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COMPENDIUM
A L'USAGE DES ARTISTES PEINTRES
PAR
Jacques Blockx, fils
i
Déposé conformément à la loi.
Tout exemplaire non revêtu de la signature de l'auteur
sera réputé contrefait.
PEINTURE A L'HUILE
MATÉRIAUX
DÉFINITION DES COULEURS FIXES
ET
CONSEILS PRATIQUES
SUIVIS d'unb notice sur
L'AMBRE DISSOUS
COMPENDIUM
A L'USAGE DES ARTISTES PEINTRES
PAR
Jacques BLOCKX, Fils
GAND
IMPRIMERIE DE EUGÈNE VANDERHAEGHEN
rue des Champs, 60
M D CGC LXXXÎ
KIUSEUM LiBRMH
3^^
A Monsieur Robert Mols.
Il est des sentiments que Von ne saurait traduire
en paroles, et je me trouve fort embarrassé pour
vous exprimer la gratitude que je ressens, en me
rappelant combien vous m'avez aidé de votre talent
et de votre nom.
Les qualités du cœur vous ennoblissent autant que
le génie vous élève !
Pénétré d'une reconnaissance profonde, je vous
prie d'accepter la dédicace de ce travail, comme un
hommage de mon admiration et comme un gage
de ma sincère amitié,
Jacques Blockx, fils.
M<-Mêï^^¥^
INTRODUCTION.
La peinture ne s'apprend pas dans les livres,
dit-on.
A ne considérer que la manière propre à
chaque artiste de reproduire sa pensée au moyen
des couleurs, cet aphorisme est juste. Mais
pris dans son ensemble, Part de peindre con-
stitue deux parties bien distinctes quoiqu'étroi-
tement liées : la partie intellectuelle et la partie
technique.
Cette dernière comprend non-seulement tout
ce qui se rattache à la peinture : — Tétude des
formes , des proportions , de la perspective , de
Tanatomie et de l'histoire — mais aussi tout
ce qui a trait au côté matériel.
De nos jours l'étude des connaissances maté-
rielles est trop négligée, et Ton doit surtout
— II —
attribuer à cette circonstance la rapide altéra-
tion de la peinture.
Au sortir des académies, les jeunes artistes
possèdent leur « art » proprement dit, miais le
plus souvent ils ignorent les notions les plus
élémentaires de leur « métier » ; rarement ils
sont à même d'apprécier les matériaux qu'ils
emploient.
Nous exprimons le vœu que l'étude des con-
naissances matérielles de la peinture, soit
dorénavant comprise dans les cours de l'en-
seignement académique. Les élèves acquer-
raient ainsi une pratique rationnelle, et la
conservation de leurs œuvres serait assurée.
Il est incontestable que pour se trouver dans
les conditions désirées par rapport à la solidité,
la peinture à l'huile est soumise à certaines
règles.
Les gothiques , que nous citons comme
exemple parce que leur peinture est la mieux
conservée, avaient une méthode uniforme; ils
employaient généralement les mêmes couleurs.
Que l'on compare la peinture moderne à
celle du XV"® siècle, et l'on conviendra avec
— - m —
nous qu'il est profondément regrettable de voir
dans nos musées, des tableaux ne datant pas
de vingt ans, plus détériorés que d'autres
existant depuis quatre siècles !
Les anciens avaient-ils des couleurs meil-
leures que les nôtres (') ? Avaient-ils, comme
nous l'avons souvent entendu affirmer, un
véhicule merveilleux dont le secret est perdu
pour nous ? Tout en respectant cette opinion,
nous sommes persuadé que c'est autant à la
manière parfaite dont les couleurs ont été
appliquées , qu'à leur bonne qualité et celle des
autres matériaux en usage à cette époque, que
la conservation des tableaux anciens doit être
attribuée.
C'est dans le but d'initier les artistes à la
partie matérielle de la peinture, et de leur en
faire comprendre toute l'importance que nous
avons écrit ces pages. Les faits qui s'y trou-
vent relatés sont basés sur le raisonnement et
l'étude; ils résultent d'une longue et sérieuse
expérience.
(i) Nous traiterons cette question an chapitre « couleurs. »
— IV —
En donnant à cet ouvrage un caractère scien-
tifique ou une étendue exagérée, nous courrions
évidemment le risque de ne pas être lu. Nous
nous efforcerons donc d'être clair et concis.
l'auteur.
Vieux-Dieu, février 1881.
CAUSES D'ALTÉRATION
DE LA PEINTURE.
Quelle est la raison pour laquelle le plus
grand nombre de nos tableaux modernes
perdent si rapidement leur fraîcheur?
Pourquoi jaunissent-ils dans les parties clai-
res et contractent-ils un aspect terreux?
Pourquoi les couleurs perdent-elles leur éclat,
et dans certains cas changent-elles de nuance?
D'où proviennent ces accidents si fréquents
et si nombreux qu'un examen sérieux nous
découvre?
Les défauts dont nous venons de nous occu-
per dépendent des causes suivantes :
De l'emploi des huiles de mauvaise qualité.
De l'usage des siccatifs et des vernis.
De l'abus de l'essence de térébenthine.
De l'emploi des couleurs dont la fixité n'est
pas parfaite, ou qui agissent d'une manière
défavorable dans les mélanges.
1
— 2 —
De la mauvaise préparation des supports
ou de leur emploi prématuré.
De la manière vicieuse d'appliquer les cou-
leurs.
Du vernissage trop hâtif des tableaux.
SUPPORTS.
Un acte d'une importance capitale, et sur
lequel nous appelons toute l'attention des artis-
tes, c'est le choix judicieux des panneaux et
des toiles. De leur bonne préparation dépend la
durée d'un tableau.
La pâte qui couvre les supports doit être
composée de céruse et d'huile de lin, et non
pas de blanc d'Espagne et de colle. Elle doit
être appliquée en quantité suffisante pour bien
remplir les pores du bois, sans former une
couche épaisse. Elle doit être avant tout par-
faitement durcie (').
On s'en assurera en grattant fortement avec
l'ongle du pouce sur les bords du panneau.
Si la préparation est sèche à point , on ne doit
(i) L*air , la lumière et la chaleur , aidant beaucoup à la
dessication , il n'y a rien d'absolu dans la détermination du
temps qu'il faut aux supports , pour être convenablement secs.
Cela dépend de la bonne qualité de» matériaux employés,
surtout des huiles , et du milieu favorable dans lequel les pan-
neaux ou les toiles ont été placés après leur préparation.
— 4 —
rien pouvoir enlever, et Tongle doit produire
un bruit aigu.
' Les supports dont la couche de fond n'est
pas parfaitement durcie, peuvent occasionner
des crevasses profondes.
Nous engageons les artistes à employer de
préférence des toiles et des panneaux non
teintés. Ordinairement les fabricants ajoutent
des ocres communes à la préparation, pour la
colorer légèrement. Comme ces ocres sont
sujettes à monter de ton, cette circonstance
peut nuire plus tard à Teffet de certaines par-
ties du tableau, là où la couche de couleur n'est
pas assez épaisse pour empêcher le fond d'agir
par transparence.
Nous conseillons aussi de préférer l'acajou et
surtout le cèdre de bonne qualité, au chêne.
Ces deux premiers bois étant plus poreux,
laissent mieux pénétrer la préparation et l'adhé-
rence est plus complète. Ils sont aussi moins
enclins à se déjeter, et les vers ne les attaquent
pas.
Nous avons dit plus haut que les supports
doivent être préparés à la céruse et à l'huile,
et non pas à la colle et au blanc d'Espagne (');
(i) On nous observera avec raison , que les gothiques ont
peint sur une préparation que Ton croit généralement être
— s —
voici pourquoi : la gélatine étant une matière
animale hygrométrique à un haut degré, elle
est naturellement exposée à se corrompre, au
contact de Thumidité, et à perdre ses qualités
adhésives.
Ce fait est constaté par des preuves saisis-
santes que nous avons journellement sous les
yeux. Combien vite est détériorée la peinture
à la colle , surtout lorsqu'elle est appliquée sur
bois! Elle s'écaille et s'effrite en peu de temps.
Le résultat qui est produit à l'air libre, doit
fatalement se représenter sur les panneaux et
surtout sur les toiles — quoiqu'ils soient pro-
tégés par la couche de couleur à l'huile — mais
au bout d'un nombre d'années plus grand.
Il est donc rationnel et prudent d'employer
la préparation à la céruse et à l'huile.
Arrivée à un état de siccité parfaite, elle
sera pour ainsi dire impénétrable à l'air et à
l'humidité.
composée de craie et de colle , et que malgré cela , leur pein-
ture s'est bien conservée sous tous les rapports. Cette objection
n'a pas d'importance sérieuse : sans compter les accidents
nombreux et funestes occasionnés par ce procédé , nous ferons
simplement remarquer que si les anciens avaient préparé leurs
supports à l'huile, leurs œuvres auraient pu résister pendant des
siècles encore; mais que le contraire est fort à craindre en
présence du manque d'adhérence -r- occasionné par la décom-
position de la matière gélatineuse — de la préparation qu'ils ont
employée.
— 6 —
Pour prévenir l'action nuisible de ces deux
agents sur le bois ou sur la toile , nous conseil-
lons aussi de faire peindre deux ou trois fois,
à la céruse et à Thuile, Tenvers des supports.
On a prétendu longtemps , et d'aucuns croient
encore qu'il vaut mieux que le bois ou la toile
soit en contact direct avec l'air! Cette opi-
nion routinière est controuvée par de nombreux
exemples. Nous en citerons deux qui suffiront,
pensons-nous à édifier nos lecteurs.
Dans les églises, où les tableaux sont géné-
ralement exposés à l'humidité, les volets de
certains tryptiques, peints des deux côtés, se
sont bien conservés ; tandis que sur le panneau
du millieu, dont un côté seulement est peint,
on trouve des accidents de toute nature. Le bon
sens nous dit que ce sont les variations hygro-
métriques de l'air qui causent en grande partie
ces désastres, par influence directe sur le bois.
La couche de couleur durcie ne pouvant suivre
la dilatation ni le rétrécissement du support
doit inévitablement se crevasser, même s'écail-
ler à la longue.
Un fait plus concluant encore :
Nous avons eu l'occasion d'examiner des
ouvrages de menuiserie, datant du XVII™®
siècle, peints de totcs côtés y placés dans un sou-
terrain, et exposés ainsi à une humidité con-
— 1 —
stante. Nous avons constaté que le bois était
en parfait état, et que la couche de couleur à
l'huile était bien adhérente.
Il est donc de première nécessité d'empêcher
l'action de l'humidité^pour assurer la conserva-
tion de la peinture et en même temps celle des
supports.
PEINTURE SUR BOIS NON PRÉPARÉ.
Certains artistes exécutent leurs œuvres
directement sur bois nu, sans aucune prépa-
ration. Nous approuvons entièrement cette
manière de procéder qui donne d'excellents
résultats, et peut-êtr© bien les meilleurs de
tous. Il est essentiel cependant, de prendre
certaines précautions que nous indiquerons plus
loin, de choisir des bois vieux, secs, peu sujets
à se déjeter, et qui en outre ne contiennent ni
résine ni principes acides. On sait que le sapin
du nord et le chêne occasionnent des dégâts
irrémédiables aux couleurs.
"'^'M^i
HUILES.
L'huile est la base fondamentale de la pein-
ture qui nous occupe ; elle doit conséquemment
se trouver dans les meilleures conditions par
rapport à la qualité ; en un mot elle doit possé-
der tout ce que la nature lui a donné.
Les faits démontrent clairement que les pro-
cédés primitifs de fabrication et d'épuration
des huiles, étaient les meilleurs. Au point de
vue industriel la science a fait des progrès : on
est arrivé à clarifier et à blanchir artificielle-
ment les huiles en quelques jours, alors qu'il
faut plusieurs mois , parfois plus d'un an, pour
que ce travail se fasse naturellement par le
repos, et par l'action des rayons solaires. Mais
la rapidité du travail nuit dans ce cas à la
solidité.
Pour posséder toutes leurs qualités grasses,
les huiles ne peuvent pas avoir été battues à
l'acide, ni clarifiées par un procédé chimique
quelconque. Le repos prolongé doit leur faire
— 10 —
perdre la partie mucilagineuse; les lavages
répétés, l'exposition aux rayons du soleil,
éliminent Tacide oléique et achèvent de les
clarifier et de les blanchir (^). Elles ne doivent
en aucun cas avoir été bouillies ni oxygénées (*)
artificiellement, par des oxydes ou des sels
métalliques. L'air et la chaleur du soleil, com-
muniquent aux huiles un degré d'oxygénation
suffisant pour leur permettre de sécher dans un
temps convenable.
Toute huile oxygénée d'une manière arti-
ficielle jaunit considérablement après sa des-
sication et devient cassante. Il suffit d'une
quantité très minime de matière oxydante en
dissolution dans l'huile, pour lui communiquer
ces graves défauts (^).
(i) Ce traitement atténue le défaut que possèdent les huiles,
à un degré variable, de jaunir en séchant.
(2) C'est-à-dire rendues plus siccatives.
(3) L*étude des huiles nous a longuement occupé. Toutes les
recherches que nous avons faites en vue d'arriver à décolorer et
à oxygéner artificiellement ces liquides , sans nuire à leur soli-
dité, ont été infructueuses, et nous avons abandonné les procé-
dés en usage , parce que nous avons acquis la conviction que
pour la peinture artistique ils ne conviennent pas. Le résultat
de nos expériences nous a donné la certitude que les huiles
lithargirées ou manganésées perdent leurs qualités grasses.
Pareilles huiles , appliquées sur verre, et exposées au grand air
et au soleil, sont devenues opaques au bout de six à huit
— II —
Les deux espèces d'huile les plus propres à
la peinture artistique, sont l'huile de lin et
l'huile d'œillette.
Nous estimons que la première est la plus
grasse et qu'elle communique le plus de solidité
aux couleurs; mais comme elle jaunit beaucoup
en séchant, même après avoir été blanchie, il
est des cas dans lesquels l'huile d'œillette doit
lui être préférée. Ainsi le blanc d'argent, le
bleu, le violet, les laques de garance pâles,
doivent être broyés â l'huile d'œillette si l'on
veut qu'ils conservent franchement leur nuance
propre (').
L'huile de lin vierge, clarifiée par les moyens
naturels que nous avons indiqués, est de cou-
leur jaune d'or.
L'huile d'œillette vierge, ayant subi le même
traitement, est de nuance paille claire.
Toutes les deux doivent être parfaitement
limpides et brillantes.
Les huiles vieilles et épaissies sont éminem-
semaines. En moins de six mois la plupart d'entre elles étaient
devenues pulvérulentes. Par contre, des échantillons d'huile
vierge , soumis à la même épreuve , avaient conservé , au bout
de ce temps , leur brillant et leur élasticité.
(i) De là découle qu'il ne faut jamais se servir d'huile de
lin pour délayer les couleurs destinées aux parties claires
d'un tableau.
— 12 —
ment propres à la peinture artistique , au point
de vue de la solidité. Le seul inconvénient
qu'elles offrent pour certains artistes, c'est de
rendre les couleurs plus ou moins poisseuses.
Approprier aux matières colorantes, les
huiles qui conviennent à leur composition
chimique et à leurs propriétés physiques, afin
d'obtenir une dessication homogène et le plus
de solidité , voilà le grand art du préparateur.
Nous croyons qu'il est malheureusement peu
connu, et moins encore mis en pratique.
VERNIS.
Nous croyons être utile à nos lecteurs en
émettant ici quelques considérations sur les
vernis , et en donnant leur composition d'une
manière générale, afin de mieux faire com-
prendre les raisons pour lesquelles il est dan-
gereux de se servir de ces liquides, pour
détremper les couleurs à l'huile — usage mal-
heureusement trop répandu parmi les artistes.
Rien n'est plus confus que les principes de
la fabrication des vernis.
Malgré les recettes sans nombre entassées
dans les recueils publiés par les praticiens;
malgré les efforts de plusieurs savants chimis-
tes, la science ne possède pas de bases cer-
taines pour définir théoriquement et d'une
manière absolue, la bonne fabrication des
vernis.
Si les procédés diffèrent, les résultats obte-
nus se ressemblent : les vernis sont inévitable-
- 14 -
ment condamnés à devenir friables. Leur durée
n'est pas déterminée; elle dépend de la qualité
des résines et des gommes ou résines molles
qui les composent, de la proportion dans
laquelle celles-ci ont été assemblées, et aussi
de la manière dont les huiles ont été préparées.
Pour qu'un vernis gras résiste bien , il faut que
la proportion d'huile soit plutôt exagérée.
« Certains vernis sont très-siccatifs, ce sont
» les moins solides; d'autres sont glutineux,
» gras , longs à sécher , mais aussi ce sont les
» plus résistants , lorsqu'ils ont atteint le degré
» de dessication qui leur convient. » (Dumas,
Précis de chimie, 1128).
On distingue plusieurs espèces de vernis :
les vernis à l'huile ou vernis gras, ceux à
l'essence , à l'alcool , à la benzine et au chloro-
forme. Les deux premiers seuls nous con-
cernent.
Un vernis gras est un mélange d'une ou de
plusieurs résines fondues, d'huile siccative ou
vernis d'huile en termes de vernisseur, et d'es-
sence de térébenthine. L'huile la plus employée
est celle de lin ; on se sert aussi d'huile de noix
et de pavot, mais plus rarement.
Le copal, le succin, la térébenthine de
Venise , la sandaraque , le mastic , le camphre ,
l'animé , l'élémi , le baume de copahu , sont les
— 15 —
résines et les gommes ou résines molles princi-
pales qui servent à composer les vernis. Selon
la nature de ces derniers , et Tusage auquel ils
sont destinés, les proportions des résines, de
l'huile, de l'essence, varient à l'infini.
Le procédé de fabrication généralement
adopté pour les vernis gras, consiste à mettre
les résines en fusion, et à leur incorporer
ensuite l'huile et finalement l'essence.
Les vernis à l'essence se font à une chaleur
modérée ou à froid, d'après le degré de solu-
bilité des gommes.
Examinons maintenant pourquoi les vernis
deviennent brunâtres et opaques après quelques
années d'application, pourquoi ils se gercent
et deviennent pulvérulents.
Vernis gras. — L'huile lithargirée ou man-
ganésée est la cause première de leur altéra-
tion. Nous avons dit en parlant des huiles , que
ces liquides jaunissent considérablement et
deviennent friables lorsqu'ils ont été traités par
des oxydes ou des sels métalliques. Or, les
huiles qui servent à fabriquer les vernis gras
sont toujours oxygénées énergiquement, parce
que l'on exige qu'un vernis sèche promptement
avant tout.
Les résines subissent une altération profonde
par la fusion. En les examinant après le refroi-
— i6 —
dissement, on s'aperçoit qu'elles ont perdu de
leur éclat, de leur transparence et de leur
cohésion. Les principes gras sont éliminés en
majeure partie.
Vernis à l'essence. — Les vernis à l'essence
se décomposent plus rapidement que les vernis
gras, parce qu'ils fournissent un enduit peu
compacte et plus perméable à l'air ; la plupart
d'entre eux peuvent être pulvérisés peu de
temps après leur application. La coloration
brunâtre qui se produit après la dessication de
la couche, dépend en partie du dissolvant,
mais de fait elle est occasionnée par la décom-
position des matières résineuses, sous l'in-
fluence de l'oxygène de l'air. Cette décompo-
sition est également cause de l'opacité que les
vernis contractent par le temps.
Les crevasses sont dues au rétrécissement de
la couche, mais elles peuvent être provoquées
par la nature des objets sur lesquels les vernis
ont été appliqués. Les vernis très-siccatifs sont
en outre enclins à s'écailler.
D'après ce qui précède peut-on obtenir un
avantage quelconque, au point de vue de la
solidité , en mêlant des vernis aux couleurs à
l'huile ? En aucune manière. On y ajoute des
résines altérées ou des gommes peu durables,
des huiles appelées à devenir friables et à
— 17 —
foncer les couleurs , et de l'essence de térében-
thine. Le seul effet que produisent dans ce cas
les vernis , c'est de donner à l'artiste une satis-
faction éphémère en voyant ses couleurs sous
un aspect plus brillant. Le résultat final est
désastreux.
En somme, il ne faut pas donner aux vernis
dont nous avons parlé, une autre destination
que celle qui leur appartient; c'est-à-dire,
d'être appliqués en couche mince sur les pein-
tures à l'huile en général, pour leur donner
plus de relief et pour les préserver du contact
de l'air.
4 "***;
DESSICATION ET SICCATIFS.
La dessication des couleurs est produite par
la solidification des huiles qui servent à les
préparer. Ces liquides absorbent Toxygène de
l'air en augmentant de poids et de volume.
Rien n'est variable comme le phénomène de
la dessication.
Selon qu'une couleur aura été appliquée sur
toile, bois, verre, métal ou autres supports;
selon qu'elle aura été exposée à une lumière
vive ou diffuse; selon qu'elle se sera trouvée
dans un milieu sec ou humide , elle se solidifiera
dans des proportions de temps différentes et
qui ne sont pas à déterminer.
Le grand air et la chaleur activent aussi la
dessication. Celle-ci dépend encore de la pro-
priété plus ou moins grande que possèdent les
matières colorantes, d'agir sur les huiles et
d'accélérer ou de ralentir l'absorption de l'oxy-
gène.
— 20 —
Préparées avec une même huile, les diverses
couleurs mettent un temps différent à sécher.
En général, les oxydes métalliques, qui forment
la plus grande partie des couleurs fixes, favo-
risent la dessication des huiles; les couleurs
animales ou végétales la retardent.
L'oxydation, d*abord lente, se produit avec
plus d*énergie lorsque Thuile se solidifie. C'est
çc qui explique pourquoi une couleur sèche plus
rapidement lorsqu'elle est appliquée en seconde
couche.
Nos observations nous ont prouvé que Ton
peut admettre comme une loi irréfragable, que
les couleurs qui absorbent Toxygène lentement
et d'une manière régulière, offrent plus de
solidité que celles qui sèchent promptement.
Après quelques années, la couche paraîtra
grasse et cornée dans le premier cas, terne et
grumeleuse dans le second.
Il faut laisser à chaque couleur le temps
qu'elle exige pour arriver au degré de siccité
voulu, et l'emploi des siccatifs Ç) dans la pein-
ture artistique est absolument inadmissible.
(i) On donne le nom de siccatifs à des huiles traitées par des
oxydants énergiques. Autrefois on avait l'habitude démêler
directement aux couleurs lentes à sécher, du sel de satume
(aéetate de plomb). Cette détestable coutume s'est heureuse-
ment perdue.
— 21 —
Lorsque la couche est sèche et qu'il n*y a
plus d'absorption d'oxygène, les couleurs se
durcissent , se pétrifient en quelque sorte, occa-
sionnant un retrait. Si ce dernier a lieu d'une
manière lente et régulière, il ne cause pas
d'accidents; mais s'il est activé par des sicca-
tifs, le rétrécissement inégal occasionne des
crevasses.
Comme corollaire nous ferons remarquer,
que les parties craquelées dans les tableaux se
trouvent principalement dans les noirs, les
bruns , les laques ; toutes couleurs séchant diffi-
cilement et laissant supposer la présence de
siccatifs.
Nous ne voyons d'ailleurs pas la nécessité de
hâter le travail naturel de la solidification des
couleurs. Nous concevons que l'on exigé qu'une
porte, un parquet, soit promptement sec,
parce que l'on peut se trouver dans le cas de
devoir s'en servir de suite. Peu importe alors
la solidité; au moyen de quelques frais, l'on
peut faire renouveler le travail. Mais une oeuvre
d'art doit être durable , et l'on ne saurait prendre
assez de précautions pour en assurer la con-
servation.
Dans ce but nous engageons les artistes à
bannir impitoyablement les siccatifs de leur
palette.
ESSENCE DE TÉRÉBENTHINE.
Ce dissolvant agit d'une manière défavorable
sur les huiles dont il détruit les qualités grasses.
Une peinture dans laquelle l'essence a été em-
ployée à l'excès , se reconnaît à sa maigreur et
à son manque d'éclat.
C'est une erreur de croire que l'essence ne
nuit pas à la solidité. Nous rappellerons comme
exemple , que les peintures à l'huile et à l'es-
sence ne résistent pas un été durant, au grand
air; au bout de ce temps elles sont pulvéru-
lentes.
L'essence est utile à divers usages dans la
peinture , basés sur la propriété que possède ce
liquide de dissoudre les corps gras et les huiles.
L'essence fraîchement rectifiée est complète-
ment incolore; elle possède une odeur franche
et caractéristique qui la fait aisément distin-
guer de l'essence commune.
— 24 —
Nous ne pouvons que conseiller aux artistes
d'être très-modérés dans l'emploi de Tessence ,
et surtout de ne pas s'en servir pour délayer les
couleurs.
PRATIQUE.
Il est indispensable de dégraisser les toiles
et les panneaux au moment d'en faire usage,
afin d'enlever la couche graisseuse qui s'est
formée par Thuile exsudée de la préparation,
et par le contact prolongé de Tair. Cette pré-
caution si élémentaire, trop souvent négligée
par les artistes, est nécessaire pour obtenir
l'adhérence parfaite des couleurs.
En enlevant la couche graisseuse, on rend la
préparation du support perméable; l'huile y
pénètre et les couleurs se fixent. Lorsqu'il y a
manque d'adhérence la couche est exposée dans
certains cas (^), à se déplacer par le retrait et à
se ratatiner; elle s'écaillera infailliblement
lorsqu'elle sera complètement durcie.
Un simple lavage à l'eau ou à l'essence ne
(i) Principalement lorsqu'on emploie des panneaux lisses et
lorsqu'on a superposé plusieurs couches de couleurs séchant
inégalement.
— 26 —
suffit pas à nettoyer un support. Il faut em-
ployer Teau savonnée et brosser dans tous les
sens au moyen d'une brosse dure, pendant
quelques minutes; laver ensuite plusieurs fois
à Teau propre.
Si le support est bien dégraissé, Teau doit
s'étaler uniformément à sa surface , mais elle ne
peut se séparer à certaines places ni former de
stries; dans ce cas il faudrait recommencer
l'opération. Essuyer avec un linge propre ou
une peau de chamois, et laisser sécher le
panneau ou la toile pendant un jour.
Avant d'entamer la peinture, il est bon
d'humecter le support au moyen d'huile addi-
tionnée d'essence de térébenthine rectifiée, pour
obtenir le plus d'affinité possible entre la couche
nouvelle et la préparation.
Lorsqu'on reprend un tableau ébauché, ou
qu'on veut corriger une œuvre achevée depuis
un certain temps, il est également nécessaire
d'enlever la couche graisseuse.
A cette fin nous conseillons l'emploi de la
pomme de terre crue. Les principes légèrement
acides de ce tubercule, et la fécule qui s'en
détache par le frottement, dégraissent d'une
manière très-convenable et ne peuvent en aucun
cas nuire aux couleurs.
Laver après à grande eau , laisser sécher, et
^ ^T —
appliquer un frottis (') d'huile sur les parties à
reprendre.
Les peintures faites grassement et d'un seul
coup (^), sont les plus solides et conservent le
mieux leur fraîcheur. Elles s'émaillent par le
temps, et elles sont à Tabri des accidents résul-
tant de l'inégale dessication des couleurs super-
posées.
Les peintures de longue haleine, celles où
l'artiste superpose plusieurs couches ou procède
par glacis , sont les plus sujettes à se détériorer
et réclament des soins attentifs. Dans ce cas,
la meilleure marche à suivre consiste à appli-
quer une couche nouvelle , ou un glacis , lorsque
la couche précédente est « poisseuse, » c'est-à-
dire pendant l'intervalle compris entre le com-
(i) Nous entendons par frottis , une couche d'huile excessive
fient mince, étendue au moyen de la brosse de telle manière
que la peinture soit simplement humectée.
(2) C'est-à-dire sans fatiguer les couleurs.
En repeignant , en changeant sans cesse les nuances , celles-ci
perdent leur vivacité. Très souvent, si Ton a appliqué des
couleurs claires sur d'autres plus foncées , ces dernières repa-
raissent pendant la dessication.
Là ne se bornent pas les écueils d'une peinture fatiguée. On
verra plus loin que la superposition de certaines couleurs
séchant inégalement , entraîne des accidents fâcheux , et que le
contact de matières colorantes hétérogènes a pour effet d'altérer
les nuances.
3
— 28 —
mencement de solidification et la solidification
complète (^). Alors la couche superposée ne se
noie pas dans la première, ni elle ne s'emboit
pas ; elle conserve au contraire sa pureté et son
éclat — de plus les deux couches sont intime-
ment jointes et font corps. — Cette manière
d'opérer est surtout avantageuse pour les cou-
leurs transparentes et pour celles qui sèchent
trop lentement, comme les laques de garance.
Si des circonstances particulières empêchent
de procéder comme nous venons de l'indiquer,
c'est-à-dire que l'on ne peut appliquer la
couche nouvelle que lorsque celle qui lui est
inférieure s'est complètement solidifiée, il est
indispensable de faire d'avance un frottis d'huile.
En négligeant cette précaution il y a manque
d'adhérence; de plus si la couche de fond n'est
pas sèche au point de ne plus emboire, on
(i) Nous avons dit plus avant que l'air , la lumière , la tempé-
rature, ont une influence très-grande sur la dessication des
couleurs. Cette circonstance peut être utilement mise à profit,
soit en plaçant une œuvre commencée dans un endroit frais et
privé de lumière , pour garder les couleurs mouillées , soit en
exposant un tableau achevé , au jour vif, dans un local sec et
bien aéré, afin d'activer la dessication de certaines couleurs
récalcitrantes.
Lorsqu'on pose le tableau devant une fenêtre au midi, il
est nécessaire de matir les vitres afin d'intercepter les rayons
du soleil , et d'éviter ainsi l'échaufTement du support.
^ 29 —
court le risque de voir se former des gerçures ,
parfois le lendemain, parfois plusieurs jours
après. Ces accidents ne résultent pas de la
dessication, mais proviennent de ce que la
première couche, trop molle et trop pénétrable,
s'empare brusquement et inégalement de la
portion liquide de celle qui lui est superposée;
par le rétrécissement et le manque de cohésion ,
celle-ci se disjoint à certaines places.
Les crevasses qui se forment plusieurs mois ,
même plusieurs années après l'achèvement d'un
tableau, lorsque les couleurs atteignent leur
maximum de siccité, sont de nature toute diffé-
rente. Elles dépendent principalement de l'iné-
gale dessication des couches superposées; de
ce que la préparation du support n'était pas
suffisamment durcie ; de la présence du bitume ^
dès siccatifs , des vernis , ou bien encore de la
mauvaise qualité des huiles.
Il faut strictement éviter de superposer une
couleur prompte à sécher, sur une autre ne
séchant que lentement. Celle-ci étant alors
privée du contact direct de l'air, met un temps
infiniment long à se durcir, et le retrait inégal
des deux couches occasionne des crevasses. En
couvrant, au contraire, une couleur siccative,
d'une autre qui l'est moins, on ralentit la
dessication de la première; le durcissement
— 30 —
différent des deux coulçurs se trouvant ainsi
équilibré , le retrait a lieu régulièrement et sans
causer d'accidents.
Nous avons fait principalement cette re-
marque, pour signaler aux artistes le danger
qu'il y a, d'ébaucher un tableau au moyen du
bitume , de la terre de Cassel , des noirs , de la
terre de Sienne brûlée. Nous les engageons à
employer de préférence des couleurs promptes
à durcir, telles que le brun de Mars, le jaune de
cadmium, le bleu d'outremer, le vert émeraude,
le violet de cobalt , et donnant en mélange avec
le blanc d'argent, les ocres, le jaune de Mars,
le violet de Mars, la teinte désirée. Peindre
l'ébauche maigrement, c'est-à-dire en n'empâ-
tant pas.
Lorsqu'on dessine un tableau , il est essentiel
de tracer les contours le plus légèrement pos-
sible, et d'enlever au moyen de l'essence de
térébenthine ceux qui sont inutiles, avant d'ap-
pliquer les couleurs. Le fusain est préférable à
la mine de plomb, à la sanguine et à la craie
noire, parce qu'il se laisse mieux enlever, qu'il
n'agit pas sur les matières colorantes et qu'il
n'empêche pas l'adhérence de la peinture.
Nous ne saurions assez recommander aux
artistes , la plus grande propreté en ce qui con-
cerne leurs brosses , leur palette , leur pincelier.
— 31 —
Le bon entretien de ces ustensiles contribue
dans bien des cas , à garantir la pureté des par-
ties claires d'un tableau.
PEINTURE SUR PANNEAUX NON PRÉPARÉS.
Il suffit de laver ces panneaux proprement,
à l'essence de térébenthine rectifiée — Peau
pouvant faire travailler le bois — et de les
enduire après, d'une mince couche d'huile qu'on
laisse bien pénétrer. Cette dernière opération
peut se faire en une fois ou par parties , d'après
le sujet du tableau ; elle est utile pour favoriser
l'adhérence et pour empêcher les couleurs de
s'emboire outre mesure.
// est d'une nécessité absolue de peindre à Vhuile
et à la céruse l'envers des supports non préparés (^),
les couleurs étant directement exposées aux atteintes
de l'humidité dont le bois pourrait s'imprégner.
(i) Ou mieux d*y faire appliquer , au tampon , une couche de
gonmie-Iaque.
VERNISSAGE.
Le vernissage des tableaux ne peut être fait
prématurément.
Deux raisons fondées s'y opposent : si les
couleurs sont insuffisamment sèches , le vernis
fait corps avec elles et ne peut être que partiel-
lement enlevé plus tard; dans le même cas, les
crevasses qui s'y forment, entament inévitable-
ment la peinture (^).
Tenant compte de la différence d'épaisseur
des couches, de l'inégal durcissement des cou-
leurs, des conditions si variables de tempé-
rature, il serait difficile, pour ne pas dire
impossible, de préciser l'espace de temps après
lequel un tableau peut être verni sans danger.
Nous ne voulons donc pas nous prononcer à
(i) Ces crevasses sont alors occasionnées par ce que la couche
de vernis , se durcissant rapidement , ne conserve pas l'élasticité
voulue pour suivre Taugmentation de volume ou le retrait des
couleurs.
— 34 —
ce sujet, mais nous conseillons aux détenteurs
d'oeuvres précieuses, fraîchement peintes, de
prendre Tavis des gens compétents et expéri-
mentés , avant de faire procéder au vernissage.
COULEURS.
En considération du caractère concis de ce
travail, nous avons renoncé à l'idée de faire
l'historique des couleurs, ou de donner leur
composition d'une manière étendue.
Nous nous bornerons à indiquer quelles sont
les matières minérales ou autres , qui servent
de base aux couleurs fixes. Nous parlerons
spécialement de ces dernières. Nous signale-
rons, autant qu'il nous sera possible, les cou-
leurs impropres à la peinture artistique , soit à
cause de leur peu de solidité, soit à cause de
l'effet nuisible produit par leur mélange.
Nous ne prétendons pas définir la catégorie
des couleurs fixes, d'une manière absolue, car
plusieurs bonnes couleurs peuvent nous être
inconnues encore ('); mais en attendant que
(i) L'examen et rexpérimentation des matières colorantes,
sont fort compliqués. Afin de pouvoir juger efficacement de
leurs propriétés , il est indispensable de les avoir pures et bien
fabriquées ; la difficulté de nous procurer ces produits — venant
de rétranger — a sérieusement entravé nos recherches.
3*
- 36 -
nous ayons complété notre étude , nous croyons
utile de faire connaître dès à présent , une série
de couleurs dont la stabilité est parfaite.
L'expérience sérieuse et concluante qu'un
de nos peintres les plus illustres a faite, il y a
bientôt trente-quatre ans, nous a servi de base
pour déterminer les couleurs fixes.
M. Joseph Laurent Dyckmans a eu , en octo-
bre 1847, l'idée d'appliquer des échantillons
des principales couleurs connues alors , sur deux
panneaux — ces couleurs étaient broyées à
rhuile. Il a mis d'abord chaque couleur à l'état
pur, puis en mélange avec du blanc de plomb,
de manière à obtenir une dégradation de nuan-
ces d'une même valeur de ton.
L'un de ces panneaux a été constamment
exposé au jour vif, plusieurs années même à
l'air et au soleil; l'autre a été privé de lumière
pendant ce long espace de temps. La disposi-
tion ingénieuse des couleurs fait voir d'emblée
quelles sont celles qui ont été altérées.
L'éminent artiste nous a permis d'examiner
longuement ces panneaux ; il a eu la complai-
sance de nous donner des renseignements pré-
cieux qui nous ont facilité l'étude des couleurs.
LISTE
DES DIFFÉRENTES COULEURS EXPÉRIMENTÉES
PAR M. J. DyCKMANS, EN 1847.
Bistre.
Bitume.
Bleu de cobalt, en diverses nuances.
Bleu de Prusse.
Bleu d'outremer.
Brown pink.
Brun de fer.
Brun d'ivoire.
Brun Van Dyck.
Carmin de cochenille.
Carmin fixe de garance.
Cinabre.
Crimson lake.
Ecarlate de Mars.
Jaune d'antimoine.
Jaune de cadmium, en diverses nuances.
Jaune de Mars.
Jaune de soufre.
- 38 -
Jaune de Naples ordinaire.
Jaune de Naples de Rome.
Laques brunes.
Laques de garance, roses et rouges.
Laques de Robert, les n*"* i, 2, 3, 4, 5,
6 et 7.
Laques de Smyrne , roses et pourpres.
Lemon yellow.
Momie.
Ocres naturelles.
Ocres brûlées.
Orangé de Mars.
Outremer vert.
Patent yellow.
Rouge anglais.
Rouge de Mars.
Rouge de Naples.
Rouge de Saturne.
Rouge indien.
Rouge Van Dyck.
Terre de Cassel.
Terre d'Italie.
Terre de Sienne, naturelle et brûlée.
Terre verte, naturelle et brûlée.
Vert de cobalt.
Vert émeraude.
Vert malachite.
Vermillon, plusieurs échantillons différents.
— 39 —
Vert Paul Véronèse.
Violet de Mars.
En tout cent cinquante échantillons de cou-
leurs pures, et les mêmes mélangées avec du
blanc de plomb.
DES COULEURS FIXES.
Les métaux sous forme d'oxydes et de sels
métalliques décomposés et calcinés , fournissent
la majeure partie des couleurs fixes (^).
Les couleurs provenant des végétaux offrent
peu de solidité; les laques de garance non cal-
cinées , ainsi que les corps ligneux carbonisés ,
font cependant exception à cette règle.
Parmi les couleurs tirées du règne animal,
le noir d'ivoire est la seule que nous nomme-
rons ici.
En général les couleurs calcinées à une
haute température acquièrent par ce fait une
solidité plus grande.
Le fer, le plus utile de tous les métaux,
compose une variété de couleurs remarquables
par leur fixité et par leur beauté. Son oxyde
colore les ocres, et leurs congénères le rouge
(i) Nous entendons par couleur fixe celle qui ne perd pas sa
nuance au contact de l'air et de la lumière et qui ne fonce pas.
— 42 —
de Venise, la terre d'Italie, la terre de Sienne.
C'est encore le fer qui forme la base de ces
intéressants produits connus sous le nom de
« couleurs de Mars » dont nous parlerons plus
loin.
Le plomb nous fournit le blanc si pur et si
éclatant nommé improprement « blanc d'ar-
gent. >
Enfin le cadmium, le chrome, le cobalt, le
mercure, donnent respectivement ces belles
couleurs jaunes, vertes, bleues, violettes et
rouges, appelées jaune de cadmium, vert éme-
raude, bleu Thénard ou de cobalt, violet de
cobalt, vermillon.
L'arsenic, le soufre, la silice, l'alumine
entrent souvent dans la composition des cou-
leurs fixes.
Parmi celles que l'on trouve à l'état naturel
nous citerons les ocres, le rouge de Venise, la
terre de Cassel, la terre d'Italie, la terre de
Sienne, le bleu de lapis-lazuli (outremer vrai)
abandonné depuis la découverte célèbre de
Guimet.
Toute couleur qui s'altère au contact de l'air
et de la lumière doit être rejetée par l'artiste
consciencieux.
Pour qu'une couleur puisse servir utilement à
la peinture qui nous occupe , il faut qu'elle pos-
— 43 —
sède une stabilité parfaite; à cette fin elle doit
être préparée dans les conditions voulues et être
exempte de fraude.
La fabrication des couleurs exige des con-
naissances spéciales, et constitue une des parties
les plus délicates de la chimie industrielle. Les
bonnes couleurs réclament des soins minutieux;
c'est par l'emploi de matières premières pures ,
que l'on peut obtenir le plus haut degré de
finesse et d'intensité dans la nuance.
On reconnaît aisément une couleur faite avec
soin, d'une autre mal fabriquée ou sophistiquée.
Dans le premier cas elle a de l'éclat et du feu;
dans le second elle parait terne, et sa nuance
n'est pas nettement caractérisée.
Les couleurs artificielles doivent être puri-
fiées par des lavages répétés, jusqu'au point où
les dernières eaux n'accusent plus de réaction
acide ni alcaline , au contact du tournesol. Cette
précaution essentielle est surtout requise pour
les couleurs préparées par voie humide , et qui
n'ont pas été calcinées.
Les couleurs naturelles sont purifiées par
lévigation. Ce traitement élimine la plus grande
partie des corps étrangers qu'elles renferment ,
et leur communique plus de finesse et une soli-
dité plus grande.
Les couleurs faites par voie humide et par
— 44 —
précipitation , joignent à une grande pureté , la
propriété d'être atomiquement divisées — avan*
tage précieux dans les mélanges.
Comme il est impossible aux artistes de véri-
fier si les couleurs qu'ils emploient sont pures .
il faut qu'ils s'en rapportent à la bonne foi du
marchand. L'habitude leur apprendra néan-
moins à connaître une couleur par sa nuance
propre, mieux encore par le ton qu'elle donne
lorsqu'elle est mélangée au blanc d'argent.
Nous leur conseillons de se méfier des cou-
leurs dont la fixité n'est pas reconnue, quelque
belles qu'elles puissent être, et de les éprouver
scrupuleusement avant d'en faire usage.
A cet effet la méthode à suivre est celle de
M. Dyckmans, c'est-à-dire d'appliquer sur
panneau la couleur que l'on veut expérimenter,
et de la soumettre à la lumière vive pendant un
espace de temps prolongé. On mettra d'abord
un échantillon de la couleur pure, puis plusieurs
autres en mélange avec du blanc d'argent, en
dégradant chaque fois la nuance jusqu'au point
d'arriver aux demi-teintes claires. Celles-ci
permettent de constater dans un espace de
temps assez court, si la couleur perd sa nuance,
si elle monte de ton , ou si elle exerce une action
nuisible sur le blanc. Pour pouvoir juger série\i-
sement de la stabilité d'une couleur, il faut
— 45 —
qu'elle ait subi l'épreuve pendant au moins
un an.
Nous terminerons ce chapitre en citant un
passage de la « Chimie des Couleurs » de
J. Lefort. Le juste raisonnement de cet auteur
n'échappera pas à nos lecteurs.
« De l'avis des historiens et des chimistes,
» les peintres de l'antiquité n'employaient qu'un
» petit nombre de couleurs , appartenant pour
» la plupart au règne minéral , et d'une fixité
» parfaitement reconnue parce qu'ils les prépa-
» raient eux-mêmes. Mais les travaux inces-
» sants de nos chimistes modernes on fait dé-
» couvrir depuis , une foule de combinaisons
» diversement colorées,que l'industrie fait servir
» d'une manière plus ou moins heureuse à la
» peinture en général. De là cette profusion de
» substances existant actuellement dans le com-
» merce, sous des noms qui n'indiquent pas
» ordinairement la véritable composition chi-
» mique.
» Toutes les recherches qui ont pour but de
» remplacer une couleur peu solide et d'une
» nuance désavantageuse,par une autre plus fine
» et plus belle, ne peuvent qu'être bien
» accueillies par les artistes. Malheureusement
» il n'en est pas toujours ainsi.
» Ce que le fabricant actuel recherche avant
- 46 -•
» tout , c'est de livrer au commerce des produits
» d'une teinte aussi belle que possible et au prix
» le moins élevé , sans s'inquiéter s'ils pré-
» sentent une solidité assez grande. Un pareil
» résultat ne peut avoir que des conséquences
» désastreuses pour l'avenir. Il est fort à croire ,
» en effet, qu'en composant de semblables
» couleurs , ces belles toiles , qui font mainte-
» nant notre admiration, perdront dans un
» temps plus ou moins éloigné ces tons riches
» que l'artiste a reproduits avec tant de fidélité,
» et que l'on retrouve encore dans les tableaux
» des anciens maîtres. »
M-^s^lêf ^^ #:
SERIE
DE COULEURS FIXES QUI PEUVENT ETRE EMPLOYEES
EN TOUTE SÉCURITÉ.
Blanc d'argent.
Rouge anglais.
Rouge de Mars.
Rouge de Venise.
Rouge indien.
Carmin fixe de garance.
Laques de garance roses et rouges non
calcinées.
Terre de Sienne brûlée.
Orangé de Mars.
Orange et jaunes de cadmium.
Jaune de Mars.
Terre d'Italie.
Vert émeraude.
Bleu de cobalt.
Outremer vrai (Lazulite).
Outremer de Guimet.
Violet de cobalt.
Violet de Mars.
Ocre brune.
- 48 -
Brun de Mars.
Terre de Cassel.
Noir de vigne.
Noir d'ivoire.
Blanc d'argent. — Carbonate de plomb pur;
obtenu par voie humide par la double décom-
position d'un sel de plomb et d'un carbonate
alcalin.
La couleur qui joue le rôle le plus impor-
tant dans la peinture est sans contredit le blanc.
Divers produits ont été proposés par les chi-
mistes comme couleurs blanches ('), mais le
carbonate de plomb a toujours été préféré, parce
qu'à une grande solidité il unit des qualités que
n'ont pas les autres blancs. Il forme avec l'huile
des combinaisons qui contribuent à en augmen-
ter la solidité.
Les expériences auxquelles nous nous som-
mes livré, nous ont prouvé que pour la peinture
(i) Le blanc de neige (oxyde de zinc) entre autres.
Nous avons minutieusement éprouvé ce produit qui a pour
avantages de ne pas noircir au contact des émanations sulfu-
reuses , de ne pas former avec les huiles des combinaisons qui
tendent à les faire jaunir après la solidification, enfin de ne
pas être vénéneux comme le carbonate de plomb.
Mais à ces qualités , qui rendraient le blanc de zinc si utile
à la peinture artistique , se joint un défaut capital qui en défend
l'emploi. Ce défaut consiste en ce que Toxyde de zinc crevasse,
surtout en seconde couche ; il devient excessivement cassant et
partant il est fort sujet à s'écailler.
— 49 —
artistique le carbonate de plomb pur, ou blanc
d'argent, est indispensable. Les céruses ordi-
naires ne sont pas d'un blanc assez vif; la plu-
part du temps elles sont sophistiquées; parfois
même elles sont acides, ce qui nuit évidem-
ment aux couleurs et aux huiles.
Fabriqué dans de bonnes conditions et suffi-
samment lavé,* le blanc d'argent n'agit pas
d'une manière sensible sur les couleurs fixes;
il est aussi opaque que les meilleures céruses et
couvre parfaitement. On le reconnaît à l'éclat de
sa blancheur et à sa finesse atomique. Broyé à
l'huile il forme une pâte qui ne doit pas avoir le
moindre grain , et qui ne peut révéler la moindre
acidité à l'odorat.
Rouge anglais. — Sesquioxyde de fer.
Rouge de Mars. — Sesquioxyde de fer et
alumine.
Ces deux produits se valent comme solidité;
leur teinte peut varier notablement par la calci-
nation. Mélangé avec le blanc d'argent, le rouge
de Mars donne une nuance plus fine que le rouge
anglais. Tous deux possèdent un pouvoir colo-
rant très-grand.
Rouge de Venise. — Couleur naturelle colorée
par le fer, comme les ocres , et ayant subi un
traitement particulier. En mélange avec le
— 50 —
blanc d'argent, le beau rouge de Venise donne
des tons très-fins et d'une solidité parfaite.
Rouge indien. — Ocre ou terre colorée par
le fer.
Belle et très-solide couleur qui s'allie bien au
blanc d'argent.
Carmin fixe de garance. — Laques de ga-
rance roses et rouges non calcinées. — Les
laques de garance sont composées d'alumine
et du principe colorant de la racine de garance
ou alizarine; elles se préparent par voie hu-
mide. La nuance des laques de garance natu-
relles, c'est-à-dire non calcinées, varie depuis
le rose-pâle jusqu'au rouge-sang intense; les
unes sont plus pourprées que les autres, suivant
le mode de fabrication et la qualité des racines
de garance employées.
Ces couleurs ont le défaut de sécher trop
lentement; plus que les autres elles tendent à se
crevasser lorsqu'on y mêle des siccatifs, surtout
quand on les applique en glacis.
Sur le panneau de M. Dyckmans il y a une
douzaine de laques de garance roçj^s et rouges
différentes. De ce nombre , deux seulement ont
bien conservé leur nuance à l'état pur et eh
mélange avec du blanc de ploiftb. C'est la laque
rouge cristallisée qui a le mieux résisté. Un
échantillon de laque de Smyme pourpre, et un
— SI —
I
autre de carmin fixe de garance , ont bien tenu
à rétat pur, mais la teinte de leur mélange
avec le blanc est très-altérée. Il est à remarquer
que les laques de garance foncées, ainsi que le
carmin fixé de garance, ne gardent pas leur
nuance lorsqu'elles sont alliées au blanc.
En résumé les bonnes laques de garance peu-
vent servir utilement; leur emploi est d'ailleurs
indispensable pour certains genres de peinture ;
leur solidité est à toute épreuve.
Terre de Sienne brûlée. — Terre argileuse
colorée par le fer et calcinée.
Sa nuance varie suivant le degré de chaleur
atteint pendant la calcination.
Cette couleur est certainement une des plus
solides ; elle s'émaille par le temps et donne des
nuances très-stables a\efi^ blanc d'argent.
Écarlate de Mars. — Orangé dé Mars. —
Oxydes de fer et d'alumine; provenant du pro-
duit primitif calciné , le jaune de Mars.
Comme toutes les couleurs de Mars, elles
possèdent une grande fixité et donnent des
nuances d'une grande finesse avec le blanc
d'argent.
Orange de cadmium. — Jaunes de cadmium.
— Sulfures de cadmium.
Les plus beaux jaunes de cadmium s'obtien-
nent par la précipitation d'un sel de cadmium
— s^ —
par rhydrogène sulfuré. Ceux faits par la cal-
cination d'un mélange de soufre et d'oxyde de
cadmium ne possèdent pas une teinte aussi
belle; ils paraissent plus terreux et ne sont
pas aussi finement divisés.
Certains auteurs prétendent que le jaune de
cadmium décompose le blanc de plomb et le
noircit. Ce phénomène s'observe en effet quand
on mêle les deux substances à l'état humide
ou même à l'état sec. Mais lorsqu'elles sont
broyées à l'huile, leur mélange ne provoque
aucune réaction appréciable; nous n'avons
jamais pu constater le moindre changement
dans la nuance obtenue.
Les nombreux échantillons de mélanges de
cadmium et de carbonate de plomb, qui se
trouvent sur les panneaux de M. Dyckmans,
ont conservé après trente-trois ans une pureté
parfaite. Il faut donc admettre que l'interposi-
tion de l'huile , entre les molécules de sulfure de
cadmium et de carbonate de blomb , suffit à les
isoler entre elles.
Jaune de Mars. — Oxyde de fer hydraté et
alumine.
Le jaune de Mars est la couleur primitive
que l'on obtient en précipitant une solution de
sulfate de fer et d'alun, par le carbonate de
potasse. Calciné à des degrés de chaleur diffé-
— 53 —
rents il donne l'écarlate , l'orangé , le rouge , le
brun et le violet.
Toutes les couleurs de Mars se distinguent
par une solidité à toute épreuve. Elles ont
l'avantage de ne pas monter de ton comme les
ocres. Elles se marient parfaitement avec le
blanc de plomb , et leur état de division extrême
permet d'obtenir des nuances d'une finesse très-
grande.
Sur le panneau expérimental de M. J. Dyck-
mans les couleurs de Mars et leurs mélanges
avec le blanc, possèdent une pureté, une fraî-
cheur vraiment remarquable.
Malheureusement ces bonnes couleurs se
trouvent rarement bien préparées dans le com-
merce ; leur fabrication difficile et délicate exige
de grands soins. Leur prix élevé fait qu'on y
mêle souvent des substances moins chères,
telles que les ocres , qui nuisent à leur beauté
et à leur fixité.
Terre d'Italie. — Hydrate de sesquioxyde de
fer, alumine, silice.
Il existe plusieurs terres ou ocres connues
sous ce nom. La bonne couleur est assez rare;
elle est transparente et d'un beau jaune-brun
doré. Son mélange avec le blanc d'argent donne
des tons très-purs et très-stables.
Des échantillions de terre d'Italie, de prove-
— 54 —
nance anglaise, se trouvent sur le panneau
susmentionné, et n'ont subi aucune altération.
Vert émeraude. — Oxyde de chrome.
Le plus beau s'obtient par la calcination d'un
mélange de bichromate de potasse et d'acide
borique.
Cette superbe couleur est d'une fixité telle ,
qu'en comparant les échantillons des deux pan-
neaux de M. Dyckmans, la différence n'est pas
appréciable. Les mélanges de vert émeraude et
de blanc de plomb qui ont été exposés au soleil,
ont conservé une grande fraîcheur, ils ont même
acquis une finesse de nuance plus grande que
ceux qui ont été privés de lumière.
Nous n'hésitons pas à désigner le vert éme-
raude comme la seule couleur verte admissible
dans la peinture qui nous occupe.
Bleu de cobalt (Bleu Thénard). — Sous-
phosphate de cobalt.
Couleur très-solide et qui se mélange bien
avec le blanc d'argent. Il en existe plusieurs
nuances dans le commerce; les plus foncées
sont les plus stables.
Outremer. — L'outremer vrai provenant du
lapis-lazuli est certainement une couleur solide,
mais son prix élevé Ta fait abandonner pour
ainsi dire complètement.
Outremer de Guimet. — Guimet à Lyon a
découvert le premier en 1827, le moyen de faire
— 55 —
artificiellement un outremer dont la beauté égale
celle du bleu de lapis. Son procédé est tenu secret.
Le bleu surfin de Guimet est le plus propre à
la peinture de chevalet. Il est d'une nuance très-
riche, se marie bien avec le blanc d'argent, et
possède une solidité à toute épreuve.
L'outremer ordinaire est composé d'alumine ,
de carbonate de soude et de soufre.
Violet de cobalt. — Arséniate de cobalt.
Nos expériences personnelles nous ont prouvé
que cette belle couleur, peu répandue encore ,
est d'une grande fixité. Par son mélange avec le
blanc d'argent, l'on obtient des nuances dont la
finesse ne s'altère pas.
Violet de Mars et Brun de Mars. — Mêmes
qualités que les autres couleurs de ce nom.
Terre de Cassel. — Lignite ou bois décom-
posé.
Couleur d'un beau brun foncé , très-transpa-
rente, très-sohde à l'état pur ou mélangée avec
les bruns, les noirs, les laques. Nous avons
remarqué que lorsque la terre de Cassel est alliée
au blanc d'argent elle se décolore.
Noir de vigne. — Sarments calcinés.
Noir d'ivoire. — Ivoire calciné.
Ces deux noirs sont également fixes; leur
nuance diffère sensiblement, tant à l'état pur
qu'en mélange avec le blanc d'argent.
4*
!
C^utre les couleurs que nous venons de dé-
crire, il y en a quelques-unes encore qui peu-
vent être employées sans danger, mais dans
des conditions de pureté à déterminer; d'autres,
comme le vermillon, doivent être évitées dans
les mélanges. Nous en faisons l'objet d'un para-
graphe spécial, pour attirer plus particulière-
ment l'attention de nos lecteurs.
Vermillon. — Sulfure de mercure.
Lorsque cette couleur est préparée dans la
perfection, et qu'elle a été appliquée en con-
naissance de cause, elle conserve en partie la
vivacité de sa nuance; on la trouve rarement
bonne et la plupart des vermillons du commerce
s'altèrent rapidement.
La Chine produit le vermillon le plus beau
et le plus solide. Nous avons appris de source
certaine, que ce pays n'exporte pas le vermillon
de qualité extra. L'allemagne et l'Angleterre
nous envoient des vermillons parfois très-bons.
Parmi les échantillons de cette couleur qui se
trouvent sur le panneau de M. Dyckmans, un
~ 58 ~
seul, d'origine allemande, s'est bien conservé.
Tous les autres ont noirci.
Rouge Van Dyck. — Oxyde de fer.
Cette couleur s'obtient par la calcination du
sulfate de fer, à un degré déterminé. Elle pos-
sède une grande fixité. Souvent on la fabrique
au moyen d'ocrés brûlées; c'est pourquoi nous
conseillons de préférer le rouge de Mars.
Jaune de Naples.
Certains auteurs disent que le jaune de
Naples véritable s'extrait des laves du Vésuve.
D'autres affirment que c'est à Naples que cette
couleur a été fabriquée en premier lieu, par la
calcination d'un mélange de carbonate de
plomb, d'antimoine diaphorétique, d'alun et de
sel ammoniac. Les renseignements que nous
avons obtenus jusqu'ici, ne nous permettent
pas de nous rallier définitivement à l'une de
ces deux opinions, mais nous avons pu nous
convaincre qu'il existe à Naples un jaune très-
fixe et d'une nuance inimitable , préparé proba-
blement d'après un procédé particulier (').
(i) Nous avons expérimenté un jaune de Naples , de prove-
nance directe, différant essentiellement des autres, sous le
rapport de là nuance. Cette couleur a conservé après deux ans
d'épreuve*, une pureté remarquable. Les échantillons de jaune
que nous avons reçus depuis lors , de Naples , nous ont paru
analogues , comme composition , à ceux fabriqués dans d'autres
pays.
— 59 —
Les produits sî variés que Ton trouve aujour-
d'hui dans le commerce, sous les noms de
jaune d'outremer et de jaune de Naples, lais-
sent beaucoup à désirer; en général ils se ter-
nissent en peu de temps. On devra donc les
éprpuver avant d'en faire emploi.
Le jaune de Naples s'altère au contact du
fer; il ne faut conséquemment pas l'allier aux
couleurs provenant de ce métal, ni l'appliquer
au moyen du couteau à*palette.
Le jaune de Naples jouit d'une réputation
outrée et ne mérite pas , à notre avis , l'impor-
tance que beaucoup d'artistes y attachent. Ne
pouvant être mêlé qu'à un petit nombre de
couleurs, il n'offre pas d'utilité réelle : un
mélange de terre d'Italie, de vert émeraude et
de blanc d'argent, fournit une teinte analogue
qui ne s'altère point.
Ocre jaune. — Terre argileuse colorée par
l'oxyde de fer.
L'ocre jaune est une couleur des plus solides;
elle doit être rangée parmi les couleurs fixes.
Cependant, pour servir utilement à la peinture
artistique , il faut qu'elle ait été convenablement
purifiée par lévigation , sinon elle monte de ton
pendant des années.
Ocre d'or. — Ocre brune.
Même observation que pour l'ocre jaune,
— 6o —
Ocres brûlées. — La solidité des ocres brûlées
est généralement très-grande. Leur stabilité
dépend de leur épuration. Leur teinte n'est
jamais aussi belle que celle des couleurs de
Mars, et elles ne produisent pas la même finesse
de nuance lorsqu'elles sont mélangées avec le
blanc d'argent.
Brun Van Dyck. — Brun de fer. — Obtenus
par une calcination spéciale du sulfate de fer.
Comme le rouge Van Dyck, on les fabrique
souvent d'ocrés ou de terres. Il vaut donc mieux
employer le brun de Mars , qui leur est supé-
rieur à tous égards.
Noir de pêches. — Noir de liéjge. — Noyaux
de pêches carbonisés; écorce du chêne-liége
carbonisée.
Nous pensons que la solidité de ces deux
substances est assez grande pour qu'il soit
permis de les ranger parmi les couleurs pro-
pres à la peinture artistique.
-'^^M^l
COULEURS
IMPROPRES A LA PEINTURE ARTISTIQUE.
Considérant qu'il serait oiseux de nous éten-
dre longuement au sujet de ces couleurs , nous
nous bornerons à signaler celles dont l'usage
est le plus répandu.
Nous dirons cependant, en substance, que
nous comprenons dans la catégorie des ma-
tières colorantes dont nous déconseillons l'em-
ploi, aussi bien celles qui montent de ton
d'une manière trop considérable ou qui noir-
cissent, que celles qui se décolorent ou qui
réagissent sur certaines autres en les décom-
posant. En un mot, nous rejetons toute couleur
qui ne possède pas les qualités requises pour assurer
à la peinture artistique une stabilité complète.
Nous croyons devoir consacrer ici un para-
graphe spécial au bitume, qui est bien comme
couleur, la plus mauvaise matière qu'il soit
possible d'imaginer (^).
(i) La momie d'Egypte a des défauts analogues à ceux du
bitume.
— 62 —
Le bitume agit sur le blanc , les laques de
garance, et en général sur toutes les couleurs
de nuance claire qui lui sont superposées,
comme le ferait le goudron , c'est-à-dire que sa
partie huileuse les pénètre, et leur commu-
nique par le temps une teinte brunâtre.
Le bitume ne durcit jamais; une chaleur
peu élevée le ramollit. Lorsqu'on y mêle des
siccatifs, il occasionne des crevasses qui aug-
mentent pendant des années, jusqu'au point
d'atteindre plusieurs millimètres de largeur.
Nous souhaitons à ceux de nos lecteurs qui
se servent de cette substance si pernicieuse,
d'en perdre jusqu'au souvenir.
LISTE
DES COULEURS IMf>ROPRES A LA PEINTURE
ARTISTIQUE.
Blanc de neige.
Carmin de cochenille.
Laques carminées.
Laques de garance calcinées.
Jaunes de chrome.
Laque de gaude.
Stil de grain.
Jaune indien.
Jaune de zinc.
Jaune d'antimoine.
Terre de Sienne naturelle.
Terre verte ou de Vérone.
Ocres vertes.
Vert de Paris.
Vert de Scheele.
Vert de Schweinfurt.
Cinabre vert.
Laques vertes.
- 64. -
Vert malachite.
Vert de cobalt.
Bleu minéral.
Bleu de Prusse.
Laques violettes.
Terre d'ombre.
Bitume.
Momie d'Egypte.
Brun d'ivoire.
Une foule d'autres couleurs compléteraient
cette liste, mais comme on les prépare rare-
ment à l'huile , nous croyons ne pas devoir en
faire mention.
DU MELANGE DES COULEURS.
Le changement de nuance que Ton obtient
au moment d'allier deux ou plusieurs couleurs ,
est un phénomène purement physique.
On sait que les corps n'ont pas de couleur
propre; suivant leur nature ils possèdent le
pouvoir plus ou moins grand de décomposer la
lumière blanche, et de réfléchir une des sept
lumières ou couleurs simples dont celle-ci est
formée.
Ainsi , en mélangeant du sulfure de cadmium
clair et une laque de garance claire , ce sont les
deux lumières simples jaune et rouge , que ces
substances réfléchissent respectivement , qui
par leur réunion donnent naissance à Torangé.
Par le mélange des couleurs il Ti'y a pas de
combinaison; les molécules des matières colo-
rantes sont simplement mises en contact.
L'air et la lumière sont des agents capables
d'altérer profondément la nature des corps,
d'en modifier la composition et partant la cou-
leur. On comprend dès lors, qu'en mêlant des
— ee —
couleurs peu fixes entre elles, ou même une
couleur fixe avec une autre qui ne Test pas , la
nuance obtenue possédera peu de stabilité.
Les couleurs de nature différente peuvent
encore réagir entre elles par le contact pro-
longé, se décomposer à la longue et changer
de nuance.
Il suit de là qu'il est rationnel de mélanger
des couleurs homogènes. Ainsi les ocres et les
terres naturelles ou brûlées, les couleurs de
Mars, en un mot tous les dérivés du fer que
nous avons rangés parmi les couleurs fixes,
peuvent être alliés sans danger.
Les couleurs rendues inertes par une calci-
nation élevée, peuvent encore être mélangées
entre elles et à celles que nous venons de
nommer. Telles sont le vert émeraude , le bleu
de cobalt, Toutremer, les noirs de vigne, de
pêches, de liège et d'ivoire.
Enfin d'autres couleurs encore , ne provenant
pas des métaux, n'exercent aucune influence
nuisible; de ce nombre sont le carmin fixe de
garance, les laques de garance roses et rouges
et la terre de Cassel.
Parmi les couleurs que l'on doit soigneuse-
ment éviter dans les mélanges, nous nomme-
jrons spécialement le vermillon et le jaune de
Naples.
- 67 -
Le premier ne peut pas être allié au blanc
d'argent — qu'il décompose et qu'il noircit —
ni aux couleurs provenant des métaux.
Le second peut être uni au blanc d'argent,
mais il ne doit pas être mis en contact avec
les oxydes de fer, ni avec les autres composés
de ce métal.
'r*" -*-'
%>.j^
T
RÉCAPITULATION.
A. Série de couleurs fixes qui peuvent être mé-
langées au blanc d'argent.
Rouge anglais.
Rouge de Mars.
Rouge de Venise.
Rouge indien.
Laques de garance roses et rouges non cal-
cinées.
Terre de Sienne brûlée.
Orangé de Mars.
.Orange et jaunes de cadmium.
Ocre jaune.
Jaune de Mars.
Terre d'Italie.
Vert émeraude.
Bleu de cobalt.
Bleu d'outremer.
Violet de cobalt.
Violet de Mars.
Ocre brune.
— 70 -
Brun de Mars.
Noir d^voire.
Noir de vigne.
B. Série de couleurs fixes de même nature qui
peuvent être mélangées entre elles sans aucun
danger.
Rouge anglais.
Rouge de Mars.
Rouge de Venise.
Rouge indien.
Terre de Sienne brûlée.
Orangé de Mars.
Ocre jaune.
Jaune de Mars.
Terre d'Italie.
Violet de Mars.
Ocre brune.
Brun de Mars,
et en général toutes les ocres, naturelles ou
calcinées, pourvu qu'elles soient convenable-
ment purifiées*
C. Série de couleurs fixes de nature différente
dont le mélange ne s'altère pas d'une manière
appréciable.
Rouge anglais.
Rouge de Mars.
— ^l —
Rouge de Venise.
Rouge indien.
Terre de sienne brûlée.
Orangé de Mars.
Orangé de cadmium.
Jaunes de cadmium.
Terre d'Italie.
Vert émeraude.
Bleu de cobalt.
Bleu d'outremer de Guimet.
Violet de Mars.
Brun de Mars.
Terre de Cassel.
Noir d'ivoire.
Noir de vigne.
D. Couleurs donnant les mélanges les plus avan-
tageux, au point de vue de la solidité, pour
remplacer certaines nuances qui manquent parmi
les couleurs fixes.
Les jaunes de cadmium de diverses nuances
unis au vert émeraude, donnent le vert-pré
intense, le vert-pomme et le vert-olive.
Les jaunes de cadmium unis aux laques de
garance, donnent l'orangé en différents tons.
La terre de Cassel, additionnée de carmin
fixe de garance ou de laque de garance foncée ,
approche sensiblement de la nuance du bitume.
5*
— 72 ~
Le vert émeraude uni au blanc d'argent y
remplace avantageusement le vert malachite
qui contracte une nuance olivâtre par le temps.
Enfin le vermillon uni aux laques de garance,
donne des nuances stables, et d'une grande
utilité pour la peinture des fleurs.
E. Série de couleurs fixes qui conservent le mieux
la finesse de la nuance obtenue par leur mélange
avec le blanc d'argent.
Rouge de Mars.
Rouge de Venise.
Laques de garance roses et rouges claires
non calcinées.
Orangé de Mars.
Jaunes de cadmium.
Jaune de Mars.
Terre d'Italie.
Vert émeraude.
Bleu de cobalt.
Bleu d'outremer de Guimet.
Violet de Mars.
Violet de cobalt.
Brun de Mars.
Noir de vigne.
— 73 —
F. Couleurs qui tendent à se décolorer lorsqu'elles
sont unies au blanc d'argent.
Laques de garance foncées.
Carmin fixe de garance.
Terre de Cassel.
G. Couleur qui noircit le blanc d'argent.
Vermillon.
H. Couleur qui s'altère lorsqu'elle est mélangée
aux composés provenant du fer.
Jaune de Naples.
COULEURS
ET VÉHICULES DES ANCIENS ('). CAUSES QUI ONT
CONTRIBUÉ A CONSERVER LEUR PEINTURE
Écartant le mystère dont on se plaît à entou-
rer la peinture ancienne, sous le rapport des
couleurs, nous prouverons logiquement que les
gothiques n'avaient pas des couleurs supérieures
aux nôtres; que le règne minéral ne leur four-
nissait pas d'autres matières colorantes que
celles que nous employons aujourd'hui; enfin
que la chimie a découvert plusieurs couleurs
fixes de première utilité, qui leur faisaient
défaut.
N'est-il pas juste d'admettre que si les pein-
tres anciens ont été sobres de couleurs, c'est
plutôt par nécessité que pour toute autre rai-
son ? Il est notoire qu'à l'époque des Van Eyck,
(i) Nous prenons pour point de départ de notre étude,
répoque de Jean Van Eyck , vers la fin du moyen-âge , la plus
intéressante au point de vue des couleurs.
-~ 76 ~
des Quentin Metsys, des Memling, la chimie
n'était pas née , ou que tout au moins elle était
à Tenfance; dès lors, la fabrication des cou-
leurs artificielles devait pour ainsi dire être
nulle. A quelques exceptions près , les anciens
n'avaient donc pas d'autres matières colorantes
que celles qui leur étaient données par la na-
ture, et dont l'emploi remonte à la plus haute
antiquité (^).
D'après ce système, nous avions établi le
relevé de leurs principales couleurs, ainsi qu'il
suit :
Naturelles.
Ocres et terres jaunes, à l'état naturel, ou
modifiées par la calcination.
(i) Les relations que certains auteurs de l'antiquité nous
ont léguées, les recherches des Davy et des Chaptal nous
apprennent en effet, que l'emploi des oxydes métalliques natu-
rels , des ocres et des terres — soit à l'état naturel , so.t modi-
fiées par la calcination — date du temps des Egyptiens , des
Grecs et des Romains. Les savants chimistes que nous venons
de nommer , ont fait l'analyse de certaines couleurs trouvées
dans les ruines à Rome et à Pompéï; elle démontre que les*
ocres et les terres , le vermillon , les oxydes de plomb , le bleu
de lapis, des bleus et des verts de cuivre, des noirs provenant
de matières animales ou végétales carbonisées , étaient connus
des peintres de l'antiquité. La fabrication des laques oe devait
même pas leur être étrangère.
— 11 —
Ocres et terres brunes , à Pétat naturel , ou
modifiées par la calcination.
Orpin.
Vermillon.
Malachite.
Terre verte de Vérone.
Vert de cuivre natif.
Lapis-lazuli.
Azurite ou bleu de montagne.
Artificielles,
Blanc, jaune et rouge de plomb.
Laques de garance.
Verts à base de cuivre.
Noirs provenant de matières animales ou
végétales carbonisées.
Voici celles de ces couleurs que nous avons
retrouvées, sans nous laisser de doute, en étu-
diant les tableaux du XV® et du XVI® siècle,
qui se trouvent dans les musées d'Anvers et
de Bruxelles.
Naturelles,
Ocres ou terre jaunes.
Les mêmes calcinées (rouges, orangées,
violacées).
Ocres et terres brunes.
- 78 -
Terre de Cassel.
Vermillon.
Bleu de lapis-lazuli.
Artificielles.
Blanc de plomb.
Laques de garance foncées en diverses
nuances.
Noirs provenant de matières végétales car-
bonisées.
Couleurs dont nous supposons la présence :
Naturelles.
Terre verte de Vérone.
Azurite ou bleu de montagne.
Artificielles.
Jaune et rouge de plomb.
Verts à base de cuivre Ç).
(i) Nous n'avons trouvé aucun indice capable de nous faire
connaître la nature de ces deux couleurs, mais tout fait sup-
poser que le jaune vif des anciens avait le plomb pour base.
Quant au vert de nuance uniforme que Ton retrouve sur le
plus grand nombre des tableaux gothiques , il nous est impos-
sible d'en déterminer positivement l'origine ou la composition.
D'après les études faites antérieurement par les chimistes,
et en raison de la teinte olivâtre qui s'est indubitableitient pro-
duite par le temps , et qui caractérise le vert des anciens , nous
— 79 —
Nous n'avons pas découvert d'autres nuances
caractéristiques sur les tableaux anciens qu'il
nous a été donné d'examiner , mais nous avons
constaté que les gothiques n'ont pas fait usage
du bitume. Nous présumons que les teintes
saillantes que nous avons remarquées — outre
les couleurs déjà nommées — résultent du
mélange de ces dernières, comme aussi de
l'effet obtenu par la superposition de couleurs
transparentes.
Connaissant les couleurs fixes que le règne
minéral et l'industrie nous fournissent aujour-
d'hui, il est certain que nous avons des res-
sources plus grandes que les anciens. Le vert
émeraude en premier lieu, les couleurs de
Mars, les jaunes de cadmium, l'outremer de
Guimet, le bleu de Thénard, le violet de cobalt,
sont des matières précieuses qui promettent à
la peinture actuelle une conservation qui sur-
passera celle des tableaux gothiques, toutefois
sous les conditions particulières de préparation
et d'application que nous avons indiquées.
sommes fondé à croire que ceux-ci ont employé un carbonate
de cuivre natif ou artificiel ; le vert-de-gris (acétate de cuivre)
aurait totalement noirci. Il est à remarquer, par rapproche-
ment, que les verts des peintures égyptiennes étaient tous de
couleur olivâtre, et que les chimistes ont trouvé que c'étaient
des composés de cuivre.
— 8o —
Véhicules des anciens. — Les auteurs an-
ciens ne nous fournissant pas de renseignements
précis, il serait téméraire d'établir autrement
que par des conjectures, qu'en dehors de l'huile,
les vieux maîtres flamands avaient des véhi-
cules à l'aide desquels ils détrempaient leurs
couleurs broyées.
Rarement, pour ne pas dire jamais, on voit
sur les tableaux gothiques les empreintes de la
brosse; les couleurs présentent une surface
unie et émaillée, comme si elles avaient été
coulées. Ce résultat n'aurait évidemment pas
été obtenu avec une huile jeune et maigre.
Donc, à juger d'après l'apparence des couleurs,
comme pâtes, nous pensons qu'elles ont été
préparées au moyen d'huiles épaissies; et, eu
égard à leur grande conservation, nous parta-
geons l'hypothèse généralement admise, que
des substances résineuses s'y trouvent mélan-
gées.
Vouloir rechercher le genre ou l'espèce de
ces résines , serait une entreprise absurde.
Causes qui ont aidé à conserver la peinture
ancienne. — Pour établir avec exactitude ,
l'ensemble des circonstances qui ont contribué
à rendre la peinture des anciens en quelque
sorte inaltérable, nous avons étudié leurs cou-
leurs sous deux rapports différents : d'abord
— 8i —
nous avons envisagé les matières colorantes
en elles-mêmes , et tout ce qui peut avoir con-
couru à en assurer la stabilité, abstraction
faite du véhicule; ensuite nous avons considéré
les couleurs préparées, principalement au point
de vue du véhicule, de l'application, en un
mot de tout ce qui a coopéré à la solidité de la
peinture.
Nous ne nous arrêterons pas à démontrer
que les anciens ont employé des matières colo-
rantes fixes, et qu'ils les ont enveloppées d'un
véhicule capable de former une couche résis-
tante et impénétrable à l'air : les faits parlent
pour nous et prouvent qu'il en est ainsi.
Méticuleux à l'excès en ce qui concerne le
« faire » , les vieux maîtres ont naturellement
reporté leurs scrupules sur les matières colo-
rantes et sur les huiles. Il est donc permis de
croire , en raison même de l'éclat que leur pein-
ture a gardé après quatre siècles, que ces
matériaux ont été d'une pureté absolue.
Les anciens ont fait sagement leurs mélan-
ges; s'ils ont parfois allié certaines matières
colorantes hétérogènes , ils l'ont fait par néces-
sité, lorsqu'il leur manquait des couleurs de
même nature pour obtenir la teinte qu'ils dési-
raient. Leurs couleurs ne s'étant pas écaillées
ni crevassées, cela prouve incontestablement
-- 82 —
qu'ils n'ont pas surchargé leur peinture, mais
qu'ils ont peint d'un seul coup. De là cette
grande pureté , ce grand éclat , et surtout cette
grande solidité. L'absence de crevasses est un
indice certain que les couleurs des gothiques
ont séché lentement , et qu'aucun siccatif n'y a
été mêlé.
En résumé, les anciens connaissaient la bonne
manière d'appliquer les couleurs, et, comme
nous l'avons dit dans notre introduction, la
conservation de leurs œuvres doit être attribuée
autant aux grands soins d'exécution, qu'à la supé^
rioritê des matières colorantes et des véhicules.
CONCLUSION.
Quinze années se sont écoulées depuis l'ori-
gine de notre étude. Ce laps de temps, qui
paraît considérable au premier abord, nous a
à peine suffi pour expérimenter les substances
dont nous avons parlé.
Comprenant la responsabilité morale que
nous allions assumer, nous n'avons pas voulu
prendre la théorie seule pour guide; nous nous
sommes attaché, au contraire, à confirmer par
l'expérience, nos raisonnements les mieux fondés.
La tâche que nous nous sommes imposée
n'est pas accomplie. Nous ne négligerons aucun
moyen, nous n'épargnerons aucune peine pour
arriver au but que nous nous sommes proposé :
développer et étendre les connaissances matérielles
de la peinture y afin qu'on leur réserve désormais,
dans l'éducation artistique, la place importante
qui leur revient.
Puissions-nous avoir réussi à jeter les bases
de cette utile réforme !
- 84 -
En nous décidant à faire connaître aujour-
d'hui les premiers résultats d'un travail con-
sciencieux, nous avons la ferme conviction de
rencontrer l'approbation de l'élite des artistes.
Les hommes éminents auxquels nous nous
adressons, liront avec intérêt — nous n'en
doutons pas — les faits et les observations con-
signés dans cet opuscule ; ils accueilleront avec
la bienveillance qui distingue le mérite, les
conseils que nous nous sommes cru permis de
leur donner. Tous nos efforts ont tendu à leur
prouver, que pour faire une peinture durable
deux conditions essentielles sont requises :
avoir de bons matériaux, et savoir en faire usage.
DE L'AMBRE DISSOUS
ET DE SON APPLICATION A LA PEINTURE ARTISTIQUE.
\
DE L'AMBRE DISSOUS
ET DE SON APPLICATION A LA PEINTURE ARTISTIQUE.
L'ambre jaune ou succin est parmi les
divers corps résineux connus, le plus solide
et le plus beau; sa dureté, son éclat, et la
couleur qui lui est propre , le classent au pre-
mier rang.
Dissoute et conservant toutes ses qualités,
cette belle matière qui a passé les siècles sans
avoir même été altérée à la surface , ne saurait
être qu'éminemment durable (').
(i) Le plus grand chimiste de notre siècle, M. J. 6. Dumas,
dit , en parlant du succin , dans son précis de chimie :
€ le plus souvent on se sert du succin modifié par la fusion ,
» dans la préparation des vernis. On extrait donc ainsi l'acide
» succinique pour les besoins des laboratoires , en même temps
» qu'on se procure le succin fondu qui est devenu plus soluble ,
> et qui par cela même, a perdu la dureté et l'éclat qui lui
» auraient donné tant de prix si on avait pu le dissoudre sans
» le modifier. »
L'opinion de l'illustre savant est pour nous d'une valeur
immense.
-^ 88 —
Nous étions convaincu de ce principe lorsque
nous avons commencé nos recherches pour
parvenir à liquéfier le succin, sans le mettre
préalablement en fusion. Les expériences
multiples que nous avons faites pendant douze
années, ont pleinement confirmé notre pensée.
Le succin dissous forme avec Thuile, qui
lui sert de véhicule, une véritable combinai-
son C), C'est un produit essentiellement gras
et élastique; il est pur, brillant, et de même
couleur que le succin naturel.
Le succin dissous ne se décompose pas.
Après sa solidification il devient corné, et non
pas cassant ni friable. Il ne change pas de
couleur, et sa dessication est lente et régu-
lière (^).
Au point de vue chimique il réunit donc les
garanties de fixité nécessaires.
Par son pouvoir réfléchissant le succin dis-
sous communique aux couleurs à Thuile, ce
(i) Il est miscible aux huiles et aux essences , en toutes pro-
portions.
(2) Il tend â régulariser la dessication et le durcissement des
couleurs , et à empêcher ainsi le retrait inégal et les crevasses.
Le succin dissous étant extrêmement sensible aux diverses
influences de la température, on peut, selon les besoins,
activer sa dessication et celle des couleurs auxquelles il est
mélangé , en suivant les indications que nous avons données
page 28, renvoi i.
- 89 -
brillant, cette finesse et cette puissance de ton,
qu'aucune autre matière ne saurait leur donner.
Par la même raison elles acquièrent plus de
transparence ('). Elles couvrent mieux et leur
pouvoir colorant est plus grand; cela résulte
de ce que le succin dissous contracte les cou-
leurs à rhuile et resserre la matière colorante ;
sous un même volume celle-ci se trouve donc
répartie en plus grande quantité. Cette force
de contraction empêche aussi les couleurs de
se noyer les unes dans les autres lorsqu'elles
ont été fraîchement appliquées (^).
Enfin ce produit si glutineux doit nécessai-
(i) £n mélangeant du succin dissous aux couleurs broyées à
rhuile, on constate immédiatement un changement considé-
rable dans leur état physique. Elles acquièrent de la consis-
tance , du moelleux , et un grand éclat.
Les couleurs transparentes — telles que les laques de garance
— deviennent pour ainsi dire diaphanes , et celles qui sont
translucides — comme la terre de Sienne brûlée, la terre
d'Italie, le jaune et l'orangé de Mars, le vert émeraude, le
bleu de cobalt — deviennent semi-transparentes. Enfin les cou-
leurs opaques paraissent plus claires et plus lumineuses.
(2) La propriété que possède le succin dissous de resserrer
les matières colorantes et d'empêcher les couleurs de se noyer
les unes dans les autres , s'observe dans la pratique par ce qu'en
appliquant des couleurs claires sur d'autres très-foncées — avant
ou après la solidification — les couleurs superposées restent
parfaitement dominantes après la dessication complète : la
couche de fond n'apparaît pas au travers de la couche supé-
rieure , et celle-ci ne perd rien de sa pureté.
— 90 —
rement prévenir, plus que tout autre, l'action
destructive que les couleurs peuvent exercer
entre elles (^).
Nous arrivons au point essentiel, celui de la
conservation des couleurs.
Les auteurs compétents et les spécialistes
sont unanimes à admettre qu'une couleur em-
prisonnée dans une matière résineuse garde
mieux et plus longtemps sa nuance. C'est pro-
bablement pour ce motif que depuis les temps
les plus reculés l'on a adopté l'usage de vernir
les peintures de valeur pour les protéger contre
l'action nuisible de l'air et des gaz méphitiques
auxquels elles sont souvent exposées.
On comprend dès lors , qu'il y a un avantage
immense à mélanger directement aux couleurs
à l'huile , la substance résineuse la plus puis-
sante, le succin. La couche sera garantie dans
toute l'épaisseur, et le vernissage des tableaux
devient une précaution inutile.
(i) La clarté que le succin dissous communique à la peinture,
est pennanente. Il est donc évident que ce liquide a pour effet
d'isoler les molécules des matières colorantes , — partant de
prévenir les réactions produites par le mélange de ces der-
nières — de rendre les couleurs à Thuile compactes et imper-
méables à Tair , et de conserver ainsi la fraîcheur du coloris.
NOTES.
6»
NOTES.
A répoque où nous nous occupions de chimie
et de photographie comme amateur, nous étions
en relation avec plusieurs artistes.
Bien des fois nous les avons entendus se
plaindre de la mauvaise qualité des matériaux
qu'ils employaient. Ils nous ont même fait
analyser certaines couleurs , afin d'en apprécier
la pureté, et ils ont soumis à notre examen les
vernis et les baumes dont ils se servaient.
Nous avons su de cette manière , que la plu-
part des peintres avaient leur procédé particu-
lier, et faisaient usage de couleurs et de véhi-
cules différents; mais ce qui nous a surpris,
c'est qu'en réalité aucun d'eux n'était satisfait
des résultats obtenus.
Notre attention a été ainsi éveillée. Nous
nous sommes entouré de renseignements précis,
et nous avons appris des artistes mêmes, qu'ils
n'avaient pas de méthode régulière, et qu'ils ne
connaissaient que superficiellement les couleurs
et les véhicules en usage.
— 94 —
Il nous tenait au cœur d'approfondir la chose.
Nous avons lu successivement les meilleurs
ouvrages traitant de la fabrication des couleurs,
des huiles et des vernis , et nous avons pu nous
convaincre de la sorte, que les recherches des
chimistes avaient été faites principalement au
point de vue de l'industrie et de la peinture du
bâtiment. Nous avons aussi consulté les auteurs
qui ont spécialement écrit pour les artistes,
comptant qu'ils nous auraient fourni des indi-
cations exactes; mais de ce côté nous avons
complètement échoué.
En somme nos investigations nous ont donné
l'assurance, qu'il restait à étudier les couleurs,
les huiles et les vernis , au point de vue parti-
culier de la peinture artistique , afin d'en déter-
miner les qualités et l'emploi , et de constituer
une méthode irréfragable qui serait générale-
ment adoptée.
Ce fut désormais le but de notre existence.
Nous n'avons pas hésité à sacrifier notre temps
à ces recherches, pénétré de l'utilité réelle de
notre entreprise.
Dès le principe nous avons été amené par
instinct, à l'étude des vernis. Après avoir
scrupuleusement expérimenté ces liquides, nous
avons acquis la certitude que leur emploi dans
la peinture artistique n'est pas sans danger.
— 95 —
Nous avons compris le besoin impérieux de
trouver un véhicule propre à donner aux cou-
leurs à rhuile les qualités désirées de solidité
et de beauté , tout en leur communiquant assez
d'éclat pour éviter les vernis.
Nous avons soupçonné tout d'abord, que
seul le succin pouvait nous fournir ce véhicule
parfait. Cette résine ne nous était pas étrangère ,
et nous avions déjà vainement tenté de la liqué-
fier par des moyens autres que ceux connus,
afin d'en faire un enduit durable pour les cli-
chés photographiques. Nous avons saisi d'em-
blée que le succin devait être traité d'une
manière toute différente que celle employée
dans la fabrication des vernis gras , c'est-à-dire
qu'il ne fallait pas le fondre pour le rendre
soluble , et hii faire perdre ainsi ses propriétés
les plus précieuses.
Après trois ans de recherches laborieuses
nous avons obtenu, en 1867, du succin dissous
applicable à la peinture à l'huile C).
(i) Nous pourrions produire de nombreux témoignages con-
statant cette date. Nous nous bornerons à insérer ici , la copie
de deux attestations qui nous ont servi auprès du jury des
récompenses, à l'exposition de Paris; Tune émanant de M. J.
L. Dyckmans , l'autre de M. P. E. Nicolié , expert , peintre-
restaurateur du musée d'Anvers ; personnes dont la bonne foi
et l'honorabilité ne peuvent être suspectées.
- 96 -
Quoique convaincu que le produit nouveau
que nous venions de trouver, devait être supé-
M. J. Blockx, fils, à Vieux-Dieu,
« Répondant à la demande que vous m*avez faite hier , je
» viens par les présentes vous donner l'attestation que j*aî
> appliqué de ma main, au mois d'août 1800 soixante huit,
» les essais d'ambre dissous et de laque de garance sur le
» morceau de verre portant l'inscription « Laque et ambre
* — appliqué par M. Dyckmans — août 1868 ». »
Anvers , le 17 mai 1878,
(Signé) J. Dyckmans.
Vu pour légalisation de la signature de M. J. Dyckmans
apposée ci-contre.
Anvers , le 25 mai 1878.
Le Bourgmestre,
(Signé) LÉOPOLD DE Wael.
« Je soussigné expert , peintre-restaurateur du musée d'An-
» vers, déclare qu'il m'est connu que M. J. Blockx, fils, a
» appliqué en mil huit cent soixante huit , une couche d'ambre
» dissous sur un petit panneau esquisse , sur lequel j'ai apposé
» mon cachet. L'examen scrupuleux et continuel que j'ai fait
» du dit panneau, me donne la conviction que la couche
» d'ambre s'est parfaitement conservée et n'a causé aucim des
» dégâts qu'occasionnent les vernis. »
Anvers , le 20 mars 1878.
(Signé) P. E. NICOLIÉ.
Vu pour légalisation de la signature de M. P. E. Nicolié
apposée ci-dessus.
Anvers , le 25 mai 1878.
Le Bourgmestre,
(Signé) LÉOPOLD de Wael.
- 97 -
rieur en tous points , nous n'avons pas voulu le
faire connaître avant de l'avoir consciencieuse-
ment expérimenté , et de l'avoir patiemment
soumis à l'épreuve du temps.
Ce n'est que dix ans après, à l'exposition
universelle de Paris en 1878, que nous avons
publié pour la première fois notre découverte.
Les expériences concluantes que nous avions
faites ne nous permettaient plus de douter de
son mérite.
Néanmoins il nous restait des craintes con-
cernant le succès de notre produit. Nous ne
nous sommes pas dissimulé que nous aurions
eu à lutter contre un obstacle sérieux, la
routine !
Mais il ne devait pas en être ainsi. Le monde
artistique réservait un accueil favorable et
spontané à notre ambre dissous. Nous avons
reçu les félicitations et les encouragements des
maîtres éminents qui en ont fait l'essai. Nous
nous faisons un devoir, nous éprouvons un vrai
bonheur de pouvoir les remercier ici, du fond
du cœur, pour le concours précieux et obligeant
qu'ils nous ont prêté, et pour l'appui qu'ils
nous ont donné dans nos recherches. Nous leur
en gardons une profonde reconnaissance.
Aujourd'hui, fort de notre expérience et de
l'approbation d'hommes compétents , nous n'hé-
- 98 -
sitons plus à préconiser notre ambre dissous,
et à dire qu'aucun produit ne saurait donner
plus de solidité , plus de beauté à la peinture ,
ni mieux assurer la conservation des couleurs.
INDEX.
Pages.
Introduction i
Causes d'altération de la peinture i
Supports 3
Huiles • . . . , 9
Vernis , 13
Dessication et siccatifs 19
Essence de térébenthine 23
Pratique 25
Vernissage 33
Couleurs 35
Liste des différentes couleurs expérimentées par
M. J. Dyckmans, en 1847 > • 37
Des couleurs fixes 41
Série de couleurs fixes qui peuvent être employées
en toute sécurité 47
Couleurs impropres à la peinture artistique ... 61
Liste des couleurs impropres à la peinture artistique . 63
Mélange des couleurs 65
Récapitulation . 69
Couleurs et véhicules des anciens. Causes qui ont con-
tribué à conserver leur peinture 75
Conclusion , . 83
Notice sur l'ambre dissous , . . 87
Notes 93
<