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LES
GRAVEURS
DU
DIX-HUITIÈME SIÈCLE
TOME SECOND
DEUXIÈME PARTIE.
LES
G RAVE U R S
DU
DIX-IIUITIÈME SIÈCLE
PAR MM,
LE BARON ROGER PORTALIS
ET
HENRI BÉRALDI
TOME SECOND
DEUXIÈME PARTIE.
PARIS
DAMASCÈNE MORGAND et CHARLES FATOUT
55, PASSAGE DES PANORAMAS, 55
1881
Tous droits réservés.
NE
95
p6
i-t le. • -^
LES
GRAVE URS
DIX-HUITIÈME SIÈCLE.
HELMAN (Isidore-Stanislas
1743-1 800.
Le graveur du Roman dangereux de Lavreince,
Helman (en flamand homme d" enfer), est né à Lille en
1743, et fut l'un des premiers élèves de l'école gratuite
de dessin de sa ville natale. Il reçut aussi des leçons
de Guéret , auquel il a dédié deux de ses meilleures
estampes, et de Louis Watteau, avant de venir se per-
fectionner chez Le Bas.
Il grava d abord quelques vignettes pour le Temple
de Gnide de Golardeau (1773), les Chefs -d" Œuvre
drainatiques réunis par Marmontel (1773) , VOrlando
furioso. le Molière de Bret , etc.
Ces premiers travaux, l'habileté qu'ils annonçaient ,
et probablement plus encore ses relations de l'atelier
Le Bas où il avait connu Moreau, le firent choisir pour
graver quelques-uns des plus agréables sujets de la
n. 26
390 LES GRAVEURS DU XYIIP SIECLE.
Seconde suite d'Estampes pour servir à l'Histoire
des modes et du costume en France pendant le
XVHP siècle , parue en 1776. Quand on regarde nos
gravures de modes actuelles, la gaucherie des attitudes
forcées pour laisser voir telle gai'niture ou tel pare-
ment , on en admire davantage les charmants artistes
qui ont su avec tant d'art et d'esprit dissimuler le côté
prosaïque et commercial de ces figures. Qui se dou-
terait, en feuilletant les estampes gravées d'après
Freudeberg , retraçant les divers incidents de la
journée d'une femme légère, ou bien en s'intéressant,
grâce à Moreau, aux menus événements de l'existence
d'une jeune femme de la cour, aux occupations de
la vie d'un petit-maître , qu'il ne s'agit que de figures
de modes destinées à donner le ton et à fournir des
idées aux couturières d'outre-Manche ou d'outre-Rhin?
C'est que Freudeberg et Moreau surtout ont jeté à
profusion , dans les scènes familières qu'ils ont dé-
peintes, la finesse et l'observation, la grâce et le goût,
ce qui en fait encore à l'heure actuelle de précieux
documents de la vie intime. C'est aussi qu'ils ont choisi
avec discernement , pour les reproduire, des graveurs
de grand talent , parmi lesquels il faut citer en pre-
mière ligne Helman, Dans les planches intitulées
N'ayez pas peur ma bonne amie , les Délices de la
Tnaternité , l'Accord parfait , comme dans le Souper
fin, il s'est montré interprète harmonieux et fidèle des
belles sépias de son modèle.
Puis Helman grave deux très jolies estampes qui
achèvent de le faire connaître, le Charlatan français
et le Charlatan allemand , travaillées avec beaucoup
de goût et de relief d'après les dessins à la mine de
HELMAN. 394
plomb de Duplessi-Bertaux (1777). Le premier débite
son orviétan sur la place de la colonnade du Louvre
devant un public parisien. L'autre , à cheval , cherche
à placer sa drogue à des gens d'un aspect plus fau-
bourien ; dans les deux pièces figurent des militaires
que le dessinateur aimait tant à reproduire. Elles sont
dédiées à M. Guérèt, professeur à TEcole de dessin de
la ville de Lille, par son élève et ami Helman, graveur
du duc de Chartres , qui donne ici son adresse : rue
des Mathurins au petit hôtel de Gluny.
Le Jardinier galant , gravé d'après Baudouin en
1778 , est une des bonnes estampes d'Helman , qui
produisit quelques autres sujets d'un moindre intérêt ,
d'après Le Prince, Lagrenée, etc.
Notre graveur est déjà de l'Académie de Lille, et
exécute deux estampes se rapportant à sa ville natale,
Quatorzième expérience aérostatique de M'' Blan-
chard faite à Lille en Flandre le 26 août 1785 , et son
pendant, Y Entrée de M'' Blanchard et du chevalier
de Lépinard à Lille, cinq jours après leur ascension .
toutes deux d'après Louis Watteau.
Helman entreprit ensuite de réduire les estampes
des Batailles de la Chine gravées sous la direction
de Gochin. Sous le règne de Kien-Long (1736-1795) ,
plusieurs jésuites purent , grâce à leur talent de
peintres et de dessinateurs, rester en faveur malgré la
proscription qui atteignait le culte cathohque. L'em-
pereur eut à réprimer une révolte des Tartares ; il fît
faire parles PP. Attiret, Jean-Damascène et autres, les
dessins représentant les épisodes de cette expédition ,
et voulut les multiplier. Ces dessins furent envoyés par
l'entremise de la Compagnie des Indes et arrivèrent à
392 LES GRAVEURS DU XYIII^ SIECLE.
Paris vers 1765 pour y être gravés. M. de Marigny
chargea Gochin de diriger l'exécution des planches ;
Le Bas , Ahamet , Choffard , A. de Saint- Aubin , Pré-
vost et Née furent choisis comme graveurs ; les seize
estampes étaient terminées en 1774.
Mais par suite des arrangements pris, tout dut être
envoyé en Chine, sauf quelques collections réservées
à la famille royale, et les planches devinrent par suite
immédiatement un objet de rareté. Ainsi M. de Marigny
avait cru pouvoir promettre un exemplaire au peintre
Attiret , frère du Jésuite auteur de la plus grande
partie des dessins , et son successeur M. d'Angiviller
était obligé de lui écrire en 1775 :
« Lorsque M'' de Marigny, M^ vous fit espérer le
» don des estampes gravées d'après les dessins du P.
» Attiret votre frère , il avoit lieu de croire que s'il
» restoit en Europe quelques-unes de ces estampes ,
» elles lui seroient remises pour en faire la distribution.
» Mais les choses ayant changé sous le ministère de
» M'' l'abbé Terray, il m'est impossible de vous pro-
» curer la satisfaction à laquelle vous aspirez depuis
» tant d'années. Il faudroit vous adresser ou à M"^ le
» contrôleur général ou à la Compagnie des Indes.
» Mais comme il intéresse fort pour cette Compagnie
» qu'aucune de ces estampes ne restent en Europe (car
» l'Empereur de la (^hine l'a recommandé fortement),
» et il y iroit peut-être pour elle de se voir fermer les
» portes de cet empire , elle vous répondra sûrement
» qu'il n'en a point resté, et cela est fort probable. Je
» n'en ai point moi-même , qui ai donné les premiers
» ordres pour l'entreprise , ce qui probablement dimi-
» nuera votre sensibilité sur cette privation. »
HELMAN. 393
Helman arrivait donc à propos, pour satisfaire la
curiosité du public , avec ses réductions qui sont
encore de fort grandes planches in-folio. Encouragé
par son succès , il entreprit ensuite les Faits mèmo-
rahles des Empereurs de la Chine, 24 estampes in-4,
à Paris chez V auteur graveur de Madame , rue Si-
Honorè 315 , vis-à-vis Vhôtel de Noailles (1788) , et
une autre suite du même genre mais d'un médiocre
intérêt, V Abrège historique des principaux traits de
la vie de Confucius, 24 estampes.
Gomme la plupart des artistes ses confrères, Helman
accueillit avec faveur les doctrines révolutionnaires,
mais sans se faire remarquer comme d'autres par son
exaltation. Il grava deux compositions de Watteau
de Lille , le Banquet civique donné par les gardes
nationales de Lille , le 27 juin 1790, et la Fête de la
fédération des Départements du Nord, faite à Lille,
le 14 juillet, 2 p. in-fol. en largeur, remplies de ces pe-
tits personnages que le peintre savait si bien costumer.
Le travail le plus considérable d'Helman est le
recueil des Principales journées de la Révolution ,
d'après les dessins de Monnet. Depuis les tableaux des
guerres du XVP siècle , remarque Renouvier, les
graveurs n'avaient pas eu des compositions aussi
émouvantes à populariser. Il faut rendre à Monnet
cette justice que malgré son incorrection, il s'est
surpassé dans l'ordonnance et la vérité de ces quinze
compositions, dont les dessins originaux passèrent en
1808 à la vente d'Augustin de Saint- Aubin ^ . Elles furent
1 Les 15 dessins des Journées de la Révolution , avec les figures
avant la lettre, furent adjugés pour 150 fr. à Naudet
394 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
terminées au burin par son ami Helman , mais le
travail du buriniste paraît bien lourd si on le compare
à celui des aqua-fortistes, Duclos et Duplessi-Bertaux.
Helman fît hommage au Conseil des Cinq-Cents , le
8 Floréal an VI (1797) , des planches déjà gravées.
Puis notre artiste salue l'avènement de César , en
graA^ant un grand cartouche allégorique confié à l'ins-
piration de Monnet par un nommé J.-B, Picquenard.
Surmontant cet Hommage à r Empereur se trouve ,
de la main d'A. de Saint-Aubin, un profil de Napoléon,
médaillon remarquable de finesse, un véritable camée :
« Le crayon et le burin, est-il dit dans l'adresse gravée,
» se sont réunis dans cet hommage pour retracer à
» la fois et sous un seul point de vue les principaux
» faits civils et militaires par lesquels vous êtes par-
» venu à refonder l'Empire. . . »
C'est , avec le Joueur de cornemuse de Téniers ,
pour le Musée français (1803), une des dernières pro-
ductions d'Helman , qui meurt en 1806.
ESTAMPES.
I. DAPRES BAUDOUIN.
1. LE JARDINIER GALANT, 1T78 ; in-fol.
L'eau-iorte, 215 fr. 1881. — Les premières épreuves ont le nom de Baudouin
écrit Baudoin .
II. DAPRES DUPLESSI-BERTAUX.
2. LE CHARLATAN ALLEMAND, —LE CHARLATAN FRAN-
ÇAIS, 2 p. grand in-4.
Les deux eaux-fortes, 285 fr. 1881 .
Les premières épreuves sont avant la dédicace.
HELMAN. 395
3. Fanfan et Colas, Scène X; in-4 (eau-forte par Duplessi-
Bertaux).
III. d'après lavreinge.
4. LE ROMAN DANGEREUX, HSl ; in-fol.
Voilà bien une estampe dans le goût léger de l'époque 1 Dans une riche alcôve,
une jeune femme couchée sur un canapé, à moitié pâmée, une jambe pendante,
un pied posé sur un tabouret. A gauche un jeune homme, caché derrière un petit
paravent , la considère, un doigt sur la bouche. Par terre, un livre entr'ouvert.
L'eau-forte, 750 fr. 1881 .
ï^' état : Avant la dédicace, 500 fr. 1881 .
IV. d'après le prince.
5. La Précaution inutile, mO; in-fol. en largeur.
6. La Leçon inutile, 1781; in-fol. en largeur.
I. Le NÉGROMANTIEN, 1785; in-fol.
8. Le Marchand de lunettes; in-fol.
9. Le Médecin clairvoyant; in-fol.
V. d'après moreau.
10. NAYEZ PAS PEUR MA BONNE AMIE; in-fol.
II. LES DÉLICES DE LA MATERNITÉ; in-fol.
12. L'ACCORD PARFAIT; in-fol.
13. LE SOUPER FIN; in-fol.
Ces quatre estampes appartiennent au Monument du Costume.
Sur l'eau-forte du Souper fin, une des deux femmes a la gorge découverte. —
1,200 fr. 1876; 1,000 fr. 1881.
VI. d'après divers.
14. Joseph et Putiphar, — Suzanne et les "Vieillards, — la Mort de
Cléopàtre, 3 p. d'après Lagrenée ; in-fol. en largeur.
15. Tivoli, d'après H. Robert.
16. Les Pêcheurs fortunés, d'après Vernel.
396 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
n. Départ d'une caisse conique en présence de Louis XVI ; — Immer-
sion d'une caisse conique dans la rade de Cherbourg le T juin 1785;
2 p. d'après Chatry de la Fosse , in-fol. en largeur.
18. Quatorzième expérience aérostatique de Blan-
chard, faite à Lille ; — ENTRÉE DE M. BLANCHARD ET
DU CHEVALIER DE LÉPINARD A LiLLE; 2 p. in-fol. en
largeur, d'après Watteau de Lille.
19. FÉDÉRATION DES DÉPARTEMENTS DU NOR D , — BANQUET
CIVIQUE DE Lille; 2 p. d'après Watteau de Lille.
PORTRAITS.
20. Le Duc, la Duchesse de Chartres et leurs en-
FVNTS , d'après Le Peintre. — Gravé par Helman (l'eau-forte par
Saint-Aubin), 1779 ; in-fol.
21. LA COMTESSE DE PROVENCE.— C. Monetiuv., Ludovicus
Le Brun effigiem pinxit, Helman sculp.
Petit portrait de la plus grande finesse, compris dans la vignette de dédicace
des Faits mémorables des empereurs de la Chine. « Madame, la protection éclairée
» que vous accordez aux arts m'a enhardi à vous présenter cet hommage. . . ••
L'eau-forte pure très vraisemblablement de la main de Clioffard.
22. Napoléon, allégorie oflérte à l'Empereur. — C. Monnet del.,
Aug. St- Aubin effigiem , Helman sculp.: in-fol.
L'eau-forte pure dans l'œuvre de Cboffard au Cabinet des Estampes.
VIGNETTES, etc.
23. Batailles de la Chine , 16 planches in-folio, réduites des planches
originales.
24. Faitx mémorables des Empereurs de la Chine . dédiés à Madame,
ornés de 24 estampes gravées par Helman ; Paris, chez l'auteur,
1*788; in-4.
Outre les estampes, cette publication comprend le joli en-tête de Monnet,
dont nous venons de parler sous le n" 21 .
HELMAN. 397
25. Abrégé historique des principaux traits de la vie de Confucius ,
orné fie 24 eslnmpes gravées par Helinan , d'après les dessine
originaux envoyés à Paris par M. Annot , ministre à Pékin. Paris,
1788; in-4.
26. PHINCIPALES JOURNÉES DE LA RÉVOLUTION, 15 pi.
in-fol. en largeur, d'après Monnet.
Voini les titres de ces planches : L'ouverture des Èlals-Qéniraux à Versailles,
le Serment du Jeu de Paume, la Prise de la Bastille, la Nuit du 4 août, lu Fête de la
Fédération, la Journée du 10 août 1792, la Pompe funèbre en l'honneur des victimes,
l'Exécution de Louis XVI, la Fontaine de la Régénération, la Mort de ilarie-Antoi-
nette, la Journée du 9 Thermidor, la Tête de Féraud présentée à Boissy-d'Angliis, le
/j Vendémiaire, l'Assassinat des Plénipotentiaires de Rastadt, Bonaparte à Saint-
Cloud le ip Brumaii e.
La suite des eaux-fortes , provenant de la coUeotion Pixérécourt, est actuel-
lement dans la bibliothèque du Sénat au Luxembourg.
Les cinq dernières eaux-fortes sont de Duplessi-Bertaux. — Les dix premières
sont signées de A.-J. Duclos .
On ne peut s'empêcher de trouver ces planches terminées bien lourdes et bien
diiruses, h côté de ces superbes eaux-fortes, si nettes et si lumineuses, ceUes
surtout qui portent la signature de Duclos.
27. Allégories sur la Constitution : la Sagesse , la Raison , la Consti-
tution, ^ la Chambre des Députés^ d'après Monnet; in-4.
Voyez, pour les eaux-fortes, le catalogue de Duclos.
28. Vignettes d'après Gravelot pour Voltaire ( le Tentple de la Gloire,
la Femme qui a raison ) ; in-4.
29. Thétis, — Hermès; 2 vignettes pour Emile, d'après Cochin ; in-4,
et les mêmes réduites in-8, terminées par Helman sur des eaux-
fortes de Prévost.
30. La Traite des noirs, vignette in-8 d'après Eisen [Raynal).
31. Vignettes d'après Eisen pour Tarsis etZélie, — les Chefs-d'œuvre
dramatiques publiés par Marmontel.
32. Illustrations d'après Moreau pour les Incas, — VHistoire de France,
— le Molière de Bret, — le Théâtre du Monde, — la Henriade in-4.
33. Illustrations pour le Temple de Gnide, d'après Monnet; — YArioste
de Baskerville, — le Théâtre du Monde, — le Rousseau de Poiuçot,
— le Voyage à Naples de Saint-Non.
34. Titre pour Suite de douze bouquets de fleurs dessinés par M. Pil-
lemenl, à l'usage des demoiselles pensionnaires des dames Ursu-
lines, joli cadre in-4, d'après Guibert.
HÉMERY (Antoine-François;
1751
HÊMERY, né à Paris en 1751 , a graA'^é « avec appro-
bation » une Création d'Eve , d'après Procaccini ,
in-fol. (1782) , qui fut qualifiée « une des belles pièces
des graveurs modernes français ».
Le Repos du plaisir, d'après Carlo Cignani.
Gaspard Neischer et sa Femme, 2 p. in-4.
Nymphe repoussant les caresses de Pan , d'après
Lagrenée, in-fol. La Mélodie, d'après le même, in-fol.
La Promesse approuvée, d'après Lépicié, in-fol.,
à Paris chez Hémery r^(e Cassette, maison du
sellier.
La Joyeuse orgie, bacchanale d'après Caresme.
La Fidélité surveillante, d'après Deshayes. in-fol.
La Fidélité en défaut, jolie pièce d'après Le Bel,
in-4 en largeur.
Il était temps, d'après Borel.
Petit garçon portant son polichinel sur le dos et
Petite fille qui relève sa robe ,2 p. d'après Drouais.
La Marchande de noisettes et la Marchande
dœufs, 1772 , in-fol. d'après Touzé.
Ce Touzé était un jeune peintre qui avait mis à la
mode , vers 1771 , un genre de facétie consistant à
HEMERY. 399
contrefaire à lui seul une infinité de phénomènes
collectifs. « Ainsi il exécute un motet à grand chœur
» et à plein orchestre ; il se met derrière un paravent
» et contrefait le chœur de tout un couvent de reli-
» gieuses avec un art et une finesse que vous jugeriez
» qu'il y en a une douzaine, et que vous devinez jus-
» qu'à rage , au caractère et à la physionomie de ces
» béguines. » Bref, comme il n'y a rien de nouveau
sous le soleil , Touzé faisait des imitations, en tout
temps si chères au public parisien. Tout le monde
voulut le voir. Il donna même une représentation
chez la Dauphine .
Inauguration de la statue du roi sur la place
Louis XV, d'après De Machy, belle estampe in-tbl. en
largeur.
Louis XVI et Marie- Antoinette en présence du
huste de HenyH IV, jolie vignette allégorique in-8,
d'après Quéverdo.
Planches pour Recueil d'Ornements à I usage des
Jeunes artistes, d'après Gauvet , 1777.
Hémery a travaillé pour le Cabinet Poullain.
Une Tète d'enfant qui rit , et une Tète de jeune
fille qui pleure , d'après Greuze , sont signées de
Louise-Rosalie Hèmery. La même signature se trouve
sur un Mendiant dessiné à Rome par Masson, pièce
in-8 au lavis.
Marguerite Hèmery, sœur aînée de notre graveur,
née en 1745, épousa le graveur Ponce.
Enfin Thérèse -Éléonore Hémery, née en 1753,
devint Madame Lingée. Nous consacrons plus loin un
article à cette aimable artiste.
HENNIN (Pierre-Michel
1728-1807.
Le Manuel énumère à l'article de ce dessinateur et
graveur amateur, né le 30 août 1728 , mort à Paris le
5 juillet 1807, diverses pièces de format in-4 , signées
de ses initiales.
Charrette à un cheval avec trois tonneaux.
Brouette, d'après Berthault.
Brouette à transporter une personne , Berthault ,
1760.
Voiture vue de face. Berthault.
Paysage, d'après Weirotter.
Paysage, d'après S. délia Bella.
Paysage avec cascade, d'après Échard, 1774.
Le Blanc signale encore un autre amateur, N. Hênin,
contrôleur des bâtiments du roi , qui vivait vers 1750.
Il signait de ses initiales.
Groupe de femmes, d'après Raphaël.
Quos ego, petite pièce en largeur.
Deux femmes enchaînées par VAm^our, in-4 en
largeur.
Les Deux Paysans, paysage in-4.
HENRTQUEZ CBenoît-Louis).
1732-1806.
Malgré la forme espagnole de son nom , Henriquez .
élève de G. Dupuis , est parisien, ou tout au moins
né à Paris en 1732. Son tout premier travail ne
serait-il pas ces Gravures de chasse , signées Henri-
quez, et qui se vendaient tout bonnement chez un
serrurier de la rue de la Tixeranderie ? Ses premières
estampes sont fort médiocres : la Négligence aper-
çue , avec son adresse , maison du Limonadier
qui fait le coin de la rue du Haut-Moulin à côté de
St-Denis de la Chartre au bas du Pont N.-Dame ;
— l'Optique et ÏEspiegleyne , d'après deux peintures
comiques d'Eisen le père qui irisent l'inconvenance ;
— Nymphes d'après Boucher (1759), deux pièces in-4
en largeur ; — Mort de Lucrèce d'après Ghalle, dédiée
à M. de Damery (1761), in-fol.: — Jupiter et lo et
Mercure et Argus, d'après Van Eckout ; — Minerve
écarte le Dieu de la guerre et protège la fécondité ,
d'après Rubens, in-fol. en largeur : — le Joueur de
Balalaye, d'après Le Prince , in-fol. (1765) , et A'tnu-
sements russes, d'après Schenau (1767), in-fol , pièces
formant pendant : — Jeune femme à sa toilette, d'après
Boucher, in-4.
402 LES GRAVEURS DU XYIII* SIÈCLE.
En 1768 , Henriquez grave : Échec et Mat , d'après
Améclée Van Loo : — Jugement de Paris , d'après
Séb. Bourdon, in-fol. en largeur; — Princesse tenant
une épée (la Chasseuse aux cœursl , d'après Nattier.
En 1769, Pan et Syrinx, d'après de Troy, estampe
agréablement gravée : — GaJathèe sur les eaux ,
d'après Nattier.
Citons encore V Amour, d'après Greuze , estampe
dédiée au beau sexe, avec un trophée formé de cœurs,
de flèches et de roses , in-fol. en rond , à Paris chez
Henriquez , rue St-Jacques dans la maison en face
du collège du Plessis ; — la Prière à V Amour,
d'après Greuze , in-fol. ovale; — Femmes au bain ,
d'après J. Vernet ; — la Musicienne , le Buveur,
d'après Grimou ; — le Miroir de la vérité, petite pièce
in-8.
Toutes ces planches sont gravées par un procédé
régulier, mais sans originalité ; on en retrouve , dans
l'œuvre du Cabinet des Estampes, la plupart des pré-
parations à Teau-forte, qu'Henriquez exécutait lui-
même.
A quelle date exacte doit se placer le voyage et
le séjour d'Henriquez en Russie? Nous nous rappro-
cherons fortement de la vérité en le plaçant vers
1770, époque à laquelle le graveur ne produit plus rien
avec son adresse en France. La gravure de la Tête
de la statue équestre de Pierre le Grand {B. L.
Henriquez sculpsit PetropoU], d'après Marie-Anne
Gollot, l'élève préférée du sculpteur Falconet, et plus
tard sa bru, fît nommer Henriquez graveur de S. M. 1.
de toutes les Russies, et membre de l'Académie Impé-
riale de St-Pétersbourg. 11 eut aussi des commandes
HENRIQUEZ. 403
et dut graver des tableaux de l'Ermitage , parmi les-
quels nous remarquons la Dame lisant une lettre , de
Terburg.
A son retour à Paris , nous retrouvons Henriquez
travaillant aux livres illustrés du moment : à la Geru-
salemme liber ata (1771) pour deux pièces , dont le
frontispice avec portrait du Tasse, hVOrlandofurioso,
édition de Baskerville (1773), à Y Heptaméron (1780),
aux Fastes d" Ovide (1783), et h un livre assez singulier :
Mémoires turcs, par un auteur turc, licencié en droit
/wrc (Godard d'Aucourt), 1776, 2 vol. in-12, frontispice
et 4 vignettes d'après Jollain. — Frontispices et
vignettes pour l'Académie militaire ou les Héros
subalternes (1777) , in-12, d'après Jollain.
Il grave aussi quelques portraits dont nous donnons
plus loin la liste.
Henriquez fut présenté par Le Bas, le 2 mars 1782 ,
aux suffrages de l'Académie royale , qui l'accepta
comme agréé , à la condition de graver pour sa ré-
ception les portraits de Pierre et de Pigalle , qu'il
n'exécuta pas, car il ne fut jamais reçu.
Ce graveur nous paraît avoir procédé un peu à la
manière de Fessard, et avoir eu une tendance à s'im-
poser de gré ou de force comme le traducteur d'œuvres
et de tableaux que leurs auteurs se souciaient peu de
lui confier. Les procès -verbaux de l'Académie ont
gardé la trace d'un dissentiment survenu à la suite de
sa gravure des Honneurs rendus au connétable
Duguesclin , d'après la peinture de Brenet , estampe
où se trouvent de louables efforts d'ailleurs. Notre
graveur désirait , paraît-il , exécuter six grandes plan-
ches de sujets relatifs à l'histoire de France , et avait
404 LES GRAVEURS DU XVIII» SIÈCLE.
imaginé, pour décider les auteurs des tableaux à se
laisser interpréter par lui, d'affirmer qu'il avait l'ordre
du directeur des bâtiments. 11 avait en même temps
mis en mouvement Pierre , premier peintre du roi ,
pour obtenir une autorisation officielle. Celui-ci en
avait référé à son supérieur le comte d'Angiviller,
dont il était le conseil ordinaire :
^< M'' Henriquez graveur vous avoit présenté un
» mémoire pour que vous lui donnassiez la permission
» de graver en suite tous les tableaux du Roy, projet
» qui a toujours été rejette parceque l'on connoît
» comment sont traittés les arts , lorsqu'ils sont à
'> l'entreprise. Aujourd'huy M'' Henriquez se restreint
» à demander la permission de graver la suite des
» sujets de l'Histoire de France exécutés pour le Roy;
» un morceau de ce genre qu'il vient de mettre au jour
» lui a donné cette idée. Je consenti à vous en parler
» mais en même tems je l'ai prévenu que dans le cas
;> ou vous accorderiés sa demande il seroit obligé
» d'aller dessiner ses traits aux Gobelins et d'y retou-
» cher ses épreuves. Ce M' Henriquez se plaint du
» nombre de ses jaloux , de ses enemis qui peuvent
» exister. Vous serés donc entouré, Monsieur, par
» les protecteurs qu'il a rassemblé. Dans le fait il n'y
» a aucun inconvénient à lui accorder sa demande,
» ce sera à lui à s'en tirer. Mais en même temps , il
» seroit bon de lui parler des morceaux de réception
» auxquels comme tant d'autres , il ne pensera que
» quand il n'y verra plus 29 Déc^"'^ 1784. »
C'est donc sur cette autorisation assez vague que
Henriquez affirmait , dans un prospectus . être chargé
par ordre supérieur de graver ces sujets de l'histoire
HENRIQUEZ. 406
de France et s'en vantait. Les peintres s'émurent et
l'Académie tint à faire publiquement une enquête
dont le résultat semble avoir été peu favorable au
graveur ;
« Le 5 mars 1785, le secrétaire fait lecture d'une
» lettre de M"" le Comte d'Angiviller écrite à M'' Pierre
» relativement à un prospectus de M' Henriquez
» L'Académie a cru devoir interroger plusieurs
» de ses membres présens à l'assemblée, auteurs des
» tableaux, à l'effet de dire leur avis sincère. En con-
» séquence M'' Brenet interrogé , a déclaré que si
» avant de se déterminer à graver son tableau de la
» Mort de Duguesclin . W Henriquez fut venu , aux
» termes des statuts, lui demander son consentement,
» il ne lui auroitpas donné, mais qu'une fois l'ouvrage
» en train , il a dû finir par des termes généraux de
» politesse. M'' Ménageot a dit que M"" Henriquez est
» venu le trouver et lui a annoncé qu'il avoit l'ordre
» de M'' d'Angiviller pour graver six tableaux du Roy
» dont la Mort de Léonard de Vincy en étoit un. Qu'à
» ce début , M"" Ménageot lui avoit dit que , puisqu'il
» avoit l'ordre du supérieur il n'avoit rien à y voir,
» mais qu'il auroit fait d'autres vœux. Enfin un des
» officiers de l'Académie s'est levé et a déclaré qu'il
» n'hésitoit point d'assurer que M'' Vincent , absent ,
» auteur du tableau du Président Mole au milieu
» des révoltés étoit loin de consentir à être gravé pai'
» M"" Henriquez et qu'il avoit d'autres désirs sur cet
» objet. D'après ces déclarations, il paroît prouvé que
» M"" Henriquez n'a point eu le consentement d'aucun
» des trois artistes susnommés. L'Académie a arrêté
» que la présente délibération sera mise sous les yeux
II. 2'7
406 LES GRAVEURS DU XYIIF SIECLE.
» de M"" le Directeur général et qu'il sera suplié de
» prononcer. ^ » Henriquez était jugé!
Tout le monde ne fut pas aussi sévère pour lui que
l'Académie ; Petit de Bachaumont , par exemple , lui
décerna des éloges dans ses Mémoires secrets . au
sujet d'un de ses meilleurs ouvrages , représentant la
Duchesse de Chartres étendue sur le gazon au bord
de la mer, portrait d'une exécution très agréable.
Henriquez eut encore des difficultés au sujet de
l'estampe de la Mort de Léonard de Vinci. Il avait
vendu la planche au marquis de Cavalcabo. Celui-ci
en fit tirer des épreuves par un imprimeur inexpéri-
menté qui l'abîma. 11 voulut forcer Henriquez à la
réparer. Le graveur fit observer qu'il n'avait garanti
deux mille bonnes épreuves qiià la charge que Vim-
primeur serait de son choix , et eut gain de cause.
La dernière partie de l'existence d'Henriquez est
bien remplie. Il collabore à la gravure delà. Galerie
du Palais-Royal , de la Galerie de Florence, du
Musée français. Quand arrive la Révolution et que
les Académies sont abolies, il signe Henriquez, de la
ci-devant Académie Royale et de celle Impériale de
St-Pétershourg, un grand nombre de planches d'une
exécution de plus en plus lourde : S*"-Famille, d'après
Péjarès ; 5' Jean-Baptiste , d'après Ribéra ; Joseph et
Zaluca , d'après Van der Werf [an lY), Jupiter et
Calisto, d'après Halle , et le Repos de Diane, d'après
Le Sueur (1795) formant pendant ; Bacchanale, d'après
Poussin (messidor an 9).
* Procès-verbaux inédits de l'ancienne Académie ( École des Beaux-
Arts).
HENRIQUEZ. 407
Une série de Costumes Turcs, d'après Le Barbier ;
et les portraits de Tm^get, l'anl*^'", Louis XVI, d'après
Boze, et Pascal Paoli , beau portrait peint Van IP de
la Liberté parDroUing et gravé la même année, in-fol.
ovale ; Séb. Mercier, d'après Pujos, in-8.
Henriquez mourut à Paris en 1806. En résumé, s'il
a gravé un grand nombre de pièces, il n'a eu que très
rai'ement la main heureuse. 11 pèche surtout par une
lourdeur excessive. Nous ne voudrions retenir de son
œuvre que les quelques pièces suivantes :
ESTAMPES.
1. L'AMOUR, DÉDIÉ AU BEAU SEXE, d'après Greuze ; in-fol
l" état: Avant les vers Sexe charmant etc.
2. La Prière a l'Amour, d'après Greuze ; in-fol.
3. GalathÉE sur les eaux, d'après Nattier, — Pan ET
Syrinx, d'après de Troy; 2 p. in-fol. en largeur.
4. LA CHASSEUSE AUX COEURS, d'après Nattier ; in-fol.
5. Les Enfants jardiniers, d'après Schenau ; in-fol.
6. Les Amusements russes, d'après Schenau, — Le Joueur
DE BalalayE, d'après Le Prince ; 2 p. in-fol.
T. Vénus désarmant l'Amour, d'après G. Van Loo , mi ; in-fol. eu
largeur.
PORTRAITS.
8. Alembert (D'), d'après Jollain ; in-fol.
9. BOSSUT, de l'Académie des Sciences, d'après Duplessis ; in-8.
1^' état : Avant toute lettre.
10. BouvaRT, médecin , d'après Bourgoin , l'7'76 ; grand in-4.
408 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE
11. Cadet, pharmacien , d'après Bourgoin ; m-4 orné.
12. CHARTRES (Louise-Marie- Adélaïde de Bourbon, Duchesse de),
étendue au bord de la mer, près d'un rocher, d'après Duplessis ;
in-fol. en largeur. — Chez l'auteur rue Vieille-Boucherie . . . ,
État d'essai au Cabinet des Estampes, les fonds seuls sont faits.
13. Diderot, d'après L. -M. Van Loo; in-fol.
1^'' état : Avant toute lettre.
14. Le Cat , d'après Restout , mi; in-4 {Galerie française).
15. Louis XIV, d'après Rigaud; in-4 {Galerie française).
16. Louis XVI, d'après Boze; ia-fol.
11. Mercier, d'après Pujos ; in-8.
l^r état : Avant toute lettre.
18. Montesquieu, profil, l'7'76; in-fol.
Existe avant toute lettre. État avant l'inscription sur la marge inférieure.
19. PAOLI, d'après Drolling; in-fol.
pf état : Avant la lettre.
20. Pierre le Grand (Tête de la Statue équestre de). — Maria-
Anna CoUot fecit, B.-L. Henriquez sculpsit Petropoli; in-fol.
1^'' état: Avant la lettre.
21. Rigoley de Juvigny , Conseiller au Parlement de Metz,
d'après Briard , 1*769 ; in-8.
22. Saussiers (P. de); in-4.
23. Target, d'après Boze; in-fol. — L'an F'' de la liberté.
N'envions plus l'antique Athènes
L'innocence a son protecteur
La Liberté son Déinosthènes
Et la France un législateur.
!«■' état : Avant toute lettre, tablette blanche.
24. Tasso (Torquato) , frontispice d'après Gravelot.
A l'eau-forte et avant la lettre au Cabinet des Estampes.
25. Voltaire, d'après Barat , mT; in-fol.
1^^ état : Avant l'inscription sur la marge inférieure.
HÉRISSET (Antoine
Hérisset , graveur - géomètre , a exécuté d'après
Juste-Aurèle Meissonnier :
Elévation gèomètrale de la chapelle de St-Sulpice
de Paris.
Élévation gèomètrale de V église de St-Aignan
d'Orléans.
Élévation gèomètrale de V autel de St-Leu de Paris.
Élévation gèomètrale d'un autre autel de St-Leu.
Élévation du projet d'un feu d'artifice sur l'eau
pour le mariage de M""^ Première.
D'après J.-F. de Troy : Saint Vincent de Paul
recevant la comm,union à ses derniers moments. —
Saint Vincent de Paul prêchant dans les châteaux
et dans les villages , 2 pièces grand in-fol. à l'eau-
forte par Hérisset , terminées par Jeaurat.
Planches pour Versailles immortalisé de Monicart.
— Planches pour la Description de Paris de Piganiol
de Laforce. — Recueil des différentes modes du temps
(1729) , suite de 12 pièces. — Acteurs du Théâtre-
Italien, 6 pièces.
C'est Hérisset qui donna à Le Bas les premières
notions de gravure.
HOGARTH (William
1698 -'1764.
Le satirique violent qui a fustigé d'une main parfois
un peu rude les hypocrisies et les vices de son temps,
l'observateur sagace de l'expression des passions sur
la physionomie humaine , William Hogarth , fils d'un
petit fermier, est né à Londres. Il eut une jeunesse
sévère et occupée. En apprentissage chez un graveur
sur métaux , il traçait sur le cuivi^e des adresses, des
écussons ; entre temps , il allait dessiner à l'Académie
publique et s'était même exercé à graver quelques
vignettes pour des éditions nouvelles du poëme de
Butler, Hudibras, et du roman d'Apulée, l'Ane d'or.
Son début dans la satire , qui attira l'attention sur
lui, fut la caricature d'un tableau de Kent, mauvais
peintre d'un académisme outré , alors dans tout l'eni-
vrement du succès. Celui-ci ne se releva pas du coup
qui lui était porté et le peintre du roi , Thornhill , son
rival , enchanté de sa chute voulut connaître le jeune
artiste qui en était la cause et l'admit dans son atelier.
Hogarth profita de l'occasion pour y prendre quelques
notions complémentaires en art , mais comme on y
enseignait à peindre la même histoire de convention ,
la même mythologie et la même sentimentalité fausse
HOGARTH. m
qui l'exaspéraient , ce qu'il trouva de mieux dans ce
milieu fut la fille de Thornhill , qu'il épousa sans le
consentement de son père,
Hogarth dut alors faire des portraits pour vivre,
mais son amour de la vérité le rendait un portraitiste
par trop cruel et réaliste pour obtenir beaucoup de
succès, aussi dut-il bientôt abandonner ce genre pour
revenir à celui qui l'avait fait connaître. C'est donc
dans la peinture satirique des mœurs qu'il se lança et
trouva sa voie. The Harlofs progress (vie d'une fille
publique) , série de six compositions qu'il peignit et
grava en 1733 et 1734 , est le tableau , d'un réalisme
effrayant , des diverses phases de dégradation par les-
quelles passe une malheureuse jeune fille arrivant de la
campagne , embauchée par une vieille trafiquante des
charmes des autres, débauchée par un vieillard qu'elle
trompe, et , de prison en hôpital , finissant par mourir
misérablement dans un galetas. Le succès obtenu par
la vérité criante et l'énergie brutale de ces composi-
tions, était encore augmenté par ce fait que l'artiste y
avait donné aux principaux personnages les traits de
gens connus et y avait représenté jusqu'à « l'ignoble
» vieille qui faisait tous les matins les antichambres
» de la jeunesse débauchée, v
Encouragé par la réussite de son œuvre , qui le
réconcilia avec son beau-père, l'artiste continua dans
la même voie par le Rake' s progress (vie d'un jeune
libertin), daté de 1735, autre curieuse étude, plus
audacieuse cette fois , en ce que si les malheurs
d'une fille dévoyée n'inspiraient que peu de pitié, les
sarcasmes sur la conduite d'un jeune homme que
ses débauches conduisent à Bedlam (maison de fousj
412 LES GRAVEURS DU XVllF SIÈCLE.
touchaient aux mœurs même de la haute classe
anglaise , et visaient ses habitudes déréglées.
Le succès n'en fut pas moins complet, et Hogarlh
publiait vers le même temps la Foire de Souihivark ,
les Buveurs de punch , les Quatre heures du jour
(1738), et beaucoup d'autres tableaux de la vie du
peuple. Pour répondre au reproche que l'on ne man-
quait pas de lui faire de toujours prendre ses modèles
dans la rue, il peignit sa plus célèbre suite, le Mariage
à la mode (1745), qui eut un immense succès et dont
les originaux sont encore conservés h la National
Gallery. Hogarth a pris cette fois ses types dans la
plus haute société et fait, avec les désordres d'un jeune
ménage, suites d'une union mal assortie, un tableau
vraiment saisissant des mœurs anglaises du XVIIP
siècle.
D'autres travaux aussi bien observés, frappant fort et
juste, mirent le comble à sa réputation : Tndustry and
Idleness (industrie et paresse) , daté de 1747 ; il s'agit
d'un jeune ouvrier qui à force de travail et de bonne
conduite devient lord-maire, tandis que la paresse d'un
autre le conduit à Tyburn ; an Election entertain-
ment , où les mœurs électorales anglaises sont saisies
sur le vif ; des scènes populaires, Beerstreet, Gin lane,
ô ihe Roastheef of old England!, Cockspit, Crudelty
superstition and fanaticism , où l'allure , les habi-
tudes , les expressions et les types de ses compatriotes
sont saisis avec autant de réahté que d'observation.
Hogarth était fort lié avec le célèbre acteur anglais
Garrick , qu'il a dessiné et gravé dans le rôle de
Richard III. Garrick possédait au plus haut degré la
faculté de modifier son visage ; il en profita pour obte-
HOGARTH. 4i3
nir du capricieux Hogarth un portrait qu'il désirait.
Fielding étant mort pendant qu'on achevait d'imprimer
ses œuvres , les éditeurs prièrent l'acteur d'obtenir de
son ami le portrait de l'auteur pour le mettre eu tête de
l'édition. Garrick s'y étant engagé, se rendit un matin
chez l'artiste, en le priant de lui donner à déjeuner.
Hogarth , qui finissait un tableau , lui dit d'entrer dans
la pièce voisine où il trouverait ce qu'il désirait. Aus-
sitôt Garrick , resté seul , se drape d'un manteau qu'il
avait apporté, donnant à ses traits la phj'^sionoraie de
Fielding , et appelle le peintre en changeant le son
de sa voix. Hogarth étonné d'entendre une voix qui
ressemblait à celle du romancier anglais se lève et
croit le revoir lui-même s'écriant : « Hâte-toi de me
peindre, Hogarth! ^ Se prêtant à la plaisanterie, il
dessina le portrait de Fielding dont on lui fournissait
ainsi le modèle.
Le peintre-graveur anglais avait été touché du re-
proche qu'on lui adressait continuellement du manque
de recherche , d'élévation et de beauté dans ses ou-
vrages, ou même de la laideur qu'il semblait afiecter.
Pour y répondre, il réunit sous le titre de Analysis of
Beauty (1753), ses idées et ses réflexions sur ce sujet,
avec planches à l'appui , ouvrage paradoxal et curieux
où il cherche à démontrer que plus l'on s'éloigne de
la froideur rectihgne et des types convenus, plus on
reste fidèle aux lois de la beauté suprême. Mais cette
analyse fut plus nuisible qu'utile à sa réputation, et
ses détracteurs saisirent cette occasion de tourner en
ridicule ses théories étranges.
On a beaucoup parlé du gallophobisme do Hogarth.
L'artiste, comme tous ses compatriotes alors, n'aimait
4U LES GRAVEURS DU XYIII* SIÈCLE.
guère la France , mais de plus il lui gardait rancune
de ce qu'un jour, dessinant les fortifications de Calais,
il avait été pris pour un espion et reconduit à trois
lieues en mer. Il s'en vengea par quelques caricatures
où l'urbanité anglaise est mise en parallèle avec la
grossièreté française et dont la plus connue est The
Gaie of Calais (1749).
Hogarth attaqua Pitt dans une estampe satyrique,
The Times, où il le montrait soufflant le feu sur l'Eu-
rope. Wilkes prit la défense de Pitt. Hogarth répondit
parle portrait en charge de Wilkes. Churchill se jeta
dans la bagarre par la publication d'une mordante
épitre. Hogarth de répliquer par la charge du poète ,
représenté en ours, avec les traits de sa physionomie,
tenant d'une main un tricot, de l'autre un pot de bière.
Jamais, dit Walpole, des hommes de talent, aigris par
l'orgueil blessé, ne se sont jeté de la boue avec plus
de gaucherie.
William Hogarth mourut à Chiswick, le 26 octobre
1764. « Implacable bourreau de tous les travers , il a
» laissé dans l'histoire de l'art une trace profonde et
» originale. Pour frapper le vice rien ne l'arrête. Il ose
» tout. Il brave toutes les convenances. Philosophe,
» conteur, romancier cynique doué de puissance dra-
» matique et d'observation, il touche à la comédie et
» atteint la tragédie de la vie privée. Ne pas l'admirer
» serait injuste, l'imiter serait dangereux » (Ph.
Chasles).
1 . Wm Hogarth serjeant painter to his majesty, 29 marck i 758 ;
in-foL en hauteur.
Portrait d'Hogarth esquissant un tableau avec le crayon blanc. La gravure
peut lui en être attribuée.
HOGARTH. 446
2. Voyage de la Motraye, 1723, 30 pi.
3. L'Ane d'or, d'Apulée, n24; 7 petites pièces.
4. Beavefs MUitary Punishments of the aniients: 15 têtes do page.
5. A Mascarade of Heidegger, l'725; in-fol. en lar^reur.
6. HUDiBRAS by Butler, 1726; 10 pi. in-4 en largeur, publiées par
Robert Sayer, et une grande planche in-fol. en largeur avec le
titre : Hudibras encounter the Skimmington.
I. A inidnight modem conversation (ou les Buveurs de punch) ; in-4
en largeur.
Cette pièce a été souvent copiée, ainsi que les suivantes.
8. SoUTHWARK F\IR (ou Foire de Southwark), invent, paint. and
engr. by "W. Hogarth, 1733; in-fol. en largeur.
9. RAKE'S PROGRESS (Scènes de la vie d'un mauvais sujet),
inv. paint. and engr. by Hogarth , 1735 ; 8 pi. in-fol. en largeur.
Un des meilleurs ouvrages de l'artiste, très bien gravé.
10. HARLOT'S PROGRESS (Vie d'une fille publique), Hogarth
inv. pinx. et sculp., 1733-34; 6 pi. in-fol. en largeur.
II. Company of underlakers (types et têtes) , 1736; 3 pi. in-4.
Satire contre les médecins.
12. Refoke , — After , 1736; 2 pi. in-fol. en hauteur.
Pièces par trop réalistes. Sur un papier placé dans la seconde, on lit : Omne
animal post coïtinn triste.
13. Strolling adresses dressing in a barn. — Inv. paint. and engr. by
Hogarth ; in-fol. en hauteur.
Scène curieuse des coulisses d'un théâtre ambulant.
14. MORNING, — NOON, — E VENING , — NiGHT (ou les Quatre
Heures du jour). — Inv. paint. by Hogarth, and engr. by Hogarth
and Baron, 1738; 4 pi. in-fol. en hauteur.
Ces compositions furent faites , paraît-il, pour le directeur du Vauxhall de
Spring-Garden.
15. The Distrest Poet, — The Enraged Musician, inv. paint. engrav.
and publish. by Hogarth, 1740-41; 2 pi. in-fol. en largeur.
416 LES GRAVEURS DU XVIIie SIÈCLE.
16. LE MARIAGE A LA MODE. — Inv. paint. and published by
Hogarth , engraved by G. Scotin and Ravenet , 1745 ; 6 pi. in-fol.
en largeur.
Bien que ces pièces si curieuses ne soient pas exécutées par Hogarth , mais
seulement sous ses yeux et sa direction , elles tiennent une place trop impor-
tante dans son œuvre pour les passer sous silence.
n. M"" G.\RRICK IN THE CH.\R.\CTER OF RICHARD THE 3^.
— Painted by Hogarth , engr. by Hogarth and Grignion , n46 ;
in-fol. en largeur.
Beau et intéressant portrait .
18. Simon Lord Lovât. — Drawn from the life and etch'd in aqua-
forlis by W™ Hogarth , 1746; in-fol. en hauteur.
19. IndusTRY .\ND IdlenESS (ou Travail et Paresse) , 1747;
10 pi. in-4 en largeur et 2 pi. in-fol.
Une des bonnes suites de l'artiste.
20. The Stage coach, an Election procession in the yard, 1747.
21. The Gâte of Calais (la Porte de Calais), 1749 ; in-fol. en largeur.
Pièce contre la France, gravée par Hogarth et Mosiey.
22. 0 the Roast beef ofthe England I in-fol. en largeur.
23. Beef Street , — Gin Lane, designed by Hogarth. — Sans nom de
graveur, 1751 , 2 pi. in-fol. en hauteur.
24. First stage ofcruelty, — Second stage ofcruelty, — Cruelty in
perfection, — The Rewari ofcruelty, 4 pi. in-fol. en hauteur,
sans nom de graveur, 1751 .
Dans ces morceaux , Hogarth a exprimé avec une vérité effrayante les tour-
ments qu'on fait souffrir aux animaux. On raconte qu'un charretier maltraitait
un jour à outrance ses chevaux; un passant, ému de pitié, lui cria : A/ts^raWe .'
tu, n'as donc pas vu l'estampe d'Bogarth ?
25. Paul before Félix. — Desig. and etch'd in the ridiculous manner of
Rembrandt, 1751 ; in-4 en largeur.
Charge de la composition suivante.
26. S' Paul before Félix. — Engraved by W" Hogarth from his ori-
ginal painting in Lincoln's Im Hall , 1752 ; in-fol. en largeur.
HOGARTH. 4<7
21. France Plate, — England Plate, 1756 ; 2 p. petit in-fol. en largeur.
Pièces satiriques contre la France.
28. Analyds of the beauty. — Desig. engr. and publish. by W. Ho-
garth, ry53; 2 grandes pi. in fol. en largeur.
29. An Election Entertainment, — Cauvassing for votes, —
The Polling, — Charing the members. — Paint, and engr. by
W^Hogartb, Grignion, Le Cave and Aveline, 1755-58; 4 pi.
in-fol. en largeur.
Ces pièces sont dédiées à Fox , Walpole, G. Hay et Ch. Handbury.
30. TVie BewcA , n58 ; pi. en hauteur.
Caricature contre les médecins.
31. The Cockpit. — Paint, and engr. byHogarth, 1759; in-fol.
32. Les Cinq ordres de Perruques , 1761 ; in-4 en hauteur.
33. The Times, l'762; 2 pi. in-4 en hauteur.
Pièces satiriques contre Pitt.
34. Credulity, Superstition and Fanaticism . — Design, and engr. by
Hogarth , 1762; in-fol. en hauteur.
35. John Wilkes, esq"". — Drawn from the life and etched in aqua-
fortis by Hogarth , 1763 ; in-fol. en hauteur.
36. The Bruiser C. Churchill, in the Character ofa Russian Hercules,
1763; in-fol.
Caricature contre le poète Churchill .
L'œuvre de William Hogarth, reproduit et gravé par Cook en 160 pi., a été
publié à Londres en 1808, en 2 vol. in-4.
HOIN (Claude-Jean).
1750-1817.
Hoin, élève de Devosge et de Greuze, fit des por-
traits au pastel et des paysages à la gouache.
Comme graveur au lavis et à l'eau-forte, Hoin fut
principalement l'interprète du sculpteur-dessinateur
Boicliot , de Dijon comme lui : Lèda et Danaè, in-8 ;
la Toilette deVénus, frise ; Hercule et Omphale (1786);
Jésus au tombeau , frise ; Assemblée de philosophes
(1788).
On trouve encore dans l'œuvre de Hoin : le Serpent
d'airain , Jésus-Christ entrant à Jérusalem, , d'après
VanDyck, Apothéose de Mirabeau, dédié aux amis de
la Constitution ; la Mort de Marie-Madeleine, d'après
Greuze ; la Mort d'un Moine , d'après Fragonard ;
Génie tenant une lampe et une couronne.
J. J. L. Hoin maître en a,rt et en chirurgie à Dijon ,
dessiné de souvenir et gravé par son fils, 1786, in-8.
Son propre portrait , C'^^J. Hoin, peintre de Mon-
sieur, associé aux Académies Royales de peinture
sculpture et architecture de Toulouse . de Lyon ,
correspondant de celle des sciences , arts et belles-
lettres de Dijon, né à Dijon le 25 juin 1750.
HORTHEMELS (Frédéric).
4688-
Ce graveur (dont le nom s'écrit aussi Hortemels),
frère aîné de Marie -Madeleine Hortliemels ^ qui fut la
femme de Cochin père, a principalement gravé pour
le Recueil de Grozat :
Portement de Croix, d'après Giorgion ; — l" Ado-
ration des Rois et le Mariage de sainte CatheiHne,
d'après Paul Véronèse ; — la Naissance de saitii
Jean-Baptiste, d'après le Tintoret ; — la Mort d^Abel,
d'après A. Sacchi ; — le Recueillement de la Vierge .
d'après D. Feti ; — Jésus parlant à la Samaritaine ,
d'après Garofalo; — la Pentecôte, d'après G. Ferrari.
Bethsabée, d'après G. Vanloo, 1729, pièce terminée
par N. Tardieu.
Philippe d'Orléans, d'après Santerre , in-fol.
Ou a reproché avec raison à Horthemels , l'abus
qu'il a fait de l'emploi des gros points pour traiter les
chairs.
1 Pour Marie-Madeleine Hortemels , voyez l'article Cochin père.
HOUBRAKEN (Jacques).
1698-1780.
Jacobus Houbraken naquit à Dordrecht , le 25
décembre 1698 , et mourut dans la môme ville le
14 novembre 1780 , sans avoir voulu accepter les
brillantes propositions qui lui étaient faites s'il voulait
résider en Angleterre. Ce graveur qui , d'après les
biographes , s'est formé lui-même , avait un talent
remarquable , quoique inégal , de la facilité et à un
haut degré le sentiment de la couleur.
Houbraken a travaillé à la collection des Portraits
des hommes illustres de la Grande-Bretagne, dont
le premier volume, publié à Londres en 1743, est su-
périeur au second daté de 1752. 11 avait déjà collaboré
avec son père , Arnold Houbraken , aux portraits
destinés à orner les Vies des peintres flamands et
hollandais , ouvrage qui commença à paraître à Ams-
terdam en 1718, et dont une nouvelle édition avec les
mêmes figures fut donnée à La Haye en 1729. Il s'est
occupé toute sa vie à graver des portraits de person-
nages hollandais , séries de Princes et Princesses de
la maison d'Orange (1750-53) , de Bourg^nestres de
la ville d'Amsterdam. Le recueil le plus important
dans ce genre est la Collection de quatre-vingt-quinze
HOUBRAKEN. 421
portraits des personnes illustres qui se sont rendues
célèbres dans les Provinces-Unies des Pays-Bas,
Amsterdam , 1761 , grand in-4.
Signalons en dehors de ces collections quelques
portraits intéressants :
Petrus Primus Russorum Imperator. — Catharina
Imper atrix Russorum , 2 pièces très grand in-fol.
Le peintre Cornèlis Eversdyck , in-fol.
Pascal Paoli, général des Corses, in-fol. ovale.
Le Cardinal de Fleury , médaillon soutenu par
Diogène , frontispice in-fol. — Louis XV.
Cornèlis Troost, peintre. — Franz Van Mieris. —
Henriette Wolters , portrait curieux à rapprocher de
celui qui a été gravé par Ficquet pour l'ouvrage de
Descamps.
Simon Fokke, dessinateur et graveur, in-8, 1773.
Houbraken était également habile dans la gravure
des tableaux , nous n'en voulons pour preuve que les
planches qu'il a gravées d'après Troost , la Fête de
St-Nicolas et le Second corps de garde d'officiers
hollandais , du cabinet Muilman à Amsterdam ; le
Divertissement de la Foire d'Amsterdam, du cabinet
Neyman ; la Belle-Mère , du cabinet de Pinto à Ams-
terdam; le Capitaine Ulric, du cabinet Van der Mark,
à Leyde ; et Tartuffe ou V Imposteur, du cabinet
Braancamps à Amsterdam.
J. Houbraken a encore gravé pour la Galerie de
Dresde , Daniele Barbare , d'après P. Véronèse,
et le Sacrifice de Manoah , d'après Rembrandt.
D'après le même maître , l'Ange et la famille de
Tobie. — Tobie préparant le foie du poisson . etc.
Houbraken a gravé deux fois son propre portrait.
n. 28
HOUEL (Jean).
1735-1813.
L'auteur du Voyage pittoresque de Sicile, de Malte
et de Lipari , texte et gravures , est de Rouen.
Jean-Pierre-Louis-Laurent Houël , né en 1735 , était
l'aîné d'une nombreuse famille ; son père le mit dans
l'école publique fondée par Descamps et le plaça en-
suite pour apprendre l'architecture chez Thibault père,
l'architecte le plus instruit de la ville. Enfin s'étant
décidé pour la gravure , le jeune Houël arriva à Paris
se mettre sous la direction de Le Bas, ou plus exacte-
ment sous celle de son compatriote Le Mire , l'un des
meilleurs élèves du maître.
« Un amateur distingué par sa naissance et sa for-
» tune , et son goût passionné pour les arts, Blondel
» d'Azincourt , fils de Blondel de Gagny, demande à
» Le Bas un élève avec lequel il puisse s'exercer à la
» gravure. Houël est désigné comme très propre à
» remplir cette tâche glorieuse. Honoré du choix de
» son maître, il se rend chez cet amateur, où il trouve
» de quoi satisfaire son goût pour l'étude. Il est placé
» au milieu d'une des plus riches collections de la
» capitale, dont il a la libre jouissance et la direction.
» L'amabilité de son caractère, son désir de s'instruire
HOUEL. 423
» lui font trouver dans cet asyle tous les moyens de
» satisfaire ses goûts ; il y trouve en même temps les
» aisances de la vie jointes aux douceurs de l'amitié.^»
Sous l'hyperbole habituelle à ce bon Le Garpentier,
on peut pourtant saisir que notre jeune artiste com-
mençait bien et que ses débuts n'eurent rien de dur,
seulement la fréquentation des beaux tableaux de
Blondel de Gagny eut cette influence sur son caractère
un peu versatile de lui faire désirer apprendre à
peindre, sans toutefois abandonner la gravure. Il prit
donc les leçons de Casanova « qui se fit un plaisir de
» lui dévoiler les secrets de son art. »
Nous pensons que c'est pendant ces années d'études
passées avec le jeune d'Azincourt qu'il faut placer
deux Livres de paysages de six pièces chacun , datés
de 1758, et des paysages d'après Boucher. C'était aussi
l'époque où le duc de Choiseul le faisait venir à Chan-
telou pour y peindre des panneaux décoratifs et c'est à
ce protecteur qu'il dut de partir pour l'Itahe avec une
pension du roi :
« J'apprens, M"", par votre lettre, écrivait le 26 avril
» 1770 M. de Marigny à Natoire , que le S^ Houël est
» forcé par le dépérissement de sa santé et les conseils
» du médecin de changer d'air et qu'en conséquence il
» est parti pour Naples qu'il a choisy de préférence
» comme plus propre à sa santé et à ses études , à
» cause des beaux points de vue. Les bons témoi-
» gnages que vous me rendes de la conduite et des
1 Ces détails sont extraits de la Notice sur Houël, par Le Carpenlier,
lue à la séance de la Société libre d'Emulation de Roueu en décembre
1813 , notice qui nous a été très obligeamment communiquée par
M. Jules Hédou.
424 LES GRAVEURS DU XYIIF SIECLE.
» talens de cet artiste me portent à consentir que vous
» continuiés sa pension comme s'il étoit toujours à
?> l'Académie. Dans ce cas il convient que vous la
» retrancliiés de la dépense du cuisinier qui ne doit
» pas être payé pour onze élèves comme pour douze. »
Le désir de changer de place devait bien être aussi
pour quelque chose dans la maladie du jeune artiste.
Il avait imaginé une manière large et expéditive
de peindre ses études à la gouache , et les gravait
promptement au lavis : il cherchait déjà , dans un
premier voyage en Sicile , à réunir rapidement des
matériaux pour l'idée qui germait dans son esprit. Il
écrivait donc en 1771 au directeur des bâtiments pour
réclamer une prolongation de séjour, dans le but
d'achever des études commencées et quelques tableaux
qu'il lui destinait. Cependant Houël dut revenir à Paris
dans le courant de 1772 , et les nombreuses et belles
études qu'il rapportait et que plusieurs amateurs admi-
rèrent , contribuèrent à asseoir sa réputation et le
firent agréer à l'Académie.
Mais il n'oubliait pas quelle mine, pour un artiste
archéologue et paysagiste, était la Sicile, ni quels
projets il avait formés dans sa première excursion.
Il partit donc pour la seconde fois de Paris, le 16 mars
1776 , pour s'embarquer à Marseille , et c'est à ce
nouveau voyage que nous devons le beau Voyage
pittoresque des Iles de Sicile , de Malte et de Lipari
(1782-89). Après avoir vu à Naples la liquéfaction du
sang de saint Janvier, il débarque à Palerme :
« Je me sentois né pour faire un voyage avec
» quelque succès et d'une manière un peu nouvelle.
» Une santé robuste me permettoit de longues fatigues,
HOUËL. 425
» une grande activité qui s'irrite par les obstacles , et
» la passion de faire des découvertes dévoient me
» rendre les travaux que je m'iraposois plus faciles et
» plus agréables. Je parfois aussi le langage du pays ;
» d'ailleurs j'étois peintre et architecte et je pouvois
» avec les connoissances de ces arts non-seulement
» m'intéresser plus qu'un autre aux objets que j'allois
» visiter, mais encore les reproduire. »
Dans la première des estampes de son livre , gravées
par lui au lavis avec une extrême aisance, Houël s'est
représenté de dos à cheval accompagné de son escorte,
et s'est ainsi décrit : <\ J'étois vêtu comme le plus simple
» des voyageurs sicihens. J'avois un fusil en travers
» sur le pommeau de ma selle , un fourniment en
» bandouillère sur le côté gauche qui contenoit des
» balles et des bourres et tout ce qui est nécessaire
» pour charger une arme. Jeportois en sens contraire
» une grande et grosse corne ornée de bronze ; elle
» contenoit de la poudre. J'avois les cheveux enve-
» loppés dans un filet au milieu duquel étoit un i^land
» très orné qui flottoit sur les épaules , ajoutez à cela
» un chapeau rabattu, des bottes courtes à l'ancienne
» mode, vous aurez la peinture complète de mon
» ajustement. »
Nous ne suivrons pas notre artiste dans toutes les
péripéties et aventures de son voyage, racontées fort
agréablement d'ailleurs, cela nous entraînerait trop
loin ; nous nous contenterons de signaler les princi-
pales planches de l'ouvrage, toujours traitées avec
beaucoup de soin , de goût et de vérité architecturale,
et toujours animées de personnages bien dessinés :
Vues intérieure et extérieure du Temple de Ségeste,
42G LES GRA"VEURS DU XVIIF SIÈCLE.
le Théâtre de Sègeste , les diverses Vues des Ruines
des Temples de Sélinonte, Vue du théâtre de Tindare.
Puis ce sont des scènes de mœurs, Salaison d'An-
chois, Char de la Moisson , la Pêche et la Prise du
TJion, les Bains de Termini, les Religieuses de Li-
pari, les Bains du temple de Bacchus à Catane,
Intérieur de la Cathédrale de Catane pendant les
fêtes de S^^- Agathe, Fête de la Moisson, Mariage
Albanais, la Fête de S*^ -Rosalie à Palerme, la
Procession de la Bar a.
Des paysages, Vue de la Naumachie de Palerme. ,
Vues de Vile de Volcano, de Stromboli, des Côtes de
Caldbre, du Tliéâtre de Taormine, de nombreuses
Vues de VEtna , qui prouvent surabondamment que
Houël était un remarquable paysagiste ; le Tremble-
ment de terre de Messine ; des cartes , des plans et
coupes de monuments, etc.
Bien que ce volumineux ouvrage , en quatre tomes
in-folio et 261 planches, soit peu recherché maintenant,
nous n'en persistons pas moins à le trouver rempli
d'intérêt.
Il paraît que l'impératrice Catherine de Russie,
goûtant le talent de Houël , fit acheter les dessins de
ce Voyage en même temps que plusieurs de ses
tableaux. Houël avait été d'ailleurs bien accueilli à son
retour à Paris. Il allait aux réunions de M""^ Geoffrin
et s'y rencontrait avec Diderot, d'Alembert, Marmontel
et Cochin qui nous a laissé de lui un profil qui devait
être bien ressemblant (Société des Enfants d'Apollon),
et que M"*' Lingée a gravé. Il était encore l'ami de
Fourcroy, Boucher, Vien, J.Vernet, Moreau qui ne
l'appelait jamais que son Van der Houël.
HOUEL. 427
11 était aussi lié avec J.-J. Rousseau. Invité par le
philosophe à dîner dans son hermitage de Montmo-
rency, il y avait été reçu avec simplicité. Le philo-
sophe s'étant assoupi près de la cheminée , son chat
sur les genoux , Houël prenait déjà son album et son
crayon. Rousseau qui n'aimait pas à être surpris se
réveille, voit le peintre en position et sourit. Cette
petite anecdote est devenue le sujet d'un tableau que
le peintre avait conservé.
Nous trouvons de lui , gravé d'après Carmontelle,
le portrait du critique d'art et courriériste Petit de
Bachaumont , avec cette épigraphe : Columna stante
quiescit.
Par quel enchaînement d'idées le paysagiste Houël
fut-il amené à graver une série de planches sur les élé-
phants, dignes d'un naturaliste de profession? Toujours
est-il que fort âgé déjà, en 1803, le graveur mit au jour
une Histoire de deux Éléphants mâle et femelle du
Muséum, de Paris , en 20 planches in-4 , d'après na-
ture. Il avait pris la peine d'aller les dessiner au Jardin
des Plantes «jusque dans le silence des nuits», afin de
les observer dans tous les moments et dans toutes les
attitudes. L'existence des éléphants n'a plus rien de
mystérieux après ces planches. On les voit buvant en
deux temps, au bain, se donnant les premières caresses,
se Hvrant à l'acte de la reproduction ; on assiste à la
naissance du petit éléphant, à son allaitement, etc., le
tout très soigneusement gravé à l'eau-forte.
A la fin de sa carrière, ennemi du repos, aussitôt que
le gouvernement demandait des projets de Temples à
élèvera la gloire des armées françaises, de Colonnes
ou à' Arcs trioTYiphaux , Houël , se remémorant ses
428 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
études architecturales , présentait les siens , délaissés
il est vrai pour ceux de ses jeunes rivaux plus au
courant des goûts et des nécessités du temps.
Célibataire, ayant traversé sans grande secousse la
Révolution, Houël mourut le 14 novembre 1813, d'une
attaque d'apoplexie.
Nous citerons de lui, comme jolies petites pièces de
portefeuille :
1 . Revue de la Maison du Roi à la plaiue des Sablons. — Inventé et
dessiné par Houël ; in-4 , cadre orné.
Eau-forte pure au Cabinet des Estampes. On retrouve dans cette petite pièce
le mouvement de la grande composition de Moreau.
2. Le Comte et la Comtesse de Crissé, 2 portraits réunis
dans le même cadre; petite pièce in-8.
3. PROFIL DE JEUNE FEMME (Madame Blondel d'Azincourt?)
dans un gracieux encadrement de fleurs; charmante pièce in-4 ,
avec ce madrigal :
Son cmur est pur, son âme est belle,
Elle est douce, tendre et fidèle.
Yoicy le trait qui la peint bien :
Elle est parfaite et n'en sait rien.
4. Encadrement pour portrait, in-4. Houël in. et se. 1760.
5. Projet de ballon dirigeable. Au lavis, in-8.
HOUSTON (Richard
-1728-17...
Bien que nous ne nous occupions qu'incidemment
des graveurs étrangers , nous ne pouvons passer sous
silence cet artiste, l'un des meilleurs graveurs en ma-
nière noire qu'ait produit l'École anglaise. Il s'est
piincipalement appliqué au genre du portrait :
Marie, duchesse (TAncastre, — Eliza , duchesse
d'Argyll , — Mistress Berrington , — Miss Kiily
Fisheï% en Gléopâtre, — Maria Walpole , duchesse
de Glocester, avec sa fille, — Lady Selyna Hastings,
— Caroline duchesse de Marlborough et Lady Char-
lotte Spencer, — Eliza , duchesse de Northumbeer-
land, — Miss Nancy Par sons, en Junon, — Har-
riett Poioell, — Miss Rudley, en Léonora, — Matie,
comtesse de Waldegrave, — tous portraits in-fol.
d'après Reynolds.
George II, — George III, — Sophie-Charlotte, —
V Amiral Byng — Christian VII , d'après A. Kauff-
mann, — Paoli, Glyn , John Wilkes et John Home,
— William Pitt, 1766, — Général J. Wolf, etc.
Les HUBER.
1721-1804,
Joseph-Ignace Huber , né à Augsbourg en 1759 ,
vint se perfectionner à Paris sous la direction de
Wille , chez lequel nous le voyons travailler en 1782.
Il a surtout gravé pour la Galerie du Palais-Royal',
et assez convenablement : la Vierge, d'après Raphaël;
Erigone , d'après le Guide ; la Musique , d'après
Valentin ; la Mort de Maxence, d'après Rubens ; la
Vieille à la lampe, d'après G. Dow.
Deux pièces d'après Tischbein : le Point du jour et
la Petite Boudeuse.
Portrait de Mademoiselle d'Oligny, in-fol.
Le journal de Wille nous le montre accompagnant
jusqu'à quelques lieues de Paris, en octobre 1783, son
compatriote Klauber qui s'en va, puis plus tard , assis-
tant à une expérience aérostatique chez Réveillon au
faubourg St- Antoine , et encore aux préparatifs de la
fête de la Fédération.
« 12 mars 1792. — M. J.-J. Huber, d'Augsbourg,
» mon élève, vint avec un clerc de notaire m'apporter
» son contrat de mariage pour le signer, cequej'ay
» fait avec plaisir. Il m'avait invité et prié d'assister
» à cette opération, mais je m'excusai, n'étant pas
HUBER. 431
» complètement bien portant. En outre le froiri étoit
» trop excessif pour me faire sortir ces jours-cy. »
Le graveur dont nous venons de parler n'a rien de
commun avec Michel Huber, né à Frontenhausen
(Bavière) en 1727, qui vint fort jeune en France, fut
nommé en 1767 professeur de langue française à
l'université de Leipsick, et mourut en 1804.
Michel Huber est le traducteur bien connu de plu-
sieurs ouvrages de littérature allemande, entre autres
des Œuvres de Gessner. Écrivain d'art distingué, c'est
encore à Michel Huber qu'on doit une traduction de
Y Histoire de Vart de Winckelmann , et enfin une
Notice générale des graveurs divisés par nations
(1787) , ouvrage qui , entièrement refait et considé-
rablement développé . avec la collaboration de Rost ,
est devenu le Manuel des curieux et des aynateurs
de Vart , Paris , chez Fuchs, et Zurich , chez Orell ,
Gessner, Fuessli et Gomp. 1797-1808, 9 vol. in-8. Un
travail étendu sur la gravure avait été demandé par
les libraires de Zurich à Rost, celui-ci , connaissant le
goût particulier d'Huber pour ce genre d'étude, le per-
suada facilement de se charger de la majeure partie
de l'exécution, et d'écrire l'original en français : « Nous
» pensâmes qu'un pareil livre devoit être écrit dans
» une langue plus universelle que l'allemand , et que
» l'ouvrage ne pouvait manquer d'être aussi goûté
» hors des hmites de l'Allemagne. Il fut convenu entre
» nous que nous travaillerions de concert. A mesure
» que je compose, M. Rost traduit d'après mon manu-
» scrit et s'attache à donner une traduction libre en
» allemand. » (Préface du Manuel).
432 LES GRAVEURS DU XVIII' SIECLE.
Cet ouvrage est fort remarquable comme travail
d'ensemble : précis sans être sec, très riche en ren-
seignements , il a joui d'une grande réputation et n'a
encore rien perdu de son intérêt.
Michel Huber est mort en 1804. Son portrait a été
gravé par Alex. Tardieu pour être placé dans l'édition
de Gessner publiée par Renouard.
Il est encore un autre Huber dont nous voudrions
parler ici , bien qu'il ne soit pas précisément un gra-
veur.
Jean Huber , né à Genève en 1721 (ou 1722) mort à
Lausanne en 1786 (ou 1790), peintre, est célèbre par
son aptitude toute particuHère à saisir la physionomie
de Voltaire et à la reproduire de toutes sortes de façons.
La reproduction des traits de Voltaire lui était si
famiUère que , même sans ciseaux , les mains derrière
le dos, il découpait son profil en déchirant une carte.
Mieux encore, il faisait faire le profil de Voltaire à son
chien, en le faisant mordre en différents sens dans une
croûte de pain , ou à son chat en lui présentant une
tranche ne fromage.
Huber cultivait aussi un genre de plaisanterie parti-
cuher, la mystification. Une de ses meilleures est celle
qu'il fit, dit-on, à Malle! du Pan. On raconte qu'il avait
fait insérer dans les feuilles publiques que l'automate
joueur d'échecs devait s'arrêter à Lyon et décida Mallet
à l'aller voir avec lui. Huber manque au rendez-vous ,
Mallet arrive seul, joue avec l'automate, perd et
revient émerveillé. Là dessus, son ami lui apprend
qu'il a été mystifié et que c'est lui, Huber, qui déguisé
a ioué le rôle de l'automate.
HUBER. 433
Ayant vécu de longues années dans la société intime
de Voltaire, il en profita pour reproduire sous toutes
les formes les scènes de la vie du patriarche deFerney
en une série de tableaux qu'il apporta avec lui dans un
voyage qu'il fit à Paris en 1772,
Dans l'un, on voyait Voltaire au lit, ravi en extase à
l'aspect des pelleteries que lui envoyait, par un officier
de ses gardes, l'impératrice Catherine. Dans un autre
tableau , le patriarche était à table prenant son café
versé par « la belle Agathe » . avec ses disciples,
d'Alembert, Marmontel , Huber lui-même : il existe de
ce tableau une petite reproduction à l' eau-forte. Dans
une autre composition encore , on voyait Voltaire
debout , au milieu de paysans , enthousiasmé des mer-
veilles de la campagne , tandis que ses auditeurs
avaient l'air de se moquer de lui.
Ces tableaux, naturellement, étaient fort peu du goiit
de Voltaire, qui les considérait comme des caricatures,
un surtout, celui de son réveil, qui a été gravé sous le
titre de le Lever du philosophe deFern...x d'après le
tableau de M. Bayer de Fonscolombe à Aix , avec
ces vers ;
Tandis que plein de sa marotte
Au lieu de mettre sa culotte
Volt, .re se livre à son feu,
Dal t et Fré. .n n'ont-ils pas fort beau jeu !
Dal t pour baiser humblement son der. . .re.
Et ce Jean Fré. .n sans pitié
Pour en faire à coups d'étrivières
Un écrivain plus châtié.
L. B.
On y voyait Voltaire « sortant de son lit et sautant
» dans ses culottes , ce qui est de vérité historique et
434 LES GRAVEURtf DU XV1II« SIECLE.
» rigoureuse, et dictant à son secrétaire placé au pied
» du lit et devant une table. Ce petit tableau a été volé
» à M. Huber par un fripon de graveur qui l'a gravé
» furtivement, et y a mis des vers aussi plats que
» grossiers , dont le sel consiste à dire que Voltaire
» montre son cul, que d'Alembert le baise , tandis que
» Fréron le fesse. Cette détestable polissonnerie se
» vend chez les marchands d'images, et M. de Vol-
» taire n"a pas encore pardonné à son historiographe
» d'avoir été la cause innocente de cette vilaine plai-
» santerie. »
D'après Huber , on a également un curieux portrait
de Voltaire, coiffé d'un bonnet , in-4 à la manière du
crayon, avec la légende : la Liberté que tout mortel
adore, etc. Huber genev. delin. — Une autre pièce
très connue d'après Huber, est une feuille contenant
trente-cinq têtes différentes de Voltaire.
Mais c'est surtout par ses découpures qu'Huber
s'est rendu célèbre ; Tune d'elles est fameuse entre
toutes , et a été reproduite pai^ la gravure. Voici
dans quels termes Grimm nous en a peint le sujet
(août 1764) :
« Lorsque j'étais à Genève il y a quelques années,
» M. de Voltaire avait fait acquisition d'un étalon da-
» nois bien vieux , avec lequel il se proposait d'établir
» un haras dans sa terre. Il avait une demi-douzaine
» de vieilles jumens qui le tramaient lui et sa nièce.
» Un beau matin l'oncle se mit lui et sa nièce à pied
» pour abandonner les six demoiselles aux plaisirs de
» l'étalon ; il espérait être dédommagé de cette petite
» gêne par une belle race de chevaux danois nés aux
» Délices, près Genève. Ses essais ne furent point
HUBER. 435
» heureux ; les efforts du vieux danois ne fructifièrent
» point; cependant son maître nous en donnait tous
» les jours le spectacle dans son jardin , au sortir du
» dîner : Venez mesdames, s'écriait-il, voirie spectacle
» le plus auguste ; vous y verrez la nature dans toute
» sa majesté. »
C'est cette scène un peu vive qu'Huber entreprit de
reproduire plaisamment en une découpure qu'il envoya
à Paris à un commissionnaire pour la vendre dix ou
douze louis. « On voit au milieu du tableau la jument
» saUlie par l'étalon. A côté, sur une butte un peu
» élevée on voit Voltaire, son habit boutonné, sa
» grande pejruque, et par dessus un petit bonnet ;
» c'est son accoutrement ordinaire. 11 est parlant , il
» est plein d'enthousiasme. Il a saisi une jeune fille
» par la main pour lui montrer l'auguste spectacle .
» Elle recule et fait les plus grands efforts pour se
» dégager. A côté d'elle sa compagne se met à courir
» de toutes ses forces de peur d'être aussi saisie par
» Voltaire. Derrière ce groupe on voit deux hommes
» qui se tiennent les côtes de rire. Dans le fond on
» voit un château et sur un balcon de ce château une
» femme que les mauvais plaisants disent ressembler
» à Madame Denis : Cette femme regarde le spectacle
» auguste avec une lunette d'approche. De l'autre
» côté de la jument, on voit une paysanne avec son
» mari , ayant un petit enfant sur les bras et regar-
» dant paisiblement l'auguste spectacle. Cette dernière
» idée, pleine d'esprit et de délicatesse, achève de
» rendre ce morceau précieux ; elle tempère ce que
» le reste pourrait avoir de trop libre. C'est une
» idée que notre Greuze n'aurait pas dédaignée. »
436 LES GRAVEURS DU XVIIie SIECLE.
Et Grimm conclut ainsi : « Ce Huber est un homme
» plein de génie et d'un talent unique. Il peut dire
» hardiment à Voltaire et à Greuze et à tous les
» peintres du monde : Anch'io son pittore. »
La scène découpée par Huber a été gravée avec
quelques variantes ; cette eau-forte a pour titre Traité
du sublime ; in-4. De toutes les pièces qui ont été
gravées sur Voltaire, c'est une des plus curieuses
et des plus rares * .
Jean Huber s'occupa d'aérostation et fut atteint , lui
f Puisque nous parlons de Voltaire, rappelons ici que son portrait est,
avec ceux de Louis XV, Louis XVI et Marie-Antoinette, celui qui a
été le plus souvent reproduit au XVIIF siècle par la gravure.
Nous citerons les principales des pièces gravées relatives à Voltaire.
D'abord son portrait, jeune, d'après Largillière, gravé par Tardieu.
C'est le seul sui- lequel la physionomie de Voltaire soit agréable.
Le même, in-12 , par Demautort.
Son portrait , d'après La Tour, gravé par Balechou , par Cathelin
quatre fois, par Langlois deux fois, par Ficquet, par Guyol au lavis,
par Alix, en couleur, deux fois.
Puis les portraits de Voltaire plus âgé : par Saint-Aubin, profil in-4 ;
par Po«ce, dans la collection des Illustres Français; par Saint-Aubin,
sur un titre, avec La Baumelle et Fréron ; par P. Duflos, sur un fron-
tispice ; par Henriquez , d'après Barat , in-fol. ; dans la collection
d'Esnmits et Rapilly, avec une vue de son tombeau; d'après Houdon,
par Al. Tardieu; par Croutelle, vignette allégorique de Moreau.
Types divers , où Voltaire est représenté très vieu^ , ou grimaçant :
par Barbie, in-8 ; par iV. de Launay, in-18; par Dagoty, en couleur;
par Brichet, in-8; par Miger, in-4; par Chodowiecki, coiffé d'un
bonnet, écrivant; par Berger, petit buste; T^av Saint-Aubin , profil,
pour Renouard ; par J.-B. Michel, coiffé d'un bonnet de fourrure, in-4 ;
autre, d'après Huber, in-4, manière de crayon ; Y>^r Saint-Aubin, d'après
Denon, fort curieux.
Pièces diverses :
Couronnement de Voltaire sur le Théâtre-Français, par Gaucher,
d'après Moreau ;
La Folie de notre âge, — l'Homme unique à tout âge, — le Vieux
HUBER. 437
aussi , de la manie de chercher à diriger les ballons ;
il publia sur ce sujet une note dans le Mercure de
France, et plus tard à Genève , des Observations sur
le vol des oiseaux de proie.
La Biographie générale le fait mourir à Genève
vers 1790.
Malade de Fernex tel qu'on l'a vu en Z*'"» 1777 , eaux-forles par
Caylus ;
Trente-cinq petiles têtes de Voltaire sur une seule feuille, d'après
Huber ;
Voltaire debout , par Carmontelle, in-12 , pièce plusieurs fois copiée;
Voltaire se promenant dans son jardin, in-8, gravé par B.-L.
Prévost ;
M. de Voltaire dessiné à Ferney et gravé par M. B. . . neS, in-4 ;
Vue au levant de Ferney, d'après le tableau du S'' Huber;
Voltaire debout dans sa chambre : J'ai interrompu mon agonie. . .;
Silhouette de Voltaire en pied , sur satin blanc ;
Credo de Voltaire ;
Le Déjeûner de Ferney, d'après Denon , in-4 ;
Le Lever du philosophe de Fern . .x, d'après Huber, in-8 ;
Voltaire couronné par Jlf«W« Vestris, par Dupin, in-1;
Jijelle Clairon aux genoux de Voltaire, eau-forte satii'ique, in-4;
Voltaire à table avec ses amis, d'après Huber, in 4 ;
Voltaire et l'étalon {Traité du Sublime), in-4 eu largeur;
Voltaire et Rousseau s'invectivant , in-8 ;
Chambre du cœur de Voltaire, in-fol. en largeur;
Tombeau de Voltaire, allégorie, in-fol. en largeur; G. M. sculpsil;
Apollon se couvrant du masque de Voltaire , allégorie par Dardel ,
gravée par A. Le Grand;
Allégorie in-fol. à la sanguine, par Ransonuette ;
Voltaire au sabbat , in-4 en largeur ;
Etc., etc.
Au Cabinet des Estampes, le recueil des portraits de Voltaire forme
plusieurs volumes in-fol. (Collection des alphabétiques).
Mais les pièces que nous citons ici sont de beaucoup les plus inté-
ressantes.
II. 29
Les HUBERT.
17i0-
François Hubert , né en 1740 à Abbeville, est un
assez bon élève de Beauvarlet. On lui doit :
La Nouvelle Hèloïse , d'après Lefèvre.
Le Retour de la nourrice^ d'après Greuze.
Deux estampes à intention grivoise, d'après Garesme
et Lefèvre : Honny soit qui mal y voit (1775), une jeune
fille qui lit l'Art d'ai^ner, mais qui semble fort distraite ;
Honny soit qui mal y pense (1777), un jeune garçon
qui mange des cerises en faisant avec deux d'entre
elles et son doigt une figure parfaitement indécente
quoiqu'en dise le titre de l'estampe. Tout cela est d'un
goût douteux.
Planches pour la Galerie de Le Brun.
François Hubert est encore l'auteur d'une suite de
portraits in-4 , représentant des marins célèbres ,
d'après Graincourt : Jean Bari, Duquesne , le Comte
de Forhin, Du Guay-Trouin , le Compte de Toulouse,
Touy^ille, Vivonne, Châleaurenaud, le Duc de Brézé,
le Duc de Beaufort, La Galissonnière, La Bourdon-
naye, le Chevalier de la Roche St- André.
Madame de '" en Hébé (L. V. Bourbon-Conti ,
duchesse d'Orléans), d'après Nattier, belle pièce in-fol.
HUBERT. 439
Liotard ,
Miromènil ,
Buffon , in-fol.,
Lètanduère , chef d'escadre ,
Panard , in-12 ,
Marie-Antoinette , dauphine, d'après Davène, iii-8.
Hubert fut un des graveurs très employés par
Esnauts et Rapilly , poui' lesquels il a gravé beaucoup
de ^ovlvaiis : Louis XV, Marie-Antoinette, d'après
Quéverdo, le Comte d'Artois , le Duc d'Orléans, père
d'Égalité, le Duc de Chartres, Louis XVI, profil,
C. de Beaumont, archevêque de Paris, le Maréchal
de Cossé-Brissac , la Chalotais , l'évêque d'A.miens
de la Motte , que le procès du chevalier de la Barre a
rendu célèbre , le Cardinal de la Roche-Aymon ,
Hue de Miromènil, Sage, chimiste, Fréron, etc.
Jean-Jacques Hubert est un élève de Le Roy, qui a
gravé des vignettes pour le Nouveau Testament et le
Précis de la Révolution de Moreau , le /. /. Rousseau
édition de Poinçot , la Henriade et le Gonzalve de
Cordoue de Quéverdo , la Bible de Marillier , le
Roman comique de Le Barbier, les Romans de la
Place de Borel, le Crébillon de Peyron , les Œuvres
de Berquin de Renouard.
Histoire de Gil Blas de Santillane, par Le Sage,
Didot jeune, 1795, 4 vol. in-8. Cette édition renferme
100 figures par Bornet , Charpentier et Duplessi-Ber-
taux, qui ne portent pas de nom de graveurs, mais qui
sont toutes signées /.-/. Hubert direxit. Il est facile
de reconnaître dans la plupart des eaux-fortes des
cinquante dernières vignettes , la main de Duplessi-
Bertaux.
HUÈT (Jean-Baptistej.
Jean-Baptiste Huët, bien connu pour les scènes
champêtres qu'il compose si agréablement, et pour les
paysages qu'il peuple d'animaux , qui grave, à côté de
Ghoffard et de Moreau , de magnifiques fleurons que
ne désavoueraient pas ces maîtres, pour le Voyage en
Grèce du comte de Choiseul-Gouffier (1778-1779) , a
traduit lui-même sur le cuivre quelques unes de ses
compositions.
Intérieur d'écurie et Intérieur d'étable, Berger gar-
dant ses bestiaux et Bergère gardant son troupeau.
Sujets de ta Fable, 16 petites pièces. — Chasses
d'après J.-B. Oudry, 3 pièces in-fol. — Des planches
de Têtes de Renards, de Loups et de Chiens, d'une
exécution très vivante. — Frises d'ornements , bril-
lamment exécutés à l'eau-forte , an Y II. — Le Cal-
vaire, d'après GasteUi (1792), in-fol. — Annonciation,
petite pièce au trait (1788), in-12.
Berger se reposant auprès de son troupeau. —
Bergère appuyée sur une vache.
Études d'animaux et de paysages dessinés par
J.-B. Huet et gravés par Huetfils, suite de 12 pièces
in-fol. et un frontispice.
H U L K.
17. .-ii
On ne commenco à voir le nom de ce graveur que
dans les dernières années du XVIIP siècle.
L'Orage d'après Grœnia, pièce politique, in-4. Deux
moines se désespèrent en voyant la foudre renverser
la croix. L« Fontaine de la régénération, d'après
Monnet , 1796, in-fol.
Frontispice de Rousseau ou V Enfance , poëme de
Desorgues.
Œuvres philosophiques de M. Hemsterhuis, Paris
1792 , 2 vol. in-8. — 26 culs-de-lampe signés Hulk.
Vignettes de Marillier pour la Bible , 8 pièces.
Frontispice pour le Voyage en Syrie, de Cassas.
Aaha ou le Triomphe de Vinnocence , an X , in-18,
frontispice et 4 figures d'après Brion.
Nous retrouvons Hulk, plus tard, sur des vignettes
de Moreau pour le Comte de Valmont , les Œuvres
de Racine (suite de 1811, les Plaideurs) et Y Ovide de
Viilenave.
Et c'est avec si peu de chose qu'un homme, un
artiste a gagné sa vie, et a fourni peut-être aux besoins
de toute une famille. Gela demeure toujours pour nous
un sujet d'étonnement.
HUOT (François).
17. .-18..
Inspiré par la lecture du fameux roman de Restif
de la Bretonne, le Paysan et la Paysanne pervertis,
Borel dessina deux compositions qui furent gravées
par Huot : l'Innocence en danger est une jolie scène
qui représente la jeune paysanne débarquant à Paris
et exposée à toutes les séductions de la capitale ; le
Voilà fait ! nous montre le Palais-Royal avec son café
de la Rotonde où le paysan se trouve compromis,
Huot a gravé quelques-uns des portraits au crayon
de Pujos , ceux de Court de Gébelin , La Harpe ,
Delille , 1783 , in-8 orné , et le portrait de son maître
de gravure Nicolas de Launay, d'après le dessin de
Aug. de Saint-Aubin.
Petit portrait de Frédéric II, et vignettes d'après
Borel pour les Mémoires du baron de Trench.
On retrouve son nom , sur une vignette de Gatel
pour Herman et Dorothée, Didot , 1800, et dans les
Œuvres complètes de Berquin, Paris, Renouard, an
XI (18031.
Les HUQUIER.
1695 -1792.
Le 9 novembre 1772 commençait, rue des Mathurins
vis à vis l'hôtel de Clugny, la vente des tableaux , des-
sins précieux et estampes choisies de l'homme que les
contemporains, pour le distinguer de son fils, appelaient
le Père Kuquier, du graveur-ornemaniste de talent
qui avait tant contribué à vulgariser les compositions
ingénieusement contournées des Meissonnier, des
Oppenord et des Watteau, du marchand-amateur
entre les mains duquel étaient passées tant de belles
choses et dont les cartons remplis de dessins , où les
anciens frôlaient les bacchanales de Gillot ou les
nymphes peu vêtues de Boucher, étaient libéralement
ouverts aux jeunes artistes venant y puiser des
inspirations , de l'éditeur accueillant enfin , qui les
encourageait en publiant leurs premiers travaux , de
Jacques-Gabriel Huquier , né à Orléans , le 9 mai
1695. Joullain le fils s'était chargé de faire la descrip-
tion des objets laissés par le vieux graveur et de les
mettre en vente.
C'est toujours avec un vif sentiment de curiosité
que Ton parcourt les catalogues des collections dis-
persées. On y saisit bien les tendances et les goûts des
444 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
amateurs disparus qui les avaient formées et l'on y
devine presque leur caractère. Celle-ci était fort belle
et consacrée surtout à l'Ecole française. Huquier,
pour arriver à satisfaire ses goûts , s'était mis à faire
le commerce des curiosités , happant au passage pour
sa propre collection les morceaux les plus précieux
qui lui passaient par les mains, et revendant ceux d'un
moindre mérite. Cette méthode infaillible , disons-le
en passant , a toujours été pratiquée , et de nos jours
nous pourrions citer maint amateur, nous disons des
plus huppés , en qui le collectionneur passionné est
doublé d'un brocanteur redoutable. On remarquait
dans la collection d'Huquier des dessins de Michel-
Ange, de Piètre de Cortone, du Cavalier Bernin , une
Sainte-Famille, précieux dessin de Raphaël, des Jules
Romain, des Guido Reni, des Dominiquin, des paysages
du Titien ; douze compositions coloriées d'Ostade ;
des Wouvermans , des Berghem et des spécimens de
presque tous les flamands et hollandais ; six belles aqua-
relles de Freudeberg ; dans l'Ecole française des des-
sins de Le Brun, de Bouchardon, deux cents paysages
de Pérelle ; de nombreuses études et compositions de
Boucher parmi lesquelles les dix-huit dessins des Cris
de Paris, six dessins d'Ecrans, les Arts représentés en
six dessins par des enfants, les Saisons, les Eléments,
presque tous gravés par Huquier ou La Rue. J.Vernet,
Fragonard , Le Prince, Eisen , C. Van Loo, Watteau
y brillaient par d'excellents ouvrages ; on y trouvait
encore des recueils uniques ; les 247 dessins d'orne-
ments de riconologie de Jacques de Bie, 216 dessins
d'une Iconologie par Huquier , 100 feuilles d'attributs
par C. de la Fosse, les charges de Léonard de Vinci ,
HUQUIER. 445
100 dessins originaux de théâtre et d'ornements par
Oppenord , enfin de magnifiques compositions orne-
mentales du même artiste et de Meissonnier en quan-
tité considérable.
Huquier contribua plus que personne à répandre on
France et à l'étranger le goût des luxueuses décora-
tions d'appartement , de ces meubles d'une si grande
richesse de formes , en gravant les nombreux dessins
de maîtres ornemanistes qui remplissaient ses porte-
feuilles.
Voici d'après Claude Gillot des Principes d'orne-
ments^, des Scènes de la comédie Italienne .
D'après Bouchardon , Apollon et les Muses, dédié à
Bernard de Rieux , deux Livres de Vases et aussi les
1 C'est dans un cadre du goût le plus exquis, c'est entourée des plus
beaux spécimens des meubles sculptés de la Renaissance italienne et
française, de tableaux de vieux maîtres, de bronzes et de marbres d'un
grand prix , que se trouve placée la remarquable collection de livres
d'ornements de toutes les époques de M. Edmond Foule.
Ces sortes de collections n'ont été que rarement entreprises , sans
doute parce que les livres et recueils de ce genre sont fort rares ; ils
forment pourtant ici un charmant et instructif ensemble qui va des pre-
miers nielles aux arabesques de la fin du XYIII" siècle.
Signalons , dans la Renaissance , les admirables livres d'heures de
Geoffroy Tory, l'orfèvrerie de Brosamer, les livres de bijouterie de
Virgile Solis , les damasquines de Fletner et de Sylvius , les vases et
les calices du maître de 1551, l'œuvre de Du Cerceau composé d'environ
1,500 pièces, la conquête de la Toison-d'Or de noti-e vieux maître fran-
çais René Boyvin et ses livres d'orfèvrerie et de bijouterie , les suites
d'ornements d'Etienne Delaulne , celles du maître orfèvre Zundt , les
bijoux et les épées deVoëriot, les pendeloques de CoUaert, les ouvrages
de Dietterliu, et tout à la fin du XVI'' siècle, les agraphes et boutroles
des de Bry , les bijoux de Daniel ^lignot et les damasquines de Gourinont.
Au XVir', Mathurin Jousse et sa Fidèle Ouverture .Jarqinrt et ses
entrées de serrure, pommeaux d'épées et boîtiers de montres , Gilles et
Gédéon Lègaré et leurs bijoux , l'œuvre de Jean et Daniel Marot , les
446 LES GRAVEURS DU X\II1' SIECLE.
belles planches d'académies pour VAnatomie néces-
saire pour Vusage du dessin.
D'après l'élégant La Joue, des Livres de Buffets, de
Vases , d'Ornements et de Rocailles , d'Écrans, de
Paysages , d Architectures , de Fontaines , de Grif-
fonnements et de Cartouches.
D'après Watteau, des compositions encadrées d'ara-
besques ; des panneaux décoratifs intitulés :
le Bouffon , la Chasseuse ;
le Berger empressé , le Jardinier fidèle ;
la Grotte , le Berceau , le Théâtre , la Déesse ;
les Oiseleurs , le Repos des Pellerins , V Innocent
Badinage , les Plaisirs de la jeunesse ;
Apollon , Diane ;
la Danse bachique , la Voltigeuse ;
r Empereur chinois, Divinité chinoise ;
la Pellerine altérée ;
décorations de Lepautre , de Charmeton et de Bei'ain , les meubles de
BouUe, les bijoux de Daudet et de Bourguet, etc.
Pour le XVIIF siècle , si babile en décorations de toutes sortes , la
collection Foule est également des plus complètes. Les œuvres entiers
d'Oppenord , J.-A. Meissonnier et Babel . les grilles de Fourdrin et de
Lamour, les ornements à la grotesque de Gillot pour tapisseries et
panneaux gravés par notre Huquier, ainsi que ses culs-de-lampe et
devises, ses clavecins gravés par Caylus, une Iconologie en 216 planches
inventée et gravée par le même Huquier, un Recueil de 600 vases,
imaginé et en partie gravé par lui , l'œuvre complet de Watteau , de
Bernard Picart , des Cuvilliès , les décorations intérieures de Leroux ,
Blondel , De La Fosse , Toro , les rares recueils de Forty, Neufforge ,
Gauvet, Lalonde, Ranson. Puis c'est Ghoffard, Eisen, Marillier, Lajoue,
Boucher fils qui sont représentés par leurs plus ingénieuses fantaisies
ornementales. Citons enfin les chifires de Mavelot , la menuiserie de
Roubo, les séries de Salembier, Saly, Germain de Saint-Aubin , etc.,
et disons que cette collection est l'une des plus précieuses et des plus
complètes qui aient été formées.
HUQUIER. 447
le Temple de Neptune , le Temple de Diane ;
le Rendez-vous, l'Amusem,ent ;
le Chasseur content , le Repos gracieuse ;
le Duo champêtre, le Repas champêtre ;
les Jardins de Cythère, les Jardins de Bacchus :
les Éléments, suite de 4 pièces ;
les Sens , suite de 6 pièces ;
les Saisons , trois séries différentes , dont l'une en
forme d'écrans ;
Etc.. etc.
D'après Boucher, des suites de Cartouches pour
adresses, frontispices, diplômes ; Sujets et Pastorales.
D'après Oudry, Panneaux décoratifs de chasse.
U Œuvre de Juste Aurèle Meissonnier , peintre,
sculpteur , architecte et dessinateur du cabinet du
Roy, est encore l'un des ouvrages les plus importants
du graveur, tant par l'importance des pièces repré-
sentées que par leur haute valeur artistique. C'est
dans ce recueil qui se vendait chez Huquier, rue St-
Jacques au coin de celle des Mathurins, mais dont
il n'a gravé qu'une partie, qu'il faut chercher les plus
beaux, modèles de style rocaille. Huquier s'est vraiment
surpassé dans ces motifs de mobiher, enlevés à l'eau-
forte avec un brio très remarquable. Une grande partie
de ces beaux objets aux riches contours étaient exé-
cutés pour le roi : les ornements de sa Carte chro-
nologique, de son Écriloire en porcelaine, de sa
Cuvette, de ses Candélabres et de ses Chandeliers ;
le Traineau de jardin de la reine d'Espagne, des
Tables, des Tabatières, des Boites de montre, des
Gardes d'épées, des Pommeaux de cannes. dc^Sur-
touts de table , Porte-Huilier , Terrines d'argent ,
448 LES GRAVEURS DU XYIII» SIÈCLE.
Sceaux à rafraîchir. Salières, Pot-à-oil, Porte-
mouchette, Bougeoir, Girandoles, Miroir de toilette,
YÈcritoir^e de M' de Maurepas, Croix, Ciboires.
Puis ce sont les intérieurs d'appartements , la Porte
de salon de la baronne de Bezenval , le Trumeau de
glace pour un cabinet en Portugal , le Canapé du
comte de Bielenski , le Plafond d'une maison rue
Rochouard , une Grande pendule sur un panneau ,
le Cadran à vent du duc de Mortemart , le Grand
Surtout de table pour le duc de Kinston, etc., etc.
GestHuquier enfin qui a popularisé les compositions
d'Oppenord , le décorateur plein d'imagination du
Palais-Royal.
Pendant qu'en Hollande et qu'en France on exprimait
le regret de ne pouvoir appliquer les compositions si
ingénieuses et si riches de ce décorateur , et que l'on
semblait les croire ensevelies pour toujours dans la
nuit des collections particulières, Huquier qui possédait
plus de 2000 de ses dessins, s'occupait de graver les plus
beaux: le fameux recueil qui les contient parut sous ce
titre : Œuvres contenant différents fragments d'ar-
chitecture et d'ornements à l'usage des Bâtiments
sacrés, publics et particuliers, gravés et mis au jour
par Gabriel Huquier, in-fol. Le volume, dédié à Le
Normand de Tournehem, s'ouvre par un remarquable
portrait librement gravé à l'eau-forte de Gille-Marie
Oppenord, écuyer, directeur général des bâtiments et
jardins du duc d'Orléans, et contient des Livres de
Consoles, de Cartels, de Trophées, de Portes, de Chan-
deliers, de Lutrins, de Cheminées, de Tombeaux ,
de Fontaines , de Lambris , de Décorations d'ap-
partements, d'Autels, etc. Le style et le dessin n'en
HUQUIER. 449
sont pas simples, il faut l'avouer, ils sont même tous
deux singulièrement contournés, mais l'invention est
toujours neuve, originale et riche, c'est une mine iné-
puisable , comme l'a dit Huquier, pour les architectes
et metteurs en œuvre.
Trophées de fleurs chinoises, d'après Peyrotte.
Fondation pour marier dix filles , grande estampe
d'après Gravelot (l'eau-forte par Moreau).
De son cru, Gabriel Huquier a inventé et gravé Trois
livres de serrurerie et d'autres de Balcons , Rampes
pour escaliers , Grilles à divers usages . Grilles à
r usage des églises, Projets de portes. Fragments de
décorations à V usage des églises et de la Serrurerie.
Accusé d'être l'auteur d'une estampe satirique sur
les jésuites, Huquier, dit-on, pour échapper aux
poursuites de la justice, se réfugia en Angleterre et y
mourut en 1772. Toutefois Herluison le fait mourir à
Paris le 11 juin 1772,
Son Adresse gravée, qui nous a été communiquée
par M. Loizelet , représente une bibhothèque remplie
de recueils d'estampes de toutes les Ecoles. A droite
une table et un carreau dépoli pour graver, et un
carton portant l'inscription : Huquier gy^aveur, rue
des Maihurins au coin de la rue de Sorhonne. Tient
tnagasin de Desseins et Estampes pour les curieux
et ayHistes. A Paris. In-8.
On consultera avec fruit la liste de 976 pièces
d'Huquier donnée par Le Blanc dans son Manuel.
Gabriel Huquier , son fils et son élève , naquit
à Paris en 1725 , épousa le 30 novembre 1758 ,
Anne-Louise Ghéreau , fille de Jacques Chéreau , et
450 LES GRAVEURS DU XVIir SIECLE.
mourut en 1792. C'est dans l'œuvre de Boucher qu'il
convient d'aller chercher ce qu'il nous a laissé. Pour
trouver des modèles, le jeune graveur n'avait qu'à
ouvrir les cartons de son père. Bien qu'exécutées
d'une pointe un peu sèche , ces eaux-fortes sont tout
à fait dans lo sentiment de l'artiste.
La Nativité ,1756), in-4. — P'' et 2' Corps de garde.
— Le Repos champêtre. — Chasse Chinoise.
Jeune fille à l'oiseau, Jeune fille aux cages, 2
pièces petit in-4. — Le Sommeil, le Réveil , le Cheval
fondu, la Caravane , Scènes pastorales et autres, 24
pièces in-4.
Signalons aussiune jolie vignette à l'eau-forte repré-
sentant une Vente à t encan, qui fut placée comme
frontispice de divers catalogues de vente, et particu-
lièrement à celui du duc de Tallard rédigé par Glomy.
Vue de Paris, prise du Po7't des Invalides , à
Paris chez Huquier fils, in-fol. en largeur. Nombreux
personnages dans des barques.
Les HUTIN.
1715-1780.
Charles Hutin l'aîné, né à Paris en 1715, étudia la
peinture dans l'atelier de Le Moine ; il alla à Rome en
1736 et abandonna la peinture pour se livrer à la
sculpture, sous la direction de Slodtz. A son retour, en
1747, il fut nommé membre de l'Académie de peinture.
Il se fixa ensuite à Dresde, où il exécuta des travaux
de peinture importants. Il y est mort en 1776.
Son œuvre forme un Recueil de diffèy'ents sujets
coîïiposés et gravés par Charles Hutin à Dresde ,
1763, et comprend : un Titre ; deux sujets de l'Ancien
Testament {Agar et Tobie) ; onze sujets du Nouveau
Testament; un Milon de Crotone, Tarquin et Lucrèce,
Amours jouant avec un bouc, la Bergère , le Jeune
ménage, le Dessinateur, 6 Fontaines, 8 Tombeaux,
les Habitants de Listre voulant offrir un sacri-
fice aux apôt7^es St-Pierre et St-Paul, d'après le
Poussin, et un Choc de cavalerie, d'après Casanova.
Un éditeur a réuni toutes ces pièces en séries,
marquées dune lettre d'ordre de a à e. ïl y a joint
l'Œuvre de Miséricorde de François Hutin , en substi-
tuant dans la signature un C à l'F pour faire passer les
pièces comme étant de Charles Hutin.
452 LES GRAVEURS DU XVIII^' SIECLE.
François Hdtin, frère du précédent, a gravé :
Les Sept Œuvres de miséricorde, in-4 , qui repré-
sentent la mise en pratique de ces préceptes : Donner
l'aumône, Donner à boire à ceux qui ont soif, Donner
Vhospitalité aux voyageurs, Vêtir ceux qui sont nus.
Secourir les malades , Visiter les prisonniers, Ense-
velir les m,orts.
La Maladie d'Antiochus , in-4.
Apollon et Daphnè , — Pan et Syrinx, 2 p. in-4
d'après J. de Troy.
Une grande estampe en lai^geur, Décoration du feu
d artifice tiré à Rome, le soir de la fête de St-Pierre
en 1741, à la suite des réjouissances publiques
données par V Ambassadeur de Naples.
Pierre Hutin vint s'établir en Saxe en même temps
que son frère Charles ; il a gravé à l'eau-forte quelques
morceaux d'après les tableaux de la galerie du comte
de Briihl. Sainte- Famille, d'après Charles Hutin ,
in-fol. — Allégorie sur la peinture, in-fol. en largeur,
également d'après son frère. — Satyre sur la scène
parlant au parterre, 1755, in-12. — Enfant monté
sur un lion, in-32. — Quatre Amateurs dans V atelier
d'un peintre. 1754, in-8. — Paysanne saxonne, in-6.
— Recueil de différents caractères de tètes tirés de
la colonne Trajane, dessiné par F. Boucher, 12 p.
Il mourut en 1763.
Jean-Baptiste Hutin , grand prix de peinture en
1748 , fut envoyé à Rome , où il a gravé en 1750 une
Annonciation d'après J. F. de Troy. On lui doit encore
une Nativité et une Adoration des mages d'après Pit-
toni, et enfin une suite ào, Prophètes et une à' Apôtres.
Il est mort à Dresde vers 1780.
IGONET (Marie-Madeleinej.
Une très jolie estampe, la Peinture (mai 1752),
charmante eau-forte oii l'on croit voir Bouclier lui-
même peignant un paysage dans son atelier, suffirait
pour conserver le nom de cette graveuse peu connue.
La Sculpture, d'après Pierre.
L'Amusement de la Bergère, d'après Boucher.
La Petite heurrière, d'après Boucher.
La Petite ménagère , d'après Boucher.
L'Enfance chimiste, d'après E. Jeaurat.
V Education , d'après Villebois.
n. 30
Les INGOUF.
1746-1812.
Pierre-Charles Ingouf l'aîné , né à Paris en 1746,
mort en 1800, est un médiocre élève de Flipart. Nous
nous bornerons à citer de lui :
Les Mœurs du temps, estampe d'après Freudeberg,
avec cette légende : On épouse une femme , on vit
avec une autre et fon naime que soi , in-fol. (deu-
xième état, avec le titre de la Surprise) ; — la Bonne
éducation, la Paix du ménage, 2 pièces d'après
Greuze ( les eaux-fortes par Moreau le jeune ) ; — les
Sevreuses, d'après Greuze, par Tilliard et Ingouf.
Et, toujours d'après Greuze, la Rêveuse, Petite fille
tenant un chien. Petite fdle jouant avec sa poupée ,
l'eau-forte de la Fille confuse , terminée par Ingouf
le jeune, et une suite de Tètes tirées du tableau du
Paralytique, titre et 6 pièces, dédiées à Wille.
Une scène de Torïi Jones , la Mère contente , et la
Mère m^écontente, d'après P. A. Wille.
La Comtesse d'Artois et ses trois jeunes enfants ,
médaillon rond dans un encadrement orné in-4 , dédié
et présenté par sa très humble servante femme Ingouf,
gravé par P. G. Ingouf d'après la boëte donnée à cette
princesse par M. Busson , son premier médecin. —
INGOUF. 465
Jérôme Bignon. — Louis XV, portrait placé sur la
porte de l'hôtel du Département de la guerre et de la
marine à Versailles, Ingouf l'ainé del. et sculp., grand
in-4. — Le Duc de Luynes , en uniforme de colonel
général des dragons, grand in-4. — Dortous de Mai-
ran, dans la Galerie française, in-4. — Pie VI. —
Wille, graveur du roi, gravé par P. C. Ingouf 1771, à
Paris chez l'auteur rue et au coin de celle du Fossé
St-Victor chez l'Epicier au 2™, in-4.
Wille nous apprend qu'lngouf l'aîné épousa la fille
d'un boulanger, qui était fort jolie.
François-Robert Ingouf le jeune, né en 1747,
mort en 1812, fait plus d'honneur que son frère à son
maître Flipart. 11 avait un burin très fin, comme en
témoignent les estampes gravés pour le Monument
du costume , d'après Freudeberg : la Soirée dliiver,
la Promenade du soir, V Evénement au hal, et les
quelques vignettes qu'il nous a laissées.
Ingouf le jeune semble du reste avoir été fort apprécié
de son temps. Sur l'épreuve d'une figure gravée par lui
pour le Théâtre de Crébillon, Marillier a écrit : « Je suis
» très-content de la planche de M'" Ingouf. Je lui en ferai
» mon compliment lorsque je serai à Paris. Dès qu'il
» aura fait la retouche que je lui envoyé il pourra faire
» tirer son nombre et le mien (qui est de 22 épreuves)
» etrendre sa planche. J'en suis si content quejedési-
» rerois fort que M"" Ingouf voulu (sic) se charger d'un
» autre dessin de la même suite dont le sujet est bien
» intéressant. Il m'obhgeroit sensiblement. »
Au bas d'une autre pièce pour le Rousseau de Cazin,
Marillier a ajouté : « Cette planche sera charmante ,
4S6 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
» mais je n'en suis pas étonné. M'' Ingouf se fait
» distinguer en petit comme en grand.» Ingouf en effet
semblait destiné surtout à graver de petites pièces. Il
a laissé notamment une série de portraits de poètes
français , in-12, dont quelques-uns sont fort précieuse-
ment exécutés, comme Boileau, Corneille, Deshou-
lières. Chatoies Perrault , Sarrazin, Voiture.
Il mourut en 1812. Sa vente fut faite par Regnault-
Delalande en mars 1813. Voici la liste de ses gravures.
ESTAMPES.
1 . La Liberté du braconnier, — le Retour du laboureur, 2 p. d'après
Benazech; in-fol. en largeur.
2. Le Négociant ambulant, —le Soldat en semestre,
2 p. d'après Freudeberg, en largeur, mT.
3. LA SOIRÉE D HIVER , — LA PROMENADE DU SOIR —
L'ÉVÉNEMENT AU BAL (eau-forte par Duclos), 3 p. in-fol.
d'après Freudeberg [Monument du Costumé).
4. Le Petit Napolitain , d'après Greuze.
5. La Fille confuse , d'après Greuze; in-fol. en largeur, terminé par
Ingouf jeune sur une eau-forte d'Ingouf l'aîné, 1773.
6. La Fille pensive, d'après Greuze.
7. Scène de l'opéra de ZÉMIRE ET AZOR, d'après P. -G. Ingouf.
8 . Les Canadiens au tombeau de leur enfant , d'après Le Barbier, 1786 ;
in-fol.
Gérard Dow jouant du violon à sa croisée , d'après lui-même.
Planches pour le Musée français ( l'Adoration des Bergers , la Vierge au linge ) ,
la Galerie d'Espagne [l'Annonciation d'après Murillo ) , la Galerie du Palais-Boyal
{Tête de femme d'après Rembrandt), \e Cabinet Choiseul [le Retour du chasseur,
Metzu ), le Cabinet Poullain [l'Enfant au chat, Van der Werff).
Six sujets de la Vie de saint Bruno.
INGOUF. 457
PORTRAITS.
9. Alleaume, médecin, médsille et revers, ms.
10. Aristophane, 1119\ in-8.
11. Côme (le Frère) , n82. Artem litholomiœ ampliflcavit et perfecit;
in-8.
12. CrÉBILLON, d'après La Tour, ornements de Marillier, 1784,
in-8.
13. FlipaRT (J.-J.) , graveur du Roi ; dessiné et gravé par son élève
Ingouf le jeune, 1112; in-4.
14. Gessner, frontispice d'après Le Barbier, n86; in-4.
15. Henri IV, non signé; in-8 (Cabinet des Estampes).
16. La Chalotais, in-4, et le même in-8, portraits non signés.
n. L.VL.4ISDE (Jérôme de), de l'Acad. royale des Sciences, d'après
Pujos, m4; in-12.
Des mondes étoiles il nous transmet l'Histoire,
A ses calculs savants le Ciel même est soumis ,
Mais cherchant le bonheur qui vaut mieux que la gloire
Pour jouir sur la terre il s'est fait des amis.
DORAT.
18. Laporte (Joseph de), d'après Pougin de Saint-Aubin , 1*780 ; in-8.
19. Lorry (Paul-Charles); in-4.
20 . M A R I VAU X , d' après Pougin de Saint- Aubin ; élégants ornements
de Marillier, l'781 ; in-8.
21. Miroménil, allégorie d'après Goulin , 1775: in-4.
22. MoTTiN DE LA Balme. — Postwe à chevnl , dessinée d'après
nature. — Moreau junior del., Ingouf junior sculp., 1773;
in-12.
Frontispice des Essais sur l'Équitation , par Mottin de la Balme , capitaine do
cavalerie .
458 LES GRAVEURS DU XYIII" SIECLE.
23. Necker (Le Compte rendu , portrait allégorique de) ; iii-8.
Rare en premier état, avec l'adresse d'Ingouf dans la marge du bas.
24. Petit (François) ; grand in-4.
25. Regnault, curé de St-Étieune-du -Mont, d'après MeUe Loir ; in-4.
26. Rousseau (J.-J.), d'après Marillier, m9; in-18.
Frontispice de l'édition Cazin .
Eau-forte et premier état terminé, avant que le cadre ait été augmenté et
porte des palmes sous le médaillon ovale.
27. Rousseau (J.-J.), m9; in-4.
28. Sartine, lieutenant-général de police; in-8.
29. Simon, imprimeur du Parlement , nSô; in-4.
Un commencement de lettre manuscrite accompagne ce portrait au Cabinet
des Estampes : « A Monsieur Lenoir, Conseiller d'Etat. — Cette estampe a paru
» d'une grande vérité pour la ressemblance, elle est si supérieure par la finesse
» du burin qu'à ce dernier titre j'ose prendre la liberté de la mettre sous les yeux
» de Monsieur »
30. Xénophon , d'après Le Barbier ; in-8.
31. Michel Leclerc, — Charles Minart , né dans le diocèse de Beauvais
le l^r octobre n04; 2 p. in-4.
Curieux types de mendiants bien vêtus, bien chaussés, portant un blssac bien
rempli et une gourde pleine, et ne manquant de rien toute leur vie.
32. POÈTES FRANÇAIS, suite de '26 portraits in-12, gravés pour
les Annales poétiques : Boileau, Chapelle, Charles IX, Corneille,
Crébillon , M*"^ Deshoulières , Destouches , Du Perron (Davy) ,
Fontenelle , La Chaussée, La Fontaine, La Mothe fH. de). Le
Moyne, Maynard, Molière, Moncrif, Montreuil, Perrault (Charles),
Piron, Racine, Regnard, Régnier, Rousseau (J.-B.), Sarrasin,
Scarron, Voiture.
1^'' état: Le nom du personnage légèrement tracé sur la tablette blanche. —
Rare.
2^ état : Le nom du personnage en caractères plus forts sur la tablette ombrée.
33. Portrait d'homme, d'après Vestier, n76-, in-18.
34. Portraits pour VHistoire de Hollande, 9 pièces.
INGOUF. 451J
VIGISETTES, ETC.
35. Ex-libris de Viatimille.
36. Ex-libris Gheve»" d'Autun.
3T. Planches de costumes "pour l'Histoire du Théâtre, in-8.
38. Élégants costumes de ville, d'après Desrais; in-8.
89. Dame créole vêtue suivant l'usage de Lima , — Indienne du Pérou
vêtue suivant l'usage du pays, 2 p. grand in-4.
40. Planches de costumes gravées avec Trière, pour V Histoire des
inaugurations des rois, empereurs, de G. J. de Bévy, me, 14 p.
41. Gul-de-lampe allégorique d'après de Sève.
42. Gul-de-lampe d'après Hilair et planches pour le Voyage en Grèce
de Ghoiseul-Gouffier.
43. Vignettes pour r/co«oiO(/ie (d'après Gochin) ; pour les Œuvres
de Crébillon et les Œuvres de Pope, d'après Marillier; pour les
Lettres d'une Péruvienne , d'après Le Barbier ; pour le Voltaire
de Renouard, d'après Moreau ; pour Gonzalve de Cor doue,
d'après Quéverdo.
44. Le Lévite d'ÉphraÏM, belle vignette in-4, d'après Le Barbier,
pour les Œuvres de J.-J. Rousseau. — Chères et précieuses
larmes. . . pour le même ouvrage.
45. Maladie de Julie, vignette pour le i?ottsseaM de Gazin.
46. Planches d'histoire naturelle. — Costumes et antiquités , d'après
Dugoure, etc.
INGRAM (John).
1721-
Né à Londres en 1721 , Ingram a principalement
travaillé à Paris. On connaît de lui :
La Jardinière , la Bouquettière Fanchonette, la
Marchande d'œufs, la Jeune ménagère, le Savoyard
avec sa marmotte, la Vendeuse de scéléry, cahier de
6 pièces d'après Boucher.
La Bonne mère, V École domestique, la Crémière,
la Quêteuse de grand cheTuin , d'après Boucher.
L'eau-forte de la vignette de Boucher pour Cythère
assiégée, opéra - comique de Favart, terminée par
Cochin , in-8. — Figures allégoriques , d'après La
Joue , 12 pièces gravées avec Cochin et Tardieu. —
Projet de tombeau de M. le baron de Bezenval,
d'après Meissonnier.
Décoration de la grande illumination faite à Ver-
sailles à l'occasion du second mariage du Dauphin,
le 9 février 1141 , eau-forte par Cochin.
Vignette de la dédicace des Èlém^ents de fortifi-
cations de Le Blond : le Dauphin instruit par Minerve,
d'après Cochin, 1759, in-12,
Ex-libris Levassor de la Touche, d'après Cochin.
Adresse du S^ Magny (l'eau-forte par Eisen).
JACOB (Louis
4712-
Louis Jacob, graveuraii burin, né à Lisieuxenl712,
vint jeune à Paris et eut pour maîtres dans son art
Gérard Scotin le jeune et Jean Audran. « Ses ouvrages
» ne sont ni fort nombreux ni d'un mérite bien émi-
» nent, on lui reproche de l'incorrection dans son
» dessin et en général un manque d'effet. Les meil-
» leures pièces de cet artiste sont celles qu'il a
» gravées pour le recueil de Crozat. ^
Persée et And?'07nècle , les Israélites sortant d'E-
gypte , r Adoration des bergers , Rèhecca et Éliézer,
d'après Paul Véronèse {Cabinet Crozat).
Les Noces de Cana {Galerie de Dresde) .
St André, St Mathieu, St Thomas, d'après Boucher,
1776, chez Jeaurat.
Le Marais, l'Abreuvoir, le Déparât des comédiens
italiens, d'après Watteau,
JANINET (François
1752-1813.
La gravure en couleur est venue réellement à son
heure au XVIIP siècle. Elle convenait parfaitement à
ce monde de blasés qui trouvait dans la coloration de
sujets risqués et de formes entrevues un régal nouveau.
Elle était bien faite aussi pour rendre les gouaches
voluptueuses des Baudouin , des Lavreince, des Char-
lier et des Garesme. Le goût était d'ailleurs aux nou-
veaux procédés récemment découverts. Le Prince
exploitait celui de la gravure au lavis, rapidement
imité parHouël et tant d'autres; François inventait ou
perfectionnait la manière du crayon , découverte que
lui disputaient immédiatement Magny et Demarteau ;
Bonnet inventait la gravure en imitation du pastel;
le pointillé allait bientôt faire fureur; quant à la
gravure en couleur, elle trouvait pour l'exploiter de
véritables artistes : après les tentatives de Le Blond et
de Dagoty, d'autres plus experts , comme Descourtis ,
Sergent , Guyot , Debucourt surtout, s'en servirent
avec une extrême habileté. Janinet doit être placé sur
la même ligne que ce dernier pour le rendu délicat et
l'aspect harmonieux de ses planches.
Et qu'on ne s'y trompe pas ! il faut un réel sentiment
JANINET. 463
d'artiste et une dextérité extrême pour donner à ces
estampes un aspect agréable et de bon goût , pour
harmoniser ces couleurs, les raccorder et les fondre.
Le graveur doit aussi donner aux physionomies les
intentions fines des originaux et c'est à quoi Janinet
n'a pas manqué. Il mérite donc des éloges , et il faut
excuser en faveur de l'artiste de talent les essais mal-
heureux , nous le verrons, de Faéronaute.
Le début de notre graveur en couleur est une petite
pièce de forme ronde, intitulée r Opérateur, et qui
porte cette mention : gravé à Vimitation du lavie en
couleur par F. Janinet , le seul qui ait trouvé cette
manière , chez fauteur, maison de M. Vahhé Lucas,
rue du Plâtre Saint-Jacques.
A voir la coloration encore un peu dure des com-
positions de Philippe Garesme, la Bacchante enivrée,
le Satyre impatient , le Culte sistématique, nous les
placerions volontiers au début de l'œuvre de Janinet,
ainsi que le Berger couronné, la Bergère couronnée,
signés de lui , d'après le même artiste. Le Baiser de
V amour et le Baiser de V amitié, pièces rondes d'après
le dessinateur-amateur Louis Doublet , ne doivent pas
être de beaucoup postérieures.
Janinet grave alors d'après nombre de maîtres di-
vers, Houël, Freudeberg, Wille le fils, Eisen, Charlier,
Gravelot. Fragonard lui fournit le sujet de deux de
ses meilleures estampes , les médaillons de CAm^our
et la Folie (1777) , représentés par deux ravissants
bambins, et le graveur y rend à merveille les chaudes
et délicates colorations du maître.
Puis viennent les curieuses imitations des précieux
dessins d'Adrien Van Ostade , qui ornaient , rue Ser-
464 LES GRAVEURS DU XYIII^ SIÈCLE.
pente, le cabinet de l'éditeur Basan : la Tabagie Hol-
landaise (1778), la Baraque rustique, la Chaumière
flamande et la Foire Hollandoise (1779), gravées au
trait et imprimées avec des teintes plates imitant assez
bien les aquarelles du maître flamand. En même temps,
Janinet aborde le portrait et produit en ce genre
plusieurs morceaux remarquables ; sa Marie-Antoi-
nette (1774), et sa M"*"' du T..., in-4, sont deux pièces
des plus curieuses et des plus estimées. Quant au por-
trait de M^'^^ Berlin , modiste de Marie- Antoinette ,
médaillon ovale in-8, il décèle une incroyable dextérité
de la part de Janinet dans lemploi de son procédé.
C'est un chef-d'œuvre de gravure en couleur.
Janinet est aussi un excellent graveur de paysages,
habile à rendre la légèreté des ciels, la diaphanéité des
eaux, toutes les finesses du pinceau de Hubert Robert
et tout le fouillis de ses ruines. Il faut citer dans ce
genre, les Restes du palais du Pape Jules (1775) et la
Colonnade du palais Médicis, à Rome, dédiées toutes
deux au comte de Baudouin , capitaine aux gardes
françaises, qui possédait les originaux dans sa galerie ;
et deux aspects de Paris, d'après De Machy, Vue prise
du Pont-Royal et Vue prise du Port Saint-Paid .
Janinet a gravé pour les frères Le Campion, mar-
chands d'estampes , et en collaboration avec Guyot ,
AF® Guyot, Chapuy, Roger et les Campion eux-
mêmes, ces séries de petites vues rondes des Monu-
m,ents de Paris , teintées légèrement de couleur
et assez fines, d'après les dessins de Durand : Sainte-
Geneviève, à l'extérieur et à l'intérieur; Notre-Dame,
id. ; Saint-Eustache ; Saint-Sulpice ; la Place Dau-
phine; le Collège des Quatre- Nations ; l'Ambigu-
JANINET. 465
Comique ; la Halle au bled ; le Palais de Justice :
les maisons de AI. de Marigny , de M. Alexandt^e .
du Clos-Payen , de M. Demonville, de AI. Rousseau ,
de M. de Sainte-Foix , de M. de Sinéty ; etc. . .
Notre graveur exécuta d'après Huet une pièce en
l'honneur de la famille royale , à l'occasion de la nais-
sance du Dauphin (1781), sous le titre de Sentiments
de la Nation. C'est la reine , assez peu ressemblante,
assise en face du buste de Louis XVI et tenant le
dauphin dans ses bras. L'estampe se vendait chez
Isabey, rue de Gesvres. C'est un des plus délicats spé-
cimens de la gravure en couleur. L'estampe des Trois
Grâces , d'après Pellegrini , n'est pas d'un aspect
agréable. Combien plus gracieuse est la Toilette de
Venus (1783), dédiée à M""' la comtesse de Coislin, où
Janinet a rendu à ravir les colorations opalines , les
roses perlés de son modèle Boucher.
Janinet s'intitulait physicien, et les nombreuses
expériences et combinaisons de couleurs auxquelles
il avait dû se livrer pour la bonne exécution de ses
planches justifieraient jusqu'à un certain point cette
prétention , si , après la mésaventure qui le rendit la
risée de Paris et que nous allons raconter, ce titre ne
fût devenu ridicule.
On sait l'enthousiasme auquel toute la nation fut en
proie au moment des premières expériences sur les
ballons. Les lauriers de Montgolfier , de Charles et
Robert, du marquis d'Arlandes et de Pilâtre deRozier,
empêchaient sans doute notre graveur de dormir.
Toujours est-il qu'il résolut , avec son ami l'abbé
Miolan, qui allait être son compagnon d'infortune, de
s'élancer, lui aussi , dans les airs.
466 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
« Point d'expérience aérostatique depuis celle de
» M. Charles , écrivait Bachaumont , qui ait plus
» occupé le public. Ils y travaillent depuis le mois de
/> mars dernier. L'Observatoire était leur atelier. Outre
» les deux auteurs , il doit monter dans la machine
» deux autres voyageurs , le marquis d'Arlande et M.
» Bredin méchanicien. C'est au Luxembourg , dans la
» partie vague et dépouillée d'arbres , que l'ascension
» doit se faire. On n'y entrera que par le Luxembourg,
» qui , lui-même, sera fermé. Toutes les précautions
» sont prises pour qu'on ne puisse être admis que par
» billet de 3 livres. Un emplacement destiné pour les
>' voitures de la famille royale annonce d'augustes
» personnages. »
La reine , en effet , avait désiré y assister, et vou-
lait que le jour choisi fût autre qu'un dimanche à
l'heure des offices , mais le lieutenant de police eut le
courage de lui résister, par la raison que cela ferait
perdre un temps précieux aux ouvriers ; aussi semble-
t-elle avoir renoncé à assister à l'expérience.
Les deux physiciens s'assurèrent par des essais , les
17 et 30 juin 1784, du succès de leur tentative, fixée
au 11 juillet. Une estampe publiée chez Esnauts et
Rapilly, nous montre cette machine aérostatique beau-
coup plus gonflée qu'elle ne fut jamais et la légende
nous apprend que plusieurs personnes de distinction ,
le duc de Chartres et M. de Cassini entre autres, s'inté-
ressaient à l'expérience. Malheureusement pour les
expérimentateurs, « par plusieurs causes, entre autres
» par suite de la grande chaleur , la machine ne put
» s'enfler. » Le peuple, qui s'était rassemblé en grand
nombre et qui attendait le spectacle promis, franchit
JANINET. 407
les barrières , déchire le ballon , met en pièces les
instruments, brûle ce qu'il ne peut emporter et met
ainsi les infortunés aéronautes dans une situation déli-
cate vis-à-vis des nombreuses personnes qui avaient
payé leur place.
11 est intéressant dans cette circonstance, de re-
trouver le récit d'un témoin oculaire, le graveur Wille,
qui connaissait Janinet , et qui raconte ainsi le fait
dans ses Mémoires :
« G'étoit un dimanche destiné pour l'ascension de
» la machine aérostatique faite par M. l'abbé Miollan
» et M. Janinet , graveur. Cette machine , la plus
» grande de toutes celles qui avoient été déjà lancées
» en l'air, devoit partir du jardin du Luxembourg ,
V où elle avoit été transportée le jour d'auparavant.
» Gomme il faisoit un temps admirable, je proposai à
» ma femme de la mener au Luxembourg même ,
» moyennant la somme de 3 livres par personne,
» pour y voir de près l'élévation de ce ballon qui avoit
» 110 pieds de haut et devoit être monté par les deux
» amateurs, le marquis d'Arlande et un mécanicien ,
» mais elle ne voulut point consentir à être dans une
» foule de monde aussi considérable que celle qui
» devoit y être. Nous allâmes donc au nouveau bou-
» levard, chez un jardinier de notre connoissance ; là
» nous étions très commodément à l'ombre, mais aussi
» le mieux du monde pour voir le départ de la ma-
» chine. Il y avoit dans cette partie également un
» peuple infini : MM. Preisler, Baader , Guttenberg ,
» M"'" Guttenberg et son frère étoient de notre bande.
» La machine devoit partir à midi précis , mais les
» pauvres auteurs , apparemment faute de science ,
468 LES GRAVEURS DU XVIII« SIECLE.
» n'ayant pu parvenir à remplb leur ballon d'air in-
» flammable , y mirent au contraire le feu, qui le con-
» somma entièrement, et nous ne vîmes de notre place
» qu'une fumée épaisse. Gela arriva vers les deux
» heures. L'abbé Miollan et l'ami Janinet, voyant que
» tout étoit perdu, jugèrent prudent de prendre la
» fuite, cependant sous la protection de la garde, dont
» bien leur en prit , car de ce moment les spectateurs
» arrachèrent la barrière composée de planches et de
» charpentes et les jetèrent dans le feu ballonique et
» toutes les chaises qui leur avoient servi par-dessus,
» si bien que ce feu étoit un feu d'enfer, La garde
» même, quoique nombreuse , n'a pas osé s'opposer à
» la fureur du peuple.
» Le lendemain et toute cette semaine on n'a vendu
» et chanté que des chansons satiriques sur MM.
» Miollan et Janinet ; de même plusieurs estampes
» parurent pour les rendre aussi ridicules que faire se
» pouvoit, »
Non ! Ce qui s'abattit de caricatures et de pièces
satiriques sur Janinet et son associé n'est pas croyable.
Ce fut une avalanche de quolibets , de plaisanteries
et de chansons plus ou moins spirituelles.
L'une d'elles a pour titre les Deux Midas et cette
épigraphe : Chacun son métier et les vaches seront
mieux gardées , et au-dessous du ballon à plat dans
le jardin , cette légende : Vue de l Elévation du Globe
aérostatique par un détachement des gardes suisses
sous la direction de MM. Miollan et Janinet. Une
autre représentant grossièrement le pillage de la ma-
chine , est intitulée : Globe des mécontem,ps au Lu-
cembourg. Janinet a l'air navré , l'abbé lève les bras
JANINET. 469
au ciel pendant qu'un monsieur et une darne crient :
J'en arracherai pour mes 6 livres.
Sur une autre caricature qui a pour titre V Ignorance
prouvée , où l'on aperçoit le ballon qui brûle et les
deux associés évanouis , on lit ces vers où se cachent
deux pauvres jeux de mots :
Ce globe qui s'enfume est d'un minet
Méritant qu'on l'e'trille ainsi que Vasinet.
Sous le titre de V Honnête retraite de Minet et de
Janot, on a représenté le ballon mis en pièces auprès
d'un poulailler dans lequel on chasse l'abbé Miolan
en chat et Janinet en âne, avec cette épigraphe mé-
chante à tous les points de vue :
Jusqu'au ciel dans la grande et la petite Ourse,
Au siècle des ballons, un chat voulut voler;
En effet, il vola, mais ce fut dans la bourse
Des curieux qui, sans doute, ont le droit de siffler.
On abusait de ce que le pauvre abbé avait un nom
rappelant les chats pour le déguiser en chat-huant
avec un rabat, sous le nom de chai-hué. Dans le Ballon
enflammé ou grande troupe d'animaux curieux ,
l'abbé est fouetté par un suisse :
Au chat ! au chat I au chat I qu'on s'arme, qu'on le fesse.
Tandis qu'on est tranquille il emporte la pièce.
On le représentait encore ramassant des pièces de
monnaie et s'enfuyant avec Janinet , dans la bouche
duquel on met ces vers :
Je pars enfin sans tambour ni trompette ,
Mon carton sous le bras, j'emporterai le chat.
J'ai vendu mes torchons pour dorer ma palette;
Partons, Janot, il ne fait plus bon là.
II. 31
470 LES GRAVEURS DU XVIIT' SIÈCLE.
Puis les chansons se mettent de la partie. Nous
détachons les deux premiers couplets de l'une d'elles ,
gravée au-dessous de la caricature de Janinet tenant
un chat à rabat par la patte :
Certain abbé rempli d'intelligence,
Certain Janot physicien savant.
Certain abbé pétri de conscience.
Certain Janot vivant très saintement ,
D'un ballon leste
Qui toujours reste,
Sont inventeurs.
Chantons ces deux voleurs.
Ce Janot donc que l'on dit si grand homme,
Cet abbé donc , ce génie étonnant ,
Ce Janot donc Janinet on le nomme.
Cet abbé donc se nomme Miolan.
Ah! je vous jure,
Cette gravure,
De ces savans
Sont les portraits vivans.
Faut-il encore parler du clystère que l'on donne à
l'artiste pour le guérir de sa maladie, de la Montagne
accouchant d'une souris, de leur Réception à l'Aca-
dè7nie de Montmartre , académie d'ânes , où « les
chardons sont les lauriers » , de Ils font ce qu'ils
peuvent , chanson satirique, et de tant d'autres pièces
en telle quantité, que l'on arrive à prendre le parti des
infortunés aéronautes et à trouver que leur échec et
leur déconvenue ne méritaient pas tant de sarcasmes.
Janinet retourna donc à son ateher et à ses planches
et se consola dans le travail de ses expériences man-
quées. C'est même pendant les années qui suivirent
qu'il produisit ses meilleures pièces.
JANINET. 471
La Comparaison , datée de 1786, est l'une des plus
attrayantes estampes du XVIIP siècle. Deux amies
sont occupées à comparer leurs gorges dévoilées ,
dont elles ne craignent pas de faire apprécier au
spectateur invisible les fermes contours. Lavreince a
rencontré là l'une de ses plus heureuses inspirations,
et Janinet a mis à son service, pour interpréter cette
scène indiscrète, un moelleux de circonstance et une
souplesse heureuse. La gravure en couleur ainsi traitée
donne l'illusion de la gouache même.
U Aveu difficile (1787), qui sert de pendant à cette
jolie pièce , est fort agréable aussi. L/'une des deux
amies qui montrait naguère ses charmes avec com-
plaisance, a voulu sans doute en éprouver le pouvoir ;
son corsage délacé , une rose emblématique sur le
point de s'effeuiller, tout l'indique : l'épreuve a mal
tourné et l'amie, plus sage, semble lui dire, en manière
de consolation : « Que veux-tu ? Cela arrive à tout le
monde », ou bien encore : « 11 n'y a pas de remède ! »
Dans l'Indiscrétion , de même format, les couleurs
sont moins harmonieuses, peut-être à cause des verts
et des bleus des draperies , quoique les blancs laiteux
des chairs, et les têtes délicatement modelées , soient
traités avec une fraîcheur d'aquarelle.
Il faut bien en arriver pourtant à dire un mot d'une
des plus jolies pièces de Janinet, en même temps
qu'une des plus risquées, nous voulons parler de celle
qui a pour légende : Ahl laisse -moi donc voir!
Messire Priapus paraît bien rire de la curiosité plus ou
moins naïve de la jeune femme et de l'embarras de son
ami qui cherche à cacher de son chapeau à la curieuse
quelque monstruosité. Mais que de finesse, dans
472 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
ce petit tableau de Lavreince , digne de figurer dans
le musée secret du XVIIP siècle !
Le Petit conseil , et son pendant , Ah ! le joli petit
chien , d'après le même artiste , sont aussi de petites
merveilles d'exécution, mais beaucoup plus convena-
bles cette fois. Citons encore l Elève discret , et son
pendant , Pauvre Minet que ne suis-Je à ta place !
L Oiseau privé, d'après Lagrenée , pièce que l'on
trouve toujours avant la lettre et que l'on pourrait
également intituler les Indisc7'ètes , est incontestable-
ment de notre artiste, bien qu'elle ne porte pas de
signature, et l'un de ses meilleurs morceaux.
Nous aiTivons à la partie de l'œuvre de Janinet qui
touche au théâtre , et ce n'est pas la moins intéres-
sante. Une de ses bonnes estampes est le portrait de
la célèbre M""^ Dugazon dans le rôle de Nina ou la
folle par amour (1787), opéra-comique de Dalayrac.
L'artiste a été représentée par Hoin et gravée par
Janinet au moment oii, assise sur un banc, elle dit avec
âme la romance sentimentale :
Hélas ! hélas I le bien-aimé n'appelle pas l
En 1786, Levacher de Chamois entreprit la publi-
cation hebdomadaire des Costumes et Annales des
grands théâtres de Paris , ouvrage destiné à repré-
senter exactement les meilleurs comédiens , à donner
un compte-rendu soigné des débuts , des pièces nou-
velles, des détails sur la vie des acteurs et actrices
distingués, des anecdotes les concernant , etc. L'illus-
tration de ce recueil , où la gravure en couleur était
nécessaire, fut confiée à Janinet , qui a signé le plus
JANINET. 473
grand nombre des planches et nous a fourni un des plus
curieux documents qui soient restés sur le théâtre d'il
y a cent ans. Le bureau de ce journal était au Palais-
Royal, arcades dujardin, au-dessus du café du Caveau
et du Salon des Arts : « On s'attachera, disait l'aver-
» tissement, plus à la vérité des attitudes qu'à l'exac-
» titude des portraits , mais l'on reconnaîtra chaque
» personnage à sa stature et à son maintien, si ce n'est
» à la régularité des traits, que l'optique du théâtre et
» l'action qu'exige le rôle changent presque toujours. »
Notons parmi les planches exécutées par Janinet ,
d'après Dutertre, Duplessi-Bertaux ou Le Barbier,
M'^^ Contât dans le rôle de Suzanne, sortant du
cabinet où elle vient de prendre la place de Chérubin :
Je le tuerai , je le tuerai; tuez-le donc ce méchant
page. La pose de l'actrice est charmante de grâce
et de naturel , et cette jolie pièce est fort recherchée
pour être placée dans la Folle Journée de 1785. —
M"* Olivier, jolie femme qui créa le rôle de Chérubin
et mourut à la fleur de l'âge. — M"^^ Vestris, dans le
rôle de Gabrielle de Vergy, prête à découvrir la coupe
qui contient le cœur de son amant. A ce dénouement
de la tragédie de De Belloy, il fut de bon ton parmi
les femmes, pendant les premières représentations, de
s'évanouir et de se faire transporter dans les couloirs
pour s'y faire délacer. — La même M'"^ Vestris dans le
rôle de Pauhne. — M'"" Saint - Huberti , d'après
Lemoine. — La figure éveillée de ikf™^ Favart ,
dans la comédie des Trois Sultanes , où furent portés,
pour la première fois , les véritables costumes turcs.
— M"** Dugazon, dans le rôle de Babet , et Michu
dans le rôle de Biaise. — M""* Dugazon, dans une
474 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
petite planche où elle est encore représentée en Nina.
— M"'' Guimat'd, dans le ballet des Navigateurs :
Elle unit les vertus, l'esprit et la bonté
A la grâce plus belle encor que la beauté'.
M"^ Guimard était laide et maigre comme chacun
sait , et l'estampe le prouve de reste. — Gardel le
jeune dansant un de ces pas qui faisaient les délices
d'alors. — La blonde ikf'^ Colombe V aînée , qui exci-
tait tant d'admiration et d'émotion dans la Colonie ,
qu'on admirait jusqu'à ses larmes : « Les amateurs
» jugeront que lorsque ces yeux que la nature a
» voilés d une humidité voluptueuse , sans laquelle
» il y a de beaux yeux , mais sans laquelle les plus
» beaux yeux ne touchent pas, laissent ou semblent
» laisser échapper des larmes véritables , il n'y a
» pas d'hyperbole à dire que ces larmes sont belles. »
— Sophie Arnould, dans Iphigènie enAulide. —
Caillot, — M"* Raucourt , — M"' Dumesnil , — Le
Kain , — Lainez et Rousseau , de l'Académie de
musique, dans des costumes empanachés et ridicules.
— Advienne Lecouvreur, — Mole, i¥"* Renaud
cadette, Garrick, Brizard et beaucoup d'autres. —
Préville, enfin, dans le rôle de La Rissole du Mercut^e
galant, où il tenait la salle charmée pendant une
longue scène d'ivresse sans tomber dans la trivialité.
On raconte qu'il avait pour ami un grenadier appelé
Montauciel , vieux soldat qui cultivait volontiers la
bouteille. Préville lui fit apprendre son rôle , le grisa
et étudia son allure et ses gestes, qu'il porta au théâtre
en les corrigeant avec goût. Montauciel donna son
nom à un personnage de la pièce du Déserteur.
JANINET 475
Nous voici arrivés aux approches de la Révolution.
Le Projet d'un monu?nent à ériger pour le Roi
est une grande estampe d'une certaine importance.
Janinet eut-il plus de facilité à se faire payer le prix
de sa gravure, par l'huissier d'honneur de l'Assemblée
nationale , Devarenne , qui en avait conçu l'idée, que
Moreau qui réclamait, sans pouvoir l'obtenir, celui du
dessin qui lui avait été commandé ? Nous ne savons.
Puis Janinet, donnant dans l'actualité, entreprend la
publication de Gravures historiques des principaux
événements depuis Vouverture des États généraux.
Il grave les figures de la Liberté , de Y Egalité , ou
interprète tristement au lavis les froids dessins en
forme de bas-reliefs du sculpteur Moitte , et donne à
ces sujets de la sécheresse et de la tension ; « un lavis
» bistre ou rouge et un fond sombre viennent leur
» donner l'effet violent exigé par le goût du jour. »
Le Barbier , pour la sévérité du dessin et la froi-
deur solennelle des compositions, le dispute à J,-G.
Moitte, et ses estampes bibliques, la Création, Adam
et Eve, la Mort d'Abel, la Mort de Caïn, n'ont
guère été réchauffées par le lavis de notre graveur.
En somme, Janinet fut un initiateur dans l'art amu-
sant de la gravure en couleur. Il perfectionna les essais
tentés jusque-là , et montra à Debucourt la voie qu'il
fallait suivre. S'il n'a pas été comme lui un observa-
teur, un vrai peintre de mœurs , il a du moins repro-
duit avec goût des sujets extrêmement gracieux , et
qui feront longtemps encore la joie des amateurs.
Sophie Janinet , sa fille, a gj^avé au lavis.
Nous essayons d'établir ici le catalogue de l'Œuvre
de Janinet.
476 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
ESTAMPES.
I. D APRES BAUDOUIN.
1. L'Agréable Négligé; grand in-4 , cadre orné.
C'est, en couleur, la même estampe que celle qui a été gravée au burio par
Chevillet sous le titre de /e t^jer V(?^eme»t. Elle forme série avec trois pièces ,
l'une d'après Saint-Quentin, les deux autres d'après Le Clerc, citées plus bas.
Elle existe avant la lettre.
II. DAPRES BOUCHER.
2. L'Amour rendant hommage a sa mère ; petit in-folio
ovale.
Cette estampe forme série avec trois pièces de Charlier citées plus bas .
205 fr. avant la lettre, vente Béhague.
3. LA TOILETTE DE VÉNUS, n83 ; in-fol.
1^' état : Avant la lettre. 500 fr. vente Béhague.
2^ état : Avec la lettre.
30 état : Avecla lettre; l'Amour qui joue avec les cheveux de Vénus a été
supprimé. Cet état n'est pas estimé.
4. Les Nourrices. — F. Janinet sculp. le 15 aoust 1184; étude in-4
au lavis.
5. Jeune fille tenant un pot au lait; étude in-4 à la sanguine.
III. d'après garesme.
6-7. Le Berger couronné, — La Bergère couronnée,
2 p. in-4 en largeur.
8-9. La Bacchante enyvrée, — Le Satyre impatient,
2 p. in-4 en largeur.
l^i" état : Avant la lettre.
Pour la Bacchante enyvrée, il y a un état d'essai, avant toutes lettres et avant
que les figures d'une bacchante et d'un satyre que l'on voit à droite sur les
nuages aient été supprimées.
10-11. Le Culte systématique, faunes et bacchantes; —
Bacchus préside a la fête , satyre poursuivant une
bergère ; 2 p. in-4 en largeur.
1*'' état : Avant la lettre .
JANINET. 477
12. Les Plaisirs champêtres, — la Danse champêtre, 2 p. in-4 en
largeur. — Wossinck sculp. , à Paris chez Janinet.
13. Satyre versant à boire à une nymphe : au fond , un jeune homme
tenant une coupe devant la statue de Priape ; in-4 en largeur.
Cette estampe, non signée , nous a été montrée par M. Lacroix , qui l'attribue
à Garesme et à Janinet.
IV. d'après gharlier.
14-16. VÉNUS EN RÉFLEXION,— VÉNUS UÉS\RM\NT L'AMOUR,
— Le Sommeil d'Ariane , 3 p. petit iu-fol. ovale.
La quatrième pièce de la série est l'Amour rendant hommage à sa mère, d'après
Boucher.
!<"■ état : Avant la lettre.
n-18. VÉNUS SUR LES EAUX,— VÉNUS SUR UN LIT DE REPOS,
2 petites pièces ovales en largeur. — Chez Janinet, place Mauberl.
19-20. Le Sommeil de Vénus, — Le Réveil de Vénus,
2 petites pièces ovales en largeur.
V. d'après doublet.
21-22. Le Baiser de l'amitié, — Le B\iser de l'amour,
2 p. in-4 ovale.
P'' état : Avant la lettre.
VI. d'après g. eisen.
23-24. Tarquin et Lucrèce, — Joseph et Zaluca, 2 p.
in-4 en largeur. — Chez Janinet , place Maubert , hôtel de la
Limace.
1^'' état: Avant la lettre. Très rare.
VII. d'après fragonard.
25-26. L'AMOUR , — LA FOLIE , 2 p. in-4 ovale.
Ces pièces sont parmi les plus estimées de l'œuvre de Janinet.
l^r état : Avant la lettre. 565 fr., vente Mtthlbaoher.
27-28. L'Amour, — la Folie ; mêmes sujets que le? leux pièces ci-
dessus, mais in-8 en noir.
Ces deux pièces rares peuvent être attribuées à Janinet.
478 LES GRAVEURS DU XV1II« SIÈCLE.
viii. d apres freudeberg.
29-30. La Confiance enfantine, 1175 ; — La Crainte
ENFANTINE , l'774 ; 2 p. in-fol., dédiées au duc de Gallean et
au comte de Baudoin.
IX. d'après GRAVELOT.
31. NiNET A LV Cour, tiré du Cabinet de M. Godefroy de Ville-
laneuse. — Gravelot del.; frise en largeur, au lavis bistre; in-4.
32. Le Roi et le Fermier, autre pièce en forme de frise, in-4
en largeur, même dédicace. — Chez Janinet rue de l'Hirondelle
la Porte cochère vis-à-vis de l'École gratuite du dessein près le
Pont St-Michel.
33. Le Repas des moissonneurs, autre pièce en forme de frise,
in-4 en largeur, un peu plus grande que les précédentes ; même
dédicace. — Chez Janinet rue de l'Hirondelle à l'hôtel de Lasala-
mandre (sic) vis-à-vis l'Ecole gratuite de dessein.
34. Le Maréchal, pièce in-8 carré, au bistre, dédiée comme les
précédentes à M. Godefroy de Villetaneuse.
X. d'après hoin.
35. NINA (Portrait de Madame Dugazon dans la Folle par amour) ,
in-fol.
l'i état : Avant la lettre. 3,550 fr., vente MûMbacher.
XI. d'après huet.
36-3'7. Jeune bergère tenant un panier, — Jeune bergère tenant des fleurs
dans son jupon, 2 p. in-8 à claire-voie. A Paris chez Janinet.
. LES SENTIMENTS DE LA NATION. — Voyez N" 134.
XII. d'après lagrenée.
38. L'OISEAU PRIVÉ; in-fol.
Un jeune paysan semble tenir sur ses genoux un oiseau caché sous son
ctiapeau; de petites paysannes l'observent curieusement. L'intention de cette
estampe est très libre.
Nous D'en connaissons que des épreuves sans lettre : 125 fr. vente Béhague.
JANINET. 479
XIII. D APRES LAVREINGE.
39. L'AVEU DIFFICILE, 1787; in-fol.
Très belle pièce représentant une femme en chapeau , à sa toilette, le jein nu,
se retournant vers une autre jeune femme dont le corsage est délacé et qui lient
une rose à la main.
505 fr. avant la lettre, vente Béhague. — 3,000 fr., vente MûUbacher.
A été copié par Chapuy sous le titre de la Réponse embarrassante .
40. LA COMPARAISON, 1786; in-fol.
Deux jeunes fam.mes, dans un cabinet de toilette, comparent la beauté de
leurs seins .
Avant la lettre, 585 fr. vente Béhague. — 610 fr., vente MUhlbacher.
A été copié par Chapuy.
41. L'INDISCRÉTION; in-fol.
Une jeune femme, debout, coiffée d'un grand chapeau à plumes, arrache une
lettre à une autre jeune femme assise auprès d'elle.
Avant la lettre, 455 fr. vente Béhague. — 1,500 fr., vente Muhlbacher.
Le prix de l'estampe, quand elle parut en 1788 , était de 9 livres (voyez
E. Hocher, Lavreince).
Ces trois pièces : l'Aveu difficile, la Comparaison , l'Indiscrétion, sont du même
format. Ce sont les plus belles et les plus recherchées de l'œuvre de Janinet.
42. L'Élève discret; in-4. — Chez Janinet, rue Hautefeuille ,
N05.
Une jeune femme, coiffée d'un grand chapeau, étendue sur un canapé, com-
mande à un petit chien de se tenir debout sur les pattes de derrière.
Même format que la pièce suivante. Rare. 755 fr., vente Muhlbacher.
43. Pauvre Minet, que ne suis-je a t\ pl\ce! in-4.
Ainsi doit s'exclamer un amoureux absent, en pensant à ce petit chat qu'une
jeunefemmetientsur ses genoux en le caressant. — 800 fr., vente Miihlbacher.
On a vendu quelquefois , comme état d'essai de cette estampe, des morceaux
de papier sur lesquels le graveur avait essayé la teinte dos couleurs qu'il allait
appliquer, ce qui n'est pas précisément la même chose 1
44. HA! LE JOLI PETIT CHIEN; in-4. — A Paris chez Janinet
rue de l'Eperon , la 1'''^ porte cochère par la rue S* André des Arts.
Deux jeunes femmes dontl'une, debout, tient un chien soas le bras.
Il y a de premières épreuves où le nom du peintre est écrit Lavrince pour
Lavreince .
Vendu 330 fr., vente Béhague. — 1,180 fr., vente Miihlbacher.
480 LES GRAVEURS DU XVIir SIÈCLE.
45. LE PETIT CONSEIL; in-4.
Deux jeunes femmes dont l'une est debout , et l'autre, assise, écrit.
Même format que la pièce précédente.
Vendu 255 fr., vente Béhague. — 1,160 fr., vente Milhlbaclier.
46. AH, LAISSE-MOI DONC VOIR! in-4.
Ces mots sont adressés par une jeune femme à un jeune homme, au bras
duquel elle se promène dans un parc, et qui cache vivement de son chapeau la
nudité d'une statue de Priape.
Cette estampe risquée, mais très finement exécutée, a été vendue 1,100 fr.
avant la lettre , eu mars 1881 .
XIV. D APRES LE CLERC.
47-48. La Compagne de PomoNE, jeuue femme tenant un panier
de fleurs; — L.\ RÉUNION DES PLAISIRS, jeune femme
buvant et tenant des cartes ; 2 p. grand in-4 , cadres ornés.
Ces deux pièces sont du même format qne l'Agréable Négligé , d'après Bau-
douin, eil'Âmable Paysanne, d'après Saint-Quentin.
V état : Avant la lettre.
XV, d'après moreau le jeune.
49. Projet d'un monument a ériger pour le Roi, d'après
de Varène, huissier de l'AssemLlée Nationale ; dessiné par Moreau,
1790; in-foL — Présenté au Roi le 30 mars n90 par MM. de
Varène et Janinet. Sa Majesté a témoigné sa satisfaction par ces
paroles remarquables : Je suis en bonne compagnie.
Sur une place pubUque , des personnages regardent ce monument , qui repré-
sente les statues de Henri IV et de Louis XVI réunies.
1^' état : Avant la lettre .
XVI. d'après SAINT-QUENTIN.
50. L'Aimable Paysanne; grand in-4 , cadre orné.
Ce même sujet a été gravé au burin par Anselin , sous le titre de ta Coquette de
village .
L'Aimable Paysanne forme série avec l'Agréable Négligé, d'après Baudouin, et
avec la Compagne de Pomone et la Réunion des plaisirs, d'après Le Clerc.
1*'' état : Avant la lettre.
xvii. d'après watteau.
51-52. Les Comédiens comiques, — les Rendez-Vous
comiques . 2 p. petit in-4.
140 fr., vente Béhague.
JANINET. 48i
XVIII. d'après willb fils.
5:5-54. La Noce de village, — le Repas des moisson-
neurs, 2 p. in-fol. en largeur.
État, très rare, avant l'encadrement.
XIX. d'après divers.
55. L'Opérateur, petite pièce représentant un saltimbanque , et ainsi
annotée sur l'épreuve du Cabinet des Estampes : Cette planche
gravé à l'imitation du lavie en couleur par F. Janinet, le seul
qui ail trouvé celle manière.
50. La Joueuse de guitare. — Jeune femme jouant de la
guitare, debout devant une table à ouvrage sur laquelle est un
miroir. Un fauteuil renversé à gauche. A droite deux petits
chiens sur un fauteuil ; in-4 , sans aucune lettre.
Rarissime. 150 fr. 1881.
57. Les Saisons, par Bouchardon , 4 p. au bistre sur une seule feuille
fond bleu. Monet del.
58. L'Arrêt du destin , d'après Brion de la Tour.
59. L'Offrande à l'Amour; in-fol. en largeur.
60. Les Trois Grâces, d'après Pellegrini ; in-fol.
61. Hébé , — la Jeune Vestale, 2 p. in-4 ovale, d'après Le Barbier.
62-63. Le Sommeil de Diane, — "Vénus aux Colombes, 2 p. in-4 ovale,
d'après Le Barbier.
64-67. La Création, — Adam et Eve, — la Mort d'Abel, — la Mort
de Caïn , 4 p. in-fol. en largeur, d'après Le Barbier.
68. Le Combat des Horaces et des Curiaces, d'après Le Barbier; in-fol.
69 74. Les Muses présentées à Minerve, — Hercule présenté a Jupiter
et à Junon , — la Vertu de Lucrèce, — les Derniers Moments de
Démosthène, — la Constance de Coriolan, — la Conspiration de
Catilina découverte ; bas-reliefs d'après J.-G. Moitte.
75-';9. La Baraque rustique, — la Chaumière flamande. — la Tabagie
hollandaise, — la Foire hollandaise, m9, — le Nouvelliste, 5 p.
d'après A. Van Ostade.
482 LES GRAVEURS DU XVIII'' SIECLE.
80. Vues de la Grèce , 2 p. in-8 rond , d'après Pernet.
81. l'''' et 2'' Ruines romaines, d'après Pernel ; in-foL ovale.
82. Vestiges d'un temple de la Grèce, d'après Pannini ; iu-fol. en
largeur.
88. COLONADE (sic) ET JARDINS DU PALAIS MÉDICIS ,
d'après H. Robert ; belle pièce iu-fol.
84. Restes du palais du pape Jules II , d'après H. Robert.
85-86. Villa Madama , — Villa Sachetti , 2 p. d'après H. Robert, n*78 ;
iu-fol.
87. Restes d'un temple aux environs de Pouzzole, d'après Clérisseau ,
me. Pendant de la Colonade du Palais Médicis.
88. Fontaine soutenue par des cariatides, d'après Saint-Quentin ; pièce
imprimée sur fond bleu et rehaussée de crayon blanc ; in-fol.
Chez Janinet.
89-90. Vues de Paris, d'après de Machy; 2 p. gr. in-fol. en largeur.
1. Vue intérieure de Paris, du Port StPaul, prise au bas du parapet.
2. Vue de Paris, du Port St Paul, prise au bas du parapet.
91. Projet d'un palais de législature, dédié à l'Assemblée Nationale et
présenté le 20 mars 1791, d'après Gilbert.
92. Chute du Staubbach, d'après Wolff.
93. Paysage, in-fol. en largeur. — J. Houël f. 1768. Gravé en l'T74,
au lavis. Dédié à M. Guilliet, peintre de la Ville.
Passage d'un ruisseau devant les vieux remparts d'un village.
94. Marine (l'île de Wight) , d'après Atkins ; in-fol. en largeur.
95. Vues pittoresques des principaux édifices de
Paris, "73 planches en couleur, in-8, par Janinet, Guyol .
Roger, Sergent. — Chez les Campion.
96. Vues des plus beaux édifices publics et particuliers de la ville de
Paris, dessinés par Durand, Garbizza et Mopille, archi ectes, et
gravées par Janinet, J.-B. Chapuis, etc. — Frontispice par Janinet
et 88 planches en noir, in-4 en largeur.
Ouvrage publié sous l'Empire. 11 y a eu une première édition, avec 4*2 plancbe-
seulement, tirées en couleur.
JANINET. 483
91. XI V Cahier do principes de desseins d'après nature, faits par
Thomas Le Clerc et gravés par Janinet , dédiés à M. Pierre,
premier peintre du Roy. — 6 feuilles, à la sanguine.
98. Têtes d'étude, d'après Greuze (Homme, Femme, Enfant, Juive).
99. Recueil de différents vases, 2 cahiers de 4 pièces.
100. Rosaces, 2 cahiers de 4 pièces.
101. Sujets galants de forme ronde, imprimés à quatre par feuille.
— BotTONS , etc.
Janinet a gravé un grand nombre de ces feuilles, qui sont fort intéressantes;
les boutons, les petites scènes avec costumes ou vues d'intérieur sont très
recherchées .
102. Planches de costumes pour les Costumes et Annales des grands
théâtres de Paris ; in-8, d'après Duplessi-Bertaux et Le Barbier :
la Colère, la Vengeance, la Terreur, le Rire, la Douleur, l'Ava-
rice, Cateau et Lucas dans la Partie de chasse de Henri IV, etc.
103. Mémorial pittoresque de la France, ou recueil de toutes les belles
actions, traits de courage, de bienfaisance, de patriotisme et
d'humanité arrivés depuis le règne de Henri IV jusqu'à nos jours,
par M. L. B. , ouvrage proposé par souscription ; in-4.
Quelques livraisons seulement ont paru. Elles contenaient des planches de
Janinet : Henri IV jouant au cheval avec ses enfants. — Henri IV à l'assemblée
de Rouen. — Trait de bonté du duc de Bourgogne. — Où vas-tu malheureux?
Mourir. . . — Trait de courage de Catherine Vassent. — J.-J. Rousseau secourant
une vieille femme.
104. La Valeur l'écompensée , allégorie ( Neptune offre à la France
l'empire de la mer), d'après Le Barbier; in-4 au lavis.
105. Gravures historiques des principaux événements depuis l'ouverture
des États-Généraux , 1789 ; suite de pièces in-8 au lavis.
106. Prise de la Bastille par les gardes-françaises et les bourgeois de
Paris; iii-4 au lavis. — Chez Janinet, l'ue Haulefeuille.
107. L\ FÉDÉRATION, n90 ; in-fol. en largeur.
108. La Liberté, — l'Égalité, 2 p. in-fol. d'après Moitié.
109. La Prison du Temple ; iu-4 rond.
110. La Naissance de Monseigneur le Dauphin , pièce allégorique gravée
au burin , avec médaillon de Louis XVI par Duvivier, nsi ; iu-4
en largeur. — Se vendait Chez Janinet , place Maubert.
484 LES GRAVEURS DU XYIIF SIECLE.
111. Pièce allégorique , avec divers médaillons appliqués sur une
colonne, Louis XVI, etc.; grand in-4, au lavis.
Dans les catalogues de ventes, on met quelquefois sous le nom de Janinet des
pièces qui ne sont pas signées, mais qui se rapprochent de sa manière. Il faut
se défier de ces attributions . Par es.emple l'Ambigu, petite pièce copiée d'une
vignette de Moreau pour les Chansons de La Borde, est signée en toutes lettres
Simpson ; une sanguine, la Belle Jambe , in-1 , chez Janinet , est signée Gilbert
sculp., etc.
PORTRAITS.
112. Janinet , né à Paris en 1752, célèbre physicien; in-8 ovale.
11 est coifTé d'un grand chapeau de feutre , et louche fortement.
1 1 3. Arnould (Sophie), rôle d'Ipliigénie, dans Iphigénie en Aulide ; in-8
ovale.
Ce portrait est intéressant , puisque c'est le seul passable qui nous reste de
la spirituelle actrice. Comme beaucoup d'autres que nous indiquons ici , il a été
fait pour les Costumes et Annales des grands théâtres de Paris, par M. de Chamois,
publication qui paraissait tous les samedis. On y rendait compte des débuts,
des pièces nouvelles , des anecdotes relatives au théâtre ; on y donnait des
détails sui la vie des auteurs et acteurs. L'ouvrage coûtait 36 livres par an.
11 forme 4 vol. in-4 ou in-8 , avec nombreuses figures en couleur par Janinet et
autres .
114. BERTIN (Mademoiselle), marchande de modes de Marie -Antoi-
nette. — F. Janinet sculp.; in-8 ovale, sans légende.
Elle est presque de face. Cheveux bouclés et étages, recouverts d'une mous-
seUne formant bonnet. Corsage décolleté, les épaules couvertes d'un fichu noué
sur le devant du corsage.
Chef-d'œuvre de gravure en couleur; jamais on n'a obtenu plus de fondu et
plus d'harmonie dans les teintes. Le modelé est aussi très remarquable.
On ne connaît de ce portrait que quelques rares épreuves ; elles ne portent
point le nom du personnage. M. Didotl'a catalogué comme étant M^^Dugazon.
351 fr. 1881. — Une épreuve avant la signature de Janinet, vendue en février
1881.
115. Brizard , rôle du vieil Horace , in-4. [Costumes et Annales.)
116. Caillot, dans To m Jones; in-4. [Id.)
m. Colombe (Mademoiselle), en pied, rôle de Belinde dans la
Colonie ; in-8. (Id.)
118. Colombe l'Aînée (Mademoiselle), dans la Colonie , de profil;
in-8 ovale. [Id.)
JANINET. 485
119. CONTAT ( Mademoiselle) , rôle de Suzanne : Je le tuerai. Tuez-le
donc ce méchant page; d'après Dutertre ; in-4. (/d.)
Jolie pièce très rechercliée des bibliophiles , qui la placent dans l'édition du
Mariage de Figaro de 1785.
120. Contât (Mademoiselle), rôle de Suzanne: Suzanne sort en
riant... — Réduction in-8 de la pièce précédente. Rare. [Id.)
121. Dugazon (M') , rôle du Chevalier de Forbignac dans les Curieux
de Compiègne. [Id.)
122. Dugazon (Madame), rôle de Babet, dans Biaise et Babet. —
J t se; in-8. (Id.)
a II faut voir la pantomime du rôle de Babet. . . que de nuances fines et déli-
» cates la voix de Madame Dugazon ne donne-t-elle pas dans ce rôle aux expres-
» sions les plus simples. Il n'y a pas un mouvement de son jeu qui n'ajoute
» aux mouvements de la scène , et la varie avec autant de vérité que de grâce. »
(Grimra.)
123. Dugazon (Madame), rôle de Nina : Paix... il appelle , hélas !
hélas ! — D'après Dutertre ; in-8. {Id.)
Nina, ou la Folie par amour, de Marsollier des Vi vetières, musique de Dalayrac,
fut représentée pour la première fois le mardi 15 mai 1786, sur le théâtre italien,
avec un succès qui ne peut se comparer qu'à celui du Mariage de Figaro. Ce fut
un triomphe pour Madame Dugazon . « S'il est vrai , — dit un contemporain , —
» que cette actrice, toute charmante qu'elle est au théâtre, hors delà scène
» manque également d'esprit et de goût, il faut se mettre à genoux devant son
» talent , et l'adorer comme le prodige de quelque inspiration divine. »
n DUGAZON (Madame), sous le nom de Nina (V. plus haut, u° 35).
124. DUT.... (Mademoiselle), de face, assise devant sa table de toilette ;
elle tient des roses de la main droite, une lettre de la main gauche ;
son miroir la reflète de profil. — D'après Lemoine ; grand in-4
ovale, cadre carré. — Chez Basan et Poignant.
Belle et intéressante pièce, rare à rencontrer dans une condition satisfaisante.
La plupart des épreuves , au lieu d'avoir leur marge , sont coupées à l'ovale et
rapportées dans un cadre.
125. FavART (Madame), rôle de Roxelane ; in-8. [Costumes et Annales .)
126. Franklin; in-4 ovale.
l^i^état: Avant la lettre.
12*7. GuiMARD (Mademoiselle), dans \e haWel dn Navigateur ; in-8.
[Costumes et Annales.)
On se rend bien compte, par cette petite estampe, de la laideur de cette actrice.
« Sa maigreur la fait ressembler à une araignée ; elle a le son de voix rauque
» et dur » , disait-on d'elle.
u. 32
486 LES GRAVEURS DU XYIIP SIECLE.
128. Henri IV, — Grillon, — Sully, 3 p. in-4 ovale.
129. Joseph, sourd et muet, 1173; ia-8, au lavis.
130. Lekain, dans Mahomet, d'après Brion de la Tour; in-8 ovale.
{Costumes et Annales.)
131. LOMÉNIE DE Brienne, Archevêque de Toulouse, Principal
Ministre d'État et Chef du Conseil royal des Finances , d'après
Cossard ; in-4 ovale.
132. MARIE -ANTOINETTE, jeune, portrait à mi-corps, de trois
quarts à droite, corsage décolleté, grand manteau royal fleurdelisé
couvrant le bras gauche, coiffure haute avec plumes et aigrette ;
in-fol. ovale, avec un encadrement mobile carré, colorié et doré.
Un des plus remarqxiables portraits de la Reine, et une des pièces les plus
recherchées de la gravure en couleur.
L'estampe est le plus souvent accompagnée d'un cadre mobile qui en recouvre
les marges, et qui est percé dans le milieu pour laisser voir le portrait.
Le prix du portrait , lors de sa publication , était de 13 livres 10 sols avec le
cadre. — Vendu 440 fr. vente Béhague. 700 £r. 1881 .
11 existe des épreuves avant la lettre, très rares . 2,850 û. vente Mûhlbacher.
133. MARIE-ANTOINETTE, petit profil à droite, dans un cercle de
40 mm. de diamètre. Elle est représentée plus âgée que dans le
portrait précédent. La robe est décolletée , un manteau doublé
d'hermine est attaché sur l'épaule droite. La coiffure est haute,
avec trois plumes et une petite aigrette. Un double trait rond
forme le cadre. Au-dessus, en deux lignes : Marie-Antoinette,
Reine de France. (Collection Béraldi.)
134. MARIE -ANTOINETTE et le Dauphin devant le buste de
Louis XVI , estampe d'après Huet, intitulée LES SENTI-
MENTS DE LA NATION.
La Reine, portant la couronne royale, est assise et tient dans ses bras le jeune
Dauphin. L'intérieur du cartouche est orné d'nn ruban bleu ondulé, auquelse
mêlent du lierre, des lys et des roses ; on voit à gauche un épagneul.
Antoinette, des Lys espérance bien chère,
Ce beau jour met le comble à la Félicité.
Vous êtes dans nos cœurs, Roi , Reine, Dauphin et Mère (sic)
Réunis par l'Amour et ta Fidélité.
GUICHAHD.
Cette jolie pièce fut publiée chez Isabey, à l'occasion de la naissance du
Dauphin , le 22 octobre 1781.
Vendu 235 fr., 1876.
135. Michu, dans Biaise et Babet] in-8. {Costumes et Annales.)
JANINET. 487
136. Ollivier (Mademoiselle), dans ilwipAy<rton; in-S. (/d.)
137. Préville, rôle de Crispin, d'après Dutertre; in-4. (/d.)
138. Raucour (Mademoiselle), rôledeMédée; in-4. {Id.)
139. SAINT-HUBERTI (Madame), de l'Académie Royalle de Musique,
d'après Le Moine, profil in-8, ovale dans un encadrement carré.
Une épreuve de cette jolie pièce, avant la lettre, a été vendue en 1880 .
Les belles épreuves sont à l'adresse de Janinet, place Maubert, vis-à-vis la
rue des 3 Ports.
Les épreuves provenant du volume des Costumes et Annales sont faibles.
140. Saint-Huberti (Madame), rôle de Didon, d'après Dutertre ;
in-8. {Costumes et Annales.)
141. Vestris (Madame), rôle de Gabrielle de Vergy. {Id.)
Dans la dernière scène delà tragédie de De Belloy, Gabrielle prenant une coupe
qu'elle croit être pleine de poison , la découvre et y trouve le cœur sanglant do
son amant Raoul. Cette scène produisit une impression immense; au même
instant , la salle retentit d'applaudissements et de buées, de cris d'admiration et
de cris d'borreur ; plusieurs femmes s'évanouirent , d'autres tombèrent en con-
vulsion. « Madame Vestris a porté l'illusion au dernier degré : ses regards en
» découvrant la coupe, les sanglots qui lui échappent , l'image de la mort qui se
» répand sur ses traits , toute cette pantomime est d'une vérité déchirante! »
(Grimm.) — Cette scène devint ce qu'on appellerait aujourd'hui le clou de la
pièce . Nos pères ne connaissaient pas le mot , mais ils connaissaient la chose .
142. Portraits divers pour les Costumes et Annales des grands théâtres
de Paris : Garrick ; — Melle Dumesnil ; — Madame Gonthier ; —
Madame Vestris dans Polyeucte ; — Madame Dugazon , rôle
d'Azémia ; — Gardel le jeune ; — Desessarts dans le Glorieux ;
etc.
143. PORTRAIT D'UNE JEUNE PRINCESSE ( Frédérique-
Sophie-Wilhelmine ? ) , de face, le corps tourné vers la gauche.
Elle est dans un parc, accoudée à l'angle d'une balustrade. Elle
tient dans la main droite une couronne de fleurs, dans la gauche
un portrait d'homme. Un panier de fleurs est placé sous son bras
droit; un ruban bleu s'en échappe, sur le(juel on lit Frider. —
Rond , in-8.
Charmant portrait, sans signature, dans le genre de Janinet. L'exécution en
est très fine.
JARDINIER (Glaude-Donat).
1726-1174.
Cet excellent élève de N. Dupuis d'abord , puis de
Laurent Gars , né à Paris en 1725, a très peu gravé,
mais ses estampes sont exécutées d'un burin ferme et
agréable. Il passe pour avoir travaillé, lui aussi , à la
grande planche de il/"* Clairon en Médée.
Les quelques pièces signées de Jardinier sont :
Le Silence , ou Ne réveille pas , d'après Greuze, in-
fol. en largeur, belle pièce que Beauvarlet a presque
entièrement gravée et que Jardinier a seulement
terminée.
La Tricoteuse endormie , d'après Greuze , estampe
d'une grande harmonie, petit in-fol.
Les Caresses réciproques, d'après Jeaurat.
Soldats jouant aux cartes , d'après Valentin , et
des planches pour la Galernc de Dresde.
Un portrait du chirurgien Moreau, d'après Ducreux,
1758, in-8.
Jardinier est mort en 1774.
JEAURAT (Edme;
1688-1738.
Edme Jeaurat le graveur et son frère cadet Etienne
Jeaurat le peintre sont nés à Vermenton près d'Au-
xerre. Il faut pour bien comprendre l'œuvre d'un
artiste, connaître ses alliances et ses relations , c'est
ce que démontre clairement celui d'Edrae Jeaurat ,
qui n'a pour ainsi dire interprété que trois peintres,
Sébastien Leclerc fils dont il avait épousé la sœur,
Vleughels son ami , et surtout son frère Etienne
Jeaurat dont il a été le graveur attitré.
Edme Jeaurat prit les leçons de Bernard Picard ,
avant son départ pour la Hollande, et conserva tou-
jours dans sa manière ce goût de pointillé dans les
chairs qui est particulier à son maître. Après avoir
copié des estampes de Vosterman et de P. de Jode ,
d'après Rubens , et avoir gravé quelques planches
d'après les maîtres, Pan et Syrinx d'après Mignard ,
Femmes au Bain , Venus et l'Amour (1708), d'après
Poussin , Enlèvement d'Europe (1709) , d'après Vé-
ronèse , et divers tableaux pour le cabinet Crozat :
d'après le même Véronèse , Moïse sauvé des eaux ,
et d'après Mola , Jacoh et Rachel et le Repos en
Egypte , il semble s'adonner complètement à repro-
490 LES GRAVEURS DU XYIIF SIÈCLE.
duire les compositions de son beau-frère Sébastien
Leclerc fils.
Cet artiste peu connu maintenant, bien qu'il ait
été de l'Académie et peintre du roi , était le fils du
fameux Sébastien Leclerc. Son père était logé aux
Gobelins comme professeur de perspective : le fils lui
succéda , ce qui le fit nommer Leclerc des Gobelins
pour le distinguer des personnes du même nom.
Jeaurat a beaucoup fait pour conserver la mémoire
des tableaux de son beau-frère. Achille reconnu par
les filles de Lycomède (1713) est une des bonnes com-
positions du peintre et une des meilleures planches du
graveur ; Enlèvement d'Europe (1714) ; les Cinq Sens
(1712) , in-4 en largeur ; les Quatre Passions de
Vhomme ( 1713 ) , c'est-à-dire l'Ambition , l'Amour,
l'Avarice et la Haine ; in-4. En 1715, Jeaurat gravait
le portrait du graveur Sébastien Leclerc son beau-
père, puis plus tard, toujours d'après Leclerc fils, des
allégories décoratives, V Histoire, la Poésie , les Ma-
théînaliques et la Peinture (1724) , et enfin la Mu-
sique , la Géographie , le Dessin et la Danse (1734),
et en 1737, Mardocliée conduit au triomphe.
Edme Jeaurat avait fait connaissance de Vleughels ,
fils d'un peintre anversols qui était venu s'installer à
Paris. Nicolas Vleughels prenait de- ci de-là son bien
pour composer ses tableaux, mais n'avait aucune ima-
gination. Il n'a pas moins beaucoup produit et Jeaurat
beaucoup gravé d'après ses peintures.
Les jolies planches des Saisons , in-8 en largeur;
les Èlèjnents (1716), Jésus apparaissant à la Made-
leine ( 1716 ) , la Naissance de la Vierge ( 1717 ) ,
V Adoration des mages (1717) ; la Résurrection de
JE AU RAT. 491
Jésus-Christ (1718) ; Apollon et les Muses, 4 pi. in-4;
Thètis plongeant son fils Achille dans les eaux du
Styx (1719) in-fol.; Ahigaïl et David (1720) ; Salomon
adorant les idoles (1723) ; la Mort de Creuse et la
Mort de Didon (1721), 2 p. ; S'" Geneviève (1721) ;
Pyrame et Thishè (1722) ; Jeaurat demeurait alors
au bas des Fossés St-Victor, maison de M^ Lebrun ;
Télémaque dans Vile de Calypso et la Cène (1724).
11 termine en 1725 par le portrait de Vleughels d'après
Pesne.
A cette époque Edme Jeaurat avait déjà placé depuis
plusieurs années son frère Etienne dans l'atelier de
son ami Vleughels. Nommé directeur de l'Académie
de France à Rome en 1724, le peintre emmena avec
lui son jeune élève alors âgé de vingt-deux ans et
donnant les plus brillantes espérances. Edme Jeaurat
grava dix ans plus tard , d'après son frère , des études
de Femmes du peuple de Rome et des environs (1734)
que celui-ci avait rapportées d'Italie ,5 p. in-4.
A cette époque , il consacre presque complètement
son burin à la reproduction des tableaux de son frère.
Etienne Jeaurat après un séjour de quelques années
à Rome, loin d'être influencé par la grande peinture
d'histoire, trouva sa voie et son succès dans la pein-
ture des scènes famihères et même populaires. Son
goût le ramenait vite à des scènes de la rue comme
la Place des Halles ou l'Enlèvement de Police, etc.
Parmi les premières planches qu'Edme Jeaurat ait
gravées d'après son frère, il faut cHqy T Amour coquet
et VA^nour petit-maître (1732), et à la même date une
série de huit compositions dont les sujets sont tirés
des Fables de La Fontaine, et qui font plutôt ressortir,
492 LES GRAVEURS DU XYIII* SIECLE.
a dit M. Puychevrier ^ le talent du graveur que celui
du peintre. Les voici par ordre de date : le Savetier et
le Financier, V Amour et la Folie (1732) ; V Huître et
les Plaideurs , la Fortune et le Jeune enfant (1733) ;
V Astrologue qui se laisse tomber dans un puits,
V Asne portant des reliques, la Montagne qui accouche
d'une souris et la Femme noyée (1736), portant cette
mention , à Paris chez Jeaurat, rue Si-Jacques vis-
à-vis V église des Mathurins.
Nous ne devons pas oublier de signaler encore
parmi les estampes d'Edme Jeaurat deux des pièces
du Roman comique , illustré par Pater : la Bataille
arrivée dans un tripot et le Poëte Roquebrune
rompant la ceinture de sa culotte (1732) ; la planche
du chant IX de la Henriade de Voltaire (1728) gra-
vée d'après Vleughels ; Y Entrevue dans Vile des
faisans et la Cérémonie du m,ariage de Louis XIV
d'après Gh. Le Brun , des pièces d'après Bonnart fils,
Bernard Picart, Tournières, Ch. de La Fosse et même
un Pierrot content et des Figures chinoises et iartares
d'après Watteau (suite de 12 pièces).
Edme Jeaurat fut le père de l'astronome Sébastien
Jeaurat de l'Académie des sciences et du peintre
Jeaurat de Bertry. Il mourut en 1738.
1 Le Peintre Etienne Jeaurat, par Sylvain Puychevrier (1862).
JONXIS (Pierre-Henri
1759-
L'estampe des Vestales, d'après le tableau do Raoux,
gravée par Jonxis en 1784 et son meilleur ouvrage, se
vendait chez Nicolas de Launay, ce qui donne à croire
que Jonxis, né à La Haye en 1759, était son élève,
et qu'il était venu à Paris pour se perfectionner chez
lui.
Nous relevons encore de Jonxis, Vénus et T Amour,
d'après Luca Giordano, in-4 en largeur, P. H. Jonxis
sculpsil PayHsii , 1783, estampe dédiée à MM. les
Régents de la fondation de feuM""^ Duysede Vorhout.
Jonxis a gravé quelques pièces pour le Cabinet
des Fées d'après Marillier, et quelques portraits peu
importants.
JOULLAIN (François).
1697 -'•779.
François Joullain, ou Jollain, appartient à une vieille
famille parisienne de marchands imagiers , graveurs-
libraires et mouleurs de bois ; il est né en 1697,
suivant Mariette qui l'intitule disciple de Gillot.
On sait que Gillot eut pendant un temps la direction
des décorations et des habillements de l'Opéra. De là la
nécessité d'imaginer sans cesse de nouveaux costumes
pour les divertissements , et de les faire reproduire.
La série de pièces connue sous le nom de Nouveaux
desseins d'habillements à l'usage des Balets, Opéras
et ComAdies . . ., à Paris chez Joullain rue Froid-
manteau chez M. Dolibeau , cordonnier , a été
gravée très agréablement par Joullain sur les dessins
et indications de Gillot. Également d'après Gillot,
Arlequin soupirant. Arlequin glouton, la Révérence
d' Arlequin . Mezzetin , Scaramouche , 14 autres
Figures d'acteurs, IIom,me et Femme de qualité, et
quatre pièces curieuses , l'Enfance , l'Adolescence, la
Virilité, la Vieillesse.
Les types d'acteurs pour une Histoire du théâtre
Italien de L. Riccoboni , capitans , arlequins, scara-
mouches , scapins , pierrots , mezzetins , sont très
JOULLAIN. 495
intéressants et gravés par JouUain d'une façon fort
expressive.
Charles Goypel, encouragé par le brillant succès
de la suite d'estampes des Aventures de Don Qui-
chotte (1724) qu'il avait fait graver par Surugue .
Lépicié, et dont plusieurs sont signées JouUain . avait
entrepris d'illustrer de même les principales scènes
des comédies de Molière. Il avait chargé JouUain d'in-
terpréter ses dessins, et s'adressant au public, il avait
fait graver sur le frontispice , figurant un rideau de
théâtre avec spectateurs attendant l'ouverture , l'avis
suivant , placé après ce titre : Suite d'Estampes des
principaux sujets des Comédies de Molière gravées
sur les esquisses de Charles Coypel, dédiée aupuhlic
en il 26 :
« Très respectable et redoutable juge . tu n'ignore
» pas que c'est au désir de te plaire que les beaux-arts
» doivent leur naissance. C'est ce même désir qui nous
» porte à les cultiver et à les perfectionner. Ne sois
» donc point surpris de l'homage que j'ose t'offrir.
» Daigne le regarder comme une marque de recon-
» noissance que j'ay cru te devoir pour le favorable
» accueil que tu as bien voulu faire aux gravures de
» D. Quichotte. ... Je suis avec tout le respect que
» te doivent ceux qui osent s'exposer à tes regards ,
» ton très humble et très soumis serviteur, Charles
» Coypel. »
Ce petit préambule n'eut-il pas l'heur de toucher le
pubUc-amateur du temps ? Charles Goypel fut-il appelé
à de plus urgents travaux? Nous ne savons, mais nous
avons le regret de ne trouver après ce frontispice que
cinq planches petit in-4 en largeur , pour George
496 LES GRAVEURS DU XYIIF SIÈCLE.
Dandin, M" de Pourceaugnac, V École des femmes,
les Femmes sçaimntes et Psyché (1726).
Plus tard Joullain collabora à la belle édition des
Œuvres de Molière illustrée par Boucher (1734).
D en grava la plupart des culs-de-lampe. Exprimons
ici un regret, c'est que les mêmes fleurons se répètent
plusieurs fois. Cette petite lésineriedes éditeurs donne
à l'illustration quelque chose de maigre. On voit bien
que nous ne sommes pas encore au temps de Dorât.
Joullain a encore gravé d'après C. Goypel le por-
trait de Du Fresny et ceux des Enfants du Duc
d'Orléans , deux charmantes pièces exécutées en
1725 et 1727. Au bas de cette dernière où ces enfants
sont représentés faisant des châteaux de cartes , on a
inscrit ce quatrain :
Tel qui rit, voyant ces enfants
Élever un château soumis aux moindres vents,
Aurait passé pour homme sage
Si des cartes jamais il n'eut fait d'autre usage.
Toujours d'après G. Goypel, VEcce Homo, peint pour
l'église des RR. PP. de l'Oratoire, dont Joullain grava
l'esquisse . et une planche à' Etudes des principales
Têtes de ce tableau ; Armide abandonnée par Renaud,
planche dédiée au comte d'Argenson ; un Christ au
tombeau, une Annonciation.
En dehors de ces travaux , de deux Véronèse pour
le Cabinet Crozat , et de quelques planches d'après
Watteau [les Agréments de l'Eté), et d'après Lancret,
[les Agréments de la Campagne, le Concert pasloyml.
la Récréation champêtre), François Joullain n'a que
peu gravé. Il abandonne de bonne heure la pointe et
JOULLAIN. 497
le burin, qu'il maniait pourtant avec goût et sûreté,
pour se livrer, quai de la Mégisserie , au commerce
des estampes et de la curiosité. 11 grave bien encore
la Chasse au Loup et la Chasse au Sanglier, et même
le portrait de François Desportes (1733) , et un por-
trait de Le Tonnelier de Breteuil, mais c'est dès lors
à la vente des estampes qu'il s'applique comme tant
d'autres graveurs, les Basan, les Le Bas, les Claude
Drevet, etc. En 1760, il publiait un catalogue des
estampes qui se vendaient chez lui. 11 avait associé
son fils à sa maison. C'est ce filsP\ C. Joullain qui s'est
plus particulièrement adonné à la direction et à l'ex-
pertise des ventes d'estampes, de tableaux et de curio-
sités, à la même époque que Remy, Basan, Paillet, Boi-
leau, Lebrun. Il a dirigé des ventes importantes, parmi
lesquelles celles des tableaux de Paris de Montmartel,
des planches gravées , tableaux et estampes de Benoist
Audran , de Huquier , des estampes de Lallemand de
Betz , du chevalier de Damery, de Claude Drevet , de
Le Bas, do Macret, des tableaux et marbres du marquis
de Lassay, des tableaux , dessins et estampes de l'édi-
teur Jombert, du sculpteur Saly, de l'abbé Terray, du
peintre Chardin, du marquis de Brunoy.
En 1779 , l'expert Buldet vend , assisté de Joullain
fils, une collection nombreuse d'estampes encadrées,
en feuilles , et de recueils provenant de la succession
de M. Joullain, graveur et marchand. C'est le vieux
François Joullain qui vient de mourir, et la date de
1790 que les biographes donnent comme celle de sa
mort doit s'appliquer à son fils l'expert.
JUBIER.
Ce graveur à la manière du crayon, procédé dont il
avait appris le maniement de son maître Bonnet , est
l'interprète attitré des dessins au crayon mélangés
d'aquarelle de Jean-Baptiste Huet.
Il rend indifféremment ses scènes mythologiques :
Diane et Endymion , Pygmalion amoureux de sa
statue (on trouve Galathèe avant le nuage), Procris
tuée par Céphale, Offrande au Dieu Pan \
Ses scènes pastorales : la Bergère récompensée , le
Départ de la cam^pagne, le Goûter champêtre, V Arri-
me de la Ferm^ière ;
Ses paysages : les Pêcheurs , les Laveuses, le Mar-
chand de poisson. Vue d'une fontaine antique , Vue
intérieure d^ une ferme ;
Et ses compositions sentimentales : Offrande à
V Amour, Offrande à V Amitié, Offrande à V Espé-
rance. Tout cela est aussi fade comme sujets que plat
comme exécution.
La Confidence d'après Bounieu, le Berger surpris
et les Baigneuses , d'après Sarrazin , Jeune femme
assise sur un banc, d'après Garesme.
JULIEN (Simon).
1737-1800.
Simon Julien , qu'on appelle à tort Julien de Tou-
louse, né à Toulon en 1737, fut élève de Carie Van Loo
et obtint en 1760 le grand prix de peinture ; il partit
pour Rome où il resta plusieurs années. Revenu à
Paris il fut agréé à l'Académie en 1779 , mais son
tableau de réception, l'Aurore et Titan, ne fut exposé
qu'en 1800, huit mois après sa mort. Baudicour décrit
huit pièces fort rares, gravées par Julien : Loth et ses
filles. — Les Tables de la loi judaïque, grande estampe
dédiée à M. Possel , commissaire de la marine , 1773.
— La Sainte Famille servie par les anges, et la même
composition en sens inverse. — Apollon et Daphnè. —
Flore et Zèphire. — Deux planches de Têtes d'études,
faites à Rome en 1764.
Joseph - Laurent Julien , son neveu , a gravé :
l'Amour et sa mère , la Rose défendue , Titon et
V Aurore, V Étude répand des fleurs sur la vie,
l'Amour de la gloiy^e , la Folle par amour écossaise,
d'après Simon Julien , et d'après ses propres composi-
tions : Desilles à Nancy, Guerre aux tyrans, l'Amour
en réquisition, Pauvre rentier ruiné, Merlan à frire,
le Riche du Jour ou le prêteur sur gages.
JULLIENNE (Jean de).
1686-1766.
Les noms de Watteau et de Jullienne sont insépa-
rables pour la postérité. Ce sera l'éternel honneur du
teinturier des Gobelins , appréciateur des choses d'art
sous toutes les formes et admirateur fanatique de toutes
les productions du peintre de Valenciennes d'avoir fait
reproduire les dessins si élégants, si vrais et si spiri-
tuels de son ami. Il en possédait près de quatre cents,
croquis de militaires . têtes de jolies femmes ou de
caractère , études de costumes et types divers. Il eut,
après la mort prématurée de Watteau , l'idée de
répandre ces morceaux inachevés, mais plus savou-
reux et expressifs que bien des ouvrages plus terminés :
« Ils sont d'un goûst nouveau, disait-il dans son préam-
» bule, ils ont des grâces tellement attachées à l'esprit
» de l'auteur qu'on peut avancer qu'ils sont inimi-
» tables , » ajoutant qu'il n'avait rien négligé pour que
les habiles graveurs auxquels il s'était adressé ne leur
fissent rien perdre du feu et de l'esprit de l'auteur.
Jean de Jullienne avait eu la main heureuse en effet en
choisissant le jeune François Boucher pour cette
besogne , Boucher tout jeune alors et trop heureux de
gagner ainsi 24 livres à la journée. Sa pointe légère a
JULLIENNE. 50i
tiré un excellent parti de ces croquis dans des
eaux-fortes qu'il se faisait un jeu de graver; les
planches du même recueil signées du C du comte de
Caylus sont également interprétées avec justesse,
ainsi que quelques-unes signées C. N. C. (Charles-
Nicolas Gochin). D'autres d'une main plus timide,
signées /. A., sont du voisin de Jullienne , Jean
Audran , qui habitait aux Gobelins ; enfin quelques
autres signés d'un /., gravées avec beaucoup de
simplicité , nous semblent pouvoh' être attribuées à
Jullienne lui-même. Ce sont : un Vielleur , Jeune
femme assise un éventail à la main , Jeune fem^ne
vue de dos. Jeune chasseur, Soldat en marche. Tam-
bour de face , Tambour de dos , Feinme à cheval ,
Soldat saluant , Officier assis. Soldat un verre à
la m^ain, Jeune femm^e assise, etc. Cette réunion
curieuse de planches parut en deux volumes sous le
titre de Figures de différents caractères, etc. Nous
en avons déjà parlé à l'article de Boucher.
Jean de Jullienne, propriétaire des manufactures de
draps fins et écarlates des Gobelins, ainsi qu'il est dit
au bas de son portrait gravé par Balechou en 1752 ,
naquit à Paris le 29 novembre 1686, et succéda en 1721
à ses oncles Jean Gluck et François de Jullienne, pro-
priétaires d'importantes teintureries établies sur le bord
de la Bièvre, à côté des établissements du même genre
d'Etienne Gobelin, acquis par Colbertpour le roi. Mais
avant de s'occuper d'industrie , c'était un jeune ama-
teur passionné pour les arts , et même, au dire de
Mariette qui le donne comme un des principaux
connaisseurs de son temps en tableaux , dessins ,
estampes et tout ce qui est du ressort de la curiosité,
n. 33
502 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
il avait eu l'idée d'être peintre. Watteau l'en dissuada,
et lui rendit un grand service , car il n'aurait pas fait
dans cet art une aussi brillante fortune.
Jean de JuUienne épousa en 1721 Marie-Louise de
Brécy, réunit alors les deux grands établissements de
ses oncles et s'y accommoda une demeure où placer
les tableaux et objets qu'il avait déjà collectionnés.
11 fit construire à cet effet en 1730 une galerie qui existe
encore. L'expert Gersaint, dans la notice du catalogue
Quentin de Lorangère , écrite en 1743 , parlait ainsi
de cette collection : « Le goût naturel pour les belles
» choses et l'amour que M'' de Jullienne a toujours eu
» pour les arts, qu'il a même cultivés dans sajeunesse,
» se reconnoissent aisément dans le fameux cabinet
» qu'il possède aujourd'hui et à la perfection duquel il
» travaille depuis une trentaine d'années. Ce cabinet
» est l'ouvrage de ses moments de loisir qu'il y a
» sacrifiés. Il a toujours eu une attention particulière
» pour en ôter les pièces de moindre mérite à mesure
» qu'il a pu en acquérir de plus recommandables. En
» effet ce n'est qu'avec du temps, du goût et du discer-
» nement que l'on peut parvenir à ce choix délicat. »
Julliot , l'expert chargé de la vente des meubles et
curiosités de Jullienne, disait aussi de son côté :
« Des tableaux, des statues, des vases de bronze et
» de marbre des plus célèbres artistes décoraient sa
» galerie et ses appartements : leur réunion à de riches
» meubles du fameux Boule, à des porcelaines des plus
» recherchées par les qualités et les montures, le tout
» avantageusement distribué, avec de rares morceaux
» de laque, formoit un accord qui donnoit aux ama-
» teurs l'agrément le plus complet. »
JULLIENNE. 503
Son catalogue nous montre en efifet , côte à côte
avec les objets les plus précieux , des tableaux célè-
bres et sa magnifique collection de dessins. C'est au
milieu de toutes ces belles choses , se délassant dans
le commerce des artistes et la recherche des objets
d'art des occupations de sa grande industrie , qu'il
passait son existence. C'est de là qu'il surveillait la
grande publication des dessins de Watteau , sorte de
monument élevé à la gloire de son ami ; c'est dans
sa tranquille demeure qu'il s'amusait à graver avec
beaucoup de goût des planches à l'eau-forte , dont
il ne faisait tirer, dit-on , que deux épreuves : « A
» voir ces essais, a écrit M. le comte Clément de Ris ,
» on regrette que Jullienne ait été aussi modeste et
» n'ait pas dirigé de ce côté son goût et l'emploi de
» ses loisirs. Son burin (ou plutôt m pointe) ressemble
» beaucoup à celui du comte de Caylus dans ses fac-
» simile. Il est moins habile et moins exercé, mais il
» possède plus d'accent et de couleur. » Le Mendiant
et V Estropié, d'après D. Téniers , deux Têtes de
soldats casqués et une Académie d'homme , d'après
Restent , justifient cette appréciation.
Le roi créa Jullienne chevalier de l'ordre de Saint-
Michel , et sur la présentation d'un exemplaire rehé
en maroquin de l'Œuvre de Watteau , l'Académie le
nommait séance tenante conseiller honoraire-amateur.
Pendant vingt-cinq ans , il fut assidu aux séances , où
il aimait à se retrouver avec tout ce qu'il y avait alors
de plus distingué en fait d'artistes et d'amateurs.
Jean de JulUenne mourait le 20 mars 1766.
« Une complexion naturellement foible , avoit été
» réparée par des mœurs sages, honnêtes et tran-
304 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
» quilles ; un exercice pris dans la nature, c'est-à-dire
» une vie continuellement active mais uniforme, lui
» avoit formé un tempérament décidé qui l'a conduit
» jusqu'à un âge fort avancé. On l'a vu jusqu'à 78 ans
» se lever à son ordinaire à cinq heures du matin,
» même en hiver, et rester jusqu'à midi sans feu, animé
» du zèle de veiller à ses affaires et récréé seulement
» par la vue de ses cabinets où son goût le rappeloit
» sans cesse. On l'a vu s'y faire promener encore pen-
» dant deux heures sans feu , dans la plus grande
» rigueur de 1765 , quoiqu'il fût âgé de 80 ans. »
Deux portraits bien connus nous ont conservé les
traits de l'ami de Watteau. Il est représenté dans un
parc jouant du violoncelle dans le tableau peint par
cet artiste , qui s'est fait figurer dans le fond. Ce
portrait qui nous le montre encore jeune , de figure
intéressante et douce, a été gravé parTardieu. Au bas
sont ces vers :
Assis auprès de toi sous ces charmants ombrages.
Du temps, mon cher Walteau , je crains peu les outrages
Trop heureux si les traits d'un fidelle burin
En multipliant tes ouvrages
Instruisaient l'univers des sincères hommages
Que je rends à ton art divin.
Le second portrait , un peu postérieur, a été peint
par J. F. de Troy et gravé par Balechou pour servir
d'en-tête aux eaux-fortes d'après Watteau , dont il
tient le portrait à la main.
La collection de Jullienne fut vendue en 1767, dans
le salon carré du Louvre.
KAUFFMANN (Angélica
1741-1807.
Née à Coire dans les Grisons le 30 octobre 1741 , la
célèbre A.ngélica Kauffmann suivit dans son enfance
son père, peintre médiocre qui changeait de résidence
suivant le hasard des commandes. C'est à Côme qu'à
l'âge de onze ans elle peignit avec succès le portrait
de l'évêque de cette ville , ce qui commença sa répu-
tation. Elle visita l'Italie et arriva à Rome en 1763.
A cette époque c'était une charmante jeune fille,
sachant quatre langues, également douée pour la mu-
sique et la peinture. Mais si elle réussissait le portrait,
ses travaux de gravure sont plutôt traités en manière
d'essais et n'ont pas grande valeur artistique. Elle gra-
vait à l'eau-forte à Ischia, dans la baie de Naples , en
cette année 1763, des Etudes de têtes d'hommes, à
Rome, Bologne et Venise en 1765 et 1766, des Etudes
de femmes, le portrait de Winckelmann , le tout sans
aucune originalité.
C'est dans cette dernière viUe qu'ayant fait connais-
sance de seigneurs anglais, Lady Vervort lui offrit de
la conduire à Londres , l'assurant d'un bon accueil et
d'un grand succès. Elle y arriva le 22 juin 1768, et
s'attacha de suite à Reynolds qui eut dès lors une
506 LES GRAVEURS DU XYIIF SIÈCLE.
grande influence sur son talent. Mais Angélica eut le
tort de se laisser prendre aux grands airs et aux
séduisantes paroles d'un aventurier qui se faisait
passer pour le comte de Horn , et qui l'épousa. Elle
put obtenir sa séparation en 1760, et libre de préoccu-
pations, se livrer entièrement à son art. Nous n'en-
trerons pas dans le détail des nombreuses compositions
sentimentales ou pseudo-historiques de l'artiste , non
plus que dans la nomenclature de ses nombreux por-
traits de l'aristocratie anglaise reproduits par les
meilleurs pointilleurs de Londres. Elle donnait de
temps à autre quelques petites planches à l'eau-forte,
Suzanne, Sainte-Catherine , Vénus et Adonis mort,
d'après A. Carrache (1770) ; Hèhé , Junon , Vierge et
enfant Jésus, etc.. Boydell ayant obtenu les cuivres
de ses premières études , elle les retoucha , et en 1780
il les fit reparaître avec des travaux à l'aqua-tinte
ajoutés.
Cependant son cœur avait parlé de nouveau. C'était
pour le peintre italien d'origine Antonio Zucchi qu'il
brûlait maintenant. Elle avait gravé d'après lui une
U7''anie, les Amours d'Ulysse et de Calypso, la Shn-
plicité , et l'épousait la même année 1781 , où eUe
gravait une Sapho s entretenant avec Homère.
Plus tard , Angélica voulut revoir l'Italie et y sé-
journer. EUe mourut à Rome le 5 novembre 1807.
Le Blanc donne une liste de 35 pièces gravées par
Angélica Kauffmann.
KLAUBER (Ignace-Sébastien
1754-1820.
Klaiiber est l'un des meilleurs élèves de Wille . qui
lui avait communiqué sa belle conduite de burin, et tels
de ses portraits , ceux notamment de Carie Van Loo
et (V AUegrain n'auraient été désavoués par aucun de
nos meilleurs artistes. D'abord élève de son père ,
graveur à Augsbourg , oii il naquit en 1754 , Ignace
Klauber fut envoyé à Paris chez Wille qui l'aimait
comme son enfant , et le témoigne dans son Journal
avec sa chaleur de cœur habituelle. Quand après un
premier séjour, il doit retourner dans sa ville natale
pour revoir sa famille , en octobre de l'année 1783,
Wille a bien soin de lui remettre une lettre pour son
oncle le sénateur pour le prier instamment au'on lui
renvoie son élève chéri , qui donne de si belles espé-
rances. Le jeune homme ayant acheté un cabriolet pour
voyager à petites journées, trouve un Anglais pour com-
pagnon de voyage : « M"" Klauber, après avoir déjeuné
» avec son camarade de voyage chez nous, s'est mis
» avec lui dans sa voiture de poste devant notre porte
» et est parti accompagné par M"^ Preisler, également
» notre pensionnaire et M"" Huber son compatriote. Ils
» ont conduit M"" Klauber tous à cheval à six lieues
508 LES GRAVEURS DU XYIIP SIÈCLE.
» d'icy et là ils ont versé des larmes en se séparant.
» J'ay donné à M*" Klauber, outre une lettre à M'' son
» oncle, une à M'' Eberts à Strasbourg et comme il
» doit passer par une partie de la Suisse pour voir
» vers le lac de Constance une de ses sœurs, religieuse
» d'un couvent de ces quartiers , une lettre à mon
» ancien élève M"" de Méchel à Basle et une à M"
» Salomon Gessner à Zurich , pour y voir cet auteur
» célèbre. J'avoue sincèrement que nous étions tous
» pénétrés du départ de M"" Klauber , parfaitement
» grand et bel homme, mais dont les quahtés du cœur
» et de l'âme sont admirables et aussi parfaites qu'il
» est possible. Je souhaite de tout mon cœur que son
» voyage soit des plus heureux : Il le fait principale-
» ment pour contenter sa mère, le sénateur son frère,
» son oncle et toute sa famille qui est des plus consi-
» dérées à Augsbourg. »
De retour à Paris après six mois d'absence, Klauber
continuant à mériter par ses progrès et son talent les
éloges de son maître , celui-ci lui conseilla de briguer
les suffrages de l'Académie royale et de graver pour
s'y faire recevoir agréé le portrait de Carie Van Loo,
d'après la peinture de Pierre Le Sueur. La belle planche
que produisit le jeune graveur sous les yeux de Wille
est exécutée d'après les principes les plus purs de l'art
classique ; on reconnaît aux souples et larges tailles
qui contournent les chairs et les draperies la manière
brillante de couper le cuivre qu'enseignait le graveur
hessois.
« C'était M'' Pierre , premier peintre du Roi, dit
» encore Wille, qui présenta l'ouvrage de M"" Klauber
» à la Compagnie qui, après l'avoir examiné , l'agréa
KLAUBER* 509
» à sa satisfaction et à la mienne. M' Klauber en en-
» trant dans l'assemblée , se présenta très bien , étant
» bel homme , grand et bien fait , avec un extérieur
» rempli de candeur ; il se tira en faisant ses diverses
» cérémonies et révérences au mieux, et chacun disoit :
» Voilà un bel homme qui paroit bien honnête. Il doit
» faire un second portrait et j ay donné ma parole à
» l'Académie qu'il le feroit incessamment. Cet événe-
» ment heureux a rempli dejoye et grand contente-
» ment ma femme et mon fils comme toute ma maison
» et plusieurs amis , parce que M"^ Klauber mérite la
» distinction qu'il a reçue à l'Académie par son talent
» comme il mérite d'être estimé de chacun par ses
» mœurs. Il doit faire pour sa réception le portrait de
» M"" Allegrain sculpteur dont il a déjà le tableau. »
Ce second portrait , gravé d'après Duplessis par
Klauber, fut terminé en 1787, et lui fait aussi beau-
coup d'honneur ; l'exécution en est pourtant un peu
trop méthodique.
Après ce nouveau succès, Klauber repartait pour sa
ville natale , rappelé par sa famille, il s'agissait pour
lui d'un mariage. Wille lui adressait alors 25 épreuves
de son Écolier de Hmiem que notre graveur avait
exécuté d"après Poelenburg en 1786 , et c'est pendant
ce voyage qu'il gravait les portraits à'A7n?nan et de
Rembold, conseillers de la ville d'Augsbourg. La jeune
fille lui ayant déplu , quoique des plus riches , il reve-
nait à Paris en août 1788, avec l'intention de s'y fixer.
Klauber étant dans une situation aisée , ne tra-
vaillait qu'à ses heures. Nous relevons quelques pièces
signées de lui dans la Galerie de Florence : l'Amour
clairvoyant, d'après Van Loo, le portrait de Gaspard
510 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
Netscher et celui de la Femme de François Mièris.
La Révolution étant arrivée , KJauber, bien qu'ins-
crit comme grenadier du bataillon des Cordeliers ,
prit le parti d'abandonner Paris pour aller se fixer à
Nuremberg. Il avait déjà épousé la veuve du graveur
Garle Guttenberg (1791). Il y entreprit un ouvrage qui
n'a pas été continué et dont il ne parut que 22 planches
en deux livraisons, sous le titre de Figures delà my-
thologie exécutées en taille douce d'après les pierres
gravées antiques du Baron de Stosch, aujourd'hui
dans le cabinet du roi de Prusse, Nuremberg, J.-F.
Frauenholtz. Le portrait de Hertzberg fut aussi gravé
à Nuremberg ainsi que celui du graveur Bause.
Puis Klauber partit pour Saint-Pétersbourg où sa
réputation d'excellent graveur l'avait précédé et où il
exécuta de nombreux travaux : Stanislas -Auguste ,
roi de Pologne , d'après M"*^ Vigée-Lebrun , dédié à
L. A. les princes Poniatowski (1798). Èlisabeth-Ale-
xiewna, grande-duchesse, d'après M"'' Vigée-Lebrun
(1798) , charmant portrait. Le Comte de Pouckin ,
d'après Lampi (1798). Joseph, archiduc d'Autriche,
d'après Ritt (1799). Maximilien archiduc, Madeleine
archiduchesse. Le Comte de Rostopsin, d'après Tonci
(1800). Le Comte de Strogonoff, d'après Lampi (1802).
Platon , métropolitain de Moscou , d'après Gutterbrun
(1803). Le Comte Litta , d'après Wigby (1804).
Paul i«^ empereur de Russie, d'après Voille. Marie-
Feodorowna, impératrice (1805) , d'après Kugelgen.
Le Prince Kourahin. Le Comte Potocki ( 1807 ) ,
d'après Lampi.
Klauber se fixa définitivement à Saint-Pétersbourg
et y mourut en 1820.
KOBELL (Ferdinand)
4740-1796.
Ferdinand Kobell, peintre et graveur à l'eaii-forte, né
à Mannheira en 1740 , eut beaucoup de peine à décider
sa famille , qui voulait le voir homme d'affaires, à le
laisser suivre le penchant qu'il montrait pour les arts.
Il fut envoyé à l'université de Heidelberg et nommé
à son retour secrétaire de chancellerie. L'électeur
palatin , auquel il fit parvenir un de ses essais , lui
accorda une pension et l'envoya à Paris oii il séjourna
à plusieurs reprises de 1760 à 1770. Si l'on vante la
fraîcheur de coloris de ses peintures , le fini précieux
de ses dessins , on ne doit pas passer sous silence les
séries nombreuses de sujets champêtres qu'il a gravées
d'une pointe fine et agréable. Nous citerons parmi ces
planches datées tantôt de Paris, tantôt de Mannheim ,
quatre Paysages de ruines, cinq Scènes de Tabagies
(1771) dans le goûtd"Ostade, huit pièces de Jeux d'en-
fants, six Paysages datés de Paris (1770) , les Ponts ,
six pièces datées de 1778 ; les Portes de ville , six
pièces.
Les uns le font mourir en 1796, et les autres en 1799.
Son fils Guillaume Kobell , né à Mannheim en 1766 .
(îst un habile graveur au lavis et à l'aqua-tinte.
KOHL (Clément).
1752-'I8...
Clément Kohi , né à Prague en 1752, apprit les élé-
ments de la gravure dans sa ville natale et alla se per-
fectionner à Vienne chez Schmutzer. 11 a gravé d'un
burin très fin un certain nombre de portraits de petit
format :
Frédéric II.
Le Duc de Brunswick- Lunebour g , auteur du
fameux manifeste,
Léopold , duc de Lorraine et Bar, 1791 .
Gessner, médaillon avec cadre orné, 1789, in-12.
Gellert, 1792, in-12.
Frédéric-Guillaume , prince de Rohenlohe , 1790.
L'Archiduc Charles, 1802, avec une vue de bataille.
Un petit portrait du poète Burger, presque aussi
célèbre par ses excentricités matrimoniales que par
ses ballades.
Johanna Saicco, célèbre actrice.
Les deux pièces les plus délicates qu'ait produits le
burin de Kohi sont les portraits du Py^nce et de la
Princesse Gagarin, née Galitzin , 2 p. in-4 , d'après
Posch.
LAGRENÉE (Jean-Jacques).
1740-1821.
Le peintre Jean-Jacques Lagrenée , né à Paris en
1740 , fut élève de son frère Louis-Jean-François
Lagrenée l'aîné, plus âgé que lui de seize ans. C'est lui
et non son frère aîné , qui est l'auteur d'un certain
nombre de pièces gravées , ainsi que l'indique claire-
ment la signature Lagrenée M. {Minor) :
La Vierge et V enfant Jésus, d'après Lagrenée l'aîné,
jolie eau-forte in-4 datée de 1762 , et , à peu près de la
même époque, quelques petites pièces assez habiles
de facture ; différents Sujets mythologiques , d'autres
tirés de la Bible : Retour d'Abraham , le Sacrifice
d'Abraham , Loth et ses filles [1763), le Sacrifice de
Gédéon, Tobie et le poisson, V Annonciation, la Nati-
vité, r Adoration des Bergers, Jésus et la Sam,ari-
taine, le Christ au tombeau, le Baptême de V Eunuque
par Si Philippe ; tout cela ne dépasse pas le format
in-4.
La plupart des pièces de J.-J. Lagrenée ont été
gravées en Russie , où il avait accompagné son frère
appelé par l'impératrice Elisabeth et où il séjourna
trois ans : quelques-unes portent même l'indication
expresse qu'elles ont été faites à Saint-Pétersbourg :
514 LES GRAVEURS DU XVIII*' SIÈCLE.
Sacrifice au dieu Pan, Sainte-Famille, la Fuite
en Egypte, le Sommeil de Jésus d'après le Guide,
Si-Jérôme, le Testament d'Eudamidas, une étude
de Vieillard russe assis, et une grande Allégorie sur
rimpérairice Elisabeth Petrowna , d'après le tableau
de Lagrenée l'aîné.
En 1765, J.-J. Lagrenée est à Rome ; une pièce qui
représente f Offrande d'un satyre est signée Lag^^enée
inv. etsculp. 1765, Romœ ; il en est de même de deux
Fragments d'antiquités.
Puis Lagrenée reste dix-sept ans sans graver, jus-
qu'en 1782 ; alors il reprend la gravure , mais cette
fois avec un autre procédé, l'eau-forte combinée avec
le lavis. De cette seconde manière sont la Toilette de
Vénus et Apollon couronnant les arts, estampes in-
fol., un Recueil de cinq co7npositions par Lagrenée
Jeune (1782), in-4 en largeur; Anacréon, l'Amour dé-
say^mé, les Apprêts du sacrifice, la Charité r^omaine,
le Cotisée , VAnge gardien , le Sommeil de Jésus , la
Sainte-Famille aux anges et la jolie pièce les Petits
Moissonneurs et la chèvre, in-4.
En 1775, Lagrenée avait été admis à l'Académie de
peinture, sur le plafond de l'Hiver, exécuté pour la
galerie d'Apollon. 11 fut aussi professeur, et attaché à
la manufacture de Sèvres.
Il s'occupa vers 1800 d'un procédé de son invention
pour dessiner sur le marbre en incrustations et pour
peindre à l'huile sur verre.
Il est mort le 22 février 1821.
Baudicour a décrit son œuvre gravé en 53 pièces.
LA LIVE DE JULLY (Ange-Laurent de]
'1725-'! 779.
Avec ce graveur amateur nous entrons dans le
monde de la haute finance du siècle dernier. Société
spirituelle, artiste, élégante s'il en fut , mais légère à
l'avenant que celle des La Live , fermiers généraux
de père en fils , de M""*^ d'Épinay, de M'"'' d'Houdetot,
de Dupin de Francueil , du chevalier de Valory et de
M"® d'Ette, des Duclos et des Saint-Lambert. C'est
un monde folâtre où chacun cherche à tout faire mar-
cher de front, l'amour, les arts , la bonne chère . la
galanterie, à la Chevrette comme à Chenonceaux ou
Place Vendôme. Et que de petits vers ! que de madri-
gaux ! que de fins portraits et que de griffbnis !
Un des premiers essais de paysages de notre ama-
teur est dédié à son père, le fermier général La Live de
Bellegarde. Au bas, ces vers d'un fils respectueux :
Vous avez formé mes talens
Ma main vous devait cet ouvrage;
Vous inspirés mes sentimens
Mon cœur vous devoit cet hommage.
Lorsque le jeune La Live , qui vient de se marier,
grave à l'eau forte , très agréablement , le profil de sa
516 LES GRAVEURS DU XVIII* SIECLE.
femme M""^ de La Lire de Jully , dont le minois
chiffonné a été crayonné par Cochin^ il inscrit au-
dessous du portrait ces vers :
Pour charmer tous les yeux , le Dieu qui nous enflante
Réunit dans He'bé les grâces , la beauté.
Pour la faire adorer les Dieux ont dans son âme
Imprimé tous les traits de la divinité.
On pourrait croire qu'une fois par hasard, au milieu
de tous ces ménages disloqués et rassortis à côté, à la
convenance et à la mesure de chacun , on se trouve
enfin en présence d'époux qui s'estiment et s'aiment.
Et de fait La Live est très amoureux de sa femme.
Voici un paysage , anodin comme facture , qu'il lui
dédie et qui témoigne de son affection :
Iris ds mon essay recevés les prémices
Que n'ai-je le burin qui grava dans mon cœur
Les tendres sentiments dont je fais mes délices
Je surpasserais larl des plus fameux graveurs.
jyime d'Èpinay, la belle-sœur de M™^ de La Live,
apporte aussi sur le jeune ménage un témoignage
flatteur et trace de la jeune femme le portrait
suivant , dans ses Mémoires : « Je suis en vérité
» tous les jours plus contente de M™** de Jully.
» Elle a de l'esprit, et la tournure en est très plai-
» santé. Son extérieur est très froid mais elle a de
» la gaité dans l'imagination. Elle cause très agré-
» ablement lorsqu'elle est tête à tête et, quoiqu'elle
» soit fort décidée, il semble que le monde lui impose.
» Elle adore son mari et je crois que c'est une des
1 On dit aussi que ce portrait est celui de la Marquise d'Etampes.
LA LIVE. Ml
» raisons qui l'empêchent de se livrer autant à la
» société, parce que toute son activité ou plutôt tous
» ses sentiments sont dirigés vers ce seul objet.
» Cependant elle aime la dissipation , les plaisirs , le
» spectacle ; je ne sais trop comment tout cela s'ar-
» range mais cela est pourtant ainsi. Je suis très cir-
» conspecte avec elle , car, aimant son mari comme
» elle l'aime , elle auroit sûrement très mauvaise
» opinion de moi , si elle pouvoit savoir à quel point
» je suis loin de penser comme elle. »
Mais hélas ! l'influence d'un entourage aimant trop
le plaisir et d'une société corrompue ne tarde pas à se
faire sentir et l'opinion de M™^ d'Épinay sur la fidélité
conjugale de sa belle-sœur se modifie sigulièrement
quand ce modèle d'épouse s'enthousiasme pour le
chanteur Jéliotte dont elle fait son amant , et quand
elle-même doit , sans trop se faire prier, servir leurs
amours à son château de la Chevrette. Un beau jour
M™^de Jully lui signifie qu'elle veut prendre un amant,
que son mari est fort bon pour elle, mais qu'elle ne l'a
pas épousé par amour. Une partie de la conversation
de M™^ d'Epinay avec sa belle-sœur, rapportée par elle,
mérite d'être citée : « Plus je connais M'" de Jully, lui
» disait sa femme et plus je m'applaudis de mon choix. 11
» est bon enfant, doux , complaisant , foible , sans nerf,
» mais sans vice ; en un mot il est tout propre à jouer
» son rôle décemment et je lui en sais gré. Au reste
» il a cru être amoureux de moi, mais il s'est trompé.
» — Que dites-vous donc , ma sœur ? Il vous adore
» comme le premier jour. — Le dit-il ? Eh bien , il se
» trompe encore. 11 y a une fille de la comédie à qui
» il fait des présents toute la journée. Dans le fond,
n. 34
518 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
» c'est l'homme du monde que je vois le moins et celui
» qui fait le moins ma volonté. — Ma sœur, ma sœur,
» vous êtes injuste. Pouvez-vous nier que votre mari
» ne soit uniquement occupé de vous plaire ? — Quoi !
» parce qu'il me donne continuellement des bijoux
» dont je ne fais nul cas , des robes qu'il choisit pres-
» que toujours contraires à mon goût ; qu'il me loue
» des loges aux spectacles le jour où je veux rester
» chez moi ? Eh, mais ! ne voyez-vous pas que ce sont
» ses fantaisies qu'il caresse et non les miennes ? mais
» priez-le de faire céder un de ses caprices ou de ses
» goûts aux miens, vous verrez cette perle des maris
» devenir tout en douceur le sultan le plus despote
» Mais nous voilà bien loin de ce que je voulois vous
» confier. J'aime, je vous l'ai dit ; savez-vous qui ? c'est
» Jéliotte. — Jéliotte! vous n'y pensez pas ma sœur,
» un acteur de l'opéra , un homme sur qui tout le
» monde a les yeux et qui ne peut décemment passer
» pour votre ami. — Doucement, s'il vous plaît, je vous
» ai dit que je l'aimois et vous me répondez comme
» si je vous demandois si je ferois bien de l'aimer. —
» Gela est vrai ; mais vous m'avez dit en même temps
» que vous exigiez que je vous rendisse service et je
» vous déclare queje ne veux pas être la confidente
» de M'' Jéliotte , ni servir ses amours. — Il ne s'agit
» pas ici du nom de mon amant, ma sœur, c'est moi
» qu'il s'agit d'obliger : le voulez-vous ou non? —
» Quant à vous , ma sœur, je n'aurois jamais rien à
» vous refuser, mais... — Fort bien ; à présent, dites-
» moi, Jéliotte n'est-il pas un homme estimable? Tout
» le monde ne le trouve-t-il pas au-dessus de son état?
» — Gela est vrai ; et cette phrase là même vous con-
LA LIVE. 519
» damne : le monde ne vous pardonnera pas. — Eh,
» mon enfant le monde est un sot et celui qui l'écoute
» aux dépens de son bonheur Test encore plus. Bref,
» Jéliotte arrive ce soir. Il faut que vous le logiez
» dans la chambre bleue , à côté de la mienne. Je me
» plaindrai pendant le dîner du bruit que fait mon
» mari en sortant le matin pour la chasse. Alcrs vous
» m'offrirez de lui donner le petit appartement qui est
» derrière le mien, je l'accepterai et tout ira bien. —
» Ah ! lui dis-je, si vous n'exigez que cela de moi , à
» la bonne heure. — Eh! qu'avez-vous donc cru, s'il
» vous plait? »
Tout s'arrangea en effet comme il avait été con-
venu. M. de Jully convint qu'il faisait beaucoup de
bruit et accepta de changer de chambre. Jéliotte arriva :
« Le bonheur éclatoit dans leurs yeux , dit encore
» M"'® d'Epinay, et ce tableau si séduisant me rappela
» des temps plus heureux pour moi et me fit verser
» des larmes. Francueil qui s'en aperçut et qui était
» dans la confidence me dit en me regardant tendre-
» ment : seront-ils les seuls heureux?... »
W^^ de La Live ne goûta pas longtemps son bon-
heur. Peu après elle tomba malade de la petite vérole
et mourut dans les bras de sa belle-sœur, pleurée
par son mari qui n'avait perdu aucune illusion : «' La
» douleur où M"" de Jully étoit d'avoir perdu sa femme,
» écrit-elle , fut poussée jusqu'au délire et parut d'au-
» tant plus étrange que la dissipation à laquelle il s'était
» livré jusqu'au dernier moment de sa vie ne l'y avoit
» pas préparé. Sa première sortie fut pour commander
» un superbe mausolée en marbre qu'il destina à être
» placé dans un cabinet au fond de son appartement.
520 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
» Il fit faire une demi-douzaine de portraits qu'il
» rangea tout autour de sa chambre et il passoit son
» temps à se nourrir de sa douleur. »
C'est à Falconnet que La Live commanda, en effet ,
le médaillon en marbre qui se trouve encore main-
tenant à St-Roch sur le tombeau de cette femme
légère et charmante. J.-J. Rousseau écrivait alors à
Dupin de Francueil , propriétaire de Ghenonceaux ,
cette appréciation suffisamment sceptique : « Vous
» êtes en peine de M'' de JuUy ; il est constant que sa
» douleur est excessive ; on ne peut être rassuré sur ses
» efiets qu'en pensant au peu d'apparence qu'il y avoit
» il y a deux mois, par la vie qu'il menoit , que la mort
» de sa femme put laisser dans son âme des traces
» bien profondes de douleur. D'ailleurs, il l'a modelée
» sur ses goûts et cela lui donne les moyens de la
» conserver plus longtemps sans nous alarmer sur sa
» santé.... »
Dupin de Francueil, le même qui, sur le tard, épousa
Aurore de Saxe et fut le grand-père de Georges Sand,
était alors comme on sait l'amant de M™^ d'Epinay et
l'ami intime des Jully. La Live lui dédiait un paysage
avec cette légende itaiïenne : Studio di paesi dedicato
al IIV^'^ Dupin de Francœuil signor viy^tuosissimo
ed amicissimo del autore de La Live de J. Le pro-
priétaire de Ghenonceaux s'amusait aussi à peindre :
la Vue du château de la B riche , propriété des La
Live, celle du Château de la Chevrette, résidence de
M™*' d'Épinay, ont été gravées par La Live d'après
ses peintures. La Live dédiait à M""® de Roissy, une
de ses bonnes amies , la suite des Éléments , repré-
sentés par Natoire sous la forme d'enfants, et les
LA LIVE. 521
accompagnait d'un cartouche historié au milieu duquel
on lit ces vers dignes de Dorât :
Sous les traits du Dieu de Cythère
Pour rendre homage à la beauté
Les Éléments se font la guerre
Chacun veut être préféré.
Vous les accorderés, Thémire
Mais si j'en crois mes sentimens
L'air qu'auprès de vous l'on respire
Est le premier des élémens.
Il gravait aussi un fleuron de Boucher pour le titre
de Y Essai sw VArt de la Guerre, de Turpin de Crissé.
Pour se consoler de son veuvage , La Live s'était
plus que jamais adonné à ses goûts de collectionneur.
Il achetait objets d'art et tableaux , et s'était tout
spécialement épris de l'école française , que le gou-
vernement du roi soutenait bien de ses commandes ,
mais à laquelle les collectionneurs préféraient d'ha-
bitude les écoles italienne , flamande et hollandaise.
Encouragé dans cette voie par son ami Mariette , aidé
de ses conseils , il formait cette belle collection
d'œuvres nationales, ce cabinet de peinture et de
sculpture française dont Mariette, en 1764, lui dressait
le Catalogue historique. Le portrait de La Live de
Jully de profil, très agréablement gravé par lui-même
d'après le dessin de Cochin , fut ajouté à ce catalogue
ainsi qu'une allégorie , Minerve enseignant un jeune
artiste, dont l'invention était due à Le Fèvre et la
gravure à notre artiste-amateur : « L'amour que j'ai
» pour ma patrie , dit-il dans la préface , et pour les
» talens qu'elle produit, joint à la connoissance que
» j'ai prise peu à peu de la peinture , m'ont fait
522 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
» observer dans divers ouvrages des artistes françois,
» qu'il seroit possible de former un très beau cabinet
» d'école françoise en peinture et en sculpture et
» que notre école pouvoit soutenir la comparaison de
» l'école flamande et souvent celle de l'école d'Italie.
» Pour exécuter ce projet de façon qu'il fit honneur
» à nos arts, j'ai fait cette collection sous les yeux et
» avec les lumières des amateurs et des artistes les
» plus éclairés , n'ayant rien voulu admettre dans
» mon cabinet qui ne fût du meilleur temps de chaque
» auteur. »
Ami de presque tous les artistes de son temps, en
relation avec les grands amateurs et les marchands ,
La Live put mettre de point en point ce projet à
exécution et , de Simon Vouët à Greuze , des Anguier
à Pajou, réunir en peinture et en sculpture les plus
beaux spécimens de l'école française. Lancret était re-
présenté dans sa galerie par deux tableautins figurant
des jeux d'enfants, que leur propriétaire a gravés sous
le titre de rAge d'or; Greuze, d'après lequel il a gravé
les Fermiers brûlés , par huit toiles dont le célèbre
tableau du Père de famille lisant la Bible à ses enfants.
Boucher aussi était l'objet d'une prédilection marquée
de la part du collectionneur, qui a galamment interprété
quelques-uns de ses plus jolis dessins, Pastourelle
portant des cages d'oiseaux. Jeune fille sacrifiant
sur V autel de V Amour, la Correzione , Jardinière
à l'air mutin (1754), mais jardinière de fantaisie, sortie
un instant du salon pour s'amuser à ratisser.
La Live avait tenté pour la sculpture française
ce qu'il avait si complètement mené à bien pour la
peinture ; seulement comme l'achat de marbres im-
LA LIVE. 523
portants aurait pu compromettre la bonne administra-
tion de son bien , il s'était d'habitude contenté des
terres cuites, premier jet qui rend souvent mieux la
véritable impression de l'artiste. Anguier, Puget ,
Michel-Ange Slodtz , Girardon , La Datte , Goustou ,
Coysevox , Gaffieri , Pigalle , Falconet , étaient repré-
sentés dans ses salons par des œuvres intéressantes et
choisies avec goût. Saly, ce sculpteur de talent que le
Danemark nous enleva , s'y trouvait pour un groupe
de Pan et Syrinx et un faune. G 'était un dessinateur
original, très jaloux de ses dessins ; Mariette raconte
qu'il avait eu beaucoup de peine à en obtenir quel-
ques-uns. La Live fut plus heureux en obtenant du
sculpteur deux séries qu'il s'empressa de graver : une
série de Vases, ornés de figures décoratives d'un effet
original , datés de 1754 , et une suite de Caricatures
en 16 pièces , dont le trait principal réside dans l'exa-
gération de la longueur, et qui manquent un peu d'in-
térêt, maintenant que nous ne savons plus quels sont
les types qui ont servi de modèles.
On voit qu'au milieu de l'existence dissipée que
M""^ d'Épinay attribue à son beau - frère , La Live
trouvait encore bien des instants à consacrer aux arts.
Il gravait le portrait de La Borde de Mèrèmlle, ban-
quier de la cour, d'après Roslin ; il gravait encore, ou
plutôt il signait un délicieux portrait de femme, qu'il
est impossible de ne pas attribuer à Saint-Aubin, celui
de Madame Lètine , sa seconde belle-mère {Tendre,
sensible, heureuse mère...), d'après Bernard , 1765,
in-fol. : « Une eau-forte qui est l'idéal de la gravure de
» femme, et qui vous fait regretter qu'il n'y ait qu'un
» portrait de femme du XVIIP siècle ainsi exécuté, et
524 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
» encore un portrait de vieille femme. » (E. de Gon-
court , la Maison d'un Artiste.)
Les rapports étaient des plus suivis entre Saint-
Aubin et notre amateur : Saint-Aubin gravait le por-
trait de La Live d'après Greuze , ou bien il retouchait
ou regravait les portraits gravés par celui-ci.
La note manuscrite ci-dessous se trouve à côté de
l'épreuve de son portrait au Cabinet des Estampes :
« Portrait de M*" de La Live de Jully, introducteur
» des ambassadeurs, dessiné par J.-B. Greuze en 1754
» et gravé par Auguste de St- Aubin en 1765. Ce por-
» trait devait servir de frontispice à la suite cy-j ointe
» des 50 portraits que M"" de La Live a gravé et qu'il
» devait donner au public avec un précis de la vie des
» grands hommes qu'elle présente pour faire suitte
» avec les hommes illustres dePérault. M"" de La Live
» avait d'abord gravé cette suitte et s'était fait aider
» pai^ un nommé Charpentier méchanicien ; M'" de
» La Live s'adressa ensuite à Auguste de St-Aubin
» qui effaça presque toutes les têtes et les refit dans le
» genre de l'auteur qui les avoyent commancées. »
M. le comte Clément de Ris rapporte dans les Ama-
teurs d'autrefois une note de La Live prise sur le
manuscrit de ses Hommes illustres dont le texte ne
parut jamais : « J'avois d'abord eu le projet de faire
» graver tous les portraits par des artistes, mais outre
» que les planches terminées eussent demandé beau-
» coup de temps , le goût que j'ai toujours eu pour
» la gravure que j'ai pratiquée dès ma plus tendre
» jeunesse , m'a déterminé à les graver moi-même à
» l'eau-forte, en ayant fait faire des dessins d'après
» les meilleurs porti aits connus pour les réduire tous à
LA LIVE. 525
» la même grandeur. J'ai cherché dans ces estampes
» la manière de Van Dyck. Je sais que je suis resté
» bien loin de mon modèle. » Tenons compte à La Live
de sa modestie , mais il n'en est pas moins vrai que
malgré les retouches de Saint-Aubin , cette série de
portraits in-4, d'une exécution honorable pour un
amateur, est en définitive restée assez faible.
En voici la liste : le Cardinal de Retz, le Car-
dinal de Polignac , Bossuet, Fènèlon, Fléchier ,
Mascaron, Nicole, Quesnel , Malebranche , Bayle ,
VAhhè de Rancé, le Maréchal de Crèquy, le Comte
de Bussy-Rahutin , Vauhan , Câlinât, Bourdaloue,
Massillon, Morèri, Bernard de Montfaucon, le P.
Porèe, le Duc de Villars, Duguay-Trouin, Mathieu
Mole, Orner Talon, le Comte d'Avaux, le Chancelier
Boucherai, La Moignon, D'Argenson, René Pucelle,
Mézeray, Saint-Évremond, Félibien , Cassiny, La
Bruyère, Dacier, Rollin, Rapin de Toyras, Segrais,
Thomas Corneille , Boileau- Despréaux , Chaulieu ,
J.-B. Rousseau, Duf7^esnoy, Jouvenet, H. Rigaud ,
François Lemo y ne , Puget, Girardon, André Le
Nosire et La Lande. Us portent des numéros , de 65
à 114.
Ce serait donc comme suite aux Hommes Illustres
de Perrault que ces portraits auraient été exécutés.
La Live ne les vendit pas. Il les ofirit à ses amis et en
envoya un exemplaire à Jean-Jacques Rousseau qu'il
avait souvent rencontré à la Chevrette. Celui-ci lui
répondait de son ermitage : <^ J'ai reçu votre présent
» avec le plaisir et la reconnaissance que me donnent
» tous les témoignages de votre souvenir. Venés ,
» Monsieur, quand il vous plaira , voir ma retraite
526 LES GRAVEURS DU XVIir SIECLE.
» ornée de vos bienfaits ; ce sera les augmenter et les
» moments que vous aurés à perdre ne seront pas
» perdus pour moi. »
La Live a gravé le portrait de son père le fermier-
général La Live de Bellegarde ; ceux de Louis Bontens
et de Pierre Oilhert de Cangè, du duc Alexandre de
La Rochefoucauld , du marquis de Montcalm ; le
Mausolée de la princesse de Condè, d'après Vassé.
Par des motifs que M""^ d'Epinay ne donne pas ,
notre amateur sollicita d'être envoyé à Genève pour
représenter la France. Quelques années après il reve-
nait à Paris avec le titre d'introducteur des ambassa-
deurs. Il avait été nommé dès 1754 à une place d'ho-
noraire amateur à l'Académie royale. Mariette, son
ami , nous apprend que sur le tard il avait perdu la
tête. « Son état fait pitié », écrit-il vers 1770. Diderot
annonçait la môme nouvelle à Falconnet en ces termes :
« M. de La Live est devenu fou furieux, vous n'auriez
» jamais cru que ce fût de cette maladie dont il fût
» menacé. Ce qu'il y a de plaisant c'est qu'on dit que
» c'est d'avoir trop aimé sa femme. » Aussi dut-on
vendre dès 1770 , par mesure de conservation , ce
fameux cabinet réuni à la gloire de l'école française.
Le pauvre La Live , devenu littéralement gâteux ,
mourut le 18 mars 1779.
Les LANGLOIS.
1754-48...
Pierre - Gabriel Langlois l'aînè , tié à Paris en
1754 , élève de Simonet , et Vincent-Marie Langlois
LE JEUNE furent surtout des graveurs de la Galerie de
Florence , et par conséquent leur œuvre se compose
presque exclusivement de reproductions de tableaux
des anciens maîtres.
D'après les artistes de leur temps, ils ne gravèrent
guère que quelques vignettes, éparses dans le Théâtre
des Grecs du P. Brumoy, le Cabinet des Fées, les
Voyages imaginaires , les Œuvres de Le Sage , le
Théâtre du 'inonde , les Figures de F Histoire de
France de Moreau . le Nouveau Testament, le Précis
de la Révolution, Héloïse et Abailay^d de Moreau ,
les Liaisons dangereuses , la Jérusalem délivrée ,
le Gessner et le Racine de Le Barbier, les Œuvres de
J.-B. Rousseau , le grand i?acme de Didot , V Ovide
de Villenave. Dans tout cela rien de bien saillant.
Nous relevons à l'actif de Langlois le jeune une
estampe d'après Lavreince , la Pat^tie de musique ,
in-fol. en largeur, publiée chez Basan.
Nous donnons ci-après la liste de quelques portraits
gravés avec soin par Langlois l'aîné , et qui , en
o2S LES GRAVEURS DU XVIIU SIECLE.
épreuves de choix , peuvent encore être regardés avec
plaisir.
1. CHATELET (Madame du), d'après Meiie Loir, 1786; in-S [Vol-
taire de Kehl).
Trois états d'essai inaclievés. — État terminé , avant toute lettre, tablette
blanche. — État avec la lettre sur la tablette blanclie; très rare. — État avec la
lettre sur la tablette ombrée .
2. Fontenelle, d'après Voiriot , an V ; grand m-4.
3. Frédéric II, d'après A. Van Loo ; in-8 [Voltaire de Kehl).
État d'essai, avec les vêtements inacbovés.
4. JOLY ( Marie - ÉlisaLeth ) , du Théâtre - Français , morte à Paris ,
l'an 6, âgée de 31 ans ; grand in-4.
Éteinte dans sa /leur, cette Actrice accomplie
Pour la première fois, a fait pleurer Thalie.
État avant toute lettre, tablette blanche.
5 . Pierre I , d'après Caravaque ; in-4.
6. Pierre I, d'après Caravaque; in-8 [Voltaire de Kehl).
État d'essai, l'ovale du portrait seul, sans le cadre. — État avant toute lettre,
tablette blanche.— État avec la lettre sur tablette blanche.— État avec la lettre
sur tablette ombrée .
I. R0USSE.\u (J.-J.); in-4.
État avant toute lettre .
8. Vertot (l'Abbé de), d'après Delyen ; in-8.
L'eau-forte pure par Aug. de Saint-Aubin.
État avant toute lettre, tablette blanche.— État avant la lettre sur la tablette
ombrée.
9. Voltaire, d'après La Tour ; in-4.
État avant toute lettre, tablette blanche.— État avant la lettre, mais avec les
signatures des artistes.
10. VoLTViRE, d'après La Tour ; in-8 [Voltaire de Kehl).
Etat inachevé. — État avant toute lettre, tablette blanche.
II. Garrel , prêtre; in-4. — Le Dominiquin ; grand in-4.
LARMESSIN (Nicolas de
1684-1755.
Jal pense que les Nicolas de Larmessin père et fils,
graveurs, doivent descendre de Nicolas de Larmessin,
libraire , fils lui-même d'un Philippe de Larmessin ,
maître peintre, qui au commencement du XVIP siècle
demeurait près de St-Germain l'Auxerrois.
Nicolas de Larmessin, le graveur de Lancret, naquit
le 28 janvier 1684 1; il épousa le 8 septembre 1705 Louise
Marchand, fille d'un pâtissier de la rue St-Jacques, et
en secondes noces, le 26 janvier 1716, Marie Seudre,
fille d'un niarchand d'Angoulême. Il mourut le 28
février 1755, rue des Noyers, et fut enterré dans le
caveau de la chapelle de S*'' - Geneviève , en présence
de son gendre Jean Adoubeau de Franqueville.
C'est à son père, l'auteur des Augustes Repy'èsenta-
lions des Rois de France depuis Pharamond Jusqu'à
Louis XIV, qu'il faut rapporter cette fâcheuse mention
inscrite sur les registres de la Bastille : « Nicolas de
» Larmessin, graveur, entré à la Bastille le 15 nov'*'"^
» 1704, mis en liberté le 20 mars 1705, accusé d'avoir
1 Gaucher dit pourtant 28 février, et remarque que les principales
actions de sa vie sont arrivées ce même jour du 28 lévrier.
530 LES GRAVEURS DU XVIIP' SIÈCLE.
» gravé, distribué des estampes injurieuses au Roy et
* à la religion et d'en avoir vendu à un étranger, on a
» saisi chez Larmessin une planche représentant deux
» figures ; l'une d'un homme qui vomit, au-dessous de
» laquelle on lisoit le Roy, l'autre d'une femme qui lui
» soutient la tête, indiquée ikf^rf. de Maintenon, et au
» bas de la planche ces mots : Décadence de la
» France. >-
C'est Nicolas de Larmessin le père qui naturellement
enseigna au futur graveur des Contes de La Fontaine
les éléments de son art , lui fit faire de fortes études
de dessin , et le poussa surtout à graver le portrait,
dont il avait fait lui-même sa spécialité, et l'estampe.
Nicolas de Larmessin fils était donc bien préparé
lorsque le célèbre amateur Crozat le choisit pour
graver dans son Recueil, réunion des chefs-d'œuvre
des plus belles collections françaises et étrangères ,
quelques-uns des tableaux célèbres de Raphaël . la.
Vierge du grand Duc , la Vision d'Èzèchiel , placés
maintenant au palais Pitti à Florence . Saint George
et le Dragon et Saint Michel terrassant le Démon ,
le poi-trait de Raphaël, Jésus succombant sous le
fardeau de sa croix , Saint Jean VÈvangéliste , les
portraits du Cardinal Polus et de Carondelet.
Quoiqu'il se soit tiré à son honneur de l'exécution
de ces planches importantes, nous devons mentionner
ce qui- dit M. Daplessis , que le genre élevé du peintre
italien ne sied pas bien au tempérament coloriste du
graveur. 11 y laisse voir en effet une certaine gêne,
mais non ï insuffisance fiagranie que lui reproche le
savant écrivain d'art.
11 se montre plus habile et plus à l'aise dans Tinter-
LARMESSIN. 531
prétation des œuvres de ses contemporains , surtout
dans leurs portraits. Ceux qu'il a gravés pour sa
réception à l'Académie en 1730, le peintre Claude
Halle, d'après Legros, et le sculpteur Guillaume
Coustou, d'après De Lien, en font foi. Ils sont vivants
et colorés et d'une très bonne exécution. Il n'est donc
pas étonnant que l'artiste, qui jouissait de la répu-
tation méritée d'un habile homme , ait entrepris la
gravure des portraits de la famille royale peints par
J.-B. Van Loo. Celui de Louis XV, in-fol. en pied, se
vendait à Paris chez N. De Lar messin, graveur du
Rjy, rue des Noyers , àla 7' porte cochère à main
droite entrant par la rue St-Jacques. M. Duplessis
l'attribue au burin de G. S. Petit, son élève, qu'il au-
rait seulement dirigé ; quant au portrait de la reine
Ma7'ie Leckzinska son pendant , très-bien gravé ,
il est sûrement de Larmessin. Les planches de Louis
Dauphin de France, d'après Tocquè, et de Marie-
Josèphe de Saxe sa femme, d'après Van Loo, sont
encore supérieures , comme science et exécution.
Nous donnerons plus loin du reste le catalogue des
portraits de Larmessin.
Les biographes qui ont consacré quelques lignes à
Nicolas de Larmessin fils disent volontiers qu'à un
certain moment, entraîné malheureusement par le
torrent de la mode , d'autres même disent par le
mauvais goût régnant , il n'a plus consacré son burin
qu'à des sujets d'un genre léger, indignes de son talent.
Combien l'époque où l'on écrit influe sur la manière de
voir ! Larmessin ne survit maintenant que par ces
planches légères d'après les gracieuses compositions
de Lancret, les Quatre Saisons, ou bien les Quatre
532 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
âges de la vie, et surtout par les Contes de La Fon-
taine, c'est là sa gloire et son succès. Nous nous gar-
derons bien en ce qui nous concerne de lui en faire
un reproche, d'abord parce que sans fausse pruderie
quelques estampes gaies , produits naturels d'un art
qui n'est pas nécessairement sérieux, ne nous effraient
pas, mais aussi parce que nous estimons qu'il faut qu'un
artiste soit de son temps , que sans chercher à lutter
contre le courant mystérieux qui l'entraîne , il doit
sacrifier au goût du jour, qui pour le XVIIP siècle
était une expression bien caractérisée du génie de la
nation et le reflet fidèle de ses mœurs. Laissons donc
gémir les esprits chagrins et constatons l'heureuse
idée, que notre graveur eut et mit à exécution, de
réunir en une série d'estampes les compositions
peintes que les contes grivois du bon La P'ontaine ins-
piraient aux artistes d'alors.
Sans être absolument dans leur nouveauté, puisqu'ils
étaient publiés depuis une cinquantaine d'années , ces
contes étaient fort à la mode et fort lus ; Vleughels,
Lancret, Pater, Boucher, Le Clerc, LeMesle et autres
avaient choisi pour les peindre les sujets les plus vifs.
Larmessin entreprit de les graver d'un format uni-
forme, petit in-folio en largeur. 11 choisit pour sa part,
et grava avec facilité et liberté d'après les peintures
de Vleughels , le Villageois qui cherche son veau ,
la Jument du compère Pierre, Frère Luce et le Bast.
11 emprunta à Boucher le Magnifique , la Coiirtisane
amoureuse, le Calendrier des vieillards et le Fleuve
Scamandre ; à Le Clerc le Rossignol et le Faiseur
d'oreilles. Enfin il dut évidemment s'entendre avec
Lancret , dont il a gravé toutes les planches , pour
LARMESSIN. 633
l'exécution de ces jolis tableautins, si fins et si amu-
sants , dont on peut voir encore quelques spécimens
au Louvre ( galerie La Gaze ) , et qui ont pour titres
le Gascon puni , les Deux amis, les Rémois, On ne
s'avise jamais de tout , le Petit chien qui secoue des
pierreries , les Oies de frère Philippe , le Pâté d'an-
guille, la Servante justifiée et les Troqueurs. Le
galant escroc de la pièce A femme avare galant escroc
passe pour être le propre portrait du graveur Schmidt,
élève de Larmessin , qui l'a aidé dans ce travail.
C'était le début de Schmidt qui, venant d'arriver à
Paris avec WiUe, était entré en qualité d'élève ou
mieux d'aide chez notre graveur, car Wille dit expres-
sément dans ses Mémoires qu'il allait souvent voir
Schmidt « lorsqu'il aidait M'' de Larmessin dans la
» gravure des Contes de La Fontaine»; aussi pensons-
nous qu'en outre de la pièce de Nicaise qui est de lui
bien que signée du nom de l'éditeur, il faut lui attri-
buer aussi une partie du travail de quelques autres
planches.
Les Contes de La Fontaine de Larmessin forment
une fort belle réunion d'estampes qui porte bien le
cachet de son époque : on a pu faire de plus gracieuses
illustrations pour cet ouvrage, on n'a rien fait de plus
important et de plus magistral.
Larmessin fut surtout l'interprète fidèle de Lancret.
Nous avons signalé ses Quatre Ages, ses Quah^e
Saisons, gracieuses compositions décoratives pour
d'élégants intérieurs. Il faut signaler encore les Quat?'e
heures du Jour, gravées en partie par lui ou tout au
moins sous sa direction et se vendant à son domicile,
ainsi que les Amours du Bocage, le Jeu de Cache-
n. 35
53V LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
cache, le Jeu des quatre coins , le Jeu du pied de
bœuf, la Coquette de village et le beau et intéressant
portrait de M'" Salle.
Larmessin a gravé d'après Watteau dont il était le
contemporain, le Passe-Temps , V Accordée de village,
le Départ pour Cythère.
ESTAMPES.
I, d'après langret.
1. L'ENFANCE, — L'ADOLESCENCE, — LA JEUNESSE, ou
le Tir à Varc, — LA VIEILLESSE, suite de quatre pièces
in-foL en largeur.
2. Les Amours du bocage ; grand in-fol. en largeur.
3. La Coquette de village; in-fol. en largeur.
4. Le Jeu de cache-cache mitoulas, — Le Jeu du pied
DE BœuF, — Le Jeu des quatre coins; 3 p. in-fol. en
largeur.
La 4^ pièce de la série : le Jeu de Colin-Maillard, est gravée par Cochln père.
5. Les Quatre Parties du Jour, suite de quatre pièces in-fol.
en largeur : le Matin , le Midi , l'Après-Dînée , la Soirée.
6. Les Saisons, suite de quatre pièces in-fol.
T. Estampes pour les CONTES DE LA FONTAINE, d'après Lan-
cret , Boucher, Pater, Vleughels, Le Clerc, gravées par de Lar-
messin (aidé quelquefois de Schmidt"), Fillœul, Tardieu, Le Grand,
Sornique, Aveline ; 38 p. petit in-fol. en largeur.
Larmessin a gravé pour sa part , d'après Lancret : A Feumb avark galant
BscRoc. — Les Deux Amis. — Le Faucon. — Le Gascon puni. — Nicaise. —
Les Oies de Frère Philippe. — On nb s'avise j.\mais de tout. — Le Pâté
d'anguille. — Le Petit Chien qui secoue de l'argent.... — Les Rémois.
— La Servante justifiée. — Les Troqueurs.
A quoi il faut ajouter :
Le Magnifique , — Le Calendrier des vieillards , — Le Fleuve Sca-
MANDRE , — La Courtisane amoureuse , d'après Boucher.
Frère Luge, — La Jument du compère Pierre, — Le Bat, — Le Villa-
geois qui cherche son veau , d'après "Vleughels.
Lb Rossignol , — Le Faiseur d'oreilles , d'après Le Clerc.
LARMESSIN. 535
ïi. d'après divers.
8. Le Savoyard, — La Savoyarde, 2 p. d'après Pierre.
9. Vénus sur les eaux , d'après Vleughels.
10. Le Feu (Alceste délivré des Enfers par Hercule), — l'Eau (Vénus
sortant de l'onde), 2 p. d'après VIeughels.
11. Apparition de Jésus à Marie, d'après Vleughels.
12. L'Ile de CythÈRE, d'après Watteau.
13. L'Accordée de village, d'aprèsWatteau;in-fol. en largeur.
14. Le Passe-Temps, d'après Watteau.
Planches pour le Cabinet Crozat, d'après Raphaël, etc. — Sujets des Contes de
La Fontaine, d'après L. GaUoche, 3 p. — Batailles de Pierre I*', d'après Martin ,
gravées avec Baquoy et Simonneau. — Tètes de pages, d'après Eisen , pour un
livre in-folio : David écrivant , l'Arche, et autres sujets bibliques.
PORTRAITS.
15. Bion, ingénieur; in-4.
16. COLBERT (Baptiste); in-fol.
n. COUSTOU, d'après de Lien , 1*730; in-fol.
Morceau de réception à l'Académie.
18. Duguay-Trouin ; in-8.
19. H ALLÉ, d'après Le Gros, 1730; in-fol.
Autre morceau de réception à l'Académie.
20. Lamet, curé de Saint-Laurent à Paris, d'après Merelle ; in-fol.
21. LORRAINE (Ch. de), prince de Vaudemont, d'après Ranc; in-fol.
22. Louis XIV mettant le cordon bleu au duc de Bourgogne , d'après
Watteau ; estampe in-fol. en largeur.
23. Louis XV, jeune, en cuirasse et en manteau royal, d'après Rigaud,
l'720; in-foL
536 LES GRAVEURS DU XVIII*- SIÈCLE.
24. Louis XV, jeune, à cheval, d'après Parrocel; grand in-foL
25. Louis XV, à mi-corps, — MARIE Leczinska, à mi-corps;
2 p. d'après Van Loo ; in-fol. •
26. LOUIS XV, en pied, — MARIE LECZINSKA, en pied; 2 p.
d'après Van Loo ; grand in-fol.
On a substitué plus tard la tête de Marie-Antoinette à celle de Marie Leczinska.
2~. LOUIS, Dauphin, fils de Louis XV, d'après Tocqué, — MA RIE-
JOSÈPHE DE SAXE, dauphine, d'après Van Loo,— MARIE-
THÉRÈSE D'ESPAGNE, dauphine, d'après Van Loo ; 3 p.
grand in-fol.
1er état du portrait du Dauphin : Avant la Toison-d'Or. La tête est très jeune.
28. Lowendal , d'après Boucher ; in-fol.
29. M A BILE AU, prêtre; in-fol.
30. Majeur, ahbé de Clairvaux , d'après Loir; in-fol.
31. Morel (Dom Robert), religieux, d'après Restout ; in-fol.
32. SALLE (MeUe), dansant, dans un décor de paj'sage , d'après
Lancret ; grand in-fol. en largeur.
Maîtresse dans un art que guide l'harmonie
Je peins les Passions, j'exprime la Gaîté
Je joins des Pas brillants au (eu de mon génie
Les Grâces, la justesse à la légèreté
Sans offenser l'aimable Modestie
Qui de mon sexe augmente la Beauté.
33. STANISLAS LECZINSKI, Roy de Pologne, — CATHERINE
OPALINSKA, Reine de Pologne; 2 p. grand in-fol. d'après
Van Loo.
34. Turenne (le Vicomte de), d'après Meissonier.
35. Vleughels , d'après Champagne. — Vleughels filius .... curavit ,
1*732; in-fol.
LA RUE (Louis-Félix DE).
Peintre, dessinateur et graveur, élève de Parrocel ,
bien connu comme dessinateur de bacchanales , aux
personnages desquelles il a donné des rondeurs et des
bouffissures qui lui sont particulières et font aisément
reconnaître ses ouvrages.
Six pièces in-8 en largeur représentant des Danses
de Satyres, signées L. F. de la Rue inv. etsclup. (sic).
Ce sont de jolies estampes àl'eau-forte dans le goût de
Fragonard. Elles se vendaient à Paris chez Roland
rue du Sépulchre, inaison du vinaigrier au S""*.
En sa qualité d'élève de Parrocel , La Paie a gravé
une suite de Divers sujets militaires , pièces en
largeur de divers formats.
Deux Etudes de chiens , d'après Van Bloemen ; —
Figures d'académies , d'après Pierre ; — portrait du
Prince Beljoioso , in-12, en médaillon (1788) ; — por-
trait de Salvator Rosa , in-fol. à l'eau-forte , d'après
Carie Maratte, dans un encadrement formé d'enfants,
pièce intéressante et qui doit être fort rare. — Troi-
sième livre de groupes d'enfants, d'après Boucher.
LAUNAY (Nicolas de).
'1739-n92.
Nicolas de Launay ! Voilà le graveur par excellence
des estampes de l'école française du XVIII^ siècle.
Parcourez son œuvre et dites si aucun graveur de
cette école fut plus remarquable dessinateur , plus
habile interprète , si aucun sut préparer ses planches
à l'eau-forte avec plus d'éclat, et les terminer au burin
avec plus d'harmonie ; dites aussi quel graveur a
mieux que De Launay montré plus de conscience et de
spirituelle habileté lorsqu'il s'est agi de descendre de
l'estampe pour se renfermer dans le cadre de la
vignette !
Nicolas de Launay ( que nous soupçonnons fort de
s'être appelé tout simplement Delaunay), né à Paris en
1739, élève de L. Lempereur, fut le graveur affectionné
des maîtres élégants de l'école française, qui lui don-
nèrent à graver leurs plus séduisantes compositions.
Deux noms dominent surtout dans l'estampe galante,
Baudouin et Lavreince.
Baudouin , le gouacheur exquis , à la facture large
et amusante, le véritable gendre de Boucher auquel il
a pris sa grasse et facile manière de comprendre le
corps onduleux de la femme, mais un Boucher beau-
LAUNAY (Nicolas de). 539
coup plus libertin quoique plus habillé. Il faudrait la
plume de Diderot pour décrire ces sujets, si vifs que
l'extrême élégance du dessin peut seule les faire
passer. On l'a bien vu quand des artistes du second
ordre ont voulu donner dans ce genre semi-érotique ;
quelle trivialité ! Mais quel goût au contraire dans les
estampes de Baudouin. Les titres font pressentir
assez les sujets et sont par eux-mêmes provoquants.
Les Soins tardifs ! On voit d'ici la mère et le petit
frère d'une paysanne qui est en train de s'ébattre
sur une botte de paille avec un jeune gars de village,
monter par la trappe pour mettre un terme à ce
duo trop tendre. Ah, certes oui, leurs soins sont
tardifs ! La Sentinelle en défaut est une vaiiante : la
mère est endormie, on l'entend ronfler et le sacripant
profite de l'occasion pour se glisser dans la couchette
de sa belle. H Épouse indiscrète ! Et n'a-t-elle pas le
droit de l'être, son mari ne s'est-il pas avisé de vouloir
faire violence à la jolie soubrette , il y a eu lutte, le lit
est dans un désarroi qui l'atteste , mais les forces de la
jeune fille vont s'épuiser , il est temps que la dame
surgisse, vengeresse. Notez que cette estampe fort
vive est dédiée à un souverain , le duc régnant de
Deux-Ponts. Et le Carquois épuisé, quel chef-
d'œuvre ! Gomme le jeune homme nonchalamment
appuyé sur les coussins d'un lit défait a l'air abattu , à
peine peut-il soutenir sa tête; ses mains retombent sans
force , ses yeux se ferment ; comme la jeune femme
le regarde d'un air méprisant , l'ingrate ! Et derrière
elle, un petit amour, sur son piédestal , ne peut s'em-
pêcher de rire, cai' son carquois est complètement
vide et il ne reste plus une seule flèche à son arc.
S40 LES GRAVEURS DU XYIIP SIECLE.
Cette fois l'estampe est dédiée au prince de Guéménée,
commandant les gendarmes de la garde.
A côté de Baudouin , le suédois Lafrensen , dont
nous avons fait Lan'eince , peint ses aquarelles adou-
cies de gouache, d'un travail froid et peiné, mais d'un
fini précieux. Rendant d'un reflet fidèle la société de
son temps, il nous introduit dans les salons, dans les
chambres à coucher du grand monde , sous les om-
brages des parcs et aussi dans les dortoirs des jeunes
ouvrières. Ce n'est plus le débraillé de Baudouin, mais
ce n'est pas non plus son faire harmonieux et souple.
L'amour aussi est de la fête, mais c'est un amour
convenable et de meilleure compagnie. C'est aussi à
De Launay qu'ont été confiées les meilleures gouaches
de Lavreince : le Billet doux, Qu'en dit Vahhè?,
V Heureux moment, et la Consolation de V absence,
une perle ! Le travail du graveur fut plus important
encore qu'on ne le croirait , car il dut retoucher et
mettre à point tous les détails, il fit pour ainsi dire un
second dessin de ses sujets.
Enfin De Launay fut aussi le graveur attitré de Fra-
gonard. Rien de plus connu que le Chiffre d'amour,
le Serment d" amour , la Bonne mère, et surtout la
célèbre estampe des Hasards heureux de VEscar-
poleite. Cette estampe est le fin du fin, la quintessence,
le dernier mot de l'art galant de l'époque. C'est vif,
mais que c'est joli !
Collé raconte dans ses mémoires qu'il rencontra un
jour le peintre Doyen qui venait d'exposer à St-Roch
un tableau qui y avait le plus grand succès et dont le
sujet était S*®-Geneviève des Ardents : « Croirait-on ,
» disait le peintre, que peu de jours après l'exposition
LAUNAY (Nicolas de). 5i<
» de mon tableau au Salon , on m'envoya chercher
» de la part d'un seigneur de la cour. Il était dans
» sa petite maison avec sa maîtresse lorsque je me
» présentai à lui pour savoir ce qu'il me vouloit. 11
» m'accabla d'éloges et finit par m'avouer qu'ayant
» vu mon tableau, il se mouroit d'envie d'avoir celui
» dont il alloit me tracer l'idée :
» Je désirerois, dit-il, que vous peignissiez madame
» (en me montrant sa maîtresse) sur une escarpolette
» qu'un évêque mettroit en branle. Vous me placerez
» de façon, moi, que je sois à portée de voir les jambes
» de cette belle enfant et mieux même si vous voulez
» égayer davantage votre tableau.
» J'avoue , me dit Doyen , que cette proposition à
» laquelle je n'aurois jamais dii m'attendre, me con-
» fondit et me pétrifia. Je me remis pourtant assez
» pour lui dire : Ah ! Monsieur, il faut ajouter à l'idée
» de votre tableau, en faisant voler en air les pantoufles
» de madame , et que des amours les retiennent.
» Mais comme j'étais bien éloigné de vouloir traiter
» un pareil sujet , si opposé au genre dans lequel je
» travaille , j'ai adressé ce seigneur à M'' Fragonard
» qui l'a entrepris et qui fait actuellement cet ouvrage
» singulier. »
Ajoutons que le seigneur en question dut rabattre
un peu de ses prétentions , et renoncer à avoir un
évêque pour tenir l'escarpolette.
Les maîtresses pièces dont nous venons de parler
nuisent à une série d'estampes gravées par De Launay,
toutes dans le même format : l'Abus de la crédulité
d'après Aubry, r Éducation fait tout, le Petit Prédi-
cateur, r Heureuse fécondité , Dites donc s'il vous
512 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
plait , les Beignets, d'après Fragonard , la Gaieté de
Silène, d'après Bertin, le Bonheur du ménage, V En-
fant chéri , d'après Le Prince, etc. ; ces pièces sont
cependant bien loin d'être sans mérite . celles de
Fragonard surtout sont charmantes.
Quittons maintenant les grandes estampes, et pas-
sons à un genre opposé , la très-petite vignette : nous
allons retrouver De Launay aussi soigneux , aussi
merveilleux , principalement dans une suite de petits
Frontispices de Marillier pour les éditions de Gazin
qui sont des chefs-d'œuvre.
De Launay fut un remarquable graveur de vignettes.
Nous ne voulons indiquer ici que les meilleures : les
Noces de Bacchus et d'Ariane, d'après Cochin (pour
r Origine des Grâces), les fleurons d'Eisen pour
les Saisons et pour les Chefs-d'œuvre dramatiques
publiés par Marmontel , et un fleuron de titre pour les
Contes mis en vers par un petit cousin de Rabelais
(n'est-ce pas une véritable estampe que ce maître luti-
nant sa servante à la cave sur un tonneau, et ne dirait-
on pas un Baudouin en miniature ? ) , les vignettes
de Gravelot pour VHonnête criminel de Fenouillot
de Falbaire , celles de Moreau pour les Bienfaits du
sommeil et surtout cette Foire dans un parc qui sert
de frontispice à un volume des Chansons de Laujon,
et qui est une des merveilles de la vignette.
De Launay s'était marié le 2 mai 1768. Le 30 juin
1770, Madame Wille tint sur les fonts de baptême, avec
L. Lempereur, une fille dont Madame de Launay avait
accouché la veille. « Gela nous a procuré force dra-
gées », ne manque pas de signaler le gourmand Wille.
Madame de Launay mourut des suites de ses couches
LAUNAY (Nicolas de). 543
De Launay fit partie de ce voyage au Havre que
nous avons raconté quand nous avons parlé de
Gaucher. Il est désigné dans la relation sous le pseu-
donyme de de Valnay. Ce pseudonyme de Valnay,
nous le retrouvons sur des vignettes du Cabinet des
Fées, des Œuvres de Le Sage et de l'Abbé Prévost.
De Launay avait la direction de la gravure de ces suites
d'illustrations ; Renouard l'accuse à ce sujet d'une in-
délicatesse.
« On sait que Delaunay l'aîné, chargé de la direction
» des gravures destinées à l'édition de Lesage 15 vol.
» et Prévost 39 in-8 , se permit d'en faire tirer à son
» profit cent exemplaires , quelques-uns disent cent
» cinquante, avant de livrer les planches à leur pro-
» priétaire. Il en fit de même pour les Voyages imagi-
» naires, les Contes des fées , les œuvres de Caylus ,
» deTressan ainsi que pour la jolie suite des portraits
» et vignettes des nombreux in-18 de la collection de
» Lyon, et pour plusieurs autres encore, car il aimait
» beaucoup à diriger les entreprises de gravure , et
» pendant plus de quinze ans les libraires ont semblé
» ne pouvoir se passer de son officieuse direction. Son
» infidélité ne fut notoirement connue que lorsque
» après sa mort , ces frauduleux tirages, vendus à vil
» prix , se répandirent dans la circulation et y res-
» tèrent à peu près sans emploi , tous les exemplaires
» de ces éditions étant garnis de leurs gravures. »
Quoi qu'il en soit , cette supercherie ne paraît pas
avoir attiré de désagréments à De Launay, qui fut plus
heureux en cela que ne le fut Balechou, accusé d'une
indélicatesse du même genre, comme nous 1 avons vu.
De Launay fut agréé à l'Académie en 1777 ; l'expo-
545 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
sitioii de notre graveur au Salon de cette année fut
importante.
« M"" de Launay, écrit Bachaumont , dernier agréé,
» sans avoir un burin aussi hardi que celui de Por-
» porati , l'a fécond et étendu. Sa Marche de Silène,
» d'après Rubens , est une preuve que les groupes
» multipliés ne l'embarrassent point , qu'il a de la
» gaieté. Son Endymion etsâLéda sont d'une grande
» correction de dessin. On trouve un faire doux et
» moëUeux dans sa Complaisance maternelle et son
» Heureuse fécondité, d'après M"' Fragonard. Les
» Ruines Romaines sont frappantes , attristent par
» une grande vérité , et ses divers sujets pour la
» Nouvelle Hèloïse , pour le Télé^naque et le Roland
» furieux sont pleins d'esprit. L'Académie ne peut
» que faire une excellente acquisition dans un pareil
» Membre. »
Les morceaux de réception de De Launay furent
les portraits de Sébastien Le Clerc fds, et de /. B. F.
deTroy. Il avait demandé, sans pouvoir l'obtenir, à ne
présenter qu'un seul morceau. Le grand portrait ne le
tentait guère , en effet ; il n'avait pas assez d'ampleur
pour aborder ce genre, son talent convenait mieux au
petit portrait de livre. Il en ût de très fins pour la
collection Gazin.
11 fut aussi membre de l'Académie des Beaux-Arts
de Danemark.
Nicolas de Launay mourut le 22 mars 1792.
11 a formé de nombreux élèves ; l'un d'eux , Huot ,
nous a laissé un profil de son maître , gravé sur le
dessin d'Augustin de Saint-Aubin.
Nous dressons ici le catalogue abrégé de son œuvre.
LAUNAY (Nicolas de;. 545
Nous ferons observer que tout, absolument tout ce qui
a été gravé par De Launay existe à l'état d'eau-forte,
ainsi que l'on pourrait s'en convaincre en parcourant
l'œuvre du Cabinet des Estampes. 11 existe aussi un
premier état des estampes de De Launay qui est géné-
ralement avec le titre mais avant la dédicace.
ESTAMPES.
I. d'après aubry.
1. L'Abus de la crédulité, petit in-fol. en largeur.
2. Première leçon d'amitié fraternelle; petit in-fol. en largeur.
II. d'après BAUDOUIN.
3. LE CARQUOIS ÉPUISÉ; in-fol.
L'eau-forte, 805 fr. vente Béhague. — Avant la lettre, 380 fr. même vente.
4. LES SOINS TARDIFS; in-fol., même format que le Carquois
épuisé.
Eau-forte avancée, 295 fr. vente MUbIbacher. — Avant la lettre, 389 fr. vente
Béhague.
5. L'ÉPOUSE INDISCRÈTE, mo ; in-fol.
L'eau-forte, 1,100 fr. vente Wasset ; 500 fr. vente Mûhlbacher. — Avant la
lettre, 500 fr. vente Mûhlbacher. — Avant la dédicace, 300 fr. vente Béhague.
6. LA SENTINELLE EN DÉFAUT; in-foL, même format que
VEpouse indiscrète.
L'eau-forte, 190 fr. 1881.
1. Le Poëte Anacréon ; petit in-fol. en largeur.
III. d'après bertin.
8. La Gaieté de Silène; petit in-fo:. en largeur.
85f r. avant la dédicace, vente Béhague.
546 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
IV. d'après fragonard.
9. LE CHIFFRE D'AMOUR; in-fol. Dédié à Madame de Polastron.
l^f état : Avant la dédicace, tablette blai-clie.
10. LE SERMENT D'AMOUR; grand in-foL
11. LA BONNE MÈRE; grand in-fol., pendant de la pièce précé-
dente.
L'eau-forte, 161 fr. 1881.
12. LES HASARDS HEUREUX DE L'£SCARPOLETTE ; grand
in-fol. Dans le bas, un fleuron aux initiales de Fragonard, composé
par Choffard.
L'eau-forte, 1,000 fr. vente Milhlbacher.
1^'' état : Le mot escarpolette écrit avec une « à la fin. 700 fr. vente Bébague.
13. L'ÉDUCATION FAIT TOUT; petit in-fol. en largeur.
370 fr. avant la dédicace, vente Béhague.
14. LE PETIT PRÉDICATEUR; petit in-fol. en largeur.
15. L'HEUREUSE FÉCONDITÉ; petit in-fol. en largeur.
16. DITES DONC S'IL VOUS PLAIT; petit in-fol. en largeur.
n. LES BAIGNETS; petit in-fol. en largeur.
59 fr. avant la dédicace, vente Bébague .
V. d'après FREUDEBERG.
18. LE PETIT JOUR; in-fol.
Pendant de l'Heureux Moment, de Lavreince.
L'eau-forte, 700 fr. vente Béhague; 710 fr. vente Mûblbacher. — Avant la
dédicace, 480 fr. vente Bébague ; 480 fr. vente Mtlblbacber.
19. La Complaisance maternelle; in-fol.
190 fr. avant toute lettre, vente Béhague.
20. La Gaieté conjugale; petit in-fol. en largeur.
120 fr. avant la dédicace, vente Béhague.
21. La FÉLICITÉ villageoise; petit in-fol. en largeur.
745 fr. avant la dédicace, même vente.
LAUNAY (Nicolas de). 547
VI. D APRES M^"° GERARD.
22. Les Regrets mérités ; petit in-fol. en largeur.
VII. d'après lavreinge.
23. LE BILLET DOUX, dédié à M. Ménage de Pressigny, fermier
général ; in-fol .
L'eau-forte, 401 fr. vente Béhague; 2,300 fr. vente Wasset; 460 fr. vente Mûhl-
bacher. — Avant la lettre, 405 fr. vente Béhague ; 510 fr. vente Mûhlbacher.
24. LA CONSOLATION DE L'ABSENCE, dédiée à Milady, com-
tesse de Douglas ; in-fol.
Avant la dédicace , tablette blanche , 300 fr. vente Béhague ; 700 fr. vente
Mûhlbacher.
25. L'HEUREUX MOMENT, dédié à Louis Lempereur, graveur du
Roi; in-fol.
L'eau-forte , 430 fr. vente Béhague : "700 fr. vente Mûhlbacher. — Avant la
dédicace, 410 fr. vente Mûhlbacher.
26. QU'EN DIT L'ABBÉ? dédié à Madame la Comtesse d'Ogny,
in-fol.
L'eau-forte , 401 fr. vente Béhague ; 920 fr. vente Mûhlbacher. — Avant la
lettre, 400 fr. vente Béhague ; 980 fr. vente Mûhlbacher.
21. Le Séducteur-, in-fol.
Cette estampe n'est connue qu'à l'état d'eau-forte. Elle représente un père qui
veut tuer le séducteur de sa fille (sept personnages). M. Era. Bocher l'attribue
pour le dessin à Lavreince et à De Launay pour la gravure. C"est la môme déco-
ration d'intérieur que celle du Billet doux.— 120 fr. 1881 .
VIII. d'après le prince.
28. Le Bonheur du ménage; petit in-fol. en largeur.
29. L'Enf.VNT chéri; petit in-fol. en largeur.
40 fr. avant la dédicace, vente Béhague.
30. L.v Lettre envoyée, — la Lettre rendue, 2p. in-fol.
ovale , dédiées à M. Radix de St^-Foix , trésorier général de la
marine en n68.
548 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
IX. d'après pierre.
31. LÉDA, — Endymion , 2 p. in-fol. ovale en largeur.
X. d'après divers.
32. La Marche de Silène, d'après Rubens; in-fol. en largeur.
— Les Vierges sages et les Vierges folles, d'après Shalken. —
Les Vendeurs chassés du Temple, d'après Jordaens. — La Partie
de plaisir, d'après Wœninx. — L'Emplette inutile, d'après Char-
pentier. — Angélique et Médor, d'après Raoux ; in-fol. — Le
Four à chaux , d'après Loutherbourg. — La Chute dangereuse,
d'après F. Meyer. — l'*' et 2"^^ Ruines romaines, d'après Dietricy.
— Miracles opérés par l'intercession de St Vincent de Paul ,
d'après A. Beaufort. — Planches pour la Galerie du Palais-
Royal.
PORTRAITS.
33. Bignon (A.-J.), d'après Drouais, HôQ ; in-fol.
34. BONNARD (Bernard de), d'après Vestier ; in-8 orné.
35. Choiseul (le Duc de) , dessiné et gravé par N. de Launay, d'après
L.-M. Van Loo ; in-4. — Chez l'auteur, rue de la Bucherie , la
porte cochère au coin de la rue des Rats.
36. La Fontaine , vignette-frontispice pour les Contes mis en vers
par un petit cousin de Rabelais. — Voyez aussi n" 63.
3T. Le BloY, abbé de Clairvaux , d'après Roslin ; in-fol.
38. LE CLERC tils (Sébastien), d'après Nonnotte; in-fol.
Morceau de réception à l'Académie.
39. Louis XV, petit médaillon soutenu par des amours, tête de page
pour un in-12. — H. Gravelot del., N. de Launay sculp.
En-tête de la dédicace du livre de Raulin sur la Conservation des enfants.
40. Louis XV, tête de page pour la description de son mausolée ,
d'après Moreau.
LAUNAY (Nicolas de\ 549
41. Louis XV, autre tête de page pour la description de son mausolée,
d'après Moreau.
Les premières épreuves sont signées N. de Launay. Les suivantes portent ]a
signature de Lempereur.
42. Louis XVI prononce un discours pour le bonheur de son peuple,
vignette d'après Borel ; in-8.
43. Necker, d'après Duplessis ; in-4.
Saint-Aubin reprocha à De Launay d'avoir copié ce portrait sur celui qu'il
avait gravé lui-même. L'Académie apaisa la querelle.
44. Necker, d'après Duplessis ; in-8.
4.5. Oultremonl (C.-N.-A. d'), évêque de Liège, d'après Rhenasteine;
in-fol.
46. Raynal (l'Abbé), d'après Cochin ; in-4 orné.
47. Raynal (l'Abbé), d'après Cochin; in-8.
48. TresSAN (le Comte de), d'après Borel- in-8 orné.
49. TROY (J.-B.-F. de), d'après Aved; in-fol.
Morceau de réception à l'Académie.
50. PORTRAITS GRAVÉS POUR LA COLLECTION CAZIN,
d'après Marillier ; in-18 ornés : BOILEAU. — Charron. —
DesHOLILIÈRES. ~ Do RAT. — Fénélon. — Fontenelle. —
Gessner. — Graffigny. — Jeanne d'Ai-c. — La Bruyère.
— La Fontaine. — Malherbe. — Marot. — Mil ton. — Mon-
tesquieu. — Ovide — Pascal. — PiRON. — RABELAIS. —
De Reyrac. — J.-R, ROUSSEAU. — Sapho. — Le Tasse. —
Voltaire.
VIGNETTES.
I. d'après cochin.
51. Le Triomphe du goût, vignette in-8 pour la Bibliothèque
du Théâtre-Français du duc de LaVallière, 1768.
I. 86
550 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE
52. Figiires pour Orlando FURIOSO DI LODOVICO ARIOSTO,
Birmingham, Baskerville, 1773, 4 voL in-8 ; 6 p.
De Launay est le graveur qui a le plus travaillé à cette illustration , pour
laquelle il a encore gravé d'après Eisen , Monnet , Cipriani et Moreau.
Les figures avant la lettre et les eaux-fortes des figures de l'édition de Basker-
ville (moins celles gravées par Bartolozzi , qui n'existent qu'avec la lettre) dans
l'exemplaire de Renouard .
53. LE TRIOMPHE DE BACCHUS ET D'ÉRIGONE , in-8.
{l'Origine des' Grâces).
54. Adieux de Télémaque et de Narbal. — Télémaque explique les
lois de Minos; 2 p. in-8 [Télémaque, texte gravé par Drouet).
55. Confiance , vignette pour VIconologie.
II. D APRES EISEN.
56. L'Age d'airain et l'Age de fer. — Panthée déchiré par les bac-
chantes. — Orphée jouant de la lyre. — Naissance d'Adonis.
(Métamorphoses d'Ovide).
51. Figures pour VArioste de Baskerville ; 3 p.
58. L'ABEILLE JUSTIFIÉE,— LA FAUSSE PUDEUR, — LES
JALOUX TROMPÉS, — LES OMBRES, têtes de pages pour
les Baisers de Dorât. — Culs-de-lampe pour le même livre.
Sur l'eau-forte de la Fausse Pudeur, le jeune génie qui offre le livre de Dorât à
trois jeunes femmes est dans l'état que Cohen qualifie de <> brillant ». Dorât a
écrit:
Ce que vous fuyez dans mon livre
Vous le cherchez dans un amant.
Les Jaloux trompés sont une sorte de contre-partie de la figure dite des petilt
pieds, de Daphnis et Chloé. Ou voit ici non les petits pieds, mais les deux têtes.
."9. Tête de page pour VHistoire des ordres royaux de Notre-Dame
du Mont-Carmel , etc., par Gautier de SLbert , 17'72.
60. Fleurons et vignettes pour les CHEFS - D'OEUVRE DRAMA-
TIQUES publiés par Marmoutel , l'7'73, in-4.
Très belles illustrations. De Launay en est le principal graveur.
61. Cul-de-lampe poiir les ÉPREUVES DU SENTIMENT, de Bacu-
lard d'Arnaud.
LAUNAY (Nicolas de). S51
62. RayNAL écrivant son livre, devant lui défilent des troupes
coloniales. — L'ANGLAIS QUI VEND SA MAÎTRESSE; 2 p.
in-8 {Histoire des Indes, de Raynal).
03. LA SERVANTE QUI ROIT A LA CAVE, très joU fleuron
de titre des Contes mis en vers par un petit cousin de Rabelais
(d'AquindeChâteaulyon), lllô, in-8.
En tirage hors texte, vendu 200 fr. 1880.
G4. En-tête pour un in-4 , IT^S. Un phénix , deux torches, etc.
65. En-tête allégorique. Les armes de la maison de Condé ; à gauche
un cabinet d'histoire naturelle, à droite une bataille.
III. d'après GRAVELOT.
66. De la Conservation des enfants, parRaulin, 1768, in-12. — Un
frontispice.
Ql. Vignette pour les Saisons de Saint-Lambert , n69.
68. Modères vos transports. ... — Voici l'instant affreux I. . . 2 très
jolies vignettes pour L'HONNÊTE CRIMINEL, de Feuouillot
de Falbaire, no^, in-8.
69. Vignette pour les Annales de Tacite, 1768, in-12.
10. Illustrations pour le Voltaire in-4 [Mariamne, Nanine, etc.)
11. Afrique. — Amérique. — Apollon. — Génie. — Janvier. — Justice.
— Loi. — Polymnie. — Pratique. — Septembre. — Thalie.
(vignettes pour VIconologie).
IV. d'après marillier.
•72. L'Incendie. — La Surprise. — L'Orage favorarle,
vignettes in-12 pour les Idylles de Berquin.
73. Femme assise sur un lion et tenant un cartouche d'armoiries, 1764;
in-12.
74. Epitre de Pierre Bagnolet , citoyen de Gonesse, aux grands hommes
du jour; 1 figure.
75. Frontispice pour les Fables de Dorât, in-8.
552 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
76. Vignettes pour les Œuvres de Le Sage et les Voyages imaginaires.
11. C'était bien assez d'être coupable. . . etc., 2 jolies vignettes pour
les Contes moraux de Mercier, 1769.
Les deux autres par De Ghendt.
78. En-tête pour un in-4. Turc accoudé sur un ballot de moka. 1779.
79. Titre et vignettes pour les ŒUVRES DE GESSNER, édition
de Cazin. Genève, 1777, 3 vol. in-18.
C'est peut-être ce que De Launay a gravé de plus fin , avec les vignettes
suivantes.
80. FRONTISPICES POUR LES ÉDITIONS DE CAZIN, ravis-
santes petites illustrations in-18.
Amours d'Ismène et d'Is.ménias. — Œuvres de Bernard. L'Art d'aimer.
P7-esse, ose tout, et Delphirc est à toi. — Œuvres de M. le Cardinal de
Bernis. — Voyage de Chapelle et Bachaumont. Hélas ! que Von serait heu-
reux. — '20^ Baiser. // faut des couronnes de roses. . . — Œuvres de Grécourt.
Philotanus. — Daphnis et Chloé. Les petits pieds. Tout se passa à l'ordinaire.
— Imitation de Jésus-Christ. Le Christ en croix. 0 vos omnes.. . — Poésies
DE La Fare. — Fables choisies de La Fontaine. Monument avec le buste
du poète. — Lettres persanes. — Régnier. — La Pucelle , titre. — La
Reine de Golgonde, conte de Boufjflers . — Les Grâces. — Les Saisons. —
Vert-Vert.
81. Figures pour la Bible de Defer de Maisonneuve, 10 p.
V. DAPRES moreau.
82. Iphis changée en garçon. — Hippomène et Atalante. — Cybèle et
les vaisseaux d'Énée (les Métamorphoses d'Ovide, in-4, 1769).
83. Les Grâces , vignette pour les Grâces de Meunier de Querlon,
1769, in-8.
84. Vénus recevant la pomme des mains de Paris , in-8 {le Jugement
de Paris, 1772).
85. Vignettes pour VArioste de Baskerville , 4 p. iu-8.
80. Vignettes pour les chants V et XII de VArioste de 1775, 1783.
Elles étaient destinées à remplacer celles d'Eisen , de l'édition de Baskerville,
jugées trop mauvaises.
87. LE COCU IMAGINAIRE. — La Comtesse d'Escarbagnas
[Molière de Bret , 1773).
LAUNAY (Nicolas de). oo3
88. St-PBEUX PROVOQUANT MYLORD EDOUARD. — LA
SORTIE DU MAUVAIS LIEU. - LE MORCEAU DE
MUSIQUE. -PIQUÉ DE MA RAILLERIE. ..- SOPHIE
REMETTEZ-VOUS. . . , illustrations pour le Rousseau in-4 de
l'774.
89. PVGMVLION REGARDANT SON OUVRAGE, — PyGMALION
POSANT SUR SON COEUR LA MAIN DE GALATHÉE, 2 têtes
de page [Pygmalion, par Imbert).
90. Marie-Thérèse au milieu des Hongrois , in-8 ( Annales de Marie-
Thérèse, par Fromageot).
91. Apollon sur son char, frontispice des Saisons de Saint-Lambert,
in-8, ms.
92. LES BIENFAITS DU SOMMEIL, ou les Quatre Rêves accom-
plis, TparlmberL Paris, Brune t, me, in-12. Ouvrage allégorique
au ministère de Maurepas.
Un titre et quatre jolies figures.
Les eaux-fortes dans l'œuvre de De Launay au Cabinet des Estampes.
1^' état : Avant l'encadrement.
93. UNE FOIRE DANS UN PARC, frontispice du tome I-t des
A-propos de société ou Chansons de Laujon. — Colin et
Colette, — l'Inauguration du temple de l'Amitié, culs-de-
lampe pour le même ouvrage.
La vignette de la Foire dann un parc est non-seulement l'une des perles de
l'œuvre de De Launay, mais encore une des plus merveilleuses que cette époque
ait vu se produire.
L'eau-forte pure au Cabinet des Estampes.
État d'essai avant toute lettre. — \«' état : Avant l'indication du tome.
94. Arrête, commence par moi!— Ah, laisse-moi et sauve Télasco.
2 p. in-8 [les Incas).
95. Esclaves conduits par des marchands, — Les Anglais demandent
pardon à Aurengzeb , — Ouragan aux Antilles , 3 p. in-8. —
Un Anglais qui vend sa maîtresse, — Voilà la monnaie. . . , 2 p.
in-4. (Rayual).
96. En-tète pour les actions de la COMPAGNIE POUR LE DESSÈ-
CHEMENT DES MARAIS DE BOURGOIN, etc.; in-8 à claire-
voie, n'79.
55i LES GRAVEURS DU XYIIIf SIECLE.
VI. d'après divers.
97. Pyrame et Thisbé, — Paysans changés en grenouilles, — Glaucus
et Scylla, 3 p. d'après Monnet {Métamorphoses d'Ovide).
98. Figures de Monuet et de Gipriani pour VArioste de Baskerville ,
5 p.
99. Vignette d'après Monnet pour le Temple de Gnide , mis en vers
par Colardeau.
100. Lettres portugaises, Paris, Delance, 1796, 2 vol. in-18; une fig.
d'après Monnet.
101. Titre pour un ouvrage italien , publié à Londres et Paris par
Molini, mS, in-12.
102. AÉBOSTATS , 4 p. grand in-8 pour le livre de Fauj as de Saint-
Fond , Description de la machine aérostatique de MM. de
Montgolfier, 1783 (un frontispice). — Suite de la Description
(3 vignettes).
103. PomoNjE GalliCjE , titre in-4 , d'après de Sève.
104. Adam et Eve, d'après de Sève; iu-8.
105. La Religion prosternée devant la croix, d'après Belle; in-12.
106. Noce russe interrompue. — Expérience sur l'électricité. — Danse
russe. — Le Knout , etc.; illustrations d'après Le Prince pour le
Voyage en Sibérie, de Ghappe.
107. Mascarade des jésuites ; in-4.
108. La Société des jésuites sur la bôle de l'Apocalypse. — St Ignace
éclairant les nations ; 2 p. in-8.
LAUNAY (Robert de).
Robert de Launay le jeune l'ut élève de son frère,
qui en fit un graveur habile ; mais son œuvre est loin
d'avoir l'importance de celui de Nicolas de Launay.
On y remarque quelques bonnes estampes, et de jolies
vignettes. Il fut très employé à la gravure de la
Galerie du Palais -Royal. Laurent lui payait une
planche pour le Musée français jusqu'à 1,800 livres.
ESTAMPES.
1. LES ADIEUX DE LA NOURRICE, d'après Aubry ; in-fol.
en largeur.
L'eau-forte, 150 fr. 1879. — Avant la dédicace, 40 fr. vente Béhague.
2. La Reconnaissance de Fonrose , d'après Aubry ; in-fol.
en largeur.
3. Le Mariage conclu, — le Mariage rompu, 2 p. faisant
pendant , d'après Borel et Aubry ; in-fol. en largeur.
4. J'y passerai! d'après Borel, HSS, in-fol. eu largeur ; imitation
de la Sentinelle en défaut de Baudouin.
5. Mort de Mirabeau, allégorie d'après Borel; in-fol.
6. Trait de charité, d'après de Fraine; in-fol. en largeur.
556 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
I. La Cachette découverte {l'Armoire), d'après Fragonard ;
in-fol. en largeur.
8. Le Malheur imprévu, d'après Greuze ; in-fol.
9. LES SOINS MÉRITÉS, d'après Lavreince.
Le titre ne fait pas comprendre le sujet; il s'agit simplement d'un lavement
administré à un petit chien. — 210 fr. avant la lettre, 1881.
10. LES ADIEUX, d'après Moreau , mT ; in-fol. [Monument du
Costume).
II. C'est papa, d'après Vangorp ; petit in-fol. en largeur, com-
mencé par N. de Launay, terminé par son frère.
12. Bain public des femmes mahométanes, d'après Le Barbier ; in-fol.
en largeur.
R. de Launay a gravé pour le Cabinet Choiseul , le Cabinet PouUain , la Galerie
du Palais-Royal , les Campagnes d'Italie, etc.
PORTRAITS.
13. Robert de Launay le jeune ; in-8.
14. Les frères Montgolfier ; in-8. — Le Comte de Caylus, d'après
Cochin; in-8. — Dazincourt , acteur; in-8. — Fénélon, vignette
d'après Monnet. — Frédéric II ; in-8. — M""*" de Graffigny ;
in-18. — M"^ de Tencin ; in-18. — Voisenon ; in-12.
15. J.-J. Rousseau, jolie vignette-frontispice pour Emile, in-4. —
La même pièce, réduite in-8.
M*"® DuchesDois, Faipoult, Macartney, etc.
VIGNETTES.
16. Ex-LiBRiS Duché, d'après Marillier, 1*779; in-12.
n. Titre, d'après Marillier, pour Le CÉLIBATAIRE, comédie de
Dorât.
LAUNAY (Robert de i. 557
18. lUuslrations d'après Marillier, pour Colomb dans les fers. . . p:ir
de Langeac ; 3 p.
19. Illustrations d'après Marillier, pour les Œuvres de Le Sage , de
l'abbé Prévost , de Tressan , de Pope , les Fables de Dorât , les
Romances de Berquin , le Gessner de Gazin , la Bible.
20. Vignette, tête de page et cul-de-lampe, d'après Marillier, pour
Pauline et Suzette, dans les Épreuves du sentiment,
de Baculard d'Arnaud.
21. Frontispice d'après Moreau : Mercure tenant une sphère sur laquelle
on lit le mot Amérique , 1778 ; in-8.
22. Vignettes d'après Moreau peur le Voltaire de Kehl, Rousseau in-l,
les Incas, Raynal.
23. Vignettes d'après Cochin pour HÉRO ET LÉANDUE , 1"84 ,
in-12 ; Em,ile, VHistoire de France du président Hénault, l'Iliade,
la Jérusalem délivrée.
24. Répoblique française, tête de page allégorique, d'après Gatteaux ;
in-4.
25. Vignettes d'après Freudeberg pour l'Heptaméron ; d'après Desrais
pour les Nouvelles de Cervantes et les Confessions du Comte
de *** ; d'après Monnet pour Gressel ; d'après Le Barbier pour
VOvide de Villenave ; d'après Borel pour le Berquin de Renouard ;
d'après Quéverdo pour Télémaque ; d'après Myris pour l'Histoire
romaine; d'après Vignaud pour Eliézer et Nephtali ; etc. —
Réductions des figures de Bernard Picart pour le Lutrin. —
Nombreuses vignettes d'après Challiou , Ghasselat , Garnerey,
de Fraine, etc.
On distingue les vignettes de R. deLaunay à ce qu'elles sont signées DeLaunay.
Son frère signe toujours N. de Launay.
LAURENT (Pierre).
4739-'! 809.
Bien qu'il ait gravé quelques morceaux tels que la
Mort du chevalier d^Assas , de Casanova, et les por-
traits du Prince de Montbarey et de sa femme née
Mailly-Nesle, Pierre Laurent, né à Marseille en
1739, élève de Balechou , reste surtout connu comme
l'éditeur, avec Robillard-Péronville, du Musée Fran-
çais , recueil complet des tableaux , statues et bas-
reliefs qui composent la collection nationale , et dont
la publication commença en 1803. A cette époque, nos
armées victorieuses avaient fait main basse dans les
pays conquis sur les plus beaux objets d'art qu'ils ren-
fermaient, et le Musée National était la plus splendide
réunion de chefs-d'œuvre qui se pût imaginer.
Depuis longtemps d'ailleurs, Pierre Laurent nour-
rissait le projet de cette publication artistique. Il s'était
précautionné auprès du ministre de la liste civile De
La Porte, en avait obtenu l'autorisation de reproduire
les tableaux et statues renfermés dans les maisons
du roi, et s'était associé pour cette entreprise avec
Jean-Esprit Bonnet, prêtre. La Révolution n'arrêta
pas les travaux. Laurent s'associait ensuite avec
Robillai'd-Péronville, et en 1803 paraissait le Musée
LAURENT. 559
Français. Les gravures, de format in-folio, ont été
exécutées avec beaucoup de soin, et tout l'ouvrage,
dont la partie descriptive était confiée à Groze-
Magnan, Visconti et ensuite à Emeric David, con-
duit avec habileté. Laurent s'était adressé aux
meilleurs graveurs de son temps, à Robert Daudet ,
à Audouin , à Delignon , à Dupréel , à Massard , à
Dequevauviller, à Helraan , à Godefroy, à Girardet , à
Robert de Launay ; en même temps il faisait graver
par de nombreux artistes à l'étranger les dessins
qu'il leur envoyait . exécutés avec soin d'après les
peintures, à Vienne par Schmutzer, à St-Pê!ersbourg
par Klauber , à Anvers par Claessens , à Augsbourg
par Eichler, à Carlsruhe par Aldenvang , à Stuttgart
par Muller, à Rome par Galendi, à Bologne par Rosas-
pina, à Vienne par Fislier, etc., etc.
Lui-même s'est employé ainsi que son fils à la con-
fection de son magnifique ouvrage. Il a gravé avec
Audouin les Muses , d'Eustache Le Sueur , avec
Duplessi-Bertaux dont il termine l'eau-forte le Passage
du Rhin de Van der Meulen , enfin seul, la Vie
champêtre de Feti , les Ruines du Colysée de
Bergliem, le Manège de Wouverraans , le Coup de
soleil de Ruysdaël. Le Pacage de Paul Potter est pour
l'eau-forte de Laurent fils , et a été terminé au burin
par le père.
« C'est grâce à la persévérance et au courage qu'a
» montrés Pierre Laurent , dit Joubert , — chez les
» parents duquel Laurent avait travaillé à Lyon , —
» que cette grande entreprise, contrariée par les trou-
» blés politiques, a pu être menée à bonne fin. Une
> direction de cette nature était une chose bien
560 LES GRAVEURS DU XVIII« SIECLE.
» délicate. Il fallait stimuler réraulation saiis blesser
» les amours-propres, faire accueillir des observations
» souvent nécessaires, difficiles à présenter, pénibles
» à entendre. La douceur naturelle de Laurent , sa
» politesse et d'adroits ménagements lui concilièrent
» à cet égard tous les suffrages. »
Le portrait de Laurent a été gravé par Miger, in-8.
Pierre-Louis-Henri Laurent, né en 1779 , a gravé
quelques pièces pour le Musée ft^ançais : à la mort
de son père il reprit et continua cette publication qui
fut terminée en 1811 et qui forme quatre volumes in-fol.
Quelques extraits des conventions passées en 1792
entre Laurent et les graveurs donneront l'idée des
prix élevés qui leur étaient payés. Le prix convenu
par Laurent avec De Launay pour la planche de la
Bacchanale du Poussin, était de 1,880 livres, avec
Miger, 1,200 livres pour la gravure d'un tableau de
Van Mol , d'après le dessin fait par Touzé , avec Le
Mire , 2,200 livres pour l'Annonciation de Solimène ,
avec Maviez, 2,000 livres pour la S^'-Cécile de Mignard,
avec N. Thomas, 1,700 livres pour la gravure du
tableau de Raoux représentant son atelier, etc.
Pierre Laurent le père a encore gravé d'après Bou-
cher, Greuze , Pierre , Dietrich , Loutherbourg , etc.;
des vignettes dans le poëme des Jardins de l'abbé
Delille d'après Cochin et dans le Voyage littéraire de
la Grèce de Guys, 1776.
Il y a un autre graveur du nom de Laurent , André
Laurent, que Basan fait naître à Londres en 1720 et
travailler à Paris sous la direction de Le Bas. Le Blanc
lui a attribué à tort des planches de Pierre Laurent
[le Bénédicité, d'après Greuze, etc.).
LAVALLÉE-POUSSTN (Etienne de).
Malgré son nom retentissant, Etienne de Lavallée-
PoussiN est ce qu'on peut appeler un fruit sec de
l'école de Rome. Ses tableaux n'ont jamais dépassé le
niveau de la médiocrité, mais il a pour nous ce mérite
d'avoir attaché son nom au petit livret que les jeunes
artistes de l'Académie de France à Rome firent
paraître pour célébrer le passage au milieu d'eux
de Marguerite Le Comte, qui voyageait en Italie
avec ses amis Watelet et l'abbé Copette. C'est pour
ce livre, intitulé Nella venuta in Roma di madama
Le Comte e dei signori Watelet e Copette, compo-
nimenti poetici di Luigi Sitbleyras colle figuy^e in
rame di Stephano délia Vallée-Poussin, 1764, que
notre jeune prea? de Rome grava par galanterie avec
Weirotter de petites estampes à l'eau-forte où la
réalité se mêle d'une façon bizarre à la fiction , et
un portrait delà charmante graveuse. On voit dans ces
figures Watelet arrivant à Rome, son carton d'un bras
et M™'' Le Comte en chapeau de paille de l'autre;
Minerve les conduit admirer l'Apollon du Belvédère
et les Ruines du Colysée. Ils sont reçus ensuite solen-
nellement par Apollon à l'Académie de St-Luc et bénis
o62 LES GRAVEURS DU XYIIP SIECLE.
parle pape... Enfin ils s'extasient devant la cascade
de Tivoli : le tout agrémenté de culs-de-lampe et
d'entourages emblématiques. Ce petit recueil entière-
ment gravé est fort curieux.
Nous rencontrons encore de Lavallée-Poussin deux
petites pièces, Mort de la Madeleine et Mort de Saint
Jérôme , in-12. — Jeux de Faunes et de Bacchantes,
2 p. in-4 à l'eau-forte.
Il ne faut pas confondre le graveur précédent avec
Jacques Lavallèe, graveur au burin , né à Toulouse,
élève de Beauvarlet et qui demeurait à Paris rue
Galande 65. Ce graveur a travaillé pour le Musée
Français de Laurent , pour la Galerie de Florence,
r Egypte , et pour les Œuvres de Racine , grande
et belle édition préparée dans les dernières années
du siècle par Pierre Didot. C'est à propos d'une
planche de cet ouvrage qu'il y eut contestation * entre
1 Voici la pièce qui concerne cette affaire , elle fait partie de la col-
lection de M. Portails :
« L'an 4" de la République, le 6 thermidor, 6 heures du soir, nous
« soussignés Noël Le Mire graveur, Pierre Choffard aussi graveur,
v> appelés par le citoyen Jacques La Vallée pour arbitrer une planche
» qu'il a gravée pour les Œuvres de Racine pour le citoyen Didot, et
'1 nous Jean-Baptiste Tilliard graveur, et Nicolas Ponce aussi graveur,
0 appelés par le citoyen Didot pour la même affaire, et ce en présence
» du citoyen Charles-Louis Rigault son fondé de procuration , nous
.1 avons procédé au domicile du citoyen Tilliard à l'examen de la dilte
'1 affaire, nous avons entendus les deux parties les unes après les autres.
n Le citoyen Lavallèe nous a déclaré avoir gravé la ditte planche
n pour laquelle il n'avoit fait aucun prix et qu'il avoit refusé même de
•> recevoir de l'argent quand le citoyen Didot lui en avoit offert et qu'il
n estimoit que dans ce moment il pensoit que son travail valoit quinze
» cents livres valeur métallique. Le citoyen Rigault nous a dit avoir
■' connoissance qu'à l'époque où le citoyen Didot avoit donné le dessin
■1 au citoyen Lavallèe, ily aàpeu près dix-huit mois ou deux ans, il
LAVALLEE-POUSSIN. 563
l'éditeur et lui et qu'on dut appeler les graveurs de
vignettes les plus compétents en la matière pour
régler le différend.
■1 avoit dit au citoyen Lavallée qu'il espéroit que cette planche ne lui
••• coûteroit pas plus de deux mille livres en assignats , que quand le
" citoyen Lavallée lui avoit rapporté sa planche, il lui avoit offert six
>i cents livres en numéraire métallique, que sur la non-acceptation du
■> citoyen Lavallée, il lui en avoit offert huit cents, que le dit citoyen
■> l'ayant refusé, ils éloient convenus de nommer chacun deux arbitres,
» que le citoyen Lavallée avait nommé les citoyens Le Mire et Choffard
<i et le citoyen Didot les citoyens Tilliard et Ponce.
> Les deux citoyens Lavallée et Rigault étant retiré, les quatre arbi-
"> très ont discuté les intérêts de leurs comettans avec l'attention la plus
" scrupuleuse , les citoyens Tilliard et Ponce ont été de l'avis que vu
'■ l'excessive rareté du numéraire, et le prix accepté aussi en numéraire
« par d'autres artistes, ils fixoient le prix de la ditte planche (qu'ils ont
n trouvé très bien exécutée) à la somme de mille livres espèce métallique.
11 Les citoyens Le Mire et Choffard ont pensé que cette même gravure
'1 valoit douze cent livres , persistant tous quatre dans cette différente
'■> opinion, ils ont rappelé les citoyens Lavallée et Rigault et ont cher-
'1 chés par tous les moyens en leur pouvoir à les concilier, ce qui n'ayant
■> pas réussi, ils sont convenus à l'unanimité d'appeler le citoyen Ingouf
■> pour débarrer. Après lecture du dit procès-verbal les parties et arbitres
'■> ont signés : Le Mire, Choffard, Ponce, Tilliard, Lavallée, Rigault
" pour Didot l'ainé.
■■> Nous soussignés , nous étant rassemblés au domicile du citoyen
" Tilliard poui- prendre un parti définitif sur la planche du citoyen
" Lavallée , en présence du citoyen Ingouf , appelé pour donner son
'1 opinion d'une manière prépondérante comme surarbitre. Après avoir
" discuté entre nous, nous avons arrêtté d'après l'avis du citoyen Ingouf,
rt que le citoyen Didot païroit au citoyen Lavallée douze cents livres
■> pour le prix de sa planche, et ce en raison des soins qu'il a mis à la
-1 terminaison de cette planche qui a atteint uue perfection particulière.
'> Fait à Paris ce 9 thermidor an IV*. Le Mire , Choffard , Ponce ,
" Ingouf le jeune, Tilliard , Lavallée, Rigault.
'1 J'ai reçu de M"" Didot la somme de douze cent livres en écus de
■' France pour l'objet mentionné cy dessus et pour solde de tout compte.
" A Paris ce onze thermidor l'an quatrième. Lavallée. «
LE BAS (Jacques-Philippe
Ce n'est pas une exagération de dire que Le Bas est
l'incarnation la plus complète de la gravure du XVIIP
siècle. Il naît presque avec lui et s'éteint aux appro-
ches de la Révolution et dans ce long espace , par ses
ouvrages si nombreux , par ceux dont il surveille
l'exécution, par son atelier bien français de gravure
d'où sortent les artistes les plus exquis de la seconde
moitié du siècle , Cochin , Moreau le jeune, Ficquet,
De Launay, Gaucher, De Longueil et Le Mire, pour
ne citer que les plus connus , il exerce une influence
prépondérante. Enfin ses reproductions de collections
célèbres , ses estampes d'après les maîtres de l'école
française , sa collaboration aux Ports de France de
Vernet , et son œuvre deïéniers , peintre avec lequel
on peut dire qu'il s'est identifié , mettent le comble à
sa réputation et lui assurent une place importante
dans l'histoire de la gravure de notre pays.
Une longue notice manuscrite de l'expert JouUain fils,
placée en tête du bel œuvre de Le Bas au Cabinet
des Estampes, œuvre formé de pièces que Le Bas
« choisissait lui-même avec le plus grand soin la loupe
à la main » pour les donner au futur rédacteur de son
LE BAS. 565
catalogue de vente , nous renseigne sur bien des par-
ticularités de sa vie.
Jacques-Philippe Le Bas naquit à Paris le 8 juillet
1707, d'un maître-perruquier et de Françoise-Etien-
nette Le Cocq. Sa mère lui apprit à lire, mais ses res-
sources modiques ne lui permettant pas de lui donner
plus d'éducation, elle se contenta de le mettre chez un
graveur d'architecture nommé Hérisset. 11 avait
quatorze ans. Elle le conduisit à la friperie, l'habilla
des pieds à la tête et le lança dans la vie avec mission
de s'y débrouiller tout seul , en lui disant ce mot qu'il
rapportait volontiers : « Jacquot , tu connais ma posi-
tion , voilà mon ami , tout ce que je puis faire pour toi. »
Par bonheur l'enfant était doué de volonté, d'intel-
ligence et d'une grande facilité. Devant l'insuffisance
de son premier maître , il dut chercher d'autres con-
seils auprès de Nicolas Tardieu et trouver ses modèles
dans les estampes des graveurs célèbres et surtout
dans celles de « l'immortel Audran ».
Le Bas fut encouragé à ses débuts par l'amateur
Crozat qui lui confia plusieurs des planches de son
Recueil : la Prédication de S^-Jean , d'après Mola ,
la Charité romaine, d'après Noël-Nicolas Goypel qui
s'empressa de faire l'éloge du travail du jeune graveur
à Crozat. Celui-ci doubla le prix convenu et confia
encore à Le Bas la gravure d'un autre tableau ,
V Adoration des rois de Véronèse.
C'est chez Crozat que lui serait arrivée la petite
aventure suivante. On y donnait d'excellents concerts
et Le Bas était amateur et se croyait virtuose. Il avait
appris tout seul , comme pour la gravure , à jouer
un peu de violon , et de cette main agile qui faisait
II. 3T
566 LES GRAVEURS DU XVIII« SIECLE.
merveille sur le cuivre, il donnait quelques bons coups
d'archet et surtout il préludait. Un jour que le concert
tardait chez Grozat, Le Bas se mit à préluder. Le maître
de la maison court à lui : « Ah ! M*" Le Bas, que je suis
» enchanté de la découverte, vous allez remplacer mon
» premier violon. » Le Bas accepte. Gomme la salle
était au rez-de-chaussée , il complotait de sauter et de
se sauver au dernier moment. Mais le violoniste arriva
et le prestige de Le Bas fut sauvé. A quelque temps de
là , obligé d'aller à la campagne chez le financier, il
n'oubUe point qu'il a une réputation de virtuose à
soutenir ; il s'enveloppe d'un linge le doigt du miheu
de la main gauche. Arrivé chez Grozat, on le prie
d'exécuter de la musique nouvelle qu'une demoiselle
venait de recevoir de Paris. Il s'excuse sur la bles-
sure qu'il dit s'être faite en aiguisant son burin et
se dispense ainsi d'avouer son peu de savoir.
Le succès des planches faites pour Grozat avait en-
gagé le jeune graveur, qui, on le voit, ne doutait de rien,
à se présenter à l'Académie et il y était agréé en 1735 ^ .
Mais on exigeait alors d'un graveur deux portraits
d'académiciens pour la réception, et ce genre de travail
n'était pas son fort. Plusieurs délais lui furent accordés
pour présenter les portraits gravés de Cazes et de Le
Lorrain, enfin, aidé des uns et des autres, il les apporta
à la séance du 30 décembre 1741 , où « ils furent re-
» jettes, pour vice de médiocrité, à la grande pluralité
» des voix. » Dumont le Romain , qui ne mâchait pas
1 Malgré JouUain fils qui affirme ( probablement pour diminuer le
désagrément de son échec) que c'est âgé de 23 ans qu'il fil une première
tentative pour entrer à l'Académie, nous maintenons nos dates qui sont
celles des Procès -Verbaux de l'ancienne Académie.
LE BAS. 567
ses expressions , s'écria : « Vous venez de refuser
» Le Bas ; eh bien , mettez-lui un porte-crayon dans
» le c, il dessinera encore mieux que vous tous ! »
Comme notre graveur, par suite de ce refus, se trou-
vait déchu de son titre d'agréé et qu'il lui avait été fait
défense de prendre la qualité de graveur du roi , « Le
» Bas représenta que s'il n'avait pas eu le bonheur de
»• satisfaire l'Académie par les deux dites planches,
» c'avait été par l'obhgation de travailler dans un
» genre sur lequel il n'était nullement exercé, ne s'é-
» tant jamais appliqué à graver le portrait ; qu'il osait
» se flatter n'être pas indigne des bontés de la Com-
» pagnie dans la partie de son art à laquelle il s'était
» dédié par préférence , et demandait qu'il lui fut
» accordé de se représenter de nouveau sur des
» planches d'après Wouvermans , Berghem ou autres
» maîtres semblables. La Société vota de nouveau
» et Le Bas fut chargé de gi-aver pour sa réception
» deux planches d'après Lancret , représentant des
» Conversations galantes dans un parc ^ . »
Le Bas fut enfin reçu le 23 février 1743. Sa Conver-
sation galante, travaillée avec beaucoup de soin et
dans le sentiment du modèle, prouve que l'Académie
eut raison de revenir sur sa décision. Elle fit d'ailleurs
plus tard , amende honorable de sa sévérité en rache-
tant à la vente après décès de Le Bas les planches
gravées des portraits de Gazes et de Le Lorrain.
C'est vers 1733 que Le Bas songea à se marier :
« Il avait alors vingt-six ans , ont écrit MM. de Gon-
» court , et vit par rencontre une belle demoiselle ,
1 Procès -Verbaux inédits de V Académie, à l'École des Beaux-Arts.
568 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
» majestueuse de taille, blanche, rose, éblouissante,
» avec de grands traits réguliers et une peau incom-
» parablement fine. Il suivit, s'informa. La jeune fille
» n'avait en dot que son teint de santé et son port de
» déesse. »
Le Bas épousa donc Elisabeth Duret , et racontait
volontiers avec sa gaieté habituelle comment , sans
position solide encore, il était entré en ménage :
« Lorsque je me suis marié , disait-il , j'ai fait du
» jeune homme, j'ai donné des dentelles, des diamants,
» de belles robes. Le lendemain de mon mariage, je
» n'avois plus d'argent. Cela me rendoit sérieux.
» Sans rien dire, j'ai pris les diamants et les dentelles
» dans la forme de mon chapeau ; j'ai tout vendu. De
» retour chez moi, j'ai montré tout mon argent à ma
» femme en lui disant : ma bonne amie, j'ai vendu tes
» parures, mais j'ai fait de l'argent, je vais en acheter
» du cuivre. Prends patience, soutiens mon courage ,
» je ne te demande que le temps, nécessaire pour gra-
» ver quelques planches et les mettre au jour et je te
» promets de te rendre avec intérêts ce dont je te
> prive aujourd'hui. J'ai tenu parole. Je me .suis ren-
» fermé. J'ai pioché le cuivre (c'étoit son mot), M*"^ Le
» Bas a secondé mon ardeur par son économie. Elle
» faisoit son ménage et balayoit elle-même son esca-
» lier. Dans très peu de temps je me suis vu dans le
» cas, non-seulement de lui rendre tout ce que je lui
» a vois enlevé sans qu'elle en eût joui . mais encore
» de la faire servir et de lui procurer toutes les dou-
» ceurs de la vie qui tiennent à une honnête aisance. »
Ce fut en effet pour soutenir tout ce monde qui
l'entourait, les parents de sa femme , sa mère qu'il
LE BAS. 569
avait logée près de lui , qu'il entreprit de faire du
commerce , de former un fonds de planches et de
rassembler pour l'aider tous les jeunes gens qui mon-
traient quelque aptitude pour la gravure ou seulement
même un peu de bonne volonté. C'est ainsi qu'il créa
cet atelier sans rival , véritable fabrique de gra-
vures bien souvent excellentes , et qu'il forma cette
merveilleuse pléiade de graveurs de talent dont
on recherche avidement les ouvrages aujourd'hui :
Aliamet, CatheUn , Gochin , Eisen, Ficquet, Gaucher,
Godefroy, Helman, Le Mire, DeLongueil, Masquelier,
Moreau le jeune, Née , des étrangers comme Strange
et Ryland. On lui envoyait des disciples des quatre
coins de la France et de l'Europe , et tout ce petit
monde d'apprentis-graveurs vivait en famille, travail-
lant , mangeant et s'amusant sous l'œil maternel de
M"® Le Bas , brave femme soignant avec dévouement
ses pensionnaires pendant que Le Bas leur indiquait
par ses conseils et ses exemples la bonne voie pour
réussir et arriver : « Bonne pension , bonne école. »
« Il avoit , dit Joullain qui nous a conservé la physio-
» nomie de ses leçons, une manière de les enseigner et
V de les reprendre qui lui étoit particulière. Un mot ,
» un seul de ses gestes , étaient plus expressifs que
» les dissertations les plus sçavantes. Le persiflage
» étoit l'arme la plus acérée dont il se servoit pour
» aiguillonner ceux qui marchoient plus lentement que
» les autres. Un jeune homme amoureux de ses pro-
» ductions , ainsi qu'il est d"usage, lui présentoit-il un
» desshi ou une planche que Le Bas trouvoit inférieure
» à ce qu'il pouvoit attendre de cet élève : Vous mé-
» ritez , disoit-il , que je vous embrasse , et se levant
570 LES GRAVEURS DU XVIIP' SIECLE.
» avec un air naturel, il l'embrassoit en efifet. Le jeune
» homme qui recevoit le premier baiser de ce genre ,
» s'en retournoit dans l'atelier, bien satisfait de lui-
» même. Les camarades le désabusoient et bientôt la
» crainte de la raillerie , plus active sur une âme bien
» née que celle de la douleur , le portoit à redoubler
» d'efforts pour se soustraire aux embrassements de
» son maître. »
L'œuvre de Le Bas est très considérable ; cela se
conçoit quand on sait de quelle facilité il était doué,
et quand on connaît son activité et ses besoins inces-
sants d'argent qui le forçaient à produire , car il ne
pouvait jamais se refuser une fantaisie , un tableau ,
un dessin. Ayant à sa disposition toutes les belles
collections qui lui étaient libéralement ouvertes ,
comme celles de la comtesse de Verrue, de Crozat ,
de Blondel de Gagny, du duc de Valentinois , du duc
de Praslin , du duc de Ghoiseul , du duc de Gossé ,
du marquis de Brunoy, du comte de Vence, du comte
de Baudouin , il en gravait les tableaux , soit que
les planches lui fussent commandées, soit qu'il les
exécutât pour alimenter son propre fonds. Pour arri-
ver à ce résultat, il était aidé par tous ces jeunes
graveurs auxquels il distribuait suivant leurs apti-
tudes la besogne qu'il payait généreusement. Tout ce
qui est signé de Le Bas n'est donc pas de lui, mais
les planches qu'il n'a pas gravées, il a dû tout au
moins les retoucher après en avoir surveillé l'exécu-
tion. Le nombre de celles commencées à l'eau-forte
par ses élèves, et terminées au burin par lui , est con-
sidérable. Gette extrême facilité de Le Bas fut son
défaut , et ce n'est pas sans raison qu'on lui reproche
LE BAS. 574
d'avoir trop répandu l'usage de la gravure expéditive.
Nous allons rapidement passer en revue les travaux
divers de notre graveur. Nous ne suivrons pas cette
fois l'ordre chronologique à cause de la confusion
qu'un aussi grand nombre de pièces ne manquerait
pas de produire.
En fait de vignettes et de recueils : Livrées de divers
paysages pour apprendre à dessiner à la plume,
à Paris, chez fauteur rue de la Harpe chez un
fayencier à la Roze-Rouge. — Études de différentes
figures militaires. — Premier livre de principes de
paysages , destinés aux jeunes gens de qualité qui
sont dans les collèges, in-4.
Les Cris de Paris , gravés avec Ravenet , d'après
Boucher, 12 pièces.
Avant de parler de ses travaux d'après les peintures
de l'école française, disons que Le Bas composait
dans la première partie de sa carrière et qu'il a gravé
d'après lui-même, f Amant aimé et le Temps m,al
employé, 2 p. in-4. — La Marchande de Beignets,
pièce assez fine, in-4 en largeur. — Les Gentilles
villageoises et les Belles vendangeuses, in-4 en lar-
geur. — Pierrot et sa progéniture et CGllin-Maillard,
2 p. in-4 en hauteur. — Saint Antoine de Padoue
prêchant aux oiseaux, pièce curieuse destinée à
servir de pendant à une pièce très fine. Saint Antoine
de Padoue prêchant aux poissons, qu'il avait gravée
d'après Salvator Rosa.
Les Cérémonies des Francs-maçons, curieuse série
de sept pièces in-4 en largeur, avec cette mention :
dessinées par M'"" la Marquise de '^'^ et gravées par
M"' *"*. « Bien qu'elles ne portent pas le nom de
572 LES GRAVEURS DU XVIIIi SIÈCLE.
» Le Bas , il n'est pas possible de douter qu'elles
» ne fassent partie de son œuvre , on reconnaît sa
» manière dans la composition et son goût pour la
» charge. N'ayant pas voulu mettre son nom à ces
» estampes qui sembloient lever en partie 1>? voile
» qui dérobe les mystères maçonniques aux regc^rds
» du vulgaire profane, il paroît que Le Bas a trou\é
» plaisant de rejetter cette sorte d'indiscrétion sur un
» sexe sujet à caution à cet égard. »
Ne pouvant faire profiter tout le monde de ses
leçons , Le Bas avait tenté d'y suppléer en publiant
un Livre de desseins qui représentent les parties du
corps humain et des Figures entières, gravé d'après
les plus grands maîtres, en 20 feuUles.
Continuant la série des recueils, nous indiquerons
une Suite de chiens, d'après Desportes. — Un Recueil
de divers animaux de chasse dessinés d'après nature
par Oudry et tirés du cabinet du comte de Tessin , 12
pièces. — Suite de sujets dessinés d'après V antique
par Edme Bouchardon et gravés à l'eau-forte par le
comte de C*** (Caylus) et terminés au burin par Le
Bas. — Recueil des plus belles ruines de Lisbonne,
causées par le tremblement de terre du l***" novembre
1755; in-fol. en larg. — Ruines de la Grèce, 24 pièces
gravées avec goût à l'eau-forte pour l'ouvrage de l'ar-
chitecte Le Roi, imprimé à Paris en 1758.
Estampes des Batailles de la Chine ; Le Bas fut
chargé par Cochin de graver quatre de ces planches,
dont on connaît l'extrême rareté. Nous avons rapporté
les détails qui les concernent à propos de Cochin , qui
avait été chai^gé par le mai^quis de Marigny de diriger
et de surveiller l'entreprise.
LE BAS. 573
Descaraps, fondateur de l'École des Beaux-Arts de
Rouen , était l'ami intime de Le Bas et s'interposait
souvent pour remettre la paix dans le ménage du gra-
veur. Quand le roi Louis XV se rendit au Havre en
septembre 1749, on fît des préparatifs pour le recevoir.
Descamps dessina d'après nature les diverses circons-
tances de ce voyage et les fit graver par Le Bas qui
s'y est distingué. Ces six grandes pièces peuplées de
personnages sont intitulées Arrivée du Roy au Havre
de Grâce, V Illumination de la grande rue, Ca7'enne
d'un navire dans le bassin du Havre , le Roy étant
sur le Balcon des cazernes de la marine , le Roy
étant sur la plage de la rade du Havre, le Roy étant
sur les hauteurs d'Ingouville. Ces compositions
« dessinées sur les lieux » furent gravées de 1751 à
1753.
Déjà, du reste, Le Bas avait été le graveur des Fêtes
données à Louis XV à Strasbourg en 1744 : Arrivée
du Roi le 5 octobre, Entrée par le faubourg de
Saverne , Représentation d'une Place, A^^rivée à la
Cathédrale, Feu, d'artifice sur l'Ill, Illumination de
r Hôtel de Ville, Illumination de la Cathédrale, Illu-
mination du Palais Épiscopal, Jeux et exercice aux
épées, le Vin d'honneur, etc.; ces compositions sont
deWeiss, dessinateur strasbourgeois.
Le Bas, dont l'atelier fut la pépinière des graveurs
de vignettes, n'a pas joué par lui-même un grand rôle
dans l'illustration des livres. Mentionnons seulement
quelques figures gravées pour un Bréviaire , d'après
Boucher; la Bohémienne, Ninetteàla Cour, comédies
de Favart , 2 fig. d'après Boucher ; Manon Lescaut,
célèbre édition de 1753 , d'après Gravelot ; Réflexions
574 LES GRAVEURS DU XVIII'' SIÈCLE.
critiques sur la poésie et la peinture de l'abbé Dubos,
d'après Eisen ; Dictionnaire portatif des Beaux- Arts ,
de Lacombe , d'après de Sève ; Mémoires de Du
Guay-Trouiii , 1740 ; Fables de la Fontaine , d'après
Oudry ; Fables nouvelles , de Pesselier ; Histoire du
Ciel, de Noël Pluche ; Histoire de V Académie royale
de Chirurgie, frontispice d'après Boucher ; Aventures
de Télémaque, Paris Legras, 1755; Vies des peintres
flamands, de Descamps, frontispice; la belle figure de
Don Juan d'après Moreau dans le Molière de Bret ,
1773. Beaucoup de ces pièces ont dû être gravées pai^
des élèves. Les fleurons du Térence de Gravelot,
par exemple , sont quelquefois signés de Le Bas , et
nous les retrouvons tous dans l'œuvre de Le Veau au
Cabinet des Estampes , œuvre qui a été formé par ce
graveur lui-même.
L'école française contemporaine du graveur lui a
souvent fourni des modèles ; Le Bas a gravé nombre
d'estampes que nous indiquerons à la fin de cet article,
d'après G. Coypel, Watteau, Lancret, Parrocel, Ghan-
treau , Boucher , Eisen , Greuze , Oudry , Le Paon ,
Le Prince et Ghardin.
Le graveur s'était de bonne heure hé avec ce dernier,
Un jour qu'il vit dans son atelier un lièvre qu'il venait
de peindre ; — Je voudrais bien avoir ce tableau, mais
je n'ai point d'argent. — On peut s'arranger, répond
Chardin , tu as une veste qui me plaît fort. — Va ,
s'écrie Le Bas , et tout aussitôt il se déshabille, remet
son habit sans veste et emporte le tableau.
N'oublions pas deux beaux Claude Lorrain, exécutés
d'après des tableaux appartenant au Roi, V Ancien port
de Messine, lumineuse peinture bien connue dont Le
LE BAS. 575
Bas dédia la planche au roi de Danemark Christian
VII , et la Récompense villageoise, dont le marquis
de Marigny accepta la dédicace.
A propos de cette dernière estampe on a raconté
que Le Bas, ayant dû en interrompre l'exécution, avait
gardé fort longtemps le tableau qu'on avait oublié de
lui redemander. Quand il le rapporta, le garde de la
galerie du Luxembourg ne voulut plus le reconnaître
et refusant pour ainsi dire de le reprendre, répétait à
Le Bas qu'il se trompait de propriétaire : « Eh bien !
» répondit-il, le Roi profitera de mon erreur. Si comme
» vous dites le tableau n'est pas à lui, je le lui donne. »
Si Le Bas a gravé avec goût d'après quelques
maîtres français, il réservait pourtant ses préférences
pour l'école flamande , surtout pour David Téniers,
dont il s'était attaché à reproduire les œuvres qui lui
inspiraient une véritable passion.
« Redevable à Téniers . écrit Joullain , d'une partie
» de sa réputation et de sa gloire , Le Bas payait à sa
» mémoire la dette d'un cœur reconnaissant. Il ne
» voyait pas un tableau de ce maître sans avoir envie
» de le graver et sans regretter de ne pouvoir en
» devenir propriétaire. On peut dire que Téniers n'a
» jamais eu d'admirateur plus vrai , plus zélé , ni de
» traducteur plus exact et plus propre à étendre sa
» gloire en multipliant ses productions et en en faisant
» connaître la naïveté et l'expression. »
Il paraît même que Le Bas aurait voulu faire élever
un monument sur le lieu de naissance de son peintre
favori et qu'il n'en fut empêché que par les représen-
tations de son ami Descamps. La comtesse de Verrue,
dont les belles collections sont si célèbres , avait
576 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
plusieurs bons tableaux du maître : c'étaient des
allégories, la Terre, le Feu, l'Air, l'Eau, la Vue,
le Toucher, VOdorat, le Goust et VOme, caractérisées
par de bons flamands et flamandes. Elle les avait prêtés
au graveur et à la première estampe qu'elle vit , elle
s'écria : « Ah ! Téniers, quel doraage que tu n'existes
» plus ou que Le Bas n'ait point existé de ton tems,
» quelle auroit été ta satisfaction de te voir gravé de
» la sorte ! » Le Bas avouait n'avoir jamais entendu
une louange plus agréable.
Et de fait. Le Bas avait parfaitement compris son
modèle et s'il l'a quelquefois alourdi, presque toujours
il a bien rendu ses intentions et donné une brillante
couleur à ses estampes. On comprendra que nous nous
dispensions d'énumérer ici les cent pièces et plus que
Le Bas a gravées d'après son maître de prédilection.
Nous nous contenterons de citer les principales :
Le Vièleur, du cabinet de M. Le Noir. — Les Phi-
losophes Bachiques et les Pécheurs flamands , du
cabinet du comte de Vence. — Le Bon père et le
Vieillard content , du cabinet du duc de Valentinois.
— Les Joueurs de boule. — La Feste de village , du
cabinet du marquis de Voyer d'Argenson. — i'"* Vue
de Flandres, du cabinet de M. de Lorangère et
2" et 3" Vues de Flandres, du cabinet du chevalier do
La Roque. — Jeu de Boule ou 4" Vue de Flandres.
— Réjouissances flamandes , du cabinet du marquis
d'Argenson ; Téniers s'y est peint avec sa famille. —
Le Château de Téniers. — La Ferme et la Basse-
Cour, dédiés au marquis de Mirabeau. — Le Sifteur
de Linoie, du cabinet d'Orry de Fulvy. — Le Rémou-
leur, du cabinet de M. de Fontpertuis. — Vue et Por^i
LE BAS. 577
de mer de Flandres ( 1746 ) , dédié au comte de
Maurepas, et du cabinet de M. Lempereur. — Téniers
et sa Famille , dédié au duc de la Vallière , pos-
sesseur du tableau. — L'Enfant prodigue , dédié
au comte de Noailles ; c'est lorsque Le Bas gravait
ce tableau dans la galerie de Blondel de Gagny qu'il
lui arriva de donner à cet amateur la petite leçon que
nous rapportons plus loin. Belle estampe très bien
gravée. — Les Œuvres de miséricorde, dédiée au
Roy (1747). Cette estampe gravée d'après l'un des plus
beaux tableaux de Téniers était , de l'avis des contem-
porains de Le Bas, l'une de ses meilleures.
Nous trouvons la remarque suivante dans les Lettres
d'un voyageur à Paris, à propos de ces estampes :
« Si les tableaux des peintres flamands et hollandais
» doivent être mis au nombre des tableaux d'histoire.
» c'est avec raison que M"" Le Bas peut passer pour
» un habile graveur dans ce genre : Mais se persua-
» dera-t-on jamais que tous les magots de Téniers ont
» assez de mérite pour passer à la postérité la plus
» reculée, ne resteront-ils pas dans l'oubli et notre
» siècle qui les a vus naître ne les verra-t-il pas mourir
» en finissant? La France elles étrangers même sau-
» ront toujours bon gré à M'' Le Bas de ses Points de
» France d'après M"" Vernet. Ces morceaux seuls
» l'immortaliseront avec plus de justice que les
» Œuvres de m,isèricorde et V Enfant prodigue de
» Téniers, qui sont cependant deux estampes où il a
» le plus fait connoître l'étendue de ses talens. »
La Tentation de St-Antoine, tableau appartenant au
duc de Valentinois , en son hôtel de Matignon. — Le
Flûteur. — Le Chimiste. — Les Pêcheu7^s et le Fugueur,
578 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE
du cabinet du comte de Vence. — La Boudinière, à
M. le marquis de Refifuge. — Le Retour de guinguette.
— 6' Vue de Flandres. — La Vessie. — La Feymne
jalouse, du cabinet du comte de Vence. — 9" Vue de
Flandres, dédiée au comte de Castlemain. — 3* et
4' Fêtes Flamandes , ces deux tableaux du cabinet
du comte de Ghoiseul.
Cette dernière estampe fort belle est dédiée à la
marquise de Pompadour. Joullain rapporte à ce propos
l'anecdote suivante :
« M""" de Pompadour étoit à sa toilette environnée
» des seigneurs de la cour, lorsque Le Bas fut admis
» à lui présenter son estampe. Elle en fît l'éloge en
» connoisseur et la fit admirer par tous les courtisans.
» Soit par distraction ou soit qu'elle fût embarrassée
» pour reconnoître l'boraage que Le Bas lui faisoit de
» son ouvrage, elle attendit qu'il fût sorti de son appar-
» tement poui' lui faire demander son mémoire. —
» Dites à M*"®, répondit Le Bas, que je ne suis point
» apotliicaii'e , que je ne donne jamais de mémoire,
» qu'elle pourroit trouver trop fort celui que je lui four-
» nirois et que je ne connois personne en droit de le
» régler. — Cette réponse énergique fut sans doute
» envenimée auprès de la favorite et Le Bas ne reçut
» aucune espèce de dédomagement des frais que lui
» avoit occasionné cette dédicace. »
Le graveur a fait une réduction de la Kermesse ou
4^ Fête Flamande , pour son confrère Basan, dans le
Cabinet de Choiseul. — 5* et 6^ Fêtes de village,
dédiées au comte de Baudouin. — Le Marché conclu ,
de la même collection (1772). — Le Matxhé à faire
(1774). — La Récréation Flamande, même collection.
LE BAS. 879
— 7* et S« Fêtes Flamandes , dédiées au comte de
Brissac et au duc de Gossé. — Environs d'Anvers,
dédié au marquis de Brunoy (1775). — Le Lendemain
des nopces, l'eau-forte par Martiny et terminé au burin
par Le Bas (1775). — Environs de Dijon, Environs
de Caudebec, Envù^ons de Nieuport , Environs de
Bruges, quatre petites pièces dédiées à Blondel de
Gagny. — Blanchisserie, dédiée à M. Vernet. — Vue
d'Anvers, dédiée à M*" M. A. Slodtz. — Canards sau-
vages, 2 pi. dédiées au baron de Nagel. — La Maison
7^ustique, dédiée à M. Fortier, conseiller du roi et
notaire à Paris. — Kermesses, appartenant au duc de
Praslin ; les eaux-fortes pai^ Martini. — Pense-t-il à
la 7nusique, l'eau-forte par Moreau ; etc., etc. . .
Après Téniers c'est Berghem , peintre aux tableaux
si heureux d'arrangement et de naturel , si attrayants
par les animaux dont il les peuple, qui eut le privilège
d'être traduit par le burin habile et coloré de Le Bas.
Le Matin , dédié au peintre anglais A. Pond par
son amy Le Bas, est lumineux d'effet ; le Midy ,
moins soigneusement exécuté , est dédié au baron
de Thiers ainsi que V Après-Disnèe ; le Soir peut
rivaliser avec le premier de délicatesse. — Etnbarque-
mentde vivres, dédié au comte de Saint-Florentin. —
Les Satyres et les Dryades , belle estampe gravée à
l'eau-forte par Martini et terminée au burin en 1772
par Le Bas , est dédiée à S. A. le prince d'Orange. —
Le Retour à la ferme , belle pièce dédiée au duc de
Gossé, l'eau-forte est de Weisbrodt (1775).
Les estampes d'après Ph. Wouvermans, sont habi-
lement exécutées aussi : le Pot au lait, dédié à messire
Palamède de Forbin (1739), la Chasse à r italienne,
580 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
dédiée au comte de Gaylus (1739), les Sangliers forcés ,
dédiés au comte de Tessin (1741) , Halte de cavalerie ,
dédiée à M. Dupleix de Bacquencourt , Attaque de
troupes légères , dédiée au comte de Baudouin ainsi
que la Matinée de printemps (1778) et la Soirée d'été,
tableaux qui lui appartenaient.
Citons encore dans cet œuvre immense , les Van
Falens du comte de Briilil , le Rendez-vous de chasse,
le Chasseur fortuné, Prise du Héron et Départ de
chasse; — les A. Van de Velde, le Point du jour
(1773) et le Déclin du jour (1777), présentés au duc et
à la duchesse de Gossé ; la Chasse royale , dédiée au
prince de Condé , terminée au burin sur une eau-forte
de Malbeste ; — les Breughel de Velours , Vues des
Environs de Bruxelles, d'Anvers, de Lockey^en ,
dAlost et de Bruges ; — les Ruisdaël , Environs de
(jueldi^es, dédiés au comte de St-Priest, Environs
de G?'oningue, dédiés au comte de Baudouin (1771) ;
— les Karel Du Jardin , la Fraîche matinée , dédiée
à M. Trouard , intendant des bâtiments du roi , et la
Belle Apres-disnée , au duc de Bourbon-Gondé ; — le
Taureau de Paul Potter, dédié au prince d'Orange,
pour lequel Le Bas et Gaucher terminent une eau-forte
de Masquelier (1773) ; — des Ostade, des Rubens , des
Pynacker, des Van der Meer, etc., etc..
Nous avons gardé pour la fin les estampes gravées
d'après Joseph Vernet , qui forment pour ainsi dire un
œuvre à part. Avec Téniers , c'est le célèbre peintre
de marines que Le Bas a le plus interprété.
Les onze Vues d Italie, qu'il a gravées d'après lui ,
et qui étaient dédiées à Soufflot , à La Live de Jully, au
fermier-général Ferrand et à d'autres, le disposaient
LE BAS. 581
admirablement à graver les grandes compositions
remplies de personnages des Ports de la France.
Cochin avait obtenu de son ami le marquis de Marigny
la permission de reproduire ces tableaux commandés
par le roi et s'était associé son ancien maître Le Bas
dont l'habileté et le savoir-faire lui étaient bien connus.
Très habile à mettre une planche en train, à l'ébaucher,
Cochin s'était réservé le travail d'eau-forte, laissant à
Le Bas dont c'était la spéciahté, le soin de les terminer
au burin.
« Le Bas et Cochin, écrivait Diderot dans un de ses
» Salons, gravent de concert les Ports de mer de
» Vernet. Mais Le Bas est un libertin qui ne cherche
» que de l'argent et Cochin un homme de bonne com-
» pagnie qui fait des plaisanteries, des soupers agréa-
» blés et qui néghge son talent. 11 y a à Avignon un
» certain Baiechou , assez mauvais sujet, qui court la
>^ même carrière et qui les écrase. »
N'en déplaise à Diderot et à Baiechou , les graveurs
qui s'étaient chargés de ce travail furent à la hauteur
de leur tâche et le succès les récompensa de leurs
efforts. Il est impossible de voir les préparations
à l 'eau-forte de ces estampes et les belles épreuves
avant la lettre sans être frappé du talent qu'ils y ont
déployé. Le Bas, habitué à une manière un peu expé-
ditive, avait peut-être besoin d'être surveillé, mais
Cochin était là et il écrivait à son ami Desfriches p'Or-
léans : « Mon camarade s'était un peu discrédité auprès
» du public. Ce n'est pas que le drôle n'ait les plus
» grands talents , mais il courait après l'argent et
» voulait le gagner à son aise. Quand maître Cochin
» est venu le prêcher qu'avant toutes choses, il fallait
n. 88
582 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
» bien faire, il a bien fallu que la conversion se fît.
» Aussi est-elle exemplaire et j'ose promettre que
» jamais Le Bas n'a rien montré d'aussi soigneusement
» fait. »
On n'ignore pas combien Joseph Vernet savait don-
ner de vérité d'allures à ses personnages et avec quel
naturel il les groupait. Le Bas eut l'idée d'en regraver
séparément quelques-uns , et de composer ainsi une
suite de 12 pièces fort jolies sous le titre de Groupes
de Figu7'es tirés des tableaux des Ports de France.
Plusieurs de ces planches furent gravées à l'eau-forte
par Moreau, mais le travail de burin est de Le Bas.
Les anecdotes abondent sur Le Bas , dont le carac-
tère vif et original avait dautant plus de primesaut
qu'aucune éducation première n'était venue l'altérer.
Ainsi au sujet de son peu d'ordre qui lui faisait oublier
de réclamer à ceux auxquels il vendait à crédit et aussi
d'inscrh'e ses billets, Joullain raconte qu'un jour à son
ordinaire, il fut surpris par l'échéance d'un de ses
billets et demanda au porteur jusqu'au lendemain pour
le payer. L'autre lui ayant répondu qu'il allait le faire
protester, il se lève furieux , pousse rudement son
créancier, l'assied dans un fauteuil , sort en robe de
chambre, l'enferme et revient quelque temps après avec
son argent qu'il avait été emprunter à un de ses amis.
En voici d'autres rapportées par le même et qui
pemdront bien le cai'actère droit et vif de l'artiste :
« Le Bas avait eu dans sa jeunesse plusieurs jeunes
» gens de qualité auxquels il donnoit des leçons de
» gravure. Une dame de la cour l'ayant choisi pour
» enseigner son fils , lui avoit recommandé d'avoir
» pour son élève beaucoup de ménagement. On le
LE BAS. 583
* faisoit ordinairement attendre et le plus souvent le
» jeune seigneur ne paroissoit que pour lui donner un
» cachet payé très chèrement. Le Bas trop honnête
» homme pour prendre ainsi l'argent qu'il n'auroit
» point gagné et trop noble par les sentimens pour
» s'avilir par une complaisance servile vis-à-vis de qui
» que ce fût, ne mit pas beaucoup de tems à prendre
* sa résolution de se retirer. Il voit dans l'antichambre
» un laquais d'une figure intéressante. Il se fait annon-
» cerpai'lui dans l'appartement de la mère de son
» élève : Madame, dit-il en entrant, je viens vous prier
» de me permettre quand M' le Comte ne sera pas en
» état ni en disposition de prendre sa leçon , de la
» donner à ce jeune homme; je ne perdrai pas mon
» tems, ni vous. Madame, votre argent, et comme votre
» domestique prendra leçon plus souvent que son maî-
» tre, il en profitera probablement davantage et sera
» promptement en état de la lui donner suffisamment
» pour ce que Mr votre fils paroit vouloir apprendre
» et ce que vous semblez désirer qu'il apprenne. La
» proposition de Le Bas fut reçue comme il s'y étoit
» attendu. De ce jour, il cessa de retourner dans cet
» hôtel et se décida de quitter tous les élèves qu'il
» pou voit avoir hors de chez lui. »
Le Bas , nous l'avons vu , avait épousé une femme
fort jolie, mais aussi vive qu'il était brusque. C'étaient
toujours des bouderies, des querelles suivies de
réconciliations et d'embrassades. Quand sa femme
commandait par trop : « Mamour, disait-il, vous oubliez
» que vous parlez à votre maître. » Et se tournant
vers ses élèves souvent témoins de ces algarades :
« Messieurs, prenez garde de ne pas causer à Madame
584 LES GRAVEURS DU XVIII« SIECLE.
» Le Bas de révolution , elle se purge. » Et les élèves
de sourire sans méchanceté, car M™" Le Bas était pour
eux une garde malade et une seconde mère.
Dans son jeune temps Le Bas avait été jaloux. Il
voyait souvent sortir sa femme en voiture ou à pied et
avait flairé quelque galant dans ce manège. Il n'osait
pas en demander le motif , mais pour se renseigner,
il dit un jour à ses élèves : « Messieurs, quand Madame
» Le Bas priera l'un de vous d'aller lui chercher une
» voiture, on en amènera deux , l'une avancera jusqu'à
» la porte et l'autre attendra au coin de la rue. »
« Peu de temps après, raconte Joullain , un jour
» qu'il pleuvoit, M™® Le Bas prie un des élèves d'aller
» lui en chercher une. Docile aux ordres de son maître
» le jeune homme en amène deux. Sa femme monte
» dans l'une. Son mari ne prend pas le temps de s'ha-
» hiller, la suit et monte dans l'autre en robe de cham-
» bre, pantoufles et bonnet de nuit. Il recommande au
» cocher qui le conduit de suivre la voiture de sa
» femme et de prendre bien garde de la perdre de vue.
» Malgré la recommandation , le cocher suit un fiacre
» pour un autre. Celui dont il a pris la trace le conduit
» à Belleville et s'arrête devant une porte-cochère qui
» se referme sur la personne descendue du fiacre et
» que notre jaloux s'est bien gardé de vob dans la
» crainte d'en être reconnu. Le Bas tenait son argent
» à la main pour ne pas perdre son tems. Il paye étour-
» diment son conducteur sans réfléchir que même en
» retrouvant sa femme , il auroit besoin d'une voiture
» pour s'en retourner et la ramener.... »
Là-dessus , Le Bas frappe à la porte , déclare avec
colère qu'il est le mari de la dame qui vient d'entrer,
LE BAS. 685
réclame sa femme à grands cris , fait un vacai'me
épouvantable , si bien que le maître de la maison le
laisse monter et parcourir l'appartement , dans lequel
Le Bas ne trouve qu'un abbé. Notre graveur, honteux
et légèrement ridicule , s'en va sans demander son
reste. Il fut obligé de revenir de Belleville rue de la
Harpe, « par une pluye battante et dans les crottes »,
à pied , en robe de chambre , pantoufles et bonnet de
nuit. Sa femme , et probablement aussi ses élèves ,
se moquèrent de lui. On dit du reste que cette leçon
fut la seule dont il eut besoin.
Elle est encore rapportée par JouUain , cette jolie
boutade :
« En 1782 nous fûmes à Trianon. Nous étions dans
» l'appartement de M™"^ la princesse de Monbazon dont
» les croisées étoient ouvertes sur un petit parterre
» d'eau dans lequel Monseigneur le Dauphin qui n'a-
» voit pas encore un an se promenoit ou plutôt étoit
» promené par ses femmes. Nous nous mîmes à la
» fenêtre pour voir passer le jeune prince qu'on nous
» fit l'honneur d'arrêter devant nous. Le Bas en fai-
» sant des grimaces, gonflant ses joues et frappant
» dessus, faisait rire cet enfant. On lui fit observer que
» ces singeries étoient peu respectueuses. Il les inter-
» rompit pour adresser les paroles suivantes à l'héritier
» du trône : On dit, Monseigneur, que je vous manque
» de respect parce que je vous fais rire. C'est Jacques
» Philippe Le Bas , graveur pensionnaire de votre
» ayeul, dont il s'estime heureux d'avoir fait rire le
» petit-fils. L'enfant qu'on eut la sotise d'éloigner de
» nous, dédomagea Le Bas de ce que l'orgueil ridicule
» de ceux qui l'environnoient pouvoit avoir de morti-
686 LES GRAVEURS DU XYIIF SIÈCLE.
» fiant pour cet artiste , en témoignant par ses pleurs
» et par ses cris, le regret qu'il avoit d'en être séparé. »
Le Bas trouvait avec raison que le talent rapproche
les hommes et comble les distances créées par la
fortune. Très susceptible sur les procédés de gens que
leur naissance seule faisait ses supérieurs , il répétait
volontiers alors qu'il était fils de perruquier, ou bien
s'il était question de perruque ou de quelque chose
d'analogue il s'écriait : « Je m'y connais , je suis fils
» de maître. » Aussi fut-il très sensible au manque de
mémoire de Blondel de Gagny. Nul tableau ne sortant
du cabinet de cet amateur, Le Bas avait obtenu d'y
venir graver V Enfant prodigue de Téniers et appor-
tait de quoi manger en travaillant. Un jour le financier
l'invita à dîner, puis oublia son invitation. Le graveur
qui n'avait rien apporté mourait de faim. Le lendemain
les garçons rôtisseurs envahissaient l'hôtel , dressaient
une table dans la galerie et la couvraient de plats, puis
restaient pour le servir. Le maître accourt au bruit
pendant que Le Bas , après avoir goûté de quelques
mets , donne l'ordre d'envoyer le reste au portier.
Blondel de Gagny compre^id la leçon :
« Vous venez de me faire apercevoir d'un tort invo-
» lontaire, dit-il ; vous m'avez refusé tant de fois que je
» suis excusable d'avoir oublié que vous aviez accepté
» pour hier. Je veux réparer demain ma faute, mais je
» vous préviens que vous ne serez pas aussi splendi-
» dément traité. »
11 ajouta qu'il ne croyait pas que les graveurs fissent
si bonne chère : « L'argent est fait pour circuler, répond
» vivement Le Bas ; je travaille bien, je me nourris de
» même. Ce n'est pas à un artiste qu'il convient de s'oc-
LE BAS. 587
» cuper du lendemain. Jamais embarrassé du moment
» qu'il a du talent , il ne doit être jaloux de laisser
» après lui que de la gloire. Une ou deux estampes
» que je vends payent mon dîner. Je n'en vends jamais
» pour si peu dans un jour. Mes planches me restent
» et j'en fais de nouvelles. »
Veut-t-on une réponse plus topique ? Un grand sei-
gneur lui avait prêté un tableau. La gravure terminée,
l'artiste sollicita la permission d'en faire hommage au
propriétaire du tableau par une dédicace. Gomme
celui-ci faisait demander s'il en coûterait quelque
chose , auquel cas il ne voulait pas l'accepter : « Je
» ferai présent à M"" , répondit Le Bas, du droit de
» se dire le protecteur des arts et je lui donnerai mon
» estampe encadrée à ses armes , avec une douzaine
» d'épreuves de ma planche pour lui servir de titres. »
Le Bas perdit sa femme le 23 juin 1781. Il fut vers la
même époque obligé de quitter le logement qu'il occu-
pait depuis quarante-huit ans. Il avait dépensé sans
compter et sans se créer une situation indépendante,
ce qui lui aurait été si facile. Des spéculations moins
heureuses étaient survenues et sa femme n'était plus
là pour remettre un peu d'ordre dans la maison du
vieil artiste. Il considérait les Figures de lliisloire de
France, dont Moreau s'était engagé h lui fournir les
dessins, comme une entreprise qui devait être hono-
rable et lucrative, mais les lenteurs, calculées , dit-on ,
de Moreau qui désirait reprendre l'affaire pour lui seul,
les souscriptions qui rentraient mal , les avances qu'il
était obligé de faire , tout contribuait à épuiser ses
ressources. Il vendait pour continuer l'ouvrage la
garde-robe de sa femme , ses bijoux , son argenterie ,
S88 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
et dans ses moments de défaillance, il s'écriait : « Je ne
» tiens plus à rien de tout cela. Je vendrai tout ce que
» j'ai, si j'y suis forcé, mais je veux me réserver
» au moins une épreuve de chacune de mes planches ,
» de quoi prendre une voiture pour me faire conduire
» à Bicêtre et de quoi planter dans ma route des po-
» teaux sur lesquels je ferai coller toutes mes estampes
» afin que les passants s'en amusent et plaignent leur
» auteur. »
11 ne vit pas en effet la réussite de son ouvrage. C'est
Moreau qui acheta après sa mort pour 993 livres les
119 dessins, les planches et les épreuves et cela dans
des circonstances qui ont toujours été vivement cri-
tiquées.
Les soucis que lui causèrent cette dernière entre-
prise furent peut-être pour quelque chose dans les
progrès de la maladie qui l'enleva , mais il en portait
depuis longtemps le germe. Le 2 février 1783 , il fut
forcé de s'aliter, après avoir encore gravé la veille ,
et depuis ce jour, il ne se releva plus jusqu'au mois
d'avril qui fut celui de sa mort. Sur la fin , le médecin
ayant averti d'un air effrayé qu'il était temps de
penser aux secours de la rehgion , Joullain alla enga-
ger le curé de la paroisse à venir assister son ami. Il
vint peu de temps après. Le Bas dormait, le pasteur
attendit longtemps, ne voulant pas troubler son som-
meil , et chargea deux anciennes domestiques , qui
avaient la confiance de leur maître, de lui dire qu'ayant
appris sa maladie il était venu pour le voir et reviendrait
le lendemain. Le Bas , prévenu de la visite du curé
dont il pressent le motif, se fait habiller dès sept heures
du matin , non en robe de chambre comme d'habitude,
LE BAS. 589
mais en redingote. Il s'assied sur un canapé, le coude
appuyé sur un oreiller. Dès qu'il aperçoit le prêtre , il
se met à tousser d'une voix forte. Le curé lui demande
des nouvelles de sa santé : « Vous voyez , répond le
» malade, j'ai un assez bon creux, » et sans lui laisser
le temps de parler, il s'empare de la conversation :
« Vous êtes bien avec Monseigneur l'archevêque. Ne
» pourriez-vous le déterminer à prêter à l'un de mes
» élèves pour le graver, un superbe tableau que j'ai vu
» plusieurs fois dans les salles de l'archevêché? Le
» jeune homme a beaucoup de talent et la planche
» qu'il graverait, suffirait pour sa fortune. »
Le curé ne trouvant pas le malade en danger et
craignant de le fatiguer se retira sans lui avoir fait
connaître le but de sa visite, et Le Bas put ainsi échap-
per à des exhortations que sa nature voltairienne lui
faisait redouter.
On retrouve d'ailleurs le gamin de Pai'is jusque
dans ses derniers moments. La veille de son décès ,
Joullain alla le voir avec un de ses amis que Le Bas
connaissait. « Aussitôt qu'il nous vit, il voulut se lever.
» Nous lui aidâmes et mon ami, se trouvant incommodé
» par l'odeur et la chaleur de la chambre , passe dans
» la pièce voisine pour prendre l'air à la fenêtre.
» Quelques instants après Le Bas me dit : — Appelez
» votre ami , je veux lui jouer un tour. Celui-ci étant
» rentré : — Je veux me coucher, dit le malade. Nous
» le conduisons jusqu'à son lit, en le soutenant chacun
» par un bras. Arrivé devant, il s'y jette à plat ventre
» en travers. Aidé de la plus forte de ses deux domes-
» tiques, nous eûmes une peine inexprimable a le tirer
» de cette posture dans laquelle nous appréhendions
590 LES GRAVEURS DU XVIIP' SIÈCLE.
» de le voir expirer. Quand il fût bien couché, sans
» même se donner le tems de se remettre de la secousse
» qu'il venoit d'éprouver et pouvant à peine articuler
» il me dit en souriant : — Elle est bonne la niche. »
11 mourut le lendemain 14 avril 1783 , et quelques
moments avant de mourir il s'écria : Voici V édifice qui
s écroule. Ce furent ces dernières paroles.
ESTAMPES.
I. d'après boucher.
1. Pensent-ils au raisin? in-fol. en largeur. — L'Agréable
Solitude. — l^c et 2^ Vues de Beauvais. — l^^ et 2« Vues de
Gharenton. — Cris de Paris, 12 p. gravées par Le Bas et Ravenet.
II. d'après canot.
2. Le Gâteau des Rois. — Le Maître de danse. — Le Souhait de bonne
année au grand-papa.
m. d'après ghantreau.
3. Rue d'un camp. — Distribution de fourrage au sec, 2 p. in-4 en
largeur.
IV, d'après CHARDIN.
4. Le Négligé ou la Toilette du matin. — La Bonne édu-
cation. — L'Étude du dessin. — L'Économe.
V. d'après n. coypel.
5. Le Bain de Diane. — L'Alliance de Bacchus et de Vénus. — La
Charité romaine.
VI. d'après desgamps.
C. Le Négociant. — Estampes sur le voyage de Louis XV au Havre
en n-lO.
LE BAS. 691
VII. d'après eisen.
~. La Comète. — Le Trictrac; 2 p. in-foL
VIII. d'après greuze.
8. L'Aveugle trompé. — L'Enfant gâté. — Les Écosseuses de pois.
IX. d'après langret.
9. CONVERSATION GALANTE, morceau de réception de Le Bas
à r Académie ; in-fol. — LE REPAS ITALIEN. — Le MAÎTRE
GALANT. — Le Jeu de Colin-Maillard. — GRANDVAL; in-f'ol.
en largeur.
X. d'après le bas.
10. L'Amant aimé, le Temps mal employé, 2 p. in-4. — Les Gentilles
villageoises , les Belles vendangeuses , 2 p. in-4 en largeur. —
Pierrot et sa progéniture, Colin-Maillard, 2 p. in-4.
XI. d'après le paon.
11. REVUE DE LA MAISON DU ROl AU TROU D'ENF
grand in-fol. en largeur (eau-forte par Moreau).
XII. d'après natoire.
12. Allégorie sur le mariage du Dauphin.
XIII. d'après oudry.
13. Les Abois du cerf. — La Curée. — Le Cygne efi'rayé. — Recueil
des animaux de chasse, 12 p.
XIV. d'après parrogel.
14. Danse à l'italienne, Départ pour la chasse à l'italienne; 2 p. —
Détachemens de cavalerie , Halte des gardes-suisses ; 2 p. in-fol.
en largeur. — Halte des gardes-françaises , Halte des gardes-
suisses; 2 p. petit in-fol. en largeur. — Rencontre de cavalerie.
— Le Matin , le Midi, le Soir, la Nuit ; 4 p. in-fol.
592 LES GRAVEURS DU XYIIl^ SIECLE.
XV. d'après PATER.
15. Mp"c D'AngevillE la jeune; in-foL en largeur. — L'Officier
galant. — Les Vivandières de Brest.
XVI. d'après les van loo.
16. L'Amour à l'école, d'après J.-B. Van Loo.
n. Charges dessinées à Rome par C. Van Loo ; 12 p. gravées par Le
Bas et Ravenet.
XVII, d'après vernet.
18. LES PORTS DE FRANCE, 16 p. très grand in-fol. en largeur.
Nous avoD s donné, au catalogue de Cochin flls, la liste des 14 premières
planches de cette magniflque série, un des plus importants travaux de gravure
que le XVllI^ siècle ait vu exécuter.
Les épreuves d'eau-forte , gravées par Cochin , sont des plus intéressantes ,
par l'esprit avec lequel sont traités les nombreux personnages qui animent les
tableaux .
Les deux dernières planches sont les vues de Dieppe par Vernet et du Havre
par Cochin , gravées à l'eau-forte par Martini.
19. Groupes de figures pris dans les tableaux des Ports de France ;
12 p. in-4 (eaux-fortes par Moreau).
20. Départ pour la pêche. — Les Pêcheurs fortunés. — Fin de la pêche.
— Les Marchandes. — Les Jardinières. — La Source abondante.
— Les Occupations du rivage. — L'Entrée du Havre. — Port de
mer d'Italie. — Vue de Naples. — Vue des galères de Naples. —
pc à XI P Vues d'Italie.
XVIII. d'après vleughsls.
21. Vénus ordonnant à Psyché d'aller aux enfers.
XIX. d'après watteau.
22. L'Assemblée galante. — La Balançoire. — La Gamme
d'amour. — L'Ile enchantée.
XX. d'après WEISS.
23. Estampes sur le Voyage de Louis XV à Strasbourg.
LE BEAU (Pierre-Adrien).
1748-18...
Le Beau, bien qu'il ait eu le titre de graveur de M. le
duc de Chartres, n'est pas un buriniste bien recomman-
dable : sa main est pesante, il grave noir. Ce défaut fut
cause apparemment qu'on ne lui confia pour ainsi dire
pas d'estampes, et pas beaucoup plus de vignettes. Ma-
rinier lui en donna quelques-unes et Le Beau les grava
généralement trop sombres. Et cependant il montra
parfois qu'avec du soin il aurait pu faire tout aussi bien
que ses confrères les plus renommés , par exemple
dans une vignette des Idylles de Berquin {les Délices
de V Hymen) qui est un véritable petit chef-d'œuvre.
Mais Le Beau ne devait pas avoir le loisir de soigner
sa besogne. Il était le graveur le plus accrédité des édi-
teurs Esnauts etRapilly qui lui faisaient exécuter force
portraits pour leur collection. Dans la quantité beau-
coup sont médiocres, mais quelques-uns sont d'une
facture très finie.
Le Beau reproduisait plus particulièrement les traits
des membres de la famille royale ; il n'a pas gravé
Marie- Antoinette moins de dix fois.
Les ornements de ses portraits sont souvent dessi-
nés par Marinier ou Quéverdo.
694 LES GRAVEURS DU XVIII^ SIECLE.
La femme de Le Beau coloriait des gravures de
modes pour Esnauts et Rapilly.
ESTAMPES.
1. Sa taille est ravissante, d'après Baudouin ; in-4.
Le titre de cette estampe est tire de sa légende :
Sa taille est ravissante
Et l'on peut déjà voir
Une gorge naissante
Repousser le mouchoir.
Avant toute lettre, 400 fr. 1881.
2. La Vertu sous la garde de la fidélité, d'après Eisen.
3 . La Réalité du plaisir, ovale en hauteur.
4 . La Sollicitation amoureuse. — L'Intrigue découverte ; 2 p. d'après
Le Brun.
5. La Naissance des désirs. — Le Danger des boscjuets ; 2 p. petit in-
fol. , dédiées à Monsieur et à Madame de Damery.
(i. Le Présent du fermier, d'après Freudeberg.
1. L'Amant victorieux , d'après Touzé.
PORTRAITS.
8. Le comte d'Artois, Marillier del. ITiO. — La duchesse de Chartres.
d'après Le Clerc. — L. F. prince de Conti , d'après Desrais. —
Louise-Marie de France , religieuse carmélite sous le nom de
S'' Thérèse de St Augustin. — L. P. J. duc d'Orléans. — Le duc
de Peuthièvre. — Le comte de Provence. — La comtesse de
Provence, Madame,
9. BOURBON (le Duc de), d'après Le Noir, présenté au duc par son
serviteur Le Beau. — LA DUCHESSE DE BOURBON, pen-
dant du précédent; 2 p. in-4 orné. — A Paris chez Le Beau. —
A. P. D. R.
LE BEAU. 695
10. Éltsabeth de France, sœur de Mgr. le Dauphin , d'après Fon-
taine , gravée deux fois successivement dans le même cadre. —
Marie-AdÉLAïde-Clotilde-XaviÈre, sœur de Mgr. le
Dauphin , d'après Fontaine ; 2 p. in-4 (Esnautsj.
11. Louis XV, — Marie Leczinska ; 2 p. ornées, dans les tablettes, de
vues de la place Louis XV et de l'église de St-Denis.
12. Marie-Antoinette, dauphine, Fossier del. ; grand in-4. — Louis,
dauphin , pendant (Esnauts).
13. Marie-Antoinette, dauphine, profil à droite. Du sang le plus
auguste. .. . Marillier del. ; in-4 (Esnauts).
14. Marie -Antoinette , Reine de France, profil à droite. Digne
fruit des Césars . . . . Fait par Le Beau , etc. (100 fr. 18'76). —
Louis XVI, pendant; 2 p. in-18.
15. MARIE-AiNTOINETTE , Reine de France, de trois quarts à
droite; gravé d'après le tableau original de Mauperin , m4 ;
in-4.— LOUIS XVI, pendant (Esnauts).
16. MARIE-ANTOINETTE, Reine, presque de face, légèrement
tournée à gauche, huute coiffure avec plumes, cadre orné; dessiné
par Le Beau (c'est le même type que celle de Janinet) et gravé par
le même; in-4 (105 fr. 1876, avant le numéro). — LOUIS XVI ,
profil à droite, pendant (Esnauts, vers m5).
n. MARIE-ANTOINETTE, en pied , d'après Le Clerc ; grand in-4
(106 fr. vente Béhague). — LOUIS XVI , pendant (Esnauts).
18. Marie-Antoinette, Reine, profil à gauche , coiffure basse ;
dessiné et gravé par Le Beau; in-4 orné (Esnauts).
19. Marie-Antoinette, Reine; Binetdel.; grand in-4 orné. — Louis XVI,
pendant, 1781 (chez Mondhare).
20. Marie-Antoinette, Reine, profil à gauche, coiiTure très
haute. Publié à Paris l'année de la paix 1183 ; chez Isabey,
deuxième adresse chez Mondhare. — Louis XVI , pendant , des-
siné par B.-A. Nicollet.
21 Marie-Antoinette , publié le l"^"" de l'an 1788 , avec les vœux de la
Nation , profil à droite : in-12. (Cité par M. de Vinck , n" 90.)
596 LES GRAVEURS DU XYIII^- SIECLE.
22. Madame Victoire-Louise-Marie de France, dessiné
et gravé par Le Beau.
23. Catherine IL — Charles-Emmanuel. — Clément XIV. — Frédéric-
Guillaume. — Joseph IL — Paul Petrowitz ; in-4. — Marie
Fœderowna.
24. Marie-Thérèse; dessiné et gravé par Le Beau.
25. Paul Petrovich, grand-duc, d'après Voille , finement gravé,
petit in-8.
26. V.-F. duc de Broglie. — Le duc de Choiseul. — Le maréchal de
Cossé-Brissac. — La chevalière d'Eon en capitaine de dragons.
— Le comte d'Estaing. — Franklin. — Hyder AUy. — De Juigné.
— La Motte-Piquet. — Le duc de La Vrillière. — Lenoir, lieu-
tenant général de police. — Lowendal. — Le chancelier Meaupou.
— Miroménil ; chez Le Beau , rue St-Jacques , maison de
M. Duchesne, libraire, au Temple du Goût. — Necker. — Sartine.
— Le maréchal de Saxe. — L'abbé Terray. — Turgot.
27. Madame du Barry, ornements par MariUier ; in-4 (Esnauts).
28. Madame de PompADOUR, en nymphe , ornements par Qué-
verdo ; in-4 (Esnauts).
29. De Belloy, d'après Desrais. — Bouvart. médecin, d'après Desrais.
— Charles aux Tuileries. — Diderot. — Goldoni, d'après Cochin,
1T87. — Hobbes. — Joseph, sourd-muet. — La Harpe. — La
Peyronie. — Antoine Louis, chirurgien. — Antoine Petit, médecin.
30. DORAT, Quéverdo inv. 1T75 , médaillon orné de fleurs par les
Grâces ; in-4 (Esnauts).
Peintre heureux des plaisirs, sa verve est dans son cœur. ..
31. Pope; Kneller pinx., Marillier ornam. del.; in-8.
32. Julie de Villeneuve -Vence de St -Vincent.
33. Madame de Wareus. — Victoire-Françoise Salmon , l'Innocence
reconnue.
34. Melle Desbrosses , de la Comédie-Italienne , 2 portraits différents.
— Melle Maillard , de l'Académie royale de musique. —
MeUe Olivier, de la Comédie-Française. — Préville. — Mme Saint-
Huberti.
LE BEAU. 897
35. M™'' DuGAZON , reçue à la Comédie-Italienne en 1T76.— Le Beau
sculp.; in-4 (Esnauts).
36. Melle DuTEY, peint en miniature par l'Aine; in-4 orné (Esnauts).
21. MeUe LesCOT, de la Comédie-Italienne; in-4 orné (Esnauts).
38. Melle Raucour, avec une scène dans la tablette; in-4 (Esnauts).
39. Louis XIV, Boileau , Bossuet, Fénélon , Turenne, Tourville, etc.
VIGNETTES.
I. d'après marillier.
40. LES DÉLICES DE L'HYMEN; in-\S {Idylles de Berquin).
41. Titre pour les Victimes de l'amour, ou Lettres en vers de quelques
amants célèbres, in-8.
42. Minerve sculptant une statue de l'Amour, en-tête,
ms.
43. Le Faux Ibrahim, frontispice, me.
44. Vignettes pour Les PrônEURS, de Dorât; 2 p. in-8.
45. En-tête et cul-de-lampe (Fables de Dorât).
46. Frontispice pour VÉpitre d'He'loïse à Aùailard , par Mercier, in-8.
4*7. Vignettes pour les Poésies fugitives de la comtesse de Beauharnais,
— les Œuvres de Pope, — les Œuvres de Poullain de Saint-Foix,
— les Aventures de Charles le Bon , sire d'Armagnac , — le
Cabinet des Fées, — les Œuvres de Le Sage, — les Œuvres de
Vabbé Prévost , — la Bible.
II, DIVERSES.
48. Vignettes pour les Nouvelles espagnoles de Cervantes , d'après
Desrais ; — les Œuvres de Gessner, d'après Le Barbier ; — le
Rousseau de Defer de Maisonneuve ; — Contes pour ceux qui
peuvent encore rire, l'789, in-18. — Médaillons sur les événe-
ments de la Révolution ; 2 feuilles d'après Desrais.
U. 39
LE BERT.
On a fort peu de chose de ce graveur, qui travaillait
à Paris dans la seconde moitié du XVIIP siècle. Hubert
et Rost ne le citent pas plus que Basan, ce qui n'a rien
d'étonnant vu le peu d'importance de son œuvre.
Nous connaissons de lui quelques jolis portraits delà
famiUe royale, médaillons ornés publiés chez Niquet :
Henri IV.
Louis XV,
Louis- Auguste, dauphin.
Marie- Antoinette, d'après Kernoski.
Le Comte d'Artois.
Le Bue d'Orléans, père d'Egalité.
Le Blanc cite : les Quatre parties du monde ado-
rant le Très-Haut , d'après Lemoine, in-8.
Le Temple de la Renoînmée, frontispice d'après
MariUier, 1768.
Citons encore un Baron de Trenck dans sa prison ,
vignette in-8 ; et des portraits pour le petit volume de
la Conspiration de Chalais {Marion Beloryne, etc.).
Frontispice d'après MariUier pour VAlmanach
Bauphin, livre d'adresses des principaux marchands,
1768.
LE BLOND (Jacques-Christophe).
1670-1741.
Le père de la gravure en couleur, Christophe Le
Blond, peintre et graveur, nous offre un singulier type
d'inventeur malheureux. Son existence fut des plus
nomades. Né à Francfort en 1670, on le trouve à Rome
en 1696, à la suite de l'ambassade du comte de Marti-
nitz. Il rencontre à Rome Overbeck qui le décide à
l'accompagner à Amsterdam. Sur ces entrefaites Le
Blond qui gravait à la manière noire, s'occupe de divers
essais de gravure en couleur, ses tentatives le satisfont
et il passe à Londres pour entreprendre l'exploitation
en grand de son procédé et son application à la repro-
duction des tableaux. Il trouve des fonds mais ne peut
mener son entreprise à bien. Il crée une manufacture
de tapisseries et aboutit à une banqueroute. Découragé,
il vient en France en 1738, déjà vieux, pour tenter en-
core l'exploitation de la gravure en couleur. Louis XV
dont il a gravé le portrait, lui accorda un privilège
exclusif pour son procédé , mais sous condition qu'il
serait tenu de fak^e graver et imprimer en présence
de commissaires nommés et qu'il leur déclarerait tous
les secrets de la pratique de son art.
Le procédé de Le Blond consistait à grainer trois
600 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
planches avec un berceau et à les graver au racloir,
comme pour la manière noire ordinaire. Le blanc du
papier rend les luisants du tableau, la première planche
imprime le bleu et rend les tournants et les fuyants ;
la seconde planche, jaune , donne les couleurs tendres
et les reflets, enfin la planche rouge anime le tableau
et fortifie les bruns jusqu'au noir. La combinaison des
trois couleurs simples donne tous les tons intermé-
diaires. Les trois planches concourent à la formation
des ombres *.
Quand Le Blond eut fait en France deux ou trois
essais d'impression en couleur, on lui prouva que les
frais rassemblés montaient à une somme considérable.
Il demanda alors à avoir un entretien secret avec
les commissaires qui lui avaient été nommés et leur
annonça que , le privilège qu'il avait obtenu le mettant
en sûreté, il allait leur faire part d'une façon d'opérer
beaucoup plus expéditive.
Cette nouvelle manière consiste à employer quatre
planches , la première imprime en noir et donne du
premier coup toutes les ombres , on se trouve ainsi en
présence d'une sorte de dessous, sur lequel les trois
dernières planches viennent appliquer les couleurs.
Ces dernières ne sont que très légèrement grainées,
et partiellement, dans les endroits utiles. Une cin-
quième planche vient quelquefois ajouter des rehauts
de blanc. Un élève de Le Blond, Gautier Dagoty, pré-
1 UArt d'imprimer les tableaux , traité d'après les écrits , les opé-
rations et les instructions verbales de J.-C. Le Bien. Paris , Le Mer-
cier, n56. — Ce volume contient également l'Harmonie du coloris
dans la peinture, réduite à des principes infaillibles et à une pratique
nécessaire, ouvrage publié par Le Blond en n30.
LE BLOND. 604
tendit aussi avoir trouvé de son côté l'emploi de la pre-
mière planche noire. Mais il est bon de remarquer que
Le Blond n'estimait pas ce procédé , il le considérait
comme ce qu'on appelle aujourd'hui une ficelle.
Le Blond n'eut pas de succès en France. Son procédé
était cher. A Londres , il travaillait dans le pays des
habiles graveurs en manière noire ; à Paris , au con-
traire la manière noire était complètement abandonnée.
Malgré son incontestable talent , il demeura inaperçu
et mourut à l'hôpital âgé de soixante-et-onze ans.
Rien n'est plus rare que les bonnes épreuves de
l'exécution de cet habile homme. Ses pièces les plus
marquantes sont :
La Fuite en Egypte , Jésus mis au tombeau ,
S^^ -Cécile, S^^ -Agnès, Portrait d'un seigneur véni-
tien, Vénus couchée, d'après le Titien ; le Tt^iomphe
de Galathée, d'après Carie Maratte, la Chasteté de
Joseph, d'après G. Gignani.
Les Enfants de Charles P" , Ruhens , Van Dyck ,
d'après Van Dyck.
Le Blond faisait les portraits de grandeur naturelle :
Le Roi George II, et la Reine sa femme. — Shakes-
peare, d'après Robusti.
Le Prince Eugène de Savoie, Amsterdam 1710.
Les deux estampes qui nous intéressent le plus dans
son œuvre sont naturellement celles qu'il a gravées à
Paris :
Le portrait du Cardinal de Fleur y, in-fol.
Et celui de Louis XV, toujours de grandeur natu-
relle, rarissime pièce qu'on peut voir exposée dans la
première salle du Cabinet des Estampes, et qui est un
très beau spécimen du talent de Le Blond.
LECŒUR (Louis).
Graveur en couleur et au lavis d'une certaine habi-
leté, Lecœur, élève de Debucourt , nous a laissé :
1. La Vieillesse d'Annette et de Lcbin, d'après Swebach;
in-fol. en couleur, pendant à'Annette et Lubin de Debucourt.
2. Une promesse? ah! laissez donc! — Ne'ant à la requête] 2 p.
petit in-fol.
La seconde pièce est assez vive ; on pourrait l'appeler la Putiphar et le Joseph
du XVIII'^iiècle.
0. L'Innocente. — Ne vous y fiez pas ; 2 p. in-8 ovales. — Si tu vou-
lais. — Eh vite, l'on nous voit; 2 p. genre de Lavreince.
4. Les Ch.\GRINS de l'enfance, d'après Mouchet ; in-fol. en
couleur.
5 Gare l'eau! — Les Folies, cai-icature sur Mesmer, d'après Watteau
de Lille. — La Visite au grand-papa , d'après Smith.
6. SERMENT FÉDÉRATIF DU 14 JUILLET. — BAL SUR
L'EMPLACEMENT DE LA BASTILLE 2 belles pièces in-
fol. en couleur.
1 . Portraits des Constituants célèbres; in-12, à l'aqua-tinte.
8 . D'Imbert , Cte de la Platière.
9. Zadig, Londres, n99, in-32. Portrait de Voltau'e , 13 figures et
2 fleurons, dessinés et gravés à l'aqua-tinte par Lecœur.
10. Où irai-je? — Chez moi; 2 p. signées Cor (Lecœur).
LEGOMTE (Marguerite;
C'est l'affection de Watelet pour elle, plus encore
que ses travaux artistiques , qui sauve de l'oubli cette
charmante femme. Aimable faux ménage au demeu-
rant , que celui de cet académicien , artiste et poète
à la fois, et de cette femme de procureur griffonnant
une eau-forte sous les ombrages du Moulin-Joli.
« 11 faut avoir du courage philosophique », écrivait
M™^ de Genlis qui avait rencontré le couple en visite
chez M™° Necker, « pour oser produire ainsi sa vieille
» maîtresse de 55 ans très ennuyeuse et très bornée. »
Mais avant d'être une vieille maîtresse, Marguerite
Lecomte avait été une charmante femme , d'une agré-
able physionomie , sans grande régularité de traits ,
telle du moins que nous le montre le joli profil dessiné
par la main de l'amoureux Watelet et gravé par leur
ami Louis Lempereur. Les vers qui l'accompagnent
sont aussi de la façon d'un amant :
L'heureux talent de plaire en n'y pensant jamais.
Un bon cœur, un sens droit et le don d'être aimée.
Une humeur franche et libre embellissant tes traits,
La grâce enfin à la raison unie :
Le Comte c'est pour toi ce que nature a fait
Et que l'art ne peut rendre en gravant ton portrait.
604 LES GRAVEURS DU XYIIF SIÈCLE.
Quand elle voyageait en Italie avec son amant en
1764, toute l'Académie de France était en émoi et les
jeunes pensionnaires composaient en souvenir de son
passage le curieux petit livre intitulé Nella venuta in
Roma di madama Le Comte... etc., et dont nous
avons parlé à l'article de Lavallée-Poussin.
Elle ne néglige pas d'ailleurs ses devoirs pieux.
Gomme il est de bon ton d'avoir une audience du Pape
ne serait-ce que pour passer l'éponge de l'absolution
sur la noirceur de ses péchés mignons, Marguerite Le
Comte se prosterne devant Clément XIII. La Vallée-
Poussin nous a conservé la scène où elle lui demande
la permission de faire son portrait. C'est une petite
eau-forte assez méchante. Elle fit aussi à Rome , cette
même année 1764 , le portrait du Cardinal Albani.
« M'"*' Lecomte, écrivait Watelet , est toujours com-
» blée de politesses, de prévenances et d'attentions...
» Il y a ici un cardinal Albane qui l'a prise dans la plus
» singulière amitié ainsi que la princesse Borghèse. . . »
Et puis après avoir bien dessiné et bien gravé, —
quelques petits Paysages italiens en font foi, — ils re-
viennent tous deux se réinstaller au Moulin-JoU , au
bord de la Seine , à deux pas d'Argenteuil. C'est dans
cet\asile chanté par Delille, que la jolie meunière rece-
vait une société agréable, ai'tiste et choisie. M'"'^ de
Genlis en parle dans ses souvenirs : « Figurez-vous
» une grande île couverte de bois, de jardins, de ver-
» gers que la Seine coupait parle milieu. On passait
» d'un bord à l'autre sur un pont de bateau garni de
» caisses de fleurs et des bancs placés de distance en
» distance permettaient de jouir longtemps d'un air
» parfumé et de points de vue admirables. Des arbres
LECOMTE. 605
» de haute futaie d'un ton vigoureux , bordaient la
» rivière à droite, à gauche la rive était couverte
» d'énormes peupliers et de grands saules pleureurs
» dont les branches tombaient en berceau. Je ne puis
» dire combien je me sentais heureuse dans ce beau
» lieu, auquel je n'ai rien vu de comparable. »
Tous ces points de vue, Watelet et Marguerite Le
Comte les dessinèrent sous tous leurs aspects. La
maison était un assez élégant pavillon carré. Watelet
qui l'a gravée a écrit au bas : Maison de Marguerite
Le Comte, meunière du Moulin-Joli ; sur une autre
eau-forte toute fraîche d'eaux et d'ombrages, on lit
côte à côte leurs deux noms avec cette mention : una
eademque die sculpsere.
Un tel goût pour la campagne et l'idylle devait faire
aimer les œuvres du poétique Gessner à la belle péche-
resse. C'est aussi à l'amitié qu'ils portaient tous deux à
Huber, le traducteur des œuvres du poète de Zurich,
qui le dit formellement , que nous devons les illustra-
tions du Daphnis et du Premier Navigateur.
Quand nous aurons dit que Marguerite Le Comte
employait ses loisirs à graver à l'eau-forte des contours
de papillons, qu'elle s'amusait ensuite à colorier {Suite
de Papillons gravés et coloriés par Madame Le
Comte, des Académies de Rome, Florence, Parme et
de r Institut de Bologne, 1766), qu'elle imitait à l'instar
de Watelet les eaux-fortes de Rembrandt , et qu'elle a
eu la délicatesse de pas nous laisser le portrait de son
mari , le plus heureux des trois, brave homme à qui
Watelet avait offert l'hospitalité et qui s'était empressé
d'accepter, nous aurons suffisamment esquissé cette
physionomie de femme artiste.
LE GOUAZ (Yves-Marie).
< 742-'! 816.
Né à Brest , Le Gouaz devait être et fut en effet un
graveur de marine. Le peintre Ozanne, professeur des
gardes du pavillon à Brest , lui donna les premières
leçons de dessin et de gravure et les débuts de l'élève
ayant fait concevoir de grandes espérances, ses parents
quoique dans une position peu aisée , l'envoyèrent à
Paris se perfectionner chez Aliamet. Encouragé par
ce maître habile, Le Gouaz fut bientôt en état de gra-
ver des planches assez importantes pour lui valoir une
certaine réputation. Un de ses premiers travaux fut la
Fin d'orage, d'après B. Peters, publiée en 1765. Peu
de temps après, il grava d'après Joseph Vernet, Temps
serein , Temps de brouillard , la belle exécution de
cette dernière planche lui valut les éloges du peintre ;
r Embarquement de la Jeune grecque, in-fol. en
lai^geur ; la Pêche de jour, la Pêche de nuit. 2 pi. en
largeur ; le Choix du poisson , in-fol. en largeur ; les
Déb?^is du naufrage.
Caudebec , d'après Hackert ; le Port et le Golfe de
Calvi, Vue du Golfe de Messine, d'après Lacroix.
Son ouvrage de prédilection fut le recueil des Nou-
velles vues perspectives des Ports de France, dessi-
LE GOUAZ. 607
nées pour le Roi par M. Ozanne, un titre , une carte
géographique et 60 vues en largeur, pittoresquement
peuplées de petits personnages qui donnent de la gaieté
à ce travail considérable , et l'empêchent de paraître
trop monotone.
Vers la même époque Le Gouaz fait accidentellement
une incursion sur le terrain de la vignette : il exécuta
un certain nombre de fleurons pour les Fables de
Dorât et des vignettes pour les Idylles de Berquin
d'après Marillier, et se tira de cette besogne à son grand
honneur. Il a gravé aussi quelques figures d'Eisen in-4
pour l'opéra comique des Moissonneurs, et deux pièces
de Saint-Quentin pour le poëme de Rosset , r Agricul-
ture. Voici la quittance qu'il donnait pour une de ces
illustrations :
« M. Tronchin , trésorier du marc d'or , riie de
>/ Richelieu. Je vous prie, Monsieur, de vouloir bien
» faire payer à M*" Le Gouasse graveur, la somme de
» quatre cent quatre vingt livres pour la gravure qu'il
» a faite du second frontispice du poëme de Tagricul-
» ture , sur les fonds de l'excédant du marc d'or
» assignés pour les Départements des mines et de
» l'agriculture.
» Parent fils.
» Pour acquit de la somme de quatre cent quatre
» vint livres. Le Gouaz. A Paris le 22 mars 1774. >^
Pourquoi ne continua-t-il pas dans cette voie où il
réussissait ? Faute de temps , probablement. Dès 1770,
Le Gouaz avait été nommé grav^eur de l'Académie des
Sciences en remplacement d'Ingram. 11 exécuta jus-
qu'en 1790 , pour les volumes publiés par celte acadé-
mie, 241 planches techniques.
608 LES GRAVEURS DU XVIIP' SIECLE
Revenant à ses sujets maritimes favoris il grava :
Différents ports et rades de France et des Antilles,
18 p. d'après Ozanne, par LoGouaz et J. F. Ozanne.
Vues de lieux célèbres de diverses parties du
monde , d'après les dessins d'Ozanne, gravées par
Goiny, Garreau, Filhol, Masquelier, Pillement, Racine
et Le Gouaz.
En-têtes pour Lettres démarque et Congés délivrés
aux bâtiments. — Suite de bâtiments , 4 sujets ronds.
Planches pour le Voyage pittoi^esque de Constan-
tinople et pour la Description de V Egypte.
Recueil des combats de Jean-Bart, Paris, Le Gouaz
1806, 19 p. — Recueil des combats de Duguay-
Trouin, par J"'' F^'^ Ozanne et le Gouaz , 29 p. — Le
Combat du Vengeur, d'après Ozanne.
Ornements de proues de divers bâtiments, d'après
Ozanne, 24 p. par Le Gouaz et Goiny.
Figures pour le Traité du grèem^ent des vaisseaux,
pour le Vocabulaire des term.es de marine.
Le Gouaz avait épousé Marie-Jeanne Ozanne, sœur
de son premier maître, plus âgée que lui de six ans,
mais « aussi recommandable par ses talens que par son
» heureux caractère » , nous apprend sa fille , M"° Le
Gouaz devenue M™° Goiny , dans une notice placée en
tête de l'œuvre de son père : « Citoyen vertueux, dit-
» elle encore, bon époux, père tendre, ami sûr et fidèle,
» M. Le Gouaz joignait à des quahtés aussi rares et à
» l'égahté de cai^actère dont la nature l'avait doué, une
» douceur qui lui a concilié pendant le cours d'une
» vie sans reproche, jusqu'à ses derniers moments, le
» respect et l'amitié de tous ceux qui l'entouraient. »
Le Gouaz est mort à Paris le 12 janvier 1816.
Les LEGRAND.
Louis Legrand est un fort bon graveur de vignettes
dont les Manuels se sont peu occupés, ou point du tout.
Quand est-il né. quel fut son maître, nous ne savons,
mais comme il commença à signer des vignettes en
1751 , il faut admettre qu'il devait avoir alors au moins
vingt ans et qu'il est né vers 1730.
Ces premières pièces datées de 1751 , sont des vi-
gnettes d'Eisen pour Clarisse Harloioe et pour Y Éloge
de la folie; nous retrouvons ensuite le nom de Legrand
dans divers ouvrages :
Pu/fendorf, 175^-1759, fleurons d'Eisen.
Histoire amoureuse des Gaules, 1754, 5 vol. in-12,
jolis titres d'après Choffard.
Épigrammes de Martial, 1754, 2 vol. in-12, en-têtes
d'Eisen.
Portraits pour la Vie des peintres flamands , de
Descamps {Éras^neJuellyn , Jacques Vaillant).
Fables de La Fontaine, d'Oudry, 1755 {la Mort et
le Bùche7^on,le Lion et le Rat, le Renard elles Raisins).
Le Congrès de Cythère, Prault, 1756, in-12.
Le Décam,éron de 1757.
Racine de De Sève, 1760.
610 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
En 1761 , Legrand grave à lui seul l'illustration d'un
petit ouvrage assez estimable : les Amours de Myrtil,
Constantinople 1761 ; in-8 , six figures d'après Gra-
velot , plus un joli titre dessiné et gravé par Legrand.
En continuant à suivre chronologiquement les vi-
gnettes gravées par Legrand nous le voyons collaborer
aux ouvrages suivants :
Titre pour VAlmanach iconologique de 1764 et pour
VIconologie.
Le Temple de Gnide, Prault, 1767; in-12, frontispice
et figure d'Eisen.
Titre pour l'Isle m.erveilleuse ou Irza et Marsis,
d'après Eisen, 1768.
Les Moissonneurs, deFavart; in-8, jolie vignette
d'après Eisen, 1768.
Métamo)'phoses d'Ovide, 1767-71.
Le Royalisme , par Limairac, 1770, frontispice, en-
tête et cul-de-lampe.
Les Aventures d'Abdallah, 1773 , fleuron de titre ,
d'après Eisen.
Fables de Dorât, 1773.
Molière de Bret, 1773 {les Amants magnifiques).
La Muse lyrique , dédiée à la Reine, par Patouart
fils, titre, frontispice de Huet,
Les Épreuves du sentiment, de Baculard d'Arnaud.
Valmon, par Loaisel de Tréogate, 1776, figure
d'après Quéverdo.
Les Quatre heures de la toilette des dames, 1779.
Cabinet des Fées.
Théâtre de Collé, 1784.
Louis Legrand a gravé quelques autres pièces qui se
rapprochent du genre de la vignette :
LEGRA.ND. 644
Fragments d'une grande bordure pour un Plan de la
ville de Rheims, d'après Cochin , 1769 ; la Statue de
Louis XV, gravée au bas du plan ; grand Cai^tel pour
le même plan (recommencé par Massard).
Le Rhin et la Moselle, allégorie pour une carte géo-
graphique d'après Monnet.
Conce?'io de violon à plusieurs instruments, dédié
au prince de Prusse, composé par le baron de Bagge ,
titre in-fol. d'après Cochin.
Le Ballet des Muses , petite pièce allégorique pour
les menus-plaisirs du roi, présentée aux gentilshommes
de la chambre par Picquet, officier du gobelet et
confiseur ordinaire des menus-plaisirs.
Très joli et rare encadrement pour Programme de
concert (?), cadre enguirlandé de fleurs , dans le haut
les armes du Dauphin , un dauphin , un phénix , dans
le bas une harpe. Legrand del. et sculp. ; in-8.
Adam et Eve dans le paradis terrestre, belle com-
position de Moreau , avec encadrement , grand in-4.
Planches d'histoire naturelle d'après de Sève.
Petit portrait de Mada^ne Bu Barry.
Nous ne savons à quel Legrand il faut attribuer les
portraits de Mesmes, d'après Pujos , de M "« d'Oliva,
de Pilaire des Roziers, signés Legrand.
Augustin Legrand, que le Manuel appelle Auguste
Claude Simon et fait fils de Louis Legrand. est un gra-
veur au pointillé des plus fades :
Le Bonheur au village et les Amis curieux, d'après
Aubry ; Ma Chemise brûle, Tèlèm.aque et Eucharis ,
d'après Fragonard ; la Bèclaration, V Amant py^essant,
d'après Huet (chez Bonnet); la Saison des amours, les
Petits savoyards, les Cerises, Geneviève de Bradant,
612 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
V Enfance e\,V Adolescence de Paul et Virginie, à' Z-'^ves
Schall ; Récit d'un invalide chez un fermier de la
Haute-Normandie en lui montrant le portrait du
Roi, d'après Debucourt; la Cocarde nationale, d'après
Boilly ; le Bât, le Rossignol , V Accord , Apothéose de
Voltaire (Apollon tenant le masque de Voltaire).
Legrand signa de l'anagramme Denargle deux es-
tampes de Lavreince publiées chez Bonnet : Jamais
d'accord et le Serin chéri.
Petit buste de Necker , ovale in-18, Legrand sculp.
Londres 1781 ; le Duc de Crillon , profil , pointillé de
couleur, ovale in-S, gravé par Legrand rue Si-Jac-
ques vis-à-vis celle des Mathurins n° 41 . Il demeurait
aussi rue St-Julien le pauvre n" 18.
Au XIX*^ siècle, Augustin Legrand grave des por-
traits de la famille royale et une grande quantité de
planches de fleurs.
Pierre-François Legrand est un autre graveur au
pointillé et au lavis de la fin du XVIIF siècle.
Le Berger des Alpes, d'après Gandat : Érigone,
d'après Vallin ; les Bey^gers d'Arcadie , r Amour
d'été, V Amour ram^oneur, Ariane abandonnée, les
Saisons, la Reine présentant le dauphin à la
France , d'après Le Roy ; Mariage républicain et le
Divorce, 2 p. au lavis ; Fénélon ou les religieuses de
CawJ)rai , suite au lavis ; Flora . d'après Cipriani ;
Persévérance, Patience, d'après A. Kauffmann;
Security, Appréhension, etc.
Portrait de d'Épréménil.
P. F. Legrand continue à graver au XIX'' siècle ,
et il fait de plus en plus horrible. Sortons vite de ces
bas -fonds de la gravure.
LEGRAND. 6<3
Le Manuel indique un graveur du nom d'HYACiNXHE
Legrand, né en Lorraine en 1755, et lui attribue une
estampe de Jupiter et lo et une copie de la Gimbleite
de Fragonard.
Il y a encore un P. Legrand (Paul?) dessinateur et
graveur, qui a dessiné des vignettes pour les Contes
en vers de l'abbé Bretin , 1797, et le roman des Trois
Feinmes , de M'"® de Charrière, ces dernières ont été
gravées par Duplessi-Bertaux , Ghoffard et Couché.
Legrand était allé passer un an à Berne, et en 1798,
de retour à Paris, il se trouvait dans une misère noire.
« Le désespoir le plus sombre est dans mon cœur, —
» écrivait-il à M™^ de Charrière , — ce qui me fait le
» plus de chagrin , c'est que je vois tous les fous de
» Paris se livrer à toutes sortes de plaisirs plus ou
» moins licencieux et qu'ils paient fort chèrement
» Oui , j'ai lieu de me plaindre de toute la nature et
» de son auteur... je ne connais qu'un moyen de
» m'affranchir... le grand tais-toy... »
Ce Legrand paraît être le même que celui qui de-
meurait 63 rue de Thionville et entreprit pour Treuttel
et Wurtz la gravure d'un « choix de tableaux distin-
» gués du musée Napoléon » : il devait livrer par mois
douze planches très soignées, de format in-8.
Mais la convention signée entre le graveur et les
éditeurs fut rompue d'un commun accord quelques
mois après, en août 1808.
40
LE LORRAIN (Louis-Joseph),
1715-1760.
Le peintre Le Lorrain, élève de Dumont, qui fut
membre de l'Académie, donna les premières leçons de
dessin à Moreau le jeune qu'il emmena en Russie, et
mourut en 1760 à Saint - Pétersbourg , où il avait
été appelé par Catherine II pour diriger l'Ecole des
Beaux- Arts. Il a gravé quelques morceaux à l'eau-
forte.
Le Jugement de Salomon, Salomon adorant les
faux dieux.
Esther et Assuérus, la Mort de Lucrèce, d'après
De Troy.
Le Bouclier d'Hercule , pièce ronde, 1756, — les
Enfers, in fol. en largeur.
Le Dessin du feu d'artifice représentant Vunion
de V Amour et de VHi/niènèe, ordonné à Rome pour
le mariage du Dauphin , mai 1745 , d'après Pannini ;
un autre Feu d'artifice représentant le Temple de
Minerve, 1746.
Planches pour la Description des fêtes célébrées à
Naples pour la naissance d'un prince héritier (1748).
LELU (Pierre).
Le peintre-graveur Pierre Lélu, de l'Académie de
Marseille, est né à Paris en 1741. Sa famille le desti-
nait à la médecine, mais elle ne put vaincre son goût
décidé pour les arts. Il fallut céder. Cependant on
raconte que lorsque Lélu, élève de Bouclier et de
Doyen, entreprit à l'âge de vingt ans, le voyage d'Ita-
lie, ses parents ne lui donnèrent que six louis, espé-
rant le dégoûter des arts par les difficultés matérielles
de la vie. On ajoute que le jeune peintre obtint par
l'entremise de son frère, commissaire des guerres, un
passe-port de la cour, qui lui tint lieu de recomman-
dations et de protections, en lui permettant de se pré-
senter partout chez les plus considérables amateurs ,
auxquels il montrait son portefeuille et vendait des
dessins. 11 put donc se suffire à lui-même, et arriver à
Rome ayant encore cinq louis sur les six qu'on lui
avait donnés. Telle est la légende.
Lélu travailla assidûment en Italie ; il étudia les
grands maîtres et s'inspira de leur manière, « mallieu-
» reusement il ne sut pas rompre entièrement avec
» les principes qu'il avait puisés à l'école de Boucher,
» ce qui fut cause que souvent dans ses compositions
616 LES GRAVEURS DU XVIIie SIECLE.
» à côté des types les plus grandioses , on retrouve
» tous les défauts des maîtres maniérés qui dirigèrent
» ses premières études. » De retour en France, il se
lia avec le comte Vialart de Saint-Morys et grava plu-
sieurs tableaux de son cabinet.
Il parcourut comme attaché d'ambassade du marquis
de Clermont d'Amboise l'Espagne et le Portugal ; se
trouvant à Lisbonne en 1775, l'ambassadeur lui de-
manda le plan d'un catafalque pour le service funèbre
de Louis XV.
Il retourna en Italie deux fois encore , en 1777 et
en 1789.
Lélu est mort le 9 juin 1810.
La vente de son cabinet fut faite par les soins de
l'expert Regnault-Delalande. Lélu avait peint seule-
ment un petit nombre de tableaux , mais grâce à sa
facilité prodigieuse et même désordonnée, ses porte-
feuilles contenaient une quantité immense de dessins.
« Entraîné par sa bouillante imagination, il ne pen-
» sait qu'à produire de nouvelles choses et négligeait
» trop son dessin, le nombre de ses compositions est
» extraordinaire, tout était de son ressort, l'histoire,
» l'allégorie, le paysage, l'architecture, les ornements
» et partout on retrouvait l'homme instruit et l'homme
» de génie. »
C'est à Prosper de Baudicour qu'on doit le cata-
logue descriptif de l'œuvre gravé de Lélu, travail d'au-
tant plus intéressant que rien n'est plus rare que les
estampes des peintres-graveurs. Nulle part on n'en
trouve de collection complète ; à peine peut-on en voir
une de loin en loin. Les pièces décrites par Baudicour
sont au nombre de 75, à l'eau-forte et au lavis. On y
LELU. en
remarque quelques morceaux d'après les dessins des
grands maîtres :
Un Prophète , d'après Michel- Ange ; le Père éter-
nel, d'après le Corrège : Dieu bénissant le monde,
V Annonciation , V Évanouissement de la Vierge , le
Massacre des Innocents , d'après Raphaël ; la Mort
d'Adonis, d'après Jules Romain , etc.
Mais Lélu a principalement gravé d'après ses propres
compositions :
Sacrifice au Dieu Pan (1760) , première eau-forte
du maître âgé de dix-neuf ans , Vllarmonie de la
nature (1762) , Vénus et V Amour (1784) , la Toilette
de Vénus et Am,phitrite, V Amour et Psyché , grande
pièce d'après un dessin exposé en 1793.
Diverses pièces d'après l'Ancien et le Nouveau-Tes-
tament :
Judith, Apparition de Dieu à Abraham,, Abeletsa
^emme priant pour leur père, dernière pièce gravée
par Lélu en 1808, la Nativité, la Sainte-Famille ,
les Quatre Evangélistes , la Vierge , V Assomption ,
V Enfant Jésus et S^" -Catherine, la Foi, r Espérance
et la Charité.
Tancrède et Herminie.
Différents sujets de genre :
L" Amour maternel , semant des fleurs sur les en-
fants d'une jeune mère, johe pièce au lavis ; Jeune
chasseur offrant un bouquet à une bergère, in-4 ; la
Lanterne magique et le Ménage champèty^e, 2 p. in-fol.
La Dictée (B.32), la Lecture i^S), V Astronome (35),
le Philosophe (36), le Sermon (37), VEscalier (38), le
Concert (39), la Confidence (42), Berger caressant
une bergère (43), les Regrets (44).
648 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
Un titre pour Seis trios para dos violines y haxo,
1769.
Divers Paysages.
Le portrait de Rome de Vlsle, 1783.
Une Allégoyne à la mémoire d'Henri IV, 1780.
Notons encore une suite de quatre pièces numérotées,
les deux premières in-4 en largeur, les deux dernières
en hauteur, et représentant des scènes de ballets :
i. Attitudes de danse exécutées à V opéra par le S.
Doderval, M"** Allard et Pelin en 1779, dessinées
et gravées par P. Lélu peintre , à Paris chez l'auteur
rue du faubourg Montmartre n° 17. — 2. Attitudes de
danse exécutées par le S. Boberval, et M"" Gut/nard
et Allard en 1779. — 3. La Diseuse de bonne aven-
ture. — 4. Le Devin du village.
Pendant la Révolution, Lélu « mit son talent au ser-
» vice des événements et des idées nouvelles et se
» lança dans les compositions les plus grandes et les
» plus scabreuses sans avoir la force nécessaire. »
Les Avilis de la Constitution aux m^ânes de Mira-
beau , par Lélu , peintre, de l'académie de Marseille,
rue St-Avoye 23 ; grand in-fol. en largeur. Dessin
fautif, juge Renouvier, composition amphigourique,
les allégories et le costume empruntés à la défroque
académique ; mais il y a de l'énergie dans l'expression
et les mouvements. — Le Triomphe de la Montagne,
grand in-fol. — La Raison soutenant la vérité ap-
puyée sur la force, in-4.
Nous relevons, pour finir, un Monument à la mé-
moire de Desaix , et une Allégorie sur Napoléon P''
terminée par Alix
LE MIRE (NoEL^
1724-1801.
NoEL Le Mire occupe, à côté de Choffard, de Gau-
cher, de Nicolas de Launay et d'Augustin de Saint-
Aubin, le premier rang parmi les artistes qui ont
gravé la vignette et le portrait de livre. Ce graveur
célèbre, qui a eu pour dessinateurs les plus fameux
vignettistes, Gravelot, Eisen et Moreau, qui a colla-
boré aux principaux livres à figures du XVIIP siècle ,
qui a même gravé à lui seul un des plus beaux, le
Temple de Gnide, qui a exprimé la grâce de la femme
comme aucun autre , le seul peut-être qui ait su tra-
duire jusqu'à la perfection les voluptueux dessins
d'Eisen, mérite d'être appelé, dans un petit genre bien
entendu, un grand maître.
11 était né à Rouen le 24 novembre 1724 , et était
l'aîné d'une famille de treize enfants. Les premières
leçons lui furent données par Descamps. Il vint à Paris
vers 1745 se perfectionner à l'Ecole des Beaux-Arts
et dans l'atelier de Le Bas , d'où sont sortis tant de
graveurs de premier mérite. En 1750 , il remporta le
premier prix du modèle au concours de l'École des
Beaux- Arts.
Le Mire était lancé. Dès le 9 mai 1751, Le Bas écri-
620 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
vait à un de ses anciens élèves, Rehn , une lettre qui
se termine ainsi : « Notre normant Lemire gagne par
» jour ses dix-huit livres. 11 a pour une petite figure
» debout qu'il fait en six jour cent livre. Le temps a
» bien changé depuis que vous étiez à Paris. »
Les figures d'une petite HenHade d'Eisen in-i2, de
rÉloge de la Folie, de la Christiade de Labaume
Desdossat, du Lucrèce de Marchetti, de Métastase,
sont ses premiers essais. En 1755, il est dans la pléni-
tude de son talent, et grave une grande partie du
Boccace de Gravelot, soixante vignettes et culs-de-
lampe. On lui doit aussi nombre de pièces des Contes
de La Fontaine des fermiers généraux, d'après Eisen,
notamment la fameuse figure du Rossignol , de toute
rareté lorsqu'elle est découverte. Les bibliophiles es-
timent qu'un exemplaire contenant cette petite gail-
lardise, vaut considérablement plus qu'un exemplaire
qui n'a que le rossignol sans le rossignol.
Car Le Mire se plaisait à commencer ses figures
découvertes ; les épreuves à remarque abondent dans
son œuvre, et font les délices de certains iconophiles
qui les recherchent avec passion, l'une avant la rose,
l'autre avant le nuage, celle-ci avec le petit trait,
cette autre avant le voile !
Le Mire fait plus que collaborer à VOvide de 1767,
il est avec Basan le metteur en œuvre de ce magni-
fique livre, il prépare une grande quantité de planches
à l'eau-forte, et de plus vingt-six pièces terminées
sont signées de lui. Les plus belles sont VAge d'or,
V Automne, Persée et Andro7nède, d'après Eisen,
Alars et Vénus, Pygmalion, Vénus pleuy^ant Adonis,
d'après Boucher, et enûn Jupiter et Zo d'après Monnet,
LE MIRE. 624
autre pièce à remarque , dont il existe des épreuves
très découvertes.
Le Mire , qui paraît n'avoir pas eu un caractère
facile , quoique droit et généreux , eut des démêlés
avec Basan au sujet de V Ovide. Wille fut leur média-
teur, et ils se séparèrent d'intérêts : Basan resta seul
propriétaire du livre , en donnant à Le Mire dix mille
six cents livres et douze exemplaires complets, (Voir
l'article Basan).
Nous retrouvons encore Le Mire interprétant Gra-
velot dans le Racine et le Corneille. Il fut le principal
graveur de la suite de Corneille, qui est un de ses chefs-
d'œuvre, -les gravures des comédies notamment sont
exquises par la légèreté et l'esprit de leur touche , et
l'une d'elles, la Galerie du Palais, est une petite es-
tampe renommée, elle est fort curieuse ; les Ahnanachs
Iconologiques , dont il a gravé le titre aux armes de
Poisson de Marigny son protecteur, les Contes mo-
raux, la Pharsale, traduction de Marmontel, V Histoire
de Miss Jenny par madame Riccoboni , V Histoire de
St-Louis de Joinville (1761), les Œuvres deLafargue,
la Nouvelle Héloïse. Les figures de V Anthologie sont
toutes gravées par Le Mire, une d'elles est découverte.
Le Mire a gravé d'après Eisen des illustrations pour
les Opuscules du marquis de Pezay, puis VHisioire
des guer?'es civiles de France , le Joujou des demoi-
selles, etc. Nous n'y insistons pas ici, nous y revenons
plus au long dans le catalogue que nous donnons à la
suite de cette notice.
En 1762 paraît son œuvre principale, le Temple de
Gnide avec dix figures gravées par lui d'après Eisen.
C'est en regardant des épreuves de premier état de ces
622 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
merveiUeuses figures, chefs-d'œuvre de gravure d'après
des chefs-d'œuvre de dessin \ qu'on saisit le côté
1 C'est chez l'un de nos meilleurs bibliophiles , pour la science, la
prodigieuse richesse de sa collection, la passion qu'il a mise à en réunir
les éléments et le soin jaloux qu'il prend de la conserver, que se
trouvent , en face des lumineuses eaux-fortes de Le Mire qui les tra-
duisent , les suaves mines de plomb d'Eisen. Ce merveilleux exem-
plaire du Temple de Gnide n'est pourtant qu'une perle au milieu du
plus riche des écrins.
Quelqu'incomplète que puisse être la rapide revue que nous allons
faire d'une des plus belles réunions de livres qui aient été formées ,
nous ne résistons pas au plaisir de donner une idée des richesses biblio-
philiques de M. de Lignerolles :
Notons, dans le XVIIF siècle qui nous occupe plus spécialement,
les Fables de La Fontaine, d'Oudry, aux armes du duc d'Aumont; les
Coules moraux de Marmontel , aux armes de M. de Sartines ; un
Temple de Gnide aux armes de la comtesse d'Artois , de merveilleux
exemplaires de l'Heplaméron , des Contes des Fées , et des Contes de
La Fontaine des Fermiers-Généraux , dans de fraîches reliures de De-
rôme ; un Décaméron de Boccace avec dentelles ; enfin la collection des
Bleuet, figures avant la lettre et eaux-fortes, habillée parTrautz.
La vieille reUure est , dans cette bibliothèque, d'une extrême richesse,
tant pour sa perfection artistique et sa conservation exquise, que par les
souvenirs historiques qu'évoquent les personnages auxquels les livres
ont appartenu et les bibliophiles célèbres qui les ont possédés.
Voici , pour le XVF siècle, ï Architecture de Vitruve et la Géomé-
trie de Bouvelles, aux armes de François F""; VEntrée de Henri II à
Paris, dans une reliure à compartiments de couleur; le Catulle d'Aide,
de Grolier ; le Thucydide et le Plutarque en reliure molle aux insignes
de Henri III ; le Du Fouilloux, s. d., aux armes de Frédéric le Pieux,
duc de Bavière ; les Généalogies des rois de France, aux rares insignes
de Gouffier, duc de Rouannois ; les Propos de Ladulphi reliés avec le
Lazarille, aux armes de DeThou, ainsi que les Œuvres de La Boé'lie,
les Essais de Montaigne , édition de 1595, aux armes de Sullj. Le
Plutarque de Vascosan est là représenté par le plus bel exemplaire
connu, relié en maroquin bleu doublé de maroquin citron par Padeloup ;
enfin des Maïoli , des Canevarius, etc . . . .
Le grand siècle, c'est dire le XVIF, est éblouissant par l'exquisité
de ses reliures et la variété autant que l'intérêt des provenances. Voici
le Molière de la rarissime édition de 1673, exemplaire du grand Colbert,
LE MIRE. 623
personnel du talent de Le Mire ; il est un des rares
artistes dont les productions ont un cachet individuel
à côté de l'Eseole des femmes , édition originale aux armes d'Anne
d'Autriche; le Racine de Madame de Chamillart ; Esther et Athalie ,
in-12 , reliées ensemble aux armes du maréchal de Montmorency-Lu-
xembourg ; une autre Esther in-12 , exemplaire de Madame de Main-
tenon; Athalie, in-4, aux armes de la marquise de Caylus, née de Vil-
lette, élève favorite de la directrice de Saint-Cyr, qui la chargea d'un
rôle dans la représentation de la pièce devant Louis XIV. — Des livres
aux chiffres de Louis XIII dans ces belles reliures à compartiments si
estimées des amateurs ; le Livre de Prières d'Anne d'Autriche, avec
miniatures et pages découpées en guipures, dans une curieuse reliure
à son monogramme ; un Balzac aux mêmes armes ; le Voiture et les
Mémoires de Rabutin , exemplaires du prince Eugène de Savoie ;
VHistoire de saint Louis et des Homélies couvertes de dorure , pour
le Président Séguier ; les Mondes de Fontenelle , avec la levrette de
Madame de Chamillart ; les Lettres du Cardinal d'Ossat , aux armes
du cardinal Aldobrandini ; le Temple des Muses de 1655, en maroquin
doublé, exemplaire de Hohendorf; V Imitation de Jésus-Christ de Hen-
riette de France ; une autre Imitation , celle-ci de l'abbé de Choisy,
avec la figure Audi filia , au lion des d'Aubigné, ce qui veut dire que
c'est à la vue de cet exemplaire même que Madame de Maintenon
ordonna la suppression de la vignette qui la représentait. Cette vignette
est un des oiseaux rares de la bibliophilie !
De la belle bibliothèque du comte d'Hoym , de nombreuses épaves :
un Virgile, son Pétrone, son Marol de HOO, ses Mémoires de Du Bellay
et l'édition originale des Amours de Psyché par La Fontaine.
Dans les Bossuet , les Divers écrits à la croix de Saint-Cyr, les
Etats d'oraison du duc de La Vieuville , \ Histoire Universelle de
Marie-Thérèse d'Autriche, VHistoire des Variations du ducdeLuynes,
le Traité de la Communion du prince de Condé , et des exemplaires
de l'évêque de Meaux lui-même, marqués de ses trois roues ; la Confé'
rence avec Mr Claude et les Réponses à farchevêque de Cambray.
Un autre exemplaire de VHistoire Universelle est aux armes de la
Duchesse de Bourgogne.
C'est d'ailleurs une des plus riches séries que celle des livres de
piété , et près des volumes ornés des masses d'armes des Gondy, qui
ont appartenu à la duchesse de Lesdiguières , brillent d'un éclat sans
pareil les Sermons et les Homélies de saint Jean Chrysostàme, quatre
volumes couverts d'une reliure en mosaïque de couleur, dorée à petits
624 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
qui peut se reconnaître au premier coup d'œil ; il
excelle à rendre le nu, sa qualité maîtresse est le bril-
fers par Le Gascon , et qui est un vrai chef-d'œuvre. Il faut encore
mentionner le Missel du Cardinal de Richelieu , écrit par Nicolas
Jarry et relié à ses armes , et provenant du même homme d'Etat ,
l'intéressant exemplaire des Sentiments de VAcadémie française sur
la tragédie du Cid.
Arrachons-nous aux reliures anciennes, car il faudrait tout citer et
établir un vrai catalogue , pour dire un mol de l'extraordinaire corps
de hibliothèque rempli de deux mille volumes , reliés par le célèbre
Trautz-Bauzonnet avec cette solidité , ce bon goût , ce gras dans la
dorure qui en font le digne descendant des Le Gascon , des Boyet et
des Padeloup.
C'est là que se trouve la plus extraordinaire réunion de plaquettes
rarissimes sur l'histoire de France. Nous n'en citerons qu'une , le seul
exemplaire connu de V Entrée de Charles VIII ; là aussi que sont rangés
eu bon ordre tous les poètes les plus rares, les séries des chansonniers,
des mystères , les pièces de Corneille , Molière et Racine en éditions
originales; les conteurs, parmi lesquels les Cent Nouvelles nouvelles,
première édition de Vérard, et la première édition des Amants fortwiés ;
romans de chevalerie , livres sur l'Amérique , sur la dentelle , sur la
chasse, livres à figures du XVP siècle, éditions originales de tous les
grands classiques, tout s'y trouve en exemplaires de choix et dans les
reliures du grand artiste.
Enfin , pour terminer cette notice bien longue et cependant trop
courte, disons qu'il se trouve encore chez M. de Lignerolles trois volumes
précieux à différents titres :
Une Semaine-Sainte à riche reliure , ofièrte à la princesse de Lam-
balle pour le jour de sa fête par la famille royale, avec des autographes
de Louis XVI, de Marie -Antoinette et de leur fille la duchesse
d'Angoulême ;
Un exemplaire unique des Oraisons funèbres de Bossuet , offert par
les typographes à leur avocat Berryer en 1863 ;
Et un livre inestimable et précieux entre tous dans sa modeste reliure
en vélin , les Essais de Montaigne de 1588 , exemplaire adressé par
l'auteur au jurisconsulte Antoine Loysel , avec un touchant envoi écrit
de la main du grand philosophe peu de temps avant sa mort.
Honneur au bibliophile éminent autant que modeste qui a su réunir
d'aussi précieux souvenirs du passé, et qui a voulu leur consacrer son
existence.
LE MIRE. 62B
lant. Aucun graveur de vignettes ne l'a égalé sous ce
rapport ; les belles épreuves de Le Mire sont à la fois
veloutées, fondues et lumineuses.
Après le Temple de Gnide, Le Mire, qui n'a guère
gravé jusqu'alors que d'après Gravelot et Eisen , de-
vient le traducteur de Moreau. Presque toutes les pro-
ductions qui portent les noms réunis de Moreau et de
Le Mire sont des chefs-d'œuvre : nous citerons la plus
belle des gravures du Rousseau in-4 , le Premier
baiser de V amour, qui représente Julie s'élançant dans
les bras de St-Preux ; dans le même ouvrage, V Ino-
culation de l'amour, Pygmalion , figure qui existe
découverte ; les vignettes des Conversations d'Emilie
in-8 , de Shakespeare in-8 ; surtout les magnifiques
portraits allégoriques de Louis XVI et Marie-Antoi-
nette in-4, ainsi que le petit médaillon àe Marie-
Antoinette soutenu par des amours ; celui de La Fon-
taine pour les Fables en vers gascons, et enfin la
fameuse allégorie sur le partage de la Pologne, le
Gâteau des Rois, pièce interdite par la censure , bien
que par amitié M. de Sartines ait laissé à Le Mire un
répit de vingt-quatre heures pour en faire tirer des
épreuves.
D'après Cochin , on a de lui le frontispice et l'une
des six figures du Télémaque gravé, dont la publication
ne fut jamais achevée. Naturellement c'est la plus
voluptueuse , Téléinaque dans le temple de Venus
à Cythère. Elle est fort jolie surtout en eau-forte ;
Romanet l'a terminée.
Les eaux-fortes de Le Mire méritent d'ailleurs d'être
recherchées entre toutes pour leur inexprimable dou-
ceur qui n'exclut pas l'éclat. Le Mire tirait aussi des
626 LES GRAVEURS DU XVIII>' SIECLE.
épreuves très avancées , avant de procéder aux der-
niers travaux.
Le Mire a gravé quelques petits portraits très re-
marquables comme finesse, Joseph II, Miroménil, etc.
Sur la fin de sa vie , ruiné par la Révolution , il
continua à graver quelques vignettes, pour le Rousseau
in-4 de Gochin et Monsiau, Gessner, Hèloïse et Ahai-
lard de Moreau, les Amours de Faublas de 1794, les
Liaisons dangereuses , Arsace et Ismènie, etc. Le
graveur du Temple de Gnide d'Eisen, exécuta même
en 1796 une vignette d'après Peyron pour le Temple
de Gnide : la Vision du fils d' Antiloque. Hélas ,
quantum, tnutatus , dessin et gravure , que cela est
donc laid !
Son œuvre se termine en 1799 par ce sujet bien
rebattu , le Gouverneur du Sérail choisissant les
feîïimes , d'après Taraval. La planche est médiocre ,
mais Le Mire n'eut pas, du reste, la prétention de se
hausser jusqu'à l'estampe.
Le Mire mourut à Paris le 21 mai\s 1801, rue de la
Harpe. 11 était membre de l'Académie Impériaile et
Royale des Arts de Vienne (1768), de l'Académie de
Rouen (1769) et de celle de LiUe (1783).
Généreux et bon, il aimait à encourager le débuts
des jeunes artistes, et ce n'est point de sa faute si
aucun de ses élèves n'est arrivé à la réputation. Mais
il était susceptible et peu d'humeur à supporter les
observations. Un jour , c'était en 1759 , Eisen lui
ayant signalé quelque défaut dans une planche qu'il
lui avait donnée à graver. Le Mire se mit dans une
colère furieuse, se répandit en invectives contre le
dessinateur, le traita de j.... f.... et lui dit que si ce
LE MIRE. 627
n'était par égard pour sa femme et ses enfants , il lui
passerait son épée au travers du corps ; et Eisen
épouvanté, de s'enfuir et d aller porter plainte au com-
missaire du Châtelet , comme quoi Le Mire lui avait
fait courir risque de la vie !
Le Veau était son élève favori ; Le Mire s'est fait
aider par lui dans beaucoup de travaux.
Antoine-Louis Le Mire, frère cadet et élève de Noël,
montrait des dispositions heureuses pour la gravure ,
mais, entraîné par un tempérament ardent il se livra
à de tels excès de jeunesse que sa constitution , bien
que robuste , ne put résister ; il mourut jeune à Paris
entre les bras de son frère.
Louis Le Mire a donc laissé fort peu de chose, une
Parade exécutée par des singes , in-4, L. A. Le Mire
inv. sculp.; une estampe d'après VanDer Meer, Temps
•roid et neigeux , et des planches pour les Fables de
la Fontaine, d'après Oudry : la Mort et le Mourant,
les Deux amis, le Singe et le Chat, Tircis et Amarante,
le Singe et le Léopard.
Cette dernière vignette est bien connue des bibUo-
philes ; elle sert à distinguer le premier tu^age du livre
lorsque l'enseigne de la baraque ne porte pas encore
ces mots : le Léopard.
11 existe un excellent catalogue raisonné de l'œuvre
de Noël Le Mire. Ce travail, fort intéressant et très
complet, est dû à M. Jules Hédou , de Rouen K
1 Noël Le Mire et son œuvre , suivi de l'Œuvre gravé de Louis
Le Mire, par M. Jules Hédou. Paris, Baur, 1875, 1 voLia-8. Portrait
à l'eau-forte par Gilbert.
628 LES GRAVEURS DU XYIIF SIECLE.
ESTAMPES.
1 . Le Berger, — la Bergère, 2 p. d'après Berghem; in-4 en largeur
2. La Curiosité, d'après Brakenburg ; in-fol.
3. La Grande Rade hollandaise , nSS. — Vue du Bassin et de la Ville
de Bruges, 1*759, 2 p. d'après Minderhout ; in-fol. en largeur.
Le titre et la dédicace de la seconde estampe sont signés M""* Lemire scrip.
Cette demoiselle Le Mire ne peut être qu'une sœur du graveur, suivant
M.Hédou.
4. L'Étang du Château de Téniers, d'après Téniers, l'748 ; in-4.
a Ce morceau , gravé par Le Mire à 24 ans , promettait déjà tout ce que ce
■> talent aimable a tenu depuis. On y trouve quelques parties un peu faibles,
» en somme la planche est fort estimable. » (Hédou.)
5. Les Nouvellistes flamans, pendant du précédent.
6. Latone vengée, d'après Téniers, l'754 ; in-fol. en largeur.
T. Mort de Cléopâtre, d'après Le Guide. — Visitation de la Vierge ,
d'après Morandini. — Statues antiques (Psyché et l'Amour,
Ganymède et Esculape) ,2 p. — Pierre gravée antique. {Galerie
de Florence.)
8. La Vierge, d'après Le Parmesan. {Galerie de Dresde.)
y. La Mort de Lucrèce, d'après André del Sarte. — Jupiter et Danaé,
d'après A. Carrache. — La Décollation de St Jean-Baptiste ,
d'après Le Guide. — Offrande à Vénus, d'après Netscher. {Galerie
du Palais-Royal. )
10. Planches pour le Voyage à Naples de Saint-Non.
La Madone du Rosaire. — Nativité de la Vierge. — La Marchande d'amours
d'Herculanum. — Bacchante. — Statues équestres des Consuls M. N. Balbus
père et fils.
11. L'Annonciation. — Solimène inv. et pinx. — Gravé par N. Le Mire
en 1793 ; grand in-4 en largeur.
12. La Pupille, d'après Descamps; in-fol.
LE MIRE. 629
13. Les Vivandières, — Les Négotians du levant, — Le François à la
découverte , — Le Matelot hollandais , — La Promenade , —
L'Heureuse rencontre, 6 p. d'après Eisen ; in-4 en largeur.
Rare. Mauvaise exécution.
14. La. Crainte, d'après Le Prince ; in-fol. en largeur.
Morceau de réception du graveur à l'Académie de Lille.
15. LE GATEAU DES ROIS. The troelfth cake . Allégorie sur le
partage de la Pologne, dessinée par Moreau el gravée par Le Mire,
qui a signé de l'anagramme Erimeln.
Sur cette estampe sont représentés Frédéric II , Catherine II , Joseph II ,
découpant la carte de la Pologne , en présence du roi Stanislas Poniatowski
qui perd sa couronne.
États d'essai à l'eau-forte et terminé avant la lettre. État avant la signature
Erimeln.
16. Le Gouverneur du sérail choisissant les femmes,
d'après Taraval. — Gravé par N. Le Mire , ci-dev^- de plusieurs
Académies; in-fol.
Cette estampe, « sur le sujet le plus vieiUi », fut exposée au Salon de 1799.
n. Plafond de la salle de spectacle de Bordeaux , d'après Robin ; grand
in-fol. rond.
18. Arc-de-triomphe de Titus , — Vue du mont Vésuve tel qu'il était
en nsT, — Vue d'un temple de Vénus dans l'île de Nisida , 3 p.
d'après Lacroix,
PORTRAITS.
19. Bernis (le Cardinal de) , d'après Callet , an II ; petit ovale pour
être placé sur un titre de livre.
Les premières épreuves sont tirées hors texte.
20. Boccace. — Un petit buste de Boccace se trouve sur le titre du
premier volume du Décaméron de l'75'7, dessiné par Gravelot.
L'eau-forte pure porte la signature de Le Mire, à la pointe.
ler état : Le titre en italien , la signature de Le Mire comme graveur.
ii® état : Le titre en français, la signature d'.\liaraet.
>i G^;therine II , Frédéric II , Joseph II et Stanislas II (voyez n° 15,
le Gâteau des Rois).
II. 41
630 LES GRAVEURS DU XVIII'^^ SIECLE.
21. CLAIRON (MeUe)^ composition allégorique d'après Gravelot,
grand in-8 , avec encadrement orné ; iTôS. — On lit à la partie
supérieure du cadre : Prophétie accomplie , et dans le bas ces
quatre vers de Garrick :
J'ai prédit que Clairon illuslreroil la scène
Et mon espoir n'a point été déçu :
Elle a couronné Melpomène ,
Melpomène lui rend ce qu'elle en a reçu.
Gabrick.
« Jolie p'èce , dit M. Hédou , dans laquelle on ne sait qui l'emporte en esprit
» de Gravelot ou de Le Mire, et certes l'un et l'autre étaient loin d'en manquer.
» La pose de la Muse est pleine de dignité , et Clairon est bien toute entière à
» Apollon. Quant au burin , le graveur l'a conduit avec une adresse et un
» charme tout particuliers. »
On signale un état avant la lettre.
22. Daviel , chirurgien du Roi , oculiste. — Audaces fortuna juvat.
— Composition allégorique d'après F. de Voge, 1760 ; in-4.
Cette allégorie se rapporte à l'opération de la cataracte par extraction du
cristallin , méthode créée par Daviel.
Hé quoi! des mains intelligentes
Dirigent un trait acéré
Dans ces tuniques transparentes
Dont l'œil fragile est entouré.. .
Le principal défaut des allégories est d'être incompréhensibles. Aussi on ne
manquait pas de joindre aux compositions de l'espèce une longue explication
imprimée , dans laquelle le dessinateur expliquait ce qu'il avait voulu faire.
L'explicalion de la planche qui nous occupe est un modèle du genre. On la
trouvera reproduite in extenso dans l'ouvrage de M. Hédou.
23. Frédéric II, roi de Prusse, profil dans une médaille. —
N. Le Mire del. et sculp.; in-B.
Le dessin des ornements , consistant en drapeaux , timbales , lyre et canons ,
est attribué à Moreau le Jeune.
24. GausSIN (Mademoiselle), jouant le rôle de Constance abandonnée
dans une île déserte {l'Ile déserte, tragi-comédie par Collet, Paris,
1158), d'après Cochin ; in-8.
Quand tu nous peins l'horreur de ton destin affreux,
Gaussin , gui ne ressent comme toy les disgrâces !
Mais à tort tu te plains d'être seule en ces lieux
Car près de toy toujours on appercoit les Grâces
État d'essai , à l'eau-forle , avant les inscriptions sur le rocher. (Collection
Béraldi.)
LE MIRE. 63<
25. GriMàLDI (Louis-André de), des Princes de Monaco, évêque du
Mans, de profil à gauche. — Dessiné et gravé par Le Mire ; in-4.
Fine exécution.
Etat d'essai avant toute lettre, tablette blanche.
26. Jeanne d'Arc, d'après un ancien tableau de l'hôtel-de-ville
d'Orléans; in-8.
1"' état : Avec la légende : La France n'a point vu de cœur plus magnanime. . .
etc. — Rare. (Hédou , 30).
2' état : La planche retouchée et un peu diminuée de format. La pointe de
l'épée de Jeanne d'Arc touche le trait carré. Un écusson sur le socle. Dédicace
à M. de Cypierre. (H. 29),
21. Joseph II , Empereur le 18 aoust 1765, né à Vienne le 13 mars
1741. — Profil de la dimension d'une bague, dans un petit enca-
drement orné. — Dessiné et gravé par N. Le Mire, 17*72 ; in-12.
Le motif d'ornementation est de Moreau le Jeune.
28. La Fayette (M. le Marquis de ) , en pied; près de lui un nègre
tenant la bride de sou cheval; d'après Le Paon. — Liberté.
Conclusion de la campagne de 1781 en Virginie. — Dédié au
Général "Washington; in-fol.
Pendant du portrait de Washington dédié à La Fayette. M. Hédou le signale
avant la lettre.
On remarquera que Le Mire s'est montré inférieur à lui-même dans les pièces
de grandes dimensions.
29. LA FONTAINE, portrait allégorique d'après Moreau le Jeune ,
servant de frontispice aux Fables causides de La Fontaine en
bers gascouns, Bayonne, 1776 ; in-8.
L'eau-forte pure de cette jolie pièce a figuré à la vente Sieurin.
Une eau-forte plus avancée, dans la collection de M. E. PaUlet.
Une épreuve avant les signatures des tirtistes autour de l'ovale et sous le
trait carré , dans la collection de MM. Béraldi.
» Laure (voyez n° 48).
30. Louis XV, médaillon contenu dans un petit titre allégorique de
VAlmanach pour la ville de Rouen, présente à M. de Luxembourg,
gouverneur de Normandie , pour 1755. D'après Eisen; in-12
(Hédou , 59).
31. Louis XV, vignette. — Le portrait du roi est sur un médaillon
appliqué sur une colonne élevée au milieu d'un cadran ; un jeune
homme et une jeune femme sont au pied de cette colonne. —
H. Gravelot inv., N. Le Mire sculp., 1758; in-8 (H. 388).
632 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
32. Louis XV (Ludovico XV, Patri Patrice) , médaille avec profil du
roi , gravée par Le ilire, et insérée dans un en-tète de page pour
livre in-foHo composé par Boucher et gravé par Cochin père.
Le portrait du roi , très délicatement gravé et signé iV. Le Mire del ij&f , ne se
trouve que dans le second état de la planche , où il remplace un cartouche
d'armoiries (voyez catalogue de Cochin père, n" 19). — Rare (H. 54).
33. Louis XV, de profil à gauche , sur un petit médaillon attaché par
un nœud de rubans à la partie supérieure d'un encadrement.
Dans le bas du médaillon , la signature N. Le Mire sculp.
34. Louis XV, vignette tii'ée de VAlmanach iconologique de Gravelot
pour 1765 , intitulée Sculpture , et signée Baquoy , avec cette
mention : la Tête du Roi est gravée par N- Le Mire (H. 55).
1"' état : Avant la lettre. Rare.
35. Louis XV. — Six pièces représentant diverses statues du roi,
avec les plans de ces monuments ; in-fol . ( Monuments érigés à
la gloire de Louis XV, par Patte, 1*765.)
1. Statue équestre de Louis XV à Paris, composée et exécutée en bronze par
M. Bouchardon. Planche F*. Dessiné par Marvie. — Sur le piédestal on lit :
Dessiné et gravé par N. Le Mire 1764 (Hédou, 420).
2. Statue de Louis XV à Bordeaux , inventée et exécutée en bronze par
M. Lemoine. PI. XIV (H. 417).
3. Statue de Louis XV à Valenciennes , composée et exécutée par M. Saly.
PI. XVII. Dessiné par Marvie. Gravé par N. Le Mire (H. 415).
4. Statue de Louis XV à Rennes , composée et exécutée en bronze par
M. Lemoine. PI. XX {H. 416).
5. Statue de Louis XV à Nanci , composée et exécutée en bronze par
M. Guibal. PI. XXIII (H. 418).
6. Statue de Louis XV à Rouen. PI. XXXIII. Le Carpentier invenit (H. 419).
Dans toutes ces planches, la tête du roi a été gravée avec un soin extrême.
Nous ne connaissons , comme épreuve de remarque , que l'eau-forte de la
statue de Louis XV à Paris , par Bouchardon.
36. LOUIS XV, LE BIEN-AIMÉ, profil dans un médaillon ovale
appliqué dans un cadre orné , avec boule fleurdelysée , casque ,
palmes , collier du Saint-Esprit , et deux amours tenant une épée
et une massue. — Signé N. Le Mire sculp. et del.; in-8 (H. 33).
C'est un des meilleurs portraits de l'œuvre de Le Mire.
Les premières épreuves sont avant la signature du graveur et l'inscription :
Gravé par N. Le Mire, etc., dans la marge inférieure. — Rare.
LE MIRE. 633
87. Louis .XV et Henri IV, deux portraits de la grandeur d'un
chaton de bague , dans des encadrements ornés , formant pendant
sur la même planche. — N. Le Mire scu. 1769 ; in-12 en largeur
État d'essai : les portraits seuls sans l'encadrement.
Les premières épreuves terminées sont celles qui portent dans la marge infé-
rieure l'inscription : Gravé par Le Mire, etc., qui a été effacée ensuite.
38. Louis XVI , auquel on présente le portrait de Henri IV. — Com-
position allégorique de Gochin , servant de frontispice au Télé-
maque gravé de Drouet, lllô ; in-8 (H. 405).
Nous en avons vu une épreuve d'eau-forte avancée chez M. Lefllleul, libraire,
l'i'' état: Avant la lettre. Il faut l'avoir avec la signature des artistes, snr
papier vergé. Les épreuves sans la signature des artistes , sur papier vélin ,
nous paraissent de mauvais aloi.
2^ état : Avec la légende :
Allez , vous êtes maintenant
Digne de marcher sur ses pas.
Cette composition a été copiée in-fol.
39. LOUIS XVI, Ludovicus Decimus Sextus Francorum Rex. —
D'après Duplessis ; in-4, orné des armes de France (H. 36).
État d'essai avant toute lettre, tablette blanche.
40. LOUIS SEIZE, Roi de France et de Navarre, d'après Duplessis ;
in-8, orné des armes de France (H. 37).
Une des meilleures pièces de l'œuvre.
Existe avant la lettre , très rare, et avant l'inscription : Peint par J. Ph. Du-
plessis, etc., dans la marge inférieure.
M. Hédou signale de ce portrait une copie allemande signée Nach Le Mire.
41 . Louis XVI , coiffé du bonnet rouge ; in-8.
Cette pièce est décrite par M. Hédou sous le n" 38. Elle est assez grossière-
ment gravée à l'eau-forte et a pour légende : Bonnet des Jacobins donné au Roi le
2o Juin 7792. — Mareau deltneavit , Le Mire sculpsit. — Le bonnet est colorié.
Rarissime.
Nous ne voyons pas de raison pour attribuer ce dessin à Moreau , sous le
prétexte que cette pièce est signée Mareau.
42. LOUIS XVI, médaillon dans une composition allégorique. —
Au Roi. Le Portrait de Sa Majesté' est soutenu par la Justice ,
la Sagesse et r Abondance soulagent ses Peuples par leurs bien-
faits, et la Vérité', délivrée du joug de la fourberie et du men-
songe, réclame ses droits. — Dessiné par J. M. Moreau le Jeune,
gravé par N. Le Mire , graveur de LL. Majestés Impies, et Ries.
1774; in-fol.
634 LES GRAVEURS DU XYIIV SIECLE.
43. MARIE-ANTOINETTE, médaillon dans une composition allé-
gorique. — A LA Reine. Le Portrait de Sa Majesté est soutenu
par la Bonté et par la Tendresse , les Grâces l'ornent de fleurs.
Au bas est la France qui lui présente ses Enfants. La Poésie et
la Peinture s'empressent d'immortaliser ses vertus. — Pendant
de la pièce précédente.
Chefs-d'œuvre de composition et de gravure.
Les eaux-fortes des deux pièces dans la collection de MM. Béraldi.
M. Mahérault signale une épreuve de la seconde allégorie avant la lettre , et
un état des deux pièces avant l'adresse de Petit.
44. MARIE-ANTOINETTE , profil à droite dans un petit médaillon
posé sur un nuage, et que deux amours enguirlandent de roses ; à
claire-voie. — Le médaillon est signé à la pointe N. Le Mire del.
et sculp. 1775. — On lit, sous le nuage, les signatures de
Moreau et de Le Mire.
Très jolie pièce des plus estimées. Rare. 599 fr. vente Sieurin , 1819.
Etat d'essai avant les signatures des artistes.
» Une des plumes de la coiffure de Marie-Antoinette sort du médaillon. Si
» Moreau avait dessiné la tête de la reine , U n'aurait pas fait cette sottise. »
(Mahérault).
45. MIROMÉNIL (Hue de), composition allégorique en forme de tête
de page pour un in-folio. — N. Le Mire sculp. ms ; in-4 en
largeur.
Le portrait de MiroménU est dans un médaillon appliqué à un obélisque. Le
génie de la Normandie est à droite, la Normandie à gauche, tenant un livre sur
lequel on lit : Lois de Normandie. Au fond , la ville de Rouen.
Cette pièce est remarquable par sa grâce et sa finesse. On en attribue généra-
lement l'invention à Moreau.
1*' état: Avant les mots Lois de Normandie sur le livre.
M. Hédou signale 1 existence d'une explication de cette allégorie dans une
planche gravée par Bacheley et représentant un encadrement composé des
produits de la Normandie et portant les armes de MiroménU.
46. Montesquieu. Tête de page pour un livre in-4. — De Sève
inv., N. Le Mire sculp. 1151.
Le profil de Montesquieu est à gauche , sur la face d'une médaille dont le
revers représente la Justice debout , et la Vérité (?) assise sur un nuage. —
Très rare.
État d'eau-forte.
47. MONTESQUIEU ( Charles-Secondat de). Médaillon dessiné et
LE MIRE. 635
gravé par Le Mire, dans une composition allégorique dessinée par
Eisen et gravée par Le Mire, mi.
C'est le frontispice du Temple de Qnide (voyez plus loin n" 115).
Sur l'eau-forte , la figure de la Nature , qui tient une lyre , à gauche du mé-
daillon , est découverte. Cette remarque subsiste sur les premières épreuves
terminées.
lor état : Avant l'inscription Dessiné par Eisen , etc., sur la marge inférieure.
48. Pétrarque, — Laure, 2 p. ovales de très petite dimension , dans un
encadrement {Voyages en France, Paris, Chaigneau, an IV).
1"' état : L'ovale seul , sans aucune bordure. — Dortu del., N. Le Mire sculp.
l'an 2'ne.
49. PlRON, d'après N.B. Lépicié, ITTS ; in-8 orné.
Tout en lui d'un poïte annonce le cerveau ,
Une belle âme encore illustre sa mémoire ;
Cet Ecrivain nerveux , saillant , toujours nouveau,
Fit peu pour nos plaisirs, mais assez pour sa gloire.
GUICHARD.
1"'' état : Avant l'adresse de Le Mire sur la marge inférieure.
50. PouLLAiN DE Saint-Foix. Si genium ex ahimâ. — Pongin
deSt-Aubineffig.pinx., Marillier ornam. del., N. Le Mire sculp ,
in-8 orné.
pf état: Le nom du personnage en lettres grises, sur un fond formé d'un seul
rang de tailles verticales. La plume qui est dans l'encrier, à droite, est blanche.
— Rare.
•26 état : Ce nom en lettres ombrées, sur le fond formé de deux rangs de tailles
croisées. La plume est ombrée.
3' état : Avec l'adresse de Duchesne.
51. Rouelle ( Hilaire-Marin ) , du Collège de Pharmacie de Paris ,
Apothicaire de S. A. S. Mgr le Duc d'Orléans, Démonstrateur de
chimie au Jardin du Roi. . . etc. — Frédou del. 1762 , N. Le Mire
sculp.; in-4 orné.
C'est le frère du célèbre chimiste RouèUe.
52. Rousseau (J.-J-), assis au pied d'un sapin. Deux enfants lui appor-
tent des plantes qu'il examine à la loupe. — Le Barbier l'aîné inv.,
N. Le Mire sculp. l'783 ; in-4.
Frontispice du Dictionnaire de Botanique pour l'édition des Œuvres de Rousseau
de n'74-83.
636 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
53. Rousseau ( J.-J.j. Buste sur un fût de colonne , dans un paysage ,
avec des enfants qui se livrent à divers exercices. — Cochin inv.
et del., Le Mire sculp. l'an 2* ; in-4.
Frontispice d'Emile pour l'édition de Defer de Maisonneuve. C'est la copie
agrandie d'une vignette de Cochin, déjà gravée in-8 et petit in-1 par R. de Launay
le Jeune, en 1782.
54. RoussELET (Claude), abbé de Ste-Geneviève , d'après Robin,
nse ; in-fol. orné.
55. Scarron ; in-8 [le Roman comique, Paris, Didot, an IV, 1796).
56. Voltaire, vignette allégorique. — Ch. Eisen inv., gravé par Noël
Le Mire, HSl ; in-8 (Hédou, 324).
Frùnlispice de la Benriade , dans une petite édition des Œuvres de Voltaire
dont nous parlons plus loin (voyez n» 108).
L'eau-forte, vendue en 1880.
Etat avec le buste de Voltaire peu ressemblant , tourné vers la droite.
Etat avec le buste de Voltaire gravé à nouveau ( par WUle, dit-on ; mais cela
est peu vraisemblable) et tourné vers la gauche.
Le même sujet en contre-partie, le buste esta droite du petit temple circulaire
au lieu d'être à sa gauche. Signature à la pointe : C. Eisen inv., N. Le Mire sculp.
57. "Washington , d'après Le Paon ; in-fol.
Pendaut du portrait de La Fayette, et morceau de réception du graveur a
l'Académie de Lille. — Gravure très froide.
1*'' état : Avant la lettre.
EX-LIBRIS, ADRESSES.
58. Ex-libris J. B. Descamps. — Une femme assise sur des nuages et
peignant une toile. — N. Le Mire inv. et sculp.; in-18.
59. Ex-LlBRIS J. J. ISAMBERT. — Écu d'armoiries appliqué contre
une grotte, 1746 ; in-12.
o Cette pièce est celle de l'œuvre de Le Mire qui porte la date la plus
» ancienne, ce n'est déjà plus l'œuvre d'un écolier ; eUe présente même une
» composition bien équilibrée. » (Hédou).
60. Ex-LiBRiS DE MONTAYNARD. — Blason soutenu sur des
nuages par deux lions. Fond rayonnant. — C. Eisen del., N. Le
Mire sculp.; in-18.
LE MIRE. 637
fll. Ex-LiBRis Marquis de Rognes. — Éou d'armoiries sur
un nuage. Fond rayonnant. Au-dessus , une banderoUe avec la
devise Latrantibus ostro. — D'après Moreau , HIT ; in-12.
62. Ex-libris ? — Écu d'armoiries soutenu par des amours ; ballot ,
caducée, etc. — N. Le Mire inv. et f. 1757 ; in-8 (H. 398).
63. Adresse du relieur Dubuisson. — Dubuisson, relieur
et doreur ordinaire du Roy, relie et entreprend toutes sortes de
bibliothèques , fait les armes en or et migniature de toutes les
noblesses de France et étrangère , il possède un cabinet généa-
logique de titres, minutes et renseignements nécessaires à la
noblesse, et il vend toutes les cartes héraldiques et nobiliaires.
— A Paris, rue S^-Jacques , près la Fontaine Saint-Benoist. —
D'après Eisen ; in-12.
64. Adresse d'une fabrique de cire. — Une Renommée s'envolant. Deux
chaudrons sur des fourneaux , dégageant une épaisse fumée. —
A la Renommée. Secret d'Hollande. Nouvelle fabrique de la cire
d'Espagne du véritable secret d'Hollande , de toutes espèces et
cotdeurs, supérieure en toute qualité à celle qui s'est fabriquée
jusqu'à présent, parfumée ou non , le tout ajuste prix, la ditte
cire se vend à Paris dans la fabrique rue de l'Arbre-Sec , à la
Renommée , près la rue des Fossés-St-Germain-l'Auxerrois. —
Manière de se servir de la ditte cire : il ne faut point brûler
cette cire sur la lumière comme on fait ordinairement, il suffit
de l'en approcher, elle l'attire d'elle-même. — N. Le Mire inv.;
in-4.
Mauvaise gravure.
65. Adresse d'un M.xItre d'armes (?). — Petite composition
représentant une salle d'armes dans laquelle des élèves s'exercent.
Dans la tablette, ces quatre vers :
Art glorieux et plein (Tune sage industrie ,
Lorsque Von te joint au grand cœur,
Tu serf à conserver la vie,
Tu sers à soutenir l'honneur.
Par M. Moraine.
— N. Le Mire in. et f.; in-8 en largeur (Cabinet des Estampes).
66. Répertoire pour la Comédie- Franc mse. —Cadre
orné, avec les armes de France à la partie supérieure. L'intérieur
638 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
du cadre est divisé par des lignes horizontales en sept cases, desti-
nées à recevoir les titres des pièces j'^uées pendant une semaine.
A gauche des cases , sept petits sujets allégoriques aux jours:
Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne, une porte fermée, Phébé.
Au-dessous , l'inscription : Semainiers, Messieurs En tête,
la légende : Répertoire de la semaine , Comédie-Française. —
N. Le Mire inv.; petit in- fol.
Pièce d'une exécution assez grossière. Très rare.
67. Carte de la Société populaire de Caen. — La République assise sur
un rocher qui porte le mot Calvados ; elle est appuyée sur les
Droits de l'homme. Exergue : Société populaire et républicaine
régénérée de la Commune de Caen. — Prignet invenit., Le Mire
sculp. l'an 2®; in-12 ovale.
TITRES.
Voir aux Vignettes :
Le Joujou des demoiselles , Lucrèce de Marchetti , Zétis au bain . le Temple de
Gnide, d'après Eisen ;
Le Décaméron, le Devin de village, Iconologie, d'après Gravelot;
Fables causides de La Fontaine en bers gascouns, d'après Moreau :
Arsace et Isménie, d'après Ghoffard.
Armoriai de Dubuisson.
FLEURONS.
I. d'après goghin.
68. En-têtes poui- le Lucrèce de Marchetti , 2 p.
Sacrifice d'Iphigénie. — Tombeau de Scipion.
69. En-tête de la dédicace à Madame de Pompadour, pour les Poésies
de Métastase, V^eQuiUau, 1755, in-12.
Minerve, à laquelle des femmes offrent des fleurs et des manuscrits.
II. d'après descamps.
70. Armes du comte de Vence, — de La Live de Jully, — du marquis
de Marigny, 3 p.
En-têtes pour la Vie des Peintres flamands et le Voyage pittoresque de la
Flandre , par Descamps.
LE MIRE. 639
III. d'après eisen.
11. Fleuron sur le litre de VEloge de la Folie, d'Érasme, \lb\.
12. En-tètes et culs-de-lampe pour 17tt/rodMC<io« à l' histoire moderne. . .
par le baron de Puâèndorf , Paris, n53-59.
1. Destruction de l'Empire romain par les barbares. — 2. L'Espagne livrée
aux Maures. — 3. La Louve romaine. — 4. La France reçoit des mains de la
Lorraine l'étendard de ce duché. — 5. Minerve debout, tenant une médaille avec
le portrait de Stanislas. — 6. Le Tibre , caractérisé par des lauriers et par la
figure de la louve. — 1. Le Vésuve et l'Etna. — 8. La République de Grnes
recevant le tribut de la Corse. — 9. Le Roi et la Reine d'Angleterre sous un
dais , entourés de seigneurs. — 10. Lapon dans son traîneau. — II. Le czar
Pierre \^' tondant Saint-Pétersbourg. — 12. Deux chasseurs, hongrois et polo-
nais. — 13. La reiue Vanda triomphante de Kitiger, prince allemand.
"73. En-têtes pour la Christiade, n53, 4 p.
"74. Galerie de Dresde. — Deux grands fleurons de titres.
Le Génie de la peinture, assis devant un chevalet, en train de peindre Vénus.
— Génie faisant arranger une galerie de tableaux.
"75. Une femme assise sur une croix et tenant une corne d'abondance.
76. Deux fleurons de titres et deux têtes de pages pour l'Histoire des
guerres civiles de France, par l'abbé M., Amsterdam, nST. in-4.
1. Homme debout près d'un autel antique, brandissant un poignard.
2. Homme nu se précipitant avec un poignard et une torche.
3. Rentrée de Henri lll à Paris.
4. Henri IV reçoit la soumission des Parisiens.
T7. En-tête pour une oraison funèbre in-4 , l'760.
La Justice assise sur un lion , la Religion portant la croix. In morte quoque
non sunt divisi.
78. Fleuron de titre pour les Poésies sacrées de Lefranc de Pompignan,
1763.
■79. Fleurons pour les Œuvres du marquis de Pezay.
En-têto du Pot-Pourri , une charrette chargée de tonneaux. Le Mire direxit. —
En-tète et cul-de-lampe de la Lettre de Vénus à Paris , 1764. — Cul-de-lampe
pour Zilis au bain , 11Q3.
" En-tête aux armes d'Angleterre pour le Temple de Guide ( V. n" 1 15).
640 LES GRAVEURS DU XYIII'' SIECLE.
IV. D APRES GRAVELOT.
80 Cartouches pour V Atlas de géographie de Bourguignon d'Anvll e
1. Première partie de la carte d'Europe, 1154. — Seconde partie de la carte
d'Europe, 1158.— Orbis veteribus notus apud auctorem, in œdibus regiis, vulgo
les galeries du Louvre , 1163 .
81. Fleurons pour LE DÉCAMÉRON de Boccace , édition de Londres
(Paris), n57-61.
Un très joli en-tête pour la Vie de Boccace , représentant les trois Grâces sur
des nuages, faisant des couronnes.
Trente-cinq culs-de-lampe ; dans ces petites compositions, très soigneusement
gravées, les personnages sont généralement des amours ou des enfants.
82. Minerve appuyée sur un bouclier aux armes de la famille d'Orléans,
tête de page pour un in-4 , 1760.
83. La Charité et la Religion , assises près d'un mausolée, avec de
petits génies ; en-tête pour une oraison funèbre in-4 , 1760.
84. En-tête pour une oraison funèbre in-4 , 1761.
Deux femmes assises près d'un cénotaphe ; celle de gauche se cache la figure
avec un voile. Au milieu , les lettres L. M.
85. Deux amours pleurant sur une urne funéraire ; cul-de-lampe pour
une oraison funèbre, 1761.
86. La Mort , armée d'une faulx , appuyée sur des armoiries ; en-tête
pour une oraison funèbre in-4 , 1762.
87. Histoire de Saint Louis, par le sire de Joinville , Paris,
Imprimerie royale, 1761, in-fol.
Un fleuron de titre, six fleurons et trois lettres ornées .
« Toutes les vignettes de cet ouvrage sont charmantes de composition. Quant
» au travail de la gravure. Le Mire y a mis tout son savoir et tout son esprit. »
(Hédou).
" Fleurons pour les Œuvres de La Fargue (voyez n° 128).
V. DAPRES MARILLIER.
88 . Femme coiffée d'un turban , tenant un sabre et appuyée sur l'Al-
coran, tête de page pour un in-4.
LE MIRE. 641
VI. DAPRES MOREAU.
89. Donation du Dauphiné a la France : me, in-4.
Très bel en-tète pour l'Histoire généalogique de la Maison de Beaumont en Dau-
phiné, Paris, IT79, in-fol.
VII. DAPRES DIVERS.
90. Assaut d'uue ville antique, tête de page (H. 373).
91. Vue de La Rochelle.
Tête de page pour X'Histoire de la ville de ta Rochelle et du pays d'Autnis ,
La Rochelle, Desbordes, 1156, iu-1.
92. Un buisson, deux amours. — N. Le Mire sculp. 1157; cul-de-
lampe (H. 367).
VIGNETTES.
I. d'après boucher.
93. Vignettes pour le Décaméron de 1751, 3 p.
94. MARS ET VÉNUS. — UERGULE ET OMPHALE. —
PYGMALION AMOUREUX DE SA STATUE. —VÉNUS
PLEURANT ADONIS.
Remarquables illustrations pour les Métamorphoses d'Ovide, nâ'-mi .
II. d'après GOGHIN.
95. Vignette pour le livre III du Lucrèce de Marchetti, in-8 avec cadre.
Vieillard assis sur l'herbe. Dans le fond , une ronde déjeunes gens.
96. Vignettes pour le Décaméron de 1757, 2 p.
97. TÉLÉMAQUE DANS LE TEMPLE DE VÉNUS. — N. Le Mire
sculp. 1773; in-8 [Télémaque àe Drouët).
98. Ulysse et Circé, 1795-, in-4 (/{oMSseau de Defer de Maisonneuve)
642 LES GRAVEURS DU XVIII« SIÈCLE.
III. d'après eisen.
99. Éloge de la Folie, d'Érasme, in-8 ; 3 vignettes.
100. Persée et Andromède. Chant 1^'' p . 4 \ vignette in-S, 1751 .
101. L'Autruche, le Rhinocéros , le Léopard , le Loup-Cervier, 4 p.
pour un ouvrage d'histoire naturelle , in-32.
102. Guerriers antiques, 2 p. in-8 (Hédou, 396-391).
103. Titre et frontispice pour LE JOUJOU DKS DEMOISELLES,
Paris, n52 ; 2 p. grand in-8.
Titre. Encadrement de g:uirlande de fleurs ; dans le bas , une femme nue ,
assise et enlaçant un petit Amour.
Frontispice. Une femme nue cherche à enchaîner avec des fleurs l'Amour
endormi.
104. Vignettes pour la Christiade, ou le Paradis reconquis, par l'abbé
de Lahaume-Desdossat , 17.53 ; 6 p. in-12.
105. Titres et frontispices pour Ll'CRÈCE, traduction de Marchetti,
1154 ; 4 p. in-8.
Les deux titres représentent des Amours qui tendent des draperies sur des
cadres.
Frontispices : 1. Lucrèce assis dans un jardin. — 2. Allégorie : une femme nue
tenant le médaillon de Lucrèce, le Temps. Ces deux pièces sont entourées d'un
cadre.
106. Frontispice pour les Épigrammes de Martial, Paris, Barbou ,
1754 , in-12.
Une femme nue , couchée sur un tertre , cherche à se défendre contre deux
petits amours.
107. Pygmalion et Galathée. — Gh. Eisen inv., Noël Le Mire sculp.;
in-8.
108. Vignettes pour la Henriade et Zaïre, dans les Œuvres deVoltaire,
Paris, 1757, 20 vol. in-8.
L'édition des Œuvres de Voltaire , dont ces vignettes font partie , est rare et
peu connue des bibliophiles. Elle n'est pas décrite par Cohen.
109. Jocondf, — le Cocu battu et content , — les Muletiers, 3 vignettes
in-12.
Ces vignettes sont d'un format sensiblement plus petit que celles de l'édition
des Fermiers-Généraux. On ne sait à quelle édition eUes étaient destinées.
LE MIRE. 643
110. Le Rossignol, — Les Lunettes, — Joconde, 3 planches.
— La Servante justifiée , — la Gageure des trois commères , —
A femme avare. . . , — le Gascon puni , — le PiUé d'anguille, —
le Magnifique , — Deuxième imitation d'Anacréon , — Richard
Minutolo, — l'Oraison de St-Julien, — le Villageois qui cherche
son veau , — Mazet , — Nicaise , — Gomment l'esprit vient aux
filles, — les Troqueurs, — la Jument du compère Pierre, — les
Quiproquos , — la Couturière.
Vignettes pour les Contes de La Fontaine , édition des Fermiers-Généraux.
Le Mire et de Longueil sont les deux graveurs qui ont le plus travaillé à cette
remarquable suite de figures.
Le Rossignol et (es Lunettes jouissent d'une réputation spéciale parmi les
bibiophiles, réputation d'assez mauvais aloi , du reste, qui tient à ce qu'il en
existe de rares épreuves découvertes.
111. L'Oraison de St-Julien, — Comment l'esprit vient aux filles,
vignettes refusées pour les Contes de La Fontaine , édition des
Fermiers-Généraux .
On sait qu'indépendamment des figures contenues dans l'édition des Fermiers-
Généraux, il existe un certain nombre de plancbes doubles, qui ont été refusées
par les éditeurs, mais que les bibliophiles ajoutent à leurs exemplaires lorsqu'ils
peuvent se les procurer. Les deux pièces indiquées ici font partie de ces doubles.
112. Titre et vignette pour ZÉLIS AU BAIN; 2 p. in-8, 1763.
Titre. Encadrement avec arbres sur les côtés , guirlande de fleurs à la partie
supérieure, et dans le bas un chapeau de berger, une corbeille, une houlette, etc.
Vignette. Hilas aux pieds de Zélis , dans un bosquet. Au-dessus d'eux , un
amour.
Très belles illustrations.
113. Le marquis de Pezay et son compagnon de voyage, guidés par un
Suisse , dans la cour du château de Blois.
Pour le Pot-Pourri.
114. L'AGE D'OR ET L'AGE D'ARGENT. — L'ÉTÉ. —
L'AUTOMNE. —PERSÉE DÉLIVRE ANDROMÈDE.—
Ovide reçoit de sa Muse une plume. — Dieu débrouille le chaos.
— Le Déluge. — Calisto chassée de la suite de Diane. — Cadmus
et Hermione métamorphosés en serpents. — Vénus prie l'Amour
de percer le cœur de Pluton. — Médée sur son char. — Hercule
étouffant Antée. — Enlèvement de Ganymède.
Illustrations pour les Métamorphoses d'Ovide, 1767-1771, 4 vol. in-4 , livre
célèbre dont Le Mire fut l'éditeur conjointement avec Basan.
Notre graveur prit une part considérable à l'exécution de cette suite remar-
644 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
quable. Outre les figures citées ici , qui portent sa signature , outre celles
qu'il a gravées d'après Boucher, Monnet et Moreau , Le Mire , cela nous paraît
incontestable , a exécuté les préparations à l'eau-forte d'un grand nombre de
figures , que d'autres artistes ont terminées et signées. Voici les eaux-fortes
qu'on peut attribuer à Le Mire:
Le Combat des Centaures et des Lapylbes , gravé par Ponce ; — Mercure
tranchant la tète d'Argus, Longueil ; — Phaëton foudroyé. Née ; — Atlas changé
en montagne , Legrand ; — Persée épouse Andromède , Massard ; — Alphée et
Aréthuse , Basan ; — Apollon et Marsyas , Massard ; — Philomèle délivrée de
prison , Baquoy; — Éson rajeuni , Baquoy ; — Thésée tue le minotauie. Ponce ;
— Icare tombe dans la mer, iV^e ; — Perdix changé en oiseau , Legrand ; —
Enlèvement de Déjanire, Le Veau ; — Luoine et Alcmène , Basan; — Dryope
changée en lotus, Lejmmi ; — Eurydice mordue par un serpent , Legrand; —
Vénus et Adonis sur un gazon, Massard ; — Orphée mis en pièces par les Bac-
chantes, Baquoy ;
Et les eaux-fortes de toutes les planches qui sont signées de Binet , ainsi que
nous l'avons dit à l'article de ce graveur.
115. LE TEMPLE DE GNIDE , suivi de Cépliise , par M. de Mon-
tesquieu, Paris, 1112, 1 vol. grand in-8.
Les illustrations de ce livre, merveilleuses comme dessin et comme gravure,
sont toutes gravées par Le Mire ; elles comprennent :
Un titre. Le premier état est sans texte au verso.
Un en-tète aux armes d'Angleterre, pour la dédicace.
Dix vignettes : 1. Le frontispice allégorique , avec portrait de Montesquieu ,
que nous avons décrit plus haut sous le n" 47. — 2. Vulcain enlevant Vénus.
Sa rohe fuit se,' genoux. — 3. Vénus sur son trône. Tu mourras accablée de refus.
— 4. Vénus donne à Thémire le prix de la beauté. Elle appela les Grâces. —
5. Apparition d'une des Grâces au fils d'Antiloque. Une nuit que j'étais.... —
6. Aiistée et Camille dans une forêt. Je sens couler mes larmes. — 1. L'Antre de
la fureur. Elle détacha un de ses serpents. — 8. ïhémire cachant un amour sur
ses genoux. Il se cacha sous ses genoux. — 9. Cophise coupant les ailes de
l'Amour. Elle coupa le sommet. — 10. Vénus et l'Amour. Embrassez-moi , elles
croissent.
La suite des eaux-fortes dans la collection de MM. Béraldi. Une autre suite
dans un exemplaire appartenant à M. Fontaine, libraire, 1819.
1*"' état : Avant la lettre. Rare et très estimé.
2"= état : Avec la lettre, mais avant les numéros des chants. Rare.
3* état : Avec la lettre.
4" état : Épreuves sur papier vélin, avec tablette pour la légende, formée par
un tiait carré. Sans valeur.
116. Allégorie.
M. Hédou décrit cette vignette sous le n» 402 de son catalogue. C'est un jeune
guerrier qui se trouve en présence de l'Ignorance et de l'Ivrognerie. A gauche ,
le Temps tient un miroir que l'Amour regarde en s'appuyant sur son arc. Les
signatures sont : C. Eisen inv., Aliamet aqua-forti et fini par Le Mire.
Nous ferons remarquer ici qu'Aliamet et Le Mire ont souvent signé des
LE MIRE. 645
vignettes dans les mômes ouvrages, que dans te Décaméron, Aliamet a signé des
titres et des vignettes sur lesquelles on trouve également la signature de
Le Mire ; il est probable qu'en général , Aliamet a dû peu travailler à ces sujets
de minime importance: il les faisait exécuter sous ses yeux , retouchait peut-
être quelquefois, et signait. Nous serions donc tentés d'attribuer à Le Mire la
gravure de beaucoup de vignettes signées d'Aliamet.
IV. D APRES GRAVELOT.
in. Titres, vignettes et fleurons pour LE DÉCAMÉRON DE JEAN
BOCCACE, Londres (Paris), Hsi-noi, 5vol.in-8.
Le Mire est le graveur qui a fourni le plus grand nombre de planches à cet
ouvrage très estimé. Tout ce qui porte sa signature est exécuté avec ses qualités
ordinaires de netteté et de brillant.
Nous avons déjà signalé un en-tête , trente-cinq culs-de-lampe d'après Gra-
velot , et cinq vignettes d'après Boucher et Cochin. Le Mire a encore gravé :
L Le titre du tome I. Amours ornant de fleurs le buste de Boccace, nST Ce
titre porte les deux signatures de Le Mire et d'Aliamet (voyez n» 20).
2. Le titre du tome IL Deux amours appuyés sur le globe terrestre, et tenant
une corne d'abondance et une draperie, \lôl.
3. Le titre du tome III. Femme nue appuyée sur une roue. Couronne, sceptre
chaîne. nST Ce titre porte les deux signatures de Le Mire et d'Aliamet. '
Et environ trente vignettes d'après Gravelot , si l'on tient compte de ce fait
que vingt-trois sont signées Le Mire, que d'autres portent à la fois la signature
de Martenasie ou d'Aliamet et de Le Mire , et qu'on ne sait si Le Mire n'a pas
travaiUé aux planches signées uniquement d'Aliamet.
118. Almanach utile et agréable de la loterie de
l'Ecole royale militaire pour l'année 1759 et 1760,
Amsterdam et Paris, Prault et Laurent , 1759 , iu-12.
Un frontispice signé de Le Mire et représentant la Fortune tirant les numéros
de la roue de la loterie. JV. le Mire lyjS.
Quatre-vingt-dix figures non signées , ayant trait aux mœurs , caractères et
métiers du sexe féminin. Chaque planche est entourée d'un petit cadre orne-
menté.
119. Soliman II, frontispice in-8, 1761.
A servi plus tard de frontispice au tome IV des CEuvres de Favart.
120. Le Premier Baiser de l'amour, — l'Inoculation de
l'amour, — Claire I les enfants chantent la nuit quand ils ont
peur, — Mort de Julie , 4 p. in-8, avec cadre.
Pour Lettres de deux amanl.t habitans d'une petite ville au pied des A Ipes, Ams-
terdam , HGl , et pour l'édition publiée à Paris, en n64, sous le titre définitif de
la Nouvelle Héloïse.
n.
42
646 LES GRAVEURS DU XYIIP SIÈCLE.
121. Le Devin de village, 1763, in-8 avec cadre (Œuvres
diverses de Rousseau, 1*764).
Ah ! berger volage!
Faut-il t' aimer malgré moi!
L'eau-forte de cette jolie pièce au Cabinet des Estampes.
Etat avant l'inscription Titre du tome second au-dessus du cadre.
122. IcONOLOGlE , frontispice-titre , — Art militaire, — Chirurgie,
Indigence, 4 p. in-18.
Pour les AlmanacAs iconotogiques.
VIconologie , frontispice-titre, a deux états :
1" Avec les armes du marquis de Marigny et la légende : Iconologie , première
suite des Arts.
2" Sans les armes du marquis de Marigny ; avec la légende : Iconologie ou
Traité de la science des Emblèmes.
Pour la Sculpture, voyez Portraits, n" 34.
123. La Thébaïde , — Andromaque , 2 p. in-8 {Œuvres de Racine ,
édition de Luneau de Boisgermainj.
124. LA GALERIE DU PALAIS [Ce visage vaut mieux que toutes
vos chansons), — le Menteur, — Mélite, — Clitandre,
LA Veuve, — la Suivante, — la Place Royale,
T p. in-8.
Ces sept pièces sont des vignettes de premier ordre. Elles illustrent les
CEuvres de Corneille , édition de Genève , 1764 , avec commentaires de Voltaire ,
12 vol. in-8.
Le Mire fut le principal graveur de cette illustration , pour laquelle il a encore
exécuté les planches de : le Cid , Pompée, Théodore, Héraclius , Don Sanche ,
Nicomède, Œdipe, Sertorius, Othon, Agésilas, Pulchérie, le Comte d'Essex.
Quelques épreuves d'eau-forte au Cabinet des Estampes et dans diverses
collections.
On ne connaît pas de suite du Corneille de Gravelot avant la lettre. Il y a un
choix à faire entre les épreuves; celles avec cadres ajoutés sont inférieures.
125. Mort de lady Alderson , — Miss Jenny secourue par le ministre
Peters, 2 p. in-12 {Histoire de miss Jenny, par M"'® Riccoboni ,
n64).
126. Anthologie française, par Monnet , neS, 3 vol. in-8.
Cette édition est ornée de quatie vignettes, toutes gravées par Le Mire :
1. Ballade de Thibault, comte de Champagne , les Rois, les Troubadours.
2. Autre ballade, Thibault fut roi galant.
3. Les trois Grâces , Retenez cette vérité. — Cette figure a d'abord été gravée
découverte, c'est-à-dire avec la nudité de l'une des Grâces accentuée.
4. Vénus, Bacchus et l'Amour.
LE MIRE. 647
12T. Le Bon Mari, — le Misanthrope corrigé, 2p. in-8
{Contes moraux, parMarmontel , 1765).
128. OEUVRES MÊLÉES DE M. DE La Fargue, Paris, Duchesne,
n65, 2 vol. in-12.
Les illustrations de ce livre sont toutes gravées par Le Mire et datées de n6-1.
Elles comprennent trois fleurons et trois figures :
1. Les trois Grâces assises sur un nuage , une lyre et un caducée ; fleuron do
titre.
2. Femme jouant de la lyre, deux amours, Pégase ; en-tête.
3. Femme tenant un caducée et la foudre; en-tête.
4. Damon et Pythias. Denis attendri.
5. Quatre ctianoinesses dans un salon. L'une d'elles lient un chat sur les
genoux. On s'étonne de son maintien. — Très jolie vignette.
6. Jeune bomme à l'entrée d'un temple grec , trois amours. La lecture nous
forme.
129. Deux vignettes pour la Pharsale de Lucain , n66, in-8.
1. Mariage de Marcie et de Caton. Junguntur laciti..,.
2. Pompée vaincu regarde le champ de bataille de Pharsale. Stetit aggere.. ..
130. Lycaon métamorphosé en loup ; in-8 [Métamorphoses d'Ovide,
n69-71).
V. D APRES MONNET.
131. Orphée et Eurydice. — Euridice amor tirende. - Alto II ,
sce. II; in-4 à claire-voie, 1764.
132. JUPITER AMOUREUX D'iO. — Céphale et Procris. —
Cyparisse métamorphosée en cyprès. — Protée et Thétis.
[Métamorphoses d'Ovide, 1769-71.)
L'eau-forte et quelques premières épreuves de Jupiter et la sont découvertes.
La nudité d'Io y est très accentuée.
133. Oh I mon ami, lui dis-je, pardonne-moi mes torts . . . — Valmont
enfonçant d'un coup de pied la porte de la comtesse ; 2 p., l'an 4"
[les Liaisons dangereuses).
134. Deux vignettes pour /osep/i , de Bitaubé, 1799, in-8.
648 LES GRAVEURS DU XVIIie SIECLE.
vi. d apres moreau.
135. Diane fait sacrifier une biche a la place d'Iphi-
GÉNIE, — lo métamorphosée en vache, — Méléagre présente
à Atalante la hure du sanglier, 3 p. (Métamorphoses d'Ovide,
1169).
J36. Hercule entre le devoir et le plaisir, n72, in-32.
Très fine vignette pour le De officiis de Cicéron , Paris, Barbou , 1773.
137. Frontispices pour un ouvrage inconnu , 3 p. in-8.
1. Tombeau avec trophée , sur lequel sont assises deux Renommées; au-
dessous, une grotte dans laquelle sont deux enfants auprès d'une urne; 1773.
2. Hercule assis, tenant sa massue et une lyre ; au fond, un temple circulaire
et Pégase ; 1774.
3. Un homme en costume Louis XV, avec une plaque et un grand cordon,
debout , appuyé à uu tombeau et tenant une lyre et un livre ouvert ; lo fond est
un paysage avec clair de lune ; 1775.
138. LE PREMIER BAISER DE LAMOUR, — le Soufflet
(Julie frappée par son père), — l'InocuLATION DE l'amouR
(Saint-Preux à genoux près du lit de Julie), — l'Orage (Julie
et Saint-Preux en bateau), — RETOUR DE CLAIRE, 5 p. in-4
[Rousseau de 1774-1783, la Nouvelle Héloïse). — Courons vite,
l'astronomie est bonne à quelque chose, — Un violent exercice
étouffe les sentiments tendres, — Il en est navré, Je l'entraîne
avec peine , 3 p. in-4 [Idem, Emile). — PYGMALION , in-4
[Idem, Mélanges).
L'art de la vignette n'a rien produit de plus admirable que ces merveilleuses
illustrations. Le Premier Baiser de l'amour est un des chefs-d'œuvre de Moreau
et de Le Mire, ainsi que Pygmalion.
Les eaux-fortes dans les collections de MM. Vanloo, Paillet. — 7,000 fr. 1880.
L"eau-forte de Pygmalion est découverte.
Les premières épreuves sont avant l'indication pour le placement dans les
volumes, au-dessus du trait cane.
Les figures de la Nouvelle Héloïse et de Pygmalion sont toujours sans légende.
Celles A'Émile, au contraire, en ont toujours une.
139. Titre pour les Fables causides de La Fontaine en hers gascouns.
Rayonne, 1766, in-8.
Voyez n" 29, portrait de La Fontaine.
L"eau-forte porte déjà la légende.
LE MIRE. 649
140. Les Conversations d'Emilie, par Madame de Lalive
d'Épinay, Paris, HSl, 2 vol. in-12.
L'Illustration se compose de deux très jolis frontispices , qui sont toujours
sans légende.
1. Une dame se promenant dans un jardin et causant avec sa fllle, 1T79.
2. La mère et la fllle visitant une famille malheureuse, 1T79.
141. Timon d'Athènes, — Troïlus et Cressida , — Jules César, —
Coriolan , — Titus Andronicus, 5 p. in-12.
Pour les Œuvres de Shakespeare, Londres, 1785-81.
Les sujets sont dans des médaillons ronds , avec tablettes au-dessus et au-
dessous.
142. Le Dépositaire, 1185, — Irène, nSG, 2 p. in-8
Pour les Œuvres de Voltaire, édition de Kehl.
143. HÉLOÏSE ET Abailard. Plura de amore quatn de lectione
verba se ingerebant , plura erant oscula quam sententiœ ,
sœpius ad sinus quam ad libros reducebantur manus. . . in-4.
Pour les Lettres d'Héloïw et d' Abailard , Paris, Didot , 1796.
144. Vignettes pour les Œuvres de Gessner, Paris, Renouard , HQQ ,
4 p. in-8.
Daphnis, liv. I. — Évandre. — IdyUe 42, Glycère. — Idylle 45, Iris, Églé.
VII. D APRES DIVERS.
145. Soldat d'infanterie faisant l'exercice, et tenant son fusil ùonzoatR-
lement. — Signé sur la gravure Le Mire f 1757 ■ iu-4.
146. Soldat d'infanterie faisant l'exercice du fusil, au port d'arme.
Planche 10. — Signé sur la gravure N. Le Mire 1766 ; in-fol.
141. Vignette du livre IV du Lucrèce de Marchetti, d'après Le Lorrain,
1754; in-8.
148. Génie ailé embrassant une femme nue ; au-dessus d'eux , l'Amour
avec son arc brisé. Cadre orné. — D'après Vassé ; in-8.
Cette vignette est une planche double pour le chant IV du Lucrèce de Mar-
chetti. EUe était destinée à remplacer la composition de Le Lorrain , qui est par
trop mauvaise.
650 LES GRAVEURS DU XVIIP' SIÈCLE.
149. Le Cheval s'étant voulu venger du cerf ^ — le Vieillard et ses
enfants , 2 p. d'après Oudry ; in-foL [Fables de La Fontaine ,
1755).
150. Ésope dictant ses fables à Phèdre, d'après Descamps ; in-12
{Fables de Phèdre, Rouen, 1758 ).
151. Alexandre, d'après de Sève; in-4 {Œuvres de Racine, 1760).
152. ARSACE et IsmÉNIE, frontispice-titre d'après Choffard, 1796,
— J'allais la préférer à elle-même, vignette d'après Le Barbier,
l'an 2"'; 2 p. in-8 {Arsace et Isménie).
153. Agnès Sorel renversée de cheval. — Moncieau (sic) del.; in-8
avec cadre.
Pour le chant VI de la Pucelle de Didot , l'an III.
154. Songe de Saint-Preux , d'après Monsiau , 1796; in-4 {Rousseau
de Defer de Maisonneuve).
155. PYGMA.LION, d'après Regnault ; in-4 (même ouvrage).
156. Vénus veut te rendre heureux, vignette pour le Temple de Gnide,
d'après Peyron.
157. Catilina, d'après Peyron; in-8 { Œuvres de Crébillon , Didot,
1797).
158. Créature amphibie vous me direz .. . — Mais f ai vu ses longs
cheveux bruns , vignettes d'après Dutertre pour le Faublas de
l'anVI; in-8.
159. Autel antique représentant Silène, d'après Adam (H. 407).
160. Deux vignettes pour les Deux Biscuits, tragédie traduite de la
langue que Von parlait jadis au royaume d'Astrakan , 1752.
161. Armoriai alphabétique des principales maisons et familles du
Roïaume..., parDabuisson; Paris, 1757, in-8. Titre dessiné
et gravé par Le Mire.
LEMPEREUR (Jean-Denis).
1710-17...
Jean-Denis Lemperedr, échevin de la ville de Paris,
était un graveur-amateur qui avait formé un très beau
cabinet de tableaux et de dessins de grands maîtres.
Il a gravé à l'eau-forte , par manière de distraction ,
plusieurs pièces d'après Piètre de Gortone , B. Gasti-
glione, Van Dyck et autres.
Son portrait a été gravé au lavis par Gonord en
1761, d'après Gochin. Il y est désigné comme ècuyer,
ancien échevin, doi/en de ikT" les Conseillers du Roy
quartiniers de la ville de Paris.
Jean-Baptiste-Denis Lempereur , son fils , né vers
1740, hérita des goûts et des connaissances de son père.
Il a aussi gravé à l'eau-forte plusieurs pièces de sa
composition ou d'après différents maîtres : l'Ange
annonçant aux bergers la naissance du Sauveur
d'après Boucher, in-foL; le Massacre des Innocents
d'après Pierre , Paysages d'après Ruysdaël.
« Je me rappelle d'avoir (sic) vu à Paris chez mon
» ami Wille un recueil assez considérable des gra-
» vures du père et du fils. » (Huber.)
LEMPEREUR (Louis-Simon
1725-17%.
Louis-Simon Lempereur , l'ami de Watelet , né en
1725, fut élève de P. Aveline : « Il a gravé, dit Huber,
» d'un meilleur goût que son maître. Les belles
» estampes que nous avons de sa main témoignent
» qu'il a réfléchi sur son art , et qu'il s'est attaché à
» rendre le caractère des tableaux qu'il gravait. Il
» réussit également le portrait et l'histoire. »
Voici un éloge exagéré. Bien que graveur du roi
et académicien , Lempereur est un artiste estimable ,
rien de plus, et n'a produit aucune pièce hors ligne.
En fait de portraits , il a gravé un Watelet et une
Marguerite Le Comte assez agréables , Etienne
Jeaurat , son morceau de réception à l'Académie ,
et une grande allégorie sur De Belloy , d'après
Jollain, dont Diderot parle avec le plus parfait mépris:
« Je ne connais pas le portrait de M"" Watelet, quant
» à l'apothéose de M*" de Belloy, tant que Voltaire
» n'aura pas vingt statues en bronze et autant en
» marbre, il faut que j'ignore cette impertinence.
» C'est un médaillon présenté au génie de la Poésie
» pour être attaché à la pyramide de l'Immortalité.
» Attache, attache tant que tu voudras, pauvre génie
LEMPEREUR (Louis). 653
» si vilement employé, je te réponds que le clou man-
-> quera et que le médaillon tombera dans la boue.
» Une apothéose! Et pourquoi? Pour une tragédie
» sur un des plus beaux sujets et des plus féconds,
» d'un style boursouflé et barbare, morte à n'en jamais
» revenir. Gela fait hausser les épaules. On dit le
» Watelet assez bien. Pour le De Belloy, mauvais de
» tout point. J'en suis bien aise. » (Salon de 1764).
En fait d'estampes : Vénus retrouvant Adonis
blessé, Clorinde blessée , d'après Barbieri (Galerie de
Dresde), Céphale et Procris, d'après le même, le Jardin
d\imour, d'après Rubens , une des bonnes pièces du
graveur ; on dit qu'elle eut tant de succès que le pre-
mier jour de sa publication il s'en vendit 700 épreuves;
son pendant le Festin espagnol , d'après Palamèdes ;
les Amusements et les Délices des flamands, d'après
Téniers, V Attente du plaisir, d'après Carrache, et
quelques pièces de l'école française que nous citerons
tout-à-l'heure. Enfin quelques vignettes.
Lempereur fut le maître de Nicolas de Launay ; le
30 juin 1770, nous le voyons tenir sur les fonts de
baptême , avec la femme de Wille , une fille dont
M'"' De Launay a accouché la veille.
Lempereur est mort en 1796. 11 demeurait rue et
porte St-Jacques au-dessus du petit marché. Il était
de l'Académie depuis le 23 août 1759, comme agréé ;
sa réception eut lieu le 2 mars 1776.
Catherine-Elisabeth Gousinet, femme de Lempe-
reur. « s'est distinguée parmi les graveuses françaises. »
On a d'elle : les Compagnons d'Ulysse , dans les
Fables de La Fontaine , d'Oudry ; le Moulin de
Quincjuengrogne, d'après Lancret, in-fol. en largeur.
664 LES GRAVEURS DU XVIII<' SIÈCLE.
ESTAMPES.
1 . Les Présents du berger , — le Retour de la foire ; 2 p. d'après
Boucher.
2 . Sylvie fuit le loup qu'elle a blessé , d'après Boucher.
3. Pjrame et Thisbé, d'après Gazes; in-fol.
4. L'Enlèvement de ProserpINE, d'après Gh. de la Fosse ,
in-fol. en largeur.
5. Paysages, d'après Desfriches; 6 p.
6. Les Grâces lutinant les Amours, — les Amours lutinant les Grâces ;
2 p. d'après Lagrenée l'aîné ; in-fol. en largeur.
I. Le Bâcha en promenade, d'après Mettan ; in-fol. en largeur.
8. Sacrifice au dieu Pan, — Bacchus et Ariane; 2 p. in-fol. d'après
Pierre.
9. Les Forges de Vulcain , — l'Enlèvement d'Europe, 2 p. d'après
Pierre ; in-fol. en largeur.
10. Titon et l'Aurore, d'après Pierre; in-fol.
II. Halte foraine, d'après Pillement.
12. Le Triomphe de Silène, d'après Vanloo ; in-fol. en largeur.
13. Les Baigneuses, d'après Vanloo.
14. LES CONSEILS MATERNELS, — LA MÈRE INDUL-
GENTE, 2 p. d'après P.-A. Wille; in-foL
PORTRAITS.
15. Belloy ( P.-L. Buirette de) , grande allégorie d'après JoUain ,
neS; in-fol.
16. Boccace, vignette du Décaméron de 1757.
17. Boyer de Fores ta, second président du parlement de Pro-
vence, d'après M. Vanloo ; in-4.
18. Gayeux , d'après Cochin ; in-4. Chez Lempereur, graveur du Roy,
rue et porte St- Jacques au-dessus du petit marché.
LEMPEREUR (Louis). 65o
19. Charles-Emmanuel III , roi de Sardaigne, en-tôte pour la descrip-
tion de son mausolée , d'après Moreau.
20. Ghàtelet (Madame du) ; in-4 {Galerie française).
21. Goppette (L'abbé) ; ia-4.
22. Je AU RAT (Etienne); morceau de réception.
23. Lecomte (Marguerite), des Académies de Rome, Boulogne (sic)
et Florence, d'après Watelet ; in-4.
24. Louis XV, frontispice allégorique d'après Boucher ; in-4.
25. Louis dauphin, fils de Louis XV, et LouiS fils du dauphin ,
depuis Louis XVI; 2 petits portraits pour l'oraison funèbre du
Dauphin.
26. Marcorelle (J. F. de) , baron d'Escale . de l'Académie des Sciences
de Toulouse: in-4 , d'après Bourgoin.
27. Rolland (B. G.), président au Parlement; in-4, d'après Suvée ,
n88.
28. Tonelli (Mademoiselle), cantatrice; in-8. Rare.
29. Watelet, portrait orné d'après Cochin ; in-4.
30. Antoine, architecte. — Bocciardi , sculpteur. — Lemit , architecte.
— Percenet, architecte ; 4 p. in-4 d'après Trinquesse.
VIGNETTES.
31. Illustrations pour Boccace, Corneille, Racine, la Nouvelle Héloïse,
d'après Gravelot ; — pour Puffendorf, 1753-59 ; — le Quinte-
Curce et le Tacite de Barbou, d'après Eisen ; — pour les Fables
de La Fontaine {Belphégor, 2*" et 3^ planches, etc. , etc.) ; — pour
la Pariseïde de Godart d'Aucourt ; — pour Racine , d'après de
Sève ; — pour l'Amitié, de M'"'^' d'Arconville. — Louis XV visi-
tant l'Ecole militaire . médaille d'après Eisen , ornements par
Choffard.
32. Extrait de différents ouvrages publiés sur la vie des peintres ,
par Papillon de la Ferté , n~6 , 2 ft-ontispices d'après Moreau ,
in-8.
Lempereur a signé deux têtes de pages , d'après Moreau , pour la description
du mausolée de Louis XV, qu'on trouve aussi en premier état avec la signatui'e
de N. de Launay.
LÉPIGIÉ (Bernard).
1698-1765.
Bernard Lépicié, le graveur de Chardin , naquit à
Paris le 8 octobre 1698 et pour premier maître eut le
graveur Jean Mariette, dont le fils ne lui consacre pas
une ligne dans non Abecedario. A l'âge de quinze ans,
il entra dans l'atelier de Gaspard Ducliange, et tout en
apprenant la gravure , il put par son intelligence et sa
facilité réparer les lacunes d'une éducation négligée.
Il lut surtout les poètes , composa lui-même des odes,
et l'on retrouve les traces de son goût pour la poésie
dans les petits vers placés au bas de ses estampes.
Ses premières amours ne furent pas heureuses , pa-
raît-il : « Son âme sensible et tendre, nous dit Gaucher,
» étoit faite pour ressentir vivement les irapre.'^sions
» de cette passion violente qui fait le tourment et les
» délices de la vie ; mais après avoir, comme Anacréon,
» chanté l'objet de son amour, il se vit contraint ,
» comme Tibulle, de soupirer des regrets.* »
Lépicié « brisa sa lyre », mais afin de ne pas être
témoin du triomphe de son rival , plus heureux parce
qu'il était plus riche , il passa en Angleterre où il fut
1 Dictionnaire des Artistes de l'abbé de Fontenav.
LEPICIÉ. G67
employé à graver avec Dubosc et Beauvais les Car-
tons (THampton- Court de Raphaël. Consumé de
langueur et de chagrin , il quitta bientôt l'Angleterre
et arriva chez son frère, directeur des monnaies à
Amiens. Ne pouvant s'y fixer, il acquit une charge
à Rennes et ne la garda qu'un an. De retour à Paris,
il fit enfin ce qu'il aurait dû faire dès le principe , il
se consola dans le commerce des arts de ses déboires
amoureux et chercha un nouvel objet pour qui brûler,
ce qu'il trouva bientôt. Il fit la connaissance d'une jeune
personne de seize ans , Renée-Élisabeth Marlié , qui
annonçait beaucoup de goût pour les arts , et l'épousa
en 1729. Nous dirons plus loin ce qu'elle a gravé.
Lépicié a été employé par (^rozat , dans la gravure
de son Recueil : Jupiter et Junon ; Jupiter et la ,
de Jules Romain , d'après des cartons appartenant au
duc d'Orléans: Prédication de Saint Jean -Baptiste
d'après Gauli ; la Circoncision . d'après Jules Ro-
main.— VeHumne et Pomone , d'après Rembrandt.
— Une pièce pour la Gale?'ie de Versailles , d'après
Le Brun : Prééminence de la France reconnue par
r Espagne. — Les Francs-Maçons fiaw^ands en loge,
d'après D.Téniers (1747), du cabinet de M. Bellanger.
Lépicié a surtout gravé d'après ses contemporains.
— D'après Rosalba Garriera , le Printemps , in-8
carré , le pastel au comte de Morville ; Flore. —
D'après Nattier, Vénus châtiant PAm^our, avec cette
épigraphe : nul amour sans peine, nul (sic) rose sans
épine : B. L Epicier sculp. — D'après Pater, deux
pièces pour son Rotnan co?nique. in-fol. en largeur :
Piramide d'ailes et de cuisses de poulets élevée sur
V assiette du Destin par M" Bouvillon , 1733, chez
658 LES GRAVEURS DU XYIII^ SIÈCLE.
Surugue , et Ragotin trouve des Bohémiens dans la
maison de campagne, 1735. — D'après Grimoux,
VEspagnolète et le Flùteur {il ■iO). — Plusieurs pièces,
le Jeu des échecs, d'après C. de Moor (1746), le Jeu
de piquet, d'après Netscher(1746), l'Accouchée (1744),
la Relevée (1744), la Jeunesse et la Vieillesse , d'après
É tienne Jeaurat (1749) sont ainsi indiquées ; à Paris
chez Lépicié et chez L. Surugue. M™" Lépicié n'y
aurait-elle pas travaillé?
Notre graveur a très agréablement aussi interprété
Charles Goypel. L'A^nour de village ou l'Am^our
naïf et VA7nour de ville ou V Amour coquet, son
pendant (1732) , se vendaient à Paris chez l'auteur
rue St-Louis au coin de fabàreuvoir du quay des
orfèvres. L Amour précepteur est une de ces amu-
santes compositions où le peintre aime à faire figurer
des enfants. Lépicié qui a gravé cette pièce en 1730,
d'après un pastel appartenant à M. le comte de Mor-
ville, met dans la bouche d'un amour en costume de
précepteur ces vers :
L'air grave que je fais paroîfre
Belles, ne doit point allarmer
Il caractérise le maître
El ne le fait pas moins aimer.
Les Jeux d'enfants , grande estampe in-folio, sont
dans le même goût. Des enfants nus se costument et
se courtisent d'une manière comique. — La Veuve ,
in-4, du cabinet de M. Fagon.
Mais c'est surtout d'après Chardin que Bernard
Lépicié a gravé avec plus de succès. Il a interprété
avec goût et mesure les compositions d'intérieurs et
LEPICIE. 659
de famille, si simples , si bien observées et si atta-
chantes du peintre. La Gouvernante date de 1739;
la Maîtresse d'école de 1740 , le Château de cartes
Bile Tôfon,de 1742, la Ratisseuse (id.), la Mère
laborieuse de 1743, le Bénédicité de 1744 ainsi que le
Sou/leur, la Pourvoyeuse , V Aveugle , le tout agré-
menté de petits vers anodins de la façon du graveur.
Signalons enfin une estampe que Gaucher appelle
« un morceau capital », le Bâcha faisant peindre une
de ses femmes , d'après la peinture de Carie Van Loo.
L'expert Remy, dans le catalogue de la vente de Jul-
lienne (1767), disait à propos de ce tableau bien connu
par l'estampe gravée en 1748 par Lépicié : « Ce tableau
» est touché moëlleusement et les figures bien dessi-
» nées , mais ce qui donne une grande preuve de sa
» distinction c'est qu'il se trouve placé dans ce cabinet
» entre plusieurs morceaux du premier mérite et qu'il
» s'y soutient parfaitement. »
En devenant en 1737 secrétaire perpétuel de l'Aca-
démie de peinture à la mort de Dubois de St-Gelais
qu'il remplaçait, Lépicié abandonna presque complète-
ment la gravure pour se consacrer à ses nouvelles
fonctions, d'autant qu'il fut aussi nommé historiographe
de ladite Académie. Il avait été un graveur habile, il
maniait également la plume avec facilité et se mit
immédiatement à l'œuvre. Ayant formé le plan d'écrire
l'histoire de l'établissement de l'Académie et la vie des
peintres et des sculpteurs qui en avaient fait partie ,
il ne put mener à bien un plan aussi vaste et se
contenta d'écrire des notices séparées sur Le Brun ,
Le Sueur, Mignard , Sarazin. Lépicié était en même
temps l'éditeur, en sa qualité de secrétaire perpétuel ,
660 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
des Vies des premiers peintres du Roi (1752) , et fut
chargé par M. de Tournehem de rédiger le Catalogue
raisonné des tableaux du Roi, avec un abrégé de la
vie des peintres, ouvrage sorti de l'imprimerie royale
en 1752-1754 , fait avec soin et que la mort l'empêcha
de terminer.
Bernard Lépicié a gravé un certain nombre de por-
traits, dont plusieurs intéressants. D'abord pour entrer
à l'Académie où il fut reçu le 31 décembre 1740, il
dut graver le portrait de Louis de Boullongne, belle
planche exécutée dès 1736 d'après H. Rigaud . et celui
du peintre Nicolas Berlin , d'après De Lien.
Tout le monde connaît et apprécie l'excellent por-
trait de Molière d'après Coypel, placé en tête de la
belle édition de ses Œuvres, 1734.
Antoine de la Roque , ancien mihtaire blessé à la
guerre, auquel le roi avait donné, comme dédomma-
gement, la ferme du Mercure de France. C'était un
amateur des beaux-arts que Watteau , qui l'a peint , a
placé dans un paysage égayé par des naïades et des
faunes. Il est assis , son chien près de lui et sa canne
à portée. Au-dessous ces petits vers du graveur :
Victime du dieu Mars, les filles de mémoire
Occupent à présent son cœur et son esprit
Il a combattu pour la gloire
Et c'est pour elle qu'il écrit.
Un bon portrait encore de notre graveur est celui ,
d'après H. Rigaud, de Messire Philibe^-t Orry, con-
trôleur général des finances et directeur des bâtiments
du roi , grande et belle estampe exécutée avec goût
en 1737.
LEPICIE. 66i
Mentionnons les portraits de l'Abbé Capperonnier,
bibliothécaire; de l'actrice Charlotte Desmares dans le
rôle de Thalie, d'après Ch. Goypel (1736); de Catherine
de Seine, femme Dufresne , dans celui de Lucrèce ,
d'après Aved ; de Ch. de Rhodes de la Morlière,
d'après La Tour. — Pour la suite d'Odieuvre , ceux de
Watteau , de la Rosalba et de M"** de Maintenon. —
Boucon , amateur, d'après F. de Troy , gravé avec
Thomassin ; enfin le portrait de Messire Pierre Gras-
sin , conseiller, offert par son très humble serviteur
Lépicié l'aîné.
« M"" Grassin (d'après une note manuscrite] prétend
» ne l'avoir point fait graver ; que c'est le frère d'un
» de ses commis qui le grava en 1718, et qu'il n'en fut
» pas plutôt informé qu'il retira la planche et tous les
» portraits qui avoient paru et il se défit de son
» commis. »
Voilà un homme qui n'aimait pas la gravure , car le
portrait n'était pas déjà si mal !
Bernard Lépicié mourut d'une attaque d'apoplexie
le 17 janvier 1755, dans son logement au Louvre. Il
fut inhumé en présence de son fils , le peintre bien
connu.
« Egalement cher aux artistes et aux gens de lettres,
» a écrit Gaucher, Lépicié emporta les regrets de tous
» ceux qui l'avoient connu. Il avoit la physionomie
» ouverte et gracieuse, le caractère gai , affable ; sa
» société étoit douce et intéressante. Il s'exprimoit
» avec autant de facilité que de grâce. Ses vers ont de
» la noblesse , de l'expression, du sentiment : l'on
» retrouve dans ses estampes les mêmes qualités réu-
» nies : du caractère , de l'énergie, une touche large
n. 43
662 LES GRAVEURS DU XVIII'' SIECLE
» et moelleuse, dirigée par une profonde connoissance
» du dessin. »
Renée-Elisabeth Marliê Lépiciê, fille d'un maître-
écrivain, avait épousé le graveur Bernard Lépicié, qui
lui mit le burin à la main et s'en fit aider, dit Mariette,
dans plusieurs de ses ouvrages. Il ajoute que c'était
une femme sage et qui a fait le bonheur de son mari et
de ses enfants.
Elle a signé de son nom diverses estampes : la Vie
chmnpêire, d'après Bouclier (1741) ; l'Amour tnois-
sonneur et l'Amour oiseleur, du même artiste. Le
Déjeuné , jolie estampe, porte cette seule mention :
gravé à V eau-forte par Lépicié, mais Le Blanc la
lui attribue. Au-dessous ces vers signés également
Lépicié :
Caffé charmant ta liqueur agréable
De Bacchus calme les accès ;
Ton feu divin dissipe de la table
Et les dégoûts et les excès.
Le Contrat de ^nariage, d'après Gh. A.VanLoo ; la
Piéniontaise, d'après N. Halle ; les Eléments, 4 pièces
in-4, d'après E. Jeaurat; la Jeunesse sous les habille-
Tnents de la Décrépitude , d'après Ch. Coypel ; une
copie du Bénédicité de Chardin ; le Philosophe, le
Buveur et le Cuisinier flamand, d'après D. Téniers ;
les portraits de C. Mellan et de Fléchier, pour la suite
d'Odieuvre, etc..
Elisabeth MarUé Lépicié , née en 1714 , mourut à
Paris le 27 mars 1773 , dans le logement qu'occupait
son mari au Louvre et qui lui avait été laissé.
LEPICIE. 663
Le fils de Lépicié a dessiné dos planches pour la suite
de VHisioire de France qui a été continuée par
Moreau.
ESTAMPES.
I. d'après boucher.
1 . Cérès endormie ; in-fol.
2. Le Déjeuner; in-fol.
3. L'Amour oiseleur, — l'Amour moissonneur; 2 p. in-fol.
II. d'après CHARDIN.
4. LE BÉNÉDICITÉ. — Lépicié sculp., 1744; in-fol.
1^'' état : Avant la lettre.
Copies par R. Elisabeth Lépicié, par Petit et Simon.
5. LE CHATEAU DE CARTES; in-4 en largeur.
6. LA GOUVERNANTE, 1739; in-foL
Copié par Le Moine.
1. Petite fille jouant au volant , 1742; in-4.
8. LA MAITRESSE D'ÉCOLE, 1741; in-4 en largeur.
l"' état : Avant les contre-tailles sur le haut du bonnet.
9. LA MÈRE LABORIEUSE. — Lépicié sculpsit , 1740, in-fol.
l"'' état : La marguerite que l'on voit à terre près du dévidoir est complète-
ment blanche (E. Bocher, 35) .
Gravure plusieurs fois copiée .
10. LA POURVOYEUSE, 1742; in-fol.
Il faut l'avoir avec la légende : A votre air j'estime et je pense.. . , et l'adresse
de Lépicié. Cette ostampe a été plusieurs fois copiée. M. Emm. Bocher indiqua
sept copies.
U. LA RATISSE USE. —Lépicié sculpsit, 1742; in-fol.
Il faut l'avoir avec la signature et l'adresse de Lépicié. M. Bocher en signale
plusieurs copies.
664 LES GRAVEURS DU XVIIU SIÈCLE
12. Le Souffleur, gravé par Lépicié, l'744 ; in-fol.
13. Le Toton, n42; in-4.
III. d'après g. goypel.
14. L'Amour précepteur. V air grave que je fais paraître 1730.
15. L'Amour de village ou l'Amour naïf. — L'Amour de ville ou
l'Amour coquet; 2 p. in-fol. ovale.
16. Thalie chassée par la peinture, 1733. — Les Amours à la toilette.
l'7. Jeune femme se mirant. Entre deux mouvements . . .
18. Le Curé et Cardenio rencontrant Dorothée. [Don Quichotte.)
19. Le Dépit de l'absence. — La Veuve coquette; 2 p. gravées avec
Surugue.
20. Jeux d'enfants ; in-fol. en largeur.
IV. d'après grimou.
21. L'Espagnolette, — le Flùteur; 2 p. in-fol., 1740
V. d'après jeaurat.
22. L'Accouchée, — la Relevée; 2 p. in-fol., 1744.
23. La Jeunesse, — la Vieillesse; 2 p. in-fol., 1745.
VI. d'après nattier.
24. Nul amour sans peine, nulle rose sans épines.
25. Vénus éprise d'Adonis.
VII. d'après rosalba garriera.
26. Le Printemps; in-4 , avec ces vers de la facture du gravent
L'éclat des fleurs est peu durable,
La Beauté s'altère aisément;
Il n'est qu'un instant favorable,
Et cet instant c'est le présent.
LÉPICIÉ.
LEPICIE. 665
VIII. d'après c.-a. vanloo.
27. B\CH.\ FAISANT PEINDRE S.V MAITRESSE; ia-fol. en largeur.
Tombeau de Pierre Mignard, d'après Le Moyne flls. — Planches pour leflomon
Comique, d'après Pater. — Jupiter et Europe, d'après Vleughels. — Planches pour
les Cartons d'Hamptoncourl. — La Circoncision, Jupiter embrassant Junon, d'après
Jules Romain. — La Prédication de saint Jean-Baptiste , d'après G. Gauli. —
Yertumne et Pomone, d'après Rembrandt. — Le Jeu des échecs, d'après G. de Moor,
et le Jeu de piquet, d'après G. Netscher. — L'Agneau Pascal, Saturne amoureux
de Phylira, d'après le Parmesan .
PORTRAITS.
28. Bertin (Nicolas), peintre du Roi , d'après de Lien, 1746; in-fol.
Morceau de réception à l'Académie .
29. Boucon , amateur, d'après F. de Troy ; in-fol. Vétude fui toujours
Vohjet de mes désirs.
30. Boulongne (Louisde), premier peintre du Roi, d'après Rigaud ;
in-fol.
Morceau de réception à l'Académie.
31. CapperonNIER (Claude), abbé, d'après Aved , 1741; in-fol.
32. DESMARRS (Charlotte), actrice, en Thalie, d'après C. Coypel ,
1733; in-fol.
Touchante dans les pleurs, piquante dans les ris,
De l'une et l'autre scène également maîtresse,
Au théâtre tu réunis
Les dons partagés au Permesse.
33. Dufresne ( Catherine de Seine , épouse du S'' ) , dans le rôle de
Cléopâtre, d'après Aved , 1737 ; in-fol.
L'art ne vous prête point sa frivole imposture
Dufrêne, vos attraits, vos talents enchanteurs,
N'ont jamais dû qu'à la nature
Le don déplaire aux yeux et d'attendrir les cœurs.
34. Grassin (Pierre), directeur général des monnaies, d'après Lar-
ffillière.
666 LES GRAVEURS DU XVIII'' SIECLE.
35. La Roque ( Antoine de ) , vieux militaire, se reposant dans un
paysage orné de nymphes et de faunes, d'après Watteau ; in-foL
en largeur.
36. Maintenon (la Marquise de), d'après Mignard (Odieuvre).
37. MOLIÈRE, d'après Charles Coypel ; in-4 (édition de 1734).
38. ORRY (Philibert), comte de Vignory, ministre et conseiller d'Etat,
contrôleur général des finances, d'après Rigaud; in-fol.
39. Richer de Roddes de la Morlierre (Charles), d'après La Tour ; in-fol.
40. Rosalba Carriera , d'après elle-même; in-8. Chez Odieuvre.
41. Watteau , se ipsum pinx.; in-8. Chez Odieuvre.
LE PRINCE (Jean-Baptiste).
1734- 1781.
« Un original , qui tout jeune encore va carrément
» trouver le gouverneur de sa province , lui demande
» sa protection et l'obtient ; puis à peine adolescent
» épouse "une femme presque vieille, rompt peu de
» temps après avec elle, s'enfuit à l'étranger, est pris
» par des corsaires qu'il charme avec son violon ,
» explore la Russie d'un bout à l'autre , est présenté
» au Gzar et choyé à Saint-Pétersbourg, revient en
» France, est nommé académicien , séduit Diderot ,
» invente un procédé de gravure dont il tire des effets
» ravissants et qu'il ne trouve pas à vendre , gagne
» beaucoup d'argent , dépense sans compter , achète
» une maison de campagne dans laquelle il doit bientôt
» mourir, en léguant pour tout héritage à une jeune
^> nièce qui l'a soigné . une jolie collection de créan-
» ciers , » telle est , spirituellement résumée par
M. Jules Hédou , la vie du peintre des mœurs et des
types russes . de l'illustrateur des Saisons de Saint-
Lambert et du Voyage en Sibérie de Ghappe, de l'in-
venteur de la gravure au lavis.
Jean Le Prince , né à Metz en 1734 , prit les pre-
mières leçons de peinture dans sa ville natale , mais
668 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
bientôt il sentit un impérieux désir de venir à Paris
recevoir les conseils de maîtres renommés. Sa famille
était pauvre , et ne pouvait lui fournir l'argent du
voyage : le jeune homme trouva le moyen de plaire au
maréchal de Belle-Isle, alors gouverneur de Metz , de
l'accompagner dans un voyage à Paris , et de se faire
placer par lui dans l'ateher de Boucher.
Le Prince aimait la dépense, il avait de pressants
besoins d'argent, il épousa en -1752 , lui garçon de dix-
huit ans, Marie Guiton, qui en avait quarante, et com-
mença à dévorer consciencieusement la petite fortune
de sa femme. L'existence à deux devint bientôt impos-
sible. Le Prince abandonna sa femme , en lui rendant
ce qui restait de sa dot, et alla faire un voyage en Italie.
11 y dessina quelques vues qui ont été gravées à l'eau-
forte par Saint-Non, mais en somme l'Italie ne l'inspira
pas. Lorsqu'il revint à Paris, il se sentit bientôt en-
nuyé des difficultés qu'il éprouvait à percer. Prenant
alors une grande résolution qui devait avoir une
influence décisive sur sa carrière artistique, il partit
pour la Russie, probablement sur les incitations de
ses frères, musiciens, qui s'étaient fixés à Moscou.
Il passa par la Hollande , où il s'embarqua sur un
navire qui faisait voile pour la Russie. On dit que ce
navire fut pillé par des corsaires anglais, et que Le
Prince put seul , en jouant du violon , obtenir de con-
server son bagage intact. Quoiqu'il en soit de cette
anecdote. Le Prince arriva sans autre encombre à
Saint-Pétersbourg où il fut admirablement accueilli.
Il demeura cinq ans en Russie, vivant de ce que
rapportaient ses peintures , exécutant des travaux
pour le palais impérial , voyageant dans cet immense
LE PRINCE. 669
empire, amassant dans ses portefeuilles les croquis
de toute sorte, matériaux de ses futurs tableaux et de
ses gravures, se liant avec Ghappe d'Auteroche, à qui
il devait bientôt fournir les illustrations de son voyage
en Sibérie. 11 revint en France à la fin de 1763.
Nous n'avons pas ici à suivre Le Prince dans sa
carrière de peintre. Rappelons seulement qu'en 1765,
à trente-et-un ans, il fut reçu à l'Académie, sur la pré-
sentation du Baptême Russe. Ajoutons que nombre
d'estampes ont été gravées d'après les tableaux de Le
Prince, par Le Veau, Née, Le Mire, Godefroy, Lon-
gueil, N. de Launay, Gaillard, Pruneau, etc.
Ce qui nous concerne particulièrement . c'est Le
Prince considéré comme graveur; à ce titre il a
le mérite d'une double originalité : celle des sujets ,
puisqu'il s'appliqua surtout à graver les types et les
paysages « russiens ». ce qui donne à son œuvre un
parfum exotique qui attire forcément l'attention ; et
celle du procédé puisqu'il a imaginé un nouveau
mode de gravure, dont il s'est sorvi avec une remar-
quable habileté.
Dès son retour en France, Le Prince commençait
à mettre à profit les matériaux qu'il rapportait de
ses voyages , et il gravait à l'eau-forte de petites
suites d'ajustements russes, d'habillements des femmes
russes, des prêtres russes , des stréhtz : des cahiers
représentant les marchands de Saint-Pétersbourg et de
Moscou ; des paysages de Livonie, et de petites scènes
comme le Cabaret livonien , la Cuisine livonienne.
le Marchand de cowasse , le Rémouleur. Tout cela .
il faut bien le reconnaître , est touché d'une pointe
assez grêle, et l'effet nous en semble des plus minces.
670 LE8 GRAVEURS DU XVIIU' SIECLE
Le Prince devait faire mieux. En 1768 se produit
un événement capital dans son existence de graveur,
l'ingénieux artiste trouve du premier coup, semble-t-il,
et sans tâtonner, le procédé de la gravure au lavis ,
qui imite le dessin avec une vérité surprenante.
Voici en quoi consiste ce procédé :
D'abord, on grave le trait à Teau-forte, comme pour
une gravure ordinaire. Une fois le trait mordu , on
couvre de nouveau la planche de vernis, et c'est sur ce
vernis qu'on lave au pinceau , avec une encre grasse
composée de noir de fumée délayé dans un mélange
d'une partie d'huile d'olive et de trois parties d'essence
de térébenthine. Cette encre dissout le vernis, plus ou
moins, suivant que la teinte est plus ou moins vigou-
reuse, et le dispose ainsi à être pénétré plus ou moins
par l'eau-forte ; de là résulteront plus tard les diffé-
rentes teintes du lavis.
Le vernis ayant été attaqué comme il convient par
cette encre grasse , on essuie la planche, et on la dé-
graisse avec de la poudre à poudrer ; puis on passe
sur la planche un tampon imbibé d'une eau savon-
neuse et sucrée, qui doit retenir la résine dont on va
se servir.
A travers un tamis , on répand sur la planche de la
poudre de résine très fine. On fait chauffer . et la
planche se trouve ainsi recouverte d'un vernis très-
poreux qui donne facilement accès à l'eau-forte et la
laisse pénétrer en un nombre infini de grains qui re-
produisent l'aspect du lavis.
On fait enfin mordre à l'eau-forte.
Dès qu'il eut trouvé son procédé , Le Prince mit au
jour une quantité dejolies pièces ainsi gravées, et dont
LE PRINCE. 674
nous doiiiioiis plus loin la liste, ce sont encore pour la
plupart des vues de Russie, des scènes de mœurs, des
paysages, sa maîtresse pièce fut une grande pastorale
en largeur, portant comme légende le vers de Virgile
0 Fortunatos niTuimn ; une très jolie pièce est
encore le Jésus au milieu des docteurs .
Le Prince reproduisit à l'aqua- tinte un de ses
tableaux , le Repos , qui représente une jeune fille
endormie sur son lit et surprise par ses parents qui
semblent se demander ce qui s'est passé. L'intention
est assez leste, à n'en pas douter.
Le Roué vertueux , incompréhensible élucubration
de Goqueley de Chaussepierre, publiée en 1770, fut
illustré de six aqua-tintes par notre artiste. En 1774,
Le Prince donna ses derniers travaux au lavis, une
suite de cinq pièces sur les Sens.
En 1775, il fut nommé conseiller à l'Académie. Il
avait beaucoup travaillé , exposé nombre de tableaux,
gagné pas mal d'argent . et dépensé encore plus, car
il était fort libertin et dépensier. « Cet artiste à la
» fleur de l'âge , trop livré au plaisir et recueillant
» les fruits amers d'une vie licentieuse que favorise
» sa profession, est attaqué de vapeurs, de vertiges, et
» dans un état d'épuisement qui fait désespérer qu'il
» puisse jamais reprendre la palette », écrivait-on de
lui en 1779. Il avait acheté une maison de campagne
à Saint-Denis du Port ; il ne travaillait plus que diffi-
cilement, sa position devenait précaire, il voulut vendre
son procédé.
Dès 1769, l'artiste avait apporté à l'Académie , pour
les soumettre à l'appréciation de ses collègues . des
« dessins à l'encre de Chine et au bistre gravés par
672 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
» un procédé nouveau de son invention , différent de
» tous ceux qui ont été trouvés jusqu'à présent, et qui
» permet d'exécuter sur le cuivre avec presqu'autant
> de promptitude que le dessin même. » Tout en
approuvant ces essais , l'Académie ne crut pas alors
devoir acquérir le fameux secret. Ce n'est qu'après la
mort de l'artiste qu'elle se décida , surtout pour venir
en aide à sa nièce , iVP"® Le Prince. Voici la lettre
qu'écrivait à ce sujet , le 30 novembre 1781 , le comte
d'Angiviller à Pierre, directeur de l'Académie :« J'avais
» eu, M"", une idée tout-à-fait semblable à la vôtre
» relativement à M^"® Le Prince ; je veux dire que
» j'avais pensé que l'acquisition du secret de M'' Le
» Prince pour la gravure en forme de dessin lavé ,
» pouvoit présenter à la fois un moyen de venir au
» secours de la nièce de cet artiste et celui d'enrichir
» les arts de ce nouveau procédé. J'approuve donc
» très-fort la proposition que vous avés faite sur ce
» sujet à M^"® Le Prince , et je pense que l'Académie
» aujourd'hui assés riche tant par la dotation du Roi
» que par la concession des baraques à son profit , ne
» peut faire de partie de son revenu un meilleur usage
» que de l'emploier à l'acquisition du secret de feu
» M"" Le Prince , soit au moyen d'une pension de
» 1200 livres sur la tête de M""^ Le Prince, soit par
» le payement d'un capital et même en ajoutant à
» la pension une petite gratification en forme de pot-
» de-vin.... * »
C'est après la conclusion de cette affaire que la nièce
de l'artiste envoya à l'Académie un carton renfermant
1 Procès-verbaux inédits de l'Académie.
LE PRINCE. 673
le secret de son oncle écrit de la main même de
Le Prince.
M. Jules Hédou a publié sur Le Prince un ouvrage
fort intéressant * contenant une notice biographique
et un catalogue raisonné de ses gravures. On aime
aujourd'hui les renseignements précis et détaillés, et
l'on veut connaître les choses par le menu. Si l'on
tient à savoir ce qu'un artiste a gravé, l'on n'est point
fâché d'apprendre aussi combien U a payé sa maison
de campagne, de quels meubles il la garnissait, quels
livres il avait dans sa bibliothèque, on ne dédaigne
point d'apprendre que Le Prince avait six chemises,
dix mouchoirs , trente-sept serviettes et trois nappes,
cinq douzaines et demie de torchons et dix tabliers de
cuisine, une seringue en étain, et « dans un petit carré
» précédent les lieux utils » trois tables de nuit en
noyer et six pots de chambre de faïence. On se repor-
tera donc avec intérêt aux documents inédits dont
l'auteur a fait suivre son travail : la description dé-
taillée du procédé de la gravure au lavis, le prospectus
de la souscription tentée par Le Prince pour la vente
de son procédé, le procès-verbal de l'apposition des
scellés à Saint-Denis du Port, le testament de l'artiste,
l'inventaire, l'acte d'achat et l'acte de vente de la
propriété de Saint-Denis du Port et le catalogue
de la vente après décès, qui fut faite le 28 novembre
1781 et jours suivants , par les soins de l'expert
Le Brun.
1 Jean Le Prince et son œuvre, suivi de nombreux documents inédits,
portrait gravé à l'eau-forte par Gilbert. Paris, Baur et Rapilly, 18^9,
1 vol. in-8.
674 LES GRAVEURS DU XVIII' SIÈCLE
EAUX-FORTES.
1 . Divers ajustements et usages de Russie, dédiés à Monsieur Boucher
peintre du Roy, par son élève Le Prince, 1764; 10 p. in-4.
Titre. — La Diseuse de bonne aventure. — La Bonne Sœur. — Femmes de
Valday. — Femmes du peuple revenant du marché. — Femme de la province
d'Ingrie, de face. — La même, de profil. — Manière dont les femmes portent
différents fardeaux. — La Promenade en hiver. — La Complaisance.
2. Divers habillements des femmes de Moscovie , dédiés à M. de La-
grenée, 1764; 6 p. iu-12.
Femme du peuple, titre. — Habillement des vieilles. — Paysanne. — Servante
en habit d'hiver. — Marchande d'Agourtzi . — La Conversation .
3. Deuxième suite d'habillements des femmes de Moscovie, 1768; 6 p.
in- 18.
Femme voliac, titre. — Paysanne moscovite. — Femme moscovite. — Fille de
Finlande. — La Marchande de champignons.— Ajustement des vieilles femmes
moscovites.
4. Divers habillements de prêtres de Russie, les mêmes qui étaient en
usage avant la désunion des deux Églises , dédiés au comte de
Caylus; 10 p. in-8.
5. Les Strélitz, ancienne milice détruite par Pierre-le-Grnnd ; 8 p. in-4.
6. Première suite de cris et divers marchands de Pétersbourg et de
Moscou, dessinés d'après nature, dédiés à Chardin, 176.5 ; 6 p. in-4.
Le Marchand de gâteaux , titre . — Marchand de poulets . — Marchand d'oeufs
et de beurre. — Marchand de limonade. — Marchande de pain . — La Petite
Marchande d'œufs d'Œtha.
1. 2'"^ Suitte de divers cris de marchands de Russie, n65 ; G p. in-4
en largeur.
Titre. — Finlandaise apportant des provisions au marché. — Marchand de
poisson gelé. — Marchand de poisson vivant. — Retour du marché. — La Lai-
tière d'Œtha .
8. IIP Suitte de divers cris de marchands de Russie, 1768 ; 6 p. in-12.
Le Marchand de beurre finlandais, titre. — Boucher. — Marchand de branches
d'arbres . — Cocher de traîneau public . — Marchand de poisson vivant . — Mar-
chand de volaille et de gibier.
LE PRINCE (375
9 . Habillements de diverses nations, dédiés à M. Pajou , sculpteur du
Roi , n65 ; 6 p. in-32.
Xitre. — Juif polonais. — Femme juive polonaise. — Officier tartaie. — Officier
turc. — Ahbé russe.
10. Suite de divers habillements des peuples du Nord, 1765; 6 p. in-4.
Femme du peuple, titre avec dédicace à Cochin. — La Jeune Bergère. — Coif-
fure des filles et des femmes en été. — Retour de la promenade. — Femme
mariée et ses enfants. — Femmes du peuple.
11. Diverses vues de Livonie, dédiées à Veraet, 1765; 6 p. in-18 eu
largeur.
12. Paysages des environs de Pétersbourg, 1764 ; 2 p. in-4 en largeur.
13. Le Cabaret livonien , — la Cuisine livonienne ; 2 p. in-8 en largeur.
14. Le Marchand de cowasse, espèce de tisane aigre (ju'on vend com-
munémeiiL au coin des rues. — Le Rémouleur; 2 p. in-8 en
largeur.
15. La Basse-Cour, — le Colombier; 2 p. in-8.
16. La Pêcherie; in-4 en largeur (Hédou , 91).
n. Le Printemps, — l'Hiver. nST ; 2 p. in-4.
18. La Conversation russe, 1768 ; in-8.
19. La Demande, — le Refus (H. 83-93). — La Marchande de fruits
(H. 87). — L'OfBcier et les trois soldats (H. 88). — L'OfScier
tartare saluant, 1768 (H. 89;.
Pièces très vares, décrites par M. Hédou d'après les épreuves de sa collection
20. Pastorale en frise (H. 90).
21 Jésus au milieu des Docteurs, 1760; in-4.
GRAVURES AU LAVIS.
•22. IV suitte d'habillemens de diverses nations, 1768; 6 p. in-32.
Femmes sctiouvaches, titre. — Femme schouvache. — Femme des environs
de Moscou. — Femme schou vache, vue de dos. — Femme d'.\rkhangel. —
Géorgien .
676 LES GRAVEURS DU XVIII' SIÈCLE.
23. F* suitte de coeffures dessinées d'après nature, 1768; 6 p. in-18.
24. La Vertu au cabaret , — le Chartier et la Laitière ; 2 p. in-4, eau-
forte reprise au lavis , 1768.
25. Le Joueur de balalaye, — le Joueur de chalumeau, 1769 ; 2 p. in-8.
26. Le Berceau , 1769 ; in-8 en largeur.
27. Le Marchand de gâteaux , — Halte de Kalmoucks, 177-2 : 2 p. in-4
sur fonds de paysages.
28. La Musicienne, — la Jardinière, 1768; 2 p. in-4 sur
fonds de paysages.
29. Le Poêle, — la Lampe polonaise, 1770; 2 p. in-4 en
largeur.
30. La Nourrice, — les Nouvellistes, — le Pont russe, — la Baraque
russe, sujets in-4 en largeur; 1768.
31. Les Œufs cassés, — le Berceau, pièces in-4 en largeur; 1769.
32. Les Barques, — la Cuisine d'été; in-4 en largeur, 1769.
3'd. La Ferme, — la Pompe; grand in-4 en largeur, 1771.
34. La Cascade, — les Filets; grand in-4 en largeur, 1771.
35. Le Chariot, — le Port; petites pièces in-8 en largeur, 1769.
36. Vue des environs de Nerva. — Le Cabaret de Moscou ; 2 p. in-4
en largeur, 1773.
37. Les Bateaux russes, — le Coche d'eau- 2 p. en largeur, 1773.
38. Calmouck; in-4, 1771.
39. Officier des janissaires polonais, — Janissaire polonais ; 2 p. in-4,
1770.
40. Le Pope ; in-8, 1768.
41. Le Paysan, — la Ménagère; 2 p. in-8, 1768.
42. La Servante, — le Page; 2 p. in-S, 1769.
LE PRINCE. 677
43. Les Laveuses, — les Pêcheors, paysages; in-fol. mi.
44. La Danse russe, — la Récréation champêtre, sujets
in-fol. n69.
45. Le Repos; in-fol. Chez l'auteur, cour du Vieux-Louvre, mi.
46. Vue perspective d'un reposoir exécuté à Versailles par Le Roy, sous
les ordres de M. de Fontanier; grand in-4 en largeur (Gaiinet
des Estampes).
4-7. 0 FORTUNATOS NIMIUM, pastorale, où l'on voit un satyre
endormi; in-fol. en largeur.
48. F^ Pastorale, — IF Pastorale; 2 p. in-fol. en largeur, 1769.
49. Le Cabaret ambulant , 1T71.
50. Le Bœuf, IT71.
51. L'Art de plaire, — la Gazette, sujets russes; in-12, mi.
52. Les Voyageurs, — les Soldats, 2 petites pièces en hauteur.
53. Le Magicien ; in-8, 1768.
54. La Maîtresse d'école, d'après Boucher ; in-4.
55. Jésus au milieu des docteurs, jolie composition in-4 en
largeur, 1768.
56. L'Adoration des Anges, d'après Vien ; in-4.
57. Le Roué vertueux, poëme en prose, en quatre chants, propre
à faire, en cas de besoin, un drame à jouer deux fois par semaine.
Lausanne, 1770, in-8.
Cet ouvrage de Coqueley de Chaussepierre, bizarre jusqu'au point d'être
incompréhensible , est illustré de six pièces : un fleuron de titre , les Génies, un
frontispice, la Nouvelle Poésie, et quatre figures,' les Pleureuses, les Tragiques,
le Guet , la Catastrophe.
58. Les Sens, jolie suite de cinq pièces in-8, 1774.
44
LE ROY (J.).
4739-18...
Cet artiste peu connu , né en 1739 , a joué un
rôle d'une certaine importance dans la gravure des
vignettes, comme le prouvera le catalogue qui va
suivre. On remarquera qu'il a gravé à lui seul trois
illustrations importantes : les fleurons de la Secchia
rapiia de 1766 et de la Jérusalem délivrée de 1771 ,
et les étranges figures du Paysan perverti.
1. Adresse de l'opticien Letellier. Cadre carré enguir-
landé , dans le bas des Amours jouent avec des instruments de
physique ; in-8.
AU
MICROSCOPE
Quay des Augustins vis-à-vis le Pont-Neuf
A PABIS
LETELLIER
Ingénieur en Optique et I\ld Miroitier :
Fait Télescopes, Microscopes, Lunettes de longue vue,
Lunettes à Nez, de Jalousies et d'Opéra: Miroirs ardens,
Lanternes Magiques, Cilyndres, Cônes, Chambres obscui
Cristeaux de Montre et tous Ouvrages d'Optique.
J? Le Roy fecit rSI
LE ROY. 679
2. Adresse de l'horloger WaltRIN. Cadre oblong en lar-
geur, avec guirlandes. Dans le haut, un sablier, la faux et les
ailes du Temps ; à gauche une armille, ù droite une pendule ;
in-18.
Waltrin Fils
horloger du Roi
Rue S' Antoine
Près celle de Geoffroy-l'Asnier,
A Paris
J* Le Roy feclt.
3. Suite complète des fleurons de Gravelot pour LA GERUSALEMME
LIBERATA , Paris, Delalain , mi , 2 vol. grand in-8.
Cette suite comprend : 2 fleurons sur les titres , 1 en-tête pour la dédicace ,
20 en-tête avec portraits , 9 grands culs-de-lampe et \\ petits.
On en a mis en vente des collections tirées à part , mais ce ne sont que de
bonnes premières épreuves et non des épreuves d'artiste .
4 . Suite complète des fleurons de Gravelot , Huet , Marillier et Qué-
verdo pour LA SECCHIA RAPITA, Paris, Prault , 1766,
2 vol. grand in-8.
Cette très belle suite comprend : 2 fleurons de titre, une allégorie-frontispice,
un portrait-médaillon de Tassoni par Gravelot, 12 en-têtes et H culs-de-Iampe.
Existe en tirage hors texte.
5. Vignette allégorique, d'après Gravelot, sur l'Incendie de l'Opéra ;
in-8.
« L'Administration de la police, sous la figure de la Prudence, console la Ville
» de Paris, en lui montrant les secours qu'elle fait préparer. » Ces secours sont
symbolisés par un tonneau et une pompe ; ce qui, comme chacun sait, n'a point
empêché l'Opéra de brûler depuis I
6 . Titre pour les Quatre heures de la toilette des Dames , d'après
Leclerc ; in-4. — Titre pour Feuilles de Terpsichore, ou Journal
composé d'ouvertures , d'airs arrangés et d'airs avec accom-
pagnement de clavecin. Il parait une feuille de ce journal tous
les lundis . . . chez Cousineau ; petit in-fol.
T . Frontispice d'après Le Clerc pour Galerie des modes et costumes
français, dessinés d'après nature et coloriés avec le plus grand
soin par M^i^ Lebeau. — Esnauts et Rapill}', commencée en 1773,
3 vol. in-fol. , 324 planches.
G80 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
8. Cartouches pour titres de cartes de géographie.
9. LE PAYSAN PERVERTI , ou les Dangers de la ville, par Restif
de la Bretonne. La Haie et Paris, ITTô, 8 parties en 4 vol.
8 frontispices et 76 figures par Binet. Les frontispices sont gravés par Berthet,
et toutes les figures par Le Roy.
10. LA PAYSANNE PERVERTIE, ou VHistoire effrayante et
morale d'Ursule^ par Restif de la Bretonne. La Haie et Paris,
1784 , 4 vol.
8 frontispices et 28 figures par Binet , gravés par Berthet , Giraud le jeune et
Le Roy.
11. Planches pour Recueil d'ornements à r usage des jeunes artistes,
d'après Cauvet , 1111 ; in-fol.
12. Vignettes pour les Nouvelles espagnoles de Cervantes , d'après
Desrais ; — la Secchia rapita , Ovide , la Jérusalem délivrée ,
VIconologie , d'après Gravelot ; — VHeptaméron , d'après Freu-
deberg ; — le Cabinet des Fées, les Fables de Dorât, d'après
Marinier ; — les Mémoires du baron de Trenck, les Romans de
La Place, Regnard, d'après Borel ; — VAlmanach du père Gérard
pour 1792, d'après Charpentier ; — VElève de la nature, d'après
Watteau de Lille ; — les Nouvelles de d'Ussieux , le Rousseau
de Poinsot , le Voyage à Naples de Saint-Non. — Vue du jardin
de Monceaux , d'après Garmontelle.
13. Pièces révolutionnaires : Déclaration des droits de Vhomme, Leroy
perfecit; in-fol. — Les dix Commandements de la République,
d'après Desrais. — Droits de l'Homme, avec portraits de Marat
et Lepelletier. — Marie-Antoinette à la Conciergerie , Marie-
Antoinette séparée de sa fille et de sa belle-sœur, 2 petites pièces
au trait (Renouvier). — Médaille allégorique sur Napoléon ,
d'après Palloy.
14. Joseph Rullier, âgé de 105 ans. — Portraits de Voltaire pour la
collection Esnauts, — de Washington en pied , in-4 , — de Beaur
marchais, d'après Cochin , in-8 , 1802.
Plus tard , sous l'Empire, Le Roy termine sa carrière en gravant des alphabets
pour les enfants et des étiquettes pour la parfumerie de Dussey et Piver, A la
Beine des Fleurs, 111 et 113, rue St-Martin: Colonafina, Eau de rose, Pastilles
odorantes, Eau du sérail, etc.
LE SUEUR (Nicolas).
1690-1764.
Toute la famille Le Sueur, grand-père, père, frères,
sœurs, gravait sur bois et en clair-obscur ; Nicolas Le
Sueur est celui de tous qui s'est le plus distingué par
ses curieuses reproductions en fac-similé de dessins
de maîtres dans le Recueil de Grozat. Ce grand ama-
teur d'art , aidé de ses amis Mariette et Caylus, avait
entrepris l'ouvrage connu sous son nom mais que son
titre expliquera mieux : Recueil d'estampes d'après
les plus beaux tableaux et d'après les plus beaux
desseins qui sont en France dans le cabinet du Roy,
dans celui du duc d'Orléans et dans d'autres cabi-
nets. Paris , Imprimerie Royale , 1729-1742. — 2 vol.
grand in-fol.
Non content de faire graver des tableaux , Crozat
avait voulu faire reproduire également les plus beaux
dessins, dont lui-même possédait une collection ma-
gnifique, sachant bien que rien n'est plus propre à
faire connaître le caractère et le génie des artistes :
« On l'a fait avec la plus scrupuleuse exactitude ,
» écrit-il dans sa préface, sans y rien omettre et
» sans y rien changer. Ainsi les desseins à la plume
» et au crayon ont été gravez à l'eau-forte dans
682 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
» l'esprit des originaux dont l'on a suivi les moindres
» traits, persuadé qu'il valoit mieux les faire paroistre
» avec certaines négligences qui échappent aux pein-
» très les plus habiles... C'est en suivant ces mêmes
» idées que lorsqu'il s'est présenté des desseins lavez
» avec des couleurs légères (ce que les Italiens expri-
» ment par le mot à'aquarella] , et rehaussez de blanc
» sur les jours, on a pour lors abandonné la graveure
-> ordinaire pour avoir recours à une autre pratique
» plus propre à représenter tout l'effet de ces
» desseins. »
Grozat exphque ensuite comment Nicolas Le Sueur
a repris l'ingénieuse invention de Hugo da Carpi, per-
fectionnée par le Parmesan, sorte de gravure à l'aqua-
tinte résultant de la combinaison de planches de cuivre
gravées à l'eau-forte pour imiter le trait de plume et
de planches de bois gravées en relief pour obtenir
d'autres effets.
Il faut convenir que les résultats obtenus sont sur-
prenants, grâce à la collaboration du comte de Caylus,
habile entre tous à saisir la manière et le goût des
artistes et à imiter leurs dessins, unie à celle de l'adroit
Le Sueur.
L'Invention de la Croix , d'après le Pérugin, VEn-
Uvement d'Europe et la Chute de Phaëton de
Farinati , sont de Nicolas Le Sueur seul , mais il a
gravé avec Cajdus les dessins tirés au bistre ou en
camaïeu verdâtre cV Alexandre etRoxane, de Raphaël,
des Pêcheurs retirant leurs filets , de Jules Romain ,
le Sacrifice de la messe , de Polydore de Caravage ,
le Passage de la mer Rouge , du Fattore , Jésus au
milieu des apôtres, de Raphaël del Colle, l'Homme et
LE SUEUR. (383
le Lion, de Peruzzi, V Empereur Henri IV aux pieds
du Pape Grégoire VIT, de Zuccaro, le Martyr de
SI- Ange, de Pietro Testa, la Mort de Saint François
Xavier, de Gimiani , la Pentecôte , de Lenardi , V An-
nonciation , de Morandi , la Vierge appat^aissant à
Saint Philippe de Néri, de Garzi.
Dans d'autres fac-similé de dessins , l'Hercule gau-
lois, Jésus donnant les clefs à Saint Pien^e , Etudes
pour l'École d'Athènes, de Raphaël, le trait est tantôt
de G. N. Gochin ou de P. A. Robert, et c'est Nicolas
Le Sueur, quelquefois Vincent Le Sueur qui fait le
travail sur bois.
Bien que ces reproductions n'aient pas la valeur
d'une estampe au burin , elles méritent toujours
l'attention. Elles rendent d'une manière aussi rappro-
chée que possible les dessins des maîtres destinés à
disparaître et mettent en lumière le talent curieux de
Nicolas Le Sueur.
Celui-ci a laissé beaucoup de ses gravures sur bois
et ornements dans les livres de son temps et plus par-
ticulièrement dans la grande édition des Fables de La
Fontaine, avec figures d'Oudry, où il a gravé les
grands bouquets formant culs-de-lampe dessinés par
le peintre de fleurs Bachelier.
Nicolas-Biaise Le Sueur, né comme le précédent à
Paris, passe pour être son frère. Peintre d'histoire, de
paysage et dessinateur, il fut , en 1750, directeur de
l'Académie de peinture à Berlin.
LE TELLIER (Charles-François;
1743-1800.
On a de ce graveur, qui demeurait rue des Vieilles-
Étuves St-Honorè , maison (Tun houtonnier :
Le Studieux , la Fainéante , d'après Dumesnil le
jeune. — La Fille grondée , et des cahiers de Têtes ,
d'après Greuze.
Nymphe au hain, Nym,phe sortant du bain, d'après
Bounieu. — L'Amour en gaieté, le Sommeil agréable,
d'après J.-B, Regnault. — La Glorieuse , d'après F.
Imbert.
Allégorie au sujet de l'élévation de M. d'Ormesson
à la dignité de premier Président , d'après Brion de
la Tour. — Le Tombeau de Voltaire foudroyé, d'après
Desrais.
Planches pour le Cabinet Le Brun , la Description
de l'Egypte, la Galerie du Palais-Royal.
Vignettes pour Gessner d'après Monnet, et pour
Faublas (dans les figures doubles].
Portraits de ^. /. B. d'Origny; du célèbre rebelle
Pougatcheff, d'après Le Mailly, in-4; joli portrait
à' Anne Vallayer Coster, de l'Académie royale de
peinture, dessiné pareUe-même, in-4. — La Chevalière
d'Eon, en capitaine de dragons, profil d'après Baader.
Les le VACHEZ.
17. .-18..
Le Vachez père et fils , qui avaient boutique à Paris
sous les colonnades du Palais-Royal n° 258, et à Ver-
sailles rue des Chantiers n" 14, exploitaient la gravure
au lavis , en couleur et au pointillé de couleur ,
d'une manière assez subalterne, plutôt en marchands
d'images qu'en artistes. Travaillant à l'époque de la
Révolution, il se bornent à produire des pièces de cir-
constance : les Atnbassadeurs du nabab Tipon reçus
au cwque par M"^^ la duchesse d'Orléans , le 13
septembre 1788, Le Vachez fils, in-fol.; Serment du
Jeu de Paume, in-4 ; etc.
Ils s'appliquèrent surtout aux portraits : leur ouvrage
le plus considérable est la Collection générale des por-
traits de MM. les Députés à l'assemblée nationale
tenue à Versailles le 4 mai 1789. Il est inutile de
dire qu'on ne recherche plus aujourd'hui , dans cette
vaste collection , gravée par Le Vachez , Sergent, Alix
et autres , que les portraits des quelques Constituants
qui se sont rendus célèbres.
Les pièces suivantes offrent de l'intérêt :
1 . Portraits gravés pour les Tableaux de la Révolution française, au-
i;86 LES GRAVEURS DU XYIIF SIÈCLE.
dessus des scènes gravées par Duplessi-Bertaux ; 66 médaillons
ronds, au lavis.
Il faut les avoir de premier tirage, avant qu'ils aient été retouchés. Le portrait
de Marie-Antoinette, en premier état, est d'après le tableau de M^^ Vigée-
Lebrun ; U a été modifié ensuite.
2. LOUIS XVI, — MARIE-ANTOINETTE; 2p. in-12.
Portraits rares et estimés. — Rien de plus difficile que de trouver une bonne
épreuve de la Marie- Antoinette. — Les deux , vendus 500 fr. en 1880.
3. Louis XVI, Marie-Antoinette et le Dauphin , dans un médaillon.
— Pointaut sculp. — Chez Le Vachez.
4. Louis XVI et M.\RIE-AnT0INETTE, au milieu d'un calendrier
rond en forme de cocarde aux trois couleurs.
5. Louis XVI , Henri IV et Louis XII , médaillon de tabatières (sic) ;
pièce en couleur.
6. Louis XVI et La Fayette, pièce ronde en couleur.
I. Médaillon contenant les portraits de Cazalès, Maury, Malouet. Chez
Blin. — Autre contenant Barnave, Alexandre et Charles Lameth.
Chez Levachez.
8. Luckner, ovale in-8.
9. JÉRÔME PÉTION, député de Chartres. Dédié et présenté par
Le Vachez père et fils à la Société des Jacobins ; in-4.
10. Marat; in-8.
II. Bonaparte, Premier Consul, — le Général MOREAU, —
M ASSÉNA , général en chef, surnommé l'Enfant gâté de la
Victoire, — CHARLES- LouiS , Archiduc; 4 p. in-12. A Mon-
ceaux , près Paris, chez Levachez père.
12. Bonaparte, premier Consul ; in-fol., d'après Boilly, avec une
vue de la Revue du Quintidi, d'après Duplessi-Bertaux.
13. CambacÉRÈS, second Consul, d'après Boilly, avec la Pre'seM^a-
tionpar le Sénat de l'acte constitutif du Consulat à vie, d'après
Duplessi-Bertaux .
14. Napoléon, empereur, à cheval, suivi de son état-major ; pièce
en couleur fort curieuse, vu sa dimension très grand in-fol.
LE VASSEUR (Jean-Charles).
1734-1816.
Le graveur de la Laitière de Greiize, du Testament
déchiré, de la Belle-Mère, de la Veuve et son curé,
Jean-Charles Le Vasseur, est né à Abbeviile , le 21
octobre 1734. Il reçut les premières leçons de dessin
et de gravure dans sa ville natale , nous apprend
M. Delignières , chez un sieur Philippe -Augustin
Lefebvre , qui fut aussi le premier maître de Danzel
et de Dequevauviller.
A dix-neuf ans il vint à Paris se perfectionner dans
l'atelier de son compatriote Beauvarlet , qu'il quitta
bientôt pour celui de son autre compatriote DauUé.
Probablement ne se sentait-il pas de goût pour la
manière recherchée et précieuse du premier, et préfé-
rait-il les procédés plus larges de Daullé. Il dut d'abord
aider Daullé dans les nombreuses estampes que ce
maître expédiait si hâtivement dans les derniers temps
de sa vie. Les premières planches que Le Vasseur
signa furent , en eflet , comprises dans le volume de
l'œuvre de Daullé publié par sa veuve.
Mais bientôt Le Vasseur comprend que cette gravure
par à peu près ne saurait mener bien loin ; il corse sa
manière , serre ses travaux , et commence une nom-
688 LES GRAVEURS DU XVIII'' SIECLE.
breuse série d'estampes dont beaucoup lui font hon-
neur. Il interprète Boucher dans la Mort d'Adonis ,
VanLoo dans Mars et Vénus , Lépicié dans Narcisse
et dans la grande estampe du Quos ego , de Troy dans
l'Enlèvement de Proserpine et dans Diane etActéon,
compositions mythologiques qu'D semble affectionner,
parce qu'elles lui permettent de montrer ses aptitudes
à modeler le nu ; il fait preuve d'un talent remarquable
en traduisant les grandes scènes dramatiques de
Greuze; il aborde avec succès les sujets de genre
dans l'Age agréable et le Larcin toléré , d'après Lam-
bert, dans la Jardinière au repos et le Vigneron
galant, d'après Peters , dans V Atnour paternel et les
Amants curieux, d'après Aubry, dans l'Occasion
favorable, d'après Lagrenée , et dans deux composi-
tions de Jeaurat, le Carnaval des rues de Paris et le
Transport des filles de joye à l'hôpital, deux pages
de l'histoire de l'ancien Paris.
Il descend même jusqu'à la vignette et grave quel-
ques bonnes illustrations d'après Gravelot , mais c'est
un travail de ses premières années et dans la suite il
n'y persévère pas, il est trop occupé à des travaux plus
considérables. Il essaie aussi le portrait et nous laisse
ceux ào, Louis XVI Qi% àQ Ma^He- Antoinette, et le sien,
/. Ch. Le Vasseur, graveur du roi, d'après Greuze :
le peintre avait voulu, en retraçant ce portrait, donner
une preuve d'affection et de reconnaissance au gra-
veur habile qui reproduisait ses tableaux , et aussi à
l'ami dévoué qui plus d'une fois , dit-on, intervint pour
calmer les orages de ce ménage si profondément
troublé.
Le Vasseur épousa en 1769 Angélique de l'Isle, dont
LE VASSEUR 689
il eut deux enfants. En 1771 , il fut reçu à l'Académie
sur la présentation de l'estampe de Diane et Endymion
d'après J.-B. Van Loo.
Pendant la Révolution , Le Vasseur ne cessa pas de
travailler, mais il ne fit pas tirer ses planches, il atten-
dait des temps plus calmes. Il conserva jusqu'au der-
nier moment , dit son biographe, toute la verdeur de
l'âge mûr , et s'éteignit sans secousse le 29 novembre
1816.
« Dans son intérieur, Le Vasseur était bon père et
» bon ami, sans prétention, d'une tranquilUté et d'une
» égalité d'humeur incomparables , d'une simplicité
» touchante dans ses manières, franc par principe
» autant que par inclination... Le Vasseur n'ambi-
» tionna jamais d'autre place que celle qu'il occupait
» à l'Académie dont il était le doyen. Etranger à
» toute espèce d'intrigues , il rendit toujours justice
» au mérite de ses confrères , parmi lesquels il
» compta beaucoup d'amis. Son caractère doux et
» liant lui faisait porter, dans le commerce de la
» Société, une aisance et un abandon qui lui conci-
» lioient tous les cœurs. Indulgent, charitable et bon ,
» il exposa plusieurs fois son repos et sa vie en don-
» nant asile à des ecclésiastiques. »
Ainsi nous parlent de Le Vasseur ceux qui l'ont
connu.
M. Emile Delignières , d'Abbeville , a décrit d'une
façon complète l'œuvre de Le Vasseur dans un cata-
logue raisonné arrêté à 166 articles *. Nous reprodui-
sons ici quelques appréciations extraites de la notice
1 Publié par le Société d'Émulation d'Abbeville.
690 LES GRAVEURS DU XVIIie SIÈCLE.
biographique dont M. Delignières a fait précéder son
travail.
« Comme graveur, Le Vasseur réunit d'excellentes
» qualités et si toutes ses gravures ne sont pas à la
» même hauteur, cela tient plutôt au peu de valeur des
» tableaux qu'il consentit parfois à reproduire. Il est
» aussi de ces pièces qu'il fit dans sa jeunesse et pour
» lesquelles la critique ne saurait être rigoureuse.
» D'un talent consciencieux et discret , Le Vasseur
» n'a jamais sacrifié , comme tant d'autres, au genre
» de l'époque, ni cherché à courir après la vogue par
» la reproduction de sujets grivois ou licencieux. 11
» travailla d'après des peintres de genres très diffé-
» rents, et sut s'inspirer tour à tour de ceux dont il
» grava les œuvres. Mais il suffit de parcourir son
» œuvre poui^ voir qu'il est supérieur et de beaucoup
» dans les sujets larges, où le nu et les draperies per-
» mettaient à son burin de se donner libre carrière :
» C'est alors qu'on reconnaît la facture de Daullé
» son maître dont il procède. Il avait dû étudier sérieu-
» sèment l'anatomie, ses nus sont parfaitement modelés
» et avec une déhcatesse dans les moindres détails qui
» n'exclut pas une certaine vigueur de touche et ne
» nuit pas à l'ensemble. »
ESTAMPES.
I. d'après AUBRY.
1. Les Amants CURIEUX, — L'Amour PVTERNEi-, 2 p. in-fol.
en largeur.
Bonnes gravures, surtout rAmour paternel.
Existent à l'eau-forte pure, — avant toute lettre, — avec le titre mais avant
la dédicace, — avec la dédicace.
LE VASSEUR. 691
II. DAPRES BOIZOT
2. Allégorie relative au mariage du comte de Provence (?) ; in-fol.
Deux personnages au pied d'un autel antique ; une femme les entoure d'une
guirlande de fieurs ; deux amours portant les armoiries de France et de Savoie.
Avant toute lettre, avec retouches à la main , au Cabinet des Estampes.
III. DAPRES BOREL.
3. L'Amérique indépendante et Franklin , allégorie, ms ; in-fol.
IV. d'après boucher.
4. La Mort d'Adonis; in-fol.
5. VÉNUS SUR LES EAUX. — Dédié à Boucher par Laurent
Cars; in-fol. en largeur.
L'eau-forte au Cabinet des Estampes.
G. Amoui's portés par des monstres marins , — Amours faisant de la
sculpture, 2 p. in-fol. en largeur.
I . Les Fruits du ménage ; grand in-fol. (Le Blanc).
V. d'après greuze.
8. Thaïs, ou lv Belle Pénitente. — Dédié à Madame la
Marquise de Rougé ; grand in-fol.
9. LA LAITIÈRE. — Dédié à M. Daché ; grand in-fol.
Très belle estampe, qui fait le pendant de la Cruche cassée gravée par Massard.
Elle représente une jeune flUe , coiffée d'un bonnet, penchée sur le cou d'un
cheval.
Épreuve inachevée, avant la tablette, 450 fr., vente Muhlbacher, 1881.
État avec le titre la Laitière, mais avant la dédicace à M. Daché. Rare. -100 fr.
10. Le Testament déchiré; grand in-fol. en largeur.
II. La Belle-Mère [Oui, elle lui donne du pain...). — La Veuve
ET SON Curé, dédiée à Messieurs les Curés qui portent la paix
et la concorde dans les familles , par leur très-humble et très-
obéissant serviteur Greuze ; 2 p. grand in-fol. en largeur.
Il y a deux planches différentes de la Belle-Mère. La plus grande fait le
pendant de la Veuve et son Curé. La seconde mesure seulement : H. 32, L. 43 ;
c'est la mieux gravée.
692 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
12. Le Petit Polisson.
13. La Jeunesse studieuse, d'après Greuze, — la Jeunesse folâtre,
d'après Voiriot.
VI. D'APRÈS JEAURAT.
14. Les Citrons de Javotte ; in-fol. en largeur.
15. Le Carnaval des rues de Paris; in-fol. en largeur.
De ces sortes de mascarades
Les artisans (ont leur plaisir. . .
16. Le Transport des filles de jote a l'hôpital; in-fol.
en largeur, pendant de la pièce précédente.
Réjouissez-vous, belle jeunesse,
Vos Kymphes vont se rafraîchir,
Non pas avec du lait d'ânesse,
Il ne suffit pour les guérir.
Souvent un père de famille
Ne pense pas dans cet instant
Que sa femme ainsi que sa fille,
A petit bruit en font autant.
Voilà une bien grosse accusation lancée à la légère contre une classe entière
de femmes. Les Français de tous les temps, remarquons-le, ont toujours aimé
se calomnier.
VII. d'après lagrenée.
11. L'Occasion favorable ; in-fol. en largeur.
VIII. d'après LAMBERT.
18. L'Age agréable, — Le Larcin toléré, 2 p. in-fol.,
dédiées à Madame la Mai-quise de Coutances.
Ces estampes représentent , la première une jeune fille tenant des fleurs sur
un voile , la seconde une jeune dame tenant des fleurs dans les plis de sa robe ,
un amour lui dérobe une rose. La gravure en est soignée : ce sont vraisembla-
blement des portraits.
IX. d'après LE BARBIER.
19. Bienfaisance du Roi, dédiée à la patrie.
Louis XVI, au milieu des seigneurs de la Cour, honore Boussart, que la ville
de Dieppe lui présente, du titre de brave homme. (Voyez à ce sujet la Correspon-
dance deGrimm.)
LE VASSEUR. 693
X. d'après lépigik.
20. Narcisse; iu-fol. en largeur.
21. QUOS EGO...; in-fol. en largeur.
« Cette gravure est généralement citée , et avec raison , comme l'une des
o meilleures du maître ; Basan , dans son Dictionnaire des graveurs , la inen-
0 tionne comme supérieurement bien exécutée ; l'appréciation n'est pas exa-
» gérée. » (Delignières).
XI. d'après peters.
22. La Petite Marchande de carpes; in-fol.
23. Le Vigneron galant, — La Jardinière au repos,
2 p. d'après les tableaux de Peters, peintre de S. M. Christian VII ;
in-fol.
Les eaux-fortes au Cabinet des Estampes.
XII. d'après de troy.
24. L'Enlèvement de Proserpine, — Triomphe de Galathée, — Diane
et Actéon ,3 p. grand in-fol. en largeur.
XIII. d'après les van loo.
25. MARS ET VÉNUS, d'après C. Van Loo; in-fol.
« Le corps de la Vénus est très bien dessiné : la tête surtout est d'un gracieux
0 achevé ; genre chatoyant , burin bien assuré et ferme ; une des meilleures
» gravures de Le Vasseur. » (Delignières).
L'eau-forte au Cabinet des Estampes.
26. DIANE ET ENDYMION. — Peint par J.-B. Van Loo pour sa
réception à l'Académie en nSl, gravé par J.-C. Levasseur pour
sa réception à l'Académie en mi ; in-fol.
L'eau-forte au Cabinet des Estampes.
XIV. d'après divers.
27. Hercule et Achéloiis, d'après Christophe; in-fol. en largeur.
28 Pyrame et Thisbé, — Circé et Ulysse, d'après A. de Giorgi, 2 p.
in-fol. en largeur.
II. 45
694 LES GRAVEURS DU XYIIP SIÈCLE.
29. Apollon et DaphnÉ, d'après Luc Jordane ; in-fol. en largeur.
« Très bonne gravure, une des plus belles du maître ; dessin gracieux et très
» pur ; le corps de Daphné est parfaitement modelé. » (Delignières).
30. Antiope réveillée par l'Amour, — le Satyre amoureux, 2 p. d'après
Mettay ; in-fol. en largeur.
31. L'Education de l'Amour, — Tancrède et Herminie, d'après Roma-
nelli; 2 p. in-fol.
32. Les Saisons, suite de quatre pièces : Sacrifice à Junon (le Prin-
temps), Sacriiîce à Cérès (l'Eté), Sacrifice à Bacchus (l'Automne),
Sacrifice à Saturne (l'Hiver"! ; in-fol.
Les deux premières pièces sont de Rembrandt, les deux autres de Le Bas.
33. Glaucias , roi d'Illyrie , prend Pyrrhus sous sa protection ; d'après
Gollin de Vermont; in-fol. en largeur.
34. Le médecin Érasistrate découvre l'amour d'Antiochus , d'après le
même ; in-fol. en largeur.
35. Retour de Bélisaire dans sa famille, d'après Du Rameau.
36. Antiochus dictant ses dernières volontés . d'après Halle ; in-fol. en
largeur.
37. La Continence de Scipion , d'après Le Moyne , estampe dédiée au
Marquis de Marigny ; in-fol. en largeur.
38. Léonard de Vinci mourant dans les bras de François F"", d'après
Ménageot; in-fol.
39. Tarquin et Lucrèce, d'après de Peters; in-fol. en largeur.
40. Les Adieux d'Hector et d'Andromaque , — Confiance d'Alexandre
dans son médecin Philippe, d'après Restout, 2 p. in-fol. en largeur.
41. Octavien rendant visite à Cléopâtre, d'après Verdier ; in-fol. en
largeur.
Ces sujets d'histoire sont généralement bien exécutés , mais le mérite de la
gravure ne rachète point la froideur de la composition.
LE VASSEUR. 695
42. La Gayeté sans embarras, — la Chaufferette, 2 p. d'après Krause;
in-foL
43. Le Génie du commerce découvre l'Amérique, tableau de la Chambre
de commerce de Rouen, d'après LeMonnier; grand in-fol. en
largeur.
L'œuvre de Le Vasseur comprend encore d'autres estampes :
Saint Georges tuant le dragon , d'après Téniers •
le Martyre de saint Barthélémy, d'après Augustin Carrache [Galerie d'Orléans) ■
le Sacrifice d'isaac, d'après Michel-Ange de Caravage {Oalerie d'Orléans) : '
Sainte Famille, d'après Raphaël Minge (sic) ;
les Plaisirs de s Satyres, d'après Polemburg , 179-2 ;
le Faune enchaîné, d'après Ph. Lor ;
le Jardinier fleuriste, le Faucheur, le Vigneron, le Frilleux, d'après Téniors •
le Voyageur rafraîchi, d'après Lingelbach ; '
le Villageois satisfait, la Villageoise à la fontaine, d'après Le Nain ;
la Vie rurale, l'Abreuvoir au lion, d'après Casanova;
les Blanchisseuses italiennes, le Ménage italien, d'après Gambarini ;
Chasse au sanglier. Chasse à l'oiseau, d'après Hodeu-yns etVandermer;
r Approche du camp, les Soldats en repos, d'après Dietricy ;
le Passe-Temps des soldats, d'après Bourdon ;
Fureur bachique, d'après Brouwer ;
te Bepos du chasseur, d'après Gryef ;
Maisons de pêcheurs à Abbeville, Maisons de pêcheurs à Saint-Va lery-sur-Somme,
d'après Hackert ;
Village proche de Mordyck, Village proche de Harlem, d'après Van Breda ;
Divers sujets sans légende, qui se trouvent dans l'œuvre de Le Vasseur au
Cabinet des Estampes : Adam et Eve chassés du paradis , la Chaste Suzanne
Jésus au mmeu des docteurs , Jésus guérissant le lépreux , Madeleine péche^
resse, Zeuxis choisissant ses modèles, etc., etc.
PORTRAITS.
44. Le Vasseur (J.-Ch.), graveur du roi , né à Abbeville. — Greuze
pinx., Le Vasseur sculp.; in-4.
45. Argenson (le Comte d') ; grand in-4 [Galerie française).
46. Louis-Auguste, dauphin de France, d'après Monnet, —
Marie-Antoinette, dauphine de France, d'après Kran-
zinger, 2 p. in-4.
4*7. Luynes (Paulus d'Albert , card. de) ; in-8.
696 LES GRAVEURS DU XVIII« SIÈCLE.
48. Olivet (l'abbé d'), à l'âge de 43 ans, d'après Restout; in-4.
49. Pomme (Pierre), médecin consultant du roi, d'après Kimli; in-4.
VIGNETTES.
50. L'Indiscret, — Œdipe, — Tancrède, — Olympie, — etc.,
vignettes d'après Gravelol pour le Théâtre et la Henriade dans
les Œuvres de Voltaire, in-4.
51. Vignettes in-8 , d'après Gravelot , pour Eugénie , drame de Beau-
marchais {Laissez faire mon fils) , — pour l'Honnête Criminel ,
de Fenouillot de Falbaire ( Grand Dieu , qu'allais-je dire ?) , —
pour le Fabricant de Londres, du même (Hélas, j'ai été père. . .
— Tenez, mes amis), — pour Lettre de Don Carlos à Elisabeth,
de Panckoucke [Mais on vient disputer).
52. Bajazet , — Iphigénie , vignettes d'après Gravelot , pour le Racine
de Luneau de Boisgermain, in-8.
53. Bélisaire, par M. Marmontel, de l'Académie française ; frontispice-
titre d'après Gravelot ; in-8.
54. Gabrielle d'Estrées à Henri IV. par Poinsinet, 176'7, une vignette
d'après Gravelot ; in-8.
55. Orphée tenant sa lyre et charmant les animaux, d'après Gravelot;
in-4.
56. Tête de page allégorique, d'après de Sève.
57. Annuaire du républicain , ou légende physico-économique avec
explication des 372 noms imposés aux mois et aux jours , par
Millin, an II, in-12; frontispice d'après Monnet.
LE VEAU (Jean-Jagques-André).
1 729 - 1 785.
Voici encore un des bons élèves de l'atelier de
Le Bas. Le Veau , l'émule et l'ami de Le Mire dont il
était le compatriote et le protégé , est né à Rouen le
dimanche 9 janvier 1729, d'un pauvre cordonnier de
la rue Malpalu et de Marie-Marthe Gatelin sa femme ^ .
Souffreteux et malingre , il dut être placé à l'hospice
et presque toute son enfance s'écoula dans cette fosse
commune de la douleur. En proie à une nouvelle
attaque de son mal (les écrouelles), il avait dû vers
seize à dix-sept ans, entrer de nouveau à l'hôpital ; au
pied de son lit se trouvait un tableau de la Madeleine
et l'idée lui vint de le copier à la plume. Son dessin
encore bien rudimentaire sans doute, attira pourtant
l'attention des religieux de la maison , et l'un d'eux
vint le soumettre à Descamps , fondateur et directeur
de l'Ecole gratuite de dessin de Rouen , et véritable
providence des jeunes gens de cette ville qui se sen-
taient quelques dispositions pour les arts.
1 Nous puisons la plupart des détails biographiques sur Le Veau
dans une notice rédigée avec le plus grand soin par M. J. Hédou , le
consciencieux auteur de la biographie de Le Mire , notice qu'il a bien
voulu nous envoyer.
698 LES GRAVEURS DU XYIII* SIECLE.
Cet artiste promit de s'intéresser au jeune malade.
Dès qu'il alla un peu mieux , — il lui restait alors à
peine un souffle de vie, dit Haillet de Couronne , son
panégyriste à l'Académie de Rouen , — Le Veau com-
mença à suivre les cours de la classe de dessin où il
se fit remarquer par son application , et en 1750 il
mérita le prix de hon copiste. Pour subvenir à ses
besoins pendant ces années d'études, Descamps lui
avait trouvé des protecteurs, M""' Roland, femme bien-
faisante qui avait pris l'engagement de lui donner cinq
sols par jour, et le négociant Blondel qui lui remettait
à titre de don deux pains de six livres par semaine.
Tout cela lui permit d'être moins à charge à sa famille
et d'arriver au moment où il pourrait gagner quelque
chose par lui-même. C'est vers 1749 que le jeune Le
Veau fut placé chez un graveur en argenterie nommé
Couvel.
Grâce encore à Descamps , qui recommandait
partout son élève pour un garçon « sage , instruit ,
» assidu et rempli de mérite », Le Veau fut présenté à
Madame Duhamel, qui désirait faire donner à ses deux
filles des leçons de dessin : « Elle l'accueillit chez elle
» et lui fournit logement, linge, habit et nourriture.
» Jamais notre jeune professeur ne s'était trouvé à
» pareille fête ; mais si M"'*' Duhamel poussa envers
-» son protégé la bienfaisance jusqu'à ses dernières
» limites, il est juste d'ajouter que Le Veau conserva
» pendant toute sa vie la plus respectueuse recon-
» naissance pour toute cette famille chez laquelle il
» avait trouvé l'accueil le plus honorable et le plus
» digne. De près ou de loin il n'oublia jamais la femme
» vertueuse qui lui avait été si secourable. »
LE VEAU. 699
Délivré du souci de subvenir à ses besoins, Le Veau
dans cette maison trouva presque le bonheur ; il dut
bien encore par suite de nouveaux accès de sa terrible
maladie retourner à l'hôpital ; mais il fut cette fois si
bien guéri par le chirurgien Bonamy qu'il ne s'en
ressentit plus et qu'il put se livrer tout entier à la gra-
vure des estampes. Il abandonna à cet effet l'atelier du
graveur d'argenterie et se mit à copier avec ardeur
des portraits d'Edelinck que lui prêta Descamps.
Mais le talent de notre graveur réclamait la consé-
cration de Paris. Un nouveau protecteur devait encore
se présenter sur son chemin pour lui en faciliter
l'accès. M^is Roland, amie de ses élèves M^"''^ Duhamel,
allait épouser M. Antoine Le Gouteulx , d'une des
bonnes familles de la ville de Rouen. Le père de la
future avait mis de côté 40 louis pour être distribués
en bonnes œuvres à l'occasion de ce mariage ; à l'insti-
gation de sa fille et de ses amies, il réserva 12 louis
pour le jeune Le Veau , et son gendre, suivant son
exemple, lui renouvela sa garde-robe.
Il ne restait plus qu'à ménager au jeune graveur un
bon accueil dans la capitale, et c'est ce que fit encore
Descamps pour son élève avec un dévouement parfait.
Profitant des loisirs que lui laissaient les vacances de
l'École gratuite de dessin , il mit à profit l'un de ses
fréquents voyages à Paris pour aller trouver Philippe
Le Bas avec lequel il était très lié , et auquel il avait ,
quelques années auparavant , procuré l'un de ses
meilleurs élèves , Le Mire , dont son maître était déjà
très fier. Descamps montra au célèbre artiste les pre-
miers essais de Le Veau et réussit k le faire admettre
« au nombre des jeunes gens auxquels Le Bas foui'-
700 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
» nissait du travail à l'année en même temps que le
» logement et la nourriture. »
Le Veau arrivait donc plein d'espérance en 1749
dans cet atelier fameux. Il y retrouvait son com-
patriote Le Mire qui dut faciliter ses premiers pas.
Les quatre années d'apprentissage terminées , Le Bas
s'empressa d'offrir à son élève la continuation du
logement et de la nourritui^e , plus 600 livres par an ,
propositions qui furent acceptées. C'est donc en 1753
et 1754 , chez Le Bas , que Le Veau grava deux
estampes , une Tempête , cinquième vue d'Italie, sans
nom de graveur, avec la mention Le Bas direœit , et
une Vue entre La Haye et Rotterdam , d'après Van
der Neer, et signée de Le Bas.
Vers cette époque , Le Veau éprouva le besoin
de revoir sa ville natale. Il retrouva à Rouen ses
premiers protecteurs et c'est pendant son séjour qu'il
emprunta à un amateur, M. Marye, secrétaire du roi
à Rouen , c'est-à-dire notaire, deux autres tableaux
de Van der Neer, une Vue de Lille en Flandre et une
Vue du canal d'Ypres à Fumes, qu'il s'empressa de
copier. Encouragé par le succès qu'obtinrent les
épreuves dont il avait emporté les planches à Paris ,
Le Veau entreprit la gravure de deux autres marines
de B. Peteers.
C'est à son retour que Le Veau dut se loger auprès
de Le Mire, rue St-Jacques. en face le collège du Plessis
oti nous savons que son ami habita de 1753 à 1761.
Artiste arrivé , chargé déjà de commandes, le travail
abondait chez Le Mire à ce point qu'il avait besoin ,
comme son maître Le Bas, de collaborateurs , et qu'il
donnait les planches de ses vignettes à préparer à des
LE VEAU. 70<
jeunes gens habiles qu'il employait. Le Veau dut avoir
immédiatement sa part de ces travaux et s'en montrer
fort satisfait . malgré le caractère un peu vif de Le
Mii'e tempéré par la bonté. L'anecdote suivante rap-
portée par Guilbert en est la preuve , en même temps
qu'elle nous montre sur le vif le procédé employé
par les graveurs de l'époque, de faire exécuter par un
élève l'eau-forte ou certaine partie d'une planche et
de se réserver soit les figures , soit la terminaison de
la planche au burin : « Un jour que Le Mire avait
» chargé Le Veau de faire le paysage dans une grande
» vignette, celui-ci se permit de graver l'eau-forte des
» figures. Au bout de quelques jours Le Mire vint voir
» si son paysage était gravé. A la vue du travail fait
» par Le Veau qui avait outrepassé ses ordres, il se
» mit en colère. 11 gratta aussitôt la planche en pré-
» sence de Le Veau et puis l'emporta avec le dessin.
» Après ce premier mouvement de colère dont il
» n'avait pu se défendre, Le Mire eut regret de s'être
» emporté de la sorte. Etant revenu trouver Le Veau
» quelques jours après, il lui rapporta la planche et
» se contenta de lui dire en la lui rendant : Vous vous
» souviendrez de ne graver que le paysage. Le Veau
» cette fois ne fit que ce qui lui était commandé.
» L'ouvrage étant terminé , Le Mire dit à son con-
» frère : Je vous dois six louis , trois pour la première
» planche et trois pour la seconde. — Le Veau voulut
» lui représenter qu'il ne devait pas la première, mais
» Le Mire ayant insisté, il lui fallut céder. Non content
» de ce procédé généreux , il prit affectueusement la
» main de Le Veau et le quitta comme s'il n'avait
» jamais eu lieu d'être mécontent. »
702 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
Enfin Le Veau est associé par Le Mire à la grande
entreprise des Métamorphoses d'Ovide, et il y grave ,
entre autres pièces , la vignette du Printemps , un
chef-d'œuvre, ainsi que deux pièces d'après Boucher,
la Naissance de Bacchus, Vertumne et Pomone,
commencées à l'eau -forte par A. de Saint -Aubin.
L'on sait que les dessins de Boucher, qu'il avait bien
voulu faire, sur les instances des éditeurs, pour les
Métamorphoses, étaient beaucoup plus grands que
ceux des autres dessinateurs du livre, le grand artiste
n'ayant pas voulu sans doute s'astreindre aux petites
dimensions exigées par le format adopté. Ces compo-
sitions devaient donc être réduites et Le Veau n'étant
qu'un simple copiste, on a dû prendre pour lui faciliter
le travail dans ces deux dernières pièces , un artiste
plus exercé, qui a exécuté la réduction.
Le Veau est encore l'un des principaux graveurs
des Ahnanachs Iconologiques, des Contes Moraux
de Marmontel , du Molière de 1773 , des Fables de
Dorât, etc., etc.
Tous ces travaux avaient peu à peu amené l'aisance
et l'indépendance dans l'atelier de notre graveur ; il
avait pu recevoir quelques élèves, enfin il avait éprouvé
le besoin de prendre une compagne et avait choisi la
sœur d'un de ses élèves , fille d'un imprimeur chez
laquelle il trouva, dit M. Hédou, « une série de qualités
physiques et morales ».
Les succès de Le Veau n'avaient pas été sans arri-
ver jusqu'à sa ville natale. Haillet de Couronne, qui
devait plus tard en qualité de secrétaire perpétuel de
l'Académie de Rouen prononcer son éloge , proposa à
l'instigation de Descamps la candidature du graveur
LE VEAU. 703
à cette société savante qui le reçut à l'unanimité. Le
Veau l'apprit et remercia aussitôt l'Académie par la
lettre suivante :
« Messieurs j'apprens avec le plus sensible plaisir
» que vous avez agréez la proposition qui vous a été
» faites de m'haunorer d'une place parmi vous; je vous
» prie, Messieurs de croires que ce titre est le seul
» que j'ambitionne. C'est à vos bontés que je dois mes
» foibles talents et c'est à vous que je vais devoir des
» nouveaux encouragements ; la gloire d'une compa-
» gnie célèbre dans ma ville rejaillira sur moi ; trop
» heureux si mes ouvrages peuvent me mériter votre
» indulgence et votre estime. Je suis etc..
» Jean-Jacques-André Le Veau. — De Paris, ce 7
» février 1775. »
Le Veau entretint du reste toute sa vie des relations
avec quelques honorables personnes de Rouen. Haillet
de Couronne était de ce nombre et s'intéressait à ses
travaux. Il avait à plusieurs reprises demandé au gra-
veur la liste de ses ouvrages. Après avoir longtemps
tardé, le 3 août 1776 , il se décidait à la lui envoyer
accompagnée de cette lettre : « Monsieur, je ne sçais
» comment je pourai mescuser auprès de vous, davoh*
» été si longtems à vous envoyer la notte de mes ou-
» vrages ; le premier retardement a occationné par les
» titre que je n'ai point à touttes les estampes que j'ai
» de moi dans mon portefeuille : et que le tems a les
» avoir (vu qu'il sont à diférant marchand) et avec ma
» négligense ont commencé à mettre un tems déjà
» trop longt ; et comme dans ce tems je comraençois
» à ne sçavoir déjà comment mescuser, j'ai désii'é finir
» la planche que je gravois pour M"' Leprince, enfin de
704 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
» VOUS l'envoyer, avec ma notte ; je contois que cette
» planche ceroit finis pour la fin d'avril mais M"" Le-
» prince mayant retardé les retouche , par diférant
* voyage qu'il a fait à une maison de campagne qui a
» achetté cette année, a retardé ma planche jusqua
» mercredi de cette semaine ; et pour comble de peine
» il ne la veut mettre au jour qu'avec le pendant que
» Ion ne fait que commencer ; et que je craint qui ne
» dur plus dune année. Voilà comme bien souvent
» par sa négligence , on perd d'heureuses occations
» d'obhger et d'avoir des amis, je ne me le pardonnerai
» de ma vie ; je suis tout pénétré de confusion, après
> la lecture que je revient de faire de votre lettre , ou
» vous me comblé d'amitié! que je ne sent pas méritter.
» Si j'osois espérer que vous voudrée bien oubher ma
» faute ; et ne rien diminuer de l'amitié que vous m'a-
» vés dévoué ce ceroit y mestre le comble. Recevés ,
» etc.. Le Veau.
« de Paris, ce 3 aoust 1776.
» tourné si vous plait »
« Je croirois manquer Monsieur à vos bontés si je
» ne vous faisois part de ma satisfaction. Mon'' Leprince
» a paru si satisfait de moi tant par mon ouvrage que
» par mon exactitude m'a promis de me donner 200 1.
«> de gratification et me recommandant de nen parler
» a personne dans la crainte que cela ne vienne au
>> aureille de ceux qui grave pour lui et qui pourait
» lexiger. Voissi ma notte * : »
Suivait une liste des planches exécutées par Le Veau.
* Ces deux lettres ont été publiées dans une Etude sur Le Veau par
M. Hédou , qui n'a pas été mise dans le commerce.
LE VEAU. 705
Bien qu'assez mal faite , elle permet de lui restituer
la Tempête et la Vue entre La Haye et Rotterdam ,
qui toutes deux ne portent que le nom de Le Bas , et
la Vue d'un Temple de Venus dans l'île de Nisida ,
signée de Le Mire. Quant à l'estampe de laquelle
Le Prince se montra si satisfait, elle a pour titre
le Corps de garde , et son pendant dont Née avait
commencé la planche en 1776 , l'Amour de la gloire,
ne fut terminé par Le Veau et mis en vente qu'en
1778.
Indiquons encore quelques autres estampes de Le
Veau. 11 n'a pas gravé moins de dix grandes Marines
d'après Joseph Vernet ; une composition de la Bergère
des Alpes d'après Aubry, sujet tiré des Contes moraux
de Marmontel; la pièce expressive d'après Debucourt,
connue sous le titre le Juge ou la cruche cassée ; la
gracieuse composition intitulée la Rencontre dange-
7'euse d'après Baudouin , dont l'eau-forte est char-
mante , enfin des Vues d'après le peintre Julhard son
ami.
Les vignettes gravées par Le Veau ne sont pas
inférieures à celles des bons graveurs ses contem-
porains. 11 s'était bien formé à l'école des Le Bas et
des Le Mire, et plusiem's de ses planches, surtout dans
les Métamorphoses d'Ovide, sont parmi les meilleures
du livre.
« Le Veau , a écrit M. Hédou , préparait toutes ces
» petites planches avec un soin tout-à-fait remarquable.
» Comme Le Mire et tous les bons graveurs du temps,
» il indiquait d'abord sa composition dans les ombres
» par un trait intelligent et dans les lumières par un
» pointillé spirituel , le tout mordu à l'eau-forte, et il
706 LES GRAVEURS DU XVIII" SIECLE.
» ne travaillait son cuivre avec le burin et la pointe
» que lorsque ce procédé avait donné tout ce qu'il
» devait produire. »
Le Veau est mort en 1785.
ESTAMPES.
1. La Bergère des Alpes, d'après Aubry.
2. La Rencontre dangereuse, d'après Baudouin ; in-fo.
3. La Consultation appréhendée, — le Retour de la consultation; 2 p.
d'après Bilcoq.
4 . Le Baiser pris de force, — l'École de l'amour ; 2 p. d'après Clermonl.
5. Le Juge, ou la Cruche cassée, d'après Debucourt, in-
fol. en largeur.
L'eau-forte, 100 fr. 1881 . M de Goncourt attribue cette préparation à Debu-
court lui-même, ce qui nous paraît fort vraisemblable.
6. Vue perspective d'une place projetée devant la colonnade du Louvre
à la Gloire de Louis XVI , d'après Doucet , 1784 ; in-fol. en
largeur.
I . La Cascade de Tivoli , in-fol. — Tour du Grec au golfe de Naples ;
— Vue de Naples du côté du Château-Neuf, in-fol. en largeur ;
3 p. d'après Lacroix.
8. Le Corps-de-Garde, d'après Le Prince ; in-fol.
9. Vue des environs de Lagny, d'après Le Prince ; in-fol. en largeur.
10. L'Amant curieux, — L'Agneau chéri, 2 p. in-fol. en lar-
geur, d'après Loutherbourg , mi.
II. La Fontaine d'Arcadie, d'après de Machy ; in-fol.
12. Arrivée de Flessingue, — Port de Flessingue, 2 p. d'après Peters,
in-fol. en largeur.
LE VEAU. 707
13. Vue d'un moulin sur la rivière d'Étampes, — Vue de Quillebœuf ,
— Vue des environs de Rouen, 3 p. d'après Sarrazin ; in-4.
14. La Jeune Napolitaine à la pêche. — La Pêche en eau douce. —
Les Amans à la pêche. — Les Femmes à la pèche. — L'Ancienne
Forteresse. — La Cuisine ambulante des matelots. — Les Pêcheurs
des monts Pyrénées. — L'Aurore d'un beau matin. — Vue proche
du Mont-Ferrat. — l^ et 2'' Vues des environs de Bayonne. —
Le Vaisseau submergé.
15. 12 vues d'après Weirotter.
Ajoutons à cette liste :
Vue des campagnes de Rome, le Bain des villageoises, d'après Julllard. — L'Entrée
d'une ville maritime, d'après Lalleinant. — Vue de Brixen en Tirol , d'après H.
Robert. — Les Bergers romains, d'après Mettay. — Agar répudiée, d'après Dietricy.
Vestiges d'anciens monuments romains, d'après Poelerabourg. — Vue de Lillo
sur l'Escaut, d'après Van der Neer. — Le Jeune piqueur vénitien, d'après Ferg. —
La Blanchisseuse flamande , d'après Wouverraans. — Troupeau de chèvres et de
moutons, d'après Weenix.
Planches pour le Caiinet JVeymaTi et le Cabinet Poullain.
Le Clair de lune, petite pièce in-8, datée de 1748.
Vue de Passy , dessinée d'après nature par J.-J. le Veau ( Description de la
France).
EX-LIBRIS, ETC.
16. Ex-libris d'Aubusson. — Cartouche d'armoiries supporté par ul
lion ot un griffon. Sur le socle, la légende : Ex-libris d'Aubusson ;
in-12.
17. Ex-libris de Brinon. — Panneau d'armoiries avec légende : Biblioth.
Rothomag. Ecclesiœ ex Dono D. D. Caroli Renati De Brinon
Docf. Paris, insignis ecclesiœ Metrop. Roth. et Norm. Prima-
tialis Canonici honorarii 1749. Leveau fecit ; in-18.
18. Ex-Ubris de Jouvencel. — Cartouche d'armoiries surmonté de trois
casques. Des palmes sur les côtés. Nobilis D. D. Petrus de Jou-
vencel Eques Monetarum Lugdunœus Senator, i749 ; in-8.
19. Adresse de l'horloger Silvestre. Cadre d'arabesques, in-18 en lar-
geur, orné de fleurs , avec une couronne à la partie supérieure.
Légende : Silvestre, Horloger, Rue Dauphine au coin de la Riie
Christine. Paris.
708 LES GRAVEURS DU XYIIF SIECLE.
VIGNETTES.
I. d'après goghin.
20. Vignettes pour VIconologie, 10 p.
21. Psyché, la figure noire , agenouillée devant Vénus, vignette pour
les Fables de l'abbé Aubert (l'eau-forte par A. de Saint-Aubin.
22. Minerve et la Folie , joli frontispice pour les Œuvres de
Saint-Marc. — En-tête et cul-de-lampe ; 3 p.
II. d'après eisen.
23. Préparation de planches, terminées par Le Mire et Longueil , pour
les Contes de La Fontaine, édition des Fermiers-Généraux.
24. LE PRINTEMPS, très belle vignette pour les ilfe'/amorpAoses
d'Ovide, n69.
Le Veau a gravé 13 autres pièces d'après Eisen , Gravelot , Monnet et Moreau
pour les Métamorphoses d'Ovide. — Il a aussi terminé, sur des eaux-fortes d'Aug.
de Saint-Aubin, deux vignettes de Bouclier pour le même ouvrage : la Naissance
de Bacchus, Vertumne et Pomone.
25. Le Prix de la beauté, — la Nymphe enlevée, — la Grotte de Vénus,
— la Prudence, 4 p. in-8 avec cadre, plus Vénus et l'Amour,
d'après Boucher.
III. d'après gravelot.
26. Fleurons pour les Comédies de Térence , Paris, Leloup , 1758,
2 vol. in-12.
Les 27 fleurons de cette série sont anonymes ou portent le nom de Le Bas.
Maison les trouve tous dans l'œuvre de Le Veau au Cabinet des Estampes. Il
est plus que probable qu'il y a travaillé, au moins pour les eaux-fortes.
27. Vignettes pour la Jérusalem délivrée , — le Décameron , — les
Contes moraux de Marmontel , — Bélisaire, par le même, — les
Almanachs iconologiques , — Eugénie, drame de Beaumarchais,
— le Voltaire in-4 de 1768, — Horace de Baskerville, — Oh mon
père. Ma fille, quoi ! c'est vous. . . — l'Amour priant une ber-
gère près d'une grotte, — la Partie de chasse de Henri IV, in-8.
IV. d'après marillier.
28. Fleurons pour les Fables de Dorât, 10 p.
LE VEAU. 709
29. Vignettes pour les Œuvres de Vabbé Prévost et le Cabinet des Fées.
V. d'après moreau.
30. Frontispice des [ncas (l'eau-forte par De Ghendt), et une figure. —
Pandore, la Femme qui a raison , le Pauvre Diable ( Voltaire de
Kehl).
31. Tai tort, mon cher Valère. . . {Rousseau de 1174, in-4).
32. Prologue de la Princesse d'Elide. — Mélicerte. — George Dandin.
— Les Fourberies de Scapin [Molière de Brel).
33. MARIE-ANTOINETTE. Melpomène présente au buste de la
Reine les Œuvres de Métastase , in-8 (vignette pour les Œuvres
de Métastase, 1780, in-8 et in-4).
L'eau-forte, 200 fr. 1879. — État d'essai, signalé par M. Jules Hédou.
Terminé, avant la lettre, les noms des artistes à la pointe. — Autres épreuves
avec les noms des artistes et la date. — Avec la légende.
Le Veau a encore gravé la vignette d'Aténaïde pour le même ouvrage.
34. Petit fleuron représentant deux femmes assises sur l'herbe ; celle de
gauche est endormie et a laissé tomber un livre ; 1774.
35. ChYMIE expérimentale et RAISONNÉE, par m. Baume
1773,3 vol.
Trois fleurons de titre, et un fleuron pour un quatrième volume qui n'a point
paru.
36. Philoclès dans l'île de Samos ( Etudes de la nature , par Bernardin
de St-Pierre), 17 , in-12.
37. Frontispice pour un ouvrage in-12. Minerve soutenant un tableau
sur lequel est tracé le carré de l'hypothénuse, etc. 1783.
38. Figures pour VHistoire de France.
VI. d'après divers.
39. Figure de Le Barbier pour les Fastes d'Ovide et fleuron de titra
pour /.-/. Rousseau. — Figure de Loutherboui'g et fleuron de
Saint-Quentin pour V Agriculture. — Figiu'es de Duclos pour
Biaise et Babet , publiées par Martinet , etc.
40. Louis XV, profil à gauche, médaillon rond dans un encadrement
carré, formant tête de pagepour un in-4. — Gravé par Le Veau,
associé de l'Académie Rie de Rouen.
n. 46
LÉVEILLÉ (Pierre;
Le Manuel le fait naître à Orléans, et Basan nous
apprend qu'il était élève de Janinet, ce qui est du
reste facile à reconnaître à la vue de ses planches. On
a de lui des frises, des ornements et quelques estampes
en couleur :
1. LE CHARLATAN, d'après Borel ; grand in-fol. en largeur.
2. LA BASCULE, d'après Borel , pendant de la pièce précédente;
1785. Chez Vidal.
Ces deux compositions sont pittoresques et animées ; le charlatan débile son
boniment avec feu. Dans la seconde, on voit toute une société qui s'ébat à une
fête villageoise etjoue à la bascule. Une jeune femme fait la culbute et montre. . .
bien des choses à ses joyeux compagnons.
Les deux pièces, 495 fr. vente Mûhlbacher.
3. La Circassienne à l'encan, d'après Borel ; petit in-fol. en largeur.
4 . Le Bain interrompu , d'après Borel ; pendant de la pièce précédente.
5. Etude de paysan russe, d'après Le Prince ; in-8, au lavis.
6. Profil de femme, d'après Huët; in-4.
LEVESQUE (Pierre-Charles).
1727-1812.
Gravei]r à l'eau-forte, amateur et littérateur, Pierre-
Charles Lévesque naquit à Paris, en 1727 d'après Le
Blanc , et en 1736 d'après la Biographie liniverselle.
Ses parents lui jBrent apprendre la gravure , mais con-
trairement à l'habitude, ce fut le jeune Lévesque qui les
supplia de lui faire apprendre le latin. 11 fut pourtant ,
par suite de revers de fortune, forcé de vivre pendant
quelque temps de son talent de graveur. Ses premiers
travaux littéraires lui ayant acquis l'estime de Diderot,
celui-ci le recommanda à l'impératrice Catherine qui
le nomma en 1783 professeur de belles-lettres à l'école
des cadets. Pendant un séjour de sept années à Saint-
Pétersbourg où il fut nommé de l'Académie des beaux-
arts de cette ville, il écrivit une Histoire de Russie
qui est estimée et revint à Paris en 1780 pour la
publier. Grâce à ce travail, il fut nommé de F Académie
des Inscriptions , fit beaucoup d'ouvrages et de tra-
ductions, entre autres celles de presque toute la collec-
tion des anciens moralistes , mais pour nous Lévesque
est surtout connu comme le continuateur ou mieux
comme le principal auteur du Dictionnaire des arts
de peinture, sculpture et gravure de Watelet (1792).
712 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
Cet artiste-écrivain avait entrepris depuis longtemps
cet ouvrage , mais d'autres occupations le lui firent
délaisser et quand il mourut , le travail n'allait guère
au-delà de la lettre G. C'est alors qu'on demanda à
Lévesque de travailler à son achèvement :
« Treize années entières de ma vie , écrit - il ,
» consacrées sans relâche à l'étude et à la pratique
» de l'un des arts qui dépendent du dessin, m'ont
» donné la confiance d'accepter la proposition qui
» m'a été faite, de remplir les lacunes laissées par
» M"" Watelet. Ce n'est pas que je croie avoir acquis
» le droit de donner impérieusement des préceptes
» aux artistes, mais j'ai du moins l'avantage d'avoir
» appris leur langue, de connoître une partie de leurs
» procédés, de tenir quelques anneaux qui peuvent
» m'aider à suivre la chaîne entière des arts ; j'en ai
» pratiqué un seul par état , mais j'ai fréquenté , j'ai
» entendu, j'ai vu prati(juer des artistes dans tous les
» genres et j'ai pu me rendre compte de leur théorie
» familière. »
Ajoutons que si Lévesque s'est fait aider pour beau-
coup d'articles de son dictionnaire , il a écrit les plus
importants. L'article Gravure , en particuHer, est à
lui seul un petit traité de cet art.
Lévesque a joint l'exemple au précepte , mais ses
travaux ne sortent pas d'une honnête médiocrité. —
Le Sommeil et le Réveil (1765) , d'après F. Boucher.
— La Gaîté , d'après C. A. Van Loo. — Vénus et
l'Amour, d'après Pierre (1770). — L'Amour aiguisant
une flèche, d'après Cazes (1770). — Jupiter et Danaé,
d'après de Troy. — Èrigone vaincue , d'après Des-
hayes. — La Toilette hollandaise , d'après Metzu. —
LEVESQUE. 743
Loth et ses filles , d'après Diépenbecke. — Planches
pour Abrégé de VHisloir'e romaine , d'après G. de
Saint-Aubin. — Planches pour le Cabinet de Choiseul.
Quelques portraits. — Gilbert de Voysins, d'après
Duplessis (1771) ; in-4. — Balland d'Augustebourg ,
d'après Colson; in-fol. — M"»* de Graffigny. — Sedaine,
d'après L. David ; in-4 en rond. — Le Maréchal de
Lowendal; in-4 (1772). — Le Duc de La Vrillière,
(1772), en rond, d'après G. Van Loo. — Le Kain, dans
le rôle de Gengis-Kan (1765) , in-4. — Jean Causeur,
bouclier de profession, âgé de 130 ans, d'après Caffieri
(1772).
Lévesque mourut le 12 mai 1812.
LE VILLAIN (Gérard-René).
1740-48.
C'est le graveur du Repentir tardif, d'après La-
vreince, charmante estampe au titre significatif.
Le Villain a gravé la Jeunesse laborieuse et la
Jeunesse studieuse , d'après Grimou , 1768. — Le
Sommeil de Venus, d'après Ghalle. — Planches pour
la Galerie de Florence et la Galerie du Palais- Royal.
Les portraits de Dufour de Villeneuve , lieutenant
civil au Chàtelet, 1767, et de Ribero Sanchez, médecin.
Des vignettes pour le Cabinet des Fées, les Voyages
îinaginaires. les Œuvres badines de Caylus, d'après
Marinier, les Œuvres de Gessner, d'après Le Barbier,
le Plutarque de Gussac, Racine, édition de Didot.
Le Comte de Valmont ou les Égarements de la
raison, par l'abbé Gérard, 1774 — 3 vol. in-12, et
lOjohes figures parLiot, gravées par Le Villain, avec
un écusson en tête de la dédicace.
Voyage sentimental , Dijon . 1797 et Paris , 1801 , 2
vol. in-8 , — 6 figures d'après Monsiau , réduites de
celles de la grande édition de Dufour, an VII.
Adresse : A la Tabatière d'or, rue neuve des Petits-
Champs, Tellier, nv^joailler, bijoutier, — in-8.
La femme de Le Villain a aussi gravé.
LEVILLY (J.-P.
Graveur au pointillé peu connu. On relève à son
actif quelques pièces « passant de la fabrique italienne
» anglomanisée à des façons tout-à-fait françaises et
» encore toutes frottées du goût des merveilleux. »
Venus, l'Amour et les Grâces , petite pièce ronde ;
r Enlèvement , r Abandon , 2 p. in-4; f Instant favo-
rable, r Heureux présage . 2 p. dessinées et gravées
par Levilly, in-4 : les Cerises, petit médaillon en cou-
leur ; le Bain de Virginie ; What you will, a Widoio,
2 p. in-4 ; la Rivale désabusée , dessiné et gravé par
Levilly ; la Valse ; Beautés dansant à la musique de
l'Amour ; Faites la paix ; C'est inconcevable, tu n'es
plus reconnaissable.
Les Croyables au Perron ; Tiens, c'est mon valet,
petites pièces rondes.
L'Amant poète, d'après Boilly, in-fol. « Un adoles-
» cent, en culotte collante et bottes à revers, le cale-
» pin à la main, s'inspire auprès delà statue d'Apollon
» au coin d'un bosquet où deux jeunes filles l'épient.
» C'est le chef-d'œuvre du graveur et une charmante
» vignette pour les poésies dont raffolèrent ceux et
» celles qui avaient leurs seize ans vers l'an VI. »
LIÉNARD (Jean-Baptiste
1750-
Liénard , né à Lille en 1750 , élève de Le Bas , fut
l'un des graveurs du Voyage de Saint-Non et plus
tard du Musée Français, et l'un des trois graveurs de
la Plaine des Sablons, de Moreau.
Nous ne trouvons guère dans son œuvre que deux
estampes notables :
Les Délices de l'été , d'après Le Prince ; in-fol. en
largeur.
Vue des principaux 7nonu7nents de Rome, d'après
H. Bobert ; grand in-fol. en largeur.
Mais nous devons particulièrement signaler la colla-
boration de Liénard à un ouvrage des plus estimés :
LA FOLLE JOURNÉE, ou le Mariage de Figaro, comédie en cinq
actes par M. de Beaumarchais (Kehl, de l'imprimerie de la société
typographique), Paris, Ruault , nss, in-8.
Cinq figures par Saint-Quentin , gravées, celles des actes 1, 3 et 5 par Liénard,
les deux autres par Halbou et Lingée.
Jolies illustrations, et des plus estimées en épreuves de remarque.
La suite des cinq gravures , avant la lettre , entourées d'un cadre , 3,000 fr.
vente Sieurin.
Un exemplaire contenant les cinq gravures dans le même état et quatre
eaux-fortes, 3,000 fr. vente Desbarreaux-Bernard.
Ces eaux-furtes sont aujourd'hui dans la collection de M. E. Paillet. — M. de
Villeneuve les possède également.
LINGÉE (Charles-Louis).
1751-
Lingée, qui demeurait rue des Maçons près l'Hôtel
des quatre Nations, a collaboré à la gravure du Monu-
ment du Costume, et nous a laissé aussi quelques
vignettes excellentes.
ESTAMPES.
1. L'OCCUPATION, — LA PROMENADE DU MATIN, — LES
CONFIDENCES, 3p. in-fol. d'après Freudeberg (Monument
du Costume).
PORTRAITS.
2. Me"e RAUGOUR , portrait dédié à la comtesse Du Barry par son
très-humble serviteur Lingée. — J. H. E. inv., Freudeberg ,
J. M. Moreau ornamenta delin., Lingée sculp.; petit iu-fol.
3. Le Tourneur, d'après Pujos ; in-4 , au pointillé.
4. Pelletier, peint par lui-même, gravé par son ami Lingée ; in-4 orné.
Très rare.
5. Profil de femme, médaillon rond in-18. M. E. Lingée del. ad vivum
1791. CL. Lingée sculp. lld'i.
Victime de la calomnie,
Gertrude ! l'avenir gémira sur ton sort;
L'Amour et les Vertus embellissaient ta vie
Et l'honneur l'a donné la mort.
Patrat.
718 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
VIGNETTES.
6. LE COLIN-MAILLARD (en-tête pour Zes Baisers de Dorât). —
Gul-de-lampe.
7. Fleurons pour les Fables de Dorât. — Très jolie tête de page pour
la première édition des Fables de Dorât, l'7'72.
8. Fleurons et vignettes pour Baculard d'Arnaud , LlEBMAN , etc.
9. Les Femmes vengées, opéra-comique en un acte, de Sedaine,
1775; in-8.
Une jolie figure de Cochln, qu'on utilise souvent pour les Rémois , conte de
La Fontaine.
10. JOCONDE, 2'"*' planche. — LE P.\YS.\N QUI .VV.\IT OFFENSÉ
SON seigneur, d'après Fragonard. — LE BAISER RENDU,
d'après Touzé [Contes de La Fontaine).
11. Vignettes d'après Gravelot pour la Jérusalem délivrée ; — d'après
Marinier pour V Iliade ; — d'après Cochin pour VArioste, la Jéru-
salem délivrée , VIconologie ; — d'après Saint-Quentin pour la
Folle Journée ; — d'après Loutherbourg pour l Agriculture ; —
d'après Chevalier pour le More de Venise, tragédie précédée d'un
discours par M. Douin , capne d'infanterie, 1773; — d'après
Moreau pour la Henriade (ch. IV) in-4 ; — d'après Le Barbier
pour les Lettres d'une Péruvienne ; — d'après Monnet pour le
Théâtre des Grecs du P. Brumoy, le Lucrèce de Bleuet et le
Gil Blas de Chaigneau ; — d'après Regnault pour le Temple de
Gnide. — Vignettes pour les Liaisons dangereuses, les Voyages
en France, et les Deux Chasseurs et la Laitière, opéra-comique.
12. Trinité conventionnelle , format de cocarde et dessus de boîte (sic) ,
dédiée à la République ; pièce en couleur. — Lingée del. et sculp.
A Paris chez l'Auteur, rue St-Thomas, porte St-Jacques, n°710.
LINGÉE (Madame;
1753-
Thérèse-Éléoiiore Hémery , sœur du graveur Hémery
et de Madame Ponce, avait un agréable talent de gra-
veur à la manière du crayon. Elle a montré qu'elle
connaissait supérieurement l'emploi de ce procédé ,
dans des portraits d'après Pujos ou d'après Moreau-,
et dans des sujets de genre d'après Cochin. Elle a
aussi gravé quelques vignettes au burin. Elle faisait
partie de l'Académie royale de Marseille.
On doit particulièrement rechercher d'elle le por-
trait de la jolie Mat^quise de Villette , la même à qui
nous avons vu Gaucher dédier son estampe du cou-
ronnement de Voltaire sur le Théâtre-Français. Rien
de plus fin aussi que les portraits des membres de la
Société des Enfants d'Apollon, le musicien Francœur,
les peintres Jeaurat , Houël, etc.
L'œuvre de Madame Lingée peut, en somme, former
un très agréable portefeuille dans la collection d'un
amateur d'estampes du XVIIP siècle.
ESTAMPES, ETC.
1 Panis ANGELORUM. — PanIS HOMINUM; 2 p. in-4 d'après
Cochin.
720 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
2. L'Enlèvement des Satines, d'après Cochin ; in-fol. en largeur.
3. Télémaque dans le temple de Vénus à Chypre. — Les Nymphes
jouent avec l'Amour; 2 p. in-4 pour Télémaque, d'après les dessins
de Cochin , publiés chez Bonnet comme sujets gracieux.
4. Le Plaisir des bonnes gens, jolie pièce in-4 en largeur,
d'après Cochin.
5 . Têtes d'étude d'après Greuze, grandeur naturelle ; 4 p. à la sanguine.
6. Validé, — Odalisque ; 2 p. in-4 , d'après A. de Saint- Aubin qui a
signé ad vivum del.
1 , Vignettes au burin pour les Contes de La Fontaine de Desrais , les
Confessions du comte de X***.
8 . Éléments de dessin par Moreau jeune , depuis les premiers prin-
cipes jusqu'à Vacadémie , avec Véchelle des proportions du
corps, 30 feuilles in-fol. à la manière du crayon.
PORTRAITS.
PORTRAITS DE DIVERS MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ
DES ENFANTS D'APOLLON; in-8 carré.
Breval , violoncelle et compositeur, d'après Moreau.
Chardiny, compositeur, d'après Moreau.
Chenard, basse-taille et violoncelle, d'après Cochin.
COTTEREAU, avocat et procureur au Châtelet, d'après Cochin.
Du Port, violoncelle et compositeur, d'après Cochin.
FRANCœUR, surintendant de la musique du roi, d'après
Moreau. Très rare.
Hou EL , peintre du Roy, d'après Cochin.
Je AU RAT, peintre, d'après Cochin.
Lancez, violon, d'après Moreau.
LOCHON , violon , d'après Moreau.
M A N D I N I , proff'". , d'après Moreau.
Moline , avocat, auteur lyrique, d'après Cochin.
Nau-Deville, amateur, d'après Moreau.
PlOT, amateur, commissaire des guerres, d'après Cochin.
LINGEE (Madame). 721
10. CaglIOSTRO (Madame); in-4. Rare et curieux.
11. Canavas, Gaurier, Séjan , médaillons ronds in-12, d'après Cochin.
12. Colardeau , d'après Trinquesse, profil in-4 , \11B.
13. Jarente d'Orgeval , coadjuteur de l'évèché d'Orléans, de face,
d'après Cochin ; in-fol
14. JoANNIS (de), de trois quarts, d'après Cochin ; in-4.
15. Le Noir, lieutenant général de police. Pujosdel. advivum; in-4.
16. Louis XVI, Marie-Antoinette, le Dauphin et Madame; in-8.
n. M AL 0 ET, conseiller d'État, premier médecin de Madame Victoire,
de trois quarts, d'après Cochin; in-4. — Antoine l'ETrT,
docteur régent, d'après Cochin, n86 ; pendant. — LOUS-
TAUNAU , conseiller d'État.
18. Marchand, avocat , censeur royal, d'après Pujos; in-4.
19. Trumeau de la Consy, prêtre, d'après Trinquesse ; in-4.
20. VILLETTE (M""" la Marq**" de), surnommée Belle et Bonne par
Voltaire , d'après Pujos ; in-4 , avec ces vers du marquis de
Villette :
Elle eut Voltaire pour parrain
Belle et Bonne est le nom que lui donna Voltaire
Et ce nom, mieux que le burin,
Peint sa grâce et son caractère.
Les LIOTARD.
4 702-1790.
Né à Genève en décembre 1702, Jean -Etienne
LioTARD fut d'abord peintre en miniature. Il vint à
Paris en 1725 et s'y fit remarquer par ses pastels et
ses émaux. Liotard passa quelque temps à Naples, où
il avait suivi le marquis de Puysieux , ambassadeur de
France. Il vint à Rome en 1736 et y fit la connaissance
d'anglais qu'il accompagna dans le Levant. AConstan-
tinople il eut du succès et adopta le costume du pays.
Quand il revint à Vienne, il était vêtu à l'orientale , et
portait une longue barbe ; sa singularité et aussi son
talent le firent bien accueillir ; il fut même admis à
peindre la famille impériale. A Paris son talent fut
plus contesté ; on trouva sa manière sècbe et sa couleur
peu agréable. Ce peintre nomade passa ensuite en
Angleterre, puis en Hollande , où il se maria, en fai-
sant le sacrifice de sa longue barbe, mais non de son
costume qui l'avait fait surnommer le peintre turc ;
on le retrouve ensuite en Allemagne, puis à Venise ;
il revint enfin à Genève sa patrie où il mourut vers
1790.
Il a gravé son propre portrait, /. E. Liotard , in-4,
et une seconde fois en clair-obscur; — Hérault,
LIOTARD. 723
lieutenant de police, in-fol.; — /. E. Goupil , écuyer ;
— la Veui^e Lullin.
A Vienne il a gravé, outre un portrait de Joseph II,
deux compositions intitulées Dame franque de Pèra
recevant visile, et Darne franque de Galata, etc.. la
première représente , suivant Huber , Timpératrice
Marie-Thérèse et sa fille l'archiduchesse Marie-Chris-
tine. Liotard a gravé les visages , et Camerata les
accessoires.
Une estampe bien connue , le Chat malade , a été
gravée par J. E. Liotard d'après Watteau ; in-fol.
J. E. Liotard a tenté quelques essais malheureux en
manière noire, comme la Vénus auce belles fesces (sic);
in-fol. 1780. Plusieurs portraits ont été gravés d'après
lui , notamment sa nièce M"*' Liotard , par Daullé , et
divers sujets par un graveur nommé Reinsperger.
Jean-Michel Liotard, frère jumeau du précédent,
vint à Paris et fut un bon élève de Benoît Audran. C'est
pendant ce premier séjour qu'il aurait gravé son propre
portrait et des pièces pour la Galerie de Versailles.
Il fut appelé à Venise par le consul anglais Smith ,
grand amateur de tableaux , qui lui confia la gravure
de sept grands cartons de Carlo Cignani, et de sept
autres morceaux de Ricci (1743).
Pendant ses séjours à Paris , J. M. Liotard a gravé
plusieurs compositions de Watteau : les Co?ncdiens
français ; la Conversation ; les Deux cousins ; En-
tretiens amoureux ; le So7nmeil dangereux ; la Plus
belle des fleurs ne dure quun matin. . .
Et d'après Boucher : le Château de cartes et la
Bergère labotneuse.
J. M. Liotard est mort vers 1760.
LIPS (Jean - Henri
1758-1817.
Peintre et graveur. Lips naquit à Kloten près de
Zurich en 1758. Son père, barbier du village, balançait
simplement, dans le choix d'une carrière pour son fils,
entre la charrue et le rasoir. Il commença par l'en-
voyer à l'école où son vif penchant pour le dessin se
manifesta en remplissant de souvenirs les livres d'é-
glise de ses camarades. A une physionomie avenante,
il joignait un esprit ouvert. Le curé du village le prit
en affection, lui donna quelque instruction et engagea
son père à l'envoyer à Win terthour auprès du graveur
Schellenberg. Mais quand le barbier eut appris qu'il
lui en coûterait 200 florins pour le faire instruire ,
il fut exaspéré : « Deux cents florins ! mon fils ,
» reprends-moi le bassin ! vraiment nous avons bien
» besoin de peintres , ce sont des barbiers qu'il nous
» faut! »
Le curé ne se rebuta pas , s'adressa à Lavater, qui
à première inspection et en sa quahté de physionomiste
crut voir dans les traits du jeune homme les signes
certains d'une organisation exceptionnelle pour la
gravure et lui prédit les plus brillantes destinées. En
même temps il l'employa à graver ses planches des
LIPS. 725
Fragmens physionomiques et se l'attacha pendant
plus de vingt ans.
Lips partit ensuite pour Rome , puis alla plus tard
s'établir à Weimar comme professeur à l'école gra-
tuite. Il y grava quelques portraits et revint finalement
dans sa patrie.
Il a gravé deux fois son portrait pour l'ouvrage de
Lavater, et ceux de Lavater, Bach , Herder, Cathe-
rine II , Beatrix Cenci et beaucoup d'autres pour le
même ouvrage.
Dans le grand nombre de portraits qu'il a exécutés,
ceux qui nous paraissent les plus intéressants font
partie d'une série de personnages de la Révolution
française, comprenant Rœderey\ Lanjuinais, Sièyès,
Condorcet, M"'* Roland, Vergniaud, Bonaparte, etc.
Quelques-uns de ces portraits sont d'une ressemblance
douteuse. Le plus recherché de cette suite est celui de
Charlotte Corday, d'après Bréa, de face, coififée d'un
bonnet (vendu 43 fr. 1876).
Lips a gravé les portraits de Ke^s, Bunker, Gœthe,
j[fme ]\iecker, Joseph II , Pestalozzi , Shakespeare ,
Cervantes , M"^ Clairon , Gessner, in-12 , le même
in-8, et un autre en médaillon de profil, Marmontel,
d'après le portrait de Gaucher, etc . . .
Le buste de Ft^anklin couronné par la Liberté, très
jolie pièce in-8.
Portraits pour le supplément des Vies des peintres
Suisses de Fuesslin.
Le Général de Hoze, in-8, médaillon en couleur.
47
LITTRET DE MONTIGNY (Claude -Antoine).
1735-1773.
Son morceau capital est le Concert du grand Sultan,
estampe d'après G. -A. Van Loo (1766), qui forme pen-
dant au Bâcha faisant peindre sa maîtresse, gravé
par Lépicié. Les figures principales sont les portraits
du peintre, de sa femme, de sa fille et de ses deux fils.
ESTAMPES, ETC.
1 . Le Sommeil de Vénus, 1764. — Diane endormie ; 2 p. d'après Saint-
Quentin , in-foL en largeur.
2. L'Amour distribuant ses dons, — l'Amour conduit par la Fidélité;
2 p. in-fol. , d'après Schenau.
3. LE CONCERT DU GRAND- SULTAN , d'après A. Van Loo ,
1766 ; grand in-fol. en largeur.
4. 1" et 2°"* Vues du Rhin , d'après Weirotter.
5. V Alphabet de V Amour, ou recueil de chiffres à l'usage des amants
et des artistes. A Paris, chez Pouget . joyallier, et chez Tilliard ;
frontispice in-4.
PORTRAITS.
6 . Baron , doyen de la faculté de médecine ; in-fol.
LITTHET DE MONTIGNY. 727
7. Belloy (de), profil , dessiné et gravé par Littret, 1765 ; in-4.
8. Belloy (de), allégorie in-8. G. A. Littret inv. sculp. 1765.
9. Bonneval , en turc. Schmidt del. ; in-8.
10. Gaylus (le Comte de), profil. Littret del. el sculp.; in-4 orné.
11. Clairon (Mel'e), médaille et revers. Litlretdel. et sculp. 1766; in-8.
12. Clairon (M^'le), médaillon dans un obélisque, d'après Schenau; in-4.
13. Dante Alighieri, 1767; in-l'Z» — Machiavel. — Arioste. — Pétrarque.
— Fortiguerra. — B. Corsini.
14. FavART, d'après J. E. Liotard ; in-8.
15. Hénault (le Président) , dessiné et gravé par Littret , 1765 ; in-4.
16. La Mettrie, d'après Schmidt ; in-4.
17. Le Kain. Littret de Montigny ad vivum del. et sculp.
18. Louis XV, vignette allégorique d'après G. de Saint-Aubin, pour
l'année jubilaire ; in-8.
19. LOUIS, DAUPHIN, dans un médaillon soutenu par la France
affligée; dédié à Madame la Dauphine , 1766. — MARIE-
JOSÈPHE DE SAXE. Dauphine, 1767, 2 allégories in-4.
20. Louise-Marie (Madame) de France.
21. Malesherbes, médaillon à la partie supérieure d'une composition
allégorique in-4. Monet inv. Eau-forte. Rarissime.
22. Malvin de Montazet, archevêque de Lyon, d'après L.-M.
Van Loo ; in-fol.
23. Montesquieu , d'après de Sève, frontispice allégorique in-4 ; 1766.
24. PoMPADOUR (Madame de) , buste de profil dans un encadrement
orné. Schenau del., 1764 ; in-4.
25. Rousseau (J.-J.), d'après La Tour, 1763; in-8.
26. Rousseau , d'après La Tour ; in-4 à claire-voie.
27. Sartines, d'après Vigée, 1765; in-4.
28. Sauvé de la Noue (J.-B.), d'après Monnel ; in-8 orné.
LONGUEIL (Joseph de),
1730-1792.
Joseph de Longueil, un des artistes du XVIIP siècle
qui ont porté à un haut degré de perfection la gravure
des vignettes, fut l'interprète le plus accrédité d'Eisen,
si bien que ces deux noms semblent presque insépa-
rables. On ne saurait , pour ainsi dire , compter le
nombre des petits chefs-d'œuvre dus à la collaboration
du dessinateur célèbre et de son graveur de prédi-
lection , mais rappelons ici que le fait seul d'avoir
été l'un des deux principaux graveurs des planches
des Contes de La Fontaine , dans la fameuse édition
des fermiers généraux, suffirait à mettre en réputation
durable le nom de Longueil.
Longueil est né à Givet en 1730. Ce fut le prince
évêque de Liège qui lui fit donner les premières leçons
de dessin. 11 apprit la gravure à Paris, sous la direc-
tion de Le Bas, d'Aliamet , et enfin de Wille, avec
lequel il conserva toujours d'excellentes relations. Il
parcourut l'Italie , l'Allemagne et les Pays-Bas , dut
beaucoup étudier, s'essayer à bien des planches , mais
ce n'est qu'assez tard qu'il osa voler de ses propres
ailes et laisser paraître les premières pièces portant
sa signature. Il est vrai que ce début est celui d'un
LONGUEIL. 729
maître ; en 1762, à l'âge de trente-deux ans, il donne
les illustrations d'après Eisen pour les Contes de La
Fontaine et se place ainsi du premier coup sur la
même ligne que Le Mire et Ghoffard,
Dès lors il est connu, sa réputation est établie, il est
sûr de ne manquer jamais de travaux. Les maîtres de
la vignette, Gravelot, Moreau, Marillier lui demandent
la gravure de quelques-unes de leurs planches, mais il
est surtout accaparé, littéralement absorbé par Eisen :
ces deux artistes créent ensemble plusieurs illustrations
fort remarquables , ils parsèment de fleurons les opus-
cules de Dorât, du marquis de Pezay et de D'Arnaud ,
ils mettent au jour les gravures de deux agréables
volumes, les Sens de Du Rozoi et les Tableaux de la
Volupté de Du Buisson : les fleurons de ce dernier
livre sont de délicieux petits tableaux. Le Matin,
c'est Diane assise sur des nuages et conduisant
le bras de l'Amour qui lance ses flèches ; le Midi
nous montre l'inévitable déclaration d'amour à une
jeune femme qui repose au pied d'un arbre; le Soir
arrivé, la jeune femme semble réparer le désordre de
sa toilette en écoutant les conseils d'une amie, l'amant
s'enfuit dans les bois , les amours s'envolent ; la Nuit
est représentée par une déesse sur son char répandant
l'ombre autour d'elle. Une des grandes vignettes est
assez plaisante , c'est celle de la nuit, l'alcôve est fer-
mée, les rideaux bien clos, mais de petits amours cu-
rieux trouvent moyen de s'y glisser sans bruit. Voilà
qui est bien d'Eisen !
Enfin , cet artiste fait graver au seul Longueil les
dix fleurons et les onze figures de la HemHade in-8
de 1770. Les fleurons sont dignes du dessinateur des
730 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
Baisers, mais nous n'en dirons pas autant des grandes
vignettes qui , sauf celle d'Henri IV et Gabrielle,
sont mal venues et pour un rien tourneraient au ridi-
cule, quoi que Voltaire en puisse dire dans cette lettre
bien connue, adressée à Eisen : « Je commence à
» croire. Monsieur, que la Henriade ira à la postérité,
» en voyant les estampes dont vous l'embellissez, je
» suis sûr que l'édition oîi elles se trouveront sera la
» plus recherchée... »
Une petite merveille , le portrait de la Comtesse de
Mareilles, mérite une mention spéciale, ainsi qu'une
suite de compositions d'Eisen , in-4 en largeur, rela-
tives aux ^Saz'sons , aux Quatre parties du jour, a.ux
Divertissements champêtres. A cette série viennent
s'ajouter encore deux pièces, la Jolie fermière <di la
Belle nourtnce.
Une des plus fines pièces de l'œuvre de Longueil est
encore gravée d'après Eisen, c'est un tout petit en-tête
pour le Théâtre de Favart, il représente la scène VIII
du Supplément aux soirées du Boulevard : M. et M"^
Roger promènent , assise sur une canne , leur petite
fille Marton. Ce petit bijou est exécuté avec une in-
croyable dextérité de main.
Gravelot fut quelquefois interprété par Longueil ;
dans les Contes Moraux de Marmontel , notamment,
le graveur s'est surpassé. Moreau lui confia aussi
quelques vignettes , pour la Lettre de Dulis à son
aîni , de Mercier, et l'Orphelin anglais, de Bongal.
Enfin De Longueil participa assez activement à la
gravure des fleurons des Fables de Dorât, d'après
Marinier.
Au dos d'un en-tête tiré à part , pour la fable de
LONGUEIL. 731
Dorât le Chemin perdu et retrouvé, que nous avons
vu dans l'exemplaire de M. Eugène Paillet , est écrit
au crayon rouge : Fait dans la pr'ison du châlelet
1773 le jour des Roy s. Pourquoi notre graveur se
trouvait-il en prison ? C'est qu'il lui était arrivé une
aventure fort désagréable. Il se trouvait rue Saint-
Séverin, lorsque survint un embarras de voitures. La
voiture de Madame Duparc , femme d'un avocat au
Parlement , se trouva prise dans la bagarre , son
cocher, nommé Antoine Bacquelin voulut avancer
quand même en criant gare , et selon toute vraisem-
blance , nous le parierions , avec force injures , et au
risque d'écraser quelqu'un. Bref un passant tira son
épée et en porta au cocher un coup si malheureux ,
en plein cœur, qu'il en mourut sur le champ , dans un
cabaret où on l'avait fait transporter. Madame Duparc,
ne pouvant désigner à coup sûr l'auteur du meurtre, fit
honnêtement arrêter deux personnes, un « particulier
en habit noir » qui se sauva , — c'était apparemment
le bon , — et Longueil.
M. Panhard, dans l'important travail qu'il vient de
publier sur Longueil , entre dans tous les détails de
de cette malencontreuse affaire et reproduit le procès-
verbal de l'interrogatoire subi devant le commissaire-
enquêteur du Châtelet : Joseph de Longueil . âgé de
quarante-trois ans , graveur en taille-douce, habitant
à Paris, rue du Plâtre Saint-Jacques , paroisse Saint-
Séverin, « enquis s'il ne passait pas dans le moment
» que le cocher dont le corps est présent a crié garre.
» et s'il n'a pas appréhendé qu'il le blessât :
» A dit que le fait est vray et qu'il avoit si sujet
» d'appréhender d'être blessé qu'il en est tombé sur
732 LES GRAVEURS DU XVIII" SIÈCLE.
» le côté droit dont son habit est crotté ainsi qu'il nous
» le fait voir
» A dit qu'il n'a point tiré l'épée : que s'il avoit eu
» à corriger un cocher insolent et maladroit il ne se
» seroit point servi d'autres armes que du bâton qu'il
» portait à la main ; que le fait est si vray que lorsqu'il
» a été arrêté , son épée étoit encore à son côté dans
» le fourreau et qu'elle n'étoit pas teinte de sang.
» Enquis s'il a vu donner le coup d'épée, a dit que
» non.
» Enquis s'il n'est pas vray qu'il s'est mis en devoir
» de sucer la plaie dudit Baquehn pour la guérir : a
» dit que le fait est vray, mais qu'il ne l'a fait que par
» un principe d'humanité.
» Enquis s'il connaissait le particulier habillé de noir
» qui avait été arrêté en même temps que lui et qui
» s'est évadé, a dit qu'il ne le connaissoit en aucune
» manière... »
Les amis du graveur, Wille surtout, firent démarches
sur démarches ; son innocence était évidente , il fut
relâché au bout d'un mois.
Longueil était d'ailleurs d'humeur assez bouillante
et querelleuse. On dit qu'il se battit une fois avec un
adversaire qui l'avait provoqué par erreur, le prenant
pour un autre, sans chercher à le détromper. Wille
fait aussi plusieurs fois allusion dans son journal à ce
cai'actère difficile.
Pour revenir aux travaux artistiques de Longueil ,
nous devons mentionner ici la grande estampe du
Dècmtrement du pont de Neuilly, cette belle pièce
est la plus considérable de l'œuvre du graveur.
A l'occasion du couronnement de Louis XVI,
LONGUEIL. 733
Longueil termina , sur les dessins de Cochin et les
eaux-fortes de Saint-Aubin, deux Allégories qu'il dédia
au roi et à la reine. Il obtint bientôt , en septembre
1776, un brevet de graveur du roi i. Le prince de
Gondé nomma aussi Longueil son graveur particulier.
La Société des graveurs de Vienne et la Société
d'Emulation de Liège se l'associèrent.
En 1773, le graveur alla demeurer rue de Sèvres 167
vis-à-vis les Incurables. Dans sa nouvelle demeure , il
fit la connaissance de la fille de Jacques-Denis Guérin,
entrepreneur des bâtiments du roi , et bien que plus
âgé qu'elle de vingt-sept ans, il demanda sa main et
l'obtint ; le mariage fut célébré le 27 novembre 1780.
Leur union fut heureuse , deux fils et deux filles en
naquirent ; mais la jeune femme fut prématurément
enlevée en 1790 à rafi"ection de son mari. Cette perte
fut pour Longueil un coup dont il ne put se relever.
1 Nous empruntons le texte de ce brevet à M. Panhard :
•' Brevet de Graveur du Roi , 16 septembre me. —
'■> Aujourd'hui , seize septembre mil sept cent soixante-seize , le Roi
■1 étant à Versailles, bien informé du talent, du mérite et de la probité
-> du sieur DE LONGUEIL, graveur, a jugé à propos de lui accorder
'^ un titre qui , en faisant connaître la protection que Sa Majesté accorde
n à ceux qui cherchent à se distinguer dans leur état, puisse en même
•> temps l'encourager à acquérir de nouveaux degrés de perfection dans
■1 celui de graveur, veut et permet qu'il puisse en prendre la qualité
'' dans tous les actes qu'il passera tant en jugement que dehors , sans
'1 que, pour raison de ce, il puisse être troublé ni inquiété pour quelque
« cause et sous quelque prétexte que ce puisse être ; et pour assurance
" de sa volonté , Sa Majesté m'a commandé d'expédier au dit sieur
•1 de Longueil le présent brevet qu'Elle a signé de sa main et fait
<■> contre-signer par moy, Conseiller Secrétaire d'Etat et de ses Com-
>i mandements et Finances.
" Signé : LOLIS.
n Et plus bas : Amelot. "
734 LES GRAVEURS DU XYIIF SIECLE.
Il alla déclinant , et le 17 juillet 1792 , faisant quelques
courses dans Paris , il se sentit indisposé , descendit
de sa voiture, entra dans un café pour demander un
verre d'eau, et tomba foudroyé par une attaque d'apo-
plexie.
Il avait beaucoup produit dans les dernières années
de sa vie , et nous signalerons , parmi ses derniers
travaux . les vignettes gravées d'après Moreau pour
le Voltaire de Kehl , un délicieux frontispice pour
Y Essai de deux amis ., de Laya et Legouvé, les illus-
trations d'après Le Barbier pour Gessner, d'après
Borel pour les Idylles de Berquin , celles enfin gra-
vées d'après les dessins de son élève Quéverdo pour
la Henriade et les Œuvres de Florian. Longueil fut
aussi employé à la gravure de plusieurs publications
importantes : la Galerie de Florence, la Galerie du
Palais-Royal, les Tableaux pittoresques de la Suisse,
et à la Galerie des peintres hollandais et flamands de
Lebrun. Voici une lettre qu'il écrivait au fameux
expert et qui montrera que l'habile buriniste était un
pauvre clerc en fait d'orthographe :
« Monsieur , je vien da voire Ihoneur de resoivoire
» une laitre de votre par par laquel vous me fait re-
» proche de navoire pas repondut a cel que vous mavé
» fait Ihoneur de meccrire je puis vous asseure Mon-
» sieur que je n'ay pas manqué a repondre quand j'ay
» eu l'honeur de resoivoire de vos laitre.
» A le gare de votre planche je suis Ihomme le plus
» malheureux je crois que M"" Quéverdo a qui j'ay
» donnez lauforte a faire a juré me faire an ragé et
» garde le tablaux au sis lontent quil a gardé le Jor-
» dansse que Monsieur De Gand vous a gravé. Je vous
LONGUEIL. 736
» asseure Monsieur que cela me mortifie daitre obligé
^> de vous faire attendre. Quand les graveur on besoins
» les un des autre il sanble quil fons ce quil peuve
» pour leur prochuredesmortificasionsje vous asseure
» Monsieur quau sistôt que jaurais Iho-forte que je me
» raeterais a près. Je vous prie de croire qu'il ni a pas
» de mauvaise volonté de ma par. Je suis parfaitement.
» Monsieur, votre très humble serviteur De Longueil. »
» Ce 24avriUel779 ^ »
Joseph de Longueil, nous le répétons, fut un des
plus habiles graveurs de vignettes de cette époque,
mais nous n'irons pas jusqu'à dire avec son biogi'aphe
que ce graveur « termina la vignette avec un fini pré-
» cieux et délicat qu'on n'était pas habitué à voir
» jusque là dans ce genre de travail, et que par la
» belle ordonnance des tailles qui donnait un velouté
» et un charme particuliers aux planches sorties de
» ses mains, il ouvrit à l'art de la vignette une route
» nouvelle que ses contemporains ont tous suivie,
» sans jamais atteindre cependant l'élévation où il
» s'était placé. » C'est là un éloge excessif auquel nous
ne pouvons souscrire. Longueil n'est pas le premier
des graveurs de vignettes. Sa touche n'a pas toujours
le brillant et l'éclat de celle de Le Mire ou de De
Ghendt ; combien aussi Saint-Aubin et Ghoffard sont
plus incisifs et plus clairs ! De Launay, Ponce et
Simonet n'ont - ils pas atteint d'ailleurs , et même
dépassé le mérite de Longueil?
Cette réserve faite , reconnaissons que Longueil
^ Cette lettre fait partie du cabinet de M. le baron .Jérôme Pichon ,
qui nous l'a gracieusement communiquée.
736 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE.
n'en fut pas moins un artiste remarquable. 11 fut sur-
tout buriniste, et se borna bien souvent à terminer des
planches préparées par d'habiles aqua-f or listes, Saint-
Aubin [Allégories dédiées au roi et à la reine) , Duclos
(figures du Voltaire de Kehl), Pélicier [Dévouement
du Sénéchal de Molac). De Ghendt (suite des Diver-
tisseinents champêtres, vignettes des Saisons , des
Idylles polonaises) , Quéverdo [la Henriade) . Giraud
le jeune [Précis de la Révolution), peut-être même
Gaucher (vignettes de Florian).
11 existe un catalogue raisonné très complet de
l'œuvre de Longueil*. Il est dû à M. Félix Panhard ,
parent par alliance du graveur, qui l'a dédié à M. H.
de Longueil, et contient, avec une notice biographique,
la description minutieuse de cinq cents pièces. Ce tra-
vail nous a été fort utile pour la rédaction du catalogue
succinct qui va suivre.
L'auteur nous avait obligeamment communiqué, du
reste, sa collection d'estampes de Longueil, réunie
avec une patience rare , et formant l'œuvre entier du
graveur.
M. Panhard, grâce à ses recherches incessantes, a
pu préciser la provenance de toutes les vignettes de
Longueil, et n'a point été obhgé (le fait vaut la peine
d'être cité parce qu'il est rare ) d'ouvrir dans son cata-
logue le chapitre des « pièces sans destination connue »
ce désespoir des iconographes , — nous en savons
quelque chose !
1 Joseph de Longueil , graveur du Roi , 1730-1792. Sa vie, son
œuvre, par F. Panhard. Paris, Morgand et Fatout, 1880. — Un fort
vol. grand in-8 , avec portrait et reproductions de gravures.
LONGUEIL. 737
ESTAMPES.
I. d'après aubry.
1 . La Correction maternelle ; in-fol. en largeur.
II. d'après boucher.
2. Les Caresses dangereuses ; m-4.
m. d'après eisen.
3. Concert MÉCFianique, inventé par R. Richard, exposé à la
bibliothèque du Roi, 1769; in-4 en largeur.
Cette estampe représente trois automates exécutant un morceau de musique.
A droite le comte de Saint-Florentin , à qiii la pièce est dédiée, reçoit les expli-
cations do l'inventeur.
4. LE PRINTEMPS, — L'ÉTÉ, — L'AUTOMNE, — L'HIVER,
suite de 4 p. in-4 en largeur.
5. LE MATIN, — LE MIDY, — L'APRÈS-MIDY, — LE SOIR,
suite de 4 p. in-4 en largeur.
6. LES AMUSEMENTS CHAMPÊTRES, — LES PLAISIRS
CHAMPÊTRES , — LE CONCERT CHAMPÊTRE , — LE
BAL CHAMPÊTRE, suite de 4 p. in-4 en largeur.
Les eaux-fortes dans l'œuvre de De Ghendt au Cabinet des Estan)pes.
1. LA JOLIE FERMIÈRE, — LA BELLE NOURRICE, 2p.
in-4 eu largeur.
Les 1 J pièces qui précèdent , et que M. Panhart appelle les Saisons, les Quatre
Parties du jour, la Vie champêtre et les Beautés, sont un des meilleurs ouvrages
d'Eisen , et aussi l'un des mieux réussis du graveur.
Nous en avons vu quelques épreuves d'eau -forte dans la collection de
M. Panhard et au Cabinet des Estampes.
11 existe des épreuves avant la lettre, très rares.
Les bonnes épreuves avec la lettre ont l'adresse de Daumont. Cette adresse a
ensuite été remplacée par celle de Crespy, puis par celle de Pillot.
IV. d'après LÉPIGIÉ.
8. Le Ménage des bonnes gens, dédié à la Comtesse de Matignon,
in-fol. en largeur.
738 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
V. d'après le prince.
9. Les Modèles, 1 789 ; grand in-fol. en largeur.
Peintre esquissant deux femmes nues, dans un riche atelier.
VI. d'après METTAY.
10. Naufrage près de Naples , — Vue des environs de Naples , 2 p.
in-fol. en largeur, dédiées à Wille et à M™*^ Wille.
Wille paya 1,300 livres à de Longueil la gravure de ces deux planches.
Madame Wille donna au graveur deux paires de manchettes de dentelle et un
nœud d'épée brodé en argent.
VII. d'après moreau le jeune.
11. Fidélité héroïque à la bataille de Pavie, ou dévouement du sénéchal
de Molac ; in-4 en largeur.
L'eau-forte par Pélicié.
VIII. d'après saint-far.
12. VUE DU DÉCINTREMENT DU PONT DE NEUILLY, tait
en présence du Roy le 22 septembre m2. — Dédié à Monsieur
Perronet , premier ingénieur des Ponts-et-Chaussées. . . . par son
très-respectueux serviteur et élève Eustache de Saint-Far, le l^""
janvier mô ; grand in-fol. en largeur.
Il faut avoir cette superbe estampe avec l'encadrement, c'est-à-dire avant que
la planche ait été dinùnuée pour être utilisée dans l'ouvrage publié par Perronnet
sur la construction de plusieurs ponts élevés sous sa direction .
IX. d'après vernet.
13. Les Pêcheurs; in-fol. en largeur. — Gravé à l'eau-forte par Lon-
gueil et terminé par Nicolet.
On trouve encore dans l'œuvre de De Longueil :
Le Cabaret flamand, Halte flamande, 2 p. bien gravées, d'après I. Van Ostade.
Le Maître d'école, d'après A. Van Ostade.
La Visite à la nourrice, d'après Téniers. « Cette estampe, l'une des plus grandes
» qu'ait exécutées le graveur, est assurément la plus mauvaise. » (Panhard) .
Cabaret 1 d'après A. Van Ostade (Cabinet Poullain).
Diane et Action, d'après Titien. — L'Amour piqué, d'après Giorgion. — Le Para-
lytique, d'après Bassan. — Les Fleuves, d'après M. de Vos. — L'Assemblée dei
dieux, d'après Th. Rombouts. [Galerie du Palais-Boyal.)
Le Bain de Diane, d'après C. Poelembourg. — Le Repas des dieux , d'après G.
Hoet. — Ruines romaines, d'après B. Breemberg. (Galerie Lebrun.)
LONGUEIL. 739
Planches pour la Galerie de Florence, les Tableaux pittoresques de la Suisse, le
Tableau général de l'Empire ottoman, le Voyage à Naples de Saint-Non, le Voyage
en France de Laborde.
X. ESTAMPES EN COULEUR.
H. LES DONS IMPRUDENTS —LE RETOUR A LA VERTU,
estampes dédiées à M. Guillaume de Grandjean, chirurgien oculiste
du Roi ; in-4.
La facture de ces compositions , qui ne portent pas de nom de dessinateur,
rappelle la manière de Borel. — 400 fr. 1881 .
15. Statue du dieu Pan ; ovale in-4.
Nous empruntons à M. Panhard la description de cette pièce : « A gauche la
» statue du dieu Pan à moitié cachée par le feuillage d'un bosquet. Un jeune
» homme tenant sa maîtresse enlacée écarte les branches pour découvrir la
•> statue. La jeune femme se détourne oirusquée, et sa compagne, assise sur un
" banc, paraît reprocher au jeune homme son acte inconvenant. »
M. Panhard cite encore les Deux Valets de chambre, estampe en couleur, — et
deux estampes en couleur relatives à l'Hymen et à l'Amour.
PORTRAITS.
16. Bossuet , d'après Rigaud ; in-8. Très mauvais.
n. Fontanieu (G. -M. de). Conseiller d'Etat, d'après Que verdo ; in-4
18. FOSSEUSE (Ma rie- Judith de Champagne, Marquise de) , mariée
en nei , morte en 1763 âgée de 18 ans, d'après Veslier ; médaillon
in-8.
A la raison dès l'âge le plus tendre
Réunissant les qualités du cœur.
Douce, aimable, sensée, elle a fait le bonheur
D'un Epoux qui te sçut et sentir et comprendre,
Il n'a duré que le tems d'une fleur,
Cest des biens d'ici-bas tout ce qu'on doit attendre.
19. Hulin (J.), Ministre de S. M. le Roi de Pologne iluc de Lorraine
et de Bar, d'après Sonois ; in-4.
20. Louis XV et Henri IV, médaillons accolés. — Eisen del.,
de Longueil sculp. mO; in-8 en largeur.
Tête de page pourYÉloge de Henri IV, par le marquis de Villette.
740 LES GRAVEURS DU XYIIl* SIECLE.
21. Louis XVI, — Marie-Antoinette, 2 p. allégoriques sur
leur avènement au trône , dessinées par Cochin , gravées à l'eau-
forte par Aug. de Saint- Aubin , terminées et présentées au Roi et
à la Reine par de Longueil. L'encadrement par Choffard. — In-4.
Ces pièces représentent Louis XVI soutenu par Minerve et Thémis { V Abon-
dance et tes Arts , les Talents, la Justice , refleurissent enfin....) et Marie-Antoi-
nette accueillant les vœux de la France ( Les Grâces sur son front soutiennent la
couronne ....). On les a , par la suite , modifiées à l'occasion de la naissance du
Dauphin. Les légendes sont alors : Peuple de ton bonheur vois ce précieux gage .
et 0 Reine, quel prisent vous faites à la France.
22. MAREILLES (P. B. H. de Létancourt , Comtesse de) , d'après
Eisen , 1765 ; in-4 orné.
L'Art ne peut exprimer les dons qu'à cet Objet
Avoit prodigués la Nature ;
Et le cœur d'un Epoux murmure
De n'en offrir ici qu'un emblème imparfait. . . .
Cette délicate pièce est la perle de l'œuvre de Longueil.
23. Ossat (le cardinal d'), d'après Bardin ; in-8.
Pour la Vie du Cardinal d'Ossat , 1771. Il y a aussi une vue de son tombeau.
VIGNETTES.
I. D APRES EISEN.
24. Illustrations pour les CONTES DE LA FONTAINE, édition
des Fermiers-Généraux , Amsterdam , n62.
LongueU est, avec Le Mire, le graveur qui a le plus travaillé à ce bel ouvrage.
Il a signé les planches de Joconde, le Cocu battu et content, le Mari confesseur, la
Gageure des trois commères (2) , le Petit Chien qui secoue de l'argent. . . (2) , le Ber-
ceau, la Mandragore , les Rémois, la Courtisane amoureuse , Féronde , le Psautier,
le Roi Candaute (2), le Diable en enfer, la Chose impossible, le Tableau , le Faiseur
d'oreilles.. ., le Contrat; toutes ces pièces sont d'une remarquable exécution,
notamment la première du Roi Candaule ; elles sont le plus beau titre de gloire
de Longueil.
25. Deux frontispices pour les Œuvres d'Ovide, Paris, Barbou, 1762,
in-12.
26. Thétis plongeant Achille dans les eaux.— Orphée-
2 p. in-8 (Emile de J.-J. Rousseau, La Haye, 1762).
LONGUEIL. 744
27. M. ET M""^ Roger et leur petite fille Marton ,
qu'ils promèaent sur le boulevard assise sur une canne.
Cette ravissante petite pièce est un fleuron pour le tome IV du Théâtre de
Favart, Paris, Duchesne, n6a-72.
28. Titre, vignette et fleurons pour ZÉLIS AU BAIN, poème du mar-
quis de Pezay, 1763, in-8.
29. Illustrations pour Lettre d'Alcibiade à Glycère, Épltre à la mal-
tresse que j'aurai, le Pot-Pourri, opuscules du marquis de Pezay.
30. Catulle, TibullE et GalluS, traduction du marquis de
Pezay, Paris, mi, in-8.
Un titre, sur lequel on voit un petit Amour voltigeant qui soulève la draperie
d'une statue de faune, et trois culs-de-lampe.
31. Lettre de Barnevelt par Dorât , 1763, in-8.
Une vignette et deux fleurons.
32. Vignette et fleurons pour Lettre du comte de Comminges à sa
mère et Lettre de Philomèle àProgne', par Dorât , 1764.
38. Lettre de Zeila à Valcourt , par Dorât, 1765, in-8.
Une vignette et deux fleurons.
34. Vignette pour Réponse de Valcourt à Zeila, par Dorât, 1765, in-8.
35. Vignettes pour Lettre de lord Velford à mylord Dirton, par Dorât,
1765, 2 p. in-8.
36. Épltre à Catherine II, par Dorât, 1765, in-8.
Deux fleurons.
37. Les De'virgineurs et Combabus, par Dorât, 1765, in-8.
Ceux vignettes.
38. Re'gulus, par Dorât , 1765.
Une vignette et deux fleurons.
39. LES TOURTERELLES DE ZELMIS, par Dorât, 1766, in-8.
Un titre, une vignette et deux fleurons composent l'illustration de cet opuscule.
Le titre représente un bassin et une fontaine avec des dauphins ; des arbres
sont sur les côtés.
I. 48
742 LES GRAVEURS DU XVIIF SIÈCLE.
40. Titre et fleurons pour LETTRES EN VERS, par Dorât , ItQQ,
in-8.
Le titre est fort joli. A ua encadrement de feuillage sont suspendus par des
rubans cinq petits médaillons représentant le sujet des Lettre» : l'abbé de Rancé,
Héro et Léandre, Zeila etValcourt, etc.
41. Amilca, ou Pierre-le-Grand , par Dorât, 1761, in-8.
Une vignette.
42. Titre pour MES FANTAISIES, par Dorât, 1768, in-8.
Une couronne de roses enrubannée occupe le milieu de ce joli titre. Au-dessus,
à gauche, déjeunes femmes dansent une ronde avec un satyre.
43. risle merveilleuse, par Dorât , 1*768, in-8.
Deux vignettes .
44. Les Cerises, ou la Double Méprise , conte en vers par Dorât ,
neg, in-s.
« Dans un riclie salon , un gros flnancier est assis, entouré de plusieurs amis,
» et tous regardent avec admiration et sensualité une jeune paysanne entière-
» ment nue qui ramasse des cerises répandues surle tapis, pendant qu'un artiste,
• assis sur la droite, dessine la jeune fille. »
45. Frontispice et fleurons pour LES BAISERS et LE MOIS DE
MAI, mO, in-8; T p.
Le frontispice et l'en-tête du Mois de Mai sont allégoriques au mariage du
Dauphin et de Marie-Antoinette.
L'eau-forte du frontispice dans la collection de M. E. Paillet.
46. Lettre de l'abbé de Rancé à un ami par Barthe, 1765, in-8.
Une vignette et deux fleurons .
47. En-tète et cul-de-lampe pour Lettre de Biblis à Caunus , de Blin
de Sainmore, 1765, in-8.
48. Frontispice pour Choix de Poésies allemandes, par Huber, 1766,
4 vol. in- 12.
49. Lettre en vers de Gabrielle de Vergy. . . par MaiUiol, 1766, in-8.
Une figure et un cul-de-lampe.
50. LES SENS, poëme en six chants par Du Rozoy, 1766, in-8, et
aussi 1767,
Titre (dans l'édition de 1767) ; la Musique, l'Ouïe, la Yue, le Tact, le Goût, l'Odorai.
LONGUEIL. 743
et la Jouissance , figures d'après Bisen et WOle fils ; six en-téte d'après Bisen et
WUle fils, et deux culs-de-lampe d'après Eisen .
Les eaux-fortes des figures dans l'œuvre de De Ghendt au Cabinet des
Estampes.
51 . Frontispice pour le Recueil de romances historiques , tendres et
burlesques, de De Lusse, 1767, in-8.
52. En-tête pour V Oraison funèbre d'Adrien-Maurice duc de Noailles,
par l'abbé de Lubersac, 1768.
53. Prométhée, — Argus, vignettes pour les Métamorphoses d'Ovide,
1769.
54. Frontispice des NOUVELLES HISTORIQUES. — Fayel. —
Mérinval. — Lucie et Mélanie. — Julie. — SYDNEY ET ValsAN.
— Basile ; il figures et fleurons pour les opuscules de Bacu-
lard d'Arnaud, n67-l'7'74.
Le frontispice des Nouvelles historiques représente la Muse de l'histoire,
55. Fleurons pour le Théâtre DU PRÉSIDENT HÉNAULT, 1770,
3 p.
Le fleuron du titre est une des plus jolies petites pièces de l'œuvre de Lon •
gueil. Dans un encadrement ovale senties trois Muses de la comédie, delà tra-
gédie et de la poésie lyrique . Au-dessus la devise Musis Amicus.
56. Les Militaires au-delà du Gange , par de Lo-Looz , 1770 , in-8 ;
2 figures.
57. Les GÉORGIQUES, traduites par Delille, Paris, Bleuet, 1770 ,
in-8.
Frontispice par Casanova et quatre figures par Eisen, gravés par de Longueil.
58. LA HENRIADE, par M. Arouet de Voltaire , nouvelle édition ,
Paris, Vve Duchesne, etc., 1770, 2 vol. in-8.
Un titre avec portrait de Voltaire , que nous avons décrit au catalogue de
Cathelin.
Un frontispice allégorique , dix figures médiocres , et dix très jolies têtes de
page par Eisen et Longueil. C'est l'ouvrage le plus considérable du graveur en
fait de vignettes .
59. Jeune femme étendue dans un bosquet , un jeune homme s'avance
vers elle , cachant un poignard derrière son dos ( les Nuits ,
d'Young, 1770, in-8).
744 LES GRAVEURS DU XVIIP SIECLE.
60. LE TABLEAU DE LA VOLUPTÉ, ou les Quatre Parties du
jour, par M. D. B. (Du Buisson), Cythère, au Temple du Plaisir,
mi, in-8.
Charmant petit livre contenant un titre , quatre figures , quatre têtes de page
et quatre culs-de-lampe. Les figures sont assez lourdes, mais les fleurons sont
gracieux et fins .
61. Illustrations pour V Histoire des ordres royaux de Notre-Dame du
Mont-Carmel, etc., par Gautier de Sibert, 1112 ; 4 p.
62. Deux figures pour VArioste de Baskerville, m3.
Elles sont tellement mauvaises qu'on en a fait refaire de nouvelles par Moreau,
gravées par N. de Launay.
63. Trois fleurons pour Tarsis et Zélie, ni4.
64. Illustrations pour V Histoire philosophique . ... de l'abbé Raynal ,
l'7'74, in-4.
65. Idylles polonaises, Varsovie, ms, in-8.
Un frontispice avec médaillons représentant des poètes polonais, et ^ figures.
L'eau-forte du frontispice dans l'œuvre de De Ghendt au Cabinet des Estampes.
66. Deux frontispices pour le Troisième et le Quatrième livre de
fragmens à Vusage des artistes, par Eisen.
II. d'après gravelot.
67. Frontispices pour Justin , Lucain , V Imitation de Jésus-Christ ,
V Éloge de la Folie , le Prœdium rusticum de Vanière , éditions
de Barbou, in-12.
68. Vignettes pour les Almanachs iconologiques, in-12 ; 19 p.
69. Rodogune, — Pertharite, — Sopbonisbe {Œuvres de Corneille,
1764, in-8).
70. Deux -vignettes ovales, in-4, pour la Partie de chasse de Henri IV,
de CoUé.
71. Illustrations pour les CONTES MORAUX de Marmontel , 1765,
3 vol. in-8.
Soliman II. — Les Deux Infortunés. — Le Philosophe soi-disant. — La Mau-
vaise mère. — La Bonne mère. — Annette et Lubin. — Les Mariages samnites.
— La Femme comme il y en a peu. — L'Amitié à l'épreuve.
Toutes ces illustrations sont ravissantes.
LONGUEIL. 7*6
•72. Prométhée, — l'Amour maternel , vignettes in-8 {Œuvres de J.-J.
Rousseau).
13. L'Orphelin de la Chine, — Socrate (Voltaire in-4, Genève, n68j.
74. Réductions des figures de Gravelot pour la grande édition in-4 de
Voltaire, n68 ; 15 p. in-12.
75. Trois figures pour les Deux Avares et le Fabricant de Londres,
de Fenouillot de Falbaire.
III. DAPRES MARILLIER.
76. De Imitatione Christi , Barbou , 1764 , in-12.
Frontispice et quatre figures.
77. Fleurons pour les Fables de Dorât , 14 p.
La Tulipe et les Bluets , en-tête représentant un jardin à la française, est une
pièce estimée et recherchée .
Le Chemin perdu et retrouvé, en-tête, représente une jeune paysanne assise au
bord d'un ruisseau.
L'eau-forte est dans l'œuvre de De Ghendt au Cabinet des Estampes.
La pièce terminée existe avec deux coiffures différentes pour la paysanne.
C'est la planche que LongueU a faite dans la prison du, Châtelet le jour des Rois
de 1773.
78. En-tête pour LOREZZO, — cul-de-lampe pour LiEBMAN (Bacu-
lard d'Arnaud , 1775).
Le fleuron de Lorezzo est une très jolie pièce. On y voit une jeune femme au
lit, un vieux médecin à son chevet appuyé sur sa canne. Un jeune homme est
debout au pied du lit.
79. Les Jardins, poème du P. Rapin, 1773; un frontispice-titre.
80. Illustrations pour le Théâtre du monde de Richer ; 5 p. in-8.
81. Vignettes pour le Cabinet des Fées, les Œuvres de Le Sage et les
Œuvres de l'abbé Prévost ; in-8.
82. Vignette pour le Rousseau de Cazin , in-18.
IV. d'après moreau.
83. En-tête et figure pour Lettre de Dulis a son ami , par Mercier,
1768, in-8.
746 LES GRAVEURS DU XVIIP SIÈCLE.
84. Le voilà, le voilà mon enfant I vignette in-8 , 1769 ( VOrphelin
anglais, drame de Bongal).
85. Progné et Térée , — l'Oracle de Delphes , 2 p. [Métamorphoses
d'Ovide, Vim, in-4).
86. Les Grâces président aux plaisirs, in-8 (^es Grâces ,
par de Querlon, 1769].
S"?. Illustrations pour le Voltaire de Kehl.
L'Orphelin de la Chine.— La Prude.— Chariot.— Memnon. — Le Blanc et le
Noir. — La Pucelle, chants VIII, XII, XIU.
Plusieurs de ces vignettes sont terminées par Longuell sur des eaux-fortes de
Duclos .
88. ESSAI DE DEUX AMIS , par Laya et Legouvé, 1786, in-8.
Très joli frontispice : deux enfants nus dans un paysage ; au fond, un berger
aux pied.s d'une bergère.
89. Vignettes pour VHisloire de France , Paul et Virginie ( 2 p. dont
une d'après Vernet), Regnard, le Nouveau-Testament, Jehan de
Saintré, le Précis de la Révolution.
90. Frontispice pour VHistoire des religions de Stanislas Delaunaye ,
in-4.
M. Panhard nous apprend en outre que c'est par Longueil qu'a été terminée,
sur une eau-forte de Giraud le jeune, la Procession de la déesse Isis.
V. DAPRES DIVERS.
91. Énée abandonne Troie, d'après Monnet [Métamorphoses d'Ovide ,
92. Figures d'après Borel pour le Siège de Calais de de Belloy, les
Œuvres de Berquin, idylles et romances, in-18.
93. Figure d'après Brandoin pour les Poésies Helvétiennes .
94. Chasse à l'épervier, dédiée à Monseigneur le Duc de Chevreuse.
Martinet inv., Longueil del. ; in-4.
95. Vignette d'après Hamilton pour Shakespaere. in-8.
96. Vignette d'après Marchand pour Plutarque, in-8.
LONGUEIL. 747
97. Illustrations d'après Le Barbier pour les Idylles de Gessner, in-4 ;
12 p.
98. Frontispice d'après Le Barbier pour les Mélanges de littérature du
baron de Villenfagne, HSS, in-8.
99. Kailaz, ou les Jeunes Sauvages, drame, 1770, in-8.
100. Les Malheurs de l'inconstance, par Dorât, 17~2, in-8.
Deux figures d'après Quéverdo .
101. Deux fleurons d'après Quéverdo pour les titres de LA DERNIÈRE
HÉLOÏSE , de Dauphin , 1784.
102. Figures d'après Quéverdo pour la Henriade in-4 ; 2 p.
Les eaux-fortes par Quéverdo .
103. Figures d'après Quéverdo et Flouest pour les Œuvres de Florian,
1783-99, in-12 ; 16 p.
104. Cul-de-lampe d'après Hilair pour le Voyage pittoresque de la
Grèce.
105. Mes Promenades champêtres, poésies pastorales de
Leclerc, 1786, in-8.
Joli frontispice d'après Marchand. L'auteur, assis sous des arbres; au fond,
des bergers .
106. Illustrations d'après Freudeberg pour l'Heptaméron ; 22 p.
107. Figures d'après Myris pour V Histoire romaine.
LORIEUX.
Aucun ouvrage ne fait mention de ce graveur. On
trouve portant son nom dans la Galerie du Palais-
Royal et dans un Faublas en 13 volumes in -18,
Paris, chez l'auteur et chez Farre, 1796, illustré de
treize mauvais frontispices de Ghalliou.
Un travail un peu meilleur est une assez jolie petite
réduction in-18 des célèbres illustrations que Moreau
avait exécutées pour Emile et pour la Nouvelle
Hèloïse dans les Œuvres de J.-J. Rousseau , édition
de Londres , 1774-1780.
Ces réductions de Lorieux sont bien moins connues
et du reste méritent bien moins de l'être , que celles
de Delvaux pour l'édition de Gazin. Nous ne savons à
quelle édition elles étaient destinées.
LORRAINE (Jean-Baptiste de
4737-
De Lorraine , né à Paris en 1737, était le fils d'un
imprimeur en taille-douce. 11 a laissé peu de pièces.
Venus, se prèparanl pour le jugement de Paris ,
reçoit dC avance la pomme des mains de l'Amour ;
in-fol. d'après Boucher, 1764.
Hommage à l'Arnour, d'après C. Van Loo, 1772;
in-fol.
L'Onde tranquille, d'après Vernet ; in-fol.
Allégorie sur le mariage du Dauphin et deMa?'ie-
Antoinette, d'après S. Beauvais ; in-fol.
Estampes pour la Vie de Saint Grégoire , d'api'ès
C. Van Loo , et pour les Sens , d'après Dumesnil. Ces
suites ont été gravées avec d'autres artistes.
Ruines, d'après Pannini.
Divers Paysages.
Duhus de Champville, acteur; — le Maréchal
d'Estrées, d'après M. Van Loo, in-4; — Forbin, col-
lection d'Odieuvre ; — le Comte de Caylus, in-4 ; —
l'Abbé Aubert , in-4.
Vignettes d'après Gravelot pour la Henriade, in-4,
et Y Histoire de Sophie Francourt.
LOUTHERBOURG (Philippe-Jacques).
n40-'1812.
La gravure ne joue qu'un rôle fort secondaire dans
l'existence artistique de Loutherbourg, et nous n'avons
ici à considérer en lui ni l'habile peintre de paysages,
ni même le dessinateur qui composa des illustrations
pour les Œuvres de Shakespeare et pour le poëme
de Rosset, r Agriculture. Nous ne dirons donc que
quelques mots de sa vie.
Loutherbourg est né à Strasbourg le 1" novembre
1740 ; son père, peintre de miniatures, lui donna les
premières leçons. A l'âge de quinze ans , le jeune
Loutherbourg vint à Paris , passa quelque temps dans
l'atelier de Carie Van Loo , puis entra dans celui du
peintre de batailles Casanova. Ses progrès furent pro-
digieux.
Au bout de peu de temps, Loutherbourg faisait haut
la main des « Casanova » parfaitement réussis. Il fai-
sait aussi, dit-on, la cour à la femme de son maître, et
avec succès. A vingt-deux ans, sa première exposition
publique fut un triomphe. On le compara à Berghem.
Diderot prodigua les éloges au jeune peintre et l'encou-
ragea à lutter de vigueur de pinceau avec le « terrible
Vernet ». L'Académie le reçut par acclamation.
LOUTHERBOURG. 764
Loutherbourg était d'un extérieur agréable, il aimait
le faste, la parure, le plaisir. Il épousa une jeune veuve
fort jolie, mais fort coquette à ce qu'il faut croire.
Rappelons le malicieux trait que lui décocha Diderot
au sujet de sa femme : « Votre femme est jolie, insi-
» nuait-il au peintre, on le lui disait avant qu'elle vous
» appartînt, on continue à le lui dire depuis qu'elle est
» à vous ; à la bonne heure si cela vous convient
» autant qu'à elle , mais faites en sorte qu'on puisse
» oublier sans conséquence, sur son lit et sur le vôtre,
» son chapeau, son épée, et sa canne à pomme d'or ;
» M'"* Vassé et tant d'autres moitiés d'artistes que je
» nommerais bien ont aussi des lits, mais on y retrouve
» tout ce qu'on y oublie. »
En 1771, Loutherbourg passa en Angleterre, appelé
pai' Garrick qui lui offrait mille livres sterling par an
pour faire les maquettes des décorations du théâtre de
Drury-Lane. 11 y retrouva son succès habituel. Il y fit
la connaissance de Cagliostro , fut en quelque sorte
fasciné pai' le célèbre aventurier, donna dans l'illumi-
nisme, et chercha à guérir les malades et à rendre la
vue aux aveugles. Il fit même avec Cagliostro un
voyage en Suisse. Loutherbourg est mort à Londres
en 1812.
Il a laissé, comme pièces gravées de sa main :
1. Première suite de soldats , dessinée et gravée par P.-J. Louther-
bourg, peintre du Roy. Se vend chez l'auteur rue du Bacq à côté
des Missionnaires étrangers ; 6 p. in-8.
2' état: Adresse de Lenfant, rue Poissonnière.
2. Seconde suite des Figures dessinées par Loutherbourg , 6 p. numé-
rotées, in-8.
752 LES GRAVEURS DU XVIII« SIÈCLE.
3. Troisième suite : le Matin, le Midy, le Soir, la Nuit ; 4 p. in-4 en
largeur.
4. Tranquillité champêtre,— la Bonne petite sœuR,
2 p. in-fol.
Ces pièces ont porté successivement les adresses : 1" de Lenfant, 2" de Niquet,
3" de Martinet; un 4* état est avec la lettre grattée.
5 . La Vache et l'Anon ; in-8 en largeur.
6. Le Repos du pâtre ; in-4 en largeur.
"7. Les Travaux rustiques ; in-4. Chez Basan.
8. Berger jouant du hautbois. Loutherbourg fecit London ; in-4.
9. Jeune berger tenant une cage entre ses jambes ; in-4.
10. Douaniers cherchant dans une malle. — Dedicated to David
Garrick, as testimony of his Regard ; in-4 en largeur. — Paysage
au bord de la mer, au premier plan un homme monté sur un
cheval qui rue ; pendant de la pièce précédente.
11. Savetier devant sa table, embrassant une jeune fille; pièce ano-
nyme, in-8 (Baudicour).
12. Joueurs de trictrac au café Procope , pièce burlesque , in-4 en lar-
geur, 1763.
13. La Boutique d'un barbier, pièce humoristique ; in-8 en largeur,
1770.
14. An Exhibition. Personnages comiques en contemplation devant des
tableaux ; in-4 en largeur, au lavis, 1776.
Sur un premier état, très rare, le titre est The Àcademy (Baudicour) .
15. M. Weston and Dragon in the Rival Candidates ; in-8.
16. Portraits en charge de divers personnages anglais ; 6 p.
17. Vignette de l'École des Femmes, pour un Molière publié en anglais.
18. Matelot oriental ; in-8, non signé (Baudicour).
19. Études de têtes ; 1 p.
20. Costumes maronites ; 4 p. au lavis.
LOUVION (Jean-Marie).
4 740-
Louvion , né à Versailles en 1740 , fut élève de
Fessard. Il n'eut jamais aucun talent et ne mit au jour
que des choses pitoyables , traitées d'une pointe que
Renouvier qualifie de « sale ».
Pendant la Révolution il s'appliqua à la gravure des
pièces de circonstance : Allégorie sur les secours
donnés aux malheureux par les francs-maçons pendant
l'hiver de 1789 ; Généreux dévouement des gardes
nationales pensionnés; Louis XVI , Mirabeau, etc.
Frontispice pour le Procès cynminel de Marie-
Antoinette, Paris, Deuné, an II ; in-8.
Quelques pièces sont d'une rare violence, comme
Appel au diable pour les corps sans têtes sur les
jugements de Dieu. Le roi , la reine et le dauphin ,
portant leur tête sous le bras , se présentent à Minos :
« Infâmes scélérats , monstres affreux, vous n'êtes
seulement pas dignes des enfers. » — Tableau d'his-
toire naturelle du diable, collection de têtes coupées.
La Surprise anglaise, an III.
Adresse de Prudhomme père et fils , imprimeurs
en taille-douce, rue Si-Jean n° 12, à Paris ; in-8.
LUCIEN (Jean-Baptiste).
i748-<806.
Lucien, étant graveur dans la manière du crayon, ne
pouvait pas manquer de faire des figures académiques
et autres têtes d'études pour servir de modèles aux
jeunes élèves : Juif, Jeune homme , Femme, Ange
pleurant, Vierge de douleur, Christ mort, d'après
Bouchardon, St-Pierre, d'après Siodtz , Apollon, St-
Jèrome et autres d'après C.VanLoo et Pierre.
En dehors de ces études, nous trouvons dans son
œuvre : la Petite sœur, d'après Greuze ; les Jeunes
italiennes , la Vendange , Danse d'enfants , la Belle
persane, S'^-Cécile, l'Automne , la Danse , Jeunes
Femmes italiennes , d'après le Guerchin ; l'Enlève-
ment de Céphale, d'après P. de Cortone ; Musiciens
italiens, d'après Bouchardon ; Sylvains et Amours ,
d'après Gipriani; le Lever de l'Aurore, d'après Pierre;
Andromaque pleurant sur les cendres d'Hector,
d'après A. Kauffmann. — Très belles vignettes d'après
Gochin pour les livres X à XIII de Tèlèmaque ; in-4 ,
en couleur ou à la sanguine.
Bas-relief, pour l'arc de triomphe de la Fédération,
grande frise d'après Moitte.
Napoléon i**" , d'après Le Barbier.
MAC-ARDELL (James;
1710-1765.
Mac-Ardell est originaire d'Irlande. « Admirable
» mezzo-tinto engraver », s'écrie Bryan. Ce graveur
fut , en effet , un des plus habiles dans l'exécution de
la manière noire. Il a traduit des tableaux de Rem-
brandt , Murillo , Rubens et Van Dyck ; mais les plus
belles pièces de son œuvre sont les portraits , qu'il
réussissait supérieurement. Citons , les Enfants du
Duc de Buckingham, d'après Van Dyck ; de très jolis
portraits de femmes d'après Reynolds : la Comtesse de
Cardigan , Lady Dawson , Comtesse de Berkley ,
Lady Fortescue, la Comtesse Stanhope, Comtesse de
Waldegrave , la Comtesse de Kildare , Lady Mon-
tagu, Lady Russel, la Duchesse de Marlhorough.
Lady Lennox et la Duchesse d'Argyll, d'après
Ramsay ; la Comtesse de Coventry, d'après Hamilton;
la Duchesse d'Ancaster, d'après Hudson.
Parmi les portraits d'hommes, Washington, d'après
Pond ; Lord Anson , B. Franklin , d'après Wilson ;
l'acteur Garrick ; l'acteur Woodwarde ; le peintre
John Pine ; et les portraits , grandeur nature , du roi
George d'Angleterre , de la reine Charlotte (1761) et
du Prince de Brunzwick-Lunehourg .
MACHY (Pierre-Antoine de).
1722-
Pierre-Antoine de Machy, né à Paris vers 1722 , et
élève de Servandoni , était un peintre d'architecture
de talent , qui fut reçu à l'Académie , et d'après lequel
ont été gravées en couleur quelques pièces intéres-
santes par Janinet et Descourtis.
Lui-même s'est appliqué à la gravure à l'aqua-tinte ,
et son fils a aussi produit quelques pièces en couleur.
Costumes des régiments d'infanterie, avec Guyot.
Portraits des grands hommes, femmes illustres et
sujets ^néinorables dédiés au Roi, titre in-fol. au
lavis.
La Victoire et la Renommée, fleuron de dédicace
d'après Monnet, au lavis.
Dévouement à la Patrie , Talamona inv. Machy
sculp.
Déclaration des droits de l'homme ; in-fol. lavis.
De Machy le fils était peintre : il exposa en 1791
une Vue de l'intérieur de l'égUse de la Madeleine , et
en 1793 un tahleau de la Fédération et des vues de
Paris. C'est d'après son dessin qu'Hémery a gravé
l'Inauguration de la statue de Louis XV.
Les magret.
1751-18...
Charles-François- Adrien Magret est né à Abbe-
ville le 12 mai 1751 * ; il fut élève deDupuis, de Littret,
d'Aliamet et de Saint- Aubin.
L'Offrande à l'Atnour, d'après Greiize, in-foL, est
sa meilleure estampe. Elle n'avait pourtant pas trouvé
grâce aux yeux de l'auteur peu bienveillant des
Lettres d'un voyageur anglais , qui ont pour sujet
les estampes gravées d'après les tableaux de Greuze.
Après avoir dit que les travaux du graveur n'indiquent
pas si l'Amour est d'airain ou de marbre , et qu'on est
tenté de prendre le plus beau des immortels pour « un
» petit marmot descendu des montagnes de la Savoie
» et monté sur le piédestal pour faire une niche à la
» nymphe », il ajoute :
« La gravure de cette estampe est en général d'un
» travail maigre et indécis. On ne peut cependant
» refuser à l'artiste un burin souple et gracieux pour
» rendre les chairs , et on doit lui savoir gré de
» n'avoir pas mis dans sa couleur cette âcreté de
1 M. Delignières a bien voulu vérifier pour nous les dates sur les
actes de baptême conservés à Abbeville.
n. 49
758 LES GRAVEURS DU XVIIF SIECLE
» teintes justement reprochée aux artistes qui gravent
» sous la direction de M'Greuze. Il semble même, par
» la manière dont il corrige les épreuves , qu'il ne
» compte pour rien la variété des tailles, la pureté des
» travaux, la netteté du burin. Aussi ne doit-on pas
» espérer de trouver dans les gravures faites sous ses
» yeux , des objets caractérisés par les tailles savam-
» ment inégales d'un burin libre et varié , et encore
» moins ces tons transparents , argentins , qui flattent
» agréablement l'œil de l'amateur dans les gravures
» des Edelinck , des Poilly, des Drevet. »
On a encore de Macret :
La Fontaine enchantée de la vérité d'amour,
grande pièce en largeur , d'après Cochin , terminée
sur une eau -forte de Saint -Aubin. Céladon et Sil-
vandre s'exposent à la fureur des lions qui gardent
la fontaine enchantée , les licornes prennent leur
défense.
La Fuite à dessein, d'après Fragonard, par Macret
et Couché.
La Méprise, d'après Mouchet, terminée par Anselin.
Arrivée de Rousseau aux Champs - Èlysées ,
d'après Moreau.
Réception de Voltaire aux Champs-Elysées par
Henri IV, d'après Fauvel.
Les Prémices de l'amour -propre (enfant se regar-
dant dans une glace), d'après Gonzalès.
Vue de l'explosion du magasin à poudre d'Ahhe-
ville en 1753; in-fol.
Portraits de Joseph Legros , de l'Académie royale
de musique, de l'oculiste Degravers, dessiné et gravé
par C. Macret en 1777, in-4 orné ; du médecin Antoine
M ACRE T. 759
Petit, 1775 ; de La Fontaine, in-8 orné, pour la*con-
trefaçon de l'édition des fermiers-généraux.
Vignettes pour les Épreuves du sentiment et les
Epoux malheureux, de Baculard d'Arnaud, /e'remze,
poëme de Desmarais (1771) , Œuvres de Le Sage, de
Pope, de Crèbillon , d'après Marillier, Voyage de
Saint-Non, etc.
Il mourut à Paris le 24 décembre 1789, n'ayant pu
terminer une planche du Siège de Beauvais, qui devait
lui ouvrir les portes de l'Académie.
Jean-César Magret , né le 1*"' mars 1768, à Abbe-
ville , fut graveur et marchand de tableaux à Paris.
M. Loizelet nous a communiqué son adresse gravée,
deux amours qu'un troisième fait danser au son du
chalumeau : Macret graveur et m'' d'estampes . rue
de Thionville, n^ 1744, à Paris. Tient les tableaux
et donne des leçons de dessin.
Ce qu'il a gravé n'a aucune importance : Mayne-An-
toinette (1789), M"»* du Châtelei au pointillé , Duporl-
Dutertre au lavis. Le Satyre et la Bacchante endor-
Tnie, la Joyeuse bacchante, 2 p. au pointillé , d'après
Caresme.
On retrouve encore César Macret dans le Racine
de Moreau (1811) , dans le Bouf/îers (1813) , etc.
MAILLET (JosEPH-C).
1751-180..
J.-G. Maillet, né en 1751 , élève de Née, a gravé
plusieurs paysages pour le Cabinet Choiseul et la
Galerie Le Brun, Diane au bain, d'après Trémolières ;
Vénus et Adonis, d'après Gazes ; divers sujets, la
Fille à Simonette et l'Heureuse Jeannette, d'après
Colibert , le Bon Berger et le Mauvais joueur ,
d'après Boucher.
Des vignettes pour différents ouvrages : Œuvres
de M. de Belloy, d'après Borel , le Berquin de Re-
nouard, Œuvres badines de Caylus et Voyages ima-
ginaires, d'après Marillier, Nouvelles de Cervantes
et Contes de La Fontaine, d'après Desrais, Œuvres
de J-J. Rousseau , édition de Poinçot , Histoire de
France, d'après Moreau, Tableaux pittoresques de
la Suisse.
Un très joli en-tête d'après Marillier pour Makin,
nouvelle de Baculard d'Arnaud.
J. G. Maillet a travaillé jusqu'en 1807.
Il y a aussi un G. -F. Maillet qui a signé l'Inno-
cence reconnue , d'après Binet , et un portrait du
botaniste Miller.
MAJOR (Thomas).
1714-1768.
Thomas Major, un des bons graveurs au burin de
l'Angleterre , a passé une grande partie de son exis-
tence en France , où il fut employé par les éditeurs
d'estampes, et particulièrement par Basan , à graver
des planches d'après Berghem , Van der Neer. Cuyp ,
Wouvermans , Claude Lorrain , Poussin . et surtout
d'après Téniers (le Chirurgien de campagne, la Ker-
messe, le Laboratoire de V alchimiste , la Chasse aux
oiseaux, etc.). Il en a signé quelques-unes par ana-
gramme Jorma ou par abréviation Jor. C'était un
habile graveur de paysages.
Major retourna en Angleterre où il exécuta quelques
portraits, Lord Granville, le Cardinal Pôle, et publia
l'année même de sa mort , à Londres , un recueil de
24 planches , The Ruins ofPœstum , d'après les des-
sins de Barra (1768).
Major a gravé , en 1744 , de jolies pièces d'après
Gravelot , Jeunes gens et jeunes filles dans diverses
attitudes.
MALAPEAU (Claude-Nicolas
1 755-'! 804..
Cet élève de Moitte a signé la Ruelle, d'après
Ghalle , et des vignettes pour le Cabinet des Fées,
l'Histoire de France de Moreau et le Gil Blas de
Ghaigneau (1796) , le Montesquieu de Plassan (1796),
l'Histoire romaine de Myris, le Bréviaire des enfants
de la joie, an IX, le Nouveau Testament, d'après
Monsiau , des planches pour le Voyage de la Suisse,
sous la direction de Née, TponrV Essai sur la musique
de La Borde, la Description générale et particulière
de la France.
Malapeau grava sur le dessin de Cochin, fait d'après
une peinture deRoslin, la planche représentant le Roi
reçu à r Hôtel - de -Ville de Paris à son 7^etour de
Metz. Diderot disait ceci , dans son Salon de 1761 , du
portrait du roi qui s'y trouve : « Ce Louis XY long ,
» sec , maigre , élancé , avec une petite tête couverte
» d'un chapeau retapé , est-ce là ce monarque que
» Bouchardon a immortalisé par sa figure de bronze ?
» Celui de RosHn a l'air d'un escroc qui a la vue basse. »
Une eau-forte de vignette d'après Cochin pour le
livre YIII de Tèlèmaque. Elle était destinée à l'édition
de Drouët et n'a pas été terminée.
MALAPEAU. 763
La Folle journée ou le Mariage de Figaro , Paris
Ruault, 1784, in-8, 5 fig. de Saint-Quentin , gravées
par Malapeau, la dernière par Roy. Nous croyons , en
ce qui nous concerne, que C(3s figures sont simplement
des retouches des planches gravées par Halbou , Lié-
nard et Lingée , et non des planches nouvelles. Elles
sont , du reste , infiniment moins estimées que ces
dernières, quoique sur la figure du cinquième acte ,
on se soit amusé à découvrir la gorge de Rosine, qui
était couverte dans la gravure primitive .
Parmi les planches préparées par Malapeau pour la
Description de la France de La Borde , on remai'que
une amusante eau-forte représentant la grande cour
du château de Versailles , avec une parade de mili-
taires.
L'eau-forte de Y Intérieur d'un comité révolution-
naire, estampe curieuse des Tableaux de la Révolu-
tion , porte le nom de Malapeau. Gomme le dessina-
teur, Fragonard fils , n'y a pas flatté les citoyens
membres du comité , Renouvier ne peut s'empêcher
d'être fort dur pour lui.
fin l'an V, Malapeau publia chez le libraire Saillior,
60 planches des bizarres gravures dites Contes drola-
tiques de Pantagruel, copies des bois originaux parus
en 1565 , et qui ont souvent été attribués , mais sans
grande vraisemblance, à Rabelais.
Portrait de i¥"* Raucour, en Médée, dessiné d'a-
près nature et gravé par Malapeau, an VII ; in-fol.
MALBESTE (Georges).
1754-
Cet élève de Le Bas est surtout connu par ses nom-
breuses préparations à l'eau-forte. Il a travaillé pour
V Histoire de France de Moreau , la Galerie de Flo-
rence, le Musée français, la Galerie du Palais-Royal,
les portraits de la Collection de Déjahin , le Voyage
en Egypte de Denon, le Voyage de Cassas, le Voyage
en Grèce de Choiseul-Gouffier, le Voyage à Naples
de Saint-Non , Y Histoire de l'Empire ottoman de
Mouradja , le Voyage d'Espagne , etc. Deux pièces ,
signées de lui , attirent surtout l'atLention :
1. LA SORTIE DE L'OPÉRA, d'après Moreau le jeune (Monument
du Costume .
Il est à remarquer que cette estampe parait plutôt représenter un mariage.
2. LA PLAINE DES SABLONS (Revue des Gardes-Françaises et
Suisses) , estampe des plus intéressantes, tirée de la Description
de la France par deLaLorde, etc., gravée par Malbeste, Liénard
et Née ; grand in-fol. en largeur.
L'eau-forte, 245 fr., et avant la lettre, 400 fi'. 1881 .
Cette estampe offre cette particularité, qu'elle fut annoncée non-seulement par
prospectas, mais encore par spécimen. Malbeste a gravé, en effet, un Groupe tiré
du, superbe dessin de M. Moreau le Jeune, et qui représente quelques personnages
du premier plan , l'homme dont le vent emporte le chapeau , etc . On promettait,
dans le prospectus, que l'estampe serait aussi bien gravée que le spécimen.
Voilà un curieux exemple de réclame.
MALŒUVRE (Pierre).
nw-isos.
Né à Paris, et ayant appris la gravure sous la direc-
tion de Beauvarlet, Malœuvre a passé plusieurs années
à Londres chez Strange. A son retour il grava quelques
portraits : le Comte d'Aranda , le Roi de Suède ,
d'Alemberi, Lalande, d'après Pujos (1775). in-8 ;
Poullain de Saint-Foix , Bèlidor, Coustiirïer, supé-
rieur de Saint-Sulpice, d'après Duplessis (1772) , Bou-
rachot, autre supérieur de St-Sulpice , d'après Gallet,
le Chevalier d'Aguesseau , d'après Tournière , et
divers sujets pour la Galerie du Palais-Royal et le
Cabiftet Poullain. On lui doit aussi quelques bonnes
estampes.
1. La Nuit passe, l'Aurore paraît, portrait de la duchesse de
Châteauroux , d'après Nattier ; in-fol.
2. Flore a son lever, portrait de Louise-Henriette de Bourbon-
Gonty, duchesse de Chartres, d'après Nattier ; in-fol.
3. L'Enfant gâté, garçon donnant sa soupe à un chien, d'après Greuze.
4. LE CURIEUX, d'après Baudouin ; in-fol.
5. LE BOUDOIR, d'après Freudeberg , in-fol.
6. Aux mânes de J.-J- Rousseau, allégorie d'après Paul.
"7. Les Bains de Diane, copie agrandie d'une vignette de Marillier.
MANSFELD (Jean-Ernest).
1738-1796.
Né à Prague en 1738 , élève de Jacob Sclimutzer,
Mansfeld vint ensuite se former à l'Académie impériale
et royale de Vienne. Gomme Jacob Adam , il a excellé
dans les portraits de petit format.
Joseph II, 1781.
Maximilien, archiduc d'Autriche, 1782.
Marie-Thérèse, femme de Léopold II.
Èlisaheth-Wilhelmine-Louise , princesse de Wur-
temberg, née le 20 avril 1767 ; ce portrait est un petit
chef-d'œuvre.
Gustave III, 1784.
Comte de Kollowrat.
Pie VI, 1782.
François-Joseph, grand prince de Toscane.
Paul Pètrovich , grand duc de Russie.
Le Général Wurmser.
Marie-Thérèse-Charlotte, fille de Louis XVI.
Anna Morichelli, cantatrice.
Frédéric baron de Trenck.
Joseph Haydn.
Garrick.
Métastase, etc., etc.
MARAIS (H.
1768-^8...
Marais, né à Paris vers 1768, fut un des graveurs
de la Galerie de Florence, pour laquelle il a exécuté :
un Frontispice (1789) , d après Moitte ; Apollon et les
Muses, d'après Jules Romain; Amphitrite sur les
eaux, d'après L. Giordano ; les Parques, d'après
Michel- Ange ; Andromède, d'après Furino; l'Her-
maphrodite et plusieurs statues antiques ; F. Miéris,
jouant de la guitare , d'après lui-même. Il a aussi
travaillé à la Galerie du Palais-Royal.
Les deux pièces les plus marquantes de son œuvre
sont :
LHermite, d'après Greuze ; in-fol.
V Apothéose de Racine, d'après Prudhon, grande
vignette qui sert de frontispice à la belle édition de
Didot. — Dans le même ouvrage , Marais a gravé une
figure d'après Gérai^d. L'exécution, fine et serrée,
n'est pas sans mérite, quoique très froide.
On retrouve encore Marais dans une composition
de Gérard pour le Daphnis et Chloè in-4 , de Didot
(1800).
Un portrait de Basan , profil d'après Cochin . in-4.
TABLE
DU TOME SECOND.
Pages
Drevet (Les) -1
Dl'bosc 26
duchange 27
DucLOS 37
DucROS 49
DuFLOS (Claude) ... 50
DiiFLOs (Claude-L.) 54
DuFLOs (Pierre) 58
DUGOURE 62
Duhamel 65
DuMONT LE Romain 66
DUNKER 67
DupiN (Les) 73
Duplessi-Bertaux 76
duponchel. 90
Dupréel 9-1
Dupuis (Cbaries) 93
Di;PL!iS (Nicolas) 96
Duret -1 03
DURUISSEAi: 1 04
duvivier 1 05
Earlom 106
Eberts UO
ÉCHARD Il 2
Édelinck 4 1 3
Pages
Eichler -114
ElSEN 115
Elluin 118
Favanne 1 25
Fay 126
Ferté (Papillon de la)... 127
Fessard (Etienne) 129
Fkssard (Mathieu) 152
Ficquet 154
FlESINGER 1 78
FiLHOL 180
FiLLŒUl 1 81
Flipart 1 83
Floding 203
FOKKE 204
FOLKÉMA 205
fosseveux 206
Fourdrinier 207
Fragonard 208
François 211
Fratrel 21 7
Freudenberger 21 9
Gaillard 220
Gallimard . 228
Gamelin 231
770
TABLE.
Carreau 233
Gaucher 234
Gautier 292
GÉRARD (Marguerite) 293
Germain 294
Gessner 295
Geyser 299
Ghendt (De! 300
Gibelin 314
GiLLOT 318
Girard 318
Girardet 319
GiRAUD (Les; 323
GoDEFROY (François) 328
Godefroy (Jean) 335
Gois 337
GoxNORû 338
GouPY 339
Goya 340
Grateloup 345
Gravelot 35(;
Green 35-2
Greuze 354
Grignio\ 355
GucHT (Van der) 35o
GuÉRiN 357
Guttenberg (Les) 358
GuYOT 366
Haokert (Les) 373
Hagedorn 375
Halbou 376
Hai.lé 380
Haussard 381
Heinecken 383
Helman 389
HÉMERY 398
Hennin 400
Heinriquez 401
hérisset 409
HOGARTH 410
HoiN 418
HORTHEMELS 41 9
HOUBRAKEN 420
HouiÉL 422
Houston 429
HuBER (Les) 430
Hubert (Les) 438
HuËT 440
HuLK 441
HuoT 442
HuQuiER (Les) 443
HuTiN (Les) 451
Igo.nêt (Marie) 433
Ingoif (Les) 454
Ingram 460
Jacob 461
Jani.net 462
Jardinier 488
Jeaurat 489
JoNTiis 493
JOULLAiN 4 94
Jubier 498
Julien 499
jullienne 500
Kauffmann (Angeiica) 505
Klauber 507
KOBELL 51 1
KoHL 512
Lagreniîe 513
La Live de Jullv 51S
Langlois (Les) 527
Larmessin 529
La Rue 537
Launay (Nie >las de) 538
TABLE
771
Pages
Launay (Roberl de) 55'.
Laurent ;i58
Lavallée-Poussin 561
Le Bas ;i64
Le Béai 593
Le Bert 598
Le Blond 599
LecoI':ur (i02
Lecomte (Marguerite) 60.'!
Le Gouaz 606
Legrand (Les) 609
Le Lorrain 614
LÉLU 616
Le Mire 619
Lemperelr (Jean) 651
Lempereur (Louis) 662
LÉPiciÉ 656
Le Prince 667
Le Roy 678
Le Si'ECR 68!
Le Tellier 684
Le Vachez (Les) 685
Le Vasseur 687
Le Veau 697
léveillé 710
Pages
Li^.VESQnî 711
Le ViLLAiN 714
Levilly 715
LiÉNARD 716
LiNGÉE (Charles) 717
Lingée (M"»*) 719
LiOTARD (Les) 722
Lips 724
LiTTRET DE MONTIGNY 726
LONGl^EIL 728
LoRiEux 748
Lorraine 749
loutiierbourg 750
LouviON 753
Lucien 764
Mac-Ardell 755
Machy 756
Macret (Les) 757
Maillet 760
Major 761
Malapeau 762
Malbeste 764
Maloeuvre 765
Mansfeld 766
Marais 767
IMPUIUBRIB L UAtiKl.
NE Portails, Roger
95 Les graveurs du dix-huitieme
P6 siècle
t. 2
ptie.2
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