square , on Wednesday , July a3, i856, and threc
following days. — N° 799. Corneille (Pierre, called le grand), letter in
french, entirely autographt relatingto the Cid. Fine spécimen, excessivelj
rare; but few letters are knomi to exist. Rouen, 14 July 1637.
4- Voyez le Bulletin du bibliophile de janvier 1857, p, 28.
j. Probably front the dictation ofhis brother.
Corneille, x
4i8 LETTRES.
né le 10 août i6a5, n'eût eu que onze ans et onze mois au mo-
ment où il l'aurait écrite. Il n'y aurait certes rien de surprenant
à ce qu'il eût pu dès lors écrire sous la dictée de son frère; mais
son écriture, nécessairement enfantine, s'écarterait sensiblement
de celle que nous lui connaissons dans la maturité de son âge.
Une autre preuve, du reste, bien autrement convaincante, éta-
blit que cette lettre ne peut émaner ni de Pierre, ni de Thomas,
ni d'aucun de leurs contemporains : l'original contient un mot
tout récent, le mot influencer. Recueilli, je pense, pour la pre-
mière fois en 1801, dans la Néologie de Mercier, qui l'appuie
d'un passage extrait de la Constitution (T Angleterre, publiée en
177 1 par le publiciste genevois Delolme, ce verbe n'est admis
qu'en i835 dans le Dictionnaire de F Académie, et dix ans plus
tard M. Francis Wey le déclare « encore bien vert pour la belle
littérature1. » Voici la phrase de la lettre attribuée à Corneille
dans laquelle il se trouve : « J'ai bonne raison, je vous assure,
mon ami, de craindre que cet aréopage ne se laisse influencer
par celui qui les a fait (si?) ce qui (sic) sont. » Il est vrai que
ceux qui ont reproduit cette lettre ont modifié ce passage de fa-
çon à faire disparaître le terrible mot; Lefèvre a mis : « Je vous
avoue, mon ami, que je dois peu compter sur la justice de l'a-
réopage placé sous F influence de celui qui les a faits ce qu'ils
sont; » et M. Edouard Fournier : « J'ai bonne raison, je vous
assure, mon ami, de craindre que cet aréopage ne se laisse di-
riger par celui qui les a faits ce qui (sic) sont 2. » Quant à nous,
le désir d'augmenter d'une pièce le recueil des lettres de Cor-
neille ne saurait nous porter à y laisser un écrit si évidemment
supposé. Nous nous sommes contenté de le conserver en appen-
dice avec ses diverses variantes.
Cette lettre écartée, l'ordre chronologique appelle tout d'a-
bord les six fragments extraits de la Relation contenant l'histoire
de F Académie françoisepa.r Pcllisson, que nous avons mentionnés
plus haut3. Nous les avons donnés d'après l'édition originale pu-
1. Ren arques sur la langue française, Paris, F. Didot, i845, tome l,
p. 141.
2. Notes sur la vie de Corneille en tête de Corneille à la butte
Saint-Rock, p. cxv.
3. Page 41 S. — Ce sont les nos 1-0' de notre recueil.
NOTICE. 4i9
bliée en i653; nous aurions bien voulu pouvoir les collationner,
et surtout les compléter d'après les originaux, mais on ignore ce
que sont devenus les papiers que Pellisson avait alors sous les
yeux, et même les registres académiques d'après lesquels il a en
grande partie rédigé son ouvrage. De tant de matériaux impor-
tants, il ne reste que le manuscrit des Sentiments de V Acadé-
mie française sur la tragi-comédie du Cid, conservé actuelle-
ment, comme nous l'avons dit1, à la Bibliothèque impériale.
Nous rencontrons ensuite une longue lettre de Corneille'2,
restée jusqu'ici en grande partie inédite; elle traite d'affaires, et
le poète s'y montre plaideur fort ardent, et très-entendu ; l'auto-
graphe en a été trouvé dans les combles du Palais de la cour
impériale de Rouen, le 24 octobre i853. M. Taschereau, qui
l'a signalé à l'attention des amis de Corneille, en a donné deux
curieux extraits, aux pages xix et xx du tome I de ses
Œuvres complètes de P. Corneille, publié en 1857 chez le
libraire Jannet; mais cette édition n'ayant pas été achevée, cette
lettre n'avait pas encore été publiée en son entier. M. Louis
Passy, qui s'est longtemps occupé de Thomas Corneille et pré-
pare un choix de ses OEuvres pour la Collection des grands
écrivains, nous a communiqué une excellente copie de cette
lettre, actuellement déposée aux archives de la préfecture de
la Seine-Inférieure, et M. Charles de Beaurepaire, qui dirige
ces archives, a bien voulu la collationner de nouveau et l'éclair-
cir par quelques notes.
La lettre à d'Argenson3, imprimée pour la première fois
dans les Mémoires de Sallengre4, recueillie dans les OEuvres
diverses publiées par Granet en 1738 8, et reproduite depuis
dans toutes les éditions des OEuvres complètes, existe en auto-
graphe dans une des vitrines des manuscrits de la Bibliothèque
impériale6: ce précieux original nous a permis de rectifier de
1. Tome III, p. 34, note 1.
2. N° 7 de notre recueil. — 3. N° 1 1 de notre recueil.
4. Mémoires de littérature et d'histoire , Paris, 1731 , tome X,
•2e partie, p. 439.
*>. Pages ifii-ifi3.
fi. Avant d'être placée sous les yeux du public, cette lettre faisait
partie de la collection Baluze, 7e armoire, Ier paquet, art. 4» n° 3.
On lit sûr la liasse qui la contenait . « Mr d'Argenson. Lettres origi-
4<2o LETTRES.
nombreuses erreurs. On trouve dans la Galerie française un
fac-similé de deux fragments de cette lettre.
Les deux lettres à M. de Zuylichem ■ ont été imprimées
d'après les copies des autographes , faites exprès pour notre
édition et plusieurs fois collationnées avec le plus grand soin.
Avant 1825 elles n'étaient pas encore sorties du pays de celui
à qui Corneille les avait adressées. Elles appartenaient à un
Hollandais de distinction et faisaient partie d'une précieuse
collection formée par sa famille. Elle fut vendue au mois de
mai 1825, et un exemplaire annoté du catalogue de vente2
nous apprend que son possesseur se nommait Synestein, et que
les deux lettres de Corneille furent acquises par M. Thorpe, au
prix, assez élevé pour le temps, de sept livres, dix-sept schel-
iings et six pence (près de deux cents francs). Trente et un
ans plus tard, nous retrouvons ces deux lettres, sous le n° 800,
dans le Catalogue de M. Belward Ray, à côté de la lettre à
Rotrou dont nous avons parlé plus haut; mais,' par une con-
fusion singulière , tandis que dans ce catalogue la lettre à
Rotrou était à tort considérée comme écrite par Pierre Cor-
neille, les deux lettres à M. de Zuylichem y étaient attribuées
nales de Mrs de Balzac et Pierre Corneille à Mr d'Argenson , inten-
dant de justice en Xaintonge, et ensuite ambassadeur de France à
Venise. Ces lettres ont été données à la bibliothèque du Roi par
Mr le marquis d'Argenson, son petit-fils, et ministre des affaires
étrangères. » On ne comprend guère comment cette lettre pouvait
faire partie de la collection Baluze, tout en ayant été donnée à la
bibliothèque du Roi par le marquis d'Argenson. Les lettres de Bal-
zac n'ont d'autre rapport avec celle de Corneille que de s'adresser
à la même personne. Sallengre les a publiées dans son recueil, immé-
diatement avant celle de notre poète.
1. Nos 12 et 14 de notre recueil.
2. En voici la description : A Catalogue of a invaluable and highlr
interesting collection of unpublished manuscripts , historical documents
the entïre property of a gentleman of the higkest considération in Hol-
land,by whose family they hâve been accumulated and preserved; which
<vill be sold by auction by Mr Sotheby, at his house, n° 3, Wellington
street, Strand, on Monday 5 May 3o, 1825, and six folio win g days (Sun-
day excepted), in- 8°, n° 117. Two letters of considérable length. froiv
the celebrated Corneille to M. de Zulichen, Roma (sic, lisez : Rouen),
i<S49-l65o, one containing a copy of latin verses (Frcnch).
NOTICE. 421
h Thomas1. Elles lurent acquises par le Britisk Muséum, et
inscrites au fonds additionnel sous le n° 2i5i4; la première
se trouve dans le même volume que la lettre à Rotrou ; la
seconde figure dans les montres 2. La première a été imprimée
d'abord dans la livraison de septembre 1859 (p. 148 et 149) de
la Revue indépendante de Londres, où elle fait partie d'un compte
rendu des deux premiers volumes des Œuvres de Corneille de
l'édition de M. Taschereau. Les deux lettres ont été signalées
ensuite et promises par nous dans notre Avertissement1 ', et
elles viennent d'être publiées au mois de février i865 par
M. Edouard Fournier4.
La lettre pour M. Dubuisson s n'est qu'un billet inscrit sur le
feuillet de garde d'un volume appartenant à la bibliothèque
Sainte-Geneviève ; il provient de l'abbaye , car on lit sur le
frontispice: Ex libris Stœ Genovefae, i?34. Il porte la mar-
que S et a pour titre : De mineralium natura in universum , ubi
no *
prœsertim de aqua minerali font i s Escarleiarum , vu/go des
Escharlis, prope Montargium, cujus vires in usum medicum ex-
penduntur. Opéra et studio M. Pauli Dubé , doctoris medici
Montisargi. — Parisiis, apud Franciscum Piot , prope fontem
Sancti Bencdicti, M.D.C.XLIX, cum approbatione. L'envoi du
livre de Dubé, annoncé par Corneille dans ce billet, avait lieu
peu de temps après la publication : le billet de Corneille est
du 25 août et l'approbation du i?> juin.
C'est encore à la bibliothèque Sainte-Geneviève qu'on trouve
I. N° 800. Corneille [Thomas). Two long and interesting letters, in
french, entirely autographe to M. de Zuylichem, secretary to the Prince
of Orange. Fine spécimens , with seals and floss silk. Very scarce. Rouen,
i649-5o.
1. Saloon. Frame VI. Elle est ainsi décrite, sous le n° 55, clans le
livret du Briùsh Muséum, intitulé : A guide to the autograph letters,
page 7 : « Pierre Corneille [b. 1606 — d. 1684.] Letter in French,
to [Constantin Huygens] Monsieur de Zuylichem , denying the
adyantage of prefixing an argument to any drama ; dated Rouen ,
28th May i65o. Holograph. Purchased in i856. »
3. Tome I, p. xn.
4- Deux lettres inédites de P. Corneille à Huyghens de Zuylichem.
Revue des provinces, tome VI, p. 3s2-33o, et tirage à part.
5 . N° 1 3 de notre recueil .
422 LETTRES.
les quatre lettres de Corneille au P. Boulart1. M. Célestin
Port, qui les a publiées le premier dans la Bibliothèque de
V École des chartes (tome III, 3e série, p. 348-36o), les a décou-
vertes dans un portefeuille intitulé : Recueil de pièces pour
prouver que Thomas a Kempis est V auteur de /'Imitation. C'est
une collection de lettres, toutes autographes, adressées au
P. Boulart, et de brochures relatives à la discussion engagée
entre les religieux bénédictins et les chanoines réguliers de
Sainte-Geneviève.
Le billet à Pellisson 2 a été publié pour la première fois dans
les Œuvres diverses (p. 219 et 220) sous ce titre et avec cette
note de l'abbé Granet : « Copié sur l'original de Corneille. »
Il se trouvait alors dans la bibliothèque des Jésuites du collège
Louis-le-Grand ; il passa depuis dans la collection de M. Pa-
rison3, et fut acheté à sa vente par M. Chambry, à qui il
appartient aujourd'hui, et qui nous a permis fort obligeamment
d'en vérifier le texte. Le fac-similé en a été publié en 1840
dans P Iconographie française.
La première des lettres à l'abbé de Pure *, entièrement iné-
dite, a été copiée sur l'original conservé au British Muséum,
fonds Egerton, n° 18, in-folio5; les quatre suivantes 6 appartien-
nent à la Bibliothèque impériale, qui possède une grande partie
des papiers de cet abbé.
11 est probable que la lettre à Saint-Evremond7 existe encore
dans quelque collection particulière, mais nous n'avons pu avoir
1. Nos i5-i8 de notre recueil.
2. N° 51 de notre recueil.
3. Voyez la Notice de M. Brunet sur M. Parison en tête du Cata-
logue de sa bibliothèque, p. xu.
4. N° 22 de notre recueil.
5. Le fonds Egerton se compose : r° des manuscrits donnés en 1825,
au British Muséum, par François-Henry Egerton, huitième comte de
Bridgewater; 20 des nouvelles acquisitions de manuscrits faites an-
nuellement à l'aide des intérêts produits par une somme de cinq mille
livres sterling trois pour cent, laissée par le donateur au même éta-
blissement. La lettre de Corneille ne provient pas de la collection
primitive ; elle a été achetée sur le revenu de la rente.
6. Nos 23, 24, 26 et 27 de notre recueil.
7. N° 29 de notre recueil.
NOTICE. 423
à ce sujet aucun renseignement. Nous avons donc suivi le texte
des Œuvres de Saint-Evremond 1, réimprimé par Granet dans
les Œuvres diverses de Pierre Corneille 2.
Enfin la dernière et si douloureuse lettre de Corneille, adres-
sée à Colbert3, appartient à la Bibliothèque impériale. Décou-
verte par M. Lacabane, dans la collection généalogique de
Chérin de Barbimont, elle en a été extraite pour être pla-
cée dans un recueil de lettres originales. M. Floquet l'a pu-
bliée pour la première fois, en i835, dans les Mémoires de
P Académie de Rouen, et elle a été reproduite depuis dans
toutes les éditions de Corneille.
Un mot maintenant sur les lettres adressées à Corneille.
Nous n'en connaissons aucune en autographe : elles devaient
exister parmi les papiers de notre poète, dont une grande partie
fut brûlée par lui quelque temps avant sa mort, et dont l'autre,
qu'il avait conservée à dessein, ne nous est point parvenue.
Nous avons donc été forcé , la plupart du temps , de nous bor-
ner à recueillir dans les œuvres des contemporains de Cor-
neille, celles des lettres écrites par eux à notre auteur qu'ils
avaient jugées dignes de l'impression. Telle est la source des
lettres de Sarrau , de Balzac , de Gilles Boileau et de Saint-
Evremond 4.
Nous nous arrêterons un instant à la première de ces lettres,
adressée à Corneille par le conseiller Sarrau, car elle nous
permettra de rectifier les dates erronées des premières repré-
sentations de plusieurs des chefs-d'œuvre de notre poëte, qui
semblent avoir été jusqu'ici, même dans la présente édition,
vieillis mal à propos de quelques années. Cette lettre de
i. Amsterdam, 1725, tome II, p. 334 et suivantes.
2. Pages 210-21 a.
3. N° 3i de notre recueil.
4. La plupart de ces lettres, connues des biographes de Corneille,
avaient été réimprimées par eux en note ou comme pièces justifica-
tives. Les lettres de Gilles Boileau cependant n'avaient pas encore été
recueillies ; mais elles ne pouvaient nous échapper, car M. Louis Passy
nous les avait indiquées, MM. Taschereau et P. Lacroix nous en
avaient parlé à leur tour , et tout récemment dans la Revue des pro-
vinces (vol. VI, p. 327), M. Edouard Fournier les recommandait
obligeamment à notre attention.
4^4 LETTRES.
Sarrau est du 1 1 décembre 1649. 1, et il est impossible de croire
que la date en ait été altérée lors de l'impression du recueil
posthume où elle se trouve, puisqu'il y est question, comme
d'un fait tout récent, de la mort de Richelieu, arrivée le 4 du
même mois. Eh bien ! à ce moment Sarrau écrit à notre poëte :
« Ce que je désire principalement c'est de savoir.... si, à vos trois
excellentes et divines pièces, vous projetez d'en ajouter une qua-
trième. » Et plus loin : « J'ai entendu dire vaguement que
vous travailliez à un certain poëme sacré. Ecrivez-moi, je
vous prie , s'il est bien avancé, ou même achevé. » Ces trois
« divines pièces, qui hésiterait à les reconnaître? c'est le Cid, Ho-
race et Cinna; et ce poëme chrétien, ce quatrième chef-d'œuvre,
qui devait égaler et même surpasser les trois autres, n'est-ce pas
évidemment Polyeucte? Dans ce cas, la première représenta-
tion de cette pièce, placée par tous les historiens du théâtre à
la fin de 1640, ne serait que du commencement de 1643, et le
privilège prudemment sollicité dès l'apparition de l'ouvrage, et
obtenu, comme nous l'avons vu, le 3o janvier, aurait été mis en
réserve jusqu'au 20 octobre 164'i, date de l'Achevé d'impri-
mer9. Mais ce n'est là qu'une des nombreuses rectifications
que la lettre de Sarrau nous amène à faire; elle nous force à
changer également la date de 1641, adoptée pour Pompée,
ainsi que celle de 1642, assignée au Menteur. Corneille, si
avare de renseignements sur ses ouvrages, nous apprend tou-
tefois que ces pièces si différentes sont « parties toutes deux
de la même main, dans le même hiver3. » Mais quel est cet
hiver dont il parle? Est-ce la fin de celui de 1642-1643, dont
le commencement, nous venons de le voir, a été occupé par les
derniers soins à donner à Polyeucte? Est-ce, et à certains
égards cela semblerait plus probable, celui de 1643-1644?
Dans ce cas, la publication aurait suivi la représentation
d'assez près, car le privilège obtenu pour les deux pièces, le
11 janvier 1644, a été mis à profit, quant à Pompée , le 16 fé-
vrier, et pour le Menteur, le dernier octobre, ainsi que le
constatent les « Achevé d'imprimer. » Mais si c'est à cette der-
1. Prid. Id. decemb. Voyez ci-après, p. 44° •
2. Voyez notre tome III, p. 4^8.
3. Voyez notre tome IV, p. i3o.
NOTICK. /,2r>
nière opinion qu'on s'arrête, il faut changer nécessairement la
date de 1643, généralement adoptée pour la Suite du Menteur;
et peut-être celle de 1644? qu'on donne kRodogune, sera-t-elle
à son tour un peu prématurée. Comment ces réflexions n'ont-
elles pas été faites plus tôt, puisque la lettre de Sarrau a été
jointe par MM. Taschereau et Guizot à leurs études sur Cor-
neille? Je m'en étonne, et je regrette pour ma part de les pré-
senter si tardivement; mais c'est un exemple de plus du soin
avec lequel il faut examiner les documents, même les plus
connus, pour en extraire tout ce qu'ils peuvent donner.
A la différence de celles dont nous venons de parler, les
lettres adressées à Corneille par Chapelain ne sont point tirées
d'un recueil imprimé; elles proviennent du manuscrit de sa
correspondance inédite que possède M. Sainte-Beuve, et d'où
M. Taschereau les a pour la première fois extraites, afin de les
insérer en i855 dans V Histoire de la vie et des ouvrages de
P. Corneille. « Malheureusement, dit-il dans X Avertissement
de cette seconde édition1, cette précieuse copie autographe est
incomplète d'un volume (164 1 à 16 58), qu'il serait bien re-
grettable d'avoir à considérer comme perdu pour toujours. »
Nous rappelions, dans ï Intermédiaire du 1 5 janvier 1864, que
dans sa Bibliothèque française Gouget cite des lettres de Cha-
pelain de 1642, 1643 et i652. Dans le nombre se trouvent
deux lettres à Corneille, que M. Edouard Fournier a rappelées
a son tour dans la Revue des provinces du i5 février i865;
nous avons eu l'occasion d'en donner une brève analyse2; mais
nous avons le regret de ne pouvoir les joindre à ce recueil par
lequel nous terminons les OEuvres de Corneille, recueil assu-
rément bien incomplet, et qui cependant paraîtra déjà riche,
nous l'espérons, à qui prendra la peine de le comparer à ceux
qui l'ont précédé.
1. Page vit. — a. Ci-dessus, p. 399. et 3Q3.
LETTRES.
DE CORNEILLE A BOISROBERT \
Rouen2, i3 juin 1637.
Pellisson ne donne par malheur que des extraits de cette lettre ;
il en rapporte la première partie sous forme indirecte, et raconte que
pressé par les lettres de Boisrobert de consentir à ce que l'Acadé-
mie examinât le Cid, Corneille, « qui voyoit bien qu'après la gloire
qu'il s'étoit acquise, il y avoit vraisemblablement en cette dispute
beaucoup plus à perdre qu'à gagner pour lui , se tenoit toujours sur
le compliment et répondoit : »
Que cette occupation n'étoit pas digne de l'Acadé-
mie. Qu'un libelle qui ne méritoit point de réponse * ne
méritoit point son jugement. Que la conséquence en se-
roit dangereuse , parce qu'elle autoriseroit l'envie à
1. Relation contenant F histoire de F Académie françoise , p. 191-193.
— Voyez ci-dessus la Notice, p. 418 et 419; et, pour le détail des faits
auxquels se rattachent les fragments de lettres I-VI, voyez tome III,
p. 22-36.
2. Voyez, pour le lieu d'où était datée cette lettre, la Relation con-
tenant l'histoire de F Académie françoise , p. 217.
3. Les Observations sur le Cid par Scudéry, auxquelles Corneille
répliqua par la Lettre apologétique, qu'il considérait avec raison comme
n'étant point une réponse en forme. Voyez ci-dessus, p. 399-407, et
ci-après', p. 43 1.
4a8 LETTRES.
importuner ces Messieurs, et qu'aussitôt qu'il auroit
paru quelque chose de beau sur le théâtre, les moindres
poètes se croiroieut bien fondés à faire un procès à son
auteur par-devant leur Compagnie
Messieurs de l'Académie peuvent faire ce qu'il leur
plaira ; puisque vous m'écrivez que Monseigneur seroit
bien aise d'en voir leur jugement , et que cela doit diver-
tir Son Eminence, je n'ai rien à dire *.
2. DE CORNEILLE A BOISROBERT 2.
i5 novembre 1637.
J'attends, avec beaucoup d'impatience, les sentiments
de l'Académie, afin d'apprendre ce que doresenavant
je dois suivre ; jusque-là je ne puis travailler qu'avec
défiance, et n'ose employer un mot en sûreté.
3. DE CORNEILLE A BOISJIOBERT3.
3 décembre 1637.
Je me prépare à n'avoir rien à répondre à l'Académie
que par des remercîments....
1. Pellisson nous apprend (p. io,3) que ces dernières paroles, échap-
pées à Corneille dans sa lettre, suffirent, « suivant l'opinion du Cardi-
nal, pour fonder la jurisdictionde l'Académie, » qui, le 16 juin 1637,
commença à s'occuper du Cidy et livra son travail à l'imprimeur
environ cinq mois plus tard.
2. Relation contenant F histoire de P Académie françoise, p. 207.
3. Ibidem.
LETTRES. 429
4-
« Lorsque les Sentiments sur le Ciel étoient presque achevés d'im-
primer, dit Pellisson1, (Corneille) ayant su par quelque moyen que ce
jugement ne lui seroit pas aussi favorable qu'il eût espéré, il ne put
s'empêcher d'en témoigner quelque ressentiment, écrivant par une
lettre, dont je n'ai vu qu'une copie sans date et sans suscription : »
Je me résous , puisque vous le voulez, à me laisser
condamner par votre illustre Académie; si elle ne touche
qu'à une moitié du Cid, l'autre me demeurera toute en-
tière. Mais je vous supplie de considérer qu'elle procède
contre moi avec tant de violence, et qu'elle emploie une
autorité si souveraine pour me fermer la bouche , que
ceux qui sauront son procédé auront sujet d'estimer que
je ne serois point coupable si l'on m'avoit permis de me
montrer innocent 2
Après tout , voici quelle est ma satisfaction : je me pro-
mets que ce fameux ouvrage , auquel tant de beaux
esprits travaillent depuis six mois , pourra bien être
1. Relation contenant P histoire de l'Académie françoise, p. 207-210.
— a Cette lettre, ajoute Pellisson, a été désavouée par M. Cor-
neille, qui a toujours protesté qu'il ne l'avoit jamais écrite : ainsi il
faut que quelque autre se soit diverti à lui prêter sa plume et l'écrire
en son nom. » Malgré cette assertion, qu'on chercherait vainement
dans les premières éditions de l'ouvrage de Pellisson , mais que je
trouve à la page i33 des éditions publiées par Coignard en 1700
e I70i;qued'01ivet a d'ailleurs supprimée, et que, chose plus étrange,
M. Livet a oublié de rétablir, au moins en note, nous penchons fort
à croire que la lettre est de Corneille. S'il en eût été autrement, Pel-
lisson ne l'eût assurément pas admise dans son Histoire, et c'est bien
probablement par un simple sentiment de convenance qu'il a cru
utile d'accompagner cet écrit d'une protestation un peu tardive, qui,
au temps où elle a paru, n'a sans doute trompé personne.
2. Pellisson nous donne ainsi (p. 209) l'analyse de la portion de la
lettre qu'il supprime: « Il se plaignoit ensuite, comme si on eût refusé
d'écouter la justification qu'il vouloit faire de sa pièce de vive voix,
pt en présence de ses juges, de quoi pourtant je n'ai trouvé aucune
4*o LETTRES.
estimé le sentiment de l'Académie françoise , mais peut-
être que ce ne sera point le sentiment du reste de Paris ;
au moins j'ai mon compte devant elle, et je ne sais si
elle peut attendre le sien. J'ai fait le Ciel pour me diver-
tir, et pour le divertissement des honnêtes gens , qui se
plaisent à la comédie. J'ai remporté le témoignage de
l'excellence de ma pièce par le grand nombre de ses re-
présentations, par la foule extraordinaire des personnes
qui y sont venues , et par les acclamations générales
qu'on lui a faites. Toute la faveur que peut espérer le
sentiment de l'Académie est d'aller aussi loin ; je ne crains
pas qu'il me surpasse
Le Cid sera toujours beau , et gardera sa réputation
d'être la plus belle pièce qui ait paru sur le théâtre , jus-
ques à ce qu'il en vienne une autre qui ne lasse point les
spectateurs à la trentième fois
5. -
DE CORNEILLE A BOISROBERT
Rouen, 23 décembre 1637.
« Lorsqu'il eut vu les Sentiments de U Académie , je trouve , dit
Pellisson (p. 211), qu'il écrivit une lettre à M. de Boisrobert du
23 décembre 1637, aans laquelle, après l'avoir remercié du soin qu'il
avoit pris de lui faire toucher les libéralités de Monseigneur, c'est-à-
dire de le faire payer de sa pension , et après lui avoir donné quel-
ques ordres pour lui faire tenir cet argent à Rouen, » il disoit :
Au reste , je vous prie de croire que je ne me scanda-
lise point du tout de ce que vous avez montré, et même
trace, ni dans les registres, ni dans la mémoire des académiciens
que j'ai consultés. »
1. Relation contenant ["histoire de L'Académie françoise, p. 2ii-2i5.
LETTRES. 43i
donné ma lettre à Messieurs de l'Académie. Si je vous
en avoisprié, je ne puis m'en prendre qu'à moi; néan-
moins si j'ai bonne mémoire , je pense vous avoir prié
seulement par cette lettre de les assurer de mon très-
humble service, comme je vous en prie encore, nonob-
stant leurs Sentiments. Tout ce qui m'a fâché, c'est que
Messieurs de l'Académie s' étant résolus de juger de ce
différend avant qu'ils sussent si j'y consentais ou non,
et leurs Sentiments étants déjà sous la presse , à ce que
vous m'avez écrit, avant que vous eussiez reçu ce témoi-
gnage de moi, ils ont voulu fonder là-dessus leur juge-
ment , et donner à croire que ce qu'ils en ont fait n'a
été que pour m'obliger, et même à ma prière
Je m'étois résolu d'y répondre, parce que d'ordinaire
le silence d'un auteur qu'on attaque est pris pour une
marque du mépris qu'il fait de ses censeurs : j'en avois
ainsi usé envers M. de Scudery *, mais je ne croyois pas
qu il fût bien séant d'en faire de même envers Messieurs
de l'Académie, et je m'étois persuadé qu'un si illustre
corps méritoit bien que je lui rendisse compte des rai-
sons sur lesquelles j'avois fondé la conduite et le choix
de mon dessein; et pour cela je forçois extrêmement mon
humeur, qui n'est pas d'écrire en ce genre, et d'éventer
les secrets de plaire que je puis avoir trouvés dans mon
art. Je m'étois confirmé en cette résolution par l'assu-
rance que vous m'aviez donnée que Monseigneur en
seroit bien aise , et me proposois d'adresser l'épître dé-
dicatoire à Son Eminence , après lui en avoir demandé
la permission. Mais maintenant que vous me conseillez
de n'y répondre point, vu les personnes qui s'en sont
mêlées , il ne me faut point d'interprète pour entendre
cela; je suis un peu plus de ce monde qu'Héliodore, qui
i. Voyez ci-dessus, p. 427, note 3.
43a LETTRES.
aima mieux perdre son évêché que son livre1, et j'aime
mieux les bonnes grâces de mon maître que toutes les
réputations de la terre : je me tairai donc , non point par
mépris, mais par respect
Je2 vous conjure de ne montrer point ma lettre à Mon-
seigneur, si vous jugez qu'il me soit échappé quelque
mot qui puisse être mal reçu de Son Eminence.
63.
« M. Corneille.... a toujours cru, dit Pellisson, que le Cardinal et
une autre personne de grande qualité avoient suscité cette persécu-
tion contre le Cid, témoin ces paroles qu'il écrivit à un de ses amis
et des miens, lorsqu'ayant publié Y Horace*, il courut un bruit qu'on
feroit encore des observations et un nouveau jugement sur cette
pièce : »
Horace fut condamné par les duumvirs, mais il fut
absous par le peuple.
i. Héliodore d'Émèse en Phénicie, évêque de Tricca en Thessalie,
contemporain de Théodose et de ses fils, est surtout connu par son
roman intitulé : les Ethiopïqiies ou les Amours de Thêagène et de Chari-
clée. Nieéphore prétend que, n'ayant voulu ni supprimer ni désavouer
cet ouvrage, Héliodore fut déposé; mais Socrate le scolastique et
Photius ne parlent de rien de semblable.
2. Dans la Relation de Pellisson, ce dernier paragraphe est précédé
de ces mots : a Cette lettre contenoit encore beaucoup d'autres choses
sur la même matière, et au bas il avoit ajouté par apostille. »
3. Relation contenant F histoire de l'Académie françoise, p. 217 et 218.
4- L'Achevé d'imprimer d'Horace est, comme nous l'avons déjà
dit (tome III, p. 2 53), du i5 janvier 1641-
LETTRES. 433
7. DE CORNEILLE A MONSIEUR GOUJON, AVOCAT
AU CONSEIL PRIVÉ DU ROI1.
Monsieur ,
Je vous envoie les pièces de mon oncle de Sainte-Marie 2,
pour vous supplier de les faire vérifier par-devant les
commissaires à ce députés. Elles sont au nombre de
quatre, à savoir : une copie de la vente que le Roi a
faite du total des quatrièmes8 de Conches à M. Jean Le-
telier, grand rapporteur de France4, avec sa quittance
de finance de Tan i554, avec deux contrats d'acquisition
que mon grand-père5 a fait d'Octavian Costantin , qui
jouissoit au nom de ses héritiers de partie de ladite
1. Voyez ci-dessus la Notice, p. 419. — « Le Conseil privé, autrement
Conseil des parties, que dans l'usage ordinaire on appelle simplement
le Conseil, et dont les conseillers se nomment conseillers d'Etat : c'est
un conseil qui se tient dans la salle du conseil par M. le chancelier ou
le garde des sceaux et les jours qu'il lui plaît; et quoique le Roi n'y
assiste pas, le fauteuil de Sa Majesté y est toujours placé et demeure
vide. » [Dictionnaire de Trévoux.)
2. Antoine Corneille, présumé né en 1^77, curé de Sainte-
Marie-des- Champs, arrondissement d'Yvetot, l'aîné des oncles de
Pierre Corneille. Une note, adressée par M. Ch. de Beaurepaire a
M. Taschereau, et tirée des registres de la fabrique de Sainte-
Marie-des-Champs, prouve qu'Antoine Corneille en était curé dès
16 14 ; il mourut dans l'exercice des mêmes fonctions en janvier
1648.
3. « Nom d'un droit que le Roi lève dans la province de Norman-
die sur le vin, le cidre et les autres liqueurs qu'on y boit. Dans les
autres provinces on ne paye que le huitième ; mais en Normandie on
paye le quatrième. » {Dictionnaire de Trévoux.) Ce droit avait été éta-
bli au commencement du quatorzième siècle.
4- « Grand rapporteur, est une charge du sceau. Il y a deux grands
rapporteurs en la grande chancellerie : ce sont des offices qui ne
peuvent être possédés que par des conseillers du grand conseil. »
[Dictionnaire de Furetière.)
5. Pierre Corneille, référendaire à la chancellerie du Parlement
Cokjseille. x 28
434 LETTRES.
rente, et un extrait de la chambre des comptes1. Pour
vous éclaircir ceci, afin que vous en puissiez rendre compte,
vous saurez que après que ledit sieur Letelier eut acquis
le total de la propriété desdits quatrièmes, ils furent
réunis à la recette des aides et rebaillés au profit du
fermier général, et par ce moyen le prix de son acqui-
sition, qui étoit de sept mil neuf cents quatre-vingt-trois
livres six sols huit deniers , fut converti en 798*- 6S 8d de
rente sur lesdits quatrièmes à la raison du denier dix,
ce qui se justifie par les extraits des comptes que je pro-
duis. Ce Jean Letelier a eu cinq héritiers, deux desquels
ont vendu leurs parts à un nommé Pierre Costantin;
ce Pierre Costantin a laissé deux fils, Pierre et Oc-
tavian. Octavian se constituant en rente envers feu mon
grand-père en Tan i584, lui a hypothéqué spéciale-
ment quarante-quatre écus cinquante- six sols huit de-
niers de rente, qu'il avoit à prendre sur lesdits qua-
trièmes , et consenti qu'il en jouît et baillât quittance
en sa place, ce qu'il a toujours fait depuis. Nous ne sa-
vons qu'est devenu cet Octavian Costantin, qui a mangé
son bien , et est mort sans biens et sans héritiers. Je sais
qu'à la rigueur on nous peut demander le droit de Pierre
son père et ses partages avec son frère; mais nous n'en
sommes point saisis. Ce que j'ai pu faire pour y suppléer,
c'a été de prendre des extraits en la chambre pour véri-
fier qu'il en jouissoit avant le payement et délégation
qu'il en a faite à mon grand-père , et que nous en avons
toujours depuis [joui]2. Pour cet effet j'en ai levé cinq
extraits, que vous trouverez enmême l'un de cinq cents
quatre-vingt et un , et celui de quatre-vingt-deux (Octa-
1. Ici le mot compte est orthographié de la sorte, mais dans tout
le reste de la lettre il est écrit conte.
a. Ce dernier mot manque dans l'autographe, ainsi qu'un autre
après même, à la phrase suivante.
LETTRES. 435
vian Costantin est employé pour cette partie), un autre
de quatre-vingt-sept, qui est la première année dont les
comptes se sont rendus depuis que nous en jouissons,
ceux de 1 584, 1 585 et i586 n'étant pas rendus. En celui-là
vous n'y trouvez plus Octavian Costantin1, et quoique
on n'y mette pas que ma grandmère, qui y est employée,
en jouit en son nom, si est-ce qu'étant employée pour
deux quittances et en deux qualités, l'une comme tutrice
des enfants de Nicolas Letelier, et l'autre comme tutrice
des enfants de son mari et d'elle, il est aisé de voir que
celle qu'elle a baillée au nom de ses enfants étoit au
droit de Costantin , vu que la partie des enfants de ce
Nicolas Letelier employée aux comptes précédents sous
le nom de mon grand-père leur tuteur ne peut être si
forte , n'étant accrue que de la moitié ou du tiers de la
part d'un autre Letelier, curé de Louviers , qui ne se
trouve plus en ce compte-ci ; j'y ai fait ajouter l'extrait
de 160 5, qui est quand mon oncle est devenu majeur
et a reçu sa part, et celui de 163*3, qui est le dernier
compte rendu à la chambre pour montrer qu'il en a
toujours joui au droit de Costantin, y étant spécialement
employé audit nom, où vous remarquerez, s'il vous plaît,
qu'encore que dans ce compte les autres parties varient,
celle-ci n'a jamais varié et est toujours de la même
quantité. On peut dire que la rente ne nous est qu'en-
gagée, et que Costantin en est le véritable propriétaire,
et que par conséquent nous n'avons pas qualité pour la
faire vérifier sous notre nom ; mais à cela on peut dire que
nous étant spécialement déléguée, en ayant joui soixante
ans , et Octavian Costantin étant mort sans héritiers ,
nous tenons lieu de véritables propriétaires, et que le
1. Ici et en quelques autres endroits il y a Constantin, et non Cos-
tantin.
436 LETTRES.
Roi est hors d'intérêt, ne lui important pas qui il paye.
Je vous envoie un état de la façon dont la rente se paye
maintenant pour vous donner lumière là dedans, afin
que vous puissiez voir au greffe de la commission si ceux
qui jouissent des restes de la rente ont rien vérifié qui
nous puisse servir. Il y a des héritiers de Telier qui
doivent avoir fait vérifier la pièce de l'aliénation totale,
dont je ne représente que la copie*, il y a encore un
M. Darey qui est héritier de Pierre Gostantin, frère
d'Octavian, qui aura fait vérifier le droit de Pierre Cos-
tantin, leur père commun. Que si pour prouver le droit
dudit Costantin, il est besoin de lever des extraits de la
chambre des comptes de Paris, où se sont rendus les
comptes de Normandie au précédant Tannée i58o4, je
vous supplie de les lever, la partie étant assez considé-
rable pour ne la vouloir pas perdre. Le plus court seroit
de donner quelque chose à ceux qui font lesdites vérifi-
cations. On m'a dit qu'il y a un nommé M. Nicolas, qui
est procureur du Roi de la commission, qui fait tout; il
vaudroit mieux lui donner double taxe et qu'il ne nous
fit point de peine. On m'a dit aussi qu'il y a un certain
M. de Courcelles, que nous avons vu à Rouen2, grand
ami de D. Robert de Sainte-Marie, feuillant, qui y peut
beaucoup -, il demeure à la rue Jean Pain-Mollet, près des
coches', si vous jugez qu'il en soit besoin, je lui en écrirai.
Pour l'argent qu'il faudra débourser, je donnerai ordre
à Courbé3 qu'il vous en baille. Mon oncle le procureur
i« C'est en cette année t58o qu'a été établie la chambre des
comptes de Normandie.
2. Corneille avait d'abord écrit ici ; il a effacé ce mot pour le rem-
placer par « Boucn.
3. Sans doute le libraire Augustin Courbé, chez qui la tragédie
d'Horace avait paru au mois de janvier de cette même année i64T
Voyez au tome III, p. 253, note a.
LETTRES. 457
vous prie aussi de lui faire vérifier une petite partie, qui
n'est que de neuf livres, dont on ne paye que la moitié.
Il vous en écrit et vous envoie ses titres; c'est pourquoi
je me dispense de vous en entretenir. Obligez-moi de
dresser leurs requêtes, l'une sous le nom de M. Antoine
Corneille, prêtre, curé de Sainte-Marie1; et l'autre de
M. François Corneille, procureur au Parlement2. Si vous
jugez que mon nom soit assez considérable pour rendre
l'affaire plus aisée, vous pouvez dire qu'ils me les ont
données comme à leur héritier. J'ai vu ici Monsieur votre
père, que j'ai trouvé fort mélancolique; je n'ai pu en
savoir la cause. Je pense vous avoir m*andé que je me
sens des bénédictions du mariage, et tire maintenant à
coup perdu aussi bien que vous 3 .
Je suis votre très-humble et très-affectionné serviteur,
Corneille.
A Rouen, ce ier de juillet 1641.
Mettez, s'il vous plaît, le port du sac en articles de
frais, et me mandez sitôt que vous l'aurez reçu, afin que
je n'en sois point en peine.
Suscription : A Monsieur, Monsieur Goujon, avocat
au conseil privé du Roi, à Paris4.
1. Voyez ci-dessus, p. 433, note 2.
2. François Corneille, quatrième oncle de Corneille, baptisé le
10 juillet 161 1.
3. Le 10 janvier 1642 , la femme de Corneille mettait au monde
sa fille Marie, l'aînée des enfants de notre poète.
4« L'ordre chronologique amènerait ici deux lettres de Chapelain
à Corneille des 20 juillet et 2 5 août 1642 ; mais le texte en est perdu.
Nous ne les connaissons que par l'analyse qu'en a donnée Goujet et
que nous avons reproduite dans la Notice des OEuPres diverses en
prose .-voyez ci-dessus, p. 392 et 3o,3.
438 LETTRES.
8. DE CLAUDE SA.RRAU A CORNEILLE1.
CLAUDIUS SARRAVIUS PETRO CORNELIO , SOTHOMAGUM.
Tantum debeo Menagio nostro quantum persolvere difficile est,
quod me impulerit ut ad te scriberem , dum fîdei meae epistolam
suam et aliquot Balsacii carmina committeret quse ad te allegarem ;
is enim ego, prœstantissime Corneli, qui cura amicitiam tuam auro
gemmisque contra caram habeam, tam bellam te compellandi occa-
sionem insuper habere non debuerim. Ut valeas tu cum tuis Musis
scire imprimis desidero, et utrum tribus eximiis et divinis tuis dra-
matis2 quartum adjungere mediteris. Sed prsesertim excitandae sunt
CLAUDE SARRAU A PIERRE CORNEILLE, A ROUEN.
Je ne sais si je pourrai jamais m'acquitter envers notre Ménage de
m'avoir poussé à vous écrire en confiant à mes soins sa lettre et quel-
ques vers de Balzac pour que je vous les envoie; car tel que je
suis, illustre Corneille, et tenant votre amitié aussi précieuse que
l'or et les pierreries, je n'ai pas dû négliger une si belle occasion de
m'adresser à vous. Ce que je désire principalement, c'est de savoir
comment vous -vous portez, vous et vos Muses, et si à vos trois excel-
lentes et divines pièces vous projetez d'en ajouter une quatrième. Mais
il faut surtout engager ces déesses à composer quelque poème, digne
i. Cette lettre, dont nous donnons la traduction au-dessous du
latin, se trouve aux pages 65 et 66 du recueil intitulé : Claudiï
Sarruvii, scnatorls parisiensis, epistolee, opus postkumum.... C13I3CLIV
(Orange, in-8°). Elle est réimprimée, sans changement, dans l'édition
des lettres de Sarrau publiée par Burmann, à Utrecht, en 1697. —
Claude Sarrau, après avoir fait ses études de droit à Rouen, remplit
successivement à Paris et à Rouen les fonctions de conseiller au par-
lement. C'était un des protégés de Christine de Suède, qui lui écrivait
souvent et lui donnait le titre d'ami. Ses lettres sont dédiées à cette
reine. Il entretenait correspondance sur des matières d'érudition avec
les savants les plus distingués de la France et des Pays-Bas. Tallemant
des Réaux raconte de lui plusieurs anecdotes. Voyez ses Historiettes 7
tome VII, p. 5i, 19.9 et 4^4- U mourut le 3o mai i65i.
2. Il semble évident que ces trois pièces sont le Cid, Horace et
Ci/ma, et que le poème sacré dont Sarrau parle quelques lignes plus
loin est Polyeucte. S'il en est ainsi, cela modifie les dates de représen-
LETTRES. 4^9
illse tuse divse, ut aliquod carnien te seque dignum pangant super
magni Panis * obitu.
Multis ille quidem flebilis occldit;
Nullï flebilïor quant tibi%9 Corneli.
Ille tamen volens nolens Apollinari laurea caput tuum redimivisset ,
si perennasset diutius. Operum saltem tuorum insignem laudatorem
amisisti; sed non eget virtus tua ullius prseconio, quippe quae per
imiversum terrarum orbem,
Qua sol exoritur, quo sol se gurgite mer gît,
latissime simul cum gloria tua diffusa, tôt admiratores nacta est quot
vivunt eruditi etcandidi. In tanto igitur argumento silere te posse vix
credam. Istud tamen omne fuerit tui arbitrii : invito non si va in Par-
nasso*. Inaudivi nescio quid de aliquo tuo poemate sacro, quod an
de vous et d'elles , sur la mort du grand Pan. Regrettable pour tant
d'autres, il ne l'est pour personne plus que pour vous, Corneille. Bon
gré mal gré, s'il eût vécu plus longtemps, il auroit couronné votre tête
du laurier d'Apollon. Vous perdez tout au moins un illustre approba-
teur de vos œuvres , mais votre mérite n'a besoin des éloges de per-
sonne : répandu au loin, avec votre gloire, il a rencontré dans le
monde entier, du point où le soleil se lève jusqu'à celui où il se plonge
dans l'Océan, autant d'admirateurs qu'il y a d'hommes instruits et sin-
cères. J'ai donc peine à croire que vous vous taisiez sur un si grand
sujet. Toutefois à vous de voir ce que vous devez faire : on ne monte
pas au Parnasse contre son gré. J'ai entendu dire vaguement que
tation généralement adoptées pour Poljeucte, Pompée et le Menteur.
Voyez ci-dessus la Notice des lettres, p. 423-425.
i. Le grand Pan n'est autre ici que Richelieu, mort le 4 décembre
1642, et dont Corneille se montra fort peu disposé a faire l'éloge
funèbre. Voyez ci-dessus, p. 86 et 87. — Malherbe désigne le Cardinal
par le même nom, dans une lettre à Racan du 10 septembre i6a5.
Voyez le Malherbe de M. Lalanne, tome IV, p. 19.
2. Allusion à ces vers si connus de l'ode d'Horace à Virgile sur
la mort de Quintilius (livre I, ode xxiv, vers 9 et 10) :
Multis ille bonis flebilis occidit ;
Nulli flebilior quam tibi, Virg'di.
3. Proverbe italien.
440 LETTRES.
uffectum an perfectum sit, quseso, rescribe, meque meritorum tuorum
assertorem, si ullo egeres, fortem crede bon unique. Vale, et me, ut fa-
eere te scio,diligereperge. Lut. Par. prid. Id. decemb.CI3I3C.XLII.
vous travailliez à un certain poëme sacré. Écrivez-moi, je vous prie,
s'il est bien avancé ou même achevé, et croyez que si vous aviez besoin
d'un défenseur de vos mérites, vous en trouveriez un bon et zélé en
moi. Portez-vous bien, et continuez à me chérir, comme je sais que
vous le faites. Paris, le 12 décembre 1642.
9. DE BALZAC A CORNEILLE l.
Monsieur,
J'ai senti un notable soulagement depuis l'arrivée de votre paquet,
et je crie miracle dès le commencement de ma lettre. Votre Clnna^
guérit les malades : il fait que les paralytiques battent des mains; il
rend la parole à un muet, ce seroit trop peu de dire à un enrhumé.
En effet, j'avois perdu la parole avec la voix ; et puisque je les re-
couvre l'une et l'autre par votre moyen, il est bien juste que je les
emploie toutes deux à votre gloire, et à dire sans cesse : La belle chose !
Vous avez peur néanmoins d'être de ceux qui sont accablés par la
majesté des sujets qu'ils traitent, et ne pensez pas avoir apporté assez
de force pour soutenir la grandeur romaine5. Quoique cette modestie
me plaise, elle ne me persuade pas, et je m'y oppose pour l'intérêt
de la vérité. Vous êtes trop subtil examinateur d'une composition
universellement approuvée, et s'il étoit vrai qu'en quelqu'une de ses
parties vous eussiez senti quelque foiblesse, ce seroit un secret entre
vos Muses et vous, car je vous assure que personne ne l'a reconnue.
1 . Cette lettre est extraite du recueil intitulé : les OEuvres de Mon-
sieur de Balzac, divisées en deux tomes, à Paris, chez Louis Billaine
M.DC.LXV, in-fol., tome I, p. 675 et 676.
2. Corneille avait sans doute adressé en toute hâte à Balzac un
exemplaire de bonnes feuilles du Cinna, car l'Achevé d'imprimer de
cette pièce est du 18 janvier, et dans ce remercîment, qui est du 17,
Balzac dit qu'il admire Emilie « depuis quinze jours. »
3. Corneille ne parle pas de cette crainte dans les préliminaires de
Cinna. C'est donc dans la lettre à Balzac qui accompagnait cette
pièce qu'il en était question.
LETTRES. 44i
La foiblesse seroit de notre expression, et non pas de votre pensée;
elle viendroit du défaut des instruments, et non pas de la faute de
l'ouvrier : il faudroit en accuser l'incapacité de notre langue. Vous
nous faites voir Rome tout ce qu'elle peut être à Paris, et ne l'avez
point brisée en la remuant. Ce n'est point une Rome de Cassiodore,
et aussi déchirée qu'elle étoit au siècle des Théodorics : c'est une
Rome de Tite Live , et aussi pompeuse qu'elle étoit au temps des
premiers Césars. Vous avez même trouvé ce qu'elle avoit perdu dans
les ruines de la République : cette noble et magnanime fierté; et il
se voit bien quelques passables traducteurs de ses paroles et de ses
locutions, mais vous êtes le vrai et le fidèle interprète de son esprit
et de son courage. Je dis plus, Monsieur, vous êtes souvent
son pédagogue, et l'avertissez de la bienséance quand elle ne s'en
souvient pas. Vous êtes le réformateur du vieux temps, s'il a besoin
d'embellissement ou d'appui. Aux endroits où Rome est de brique,
vous la rebâtissez de marbre. Quand vous trouvez du vide, vous le
remplissez d'un chef-d'œuvre; et je prends garde que ce que vous
prêtez à l'histoire est toujours meilleur que ce que vous empruntez
d'elle. La femme d'Horace, et la maîtresse de Cinna, qui sont vos
deux véritables enfantements et les deux pures créatures de votre
esprit, ne sont-elles pas aussi les principaux ornements de vos deux
poèmes? et qu'est-ce que la saine antiquité a produit de vigoureux et
de ferme dans le sexe foible, qui soit comparable à ces nouvelles
héroïnes que vous avez mises au monde, à ces Romaines de votre
façon? Je ne m'ennuie point, depuis quinze jours, de considérer
celle que j'ai reçue la dernière. Je l'ai fait admirer à tous les habiles
de notre province : nos orateurs et nos poètes en disent merveilles ;
mais un docteur de mes voisins, qui se met d'ordinaire sur le haut
style, en parle certes d'une étrange sorte, et il n'y a point de mal
que vous sachiez jusques où vous avez porté son esprit. Il se conten-
toit le premier jour de dire que votre Emilie étoit la rivale de Caton
et de Brutus, dans la passion de la liberté. A cette heure il va bien
plus loin. Tantôt il la nomme la Possédée du Démon de la Répu-
blique ; et quelquefois la belle, la raisonnable, la sainte et l'adorable
Furie. Voilà d'étranges paroles sur le sujet de votre Romaine, mais
elles ne sont pas sans fondement. Elle inspire en effet toute la con-
juration , et donne chaleur au parti par le feu qu'elle jette dans
l'âme du chef. Elle entreprend en se vengeant de venger toute la
terre ; elle veut sacrifiera son père une victime qui seroit trop grande
44* LETTRES.
pour Jupiter même. C'est à mon gré une personne si excellente, que
je pense dire peu à son avantage, de dire que vous êtes beaucoup
plus heureux en votre race que Pompée n'a été en la sienne, et que
votre fille Emilie vaut sans comparaison davantage que Cinna son
petit-fils. Si cettui-ci même a plus de vertu que n'a cru Sénèque *, c'est
pour être tombé entre vos mains, et à cause que vous avez pris soin
de lui. Il vous est obligé de son mérite, comme à Auguste de sa
dignité. L'Empereur le fît consul, et vous l'avez fait honnête homme ;
mais vous l'avez pu faire par les lois d'un art qui polit et orne la
vérité, qui permet de favoriser en imitant, qui quelquefois se propose
le semblable et quelquefois le meilleur. J'en dirois trop si j'en disois
davantage. Je ne veux pas commencer une dissertation, je veux finir
une lettre, et conclure par les protestations ordinaires, mais très-sin-
cères et très- véritables, que je suis,
Monsieur,
Votre, etc.
De Balzac.
Le xvii janvier m.dcxliii.
ÎO. DE BALZAC A CORNEILLE3.
Monsieur,
J'aurois grand dessein de vous faire un magnifique remerciement,
digne des honnêtetés de votre lettre , digne du rang que vous m'avez
donné parmi les poètes latins, et de ce trop favorable
Tibi carminé ab omni
Cedeturf jurlque tuo natura relinquet
Quis vatum esse velis*
Mais quelle apparence de disputer de civilité avec vous, qui êtes à
Rouen quand vous n'êtes pas à Paris, c'est-à-dire qui changez une
cour pour une autre cour et ne sortez jamais du grand monde? Je
i. Sénèque l'a nommé : stolidi ingenii vlrum. Voyez notre tome III
p. 373.
2. Extrait du tome I, p. 692 et 6g3 du recueil décrit ci-dessus,
p. 44o, note 1.
3. « Tout genre de poésie te cédera le premier rang, et la nature
te laissera décider qui tu veux être parmi les poètes. » On voit, par
ce que dit Balzac, que ces vers sont de Corneille.
LETTRES. 443
vous dirai donc, sans prétendre à la gloire que votre lettre m'a déjà
ravie, que je reçois a beaucoup d'honneur les quatre noms de guerre
qu'elle me donne, et le premier aussi bien que les trois autres. Quoique
le caractère de Stace ne soit pas celui sur lequel je voudrois me
former, son esprit n'est pas de ceux dont j'estime la ressemblance
vicieuse. Je ne suis pas si délicat que ces Messieurs de delà les monts,
et j'ai toujours blâmé le caprice du gentilhomme vénitien * qui, pour
se réconcilier avec Virgile, brûla les Silves qu'il avoit composées en
sa jeunesse, parce qu'elles venoient du plan de celles de Stace. Il ne
voulut pas même que la postérité ignorât sa mauvaise humeur, dont
il a conservé la mémoire dans une épigramme qui commence ainsi :
Has} Vulcane, dicat silvas t'ibi villicus Acmon :
Tu sacr'is Mas ignibus ure, pater.
Crescebant ducta e Stati propagine silvis,
Jamque erat ipsa bonis frugibus timbra nocens.
Peut-être que ce qui fut un effet de cruauté en la personne du gen-
tilhomme de Venise, seroit en moi une action de justice, si je con-
damnois mes vers au même supplice qu'il fit les siens. Et en vérité,
j'ai tant de peur qu'ils ne soient pas bons, que si notre maître M. Mé-
nage ne me jure encore une fois que mon appréhension est mal
fondée, et ne confirme de nouveau son serment par le témoignage de
nos autres maîtres, Monsieur Bourbon2, Monsieur l'ambassadeur de
Suède5, etc., je croirai que vous et lui me jouez en me louant. Je
m'imaginerai que vous avez dessein de prendre votre plaisir du jar-
gon d'un versificateur de province,
Qui linguam violare Rémi temerarius audet,
Somniat et Tuscum Tiberim et Saturnia régna,
Accola Santonici Oceani, viridisque Carentss
Potator, procul a doctis, vêtus exsul} amicis.
1 . André Navagero. L' épigramme citée par Balzac se trouve dans le
volume intitulé : Andréa: Naugerii, patricii veneti, orationes dusc carmi-
naque non nulla, Venise, i53o.
2. Nicolas Bourbon, né à Bar-sur-Aube en i5y4, mort en 1644,
professeur de rhétorique dans plusieurs collèges de Paris, membre de
l'Académie française, et père de l'Oratoire. Voyez la notice que lui
consacre Pellisson dans son Histoire de l'Académie.
3. Hugo Grotius. Voyez tome I, p. 102, note 2. Il fit son entrée
solennelle à Paris, en qualité d'ambassadeur de la reine de Suède, le
2 mars i635; il demanda son rappel en i645.
444 LETTRES.
Quoi qu'il en soit, il n'est point de passe-temps qui ne doive être
permis dans la république des belles-lettres à deux personnes qui ont
tant mérité d'elle que M. Ménage et vous; et en matière de raillerie,
il faut bien souffrir quelque cbose de l'historien de Mamurra1 et du
père de la comédie2. Je veux dire par ce dernier mot, que vous serez.
Aristophane quand il vous plaira, comme vous êtes déjà Sophocle, Mais
quand vous devriez toujours rire à mes dépens, je ne veux jamais
m'offenser de votre joie. La guerre que vous me ferez, au lieu de me
blesser, me chatouillera. Vous ne sauriez être pour moi que doux et
agréable persécuteur ; et bien ou mal traité de vous, je ne sauroisêtre,
Monsieur,
Que votre, etc.
De Balzac.
Du x février m.dc.xliii.
II. DE CORNEILLE A VOYER d'aRGENSON \
Monsieur ,
Votre lettre m'a surpris en4 deux façons : Tune, par
i . L'écrit de Ménage dont il est ici question est un des principaux
opuscules dirigés contre le parasite Montmaur; il est intitulé : Vit a
Garg'dii Mamurrse parasitopsedagogi , scriptore Marco Licinio. L'épître
dédicatoire est datée d'Angers, le 3o octobre i636; il n'est pas cer-
tain toutefois qu'elle ait été publiée à cette époque, mais on la trouve
dans le recueil contre Montmaur qu'Adrien de Valois fit publier en
1643. On peut voir l'éloge que Balzac fait de cette œuvre de Mé-
nage dans la dédicace du Barbon, qui lui est adressée.
2. Un passage d'une des lettres précédentes nous porte à croire
qu'il y avait alors fort peu de temps que le Menteur avait été repré-
senté pour la première fois. Voyez la Notice des lettres, p. 424-
3. Voyez la Notice, p. 4*9* Cette lettre était fermée à l'aide d'un
cachet en cire rouge fixé sur un cordon de soie jaune. Ce cachet
porte les armoiries de Corneille. — René de Vover, comte d'Argen-
son,mort en 1700. Au moment où Corneille lui écrivait, il était con-
seiller du Roi au parlement de Normandie, et intendant en Sain-
tonge; en i65i, lors de la mort de son père, ambassadeur à Venise,
il lui succéda dans ses fonctions. Voyez Journal et mémoires du marquis
d'Argenson, publiés par E. J. B. Rathery, tome I, p. 1-4.
4. De y dans les OEuvres diverses et dans les éditions suivantes.
LETTRES. 445
les témoignages de votre souvenir, que je n'avois garde
d'attendre, sachant bien que je ne les méritois pas;
l'autre, par l'honneur que vous faites à nos Muses, je
ne dirai pas de leur donner vos loisirs , car je sais que
vous n'en avez point , mais de dérober quelques heures
aux grandes affaires qui vous accablent , pour vous dé-
lasser en leur conversation. Trouvez donc bon que je vous
remercie très-humblement du premier, et me réjouisse
infiniment de l'autre. Ce n'est pas vous que j'en dois
congratuler : c'est le Parnasse entier, que vous élevez au
dernier point de sa gloire , par la dignité des choses dont
vous faites voir qu'il est capable1. Il est trop vrai que
communément la poésie ne trouve pas bien ses grâces
dans les matières de dévotion ; mais j'avois toujours cru
que ce défaut provenoit plutôt du peu d'application de
notre esprit que de sa propre insuffisance, et m'étois per-
suadé que d'autant plus que les passions pour Dieu sont
plus élevées et plus justes que celles qu'on prend pour
les créatures , d'autant plus un esprit qui en seroit bien
touché pourroit faire des poussées2 plus hardies et plus
enflammées en ce genre d'écrire , et m'étois fortifié sur
ce sentiment* par la nature de la poésie même, qui a les
passions pour son principal objet, n'étant pas vraisem-
1. Les écrits de dévotion de Voyer d'Argenson « remplissent les
nos 20 à 27 des Papiers <T Argenson. Plusieurs ont été imprimés. On
y remarque des traités théologiques, des oraisons, des litanies, des
poèmes plus ou moins étendus, tels que l'Art cT aimer Dieu, les Exer-
cices spirituels de saint Ignace, le Poème du Sauveur, en vingt-sept
chants ou récits; des projets d'établissements charitables, des statuts
de confréries, etc., etc. (Note de M. Ratlicry dans le Journal du mar-
quis d? Argenson, tome I, p. 3, note 1.)
2. Pensées, au lieu de poussées, dans les OEuvres diverses et dans
les éditions suivantes.
3. Ici Sallengre et tous les autres éditeurs ont coupé mal à propos
la phrase : « Je m'étois fortifié dans ce sentiment. »
446 LETTRES.
blable que l'excellence de leur principe les doive faire
languir. Mais qu'on pût apprivoiser avec elle la partie la
plus sublime et la plus farouche de la théologie, mettre
saint Thomas en rime, et trouver des termes éloquents
et mesurés pour exprimer des idées que l'esprit a peine
à concevoir que par abstraction , et en captivant ses
sens , qui ne les peuvent souffrir sans répugnance et
sans rébellion, c'est ce que je ne me serois jamais ima-
giné faisable , et dont toutefois vous me venez de dé-
tromper * .
Pour vous en dire mon sentiment en particulier, je
vous confesse que cet échantillon m'a jeté dans une ad-
miration si haute , que je ne rencontre point de paroles
pour m'expliquer là-dessus, qui me satisfassent. Tout ce
que je vous puis dire sincèrement, c'est que vous me lais-
sez dans une grande2 impatience d'en voir d'autres frag-
ments, puisque votre peu de loisir nous défend d'en es-
pérer autre chose, et que je m'y promets3 des ornements
d'autant plus grands , que vous étant débarrassé dans
celui-ci de toutee qu'il y a4 de plus épineux dans ce grand
dessein , vous allez tomber dans de vastes campagnes ,
où la poésie, étant en pleine liberté, trouve lieu de se
parer de tous ses ornements , et de nous étaler toutes ses
grâces. Cependant , pour ce premier chapitre que vous
m'avez envoyé, dispensez-moi derechef de vous dire
autre chose sinon que je souscris à tout6 ce que vous
1. « Vous venez me détromper, » dans les OEuvres diverses et
dans les éditions suivantes.
2. Ce mot manque dans les OEuvres diverses et dans les éditions
suivantes.
3. Ici la phrase est encore coupée dans les éditions : « Je m'y pro-
mets »
4. Le mot a manque dans l'original.
5. Sallengre et les éditeurs suivants, trouvant sans doute cette pé-
LETTRES. 447
en aura dit M. de Balzac. Gomme il a des connois-
sances très-achevées, et une franchise incorruptible, je
sais qu'il vous en aura dit la vérité , et tout ensemble
d'excellentes choses. Il n'appartient qu'à lui de trouver
des termes dignes des vertus et des perfections 4 qui sont
hors du commun. Vous vous pouvez reposer sur son té-
moignage, qui a autrefois été2 le plus ferme appui du
Cidau. milieu de la3 persécution, et dont, avec une gé-
nérosité qui lui est toute particulière, il a fait une il-
lustre apologie, en faisant des compliments à son per-
sécuteur \
Je n'ajouterai donc rien à ce que je sais qu'il vous en
a dit, et me défendrai seulement, pour achever cette
lettre , des civilités par où vous commencez la vôtre. Je
veux bien croire que Cinna et Polyeucte ont été assez
heureux pour vous divertir ; mais je ne m'abuserai jamais
jusques à m'imaginer qu'ils ayent pu servir de quelque
modèle ou à la force de vos vers , ou à la piété de vos
sentiments. J'en appelle derechef à M. de Balzac, et6 je
ne doute aucunement qu'il ne soutienne avec moi que le
plan de ce merveilleux ouvrage est dressé par un génie
tout à vous, et qui, n'empruntant rien de personne, se
doit6 nommer à très-juste titre ccùtoSioocxto; 7 . J'espérerai
riode un peu lourde, l'ont ainsi dégagée : « Cependant, pour ce premier
chapitre que vous m'avez envoyé, je ne puis que souscrire à tout »
i . Corneille avait d'abord écrit par erreur : expressions. Il a effacé
ce mot.
2. Qui a été autrefois, dans toutes les éditions.
3. Sa, mais à tort, dans toutes les éditions.
4< Voyez tome III, p. 44 et suivantes.
5. Ici encore les éditeurs on supprimé le mot et pour couper la
phrase.
6. Corneille avait d'abord écrit peut, qu'il a remplacé par doit.
7 a Instruit par lui-même. »
448 LETTRES.
que vous m'honorerez non-seulement de1 ce que vous
ajouterez à ce grand coup d'essai, mais aussi de cette
paraphrase de Jérémie, dont vous voulez vous défier2
injustement, puisque M. de Balzac est pour elle3. Je
vous la demande avec passion*, et demeure de tout
mon cœur,
Monsieur,
Votre très-humble et très-obligé6 serviteur,
Corneille.
A Rouen, ce 18 de mai 1646.
Suscription : A Monsieur, Monsieur d'Argenson, con-
seiller du Roi en son parlement de Normandie et inten-
dant de sa justice en Xaintonge. A Xaintes.
12. — DE CORNEILLE A MONSIEUR DE ZUYLICHEM .
Monsieur ,
Je ne sais ce que vous direz de moi d'avoir attendu si
longtemps à vous remercier de votre souvenir et du pré-
sent que vous m'avez fait de ces précieux Moments dont
1. Le mot de manque.
a. Corneille avait d'abord écrit : dont vous vous défiez. Sallengre et
les éditeurs qui lui ont succédé ont suivi cette leçon.
3. Première rédaction : « pour vous. »
4. Première rédaction : ce avec affection. »
5. Très-obéissant, dans toutes les éditions.
6. Voyez la Notice des lettres, p. 4?o et 4?-i. Cette lettre est scel-
lée du même cachet que la précédente. En tête de la lettre On lit :
« R. 3o mars 1649. » Cette date, probablement écrite par M. de Zuy-
lichem, est celle de la réponse qu'il fit à la lettre de Corneille. —
Sur Constantin Huygbens, seigneur de Zuylichem, voyez tome IV,
p. 1 33, note 1.
LETTRES. 449
vous avez enrichi le public * . Ce n'est pas que je ne sois
très-sensible aux obligations de cette nature , et à la
gloire qui me vient d'une main si savante à la distribuer:
votre présent m'a été très-cher et par2 sa propre valeur,
et parce qu'il vient de vous, et par l'estime que vous y
témoignez pour mon bon ami Lucain3; mais j'avois honte
de vous en rendre grâces sans m'en revancher en quel-
que sorte , et j'espérois que cet hiver me mettroit en état
d'accompagner mes remercîments de quelque pièce de
théâtre qui du moins eût été considérable pour sa nou-
veauté. Les désordres de notre France ne me l'ont pas
permis, et ont resserré dans mon cabinet ce que je me
préparois à lui donner4; si bien que pour ne paroître pas
devant vous5 tout à fait les mains vides, je me trouve ré-
duit à vous envoyer deux recueils de mes ouvrages qui
n'ont rien de nouveau que l'impression6. Je crois toute-
fois que le premier n'a pas eu assez de réputation pour
aller jusqu'à vous7. Ce sont les péchés de ma jeunesse et
les coups d'essai d'une muse de province qui se laissoit
i. Il s'agit ici du recueil de vers latins intitulé : Momenta desultoria,
publié pour la première fois par Zuylichem en 1644? et dont nous
avons déjà parlé précédemment tome IV, p. i35, note I,
2. Corneille avait d'abord écrit ici V estime, puis il a effacé ce mot
pour ajouter, avant de le mettre, deux membres de phrase.
3. Une pièce des Momenta desultoria (voyez ci-dessus, note 1 ,
composée en i633, est intitulée : Ad R. Honerdum in suprema curia
scnatorem, de Virgilio et Lucano inter pocula collatis, animi autem gra-
tta hoc illi a me et aliis prsclato.
4- Voyez la Notice & Andromède, tome V, p. 248-25 1.
5. Corneille, après avoir d'abord écrit : « pour ne paroitre pas
ingrat , 1» a effacé ingrat, et a ajouté ff devant vous » dans l'inter-
ligne.
6 . Corneille veut parler du recueil en deux parties intitulé : OEuvres
de Corneille, publié en 1648, et qui comprend toutes les pièces de
notre poète jusqu'à la Suite du Menteur inclusivement.
7. Ce volume comprend les premières pièces depuis Mélite jus-
qu'à F Illusion comique, inclusivement.
Corneille, x >9
45o LETTRES.
conduire aux lumières purement naturelles, et n'avoit
pas encore fait réflexion qu'il y avoit un art de la tragé-
die, et qu'Aristote en avoit laissé des préceptes1. Vous
n'y trouverez rien de supportable qu'une Méfiée , qui
véritablement a pris quelque chose d'assez bon à celle
de Sénèque, et ne l'a pas2 tellement défigurée qu'il ne lui
reste une partie de ses grâces :
Hanc, si fas veterum videre nœvos',
Graiis Euripides dédit trementem,
Nec digna prece supplicem Creonti :
Anmeus Latio , malam et tremendam
Jasoni nimis , et nimis Creusa? :
Nos Gallis tumidam , atque sic furentem ;
i. Voyez V Examen de Mélîte, tome I, p. i37 et j38.
2 . Il y a pris, au lieu de pas, dans l'édition de la Revue indépendante.
3. Versus, au lieu de nsevos^ dans la Revue indépendante. — « Cette
femme, s'il est permis de voir les taches des anciens, Euripide
l'a présentée aux Grecs, tremblante et adressant à Créon d'in-
dignes prières ; Sénèque aux Latins , cruelle et terrible à l'excès
pour Jason, pour Creuse. Nous, nous l'avons offerte aux Français,
gonflée d'orgueil, emportée par la fureur; tandis qu'elle se répand
en invectives, reprochant ses nombreux attentats ou plutôt les nom-
breux bienfaits de son criminel amour, il ne faut ni farouche empor-
tement dans ses menaces ni crainte non plus de la vengeance qu'on
lui prépare. Ma Médée ne doit rien au poète grec, mais infiniment
au latin : ces poisons, ces lamentations, ces cruels élans de l'épouse
abandonnée, balancés par l'amour maternel, tant de sentiments qu'elle
revêt et dépouille tour à tour, qui font la douleur de la mère et
l'audace de l'épouse , tous ces mouvements dignes du cothurne tra-
gique, que tous admirent sur la scène, jeunes et vieux. C'est là, là
seulement ce que je lui ai pris; voilà ce que, d'une veine facile et
abondante, dans de doux vers, qui toutefois n'ont rien de bas, mon
style industrieux, souvent, hélas ! trop peu sûr interprète, a détourné
à notre usage. J'y ai ajouté bien des choses de mon fonds, mais qui
soutiendraient mal la comparaison avec mes habiles larcins, mes
emprunts retravaillés. Cette Médée, vieille ainsi tout à la fois et nou-
velle, une nombreuse assemblée l'a reçue avec un murmure favorable;
lisez-la, et peut-être la goûterez-vous. »
LETTRES. 451
Et per crimina tanta dum recurrit,
Multiplex scelus , aut magis scelesti
Multiplex meritum exprobrans amoris,
Ferox spiritus absit a minaci,
Parata3 metus absit ultionis.
Haec Graio nihil, at nimis nimiscjue
Débet Ausonio , venena , planctus,
Diros conjugis impetus relictae,
Materna in pietate fluctuantes ,
Quotquot induit, exuitve motus,
Qua mater doluit vel ausit uxor,
Et quicquid tragicum sonans cothurnum
In scena juvenis stupet senexque.
Id solum1 facili ac fluente vena ,
Leni carminé , nec tamen jacenti ,
Interpres malefidus inde nostros
Detorsit stylus artifex ad usus :
Addidit sua multa, sed recoctis
Nunquam non maie comparanda furtis.
Hanc sic et veterem simul novamque
Frequens murmure non malo probavit
Cœtus , banc lege, forsan et probabis.
Vous voyez, Monsieur, quelle peine je prends à me
décréditer auprès de vous , puisque , au mauvais françois
que je vous envoie, j'ose joindre cette écbappée en une
langue qu'il y a trente ans que j'ai oubliée2. Aussi ai-je
grand intérêt que vous me connoissiez tout entier, et que
vous rabattiez un peu de cette trop8 bonne opinion pour
i. Totum, dans la Revue indépendante.
•2. Corneille continuait, quoiqu'il en dise, à écrire de temps à autre
en latin. Voyez dans les Poésies diverses les pièces XX, LXXII et
LXXX ; dans les OEuvres diverses en prose la pièce I; et ci-dessus
la seconde lettre de Balzac, p. 44 2 et 443.
3. Ce mot a été passé dans l'édition de M. Fournier.
452 LETTRES.
moi, dont vos deux épigrammes 4 vous accusent, afin
que je la puisse remplir quand vous l'aurez mise à son
juste point; mais en vous demandant cette diminution
d'estime, je ne consens pas que vous me fassiez rien
perdre de la part qu'il vous a plu me donner en vos
bonnes grâces : ma plus haute ambition est de m'y con-
server, et je mimputerois à un bonheur extraordinaire
une occasion qui me donnât lieu de vous faire connoître
par les effets que je suis véritablement,
Monsieur,
Votre très-humble et très-obligé serviteur,
Corneille.
A Rouen, ce 6 de mars 1649.
Suscription : Monsieur, Monsieur de Zuylichem, con-
seiller et secrétaire des commandements de Monseigneur
le prince d'Aurange à la Haye.
l3. DE CORNEILLE A MONSIEUR DUBDISSON2.
Monsieur ,
Vous recevrez le livre de M. Dubés, mon parent et
allié, qu'il vous envoie avec les protestations d'employer
ses soins pour Mme de Hanelay, ainsi qu'il m'a écrit.
Pour moi, je n'ai rien à vous envoyer que la continua-
tion de mes affections à votre service, qui ne sont pas
i. Les deux pièces de vers de M. de Zuylichein en l'honneur du
Menteur, Voyez tome IV, p. i35 et ï36\
2, Voyez ci-dessus la Notice, p. 421.
3. Voyez sur ce livre la Notice, à l'endroit cité.
LETTRES. /»53
si bien écrites ici que dans mon cœur, car je suis plus
de cœur que de bouche,
Monsieur,
Votre très-humble serviteur,
Corneille.
De Nemours, ce 25 août 1649.
Suscription : Pour M. Dubuisson *.
ï4- DE CORNEILLE A MONSIEUR DE ZUYLICHEM8.
Monsieur ,
Voulez-vous bien recevoir la même excuse deux fois,
et que je vous die encore que je vous aurois plus tôt fait
réponse si j'avois pu me résoudre à me présenter devant
vous les mains vides. Vous seriez quitte de mes impor-
tunités à trop bon marché si je ne vous persécutais que
par les civilités d'une lettre et par les remercîments que
je vous dois de la part que vous me donnez en votre
estime et en votre bienveillance. Quoique tous vos mo-
ments soient précieux, permettez que j'en dérobe quel-
ques-uns à vos grands emplois pour vous délasser en la
lecture d'une comédie que je vous envoie3. C'est une
1 . Cette suscription , ou plutôt cette inscription , et le billet se
trouvent, ainsi que nous l'avons dit, sur le feuillet de garde du livre
de Dubé.
2. Voyez ci-dessus la Notice, p. 42° et 42I« Cette lettre est
scellée du même cachet que les lettres 11 et 12. M. de Zuylichem a
écrit en tète : « R. 3 juin i65o. » — Voyez ci-dessus, p. 448, note 6.
3. Cette pièce est Don Sanche, dédiée par Corneille à M. de Zuy-
lichem. On retrouvera dans la dédicace (tome V, p. 204 et sui-
vantes) le développement d'une partie des idées exprimées ici.
454 LETTRES.
nouveauté qui pourra sembl or monstrueuse, et donnera
lieu de soutenir que faire une comédie entre des per-
sonnes illustres n'est autre chose que
Humano capiti cervic cm jungere equinam1.
Je suis pourtant assez hardi pour la vouloir justifier
auprès de vous, ou du moins pour en faire les mines;
car, à ne rien déguiser, je sais bien que je parle le lan-
gage d'Aristote dans le mauvais discours que je vous en
fais, mais je ne sais pas si je l'entends bien, ni si les con-
séquences que j'en tire sont justes. Dans cette incerti-
tude 2 j'ai voulu seulement éblouir les peuples par l'au-
torité de votre nom, et comme ils savent qu'on ne vous
peut surprendre , j'ai cru qu'ils se persuaderont aisé-
ment que toutes mes raisons sont de mise, quand ils
verront que j'ose vous en faire le juge. Vous m'appren-
drez quand il vous plaira si j'ai bien rencontré, et je
serai aussi prêt à exécuter ce que vous en ordonnerez
que vous me voyez l'être touchant les arguments que
vous demandez à nos poëmes. Nous nous en sommes dis-
pensés depuis quelque temps, et avons cru que nous
ne devions pas davantage aux lecteurs qu'aux spectateurs
que nous convions à leur représentation sans leur en
donner aucune lumière. Ce n'est pas qu'il n'y aye des
pièces d'une espèce si intriquée3 qu'il échappe beaucoup
i. « Joindre à une tête d'homme un cou de cheval. » Allusion au
début de Y Ai t poétique d'Horace :
Humano capiti cervicem pictor equinam
Jungere si velit....
2. Ces trois mots sont ajoutés dans l'interligne.
3. Il y a intriguée dans l'édition de M. Edouard Fournier 5 mais
l'autographe porte bien intriquée, et cette forme ne doit pas sur-
prendre, car nous avons trouvé souvent intrique dans les préfaces et
examens de Corneille. Voyez le Lexique.
LETTRES. 455
de choses à la première représentation et à la première
lecture faute d'un tel secours, mais nous avons estimé
cela avantageux pour ceux qui les voient et pour ceux
qui les lisent, puisqu'il est cause que l'ouvrage a pour
eux la grâce de la nouveauté , plus d'une fois leur lais-
sant à la première le plaisir entier de la surprise que font
les événements, et réservant pour l'autre celui que leur
donne l'intelligence de ce qu'ils n'ont pas bien compris
à l'abord. Vous me direz qu'il ne les faudra donc voir
ou lire tout au plus que ces deux fois, et j'en suis d'ac-
cord avec vous pour les poëmes dont toute la grâce
consiste en cette nouveauté et en cette surprise; mais
pour ceux qui ont quelque chose de plus solide, il est à
présumer qu'ils donneront la même satisfaction à toutes
les lectures qu'on en voudra faire , qu'ils auroient don-
née à la première , où Ton auroit été préparé par un ar-
gument. J'avoue que nous en voyons presque au-devant
de tous ceux que nous ont laissé1 nos anciens, mais je
m'imagine que nous en avons l'obligation à leurs inter-
prètes ou à leurs scoliastes plutôt qu'à eux-mêmes.
Parmi les Grecs il y en a quelques-uns dont Aristophane
le grammairien est nommé l'auteur, quelques-uns tirés
de la bibliothèque d'Apollodorus2. La plupart même des
comédies d'Aristophane n'en ont que de latins. Ceux de
Plaute paroissent être de son style, mais j'ai toutefois
bien de la peine à croire qu'ils soient de lui , et ses pro-
logues semblent m'autoriser à ce doute. Il ne les intro-
i. Il y a laissé, sans accord, dans l'original.
2. Le grammairien grec Aristophane, disciple d'Aristarque, floris-
sait à Alexandrie au commencement du second siècle avant Jésus-
Christ. — Apollodore vivait au milieu du même siècle. Sa Biblio-
thèque, contenant l'histoire des dieux et des héros, pourrait bien
n'être qu'un abrégé d'un ouvrage plus considérable composé par
lui.
/,56 LETTRES.
duit que pour conter le sujet de sa comédie et le leur
fait dire souvent en termes exprès :
Nunc argumentant eloquar hujus comœdix l .
Pourquoi donc auroit-il encore fait des arguments
dont il n'avoit pas besoin et qui souvent sont si obscurs,
que des esprits médiocres ont besoin de lire toute la
comédie pour les entendre, au lieu qu'ils devroient faire
entendre la comédie ? Au regard de Térence, je n'en vois
que dans ses commentaires, où le nom de leurs auteurs
ne manque jamais, et dans les impressions de Plantin2,
je n'y en trouve aucun. Les tragédies de Sénèque ne me
convainquent pas davantage : on en voit presque autant
de différents arguments que de différentes éditions , et
s'il y en a quelques-uns de sa façon dans une diversité si
grande, je n1ai encore su le deviner. Voilà, Monsieur,
sur quoi nous nous étions enhardis à les retrancher et à
prendre cette maxime, qu'une pièce de théâtre est fort mal
faite quand elle ne porte point toutes ses lumières elle-
même, et qu'elle a besoin d'un faux jour qui vienne
d'ailleurs. Depuis quelque temps, j'ai jeté au-devant des
miennes le texte des auteurs dont j'en ai tiré les sujets,
mais ce n'a été que pour faire démêler l'histoire d'avec
la fable; et si j'avertis quelquefois de quelques circon-
stances de mon invention, ce n'est que pour conduire
mes lecteurs jusqu'au premier vers sans leur donner la
connoissance des épisodes. C'est ainsi que d'ordinaire
i. «Je vais maintenant dire le sujet de cette comédie. » — Ce
vers ne se trouve textuellement dans aucun prologue de Plaute , mais
il ressemble fort au 5ie du prologue de V Amphitryon :
Post argumenlum hujus eloquar tragœdiee.
a. Célèbre imprimeur du seizième siècle, né à Tours, établi à An-
vers. Son Térence, revu par Antoine Dolet, et réimprimé plusieurs
fois, est de l'an i565.
LETTRES. 457
en use Plante, et y ajoute quelquefois l'événement par
où sa fable se termine. J'en ai fait de même en cette co-
médie, et pour vous satisfaire davantage, j'ai rappelé le
nom tf argument que nous avions banni1. Je n'ai pas
cité mon auteur ; et si vous me pressez là-dessus , je
vous dirai ingénument que je l'ai pris d'un vieil ma-
nuscrit espagnol que personne n'a jamais vu, et dont je
ne saurois rien moy-même si le dieu de la poésie ne me
l'avoit révélé ; mais insensiblement, en vous rendant
compte de notre usage touchant les arguments de nos
poëmes, j'oublie à vous demander pardon d'avoir abusé
de l'honneur de votre amitié, dont j'ai fait parade en
public. C'est un sentiment de vanité que vous trouverez,
juste quand vous considérerez que je n'en pouvois faire
un secret sans me priver du plus grand avantage que les
Muses m'ayent fait recevoir, puisqu'elles ne m'ont en-
core rien procuré de plus glorieux que le droit de me
pouvoir dire avec votre aveu ,
Monsieur,
Votre très-humble et obéissant serviteur,
Corneille.
A Rouen, ce 28 de mai i65o.
Suscription : A Monsieur. Monsieur de Zuylichem ,
conseiller et secrétaire de Monseigneur le prince d'Orange
à la Haye.
1. Corneille a mis en effet un exposé du sujet, avec le titre à? Ar-
gument, en tête de Don S anche et en tête d' Andromède, qui, quoique an-
térieure à Don Sanche, ne fut, paraît-il, imprimée qu'après ; mais il n'a
pas étendu au delà la concession faite à M. de Zuylichem : Nicomède,
qui vient après Don Sanche, n'a pas d'argument, non plus que les tra-
gédies suivantes. Parmi les pièces précédentes, les trois premières
{Milite, Clitandre , la Veuve) sont les seules qui aient des sommaires
intitulés : Arguments.
/|58 LETTRES.
l5. DE CORNEILLE AU REVEREND PKRE BOULA.RT1.
A Rouen, la veille de Pâques i65s* 8.
Mon révérend Père,
Je reçus votre paquet mercredi dernier, et avois résolu
de différer à vous en remercier après les fêtes, d'autant
que les dévotions ordinaires de la semaine sainte, et les
embarras où je suis maintenant comme marguillier de
i. Voyez ci-dessus la Notice, p. 421 et 422. M. Célestin Port, qui
a le premier publié ces lettres de Corneille, a extrait du Gallia chris-
ùaita, tome VIT, et de la Vie du révérend père Charles Faure, abbé de
Sainte-Geneviève de Paris, oit l'on voit l'histoire des chanoines réguliers
de la congrégation de France, dont il a été le premier supérieur général
(Paris, J. Anisson, K>98, in-4°j, quelques renseignements sur le cor-
respondant de notre poète. Il prit l'habit en 1620, à Saint-Vincent
de Senlis, et prononça ses vœux l'année suivante. Il fut au nombre
des religieux qui vinrent établir la réforme à Sainte-Geneviève, et,
dès l'année 164°* il fut élu général de l'ordre, partagea ces fonctions
avec le R. P. Faure, et les lui abandonna de nouveau tout entières
le 3o avril i643; deux ans après il fut nommé, parle P. François
Blanchart, abbé coadjuteur. I! occupait cette dignité au moment
où Corneille lui écrivait les lettres qu'on va lire. La Vie du
R. P. Charles Faure nous le présente comme un « homme d'une
admirable candeur et d'une très- parfaite sincérité. » Tout porte à
croire qu'il conserva toujours ses bonnes relations avec notre poète,
et nous avons pu conjecturer avec beaucoup de vraisemblance que ce
fut ce savant religieux qui l'engagea de 1660 à i665 à entreprendre
la traduction des Hymnes de sainte Geneviève. Voyez tome IX, p. 616.
Après avoir examiné avec soin les lettres autographes de Corneille
au P. Boulart et les différents documents où il est question de ce
religieux , nous nous sommes convaincu que son nom doit bien être
écrit ainsi, et non Bouiard, comme Corneille l'a écrit une seule fois
dans la suscription de la lettre 18, et comme nous l'avons imprimé
deux fois (tome VIII, p. 10 et 11), d'après M. Célestin Port. On
ne pouvait du reste hésiter qu'entre ces deux formes ; quant à
Boulaud, c'est une coquille de l'édition Lcfèvre (tomeX, p. 5i2), qui
de là s'est répanuue dans quelques autres.
2. Le 3o mars. En i652, Pâques tombait au 3i de ce mois.
LETTRES. 459
ma paroisse, qui dois rendre compte de mon* adminis-
tration dans deux ou trois jours2, ne me donnent point
le loisir de lire aucune chose de ce que vous m'envoyez.
Mais ayant rejeté les yeux sur votre lettre, j'ai vu qu'elle
étoit datée du 7 du courant, et que ce seroit reculer trop
loin à vous faire savoir que je l'ai reçue. Vous avez
eu peur de me faire coûter du port par le messager, et
votre paquet a été dix-huit jours à venir de Paris à Rouen
pour me faire cette épargne. Je vous supplie de n'avoir
plus cette circonspection, et de croire ques la voie du
messager n'est pas si onéreuse qu'on n'en soit bien ré-
compensé par la promptitude. Je vous fais cette prière
d'autant que je prévois bien que ce paquet ne sera pas
la dernière faveur que je recevrai de vous. Je vous de-
mande donc encore une huitaine pour le lire, et vous en
mander ma pensée , en vous envoyant l'opuscule du
P. Heserus4, qui vous est venu d'Allemagne. En atten-
dant, je vous dirai que je travaille à la continuation de
ma version, et que sitôt que nous pourrons avoir quel-
que calme, j'en donnerai une seconde partie au public,
avec la première fort corrigée en beaucoup d'endroits.
C'est ce qui me fait vous prier de deux choses : l'une 6 ,
de me donner avis de ce que vous et vos amis jugerez
à propos de corriger dans cette première , soit pour
la bassesse de l'expression , soit pour la fidélité que je
dois au texte de l'auteur, car je suis de ceux qui ne se
i. Corneille avait mis d'abord «quidoit rendre compte de son, etc. »
2. En effet, le compte de Corneille en qualité de « trésorier en
charge de la paroisse de Saint-Sauveur, » dont nous parlons dans
la Notice biographique en tête du tome I, est « pour l'année com-
mençant à Pâques i65i, et finissant à pareil jour i65a. »
3. Ici Corneille avait écrit le mot si, puis il l'a effacé.
4- Il est question plus au long dans la lettre suivante de cet opus-
cule intitulé : Lexicon Germanico-Thomœum .
5. Il y avait ici : « que si vous trouvez. » Ces mots sont effaces.
/,6o LETTRES.
tiennent pas impeccables, et qu'un avis particulier oblige
autant qu'une censure publique offense; l'autre est rie
vouloir contribuer quelque chose à un1 embellissement
que je prépare à ce travail : c'est que je me suis résolu
de mettre îles tailles-douces au devant de cbaque cha-
pitre, et en ai déjà fait graver onze que je vous envoie,
afin que vous puissiez connoître mieux l'ordre du dessein,
qui est de choisir un exemple dans la Vie des Saints ou
dans la Bible, et l'appliquer sur une sentence tirée du
chapitre où doit être mise l'image2. On m'en grave encore
deux ou trois ; mais comme je ne suis pas fort savant en
ces histoires, je mendie des sujets chez tous les religieux
de ma connoissance. Entre autres, j'ai besoin que vous
m'en donniez de vos saints, parce que, dans celles que
je vous envoie, vous en trouverez trois de l'habit de
Saint-Benoît8, et on pourroit prendre cela pour une dé-
claration tacite d'être du 4 parti des bénédictins dans votre
querelle. Vous m'obligerez donc fort de m'en donner
quelques-uns de votre habit, et, s'il se peut, même de
Thomas a Kempis5, pour appliquer aux chapitres qui me
manquent encore de cette première partie, ou aux cinq
derniers du premier livre et aux douze du second, qui
i. Corneille avait commencé à écrire P embellissement : « l'e; » puis
il a corrigé.
2. Corneille avait écrit : « la taille; » puis il y a substitué :
« l'image. » — Voyez pour ces sentences le rve avis au Lecteur de
l' Imitation (tome VIII, p. 21-23) et la première note de chacun des
chapitres de cet ouvrage.
3. Voyez au tome VIII (notes i des pages 6/h 114, 3ioj trois
emblèmes tirés de la vie de saint Benoit; dans le premier des trois
figurent avec lui ses disciples saint Maur et saint Placide.
4- Première rédaction : « de prendre le. »
5. L'emblème du chapitre xxn du livre I de Y Imitation, donné sans
doute par le P. Boulart, représente Thomas a Kempis convertissant
plusieurs séculiers par la lecture d'une sentence. Voyez tome VTTI ,
p. 1 3o, note r .
LETTRES. 461
composeront la seconde partie. Je n'ai point encore
d'exemples, au reste, pour le sixième chapitre, De inordi-
nat'is affection/bus^ ni pour les X, XI, XII, XIV et XIX.
Le reste des vingt premiers est rempli ; mais il faut, s1]"!
vous plaît, que ce ne soit pas une simple image de saint,
mais une action qui parle, et qui soit belle à peindre. Le1
soin que j'avois de conserver ma neutralité entre les deux
partis m'avoit fait adresser déjà à vos pères de Saint-Lô2
pour cela; mais je n'en ai pas eu de satisfaction. Si vous
daigniez prendre la peine d'y songer (et il me semble que
vous y avez quelque intérêt), et que vous voulussiez rem-
plir ces cinq places vacantes, il faudroit, s'il vous plaît,
m'en envoyer les sujets dans dix ou douze jours. Pour les
chapitres qui feront la seconde partie, je n'ai rien qui
presse; mais comme je ferois ajouter déjà ces images à
la première partie, si j'avois ma vingtaine fournie , je
cherche de tous côtés à trouver de quoi l'achever. Excusez
l'incivilité de ma prière: j'aurai l'honneur de vous écrire
plus au long dans huit ou dix jours. Cependant, obligez-
moi de croire que si les raisons de vos adversaires m'ont
fait douter si T. a K.8 étoit l'auteur de ce que je tra-
duis , du moins ils ne m'ont point encore persuadé
que Jean Gersen aye jamais été au monde4. J'ai grande
obligation au P. Souply, dont l'épître me donne autant
de confusion pour moi que je dois d'admiration à la
beauté de ses vers. Nous avons ici une famille de ce
nom-là ; je voudrois qu'il en fût, afin de me pouvoir
vanter de l'avoir pour compatriote. A la première im-
1 . Ici la phrase devait d'abord commencer autrement : « Je m' » ;
probablement : « Je m'étois adressé. »
2. Le prieuré de Saint-Lô de Rouen, récemment réiormé par des
chanoines réguliers venus de Paris
3. Thomas a Kempis. On trouvera presque toujours ce nom abrège
dans les lettres suivantes, où il revient souvent.
4. Voyez tome VIII, p. 10.
ii67. LTTTRES.
pression que je ferai faire, je lui demanderai la permis-
sion de me parer de son travail, et des éloges qu'il me
donne sans les mériter. Je pensois ne vous écrire que deux
lignes à la dérobée, et à peine puis-je trouver place pour
vous dire que je suis,
Mon révérend Père ,
Votre très-humble et très-obligé serviteur,
Corneille.
Suscription : Au R. P., le R. P. Boulait. A Paris.
l6. DE CORNEILLE AU REVEREND PÈRE ROULART.
Mon révérend Père ,
Vous me trouverez un peu paresseux à vous remer-
cier du soin que vous avez pris de m'envoyer des sujets
pour mes tailles-douces ; mais je voulois vous renvoyer le
Lexicon Germanico-Thomaeum du P. Heserus ; j'ai voulu
attendre que j'eusse eu le loisir de l'extraire. A mon petit
sens, ce livret ne fait pas assez pour votre parti , parce
qu'il ne vous vendique* pas assez l'ouvrage contentieux.
C'est un Allemand qui l'a fait ; et le zèle qu'il a pour son
pays lui faisant faire effort pour montrer sa phrase alle-
mande, laisse à vos adversaires l'avantage des mots qu'ils
prétendent italiens, comme cortte/itare, bassare2, etc. Quoi-
qu'il dise à la fin que cent phrases allemandes doivent
l'emporter sur treize mots italiens, c'est toujours recon-
i. Dans le sens du latin vindicare, ancien terme de droit qui a le
même sens que revendiquer, réclamer comme son propre bien.
2. Mots employés dans V Imitation, dans le sens de contenter et d'a-
baisser : le premier au livre III, chapitre xi, verset 5, et chapitre xxn,
verset 5; le second au même livre, chapitre xlvi, verset a.
LETTRES. 463
noître qu'il y a treize mots italiens, et laisser la chose
douteuse. Je ne sais pas F allemand, et par conséquent
je ne puis pas juger de la conformité du style de notre
auteur avec la grammaire de son pays; mais je crois
qu'il vous seroit plus avantageux de prétendre que son
latin sentiroitle flamand ou, pour mieux dire, le wallon,
que non pas l'allemand. Il ne cite pas une phrase pour
allemande que je ne prétende françoise, et les mots que
les Italiens prétendent leur appartenir ont aussi l'air en-
tièrement françois ' . Ainsi vous pourriez prétendre que
Thomas a Kempis auroit pris la phrase et les mots
des Wallons2, dont son monastère étoit très-proche8, et
qu'il s'y seroit mêlé aussi quelque chose de flamand. En
son temps, la Flandre étoit sous la souveraineté de
France ; on y parloit françois, on y plaidoit en françois,
et on s'y servoit de nos ordonnances , qui sont pleines
de ce 4 latin grossier. Et peut-être a-ce été la cause qu'on
a attribué ce livre, en son commencement, à deux Fran-
çois, saint Bernard et Jean Gerson, dont le premier, à ce
qu'on m'a dit (car je ne le lis pas souvent), se sert aussi de
grosse vestire6, et de mots semblables. M. Carré touche
cet argument dans l'ouvrage que vous m'avez envoyé,
mais il ne fait que l'effleurer et ne l'approfondit pas.
Du reste, ce dernier travail est très-pressant, et il ne s'est
rien fait de plus fort dans la querelle. Celui qui a fait la
petite Apologie* françoise me semble y avoir aussi fort
i. Voyez tome VIII, p. 14. — 2. Corneille a écrit qui et l'a raturé.
3. Thomas a Kempis, qui fut sous-prieur de son ordre, vécut dans
le monastère du mont Sainte-Agnès, près de Zwoll, en Hollande. —
On lit ici parmi, raturé.
4. Ici Corneille avait commencé à écrire le mot « mauvais » :
mauu.
5. Ces mots sont au livre I de V Imitation, chapitre xxv, verset 8.
6. Corneille veut probablement parler de l'ouvrage intitulé : Apo-
logie pour Thomas a Kempis , chanoine régulier de Saint- Augustin.... par
464 LETTRES.
bien réussi; mais il faut être instruit déjà1 : autrement on
ne comprendra pas toute la force des raisonnements
qu'il a réduits en abrégé, et dont il fait comme une réca-
pitulation, Je vous demande pardon si je vous débite
avec tant de franchise ma pensée sur les présents que
vous m'avez faits : vous me lavez ordonné, et je vous
obéis. La sentence que vous avez obtenue vous est aussi
fort avantageuse, en ce que un des quatre manuscrits dont
il est question, et le seul qui n'étoit point au pouvoir de
vos parties, a été produit au procès. Il est vrai que je
douterois fort si ce jugement est de la compétence du
Palais, et2 en croirois plus volontiers une décision de
Sorbonne. Vous voyez par là que si j'étois obligé de
choisir un auteur et d'entrer en la querelle, je me ran-
gerois plutôt du côté de T. a K.8 que de J. G.*, quoique
les pères bénédictins ayent formé des arguments contre
ce premier qui peuvent en faire douter*, et je connois des5
personnes savantes qu'ils ont persuadées que ce n'est
point lui. Mais autre chose est de faire douter de celui
qui est en possession, autre chose d'en établir un autre
en sa place; et les mêmes qui croient que Th. a Kempis
n'est pas l'auteur du livre contesté demandent qu'on leur
montre que J. Gersen aye été au monde. Pour moi, qui ne
prends intérêt ni pour le pays ni pour l'habit, j'ai besoin
de me tenir neutre, et poursuivre comme j'ai commencé,
afin que ma traduction puisse être bien reçue de tout le
monde. Quoique la cause de J. Gersen me semble jusqu'ici
un chanoine régulier de V ordre de S. Augustin, de la congrégation de
France. Seconde édition. — A Paris, chez Claude Cramoisy, M.DC.LI,
in-8°, 34 pages.
1. Corneille avait écrit ici : de la querelle, puis il l'a effacé.
2. Corneille avait d'abord écrit : oc m'en, » probablement potu
mettre : « m'en rapporterois. »
3. Thomas a Kempis. — 4 Jean Gersen.
1. Première rédaction : « des gens. »
LETTRES. 465
assez mal fondée, puisque son existence est révoquée en
doute, elle a fait l'opinion à la mode, et il y a eu des doc-
teurs qui m'ont refusé leur approbation si j'y mettois le
nom de T. a K. Il y a même quelque raison particulière,
que je ne vous puis écrire et que je vous dirai quand j'aurai
l'honneur de vous voir, qui m obligea m'attacher à cette
neutralité, du moins jusqu'à ce que l'ouvrage soit achevé.
Entre ci et là, les choses pourront changer de face, et
la vérité plus connue. Cependant vous m'obligerez fort
de me faire part de ce qui s'écrira pour votre parti. J'ai
un frère de votre habit * , et, sans cela, j'y penche plus que
de l'autre. J'oubliois à vous remercier de vos sujets pour
mes tailles-douces • les premiers me semblèrent un peu
nus, et n'avoir pas de quoi satisfaire le peintre ; les au-
tres sont fort beaux, et je crois que je me servirai pres-
que de tous, à la réserve de ceux qui sont pour les cha-
pitres pour qui j'en ai déjà fait graver2. Quand il vous en
tombera quelques autres dans la pensée pour la suite,
où je travaille à présent, je tiendrai à grande faveur
que vous m'en fassiez part : vous ne trouverez point la
place occupée. Cependant obligez-moi de croire que je
suis de tout mon cœur,
Mon révérend Père,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
A Rouen, ce 12 d'avril i652.
J'ai remis le livret du P. Heserus entre les mains du
1. Antoine Corneille, baptisé le 10 juillet 1611, lauréat du Puy
de la Conception (voyez ci-dessus, p. 7 et suivantes), chanoine
régulier au Mont-aux-Malades, prés de Rouen.
2. Corneille avait terminé rette phrase par a d'autres, » qu'il a
effacé.
CORWEILLE. X 3o
466 LETTRES.
révérend père prieur de Saint-Lô1, pour vous le ren-
voyer.
Suscription : Au R. P., le R. P. Boulart, assistant
du T. R. P. général des Chanoines réguliers abbé de
Sainte Geneviefve. A Paris.
17. DE CORNEILLE AU REVEREND PERE ROHLART.
Mon révérend Père ,
Je vous remercie de ce que vous m'avez fait voir de
nouveau pour la défense de Th. a K., et vous renvoie ce
que vous m'ordonnez, que je remettrai avec la présente
entre les mains du père prieur de Saint-Lô ; et puisque
vous voulez aussi que je vous en dise ma pensée, la voici :
Les Septuaginta palmœ du P. Heserus2 ne vous font ni
bien ni mal : ce sont des éloges de l'ouvrage, et non pas
des arguments pour en connoître l'auteur.
J'avois vu déjà les deux lettres de M. Chifflet3; elles
enfoncent plus avant , et comme elles portent une re-
cherche exacte des manuscrits de Flandre, son témoi-
gnage vous est assez avantageux.
La lettre du P. Petau est de fort grand poids, et fort
1. Voyez ci-dessus, p. 461» note 2.
2 . Septuaginta palmœ seu sacer panegyricus in laudem librorum IV
Thomœ a Kempis. .. de Imitatione Christi, ex hominum piorum elo-
giis LXX concinnatus a Georgio Hesero, societ. Iesu Ingolsta-
dii^ in ederiana typographia, excudebat Johannes Ostermayr, t65i,
in-12.
3. Fn "voici le titre : Copie de deux lettres escrites par Monsieur Phi-
lippe Chiflet , abbé de Balerne, à un de ses amis touchant le véritable
mit heur des livres de l'Imitation de Jésus-Christ. Avec un advis sur le
factum des Bénédictins (sans lieu ni date), in -8°.
LETTRES. 467
propre à opposer à celle du P. Sirmond1, dont les gersé-
nistes se fortifient. C'est un homme docte, et2 en réputa-
tion de grand antiquaire, et qui donne son témoignage
après avoir examiné les raisons et connu Fauteur du ger-
sénisme, l'abbé Caiétan*, pour un fourbe, et maître à
faire des suppositions en faveur de son ordre.
Les témoignages de Monsieur de Grâce* et de M. Ar~
nauld ne sont pas de si haute conséquence, d'autant qu'ils
ne font que dire leur opinion comme en passant ; le pre-
mier l'attribuant simplement à T. K., sans savoir même
si cela lui étoit disputé; et l'autre > comme ayant appris
d'un des vôtres que Jean Gersen n'en étoit pas l'auteur, et
se tenant comme satisfait de ses raisons. Ce sont deux
opinions de modernes, qui seront bonnes à ajouter au
Centumvirale judicium du P. Heserus.
Bolandus6 et ce témoignage que vous avez fait venir
de Flandre ne sont que la même chose, et' l'un sert de
preuve à l'autre et aux lettres de M. Chifflet.
Le témoignage du jésuite Théophilus Renaudus est
très -élégant et bien couché ; mais comme il se fonde
1. Des deux savants jésuites ici nommés, l'un, le P. Petau, mourut
l'année même où Corneille écrivait cette lettre; l'autre, le P. Sirmond,
était mort l'année précédente (i65i).
2. Corneille avait écrit immédiatement après et la première lettre
du mot grand; il l'a modifiée pour ajouter : « en réputation de. »
3. Le bénédictin Constantin Caiétan, qui avait donné une édition
de F Imitation. Voyez notre tome VIII, p. xxiii.
4. Du célèbre Godeau, qui fut no mmé évêque de Grasse en i636,
et devint plus tard évêque de Vence. Il mourut en 1672.
5. Bolland, Bollandus, jésuite d'Anvers, mort en i665. C'est lui
qui a commencé le recueil des Vies des saints connu sous le nom des
Acta sanctorum des Bollandistes.
6. Corneille avait écrit ici conf, probablement pour commencer le
mot confirment; puis il a effacé ce commencement de mot et y a
substitué le mot servent, qu'il a raturé à son tour.
468 LETTRES.
particulièrement sur ce qu'il a appris de M. Naudé1, il
ne persuadera que ceux que ledit sieur Naudé aura
déjà persuadés, si ce n'est par le témoignage qu'il rend
contre l'abbé Caiétan, pareil à celui du P. Petau, et d'au-
tant plus considérable que demeurant de son temps à
Rome, il le connoissoit encore mieux que le P. Petau.
Voilà, mon révérend Père, ce que vous avez voulu
que je vous mandasse touchant ces papiers que je vous
renvoie, et vous prie que si vous pouvez avoir encore un
exemplaire de Dioptra Heseri , que vous me mandez
avoir reçu d'Allemagne, vous m'en fassiez part; mais
tant que vous n'en aurez qu'un, ne me l'envoyez point,
s'il vous plaît; car je crains de n'être pas assez obéis-
sant pour vous le renvoyer comme je fais ceux-ci, à la
réserve de ceux que vous voulez que je garde.
J'ai vu le Thomas vindicatus du R. P. Fronteau, que
j'estime très-fort ; mais si je ne me trompe, il ne répond
point aux mots dont je vous parlois dans ma dernière. Il
justifie bien que les façons de parler de V Imitation de
Jésus-Christ sont les mêmes que celles des autres livres
de Th. a Kempis , ce que M. Carré a fait encore plus au
long; mais il ne touche qu'au mot de leviter ; pour les
autres, bassare, grosse vestire, sentimenta, sententiare 2 ,
contentare , etc., il n'en dit rien du tout ; et je ne vois
pas de moyen de faire passer ces mots-là pour allemands4,
i. Gabriel Naudé, qui fut médecin de Louis XIII, puis bibliothé-
caire du cardinal Mazarin. Il mourut en i653. Voyez ci-après la
note 4 de la page 469.
2. Sentimenta se lit au livre IV, chapitre xvn, verset 2 deV Imitation;
sententiare est au chapitre l du livre III, verset 7. Nous avons déjà
parlé des autres mots que Corneille cite ici.
3. Corneille avait écrit : a pas un mot; » il y a substitué : « rien du
tout, » dans l'interligne.
4. Il y avait d'abord : « de faire ces mots -là allemands. » Corneille
a modifié et complété l'expression par des additions dans l'interligne.
LETTRES. 469
si bien qu'il faut les avouer italiens, à moins que vous
disiez que Th. a K. les a pris de la langue françoise, qui
se parloit en son monastère ou aux environs, aussi bien
que la flamande1. Cela ne fait rien contre Th. a Rempis:
au contraire, je crois qu'il lui peut servir, à cause de la
quantité d'autres façons de parler qui sont purement
françoises, et2 égaleroient bien le nombre des allemandes.
Au reste, je ne crois pas que les Pères bénédictins
puissent prendre aucun avantage de ce que je continue-
rai à ne mettre aucun nom d'auteur3 à ma traduction.
Ils en ont eu, à la vérité, de ce qu'on n'en a point mis
à l'impression royale 4, parce que c'étoit beaucoup faire
que d'ôter dès l'abord Th. a K. de la possession où il
étoit avant qu'il y eût contestation formée ; mais à
présent qu'il y a querelle et procès, et qu'après la sen-
tence des requêtes5 leur appel met encore la chose en
doute, les particuliers qui n'ont point d'intérêt à la chose
1. Voyez ci-dessus, p. 463 et la note 3.
2. Au lieu de et, Corneille avait d'abord écrit q, sans doute pour
commencer le mot qui; puis il a effacé cette lettre.
3. Première rédaction : « aucun auteur. »
4. Cette édition avait été l'occasion de toute la querelle. « Les bé-
nédictins, dit M. Célestin Port dans sa notice sur les Lettres de Cor-
neille au P. Boulart, s'appuyant sur la prétention récente de l'abbé
Caiétan, sollicitèrent le cardinal de Richelieu de faire inscrire au
titre le nom de Jean Gersen, leur confrère, abbé prétendu de Verceil,
qu'ils assuroient être le véritable auteur. Le Cardinal y consentit,
mais demanda le témoignage authentique d'une personne publique et
d'autorité. Avis reçu, les PP. Placide et Jean, procureurs en cour de
Rome pour la Congrégation de Saint-Maur, s'adressèrent au cardinal
de Bagny, et le prièrent de se porter garant pour eux; mais celui-ci
voulut voir l'affaire de près. Naudé, pour lors ce son domestique, »
et Fioravante Martinelli, choisis pour examiner les manuscrits, les
trouvèrent chargés de falsifications évidentes. Les procureurs des bé-
nédictins furent appelés au Palais; ils avouèrent qu'on les avoi
trompés. » L'édition royale parut en i64°i mais sans nom d'auteur.
5. Voyez tome VIII, p. xi ; et ci-après, p. 471, note 1.
470 LETTRES.
doivent du moins attendre que l'arrêt qui interviendra
leur apprenne ce qu'il en faut croire. Vous me permet-
trez donc de continuer comme j'ai commencé, et me ferez
la grâce de croire que je n'en suis pas moins,
Mon révérend Père,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
A Rouen, ce i3 d'avril i652.
J'oubliois à vous dire que je ne suis point encore pressé
d'images pour le second1 livre, ne faisant que d'ache-
ver la traduction de ce qui restoit du premier, où je
crois avoir été un peu au de là de ce que vous avez pu
voir.
Suscription : Au R. P., le R. P. Boulart, assistant
du T. R. P. général des chanoines réguliers. A Sainte
Geneviefve. A Paris.
l8. DE CORNEILLE AU REVÉREJND PERE BOULART.
A Rouen, ce 10 de juin i656.
Mon très-révérend Père ,
J'espérois de jour en jour aller à Paris, suivant ce que
vous a dit M. Ballard2, et là vous remercier de vive voix
de celle qui {sic) vous a plu m'écrire; mais quelque affaire
i. Second est écrit en chiffre : « le 2. liure. »
1. Peut-être s'agit-il ici de l'imprimeur Robert Ballard : voyez ci-
dessus, p. i3a. Corneille avait pour ami un chartreux nommé Lau-
reus Ballard (voyez tome VIII, p. xvi); mais si c'était de ce religieux
qu'il fat question ici, notre poëte ne se servirait point , en parlant
de lui, du mot Monsieur.
LETTRES. 471
m'ayant obligé de remettre ce voyage, trouvez bon que
je me serve de ma plume pour m'acquitter en quelque
sorte de ce que je vous dois. Vous ne m'avez aucune
obligation du témoignage que j'ai rendu à la vérité, je
n'ai point fait le juge en votre affaire, ni ajouté mon sen-
timent au jugement que vous avez emporté : j'en ai fait
seulement un récit fidèle , pour en rafraîchir la mémoire
à ceux qui le savent et l'apprendre à ceux qui ne le savent
pas. Si j'avois mis le nom de Th. a Rempis à la tête
du livre, je me fusse déclaré partial; et comme cet au-
teur m'apprend qu'il faut chercher la paix et dedans
et dehors, j'ai été bien aise de la conserver avec les
Pères bénédictins, et d'être en pouvoir de leur dire que,
quand ils auront eu un jugement à leur avantage, j'en
ferai le même récit au public pour eux : comme j'ai fait
pour vous1. J'ai été assez heureux pour conserver la paix
en mon particulier avec les deux partis opposés sur les
questions de la grâce. Tous deux prétendent que l'au-
teur soit de leur opinion, et tous deux m'ont avoué que
ma traduction est fidèle, et veulent qu'elle tombe dans
leur sens. Je ne sais pas assez de théologie pour péné-
trer dans leurs différends , que même je ne comprends
pas; mais je crois savoir assez de latin pour rendre le
sens d'un auteur dont le style n'est pas fort obscur, et
heureusement je n'ai déplu à aucun de ces deux partis,
parmi lesquels il s'est mêlé tant d'aigreur. J'ai tâché de
faire la même chose pour votre différend entre les Pères
de Saint-Benoît ; bien que je voie un peu plus clair dans
1. Corneille, faisant allusion à l'arrêt du Parlement du 12 fé-
vrier i65a, avait dit dans son avis au Lecteur : « Messieurs des re-
quêtes du parlement de Paris ont prononcé en faveur de Thomas
Kempis; et nous pouvons nous en tenir à leur jugement, jusqu'à ce
que l'autre parti en ait fait donner un contraire. » Voyez tome VIII,
p. xi et p. 12.
47* LETTRES.
cette question que dans l'autre, et que je ne vous en ave
pas celé mon sentiment, je n'ai voulu rien dire de moi-
même, et m'arrête au récit du jugement célèbre qui a
assoupi cette guerre. J'ai cru vous satisfaire et ne les pas
mécontenter. Voilà, mon révérend Père, ce qui m'a re-
tenu pour le regard de l'inscription, qui ne vous est pas
de grande importance et les eût puissamment désobligés :
j'ai des parents et des amis parmi eux, à qui j'ai été bien
aise de ne rendre pas ce déplaisir , ayant trouvé cette
voie d'acquitter ma conscience envers la vérité.
Pour le manuscrit de Thomas a Rempis, vous me fîtes
la faveur de me le faire voir, il y a tantôt deux ans,
quand je passai pour aller à Bourbon; vous me donnâtes
aussi le livre de la contestation, qui est fort bien fait.
Vos Pères de Saint-Lô 4 m'en ont fait voir un autre en
latin, intitulé : Triumphus Thomœ a Kempis, fait par un
religieux deNevers et imprimé là, qui n'est presque que la
répétition de ce qui a été déjà dit en françois dans l'autre ;
il ne laisse pas d'être fait avec beaucoup desprit. Je crois
que vous faites bien de ne faire rien imprimer davan-
tage : il est bon de se reposer après la bataille gagnée, et
il semble2 que vous n'avez plus rien à faire, puisque
le champ vous est demeuré, surtout pour ce qui regarde
les écrits de M. Naudé, qui étoit sans doute très-savant,
mais qui mêloit plus de doctrine que d'agrément dans
ses ouvrages. Le livret de M. de Launoy ne mérite pas
de réponse.
Je vous rends grâce de ce que vous m'avez envoyé de
la façon du R. P. Fronteau : c'est un grand homme en
tout, et ce n'est pas avoir peu fait d'effet sur moi que de
i. Voyez ci-dessus, p. 46 1> note 2.
2. Dans son excellent texte, M. Célestin Port donne : « il me
semble; » mais il y a bien : « il semble, » dans l'autographe.
LETTRES. /»7i
n'avoir obligé à lire son oraison funèbre1 toute entière,
moi qui ai une aversion naturelle contre les panégy-
riques, et qui n'ai jamais pu lire plus de quatre pages
d'aucun qui soit tombé sous ma main; je n'en excepte
pas même celui de Pline second. Le papier me manque :
trouvez bon que j'emploie ce qui m'en reste ici à vous
assurer que je serai toujours,
Mon très-révérend Père,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
Suscription. Au T. R. P., le T. R. P. Roulard2, cha-
noine régulier de Saint Augustin, assistant du T. R. P.
abbé de Sainte Geneviefve. A Paris.
19. DE GILLES BOILEAU A MONSIEUR DE CORNEILLE8.
Monsieur ,
Je crois que vous avez regretté avec toute la France la mort de
1. Oratio funebris in obitum Matthsei Mole..., inter solemnia quœ il-
lius mémorise celebraverunt abbas et canonici regulares Sanctœ-Geno-
vefee parisiensis pronunciata a F. J. Frontone..,. die januar. 28. A. D.
i656. Par/siis, ex ofjîcina cramosiana , ifi56, in-^°.
2. Corneille n'a écrit ainsi ce nom, Boulard par un d, que dans
cet endroit.
3. Cette lettre est tirée du recueil qui a pour titre : les OEuvres
posthumes de défunt Monsieur B . de l 'Académie françoise, contrôleur de
l' 'argenterie du Roy. A Paris, chez Claude Barbin, M.DC.LXX, in-12,
p. 113-117. Voyez la Notice, p. 4^3, note 4- — Gilles Boileau, né à
Paris en i63i, mort en 1669, était le frère aîné de notre illustre
poëte, Nicolas Boileau Despréaux. Il avait traduit du grec en fran-
çais le Tableau de Cébès (i653), le Manuel d'Épictète (i655); plus tard
(1668) il traduisit encore Diogène de Laërte.
474 LETTRES.
Monsieur le premier président4; mais peut-être avec tout cela ne
l'avez-vous pas regretté autant que vous deviez; du moins je suis
bien assuré que vous y avez perdu plus que vous ne pensez. La der-
nière conversation que j'eus l'honneur d'avoir avec lui ne fut que
de vous ; et comme je lui dis que vous aviez envie de le saluer, il me
témoigna qu'il en seroit ravi, et me donna charge même de vous
mander l'estime particulière qu'il faisoit de vous, et le plaisir qu'il
auroit à vous pouvoir rendre service. Si la mort ne l'eût point
prévenu, il n'auroit pas manqué de vous en donner de meilleures
preuves : il étoit en assez belle posture pour cela, et en avoit tout à fait
la volonté. Quoique vous ayez remporté tout seul tout l'honneur de
notre siècle, et que vous ayez reçu des louanges de toute la terre, il
me semble que ce ne vous doit pas être un petit sujet de joie d'avoir
en particulier l'approbation du plus galant homme et du plus bel
esprit de notre temps. Je fais imprimer un recueil de toutes les
pièces qui ont été faites sur sa mort. Monseigneur de Vence, Mon-
sieur de Gombaut, Monsieur de Bois-Robert, et tous nos autres
illustres amis m'ont déjà donné des vers. Je crois que vous, Mon-
sieur, à qui cent vers coûtent moins qu'un couplet de chanson*, ne
refuserez pas un madrigal ou une épigramme. Pardonnez-moi, Mon-
sieur, la liberté que je prends. Permittit sibi qusedam et contra bonum
morem magna pietas*.
Je suis,
Monsieur,
Votre, etc.
Gilles Boileau.
Ce io avril 1657.
1. Pompone de Bellièvre. Voyez ci-dessus, p. i3i. Gilles Boileau
le nomme vers la iin de la lettre suivante. Il était mort au mois de
mars 1647.
2. Allusion au quatrième vers de Y Excuse à Ariste (ci-dessus,
P- 74):
Cent vers lui coûtent moins que deux mots de chanson.
3. « La grande piété se permet quelque chose même contre le bon
usage. »
LETTRES. 475
20. — DE GILLES BOILEAU A MONSIEUR DE CORNEILLE1.
Monsieur,
Ou vous ne vous souvenez plus de ce que vous avez fait, ou vous
avez envie de me railler. Pour votre honneur je veux bien plutôt
croire l'un que l'autre : j'aime mieux me faire un petit tort que d'en
faire un si grand à votre mémoire. J'ai eu le plaisir de lire plus
d'une fois en ma vie les pièces que vous avez données au public, et
je ne suis pas si peu connoissant aux choses que je n'aye très-bien
reconnu que vous possédez admirablement le talent de louer et de
blâmer tout ce que vous voulez. Je n'ignore pas que comme la mé-
disance est indigne de tout honnête homme, vous n'en soyez aussi
incapable. Mais pour la raillerie qui chatouille et qui pique sans
égratigner, je sais qu'elle règne dans la plupart de vos comédies, que
vous vous en servez fort ingénieusement, et que vous êtes trop jaloux
de votre réputation pour y renoncer. Mais, Monsieur, il ne s'agit
point ici de cela. Je ne vous demande que des louanges. Vous dites
que vous n'y excellez pas et que vous ne vous en mêlez plus2. Depuis
quel temps avez-vous renoncé à un métier qui vous a fait ce que
vous êtes ? Ne sont-ce pas les louanges que vous avez données aux
Pompées, aux Césars et à tous vos autres héros, qui vous ont attiré
celles de toute la terre ? Y en a-t-il de plus fines et de plus délicates
dans toute l'antiquité? Vos ouvrages n'en sont-ils pas tout remplis,
et n'en avez-vous pas fait des leçons publiques à toute la France?
Qu'est-il besoin que j'aille chercher des exemples si loin ? Ne vous
souvient-il plus de tant et tant de fameuses épitres liminaires, où vous
prodiguez les louanges avec tant d'abondance, et où vous vous exer-
cez souvent sur des sujets dont toute autre éloquence que la vôtre
1 . Cette lettre est tirée du même recueil que la précédente ; elle
en occupe les pages 11 8-1 25.
2. Corneille a souvent fait des protestations du même genre, au
milieu même de ses pièces laudatives :
Laudibus apta minus Melpomene
(Voyez ci-dessus, p. 70 et 71, vers 67 et 68. )
Pour moi qui de louer n'eus jamais la méthode.
(Voyez ci-dessus, p. 177, vers 29.)
',76 LETTRES.
seroit incapable1 ? Avez- vous oublié ces beaux vers où vous remercie/
Monsieur le cardinal Mazarin2? Avez-vous perdu la mémoire de votre
sonnet pour la Reine3, et de ces deux autres que vous avez faits sur la
mortde deux personnes de qualité, où il est parlé de phénix, si je ne
me trompe4? Que pourrez-vous dire après la lettre à AristeB, où vous
vous louez si bien vous-même? Mais que nedira-t-on point quand
on lira votre sonnet pour maître Adam Billot6 ? Monsieur de Bellièvre
ne méritoit-il pas bien que vous prissiez la même peine pour lui, que
celle que vous aviez prise pour le menuisier de Nevers? Je vois bien,
Monsieur, ce que c'est ; vous ne versez pas vos grâces tous les jours:
elles sont chères et précieuses. Il faut ***. Croyez-moi pourtant. Ce
silence que vous affectez vous sied fort mal. Les gens qui parlent
aussi bien que vous ne doivent jamais craindre de parler. Faites,
Monsieur, tout ce qu'il vous plaira ; mais si vous étiez jaloux de votre
honneur et de votre réputation au point que vous le dites, je suis
assuré que vous feriez ce que je désire. Je suis,
Monsieur,
Votre, etc.
Gilles Boileau.
Ce 29 avril 1657.
1. C'est ici, suivant toute apparence, une allusion à la dédicace de
Cinna à Montauron, si souvent reprochée à Corneille. Voyez tome III,
p. 369 et suivantes.
2. A Monseigneur Monseigneur Pérninentissime cardinal Mazarin.
Remerciment : ci-dessus, p. 92 et suivantes.
3. C'est le sonnet qui se trouve dans la dédicace de Polyeucte à la
Reine. Voyez tome III, p. 4j3.
4. Ce passage nous fait connaître l'existence de deux sonnets qui
ne nous sont point parvenus.
5. L' Excuse à Ariste, ci-dessus, p. 74 et suivantes.
6. Voyez ci-dessus, p. 100. La manière dont le nom de Bidault
est imprimé ici montre que Corneille n'était pas le seul a employer
cette forme, que nous avons vue au dernier vers de son sonnet.
LETTRES. A7
* j 1
21. DE CORNEILLE A PELLISSON1.
Ce vendredi2.
En matière d'amour je suis fort inégal :
J'en écris assez bien , et le fais assez mal;
J'ai la plume féconde , et la bouche stérile,
Bon galant au théâtre , et fort mauvais en ville ;
Et Ton peut rarement mécouter sans ennui ,
Que quand je me produis par la bouche d'autrui.
Voilà, Monsieur, une petite peinture que je fis de
moi-même il y a vingt ans3. Je ne vaux guère mieux à
présent. Quoi qu'il en soit, Monseigneur le Surintendant
a voulu avoir ces six vers ; et je ne suis pas fâché de
lui avoir fait voir que j'ai toujours eu assez d'esprit pour
connoîtremes défauts, malgré l'amour-propre qui semble
être attaché à notre métier. J'obéis donc sans répu-
gnance aux ordres qu'il lui a plu m'en donner , et vous
supplie de me ménager un moment d'audience pour
prendre congé de lui , puisqu'il a voulu que je l'impor-
tunasse encore une fois. Il me témoigna, dimanche der-
nier, assez de bonté pour me faire espérer qu'il ne dé-
daigneroit pas de prendre quelque soin de moi ; et je ne
doute point que tôt ou tard elle n'aye son effet, princi-
i. Voyez sur la source de cette lettre la iVoft ce, p. 422. — SurPellisson
et sur ses rapportsavee notre poëte, voyez tome VI, p. io3, et ci-dessus.,
p. 3i5-32i. Les six vers rapportés au début de cette lettre doivent
avoir été composés peu après le Rondeau sur le Cid, vers l'année i638,
ainsi que nous l'avons indiqué ci-dessus, p. 80, dans une note où par
erreur nous désignons cette lettre sous le chiffre 22, au lieu de 21.
2. Granet et les éditeurs suivants ont supprimé cette date, et ont
placé ce billet dans les OE livres diverses.
3. Dans Granet : « près de vingt, ans; » et à la ligne suivante :
Monsieur, pour Mgr, qui est dans l'original, où le mot Surintendant
est aussi remplacé par une abréviation, de même qu'à la première
ligne de la prose il y a Mr, pour Monsieur.
478 LETTRES.
paiement quand vous prendrez la peine de l'en taire sou-
venir. Je me promets cela de la généreuse amitié dont
vous m'honorez, et suis à vous de tout mon cœur.
Corneille.
22. DE CORNEILLE A l'aBBÉ DE PURE1.
A Rouen, ce 9 juillet i658.
Monsieur ,
L'inquiétude dont vous m'écrivez n'est pas une petite
marque de votre amitié, et me fait bien voir que j'ai eu
raison d'y prendre une entière confiance. Je me suis
enhardi de vous écrire en faveur d'un de mes parents
1. Voyez sur cette lettre inédite la Notice, p. 422. Les frères
Corneille étaient en correspondance suivie avec l'abbé de Pure
et quel que fût celui qui tînt la plume, il écrivait en général au
nom de tous deux. Dans les lettres de Thomas, on en trouve une
datée de Rouen, du « 19 de mai i658, » et adressée à cet abbé pour
le remercier de la quatrième partie de sa Précieuse; cette lettre ren-
ferme un passage intéressant sur ce que Pierre Corneille disait de ce
roman : a Si la haute estime que j'ai pour tout ce qui part de vous,
et la satisfaction que j'ai reçue de la lecture de vos trois premières
parties de la Précieuse^ m'en firent d'abord attendre une entière de
cette conclusion, mon frère, qui l'avoit lie et admirée, m'en fut un
garant assuré pour en tenir le jugement moins suspect que la mo-
destie avec laquelle vous me préparez à souffrir des défauts qu'il n'y
a pu remarquer. C'est par lui que je sais déjà avec quelle délicatesse
et de termes et de pensées vous continuez à examiner les questions
les plus subtiles de l'amour, surtout en voulant établir l'union pure
des esprits exempts de la foiblesse qui nous impose la nécessité du
mariage. 11 avoue qu'il n'en connoît pas tout le fin, et il se persuade
que l'interruption d'Eulalie, qui se plaint de voir employer son nom
dans un roman, n'est pas le seul endroit qui ait ses secrets réservés.
Mais il trouve tant de liberté d'esprit dans la manière agréable dont
vous traitez vos idées les plus mystérieuses, qu'il voit partout sujet
d'admirer l'heureuse fécondité de votre génie, et me busse dans la
LETTRES. 479
qui porte même nom que moi et est mon cousin germain.
Il a été lâchement outragé par le fils de M. du Mesnil
Haudrey , son voisin au pays , qui est premier capitaine
certitude que je n'y rencontrerai rien qui ne me satisfasse pleinement,
si j'en excepte la première page, qui me défend d'espérer une plus
ample suite d'un ouvrage si galant, après cette quatrième partie. » —
L'abbé de Pure, dont Corneille, on vient de le voir, faisaitgrandcas, a
porté sur notre poète dans ce roman de la Précieuse un jugement par-
faitement motivé et exprimé en fort bons termes. Il mérite d'être
conservé comme un des rares témoignages du goût littéraire, à cer-
tains égards fort délicat, de cet abbé si sévèrement jugé; il se rattache
d'ailleurs de très-près à notre sujet, et nous pensons qu'on nous saura
gré de le donner ici. ce II ne reste plus, reprit Philonime, qu'à vous
demander quelle est la poésie que vous aimez. Aimez -vous...?
— Je vais vous interrompre et m 'interroger moi-même : ne vouliez
vous point me demander quel étoit le poète que j'aimois? — ■ C'est
cela même , répondit Philonime. — J'avoue , continua Eulalie , que
par-dessus tout et hors de pair, je mets Corneille. Je ne puis parler
de cet homme sans respect, sans vénération, et quand je devrois m'é-
riger en diseuse de grands mots, il faut cfue vous me permettiez de
m'acquitter d'une partie de ce que je crois lui devoir. Le théâtre n'a
jamais rien vu ni montré de si beau que ses ouvrages, l'esprit, la
conduite, le travail, les vers, et surtout les sentiments honnêtes et les
mouvements de la droite raison, y brillent avec tant d'éclat et de
douceur tout ensemble, que cela me paroît au delà de tous les
exemples, et au-dessus de toute imitation. Mon Dieu! poursuivit-elle,
que dira-t-on de ma présomption d'entreprendre de si mal louer un
si grand homme ? mais il faut que je me satisfasse aux dépens de tout
ce qui m'entend. Corneille, au dire même des grands hommes, a une
chose qui lui appartient à lui seul, qui lui est propre, et d où personne
n'a pu encore approcher : c'est qu'il n'y a rien de si divers, de si
changeant dans toutes ses pièces, qu'il n'unisse par des traits si adroits
et si bien ajustés qu'il semble que la suite soit naturelle et sans art,
et que les événements supposés sont confondus avec les véritables.
Jamais le vers ne le fait éloigner de la -chose ; jamais la rime ne
l'oblige d'extravaguer ; jamais les grands mots ne sont violemment
appliqués : tout y paroît naturel et lié, plutôt par l'ordre des choses
que de l'ouvrage, et par l'enchaînure des sujets que par les soins de
l'esprit; mais après lui j'aurois peine à dire du bien ou du mal de
tous les autres. » {La Preticuse, ou le Mystère des ruelles, dédiée à telle
qui n'y pense pas, i656, tome I, p. 357~36o.)
48o LETTRES.
au régiment de Grammont, et par conséquent tire sa
plus forte recommandation de l'hôtel de Grammont. Je
sais le pouvoir que vous y avez, et comme j'ai cru qu'il y
auroit quelque incivilité de vous prier de solliciter contre
un gentilhomme qui est créature de Monsieur le Maré-
chal, je vous ai écrit seulement pour vous prier1 d'affoi-
hlir le secours qu'il pourroit tirer de ce côté-là , et de
faire en sorte, s'il se peut, que2 l'affaire s'accommode par
votre moyen3. Ils étoient d'accord pour les intérêts ci-
vils et ses parties ont voulu longtemps remettre à moi
seul la satisfaction d'honneur; je n'ai pas voulu m'en
charger seul, et ai fait en sorte qu'ils ont nommé un
gentilhomme de leurs amis, à l'avis duquel j'ai passé pour
pacifier les choses. On nous a dédit l'un et l'autre à cause
que nous avons trouvé à propos que l'offensant deman-
dât pardon à l'offensé, bien que nous en ayons exténué la
manière pour la rendre la plus douce qu'il a été possible;
et je m'assure que si Monsieur le Maréchal 4 étoit en
France, et qu'il en daignât être seul juge, il la régleroit
en une forme plus avantageuse pour nous que nous ne la
demandons. L'outrage est grand, et intéresse toute notre
famille. Mon parent en poursuit la réparation au con-
seil , et outre la ruine qu'un si long procès leur appor-
tera , il a à craindre qu'ils ne se rencontrent. Ils sont
tous deux gens de cœur et de main, et de plus, proches
voisins, ce qui augmente le danger. J'avois donc donné
une lettre à ce6 parent pour vous, et l'avois adressé chez
i . Ces mots : « pour vous prier, » sont écrits dans l'interligne.
2 . Ici Corneille a écrit qu'il; puis il a effacé ces deux mots.
3. Ici Corneille a mis je vous.
4. Antoine III, comte, puis maréchal de Guiche, puis maréchal
de Gramont, mourut en 1678, âgé de soixante-quatorze ans. Au
moment où Corneille écrivait, le maréchal de Gramont était en Alle-
magne, en qualité d'ambassadeur, avec M. de Lionne.
5. Corneille a substitué ce à /non, qu'il avait écrit d'abord.
LETTRES. 481
M. Lamy, où il n'a pu vous rencontrer; ce n'est pas sans
doute celui dont M. Lucas1 vous a donné avis et à qui
vous avez rendu visite, puisqu'il ne vous a point rendu
de lettres de ma part. Je n'ai point eu des siennes2 depuis
quinze jours; il me mandoit que quelque assiduité qu'il
eût rendue au Palais, il n'avoitpu vous trouver; que sa
femme lui avoit mandé que ses parties étant retournées ,
l'avoient fait de nouveau rechercher d'accord par l'en-
tremise d'un capucin qui prêchoit l'octave en leur quar-
tier, et qui est frère de ma femme ; qu'il attendoit dans
deux jours quel effet auroit produit sa médiation, et
m'en donneroit avis : depuis ce temps-là je n'ai eu au-
cunes nouvelles ni de lui , ni du capucin mon beau-
frère 3; et je le crois retourné au pays. Néanmoins, puisque
vous avez déjà pris tant de peine en ma considération,
achevez4, s'il vous plaît, et prenez encore celle6 de l'en-
voyer chercher à son hôtellerie, et m'en faites savoir des
nouvelles. Il loge au Paon, tout contre la poste de Rouen,
où vous envoyez vos lettres , et comme je vous l'ai déjà
dit, il porte même nom que moi, et je regarde son
affaire comme si c'étoit la mienne. Je n'en ai écrit qu'à
M. de Boisrobert et à vous; mais si elle ne s'accorde,
j'en importunerai tous mes amis, et irai moi-même la
solliciter, si mes affaires et ma santé me le permettent.
J'abuse bien de votre bonté; mais aussi j'y prends une
confiance parfaite.
Mon frère vous salue, et travaille avec assez de cha-
t . Riche marchand de Rouen, frère du P. Lucas (voyez ci-dessus,
p. 299, note 2), et père du célèbre voyageur Paul Lucas. Voyez Notes
sur la vie de Corneille, par M. Edouard Fournier, p. xxvni.
2. Première rédaction : « de ses lettres. t>
3. Première rédaction : a qui est mon beau-frère. »
4. Ici Corneille avait écrit prenez; il a ensuite effacé ce mot.
5. Première rédaction : a prenez la peine. »
Coknetli.e. x 3i
482 LETTRES.
grin. Il ne donnera qu'une pièce cette année1. Pour moi,
la paresse me semble un métier bien doux, et les petits
efforts que je fais pour m'en réveiller s'arrêtent à la cor-
rection de mes ouvrages. C'en sera fait dans deux mois,
si quelque nouveau dessein ne l'interrompt. J'en voudrais
avoir trouvé un2, Je suis de tout mon cœur
Votre très-humble et rès-obligé serviteur,
Corneille.
Monsieur,
Je vous envoie un méchant sonnet que je perdis hier
au jeu contre une femme dont le visage et la voix valent
bien quelque chose8. C'est une bagatelle, que j'ai brouil-
lée4 ce matin. Vous en aurez la première copie. Il y a un
peu de vanité d'auteur dans les six derniers vers.
Suscription : A Monsieur, Monsieur l'abbé de Pure.
A Paris.
23. DE CORNEILLE A. l'aBBÉ DE PURE5.
A Rouen, ce 1 2 de mars 1659.
Monsieur,
Quelque pleine satisfaction que vous ayez reçue de la
1 . Les frères Parfait mentionnent à la fin de Tannée 1 658 (tome VIII,
p. 243 et suivantes) la Mort de Commode, tragédie de M. Corneille de
Lisle, représentée sur le théâtre du Marais.
2. Ce dessein ou sujet, Corneille le trouva dans YOEdipe, qui fut,
comme il nous l'a appris lui-même, « un ouvrage de deux mois, »
et qu'on représenta le vendredi 24 janvier i65g. Voyez tome VI,
p. 104 et io5, et la lettre suivante.
3. Voyez ci-dessus, p. 140. La personne qui a gagné ce sonnet, et
qui y est désignée sous le nom d'Iris, paraît être la du Parc.
4. On lit ici le mot à sous une rature.
5. L'original autographe de cette lettre se trouve à la Bibliothèque
impériale, fonds français, n° j 2763, Lettres originales, tome II, fol. i55
et i56.
LETTRES. 483
nouvelle représentation d'OEdipe*, je puis vous assurer
qu'elle n'égale point celle que j'ai eue à lire votre lettre,
soit que je la regarde comme un gage de votre amitié ,
soit que je la considère comme une pièce d éloquence
remplie 2 des plus belles et des plus nobles expressions
que la langue puisse souffrir. En vérité, Monsieur, quelque
approbation qu'aye emportée8 notre nouvelle Jocaste,
elle n'a point fait faire tant de ha ! ha ! dans l'Hôtel de
Bourgogne que votre lettre dans mon cabinet; mon frère
et moi les avons redoublés à toutes les lignes , et y avons
trouvé de continuels sujets d'admiration. Je suis ravi que
Mlle de Beauchâteau* aye si bien réussi ; votre lettre n'est
pas la seule que j'en ai vue : ou a mandé du Marais à mon
frère qu'elle avoit étouffé les applaudissements qu'on
donnoit à ses compagnons6, pour attirer tout à elle ; et
M. Floridor6 me confirme tout ce que vous m'en avez
mandé. Je n'en suis point surpris , et il n'est rien arrivé
que je ne lui aye prédit à elle-même , en lui disant adieu,
quand je sus l'étude qu'elle faisoit de ce rôle. Je souhaite
i, Voyez ci-dessus, p. 482, note 2.
2. Corneille avait écrit le mot pleine; il l'a effacé et l'a remplacé
par remplie.
3. Première rédaction : « reçue. »
4- Madeleine Dubouget, femme de François Chatelet, dit Beauchà-
leau. Elle avait créé le rôle de l'Infante dans le Cid (voyez tome III ,
p. i5), et avait joué Camille dans Horace (\oyez tome III, p. 202),
puis Erixe dans Sophonisbe (voyez tome VI, p. 4^2). Elle figure,
en 1674, en tête du tableau des noms des acteurs et actrices qui com-
posent présentement la troupe royale , par ordre d'ancienneté, dans le
Théâtre-François de Chapuzeau (p. 184).
5. A ses compagnes, dans les éditions modernes, ce qui est un éloge
beaucoup moins étendu.
6. Le comédien Floridor , qui très-probablement jouait le rôle
d'Œdipe, et qui, en sa qualité de chef de troupe, complimenta le
Roi lorsqu'il vint voir cette pièce. Voyez à ce sujet tome VI,
p 107-109; et sur Floridor et les pièces qu'il a jouées, tome II,
p. 427,. notes 2 et 3; tome W, p. 126; et tome VI, p. 4^2.
484 LETTRES.
seulement pouvoir trouver un sujet assez beau pour la
faire paroître dans toute sa force ; je crois qu'elle pren-
droit bien autant de soin pour faire réussir un original
qu'elle en a fait à remplir la place de la malade1. Je suis
marri de la difficulté que rencontre M. Bois[robert]2. A
ne vous rien[cach]er3, je ne suis point fâché d[e n'être]
point à Paris en ce rencontre où je me dans la nécessité
de désobliger un des deux. Le poste où est son opposant
est si considérable , que je crains pour lui qu'il ne fasse
venir bien des voix. Je souhaite d'apprendre bientôt qu'il
se soit relâché, et que notre ami ait eu ce qu'il demande,
avec l'agrément de tout le monde. Je suis de tout mon
cœur,
Monsieur,
Votre très-humble et très-affectionné serviteur,
Corneille.
Suscription : A Monsieur, Monsieur l'abbé de Pure,
à Paris.
i . On ne sait point quelle était cette malade.
2. Deux déchirures qui se sont faites dans le second feuillet de la
lettre, lorsqu'on l'a découverte, empêchent de lire la fin de ce nom
et quelques mots dont nous allons parler dans la note suivante.
3. Les mots ou portions de mots entre crochets sont des restitu-
tions. Dans le premier endroit les éditeurs ont mis celer; mais nous
croyons qu'il y a un peu trop d'espace pour lire ainsi, et nous pré-
férons cacher. La lacune que nous avons laissée est comblée par les
éditeurs au moyen du mot verrois , qui convient bien pour le sens ,
mais qui n'est assurément pas celui que Corneille avait écrit, Les
deux premières syllabes du mot qui manque commençaient chacune
par une lettre à queue descendante, peut-être jugerois.
LETTRES. 485
24. I>E CORNEILLE A L'ABBÉ DE PURE1.
A Rouen, ce 2 5 d'août 1660.
Monsieur,
Un petit séjour aux champs, et un peu d'indisposition
à2 la ville, m'ont empêché de vous remercier plus tôt du
dernier présent que vous m'avez fait. Je ne suis pas as-
sez récent de mon latin pour me vanter d'entendre tous
les mots choisis3 dont vous avez semé cet ouvrage ; mais
je me connois assez en ce genre de poésie pour assurer
qu'il y a des strophes dignes d'Horace. Il y en a quel-
ques-unes où vous avez un peu trop négligé le tour du
vers , qui n'a pas assez de facilité ; mais , à tout prendre,
c'est un très-beau travail , et un dessein tout à fait beau
de vous écarter de la route des autres. Si vous l'eussiez
exécuté en françois , il auroit eu une vogue merveil-
leuse. Le latin lui ôtera sans doute quelque chose; il est
si recherché qu'il n'est pas intelligible à ceux qui n'y
savent que le plain-chant *, il m'échappe en quelques lieux,
et je m'assure que u quelques-uns des lecteurs en sau-
ront encore moins que moi. Cependant trouvez bon que
je vous rende de très-humbles grâces, et de l'exemplaire
que vous m'en avez envové , et de la manière dont vous
y avez parlé de moi 6 .
1. L'original autographe de cette lettre se trouve aux folios 157
et i58 du recueil indiqué page 482, note 5. On a plusieurs lettres
de Thomas, qui, par leurs dates, se placent entre celle-ci et la pré-
cédente (n° 23). Dans l'une d'elles, du 4 avril i65(), on lit : « Mon
frère vous assure de ses services et a donné charge à M. Courbé de
vous porter son OEdlpe. »
2. En, dans les éditions modernes.
3. Première rédaction : « recherchés. »
4. Première rédaction : « que vous aurez x>
5. Nous n'avons pu voir ce recueil de poésies latines de l'abbé de
Pure ; nous ne l'avons même trouvé mentionné dans aucune des di-
verses listes de ses ouvrages que renferment les bibliographies. Les
486 LETTRES.
Je suis à la fin d'un travail fort pénible sur une ma-
tière fort délicate. J'ai traité en trois préfaces les prin-
cipales questions de l'art poétique sur mes trois volumes
de comédies1. J'y ai fait quelques explications nouvelles
d'Aristote , et avancé quelques propositions et quelques
maximes inconnues à nos anciens. J'y réfute celles2 sur
lesquelles l'Académie a fondé la condamnation du Cid,
et ne suis pas d'accord avec M. d'Aubignac de tout le
bien même qu'il a dit de moi. Quand cela paroîtra, je ne
doute point qu'il ne donne matière aux critiques : prenez
un peu ma protection. Ma première préface examine si
l'utilité ou le plaisir est 3 le but de la poésie dramatique ;
de quelles utilités4 elle est capable, et quelles en sont les
parties, tant intégrales, comme le sujet et les mœurs,
que de quantité, comme le prologue, l'épisode et
l'exode. Dans la seconde , je traite des conditions du su-
jet de la belle tragédie ; de quelle qualité doivent être les
incidents6 qui la composent, et les personnes qu'on y in-
troduit, afin d'exciter la pitié et la crainte; comment se
fait la purgation des passions par cette pitié et cette crainte,
lettres adressées à l'abbé de Pure que possède la Bibliothèque impé-
riale, et dont les quatre autographes de Corneille que nous reprodui-
sons ici sous les nos 23, 24, 26 et 27, ont autrefois fait partie, ne
nous ont fourni non plus aucun renseignement précis à ce sujet. Nous
avons seulement recueilli la mention suivante dans une lettre signée
Delacoste, et datée de Rouen le 18 juillet 1660 : « Je suis persuadé
que votre latin ne ressemble pas au mien, mais cela n'empêche pas
que je n'attende avec impatience celui que vous me devez envoyer.
Les illustres frères (Pierre et Thomas Corneille) et l'incomparable Bré-
beuf en ont autant que moi. » (Fonds français, n° 15209, folio 74
verso 0
1. Voyez les trois Discours sur le théâtre, tome I, p. i3-i22.
2. Corneille avait d'abord écrit les.
3. Corneille avait d'abord écrit sont.
4. Toutes les éditions donnent : « de quelle utilité, » au singulier.
5. Première rédaction : « des incidents. »
LETTRES. 4«7
et des moyens de tra iter les choses selon le vraisemblable
ou le nécessaire. Je parle, en la troisième, des trois uni-
tés : d'action1, de jour et de lieu. Je crois qu'après cela
il n'y a plus guère de question d'importance à remuer,
et que ce qui reste n'est que la broderie qu'y peuvent
ajouter la rhétorique , la morale et la politique.
En ne pensant vous faire qu'un remercîment , je vous
rends insensiblement compte de mon dessein. L'exécu-
tion en demandoit une plus longue étude que mon loisir
ne m'a pu 2 permettre. Vous n'y trouverez pas grande élo-
cution ni grande doctrine; mais, avec tout cela, j'avoue
que ces trois préfaces m'ont plus coûté que n'auroient
fait trois pièces de théâtre. J'oubliois à vous dire que je
ne prends d'exemples modernes que chez moi ; et bien
que je contredise quelquefois M. d'Aubignac et Mes-
sieurs de Y Académie , je ne les nomme jamais , et ne parle
non plus d'eux que s'ils n'avoient point parlé de moi 8.
J'y fais aussi une censure de chacun de mes poèmes en
particulier, où4 je ne m'épargne pas. Derechef, prépa-
rez-vous à être de mes protecteurs , et croyez que je suis
toujours,
Monsieur,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
Suscription : A Monsieur, Monsieur l'abbé de Pure,
à Paris.
i. Corneille avait écrit « de jour» en premier, puis il a effacé
ces deux mots.
2. N'a pu, dans toutes les éditions.
3. Corneille avait commencé la phrase suivante en écrivant Dere-
chef\ puis il a effacé ce mot.
4. Et, dans toutes les éditions
488 LETTRES.
25. DE CHAPELAIN A CORNEILLE1.
3o mars 1661.
Monsieur ,
Aussitôt que mon indisposition m'a permis de sortir, j'ai vu Ma-
dame la duchesse de Nemours sur le dessein de lui faire agréer un
de vos fils pour page2, et de la plus adroite manière que j'ai pu, je
lui ai proposé ce que vous souhaitiez d'elle. Votre mérite et sa con-
noissance m'ont facilité la négociation. Elle m'a même fait l'honneur
d'y considérer mon entremise et la part que je prends en vos intérêts.
Sa réponse a été qu'elle seroit bien aise de vous donner cette marque
de sa bienveillance, et du cas qu'elle fait de votre personne, lorsqu'il
y auroit une place vacante pour cela; qu'on l'avoit prévenue pour la
première; que néanmoins il ne seroit pas impossible qu'elle n'en
demeurât la maîtresse, et qu'en ce cas je vous pouvois assurer que
cette place seroit pour votre fils; mais que si elle étoit obligée de
tenir sa parole, la première d'après seroit pour lui 5. Je suis d'avis,
1. Voyez ci-dessus la Notice, p. 42^. M. Taschereau a publié
cette lettre à la page 177 de la seconde édition de son Histoire de la
vie et des ouvrages de P. Corneille.
2. Son second fils, tué au siège de Grave : voyez ci-dessus, p. 188,
note 4, et p. 189, note 2.
3. Le succès, comme le remarque M. Taschereau, fut plus prompt
que Chapelain lui-même n'avait osé l'espérer. Nous l'apprenons par
la Muse historique de Loret du 3o avril suivant. Sa lettre de ce jour-
là, intitulée: Equivocante, à cause d'un jeu de mots, qu'il a le bon
goût de ne pas défendre, commence ainsi :
ï Princesse, vous faites la grâce
Aux sieurs courtisans du Parnasse
D'avoir de l'estime pour eux,
Témoin cet instinct généreux
Qui vous a fait prendre pour page
Un jouvenceau de Rotomage * ,
Parce qu'il est le noble enfant
De Corneille, esprit triomphant,
Qui par les beaux vers de sa veine
A surpassé sur notre scène
Les poètes 'es mieux sensés,
* Rouen. (Note de Loret.)
LETTRES. 489
Monsieur, que vous lui écriviez une lettre fort respectueuse et fort
pleine de gratitude pour la faveur qu'elle vous fait, afin de l'en faire
souvenir et d'engager toujours la chose. Cependant il sera bon de la
tenir secrète, car on ne sait ce qui peut arriver, et il faut traiter dé-
licatement avec cette princesse, de l'humeur dont nous la connois-
sons. Vous me pourrez envoyer la lettre, que j'accompagnerai de
mes offices en la lui rendant 5 et un peu mieux que si c'étoit pour
moi-même. Je vous suis au reste obligé de m'a voir offert cette occa-
sion de vous témoigner que je suis véritablement,
Monsieur,
Votre, etc.
Chapelain.
Suscriptïon : À Monsieur Corneille l'aîné, à Rouen.
26. DE CORNEILLE A l'aBBÉ DE PURE1.
A Rouen, ce 3 de novembre 1661.
Monsieur,
A quoi pensez-vous de me donner une joie imparfaite,
et de me rendre compte de la moitié dune pièce si rare,
pour m'en faire attendre en vain l'achèvement ? Pensez-
Tant les présents que les passés.
Je n'entre point en compétence
Avec sa sublime science;
Mais sans faire ici l'important,
Je vous ai présenté pourtant,
En vous dédiant mes ouvrages,
Mille fois plus que lui des pages
Depuis pour le moins douze hivers,
Mais c'étaient des pages de vers.
Si l'équivoque est un peu plate,
Et non pas fine et délicate,
Excusez le peu qu'elle vaut,
Et lisez ceci bas ou haut. »
1. L'autographe de cette lettre se trouve aux folios i5o, et 160 du
recueil indiqué page 482, note 5.
490 LETTRES.
vous que ce que vous me mandez de trois actes ne me
rende pas curieux, voire impatient de savoir des nou
velles des trois qui restent1 ? C'est ce qui a différé ma ré
ponse, et la prière que j'ai à vous faire de ne vous con-
tenter pas du bruit que les comédiens font de mes deux
actes2, mais d'en juger vous-même et m'en mander votre
sentiment, tandis qu'il y a encore lieu à la correction.
J'ai prié Mlle des OEillets3, qui en est saisie, de vous les
montrer quand vous voudrez; et cependant je veux bien
vous prévenir un peu en ma faveur, et vous dire que si
le reste suit du même air4, je ne crois pas avoir rien écrit
de mieux. Mes deux héroïnes ont le même caractère de
vouloir épouser par ambition un homme pour qui elles
n'ont aucun amour, et le dire à lui-même ; et toutefois je
crois que cette ressemblance se trouvera si diversifiée par
la manière de l'exprimer, que beaucoup ne s'en 6 aper-
cevront pas. Elles s'offrent toutes deux à lui sans blesser
la pudeur du sexe ni démentir la fierté de leur rang. Les
i. « De ceux qui restent, » dans toutes les éditions ; mais il y a bien
dans l'autographe : «des trois qui restent, » soit que Corneille ait, ce
qui semble fort probable , écrit la seconde fois trois , pour deux ;
soit que de Pure ait composé une pièce avec prologue qu'on ait pu
considérer comme étant en six actes. Il est du reste à peu près certain
que cet ouvrage n'a jamais été représenté ni même imprimé, car de Pure
n'est connu comme auteur dramatique que par sa tragédie à'Ostorius,
publiée en 1659 chez Guillaume de Luyne, et dont les frères Parfait
rendent compte dans leur Histoire du Théâtre franc ois (tome VIII,
l>. 2 8 3 et suivantes).
2. Les deux premiers actes de Sertorius , tragédie de Pierre Cor-
neille représentée à la fin de février 1662. Voyez tome VI, p. 353
et suivantes.
3. Actrice de l'Hôtel de Bourgogne (voyez tome VI, p. 355), qui
joua plus tard avec un grand succès le rôle de Sophonisbe (voyez
tome VI, p. 452). Elle mourut le 25 octobre 1670, à l'âge de qua-
rante-neuf ans.
4- « Du même art, » dans toutes les éditions.
5. L'j, au lieu de s'en, dans toutes les éditions.
LETTRES. 491
vers en sont assez, forts et assez nettovés, et la nou-
veauté de ce caractère pourra ne déplaire pas, si elle est
bien soutenue par le reste de l'action. Je vous ai déjà
parlé de Tune, qui étoit femme de Pompée. Sylla le força
de la répudier pour épouser Emilia, fille de sa femme
et d'Emilius Scaurus, son premier mari. Plutarque et
Appian la nomment Antistie, fille du préteur Autistius.
Un évêque espagnol, nommé Joannes Gerundensis, la
nomme Aristie, et son père Aristius * . Je ne doute point
qu'il ne se méprenne ; mais à cause que le mot est plus
doux, je m'en suis servi, et vous en demande votre avis
et celui de nos savants amis. Aristie a plus de douceur,
mais il sent plus le roman. Antistie est plus dur aux
oreilles, mais il sent plus l'histoire et a plus de majesté.
Quicl juris*? J'espère dans trois ou quatre jours avoir
achevé le troisième acte. J'y fais un entretien de Pompée
avec Sertorius que les deux premiers préparent assez,
mais je ne sais si on en pourra souffrir la longueur. Il
est de deux cent cinquante-deux vers3. Il me semble que
deux hommes tels qu'eux, généraux de deux armées
ennemies, ne peuvent achever en deux mots une confé-
rence si attendue durant une trêve4. On a souffert Ginna
et Maxime, qui en ont consumé davantage à consulter
avec Auguste. Les vers de ceux-ci me semblent bien
aussi forts et plus pointilleux , ce qui aide souvent au
théâtre, où les picoteries soutiennent et réveillent l'atten-
[. Voyez tome VI, p. 358, note 2.
2. Formule usitée dans la langue du droit, qui répond tout sim-
plement ici à : « Qu'en pensez-vous? qu'en jugez-vous? »
3. Voyez tome VI, p. 3g5, à la fin de la note 1.
4- Tout ce passage a été fort mal donné par les éditeurs de Cor-
neille ; voici leur texte : « Il me semble que deux hommes belli-
queux ne peuvent achever en deux mots une conférence si long-
temps attendue, v Ils ont supprimé les mots : « durant une trêve, »
qui étaient un peu difficiles à lire.
49* LETTRES.
tion de l'auditeur. Mon autre héroïne n'est pas si histo-
rique qu'Aristie, mais elle ne laisse pas d'avoir son fon-
dement en l'histoire1 . Je la fais fille de ce Viriatus qui
défit tant de fois les Romains en Espagne2, et fut enfin
défait douze ou quinze ans avant la venue de Sertorius,
qui fut particulièrement assisté par les Lusitaniens , qui
étoient les compatriotes de ce grand capitaine, que j'en
fais roi, bien que l'histoire n'en fasse qu'un chef de bri-
gands , qui enfin combattit en corps d'armée. J'ai plus
besoin de grâce pour Sylla, qui mourut et se démit de
sa puissance avant la3 mort de Sertorius; mais sa vie est
d'un4 tel ornement à mon ouvrage pour justifier les armes
de Sertorius, que je ne puis m' empêcher de le ressusci-
ter. Mon auteur moderne, Joannes Gerundensis, le fait
vivre après Sertorius ; mais il se trompe aussi bien qu'au
nom d'Aristie. Je ne demande point votre avis sur ce
dernier point, car quand ce seroit une faute, je mêla
pardonne, ignosco egomet mi. Adieu, notre ami : aimez-
moi toujours, s'il vous plaît, et me tenez pour
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
Suscription : A Monsieur, Monsieur l'abbé de Pure,
à Paris.
i. Voyez tome VI, p. 35g.
2. Voyez tome VI, p. 36o.
3. Première rédaction : « un peu avant la. »
4* Première rédaction : « il sert d'un. »
LETTRES. 493
27. DE CORNEILLE A l'aBBE DE PURE1.
A Rouen, ce »5 d'avril [1662].
Monsieur,
L'estime et l'amitié que j'ai depuis quelque temps
pour Mlle Marotte 2 me fait vous avoir une obligation
très-singulière de la joie que vous m'avez donnée en
m'apprenant son succès et les merveilles de son début.
Je l'avois vue ici représenter Amalasonte1 , et en avois
conçu une assez haute opinion pour en dire beaucoup
de bien à M. de Guise * quand il fut question, vers la mi-ca-
rême, de la faire entrer au Marais; mais ce que vous m'en
mandez passe mes plus douces espérances, et va si loin,
que mes amis, à qui j'ai fait part de votre lettre, veulent
mal gré que vous en aviez un peu le cœur navré quand
vous m'avez écrit5. Puisque MM. Boyer et Quinault sont
1. L'autographe de cette lettre se trouve aux folios i53 et i54 du
recueil indiqué page 482, note 5.
2 . Marotte Beaupré, très-jolie actrice, nièce de la Beaupré, de l'« ex-
cellente comédienne, qui a joué dans les commencements de la grande
réputation de M. Corneille, » dit Segrais dans ses Mémoires-anecdotes .
Voyez sur la demoiselle Marotte et sur sa tante un long article dans
Molière et sa troupe, par H. A. Soleirol (p. 70-75). L'auteur, faute
d'avoir connu la lettre de Corneille, fixe par conjecture l'entrée de
Marotte au théâtre du Marais à Pâques 1639.
3. Tragédie de Quinault, représentée pour la première fois à Paris
en 1657, et jouée, à ce qu'il paraît, à Rouen, en i658, par la troupe
de Molière, dont Marotte faisait alors partie.
4. Henri II de Lorraine, duc de Guise, mort le 2 juin ï664- Voyez,
ci-dessus, p. 182-184.
5 . Cette rédaction un peu obscure est bien la reproduction exacte
du texte autographe. Corneille avait d'abord écrit que avant mal gré,
et moi après; mais il a soigneusement effacé ces deux mots, qui d'ail-
leurs n'expliqueraient rien. Les éditeurs ont mis tout à fait arbitrai-
rement : « Mes amis, à qui j'ai fait part de votre lettre, veulent la lui
communiquer malgré que vous en aviez un peu le cœur navré. » Sur
quoi M. Parrelle dit en note : « Cette locution ne serait pas reçue
aujourd'hui. »
494 LETTRES.
convaincus de son mérite, je vous conjure de les obli-
ger à me montrer bon exemple; car outre que je serai
bien aise d'avoir quelquefois mon tour à l'Hôtel, ainsi
qu'eux, et que je ne puis manquer d'amitié à la reine
Viriate1, à qui j'ai tant d'obligation, le déménagement
que je prépare pour me transporter à Paris2 me donne
tant d'affaires, que je ne sais si j'aurai assez de liberté
d'esprit pour mettre quelque chose cette année sur le
théâtre*. Ainsi, si ces Messieurs ne les secourent, ainsi
que moi, il n'y a pas d'apparence que le Marais se réta-
blisse; et quand la machine *, qui est aux abois, sera tout
à fait défunte , je trouve que ce théâtre ne sera pas en
trop6 bonne posture. Je ne renonce pas aux acteurs6 qui le
soutiennent ; mais aussi je ne veux point tourner le dos tout
à fait à Messieurs de l'Hôtel7, dont je n'ai aucun lieu de
me plaindre, et où il n'y a rien à craindre quand une pièce
est bonne. Ils aspirent tous à y entrer, et ils ne sont pas
i . Probablement Mlle des OEillcts. Voyez ci-dessus, p. 49° > note 3 ;
et tome VI, p. 355.
2. Corneille, au commencement du mois d'octobre, n'était pas
encore établi à Paris. Voyez les premières lignes de la lettre suivante.
3. Sophonisbe, la première des pièces de Corneille représentée après
qu'il eut écrit cette lettre, ne fut jouée qu'au mois de janvier i663.
4- La Toison d'or de Corneille, jouée au théâtre du Marais au
mois de février 1661 , fut rejouée l'année suivante jusque vers la fin
de février. Voyez tome VI, p. 225-227.
5. Ce mot trop manque dans toutes les éditions.
6. Première rédaction : « je trouve que ces Messieurs ne seront
pas en trop bonne posture. Je ne renonce pas à eux. »
7. Tallemaut des Réaux a remarqué avec quel soin Corneille
s'est appliqué à maintenir les deux troupes (voyez notre tome I ,
p. 258). — Notre poêle avait à se louer, non-seulement de la ma-
nière dont les comédiens de l'Hôtel jouaient ses pièces, mais du res-
pect et de l'admiration que certains d'entre eux lui témoignaient
publiquement. Voici en quels termes s'exprime, en tête d'une tragi-
comédie intitulée : le Festin de pierre ou le Fils criminel, publiée a
Amsterdam en 1660, le sieur de Villiers , qui était, ainsi qu'il le
LETTRES. /,95
assez injustes pour exiger de moi un attachement qu'ils
ne me voudraient pas promettre. Quelques-uns , à ce
qu'on m'a dit, ont pensé passer au Palais-Royal. Je
ne sais pas ce qui les a retenus au Marais; mais je sais
bien que ce n'a pas été pour l'amour de moi qu'ils y
sont demeurés. J'appris hier que le pauvre Magnon1 est
déclare lui-même dans l'avis au Lecteur, « un des comédiens de la
seule troupe royale, et seule entrenue par Sa Majesté. »
A Monsieur de Corneille, à ses heures perdues.
« Monsieur, si vous jugez de moi comme vous devez, vous ne
croirez jamais que je me puisse persuader qu'il y ait rien de bon
goût dans ce Festin. Ce n'est point du tout dans cette créance que je
vous dédie cette pièce, c'est un hommage que je vous dois et que je
vous rends, non pas en qualité de votre confrère en Apollon, comme
vous avez voulu dire par raillerie, mais en celle d'un rimailleur, qui
ne devoit rien mettre au théâtre sans votre aveu.... D'abord que l'on
entonnera dans le Palais : « Yoilà le Festin de pierre ou le Fils cri-
« minel, » mille personnes qui ne voudroient pas faire un pas pour
prendre part à ce Festin dans l'Hôtel de Bourgogne, en attendant
leur rapporteur ou leur avocat, verront au moins, à l'ouverture de
ce livret, de quelle façon je vous honore, et qu'en vous seul je ré-
vère plus qu'Aristote, plus que Sénèque, plus que Sophocle, plus
qu'Euripide, plus que Térence, plus qu'Horace, plus que Plaute, et
généralement plus que tous ceux qui se sont mêlés de donner des
règles à notre théâtre. »
I. Nous lisons dans la Muse historique de Loret du 29 avril 1662 :
Magnon, esprit tout plein de feu,
Fut assassiné depuis peu,
C'est-à-dire l'autre semaine,
Vers, dit-on, la Samaritaine.
Ce Magnon était un poète tragique , qui avait eu un instant l'inten-
tion de traiter le sujet de Stilicon, puis s'était retiré devant Thomas
Corneille, qui nous a appris ce fait en ces termes dans une lettre du
Ier décembre ir>5g, adressée à l'abb? de Pure : « Je ne saurois assez
vous remercier du soin que vous vous êtes donné de voir M. Ma-
gnon en ma faveur. Je vous l'aurois néanmoins épargné, si j'eusse
prévu que M. de la Coste eût dû vous écrire sur le bruit qui couroit
d'un double Stilicon. J'en ai assez bien jugé pour avoir toujours cru
que c'étoit une fausse alarme, et vous m'auriez rendu un mauvais
\96 LETTRES.
mort de ses blessures. Je le plains, et suis de tout mon
cœur,
Monsieur,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
Suscription : A Monsieur, Monsieur l'abbé de Pure ,
à Paris.
28. DE CHAPELAIN A CORNEILLE1.
4 octobre 1662.
Monsieur,
Vous tardez trop à venir vous établir à Paris2, et je ne saurois
plus vous attendre pour vous remercier de bouche du présent exquis
que votre jeune page5 m'a fait de votre part. La beauté de Sertorius,
qui m'a paru encore plus grande sur le papier que sur le théâtre,
me sollicite trop puissamment de vous en témoigner ma reconnois-
sance 4. Elle est proportionnée au mérite de la pièce, c'est-à-dire
qu'elle est extrême, jusques à m'ôter le moyen de l'exprimer. Mais
vous, Monsieur, qui entrez si bien dans le cœur de vos personnages,
vous n'aurez pas de peine à entrer dans le mien, et vous vous direz
office auprès de M. Magnon, si vous lui aviez laissé croire que j'eusse
besoin de l'assurance qu'il me donne pour n'appréhender pas le
péril de la contrefaçon. Je reçois sa lettre comme une civilité obli-
geante , et je lui ferois tort si , doutant qu'il fût capable de se man-
quer à soi-même , je me persuadois que la considération de mes
intérêts eût contribué quelque chose à l'éloigner d'une entreprise
qu'on lui a faussement imputée. »
1. Voyez ci-dessus la Notice, p. 425. — M. Taschereau a publié
nette lettre aux pages i83 et 184 de la seconde édition de son His-
toire de la vie et des ouvrages de P. Corneille,
2. Voyez ci-dessus, p. 494 et note 2»
3. Son second fils, page de la duchesse de Nemours. Voyez ci-
dessus, p. 488.
4 • Chapelain devait en effet avoir reçu depuis un certain temps déjà
le volume de Sertorius,, dont l'Achevé d'imprimer est du 8 juillet 1662.
LETTRES. 497
pour moi ce que je ne vous puis assez bien dire. Vous penserez,
s'il vous plaît, la même chose de Conrart, à qui j'ai envoyé le même
régal en votre nom, et qui vous en auroit rendu ses grâces lui-même
s'il avoit les mains assez libres et s'il en disposoit aussi bien que de
son esprit1. Il m'a fait conjurer de ne vous laisser pas ignorer sa
gratitude, et vous la croirez aisément d'un aussi homme d'honneur
et autant votre admirateur que lui. Il vous le dira de sa propre
bouche quand vous serez tous deux ici. C'est de quoi je ne le presse
pas moins que vous, vous y souhaitant également pour ma joie; car
je ne suis pas moins touché de votre vertu que de la sienne, ni ne
suis pas plus son ami que je ne suis,
Monsieur,
Votre, etc.
Chapelain.
29. DE CORNEILLE
A MONSIEUR DE SAINT-ÉVREMOND2.
[1666.]
Monsieur ,
L'obligation que je vous ai est d'une nature à ne pou-
voir jamais vous en remercier dignement3; et dans la
confusion où j'en suis4, je m'obstiuerois encore dans le si-
lence , si je n'avois peur qu'il ne passât auprès de vous
pour ingratitude. Bien que les suffrages de l'importance
j. Valentin Conrart, l'un des premiers académiciens , mort le
?.3 septembre 1675. « Mille raisons, dit d'Olivet, peuvent mettre ob-
stacle à la fécondité des meilleures plumes; et une partie tout au moins
de ces raisons avoit lieu à l'égard de M. Conrart , qui fut horrible-
ment goutteux les trente dernières années de sa vie. » ( Histoire de
ï Académie française, édition de M. Livet, tome II, p. 141 •)
a. Voyez ci-dessus la Notice, p. 422 et 4^3.
3. Corneille adressa cette lettre à Saint-Évremond pour le remer-
cier de l'éloge qu'il avait fait de Sophonisbe dans sa Dissertation sur
/'Alexandre de Racine. On trouvera le morceau dont il est question ici
dans notre tome VI, p. 4^7> note *•
1 Je suis, dans les OEuvres diverses et les éditions suivantes.
Corneille, x 3 t.
498 LETTRES.
du vôtre nous doivent toujours être très-précieux, il y a
des conjonctures qui en augmentent infiniment le prix.
Vous m'honorez de votre estime en un temps où il semble
qu'il y ait un parti fait pour ne m'en laisser aucune. Vous
me soutenez, quand on se persuade qu'on m'a abattu1;
et vous me consolez glorieusement de la délicatesse Je
notre siècle , quand vous daignez m' attribuer le bon goût
de l'antiquité. C'est un merveilleux avantage pour un
homme qui ne peut douter que la postérité ne veuille
bien s'en rapporter à vous. Aussi je vous avoue, après
cela, aue je pense avoir quelque droit de traiter de ridi-
cules ces vains trophées qu'on établit sur le débris ima-
ginaire2 des miens, et de regarder avec pitié ces opi-
niâtres entêtements qu'on avoit pour les anciens héros
refondus à notre mode.
Me voulez- vous bien permettre d'ajouter ici que vous
m'avez pris par mon foible , et que ma Sophonisbe, pour
qui vous montrez tant de tendresse, a la meilleure part
de la mienne? Que vous flattez agréablement mes senti-
ments, quand vous confirmez ce que j'ai avancé touchant
la part que l'amour doit avoir dans les belles tragédies,
et la fidélité avec laquelle nous devons conserver à ces
vieux illustres ces caractères de leur temps, de leur na-
tion et de leur humeur! J'ai cru jusques ici que l'amour
étoit une passion trop chargée de foiblesse pour être la
dominante dans une pièce héroïque; j'aime qu'elle y
serve d'ornement, et non pas de corps, et que les grandes
âmes ne la laissent agir qu'autant qu'elle est compatible
avec de plus nobles impressions. Nos doucereux et nos
enjoués sont de contraire avis ; mais vous vous déclarez
i. « Qu'on m'a battu, » clans les mêmes impressions.
2. et Les débris imaginaires, » dans l'édition de Lefèvre et dans
quelques autres.
LETTRES. 499
du mien : n'est-ce pas assez pour vous en être redevable
au dernier point , et me dire toute ma vie,
Monsieur ,
Votre très-humble et très-obéissant serviteur,
Corneille.
3o. DE SAÏNT-ÉVREMOND A CORNEILLE1.
Monsieur,
Je ne doute pas que vous ne fussiez le plus reconnoissant homme
du monde d'une grâce qu'on vous feroit, puisque vous vous sentez
obligé d'une justice qu'on vous rend. Si vous aviez à remercier tous
ceux qui ont les mêmes sentiments que moi de vos ouvrages, vous
devriez des remercîments à tous ceux qui s'y connoissent. Je vous
puis répondre que jamais réputation n'a été si bien établie que la
votre en Angleterre et en Hollande. Les Anglois, assez disposés natu-
rellement à estimer ce qui leur appartient, renoncent à cette opinion
souvent bien fondée, et croient faire honneur à leur Ben Johnson 2
de le nommer le Corneille de l'Angleterre. M. Waller5, un des plus
i. Cette lettre est tirée du même recueil que la précédente. Elle
parvint à Corneille par l'intermédiaire du comte de Lionne, à qui
Saint-Evremond s'adresse en ces termes: « Je suis fort obligé à Mon-
sieur Corneille de l'honneur qu'il me fait. Sa lettre est admirable, et
je ne sais s'il écrit mieux en vers qu'en prose. Je vous supplié de lui
rendre ma réponse, et de l'assurer que personne au monde n'a tant
dVstime pour tout ce qui vient de lui, que moi. »
i. Ben ou Benjamin Jonson, célèbre auteur dramatique anglais,
né à Londres en 1 574 > mort en 1637.
3. Edmond Waller, poëte anglais, né en ifio5, mort le 21 octobre
1687. Réfugié pendant quelque temps en France, il habita Rouen,
où il put connaître Corneille; il faisait partie, dans les dernières
années de sa vie, du petit cercle tout français formé à Londres par
les duchesses de Bouillon et de Mazarin. La Fontaine , dans une
lettre à Saint-Evremond, datée du 18 décembre 1687, fait en ces
termes l'éloge du poëte anglais :
Cet homme sut en quatre arts exceller :
Amour et vers, sagesse et beau parler
5oo LETTRES.
beaux esprits du siècle, attend toujours vos pièces nouvelles, et
ne manque pas d'en traduire un acte ou deux en vers anglois pour
sa satisfaction particulière. Vous êtes le seul de notre nation dont
les sentiments ayent l'avantage de toucher les siens. Il demeure d'ac-
cord qu'on parle et qu'on écrit bien en France : il n'v a que vous,
dit-il, de tous les François qui sache penser. M. Vossius*, le plus
grand admirateur de la Grèce, qui ne sauroit souffrir la moindre com-
paraison des Latins aux Grecs, vous préfère à Sophocle et à Euripide.
Après des suffrages si avantageux, vous me surprenez de dire que
votre réputation est attaquée en France. Seroit-il arrivé du bon goût
comme des modes, qui commencent à s'établir chez les étrangers,
quand elles se passent à Paris ? Je ne m'étonnerois point qu'on prît
quelque dégoût pour les vieux héros, quand on en voit un jeune qui
efface toute leur gloire2. Mais si on se plaît encore à les voir repré-
senter sur nos théâtres, comment peut-on ne pas admirer ceux qui
viennent de vous? Je crois que l'influence du mauvais goût s'en va
passer; et la première pièce que vous donnerez au public fera voir,
par le retour de ses applaudissements, le recouvrement du bon sens
et le rétablissement de la raison. Je ne finirai pas sans vous rendre
grâces très-humbles de l'honneur que vous m'avez fait. Je me trou-
verais indigne des louanges que vous donnez à mon jugement ; mais
comme il s'occupe le plus souvent à bien connoître la beauté de vos
ouvrages, je confonds nos intérêts , et me laisse aller avec plaisir à
une vanité mêlée avec la justice que je vous rends.
I. Isaac Vossius, né à Leyde en 1618, bibliothécaire de Christine
de Suède, disgracié par l'influence de Saumaise, fit partie de la société
de la duchesse de Mazarin, comme le prouvent ces vers de Saint-
Evremond :
Qu'est devenu le temps heureux
Où la raison d'accord avec vos plus doux vœux,
Où les discours sensés de la philosophie
Partageoient les plaisirs de votre belle vie ?
Vossius apportoit un traité de la Chine,
Où cette nation paroît plus que divine.
(Epitre à Madame la duchesse de Mazarin sur la bassette.)
Nommé par Charles II, en 1673, chanoine de Windsor, il mourut
en 1689.
a. Allusion aux victoires de Louis XIV.
LETTRES. 5oi
3r. DE CORNEILLE A COLBERT1.
[1678V]
Monseigneur ,
Dans le malheur qui m'accable , depuis quatre ans , de
n'avoir plus de part aux gratifications dont Sa Majesté
honore les gens de lettres, je ne puis avoir un plus juste
et plus favorable recours qu'à vous, Monseigneur, à qui
je suis entièrement redevable de celle que j'y avois. Je
ne l'ai jamais méritée, mais du moins j'ai tâché à ne
m'en rendre pas tout à fait indigne par l'emploi que j'en
ai fait. Je ne l'ai point appliquée à mes besoins particu-
liers , mais à entretenir deux fils dans les armées de Sa
Majesté, dont l'un a été tué pour son service au siège de
Grave; l'autre sert depuis quatorze ans, et est mainte-
nant capitaine de chevau-légers1. Ainsi, Monseigneur, le
retranchement de cette faveur , à laquelle vous m'aviez
accoutumé, ne peut qu'il ne me soit sensible au dernier
point, non pour mon intérêt domestique, bien que ce
soit le seul avantage que j'ay e reçu de cinquante années de
travail , mais parce que c'étoit une glorieuse marque de
l'estime qu'il a plu au Roi faire du talent que Dieu m'a
donné , et que cette disgrâce me met hors d'état de faire
encore longtemps subsister ce fils dans le service où il a
consumé la plupart de mon peu de bien pour remplir
avec honneur le poste qu'il y occupe. J'ose espérer, Mon-
seigneur, que vous aurez la bouté de me rendre votre
i. Voyez ci-dessus la Notice, p. 423. — Cette lettre se trouve aux
folios i5i et i5s du recueil indiqué page 482, note 5.
2. Pour cette date, voyez la note suivante.
3. Voyez ci- dessus, p. 188, note 4- — C'est, comme l'a remarqué
M. Edouard Fournier, la date bien certaine de 1664, pour l'entrée du
fils aîné de Corneille au service, qui fixe à l'année 1678 la présente
lettre, qu'on avait regardée comme postérieure à cette époque.
5o2 LETTRES.
protection, et de ne pas laisser détruire votre ouvrage.
Que si je suis assez, malheureux pour me tromper daus
cette espérance, et demeurer exclu de ces grâces qui me
sont si précieuses et si nécessaires, je vous demande cette
justice de croire que la continuation de cette mauvaise
influence n'afîbiblira en aucune manière ni mon zèle
pour le service du Roi, ni les sentiments de reconnois-
sance que je vous dois pour4 le passé, et que, jusqu'au
dernier soupir, je ferai gloire d'être, avec toute la pas-
sion et le respect possible,
Monseigneur ,
Votre très-humble, très-obéissant
et très-obligé serviteur,
Corneille.
i. Par, dans l'édition de Lefèvre et dans quelques autres.
APPENDICE DES LETTRES.
DE CORNEILLE A ROTROU1.
A2 Rouen, ce 14 juillet 1637.
La raison, mon cher ami, n'a jamais eu d'empire5 ni sur les fous4,
ni sur les sots, et voilà juste pourquoi elle peut être d'usage quelque
peu pour8 les gens sensés; ayant l'approbation de ceux-ci et la vôtre,
qui est tout ce que je souhaite, je ne dois donc éprouver6 aucune
peine des extravagances que débitent les premiers. L'envie peut en-
core aller 7 se joindre à eux sans que j'aye pour cela un moindre
souci8. Si le Cid est jugé par l'Académie, et s'il est jugé avec impar-
tialité, quel que soit son jugement, je ne dois voir en cette intention
qu'une entreprise qui m'honore9; mais j'ai bonne raison, je vous
assure, mon ami, de craindre que cet aréopage ne se laisse in-
fluencer par celui qui les a fait (sic) ce qui (sic) sont ,0. Ne croyez pas
1. Voyez ci-dessus la Notice, p. 416-418. Cette lettre a été publiée très-
exactement, en janvier 1857, dans le Bulletin du bibliophile, p. 28 et 29.
•2. Ce mot A a été supprimé devant Rouen par Lefèvre.
3. « N'a point d'empire. » (Lefèvre.)
4. « N'a jamais eu d'énergie ni sur les forts, » en tète du Corneille a lu
butte Saint-Rock de M. Edouard Fournier, p. cxv.
5. « Et voilà tout juste pourquoi elle est d'usage quelque peu parmi. »
[Lefèvre.)
6. a Leur suffrage et le vôtre, qui est ce que je souhaite le plus, ne me
permet pas d'éprouver. » (Lefèvre.)
7. « L'envie peut aller, si elle veut. » (Lefèvre.)
8. « Le moindre souci. » (M. Fournier.) — « Sans que j'en aye aucun
souci. » (Lefèvre.)
9. « Le Cid doit être jugé par l'Académie-, et si ce jugement, tel qu'il soit,
se fait sans partialité, je n'aurai pas à me plaindre d'une entreprise dontl'in-
teution m'honore. » (Lefèvre.)
10. a Ne se laisse diriger par celui qui les a faits ce qui sont. » (M. Four-
nier.) — « M-iis je vous avoue, mon ami, que je dois peu compter sur la jus-
5o4 APPENDICE DES LETTRES.
que ' Chapelain et Sirmon a se dédisent : ils sont trop près de leur
maître pour penser autrement que lui. Enfin je vous promets que je
suis5 moins occupé de ma pièce que d'apprendre ce que vous faites4.
M. Jourdy m'a conté5 les plus belles choses de son voyage de Dreux,
et me donne grande 6 envie de venir vous voir dans votre belle
famille, mais c'est un plaisir que je ne saurai avoir encore7 de long-
temps8, vu que je veux vous montrer une nouvelle pièce qui est loin
d'être finie. Adieu, mon cher ami ; mandez-moi de vos nouvelles9
plus souvent, et croyez que vous me comblez de joie quand je reçois
des vôtres.
CoRNETM/E.
Suscription : A Monsieur J. de Rotrou, à Dreux.
tice de l'aréopage placé sous l'influence de celui qui les a faits ce qu'ils sont. »
{Lefèvre.)
I. Lefèvre ajoute ici Messieurs.
i. Serizay, Chapelain et Sirmond avaient été chargés de rédiger les Senti-
ments de V Académie sur le Cid. Voyez tome III, p. 35 et 36.
3. M. Fournier ajoute ici encore.
4. « Ils sont trop près du maître. Au surplus je m'inquiète peu de toutes
ces choses. » [Lefèvre.)
5. « Raconté. » {Lefèvre.')
6. Grande manque dans le texte de M. Fournier.
7. Encore manque également dans le texte de M. Fournier.
8. « de ce qu'il a vu à Dreux. J'aurois intention d'aller voir votre belle
famille ; mais je ne l'espère pas de sitôt. [Lefèvre.)
9. « Des nouvelles. » (M. Fournier.) — C'est à peine si cette correction rend
supportable cette dernière phrase, encore singulièrement gauche. Lefèvre a en-
tièrement modifié le passage précédent et a remplacé tout ceci par des points.
Voici son texte : « Je suis occupé d'une nouvelle pièce que je veux vous mon-
trer et qui est bien loin d'être terminée. ...
P. Corneille. »
TABLE
ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
DES OEUVRES DE CORNEILLE
TABLE
ALPHABETIQUE ET ANALYTIQUE
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
N. B. Les chiffres romains indiquent les tomes; les chiffres arabes qui les
suivent ou qui sont précédés d'un point et virgule marquent les pages ; les
chiffres arabes qui sont précédés d'une virgule après un autre chiffre arabe ,
les vers.
Ajete, Ajetès , roi de Colchos ,
personnage de la Toison d'or,
VI, 221-349.
Aaron, IX, 24, 3i5 ; 317, 69 et
83.
Aeigaïl, femme de Nabal, IX,
32,4^5; 34>48">- ; 36, 5ai.
Abraham, I, 90; IX, i59, 22;
225, 38; 23g, 4; 3n, 1 ; 55y,
11; 600, 435, — Le sacrifice
d'Abraham, VIII, 449.
Abraham (saint), VIII, 44°-
Absyrte, fils d'Aœte , person-
nage de la Toison d'or, VI,
221-349.
Académie Françoise (1'). Ses Sen-
timents sur le Cad; Corneille ne
l'a point, dit-il, choisie pour
arbitre, III, 83-85. — Frag-
ments de lettres de Corneille à
Bois-Robert au sujet de l'exa-
men du Cid par l'Académie
françoise, X, 427~432. — Il
avait l'intention de répondre à
la critique de l'Académie, mais
Bois-Rôbert lui a conseillé de ne
point le faire, X, 43 1. — Cor-
neille réfute les maximes sur
lesquelles l'Académie fondait la
condamnation du Cid, X, 486.
— Discours de réception de
Corneille, X, ^oy-^n. — Ri-
chelieu confie aux soins de
l'Académie la pureté d'une
langue qu'il veut faire en-
tendre et dominer par toute
l'Europe, X, 4IO«
Acaste, roi d'Iolcos, II, 346,
102 et 108 et 121 ; 347, x^6
(var.); 366, 5i6; 384 (var.).
Acaste, nom d'homme men-
tionné dans la Veuve, I, 490
(var.).
Accurse, jurisconsulte, IV, i58,
328.
Acheron (1'), II, 35o, 210.
Achillas, lieutenant général des
armées du roi d'Egypte, per-
sonnage de Pompée, IV, i-ii5.
Achille, I, 28; 3i-33; 37; VI,
122, 41 ; X, 70, 61 ; 118, 49*
Achorée, écuyer de Cléopatre,
r>o8 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
personnage de Pompée , IV,
i-ii5;I, io3 et 104 ; II, 337.
Acte (le premier) doit contenir
les semences de tout ce qui
doit arriver, 1 , 42 et 43- —
Actes d'un poëme dramatique,
I, 107.
Action (1'), dans un poème dra-
matique, doit avoir une juste
grandeur, I, 29.
Action {Discours des trois unités
d'), de jour et de lieu, I, 98-1 22 .
Actium (la bataille d'), I, 89.
Adam, le premier homme, VIII,
198; 467, 4°5; IX, 35, 5o4;
519, 6. — Le vieil Adam, le
vieil homme, VIII, 439, 3654 >
449, 3877.
Adam Billault. Voyez Btllault.
Adonis, II, 372, 642; VII,
36o, 1871.
Adraste , personnage de l'Illu-
sion, II, 4^1-527.
Adrian (saint), VIII, 496 •
tEgée, roi d'Athènes, personnage
de Médée , II, 327-419. — Il
est mentionné dans OEdipe ,
VI, I90, l322.
jEmon, fils deCréon, VI, 141,
182; 142, 191; i43, 212 et
224; ï45j 265; 146, 278 et
282 et 288; i5a , 4°2; i55,
482; 157, 529 et 533; 160,
Grt', 174, 95°; l94> 1410;
210, 1799. Voyez Hémon.
jEole, VII, 33i, ii34-
jEson, père de Jason, II, 345,
97; VI, 247.
^Ethra, fille dePitthéus, II, 335.
AÉttcs, général romain, VII, 1 1 5,
180; 117, 214; 118, 264; i39,
739; i5o, 1040; i54, 1106.
Africain (F), surnom de Scipion,
V, 542, 678.
Africains (les\ II. 45o, 327;
III, i36, 543;' i63, 1084;
VI, 482, 221 et 226.
Afrique (1'), I, g3 ; II, 389, 976 ;
III, i36 (var.); 4o3, 401 ; IV,
5o, 565; 55, 685; 81, 1 3 1 4 ;
97, 1705; V, 143 ; i52; 568,
1299; VI, 359 ; 43o, i58i;
VII, 464; 481, 211 ; 482, 222;
54o, 1609; X, 270, 266.
Agamemnon, I, 20; 112; V, 406.
Agamemnon, tragédie de Sénèque,
IV, i83.
Agathon, poète grec. Sa tragédie
intitulée la Fleur, I, 14.
Agénor, prince , amant de Psy-
ché, personnage de Psyché,
VII, 277-370.
Agésïlas , tragédie de Corneille,
VII, 1-95. — L'auteur de-
mande au Roi de la faire re-
présenter devant lui , X , 3 1 2 ,
7-
Agésïlas, roi de Sparte, person-
nage principal de la pièce de
ce nom, VII, 1-95.
Aglante, nom d'homme men-
tionné dans la Veuve, I, 4oiî
53. — Personnage de la Co-
médie des Tuileries, II, 3o3-
325.
Aglante, nymphe, personnage
d'Andromède, V, 243-3g6.
Aglatide, fille de Lysander, per-
sonnage d' A gésilas , VII, 1-95.
Aglaure, sœur de Psyché, per-
sonnage de Psyché, VII, 277-
370.
Agnès (sainte), V, 89 1639.
Agnition, reconnaissance, grand
ornement dans les tragédies,
L71.
Agrippa, VI, 585, 237.
Agrippe , Agrippa , III , 4°3 ,
394-
Aiguillon ( la duchesse d' ).
Voyez Combalet (dame de).
Aire (la ville d'), X, 3o6, 36 et
45 ; 307, 60.
Airs (les) de musique de d'As-
soucy, X, i32.
Ajax,I, 28; III, 274.
Ajax, tragédie de Sophocle, 1,
28; (>6 ; 102 ; 1 19 ; II, 1 1 .
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
509
Alains (les), VII, ni, 52.
Alais. Voyez Aletz.
Alarcon (don Juan d"), auteur
de la comédie intitulée la Ver-
dad sospechosa, IV, i3j; i38.
— Parallèle de cette comédie
et du Menteur de Corneille ,
IV, 241-272.
Albain (!'), Curiace , III , 332 ,
n36.
Albains i^les), III, 335, 1217.
Albanie (!'), VI, 247; 271,
374.
Albe (la ville d'), III, 279 ; 282 ;
184, 29 et 3o ; 285, 55;
286, 80 et 88 ; 290, 195 ; 292,
229; 293, 267; 297, 366;
298, 371 et 391; 399, 409 ;
3o2, 4^5; 3o3, 5o2 ; 3o5,
539 et 546 ; 3o6, 557 et ^65 ;
309, 63o et 646; 3io, 666;
323, 955 et 974; 324, 994 et
997; 33o, 1094 et 1095; 33i,
1119; 332, 1128; 334, 1177;
337, 1253; 348 (var.) ; 353,
i638 ; 355, 1699 ; 356, 1743 ;
358 (var.).
Albe (le duc d'). Voyez Tolède.
Albiane , dame d'honneur de
Camille, personnage à'Othon,
VI, 564-657.
Albin , un des complices de
Cinna, III, 4^1, i49°-
Albin, confident de Félix, per-
sonnage de Polyeucte , III,
463-570.
Albin, centenier romain, per-
sonnage de Sophonisbe , VI ,
447-549.
Albin , ami d'Othon , person-
nage ftOthon, VI, 564-657.
Albin, confident de Domitian,
personnage de Tite et Béré-
nice, VII, 183-276.
Alcandre, roi d'Ecosse, person-
nage de Clitandre, I, 255-369.
Alcandre, nom d'homme men-
tionné dans la Veuve, I, 393;
424, 48.3.
Alcandre , magicien , person-
nage de F Illusion, II, 421-527.
Alciat, jurisconsulte, IV, i58,
328.
Alcibiade, I, 88.
Alcide, Hercule, I, 226, i3g6;
349, i3o3; VI, 211, 1822
Alcidon, personnage de la Veuve,
I, 37i-5oo; 43.
Alcidor , nom d'homme men-
tionné dans ta Galerie du Pa-
lais, II, 47» 535.
Alcippe, personnage du Menteur,
IV, 117-273; 3o5, 290; 32i,
604 ; 322, 629.
Alcmène, mère d'Hercule, IV;
i56, 294 (var.).
Alcméon \, tragédie d'Astydamas,
I, 67.
Alcméon, personnage de la tra-
gédie de ce nom, I, 77.
Alecton, furie, I, 226, i3g3 ;
23l, I467; 232, I489; 359,
i537;V,376, i3a8; VI,5aa,
1206 ; X, 236, 12.
Aletz (la ville d'), X, 112.
Alexandre le Grand, I, 88 ; 89 ;
IV, 411; V, 3i7, 53; 656;
X, 178, 39.
Alexandre, adversaire de Démé-
trius Nicanor, IV, 4ï8.
Alexandre VII ( Fabio Chigi ,
pape de i655 à i665 sous le
nom d'). Dédicace que lui
adresse Corneille de sa tra-
duction de Y Imitation, VIII,
1-7. — Son recueil de vers
latins, VIII, 4. — Négocia-
teur à Munster pour le pape
Innocent X, son prédécesseur.
VIII, 6.
Alexandrie, ville d'Egypte, IV,
20; ai; 22; 26; 38, 289;
81, i32i; VIII, 428.
Alexandrin , citoyen d'Alexan-
drie, IV, 41 4; VII, 460.
Alexandrins (vers), V, 309 et
3io.
Alexis (saint), VIII, 34-
5io TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Alger (la ville d'), IV, 235,
171 2; X, 197, 4^« Voyez
Arger.
Alidor , personnage de la Place
Royale, II, 2i5-3oi.
Alindor , nom d'homme men-
tionné dans la Veuve, I, 4°8,
181.
Allemagne (F), IV, i32; 148,
i54 et 161; 187, 861; 293,
104 ; X, 267, 77; 292, 33;
3o4, 1; 468.
Alonse (don) , personnage du
Cid, III, 1-241.
Alost (la place d') , X, 2o5,
161.
Alpes (les), I, 90.
Alphonse (don), roi de Castille,
V, 412.
Althee, mère de Méléagre, II,
390, 989.
Alvar de Lune (don). Voyez
Lune (don Alvnr de).
Amalasonte, tragédie de Quinault,
x, 493.
Aman, VIII, 572; IX, 4i,6i3;
42, 642.
s/ niant libéral ( /' ), comédie de
Scudéry, X, 400.
Amarante , personnage de la
Suivante, II, Ii3-2i4.
'A(j.apxr)|jia. Signification de ce
mot dans Aristote, I, $7.
Amathonte (la reine d'), Vénus,
V, 329, 332.
Amboise (Georges d'), cardinal,
X, 32, 1.
Amkroise (saint), IX, 127. — Le
sujet de Théodore est tiré de
son second livre des Vierges,
V, 9 ; 1 1 . — Extrait de ce se-
cond livre, V, 108-111.
Amérique (F), X, 197, 45.
Aminte, nom de femme men-
tionné dans Mélite , I, i49>
ii3, — dans la Galerie du
Palais, II, 57, 734 et 735;
— dans des stances, X, 172,
i. Vovez Amynte.
Ammon (l'oracle d'), V, 294 ; 299.
Ammon , personnage d'Andro-
mède , V, 243-396; I, io3
et io4-
Amour (F) dans la tragédie ,
I, 24.
Amour (le dieu), I, 147, 77;
i5o, i43; 55i, i52 ; iÔ2,
176 (var.); i53, 197; 162,
345; 220, 1286; II, 147,
401; i63 (var.); i75, 941;
191, i25o; 202 (var.); 272,
941; 286, 1221; 3oo; i5o3;
320, 256 ; 324, 352 ; 343, 44;
447» 247; 5i3, 1473; IV, 464,
83o et 83i et 842; V, 329,
333; 356, 882; X, 47, 2;
174, 2. — L'Amour , person-
nage de la Toison d 'or , VI, 221-
349. — Personnage de Psyché,
VII, 277-370.
Amours (les), X, 339, I2°* —
Quatre amours, personnages du
prologue de la Toison d'or, VI,
252-265.
Amphion, roi de Thèbes, IV,
171, 555.
Amphitryon, comédie de Plaute,
V, 4o5.
Amsterdam (la ville d'), X, 259,
101 ; 282, 429.
Amyntas, personnage de Théo-
dore, non marqué dans la liste
des acteurs, V, 77, 1367; 78.
— Personnage à'Héraclius , V,
ii3-24i; I, n5.
Amynte, nom de femme dans
une ode, X, 3o, 6. Voyez
Aminte.
'Àvayxoôbv. Diverses acceptions
de ce mot, I, 94.
Ananias, VIII, 643.
Anajnte, Ananias, IX, i47-
Anapestiques (vers), V, 3 10.
Anchise, père d'Enée, II, 372,
642; VII, 36o, 1871.
Andalousie (F), III, i39 (var.);
140, 614; V, 428, 217.
André (saint), VIII, 289; 347-
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
bu
Andricnne (/'), comédie de Té-
rence, I, 46; n5; II, i3.
Andromède , tragédie de Corneille,
V, 243-396; I, 47; 75 ; io3;
116 et 117; 273 ; III, 278 ;X,
178, 37. — Dessein de la pièce,
V, 258-278. — Examen, V,
299-312. — Adromède est re-
présentée sur le théâtre royal
de Bourbon, VI, 268. — La
représentation de cette tragé-
die a été un des plus beaux
spectacles que la France ait
vus, V, 292. — Les machines
font le nœud et le dénoùment
de cette pièce, V, 297; 3o5. —
La beauté de la représentation
y supplée au manque des beaux
vers, V, 298. — Corneille ex-
plique et justifie l'emploi qu'il
a fait dans Andromède de vers
de diverses mesures, V, 3o8-
3l2.
Andromède, fille de Céphée et
de Cassiope, personnage prin-
cipal de la pièce de ce nom,
V, 243-396; I, i5; 75.
Angélique , personnage de la
Place Royale, II, 2i5-3oi; X,
68, 29 et 32
Angenine (Julie d"). Voyez Julie
de Rambouillet.
Anges gardiens (les saints).
Hymnes pour leur fête, IX,
563-565.
Angleterre (F), II, 96, i45o ;
VI, 264,229; X, 327, 10; 499
Anglois, les Anglois, II, 434 j
X, 69, 43; 197, 45; 258, 91;
3o2, 5i; 499-
Anglois (1'), la langue anglaise,
III, 82
Anguien. Voyez Enghien.
Anne d'Autriche, femme de
Louis XIII, V, 319, 85 ; VI,
258, 90; 260 et 261; 265; 319,
85; X, 401. — Épître dédica-
catoire, à elle adressée, de la
tragédie de Polyeucte, III, 417-
474* — La première année de
sa régence, III, 473. — Son-
net en son honneur, III, 473;
X, 476.
Annibal, IV, 70, 1004 ; V, 5o3;
5o6 ; 5i2, 22; 5i3, 35 et 41;
5i4, 72; 523, 276; 524, 294;
525, 3io; 532, 444 et 446;
537, 574; 538, 578 et 584 et
589; 55 1, 911; 552, 91 5; 553,
952; 563, iiSg; 564, 1175;
568, 1297; 587, 1727; IV,
480, 174 et 177; 5i6, 1868;
X, 259, 104.
Antigone , fille d'OEdipe , VI ,
140, 146 et i53; 141, 161;
159, 574.
Antigone, tragédie grecque, I, 68.
Antioche, ville de Syrie, V, 16;
20, g5; 24, 17^; IX, 55o.
Antiochus, fils de Démétrius
Nicanor et de Cléopatre, per-
sonnage de Rodogune,W , 3gj-
5n ; I, 27; 60; 63; 70; 79;
89î 99; 272-
Antiochus, frère de Démétrius
Nicanor, IV, 4l8; 424 î 43i,
53; 4^9, 222; 44o> 4^3 ; 45o,
491; 4^1? 507; 452, 541.
Antiochus, roi de Syrie, V, 5o,
746; 525, 3o2; 539, 6o5; 55i,
9o5; 568, i3oo; 578, i524-
Antiphon, personnage de l'Eu-
nuque de Térence, I, 102.
Antistie, VI, 358; X, 491- Voyez
Aristie.
Antistius, préteur romain, père
de la précédente, X, 491.
Antoine (Marc), I, 89; III, 392,
171; 410, 584; 4n, 598; 427,
993; 434, Ii34; 449, i45o;
457, i658; VI, 439, 1807.—
Personnage de Pompée , IV,
i-ii5.
Antoine (Marc), tragédie de Mai-
ret, VI, 463.
Antoine (saint), VIII, 100; 242.
Aonie (J'), X, 66, 2.
Aparté,!, m. — Aversion de
5i2 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Corneille pour les a parte, I,
396; II, 123; IV, 137.
Apelle, X, 120, 91.
apocalypse (/'). Passage traduit,
VIII, 229, 1094-1096. —
Allusion à un passage, VIII,
570, 6404 et suiv.
Apollidon, enchanteur, X, 59,
16.
Afoliodorus , Appolîodore. Sa
Bibliothèque, X, 455.
Apollon, I, 76; II, 522, i663;
III, 290, 193; 473; V, 267;
VI, i55, 486; i59, 592; VII,
362, 1913; X, 70, 63; i3o,
18; i32, 6; 196, 3o ; 439. —
Apollon dans VOreste d'Euri-
pide, I, 106.
Apollonius Rhodius, poëte grec,
VI, 249.
Apôtres et évangélistes. Hym-
nes en leur honneur, IX, 573-
58o.
Appian Alexandrin, Appien d'A-
lexandrie, VII, 460; X, 491.
— Extrait de son livre des
Guerres de Syrie, contenant le
sujet de Rodogune, IV, 4J4~
4i8; 420.
Apparitions dans la tragédie, I,
75 et 76.
Aquitaine (F), VIII, 592.
Arabe (un auteur), Averroès, V,
409.
Aragon (P), I, 44; Ir>1 ; III, 81;
n5, 197; i36, 54o; i45,
706; V, 411 ; 41a; 415 ; 4i8;
419, 3; 42°> 36; 434» 356;
438, 459; 444, 609; 446,
663; 4^3, 1084; 4^5, 1109;
466, ii23; 468, 1196; 473,
ï334 ; 4j5, 1376 et 1389 » 482,
i55o; 483, 1572 ; 489, 1712;
492> l79°\ 494, i8a3; VI,
364.
Aragonois (les), V, 4i3.
Arar (P), la Saône, VII, 117,
228; 162, l3l2.
Araspe, capitaine des gardes de
Prusias , personnage de Nico-
■ mède, V, 495-5g3.
Arbaze, personnage de la Comé-
die des Tuileries, II, 3o3-325.
Arcadius, empereur, père de
Pulchérie, VII, 376; 38i, i3.
Arcas, frère d'Aristie, person-
nage de SertoriuSf VI, 35 1-
445.
Archers, dans Clitandre, I, 255-
369.
Ardabure, général romain, VII,
382, 34.
Ardaric, roi des Gépides , per-
sonnage à" Attila, VII, 97-
181.
Ardents. Hymnes de sainte Ge-
neviève pour le miracle des
Ardents, IX, 63i-636.
Aréobinde, général romain, VII,
382, 3i ; 385, 97.
Argenis (P) de Barclay, I, 90.
Argenson (Voyer d'). Voyez
Vo YER .
Arger,X,62, 11. Voyez Alger.
Argo (le navire), VI, 247; 33o.
Argonautes (les), II, 362, 434;
VI, 245; 247; 249; 252.
Argos, ville de Grèce, V, 296 ;
vi, 144, 229; 157, 540.
Argus, X, i55, 16.
Artas (don), personnage du Cid,
III, 1-241.
Arimant, nom d'homme men-
tionné dans Clitandre, I, 265;
36o, i547-
Aristandre, nom d'homme men-
tionné dans Mèlite, I, 201,
963.
Artste [Excuse a) , X, 74-78; 4°3:
474.
Aristie, nommé par d'autres
Antistie , femme de Pompée,
personnage de Sertorius , VI,
35i-445; X, 491.
Aristius, père de la précédente,
X, 491.
Aristius (Quintus), frère d'Aris-
tie, VI, Î64; 432.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
5i3
Aristophane, II, 12; V, 3o8.
Aristophane le grammairien, X,
455.
Aristote, I, 3; 13-17; 21-23
27; 29; 3l-42; 44; 47; 48
5o; 52; 54-56; 58; 60; 61
63;65;68-73;75;77; 8o-83
85; 91-94; 96; Iof; io4; 106
107; 109; 111; n3; 117; II
119; 121; 432 ; III, 83; 84
85; 91 ;94; 273; 275 ; 479
IV, 280; 281; 417; V, i3
146; 147; i5i; 309; 4o5
407; 409; 5o8; VI, 127 ; i3o
363 ; 461; 468; X, 402; 45o
454; 486. — Sa Poétique, III,
85. — Les préceptes qu'il nous
a laissés de la poétique sont
de tous les temps et de tous
les peuples, III, 85.
Armédon, nom d'homme men-
tionné dans le Menteur, IV;
174, 6o3 ; 208, 1252 et 1256;
220, i452 et 14^7.
Arménie (1'), I, 273; III, 47^;
478; 479; 486; 5oi, 3i4;IV,
463, 8i5 ; V, 5c6 ; 5io; 5i4,
63; 5i8, 172; 327, 347; 535,
Ô23; 543, 706; 546, 764 et
770 et 779; 549, 847; 548,
875; 55i, 910; 567, 1252;
574, 1411; 578, 1497; 584,
i655; 587, 1712; Vil, 462;
466, 84; 496, 809; 526, 1549.
Arménien, III, 479; 494? ï^o;
IV, 441, 284.
Armentière (la ville d'), X, 2o3,
i45.
Arnauld, X, 467.
Arnheim (le fort d'), X, 278,
376.
Arnoul (saint), VIII, 392.
Aronte, personnage de la Gale-
rie du Palais, II, 1-112.
Arrie, VI, 626, 1190.
Arsace, roi des Parthes, V, 533,
467 (var.).
Arsidas, éphore de Lacédémone,
VII, 78,. 1707; 91, 2007.
Corneille, x
Arsinoé, seconde femme de Pru-
sias, personnage de Nicomède,
v, 495-593.
ARTABASE,roi d'Arménie, VII,
462; 465, 38; 494, 747 et
763; 497, 839.
Artois (1'), X, 201, 114.
Asdrubal, VI, 465; 472; 484,
262; 5o8, 868; 526, 1291;
532, 1439; 548, 1790.
Asie (1'), II, 336; 344, 56; III,
4o3, 401; 428, 997 ; IV, 423;
435, i36; 437, 176; V, 5i3,
48; 526, 3i6; 539, 608; 55i,
917; 563, u55; 568, 1299;
577, 1492; 591, i8o3; VI,
481, 216; 546, 1747; VII,
4o, 766; 495, 769; X, 196,
40.
Aspar, amant d'Irène, person-
nage de Pulchérie, VII, 371-
453.
Asphalte, personnage de la Co-
médie des Tuileries , II, 3o3-
325.
Assoucy (d'). Sonnet que lui
adresse Corneille sur son Ovide
en belle humeur, X, 124. —
Vers sur ses Airs, X, i32.
Assuérus, IX, 39, 572; 41, 617
et 622 et 623.
Assyriens (les), IX, 36, 523.
Astérodie, mère d'Absyrte, VI,
249.
Astrée (/'), roman de d'Urfé,
IV, 354, 1238.
Asturies (les), III, 96.
Astyanax , personnage de la
Troade de Sénèque, I, 99; IV,
283.
Astydamas, poète grec, I, 6y.
Atax (1'), rivière de la Gaule,
l'Aude, X, 23i.
ATHAMAS,roideThèbes, VI, a45.
Athénaïs , femme de Théodose,
II, VII, 383, 44.
Athènes, I, 54; 77; 112; II,
335; 346, n4; 367, 52i ;
370, 609; 4o°» 1229; 4°3
33
5i4 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
(var.); VI, i34; i4o> I42;
146, 273; 149, 35o et 353;
i76> 977; 2l6> 1942; X,
3i2, 27.
Atlas , changé en rocher, V,
375, i3o8.
Atrée, I, 20; 78 ; V, 3i6, 25. —
Personnage du Thyeste de Sé-
nèque, IV, 283.
Attale , roi de Pergame, III,
428, 995; VI, 546, 1751.
Attale, fils de Prusias et d'Ar-
sinoé , personnage de Nico-
mède, V, 495-593.
Atticus, soldat romain, person-
' nage à'Othcn, VI, 564-657.
Attila, roi des Huns, tragédie de
Corneille; VII, 97-181. —
L'auteur demande au Roi de
la faire représenter devant lui,
X, 3n, i5.
Attila, roi des Huns , person-
nage principal de la pièce de
ce nom, VII, 97-181.
Aubignac (l'abbé d'), VI, 4^3;
X, 486; 487. — Vers de Cor-
neille, de ses amis et de ses par-
tisans contre l'abbé d' Aubi-
gnac , X, 372-377.
Audenabde (la ville d'), Oude-
narde, X, 2o5, 162.
Audoënus, traduction latine du
nom d'Owen, X, 46. Voyez
Owen.
Aufide, tribun de l'armée de
Sertorius, personnage de Ser-
torius, VI, 35i-445.
Auguste (l'empereur), I, 89; VI,
47, 649; 48, 680; 614, 879 ;
616, 946; X, 96, 29; 97, 37;
442J491- — Personnage de
Cinna, III, 35g-462 ; I, 26 ;
3o; 44; 45; 47 5 61; 69575;
87; io5 ; 118; 120; 272.
Auguste, titre des empereurs ro-
mains, VII, 385, 102.
Augustin (saint) , V, 11 ; VIII ,
70; IX, 127. — Il déclame
contre certaines comédies, V, 9.
Aurange (le prince d'). Voyez
Orange.
Aurore (1'), déesse, II, 68, 942;
449, 298; VI, 293, 903 et 910.
Authentiques (les), extraits som-
maires des Novelles , dans .le
Code de Justinien, IV, i58,
326.
Aventin (le mont), III, 290,
1925 V, 579, i55c; VI, 419,
i332.
AVERNE (1'), IX, 521, 7; 591,
19 ;X, 237, 34-
Averroès. Il définit la tragédie
a un art de louer, » V, 4°9-
Avignon (la ville d'), II, 96,
i45o.
Ayala (don Garcie d'), comte
de Fuensalida, usurpateur du
trône d'Aragon, V , 411.
Azarie, Azarias, IX, 147.
B
Babylone (la ville de), VIII,
444; 457; IX, 107, 9.
Bacchus, X, 239, 64.
Balde, jurisconsulte, IV, i58,
328.
Ballard, X, 470.
Balzac (de), 1, 5i; IV, i33 ;
X, 438; 447. — Sa lettre
à Scudéry au sujet du Cidy
III, 83; 84. — Ce qui part
de sa plume regarde toute la
postérité, III, 84. — Lettres
qu'il écrit à Corneille, X, 44°~
442; 442-444.
Baptiste. Voyez Jean- Baptiste
(saint).
Barbares (les), IX, 53o, 21.
Barcée, dame d'honneur d'É-
ryxe, personnage de Sopho-
nisbe, Vl, 447~^49'
Barclay, I, 90.
Barlaam, VIII, 452.
Babonius (les Annales de), III,
475; V, 144; i53.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
5i5
Bartole, jurisconsulte, IV, 142,
14.
Basile (saint), VIII, 6o5.
Bassée (la place de la), X, 2o3,
i45.
Bastille (la), X, 3 17, 37;3i8,52.
Bataves (les), VII, 246, 1099 ;
X, 25o, 7; 255, 33; 268,
249; 3a9> 71-
Batavie (la), X, 278, 378.
Baume fia Sainte-). Voyez Sainte-
Bal me (la).
Bavière (la), X,338, 90.
Béarn (le), III, 82; X, 107.
Beauchateau (Mlle de), comé-
dienne, X, 483.
Beaulieu. Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve ,
I, 392 et 393.
Belges (les;, X, 21 3, 294.
Belgique (la), X, 195, 12.
Béllnde, nom de femme men-
tionné dans la Veuve, I, 416,
3s5 ; 492 -, 1820.
Bellecour (la place) , à Lyon,
IV, 345, 1087; 36i, i387;
368, i5oo.
Bellièvre ( de Pompon e de ) ,
premier président du parle-
ment de Paris, X, i3i. — Sa
mort, X, 473 et 474-
Bellone, X, 109, 44 > 23>9, 58;
3oi, 24; 3o2, 46*
Bénévent, VI, 20; 22, 18.
Béni (Paul), littérateur et cri-
tique italien, I, 53.
Ben Johnson, nommé le Corneille
de l'Angleterre, X, 499-
Benoît (saint), VIII, 64; 114;
319; X, 460; 471.
Benoît (l'ordre de Saint-). Voyez
Saint-Benoît.
Benserade, VI, 463. — Sa tra-
gédie intitulée la Mort <&A-
chille et la Dispute de ses
armes, I, 28.
Bérénice, reine d'une partie de
la Judée, personnage de Tite
et Bérénice, VU, 183-276.
Bergues (la ville de), X, 204,
i54.
Beringhen (le marquis de), X,
271, 272.
Bernard (saint), VIII, 592. —
Il a été regai dé comme l'auteur
de V Imitation, VIII, l5; X,
463 . — Sonnet de Corneille sur
une traduction de ses Èpitres,
X, 122 et 123.
Bersabée , aimée du roi David,
m, 481; vin, 54.
Béthanie (le bourg de), VIII,
434, 3563.
Bethléem (la ville de), IX, 5o 2, 1.
Bethsabée. Voyez Bersabée.
Béthulie (la ville de), IX, 36,
524; 37, 541 et 552.
Bezançon (la ville de), X, 296,
101.
Bible (la), III, 48o; VIII, 3i,
3i; X, 460. — Passage traduit
de V Exode, VIII , 262 , 67-70.
— Passage traduit du livre des
Rois, VIII, 263, 75-78. — Al-
lusion à un passage du cha-
pitre vu deMichée, VIII, 481,
45 5 o. Voyez Apocalypse, IsaÏe.
Bicêtre (le château de), X, 58;
60. Vo^ez Bissestre.
Billault (Adam), menuisier de
Ne vers. Sonnet que lui adresse
Corneille sur ses Chevilles, X,
100 et 101 ; 476.
Billot. Voyez Billault.
Biondo (Flavio). Voyez Blon-
dus (Flavius)
Bissestre, Bissètre (le château
de), lieu de rendez-vous pour
un duel, II, 189, i2o5; X,
59, 6 et 12 et 18 et 24. Voyez
Bicêtre.
Bithynie (la), V, 5io; 512,28;
5 14, 64 ; 527, 348; 533, 468 ;
541, 65i ; 542, 700; 574 1
1412; 587, 1711; 588, 1732.
Blanche , personnage de Don
Sancke d'Aragon, V, 397-494*
Blondel, musicien, X, 233.
5i6 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Blondus (Flavius), auteur d'une
Histoire de la décadence de
l'Empire romain, VI, 7.
Bocchar, lieutenant de Svphax,
personnage de Soplwùsbe, VI,
447-549.
Boéce, VIII, 395.
Boileau (Gilles), frère de Boileau
Despréaux. Lettresqu'il adresse
à Corneille, X, 473 et 474;
475 et 476.
Bois-Robert (François le Métel
de), VI, 462; X, 474; 48 1 ; 484.
— Son hommage à Corneille au
sujet de la Veuve, I, 384. —
Vers que lui adresse Corneille
sur ses Epitres, X, 102 et io3.
— Fragments de diverses let-
tres que lui écrit Corneille au
sujet du Cid, X, 427 432. —
Il conseille à Corneille de ne
pas repondre aux Sentiments de
l'académie sur le Cid, X, 43l.
Bolandus, X, 467.
Bonaventure (saint), auteur des
Louange-s de la Vierge , tra-
duites par Corneille, IX, 5.
Bordeaux (la ville de), II, 434;
444, 192.
Borée, VI, 248; 262; 337,
1946; 342, 2074
Bouchain (la ville de), X, 3o4,
2 ; 307, 60.
Boulart (le R. P.), assistant du
général des chanoines réguliers
de la congrégation de France.
Lettres à lui adressées par
Corneille, X, 458-462; 462-
466; 466-470; 470-473.
Bourbon, nom de lieu, X, 472.
Bourbon ( le théâtre royal de).
Andromède y est représentée,
V, 258.
Bourrons (les), V, 3i8, 60; X,
194, 1 ; 211, 25i.
Bourbon (Nicolas), X, 443.
Bourgogne (l'Hôtel de), II, 32,
25o; X, 483; 494.
Bourguignon , Bourguignons ,
VII, ni, 52; 160, 1269; 161,
1281.
Bovines, Bouvines (la bataille
de), X, 211, 258.
Boyer, X, 493.
Bradamante, personnage du Ro-
land furieux, X, 62, 12.
Brandebourg (l'électorat de),
X, 3o2, 53.
Brest (inscription pour l'arsenal
de), X, 33i-333.
Bretagne (la), II , 438 , 69 ; 492,
1089.
Briole ou Briord (le comte de),
X, 270, 267.
Broglie (Charles-Amédée de).
Voyez Revel (Charles-Amé-
dée de Broglio, comte de).
Bruge la ville de), X, 207, ig3.
Bruno (saint), VIII, 67.
Brute, Brutus, III, 396, 265 ;
4o5, 438; 414, 667; 421, 829
et 842 ; 436, 1169 ; 566, 1703 ;
VI, 36o; 38i (var.);X, 441.
Bruxelles (la ville de), III, 473 ;
VIII, 17.
Bubierça, village d'Espagne, V,
4n; 4J3.
Bucéphale, II, 497, 1162.
Buchanan (Georges), I, 102. —
A fait une tragédie de l'his-
toire de Jephté, et une autre
de la mort de saint Jean-
Baptiste, III, 480.
Burgos, ville d'Espagne, V, 429,
263 ; 446, 662.
Buric (la place de), X, 260, 122.
Bttrnel. Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve,
1, 3go.
Buscon, héros du roman espa-
gnol de ce nom, II, 444> i85.
Byzance (la ville de), V, 182,
602 ; 192,844 ;VH> 4i3, 812.
Cadès, IX , 125.
Cadmus, 1 , 78.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
5f7
Caen (la ville de), X, 106.
Caiétan (l'abbé) , X, 467; 4^8.
Caire ( le grand) , en Egypte ,
II, 456, 45o.
Calais , argonaute ailé, fils de
Borée et d'Orithye, II, 362.
— Personnage de la Toison
d'or, VI, 221-349.
Calicut, ville de l'Hindoustan,
II, 470, 688.
Caltgule, Caligula, VI, 621,
io63.
Caliste, personnage de Clitan-
dre , I, 255-369- — Nom
de femme, X, 5o-52; 170, 1
et 10.
Calliope, V„ 317, 42-
Calphurnie, Calpurnie, femme
de César, VI, 44, 417; 45,
422 ; 67, 965.
Cambray (la ville de), X, 307,
71-
Camille , sœur d'Horace , per-
sonnage à! Horace, III, 243-
358; I, 3o; 85; 86; IV,
424.
Camille, nièce de Galba , per-
sonnage (Y O thon , VI , 564-
657.
Camille , nom d'une Romaine
mentionnée dans Tite et Béré-
nice, VII, 240, 972.
Camille, personnage de Y Enéide,
X, 63, 17.
Camfion (de). Sonnet que lui
adresse Corneille sur ses
Hommes illustres, X, 137-
139.
Cannes, en Italie, V, 924.
Canon (de). Son hommage à
Corneille au sujet de la Veuve,
I, 389.
Cantiques traduits par Corneille.
Voyez tome IX, p. 641.
Capitule (le), III, 3g4 . 23o ;
45o, 1482; V, 55i, 920; VI,
491, 444; 5i2, 978; 533,
i45o; 53g, i593; 646, i63i;
656, 1822.
Capiton , nom d'un Romain
mentionné dans Othon , VI ,
577, 52.
CAPPADocE(la), V, 512,28; 533,
467 ; 542, 700.
Carbon, VI, 366, 26; 424,
i455.
Carloman, VIII, 98.
Carlos , cavalier inconnu , qui
se trouve être don Sanche ,
roi d'Aragon , V, 397-494.
Voyez Sanche (don).
Carmel (le), IX, 567, 6.
Carré, X, 463; 468.
Carthage, V, 542, 676; 55 1,
9o5; 568, i3oo; 578, i524;
VI, 465; 474, 39; 47$ > 48
et 53 ; 479, i58 et 164 et 168 ;
480, 181 ; 482, 224; 484, 264
et 268; 485, 296; 486, 3i6 et
33o ; 487, 33g et 347 et 364;
488, 377; 490, 433; 498,
6^9; 499> 654; 5oo, 688;
5i5, 1049; 517, 1102; 520,
n58; 522, 1206 et 1207;
523 , 1222 et 1242; 524,
1258; 526, 1284 et 1286;
532, i438; 533, i445; 536,
i533; 548, 1792.
Carthaginois , Carthaginoise ,
VI, 465; 497, 599; 524,
1247; 546, 1756.
Casal. Voyez Cazal.
Cassel. Voyez Mont-Cassel.
Cassie, Cassius, III, 396, 265;
41 4) 669. Voyez Cassius.
Cassiodore, X, 44 !
Cassiope, reine d'Ethiopie, per-
sonnage à? Andromède, V, 243-
396.
Cassius, VII, 465, 36. Voyez
Cassie.
Castelvetro, critique italien, I,
34; 35.
Castillans (les), III, i85, 1559.
Castille (la), III, g5; 104; 110,
89; n3, i53; n5, 198; 129,
421; i36 (var.); 140, 618;
i44 (var.) ; 168, 178; 170,
5i8 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
1210; V, 412; 4i3; 416; 418
4i9> 95 42«» 17; 422, 80
4^5, i54; 427, an"; 428
226; 441, 545; 465, 1109
466, n38etn45; 468,1184
470, 1242; 490, 1741 ; 491,
1758 ; 493, 1804.
Castor , argonaute , II , 362 ,
439.
Castro (don Guillen de), poëte
espagnol , auteur des Moce-
dades del Cid , III, 80; 82;
87; 94; 96î 98; 99; IV> !4
(var.); i3i; i32; X, 4°3.
— Extrait de sa comédie in-
titulée Enganarse enganando ,
III, 82. — Passages des Mo-
cedades del Cid imités par
Corneille et signalés par lui ,
III, 199-207.
Catalaïud, Catalayud , ville
d'Aragon, V, 411; VI, 364-
Catalogne (la), X, 114.
Catherine (sainte) , VIII, 266.
Catherine de Sienne (sainte) ,
VIII, 368.
Catin , nom de femme , X ,
48, 1.
Caton, IV, i5; 47, 476; 97,
1706; V, 141 ; VI, 601, 608 ;
X, 97, 44; 441.
Cazal (la place de), X, 69, 5i ;
110.
Cécile (sainte), VIII, 209.
Cédar, IX, 181, 18.
Céladon, personnage de VAs-
trée , I, 406, 127; IV, 354,
1240.
CÉlidan, personnage de la Veuve,
I, 371-500; 43; II, 120.
Célidée, personnage de la Ga-
lerie du Palais, II, 1-112. —
Nom de femme mentionné dans
la Veuve, I, 408, 182.
Célie, personnage de la Suivante,
II, 11 3-2 14. — Nom de femme
mentionné dans la Veuve, I,
4o8, 181.
Celsus, tribun du parti de Pom
pée, personnage de Sertorius,
VI, 35i-445.
Celtirères (les), VI, 38o, 417-
Céphale, aimé de l'Aurore, II ,
449, 3oo.
Céphalie , nymphe, personnage
d'Andromède, V, 243-396.
Céphée, roi d'Ethiopie, person-
nage à' Andromède, V, 243-
396.
Cépion, nom d'un Romain men-
tionné dans Cinna, III, 438,
I203.
Cerbère, I, 226, 1399.
Céréal, Céréalis, général ro-
main, VII, 246, 1102.
Cérès, III, 5o2, 1419; X, 239,
64.
César (Jules) , 1 , 88-90 ; III ,
402, 378; 4°4> 427 et 43o;
4o5, 449; 410, 584; 4i ! »
5g4 et 597 et 600; 4J4> 664
et 665 et 668; 421, 842 ;
453, i548; 497, 228; IV,
412; V, 317, 53; VI, 36i;
X, 118, 49; 178, 39. — Ses
Commentaires, 1 , 90 ; IV, 21.
— Personnage de Pompée, IV,
n-i5; I, 26; io3; III, 483;
484-
César, titre, V, 17, 11; 84,
i534; 200, io38; VI, 582,
162; 601, 608; 619, 1019;
637, 1419; VII, 204, 89;
212, 3oi ; 216, 390; 382,
32; 4°4> 583; 425, 1091;
43o, 1227; 452, 1752.
CÉSARS, LES CÉSARS, III, 543,
1190; IV, 81, i324 ; VI,
597, 53i ; VII, 126, 427;
i5»2, 1082; 159, 1245; 218,
433; 243, 1037; 275, 1751 ;
443, i534eti546; IX, 607,
7; X, 180, 92; 260, 124;
268, 252 ; 441 ; 475.
Césars (les), les empereurs d'Al-
lemagne, X, 338, 101.
César ion, fils de César et de
Cléopatre, IV, 21.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
Jiy
Chaise (le P. de la), jésuite,
confesseur de Louis XIV, X,
3o8, 9 ; 3i4 , 52.
Chalciope , fille d'Aaete , veuve
de Phryxus , personnage de
la Toison d'or, VI, 221-349-
Chansons de Corneille, X, 53 ;
55; 168.
Chapelain. X, 71, 78. — Let-
tres qu'il adresse à Corneille,
X, 488 et 489; 496«t 497-
Charente (la), X, 443.
Chariglee, personnage du roman
grec d'Héliodore , V, 296;
3o4-
Charlemagne, III, 81; VIII,
98.
Charleroi (la ville de), X, 204,
146.
Charles II , roi d'Espagne , X ,
329, 59.
Gharles-Quint, VIII, 140.
CHARMroN , dame d'honneur de
Cléopatre, personnage de Pom-
pée, IV, i-ii5; I, io3; III,
483; 484.
Charon , nocher des enfers , I ,
222, 1327; 223, i333; 229,
1440; 23i, 1471 ; II, 4i3 ,
^ i473; VII, 352.
Chartreuse (la), VIII , 67.
Chartreux (l'ordre des) , VIII,
171, 2617; 470.
Chastes martyrs (les), tragédie de
Mlle Cosnard , X, i3o, 1.
Chavigny (le marquis de), X,
270, 267.
Chersonèse Taurique (la), VI,
247.
Chérubins (les), IX, 127, 7.
Chevreul (Nicolas du), sieur
d'Esturville, X, i33.
Chevreul (Mme du). Voyez
Ranquet (Elisabeth) .
Chifflet (Philippe), X, 466; 467.
Chigi (Fabio). Voyez Alexan-
dre VII.
Chimène, personnage du Cid,
III, 1-241; I, 27; 38; 57; 60;
69; 70; n5; 120; IV, 144
(var.) ; X, 401.
Chine (la) , II , 456 , 443 ; X ,
254, 3i.
Choeur (le), dans la tragédie
ancienne, VI, i32. — Le
chœur dans Jndromède, Y, 243-
396.
Chrêmes, personnage de l'An-
drienne de Térence,I, 102;
II, 433.
Christ de Saint-Roch (quatrain
pour le), attribué à P. Cor-
neille, X, 377.
CHRiSTrNE de France, duchesse de
Savoie, fille de Henri IV, X,
338, 94.
Chrysante , personnage de la
Veuve, I, 37i-5oo. — Per-
sonnage de la Galerie du Pa-
lais, II, 1-112.
Chrysolite, nom de femme
mentionné dans la Veuve, I,
416, 325 et 339; 492> 1820.
Voyez Crisolite.
Cid, en arabe seigneur, III, 170,
1222 et 1223 et 1225 ; 187,
1587; 189, i636; 197, 1827.
Cid (le), tragédie de Corneille,
III, 1-241 ; I, 4 ; 24 ; 25 ; 43 ;
48; 57; 59; 60 ; 62; 68 ; 70; 84;
96; 101; 112; n3; Ii5; 120,
272; 277; 279; 483; IV, i3i;
l32 ; 144 (var.); 420 ; VI, 3ll;
463 ; VII, 107 ; X, 79, 2 ; io3,
10; 187, 29; 447; 486. — Exa-
men de la pièce, III, 91-102.
— Ecrits en faveur du Cid at-
tribués à Corneille, III, 53-76.
— Succès du Cirf, III, 77; 86;
91. — Deux romances espa-
gnols sur le Cid , 111, 82 ; 87 -
90. — Le Cid traduit en ita-
lien, en flamand et en anglais,
III, 82. — Corneille nie « qu'il
ait convenu de juges touchant
son mérite, » III, 80. — C'est
celui de ses ouvrages réguliers
où il s'est donné le plus de
5-2o TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
licence, III, 91. — Critique
des vers, III, 38 1. — Lettre
apologétique de Corneille en
réponse aux Observations de
Scudéry sur le Cid, X, 3g6-
407. — Représenté trois fois
au Louvre, et deux fois à
l'hôtel de Richelieu, X, 401.
— Fragments de lettres de
Corneille à Bois-Robert au sujet
de l'examen du Cid par l'Aca-
démie française, X, 427-432. —
Corneille a remporté le témoi-
gnage de l'excellence de sa
pièce par le grand nombre de
ses représentations , par la
foule extraordinaire des per-
sonnes qui y sont venues, et
par les acclamations qu'on lui
a faites, X, 43o.
Cid (le) , personnage principal
de la tragédie de ce nom.
Voyez Rodrigue (don). —
Deux chroniques du Cid, III,
80.
Cinna, partisan de Marius, VI,
424, i455.
Cinna , tragédie de Corneille,
III, 359-462; I, 44; 45; 47;
61; 68; 84; 87; 102; io5; 109 ;
n3; n5; 118; 120; 272; IV,
i3o; 421 ; V, 298; X, io3,
10; 3ii, 14 ; 447* — Examen
de la pièce, III, 379-382. —
Ses vers ont quelque chose de
plus achevé que ceux d'//o-
race, III, 38 1. — Représenté
à Versailles en octobre 1676,
X, 309; 3n, 3. — Loué par
Balzac, X, 44°-442.
Cinna, chef de la conjuration
contre Auguste , personnage
principal de la tragédie de
Cinna, III, 359-462 ; I, 26;
3o; 44; 45; 69; 75; 87; io5;
III, 370; 379; 38i; VI, 122,
36; X, 441 et 442; 491.
Circé, VI, 33 1, 1794 et 1796 et
1797 ; 34o, 2oa5j 246.
Cîteaux (l'ordre de), VIII, 171,
2617.
Cithéron (le), montagne de
Béotie, VI, 144, 236; 176,
991; 189, 1307; 207, 1739.
Civilis, chef des Bataves, VII,
246, 1099; 258, i386.
Claire (sainte), VIII, 673.
Clarice, personnage de la Veuve,
I, 37i-5oo. — Personnage du
Menteur, IX, 117-273; 3o5,
289 ; 320, 6o3 ; 371, i553.
Clarimond, personnage de la
Suivante, II, Ii3-2i4«
Clarine, nom de femme men-
tionné dans la Suivante, II,
i5i, 47° et 471 > — dans la
Place Royale, II , 23g, 3o6 ;
240, 317; 242, 343; 247,
461; 264, 781. — Nom d'un
rôle de femme dans le Ve acte
de r Illusion, II, 5o7-5i8.
Claude, empereur romain, VI,
597, 5io; 621, 1064 et 1067 ;
VII, 254, i3o3.
Claveret, X, 4°3. — Ses hom-
mages à Corneille au sujet de
la Veuve, I, 385 et 386.
Cléandre , personnage de la
Place Royale, II, 2l5-3oi. —
Personnage de la Suite du Men-
teur , IV, 275-395. — Nom
d'homme, dans les vers sur le
Départ de la marquise, X, 148,
95.
Cléante, personnage de la Gale-
rie du Palais, II, 1-112. —
Confident d'OEdipe, person-
nage à'OEdipe, VI, 101-219.
— Nom d'homme mentionné
dans Théodore, V, 40, 527.
Cléobule, personnage de Théo-
dore, V, i-iii.
Cléomène , amant de Psyché,
personnage de Psyché, VII,
277-370.
Cléon, personnage de Clitandre,
I, 255-369. — Personnage de
la Suivante, II, n3-2i4« —
DES OEUVRES DE CORNETLLE.
JH
Domestique de Félix, person-
nage de Polyeucte, III , 463-
570.
Cléon, orateur grec, natif d'Ha-
licarnasse, personnage iïAgé-
silas, VI, 1-95.
Cleone, personnage de Médée,
II, 327-4 r 9. — Personnage de
Nicomède, V, 49^~5g3.
Cléonice, personnage de la Co-
médie des Tuileries, II, 325-
3o3.
Cléonte, personnage d'une tra-
gi-comédie de Scudéry, X,
61, 1.
Cleopatre, sœur de Ptolomée,
personnage de Pompée, IV, 1-
n5; II, 337; III, 483; IV,
416; 420.
Cleopatre, reine de Syrie, veuve
de Démétrius Nicanor, per-
sonnage de Rodogune, IV, 397-
5n; I, 19; 32; 39; 60; 61;
64; 69; 79; 99; 100; io3; ni;
118 ; 121.
Cleopatre, tragédie de Benserade,
VI, 463.
Clerïc (Pierre), jésuite. Sa tra-
duction en vers latins des vers
français de Corneille sur le
canal du Languedoc, X, 232.
Climène , nom de femme men-
tionné dans la Suite du Men-
teur, IV, 359, i346; 386,
^1873; 388 (var.).
Clindor, personnage de f Illu-
sion, II, 421-527.
Clitandre, tragédie de Corneille,
I, 255-369- — Examen de la
pièce, I, 270-273.
Clitandre, personnage princi-
pal de la pièce de ce nom, I,
255-369.
Cliton, personnage de Mélite, I,
123-253. — Personnage du
Menteur, IV, 117-273; — de
la Suite du Menteur, IV, 275-
395.
Cloris, personnage de Mélite, I,
123-253; 3g4 ; 44°, 932. —
Nom de femme mentionné dans
la Galerie du Palais, II, 20,
63; 76, 1092.
Clothon, uwe des Parques, I,
23i (var.); II, 410 (var.).
Clyte, nom d'homme mentionné
dans Andromède , V , 390,
i652 *, 391, 1680.
Clytemnestre, I, i5; 20; 67;
77; 78; 80; 106; 112; III,
274; V, 406; VI, 461.
Code (le), IV, 142, 9 ; i58,
3a6.
Coëffeteatj. Son Histoire ro-
maine, III, 478.
Coislin (Armand de Cambout,
duc de), X, 271, 269.
Colbert, X, 295, 78. — Lettre à
lui adressée par Corneille , X ,
5oi et 5o2.
Colchos, I, 106 ; II, 336; 343,
35; 363, 45i; VI, 246;
247; 248; 252; 265, 240;
285, 695 ; 291, 870; 294,
926; 295, 942; 3io, 1294;
317, 1459; 345, 2i34; 348,
2212.
Collardeau (Julien). Son hom-
mage à Corneille au sujet de
la Veuve, I, 386.
Cologne (la ville de), X, 258,
92.
Combalet ( Marie -Madeleine de
Vignerot, marquise du Roure,
dame de), plus tard duchesse
d'Aiguillon, nièce du cardinal
de Richelieu. Epître dédica-
toire, à elle adressée, de la tra-
gédie du Cid, III, 77.
Combat spirituel ( le livre du ) ,
VIII, i3.
Comédie. Sa définition, I, 23 ;
377. — Sa conclusion, I, 27.
— Comédie héroïque, I, 25.
— Actions de la comédie, I,
96. — En quoi la comédie
diffère de la tragédie, I, 25. —
Ce qu'elle a de commun avec
522 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
elle et en quoi elle lui ressem-
ble, I, 26 ; 29. — Défense de
la comédie, VII, 105-107.
Voyez Théâtre (éloge du).
CoMEDTENS, II, 5l9; III, IOO.
— Il s'en établit une nouvelle
troupe à Paris, I, i38.
Commentaires (les) de César .Voyez
César (Jules).
Complies (les) traduites en vers
français par Corneille , IX ,
323-34i-
Comte (le), personnage du Cid.
Voyez Gomès (don), comte de
Gormas.
Comte (Noël le), mythologiste ,
VI, 248.
Conches (la ville de), X, 433.
Condé (la ville de), X, 307, 60.
Condé (la maison de), X, 208,
210.
Condé (le grand), X, 208, 208;
260, 119; 277, 35i; 3o6,
56. - — Épître dédicatoire, à
lui adressée, de la tragédie de
Rodogune, IV, 4n-4I3-
Confesseur. Hymne pour un
confesseur, IX, 587 et 588. —
Hymne pour un confesseur
pontife, IX, 589 et 590. —
Hymne pour un confesseur non
pontife, IX, 590-592.
Conrart, X, 497-
Constance, associé à l'empire par
Honorius, VII, 118, 242.
Constantin. Voyez Costantin.
Constantin, empereur romain, I,
71 ; V, 164, 188.
CoNSTANTiNE, veuve de l'empe-
reur Maurice, V, 14^; i5î;
23g; 240.
CONSTANTINOPLE, T, 120; l38; V,
i56; VII, 38o.
Conti (Noël). Voyez Comte (Noël
Je).
Corbîe (la ville de), X, n3.
Corbtjlon, général romain, VII,
200; 204, 80 et 89; 218, 4!$;
228, 682.
Cordoue (la ville de), IV, i3i.
Corbus , vieux Romain men-
tionné dans Pompée, IV, 89,
1499-
Coeinthe (la ville de), I, 21; 42;
46; 106; II, 335; 34o; 341,
3; 342, 26; 346, 106; 353,
264 et 266; 371, 618; 373,
667 ; 399, I2o5; 411» i44° ;
IV, 423; VI, i34; i45, 261;
148, 34i; 149, 353; i5i,
399; 2o3, i633; 204, 1661 ;
205, i683 et 1687 et 1688 ;
206, 1700; 208, 1755.
Corinthiennes (chœur de), II,
333.
Corneille (Pierre). Etant de-
meuré provincial, ce n'est pas
merveille si son élocution en
conserve quelquefois le carac-
tère, 1,2. — Il ne pouvait
sentir, quand il écrivait M élite,
que la rudesse de son pavs, et
était tellement inconnu qu'il lui
était avantageux de taire son
nom,I, i35. — Sa façon d'écrire
est simple et familière, I, i35.
— Beaucoup de ses amis lui ont
toujours conseillé de ne rien
mettre sous la presse, I, i35.
— Il fait un voyage à Paris pour
voir le succès de Mélite, I,
270. — Dieu l'a fait naître
mauvais courtisan, et il a
trouvé dans la cour plus de
louanges que de bienfaits, I, 2.
— Il étoit absent de Paris pen-
dant l'impression de V Illusion et
n'a pu en corriger les épreuves,
II, 43 1 . — 11 est encore en pro-
vince lorsqu'il compose Ho
race, III, 259. — Il a inventé
les machines tf Andromède, V,
297. — Il a fait réciter, avant
Nicomède, quarante mille vers
sur le théâtre, V, 5oi; 5o5. —
Il s'aperçoit qu'après vingt an-
nées de travail, il devient trop
vieux pour être encore à la
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
523
mode, VI, 5. — Il laisse le
théâtre français en meilleur
état qu'il ne l'a trouvé, et du
côté de l'art et du côlé des
mœurs, VI, 5. — Son ortho-
graphe, VIII, 16. — Ses inno-
vations orthographiques, I, 5-
12. — Il remercie le cardinal
Mazarin de la pension qu'il lui
a donnée, X, 92. — Il de-
mande à Louis XIV la confir-
mation des lettres de noblesse
accordées à son père, X, i35.
— Il le remercie de la pen-
sion qu'il lui a accordée, X,
175. — Il se plaint du retard
du payement de cette pension,
X, i85. — Il le remercie d'a-
voir fait représenter devant
lui, en octobre 1676, plu-
sieurs de ses chefs-d'œuvre ,
X, 309, — Son hommage poé-
tique à son ancien maître le
P. Delidel, jésuite, X, 222. —
Son discours lorsqu'il fut reçu
à l'Académie française, X,
407. — Il désire qu'un de ses
fils entre comme page chez, la
duchesse de Nemours, X, 488.
— Pour diverses relations, lit-
téraires et autres, de Corneille,
et les occasions qui ont donné
lieu à certains de ses ouvrages,
voyez les articles Académie,
Bois - Robert , Foucquet ,
Guise, Hariay (de), Julie de
Rambouillet , Louis XIII ,
Louis XIV, Mazarin, Pascal
(Jacqueline) , Richelieu, Scu-
déry.
Corneille (Mme), femme du
précédent, X, 481.
Corneille (Pierre), fils aîné des
précédents, capitaine dans l'ar-
mée du Roi, X, 188 et 189,
64-78; 272, 280; 3i4, 47 ;
5oi.
Corneille (A7.), second fils du
poëte, X, 272, 280. — Blessé
au pied pendant le siège de
Douai en 1667, X, 188-190,
64-86. — Tué au siège de
Grave en 1674, X, 3i4, 47;
5oi.
Corneille (Charles) , troisième
fils du poëte, mort en 1667, à
l'âge de quatorze ans. Vers
du P. de la Rue sur sa mort,
X, 383.
Corneille ( Thomas ) , fils du
poëte. Son père demande pour
lui un bénéfice au Roi, X,
3o8 ; 3i4, 52.
Corneille (Thomas), frère du
poëte, X, 481; 483.
Corneille (Antoine), frère du
poëte, chanoine régulier au
Mont-aux-Malades, X, 465.
Corneille (Pierre), grand-père
du poëte, référendaire à la
chancellerie du Parlement, X,
433-435.
Corneille (Mme), femme du pré-
cédent, X, 435.
Corneille (Antoine), oncle du
poëte, curé de Sainte-Marie-
des-Champs, X, 433; 435;
437.
Corneille (François), oncle du
poëte, procureur au Parle-
ment, X, 436 et 437.
Corneille, cousin germain du
poëte, outragé par du Mesnil
Haudrey,^X, 479 et 4 80.
Corneille (Mme), femme du pré-
cédent, X, 481.
Cornélte, femme de Pompée,
personnage de la tragédie de
Pompée, IV, i-ii5 ; I, 118.
Cosnard (Marthe). Vers que lui
adresse Corneille, X, 129 et
i3o.
Cosses (les), les Cossus, famille
romaine, III, 4^2, i536.
Costantin (Octavian), X, 433-
435.
Costantin (Pierre), X, 434;
436.
5*4 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Cotys, roi de Paphlagonie, per-
sonnage à'Agésilas, VII, 1-95.
Courbé, X, 436.
Cour celles (de), X, 436.
Courtrai (la ville de), X, 2o5,
159.
Crasse (le jeune), le jeune Cras-
sus, IV, 68, 990; 69, ioi3;
70, io33.
Crassus, père du précédent, VI,
614, 883; VII, 462; 464,
29; 466, 83; 493, 7i3 ; 494,
764 ; 5oo, 904 et go5 ; 5i3,
1221 ; 526, i547-
Cratès, sénateur de Lacédémone,
_ yn, 78, T707; 91, 2007.
Créon, roi de Corinthe, person-
nage de la Médêe de Corneille,
II, 327-419; I, ai; 106. —
Créon dans la Médée d'Euri-
pide, X, 450.
Créon, frère de Jocaste, VI, 194,
1410.
Cresphonte, personnage de la
tragédie grecque de ce nom,
1,67.
Crète (l'île de), VI, 164, 695.
CriÉtheus, père d'vEson, VI, 247.
Creuse, fille de Créon, person-
nage de Médée, II, 327-419;
I, 4^ ; 106 ; X, 45o.
Crisolite, nom de femme men-
tionné dans M élite y I, 147,
69. Voyez Chrysolite.
Crispe, gendre de l'empereur
Phocas , personnage d'Héra-
clius, V, 11 3-24i.
Crispe, fils de Constantin, I,
71'
Crispe ( la mort de ) tragédie
italienne de Ghirardelli , I ,
71-
Criton, personnage de YAn-
drienne de Térence, I, 11 5.
Croix -du -Tiroir (la), carrefour
de Paris, II, 76, 1084.
Curiace, gentilhomme d'Albe.
personnage d'Horace, III, 243-
358; I, 65; 85; 86; IV, 424.
Cybèle, la bonne déesse, III,
552, 1419.
Cydippe, Néréide , personnage
d' Andromède, V, 243-396.
Cydippe, sœur de Psyché, per-
sonnage de Psyché, VII, 277-
370.
Cymodoce, Néréide, personnage
d'Andromède, V, 243-396.
Cyrte, capitale du royaume de
Syphax, VI, 472; 483, 261 ;
487, 358; 489, 391; 490,
416; 5i6, 1066 et 1073; 519,
n33.
Cythère, V, 33 1, 372.
D
Damas (la ville de), II, 4^7,
455.
Damaste, brigand tué par Thésée,
VI, 164, 696.
Damiette (la ville de), IV, 20.
Damis, nom d'un esclave dans
Agésilas, VII, 53, 1102; 78,
1705.
Damon, personnage de la Sui-
vante, II, 11 3- 2 14.
Damon , nom d'homme men-
tionné dans Mélite , I, 201,
963.
Danaé, mère de Persée, V, 3i4;
375, 1298.
Danemark (le), X, 257, 79.
Daniel (le prophète), VIII,
188.
Danois (les), X, 3o2, 53,
Danube (le), VI, 249; X, 339,
114.
Daphné, aimée d'Apollon, V,
356, 881.
Daphné, nom de femme men-
tionné dans Clitandre, I, 265 ;
36o, i548 ; — mentionné dans
le Menteur, IV, i83, 783.
Daphnis, nom de femme, per-
sonnage de la Suivante, II, 1 13-
214. — Mentionné dans la
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
Veuve , I, 4*4> 29%t — dans
la Galerie du Palais, II, 20,
58; 35, 325 ; 40, 4°7-
Darey, X, 436.
Dauphin (le). Voyez Louis, Dau-
phin, fils de Louis XIV.
Dauphlne (la), femme du fils de
Louis XIV. Voyez Marie-
Anne- Christine -Victoire de
Bavière .
David, roi de Judée, III, 481;
VIII, 54; i33, i836; 166,
25o8; 226, 1019; 333; 4IO>
422, 3335; 4^5; 586, i53; IX,
32, 459; 33, 466 et 471; 34,
485 et 491; 499, 3; 5io, 9.
Voyez Psaumes. — La maison
de David, IX, i59, 7. —
Les enfants de David, IX, i85,
20.
Davus dans le Phormion de Té-
rence , 1 , 46 i — dans YAn-
drienne, II, i3 et i4-
Décie (l'empereur), III, 486;
495, 174 et 179; 499, 270; 5oo,
302; 5oi, 307; 526,846; 535,
1017 et 1021 et io3o et io38;
540, ii25; 543, 1208; 552,
1400 et 1 414» 556, 1484; 56 1,
1576. Voyez Décius.
Déctus, III, 476 ; 479- Voyez
Décie.
Décoration du théâtre , décora-
tions, I, 40; 120.
Dédicace. Hymnes pour la dé-
dicace d'une église, IX, 598-
602.
Dédicaces : de M élite , à M. de
Liancour, I, i34 et i35; —
de Clitandre, au duc de Lou-
gueville, I, 26g et 260; — de
la Veuve, à Mme de la Mai-
sonfort, I, 375 et 376 ; — de
la Galerie du Palais^ à Mme de
Liancour, II, 10 et 11; — du
Çid, à Mme de Combalet, III,
77 et 78; — & Horace, au car-
dinal de Richelieu, III, 258-
26 1 ; — de Cinna , à M . de Mon-
toron , III, 369-372; — de
Polyeucte, à la Reine régente,
III, 471-474j — de Pompée,
au cardinal Mazarin, IV, 11-
i3; — de Rodogune, au grand
Condé, IV 4n-4I3; — d'Hé-
raclius, au chancelier Seguier,
V, 141 -i43 ; — de Don Sanche
d'Aragon, à M. de Zuylichem,
V, 4°4-410 > — &OEdipe,k
Foucquet, VI, 1 21-124.
Delidel (le R. P.), jésuite. Vers
que lui adresse Corneille, son
ancien élève, sur sa Théologie
des saints, X, 220-222.
Delphes (la ville de), II, 335;
VI, 139, 127; 149, 355; i83,
1 i5i; 184, 1173.
Démétrius Nicanor, roi de Sy-
rie, IV, 4i5 ; 4*8; 42°; 4^4 ;
4^8. Voyez Nicakor.
Dénouement du poëme drama-
tique, I, 75 ; io5.
Denys le Milésien, VI, 248.
Desmarets (J.), auteur d'une tra-
duction en vers du Combat
spirituel, VIII, i3.
Desoeillets (Mlle), comédienne.
Voyez Œillets (des).
Destin (le), V, 269; 364, io36
et 1048; 3g3, 1716; VII, 347,
1548; 356, 1763; 362, 1929;
363, i942-
Deventer (la place de), X, 280,
395.
Dialogue, X, 5o-52.
Diane, déesse, I, 67; 412, 257;
IV, 417; VI, 249; X, 236, i3.
Diction, I, /\0.
Didon. Son épitaphe, X, 36 et
Didon, tragédie de Scudéry, VI,
462.
Didyme, personnage de Théo-
dore, V, 1-1 11.
Diègue (don) , personnage du
Cid, III, 1-241.
Digeste (\e) , IV, i58, 327; 219,
1443.
5^6 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Digue (la) de la Rochelle, X,
109.
Dioclétiajv , empereur romain,
V, 17, 35.
Dion, historien grec, VII, 197.
Dircé, princesse de Thèhes, fille
de Laïus et de Jocaste, per-
sonnage à'OEdipe, VI, 101-
219; I, 71.
Discorde (la), X , 265 , 209. —
Personnage du prologue de la
Toison d'or, VI, 252-265.
Discours généraux dans le poëme
dramatique, I, 18.
Distïque latin sur les conquêtes
de Louis XIV en 1672, attri-
bué à Corneille, X, 385.
Doesbourg (la ville de), X, 280,
397-
Dole (la ville de), X, 296, 102.
Domitia, fille de l'empereur Pho-
cas, V, 143 ; i52.
Domitian, frère de Tite et amant
de Domitie , personnage de
Tite et Bérénice, VII, i83-
276.
Domitie, fille de Corbulon, per-
sonnage de Tite et Bérénice,
Vil, i83-276.
Don Sanche. Voy. Sanche (don).
Dorante, personnage de /' Illu-
sion, II, 421-527. — Person-
nage principal de la comédie
du Menteur, IV, 117-273; I,
100. — Personnage principal
de la Suite du Menteur, IV,
275-395; 280; 282; 283; 285;
286 ; 3o4, 270 ; I, 19.
Doraste, personnage de la Veuve;
I, 37i-5oo. — Personnage
de la Place Royale, II, 21 5-
3oi.
Dorimant , personnage de la
Galerie du Palais, II, 1-112.
Doris, personnage de la Veuve,
I, 3^; i-5oo. — Doris, nom de
femme, I, 149, 112.
Dorise, personnage de Clitandre,
I, 255-369.
Douai (la ville de), X, 189, 82,
2o5, 157.
Drusus Nero, frère de l'empe-
reur Tibère, X, 266, 227.
Dubé , parent de Corneille , X,
452.
Dubuisson. Lettre à lui adressée
par Corneille, X, 452 et 453.
DUNKER QUE. Voyez DuNQUERQUE .
Dunois, X, 208, 210; 276, 348.
Dunquerque (la ville de), IV,
412.
Dymas, confident d'OEdipe, per-
sonnage d' Œdipe, VI, 101-
219.
E
E. Ses trois prononciations , I,
6 ; 9 ; — e féminin ,1,9; — e
masculin, I, 9 ; — e simple,
!> 9; — e aigu, I, 10; — e
grave, I, 10.
Ebre(I'), X, 286, 11.
Echion , fils de Mercure, VI,
343, 2093.
Écho, V, 33i, 384; X, 236, 16.
Ecosse (1'), I, 274.
ÉDEN(l'), IX, i3, io3.
Eduige, sœur de Pertharite, per-
sonnage de Pertharite, VI, 1-
100 ; 17.
Egée, roi d'Athènes, personnage
de Médée, I, 46 ; 107. Voyez
jEgée.
Egée (la mer), V, 539, 607.
Egisthe, I, 20 ; 81 ; III, 274.
Église (Y), X, 237 33; 238,
, 38
Égnace, Énatius, nom d'un Ro-
main mentionné dans Cinna,
111,438, i2o5.
Egypte (F), II, 456, 448; III,
552, i423;IV, 11; 19; 21
22; 23; 26; 28, 3o; 33, 148
35, 212; 42, 366; 44> 4°4
47, 47°; 48, 5i2; 5i, 582
52, 609; 55, 664; 60, 797
77, 1208 ; 85, 1421 ; 89, 1507
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
527
p5, i658; ioo, 1784; 416 ;
420; 4a3 ; 441, 279; V, 17,
6; ai, n3; 24, Ï7S; 26, 210;
54, 83g; 86, i576; VII, 2o5,
101 ; VIII, 4^3, 3949; IX,
3io; 3n, 3 ; X, 329, 53.
Egyptiens (les), IV, 20; 26.
Electre, fille d'Agamemnon,
personnage des tragédies de
Sophocle et d'Euripide, I, 69 ;
80; 106.
Electre, tragédie d'Euripide, IV,
417 , V, i5r ; — tragédie de
Sophocle, IV, 417; V, i5i.
Eleusine (Gérés), III, 552,
Elide (1'), VI, 190, i3i2.
Élie (le prophète), VIII, 635.
Elisabeth de Hongrie (sainte"),
VIII, i63;545.
Elfinice, fille deLysander, per-
sonnage ftAgésilas, VII, 8-95.
Elvire, personnage du Cid, III,
1-241 ; I, n5.
Elvire, princesse d'Aragon, per-
sonnage de Don Sanche d'Ara-
, gon, V, 397-494.
Elysiens (les champs), I, 222,
i3i2 ; X, 266, 222.
Elzeviers, IV, i34; V", 410.
Emaus (les pèlerins d'), VIII,
. 664.
Emiles (les), famille illustre de
Rome, X, 214, 3o6.
Emilia. Voyez, Emilie.
Emilie , fille de C. Toranius,
personnage de Cinna, III, 359-
462; I, 3o; 45; 47; 69; 87;
io5; 109; 118; 120; X, 441-
Emilie, fille de la femme de
Sylla, VI, 358; 375, 265 et
269; 377, 333; 4°6, 1022;
407, 1048; 4Jo> n37;432,
i636; X, 491.
Emilius Scaurus, X, 491»
Empire (F) d'Allemagne, X, 257,
78 ; 286, 12.
Encelade, un des Titans, II,
5l2, i438.
Endymion, X, i54, 2.
Énée, III, 324, 991 ; VI, 122,
, 4i ; X, 63, 16.
Enéide (1'), V, 317, 44.
Enghien (Henri-Jules duc d'),
fils du grand Condé, X, 208,
201 ; 277, 36i et 362.
Entrées des acteurs sur la scène,
I, 108 et 109.
Envie (1'), X, 266, 222. — Per-
sonnage du prologue de la
Toison d'or, VI, 252-265.
Éole, I, 75 ; X, 109, 49; 239,
63. Voyez vEole, — Person-
nage à? Andromède , V, 243-
, 3g6.
Éphese (la ville d'), Vil, 8; 9,
1; 48, 970; 52, iii4; 56,
. "89; 79, 1733.
Ephyre, Néréide , personnage
R Andromède, V, 243-3g6>
'E7uetma. Traduction de ce mot,
, I, 34.
Epigrammes, X, 46-49; 60; 129;
173. — Epigrammes attribuées
à Corneille, X, 357~35o.
Episode, I, 40 et 41; 47- — Épi-
sodes détachés, I, 4§-
Episodiques (personnages), I,
47 et 48.
Epitaphes : de Didon, X, 36 ; —
d'Elisabeth Ranquet, X, i33.
Eraste, personnage de Mélite, I,
123-253; 271; 394; 397. —
Nom d'homme mentionné dans
l'argument de Clitandre , I ,
265. — Personnage de /' Illu-
sion , II, 42I"^27- — Nom
d'un serviteur d'Auguste dans
Cinna, III, 433, Iioi.
Eriphyle, femme d'Amphiaraùs,
!> 77-
Ermite, II, 3i2 et 3i3.
Eryce , V, 33i, 372. — La
déesse d'Eryce , Vénus, V,
329, 328.
Eryxe, reine de Gétulie, person-
nage de Sophonisbe , VI, 447"
549.
528 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Escaut (1'), X, 208, 2o3 ; 218,
1 ; 286, 11 ; 3o3, 58.
Eschyle, I, 66-, 112; V, 404 ;
. VI, 461.
Eson, père de Jason , I, 106.
Voyez ^Eson.
Espagne (1'), I, 89; 90; III, 118,
240; 123, 333; 186, i56o;
IV, 43, 393; 55, 685; ï3i,
285; 3i5, 475 (var.) ; V, 407;
VI, 23o; 264, 229; 35g; 36i;
364; 367, 58; 370, i33;384,
409; 387, 591 ; 408, 1090;
417, 1291; 49-5, 1482 ; 43i,
1602; 465; 47^ ; 4i; 526,
1282; 63o, 1267; X, n5;
186, 7; 198, 59; 200, g3;
201, 101 ; 202, 128; 219;
253, 6; 256, 5o; 257, 78;
292,34; 3o4, 1; 325, 69;
328, 33; 4IO;492- — Paix
avec l'Espagne, I, 47* —
Point d'Espagne, II, 23, 109.
— La cour d'Espagne , VIII,
432.
Espagnes (les), VI, 388, 622;
419, i33o.
Espagnol , les Espagnols , I ,
107; III, 82; 87; 95; 98;
99 ; IV, i3i ; i32 ; i38; 279;
V,3io;4i4; VI, 358; 36o;
387; 420, 1369; X, 197, 5i;
2o5, l6o; 2l5, 321.
Espagnol (F), la langue espa-
gnole, III, 94; IV, i32;
i37.
Esther, IX, 38, 571; 4°, 601;
41, 621 et 625 ; 42> 63i.
Esturville (Nicolas du Che-
vreul, sieur d'), X, i33.
Esturville (Mme d'). Voyez
Ranquet (Elisabeth).
Etéocle, VI, i59, 575.
Ethiopie (1'), II, 448, 267 ; V,
273; 296; 3oi; 3o2; 3o3;3i4;
VIII, 5i; IX, 107, i5. —
La reine d'Ethiopie, VIII ,
5i.
Ethiopiens (les), V, 296; 3o3.
Éthra, personnage des Sup-
pliantes d'Euripide, I, 112.
Voyez jEthra.
Etienne (saint), martyr, VIII,
i 191-
Etienne (saint), pape, VIII, 620.
Eudoxe, fille de Léontine, per-
sonnage à'Héraclius^ V, n3-
241.
Eudoxe, mère de Pulchérie, VI,
384, 88.
EUMÉNIDES (les), I, 225, l363.
Eunuque (/') , de Térence , II
102.
Euphorbe, affranchi de Maxime,
personnage de Cinna, III, 359-
462; I, 47.
EUPHRATE (1'), VII, 462.
Euripide, I, 35; 44et4^; ^', 77
et 78 ; 106 et 107 ; 112 ; II ,
isz; 333 ; 335 ; IV, 417; 424 >
V, i5i; 3o8; 408; VI, 461;
X, 4^o; 5oo.
Europe (V), I, 5; II, 45o, 325;
III, 4o3, 401; IV, 411; V,
142; VI, 257, 75 et 76; 481,
216; VII, 495, 769; X, 93,
4ii
Eurydamas , un des argonautes,
vi, 343, 2093.
Eurydice, fille d'Artabase, roi
d'Arménie, personnage de Su-
véna, VII, 455-534-
Eustache (saint), VIII, 362.
Evandre , affranchi de Cinna,
personnage de Cinna, III, 35g-
, 462.
Evangélistes (Apôtres et). Hym-
nes pour eux , IX, 573-58o.
Évangile (F), 111, 481.
Eve, VIII, 198. — Les enfants
d'Eve, IX, 339.
Excuse : à l'archevêque de
Rouen, X, 64-72; — à Ariste,
X, 74-78 ; 476.
Exode, ce qui se récite après le
dernier chant du chœur , I,
4o et 41 . — H répond à notre
cinquième acte, I, 48.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
529
Exode (F). Voyez Bible.
E\i père, personnage d'Héra-
clius, V, 1 13-241 ; I, 79.
Ezéchias (le roi), VIII, y5-, ftj.
Ezéchiel, IX, 46, 702
Fabian, domestique de Sévère,
personnage de Polyeucte, III,
463-570.
Fabien s (les), les Fabius, III,
452, i536.
Fabius, X, 97, 45.
Fables clans la poésie (Défense
des), X, 234-24i-
Farnèse (^Alexandre duc de), X,
267, 235.
Fauste femme de Constantin ,
I,7i.
Faustin (saint), VIII, 659.
Félix , gouverneur d'Arménie ,
personnage de PolyeucU , III ,
463-070; 1,64; 273; V, 12 et 1 3.
Félix, affranchi de l'empereur
Claude, VI, 597, 5io.
Félix, nom d'homme mentionné
dans la tragédie d'Hén clius,
V, i83, 642 et 645.
Fernand (don), premier roi de
Castille, personnage du Cid,
III, 1-241; 38; 96; 120.
Fernand (don), roi d'Aragon,
V, 411; 466, 11 26; 490, 1732 ;
492.
Ferrier (le P.), jésuite, con-
fesseur de Louis XIV, X,
3o8, 3.
Feuillants. Voyez Goulu (dom
Jean).
Fictions de théâtre, I, rai.
Fiérabras, II, 464, 390.
FiESQiiE (le comte de), X, 60.
Flamands (les), X, 2o3, i4T >
204, i5i; 206, 176; 325, 67.
Flamand (le), la langue flamande,
III, 82.
Flamininus. Voyez Flaminius,
CoîiAUILLE. X
Flaminius, mieux Flamininus,
ambassadeur de Rome en Bi-
thynie, personnage de Nico-
mède, V, 49^-593; I, n5.
Flaminius, père du précédent,
V, 3o9.
Flandre (la), IV, 4i3 ; X, 186,
8; 202, 116 ; 206, 174 et 175 ;
209, 2i5; an, 257; 253, 5;
3o4 , 1 ; 328 , 35 ; 463 ; 466 :
467.
Flavian , soldat de l'armée
d'Albe, personnage d'Horace,
III, 243-358.
Flavian, confident de Tite, per-
sonnage de Tite et Bérénice,
VII, i83-276.
Flavie, fille de Marcelle, per-
sonnage de Théodure, ne pa-
raissant pas sur la scène, Y,
i-iii.
Flavie , amie de Plautine, per-
sonnage d'Othon, Y 1,5 64-657.
Flavie, dame d'honneur d'Ho-
norie , personnage d'Attila ,
VU, 97-181.
Fleur {la) , tragédie d' Agathon ,
I, 14.
Florame , personnage de la Sui-
vante, II, 11 3- 2 14.
Florange , personnage de la
Veuve, ne paraissant pas sur
la scène, I, 37i-5oo. — Nom
d'homme mentionné dans la
Suite du Menteur, IV, 3 1 2 . 4 1 2 .
Flore, déesse, II, 27, 170; VI,
293, 9°4; VII, 338, 1309 ;
X, 23g, 5o.
Florence (la ville de), IV, 292,
79; 293> 96-
Florice, personnage de la Gale-
rie du Palais , II, 1-112.
Floridan, fils du roi d'Ecosse,
personnage de Clitandre , T ,
255-36g.
Floridor, X, 483.
Florilame, nom d'homme, per-
sonnage du Ve acte de F Illu-
sion, ne paraissant pas sur la
34
Y\o TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
scène , II, 5<>7-5i8; 524-527
(var.).
Florine, personnage de la Comé-
die des Tuileries, II, 3o3-355.
Flobise, nom de femme men-
tionné dans la Suivante, II,
120; i45, 366; 211, 1637.
Foucquet (Nicolas), surinten-
dant des finances, X, 477- —
Épître à lui adressée en tête de
la tragédie d'OEd/pe, VI, 121-
124. — Il a proposé à Corneille
trois sujets pour le théâtre,
dont il lui a laissé le choix,
VI, 124; 128 et 129.
France (la), I, 89; i34; III, 7f ;
81, 280; 473 ; 474; IV, 11 ;
i44, 74; 145, 79; 285, 412 ;
V, 292 ; 3 10; 3 16, 6 ; VI, 254 ;
463; VII, 104 ; 108 ; 114, i42
et 149 et 157 ; 120, 3i3 ; i34,
622;VIII,343;IX,63;X, 32,
i3 et 14; 57, 3; 75, 23; g5,
10; 100, 5; 112, 75; 117, 23;
119, 57; 123, 9; 125, 2; i35,
8; i38, 5; i53, 5; 186, 3i,
194 ; 196, 37; 200, 99; 201,
io5; 206, 177; 244, 5; 253,
2; 258, 89; 264, 190; 291,
26; 3oo , 17; 3o6, 49 '■> 32o,
71 ; 322, 1 ; 334, 1 ; 336, 57 ;
338, 90 ;33g, n5 ; 449; 4fi3 ;
473; 475 ; 4^o; 5oo. — La
France, personnage du pro-
logue de la Toison d'or, VI,
2Ô2-265.
Franche-Comté (la), X, 223;
297, io3.
Franciade (la) , poème épique de
Ronsard, X, 117, 34-
François, Françoise, Français,
Française, IV, 19. ; VIII, i5 ;
19. — '.A la. françoise, III,
280 ; IV, i32.
François (les), les Français, II,
43i; III, 81; V, 319, 81;
404 ; VII, 5 ; 1 1 2, 96 ; IX, 65 ;
X, 202, 117; 212, 277; 263,
172; 265, 212 ; 268, 254; 274»
3i2 et 3ai ; 278, 374; 3o3,
54;3o4,7; 325, 61; 45o;5oo.
François (le) , la langue fran-
çaise, III, 82; IV, 12; i32.
François d'Assise (saint), VIII,
T07; 356 ; 5?i, 5373 ; 533.
François de Paule (saint), VIII,
422.
François Xavier (saint), VIII,
338.
Francs (les), Vil, ni, 52; 118,
259; 127, 458; 129, 507 et
520; i3o, 536; i34, 619;
181, 1779 ; 382, i3.
Frayeub (la), X, 3o2, 38.
Fronteau (le R. P.). Son Tho-
mas vindicatus, X, 4^8. — Son
Oraison funèbre de Matthieu
Mole, X, 472 et 473.
Fuensalida (le comte de). Voyez
Ayala (don Garcie d').
Fulvdz, confidente d'Emilie, per-
sonnage de China, III, 359-
462.
Furtes (les), I, 296, 353. —
Furies vengeresses données à
Oreste, I, 20.
Furne (la ville de), X, 204, i53.
Gabaonites (les") , VIII , 455 ,
3998.
Gabriel (l'ange), IX, 8, i3;
497, *7î 56l>9-
Gainas, général goth, VII, 116,
199-
Galas , général de l'empereur
Ferdinand III, IV, 159, 336.
Galaite (la), province de l'Asie
Mineure, V, 542, 699.
Galba, empereur de Rome, per-
sonnage cVOthon, VI, 564-
657; VII, 272, 1686.
Galerie du Palais (la), comédie de
Corneille, II, 1-112; 10-12.
— Examen de la pièce , II ,
ii-i5.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
53 1
Galilée (la), IX, 577, 7.
Gange (le), IV, 53, 622 et 625.
Garcie (don), usurpateur du
trône d'Aragon, V, 4*3; 422>
82; 445, 65o; 446, 678; 466,
n3o; 473, i333; 481, i538
et i544-
Garibalde, duc de Turin, per-
sonnage de Pertharitc , VI, 1-
100.
Garomne (la), la Garonne, VII,
117, 228 ; X, 23i.
Gascon. Voyez Matamore.
Gaule (la), VI, 58?, i54; VII,
110, 46; 119, 79; 117, 232;
144, 875; 145, 901.
Gaules (les), I, 90 ; IV, 43, 3g3.
Gaulois (les), VII, 246, 1100
Gautier - Garguille ( Hugues
Guéru , dit) , comédien , II,
^ 443, 181.
Gènes. Point de Gênes, II. 23,
109.
Geneviève (sainte), IX, 619, 2.
— Hymnes de sainte Geneviève,
traduites en vers français par
Corneille, IX, 619-636.
Geôlier (un), personnage de
Clitandre, I, 255-369- — Per-
sonnage de l'Illusion, II, 421-
527.
Gépidf.s (les), VII, io3; 108.
GÉraste, personnage de la Sui-
vante, II, n3-2i4.
Germain d'Auxerre (saint), ap-
pelé un saint prélat, IX, 619,7.
Germanicus ( Tiberius Urusus
Nero), X, 267, 23i.
Germanie (la), \I, 582, i54-
Géron, personnage de la Veuve,
l, 37i-5oo.
Géronte, personnage de Clitan-
dre, I, 255-369. — Personnage
de l'Illusion, II, 42lI"527. —
Personnage du Menteur, IV,
it 7-273. — Nom d'homme
mentionné dans M élite , I, 201,
963.
Gersen (.Jean) a été regardé par
quelques-uns comme l'auteur
de Y Imitation, VIII, 12; 18;
X, 461 ; 464; 467.
Gerson ( Jean ) a été regarde
comme l'auteur de Y Imitation ,
VIII, i5; X, 463.
Gerujndensis (Joannes), évêque
espagnol, X, 491 et 492.
Gervais (saint), IX, 283.
GÉTui,iE(la),VI,472; 545, 1723.
Gétuliens (les), VI, 476, 92.
Ghirardelli (Jean - Baptiste") ,
poëte italien, I, 71.
Ghisi, pour Chigi, VIII, 6.
Voyez Chigi.
Gibelins (les), X, 126, 8.
Gilbert, poëte français. Analyse
de sa Bodogune, IV, 5o9-5n.
Girard (le frère), convers de l'or-
dre des Chartreux, VIII, 470.
Gironne , ville d'Espagne , VI,
358.
Glabrion, un des complices de
Cinna, III, 45i, 1489.
Glabrion, mentionné dans Ser-
torius, VI, 407, io55.
Glauque, dieu marin, person-
nage de la Toison d'or, VI,
221-349-
Glycère, personnage de l An
drienne de Térence , I, n5;
II, 14.
Godeau (Antoine), X, 71, 77.
Goldoni, poëte italien. Note sur
sa pièce intitulée il Bugiardo ,
IV, 272 et 273.
Goliath, VIII, 333.
Gombaut (de), X, 474-
Gomès (don), comte de Gormas,
personnage du Cid, III, 1-24 1 ;
I, 60; 10 1 ; X, 401.
Gondebaut, allié d'Aétius, men-
tionné dans /ittila , VII, n 5,
*79-
Gorgone, V, 295; 3oi.
Gormas (le comte de). Vove/
Gomès (don
Goth, les Goths, VII, 116, 202-
149, 1012 ; 382, 27.
y$i TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Goujon, avocat au conseil privé
du Roi. Lettre à lui adressée
par Corneille, X, 433-437.
Goujon, père du précédent, X,
437.
Goulu (dom Jean), général des
Feuillants. Epitaphe latine
composée en son honneur par
Corneille, X, 3g6.
Grâce (Monsieur de), l'évêque de
Grasse, X, 467.
Grâces (les), I, 147, 75; VI,
293,902 et 908; X, 339, n5.
Grammont (le maréchal de), X,
480.
Grammont (l'hôtel de), X, 480.
Grammont (le régiment de), X,
AZo.
G r amont (Armand de), comte de
Guiche, X, 269, 264.
Grand Seigneur (le), II, 448?
271.
Grasse. Voyez Grâce.
Gratian, mentionné dans Pul-
cherie, VII, 38s, 3l.
Grave (le siège de). Un fils de
Corneille y est tué, X, Soi.
Grec, les Grecs, I, 107; 262; II,
12; 118; III, 408, 542; IV,
2S2 ; V, 296 , 3io ; 4o4 j VI,
249; 271, 379 ; 289, 816; 325,
i655;346, 2151^11, 5; 11,
45; 45, 898; 47, 95i; 56,
1208; 45o; IX, 53o, ai; X,
45c; 455 ; 5oo.
Grèce (la), II, 336; 362, 438;
369, 566; 371, 621 ; III, 552,
1420; IV, 437, 176; V, 3o4;
VI, i37, 55; i38, 78; i65,
729; 268, 294; 271, 366 ; 272,
3g4 et 401 et 419; 275, 478;
276, 522; 284,670; 291, 862
et 877 ; 3oi, io53 ; 3o5, 1188;
3io, 1296; 337, 1961; 344,
•2109; 347, 2i58; VU, 23,
356; 27, 441 et 458: 46, goÔet
93o; 48,966; 56, n85etii94;
07, i2i9;8o, 1742; 92, 2040;
X, 63, i5; 206, 167; 5oo.
Grenade, III, 11 5, 197; i36,
538; i45, 706; 170, 1226.
Grenouilles (/es) , comédie d'A-
ristophane, II, 12 ; V, 3o8.
Grimoald, comte de Bénévent,
personnage de Pertharîte, VI,
1-100; I, 272.
GROLLE(laplacede ), X, 280, 395.
Grotius (Hugo), ambassadeur de
Suède, I, 102; X, 443. — H a
mis sur la scène la Passion de
Jésus-Christ et l'histoire de
Joseph, III, 480.
GuADALQUIVIR (le), III, 98
Guarini. Voyez Pastor fido.
Guelfes (les), X, 126, 8.
Guêpes (les), comédie d'Aristo-
phane, II, 11.
Guérente. Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve ,
I, 38o et 38i.
Guérin (Bobert). Voyez Guil-
laume (Gros-).
Guéru (Hugues) . Voyez Gautier-
Garguille.
Guiche. Voyez Gramont.
Guillaume (Robert Guérin, dit
Gros-), comédien, II, 443, 181.
Guillaume (saint), duc d'Aqui-
taine, VIII, 592.
Guillen de Castro (don). Voyez
Castro (don Guillen de).
Guise (Henri II duc de), X,
493. Sonnet adressé après sa
mort à son neveu par Cor-
neille, X, 182-184.
Guise (Louis- Joseph duc de),
neveu du précédent. Sonnet
que lui adresse Corneille sur
la mort de son oncle, X, 182-
184.
Guitry (Guy de Chaumont de),
tué au passage du Rhin, X,
271, 271 ; 276, 345.
GlNDEBERT, VI, 22, 32; 23, 4T
et 59; 24, 79; 91, 1639.
Gusman (don Lope de), person-
nage de Doit Sanche a I Aragon ,
v, 397-494.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
5i!
GustylAH d'Alfarache, héros d'un
roman espagnol , mentionné
dans P Illusion, II, 444, 186.
H
Hainaut rie), X, 202, 116 ; 253,
5; 328', 35.
Halicarnasse, VII, 8; 52, 1096.
Hanelay (Mme de), X, 4^2.
Hannon, VI, 5i6, 1068.
Harangues, déplacées à la fin
d'une pièce, III, 279.
Hardy, poète dramatique, I, 137;
VI, 462. — Sa veine est plus
féconde que polie, I, i38.
Harlay de Champvaixgn (Fran-
çois de), archevêque de Rouen.
Vers latins faits par Corneille
à son invitation, X, 64-72.
Harlw de Champvallon (Fran-
çois), neveu du précédent, ar-
chevêque de Rouen de i65i à
1671, puis archevêque de Pa-
ris, X, 296, 91. — Il décide
Corneille à dédier au pape
Alexandre VII sa traduction de
Y Imitation^ VIII, 3.
Harpies (les), VI, 248; 327,
1725.
Haye (la ville de la), X, 282,
429; 452; 457.
HÉBREU , les HÉBREUX , VIII ,
262, 63; 453, 3g49; IX, 45,
681.
HÉCATE, X, 236, l3.
Hécatompyle, capitale des Par-
thes, VII, 463, 6.
Heinsius (Daniel), I, 34; 102;
IH,479;48o;iV,i33;y,4o9.
Hélène, femme de Ménélas, I,
106.
Hélène, tragédie d'Euripide, I,
45; 77; IV, 417; V, i5i.
Héltodore, évêque de Tricca,
auteur du roman de Théagène
et Ghariclée, V, 296; 3o4- —
Il aime. mieux perdre son évê-
ché que son livre, X, 43 1 et
432.
Héliodorus, envoyé pour piller
le temple de Jérusalem, VIII,
404.
H elle, tragédie grecque, I, 67.
Hellespont (1'), V, 539, 607.
Hémon, fils de Créon, person-
nage de YJntigone de Sopho-
cle, I, 68. Voyez JEmqn
Hénouville (le presbytère (T), épî-
tre attribuée à P. Corneille,
X, 345-352.
Henri IV, roi de France, V, 3 18,
61; X, 211, 260; 338, 92.
Héraclius, empereur d'Orient tra-
gédie de Corneille, V, n3-
241 ; I, 47 ; 63 ; 68 ; 93 ; io5 ;
n5; 119; 121; 272; 273;
II, 337; III, 382; IV, 417. —
Examen de la pièce, V, 148-
i54- — Applaudissements qui
en ont suivi les représenta-
tions, V, 141. — Sa représen-
tation fatigue et il l'a fallu
voir plus d'une fois pour en
remporter une entière intelli-
gence, V, i54-
Héraclius, fils de l'empereur
Maurice, personnage princi-
pal de la pièce de ce nom, V,
ii3-24i ; I, 59 ; 60; 63 ; 69 ;
76; 79; V, 5o8.
Hurcule, IV, 4i6; V, 3i6, 25;
VI, 147, 3o6; VII, 11, 5o;
44, 856; 45, 876. — Les co-
lonnes d'Hercule, III, 285, 5i.
Herminie, dame d'honneur de
Sophonisbe , personnage de
Sophonisbe, VI, 447_549-
Hermione, fille de Ménélas et
d'Hélène, I, 106.
Hérode , roi de Judée , IX ,
5oi, 1. — Personnage de la
tragédie de Herodes infanti-
cida, de Heinsius, III, 481. —
Personnage de la tragédie de
Mariane, de Tristan, I, 48.
Hesdin (la ville de), X, 11 4-
534 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Heserus (le P.). Son Lexïcon
Germanico-Thomœum, X, 4^9 >
462 ; 4^5. — Ses Septuaginta
palmée, X, 4^6- — Son Cen-
tumvirale judicium, X, 4° 7- —
Dioptra Heseri, X, 46$.
Hexamètres (vers), V, 3og et 3 10.
Hiérico (la ville de), IX, 125.
Hiérusalem, VIII, 4'72> 43^4-
Voyez JÉRUSALEM.
Hippolyte, fils de Thésée, I, 72;
II, 5s5 (var.).
Hippolyte , tragédie de la Pine-
lière, X, 73.
Hippolyte, nom de femme, per-
sonnage de la Galerie du Pa-
lais, II, 1-112 ; 11; 12. —
Nom d'un rôle de femme dans
le Ve acte de /' Illusion, II, 607-
5 18. — Nom de femme, men-
tionné dans M élite , I, 149,
Ii3; — dans Clitandre, I, 265;
275, 2; 276 (var.); 281, too;
287, 199; — dans le Menteur,
IV, i83, 783; — dans une
chanson, X, 54, 25.
Hirtius, historien, IV, 22.
Hollande (la), IV, i33; X, 252;
258, 97 ; 278, 365 et 373 ;
285, 5; 292, 34; 325, 69;
499. — Toile de Hollande,
II, ai.
Hollandots (imprimeurs), I, 5.
HoLOFERNE, HoLOPHERNE , VIII,
485; IX, 36, 528; 37, 536
et 55i.
Homère, I, 32; 33; VI, 122, 42.
Homme-Dieu (1'), IX, 18, 2o5.
Hommes illustres (les) de Cam-
pion, X, 137.
Hongrie (la), X, 196, 38.
Honorte, sœur de l'empeur Va-
lentinian, personnage d'Attila,
VII, 97-181.
Horace, poëte latin, I, 16; 19;
25 ; 3i-33 ; 36 ; 37 ; 5o ; 78 ;
79; 97; io7; "7» 2Ô1 5 n>
119; 433; III, 86; 100; 101;
•260; a6i; *73; 374-, 376; 277;
IV, i3i ; 280; 281; V, 404;
406; 5o4; VI, 5; 468; VII,
5 ; X, 485. — Fausse citation,
I, 3. — Horace confondu avec
Perse, V, 3i2 (var ). — Vers
imités d'Horace, attribués à
Corneille, X, 356.
Horace, tragédie de Corneille,
III, 243-358; I, 4; 85; 97;
98; 116; n8; 122; iv, 424;
V, 14 ; X, io3, 10. — Examen
de la pièce, III, 273-280 —
Sa chute, III, 274 (voyez la
note). — Le Ve acte est cause
du peu de satisfaction que laisse
cette tragédie, III, 279. —
Les vers d' Horace ont quelque
chose de plus net et de moins
guindé pour les pensées que
ceux du Cid, III, 281. — Ho-
race représenté à Versailles en
octobre 1676, X, 3og; 3 11, 3.
Horace, personnage principal de
la pièce de ce nom ; III, 243-
358; I, 65; 109; VI, 122, 34;
X, 97, 37; 432; 441.
Horace (le vieil), père du pré-
cédent , personnage d' Horace,
III, 243-358.
Horaces (les), adversaires des
Curiaces, I, 85 ; 86; III, 279.
Horaces (les), autre titre de la
tragédie d'Horace, VI, 4^4-
Hôtel de Bourgogne (1'). Voyez
Bourgogne.
Huns (les), VI, 3o, 25i; VII,
108 ; 382, 27.
Hyarbée, capitale de la Gétulie,
VI, 491, 455; 494, 543.
Hymen (le dieu), 1, 248 (var.).
Hyménée (F), II, 3a4> 352. —
Personnage du prologue de la
Toison d'or, VI, 252-265.
Hymnes pour chaque jour de la
semaine, traduites en vers fran-
çais par Corneille, IX, 449~
488 — Hymnes propres du
temps, IX, 489-541. — Hymnes
propres des saints, IX, 542-
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
535
572. — Hymnes du commun
des saints, IX, 573-602. —
Hymnes de saint Victor, IX,
607-612. — Hymnes de sainte
Geneviève, IX, 619-636.
Hypsipyle , reine de Lemnos ,
mentionnée dans Médée, II,
342, 9 et 25; 343, 34 — Per-
sonnage de la Toison d'or, VI,
221-349-
I
I consonnes, distingués des i
voyelles, I, 6.
I. Son emploi, I, 6.
Iambiques (vers), V, 309 et 3io.
Ibères (les), X, 69, 5i.
Icélus, nom d'esclavage de Mar-
tian, personnage à' O thon, VI,
596, 492.
Icile , un des complices de Cinna,
III, 45i, 1490.
Idye, fille de l'Océan, VI, 249.
Ignace (saint) ,martyr , VIII, 2 1 3 .
Ignace de Loyola (saint), VIII,
3io.
Ildione, sœur de Mérouée, roi
de France, personnage d1 'Attila,
VII, 97-181.
Ilergètes (les), peuple de l'Es-
pagne tarraconaise, VI, 42 5,
i485.
Iliade (F), V, 3 17, 44-
Illusion (1'), comédie de Corneille,
II, 421-527. — Examen de la
pièce, II, 4^2 et 433. — Son
succès au théâtre, II , 43 1 et
432. — L'auteur, absent de
Paris, n'a pu en corriger les
épreuves, II, 43 1- — Elle se
soutient encore au théâtre après
trente ans, II, 433.
Illyriens (les), VI, 643, 1539.
Imitation de Jésus-Christ (F), X,
468. — Traduite en vers fran-
çais par Corneille, VIII, 29-
687. — Auteurs présumés de
Y/mitarion, VIII, T2-t5; X,
460-472. — Mise en vers latins
par Thomas Mesler , bénédic-
tin (1649) , VIII, 17.
Imitations. Voyez Traductions.
Inde (1'), IX, 2i5, n.
Indes (les), V, i32 ; VIII, 4^2.
Indibilis, prince des Ilergètes,
mentionné dans Sertorius, VI,
38i, 43"î.
Infante (F), personnage du Cid.
Voyez Urraque (dona).
Infortiat (F), IV, i58, 327.
Infortune. Aristote ne veut pas
qu'un homme tout à fait in-
nocent y tombe ; il ne veut
pas non plus qu'un très-mé-
chant y tombe, I, 63.
Innocents (les saints). Tragédie
d'Kcinsius sur leur martyre,
III, 480.
Ino, VI, 245.
Inscriptions , mises au-dessous
des estampes qui représentent
les glorieuses actions de Louis
XIII, X, io4-ii5; — de deux
fontaines de Paris, X, 242-
244>
Ion, tragédie d'Euripide, I, 77.
Iphicrate, vieillard de Corinthe,
personnage d'OEdijoe, VI, 101-
219.
Iphigénte , fille d'Agamemnon ,
I, 67; IV, 417.
Iphigénie in Tauris, tragédie d'Eu-
ripide, I, 4^; 77; I22» IV>
417; V, i5i.
Iphite , argonaute , personnage
de la Toison d'or, VI, 221-
349.
Irène, sœur de Léon, person-
nage de Pulchérie, VII, 371-
453.
Iris, personnage de la Toisond'or,
VI, 221-349-
Iris, nom de femme, désignant
probablement la comédienne
du Parc, X, 140, 12; i63, 1;
167, i3; 168, 7; 233, 3. —
Élégie sur son départ qui a
536' TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
été attribuée à Pierre Corneille,
mais est de Thomas, X, 363.
— Derniers vers de Corneille
à Iris, X, 387.
Isabelle, personnage de l'Illu-
sion, II, 421-527 — Person-
nage du Menteur, IV, 117-273.
Isabelle, reine de Castille, per-
sonnage de Don Sancke d? Ara-
gon,!, 44; V, 397-494.
Isaïe, Vin, 5 1 ; 75; 457. — Pas-
sage de lui traduit par Cor-
neille, VIII, 269, 191.
Islande (1'), II, 457, 462.
Ismène, fille d'OEdipe, VI, 140,
146 et i53; 141, 1.6 1.; 15g,
574-
Israël, IX, 24, 3o6 et 3i2; 27,
355 et 371; 95, 24; 107, 3;
119, 14; 123; i45, 57; i83,
i3; i85, 7; 192; 197, 20;
207, 27; 219, 29; 225, 34;
23o ; 235, 29; 237, 18; 238;
3n, 7; 333, i3; 557, 10. —
Les fils ou enfants d'Israël
VIII, 444; 454, 3995; 263,
72; IX, i5o; 317, 81. — Les
trois enfants d' Israël dans la
fournaise, VIII, 444. — La
maison d'Israël, IX, 3i5, 65;
3 16. — Le sang d'Israël, IX,
i85, 14. — I^ Seigneur Dieu
d'Israël, IX, i56; i93, 3.
Issel. Voyez Yssel.
Isthme de Corinthe(I'), II, 353,
271.
Italie (F), II, 199, i4o5; 3i4,
76; III, 339, 1307; 389, 109;
45o, 1470; 458, 1678; IV,
43, 3g3 ; 71, io65 ; 194,
1029; 291, 48; 3i5, 47^
(var.); 346, 1097; V, 3i6, 6;
587, 1728; VI, 6i,978;375,
266; 377, 334; 4IO> n38;
463; VII, 117, 233; X, 110,
60.
Italien, les Italiens, 1, 107;
VIII, i3; 18; X, 463. — Ils
affectent l'agnition, I, 71.
Italien (1') , la langue italienne,
111,82.
Ivry. Voyez Yvry.
Txion, I, 3i; 225, i359; II ?
409, 1387; 4i5, i524;VII,
353, 1669; 357, 1779.
J. Son emploi, I, 6.
Jaca , forteresse d'Aragon , V ,
4i3.
Jacob, IX, 18, 191; 26, 352;
67, 3 ; 123; 170; 171, 4 ;
218; 23i, 3; 3i3, 28. — Le
Dieu de Jacob, IX, 3i2. —
Les fils de Jacob, IX, i5i,
5i; 235, 22. — La maison de
Jacob, IX, 3io ; 3n, 4-
Jacobin (religieux), VIII, 3 13.
Jacques (saint), ermite, VIII,
524.
Jaffa, ville de la Palestine, V,
3oi.
Jane, nom de femme, X, 46, 1.
Janus (les portes de), III, 4°9>
554.
Japon (le), II, 448,267; X, 254,
3i.
Jason, chef des argonautes, I,
20; X, 45o. — Personnage de
la tragédie de Méclée, II, 327-
419 ; I, 46; 106 ; IV, 423. —
Personnage de la Toison d'or,
VI, 221-349- — Personnage
do la Médee de Sénèque, I,
21; IV, 282.
Jason, jurisconsulte, IV, i58,
328.'
Java, X, 254, 3i.
Jean (saint) l'évangéliste, VIII,
382, 2535 ; IX, ,47, 735. —
Passages de son Evangile tra-
duits par Corneille, VIII, 178,
43-49; 214, 760; 395, 2776-
2778; 680, 2o83-2o86.
Jean-Baptiste (saint) , VIII ,
529. — Sa mort sujet d'une
DES ŒUVRES DE CORNEH.Î.E.
5Î7
tragédie de Buclianan, LU,
480. — Hymnes pour la nati-
vité de saint Jean-Baptiste ,
IX, 543-548.
Jean-Calybite (saint), VIII,
399-
Jean d'Autriche, don Juan, X,
267, 233.
Jean Pain-Mollet (la rue), à
Rouen, X, 436.
Jephté. Son histoire mise en tra-
gédie par Buclianan, III , 480.
Jérémie, X, 448.
Jébtco. Voyez HraRico.
Jérôme (saint), VIII, 48.
Jérusalem, V, 3oa ; VIII, 5i
472, 4364 ; IX, is3 ; i55
184; 187; 194; 197, 5
217, 1 ; 264; 271, 87; 272
598,i.
Jesse, IX, 28, 375.
Jésus-Chrtst, III, 476; 479;
480 ; VIII, 1; 16 ; 22 ; 27; 29 ;
3o, 5; 48, 3o8; 82, 884; 90,
1026 et note 2; n5, 1491;
i45, 2o85 ; 148, 2i55 ; 169,
2568 ; 177,22; 179, 67; 181,
117; 184, i83 ; 209, 664;
210, 680 et 687; 2i3, 751 et
note 1 ; 2i5, 784 et 794 ; 216,
804 ; 217, 832 et 839 et 840 ;
218, 854 et 855 ; 232, 1142 ;
237, titre et i253;238, 1282;
239, 1293 ; 240, i3i2 ; 242,
i348 et i358 ; 249, i5n ;
25o, i52i ; 253, 1601 ; 255,
i63g; 259, titre et note 1;
281, 436 ; 283, 479 ; 289;
295, 745; 3i3; 328; 35i,
titre et note 1; 368; 371; 384;
412; 4i5; 434, 3563; 475;
477; 479, 45i4; 5o3; 537,
5686; 552, 6042; 553, titre
et note 1; 557, 6026 ; 558;
58o, titre et note ij 5go ,
546: 594, 319; 599; 611,
682 ; 616, 784; 625, titre et
note 3; 643, titre; 653, i544;
654; 659, titre; 664, titre et
note 1; 673, titre; 677, titre;
IX, 8, 12 ; 17, 178; 19, 228;
27, 358; 33, 477 ; 161; i63;
177; 187; 189; 199; 209, 223,
23; 227; 229: 239 ; 241 ;
289; 291; 299; 319; 3ai, 18;
335, 10; 337; 339; 341; 45i,
34; 463, 18; 464» 22 ; 466,
18; 468; 18; 472, 18; 473,
4; 475, 20; 480, 18; 481,
22 ; 484, 18 ; 493, 4; 494, 1;
496, 3; 5oo, 11 et 12; 5oi,
2; 5o6, 7; 5o8, 1; 5i6, 4;
5i8, 21; 528, 29; 529, i5 ;
538, 6; 549, 17; 553, i3 ;
556, titre et 1; 558 , 1 ; 56o ,
2o;56i,i;565,22; 570, 29;
576, 11 et 17; 585, 17; 590,
21 ; 5g3, 1 ; 625, 22.
Jeux (les), VI, 293, 902 ; X,
339, n5,
Jor, VIII, 78; 79, 822; 227,
io5i. — Passage de lui tra-
duit par Corneille, VIII, 227,
io5i-io54- — Le livre de
Job, VIII, 636, 1172. — Le
sonnet de Job, X, La 5.
Jobelins (les), partisans du son-
net de Job, X, 126, 5.
Jocaste, reine de Thèbes, femme
et mère d'OEdipe, personnage
d'OEdipe , VI, 10 1 -219; I,
62; VI, 25o; X, 483.
Jodelet, comédien, IV, 3o4,
281; 333, 826.
Joël, IX, 53o, 3i.
Jopfé, ville de Syrie, V, 3oi;
3o2_
Josaphat, roi des Indes, VIII,
452.
Joseph, fils de Jacob, VIII, 202;
274. Son histoire mise en
tragédie par Grotius, III, 480.
Joseph (saint), VIII, 52 1.
Josèphe, historien, IV, 4!8;
420
Josué, VIII, 454, 3995.
Jour (unité de). Voyez Unité de
temps ou de jour
r>38 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Jourdain (le), IX, 3n, n ; 3i3,
Jovite (saint), VIII, 65g.
Juan (don) d'Autriche. Voyez
Jean d'Autriche.
Juba, roi de Mauritanie, IV, 47»
473; 56,686.
Juda, IX, 117, 33.
Judée (la), VII, 200; 242, ioi5 ;
269, 1640; IX, 175, 3; 235,
21 ; 5n, 5 ; 383, 44*
Judith, VIII, 485; IX, 36, 522
et 53i ; 37, 55i.
Jugurthe, Jugurtba,X, 259, io5.
Juif, les Juifs, VIII, 4^4» 3563;
462, 4i5i; 475; ÏX> 4i, 619;
53o, 25; 53i, 11; 553, n,
Jule, Jules César, VI, 614, 879.
Julie, dame romaine, personnage
d' Horace, III, 243-358 ; 1, 109.
Julie, fille d'Auguste , mentionnée
dans Cinna, III, 4I2> 638 ;
455, 1589.
Julie de Rambouillet. Sa Guir-
lande, X, 10; 82-85. — Trois
autres pièces de sa Guirlande
attribuées à Corneille, X, 344 j
345.
Junon, II, 372, 640. — Person-
nage d'Andromède, V,'243-396.
— Personnage de la Toison
d'or, VI, 221-349-
Jupiter, I, 75 ; II, 386, 925 ;
448, 276 ; IV, 70, 1039 ; IX,
610, 17; X, 237, 22; 442- —
Personnage à? Andromède , V ,
243-396. — Personnage de la
Toison a"or, VI, 221-349- —
Personnage de Psyché, VII ,
277-370.
Justin (saint), VIII, 298.
Justin, historien latin, IV, 4I7~
419 ; V, 5o5. — Extrait de son
trente-quatrième livre, conte-
nant le sujet de Nicomède, V,
5o2 et 5o3.
Justine, fille de Martian, per-
sonnage de Pulchérie , VII,
371-453.
Juvénal, poète latin, V, 41 5.
Juvenel (de), auteur du roman
de Dom Pelage, V, 4i4-
K
Kempen (la place de), X, 280,
395.
Knosembourg (le fort de), X,
278, 375.
L double supprimée dans cer-
tains mots, I, 11 et 12. — Deux
prononciations pour la double
//, I, 11.
Lacus, préfet du prétoire, per-
sonnage d'Othon, VI, 564-657.
L/elie, Lélius, III, 261. Voyez
Léltus.
Laïus, pèred'OEdipe,I, 62; VI,
127; 128; i3o; i34; i38, 106;
i53, 434; i58, 548; 159, 58i
et 591; 172, 877 et 899; 178,
ioi5 ; 181, io83 ; 184, 1186;
187, 1245; 191, i35i ; 193,
1394 et i3g6 et i4<>4; 195,
1434; 196, 1470 ; 197, 1492
et i5o2 ; 198, 1526; i99,i55o
et i554 ; 200, i582 ; 201,
1602; 211, 1814; 212, i85o;
219, 2004.
Lambert, musicien, X, i53.
Lamboy , général de l'empereur
Ferdinand III, IV, iSg, 336.
Lamy, X, 481.
Laodice, reine d'Arménie , per-
sonnage de Nicomède, V, 495-
593.
Laonice, personnage de Rodo-
gune, IV, 397-5 11 ; I, ni;
121 ; V, 148.
Lare (don Manrique de), per-
sonnage de Don Sanche d'Ara-
gon, v, 397-494.
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
5'ig
Latin (le), la langue latine, IV,
i5; VIII, i4; 19.
Latins (les),!, 262 : II, 117 ;IV,
i3i; IX, 53o, 21; X, 63,
16; 5oo.
Latines ( œuvres ) de Corneille :
excuse à l'archevêque de
Rouen, X, 64-72 ; — traduc-
tion en vers latins de ses pro-
pres stances sur la conquête
de la Franche-Comté, X, 2 25;
— vers latins présentés au Roi
à son retour de la guerre
d'Hollande, en 1672, X, 249;
— distique latin sur les con-
quêtes de 1672 , attribué à
Corneille , X, 385 ; — épita-
phe latine du P. Goulu , X,
396.
Latinus, roi des Latins, X, 63,
16.
Latium (le), X, 45o.
Launoy (de), X, 4?2-
Laure de Noves, X, 147, 60
et 62.
Laurens (saint), VIII, 220; 222,
935.
Laurens de Suniano (le P.),
VIII, 323.
Lazare (le), saint Lazare, VIII,
434, 3566.
Lazarille de Tormes, héros d'un
roman espagnol, II, 444 >
i85.
Lélius, lieutenant de Scipion,
consul de Rome, personnage
de Sophonisbe, VI, 447"549*
Voyez LyELIE
Lemnos (l'île de), II, 34^, 25;
343, 33; VI, 248; 252; 294,
940 ; 295, 943 : 3io, 1295 et
i3o3; 317, 1458; 345> 2i34;
348, 2206.
Lenas, un des complices de
Cinna, III, 4^i, i49°-
Lens (la bataille de), X, 27,352.
Léon, amant de Pulchéhe, per-
sonnage de Pulchérie 7 Vil ,
371-453.
Personnage de Pom-
Léonce, nom du fils de la gou-
vernante d'Héraclius et de
Martian , et nom supposé de
Martian, V, n3-a4i.
Léonor, personnage du Ciel, III,
1-241; 483 ; I, n5.
Léonor, reine d'Aragon, person-
nage de Don Sanche d'jragon,
y, 397-494 ;I, 44.
Léontine, dame de Constantino-
ple, personnage à'Héraclius ,
V, ii3-24i ; I, 119; 121.
Léopold Ier, empereur d'Allema-
gne, X, 3o6, 5i.
Léotychïde, fils d'Agis , roi de
Sparte, VII, 47, 961.
Lépide, un des triumvirs, II,
4n, 598; 437, 1202; 4^7,
i658.
pée, IV, i-ii5
Lépide, tribun romain , person-
nage de Sophonisbe , VI, 447~
549.
Letelier (Jean), grand rappor-
teur de France, X, 433 et 434;
436.
Letelier, curé de Louviers, X,
435.
Letelier (Nicolas), X, 435.
Léthé (le fleuve), I, 222 (var.).
Leuco-^Ethiopes, peuples d'Afri-
que, V, 3o4.
Leuctres, en Réotie, I, 55 ; V,
4o6.
Levant (le), VII, 204, 88.
Leyden (la ville de), Leyde, IV,
i34.
Liaison des scènes ,1,3; 101 et
suiv.
Liancour (Roger du Plessis de).
Epître dédieatoire,à lui adres-
sée, de la comédie de Mêlite.^
I, i34.
Liancour (Jeanne de Schom-
berg , dame de ) , femme du
précédent. Epître dédicatoire,
à elle adressée, de la Galerie du
Palais, II, 10.
Liban (le), IX, 125.
:V,o TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Libraire m Palais (le), per-
sonnage de la Galerie du Pa-
lais, II, I-II2.
Lieu (unité de). Voyez Unité
de lieu.
Ligdamon, personnage d'une tr;i-
gi-comédie de Scudéry,X , 57,
I. Voyez Lygdamon.
Ligdamon et Lidias , tragi-co-
médie de Scudcry,X, $7 ; 401 .
Ligue (la), X, 211, 261.
Lille (la ville de), X, 2o5, i63.
Lingère du Palais (la), person-
nage de la Galerie du Palais,
II, 1-112.
LrRioPE, nymplie, personnage
d'Andromède, V, 243-396.
Lisis, personnage de Mêlite , I,
123-253.
LiSTOR, personnage de la Veuve,
I. 37i-5oo.
! ive (Tite), III, 258; VI, 464;
466; X, 441. — Extrait du
livre Ier (chapitres xxîii-xxvi)
de son Histoire romaine, conte-
nant le sujet de la tragédie
d'Horace, III, 262-272.
Lïvie, impératrice, personnage
de Cinna, III, 359-462; I, 44;
47- v
Loire (la), VII, 117, 226; X,
106, 7.
Lombardie (la), VI, 22, 3i ; 23,
63; 32, 3oo; 99, i83i.
Lombards (les), VI, 1; 6; 20,
Longueville (Henri II duc de),
VIII, 6. — Épitre dédicatoire,
à lui adressée, de la tragédie
de Clitandre, I, 259.
Longueville (le duc de), fils du
précédent, tué au passage du
Rhin, X, 27, 346. Voyez Saint-
Paul.
Longueville (la duchesse de),
VILI, 6; X, 208, 210.
Lope, IV, 279. Voyez Vega
(Lope de).
Lope de Gusman (don). Vovez
Gi'sman (don Lope de)
Lobraine (la), X, 253, 5.
Lothaire (l'empereur) , VIII ,
237.
Louanges de la sainte Vierge (les)
de saint Bonaventure, traduites
en vers français par Corneille,
IX i-53.
Louis (saint), roi de France,
VIII, 343; X, 211, 25i.
Louis XI, roi de France, VIII,
422.
Louis XII, roi de France, X,
32, 8.
Louis XIII , roi de France, II,
522, 1657 ; III, 472 ; IV, 412;
V, 3 18, 61 ; X, 32, 8 ; 64; 69,
41; 70, 57; i35, 2; 338, 94;
433; 4^5; 436> — Sonnet de
Corneille sur sa mort, X, 87
et 88. — Pièce de vers intitulée
les Triomphes de Louis le Juste,
X, io4-n5.
Louis XIV, roi de France, I, 47;
III, 472 ; IV, 11; 12 ; V, 3i6,
3o; 319, 79; VI, 123, 67;
126; IX, 63 et 64; 71 ; X,
i53, 6 ; 232, 9; 3i8, 49 ; 32o,
76; 323, 10 et i3 ; 327, 12 ;
328, 43; 33o, 77; 333, 5;
335, 12; 339, io3; 5oi; 5o2.
— Il a fait recevoir à Corneille,
au sujet d'OEdipe, de véritables
et solides marques de son ap-
probation, VI, 126; 129. —
La tragédie d' "Andromède a été
entreprise par son commande-
ment, V, 259. — La Toison
d'or a été composée pour la
réjouissance publique célébrée
à l'occasion de son mariage,
VI, 23o; 253 et 254; 262,
174 et 175. — Vers sur lui ou
adressés à lui par Corneille :
pour obtenir la confirmation
des lettres de noblesse accor-
dées à son père, X, i35 et
i36; — pour le remercier de
la pension accordée au poète
en i663, X, 175-181 ; — pour
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
>/,!
le rétablissement du payement
de cette pension , X, i85; —
sur son retour de Flandre, X,
1 86- 191 ; — sur les victoires
de 1667, X, 192-217; 218 et
219; — sur la conquête de la
Franche- Comté, X, 223-226;
— sur son départ pour l'ar-
mée en 167a, X, 247 et 248 ;
— à son retour de la guerre
d'Hollande en 1672, X, 249-
25 1 ; — sur les victoires rem-
portées en Hollande en 1672,
X, 262-283; — sur la prise
de Mastricht, X, 285 et 286;
— sur sa libéralité envers les
marchands de la ville de Pa-
ris, X, 287-298; — sur son
départ pour l'armée en 1676,
X, 299~3o3; — sur sa campa-
gne de 1676, X, 3o4-3o7 ; —
placet pour obtenir un béné-
fice à son fils Thomas, X,
3o8 ; — sur C'inna , Pompée ,
Horace, etc., qu'il a fait re-
présenter devant lui à Ver-
sailles, X, 3o9-3i4; — sur
ses victoires en 1677, X, 322-
325; — sur la paix de 1678,
X, 326-33o.
Louis, Dauphin, fils deLouis XIV,
IX, 64; 71 ; X, 216, 335; 329,
63. — Vers sur son mariage,
x, 334-339.
Louviers, X, 435.
Louvre (le), X, 244» 9J 3oi,
24; 3i8, 52 ; 401.
Loy (de), professeur en l'Uni-
versité de Paris. Vers que lui
adresse Corneille sur son pa-
négyrique dePomponede Bel-
lièvre, X, 1 3 1 .
Luc (saint) . Passages de son Evan-
gile traduits, VIII, n3, i454~
1457; 176, 1; 241, i34i-i346;
628, 1017 et 1018; 679, 2062-
2064.
Lucain, poëte latin, II, 339;
TTT, 87; IV, 12; 14; i5; 21-
22; 2.3; >4; i3i; i3v>.; X, 449
— Epitaphe de Pompée , tirée
du livre IX, vers 190-214, de
sa Pharsale, IV, 15-17. — Pas"
sages de la Pharsale imités par
Corneille dans la tragédie de
Pompée, et signalés par lui, IV,
103-109. — Vers imités de
Lucain, attribués à Corneille,
X, 355.
Lucas (Jean), jésuite. Imitation
par Corneille de ses vers la-
tins sur le départ du Roi pour
l'armée en 1672, X, 299,
3o3.
Lucas, X, 481.
Lucie (sainte), VIII, 477.
Luciffr, VIII, 57. Voyez Phos-
phore.
Lucrèce, personnage du Men-
teur, IV, 117-273 ; I, 98; IV,
i38 ; 275-395, 282 ; 3o5 , 293 ;
320, 6o3;324,675 ; 371, i553.
Lune (don Alvare de), person-
nage de Don Sanche d Aragon,
V, 397.
Lusitanie (la), VI, 364 ; 387,
6025424, i465 ; 441» i83o;
601, 607; 621, io85.
Lusitaniens ^les), VI, 359; 368,
78; X, 492.
Luther, X, 338, 98.
Luxembourg (la ville de), X,
307, 71.
Lycante, personnage de la Place
Royale, II, 2i5-3oi. — Per-
sonnage de Théodore, V, 1-
iii.
Lycas, personnage de la Veuve,
I, 37i-5oo. - - Personnage du
Menteur, IV, 117-273.
Lycaste, personnage de Clitan-
dre, I, 255-369.
Lycus, VI, 194, 41 1 •
Lygdamon , tragi-comédie di
Scudéry, X, 4QI- Voyez L'ig-
damon.
Lyon (la ville de), I, 120; IV,
288; 289, 4; 292, 81; 293,
542 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
io3; 3i4, 449» 356, 1267;
168, 1507; VII, 246, 1097.
Lysander, fameux capitaine de
Sparte, personnage d' 'A g es lias ,
VII, i-95.
Lysandre, personnage de la Ga-
lerie du Palais, II, 1-112; X,
68, 28. — Nom d homme men-
tionné dans la Veuve, I, 4°8,
182.
Lysarque , personnage de Cli-
tandre, I, 255-369-
Lyse, personnage de la Suite du
Menteur y IV, 275-395. — Per-
sonnage de P Illusion, II, 421-
527.
Lysis, nom d'homme, person-
nage de la Place Royale, II,
2i5-3oi.
M
Macédoine ( la ) , III , 4^4 »
n33.
Macédoniens (les), III, 4°8,
54i.
Macer (Clodius), Romain men-
tionné dans Olhon, VI, 577,
52.
Mackabées (le livre des), IV,
418; 42°«
Machabées (la mère des), VIII,
491-
Machine ( la ) comme dénoue-
ment de la tragédie, I, io5
et 106.
Madelaine (la). Voyez Made-
leine (sainte Marie-).
Madeleine (sainte Marie-), VIII,
61; 90; 2i3, 758; IX, 553,
2; 554, 21; 555, 4- — Ap-
pelée seulement la sainte pé-
cheresse, VIII , 644, 1334.
— Hymnes pour sa fête, IX ,
552-556.
Madrid (la ville de), III, 473.
Madrigaux, X, 35; 45; 61; 82;
83; 85; i5o; i52; i54.
Maestricht. Voyez Masteic.
Magdebourg (la ville de), VIII,
618.
Magnon, poète tragique. Sa mort,
X, 495 et 496.
Maihet (Jean), poëte drama-
tique, VI, 460; 463 et 464;
466. — Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve,
I, 38o.
Maisonfort (Elisabeth d'Estam-
pes, baronne de la). Épître
dédicatoire, à elle adressée,
de la comédie de la Veuve, I,
375.
Malachie (saint), VIII, 61 3.
Malherbe, I, i36.
Mandane , sœur de Spitridate ,
personnage d'Age'silas, VII,
1-95.
Mandane, mentionnée dans Su-
réna, VII, 47^, 277 et 286;
476, 317 et 329; 477, 344;
495> 775; 499» 872; 507,
1070; 5io, 1142; 5i6, 1283;
519, 1374 ; 523, 1470 et 1473
et i483; 5s4 , i492 et i5o6;
529, 1621 ; 533, 1705.
Mandonius , frère d'Indibilis ,
prince des Ilergètes , men-
tionné dans Sertorius, VI, 38 1,
43 1.
Manlie , Manlius , III , 566 ,
1703.
Manlius , Romain mentionné
dans Sertorius, VI, 43g, 1807.
Manrique de Lare ^don) . Voyez
Lare (don Manrique de).
Manto, nymphe, X, 112, 72.
Mantoue ( la ville de) , X , 69 ,
52.
Marais (le), quartier de Paris,
II, 57, 738; 76, io85.
Marais (le théâtre royal du), VI,
23o; X, 483; 4g3'; 494; 495.
Marais (la troupe de comédiens
du), IV, 286; 388 (var.). —
Elle représente OEdipe, VI ,
a3o.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
54 i
Marbeuf Kde). Son hommage à
Corneille au sujet de la Veuve.,
I, 389.
Marcel. Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve,
I, 391.
Marcel , un des conjurés de
Cinnn, III, 45 1 , ï49°-
Marcelle (sainte), VIII, 48.
Marcelle, femme de Valens,
gouverneur d'Antioche , per-
sonnage de Théodose , V, 1-
iii.
Marcellin , frère de Marcelle
dans ThéodosCjV, 18,22 et 39.
Marcellin, auteur d'une chroni-
que, VII, 104.
Marcin (le comte de) , X , 207,
196.
Mardochée, VIII, 572; IX, 41,
618.
Mareschal. Vers de Corneille
sur sa tragi-comédie de la
Sœur valeureuse, X, 62 et 63.
Mariage (le) n'est point un
achèvement nécessaire pour la
tragédie heureuse , ni même
pour la comédie, I, 26 et
M ariana, historien espagnol, III,
81. — Extrait de son Histoire
d 'Espagne », III, 79.
Mariane, femme du roi Hérode,
III, 480.
Marlane (/a), tragédie de Tristan,
I, 48; VI, 462.
Marie (la vierge) , IX, 161; i63;
167; 175; 177; 179; 187;
191; 201; 211; 227; a3i; 241;
339. Voyez Vierge (la sainte).
Marie (sainte), nièce de saint
Abraham, VIII, 440.
Marie- Anne-Christine- Victoire
de Bavière, femme du Dau-
phin fils de Louis XIV , X ,
338, 88.
Marie-Thérèse, reine de France.
— Corneille lui dédie sa tra-
duction de l'Office de la sainte
Vierge, [X, 63-65; 71. — Vers
que lui adresse Corneille, X,
i53.
Marin (le cavalier), II, 22,
100.
Marius, III, 410, 583; VI,
364; 366, 26 et 27; 386,
5?°; 399, 856; X, 214,
3o6.
Marius (le jeune), VI, 424,
i455.
Marotte (Mlle), comédienne, X,
493.
Mars, II, 342, 25; 36i, 416,
372 , 641 ; 447, 243 ; 449,
281; III, 114, 179 ; 167,
n58; IV, 45o, 489; 59, 744;
V, 159, 63; VI, 528, i346;
VII, 3 19, 819 ; X, 110, 65 ;
179, 59; 186, 5; 211, 266;
239, 58; 259, 112; 277, 352;
3i4, 48; 333, 1. — Per-
sonnage du prologue de la
Toison cTor, VI, 252-265;
246.
Marsln (le comte de). Voyez,
Marcin.
Martian, fils de l'empereur Pho-
cas , personnage d'Héraclius ,
V, n3-24i; 1,63; 76; n5;
V, 5o8.
Martian , affranchi de Galba ,
personnage ROthon, VI, 564-
657.
Martian, ministre sous Théodose
le jeune, personnage de Pul-
chérie, VII, 371-453.
Martie, Marcia , femme di-
vorcée de Titus, VII, 2o5,
n5.
Martyr. Hymnes pour un mar-
tyr, lX,'58o-582. — Martyrs
bannis de notre théâtre, I, 59.
— Hymnes pour plusieurs
martyrs, IX, 583-587
Mascarade des enfants gâtés, X ,
38.
Massinissi., roi deNumidie> per-
sonnage de Sophumsbe, VI ,
544 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
447-549- — Personnage de la
Sophonisbe de Mairet, VT,46o.
Mastric,Mastricht, X, 3o6,36;
307, 61. — Vers de Corneille
sur la prise de cette ville, X ,
285 et 286.
Matamoke , capitaine gascon ,
personnage de ï Illusion , II ,
421-527.
Mathilde (sainte), mère de l'em-
pereur Othon, VIII, 668.
Matthieu (saint), VIII, 2 5g. —
Passages de son Évangile tra-
duits en vers par Corneille,
VIII, 258, 1695 et 1696 ; 5oi,
4977 5 S?1' 6419-6430; 58i,
53-56; 592, 280-282; 612,
688-690.
Maur (saint), VIII, 64.
Maures (les), III, 96; 97; 98 ; V,
412; 4r4- — Les Maures dans
le Cid, I, 43 ; 96 ; 10 1. Voyez
More.
Maurice , empereur d'Orient ,
père o"Héraciius, V, ii3-24i ;
I, 93 ; VIII , 464.
Maxime , un des deux chefs de
la conjuration contre Auguste,
personnage de Ci/ma, III, 359-
462; I, 3o; 44; 47; X, 491.
MAxrMiLiEN Ier de Bavière, X,
338, 99.
Maximin (l'empereur), VIII, 266.
Mayerne Turquet (Loys de),
auteur d'une Histoire générale
a
a" Espagne, III, 81.
Maynard, X, 118, 35.— P. Cor-
neille le remplace à l'Acadé-
mie française, X, 4°7-
Mazaruv (le cardinal), X, 179,
66 ; 476- — Épître dédicatoire,
à lui adressée, delà tragédie de
Pompée, IV, ii-i3. — Remer-
cîment en vers que lui adresse
Corneille, X, 92-99.
Mécène, III, 4°3, 3g4 ; 449?
1461 ; X, 118, 5o.
Medef , fille d'Aaete, amante
rie Jason, ï, r5; ->o; 3t; 37; 67;
78; 106 et 107; III, 273; 1\ ,
416. — Personnage principal
de la tragédie de Corneille, II,
327-419. — Personnage de la
Toison a"or VI, 221-349* —
Personnage de la Médée de Sé-
nèque , IV, 282.
Médée , tragédie de Corneille, II,
327-419 ; I, 46; IV, i3l; 423.
— Examen de la pièce , II ,
333-339.
Médée, tragédie de Sénèque, 1, 2 1 ;
II, 333; IV, i3o; X, 45o. —
Tragédie d'Euripide, II, 333;
X, 45o-
Mèdes (les), VI ,2 44-
Medor , personnage du Roland
furieux, II, 248, 487.
Médus, fils de Médée, VI, 244.
Méduse, V, 275; 2g5; 3oi;35s;
375, i3o3; 392 1684*
Mégare , fille d'honneur de
Dircc , personnage ftOEdipe ,
VI, 101-219.
Mégate, nom de femme, II, 3ai,
274 ; 325, 386.
Mégère, I, 23 1, 1467; II, 35 1,
217; IV, 457, 679; VII, 353,
1667.
Mégères (les), I, 225, i36o.
Mein (le), X, 257, 78.
MelchisÉdech, IX , 212 ; 2l3, 18.
Méltsse, personnage de la Suite
du Menteur, IV, 275-395 ; I,
19; 120.
Mélite, nom de femme, X , 44 >
1 et 11.
Mélite, comédie de Corneille, I,
i23-i53; 19; 28; 261 et 262;
270-272; 394 et 3g5; 397;
446, 93i; II, 10. — Examen
de cette pièce, I, 137-14* •
— Le peu de bruit qu'elle fait
à son arrivée à Paris, I, i34
— N'est pas dans les règles ,
I, 137. — Son succès surpre
nant , I , i38. — L'auteur faii
un voyage à Paris pour voir l<
succès de cet ouvrage, I, 270.
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
545
Meute, personnage principal de
la comédie de ce nom , I, 123-
253.
Mélitène , capitale d'Arménie,
III, 476; 486; 5i4; 601 ; 522,
757.
MELroMÈJNE, I, 47» ^1 7l, 68;
i3o, 16; 178,38. — Personnage
& Andromède y V, 243-396 .
Mélusine (la fée), IV, 159, 353.
Memnon , fils de l'Aurore , II ,
449, 3oo.
Memphis (la ville de';, IV, 29,
36; 43o, 38.
Ménage, X, 438; 444.
Ménale, nom d'homme, V, 391,
1680.
MÉnÉLAS, I, 28; 35; IOÔ; II,
4o5, i324; IV, 4^4-
Menteur (/e), comédie de Cor-
neille, IV, 117-273; I, 32;
36;43; 84; 99; I2°; n> 433;
IV, 279; 282; 284; 285; 3o4
et 3o5; 388 (var.). — Examen
de la pièce, IV, 137 et i38.
Mercier du Palais (le), person-
nage de la Galerie du Palais,
II, 1-112.
Mercure, I, 75 et 76; 597,
365 ; VI, 246. — Personnage
d1 Andromède, V, 243-3g6.
Merope dans Cresphonte, I, 67.
Mérouée , roi de France , VII .
108; 160, 1273; 161, 1279;
175, 1639; 181, 1778.
Mesler (le R. P. Thomas), bé-
nédictin, a mis Y Imitation en
vers latins (1649), VIII, 17.
Mesnil Haudrey (du), X, 479.
Mesnil Haudrey (du), fils du
recèdent, outrage un cousin
de Corneille, X, 479.
Messie (le), III, 477 ; IX, 546,
9 ; 571, 10.
Métamorphosera) d'Ovide, 1,74-
Métels (les), les Métellus, III ,
452, i536; X, 214, 3o6.
Métrobate, V, 522, 24^ et 247 ;
526, 33 1 ; 554, 964; 557,
Corneille, x
1040; 565, 1219; 566, 1240;
567, 1257; 58o, i566; 586,
1706.
Metz (l'évêché de), VIII, 392.
Meuse (la), II, 436; X, 257, 70;
3o3, 57 ; 307, 66.
Mexique (le), II, 45o, 3 10.
Mézétulle, lieutenant de Massi-
nisse , personnage de Sopho-
nisbe, VI, 447~^49-
Mtap6v. Sens de ce mot, 1 , 55.
Michée (le prophète). Voyez
Bible.
Michel (saint). Hymnes pour son
apparition et pour sa dédicace,
IX, 559-562.
Milan (la ville de), VI, 20; 22,
32; 24, g3; 25, io3 et io5;
32, 284; 33, 3n; 35, 38i ,
67, 1097; 88, i56i; 91, 1641;
97, 1777; 99, 1823 et i83oet
i832.
Milésien (Denys le), VI , 248.
Minerve, X, 63, 19.
Minos, I, i3g; 225, 1373.
Minotaure (lej, VI, 164,695.
Minturnus. Citation de son traité
du Poète, III, 479-
MlSAÈL, IX, l47, 69.
Mithradate, VII, 498, 857;
5oo, 904 et go5 ; 522 , i44^ ;
53o, 1644*
MlTHRIDATE, VI, 370, l5o.
Mitrane, nom d'homme men-
tionné dans Pulchérie , VII,
382, 35.
Moab, IX, 27, 355.
Moeurs (les) dans la tragédie
IV, 282. — Conditions des
mœurs, I, 3i. — Elles doivent
être convenables , 1 , 36. —
Elles doivent être semblables,
1 , 37. — Égalité dans les
mœurs, I, 37. — La tragédie
se peut faire sans mœurs, I, 38.
Mogor (le grand), le grand Mo
gol, II, 447, 227.
Moïse, VIII, 262, 67; 263, 79,
265, n5; 354, 19^7; 4^4?
35
546 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
3980; 583, 83; IX, 24, 3ia;
45, 681; X, 319, 59. Voyez
Bible.
Mole (Matthieu) , Son Oraison
funèbre, par le P. Fronteau,
X, 472 et 473.
Moncade (don Raymond de),
personnage de Don Sancke
d'Aragon, V, 397-494-
Monologues, I, 4^- — Pièces
où Corneille n'en a pas mis,
I, 273.
Mons, ville de Flandre, X, 328,
43.
Montagne, Montaigne , Fauteur
des Essais, II, 217 ; V, i47«
— Extrait du livre I (chapi-
tre xin) de ses Essais, conte-
nant le sujet de la tragédie de
Cinna, III, 376-078.
Montagne (le sieur de la), faux
nom de Clindor dans l'Illusion,
II, 445, 2o5; 456, 442; 492>
1090.
Montaigne, l'auteur des Essais.
Voyez Montagne.
Montausier (Julie de). Voyez
Julie de Rambouillet.
Mont-Cassel (la place de), X,
323, 12.
Mont-Chrestien, écrivain fran-
çais, VI, 463; 466.
Montmor (Henri-Louis Habert
de). Traductions et imitations
de son épigramme latine sur
les victoires de Louis XIV en
1667, X, 218 et 219.
Montoron ou Montauron (Pierre
du Puget, seigneur de), pre-
mier président des finances au
bureau de Montauban.— Epî-
tre dédicatoire, à lui adressée,
de la tragédie de Cinna, III,
369-372.
Mopse,V1, 343, 2093.
More (le), les Mores, III, i36,
539; i3g (var.); 140, 610;
i63, 1075; i65, no5; 168,
11 78; 170,1217 ; 17a, 1276 ;
173, 1286; 174, i3io; 179,
1414; i83, 1477; 184, i523 ;
i85,i559; 197,1823^,296;
422, 79; 427,214; 428, 23o;
463, 1090; 465, ni4; 486,
1624; VII, 275, 1755. Voyez
Maures.
Mort de Pompée (/a), titre donné
d'abord à la tragédie de Pom-
pée, IV, 27 (var.); III, 87.
Mosander, III, 475 •
Moucheurs de chandelles, au
théâtre, III, 100.
Mucian, Mucien , général romain ,
VII, 246, 1097.
Munster (la ville de), X, 258,
92; 280, 396. — Part prise par
Fabio Chigi, depuis pape sous
le nom d'Alexandre VII ,
aux négociations de Munster,
VIII, 5.
Murène, Muréna, nom d'un Ro-
main mentionné dans Cinna,
III, 438, i2o3.
Muse, les Muses, III, 372 ; VI,
i2i,3; 123, 62; 125; X, 74,
1 ; i3o, 9; 196, 32; 2o5, 157;
25o, 21 ; 3o5, 29; 438 ; 44 ! ;
445 ; 457-
Musique (la) retranchée de nos
poëmes dramatiques, I, 40 •
Mycènes (la ville de), VI, 144.
229.
Mysie (la), province de l'Asie
Mineure. V, i63, 173.
Mysis, personnage de V Andricnne
de Térence, II, 14.
N
Nabal, IX, 33, 465; 34, 484.
Nabuchodonosor, VIII, 3o6.
Namur (la ville de), X, 328, 43.
Nancy (la ville de), X, 70, 54 ;
n3.
Nantouillet (François du Prat,
fils cadet du marquis de), X,
270, 267.
DES GEILVRES DE CORNEILLF..
547
Narcisse, affranchi de l'empereur
Claude, VI, 597, 507; 621,
1069.
Narration dans le poëme dra
matique, III, 38 1; 484; IV,
24; 422-424; V, 148; i5o;
VI, i3i.
Narsingue, ancien royaume de
la presqu'île occidentale de
l'Hindoustan, II, 47°> 688.
Nassau (Guillaume Ier de), dit le
Taciturne, X, 262, i65 ; 267,
235.
Nassau (Maurice de), fils aîné du
précédent, X, 262, i65; 267,
235.
Nassau (Frédéric-Henri de), frère
du précédent, X, 262, 166;
267, 235.
Natalie (sainte), VIII, 496.
Naudé (Gabriel), X, 468; 472«
Naugerius, André Navagero.
Citation d'une de ses épigrain-
mes latines, X, 443.
Navarre (la), III, 81.
Navarrois (les), III, i85, i55g.
Néarque , seigneur arménien,
ami de Polyeucte, personnage
de Polyeucte, III, 4°3-570.
Nécessaire (le), III, 379; V, 3 06.
— Discours de la tragédie et des
moyens de la traiter selon le
vraisemblable ouïe nécessaire, 1,
52-97.
Nemours (la ville de), X, 453.
Nemours (la duchesse de) promet
de prendre pour page un fils
de Corneille, X, 488 et 489.
Nephélé, femme d'Athamas, VI,
245.
Neptune, II, 344> ^7; IV, 59,
745; VI, 247; 285, 701; 294,
918 et 920 ; 295, 948 ; X, 109,
49; 236, 14. — Personnage
d'Andromède^ V, 243-3g6.
Nerée, nom de femme men-
tionné dans Andromède, Y ,
266; 271; 351,764; 372, 12 18
et 1227.
Néréides (les), V, 260; 267; 268;
272; 3o3; 3i4; 322, i38.
Nérine, personnage de Mèdée,
II, 327-419. — Personnage
d'OEdipe, VI, 101-219.
Néron, empereur romain, VI,
J77, 54; 583, 196; 596,481
600, 596;6oi, 606 ; 6i3, 863
6i5, 9095616,947; 617,978
621, 1064 et 1072 et 1081
VII, 204, 85; 2o5, g5; 218,
417; 228, 681; 267, 1579.
Nertobrige, ville d'Aragon, VI,
364.
Nesse, le centaure Nessus, II,
390, 986.
Nestor, II, 362, 44° ; X, 70, 61 .
Neufbourg (le château de), ap-
partenant au marquis de Sour-
deac, VI, 23o.
Nevers (la ville de), X, 100; 472;
.476.
Nicandre, nom d'homme men-
tionné dans OEdipe, VI, 161,
652; 196, 1470 et 1476.
Nicanor (Démétrius), IV, 41 4 ;
4i5; 428; 43o, 26; 4^9, 229;
449, 464; 453, 553. Voyez Dé-
métrius Nicanor.
Nicolas, procureur du Roi, X,
436.
JYicomède, tragédie de Corneille,
V,495-593;I; 64; 68; 80; 84;
93; 97; n5; 272; 273 (var.).
— Examen de la pièce, V, 5o5-
509. — Elle est d'une consti-
tution assez extraordinaire, V,
5oi. — La représentation n'en
a point déplu, V, 5o4; 507. —
Ce ne sont pas les moindres
vers qui sont partis de la main
de Corneille, V, 5o4; 507.
Nicomède, fils aîné de Prusias,
personnage principal de la tra-
gédie de ce nom, V, 495-593;
I, 59 et 60; 69; 75; 272.
NicoMÉpiE , ville de Bithynie ,
V, 5io,
Nil (le), IV, 53, 620; 85, i4i4j
548 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
VI, 643, i54i ; IX, 107, i5 ;
x, 329, 54.
Nimègue (la ville de), X, 281,
422. — La paix de Nimègue,
X, 326-33o; 327, 20; 336. —
Allusion aux vers sur la paix
de Nimègue, X, 335, 3i et
32.
Nise, nom de femme mentionné
dans Médèe, II, 397, 11 55;
4o4, i3oi.
Noé,VIII, 583, 77;IX,i4,i3i;
i5, 139; 44, 671.
Noeud (le) du poème dramati-
que, I, 104.
Nogent (Armand de Bautru
comte de), tué au passage du
Rhin, X, 270, 267; 273, 3oi.
Norbert (saint), VIII, 5i2.
Norique (la), VII, 108.
NoRLINGHEN, NoRTLINGHE, Nord-
lingen, ville de Bavière, IV,
412; X, 277, 352.
Normandie (la), II, 26, 146 ; X,
64, 407; 436.
Notre-Dame (la pompe du pont),
X, 242.
Nourrice (la) de Mélite, I, 123-
2 53. — La nourrice de Clarice,
dans la fleuve, I, 37i-5oo. —
Le personnage de nourrice re-
présenté sous le masque par
un homme, II, 14.
Nues (les) , comédie d'Aristo-
phane, II, 11.
Nugne, pauvre pêcheur, men-
tionné dans Don Sanche, 1, 10 1 ;
V, 492, 1781; 493, 1797.
Numide, les Numides, VI, 5o4,
774; 538, 1578.
Numidie (la), VI, 472; 5i5,
io58 ; 524; i2Ôo.
Nyiee , nom d'homme men-
tionné dans Andromède, V ,
390, i652.
Nymphidius, préfet de Rome sous
Néron, VI, 577, 47; 582, 157.
O
Occident (1'), III, 33g, i3o8.
Océan (1'), IV, 4i3 ; VI, 249.
Octar, capitaine des gardes d'At-
tila, personnage & Attila, VII,
97-181.
Octave-César-Auguste. Voyez
Auguste.
Octavian , personnage d'He'ra-
clius, non marqué dans la liste
des acteurs, V, 23o, 1703.
Octavie, femme de Néron, VII,
204, 84-
Ode, X, 3o et 3i.
OEdipe , tragédie de Corneille ,
VI, 101-219; I, 59; 67; 74;
116; 122; 273; III, 278; X,
482. — Examen de la pièce,
VI, 128-132. — Le sujet a
été proposé, avec deux autres,
par Foucquet, VI, 124; 128
et 129. — Est un ouvrage de
deux mois, VI, 128. — Les au-
diteurs de Corneille avouent
qu'il n'a fait aucune pièce où
il se trouve tant d'art qu'en
celle-ci , VI , 128. — Représenté
à Versailles en octobre 1676,
X, 309; 3n, 11.
OEdipe (les) de Sophocle et de
Sénèque, I, 42 > ÎH, 86; VI,
129; 25o; X, 3i2, 29.
OEdipe, fils et mari de Jocaste,
I, 56; 62 ; V, 146. — Person-
nage principal de la pièce de ce
nom, VI, 101-219 ; I, 43 ; 70.
Œillets (Mlle des), comé-
dienne, X, 49° •
Office de la sainte Vierge (1'), tra-
duit en vers français par Cor-
neille, IX, 55-24i.
Oïlée, argonaute, VI, 343, 2093,
Olives (le jardin des), VIII, 412;
558
Oracles, III, 278 ; V, 298; 307 ;
V[, 127; i3o.
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
549
Orange (Guillaume prince d'),X,
279, 38i.
Orange (Henri-Frédéric prince
d'), IV, i33;X,452; 457.
Oreb (le mont), IX, 19, 21 3.
Oreste, fils d'Agamemnon, I, i5;
20; 67; 77; 80 et 81; 106; III,
274; V, 406; VI, 461; VII,
394, 325.
Oreste , tragédie d'Euripide, I,
35; IV, 424.
Orient (1'), III, 283, 49; 339,
i3o8; VII, 2o5, 97; 38o.
Orithye , mère de Zéthès et de
Calais, VI, 248; 252 ; 342 ,
2o83.
Orléans (Philippe duc d'), frère
de Louis XIV . Voyez Philippe .
Ormène, dame d'honneur d'Eu-
rydice, personnage de Suréna,
VII, 455-534.
Orode, roi des Parthes, person-
nage de Suréna, VII, 455-534-
Oronte, ambassadeur de Phraa-
tes, roi des Parthes, person-
nage de Rodogune^ IV, 397-5 1 1 .
Oronte, nom d'homme, men-
tionné dans la Veuve, I, 4°8,
182.
Orphée, argonaute, personnage
de la Toison d'or, VI, 221-349;
II, 362, 44° > X, 100, 2.
Orphise, nom de femme men-
tionné dans le Menteur, IV,
174, 6o3 ; 176, 653; 220,
i453 et 1457 et 1461; 222,
i486; 229, i638. — Person-
nage de la Comédie des Tuile-
ries, II, 3o3-325.
Orsoi (la place d'), X, 260, 120.
Orthographe (l') de Corneille,
VIII, 16. —Ses innovations en
l'orthographe, I, 5-12.
Osca, ville d'Espagne, VI, 373,
218.
Osiris, dieu égyptien, IV, 61,
800.
Ostende (la ville d'), X, 256, 62.
Ostte (la ville d'), VII, 2l5, 355.
Ostrogoths (les), VII, io3; 108.
Othon, empereur romain, VII,
243, 10405272, 1686. — Per-
sonnage principal de la pièce
de ce nom, VI, 564-657.
Othon, tragédie de Corneille, VI,
564-657. — Ses amis l'assurent
que cette pièce égale ou passe la
meilleure des siennes, VI, 571.
On n'a point vu de lui de vers
qu'il ait travaillés avec plus de
soin, VI, 571. — Othon n'est
pas indigne de Cinna. Cor-
neille demande au Roi de le
faire représenter devant lui, X,
3n, i3 et 14.
Othon d'empereur) , père de
sainte Mathilde, VIII, 668 —
Othon IV, empereur d'Allema-
gne, X, 211, 256.
Oudenarde (la ville d'). Voyez
Audenarde.
Ouver-Yssel (1') , X , 280 , 3 94.
Ouville (Antoine le Métel, sieur
d' ) . Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve, I,
384-
Ovide, I, 74; V, 259; 294-296;
299 et 3oo; 3o2 et 3o3 ; VI,
249; X, 124, 1 ; — Extrait du
quatrième et du cinquième livre
de ses Métamorphoses, conte-
nant le sujet d'Andromède, V,
292-294.
Owen (John). Traduction par
Corneille de sept de ses épi-
grammes latines, X, 46-49-
Pachome (saint), VIII, 195.
Pacius (Jules), cité par Corneille,
1,34.
Pacorus, fils d'Orode, person-
nage de Suréna, VII, 455-
534.
Pactole (le), X, 121, 102.
Page (un), personnage de Vlllu-
55o TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
iion, II, 42I5 ^27. — Person-
nage du Cid, III, 104-198. —
Personnage cl1 Héraclius , V ,
1 i3-24i. — Personnage d'An-
dromède, V, 243-896. — Per-
sonnage tiOEdipe, VI, 101-
219. — Personnage de Sopho-
nisbe, VI, 447~549«
Paix (la), personnage du prolo-
gue de la Toison d'or, VI, 252-
265.
Paix (la) de 1659 , VI, 253 et
254. — La paix de Nimègue.
Voyez Nimègue.
Palacio confuso (et), comédie es-
pagnole, V, 414.
Palais de justice (le), II, 4° ,
412 et 4i5; 76, 1086; 444»
184; X, 464; 481. Voyez Gale-
rie du Palais (la).
Palais Cardinal (le), IV, 171,
56o.
Palais-Royal (le), IV, 171 , 56o
(var.). — Le théâtre du Palais-
Royal, X, 495.
Palerme (la ville de), X, 307,
70.
Palestine (la), V, 3oi.
Palinod (le Puy de) de Rouen;
X, 81.
Pallas, VI, 597, 507; 621,
1069. — Personnage de la
Toison d'or, VI, 221-349-
Palmis, sœur de Suréna, person-
nage de Suréna, VII, 4^5-
534.
Pamphile, personnage de fJn-
drienne de Térence, I, ii5.
Pan, X, 238, 49.
Pan (le grand), nom sous le-
quel est désigné Richelieu, X ,
439.
Panthée , tragédie de Tristan,
VI, 462.
Paon (l'hôtellerie du), à Rouen,
X, 481.
Pafhe (la reine de), Vénus, V,
329, 332.
Paphlagonie (la), VII, 8.
Paraclet (le Saint-Esprit), IX,
526, 5; 528, 27; 53i, 35.
Paradis céleste (le), IX, 14,
ia3.
Paradis terrestre (le), IX, i3,
112.
Parc (Thérèse du), comédienne.
Vers de Corneille sur elle ou
adressés à elle, X, 141 -149;
i54; i63 ; i65 et 166 ; 233
Paris (la ville de), I, 89; 90,
117; 120; i35; i38; 1425398;
401, 49; II, 16; 20, 64 ; 24,
m; 53, 655; 96, i45o; 126;
224; 280, 1091 ; 43i; 442>
169; 52i, i636 et i65o; 522,
1681 ; IV, 137; 140; 142,
16 ; i44> 60 et 67 et 71 et 72 ;
i56, 298; 171, 557; 173,
578; 187, 866; 293, 93; 3o2,
236; 3o4, 269; 3o6, 3i3 ;
3n, 393; 362, i395; 382,
1761 ; 412 ; V, 4i5 ; VI, 124 ;
IX, 626, 2; 633, 8; X, 47»
7; 242, 1 ; 244, 4; 287; 295,
87; 3o2, 37; 399; 43o; 437;
44i ; 442; 459; 473; 482;
492; 494; 496; 5oo.
Pâbis, fils de Priam, V, i5i.
Parisot. Imitation par Cor-
neille de ses vers sur le canal
du Languedoc, X, 23 1.
Parlement (le) de Paris. Juge-
ment de Messieurs des re-
quêtes en faveur de Thomas a
Kempis, VIII, 12.
Parnasse (le), II, 522, 1661;
VI, 122, 25; X, 75, 23;
i3o, 11; i85, 2; 222, 44 ;
335, 9; 439; 445.
IlapoBo;. Sens de ce mot, I, 41-
Parque (la), les Parques, I, 220,
1285; 23i, 1469; II, 447»
237; 387, 927; 410, 1399;
m, 335, 1196; iv, 499,
1647; VI, 171, 860; VII,
365, 1995; X, i38, 1; 271,
271.
Parthe, les Parthes, III, 4°8,
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
55
543; IV, 397; 418; 4M; 428;
429, 4; 43o, 27 et var. ;
432, 65; 439, 217; 440, a5i
et 262 ; 441, 271 et 283 ; 447»
409; 4^4» 838; 472, io5o;
493, 1527; 494, i553 ; 4g5,
1573 ; VII, 460 ; 462; 464,
3o ; 466, 61 et 70; 497, 835.
Parties du poème dramatique,
I, i3-5i.
Pascal (Jacqueline) remporte un
prix de poésie, X, 81.
Pastor fido [il) de Guarini, I, 3.
Pathmos, IX, 47, 735.
Patrobe, affranchi de Néron,
VI, 597, 507.
Pau (la ville de), X, 385.
Paul (saint), VIII, 85, 95o ; 94;
100; 208, 654; 2$5, i63a;
445, 37; 643 ; IX, i63, 791;
227; 472, 12; 548. — Passage
traduit, VIII, 208, 653-657.
— Hymne pour la fête de
saint Pierre et de saint Paul,
IX, 548-55o.
Paul Diacre, auteur des Gestes
des Lombards, VI, 6; 17.
Pauls (les), famille illustre de
Rome, 111,452, i536;X, 97,
45.
Paulin, personnage de Théodore,
V, i-iii.
Pauline, fille de Félix et femme
de Polyeucte, personnage de
Poljeucte,ll\, 463-570; V, i3.
Pausanias, roi de Lacédémone,
VII, 57, I2i3.
Pavie (la ville de), VI, 22, 32;
33, 307 ; 35, 38o et 38i; 67,
1097 > 99» x832 et 1840.
Pêcheur (le), dans Don Sancke
d'Aragon. Voyez Nugne.
Pégase, V, 268; 2g5; 3oi; 358.
Pelage (Dom) , roman de Juve-
nel, V, 4*4-
Pelée, argonaute, personnage de
la Toison d'or, VI, 221 -349-
Pélias, frère d'oison, VI, 247.
Vovez Pélte.
Pélie, tyran d'Iolcos, II, 343,
45 ; 344> 62 ; 357, 333 ; 36i,
4o3; 364, 48i;38o, 809; VI,
285, 702. Voyez Pélias.
Pellisson (ode à), X, 3i5, 1;
3i6, 11 ; 3i8, 45 ; 3ai, 85.
— Corneille l'invite à écrire
l'histoire de Louis XIV, X,
3 20 et 32i. — Lettre à lui adres-
sée par Corneille , X , 477 et
Pélusium, ville d'Egypte, aujour-
d'hui Damiette, IV, 19.
Pennafiel (comte de), V, 429?
263 ; 446, 662.
Périandre, nom d'homme, IV,
194, 1026.
Périer (Charles du). Sa double
traduction en vers latins des
vers français de Corneille sur
la conquête de la Franche-
Comté, X, 228 et 229.
Périphète, brigand immolé par
Thésée, VI, 164, 696.
Pérou (le), IV, i32.
Pérouse (la ville de), III, 435,
n36.
Perpenna, lieutenant de Serto-
rius, personnage de Sertorius,
VI, 35i-445.
Perpignan (la ville de), X, 11 5,
114.
Persan, Persane, Persans, III,
408, 543; VII, i5, 114 ; 37,
688; 56, 1195 et 1207; 74,
1627; 86, 1743 ; 86, 1878 et
1894.
Perse, poète latin, VI, 3ia.
Perse (la), II, 447» 227> 45°>
3n ; III, 5oo, 288; 54i,
1128 ; V, 210, I25i ; VII, 27,
45;; 48, 967; 66, 1448; 80,
1742; 86, 1894; 87, 1922;
382, 36. — La cour de Perse,
VII, 46, 933.
Perse, les Perses, III, 478 ; 495,
176; 5oi, 3o4; V, 145 ; VII,
11, 46; 18, 245; 26, 412;
45, 898 ; 46, 906.
i>52 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Persée, fils de Jupiter et de Da-
naé, X, 25g, io5. — Person-
nage d' Andromède , V, 243-
396.
Perses, roi de la Chersonèse
Taurique, VI, 247; 267, 246
et 253 et 263 ; 269, 309 ; 348,
2202.
Pertharite, roi des Lombards, tra-
gédie de Corneille, VI, 1-100;
I, 272 et 273. — Examen de la
pièce, VI, 17 et 18. — Mau-
vaise réputation que le public
lui a faite, VI, 5. — Son
malheureux succès, III, 276;
VI, 17; 128.
Pertharite, roi des Lombards,
personnage principal de la
pièce de ce nom, VI, 1-100 ; 7.
Petites-Maisons (les), hospice de
fous à Paris, IV, 3oo, 214.
Petit- Val (Raphaël du). Son
hommage à Corneille au sujet
de la Veuve, I, 386 et 387.
PÉTRARQUE, X, l47, 60.
Peugé, île à l'embouchure du
Danube, VI, 249.
PhjEA (la laie), immolée par
Thésée, VI, 164, 697.
Ph^dime, nom d'homme men-
tionné dans OEdipe, VI, i35,
10; 171, 858; 190, 1319.
Phaéton, I, 75; II, 390, 991;
vu, 347, 2169.
Pharaon, VIII, 202; IX, 517, 11.
Pharnabaze, satrape d'une par-
tie de l'Asie Mineure, VII,
27, 437.
Pharsale, I, 89; IV, 27 et 4;
3o, 58 ; 32, 120 ; 37, 246;
42, 368; 44? 4oï; 56, 689;
62, 829 ; 79, 1269 ; 81, i3ii;
85, 1422598, 1710; 99, 1738.
Phase (le), II, 342, 25 ; 379;
777 ; V, 283; 292 ; 33o.
Phébus (le dieu), V, 356, 881;
X, 75, 12.
Phèdre, femme de Thésée, II,
525 (var.); X, 73, I.
Phéniciennes (les), tragédie d'Eu-
ripide, II, 11.
Philandre, personnage de Mé-
lite,\, 123-253; 440>932.
Philène, nom d'homme dans la
Comédie des Tuileries, II, 323,
329 ; 324, 355.
Philippe (saint), VIII, 5i.
Philippe, affranchi de Pompée,
personnage de la tragédie de
Pompée, IV, i-ii5.
Philippe duc d'Orléans, frère de
Louis XIV, X, 260, 120,280
et 281, 398-408; 323, 20.
Philippe Auguste, roi de France,
X, 211, 253.
Philis, nom de femme, I, 4OI>
53; X, 26, 40; 35, i3; 45, 6;
49, 3; 60, 1; 77^ 65; i5i, 4
et 9; i52, 2; i55, 1 ; i56,
29; 157, 54; 173, 3. Voyez
Phylis.
Philisbourg, IV, 412 » X, 3o6,
5o ; 307, 64 et 72 ; 322, 3.
Philiste, personnage de la Veuve,
I, 37i-5oo. — Personnage du
Menteur, IV, 117-273; I, 43.
— Personnage de la Suite du
Menteur, IV, 275-395.
Philoctète, tragédie de Sophocle,
I, 66.
Philon, ministre d'État, confi-
dent de Bérénice, personnage
de Tite et Bérénice, VII, i83-
276.
Phinée, prince d'Ethiopie, per-
sonnage d'Andromède, V, 243-
396 ; I, io3.
Phinée et les Harpies, VI, 248.
Phlégéthon, I, 23o, i465 ; II,
3g°> 992-
Phocas, empereur d'Orient, VIII,
464. — Personnage d,Héraclius,
V, 11 3-241, I, 61 ; 64 ; 69 ;
76; 79 ; 93; "5; 119; 12 f ;
272.
Phocide (la), VI, 184, 1181;
195, i43o et 1439.
Phorbas , personnage ftAndro-
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
>53
mède, non marqué clans la liste
«les acteurs, X, 275.
Phorbas, vieillard thébain, per-
sonnage (VOEdipe, VI, 101-
Phormion (le) , comédie de Té-
rence, I, 46.
Phosphore, Lucifer, l'étoile du
matin, IX, 452, 9.
Photin, eunuque, chef du con-
seil d'Egypte, personnage de
Pompée, IV, i-ii5.
Phraates, roi des Parthes, IV,
428.
Phradate, fils d'Orode, roi des
Parthes, VII, 498, 856 et 858 ;
522, i44^j ^23, 1470 et 1474;
536, 1645.
Phryxus, VI, 245; 247; 252;
267, 245; 268, 296; 272,
393; 275, 481 et 482 et 5oi ;
276, 5i2; 277, 535.
Phylis, personnage de la Place
Royale, II, 2l5-3oi.
Phylis, nom de femme, X, 68,
3o. Voyez Philis.
Pïerre (saint), VIII, 123 ; 289;
382, 2535; 53o, 5555;IX, i63;
227; 53o, 29. — Hymnes pour
la fête de saint Pierre et de
saint Paul, IX, 548-55o. —
Hymne pour la Chaire Saint-
Pierre, IX, 55o et 55 1. —
Hymne pour le jour de saint
Pierre aux Liens, IX, 55 1 et
552.
PiERRE(saint),célestin,VIII, 378.
Pilate, VIII, 475. Voyez Ponce
Pilate.
Pill astre. Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve, I,
388.
Pinelière (de la). Vers de Cor-
neille sur sa tragédie à'Hippo-
lyte, X, 73.
Pison, fils adoptif de l'empereur
Galba, VI, 582, 166; 584,
23o ; 585, 23g et 240; 598,
543; .602, 635; 6o3, 665;
6o5, 703 ; 607, 755; 608.
758 et 763 et 767; 614, 883 et
893 ; 61 5, 906 et 912 et 933 ;
616, 944 et 958; 617, 973 ;
618, 986 et 995 ; 620, 1047;
621, io5g et 1076; 622,
1086 et nu; 623, 1140;
625, n58; 628, 1225; 629,
12.57; 63o, 1271; 63i, 1289
et i3oi et i3o2 ; 633, i349
et i35i et i353 ; 634, i357 5
636, 1400; 637, 1414 el
i433; 641, i5oi ; 642, i5ii ;
645, l582 ; 646, 1627; 647,
1646 ; 65i, 1728.
Pitthéus, roi de Trézène, II,
335.
Place (la), la place Royale, IV,
i5o, 198.
Place Royale (la), à Paris, I,
120; II, 224; 233, 178; IV,
i38; i5i, 199.
Place Royale (la), comédie de
Corneille, II, 2i5-3oi. —
Examen de la pièce, II, 221-
223.
Placide , fils du gouverneur
d'Antioche , personnage de
Théodore, V, 1-111 ; I, 62.
Placide (saint), VIII, 64.
Placidie, tante de Pulchérie,VII,
384, 88.
Plaisir (genre de) que donne
la poésie dramatique, I, i3.
Plaisirs (les) personnifiés, VI,
293, 902.
Plantin, imprimeur, X, 456.
Platon, I, 58.
Plaute, I, 45; 96; i38; 377;
IV, 283; V, 404; X, 455;
457.
Plaute , un des complices de
Cinna, III, 45i, i49°-
Plautine, fille de Vinius, per-
sonnage à'Othon , VI, 565-
657.
Plautine, confidente deDomitie,
personnage de The et Rérénice,
VII, 183-276
554 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Pleirante, personnage de la Ga-
lerie du Palais, II, 1-112.
Pline l'ancien, V, 3o2;3o4.
Pline le jeune, X, 47$.
Plutarque, IV, 20 et 21 ; VI,
36i; VII, 5; 460; X, i38,
5; 491.
Pluton, I, 226, i394 ; 227,
1402; 234, i532 et i538;
II, 414, 1498; IV, 47, 47$_;
V, 269; 272; 376, i33o;X,
236, 11.
Pô (le), II, 436, 34; VI, 43i,
i6o3; VII, 117, 236; X,
116, 2.
Poème dramatique (Discours de
futilité et des parties du), I,
i3-5i.
Poésie dramatique. Son but, I,
i3 ; 16 et 17.
Poète (le) est excusable quand il
pèche contre un autre art que
le sien, I, 91. — Son but est
de plaire selon les règles de
son art, I, g5.
Pointes dans le style, I, 270;
397; II, 14.
Poitiers (la ville de), I, /fî ; IV,
144, 58 et 60 ; 149, 170; 162,
3g3; 174, 593; 180, 720;
184, 807; 193, 987; 201,
n33; 219, i443 ; 220, 1449
et i456 (var.) et i458; 221
(var.j; 238, 1783; 291, 36;
294, i34 ; 3o5, 298; 309,
368 ; 32i, 610.
Polémon, roi de Cilicie, men-
tionné dans Tite et Bérénice,
VII, 216, 38i; 245, 1073.
Polémon, personnage de la Sui-
vante, II, ii3-2i4-
Polimas, personnage de la Veuve,
I, 37i-5oo. Voyez Polymas.
Pollux, argonaute, personnage de
Médée, II, 327-419 ; I, 4fS IV,
4^3.
Polyee, roi de Corinthe, VI,
204, i665 et 1672.
Polyclète, affranchi d'Auguste,
personnage de Cinna , III ,
359-462.
Polyclète, affranchi de Néron,
VI, 597, 507.
Polyeucte, martyr, tragédie chré-
tienne de Corneille, III, 4^3-
570; I, 62; 84; 118; 122;
273 ; II, 337; III, 278; IV,
20; 24; i3o ; V, 12 ; X, 447-
— Examen de la pièce, III,
478-485. — Le style n'en est
pas si fort et si majestueux
que celui de Cinna et de Pom-
pée , mais il a quelque chose
de plus touchant, III, 481.
Polyeucte, seigneur arménien,
gendre de Félix, personnage
principal de Polyeucte , III,
463-570 ; I, 59; 64 ; V, i3. —
Abrégé de son martyre, écrit
par Siméon Métaphraste, et
rapporté par Surius, III, 474"
478.
Polymas, personnage de la Place
Royale, II, 2i5-3oi. Voyez
Polimas.
Polynice , fils d'OEdipe , VI ,
159, 575.
Polyxène , personnage de la
Troade de Sénèque, I, 99; IV,
283.
Pomone, X, 23g, 5o.
Pompée, I, 89; III, 384; 395,
238; 409, 563 et 566; 411,
5g4; 429, io3o; 453, i546 ;
V, 3i7, 53; VI, 614, 884 ;X,
97, 37; 442; 475; 491. — -
Personnage de la tragédie de ce
nom, VI, 122 , 36. — Pompée
donne son nom à une des tra-
gédies de Corneille, mais ne
paraît pas sur la scène, IV, 1-
11 5. — Personnage de Serto-
rius, VI, 35i-445; 4^6.
Pompée, tragédie de Corneille,
IV, i-ii5; I, 26; 84; 97;
io3; 112; 118; 122; 273; II,
339; III, 481; 483; IV, i3o-
i32. — Examen de la pièce,
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
• IV, 19-35. — Explication du
titre, IV, ai et 22. — Les vers de
Pompée sont les plus pompeux
que Corneille ait jamais faits,
l\ , 24. — Pompée représenté
à Versailles en octobre 1676,
X, 309; 3n, 3.
Pompée [la Mort de), tragédie, la
même que Pompée. Voyez ce
mot.
Pompée (Sextus). Voyez Sexte.
Pompées (les jeunesu les fils de
Pompée, IV, 56, 686.
Pompone, un des complices de
Cinna, III, 45 1, 1490.
Ponce Pilate, IX, 75. Voyez
Pilate.
Pont (le), province de l'Asie Mi-
neure, IV, 62, 840; V, 533,
468; 542, 699; 572, 1377;
574, i43o.
Pont-de-Cé (le), X, 106.
Poppée , femme d'Othon , VI,
583, 191 et 193; 5g5, 480;
621, 1081; 623, 1118.
Poppée, mentionnée dans Tite et
Bérénice, VII, 204, 84-
Portugal (le), III, i36, 54i ;
VI, 364; X, 114.
Potosi (le), X, 120, 101
Prague, X, 338, 99.
PrÉ-AUX-ClERCS (Je), IV, 171,558.
Prévôt (un) dans Cli tondre, I,
3i4; 3i8 (var ); 349; 356.
Pridamant, personnage de V Illu-
sion, II, 42I_^27.
Priscus, nommé par d'autres
Crispus, gendre de l'empereur
Phocas, V, i43. Voyez Crispe.
Procope, général romain, VII,
382, 3i; 385, 97; 393, 3so ;
394, 349 ;446, i595.
Prgcule, soldat de l'armée de
Rome, personnage à'Horace,
HI, 243-358.
Procule, un des complices de
Cinna, III, 45 1, 1489.
Progné, I, 78.
Prologue, I, 4°; 4T; 4aî 44- —
Prologue des pièces de ma-
chines, I, 46 et 47- — Prolo-
gue A' Andromède, V, 3i5-
319. — Prologue de la Toison
d'or, VI, 253-265. — Prolo-
gue, nom d'un personnage, I,
45.
Prométhée, II, 409, i386.
Prononciation de nos e, I, 7; 9;
— de la double II, I, 1 1 • —
de nos f, I, 7 et 8.
Proserpine, I, 227, 1404 ; 23o,
i45i; VII, 358, 1818 ; X,
236, 11.
Pkotatiques (personnages), 1, 46.
Prusias , roi de Bithynie, per-
sonnage de Nicomède, V, 495-
5g3 ; I, 61; 64; 69; 80; n5.
Psaumes de David, traduits en
vers français par Corneille.
Voyez tome IX, p. 639 et 640.
— Passages de psaumes, tra-
duits par Corneille, VIII, 129,
1771-1775; i33, i838et 1839;
226; 227; 242, i35oet i35i;
4a3, 3338-3340.
Psaumes pénitentiaux (les sept),
traduits en vers français par
Corneille, IX, 245-299.
Psyché , tragédie-ballet de Cor-
neille, VII, 277-370.
Psyché, V, 356, 882. — Person-
nage de la pièce de ce nom,
Vit, 277-370.
Ptolomée XI ou Aulétès, IV,
32, i34-
Ptolomée, XII roi d'Egypte, fils
du précédent, personnage de
Pompée, IV, i-n5; 19; 21 et
22; 23 ; I, 26.
Pulchérie , fille de l'empereur
Maurice, personnages d'Héra-
clius, V, ii3-24i; I, 63; n5,
119; 121.
Pulchérie , comédie héroïque de
Corneille, VII, 37i-453. —
L'auteur demande au Roi de la
faire représenter devant lui, X,
3i 1, i5.
')56 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Pulchérte, impératrice d'Orient,
personnage de la pièce de ce
nom, VII, 371-453.
Pitre (l'abbé de). Lettres à lui
adressées par Corneille, X ,
478-482; 482-484; 485-487;
489-492 ; 493"496-.
Purgation des passions, I, 23;
52 et suiv.; V, 5o8 ; X, 486.
Puteanus (Erycus, Erycius), en
français Henri Dupuis, en fla-
mand van de Putte, VI, 6; 17.
— Extrait de son Histoire de
l'invasion de l'Italie par les Bar-
bares (livre II, n° i5), conte-
nant le sujet de Pertharite, VI,
14-16.
Puy de Palinod (le) de Rouen ,
X, 8r, 10.
Pylade, I, 106; VII, 394, 325.
Pymante, personnage de Clitan-
dre, I, 255-369.
Pyrandre, nom d'homme, IV,
207, i25o; 208, i25i; 219,
1446» 220, i447 et x457-
Pyrénées (les), III, 285, 48; VI,
38i (45o); 43o, 1594; X, 200,
93.
Pyrrhus, X, 259, io5. — Per-
sonnage de la Troade de Sénè-
que, IV, 283.
Pythagore, X, 100, 1.
Pythias, personnage de F Eunu-
que de Térence, I, 102.
Python (le serpent), II, 3go,
987.
Quatrains, X, 36; 47; 49; 57;
60; 86; 218; 219. — Quatrain
pour le Christ de Saint-Roch,
attribué à Corneille, X, 377.
Qutntilian, Quintilien, auteur
des Déclamations, II, 122.
QuATRE-NATiONs(la fontaine des),
à Paris, X, 244.
Quinault, X, 493.
Quirinal le mont), V, 579
i55o.
R
Rahab (la ville de), IX, 107, 9.
Raimont (saint), VIII, 432.
Rambouillet. Voyez Julie.
Ramire (don), en possession du
trône d'Aragon, V, 4i3.
Ranquet (Elisabeth). Son épi-
taphe par Corneille, X, i33
et i34-
Raphaël (l'ange), IX, 562, 14.
fPoc6u[xoç. Sens de ce mot, I, 33
et 34.
Ravaud (Abraham) , dit Remius.
Sa traduction en vers latins
du Rcmerciment de Corneille au
cardinal Mazarin, X, 94-99«
Raymond de Moncade (don).
Voyez Moncade (don Ray-
mond de).
Récit, I, 78. Voyez Narration.
— L'action préférable au récit,
I, 262. — Récit pour le ballet
du château de Bicêtre, X, 58.
Reconnaissance dans le poëme
dramatique, I, 70. Voyez
Agnition.
Reine, d'Aragon (la), personnage
de Don Sanche. Voyez Léonor .
Reine de Castille (la), person-
nage de Don Sanche. Voyez
Isabelle.
Remercîments : au Puy de Pali-
nod de Rouen, X, 81; — au
cardinal Mazarin, X, 92-99 ;
— au Roi pour la pension ac-
cordée au poëte en i663, X,
i75-i8i.
Remius (Abrahamus). Voyez Ra-
vaud (Abraham).
Rémus, X, 443.
Renaudot. Il fait, dans un nu-
méro extraordinaire de la Ga-
zette, le récit de la tragédie
d'Andromède, V, 277,
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
557
Renaudus (Theophilus), jésuite,
Rennes (la ville de), II, 4^9, 97.
Renommée (la), X, 258, 97 ; 266,
220.
Représentation. Sa durée, I,
3o.
Revel (Charles- Amédée de Bro-
glio, comte de), X, 271, 270.
Rhadamante, II, 4*3, 147^.
Rhé (l'île de), X, 69, 43.
Rhimbergue (la place de)j X,
260, 121.
Rhin (le), II, 436, 34; III, 285,
5o; VII, 246, 1101 ; X, 307,
66; 335, 11; 257, 70; 260,
118; 264, 201; 266, 218 et
228; 275, 342; 281, 4°9 et
420; 3o3, 57. — Allusion aux
vers sur le passage du Rhin,
X, 335, 11 et 12.
Rhône (le), I, 90; VI, 419,
i338; X, 116, 2.
Riche (la mort du mauvais) ,
VIII, 562.
Richelieu (le cardinal de), V,
142 ; X, 69, 42 ; 70, 55 et 61 ;
71, 76; 87; 4o3; 410; 428. —
Épître dédicatoire, à lui adres-
sée, de la tragédie d'Horace,
III, 258-261. — Corneille lui
dit qu'il tient de lui tout ce
qu'il est, III, 258; — qu'il a
l'honneur d'être à Son Emi-
nence, III, 25g. — Sonnet en
son honneur, X, 32. — Qua-
train sur lui, X, 86. — Epi-
taphe du cardinal, attribuée à
Corneille, X, 35 2. — Corneille,
pour lui être agréable, veut ré-
pondre aux Sentiment s de l'Aca-
démie sur le Cid, X, 43 1. — Il
est désigné sous le nom de
grand Pan, X, 4^9-
Richelieu (l'hôtel de), X, 401.
Rié (l'île de), X, 109.
Ris (les), X, 33g, 120.
Robert (dom) de Sainte-Marie,
feuillant, X, 436.
Robortel, commentateur de la
Poétique d'Aristote, I, 33; 59;
III, 86.
Rochelle (la ville de la), X, 69,
45 ; 109, 5i; 110.
Rocboi, III, 473; IV, 412.
Rodelinde , femme de Pertha-
rite, personnage de Pertharite,
VI, 1-100; III, 276.
Rodogune, princesse des Partîtes,
tragédie de Corneille, IV, 397-
5ll; 411; 416; I, 27; 60; 62;
63;68;70;8o;97;99;ii3;ii5;
116; 121; 272 ; III, 382; V,
144; 148; i53; 298; X, io3,
10. — Examen de la pièce,
IV, 418-427. — Explication
du titre. IV, 416. — L'au-
teur est porté à préférer Rodo-
gune à ses autres tragédies, IV,
420. — Rodogune représentée
à Versailles en octobre 1676,
X, 309; 3n, 11.
Rodogune, sœur de Phraates, roi
des Parthes, personnage de la
tragédie de ce nom, IV, 397-
5n; I, 19; 39; 63; 69.
Rodogune, tragédie de Gilbert,
IV, 5o9-5ii.
Rodomont, roi d'Alger, person-
nage du Roland furieux , X,
62, 11. — Au figuré, II, 464
(var.).
Rodrigue (don) , surnommé le
Cid , personnage principal de
la tragédie du Cid, III, 1-24 1 ;
I, 27 et 28; 57; 60; 62; 65;
96 ; VI, 122, 34.
Rogeb , personnage du Roland
furieux, X, 62, l3.
Roi de CoRiNTHE(le), personnage
de Médée. Voyez Créon.
Roi (le) , personnage du Cid.
Voyez Fernand (don), roi de
Castille.
Rois (le livre des). Voyez Bible.
Roland, neveu de Charlemagne.
HI,8i.
Romain, III, 258; 280; 284, î5
558 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
302,481 et483; 3o8, 6oi;324,
978; 334, 1181; 339, 1317;
344, i4i3; 354, i685; 566,
1701; IV, 20; 26; 34, 193;
85, i4i5 et 1416; 96, 1659;
V, 56, 9o5; 5i8, i56; 5ig,
192; 520, 2o5 et 218; 524,
296; 527, 353; 539, 5g4 ;
55o, 876; 556, 1010; 589,
1764; VI, 362; 366, 45; 384,
5o3 ; 385, 526; 386, 571;
398, 833 et 842; 4°2» 943;
4o3, 963 ; 4L3, n85 et 1194;
416, 1242; 42Ii i383; 429,
i555; 43i, 1624; 436, 1715;
469; 5i2, 983; 517, 1097;
534, i483; 587, 287; 626,
1184; VII, m, 475 229,
689 ; 466, 70.
RoMAiJVE, Romaines, III, 427,
978; 494, i5o; 284, 24et 25;
286, 72 et 84 ; 3o8, 601 ; 324,
984; IV, 69, 992; 98, 1725;
VI, 374, 238; 387, 583; 3g6,
790; 398, 822; 464; VII,
23o, 727; 271, 1671.
Romains (les), III, 292, 238;
294, 285; 297, 354; 327,
io5o; 332, 1128; 347, i49°;
348, i4g5 ; 388, 80; 389, 89;
3gi, i56; 393, 187; 394,
227; 3g6, 269; 4o3, 398;
408, 544; 411, 599; 428>
1000; 437, 1187; 444, i359;
453, i546; 4g5, 176; 544,
1209; IV, 20; 26; 3o, 5g; 35,
212; 48, 5i2; 62, 828; 73,
iif2; 75, 1167; 89, i5ai;
p5, i638; V, 5o3; 5o4; 5o6;
JO7 ; 5l2, 19; 5l3, 49 i ^22,
253 ; 524, 289 et 293 ; 539,
6o3 et 618; 542, 674; 55i,
914; 567, i25o; 568, 1^89;
571, i36i; 576, 1472; 578,
i5t5; 588, 1738; 592, 1825;
5g3, i854; VI, 359; 367, 55;
373, 219; 376, 296; 377,
338 et 34o; 38o, 420; 384,
517; 387, &75; 389, 647;
400, 881; 4°2, 934> 42°»
i358 ; 43 1, 1 619 ; 44i > i83i
443, 1879; 444, i9°4; yl
464; 465; 473, 5; 474, 18
475, 45; 481, 198; 482, 222
483, 253; 485, 3o2; 487
352; 49°, 438; 495, 557
Soi, 5i4; 5o8, 869 et 888
510,932; 5n, 952; 5i2
973; 5i3, ioo5 ; 5i6, 1084
517, 11 00; 5i8, 11 21 et 11 29
524, 1247; 528, i345; 532
i435 ; 54i, 1623; 542, i653
543, 1666; 546, 1742; 583
2o3 ; 587, 295 ; 596, 5o2
65o, 1268; 656, i8ii;VII,5
n5, 181; 116, 196; 117, 216
118,247; 139,739; 140,752
24i, 999; 244, io55; 247
1129; 4°8, 118; 49°, 670
494, 745 et 750 et 757 et 764
5oi, 923; 5i3, 1219; 517
i3o8; 522, i443; 527, i568
X, 214, 3o4; 257, 71; 259
112; 264, 189; 492.
Roman (le). Il n'a point les con-
traintes du théâtre , 1 , 84 et
85.
Romances espagnols sur le Cid,
III, 87-90.
Rome, I, 89; 118; 120; i38; III,
280; 282; 284, 20 et 33; 285,
68; 286,73 et 80 et 88 ; 290,
195 ; 292, 229 et 232 et 236 et
239; 293, 256;295,332; 297,
347; 298, 371 et 383 et 387;
399, /\02 ; 3o2, 466 et 467 et
480 ; 3o3, 498 ; 3o6, 565 ; 309,
63o et 646; 3io, 666; 324,
988 et 994 et 997 et 1000;
323, ioi4; 326, 1024; 328,
1062 et io65 ; 33o, 1091 et
1 100 et 1101; 332, n32 et
1140 etn43; 334, 1177 et
1180; 335, 1217; 336, 1220;
337, 1258; 339, i3oo et i3oi
et i3o2 et i3o3 et i3o4; 348,
1499 et 1507 et i5n; 349,
1626 et i532;35i, i58g ; 352,
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
559
i63o;353, i655 ; 354, 1684;
355, 1700 et 1706; 356, 1728
et 1743 ; 357, 1755; 358 (var.);
38o; 384; 389, no; 392, i65
et 178; 393, 196; 394,226;
396, 259 ; 3g6, 368 ; 4°3, 400;
404, 421 et 422; 4°5> 4^i et
461; 406, 470 et 481; 4°7>
502 ; 4°8, 522 et 526; 4°9,
549 et 565 ; 4IO> 570 et 589;
41 1,599 et 606 ; 4ia> 623; 4i3,
65i et 655 ; 4i4, ^72 et 686;
4i5, 6g5 ; 4ID> 7X8 et 720;
417, 743 ; 418, 7545421, 847;
423, 886; 428 (var.); 429,
io5o; 436, 1 165 et 1173 ; 437,
1186; 438, 1221; 442» i3o5;
45i, i5i2; 452, i5i8; 4^2>
1765; 494, l55; 4g5, 169
et 181; 496, 2o3 ; 497» 228;
5o5, 390; 5io, 5i3; 548,
i3o4; 552, 1420 et 1423 ; IV,
11 et 12; 3o, 59et7o;32, i33;
34, 178 et 193 et 201; 39,
291; 43, 389; 48, 5o5 ; 5i,
577; 56, 694; 61, 811; 62,
838; 64, 883; 65, 923; 66,
93o; 67, 964; 69, 1018; 70,
1037; 71, io56: 73, 1107;
74, 1122; 75, 1174; 80, 1278
et 1299 et i3o6 ; 81, i3i7 ; 84,
1407; 97» l699 et I7°°l 99>
1748; 23i, i658; 292,70;
294, 140; 309, 364; 39, 524,
677; V, 34, 376; 39, 3o5;
46, 664; 55, 871; 56 go3 ;
89» i^39; 95, i759» 3o2,
503 ; 5o6 ; 5o8 ; 5i2 , 24; 5i3,
57 et 58 ; 5i8, i55 et 157;
519, 175 ; 523, 270 et 276;
524, 297; 526, 3i5 et 323;
527, 343 et 346 et 354; 536,
53i ; 537, 557 et 56o et 567 ;
539, 610; 54o, 627 (var.) et
643; 54i» 646 et 660; 542,
fi79> 543, 7°4; 544, 743;
545, 755, 546, 766; 547?
800; 55o, 877 et 887; 55 1,
903 et 908 ; 55a , 926 et 927,
553, 956 ; 554 , 981 et 983 et
989 ; 556, 1028 et io3i ; 563
n56; 564, 1182; 568, 1277;
568, 1295 et 1298; 569, i3o9
et i322; 572, 1283 et 1287;
573, 1392 ; 574, i42o et i427 ;
575, i432 et 1439 et i456;
576, 1464; 578, i5o5; 579,
i545 ; 582, 1602 et i6io;583,
1616 et 1627; 587, 1715 et
1725; 589, 1749 ; 590, 1772e!
1787 ; VI, 35g; 366, 32 et 46;
367, 49; 370, i5i; 375, 166
et 175 ; 375, 288 ; 377, 345 ;
379, 374; 38o , 421; 38i,
444; 384, 5o6; 386, 56g;
388, 63i ; 389, 646; 3g6,
783; 400, 873 et 894; 4oit
922; 4°2, 927 et 929 et g36
et 940; 4o9,no5;4io, 1139;
411, n5o; 4i3, 1193; 419,
i32i et i324 et i338; 42°>
1357 et 1362; 424> 1464 ;
43i, i6ioet 1618; 432, 1640;
44 rj 1840 ; 442, 1857 et 1862 ;
444, 1900; 445, 1912 ; 464;
465; 472; 479, i57 et 160;
480, 173 et 176 et 186; 484,
264 ; 487, 34i ; 499, 669 ; 5oo,
674 et 688 et 698; 5oi, 716;
5n, 970; 5i4, 1022; 5i5,
1049; 52o, 1157; 526, 1289;
528, 1324 ; 533, i445 et 1467;
537, i54i ; 538, 1577; 541,
i63i ; 544, 1691; 574; 577,
47 ; 58o, 122 ; 585, 232 ; 600,
602; 601, 609; 602, 65o et
65i; 612, 849 et 853; 6i3,
871 et 874; 614,895 et 898;
6i5, go5 et 906 ; 617, 973 et
975; 618, 994; 620, 1048;
621, 1060; 63o, 1267; VII,
m, 79; 114. 149; ir8, 248
et 255; 120, 3i2; 124, 399;
125, 4<>9; J34> 634 et 635;
139, 745; i5o, 1026; 169,
i475; 181, 1778; 200; 2o5,
n4; 207; 164; 210, 249; 214,
344; 2i5, 364; 317, 411; 218,
56o TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
434 ;2 2i,5io;2 22, 536; 229,
687; 23i, 744; 235, 844; 236,
860; 241, 983 et 988 et 989 et
993; 243, io34; 244» io52 et
io65 ; 245, 1078 et 1089 ; 25o,
i2o5; 25i, 1209; 256, i332
258, 1397 ; 2^2> I45i ; 264
i5oi ; 268, 1611; 169, 2640
271, 1672 ; 272, 1687 et x^97
273, 1711 et 17205274, 1743
275, 1751 et 1762; 418, 934
465, 36; /\66, 70 et 75; 498
85o; 499, 870; 5oo, 894
5i3, 1221; X, 95, 10 et 12
98, 59; 2i3, 298; 259, 102
et 108; 268, 252; 338, 100
441; 4^8. — Les deuxRomes
VH, 116, 193.
Romule, Romulus, III, 285, 52
357, 1756.
Rondeaux, X, 79 et 80; 174.
Ronsard, I, i36; X, 117, 3i.
Roscius, comédien romain, dési-
gnant l'acteur Mondory, X,
68, 34.
Rosélie, nom de femme men-
tionné dans la Veuve , I, 408,
182.
Rosidor, personnage de Clitan-
dre, I, 255-369.
Rosine , personnage du Ve acte
de F Illusion, ne paraissant pas
sur la scène, II, 434 (var0;
5o7~5i8; 520 (var.); 524-527
(var.).
Rotrou (Jean). Son hommage à
Corneille au sujet de la Veuve,
I, 38i-383. — Lettre apo-
cryphe de Corneille à lui, X,
5o3 et 5o4.
Rouen (la ville de), I, 117; X,
437; 438; 442; 448; 4^2;
457-459; 465; 47°; 478;
481; 482; 485; 489; 493.
— L'archevêque de Rouen.
Voyez Harlay de Champ -
VALLON
Rouge (la mer;, IX , 5t6, 3.
Rue (le P. de la), jésuite.
Traduction par Corneille de
ses vers latins : sur les vic-
toires de 1667, X, 192-217;
— sur les victoires de 1672,
X, 252-284. — Traduction en
vers latins par le P. de la
Rue des vers français de Cor-
neille sur la conquête de la
Franche -Comté, X, 226. —
Son épître dédicatoire à Cor-
neille, X, 378-383. — Ses
vers sur la mort de Charles
Corneille , troisième fils du
poète, X, 383-385.
Rufus (Virginius), commandant
en Germanie, VI, 6i3 , 865.
Ruiter, amiral hollandais, X,
3o6, 47.
Rutile , un des complices de
Cinna, III, 4^1, 1489.
Rutile , soldat romain , per-
sonnage ai O thon , VI , 564-
657.
Piyer (Pierre du). Ses hommages
à Corneille au sujet de la
Veuve, I, 383; 384.
S (suppression de P), 1,8. — S
se change en z après é, 1, 10»
— Emploi de la grande f\ ses
quatre prononciations, I, 6; 8.
— Emploi de la petite s, I, 8.
Saeaoth, IX, 127, 8.
Sabine, femme d'Horace et sœur
de Curiace , personnage d'Ho-
race, [II, 243-358 ; I, 4; 86;
IV, 424; X 441.
Sabine, personnage du Menteur,
IV, 117-273.
Sabine, nom d'une Romaine
mentionné dans Tite et Béré-
nice, VIL 240, 972.
Saint-Benoît (Tordre de\ VIII,
98.
Saint-Evremond. Lettre à lui
HES OEUVRES DE CORNEILLE,
r)6i
a dressée par Corneille, X,
497-499- — Sa réponse, X,
499 et 5°0*
Saint-Germain-en-Laye, I, 2y3;
X, 199, 84; 240, 66.
Saint-Germain (le faubourg), II,
57, 736; 443, 176.
Saint-Innocent (secrétaire Je),
II, 442, 173.
Saint-Jean-d'Angéli ( la ville
de), X, 107.
Saint-Lô de Rouen (le prieuré
de), X, 461 ; 466 ; 472.
Saint-Malachie (clom Gabriel
de), traducteur des Epures de
saint Bernard, X, 122.
Saint-Omer (la ville de), X, 307,
71; 329, 47.
Saint-Paul (Cbarîes-Paris d'Or-
léans, comte de), plus tard duc
de Longueviîle, X, 208, 209.
Voyez Longueville.
Saint-Roch (quatrain pour le
Christ de), attribué à Cor-
neille, X, 377.
Saints. Hymnes pour la fête de
tous les saints, IX , 568-572.
Sainte. Hymnes pour une sainti-
ni vierge ni martyre, IX, 5 96-
59B.
Sainte-Baume (la), VIII, 61.
Sainte-Geme (dom Gabriel de),
traducteur d< s Épitres de saint
Bernard, X, 122.
Sainte-Marie - des-Champs , où
était curé un oncle de Cor-
neille, X, 433 ; 4^7.
Saintks. Voyez Xaintes.
Saintonge. Voyez Xaintonge.
Salart (le chevalier de),X, 271,
272.
Salins (la ville de), X, 296, 102.
Salle (le marquis de la), X, 271,
269.
Salmonée, VI, 247.
S\lomon, VIII, 584, 94; IX, 3o,
425.
Salvidien, Romain mentionné
dans Cinna, 111,437, 1202.
Cornftu.e, X
Samaritaine (la) de l'Évangile,
VIII, 280.
Samaritaine (fontaine de la), à
Paris, II, 443, 178.
Samuel, VIII, 261; 263, 74.
Sanche fi"1 Aragon (Don), comédie
héroïque de Corneille, V, 397-
494; I, 25 ; 44; 101 ; 116 et
117; 272. — Examen de laipièce,
V, 414.416. — Corneille ex-
plique et défend le titre de co-
médie héroïque qu'il lui a donné,
V, 4°4-4 IO- — D°n Sanche
eut d'abord grand éclat sur le
théâtre, mais le refus d'un il-
lustre suffrage dissipa les ap-
plaudissements qu'il avait re-
çus à Paris ; il lut relégué dans
les provinces , où il conserva
son premier lustre, V, 4i5.
— Corneille envoie cette pièce
à M. de Zuylichem , X , 453-
, 457.
Sanche (don) , personnage prin-
cipal de Don Sanche d'Aragon,
où il figure sous le nom de
Carlos, V, 397-494; I? loi.
Sanche (don) , personnage du
Ciel, III, 1-241 ; I, 96; 11 5.
Santeul (Jean-Bci ptiste) , cha-
noine de Saint- Victor. Ses
Hymnes de saint Victor tra-
duites en vers par Corneille,
IX, 607-612. — Sa traduction
en vers latins : des vers français
de Corneille, sur la conquête
de la Franche-Comté, X, 227;
— d'un passage de Tite et Bé-
rénice^ appliqué au départ du
Roi pour l'armée, en 1672, X,
247* — Imitation par Cor-
neille : de sa Défense des fables
dans la poésie , X, 234-241;
— de deux inscriptions latines
pour deux fontaines de Paris,
X, 242-244; — de ses vers
latins sur la libéralité du Roi
envers les marchands de Pa-
ris, X, 287-298; — de son
36
J62 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
inscription pour l'Arsenal de
Brest, X, 33i-333.
S antillane (marquis de), V, 429,
262 ; 44^i 662.
Saragosse (la ville de), V, 41 3.
Sardaigne (la), 3o6, 48.
Sarrasins (les), VIII, 673.
Sarrau (Claude), conseiller du
Roi en sa cour de parlement.
Lettre latine qu'il écrit à Cor-
neille, X, 438-44° •
Satan, II, 472, 740.
Saul, VIII, 328.
Sault (François-Emmanuel com-
te de), X, 271, 270.
Satjmur (la ville de), X, 107.
Savoie (la), X, 69, 49-
Sayavèdre , personnage du ro-
man espagnol intitulé Gusman
(TAlfarache, II, 444, 186.
Scaltger (Jules-César), II, 117.
Scéoase, paysan de Leuctres , I,
55; V,4o6.
Scènes (liaison des), I, 3; 101 et
suiv. — Nombre des scènes,
I, 108.
Schenk (le fort de). Voyez
Skeink.
Scipion , le premier Africain, V,
53g , 604 ; 542, 675 ; VI, 468,
472; 484? 262; 487, 353;
497, 602; 5oo , 689; 5i2,
987; 5i4, 1024; 520, 1149;
532, 1420; 534, 1499; 536,
i5i8; 544, 1690; 547, 1777
et 1785 ; 548, 1806; 549, i8i5.
— Personnage de la Sopho-
nisbe de Mairet, VI, 460.
Scipion Émilien, III, 260.
Scipion, père de Cornélie, IV,
69> 991-
Scipion (Métellus), IV, 56, 686.
Scipions (les), IV, 70, io35; X,
97' 44- m
Sciron, brigand tué par Thésée,
VI, 164, 697.
Scuoéry (Georges de), VI, 462;
X, 43 1. — Son homni âge à Cor-
neille, au sujet delà Veuve, I,
379. — Vers que lui adresse
Corneille sur ses tragi-comé-
dies de Ligdamon et Lidias et
du Trompeur puni, X, 57 ; 61 .
— Lettre apologétique de Cor-
neille en réponse à ses Obser-
vations sur le Cid , X , 399
407.
Scudéry (Mlle de), X, i5i.
Scythe (le), les Scythes. II, 38o,
812; III, 54i, 1 128; VI, 247;
270, 33i ; VIII, 275, 1755.
Scythie (la), II, 369, 577; 385,
90i;VI, 273, 437; 348, 2202.
Seguier (Pierre), chancelier de
France. Epître dédicatoire,
à lui adressée, de la tragédie
d' Héraclius , V, 141-143. —
Obligations que lui a Cor-
neille, V, 141 et 142. — Les
Muses ont trouvé chez lui la
même protection qu'elles ren-
contraient chez Richelieu, V,
142. — Protecteur de l'Aca-
démie française, X, 411»
Seine (la), 1, 90; II, 436, 34;
III, 98 -,473; VI, 259, i25;
263, 209; VII, 117; 226; X,
116, 7; 242, 1; 244, 1; 339,
114.
Séleucie, ville de Syrie, IV,
428; VII, 462, 463, 6.
Séleucus, fils de Démétrius Ni-
canor et de Cléopatre , per-
sonnage de Rodogune,ÏV, 397-
Sll; 423; 425; 426; I, 79 ;
80, 99, 100.
Séméi injurie David, VIII, 410.
Semiramis, VII, 439, i45o et
i45i.
Sémire, personnage de Pststrée,
iv, 354, 1243.
Sénèque le philosophe, V, 141.
— Extrait du livre I (cha-
pitre ix ) de son traité de La
Clémence , contenant le sujet
de la tragédie de Cinna, III,
373-375. — Allusion à un pas-
sage de ses lettres, faite par
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
565
l'auteur de l' Imitation, VIII,
n5, 1476-1478.
Senèque, poëte tragique, I, 21
42 ; 99; 107; II; 121 ; 333
334; 338; III, 274; IV, i3o
i3i ; 282; V, 3io; VI, 129,
249; 25o;X,45o; 456.
Sentences morales dans lepoëme
dramatique, I, 18.
Sentiments dans le poëme dra-
matique, I, 39.
Sentiments de /' Académie fran-
çaise sur le Cid, X, 43 1-
Septime , tribun romain à la
solde du roi d'Egypte, person-
nage de Pompée, IV, i-ii5.
Sérail (le), II, 448, 270.
Séraphins (les), IX, 127, 7.
Serment (Mlle), X, i5o, 1 5 1,173.
Sertorius , tragédie de Corneille,
VI, 35 1-445; 466. — N'a point
déplu , V 1 , 3 5 8 . — Représentée
à Versailles en octobre 1676,
X, 3o9 ; 3ii, 11. — Cor-
neille demande à l'abbé de Pure
son sentiment sur cette tragé-
die, X, 490-492. — Louanges
que lui donne Chapelain, X,
496 et 497.
Sertoritjs, général du parti de
Marius en Espagne, person-
nage principal de la pièce de
ce nom, VI, 35i~445; X, 491-
Serviliens (les), illustre famille
de Rome, III, 452, i535.
Servilitjs Cjepio (Quintus), VI,
36o ; 38i, 439.
Sévère, chevalier romain, favori
de l'empereur Décie , person-
nage de Poljeucte , III, 463-
570 ; I, 61.
Séville, I, 120; III,8o; 97598;
104 ; 140, 617; V, 422, 79;
428, 2 25.
Sexte, Sextus Pompée, III, 435,
n35.
Sicile (la), I, 90 ; III, 412, 633.
— Les mers de Sicile, X, 3o6,
45.
SlDON, VIII, 269, 191.
Sigismond, roi des Bourguignons,
VII, 160, 1270; i6i, i3i2.
Sillace, lieutenant d'Orode, per-
sonnage de Suréna, VII, 455-
534.
S'dves (les) de Stace, X, 443.
Silvie, personnage d'une tragi-
comédie de Scudéry,X, 57, 1.
Siméon. Son cantique, IX, 23g,
337.
Siméon Métaphraste. Son récit
du martyre de saint Polyeucte,
III, 474-478.
Siméon Stylite (saint), VIII, 466 .
Simon le Cyrénéen, VIII, 553.
Simon le lépreux, VIII, 90.
Simon , personnage de YAn-
drienne de Térence, I, n5;
II, i3.
Sina (le mont de\Sinaï,X, 3i9,
61.
Singibar, un des chefs des alliés
d'Attila, VII, 11 5, 179.
Sinnis, brigand tué par Thésée,
VI, 164, 697.
Sion, IX, 67, 8; io3, 14 ; 107,
17; 117, 3i; 119, 1; 123; 125;
i85, 6 et 26; 187, 195; 38;
200; 206; 207, 21; 211; 9;
217, 2; 225, 35; 23i , 16;
265, 74; 269, 54; 271, 67;
295 ; 334; 601, 18. — Dieu de
Sion, IX, 157, 2. — Les filles
de), IX, i55. — Les fils de
Sion, IX, i5i, 7.
Sirènes (deux), personnages de
la Toison d'or, VI, 2 20-349«
Sirmond (le P.), X, 4^7-
Sisyphe, II, 383, 876.
Sixte, II (le pape), VIII, 222,
o36.
Skeink (le fort de), Schenk,
X, 264, 202; 265, 210; 279,
38o.
Sœur valeureuse (/a), tragi-come
die de Mareschal, X, 62.
Soleil (le), II, 353, 261; 383,
876; 396, 1124; 449, 296.—
S64 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
Personnage d'Andromède, V,
a43-396. — Personnage de la
Toison d'or, VI, 22 1-349-
Solyme, Jérusalem, VII, 2o5,
ïoo; 236, 860, 245, 1088.
Songes , dans la tragédie , III ,
278.
SONNETS, I, 171; III, 473; X, 32J
33 , 44 > 87 ; 100; 122; 124 et
125 ; 127; i33 ;i35; 137; 140;
162-164; 167; 285. — Son-
nets attribués à Corneille, X,
354 ; 359 et 36o.
Sophi de Perse (le grand), II,
447, 227.
Sophocle, poète tragique, I, 28;
42; 66; 78580 et 81; 102;
119; II, 11; III, 274; IV, 416
et 417; Y, i5i ; VI, 129; 461 ;
X, 119, 57; 3i2, 27; 5oo.
Sophonisbe, tragédie de Corneille,
VI, 447-549; X, 195.— L'au-
teur demande au Roi de la
faire représenter devant lui, X,
3n, i5.
Sophonisbe, fille d'Asdrubal et
reine de Numidie, personnage
de la pièce de ce nom, VI,
447-549-
Soplwnïàhe , tragédie de Mairet,
VI, 460; 463; 466.
Sophonisbe , tragédie de Mont-
Chrestien, VI, 463.
Sophonisbe, tragédie du Trissin,
VI, 463.
SoRBONNE (la), X, 464.
Sorties des acteurs, I, 108.
Sosie, personnage de V Andrienne
de Térence, I, 46; II, i3.
Sostrate, nom d'homme men-
tionné dans OEdipe, VI, 171,
858.
Soubise (François de Rohan de),
X, 271, 269.
Souplv (le P.), X, 461.
Sourdeac (le marquis de). OEdipe
représenté chez lui, VI, 23o.
Sparte, VI, 157, 54o; VII, 8;
10; 3o; i3, 98; 19, 258; 37,
697; 52, 1076; 56, n85; 67,
1466 et 1475 ; 79, 1733; 86,
1875; 94, 2082.
Sphinx (le), VI, i44> 233 ; i54,
449; 161, 633; 179, 1059; X,
246, 1.
Spitridate, grand seigneur per-
san , personnage d' 'Agêsilas ,
VII, i-95.
Stace, X, 443. — Fragments de
traduction de sa Thébaïde, par
Corneille, X, 245 et 246.
Stances, X, 43; 160; i65; 170;
172. — Dans les pièces de
théâtre : à quels sentiments
elles conviennent, V, 3 10. —
Dans la Veuve, I, 420~4225
454-456.— Dans la Galerie du
Palais, II, 70-72. — Dans la
Suivante, II, 146 et 147; ï8o
et 181; 212-214. — Dans la
Place Royale, II, 232 et 233;
262; 267 et 268; 299-301. — -
Dans Médée, II, 398 et 399.
— Dans le Cid, III, 321-324;
186 et 187. — Dans Polyeucte,
III, 539-542. — Dans la Suite
du Menteur, IV, 337 et 338.
— Dans Héraclius, V, 222 et
2 23. — Dans Andromède, V,
329-33i; 338; 339-34i; 353-
355; 35g; 36i; 376; 377 et
3785393-396. — Dans OEdipe,
VI, 168 et 169; 280 et 281.
— Dans la Toison d'or, VI,
293 et 294; 3i8-32o; 342 et
343. — Sur les vers de stances
d1 Andromède , V, 3o8-3i2. —
Les stances du Cid inexcusa-
bles, V, 3n.
Stéphanie, personnage de Théo-
dore, V, 1-1 1 1 :.
Stéphonius (le P. , jésuite,, au-
teur de tragédies, I, 72.
Stilicon, VII, 116, 199.
Stratonice, confidente de Pau-
line, personnage de Poljeucle,
- III, 463-570.
Stylite. Voyez. Siméon (saint).
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
565
Stybus, roi d'Albanie, VI, 247;
267, 263 et 264; 271, 375.
Styx (le), I, 222, c 3 1 5 ; 223
(var.); VII, 345, i4y3.
Suède (la) , X , 443 •
Suédois (les), X, 3o2, 52.
Suite du Menteur (ta), comédie
de Corneiile, IV, 275-395; I,
19, 120; 273 — Examen de
la pièce, IV, 285 et 286. — A
été moins heureuse au théâtre
que le Menteur, IV, 279.
Suivante (la), comédie de Cor-
neille, II, n3-2i4; I, 84. —
Examen de la pièce, II, 120-
125.
Sujets du poëme dramatique.
S'ils viennent de la fortune ou
de l'art, I, i5. — S'il est per-
mis de changer ceux qui sont
empruntés de l'histoire ou de
la fable, I, 77.
Sulpitie, nom d'une Romaine
mentionnée dans Tite et Béré-
nice, VII, 240, 971.
Suppliantes (les), tragédie d'Eu-
ripide, I, 112.
Suréna, général des Parthes, tra-
gédie de Corneille, VII, 455-
534- — N'est pas indigne de
Cinna. Corneille demande au
Roi de le faire représenter de-
vant lui, X, 3n, i3.
Suréna , lieutenant d'Orode , et
général de son armée contre
Crassus, personnage de Suréna,
vu, 455-534.
Surius, auteur des Pies des Saints,
III, 4745 478.. .
Suso (Henri\ religieux jacobin,
VIII, 3i3.
Suze (le pas de), X, 110.
Swol (la place de), Zwol, X, 280,
395.
Sylla, III, 402, 377; 4IO> 583;
4M, 664; 438, 1227; VI, 358;
359; 36o; 36i; 362; 364; 366,
27 et 44; 370, i3a; 376, 3o4;
377, 334 et 346; 387, 601,
389, 636; 396, 787; 397, 809;
398, 832; 399, 856 et 867;
400, 886 et 894; 4Q1, 9°4 ;
4o3, 958; 4°4> 982; 4°6, io32
et 1039 ; 4°7> 1048 et 1067;
408, 1070 et 1078 ; 409, 1104
410, 1137; 420, 1371; 423,
1425 et 1434; 424> i446 et
i453; 429, 1567; 43o, i584;
432, i63i et 1637 et i645;
442, 1859; X, 491.
Sylvandre, personnage de t As-
trée, IV, 353, 1235.
Sylvérie, nom de femme men-
tionné dans l'Illusion, II, 438,
72.
Sympathie (poudre de), IV, 204,
1182.
Syphax, roi de Numidie, person-
nage de Sophonisbe, VI, 447"
549-
Syrie (la), I, 273; IV,4i5;4i6,
420; 423; 428; 43o, 24; 43i>
56 (var.); 440, 248; 494> i54a;
5o4, 1764; 5o6 (var.); V, 17,
3; 92, 1692; 94, 1705; 3o2;
VI, 58i, i&s; VII, 218, 418.
Syriens (les), IV, 448, 43o; 494,
i553; 49^, i573.
Tabenne (l'île de), VIII, 195.
Table de marbre de Normandie.
P. Corneille y est avocat géné-
ral, X, 407-
Tacite, I, 25; 76. — Le sujet
â'Othon tiré de ses Histoires,
VI, 57i.
Tage (le), II, 436, 34 ; IV, 53 ,
622 et 625; VI, 259, 125;
419, i333; 42°> i36i ; IX,
2i5, 11; X, 121, 102; 257,
78.
Tantale, VII, 353, 1669.
Tarquins (les), III, 409, 56 1.
Tartare, nom de peuple, II,
470, 687.
566 TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
TAKTARE(le), aux enfers, X 237,
35.
Télégonus, personnage de la tra-
gédie grecque d'Ulysse blessé,
1,67.
Temps (unité de). Voyez Unité
de temps ou de jour.
Tenare (le), 1 , 223 (var.).
Téhence , poëte comique latin ,
I, 46; 96 ; n5 ; i38 ; II, i3 et
14 ; 119; III, 260; IV, 283;
423; X, 45 fi. — Traduction de
Térence dite de Port-Royal
VII, 106.
Térèse. Voyez Thérèse.
Terme, statue, V, 12.
Termes (Roger de Pardaillan de
Gondrin, marquis de), X, 271,
269.
Terre (la), II, 385, 905.
Terre promise (la), VIII, 4^3,
3p5i
Testament ( l'Ancien ) , IX ; 5 ,
II, 65.
Testament (le Nouveau), IX, 5;
11, 65.
Teucer, personnage de XAjax de
Sophocle, I, 28.
Thabor (le), IX, 556, 2.
Thaïs (sainte), VIII, 428.
Thamire, dame d'honneur de
Viriate, personnage de Serto-
rius, VI, 35i~445.
Théagène , nom d'un rôle
d'homme dans le Ve acte de
/' 'Illusion, II, 5o9~5i8; 524-
527 (var.).
Théagène, lieutenant de Nico-
mède, V, 5i2, 3i.
ThÉante, personnage de la Sui-
vante, II, n3-2i4; 260,702.
ThéAtre (éloge du), II, 522
et 523.
Thèbàide (la), tragédie de Sénè-
que, VI, 25o.
Thébaïde. (la) de Stace. Fragments
de traduction par Corneille,
X, 245 et 246.
Thébains (les), VI, i45, 263;
166, 746; 174, 935; 207 ,
1723 et i635; 212, i853, 219,
1996-
Thèbes , ville de Béotie , 1 , 112;
IV, 437, 179; 438, i95 ; V,
146; VI, i34 ; i4° ■> ï42 ;
149, 353; i5o, 38i ; 176,
977; 245.
Thémis, II, 488 (var.).
Théodore, vierge et martyre, tra-.
gédie chrétienne de Corneille,
V, i-iii;I, 62; 64; 84; 98;
273. — Examende la pièce, V,
10-14. — Sa représentation n'a
pas un grand éclat, V, 8; 10.
— Son mauvais succès est im-
puté à l'idée de la prostitution,
V, 8; 9 et 10. — N'a pas été
rétablie à Paris depuis sa dis-
grâce , mais les troupes de
province l'y ont fait assez pas-
sablement réussir, IV, 286.
— Corneille ne croit pas avoir
fait d'acte où les diverses pas-
sions soient ménagées avec plus
d'adresse que dans le quatrième
de Théodore, et qui donne plus
de lieu à faire voir tout le ta-
lent d'un grand acteur, V, 1 1 .
Théodore, princesse d'Antioche,
personnage principal de la
pièce de ce nom, V, i-iii.
Théodoric, roi des Ostrogoths,
VII, 120, 3n, 169, 1476.
Théodorics (les), X, 441-
Théodose Ier, dit le Grand, em-
pereur d'Orient, V, 164, 188;
VII, 116, 190; 118, 262;
128, 481; VII; 38i, i3; 383,
42; 385, n5; 389, 198; 438,
1418; 443, i534.
Théodose II, fils d'Arcadius, em-
pereur d'Orient , VII , 116,
2o5 ; 376; 38o, 4°3> 554;
404, 602; 429, 1197.
Théodote, ministre de Ptolomée.
IV, 21.
Théophile, poëte français, I ,
i36.
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
567
Thérèse (sainte) , IX, 566, 3;
567, 3. — Hymnes pour sa
fête, IX, 566-568.
Thésée, fils d'Egée, I, 77; 112;
122; II, 335, 525 (var.); X,
73, 9. — Personnage (YOFdipe,
VI, 101; 219.
THESSALIE(la),I, 46; II, 343,46;
357, 334; 36o, 391; 365,
482; 367, 533; 379, 779;
IV, 5o, 566; 59, 757; 71,
1066; VI, 247 ; 252.
Thétis, Thétys, I, 244 ('var-)>
277 (var.); X, 273, 307.
Theudas, personnage de Médée,
II, 327-419.
Thierri, roi des Visigoths, VII,
n5, 179.
Thionville (la ville de), III, 473 ;
IV, 412.
Tholus (la forteresse de) , X,264,
202; 268, 242.
Thomas d'Aquin (saint), VIII ,
38; X, 446.
Thomas a Kempis, X, 4^0. — Il
est considéré par plusieurs
comme l'auteur de Y Imitation^
VIII, 12; 18; i3o; X, 461;
464; 4«5; 466; 467, 4^8; 469;
471. — Messieurs des requê-
tes du parlement de Paris se
sont prononcés en sa faveur,
VIII, 12.
Thorismond. Voyez Torris-
MOND,
Thrace (le), II, 375 (var.); VI,
248.
Thyeste, frère d'Atrée, I, 20; 56;
57-78.
Thyeste, tragédie de Scnèque, I,
21; IV, 283.
Tibère, empereur romain, suc-
cesseur d'Auguste, VI , 585 ,
237 ; 621, io63.
Tibère, empereur d'Orient, V,
i43; i5i; i6g, 58, 164, 186.
Tibre (le), III, 4^4i H»; 44ri
1290; IV, 84, 1414; VI, 397,
8i5; 4*9? i333; 43r, 1604;
VII, 117, 236; X, 116, 7;
443.
Tigeixïn , favori de Néron, VI ,
609, 780.
Timagène, gouverneur de Sé-
leucus et d'Antiochus , per-
sonnage de Rodogune, IV, 397-
5n.
Timante , personnage & Andro-
mède, v, 243-396.
Tircis, Tirsis, personnage de
Mélite,!, 123-253; 19; 395.
Voyez I, 147, note 4(«)«
Tirésie , Tirésias , devin , VI ,
127; i3o; i5i, 3g4 ; i56,
5o6 ; i58, 549; i59, 589;
170, 829; 178, 1026; 182,
1099; l88, 1277; I9°5 l3*7i
*97, x493.
Tirsîs, nom d'homme, X, 5o-52;
54, a5. Voyez Tikcis.
Tisiphone, I, 226, i393 ; a3i,
1467.
Titans (les), I, 226, 1401 ; II,
5i2, 1437 ; IV, 28, 24.
Tile et Bérénice , comédie hé-
roïque de Corneille, VII, 1 83-
276. — L'auteur demande au
Roi de faire représenter cette
pièce devant lui, X, 3 12, 18.
Tite, Titus, empereur de Rome
et amant de Bérénice, person
nage de Tite et Bérénice, VII.
183-276.
Tite Ltve. Voyez Live (Tite).
Tithon, amant de l'Aurore, II,
449> 299-
Titres des pièces de théâtre, II,
11; 12.
Titye, géant, II, ^iSf i524;
VII, 357, 1779.
Toison d'or (la), tragédie de Cor-
neille, vi, 221-349; 1, 47;
273; V, 3n; X, 179, 57. —
Desseins de la pièce, VI, 23o-
244» — Examen , VI, 245-
25o.
Tolède (la ville de), III, 170,
1226.
568 TABLE ALPHABETIQUE ET ANALYTIQUE
Tolède (Ferdinand Alvarez de),
duc d'Albe, X, 267, 233.
Torelli (Jacques) a exécuté les
desseins des machines iV An-
dromède, V, 277; 297.
Tormes. Voyez Lazarili/e de
ToBMES.
Tobbismond , Thorismond, fils
de Théodoric , roi des Visi-
goths, VII, 162, i3ii.
ToURAINE(ia ), II, 4^4-
Tournai (la ville de), X, 2o5,
i55.
Toubné, jésuite. Sa traduction
en vers latins des vers français
de Corneille sur la conquête
de la Franche-Conîté, X, 227.
Tours (la ville de), IV, i63, 432.
Trachiniennes [les) , tragédie de
Sophocle, II, 11 ; IV, 416.
Traductions : de V Imitation de
Jésus - Christ , VIII; — des
Louanges de la sainte Vierge,
IX, 1-53; — de l'Office de la
sainte Vierge, IX, 55- 241; —
des sept Psaumes pénitentiaux,
IX, 243-299; — des Vêpres
et Complies des dimanches,
IX, 3oi-34i ; — des Hymnes
du Bréviaire romain, IX, 447~
636 ; — des Hymnes de saint
Victor, IX, 6o3-6i2; — des
Hymnes de sainte Geneviève,
IX, 6i3-637.
Traductions et imitations : de
sept épigrammes lalines d'O-
wen, X, 46-49; — des vers
latinsxdu P. de la Rue sur les
victoires de 1667, X, 172-217 ;
— d'une épigramme latine de
Montmor sur les mêmes vic-
toires, X, 218 et 219 — Tra-
duction en latin, faite par Cor-
neille lui-même, de ses stances
sur la conquête de la Franche-
Comté, X, 225. — Imitation:
d'une pièce latine de J. Pari-
sot sur le canal de Languedoc,
X, 23 1: — des vers latins de
Santeul sur la défense des fa-
bles dans la poésie, X, 234-
241 ; — de deux inscriptions
latines du même pour deux
fontaines de Paris, X, 242-
244 ; — de deux passages de
la Thébaïde de Stace, X, 245
et 246; — de ses propres vers
latins présentés au Roi à son
retour de la guerre d'Hol-
lanue en [672, X, 25o; —
des vers latins du P. de la
Rue sur les victoires de 1672,
X, 252-284; — des vers la-
tins de Santeul sur la libéra-
lité du Roi envers les mar-
chands de Paris, X, 287-298 :
— des vers latins du P. Lucas
sur le départ du Roi pour l'ar-
mée en 1672. X, 299~3o3 ; —
d'une ode latine à Pellisson
par un auteur inconnu, X,
3i5-32i; — de l'inscription
sur l'Arsenal de Brest par San-
teul, X, 33i-333. — Imita-
tion attribuée à Corneille d'un
distique latin sur les victoires
de 1672, X, 385.
Tragédie [Discours de la), I,
52-97. — Ce que demande la
dignité de la tragédie, I, 24.
— Tragédies parfaites, I, 66.
— Quatre sortes de tragédie,
1 , 67. — Les tragédies an-
ciennes arrêtées autour de peu
de familles, I, 73. Voyez
C^OMEDIE.
Transylvanie (la). II, 4^0, 3i4«
Trasimène (le lac de), V, 525,
3o8 ; 539 , 620.
Trébie (la), V, 55i, 924.
Trézène (la ville de), VI, 190,
i32i. Voyez Tboezène.
Tbicin (le), le Trissin, poëte ita-
lien, VI, 463 ; 466.
Trinité la sainte), IX, 52, 823
Tristan, poëte dramatique, I,
49 (var.); VI, 462.
Tritons, V, 267. — Deux Tri-
DES OEUVRAS DE CORNEILLE.
569
tons, personnages de (a Toison
d'or, VI, 220-349.
Troade (/a), tragédie de Sénèque,
1,99; IV, 283.
TrochaÏques vers, V, 3 10.
Troezène (la ville de), II, 335.
Voyez Tbézène.
Troie (la ville de), I, 112; IV,
437, 171 et 179; 438, i95;V,
i5i ; X, n3, 89.
Trompeur puni (lé), tragi-comédie
de Scudéry, X, 61.
Tryphon, nom que prend Dio-
dotus en usurpant le trône de
Syrie, IV, 418; 43o, 3o ; 43i,
43 et 57 ; 45o, 491; 452, 528 ;
453,548.
Tutleries (les , à Paris, I, 120 ;
II, 3io, 32i, 293; IV, i38 ;
141, 5 ; 212, i333; 216, 14*7;
234, 1698; 237, 1765.
Tuileries (le IIIe acte de lu Comé-
die des, , par les cinq auteurs
II, 3o3-325.
Tulle , Tullus Hostilius , roi de
Rome, personnage d'Horace,
II, 243-358.
Tunis (la ville de ), X, 197,
42.
Turc (le grand), II, 471,
726.
Turcs (les), X, 196, 39.
Tubdétans (les) , peuple de la
Bitique, VI, 38o, 417*
Turenne (le vicomte de), X, 260,
122.
Turin (la ville de), VI, 20.
Tubpilian, nom d'un Romain
mentionné dans Otkon , VI ,
577, 52.
Turquie (la), IV, ig5, io5o ;
235, 1710.
Tyndare, père de Clytenmestre
et d'Hélène, I, 106.
Tyr (la ville de), VI, 481, 2i3;
IV, 101, 53; 107, 14.
Tybiens (les), VI, 482, 221.
Tyro, fille de Salmonée, VI,
247.
I
U. Son emploi , I, 6. — U con-
sonnes distingués des u voyel-
les, I, 6.
Udo, évêque de Magdebourg,
VIII, 618.
Ulysse, I, 28, 37. — Person-
nage de la Troade de Sénè-
que, IV, 283.
Ulysse blessé, tragédie de Chéré-
mon, I, 67.
Unité d'action, I, 98-122; i38;
378;II, 118; 221; III, 275 ;
481; IV, 22; i38; V, i3 et
if
Unité de lieu, I, 3; 84; 98-1 22;
377; 378; 3g4; II, i3; n8;
123; 223;III,97;98-ioi; 276;
379; 481 ; 482; IV, 20; 137;
421 ; V, i3 ; l53 ; 3o5 ; 416;
VI, 362.
Unité de temps ou de jour, 1,
3; 84; 98-122; 140; 1415262;
270; 377 et 378; II, 14; 118;
119; 124; 432; 433; III, 96;
97; 276; 379; 481; 482;lV,ao;
21 ; i38; V, i3; i53 ; 416.
Unulphe, seigneur lombard , per-
sonnage de Pertharite , VI , 1-
100.
Uranie (le sonnet d'), X, 125.
Uranins (les) , partisans du son-
net d'Uranie, X, 126, 5.
Urgande (la fée), IV, i59,
353.
Urraque (dona), infante de Cas-
tille, personnage du Cid , III,
1-241; 277; 483;I, 4; 38; 48;
n5 ; 120.
Utilité du poème dramatique,
I, i3-5i.
Utique (la ville d'), VI, 53o,
1397; ^9, i584«
Utrecht la ville d'), X, 281.
422.
57o TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
V. Son emploi, I, 6.
Vacéens (les), peuple de l'Espa-
gne tarraconaise , VI , 425,
i485.
Valamir, roi des Ostrogoths,
personnage & Attila, VII, 97-
181.
Valens , gouverneur d'Antioche,
personnage de Théodore , V '
i-lll; I, 64; 273.
Valentinian III, empereur ro-
main, VII, io3 ; 108; 116,
209.
Valère , chevalier romain , per-
sonnage d'Horace, III, 243-
358.
Valerius Flaccus, poëte latin,
VI, 245; 249.
Valladolid (la ville de), V, 418.
Vandale, les Vandales, VII,
116 , 202 ; 382, i3.
Varron, nom d'un Romain men-
tionné dans Othon, VI, 577, 52.
Varus (P. Quintilius), X, 267,
229.
Vastht, femme d'Assuérus, IX,
39, 575.
Vega (Lope de), poëte espagnol,
IV, i32; i33. — Corneille lui
attribue la comédie d'Alarcon
intitulée la Verdad sospechosa,
IV, i3i. — 11 rectifie cette er-
reur, IV, 137. — Sa comédie
intitulée Amor sin saber n auien,
IV, 279. Voyez Vègue.
Vègue (Lope de), IV, 137. —
Corneille a imité une de ses
comédies dans la Suite du
Menteur, IV, 285; 391-395.
Voyez Vega.
Velleius Paterculus, IV, i5.
— Portraits de Pompée et de
Jules César, tirés du livre II
(chapitres xxix et xli) de son
Histoire romaine, IV, 17-19.
Vence (Monseigeur de), X, 473.
Vendôme (César duc de), fils na-
turel légitimé de Henri IV, X,
398.
Vendôme (Françoise deLorraine,
duchesse de), femme du pré-
cédent, X, 398.
Vendôme (le chevalier de), X,
270, 265.
Veneurs, dans Clitandre, I, 2Ô5-
36g,
Venise, IV, 298, 187; X, 443.
Vents, personnages d'Andromè-
de, v, 243-396.
Vents (quatre) , personnages de
la Toison d'or, VI, 220-349.
Vénus, 1,75; i47,73; 4i2,258;
II, 27, 170; 372, 641 ; VI,
293, 900 et 910 ; 328 ; X, 63,
i5. — Personnage d'Andro-
mède , V, 243-396. — Per-
sonnage de Psyché, VII, 277-
370.
Vèfris des dimanches, traduites
en vers françois par Corneille,
IX, 3o4~32i.
Verdier (Antoine du), auteur
des Diverses leçons, IV, 6. —
Extrait de cet ouvrage , relatif
au sujet de Pertharite , VI, 8-
14.
Vers des pièces de théâtre. Leur
nombre, I, 3o. — Vers de di-
verses mesures dans Andro-
mède. Corneille en explique et
en justifie l'emploi , V , 3o8-
3l2.
Versailles, X, 240, 66. — Fêtes
de juillet et août 1674, X, 3o5,
25; 324, 45.
Vert (Jean de), Jean de Wert,
général de l'empereur Ferdi-
nand III, IV « 159, 336.
Vesf.lle (la place de), X, 260,
119.
Vespasian (1 empereur), VII,
2o5, 98; 206, i38.
Vestales en Ecosse, I , 36 1 ,
1570.
DES ŒUVRES DE CORNEILLE.
57.
Vésuve (le), VII, 247, ma;
256, i345; 271, 1661.
Veuve {la), comédie de Corneille,
I, 37i-5oo; 43; 120; 123. — Le
Ve acte de la Veuve, I, 28. —
Examen de la pièce, I, 394-397.
Vhal (le), le Wahal, X, 266,
218; 281, 414 et 4*5.
Victoire (la), V, 3 18, 62; X,
239, 59; 282, 427> 3o2, 40.
— Personnage du prologue de
la Toison d'or, VI, 252-265.
Victor (saint), IX, 607, 5; 611,
II. — Hymnes de Santeul en
l'honneur de saint Victor, tra-
duites en vers françois par
Corneille, IX, 607-612.
Victorius, Pierre Vettori, criti-
que du seizième siècle, cité par
Corneille, I, 34.
Vie des Saints (la) , X, 460.
Vieillard (le) de Corinthe dans
YOEdipe de Sophocle et dans
celui de Sénèque, I, 42.
Vierge (la sainte), VIII, 22;
176; 368; 521 ; 628; IX,
562, 17; 568, 3; 570, 3. —
Ses Louanges^ IX, 1-53. — Son
Office, IX, 55-24i; 175: 221,
12 et 17; 227; 241. — Can-
tique de la sainte Vierge, IX,
2 23-2 25. — Antienne de la
sainte Vierge, IX, 339.
Vierges. Hymnes pour les vier-
ges, ix, 593-595,
Villeneuve. Son hommage à
Corneille au sujet de la Veuve,
I, 388.
Vinius, consul, personnage d'O-
thon, VI, 564-657-
Virgile, I, 377; II, 118; IV,
12; VI, 122, 42; X, 66, 3;
72, 85; 96, 3o; 118, 5o; 443.
Virginian, III, 45 1, 1489.
Viriate, reine de Lusitanie, per-
sonnage de Sertorius, VI, 35 1-
445; X, 491 et 492; 494.
Viriatus, père de la précédente,
VI, 359; 38i, 435 ; X, 492.
Visigoth, les Visigoths, VII,
m, 48; 160, 1278.
Vitalian (saint), VIII, 87.
VlTELLÎUS, VII. 243, 104i; 272,
1686.
Vivonne (Louis- Victor de Ro-
chechouart, duc de Mortemart
et de), X, 270, 266.
Vizir (le grand), II, 470 , 686.
Vléda, Bléda, frère d'Attila,
VII, 121, 342; 123, 375.
Voille. Son hommage à Cor-
neille au sujet de la Veuve,
I, 392.
Vossius (Isaac), X, 5oo.
Voyer d'Argenson (de), conseil-
ler du Roi au parlement de
Normandie. Lettre à lui adres-
sée par Corneille, X, 444"
448.
Vraisemblable (le), V, 3o6. - —
Ce que c'est, I, 14. — Discours
de la tragédie et des moyens de
la traiter selon le vraisemblable,
I, 52-97.
Vraisemblance (la), III, 379; V,
146 et 147.
Vulcain, II, 36i, 4i3;390, 994;
VII , 322 , 902 ; X, 63 , 19;
443.
W
Wahal (le). Voyez Vhal.
Waller (Edmond) , poète an-
glais, X, 499 et 5oo.
Wallons (les), X, 4^3.
Wert (Jean de). Voyez Vert
(Jean de).
Westphalie (la), X, 280, 394.
X
Xaintes (la ville de), X, 448.
Xaintonge (la), X, 448.
Xanthias, personnage des Gre-
nouilles d'Aristophane, V, 3o8.
Xénoclès, lieutenant d'Agésilas,
572 TABLE DES OEUVRES DE CORNEILLE.
personnage d'Jgésitos , Vil ,
i-95.
Xiphilin, abréviateur de Dion
Extrait de son ouvrage, conte-
nant le sujet de Tite et Bérénice,
VII, 197.
Ypre, Ypres, X, 307, 71; 329,
47-
Yssei. (1') , X, 257, 70; 266,
228 ; 279,38^et389; 280, 394.
Vvry (la bataille d'), X, 211,
259.
Zacharie. Son cantique traduit,
IX, 157-161.
Zachée, 6oo, 4^4; 654-
Zénobie, reine de Palmyre, VII,
439, i45o.
Zenon , agent d'Arsinoé , dans
Nicomède , V, 554, 9^4 j 557,
1040; 565, 1219; 567, 1257;
58o, i566; 586, 1706.
Zéphire, le Zéphire, V, 33 1 ,
371; X, 84, 24. — Le Zéphire,
personnage de Psyché, VIII,
277-370.
Zéphirs, VII, 322 ; 333, 1214 ;
357, 1781 ; 3b2, 1912.
Zéthès , argonaute ailé , fils de
Borée et d'Oritlrye, II, 362,
43g. — Personnage de la Toi-
son d'or, VI, 221-349-
Zeuxis, X, 120, 91.
Zoïle, X, 66, 12.
Zuifaeten ( l'abbaye impériale
de), VIII, 17.
Zutphen (la ville deJ,X, 280, 398.
Ztjylichem (Constantin Huyghens
de), IV, i33. — Sonépigramme
latine sur le Menteur, IV, i35.
— Son épigranime française sur
la niême pièce, IV, i36. — Epî-
tre dédicatoire , à lui adressée,
de Don S anche d'Aragon, V,
4o4-4IO« Lettres à lui adres-
sées par Corneille, X , 44&~
452 ; 453-457.
Zwol (la place de). Voyez
Swol.
FIN DE LA TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
DES OEUVRES DE CORNEILLE.
TABLE DES POESIES DIVERSES
RANGEES SULVANT L'ORDRE ALPHABÉTIQUE
DU PREMIER VERS DE CHAQUE PIÈCE.
Ainsi du Dieu vivant la bonté surprenante. 176
Allez, belle marquise, allez en d'autres lieux 142
Allez voir ce jeune soleil 35
Ami, veux-tu savoir, touchant ces deux sonnets . . 128
Après l'œil de Mélite il n'est rien d'admirable 44
Au point où me réduit la distance des lieux 33
Bel astre à qui je dois mon être et ma beauté 82
Caliste, lorsque je vous voi 170
Caliste, mon plus cher souci 5o
Ce n'est donc pas assez, et de la part des Muses 74
Ce n'étoit pas assez, grand Roi, que la victoire 326
C'est trop faire languir de si justes désirs 1 53
C'est trop gémir, Nymphes de Seine 244
Cet auteur a quelque génie i32
Chantez, peuple, chantez la valeur libérale 290^
Croissez, jeune héros ; notre douleur profonde i83
Demeurez en repos, frondeurs et mazarins 125
Depuis qu'un malheureux adieu „ 43
Deux sonnets partagent la ville 127
Donnez-moi vos couleurs, tulipes, anémones 85
Dont autrefois le Sphinx, ce monstrueux oiseau 246
Du cloître et de la cour précieuse clarté 122
574 TABLE ALPHABÉTIQUE
Du palais d'émeraude où la riche nature 83
D'un accueil si flatteur, et qui veut que j'espère 164
Encor que Ligdamon, eR dépeignant Silvie 57
Enfin échappé du danger 26
Enfin tu m'as suivie, et ces vastes montagnes 116
Ennemis de mon roi, Flandre, Espagne, Allemagne. . . 3o4
Est-il vrai, grand Monarque, et puis-je me vanter 3n
Grand Roi, dont nous voyons la générosité . i85
Grand Roi, Mastric est pris, et pris en treize jours. . . 2 85
Invincible ennemi des rigueurs de la Parque i38
J'ai vu la peste en raccourci 160
Jane, toute la journée 46
Je chéris ma défaite, et mon destin m'est doux 140
Je ne veux plus devoir à des gens comme vous i52
Je pense , à vous voir tant d'attraits 174
Je suis blessé profondément 4^
Je vous estime, Iris, et crois pouvoir sans crime i63
Je vous l'avois bien dit, ennemis de la France 3 0.2
La Garonne et l'Atax dans leurs grottes profondes. 23 1
La noblesse, grand Roi, manquoit à ma naissance. . i35
Le château révolté donne à Caen mille alarmes 106
Le dieu de Pythagore et sa métempsycose 100
Le printemps a changé la face de la terre 299
Les douceurs de la paix et la pleine abondance 253
Mânes des grands Bourbons, brillants foudres de guerre 194
Marquise , si mon visage i65
Mes deux mains à l'envi disputent de leur gloire , i5i
Mes soupirs vous ont dit plus de cent fois le jour 233
Misérable Didon , pauvre amante séduite 36
Mon nom par la victoire est si bien affermi . . . . 247
N'aimez plus tant , Philis, à vous voir adorée i55
Neustriacse lux aima plagse , quo nostra superbit 65
Ne verse point de pleurs sur cette sépulture i33
Non, je ne serai pas , illustre Pkllisson 3i5
Non, tu n'es point ingrate, ô maîtresse du monde. ... 94
O Dieux! qu'elle sait bien surprendre 3o
Palais digne de Mars, qui fournis pour armer 333
Phèdre, si ton chasseur avoit autant de charmes 73
Plaise au Roi ne plus oublier 3o8
Pourquoi s'étonner que de Loy i3t
Pour une jeune muse absente 81
DES POÉSIES DIVERSES. 575
Prince, l'appui des lis , et l'amour de la France 334
Puisqu'un d'Amboise et vous d'un succès admirable. ....... 32
Quand je vois, ma Philis , ta beauté sans seconde 60
Que doit penser Ovide, et que nous peut-il dire 124
Que le dieu de la Seine a d'amour pour Paris 242
Quelle rapidité de conquête en conquête 223
Que tes Chastes martyrs vont te faire d'amants. ... i3o
Que tes entretiens sont charmants 102
Que vous sert-il de me charmer. . , 172
Qitld mirum rapido tibi si Victoria cursu 249
Qu'il fasse mieux , ce jeune jouvencel 79
Quoi ? sitôt que j'en veux rabattre i58
Qu'on fait d'injure à l'art de lui voler la fable 235
Qu'on parle mal ou bien du fameux Cardinal 86
Qu'on te flatte , qu'on te baise 173
Rendez-vous , amants et guerriers . . 62
Si je perds bien des maîtresses 55
Si la Lune et la Nuit sont bien représentées i54
Sous ce marbre repose un monarque sans vice 87
Sur l'Escaut étonné tu lances la tempête. . . 218
Toi , dont la course journalière ... 58
Toi qui nous apprends de la grâce 220
Toi qui près d'un beau visage 53
Ton Ciéonte, par son trépas 61
Tu reviens , ô mon Roi , tout couvert de lauriers. . 186
Une ambition déréglée 38
Usez moins avec moi du droit de tout charmer. 167
Vos beaux yeux sur ma franchise 168
Vous aimez que je me range 162
FIJV DE LA TABLE ALPHABETIQUE DES POESIES DIVERSES.
TABLE DES MATIERES
CONTENUES DANS LE DIXIÈME VOLUME.
POÉSIES DIVERSES.
Notice 3
Au lecteur 24
I. A Monsieur D. L. T a5
II. Ode sur un prompt amour 3o
III. A Monseigneur le cardinal de Richelieu. Sonnet 32
IV. Sonnet pour M. D. V., envoyant un galand à M. L.
C. D. L : 33
V. Madrigal pour un masque donnant une boîte de cerises
confites à une damoiselle 35
VI. Epitaphe de Didon. Traduit du latin d'Ausone : In f dix
Dido, etc 36
VII. Mascarade des enfants gâtés. ...... 38
VIII. Stances sur une absence en temps de pluie 43
IX. Sonnet 44
X. Madrigal 4^
XI. Épigrammes traduites du latin d'Audoènus 4^
XII. Dialogue. 5o
XIII. Chanson 53
XIV. Chanson 55
COEKEILLE. X %7
578 TABLE DES MATIÈRES.
XV. A Monsieur de Scudéry [sur son Ligdamon et Lidias] $j
XVI. Récit pour le ballet du château de Bicêtre 58
XVII. Pour Monsieur L. C. D. F., représentant un diable au
même ballet. Épigrammc 60
XVIII. A Monsieur de Scudéry, sur son Trompeur puni.
Madrigal 61
XIX. Pour la Sœur valeureuse de Monsieur Marescîial 62
XX. P. Cornel'à rothomagensis, ad illustrissimi Francisci^ archie-
piscopi, Normanise primates, invitationcm, qua gloriosis-
simum regem, eminentissimumque cardinalem-ducem ver-
sibus celebrare j tissus est, excusatio 64
XXI. Pour YHippolyte de Monsieur de la Pinelière 73
XXII. Excuse à Ariste 74
XXIII. Rondeau 79
XXIV. Remercîment fait sur-le-champ par Monsieur de Cor-
neille 81
XXV. La Tulipe. Madrigal. Au Soleil 82
XXVI. La Fleur d'orange. Madrigal 83
XXVII. L'Immortelle blanche. Madrigal 85
XXVIII. Vers sur le cardinal de Richelieu 86
XXIX. Sur la mort du roi Louis XIII. Sonnet 87
XXX. A Monseigneur Monseigneur l'éminentissime cardinal
Mazarin. Remercîment a 92
XXXI. A maître Adam, menuisier de Nevers, sur ses Chevilles.
Sonnet 100
XXXII. A Monsieur de Boisrobert, abbé de Châtillon, sur ses
Épitres 102
XXXIII. Les Triomphes de Louis le Juste 104
XXXIV. La Poésie à la Peinture , en faveur de l'Académie des
peintres illustres 116
XXXV. A saint Bernard, sur la traduction de ses Épitres, par
le R. P. dom Gabriel de Sainte-Geme. Sonnet. ... 122
XXXVT. A Monsieur d'Assoucy, sur son Ovide en belle humeur. 124
XXXVII. Sur la contestation entre le sonnet d'Uranie et de
Job. Sonnet 1 25
TABLE DES MATIÈRES. 579
XXXVIII. Sonnet I2?
XXXIX. Épigramme ï 28
XL. A Mademoiselle de Cosnard de Ses 1 29
XLI. A Monsieur de Loy, professeur en l'Université de Paris,
sur son panégyrique de Monseigneur le premier pré-
sident de Bellièvre i3i
XLII. Pour Monsieur d'Assoucy, sur ses Airs i32
XLIII. Epitaphe sur la mort de damoiselïe Elisabeth Ran-
quet , femme de Nicolas du Chevreul , écuyer, sieur
d'Esturville. Sonnet , i33
XLIV. Sonnet. [Au Roi, pour obtenir la confirmation des lettres
de noblesse accordées à son père.] i35
XLV. A Monsieur de Campion , sur les Hommes illustres.
Sonnet. < 137
XLVI. Sonnet perdu au jeu. 140
XLYII. Sur le départ de Madame la marquise de B. A. T. . . 141
XLVIII. Madrigal .., .... i5o
XLIX. Autre sur le même sujet. ..., i5a
L. Air de M. Lambert pour la Reine i53
LI. Pour une dame qui représentoit la Nuit en la comédie
dCEndymion, Madrigal , i54
LU. Jalousie „ 1 55
LUI. Bagatelle , i58
LIV. Stances « , 160
LV. Sonnet , 162
LVI. Sonnet . . . i63
LVII. Sonnet. , . . . 164
LVIII. Stances i65
LIX. Sonnet , . 167
LX. Chanson 168
LXI. Stances * 170
LXII. Stances. . . 172
LXIII. Epigramme 173
LXIV. Rondeau , 174
LXV. Remerciment présenté au Roi en Tannée i663 17$
58o TABLE DES MATIÈRES.
LXVI. A Monseigneur le due de Guise, sur la mort de Mon-
seigneur son oncle. Sonnet 182
LXV1I. Au Roi, pour le retardement du payement de sa
pension i85
LXVIII. Au Roi, sur son retour de Flandre 186
LXIX. Poëme sur les victoires du Roi , traduit de latin en
françois par P. Corneille 192
LXX. Traductions et imitations de l'épigramme latine de
M. de Montmor, premier maître des requêtes de
l'hôtel du Roi , , 218
LXXI. Au R. P. Delidel, de la Compagnie de Jésus, sur son
traité de la Théologie des saints 220
LXXII. Au Roi, sur sa conquête de la Franche-Comté 2 23
LXXIII. Sur le canal du Languedoc 5 pour la jonction des
deux mers. Imitation 23 1
LXXIV. Air de M* Blondel 233
LXXV. Défense des fables dans la poésie. Imitation du latin. 2 34
LXXVI. Sur la pompe du pont Notre-Dame. Traduction par
Pierre Corneille. , 242
LXXVII. Pour la fontaine des Quatre-Nations , vis-à-vis le
Louvre. Traduction par Pierre Corneille 244
LXXVIII. Traduction en vers françois de la Thébaïde de
Stace 245
LXXIX. Sur le départ du Roi 247
LXXX. Vers présentés au Roi à son retour de la guerre d'Hol-
lande, le 2 août 1672 , 249
LXXXI. Les victoires du Roi, sur les Etats de Hollande, en
l'année M.DC.LXXII. Par P. Corneille. [Traduit
du latin du P. de la Rue.] 252
LXXXII. Sur la prise de Mastric. Sonnet , 285
LXXXIII. Au Roi, sur sa libéralité envers les marchands de
la ville de Paris. [Traduit du latin de Santeul.] . 287
LXXXIV. Au Roi, sur son départ pour l'armée, en 1676.. .. 299
LXXXV. Vers présentés au Roi sur sa campagne de 1676. . . . 3o4
LXXXVI. Placet au Roi, , 3o8
TABLE DES MATIÈRES. 58i
LXXXVII. Au Roi, sur Cinna, Pompée, Horace, Sertorius ,
OEdipe , Rodogune, qu'il a fait représenter de
suite devant lui à Versailles, en octobre 1676. . . 309
LXXXVIII. Version de l'ode à Monsieur Pellisson 3i5
LXXXIX. Sur les victoires du Roi, en l'année 1677 322
XC. Au Roi, sur la paix de 1678 3 26
XCI. Inscription pour l'Arsenal de Brest. Traduction 33 1
XCII. A Monseigneur, sur son mariage 334
APPENDICE DES POESIES DIVERSES.
I. Relation du ballet du château de Bissestre 341
II. Trois pièces de la Guirlande de Julie 344
III. Le Presbytère d'Hénouville »... 345
IV. Epitaphe de Richelieu 352
V. Sonnets d'Uranie et de Job 352
VI. Deux sonnets signés G .... , 354
VII. Vers imités de Lucain et d'Horace 355
VIII. Epigrammes attribuées à Corneille 357
IX. Deux sonnets pour Timocrate 35o.
X. Note sur Mademoiselle Serment 36i
XI. Élégie 362
XII. Plainte de la France à Rome sur l'assassinat de son am-
bassadeur. Elégie r 367
XIII. Vers de Corneille, de ses amis et de ses partisans contre
l'abbé d'Aubignac 372
XIV. Quatrain pour le Christ de Saint-Roch à Paris.. « 377
XV. Epître dédicatoire du P. de la Rue à Corneille, et vers
sur la mort de Charles Corneille, son troisième fils. . . 378
XVI. Sur les conquêtes du Roi [en 1672] 385
XVII. Vers anonymes, publiés dans le Mercure de 1677 386*
582 TABLE DES MATIERES.
OEUVRES DIVERSES EN PROSE,
Notice 3o. i
I. Epitaplie de dom Jean Goulu, général des Feuillants.. . . . 3q6
II. Lettre apologétique du sieur Corneille, contenant sa réponse
aux Observations faites par le sieur Scudéry sur le Cid. . 399
III. Discours prononcé par Monsieur Corneille, avocat général
à la table de marbre de Normandie, le 22. Janvier 1647,
lorsqu'il fut reçu [à l'Académie françoise] à la place de
Monsieur Maynard 4°7
LETTRES.
Notice . 4^
i-3. De Corneille à Boisrobert 427
4. De Corneille à** 429
5. De Corneille à Boisrobert. , 43o
6. De Corneille à** 4^2
7. De Corneille à Monsieur Goujon, avocat au conseil privé du
Roi 433
8. De Claude Sarrau à Corneille 438
9-10. De Balzac à Corneille 44°
1 1 . De Corneille à Voyer d'Argenson 444
12. De Corneille à Monsieur de Zuylicbem 448
i3. De Corneille à Monsieur Dubuisson , 4^2
14. De Corneille à Monsieur de Zuylichem 453
i5-i8. De Corneille au révérend Père Boulart 4^8
19-20. De Gilles Boileau à Monsieur de Corneille 473
ai. De Corneille à Pellison 477
22-24. De Corneille à l'abbé de Pure 478
25. De Chapelain à Corneille. 488
26-27. De Corneille à l'abbé de Pure 489
TABLE DES MATIERES. 583
o>.8. De Chapelain à Corneille. 49^
29. De Corneille à Monsieur de Saint-Evremond 497
30. De Saint-Evremond à Corneille 499
3 1 . De Corneille à Colbert. . , 5oi
APPENDICE DES LETTRES.
De Corneille à Rotrou ■ 5o3
Table alphabétique et analytique des OEtjvres de Cor-
neille , 5o5
Table des Poésies diverses , rangées suivant l'ordre al-
phabétique DU PREMIER VERS DE CHAQUE PIECE. 6j3
FIN DE LA TABLE DES MATIERES.
IMPRIMERIE GÉNÉRALE DE CH. LAHURE
Rue de Fleurus , 9, à Paris
La Bibliothèque
Université dtOttawa
Echéance
The Library
University of Ottawa
Date Due
a39003 002372^22b
CE PQ 174 1
1862 V010
CGO CORNEILLE»
ACC# 1400929
a
OEUVRES DE