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Full text of "Peinture a l'huile: matériaux, définition des couleurs fixes et conseils ..."

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COMPENDIUM 

A L'USAGE DES ARTISTES PEINTRES 

PAR 

Jacques Blockx, fils 



i 



Déposé conformément à la loi. 

Tout exemplaire non revêtu de la signature de l'auteur 
sera réputé contrefait. 




PEINTURE A L'HUILE 



MATÉRIAUX 

DÉFINITION DES COULEURS FIXES 

ET 

CONSEILS PRATIQUES 

SUIVIS d'unb notice sur 

L'AMBRE DISSOUS 



COMPENDIUM 

A L'USAGE DES ARTISTES PEINTRES 

PAR 

Jacques BLOCKX, Fils 




GAND 

IMPRIMERIE DE EUGÈNE VANDERHAEGHEN 
rue des Champs, 60 

M D CGC LXXXÎ 



KIUSEUM LiBRMH 



3^^ 







A Monsieur Robert Mols. 

Il est des sentiments que Von ne saurait traduire 
en paroles, et je me trouve fort embarrassé pour 
vous exprimer la gratitude que je ressens, en me 
rappelant combien vous m'avez aidé de votre talent 
et de votre nom. 

Les qualités du cœur vous ennoblissent autant que 
le génie vous élève ! 

Pénétré d'une reconnaissance profonde, je vous 
prie d'accepter la dédicace de ce travail, comme un 
hommage de mon admiration et comme un gage 
de ma sincère amitié, 

Jacques Blockx, fils. 




M<-Mêï^^¥^ 



INTRODUCTION. 



La peinture ne s'apprend pas dans les livres, 
dit-on. 

A ne considérer que la manière propre à 
chaque artiste de reproduire sa pensée au moyen 
des couleurs, cet aphorisme est juste. Mais 
pris dans son ensemble, Part de peindre con- 
stitue deux parties bien distinctes quoiqu'étroi- 
tement liées : la partie intellectuelle et la partie 
technique. 

Cette dernière comprend non-seulement tout 
ce qui se rattache à la peinture : — Tétude des 
formes , des proportions , de la perspective , de 
Tanatomie et de l'histoire — mais aussi tout 
ce qui a trait au côté matériel. 

De nos jours l'étude des connaissances maté- 
rielles est trop négligée, et Ton doit surtout 



— II — 

attribuer à cette circonstance la rapide altéra- 
tion de la peinture. 

Au sortir des académies, les jeunes artistes 
possèdent leur « art » proprement dit, miais le 
plus souvent ils ignorent les notions les plus 
élémentaires de leur « métier » ; rarement ils 
sont à même d'apprécier les matériaux qu'ils 
emploient. 

Nous exprimons le vœu que l'étude des con- 
naissances matérielles de la peinture, soit 
dorénavant comprise dans les cours de l'en- 
seignement académique. Les élèves acquer- 
raient ainsi une pratique rationnelle, et la 
conservation de leurs œuvres serait assurée. 

Il est incontestable que pour se trouver dans 
les conditions désirées par rapport à la solidité, 
la peinture à l'huile est soumise à certaines 
règles. 

Les gothiques , que nous citons comme 
exemple parce que leur peinture est la mieux 
conservée, avaient une méthode uniforme; ils 
employaient généralement les mêmes couleurs. 

Que l'on compare la peinture moderne à 
celle du XV"® siècle, et l'on conviendra avec 



— - m — 

nous qu'il est profondément regrettable de voir 
dans nos musées, des tableaux ne datant pas 
de vingt ans, plus détériorés que d'autres 
existant depuis quatre siècles ! 

Les anciens avaient-ils des couleurs meil- 
leures que les nôtres (') ? Avaient-ils, comme 
nous l'avons souvent entendu affirmer, un 
véhicule merveilleux dont le secret est perdu 
pour nous ? Tout en respectant cette opinion, 
nous sommes persuadé que c'est autant à la 
manière parfaite dont les couleurs ont été 
appliquées , qu'à leur bonne qualité et celle des 
autres matériaux en usage à cette époque, que 
la conservation des tableaux anciens doit être 
attribuée. 

C'est dans le but d'initier les artistes à la 
partie matérielle de la peinture, et de leur en 
faire comprendre toute l'importance que nous 
avons écrit ces pages. Les faits qui s'y trou- 
vent relatés sont basés sur le raisonnement et 
l'étude; ils résultent d'une longue et sérieuse 
expérience. 



(i) Nous traiterons cette question an chapitre « couleurs. » 



— IV — 

En donnant à cet ouvrage un caractère scien- 
tifique ou une étendue exagérée, nous courrions 
évidemment le risque de ne pas être lu. Nous 
nous efforcerons donc d'être clair et concis. 

l'auteur. 
Vieux-Dieu, février 1881. 




CAUSES D'ALTÉRATION 



DE LA PEINTURE. 



Quelle est la raison pour laquelle le plus 
grand nombre de nos tableaux modernes 
perdent si rapidement leur fraîcheur? 

Pourquoi jaunissent-ils dans les parties clai- 
res et contractent-ils un aspect terreux? 

Pourquoi les couleurs perdent-elles leur éclat, 
et dans certains cas changent-elles de nuance? 

D'où proviennent ces accidents si fréquents 
et si nombreux qu'un examen sérieux nous 
découvre? 

Les défauts dont nous venons de nous occu- 
per dépendent des causes suivantes : 

De l'emploi des huiles de mauvaise qualité. 

De l'usage des siccatifs et des vernis. 

De l'abus de l'essence de térébenthine. 

De l'emploi des couleurs dont la fixité n'est 
pas parfaite, ou qui agissent d'une manière 
défavorable dans les mélanges. 



1 



— 2 — 

De la mauvaise préparation des supports 
ou de leur emploi prématuré. 

De la manière vicieuse d'appliquer les cou- 
leurs. 

Du vernissage trop hâtif des tableaux. 




SUPPORTS. 



Un acte d'une importance capitale, et sur 
lequel nous appelons toute l'attention des artis- 
tes, c'est le choix judicieux des panneaux et 
des toiles. De leur bonne préparation dépend la 
durée d'un tableau. 

La pâte qui couvre les supports doit être 
composée de céruse et d'huile de lin, et non 
pas de blanc d'Espagne et de colle. Elle doit 
être appliquée en quantité suffisante pour bien 
remplir les pores du bois, sans former une 
couche épaisse. Elle doit être avant tout par- 
faitement durcie ('). 

On s'en assurera en grattant fortement avec 
l'ongle du pouce sur les bords du panneau. 
Si la préparation est sèche à point , on ne doit 



(i) L*air , la lumière et la chaleur , aidant beaucoup à la 
dessication , il n'y a rien d'absolu dans la détermination du 
temps qu'il faut aux supports , pour être convenablement secs. 
Cela dépend de la bonne qualité de» matériaux employés, 
surtout des huiles , et du milieu favorable dans lequel les pan- 
neaux ou les toiles ont été placés après leur préparation. 



— 4 — 

rien pouvoir enlever, et Tongle doit produire 
un bruit aigu. 

' Les supports dont la couche de fond n'est 
pas parfaitement durcie, peuvent occasionner 
des crevasses profondes. 

Nous engageons les artistes à employer de 
préférence des toiles et des panneaux non 
teintés. Ordinairement les fabricants ajoutent 
des ocres communes à la préparation, pour la 
colorer légèrement. Comme ces ocres sont 
sujettes à monter de ton, cette circonstance 
peut nuire plus tard à Teffet de certaines par- 
ties du tableau, là où la couche de couleur n'est 
pas assez épaisse pour empêcher le fond d'agir 
par transparence. 

Nous conseillons aussi de préférer l'acajou et 
surtout le cèdre de bonne qualité, au chêne. 
Ces deux premiers bois étant plus poreux, 
laissent mieux pénétrer la préparation et l'adhé- 
rence est plus complète. Ils sont aussi moins 
enclins à se déjeter, et les vers ne les attaquent 
pas. 

Nous avons dit plus haut que les supports 
doivent être préparés à la céruse et à l'huile, 
et non pas à la colle et au blanc d'Espagne ('); 



(i) On nous observera avec raison , que les gothiques ont 
peint sur une préparation que Ton croit généralement être 



— s — 

voici pourquoi : la gélatine étant une matière 
animale hygrométrique à un haut degré, elle 
est naturellement exposée à se corrompre, au 
contact de Thumidité, et à perdre ses qualités 
adhésives. 

Ce fait est constaté par des preuves saisis- 
santes que nous avons journellement sous les 
yeux. Combien vite est détériorée la peinture 
à la colle , surtout lorsqu'elle est appliquée sur 
bois! Elle s'écaille et s'effrite en peu de temps. 
Le résultat qui est produit à l'air libre, doit 
fatalement se représenter sur les panneaux et 
surtout sur les toiles — quoiqu'ils soient pro- 
tégés par la couche de couleur à l'huile — mais 
au bout d'un nombre d'années plus grand. 

Il est donc rationnel et prudent d'employer 
la préparation à la céruse et à l'huile. 

Arrivée à un état de siccité parfaite, elle 
sera pour ainsi dire impénétrable à l'air et à 
l'humidité. 



composée de craie et de colle , et que malgré cela , leur pein- 
ture s'est bien conservée sous tous les rapports. Cette objection 
n'a pas d'importance sérieuse : sans compter les accidents 
nombreux et funestes occasionnés par ce procédé , nous ferons 
simplement remarquer que si les anciens avaient préparé leurs 
supports à l'huile, leurs œuvres auraient pu résister pendant des 
siècles encore; mais que le contraire est fort à craindre en 
présence du manque d'adhérence -r- occasionné par la décom- 
position de la matière gélatineuse — de la préparation qu'ils ont 
employée. 



— 6 — 

Pour prévenir l'action nuisible de ces deux 
agents sur le bois ou sur la toile , nous conseil- 
lons aussi de faire peindre deux ou trois fois, 
à la céruse et à Thuile, Tenvers des supports. 
On a prétendu longtemps , et d'aucuns croient 
encore qu'il vaut mieux que le bois ou la toile 
soit en contact direct avec l'air! Cette opi- 
nion routinière est controuvée par de nombreux 
exemples. Nous en citerons deux qui suffiront, 
pensons-nous à édifier nos lecteurs. 

Dans les églises, où les tableaux sont géné- 
ralement exposés à l'humidité, les volets de 
certains tryptiques, peints des deux côtés, se 
sont bien conservés ; tandis que sur le panneau 
du millieu, dont un côté seulement est peint, 
on trouve des accidents de toute nature. Le bon 
sens nous dit que ce sont les variations hygro- 
métriques de l'air qui causent en grande partie 
ces désastres, par influence directe sur le bois. 
La couche de couleur durcie ne pouvant suivre 
la dilatation ni le rétrécissement du support 
doit inévitablement se crevasser, même s'écail- 
ler à la longue. 

Un fait plus concluant encore : 

Nous avons eu l'occasion d'examiner des 
ouvrages de menuiserie, datant du XVII™® 
siècle, peints de totcs côtés y placés dans un sou- 
terrain, et exposés ainsi à une humidité con- 



— 1 — 

stante. Nous avons constaté que le bois était 
en parfait état, et que la couche de couleur à 
l'huile était bien adhérente. 

Il est donc de première nécessité d'empêcher 
l'action de l'humidité^pour assurer la conserva- 
tion de la peinture et en même temps celle des 
supports. 

PEINTURE SUR BOIS NON PRÉPARÉ. 

Certains artistes exécutent leurs œuvres 
directement sur bois nu, sans aucune prépa- 
ration. Nous approuvons entièrement cette 
manière de procéder qui donne d'excellents 
résultats, et peut-êtr© bien les meilleurs de 
tous. Il est essentiel cependant, de prendre 
certaines précautions que nous indiquerons plus 
loin, de choisir des bois vieux, secs, peu sujets 
à se déjeter, et qui en outre ne contiennent ni 
résine ni principes acides. On sait que le sapin 
du nord et le chêne occasionnent des dégâts 
irrémédiables aux couleurs. 



"'^'M^i 




HUILES. 



L'huile est la base fondamentale de la pein- 
ture qui nous occupe ; elle doit conséquemment 
se trouver dans les meilleures conditions par 
rapport à la qualité ; en un mot elle doit possé- 
der tout ce que la nature lui a donné. 

Les faits démontrent clairement que les pro- 
cédés primitifs de fabrication et d'épuration 
des huiles, étaient les meilleurs. Au point de 
vue industriel la science a fait des progrès : on 
est arrivé à clarifier et à blanchir artificielle- 
ment les huiles en quelques jours, alors qu'il 
faut plusieurs mois , parfois plus d'un an, pour 
que ce travail se fasse naturellement par le 
repos, et par l'action des rayons solaires. Mais 
la rapidité du travail nuit dans ce cas à la 
solidité. 

Pour posséder toutes leurs qualités grasses, 
les huiles ne peuvent pas avoir été battues à 
l'acide, ni clarifiées par un procédé chimique 
quelconque. Le repos prolongé doit leur faire 



— 10 — 

perdre la partie mucilagineuse; les lavages 
répétés, l'exposition aux rayons du soleil, 
éliminent Tacide oléique et achèvent de les 
clarifier et de les blanchir (^). Elles ne doivent 
en aucun cas avoir été bouillies ni oxygénées (*) 
artificiellement, par des oxydes ou des sels 
métalliques. L'air et la chaleur du soleil, com- 
muniquent aux huiles un degré d'oxygénation 
suffisant pour leur permettre de sécher dans un 
temps convenable. 

Toute huile oxygénée d'une manière arti- 
ficielle jaunit considérablement après sa des- 
sication et devient cassante. Il suffit d'une 
quantité très minime de matière oxydante en 
dissolution dans l'huile, pour lui communiquer 
ces graves défauts (^). 



(i) Ce traitement atténue le défaut que possèdent les huiles, 
à un degré variable, de jaunir en séchant. 

(2) C'est-à-dire rendues plus siccatives. 

(3) L*étude des huiles nous a longuement occupé. Toutes les 
recherches que nous avons faites en vue d'arriver à décolorer et 
à oxygéner artificiellement ces liquides , sans nuire à leur soli- 
dité, ont été infructueuses, et nous avons abandonné les procé- 
dés en usage , parce que nous avons acquis la conviction que 
pour la peinture artistique ils ne conviennent pas. Le résultat 
de nos expériences nous a donné la certitude que les huiles 
lithargirées ou manganésées perdent leurs qualités grasses. 
Pareilles huiles , appliquées sur verre, et exposées au grand air 
et au soleil, sont devenues opaques au bout de six à huit 



— II — 



Les deux espèces d'huile les plus propres à 
la peinture artistique, sont l'huile de lin et 
l'huile d'œillette. 

Nous estimons que la première est la plus 
grasse et qu'elle communique le plus de solidité 
aux couleurs; mais comme elle jaunit beaucoup 
en séchant, même après avoir été blanchie, il 
est des cas dans lesquels l'huile d'œillette doit 
lui être préférée. Ainsi le blanc d'argent, le 
bleu, le violet, les laques de garance pâles, 
doivent être broyés â l'huile d'œillette si l'on 
veut qu'ils conservent franchement leur nuance 
propre ('). 

L'huile de lin vierge, clarifiée par les moyens 
naturels que nous avons indiqués, est de cou- 
leur jaune d'or. 

L'huile d'œillette vierge, ayant subi le même 
traitement, est de nuance paille claire. 

Toutes les deux doivent être parfaitement 
limpides et brillantes. 

Les huiles vieilles et épaissies sont éminem- 



semaines. En moins de six mois la plupart d'entre elles étaient 
devenues pulvérulentes. Par contre, des échantillons d'huile 
vierge , soumis à la même épreuve , avaient conservé , au bout 
de ce temps , leur brillant et leur élasticité. 

(i) De là découle qu'il ne faut jamais se servir d'huile de 
lin pour délayer les couleurs destinées aux parties claires 
d'un tableau. 



— 12 — 

ment propres à la peinture artistique , au point 
de vue de la solidité. Le seul inconvénient 
qu'elles offrent pour certains artistes, c'est de 
rendre les couleurs plus ou moins poisseuses. 
Approprier aux matières colorantes, les 
huiles qui conviennent à leur composition 
chimique et à leurs propriétés physiques, afin 
d'obtenir une dessication homogène et le plus 
de solidité , voilà le grand art du préparateur. 
Nous croyons qu'il est malheureusement peu 
connu, et moins encore mis en pratique. 






VERNIS. 



Nous croyons être utile à nos lecteurs en 
émettant ici quelques considérations sur les 
vernis , et en donnant leur composition d'une 
manière générale, afin de mieux faire com- 
prendre les raisons pour lesquelles il est dan- 
gereux de se servir de ces liquides, pour 
détremper les couleurs à l'huile — usage mal- 
heureusement trop répandu parmi les artistes. 

Rien n'est plus confus que les principes de 
la fabrication des vernis. 

Malgré les recettes sans nombre entassées 
dans les recueils publiés par les praticiens; 
malgré les efforts de plusieurs savants chimis- 
tes, la science ne possède pas de bases cer- 
taines pour définir théoriquement et d'une 
manière absolue, la bonne fabrication des 
vernis. 

Si les procédés diffèrent, les résultats obte- 
nus se ressemblent : les vernis sont inévitable- 



- 14 - 

ment condamnés à devenir friables. Leur durée 
n'est pas déterminée; elle dépend de la qualité 
des résines et des gommes ou résines molles 
qui les composent, de la proportion dans 
laquelle celles-ci ont été assemblées, et aussi 
de la manière dont les huiles ont été préparées. 
Pour qu'un vernis gras résiste bien , il faut que 
la proportion d'huile soit plutôt exagérée. 

« Certains vernis sont très-siccatifs, ce sont 
» les moins solides; d'autres sont glutineux, 
» gras , longs à sécher , mais aussi ce sont les 
» plus résistants , lorsqu'ils ont atteint le degré 
» de dessication qui leur convient. » (Dumas, 
Précis de chimie, 1128). 

On distingue plusieurs espèces de vernis : 
les vernis à l'huile ou vernis gras, ceux à 
l'essence , à l'alcool , à la benzine et au chloro- 
forme. Les deux premiers seuls nous con- 
cernent. 

Un vernis gras est un mélange d'une ou de 
plusieurs résines fondues, d'huile siccative ou 
vernis d'huile en termes de vernisseur, et d'es- 
sence de térébenthine. L'huile la plus employée 
est celle de lin ; on se sert aussi d'huile de noix 
et de pavot, mais plus rarement. 

Le copal, le succin, la térébenthine de 
Venise , la sandaraque , le mastic , le camphre , 
l'animé , l'élémi , le baume de copahu , sont les 



— 15 — 

résines et les gommes ou résines molles princi- 
pales qui servent à composer les vernis. Selon 
la nature de ces derniers , et Tusage auquel ils 
sont destinés, les proportions des résines, de 
l'huile, de l'essence, varient à l'infini. 

Le procédé de fabrication généralement 
adopté pour les vernis gras, consiste à mettre 
les résines en fusion, et à leur incorporer 
ensuite l'huile et finalement l'essence. 

Les vernis à l'essence se font à une chaleur 
modérée ou à froid, d'après le degré de solu- 
bilité des gommes. 

Examinons maintenant pourquoi les vernis 
deviennent brunâtres et opaques après quelques 
années d'application, pourquoi ils se gercent 
et deviennent pulvérulents. 

Vernis gras. — L'huile lithargirée ou man- 
ganésée est la cause première de leur altéra- 
tion. Nous avons dit en parlant des huiles , que 
ces liquides jaunissent considérablement et 
deviennent friables lorsqu'ils ont été traités par 
des oxydes ou des sels métalliques. Or, les 
huiles qui servent à fabriquer les vernis gras 
sont toujours oxygénées énergiquement, parce 
que l'on exige qu'un vernis sèche promptement 
avant tout. 

Les résines subissent une altération profonde 
par la fusion. En les examinant après le refroi- 



— i6 — 

dissement, on s'aperçoit qu'elles ont perdu de 
leur éclat, de leur transparence et de leur 
cohésion. Les principes gras sont éliminés en 
majeure partie. 

Vernis à l'essence. — Les vernis à l'essence 
se décomposent plus rapidement que les vernis 
gras, parce qu'ils fournissent un enduit peu 
compacte et plus perméable à l'air ; la plupart 
d'entre eux peuvent être pulvérisés peu de 
temps après leur application. La coloration 
brunâtre qui se produit après la dessication de 
la couche, dépend en partie du dissolvant, 
mais de fait elle est occasionnée par la décom- 
position des matières résineuses, sous l'in- 
fluence de l'oxygène de l'air. Cette décompo- 
sition est également cause de l'opacité que les 
vernis contractent par le temps. 

Les crevasses sont dues au rétrécissement de 
la couche, mais elles peuvent être provoquées 
par la nature des objets sur lesquels les vernis 
ont été appliqués. Les vernis très-siccatifs sont 
en outre enclins à s'écailler. 

D'après ce qui précède peut-on obtenir un 
avantage quelconque, au point de vue de la 
solidité , en mêlant des vernis aux couleurs à 
l'huile ? En aucune manière. On y ajoute des 
résines altérées ou des gommes peu durables, 
des huiles appelées à devenir friables et à 



— 17 — 

foncer les couleurs , et de l'essence de térében- 
thine. Le seul effet que produisent dans ce cas 
les vernis , c'est de donner à l'artiste une satis- 
faction éphémère en voyant ses couleurs sous 
un aspect plus brillant. Le résultat final est 
désastreux. 

En somme, il ne faut pas donner aux vernis 
dont nous avons parlé, une autre destination 
que celle qui leur appartient; c'est-à-dire, 
d'être appliqués en couche mince sur les pein- 
tures à l'huile en général, pour leur donner 
plus de relief et pour les préserver du contact 
de l'air. 



4 "***; 



DESSICATION ET SICCATIFS. 



La dessication des couleurs est produite par 
la solidification des huiles qui servent à les 
préparer. Ces liquides absorbent Toxygène de 
l'air en augmentant de poids et de volume. 

Rien n'est variable comme le phénomène de 
la dessication. 

Selon qu'une couleur aura été appliquée sur 
toile, bois, verre, métal ou autres supports; 
selon qu'elle aura été exposée à une lumière 
vive ou diffuse; selon qu'elle se sera trouvée 
dans un milieu sec ou humide , elle se solidifiera 
dans des proportions de temps différentes et 
qui ne sont pas à déterminer. 

Le grand air et la chaleur activent aussi la 
dessication. Celle-ci dépend encore de la pro- 
priété plus ou moins grande que possèdent les 
matières colorantes, d'agir sur les huiles et 
d'accélérer ou de ralentir l'absorption de l'oxy- 
gène. 



— 20 — 

Préparées avec une même huile, les diverses 
couleurs mettent un temps différent à sécher. 
En général, les oxydes métalliques, qui forment 
la plus grande partie des couleurs fixes, favo- 
risent la dessication des huiles; les couleurs 
animales ou végétales la retardent. 

L'oxydation, d*abord lente, se produit avec 
plus d*énergie lorsque Thuile se solidifie. C'est 
çc qui explique pourquoi une couleur sèche plus 
rapidement lorsqu'elle est appliquée en seconde 
couche. 

Nos observations nous ont prouvé que Ton 
peut admettre comme une loi irréfragable, que 
les couleurs qui absorbent Toxygène lentement 
et d'une manière régulière, offrent plus de 
solidité que celles qui sèchent promptement. 
Après quelques années, la couche paraîtra 
grasse et cornée dans le premier cas, terne et 
grumeleuse dans le second. 

Il faut laisser à chaque couleur le temps 
qu'elle exige pour arriver au degré de siccité 
voulu, et l'emploi des siccatifs Ç) dans la pein- 
ture artistique est absolument inadmissible. 



(i) On donne le nom de siccatifs à des huiles traitées par des 
oxydants énergiques. Autrefois on avait l'habitude démêler 
directement aux couleurs lentes à sécher, du sel de satume 
(aéetate de plomb). Cette détestable coutume s'est heureuse- 
ment perdue. 



— 21 — 

Lorsque la couche est sèche et qu'il n*y a 
plus d'absorption d'oxygène, les couleurs se 
durcissent , se pétrifient en quelque sorte, occa- 
sionnant un retrait. Si ce dernier a lieu d'une 
manière lente et régulière, il ne cause pas 
d'accidents; mais s'il est activé par des sicca- 
tifs, le rétrécissement inégal occasionne des 
crevasses. 

Comme corollaire nous ferons remarquer, 
que les parties craquelées dans les tableaux se 
trouvent principalement dans les noirs, les 
bruns , les laques ; toutes couleurs séchant diffi- 
cilement et laissant supposer la présence de 
siccatifs. 

Nous ne voyons d'ailleurs pas la nécessité de 
hâter le travail naturel de la solidification des 
couleurs. Nous concevons que l'on exigé qu'une 
porte, un parquet, soit promptement sec, 
parce que l'on peut se trouver dans le cas de 
devoir s'en servir de suite. Peu importe alors 
la solidité; au moyen de quelques frais, l'on 
peut faire renouveler le travail. Mais une oeuvre 
d'art doit être durable , et l'on ne saurait prendre 
assez de précautions pour en assurer la con- 
servation. 

Dans ce but nous engageons les artistes à 
bannir impitoyablement les siccatifs de leur 
palette. 



ESSENCE DE TÉRÉBENTHINE. 



Ce dissolvant agit d'une manière défavorable 
sur les huiles dont il détruit les qualités grasses. 
Une peinture dans laquelle l'essence a été em- 
ployée à l'excès , se reconnaît à sa maigreur et 
à son manque d'éclat. 

C'est une erreur de croire que l'essence ne 
nuit pas à la solidité. Nous rappellerons comme 
exemple , que les peintures à l'huile et à l'es- 
sence ne résistent pas un été durant, au grand 
air; au bout de ce temps elles sont pulvéru- 
lentes. 

L'essence est utile à divers usages dans la 
peinture , basés sur la propriété que possède ce 
liquide de dissoudre les corps gras et les huiles. 

L'essence fraîchement rectifiée est complète- 
ment incolore; elle possède une odeur franche 
et caractéristique qui la fait aisément distin- 
guer de l'essence commune. 



— 24 — 

Nous ne pouvons que conseiller aux artistes 
d'être très-modérés dans l'emploi de Tessence , 
et surtout de ne pas s'en servir pour délayer les 
couleurs. 







PRATIQUE. 



Il est indispensable de dégraisser les toiles 
et les panneaux au moment d'en faire usage, 
afin d'enlever la couche graisseuse qui s'est 
formée par Thuile exsudée de la préparation, 
et par le contact prolongé de Tair. Cette pré- 
caution si élémentaire, trop souvent négligée 
par les artistes, est nécessaire pour obtenir 
l'adhérence parfaite des couleurs. 

En enlevant la couche graisseuse, on rend la 
préparation du support perméable; l'huile y 
pénètre et les couleurs se fixent. Lorsqu'il y a 
manque d'adhérence la couche est exposée dans 
certains cas (^), à se déplacer par le retrait et à 
se ratatiner; elle s'écaillera infailliblement 
lorsqu'elle sera complètement durcie. 

Un simple lavage à l'eau ou à l'essence ne 



(i) Principalement lorsqu'on emploie des panneaux lisses et 
lorsqu'on a superposé plusieurs couches de couleurs séchant 
inégalement. 



— 26 — 

suffit pas à nettoyer un support. Il faut em- 
ployer Teau savonnée et brosser dans tous les 
sens au moyen d'une brosse dure, pendant 
quelques minutes; laver ensuite plusieurs fois 
à Teau propre. 

Si le support est bien dégraissé, Teau doit 
s'étaler uniformément à sa surface , mais elle ne 
peut se séparer à certaines places ni former de 
stries; dans ce cas il faudrait recommencer 
l'opération. Essuyer avec un linge propre ou 
une peau de chamois, et laisser sécher le 
panneau ou la toile pendant un jour. 

Avant d'entamer la peinture, il est bon 
d'humecter le support au moyen d'huile addi- 
tionnée d'essence de térébenthine rectifiée, pour 
obtenir le plus d'affinité possible entre la couche 
nouvelle et la préparation. 

Lorsqu'on reprend un tableau ébauché, ou 
qu'on veut corriger une œuvre achevée depuis 
un certain temps, il est également nécessaire 
d'enlever la couche graisseuse. 

A cette fin nous conseillons l'emploi de la 
pomme de terre crue. Les principes légèrement 
acides de ce tubercule, et la fécule qui s'en 
détache par le frottement, dégraissent d'une 
manière très-convenable et ne peuvent en aucun 
cas nuire aux couleurs. 

Laver après à grande eau , laisser sécher, et 



^ ^T — 

appliquer un frottis (') d'huile sur les parties à 
reprendre. 

Les peintures faites grassement et d'un seul 
coup (^), sont les plus solides et conservent le 
mieux leur fraîcheur. Elles s'émaillent par le 
temps, et elles sont à Tabri des accidents résul- 
tant de l'inégale dessication des couleurs super- 
posées. 

Les peintures de longue haleine, celles où 
l'artiste superpose plusieurs couches ou procède 
par glacis , sont les plus sujettes à se détériorer 
et réclament des soins attentifs. Dans ce cas, 
la meilleure marche à suivre consiste à appli- 
quer une couche nouvelle , ou un glacis , lorsque 
la couche précédente est « poisseuse, » c'est-à- 
dire pendant l'intervalle compris entre le com- 



(i) Nous entendons par frottis , une couche d'huile excessive 
fient mince, étendue au moyen de la brosse de telle manière 
que la peinture soit simplement humectée. 

(2) C'est-à-dire sans fatiguer les couleurs. 

En repeignant , en changeant sans cesse les nuances , celles-ci 
perdent leur vivacité. Très souvent, si Ton a appliqué des 
couleurs claires sur d'autres plus foncées , ces dernières repa- 
raissent pendant la dessication. 

Là ne se bornent pas les écueils d'une peinture fatiguée. On 
verra plus loin que la superposition de certaines couleurs 
séchant inégalement , entraîne des accidents fâcheux , et que le 
contact de matières colorantes hétérogènes a pour effet d'altérer 
les nuances. 

3 



— 28 — 

mencement de solidification et la solidification 
complète (^). Alors la couche superposée ne se 
noie pas dans la première, ni elle ne s'emboit 
pas ; elle conserve au contraire sa pureté et son 
éclat — de plus les deux couches sont intime- 
ment jointes et font corps. — Cette manière 
d'opérer est surtout avantageuse pour les cou- 
leurs transparentes et pour celles qui sèchent 
trop lentement, comme les laques de garance. 
Si des circonstances particulières empêchent 
de procéder comme nous venons de l'indiquer, 
c'est-à-dire que l'on ne peut appliquer la 
couche nouvelle que lorsque celle qui lui est 
inférieure s'est complètement solidifiée, il est 
indispensable de faire d'avance un frottis d'huile. 
En négligeant cette précaution il y a manque 
d'adhérence; de plus si la couche de fond n'est 
pas sèche au point de ne plus emboire, on 



(i) Nous avons dit plus avant que l'air , la lumière , la tempé- 
rature, ont une influence très-grande sur la dessication des 
couleurs. Cette circonstance peut être utilement mise à profit, 
soit en plaçant une œuvre commencée dans un endroit frais et 
privé de lumière , pour garder les couleurs mouillées , soit en 
exposant un tableau achevé , au jour vif, dans un local sec et 
bien aéré, afin d'activer la dessication de certaines couleurs 
récalcitrantes. 

Lorsqu'on pose le tableau devant une fenêtre au midi, il 
est nécessaire de matir les vitres afin d'intercepter les rayons 
du soleil , et d'éviter ainsi l'échaufTement du support. 



^ 29 — 

court le risque de voir se former des gerçures , 
parfois le lendemain, parfois plusieurs jours 
après. Ces accidents ne résultent pas de la 
dessication, mais proviennent de ce que la 
première couche, trop molle et trop pénétrable, 
s'empare brusquement et inégalement de la 
portion liquide de celle qui lui est superposée; 
par le rétrécissement et le manque de cohésion , 
celle-ci se disjoint à certaines places. 

Les crevasses qui se forment plusieurs mois , 
même plusieurs années après l'achèvement d'un 
tableau, lorsque les couleurs atteignent leur 
maximum de siccité, sont de nature toute diffé- 
rente. Elles dépendent principalement de l'iné- 
gale dessication des couches superposées; de 
ce que la préparation du support n'était pas 
suffisamment durcie ; de la présence du bitume ^ 
dès siccatifs , des vernis , ou bien encore de la 
mauvaise qualité des huiles. 

Il faut strictement éviter de superposer une 
couleur prompte à sécher, sur une autre ne 
séchant que lentement. Celle-ci étant alors 
privée du contact direct de l'air, met un temps 
infiniment long à se durcir, et le retrait inégal 
des deux couches occasionne des crevasses. En 
couvrant, au contraire, une couleur siccative, 
d'une autre qui l'est moins, on ralentit la 
dessication de la première; le durcissement 



— 30 — 

différent des deux coulçurs se trouvant ainsi 
équilibré , le retrait a lieu régulièrement et sans 
causer d'accidents. 

Nous avons fait principalement cette re- 
marque, pour signaler aux artistes le danger 
qu'il y a, d'ébaucher un tableau au moyen du 
bitume , de la terre de Cassel , des noirs , de la 
terre de Sienne brûlée. Nous les engageons à 
employer de préférence des couleurs promptes 
à durcir, telles que le brun de Mars, le jaune de 
cadmium, le bleu d'outremer, le vert émeraude, 
le violet de cobalt , et donnant en mélange avec 
le blanc d'argent, les ocres, le jaune de Mars, 
le violet de Mars, la teinte désirée. Peindre 
l'ébauche maigrement, c'est-à-dire en n'empâ- 
tant pas. 

Lorsqu'on dessine un tableau , il est essentiel 
de tracer les contours le plus légèrement pos- 
sible, et d'enlever au moyen de l'essence de 
térébenthine ceux qui sont inutiles, avant d'ap- 
pliquer les couleurs. Le fusain est préférable à 
la mine de plomb, à la sanguine et à la craie 
noire, parce qu'il se laisse mieux enlever, qu'il 
n'agit pas sur les matières colorantes et qu'il 
n'empêche pas l'adhérence de la peinture. 

Nous ne saurions assez recommander aux 
artistes , la plus grande propreté en ce qui con- 
cerne leurs brosses , leur palette , leur pincelier. 



— 31 — 

Le bon entretien de ces ustensiles contribue 
dans bien des cas , à garantir la pureté des par- 
ties claires d'un tableau. 

PEINTURE SUR PANNEAUX NON PRÉPARÉS. 

Il suffit de laver ces panneaux proprement, 
à l'essence de térébenthine rectifiée — Peau 
pouvant faire travailler le bois — et de les 
enduire après, d'une mince couche d'huile qu'on 
laisse bien pénétrer. Cette dernière opération 
peut se faire en une fois ou par parties , d'après 
le sujet du tableau ; elle est utile pour favoriser 
l'adhérence et pour empêcher les couleurs de 
s'emboire outre mesure. 

// est d'une nécessité absolue de peindre à Vhuile 
et à la céruse l'envers des supports non préparés (^), 
les couleurs étant directement exposées aux atteintes 
de l'humidité dont le bois pourrait s'imprégner. 



(i) Ou mieux d*y faire appliquer , au tampon , une couche de 
gonmie-Iaque. 



VERNISSAGE. 



Le vernissage des tableaux ne peut être fait 
prématurément. 

Deux raisons fondées s'y opposent : si les 
couleurs sont insuffisamment sèches , le vernis 
fait corps avec elles et ne peut être que partiel- 
lement enlevé plus tard; dans le même cas, les 
crevasses qui s'y forment, entament inévitable- 
ment la peinture (^). 

Tenant compte de la différence d'épaisseur 
des couches, de l'inégal durcissement des cou- 
leurs, des conditions si variables de tempé- 
rature, il serait difficile, pour ne pas dire 
impossible, de préciser l'espace de temps après 
lequel un tableau peut être verni sans danger. 

Nous ne voulons donc pas nous prononcer à 



(i) Ces crevasses sont alors occasionnées par ce que la couche 
de vernis , se durcissant rapidement , ne conserve pas l'élasticité 
voulue pour suivre Taugmentation de volume ou le retrait des 
couleurs. 



— 34 — 

ce sujet, mais nous conseillons aux détenteurs 
d'oeuvres précieuses, fraîchement peintes, de 
prendre Tavis des gens compétents et expéri- 
mentés , avant de faire procéder au vernissage. 




COULEURS. 



En considération du caractère concis de ce 
travail, nous avons renoncé à l'idée de faire 
l'historique des couleurs, ou de donner leur 
composition d'une manière étendue. 

Nous nous bornerons à indiquer quelles sont 
les matières minérales ou autres , qui servent 
de base aux couleurs fixes. Nous parlerons 
spécialement de ces dernières. Nous signale- 
rons, autant qu'il nous sera possible, les cou- 
leurs impropres à la peinture artistique , soit à 
cause de leur peu de solidité, soit à cause de 
l'effet nuisible produit par leur mélange. 

Nous ne prétendons pas définir la catégorie 
des couleurs fixes, d'une manière absolue, car 
plusieurs bonnes couleurs peuvent nous être 
inconnues encore ('); mais en attendant que 



(i) L'examen et rexpérimentation des matières colorantes, 
sont fort compliqués. Afin de pouvoir juger efficacement de 
leurs propriétés , il est indispensable de les avoir pures et bien 
fabriquées ; la difficulté de nous procurer ces produits — venant 
de rétranger — a sérieusement entravé nos recherches. 

3* 



- 36 - 

nous ayons complété notre étude , nous croyons 
utile de faire connaître dès à présent , une série 
de couleurs dont la stabilité est parfaite. 

L'expérience sérieuse et concluante qu'un 
de nos peintres les plus illustres a faite, il y a 
bientôt trente-quatre ans, nous a servi de base 
pour déterminer les couleurs fixes. 

M. Joseph Laurent Dyckmans a eu , en octo- 
bre 1847, l'idée d'appliquer des échantillons 
des principales couleurs connues alors , sur deux 
panneaux — ces couleurs étaient broyées à 
rhuile. Il a mis d'abord chaque couleur à l'état 
pur, puis en mélange avec du blanc de plomb, 
de manière à obtenir une dégradation de nuan- 
ces d'une même valeur de ton. 

L'un de ces panneaux a été constamment 
exposé au jour vif, plusieurs années même à 
l'air et au soleil; l'autre a été privé de lumière 
pendant ce long espace de temps. La disposi- 
tion ingénieuse des couleurs fait voir d'emblée 
quelles sont celles qui ont été altérées. 

L'éminent artiste nous a permis d'examiner 
longuement ces panneaux ; il a eu la complai- 
sance de nous donner des renseignements pré- 
cieux qui nous ont facilité l'étude des couleurs. 



LISTE 

DES DIFFÉRENTES COULEURS EXPÉRIMENTÉES 
PAR M. J. DyCKMANS, EN 1847. 

Bistre. 

Bitume. 

Bleu de cobalt, en diverses nuances. 

Bleu de Prusse. 

Bleu d'outremer. 

Brown pink. 

Brun de fer. 

Brun d'ivoire. 

Brun Van Dyck. 

Carmin de cochenille. 

Carmin fixe de garance. 

Cinabre. 

Crimson lake. 

Ecarlate de Mars. 

Jaune d'antimoine. 

Jaune de cadmium, en diverses nuances. 

Jaune de Mars. 

Jaune de soufre. 



- 38 - 

Jaune de Naples ordinaire. 

Jaune de Naples de Rome. 

Laques brunes. 

Laques de garance, roses et rouges. 

Laques de Robert, les n*"* i, 2, 3, 4, 5, 

6 et 7. 
Laques de Smyrne , roses et pourpres. 
Lemon yellow. 
Momie. 

Ocres naturelles. 
Ocres brûlées. 
Orangé de Mars. 
Outremer vert. 
Patent yellow. 
Rouge anglais. 
Rouge de Mars. 
Rouge de Naples. 
Rouge de Saturne. 
Rouge indien. 
Rouge Van Dyck. 
Terre de Cassel. 
Terre d'Italie. 

Terre de Sienne, naturelle et brûlée. 
Terre verte, naturelle et brûlée. 
Vert de cobalt. 
Vert émeraude. 
Vert malachite. 
Vermillon, plusieurs échantillons différents. 



— 39 — 

Vert Paul Véronèse. 

Violet de Mars. 

En tout cent cinquante échantillons de cou- 
leurs pures, et les mêmes mélangées avec du 
blanc de plomb. 




DES COULEURS FIXES. 

Les métaux sous forme d'oxydes et de sels 
métalliques décomposés et calcinés , fournissent 
la majeure partie des couleurs fixes (^). 

Les couleurs provenant des végétaux offrent 
peu de solidité; les laques de garance non cal- 
cinées , ainsi que les corps ligneux carbonisés , 
font cependant exception à cette règle. 

Parmi les couleurs tirées du règne animal, 
le noir d'ivoire est la seule que nous nomme- 
rons ici. 

En général les couleurs calcinées à une 
haute température acquièrent par ce fait une 
solidité plus grande. 

Le fer, le plus utile de tous les métaux, 
compose une variété de couleurs remarquables 
par leur fixité et par leur beauté. Son oxyde 
colore les ocres, et leurs congénères le rouge 



(i) Nous entendons par couleur fixe celle qui ne perd pas sa 
nuance au contact de l'air et de la lumière et qui ne fonce pas. 



— 42 — 

de Venise, la terre d'Italie, la terre de Sienne. 
C'est encore le fer qui forme la base de ces 
intéressants produits connus sous le nom de 
« couleurs de Mars » dont nous parlerons plus 
loin. 

Le plomb nous fournit le blanc si pur et si 
éclatant nommé improprement « blanc d'ar- 
gent. > 

Enfin le cadmium, le chrome, le cobalt, le 
mercure, donnent respectivement ces belles 
couleurs jaunes, vertes, bleues, violettes et 
rouges, appelées jaune de cadmium, vert éme- 
raude, bleu Thénard ou de cobalt, violet de 
cobalt, vermillon. 

L'arsenic, le soufre, la silice, l'alumine 
entrent souvent dans la composition des cou- 
leurs fixes. 

Parmi celles que l'on trouve à l'état naturel 
nous citerons les ocres, le rouge de Venise, la 
terre de Cassel, la terre d'Italie, la terre de 
Sienne, le bleu de lapis-lazuli (outremer vrai) 
abandonné depuis la découverte célèbre de 
Guimet. 

Toute couleur qui s'altère au contact de l'air 
et de la lumière doit être rejetée par l'artiste 
consciencieux. 

Pour qu'une couleur puisse servir utilement à 
la peinture qui nous occupe , il faut qu'elle pos- 



— 43 — 

sède une stabilité parfaite; à cette fin elle doit 
être préparée dans les conditions voulues et être 
exempte de fraude. 

La fabrication des couleurs exige des con- 
naissances spéciales, et constitue une des parties 
les plus délicates de la chimie industrielle. Les 
bonnes couleurs réclament des soins minutieux; 
c'est par l'emploi de matières premières pures , 
que l'on peut obtenir le plus haut degré de 
finesse et d'intensité dans la nuance. 

On reconnaît aisément une couleur faite avec 
soin, d'une autre mal fabriquée ou sophistiquée. 
Dans le premier cas elle a de l'éclat et du feu; 
dans le second elle parait terne, et sa nuance 
n'est pas nettement caractérisée. 

Les couleurs artificielles doivent être puri- 
fiées par des lavages répétés, jusqu'au point où 
les dernières eaux n'accusent plus de réaction 
acide ni alcaline , au contact du tournesol. Cette 
précaution essentielle est surtout requise pour 
les couleurs préparées par voie humide , et qui 
n'ont pas été calcinées. 

Les couleurs naturelles sont purifiées par 
lévigation. Ce traitement élimine la plus grande 
partie des corps étrangers qu'elles renferment , 
et leur communique plus de finesse et une soli- 
dité plus grande. 

Les couleurs faites par voie humide et par 



— 44 — 

précipitation , joignent à une grande pureté , la 
propriété d'être atomiquement divisées — avan* 
tage précieux dans les mélanges. 

Comme il est impossible aux artistes de véri- 
fier si les couleurs qu'ils emploient sont pures . 
il faut qu'ils s'en rapportent à la bonne foi du 
marchand. L'habitude leur apprendra néan- 
moins à connaître une couleur par sa nuance 
propre, mieux encore par le ton qu'elle donne 
lorsqu'elle est mélangée au blanc d'argent. 

Nous leur conseillons de se méfier des cou- 
leurs dont la fixité n'est pas reconnue, quelque 
belles qu'elles puissent être, et de les éprouver 
scrupuleusement avant d'en faire usage. 

A cet effet la méthode à suivre est celle de 
M. Dyckmans, c'est-à-dire d'appliquer sur 
panneau la couleur que l'on veut expérimenter, 
et de la soumettre à la lumière vive pendant un 
espace de temps prolongé. On mettra d'abord 
un échantillon de la couleur pure, puis plusieurs 
autres en mélange avec du blanc d'argent, en 
dégradant chaque fois la nuance jusqu'au point 
d'arriver aux demi-teintes claires. Celles-ci 
permettent de constater dans un espace de 
temps assez court, si la couleur perd sa nuance, 
si elle monte de ton , ou si elle exerce une action 
nuisible sur le blanc. Pour pouvoir juger série\i- 
sement de la stabilité d'une couleur, il faut 



— 45 — 

qu'elle ait subi l'épreuve pendant au moins 
un an. 

Nous terminerons ce chapitre en citant un 
passage de la « Chimie des Couleurs » de 
J. Lefort. Le juste raisonnement de cet auteur 
n'échappera pas à nos lecteurs. 

« De l'avis des historiens et des chimistes, 
» les peintres de l'antiquité n'employaient qu'un 
» petit nombre de couleurs , appartenant pour 
» la plupart au règne minéral , et d'une fixité 
» parfaitement reconnue parce qu'ils les prépa- 
» raient eux-mêmes. Mais les travaux inces- 
» sants de nos chimistes modernes on fait dé- 
» couvrir depuis , une foule de combinaisons 
» diversement colorées,que l'industrie fait servir 
» d'une manière plus ou moins heureuse à la 
» peinture en général. De là cette profusion de 
» substances existant actuellement dans le com- 
» merce, sous des noms qui n'indiquent pas 
» ordinairement la véritable composition chi- 
» mique. 

» Toutes les recherches qui ont pour but de 
» remplacer une couleur peu solide et d'une 
» nuance désavantageuse,par une autre plus fine 
» et plus belle, ne peuvent qu'être bien 
» accueillies par les artistes. Malheureusement 
» il n'en est pas toujours ainsi. 

» Ce que le fabricant actuel recherche avant 



- 46 -• 

» tout , c'est de livrer au commerce des produits 
» d'une teinte aussi belle que possible et au prix 
» le moins élevé , sans s'inquiéter s'ils pré- 
» sentent une solidité assez grande. Un pareil 
» résultat ne peut avoir que des conséquences 
» désastreuses pour l'avenir. Il est fort à croire , 
» en effet, qu'en composant de semblables 
» couleurs , ces belles toiles , qui font mainte- 
» nant notre admiration, perdront dans un 
» temps plus ou moins éloigné ces tons riches 
» que l'artiste a reproduits avec tant de fidélité, 
» et que l'on retrouve encore dans les tableaux 
» des anciens maîtres. » 




M-^s^lêf ^^ #: 



SERIE 



DE COULEURS FIXES QUI PEUVENT ETRE EMPLOYEES 

EN TOUTE SÉCURITÉ. 



Blanc d'argent. 

Rouge anglais. 

Rouge de Mars. 

Rouge de Venise. 

Rouge indien. 

Carmin fixe de garance. 

Laques de garance roses et rouges non 

calcinées. 
Terre de Sienne brûlée. 
Orangé de Mars. 
Orange et jaunes de cadmium. 
Jaune de Mars. 
Terre d'Italie. 
Vert émeraude. 
Bleu de cobalt. 
Outremer vrai (Lazulite). 
Outremer de Guimet. 
Violet de cobalt. 
Violet de Mars. 
Ocre brune. 



- 48 - 

Brun de Mars. 
Terre de Cassel. 
Noir de vigne. 
Noir d'ivoire. 

Blanc d'argent. — Carbonate de plomb pur; 
obtenu par voie humide par la double décom- 
position d'un sel de plomb et d'un carbonate 
alcalin. 

La couleur qui joue le rôle le plus impor- 
tant dans la peinture est sans contredit le blanc. 
Divers produits ont été proposés par les chi- 
mistes comme couleurs blanches ('), mais le 
carbonate de plomb a toujours été préféré, parce 
qu'à une grande solidité il unit des qualités que 
n'ont pas les autres blancs. Il forme avec l'huile 
des combinaisons qui contribuent à en augmen- 
ter la solidité. 

Les expériences auxquelles nous nous som- 
mes livré, nous ont prouvé que pour la peinture 

(i) Le blanc de neige (oxyde de zinc) entre autres. 

Nous avons minutieusement éprouvé ce produit qui a pour 
avantages de ne pas noircir au contact des émanations sulfu- 
reuses , de ne pas former avec les huiles des combinaisons qui 
tendent à les faire jaunir après la solidification, enfin de ne 
pas être vénéneux comme le carbonate de plomb. 

Mais à ces qualités , qui rendraient le blanc de zinc si utile 
à la peinture artistique , se joint un défaut capital qui en défend 
l'emploi. Ce défaut consiste en ce que Toxyde de zinc crevasse, 
surtout en seconde couche ; il devient excessivement cassant et 
partant il est fort sujet à s'écailler. 



— 49 — 

artistique le carbonate de plomb pur, ou blanc 
d'argent, est indispensable. Les céruses ordi- 
naires ne sont pas d'un blanc assez vif; la plu- 
part du temps elles sont sophistiquées; parfois 
même elles sont acides, ce qui nuit évidem- 
ment aux couleurs et aux huiles. 

Fabriqué dans de bonnes conditions et suffi- 
samment lavé,* le blanc d'argent n'agit pas 
d'une manière sensible sur les couleurs fixes; 
il est aussi opaque que les meilleures céruses et 
couvre parfaitement. On le reconnaît à l'éclat de 
sa blancheur et à sa finesse atomique. Broyé à 
l'huile il forme une pâte qui ne doit pas avoir le 
moindre grain , et qui ne peut révéler la moindre 
acidité à l'odorat. 

Rouge anglais. — Sesquioxyde de fer. 

Rouge de Mars. — Sesquioxyde de fer et 
alumine. 

Ces deux produits se valent comme solidité; 
leur teinte peut varier notablement par la calci- 
nation. Mélangé avec le blanc d'argent, le rouge 
de Mars donne une nuance plus fine que le rouge 
anglais. Tous deux possèdent un pouvoir colo- 
rant très-grand. 

Rouge de Venise. — Couleur naturelle colorée 
par le fer, comme les ocres , et ayant subi un 
traitement particulier. En mélange avec le 



— 50 — 

blanc d'argent, le beau rouge de Venise donne 
des tons très-fins et d'une solidité parfaite. 

Rouge indien. — Ocre ou terre colorée par 
le fer. 

Belle et très-solide couleur qui s'allie bien au 

blanc d'argent. 

Carmin fixe de garance. — Laques de ga- 
rance roses et rouges non calcinées. — Les 

laques de garance sont composées d'alumine 
et du principe colorant de la racine de garance 
ou alizarine; elles se préparent par voie hu- 
mide. La nuance des laques de garance natu- 
relles, c'est-à-dire non calcinées, varie depuis 
le rose-pâle jusqu'au rouge-sang intense; les 
unes sont plus pourprées que les autres, suivant 
le mode de fabrication et la qualité des racines 
de garance employées. 

Ces couleurs ont le défaut de sécher trop 
lentement; plus que les autres elles tendent à se 
crevasser lorsqu'on y mêle des siccatifs, surtout 
quand on les applique en glacis. 

Sur le panneau de M. Dyckmans il y a une 
douzaine de laques de garance roçj^s et rouges 
différentes. De ce nombre , deux seulement ont 
bien conservé leur nuance à l'état pur et eh 
mélange avec du blanc de ploiftb. C'est la laque 
rouge cristallisée qui a le mieux résisté. Un 
échantillon de laque de Smyme pourpre, et un 



— SI — 

I 

autre de carmin fixe de garance , ont bien tenu 
à rétat pur, mais la teinte de leur mélange 
avec le blanc est très-altérée. Il est à remarquer 
que les laques de garance foncées, ainsi que le 
carmin fixé de garance, ne gardent pas leur 
nuance lorsqu'elles sont alliées au blanc. 

En résumé les bonnes laques de garance peu- 
vent servir utilement; leur emploi est d'ailleurs 
indispensable pour certains genres de peinture ; 
leur solidité est à toute épreuve. 

Terre de Sienne brûlée. — Terre argileuse 
colorée par le fer et calcinée. 

Sa nuance varie suivant le degré de chaleur 
atteint pendant la calcination. 

Cette couleur est certainement une des plus 
solides ; elle s'émaille par le temps et donne des 
nuances très-stables a\efi^ blanc d'argent. 

Écarlate de Mars. — Orangé dé Mars. — 
Oxydes de fer et d'alumine; provenant du pro- 
duit primitif calciné , le jaune de Mars. 

Comme toutes les couleurs de Mars, elles 
possèdent une grande fixité et donnent des 
nuances d'une grande finesse avec le blanc 
d'argent. 

Orange de cadmium. — Jaunes de cadmium. 
— Sulfures de cadmium. 

Les plus beaux jaunes de cadmium s'obtien- 
nent par la précipitation d'un sel de cadmium 



— s^ — 

par rhydrogène sulfuré. Ceux faits par la cal- 
cination d'un mélange de soufre et d'oxyde de 
cadmium ne possèdent pas une teinte aussi 
belle; ils paraissent plus terreux et ne sont 
pas aussi finement divisés. 

Certains auteurs prétendent que le jaune de 
cadmium décompose le blanc de plomb et le 
noircit. Ce phénomène s'observe en effet quand 
on mêle les deux substances à l'état humide 
ou même à l'état sec. Mais lorsqu'elles sont 
broyées à l'huile, leur mélange ne provoque 
aucune réaction appréciable; nous n'avons 
jamais pu constater le moindre changement 
dans la nuance obtenue. 

Les nombreux échantillons de mélanges de 
cadmium et de carbonate de plomb, qui se 
trouvent sur les panneaux de M. Dyckmans, 
ont conservé après trente-trois ans une pureté 
parfaite. Il faut donc admettre que l'interposi- 
tion de l'huile , entre les molécules de sulfure de 
cadmium et de carbonate de blomb , suffit à les 
isoler entre elles. 

Jaune de Mars. — Oxyde de fer hydraté et 
alumine. 

Le jaune de Mars est la couleur primitive 
que l'on obtient en précipitant une solution de 
sulfate de fer et d'alun, par le carbonate de 
potasse. Calciné à des degrés de chaleur diffé- 



— 53 — 

rents il donne l'écarlate , l'orangé , le rouge , le 
brun et le violet. 

Toutes les couleurs de Mars se distinguent 
par une solidité à toute épreuve. Elles ont 
l'avantage de ne pas monter de ton comme les 
ocres. Elles se marient parfaitement avec le 
blanc de plomb , et leur état de division extrême 
permet d'obtenir des nuances d'une finesse très- 
grande. 

Sur le panneau expérimental de M. J. Dyck- 
mans les couleurs de Mars et leurs mélanges 
avec le blanc, possèdent une pureté, une fraî- 
cheur vraiment remarquable. 

Malheureusement ces bonnes couleurs se 
trouvent rarement bien préparées dans le com- 
merce ; leur fabrication difficile et délicate exige 
de grands soins. Leur prix élevé fait qu'on y 
mêle souvent des substances moins chères, 
telles que les ocres , qui nuisent à leur beauté 
et à leur fixité. 

Terre d'Italie. — Hydrate de sesquioxyde de 
fer, alumine, silice. 

Il existe plusieurs terres ou ocres connues 
sous ce nom. La bonne couleur est assez rare; 
elle est transparente et d'un beau jaune-brun 
doré. Son mélange avec le blanc d'argent donne 
des tons très-purs et très-stables. 

Des échantillions de terre d'Italie, de prove- 



— 54 — 

nance anglaise, se trouvent sur le panneau 
susmentionné, et n'ont subi aucune altération. 

Vert émeraude. — Oxyde de chrome. 

Le plus beau s'obtient par la calcination d'un 
mélange de bichromate de potasse et d'acide 
borique. 

Cette superbe couleur est d'une fixité telle , 
qu'en comparant les échantillons des deux pan- 
neaux de M. Dyckmans, la différence n'est pas 
appréciable. Les mélanges de vert émeraude et 
de blanc de plomb qui ont été exposés au soleil, 
ont conservé une grande fraîcheur, ils ont même 
acquis une finesse de nuance plus grande que 
ceux qui ont été privés de lumière. 

Nous n'hésitons pas à désigner le vert éme- 
raude comme la seule couleur verte admissible 
dans la peinture qui nous occupe. 

Bleu de cobalt (Bleu Thénard). — Sous- 
phosphate de cobalt. 

Couleur très-solide et qui se mélange bien 
avec le blanc d'argent. Il en existe plusieurs 
nuances dans le commerce; les plus foncées 
sont les plus stables. 

Outremer. — L'outremer vrai provenant du 
lapis-lazuli est certainement une couleur solide, 
mais son prix élevé Ta fait abandonner pour 
ainsi dire complètement. 

Outremer de Guimet. — Guimet à Lyon a 
découvert le premier en 1827, le moyen de faire 



— 55 — 

artificiellement un outremer dont la beauté égale 
celle du bleu de lapis. Son procédé est tenu secret. 

Le bleu surfin de Guimet est le plus propre à 
la peinture de chevalet. Il est d'une nuance très- 
riche, se marie bien avec le blanc d'argent, et 
possède une solidité à toute épreuve. 

L'outremer ordinaire est composé d'alumine , 
de carbonate de soude et de soufre. 

Violet de cobalt. — Arséniate de cobalt. 

Nos expériences personnelles nous ont prouvé 
que cette belle couleur, peu répandue encore , 
est d'une grande fixité. Par son mélange avec le 
blanc d'argent, l'on obtient des nuances dont la 
finesse ne s'altère pas. 

Violet de Mars et Brun de Mars. — Mêmes 
qualités que les autres couleurs de ce nom. 

Terre de Cassel. — Lignite ou bois décom- 
posé. 

Couleur d'un beau brun foncé , très-transpa- 
rente, très-sohde à l'état pur ou mélangée avec 
les bruns, les noirs, les laques. Nous avons 
remarqué que lorsque la terre de Cassel est alliée 
au blanc d'argent elle se décolore. 

Noir de vigne. — Sarments calcinés. 

Noir d'ivoire. — Ivoire calciné. 

Ces deux noirs sont également fixes; leur 
nuance diffère sensiblement, tant à l'état pur 
qu'en mélange avec le blanc d'argent. 

4* 



! 





C^utre les couleurs que nous venons de dé- 
crire, il y en a quelques-unes encore qui peu- 
vent être employées sans danger, mais dans 
des conditions de pureté à déterminer; d'autres, 
comme le vermillon, doivent être évitées dans 
les mélanges. Nous en faisons l'objet d'un para- 
graphe spécial, pour attirer plus particulière- 
ment l'attention de nos lecteurs. 

Vermillon. — Sulfure de mercure. 

Lorsque cette couleur est préparée dans la 
perfection, et qu'elle a été appliquée en con- 
naissance de cause, elle conserve en partie la 
vivacité de sa nuance; on la trouve rarement 
bonne et la plupart des vermillons du commerce 
s'altèrent rapidement. 

La Chine produit le vermillon le plus beau 
et le plus solide. Nous avons appris de source 
certaine, que ce pays n'exporte pas le vermillon 
de qualité extra. L'allemagne et l'Angleterre 
nous envoient des vermillons parfois très-bons. 

Parmi les échantillons de cette couleur qui se 
trouvent sur le panneau de M. Dyckmans, un 



~ 58 ~ 

seul, d'origine allemande, s'est bien conservé. 
Tous les autres ont noirci. 

Rouge Van Dyck. — Oxyde de fer. 

Cette couleur s'obtient par la calcination du 
sulfate de fer, à un degré déterminé. Elle pos- 
sède une grande fixité. Souvent on la fabrique 
au moyen d'ocrés brûlées; c'est pourquoi nous 
conseillons de préférer le rouge de Mars. 

Jaune de Naples. 

Certains auteurs disent que le jaune de 
Naples véritable s'extrait des laves du Vésuve. 
D'autres affirment que c'est à Naples que cette 
couleur a été fabriquée en premier lieu, par la 
calcination d'un mélange de carbonate de 
plomb, d'antimoine diaphorétique, d'alun et de 
sel ammoniac. Les renseignements que nous 
avons obtenus jusqu'ici, ne nous permettent 
pas de nous rallier définitivement à l'une de 
ces deux opinions, mais nous avons pu nous 
convaincre qu'il existe à Naples un jaune très- 
fixe et d'une nuance inimitable , préparé proba- 
blement d'après un procédé particulier ('). 



(i) Nous avons expérimenté un jaune de Naples , de prove- 
nance directe, différant essentiellement des autres, sous le 
rapport de là nuance. Cette couleur a conservé après deux ans 
d'épreuve*, une pureté remarquable. Les échantillons de jaune 
que nous avons reçus depuis lors , de Naples , nous ont paru 
analogues , comme composition , à ceux fabriqués dans d'autres 
pays. 



— 59 — 

Les produits sî variés que Ton trouve aujour- 
d'hui dans le commerce, sous les noms de 
jaune d'outremer et de jaune de Naples, lais- 
sent beaucoup à désirer; en général ils se ter- 
nissent en peu de temps. On devra donc les 
éprpuver avant d'en faire emploi. 

Le jaune de Naples s'altère au contact du 
fer; il ne faut conséquemment pas l'allier aux 
couleurs provenant de ce métal, ni l'appliquer 
au moyen du couteau à*palette. 

Le jaune de Naples jouit d'une réputation 
outrée et ne mérite pas , à notre avis , l'impor- 
tance que beaucoup d'artistes y attachent. Ne 
pouvant être mêlé qu'à un petit nombre de 
couleurs, il n'offre pas d'utilité réelle : un 
mélange de terre d'Italie, de vert émeraude et 
de blanc d'argent, fournit une teinte analogue 
qui ne s'altère point. 

Ocre jaune. — Terre argileuse colorée par 
l'oxyde de fer. 

L'ocre jaune est une couleur des plus solides; 
elle doit être rangée parmi les couleurs fixes. 
Cependant, pour servir utilement à la peinture 
artistique , il faut qu'elle ait été convenablement 
purifiée par lévigation , sinon elle monte de ton 
pendant des années. 

Ocre d'or. — Ocre brune. 

Même observation que pour l'ocre jaune, 



— 6o — 

Ocres brûlées. — La solidité des ocres brûlées 
est généralement très-grande. Leur stabilité 
dépend de leur épuration. Leur teinte n'est 
jamais aussi belle que celle des couleurs de 
Mars, et elles ne produisent pas la même finesse 
de nuance lorsqu'elles sont mélangées avec le 
blanc d'argent. 

Brun Van Dyck. — Brun de fer. — Obtenus 
par une calcination spéciale du sulfate de fer. 

Comme le rouge Van Dyck, on les fabrique 
souvent d'ocrés ou de terres. Il vaut donc mieux 
employer le brun de Mars , qui leur est supé- 
rieur à tous égards. 

Noir de pêches. — Noir de liéjge. — Noyaux 
de pêches carbonisés; écorce du chêne-liége 
carbonisée. 

Nous pensons que la solidité de ces deux 
substances est assez grande pour qu'il soit 
permis de les ranger parmi les couleurs pro- 
pres à la peinture artistique. 



-'^^M^l 









COULEURS 

IMPROPRES A LA PEINTURE ARTISTIQUE. 

Considérant qu'il serait oiseux de nous éten- 
dre longuement au sujet de ces couleurs , nous 
nous bornerons à signaler celles dont l'usage 
est le plus répandu. 

Nous dirons cependant, en substance, que 
nous comprenons dans la catégorie des ma- 
tières colorantes dont nous déconseillons l'em- 
ploi, aussi bien celles qui montent de ton 
d'une manière trop considérable ou qui noir- 
cissent, que celles qui se décolorent ou qui 
réagissent sur certaines autres en les décom- 
posant. En un mot, nous rejetons toute couleur 
qui ne possède pas les qualités requises pour assurer 
à la peinture artistique une stabilité complète. 

Nous croyons devoir consacrer ici un para- 
graphe spécial au bitume, qui est bien comme 
couleur, la plus mauvaise matière qu'il soit 
possible d'imaginer (^). 



(i) La momie d'Egypte a des défauts analogues à ceux du 
bitume. 



— 62 — 

Le bitume agit sur le blanc , les laques de 
garance, et en général sur toutes les couleurs 
de nuance claire qui lui sont superposées, 
comme le ferait le goudron , c'est-à-dire que sa 
partie huileuse les pénètre, et leur commu- 
nique par le temps une teinte brunâtre. 

Le bitume ne durcit jamais; une chaleur 
peu élevée le ramollit. Lorsqu'on y mêle des 
siccatifs, il occasionne des crevasses qui aug- 
mentent pendant des années, jusqu'au point 
d'atteindre plusieurs millimètres de largeur. 

Nous souhaitons à ceux de nos lecteurs qui 
se servent de cette substance si pernicieuse, 
d'en perdre jusqu'au souvenir. 




LISTE 

DES COULEURS IMf>ROPRES A LA PEINTURE 

ARTISTIQUE. 

Blanc de neige. 

Carmin de cochenille. 

Laques carminées. 

Laques de garance calcinées. 

Jaunes de chrome. 

Laque de gaude. 

Stil de grain. 

Jaune indien. 

Jaune de zinc. 

Jaune d'antimoine. 

Terre de Sienne naturelle. 

Terre verte ou de Vérone. 

Ocres vertes. 

Vert de Paris. 

Vert de Scheele. 

Vert de Schweinfurt. 

Cinabre vert. 

Laques vertes. 



- 64. - 

Vert malachite. 

Vert de cobalt. 

Bleu minéral. 

Bleu de Prusse. 

Laques violettes. 

Terre d'ombre. 

Bitume. 

Momie d'Egypte. 

Brun d'ivoire. 

Une foule d'autres couleurs compléteraient 
cette liste, mais comme on les prépare rare- 
ment à l'huile , nous croyons ne pas devoir en 
faire mention. 








DU MELANGE DES COULEURS. 



Le changement de nuance que Ton obtient 
au moment d'allier deux ou plusieurs couleurs , 
est un phénomène purement physique. 

On sait que les corps n'ont pas de couleur 
propre; suivant leur nature ils possèdent le 
pouvoir plus ou moins grand de décomposer la 
lumière blanche, et de réfléchir une des sept 
lumières ou couleurs simples dont celle-ci est 
formée. 

Ainsi , en mélangeant du sulfure de cadmium 
clair et une laque de garance claire , ce sont les 
deux lumières simples jaune et rouge , que ces 
substances réfléchissent respectivement , qui 
par leur réunion donnent naissance à Torangé. 

Par le mélange des couleurs il Ti'y a pas de 
combinaison; les molécules des matières colo- 
rantes sont simplement mises en contact. 

L'air et la lumière sont des agents capables 
d'altérer profondément la nature des corps, 
d'en modifier la composition et partant la cou- 
leur. On comprend dès lors, qu'en mêlant des 



— ee — 

couleurs peu fixes entre elles, ou même une 
couleur fixe avec une autre qui ne Test pas , la 
nuance obtenue possédera peu de stabilité. 

Les couleurs de nature différente peuvent 
encore réagir entre elles par le contact pro- 
longé, se décomposer à la longue et changer 
de nuance. 

Il suit de là qu'il est rationnel de mélanger 
des couleurs homogènes. Ainsi les ocres et les 
terres naturelles ou brûlées, les couleurs de 
Mars, en un mot tous les dérivés du fer que 
nous avons rangés parmi les couleurs fixes, 
peuvent être alliés sans danger. 

Les couleurs rendues inertes par une calci- 
nation élevée, peuvent encore être mélangées 
entre elles et à celles que nous venons de 
nommer. Telles sont le vert émeraude , le bleu 
de cobalt, Toutremer, les noirs de vigne, de 
pêches, de liège et d'ivoire. 

Enfin d'autres couleurs encore , ne provenant 
pas des métaux, n'exercent aucune influence 
nuisible; de ce nombre sont le carmin fixe de 
garance, les laques de garance roses et rouges 
et la terre de Cassel. 

Parmi les couleurs que l'on doit soigneuse- 
ment éviter dans les mélanges, nous nomme- 
jrons spécialement le vermillon et le jaune de 
Naples. 



- 67 - 

Le premier ne peut pas être allié au blanc 
d'argent — qu'il décompose et qu'il noircit — 
ni aux couleurs provenant des métaux. 

Le second peut être uni au blanc d'argent, 
mais il ne doit pas être mis en contact avec 
les oxydes de fer, ni avec les autres composés 
de ce métal. 




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%>.j^ 



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RÉCAPITULATION. 



A. Série de couleurs fixes qui peuvent être mé- 
langées au blanc d'argent. 

Rouge anglais. 
Rouge de Mars. 
Rouge de Venise. 
Rouge indien. 

Laques de garance roses et rouges non cal- 
cinées. 
Terre de Sienne brûlée. 
Orangé de Mars. 
.Orange et jaunes de cadmium. 
Ocre jaune. 
Jaune de Mars. 
Terre d'Italie. 
Vert émeraude. 
Bleu de cobalt. 
Bleu d'outremer. 
Violet de cobalt. 
Violet de Mars. 
Ocre brune. 



— 70 - 

Brun de Mars. 
Noir d^voire. 
Noir de vigne. 

B. Série de couleurs fixes de même nature qui 
peuvent être mélangées entre elles sans aucun 
danger. 

Rouge anglais. 

Rouge de Mars. 

Rouge de Venise. 

Rouge indien. 

Terre de Sienne brûlée. 

Orangé de Mars. 

Ocre jaune. 

Jaune de Mars. 

Terre d'Italie. 

Violet de Mars. 

Ocre brune. 

Brun de Mars, 
et en général toutes les ocres, naturelles ou 
calcinées, pourvu qu'elles soient convenable- 
ment purifiées* 

C. Série de couleurs fixes de nature différente 
dont le mélange ne s'altère pas d'une manière 
appréciable. 

Rouge anglais. 
Rouge de Mars. 



— ^l — 

Rouge de Venise. 

Rouge indien. 

Terre de sienne brûlée. 

Orangé de Mars. 

Orangé de cadmium. 

Jaunes de cadmium. 

Terre d'Italie. 

Vert émeraude. 

Bleu de cobalt. 

Bleu d'outremer de Guimet. 

Violet de Mars. 

Brun de Mars. 

Terre de Cassel. 

Noir d'ivoire. 

Noir de vigne. 

D. Couleurs donnant les mélanges les plus avan- 
tageux, au point de vue de la solidité, pour 
remplacer certaines nuances qui manquent parmi 
les couleurs fixes. 

Les jaunes de cadmium de diverses nuances 
unis au vert émeraude, donnent le vert-pré 
intense, le vert-pomme et le vert-olive. 

Les jaunes de cadmium unis aux laques de 
garance, donnent l'orangé en différents tons. 

La terre de Cassel, additionnée de carmin 
fixe de garance ou de laque de garance foncée , 
approche sensiblement de la nuance du bitume. 

5* 



— 72 ~ 

Le vert émeraude uni au blanc d'argent y 
remplace avantageusement le vert malachite 
qui contracte une nuance olivâtre par le temps. 

Enfin le vermillon uni aux laques de garance, 
donne des nuances stables, et d'une grande 
utilité pour la peinture des fleurs. 

E. Série de couleurs fixes qui conservent le mieux 
la finesse de la nuance obtenue par leur mélange 
avec le blanc d'argent. 

Rouge de Mars. 

Rouge de Venise. 

Laques de garance roses et rouges claires 

non calcinées. 
Orangé de Mars. 
Jaunes de cadmium. 
Jaune de Mars. 
Terre d'Italie. 
Vert émeraude. 
Bleu de cobalt. 
Bleu d'outremer de Guimet. 
Violet de Mars. 
Violet de cobalt. 
Brun de Mars. 
Noir de vigne. 



— 73 — 

F. Couleurs qui tendent à se décolorer lorsqu'elles 
sont unies au blanc d'argent. 

Laques de garance foncées. 
Carmin fixe de garance. 
Terre de Cassel. 

G. Couleur qui noircit le blanc d'argent. 
Vermillon. 

H. Couleur qui s'altère lorsqu'elle est mélangée 
aux composés provenant du fer. 

Jaune de Naples. 





COULEURS 

ET VÉHICULES DES ANCIENS ('). CAUSES QUI ONT 
CONTRIBUÉ A CONSERVER LEUR PEINTURE 

Écartant le mystère dont on se plaît à entou- 
rer la peinture ancienne, sous le rapport des 
couleurs, nous prouverons logiquement que les 
gothiques n'avaient pas des couleurs supérieures 
aux nôtres; que le règne minéral ne leur four- 
nissait pas d'autres matières colorantes que 
celles que nous employons aujourd'hui; enfin 
que la chimie a découvert plusieurs couleurs 
fixes de première utilité, qui leur faisaient 
défaut. 

N'est-il pas juste d'admettre que si les pein- 
tres anciens ont été sobres de couleurs, c'est 
plutôt par nécessité que pour toute autre rai- 
son ? Il est notoire qu'à l'époque des Van Eyck, 



(i) Nous prenons pour point de départ de notre étude, 
répoque de Jean Van Eyck , vers la fin du moyen-âge , la plus 
intéressante au point de vue des couleurs. 



-~ 76 ~ 

des Quentin Metsys, des Memling, la chimie 
n'était pas née , ou que tout au moins elle était 
à Tenfance; dès lors, la fabrication des cou- 
leurs artificielles devait pour ainsi dire être 
nulle. A quelques exceptions près , les anciens 
n'avaient donc pas d'autres matières colorantes 
que celles qui leur étaient données par la na- 
ture, et dont l'emploi remonte à la plus haute 
antiquité (^). 

D'après ce système, nous avions établi le 
relevé de leurs principales couleurs, ainsi qu'il 
suit : 

Naturelles. 

Ocres et terres jaunes, à l'état naturel, ou 
modifiées par la calcination. 



(i) Les relations que certains auteurs de l'antiquité nous 
ont léguées, les recherches des Davy et des Chaptal nous 
apprennent en effet, que l'emploi des oxydes métalliques natu- 
rels , des ocres et des terres — soit à l'état naturel , so.t modi- 
fiées par la calcination — date du temps des Egyptiens , des 
Grecs et des Romains. Les savants chimistes que nous venons 
de nommer , ont fait l'analyse de certaines couleurs trouvées 
dans les ruines à Rome et à Pompéï; elle démontre que les* 
ocres et les terres , le vermillon , les oxydes de plomb , le bleu 
de lapis, des bleus et des verts de cuivre, des noirs provenant 
de matières animales ou végétales carbonisées , étaient connus 
des peintres de l'antiquité. La fabrication des laques oe devait 
même pas leur être étrangère. 



— 11 — 

Ocres et terres brunes , à Pétat naturel , ou 
modifiées par la calcination. 
Orpin. 
Vermillon. 
Malachite. 

Terre verte de Vérone. 
Vert de cuivre natif. 
Lapis-lazuli. 
Azurite ou bleu de montagne. 

Artificielles, 

Blanc, jaune et rouge de plomb. 
Laques de garance. 
Verts à base de cuivre. 
Noirs provenant de matières animales ou 
végétales carbonisées. 

Voici celles de ces couleurs que nous avons 
retrouvées, sans nous laisser de doute, en étu- 
diant les tableaux du XV® et du XVI® siècle, 
qui se trouvent dans les musées d'Anvers et 
de Bruxelles. 

Naturelles, 

Ocres ou terre jaunes. 
Les mêmes calcinées (rouges, orangées, 
violacées). 

Ocres et terres brunes. 



- 78 - 

Terre de Cassel. 

Vermillon. 

Bleu de lapis-lazuli. 

Artificielles. 

Blanc de plomb. 

Laques de garance foncées en diverses 
nuances. 

Noirs provenant de matières végétales car- 
bonisées. 

Couleurs dont nous supposons la présence : 

Naturelles. 

Terre verte de Vérone. 
Azurite ou bleu de montagne. 

Artificielles. 

Jaune et rouge de plomb. 
Verts à base de cuivre Ç). 



(i) Nous n'avons trouvé aucun indice capable de nous faire 
connaître la nature de ces deux couleurs, mais tout fait sup- 
poser que le jaune vif des anciens avait le plomb pour base. 

Quant au vert de nuance uniforme que Ton retrouve sur le 
plus grand nombre des tableaux gothiques , il nous est impos- 
sible d'en déterminer positivement l'origine ou la composition. 

D'après les études faites antérieurement par les chimistes, 
et en raison de la teinte olivâtre qui s'est indubitableitient pro- 
duite par le temps , et qui caractérise le vert des anciens , nous 



— 79 — 

Nous n'avons pas découvert d'autres nuances 
caractéristiques sur les tableaux anciens qu'il 
nous a été donné d'examiner , mais nous avons 
constaté que les gothiques n'ont pas fait usage 
du bitume. Nous présumons que les teintes 
saillantes que nous avons remarquées — outre 
les couleurs déjà nommées — résultent du 
mélange de ces dernières, comme aussi de 
l'effet obtenu par la superposition de couleurs 
transparentes. 

Connaissant les couleurs fixes que le règne 
minéral et l'industrie nous fournissent aujour- 
d'hui, il est certain que nous avons des res- 
sources plus grandes que les anciens. Le vert 
émeraude en premier lieu, les couleurs de 
Mars, les jaunes de cadmium, l'outremer de 
Guimet, le bleu de Thénard, le violet de cobalt, 
sont des matières précieuses qui promettent à 
la peinture actuelle une conservation qui sur- 
passera celle des tableaux gothiques, toutefois 
sous les conditions particulières de préparation 
et d'application que nous avons indiquées. 



sommes fondé à croire que ceux-ci ont employé un carbonate 
de cuivre natif ou artificiel ; le vert-de-gris (acétate de cuivre) 
aurait totalement noirci. Il est à remarquer, par rapproche- 
ment, que les verts des peintures égyptiennes étaient tous de 
couleur olivâtre, et que les chimistes ont trouvé que c'étaient 
des composés de cuivre. 



— 8o — 

Véhicules des anciens. — Les auteurs an- 
ciens ne nous fournissant pas de renseignements 
précis, il serait téméraire d'établir autrement 
que par des conjectures, qu'en dehors de l'huile, 
les vieux maîtres flamands avaient des véhi- 
cules à l'aide desquels ils détrempaient leurs 
couleurs broyées. 

Rarement, pour ne pas dire jamais, on voit 
sur les tableaux gothiques les empreintes de la 
brosse; les couleurs présentent une surface 
unie et émaillée, comme si elles avaient été 
coulées. Ce résultat n'aurait évidemment pas 
été obtenu avec une huile jeune et maigre. 
Donc, à juger d'après l'apparence des couleurs, 
comme pâtes, nous pensons qu'elles ont été 
préparées au moyen d'huiles épaissies; et, eu 
égard à leur grande conservation, nous parta- 
geons l'hypothèse généralement admise, que 
des substances résineuses s'y trouvent mélan- 
gées. 

Vouloir rechercher le genre ou l'espèce de 
ces résines , serait une entreprise absurde. 

Causes qui ont aidé à conserver la peinture 
ancienne. — Pour établir avec exactitude , 
l'ensemble des circonstances qui ont contribué 
à rendre la peinture des anciens en quelque 
sorte inaltérable, nous avons étudié leurs cou- 
leurs sous deux rapports différents : d'abord 



— 8i — 

nous avons envisagé les matières colorantes 
en elles-mêmes , et tout ce qui peut avoir con- 
couru à en assurer la stabilité, abstraction 
faite du véhicule; ensuite nous avons considéré 
les couleurs préparées, principalement au point 
de vue du véhicule, de l'application, en un 
mot de tout ce qui a coopéré à la solidité de la 
peinture. 

Nous ne nous arrêterons pas à démontrer 
que les anciens ont employé des matières colo- 
rantes fixes, et qu'ils les ont enveloppées d'un 
véhicule capable de former une couche résis- 
tante et impénétrable à l'air : les faits parlent 
pour nous et prouvent qu'il en est ainsi. 
Méticuleux à l'excès en ce qui concerne le 
« faire » , les vieux maîtres ont naturellement 
reporté leurs scrupules sur les matières colo- 
rantes et sur les huiles. Il est donc permis de 
croire , en raison même de l'éclat que leur pein- 
ture a gardé après quatre siècles, que ces 
matériaux ont été d'une pureté absolue. 

Les anciens ont fait sagement leurs mélan- 
ges; s'ils ont parfois allié certaines matières 
colorantes hétérogènes , ils l'ont fait par néces- 
sité, lorsqu'il leur manquait des couleurs de 
même nature pour obtenir la teinte qu'ils dési- 
raient. Leurs couleurs ne s'étant pas écaillées 
ni crevassées, cela prouve incontestablement 



-- 82 — 

qu'ils n'ont pas surchargé leur peinture, mais 
qu'ils ont peint d'un seul coup. De là cette 
grande pureté , ce grand éclat , et surtout cette 
grande solidité. L'absence de crevasses est un 
indice certain que les couleurs des gothiques 
ont séché lentement , et qu'aucun siccatif n'y a 
été mêlé. 

En résumé, les anciens connaissaient la bonne 
manière d'appliquer les couleurs, et, comme 
nous l'avons dit dans notre introduction, la 
conservation de leurs œuvres doit être attribuée 
autant aux grands soins d'exécution, qu'à la supé^ 
rioritê des matières colorantes et des véhicules. 




CONCLUSION. 



Quinze années se sont écoulées depuis l'ori- 
gine de notre étude. Ce laps de temps, qui 
paraît considérable au premier abord, nous a 
à peine suffi pour expérimenter les substances 
dont nous avons parlé. 

Comprenant la responsabilité morale que 
nous allions assumer, nous n'avons pas voulu 
prendre la théorie seule pour guide; nous nous 
sommes attaché, au contraire, à confirmer par 
l'expérience, nos raisonnements les mieux fondés. 

La tâche que nous nous sommes imposée 
n'est pas accomplie. Nous ne négligerons aucun 
moyen, nous n'épargnerons aucune peine pour 
arriver au but que nous nous sommes proposé : 
développer et étendre les connaissances matérielles 
de la peinture y afin qu'on leur réserve désormais, 
dans l'éducation artistique, la place importante 
qui leur revient. 

Puissions-nous avoir réussi à jeter les bases 
de cette utile réforme ! 



- 84 - 

En nous décidant à faire connaître aujour- 
d'hui les premiers résultats d'un travail con- 
sciencieux, nous avons la ferme conviction de 
rencontrer l'approbation de l'élite des artistes. 
Les hommes éminents auxquels nous nous 
adressons, liront avec intérêt — nous n'en 
doutons pas — les faits et les observations con- 
signés dans cet opuscule ; ils accueilleront avec 
la bienveillance qui distingue le mérite, les 
conseils que nous nous sommes cru permis de 
leur donner. Tous nos efforts ont tendu à leur 
prouver, que pour faire une peinture durable 
deux conditions essentielles sont requises : 
avoir de bons matériaux, et savoir en faire usage. 




DE L'AMBRE DISSOUS 

ET DE SON APPLICATION A LA PEINTURE ARTISTIQUE. 




\ 




DE L'AMBRE DISSOUS 



ET DE SON APPLICATION A LA PEINTURE ARTISTIQUE. 



L'ambre jaune ou succin est parmi les 
divers corps résineux connus, le plus solide 
et le plus beau; sa dureté, son éclat, et la 
couleur qui lui est propre , le classent au pre- 
mier rang. 

Dissoute et conservant toutes ses qualités, 
cette belle matière qui a passé les siècles sans 
avoir même été altérée à la surface , ne saurait 
être qu'éminemment durable ('). 



(i) Le plus grand chimiste de notre siècle, M. J. 6. Dumas, 

dit , en parlant du succin , dans son précis de chimie : 

€ le plus souvent on se sert du succin modifié par la fusion , 
» dans la préparation des vernis. On extrait donc ainsi l'acide 
» succinique pour les besoins des laboratoires , en même temps 
» qu'on se procure le succin fondu qui est devenu plus soluble , 
> et qui par cela même, a perdu la dureté et l'éclat qui lui 
» auraient donné tant de prix si on avait pu le dissoudre sans 
» le modifier. » 

L'opinion de l'illustre savant est pour nous d'une valeur 
immense. 



-^ 88 — 

Nous étions convaincu de ce principe lorsque 
nous avons commencé nos recherches pour 
parvenir à liquéfier le succin, sans le mettre 
préalablement en fusion. Les expériences 
multiples que nous avons faites pendant douze 
années, ont pleinement confirmé notre pensée. 

Le succin dissous forme avec Thuile, qui 
lui sert de véhicule, une véritable combinai- 
son C), C'est un produit essentiellement gras 
et élastique; il est pur, brillant, et de même 
couleur que le succin naturel. 

Le succin dissous ne se décompose pas. 
Après sa solidification il devient corné, et non 
pas cassant ni friable. Il ne change pas de 
couleur, et sa dessication est lente et régu- 
lière (^). 

Au point de vue chimique il réunit donc les 
garanties de fixité nécessaires. 

Par son pouvoir réfléchissant le succin dis- 
sous communique aux couleurs à Thuile, ce 

(i) Il est miscible aux huiles et aux essences , en toutes pro- 
portions. 

(2) Il tend â régulariser la dessication et le durcissement des 
couleurs , et à empêcher ainsi le retrait inégal et les crevasses. 
Le succin dissous étant extrêmement sensible aux diverses 
influences de la température, on peut, selon les besoins, 
activer sa dessication et celle des couleurs auxquelles il est 
mélangé , en suivant les indications que nous avons données 
page 28, renvoi i. 



- 89 - 

brillant, cette finesse et cette puissance de ton, 
qu'aucune autre matière ne saurait leur donner. 
Par la même raison elles acquièrent plus de 
transparence ('). Elles couvrent mieux et leur 
pouvoir colorant est plus grand; cela résulte 
de ce que le succin dissous contracte les cou- 
leurs à rhuile et resserre la matière colorante ; 
sous un même volume celle-ci se trouve donc 
répartie en plus grande quantité. Cette force 
de contraction empêche aussi les couleurs de 
se noyer les unes dans les autres lorsqu'elles 
ont été fraîchement appliquées (^). 

Enfin ce produit si glutineux doit nécessai- 



(i) £n mélangeant du succin dissous aux couleurs broyées à 
rhuile, on constate immédiatement un changement considé- 
rable dans leur état physique. Elles acquièrent de la consis- 
tance , du moelleux , et un grand éclat. 

Les couleurs transparentes — telles que les laques de garance 
— deviennent pour ainsi dire diaphanes , et celles qui sont 
translucides — comme la terre de Sienne brûlée, la terre 
d'Italie, le jaune et l'orangé de Mars, le vert émeraude, le 
bleu de cobalt — deviennent semi-transparentes. Enfin les cou- 
leurs opaques paraissent plus claires et plus lumineuses. 

(2) La propriété que possède le succin dissous de resserrer 
les matières colorantes et d'empêcher les couleurs de se noyer 
les unes dans les autres , s'observe dans la pratique par ce qu'en 
appliquant des couleurs claires sur d'autres très-foncées — avant 
ou après la solidification — les couleurs superposées restent 
parfaitement dominantes après la dessication complète : la 
couche de fond n'apparaît pas au travers de la couche supé- 
rieure , et celle-ci ne perd rien de sa pureté. 



— 90 — 

rement prévenir, plus que tout autre, l'action 
destructive que les couleurs peuvent exercer 
entre elles (^). 

Nous arrivons au point essentiel, celui de la 
conservation des couleurs. 

Les auteurs compétents et les spécialistes 
sont unanimes à admettre qu'une couleur em- 
prisonnée dans une matière résineuse garde 
mieux et plus longtemps sa nuance. C'est pro- 
bablement pour ce motif que depuis les temps 
les plus reculés l'on a adopté l'usage de vernir 
les peintures de valeur pour les protéger contre 
l'action nuisible de l'air et des gaz méphitiques 
auxquels elles sont souvent exposées. 

On comprend dès lors , qu'il y a un avantage 
immense à mélanger directement aux couleurs 
à l'huile , la substance résineuse la plus puis- 
sante, le succin. La couche sera garantie dans 
toute l'épaisseur, et le vernissage des tableaux 
devient une précaution inutile. 



(i) La clarté que le succin dissous communique à la peinture, 
est pennanente. Il est donc évident que ce liquide a pour effet 
d'isoler les molécules des matières colorantes , — partant de 
prévenir les réactions produites par le mélange de ces der- 
nières — de rendre les couleurs à Thuile compactes et imper- 
méables à Tair , et de conserver ainsi la fraîcheur du coloris. 



NOTES. 



6» 




NOTES. 



A répoque où nous nous occupions de chimie 
et de photographie comme amateur, nous étions 
en relation avec plusieurs artistes. 

Bien des fois nous les avons entendus se 
plaindre de la mauvaise qualité des matériaux 
qu'ils employaient. Ils nous ont même fait 
analyser certaines couleurs , afin d'en apprécier 
la pureté, et ils ont soumis à notre examen les 
vernis et les baumes dont ils se servaient. 

Nous avons su de cette manière , que la plu- 
part des peintres avaient leur procédé particu- 
lier, et faisaient usage de couleurs et de véhi- 
cules différents; mais ce qui nous a surpris, 
c'est qu'en réalité aucun d'eux n'était satisfait 
des résultats obtenus. 

Notre attention a été ainsi éveillée. Nous 
nous sommes entouré de renseignements précis, 
et nous avons appris des artistes mêmes, qu'ils 
n'avaient pas de méthode régulière, et qu'ils ne 
connaissaient que superficiellement les couleurs 
et les véhicules en usage. 



— 94 — 

Il nous tenait au cœur d'approfondir la chose. 

Nous avons lu successivement les meilleurs 
ouvrages traitant de la fabrication des couleurs, 
des huiles et des vernis , et nous avons pu nous 
convaincre de la sorte, que les recherches des 
chimistes avaient été faites principalement au 
point de vue de l'industrie et de la peinture du 
bâtiment. Nous avons aussi consulté les auteurs 
qui ont spécialement écrit pour les artistes, 
comptant qu'ils nous auraient fourni des indi- 
cations exactes; mais de ce côté nous avons 
complètement échoué. 

En somme nos investigations nous ont donné 
l'assurance, qu'il restait à étudier les couleurs, 
les huiles et les vernis , au point de vue parti- 
culier de la peinture artistique , afin d'en déter- 
miner les qualités et l'emploi , et de constituer 
une méthode irréfragable qui serait générale- 
ment adoptée. 

Ce fut désormais le but de notre existence. 
Nous n'avons pas hésité à sacrifier notre temps 
à ces recherches, pénétré de l'utilité réelle de 
notre entreprise. 

Dès le principe nous avons été amené par 
instinct, à l'étude des vernis. Après avoir 
scrupuleusement expérimenté ces liquides, nous 
avons acquis la certitude que leur emploi dans 
la peinture artistique n'est pas sans danger. 



— 95 — 

Nous avons compris le besoin impérieux de 
trouver un véhicule propre à donner aux cou- 
leurs à rhuile les qualités désirées de solidité 
et de beauté , tout en leur communiquant assez 
d'éclat pour éviter les vernis. 

Nous avons soupçonné tout d'abord, que 
seul le succin pouvait nous fournir ce véhicule 
parfait. Cette résine ne nous était pas étrangère , 
et nous avions déjà vainement tenté de la liqué- 
fier par des moyens autres que ceux connus, 
afin d'en faire un enduit durable pour les cli- 
chés photographiques. Nous avons saisi d'em- 
blée que le succin devait être traité d'une 
manière toute différente que celle employée 
dans la fabrication des vernis gras , c'est-à-dire 
qu'il ne fallait pas le fondre pour le rendre 
soluble , et hii faire perdre ainsi ses propriétés 
les plus précieuses. 

Après trois ans de recherches laborieuses 
nous avons obtenu, en 1867, du succin dissous 
applicable à la peinture à l'huile C). 



(i) Nous pourrions produire de nombreux témoignages con- 
statant cette date. Nous nous bornerons à insérer ici , la copie 
de deux attestations qui nous ont servi auprès du jury des 
récompenses, à l'exposition de Paris; Tune émanant de M. J. 
L. Dyckmans , l'autre de M. P. E. Nicolié , expert , peintre- 
restaurateur du musée d'Anvers ; personnes dont la bonne foi 
et l'honorabilité ne peuvent être suspectées. 



- 96 - 

Quoique convaincu que le produit nouveau 
que nous venions de trouver, devait être supé- 



M. J. Blockx, fils, à Vieux-Dieu, 
« Répondant à la demande que vous m*avez faite hier , je 
» viens par les présentes vous donner l'attestation que j*aî 
> appliqué de ma main, au mois d'août 1800 soixante huit, 
» les essais d'ambre dissous et de laque de garance sur le 
» morceau de verre portant l'inscription « Laque et ambre 
* — appliqué par M. Dyckmans — août 1868 ». » 
Anvers , le 17 mai 1878, 

(Signé) J. Dyckmans. 

Vu pour légalisation de la signature de M. J. Dyckmans 
apposée ci-contre. 

Anvers , le 25 mai 1878. 

Le Bourgmestre, 
(Signé) LÉOPOLD DE Wael. 

« Je soussigné expert , peintre-restaurateur du musée d'An- 
» vers, déclare qu'il m'est connu que M. J. Blockx, fils, a 
» appliqué en mil huit cent soixante huit , une couche d'ambre 
» dissous sur un petit panneau esquisse , sur lequel j'ai apposé 
» mon cachet. L'examen scrupuleux et continuel que j'ai fait 
» du dit panneau, me donne la conviction que la couche 
» d'ambre s'est parfaitement conservée et n'a causé aucim des 
» dégâts qu'occasionnent les vernis. » 
Anvers , le 20 mars 1878. 

(Signé) P. E. NICOLIÉ. 

Vu pour légalisation de la signature de M. P. E. Nicolié 
apposée ci-dessus. 

Anvers , le 25 mai 1878. 
Le Bourgmestre, 
(Signé) LÉOPOLD de Wael. 



- 97 - 

rieur en tous points , nous n'avons pas voulu le 
faire connaître avant de l'avoir consciencieuse- 
ment expérimenté , et de l'avoir patiemment 
soumis à l'épreuve du temps. 

Ce n'est que dix ans après, à l'exposition 
universelle de Paris en 1878, que nous avons 
publié pour la première fois notre découverte. 
Les expériences concluantes que nous avions 
faites ne nous permettaient plus de douter de 
son mérite. 

Néanmoins il nous restait des craintes con- 
cernant le succès de notre produit. Nous ne 
nous sommes pas dissimulé que nous aurions 
eu à lutter contre un obstacle sérieux, la 
routine ! 

Mais il ne devait pas en être ainsi. Le monde 
artistique réservait un accueil favorable et 
spontané à notre ambre dissous. Nous avons 
reçu les félicitations et les encouragements des 
maîtres éminents qui en ont fait l'essai. Nous 
nous faisons un devoir, nous éprouvons un vrai 
bonheur de pouvoir les remercier ici, du fond 
du cœur, pour le concours précieux et obligeant 
qu'ils nous ont prêté, et pour l'appui qu'ils 
nous ont donné dans nos recherches. Nous leur 
en gardons une profonde reconnaissance. 

Aujourd'hui, fort de notre expérience et de 
l'approbation d'hommes compétents , nous n'hé- 



- 98 - 

sitons plus à préconiser notre ambre dissous, 
et à dire qu'aucun produit ne saurait donner 
plus de solidité , plus de beauté à la peinture , 
ni mieux assurer la conservation des couleurs. 





INDEX. 



Pages. 

Introduction i 

Causes d'altération de la peinture i 

Supports 3 

Huiles • . . . , 9 

Vernis , 13 

Dessication et siccatifs 19 

Essence de térébenthine 23 

Pratique 25 

Vernissage 33 

Couleurs 35 

Liste des différentes couleurs expérimentées par 

M. J. Dyckmans, en 1847 > • 37 

Des couleurs fixes 41 

Série de couleurs fixes qui peuvent être employées 

en toute sécurité 47 

Couleurs impropres à la peinture artistique ... 61 

Liste des couleurs impropres à la peinture artistique . 63 

Mélange des couleurs 65 

Récapitulation . 69 

Couleurs et véhicules des anciens. Causes qui ont con- 
tribué à conserver leur peinture 75 

Conclusion , . 83 

Notice sur l'ambre dissous , . . 87 

Notes 93 



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