THE J. PAUL GETTY MUSEUM LIBRARY
BULLETIN
SOCIÉTÉ POUR LA CONSERVATION
MONUMENTS HISTORIQUES
D ALSACE
STRASBOURG, IMPRIMERIE DE VEUVE BERGER-LKVRAÜLT.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ POUR LA CONSERVATION
DES
MONUMENTS HISTORIQUES
D'ALSACE
IV SÉRIE — DEUXIÈME VOLUME
(1863 - 1864)
PRE9IIEBB PARTIE — PROCÈS-VERBAUX.
AVEC GRAVURES ET PLANCHES
VEUVE BERGER -LEVRAULT ET FILS, LIBRAIRES - ÉDITEURS
PARIS
RUE DES SAINTS-PÈRES , 8
STRASBOURG
RUE DES JUIFS, 26
1864
•
SOCIETE
POUR LA
CONSERVATION DES MONUMENTS HISTORIQUES
D'ALSACE.
Séance du Comité du S janvier 1865.
Présidence de M. SPACH.
La séance est ouverte à 11 heures et un quart.
Sont présents: M. Schirr, vice-président; MM. de Ring et Eissen, secré-
taires; MM. Heitz, de Schauenburg, Oppermann, Bœrsch, Straub, Conratb,
Petit-Gérard, Grass, Morin, Ringeisen, Jung et Klotz, membres du comité.
MM. Sabourin de Nanton , Bernard et l'abbé Nartz, membres libres de la
Société, assistent à la séance.
Le secrétaire dépose sur le bureau les ouvrages suivants :
'V^ Anzeiger für Kunde der deutschen Forze«^; 11*^ cahier, novembre 1862;
2° De la part de la Société d'histoire nationale de la Haute-Bavière, le
3® cahier du tome XX, et 3® cahier du tome XXI de ses archives, ainsi que
le trente-troisième compte rendu de cette même Société pour l'année 1860.
Est admis au nombre des membres de la Société pour la conservation
des monuments historiques d'Alsace, sur la proposition de M. le curé SifTer,
M. Karm à Weyersheim.
Le procès-verbal de la dernière séance, lu par le premier secrétaire, est
adopté.
L'ordre du jour appelle le président à prendre la parole sur la question
du renouvellement du bureau.
« Avant de procéder à ce renouvellement, dit-il, il s'agit. Messieurs, de
vider une question préalable. M. Ignace Chauffour, membre du comité,
à Colmar, nous a adressé une demande tendant à ce que tous les
II« SÉRIE. — T. H. — (r.-v.) 1
— 2 —
membres tlu comité du Haut-Rhin soient convoqués pour procéder à ce
renouvellement.
« La demande de M. Chauffour, parlant au nom de ses collègues du
Haut-Rhin, me semble si bien fondée et si naturelle, que j'aurais convo-
qué le sous-comilé de Golmar , en vertu de mon pouvoir discrétionnaire
de président, si je n'avais cru, dans une question de cette gravité, devoir
m'entourer de toutes les garanties et de toute l'autorité, puisées dans
votre libre assentiment.
(( En instituant, dès 1857, le comité du Haut-Rhin, nous avions l'espoir
que quelques-uns de ces messieurs viendraient parfois assister à nos
réunions ; ils étaient une fois pour toutes convoqués pour le premier
lundi de chaque mois, et certes, s'ils avaient pu régulièrement se rendre
auprès de nous, nous en aurions été très - flattés et très-heureux; per-
sonne n'aurait songé à leur contester le droit de prendre part à nos votes.
(( En août 1857, M. Véron-Réville et un de ses collègues tirent acte de
présence pour constater leur bonne volonté et les droits que l'assemblée
générale de la même année leur avait conférés.
t( Et de même que, tout récemment, nous avons, pour maintenir l'union
entre les deux départements, constaté le droit de votre président non-
seulement d'assister aux séances de Golmar, mais de les présider toutes
les fois qu'il pourrait s'y rendre, nous devons, par la même raison, ac-
cueillir avec le plus grand empressement le désir de nos collègues qui
espèrent , aujourd'hui , être avertis et convoqués spécialement pour un
acte important d'administration intérieure,
« Mon avis est donc de fixer au premier lundi de février le renouvelle-
ment du bureau, en prévenant M. le vice-président du comité du Haut-
Rhin , et en le priant de convoquer MM. les membres en résidence à
Golmar, à Mulhouse et à Guebwiller.
« Mes collègues me permettront de leur rappeler, à cette occasion, que
je m'étais prononcé, en plusieurs circonstances, pour le respect littéral
des statuts et du règlement de notre Société. S'il n'est plus temps, au-
jourd'hui, de retourner en arrière dans la voie où l'on s'est engagé
pendant le dernier semestre, il doit toujours être loisible et permis d'ex-
horter à la conciliation de tous les intérêts, de toutes les tendances; de
rappeler que c'est par là que notre Société a prospéré, et qu'en ne
respectant pas le vœu de la majorité , de quelque manière qu'elle se
prononce, nous détruirons volontairement et briserons une œuvre d'union,
pour laquelle tous les Alsaciens se sont donné fraternellement la main. »
La proposition du président est adoptée; seulement pour donner à cette
convocation un caraolère plus ofliciel encore, le comilé décide (jue pour
la séance du mois de février, les membres du Haut-Rhin, faisant partie du
comité, seront individuellement convoqués; et que pour les séances à
venir, si elles étaient tenues en dehors des premiers lundis, M. le vice-pré-
sident du comilé de Golmar serait prévenu, avec prière d'en donner avis à
ses collègues.
M. le baron de Schauenburg présente le devis des frais auxquels re-
viendrait l'impression de la charte qui doit accompagner le travail de M. le
président de la Société, lu dans l'avant-dernière séance. Le président prie
instamment ses collègues de ne point voter les dépenses considérables
qu'occasionnerait la reproduction totale de la charte; il fait d'ailleurs re-
marquer que ce document présente beaucoup moins d'intérêt que celui du
Sindelsberg. — Sur les conclusions du rapporteur, et conformément à la
proposition du secrétaire, il est décidé que, pour amoindrir ces frais, il ne
sera publié de ce document en lithochromie qu'un des fragments les plus
dignes d'être reproduits. Un crédit de 200 fr. est ouvert à ce sujet à M. le
baron de Schauenburg, qui veut bien se charger de présider à la confec-
tion de cette planche.
Le secrétaire donne lecture d'une note de M. le curé Siffer, à Weyers-
heim, sur les antiquités des environs de Reichshoffen , précédemment déjà
signalées par l'auteur. Le point le plus intéressant est la découverte d'une
urne cinéraire, portant le nom du potier, tracé en couleur rouge sur le
cintre près de l'orifice. M. le curé Siffer promet l'envoi de ce vase au musée
de la Société. — Remercîments et dépôt dans les archives.
La séance est levée à 1 heure moins un quait.
Séance du Comité du 2 février 1863.
Présidence de M. SPACH.
La séance est ouverte à 11 heures.
Présents: MM. RuTSch , Brièle , Ig. Chauffour, Conrath, Eissen , Frantz,
Guerber, Grass, Fleitz, Jung, Klotz, Levrault, Mayer, Morin, Petit-Gérard,
de Ring, Ringeisen, baron de Schauenburg, Schirr, Schlumberger-Harl-
mann. Straub, Véron-Réville.
M. de Ring, l'un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal de la
séance du 5 janvier I860. Le procès-verbal est adopté.
— 4 —
Il dépose ensuite sur le bureau les ouvrages suivants :
1° Promenades en Belgique, par M. d'Otreppe de Bouvelte. 1 vol. in-12;
"2° Mémoires sur l'importance pour l'histoire intime des communes de
France des actes mortuaires antérieurs à il 90, par M. Gustave Saint-
Joanny, avocat, archiviste - bibliothécaire honoraire de la ville de Thiers;
broch, in-4°;
3° Dictionnaire topographique de V arrondissement de Sarreguemines ,
par M. Jules Thilloy , procureur impérial à Sarreguemines, in-8° ;
A'^ Mittheilungen der k. k. geographischen Gesellschaft, redigirt.von
Franz Fœtterle. V. Jahrg. Vienne, 1861. 1 vol. in-4°;
5° Archeologischer Anzeiger zur archeologischen Zeitung , XX® année,
déc. 1862.
M. le baron de Schauenburg dépose un spécimen du fac-similé de la
charte de Surbourg. Ce spécimen devra passer encore par plusieurs tirages,
mais le tout pourra être terminé sous peu.
L'ordre du jour appelle le renouvellement des fonctionnaires du bureau,
selon la modification apportée aux statuts par la dernière assemblée géné-
rale.
M. le président constate la présence de vingt- trois membres du comité,
complétant les deux tiers du nombre total des membres exigés par les
statuts pour la validité du vote.
La réunion consultée décide que l'on procédera immédiatement au vote
par scrutin secret.
Nomination du vice-président: M. le grand-vicaire Schirr obtient 21 voix.
Nomination des secrétaires : M. le président propose pour différents
motifs, dont il donne le développement, de ne nommer qu'un seul secré-
taire.
Les deux secrétaires objectent que les statuts exigent deux secrétaires
pour compléter le bureau.
Le comité, après avoir entendu et discuté différentes objections, décide
que l'on procéderait à la nomination d'un seul secrétaire.
Votants : 23. Deux bulletins portent deux noms , une fois Straub et
Eissen , la seconde fois Eissen et Straub. On compte chaque fois le nom
inscrit en tête du bulletin. M. de Ring obtient 3 voix, M. Straub, 2,
M. Eissen , 18.
M. Eissen est proclamé secrétaire.
Le scrutin pour la nomination du trésorier donne 22 voix à M. Klotz ,
et celui pour la nomination de l'archiviste 21 voix à M. Heitz.
Le président déclare le bureau constitué pour l'année 1863.
— 5 -
L'ordre du jour appelle la continuation des travaux ordinaires du comité.
M. de Ring lit la note suivante sur un mémoire de M. le curé Siffer:
« Dans la dernière séance du comité , sur la proposition du président ,
vous avez bien voulu me charger de vous rendre compte d'un mémoire
envoyé par M. le curé Siffer, sur quelques traces de sépultures, décou-
vertes en 1855 , au bord de la forêt dite Reubberg , prés de Zinswiller.
« M. Siffer n'était pas lui-même sur les lieux , lorsque le hasard les fit
retrouver. Son appréciation ne porte donc que sur les détails qu'il a pu
recueillir et sur la vue de plusieurs urnes qui ont été découvertes en cet
endroit sous un champ de culture. Ces urnes, dit-il, d'une poterie noire
ou jaune, remplies de cendres et d'os calcinés, étaient placées, les unes
au milieu d'un assemblage de petites pierres, réunies à dessein par ceux
qui avaient présidé aux funérailles; les autres encaissées debout dans des
pierres de grès d'environ 20 à 30 centimètres de hauteur sur à peu près
autant de diamètre. Ces pierres sont les unes de forme carrée, les autres
de forme ronde. La cavité, contenant le vase pratiqué dans le centre de la
face supérieure, présente pour les unes et les autres une forme sphérique
simulant une coupe.
.«M. le curé Siffer demande si ces sépultures ne doivent point être
attribuées aux Triboques. Il est impossible de pouvoir, avec ce peu de
données, répondre à cette question; ce qu'il y a de certain, c'est qu'à
Brumath, la civitas Tribocorum , on a rencontré plusieurs urnes pareilles,
soit en terre , soit en verre , emboîtées dans des pierres et même scellées
à l'aide de mortier.
« Quoi qu'il en soit, les sépultures du Reubberg se trouvaient placées,
comme celles de Reichshoffen etd'Uttenhoffen, précédemment mentionnées
par l'auteur du mémoire, à côté d'un ancien chemin auquel on donne une
origine romaine et qui, d'après M. le colonel de Morlet, traversait les
Vosges par la vallée de Bœrenthal pour se réunir à celui qui a été signalé
suivant la même direction sur l'autre versant , par les archéologues du
département de la Moselle. »
Il propose de voter des remercîments à l'auteur, et le dépôt de son tra-
vail aux archives de la Société. — Le comité vote les remercîments et le
dépôt.
Proposition d'un nouveau membre de la Société. M. l'abbé Straub pro-
pose l'admission de M. l'abbé Keller, rue du Bac, 97, à Paris. — L'admis-
sion est prononcée.
M. le président annonce que M. le baron Matthieu de Faviers a réussi
dans les négociations dont il s'était chargé auprès de M. Mannheimer, pro-
— 6 —
priélaire de la ruine de Iloli-Kœnigsbourg', aliii de pouvoir placer des
portes pour prévenir les trop fréquentes dégradations commises par les
visiteurs. M. Mannheimer a donné son consentement sous réserve de ses
droits de propriétaire.
M. lUn/jelsen. Je n'ai pas assisté à la délibération du comité lorscpi'on a
décidé l'installation de ces portes. Si j'avais été présent, j'aurais appelé
l'attention du comité sur les nombreuses difficultés et même sur les grands
inconvénients qui pourraient résulter de l'adoption de cette mesure. En
effet, la ruine est très-étendue, et présente de nombreux points accessibles.
Il faudrait faire une dépense très-considérable pour interdire absolument
l'accès aux visiteurs non autorisés, et dès lors on s'exposerait peut-être à
voir commettre des dégâts plus nombreux encore. Des visiteurs entrepre-
nants finiraient toujours par trouver un point quelconque pour s'introduire
dans l'intérieur de la ruine, et se vengeraient ensuite de leur désappointe-
ment en se permettant des mutilations auxquelles ils n'auraient peut-être pas
songé, s'ils avaient trouvé l'accès entièrement libre. Tout ce qu'il me sem-
blerait opportun de faire, serait de garantir les endroits dangereux, les
parties les plus compromises de l'édifice par des cloisons ou des bar-
ricades.
M. Bœrsch. Il est évident que cette question n'a pas été suffisamment
étudiée. Je propose de ne prendre aucune décision à cet égard, avant que
M. Ringeisen, de concert avec M. le baron Matthieu de Faviers, nous ait
soumis un rapport sur les mesures qu'il conviendrait de prendre dans l'in-
térêt de la conservation de la ruine.
Cette proposition est adoptée. M. le président en informera M. le baron
Matthieu de Faviers.
M. le ]-)rofesseur Jung fait une communication sur un certain nombre
d'objets gallo-romains et autres, trouvés, depuis une série d'années, à
Kœnigshofen, banlieue de Strasbourg. Ce sont des statuettes en bronze, des
boucles, des colliers d'ambre et de différentes matières coloriées, des ob-
jets en bronze qu'il suppose avoir été des distinctions militaires, honorifi-
ques, etc. Tous ces objets sont déposés sur le bureau. Vu le haut intérêt
que présente cette communication, le comité prie M. le professeur Jung
de vouloir bien la rédiger par écrit, afin qu'elle puisse être publiée dans
son Bulletin.
M. le président annonce qu'une réunion extraordinaire du comité pourra
devenir nécessaire prochainement.
La séance est levée à 1 licnre.
_ 7 -~
Séance du Comité du 2 mars 1865.
Présidence de M. SPACH.
La séance est ouverte à 11 heures.
Sont présents: MM. Bœrsch, Bissen, Guerber, Grass, Ileitz, Klotz , Morin,
Petit-Gérard, baron de Sebauenburg, Straub.
Le secrétaire donne lecture du procès-verbal de la séance du 2 février,
qui est adopté. Il donne lecture ensuite du procès-verbal de In séance du
26 janvier, tenue par le sous-comité du Haut-Rhin :
SOUS-COMITÉ DU HAUT-RHIN.
Séance du 20 janvier 1863.
Présidence de M. VÉRON- RÉ VILLE, vice-président.
L'an 1863, le 26 janvier, à 2 heures de relevée, le sous-comité des
monuments historiques pour le Haut -Rhin s'est réuni au lieu ordinaire
de ses séances.
Étaient présents: MM. Véron-Réville, vice-président, J. Chauffour, Liblin,
Meyer, Schlumberger- Hartmann, Huot et Brièle, secrétaire. MM. Ham-
berger, Stœber et Frantz s'excusent de ne pouvoir assister à la séance.
Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté.
Dépôt sur le bureau des ouvrages dont il est fait hommage au sous-
comité.
Le vice-président communique au sous-comité divers' documents, avec
dessins à l'appui, relatifs à deux puits récemment supprimés à Rouffach
et qui dataient, l'un du quinzième siècle , l'autre de l'époque de la Renais-
.sance. Un rapport de M. Laubser, architecte du déparlement, constatant
que les modifications et mutilations subies par ces puits ont rendu impos-
sible toute restauration propre à rappeler le style architectural de ces vieux
monuments, le sous-comité passe à l'ordre du jour.
M. le Préfet adresse au sous-comité un rapport de M. Bogard , ingénieur
des ponts et chaussées, à Belfort , sur des découvertes de débris de
bâtiments et de constructions, faites récemment à l'entrée du village de
BaviUiers , à la suite de déblais nécessités par la rectification de la route
impériale de Lyon à Strasbourg. Les portions de murs et les débris de
— 8 —
bâtiments découverts semblaient indiquer qu'ils avaient dû être détruits
par un incendie. Dans les décombres on trouve des fragments d'enduit ou
ciment, des pavés en marbre blanc, des portions de frise en marbre
sculpté, des tuiles à rebord et des fragments de poterie, qui avaient fait
tout d'abord croire à une construction monumentale de l'époque gallo-
romaine. Les fouilles mirent également à jour plusieurs ossements humains
carbonisés et un squelette entier qui était mêlé aux décombres. Toutefois
un examen plus attentif donna bientôt la conviction que ces bâtiments
détruits n'appartenaient point à une époque aussi ancienne qu'on l'avait
cru d'abord. A défaut de données historiques positives, M. Bogard dit avoir
interrogé la tradition et tenir de vieillards fort âgés , que les vestiges de
bâtiments trouvés à l'entrée du village de Bavilliers sont les ruines d'un
ancien couvent, détruit probablement à l'époque de l'invasion de l'Alsace
par les Suédois. Le sous - comité , estimant qu'il peut y avoir dans les
circonstances signalées par M. Bogard un fait historique intéressant à
éclaircir , renvoie l'examen de la question à M. le curé Zimberlin et à
M. Bardy, fils, membres de la Société.
Dépôt opéré par M. Schlumberger -Hartmann de fragments de poterie
et de mosaïque trouvés par lui dans la cave de la maison de Cicéron , à
Tusculum.
Communication par M. Huot d'un diplôme de la nation germanique, de
l'université de Bourges, délivré en 1644 à un jeune de Brinighofen.
Communication par M. Brièle d'un commentaire du capitulaire d'Aix-la-
Chapelle, de Monachis, document conservé dans les archives de l'abbaye
de Murbacb.
Le sous-comité a reçu ces deux dernières communications avec le plus
vif intérêt.
M. Doyen, juge de paix à Huningue et membre de la Société, expose
au sous-comité que la belle collection de médailles alsatiques, laissée par
feu M. Dorlan, avocat à Schlestadt, est sur le point d'être aliénée par
l'héritier qui la détient. Déjà ce dernier s'est mis en rapport avec des trafi-
quants de Paris. Celte collection, unique dans son genre, réunie avec tant
d'efforts et de sacrifices, et qui vraisemblablement ne se recomposera plus,
va donc être dispersée et perdue pour le pays au sein duquel elle a été
formée et qui seul a un intérêt véritable à sa conservation. Dans ces cir-
constances, M, Doyen demande au sous-comité s'il ne serait pas urgent
que la Société prît l'initiative et recherchât une combinaison propre à
empêcher la dislocation et la dispersion de ce précieux médaillier qui con-
stitue, dans son genre, pour l'Alsace un véritable monument historique.
— 9 —
Le sous-comité, frappé de la justesse de ces observations et reconnaissant
toute l'importance de la question qui lui est soumise, dit que l'examen en
sera porté et vivement recommandé au comité central, en sa prochaine
séance, à laquelle la plupart des membres du sous-comité se proposent
d'assister.
La séance est levée à 4 heures.
Ce procès-verbal donne lieu à une discussion relative au médaillier de feu
M. Dorlan, avocat à Schlestadt, (sur lequel le sous-comité appelle l'attention
du comité, en exprimant le regret de voir cette collection si éminemment
alsacienne sur le point d'être dispersée, perdue à jamais pour la province
pour laquelle elle offre le plus puissant intérêt, par suite de la liquidation
de la succession du collectionneur.
Le président fait remarquer, en s'appuyant de l'opinion de M. le profes-
seur Jung, que déjà cette collection a perdu ses pièces les plus rares, que
dès lors, n'étant plus complète, elle est loin d'avoir la valeur que les héri-
tiers lui attribuent.
Le comité passe à l'ordre du jour.
Le président dépose sur le bureau les ouvrages suivants :
1° Mémoires et documents, publiés par la Société d'histoire et d'archéo-
logie de Genève, tomes I-XII et XIV, Genève, '1841-1862 (13 vol.in-8°);
2" Œuvres historiques et littéraires, de Léonard Baulacre, ancien biblio-
thécaire de la république de Genève (1728- 178C), recueilHes et mises en
ordre par Edouard Mallet, tomes 1 et II, Genève, 1857 (2 vol. in-8°);
3'' Congres archéologique de France, XX VHP session. — Séances géné-
rales tenues à Reims en 1861. Paris, 1862 (1 vol. in-8°);
4" Messager des sciences historiques de Belgique, année 1862, 4^ livrai-
son (1 broch. in-8°);
5'^ Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie, année 1862,
n°^ 2, 3 et 4(1 broch. in-8°);
6° Miltheilungen der antiquarischen Gesellschaft in Zurich , Band XI,
Heft 3; Band Xlll, Hefte 3, 4, 6 (4 cahiers in-4°);
7° Anzeige für Kunde der deutschen Vorzeil, 18G2,n*' 12 (décembre);
8*^ Mittheilungen der Gesellschaft für vaterländische Alterthümer in
Basel, IX. Basel, 1862 (1 cahier in-4°);
9'^ Mittheilungen des historischen Vereines für Steiermark, eilftes Heft,
Gratz, 1862 (1 vol. in-8°);
10° Jahrbücher für die Landeskunde der Herzogthümer Schleswig,
— 10 —
Holstein und Lauenburf/ , Band V, Hefte 1,2, 3. Kiel, 1862 (o bru-
chures in -8"),
Le président informe le comité qu'il a écrit les lettres suivantes depuis
le 5 janvier dernier :
Correspondance avec les membres du Haut-Rhin au sujet du renouvelle-
ment du bureau;
A M. le Préfet du Haut -Rhin, au sujet du versement de la sub-
vention votée par le Conseil général de son département, pour l'exer-
cice 18G2;
Accusé de réception et lettre de remercîments pour la somme reçue ;
Correspondance avec M. le baron Matthieu de Faviers, et avec M. Mann-
heimer, propriétaire à Cohnar, relativement aux clôtures à établir au châ-
teau de Hoh-KœniQsbour^-;
Lettre à M. Jules Thilloy, procureur impérial à Sarreguemines, au sujet
d'un travail projeté par lui sur l'abbaye de Herbitzheim;
Lettre à M. Lefort, président de la Société d'histoire et d'archéologie de
Genève; remercîments pour l'envoi de la collection des mémoires de cette
Société; annonce de l'envoi de notre Bulletin;
A M. Véron-Réville au sujet du médaillier de feu M. Dorlan ;
Au même, au sujet des travaux à faire au château d'Eguisheim;
A M. Ingold, à Cernay, pour avoir des renseignements sur les travaux
du château d'Engelsbourg, à Thann, et du tertre d'Uiïholtz, et le prier d'en
référer au sous-comité de Colmar;
A M. Louis Levrault, à Obernai, pour le prier de surveiller les décou-
vertes faites dans cette localité;
A M. Sichert, à Obernai, lettre de remercîments pour ses communica-
tions relatives au même objet.
Le président annonce que la Société historique de Berne {Gesellschaft
für Geschichtsforschum/) demande à établir des relations avec la Société
d'Alsace. L'étabhssement de ces relations est décidé.
Il dépose sur le bureau une photographie dont M. Stuber, architecte, fait
hommage à la Société. Cette photographie représente une restauration fort
intéressante du château de Landsperg. Remercîments.
M. Klotz dépose, au nom de M. le docteur Rouis, médecin principal,
sous-directeur de l'École du service de santé militaire, qui en fait hom-
mage à la Société, deux fort beaux fers de lance, trouvés à Ilochfelden,
accompagnés d'une notice et d'un plan des lieux.
Le comité vote des remercîments à M. le docteur Rouis.
M. de Morlct constate (juc ces objets se sont trouvés précisément à l'en-
— M —
droit où devaienl se rencontrer deux voies romaines, l'une venant de Sa-
verne, par la rive doite de la Zorn, l'autre de Bouxwiller.
M. le président donne communication de la démission de M. de Ring,
comme membre de la Société, et d'une lettre de M. Liblin, proposant comme
membre, M. Constant Schœllbaum, architecte à Colmar. L'admission de
M. Schœllbaum est prononcée. La lettre de M. Liblin donne lieu à des
réclamations de la part du trésorier. Selon la teneur de cette lettre, M. Li-
blin paraît supposer qne le comité a déjà voté un crédit de? à 800 fr. pour
travaux aux châteaux de Hoh-Landsperg et Plixbourg, tandis (jue ce vote
n'a pas encore eu lieu.
Quelques membres proposent de voter ce crédit immédiatement.
Sur la proposition de M. le président, ce vote est mis à l'ordre du jour
de la réunion générale qui se tiendra à Colmar.
M. le président communique au comité le programme des questions pro-
posées par les diverses sections du congrès scientifique de France , dont la
trentième session aura lieu du 10 au 20 août, à Chambéry.
Il communique également une lettre de M. le Ministre de l'instruction
publique et des cultes annonçant la distribution solennelle des prix ac-
cordés aux sociétés savantes, qui aura lieu le il avril prochain, à la Sor-
bonne.
M. le curé Guerber demande la parole pour une motion d'urgence.
« D'importantes découvertes archéologiques, dit-il, ont été faites à l'église
paroissiale de Wissembourg. Il serait d'un grand intérêt de continuer les
travaux dans la direction suivie jusqu'ici, et d'allouer à cet elîet une
somme de 400 fr. pour cet objet, dont la moitié serait consacrée à la re-
cherche de ces peintures murales et l'autre moitié à décalquer les dessins
découverts, ainsi que cela a déjà été fait. »
M. Klotz demande qu'on ajoute 200 fr. de plus pour le rétablissement de
l'ancien niveau du sol de l'église.
On réplique que le régime des cours d'eau de Wissembourg paraît
s'opposer d'une manière absolue à toute tentative dans ce sens, l'ancien
pavé de l'église étant en contre-bas du niveau des canaux acluels. La ques-
tion est d'ailleurs à l'étude des ingénieurs, et parait devoir entraîner des
frais très-considérables. 11 faudrait que la comnume de Wissembourg inter-
vînt pour cela; dans ce cas, les 200 fr. votés par la Société ne seraient qu'un
appoint illusoire en présence des sommes importantes qu'il faudrait consa-
crer aux travaux de nivellement, entrepris simultanément en dedans et en
dehors de l'église.
M. le baron de Schauenbuig propose en conséquence d'écrire à M. le
— 12 —
maire ou à M. le curé de Wissembourg, pour s'informer de l'état de la
question, avant de voter les 200 fr. proposés par M. Klotz.
Cette proposition est adoptée.
Le comité vote ensuite les 400 fr. demandés par M. Guerber, avec la
stipulation expresse qu'une moitié sera employée pour continuer la re-
cherche des peintures murales, et l'autre moitié pour décalquer.
M. le président communique un mémoire de M. L. Levrault sur les dé-
couvertes archéologiques faites à Obernai. Lecture est donnée de ce mé-
moire, dont l'impression dans le Bulletin est décidée par le comité, ainsi
que la reproduction des dessins qui l'accompagnent. On décide en outre
que M. L. Levrault sera prié de s'informer si les recherches pourraient se
continuer, et d'envoyer à l'examen du comité les médailles trouvées.
M. le colonel de Morlet annonce que certains travaux de terrassements,
ainsi que la plantation d'une haie, décidés dans l'intérêt de la conservation
des ruines de Mackwiller, sont sur le point d'être terminés, grâce aux soins
et à l'activité de M. Schmidt, agent voyer à Drulingen.
Le comité vote des remercîments à M, Schmidt, ainsi qu'une somme de
150 fr. pour solde de ces travaux.
M. le baron de Schauenburg communique une lettre de M. Saglio de
Walbourg, demandant que le comité envoie une commission dans cette
localité pour examiner les travaux qu'il conviendrait d'entreprendre à
l'église, où des fresques, couvertes par le badigeon, commencent à repa-
raître, et qui possède des vitraux d'un grand mérite. La décision à inter-
venir est renvoyée à la séance d'avril.
M. le trésorier soumet au comité le relevé de quelques sommes votées
dans l'exercice précédent, mais qui n'ont pas été employées. Il demande
l'autorisation de reporter d'office ces sommes au prochain budget.
Cette autorisation est accordée.
M. le baron de Schauenburg dépose sur le bureau la photographie d'une
fresque découverte dans le cloître de l'ancien couvent des Dominicains de
Strasbourg, 11 a l'espoir de pouvoir conserver la peinture avec un fragment
du mur qui doit être démoli, et demande à être autorisé de procéder à
cette opération, sauf à demander des fonds plus tard.
Cette autorisation est accordée.
M. le président, vu le grand nombre de travaux à examiner, demande
une réunion extraordinaire pour le lundi 9 mars.
Le comité se prononce dans ce sens.
La séance est levée à 1 heure.
— 13 —
Séance du Comité du 9 mars 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents : MM. de Schauenbiirg, de Morlet, Ringeisen, Jung, Heitz,
Bœrsch, Straub, Petit-Gérard, Klotz.
M.M. Sabourin de Nanton, et Thomas, membres libres, assistent à la réu-
nion.
M. Jung invite ses collègues à descendre dans l'emplacement de l'ancien
cloître des Dominicains, pour y inspecter avec lui les découvertes d'anciens
tuyaux, d'un four et de poteries. M. Jung explique sur place la direction
des tuyaux, la disposition du four, et se réserve de prendre ultérieurement
des conclusions, ou d'émettre un avis sur l'époque et la destination de ces
matériaux.
La séance ordinaire est reprise vers midi.
En l'absence de M. Eissen, indisposé, le président se charge de tenir la
plume.
M. Ringeisen rend compte de la mutilation subie par une colonne mil-
liaire, sise dans le champ d'un particulier, près de Châtenois. Il demande à
être autorisé à prendre avec le propriétaire des arrangements pour le re-
placement, la restauration et la conservation de ce petit monument romain.
— Le comité donne ses pleins pouvoirs à M. Ringeisen.
M. de Morlet annonce avoir pris, de concert avec M. Klotz, des mesures
pour la confection des vitrines, destinées à la conservation d'une partie
des objets de notre musée. Il demande l'allocation d'un crédit de 300 fr.
pour la confection de ce mobilier indispensable. — Accordé.
On donne lecture du procès-verbal de la séance du 2 mars, qui est adopté,
après quelques légères modifications.
Le président annonce avoir écrit, dans l'intervalle du 2 au 9 mars, les
lettres suivantes :
A M. Stuber, architecte, pour le remercier du don récemment fait à la
Société;
A M. Louis Levrault, à Obernai, à l'occasion des fouilles et des décou-
vertes faites dans cette localité;
A M. Rouis, sous-directeur de l'École de santé, pour le remercier du don
de deux fers de lance trouvés à Mittelhausen ;
A M. Berger-Levrault, imprimeur du Bulletin^ pour le prévenir que les
— 14 —
cuivres et petits bois employés dans le texte, demeurent la propriété de la
Société;
A M. Schmitt, agent voyer à Saar-Union, pour le remercier des soins
donnés à la clôture des thermes de Mackwiller, et pour établir le solde de
cette clôture ;
A M. Klotz, pour le même objet et pour diverses questions de comptabilité;
A M. Véron-Réville, vice-président du comité de Col mar, pour le prier
de saisir le comité de la question de déblayer les châteaux de Hoh-Lands-
perg et de Plixbourg;
A M. Michel Saglio, pour le remercier de l'invitation adressée au comité,
à l'effet d'examiner sur place les vitraux de Walbourg ;
A MM. le curé de Wissembourg, Ohleyer, Matuszinsky et Klotz, au sujet
des travaux à exécuter dans l'église paroissiale de Wissembourg;
A M. de Morlet, au sujet du moulage en plâtre du plan en relief des
thermes de Mackwiller;
A M. le Préfet du Bas-Rhin, pour le prier de vouloir bien mandater les
fonds votés par le Conseil général (exercice 1862), pour les monuments
historiques;
A M. le président de la Société historique générale de la Suisse, en rési-
dence à Berne', pour l'établissement de rapports entre les deux Sociétés;
A Son Excellence M. le Ministre de l'instruction publique, pour lui an-
noncer la nouvelle composition du bureau.
M. le professeur Jung dépose sur le bureau des anneaux de bronze, dé-
couverts à Lingolsheim; il fait à ce sujet le rapport qui suit :
« Les recherches faites dans les tombeaux appelés communément gallo-
romains, ont le plus souvent conduit à la découverte d'anneaux en bronze,
ornementation, à ce qu'il paraît, assez commune qui a été enterrée avec le
défunt, ou plutôt avec la défunte.
«11 y a quelques jours, un habitant de la commune de Lingolsheim, oc-
cupé à disposer son champ longeant la grande route, pour y bâtir une
maison, a rencontré dans la couche de sable un squelette qui, par les pro-
portions des ossements, doit avoir fait partie du corps d'une femme d'une
constitution délicate. On a d'abord mis à découvert les pieds, et les ouvriers
sont arrivés successivement aux bras et à la tcte. En mettant à découvert
les pieds, ils ont commencé par trouver deux anneaux de bronze à chaque
pied, le même nombre d'anneaux a marqué les hras, enfin, deux anneaux
plus grands se sont trouvés à la place du cou, en tout dix cercles de façon
égale, mais de diamètres différents. Ceux des bras ont environ 6 centi-
mètres de diamètre-, ceux des pieds entre 8 et 9, et ceux du cou, 15.
— 15 —
« (juonl i"i leur forme, ils ressemblent à ceux qu'on a rencontrés dans
toutes ces tombes; ils sont le produit de la fonte, mais ne sont pas creux
comme les anneaux de métaux plus précieux. A la jointure, ils se terminent
par deux boutons qui étaient liés peut-être par un métal ou une autre ma-
tière pour faire le cercle. Les boutons qui se rattachaient, sont précédés
par d'autres plus petits et marqués par quelques rainures. >>
Cette découverte est remarquable en ce qu'elle nous offre le cas très-
rare, peut-être unique, d'une ornementation complète dans ce genre.
M. le baron de Schauenburg donne communication d'une lettre de M. de
Schauenburg, de Hochfelden, au sujet des découvertes faites près de Mu-
tzenbausen.
Le mème^membre dépose sur le bureau un médaillier en bronze, conte-
nant la série complète des ducs de Lorraine. — Remercîments.
On procède à la lecture des mémoires déposés depuis quelque temps
dans les carions du comité :
1° De celui de M. Sabourin de Nanton, sur la statue de saint Apollinaire,
dans l'église d'Obermicbelbach. Ce travail est renvoyé au comité de Colmar,
pour émettre un avis et prendre des mesures dans l'intérêt de la conserva-
lion de cet objet d'art ;
2'^ De celui de M. le curé Siffer, sur la grande voie romaine de Brumath
à Seltz , notamment sur la partie sise entre Weitbruch et Kaltenhausen.
Ce mémoire trouvera place au Bulletin.
La lecture des mémoires sera reprise le 16 mars prochain.
Séance extraordinaire du Comité du 16 mars 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Eissen , secrétaire, Grass, Heitz, colonel de Morlet,
L. Levrault, Petit-Gérard, baron de Schauenburg.
Le procès-verbal de la séance du 9 mars est lu et adopté.
Le secrétaire dépose: Ânzeir/cr für Kunde der deutschen Vorzeit, t. X,
n" 1 ; — Mémoires de la Société académique d'archéologie , sciences et arts
du département de l'Oise, t. V, 1'"'' partie.
M. Petit- Gérard dépose un dessin de M. N. Nicklès, représentant un
écusson sculpté , trouvé à Benfeld.
— 16 —
Le président annonce (|u'il a écrit à M. le maire de Wissembourg au
sujet de l'abaissement du dallage de l'église de Saint-Pierre et Saint-Paul;
— AM. Véron-Piéville: Envoi d'un mémoire de M. Sabourin de Nanton
sur la statue de saint Apollinaire à Obermichelbach, avec prière d'examiner
la question et de donner un avis.
En même temps il expose au comité que, d'après son opinion , la réunion
générale de Colmar devra être retardée cette année jusqu'à la fin d'avril
ou au commencement de mai, vu les fêtes de Pâques et la tournée de ré-
vision de M. le Préfet du Haut-Rhin, Il sera donné avis de cette décision à
M. Véron-Réville.
Lecture est donnée par M. le baron de Schauenburg et par M. Levrault
d'un mémoire de M. l'abbé Gyss d'Obernai sur l'hôtel de ville de celte
localité.
Le comité vote des remercîments à M. Gyss et décide l'impression dans
le Bulletin, sauf à prier l'auteur de vouloir bien opérer quelques réduc-
tions exigées par les limites des publications de la Société.
M. le baron de Schauenburg donne lecture d'un mémoire critique de
M. Coste sur l'emplacement d'Argentovaria.
Le comité vote des remercîments à M. Coste et décide l'insertion du
mémoire dans son Bulletin, ainsi que de la carte qui l'accompagne.
La séance est levée à i heure.
Séance du Comité du i3 avril 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Eissen, Grass, Heitz, Klotz, colonel de Morlet, baron de
Schauenburg , Schirr.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Le secrétaire dépose sur le bureau :
Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit , 1863, n° 2;
Bulletin de la Société d' archéologie et d'histoire de la Moselle ;
Mémoires de la même. 5^ année , 1862 ;
Revue des Sociétés savantes des départements. 3'^ série , t. I ;
Mém,oires , lus à la Sorbonne dans les séances extraordinaires du Con-
seil impérial. 2 vol., l'un intitulé Archéologie, l'autre Histoire, philologie
et sciences inorales ;
- 17 —
Mémoire de la Société des antiquaires de France , t. XXV et XXVI ;
Bulletin de la même société. 1862. 3^ trimestre.
Lecture est donnée par le secrétaire du procès-verbal suivant du sous-
comité du Haut-Rhin du 16 mars dernier.
SOUS-COMITÉ DU HAUT-RHIN.
Séance du 16 mars 1863.
Présidence de M. VÉR ON-RÉ VILLE , vice -président.
Présents : MM. Meyer, J. Chauffour, Huot, Liblin, Schlumberger-Hart-
mann, Frantz, Brièle, secrétaire, membres du sous-comité.
MM. l'abbé Reinhart, Foltz et Schœllbaum, membres libres de la Société,
assistent à la séance.
Lecture est donnée par le secrétaire du procès-verbal de la séance pré-
cédente. Le vice-président expose que, depuis la dernière séance, il a re-
cueilli, relativement au médaillieralsatique de feu M. Dorlan, de Schlestadt,
des renseignements desquels il résulte que cette collection, après avoir
subi des phases diverses et passé par différentes mains, aurait perdu une
grande partie de son importance par suite de l'aliénation ou de la distrac-
tion de quelques-unes de ses pièces les plus précieuses. D'autre part, le
comité central semblerait peu disposé à poursuivre l'acquisition de ce mé-
daillier, dont le propriétaire actuel demande un prix que ni les ressources,
ni les moyens dont peut disposer la Société, ne permettraient de réaliser.
En conséquence, le vice-président propose de laisser au comité central, à
qui la question a déjà été renvoyée, le soin de l'apprécier définitivement ,
sans que le sous-comité ait dès lors à s'en occuper davantage.
M. Liblin conteste la portée des documents produits. Il pense, au con-
traire, que la question a conservé toute l'importance que lui avait reconnue
la délibération précédente du sous-comité; iljnsiste pour que l'examen du
médaillier de M. Dorlan soit confié à une commission dont le travail déter-
minera peut-être le sous-comité à recommander plus vivement encore à
la sollicitude du comité central, la proposition de M. Doyen.
Le sous-comité, sans juger nécessaire de nommer une commission, dé-
cide que MM. Drion et Ringeisen, membres de la Société, à Schlestadt,
seront priés de vouloir bien l'éclairer sur la question de l'intégrité du mé-
daillier de M. Dorlan, et de sa valeur actuelle.
TI-Skrie. — T. II. — (p.-v.; -
- 18 —
Dépôt est effectué sur le bureau tWui fragment de frise et de débris de
poterie et autres, trouvés parmi les ruines de bâtiments incendiés, récem-
ment mis à jour, à la suite de fouilles opérées près de Bavilliers, par les
soins de l'administration des ponls et chaussées. M. Schlumberger-IIart-
mann, après avoir examiné avec soin ces fragments, pense qu'ils provien-
nent d'un établissement remontant à la période gallo-romaine. Celte appré-
ciation confirme celle de MM. Zimberlin et Bardy qui, consultés à ce sujet,
ont répondu par deux lettres séparées, dont il est donné lecture, et qui
aboutissent à cette double conclusion contraire à l'opinion exprimée par
M. l'ingénieur Bogard : 1° qu'il n'y a jamais eu de couvent à Bavilliers;
2" que les ruines qui y ont été récemment découvertes doivent dater de la
période romaine et qu'elles prouvent une fois de plus ce qu'avaient déjà
révélé les découvertes faites à Offemont et à Chàlonvillars, qu'il existait, dans
celte partie de notre département, des établissements romains considé-
rables.
Le sous-comité, en remerciant M. le Préfet du Haut-Rhin de son inter-
vention dans cette question , et M. Bogard des soins qu'il a bien voulu y
apporter, décide que M. le Préfet sera prié de vouloir bien recommander
aux agents de l'administration de laisser, autant que possible, les heux
dans l'étal où ils se trouvent en ce moment, de manière à ce qu'ils puissent
servir de point de départ, pour le cas où, dans la suite, des investigations
nouvelles seraient tentées sur ce point.
Le vice-président communique au sous-comité une demande dont l'exa-
men lui a été renvoyé par le comité central, et par laquelle M. Liblin, en
proposant l'admission comme membre de la Société, de M. Schœllbaum,
architecte à Colmar, exprimait le vœu que cet homme de l'art fût chargé
d'examiner l'état dans lequel se trouvent les châteaux de Hoh-Landsperg
et de Plixbourg , et de déterminer la nature et l'importance des travaux de
réparation ou de consolidation à opérer pour la conservation de ces inté-
ressants monuments. M. Schœllbaum, présent à la séance, déclare être prêt
à remplir cette mission, et promet de rendre compte du résultat de ses
soins à l'une des prochaines ^éances du sous-comité.
En acceptant avec satisfaction le concours de M. Schœllbaum, le sous-
comilé lui confie en même temps les projets et devis de MM. Ortlieb et Ring-
eiscn, relatifs aux travaux à effectuer aux châteaux d'Eguisheim, pour
lesquels le comité central a alloué une somme de 700 fr., déposée entre les
mains de M. Brièle. M. Schœllbaum veut bien s'engager également à assurer
l'exécution de ces Iravaux.
— 19 —
Le secrétaire donne ensuite lecture d'un rapport de M. Sabourin de Nan-
lon, relativement à des réparations d'une nature fort délicate qu'exigerait la
statue de saint Apollinaire, œuvre d'art remarquable qui se trouve dans l'église
d'Obermichelbach. Le sous-comité, tout en exprimant le regret de ne pou-
voir prendre les mesures propres à l'exécution de ces travaux, décide que
M. le Préfet sera prié d'en faire prendre note, pour le cas où des fonds à
consacrer aux œuvres d'art seraient rais à sa disposition ; qu'enfin , M. le
curé d'Obermichelbach sera prié, de son côté, de veiller à ce qu'il ne soit
rien fait à la statue dont il s'agit, jusqu'à ce que l'administration ou la
Société soient en mesure de confier à un artiste spécial l'exécution de ces
travaux.
Le vice-président donne communication au sous-comité d'une notice qui
lui a été adressée par M. Bardy, de Saint-Dié, sur le village de Bermont, et
d'un dessin fort bien fait représentant la petite église romane de ce vil-
lage. Le sous-comité décide que le tout sera transmis au comité central,
avec proposition de faire insérer au Bulletin de la Société, le dessin de
l'église de Bermont, ainsi que la partie de la notice de M. Bardy qui s'y
rapporte.
Communication est donnée par le vice-président, de trois fragments
détachés d'un roman historique, intitulé: la Kaysershurg d'Alsace, par feu
M. le docteur Richard, de Colmar. La lecture de ces fragments qui donne
une idée de la manière de l'auteur, au point de vue descriptif, historique
et légendaire, est écoutée avec le plus vif intérêt par le sous-comité.
La séance est levée à 4 heures et demie.
Le président annonce qu'il a écrit :
A M. Stoffel, juge à Wissembourg, au sujet de son travail sur Dœrren-
bach;
A M. Coste, lettre de remercîments et de félicitations sur son travail
relatif à l'emplacement d'Argentovaria;
A M. Gyss à Obernai , lettre de remercîments et de félicitations sur son
travail relatif à l'hôtel de ville d'Obernai ;
A M. Véron-Réville , au sujet de l'époque de la convocation de l'assemblée
générale de Colmar ;
A M. le commissaire central pour recommander à sa sollicitude la sur-
veillance du petit musée placé entre les contre-forts de la Bibliothèque ;
A M. le receveur général du Haut - Rhin au sujet des recouvrements de
la Société dans son déparlement.
Il communique la réponse de M. Véron - Réville , qui annonce que M. le
— 20 —
Préfet du Haut -Rhin veut bien accepter Je 7 mai prochain comme jour de
réunion de l'assemblée générale dans le Haut-Rhin ;
Une autre de M. le receveur général du Haut -Rhin, qui veut bien se
charger des recouvrements de la Société;
Une autre de M. Knoll , membre de la Société, proposant l'admission
de M. Brumpt, professeur de musique à Guebwiller;
Une autre de M. le maire de Wissembourg au sujet de l'abaissement du
dallage de l'église de Saint -Pierre et Saint- Paul. Les explications données
par cette lettre déterminent le comité à ne plus s'occuper provisoirement
de cette question.
L'admission de M. Charles Brumpt comme membre de la Société est
prononcée.
M. le président et M. le colonel de Morlet proposent de conférer dans
la réunion générale du Haut -Rhin le titre de membres honoraires à
MM. Anatole de Barthélémy, ancien sous-préfet de Belfort, et Robert,
directeur général de l'administration au ministère de la guerre, auteur
d'un ouvrage très-estimé sur la numismatique et l'archéologie, membre
correspondant de l'Institut.
M. le colonel de Morlet lit la lettre suivante de M. Goste :
«Monsieur le Colonel, le canton rural de la banlieue de Grussenheim ,
où l'on remarque la bifurcation des deux voies romaines, porte le nom
de Hengst. Comme il est d'usage dans la haute Alsace d'appeler ainsi les
étalons, et que la forêt de la Harth de Marckolsheim est tout près, je
pensais que ce canton devait être un ancien pâturage.
« La curiosité m'a fait ouvrir le glossaire de Schertz et j'y ai trouvé que
Hengst est la même chose que tolleno , un puits à bascule, semblable à
celui qui est à quelques pas du sommet de l'angle formé par la bifurca-
tion. La forme de ces puits est fort ancienne, ainsi que me l'a prouvé
une gravure du Dictionnaire des antiquités de Rieh , traduit sous la di-
rection de M. Chéruel. Les margelles de ces puits à bascule me sem-
blent devoir être examinées, dessinées et mesurées, car il est probable
qu'il en est de fort anciennes. Je crois pouvoir citer celles de Grussen-
heim, de Heidolsheim; et une autre sur le Schmalslrsessel entre Benfeld
et Kertzfeld.
« Ne pensez-vous pas qu'il serait utile d'appeler sur ce point l'attention
de nos observateurs les plus connus dans la Société? C'est une étude à
essayer comme bien d'autres. »
Cette lecture donne lieu à quelques observations. M. le baron de
Schauenburg pense qu'à raison des nombreuses conditions d'usure aux-
— 21 —
quelles les auges des puits sont exposées, et qui ne leur constituent qu'une
durée assez limitée, il sera difficile de trouver aujourd'hui encore des
parties primitives de ces appareils, et que, quant au terme de Hengst, il se
retrouve partout où l'on entretenait des animaux reproducteurs, Hengst-
matt, Miimmelmatl , etc., sans qu'il s'y trouve toujours des puits.
M. Eissen tait remarquer qu'il existe dans les champs , entre la route
impériale de Paris à Strasbourg, et la route départementale n° 1 , à la
hauteur à peu près de la propriété Hurel, une auge de puits formée avec
un cercueil en pierre, probablement déterré en cet endroit pendant que
l'on creusait le puits.
M. le colonel de Morlet rappelle qu'on a découvei't à Saint-Léonard une
quantité considérable de petites monnaies.
M. deDartein promet une note sur cette trouvaille, ainsi que l'envoi d'un
certain nombre de spécimens.
Le trésorier dépose le rapport sur le budget de 1862, arrêté avec un
reliquat actif de 6,546 fr. 40 c. , et les pièces de comptabilité à l'appui,
ainsi que le budget de 1863, arrêté en recettes et en dépenses à la somme
de 13,046 fr. 40 c.
Le rapport et le budget de 1863 sont approuvés.
Une commission composée de MM. le baron de Schauenburg, Morin et
du secrétaire, est chargée de la vérification des comptes des frais d'im-
pression.
La séance est levée à 1 heure.
Séance extraordinaire du Comité du 20 avril 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents : MM, Eissen, Heitz, Klotz, L. Levrault, colonel de Morlet,
Schirr.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Le secrétaire dépose : Mémoires de la Société dliistoire et d'archéologie
de Chalon-sur-Saône , t. IV, iii*^ partie.
Le trésorier dépose une copie du budget de 1863, dont il fait hommage
au comité.
— 22 —
Le président annonce qu'il a écrit à M. Véron-Réville relativement aux
objets d'antiquité qui doivent se trouver dans la succession de feu M. Zsep-
fel, et à M. Jules Thilloy , procureur impérial à Sarreguemines, pour le
remercier de l'envoi de son mémoire sur Herbitzheim.
M. le grand vicaire Schirr demande un crédit pour quelques petits tra-
vaux de terrassement à exécuter sur le plateau de Sainte-Odile, pour faci-
liter l'accès des monuments druidiques. Le comité prie M. Schirr, auquel
il adjoint M. L. Levraulî, de faire un rapport au comité sur cette question.
Le président communique une lettre de M. Ringeisen , au sujet de
monnaies du dix-septième siècle, trouvées dans la banUeue d'Artolsheim.
M. Sabourin de Nanton, présent à la séance, donne lecture d'un mé-
moire sur Huningue, et le comité décide l'insertion de ce mémoire dans
son Bulletin.
Le secrétaire donne lecture d'une notice de M. SifFer sur le monument
romain trouvé à Gersthelm, et transféré à la bibliothèque du temps de
Schœpflin, Il essaye une interprétation du nom inscrit sous la figure repré-
sentée sur ce monument et que jusqu'ici on lisait Gabro.
Le comité vote des remercîments à M. Siffer, ainsi que le dépôt de la
notice aux archives.
Séance du Comité du 4 mai 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Bœrsch, Eissen, Heitz, colonel de Morlet, Petit-Gérard,
Ringeisen, baron de Schauenburg, Schirr, Straub.
Le secrétaire donne lecture du procès -verbal de la dernière séance qui
est adopté.
Le président dépose sur le bureau :
Le Bulletin de la Société impériale des antiquaires de France, 1862 ;
Arclieologischer Anzeiger, n" 169 ;
La Notice sur la souscription pour la médaille de M. de Caumont;
La médaille offerte à M. de Caumont, exemplaire appartenant à la Société,
Il annonce avoir écrit à M. Ringeisen pour s'informer de la possibilité de
publier les planches de son projet de restauration de l'église de Sainte-Foi
de Schlesladt.
- 28 —
M. Kingeisen, présent à la séance, répond que la reprotluction de ses
dessins pourrait entraîner à des frais trop considérables.
M. Bœrsch propose d'essayer de faire cette publication avec la participa-
tion de la ville de Schlestadt. Il pense que M. le Préfet voudra peut-être
bien s'intéresser à cette œuvre et patronner l'offre de la Société auprès de
l'administration municipale de cette ville.
M. le grand vicaire Schirr est d'avis qu'il serait désirable de réserver
une plus large part des fonds disponibles aux travaux d'entretien et de
consolidation des monuments si nombreux qui en ont besoin.
M. le colonel de Morlet répond qu'il est matériellement impossible de
s'occupera la fois d'un trop grand nombre de monuments, parce qu'il
n'est pas toujours facile de trouver des personnes capables pour surveiller
et diriger ces sortes de travaux, ordinairement assez éloignés des endroits
habités, que même les ouvriers intelligents font souvent délaut, et qu'ainsi
le comité se voit dans la nécessité d'échelonner les travaux, afin de pou-
voir les exécuter d'une manière satisfaisante et conforme au but de la
Société. •
M. le baron de Schauenburg pense qu'en cherchant bien on trouvera,
et cite à l'appui de son opinion l'exemple de la ville de Thann, où les
travaux de l'Engelbourg ont été exécutés d'une manière fort satisfaisante.
II convient du reste lui-même que cette ruine doit être comptée au nombre
de celles qui sont le plus facilement abordables.
M Bœrsch, répondant à l'observation de M. Schirr, insiste sur la néces-
sité de ne pas perdre de vue l'importance de l'influence morale de la
Société, qui ne peut être obtenue et maintenue qu'au moyen de ses pubU-
cations. Cette influence morale a déjà porté d'heureux fruits en répandant
le goût de la conservation des antiquités; il ne fiut donc pas la laisser
péricliter, tout en continuant à soustraire à la destruction les monuments
qui ont droit à la sollicitude de la Société. Il croit que l'état financier de
la Société permet d'atteindre ce double but.
M. le colonel de Morlet annonce qu'un conducteur de travaux , résidant
à Ribeauvillé, a offert de se charger de la direction de tous les travaux que
la Société voudra entreprendre.
Le comité charge M. Ringeisen d'examiner cette question et de lui en
rendre compte.
Le président annonce avoir écrit les lettres nécessaires à plusieurs
membres .du comité de Colmar pour l'organisation de la séance du 7 mai;
— une lettre de remercîments à M. le curé Siffer pour envoi de mémoire ;
— et plusieurs lettres relatives à des ([uestions de comptabilité.
— 24 —
11 annonce qu'il a reçu une lettre de M. le Préfet du Haut-Rhin, qui sera
empêché d'assister à la séance générale de Colmar;
Une autre de M. J. ChaufFour , qui propose comme membre honoraire
M. Trouillat de Porentruy. Cette proposition figurera sur l'ordre du jour
de la réunion générale de Colmar;
Même décision pour une autre proposition de M. ChaufTour, tendant à
établir des relations avec la Société jurassienne;
Une autre de M. Oppermann , toujours empêché de prendre part aux
travaux du comité par l'état de sa santé, et qui propose de voter une
indemnité à M. Nicklès, de Benfeld, pour les déboursés qu'il a faits à l'occa-
sion de fouilles et de recherches;
Une autre de M. le trésorier, relative à des questions de comptabilité que
le comité décide dans le sens le plus large.
A l'occasion de cette lettre, M. le baron de Schauenburg fait la proposi-
tion de décider, une fois pour toutes, que tout membre nouvellement
admis le sera pour l'année courante, si l'admission a lieu pendant le pre-
mier semestre, et pour l'année suivante, si elle a lieu pendant le deuxième.
En conséquence les membres de la première catégorie payeront leur coti-
sation pour l'année entière et recevront le Bulletin , tandis que ceux de la
deuxième catégorie ne recevront le Bulletin et ne payeront la cotisation
qu'à partir du 1^*" janvier de l'année qui suivra leur réception.
Cette proposition est adoptée et sera notifiée au trésorier.
Une autre lettre des héritiers de feu M. Zaepfel, conservateur des forêts,
annonçant l'intention de ne pas se dessaisir des objets d'antiquité qui font
partie de la succession.
Le président dépose un dossier communiqué par la Conservation des
forêts et qui est relatif à des fouilles projetées dans la banlieue de Wœrth-
sur-Sauer pour le compte d'un particuHer. M. le président croit qu'il faudrait
déléguer un membre du comité pour assister à cette opération.
Plusieurs membres pensent, au contraire, que l'autorisation de procéder
à de semblables opérations par des particuliers sur les terrains de l'Etat
ou des communes ne devrait pas être accordée sans le concours du comité.
Ils proposent en conséquence de renvoyer le dossier à M. le Préfet en
prenant des réserves dans ce sens, basées, du reste, sur une récente
circulaire préfectorale.
Cette proposition est adoptée et le comité charge M. Morin , auquel le
dossier est remis , de faire les démarches nécessaires.
Le secrétaire lit la lettre suivante de M. le docteur Taufïïieb de
Barr:
— 25 —
« Monsieur et très-honoré confrère , je m'empresse de répondre à votre
honorée lettre du 28 avril courant.
« Mon frère avait permis, il y a environ un an , au maire de Saint-Nabor
d'enlever quelques pierres sans valeur sur notre propriété de Niedermünster
et en dehors des ruines. Comme peu après l'on était venu nous avertir que
l'on était en train d'enlever aussi des pierres provenant de la ruine, je me
suis hâté d'écrire à M. le Maire pour le prévenir que nous lui relirions la
permission qui lui avait été accordée.
« Mon frère et moi nous nous sommes immédiatement après rendus à
Niedermünster pour voir ce qui s'y était passé. Nous nous sommes assurés
que l'on n'avait enlevé que des moellons plus ou moins déformés ou des
fragments de moellon, n'offrant aucune espèce d'intérêt. Ces matériaux
faisaient partie d'un énorme tas de pierres qui encombre encore mainte-
nant la ruine et qu'il faudra faire enlever tôt ou tard pour dégager le
monument.
« Depuis cette épo((ue, c'est-à-dire depuis un an, aucune pierre n'a plus
été enlevée à Niedermünster. J'y suis encore allé hier pour m'en assurer
et, en même temps, pour renouveler au fermier la défense de laisser
enlever des pierres du monument de quelque nature qu'elles soient.
«Nous comprenons et nous apprécions, comme il convient, la sollici-
tude avec laquelle la Société pour la conservation des monuments histo-
riques veille sur Niedermünster et je vous prie de croire, très-honoré
confrère , que nous nous faisons un devoir de partager avec elle cette
sollicitude parfaitement justifiée , d'ailleurs, par l'importance des ruines
dont il s'agit.
« L'un des motifs qui ont déteiminé mon frère et moi à acheter les
ruines de Niedermünster en 1842, ce fut précisément le désir de préserver
ces belles ruines de la destruction qui les menaçait et qui était en voie de
s'accomplir sous nos prédécesseurs.
« J'espère que les renseignements précis que j'ai l'honneur de vous trans-
mettre, suffiront pour dissiper les craintes, heureusement peu fondées,
dont vous aviez été chargé de me faire part.
« Agréez, etc. o
Le comité vote des remercîments à M. Taufflieb.
M. le colonel de Morlet expose des objets d'antiquité trouvés récemment
à Gerstheim et ht la note explicative suivante :
«Je mets sous les yeux du comité plusieurs objets d'antiquité, trouvés
récemment à Gerstheim (canton d'Erslein) dans la propriété du sieur Jean
Briegmann, tils. .
— 26 —
« Ces objets dont nous devons la connaissance au zèle infatigable de
M. Nicklès, membre de la Société, à Benfeld, ont été trouvés près de
nombreux squelettes à l'",20 environ au-dessous du sol. Ce sont :
« 1° Une fibule d'or enrichie de pierres précieuses et de pâtes coloriées ;
« 2° Une boule creuse en cuivre doré, s'ouvrant à charnière avec système
de suspension ;
« 3° De nombreux grains de pâte émaillée percés d'un trou ;
« A^ Un anneau et quelques fragments de cuivre et de bronze;
<~i 5° Deux vases en terre , dont l'un est en partie brisé.
«.(La fibule est formée de deux plaques circulaires, l'une en or, l'autre
en cuivre, séparées par une couche de mastic de 3 millimètres d'épaisseur;
la plaque d'or a 40 millimètres de diamètre et '/, millimètre d'épaisseur,
celle de cuivre la déborde un peu, elle a 43 millimètres de diamètre et
1 millimètre d'épaisseur; elles sont réunies solidement l'une à l'autre par
six clous rivés en cuivre , placés à la circonférence.
« La plaque d'or est couverte d'un semis irrégulier de petits cercles de
i à 2 millimètres de diamètre , formés par des filigranes d'or roulés en
tresses très -fines; de semblables torsades en filigrane décorent la mince
lame d'or qui entoure la fibule sur sa tranche. Le centre de la plaque d'or
est orné d'un grenat, et six groupes formés par de petits grenats et des
pâtes blanchâtres sont disposés régulièrement sur la circonférence.
« Au revers de la fibule on voit distinctement le pivot mobile de l'aiguille,
ainsi que l'arrêt qui devait la fixer.
« En fabsence de termes de comparaison que les musées d'Alsace ne
nous offrent pas, il est difficile de fixer d'une manière précise la date de ce
bijou; cependant, en examinant ces tresses de filigrane d'or qui forment
sur notre fibule de si gracieux contours , je crois reconnaître l'art de
Byzance. De semblables ornements se voient encore sur des bijoux de
Venise, où les traditions de l'Orient se sont maintenues si longtemps. En
comparant ce bijou avec ceux de même nature que possède le cabinet des
médailles de la Bibliothèque impériale et dont la date est déterminée, je
serais porté à voir dans notre fibule un travail du quatrième ou du cin-
quième siècle.
«La boule creuse, que j'ai citée en seconde ligne, est en cuivre rouge,
on aperçoit sur sa surface des parties dorées; elle est légèrement aplatie,
son plus grand diamètre est de 47 millimètres , le plus petit de 40 milli-
mètres. Les deux calottes d'égale dimension qui forment cette boule , ont
à peine 1 millimètre d'épaisseur; elles sont réunies par une charnière à
laquelle est adapté un système de suspension. A l'extrémité opposée à la
— 27 —
charnière se trouve un arrèl mobile destiné à maintenir à volonté la fer-
meture de la sphère. Ce curieux objet nous représente la bulla aurea que
les Romains suspendaient au cou de leurs enfants jusqu'au moment où
ceux-ci revêtaient la robe virile. Des talismans destinés à préserver les
enfants de tout maléfice étaient renfermés dans ces boules , dont l'origine
remonte, d'après Pline, à Tarquin l'Ancien. Cet usage, réservé d'abord
aux seuls patriciens, s'étendit ensuite aux enfants de toutes les classes qui
portèrent des hullœ formées de diverses matières.
« Les détails que donnent à ce sujet les auteurs anciens et notamment
Macrobe, se rapportent très-exactement à la boule creuse de Gerstheim,
dont on retrouve l'image sur plusieurs bas-reliefs.
« On voit aussi des hullœ figurées sur des statues de dieux lares , aux-
quelles les Romains les suspendaient lorsque leurs enfants atteignaient
l'âge viril.
« Les grains en pâte émaillée sont semblables à ceux que l'on trouve
habituellement dans les sépultures franques.
«Les fragments de cuivre, de bronze, ainsi que les poteries, n'offrent
rien de bien caractérisé.
« Malheureusement M. Nicklès n'a pu recueillir aucun renseignement
précis sur la position des squelettes dont les ossements ont été immédiate-
ment dispersés. Il nous manque ainsi un élément d'appréciation fort important.
« De nouvelles fouilles seront donc nécessaires pour pouvoir déterminer
avec quelque précision l'origine et la date de ces sépultures qui nous ont
offert à la fois des preuves non douteuses des époques romaine et franque.
« Gerstheim est fort rapproché d'une ancienne voie dite Heidenstrœssel
qui aboutissait à Eli {Heluelus), d'où partaient plusieurs voies romaines ou
celtiques, entre autres Va Hochstrasse el Harweg , qui se prolongeaient
jusqu'au sommet du mont Sainte-Odile. Ces communications, décrites avec
une grande exactitude par M. Cosle, rattachent Gerslheim au réseau des
voies antiques de l'Alsace.
«Un ancien chemin, dit Alt-Weg, conduit du village sur les bords du
Rhin, à l'emplacement du château féodal de Schwanau, détruit au quator-
zième siècle, où l'on trouve encore aujourd'hui beaucoup de poteries gau-
loises et romaines. Enfin, c'est à Gerstheim même qu'a été trouvé au siècle
dernier un bas-relief gaulois sur lequel on lit le mot GLABRO, et que pos-
sède la Bibliothèque de Strasbourg. Gerstheim est donc un lieu historique
d'une haute importance.
« L'on doit des remercîmenls à M. Nicklès pour le zèle qu'il a déployé
dans cette circonstance, comme aussi à M. Briegmann qui a bien voulu
— 28 —
consentir à céder au musée de la Société , les objets que je viens de dé-
crire.
«Je joins à cet exposé une note de M. Nicklès qui accompagnait ces ob-
jets, et dans laquelle notre zélé collègue a inséré un extrait du travail qu'il
prépare sur Helvetus, en ce qui concerne la position de Gerstheim.
Communication de M. Nicklès.
« En creusant récemment une cave à Gerstbeim, les ouvriers ont ren-
contré, à plus d'un mètre sous terre, des squelettes et différentes pièces de
poterie. Le propriétaire, rendu attentif, se mit à y veiller. On déterra alors
un vase entier, des plaques en bronze, des grains de collier que l'on re-
cueillit avec soin, une cassolette et une broche plaquée d'or. Une autre
broche, plus petite et plus belle encore, fut enlevée par un curieux indis-
cret, qui dit l'avoir perdue. Prévenu par un habitant du village, je me ren-
dis sur les lieux. Il n'était plus possible de se rendre compte de la position
occupée par chaque pièce; mais il paraît que les squelettes se trouvaient
placés sans aucune orientation.
c< L'emplacement se trouve à quelques mètres de la route impériale de
Bâle à Spire; c'était une cour suivie d'un jardin. Dans ce dernier, on a fait
une simple excavation pour y éteindre de la chaux, et à une faible pro-
fondeur on a rencontré des pièces en céramique dont l'une avait la forme
d'une bouteille {lagena). A côté de la cave que l'on vient de creuser, on
en a fait une il y a vingt-quatre ans, et on y a rencontré également des
squelettes , des vases et un glaive; mais aucun de ces objets n'a été con-
servé.
« 11 y a là, évidemment, un lieu de sépulture qui mériterait d'être exa-
miné par des fouilles méthodiques.
«La plupart des vases trouvés, d'après ce que l'on m'a rapporté, étaient
de forme ondulée et à grain grossier, comme le spécimen ci-joint, qui
rapfielle un vase figuré sur le premier tableau de \ Archéologie céramique
de M. l'abbé Cochet, et qu'il donne comme étant d'origine celtique. Sans
cette circonstance, je serais tenté de voir dans cette localité, un cimetière
franc. Je laisse d'ailleurs au comité le soin de résoudre cette question. Qu'il
me soit permis seulement de saisir cette occasion pour lui communiquer
ce que mes recherches m'ont appris sur Gerstheim; j'emprunte ces don-
nées à la notice qui doit accompagner ma carte d'Helvetus et de ses envi-
rons, dont je joins ici également un petit extrait.
« § 1*"". Course d'eau : Près de Gerstheim, le Rhin forme beaucoup d'îles,
et malgré la mobilité de ces atterrissements, il y en a qui sont devenus assez
29
permanents pour avoir reçu des noms particuliers. Il est donc probable
qu'aux environs de Scliwanau, il y a eu dans tous les temps des îles nom-
breuses, où les Germains pouvaient se i-assembler avec leurs canots pour
opérer leurs invasions dans la Gaule rhénane.
« § 2. Hclvelus: Il y a des auteurs qui ne considèrent l'ancien Helvel que
comme un lieu d'étapes (mansio)^; d'autres en font un poste militaire de
surveillance ^ Il est certain que la huitième légion y avait une garnison
(je possède une brique provenant d'Ehl , et portant : LEG VIIÏ. AV); mais je
n'ai rien trouvé qui autorise de classer cette localité parmi les villes forti-
fiées. S'il a existé un fori destiné à la protéger contre les invasions des
Germains, il a dû se trouver sur les bords du Rhin, près de Gerstheim, à
la place où fut construit plus tard le château féodal de Schivanaii.
«§3. Vestiges cl' établissements romains, d'après les recherches faites
sur le terrain: Schivanau, près Gerstheim; débris de poterie ancienne,
fragments de poterie romaine fine (rare), tuileaux et débris de tuiles à
rebord (rares), substructions à petit appareil de la dureté du granit, que
les outils ne peuvent entamer sans se briser. Je possède plusieurs médailles
romaines trouvées à Gerstheim, entre autres celles de la colonie de Nîmes,
avec un crocodile enchaîné à un palmier et les effigies d'Agrippa et d'Au-
guste. Tout le monde connaît le bas-relief du musée Schœpflin , représen-
tant un esclave gaulois du nom de Glabro , découvert dans cette localité
au siècle dernier. ^
«Que signifient ces vestiges romains sur le territoire de Gerstheim? Le
château féodal de Schwanau, détruit par les Strasbourgeois en 1333, ne
pouvait-il pas avoir été précédé, comme défense contre les Germains, d'un
camp gaulois, remplacé, dès le commencement de l'occupation romaine,
par un castrum .^ On a vu (§ V^) que, dans cette direction, le Rhin a tou-
jours dû former de nombreuses îles, où les Germains pouvaient se rassem-
bler sans être remarqués et tenter un coup de main contre les habitants de
la rive gauche. Ce point fortifié avait donc toujours son utilité, même après
l'établissement de la colonie gauloise, sur la rive droite, des champs décu-
raales, sous le protectorat des Romains; car les Germains étaient sans cesse
des voisins incommodes et menaçants.
« La voie de Burgheim au Rhin, telle que je l'ai tracée, ne s'arrêtait pas
à ces deux points. Tout le monde connaît sa prolongation sur le Män-
nelstein, le plateau de Sainte-Odile, dans l'enceinte du mur païen, et il est
1 . steinet". Codex inscripl. romani.
2. Strobel.
3. Schœpflin. Alsat. illiistr. Tab. 1 , lig. n" H.
— 30 —
probable qu'elle communiquait avec le pays des Leuciens. M, L. Levraull
l'a indiquée, et M. Goste en a donné la direction de Sainte-Odile à Helvet.
J'ai trouvé sa continuation d'Helvet au Rhin, et tout me porte à croire que
cette voie transversale s'étendait dans les champs décumates vis-à-vis de
Gerstheim, par Ottenheim, Allmansweier, Dinglingen, Lahr, Burgheim ,
pour passer près du château de Géroldseck, dans la vallée de la Kinlzig.
C'était le trait d'union entre Vosagus et Ahnoba.
« Le Männelstein, dans les Vosges, et le cône de Géroldseck, dans
la Forêt-Noire, sont deux points culminants qui dominent toute la partie
supérieure de la vallée du Rhin.... Et partout, sur toute la ligne, on voit la
main du grand peuple conquérant!
<i Emplacements où il y a des vestiges romains incontestables : Sainte-
Odile, Burgheim, Holzbad-Westhausen, Ellzach-Kertzfeld, Benfeld, Hu-
senburg, Sand, Ehl, Kohlengraben, Haberacker, Kirchströng, Schwanau-
Gerstheim, Mauerfeld-Dinglingen, Burgheim-Lahr, etc. Le § 4 de ma notice
donne le détail de tout ce que j'ai trouvé sur la ligne de Burgheim à
Schwanau.
« Au dire des habitants, il y avait jadis des tumulus tout près de Gerst-
heim ; ils ont été tous nivelés , il ne m'a plus été possible d'en reconnaître
la place. 11 y en avait peut-être même sur le terrain occupé par le village
qui ont disparu depuis plusieurs siècles. Les sépultures de la propriété
Briegmann étaient sans doute recouvertes de tertres pareils; mais c'est là
une question dont la solution n'est plus possible.
« Le bas-relief de Glabro a fait supposer à Schœpflin et à Schweighaeuser,
qu'à l'époque romaine, il devait y avoir une villa à Gerstheim. Il m'est im-
possible d'admettre cette opinion. Une villa est un séjour de plaisance; or,
à cette époque, la résidence dans un lieu continuellement exposé au pre-
mier choc d'une invasion de barbares, n'a pu offrir le moindre agré-
ment. »
M. le colonel de Morlet, à la suite de ces communications, reprend la
motion de M. Oppermann, et propose d'allouer à M. Nicklès une somme
de 100 fr.
M. le baron de Schauenburg propose de porter ce crédit à la somme de
400 fr. pour permettre à M. Nicklès d'acquitter les travaux déjà faits, et de
continuer les recherches.
Le comité s'associe à cette proposition, en votant le crédit de 400 fr.
M. Merk soumet au comité une lampe en bronze, suspendue à des chaî-
nettes, trouvée lors de la construction de l'égout, près des Grandes-Bou-
cheries, à trois mètres sous terre. Il en fait don au musée de la Société.
— 31 —
Le comité vote tles reniercîmenls à M. Merk.
Le comité décide la reproduction typographique en impression de cou-
leurs par les procédés de la maison Silbermann, de la fibule et de la bulla
trouvées à Gersiheim.
Lecture est donnée d'un mémoire de M. Spach, intitulé : Une excommu-
nication à Mulhouse, au treizième siècle, destiné à la réunion générale de
Colmar.
M. l'abbé Straub rend compte d'une trouvaille faite, à Saint-Léonard, de
monnaies du moyen âge, douzième et treizième siècles; cette communica-
tion devra être également repi'oduite à Colmar.
M. Sabourin de Nanton soumet le dessin de la médaiFle commémorative
de Iluningue. Ce dessin sera reproduit dans le Bulletin,
Le secrétaire rappelle qu'il est devenu nécessaire de compléter le comité.
Renvoyé à la séance de juin.
Assemblée générale, tenue à Colmar, le 7 mai 186^.
Présidence de M. SPACH.
La séance est ouverte à 2 heures, à l'hôtel de la Préfecture.
Environ soixante membres sont présents. Le bureau est occupé par
M. Spach, M. Véron-Réville, président du comité de Colmar; MM. Eissen et
Brièle, secrétaires; M. le baron de Schauenburg,MM. l'abbé Straub, Ring-
eisen, le curé Meyer, M, l'abbé Joseph Mury, de Strasbourg, assistent à
la séance.
Le président annonce l'absence de M. le Préfet du Haut-Rhin, deuxième
président honoraire, empêché par ses fonctions, de prendre part à la
séance.
Il propose l'admission, comme membres honoraires de la Société, de
MM. Trouillat, ancien maire de Porentruy, Robert, directeur gvénéral de
l'administration de la guerre, à Paris, A. de Barthélémy, ancien sous-
préfet de Belfort, ainsi que l'établissement de relations régulières avec la
Société jurassienne de Porentruy.
Ces diverses propositions sont votées par acclamation.
M. Ringeisen propose l'admission de M. Hartmann, architecte; M. l'abbé
Reinhard propose celle de M. Gerst , photographe à Colmar.
— 3^2 —
Le comité prie les proposants de faire leurs demandes par écrit, et de
préciser la date de l'entrée des candidats dans la Société.
Le président donne lecture d'une lettre de quelques héritiers de feu
M. Dorlan, qui s'élèvent contre certaines assertions produites au sein du
comité, à Strasbourg, au sujet du médaillier alsatique réuni par feu
M. Dorlan.
M. le conseiller Boyer fait observer que le médaillier en question pro-
vient en grande partie de M. le baron de Berstett, qu'il contient certaines
pièces mentionnées et dessinées par cet éminent numismate, et trouvées à
Fessenheim, avec des armures et des objets mérovingiens. Le nom de
Strasbourg y est parfaitement reconnaissable. Ces pièces sout donc exces-
sivement précieuses, car Schœpflin chercha en vain des monuments numis-
matiques de celte époque, frappés à Strasbourg. Il donne ensuite lec-
ture d'une lettre de M. de Longpérier, qui a examiné le médaillier de feu
M. Dorlan, et de laquelle il résulte que réellement cette collection a une
valeur très -considérable.
M. le baron de Schauenburg demande si M. de Longpérier a examiné le
médaillier lui-même, ou bien le catalogue seulement.
M. Boyer répond que l'un et l'autre ont été l'objet d'un examen scrupu-
leux de la part de ce membre de l'InstituL
M. Ringeisen, chargé par le comité, dans une de ses dernières séances,
de l'examen de la question, soumet des conclusions desquelles il ressort
qu'effectivement le médailher avait été momentanément dépareillé à l'épo-
que où le comité de Colmar a été saisi de celte affaire, mais qu'il a depuis
été pleinement reconstitué, avec les éléments détournés un moment par
des nécessités pécuniaires. Les pièces les plus rares et les plus précieuses
y ont été replacées, et la collection possède en tout deux mille trente-hiiit
médailles.
Le président croit que la Société devrait recommander cette acquisition
à la ville de Schlestadt.
M. le baron de Schauenburg s'élève contre quelques expressions de la
lettre lue par M. Boyer, reprochant à la Société d'avoir, par ses apprécia-
tions, causé un préjudice à la propriété des héritiers. « La Société n'avait
point à s'occuper de détails semblables; les circonstances dans lesquelles
cette question s'est présentée au comité, ont seules pu déterminer son
appréciation. Si ces circonstances ont changé depuis, il faut s'en féliciter. »
M. Liblin. Quand la question s'est présentée à Colmar, le comité n'avait
pas l'intention de recommander l'acquisition à la Société; le principal but
était d'empêcher la dilapidation de la collection.
M. Ehrlen demande que l'assemblée émette le vœu que la collection soit
conservée à l'Alsace. Cette proposition , appuyée par M. le baron de Schauen-
burg, est votée par acclamation.
M. le baron de Scbauenburg, à la prière du président, donne lecture de
la lettre suivante de M. Ingold de Cernay :
«Messieurs,
«Le 18 août dernier, vous avez pris en très-sérieuse considération la
demande que je vous ai faite d'affecter quelques fonds à des travaux de déblai
à faire au château d'Engelbourg, près de Thann, et vous avez bien voulu,
séance tenante, voter une somme de 300 fr. pour commencer ces tra-
vaux.
« On s'est mis immédiatement à l'œuvre ; dix journées ont été employées
aux plus urgents travaux de consolidation, soixante-une à creuser le puits
qui est aujourd'hui complètement déblayé. Les abords de cette partie im-
portante de nos ruines sont remis dans leur état primitif, et l'Engelbourg,
se dégageant de plus en plus des décombres dans lesquels il était couché
depuis bientôt deux siècles, semble grandir et reprendre son ancienne
importance.
«Les frais de ces premiers travaux se sont élevés à . . . . 148*^
que le comité pourrait mandater directement au profit de l'entre-
preneur, tout en laissant ouvert le crédit voté pour le solde de
la somme votée s'élevant à 152
Ensemble. — Crédit alloué . . . 300*
« Ce que nous avons prévu relativement à notre entreprise se réalise en
tous points. Les ruines de l'Engelbourg gagnent en popularité, on s'y in-
téresse de plus en plus; l'administration municipale de Thann, qui ne se
laisse jamais devancer par l'opinion publique , a fait faire à l'Engelbourg des
travaux non moins importants que notre Société histori(jue. Elle a fait re-
mettre en parfait état de viabilité les chemins qui y conduisent, et pris des
mesures utiles à la conservation des ruines.
« Je crois devoir profiter de cette occasion pour vous adresser :
« 1° L'état des travaux exécutés;
« 2° Un calque du plan de l'Engelbourg ;
« 3"^ Un exemplaire d'une ancienne gravure représentant saint Thiébault,
et à ses pieds une vue de Thann et de son château. Cette gravure se trouve
ordinairement en tête de la vie de saint Thiébault, imprimée en 1723, à
II' SÉRIE. — T. II. — (P.-V.) 3
— 34 —
Porentruy. C'est la plus ancienne représentation que nous connaissions de
l'Engelbourg;
« 4° Un calque d'une vieille peinture faite il y a quatre-vingts ans envi-
ron, par Pulfer, aïeul d'un artiste de notre ville.
« Cette peinture a été faite de la place de l'église de Thann. Depuis long-
temps déjà, le château était ruiné; les toits n'existaient plus. Pour les réta-
blir, l'artiste s'est sans doute inspiré de l'image ci-jointe, dont il confirme
ainsi, en partie, l'exactitude. Mais il doit avoir fait fausse route à l'endroit
delà grosse tour, des créneaux et des toitures, lesquelles, en général, étaient
plus élancées.
« Sous la maison d'Autriche, le château de Thann, dit Schœpflin, resta
intact, défendu qu'il était par sa situation et ses ouvrages d'enceinte'. Les
archives du département renferment, en effet, divers comptes de sommes
affectées à son entretien et à des réparations (années 1557, 1593, 1614,
1618, 1621). En 1621 , l'archiduc Leopold d'Autriche y fit établir, par son
fontainier ordinaire {unser brunnen meister), Michel Benck de Soultzmatt,
le puits qu'on vient de remettre au jour.
il. Ce château renfermait une chapelle dédiée à sainte Catherine, qui était
richement dotée. Le chapitre de Saint-Thiébault, de Thann, en touchait les
revenus en vertu de son droit de patronage, et y faisait dire trois messes
chaque semaine.
« Dans la Charte de 1251, où le château de l'Engelbourg fut offert à
l'évêque de Strasbourg, il est question, tant d'un nouveau château , que
d'un plus 3ncien,vel novo,vcl antiquo,ce qui semble indiquer d'importantes
reconstructions faites à cette époque reculée. On remarque dans les ruines
actuelles, des débris d'une construction antérieure; la continuation des
travaux mettra peut-être au jour des médailles contemporaines de ces pre-
mières constructions.
({ Dans la guerre de Trente ans, dit Silbermann, l'Engelbourg a été pris
sept fois, et enfin détruit par les Français, en 1674 ^ nonobstant la dona-
tion que Louis XIV en avait faite au cardinal Mazarin, par lettres de don des
comtés de Ferrette, seigneuries de Belfort, Delle, Thann, Altkirch et Isen-
heim, en date de Toulouse, du mois de décembre 1659.
« Ce ne fut pas sans un vif sentiment de tristesse que les habitants de
la patriotique ville de Thann virent sauter en l'air le manoir féodal qui
couronnait d'une manière si pittoresque leur cité. Avaient-ils conservé un
1. Traduction Ravenez. Tome III, p. 102.
2. Silbermanii, Merkwüi-digkeiten , p. 81.
reste d'attachement pour la maison d'Autriche qui avait constitué leur ville
en fidèle gardienne des trésors de ses archiducs? voyaient-ils dans l'En-
gelbourg un dernier refuse en cas de détresse ? Toujours est-il qu'ils criè-
rent à la trahison, comme aux grands revers, à l'intrigue, à la jalousie.
Ecoutez leurs chroniques :
« M. Poncet de la Rivière, nommé premier président du conseil souve-
rain d'Alsace, en 1670, en remplacement de M. Charles Golbert, était en
mauvaise intelligence avec le cardinal de Mazarin; il insinua au roi qu'un
gros d'ennemis, se jetant dans l'Engelbourg, pourrait compromettre son
autorité encore mal affermie dans la haute Alsace; puis il fit venir en toute
hâte des mineurs de Giromagny qui mirent trois fois le feu aux poudres.
La première fois, le principal corps de logis et les bâtiments de service
s'écroulèrent; la seconde fois, le donjon {der Heidenthurn) fut ébranlé; au
troisième feu, il fut renversé. Le grand roi, mieux informé, donna contre-
ordre; c'était trop tard, le mal était fait. Il en eut du regret. Et depuis,
notre antique forteresse (unser uraltes ScIUoss) est là, couchée dans la
poussière, comme vous pouvez le voir avec tristesse (init Trauren). »
L'assemblée, sur la proposition de M. le baron de Schauenburg, vote
un crédit de 300 fr. pour compléter le crédit antérieur.
M. Spach prie M. le président du comité de Colmar de vouloir bien
indiquer à l'assemblée les travaux déjà exécutés ou projetés au château de
Hoh-Landsperg.
M. Véron - Réville répond qu'il regrette l'absence de M. Schœllbaum,
architecte et membre de la Société, qui est chargé de ces travaux, qu'il
va entamer au premier jour.
M. J. Chauffour communique une lettre de M. Ortlieb qui offre son
concours à M. Schœllbaum pour les travaux à entreprendre au château
d'Eguisheim.
M. Straub dépose sur le bureau les médailles trouvées à Saint-Léonard
et lit la note suivante:
«A la fin d'août 1802, pendant la démolition d'un ancien mur de clôture
de la collégiale de Saint-Léonard, les ouvriers firent la découverte de 2 à
3,000 anciennes monnaies d'argent de petit module.
« M. Laugel, le propriétaire de cette partie de l'enclos, nous en fit par-
venir 125 pièces prises au hasard dans le nombre.
« L'examen , auquel nous nous hvrâmes, nous fit reconnaître 16 variétés.
57 présentent sur l'avers un clerc avec une grande tonsure et la légende
BERTRANN", sur le revers la main divine bénissant. Entre les bras de la
croix, dont le nimbe est timbré, se trouve l'épithète METENSIS. Il serait
— 30 —
peut - être permis d'en conclure que ce petit trésor a été muré dans ce
réduit par un moine lorrain.
« 9 pièces perlent sur l'avers un évêque mitPé , à droite bénissante et
portant une croix dans la main gauche. Sur le revers un ange tenant une
croix à piédestal très-prononcé.
«13 pièces avec un évêque mitre et crosse, à droite bénissante, au-
dessus de laquelle on voit une étoile. Le revers est le même que celui des
9 pièces ci-dessus.
«D'après la forme des caractères et des détails architectoniques, les
monnaies semblent appartenir pour la plupart à la fin du douzième et au
commencement du treizième siècle. »
L'assemblée vote des remercîments à M. Laugel qui a offert lesdites
médailles à la Société.
M. Straub rend compte des réparations faites aux frais de la Société au
mur d'enceinte de Hunawyhr et annonce que le crédit de 300 fr. a été
dépassé de 13 fr.
Ce supplément est accordé.
M. Ringeisen soumet des médailles trouvées à Artolsheim et acquises
depuis par la ville de Schlestadt.
M. Ghauffour dépose six photographies de tapisseries exécutées aux
quinzième et seizième siècles d'après des dessins de A. Dürer et offertes à
la Société par M. II. Kestner.
Remercîments votés à M. Kestner.
M. Frantz dépose un dessin représentant une tour très-remarquable du
mur d'enceinte d'Ammerschvvyhr, en annonçant que la commune a décidé
la démolition de ce monument. Il prie la Société d'intervenir.
Des explications échangées il résulte que cette démolition n'est com-
mandée par aucun intérêt majeur, que la tour en question n'est pas
un obstacle au passage, puisque la nouvelle porte qui va être établie,
le sera dans un autre endroit et qu'ainsi rien ne saurait justifier la des-
truction. '
Le comité de Colmar est chargé de suivre cette affaire auprès de l'admi-
nistration départementale.
M. Mossmann donne lecture d'un travail sur d'anciennes tapisseries qui
existaient autrefois à l'abbaye de Murbach. C'est la traduction d'une lettre
fort curieuse d'un frère Sigismond adressée à l'abbé de Murbach et donnant
une description détaillée et raisonnée de ces tapisseries.
1. Voir la suite de cette affaire et la justiticatioii de raiitorifé d'Animerschwylir an procès-
verbal de la séaijce extraurdiuaire du 18 mai 1S63.
Ce travail intéressant sera publié dans le Bulletin de la Société.
Lecture est donnée de la lettre suivante de M. Bardy :
«Je viens appeler votre attention et celle de nos collèg-ues de la Société
sur la vieille église romane de Bermont, près de Belfort, lieu devenu
célèbre dans le pays par les promenades qu'y faisait autrefois la belle
Henriette de la Suze. Je ne reviendrai pas sur ce sujet que j'ai traité en
détail, l'année dernière, dans une petite brochure dont j'ai eu l'honneur
de vous adresser un exemplaire.
«Je vous envoie un croquis à la plume, dessiné d'après nature, au mois
de novembre dernier, par mon frère.
« L'église de Bermont est mentionnée pour la première fois dans un titre
du 5 janvier 1147, par lequel Humbert, archevêque de Besançon, con-
firme les possessions du prieuré deLanthenans (.... cum ecclesia de Belle-
monte et capella de Trestudens ). On la retrouve encore dans un autre
titre du 4 mai 1177, par lequel le pape Alexandre III confirme ces mêmes
possessions ( — ecdesiam de Bellemonte cum capella sua de Trestu-
dens — ).
« Tout près de Bermont se trouve le village de Châtenois, qui remonte
aussi à une haute antiquité. Son nom se trouve orthographié dans les anciens
litres de différentes manières : Casteneyaco (5 janvier 1147); Castiney
(4 mai 1177); Schehteney (8 juillet 1241); Chestenoy (15 mai 1282);
Cliastenoy (12 mai 1342). Les Allemands le nommenl Kestenh oh , et le patois
du pays Cliâteneu.
« Il s'y trouvait autrefois un prieuré sous la règle de Saint-Augustin, qui
fut uni en 1435 à la collégiale de Montbéliard. Les terres qui composaient
la dotation de ce prieuré furent exceptées de la mesure qui prescrivait que
les biens immeubles des églises du comté de Montbéliard seraient mis
aux enchères publiques , et que l'argent provenant de cette vente serait
placé à intérêts au profit de la recette ecclésiastique. Celte mesure
avait été prescrite par une ordonnance du comte Frédéric du 13 sep-
tembre 1585.
«L'histoire ne mentionne qu'un seul prieur de Châtenois , c'est Jean,
chanoine de Saint-Paul de Besançon , qui , en 1209, eut de graves démêlés
avec son collègue le prieur de.Lanthenans.
«L'église de Châtenois, quoique ancienne, n'offre rien de remarquable.
Il n'y existe qu'une pierre tombale qui puisse offrir (juelque intérêt. Je vous
en adresse le fac-similé.
- 38 —
Pierre tombale dans l'église de Châtenois (Haut-Rhin).
CY GIST LE CORPS DE
FVT lEAN DESCOMaEY
LVY VIVANT SIEVRDE LA
VALLEY EN NORMANDIE
ET MARESCHAL DES LOGIS
DE LA COÄ^PPAGNIE DE
CHEWLX LEGERS DE
MONSIEVR LE MARQVIS
DE CASTELMORON CO
MAMDANT POVR SA
MAIESTE TRES CHRES
TIENNE A MONTRELI
ARD ET PAYS EN DE
PENDANTS LEQVEL DE
CEDA DE CE MONDE
LE 7 JOVR DV MOIS
DE FEBRVIER 1642
LA MORT EST LA FIN
DE TOVTES LES CHOSES
«Je termine ces renseignements sur Châtenois en rappelant qu'il s'y
trouvait autrefois un haut-fourneau et une usine pour l'exploitation des
mines de fer qui existent dans le pays. » '
M. le président lit un mémoire historique intitulé: Une excomiminication
à Mulhouse au treizième siècle , qui est couvert par les applaudissements
de l'ossemblée.
Ce mémoire sera publié dans le Bulletin de la Société,
La séance est levée à 5 heures.
1. La description complète de cette union, faite par Duhamel , se trouve insérée dans
l'ancien Journal des mines (n° XXXYII, vendémiaire an VI).
— 39 —
Séance extraordinaire du Comité du 18 mai 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Eissen, Heitz, Jung, baron de Schaiienburg, Schirr.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Le secrétaire dépose les publications suivantes, reçues dans l'intervalle
des deux séances:
Bulletin de la Société impériale des antiquaires de France, 1862,
4^ trimestre;
Messager des sciences historiques, ou Archives des arts et de la biblio-
graphie de Belgique, 1863, V^ livraison;
Mémoires et documents publiés par la Société d'histoire et d'archéologie
de Genève, t. XIII;
Revue des Sociétés savantes des départements, S'' série, t. P'", mars 1863;
Anzeiger für Kunde der deidschen Vorzeit, X. Jahrg., n° 3.
Le président annonce avoir reçu une lettre de M. le sous-préfet de
Schlestadt, proposant comme membre M. Simonin, Pierre, capitaine au
S-i*' régiment de ligne.
Cette admission est prononcée.
Il a reçu également une lettre de M. A. de Barthélémy, faisant ses remer-
cîments pour sa nomination de membre honoraire.
De son côté, il a écrit à MM. Oppermann, Nicklès et au trésorier, au
sujet des fouilles de Gerstheim, et du vote auquel elles ont donné lieu ;
A M. le sous-préfet de Schlestadt pour le remercier de la présentation
de M. le capitaine Simonin;
Une deuxième lettre au trésorier, au sujet de certaines réclamations
venues de Wissembourg et de Haguenau, et de la décision du comité qui
y a fait droit;
A M. Laugel, entrepreneur, pour le remercier des médailles trouvées à
Saint-Léonard, et dont il a offert des exemplaires à la Société ;
AM. le Préfet du Haut-Rhin, pour le prier d'intervenir auprès de l'au-
torité municipale d'Ammerschwyhr , contre la démoHtion projetée d'une
ancienne tour ;
A MM. Trouillat, A. de Barthélémy et Robert, directeur de l'administra-
tion au département de la guerre, pour leur annoncer leur nomination de
membres honoraires de la Société;
— 40 —
A M. le président de la Société jurassienne de Porenlruy, pour lui an-
noncer que la Société accepte avec empressement l'échange des publica-
tions respectives;
A M. Müller, agent voyer inspecteur, pour le remercier de son rapport
du 7 mai sur les tombeaux découverts le long du chemin de fer vicinal de
Molsheim à Wasselonne;
A M. le conservateur des forêts, au sujet des fouilles deWœrth-sur-Sauer;
de plus, des lettres concernant des affaires diverses.
Le président communique ensuite une lettre de M. Mœhler, notaire à
Ammerschwyhr (Haut-Bhin), qui fait observer que l'assemblée générale à
Golmar a été mal renseignée au sujet du dessein qu'on a prêté à l'adminis-
tration municipale de démolir une tour historique faisant partie de son en-
ceinte. 11 appuie sa lettre d'un extrait des délibérations du conseil municipal,
duquel il appert qu'effectivement le projet de destruction n'a jamais existé,
et que tout se borne à ouvrir, pour les besoins de la circulation, une nou-
velle porte d'enceinte.
Le secrétaire donne lecture de la note suivante de M. Morin, chargé
d'examiner l'affaire des fouilles projetées à Wœrth-sur-Sauer.
M. Weissacker, notaire à Wœrth, a demandé au conseil municipal, l'au-
torisation d'exécuter à ses frais des fouilles de tumuli dans la forêt de cette
commune, dans le but de découvrir des fragments antiques.
Par délibération du 12 mars 1863, le conseil municipal admet cette de-
mande, qui est également appuyée par M. le garde général des forêts, sous
réserve de communiquer les objets trouvés à la Société pour la conserva-
lion des monuments et à la Société philomalique de Niederbronn. Avant
de se prononcer, M. le conservateur des forêts demande l'avis du comité.
Par lettre du 20 octobre 1859, M. le Préfet a ordonné que les inscrip-
tions, pierres tombales, ou fragments d'architecture, ayant un intérêt his-
torique quelconque, trouvés dans les fouilles de bâtiments ou d'anciens
édifices quelconques, resteront la propriété de la commune.
Cette décision est maintenant insérée dans tous les cahiers des charges
d'entreprise des bâtiments communaux.
La forêt communale de Wœrth est soumise, comme toutes les autres pro-
priétés communales, à la tutelle du Préfet, et la décision du 20 octobre
1859 doit s'y appliquer également.
Dans le cas particulier, je crois que les objets quelconques qui seront
trouvés dans les fouilles, resteront propriété communale, et seront remis
au maire de Wœrth.
La valeur de ces objets sera estimée par le comité de la Société pour la
— Ai —
conservation des monuments, et l'administration locale de Wœrlh pourra
opter entre la conservation de ces objets avec remboursement, à M. Weiss-
acker, delà somme déterminée, ou l'abandon de ces mêmes objets.
Sur le refus de la commune de conserver les fragments trouvés , et d'en
tenir compte , la Société des monuments sera autorisée à garder les frag-
ments aux mêmes conditions que la commune; mais dans ce dernier cas,
la valeur en sera tlxée par expertise contradictoire.
Dans tous les cas, les fouilles et recherches seront faites avec le con-
cours de la Société des monuments historiques d'Alsace , qui sera avertie
huit jours à l'avance du commencement des opérations, et s'y fera repré-
senter.
Le secrétaire donne lecture de la lettre suivante de M. Müller, agent
Yoyer inspecteur :
« Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous informer qu'en faisant
des fouilles sur le chemin de fer vicinal de Molsheim à Wasselonne, près
du grand pont sur la Bruche, on a découvert plusieurs tombes composées
de dalles grossières de fortes dimensions, posées de champ. Ces tombes
affectent la forme d'un cercueil de quatre parois verticales, mais sans être
ferme ni en bas, ni en haut; en les vidant, on n'a pu rassembler que
quelques fragments d'ossements, et un crâne avec les dents.
«Une seule tombe était maçonnée et fermée, et une autre avait une
longueur de plus de deux mètres. Jusqu'à présent, on n'a trouvé dans
aucune ni inscription, ni quelque objet pouvant indiquer jusqu'où elles
remontent.
« J'ai recommandé à l'agent voyer de Molsheim de laisser intactes, pen-
dant quelques jours, les tombes les mieux conservées, afin que, dans le
cas où vous jugeriez à propos de les faire examiner, on puisse voir com-
ment elles sont disposées. Cet agent fournira aussi le dessin et un plan des
lieux que je m'empresserai de vous communiquer.»
Puis d'une lettre ministérielle annonçant la réunion des sociétés savantes
au mois d'avril 1864, et indiquant les conditions du concours', et la valeur
des prix à décerner à cette occasion ;
Et enfin du programme de la trentième session du congrès archéolo-
gique de France, qui s'ouvrira le 28 mai, à Alby, et le 2 juin , à Rhodez.
M. le baron de Schauenburg commence la lecture du mémoire de M. Thil-
loy, sur Herbitzheim.
La séance est levée à 1 heure.
— 42 —
Séance du Comité du \'' juiu 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Eissen, Guerber, Ileitz, Klotz, Levrault, Matuszinsky,
Morin , Petit-Gérard, baron de Schauenburg-, Schirr, Straub.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Le procès - verbal de l'assemblée générale de Golmar est lu et approuvé.
Le secrétaire dépose :
ISotes sur les débris antiques recueillis en 1855 à Kustendje (Dobrudja).
Extrait des Mémoires de l'Académie impériale de Metz (1857-1858);
Numismatique lorraine. Tomes XllI et XIV;
Notes sur des monnaies austrasiennes inédites, par Ch. G. Robert;
Considérations sur la monnaie à l'éfoque romane et description de
quelques triens mérovingiens ;
Jahrbücher für die Landeskunde der Herzogthümer Schleswig -Holstein
und Lauenburg, herausgegeben von der schlesiuig-liolstein-lauenburg-
schen Gesellschaft für vaterländische Geschichte , redigirt von Tli. Lehmann
und IL Handelmann. Band VI. Heft 1-3;
Archive für Schiveizer- Geschichte , herausgegeben auf Veranstaltung
der allgemeinen geschichtsforschenden Gesellschaft der Schweiz. Band XII
und XIII;
Numismatique de Cambrai , par G. Robert , membre correspondant de
la Société des antiquaires de France, etc.;
Recherches sur les monnaies et les jetons des maîtres - échevins et
description de jetons divers , par G. Robert.
Les ouvrages de M. Robert sont un hommage de l'auteur , récemment
reçu membre honoraire de la Société.
MM. Mœhler, notaire à Ammerschwyhr, présenté par M. Frantz, de
Golmar; Butsch, meunier à Baldersheim, présenté par M. Ingold , de
Gernay , et Hartmann, architecte à Golmar, présenté par M. Ringeisen,
sont proclamés membres de la Société, pour prendre rang à partir du
r-" janvier 18G3.
Le président annonce avoir écrit les lettres suivantes :
A M. le Préfet du Haut-Rhin ;
A M. le Maire d'Ammerschwyhr ;
A. M. Frantz, chef de division à la préfecture du Haut-Rhin ;
— 43 —
A M. J. Thilloy , substitut du procureur général à la Cour impériale de
Metz, pour lui annoncer que son mémoire sera publié dans le Bulletin de
la Société ;
AM. le professeur Ilidber à Berne, accusé de réception d'un volume
de la Société historique de Berne ;
A M. le Préfet du Haut -Rhin, à M. Véron- Réville, à M. l'ingénieur en
chef Coumes, à M. le Conservateur des forêts, pour les prier de se charger
de la distribution, aux divers agents de leurs administrations, de la mono-
graphie de M. de Morlet sur les tumull de Brumath;
A M. Ingold, au sujet de l'Engelbourg et d'une statuette de Vénus, mise
en vente à Mulhouse, et de photographies à prendre de statues du Christ
à Pfastatt et de saints à Cernay ;
A M. le Préfet du Bas-Rhin , relativement à des bracelets trouvés à Ros-
heim et qui sont à réclamer à Schlestadt, auprès de l'un des agents voyers.
Le président procède au scrutin pour compléter le comité.
MM. Saum, inspecteur de la librairie étrangère, et Siefïer, curé à Weyers-
heim, ayant obtenu la majorité absolue des voix, sont proclamés membres
du comité, sauf ratification de l'assemblée générale.
M. Levrault donne lecture de son rapport sur le mémoire de M. Krämer,
curé à Niederhaslach, sur le château de Girbaden.
Le comité vote des remercîments à M. Krämer et le dépôt de son mé-
moire aux archives.
M. Levrault dépose des objets antiques découverts à Obernai pendant
les travaux du chemin de fer et offerts par M. Gascoin, commissaire de
police. C'est un flacon et une soucoupe en verre, et un bracelet en bronze,
selon toute apparence d'origine romaine.
Le président communique la lettre de remercîment de M. Robert, pour
sa nomination de membre honoraire, et une lettre de M. Ingold de Cernay,
annonçant la découverte de six statues en pierre d'une taille colossale, qui
ornaient le pourtour intérieur de l'église de Cernay.
Le même membre demande l'autorisation de faire photographier la
statue du Christ de Pfastatt; — accordé. Il annonce la vente prochaine, à
Mulhouse , d'une statuette en marbre de Vénus , provenant des ruines de
Mandeure; il pense que la Société devrait en faire Tacquisition. Le comité
ne croit pas pouvoir prendre de décision à ce sujet avant d'avoir des ren-
seignements plus précis.
Le président donne lecture du reste du mémoire de M. Thilloy sur
Herbitzheim, ainsi que d'une note de M. Sieffer sur les ruines d'une villa
romaine à Oberbronn.
— u —
M. le baron de Schauenburg lil la note suivante sur un camp romain
présumé.
« L'accident de terrain qui a été signalé au comité par M. Schmidt-Ba-
tiston, comme pouvant être un camp romain, se trouve à la lisière orien-
tale de la forêt de Haguenau, en face et à une petite demi-lieue du village
de Leutenheim, dans le canton forestier dit Klostenvald, dénomination qui
semblerait indiquer une ancienne dépendance de l'abbaye de Kœnigsbruck.
« Le monticule lui-même porte le nom de Hcidenberg, et pres(|ue à l'ex-
piration de sa plus grande pente coule, à l'est, le ruisseau, ou petite rivière,
appelé Eberbach.
« Ce monticule est la seule éminence qui surgisse d'une surface plane
très-étendue, à peu près comme dans la plaine de Laon le plateau qui
porte la ville.
« C'est probablement à cette singularité , à son voisinage de la voie
romaine dont on recouvre des vestiges, s'élendant à l'ouest entre Souffïen-
heim et Kœnigsbruck, à sa situation évidemment favorable comme point
militaire d'observation et aux particularités de ses formes, qu'il faut attribuer
la supposition qu'il aurait été élevé de main d'homme et aurait été un camp
romain.
« Autant qu'il a été possible d'en juger par des mesures prises au pas
et par des observations, rendues très-difficiles et, par conséquent, très-
incertaines à raison de l'épaisseur de la végétation forestière, le périmètre
de sa base, de forme ovalaire, déprimée à son grand côté ouest, embrasse
une surface d'environ trois hectares.
« Son point culminant, qui porte le nom de Schlœssel et ne s'élève
guère qu'à une trentaine de mètres au-dessus du niveau général de la
plaine, est un mamelon arrondi, dont le plateau supérieur a environ
2,000 mètres de surface , à l'extrémité nord-ouest duquel il est situé.
« Le terre-plein, qui domine la plaine, tantôt de 15, tantôt de 20 et de
25 mètres, est entouré d'un ravin présentant l'aspect d'un grand fossé et
est coupé vers la saillie sud-ouest par une sorte de fossé intérieur.
«A deux des angles saillants, dont cinq se dessinent encore d'une ma-
nière assez sensible, on pourrait, avec un certain effort d'imagination ,
reconnaître un supplément de défense.
« Le ravin principal forme un fossé continu, qui entoure l'ensemble des
terre-pleins ainsi que le mamelon, dit Schlœssel, qui n'a de ravin ou de
fossé propre que du côté du grand terre-plein et qui , à raison de sa sur-
élévation et de ses dimensions restreintes, pourrait avoir fait à la fois
l'office de réduit et de vigie.
— 45 —
« Evidemment les espaces renfermés dans les profils sont de trop petite
étendue pour que cet accident de terrain ait jamais pu jouer un rôle de
camp retranché de quelque importance; mais sa forme, son étendue, sa
situation , sa proximité d'une voie romaine reconnue , permettent de penser
et de soutenir, qu'il a pu et dû jouer celui d'un poste d'observation,
occupé dans des circonstances données.
« Comme poste d'observation , il n'est guère possible de reconnaître dans
\e Heidenberg et le Sddossherg, qui le domine, que les vestiges, très-
bien conservés, d'un ouvrage en terre, formé en régularisant les accidents
naturels du terrain, pour leur donner la forme et le profil d'un retranchement.
«L'absence de tout vestige de construction en matériaux solides et la
nature de la végétation forestière corroborent cette opinion , qui ressort
déjà du peu d'espace des terre-pleins.
«En effet, les arbres, d'une stature gigantesque, sont d'une vigueur
peu ordinaire et de la plus belle venue, ce qui atteste sufïisamment que
leurs racines ne rencontrent ni roches , ni substructions qui pourraient
contrarier leur développement.
« S'il est difficile d'admettre qu'un remblai d'un cube aussi considérable
ait pu avoir été entièrement élevé de main d'homme, sans avoir laissé à
proximité aucune trace de l'excavation qu'il aurait fallu faire pour en ex-
traire l'étoffe; s'il est tout aussi difficile d'admettre qu'une aussi grande
masse de terre ait été amenée de loin; il serait pour le moins aussi difficile
de prétendre que la nature ayant produit, sur un point marqué par un
intérêt stratégique évident, une élévation qui ne demandait qu'un peu de
travail pour en faire un poste d'observation important et un retranche-
ment facile à défendre , l'époque romaine ou le moyen âge n'aurait pas
perfectionné l'ébauche de la nature.
«Dans le même canton forestier, à 2,000 mètres à peu près au nord
du Heidenberg, existe, il est vrai, un étang, qui figure sur la carte de
l'état-major, sur laquelle on ne découvre aucune indication dudit Heiden-
berg; mais cet étang dont la surface est plus que triple que celle du mon-
ticule , ne semble pas être une excavation artificielle et aurait fourni trois
fois plus de matériaux qu'il n'en fallait.
«Quel intérêt, d'ailleurs, auraient pu avoir les constructeurs du retran-
chement, à chercher de la terre, à une si grande distance et dans un
bas-fond, où ils auraient rencontré l'eau presque à fleur de sol, quand ils
l'avaient sur place, à la seule condition, peut-être, de donner un peu plus
de largeur et de profondeur, en même temps que plus de force, au retran-
chement.
— 40 —
« Toutes les données d'observation se réunissent donc pour faire ad-
mettre, non pas qu'il y ait eu au Heidenberg un camp romain, un grand
établissement militaire avec des constructions en matériaux solides , mais
bien qu'un accident naturel de terrain, existant sur un point favorable, a
été utilisé pour en faire un poste d'observation, un retranchement, dont
les profils sont encore assez bien dessinés aujourd'hui pour témoigner de
la destination à laquelle il a été approprié à une époque plus ou moins
reculée. »
M. l'abbé Straub lit une note étendue sur l'église de Walbourg, dont
l'insertion au Bulletin de la Société est votée, ainsi que la reproduction
de quelques signes de tailleurs de pierre et d'une date, et celle du reli-
quaire réduit au quart ou au cinquième.
Le comité vote 400 fr. pour replacer le tabernacle de Walbourg à
l'église et y faire les restaurations les plus urgentes.
La séance est levée à 1 heure.
Séance extraordinaire du Comité du VS juin 1861
Présidence de M. SPACH.
Présents : MM. Eissen , Jung, baron de Schauenburg, Straub.
Le secrétaire donne lecture des procès-verbaux de la séance extraordi-
naire du 18 mai et de la séance ordinaire du 1*^'" juin, qui sont adoptés.
M. le président annonce que M. Paul Ristelhueber a fait don à la Société
d'un opuscule intitulé : Liber vagatorum. — Remercîments votés.
Le secrétaire dépose sur le bureau :
Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit, X. Jahrgang, n*' 4;
Neujahrsgabe den Mitgliedern des Vereins für nassauische Alterthums-
kunde und Geschichtsforschung in Wiesbaden. Jan. 1803;
Mittheilung an die Mitglieder des Vereins für nassauische Alterthums-
kunde und Geschichtsforschung in V\^iesbaden , ausgegeben im Januar
i863 ;
Revue des Sociétés savantes des départements, 3*^ série, t. I. Avril 1803.
Le président annonce que M. Goste propose d'admettre comme membres
de la Société M. Keller, pasteur à Muttersholz, et M. Hirt, son vicaire. —
Adopté.
— 47 —
Il annonce de plus qu'il a écrit à M. Krämer, curé à Niederhasiach,
pour le remercier de sa monographie historique, descriptive, topogra-
phique et légendaire du château de Girbaden, et pour le prier de vouloir
bien continuer sa collaboration , en s'appliquant de préférence à des sujets
qui n'ont pas encore été traités dans le Bulletin ;
A M. Michel Saglio, maire à Walbourg, pour le remercier de l'accueil
fait à la commission delà Société, chargée d'examiner les peintures mu-
rales du chœur de l'église de son endroit, et pour le prier de réaliser ses
généreuses intentions au sujet de la restauration de ces peintures;
A M. Gascoin, commissaire de police à Obernai, pour le remercier du
don des objets antiques trouvés pendant les travaux du chemin de fer;
A MM. Saum, chef de bureau à la Préfecture, et Sieffer, curé à Weyers-
heim, pour leur annoncer leur nomination provisoire comme membres
du comité.
Il communique une lettre de M. Zimberlin, curé à Biederthal, contenant
des documents concernant le château de Landskron.
M. le baron de Schauenburg lit une note au sujet d'une pierre sculptée,
trouvée dans la maison n° 10 de la rue Mercière.
Le comité vote des remercîments à M. Kuntz , propriétaire de la susdite
maison et l'insertion de la note au Bulletin.
A cette occasion M. le professeur Jung rappelle que la maison d'habita-
tion, portant la plus ancienne date à Strasbourg, est située rue des Bou-
chers n° 27. Le rez-de-chaussée a une porte d'entrée ogivale en accolade;
l'ogive porte l'inscription suivante sculptée en relief:
ts. liomns. ricl)tr. nûcupûtus- biitscl)munn. miles- onno- bmi- mccccroij- o. ibos- ûngusti
Le rez-de-chaussée pourrait être de celte époque; les étages supérieurs
sont du commencement du dix-septième siècle, car les garnitures de bois
sculptées des croisées portent le millésime 1607. 11 ajoute que pourtant,
d'après différents indices, la pierre qui porte l'inscription pourrait être une
pierre rapportée, utilisée, ou conservée en cet endroit. Au sommet de
l'ogive, entre les mots miles et anno, existe un petit écusson effacé.
M. Straub annonce qu'on songe à Altorf à faire restaurer les peintures
murales de l'église, qui ne peuvent pas rester dans l'état actuel, parce
que, telles qu'elles sont, elles déparent l'intérieur de l'édifice. Si on
reconnaît l'impossibilité de les restaurer, il vaudrait mieux les couvrir
d'un badigeon.
M. le professeur Jung lit une note sur des médailles trouvées à Ottrott
et communiquée par M. le baron Léon de Bussierre :
— 48 —
Paquet A. Onze médailles en argent. Un évêque, donnant la bénédiction ;
sur le revers, un ange, portant une croix double. Il est impossible de
reconnaître des lettres sur le bord.
i. 2. 3. 4. La crosse épiscopale ou abbatiale est sur le dos de l'évêque.
5. 6. Une croix sur le dos de l'évêque.
Ces médailles ressemblent au n° 289 de l'ouvrage de M. de Berstell,
qui dit que probablement elles appartiennent à l'Alsace.
7. 8. Un évêque, donnant la bénédiction; devant l'évêque, une étoile.
Une étoile se trouve sur la médaille n" 300 de l'ouvrage cité.
Les monnaies des abbayes de Saint - Maximien à Trêves ont des étoiles
semblables.
9. 10. H. Abbé ou évêque, portant une croix , sur le dos un sceptre.
Paquet B. Huit médailles. Saint qui prie. BERTRANN — (?); revers:
main qui bénit: NE TENSIS'.
Paquet G. Une médaille, tour au-dessus d'un mur crénelé. Deux mé-
dailles indéchiffrables.
Paquet D. Six médailles. Abbé donnant la bénédiction. Grande tour sur
un mur crénelé.
La connaissance des médailles frappées par les évêques et les abbayes
en Allemagne est encore très-incomplète, et chaque découverte en produit
un certain nombre que les numismates ne savent où classer.
M. Ringeisen fait un rapport verbal sur sa tournée aux châteaux d'Eguis-
heim , Hoh-Landsperg et Plixbourg.
La séance est levée à 1 heure.
— 49 —
Séance du Comité du 6 juillet 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents : MM. Bœrsch, Eissen, Heitz, baron Matthieu de Faviers, Morin,
colonel de Morlet, Nicklès, Pelit-Gérard, Ringeisen, Saum, baron de Schauen-
burg, Siffer.
Le secrétaire dépose : Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit, zehnter
Jahrgang i863, n° 5, Mai;
Annales de l'Association philomatique vogéso-rhénane, par le professeur
Kirschleger; l'"^ livraison, i'"'^ série;
Sabourin de Nanton, le général Barbanègre au blocus d'Huningue;
Revue archéologique. Cartulaire de l'abbaye de Redon en Bretagne,
tirage à part;
Revue des sociétés savantes des départements , 3^ série, t. F"";
Bidletin de la Société des antiquaires de Picardie, 1863, n° i.
Il donne ensuite lecture du procès-verbal de la dernière séance, lequel
donne lieu aux observations suivantes :
M. le baron de Schauenburg. Le comité a bien voulu me confier la
mission, de concert avec M. l'abbé Straub, de nous rendre à Altorf pour l'exa-
men des restaurations de peintures murales qui y ont été exécutées. Cette
mission n'a pu être remplie, vu que nous avons été devancés, sans doute
par suite d'un malentendu, et que l'on a continué, sans attendre notre avis,
à dénaturer ces peintures. D'après ce qui m'a été rapporté, ces travaux ne
sauraient être approuvés ni au point de vue archéologique, ni au point de
vue artistique. Je serais d'avis d'en informer M. le Préfet, en le priant d'in-
tervenir pour qu'un travail aussi peu justifiable ne se continue pas.
Quelques membres proposent d'en écrire d'abord à M. le maire d'Altorf,
ou bien à M. le grand-vicaire Schirr, vice-président.
M. le président se charge de l'en entretenir verbalement.
Le comité adopte cet avis.
Après cette discussion, le procès-verbal est adopté.
M. Véron-Réville propose comme membre, à partir de 1864, M. Mat-
thieu Saint-Laurent, notaire à Colmar,
Et M. Heitz, M. Brandhof er, ancien négociant à Strasbourg, qui demande
à faire partie de la Société à partir du T"" janvier 1863.
Admis.
n* Sjérie. — T. II. — (P.-V.) 4
- 50 -
Le président annonce avoir écrit à MM. Kunlz, Zimberlin, Malhyss,
inspecteur voyer à Sclilestadt, Trouillal, à Purentruy, Véi'on-Réville, Ber-
nard, à Paris, et Merck.
11 lit ensuite une lettre adressée à M. le Préfet par M. de Ring, qui de-
mande l'autorisation de faire des fouilles. Le conn'té émet l'avis d'être re-
présenté pendant cette opération.
Puis il communique des [lièces de comptabilité des maisons Simon et
Silbermann, qui sont approuvées.
Le colonel de Morlet appelle l'attention du comité sur la chapelle du
Haut-Barr, pour laquelle des fonds avaient été votés. Il résulte de son rap-
port que la partie historiquement et archéologiquement la plus intéres-
sante n'exige aucune dépense, tandis que la partie la plus compromise,
de construction plus récente, et n'offrant que fort peu d'intérêt, exigerait
une dépense assez considérable pour être convenablement restaurée.
D'après ces motifs il propose de renoncer à ce travail. Le comité adopte
cet avis et annule le crédit de 150 fr. qui avait été alloué.
M. de Morlet dépose ensuite une agrafe mérovingienne (fibule), des
colliers, des lames d'épée franques, trouvés dans des tombeaux à Odratz-
heim, par les soins de M. Kast, conducteur des travaux du chemin de fer,
et lit la note suivante sur cette trouvaille :
«Une intéressante découverte vient d'avoir lieu dans la banlieue d'Odralz-
heim (canton de Wasselonne).
«M. Kast, agent-voyer conducteur des travaux du chemin de fer deMols-
heim à Wasselonne, en faisant exécuter des déblais pour extraire du bal-
last, a mis à jour plusieurs tombeaux formés de dalles posées de champ et
recouverts par des pierres plates. Leur forme est celle d'un trapèze de
1'",90 de longueur sur 0'",C0 de largeur à la tête, et 0'",45 aux pieds. Les
squelettes placés horizontalement sur le sol au fond de la tombe, étaient
toujours orientés vers l'est. On a trouvé près d'eux les objets qui se ren-
contrent habituellement dans les sépultures franques, savoir: des sabres
en fer à un tranchant (scramasaxes), des couteaux et des fers de lance du
même métal, des grains de pâte émaillée, percés d'un trou, quelques dé-
bris de bronze et trois petites monnaies en bronze également percées
d'un trou\ — Une seule libule a été découverte, elle est en argent, d'un
travail analogue à celui de la belle fdjule d'or de Gerstheim que j'ai mise
sous vos yeux à la séance du 4 mai dernier.
1. Deux de ces monnaies, quoique très-frustes, ont été reconnues par notre collègue
M. Saum, pour être l'une de Gonstantiü, l'autre de Valenlinien.
BIJOUX TROUVÉS EN I8()5 DANS DES SÉPULTURES ANCIENNES
à ODRATZHEIM (canlon de Wasselonne) el à GERSTIIEIM (cniilon do lîeiifeld)
(CRANDEUR D'EXÉCUTION).
Fibule en argent (Odratzheini).
Fibule en or (Gerstlieim)
Croix en or, épaisseur 0™, 00025
(Odratzheim).
Bulla en cuivre doré
(Geistbeim).
Pâtes émaillées (Gerstheim et Odratzheim).
flÉ
^^^t^
%
Voir les procès-verbaux des séances du Comité du 4 mai et du 6 juillet 1803.
Sliiishoiii j4 , ly|inKia|iliic ili' I! Sillicinianii
— 51 —
«La fibule d'Odratzheim a la forme d'un carré de 0 centimètres de côté,
dont le contour est découpé en buit festons alternativement courbes et an-
gulaires; au centre s'élève une demi-spbère de 16 millimètres de bauleur,
d'où partent buit rayons qui partagent la surface en buit secteurs, au mi-
lieu desquelles sont encbàssées des pierres bleues et rouges. — Des pierres
semblables, mais de plus petite dimension, forment ces rayons, et entou-
rent la demi-sphère centrale d'un cercle colorié. — Toute la surface de la
plaque d'argent est couverte de filigranes de même métal, délicatement
tressés et formant des dessins réguliers. — Au-dessous de cette plaque
se trouve une coucbe de masiic blanc de 10 millimètres d'épaisseur, repo-
sant sur une plaque de cuivre rouge; les deux plaques, qui sont l'une et
l'autre d'une épaisseur d'un millimètre à peine, sont réunies par des clous
rivés en cuivre traversant le mastic; un de ces clous aboutit au sommet
de la demi-spbère centrale et relie solidement tout le système. Le mastic
est formé d'une terre alumineuse, à laquelle est mêlée une substance
grasse organique. — Une des pierres bleues s'étant détachée, on a pu
l'analyser et on a reconnu que c'était un verre à base de soude coloré au
cobalt. (Cette analyse a été faite par un habile chimiste, M. Kopp.)
«Des fouilles toutes récentes viennent de faire apparaître , parmi les
ossements, une croix formée par une mince lame d'or; ses quatre branches,
d'égale longueur, sont percées de trous qui annoncent qu'elle a dû être
cousue sur les vêtements du mort.
«Les tombeaux longeaient un chemin rural dit Wœhland, qui se dirige
vers Molsheim.
«Cette découverte plus complète que celle de Gerstheim, puisque j'ai pu
constater la forme et l'orientation des tombeaux, se rapporte sans aucun
doute à l'époque franque, et la fibule d'Odratzheim, comme celle de Gerst-
heim, paraît dater du quatrième ou cinquième siècle.
«Nous retrouvons dans les sépultures d'Odratzheim tous les caractères
de celles de Lorentzen, découvertes en 1861 par M. le pasteur Ringel.
Toutefois on remarque dans les premières la forme du trapèze, c'est-à-
dire la diminution de largeur de la tombe vers les pieds, qui annonce une
date moins ancienne que celle des tombeaux rectangulaires de Lorentzen,
dont la construction est d'ailleurs plus grossière.
«On peut juger d'après cet exposé combien il serait important, dans l'in-
térêt de l'histoire de l'Alsace pendant la période franque, d'effectuer sur
notre sol des recherches multipliées pour obtenir la carte complète de ces
sépultures si bien caractéiisées.Déjà trois jalons sont fixés; le premier, près
de la Sarre à Lorentzen; le deuxième, sur le Khin à Gerstheim ; et le Iroi-
— 52 -
sième, inlermédiaire, à Odratzheim, près de Kirchheim et de Marlenheim,
lieux célèbres en Alsace par la résidence des rois d'Austrasie.
«M.Kast m'a prié d'offrir au comité la belle fibule d'argent que je viens de
décrire ainsi que les sabres, couteaux et pâtes émaillées, recueiUis par ses
soins dans ces tombeaux. Grâce à ce don, la Société possède aujourd'hui un
nouveau spécimen de l'art de la bijouterie à l'époque franque, qui ira
prendre place à côté des bijoux de Lorentzen et de Gerstheim dans la
vitrine qui vient d'être placée, par les soins de M. Klotz, dans la salle du
rez-de-chaussée de la Bibliothèque, que notre collègue, M. Jung, a bien
voulu mettre à la disposition du comité.
«M. Kast, qui avait déjà donné à la Société de précieux renseignements
sur des sépultures d'incinération, découvertes par lui dans la vallée du
Cronthal, vient ainsi d'acquérir de nouveaux droits aux récompenses
honorifiques que la Société distribue lors de ses assemblées générales. »
M. Bœrsch informe le comité de la découverte d'anciens pilotis sur la
place de l'Hôpital civil, mis à nu pendant les fouilles faites pour asseoir les
fondations de la Faculté de médecine. 11 propose de demander une note
sur ces découvertes à M. l'architecte de la vihe.
M. Nicklès demande si le comité entend faire l'acquisition de toutes les
médailles antiques qui seraient trouvées; M. le président répond que jus-
qu'ici le comité ne s'est point engagé dans cette voie.
M. le colonel de Morlet pense qu'il n'en serait pas moins fort intéressant
d'acquérir toutes les médailles trouvées dans les localités qui ont une no-
toriété historique, surtout si on peut obtenir ces médailles pour leur va-
leur intrinsèque.
M. Saum ajoute qu'il est utile que le public sache que la Société achète,
afin que celle-ci ne reçoive pas seulement ce dont personne ne veut
plus.
Le comité décide que l'on achètera en ce genre tout ce qui peut offrir
de l'intérêt.
M. Nicklès dépose ensuite un fragment de poterie romaine, marqué
VICTOR. F., un autre marqué BELATVLLVS. F. et des clefs en fer, trouvés
sur l'emplacement du château de Schwanau, à Sand, etc., et communique
deux dessins de têtes trouvées à Ehl et à Benfeld. L'époque à assigner à ces
deux têtes est difficile à déterminer.
Le président dépose une petite carte des environs d'Obernai et de Ros-
heim, et deux bracelets trouvés pendant les travaux du chemin de fer, le
tout donné par M. Mathyss, inspecteur voyer. — Remercîments votés à
M. Mathyss.
— Do-
li communique un arrêté de M. le Préfet auturisaiit M. Weissacker, no-
taire, à faire des fouilles dans la forêt communale de Wœrth-sur-Sauer.
Le comité prie le président d'intervenir ofTiciellement auprès de M. le
Préfet pour que la Société soit représentée pendant ces opérations.
M. Morin déclare qu'il est prêt à se charger de cette mission pour celte
fois.
M. Sifîer lit deux notes sur deux villas romaines aux environs d'Ober-
bronn. — Le comité vote l'insertion de ces notes au Bulletin.
M. Saum rend compte d'une excursion dans la vallée de la Bruche au
Ringelberg- qui renferme trois monuments d'origines diverses : un château
féodal dont la base paraît celtique ; une espèce de bastion en terre, nommé
la Schantz, qui paraît d'origine suédoise, et une grande enceinte en pierres
entourée de fossés, qui semble un camp romain. En tous ces endroits on
trouverait sans doute des objets d'antiquités , et, puisqu'on y exécute en
ce moment des coupes, il conviendrait peut-être de prendre quelques me-
sures conservatrices.
Le président écrira en ce sens à M. le conservateur des forêts.
M. le baron de Schauenburg dépose des débris trouvés dans les fouilles
faites derrière la chapelle de la Toussaint, débris paraissant avoir appartenu
à une frise sculptée. M. de Schauenburg pense qu'ils proviennent de l'an-
cien couvent de la Toussaint.
Le président annonce que M. Véron-Piéville demande une gratification
pour le concierge de la Préfecture de Colmar, chargé de disposer la salle
des séances de l'assemblée générale du Haut-Rhin.
Le comité vote la somme de 30 fr.
Le président communique une note de M. Müller sur un écusson sculpté
trouvé à Benfeld.
Quelques membres engagent M. Nicklès à chercher un endroit plus con-
venable, à Benfeld, pour la conservation de cet écusson. M. Nicklès répond
qu'il ne s'en trouve pas.
M. Bœrsch pense que, dans ce cas, et puisque l'écusson provient d'un
évêque de Strasbourg, cet objet devrait être transporté au musée de la
Société.
M. Ringeisen répond que le magasin de tabacs, où cet écusson se trouve
provisoirement conservé par son incrustation dans le mur des nouvelles
constructions, a été élevé sur l'emplacement de l'ancien château épiscopal,
et qu'au fond il ne pourrait être mieux placé, pourvu que l'on eût des ga-
ranties pour sa conservation.
Le président met aux voix la question de savoir si la pièce doit rester à
— 54 —
Benfeld, ou bien s'il faut prendre des mesures pour la faire transporter à
Strasbourg.
Le comité décide qu'elle restera dans la localité actuelle, et prie le pré-
sident de recommander à qui de droit la conservation de la pièce.
M. Riiigeisen rend compte des déblais exécutés aux châteaux d'Eguis-
heim, et communique la composition de la commission qui préside à ces
travaux. Ce sont: MM. Véron-Ré ville, îluot, conseillers; Gérard, avocat;
Liblin-Ortlieb,, architecte; Schœllbaum , ingénieur; Feltz, Ringeisen,
M. Rudler, maire d'Eguisheim.
- 55 —
SOCIÉTÉ
POUR LA
CONSERVATION DES MONUMENTS HISTORIQIÎES
D'ALSACE.
Fin novembre 1863.
COMPOSITION ACTUELLE DU COMITE D'ADMINISTRATION.
MM. MiGNERET, préfet du Bas-Rhin, fondateur de la Société, premier président
honoraire.
ÜDEM, préfet du Haut-Rhin, second président honoraire.
Bureau.
MM. Spacii (Louis), archiviste de la Préfecture, correspondant du Ministère de
l'instruction publique pour les travaux historiques, président.
Schirr, vicaire général, vice-président.
EissEN, docteur en médecine, secrétaire.
Klotz, architecte de l'œuvre Notre-Dame, trésorier.
Heitz, imprimeur-libraire, archiviste.
Membres.
MM. ScHAUEXBURG (barou de), membre du Conseil général.
MoRLET (de), colonel du génie en retraite.
Straub (abbé), professeur au petit Séminaire.
Bœrsch (Charles) , membre du Conseil général.
Petit-Gérard (Baptiste), peintre sur verre.
Grass, artiste-statuaire.
Guerber, curé de Saint-George à Haguenau.
MoRiN, architecte du département.
Levrault (Louis), percepteur à Obernai, correspondant du Ministère de
l'instruction publique.
Oppermann, directeur de l'Ecole de pharmacie à Stiasbourg.
Ringeisen, architecte de l'arrondissement de Schlesladt.
— 56 —
MM. Faviers (baron Matthieu de), propriétaire à Kintzheim.
Matuszinski, arciiitecle de l'arrondissement de Strasbourg.
Fürst, architecte de l'arrondissement de Saverne, membre adjoint.
CoNRATH, architecte de la ville de Strasbourg, membre adjoint.
Guerre, ingénieur en chef à Strasbourg.
CouMES, ingénieur en chef des travaux du Rhin à Strasbourg.
Saum, sous-chef de division à la Préfecture.
Siffer, curé à Weyersheim.
Sous-Comité du Haut-Rhin.
MM. Véron-Réville, conseiller à la cour impériale de Colmar, vice-président.
Hamberger, président de chambre à la cour impériale de Colmar.
Chauffour (Ignace), avocat à la cour impériale de Colmar.
Gérard, avocat à la cour impériale de Colmar.
LiBLiN, directeur de la Revue d'Alsace à Colmar.
Stœber (Auguste), professeur au collège de Mulhouse.
Brièle, archiviste du Haut-Rhin à Colmar.
Schlumberger-Hartmann (fils), fabricant à Guebwiller.
Frantz, chef de division à la préfecture du Haut-Rhin.
Meyer, curé à Colmar.
HuoT, conseiller à la cour impériale de Colmar.
LISTE DES MEMBRES PAR DÉPARTEMENTS, ARRONDISSEMENTS ET CANTONS.
DEPARTEMENT DU BAS-RHIN.
ARRONDISSEMENT DE SAVERNE.
Canton de Bouxwiller.
M. Schattenmann, membre du Conseil général à Bouxwiller.
Canton de Drulingen.
MM. Ringel, pasteur à Diemeringen.
Schmidt, agent voyer à Drulingen.
Canton de Hochfelden.
MM. CousTANS, piqueur au chemin de fer à Hochfelden.
May, curé à Hochfelden.
— 57 —
Ganton de Marmoutier.
M. Hüter, commissaire de police à Marmoutier.
Canton de la Petite-Pierre.
MM. Grünsfelder, médecin à Neuwiller.
TüRCKHEiM (A. de), garde général à Neuwiller.
Canton de Saar-Union.
MM. Erhard (Henri), géomètre-arpenteur à Harskirchen,
Flurer (Frédéric), maire à Saar-Union.
Kremer, conducteur des ponts et chaussées à Saar-Union.
MuLOTTE (Auguste), notaire, membre du Conseil général a Saar-Union.
Wehrung (Charles), propriétaire à Harskirchen.
Canton de Saverne.
MM. Arth, propriétaire à Saverne.
Fischer (Dagobert), à Saverne.
Fürst, architecte de l'arrondissement à Saverne.
Goldenberg (Alfred), fabricant au Zornhof (près Saverne).
Lecomte, pharmacien à Saverne.
Mertian, sous-préfet à Saverne.
Schauenburg (de, fds), juge.
ARRONDISSEMENT DE SCHLESTADT.
Canton de Barr.
MM. Deharbe, curé d'Andlau.
DiEMER, notaire honoraire à Barr.
Dietz, maire à Barr.
Frey, secrétaire de la mairie à Barr.
Girolt (Antoine), brigadier forestier à Barr.
Schmidt (Jean), propriétaire à Barr.
Taufflieb (Auguste), négociant à Barr.
Taufflieb, docteur en médecine à Barr.
Nebinger, maire à Heiligenstein.
Stahl, propriétaire à Heiligenstein.
Buhlmann, propriétaire à Nothhalten.
Cœhorn (baron de), député au Corps législatif, maire de Saint-Pierre.
Canton de Benfeld.
MM. Meyer, vétérinaire à Benfeld,
NiCKLÈs (Napoléon), pharmacien à Benfeld.
Siffert, directeur de la manufacture à Ehl (près Benfeld).
Stackler, propriétaire, membre du Conseil général à Benfeld.
— 58 —
MM. WoHLFAUTfï, juge (le paix à Denfeld,
VoLTZ, curé à Herbslieim.
Walcii, vicaire à Iliittenlieim.
Heimburger, propriétaire et géomètre à Kerlzield.
Reibel, notaire à Riiinau.
Albrecht, propriétaire de l'usine à Sand.
Barïhelmé (Adolphe), propriétaire à Sand.
Canton d'Erstein.
MM. Bancalis (Rodolphe de), propriétaire à Gerstheim.
Martin, curé à Nordhausen.
BuLACH (baron Zorn de), chambellan de S. M. l'Empereur, maire d'Ost-
hausen.
Canton de Marckolsheim.
MM. Strehlé ((ils), notaire à Marckolsheim.
Heckmann-Stintzy, notaire à Müttersholz.
Keller, ancien pasteur à Müttersholz.
Hirt, vicaire à Müttersholz.
Kastler (Jérémie), notaire à Sundhausen,
Canton d'Obernai.
MM. Blandin (César), notaire honoraire à Obernai.
Gyss (abbé), à Obernai.
Hervé, percepteur à Obernai.
Levrault (Louis), percepteur à Obernai.
Mohler (Adolphe, père), à Obernai.
Ortlieb, ancien curé de Sainte-Foi de Schlestadt, à Obernai.
Siebert, pharmacien à Obernai.
Wagner (Richard), à Obernai.
Reinach (baron de), membre du Conseil général, maire à Niedernai.
Canton de Rosheim.
MM. Dartein (Théodore de), propriétaire et maire à Ottrott.
Bigeault (Remi-Marc), percepteur à Rosheim.
Blumstein, à Rosheim.
Schmidt-Batiston (Emile), à Rosheim.
Canton de Schlestadt.
MM. Doverva, curé à Châtenois.
Faviers (baron Matthieu de) , propriétaire à Kintzheim.
CosTE, juge au tribunal civil de Schlestadt.
Drion, président du tribunal civil de Schlestadt.
Lacomble (de), receveur des finances à Schlestadt.
— 59 —
MM. PiiNGEiSEN, architecte de l'arrondissement à Schlestadt.
La bibliothèque de la ville de Schlestadt.
Vaux, avocat à Schlestadt.
ARRONDISSEMENT DE STRASBOURG.
Canton de Bischwiller.
M. Schmitt-Batiston, avocat, propriétaire à Reschwoog.
Canton de Brumath.
MM. ScHNŒRiNGER, docteur en médecine à Brumath.
Trautmann, membre du Conseil d'arrondissement à Brumath.
FoDÉRÉ (Raymond), secrétaire de la direction de l'asile de Stéphansfeld.
WiLLiEN (Henri), percepteur à Geudertheim.
SciiiFFERSTEiN (Antoine), propriétaire à Mommenheim.
ScHAUMANN, curé à Vendenheim.
Karm, ancien notaire à Weyersheim.
SiFFER, curé à Weyersheim.
Ulrich, curé à Hœrdt.
Canton de Geispolsheim.
MM. Carbiener (George), notaire à Geispolsheim.
Fuchs, propriétaire à Illkirch.
Bussierre (Frédéric de), ingénieur civil à Graffenstaden.
GoLDSCiiMiTT, médecin à l'usine de Graffenstaden.
Messmer, directeur de l'usine de Gralfenstaden.
Canton de Haguenau.
MM. Guerreu, curé de Saint-George à Haguenau.
Guerber (abbé), vicaire de Saint-George à Haguenau.
Harter (abbé), vicaire de Saint-George à Haguenau.
Kleinclaus, notaire à Haguenau.
Nessel, propriétaire à Haguenau.
Paganetto, membre du Conseil d'arrondissement à Haguenau.
Pfundt (abbé), vicaire de Saint-George à Haguenau.
Sciiouller (Eugène), fabricant au Geisselbronn, près Haguenau.
Schweissguth (Louis), à Haguenau.
Canton de Molsheim.
MM. AuDÉouu, maire à Avolsheim.
Bausinger, curé à Dachstein.
Bégel (de), ingénieur en chef à Liitzelhausen.
Krämer, curé à Niederhaslach.
Canton de Schiltigheim.
M. Greiner , pharmacien à Schiltigheim.
— 60 —
MM. RouDOLPHi, membre du Conseil général, maire de Scliilligheim.
Stahl ((ils), marchand de bois à SchiUigheim.
Cantons de Strasbourg.
Ville de Strasboin-g.
MM. Adam (abbé), vicaire à Saint-Pierre-le-Jeune.
Apprederis, aumônier de la colonie d'Oslwald.
Arnold, architecte.
AuBRY, doyen de la Faculté de droit.
Baltzer, professeur au Gymnase.
Barte de Sainte-Fare, conservateur des forêts.
Barth, propriétaire.
Bayer, architecte.
Berger-Levrault, imprimeur-libraire.
Bergmann (Frédéric-Guillaume), doyen de la Faculté des lettres.
Bernard (Joseph-Félix), receveur des hospices de Strasbourg.
Blanck, entrepreneur.
Bœckel (Charles), libraire.
Bœrsch (Charles), membre du Conseil général.
Bœsswillwald , négociant.
Brandhoffer (Jean-Fréderic), ancien négociant.
Braunwald, pasteur-président du consistoire de Saint-Thomas.
Bruch, doyen de la Faculté de théologie.
Brunet, commissaire central.
Buchmüller, marchand de bois.
Chastelain, propriétaire.
Conrath, architecte de la ville.
CouLAUX, député au Corps législatif, maire de Strasbourg.
CouMES, ingénieur en chef.
CozE (Léon), professeur à la Faculté de médecine.
Crépîn, professeur de dessin au Lycée.
CuNTz, négociant.
Dacheux (abbé), professeur au petit Séminaire.
Dartein (François-Félix de), propriétaire.
Debenesse, propriétaire.
Denecken (Antoine), peintre-décorateur.
DiEHL (Bernard), aubergiste.
DuRRiEU, receveur général des finances.
DuvAL-JouvE, inspecteur de l'Académie.
Ehrmann, doyen de la Faculté de médecine.
Ehrmann (Auguste), propriétaire.
Ehrmann (Maurice), adjoint au maire de Strasbourg.
- 61 —
MM. Ehrmann (Edmond) , ancien négociant.
Bissen, docteur en médecine.
Engelbacii, propriétaire, ancien conseiller de préfecture.
Fée, professeur à la Faculté de médecine.
FiNCK , professeur à la Faculté des sciences.
Frantz, avocat.
FuES (abbé), professeur au grand Séminaire.
Georges, inspecteur des forêts.
GiRARDOT, chef de division à la Préfecture.
Gœrner (Jules), architecte.
GoGUEL, officier de l'instruction publique.
Grass (Philippe), artiste-statuaire.
Guerre , ingénieur en chef.
Hecht (abbé), professeur â l'établissement de Saint-Arbogast.
Heiser, professeur de maintien.
Heitz, imprimeur-libraire.
Hemberger, aumônier de l'hospice civil.
Herrgott, docteur en médecine.
HiRTZ, professeur à la Faculté de médecine.
Holtzapfel, avocat.
HuDER, imprimeur, rédacteur en chef de V Alsacien.
HtJGELiN (Ferdinand), peintre sur verre.
Hugueny, professeur au Lycée.
JuNDT (Eugène), négociant.
Kablé, directeur du Phénix.
Kapps, aumônier à la Toussaint.
KiRSCHi.EGER, professcur à l'Ecole de pharmacie.
Klose, banquier, consul des Pays-Bas.
Klotz, architecte de l'œuvre Notre-Dame.
Kœtschel (abbé), professeur au collège libre de Saint-Arbogast.
Kratz, ancien maire de Strasbourg, membre du Conseil général et du Con-
seil municipal.
Küss, professeur à la Faculté de médecine.
Lauth (Charles), juge.
Lebel (baron), juge d'instruction.
Leblois, pasteur.
Lehr (Paul), propriétaire.
Lehr (Ernest), secrétaire général du directoire de la Confession d'Augsbourg.
Lelièvre, secrétaire du bureau de bienfaisance.
Lemaistre-Chabert, adjoint au maire de Strasbourg, propriétaire.
Lerbs (abbé), professeur au petit Séminaire.
Lereboullet, doyen de la Faculté des sciences.
— 02 —
MM. Lévy (Félix), marchand d'antiquités.
Lévy (Robert), archilecte.
LiciiTENFELDKR (Guillaume), mécanicien.
Linder, avocat.
M.EDER, président du Consistoire réformé.
M.EHN (Ferdinand), ferblantier.
Matuszfnski, arciiitecte de l'arrondissement de Strasbourg.
Mayer, bomme de lettres, agent du chemin de fer de l'Est pour la corres-
pondance avec l'étranger.
Merck, rentier.
MoRiN, architecte du département.
Morlet (de), colonel du génie en retraite.
MiJHL, docteur en médecine.
Müller, préposé en chef de l'octroi.
MtJLLER (Joseph), sculpteur.
MuRY (Joseph), professeur au petit Séminaire.
MuRY (Pantaléon), professeur au petit Séminaire.
Nartz (abbé), professeur au petit Séminaire.
Nœtinger (Alfred), avocat.
Nœtinger, notaire.
Oberlin, professeur à l'Ecole de pharmacie.
Oppermann, directeur de l'Ecole de pharmacie.
Perrin, architecte.
Petit-Gérard, peintre sur verre.
Pétiti (Eugène), architecte.
Prost, membre du Conseil général.
Rapp, vicaire général du diocèse.
Ratisbonne (Achille), président du Consistoire Israélite.
PiAU, professeur à la Faculté de droit.
Renouard de Russierre (baron A.), député au Corps législatif.
Reussner (Frédéric), professeur au Gymnase.
Riciiert, juge.
Ristelhueber (Paul), licencié es lettres.
Sarourin de Nanton, membre de la Société d'émulation des Vosges.
Saglio (Alphonse), ancien député.
Sainte-Suzanne (baron Ferdinand de).
Salomon, libraire.
Saum, inspecteur de la librairie étrangère.
ScHAUENBURG (barou de), membre du Conseil général.
M""' Sciieidecker.
MM. Schirr, vicaire général du diocèse.
Sciilagdenhaufen (Frédéric), professeur agrégé à l'École de pharmacie.
— G3 -
MM. ScHNÉEGANS, licencié es lettres, rédacteur du Courrier du Bas-Rhin.
Schnell (abbé), aumônier à Tinstitution de Glaubilz.
ScHWEBEL, professeur agrégé au Séminaire proteslanl.
Sengenwald (Jules), président de la Chambre de commerce.
Silbermann, imprimeur.
Simon, imprimeur-litbograplie.
Simonin, capitaine au âC de ligne.
Spach (Louis), archiviste du département.
Spach (Gustave), secrétaire en chef de la mairie de Strasbourg.
St.ehling, négociant.
Stœder, professeur à la Faculté de médecine.
Stoltz, professeur à la Faculté de médecine.
Stotz (Jean-Jacques), propriétaire.
Straub (abbé), professeur au petit Séminaire.
Teutsch (Charles), négociant.
Thiébaut, agent de change.
Thomas (Auguste), inspecteur des douanes.
Tourbes, professeur à la Faculté de médecine.
Uhrin (abbé), professeur au collège de Saint-Arbogast.
Weyer (André), architecte.
Winter (Charles), photographe.
WoLFF, avoué.
Wolff (abbé), professeur au petit Séminaire.
Zeysolff (Charles), notaire.
Zimmer, notaire.
ZoPF, négociant.
Canton de Truchtersheim.
M. Ohlmann, curé à Truchtersheim.
Canton de Wasselonne.
MM. Lallemanû, percepteur à Wasselonne.
North, membre du Conseil général, maire à Wasselonne.
ARRONDISSEMENT DE WISSEMBOURG.
Canton de Niederbronn.
MM. Dietrich (Eugène de), ancien député, à Niedcrbronn.
Kuhn, médecin-inspecteur de l'établissement thermal de Niedcrbronn.
Reichard, supérieur de la congrégation des filles du divin Rédempteur à
Niederbronn.
TüRCKHEiM (Rodolphe de), à Niederbronn.
Lehmann, curé-recteur h Roichshoflen.
— 64 —
Canton de Wissembourg.
MM. DuviviER, sous-préfet à Wissembourg.
Gœtz (abbé), vicaire à Wissembourg.
Ohleyer, professeur au collège de Wissembourg.
PuGNiÈRE, membre du Conseil général, maire à Wissembourg.
Schaffner (chanoine), curé à Wissembourg.
ScHŒLL (fils), substitut du procureur impérial à Wissembourg.
Stoffel, juge au tribunal de première instance à Wissembourg.
Wernert (abbé), vicaire à Wissembourg.
DÉPARTEMENT DU HAUT-RHIN.
ARRONDISSEMENT DE BELFORT.
Canton de Belfort.
M. PoiSAT, architecte à Belfort.
Canton de Cernay.
M"^ Andlau (baronne de), à Cernay.
M. Ingold, notaire à Cernay.
Canton de Massevaux.
M. BiAN, manufacturier à Sentheim.
Canton de Thann.
MM. Amrein (docteur), adjoint au maire à Thann.
Bulffer, peintre à Thann.
Chauffour (Victor), à Thann.
GscHwiND, notaire à Thann.
Kästner (Charles) , manufacturier à Thann.
Kult, entrepreneur des travaux à Thann.
Mercklin, greffier de la mairie de Thann.
MossMANN (Xavier), ancien archiviste, commis négociant à Thann.
Müller, ancien professeur, receveur municipal à Thann.
SiCK, négociant, adjoint au maire à Thann.
HuHN, curé à Vieux-Thann.
ARRONDISSEMENT DE COLMAR.
Canton de Colmar.
Ville de Colmar.
MM. Bartholdy (Charles), à Colmar.
BiAN, conseiller à la cour impériale.
Bonvalot, conseiller à la cour impériale.
— 65 —
MM. Brielle (Léon), archiviste du Haut-Riiin.
Brunck (Eusèbe), inspecteur des forêts.
BussiERRE (Paul de), receveur général.
Ghauffour (Ignace), avocat.
Cherrier, juge suppléant au tribunal de première instance.
Dillemann, conseiller à la cour impériale.
Dubois, président du tribunal de première instance.
Ehrhard, vicaire.
Ehrlen (Gustave), négociant.
Faudel, docteur en médecine.
Fleischhauer, négociant, juge au tribunal de commerce.
FoLTZ (Charles), limonadier.
Frantz (George), chef de division à la préfecture.
Gallimard, conseiller à la cour impériale.
Gérard, avocat.
Hamberger , président de chambre à la cour impériale.
Hartmann, architecte.
HuoT, conseiller à la cour impériale.
Huss, vicaire.
Junger, docteur en médecine.
KocH, avocat.
KoHLER (Alphonse), propriétaire,
Laurent-Athalin, propriétaire.
LiBLiN, directeur de la Revue d'Alsace.
Marquez, docteur en médecine.
Mathieu-Saint-Laurent , notaire.
Meyblum (WendeUn, abbé), aumônier de l'hôpital militaire.
Meyer, curé.
Meyer, conseiller î\ la cour impériale.
Neyremand, conseiller à la cour impériale.
Ostermeyer, avocat à la cour impériale.
Peyrimhof, maire de Colmar.
Reeb (Victor), architecte.
Reinhard (abbé), vicaire.
Rencker, notaire.
Rieff, premier président de la cour impériale.
Sandherr (Charles), avocat,
Schellbaum (Constant), architecte.
Schirmer, conseiller à la cour impériale.
Schmitt (-1. J.), directeur de la compagnie r Union.
Schultz, conseiller à la cour impériale.
Simottel, avocat à la cour impériale.
Il' SÉRIE. — T. II. — (l'.V.)
— 00 —
MM. Véron-Réville, conseiller à la cour impériale.
ViLMAiN (abbé), vicaire.
Werneh (abbé), professeur au collège libre.
WiMPFEN , docteur en médecine.
Winterer (abbé), vicaire.
Z.EPFEL (Edgard), conseiller de préfecture.
Canton de Guebwiller.
MM. Bary (Frédéric de), manufacturier à Guebwiller.
Bary (Albert de), manufacturier à Guebwiller.
BouRCART (Henri), manufacturier à Guebwiller.
Braun (abbé), ancien rédacteur du Volhsfreund h Guebwiller.
Brumpt (Charles), professeur de musique à Guebwiller.
Burkard, fabricant à Guebwiller.
Frey-Bourcart, manufacturier à Guebwiller.
Frey (Henri), fabricant à Guebwiller.
Jung, imprimeur îi Guebwiller.
Pépin, notaire à Guebwiller.
ScHLUMBERGER-DoLLFUs (Jean), à Guebwiller.
Schlumberger-Hartmann (fds), fabricant à Guebwiller.
Canton de Kaysersberg.
M. Mœiiler, maire et notaire à Ammerschwihr.
Canton de Münster.
MM. Hartmann (Alfred), manufacturier à Münster.
Hartmann (Frédéric), manufacturier à Münster.
Hartmann (Henri), manufacturier à Münster.
Hartmann (Jacques), manufacturier à Münster.
Canton de Neuf-Brisach.
MM. DuFAURE DE LA Prade, jugc de paix à Neuf-Brisacb.
Memminger, pharmacien à Neuf-Brisach.
Canton de la Poutroie.
M. Pernot, curé à Bonhomme.
Canton de Ribeauvillé.
M.M. Heitz (Henri), pasteur à Hunawihr.
Feltz (abbé), aumônier du pensionnat des sœurs de la Providence à Ri-
beauvillé.
Hœrter (abbé), professeur à Ribeauvillé.
JoRANSON (Alexandre), négociant à Ribeauvillé.
— 07 -
MM. Lanoih (Charles), rentier à Ribeauvillé.
Hosenstiel, archilecle h Ribeauvillé.
Saltzmann, maire à riibeauvillé,
Stahl (Louis-Désiré) , adjoint au maire à Ribeauvillé.
• Canton de Rouffach.
MM. Ganter, curé à Gueberschwibr.
Metzger, ancien principal du collège de Roullacli.
Stœckle, curé à Rouffach.
Canton de Sainte-Marie-aux-Mines.
MM. Baumgartner (Léon), fabricant à Sainte-Marie-aux-Mines.
Landmann (Léon), fabricant à Sainte-Marie-aux-Mines.
Lesslin (Adolphe), à Sainte-Marie-aux-Mines.
RiSLER, dessinateur à Sainte-Marie-aux-Mines.
Canton de Soultz.
MM. Noll, curé à Hartmansvviller.
Cacheux, curé à Isenheim.
Zeller, à la tuilerie d'OlIwiller près Hartmannswiller.
Heckeren (baron de), sénateur, a Soultz.
Knoll (Charles) , artiste-vétérinaire à Souilz.
M"* Waldner (comtesse de), à Soultz.
Canton de Wintzenheim.
M. WiRTH (abbé), vicaire à Eguisheim.
ARRONDISSEMENT DE MULHOUSE.
Canton de Ferrette.
MM. Zimrerlin , curé à Biederthal.
J^ger, curé à Fislis.
Canton de Habsheim.
MM. BuTSCii (Joseph), meunier à Baldersheim.
Stoffel, percepteur à Ilabsheim.
Reiniiart, pharmacien à Rixheim.
Ettlin (Jacques), propriétaire à Zimmersheim.
Canton de Hirsingeu.
M. Tallon, employé des contributions indirectes à Hirsingeu.
— 68 —
Canton de Huningue.
MM. Doyen (Alphonse), juge de paix à Huningue,
LiTZLER, curé à Liebentzwiller.
Canton de Landser.
M, Feurmann , curé à Schlierbach.
Canton de Mulhouse.
MM. BuRNAT (Emile), à Dornach.
DoLLFUs (Edouard), à Dornach.
DoLLFUs (Eugène), à Dornach.
Engel-Dollfus, manufacturier à Dornach.
Ville de Mulhouse.
MM. Bader, directeur de l'école professionnelle.
Chacre, architecte de la ville.
Chauffour, avocat.
DoLL (Charles), consul de Bade.
DoLLFUS (Gustave).
Dollfus-Galline (Charles).
Ehlinger, dessinateur.
Ehrsam, archiviste.
Grosjean (Emile) , manufacturier.
Hubert (abbé), vicaire.
.Tancigny (de), sous-préfet.
Kenck (Auguste), professeur au collège.
Kestner-Kœchlin, docteur en médecine.
Kœchlin (Alfred).
LiNDiNGER (Alfred), pharmacien.
Maine, inspecteur des douanes.
Meyblum (abbé) , vicaire.
Michel, instituteur de l'école communale.
MiEG (G.), négociant.
Paraf (ß.), négociant.
RiSLER (J. P.), imprimeur-libraire.
Saal (Louis), chimiste.
Sandherr, greffier du tribunal de commerce.
Sandherr , notaire honoraire.
ScHEiDECKER (Mathias), ingénieur mécanicien.
Sghlumberger (Amédée) , banquier.
ScHLUMBERGER (Eugèuc), manufacturier.
Schlumberger-Schlumberger (Alphonse), manufacturier.
Schœnhaupt (Louis), président de la société du dessin industriel.
Stein (Martin), fabricant de cordages.
- 69 —
MM. Stœber (Auguste), professeur au collège.
Thierry (Charles) fils, manufacturier,
Thierry (Emile).
Uhlmann, curé.
Wagner, architecte.
Weber-Blech (Emile).
Zetter-Graf, rédacteur du Samslagsblatt.
Zuber (Frédéric), manufacturier.
DÉPARTEMENTS HORS D'ALSACE.
MM. Schleiter (Eugène), juge de paix à Azai-le-Rideau (Indre-et-Loire).
Müllenheim (de), sous-préfet à Pithiviers (Loiret).
Metz-Noblat(A. de), membre de l'Académie de Stanislas a Nancy (Meurthe),
Pugnière, ingénieur des ponts et chaussées à Nancy.
Saladin (Emile) père, manufacturier à Bonsecours (Meurthe).
Saladin (Emile) fils, manufacturier à Bonsecours,
Saladin (Jules), manufacturier à Bonsecours.
Benoit, maire à Berthelming (Meurthe).
Ratisbonne (Edmond), receveur général du Morbihan à Vannes.
Thilloy, substitut du procureur général à la cour impériale de Metz
(Moselle).
Haigneré (abbé), archiviste de la ville de Boulogne (Pas-de-Calais).
Vallois, sous-préfet à Péronne (Somme).
Bardy, pharmacien à Saint-Dié (Vosges).
Golbéry (Philippe de), ancien magistrat à Saint-Dié.
Zetter, à Saint-Dié.
Vaulx (de), premier président de la cour impériale d'Alger.
Kling (Antoine), stationnaire du télégraphe à Gonstantine.
DÉPARTEMENT DE LA SEINE.
Ville de Paris.
MM. Bécourt (docteur).
Becquet, conservateur des forêts, membre du Conseil général dû Bas-Rhin.
M"« Begin (veuve).
MM. Blanchard , général de brigade.
Bussierre (baron Léon de), conseiller d'État.
DoLLFus (Charles).
Felmann, chef du bureau au Ministère de la guerre.
GosciiLER (abbé).
Goschler, chef de section aux archives de l'Empire.
Grün (Al.), chef de section aux archives de l'Empire.
— 70 —
MM. Hallez de Claparède (comte), membre du Conseil yéjiônil du B;is-Uliiii.
Heim, membre de Fliislitut.
HiMLY, professeur ii la Faculté des lettres.
HoFER, directeur de la Parisienne.
JoLiAT, directeur ij^énéral de la Compagnie d'assurances du Phénix.
Kastner, membre de l'Institut.
Keller (Emile).
Keller (abbé).
Lévy, médecin en chef au Val-de-Grâce.
MoRPAiN (Alphonse), docteur en médecine.
Oppermann (Louis-Charles), banquier.
M"'« PiCART.
MM. Ratisronne (Louis).
RoMiLLY (Félix de).
Schneider, archiviste aux archives de l'Empire.
jjmes Singer.
Érard, à Passy.
MM. Guibert, à Passy.
Scheffer, à Passy.
MEMBRES RÉSIDANT A L'ÉTRANGER.
MM. Klappenbach , ancien secrétaire de la mairie de Barr, à Buenos- Ayres
(Amérique).
LicHTLÉ, curé catholique à Christiania (Norvvége).
HÜCKEL, rentier à Stuttgart.
KuHLMANN (Emile), chancelier de la légation de France à Stuttgart.
Heinemann, à Offenbourg (Bade).
OcHS, à Frauenfeld (Suisse).
Ehrhardt (Charles), chef du dépôt du chemin de fer de Lyon à Genève, à
Genève.
^lEMBRIS HONORAIRES.
M^ R.ESS (André), évêquc de Strasbourg.
MM. Braun, président du directoire de la Confession d'Augsbourg.
Delcasso, recteur de l'Académie de Strasbourg.
Gerhardt (Edouard) , conseiller intime , membre de l'Académie des
sciences à Berlin.
WiDTMANN, président de la Société archéologique de Mayence.
MoNÉ, directeur des archives grand-ducales de Bade, à Carlsruhe.
Keller, président de la Société archéologique de Zurich.
LoNGPÉRiER (DE), mcmbrc de l'Institut à Paris.
MoRiN-l*ONs, bun(|uier à Lyon.
— TI-
MM. FoRCHiiAMMER, professeiir (Inrcliéologie à Kiel.
BuuNET DE Presle, iiiembro de rinstiluf à Paris.
Robert, directeur de l'administration au Ministère de la guerre à Paris.
Barthélémy (Anatole de), membre de la Société des antiquaires de France
à Paris.
Trouillat, ancien maire et bibliothécaire à Porentruy.
Lindenschmitt, conservateur du musée, et secrétaire de la Société archéo-
logique à Mayence.
MEMBRE CORRESPONDAIVT.
M. Mougenot, secrétaire de la Société archéologique de Nancy.
SOCIÉTÉS SAVANTES
AVEC LESQUELLES LA SOCIÉTÉ POUR LA CONSERVATION DES MONUMENTS HISTORIQUES
D'ALSACE SE TROUVE EN RAPPORT.
1. Société historique et archéologique de Darmstadl.
2. Bibliothèque publique de Stuttgart.
3. Société archéologique de Bade à Carlsruhe.
•4. Société d'histoire et d'archéologie rhénane à Mayence.
5. Société des antiquaires à Zurich.
6. Société historique et archéologique des quatre cantons forestiers à Lucerno.
7. Messager des sciences historiques de Belgique à Gand.
8. Institut archéologique liégeois à Liège.
U. Société des antiquaires à Amiens.
\0. Académie d'archéologie à Anvers.
11. Société d'histoire et d'archéologie de la Moselle à Metz.
4:2. Société impériale des antiquaires de France à Paris.
13. Musée germanique de Nuremberg.
14. Société d'émulation de Montbéliard.
15. Société d'émulation des Vosges à Épinal.
IG. Société archéologique de Maine-et-Loire à Angers.
17. Société des antiquaires de la Morinie à Saint-Omer.
18. Société d'histoire de la haute Bavière à Munich.
10. Société historique de Bàle.
20. Société académique d'archéologie de l'Oise à Beauvais.
— 72 —
:i[. Société d'histoire et crarchéologie de Cliàlon-sur-Saone.
22. Société historique de Kiel (Holstein).
23. Société d'archéologie de Lorraine à Nancy.
2i. Société dunkerquoise pour l'encouragemeni des sciences, des arts et des
lettres.
25. Société pour les recherches utiles à Trêves.
26. Société impériale de géographie à Vienne (Autriche).
27. Société archéologique éduenne à Autun.
28. Société archéologique à Bonn,
29. Société archéologique et d'histoire de Nassau à Wieshaden.
30. Société nivernaise des sciences, lettres et arts à Nevers.
31. Société d'histoire et d'archéologie à Genève.
32. Société jurassienne à Porentruy.
33. Commission historique du Nord à Lille.
34. Société historique de Styrie à Gratz.
35. Société historique générale de la Suisse h Berne.
CARTE I^DIQIA^T LES DÉCOIVEIÎTES AUCHElHOiJIUlES
La pliiiiaii dl- ces (k-coiivtrEfs, sonl le rosiillat des fouilli
êes par l:i Sociélé pour la conservalion des monumenls histonqi
d'Alsace, sous la direction de M. Ringel, pasteur à Diemeringeti
.ililissemcnis df l'époiiue gallo-i
Bijou\ Ipfluvés en IS02 dnns dos tombeaux francs, sui* le territoire de la commune de Lorentzen
iv'j sur le chaton
m m
SOCIETE
POlIl LA
CONSERVATION DES MONUMENTS HISTORIOUES
D'ALSACE.
Séance du Comité du 5 août 1861
Présidence de M. SPACH.
Présenls : MM. Bœrscli, Bissen , ïleitz, Klotz, Moi in, Ringeisen, Saum,
baron de Schau enburg-. Straub.
Le secrétaire rlonne lecture du procès-verbal de la dernière séance, qui
est adopté.
Il dépose ensuite sur le bureau :
]jC Bulletin liistoriqne de la Société des an tiqua ires de la Morinic :
X\\^ année , 45*^ et i6^ livraisons;
L'hôtel et l'épitaplie de BaWiasar d' Haussons illc , par Léon Mougeol;
Les hôtelleries du vieux Nancy, |)ar le même;
Archeologischer Anzeiger zur archeologischen Zciiüug : .lalii'gaiip- XXI.
173, 174;
Musée d'art et d'archéologie offert à la province^ par A. d'Otreppe de
Bouvette; 40^ livraison;
L'abbaye de Wissembourg , avec quelques châteaux forts de la Basse-
Alsace et du Palatinal ; monographie historique , par J. Rheinwald;
Annales de l'Académie d'archéologie de Belgique; t. XVIII, liv. I à H':
Bévue des Sociétés savantes des départements; t. P'", IIP série.
M. le président annonce avoir écrit les lettres suivantes :
A M. le Préfet du Bas-Rhin, au sujet des fouilles à faire à Wœrlli et dun^
5'
— 74 —
d'autres localités du Bas-IUiiu par des particuliers. La Société réserve ses
droits, et désire être représentée pendant les opérations ;
A M. le conservateur des forêts , prière de donner des instructions aux
agents de son administration à l'occasion des coupes faites aux environs
du Ringelberg et du Hiugelstein;
A M. Conratli, arcliitecte de la ville de Strasbourg, pour lui demander
une note au sujet des fouilles faites sur la place de rilôpital civil ;
Au conservateur des forêts, pour lui annoncer que la Société renonce
en ce moment à faire des travaux dans le cbàteau deHaut-Barr, parce que
cette opération entraînerait des dépenses trop considérables. Prière de
transmettre aux propriétaires du château les remercîments du comité pour
le concours libéral qu'ils avaient l'intention de lui prêter;
A M. Véron-Uéville, vice-président du comité à Colmar , pour le remer-
cier des renseignements transmis sur les travaux à entreprendre dans
plusieurs châteaux des environs de Colmar. — Indemnité votée pour le
concierge de la préfecture du Haut-Rhin ;
A M. le Préfet du Bas-Rhin : prière d'intervenir auprès de l'administra-
tion des tabacs, pour mesures de conservation à entreprendre au sujet
d'armoiries épiscopales, scellées dans le mur du magasin à tabac à Benfeld;
A M. Müller, préposé en chef de l'octroi, pour le remercier de la note
historique sur ces armoiries;
A M. Kast, agent voyer à Odratzheim , pour le remercier des objets
antiques (fibule en argent, etc.) dont il a fait don au musée de la Société.
— Prière de dresser le plan du palais mérovingien de Kirchheim ;
A M. Straub: affaires confidentielles d'Altorf et d'Eschau;
A iM. Rheinwald , professeur au collège de Wissembourg : remercîments
pour le don de sa monographie sur Tabbayc de Wissembourg;
A M. Bardy, à Saint-Dié : remercîments pour l'annonce de la candidature
de M. Philippe de Golbéry;
A MM. les Préfets du Haut- et du Bas-Rhin, pour leur recommander les
intérêts de la Société aux approches du Conseil général ;
A M. de Beausobre, inspecteur principal du chemin de fer de l'Est: re-
mercîments pour la transmission de quatre monnaies antiques trouvées à
Kœnigshoffen ;
A M. le Ministre de l'instruction publique, pour une rectification à faire
dans le dernier numéro de la Bévue des Sociétés suvanlcs.
Le secrétaire dépose trois médailles données par M. le colonel de Morlel
à l'appui de sa note sur les tombes d'Odralzheim.
M. Klotz remet un globule percé d'un trou , trouvé près de Mutzenhausen
— 75 —
et donné par M. le docteur Rouis. Remercîments à M. Rouis. — M. Lehr
envoie quelques remorques sur le mémoire de M. de Schauenburg sur les
armoiries de Jean Hammerer. — Dépôt aux archives.
Lecture est donnée des délibérations suivantes du sous-comité du Haut-
Rhin :
SOUS-COMITE DU HAUT-RHIN.
Séance du 51 juillet 1865.
Présidence de M. VÉRON-RÉVILLE , vice -président.
«Présents: MAL Véron-Réville , vice-président; Hambergcr, CbaufTour,
Gérard, Liblin, Huot, membres du sous-comité; Brièle, secrétaire; Foltz,
Ortlieb et Schelbaum, membres libres, assistent à la séance.
«Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
«Lecture est donnée d'un rapport de M. Ortlieb, architecte à Colmar,
sur l'étal des travaux d'entretien et de conservation exécutés pendant une
première campagne, du 22 juin au 18 juillet dernier, au château supé-
rieur d'Eguisheim. Ces travaux avaient été arrêtés en principe par MM. les
architectes Ringeisen, Ortlieb et Schelbaum, en présence de plusieurs
membres du sous-comité de Colmar, lors d'une visite opérée sur les lieux,
dans le courant du mois de mai dernier. La plus grande partie des répa-
rations convenues a été exécutée. Sur certains points, des accidents, des
effondrements de terrain , qu'il était impossible de prévoir et qui se sont
produits à la suite des déblais, ont forcé M. Ortlieb, après en avoir référé
à M. Ringeisen , à modilîer le projet primitif et à recourir à d'autres voies
d'exécution. Enfin, quelques-uns des travaux arrêtés n'ont pu être exé-
cutés, faute de fonds et par suite de l'épuisement du crédit de 700 fr.
alloué. Pour l'entier achèvement de l'œuvre, M. Ortlieb termine son rap-
port par un devis détaillé, duquel il résulte qu'une allocation supplémen-
taire de 325 fr. serait nécessaire.
«Le sous-comité, en remerciant M. Ortlieb des soins qu'il a apportés
dans l'exécution de cette opération difficile et pénible tout à la fois, décide
que son rapport sera adressé au comité central , qui est prié de vouloir
bien accorder les fonds nécessaires, pour qu'il soit mis un terme à la sus-
pension regrettable des travaux commencés au château supérieur d'Eguis-
heim. Le sous-comité demande en outre que celte allocation soit portée à
^ 76 -
500 fr., à raison des difficultés imprévues qui pourraient se produire encore
sauf à faire état de la partie de ces fonds qui n'aurait pas été employée.
« Le vice-président est invité à écrire à M. le Préfet du Haut-Rhin , pour
le prier d'intervenir auprès des administrations municipales des communes
d'Éguisheim et de Hiisseren, sur le teiritoire desquelles sont pratiqués les
chemins qui conduisent au château supérieur, dont l'ahord est devenu si
difficile, pour qu'elles veuillent bien prendre les mesures propres à l'amé-
lioration de ces voies. On rappelle à cette occasion que partout où des cas
semblables se sont présentés, les communes se sont empressées d'accéder
aux vœux exprimés par la Société, témoin la ville de Ribeauvillé, qui, il y
a quelques années, a donné sous ce rapport à ses sœurs du Haut-llhin le
plus digne exemple.
«M. Schelbaum , ingénieur et architecte à Golmar, expose dans un
rapport dont il donne lecture au sous-comité, que par suite du concours
que MM. Ilanhart, propriétaire du château de Plixbourg, et Manheimer, pro-
priétaire du IIoh-Landsperg, veulent bien prêter à la Société, les travaux
de déblaiement et de nettoiement, dont l'urgence a été reconnue, à l'effet
d'arrêter le progrès des dégradations et de faciUter l'accès de ces monu-
ments , devenu presque impossible sur ceilains points, pourront com-
mencer dès que les fonds nécessaires auront été alloués par le comité cen-
tral. Il y a plus encore , tel a été l'empressement de M. Hanhart à accéder
au vœu de la Société, que dès la semaine prochaine et avant toute avance
de fonds de la part du comité central , il sera procédé à la coupe de bois,
qui a été reconnue nécessaire et que M. Hanhart veut bien effectuer à ses
frais. Quant aux travaux qui doivent rester à la charge de la Société, et
dont l'urgence a été constatée par MM. les architectes Ringeisen, Orflieb
et Schelbaum , les dépenses évaluées dans le devis présenté par M. Schel-
baum pourront s'élever, pour chaque château, à la somme de 1,000 fr.
« Le sous-comité approuve, dans ses termes et dans ses conclusions, le
rapport qui lui est présenté , en ordonne l'envoi au comité central et
exprime le vœu que la somme de 2,000 fr. demandée par M. Schelbaum,
soit mise à la disposition de cet homme de l'art.
« M. Foltz, membre de la Société , présent à la séance, produit un plan
du Hoh-Landsperg et lieux circonvoisins, sur lequel il a tracé une ligne
pour indiquer toute une portion de terrain dont la sonorité lui fait sup-
poser l'existence d'une longue galerie souterraine communiquant avec le
château. Le sous -comité invite M. Foltz à s'entendre avec M. Schelbaum,
à l'effet de procéder sur les lieux aux recherches et aux vérifications con-
venables.
— 77 —
«Le vice-président rappelle à ceux de ses collègues qui ont pris part à
l'excursion du mois de mai dernier, qu'en passant à Éguisheim ils se sont
arrêtés, quelques instants, pour visiter le vieux château deDaxbourg', sis
au milieu de cette commune. Il leur rappelle également l'impression que leur
a fait éprouver l'aspect imposant de ces restes, malgré l'élat d'humiliante
dégradation où on a laissé tomher cet antique monument. Grâce à leur
extrême solidité , les murs ont résisté jusqu'ici à l'action dévastatrice dont
ils sont l'objet, depuis des siècles, par le fait de l'homme plus encore,
peut-être, que par celui du temps. A l'intérieur, le polygone formé par
les huit pans qui composaient son enceinte , a été envahi par des habita-
tions, ou plutôt par des masures qui sont venues s'appliquer contre ses
murailles; il en est de même de son pourtour extérieur, qui n'est séparé
des maisons qui le pressent et l'obstruent de toutes parts, que par une
sorte de Schlupff sombre et infect. Or, le pays n'est-il pas en droit de
demander compte à la Société de l'état d'abandon et de dégradation dans
lequel elle délaisse celui de ses vieux monuments qui offre peut-être le
plus d'intérêt, sinon au point de vue architectural, du moins, sous le
rapport de l'antiquité et des souvenirs qui s'y rattachent. Sans doute, il ne
saurait être question de ressusciter le vieux manoir du petit-fds d'Etichon,
mais seulement de sauver ce qui en reste, de lui rendre le jour et la lu-
mière. Ainsi réduite, la tâche de la Société présentera encore d'énormes
difficultés, mais peut-être ces difficultés ne sont-elles pas insurmontables,
et dans tous les cas le sujet mérite bien qu'on les aborde de front et qu'on
cherche à les vaincre.
« En suite de ces observations , le sous-comité adjoint à son vice-prési-
dent MM. ChaufPour et Gérard , à l'effet de former une commission chargée
de rechercher les voies et moyens propres à conserver ce qui reste du
vieux château d'Eguisheim et à lui restituer le rang qu'au point de vue
historique et archéologique il mérite d'occuper parmi les anciens monu-
ments du pays. Le sous-comité adjoint en outre à cette commission
MM. Ringeisen , Schelbaum et Foltz , qui auront plus particulièrement à
traiter la partie artistique de la question.
c(A la fin de la séance, M. Brièle donne lecture d'un récit fort intéres-
sant de la prise de Colmar par les Français, extrait d'un registre des actes
capitulaires du Chapitre de cette ville. »
A la suite de cette lecture et après des explications fournies par M. Ring-
eisen , le comité vote la somme de 500 fr. pour continuer les travaux de
1 . C'est le nom qui est donné à ce château sur un plan, de 1 790, aux archives du Haut-Rhin.
— 78 —
déblaiement, conformément au rapport détaillé de M, Ortlieb. Il décide de
plus que pour les châteaux de IIoh-Landsperg et de Plixbourg- , les travaux
de déblaiement devront également précéder toute autre tentative.
Il appuie cette décision d'un nouveau vote de 500 fr., pour préparer les
travaux ultérieurs dans la direction qui vient d'être indiquée.
Le comité se montre on ne peut plus satisfait de la lucidité et de l'exac-
titude du rapport de M. Ortlieb, et charge M. le président de féUciler le
rapporteur sur son consciencieux travail.
Le secrétaire dépose une reproduction galvano-plastique du sceau de la
Société, exécutée par M. Oppermann, pharmacien.
Le comité vote des remercîments à M. Oppermann.
M. Straub dépose deux photographies, représentant, l'une l'église de
Saint-Guillaume de Strasbourg, et l'autre un reliquaire appartenant à
l'évêché , sur lequel il prépare une note.
Remercîments votés à M. Straub.
M. Ringeisen demande que les sommes votées pour le château de Hoh-
Kœnigsbourg soient mandatées.
Il demande de plus un crédit de 200 fr. pour entreprendre des travaux
au château de Frankenbourg.
Le comité vote ces 200 fr.
La séance est levée à une heure.
Séance extraordinaire du Comité dn iO août 1803.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Bœrsch, Eissen, Guerber, baron de Schauenburg,Saum.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Le secrétaire dépose la Revue des Sociétés savantes des départements ,
IIP série, t. P"", juin 1863.
Le président fait part au comité du désir de la Société historique de
Styrie d'entrer en relations avec la Société d'Alsace.
L'établissement de ces relations est décidé.
Le président annonce qu'il a écrit depuis la dernière séance à M. Véron-
Réville pour un envoi de fonds destiné aux travaux des châteaux d'ÉguiS'
beim, de Hoh-Landsperg et de Plixbourg;
— 79 —
A MM. Ortlieb et Sclielbaum, architectes à Colmar, pour le concours
qu'ils ont offert à ces travaux;
A M. Oppermann, pharmacien à Strasbourg, pour le remercier de l'en-
voi de la reproduction galvano-plastique du sceau de la Société;
A M. de Beausobre, ingénieur principal du chemin de fer de l'Est, pour
le remercier des monnaies offertes à la Société;
A M. le président du consistoire de Saint-Guillaume pour lui annoncer
la visite prochaine de M. l'abbé Straub à l'église de Saint-Guillaume. —
Vérification des notices de feu M. Fries;
A M. le receveur général du Ilaut-Rhin, et à M. le trésorier pour affaires
de comptabilité.
Le comité décide ensuite que le Bulletin de la Société sera communiqué
à M. le conseiller aulique Warnkœnig à Sluttgart, qui offre d'en rendre
compte dans les publications allemandes.
Le président donne lecture d'une note de M. Lehr à propos de la note
de M. le baron de Schauenburg sur la maison de la rue Mercière attribuée
à Jean Hammerer. — Dépôt aux archives.
M. le conseiller Huot adresse la lettre suivante au comité, dont l'inser-
tion au procès-verbal est votée:
<•< Monsieur le Président, le dernier Bulletin de la Société, en rendant compte
de la séance dans laquelle le comité m'a fait l'honneur de m'admettre
parmi ses membres, m'attribue un mémoire sur les maisons prébendaires
du chapitre de Colmar au onzième siècle.
«Il y a là une erreur peut-être typographique, mais qui, si elle n'était
pas rectifiée, pourrait tromper les lecteurs soit sur l'ancienneté du cha-
pitre de Saint-Martin, soit sur l'exactitude des documents que j'ai con-
sultés.
ft Le travail que j'ai eu l'honneur de communiquer au sous-comité du
Haut-Rhin et qui a été inséré dans les Curiosités d'Alsace (2^ numéro de
1863) porte pour titre : « Charte de fondation du chapitre de Saint-Mar-
tin de Colmar (1237). — Les maisons prébendaires (1276-1368). y> 11 faut
donc lire dans le rapport où il est mentionné: quatorzième siècle au Heu
de onzième. »
— 80 —
Séance du Comité du S octobre 1863.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Eisscn, Guerber, Heitz, Klotz, Maluszinski, Morin, co-
lonel de Morlet, Ringeisen, Saum , baron de Schanenburg, Siffer.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
Le secrétaire dépose le n" 6 de Y Anzeiger für Kunde der deutschen
Vorzeit, juin 1863;
Annales de la Société d'émvlation des Vosges, 1861, l"^'" cahier;
Messager des sciences historiques de Belgique, année 1863, 2^ livraison;
L'Année géographique; Bévue annuelle, par M. Vivien de Saint-Mar-
tin, première année, 1863;
Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie, année 1863, n° 2;
Bévue des Sociétés savantes des départements , juin, juillet et août 1863;
Alesia, par M. G. M. de Bouriane. Toulouse, 1863, 1 broch. in-8-;
Considérations générales sur les tombes celtiques de l' Alsace, \:>üivU. Mor-
PAiN. Paris, 1863, 1 broch. in-8'^;
histruction sur l'anthropologie de la France; rapport de M. Gustave
Lagneau. Paris, 1861, 1 broch. in-8°;
Bulletin delà Société nivernaise des sciences, lettres et arts, t. III, nT);
Le château de Lamhalle, par M. Anatole de Barthélémy, 1 broch.
in-8'^;
Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit, 1863, w^^ 7 et 8, juillet et
août;
Der Geschichlsfreund, Mittheilungen des historischen Vereins der fünf
Orte Uri, Schwyz, Untenucdden und 7A(g, neunzehnter Band;
Schweizerisches Urkundenregister , herausgegeben von der allgemeinen
geschichtsforschenden Gesellschaft der Schiveiz; erster Band, erstes Heft;
Bericht der königlichen Gesellschaft für Sammlung und Erhaltung va-
terländischer AUerthümer , Kiel, 1857;
Zwanzigster und dreiundzwanzigster Bericht der königl. Schleswig-Hol-
stein - Lauenhurgiscli en Gesellschaft für die Sammlung und Erhaltung
vaterländischer AUerthümer. Kiel, 1861 et 1863, 2 broch. in-8°;
Ueber Alterthums-Gegenstände. Eine Ansprache an das Puhlicum, von
T. V. Warnstedt, Kiel, 1835, 1 broch. in-8".
Le président annonce avoir écrit depuis la séance du 10 août dernier les
lettres suivantes:
— 81 -
A M. le Préfet du Bas-Rhin, pour le prier de faire interrompre les tra-
vaux de peintui'e dans l'église d'Altorf;
A M. Coste, juge à Schlesladt, pour le prier de demander à M. Balden-
weck, horloger à Schlestadt, le prix qu'il mettrait à la puhlication, dans
notre Bulletin, delà photographie du portrait de Wimpheling; 2^ lettre,
même sujet;
A M. le professeur Warnkœnig, conseiller aulique à Stuttgart; envoi du
Bulletin;
A M, Benoît, maire de Berlhelming (Meurthe); annonce que son mé-
moire sur « un Dieu inconnu» a été envoyé pour examen et avis à l'un
des membres du comité;
A M. le Ministre de l'instruction publique ; remercîments pour l'alloca-
tion de 400 fr. ;
A M. Vivien de Saint-Martin; accusé de réception de « l'Année géogra-
phique »; remercîments;
A M. Mougenot à Nancy; accusé de réception de brochures;
A M. Ohleyer, professeur à Wissemboui'g, au sujet de la restauration
des fresques dans l'éghse Saint-Pierre et Saint-Paul de Wissembourg.
Le secrétaire donne lecture de la lettre suivante de M. Ohleyer de Wis-
sembourg:
«Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous adresser les résultats de
mon grattage dans notre église; je me suis mis à l'œuvre le 21 mai de l'an-
née courante, et depuis ce jour jusqu'au 9 septembre, j'y ai consacré tout
mon temps entre les classes et mes vacances. J'ai terminé sur la partie
sud du transept, la série des personnages du credo; seulement au lieu
de six autres apôtres, j'ai découvert six saintes femmes voilées et tenant
chacune un livre; au-dessus de chacune d'elles se trouve un phylactère
avec les derniers passages du credo, très-lisibles. La forme des lettres,
la draperie, les personnages et les dessins me prouvent que ces tableaux
sont du commencement du quatorzième siècle.
« J'ai continué les séries au-dessous des apôtres et j'ai mis au jour deux
rangées de tableaux dont voici le sujet: •l^'"en commençant par la gauche,
la résurrection de Lazare; 2° l'entrée de Jésus dans Jérusalem ou le di-
manche des Rameaux; S'' le lavement des pieds et la sainte cène; 4^ Jé-
sus au jardin des OHviers et la trahison de Judas qui le livre aux soldats;
5^ Jésus devant Hérode et Kaïphas. Ces cinq tableaux vous sont déjà con-
nus de l'année dernière. 6^ tableau : la fustigation; V le couronnement
de Jésus-Christ; 8^ ecce homo ; le O'^ tableau et les suivants se trouvent
sur le mur qui est d'équerre avec la face sud du transept, il y a : Jésus
11« Série. — T. II. — (P.-V.) 6
tombe avec la croix; 10*^ Jésus dépouillé de ses habits; iV le crucifiement
de Jésus; 12® ce tableau est deux fois plus haut que les autres et com-
mence dans la série d'en bas pour se terminer au bord supérieur de celle
d'en haut; on y voit Jésus et les deux larrons; 13® et dernier tableau de la
séi'ie: Jésus sur les genoux de Marie ou la descente de croix. Le 14® tableau
se trouve, sur la face sud du transept, le 1®'' de la seconde série et repré-
sente Jésus au tombeau; 15® la résurrection de Jésus; 16® Jésus apparaît à
ses apôtres et remet la clef à saint Pierre; 17® la Pentecôte; 18® le jugement
dernier; 19® et les suivants selon saint Matthieu, ch. 25, v. 34-41 ; tableau
19®: nourrir ceux qui ont faim; 20® donner à boire à ceux qui ont soif; 21®
habiller les dénudés; 22® donner l'hospitalité; 23® visiter les prisonniers;
24® guérir les malades; 25® enterrer les morts. Le tout dernier tableau re-
présente la sainte Vierge assise sur un trône au milieu des Chérubins. A
la même hauteur que les apôtres du credo , et sur le mur occidental du
transept, se trouvent encore de grands personnages, d'après les propor-
tions des pieds. Toute cette partie reste encore à gratter, mais je ne pou-
vais la terminer faute d'échafaudage. J'ai donc commencé sur la partie
nord du transept du côté de la sacristie et là j'ai trouvé: saint Jean dans la
chaudière devant la porte latine; un second tableau dont nous n'avons pu
découvrir le sens, et un troisième qui représente saint Jean dans l'île de
Pathmos; le reste est plein de peintures. Ce travail de grattage est fort lent
et fort pénible et ne peut être confié qu'à des mains habiles et à un homme
dévoué à l'art.
« Le chœur de l'église a été gratté aux frais de la ville, ainsi que la belle
coupole. Nous avons remis le dallage du chœur sur son niveau primitif, et
M. l'architecte Morin a approuvé cette restauration. Ce dernier travail a été
payé par M. le curé. Il nous reste encore à baisser le dallage du transept
au-dessous delà coupole; ce travail pourrait être fait avant la Toussaint,
mais nous n'avons pas assez d'argent. J'ai l'honneur de prier M. le Prési-
dent de nous accorder un secours de 200 à 300 fr. pour terminer cette par-
tie de l'église et pour pouvoir rendre le chœur au culte. Nous avons retrouvé
la place des apôtres qui se trouvaient dans le chœur jusqu'en 1819 , et
saint Pierre et saint Paul malheureusement très-mutilés. J'ai surveillé
comme par le passé tous les travaux de restauration qui auront la pleine
approbation de la Société historique. Comme nous sommes très-pauvres,
j'ai laissé à M. le curé les fonds votés par la Société historique pour les
tableaux, cet argent a été employé pour l'abaissement du chœur.»
M. Morin lit la note suivante sur le même objet:
« le dallage da l'église de Saint-Pierre et Saint-Paul de Wissembourg'
avait été dans le dernier siècle exhaussé de deux marches, soit pour as-
sainir le sol, soit plutôt pour diminuer la hauteur de l'édifice, qui à cette
époque devait paraître excessive et de mauvaise proportion. Le chœur
avait à son tour subi un exhaussement plus considérable de cinq marches
au-dessus de la nef; il en résultait que les socles et les bases étaient com-
plètement enterrés. Ajoutons que le maître-autel, qui était autrefois au fond
de l'abside, avait été considérablement avancé vers le transept.
(' Une première opération exécutée en 1862 avait eu pour effet de ré-
tablir la hauteur primitive du dallage dans le double collatéral sud. Un
travail analogue en cours d'exécution a déjà abaissé de trois marches la
partie absidiale de l'ancien chœur, et on se propose, si les ressources le
permettent, d'abaisser ainsi toute cette partie de l'édifice.
« A cette occasion un doute s'était élevé sur l'emplacement qu'il conve-
nait de donner au maître-autel; l'avis que j'ai d'abord donné, de le reporter
au fond, a été justifié par les traces de ses anciennes fondations qui ne
laissaient qu'un passage de 1™,50 entre l'autel et le mur du fond de l'ab-
side. Il est probable que l'espace l'éseryé à cette époque en arrière de
l'autel était affecté au chapitre; cette disposition n'est plus utile aujour-
d'hui, elle perd un espace considérable, tout en amoindrissant les formes
apparentes de l'édifice; je persiste donc dans mon avis, tout en réclamant,
une discussion el un examen du comité.
« Les travaux de débadigeonnage se poursuivent et permettent déjà
d'apprécier les belles proportions de l'édifice. De nouvelles peintures mu-
rales ont été découvertes par les soins et l'habileté de notre honorable col-
lègue M. le professeur Ohleyer.
«J'ai fait récemment surplace, et je présente au comité une photogra-
phie de quelques fragments de figures trouvés dans les déblais et qui pa-
raissent appartenir à la fin du quatorzième siècle. Les vêtements des deux
figures centrales sont parsemés de losanges dorés en plein avec filets rouges,
chaque losange est cantonné de quatre palmettes à trois lobes dont les
couleurs sont effacées, les revers de vêtements sont d'un bleu azur. La
première figure à gauche paraît être celle d'un fondateur, il tenait dans
ses bras le modèle en relief de l'église, le fragment en a été déposé à
ses pieds.
<( La figure en suite est une sainte Vierge tenant l'enfant Jésus, dont la
main seule reste apparente, les deux autres figures ne sont pas ca-
ractérisées, i^
Une discussion s'ouvre sur cette note.
M. Morin propose de choisir pour le m9Îlre-9inel l'emplacement de l'an-
— 84 —
den aulel de l'abbé Edelin dont les fondements ont été retrouvés et qui
était placé à 1"\50 du cbevet de l'abside.
M. le curé Guerber pense que cet emplacement ne pourrait convenir.
L'autel se trouverait trop éloigné des fidèles, et il ne serait guère possible de
lui donner le développement qu'il comporte.
L'autel de l'abbé Edelin, placé tout au fond de l'abside, servait aux offices
particuliers de la communauté bénédictine; c'était l'autel matutinal. Mais il
y en avait un autre placé devant le jubé, ou même sur le jubé, qui servait
aux offices des fidèles. Aujourd'hui comme alors, les exigences du culte et
l'opportunité de le rapprocher des fidèles, obligent à avancer l'autel soit
jusque sous l'arc triomphal, soit même davantage si on le juge bon. En
tout cas l'avant-chœur, la partie du transept, qui faisait toujours partie du
sanctuaire, devra lui rester acquis et ne pas être livré aux fidèles, à moins
d'une urgence réelle, celle par exemple du manque de place.
M. de Schauenburg n'aimei'ait voir l'autel ni trop avancé ni trop en re-
traite; à son avis, le meilleur emplacement, c'est la première partie de l'ab-
side, celle immédiatement derrière l'arc triomphal. II y serait vu de tout le
monde, et on pourrait commodément placer le chœur des chantres derrière
l'autel.
Après plusieurs observations faites à ce sujet, M. le président pense que
l'avis de M. le curé de Wissembourg doit être demandé, et que du reste
MM. les membres de la commission qui se rendront prochainement à Wis-
sembourg, pourront s'occuper sur place de cette question.
Le comité décide que la note de M. Morin sera transmise à M. le curé de
Wissembourg pour avoir son avis.
Le comité approuve le prochain tirage du Bulletin de la Société, et pour
le compte de celle-ci, au nombre de 700 exemplaires.
M. Ohleyer, sur sa demande, est réadmis comme membre de la Société.
Le comité vote une somme de 300 fr. pour travaux supplémentaires de
grattage et de calquage à l'église de Wissembourg.
M. Ringeisen revient sur l'afl'aire des portes et clôtures à placer dans la
ruine de Hoh-Kœnigsbourg, cette question étant restée en suspens de-
puis le moment où il en a été parlé pour la première fois. II dit qu'il se-
rait facile de placer dans l'intérieur de la ruine en certains endroits qui au-
raient plus spécialement besoin d'être protégés ou qui pourraient cacher
des dangers pour les visiteurs imprévoyants, les portes pour lesquelles le
comité a jadis émis un vote.
Un membre est d'avis de ne rien précipiter dans cette affaire et de la
soumettre encore à quelques études; il craint que des obstacles placés en
- 85 -
certains endroits ne tentent précisément la témérité ou les mauvaises dis-
positions de certaines classes de visiteurs, et que l'on n'aille droit contre
le but que l'on se proposait.
Le comité maintient son premier vote.
M. Ringeisen demande un crédit de 100 fr. de plus pour le château su-
périeur de Hoh-Kœnigsljourg-, ce qui portera la somme totale affectée à cette
ruine à 200 fr.
Le comité vote cette somme.
M. le président communique une nouvelle lettre de M. Coste sur le por-
trait photographié de Wimpheling-. — Le comité passe à l'ordre du jour.
11 Ht ensuite une lettre de M. le Préfet qui transmet au comité, en lui de-
mandant sa manière devoir, l'avis suivant deM. l'architecte en chef du dé-
partement sur les peintures murales de l'église d'Altorf.
Avis de l'architecte en citef sur les peintures de l'église d'Altorf.
V Les peintures murales de l'église d'Altorf occupent quatre grands pan-
neaux au-dessous des croisées hautes de la nef à l'emplacement du trifo-
rium; elles ont été trouvées au-dessous du badigeonnagequi couvrait l'in-
térieur de l'édifice.
« Quelle que soit l'époque de leur exécution , ces peintures avaient été faites
suivant les bons principes de l'école romano-byzantine, c'est-à-dire à l'eau,
en teintes généralement claires séparées par des traits fortement accentués,
avec très-peu de modelés et point d'ombres portées.
« Ces peintures étaient assez intéressantes et assez bien conservées pour
être ravivées au besoin par le même procédé.
« Au lieu de suivre ce principe, l'un des quatre panneaux a été recou-
vert de couches d'huile fortement colorées, modelées et ombrées à l'excès
qui font tache dans l'intérieur de l'église, s'accordent mal avec les lignes
d'architecture, ne conservent aucune trace des peintures primitives et n'ont
aucun mérite comme peinture moderne. C'est un fait très-fàcheux auquel
on ne peut aujourd'hui remédier.
« Le parti le plus convenable serait de maintenir et réparer les trois
autres panneaux par le procédé suivant:
« 1"^ Calquerles anciennes peintures afin d'en conserveries traces exactes.
(( 2° Donner une couche générale de colle très-claire et très-transparente
pour maintenir les anciennes peintures.
(( 3*^ Reprendre les contours et traits de force de toutes les figures, avec
teintes à la colle d'un degré de ton un peu inférieur aux anciennes traces.
K 4" Enfin à l'aide de frottés et quelques teintes plates à la colle Irès-faiblec
de ton , rétablir les anciennes couleurs égrenées ou enlevées.
— 86 -
(' Le dernier panneau étant complètement perdu , il conviendra de s'as-
surer de l'identité du sujet nouveau avec l'ancien, d'en faire sur place un
carton, de repiquer le mur, faire un nouvel enduit et repeindre le pan-
neau à la colle; du resie, l'opération de ce quatrième tableau peut n'être
faite qu'après coup et après que les trois autres auront été réparés.»
Le comité adopte en partie les conclusions de M. l'architecte en chef,
sauf à proposer la conservation des peintures au moyen du silicate de po-
tasse, afin de pouvoir les cacher par un badigeon si les tenlatives de con-
servation ne devaient pas être satisfaisantes.
M. le Préfet communique un arrêté préfectoral autorisant M. Maximilien
de Ring à continuer les fouilles dans les tumuli de la forêt de Brumath
avec l'assistance de M. Morin, délégué de la Société des monuments his-
toriques.
Le président lit une autre lettre de M. le Préfet relative aux armoiries
épiscopales de Benfeld. Cette lettre recommande la pierre sculptée retra-
çant ces armoiries à la sollicitude de M. le directeur général des tabacs,
qui de son côté offre à la Société de la mettre à sa disposition aux frais de
l'administration.
Une lettre de M. Nicklès relativement au même objet propose de placer
la pierre à l'église de Benfeld.
Le comité, pour ne pas faire un anachronisme ou donner lieu peut-être
à des interprétations erronées dans les temps futurs, préfère accepter
l'offre de l'administration des tabacs.
Il vote des remercîments à cette administration.
Lecture est donnée de la lettre suivante de M. Véron-Béville.
« Monsieur le Président, j'ai l'honneur de vous communiquer ci-joint une
lettre par laquelle M. Geiger, architecte à Colmar, m'a fait connaître qu'une
cloche duquinzièmesiècle, dont il donne une description détaillée, doit être
sous peu, à Lautenbach, livrée à un fondeur de cloches et vendue comme
vieux bronze.
« Je me suis transporté hier sur les lieux avec mon collègue M. le con-
seiller Huot, et nous avons constaté que la description de M. Geiger était
parfaitement exacte et qu'il n'avait nullement exagéré l'intérêt que présente
cette cloche comme antiquité et comme objet d'art.
« Malheureusement il est deux autres points sur lesquels nous avons été
également édifiés : c'est d'abord, que le son de cette cloche, par suite d'un
long usage, s'est altéré, de manière à ce qu'elle ne peut plus, sans disso-
nance grave, prendre part à un concert de cloches quelconques. M. le pro-
fesseur de musique Kintzlé, de Guebwiller, appelée donner son avis, a été
- 87 —
jusqu'à affirmer à M. le curé , qu'un plus long usage de ceüe cloche (son-
nant avec d'autres) finirait par fausser l'oreille de toute la jeunesse de la
paroisse. D'un autre cùté la commune de Laulenbach, qui n'est pas riche
et qui se saigne, en ce moment, pour remplacer son disgracieux clocher du
quinzième siècle par deux lours en harmonie avec l'architecture romane de
sa belle église, est hors d'état de conserver cette cloche au seul titre d'ob-
jet d'art; elle est absolument obligée d'en tirer un parti quelconque. L'en-
lèvement a été fixé au 15 octobre prochain; toutefois j'ai la certitude,
grâce à l'intervention de M. le Préfet, de pouvoir faire proroger ce délai à
trois mois.
«Dans ces circonstances je viens vous prier, Monsieur le Président, de
vouloir bien appeler sur cette question la sollicitude du comité et particuliè-
rement des vénérables ecclésiastiques qui en font partie, de M. l'abbé Straub
notamment, si versé en ces matières. Celle cloche mérite d'être conservée,
elle conviendrait paifaitement à une petite paroisse dont elle composerait
à elle seule toute la sonnerie. La commune de Lautenbach la céderait au
prix qu'en offre le fondeur, c'est-à-dire au prix du vieux bronze. Le fait
pourrait être divulgué par les moyens de publicité dont dispose la Société
dans les deux déparlements. »
Le comité, considérant que l'Alsace possède des cloches plus intéres-
santes que celle qui forme l'objet de cette lettre, décide que l'on se bornera
à faire prendre le moulage de l'ornementation de la cloche, et puis de l'a-
bandonner à son sort.
M. le président est prié d'écrire dans ce sens à M. Véron-Réville.
M. le président dépose un mémoire de M. le baron de Lützelbourg. —
Ordre du jour.
M. Guerber rend compte d'un mémoire de M. Louis Benoît qui lui a été
remis dans la séance extraordinaire du 10 août. Ce mémoire s'occupe de
l'image d'une divinité inconnue, peut-être gallo-romuine, peut-être anté-
rieure à celle époque, peut-être aussi déjà de l'époque chrétienne.
Le comité vote des remercîments à l'auteur et le dépôt aux archives.
Le comité examine une épreuve de la lithographie représentant l'église
de Berraont. Cette épreuve n'étant pas satisfaisante, il décide que la planche
ne sera pas tirée.
M. le colonel de Morlet rend compte de la découverte faite àSaar-Union
des ruines d'un établissement gallo-romain, qui renferme des restes fort
distincts de calorifères construits sur le mode usité à celle époque. Il annonce
aussi avoir été à Haslach el y avoir visité le grand et le petit Ringelstein,
ainsi que le château de Hohenslein, tous les trois d'un accès fort difficile.
II propose de faire une demande à l'adniinistration forestière pour faciliter
les abords.
Le comité s'associe à ce vœu et vole à cet effet une somme de 200 fr.
Le comité autorise ensuite l'échange de modèles en plâtre d'objets an-
tiques contre des modèles analogues de la collection de Mayence.
M. le curé Silier donne lecture d'une notice sur une troisième villa ro-
maine découverte à Oberbronn.
M. Saum fait une communication au sujet d'une dizaine de châteaux
qu'il a visités le long de la frontière du Palatinat entre Niederbronn et
Wissembourg, et sur lesquels il croit devoir appeler l'attention de la
Société.
il signale plus spécialement, outre les deux Windstein au fond de la val-
lée du Jaegerthal, le château de Schœneck situé entre Dambach et Ober-
steinbach, le petit château de Lützelhard à l'ouest d'Obersteinbach, qu'une
coupe récente a entièrement dégagé, etplusprès de Wissembourg l'énorme
rocher du Fleckenslein avec ses nombreuses salles souterraines, ses gale-
ries, ses escaliers et son puits taillés dans le roc et ses ruines de toutes
dates. Il appelle notamment l'attention sur deux inscriptions en caractères
gothiques du quinzième siècle, signalés par Schweighœuser et Golbéry,
qui, devenus frustes, menacent de disparaître et qu'il serait bon de faire
transcrire exactement ou même mouler, si ce travail n'a pas été exécuté
déjà.
La séance est levée à une heure.
Séance du Comilé du 2 novembre 1861
Présidence de M. SPAGH.
Présents : MM. Bœrsch, Eissen, Grass, Guerber, Ilcitz, Klotz, baron Ma-
thieu de Faviers, Morin, Ringeisen, Saum, baron de Schauenburg, Schirr,
Straub.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Avant de commencer ses travaux, le comité décide à l'unanimité que le
procès-verbal contiendrait l'expression des regrets profonds que la mort
inattendue de M. Jung a fait éprouvera ses collègues. Il charge le président
d'elle l'orgaue de ses sentiments auprès de la famille. Le président fera
parvenir à M'"° Jung la lettre suivante :
«Madame, dans la séance du 2 novembre courant, le comité historique,
vivement ému de la mort récente de M. le professeur Jung, a consigné
officiellement dans le registre de ses procès-verbaux les douloureux regrets
qu'éprouvent tous les membres de cette réunion. M. Jung était à la fois
un collègue bienveillant et zélé; il était de plus, par son vaste savoir et sa
longue expérience, l'un des soutiens et des promoteurs les plus ardents
de la Société pour la conservation des monuments historiques d'Alsace.
«J'ai pensé, iMadame, que, dans le deuil où vous êtes plongée par une
perte irréparable, vous accueilleriez avec indulgence ce témoignage flat-
teur pour la mémoire de votre époux, et je me suis empressé de vous en
transmettre l'expression , affaibhe , mais en tout cas bien vivement sentie.
«Agréez, Madame, l'hommage de ma respectueuse condoléance. »
Le secrétaire dépose :
Bulletin de la Société impériale des antiquaires de France, 1^'' et 2^ tri-
mestres 1863;
Neunter Jahresbericht des germanischen National-Museîims zu Nürnberg;
Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit, 18G3, septembre, n'' 9;
Jahrbücher des Vereins von Alterthumsfreunden im Rheinlande, "XXXV,
18. Jahrgang.
Le président annonce avoir écrit, entre autres, les lettres suivantes de-
puis le 5 octobre :
A M. Ohleyer, professeur à Wissembourg; annonce des décisions prises
au sujet du grattage des fresques de l'éghsc Saint-Pierre et Saint-Paul;
annonce de la prochaine arrivée d'une commission ;
A M. le curé de Wissembourg; envoi de la note de M. Morin sur la situa-
tion de l'autel de l'église de Wissembourg;
A M. L. Benoît, maire de Berthelming; remercîments en retour de son
mémoire sur «un dieu inconnu»;
A M. le conservateur des forêts; pour les travaux à faire aux châteaux
de Ringelstein et de Hohenstein;
A M. Coste , juge à Schlestadt, pour lui annoncer le refus du comité quant
aux propositions de M. Baldenweck;
A M. le Préfet du Bas-Rhin ; prière de charger M. l'architecte de l'arron-
dissement de Schlestadt de transférer à Strasbourg la pierre avec armoiries
épiscopales en ce moment à Benfeld;
A M. Véron-Réville; prière de faire photographier la cloche de Lauten-
bach;
6*
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A M. Vivien de Saint-Mailin, à Paris; envoi de nuire Bulletin;
A M. le Préfet du Bas-Rhin; avis du comité au sujet des mesures de
conservation à prendre pour les fresques d'Altorf;
Au même; remercîments au sujet du vote du Conseil général en faveur
de la Société.
Le président annonce l'envoi d'un mémoire de M. Nicklès, avec une
carte, sur Helvetus. — Le comité vole l'impression et la reproduction de
la carte dans la prochaine livraison du Bulletin.
M. Nicklès propose l'admission, comme membres de la Société, de MM. Sa-
ladin, Emile, père, Saladin, Emile, fils, Saladin, Jules, manufacturiers à
Bonsecours (Meurthe), et de M. Charles Ehrhardt, chef de dépôt du chemin
de fer de Lyon à Genève, résidant à Genève;
Et M. Slraub, celle de M. l'abbé Hubert, vicaire à Mulhouse.
Le comité prononce l'admission de ces nouveaux membres.
Le président annonce que M. Bureau, membre de plusieurs sociétés sa-
vantes, à Paris, demande communication des statuts de la Société, de la
liste des membres et de l'année courante du Bulletin. — Le comité accorde
la demande.
Lecture est donnée de la lettre suivante de M. le curé de Wissembourg :
«Monsieur le Président, par une lettre que vous m'avez fait l'honneur
de m'écrire, sous la date du 5 courant, vous me donnez communication,
pour avis, de la note ci-jointe sur l'église de Saint-Pierre et Saint- Paul, à
Wissembourg. Je m'empresse de répondre à votre invitation.
c( L'exhaussement du dallage, au commencement de ce siècle, n'a eu
qu'un seul but : l'assainissement de l'édifice; différentes délibérations du
conseil de fabrique prises à cette époque en font foi.
'i Les nombreuses inhumations faites dans les chapelles et les nefs, l'élé-
vation qu'avait prise le sol extérieur devenu, après la suppression du cha-
pitre, un dépôt de décombres, avaient donné à l'éghse une atmosphère
malsaine et nauséabonde à laquelle on attribuait les fréquents évanouisse-
ments qui se produisirent pendant la célébration des offices. Au lieu de
dégager l'édifice au dehors et de pratiquer des fouilles en dedans qui au-
raient débarrassé le sol de sa terre pourrie, on préféra, pour y remédier,
le système d'exhaussement : il laissa subsister en partie le mal et enterra,
d'après l'expression d'un de vos honorables membres, le géant jusqu'aux
genoux.
'(Une opération analogue à celle de 1862, dont parle M. l'architecte en
r-hcf du département, entreprise dans l'abside, a du être interrompue faute
de fonds.
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(.(Quand il nous sera possible de reprendre les travaux d'abaissement,
il s'agira de l'emplacement qu'il convient de donner au maître-autel.
('Les principes de l'architecture gothique nous laissent ici toute liberté,
puisqu'ils n'indiquent pas, que je sache, une place bien déterminée pour cet
objet du culte.
«Dans l'église de Wissembourg, l'autel primilif servant aux exercices
religieux de la communauté était à i'",50 du fond de l'abside, et un se-
cond autel servant aux cérémonies du culte, auxquelles prenaient part les
fidèles de la ville, se trouvait sous le jubé.
«Les stalles des chanoines étaient placées, non pas dans l'abside der-
rière l'autel, mais verticalement à droite et à gauche, dans le transept,
entre le jubé et l'abside. Cette partie du transept, où se trouvaient les
stalles, était séparée des parties nord et sud par des arcatures, et le tran-
sept, dans toute sa partie transversale, était séparé des trois nefs par deirx
grilles, aux extrémités, et par le jubé au milieu.
«En 1806, quand le jubé fut enlevé, on démolit en même temps l'autel
du fond de l'abside et on le remplaça par un autre qui fut placé au miheu
de l'abside. Plus tard, en 1829, quand on fit subir un second exhausse-
ment à l'abside et à la partie du milieu du transept, on remplaça l'autel de
1806 par l'autel actuel, et on lui assigna l'emplacement qu'il occupe en-
core, à l'heure qu'il est, dans le transept.
«Mon opinion, sauf meilleur avis, serait de rendre aux nefs la partie du
transept formant en ce moment l'avant-chœur, d'en ôter l'autel et de le
mettre au milieu de l'abside, en laissant assez d'espace entre l'autel et le
fond de l'abside pour que les chantres y trouvent place.»
M. le curé Guerber lit le rapport suivant sui' le même sujet :
«La commission désignée l'an dernier pour examiner les travaux de
restauration de l'église abbatiale de Saint-Pierre et Saint-Paul, à Wissem-
bourg, a été convoquée de nouveau et pour le même objet le 21 octobre
dernier. M. le baron de Schauenburg et M. le curé de Saint-George de
Ilaguenau se sont trouvés au rendez-vous et ont pris connaissance des
travaux exécutés depuis le mois de novembre 1862. Le compte rendu que
nous avons l'honneur de vous présenter, vous édifiera, nous l'espérons,
sur leur importance.
<i Restauration proprement dite. Dans le beau cloître dont les mutilations
nombreuses ont été signalées, nous avons vu avec bonheur un nouveau
mur de soutènement établi à la dernière travée supérieure. Cette partie du
cloître menaçait de s'écrouler; le mur qu'on vient d'élever le met à l'abri
du danger.
^ 02 —
«Ell cléniolissanL un autel lalcial dans l'inléiiuur, on Irouva qualre 8ta-
lues, dont les pliotograpliies vous ont été soumises; dans d'autres décom-
bres on découvrit les troncs de deux apôtres, saint Pierre et saint Paul. Les
)>remières sont tort belles et appartiennent à la bonne époque de la sculp-
ture chrétienne du quatorzième siècle. On y a reconnu une sainte Vierge,
un empereur donateur, un prophète ou apôtre, et un guerrier. Il ne reste
du dernier que le tronc, et il est difficile d'y reconnaître, comme on l'a
voulu, un saint Louis, roi de France. Nous admettons plus volontiers que
la première représente Dagobert, fondateur de l'église primitive.
«Les deux troncs figurant saint Pierre et saint Paul, sont moins anciens
et d'un mérite bien inférieur. On suppose qu'ils faisaient partie des douze
apôtres placés sur les parois des colonnes du chœur et dont on a reconnu
les traces. Il nous serait difficile de trouver l'emplacement nécessaire pour
douze apôtres; le nombre de colonnes du chœur ne le comporte pas; et il
est plus probable qu'il n'y avait jadis que les deux apôtres nommés, patrons
principaux de la basilique, et peut-être quatre autres saints, ceux, par
exemple, (ju'on a découverts dans l'autel latéral susdit.
a Abside. Toute l'abside est débadigeonnée aujourd'hui, ainsi que la
coupole et les quatre niches-pendentifs. Cette opération, lente et pénible,
continue à réussir et mérite les encouragements de tous les amis de l'art
chrétien. Le chœur se présente aujourd'hui dans toute sa majesté, avec la
pureté parfaite de ses lignes. Toutefois, certaines pierres des quatre grands
piliers qui portent le dôme et la tour, certaines autres des quatre
pendentifs et de massifs qui supportent une partie de la retombée, sont
inoins belles, d'une nuance moins avantageuse que celles signalées dans
d'autres parties du monument. On nous fournit l'explication suivante:
Cette pierre, moins belle, est plus dure que l'autre, et elle supporte
bien plus sûrement l'énorme charge de la coupole et de la tour, qui, sans
ces matériaux plus résistants, eussent fait fléchir les quatre appuis en
apparence bien insuffisants à supporter un pareil poids. La raison est
bonne et nous l'admettons, tout en constatant la différence de beauté de
l'appareil.
<i Abaissement du sol intérieur. Le collatéral extrême sud est replacé
à son ancien niveau. Il a eu les prémices de cet acte de justice, puisqu'il
louche au beau sépulcre dont on désirait dégager la base tout ensevelie.
L'œuvre a été bien conduite; on a posé les dalles sur un fond parfaitement
sec, et ce collatéral est à peu près au niveau du sol extérieur.
«On en a fait autant de l'abside, c'est-à-dire depuis la ligne de l'arc
triomphal jusqu'au chevet. C'est le point de départ pour le reste, et toute
— 93 —
affaire cessante, pour le centre du transept ou l'intersection tle la croix.
Dans nos conclusions, nous reviendrons sur ce point.
«Il a été question du nouvel emplacement du maître-autel. M. le curé de
Wissembourg a bien voulu demander notre avis sur cet objet, et quoique
cela ne rentre pas directement dans nos attributions, nous devions, par
déférence pour cet acte de confiance, formuler notre opinion. La place
qu'occupent le plus souvent les maîtres-autels, c'est l'axe de l'arc triomphal
à l'entrée de l'abside, en sorte que cet arc en forme comme le couron-
nement. Nous disons que c'est la place la plus ordinaire, non pas exclu-
sive, car il y a des autels placés plus au fond de l'abside, et il en est qui
occupent le centre de la coupole. Examen fait des lieux, nous avons trouvé
que la place usuelle, à l'entrée de l'abside, ne conviendrait pas au maître-
autel de Wissembourg, puisque les premières baies de l'abside, qui de-
vraient lui donner la lumière, sont aveugles. Il faudrait donc ou l'avancer
sous la coupole, ou, ce qui semble plus conforme aux suffrages des hom-
mes de l'art, le reculer jusque sous la lumière des premières baies ouvertes
sur le fond de l'abside. Ce ne sera pas tout à fait l'emplacement de l'ancien
autel matulinal de l'abbé Edelin, maist;e sera une place convenable et qui
réunira à peu près les conditions tendant à satisfaire les besoins liturgiques
du culte et la facilité de placer le chœur des chantres. Ce sentiment est le
nôtre, et c'est aussi celui du respectable curé de Wissembourg.
ahnagerie. M. Ohleyer a dégagé, en 1863, le reste de la surface sud
du transept méridional et une partie de la surface orientale du même tran-
sept. Il a trouvé six autres apôtres qui complètent ainsi la série ouverte
sur la droite du trône de Jésus-Christ. Il a pris à tort ces six apôtres pour
six vierges. Puis il a opéré la délivrance de la suite des sujets de la passion
du Sauveur, la flagellation, le couronnement d'épines jusqu'au crucifie-
ment de Jésus-Christ et la descente de la croix. Revenant ensuite sur la
gauche, il découvrit Jésus-Christ au tombeau, sa résurrection et son appa-
rition à Madeleine, son ascension, la descente du Saint-Esprit et le juge-
ment. Continuant son œuvre, il mit au jour sept tableaux figurant les œu-
vres de miséricorde. Ces sujets sont traités avec un sentiment profondément
touchant. Dans chaque tableau, Jésus-Christ accompagne invariablement
les nécessiteux; — ceux qui sont affamés, altérés, qui manquent de vête-
ments, qui sont malades, — et sollicite la charité auprès de ceux qui vont
leur ouvrir les trésors de la miséricorde chrétienne. C'est l'expression lit-
térale des paroles : «Tout ce que vous donnez au dernier de mes frères en
«mon nom, c'est à moi que vous l'aurez donné.»
«Un dernier tableau qui termine simultanément la série des sujets de In
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passion et celle des œuvres de miséricorde, n'a pu être déchiffré encore.
«Remarquons quelques particularités dans ces tableaux :
«Dans la résurrection, Jésus-Christ n'est point représenté sortant du
tombeau, car personne, en effet, ne l'a vu sortir. Mais d'un côté on aper-
çoit une feinme portant un pyxide d'aromates, d'un autre côté, un ange
(jui ini apprend que le Sauveur est ressuscité. Mais dans le même tableau
on voit In jiremière apparition de Jésus-Christ à sainte Madeleine; le Sau.-
vcur étend les mains sur elle, et semble lui dire : Ne me touchez pas.
L'ascension n'est pas figurée au moment où le Sauveur s'élève de terre et
va se perdre dans les nues; mais on le voit donnant ses derniers avis aux
disciples, remettant la clef à saint Pierre et disant à tous: Allez enseigner
toutes les nations. Dans la Pentecôte, le Saint-Esprit ne descend pas sous
forme de langues de feu, mais sous celle de rayons. Dans le jugement, on
remarque aux côtés de Jésus-Christ Marie, sa mère, et Jean, le précurseur.
Enfin, dans le tableau du crucifiement, l'artiste, pour allonger suffisam-
menl la lance du soldat qui perce le côté du Sauveur, place ce soldat à un
étage plus bas que les autres figures.
«Il règne dans toutes ces compctsitions la touchante naïveté qu'on a pu
constater déjà dans les précédentes, et, en tout cas, elles sont dignes de la
sollicitude que notre Société leur a vouée et qu'elle leur conservera.
«Ce n'est pas tout. Le transept sud, au-dessus de la dernière série de
tableaux que nous venons de nommer, porte des traces d'autres peintures
encore qu'on se propose de dégager dans une campagne prochaine.
«Le transept nord, on l'a dit et répété, porte également sur toutes ses
surfaces des tableaux muraux , mais le peu qu'on y a fait pour les rendre
à la lumière, ne permet point de déterminer, soit la série, soit la valeur
des sujets que recouvre encore le linceul blanc. Il est probable pourtant
qu'on y découvrira un certain nombre de miracles opérés soit par le Sau-
veur, soit par les apôtres; peut-être les actes et le martyre de ces derniers.
On a constaté aussi des vestiges de fresques sur la longue surface du mur
collatéral nord. Espérons que le jour n'est pas loin où on pourra dire à
tous ces morts : Levez-vous et sortez de votre tombe séculaire!
«cNous nous permettons de terminer notre rapport par une demande
adressée à la munificence de la commission de notre Société.
«La campagne de 1863 pour le débadigeonnage est terminée et on ne
pourra reprendre ce travail qu'au printemps. 11 reste à employer, pour
décalquer les meilleurs tableaux, une somme de 200 fr. votée depuis un an;
de plus 300 fr. récemment votés pour continuer la découverte des pein-
tures. Mais un travail plus urgent et qui ne comporte guère de remise.
~ 95 —
c'est l'abaissement du niveau actuel rie l'avant-chœur, pour le remettre en
harmonie avec l'abside. Celle-ci est aujourd'hui à un niveau plus bas que
l'avant-chœur, et, raisonnablement, cela ne saurait durer. Ce travail rentre
à plus d'un titre dans la catégorie de ceux que vous tenez à honneur d'en-
courager par vos intelligentes contributions. Restaurer, fort souvent c'est
conserver. L'abaissement du chœur à son niveau primordial restituera au
transept les bases de ses piliers et de ses colonnes , les rendra à l'air et à
la lumière et les soustraira à l'humidité qui les ronge. De plus, on se pro-
met, et les fouilles antérieures autorisent cet espoir, de découvrir parmi
les décombres amoncelés dans le transept d'intéressants fragments des sta-
tues, des ornements provenant de l'ancien jubé, et des inscriptions tumu-
laires qui abondaient dans l'abbaye de Wissembourg. C'est à ce double
point de vue que nous pensons qu'une allocation de 300 fr. sera bien reçue
et deviendra fructueuse. Le travail des fouilles pourra être entrepris dans
la saison d'hiver. C'est dans ce but que nous avons l'honneur de vous de-
mander ce voté, nous pouvons en toute sûreté nous présenter comme or-
ganes de la légitimité du vœu qu'on nous a exprimé à Wissembourg.
« Notre Société patronnera ainsi jusqu'à la fin et dirigera jusqu'à un cer-
tain point une intelligente et féconde œuvre de conservation et de restau-
ration. La campagne d'hiver ne sera pas stérile; car on achèvera de rendre
au sanctuaire de la basihque son niveau primitif et on pourra sérieusement
songer à entamer les nefs dans la prochaine campagne d'été. Notre exem-
ple, on l'espère, influera sur les décisions de la municipalité, qui voudra
ne pas retirer son concours à une entreprise dont le bien et l'éclat rejail-
lissent sur la cité de Wissembourg. »
Le comité vote des remercîments à la commission.
Le rapport cependant ne paraît pas pouvoir être accepté dans toutes ses
conclusions.
M. Morin fait observer que l'église de Wissembourg est un monument
classé, et que dès lors l'abaissement du sol pourrait être, de la part de la
Société, un empiétement qui serait hors de ses attributions et auquel elle
ne saurait pas être autorisée à contribuer de ses deniers.
Cette manière de voir est partagée par M. Bœrsch.
M. le baron de Schauenburg estime que la question est mal posée. Il
s'agit, au fond, selon lui, non d'un travail de remaniement d'une partie du
monument, mais plutôt d'un travail d'investigation. Déjà, en dégageant le
socle des piliers, on a trouvé des statues d'une grande valeur, et en con-
tinuant les recherches , il est à peu près certain que l'on retrouvera d'au-
tres objets aussi importants, notamment, peut-êtie la série des dalles Inmn-
— 96 -
laires des abbés de la collégiale de Wissembourg. C'est donc plutôt de
fouilles que de réparations qu'il s'agit, et dès lors la Société, en s'y inté-
ressant, ne saurait sortir de ses attributions. C'est un crédit nouveau et
non pas un virement qui est demandé. ^
M. Bœrsch, tout en admettant la justesse des observations de M. de
Schauenburg, émet le vœu que M. le curé de Wissembourg présente sa
demande motivée dans le sens indiqué.
Le secrétaire fait observer que la somme demandée pourrait être attri-
buée sur le chapitre f^ du budget, qui présente encore des fonds disponi-
bles, et qui d'ailleurs est consacré aux allocations pour fouilles, gratifica-
tions, transports, etc.
M. de Schauenburg pense que la ville de Wissembourg s'associera à
cette dépense, d'autant plus que c'est en même temps un travail de con-
servation du monument, les soubassements des colonnes se détériorant
de plus en plus par la manière dont ils sont actuellement enterrés.
Le comité vole une somme de 300 fr. pour les travaux projetés, à prendre
sur le chapitre i®"" du budget.
M. Morin rend compte des fouilles entreprises par M. Weissacker dans
la forêt de Wœrth-sur-Sauer, auxquelles il a assisté comme délégué de la
Société. Ces fouilles n'ont produit aucun résultat en sa présence, et
M. Weissacker, qui avait promis de le tenir au courant, si postérieurement
il devait trouver des objets de quelque intérêt, n'a pas écrit depuis, ce qui
fait supposer que ses recherches sont restées stériles.
M. le baron de Schauenburg annonce qu'on a découvert une sépulture
romaine entre Krautweiler et Bernolsheim. C'était un dé en pierre avec un
vase en verre rempli de cendres. Le vase a été brisé par les paysans qui l'ont
déterré. Cette pierre a pu être obtenue par suite de la superstition des pay-
sans qui racontent des histoires de revenants sur l'emplacement où elle
était enfouie, et qui ont craint d'attirer dans leurs demeures, en l'y trans-
portant, les êtres mystérieux signalés par la tradition. Il appuie sa com-
munication du rapport suivant de M. Beilstein, agent voyer, accompagné
d'un dessin exécuté avec le soin que met ce fonctionnaire à tout ce qui
sort de ses mains :
Rapport de M. Beilstein, agent voyer, sur la découverte d'une sépulture
romaine, au canton dit: auf dem Hochatzenheimerfeld, territoire de la
commune de Bernolsheim.
«Dans le courant de la journée de vendredi, 23 octobre 1863, des ou-
vriers de Bernolsheim étaient occupés à extraire de la garance sur une
parcelle du sieur Lagel, Antoine, adjoint au maire de la susdite localité,
— 97 —
quand, tout à coup, l'un d'eux crut trouver de la résistance dans ses afTouil-
lements et toucher un corps solide; il en fit la remarque à ses camarades,
et, redoublant d'efforts, ces ouvriers réunis mirent bientôt à jour une dalle
brute d'environ O^jlS d'épaisseur; ils la soulevèrent, et une urne à deux
anses, posée dans l'excavation d'une pierre de taille de f:|^ d'équarris-
sage se présenta à leurs yeux. Sûrs d'avance d'avoir fait une bonne
journée, ils se mirent instantanément à l'œuvre, soulevèrent l'urne,
la brisèrent, et, au lieu de l'or qu'ils cherchaient, ne trouvèrent dans
l'intérieur du vase que des ossements calcinés, les débris d'un sablier
et un clou rouillé, le tout entremêlé de cailloutis et de terres d'infil-
tration.
4 On sortit néanmoins la pierre sépulcrale qui n'avait pas moins de 0",40
de hauteur, et tout en fouillant à l'entour, on trouva encore une demi-
douzaine d'urnes ordinaires (terre jaunâtre), de plus un petit vase en terre
rouge fine et un plateau de la même matière; toutes ces pièces eurent le
sort de l'urne cinéraire, toutes furent brisées.
«Informé de ce qui s'était passé au Hohatienheimerpfad, un peu au-
dessus de la ferme Lemaître-Chabert, je me suis rendu sur les lieux pour
y recueillir des renseignements et ramasser quelques fragments dispersés
autour de la tombe.
«Quant à la tombe ou pierre sépulcrale elle-même, j'ai obtenu du sieur
Lagel l'autorisation de pouvoir l'enlever pour en faire don à la Société pour
la conservation des monuments historiques d'Alsace. En attendant que je
puisse faire cette transmission , je soumets à la commission le plan exact
des lieux où notre trouvaille a été faite.»
Le comité vote des remercîments à M. Beilslein.
Le président donne communication du rapport suivant de M. Conrath,
architecte de la ville de Strasbourg :
«Dans les fouilles faites depuis le mois de juillet dernier pour la recon-
struction du pont Saint-Martin, j'ai recueilli plusieurs objets dont voici la
nomenclature et la description :
«1°Une amphore, vaisseau en poterie de 0'",80" de hauteur et d'une
contenance de 9'",75, avec une anse des deux côtés et terminé en
pointe. Ces vaisseaux servaient surtout à tenir le vin en réserve, on les en-
fonçait en terre ou on les appuyait simplement à un mur. On les transpor-
tait en passant un bâton dans une courroie fixée aux deux anses. Le bâton
lui-même reposait sur l'épaule de deux hommes.
«L'amphore trouvée est de grandeur moyenne et d'une pureté de forme
peu commune ; elle est complète sauf l'extrémité inférieure de la pointe.
n« SÉRIE. — T. n. — (p.-v.) . 7
— 98 —
Elle porte à la partie supérieure entre les deux anses les traces d'une assez
longue inscription que je n'ai pu déchiffrer.
((2° Un capis, pot en poterie avec une seule anse d'une contenance de
0'",65. En raison du col étroit de ce pot, par lequel le liquide ne pouvait
s'écouler qu'en petite quantité ou goutte à goutte, on l'appelait aussi
guttus.
«On se servait de ces vases pour verser le vin dans la paiera avec la-
quelle on faisait les libations.
«Le gutlus trouvé est entier, sauf un petit trou, la forme ne manque
pas de caractère, mais elle est commune et n'a ni la finesse ni la pureté de
galbe de l'amphore.
« 3° Une patina, un bassin sans anse, moins creux que Voila, servant à
la cuisson de la viande et des légumes, et plus profond que la paiera qui
ressemblait à une soucoupe.
« Ces vases avaient souvent un couvercle et servaient à un grand nombre
d'usages, mais principalement aux opérations culinaires et pharmaceu-
tiques.
« Ce vase est entier, mais sa forme est commune.
«4° Une lampe à huile en terre cuite avec une petite poignée d'un côté
et un bec de l'autre pour la mèche; au centre l'orifice, servant à verser
l'huile dans la lampe.
«Cette petite lampe, quoique fendue, est parfaitement intacte; elle est
d'une grande finesse et se distingue de l'ordinaire par un petit bord ou
bourrelet destiné à ramener dans la lampe l'huile qui pouvait sortir par
l'ouverture de la mèche.
« 5° Plusieurs débris d'amphores de form.es différentes de celle restée
entière, deux cols de capis plus grands que les guttus, un guttus sans col,
un petit pot ébréché d'une grande finesse de galbe et dont je n'ai pu trou-
ver ni le nom, ni l'emploi, un morceau d'un vase plat circulaire dont le
diamètre extérieur était de 0"\84, et la hauteur de 0"\19. Ce plat me
paraît trop grand pour avoir pu être un cutinus, sorte de vase sur lequel
on servait des légumes, du poisson et de la volaille; il paraît avoir appar-
tenu plutôt à un pellavium ou bassin pour laver les pieds.
«6° Deux monnaies en cuivre, dont l'une de l'empereur Adrien, la se-
conde, plus petite, me paraît indéchiffrable; deux instruments tranchants,
auxquels il m'est impossible d'assigner une date précise.
« 7° Trois morceaux de parchemin paraissant avoir appartenu à un missel
du quatorzième ou quinzième siècle.
«Il esl impossilile de préciser à quelle profondeur ces objels se Irou-
— 99 —
vaient, ils pouvaient avoir glissé de la surface ou à peu près dans la fouille,
et de là à la profondeur où on les a trouvés.
«Tous ces objets sont à la disposition de la Société; je vous prie de
vouloir me désigner ceux qui vous paraissent assez intéressants pour de-
voir être conservés.
« J'ai indiqué en marge les croquis aussi exacts que possible de ces ob-
jets au cinquième de leur grandeur.»
Le comité vote des remercîments à M. Conrath.
Le président donne communication d'un envoi transmis par M. le Préfet;
c'est une demande de concours de la Société Édtienne qui a entrepris la
création d'un musée lapidaire.
Le comité passe à l'ordre du jour.
Le président annonce au comité qu'il s'agit de s'occuper i^ du local pour
les réunions du comité; 2° de la fixation du jour de l'assemblée générale.
Quant à la première question, il fait observer que, déjà pour la séance
actuelle, les travaux entrepris en ce moment à la bibliothèque ont néces-
sité le déplacement du comité, qui n'a dû le local qu'il occupe en ce mo-
ment qu'à la bienveillance de M. le Préfet. De plus, le nouveau bibliothé-
caire insiste pour que la Société reprenne les livres qu'elle a déposés à la
bibliothèque, pour éviter toute confusion ou réclamation ultérieure. Cette
mesure doit, du reste, être désirée par le comité lui-même pour faire
cesser un état de chose irrégulier, susceptible de porter préjudice aux in-
térêts de la Société. Les vitrines déposées dans la salle basse de la biblio-
thèque n'ont pas fait jusqu'ici l'objet d'aucun pourparler. Le président émet
en terminant l'opinion, que le local de la bibliothèque est insuffisant, in-
commode, ne présentant pas toutes les garanties que le comité doit désirer,
et qu'il est dès lors urgent de prendre une décision à cet égard.
Après une discussion animée, le comité décide la nomination d'une
commission pour s'occuper de la recherche d'un local convenable. ^ La
commission désignée se composera de M. le président, de M. le colonel de
Morlet , de MM. Morin et Ileitz.
L'ordre du jour appelle la fixation de l'assemblée générale. Le président
propose le jeudi, 10 décembre. L'ordre du jour comprendra les différents
rapports réglementaires, la lecture de divers mémoires, le remplacement
ou la réélection des membres sortants du comité, la nomination de mem-
bres honoraires, la distribution et le rappel de médailles, et diverses mo-
tions d'ordre.
Le comité adopte la journée du 10 décembre pour la tenue de l'assem-
blée générale, ainsi que l'ordre du jour indiqué par le président, ot décide
— 100 —
que, tle même que les années précédentes, il proposera une liste rie mem-
bres pour remplacer ceux dont les pouvoirs ont expiré, ou qui, par un
motif quelconque, ont cessé de faire partie de la Société.
Le président propose, de concert avec M. le colonel de Morlet, la nomi-
nation comme 'membre honoraire à l'assemblée générale de M. Linden-
schmitt, conservateur du musée de Mayence. — Adopté à l'unanimité.
Quelques membres proposent ensuite des médailles et des rappels de
médailles pour des personnes qui ont rendu des services à la Société.
Ces propositions seront discutées à la prochaine séance, ainsi que le
choix d'un membre du comité en remplacement de M. le professeur Jung.
M. Ileitz soumet au comité une pierre sculptée trouvée dans la maison
de M. Hoffmann, propriétaire, rue des Cordonniers, et que M. Scherdhn,
professeur au Gymnase, met à la disposition de la Société. — C'est un frag-
ment qui paraît provenir d'un meneau de fenêtre; il représente une figure
humaine tenant une espèce de gobelet. Le style accuse le douzième siècle.
C'est donc un des rares débris d'une habitation particulière de cette époque
parvenus jusqu'à nous.
Remercîments à M. Scherdlin. — Dépôt au musée.
M. le baron de Schauenburg présente six médailles de la part de M. Beil-
stein, agent voyer. — Remercîments à M. Beilstein.
M. Straub annonce que l'ancienne église des dominicains de Guebwiller
est devenue la propriété de la ville. On a commencé par y enlever une
couche de badigeon et on a découvert des figures d'apôtres, un gigan-
tesque saint Christophe, enfin, une petite peinture qui paraît représenter
le peintre lui-même offrant son travail à l'enfant Jésus avec la suscription :
« dis machte Werlin zum hörnen. »
Le comité prie M. Straub de rédiger une note sur ces découvertes.
La séance est levée à une heure.
Séance du Comité du 7 décembre I86S.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Bœrsch, Eissen, Ileilz, Klotz, Morin, colonel de Morlet,
Saum, Siffer, Straub.
Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté.
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Le président annonce avoir écrit les lettres suivantes :
A M. le Préfet du Haut-Rhin , pour le prier de mandalci' la somme de
500 fr., volée par le Conseil général du Haut-Rhin, en faveur de notre
Société, pour l'exercice 1863;
AM. Vincent, secrétaire de la commission historique du Nord; annonce
de l'envoi prochain de notre Bulletin , par l'intermédiaire de M, le Minisire
de l'instruction publique ;
A M. Scherdlin, pour le remercier de l'envoi d'une pierre sculptée du
douzième siècle;
A M. de Bougerel, inspecteur principal du chemin de fer de l'Est; prière
de transmettre à M. Jacqmin, directeur de l'exploitation à Paris, une de-
mande de rabais de 40 p. 100;
A M. Nicklès, à Benfeld; détails sur la séance du 2 novembre quant
à son mémoire d'Heluehis;
A M™^ veuve Jung; lettre de condoléance;
A M. Véron-Réville, pour lui demander les pièces justificatives des
comptes des travaux dans le Haut -Rhin, pour le rapport de M. Ringeisen;
A M. l'architecte de l'arrondissement de Saverne, pour lui demander
une note sur les travaux dans les châteaux des environs de Saverne;
A M. Coste, juge à Schlestadt, au sujet de sa carte des seigneuries d'Al-
sace;
A M. Paul Risteihuber; accusé de réception d'un mémoire sur la marche
d'Aquilée;
A M. Ringeisen; — envoi du dossier de M. Ortlieb, pour les châteaux
d'Eguisheim (dépenses).
Le secrétaire dépose : Oberbayerisches Archiv für vaterländische Ge-
schichte von dem historischen Verein von und für Oberbaijern, t. XXII,
fascicules 1, 2, 3;
M. le colonel de xMorlet: une carte des voies romaines qui convergent
sur Mackwiller;
M. Heitz : Les Sociétés politiques de Strasbourg pendant les «nnees 1790
à 1795. — Extraits de leurs procès-verbaux, 1 vol.;
Schriften der Universität zu Kiel aus dem Jahrgang i863, Band IX.
Kiel, 1863, in-8";
Bulletin de la Commission historique du département du Nord, t. V, VI
et VII. Lille, 1863, in-8°;
Mémoires de la Société d'émulation de Montbéliard. 1863, in-8°;
Revue des Sociétés savantes des départements , septembre et novembre
1863, in-8°;
— 102 —
licviie archéoloijique. Paris, 1863, in-8";
Anatole de Barthélémy, la Numismatique de 1862. Paris, 1863, in-8°.
Le président propose, au nom de M. Stoffel, juge à Wissenilsourg, les
membres suivants :
M. Auguste Stoffel, père, rentier à Schlestadt;
M. Jules Stoffel, avocat à Schlestadt;
M.Léon Stoffel, capitaine d'artillerie à la manufacture d'armes deMulzig.
Leur admission est prononcée.
Il invite le comité à s'occuper du remplacement de M. le professeur
Jung comme membre du comité. M. Ueussner, professeur au Gymnase et
bibliothécaire du Séminaire protestant, ayant réuni tous les suffrages, est
proclamé membre du comité, sauf ratification de l'assemblée générale.
Le président dépose une demande, signée de plusieurs membres, à l'effet
de changer le jour et l'heure des réunions du comité.
Le comité, n'étant pas en nombre pour décider cette question, et l'assen-
timent de l'assemblée générale étant d'ailleurs exigé par le règlement, dé-
cide qu'elle seia mise à l'ordre d'une prochaine réunion.
M. Heitz soumet au comité une carte dressée par feu M. Godefroi Schweig-
hoBuser, indiquant les découvertes archéologiques faites en Alsace, dont
M. Jung avait confié la reproduction à M. Simon, et destinée au Bulletin. Il
demande la nomination d'une commission pour examiner la meilleure
manière d'utiliser cette carte dans l'intérêt de la Société et de la science
archéologique.
M. Saum propose de commencer par acheter la pierre qui est la pro-
priété de M. Simon, lithographe. On décidera ensuite comment elle sera
employée.
Le comité charge M. Saum de s'aboucher à cet effet avec M. Simon.
Le président annonce qu'une nouvelle démarche a été faite auprès de
lui pour l'acquisition du médailler alsatique de feu Doiian. On offre de le
céder pour 20,000 francs, payables en dix annuités.
Le comité passe à l'ordre du jour.
M. le colonel de Moiiet présente un plan du château mérovingien de
Kirchheim, dressé par M. Kast, agent voyer à Wasselonne. Ce travail, fort
bien fait et fort intéressant, reçoit toute l'approbation du comité.
M. le colonel de Morlet demande l'annulation d'un crédit de 200 fr.,
voté pour des travaux au Ringelberg, qui n'ont pas pu être entrepris. Il
soumet ensuite des dessins de découvertes faites par M. Ringel. Ce sont
des tombes i'ranques sises près de Mackwiller, et dont l'une a été creusée
dans un fragment de frise romaine^
— 103 —
H demande que ce crédit de 200 fr. soil reporté aux reclierclies entre-
prises par M. Ringel.
Le comité, pour la régularité de la comptabilité, annule dans son bud-
get ledit crédit de 200 fr., et vote une somme de 300 fr. pour les travaux
de M. Ringel.
Le colonel de Morlet dépose des objets en fer trouvés par M. Kast.
Le trésorier demande une somme de 65 fr. à ajouter aux 300 fr. votés
pour la confection d'une vitrine, qui a dû recevoir des additions, et qui,
par conséquent, a dépassé le prix fixé dans le principe.
Le comité vote les 65 fr. demandés.
Le trésorier ajoute, de plus, qu'il a présenté le compte de 1802, dans la
séance du comité du mois d'avril, avec un excédant de recette de 6,540 fr.
Depuis lors, la perception s'exécute d'après un autre mode. MM. les rece-
veurs généraux et particuliers et percepteurs ont bien voulu prêter leur
concours gratuit, ce qui a simplifié et facilité infiniment la rentrée des
cotisations. Il demande à exprimer dans l'assemblée générale, et à l'occa-
sion de son rapport, la reconnaissance que ce bienveillant concours a pro-
voquée au sein du comité.
Le comité s'associe avec empressement à cette proposition.
Le président annonce que M. Coste demande à mettre la publication de
ses cartes sous le patronage de la Société.
Le comité accorde ce patronage avec empressement.
La séance est levée à une heure.
Assemblée générale, le 10 décembre 1863.
Présidence de M. MIGNERET, Préfet du Bas-Rhin, Président honoraire.
La réunion se tient dans la salle du Conseil général du départenjenl,
mise à la disposition de la Société par M. le Préfet du Bas-Rhin.
Dans la salle d'entrée et dans la salle des séances se trouvent exposés
les objets suivants :
Un calque d'une partie des fresques de l'église Saint-Pierre et Saint-Paul
de Wissembourg, par M. Ohleyer;
Une photographie d'un groupe de tombes franques, découvertes, en
1862, à Lorentzen, par M. Ringel;
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Objets trouvés dans les tombes de Lohr et Luperg (Durstel);
— — du Lechberg;
— — d'Odratzheim (don de M. Kast) ;
— — de Hochfelden (don de M. Schnœringer) ;
Plan du palais mérovingien de Kirchheim (par M. Kast);
Plans relatifs aux recherches archéologiques de M. Ringel, surtout à
Mackwiller;
Grandesalle: objets (vases, amphores; feuillets manuscrits du quinzième
siècle), trouvés près du pont Saint-Martin à Strasbourg (juillet 1863),
présentés par M. Conratli;
Reproduction chromo-Ulhographique des bijoux trouvés à Gerstheini et
à Odratzheim (croix, fibules, une buila; pâtes émaillées);
Objets envoyés par M. Nicklès, de Benfeld:
Des kelt, etc., en pierre, bronze, fer, trouvés près de Benfeld, sur l'em-
placement de l'ancien Helvetus ;
Urnes cinéraires, trouvées à Hœrth, par M. de Schauenburg.
A deux heures, M. Migneret, préfet du Bas -Rhin, président honoraire,
prend place au bureau et déclare la séance ouverte.
A côté de lui prennent place au bureau: MM. Braun, président du Di-
rectoire de la Confession d'Augsbourg; Delcasso, recteur de l'Académie;
Barlhe de Sainte-Fare, conservateur des forêts, le président, le secrétaire
et le trésorier de la Société.
Environ soixante membres se sont rendus à cette réunion.
La parole est donnée à M. le président Spach , qui lit le discours sui-
vant :
«Messieurs, je crois répondre à un sentiment général de l'assemblée,
en commençant par payer un tribut de regrets et d'hommages à la mé-
moire d'un collègue qui nous a été enlevé d'une manière bien inattendue,
il y a deux mois. Des paroles éloquentes ont été prononcées sur la tombe
de M.Jung; et à la rentrée solennelle de l'Académie, M. le recteur a retracé
les mérites du savant et de l'éminent bibliothécaire dans des termes qui
ne laissent, en vérité, plus rien à dire après lui. C'est le digne couronne-
ment d'une laborieuse existence, tout entière vouée au culte de la science
et au service des travailleurs intellectuels de tous les degrés, que cette
justice rendue à un noble défunt par ses pairs, sur les bords mêmes du
sépulcre, qui engloutit la dépouille mortelle seulement, et laisse intacte,
dans le souvenir des amis et des parents, la forme immortelle de l'esprit.
«M. Jung, vous ne l'ignorez point. Messieurs, a été l'un des fondateurs
de notre Société. Il a pris part, dès le début, à tous les travaux du comité;
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il a, en grande partie, élaboré le règlement complémenlaire des statuts,
que nous avons pu présenter à voire acceptation, en février 1850, deux
mois à peine après le premier appel, fait par M. Migneret, aux sympathies
des Alsaciens, pour les monuments historiques de notre province. 11 a
dirigé, dans nos commencements encore incertains, les premiers pas de
celui qui a l'honneur de vous entretenir de cette mémoire chère et vénérée.
Mes collègues et moi, nous n'avons point de couronnes à déposer sur la
tombe à peine fermée du bibliothécaire de la ville de Strasbourg; ce serait
un hommage tardif; — le digne héritier de Schœpflin et d'Oberlin est
placé dans une région meilleure, au-dessus de nos éloges; mais le témoi-
gnage que nous lui rendons est le cri spontané qui s'échappe de nos
cœurs.
«Notre Bullethi porte, dans toutes les livraisons, les traces de l'active
intervention de M. Jung, au miheu de nos débats et de nos travaux. L'an-
tiquité romaine, l'épigraphie, la numismatique, trouvaient en lui un intel-
ligent et ingénieux interprète. Le jugement critique porté par M. Jung sur
les découvertes vraies et controuvées de Rheinzabern a laissé un long
retentissement dans le monde érudit de la vallée rhénane et des pays limi-
trophes. Infatigable comme un jeune homme,- il vérifiait, jusque dans ces
derniers temps, sur place, les débris du passé, et venait, dans ses impro-
visations simples, lucides, convaincantes, nous apporlei' le fruit de ses
promenades et de ses études archéologiques. Et puis, il ne se bornait pas
à l'exploitation d'un seul champ; son savoir multiple l'avait familiarisé avec
toutes les époques de notre histoire locale. Dans une remarquable mono-
graphie sur le château de Lœwenstein , il nous a pour ainsi dire révélé la
sinistre figure de Jean d'Albc, qui restera désormais inscrit dans notre
mémoire comme l'un des représentants de l'époque désastreuse des cheva-
liers-oiseaux de proie.
«Dans les derniers temps, M. Jung, bientôt septuagénaire, éprouvait,
sans vouloir s'en rendre compte peut-être, un déchu de ses forces, et
sentait les matériaux accumulés autour de lui à la bibhothèque, déborder
son activité jusque-là incessante. En transférant à la bibliothèque nos
séances et une partie de nos collections, nous avons, je le sais maintenant,
contribué à grossir ses embarras, qui tenaient surtout à un manque d'es-
pace. Pour ma part, je lui demande, mentalement, pardon de nos impor-
tunités forcées. L'immense lacune, qu'il laisse dans nos réunions, et en
dehors, qui peut mieux la sentir et l'apprécier que moi? car il était mon
conseil comme celui de plusieurs de mes collègues. Toujours nous nous
souviendrons de l'inépuisable complaisance du bibliothécaire cncyclopé-
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dique, qui se prodiguait à ses amis, et se donnait même aux inconnus,
pourvu qu'il entrevît en eux des travailleurs sérieux. C'est, qu'en effet, la
science commande cette abnégation et cet oubli de soi-même que prati-
quait notre ami, très-souvent avec la certitude d'obliger des ingrats. Quant
aux membres du comité, on n'aura point à leur reprocher d'avoir, en celte
occasion, manqué de reconnaissance; ils l'ont exprimée d'une commune
voix, et se tiennent pour assurés qu'ils trouveront de l'écho dans votre
assemblée.
«J'ai donc l'honneur, Messieurs, de vous proposer de vouloir bien con-
signer au procès-verbal de votre réunion de ce jour, que feu M. le pro-
fesseur André Jung , bibliothécaire de la ville de Strasbourg, et membre
de notre comité d' administration , a bien mérité de la Société pour la
conservation des monuments historiques d'Alsace, et qu'il a puissamment
contribué à la prospérité de notre œuvre, en répondant, dès le principe,
avec une intelligente activité, aux intentions du fondateur de notre asso-
ciation.
«Vous aurez, Messieurs, à vous prononcer, dans le courant de cette
séance, sur l'admission définitive des membres que nous avons préalable-
ment admis au sein du comité, pour essayer de remplir les lacunes lais-
sées par des circonstances que relate l'ordre du jour imprimé. Nous pro-
posons à votre choix :
«1° M. le curé Siffer, qui, depuis la fondation de notre Société, a fait
preuve de bonne volonté pour nous, en nous communiquant des mémoires
sur les antiquités romaines de la Basse-Alsace;
«2° M. Saum, qui, à plusieurs reprises, a doté nos archives de notices
sur les antiquités gallo-romaines et les châteaux des Vosges;
<i^^ M.Beussner, gendre de feu M.Jung, son successeur dans une partie
de la bibhothèque, et justement apprécié dans le monde savant comme
philologue, par un mémoire couronné.
« Gomme les années précédentes, quelques noms auront à subir l'épreuve
de votre suffrage, et votre président doit déposer entre vos mains son
mandat annuel. — Mes collègues et moi, nous attendons avec confiance
votre verdict, qui devra aussi se baser sur l'appréciation des rapports et
des comptes rendus que nous allons tout à l'heure vous soumettre.
«Quant à moi. Messieurs, je n'ai qu'à renouveler ma profession de foi,
faite au sein de votre assemblée, il y a sept ou huit ans déjà. Mon con-
cours demeure offert à la Société, quelque place qu'elle juge convenable
de m'assigner au nombre de ses travailleurs. J'ai eu le bonheur jusqu'ici
de ne point manquer au moins à la partie matérielle de mes fonctions :
— 107 —
sur 120 réunions, tenues depuis décembre 1855 jusqu'à ce Jour, j'ai pu
assister à H8; mes devoirs officiels, qui me retiennent à peu près en per-
manence à Strasbourg, ont eu, pour la Société, l'avantage de lui offrir
un point stable et central; mais l'assiduité n'est que le devoir élémentaire
d'un président; et personne mieux que moi n'estime à toute leur valeur
le concours intelligent, zélé, que j'ai trouvé dans tous mes collègues, sans
lesquels mon action eût été frappée de stérilité. Nous ne sommes rien ou
peu de chose isolément; serrés les uns contre les autres, nous acquérons
peut-être quelque valeur.
«Vous me permettrez de rappeler ici que de nouvelles relations ont été
établies avec plusieurs sociétés archéologiques, françaises et étrangères.
Et, à ce propos, je prends la liberté de proposer, comme membre hono-
raire à inscrire dans notre liste, M. Lindenschmitt, conservateur du beau
musée de Mayence, et secrétaire de la Société archéologique de cette ville.
Notre collègue, M. le colonel de Morlet, a déjà entamé des rapports offi-
cieux avec ce savant archéologue, qui promet à notre musée naissant, de
précieux moulages d'objets antiques.
((Dès le mois de février 1857, nous avons admis comme membre hono-
raire, M. WicUmann, le président de cette même société de Mayence. Ceux
de nos collègues qui ont visité les musées de la vallée rhénane, n'ont eu
qu'à se féliciter de trouver, dans les cités allemandes des bords du Rhin,
des liens déjà formés, qui leur donnaient immédiatement un droit d'ad-
mission et de confraternité dans ce monde savant.
«Nous ne perdons point de vue l'établissement définitif d'un musée.
Vous savez tous, Messieurs, combien de difficultés s'opposent, dans notre
ville, à toute entreprise de ce genre, combien les localités sont rares et
peu appropriées à un pareil emploi. En attendant que M. le Maire puisse
réaliser ses intentions, et abriter dans un édifice spécial la collection des
tableaux et celle des antiques, nous aviserons à nous caser aussi conve-
nablement que possible, et à réunir nos livres, nos armoires, nos vitrines,
qui maintenant sont placés, les uns aux Archives, les autres à la Biblio-
thèque.
«Ceci me conduit à redire (jue nos collections se sont considérablement
augmentées, dans ces derniers temps, grâce aux découvertes importantes
de sépultures antiques faites sur plusieurs points du département , et dont
nos procès -verbaux ont rendu compte en temps utile. Une partie des mé-
dailles qui ont été décernées celte année et les années dernières, se rap-
portent à ces intéressantes fouilles. Je n'y reviens point ici, pour échapper
aux redites; vous vous joindrez à nous, Messieurs, pour remercier les
— 108 —
liunirnes zcléb qui oui oauvé de la deslrucliun ou do la veiilu les ubjels
préeieux auxquels je fais allusion.
«Je ne puis, dans ce court aperçu, rendre justice à chacun; mais je
dois rappeler en première ligne les travaux incessants de M. le pasteur
Ringel, ceux de M. Nicklès, ceux de M. Kast. Vous en trouvez la preuve
patente, sous vos yeux, à l'entrée même de la salle de nos réunions.
((Indépendamment de l'antiquité celtique, romaine ou franque, le moyen
âge aussi a trouvé des travailleurs qui ont mis à jour ses trésors enfouis
ou oblitérés; les travaux sur les fresques de l'église de Wissembourg, ceux
dans l'église de Walbourg ont attiré déjà, je pense, votre attention.
«Dans le Haut-Rhin, nos collègues du comité de Colraar se réunissent
fréquemment, pour donner une impulsion incessante aux travaux de con-
servation , de découvertes et d'érudition. Notre Rullelin vous familiarise
avec leurs travaux, auxquels nous applaudissons de bon cœur, convaincus
(jue cette émulation, sans nuire à notre confraternité et à notre action
unitaire, tournera au profit du but que la Société poursuit.
«Cependant, Messieurs, veuillez bien vous dire que les comités ne sont
(]ue des ouvriers un peu plus fréquemment en vue et à l'œuvre que les
autres membres de l'association. Chacun de vous peut contribuer, pour
une bonne part, à notre réussite; et notre prospérité future dépendra,
finalement, toujours du plus ou moins de sympathie que nous rencontre-
rons parmi vous. Votre concours matériel, moral et intellectuel, constitue
la sève de l'arbre que nous avons essayé de planter; sans vous, il languira;
avec vous et par vous, il jettera des racines de plus en plus solides et se
couronnei'a d'un feuillage touffu. Ne donnez point, je vous prie, un démenti
à mes vœux et à mes espérances; et que chacun de vous, Messieurs, con-
sente à recruter des adhésions parmi nos concitoyens de tous les points
de l'Alsace.»
Ce discours est couvert d'applaudissements et ses conclusions sont volées
par acclamation.
La parole est donnée ensuite à M. Eissen, secrétaire, pour le rapport sur
les travaux littéraires et graphiques delà Société pendant l'année 1863.
«^Messieurs, l'année qui vient de s'écouler a apporté des matériaux nom-
breux et remarquables à l'édifice que nous élevons ensemble à la mémoire
de nos prédécesseurs dans ces régions.
«L'ouverture des nouvelles voies ferrées, d'autres travaux entrepris
dans un but archéologique spécial, ont donné lieu à une foule de décou-
vertes précieuses, et ont motivé, soit de la part de leurs auteurs, soit de
la part de plusieurs membres de la Société, la rédaction de notes et de
— 100 —
mémoires du plus haut intérêt. D'autres travaux élaborés dans le silence
du cabinet et basés sur les renseignemenis fournis par des cbartes ou des
documents tirés de la poussière et de l'oubli sont éoalenienl venus aug-
menter nos richesses littéraires.
«La collaboration si zélée de MM. les agents voyers a peuplé nos cartons
d'un certain nombre de plans et de dessins entièrement inédits, et exécutés
avec la perfection qui est une des nombreuses qualités de ces utiles et
modestes fonctionnaires, et le Comité a souvent eu l'occasion de leur
adresser ses plus chaleureux remercîments. Vous trouverez des preuves
nombreuses de mon dire dans les livraisons du Bulletin en cours de pu-
blication,
«Nos relations avec des Sociétés poursuivant le même but se sont encore
étendues, et nous avons à ajouter aux Sociétés avec lesquelles nous échan-
geons nos publications, la Société historique de Berne , la Société juras-
sienne, de Porenti'uy, la Commission historique du Nord, à Lille, et la
Société historique de Styrie, à Gratz.
«Je vais avoir l'honneur. Messieurs, de dérouler devant vous l'énumé-
ration des travaux littéraires et graphiques accomplis. Vos moments sont
précieux, et je m'abstiendrai de tout développement et de luute considé-
ration générale, persuadé que vous les ferez beaucoup mieux (jue moi
dans votre esprit.
PÉRIODE G.\LLO-ROMAINE ET TEMPS ANTÉRIEURS.
i< Maximilien de Ring. Mémoire sur les fouilles entreprises par lui dans
les tombelles celtiques de la forêt communale de Dessenheim, avec dessins
dans le texte.
« Coste. Lettre et plan des fouilles faites à Grussenheim et qui déter-
minent l'auteur à placer près de cette commune l'antique x\rgentovaria.
(i.e. F. Oppermann. Notice sur quelques antiquités de la montagne de
Sainte-Odile et des environs.
« Colonel de Morlet. Note sur les tumuli de la forêt de Br-imath, avec une
planche lithographiée.
•d-Id. Notice sur quelques monuments de l'époque gallo-romaine, trouvés
sur les sommités des Vosges, près de Saverne, avec des planches et des
dessins dans le texte.
«/d. Note sur des objets d'antiquité trouvés à Gerstheim.
«Siffer. Note sur des sépultures découvertes, en 1(S55, au bord de In
forêt dite Bmhherg, près de Zinswiller.
__ 410 —
« Si/fer. Mémoire sur la grande voie romaine de Brumalh à Seltz.
(ild. Note sm' le monmiient romain de Gerslheim, trouvé du temps de
Schœpflin, et déposé à la bibliothèque de Strasbourg. — Note sur une i;///a
romaine à Oberbronn.
«L. LevrauU. Note sur les découvertes d'antiquités faites à Obernai.
« Jung. Note sur une ornementation complète gallo-romaine d'un sque-
lette trouvé à Lingolsheim.
«A'. Nicklês. Mémoire sur des objets trouvés à Gerstheim, sur la localité
de Gerslheim et sur Schwanau.
((Baron de Schauenburg. Note sur un camp romain présumé sur la
lisière de la forêt de Haguenau.
«L. BenoU. Mémoire sur l'image d'une divinité inconnue.
(< BeUslein. Petite notice sur une sépulture romaine, trouvée près de
Krautweiler, avec dessin.
((ConratJi. Rapport sur des objets d'antiquité romaine, trouvés dans
rill, au pont Saint-Martin, à Strasbourg.
«.Ringel. Dessins de constructions romaines trouvées à Saar-Union.
MOYEN AGE.
« Spach. Lettre d'indulgence de dix-sept cardinaux, en faveur des églises
de Saint-Martin et de Saint -Arbogast, à Surbourg, avec fac-similé d'une
partie du document.
« Id. Mémoire et documents sur une excommunication de la ville de Mul-
house au treizième siècle.
« Sabourin de Nanlon. Rapport sur les tableaux et les autels de Fol-
gensburg.
y ïd. Mémoire sur la statue de sainte Apolhnaire à Ober-Michelbach.
(S. Ring eisen. Note sur l'importance des châteaux d'Eguisheim.
<i.Huot. Mémoire sur les maisons prébendaires du chapitre de Colmar
au quatorzième siècle.
(s-Brièle. Deux chartes originales, l'une de 1276, acte de donation d'une
censé (Hof), dite de Sainte -Adélaïde, à Steinbrunn, au profit de l'abbaye
de Lucelle; l'autre de 1472, sentence arbitrale du magistrat de Strasbourg
contre Henri Beger de Geispolsheim.
<i Si ff er. Note sur l'ancienne commanderie leutonique de Dhan, près de
Zinswiller.
c( Fries. Églises de Sainte-Madeleine, de Saint-Louis et de Sainte-Cathe-
rine à Strasbourg, avec dessins dans le texte.
— 111 —
« Gyss. Mémoire sur l'hôtel de ville d'Obernai.
(i^lngold. Notice sur le château d'Engelburg à Thann.
aMossmann. Traduction d'une lettre de Fr. Sigismond à l'abhé de Mur-
bach, co)ilenant la description raisonnée d'antiques tapisseries que possé-
dait ce monastère.
aBardîj. Note sur l'église de Bermont.
« Strauh. Note sur l'église de Walburg.
a Krämer. Mémoire sur le château de Girbaden.
aZimberlin. Documents sur le château de Landskron.
« Colonel de Morlei. Note sur des tombeaux francs à Odratzheim.
« Ortlieb. Rapport sur les travaux exécutés au château supérieur d'Éguis-
heim,
« Ohleyer. Rapport sur les travaux de recherche de peintures murales
et de déblais à l'église de Wissembourg.
« Guerher. Rapport fait au nom de la commission de la Société sur les
mêmes travaux.
d-Morin. Avis sur les peintures murales à l'éghse d'Altorf.
«.Saum. Note sur un certain nombre de ruines de châteaux à l'extrémité
septentrionale du Bas-Rhin.
<iKast. Note sur des tombes franques à Odratzheim; don fait à la So-
ciété d'une précieuse fibule.
ce Dessins intéressants de tombes de la même époque à Wasselonne.
«Fouilles à Kirchheim pour relever soigneusement les traces du palais
des rois mérovingiens, palais de Dagobert, détruit depuis plus de dix
siècles, et dont Beatus Rhenanus a encore vu d'imposantes ruines, car
il dit au livre III (p. 315) de ses Rer. German. : aVix ullo Elsatiœ loco
majora antiquitatls extare vesiigia. Prominent adhuc, inter minas altis-
simi muri, turrium instar. i> M. Kast a réussi à déterminer l'enceinte com-
plète de ce palais, qui remonte au septième siècle de notre ère, et à en
dresser un plan exact; il a même pu établir, par des fouilles intelHgentes
et laborieuses, la manière dont les fondations étaient assises.
<■< Ringel. A enrichi nos collections de dessins fort curieux de tombes
franques trouvées à Mackwiller, dont l'une est creusée dans un fragment
de frise de l'époque romaine.
«Il est juste de mentionner ici que l'infatigable activité de M. le pasteur
Ringel a valu à la Société une subvention du Gouvernement, sans même
qu'elle en eût fait la demande.
— 112 —
RENAISSANCE ET TEMPS POSTÉRIEURS.
« Müller. Noie sur des armoiries sculptées Irouvées h Beiifeld, et prove-
nant de l'évêque de Strasbourg Li'Opold (16(17 à 1025), ou Léopold-(lnil-
Inume (1025-1 002), les deux princes de la maison d'Autriche.
aSabonrin de Nantou. Mémoire sur Iluningue.
EMBRASSANT DIVERSES PÉRIODES.
c( Thilloy. Mémoire sur Herbitzheim.
«Vous le voyez, Messieurs, le zèle ne s'est point arrêté à la limite ni de
l'une ni de l'autre des deux divisions administratives de l'Alsace; l'émula-
lion a été la même au nord comme au midi, et l'année qui va se terminer
a donné ainsi une consécration éclatante aux paroles si pénétrées que nous
adressa ici même, il y a un an, l'éminent magistrat, notre président hono-
raire, lorsqu'il nous exhorta à ne pas oublier que l'Alsace remonte plus
haut (|ue Mulhouse et descend plus bas que Strasbourg. Les membres de
la Société alsatique ont continué à se tendre une main fraternelle d'une
des extrémités à l'autre de leur beau pays, au plus grand profit de l'har-
monie qui doit régner parmi eux, au plus grand profit de la gloire et de
l'utilité de leurs travaux.»
M. le Préfet procède, après la lecture de ce lapport, à la distribution
des médailles votées par le comité. Il se félicite, en quelques mots partis
du cœur, de la prospérité de la Société, des sympathies qu'elle rencontre
partout, et du concours empressé que lui prêtent de simples amateurs,
ainsi que les fonctionnaires des diverses branches administratives. Des
paroles aussi flatteuses qu'encourageantes accompagnent la remise de
chaque médaille aux divers lauréats.
Ce sont: M. Krämer, curé à Niederhaslach, médaille d'argent; M. Ohleyer,
professeur au collège de Wissembourg, id.; M. Kast, agent voyer à Wasse-
lonne, id.; MM. Huss, Bauer, Dick, gardes forestiers à Ochsenstein, médailles
de bronze. — Rappel de médaille en vermeil et en argent: M. le pasteur
Bingel, à Diemeringen, et M. Beilstein, agent voyer à Brumalh.
M. Klotz, trésorier, présente le rapport financier suivant:
— 118 —
Exposé des Recettes et des Dépenses de l'exercice 1862.
Section V^. — Recettes.
Chapitre I*
ALLOCATIONS DlSlTAILS.
du budget.
Arl. 1*^''. Le reliquat de l'e.xer-
cice précédeiil, esîimé à G,000 î»*^
se compose :
1" Du solde du compte précé-
dent 5,774^60«=
2° D'un lesle du compte de
IIoh-Kœnigsbourg 13 50
5,788 '"lO'^
Chapitre II.
Art. 2. Le produit des cotisa-
tions de l'année, prévu pour 400
sociétaires, à 4,000 »
s'est élevé pour
275 sociétaires du Bas-Rhin,
156 )i du Haut-Rhin,
30 » de Paris,
14 )) dediversendroits,
475' >^ au total de. . . . 4,750 »
En y ajoutant pour dix paye-
ments afférents à l'année 18fi1 . 100 ')
Ensemble .... 4,850 >
Chapitre III.
Art. 3. Les subventions émar-
gées à 1,000 »
ont été :
A reporter 11,000'" »' 1 0.638 •■ 10*^
1. Coupons détachés du registre 490
némissions et exercices 11
Sur l'exercice précédent 10
•Jl
Nombre égal 475
]]• SÉRIB. — T. II. — (H.-V. 1 °
— 114 —
ALLOCATIONS DÉTAILS.
du budget.
Report 11,000^ »'^
1° Du ministère d'État 300 »
2*^ Du ministère de l'instruction
publique 400 >
S^ Du département du Bas-
Rhin 500 »
4° Du département du Haut-
Rhin 2,000 ^)
Ensemble ....
Total des recettes prévues . . . 11,000 >;
Total des recettes effectuées .
Soit un excédant sur les prévi-
sions de 2,838 10
Section 2^^. — Dépenses.
Chapitre I.
Art. I^"". Allocation pour fouilles,
gratifications, transport de fragments
et achat de médailles 1,500^ »*'
Les dépenses ont été :
1° hidemnité à M. le pasteur Ringel
à Diemeringen 500^ »'
2° A MM. de Morlet et Morin, pour
transport de chapiteaux et pierres tom-
bales 131 85
3" A M. Oppermann, pour frais de
fouilles aux monuments druidiques . 18 10
4° Au garde des ruines de Hoh-
Kœnigsbourg 20 ->
5° Acquisition de médailles (extrait
de la note Berger-Levrault) 43 70
6° Au sieur Müller, graveur, pour
les noms mis sur les médailles, note
de 18G1 96 70
7° Au même, sa note de 1862 . . . 44 40
A reporter 1,500^ »"^
10,638^10*^
3,200
13,838 10
854^75*=
854^75'=
— 115 —
ALLOCATIONS DÉTAILS. TOTAUX.
du budget.
'Report 1,500^ ))*-' 854*75'
Chapitre 11.
Art. 2. Frais de publication du Bul-
letin de la Société 1,500 «
Bulletin de la Société 2,800 »
Dépenses faites :
1° Pour le répertoire des premiers
volumes 143 20
2" 11^ série, tome F'", 1''^ livraison . 1,413 75
2*^ livraison 964 45
2,521 40
Art. 3. Frais de bureaux 500 »
Fournitures diverses 120 70
Remboursement de frais à M. Grün
(pour circulaires) 20 »
Affranchissements de la correspon-
dance et des bulletins du président . . 155 25
Id. du secrétaire 6 55
Ici. du trésorier 1 1 80
Gratifications :
Au sieur Fastinger des archives . . 100 »
Au gardien de la bibliothèque ... 30 »
Aux garçons de bureaux de la Pré-
fecture 30 »
480 30
Art. 4. Frais de perception 100 »
Au collecteur de la ville v . 50 »
50 »
Art. 5. Frais de déplacement .... 100 »
11 n'y en a pas eu » »
Art. 6. Frais de reliure et de mobilier 100 »
Il a été payé pour une armoire . , 51 50
51 50
A reporter 6,600'" »*= 3,957 ^95"
116 -
ALLOCATIONS
(lu budget.
Total des dépenses prévues 1,100
Soil une diminution sur les prévi-
sions de 2,808 30
7fQrvC
nepori 0,000 •■ »'■ fi,057'^9r.
Chapitre 111.
Art. 7. Ti'ovaux de conservation
émargés à la somme de 3,500 »
Sommes payées:
1° A M. Ringeisen, pour le château
de Hoh-Kœnisbourg 1,200 »
Id. de Landsberg 300 »
2° A M. Fürst, pour les deux châ-
teaux de Greiffenstein et Geroldseck . 339 40
3" A M. Morin, pour travaux de con-
servation et de badigeonnage aux égli-
ses d'Avolsheim 124 30
4° A M. Straub, pour déblais et
consolidations à l'église de Hunawyhr 300 )i
5'' A M. Ringel, pour les fouilles de
Mackwiller, Lorentzen, etc 800 >
C)^ A M. Rosenstiel, pour complé-
ment de travaux au château de Saint-
Ulrich 170 05
7" A M. Ohleyer, pour travaux de
recherches et de déhadigeonnage à
l'église Saint-Paul de Wissembourg. . 100 ,»
3,333 75
Total des dépenses effectuées . . . 7,291 70
RÉSUMK.
Les recettes effectuées ont été de 13,838 10
Les dépenses se sont élevées à 7,291 70
D'où résulte un excédant de recettes de 6,546 40
(111 31 mars 1803.
— 117 —
Ce coniple rendu clai)t un peu aueieu, vu (ju'il n'a lappuiL qu'à l'exercice
clos de 1862 airêlé au 31 mais dernier, il ne sera peut-être pas sans in-
térêt, Messieurs, d'y ajouter, à titre de renseignement, un aperçu som-
maire de nos opérations en '186o, et de vous faire connaître la situation
financière de la Société à la veille même de votre réunion.
Je commence par les recettes :
Solde du compte de 1862 6,546*40*^
Recettes nouvelles :
Cotisations effectuées (elles ne le sont pas en-
core toutes) 4,520 ' » '^
Subvention du ministère de l'instruction pu-
blique .... 400 »
Subvention du département du Haut-Rhin . . 500 »
Reliquat d'un compte de 1862 et divers ... 183 20
Total des recettes nouvelles au 9 décembre . 5,603 20
Total général des recettes ... 12,149 60
Dépenses :
Frais de publication du Bulletin 2,920 70
Dépenses de conservations, fouilles,- etc., recherches votées
par le comité :
Fouilles au tertre d'Ufholtz 150 »
Travaux à la chapelle du Bruderhaus .... 78 »
Débadigeonnage pour recherche et conser-
vation de peintures murales et fouilles à l'église
Saint-Pierre et Saint-Paul de Wissembourg, en v
plusieurs fois 1,000 "
Recherches, fouilles et travaux à Mackwillei'
et environs 600 >-
Travaux au château d'Eguisheim, supplément 500 »
Travaux aux châteaux de Hoh-Landsberg et
Plixbourg 500 »
Travaux à l'Engelsbourg près Tliann 300 »
Travaux au château de Hoh-Kœnigsbourg ,
pour portes 100 »
Travaux au petit château derrière le précédent 200 »
Travaux au château de P^ranckenbourg . . . 200 »
A reporter 3,628 ö*^ 2,920^ 70 «^
— 118 —
Beport 3,628 f »'^ 2,920^70'^
Recherches à Gerslheim 400 »
Replacement de la custode ancienne à la place
primitive dans l'église de Walbourg 100 »
4,428 »
Dépenses pour transport d'antiquités an musée de la biblio-
thèque de la ville, confeclion de plaques d'inscription et d'une ^f
vitrine pour les petits objets 467 90
Frais de bureau, d'employés, de gardiens; poris, affran- A
chissements, reliures et autres menues dépenses 516 4O
Total des dépenses au 9 décembre 8,333 »
Encaisse .... 3,816 60
Somme égale aux recettes .... 12,149 60
De ces deux résultats, celui de l'exercice clos comme celui de l'exercice
courant, il ressort une situation que l'on peut appeler prospère, vu qu'elle
nous fait passer d'un exercice à l'autre avec un fonds de réserve et de rou-
lement; cette situation m'a permis d'inaugurer l'année 1863 par le dépôt
en compte courant, à la Recette générale, des sommes dont l'emploi
n'est pas immédiat et qui dès lors ne resteront pas improduclives.
Je dois encore porter à la connaissance de l'assemblée une autre amé-
lioration datant également de cette année : elle concerne la perception des
cotisations de ceux de nos sociétaires des départements du Haut- et du
Bas-Rhin, habitant hors de Strasbourg dans plus de quatre-vingts locahtés
différentes, que je dois à l'obligeant concours de MM. les receveurs gé-
néraux et particuliers et à la coopération désintéressée de MM. les percep-
teurs de pouvoir réaliser en temps opportun et sans aucuns frais.
L'assemblée générale appréciera les avantages de cette excellente me-
sure, que nous devons à l'initiative de M. Durrieu, receveur général de
notre département; elle consentira, j'ose le croire, à rehausser par son
suffrage les remercîments que je lui exprime pour un si inappréciable con-
cours.
L'assemblée applaudit le résultat satisfaisant démontré par ce rapport et
vote, par acclamation, les remercîments proposés par le trésorier.
M. le baron de Schauenburg propose de voter des remercîments au
trésorier. — Acclamation.
M. Ringeisen présente le rapport suivant sur les travaux techniques
accomplis pendant la campagne de 1863:
— 119 —
«Messieurs, vous savez avec quelle sollicitude votre comité cherche à
répondre à la mission qui lui est dévolue, de veiller à la conservation des
monuments historiques répandus sur notre sol alsacien. Leur nombre est
considérable, les besoins sont incontestés; et à voir cette situation il
semblerait qu'il n'eût d'autres embarras que de résister aux demandes
qui lui sont faites à cet effet, afin de rester dans les limites des ressources.
«Il n'en est pas ainsi cependant. Si jusqu'à ce jour des besoins ont été
signalés, le manque de concours pour leur exécution s'est souvent fait
sentir. Il ne faut pas trop s'en étonner. Messieurs. Lorsqu'on pense aux
obstacles de toute nature qu'on éprouve à organiser des chantiers; à les
surveiller; à s'attaquer avec les moyens les plus primitifs, aux difficultés
d'exécution les plus ardues, les plus en dehors de nos habitudes modernes;
on comprend qu'il soit rare de trouver des hommes qui réunissent aux
connaissances spéciales, la bonne volonté et le temps nécessaires pour
commencer et mener à bonne fin des entreprises de ce genre.
«Vous avez remarqué, sans doute, que les travaux exécutés jusqu'à ce
jour, l'ont été priicipalement dans le Bas-Rhin. Cependant des sommes
importantes avaient été mises à la disposition du Haut-Rhin sans pouvoir
aboutir; et si nous exceptons celles dépensées à Saint-Ulrich et plus ré-
cemment à Thann, les autres restaient sans emploi.
« Nous sommes heureux de vous annoncer que, cette année, la part prin-
cipale revient au Haut-Rhin. Grâce à l'initiative de M. Véron-Réville, vice-
président du sous-comité de Colmar, il a été formé une commission spé-
ciale composée de MM. Huot, conseiller à la cour impériale; Gérard, avocat;
Liblin, directeur de la Revue d'Alsace; Ortlieb, architecte; Schœlbaum, in-
génieur civil, et Foltz, membre de la Société.
«Cette commission a bien voulu demander mon concours. Elle s'est
transportée sur les lieux, a débattu sur place les mesures les plus efficaces
à prendre, pour donner une impulsion aux travaux et répondre à la bonne
volonté du comité. Sous cette influence, des travaux très-importants ont
été commencés et seront continués avec le même succès, nous en sommes
convaincu.
«Les travaux du Bas-Rhin ont été restreints par ce fait, sans cependant
être abandonnés. Ils seront repris en temps et lieu.
« Nous allons vous donner un compte détaillé des travaux exécutés dans
le courant de l'année 1863.
Eguisheim, 1200 fr.
«Il n'est personne qui, ayant parcouru notre ligne de chemin de fer, n'ait
été frappé de la disposition de ces trois tours qui se détachent sur nos
— 120 —
montagnes un j)eu au-dessus de Colmar. Lorsque, après avoir quille IJus-
seren, on a gravi le mamelon qui le domine, on arrive sur un pelil plateau
se prolongeant du nord au midi, sur lequel ont été plantées ces construc-
tions d'un autre âge qui étonnent nos regards, et qui sont connus sous le
nom de château d'Eguisheim.
«C'est en vain que l'on chercherait, à priori, les motifs qui ont déter-
miné ces formes et ces dispositions.
i(Du reste, dans leur état actuel, l'homme spécial lui-même reste privé
des moyens d'une appréciation certaine. Cependant il est facile de recon-
naître tout d'abord trois constructions distinctes:
« La première à l'extrémité de la pointe sud, appelée Weckmimd, se com-
pose d'une tour rectangulaire en pierre de grès, de grand appareil, à bos-
sages rustiques; à côté sont quelques constructions sans importance; le
tout séparé du reste du plateau par des escarpements factices.
«La deuxième vers le centre, appelée Wallenbourg^ se compose également
d'une tour rectangulaire autour de laquelle ont été élevés, à plusieurs
époques, diverses constructions destinées à l'habitation; elle est également
séparée en avant et en arrière par des escarpements faits de main d'homme.
«La troisième vers le nord, appelée Bagshourtj, se compose d'un corps
de logis principal établi vers l'extrémité du mamelon, et précédé au sud
d'une tour rectangulaire entièrement isolée. Toute cette construction, la
plus importante des trois, est de l'époque romane, et porte encore des
traces d'architecture d'un haut intérêt.
«Malheureusement ces trois parties distinctes sont tellement dévastées,
les débris amoncelés à leur pied ont tellement enfoui les soubassements
sous des monceaux de décombres, qu'il n'est pas possible de reconnaître
les dispositions principales, les accès, les communications, etc. Les trois
tours seules surgissent au milieu du chaos, et encore la troisième est-elle
effondrée sur deux faces.
«Après un mûr examen il a été reconnu :
«Que, parmi les constructions encore debout, les unes étaient le résultat
de besoins successifs et n'avaient aucun caractère monumental; les autres
au contraire formaient l'essence môme du bâtiment, et portaient en elles
le cachet de leur époque et de leur destination ; que dans le premier cas
lorsqu'elles menaçaient ruine, il n'y avait qu'à laisser faire le temps, mais
que dans le deuxième il y avait lieu de conjurer cette action, par tous les
moyens possibles.
En parlant de ce principe admis par la Société jusqu'à ce jour, il a été
arrêté l'exécution immédiate des travaux suivants:
— 121 —
(.(1" Boucher la brèche de la paroi nord, du corps de logis principal, sous
la cheminée romane; 2° reprendre les deux brèches dans les parements
extérieurs, vers l'angle nord -ouest du même corps de logis; 3" réparer
et consolider le bas de la fenêtre géminée ouest du même corps de logis,
terminer le mur en arrachement sous forme de contre-fort; 4° boucliei-
une brèche dans le mur sud du soubassement; 5° arrêter la ruine immi-
nente du mur est de la troisième tour, au moyen d'un grand contre-fort,
posé sur le soubassement de la face nord, et s'élevant en arrachement
jusque vers la seizième assise environ; 6'' déblayer la deuxième et la pre-
mière tour; dégager les deux brèches d'accès et les consolider au moyen
de reprises en sous-œuvre et en arrachement, de manière à en permettre
l'entrée, sans altérer le caractère de ces tours; 7° en général dégager et
déblayer autant que possible les abords, ranger les matériaux susceptibles
d'être employés; conserver précieusement toute pierre taillée; 8° et enfin
pour l'exécution des travaux, mettre en hgne toutes les maçonneries nou-
velles, en ayant la précaution de bien garnir de mortier l'intérieur, mais
en évitant scrupuleusement de laisser apparaître à l'extérieur le moindre
mortier sur les lits et joints.
«Ces travaux ont été exécutés suivant ce programme, avec un soin qu'on
ne saurait trop louer, sous la direction immédiate de M. Orllieb, ancien
architecte à Colmar, artiste aussi consciencieux que modeste. Ils ont par-
faitement réussi; et si l'on excepte la reprise sous la cheminée romane,
où l'on a voulu trop bien faire, et à laquelle il sera du reste facile de re-
médier, ils devront servir d'encouragement pour l'avenir.
«Le crédit de 1,200 francs voté à cet effet a été absorbé jusqu'à la somme
de 1,195 fr. 68 c.
«Il reste encore à faire, pour compléter le programme ci-dessus, des
déblais et la partie supérieure du contre-fort de la troisième tour.
«Nous nous proposons de demander dans la campagne prochaine, pour
ces travaux et pour d'autres non moins urgents, les nouveaux crédits né-
cessaires pour les mener à bonne fin.
Hohlandsberg, 300 fr.
« Sur un autre mamelon, non loin des châteaux d'Éguisheim apparaissent
de vastes murailles d'enceinte, d'une étendue et d'une structure remar-
quables. Leur périmètre affecte la forme d'un rectangle presque régulier,
sauf vers l'angle ouest, où il s'infléchit légèrement entre deux tours rondes,
presque entièrement engagées dans les angles. Cette enceinte n'est ouverte
que sur deux points: l'un vers le nord-ouest où il existe une petite po-
8*
— 122 —
terne; le deuxième vers le nord-est, où se trouvait l'entrée principale,
avec traces de pont-levis, mâchicoulis; le tout d'un très-grand caractère
architectural. On pénètre par ces portes dans deux cours d'entrée adja-
centes, précédant une troisième cour, au nord de laquelle s'élève un mas-
sif jusqu'à hauteur des murs, en partie formé de décombres qui laissent
apercevoir: des fragments d'escaUer; un chemin de ronde; une grande
tour carrée, une petite tour circulaire, pittoresquement assise sur une
base de rochers; un puits, etc.
«Ces dispositions indiquent évidemment l'emplacement de l'ancienne de-
meure seigneuriale.
« La quatrième enceinte à la suite contient, contre les parois est eisud,
des restes de bâtiments de dépendances. Dans la cour et sous l'ancienne
demeure existent encore deux citernes.
«Tout cet ensemble est d'un très-haut intérêt; mais au milieu des décom-
bres et des massifs de végétation qui l'obstruent, il n'est guère possible
de se rendre un compte bien exact de l'ensemble, ni des détails.
«La première chose à faire est évidemment de débarrasser cette enceinte
de celte végétation parasite. M. Manheimer, le propriétaire de ce domaine,
s'est engagé gracieusement à couper, cet hiver, tous les bois jugés néces-
saires; et M. Schœlbaum, jeune ingénieur à Golmar, a pris ses mesures
pour commencer avec l'ouverture de la campagne prochaine les déblais
convenus.
Plixbourg, 200 fr.
«Un peu plus bas, sur un petit mamelon vers le val Saint-Gilles, s'élève
une autre enceinte rectangulaiie avec une puissante tour ronde vers le
centre, en maçonnerie de granit de petit appareil. A côté est une petite
construction souterraine voûtée; et sur trois faces intérieures de l'enceinte,
apparaissent encore les restes d'anciennes constructions.
«Mais dans ce château comme dans celui de Hohlandsberg les décombres
et la végétation sont tellement intenses qu'il est impossible d'arrêter une
opinion.
«Il y avait lieu avant tout, comme dans le château précédent, d'enlever
la plupart des arbres et arbustes.
«M. Hanhardt, le propriétaire de ce domaine, avec lequel M. Schœlbaum
s'est mis en rapport, a bien voulu accéder à ce vœu; et déjà ont commencé
les coupes. M. Schœlbaum nous a promis de mener de front les déblais
avec ceux de Hohlandsberg. Une fois ces premiers travaux opérés, il sur-
gira probablement quelques travaux de consolidation à effectuer. Cepen-
— US —
dant, les parties intéressantes qui ont échappé jusqu'à ce jour aux ravages,
sont généralement en bon état de conservation.
« Resterait alors à faciliter les abords de ces trois châteaux au moyen de
chemins qui permissent une pérégrination agréable aux touristes. Mais
comme les fonds de la Société ne sauraient être affectés à des travaux de
cette nature, il y aurait peut-être lieu de s'adresser à l'administration fores-
tière si bienveillante, et aux communes intéressées, pour obtenir d'elles
ces améliorations, ainsi que cela .s'est pratiqué d'une manière remarquable
à Ribeauvillé.
Hoh-Barr, 150 fr.
«Il avait été projeté de faire quelques travaux de consolidation à la cha-
pelle de Hoh-Barr. Mais après un examen approfondi, M. Fürst, notre col-
lègue de Saverne, chargé de ces restaurations après s'être entendu avec
M. le colonel de Morlet, reconnut que ces travaux, pour arriver à un bon
résultat, auraient mené trop loin, et comme du reste ils n'étaient pas d'une
urgence imminente, ils ont été ajournés.
Hoh-Kœnigsbourg, 100 fr.
«Les travaux importants du Kœnigsbourg qui ont été entrepris jusqu'à
ce jour sur les fonds de la Société, se maintiennent parfaitement; et quoi-
qu'ils soient loini d'être achevés, ils peuvent être impunément remis. Géné-
ralement ils sont respectés. Cependant nous avons eu à déplorer quelques
dégradations répétées; une, même assez regreltable, le bris de la rosace
centrale de l'escalier à jour de la cour, qui avait été recueillie et disposée
à son pied.
«Pour éviter ces inconvénients, il a été décidé qu'il serait établi deux
portes à l'entrée du bâtiment principal d'habitation. Les clefs de ces deux
portes seront déposées chez le garde et seront confiées à tout visiteur qui
en fera la demande. Les ouvrages extérieurs du château resteraient libres
comme précédemment. Cette restriction est sans doute fâcheuse, mais elle
a été jugée nécessaire. Ces deux portes sont faites et elles ont absorbé le
crédit accordé.
Petit-Kœnigsbourg , 200 fr.
« Le petit château de Kœnigsbourg, situé vers l'ouest du grand , forme
une construction complètement distincte et séparée de la première. Il est
entouré de fossés et d'escarpements formidables, ses murs extérieurs percés
de baies ogivales et plein cintre restent seuls debout. Il présente des par-
— 1-24 —
tics d'un haut inlérêt, mais enfoui clans une végétation qui l'envahissait et
d'un accès difficile, il est resté inconnu à la plupart des visiteurs.
«Cette partie de la forêt venant d'être exploitée, il apparaît maintenant
aux yeux étonnés. De plus, des chemin^ d'exploitation ont été établis, qui
rendent son accès facile et permettent de suivre tout le contour du mame-
lon du côté du Val de Ville.
((Restait alors à compléter ce premier travail par le déblai des masses
considérables de décombres qui couvrent le pied des murs intérieurement
et extérieurement. La somme de 200 francs affectée à ces travaux a été
presque entièrement employée sans réaliser un grand résultat. Ces travaux
sont extrêmement intéressants; nous nous proposons de soHiciter pour
l'année prochaine de nouveaux crédits pour les continuer.
Frankenbourg, 200fr.
«Parmi nos châteaux, un des plus intéressants par sa structure et surtout
par sa position exceptionnelle, est certainement le Frankenbourg. Après
avoir passé la gorge étroite, commandée par les châteaux d'Ortenbourg
et de Ramstein d'un côté, par ceux de Kintzheim et de Kœnigsbourg de
l'autre, la vallée s'élargit bientôt et se divise en deux nouvelles vallées res-
serrées entre de hautes montagnes, se dirigeant l'une vers Sainte-Marie-
aux-Mines, l'autre vers Ville. A la bifurcation de ces vallées, sur le sommet
de la première montagne, s'élève le Frankenbourg comme une sentinelle
avancée, pouvant communiquer au loin au moyen de signaux avec Burg-
heim, ancien poste romain.
«M. Coste, notre érudit collègue, qui le premier nous a révélé nos an-
ciennes voies romaines et franques, attache une importance extrême à la
position de ce château. Il ne balance pas à reculer l'origine de son établis-
sement jusqu'à l'époque romaine. Au premier aspect l'époque romane seule
ressort des formes de son architecture. Sa tour ronde, d'un travail remar-
quable, porte même des signes de tailleur de pierres qui feraient remonter
sa date aux dernières années de l'époque romane, vers la transition ogivale.
Mais ses substructions imposantes, qui peut-être pourraient nous révéler
des constructions plus anciennes, sont tellement enfouies sous les dé-
combres, qu'il est impossible de rien préciser à cet égard. Nous nous étions
proposé d'entreprendre des travaux de déblai dans le cours de cette cam-
pagne: malheureusement le manque d'ouvriers intelligents et aussi diffé-
rents empêchements successifs ont mis obstacle à ce désir. Us seront cer-
tainement exécutés dans le courant de la campagne prochaine.
(iEn résumé, il a été accordé cette année par la Société, pour déblais el
— 125 —
consolidation des monuments historiques d'Alsace, un crédit de 2,300 fr.,
sur lesquels 350 fr. restent encore à employer.
«Pour ces travaux, c'est le Haut-Rhin qui a eu les honneurs de la cam-
pagne. Nous nous empressons de le proclamer avec d'autant plus de bon-
heur, qu'il avait mis plus de temps à se décider et que son essai a été un
coup de maître. Sur ce terrain tout succès est une œuvre patriotique qui
ne laisse que de douces jouissances, et n'inspire au vainqueur et au vaincu
que le désir plus vif de mériter vos suffrages.
f A. Ringeisen. »
Cet intéressant travail est couvert d'applaudissements, et les remercî-
menls à MM. les architectes qui ont prêté leur concours, sont votés par ac-
clamation.
La parole est donnée à M. Spach, président du comité, qui rend compte
à l'assemblée, en lui demandant sa sanction, de la nomination de trois
membres pour compléter le comité; ce sont : MM. Siffer, curé à Weyers-
heim, Saum, chef de bureau à la préfecture, et Reussner, professeur au
Gymnase protestant.
Il prie également l'assemblée de remplacer les trois membres sortants
du comité dont les fonctions sont expirées d'après les statuts, et qui sont :
MM. le baron de Schauenburg, docteur Eissen, et lui-même, ou de leur
continuer leur mandat par une nouvelle élection.
L'assemblée, par acclamation, sanctionne la nomination des trois nou-
veaux membres du comité, et renouvelle le mandat des trois membres
sortants.
Le président prie l'assemblée d'autoriser le changement de jour et d'heure
des réunions du comité. — Accordé.
M. Spach exprime à l'assemblée, en son nom et en celui de ses collègues,
les sentiments qui les animent, et le prix qu'ils savent attacher à l'honneur
que l'assemblée vient de leur faire en leur continuant sa confiance.
Il propose de voter des remercîments aux deux Préfets des déparle-
ments alsaciens et à leurs Conseils généraux pour la protection et les géné-
reux encouragements dont ils ne cessent d'entourer la Société, remercîments
auxquels l'assemblée s'associe avec enthousiasme.
La séance est levée à quatre heures.
- 126 —
Séance du Comité du 4 janvier 1864.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Eissen, Ileitz, Klotz, colonel de Morlet, Saum, Siffer,
Slraub.
Les procès-verbaux des séances du 7 décembre et 10 décembre (assem-
blée générale) sont lus et adoptés.
Le secrétaire dépose : Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit; n^ 10,
octobre 1863.
Der Doryplioros des Polyklet, XXIII. Programm zum Winkelmannsfest,
der archeologischen Gesellschaft zu Berlin, von Karl Friedrichs; Berlin;
1863 (transmis par M. le professeur Ed. Gerhard);
Messager des sciences historiques ou Archives des arts et delà bibliogra-
phie de Belgique; année 1863, HP livraison.
La question mise à l'ordre du jour de la séance est le changement de
l'heure et éventuellement du jour des réunions du comité. La majorité s'é-
tant prononcée pour le deuxième lundi de chaque mois et pour deux heures
après midi, celle modification est adoptée.
Le renouvellement du bureau est remis à une prochaine réunion, vu le
petit nombre des membres présents.
M. Saum, après avoir rendu compte de sa mission auprès de M. Simon,
au sujet de la carte d'Alsace de Schvveighaeuser annotée par M. le profes-
seur Jung, dépose un beau kelt en bronze dont M. Gustave Freyss, fon-
deur, fait hommage à la Société, et une médaille de Hanau du dix-septième
siècle trouvée au pont Saint-Martin à Strasbourg.
Le comité vote des remercîments à M. Freyss.
M. le colonel de Morlet dépose une carte indiquant les trouvailles faites
pendant les travaux de la gare de Wasselonne, et dressée par M. Kast;
plus une autre carie dressée par M. Gœtz, où sont relevées les découvertes
faites à Molsheim, Kirchlieim,Küttolsheim, etc. M. Gœtz promet de rédiger
une note à l'appui.
M. Slraub explique la signification d'une croix trouvée dans l'emplace-
ment du cimetière d'Odratzheim et qui lui a été remise par M. le colonel
de Morlet. C'est, selon lui, une croix dite croix de peste. Pour établir la
comparaison, il met sous les yeux du comité un certain nombre d'autres
— 1^7 —
croix, toutes en métal, tirées de ses collections; ce sont: une croix caba-
listique, une croix espagnole dite de Caravaca, une croix russe, une croix
patriarcale de saint Benoît, et une croix de saint Udalrich.
M. Straub promet une notice sur ces différentes croix.
M, Heilz soumet une planche gravée par Isaac Brunn, graveur strasbour-
geois, représentant la cathédrale et l'horloge astronomique. Il est fortement
à présumer que cette gravure est la première image qui ait été publiée de celte
horloge. Le comité décide qu'il sera tiré un nombre suffisant d'exemplaires
pour le Bulletin , et qu'on les accompagnera d'une notice sur ce graveur.
M. Heitz offre la planche à la Société, qui la placera dans ses collections.
Le comité vote à cet effet une somme de 26 fr., prix de la planche, et des
remercîments à M. Heitz.
M. Siffer lit la note suivante :
Notice suryme dalle épigraphique d'origine romaine, chargée de denx
images, représentant l'une Mars, l'autre Pcdlas, et sur diverses autres
antiquités, découvertes , en i862, dans les forêts des deux Betschdorf.
«Au mois de mars de l'année 1862, des bûcherons, occupés dans la
forêt communale d'Oberbetschdorf à extraire des souches au canton appelé
Spechtensee, distant d'environ deux kilomètres au sud de Niederbetschdorf,
ont mis à découvert, sous le cône d'un tertre tumulaire, une pierre votive
de 80 centimètres de haut, sur 38 centimètres de large et 10 centimètres
d'épaisseur, figurant, sur la même face, deux divinités, l'une masculine et
l'autre féminine, placées côte à côte, la féminine à droite et la masculine à
gauche.
« Une inscription mi-fruste et en partie illisible , gravée sur la doucine
du front, donne la première place à la divinité masculine et nous apprend
que c'est -Mars, le dieu des batailles, caractérisé d'ailleurs par la courte
tunique (le sagum militaire) dont il est revêtu; par un bouclier, qu'il sou-
tient près du pied, de la main gauche; et par une espèce de demi-pique,
qu'il lève de la main droite.
a Le tome IV du Bulletin mentionne, dans la partie des mémoires, page
90, une pierre épigraphique trouvée sur la lisière de la forêt de Nieder-
betschdorf vers la finde la seconde décade du siècle courant. Cette pierre a
été consacrée à Pluton « Diti Patri » parun Gaulois, nommé Vassorix dans
l'inscription; Mars, dont le titre principal était de repeupler sans cesse
le royaume des Ombres, avait donc, dans cette localité, son autel à côté
de celui du dieu des morts.
«La divinité féminine se dislingue par une chevelure très- touffue, for-
mant sa coiffure; puis, comme le dieu Mars, par une demi-pique qu'elle
— 128 —
lève de la main, du côté gauche; et par une ample draperie dont elle est
enveloppée. Les tresses de la chevelure se rapprochent assez de celles que
l'on remarque dans la coiffure moderne des jeunes filles. Selon moi, la pique
est ici un attribut qui caractérise Pallas, déesse de la Victoire; le vêtement
est identique à celui de plusieurs bas-reliefs que nous connaissons de cette
déesse. Enfin l'inscription, malgré son état de délabrement, me permet
d'asseoir mon opinion d'une manière définitive.
MARSE : : : : ; ; DAE
vs.
(( Analysons brièvement ces lettres. Tous les doutes sont levés en ce qui
concerne Mars, seulement je fais observer que l'épitaphe donne le nomi-
natif en place du datif, c'est un barbarisme qui se rencontre ailleurs. La
lettre E, qui est très-bien exprimée, appartient à la copulative ET. Les lettres
qui suivent sont tronquées et très-informes; je les omets pour éviter une
transcription fautive, espérant toutefois que l'un ou l'autre des membres
de la Société, à la suite d'un examen moins fugitif que le mien, parviendra
à les retrouver DAE, lettres finales du nom propre de la déesse; il y a
ici, à mon sens, encore un solécisme: PALLADAE pour PALLADL Les deux
lettres VS, placées au-dessous sur l'encadrement latéral, expriment la for-
mule « votum solvit. »
(«Comme le culte de Mars était associé à cekii de Pallas, il n'est pas éton-
nant qu'on ait réuni leurs noms sur une même pierre. L'inscription se ré-
tablirait donc ainsi :
« Marti et Palladœ votum solvit. »
« Le comité me pardonnera ce déchiffrement hypothétique, que je suis
prêt à abandonner, dès qu'une explication meilleure aura été donnée.
« Les deux figures sont hautes de 30 cenfimètres; elles n'occupent que
la partie supérieure de la pierre. La partie inférieure ne montre ni sculp-
tures, ni caractères; elle paraît avoir été réservée à dessein pour la dési-
gnation du donateur: l'autel confectionné d'avance, le tailleur de pierre
gallo-romain l'aurait conservé dans l'atelier, pour l'offrir tel quel, ou le
cas échéant, pour le parachever d'après les indications de la commande.
«Feu M. le professeur Jung, notre regrettable collègue, a acquis, à
prix d'argent, cet intéressant monument pour le musée départemental; sa
conservation est dès lors assurée. Mais jusqu'ici, le Bulletin n'a mentionné
ni sa découverte ni son acquisition.
« Celte pierre et celle ronsarrée au dieu des Enfers sont une nouvelle
— 129 —
preuve, d'après moi, que la théologie de l'Alsace était, sous les Romains,
un mélange des diverses croyances de ses habitants.
« Il est à noter qu'un poignard oxydé a été enfoui sous la dalle qui nous
occupe; que le tertre qui contenait ces deux objets, est situé à quelques
mètres seulement d'un ancien chemin, qui se raccorde, dans la direction
de Kœnigsbriick, à la grande voie romaine de Brumath à Seltz; et que ce
rayon a donné heu en même temps à la découverte de divers autres débris
de l'époque romaine, tels que fragments de poterie, restes de tuiles à re-
bords, morceaux de ciment, vestiges de fondements qui annoncent appa-
remment une construction sacellaire.
« Le chemin que nous indiquons , portant vulgairement le nom de
Sirœssel, forme la ligne séparative des forêts d'Ober- et de Nieder-Betsch-
dorf. II est très-admissible qu'il rehait les positions romaines de ces deux
locahtés à la grande route et à la fois au camp romain, connu sous le nom
de Heidenberg, que M. le baron de Schauenburg a si savamment décrit
dans une notice insérée au procès-verbal de la séance du comité du PV juin
dernier. Le tracé de ce chemin est donné comme incertain ou présumé,
sur la carte romaine de M. le colonel de Morlet, son existence positive est
attestée par les découvertes que nous signalons.
« L'édicule sacré du Spechtensee était à la distance d'environ 6 à 7 kilomè-
tres du camp romain établi à l'extrémité orientale de la forêt de Haguenau.
« Je termine cette notice en faisant connaître que les forêts des deux
Betschdorf possèdent, sur différents points, un certain nombre de tertres
mortuaires dont la plupart restent inexplorés; des groupes de tumuli sont
visibles, dans la forêt d'Oberbetschdorf, aux cantons appelés Spechtensee
et Furlenhübel; dans celle de Niederbefschdorf, aux lieux dits Grosshvhel,
Birchenhühelei Fnchszipfel. On prétend avoir rencontré, sous quelques-uns
de ces tumuli, des traces de l'occupation romaine. M. Nessel, de Haguenau,
membre de notre Société, est en possession de plusieurs objets provenant
des tertres fouillés; ces objets, en partie du moins, sont de l'époque où le
1er était déjà en usage. On ne saurait donc, indistinctement, faire remon-
ter toutes ces tombelles aux temps antéromains; elles appartiennent en
partie à mon avis, à la population aborigène qui, subjuguée, s'était fondue
dans les florissantes colonies romaines. Une fouille, attentivement reprise,
ne manquerait pas d'éclairer cette question. »
M. le président annonce avoir écrit depuis le 7 décembre les lettres
suivantes:
A M. Kast, agent voyer à Wasselonne; lettre de remercîmenls poni' le
plan du palais mérovingien;
II' Sbrie. — T. n, — (P.-V.) 9
— 130 —
A M. Barte de Sainte-Fare, conservateur des forêts; prière de permettre
que l'on continue les fouilles à Mackwiller etRatzwiller;
A M™® Borderieu à Schlestadt au sujet du médailler de feu M. Dorlan;
AM. Goste, pour lui annoncer que le comité accorde le patronage à sa
future publication ;
AM. Dureau, à Paris; annonce de l'envoi de trois livraisons de notre
Bulletin;
A M. Nicklès; annonce de la lecture de son mémoire en assemblée
générale;
A M. Reussner; annonce de sa nomination en remplacement de M. Jung
au comité;
A M. Lindenschmidt à Mayence, pour lui annoncer sa nomination comme
membre honoraire.
La séance est levée à une heure.
Séance extraordinaire du Comité du \i janvier i 864.
Présidence de M. SPACH.
Sont présents : MM. Conrad, Heitz, Matuszinski, Morin, de Morlet, Reuss-
ner, Saum, de Schauenburg et Straub, membres du comité. M. Thomas,
membre de la Société, assiste à la séance.
M. l'abbé Straub remplit les fonctions de secrétaire.
M. Morin, architecte du département, donne lecture d'un rapport fait
par M. le curé Guerber sur la seconde visite à l'égHse de Walbourg. Une
commission, composée de MM. Guerber, curé de Haguenau, Klotz, de
Morlet et de Schauenburg, s'est rendue dans cette église dans le courant
de novembre 1863 pour examiner l'ancienne custode dont la conservation
avait été décidée par le comité dans sa séance de juillet.
M. Guerber décrit l'état de ce remarquable monument et demande qu'un
nouveau crédit de 300 fr. soit ajouté au crédit de 400 fr. déjà voté. Après
avoir appelé l'attention sur sept statues en bois de la fin du quinzième
siècle, remarquables surtout par les vestiges d'ancienne polychromie, M. le
curé annonce que le débadigeonnage du chœvu' sera opéré dans la pro-
chaine campagne et insiste sur l'assainissement du côté nord de l'église,
dont le dallage est aujourd'hui inférieur au sol extérieur.
M. l'abbé Straub annonce qu'il a examiné de plus près les statues de
— 131 —
VValbourg, aujourd'hui déposées au musée de l'Œuvre Notre-Dame, et que
l'une d'elles, celle de sainte Barbe, porte le millésime 1484, un écusson
surmonté d'une couronne et les mots : m. demen» te bainninH \ qu'il consi-
dère comme les noms du statuaire. Il pense qu'elles sont dues au même
ciseau qui a taillé plusieurs statues appartenant à l'église de Saint-Pierre
et Saint-Paul à Neuwiller.
M. Spach prie M. le secrétaire de donner lecture d'un rapport de M. P.
Ristelhuber sur la marche d'Aquilée, Le comité vole l'impression du
mémoire.
M. le président communique ensuite la première partie de son travail
sur le pape alsacien, Léon IX.
La séance est levée à quatre heures.
Séance du Comité du 8 février 1864.
Présidence de M. SPACH.
Présents: MM. Rœrsch, Conralh, Eissen, Grass, Klotz, Morin , Ringei-
sen, baron de Schauenburg, Straub.
Le secrétaire dépose sur le bureau :
Helvetns (Ehl, près Benfeld), par Napoléon Nicklès, 1 broch. in-8°;
Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie, année 1863, n** o,
1 broch. in-8°;
Bévue des sociétés savantes des départements , novembre 1863, 1 broch.
in-8°;
Carte de la Gaule sous le proconsulat de César. — Examen des obser-
vations auxquelles elle a donné lieu, par le général Creuly. Paris, 1864,
1 broch. in-8°;
Les Voies romaines en Gaule, par Alexandre Bertrand. Paris, 1864,
1 broch. in-8";
Anzeiger für Kunde der deutschen Vorzeit, novembre et décembre 1863;
Mittheilungen des historischen Vereins fivr Steiermark, zwölftes Heft.
Gratz, 1863, 1 broch. in-8°;
Jahresbericht der Gesellschaft für nützliche Forschungen zu Trier über
die Jahre 186i und i862. Trier, 1864, 1 cahier in-4°.
Le président annonce avoir écrit les lettres suivantes:
— 132 —
A MM. Ringel et Beilstein, pour leur annoncer le rappel, en séance gé-
nérale du 10 décembre dernier, des médailles qui leur avaient été décer-
nées antérieurement;
A M. Gustave Freyss, fondeur, pour le remercier du don d'un kelt en
bronze;
A M. Paul Ristelhuber; annonce de la lecture de son mémoire sur la.
marcbe de Marmoulier ou d'Aquilée, en séance du 18 janvier 1864;
A M. le curé Guerber; annonce de la lecture de son rapport sur la visite
de l'église de Walbourg;
A M. de Schauenburg; prière de se charger des dessins des antiquités
de Stéphansfeld;
A. MM. Greiner et Verdin; renseignements demandés au sujet des inten-
tions de M. Verdin pour le don de quelques antiquités;
A M. le professeur Warnkœnig, à Stuttgart; remercîments pour la men-
tion faite de notre Bulletin et de notre Société dans la Historische Zeit-
schrift de Sybel.
Le procès-verbal de la séance du 4 janvier est lu et adopté.
M. l'abbé Straub lit le procès -verbal de la séance extraordinaire du
18 janvier qui est également adopté.
Le trésorier présente le budget de l'année 1864.
Le comité décide que le budget sera présenté et voté à la séance du mois
de mai, alors que toutes les subventions auront été réalisées et que le
chiffre de report de l'exercice précédent pourra être exactement déterminé.
Toutefois, quoique le budget ne soit pas arrêté, le trésorier est invité à
recevoir les cotisations pour 1864, et autorisé à payer les dépenses cou-
rantes qui rentrent dans la nature des crédits ordinaires, en se renfermant
dans leur hmite.
M. le pasteur Ringel propose, comme membre de la Société, M. J. Kug-
1er, sculpteur à Hommarting (Meurthe).
L'admission de M. Kugler est prononcée.
Le président annonce que le renouvellement du bureau est à l'ordre du
jour de cette réunion.
Le comité décide que cette opération devra être mise à l'ordre de la réu-
nion du mois de mars, et que les membres du Haut-Rhin devront être
régulièrement convoqués.
M. le baron de Schauenburg lit une communication de M. le colonel de
Morlet, qui fait connaître au comité que M, le pasteur Ringel vient de décou-
vrir dans la forêt de Mackwiller, au lieu dit Todtenberg, un tumulus ren-
fermant au centre une table en pierre (espèce de dolmen), entourée de
— 133 —
deux cercles de grosses pierres, entre lesquels se trouvaient des tombes,
disposées parallèlement et orientées de l'ouest à l'est. Des tombes formées
de pierres brutes, renfermaient des colliers et des bracelets en bronze
qui, par leur position, indiquent l'emplacement de squelettes, dont les
ossements décomposés laissaient encore quelques traces dans le sol.
Deux autres tumulus, renfermant des tombes semblables, mais sans
cercles de pierre ni dolmen, se trouvaient près du premier.
Ces sépultures, placées à côté des tombes franques du Todtcnhery, et
très-près des ruines gallo-romaines de Mackwiller, offrent aux archéologues
un grand intérêt.
M. de Morlet met sous les yeux du comité les lettres et les dessins de
M. le pasteur Ringel, qui vient, par cette découverte, d'acquérir de nou-
veaux droits à la reconnaissance des antiquaires alsaciens.
Sur la demande de plusieurs membres, le Comité alloue une somme de
300 fr. pour la continuation des fouilles du Todtenberg et l'achèvement
des sondages de Mackwiller. M. de Morlet fera un rapport détaillé après
l'achèvement de ces travaux.
M. Merck, membre de la Société, qui assiste à la séance, annonce qu'il
possède un beau chapiteau de colonne qui, selon l'opinion de M. le pro-
fesseur Jung, daterait du troisième ou quatrième siècle de notre ère. Ce
chapiteau est déposé dans son ancienne propriété à Brumath; les proprié-
taires actuels (MM. Gœtz, frères) seraient disposés à le céder à la Société.
M. le président se charge de se mettre en rapport avec MM. Gœtz, frères.
pour cet objet. — A cette occasion, M. le président rappelle que M. Verdin,
propriétaire à Marlenheim , se propose de faire également don à la Société
de chapiteaux provenant de l'ancienne éghse de Saint -Etienne, à Stras-
bourg.
Le comité vote des remercîments à M. Verdin.
Il décide qu'à l'assemblée générale de Colmar seront proposés , comme
membres honoraires, MM. de Caumont' et Warnkœnig.^
Le président communique une lettre de M. Lindenschmidt, de Mayence,
qui remercie la Société de sa nomination de membre honoraire, et une
lettre de M. Nicklès, deßenfeld, qui annonce la découverte d'objets d'an-
tiquités gallo-romaines, à Kertzfeld (telles que tuiles à rebord, viriole et
épingles à cheveux en bronze), le long d'un chemin vicinal qui paraît avoir
été une voie vicinale romaine reliant Kertzfeld à Sermersheim. La première
mention de Sermersheim, selon M. Nicklès, remonterait à l'année 770.
1. Fondateur et directeur de la société l'rauoaise d'archéologie.
2. Ancien professeur de jurisprudence à Tubingue, conseiller aulique à Stuttgardt.
— 134 —
Plusieuis voies anciennes y conduisent, et tout porte à croire qu'il y avait
en cet endroit un établissement gallo-romain.
M. Nicklès a cherché en vain, jusqu'ici, à retrouver du côté de Matzen-
heim la place où Schweighœuser a découvert des tuyaux provenant d!un
bain romain. (Ces tuyaux ont été déposés à la bibliothèque de Strasbourg.)
Il serait d'autant plus intéressant de retrouver cette place, que la décou-
verte de Schweighseuser paraît venir en confirmation de la tradition locale,
qui veut que la source minérale de Holtzbad, près de Westhausen, ait été
conduite jadis, à Ehl, par des tuyaux souterrains, dont on prétend avoir
trouvé les fragments, il y a environ cinquante ans, aux environs dudit bain.
Le président termine la lecture de son histoire de saint Léon IX , pape
alsacien. — Le comité décide l'impression de cette monographie.
La séance est levée à quatre heures.
SOUS-COMITE DU HAUT-RHIN.
Séance du 22 février 1864.
Présidence de M. VÉRON -RÉVILLE, vice -président.
Sont présents : MM. Véron-Réville, vice-président; Hamberger, Gérard,
Libhn, Franlz, Schlumberger- Hartmann, Huot, et Brièle, secrétaire,
membres du sous-comité.
MM. Foltz, Ortlieb, Laurent Althalin, Hartmann, Stahl, membres libres,
et OrtUeb, architecte^ assistent à la séance.
Le secrétaire donne lecture du rapport suivant de M. Ortlieb, architecte,
relatif à la continuation, pendant cette campagne, des travaux de restau-
ration commencés Tannée dernière au château supérieur d'Eguisheim.
•(Monsieur le Vice -Président, lorsque nous avons visité ensemble, le
19 août dernier, peu de jours avant leur clôture, les travaux entrepris,
l'année dernière, pour la conservation du château supérieur d'Eguisheim,
près Colmar, à l'effet de reconnaître ceux achevés et ceux encore restant
à faire parmi ceux dont l'exécution a été arrêtée précédemment et d'un
commun accord, d'après les indications de M. Bingeisen, architecte, j'ai
appelé votre attention sur un de ces derniers, à savoir, un parement de
mur à rétablir à l'un des angles extérieurs du bâtiment d'habitation, tout
à fait à l'extrémité nord du château.
— 135 -
((Ce revêtement de mur, auquel cet architecte paraît attacher quelque
importance, comme moyen de consolidation, allait être entrepris, lorsque
je me suis aperçu, à temps encore, que la somme de i,200 fr., formant
le montant des deux crédits de 700 et de 500 fr., alloués successivement,
était sur le point d'être épuisée entièrement par les ouvrages faits anté-
rieurement aux autres parties de ce château.
«Les prix élevés outre mesure, qu'en l'absence de toute concurrence,
il a fallu accorder pour ses journées au sieur Baumeister, Joseph, maçon,
et à ses aides, à Hüsseren, ont amené nécessairement trop vite la cessation
des travaux qui n'ont point produit le résultat auquel on était en droit
de s'attendre pour ces prix.
«Dans le cas où le comité se résoudra à la continuation de ces travaux
de conservation, ce revêtement de mur devra être entrepris le premier;
d'autant plus que le sol a été arasé et nettoyé déjà pour commencer ce
revêtement en moellons par assises réglées suivant l'état ancien de ce mur.
«En second Heu, il y aurait à déblayer les décombres qui s'étendent,
entre la tour du nord et le bâtiment d'habitation, sur une longueur de
10 mètres, une largeur de 8 mètres, et une hauteur d'environ 4 mètres
(au delà de oOO mètres cubes), en commençant par le côté ouest, en dé-
versant ces décombres sur le versant de ce côté, et en rangeant contre le
pied du mur de ce dernier bâtiment toutes les pierres façonnées, ainsi que
celles de dimensions trop fortes pour être passées de la main à la main.
«Au moyen de ce déblai, également conseillé par M. Ringeisen, on pour-
rait continuer jusqu'à l'angle nord-ouest le revêtement en grosses pierres
de la base du mur septentrional de la tour, tel qu'il a été conduit à partir
de l'angle nord-est jusque vers le milieu de ce côté, où, comme je l'ai fait
observer déjà, le noyau du mur était privé de ce revêtement par suite de
l'écroulement.
«En troisième 'Heu, afin de rendre le château plus accessible dans ses
abords immédiats, établir, à la base du rocher qui supporte la tour du
sud avec une partie de son ancienne enceinte, une espèce d'escalier rus-
tique en pierres posées à sec, et le compléter vers le haut au moyen de
quelques entailles sur le rocher; débarrasser des décombres qui obstruent
un arc situé dans un angle du bâtiment adjacent à la tour du milieu, et qui
paraît indiquer l'existence d'une porte de cave donnant sur un escalier.
«Enfin, ne conviendrait-il pas de mettre à découvert, au moyen de quel-
ques déblais peu profonds, et à leur rencontre, les murs, recouverts en
beaucoup d'endroits de gazon, que l'on aperçoit par ci, par là, notamment
devant et à l'est de la tour du milieu, afin de permettre un coup d'œil sur
— 136 —
l'ensemble des anciennes dispositions de cette localité et de l'aciliter ainsi
le lever d'un plan de tout ce qui existe encore aujourd'hui sur ce point,
mais qui tend à disparaître peu à peu, ainsi que j'ai pu m'en convaincre
depuis cinquante ans?
«Ces diverses propositions pour la conservation et l'entretien du château
supérieur d'Éguisheim, si elles sont admises en totalité par le comité que
vous présidez , pourront donner lieu à une nouvelle dépense de 7 à 800 fr.
au moins, même en admettant des salaires moins élevés que ceux payés
l'année dernière.
(.(Gomme les divers travaux indiqués ci-dessus exigent, pour les achevei'
et mener à bien dans une seule campagne, une surveillance journalière et
incessante , 7*6 crois devoir vous prévenir, dès à présent, que l'état très-
variable de ma santé, ainsi que d'autres circonstances, m'empêchent d'of-
frir et d'engager cette fois mon concours personnel pour cette surveillance.
«Recevez, Monsieur le Vice-Président, l'assurance de ma considération
très-distinguée.
«Colmar, le 20 février 1864
« D. Ortlieb.»
Le sous-comité décide l'envoi du rapport de M. Ortlieb au comité central
et, en rendant hommage au zèle dont M. Ortlieb n'a cessé de donner des
preuves, insiste auprès de lui pour qu'il veuille bien, au moins pour cette
année encore, continuer des soins dont le comité se verrait privé bien à
regret.
M. Véron-Réville fait part au comité d'une légère difficulté qui se pré-
sente pour les travaux de déblai projetés au château de Hoh-Landsberg.
M. Manheimer, auquel on s'était d'abord adressé pour obtenir l'autorisa-
tion de faire ces déblais et de couper les arbres qui pourraient gêner l'opé-
ration, a écrit qu'il ne croyait pas pouvoir prendre sur lui seul d'accorder
cette autorisation et qu'il serait bon de s'assurer de l'assentiment de
M. Dreyfuss, de Ribeauvillé, copropriétaire avec M. Manheimer du Hoh-
Landsberg.
Le sous-comité décide que le vice-président priera M. le Préfet de vou-
loir bien écrire de nouveau à M. Manheimer qui, sur sa demande, s'en-
tendra sans doute avec M. Dreyfuss, lequel ne lui refusera certainement
pas son consentement.
Le vice-président ayant écrit à M. Schlumberger- Hartmann, de Gucb-
willer, pour le prier de se charger, s'il lui était possible, de la photogra-
phie de la cloche de Lautenbach, destinée à être vendue, et de faire
— 137 —
prendre l'empreinte de l'inscription qui s'y trouvait, M. Schlumberger a
poussé l'obligeance jusqu'à faire chercher à Laulcnbach cette cloche qui a
été déposée dans sa cour, à Guebwiller, et dont la photographie a été tirée
à quatre exemplaires que M. Schlumberger dépose sur le bureau. L'em-
preinte de l'inscription, moulée en plomb par un procédé assez analogue à
celui du clichage, est ofl'erte par M. Schlumberger au musée de la ville de
Golmar.
M. Huot se charge de la lecture et de l'interprétation de cette des-
cription.
Distribution est faite, au nom de M. le colonel de Morlet, de Strasboui'g
à ceux des membres du comité qui ne l'ont pas encore reçue, de la photo-
lithographie des tombes de Lorentzen; le sous-comité charge le secrétaire
d'adresser en son nom des remercîments à M. de Morlet.
M. Véron-Réville ayant été informé, il y a quelque temps, que des fouilles
et des extractions de pierres avaient été récemment pratiquées dans l'in-
térieur du château de Winecke qui domine le village de Katzenthal, s'est
adressé à M. le Préfet pour faire cesser un état de choses qui, s'il conti-
nuait, compromettrait gravement l'existence d'un monument historique
intéressant; les ordres donnés à cet égard par l'administration préfectorale
font espérer que les ruines du Winecke seront désormais respectées.
Une discussion intéressante s'engage à ce propos sur les mesures les
plus efficaces pour arrêter la destruction, par la main de l'homme, de nos
vieux châteaux. Quelques membres font observer que, dans bien des cas,
une prière, un appel à l'honneur et au patriotisme ont produit de meilleurs
résultats qu'une défense, même formulée dans les termes les plus sévères.
M. Schlumberger-Hartmann communique au comité le texte d'un Avis au
public qu'il a fait mettre aux ruines du château de Winecke-Hugstein, an-
cienne demeure des abbés de Murbach, dans la vallée de Guebwiller; cet
avis est conçu en ces termes :
«Tout citoyen est prié de respecter et de ménager ces ruines (es ivird
Jedermann gebeten diese Allerthümer zu verschonen und in Ehren zu
halten). »
M. Foltz rappelle au comité qu'une somme de 15,500 fr. a été accordée
l'année dernière par le Ministère de la maison de l'Empereur pour la res-
tauration de l'anciennne église abbatiale de Murbach, classée parmi les
monuments historiques de la France; il demande si ces travaux, reconnus
dès lors comme très-urgents, ont déjà reçu un commencement d'exécution.
M. Frantz, chef de division à la Préfecture, entre à ce sujet dans quel-
ques détails et donne les renseignements suivants :
9*
— 138 —
Le Ministère des beaux-arts n'accorde d'allocations pour la restauration
des monuments historiques classés, qu'à la condition que les communes,
propriétaires de ces monuments , votent des sommes égales à ces alloca-
tions; cette condition vient d'être remplie par la commune de Murbach et
les travaux de restauration de l'église vont bientôt être entrepris sous la
direction de M. Bœswillwald, architecte, attaché au Ministère des beaux-
arts en qualité d'inspecteur des monuments historiques. Ces travaux, dont
le devis s'élève à 30,965 fr., comprennent : 1^ la dépose et la reconstruction
du mur sud-ouest du transept sud; 2° le rétablissement des arcades rom-
pues du chœur; 3° des réparations à la première voûte du bas côté sud,
4° la reprise à l'extérieur des murs du chœur et la reconstruction de la
sacristie.
M. Laurent Atthalin entretient le sous-comité de l'intérêt archéologique
que présentent certaines portions de la vieille école de la rue Saint-Jean ,
située vis-à-vis de l'ancienne maison des chevahers de Saint-Jean; il croit
devoir, au moment où les projets de l'édihté colmarienne vont faire dispa-
raître ces bâtiments, exprimer le vœu que les parties les plus intéressantes,
notamment la tourelle et la porte d'entrée, en soient conservées.
Le même membre communique encore au comité un projet qui tendrait
à percer le mur des Unterlinden donnant sur la place l'ieiïel, et à y pra-
tiquer des ouvertures dans l'axe des deux galeries du doître perpendicu -
laires à la place; ce projet, s'il était mis à exécution, aurait pour résultat
de révéler l'existence du beau cloître des Unterîiuv-Ci: ?iix étrangers qui
visitent Colmar et qui souvent en repartent sans avoir vu une des choses
les plus intéressantes que notre ville puisse offrir à la curiosité des touristes
aussi qu'à l'étude des archéologues.
Le comité reconnaît avec M. Atthalin l'utilité qu'il y aurait à mettre à
jour l'intérieur du cloître des Unterlinden aujourd'hui complètement res-
tauré, et qui s'est récemment embelli du monument Schœngauer, une des
œuvres les plus importantes de M. Auguste Bartholdi; toutefois, il se borne
à consigner dans son procès-verbal les deux projets qui lui sont soumis
par M. Atthalin, attendant, pour formuler son avis, que le conseil muni-
cipal en ait été saisi.
La séance est levée à trois heures et demie.
— 139 —
Séance extraordinaire du Comité du 22 février 1864.
Présidence de M. SPACH.
Présents : MM. Bœrsch, Eissen, Heilz, Klotz, colonel de Morlet, Saum,
baron de Schauenburg, SitTer, Straub.
Le secrétaire dépose le Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie,
1863, nM.
Il donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, qui est adopté.
Il communique ensuite une lettre de M. le docteur L. Leclerc, secrétaire
de la Société d'archéologie de Gonstantine, qui offre d'entrer en relations
avec la Société d'Alsace.
Le Comité décide que l'on fera parvenir à la Société de Gonstantine tout
ce qu'il y a de disponible du bulletin, et que l'on continuera désormais à
lui adresser régulièrement les publications de la Société.
Le président annonce avoir écrit les lettres suivantes depuis la dernière
réunion :
A M. Véron-Réville; convocation pour la séance du 14 mars 1864, des-
tinée au renouvellement du bureau;
A M. Verdin, propriétaire à Strasbourg; remercîments de son intention
de donner des objets antiques à la Société;
A MM. Gœtz, marchands de bois à Brumath; demande s'ils veulent se
dessaisir de quelques fragments antiques déposés dans leur propriété;
A M. Ringel, pasteur à Diemeringen; remercîments pour l'envoi d'objets
antiques récemment trouvés à Mackwiller; annonce d'un vote de 300 fr.
pour continuer ces fouilles;
Envoi de la dernière livraison du bulletin à M. le Ministre de l'intérieur
et au Ministre secrétaire d'État;
AM. Paul ilistelhuber; accusé de réception de sa note sur le mémoire
de M. Levrault ;
A M. Ernest Lehr, secrétaire général du Directoire, au sujet de l'écusson
de la famille Hammerer;
A M. Véron-Réville; réponse à sa lettre du 15; questions d'intérieur;
A M. Kast, agent voyer à Wasselonne; envoi de la dernière livraison de
notre bulletin.
M. Klotz soumet au Gomité une médaille envoyée par M. Sachs, ecclé-
~ 140 —
siasiique du grand - duché de Bade, à la mairie de Strasbourg, et donne
lecture d'une notice à ce sujet.
Le Comité décide l'insertion de celte notice aux mémoires, avec jepro-
duction et traduction de la lettre d'envoi.
Il vote des remercînienls à M. Sachs.
M. Saum annonce que la succession de feu M. Massé lail don à la So-
ciété d'une dalle sculptée, de provenance inconnue, représentant un dau-
phin. — Remercîments.
M. Siffer donne lecture d'une notice sur une charte du quinzième siècle,
relative à une affaire de dîme, et mentionnant trois locahtés qui n'existent
plus, Ramshard, Kronenbruch et Buchhurst, du canton de Wœrth.
Le président communique au Comité la lettre suivante :
«Monsieur le Président, le Comité de la Société des monuments histo-
riques d'Alsace vient de publier dans le Bulletin (t. II, p. i06) une intéres-
sante note de M. le baron de Schauenburg sur une pierre armoriée trou-
vée dans la maison n° 10 de la rue Mercière, à Strasbourg.
«M. de Schauenburg a reconnu avec raison dans l'un des deux écussons
gravés sur cette pierre celui de la famille Ilammerer, et s'appuyant tant
sur l'antiquité présumée de la maison dont il s'agit que sur les indications
de son propriétaire actuel, il attribue et l'écusson et la construction de la
maison à l'ammeister Jean Hammerei'.
«Lorsque, dans le courant de l'été dernier, le Cotirrie?' du Bas-Rhin
annonça la découverte de ce bas-relief et en donna la description som-
mah'e, je me permis déjà de vous soumettre, par une petite note, mes
doutes sur l'attribution qui en était faite à l'ammeister Hammerer. Mais
comme je n'étais pas parvenu à me faire montrer la pierre, vous avez sans
doute jugé. Monsieur le Pj'ésident, que mon observation ne reposait pas
sur un fondement assez solide, et avec toute raison, vous ne l'avez pas pré-
sentée au Comité à cette époque.
«Aujourd'hui qu'un dessin élégant me permet d'émettre mon opinion
moins à la légère, je prends la liberté de renouveler mes respectueuses
objections. Selon moi, la pierre ne porte pas les armoiries de Jean Ham-
merer, parce que l'écusson de droite, qui est un écusson d'alliance, n'est
celui d'aucune des deux femmes successivement épousées par ce magistral.
Jean Hammerer s'était marié en premières noces avec Dorothée Pfarrer,
sœur d'une autre notabilité strasbourgeoise, de l'ammeister Mathias Pfarrei',
qui seul, dans la longue liste de ces fonctionnaires, exerça sept fois la
régence. Il se maria en secondes noces avec Marguerite Wilhelm, qui,
selon toutes les probabilités, descendait de l'ammeister Gœtz Wilhelm, du
— U1 —
milieu du quatorzième siècle. D'après une autre indication, Marguerite
\Yilhelm appartenait à une famille différente, qui portait: de gueules à la
bande d'ar?ent chargée de trois elands au naturel, feuilles de sinople.
"Or, les armes des Pfarrer et de l'arameister Wilhelm, si c'est de lui
qu'est issue la seconde femme de Hammerer, n'ont aucune analogie avec
celles qui sont figurées sur la pierre. Pfarrer portait : d'or à la bande ondée
d'azur (aUas d'argent), parti de gueules (Hertzog, liv. VIII, p. 9i). Wilhelm
portait : de sable à la face d'or accompagné* de trois coquilles d'argent 2 et 1 .
(Ibid., p. 54.)
<rEn réahté, l'écusson dont je parle est celui d'une autre famille illustre
dans les fastes de Strasbourg, des Obrecht, qui portaient au seizième siècle :
d'argent au rencontre de bœuf de sable et une bordure d'or (plus tard, on
a supprimé la bordure). Or, Henri Hammerer, fils aîné de l'arameister, qui
siégea comme son père dans le magistrat sans cependant parvenir à la
dignité suprême, avait pour femme une fille de Thomas Obrecht et d'Elisa-
beth Roth, Rosine Obrecht, sœur cadette de l'arameister Henri Obrecht
(né 1536, 7 1606). Ne vous semble-t-il pas infiniment probable. Monsieur
le Président, que c'est à Henri Hammerer que doit être attribuée la con-
struction de la maison de la rue Mercière, et que, s'il existe du contraire
des preuves que je ne puis discuter, ne les connaissant pas, ce sont dans
tous les cas ses armes que représente le bas-reUef? J'ajoute que Henri
Hammerer paraît avoir été un grand amateur de bâtisses, car il résulte
d'une note manuscrite du chroniqueur et généalogiste Reichard , qu'en
1566, il acheta, au coin de la Spiessgasse, probablement à côté de la mai-
son Camraerzell, trois baraques qu'il fit démohr, et sur l'emplacement
desquelles l'architecte Martin Schorndorfer éleva pour lui une belle et grande
construction.
" Si vous pensez que ces renseignements puissent oflVir quelque intérêt ,
je vous serais obligé de vouloir bien les communiquer au Comité dans
l'une de ses prochaines séances.
« Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de raa haute consi-
dération et de mon dévouement.
«Ernest Lehr.j»
Le président lit ensuite une lettre de M. Paul Ristelhuber, qui conteste
certaines étyraologies et assertions contenues dans le dernier mémoire de
M. L. Levrault sur la découverte de sépultures antiques à Obernai. Il pense
que l'opinion de vouloir faire dériver le nom du village d'Ingmarsheim,
disparu depuis la fin du treizième ou au commencement du quatorzième
siècle, d'un ancien temple de Mars, est beaucoup moins soutenable que
— 142 —
l'élymologie qui ramènernil, ce nom au mol de Mark ou Marsch, justifié,
selon lui, par le voisinage du payus mérovingien. Selon Schœpflin, les
dénominations franques des endroits se composent généralement de deux
vocables, dont le premier indique le plus ancien propriétaire, et le second
la condition ou la situation du lieu. D'après cela, l'étymologie de M. Levraull,
ainsi que celle qui se rapporterait au mot de Marche, devrait s'évanouir
devant celle plus simple à'înginar'-s-heim, demeure âlngmar ou de Hink-
mcrr. D'après M. Stoflel, le nom» û'Tngmar ou Hinkmar se traduirait dans
l'allemand moderne par Stammberühmter (d'origine célèbre, illustre). Ingo
est, selon Grimm, le fils de Mannus et le père des Ingœvones. A la même
famille appartiennent les Jngilhard, Jngilrcmim (Enguerrand), et avec toute
évidence, ïngmar ou Hincmar. La même remarque paraît devoir être faite,
selon M. Ristelhuber, sur Oltmarsheim , pour laquelle on a aussi cberché
des étymologies inadmissibles, et qui signifie simplement la demeure
d'Ottmar.
Les monuments toujours vivants de la linguistique paraissent à M. Ristel-
huber dignes d'éveiller tout l'intérêt de la Société.*
Le président communique une lettre de S. Exe. le Ministre de l'instruc-
tion publique, concernant la distribution des récompenses aux Sociétés
savantes des départements, qui aura lieu le l'^'' et le 2 avril.
La séance est levée à quatre heures.
Séance du Comité du Ui mars 1864.
Présidence de M. SPACH.
Présents : MM. Bœrsch, Brielle, secrétaire du comité du Haut -Rhin,
Eissen, Grass, Guerber, lleilz, Huot, membre du comité du Ilaut-Rhin,
Klotz, Morin, Ringeisen, baron de Schauenburg, Siffer,
Le secrétaire dépose :
Bulletin de la Société Nivernaise des sciences, lettres et arts, t. il, W^ série;
Bulletin de la Société impériale des antiquaires de France, 1863, IIP tri-
mestre;
Bévue des Sociétés savantes des départem^ents, IIP série, t. R;
1. Le procès-verbal de l'une des séances suivantes contiendra la réplique de M. Levraiilt^
et la rectilication de l'erreur, que M. Ristelhuber lui impute.
— 143 —
Messager des sciences Jiisloriques , ou Archives des arts et de la biblio-
graphie de Belgique, année 1863, 4^ livraison.
Le secrétaire du comité du Haut-Rhin donne lecture du procès-verbal
de la dernière séance de ce comité, qui sera inséré dans la prochaine livrai-
son du Bulletin.
Le secrétaire du comité du Bas-Rhin donne lecture du procès-verbal de
la séance extraordinaire du 22 février, qui est adopté.
Le président annonce avoir écrit les lettres suivantes :
A M. Sachs, doyen à Carlsruhe; remercîments de l'envoi de la médaille,
trouvée en 1760, dans le maître-autel de la cathédrale de Strasbourg;
A M. Leclerc, secrétaire de la Société archéologique de Constantine;
acceptation empressée de l'échange des Bulletins entre les deux Sociétés;
A M. Charles Mehl, représentant de la succession Massé; remercîments
de la remise d'une pierre historiée;
A M. Paul Ristelhuber, homme de lettres; annonce de la communica-
tion faite au comité de sa lettre sur Ingmarsheim ;
A M. E. Lehr, secrétaire général du Directoire; annonce que sa lettre
complémentaire sur les armes de la famille Hammerer sera insérée au
Bulletin;
A M. Véron-Réville; affaires d'administration intérieure;
A M. Berger-Levrault; annonce que le comité ne peut admettre la vente
par livraisons, mais seulement par volume, après fixation d'un prix de
nature à garantir les intérêts des membres de la Société contre les simples
acheteurs du Bulletin;
A M. Morin, architecte du département; prière de prendre l'estampage
d'une inscription à Pfaffenhoffen ;
A M. Anatole de Barthélémy; pour le prier de nous représenter à la
réunion générale des Sociétés savantes, le 2 avril prochain;
A M. de Belle-Trauttwein, bibliothécaire à Berlin; envoi de la 2** série
de notre Bulletin ;
A M. de Longpérier, membre de l'Institut; réponse explicative à sa lettre
du 24 février (au sujet du médailler Dorlan) ;
A M. Schneller, président de la Société historique à Lucerne; affaires
d'administration;
A M. Nicklès, à Benfeld; demande d'envoyer son mémoire sur Ehl (Hel-
vetus);
A M. le Préfet du Haut- Rhin ; accusé de réception du mandat de 500 (v.,
montant de l'allocation du Conseil général du Haut -Rhin pour l'exer-
cice 1864.
— 144 —
Le président informe le comité du changement de résidence de M. le
Préfet du Haut-Pdiin, deuxième président honoraire, et se charge de lui
exprimer les regrets de la Société.
Il fait part des propositions suivantes de membres à admettre:
MM. Constant Limon, avocat et propriétaire, quai des Bateliers, 18, à
Strasbourg, présenté par M. Sabourin de Nanton;
Bürel, curé de Schleithal, présenté par M. Schaffner, curé de Wissem-
bourg ;
Charles Geisen, agent voyer, rue de l'Écarlate, 5, à Strasbourg, présenté
par M. P. Ristelhuber;
Ilildenbrand, conseiller à la Cour impériale de Colmar, présenté par
M. Hamberger;
Wendling, juge au tribunal civil de Colmar, présenté par le même;
Méline, id. id.
Ces diverses personnes sont proclamées membres de la Société.
M. le président lit une lettre de M. de Longpérier, qui réclame contre une
erreur commise par M. Boyer, à la dernière assemblée générale de Colmar;
il annonce avoir donné des explications à M. de Longpérier.
Il communique une lettre de M. Schneller, président de la Société histo-
rique de Lucerne, Uri, Schwytz, Unterwaiden et Zug, qui demandée être
reçu membre honoraire de la Société. Le président ajoute que ce savant a
publié un grand nombre de mémoires d'une grande valeur et un partie
relatives à l'Alsace. Cette proposition, par décision du comité, sera soumise
à l'assemblée générale de Colmar.
M. le docteur Wieger annonce au président qu'il met à la disposition
de la Société un certain nombre d'objets d'antiquités trouvés à Kraut-
weiler.
M. Saum écrit au sujet de la carte de Schweighœuser, annotée par
M. Jung, que, pour le moment, M. Simon n'est pas encore en mesure de
produire les deux planches demandées.
L'ordre du jour appelle le renouvellement réglementaire du bureau,
c'est-à-dire du vice-président, du secrétaire, de l'archiviste et du tré-
sorier.
Le comité décide qu'il votera par un seul bulletin d'ensemble pour les
quatre fonctionnaires. Le président et le secrétaire procèdent au dépouil-
lement du scrutin.
Treize votants. — M. le grand -vicaire Schirr (absent) obtient treize voix
pour les fonctions de vice-président.
M. le docteur Eissen, douze voix pour les fonctions de secrétaire.
— U5 —
M. ïïeilz, dix voix pour celles d'archiviste.
M, Klotz, douze voix pour celles de trésorier.
En conséquence, sont proclamés pour l'année 1804-1865 : vice-prési-
dent, M. Schirr; secrétaire, ]\I. Eissen; archiviste, M. Heitz; trésorier,
M. Klotz.
M. le baron de Schauenburg propose de mettre désormais à la disposi-
tion de MM. les collaborateurs du Bulletin , un tirage à part de leurs tra-
vaux, à un certain nombre d'exemplaires, à l'instar de ce qui se fait à la
Société hltéraire.
M. Huot propose de donner cinquante exemplaires, ce qui est appuyé
par M. Bœrscli et par le secrétaire. M. Bœrsch espère que M. le président
voudra bien se charger de prendre des arrangements avec l'imprimerie
du Bulletin pour le prix de la feuille et de la demi -feuille, et d'en rendre
compte au comité à sa prochaine réunion.
M. le baron de Schauenburg lit le mémoire suivant sur les antiquités de
Stéphansfeld :
« Il y a bien longtemps déjà qu'une commission, choisie dans le sein du
comité, et de laquelle j'ai eu l'honneur de faire partie avec MM. Jung, de
Morlet, de Ring et Morin, s'est rendue à l'asile départemental de Stéphans-
feld, pour examiner des antiquités découvertes dans l'enceinte même de
l'asile, recueillies et conservées par les soins éclairés d'un homme de cœur
et de grand mérite, M. David Richard, qui en était alors le directeur, et qui
a été trop tôt enlevé au bien immense qu'il y faisait.
«A notre savant et profondément regretté collègue, M. Jung, revenaient
de droit et la présidence de la commission et la tâche de faire, avec la
haute autorité scientifique qui n'appartenait qu'à lui, l'appréciation judi-
cieuse et certaine de l'origine, de l'âge, de la destination et de l'importance
archéologique des objets et de vous en rendre compte.
«Malheureusement les travaux sans nombre que son immense savoir,
sa vaste érudition et ses utiles fonctions accumulaient incessamment sur lui
n'ont pas permis qu'il pût leur dérober le court loisir qui lui aurait suffi
pour donner une forme attrayante et instructive à ses notes sur les anti-
quités de Stéphansfeld.
« Notre excellent et cher président, à qui je ne sais rien refuser, a voulu
que le moins capable des membres de la commission se chargeât d'un tra-
vail évidemment au-dessus de ses forces, n'ayant pas même pour guide
les notes prises par M. Jung.
«C'est vous dire assez, Messieurs, que vous allez sentir une fois de plus
tout ce que vous avez perdu dans notre savant et excellent collègue; c'est
II'Skrie. — T. II. — (P.-V.) '10
— 146 —
vous dire aussi que je compte beaucoup sur la bienveillante indulgence à
laquelle me donne droit un évident sacrifice d'amour-propre.
« Tous les objets formant la précieuse et riche collection dont j'ai à vous
entretenir ont été découverts pendant les quinze dernières années, à la
faveur des démolitions et reconstructions successives qui ont fait de notre
asile départemental ce qu'il est aujourd'hui, un établissement modèle, un
monument aussi remarquable par sa grandeur et son élégance que par
l'utihté de sa destination et la manière dont il y est approprié.
«Il serait superflu de vous rappeler ce qu'a été Stéphansfeld depuis, 1220,
époque de sa fondation par les comtes de Werde, landgraves d'Alsace, et
trop scabreux pour moi dem'aventurer comme aurait pu le faire sans péril
notre savant et regretté collègue, à la recherche de ce qu'il a pu être à
des époques plus reculées.
« Obligé de prendre un moment sa place, sans pouvoir la remplir, je dois
me borner prudemment à consigner ici la remarque d'un fait dont la signi-
fication ouvre un vaste champ aux suppositions, à savoir que la presque
totalité des objets et fragments antiques découverts à Stéphansfeld, au
nombre de plus de 200, remontent à l'époque de foccupation romaine et
ont été trouvés, à peu d'exceptions près, dans un espace de très-peu d'é-
tendue, situé au sud-est de l'abside de la chapelle, c'est-à-dire au centre
même de l'établissement.
«Là, en effet, les objets de toute nature étaient, pour ainsi dire, accu-
mulés, comme pour témoigner qu'un ancien établissement d'une certaine
importance occupait avant la fondation des comtes de Werd la place de
l'asile actuel, et était alors, comme aujourd'hui, mais avec une destinalion
différente, une dépendance de ßrumath (Brocomagus), ville romaine.
« Voici à l'appui de cette remarque la nomenclature des objets formant la
collection:
«Epoque romaine:
«Deux cercueils en pierre des Vosges, creusés à angles droits, avec
couvercles à pans inclinés, dont l'un entier et l'autre brisé en trois frag-
ments;
« Un vasque en pierre des Vosges, à pans verticaux, dont l'un est sculpté
d'un masque en relief, reproduit sur l'une des planches;
^' Trois fragments de miroir en métal trouvés dans un vase en terre rouge,
orné d'une grecque et d'une élégante guirlande, représenté sur la planche;
« Un petit vase en bronze; •
i^Une cuillère à broche en bronze;
« Neuf fragments d'anneaux en bronze;
— 147 —
«Une monnaie en bronze à l'efïigie de Magnence;
«Un anneau en fer;
«Trente et un fragments d'objets en fer;
«Dix débris d'ossements, recueillis dans les cercueils, seuls restes des
squelettes qu'ils contenaient et qui sont tombés en poussière au contact de
l'air;
« Trois lacrimatoires en verre ;
«Trois vases en verre;
«Dix fragments de vases en verre;
« Trente-trois vases en poterie : argile, grès, terre jaune, rouge, noire,
dont sept de grande dimension, entiers ou presque entiers;
(( Cinquante-neuf fragments de poterie, dont quelques-uns ornés d'élé-
gants modelages.
« Époques postérieures :
«Cinq clés en fer;
«Deux éperons;
«Un fer à cheval;
«Deux parties d'une agrafe, représentant deux pigeons et qu'on peut
supposer avoir appartenu au costume de chœur des chanoines de l'ordre
de Saint-Augustin, possesseurs de l'hôpital du Saint-Esprit, qui a remplacé
à Stéphansfeld l'hospice fondé par les landgraves d'Alsace;
«Enfin, une dalle armoriée, portant l'inscription : a Anniversarimn fun-
dauit hoc loco validus Ludovicus Zorn zum Kiel, armiger, et Agatha de
Hochfelden, nxor ejus légitima, pro se et pareulibits suis, anno Christi.»
«La date manque; mais Herzog, donnant au décès d'Agalhe de Hoch-
felden la date précise du 24 avril 1539, fixe approximativement ainsi
celles de la fondation et de la pose de la dalle retrouvée parmi les débris
de l'ancienne nef et replacée dans la chapelle actuelle.
t' Une description raisonnée de tous ces objets , qui serait devenue sous
la plume de M. Jung une savante et précieuse leçon d'histoire et d'archéo-
logie, courrait trop grand risque de devenir fastidieuse sous la mienne,
sans vous rien apprendre que vous ne sachiez mieux que moi; j'espère que
vous me saurez gré de vous en avoir fait grâce, en ayant recours à un
moyen moins hors de ma portée de vous faire connaître les objets les plus
intéressants de la collection, ceux auxquels j'ai cru devoir donner la pré-
férence, parce qu'ils n'ont pas, comme le surplus, dans les musées publics
et particuliers, de nombreux similaires, déjà décrits et reproduits.
« L'asile possède d'ailleurs un portefeuille contenant des dessins coloriés
de tous les objets formant sa collection, dessins exécutés avec le soin le
— 148 —
plus minutieux et presque tous à la mesure même des objets, par un pen-
sionnaire de l'établissement, sous la direction de feu M. Richard, circon-
stance qui m'a déterminé à restreindre le nombre des dessins, également
fidèles , mais réduits à la mesure du format de notre Bulletin, que j'ai l'hon-
neur d'offrir au comité.
« Ayant fait ces dessins sur pierre , il n'en coûtera à notre budget que les
frais de tirage et de papier, si le comité les juge dignes de paraître dans le
Bulletin. » t
Le comité vote l'impression de ce mémoire avec la reproduction des
planches.
M. Huot rend compte des découvertes faites dans le Haut-Rhin. C'est un
four trouvé près d'Altkirch, renfermant des moules à poterie. Il soumet au
comité la photographie d'une cloche de Lautenbach, qui a dû être refon-
due; reproduction que le comité avait demandée dans une de ses précé-
dentes séances.
La séance est levée à quatre heures.
ANTIQUITES DE STEPHANSFELD
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ANTIQUITES DE STEPHANSFELD
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Pierre sculptée.
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0, 37 J'.
TABLE DES MATIÈRES.
PAGES.
Séance du Comité du 5 janvier 1863 1
Séance du Comité du 2 février 1863 3
Séance du Comité du 2 mars 1863 7
Séance du Sous-Comité du Haut-Rhin, tenue le 26 janvier 1863 7
Séance du Comité du 9 mars 1863 13
Séance extraordinaire du Comité du 16 mars 1863 15
Séance du Comité du 13 avril 1863 16
Séance du Sous-Coraité du Haut-Rhin, tenue le 16 mars 1863 17
Séance e.xtraordinaire du Comité du 20 avril 1863 21
Séance du Comité du A mai 1863 22
Assemblée générale tenue à Colmar, le 7 mai 1863 31
Séance extraordinaire du Comité du 18 mai 1863 39
Séance du Comité du 1" juin 1863 42
Séance extraordinaire du Comité du 15 juin 1863, avec 1 gravure .... 46
Séance du Comité du 6 juillet 1863, avec 1 planche chromo-lithographiée 40
Composition du Comité d'administration (fin novembre 1863) 55
Liste des membres par départements, arrondissements et cantons .... 56
Sociétés savantes avec lesquelles la Société pour la conservation des mo-
numents historiques d'Alsace se trouve en rapport 71
Séance du Comité du 3 août 1863 74
Séance du Sous-Comité du Haut-Rhin, tenue le 31 juillet 1863 75
Séance extraordinaire du Comité du 10 aoiït 1863 78
Séance du Comité du 5 octobre 1863 80
Séance du Comité du 2 novembre 1863 88
Séance du Comité du 7 décembre 1863 100
Assemblée générale du 10 décembre 1863 103
Exposé des Recettes et des Dépenses de l'exercice 1862 113
Séance du Comité du 4 janvier 1864 126
Séance extraordinaire du Comité du 18 janvier 1864 130
Séance du Comité du 8 février 1864 131
Séance du Sous-Comité du Haut-Rhin, tenue le 22 février 1864 134
Séance extraordinaire du Comité du 22 février 1864 139
Séance du Comité du 14 mars 1864 142
BULLETIN
SOCIÉTÉ POUR LA CONSERVATION
MONUMENTS HISTORIQUES
DALSACE
STRASBOÜUn , IMPRIMERIE DE VEUVE BERGEK-LEV RAULT.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ POUR LA CONSERVATION
DES
MONUMENTS HISTORIQUES
D ALSACE
IP SERIE — DEUXIEME VOLUME
(1863 - 1864)
UECXIEME PAKTIE — ME.^OIRES.
AVEC GRAVURES ET PLANCHES
VEUVE BERGER -LEVRAULT ET FILS, LIBRAIRES - ÉDITEURS
PARIS
RUE DES SAINTS-PÈRES, 8
STRASBOURG
RUE DES JUIFS , 26
1864
NOTICE
SUR QUELQUES DECOUVERTES ARCHÉOLOGIQUES
EFFKCTUÉES DANS LES CANTONS
DE SAAR-UNION ET DE DRULL\GEN (ARRONDISSEMENT DE SAVERNE).
La partie de l'arronclissement de Saverne, désig-née sous le nom de Lor-
raine allemande ', qui s'étend sur le versant occidental des Vosges, jusqu'à
la Sarre, mérite une attention toute spéciale de la part des archéologues. Les
fouilles qui y ont été exécutées par la Société des monuments historiques
d'Alsace, sous l'habile direction de M. le pasteur RingeP, ont fait appa-
raître, sur une surface d'environ six lieues carrées, une quantité considé-
rable de ruines et de monuments dont la carte ci-joinle donne l'indication,
et que je classerai dans trois catégories.
$ 1*^'". — Enceintes fortifiées.
Die Burg, dans la forêt de Ratzwiller ;
Grosse Schmitz, forêt dite Scheidlwald; Heidenschantz, forêt d'Œrmingen.
§ 2. — Villa , thermes, tuileries et voies anciennes.
Mackîviller , thermes, aqueduc, etc.;
Heidenhübel (forêt de Saar-Union), ruines d'un établissement métallur-
gique, hypocaustes;
Gorgelhach (commune de Dehlingen), ruines, hypocaustes;
Lutterbacherhof (commune d'Œrmingen), ruines, marbres;
Heidenmauer (commune de Saar-Union), ruines, marbres;
Domfessel, villa, marbres, tuiles romaines;
Buscherliof (commune de Saar-Union), tuilerie, hypocaustes, fours.
1. Ce territoire, qui comprend les cantons de Saar-Union et de Prulingen, n'a jamais fait
partie de l'Alsace. Possédé, à part quelques enclaves, jusqu'en 1793 par deux branches
distinctes de la maison de iNassau, il. fut réuni à la république française par décret de la
Convention nationale, en date du 14 février 1793, à l'exception de la ville de Vieux-Saar-
werden, qui appartenait déjà à la France comme dépendance du duché de Lorraine.
2. C'est à M. Ringel, pasteur de Diemeringen, que sont dues toutes les découvertes dont
il est fait mention dans cette notice.
Il« SÉRIE. — T. H. — (M.l \
— 2 —
$ "3. — Sépultures.
Cimetière deLorentzen, canton /?e/w; cimetière de Diemeringen; canton
Lechberg; tombes de Hatzwiller; tombes de Todtenberg.
Je vais exposer rapidement l'état d'avancement des recherches effectuées
dans les deux premières catégories, puis je parlerai en détail des sépul-
tures qui forment l'objet spécial de cette notice.
'V^ Catégorie. — Enceintes fortifiées.
Les recherches que j'ai faites sur les enceintes fortifiées, se sont
bornées jusqu'à présent au Burg de Ratzwiller , où des objets appar-
tenant à fàge de pierre ont été trouvés; de nouvelles fouilles seront né-
cessaires pour reconnaître l'origine de ce, Burg et de la Gross Schmitz, qui
tirent l'un et l'autre un grand intérêt de la proximité de deux monuments
druidiques, le Breitenstein et le Spilzstein.^
2*^ Catégorie. — Villa, thermes, etc.
Tous les monuments de cette catégorie sont de l'époque gallo-romaine.
Le plus important est celui des termes de Mackwiller, découvert en 1859
par M. le pasteur Ringel, et dont on continue encore les fouilles.
Des notices spéciales, insérées au Bulletin de la Société, ont donné
d'intéressants détails sur la plupart de ces constructions, dont les mo-
nographies complètes seront sans doute rédigées plus tard. Dès à présent ,
les beaux plans en relief exécutés par M. le pasteur Ringel, font connaître
l'importance de ces ruines qui sont groupées le long de deux voies ro-
maines, dont un tronçon est encore intact entre Mackwiller et Domfessel.
3^ Catégorie. — Sépultures.
Cimetières de Lorentzen et de Diemeringen. Tombes de Ratzwiller.
Lorsque , après avoir visité les ruines de Mackwiller . on se dirige vers
Domfessel en suivant la voie romaine, on remarque, sur la droite, deux
monticules qui recèlent de nombreuses sépultures. L'un, le plus rapproché
de Mackwiller, fait partie du territoire de Diemeringen, il s'appelle le Lec/t-
berg; l'autre appartient à la banlieue de Lorentzen, canton Behs. Sur
tous les deux, la charrue a souvent amené à la surface des ossements
1. Ces monuments, situés sur les contins de l'Alsace et de la Lorraine, sont désignés
par Schweigh?euser (Antiquités d'Alsace) comme faisant partie des nombreuses pierres levées
que Specklin annonce avoir existé de son temps (XVI'' siècle) sur la crête des Vosges, et
qui, d'après ce savant ingénieur, devaient marquer les limites des Triljoques et des Médio-
matriciens.
- 3 —
humains, des sabres en ter, des débris de fibules en bronze, et des boucles
en fer richement incrustées d'argent, accompagnées de grains d'ambre et
de fragments de poterie grossière.
Le mamelon liehs de Lorentzen ayant été en partie décapé en 186 J, par
suite de travaux exécutés par la commune, on y a découvert un cimetière
complet, dont nous devons la connaissance à M. le pasteur Ringel qui,
avec un zèle infatigable, en a relevé tous les détails.
Fig. a.
(1/20 de la grandeur réelle.)
Les tombes, fig. a, toutes orientées vers l'est, sont de forme rectangulaire,
leurs parois en dalles de grès grossièrement taillées, ou en pierres cal-
caires posées de champ; quelquefois ces dernières, placées à plat, for-
maient une véritable muraille. Souvent, une même tombe renfermait plu-
sieurs squelettes; on a vu une seule fois deux corps superposés, un jeune
homme au-dessus d'un vieillard.
%.™-, J^-^i^ ^^^^g£.
Fig. h.
,1 20 de l.a grandeur réelle.)
_ 4 —
Les pierres qui recouvraieni, ces tombes étaient brisées, à l'exception
d'une seule, fig. b. C'est une dalle en grès appuyée sur des moellons cal-
caires posés de champ.
Au milieu du champ funèbre, on a découvert, à 80 centimètres au-des-
sous du sol, un caveau voûté, entièrement clos,dont l'intérieur était rempli
"Vjra
-^r-^!C=^ -^-^
(1/20 de la grandeur réelle.)
de chaux vive, fig. c. Sa longueur était de 5 mètres sur 2 mètres de lar-
geur, et -1"\80 de hauteur sous clef, un pavé en dalles calcaires soigneuse-
ment taillées et incliné vers l'ouest couvrait le sol. La voûte était con-
struite en pierres calcaires, avec mortier de chaux et sable de la Sarre.
On n'a trouvé à l'entour, ni cendres, ni trace de combustible.
Les sabres, boucles et fibules trouvés dans quelques-unes de ces tombes
étaient entièrement semblables aux objets de même nature que l'on rencontre
invariablement dans les sépultures germaines, frankes et burgondes, je
n'en reproduirai pas les dessins, et je me bornerai à signaler une bague
en argent et une fibule ornée d'une mosaïque en verre filigrane qui sont
représentées sur la planche ci-jointe, avec une remarquable exactitude. '
La bague ^ porte sur le chaton une inscription en caractères de l'époque
1. Celte plaiifhe sort des presses de notre liahile imprimeur M. Sill)ermaim.
2. Le niiisée de Bonn possède une Ijagne à peu près semi)lai»le qni provient d'nne tombe
franke des bords du Rliin.
mérovingienne, dont rinterprélation paraît diflicile; des archéologues dis-
tingués ont lu CHLODOVEVSC?).
La fibule est un produit de l'ait antique, dont les Egyptiens fiy^ent les
inventeurs et les Phéniciens les propagateurs '; celte mosaïque, d'uneépais-
seur d'un demi-millimètre à peine, est formée par des fils de verre colorés,
réunis en faisceau, étirés et soumis au feu,de manière à former une masse
vitreuse, dont la section a produit un dessin admirable de finesse et de
régularité ^ Des lignes rouges parallèles, espacées de 2 millimètres, parta-
gent la surface en une série réguHère de j)etits carrés bleus, dans lesquels
paraissent des points blancs; le tout formé par des cubes de verre dont les
plus petits n'ont que 7,o de millimètre de côté, et les plus grands 7,o de
millimètre. On aperçoit dans la partie de la mosaïque qui est ébréchée,
l'empreinte colorée de ces cubes sur le bronze.
Ce bijou, trouvé dans une tombe d'enfant, vient-il de Home ou de By-
zance^? ou bien les Gaulois qui ont parcouru en vainqueurs la Grèce,
l'Asie Mineure et l'Egypte, l'ont-ils rapporté de leurs excursions?
Quelle que soit son origine, la présence de cette belle mosaïque dans les
tombes de Lorentzen est un fait remarquable; et la Société pour la con-
servation des monuments historiques d'Alsace doit s'estimer heureuse de
posséder un de ces rares bijoux que les musées d'antiquité de Naples offrent
à l'admiration des archéologues et que Venise et Florence ont impar-
faitement imités.
Un seul signe de l'ère chrétienne a été découvert,
c'est une petite ci'oix en plomb, de forme grecque,
trouvée dans le sol près d'une tombe.
Aucune médaille , aucune monnaie n'a été re-
cueillie.
Fig, d. Tels sont les résultats des fouilles du cimetière
Grandeur d'exécution. (Je Lorcutzeu, OÙ sc montrc une suitc remarquable
de monuments, depuis l'art antique représenté par la belle fibule mosaïque,
jusqu'à la bague mérovingienne de Chlodoveus et la modeste croix de
plomb qui annonce le christianisme. C'est dans ce cimetière que j'ai trouvé
1. De la Borde, Notice sur les émaux et bijoux du Louvre, p. 22.
2. Otto Müller. — Handbnch der Archéologie der Kansl, p. 436 et 437. »Mosaïques :
« zusainme)t(jeschmolzc)ie Glasfäden, welche im Durclischnitt immer dasselbe höchsl zarte
« U7id glänzende Bild geben.«
3. Byzance devint après la chute de l'empire d'Occideat un centre de fabrication d orfèvrerie,
dont les produits se répandirent dans toute FEurope.
6 —
la tombe complélemenl rectangulaire, dont la date remonte sans doute
très-loin; tandis qu'à Ralzwilier et au Todtenberg , fig. e, se présentent les
caractères d'une époque plus récente, tels que le rétrécissement de largeur
aux pieds, et la cavité destinée à recevoir la tête du mort.
Fig. e.
(1/20 de la grandeur réelle.)
Dans cette série funèbre, ne paraît pas la sépulture par incinération',
que j'ai cherchée en vain sur le sol de cette partie de la Lorraine allemande
où les monuments de l'époque gallo-romaine sont si nombreux.
Colonel DE MORLET.
1. Une seule pierre pouvant avoii* celte tlestiiiatiou a été trouvée, dit-on, il y a près de
deux siècles, près de Domfessel : c'est un bloc calcaire à peu près cubique de 0^,bO de côté
dans lerpiel est creusée une cavité qui a pu recevoir des ossements et des cendres. —
Cette pierre est déposée au musée de Saverne.
-*»®8^S3^S»o~
DÉCOUVERTE
DE SÉPULTURES ANTIQUES A OBERNAI.
En IS^T le rédacteur de ces lignes soumit à M. de Salvandy, ministre
de l'instruction publique, un mémoire, qui fut communiqué, je crois, au
Comité historique des arts et monuments et qui signalait sur le territoire
d'Obernai des vestiges d'une colonisation bien antérieure aux souvenirs
traditionnels et aux documents historiques dont l'accord permet d'assigner
à XEhnhemium du testament de sainte Odile et de l'annaliste d'Ebersheim
une origine au moins contemporaine de l'époque mérovingienne.
Ce mémoire, après avoir cité les monuments des âges divers de l'anti-
quité , épars dans les environs d'Obernai, tels que le mur païen de
Hohenbourg, les agencements de rochers an Homhurgerberg , les dolmens
plus ou moins authentiques de la Bloss, l'enceinte du Kœpfel, les fossés
et les amas de pierres sèches du Heidenkopf et du Purpiirkopf, enfin les
nombreux tumuli (hypothétiques , puisqu'ils n'ont pas été fouillés) , dont
les tertres boisés s'échelonnent sur divers points de la forêt d'Obernai,
ainsi que des forêts contiguës de Landsperg, de Barr, de Strasbourg, de
Rathsamhausen, de Bœrsch, de Rosheim, de Bischoffsheim, relatait la
découverte récente d'un kelt de pierre, d'un anneau de bronze, d'un
fragment de collier en oves d'argile cuite et de quelques débris d'un vase
de même matière, déterrés dans une vigne très à proximité d'Obernai,
au canton dit Hauel, à côté d'ossements dont la disposition indiquait
plutôt un squelette accroupi qu'un squelette étendu sur le dos.
Depuis l'envoi du mémoire précité, d'autres découvertes du même
intérêt archéologique ont encore eu lieu , toujours dues, comme la pre-
mière, au hasard. C'est ainsi que tout près de ce canton vignoble Hauel,
dans la vigne dite Spitelskirche , on trouva à deux reprises différentes des
squelettes ayant à leurs pieds des débris de poterie gallo-romaine, et l'un
d'eux , ayant de plus à sa droite quelques grains d'argile, recouverts d'un
émail bleu et un morceau de fer très-oxydé, dont la forme longue, sans
pointe, pouvait rappeler l'épée gauloise. Ce morceau de fer et la position
du squelette , la tête au nord , les pieds au sud, semblait révéler une phase
de l'antiquité, diflerente de celle indiquée par la première découverte,
l'âge de fer au lieu de l'âge de pierre ou de bronze.
La situation du lieu de ces trois sépultures, à l'est et presque à côté du
chemin d'Obernai à Bischoftsheim , mérite d'être remarquée. Le mémoire
de 1847 désignait ce chemin, près duquel on a trouvé à différentes époques
des débris de briques minces, striées et de ciment très-dur, comme pou-
vant devoir son origine à l'une de ces voies hypothétiques qui devaient
sillonner le pied des Vosges, parallèlement à la grande voie de Milan à
Mayence, voies vicinales, militaires ou particulières, dont les recherches
savantes de nos collègues, MM. Coste et de Morlet, ont démontré dans ces
dernières années l'existence.
Ce chemin d'Obernai à Bischoffsheim pouvait avoir sa raison d'être
même avant l'ère gallo-romaine , car il longe le pied de la colline à laquelle
s'adossent les deux communes et s'adossèrent peut-être des habitations
antiques, soit médiomatriciennes, soit triboques. Il aboutit aussi au heu
appelé Ingmarsiieim , qui fut un très - ancien village , que ses habitants
abandonnèrent au commencement du quatorzième siècle, suivant Schœpflin,
ou peu après l'année 1298, pour venir se fixer derrière les murs d'Obernai.
Sans partager l'opinion de quelques personnes qui veulent faire dériver
ce nom d'Ingmarsheim d'un ancien temple de Mars et tout en avouant
notre préférence pour l'élymologie des mots Mark , Marsch , étymologie
que jus'ifiprait peut-être le voisinage du pagus mérovingien de Bishovis-
heim , cité dans la donation de Dagobert II à l'église de Strasbourg , il y
a lieu de crohe que, soit à Ingmarsiieim, soit sur l'emplacement actuel
d'Obernai , il exista à une époque de l'histoire encore indéterminée un
rassemblement d'hommes assez considérable pour servir d'explication à la
rencontre de ces tombes antiques.
C'est à environ 500 mètres des vignes où furent trouvées ces dernières,
dans le canton rural appelé Grünling, tout à fait en plaine, au bord de
la route actuelle d'Obernai à Strasbourg et à près de trois kilomètres
d'Ingmarsheim , que des ouvriers occupés à creuser les fondations d'une
maison sur un terrain jusqu'alors en nature de vignes , mirent, il y a quel-
ques jours , à découvert une grande quantité d'ossements appartenant à
des squelettes qui paraissaient avoir été fort symétriquement alignés et
couchés la lète à l'est et même un peu nord-est. Des poteries et des
vases de veri'e, dont un à émail bleu, étaient aux pieds de quelques-uns
de ces squelettes , pas de tous , comme pour servir à désigner ceux qui
provenaient de défunts plus élevés en rang que leurs voisins. *
II y avait là des vases de terre cuite plus ou moins rougeâtre de formes
très-variées, préféricules , patères , lanx , palinœ et pö/e^te, sans autres
empreintes que quelques stries très-peu apparentes, la plupart brisés,
4^^W
iah Ml f 3cr,iT-U-<yTiiv.lli lils i StrMtoiirj
YASIS.YIRIOLE ET ANNULE THOUYÉS A OBERNAI EN FÉVRIER 1863,
— 9 —
quelques-uns encore entiers ou à peu près. Un petit vase sans anse , large
à son ouverture, rappelait cette sorte de préféricules dont Millin cite la
description par Festus et qui sei'vaient dans les sacrifices à Ops Consiva.
Les vases de verre étaient nombreux, entre autres une patère sans
manche et une petite fiole parfaitement conservées; des fragments d'autres
fioles, beaucoup plus grandes, étaient encore enduits à l'intérieur d'une
matière graisseuse et appartenaient évidemment au genre de ces vases
improprement appelés lacrymatolres , qui servaient aux huiles et aux on-
guents funéraires.
Près d'ossements relativement plus petits que les autres et qu'on pou-
vait supposer être ceux d'une femme ou d'un adolescent, on ramassa une
viriole et une armille, les seuls objets en métal qui fussent parmi tous ces
ossements, sauf trois petites pièces de monnaie, dont les flancs informes
et le module rappellent les monnaies gauloises, mais trop oxydées et trop
frustes pour pouvoir être classées. Ces trois pièces furent trouvées dans un
des vases.
Un fragment de poterie noircie était aussi de ce côté, entre deux ran-
gées de squelettes, et pourrait avoir appartenu à la partie inférieure d'une
urne, ou à un réchaud; le grain en paraît plus fin que celui des autres
vases qui ressemblent, quant à la couleur de la terre, aux fragments trou-
vés, il y a quelques années, près du four à potier de Burgheim. Ces traces
noires sont, d'ailleurs, avec celles moins bien marquées de deux autres
vases, les seuls indices qui puissent faire penser aux rites de l'incinération.
Encore pour les deux autres vases, ces marques proviennent-elles plutôt
de cette couleur noire, plus ou moins grossière, dont étaient généralement
peints les vases gaulois ou celtiques. D'ailleurs, point de cendres, point
d'apparence de couches de charbon, seulement, au dire des ouvriers, la
terre qui supportait les ossements était plus friable et formait un lit presque
moelleux.
Un détail qui ne manque pas d'intérêt est celui du fragment de vase ou
de patina, contenant encore des restes de volatile. On sait l'usage commun
à plusieurs peuples de l'antiquité, et principalement aux races celtiques, de
placer dans la tombe, à côté du mort, les apprêts de son dernier souper
et de composer ce repas posthume, soit du mets que le défunt préférait ,
soit de celui plus spécialement consacré dans les traditions du clan ou de
la peuplade. A ce dernier point de vue, le volatile placé dans ce vase mé-
riterait quelque attention. Presque chaque clan ou chaque tribu celtique
avait son oiseau ou son quadrupède préféré. L'alouette est célèbre, le coq,
à plus ou moins bon droit, ne l'est pas moins. D'autres volatiles avaient en
— 10 —
quelque sorte leur circonscription d'élection ou de popularité. Qui sait si
les restes, peut-être vingt fois séculaires du volatile placé dans le vase dont
nous parlons, ne sont pas un signe, non-seulement de race, mais de mi-
gration de race? Qui sait s'ils n'ont pas (bien entendu, toutes propor-
tions et toutes différences gardées) quelque mystérieuse analogie avec ce
que des travaux récents nous apprennent de \alca impennis, si chère aux
antiques traditions du nord Scandinave?
Un fait digne de remarque, c'est qu'aucun morceau de fer, aucune arme,
n'ont été aperçus au milieu de ces ossements, de ces ornements et de ces
vases. Cela donne à la découverte d'aujourd'hui un caractère différent des
découvertes antérieures. Les guerriers de race ou les guerriers improvisés
pour la conquête ou la défense du pays, étaient d'ordinaire, comme tout le
monde sait , inhumés avec leurs armes. Et pourtant, aucune trace d'armes,
rien de militaire , en cette nouvelle nécropole antique , rencontrée à
Obernai.
Nous disons nécropole, et ce mot n'est peut-être pas trop ambitieux,
car il est facile encore de voir que le champ des morts ne finit pas où s'ar-
rêtent les travaux actuels de fondations de la maison en construction. Ces
travaux n'ont amené à décaper qu'environ 9 mètres de long sur à peu
près autant de largeur; or, là où le terrain cesse d'être décapé, on peut,
non-seulement deviner, mais reconnaître encore, sous le terrain que re-
vêt la vigne, les indices et en quelque sorte le relief d'autres rangées de
sépultures.
Y avait-il là, autrefois, quelque tertre nivelé lors de la mise en culture
de cette partie du sol avoisinant Obernai? Gela serait probable, car l'arran-
gement symétrique des squelettes semble indiquer une chambre sépulcrale.
Ces squelettes ont apparu à i'",40 du niveau des vignes et par conséquent
presqu'à hauteur de la route moderne. La terre végétale n'avait guère au-
dessous d'eux qu'environ 1 mètre, et le sous-sol est de sable d'alluvions.
Tout autour, point de tertres, c'est la partie la moins accidentée de la ban-
lieue d'Obernai.
A quelle époque, à quel peuple, ou à quelle race de l'antiquité faut- il
assigner cette nouvelle trouvaille archéologique? Cette question est de celles
qui ont plus d'importance peut-être pour la science historique que l'éti-
quetage des ustensiles et ornements découverts, car ces ornements et ces
ustensiles sont communs à plus d'une époque de l'histoire de la Germanie
et de la Gaule rhénanes. Avant l'invasion romaine, on plaçait des vases,
des bijoux, des armes, auprès des corps ensevelis, et cet usage, qui fut
aussi celui des nouveaux conquérants, continua, non-seulement pendant
— li-
la domiiialioii romaine, mais même encore après elle. Les honneurs rendus
à la flépouille des morts, à ia matière humaine, s'il est permis de s'expri-
mer ainsi, se maintinrent pendant les longs siècles de paganisme, avec
d'autant plus de persistance et de popnlarité, que les espérances de la foi
chrétienne ne pouvaient pas encore apprendre aux survivants à accompa-
gner de leurs vœux dans une autre patrie la dépouille immatérielle des
morts chéris de la famille, ou honorés par la conscience des peuples.
Nous savons peu de chose de la colonisation de la i ive gauche du
Rhin supérieur, contiguë aux Vosges avant la conquête de Jules César. Le
guerrier-historien nous apprend bien que les Belges, et parmi eux les Mé-
diomatrikes ou Médiomatriciens s'étendaient avant la guerre d'Arioviste
sur les bords du Rhin, jusqu'au point assez peu défini encore, où com-
mençait le territoire d'une race plus anciennement étabUe dans les Gaules,
celle des Celtes séquaniens ou Séquanes. Il nous apprend aussi que les
Helvètes envahirent une certaine partie de ces territoires, mais il ne déter-
mine pas les limites entre ces empiétements des Helvètes, puis ceux des
Triboques et les avant-postes ou arrière-postes des Médiomatrikes et des
Séquanes.
Après Jules César, ce que les historiens romains rapportent de l'établis-
sement des Triboques dans la contrée entre Vosges et Rhin, reste pres-
qu'aussi vague, du moins quant à la hgne précise où, soit le rayon, soit le
rempart même des Vosges, avait permis aux populations antérieurement
établies de se retrancher. Il parait, toutefois, ou il appert des données les
moins incertaines, que la partie du pays appelée, longtem|)s après, la Basse-
Alsace, devint, principalement sous les premiers Césars, le territoire des
Triboques et que cette peuplade d'envahisseurs ulti'a-rhénans, refoulée un
instant, puis réintégrée, ne tarda pas à devenir assez vite sédentaire, et
conservatrice, comme nous dirions aujourd'hui.
Si donc les découvertes faites naguère à la Hauel, celles du kelt et des
armes surtout, peuveni être attribuées, sans trop de présomption, à
une tribu, passagère sur notre territoire, y combattant pour conquérir ou
pour se défendre, et s'y étant cantonnée, pour plus ou moins longtemps
avant même la domination romaine, il y a lieu de croire que l'ère gallo-
romaine doit être le point de départ des investigations relatives aux ré-
centes découvertes d'Obernai, et dans ce cas, nous y verrions de préférence
un monument des Tiiboques, non pas des Triboques d'Arioviste, mais des
Triboques soumis à la Rome impériale, des Triboques, race celtique d'ou-
tre-Rhin, arrivée une des dernières de la première migration des peuples
germaniques dans la Gaule rhénane, et promptemenl façonnée aux dou-
— 12 —
ceiirs (Je la paix, au bien-èlre de la civilisation romaine, au dédain peut-
être, ou à l'oubli des armes.
En effet, comme on vient d'en faire l'observation, rien qui rappelle ici
une race conquérante, militaire, passant à main armée sur le sol qui doit
servir de tombeau à quelques-uns de ses guerriers. Point de fer, rien que
des ustensiles de la vie domestique, ou des insignes pacitiques de la posi-
tion sociale. Point de fer : on serait tenté de croire, d'après celte absence
si complète du fer, même le plus oxydé, que ces sépultures remontent à
ce que des arcbéologues modernes ont appelé l'âge de bronze, c'est-à-
dire, pour ce qui concerne la Gaule, à une époque bien antérieure à la.
conquête romaine; mais quelques-uns des objets trouvés ont un caractère
trop gallo-romain pour autoriser à se perdre ainsi au delà des temps de
l'histoire écrite.
Rappelons-nous que dans les deux premiers siècles de l'Empire et dans
la plus grande partie du troisième, le pays entre Vosges et Rhin, protégé
par les terres décumates, n'avait rien à craindre des agglomérations de
peuples barbares déjà en fermentation au nord de la Germanie. Les colons,
abrités sous l'aigle des Césars, pouvaient à loisir se livrer aux travaux agri-
coles, et laisser enfouies dans les tiimull des aïeux, ces armes qui naguère
avaient établi leur race dans le pays. On comprend qu'ils n'aient pas fait
contribuer le métal des combats aux offrandes pieuses à leurs morts. Avant
l'emploi du fer, on se battait, il est vrai, et l'on ne cessait guère de se
battre en Gaule et en Germanie, mais alors on enterrait avec le guerrier
sa hache de silex ou son poignard de bronze, et l'on ne se bornait pas à
déposer à ses pieds les gages du foyer paisible.
Mais, dira-t-on, les Triboques prirent assez vite toutes les coutumes ro-
maines, et dès lors, ils ne se bornèrent plus à enterrer leurs morts sous
un tertre, et ils élevèrent des cippes et autres mausolées à l'instar des Ro-
mains. On connaît des monuments à inscriptions commémoratives de ci-
toyens triboques. Il est toutefois facile de répondre que les monuments
dans le goût romain ne furent jamais sans doute que l'exception, un luxe
réservé aux principaux membres de la cité. D'ailleurs, quelques-unes des
formes et le peu de valeur intrinsèque des objets récemment trouvés pour-
raient servir à indiquer cette époque transitoire où, désarmés par les Ro-
mains, les Triboques ne s'étaient pas encore laissé envahir par le luxe de
leurs dominateurs, et se bornaient à cultiver, sous eux et pour eux, les
terres de cette partie de la première Germanie.
Sans doute ce qui vient d'être dit des Triboques pourrait s'appliquer
aussi à d'autres colons de l'époque gallo-romaine, établis après eux ou au
— 13 —
milieu d'eux, sur notre sol. Le caprice du gouvernement ou d'un grand
propriétaire pouvait installer dans tel ou tel coin de la province, des tra-
vailleurs venus des contrées les plus éloignées de la Gaule ou de l'Espagne,
et de l'Afrique ou de l'Asie , pour cultiver le sol et pour le garder. Même
en écartant, à cause de l'absence des armes, l'hypothèse de quelque cohorte
auxiliaire en garnison plus ou moins temporaire sur cette partie du terri-
toire, hypothèse peu autorisée par ce que l'on connaît des garnisons fixes
de ces cohortes, on peut rencontrer encore jusque dans le dernier siècle
de l'ère romaine des Gaules, un nom de race ou de tribu à donner aux
squelettes de la nécropole d'Obernai.
Ainsi, dans le quatrième siècle de notre ère, et après la grande invasion
du commencement du cinquième siècle, les Burgondes et les Alemans ont
pu fournir en ces lieux leur contingent de dépouilles mortelles enterrées
avec de la poterie gallo-romaine. Les Burgondes surtout, race agricole ,
durent fort vite imiter les anciens Triboques, et négliger les instruments
de la guerre pour utiliser en nos champs ceux du labour. Ce que nous sa-
vons des coutumes funéraires des Francks qui étaient généralement enter-
rés sans cercueils, ni de pierre, ni de bois, mais avec une simple pierre
sous la tête, peut s'appliquer aux Burgondes, peuple de même origine que
les Francks, mais aux goûts plus simples, plus pacifiques, plus casaniers,
s'il est permis d'employer ce dernier mot, en parlant d'un peuple barbare.
Or, au moins dans la dernière période de leur existence comme nation
dans la Gaule, avant l'époque mérovingienne,les Burgondes étaient ariens,
et cette circonstance expliquerait peut-être l'absence de tout signe reli-
gieux déterminé dans les tombes qui nous occupent, si toutefois elles sont
de la dernière époque gallo-romaine.
Quel que soit, au surplus, le peuple depuis tant de siècles disparu de la
terre, qui ait laissé en ces lieux cette marque de son passage, l'on est en
droit d'admettre dès à présent que là où fleurit dans le septième siècle
la villa ßscalis du duc Ettichon ou Atticus, il y eut déjà dans les siècles
précédents, une population relativement nombreuse et suivant toute appa-
rence sédentaire.
Obernai, 20 février 1863.
L. Levrault.
MEMOIRE
SUR LA GRANDE VOIE ROMAINE DE BRUMATH A SELTZ
POUR LA PORTION DE WEITBRUCH A KALTENHAUSEN.
II reste quelque chose à ajouter à ce qui a déjà été dit de la grande voie
romaine de Brumath à Sellz. J'ai fait, l'automne dernier, une excursion sur
cette route, de Weitbrucli jusqu'à Kaltenhausen, et c'est le résultat de
mes investigations que j'ai l'honneur de soumettre dans cette notice au
comité historique d'Alsace. Pour celte portion, l'ancienne voie peut très-
facilement être étudiée : les singularités qu'elle présente la font recon-
naître partout.
Le point de départ de ma course a laissé le village de Weitbruch à droite,
et le hameau de Birckwald à gauche. Dans cette direction, la voie est entiè-
rement abandonnée, sans doute depuis une longue suite de siècles; elle est
très-élevée, et se montre par-ci par-là à une hauteur d'environ i mètre
au-dessus (ki niveau des terrains cultivés qui y aboutissent; son tracé pour-
suit à travers la forêt une ligne fort directe ; aucun pavage ne la recouvrait,
du moins on n'en trouve de débris nulle part, mais elle est encore recou-
verte sur divers points d'une épaisse couche de gravier, comme nos routes,
ce qui prouve que le système actuel se pratiquait aussi dans la construc-
tion des grandes voies romaines, au moins par parties : d'ordinaire, les
matériaux employés parles Romains variaient selon les lieux. C'est sur cette
voie que la commune de Weitbruch prenait autrefois le gravier pour le
chargement des chemins du village. On remarque qu'elle était bombée
pour faciliter l'écoulement des eaux, et munie, des deux côtés, de fossés,
dont il existe çà et là des traces; malgré de fréquents rétrécissements, elle
conserve partout une largeur très-raisonnable, paraissant avoir été de 12 à
16 mètres, entre fossés; des pierres leugaires la jalonnaient de distance
en distance : ces stèles la caractérisent évidemment comme voie militaire.
La colonne dont M. le colonel de Morlet a signalé le gisement dans la
forêt de Weitbruch, se trouve redressée sur sa base, à l'endroit où elle a
été découverte par des bûcherons. Je pense que l'on devrait lui conserver
sa place historique. On y a gravé le millésime de 1859, relatant l'année de
sa découverte, et dans un but de préservation, on l'a entourée d'une claire-
voie en bois de chêne. Cette pierre, de couleur blanchâlre, était enfouie
dans la partie carrossable même de la route: elle affecte la forme elliptique
— 15 —
et ne porte aucune cannelure. C'est un pilier cylindrique, légèrement
aminci vers le haut, sans chapiteau, à base carrée, prise dans le bloc; son
sommet, malheureusement dégradé, se termine en cône tronqué, à mon
avis, par suite du frottement des roues, dans l'état de son gisement. En
examinant ce piher avec soin, on peut se convaincre qu'il est entier dans
sa longueur : le fût mesure en hauteur 1"\80; son contour, au milieu, est
de i'^,95. La base, adhérant au fût, est écornée sur deux de ses angles; elle
a une hauteur de 30 centimètres, sur une largeur de 65 centimètres de
chaque côté. Ainsi, la hauteur totale de la colonne est de 2'",10, sur 65
centimètres de diamètre. La largeur, de chaque côté de la base, est égale
au diamètre de la colonne et à un tiers de sa circonférence. Telles sont ses
proportions métriques.
C'est, ni plus ni moins, une véritable pierre leugaire, primitivement
supportée, à n'en pas douter, par un socle maçonné. Elle est, pour ses
proportions, à peu près semblable à la colonne milliaire de Mandeure, dé-
crite par Schœpflin, tome I, page 547, et, ce qui est plus important, elle
conserve, selon moi, à son sommet, un reste précieux de son indication
numérique.
Les cippes milliaires, comme on sait, marquaient la distance de la ville
où la route commençait. Dans les Gaules, les distances étaient données,
non en milles, mais en lieues; les chiffres y sont précédés des lettres LEVG
(leugœ). La colonne viaire de la forêt de Weitbruch n'indique plus rien
et ne paraît pas avoir jamais indiqué quelque chose du nom de la ville d'où
la distance était comptée; mais elle porte encore, dans sa partie fruste
les traces d'un X (du chiffre dix), précédé d'après une très-grande proba-
bihté des lettres LEVG, dont on ne remarque, toutefois, plus de vestiges.
Si c'est là, comme tout m'induit à le croire, le seul chiffre numérique gravé
sur cette colonne, il indique juste la distance de Sli'asbourg; dix lieues
gauloises font cinq Ueues anciennes de Fj-ance, or, c'est là le chiffre donné
par la colonne, comme c'est aussi la distance qui sépare le lieu de sa dé-
couverte de l'ancien Argentorat.
La route aurait été suivie encore après la chute de la colonne, si l'on
attribue au contact des roues les parties usées ; ces conjectures me parais-
sent fondées, et n'ont, en aucun cas, rien d'invraisemblable.
S'il faut en juger par des tuileaux et des restes de ciment romain que
l'on rencontre clair-semés dans le même périmètre, il existait en cet en-
droit une bâtisse romaine quelconque, que je m'abstiens, à défaut d'autres
vestiges, de préciser davantage. Ce sont, peut-être, des débris du socle
qui avait supporté la colonne, ou des restes de la guérite qui l'avait abritée.
— 16 —
A nne petite distance du même lieu, à proximité du hameau de Birck-
wald, on a découvert, il y a une vingtaine d'années, dans un champ planté
en garance, les restes d'une aire en béton, des tuiles à rebords, et beau-
coup d'antres débris de provenance romaine, et dans la même circonscrip-
tion, une médaille d'argent et plusieurs urnes cinéraires, renflées au miheu.
Tout cela, et différents autres débris, restés surplace, attestent, en ce lieu,
l'existence d'une villa romaine.
Le tronçon que nous décrivons, est bordé d'autres monuments des temps
passés : trois tertres tumulaires inexplorés se voient à droite de la route,
dans la forêt de Wcitbruch, au canton dit Wœldel; deux autres tumuli,
aujourd'hui affaissés et nivelés, se sont trouvés, à gauche, dans la forêt dé-
frichée de Niederschseffolsheim. Les guides qui m'ont accompagné, m'ont
aussi parlé d'anciennes poteries en argile, découvertes, à diverses époques,
par-ci par-là.
La voie sort de la forêt de Weitbruch pour entrer, après avoir franchi le
Rothbsechel, dans celle de Marienthal où elle passe, tout d'abord, près d'un
ancien retranchement militaire, construit parles Autrichiens, en 1793. En
cet endroit se remarquent divers restes portant le cachet de l'époque
romaine: ce sont des substructions assez étendues, des décombres variés,
comprenant des briques striées, des tuiles à rebords rayées, des morceaux de
ciment à bain de mortier, de petites pierres entremêlées de quelques moel-
lons, enfin des fragments de poterie. Le garde forestier de Marienthal m'a
assuré qu'il avait retiré de ce lieu, il y a une quinzaine d'années, une
grande quantité de moellons de grès maçonnés dans un ciment fort dur et
beaucoup de tuiles à rebords, à côté desquelles il a trouvé des ferrements
de toute espèce, rongés, une hachette de forme antique, et une grande
clef très-massive en fer, ayant 8 pouces de longueur : il est à regretter
que ces restes des temps anciens n'aient pas été conservés; ils méritaient
bien certainement l'attention des archéologues. De plus, selon le témoi-
gnage de plusieurs vieillards que j'ai interrogés, on a, vers 1806, enlevé
du même lieu des pierres de taille et des briques très-volumineuses; on y
a rencontré des substructions, noyées, pour me servii' de leur expression ,
dans un mortier aussi dur que le grès; enfin, on a découvert un puits,
maçonné en pierres de grès. Leurs pères et grands-pères, me dirent-ils,
leur ont souvent répété que c'était un bourg, je dis un castel. Il y avait là,
on ne peut en douter, une construction importante, une taverne, une
mansion, une station de halte, un relais public, un poste de vigie, peut-être
tout cela à la fois. C'était très-probablement le point de jonction de la route
d'higwiller, par Schweighansen, dont j'ai indiqué le Iracé dans le mémoire
— 17 —
renvoyé, dans la séance du comité du 5 mars 1860, à M. le colonel de
Morlel, chargé du travail sur la topographie romaine de nos contrées. ( Voy.
le Bulletin, tome III, page 14-7.) Je dois faire ici une autre observation : il
est très-présumable qu'au même endroit, un second rameau se soit encore
détaché de la grande voie, pour conduire dans les positions romaines si-
tuées sur les bords du Rhin. Enfin, comme il reste des constructions sou-
terraines sur place, je me demande s'il ne conviendrait pas de les signaler
à l'attention des antiquaires à venir. Si, tôt ou tard, des fouilles étaient
faites en ce lieu , il est plus que probable qu'on ferait des découvertes
assez importantes.
Le rayon de Marienthal offre d'autres vestiges de l'antiquité gallo-ro-
maine; on voit sur différents points d'anciennes glaisières, que l'on pré-
tend avoir été exploitées déjà par le peuple -roi, et dont on retire encore
aujourd'hui une très-bonne terre sigillée, qui est propre, non-seulement à
la fabrication de briques et de tuiles , mais aussi aux ouvrages de poterie.
Je sais que la céramique fut connue partout où il y eut des établissements
romains; mais à défaut de tout autre certificat que la tradition sur l'origine
de ces glaisières, je dois ne pas m'y arrêter davantage.
A quelques pas de la taverne, la voie coupe, près d'une redoute , datant de
1792, le chemin appelé par les pèlerins de Marienthal, chemin de Schweig-
hausen. Une mousse épaisse la couvre dans cette direction, mais elle se
distingue parfaitement dans l'éclaircie entre les parties boisées : tandis que
les arbres qui la bordent, élancent vigoureusement, des deux côlés,leur cime
dans l'air, le sol durci de la voie ne produit, évidemment à cause de son
empierrement, que des tiges rabougries. Son tracé se dessine ici, s'il m'est
permis de m'exprimer ainsi, par un tunnel aérien, qui se prolonge en
ligne droite, aussi loin que le regard peut s'étendre, et dont le romantique
coup d'œil n'est ni sans charmes, ni sans originalité.
La voie quitte la forêt au point où se trouvent, sur la route de Hague-
nau, les premières maisons de Marienthal, d'où elle se dirige sur Kalten-
hausen. Le labour l'a fait disparaître en partie dans cette direction, cepen-
dant elle est encore visible : un sol plus haut et moins fécond que les
champs adjacents, indique son tracé tout le long jusqu'aux abords de cette
commune, où l'on dislingue, à un endroit qu'on nomme Près de la croix^
les meines couches de graviers, comme près de Wcitbruch. Elle a du pas-
ser la Moder, en laissant à gauche le clocher du village.
Jér. Ans. Siffer ,
curé de Wei/ersheim.
II« SÉRIE. — T. II. — (M.) 9
ARGENTOVARU
STATION GALLO-ROMAINE
RETROUVEE
A GRUSSENHEIM (HAUT-RHIN).'
(avec une carte LlTIlOCUAPIllICE.)
La station (YArgentouaria doit une certaine célébrité à la bataille livrée
dans ses environs, aux Allemands-Lentiens,par les généraux de l'empereur
Gratien en 377.
Ptolémée, dont la géographie remonte à la première moitié du deuxième
siècle de l'ère chrétienne, nous fournit la plus ancienne mention à'Argen-
tovaria, comme ville des Rauraques.
La seconde citation qui est la plus importante, puisqu'elle nous donne,
tout à la fois, et le nom et l'indication d'une station sur la voie de Milan
à Mayence, et ce, entre deux stations déterminées, se trouve dans l'itiné-
raire dit d'Antonin, Ce document représente, d'après le savant épigraphiste
M. Léon Renier, la géographie du monde romain au temps de Dioclétien
(284-305), c'est-à-dire à la veille des incursions successives des Barbares
qui ont dévasté les bords du Rhin.
Voici, d'après l'édition de l'itinéraire donnée par M. Léon Renier, ce qui
concerne Argentovaria :
In itinere a Mediolano Moguntiacum.
• Camhele (Kembs)'.
Stahulis, F/ /et/.^. (Bantzenheim) l
Argentovaria, XVIII iû. (Grussenheim).
1. La note insérée au Bulletin, p. 93-94, nouvelle série, et le rapport du secrétaire
sur les travaux de la Société, lu en assenfl^lée générale le 4 décembre I8G2, ont donné
lieu à ce mémoire, dans lequel j'éviterai, autant que je le pourrai, de reproduire ce que
j'ai dit dans mon Alsace romaine sur cette station.
2. Beatus Rhenanus dit ce qui suit de Kembs et de Bantzenlicim : Kembs : in ipso vico
mira vestifjia murorum subterraneoriim apparent.
3. Bantzenheim : Illic enim tantum vetustatis indiciorum reperire est , ut non liceat
palum infigere terrce quin' aliquid occurrat. Porrigebaticr autem usque ad publicani
illamin campis viam quam altam [Eochstrass] vocant. Nam agri Uli 7-idnas tegunt ubi
subsidens qnoque. terra sarcophagos lapideos demonstral. {Ren/m germanicaryvi liber
tertius.)
- 19 —
Helvelum, XVJ kl (Ehl-Benfelcl).
Argenloralo , XII '\<\. (Slrasliourg).
Si de ritinéraire d'Antonin nous passons au récil que fait Ammien Mar-
cellin de la bataille d'Ar^e?i/mrt', nous rencontrons encore une indication
complexe, indivisible conime celle de l'itinéraii'e : c'est Argentaria oppidum
Galliœ, et il en est de même dans Orose et Aurelius Victor.
Au quatrième siècle les irruptions des Alcmanni deviennent de plus en
plus fréquentes, et, à la fin de ce même s\è,c\e,Augusta Rauracorum ainsi
qvLArgenlovaria ou Argentaria, comme on disait alors, ne figurent plus
comme villes dans cette région frontière, dans le Littiis Ducis Sequaniœ.
hix JSotitia provinciarum, dont le plus ancien texte connu, remontant
au huitième siècle, se trouve aux archives grand-ducales à Carlsruhe,
porte Castellum Argentariense, et le texte donné par M. Guérard sur la col-
lation de vingt-neuf manuscrits, mais dont les plus anciens sont du
neuvième siècle, donne CastrumArgentariense, dans la grande Séquanaise,
partant dans la Gaule.
Voilà ce que l'antiquité nous a transmis sur la station â'Argentovaria
qui a été ruinée de fond en comble et détruite par l'incendie, ainsi que
viennent l'attester les fouilles de Grussenheim.
Avant d'aller plus loin, il est bon de faire remarquer que la Table de Peu-
linger ou Théodosienne, dont la meilleure édition est celle de 1824, ne
donne point la station (ïArgentovaria, parce que le fragment sur lequel se
trouve l'itinéraire de Mayence à Milan s'arrête à la hauteur d'Ohnenheim,
à une station dont le nom est perdu, par suite de la destruction de cette
partie de la carte.
Voici la copie figurative de cette portion de la table qui donne la géogra-
phie de la première moitié du troisième siècle, d'après l'édition donnée à
Leipzig, en 1824, par Mannert:
Argentoraio
XI! Hehllum ^^j | Bord
1 de la
i Carte.
\. Au quatrième siècle beaucoup de localités subissent des altératious de nom: c'est
ainsi qn'Argrntoraria devient Argentaria dans Annniou Marceliin, Orose, Aurelius Victor,
etc. , et dans la notice des provinces.
— 20 —
C'est-à-dire de Sellz à Brumath dix-huit lieues gauloises; de Brumalh à
Strasbourg sept lieues; de Strasbourg à Ebl-Benield douze lieues, etd'Ehl
à?... (ruines d'Ohnenheim) encore douze lieues: il est permis de supposer
qu'il y avait à quatre lieues plus loin la désignation d'Argentovaria.
A l'époque de la renaissance des lettres, l'attention s'est aussi portée sur
les débris d'antiquité que fournit le sol, ainsi (ju'on l'a vu pour Kembs et
Bantzenheim.
C'est alors que Ilorbourg, sans que l'on y eût découvert une inscription
donnant le nom iVArgentovaria, semble à Beatus Rhenanus devoir répon-
dre à la ville citée par Ptolémée : une occasion se présente même de mani-
fester cette opinion, et, dans une inscription composée par ce savant pour
le château du duc de Wurtemberg, il explique comment ce château occupe
la place d'Argentovaria, faisant dériver le nom de Uorhouvg qY Ar gentova-
ria par un tour de force étymologique consigné dans une lettre à Erb,
l'un de ses amis.
De Beatus Rhenanus à Schœpflin il n'y a point de contradiction : l'impor-
tance de Ilorbourg, dont le sol fournit un autel dédié à Apollon, des mé-
dailles, etc., etc., grandit à ce point que l'imagination en fait une cité des
plus considérables de la vallée rhénane. Mais Schœpflin, qui a lu les éclair-
cissements géographiques de d'Anville, publiés en 1741, conçoit des doutes
et interroge les habitants d'Artzenheim, village que d'Anville croit avoir
succédé à la station d'Argentovaria, d'après les mesures que lui fournissent
l'itinéraire d'Antonin et le texte de la table de Peutinger alors en usage; ce
n'est qu'après avoir obtenu une réponse négative, donnée à la légère par
des personnes incapables de discerner des débris antiques des fragments de
poterie moderne, que Schœpflin reste dans le sillon tracé par Beatus Rhe-
nanus; mais il est à remarquer qu'il le fait avec cette réserve formelle, que
si le sol d'Artzenheim recelait des débris antiques, c'est là qu'il faudrait
placer Argentovaria. *
Grandidier a accepté l'opinion reçue avec d'autant plus d'ardeur que,
de son temps, l'on a découvert le caslnmi de Ilorbourg.
Quant à M. de Golbéry, les distances fournies par les itinéraii'es ne l'ont
guère préoccupé, et, tout en décrivant avec le plus ^rand soin, pour le
Haut-Rhin, la voie de Milan à Maycnce, il a oublié de remarquer que la
donnée de l'itinéraire d'Antonin est, en soi, indivisible et complexe, en ce
1. Alsatia illustrata , t. I, fol. p. 193-194, gg 125 et 128. — Walck-enaer, Géogr. des
Gaules, a suivi l'opiaiou de d'Anville et s'est préoccupé d'Artzenheim; mais comme les
mesures le portaient plus au nord , il a indiqué Manchon {Manchen) comme étant la posi-
tion exacte. (Voir le plan ci-joint.)
24
qu'elle donne, tout à la fois, coninie nous l'avons déjà dit, le nom et la po-
sition cVArgentovaria.
Examinons maintenant la valeur de la citation de Ptolémée : ce géographe
donne Argentovaria comme une ville des Rauraques, ce qui est confirmé
par la Notitia provinciamm, puisque la partie nord de la Maxima Sequa-
norum comprenait le pays des Rauraques. D'un autre côté, il est bon de
faire observer que Ptolémée n'a pas cité uniquement de grandes villes, des
capitales de cités; il suffit de parcourir son œuvre pour se convaincre du
contraire : je n'en donnerai, pour abréger, qu'un exemple, voisin de la con-
trée qui nous occupe, c'est Tarodunum (Zarten) près de Fribourg.
Si nous passons au récit de la bataille livrée par les généraux de Gratien
aux AUemands-Lentiens en 377, nous voyons que ces Barbares, excités par
l'un des leurs qui avait pris du service dans la garde de l'Empereur, et
instruits par lui que Gratien allait se joindre à Valens pour combattre les
Goths en Orient, ils font une première irruption sur le territoire romain et
sont repoussés par les Celtes et les Pétulants; que, bientôt après, ayant ap-
pris que la majeure partie de l'armée d'Occident est arrivée en Illyrie,
toutes leurs tribus, formant une masse d'environ quarante mille hommes,
passent le Rhin et font irruption dans la Gaule. C'est alors que Gratien fait
rétrograder ses troupes, appelant à lui les réserves laissées dans la Gaule,
et donne à cette armée Nannien et Mellaubode pour chefs.
Tout à coup, près d'Argentaria, les Romains se trouvent en présence
des Barbares, et c'est dans une plaine où ils sont à découvert qu'ils se
voient exposés à leurs coups; il n'est nulle question dans cette description
d'un cours d'eau tel que l'Ill, contre lequel ils pouvaient être acculés ou
rejetés, ou bien duquel ils pouvaient se couvrir, mais d'une forêt dans la-
quelle ils prennent position à la hâte, et où ils sont sur la défensive jusqu'à
l'arrivée de la garde de l'Empereur qui décide la victoire.
L'armée de Gratien reprend alors sa marche vers l'Orient; mais, après
avoir dépassé le coude que fait le Rhin près de Râle, les Romains tournent
subitement à gauche, traversent le fleuve, et là se passe la seconde affaire
dans un espace resserré où tout l'avantage de la position était pour les
Barbares: ceux-ci sont de nouveau défaits, et l'armée, revenant sur le sol
gaulois, près du lac de Constance, continue sa marche pour aher joindre
Valens.'
Je dois déclarer ici qu'en décrivant cette bataille dans mon Alsace ro-
1. Ammien Marccllia , liv. 31, g 10. — Aurelius Victor, E/nlome. — Orose,. liv. 7,
chap. 33. — Moue , ïeilschrift, Xlll^ vol. , a donné nne description très-détaillée de la ligne
de défense des Uoniains dcpnis Bàlc jnsqu'à .'^cliafllionsc.
22
tnaine/fai eu le tort de considérer comme la principale affaire celle qui
eut lieu dans le pays de montagnes voisin du lac de Constance, et que j'a-
vais considéré Langen Argen, comme répondant h Argentaria : c'était une
erreur, puisqu'il s'agit d'une ville de la Gaule, oppidum GaUice, tandis
que Langen Argen était dans la Rhétie, et (jue la plaine d'Alsace répond
bien mieux aux détails fournis par Ammien Marcellin.
Quant aux autels, monuments funéraires, médailles et surtout Xacastrum
découverts à Ilorbourg-, je répondrai que ce n'est pas une raison pour
donner à cette ville, dont l'importance est incontestable, le nom ù'Argen-
tovaria. M. Alfred Maury, de l'Académie des inscriptions, l'un des savants
les plus éminents de la France, m'a fait, à ce sujet, l'iionneur de m'écrire
ce qui suit : « 11 est clair que le castrum de Horbourg n'est plus une raison
péremptoire d'y placer Argentovarla, des antiquités se trouvant en bien
des points voisins; dès lors, il ne reste plus que les distances qui sont en
votre faveur. »
Quant à l'inscription relatée dans le Bulletin,
G.A.P.R.
page 94, qui a été interprétée comme il suit :
Genio Argentovariœ populi restitutum ou bien Genio Argentovariœ po-
pulus restituit, et que M. le conseiller Boyer , auteur d'une histoire d'Al-
sace, qui est sur le point de paraître, m'a dit devoir être traduite comme
il suit :
Gratianus Argentovariœ populus restituit, je me bornerai, pour toute
réponse, à donner connaissance de ce que M. Jules Quicherat, professeur
d'archéologie à l'école des chartes, ce savant aussi bienveillant que distin-
gué, a répondu à la communication que je venais de lui faire de cette in-
scription : (( Je ne vois pas que vous ayez Heu d'être inquiet du côté de vos
contradicteurs tant qu'ils n'auront pas de titre plus solide à vous opposer
que l'inscription de Ilorbourg. Ces quatre lettres peuvent recevoir toute
sorte d'interprétations, excepté celles qu'ils en tirent, car ce n'était pas
l'usage d'écrire les dédicaces uniquement avec des sigles, et les sigles que
l'on rencontre dans les inscriptions dédicatoires, n'expriment les noms ni
de ceux qui ont fait la dédicace, ni de ceux qui l'ont reçue. S'il en était au-
trement, l'épigrapbie ne serait qu'un champ ouvert à la fantaisie, et cha-
cun y trouverait des noms propres à sa commodité pour le triomphe des
opinions qu'il soutient. »
11 me reste à prouver, par des autorités irrécusables, (jue la station à'Ar-
gentovaria n'a pas été vainement recherchée jusqti'à présent. En effet, voici,
à propos de la découverte de Grusscnheim , l'opinion de la commission de
— 23 —
topographie de la Gaule ', qui m'a fait l'honneur de m'adresser officielle-
ment, par l'organe de son secrétaire, M. Alexandre Bertrand, les lignes
suivantes : « La commission de la topographie des Gaules a reçu, par l'in-
termédiaire de M. le général Creuly, la note que vous lui avez envoyée
touchant la station ô'Argentovari.a. La commission vous remercie de cette
communication qui l'a vivement intéressée, d'autant plus que vos rensei-
gnements viennent confirmer la décision qu'elle avait prise en plaçant Ar-
rjentovaria sur la voie romaine, exactement au point où vous avez trouvé
des ruines, à Grussenheim. »
M. le général Creuly m'écrivait à la même date (20 mars 1862) : « La
commission n'hésite pas à placer la localité antique (YArgentovaria sur la
voie même, au point môme qu'elle avait trouvé, au moyen des mesures
itinéraires, dans la banlieue de Grussenheim, là où vous avez reconnu qu'il
existe des restes d'un centre de population antique. Elle m'a chargé de
vous exprimer sa reconnaissance pour celte utile communication. »
Je transcris ces lettres pour répondre à ceux qui prétendent que les
textes des itinéraires sont tellement défectueux, que l'on ne saurait étayer
qu'un système purement problématique, et sans valeur sur leurs données.
Oui, assurément, les textes des itinéi'aires présentent bien des erreurs;
cela est incontestable. Mais, quand les savants les plus sérieux ne dédai-
gnent pas d'y recourir, faut-il jeter au rebut ces documents qui nous
ont été légués par l'antiquité? Non; et voici ma conclusion que je soumets
à tous ceux qui lisent sans parti pris à l'avance: toutes les fois que les don-
nées des itinéraires sont confirmées par des gisements de ruines, il faut
reconnaître qu'il n'y a point d'erreur dans le texte, dans les manuscrits.
Appliquons cela au fragment de la voie que nous venons d'examiner. La
Table de Peutinger, qui donne la géographie du temps d'Alexandre Sévère
et d'Auréhen, place à douze lieues gauloises au sud cV Argentoratuni une
station appelée Helellum, répondant parfaitement à Ehl-Benfeld,ct, à douze
lieues plus loin, une autre station dont le nom est perdu, mais dont la po-
sition concorde exactement avec le gisement de ruines d'Ohnenheim.
Quant à l'itinéraire d'Antonin, postérieur en dale, et donnant la géogra-
phie au temps de Dioclétien, nous y voyons encore Ehl {Hcluetus), à douze
lieues au sud d' Argentoratuni, et à seize lieues plus loin Argentovaria, ré-
pondant au gisement de Grussenheim : la station près d'Ohnenheim a pu
• I. Cette commission est ainsi composée : MM. de Saiilcy, président; Alfred Manry et
Alex. Bertrand, secrétaires; (juigiiant, Léon Renier, général Creuiy, Viollet le Duc, Blonde!,
de Goynart, Amédéc Thierry . Alfred Jacobs, Anatole de Barthélémy et Gustave Ronland ,
membres.
— 24 —
être ruinée dans l'inlervalle de la confection des deux itinéraires, par une
incursion de Barbares, puisqu'elle n'est plus indiquée dans celui d'Antonin
qui nous occupe. A dix-huit lieues au sud à'Argentovaria, est la station de
Stoôt^/œ, correspondant aux substruclions de Bantzenheim ; enfin, à six
lieues plus loin se trouve Kembs qui, outre un gisement considéi'able, a re-
tenu en partie son ancien nom.
Je le demande, en terminant, comment pourrait-on, en présence défaits
aussi précis, rejeter absolument, comme erronés et problématiques, les
deux itinéi-aires qui viennent d'être cités, et s'obstiner à gratifier Horbourg
du nom cVArgentovaria, alors que ce nom ne touche en rien à son impor-
tance dans l'antiquité?
Schlestadt, 20 janvier 1863.
COSÏE.
ARGEN TOVARIA
Station dallo-romaine
Grusseiilieim
' S3 Terrain fouillé.
h^ Siiktiuctions romaines.
c ii: Delnsromams sur les champs .
// Elévation ie terrain assez iDrononcée
Marckolslieini
^// Mxmcheiv
// *
ChapeJle/ .
^^i. Moulin dArtx£nTuim
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essejar Coste.
ùtiîiU c St--^s:n
NOTICE HISTORIQUE
L'HOTEL DE VILLE D'OBERNAI
LES ANCIENS EMPLACEMENTS JUDICIAIRES DITS SEELHOF ET LAUBE.
A côté de ceux des monuments anciens qui se distinguent par leur type
architectonique ou qui nous révèlent les mœurs et les institutions des âges
les plus reculés, il y en a d'autres qui, pour avoir un caractère plus modeste,
n'en sont pas moins dignes d'intérêt, en ce que le passé qu'ils rappellent,
mérite également d'être préservé des dédains de l'oubli. C'est dans cette
dernière catégorie que nous croyons devoir ranger l'hôtel de ville d'Ober-
nai , ou du moins la partie de ce bâtiment qui a élé conservée lors de la
dernière reconstruction et qui renferme l'ancienne salle de conseil et de
justice.
Non-seulement cet édifice vit encore fonctionner dans son enceinte le
régime municipal dans toute sa vigueur première, mais dans le cours d'au
delà de trois siècles qu'il a traversés, il fut aussi témoin de débats d'un in-
térêt plus général, en accueillant à mainte reprise les représentants des
diverses autorités de la province.
Si, d'un autre côté, nous voulons prendre en considération l'emplace-
ment sur lequel s'élève cette construction, nous trouvons qu'il correspond
à un ancien siège de justice qui jouissait autrefois d'une grande importance
dans la contrée, et dont l'origine se rattache peut-être aux institutions
judiciaires de l'Alsace primitive.
Qu'il nous soit permis de préciser ces différents souvenirs, à l'aide de
renseignements puisés dans des documents divers, mais principalement
dans ceux qui se trouvent conservés aux archives de la ville. Nous com-
mencerons par les détails qui ont rapport au siège de justice, en suivant
ainsi la marche des .faits , puisque partout les institutions judiciaires ont
précédé de loin l'organisation du régime municipal proprement dit.
26
I.
Quand, dans la première moitié du quatorzième siècle, Obernai eut fait
son acte de soumission à l'empereur Louis de Bavière, après avoir, à l'in-
slar d'autres villes impériales d'Alsace, adhéré pendant de longues années
au parti de Frédéric d'Autriche, et pris part aux diverses expéditions du
duc Leopold, frère de Frédéric, la ville obtint immédiatement du chef de
l'empire la confirmation de tous les privilèges dont elle avait été gratifiée
par ses prédécesseurs, et reçut en outre l'assurance d'être dotée de nou-
velles franchises. Parmi les immunités qu'Obernai reçut à celte occasion,
on remarque l'exemption de la ville de toute juridiction étrangère. Par let-
tres datées de Bâle, du lundi avant la Sainl-Barthélemy de l'année 1330,
l'empereur Louis de Bavière déclara « à ses amés et féaux, le conseil et la
communauté des bourgeois d'Ehenheim supérieur », « que désormais nul
habitant de la ville ne pourra être cité en justice devant aucun autre tri-
bunal que celui du prévôt impérial de la ville même, c'est-à-dire les nobles
au lieu dit Sedltof, et les bourgeois sous la Laube. » '
Cette charte est le premier document qui fasse mention du double tri-
bunal de justice qui siégeait d'une part sur la place dite Seelhof, contiguë
au cimetière, et de l'autre sous la halle ouverte dite Laube, par-dessus la-
quelle s'éleva plus tard l'hôtel de ville; il est clair, toutefois, d'après les ter-
mes de ce titre, qu'à cette époque, celte institution judiciaire fonctionnait
déjà de temps immémorial. Le privilège de Louis de Bavière fut confirmé
dans les mêmes termes par les empereurs Charles IV, Frédéric III et
Charles V; de plus, sa teneur et ses expressions se trouvent reproduites
dans toutes les lettres réversales délivrées à la ville par les UnlerlandvÖgt
ou sous-bailhs provinciaux, y compris ceux même de la domination fran-
çaise. Quand, en 1714, le sieur Gaspard d'Halzel prêta à la ville d'Obernai
le serment d'usage, il dut encore jurer de respecter l'ancienne franchise de
la ville qui voulait « que ses habitants ne pussent être obligés à d'autres
ressorts en première instance qu'à la justice qui se rend au Seelhof pour les
nobles et en la Laube pour les bourgeois. » Pourtant, il s'était déjà écoulé
des siècles, que la place dite Sed/io/" n'avait plus vu se réunir dans son en-
ceinte, ni chevaliers, ni écuycrs, poui" y tenir des séances judiciaires;
1. Voy. Albcrli argcntinensis chronicon in Ursiisio, pars II, p. 122; puis les lettres
réversales du Laiidvogt Albert Humélloii de Lichtenberg; et les divers diplômes de Louis de
Bavière aux archives de la ville. Voici les termes dans lesquels s'exprime le diplôme de
13.30 : " So fjcben ivir in die vriheit , und wellen och , dasz dliein man oder frow der ze
'I Ehen/ieim hörl, irirjend ze rclil slan soll, wann die Edlen Hit in dem sctliof und die
<' Bin-ijrr muter der loben ze Ehenheiiu ror dem Srlntltheizze. »
_ 27
quant au Iribiinal bourgeois de la Lcmbe, celui-ci, las de siéger en plein
air, comme dans le bon vieux temps, avait aussi abandonné depuis fort
longtemps cet emplacement pour s'installer dans la salle de conseil actuelle.
Néanmoins, les noms traditionnels des deux emplacements s'étaient encore
conservés au dix-buitième siècle, et ils se sont même maintenus jusqu'à
nos jours. En rappelant les faits qui s'y rapportent, nous ferons revivre le
souvenir à peu près effacé de ces anciennes assises judiciaires, dont les
actes occupent une si large place dans les archives de la ville.
L'importance du tribunal de justice établi à Obernai est constatée à la
fois par celle de l'office de la haute prévôté dont le titulaire le présidait,
par les divers fiefs attachés à ce tribunal, et enfin par f étendue de la juri-
diction de ce dernier. L'office de la haute prévôté (OberscJmltheissamt) ,
après avoir été conféré par les empereurs à des seigneurs divers, et un
instant impignoré à la ville même, tomba, dans la première moitié du
quinzième siècle, entre les mains des comtes palatins, qui en jouirent à
titre de gage de f empire, jusqu'à ce qu'au commencement du seizième
siècle, la guerre palatine dépouillât cette maison de tous ses fiefs impé-
riaux. Ce fut alors que f empereur Maximilien P'' conféra cette charge, con-
jointement avec la seigneurie de Barr, à son vice-chancelier, Nicolas
Ziegler, lequel reçut plus tard l'une et l'autre à titre de propriété de l'em-
pereur Charles V, du consentement des électeurs de l'empire. De Nicolas
Ziegler et de ses fils, la seigneurie de Barr et la haute prévôté d'Obernai
passèrent par voie d'achat à la ville de Strasbourg, laquelle finit par vendre
foffice à la ville d'Obernai même, en 1609. — Quant aux divers fiefs qui
formaient une dépendance du tribunal impérial, ces fiefs judiciaires, con-
jointement avec les fiefs castraux, relevant du ci-devant château impérial
des Hohenstaufen, ne contribuèrent pas peu à augmenter le nombre des
nobles, autrefois domiciliés ou possessionnés à Obernai. Outre la juridic-
tion criminelle et le droit de glaive (Blutbann) y attaché, qui restèrent
constamment fiefs de l'empire, il y avait le fief du bourreau ou Henckers-
lehen qui eut pour charge de pourvoir aux frais des exéculions criminelles
et qui des nobles Wepfermann, ses possesseurs primitifs, passa aux Land-
schaden de Steinach.Le fief dit Büllelam lichen, dont se trouvaient investis
les nobles Bcger de Geispolsheim, avait à soldei' les appariteurs du tribunal.
Un autre fief judiciaire se trouvait entre les mains des Gossmar d'Ehen-
heim. — Pour ce qui concerne fétenduedela juridiction du tribunal, nous
trouvons que celle du Seelhof s'étendait aux nobles de toute la contrée ,
comme aussi celle du tribunal bourgeois de la Laube s'exerçait uon-scule-
inent sur les habitants de la ville, mais encore sur un grand nombre de
— 28 —
localités plus ou moins éloignées; à ce tribunal ressortissaient, en effet, ainsi
que le constatent les procédures conservées aux archives, les justices lo-
cales de Barr, Heiligenstein, Gertweiler, Goxweiler, Mittelbergheim, Blienswei-
1er, Nothalten et Zell , Krautergersheim et Innenheim. On y porta aussi, pen-
dant plusieurs siècles, les appels des justices d'Ottrott-le-lIaut, Saint-Nabor,
Blsesheim, Erstein, Weslhausen, Hüttenheim, Kogenheim, etc. Toutefois,
l'étendue de cette juridiction se trouvait déjà amoindrie, quand la ville de
Strasbourg fit l'acquisition de la haute prévôté, et elle le fut encore bien
plus, quand cette ville céda l'office à celle d'Obernai.
L'ancienne importance du Beichsgericht, ou tribunal impérial d'Ober-
nai, étant ainsi dûment constatée, ne serait-il pas permis de voir dans ce
tribunal un débris de ce siège judiciaire des ducs mérovingiens d'Alsace
qui, d'après un document célèbre, quoique d'une authenticité très-contro-
versée, aurait existé à Ehenheim, dès les temps anciens' ? Et, par contre,
si le souvenir de cette cour ducale et de ses assises judiciaires s'était con-
servé au douzième siècle, ne pourrait-il pas y avoir quelque connexion
entre cette cour ducale primitive, et l'origine du château ducal, puis impé-
rial des Hohenstaufen, lequel surgit à cette époque à Ehenheim, château
connu par les chartes qu'y signèrent les empereurs Frédéric Barberousse
et Henri VI, et dans lequel le Minnesänger Gösli d'Ehenheim charmait par
les accords de sa lyre le séjour des princes souabes? Quoi qu'il en soit,
même quand le château des Hohenstaufen gisait déjà en ruines à la suite
des revers qui avaient amené la chute de cette race illustre, nous voyons
encore s'ouvrir à Ehenheim une de ces hautes cours de justice qui, dans
ces temps reculés, étaient présidées par les souverains en personne. Une
charte d'investiture, délivrée en 1283, par Rodolphe de Habsbourg, nous
apprend, en effet, que cet empereur présidait, alors à Ehenheim, des co-
1 . " Prêter curimii unam in Ehenheim sitam, ob cujus curie di(j)ii tatou et memoriale,
« quia curia pupplica Ducis dicebatur^ et sedesjudicialis Ducis in Un erat ab antiquitale.»
Testament de S'« Odile. — Quel que soit le jugement que l'on porte sur ce document, il
faut conveuir qu'il est d'une haute autiquité et que dès lors il mérite d'être pris en consi-
dératiou très -sérieuse, ne fût-ce que parce qu'il serait l'écho des traditions qui avaient
cours à l'époque où il fut rédigé. Au reste , on sait que Grandidier, tout eu rangeant parmi
les pièces apocryphes le titre que Schœpfliu avait examiné, revendique la parfaite authen-
ticité d'un autre exemplaire, qui existait autrefois aux archives épisf^opales de Saverne, et
déclare que ce dernier est le véritable original. Le célèbre critique explique d'une manière
très -plausible les raisons pour lesquelles le titre véritable est resté dans l'oubli, tandis
que la pièce supposée a été exhibée au public et a même reçu la confirmalion des empe-
reurs. (V. Grandidier, Hist, de l'évêché, dissertation sur le lestanient de S'" Odile, 1. 1, p. 90.)
Mallieiu-ensement il parait que c'est encore la pièce apocryphe seule qui a échappé au dé-
ménagement des archives et qui se trouve maintenant à la l'réfecture.
— 29 —
mices judiciaires, auxquels prirent pari « l'évêque Conrad de Lichtenberg
et un grand nombre de comtes, vassaux, ministériaux et autres personnages
de distinction. » '
Ce qui conlirmc puissamment notre hypothèse sur l'origine première du
tribunal de justice d'Obernai, ce sont les prérogatives que les abbayes de
Uohcnbourg et de Niederraünsler exerçaient sur ce tribunal. D'après le
document mentionné plus haut, la cour d'Ehenheim, qui aurait été le siège
judiciaire des ducs d'Alsace, fut léguée par indivis aux deux monastères
fondés par sainte Odile, la(iuelle avait obtenu cette cour du duc Athic, son
père. Or, jusqu'au seizième siècle, l'emplacement où se rendait la justice
pour les nobles, la cour, dite Seelhof, était la propriété des deux abbayes,
lesquelles nommaient en même temps les juges ou assesseurs du tribunal.
Le titre le plus ancien qui fasse mention de cette place, est un acte de vente
de biens communaux, daté de 1258. Celte charte, qui est la première qui
donne à Obernai la qualification de ville, montre que sur ce même empla-
cement se débattaient aussi les intérêts de la commune; elle se termine par
ces mots : « Ada sunt hœ in cimiterio Ehenheim ->-> . 1 e mot « cimiterhtm »,
qui est la traduction latine de Seelhof, désigne sans aucun doute la place
contiguë au cimetière qui porte encore aujourd'hui ce nom, et qui, pro-
bablement, ne formait alors qu'un seul et même enclos avec le cimetière.
Quelques années plus tard, en 1276, « la cour de l'abbaye de Hohenbourg
à Ehenheim, dite Seelhof)), réunit dans son enceinte les représentants de
la plupart des familles nobles d'Obernai et du voisinage, chargés de décider
les questions litigieuses qui s'étaient élevées au sujet des immunités des
cours franches que l'abbaye de Hohenbourg possédait dans diverses loca-
lités. Cette assemblée avait été convoquée par le Landvogt ou préfet pro-
vincial Cunon de Bergheim, sur les ordres de l'empereur Rodolphe de
Habsbourg ^ Au siècle suivant, la cour dite Seelhof devint elle-même un
objet de graves contestations entre les deux abbayes de Hohenbourg et de
Niedermünster. Comme le premier de ces monastères revendiquait exclusi-
vement cette cour avec les prérogatives judiciaires y attachées, l'abbesse de
I. " Préside nlibus nobis judieio apitd Ehilieim J'eriâ sexld post, feslum beall andreœ
»aposlo/i, présente ocnerubili argentijœtisi Episcopo, el niultis uliis coiuitibus , nobi-
« libiis , miuislerlalibus et vasallis. •> Sduepllin, Aïs. diplum., 11° 732. Scliœpllin a'iiésile
pas à alliriiier que la localité nommée ici Eiiilieim n'est autre cjue la ville d'Eliealieim supé-
rieure avec son château. « Prociil dubio Elmlieim superiiis oppidain imperiale cum eoslro.»
'2. Il Qui {Rudo/phus rex) nobis iajunxit ut apud ciiriam suam Ehenheim quœ dicitur
selhoj venerimus^ etc.» Archives de la Préfecture, série G, u° 548. Évèché, trésor des
chartes, armoire iiistorique. — Une ancienne copie de cette charte se trouve aux archives
d'Obernai.
— m ~
Niedermiinstcr, Margiicrile de Senones, enl. recours à la proleclion de son
haut el puissant vassal, le duc Albert d'Autriche, lequel prit à tâche défaire
constater solennellement les droits de sa protégée. Par acte, daté du di-
manche avant la fête de saint Nicolas de l'année 1351, les évêques Berthold
de Strasbourg, et Jean de Baie, Eberhard, comte de Wurtemberg, et
Jean, seigneur de Rappolstein, attestèrent «qu'étant réunis à Ensisheim ,
dans le Burg, le sérénissime prince Albert, duc d'Autriche, avait déclaré
en leur présence qu'il tenait des fiefs de l'abbaye de Niedermünster, dont
il avait reçu récemment l'investiture, et qu'en même temps il avait reconnu,
d'après les titres qu'il Eivait vus et les attestations qu'il avait entendues, que
la cour, dite Seelhof, à Ehenheim, supérieure avec la justice, les hommes
et tous les droits y attachés, appartenaient par indivis aux deux abbayes de
Ilohenbourg et de Niedermünster. » '
Que si nous examinons maintenant l'organisation de ce tribunal, nous
voyons que le même prévôt présidait, au nom de l'empire, la justice noble du
Seelhof, et la justice plébéienne de la Laube; mais les juges ou assesseurs
étaient différents. Tandis que ceux de ce dernier tribunal étaient élus parla
bourgeoisie, les premiers étaient nommés par les deux abbayes, et choisis de
préférence parmi leurs ministériaux et employés. Au nombre de ces asses-
seurs figurent successivement la plupart des nobles d'Obernai et du voisi-
nage, tels que les Schenck, les Gossmar, les Oberkirch, les Landsperg, les
Uttenheim lu Ramstein, les Beger, les Zorn, etc. Aux assesseurs nobles se
trouvait toujours adjoint un certain nombre de plébéiens choisis parmi les
employés des cours franches des deux abbayes à Obernai et à Rosheim l La
juridiction de ce tribunal, ainsi que nous l'avons déjcàdit, s'exerçait sur les
nobles de toute la contrée, et en outre sur les employés subalternes des
deux abbayes. A ce dernier sujet, la ville d'Obernai eut de longues et graves
contestations avec ces deux maisons religieuses. Néanmoins, à la faveur
des rescrits impériaux qu'elles obtinrent à plusieurs reprises, celles-ci
réussirent à maintenir leur privilège qui voulait que tous leurs employés,
même roturiers, ne pussent être traduits devant aucune autre justice que
1. » Dasz der scikof zu Obern-Ehenheim mit gerichte, manschafte und allen andern
u sinen rechten dem vorgenannten Closter Nidernmünster zu Hohe nburg und demCloster
« zu Obern-Hohenhurg gemein zugehorte." Archives de la Préfecture, série G, n" 3431.
Évêché, nova registratura.
2. Voy. diverses sentences rendues an Seelhof, aux archives de la ville. Voici la formule
ordinaire dans laquelle elles sont rédigées : « Ich N. des Riches UnterschuUheisz zu Obern-
« Ehenheim, als ich. öffentlich zti Gerichte sasz an des Riches Edelgericht indem Selhove
0 zu Obern-Ehenheim , da kam für mich .... und waren an disem Gericht die Urtel-
II geber N. N. . . . der gnädigen Fraiven von Hohenburg und Nidernmünster Manne und-
i< Ambahtlüte , etc. "
- 31 —
celle (les nobles au Seelhof. La dernière sentence rendue au Seelhof qui
soit conservée aux archives, est de 1507. L'extinction de la plupart des
familles nobles d'Obernai vers la fin du quinzième siècle, et le recours à
d'autres juridictions expliquent sufiîsamnienl la disparition de cet ancien
tribunal.
Le tribunal bourgeois de la Laube qui se rattache plus étroitement à
notre sujet, avait emprunté son nom à la halle ou galerie ouverte qui l'a-
britait et par-dessus laquelle s'éleva plus tard l'hôtel de ville. Cet emplace-
ment figure encore dans les titres sous les noms de Gerichtslmibe et Reichs-
laube.Ce ne fut qu'au commencement du dix-septième siècle que les séances
de ce tribunal commencèrent à être tenues à huis clos, et que la salle de
conseil actuelle i'ul appropriée à celte destination *. Cette justice avait le
même chef suprême que celle du Seelhof, à savoir le grand prévôt ou
Oherschultheiss qui tenait sa dignité de l'empire, et était présidée par le
suppléant de ce dernier, le sous-prévôt ou Vnterschulthciss lequel, en rai-
son de ses fonctions, était aussi appelé le prévôt résidant ou siégeant {der
sitzende Schulthehs). Ce fonctionnaire ne pouvait être choisi par le grand
prévôt que parmi les bourgeois indigènes, et sa nomination dut êtreagréée
par le magistrat. Les assesseurs de ce tribunal étaient au nombre de treize;
ils sont désignés dans les documents sous la qualification des h. Reich-
gericht zu Obern-Ehenheim dreyzehn Richter, ou dreizehn Urthelsprecher.
Ces assesseurs se renouvelaient chaque année par la voie du suffrage pu-
blic. Le surlendemain du renouvellement du magistral, les bourguemeslres,
les conseillers et les chefs de tribu nouvellement élus, procédaient à l'élec-
tion des treize juges. Comme les deux bourguemeslres de l'année précédente
faisaient partie de droit du tribunal, les suffrages ne portaient plus que sur
onze membres, parmi lesquels deux durent être choisis dans le conseil, et
un dans chacune des neuf tribus. L'élection des juges était suivie de celle
des procureurs ou avocats (Fürsprecher), chargés de porter la parole au
nom des parties, et qui étaient au nombre de trois-. JNous avons déjà men-
1. Les titres de la fm du seizième siècle meiitioiiLent eucore la Reichslaube comme le lieu
où se rendaientles jugements, tandis que ceux de la première moitié du dix-septième portent
déjà la suscription : « Geschehen auf der Rathstube angewohnlichei- Gerichtstalt. » — Quant
an siège de justice, c'était un ouvrage eu maçonnerie; il fut reconstruit en 1456. Une re-
construction antérieure du Lobium, à la date de 1370, est révélée par une inscription latine
qu'on a trouvée lors de la dernière reconstruction de l'Hôtel de ville; malheureusement
cette pierre n'a pas été conservée.
2. Voy. les Rathsprotokolle et les GerichtsprolokoUe aux archives de la ville. Quant aux
sentences de la justice 4e la Laube, voici les anciennes formules de ces sentences : « Ich
« N. des Riches UnterschuUheiss zu Obern-Ehenheim, künde menglichem mit diesem
a Briefe , daz uff' mittwoch, etc. . . als ich zu Gerichte sos:- an des h. Riches Gerichte unter
— c]2 —
lionne les nombreuses localités étrangères qui relevaient directement de la
justice d'Obernai, ou qui y portaient leurs causes en appel. Quant à la ville
même, elle appelait des décisions de sa justice locale au jugement du ma-
gistral de la ville impériale d'Ulm, en Souabe,et le droit de cet appel facul-
tatif lui fut conflrméen 1440, par l'empereur Frédéric III, avec la mention
expresse que cet usage existait de temps immémorial. Ces appels étaient
désignés sous le nom de Ulmzüge,elne cessèrent qu'à l'époque de la guerre
de Trente ans.
Il ne serait peut-être pas hors de propos de donner ici quelques détails
sur le mode de procédure de notre justice locale, ainsi que sur les divers
genres de supplices et d'exécutions que nous révèlent nos documents; mais
nous préférons mentionner une affaire d'un intérêt plus général, dont les
débats se déroulèrent devant notre siège judiciaire de la Laube. On con-
naît la première conspiration anti-sociale qui, sous le nom de Bundschuh,
se trama au pied de l'Ungersberg, en 1493, et on sait le sort des deux
principaux chefs de l'association, dont l'un fut écartelé à Bàle, et l'autre
subit le même supplice à Sclilestadt; mais on connaît moins celui des affi-
liés subalternes. Des renseignements puisés dans nos archives nous appren-
nent que les sujets épiscopaux qui avaient pris part à la conspiration, fu-
rent jugés à Molsheim par un tribunal extraordinaire, composé d'un certain
nombre de délégués des villes et des seigneurs de la province, et convoqué
par l'évêque. Quant aux autres affiliés, ils furent jugés à Obernai, sous la
Reichslaîibe;c'élQienides habitants de Blienschweiler, Nothalten et Zell, lo-
calités qui, comme nous l'avons déjà dit, relevaient du tribunal impérial
d'Obernai. Toutefois, ce ne fut pas le corps des treize juges qui eut à s'oc-
cuper de cette affaire, mais également une commission extraordinaire nom-
mée par le Landuogt, et présidée par le grand prévôt d'Obernai, le gen-
tilhomme Euchaire Vœltsch, lequel occupait alors cette charge au nom des
comtes palatins. Quant à la commission, elle comptait six délégués d'Ober-
nai, et un de chacune des villes suivantes, à savoir : Sli'asbourg, Hague-
nau, Golmar, Schlestadt, Wissembourg, Kaysersberg, Rosheim et Barr;
puis les deux gentilshommes Bernard d'Uttenheim et Maurice Jungzorn ,
Gangolphe de Mittelhausen, prévôt à Haguenau, Emmerich Ritter, receveur
de la Landvogtey, et maître Baldung, prévôt à Baden. A la suite des débats
judiciaires, qui se prolongèrent plusieurs jours, et pendant lesquels la ville
était occupée par la force armée, les inculpés, qui étaient au nombre de
i< lier iMif/jf, (la kam für mich and das Ucriclil der dry zehn Matiiic und Urllielspreclier
» . . . do crkannlen die drijzeha Manne, nachdem sie Clag und antinirf, auch hrieffe und
« Kundschaß irnd ir heiderfei Fiirbrincjen gehört, de.
— 33 —
vingt-quatre, furent condamnés à payer au grand prévôt d'Obernai une
amende de cinq livres deniers, et à avoir deux doigts coupés. Cependant,
ils obtinrent grâce de la mutilation, à condition de la racheter à prix d'ar-
gent (die Finger sind abgebeten tu or den , aber bezahlt).^
Trente-deux ans plus tard , quand éclata la formidable insurrection dite
guerre des Paysans, le tribunal de la Laube eut encore à juger des conspi-
rateurs contre l'ordre social, et, cette fois-ci, dans leur nombre se trou-
vaient aussi des coupables indigènes. Cependant le magistrat, dans l'intérêt
de la pacification des esprits , suspendit la procédure , après s'être arrangé
à l'amiable au sujet des amendes avec le seigneur de Barr qui était alors
investi de la haute prévôté.
L'organisation du tribunal impérial d'Obernai , telle que nous l'avons
décrite , se maintint jusqu'à la guerre de Trente ans , à la suite de laquelle
ce siège de justice perdit complètement son ancienne importance. Les
appels facultatifs avaient déjà cessé, et quand, en 1669, la ville de Stras-
bourg vendit à celle d'Obernai l'office de la haute prévôté, elle se réserva
la juridiction sur toutes les localités de la seigneurie de Barr et autres qui
dépendaient autrefois de la justice d'Obernai , de sorte que la compétence
de cette dernière ne s'étendit plus que sur la ville et sur son domaine de
Bernardswiller. Un peu plus tard , sous l'administration française , on sup-
prima même la charge de prévôt, ainsi que l'élection annuelle des
juges , et le magistrat , concentrant dès lors l'administration civile et judi-
ciaire, jugea en premier ressort les causes tant criminelles que civiles,
tandis que les appels durent être portés devant le Conseil souverain d'Al-
sace.
U.
Si l'emplacement, sur lequel s'élève l'hôtel de ville d'Obernai, est de
nature à évoquer le souvenir des assises judiciaires de l'Alsace primitive,
par contre l'édifice même nous rappelle une époque dans laquelle fonction-
nait encore dans toute sa vigueur ce régime municipal d'autrefois, que la
bourgeoisie des villes libres avait su créer de son propre fonds dans la
seconde période du moyen âge. Quelques mots sur la manière dont ce
régime se constitua à Obernai , doivent trouver ici leur place. On sait que
l'émancipation des villes impériales date de l'époque où ces villes, les unes
un peu plus tôt, les autres un peu plus tard, parvinrent d'un côté à
s'affranchir de la juridiction civile des prévôts impériaux (lesquels ne
1. Voy. à ce sujet les comptes communaux de 1498 et d'autres pièces aux archives de
la ville. Les prévenus y sont désignés par la qualification «die gefangene Buntschuher. »
II- SÉRIE. _ T. II. ~ (M.) 3
— 3i —
conservèrent plus, dès lors, que leurs attributions judiciaires), et de
l'autre, à dominer l'influence prépondérante des nobles domiciliés dans
leur enceinte.
Le premier prévôt ou Schultheiss d'Obernai, dont il soit fait mention,
fut un nommé Walther, qui apposa son sceau à une charte de 1 178 (volun-
taie oduocali et sculteti de Ehenheim WaUheri). Ce fonctionnaire impérial
apparaît encore -en première ligne dans les actes publics du siècle suivant;
ce n'est qu'à partir du commencement du quatorzième siècle que nous le
voyons omis dans divers titres, tandis qu'il figure encore dans d'autres;
enfin il est mentionné pour la dernière fois dans un acte de 1362. C'est
que, entre le prévôt et les notables qui le suivaient immédiatement, il avait
surgi un nouveau fonctionnaire qui , après avoir marché pendant un cer-
tain temps à la suite du prévôt, finit par le supplanter. Ce nouveau chef,
c'est le Meister ou maître des bourgeois, choisi par ceux-ci au sein du
conseil et chargé d'administrer la communauté en leur nom. Dès lors les
deux éléments essentiels du régime municipal, magistrat et conseil (Meister
und Rath), sont constitués. Les anciens notables (potiores civitatis), trans-
formés en conseillers {Bathsherrn) , forment le corps délibératif , tandis
que les magistrats ou maîtres, appelés indifféremment ./l/ew/er, Stetimeister
ou Bürgermeister , constituent le corps administratif de la cité. Les uns
comme les autres sont les délégués de la bourgeoisie et exécutent leur
mandat au nom de celle-ci. Le chef de l'Empire n'a plus droit qu'au ser-
ment d'hommage et de fidélité, et encore les villes libres de premier rang
ne reconnaissent-elles pas même cette formalité. '
Telle fui la première conquête faite par les villes , conquête toute paci-
fique et qui paraît s'être réalisée avec l'assenliment tacite de l'autorité
suprême. Il n'en fut pas de même de la seconde , laquelle ne se fit qu'au
prix de luttes violentes , à raison des intérêts opposés qui se trouvaient en
présence immédiate. A Obernai , comme ailleurs, nous voyons dans le
principe l'administration publique exclusivement enti-e les mains de la
noblesse. Les actes du treizième au quinzième siècle portent la signature
non-seulement des nobles indigènes, tels que les Ehenheim, les Schenck,
les Gossmar, les Oberkirch, les MittSlhausen , les Rumersheim, les Wepfer-
mann, les Marschalk, les Wildemann , les Stangen, les Lamprecht, etc.,
1. Les modiûcatioiis que subit le régime des villes, sont indiquées par les formules qui
se trouvent à la tête des actes publics. Voici dans quel ordre se succèdent ces formules
dans les titres de la ville d'Obernai : Scultetus , potiores cioilatis et universitas civium.
— Wù' der Schultlieiss , der Rath und. die Bürger (jemeinlich. — Wir der Schultheiss ,
der Meister , der Rath iivd die Bürger. — Wir der Meister . der Roth und die Binr/er.
— 35 —
mais encore celle de nobles non doraiciliés dans la ville, mais qni y pos-
sédaient des fiefs ou qui étaient de véritables Ussbnrger.
Ce fut, comme on sait, l'organisation de la bourgeoisie en tribus et corps
de métiers qui mina ce régime aristocratique ; l'élément plébéien , après
s'être introduit petit à petit dans l'administration publique, finit par dominer
l'élément aristocratique et même, dans quelques villes, à exclure complè-
tement ce dernier. Une première tentative de ce genre eqt lieu à Obernai
en 1339, quelques années après la révolution municipale qui s'opéra à
Strasbourg à la suite de la rixe sanglante entre les Zorn et les Müllenheim.
A Obernai on mit également à profit une scission qui s'était déclarée entre
j nobles au sujet de plusieurs questions d'administration intérieure; le
mécontentement public se fit jour par une émeute, à la suite de laquelle tous
ceux parmi les nobles, qui s'étaient montrés hostiles à la bourgeoisie, furent
expulsés de la ville, en même temps que l'on procéda à l'instituUon d'un
nouveau conseil. Toutefois, cette mesure profondément radicale ne fut pas
couronnée de succès ; l'empereur Louis de Bavière intervint de tout le poids
de son autorité pour réprimer ce que le mouvement avait de trop exclusif.
Ce fut sur ses ordres que l'Unterlandvogt Conrad duc d'Ui'selingen, assisté
d'un certain nombre d'arbitres, à savoir trois nobles du voisinage et quatre
délégués des villes impériales de Colmar, Schlestadt, Brisach et Rosheim,
tint à Obernai une séance judiciaire dans laquelle il trancha les questions
litigieuses, en donnant satisfaction aux griefs légitimes de la bourgeoisie,
mais en réintégrant en même temps les nobles expulsés, non-seulement
dans leur domicile, mais encore dans tous les droits dont ils avaient joui
avant leur expulsion. Il décida, en outre, que nobles et non nobles seraient
admis désormais en nombre égal dans le conseil.'
L'essai tenté par la bourgeoisie d'Obernai ne se réalisa qu'un siècle plus
tard. Les nobles, quoique déjà réduits à partager le pouvoir avec les plé-
béiens, n'en jouissaient pas moins encore d'une influence prépondérante,
et ce fut à la faveur de cette influence qu'ils entraînèrent la ville dans d'in-
nombrables conflits, qui, bien souvent, n'avaient d'autre motif que la
satisfaction de leurs rancunes personnelles. Les diverses luttes et guerres
féodales, dans lesquelles la ville se trouva engagée dès la seconde moitié
1. Sentence arbitrale de VUnterlandvorjt Conrad duc d'Urselingen, dn vendredi avant le
dimanche Lœtare 1339, aux archives de la ville. Parmi les nobles expulsés et réintégrés
dans leurs fonctions, cette charte nonnne les suivants, qui ilgurent encore dans d'autres
titres de l'époque: herr Rudolf von Oberkirchc , herr FritcHii, herr Landold Gossmar,
herr Jacob sin Bruder Schocke gênant, herr Johann SchenAe ritter , Johann von Oher-
kirche herr sijfrids seligen son, Dietsche von Honnenwilr, Contze Stangen. Johannes
Wililcmrin, Confz Wildcmn» sin hnider , Rudolf ron Millelcnhusc und lier r Tuldclin.
— 36 —
du quatorzième siècle et pendant tout le siècle suivant, et qui nous sont
révélées par de nombreuses lettres de défi ou Fehdebriefe et transactions
conservées dans nos archives , attestent suffisamment quelles graves per-
turbations ce régime produisait dans les intérêts publics. Ce fut dans ces
circonstances que la bourgeoisie d'Obernai songea à réformer son système
municipal, dont les divers éléments existaient dès le siècle précédent, et à
s'affranchir de toutes les entraves qui en gênaient la marche. Une nouvelle
constitution, par laquelle, selon l'observation de Schœpflin, fut introduit
à Obernai le régime franchement démocratique, fut établie en 1459*. En
présence de l'Unterlandvogt Gœtze d'Adelsheim et de Jean , grand prévôt à
Obernai, les deux en qualité de délégués de l'Oberlandvogt , comte palatin
Frédéric, et avec le concours de représentants extraordinaires de la popu-
lation tout «litière, on détermina le mode d'élection des bourguemestres ,
des conseillei's , des chefs de tribus et des assesseurs du tribunal de justice,
ainsi que la part qui revenait à chacun de ces corps dans l'administration
des intérêts publics. Mais le point capital de ce nouveau règlement, ce
furent les conditions que l'on établit pour l'admission aux emplois publics.
II fut arrêté « que nul ne serait dorénavant admis soit au conseil, soit au
tribunal de justice ou aux autres emplois publics, à moins d'être bourgeois
indigène depuis cinq ans révolus, et d'avoir supporté toutes les charges
pubhques à l'instar de tous les autres bourgeois.» Cet article atteignait
directement les nobles, dont les uns, à la faveur des fiefs qu'ils possé-
daient dans la ville, jouissaient du droit de bourgeoisie sans y résider,
tandis que les autres, tout en y étant domiciUés, s'affranchissaient des
charges publiques en vertu de leurs privilèges et immunités. Malgré le
conflit que provoqua cette mesure entre la ville et la noblesse, elle fut
approuvée sept ans plus tard par l'empereur Frédéric III, lequel, par lettres
datées de Grsetz du hiardi après la Toussaint de l'année 1466, autorisa la
ville d'Obernai « à ne plus admettre dans son conseil et dans son tribunal
de justice que ses propres bourgeois indigènes , vu que jusqu'alors la ville
s'était trouvée gravement onérée, par cela même que le conseil et la justice
avaient été occupés par les nobles tant indigènes qu'étrangers. » Aussi à
partir de cette époque aucun noble ne figure plus sur la liste des autorités
de la ville. 11 faut avouer toutefois que, si celle-ci y gagna en sécurité inté-
rieure, d'un autre côté l'exclusion complète de l'élément aristocratique la
priva en grande partie de son prestige et de son influence au dehors. Par
1. Voy. Scliœpfliii, Alsnt. illust. , pars \U, sectio 1 a, § 745. — La nouvelle constitution
municipale de 1459 est insérée dans le Sladtbuch, fol. 1", sous le titre : dis ist die nuwe
ordcnunge ?'on don Hute setzen.
— 37 —
contre le nouveau régime fonctionna avec une régularité parfaite pendant
plus de deux siècles et ne déchut qu'à l'époque où disparurent toutes les
libertés municipales. Voici en abrégé ce régime tel qu'il fut introduit en
1459 et que notre hôtel de ville vit encore fonctionner dans toute sa vigueur
primitive.
La Saint-Jean était l'époque fixée pour le renouvellement annuel du
magistrat. La veille du jour de l'élection, les bourgeois convoqués dans
leurs curies respectives (ces dernières étaient au nombre de neuf: cinq
tribus d'artisans ou Zünfte et quatre quartiers ou Viertentheile dans lesquels
était réparti le reste de la bourgeoisie) nommaient les délégués chargés
d'exprimer leurs suffrages. Ces délégués ou écbevins, désignés sous le
nom de Ordnungsleute, étaient au nombre de 83 et constituaient ce qu'on
appelait le corps des SS électeurs (die 83 Manne, die den Rath zu besetzen
haben). Cette élection au premier degré terminée, lesdits électeurs ou
délégués des curies se rendaient à l'Hôtel de ville, où ils procédaient en-
semble à l'élection du conseil, sous la présidence du bourguemeslre en-
core en fonctions, chargé de recueillir les suffrages. Chacune des six
grandes curies avait à élire deux conseillers, tandis que les trois petites
n'avaient à nommer qu'un seul membre, ce qui portait le nombre des con-
seillers à quinze. Quant aux deux bourguemestres qui allaient se retirer
de leurs fonctions, ils siégeaient de plein droit dans le conseil l'année sui-
vante, et en raison de cela on les désignait par la qualification de Selbst-
gesetzte. — Les quinze conseillers ou Rathsherrn étant élus, il restait à
choisir dans leur sein les deux nouveaux stettmeister ou bourguemestres
qui devaient administrer la commune pendant le cours de l'année; car
ceux qui sortaient de fonctions n'étaient rééligibles que l'année suivante.
A cet effet les conseillers nouvellement élus se retiraient tous, et aux
83 électeurs des curies venaient s'adjoindre quatre délégués du faubourg
et dix du village de Bernardswiller. Tous ces électeurs, réunis aux deux
anciens bourguemestres, nommaient alors à la pluralité des voix, parmi
les quinze conseillers, les deux nouveaux bourguemestres dont chacun
avait à gérer les affaires de la ville pendant un semestre et portait alors le
titre de bourguemeistre régent {regierender Stettmeister ou Amtsburger-
meister). — Le lendemain des élections avait lieu l'installation solennelle
des magistrats et conseillers nouvellement élus. Cette cérémonie était dé-
signée du nom de Ralhshuldigung ou Schivörtag, parce que les nou-
veaux dignitaires, ainsi que toute la bourgeoisie, prêtaient alors le serment
d'usage; elle était présidée par X Untertan dvo gl, ou à défaut de celui-ci,
par les conseillers de la Landvogtey. La prestation du serment se faisait
— 38 —
tantôt dans la Rathsstuhe ou Salle de conseil, à portes ouvertes; tantôt sur
la place dite Seelhof, et dans les derniers temps aussi dans la cour du
bâtiment dit Burg qui occupe l'emplacement du ci-devant château impé-
rial. — Le lendemain du Schwörtag, les bourgeois se rassemblaient de
nouveau dans leurs curies respectives pour procéder à l'élection des neuf
Zunftmeister ou chefs de tribus. Immédiatement après leur élection, ces
derniers se rendaient à l'Hôtel de ville pour prêter leur serment et , séance
tenante, ils s'adjoignaient aux bourguemeslres et aux conseillers pour élire
les treize juges ou assesseurs du tribunal de justice, ainsi que nous l'avons
déjà dit. Quant aux autres emplois pubhcs, ils étaient conférés à une
autre époque de l'année par le conseil et les chefs des tribus, à la plura-
lité des suffrages. — Les chefs de tribus prenaient part aux délibérations
du magistrat et du conseil dans toutes les circonstances importantes : c'est
ce qu'on appelait : Halb dritt Eatli gehalten. Dans les circonstances ma-
jeures, on convoquait même tout le corps électoral, d'où la formule: <i Es
ist durcli Bath , ZunfUneisLer nnd die gantze Ordnung der 83 Manne er-
kannt ivorden, etc. » Les 83 électeurs ou échevins formaient ainsi une
espèce de grand conseil {der gemeine Rath) qui passait pour être l'organe
le plus complet de la communauté. '
C'est de l'époque où le régime municipal était parvenu à son état de
parfait développement et surtout du temps où la bourgeoisie avait acquis
sa part de l'administration pubhque, que paraît dater l'origine des Rath-
hauser ou maisons de conseil. On sait que primitivement les affaires pu-
bliques se débattaient en plein air, sur les places publiques, ainsi que l'at-
teste la charte de 1258 que nous avons citée. D'un autre côté la noblesse,
quand elle était encore à la tête des affaires , se réunissait de préférence
dans ses poêles ou Trinckstuhen , pour y discuter ses intérêts. Un autre
motif qui dut contribuer également à la construction de maisons commu-
nes, c'est l'établissement des Cantzleyen ou chancelleries: ce fut en effet
à partir du quatorzième siècle que l'on commença à faire dresser devant
les magistrats locaux les actes privés de quelque importance, qui avant ce
temps étaient presque tous rédigés devant la cour épiscopale. Quoi qu'il en
soit, dès le milieu du quinzième siècle, il y avait à Obernai une maison
commune qui tombait déjà de vétusté ou qui était devenue insuffisante,
car en MfiS on construisit un nouveau Rathhaus, ainsi que nous l'appre-
nous par les comptes communaux de cette année. L'emplacement qu'occu-
pait cet édifice, fut déjà celui de l'ancienne Reichslaube , où siégeait le tri-
I. Voy. iiiix arcliiv(!S de la ville le Slad/bndt et les RalhsprolohoUc qui renie raient les
|)rocès-verhaux ilos éloctions et des séances dn magistrat.
— 30. -
bunal bourgeois ; il était naturel en effet d'abriter ce siège judiciaire
dans le local où devaient se débattre les intérêts publics. Cependant
cette nouvelle construction étant encore deveiuie insuffisante, ce fut alors
que l'on éleva, en 1523, l'édifice qui subsiste encore de nos jours, ainsi
que le marque l'inscription qui s'y trouve. Ce dernier édifice, à ce qu'il
paraît, ne fut qu'annexé à celui du siècle précédent et il avait pour destina-
tion de servir de cbancellerie, car c'est sous la rubrique de Ccmtzleyarheit
que les comptes communaux de 1522 en font mention. Maître Hans Jüng-
ling était alors Baumeister ou architecte de la ville. Ce ne fut que plus
tard que la salle de conseil fut transférée dans ce même édifice; au com-
mencement du dix-sepUème siècle cette salle fut appropriée à servir en même
temps de salle de justice, et c'est à raison de cette double destination
qu'elle figure tour à tour sous les noms de Eathsstube et Gerichtsshibe. —
Celle salle offre encore maintenant un curieux échantillon du style déco-
ratif de l'époque. Si l'encadrement des portes et des fenêtres, ainsi que les
deux belles colonnes à nervures prismatiques, par lesquelles ces fenêtres
se trouvent distancées, rappellent le style de renaissance ou plutôt de tran-
sition du commencement du seizième siècle, par contre la décoration accuse
déjà le siècle suivant. On y remarque le plafond à compartiments ornés de
peintures emblématiques et portant au milieu l'aigle impériale, puis les
lambris sculptés qui encadrent dix tableaux à fresque représentant les dix
commandements de Dieu d'après des scènes tirées de l'Ancien Testament.
Un autre tableau à côté de la porte principale représente Moïse avec les
tables de la loi et porte la date de 1610, et un dernier tableau au-dessus
de cette porte représente le jugement derniei-. Les portes méritent égale-
ment de fixer l'attention, surtout à cause de leurs seirures à jeu compli-
qué et à exécution artistique. Mais ce qui malheureusement n'existe plus ,
ce sont les vitraux peints qui garnissaient la longue rangée de fenêtres de
la salle et qui offraient des scènes relatives aux origines de la ville, ainsi
que les blasons des familles nobles autrefois domiciliées à Obernai ou qui
y tenaient des fiefs. Ces vitraux ont été supprimés pendant la révo-
lution et dispersés depuis'. — Quant au bâtiment même, il reçut une
1. Les comptes communaux de 1604 à 1610 nous fournissent des renseignements sur
les artistes qui furent chargés de la décoration de cette salle. Le balcon ou la balustrade
qui la longe à l'extérieur, fut exécuté par maître George Widemann, tailleur de pierre
strasbourgeois , le même qui avait construit en 1579 l'étage supérieur du clocher dit
Kapellthurm. — Maître Melchior Beutel, peintre de Schlestadt, fut charge d'orner l'Hôtel
de ville de i)eintures à l'extérieur. — Les peintures qui décorent la salle même furent
exécutées par les peintres Zébédée Miller et Jean Bartenschlager. — L'exécution des vitraux
fut confiée au peintre sur verre strasbourgeois Barthélémy Link. Il est fait mention de ces
— 40 —
nouvelle annexe en 1626 et une dernière en 1688; d'où il résulta que
l'Hôtel de ville d'Obernai formait une agglomération de plusieurs construc-
tions à styles divers, lesquelles ont toutes disparu lors de la dernière re-
construction, à l'exception de l'édifice de 1523.
A la suite de cet aperçu archéologique, nous pourrions citer quelques-
unes des graves délibérations dont notre Hôtel de ville fut témoin dans le
cours agité du seizième siècle et surtout dans les temps calamiteux du
siècle suivant, quand bien souvent, dans des moments de crise suprême,
le corps municipal tout entier se réunit dans cette enceinte, afin d'aviser
aux moyens de pourvoir au salut commun. Mais le cadre limité de cette
notice ne nous permet pas cette digression, et au lieu de toucher à ce sujet
sévère et parfois lugubre, nous préférons mentionner des réunions d'un
autre genre, auxquelles cet édifice donna accueil; il s'agit de ces festivités
dont nos ancêtres étaient si prodigues au milieu d'agitations et de préoc-
cupations de toute nature, et qui, en raison des dépenses qu'elles occasion-
naient, fournissaient chaque année, sous la rubrique de a Zehrungen }>, un
large chapiire aux comptes communaux du quinzième et du seizième
siècle. Le renouvellement du magistrat et le Schivörtag, l'apurement des
comptes, la distribution des emplois publics, la publication des ordonnan-
ces du magistrat et des règlements d'ordre public, la foire de Saint -Gai
et les autres foires, le jour des Rois {Königreich gehalten) et d'autres oc-
casions encore motivaient autant de réunions festivales , dans lesquelles
des tables somptueuses se dressaient ^u Rathhaus pour les bourguemestres,
les conseillers, les chefs de tribus et tous les fonctionnaires publics; à ces
mêmes repas était aussi conviée la noblesse de la ville et du voisinage. Ce
ne fut que lors de la guerre de Trente ans que cessèrent presque complète-
ment ces habitudes joyeuses. Cette terrible lutte, qui bouleversa de fond
en comble les anciennes institutions, ne réagit pas moins sur le caractère
vitraux en 1G53 , dans la correspondance de François Pistorius, député de la ville à la diète
de Ratisbonne. On lui avait demandé des renseignements sur le fief que les nobles Land-
schaden de Steinach possédaient autrefois à Obernai; sur quoi il répondit: que le blason de
cette famille figurait elfeclivement parmi les antres armoiries que représentent les vitraux
de la salle de conseil, l'armi les divers sujets qui y étaient représentés, on remarquait aussi
la donation de Hohenbourg, faite par le duc Atbic à sa fille sainte Odile. Cette figure, qui
porte en bas le blason des comtes de Habsbourg, a été reproduite par Silbermann, Be-
schreihumj von Uohenhnrg , page 8 , et par Pfeffinger, idem page 40, planche V. La moitié
de cette verrière se trouvait dans ces derniers temps encadrée daus les fenêtres de Tau-
berge d'innenheim sur la route, et doit s'y trouver encore. Une autre verrière qui se trouve
au presbytère d'Obernai et qui représente les armoiries de l'abbaye de Niedermünster, le
chameau chargé de la célèbre croix, avec la légende: Rozina zum Stein, Äbtissin zu
Niedermilnster , paraît être aussi un débris des vitraux peints de la salle de conseil.
— 41 —
public, en bannissant pour toujours la gaieté du cœur des populations qu'elle
avait décimées.
Si nous avons cru devoir passer sous silence les faits purement locaux
qui se rattachent à notre Hôtel de ville, par contre nous ne devons pas
oublier ceux qui présentent un intérêt plus général. Le Rathhaus d'Obernai
ne resta pas étranger aux assemblées politiques autrefois si fréquentes, et
sa salle de conseil, telle qu'elle existe encore maintenant, accueillit plus
d'une fois les délégués des divers corps politiques de la province. Deux
ans après la construction de l'édifice, en 1525, éclata la formidable insur-
rection connue sous le nom de guerre des Paysans, et alors s'y ouvrirent
à deux reprises des conférences qui avaient pour but d'étouffer l'émeute
par des voies pacifiques, et auxquelles prirent part rf/n/ertonc/yo^Uacques
Baron de Mœrsperg, le maître d'hôtel de l'évêque Guillaume de Honstein,
Jacques d'Ûberkirch, le comte de Hanau-Lichtenberg, les délégués de la
ville de Strasbourg, le seigneur de Barr Nicolas Ziegler, le vice -dôme
Wolfgnng de Landsperg et d'autres seigneurs de la province. En 1567 les
délégués des cinq villes catholiques de la Landvogtey vinrent à Obernai
s'occuper des affaires religieuses de la ville de Haguenau. En 1584 les dé-
putés des Etats provinciaux de la basse Alsace s'y réunirent, afin d'arranger
le différend qui s'était élevé entre la ville et le prince palatin Jean -George
de Veldentz, à l'occasion de l'acquisition faite par ce dernier de la seigneu-
rie du Ban de la Roche et de la cour seigneuriale de Ralhsamhausen à
Obernai, laquelle en formait une dépendance. En 1C00 fut conclu à l'Hôtel
de ville d'Obernai le traité par lequel le duc Frédéric de Wurtemberg re-
nonça, en faveur du cardinal de Lorraine, aux droits qu'il avait acquis sur
l'évéché de Strasbourg de la part du prétendant George, margrave de
Brandebourg. En 1625, nouvelle assemblée des États provinciaux d'Alsace
à Obernai, dans le but d'organiser la défense du pays contre le comte de
Mansfeld, lors que la nouvelle s'était répandue que cet aventurier allait
visiter de nouveau les contrées rhénanes; on y vola la continuation des
mesures de défense déjà décrétées à Schlestadt. Ces mêmes Étals se réuni-
rent encore à Obernai en 1626 et en 1627, pour y débattre les nombreu-
ses questions qui étaient alors à l'ordre du jour, notamment celle des lour-
des contributions de guerre qui pesaient déjà sur la province. Après la guerre
de Trente ans, en 1654, on y vit une assemblée des délégués des dix villes im-
périales, dans le but d'arranger le différend qui s'était élevé entre Obernai et
les autres villes, au sujet des frais de représentation à la diète deRatisbonne,
tenue l'année précédente. A cette époque la situation critique des dix villes
se faisait déjà sentir. Les prérogatives, dont jouissait le Landvogt, fourni-
— 42 —
renl le terrain sur lequel s'engagea la luUe si remarquable que ces villes
soutinrent pendant une série d'années contre le puissant monarque, qui
dicta bientôt des lois à l'Europe entière. Quand, après la retraite du comte
d'Harcourt, le duc île Mazarin, neveu du cardinal, vint prendre possession
de la Landvogtey, et que ce changement présageait déjà de nouveaux con-
flits, les dix villes crurent devoir se concerter préalablement, afin d'être
prêtes à toute éventualité. Les séances se tinrent à l'Hôtel de ville d'Ober-
nai le 1^"^ et le 2 juillet 1661, et l'on se décida à envoyer une députation
à iMayence pour recueillir l'avis de l'électeur-chancelier de l'empire. Le
20 septembre suivant on se réunit encore à Obernai pour prendre connais-
sance du résultat de cette mission. Douze ans plus tard, quand la guerre
se fut rallumée dans notre province, les dix villes désarmées, démantelées
et surchargées de garnisons royales, n'eurent plus qu'à se soumettre aux
volontés du maître. Puis, après la paix de Nimègue, en 1679, le baron de
Montclar arriva à Obernai et y reçut, à l'Hôtel de ville, le serment d'hom-
mage et de fidélité au roi de la part du magistrat et de la bourgeoisie.
L'année suivante le corps équestre ou la noblesse immédiate de la basse
Alsace reçut également la sommation de prêter le serment de fidélité à la
France. Cet acte eut lieu à l'Hôtel de ville d'Obernai, le 9 octobre 1680,
en présence de l'intendant Jacques de Lagrange et de sa suite.'
A partir de cette époque, plus de ces débats publics dans lesquels, pen-
dant de longs siècles, les divers membres du grand organisme de l'Etat
avaient su maintenir leur existence propre et s'y mouvoir librement, tout
en ne perdant pas de vue l'intérêt général. Sous le régime autocratique,
qui fut inauguré dans notre nouvelle patrie, la vie municipale elle-même
ne larda pas à s'éteindre sous le voile trompeur des anciennes formes aux-
quelles toute sève vitale fut violemment enlevée. Aux discussions des âges
passés succéda un silence profond; mais ce silence ne faisait que masquer
l'agitation intérieure qui fit explosion un siècle plus lard. Ce fut au milieu
du mouvement général qui poussait les esprits vers un avenir inconnu et
qui précéda immédiatement la révolution de 1789, que l'ancienne décapole,
qui allait être effacée pour toujours de la carte politique de l'Europe, donna
un dernier signe de vie et marqua le terme de sa carrière par une de ces
]. Ou affirme ordinairement que la prestation du serment de la noblesse eut lieu au
château des Landsperg à Niedernai; c'est une erreur. Les comptes communaux d'Obernai
de Hi8() mentionnent d'une manière très-explicite les dépenses faites par la ville à l'occa-
sion de cette cérémonie; sur les ordres de l'intendant, celle-ci dut même mettre en cam-
pagne ses propres messagers ou Lauf erboten , pour expédier les lettres d'invitation. L'année
suivante le directoire de la noblesse fut transféré momentanément de Strasbourg à Niedernai,
et c'est peut-être ce fait qui a donné lieu à la méprise.
— 43 —
assemblées autrefois si fréquentes, dans lesquelles elle avait jadis si ardem-
ment débattu ses intérêts particuliers. Ce fut l'Hôtel de ville d'Obernai qui
recueillit ce soupir de l'agonie. Le 2 et le 3 septembre 1788 « les députés
des raagisti'ats des dix villes jadis impériales d'Alsace » se réunirent au
Rathhaus d'Obernai, en assemblée générale, afin d'y délibérer sur les
moyens de sauvegarder leur ancienne constitution et leurs privilèges, ga-
rantis par les traités, contre l'inslitution projetée des administrations in-
termédiaires provinciales, des districts et des nouvelles municipalités.' —
Toutefois cet appel au passé ne trouva plus d'écbo. Le peuple, qui ne re-
connaissait plus dans ses magistrats les représentants de ses intérêts, leur
prêta l'intention de vouloir exploiter pour leur propre compte les ancien-
nes franchises qu'ils revendiquaient, et ne tarda pas à se déclarer franche-
ment pour les nouveaux principes qui s'étaient fait jour. L'ancien régime,
qui en réalité n'était qu'un régime fort moderne, disparut définitivement
pour faire place à un régime plus moderne encore et dont l'égalité civile
est la base principale. Mais quelle que soit la valeur sociale de ce
nouveau principe, qui attend l'épreuve du temps pour pouvoir être
jugé définitivement, il n'en est pas moins vrai, qu'au milieu de l'uniformité
tant soit peu désolante qui résulte de la fusion générale des mœurs et des
institutions, on aime à reconstituer de nos jours, par la pensée du moins,
nos individualités communales d'autrefois, avec le cortège pittoresque de
leurs institutions dont l'originalité offre tant de charme. Heureuses sous
ce rapport celles de ces locahtés qui ont conservé un édifice dans lequel se
résume leur passé; les souvenirs qui s'y rattachent, attestent que là aussi
se mouvait jadis, dans la plénitude de sa liberté, une existence personnelle,
ayant sa physionomie propre et caractéristique.
L'abbé Gvss.
1. Voy. aux archives d'Obernai le procès-verbal des séances de cette assemblée. Voici
les députés qui y assistèrent: Hagueuau , MM. de Cointou, préteur- royal, et de Barth,
stettmeister ; Coliwar, Delort et Buob, stettmeister ; Schlestadt , tvœbele, bourg-uemestre;
Wissembourg , de .Neubeck, préteur-royal, et Quefemme, bourguemestre; Landau, Gromer,
préteur-royal, etilofmaun, boiu'guemestre ; Oberenheini, Soutag et Lander, bourguemestres;
Rosheim , Braun, bourguemestre et Reyset, syndic; KeyserSberg, Peyerinihoff, stettmeister;
Münster, de Barth, préteur-royal, et Boyet, bourguemestre; Türckheim, Hübler, syndic.
LES FORTIFICATIONS D'HUNINGUE.
J'ai déjà eu l'honneur de vous parler des ruines d'Huningue et de vous
proposer de conserver le souvenir de ces restes imposants d'un passé si
glorieux en les faisant reproduire par la photographie dont l'inexorable
précision nous tracerait la vue. Je vous disais qu'un pareil tableau méritait
d'être conservé et que personne mieux que M. Braun, dont vous avez déjà
pu admirer le mérite, ne serait plus apte à nous conserver cette ceinture
de ruines.
Je ne sais si ce travail a été entrepris, mais en attendant j'ai pu me pro-
curer le plan de la ville, telle qu'elle était avant la paix de Ryswick, avant
d'avoir été privée de son pont sur le Rhin en 1752, et considérablement
réduite l'an V, après qu'une grande partie de l'armée y. eut opéré son pas-
sage lors de la belle et célèbre retraite de Moreau. Je crois que ce plan
que j'ai l'honneur d'offrir à la Société et dont je vais vous dire quelques
mots, pourrait être conservé dans vos archives.
La forteresse d'Huningue, située sur le Rhin, à peu de distance de Bâle,
était un modèle achevé dans ce genre. Son long côté était sur le fleuve.
M. de Vauban, qui l'a fortifiée, n'avait rien oublié pour la mettre à couvert
de toute insulte. Louis XIV voulait qu'Huningue fût une forteresse redou-
table et le boulevard de l'Alsace. (Note n" 1.)
Commencés en 1680, les travaux furent poussés avec une ardeur in-
croyable; une année les vit pour ainsi dire commencer et terminer. La mé-
moire de ce fait a été conservée par une médaille qui représente Huningue
sous la forme d'une femme qui offre à Pallas le dessin de la nouvelle forte-
resse; le Rhin, sous la figure d'un vieillard, y applaudit. Sur la légende on
lit : Muniti ad Rlienum fines. Huninga condita MDCLXXX (1080).
Cette médaille, qui est très-rare, se trouve au cabinet de la Bibliothèque
impéiiale, c'est la seule que j'aie rencontrée jusqu'ici. (Note n° 2.)
11 est facile de se rendre compte de ce qu'était cette forteresse. Pleine
liberté avait été laissée à Vauban, aucune règle absolue ne lui avait été
imposée; il savait seulement qu'il devait amener les eaux du Rhin à l'entour
de la place, y creuser le lit d'une rivière et rendre ce fort redoutable.
— 4D —
Or, qu'esl-il résulté des souhaits exprimés par Louis XIV et de cette
liberté laissée à l'architecte? Ce qui résulte toujours d'une grande idée
quand son exécution est confiée à l'expérience: une œuvre complètement
réussie, parfaite en tous points.
Vauban en véritable artiste procédait largement et d'une manière sai-
sissante: il prenait un coin de terre ou un bois, bien uni de sol, sans vues,
sans un filet d'eau, brûlé par le soleil; et, d'un coup de baguette, le ma-
gicien vous le transformait si bien que vous ne le reconnaissiez plus. La
forteresse s'élevait, une large rivière coulait à l'entour, des ouvrages à
corne, des demi-lunes sortaient des ondes du vieux Rhin; l'œil embrassait
tous ces travaux, ces casernes, ces courtines; les remparts et les fossés se
courbaient, serpentaient comme de longs rubans. L'œuvre était achevée.
Vauban y avait mis la main, il l'avait signée de son nom, le poëme était fait
(Note n" 3.)
Ces grands travaux, sûrement et économiquement conduits, occupèrent
pendant un an 1,200 ouvriers et 300 chevaux. Presque toutes les commu-
nes des bailliages d'Altkirch, de Delle, de Ferrette et de la seigneurie de
Landser avaient été mises en réquisition pour transporter les pierres et
les bois propres à la construction.
— 46 ~
Ces travaux ont été poussés si vite que toute l'Alsace, et surtout la Suisse
et le duché de Baden étaient étonnés de les trouver achevés en si peu de
temps. C'est que des centaines de bras creusaient la terre, élevaient les
ponts, fabriquaient la brique, bâtissaient les casernes. Une égale activité
régnait au dedans et au dehors de la place et préparait pour le printemps
suivant un lever de rideau dont tout le monde était aussi surpris qu'en-
chanté. (Note n° 4)
On voyait d'abord sur l'autre bord du Rhin un grand ouvrage à corne
avec une demi-lune devant la courtine et une contre-garde à côté de cha-
que aile. Ces ouvrages étaient environnés d'un bon fossé d'environ 30 mè-
tres de longueur, qui communiquait avec le Rhin. Sur le milieu du fleuve
à peu près, il y avait un autre ouvrage à corne plus grand, qui enfilait
tous les fossés du premier. Sur le bord du Rhin, du côté de la forteresse,
on trouvait d'abord une espèce de chemin couvert plus long que le front
de la place. Il y avait un bastion sur le milieu pour défendre le passage du
Rhin.
De tous les côtés, -et à chaque extrémité, il y avait deux digues ou éclu-
ses pour retenir l'eau dans les fossés, afin qu'ils ne fussent pas à sec, lors-
que le fleuve venait à baisser. Ce chemin couvert était séparé du corps de
la place par un bon fossé, où l'on voyait un double ravelin vis-à-vis le
milieu delà courtine, et une tenaille double pour la mousqueterie; le reste
de la place, du côté de la terre, n'était pas fortifié avec moins de soin,
comme le plan nous l'indique.
On peut remarquer l'attention que Vauban avait d'occuper les postes qui
pouvaient l'incommoder par des ouvrages à corne, d'y attirer l'eau du
Rhin par un canal qui servait en même temps d'avant-fossé à la place, et
à la tète duquel il avait mis un pâté pour empêcher que l'ennemi ne tentât
d'arrêter l'eau par une digue, et enfin de mettre une contre-garde devant
le bastion où il n'y avait point d'ouvrages à corne, afin de rendre par là
la force à peu près égale sur tous les côtés. La forteresse était garnie de
cent quarante pièces d'artillerie.
hitérieurement la ville était régulièrement bâtie, elle renfermait une
place d'armes, une église et des logements pour douze cents habitants.
L'arsenal était bien distribué et à l'abri des bombes. Les casernes vastes
et bien percées avaient été construites pour y loger de quatre à cinq mille
hommes. Un hôpital magnifique pour deux cents à trois cents malades
avait été construit et commodément installé. Enfin rien n'avait été négligé
par Vauban, (|ui avait fait de cette forteresse un chef-d'œuvre de l'art.
(Note n" 5.)
_ 47 —
Sur la porte qui dominait Bâle et qui a été démolie, ainsi que les caser-
nes et tous les bâtiments de l'Etat, par suite des traités de 1815, on lisait
l'inscription suivante sur une plaque de marbre, et au-dessus des armes
de Louis XIV : Ludoviciis M. Rex christianissimus , Belgiens, Sequanicus ,
Germanicus, pace Europa cnncessa Himingam arcem, sociis iutelam Jios-
tibîts terrorem extruxit. MDCLXXXI {I68i).
Sabourin de Nanton.
NOTE] S.
Note n» 1 .
Vanban s'empresse de répondre à la confiance dont l'honore son roi. Sûr de sa protec-
tion et de son sufTrag-e , il se livre à toute l'énergie de son talent, et c'est alors qu'on voit
éclore un art tont nouveau. Déjà tombent de toutes parts ces tours orgueilleuses élevées
sur la cime des rochers, inaccessibles peut-être au fer et au feu, mais non pas à la famine
qui les assiège. Une haie de bastions artisteraent ménagés ne sort du rempart que pour
présenter une pointe menaçante à l'ennemi qui se trouve investi de feux qui se croisent
et le prennent dans tous les sens. Chaque ouvrage se défend lui-même , et reçoit de
l'ouvrage voisin la défense qu'il lui rend à son tour. Désormais les places fortes situées en
plaine , à la portée des convois et des subsistances, secourues par les eaux dont les grandes
manœuvres seront appelées à leur secours, défendues par des fortilications rasantes qui
bravent les foudres ennemies, garantiront les campagnes de l'incendie et du ravage, et les
couvriront de leur feu protecteur.
Mais ces principes mêmes varient suivant le site et la nature des lieux, et Vauban ne suit
que l'impulsion de son génie, et déclare qu'il n'adopte point de manière exclusive. Trop
souvent l'auteur d'un système vent tout ramener, de gré ou de force, à sa théorie. Vauban
sait en changer suivant la différence locale des places qu'il doit fortifier. D'un coup d'œil
d'aigle, il saisit les rapports militaires et politiques qui fout la véritable valeur des places
fortes, choisit ses positions, lie les postes entre eux, se plie aux divers accidents de la na-
ture, maîtrise les éléments, les irrégularités du terrain; les obstacles mêmes deviennent
des moyens sous ses mains victorieuses, et les fleuves, les rochers, les marais, les mon-
tagnes et les mers, dociles à sa voix, s'étonnent d'entrer dans la grandeur de ses plans et
de se trouver tributaires de son génie.
François-Joseph Noël,
professeur à l'université de Paris, au collège Louis-le-Grand.
(L'Éloge du maréchal de Vauban.)
Note n" 2.
Nous avons pu nous procurer la copie de cette médaille, qui accompagne notre mémoire,
dans l'ouvrage intitulé : Médailles sur les principaux érénemeuls du règne de Louis le
Graïul; Paris, imprimerie royale, 1723.
Voici le texte qui suit la reproduction de cette médaille: 1680. Les fortifications d'Hu-
ningue. Entre les divers soins que le roi a toujours pris pour affermir le repos et le bonheur
de ses sujets, un des principaux a été de fortifier les frontières du royaume, par les en-
droits qui paraissaient faibles et ouverts aux ennemis. Entre Bàle et Brisach, il n'y avait point
de place qui fermât aux Allemands l'entrée de la haute Alsace. Sa Majesté ordonna qu'on
— 48 —
fortifiât Hiiiiiiigue, petit village à une deiui-lieue de Bàle, et en fit une place très-régulière à
cinq i^astions, avec tous les dehors nécessaires.
C'est le sujet de cette médaille. Ou y voit Pallas, déesse de la guerre et des arts , à qui
la ville d'Huniugue présente le plan de ses fortifications. Le fleuve du Rhin regarde avec
joie ce nouvel ornement que l'on ajoute à ses rivages. Les mots de la légende, Muniti ad
Rheyium fines, signifient, les frontières sur les bords du Rhin fortifiées. Ceux de l'exergue,
Huninga condita MDGLXXX : Huningue, bâtie I6SÜ.
Note n" 3.
M. le maréchal de Vauban fut inventeur dans le grand art des dispositions générales de
la défense ; c'est en le voyant se plier à la nature du sol, tantôt ingrat, et tantôt favorable,
qu'on reconnaît l'homme fécond en grandes vues. Le conservateur des frontières fut en
même temps le créateur de l'art de latfaque, et il le porta au dernier degré de perfection.
M. de Vauban fut non-seulement le plus grand artiste de son temps; mais tons les pro-
cédés de détail, dont il fut l'inventeur dans les constructions importantes, servent encore
aujourd'hui de modèles , et l'on ne peut s'en écarter qu'aux dépens de la consistance et de
la sohdité , qui doivent constituer les premiers caractères des travaux publics.
Les levées, les moles, les jetées, les écluses, l'art des fondations sur les sols les plus
Ingrats ; le dessèchement des marais, la réunion des plus vastes magasins d'eau, soit pour
la défense, soit pour alimenter des canaux de navigation; les digues destinées à préserver
les campagnes contre les ravages des torrents ; les fleuves resserrés et contenus dans leurs
lits ; partout il déploya le grand art de prescrire des lois au caprice des éléments fougueux,
et avec un tact si sûr dans ces savantes constructions, que les théories les plus subtiles de
rhydrauhque l'ont à peine remplacé.
Le général d'Arçon.
{Considérations sur l'influence du génie de Vauban dans
la balance des forces de l'État.)
Note n° 4.
Ce succès étonne; TAlsace dont Vauban avait établi la sûreté, en fortifiant ses villes ,
doit le respecter comme son bienfaiteur , puisqu'il lui ouvrit les sources du commerce , par
la facilité des transports qui l'ont tirée de la langueur et l'ont rendue une de nos plus
riches provinces.
Sabourin de Nanton.
Note n" 5.
Vauban poussa les travaux avec une telle activité que bientôt Huningue sortit du milieu
de ses retranchements et que , là où deux ans auparavant il n'y avait que des cabanes de
pêcheurs, la puissance de la France avait su créer une citadelle redoutable défiant les in-
sultes de l'étranger, sauvegardant l'Alsace; forteresse d'autant plus difficile à prendre que
sa droite était appuyée à un territoire neutre qui se défendait par lui-même, et que des
ouvrages avancés établis dans les lies du Rhin devaient protéger les approches du fleuve
et couvrir un pont de bateaux qui relierait les deux rives.
Le 15 octobre 1681, Louis XIV se rendit à Huningue, visita la nouvelle place de guerre
et reçut les députés du canton de Bâle qui vinrent le complimenter.
Franck Latruffe.
LETTRE DE FRERE SIGISMOND
A L'ABBÉ BARTHÉLÉMY D'ANDLAU
SUR LES ANCIENNES TAPISSERIES
DE L'ABBAYE DE MURBACH.
En publiant dans la Revue d'Alsace de 1855 le (< Catalogue de la biblio-
thèque de l'abbaye princièrc de Murbach » , M. Matter a cru devoir dire
quelques mots d'un document qui l'accompagne et qui, à son avis, mérite
d'être mieux connu.
C'est une description des anciennes tapisseries de l'église de Murbach,
adressée sous forme de lettre par l'auteur du catalogue, frère Sigismond ,
à l'abbé Barthélémy d'Andlau , lettre digne , en effet , sous plus d'un rap-
port, de l'attention des antiquaires. Tout autant que le catalogue publié et
annoté par M. Matter, elle témoigne du zèle de Barthélémy d'Andlau et de
son bibliothécaire pour les choses de l'esprit. En dépit des imperfections
de la langue et de la barbarie grammaticale, on discerne, dans l'enthou-
siasme de quelques passages et dans la vivacité de certains regrets, quelque
chose du feu sacré de la Renaissance. Pouvons -nous voir, sans un retour
sur nous-mêmes, cette curiosité archéologique qui arrache frère Sigis-
mond à des travaux sérieux et lui inspire l'idée de consacrer une notice à
de vieilles tapisseries qui l'avaient frappé? Ne tenons-nous pas là un homme
et une passion? A part tout intérêt de sentiment, la lettre de frère Sigis-
mond est d'ailleurs un document historique précieux , unique trace d'une
décoration fort originale, qui remontait peut-être à la première moitié du
douzième siècle, puisque l'empereur Henri V (1106-1125) est le dernier
souverain qui y figure. On y trouve la mention sommaire des faits les plus
importants du passé de l'abbaye, la commémoration de ses principaux
bienfaiteurs et des avantages qu'ils lui ont procurés, l'analyse de titres
II« .Skkie.— T. II. — (M.) A
— 50 —
dont plusieurs sont aujourd'hui perdus, le nom d'un abbé inconnu, con-
temporain d'Olhon le Grand; tout cela peut servir à combler quelques
lacunes dans l'histoire de Murbach qui est toujours à faire.
Ne dédaignons même pas les vers léonins qui terminent la description.
En définissant les devoirs réciproques des rois et des pontifes , des pasteurs
des peuples et des pasteurs des âmes, le versificateur qui s'est complu
dans ces puériles allitérations, paraît avoir voulu résoudre à sa manière
le problème des deux puissances, que les luttes du sacerdoce et de l'em-
pire avaient fait surgir. Cette observation confirme, ce me semble, ma
supposition sur l'âge de ces tapisseries. Que ne les avons-nous encore !
Quel intérêt n'y aurait-il pas pour l'histoire de l'art à les comparer à la
célèbre tapisserie de Bayeux? Mais dès le temps de Barthélémy d'Andlau,
cette œuvre curieuse était déjà gravement endommagée et nous devons de
la reconnaissance à frère Sigismond pour ne l'avoir point laissée périr tout
entière.
On remarquera que les ouvriers qui ont exécuté cette tenture, y ont
mis leurs noms, Ulric et Bertold. Cette particularité prouve qu'au douzième
siècle la tapisserie n'était pas seulement une distraction pour les dames,
qu'elle constituait une industrie.
J'ai déterminé de mon mieux les titres auxquels sont empruntées les
légendes. La description y gagne en clarté et en précision , et nous établis-
sons ainsi une sorte de récolement des diplômes qui servaient à l'abbaye
de Murbach , dans le courant du douzième siècle, à justifier de son impor-
tance , de son antiquité , de ses privilèges et de ses possessions. On peut
s'assurer par là que la série des plus anciennes pièces de ses archives n'a
pas trop souffert des ravages des siècles depuis l'époque de l'abbé Erlolfe.
Quant au texte, je puis d'autant mieux en garantir la fidélité , que le
bibUothéeaire de la ville de Colmar , M. L. Hugot (c'est tout dire en pareille
matière) , a bien voulu le coliationner dans le temps avec moi , et que de
plus, il vient d'être revu par un de mes amis, excellent latiniste, dont la
modestie seule me défend de produire le nom et de reconnaître, comme
je le voudrais, mille obligations que lui ont mes études. Sous cette double
garantie je reproduis la lettre de frère Sigismond telle quelle, me bornant
à placer entre crochets [ ] les corrections visibles que le sens impose.
Thann, 10 mars 1863.
X. MOSSMANN.
— 51
Lettre sur les anciennes tapisseries de l'abbaye
de Murbach.
Au très -révérend père et seigneur, très-digne
de tout honneur, Barthélémy, abbé de Murbach,
frère Sigismond, dévoué à votre affection, pré-
sente l'effort d'une sincère charité d'obédience.
Comme je sais, ô le meilleur des hommes , que
par une industrie singulière tu t'es fort appliqué
depuis longtemps à préserver de la destruction
et à restaurer tous les monuments de tes prédé-
cesseurs pour les étudier, je crois que pour te
faire atteindre ce but, ma bonne volonté ne t'a
pas fait défaut: plaise à Dieu que ce soit avec
fruit. Il est trop vrai, et l'expérience nous l'ap-
prend, que la vétusté consume tout et que la teigne
de l'antiquité réduit toutes choses à rien; c'est
ce qu'il nous a été donné de voir par tant de ma-
nuscrits que le grand soin et le génie de nos
pères avaient réunis dans le lieu très- saint et
très-ancien qui t'est confié , témoin le volume
que nous déroulâmes hier et qui promet tant d'é-
crits dioérents , mais où malheureusement le
nombre des œuvres perdues dépasse celui des
œuvres retrouvées. Et plût à Dieu que le peu de
celles qui restent fussent parvenues entre tes
mains dans leur intégrité et non maculées de
crasse! Mais aussi combien tes efforts te vaudront
d'éloges auprès des hommes de notre temps et
combien de récompense? de la part de Dieu, dis-
pensateur de tous les biens (qui sait aussi cela,
j'en suis persuadé, car rien ne lui est caché) ;
ta renommée, ta louange et ton nom, jamais
rage ne les fera sortir de la mémoire de la pos-
térité, si du moins mes vers ont quelque pou-
voir. Si même je me taisais, tesœuvres suffiraient
pour proclamer tes mérites. Mais remettons cela
à plus tard.
Maintenant apprends eu peu de mots par quelle
causej'ai entrepris ceci. J'ai éprouvé aujourd'hui
un de ces dégoûts auxquels on est parfois sujet
pour la besogne sérieuse. C'est pourquoi je dé-
bandai mon esprit et voulus repaître mes yeux ;
mais quoi? je tombai sur un travail plus pénible.
J'examinai, en effet, ces antiques tapisseries,
comme tu l'as fait toi-même fort souvent à ma
connaissance , et bientôt je me demandai s'il n'y
aurait pas moyen de les dépeindre pour les trans-
' mettre à nos successeurs, de peur qu'elles ne
soient perdues pour eux , l'étant déjà presque
pour nous, car en cela brillent le zèle, l'appli-
cation de l'amour et la sollicitude diligente pour
ce lieu de ceux qui ont voulu exposer aux yeux
des hommes, tissés dans cette étoffe, les bienfai-
teurs de l'abbaye pour en inspirer le respect aux
mous et aux pervers , et pour servir d'aiguillon
aux excellents et aux zélés. Quoique tu connaisses
ces tentures mieux ([ue moi , je n'en ai pas moins
voulu les décrire, pour que celui qui souffre des
yeux ou du cou , en s'aidant de ce papier, puisse
lire malgré la hauteur où elles sont suspendues.
Epistola de Tapecijs antiquis in monasterio
Horbacensi.
Reuerendo valde omnique honore dignissimo
domino patrique Bartholomeo abbati Morba-
censi, frater Sigismundus vestre dilectioni de-
uotus sincère caritatis conatum ad obedienciam.
Cum te sciam, virorum optime, pro tua singu-
lari industria iam dudum operam dédisse ma-
gnam, qua via omnia predecessorum tuorum
mouimenta ne perditum irent, possint ad resti-
tucioncm deduci ut inuestigares, credo lit id
assequi in tam laudabili cepto finem possis me
quoque non defuisse uoluntate,utinam et fructn.
Profecto verum experti sumus quoduetustas om-
nia consummit, (sic)actinea antiquitatisconficit
vniuersa, idque licnit videre in tot codicibiis
magna cura et ingenio patrum in loco illo sanc-
tissimo ac vetustissimo tibi commisse repositis,
prout hesternum quod reuoluebamus ostendit ro-
tulum, quod tot describit iamproch! (sic) deper-
dita opéra ut numerum repertorum excédant. Et o
vtiuam et illa que de tot supersunt tuas ad ma-
lins deuenissent intégra ac [nec] aluuione at-
trita. Ob quem tuum conatum quanta assequaris
preconia aput homines nostri evi quantaque pre-
miaalargitore omnium bonorum deo (sibi notum
reor quod nil latet) fama [famam] tamen cciam
tua [tuam], laus [laudem] nomenque nulla vm-
quam eximet vetustas posteris si quid mea car-
mina possnut. Me tamen eciam si tacente ipsn
opéra clamarent, sed hoc in aliud tempus diffe-
ramus.
Nunc qua de causa hec cepi percipe paucis.
Tediuniquoddaravtassolet cepit mehodicagendi
aliquid naviter ; ob hoc romisi animiim ocu-
losque volui pascere et maiori labori tum incidi.
Si quidem cortinas illas antiquas inspexi, quod
te fecisse scio quam sepe , moxquc animum ap-
posui si ne ipsa dcpiota possint etiam posteris
tradi , ne , ut iam pêne factum est nobis , sic et
ipsis périrent. Studij nempe eorum et in hoc re-
liicet assiduitas , amoris diligencijque [diligen-
tiseque] ad locum sollicitude, quando ante ocn-
los hominum voluerunt intcxta [intextos] pannis
eos proponere qui loco benefecerant, vt segni-
bus peruersisque verecundiam, egregijs vero ac
laborantibus addercnt (luoddam calcar. Nosti au-
tem me ipsam melius, tamen scribere uolui ut
qui iiel oculis dolet aut collo , nt alte suspensa
non queat legere , carte vtatur suffragio.
52
Donc les pères voulant transmettre avec ordre
la suite exacte de la fondation et de l'accroisse-
ment de ton monastère, résolurent de faire dé-
peindre les princes accordant leurs bienfaits et
leurs privilèges, et les pères dont les mérites les
obtinrent. Le premier d'entre eux est ce duc
illustre, notre fondateur, qui debout et tourné
vers le très-saint martyr et l'éminent patron de
ce lieu, Léger, lui adresse la parole par ces
vers :
oLe peu queje donne, puissant et saint prélat, fais qu'il
se multiplie , et fais de cet asile une maison digne de toi. »
A la suite viennent les rois , les empereurs et
les autres princes , tenant chacun à la main des
passages du privilège dont il dota ce lieu.
Premièrement le roi Thierry, disant à l'abbé
et évêque réformateur de ce lieu, le très - saint
Pirmin : « Il nous a plu de placer ton monastère
• sous notre défense et celle de nos successeurs ,
j et tout ce que le fisc pouvait détacher de ses
a cours ou de son territoire, nous l'accordons à
a ton église. ' •
Suit Pépin , empereur auguste , disant à l'abbé
Baldebert : « Qu'aucun juge ne prétende se mêler
« des affaires de ton église , ni pour entendre les
I causes , ou exiger le fredum ou recevoir les cau-
« tions , ni pour saisir les habitants libres ou serfs,
t pour quelque motif que ce soit.' >
Après lui Charles, empereur auguste, dit à
Sintpert, évêque et abbé , — que d'autres aient
des doutes sur la personne de ce Sintpert, moi je
pense que c'a été cet évêque de l'église d'Augs-
bourg, d'abord abbé de Murbach , dont la vie
fut merveilleuse et qui fleurit au temps de Char-
les; de nos jours son tombeau est illustré par
des miracles , et l'on célèbre sa fête par un office
propre le treizième jourd'octobre, dans le cloître
du monastère des saints Udalric et Afifra, dans la
susdite ville où il a été enterré. Mais revenons à
no'tre sujet. — Charles dit à Sintpert: «Que le
bienfait confirmé à cette église par l'autorité de
nos prédécesseurs, subsiste dorénavant intact.^ •
Suit Louis , empereur auguste , disant à l'abbé
Gontram : « Que nul ne prétende par autorité
judiciaire inquiéter les hommes tenant les terres
de ton abbaye , ou porter plainte contre eux ou
les poursuivre. ' •
Patres igitur fundacionis incrementique mo.
nasterij tui volentes tradere ordinem recto tra-
mite , bénéficia, priuilegiaque tradentes princi-
pes, ac patres quorum meritis dabantur, depin-
gendos statuerunt. Quorum primus fundator ille
inclitus dux, stans versus almum loci ipsius sanc-
tissimum martirem ac patronum Leodegarium ,
eum alloquitur per versus illos :
«Paucum, summe, datuni quod reddas mnltiplipalum,
« Haue tibi fac sedem dignam, presul sactr, eJem. •
Subsccuntur illum reges, imperatores ceteri-
que principes quilibet manu gestans verba sui
priuilegij quo locum dotauit.
Primo Theodericus rex dicens abbati ac epis-
copo , locique Ipsius reformatori sanctissimo
Pirminio : «Placuit ut monasterium tuum sub
• defensione uostra successorumque nostrorum
« consistât, et quid fiscus de curtis uel territorijs
« separare potorat, ecclesie tue indulgemus. ' »
Sequitur eum Pipinus imperator augustus , di-
cens abbati Baldeberto : « NuUus iudex in res
« ecclesie tue nec ad causas audiendas , uel freda
«exigenda, uel fideiussores tollendum , nec ho-
• mines tam ingenuos quam et seruos de quibus-
■ übet causis stringendum ingredi audeat.'«
Post hune Carolus imperator augustus dicit
Sintperto episcopo et abbati — Quisquis fuit ille
Sinpertus titubent alij , ego reor omnino fuisse
hune episcopum augustensis ecclesie ac abbatera
Morbacensem prius, cuius vita mirifica fuit ac
temporibus Karoli floruit, hodieque sepulchrum
eius miraculis choruscat, diesque eins vna cum
historia propria celebratur infra septamonasterij
sanctorum Vdalrici et Affre vbi et sepultus est,
in prefata ciuitate terciadecimadie octobris. Re-
deamus ad propositum. — IsKarolus dicit eidam :
« Beneficium auctoritateantecessorum nostrorum
confirmatum huic ecclesie deinceps per nostram
auctoritatem maneat inconcussum.' >
Sequitur hune Ludv^icus imperator augustus ,
dicens Guntramo abbati : « Nullus ex iudioiaria
potestate homines tue ecclesie terras possidentes
inquietare, uel calumpniam geuerare vel con-
traire temptare presummat. ' »
1. Le diplôme de Thierry iV , daté de Gondreville , 12 juillet 727, et confirmant la fondation de Murbach, ne donne
pas la fin de ce passage telle qu'elle est reproduite ici ; on y lit . ... • et nulla publica judiciaria poteslas, nec prœsente
nec futuro tempore, in curtis vel territuriis , ubicumqiie ipsius monasterii ad causas atidiendum , vel freda undique exigen-
dum non prœsumant ingredere. » (V. Grandidier, Histoire d'Alsace, t. I«'' , Pièces justifie. , n° 23 ; Schœpflin, Als. dipl. ,
t. I^r^ p 7) Cette différence est très-remarquable: dans l'original il n'est question que de l'abandon des droits de
juridiction , tandis que la tapisserie, en employant les propres expressions du diplôme , fait de ce texte une véritable
concession de territoire.
2. Titre n" 45 des Pièces justificatives de Grandidier , de l'année 760.
3. Ce diplôme manque parmi les Pièces justificatives de Grandidier, mais il est mentionné dans sa « Notifia funda-
tionis murbacensis abbatiœ (Pièces justifie, du t. Il, pp. LXXI-LXXIV) : . . . « Omni« privilégia ab antecessoribus suis
.... conccsso conprynavit et phira superaddidit Carolus magmis , anno vigesimo rcgni sui (788). »
4. Tit. 136 des Pièces justifie, de Grandidier, 22 août 816. Le texte original ne s'applique pas à des tenanciers ou
vassaux, mais h des hommes libres justiciables de l'abbaye: .... « homines liberos qui .... ad prœdiaum monas-
terium deservierunt. • J'ai fait voir ailleurs (Musée pittoresque et historique de l'Alsace) qu'encore en 1310 IWiirbacli ne
prétendait sur Guebwiller que des droits de juridiction et non de suzeraineté.
53
Après lui, Charles, empereur auguste, ilit à
l'abbé Frédéric : ' Qu'il soit permis aux teuan-
ciers de tou église de jouir en paix de leurs biens
et je leur concède tout ce que je pouvais en droit
tirer de notre fisc. ' •
Ensuite le roi Conrad dit à l'abbé Nantpert :
« En vertu de notre autorité royale nous te con-
firmons la basilique de Saint-Didier et de Sainte-
Susanne, ainsi que Delle, avec tout ce qui eu
dépend. * »
A l'extrémité de la première tapisserie est placé
Hugues, archevêque de Besançon, parlant à
l'abbé Eberhard, à qui il dit: «Nous te concé-
dons, à toi et à tes successeurs, la faculté de
consacrer les autels que saint Léger possède
dans notre diocèse. ' •
Cette tenture ou tapisserie se termine de côté
de cette manière : « Tu donnes, Ulvic, tù (la fin),
Bertolddonne A(le commencement) et le milieu.»
Les ouvriers, sans doute, ont apposé cela. Il eu
est du reste comme de la première tapisserie ;
Otlion, empereur auguste, tient le premier rang
et dit à l'abbé Landelohepset : • Nous confirmons
à ton église tout ce quiluiaété concédé dutemps
d'Eberhard , ou ce dont elle s'est enrichie dans la
suite, ou ce qui lui a été ravi injustement.' ■
Othon n, empereur auguste, dit à l'abbé Bé-
ringer : • Conformément aux décrets de nos pré-
décesseurs, nous ordonnons sous notre sanction
que -nul comte ou juge, ou toute autre personne
de grande puissance ne prétende avoir un gîte
dans les domaines de ton église, ou n'eu exige
ses frais de tournée.' »
Othon III, roi très-glorieux, dit à l'abbé Hel-
meric : « Nous concédons à l'église de Murbach
et à ses religieux le droit d'élire librement un
abbé qui ait puissance de présider aux domaines
et au gouvernement des frères, autant qu'il est
nécessaire. * •
Henri , empereur auguste , dit à l'abbé Degin-
hard : « Confoi-mément aux concessions de nos
prédécesseurs, qu'aucun péage ne soit exigé des
vôtres par toute l'étendue des frontières de no-
tre royaume, ni dans la ville , ni sur la route ,
ni aux ponts , ni à aucune autre construction. ' »
Conrad , roi par la grâce de Dieu , dit à l'abbé
Deginhard : »Nous ordonnons sous notre sanc-
tion que nul comte ou juge ou toute autre per-
Post hune Karolus Imperator augustus dicit
Friderico abbati : • Liceat possessoribus ecclesie
tue res suas quiète possidere, etquidquid dejure
fisci nostri habere poteram, ipsis concedimus. ' •
DeincepsCuouradusrexdicitNantperto abbati :
t Basilicam sancti Desiderij et sancte Susanne
et Dodilam et quidquid ad ipsam pependit regali
auctoritate tibi roboramus. ' »
In fine prime cortine Hugo archiepîscopus bi-
suntinus ponitïir, loquens abbati Eberharde di-
cit : • Concedimus tibi et successoribus tuis liber-
tatem consecrandi altaria in ecclesijs quas habet
sanctus Leodegarius in nostra diocesi.' •
A latere vero taliter coucluditur ipsa cortina
seu tapecium : < G) das, Volrice, Berchtoldus A da
mediumque , > (luod artifices forsitan apposuore.
Reliqua vero ita habet se sicut prima, nam pri-
mum locum tenet Otto Imperator augustus et di-
cit Landelohepset abbati : ■ Omnia que tempore
Bernhardi [Eberhardi] concessa sunt uel post
adaucta uel iniuste abstracta ecclesie tue corro-
boramus. ' •
Otto 2 us Imperator augustus dicit Beringero ab-
bati : « Juxta antecessorum nostrorum décréta
sanccimus ut nuUus cornes aut iudex uel aliqua
prepotens persona in locis ecclesie tue mansiones
habere uel paratas exquirere presummat. • »
Otto 3 us gloriosissimns rex ait Helmerico ab-
bati: • Morbacensi ecclesie et eis [monachis] eli-
gendi abbatem qui rebus fratrumque regimini
preesse possit quantum cumque necesse sit , libe-
rum concedimus arbitrium. " •
Hainricus Imperator augustus loquitur Degin-
hardo abbati : • Teloneum iuxta antecessorum
nostrorum concessiones per omnes regni fines
nequeinvrbe, neque in uia, neque ad pontes
seu aliquam structuram a uestris requiratur. '■
Cuonradus dei gracia rex dicit Deginhardo ab-
bati : > Sanccimus vt nullus iudex uel comes seu
quelibet prepotens persona mansiones in loco
1. Tit. 209 des Pièces justifie. , du 7 juillet S77.
2. Diplôme de Conrad I" du 12 mars 913 (Pièces justifie, de Grandidier, lit. 251). La possession de l'église do
Sainl-Dizier et de Delle par Murbach remonte aux donations du comte Eberhard.
3. Ce privilège n'est pas énoncé dans la charte de l'archevêque Hugues (6 novembre 1041) publiée par Grandidier,
Pièces juslificat. , tit. 398, V. Dom. Martenne, Thés, anecd. , t. I, p. 164.
4. La « \ntitia fundationis, • catalogue le plus complet des abbés de Murbach, ne mentionne ni l'ahbé Landelohepsol,
ni le diplôme d'Olhon le Grand (930-97;?). ('»'pendant on retrouve ces expressions dans une confirmation d'Othon II du
27 avril 977. (Pièces justifie. , tit. 312.)
5. Diplôme du 27 avril 977. (Pièces justifie, de Grandidier, lit. 312.)
6. tdem, tit. 324 du 24 octobre 988.
7. Idem, tit. 37") du 2j septembre 1023.
— 54 —
sonne de grande puissauce ne prétende à un gîte
dans les domaines de ton église on n'en exige ses
frais de tournée. ' •
Henri , empereur auguste , dit à l'abbé Wolfe-
rad : • Tous les domaines qu'Eberhard et Luit-
frid, fondateurs de ton monastère, ont concédés
pour l'usage des religieux, nous les confirmons
en vertu de notre autorité impériale. ' »
Henri auguste dit en dernier lieu à l'abbé Ey-
lolfe : tNous te confirmons, en vertu de notre
autorité royale , tous les domaines qu'après la
construction de ton monastère nos prédécesseurs
ont concédés pour l'usage des frères. ^ »
Les noms des personnages se trouvent inscrits
au-dessus de la tète desdites figures, dans l'ordre
où je les ai cités ; de plus, les vers suivants, qui
se rapportent à la fois aux princes et aux abbés,
forment une longue ligne au haut de l'une et de
l'autre tenture :
• Les pères et les rois émettent ensemble les dogmes ,
• les lois ; une double atfectiou brille dans la doctrine des
«pères ; les rois soumettent les révoltés de peur qu'ils ne
«renversent les droits; unis aux pères, oints du même
• chrême, ils enrichissent les églises, détournent les
• maux de l'injustice, par acte royal, vrai monument,
«confirmant aux pères ce qui est commis à leur soin vigi-
■ lant. Ces rois donnent largement aux pauvres du Christ
lia culture humaine et la subsistance quotidienne. Les
• pasteurs pourvoient à ce que les mœurs tiennent tout en
• ordre et que, pieusement joyeuses, elles procurent le
«repos aux cœurs; à ce qu'on pleure les maux publics ou
• qu'on prie pour les rois.
«Ils ont reçu les récompenses célestes qu'ils ont mé-
«ritées.i»
Voilà , ô le plus illustre des hommes et mon
gracieux seigneur, quel a été l'emploi de mon
temps aujourd'hui. Fais que ce petit présent te
soit agréable , et continue , suivant ta coutume ,
à m'acoorder tes faveurs.
Donné àHugstein, au château de ta seigneurie,
le mardi septième jour de juiu 1464.
ecclesie tue aut paratas exquirere présumât ,
etc. ' »
Hainrieus Imperator augustus dieit WoU'erado
abbati : « Omnia loca que Eberhardus et Luitfri-
dus tui monasterij constructiones [constructores]
fratrum usibus concesserunt , imperiali auctori-
tate roboramus.' •
Hainrieus augustus vltimo loco dicit abbati
Eylolfo : « Omnia loca que constructo monaste-
rio tuo vsibus fratrum anleccssores nostri con-
cesserunt, regali auctoritate confirmamus. ' •
In capitibus uero prcfatarum ymaginum uo-
mina ipsa personarum prout posui continentur,
porro isti versus por longam lineam superiorem
in ambabus cortinis positi sunt, tam de principi-
bus quam abbatibus indicantcs :
«Paires et reges simul ornant dogmata, leges;
• Patruni doclrina rutilât dileccio bina;
f Reges debellaut tumidos ne iura refellant ;
• Hi patrlbus iuncti , parili carismate vncti ,
• Ecclesias ditanl, iuiusticie mala uitant,
• Per testamentum régale qnod estmonu-mentum,
«Pervigili cura patribus firmantes valitura.
• Panperibus Christi dant repes largiler isti
• (Quitus humanos et victus cottidianos.
«Curant pastores teneant vt in ordine mores,
« Atque pie leti sua credant corda qiiieti ;
«Publica qua plorent mala uel pro regibus orent.
«Premia sumi)serunt celestia que meruerunl, »
Ecce, virorum prestantissime ac domine mi
graciose, racioneni temporis mei hodierni. Tu
fac ut gratuni tibi sit hoc munusculum, mcque,
ut assoles, fauoribus prosequere.
Datum in castro tue dominacionis Hugstein ,
die martis septima junij [14]64.
1. Diplôme du 27 avril 977; lit. ;!78 du 23 juin lOSo.
2. Diplôme de l'empereur Henri IIl du 5 juillet 1049. (Tit. 403 des Pièces justifie, de Grandidier.)
3. L'abbé LylolCo ou Egelolphe n'est conlemporain d'aucun empereur du nom de Henri, puisqu'il ne figure dans les
catalogues qu'après l'année 1 150. Au lieu de Lylolfe, frère Sigismond aurait donc du lire Erlolfe qui gouverna Murbach
sous le règne de Henri V. Le diplôme auquel la tapisserie faisait allusion, n'existe plus, et même la Nolitia fundalionis
n'eu fait pas muutiou.
UNE EXCOMMUNICATION DE MULHOUSE
AU TREIZIÈME SIÈCLE.
Dans l'histoire spéciale de la ville de Mulhouse {Mülhausen) la lutte des
empereurs de la maison de Souabe, agissant comme ducs d'Alsace, avec les
évêques de Strasbourg, remplit une partie du douzième et du treizième
siècle. Pendant l'interrègne, la ville elle-même se trouve entrahiée à résister
aux évêques, et à appeler à son secours le comte de Habsbourg, landgrave
d'Alsace, qui était réservé à de grandes destinées.
Les dissentiments entre l'autorité épiscopale et l'autorité municipale con-
stituent le premier acte de cette dramatique histoire mulhousienne. Au
quatorzième siècle, les guerres intestines entre la noblesse et la bourgeoi-
sie; au quinzième, des troubles analogues et des guerres avec la noblesse
des environs, avec Charles le Téméraire, etc.; enfin les troubles religieux
au seizième siècle forment une série de violentes crises, dont la petite cité
réussit toujours à se tirer, un peu meurtrie, mais victorieuse en définitive.
De nos jours, des luttes pacifiques ont remplacé les manifestations d'une
force exubérante. Tout est contraste dans l'existence des individus, des
cités et des nations. Pour la ville de Mulhouse de 1860, telle que le génie
créateur du commerce et celui de l'industrie l'ont faite, la cité municipale de
1260, usant ses forces à résister aux mesures coërcitives d'un prélat alsa-
cien, soutenu par un prélat de Bâle et par le pontife de Rome, est une
anomahe et une énigme. Essayons de feuilleter une partie de ces annales
du passé à titre de spectacle curieux ; remontons au point de départ de
cette infatigable vitahté; recherchons-en les premiers symptômes sans ar-
rière-pensée. L'expansion se traduisait autrement, il y a six siècles, que
de nos jours.
Les archives départementales du Bas-Pdiin contiennent le vaste dossier
d'une procédure ecclésiastique contre Mulhouse; je me propose d'en indi-
quer les principaux titres, qui n'ont point, que je sache, été mis au jour.
Je tomberais dans une monotonie oiseuse, si je m'imposais la tâche de co-
pier, de traduire, et de commenter tous les parchemins qui se rattachent
à la sentence d'excommunication à laquelle je fais allusion. 11 suffira de
reproduire les principales phases de la lutte; on y verra, des deux côtés,
— 56 —
une égale persistance à défendre des droits ou des prétentions tradition-
nels, et comme toujours, une transaction clore des débats qui semblaient
interminables.
En 1221, un arbitrage prononcé par les abbés de Murbach et de Neu-
bourg, et par le comte de Werde, avait attribué la ville de Mulhouse à
Henri de Vebringen, évêque de Strasbourg*; mais trois ans plus tard, le
successeur de Henri, l'évêque Berthold de Teck, conféra l'avouerie {die
Vogteij) de la ville, à titre de fief, à l'empereur Frédéric IP. En 1236,
enfin, le même évêque inféode au même souverain Mülhausen avec tous
les droits de patronage, tous les revenus, toutes les dépendances.^
Cette charte de 1236 constitue, pour l'histoire de Mulhouse, et même
pour celle d'Alsace, l'un des. documents les plus importants. On dirait, en
prenant connaissance de ses dispositions solennelles et détaillées, que le
mal était coupé dans sa racine, que toute discussion allait devenir impos-
sible à l'avenir. Ce n'est pas seulement le sort de Mulhouse qui est réglé;
parle même titre, l'empereur acquiert le fief de Neubourg, l'avouerie de
Molsheim et de Mutzig; il échange le beau val de la Bruche contre Trsenheim;
il acquiert Wasselonne contre l'avouerie de Bischoffsheim; il obtient les
droits de l'évêque à Offenbourg, les hommes de WeslhofTen et de Ros-
heim; mais il renonce lui-même, en faveur de l'évêque, à Thann-le-Vieux,
à Éguisheim, aux châteaux de Bernstein, de Guirbaden, à Dagsbourg, àRhi-
nau, à Dambach, au Nouveau-Tliann; et pour solenniser ce pacte d'échange et
de bonne amitié, toute une série de prélats et de grands seigneurs laïques
y assistent comme témoins: par exemple, Conrad, abbé de Saint-Gall,
Conrad, burgrave de Nuremberg, des membres de la famille de Hohen-
lohe (Hochenloch) , de la famille deNifen, de Geroldseck, deLandsperg, de
Pappenheim, de Winterstetter. On devait croire que la paix était assurée
pour longtemps. Mais, vanité des vanités! Déjà en 1246, la lutte renou-
velée entre l'Empire et le sacerdoce amena l'excommunication de Frédé-
ric II, et, de ce moment, la ville de Mulhouse ayant fait retour à son sei-
gneur direct, Henri de Stahleck, évêque de Strasbourg, on vit se rompre
la digue qui contenait la jeune et turbulente cité. Henri de Stahleck prit
de vive force Colmar, Kaysersperg, Mulhouse; un prévôt (Schultheiss) ,
1. Schœpflin, Als. diplom., p. 347.
2. Schœpflin, ibid., p. 351. — En 122S les Mulhousiens prennent part à une lutte entre
Bcrthold de Teck et Ulrich, comte de Ferrette; ils sont les alliés du comte et subissent
avec lui une défaite entre Blodelsheim et Hcrtzfeld. Cette querelle fut apaisée eu 1230.
Voy. Grair, I, 6G.
3. Schœpflin, ibid., H, p. 374-370; Archiv, départ, du Bas-Rhin, (1, 486.
— 57 —
placé par l'évêque dans le châleau de cette dernière ville, accabla les
habitants d'exactions et de corvées.
Bientôt le joug de l'autorité épiscopale devint insupportable à ces cita-
dins de fraîche date. L'évêque Walther de Geroldseck, surtout, provoqua
parmi les Mulhousiens des mécontentements analogues à ceux qui ame-
nèrent la crise à Strasbourg, et la victoire décisive de Hausbergen. La cité
du Haut-Rhin, déjà entourée de murs par Wœlfelinus, résista à l'autorité
épiscopale et se donna en 1261 à Rodolphe, comte de Habsbourg, landvogt
de la haute Alsace, qui assiégea et détruisit le château. Lorsque Henri de
Geroldseck, successeur de Walther, voulut remettre les choses sur l'ancien
pied, il rencontra une opposition qui motiva des mesures d'une extrême
sévérité; Mulhouse fut excommuniée (1264 à 1271). C'est ici que nous
touchons à l'épisode que j'ai annoncé plus haut.
Les poursuites dirigées contre Mulhouse commencent à la date du 11 fé-
vrier 1265. C'est Henri, évêque de Bàle, délégué du prélat de Strasbourg,
qui ouvre la campagne; il se borne d'abord à une simple menace, en s'a-
dressant au prévôt (Schullheiss, scultetus), et aux consuls de Mulnhusen.
Il dit avoir reçu mission de Henri, évêque de Strasbourg, de rappeler les
griefs de ce seigneur; il répète comme un fait notoire que la localité et les
habitants de Mulhouse appartiennent à la juridiction de l'église de Stras-
bourg, et forment une propriété de cette église; que pendant longtemps
l'évêque strasbourgeois n'avait point été troublé dans l'exercice de ses
droits; que les habitants de Mulhouse lui avaient prêté, librement, serment
de sujétion et d'obéissance; qu'à la vérité, sous Walther, prédécesseur de
Henri, les habitants de Mulhouse, émus par des procédés peu loyaux et
parla dureté intolérable de leur maître, s'étaient temporairement soustraits
au gouvernement de l'église de Strasbourg; mais qu'ils persévéraient sans
raison dans ces errements, maintenant que l'évêque Henri, homme paci-
fique et clément entre tous, avait succédé à Walther; que le délit d'une seule
personne ne devait point porter dommage aux intérêts imprescriptibles de
l'Église.
Le prélat de Bâle continue à établir en principe, que le bon droit ne
peut être refusé à aucun souverain; il rappelle le serment prêté à l'évêque
strasbourgeois par les habitants de Mulhouse, il les engage à rentrer sous
une paternelle domination, en recourant à la clémence de leur seigneur; il
leur fixe un terme rapproché pour une transaction, et, en cas de refus,
il laisse entrevoir des mesures de rigueur qui ne seront au surplus adoptées
qu'après avoir pris conseil des chanoines du chapitre de Bàle, et de qucl-
(jues prud'hommes, de manière à concilier avec les principes d'équité,
- 58 —
applicables aux citadins, le droit imprescriptible de l'évêque. ( Voy. Pièce
annexée n° 1.)
L'effet suivit de près celte première menace; car déjà un mois plus tard
(aux ides de mars) le même prélat, usant de son pouvoir discrétionnaire,
annonce à tous les ecclésiastiques de son diocèse que, Mulnbusen refusant
de rentrer sous l'obédience de l'évêque de Strasbourg-, son seigneur, et
dédaignant même d'entamer des pourparlers avec lui, évêque de Bâle,
lance contre eux une excommunication qui doit plus particulièrement frap-
per Wezelon d'Ilzicb, et Henri zum Thor, chevaliers, Pierre de Walen et
son (ils; puis les seigneurs de Piéguisheim, ceux de Trotenhoven, Werner
de Schermenz et son frère, enfin le cellerier de Lutenbach, tous citoyens
de Mulnbusen. Dans le délai d'un mois, à partir de la réception de la
présente, toute personne relevant du clergé bâlois aura à s'abstenir de
toute communion avec les personnes frappées de cette mesure de rigueur.
( Voy. Pièce annexée n« 2.)
L'offîcial de Besançon s'adresse, à la même époque, aux doyens des cha-
pitres de Murbach et de Lutenbach, pour confirmer la sentence d'excom-
munication, «parce que les chevaliers et citoyens de Mulhouse, ci-dessus
« désignés, ont persévéré dans leur désobéissance, quoiqu'ils aient été dià-
ment avertis. » (Voy. Pièce annexée n** 3.)*
Le même juge ecclésiastique (Gui de Foulenis) mande, en sa quahté de
représentant de l'autorité métropolitaine, au doyen et à l'écolâtre de Luten-
bach, d'aggraver, contre lesdils habitants de Mulhouse, la sentence d'excom-
munication, si l'évêque de Bâle, chargé par eux de ce faire, se montrait
indulgent ou retardataire; « car l'insolence et le dédain des excommuniés ne
méritent pas mieux^ » Dans le cas où l'un des deux dignitaires de Luten-
bach se trouverait empêché, son collègue aurait plein pouvoir de procéder
tout seul. ( Voy. Pièce annexée n° 4.)
Une missive spéciale, adressée à la même époque, par l'offîcial de Be-
sançon à l'évêque de Bâle, met ce prélat au courant de la situation, lui
enjoignant d'aggraver la sentence lancée contre certains citoyens de Mul-
house, et rinformant de la mission qui compéterait éventuellement au
doyen et à l'écolâtre de Lutenbach.
C'est à la date du 11 avril 1266 que l'évêque de Bâle exécute les injonc-
tions qui lui ont été failes. Le prélat, s'adressant au curé de Mulhouse et
(. Cil lie comprend pas trop re.\trèmc hâte que met roflîcial de Besançon à confirmer et
ù renforcer la sentence première; car les pièces émanées de lui sont de la môme date que
la sentence de l'évêque de Bâle.
2. P/-oi<l mrridl conim prolervilas et coulemplua.
- 59 -
au clergé du Sundgau, rappelle l'obstinalion que mettent le prévôt, les
consuls, les chevaliers et citoyens susnommés de Mulhouse, à ne point
rentrer sous le gouvernement de l'évêrpie de Strasbourg. «Non-seulement
ils ont affecté de ne pas se rendre aux salutaires avertissements du prélat
(bàlois); ils ont même dédaigné d'entrer en conférence avec l'évêque de
Strasbourg, leur maître et seigneur. » Les habitants de Mulhouse sont som-
més de rompre dans le délai d'un mois toute liaison avec les citoyens et les
magistrats excommuniés. «Et parce que lesdits citoyens, méprisant les
ordres épiscopaux, ont persévéré dans leur dureté de cœur, sans aucun
égard pour leur propre salut et pour leur repos, le prélat bàlois a jugé
convenable d'aggraver la sentence qui devra être proclamée les dimanches
et jours de fêle, au son des cloches, les cierges allumés; on interrompra
toute relation avec les excommuniés, et la ville de Mulhouse avec tous ses
habitants et leurs colons sera mise sous l'interdit. (Foî/. Pièce annexée n° 5.)
En attendant les deux partis s'agitent pour arriver à un accommodement.
Henri de Geroldseck, évêquede Strasbourg, nomme ses fondés de pouvoir
(29 mai 1260). Ce sont Billung, juge de l'Offîcialité, et Werlen de Nor-
dera. Il annonce cette délégation à l'abbé de Saint-George et au prévôt de
Bischoffszelle, délégués apostoliques. Il rappelle, dans des termes déjà
employés par les rédacteurs des documents précédents, le point de départ
du litige; puis l'opposition formulée par les excommuniés contr'e la sen-
tence, et les lettres préalables qu'ils ont obtenues du saint-siége; il supplie
les juges apostoHques qui avaient déjà commencé une instruction à Viilingen,
de surseoir et de fixer un nouveau lieu de rendez-vous avec l'abbé de
Schultern, subdélégué du prévôt de Colmar (l'un des juges apostohques), et
avec le prévôt de Sainl-Quirin , subdélégué de l'abbé de Saint-George. Dans
le cas où l'abbé de Saint-George passerait outre, l'évêque de Strasbourg
forme à l'avance opposition contre l'absolution desdites personnes déjà
mentionnées, vu qu'il en résulterait un préjudice grave pour l'église de
Strasbourg; il en appelle dès ce moment au siège apostolique. (Fo//. Pièce
annexée n° 6.)
Au nombre des pièces justificatives de cette volumineuse procédure
ligure un certificat, adressé à l'abbé de Saint-George, par Herrmann de
ïhierstein, custode du grand-chapitre, par Rodolphe Crafton, chanoine de
Baie, et par maître Jean de Pertha, chanoine de Rhinfelden, à l'effet de
constater que dans le concile de Bâlc la ville de Mulhouse a été légalement
excommuniée sur les instances de l'évoque de Strasbourg.
Pendant quelque temps, les chances semblent, on ne sait sous l'empire
de quelle influence, tourner en faveur de la cité rebelle. A la date des 16 et
— 60 —
17 mai, le fondé de pouvoir de l'évêque de Strasbourg est condamné aux
dépens pour n'avoir pas fourni de preuve suffisante de son assertion, por-
tant que l'abbé de Saint-George n'avait pas eu le droit de subdéléguer un
sien représentant; et à la date du 30 juin 1266 l'abbé de Saint-George et
ses collègues (l'abbé de Scbuttern et le prévôt de Femern, hnbriacum) sus-
pendent provisoirement l'excommunication. Cet acte important, émis dans
l'église de Hornberg (Forêt-Noire), porte que, les citoyens de Mulhouse
ayant fourni caution, les sentences premières ont été adoucies, et les par-
ties assignées, à nouveau, dans l'église deFribourg en Brisgau.(Foî/. Pièce
annexée n" 7^)
Mais cette intermittence favorable est de courte durée. Dès le 4 décem-
bre (1266) l'abbé de Saint-George, qui semblait prendre fait et cause pour
Mulhouse, et qui avait dû ramener l'évêque de Strasbourg à l'observance
stricte des formes légales, le même abbé déclare que la sentence d'excom-
munication a été légalement promulguée, et le 17 décembre suivant, il
remet les habitants sous le joug de l'interdit dont ils avaient été préalable-
ment relevés.
Les années 1267 et 1268 s'écoulent encore en discussions et en procé-
dures. Loin de se laisser intimider, les Mulhousiens avaient de nouveau
interjeté appel auprès du Saint-Siège; deux fois ils avaient renouvelé le
mandat du clerc Conrad (6 janvier et 31 mai 1268; voy. Pièce annexée n°9).
L'évêque de Constance, le trésorier de l'église de Constance, Walther de
Saint-Gall, chanoine de Saint-Étienne de Constance, avaient fixé un terme
aux citoyens de Mulhouse, avant l'expiration duquel ils auraient à prouver
que leur appel était régulier (24 mars 1268); ils avaient donné mandat au
curé de Saint-Martin de Waldkirch, à l'effet d'entendre des témoins dans
cette affaire (juin 1268; votj. Pièce annexée n° 10), et cet ecclésiastique
avait rempli consciencieusement sa mission'. L'évêque de Constance avait
prononcé une sentence interlocutoire (6 juillet 1269); de nouveaux délais
avaient été accordés aux citoyens de Mulhouse (1269, 17 et 23 octobre);
une citation avait été lancée par Conrad, évêque de Constance, contre
l'évêque de Strasbourg (16 janvier 1270; voy. Pièce annexée n^'ll);
de longs plaidoyers ou moyens de défense avaient été fournis par les deux
1. Parmi les pièces marquantes de ce long procès, ligure la délégation, donnée par la
ville de Mulhouse à maître Conrad [voy. Pièce annexée n» 8) et celle, donnée par
l'évoque de Strasbourg à maître Billung et à Conrad de Rodcsheim ; les divers délais et
rendez-vous flxés par l'abbé de Saint-George et ses collègues , etc.
2. Une série de délais accordés par lui, de mandats qu'il donne et de procès-verbaux
qu'il dresse, sont au dossier.
- Ol —
partis (pancartes sans tlale, probablement de 1270 ou 1271). Le mémoire
de la cité de Mulhouse, basé sur des faits historiques, semblait devoir faire
pencher la balance en leur faveur.
« Le seigneur, évêque de Strasbourg, y est-il dit, n'ayant pas rempli les
conditions de son pacte avec les citoyens de Mulhouse, ceux-ci ont pu, en
toute justice, s'éloigner de lui, car les citoyens ont prêté serment de fidé-
lité et d'obéissance au comte de Habsbourg , d'après l'avis et sous les aus-
pices de l'évêque de Bâle; ils ne pouvaient fausser ce serment et devenir
parjures, pour obéir à un avertissement épiscopal; même s'ils avaient, en
seconde ligne, prêté serment à l'évêque, ce second serment ne pourrait
infirmer le premier. Comment auraient-ils pu, de bon cœur, se laisser dé-
tourner de ce premier serment, prêté de l'aveu même de l'évêque; comment
une pareille sentence prononcée par ce prélat serait-elle juste, puisqu'elle
n'est point le résultat dicté par la justice, mais par la haine et l'inimitié?»
Ils concluent donc « à ce que ladite sentence d'excommunication soit
déclarée injuste, et que la partie adverse soit condamnée aux dépens. »
La victoire resta, du moins en théorie, à l'évêque de Strasbourg. Au mois
de mai 1271, Henri, évêque de Bâle, parlant et agissant au nom du pape,
accorde à son collègue de Strasbourg la faculté de réduire Mulhouse à l'o-
béissance par le bras séculier. ( Voy. Pièce annexée n° 12.)
Mais ce devait être, pour l'autorité épiscopale, une victoire stérile. Henri
de Geroldseck et son collègue de Bâle mirent en vain le siège devant Mul-
house, qui fit une héroïque et efficace résistance (1271). De plus en plub
intimement bée à Rodolphe de Habsbourg , la ville obtint les privilèges de
cité libre et impériale, de la munificence de ce prince, qui avait été élu roi
des Romains pendant qu'il assiégeait Bâle (1273).
Ainsi se trouvait terminé, de fait, le long litige entre l'autorité épisco-
pale et la jeune cité, protégée de Frédéric II et de Rodolphe de Habsbourg.
Cependant la question de droit demeurait en suspens aussi longtemps que
l'évêque de Strasbourg n'avait point, par un nouveau contrat, formelle-
ment renoncé à ses prétentions antérieures. Aucun document officiel ne
nous dit à quelle époque cette terrible et cruelle sentence d'excommunica-
tion fut levée. Je dois croire que l'empereur Rodolphe de Habsbourg eut
assez de crédit pour rétabUr la paix et faire rentrer en grâce auprès du
Saint-Siège et de l'évêque, les citoyens qui avaient en 1265 encouru la
disgrâce de leur ancien seigneur, et avaient, pour sauvegarder les franchises
municipales, joué leur repos et en quelque sorte toute leur existence.
' La ville a dû rentrer à la fois dans le giron de l'Église (1273) et dans
les liens constitutionnels qui la rattachaient depuis une trentaine d'années
— 02 —
à l'empire germanique. A des intervalles rapproehes les ('vêques de Stras-
bourg rappelaient leurs droits de seigneurs; mais en 1308, une transaction
formelle régla irrévocablement les positions respectives. Henri VU, roi des
Romains, et Jean P, évéque de Strasbourg, convinrent d'un acte d'échange,
en vertu duquel Mulhouse et la moitié de Wasselonne, restaient à l'Empire,
Molsheim, Mutzig, Hermolsheim el Wang-en, à l'évèché. L'archichancelicr de
l'Empire, Pierre, archevêque de Mayence, consentit à cet acte et le corro-
bora par une charte émise à Francfort le 28 novembre 1308. (Voy. Ajxh.
dép. du Bas-Bhln, G. 77, etSchœpflin, Als. dipl., Il, p. 87-88.) Des dispositions
accessoires sur les Juifs de Rouffach et de Souitz, de Rhinau et de Mols-
lieira, qui sont cédés à l'évèché, et sur les Pfahlbürger, donnent à celte
convention une valeur particulière, mais qui ne rentre plus dans le cadre
du présent mémoire.
Quelles seraient les conclusions à tirer de cette lutte entre l'épiscopat de
Strasbourg ou le pouvoir clérical, et la jeune cité de Mulhouse? Il me sem-
ble qu'ici, sur un étroit théâtre, nous voyons se répéter le spectacle qui
s'offre à nous dans tous les siècles et dans tous les pays du monde. Des
intérêts que, de prime abord, l'on dirait inconciliables, se prennent corps
à corps comme deux lutteurs acharnés, entrelacés dans une étreinte vio-
lente; ils paraissent devoir aboutir immanquablement à la ruine des uns,
au triomphe définitif des autres. Il n'en est rien pourtant; les passions s'a-
mortissent, les angles s'effacent, les prétentions absolues se modifient, les
muscles des lutteurs se fatiguent et se distendent, l'on finit par s'entendre
sinon complètement, du moins par vivre côteà côte, quitte àrecommencer
à nouveau. Ces intermittences de véhémente application et de repos consti-
tuent la vie des cités et des peuples, comme celle des individus; c'est la
succession des nuits et des jours, de la vie active et du sommeil. Peut-être
trouvera-t-on aussi dans cet esprit de lutte qui anime la municipalité de
Mulhouse, comme à Strasbourg, contre le pouvoir clérical, peut-être y
trouVera-t-on les symptômes avant-coureurs de la lutte du seizième siè-
cle. Il n'est point impossible que l'habitude de s'opposer à l'autorité ecclé-
siastique pour des questions locales, ait prédisposé ces populations à accueil-
lir et à féconder les germes de l'opposition religieuse. En émettant cette
hypothèse, j'énonce plutôt l'opinion d'autrui que la mienne propre, car je
crois que les causes de la Réforme sont plus profondes, plus complexes, el
surtout plus difficiles à encadrer dans une seule et même formule.
Louis Spach,
archiviste au Bas-Rhin.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
X» 1.
14 janvier 1265.
Henricus dei gratia Episcopus Basiliensis Di-
lectis amicis suis sculteto et consulibiis in Mulu-
liuseu salutem cum siucerœ dilcctiouis affectu.
Gravera reverendi patris ac domlni Henricl di-
vine favoie Argentinensis Episcopi querelam
recepinius coutiuentcmqnod cum notorium sit et
Ijublicum toti terrae locum vestrum et gentem ad
jus et proprietatcm argentinensis ecclcsiaa libère
pcrtiuere : quam longo dudum tempore possessio-
nem quoque pacificam teuuerat et quietam ut-
pote oui concorditer omnes juramentum subjec-
tionis et obedientise perpetuje prnestitistis eo ta-
men quod felicis mémorise predecessoris sui ve-
uerabilis WaltUeri qnondam Argentinensis Epis-
copi vestram lionestatem minus honeste quodam-
modo pertractantis intollerabilem vobis duriciam
fugientes ad tenipus vos ejusdem Argentinensis
ecclesiœ regimini subtraxistis.
Ipsi revereudo principi domino Henrico Epis-
copo dudum in locum prsemortui divinitus sub-
rogato quietem et pacem non tam suorum quam
totius terrae generaliter affectanti devotione dé-
bita subesse renuitis ipsius clementiam sicut il-
lius duritiam fugientes prsesertim cum delictum
personae in dampnum ecclesiss non debeat re-
Hulhouse menacée d'être excommuniée par Henri , évêque de Bàle-
dundare. Licet itaque personas vestras et locum
non cum ceteris nostro subjectis regimini sed
prie ceteris diligamus, eo quod majori nobis sitis
confederationis vinelo couniti quia tarnen non
convenit ulli quautomagis tanto principi jvsti-
ciam denegarc devotionem vestram moncndam
duximus et hortandam quatenus memores jura-
mcnti quod eidem dudum Argcntinensi ecclesia?
praestitistis ad ipsiiis fldelitatem et obedientiam
debitam revertentes ejusdem piissimi principis
omnem vobis impcndere parati clementiam vos
dominio submittatis infra synodum uostram qua-
dragesimalem aiit aliter componatis amicabiliter
cum eodem. Alioquin extunc de concanonicorum
nostrorum et aliorum prudentum consilio taliter
procedemus quod nec vobis aliquam faciamus
injuriam nec ipsi domino episcopo justitiam de-
negemus. Datum anno domini 1265. 18 kal. fe-
bruarii. Indictionis octavjc.
Avec le sigillé détérioré de l'évêque de Bàle.
— Sur le revers: Episcopus Basiliensis ut se dé-
bita; obedientiœ erga Argentinensem Episcopum
submittat commuuitatem in Mulhusen monet.
1265. (14 janvier.)
Deux exemplaires.
1265. Ides de mars. — Les citoyens de Mulhouse sont excommuniés par l'évêque Henri de Bàle.
Henricus de igraciaEpiscopus Basiliensis omni-
bus archipresbyteris deccanis (sic) camerariis
plebanis et vicariis in nostra diocesi constitutis
salutem in domino. Cum nos jam dudum gravera
reverendi patris et domini Heinrici dei gracia
Episcopi Argçntinensis querelam receperimus
super eo quod licet notorium sit et publicum toti
terr» locum et gentem oppidi Mululius-en ad jus
et proprietatem ecclesiae argentinensis libère
pertinere utpote quse jam longo tempore ipsius
oppidi possessionem paciiîcam tenuerat et quie-
tam et cui concorditer omnes majores et minores
immo tota universitas ejusdem oppidi juramen-
tum subjectionis et obedieutiae perpetuae praisti-
terunt. Scultetus tamen consules acalii iuhabita-
tores oppidi prœfati ex eo forsau quod venerabi-
lis dominus Waltherus quondum Episcopus Ar-
gentinensis ipsos iuhoueste ac dure quodammodo
pertractavit , praedictorum argentinensis ecclesiae
et domini Henrici nunc ejusdem Episcopi quie-
tem et pacem non tam suorum quam totius terrae
generaliter affectantis , ac debitam ipsis impen-
dere parati clementiam se ad temjjjis dominio et
regiaiini subtraxerunt. Nos scultetum consules et
uuiversitatem predictos per litteras nostras mo-
nuimus ut cum delictum person.-r in dampnum
ecclesiae non debeat redundare , et cum non sit
convenions nos ulli quantomagis tanto principi
justitiam denegare quatenus memores jura-
menti quod dictae argentinensi ecclesiae praesti-
ternnt ad ipsius fidelitatem et obedientiam rever-
tentes ejusdem piissimi principis se infra certum
tempus prout dignum erat dominio submitterent
humiliter ac devote , alioquin taliter procedere-
mus quod nec ipsis faceremus injuriam nec pre-
dicto principi videremur justiciam denegare.
Verum dicti scultetus et consules mouitis nostris
in hac parte licet salubribus non solum parera
contempserunt , immo quod contemptibilius est
nulluni cum ipso domino Episcopo super eo post-
modum dignati sunt habere tractatum. Unde ex
parte dicti domini Episcopi ut ad executionem
aliquam juxta monitionem nostram proccdere-
mus fuit a nobis cum instancia requisitum dei
etjustitiœ intuitu. Quare vobis mandamus et sub
penaexcommunicationis sententiic quam ex nunc
in vos ferimus si mandate nostro quod absit re-
belles fueritis in hac parte pr:Ecipimus quatenus
praedictos scultetum et consules et inter eos spe-
cialiter Vezzelo7iem de llciche , Heinricum zitoine
Tor, milites Petrum de Walhen et fllium ejus
rotrinn Undolfum Sifridum et Johannom de Re-
64 —
■vpnsheim, Buroardum et Petrinn de Trotehoven,
Wernlierum de Schermenz et fratrem suum et
cellerarium de Luterbach cives de Miilnhusen
quos nominatim et in specie presentibus excom-
raunicamus, omuibus diebus dominicis et festi-
vis excommunicatos lu antea soUempniter et pu-
blice nuutiotis. Monentes subditos vestros omnes
ut a receptione presentiuni usque ad uiiiiiD men-
senia dictorumexeommunicatorum commuuioiie
se subtrahant ne contra ipsos ad penam quam
convenit pvoccdamus. Dattim Basileîe Idibiis Mav-
tii. Anno domini 1265.
Avec sigillé épiscopal.
M» 3.
1265- Ides de mars- — L'offlcial de Besançon s'adresse aux doyens de Hurbacb et de Lutenbach,
pour confirmer ladite sentence d'exécution.
Officialis cui-iœ Bisuntinœ viris vencrabilibus
et discretis decanis Morbacensi et Lutenbacensi
basilieusis dyocesis salutem in domino. Ex parte
venerabilis in Christo patris Heurici dei gratia
Argentinensis Episcopi propositum extitit coram
nobis quod venerabilis in Christo pater Henricus
dei gratia Basiliensis episcopus nominatim et in
specie in quosdam milites et cives opidi de Muln-
husen suœ dyocesis propter eorum offensam ma-
nifestam ad instantianipraînomiuati Argentinen-
sis Episcopi excommunioationis sententiam com-
petenti monitione prwniissa et juris ordine ob-
servato promulgavit et cum iidcm milites et cives
dictam excommunicationis sententiam per lon-
gum tempus sustinuîssent et adhuc siistinorent
animonequitor indurato, suaî salutis immemores
nobis liumiliter supplicavit , ut nos sententiam
ipsam auctoritate metropolitana confirmare di-
gnaromur. Nos igitur ipsius justis supplicationi-
bns anuuentes sententiam prsedictam prout juste
et rite lata est auctoritate metropolitana dnximus
conflrmanrtam.
Vobis auctoritate metropolitana firmiter et
districte prrooipiendo mandantes quatinus sen-
tentiam ipsam observetis et observari faciatis fir-
miter per totam dyocesin basiliensem usque ad
sattisfactionem condignam. Datum Iilibus Martlî
anno domini 1265.
(tUIDO de Fenilenis.
(Sigillé manque.)
M« 4.
1265. — L'offlcial de Besançon mande au doyen et écolàtre de Lutenbach , d'aggraver la sentence
d'excommunication contre les habitants de Mulhouse.
Officialis curiœ Bisuntinœ viris venerabilibus
et discretis Decano et scolastico lutembacensi
salutem in domino, ex parte venerabilis in Christo
patris dei gratia argentinensis Episcopi propo-
situm extitit coram nobis quod cum venerabilis
in Christo pater dei gratia Basiliensis episcopus
ad instantiam suam in quosdam milites et cives
de Mulnhusen su» dyocesis excommunicationis
sententiam promulgaverit propter ipsorum ma-
nifestam otFensam ipse licet per annum et am-
plius dictam excommunicationis sententiam sus-
tinuerint et adhuc sustineant in aggravatione
dictœ sententise est et fuit negligens et remissus.
Hinc est quod vobis auctoritate metropolitana
prœcipimus et maudamus quatinus ad ipsum opis-
copum basiliensem accedentes ipsum ex parte
nostra moneatis ut sententiam ips.am prout decet
et sua interest studeat aggravare prout meruit
eorum protervitas et contemptus. Et si eundem
in hoc inveneritis remissum vobis prasdicta auc-
toritate prsecipimus et mandamus quatinus sen-
tentiam ipsam prout decet et justum fuerit ag-
gravantes faciatis eamdem per totam dyocisim
basiliensem firmiter observari et executioni man-
dari. — Et si ambo hiis exequendis non potueri-
tis interesse , alter vestrûm nihilominus exe-
quatur. Datum Idibus Martii anno domini 1265.
Guido de Fenulenis. ( ? )
11 avril 1266. — Excommunication de la ville de Mulhouse par l'évêque de Bàle sur les instances
de l'évêque de Strasbourg.
Henricus dei gratia Basiliensis Episcopus viro
discrète plebano seu incurato vel vicario in
Mulnhusen salutem in domino.
Quum nos jam dudum ad querimoniam reve-
rendi patris ac domini Henrici dei gratia epis-
copi argentinensis, ad cujus ecclesi» jus pro-
prietatem et locus et gens opidi in Mulnhusen,
pront hoc est toti terrse notorium dinoscitur li-
bère pertinere, nos monueriraus ac monere fece-
rimusscultetum eonsulos et alios cives et inlial)i-
tatores opidi prfefati ut se infra certum tempus
predicti domini dominio submitterent ad ipsius
et ecclesise su» argentinensis in cujus posses-
sione aliquando fuerint pacifica fidelitatem et
obedientiam debitam revertentes. Ipsi tamen scul-
tetus et consules ac alii cives opidi pr:«dicti mo-
nitis nostris en hac parte licet salubribus non
solum parère contempserunt immo quod pejus
est nulluni cum ipso domino Episcopo predicto
super hoc postmodum dignati sunt habere trac-
65 —
tatum , propter quod predictos scultetum et con-
sules et inter eos specialiter 'Wezelonem de II-
ziche Henricum Zemtor milites Petrum de Wal-
hen et fllium ojus Petrum , Rudolfum Syfridum
et Johannem de Regensheim , Burchardum et
Petrum de Trotehofen. Wernerumde Schermenz
et fratrem suum cellerai-ium de Luterbach cives
in Mulnhusen excommunicavimus et excommu-
nicatos mandavimus publice et soleuniter nun-
ciari. Insuper moneri fecimus omnes inhabita-
tores de Mulnhusen ut usque ad unum mensem
post receptationem litterarum nostrarum tune
datarum a dictorum excommunicatorum com-
munione se penitus subtraheront alioquin scirent
nos contra eos ad pœnam qu;e esset convenieus
processuros. Verum cum prsedicti cives propter
mandata monita nostra vel etiam senteutias ex-
communicationls in ipsos latas nec saluti suse vel
quieti in hoc providere curantes mandatis nos-
tris vilipensis in sua duricia contumaciter persé-
vèrent penam raerito duximus agçravandam.
Mandamus igitur universis ac singulis sub pena.
suspensionis jam in vos latœ ut contra pcrsonas
prsefatas cumcandelisaccensis pulsatis campanis
excommunicationis prioris sententias exercentes
singulis diebus domiuicis et festivis ipsos evitetis
et facialis ab omnibus artius evitari. Locum vero
Mulnhusen propter contemptum prsedictum ec-
clesiastico snbponimus interdicto familiam et
eorum colonos inquilinos dictorum inhabitato-
rum excludimus et excludi prœcipimusa divinis.
Datum Easilese anno domini 1266, tertio Idus
Aprilis.
Avec sigillé de l'évêque de Bâle.
xU» 6.
1268. 4 des kal. de jnin. 29 mai.
Henricus dei gratia cpiscopus argentiiiensis
honorabilibus viris et amicis dilectis abbati
sancti G-eorgii in nigra silva etpreposito episco-
palis celle Constantin dyocesis delegato sedis
apostolicse seusuo snbdelegato in hac parte salu-
tem et afifectuosam ad servitia voluntatem. Inno-
tuit nobis qualiter venerandus in Christo pater
et dominus Basiliensis Episcopus in sculthetum
consules et inter eos nominatim in quosdam de
universitate opidi Mulnhusen pro eo quod licet
locus et gens opidi pr»fati ad jus et propricta-
tem ecclesise nostr» argentinensis prout hnc est
notorium toti terrie libère dinoscitur pertinere
tamen idem sculthetus et consules ac alii inhabi-
tatores opidi pr^dicti nostro et ecclesiîe nostr<e
dominio ac regimini se temeritate propria sub-
trahentps usque ad terminum competentem eis
prsefixum nobis subesse et obedire contempse-
rnnt. Compétent! monitione prîemissa excommu-
nicationis sententiam auctoritate ordinaria pro-
mulgavit. Propter quod prrenominati sculthetus
et consules et inter eos nominatim excommuni-
cati falso suggerentes dictam excommunicationis
sententiam minus legitime prolatam et contra
statuta concilii generalis adprœdictum dominum
Basiliensem episcopum alioquin ad nos super
absolutione sua in forma communi ut dicitur a
sede apostolica litteras impetraverunt.
Cum autem vos seu per vos et subdelegatum
virnm domine preposite ac vos domine abbasper-
sonaliter inceperitis in negotio praîdicto proce-
dere ac ad procedendum iilterius secundum re-
troacta primo tertiam feriam post ascensioncm
domini secundo feriam tertiam post Urbani apud
Vilingen terminum prsefixeritis Rogamus vos
domine abbas quatinus memor honoris proprii
acjustitine intuitu cum sicut per vestras litteras
apparet de oommissione facta a nobis discreto
viro prseposito sancti Quirlni procedere non pos-
sitis cum jurisdicfio jam apud alium resideat,
quoadabsolutionis negotium supradictnm. Ac vos
domine preposite et vestram habemus commoni-
tam honestatem,autsubdeIegati vestri quicunque
sit ille cumsolus vos aut subdelegatus vester non
possitis judicare negotio absolutionis praîdicto
seu causas supersedere velitis, immo vos domine
preposite aut subdelegatus vester una cum hono-
rabilibus viris abbate de Scutthera (Schuttern)
subdelegato domini prœpositi Columbariensis et
prfeposito sancti Quirini subdelegato domini ab-
batis prrodicti qui nobis suas litteras nuper super
hoc direxerunt deloco, ubi et in quo congrue
procedi possit velitis prout justum est et conve-
nit convenire. Quod si forsan quod non credimus
procedere prfesumpseritis quia nostri interest
nos opponere absolutioni supradictarum perso-
narum cum processus noster in hac parte in nos-
tram redundatinjuriam et non modioum ecclesias
nostrîB prsejudicium etgravamen exeosentiontes
nos indebite et contra justitiam ac nostram gra-
vari ecclesiam scripto presenti sedem apostoli-
cam appellamus appellatos cum instantia postu-
lantes quos si nobis dare denegaveritis iterato
sedem eandem appellamns. Dantes qnoque Bil-
lungo judiei curias nostrae et magistro 'Werlino
deNordera' exhibitoribus presentium mandatum
in solidum sic videlicet quod occupantis conditio
non sit melior in hac parte petendi a vobis prss-
dicta et alla proponendi coram nobis qua> citra
negotium quod incumbit viderint expedire et
vivavocepro nobis in ecclesia nostra sedem pra>-
dictam appellandi et appellatos postulandi. Ra-
tum habentes quidquid dicti BilUuigus et AVerli-
nus aut alter eorum fecerit in hao parte. In cujus
rei testimonium sigillum curiîp nostra; poni feci-
mus ad prc-psentes. Datum Argentinpe quarto kal.
Junii anno domini 126,^.
1. Nordrsch.
Il« PÉRiE. — T. ir.
— 66 -
M» 9.
1266. 30 Juin.- Suspension de l'excommunication, par l'abbé de Saint-George et ses codélégués.
Anuo domini 1266 iu crastino apostolonim
pétri et pauli in ecclesia villîe Horneberc supe-
riori coram nobis abbati sancti Georgii in nigra
Silva Judice a sede apostolica delegato et abbate
deSchuttera a prœposito Columbarensi Judice ab
eadem sede delegato siibdelegato , nec non pre-
posito Imbriacensi (de Fernem) subdelegato pre-
positi Episcopalis celliB sedis apostolicre delegati
comparontibiis magistro Billungo Reverendi pa-
tris ac domini argentinensis Eijiscopi procura-
tore ex una parte et Conrado sacrista clerico de
Mulnhusen procuratoresculteti consulum et alio-
rum civium quoruudam predict» villœ Mulnhu-
sen in autontico noniinatoriim ex altera in causa
absolutionis ipsorum et quibusdam aliis quœ par-.
tes predict,"c invicem coram nobis habere noscun-
tur sic in forma judicii fuit a nobis recessum
(juod nos in omnibus partium hic inde auditis iu-
terloquendo pro3iunciavimus prœdictos sculte-
tum et consules et cives recepta a procuratore
ipsorum qui ad hoc pr«cipue speciale mandatum
habebatjuratoria in animas sculteti consulum et
civium cautione de parendo juri coram nobis a
sententia excommunicationis a venerabili pâtre
ac domino Basiliensi episcopo ad iastantiara prae-
fati domini Argentinensis Episcopi et ab aliis
contra ipsos occasione prefatœ excommunicatio-
nis latis sententiis absolvere deberemus unde
etiam juxta prîedictam formam sententias ipsas
duximus relaxandas , prfesentibus partibus termi-
num peremptorium feriis messium expresse re-
nunciantibus et locum iu ecclesia villas Friburc
iu Brisgaugia partibus similiter enndem locum
acceptantibus duximus prîefigendum ad cognos-
cendum utrumprœfatse sententiœ excommunica-
tionis juste vel injuste fueriut promulgatse et ad
procedendum etiam alias in ncgotio sicut de jure
fuerit procedendum. Est autem terminus ad haec
proxima tertia feria post festum beati Jacobi
apostoli assignatns. Actum et datum loco et ter-
mine subscriptis.
W« 8,
1266. 3 des Ides de juin. — Le prévôt et les consuls de Mulhouse nomment le clerc Conrad leur fondé
de pouvoir dans l'affaire contre l'évëque de Strasbourg-
Honorabilibus dominis divina permissione ab-
bati sancti Gcorgii in Nigra silvà Episcopalis
cellîe et Columbariensis ecclesise prsepositis Con-
stantire et Basiliensis dyocesis judicibus a sede
apostolica delegatis seu eorum subdelegatis ....
Scultetus et consules villse de Mulnhusen Wezelo
de Ilzicha Henricus diotus Zumetor milites pe-
trns de Walhen petrus filius ejus Rudolphus Si-
fridus et Johannes de Reginsheim, Burchardus
et Petrus de Trothoven et Wernherus de Scher-
mirs predicta; villaj cives reverentiam cum sub-
jectione débita et devota. In causa quœ super
excommunicationis sententia quam venerabilis
pater et dominus Basiliensis episcopus in nos
contra justitiam prout credimus promulgavit,
inter ipsum dominum Basiliensem Episcopum
nec non venerabilem patrem ac dominum Argen-
tinensem Episcopum cujus ut asserit interest
nostraî absolutioui se opponere, vitpote qui
permanifcsta offensa ad ipsius instantiam in nos
dictam sentontiam asserit promulgatam vertitur
ex una et nos ex parte altera etiam iu causa prin-
cipali Cunradum clericum exhibitorcm presen-
tium nostrum constitutum procuratorem et mi-
nistrum (?) specialem Dantes eidem potestatem
et mandatum agendi dcfendendi excipieud: ro-
lilicaudi benoficium absolutionis petondi etju-
randi in animas nostras quod juri parebimus ut
tenemur item litem eontestandi tam super ipsa
causa principali quam super incideutibus seu
emergentibus questionibus intercedere (?) et po-
tissimum in exceptione manifestfe offensœ quam
pars adversa opposuit et se obtulit probaturam
et replicatione ad ipsam si visum fuerit facienda.
Jurandi quoque super hiis in animas manus nos-
tras de calumpnia seu de veritate dicenda et quod-
cumque aliud sacramentum prœstandi si fuerit
oportunum. Item propositiones faciendi et ad eas
respondendi, instrumenta testes producendi et
objiciendi contra testes et instrumenta si quse
aperte adversa producantur et expensis pctendi
quiB sibi et nobis adjudicat» sunt vel adhuc ad-
judicari possunt. Ita omnia et singula qufeque
faciendi quse verns et legitimus procuratorfacere
potest et débet. Promittentes sub ypotheca rerum
nostrarum pro eodem Cunrado procuratore nos-
tro judicatum solvi , et ratum et gratum habere
quicquid idem Cunradus circa prfcmissa vel alia
quœ caussB expedirc judicet decreverit facien-
dum, et hoc nobis et omnibus aliis quorum inter-
est presentibus nuutiamus. In hujus roi cviden-
tiam sigillé universitatis nostrœ in Mulnhusen
utimur in hac parte. Datum Mulnhusen anno do-
mini 1266. .3. Idus Junii. Indictione nona.
67 —
1268. 6 Janvier. — Conrad nommé fondé de pouvoir par le magistrat de la ville de Hulhouse.
Venerabili in Christo patri ac domino dei gra-
tia Constanciensi Episcopo et discretisvirisTtie-
saurario Walthero de sancto Gallo Canonico
sancti Stephani ecclesiarum Constanciensiura
judicibus in causa appellationis a sede apostolica
delegatis scultetus et consules et universitas de
Mulnhnsen reverentiam tam debitam quam de-
votam. In causa appellationis quK vertitiir inter
nos ex una et venerabilem in Christo patrem et
dominum Argentinensem Episcopum ex parte
altera.
Magistrum Cunradum exliibitorem prsesentium
nostrum constitutum proeuratorem dantes sibi
plenariam potestatem agendi defendendi exci-
piendi reconveniendi replicandi et si necesso
fuerit appellandi et omnia faciendi quas verus et
legitimus potest et débet facere procurator, et
sacramentum cujuslibet generis in nostras ani-
mas prîestandi. Promittentes sub ypotheca rerum
nostrarum ratum et gratum habere quicquid per
dictum proeuratorem quoad hanc diem videlicet
crastinum Hilarii legitime fuerit ordinatum. Pro-
mittimus etiam judicatum solvi sub singulis clau-
sulis et ut dictus procurator a satisdatione rele-
vetur duximus prajsentem cedulam sigillo nostro
slgillandam (sic) roborandam. Datum in Muln-
hnsen anno domini 1268. In Epiphania domini.
1«" lO.
1268. 4 juin — L'évëque de Constance et ses codélégnés donnent commission au cnré de Waldkircb
d'examiner les témoins produits par les citoyens de Mnlhouse.
Conradus dei gratia Episcopus Coustantiensis
Bertoldus Thesaurarius majoris et magisterWal-
therusde Sancto Gallo canonicus sancti Stephani
Coustantiensis judices in causa appellationis qua;
vertitur inter venerabilem in Chresto dominum
Episcopum Argentinensem ex una et scultetum
consules et uuiversitatem hominum de Muluhu-
sen ex parte altera , a sede apostolica delegati,
dilecto in Christo plebano sancti Martyni in
Wallkilche. Salutem in domino.
Examinationem testium quos viri discreti scul-
tetus consules et universitas hominum de Muln-
husen producere proponunt in causa appellatio-
nis esse factœ (sic) contra venerabilem in Christo
dominum episcopum Argentinensem, discretioni
tuœ duximus committeudam. Mandantes tibi auc-
toritate nobis commissa quatinus personas sub-
scriptas videlicet magistrum Cunradum de Hu-
gelnhaim plebauum de Brizzikoven Eectorem
ecclesiœ de Balderet magistrum Cunradum de
Burgerawe, magistrum Walterum de Vilingen,et
dictum Lozen clericum in dicta causa appellatio-
nis esse factae in Friburgo examines diligenter
dictaque ipsorum sigillo tuo interclusa cum par-
tibus in crastino Johannis Baptiste remittere non
omittas. Datum Gotteleben anno domini 1268. II.
Nouas Junii.
Avec sigillés du trésorier et du magister W. de
Saint-Gall. Le sigillé de l'évëque manque.
Sigillum Bertoldi.
N° II.
1270. 16 janvier. — Citation, délivrée par l'évëque de Constance, contre l'évëque de Strasbourg
sur l'instance des citoyens et magistrats de Mulhouse.
Conradus dei gratia Episcopus Constantiensis
Bertoldus Thesaurarius Ecclesi» Constantiensis
et Waltherus de Sancto Gallo canonicus Sancti
Stephani Judices appellationis a sede aijostolica
delegati discrète viro decano inter colles salutem
in domino. Mandatum domini papae recepiraus
in hoc verbo. Clemens (IV) episcopus servus ser-
vorum dei. Venerabili fratri Episcopo et dilectis
flliis Thesaurario majoris et Walthero de Sancto
Gallo canonico Sancti Stephani ecclesise Con-
stantiensis salutem etapostolieambenedictionem
Sua (?) nobis scultetus consules et universitas
hominum opidi de Mulnhnsen Basiliensis dyoce-
sis petitionc monstrarunt quod licet ipsi de do-
minio imperii Romani existant venerabili tamen
fratris nostro Argentinensi episcopo asserente
quod iidem una cum prcdicto opido ad Argenti-
nensem ecclesiam pertinerent, venerabilis frater
noster Basiliensis Episcopus non ex delegatione
apostolica mandavit eisdem ut dicto Argenti-
nensi Episcopo se submitterent ac eidem fideli-
tatis jurameutum prsestarent et quia id sicut necne
etiam tonebantur facere noluerunt in eosdem
scultetum et consules ac homines universitatis
prîedictre alias omnino sufiicienter monitis nec
citatis nec se per contumaciam absentantibus ex-
communicationis et in ipsum opidum interdicti
sententias promulgavit. Porro dicfi scultetus con-
sules ac Wezzelo de Ilzecha dictus Zom Tore,
Petrus de Walen, Petrus filius ejus Rudolfus ,
Syfridus et Johannes de RegcnsheimBurschardus
et Petrus de Trothoven et Wernerus de Scher-
mcnz laici asserentes dominum Basyliensem Epis-
copum in eos communiter, nulla compctenti mo-
- 68
nitlone prjemlssa sine causa rationabili excom-
municationis sententiam auctoritate propria (?)
promulgasse contra statuta concilii generalis ad
eundem Basiliensem Epipcopnm monitorias et
ad abbatem monasterii Sancti Georgii in nigra
Silva et ad Episcopalis ccllre et Columbariensis
ecclesiarivm prïcpositos Constantiensis et Basi-
liensis dyocesis in consueta forma super relatio-
nem sententiarum dictarum executorias litteras
apostolicas impetraverunt. Et licet prœdictos ab-
bates et Irabriacenscm oui dictus Episcopalis
cellœ ac Cellerarius Sancti Pétri cui dictus Co-
lumbariensis ecclesiarum prepositi Constantien-
sis et Basiliensis dyocesis commiserant totalitär
vices suas primo dictos scultetum consules ac
horoinesaprîedicta excommunicationis sententia
duxerint absolvendos justitia exigente.
Quia tarnen idem abbas et cellerarius postmo-
dum in ipsa causa perperam procedentes in eos-
dem scultetum consules et homines dictas sen-
tentias per pra;fatum Basiliensem Episcopura rit«
latas per unquam diffinitivam sententiam protu-
lerunt ex parte sculteti consulum et universitatis
predictorum ad nostrum (sculteti)audientiam ap-
pelatum (?). Quo circa discretioni vestrœ per
apostolica scripta mandamus quatinus vocatis
quot sunt evocandi et auditis hinc iude proposi-
tis quod justum fuerlt apellatione postposita sta-
tuatis, facientes quod decreveritis per censuram
ecclesiasticam firmiter observari. Testes autem
qui fuerint nominati si se gratia odio vel amore
subtraxerunt per censuram eandem appelatione
cessante rogatis voritate testimonium perhibere.
Quod si non omnes hiis exequendis potueritis
interesse tu frater Episcope ceperis cum altere
ipsorum ea nihilominus exequaris.
Datum Viterbii Non. April, pontificatus nostri
anno tertio. Hujus igitur auctoritate mandatî
discretione tuae sub pena ofBcii prsecipiendo
mandamus quatinus uter eorum nobis Constan-
tisB ad sextam feriam post dominicam quœ can-
tatur laetare Jerusalem venerabilem in Christo
patrem et dominum Argentinensem Episcopum
ad instantiam sculteti consulum ac universitatis
de Mulnhusen ad procedendum in causa appel-
lationis qu» vertitur inter ipsos quantum de jure
fuerit procedendum.
Datum Episcopalis cellse XVII kal. febr. indic-
tione XI. Reddi litteras sigillatas mandate exé-
cute.
Avec sigillés de l'évêque de Constance, du
trésorier de l'église de Constance et de Walther
de Saint-Gall.
TK" 1».
Mai 1271. — Henri, évêque de Bâle, après avoir pris auprès de la cité de Mulhouse tons les moyens
de douceur, autorise l'évêque de Strasbourg à recourir au bras séculier.
Révérende in Christo patri consanguinee ka-
rissime venerabili Episcope Argentinensi. Hen-
ricus dei gratia Episcopus Basiliensis obsequio-
sam voluntatem ad beneplacita cum salute. Cum
sicut publicum est et notorium civitas de Muln-
husen et populus ejus ad jus et proprietatem
ecclesifB argentinensis libère pertinet quod que (?)
possessionem eorum pacificam et quietam ipsa
Argentinensis ecclesiaseu tenuitpaciflce et quiè-
te , quia tamen ipse populus propter eorum forsan
duritiam qui a predecessore vestro eorum regî-
mini priefecti fuerunt ab ipsius predecesseris
vestri subjectiene et obedientia se subtraxit nos
laudem ad regimen memoratas ecclesi» vobis vo-
cato id magnam vostram instantiam consules et
cives universos civitatis ejusdem per litteras
nestras diligentermonuimus et attente ut ipsi re-
cognoscentes se ad jus et proprietatem argenti-
nensis EcclesifB pertfnere vobis in omnibus obe-
dirent et intenderent sicut consuetudinis esset
atquejuris, verum quodiidçm menitionibus nos-
tris semet iterum immo multotiens eis factis mi-
nime parère curarunt nec aliquid rationabile
prepesuerunt quare parère dictis menitionibus
non deberent. Nos in majores civitatis prœfatse
excommunicationis nominatim et interdicti in
lecum ipsum sententias justicia tulimus exigente.
Sane licet asententiishujusmodi, ad sedem apos-
tolicam fueritappellatum Judicesque a dicta sede
deputati appellatione hujusmodi injusta pronun-
ciata dictas sententias confirmarunt ac denuo ab
eisdem judicibus ad eandem sedem fuerit provo-
catum a censulibus et civibus memoratis quia
tamen judicesipsiussedisapostolicse super hujus-
modi appellatione secundo obtenti eadem appella-
tione injusta pronunciata praslibatas excommu-
nicationis et interdicti sententias clerum confir-
marunt, dictique cives adhuc in sua contumacia
pertinaciter persistentes ad jus et subjectionem
et obedientiam debitam memorate Argentinensis
ecclesiœ redire non curarunt non selum moni-
tienes nestras eis karitative factas immo etiam
censuram ecclesiasticam penitus contempnentes
cum in dictis excommunicationis et interdicti
sententiis per triennium et amplius animo indu-
rate perstiterunt et persistant adhuc iu non mo-
dicum suœ salutis dispendium et periculum ani-
marum, (et) ultra non habeat ecclesia quid faciat
ut invocato auxilie brachii secularis memoratos
consules et cives ad vestrum et dictœ ecclesiœ
argentinensis subjectionem et obedientiam debi-
tam cheercere [sic) possitis liberam vobis aucto-
ritate prsesentium in dei nomine concedimus fa-
cultatem. Datum mense majo anne demini 1271.
Avec sigillé de Henri, évêque de Bâle.
HERBITZHEIM.
(avec L'NE CAKTE LITHOGnAPIllÉE.)
I.
A l'extrémité la plus septentrionale du département du Bas -Rhin, le
canton de Saar-Union pénètre par une pointe aiguë jusqu'au cœur du dépar-
tement de la Moselle, et son territoire s'avance jusqu'à 5 kilomètres de la
ville de Sarreguemines. )
Au milieu de cette pointe, le beau village de Herbitzheim s'élève sur les
deux rives delà Sarre à l'endroit où cette rivière abandonne les magnifiques
prairies qu'elle arrosait depuis Ilarskirclien, pour s'enfoncer dans le massif
de collines, qui caiactérise l'arrondissement de Sarreguemines.
La commune de Herbitzheim se compose de deux villages reliés entre
eux par les seize arches d'un antique pont de pierre. Sur la live droite le
véritable llerbilzheim ou Kloster-Ilerbilzheim s'étage aux flancs d'un coteau
assez abrupt; sur la rive gauche, dans une plaine ondulée, s'étend Mich-
lingen, que les chartes du seizième siècle appellent aussi Saint-Michel* et
qui semble aujourd'hui perdre ce double nom.
II.
Herbitzheim paraît avoir été bâti sur l'emplacement d'une station romai«fe.
On y a trouvé jadis un monument en grès vosgien, consacré à Mercure, et
portant celte inscription :
IN. H. D. D.
MERGVRIO.
SEXIVLIVS.
Au rapport de Schœpflin, ce monument n'avait rien de remarquable, et
il ne me semble pas suffisant pour que l'on puisse en conclure avec Dom
Calmet , que Herbitzheim a dû être considérable autrefois.^
Le séjour des Romains sur ce point est, du reste, facile à comprendre et
à expliquer.
1. Du patron de son église aujourd'hui détruite
2. Schœpflin, Als. illiist., 1, 460. — Sotice de Lorraine, \° Herbitzheim.
-^ 70 —
Il esl au joLiid'lmi établi qu'une voie romaine venant de Saverne descendait
la vallée de l'Eichel. Elle a été retrouvée intacte à Diemeringen et reconnue
jusqu'à Œrmingen. De plus, il paraît certain qu'elle devait se prolonger par
la vallée de la Sarre et se diriger sur Trêves ^ Or, l'étude du pays démontre
que vers Œrmingen la voie devait abandonner les vallons resserrés et sinueux
des deux cours d'eau, et très-probablement elle s'infléchissait à l'ouest,
coupait en biais la Porèt de Lothringen et venait franchir la Sarre à Her-
bitzheim pour se diriger en ligne directe sur Sarreguemines, ainsi que le
fait encore la route actuelle.
D'un autre côté, l'on sait qu'une autre voie romaine venant de Metz existe
encore" depuis Bistroff et l'Étang du Bischwald (canton de Grostenquin);
— qu'elle a été reconnue jusqu'à Steinbach , hameau de la commune de
Guéblange (canton de Sarralbe), et retrouvée dans le canton de Rohrbach
entre Schmittvsiller et Hahlingl II est généralement admis que des hauteurs
qui dominent Guéblange, cette voie se dirigeait parKeskastel sur Œrmingen
pour gagner le pays de Bitche. Bien des motifs, trop longs à déduire ici, me
font rejeter celte opinion. Je suis persuadé que la direction de la voie
était différente*. A mon avis, de Steinbach elle gagnait par les hauteurs
l'Albenerberg ou l'Ermitage, au-dessus de Sarralbe^ franchissaitl'Albeetla
Sarre sur ce point et rejoignait à Herbitzheim la voie d'Œrmingen à Sarre-
guemines.
Ilerbilzheim aurait donc été situé à l'intersection de deux voies im-
portantes.
III.
Les traditions populaires assignent à Herbitzheim une grande antiquité.
Le presbytère actuel, brûlé et reconstruit en 153G, occuperait, dit-on,
l'emplacement d'un château, maison de chasse de Clovis. "
Sans partager le moins du monde les illusions des partisans d'une aussi
illustre origine, l'on ne peut se refuser à admettre que Herbitzheim remonte
à l'époque carlovingienne^ et qu'il était déjà célèbre au neuvième siècle.
1. Bulletin de la Société pour la conservation des monuments Iiistoriques de l'Alsace,
IV, 62, 66.
2. Carte du dépôt de la guerre, f. 53.
3. J. Tliilloy; Dict. topogr. de l'arrondissement de Sarreguonines , v» Voie romaine.
4. Voy. la carte à la fin.
5. Bull, archéol. de la Moselle, II, 140. — Revue d'Austrasie, VII, 417.
6. Bacquol, Dict. de l'Alsace, 1 59, v» Herbitzheim.
7. Une tradition que m'a transmise M. le curé de Herbitzheim , en attribue l'origine à
saint Pirmin, le fondateur de l'abbaye de Hornbach, près l'irniasenz (Pirminislmsa) vers
le milieu du huitième siècle.
— 71 —
L'empire de Chaiieniagne venait de s'écrouler. Une première fois, en
845, les fils de Louis le Débonnaire avaient divisé la grande monarchie et
y avaient créé le Lother-reich, l'empire de Lother, royaume qui ne pouvait
vivre, mais dont le nom devait être illustre pendant neuf siècles.
Dix ans plus tard (855), un nouveau partage avait amoindri la Lorraine
naissante, et l'avait confinée entre la Meuse et le Rhin. En 870, enfin, à la
mort de Lother II, ses deux oncles, Charles le Chauve et Louis le Germanique
s'emparèrent du petit royaume et en opérèrent le partage.
Le procès-verbal de ce partage, connu sous le nom de « Traité de paix
et de partage de l'an 870, » est parvenu jusqu'à nous. Dansla longue nomen-
clature des locahtés attribuées au roi de Germanie, parmi les monastères
les plus célèbres des pays eis -rhénans, l'on voit figurer le nom de Heri-
bodesheim^
Rien n'indique si, dès lors, Herbitzheim était un monastère d'hommes ou
un couvent de religieuses ; mais il devait avoir de l'importance, puisqu'il est
cité nominativement dans ce document, tandis qu'il n'y est question, ni de
Saint-Arnould, ni de Sainte-Glossinde de Metz, ni de Saint-Avold , ni de
Longeville, monastères qui tous existaient incontestablement au neuvième
siècle. ^
IV.
Vingt-cinq ans plus tard, pendant les grandes crises qui enfantèrent la
féodalité, nos provinces appartenaient à trois frères: les comtes Stephan,
Gerhard et Matfried. ^
Stephan était comte de deux pagi importants :
1. D. Calmet, Hist. de Lorr., pr. sous l'an 870, etc., I, 739.
Ethœc est portio qnamsibi Hludoviais recepit : .... Niu-monasterium (Neiimuuster) ;
.... S' Maximini (à Trêves);
Epternacum (Echternacli) ;
Horream (Sainte-Marie d'Horreen à Trêves);
.... Maiiri monasterium (Marmoiitiers) ;
S' Stephani Strasburch ;
.... Eeribodesheim .... etc.
Pas un seul commentateur n'a émis un doute sur l'identité de Heribodesheim et de Her-
bitzheim.
2. D. Calmet, I, 739, suppose que les abbayes omises avaient été données en lief anté-
rieurement à 870 et que celles dont les noms figurent au traité appartenaient immédiatement
à Lother II.
C'est possible, mais rieu ne l'établit.
3. Croll, Origines Dipontinœ, 1, 65 seq.
— Westricher Alih(indhingen,\, 13.
— 72 —
Le Pialgüwe (Biedgau, PaytisBedensis^) elhCühnenzgov/ {Pagus Calvi-
montensis^).
11 possédait en oulre l'abbaye de Saint-Epore de Toul.
Gerbard était comle de Metz; de plus il avait en communauté avec son
frère Malfiied de vastes domaines dans le Biiesgau, et ils détenaient en-
semble les abbayes de Saint-Pierre de iMetz, de Saint-Maximin et de Sainte-
Marie d'Horrcen de Trêves.
Gerbard cnbn possédait l'abbaye de Heribodesheim.
Ces trois comtes étaient en Lorraine les cbefs et l'àme du grand parti
féodal et aristocratique, qui cbercbait par tous les moyens à renverser la
puissance royale. En lutte ouverte avec le roi Zuentebold, privés par lui de
leurs domaines et exilés, ils tirent alliance avec Odaker, le puissant comte
du Bliesgau , appelèrent aux armes tous les mécontents et se mirent à la
tête de la révolte qui, en 899, enleva à Zuentebold le trône et la vie.
Après la mort du roi de Lorraine, le comte Gerbard épousa sa veuve
Oda^ se remit en possession du comté de Metz et de tous ses immenses
domaines parmi lesquels Herbitzbeim, qu'il ne paraît pas, du reste, avoir
conservé longtemps, car son indépendance trop absolue le fit de nouveau
tomber en disgrâce.
Le 28 janvier 908, le roi Louis l'Enfant, tils d'Arnulf , roi de Germanie,
lui enleva l'abbaye de Ilerbitzheim pour la donner à l'évêque Stephan de
Liège, parent du comte. Cette donation* est ainsi conçue:
« Parlier qiioque abballam Heribotesheim nomine didam quœ a Ger-
liardo quondcnn comité proprio jure habita postea pro culpa inßdelitatis
contra nostra)ii sereniiatem cxhibita, noslro cessit donatui versa, quam
prœlibato Stephano ipsiits proprio affmi quando quidem mansit semper
fidelis dure volentes, tarnen suce j am dictœ ecclesiœ ipsius precato dedimus
etc. . . . Date V kal. febr. A° DCCCCVIII indictione IX. Actum Acquis
granii palalio. »
A la mort de Louis l'Enfant, le comte Gerbard rentra de nouveau en
possession de tous ses biens et du comté de Metz. Il les transmit en mourant
à son frère Matfried, mais aucun document ne vient nous apprendre quel
fut le sort de l'abbaye d'Hcrbitzheim.
1. Le iiiiJbourg', vers Megen, dans le pays de Trêves.
2. Le Chaiimontois, depuis la Meurihe et la Moselle, de Bayou aux Vosges.
3. Oda, lille du duc Olto de Saxe.
4. MIraîus, Cod. don. piar. 2'o.
Liinig, Reichsar chi o , Spic. 11, cap. IV, 485.
Eckhard, Dr robiix frrnir. oj-ient. L. XXXII. c. .^0. od ami. '.'08.
^
Saarbrücken
Blies casiell
&
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Rentes .
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à L'Mwi/e Ä- Herhitzhutn .
''ÂUwilhr ^^-^\^/a)\erJm
KoTslcirchen fo
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'•-.._ J?ü-d£7iJorf ^ ^~^-^ B^tiwiïïf.r-
~' o/ -^ oWolfskir-cluih \o \ ^
CARTE DUM PARTIE
de la.
VALLEE DE LA SARRE
dressée paT- J. ThiDoy .
lu:h ,,de.r-'-Vj'rjer-lAm-^,dl ilHS-iStraliM^)^
Ta
« L'an 965, dit le continuateur de Reginon', l'empereur (Olto le Grand),
après avoir célébré à Pavie la fête de la nativité du Christ, revint dans son
pays. Ses fils Olto et Wilhelm, l'archevêque, accoururent au-devant de lui
jusqu'aux confins de la France et de FAllemagne, dans la villa Heimbodes-
heiin et f accueillirent avec de grandes manifestations de joie. De là, fem-
pereur se rendit à Worms. ...»
Ne peut-on pas supposer qu'il s'agit ici de Herbitzheim? ne serait-ce pas
aux constructions de cette villa qu'on doit rapporter les ruines d'un grand
caractère que l'on voyait naguère sur le coteau de Herbitzheim, ou ces
autres ruines que l'on retrouve dans le bois voisin sous le nom de Scliloss
et qui accusent une origine féodale?
C'est là une question que je me contente de poser.
VI.
Au moyen âge Herbitzheim est une abbaye de femmes de l'ordre de
Saint-Benoît; mais il ne nous reste rien de son histoire.
Meurice n'en parle pas.
Dom Calmet lui consacre à peine quelques lignes.
Les Bénédictins se bornent, pour ainsi dire, à répéter ce qu'en dit fabbé
de Senones.
A fépoque où écrivaient ces historiens, l'abbaye était détruite depuis
longtemps; ses archives avaient disparu; le pays était devenu protestant.
Ils ne cherchèrent pas à reconstituer à grand'peine une histoire qui n'of-
frait plus un intérêt immédiat. Ils se bornèrent à dire: « Abbaye fondée ap-
paremment par les évoques de Metz, mais on ignore le nom du fonda-
teur.* »
Sans essayer de combler cette lacune, entreprise pour laquelle tout
m'aurait manqué, je me bornerai à transcrire, par ordre chronologique,
les rares indications que le hasard m'a fait trouver, concernant le monas-
tère de Herbitzheim, ses abbesses et ses voués.
VII.
Quelques documents du douzième siècle font mention de propriétés
possédées par ce monastère et vendues par les abbesses à l'abbaye de
Wadgasse, fondée par les comtes de Saarbruck.
1. Recjinonia continuotor ad ann. 965^ II, 111.
2. Notice de Lorraine, v» Herbitzheim. D. c. II, 739.
Bened. Hist. de Metz, II. 157.
— 74 —
La conßrnialioii des l)iens de l'abbaye de Wadynsse, l'ailt! à l'abbé Wol-
fram par le pape Eugène III, le VI des Kalendes de juin (27 mai) 1152,
donne la nomenclature des biens possédés par celte abbaye. On y lit la
mention suivante : « ....In Hesemingen mansum unum et Leimam quas ha-
betis ah ecclesia de Herhodesheim, sub censu septem solidorum eidem ec-
clesice a vobis vestrisque successoribus annis singulis persoluendo ' »
La confirmation des biens de la même abbaye, faite à l'abbé Gotfried par
le pape Alexandre III, le 3 des ides d'avril (11 avril) 1179, donne une in-
dication nouvelle: a In Caldebach quœ habetis ab ecclesia Ilerbodes-
lie'im sub censu triginla agnorum et tredecim solidorum Metensis nio-
netœ ^»
A la fin du douzième siècle^ mais sans que la date de cet acte soit in-
diquée, SopJiie, abbesse de Sainte-Marie in Herbodenseim, concède à
perpétuité à Gotfried, abbé de Wadgasse*: a. Allodium de Leminem et
Chaldebach et Mimicliuuilre qiùod prius rationabiliter ut noster conventus
aiebat, multo tempore tenebat, consilio et assensu totius nostri capitull in
omni jure quo predicta allodia Herbodinensis ecclesia possidebat, ea con-
ditione concessimus-quatenus quotannis in medlo Majo xxxij ag^ios et in
assumptione beatœ Marie xiii solidos metensis monete in décimas omnis
annone quas in predictis locis fratres de Wadegocenses adquirerent pre-
dicie ecclesie nostre sine retractatione darent » Et ont signé audit acte :
<.<. Beatrix, decana, Lucardis, sacrista, Cunigundis , Juliana, Matildis ,
Adeleidis, etc. »
La date de ce document n'est pas précise, mais elle paraît postérieure à
1179, car la vente faite par l'abbesse Sophie comprend des biens à Munich-
weiler qui ne sont point portés dans la confirmation faite par le pape
Alexandre III.
VIII.
En 1251 % le monastère de Herbozheim accorde au chevalier Henri de
Scharffeneck un fief sur la Queich, à charge par lui de payer chaque année
audit monastère cent livres d'huile.
Au mois d'avril 1271% Hugo, comte de Lutzelstein, abandonne à l'ab-
besse et au couvent deHerborsIieim, « quidquid habemus tam in grossa
1. Hontheim, Hisi. treinr. diplom. I, 565.
2. Kremer, Geschichte des alten ardennischen Geschlechts, 11, 299, 301.
3. Kremer, Ardewnsche Geschichte, II, 306.
4. L'abbé Gotfried avait succédé à l'abbé Wolfram. Son nom est encore cité en 1 197,
5. Schœpflin, Als. ilL, II, 256. Note t.
6. Ms. diplom. DCLXVi. Ch. abb. Ilerbitz.
- 75 —
décima quam lulnuta parochialis ecclesiœ de Achkcna metensis dioce-
sis ,» sa part des dixmes de la paroisse d'Achen , canton de Rolir-
baclî.
Il semble, malgré la généralité des termes, que cette donation n'ait pas
été absolue. En effet, en 1272, à l'octave de la Purification^ le même
comte Hugo donna à l'abbé Nicolas et au monastère de Sturtzelbronn les
dixmes d'Achen, grosses et petites, et le patronage de l'église; et en i303^
inie part de ces mêmes dixmes appartenait au comte Eberhardt de Deux-
Ponts-Bitche. Le monastère de Sturtzelbronn conserva les dixmes d'Achen
jusqu'en 1621 , époque à laquelle le rachat en fut opéré par le duc Henri
de Lorraine.
Je suppose donc que cette donation faite à l'abbaye de Ilerbitzheim n'eut
d'effet que durant peu d'années, et que les dixmes d'Achen furent rache-
tées ou par le comte de Lutzelstein ou par l'abbé de Sturtzelbronn.
« A cette époque (1292), dit Dom Calmet% le nom de l'abbesse de Iler-
bitzbeim est indiqué par son initiale H. »
Nous allons voir par plusieurs documents que ce nom est Hanle, nom
que l'abbé de Senones écrit un peu plus tard (1302) Avole.
En 1302 % l'abbesse de Ilerbilzheim, Aule,mel son sceau à une vente de
prés situés au lieu dit Drutlenroch, faite à l'abbé du monastère de Sturtzel-
bronn par Reinfried dit Ongel Dad, fils de feu Tiedric, et Gai d'Albe, sa
fenmie.
En 1309^ la quatrième férié après la nativité de la Vierge, il intervient
une convention entre l'abbesse de Herboldsliemi et son couvent, et l'abbé
de Sturtzelbronn au sujet de la perception des novales dans la paroisse de
Rohrbach. L'abbé ne paiera rien pour les cinq dernières années écoulées; il
ne paiera rien pour les cinq à venir si les cultures sont faites par l'abbaye
ou à ses frais; mais si l'abbé loue ses propriétés, les locataires paieront les
novales.
En 1316', le jour de la Saint- Michel, //«M/e, par la grâce de Dieu abbesse
de Herboltzheym, appose son sceau à un acte par lecjuel Barthélémy de
1. Chartul. Sturzelbronn. 37.
2. Ibiâ. 61.
3. D. Calmet, 1, 739.
4. hiventaire des titres H papiers t, 176. de lorraine. Tous les iioni.s sont évidem-
ment incorrects.
5. Chartul. Sturzelbronn. 85, I M.
Je n'ai pu déterniiner s'il s'agit de l'abbé Nicolas qui vivait eu I 305 ou de l'abbé Hermann
qui gouvernait Sturzelbrouu en 1310.
6. Chartul. Stm-zett^mmi. 260.
— 76 —
Raldingen*, bailli de Bitche, fait remise à l'abbaye d'une rente viagère en
grains (13 viertel et 2 sester de seigle) qui lui était due et pour le rachat
de laquelle l'abbaye lui a payé 36 livres turney.
IX.
Herbitzheim est situé à environ deux kilomètres de Sarralbe, dont les
salines étaient au moyen âge si célèbres et si fructueuses pour leurs pro-
priétaires.
Albert, dernier comte de Dagsbourg et seigneur d'Albe, avait, vers l'an
1200, donné à l'abbaye de Sturtzelbronn la jouissance d'une poêle dans
ces salines, et tout fait croire que les religieuses de Herbitzheim reçurent
de lui une semblable libéralité. Toujours est-il certain que leur monastère
était, au siècle suivant, en possession d'une poêle et que des contestations
à ce sujet s'étaient élevées entre l'abbesse de Herbitzheim et l'abbé de
Sturtzelbronn. L'évêque de Metz, Rainald ou Renaud de Bar (1302 1 1316),
était intervenu dans cette discussion, et avait fait consentir les deux par-
ties à une transaction. Toutefois ces contestations se renouvelèrent, et en
1319^, l'évêque Henri Dauphin, successeur de Rainald de Bar, intervint à
son tour en sa triple qualité de seigneur direct de la terre d'Albe, de pro-
priétaire des salines et de supérieur ecclésiastique. 11 maintint les deux
abbayes dans leurs droits de faire du sel et les prit sous sa protection et
sauvegarde; mais il leur fit acheter ce double privilège, par l'abandon
d'une partie de leurs droits, ce qui fut dissimulé sous cette phrase du chro-
niqueur: «En reconnaissance, l'abbesse et l'abbé l'associèrent pour un
tiers dans leur poêle »
X.
En 1323% le jour des rois, Haula, par la grâce de Dieu abbesse de
Herbotsheym , appose son sceau à un acte par lequel Claus de Raldingen
reconnaît que l'abbaye a racheté, moyennant 36 livres turney, la rente de
13 viertel et 2 sechster de seigle qui lui était due.
En 1338*, le jour de la division des apôives, Elisabeth, abbesse de Her-
bitzheim, s'accorde avec l'abbé de Sturtzelbronn, au sujet d'une dette de
1. Chaïtu]. St7(rzelöron7i. 260.
Barthélémy nomme l'abbesse meine gnœdige frmiwe ; il était sans doute vassal de l'abbaye
2. D. G. Dissertation sur les salines, xviii. Notice , v" Hehbitzheim.
Bened. II, 157.
3. Ghartul. Sturtzelbronn. 260, v" An dem Zivœlfftentag.
■4. Inv. de lorr. , 1, 178. Ce doit être l'abbé Ysenhard.
— 77 —
vingt livres qu'ils doivent ensemble à cause de la saline d'Albe, et que
l'abbesse de Herbilzheim s'engage à payer.
En 1345^ le jour de saint Marc l'évangéliste, Hi/lleffart, abbesse de
Herbesheym, est témoin d'une quittance donnée et d'une donation faite à
l'abbé Johann de Slurtzelbronn par Johann, curé de Rohrbach, et prében-
dier de Herbesheim,
XL
Mais à côté du pouvoir spirituel de l'abbesse, il y avait la puissance tem-
porelle du haut baron protecteur, du voué, chargé des obligations féodales
et jouissant des avantages attachés au fief ecclésiastique.
A défaut de preuves directes et irréfutables , la situation des lieux,
l'usage général, l'analogie avec les autres abbayes, tout doit nous faire sup-
poser que l'abbaye de Herbitzheim avait pour voués les comtes de Saar-
werden, ses puissants voisins, dont la belle baronnie touchait immédiate-
ment les terres de l'abbaye.
La maison de Saarwerden se perd dans la nuit des temps féodaux.'
En iioi , le comte Friederich était un baron indépendant dont le franc-
alleu enclavait complètement Vieux-Saarwerden et Bouquenom , bâtis sur
la terre de l'évêché de Metz, et qu'il tenait en fief des évéques.
Au quatorzième siècle , ses descendants possédaient la baronnie de
Fénestrange (Vinstingen) et la seigneurie de Kirkel sur la Bliese.'
Mais leur descendance directe allait s'éteindre, et en 1396, la mort de
Henri II, le dernier comte, transférait ces beaux domaines à Friederich,
comte de Moers, qui avait épousé Walburge, sœur du comte Henri, et
héritière du nom et du comté.
Tels étaient les barons que l'on croit avoir été les voués de Herbitzheim.
Toutefois , quelques documents contemporains semblent établir que ce
privilège ne leur a pas toujours été exclusif et qu'il a appartenu aux comtes
de Saarbruck, sans qu'il soit possible de dire si la vouerie a appartenu à
ces comtes en totalité ou en partie; momentanément ou d'une manière
1. Chartul. Sturtzelbronn. 240.
2. Voy. les Tables généalogiques à la fin.
3. Les comtes de Saarwerdea tenaient en fief: 1" de Tempire, le péage des routes impé-
riales à travers leurs domaines ; 2° de l'archevêché de Trêves , le château de Lorentzen et
les villages de Wachten et Limbach; 3° de Tévêché de Metz, le château de Vieux-Saar-
werden, la ville de Bockenheim et la cour de Wiebersweiler , dans le Saargau.
Dans le Bliesgau, une branche de leur maison tenait de l'empire les seigneuries de
Hombourg, de Kirkel, de Buntenbach et Vogelbach. Ils avaient fondé l'abbaye de Wersch-
weiler on Wernerswiller.
— 78 —
persistante; s'ils l'ont acquise par alliance ou par héritage; si elle leur avait
été cédée par engagère, ou bien s'ils étaient tout simplement les arrière-
voués (le l'abbaye.'
Voici ces documents:
En 129 1 , le jour de la Saint-Rémi, « en chief d'octembre (1^'' octobre) » le
comte Simon IV de Saarbruck confirme le douaire que le chevalier, lehan de
Rozières avait constitué à sa fiancée « Alh, fille monseigvour Ourri de
Fontoi cheuallier seignour de Bessompierre , )^ ce qu'il tenait en fief dudit
comte, « et nommément la moitié de lawoerie de Harhorzheim et de la ville
de Cuistres (Keskastel) , et son tiers de la woerie de la ville d'Oldenges {01-
dingen), et des a.ppendises et appartenances des leuz devant dix..., en quel-
que manière que ce soit, ou en autre lieu que de mon fie moueroint^.D Ce
document, d'accord avec les suivants, montre que la vouerie de Herbitz-
heim comprenait Ilerbilzheim, Keskastel et Oldingen, village aujourd'hui
détruit, qui était situé au nord de Rahling (canton de Rohrbach), au lieu où
la carte du dépôt de la guerre indique une chapelle sous le nom de Alt-
Kirch.^
Le village de Siiltzheim ou Siltzheim, qui plus tard a appartenu à l'ab-
baye, n'existait probablement pas encore dans ces temps reculés.
En 1593*, Friederich de Ettendorf permit à Henri de Fleckenstein de
constituer en douaire à sa femme « quinquaginta marcarum dotalitium »
50 marcs à Uerbolsheim sur la Sarre.
En 1342% le mardi après la Saint- Laurent (13 août), le comte Jean il
de Saarbruck et Bœmond, Jean et Nicolas, sires de Dagstoul, font un com-
promis sur les différends élevés entre eux à l'occasion des fiefs que le sire
de Dagstoul, leur père, tenait du comte de Saarbruck et de ses ancêtres.
Parmi ces fiefs se trouvent les cours et les villages de Herbisheim, Keyse-
castle et Oldingen^ et ce qui en dépend. Le comte Jean leur donne ces
biens en fief comme leur père les avait possédés.
1. Ainsi à Saint-Avold les comtes de Saarbruck ctaiciil. voués, et les comtes de Créhaugc
arrière-voués.
2. Kremer, A)-d. Gesch., 1 , 195; II, 376. II la nomme Adelheid.
Fr. Kölluer, Geschichte des Nassem -Saarbruc Aschen Landes. 112, l'appelle "A/ize-
II fllle du chevalier de Fontenai, sire de Bassompierre. »
3. J. Thilloy , Raines du comté de Bitche, 27.
4. Schrepdin, Als. illaslr.. II, 253.
5. Kremer, Ard. Gesch., II, 455. — F. Köllner, l'il.
6. « Das ist zu toussai in den Ueuhen -und Dearßcrn von llerhisheim . Keijsecastle tind
« Oldingen. »
- 79 —
En 1376', Arnokl, sirede PiUiiigen, chevalier, neveu de Jean et Nicolas
de Dagstoul, Henri de Fleckenstein, Jean el Jacob, frères de Ruldingen
(Raville), sires de Benestorff, el Jean de Brück, sire de llingesingen (Ilin-
guesange), reçoivent en fief du comte Jean II de Saarbruck tous les fiefs
qu'avaient possédés les sires de Dagstoul. Parmi ces fiefs, Jacob de Hul-
dingen, sire de Benestorff, fait plus particulièrement hommage pour les
cours de Herbetzhewi, Kesecastel et Oldingen, et les (i hohen » de Sainte-
Marie dans la vouerie de Herbitzheim.
XII.
La maison de Mœrs posséda le comté de Saarwerden pendant un siècle,
et elle brilla d'un certain éclat dans l'histoire locale de celte époque. Frie-
derich III, pelit-fils de Friederich F'', fui tué à la bataille de Bulgnéville ,
en 1431, aux cotés du roi René d'Anjou, duc de Lorraine. Il laissa un
jeune enfant, lecomle Jacob, pendant la minorité duquel la vouerie de
Herbitzheim eut à supporter de cruelles calamités.
En 1460^ une guerre violente s'était élevée entre l'électeur palatin, Frie-
derich le Victorieux, et son parent Louis le Noir, duc de Deux-Ponts.
Les soldais de Louis le Noir, commandés par le comte Emich de Leinin-
gen, pénétrèrent dans la seigneurie de Kirchheim et Stauf qui apparte-
nait aux comtes de Saarbruck, et qui avait été engagée par eux pour un
tiers au Pfaltzgraf Friederich. Peu de temps après (janvier 1461) ils s'em-
parèrent de la ville de Kirchheim et firent prisonnier le comte Philippe III
de Nassau-Weilburg, frère du comte Jean III de Nassau-Saarbruck. La
guerre éclata aussitôt entre Jean III et Louis le Noir. Le duc de Deux-Ponts
attaqua vigoureusement toutes les seigneuries de son adversaire, situées
dans le Westrich, et s'avança vers la Bliese,
Quarante ans auparavant (1421) le comte Henri de Fénestrange avait en-
gagé au comte Phihppe F*" de Nassau-Saarbruck (père de Philippe II et de
Jean III) la seigneurie de Diemeringen^, comprenant le château et la ville
de Diemeringen, Bütten, Dellingen, Wellerdingen et Wyher*, el cette en-
gagère durait encore. Louis le Noir vint porter la guerre dans la seigneu-
rie de Diemeringen. Ses cavaliers et ses fantassins ravagèrent d'une manière
1. Kremcr, Ard. Gesch., II, 537.
Uff den Sonderg n/s man singet lœtare das ist zu haHifasloi (23 mars).
2. F. Küllner, 209, 210.
Ad. Kölincr, Geschichte der Herrschaft Kirchheim - Hotand vnd Stauf. 189.
3. F. Köllner, 190 ; moyennant 4,000 florins.
4. Weyer , village détniit près do Raliliiig.
— 80 —
épouvantable tout le pays compris entre la Bliese et l'Eichel, bien qu'il
appartînt au comté de Bitche, et portèrent la flamme et la dévastation jus-
qu'à Herbilzlieim et Keskastel.
C'est à celte guerre dévasiatrice que l'on peut attribuer la ruine, et
peut-être la destruction de plusieurs villages du canton de Bobrbach qui
ont complètement disparu, soit à cette époque, soit pendant le siècle sui-
vant.*
Malgré un arbitrage et une paix intervenus au mois de juin 1461 , la
querelle de ces princes dura longtemps encore. Dix ans plus tard (1471)
ils étaient encore en guerre, et le comte Jean de Saarbruck défiait le duc
de Deux-Ponts. Le chroniqueur ne prononce plus le nom de Herbitzheim,
mais il n'est que trop probable que, pas plus en 1471 qu'en 1461, la vallée
de l'Eichel n'a échappé aux horreurs de la guerre.
XIII.
Le quinzième siècle paraît avoir été pour l'abbaye de Herbitzheim l'é-
poque de sa plus haute prospérité.
L'abbesse exerçait les droits seigneuriaux^ dans les villages de Herbitz-
heim, Keskastel, Gersheim sur la Bliese (Bavière), Grening, en partie,
Grundwiller et Bemering, dont les habitants étaient désignés sous le nom
« d'enfants de Sainte-Marie. »
Elle tenait Siltzheim en vertu d'une engagèredes comtes de Saarwerden,
et il paraît que cette engagère durait encore en 1525% malgré le docu-
ment suivant que rapporte Dom Calmet:''
«En 1518, Jacob, comte de Mœrs et de Saarwerden, déclare qu'en re-
connaissance des services que lui a rendus Conrad Bayer de Boppart^ il lui
donne en fief héréditaire tous ses droits au village de Sultzen, pour en
jouir lui et ses héritiers en la manière qu'en jouissait dame Benigne Kreu-
tzinn, abbesse de Herbitzheim, à titre d'engagère. »
Outre ces droits seigneuriaux, l'abbaye avait divers revenus ecclésias-
tiques. « Elle jouissait de beaux droits, dit l'histoire de Metz®, et entre autres
1. J. Thilloy, Ruines du comté dp. Bitche. 45.
2. Henri Lepage, Documents inédits si/r la guerre des Rnstmtds , 142. 147, 121 , 140.
94, 92 et 134.
.3. Henri Lepage, 134.
4. Notice de Lorraine, V Herditzheim. Il s'agit évidemment du comte Jean Jacob. Le
comte Jacob, son père, était mort avant I.')12.
5. Les Bayer de Boppart étaient seigneurs à Sarralbe et à Chàteau-Brehain.
6. Bened. H, 158. Ils ont emprunté ces détails à l'ancien »polium metense , tit. « Be7ief.
« abbatisscp in Herhitzkeim » , document perdu.
— 81 -
du patronage des cures de Morlene (Merten près Boulay) , dans l'archi-
prêtré de Varize; de Remering(près Puttelange-lès-Sarralbe); de Gersheim
(sur la Bliese, en Bavière); de Balding ou Ralding (Rahling, canton de
Rohrbach); de Herbitzheim; de Œrmingen (surl'Eichel), dans celui de Bou-
quenom; de Rodalben (près Pirmasentz, Bavière); de Valmistri (Volmün-
ster, chef-lieu de canton); de Rohrbach (chef-lieu de canton); de Kirch-
heim (sur la Bhese, Bavière), dans celui de Hornbach. »
Il esta remarquer que les pouillés du dix-huitième siècle n'ont pas gardé
trace de ce patronage de l'abbaye de Herbitzheim. Ils indiquent comme
collateur de toutes ces paroisses, le roi, ratione dominii, aux droits du
duc de Lorraine', tant au siècle dernier l'on avait déjà perdu le souvenir
de l'antique abbaye de Herbitzheim.
XIV.
La maison de Mœrs allait s'éteindre. Les comtes .lean et Jacob H, qui
s'étaient partagé le comté de Saarwerden, avaient laissé l'un une fille, Ca-
therine, mariée au comte Jean-Louis de Nassau-Saarbruck, l'autre un fils,
le comte Jean-Jacob, le dernier de sa race, et qui était en état d'imbé-
cillité.
Dès l'an 1512% avec le concours de Beatrix de Salm, mère de Jean-
Jacob, et l'assentiment du duc Antoine de Lorraine, le comte Jean-Louis
de Nassau-Saarbruck, héritier pour moitié de ces beaux domaines, prit la
tutelle du comte et l'administration de sa part de la seigneurie, portion
dont il avait la succession éventuelle. Mais avant que la mort du comte
Jean-Jacob ne lui donnât la possession exclusive du comté de Saarwerden
et de ses dépendances, de bien graves événements devaient survenir dans
la vouerie de Herbitzheim.
Tous les historiens ont raconté la terrible jacquerie qui éclata, en 1525,
sur les deux rives du Rhin et qui est connue sous le nom de guerre des
Paysans, des Rustauds ou des Anabaptistes. Effroyable explosion des haines
et des rancunes d'un peuple réduit à la plus horrible misère par deux siè-
cles de guerres intestines, et opprimé par des vexations intolérables, elle
était la plus sauvage réaction du vassal contre les seigneurs, du paysan
contre le clergé et surtout contre les moines. Les nouvelles doctrines re-
ligieuses n'en étaient que le prétexte. Luther avait prêché la suppression
1. rouillé (Je lovôché de Melz.
Thibaud, Ma/ières hctiélicialex. 394.
2. F. Köllner. 232.
11- SÉRIE. — T. II. —(M) 6
— 82 -
(les monastères et la confiscation de leurs biens; il avait proclamé les princes
les lictem'S, ot les bourreaux de Dieu Le peuple s'empara de ces théories
qui flattaient ses passions haineuses et sa soif de vengeance; cette liberté
religieuse dont on lui parlait, il en fit une liberté politique et sociale. Il
n'eut plus qu'un but, la destruction de toutes les autorités tyranniques et le
partage des biens.
La révolte éclata en Alsace vers le milieu du mois d'avril, et le 1^'' mai
suivant, l'armée des insurgés s'élevait à plus de 60,000 hommes!
Partout où ils se soulevaient, les paysans se jetaient sur les abbayes les
plus voisines, sur les châteaux sans défenseurs, et les livraient au pillage et
à l'incendie. Les cruautés les plus atroces mêlées aux excès de tous genres;
le massacre des moines, l'incendie des châteaux, le pillage des couvents et
des églises signalaient partout le passage des bandes qui allaient rejoindre
la grande armée.
Formée des révoltés accourus de tous les points de l'Alsace, cette armée
se rassemblait à Saverne, avec l'intention hautement manifestée de franchir
les Vosges et de donner la main aux paysans lorrains.
Déjà l'incendie avait gagné les forêts du comté de Bitche. Soulevés en
masse, les sujets du comte Reinhard s'étaient rués sur l'abbaye de Sturtzel-
bronn et s'y étaient installés après l'avoir presque détruite; puis, appelant
à eux les révoltés du Palatinat, ils s'étaient emparés des châteaux de Lin-
delbronn et de Graffenstein , appartenant au comte Emich de Leiningeii;
enfin, ils étaient allés à Wissembourg rejoindre le vigneron Bacchus Fisch-
bach.
11 fallait mettre un terme à ces épouvantables désordres. Les villes de
Strasbourg et de Haguenau, la régence autrichienne d'Ensishejm et le comte
Reinhard de Deux-Ponts-Bitche s'adressèrent au duc Antoine de Lorraine.
Le péril était grand; il fallait se hâter. Avec faide de son frère, le comte
Louis de Vaudemont, et du duc Claude de Guise, le duc Antoine rassembla
promptement une armée et se dirigea à marches forcées vers les passages
des Vosges.
Pendant que le principal corps d'armée des insurgés occupait Saverne et
menaçait la Lorraine française, une troupe de 4,000 paysans s'était dirigée
vers Sarrebourg et, descendant la vallée de la Sarre, était venue détruire et
occuper l'abbaye de Ilerbitzheim.
A leur approche, entraînés par les conseils et les excitations de quelques-
uns des sujets du comte Reinhard de Bitche, les vassaux de l'abbessc s'é-
taient soulevés, avaient couru se joindre aux bandes qui s'approchaient et
les avaient conviées au pillage du monastère. Le couvent lui-même devint
le quaiiier-général d'où ils envoyèrent des émissaires dans tout le bailliage
(rAllemagnc. C'est à Ilerbitzheim que vinrent les rejoindre les paysans des
comtés de Morhange, de Puttelangc, deForbach, et des chàtellenies de
Ilombourg- et de Gemünd (Sarreguemines). ^
De son côté, le duc Antoine s'était mis en mouvement avec son armée.
Tandis que lui-même s'avançait vers Saverne, il avait envoyé sur la Sarre
un corps détaché, sous le commandement de Jean de Draubach, capitaine
de Gemünd , avec mission de reconnaître la position des insurgés , qui s'é-
taient retranchés à Ilerbitzheim ". Un premier engagement eut lieu dans
les bois situés entre Herbitzheim et Sarreguemines \ Jean de Braubach,
désarçonné par accident, tomba entre les mains des insurgés, qui le firent
conduire à Saverne.
Privée de son chef, l'avant- garde lorraine dut se replier sur le château
de Gemünd; mais peu de jours après, ralliée par de nouvelles troupes, sous
le commandement de Wolff de Hohenfelz et Reypoltzkirchen , sire de For-
bach, elle se porta de nouveau en avant.
Pendant ce temps, le comte Jean-Louis de Nassau-Saarbruck et le Rhin-
graff Jean VII, comte de Morhange, s'emparaient d'Œrmingen. Les paysans
durent abandonner leur camp de Ilerbitzheim , et ils se retirèrent sur
Saverne, où ils ne tardèrent pas à être détruits par l'armée du duc An-
toine.
Cette crise avait porté un coup mortel à l'abbnye de Ilerbitzheim. Nous
n'avons aucun renseignement précis sur ce qu'elle eut à souffrir; mais les
détails que les chroniqueurs rapportent du pillage des autres abbayes, des
destructions sauvages et aveugles de tous les objets d'art, des bibliothèques,
des chartriers, peuvent nous donner une idée exacte de ce qui dut se passer
dans ce malheureux monastère.
Lorsque, après une occupation de trois semaines , les paysans furent
obligés de se retirer, les religieuses reprirent possession des ruines de leur
couvent, mais c'en était fait de l'antique abbaye; elle ne devait plus se re-
1. Henri Lepage. Docameids sur les guerres des Rustauds. XII. M. Lepage ostinie à en-
viron 1,800 le nombre des révoltés de ces seignenries, y compris environ 300 vassanx de
l'abbaye.
'2. ¥. Kolliier, AiiO.
Merian. Topogr. imlnlln. Rheni, 43; v'" Sa.vhbrucicen et Saarwhrden.
3. Ce combat paraît avoir été livré entre Snltzheim et Wittring, dans ic petit liois dn
Kremrich aiijourdlnii défriché et transformé en nne des plus belles fermes du pays.
Lors du défrici:ement, M. Eusèbe Houricr , propriétaire du Kremrich, trouva sous un
chêne le tronçon d'une belle épée damasquinée d'argent, dont la forme et le dessin accusent
d'une manière positive la fin du quinzième siècle.
— 8â —
lever de cette crise, et il ne lui restait plus que peu d'années d'une exis-
tence languissante.
XV.
Deux ans plus tard (1527), Jean-Jacob, dernier comte de Mœrs et Saar-
werden, mourut. Parmi les domaines de sa maison, le château de Vieux-
Saarwerden, la ville de Bouquenom et la cour de Wiebersvveiler étaient fiefs
de l'évêché de Metz; le reste était franc-alleu ou relevait de l'archevêché de
Trêves. Néanmoins, le cardinal Jean de Lorraine, administrateur de l'évê-
ché de Metz , se hâta de revendiquer comme suzerain la totalité du comté,
foute d'héritier mâle. Le comte Jean -Louis de Nassau-Saarbruck résista à
ces prétentions et porta la question devant l'empereur Charles-Quint*, qui,
le 13 juin 1527, défendit au cardinal de prendre possession de la baronnie
contestée et fit porter la question à la chambre impériale. Le cardinal jugea
prudent de cesser ses poursuites; mais il s'empressa d'accorder à son frère,
le duc Antoine de Lorraine^, l'investiture du château de Vieux-Saarwerden,
de la ville de Bouquenom, de la cour de Wiebersweiler, et de tout ce qui
en dépendait. Dans la pensée des deux frères, ces expressions signifiaient
le comté de Saarwerden tout entier.
Le comte Jean-Louis s'adressa de nouveau à l'empereur, qui, le 22 oc-
tobre 1530, saisit la chambre impériale d'Augsbourg. Dès lors commença,
devant cette haute juridiction, un procès qui dura un siècle, et dont nous
verrons plus loin les résultats et les conséquences. Mais pendant tout ce
temps, bien que son droit fût contesté, la maison de Saarbruck demeura
en possession du comté de Saarwerden. Elle allait y ajouter la propriété de
l'abbaye de Herbitzheim, dont elle revendiquait la Vouerie du chef des
comtes de Saarwerden.
XVI.
Le 1^'' avril 1544 ^ l'abbesse de Herbitzheim, Amalia d'Altorff de Wol-
lenschlager \ avec le consentement de la seule professe (conventualinn)
encore vivante, vendit au comte Jean -Louis de Nassau-Saarbruck, «ileur
voué héréditaire» (Erb- und Schirmvogt), le monastère avec les villages,
1. F. Külliier, 24ß.
2. Notice, V" Saarwkroen. Les lettres patentes sont datées de Gorapièg-ne le 26 septembre
1527.
Meurlssc, Histoire des e'rêqi/es de Metz. G04.
3. F. Kollner, 247.
Merian., 48; v Saarbruck.
4. Famille dn Talatinat établie en Alsace, voy. Hertzog, Edclsass. clironik, VI, 217.
- 85 -
cours, biens, rlixines, rentes, etc., en tonte propriété et hérédité. Les
motifs de cette vente (ou plutôt de cette donation) sont: «Que dans ces
temps si pleins d'anxiété et de troubles , l'état monastique est tombé en tel
discrédit, mépris et déconsidération, que personne, quelle que soit sa posi-
tion sociale, élevée ou inférieure, ne veut plus l'embrasser ou le faire em-
brasser à ses enfants'.» Elle ajoute que les revenus de l'abbaye sont
tellement diminués que les religieuses ne peuvent plus subvenir à leurs be-
soins.
Le comte Jean -Louis ne promettait aucun prix pour cette acquisition,
mais il conservait à l'abbesse la jouissance des biens de l'abbaye, l'adminis-
tration et le gouvernement du monastère; il s'engageait à protéger les
religieuses, à subvenir à leurs besoins aussi longtemps qu'elles voudraient
rester dans leur couvent, et, lorsqu'elles l'abandonneraient, à leur donner
à Saarbruck un asile et une pension.
Cette cession, faite avec le concours du vice-légat Jean Turgot, fut ap-
prouvée, en 1545, 1548 et 1550, par les papes Paul III et Jules III; mais
avec les réserves expresses, prescrites par la bulle du pape Paul II, concer-
nant l'inaliénabilité des biens de l'Église.'^
En même temps et la même année 1544, l'abbesse vendit au comte Jean-
Louis le tiers de poêle qu'elle possédait aux salines de Saltzbronn , près
d'Albe, pour la somme de 2,000 florins.^
Cette même année 1544, le mardi après Jubilate, au mois de mai, le
comte Jean-Louis partagea ses domaines entre ses fils. Il attribua la vouerie
de Herbitzheim à l'aîné, Philippe, qui héritait du comté de Saarbruck *.
Jean-Louis mourut le 18 juin 1545, et sa veuve le suivit dans la tombe en
1547 (vendredi après l'exaltation de la croix). Avec elle s'éteignit la maison
de Saarwerden. ^
XVII.
Si l'on en croyait les termes d'une ordonnance du duc François II de
Lorraine, du r'' décembre 1630 ^ les comtes de Nassau-Saarbruck auraient,
en 1553, expulsé les religieuses de Herbitzheim et se seraient saisis des
rentes et revenus de l'abbaye. Cette assertion ne paraît point exacte. En
1. Kreiacr, !, -221 , dit que l'on ne pouvait plus trouver de novices pour peupler Tabbaye.
2. Fr. Kollner, '247, note 20.
3. Ibid. 248.
4. Ibid. 252.
5. Ibid. 252, 255.
6. Rogcviile, Dict. hislor.; v" Colléue, I, 342.
— 80 -
effet, en 1554, le comte Jean IV, qui venait de succéder à son Irèrc Phi-
lippe, donna l'abbaye de Herbitzheim à sa sœur Jeanne.
Jeanne, comtesse de Nassem- Saarbruck , fille du comte Jean-Louis et de
sa première femme, la pfaltzgTa3finn Elisabeth, était née le 13 décembre
1490. A fàge de seize ans (1512), elle avait fait profession au monastère de
Rosenthal, avec sa sœur Anna, alors âgée de dix-neuf ans (t 1505). Elle avait
donc cinquante-huit ans alors qu'elle fut nommée abbesse de Herbitzheim.'
L'année suivante 1555-, elle vendit, en cette qualité, au comte Jean IV,
son frère, la ferme de Kirchlieim sur la Bliese (Bavière) qui appartenait à
l'abbaye.
Cette même année, elle retourna à Rosenthal et y mourut le 12 des kal.
de décembre 1550, jour de saint Thomas apôtre (21 décembre).^
A partir de cette époque l'abbaye de Herbitzheim n'existe plus. .
Dom Calmet* dit bien qu'en 1579 un procès était pendant devant la
chambre impériale sur les plaintes de l'abbesse et des religieuses de Her-
bitzheim au sujet d'attentats et de violences commis par les officiers d'Albe
contre quelques-uns de leurs oQîciers de Keskastel. Mais c'était évidem-
ment la suite d'une instance entamée depuis longues années, qui avait
survécu aux abbesses et aux religieuses, et qui se rattachait sans doute au
grand procès entre les ducs de Lorraine et les comtes de Saarbruck, pro-
cès qui ne devait se terminer qu'en 1029.
Dans les dernières années du seizième siècle, les comtes de Saarbruck
se convertirent au protestantisme et mirent en œuvre tous les moyens à
leur disposition pour développer les idées nouvelles dans le comté de Saar-
werden et la vouerie de Herbitzheim.
Ce qui subsistait encore des revenus de l'abbaye, avec ceux de la collé-
giale de Saint - Arnuald , également supprimée, fut attribué par eux à l'en-
tretien des ministres introduits partout au lieu et place des curés; aux
réparations des églises transformées en temples; et à l'entretien de bour-
siers (Stipendiaten) au gymnase protestant de Saarbruck (1575).
Enfin en 1002^, le comte Louis donna à l'hôpital de Saarbruck une rente
de 100 florins sur les biens de Herbitzheim
1. Fr. Kolliiei', 350, 351 et note.
J. G. Hagelgans. Nassanisckc GeschlechtstaJ'cl, 53. 11 la dit née le 13 septembre.
2. Fr. liöllner; 25G, 284.
3. Orig. nossoic. dip/om. Il, 426; Necrologium mo7uist. vcilHs Rosarum : « obiil frauw
Johanna grcffin zu Nassaime in anno LXVI (faute d'impression : ce doit être LVI).
4. Notice, v° Herritzheim. Siipp.
5. Fr. Küllncr, 2i)0, 312.
Mcriaii., 13; v" Saakuuuck.
— 87
XVIII.
Le 25 aoûl 1581', nonobstant le grand procès relatif au connté fie Saar-
werden et à ses dépendances qui se poursuivait toujours devant la cham-
bre impériale , le duc Charles III de Lorraine et le comte PhiHppe III de
Nassau-Saarbruck, firent un traité sur quelques-uns des différends qui s'é-
taient élevés entre eux. Le duc céda au comte, «à perpétuité et héréditai-
rement l'advocatie et le droit de haute justice, en cinq cas appelés com-
munément le grand criminel savoir: meurtre, incendie, vol, viol, et plaies,
comme aussi les droits régaliens et autres droits et revenus à cause de sa
seigneurie de Sarralbe sur le monastère de Ilerbilzheim et dans les villages
de Hcrbitzheim, Keskastel, Saint-Michel, Remcring et Grundviller, ez ban?
sujets, maisons, cours, bois, moulins et autres profits, et émoluments
dont il jouissait ou qui pouvaient luicompéter ou appartenir... »
En un mot, le duc fit un abandon complet de toutes ses prétentions à la
.souveraineté et seigneurie de la vouerie de Herbitzheim.
Ce même traité de 1581 constate qu'à cette époque le seigneur de Châ-
teau-Brehain^ avait une part dans la vouerie de Herbitzheim.
«Il a été reconnu, dit le traité, qu'en cas où nous, duc Charles, vien-
drions à acquérir à titre d'achat ou autrement la part et droit qui appar-
tiennent au sieur de Château-Brehain dans les villages de Keskastel, Saint-
Michel et Herbitzheim , nous en accommoderons ledit comte Philippe,
moyennant d'autres biens de même valeur et aussi convenables à notre
seigneurie de Sarralbe »
Cette clause du traité paraît avoir reçu son exécution, lorsque, peu de
temps après, le duc Charles acquit du baron de Bopparl sa part de la sei-
gneurie d'Albe et de ses dépendances.
XIX.
Une clause spéciale de ce même traité de 1581 avait consacré la cession
et l'abandon faits au duc de Lorraine par les comtes de Nassau de tous
leurs droits sur les salines de Sarralbe et sur la Cour de Saltzbronn. Mais
plus tard, ces comtes cherchèrent à éluder ce traité et tentèrent d'établii-
une saline sur le territoire de Herbitzheim. Aujourd'hui encore il existe sur
le ban de ce village un filet d'eau salée que l'on croit être une dérivation
I . Arch. de Sarrulbr.
Fr. Kölliier, -'91.
•-'. Georges, baroii Bayer de Bopparl, général au service de IKiiipirc, dernier de son
nom, tué d'un coup de canon au siège d'Ofcu en 1098.
des sources de Sallzbronu'. Â la suite des guerres du dix-septième siècle
les salines de Sarralbe demeurèrent abandonnées et inexploitées. Les offi-
ciers des princes de Nassau profitèrent de cet état de choses. Au mois de
juillet 1737, un essai de saline fut tenté à l'aide de ce fdet à environ 400
toises au-dessous de Saltzbronn. Cette tentative semble ne pas avoir réussi,
toutefois elle amena des négociations avec le roi de France. Par une con-
vention du 27 août i7i1 les princes de Nassau renoncèrent à faire du sel,
dans leurs terres de Saarwerden, Saarbruck, Otlweiler, Hombourg etHer-
bitzheim, moyennant l'engagement pris par le roi de leur donner annuel-
lement 400 muids de sel sur les salines de Lorraine.^
XX.
En 161 9^ un traité entre le duc Henri II de Lorraine et le comte Louis
de Nassau-Saarbruck, régla diverses prétentions, contestations et erreurs
relatives à la vouerie de Herbitzheim, et deux ans plus tard, le 3 octobre
1621 , un autre traité régla un échange de droits et de biens. Le duc Henri
reçut les villages de Wiesviller, Wœlfling, Remeringet Grundviller (arron-
dissement de Sarreguemines); il abandonna au comte la part lorraine dans
les villages d'Œrmingen, Siltzheim et Zetlingen, ainsi que des biens par-
ticuliers dans la vouerie de Herbitzheim.
Le 24 mai 1623*, le même comte Louis signa avec le duc Henri un traité
ayant pour but de rendre la Sarre navigable de Herbitzheim à Saarbruck,
sous la réserve des droits de l'électeur de Trêves, Lothaire de Metternich,
à qui appartenait le village de Welferding, dépendant du bailliage de Blies-
castel.
Il est inutile d'ajouter que ce traité ne fut suivi d'aucune mise à exécution.
XXI.
Peu d'années plus tard^ et après un siècle de plaidoiries, la chambre
impériale de Spire rendit enfin, le 7 juillet 1629 (N. St.), un arrêt par le-
quel elle restituait au duc François de Lorraine les anciens fiefs de l'évêché
Vieux-Saarwerden, Bouquenom et Wiebersweiler. Tout le reste fut attribué
1. Baquoi, \° Herritzheim, 159.
2. Notice, v° Saltzbkonn.
Durival, la Lorraine , II, 247.
L'exploitation des salines de Saltzbronn ne fut reprise qu'en 1779.
3. Fr. Köllner, 310.
•i. Dom. Cal. III; 17S, pr. 111. ccccxcij.
o. Fr. Kollner, 320.
Merian., Topnrj. palalin. Rheni, 44; x" SA.vuwEnnKN. 11 donne le texte de l'arrêt.
— 89 -
au comte de Nassau-Saarbruck. L'arrêt était bref et peu clair. Le duc de
Lorraine s'empressa de l'interpréter à sa manière. Le 24 juillet, le baron
de Serainchamp notifia l'arrêt au comte Wilhelm-Louis, et six jours après,
à la tête de quelques milliers d'hommes avec du canon, il se mit en pos-
session non pas seulement du comté de Saarwerden tout entier, mais en-
core de toute la vouerie de Herbitzheirn, y compris Keskastel, Siltz-
heim et Œrmingen. Les officiers du comte de Saarbruck furent expulsés et
les habitants se virent contraints de faire hommage au duc.
En vain le comte Wilhelm-Louis obtint-il de la chambre impériale de
Spire un mandat de restitution*; le duc persista. Il fit arracher les armes
de Nassau, ferma les temples de la religion réformée, et le président
Rousselot enjoignit, le 18 août, à tous les ministres de quitter le comté et
la vouerie dans les vingt-quatre heures, sous peine de mort.
A Ilerbitzheim, en particulier, les fonctionnaires et les ministres furent
expulsés; les documents, comptes et papiers de toute espèce enlevés, et
toutes les propriétés particulières du comte de Nassau confisquées.^
Vers le même temps, le duc François qui s'occupait à fonder à Bouque-
nom un collège de jésuites pour combattre l'hérésie, lui attribua, par son
ordonnance du i^'' décembre 1630' tous les revenus et rentes de Ilerbitz-
heim qu'il s'était fait donner par un bref du pape Urbain VIIL
Le duc François mourut en 1632, et le t= octobre le duc Charles IV,
son successeur, se fit rendre hommage dans la vouerie de Herbitzheirn
aussi bien que dans le comté de Saarwerden.*
Mais la période franco-suédoise de la guerre de Trente ans venait de
commencer. Bientôt les provinces rhénanes furent envahies par les troupes
du maréchal Horn," et son lieutenant dans le Westrich, le Rhingraff Otto-
Louis, comte de Morhange, repoussa les soldats lorrains qui, depuis 1629,
occupaient la vouerie de Herbitzheirn.'
Dès lors, l'histoire locale disparaît dans cette terrible crise qui pesa sur
nos provinces, et les querelles du duc de Lorraine et du comte de Saar-
bruck demeurent en suspens durant tout le temps de l'occupation française.
Le traité d'Osnabruck du H octobre 1648 entre le roi de Suède et
l'empereur, réserva les droits de la maison de Nassau sur le comté de
Saarwerden, mais ce n'est que par le traité de Nuremberg du vf juillet
I. MinulafidH pœnrile de reslilupialo , item de relnxando. a/>ducc/tdo luilite et (iniplius
non ofTcndendo smc clausula (15 août 1G29).
•2. Fr. KöUiier, 321, 322.
3. Rogéville, Dict. hist., v° Culléue.
4. Mcriaii. Zugab ellichc. oh. Rheinisch Craijs Standen. 17; v" Saarwehue.n.
5. Fr. Kölliicr. 321.
— 00 —
1650 que ces droits l'ureiil définitivemenl consacrés'. Toulelbis le duc
Charles IV réclamait une indemnité d'un million de florins; d'un autre
côté, les seigneuries contestées étaient toujours aux mains du roi de France,
la restitution prescrite par les traités ne fut point opérée.
En 1659', le comte de Saarbruck porta de nouveau ses réclamations
devant la chambre impériale; cette fois il devait réussir.
Le 28 février i66i ', un traité signé à Paris entre le cardinal Mazarin
et le duc de Lorraine restitua au duc tous ses États. Par l'article xxiv de ce
traité, le roi, comme garant du traité de Munster, réserva tous les droits
du comte de Nassau -Saarbruck sur le comté de Saarwerden et sur la pré-
vôté de Herbitzheim, droits qui, du consentement du duc, devaient être
soumis à la chambre impériale de Spire.
Après de longues et nombreuses péripéties , la diète de Ratisbonne obligea
enfin le duc de Lorraine à restituer ce comté et cette vouerie tant disputés
et à s'en tenir aux trois locahtésqui lui avaient été accordées par la chambre
impériale de Spire, en 1629, c'est-à-dire Vieux -Saarwerden, Bouquenom
et Wiebersvveiler. '^
Le r^ octobre 1670, les commissaires impériaux remirent les comtes
de Nassau en possession officielle des domaines dont ils avaient été privés
depuis trente-cinq ans. Les vassaux de Saarwerden furent réunis le 13 à
Lorentzen; ceux de la vouerie furent rassemblés à Herbitzheim le 14, el là,
en grand appareil, au son des trompettes, les commissaires impériaux et
les cinq princes de Nassau^, à cheval, firent donner lecture de la décision
de la diète, délièrent leurs sujets du serment de fidélité au duc de Lor-
raine, reçurent leur hommage et firent planter partout des poteaux à leurs
armes.
Après quoi, les vassaux furent « régalés de vin,» et, dit le chroniqueur,
« renvoyés joyeux à la maison. » "
Mais lorsque, à Herbitzheim comme ailleurs, les populations catholiques
réclamèrent le libre exercice de leur religion et le droit de conserver leurs
préti-es, on leur répondit que les stipulations de la paix de Munster (1624)
seraient suivies; qu'il leur était parfaitement loisible d'aller, eux et les leurs,
1. Fr. Ivöllaer, 333.
2. Ibid. 342.
3. Ü. Calmet. pr. III, Dlxij , DIxviij. ,
4. Fr. Köllner, 343.
5. Les comtes Johann d'Idstciu, Jean-Louis d'Otlwcilcr, Gustave-Adolph de Saarbruck,
Walrad de Usingen et Friederich de Weilburg.
6. üotfried's flironik , l\ , rJ7 ap. Köllner, 341, 345: « LusHij luid J'ràldich nach
haus ...»
— 91 —
aux églises où bon leur semblerait; mais on leur refusa de la manière la
plus absolue le droit de conserver un seul prêtre catholique. '
Ainsi fut terminée cette contestation plus que séculaire. Les comtes de
Nassau ne devaient pas jouir longtemps de leur succès.
XXII.
Dès l'année suivante éclata cette fameuse guerre de Hollande, sous le
prétexte de laquelle la France envahit de nouveau la Lorraine et les pro-
vinces rhénanes. En 1672 et 1673, les armées françaises se livrèrent dans
les pays au delà de la Sarre à ces horribles dévastations dont les cruels
souvenirs sont encore vivants aujourd'hui ; puis, en 1680, la chambre royale
de Metz rendit ses célèbres Arrêts de réunion , par lesquels elle revendiqua
pour la couronne de France, à divers titres, une foule de seigneuries, parmi
lesquelles les comtés de Saarbruck et de Saarwerden. Toutefois, le roi se
contenta d'en réclamer la suzeraineté, et la comtesse Éléonora-Clara, douai-
rière du comte Gustave-Adolf de Nassau-Saarbruck, dut faire hommage à
la chambre royale de Metz, le 9 janvier 1681, au nom et comme ayant la
garde noble de ses enfants mineurs. ^
Dès lors, une ordonnance du bailliage épiscopal de Vie enjoignit aux su-
jets et vassaux du comté de Saarwerden et de ses dépendances, de prêter
de nouveau serment aux comtes de Nassau-Saarbruck,
XXIII.
Une autre contestation allait s'élever, moins menaçante cependant que les
précédentes.
Le duc Charles IV de Lorraine avait eu de Beatrix de Cusance, princesse
de Cantecroix, un fils naturel, Charles-Henri, prince de Vaudemont. Il
portait à ce fils une affection profonde, et il avait conçu l'idée de lui créer
un grand fief au milieu de ses États. Dès le 19 mars 1667, il lui avait donné
le comté de Falkenstein; le 13 novembre suivant, le comté de Bitche; deux
jours après, il y avait ajouté le comté de Saarwerden et la baronnie libre
de Fénestrange. Enfin, il avait joint, à ces beaux domaines, les commu-
nautés de Lixheim, Marmoutier, Saareck et Saaralbe, et il avait résolu de
demander à l'Empereur d'en former un État souverain et d'ériger ces
belles baronnies en « duché et principauté de Saarland et de l'Empire ».
1. Fr. Köllner, 3i5.
2. Fr. Küllner, 372: Eleonora Clara, comtesse de Holieiilohe et Gleichen. Le comte
Friedericli Ludwig, comte d'Ottweiler (et eu 1723 de ^Saarbruck), lit hommage avec elle i)uiif
les parts qu'il possédait par indivis avec ses cousins.
— 92 —
Charles IV étail mort, en 1675, sans avoir pu obtenir celte érection;
mais le prince de Vaudemont avait la propriété nominale de tons ces fiefs.
En iG8i, il avait fait faire ses aveu et dénombrement à la chambre royale
de Metz, et le IG janvier, il en avait obtenu une ordonnance de mise en
possession.
Armé de cette ordonnance, il fit intimer aux baillis de Nassau d'avoir à
évacuer le comté de Saarwerden et la vouerie de Herbitzheim. Une pro-
testation fut opposée à ces prétentions, et il s'éleva devant la chambre
royale un nouveau procès qui était encore pendant en 1683, époque à la-
quelle le procureur général reçut du roi l'ordre de faire débouter le prince
de Vaudemont de ses prétentions sur le comté de Saarwerden.'
A cette même époque (1683) fut opérée la réunion à la France , qui mit
sous le sceptre de Louis XIV la Lorraine et ses enclaves. Le comte Louis-
Crato de Saarbruck était au service de la Hollande, Tous ses domaines
furent confisqués et suivirent les destins de la Lorraine jusqu'à la paix de
Ryswick(1607).'
Par suite de cette paix, le coriitc de Saarwerden et la vouerie de Herbitz-
heim revinrent définitivement aux princes de Nassau, furent possédés indi-
visément par eux, et, suivant le pacte de famille, les reprises en furent
faites par le prince-chef de la maison.
Dès lors, le calme et la paix revinrent à ces petites seigneuries aussi cruel-
lement éprouvées par les événements que l'avaient été leurs grandes et
non moins malheureuses voisines, l'Alsace, la Lorraine et les provinces rlié-
nanes.
XXIV.
Par suite de différents pactes de famille intervenus entre les membres de
la maison de Nassau, le comté de Saarwerden et la vouerie de Herbitz-
heim étaient demeurés indivis. Le 27 mai 1745 '\ un partage fut opéré
entre les deux branches de Saarbruck et de Weilburg dans la proportion
de deux tiers pour Saarbruck et un tiers pour Weilburg. Le prince de
Nassau -Weilbourg obtint Herbitzheim, Keskastel et Sültzheim , avec les
villages de liurbach, Ey willer, Pistorff, Rimsdorf, Schopperten, WoUer-
dingen et Zollingen, Neu-Saarwerden fut le chcf-licu de ce bailliage et la
résidence seigneuriale. *
1. Fr. Kolliicr, oT;').
2. Ibid. iOl, 4ö2.
3. Ibid. 454.
4. Barj^iiol , ô51.
— 93 —
Le prince de Nassau-Saarbruck établit son bailliage à llarskirchen et
eut dans son lot toutes les autres communautés de l'ancien comté de Saar-
werden', sauf Bouquenom et Vieux-Saarwerden , qui appartenaient au roi,
aux droits du duc de Lorraine.
Après la mort du roi Stanislas, duc de Lorraine, et la prise de posses-
sion de la Lorraine par la France, deux traités intervinrent entre le roi
Louis XV et les princes de Nassau-Saarbruck ^ et de Nassau-Weilbur"-. ^
Ces deux traités confirmaient aux princes de Nassau tous les droits con-
sacrés par les conventions antérieures, portaient rectification des frontières
et abolition du droit d'aubaine. Ils ne présentent qu'une circonstance que
nous ayons à relever : la vouerie de Herbitzheim y est indiquée comme
appartenant aux deux branches de la maison de Nassau, dans les propor-
tions du partage de 1745, c'est-à-dire deux tiers pour Saarbruck et un
tiers pour Weiiburg.
XXV.
Les princes de Nassau conservèrent la paisible possession de leurs do-
maines jusqu'à la Révolution française. A cette époque, le mouvement qui
se produisait dans les esprits en Lorraine et en Alsace ne pouvait épargner
les enclaves allemandes. Les idées révolutionnaires envahirent ce petit pays.
Les sujets de la maison de Weilburg- se firent surtout remarquer par leur
esprit de révolte contre les officiers des princes de Nassau.
Le décret du 19 novembre 1792, par lequel la Convention engageait
tous les peuples voisins de la frontière à se soulever contre leurs souve-
rains fut entendu. De toutes parts des pétitions furent adressées à la Con-
vention et demandèrent la réunion à la France des enclaves relevant de
l'Empire. Dans sa séance du 14 février 1793*, la Convention entendit un
rapport de Carnot sur cette question ; le comité diplomatique proposa et la
Convention rendit immédiatement un décret par lequel le comté de Saar-
vverden et la vouerie de Herbitzheim se virent réunis à la République fran-
1 . Altwiller.
Eschwiller.
Otlwiller.
Baerendorfl.
Gocrlingeii.
Ramvillcr.
Berg.
Harskirchen.
Rexiiigen.
Bissen.
Hijisingeii.
Sicwiller.
Bust.
Hirschland.
Thal.
Butten.
Ivirchberg.
Weyor.
Diedendorff.
liOrentzen.
Willer.
Domfessel.
Mackwiller.
WolirskirclKTn
Drulingeii.
OHrmingen.
2. Ordonnances de Lorruine, XI, 312 : 15 févr. 1706, 30 avril 17GS.
3. Ibid. XIII, 540 : 24 janvier, 2G avril 1770.
4. Chastellux, Territoire de la Moselle , 102, 103.
_ u —
çaise. Les biens domaniaux, les propriétés privées des princes furent confis-
qués, la maison de Nassau perdit un revenu d'environ 80,000 iloiùns, et
toutes les réclamations qu'elle porta à la barre de la Convention furent
considérées comme non avenues. « Les habitants se sont affranchis eux-
mêmes, répondit-elle en passant à l'ordre du jour , et le peuple français
doit être favorable à tous ceux qui cherchent la liberté ! »
Jules Tiiilloy.
ÂBBESSES DE HERBITZHEIM.
Fin du XI 1*^ siècle. Sophie.
1292. II. (Ilaula):
citée en 1302 : Aule. -
— en 1316:Haula.
— en 1323: Ilaula.
1338. Elisabeth.
1345. Ilyllegard.
1518. Benigne Kreutzinn owKreutz.
Avole. 1544. Amaha von Altorff, genannt
Wollenschlägerinn.
1554. Johanna, comtesse deNassau-
Saarbrück 1 1556.
I. Maison de SaarAverden.'
Fridericus I , cornes de Saarwerden, 1131.
Ux. Gertrudis.
Volniarus, circa 1150.
Ux. Stephania.
Liidovicus I ,
1172-1185.
Lutlovicus II ,
1172-1176.
Ludovicuslll, cornes de Saarwcrdeu, Heiiriciis,
1223-1246. dorn, de Kirkel
Ux. Agnes, comit. Geminipontis/ f 124-2 improlis.
Ludovicus IV, lienricns, dorn, de Kirkel, 1243.
I 1242. postpatiis ol}it. coin, de Saarwerd.
Ux. Elisabeth,
vidua et lutrix 1278.
Johannes 1 , com. Saarw.
t 1310. Ux. Fcniaca.
N. Filia
Ux. N. dom. de
Siersberg.
Johannes,
dom. de Siersberg et
Kirkel.
Ux. Elisabeth.
Fridericus II , cornes.
Ux. Agnes.
1323-1361.
Johannes,
canon. Spirens.
Johanna.
Ux. Cnno de
Falkenstein.
Nicolans,
pra^p. S. Arnualis.
Gisela.
Ux. N. de
Duna.
Johannes H ,
cornes Saarwerd. 1344. t a. 1375.
Ux. Clara ,
hieres de Vinstingen, vidua 1375.
Henricus 11, conies Saarw.
1378 t 1397 sine ha;red.
Ux. llerziand , filia ha;res
Ulrici de Rappoltstein.
Walpiirgis
nupsit 1376 Friderico
coni. in Mœrs, Satori
fam. Mœrs et Novœ Saarw.
Fridericus
archiep. Colon.
1370-1414.
Ilildegardis
U\. Job. de Limburg.
1. Kxtrait de Croll, Orirj. liipont. , I, p. 12(!-14!i; tah. I.
— 95 -
Tl. Maison de Mœrs-Saar^verden.
(essai.) '
Friederich , comte de Moers et Saarwerden.
Ep. Walburge, comtesse et héritière de Saarwerden.
Frietlericli, Jean, C"* de Saarwerden Tliiedricli, Heinrich,
C"' de MceiA en 14."2U. Arch. de Cologne Ev. de Munster
t s.ins enfants. Ep. Adeiiieid de Geroldseck. 14U-1454 f 1450. UlötüSO.
Kriedericli , Walpurgis
tué à Dulgnéville en 1431. Ep. Jean de Lœn-Heinsberg.
Jacob, C"^ de Saarwerden, 1449. Jean.
Ep. 1" Anastasia de Leiningen. S" Isabel de Glynies.
Nicolas, G'^ de Saarwerdeii.
Ep. Barbara de Vinstingen.
Johanna de Saarwerden.
Ep. en 1478 le
Wild et Rheingraf Jean VI ,
C''^ de Morhange.
Walburgtl46i.
Ep. Jacob,
G'*' de Liciiteraberg.
Jean ,
C'^ de Saarw.
t 1507.
Ep. Anna de Berg
Katharina de Saarw.
Ep. en 1506 le
C"= Jean-Louis de
Nassau-Saarbruck.
Walrani,
Ev. de Munster
en 1450.
Jacob,
G'" de Saarw.
Ep. Beatrix
de Salni.
Jean Jacob ,
dernier C"^ de
Saarwerden.
t 1527.
III. Maison de Nassau-Saarbruck.^
Johann, comte de Nassau f 1371.
Ux. Johanna, comtesse de Saarbruck.
Philipp I, G*« de Nassau et Saarbruck t 1429.
V\ Elisabeth de Lorraine, G'"'*'' de Vaudeniont f 1455.
Philipp, G'" de Weilburg 1418 f 1492.
Ux. 1" Margarelha von Lœn f 1440.
'2" Veronika von Sayn f 1500.
Johann f 1480.
Ux. Elisabeth, Landgriefin von Hessen.
Ludwig t 1523.
Ux. Maria v. Nassau-Wiesbaden.
Philipp! 1559.
Ux. 1" Elisabeth v. Sayu.
2° Anna v. Mansfeld.
3" Anialia v. Isenburg.
Johann III, G'« de Saarbruck 1423 | 1472.
Ux. 1° Johanna von Lœn-Heinsberg f 1469.
2« Elisabeth von Wurtemberg f 1490.
Johann Ludwig 1472 f 1545.
Ux. Katharina, G"'*«'' de Saarwerden f 1547.
Philipp II
Johann IV
Adolf
Johanna
t 1554.
t 1574.
t 1559.
t 1550.
G'«" de Saar-
Ottweiler-
Kirchheim-
Abbesse de
bruck.
Honiburg.
Saarwerden.
Herbitz-
Cle
de Saarbruck.
1554.
heim.
Philipp III t 1602.
Weilburg, Saarbruck, Saarwerden.
Ux. 1» Erika v. Manderschcidt f 1581.
2» Elis. V. Nassan-Katzenellenbogen.
Wilhelm f 1597.
Johann Gasiniir | 1602.
Albrecht t 1593.
Weilburg, Ottweiler, Homburg,
Kircbheim , Lahr.
Ux. Anna v. Nassau-Katzcnellenbogen.
Ludwig t 1627.
Ottweiler, Homburg, Kirkel, Lahr,
Weilburg, 1602. Saarbrücken,
Saarwerd. 1605. Wiesbaden, Idstein.
Ux. Anna Maria Elisabeth ,
Landgrœfin v. Hessen.
1. Les éléments de cet essai ont été extraits de divers actes et documents rapportés par le.s auteurs
déjà cités et aussi d'un mémoire intitulé : . Kurzgefasste Geachichte des Wild- und lleingi-iiflirhen
Hanses, etc. 1760. •
2. Fr. Kœllner , passhn. — Jlorori , v" NASSAf.
96
IV. Maison de Nassau-Saarbruck (suite).
Ludwig, comte de Nassau et Saarbruck, etc. f 1629.
Ep. Anna Maria Elisabeth , Landgraefin von Hessen.
Wilhelm Ludwig
1 1640.
Saaibruck, Herbitzheim, Saarwerden , etc.
Ep. Anna Amalia
V. Baden.
Gust. Adolf
^ t 1677.
C" lie Saarbr.
Ep.Eleonora
Clara
V. Hohciilolie.
Joh. Ludw. ,
Otiweiler
t 1 690.
Ep. Doroth.
Katharina
Pfaltzgiœfin.
Friedrich
Ludwig
ti728.
Ep. 1° Christ.
V. Ahlefeld.
2° Luise Sopli.
V. Hanau.
Carl t 1"75.
Prince de Usingen.
Ep. Christiana Wilhelmina,
Herzogin zu Sachsen-Eisenach.
Carl Wilhelm Friedr. Aug.
t 1803. Duc.
Duc her. de Saar- f 1816.
brücken.
Walrad
t 1702.
Uüingen.
1° Catherine
de Ciov.
S^Magdal.
de Lœweiist.
Johannes
t 1688.
Id.iitein, Wiesbad., Saaiw
Ep. -loSybilla Magdaleina
V. Baden-Douilach,
2» Anna v. Leiningen.
G. A Samuel
t 172L
Prince de Idstein.
Henriette Dorothea
V. Œltingen.
Ludwig
Carl
Crato
Ludw
t 17l5.
1 172.3.
C." de
C'de
Saar-
Saar-
bruck.
bruck.
Wilhelm Heinrich
t 1718.
Prince de Usingen.
Ep. Ch. Amalia
•. Nassau-Dillemhurf
"Wilhelm Heinrich t 1"68.
Prince de Saarbrücken,
Saarwerden, etc.
Ep. Sophia Erdmuth v. Erbach.
Ludwig t 1794.
Prince de Saarbrücken
Ep. 1° Wilhelmina v. Schwartzen-
burg-Rudolstadt.
2° Katharina, gr. v. Oltweiler.
Heinrich Karl Albrecht f 1797,
dernier prince de Saarbrücken.
Ep. Marie-F*<"-Maximilienne ,
pr. de S'-Maurice Montbarrey.
Ernst Casimir f 1G55.
Weilburg, Kirchlieim, Saar-
Avejdeu, Ilombur;;.
Ep. Anna Maria
V. Sayn Wittgenstein.
Friedrich f 1675.
Comte de Weilburg.
Ep. Elisab. Christ, v. Sayn
Wittgenstein.
Johann Ernst f 1719.
Comte de Weilburg.
Ep. Maria Polyxena v. Lei-
ningen-Hartenburg.
Carl Auguste f 1753.
Prince de Weilburg.
Ep. A. Frider. W. deNassa^i-
Idstein.
Carl Christian f 1788.
Prince.
Ep. Carol. de Nassau-Orange.
Friedrich Wilhelm t 18 IG-
Duc de Nassau.
Ep. L. Isab. A. A. de Kirch-
berg.
Wilhelm Georg t 1839.
Duc.
Ep. Duch. Louise de Saxe-
Altenbourg f 1825.
Adolf, né 24 juillet 181'
Duc régnant de Nassau.
L'ÉGLISE DE WALBOURG.
L'abbaye de Walbourg- eut une origine bien modeste. S'il faut en croire
une ancienne tradition, conservée par Bernard Herzog, l'an 1074, sous le
pontificat de Grégoire VII, deux moines bénédictins, se sentant appelés à
l'apostolat de la prière pendant la lutte qui était alors engagée pour l'affran-
chissement de l'Eglise, vinrent demander à Thierry, comte de Montbéliard,
un coin de terre où ils pussent servir Dieu dans la retraite la plus profonde.
A cette époque la forêt de Haguenau s'étendait bien au delà de ses limites
actuelles, et abritait depuis des siècles nombre de pieux solitaires, qui
avaient fui le bruit des hommes; c'est là que le comte Thierry fît conduire
les deux moines, qui établirent leur cellule près d'une source, consacrée à
sainte Walpurge, et défrichèrent le sol autour de leur habitation. Grâce aux
libéralités de l'empereur Henri V, de Frédéric, duc de Souabe et de son fils,
Frédéric Barberousse, la cellule fit bientôt place à un monastère, auquel le
dernier de ces princes donna le rang d'abbaye.
Mon but n'est pas de tracer l'historique de cette maison religieuse. Je me
bornerai à dire que sa décadence coïncide avec la désastreuse guerre des
Paysans; en 1544, elle fut incorporée au chapitre de Wissembourg; en
1685, un arrêt du Conseil d'Etat assura la propriété de ses biens au sémi-
naire de Strasbourg, qui en jouit jusqu'à la révolution.
Arrêtons maintenant les yeux sur l'église, la seule construction qui reste
de l'ancienne abbaye. Quelques débris de sculptures, qu'on voit à l'extérieur
de la nef du côté sud, sont les seules traces de l'édifice roman, dans lequel
le père de Barberousse, le grand protecteur du jeune monastère, avait trouvé
sa dernière demeure. L'église actuelle fut élevée par l'abbé Burckard de
Müllenheim en 1456 , comme l'indique la date sculptée à l'entrée du
chœur, au bas de l'un des piliers qui soutiennent la tour. C'est une con-
struction très -simple dont le chœur seul est voûté, et qui, malgré les dé-
vastations de tout genre, offre une série d'objets d'art dignes du plus grand
intérêt.
n« SÉRIE. — T. II. — (m.) 7
— 98 —
Je commenc(3 i)ar son plus précieux Irésor, pnr les vitraux qui garnissent
cinq fenêtres du chœur. Une légende en majuscules qui se rapprochent du
caractère romain, nous en indique la date et nomme le donataire des Irois
fenêtres absidales :
M • CCGG . LXI • JOR • WRDEN • DISE • FENSTEB .
GEMACHT • IN DISEN • KOR •
«L'an 1461, on exécuta ces vitraux pour ce chœur.»
La plupart des panneaux distribués dans les deux fenêtres, qui avoisinent
celles du fond de l'abside, sont d'une autre main et paraissent postérieurs
de quelques années. Un grand sujet figurant la tentation de saint Antoine
porte l'écusson de Pierre Schwartz, qui fut abbé de Walbourg depuis 1479
à 1519.
Lors du congrès archéologique de Strasbourg en 1859, j'ai donné une
description assez détaillée de cette belle collection de verrières'. Je me
bornerai donc aujourd'hui à dire un mot de leur état de conservation et
d'émettre nn vœu au sujet d'un classement plus rationnel qu'on pourrait
donner aux panneaux des deux fenêtres extrêmes.
Les trois grandes verrières du fond de l'abside , consacrées à la légende
de la sainte Vierge d'après le naïf récit des évangiles apocryphes, à la vie
de Jésus-Christ et à celle de saint Jean-Baptiste , ont très-peu souffert et
n'offrent que de petites lacunes faciles à remplir.
Il n'en est pas de même des deux baies adjacentes, dont les sujets infé-
rieurs occupent seuls la place primitive et n'ont pas été avariés par suite de
transports et de déclassements toujours funestes et regrettables. Les frag-
ments, rapportés probablement de la nef, appartiennent à la représentation
des douze apôtres, à une série de saints et à un vitrail figurant les quinze
1. Voy. Co))!/rès nrdiéol. de France , session XXVI , p. 344-863.
— 99 —
signes précurseurs du jugement dernier. Les six panneaux qui restent de
ce sujet fort curieux, et dont je ne connais pas d'autre exemple en Alsace,
ont été le plus maltraités, mais pourraient encore devenir l'objet d'une
restauration. Ils garnissaient primitivement la fenêtre occidentale de la nef,
au-dessus delà tribune des orgues, et n'auraient jamais dû quitter cette
place, où depuis le treizième siècle, les peintres à l'intérieur des églises, les
statuaires à l'extérieur de la façade, aimaient à retracer l'émouvante scène
des dernières assises du Christ.
S'il faut abandonner l'idée de les y replacer, parce que les ressources de
la commune ne permettent pas de songer à une restauration complète du
vitrail, on pourra du moins les disposer dans l'une des fenêtres adjacentes
du chœur, aujourd'hui garnies de verre blanc. On procéderait de même avec
les neuf grandes figures de saints, placés au bas des fenêtres, dont la partie
supérieure pourrait être garnie de grisailles ou de mosaïques en harmonie
avec le ton des sujets historiés. Ces précieux restes, qui sont pêle-mêle et
dont plusieurs sont devenus presque méconnaissables par suite de malheu-
reux remplissages, reprendraient leur valeur, non-seulement pour l'artiste
elle connaisseur, mais encore pour le simple fidèle. J'ajouterai que sous le
rapport de l'exécution artistique et du goût qui a présidé à la composition
des cartons, la plupart de ces fragments sont bien supérieurs aux petits
sujets des trois fenêtres absidales, et rappellent tout le fini de nos riches
verrières de Sainte-Marie-Madelcine à Strasbourg. D'après la tradition locale,
les vitraux de Walbourg furent exécutés dans les propriétés de l'abbaye
même, dans un canton désigné encore de nos jours sous le nom de « Glas-
platz. »
Aux peintures sur verre qui décoraient l'église de Sainte- Walpurge, l'art
chrétien avait, comme dans la plupart de nos anciennes églises , ajouté les
peintures murales. Il y a cinq ans, lors d'une visite que je fis à l'église de
Walbourg, je crus entrevoir à travers le badigeon du chœur une série de
nimbes, que je supposais appartenir aux douze apôtres, si fréquemment
représentés dans le sanctuaire*. Quelques essais de débadigeonnage, opérés
il y a peu de jours, ont justifié les prévisions que je formulais alors timide-
ment, et ont fait paraître à la lumière la série des apôtres, ainsi que les quatre
docteurs de l'Église latine. Ces derniers occupent les angles formés par la
rencontre des pans de l'abside, tandis que les apôtres sont rangés des deux
côtés de l'avant-chœur, au-dessus des stalles. La série commence du côté
de l'épître. Autour de chaque apôtre, un long phylactère jiorte le verset du
1. Voy. Congrès ni-chéol. de. France, session \XV, ji. -lis.
— 100 —
Credo, dont une antique tradition lui attribue la composition. Ainsi la ban-
derole de saint Pierre donne en beaux caractères minuscules les mots:
crtbD in unum beum patrcm omnipotentem creotorcm celi et terre
Saint Paul, le treizième apôtre, placé à la fin de la série après saint Ma-
thias et vis-à-vis de saint Pierre, a l'inscription suivante:
ego ultimns upostolorum qnt oent, (upoütotus) non sum bipns oocari
Les quatre docteurs de l'Eglise, de dimensions un peu plus grandes, pa-
raissent d'une autre main et ofTrent plus de mérite artistique. Saint Grégoire
porte Ja tiare ornée de trois couronnes et la croix à trois branches , dont
celle du milieu est plus longue que les deux autres. Par une erreur assez
curieuse à signaler, le peintre a omis la colombe divine qui accompagne
toujours ce père de l'Eglise dans les anciennes images, et a donné ce symbole
du Saint-Esprit à saint Augustin. Ce docteur est le mieux conservé, quanta
l'ensemble des contours. Comme saint Ambroise, dont la majestueuse figure
se dessine près de lui, il tient d'une main un livre, de l'autre la crosse au
volute richement ouvragé et muni du sudarium. Le quatrième est saint Jé-
rôme vêtu en cardinal et tenant une croix double.
Chacun des phylactères qui se déroulent autour de ces images présente
une inscription ayant rapport à la sainte Eucharistie. Les images n'étant
pas entièrement débadigeonnées, je n'ai pu hre exactement que les deux
inscriptions du fond, appartenant à saint Augustin et à saint Ambroise. Les
voici:
ficet fignro pnnts et ntni ntbentnr nil tomen nlinïi quom coro cljristi
et songnts post conoersionem crebeubo est • 3 • Jlugustinns boct' ■ *
Jn 5inplî8 porcionib' cl)rist' îiomtn' tot' est, non per singnlûs
minnitur, seD tntegrnmin singulis tenemus- S- Jlmbrosins boctor- '
Espérons qu'en opérant avec soin le débadigeonnage de toutes ces figures,
les deux autres inscriptions dont je n'ai que des fragments qui m'en donnent
bien le sens général, mais ne me permettent pas d'offrir une transcription
authentique, seront entièrement lisibles. Il est possible qu'au-dessus des
quatre pères de l'Église, on trouvera les symboles des évangélistes que l'on
1. « Quoique l'œil n'aperçoive que rtapparence du pain et du vin , après la consécration ,
la foi ne doit admettre autre chose sous ce voile que le corps et le sang de Jésns-Christ.
Saint Augustin docteur.»
2. « Le Seigneur Jésus-Christ est tout entier dans chaque parcelle de l'hostie, il ne perd
rien par la fraction, dans chacune nous recevons le Sauveur tout entier. Saint Ambroise
docteur. »
— 101 —
aimait mettre en rapjjort avec les docteurs. Nuus eu avons un bel exemj)le
dans la chapelle de Saint-Michel à Kaysersberg, qui date à peu près de la
même époque que l'église de Walbourg. *
On découvrira peut-être également les inscriptions dont parle Herzog.
Quelques essais de débadigeonnage que je fis au-dessus de la porte de la
sacristie actuelle m'ont fait reconnaître celle qui parle de la fondation de
l'abbaye, une autre, décorant la face occidentale de la sacristie et que j'ai
trouvée cachée sous le plâtre, est maintenant lisible à l'exception des deux
derniers mots. En voici la transcription, qui constate que celte construction
a été primitivement une chapelle des anges :
|)resens saccUnm
in l)onore 3anctorum ^iBirlinelis (ßubritlis
lii)pt)aclis et oTm ûngclorum
in odua opostolorum yctri et |)ault
a e3acoba tfo supraMcto
(consccrtttum est)'
Une des inscriptions mentionnées par Herzog el (ju'on retrouvera sans
doute sous le badigeon du chœur , nous apprend que ce prélat Jacques
était évêque de Bethlehem m pf/r//6?«, et vicaire général de l'évèque de
Strasbourg. Ladite chapelle, dont les murs sont encore ornés des croix de
consécration , est construite entre trois contre-forts et présente tous les
caractères de la seconde moitié du quinzième siècle. La porte sculptée offre
au milieu de délicates ciselures architectoniques, deux écussons dont l'un
appartient au constructeur de l'église, l'abbé Burckard de Müllenheim; le
second , portant trois roses posées deux et une et séparées par une fasce,
ne m'est pas connu.
1. I^es docteurs de l'Église y sont représentés dans les iiualre seclioiis Iriangiilaires de
l'une des voûtes. Au-dessus de chacun d'eux ou voit une des ligures du tétraniorphe avec
une inscription qui donne les sens du symbole. Voici les légeudes , moins une , presque
complètement effacée :
^0m(j siptficat l)omanitntfm cristt* solutus ^îlntljcus —
Au-dessous de riioninie ailé, S. Amhroise.
P0US (sic) signifient pnssionem crtsti * sanctns fucns euinnoelisto
Au bas du veau de sacrilice, S. Augustin.
^qnila signifient nsrensionrm rristi « snnctns ^o|)nnnes
Au-dessous de l'aigle , S. Jérôme.
2. « Cet oratoire a été consacré en l'honneur de saint Michel , de saint Gabriel , de saint
Raphaël et de tous les saints anges , dans roctave de la fête des apôtres saint Pierre et
saint l'aul par l'évèque Jacques susnommé. »
— 102 —
Les sciilplures de celte iiiléressante porte ne sont pas les seules ni les
plus importantes de l'église. Oulre plusieurs statues en bois*, aujourd'hui
reléguées sur les deux petites tribunes, qui se trouvent à l'entrée du chœur
contre les parois du clocher, je signalerai les stalles du quinzième siècle et
surtout un charmant petit reliquaire qui décore l'autel de Sainte- Walpurge.
Les stalles du chœur , d'un dessin qui rappelle les meilleures traditions
du commencement du quinzième siècle, n'ont pas subi de mutilation no-
table. Un s'est borné à remplacer les banquettes de devant par un travail
moderne et de les peindre en noyer.
Les autels latéraux sont restés intacts , à l'exception des deux grandes
statues qui ont reçu une couche de peinture. Ces autels sont semblables et
ne manquent pas d'une certaine élégance de forme. Deux colonnes corin-
thiennes reçoivent la retombée d'un arc, qui forme une espèce de dôme
au-dessus de la figure décorant l'autel. C'est d'un côté la sainte Vierge, de
l'autre, sainteWalpurge en costume d'abbessc. Les socles de ces deux grandes
statues, qui, tout en se ressentant du goût de l'époque où elles furent exé-
cutées, trahissent la main d'un bon maître, présentent chacun une sculpture
en bas-relief, dont l'une, représentant la sainte Cène, peut être considérée
comme un chef-d'œuvre. C'est une composition pleine de vie et de mouve-
ment qui rappelle la sainte Cène de Léonard de Vinci, sans en être une imi-
tation servile. Je pense que ce travail remonte au milieu du siècle passé.
La chaire est d'un goût moins pur. Au-dessus de l'abat-voix on remarque
un ange joulïlu prenant l'essor et embouchant la trompette.
Le dessin ci-joint du reliquaire de sainte Walpurge me dispense d'entrer
dans le détail d'une description de ce beau meuble d'église.
Tout porte à croire qu'il y avait autrefois un jubé à l'entrée du chœur.
En montant au clocher, on voit encore la porte qui menait à cette tribune
transversale, et l'œil peut suivre, le long des premiers piliers de la tour, la
trace des pierres qui en formaient l'arceau.
Un autre monument a disparu de l'église : c'est la remarquable custode
en pierre dont les débris se trouvent actuellement dans le jardin de M.Saglio
et ont été adossés contre le mur extérieur de la nef Cette œuvre gracieuse,
moins g^rande et moins riche de sculptures que celle de Haguenau ou de
Baden, l'emporte sur ces deux tabernacles par la pureté du dessin et par
l'exquise élégance de forme. La Société pour la conservation des monuments
historiques de l'Alsace voudra s'associer au vœu que je forme de voir
bientôt ce charmant édicule replacé dans l'église, après être devenu l'objet
1. On remai-qne parmi ces slatucs une sainte Vierge et une sainte Catlicrine, qui ne sont
pas sans morilc.
- 103 —
— 104 —
1_
d'une restauration relativement peu coûteuse. Le socle offre une série de
pénétrations de plans d'une richesse de combinaison et d'une originalité
telles que ne les présentent que les plus belles œuvres de la seconde moitié
du quinzième siècle. Tout près, on remarque également dans le mur extérieur
de l'église un joli bénitier en pierre portant l'écusson de la famille des
Brechter,
Je termine ma notice par la communication des signes lapidaires que
j'ai observés dans la tour, et par un mot sur les deux grandes pierres tom-
bales, qui sont dressées contre le mur de l'église, près de la porte d'entrée.
1
L'une appartient au constructeur de l'église actuelle, à l'abbé Burckard de
Müllenheim, dont la figure taillée en bas-relief est abritée sous un pinacle
aux formes tourmentées de l'époque.
L'inscription donnée par Herzog dans son troisième livre, folio 56, a été
mal copiée, comme on verra par ma transcription que voici :
+ Jlnn • btti • m'' • cccc ■ Irrir • nj | falûs • ^ulij • © • Dencrûbtlis •
ûc • religiosus • pr • bus • |urcKI)arbits 1 be • Jïlnlnl)eim • <?lbbûs 1
l)ijius cenobij ■ €uius • spus • ûput • 3upcros • foeltcitcr • recnbct *
Un hvre est placé sous la tête du prélat, preuve que la pierre était étendue
sur le sol. Cela nous explique pourquoi la dernière partie de l'inscription
est devenue presque illisible. Lors d'un nettoyage fait avec des ciseaux, on a
malheureusement dénaturé la première lettre du mot apud, ce qui rend la
légende presque indéchiffrable.
La seconde pierre tombale est celle du successeur de Burckard, de l'abbé
Pierre Schwartz, qui présida à l'abbaye pendant quarante années. Sur ce
1. «L'an du Seigneur 1479, le 20 juin, décéda le vénérable et pieux seigneur père abbé de
ce monastère Burckard de Müllenheim. Que son âme repose auprès des saints et jouisse
du bonheur éternel.»
— 105 —
monument la tête seule est en bas-relief; le reste de la figure n'est exécuté
qu'au Irait. Deux inscriptions la décorent; l'une en caractères minuscules,
courant tout autour de la pierre, donne les litres du défunt, la date de sa
mort et termine par une nouvelle variation de la clausule ordinaire; l'autre,
en lettres romaines, se trouve sur une longue banderole , enlacée dans le
pinacle qui abrite la tête de l'abbé.
+ Jlnn0. îini- 1519 • ipso- liie- | tritt- regnm- obiit- in Jtpo reuerenb'
patfr et îins petr'Stoürtj t)nius - monastcrit abbas- in- I regimint
(juabrûgîta ûnuis - qui • felicit ■ pfroûtur - tUtnis ■ '
qVISqS • APVD • TVMVLVM pétri SPACIABERE • NIGRI •
DIC - SALTEM DVLCIS - SIT - TIBI • ABBA - QVIES.
FRIGIDA ■ PETRI • LAPIS - HIC • TEGIT ■ OSSA - ABBATIS -
FESSA • TERRIS - ANIMA • CELI • REQVIESCAT - IN • ARGE • '
Ces deux pierres tombales sont avec une troisième du quatorzième siècle,
aujourd'hui coupée en deux et servant de marches, les seuls monuments
funéraires de Walbourg qui aient échappé aux ravages du temps. Quanta la
tombe de Frédéric, duc de Souabe , père d'un des plus puissants em-
pereurs du Saint-Empire, il n'en reste plus même le moindre souvenir dans
la localité.
1. «L'an du Seigneur 1519, le jour même des trois mages, décéda en Jésus-Christ le
vénérable seigneur Pierre Schwartz, père abbé de ce monastère, après une administration
de quarante années. Qu'il jouisse de la félicité éternelle. »
2. « Qui que vous soyez, qui viendrez au tombeau de Pierre Schwartz, dites du moins:
Abbé, jouissez d'un doux repos !
« Cette pierre recouvre les ossements glacés de l'abbé Pierre. Puisse son àrae fatiguée
du monde reposer dans la retraite du ciel. »
L'abbé A. Straub,
professeur au_ Petit-Séminaire.
NOTE
U PIERRE AUX ARMES DE JEAN IIAMERER.
Ainsi que notre collègue, M. Morin, vous en a informés dans noire
dernière réunion, on a retrouvé, en faisant une réparation ou plutôt une
addition à la maison n'' 10 de la rue Mercière, une pierre sculptée, qui
a été employée, probablement lors de la confection des trottoirs, pour
former une partie de seuil, sous celle des arcades qui donnait entrée au
magasin de M. Kuntz , propriétaire actuel de la maison.
La pierre a dû avoir primitivement 0'",85 de haut, sur O'^jßS de large,
et a été diminuée du haut de 0'",05 et d'un côté deO^,iD, pour la réduire
à la mesure de la place qu'elle devait occuper comme seuil.
Heureusement la mutilation, qui n'a porté que sur une sorte d'encadre-
ment, s'est arrêtée là, et la pierre ayant été couchée dans un bain de mor-
tier, du côté sculpté, le relief, qui était alors déjà assez émoussé, a été
préservé de toute nouvelle dégradation.
Il a suffi d'un peu d'acide muriatique, étendu d'eau, et d'une certaine
dose de patience pour la débarrasser du mortier qui s'était logé dans tous
les creux de la sculpture.
On y reconnaît parfaitement des armoiries conjugales, dont l'écu mas-
culin désigne une notabilité strasbourgeoise, honorablement mentionnée
dans nos chroniques , Jean Ilamerer , de la tribu des cordonniers , trois
fois Ammeister (1554, 1559 et 1565), et dont l'écu féminin porte une tête
de bœuf aux cornes dressées et aux oreilles pendantes.
Les deux écus sont embrassés en haut par des lambrequins d'un fort
relief et surmontés d'un seul heaume, ayant pour cimier un vol à six
plumes , timbré des pièces de l'écu masculin.
Selon l'usage du temps , le sculpteur n'a pas marqué les émaux ; mais
l'écu de Jean Ilamerer est figuré au 8^ livre , page 99 de la chronique de
Herzog qui indique l'azur pour le champ, et l'oi* pour le chevron et la
croix.
— 107 —
D'après les renseignemenls recueillis auprès du propriétaire actuel, qui
s'est empresse d'olïrir la pierre pour enrichir le musée de la Société, c'est
l'Ammeister Jean Hamerer qui a fait bâtir la maison, dont la construction
remonte ainsi au commencement de la seconde moitié du seizième siècle.
Des témoins matériels irrécusables attestent qu'elle avait lors de sa con-
struction et qu'elle a dû avoir encore longtemps après et probablement
jusqu'en 1809, époque à laquelle un vœu manifesté par l'Empereur a dé-
terminé l'élargissement de la rue Mercière, outre la façade actuelle, re-
marquable par la solidité de sa construction, son rez-de-chaussée à arcades
en plein cintre et sa tourelle en saillie, portée j)ar une puissante el mas-
— 108 —
sive console, une aulre façade, ayant vue sur la place et le grand portail
de la cathédrale.
On reconnaît encore à l'intérieur des jours de cette façade, aujourd'hui
cachée par des constructions nouvelles, et notamment, aurez-de-chaussée,
la porte qui ouvrait sur la place de la cathédrale.
D'après les souvenirs du propriétaire, cette façade, aujourd'hui obstruée,
aurait été plus richement décorée que celle qui est en voie de se modifier
à son tour, sous l'empire de ces fatales nécessités qui effacent chaque jour
quelque trait de la physionomie particulière de notre antique cité.
Si cette façade masquée pouvait être découverte , elle montrerait un
certain luxe d'ornementation sculpturale, des chambranles ornés, des têtes,
des fleurons, etc., et ce ne serait pas une supposition bien basardée que
celle qui marquerait sur cette façade, au-dessus de sa principale porte, la
place de la pierre retrouvée au seuil de la façade encore visible.
L'intérieur de la maison présente encore, comme remarquables , une
pièce voûtée au rez-de-chaussée et un escalier tournant en pierre , à limon
vide en spirale, très-spacieux et qui a cela de particulier qu'il s'élève à
quatre étages , ainsi à une hauteur à peu près double de celle de l'escaher
de l'œuvre Notre-Dame et des autres escaliers tournants en pierre qui
existent encore dans d'anciennes maisons à Strasbourg.
II ne se trouve sur aucune partie de la maison, ni inscription de date,
ni monogramme de maître-ouvrier, sauf celui du sculpteur, qui se voit
sur la pierre armoriée, au-dessus de l'écu masculin, et que j'ai eu soin de
reproduire sur le dessin joint à cette note.
Le comité s'empressera , je n'en doute pas , de voter des remercîments
au donataire de cet intéressant souvenir de notre histoire locale et de
décider l'inscription de son nom au-dessus de la pierre , déposée dans
notre naissant musée.
Baron de Schauenburg.
NOTES
LES RUINES DE VILLAS ROMAINES
PRÈSD'OBERBRONN.
Les positions romaines du canton de Niederbronn sont loin d'être toutes
connues ; il en est une à l'est d'Oberbronn , au canton rural dit Eber-
schœtzcl, à côté d'un ancien chemin de traverse, qui relie cette commune
à celle de Reichshoffen. C'était, selon moi, une splendide villa; nous en
avons au reste la preuve, dans les substruclions qu'on y a découvertes,
et dans les objets variés qui en ont été retirés.
L'enlèvement des décombres, accumulés depuis des siècles, amis au
jour des tuileaux à rebords, des restes de ciment antique , des pierres de
grès taillées, des fragments de sculpture, des morceaux de colonnes, des
débris de chapiteaux. Parmi les fragments sculptés, je mentionnerai un
morceau, en lui-même assez insignifiant, mais qui à raison de son sujet
mérite d'être coniui : c'est une tablette de grès des Vosges, où l'on voit la
sculpture d'un paon, provenant vraisemblablement d'une figure de Junon;
ce morceau , travaillé il y a quinze à dix-huit siècles , fait partie de la col-
lection d'antiquités de M. le docteur Schnœringer, à Brumath. Sous les
décombres on a rencontré une pièce carrée, dont le parquet se composait
d'un carrelage en briques romaines. Les travaux de déblaiement ont amené
en outre la découverte de deux autres pièces, l'une goudronnée de béton
romain, l'autre pavée à la manière antique.
Une observation me semble devoir trouver ici sa place. Le carre-
lage en briques était très-usité dans celte contrée à l'époque romaine ; on
en a rencontré ailleurs. Ces sortes de parquets, encore si communs il y a
moins de deux siècles, pourraient fort bien nous être venus d'usages do-
- 110 —
niesliques, que nos pères auraient Iraditionnellemenl conservés des anciens
Gallo-Romains.
Une importante construction romaine avait encore existé au sud-est
d'Oberbronn, à la lisière orientale de la forêt dite Frorott. Des recherches,
faites sur cel emplacement à diverses reprises, ont eu pour résultat une
récolte d'antiquités, conservées pour la plupart au cabinet Schnœringer,
à Brumalh; elles sont intéressantes au point de vue des usages domestiques
des anciens Gallo-Romains.
A part quelques outils, dont l'usage est difficile à indiquer, il a été retiré
de ce lieu différents objets métalliques et une foule de vaisselle en terre
cuite: un morceau en bronze d'un fourreau d'épée ou d'un étui quelconque,
travaillé avec élégance, plusieurs agrafes de bronze , en forme de boutons,
de différentes grandeurs, un ciseau en fer battu, une espèce d'alêne à pointe,
une hachette d'une très-belle forme, dont la douille retient encore le bout
du manche en bois méconnaissable, un style, des clous, des ferrailles oxy-
dées, plusieurs pièces de monnaie romaine-; des tas de tuiles et de briques,
des carreaux à rebords latéraux, des tuyaux d'argile, des tessons de poterie
rouge, des vases de terre vernissés, de forme et de couleur variées, parmi
lesquels une espèce de gamelle mérite une mention particulière : elle est
percée de petits trous, tant au fond que dans la partie basse de son contour;
l'on présume qu'elle a servi à griller des châtaignes; elle porte encore des
traces du feu. En outre, on a trouvé plusieurs énormes défenses de sanglier
et une trentaine de dents, des fragments de verre blanc et d'un blanc ver-
dâtre, un torse d'une sculpture brisée, représentant une partie du devant
du corps d'une divinité drapée, qu'il est impossible de déterminer, faute
d'attributs. Enfin, on a rencontré dans les déblais des morceaux de crépi
couverts de lignes de couleurs différentes, rouge, verte et jaune sur fond
blanc, des plaques coloriées des mêmes nuances; ce sont là, à n'en pas
douter, des restes de peintures murales ou à fresque, qui permettent de
conclure à un compartiment, qui a dû se faire remarquer par son élégance.
Les tranchées pratiquées dans les ruines ont mis à jour, à côté d'un
grand amas de décombres, une fournaise posée à terre et construite en
briques, avec des couches de cendre et de charbons, d'où le feu a pénétré
souterrainement dans des tubes d'argile, lesquels transmettaient la chaleur
dans les appartements habités. Dans les Gaules, comme chacun le sait, le
chauffage avait lieu le plus communément au moyen de tuyaux en terre
cuite, placés dans les murailles, ou appliqués en forme de cheminée. Ainsi,
les tubes d'argile des fournaises à terre chauffaient anciennement les habi-
tations, comme les tuyaux de tôle des fourneaux en fonte ou en faïence
— 111 -
(
chauffent aujourcrhui les poêles. Toutefois, je ne repousse point l'opinion
qui considère ces tubes aussi comme des conduits dans lesquels la chaleur
montait pour chauffer une baignoire; chez les Romains, tout citoyen aisé
avait dans sa maison un cabinet de bain, et ces calorifères pouvaient bien
être à double usage.
Il est très-présumahle que des fouilles, reprises convenablement, donne-
raient de nouveaux éclaircissements.
Jér. Ans. Siffer,
curé de Weyersheim.
I
H E LVE TUS
. ET SES ENVIRONS
(EHL, PRÈS BENFELD
AU CINQUIÈME SIÈCLE.
AVANT-PROPOS.
Les inaléiiaux (jui font le sujet de ce mémoire et qui ont servi à établir
la carie qui l'accompagne', ont été recueillis sur le terrain, la pioche et le
décamètre en main ; j'y ai consacré mes loisirs d'été de plusieurs années.
J'ai visité successivement une trentaine de localités, compulsant les archives
des mairies, les cadastres, les livres terriers, questionnant les vieillards,
les maires, les instituteurs, les gardes champêtres. Je suis heureux de pou-
voir dire que partout j'ai trouvé un accueil empressé et bienveillant, grâce
à la popularité dont jouit la Société des monuments historiques d'Alsace.
En passant par les comnmnes, j'ai toujours consulté les traditions locales;
car toute tradition rationnelle me paraît aussi digne d'être recueillie que
les monuments en céramique, en pierre ou en métal.
L'année dernière j'eus l'honneur d'adresser à M. le Ministre de l'instruc-
tion publique un petit extrait de ce travail sous ce titre : Hdvetus au cin-
quième siècle, — que Son Excellence voulut bien faire admettre parmi les
mémoires de la Sorbonne. A l'invitation de M. le Président de notre société,
je présentai, à la séance générale du 10 décembre 1863, une courte notice
sur le même sujet. Ces deux petites publications n'étaient destinées qu'à
donner une idée sommaire de la ville gallo-romaine dont je cherche, en
quelque sorte, à refaire le squelette. Le présent mémoire {Helvehis et ses
environs) renferme tout ce que j'ai vu, observé, appris, découvert, jusqu'à
ce jour, dans un rayon de 15 à 16 heues carrées. Au travail de pionnier
j'ai ajouté tout ce que j'ai pu trouver d'important sur la matière dans les
auteurs que j'ai eus à ma disposition. Je n'ai pas la prétention de faire une
1. I'üur la partie graphique, j'ai été secondé, avec autant d'obligeance que de talent, par
M. Anthon, ancien agent voyer à Benfeld, actuellement architecte de la liiature du Bas-Rhin.
Qu'il en reçoive ici l'expression de toute ma gratitude.
U« SÉEIB. — T. II. — (M.) 8
— 1i4 —
monographie complète; mon but principal, en me livrant à ces investi-
gations, est de reconnaître l'état où se trouvait ce coin de terre avant l'in-
vasion des hordes barbares qui ont renversé la domination romaine, et de
contribuer ainsi à la topographie de l'ancienne Gaule.
En remuant ces ruines d'un autre âge et d'une autre civilisation, je ne
puis résister à la tentation d'en tirer quelque fruit pour l'histoire: c'est
ainsi que je me suis laissé entraîner à quelques hypothèses que je soumets
aux hommes compétents; ils sauront distinguer le bon grain de l'ivraie, et
ils feront de mes conjectures le cas qu'elles méritent.'
Benfeld, mai 1864.
CHAPITRE 1.
Topographie.
Je ne répéterai point ici ce qui se trouve dans les ouvrages qui traitent
de la topographie de l'Alsace; mon seul but est de donner une idée
approximative de l'état des lieux dans le anciens temps, et de décrire
succinctement la contrée qui a fait le sujet de mes explorations.
$ F'. — Elu et ses environs.
Ehl ou EU est un hameau sur la rive droite del'lll; il dépend en majeure
partie de Benfeld (chef-lieu de canton, arrondissement de Schlesladt, dé-
partement du Bas-Rhin); quelques maisons occupent la banlieue de la com-
mune de Sand. La tradition populaire regarde Ehl comme le reste d'une
ancienne ville romaine; tous les historiens sont d'accord pour placer en
ce lieu la ville gallo-romaine d'Hellelum ou Helvetus, qui, sur la table théo-
dosienne et sur l'un des itinéraires d'Antonin, figure enlre Argentovaria et
Argentoralum, et entre u/o?î5 Brisiacns et Argenlorainm sur deux auti'es de
ces itinéraires.
Sur ma carte j'ai indiqué, au liait rouge, une bande de terre, baignée
par trois cours d'eau, représentant une longueur d'environ \% kilomètre,
d'une largeur moyenne de 300 à 400 mètres, ayant le hameau à son ex-
trémité nord: c'est à peu près cette superficie que les archéologues consi-
dèrent ordmairement comme ayant été occupée par la ville romaine. Nous
verrons plus loin que ce point pouvait être le quartier principal de la ville,
1. Il demeure bien entendu que c'est sous sa responsabilité personnelle que l'auteur
rmet, dans ce travail, des opinions hypothétiques qui pourraient être ultérieurement rec-
lifiées ou complétces par de nouvelles découvertes.
- 115 —
mais non la ville tout entière. Dans le cours de ce travail je désignerai cette
bande de terre sous le nom de territoire d'Eltl ; on reconnaîtra son impor-
tance archéologique au chapitre II.
La contrée que j'ai explorée, et dont Ehl occupe le centre, forme une
petite section de la plaine de la vallée du Rhin, entre la rive gauche de ce
fleuve et le pied des montagnes. Au nord, ma limite est sur la ligne de Meis-
tratzheim à Kraffl; au sud sur celle d'Ebersmünster à Rhinau. Cette étendue
comprend environ 15 lieues carrées. Ma circonscription est indépendante
de la division politique actuelle; pourtant le canton de Renfeld s'y trouve
en entier, le reste est emprunté par fractions aux cantons d'Erslein, d'Ober-
nai et de Barr. Cette plaine est sillonnée de plusieurs cours d'eau et l'on y
remarque deux zones de terrains marécageux: l'une entre la Scheer et
l'Andlau, qui probablement a été plus humide jadis qu'aujourd'hui; l'autre
entre le Zembs et le Rhin, qui sans aucun doute a été moins marécageuse
à l'époque qui nous occupe. Entrelarive gauche de l'ill et la première zone
paludéenne, la terre est d'une fertihté exceptionnelle et l'on peut admettre
hardiment qu'elle a dû être exploitée par l'agriculture, dès que les peu-
ples eurent renoncé à la vie nomade pour se tixer dans ces cantons. 11 est
probable que le terrain situé entre la rive droite de l'IU et le Rhin a été
en nature de pâturages et de forêts riches en chênes, où les premiers
habitants ont pu élever leur bétail et leurs porcs'. Dans les bois aux en-
virons d'Ehl, il y a beaucoup de vignes sauvages; je suis tenté de les re-
garder comme des restes de viticulture de l'époque de l'empereur Probus,
dont les ceps sont redevenus sauvageons.
§ 2. — Cours d'eau encore existants.
Lesplusimporlantsde ces cours d'eau sont: le Rhin, le Zembs, la Lutter,
l'Ill, la Scheer, l'Andlau.
Le Rhin (Rhenus). — Dans les temps primitifs, le Rhin formait trois
bras entre Râle et Bingen; mais déjà, à l'arrivée des Romains, ces trois bras
se trouvaient réduits à un seul, à celui du milieu. Il n'est guère possible
de savoir si ce changement a été opéré par la nature ou par la main de
^homme^ Avant les travaux d'endiguemcnt, le fleuve avait un large ter-
t. L'élat de l'agriculture sur la rive droite du Rhin , sous les Romains, se trouve parfai-
tement décrit dans Moue, Urgeschichte des hüdischen Landes. Celte description peut, sans
aucun doute, s'appliquer ù la rive gauclie.
2. Pour ne pas trop charger ma carte, j'ai négligé tous les travaux d'art modernes, tels
que chemin de fer, canal du Rhône au Rhin etc. Le Rhin est emprunté à la carte de l'état-
major.
3. Mone, Urgeschichte des badischeii Landes, t. II, p. 143.
— 116 —
l'ain pour éleMiIre sa nappe d'eau; dans beaucuiip d'endroils on le passait à
^iié pendant la sécheresse. Entre Bàle et Spire il y avait toujours des
faux-bras, quantité d'îles et d'îlots où les peuplades germaines avaient la
facilité de se rassembler avec leurs barques, lorsque le guéage était impos-
sible, pour se jeter, à un moment donné, sur la rive gauche et envahir la
(iaule rhénane'. Ce fleuve a toujours divagué; encoj-e aujourd'hui son
Thalweg change tous les ans, des îles disparaissent et d'autres se forment;
mais malgré la mobilité de ces atterrissements, il y en a (jui sont de-
venus assez permanents pour avoir reçu des noms propres. (Voir la carte.)
11 est donc tout à fait naturel, qu'entre le pays des Rauraqucs et celui des
Némètes, on ait étabh, le long du Rhin, une série de forts, môme assez
rapprochés, et il est probable qu'il existait un casirum ou un casteUttm
pour chaque ville romaine un peu importante. On verra plus loin (jue je
crois avoir trouvé le castrum protecteur de cette contrée, à la place où
fut construit plus tard le castel féodal deScInucnuai, et ce fort romain même
a pu être précédé d'un poste de défense gaulois.'
Le grand changement du cours du Hhinqui, d'après la chronique des
Dominicains de Golmar, a eu lieu en 1295 et qui a placé (le vieux) Brisach
sur la rive droite, a dû, entre cette ville et Rhinau, enlever une large bande
de terre et |)roduire sur toute la zone comprise entre leZembs et le fleuve,
des bas-fonds et des infdtrations qui n'existaient pas avant cet événement
géologique. Le fait est importaiit à noter. On verra i? 8, qu'il a dû occa-
sionner la destruction d'une grande partie de la chaussée d'iielvet à Mont-
Brisach, puis il servira à expliquer comment, à l'époque romaine, une nom-
Itreuse population a pu exister dans une contrée aujourd'hui marécageuse.
Les découvertes laites à Schwanau et à Gerstheim ^ prouvent (jue cette par-
tie des bords du Rhin a été épargnée parla catastrophe de 1295'. Le fleuve
charrie du sable aurifère ([ui a été exploité dès les temps les plus reculés
par des orpailleurs.''
Le Rhin a quelques petits bras appelés Ischeti, Brunnwasser , etc., j'ai
cru pouvoir les négliger.
Le Zemhs (Gebus) est un ruisseau tranquille qui déborde rarement; son
1. .Moiic, loc. cil. , t. I! , 1). '.'Si.
2. Voy. ggôet 11.
3. Voy. U 5 et 7.
i  11 quatorzième siècle, le Rliiu causa de nouveaux dOgàts à la ville de liliiuau qu'il
enleva successivemeot avec son couvent. Par les basses eaux, on voit encore des pans de
inurs inclinés en aval. Je lésai vus , le 10 février 1858, du côté de la rive badoise.
5. Voy. Daubrée, Deacripiio^i gdoloriiqne et mmt'rulorjiqKe du Bus-Bhhi , p. 308. On verra
an ê 4 la mention d'une médaille gauloise qui peut avoir été l'aile avec cet or du liliin.
— 117 —
eau limpide et poissonneuse, était bien de nature à attirer l'attention des
populations prinnitives, et surtout à plaire aux Germains. Sur la ligne de
l'ancienne voie des Vosges au lihin, on remarque, dans son lit, les vestiges
d'un pont qui paraît dater d'une époque fort reculée.
La Lutter n'a sans doute joué aucun rôle particulier. Elle prend sa source
dans la banlieue de Hültenbeim, près de l'ancien cbâteau de Husenburg ou
Heidenscbloss. Ce ruisseau fend visiblement à se dessécher; il a déjà perdu
plusieurs petits faux-bras et son lit diminue en largeur et en profondeur.
L'Ill (Ellus). — Cette rivièrS navigable, quia donné son nom à l'Alsace (et
peut-être même à notre ville romaine), a eu certainement une grande im-
portance pour les anciens peuples qui ont habité ses rives. Sur la carte je
n'en ai indiqué que le cours principal. A Erstein il existe un bras de cette
rivière, qui sous le nom de Kro(ft et de Krafftivasser, se dii"ige dans le Rhin.
Ce n'est qu'un cours d'eau artificiel qui a été creusé en lo92 par l'évêque
Frédéric II*, qui faisait alors la guerre aux Strasbourgeois; son but était
de priver cette ville des eaux de l'HP. J'omets ce canal et je fais de même
pour tous les canaux usiniers. Il est certain qu'aux environs de Benfeld, le
régime des eaux a été complètement modifié par l'établissement des fortifi-
cations de celte ville au moyen âge. Entre Benfeld et Sand les eaux de l'Ill
sont actuellement divisées en trois bras: le canal du moulin de Sand, un
autre canal, dit Pidu er graben , qui jadis desservait un moulin à poudre,
puis le cours de la rivière proprement dite. Au siècle passé il y avait en-
core un quatrième bras qui se trouvait entre ces deux derniers. Comme
un certain fossé célèbre de Strasbourg, qui était dénommé d'après son
origine, celui-ci l'était d'après sa destination : an moyen âge on y trempait,
dit-on, les filles de mœurs trop légères.
Tout me porte à croire qu'à l'époque qui nous occupe, la rivière n'avait
qu'un seul bras aux environs d'Ehl et qu'alors elle était telle qu'elle se pré-
sente encore aujourd'hui à un demi-kilomètre plus loin, au-dessous de
l'usine de Sand.
Sur la ligne du tracé hypothétique de Hochstrass à Ehl, on voit, par les
basses eaux, sortir du lit de la rivière, les tèles corrodées d'un grand nombre
de pieux Irès-rapprochés, en bois de chêne norci jusqu'au cœur. La tradition
1. Kœiiigshoveii , Eis. u. slrasb. Chronicke, An))ie)-/,ir//(/('ii cou ScIiiKer, p. 7G4, et
Scliœpllin. Alsat. iUnstr. . f. Il, p. 16i. G'esl sans doute rétablissement de ce cours d'eau
artificiel qui a coupé la voie païenne n° 3 et l'a mise hor.s d'usage dans la direction de
Nordhausen. V. §8.
2. Kn 1791, le génie militaire lit établir un grand barrage, protégé iiar une batterie de
canons, pour rejeter les eaux de la Kraflt dans l'Ill et augmenter ainsi les moyens de dé-
fense de la place de Strasbourg.
— 118 —
— d'accord avec les probabilités — considère ces pilotis comme vestiges
d'un pont qni, à l'époque romaine, reliait les deux rives. Leur rapprocbe-
ment permet de présumer que ce sont des matériaux, demeurés sur place,
de constructions successives de ponts détruits et rétablis suivant les cir-
constances. Les charpentiers de la localité vont extraire ces pieux pour di-
vers usages de construction.
La Scheer n'est ni navigable ni flottable; son rôle paraît avoir été tou-
jours passif. Pourtant à Kertzfeld il y avait des établissements importants
sur ses rives.
UAndlmi. — Ce ruisseau porte le nom ô'AncUau jusqu'au moulin dit
Bntchwült t ; au-àessous, '\üS(\u' à son embouchure, il est vulgairementappelé
Schifjbach (rivière à bateau). D'après Horrer', qui s'appuie du témoignage
de Sébastien Brandt^ cette rivière a été rendue navigable au moyen d'un
canal artificiel. Mais ce fait ne paraît pas remonter jusqu'à l'époque gallo-
romaine.
$ 3. — Cours d'eau disparus.
Je les ai rétablis sur la carte d'après les traces qui en sont restées.
Brunnwasser et Hanfgraben. — Sur le plan du siège de Benfeld par les
Suédois en 1632', on voit un cours d'eau, à l'est d'Ehl, sans indication de
nom. La présence de plusieurs îlots prouve sa qualité de cours d'eau na-
turel; il a disparu en majeure partie, mais il est permis d'admettre qu'à
l'époque romaine, il a bordé Helvelus de ce côté-là. Sa source principale,
que j'ai eu beaucoup de peine à retrouver, existe dans une forêt dite Brunn-
%vald; elle était grossie par un faux-bras du Zembs. Ce cours d'eau paraît avoir
porté à Benfeld le nom de Brunmvasser ; il existe encore, sous forme de
ruisseau, dans les banlieues de Sand et de Matzenheim , où il prend le nom
Ae Hanf graben , et se jette dans l'Ill près du château de Wœrlh. Sur la carte
de Beaurain, dressée pour la campagne de Turenne, en 1674 et 1675, on
voit figurer un Brunnwasser , qui correspond en partie avec notre cours
d'eau; seulement l'auteur, égaré sans doute par le grand nombre de fossés
dont ce terrain est sillonné, lui a donné une embouchure impossible. La
source dite de Saint-Materne'' se trouve sur la ligne parcourue jadis par ce
ruisseau; elle en a peut-être occupé un des îlots.
Le Quer. — C'est un bras de l'Ill qui se dirigeait vers Kertzfeld pour s'em-
boucher avec la Scheer. Des travaux hydrauliques, faits par la filature du
1. Dictionn. f/éogrupf/., histor. et polit, de fA/soce, p. I7G.
2. Theatnim eîiropœum ^ t. 11 , p. G38.
3. Voy. gg Ü et 12.
— 119 —
Bas-Rhin, à Hüttenheim, l'ont barré et mis à sec, à la grande satisfaction
des habitants de Kertzfeld, auxquels il occasionnait parfois de redoutables
inondations. Le Quer a été probablement navigable à l'époque romaine et
a pu servir de moyen de communication entre les possessions des bords
de riU et celles des bords de la Scheer.
CHAPITRE II.
Recherches archéologiques. *
Dans mes travaux sur les lieux , j'ai eu quelques résultats négatifs qui ,
je crois, méritent d'être rappelés, car ils pourront prévenir dorénavant
des recherches inutiles. Ainsi, j'ai essayé de découvrir, dans nos forêts,
ces excavations circulaires qu'on appelle margelles, fosses à loup, sur les- '
quelles étaient assises les cabanes des populations primitives; mais sans
aucun succès. Dans les banlieues de Herbsheim (près des lumulus e) et de
Friesenheim {Königsherberg ^), on m'a signalé, dans les prairies, des places
où le sol est ondulé comme sur un ancien cimetière, et que les habitants
appellent Grœher (tombeaux). Je les ai examinées et fouillées jusqu'à la
nappe d'eau souterraine, sans aucun résultat archéologique. La régularité
des couches superposées dans ce terrain d'alluvion moderne, m'a d'ailleurs
prouvé que la main de l'homme n'y avait jamais touché. Il est probable
que ces ondulations ont été produites par le parcours du bétail et que le
nom a été donné par analogie. ^
'Quoique mes recherches s'arrêtent à la lin de l'époque gallo-romaine,
j'ajouterai dans ce chapitre toutes les données ultérieures qui peuvent pré-
senter de l'intérêt. J'indiquerai surtout, pour les localités principales, les
premières mentions d'après Scbœpflin et Grandidier.
§ 4. — Observations et découvertes faites sur le territoire d'Elu.
La lene et l'eau de ce petit point d'environ 60 hectares, recouvre des
restes de presque tous les âges; mais les plus nombreux sont ceux de
l'époque romaine. Presque partout des deux côtés de la voie païenne n° 1,
on trouve, parfois à fleur de terre, des tuiles à rebords, des tuileaux,
des faîtières, des briques striées, de la poterie, des subslruolions, du
1. Je conserve dans ma coUeclioii des specmiens de prescjuc loiilos les trouvailles qui
soiil iiientionii('C.< dans re chapitre. Les matériaux les plus abondants sont les produits de
la céramique.
2. Yoy. § 6.
3. Voy. Bulletin de la Société . t. 111, p 11 , P. V.
— 120 —
ciment, des objets en métal, et principalement des médailles en bronze,
argent et or. Parmi la céramique, on distingue surtout la poterie rouge
fine avee moulures en relief; puis, plus fréquemment, de la poterie romaine
ordinaire à pâte rougeâtre, rosâtre, blanche, grise, noirâtre; parfois
aussi de la poterie gauloise sableuse et micacée, et une poterie à pâte
grise cendréeet jaunâtre, qui est probablement germaine. 11 y a des débris
de vases de toutes les formes et de toutes les dimensions. Les vases entiers
sont rares, et lorsqu'il s'en trouve, les ouvriers les brisent. Ce n'est qu'avec
peine que j'ai pu en sauver quelques-uns d'espèce commune. Ce ter-
rain étant livré à la culture, je n'ai jamais pu y faire des fouilles métho-
diques sur une grande échelle; mais j'ai soin de suivre, autant que pos-
sible, les travaux des champs et de recueillir tous les objets qui présentent
quelque intérêt.
A gauche de la voie païenne qui traverse Ehl, à la place marquée d'une
petite croix avec le chiffre I, on a fait des fouilles, il y a environ vingt -huit
ans, et on a rencontré les restes d'un four, des cendres et des charbons,
deux coins en fer, des objets en bronze, des scories avec paillettes d'or,
des morceaux informes de métal fondu.^ C'est là, sans aucun doute, qu'était
située la fabrique de bronze {ofjßcina œraria) dont parlent quelques auteurs
modernes. A environ 50 mètres de là se trouve la place de l'ill, où l'on a
mis au jour, il y a environ quarante ans, ce grand gisement de médailles et
d'objets en bronze, dont les spécimens se sont répandus dans presque toutes
les collections de l'Europe. Cette partie de la rivière est jonchée de restes
de constructions: moellons, tuiles à rebords, ciment etc. Par les basses
eaux, les pêcheurs en retirent des pierres à bâtir. L'endroit le plus riche
en matériaux de ce genre se trouve vis-à-vis de l'ancien couvent qui, d'après
la tradition et les auteurs, occupe la place du temple païen que saint Ma-
terne aurait fait démolir \ M. Barthelmé, de Sand (membre de la Société),
possède la partie inférieure d'un autel votif brisé, qui a été retirée ici de
la rivière; il est à quatre faces, sur chacune desquelles se trouve une
figure incomplète. Il n'est pas probable que les médailles et objets en métal
aient été jetés directement dans l'eau; en cet endroit, le courant est ordi-
nairement très-fort et a une tendance à corroder la rive droite: on pour-
rait donc présumer qu'ils ont été enfouis dans la terre et enlevés peu à
peu par des érosions.
Je collectionne tout ce que je puis me procurer de la localité d'Ehl, tant
par des fouilles directes et des draguages dans l'Ill, que par des dons et
1. Voy. gg 7, Il et page 122 pour la description des coins.
2. Voy. sur la carte l'eniplaceiTient de ce temple indiqué par un signe particulier.
— 121 —
(les acquisitions. Voici à peu près les objets les plus intéressants que je
suis parvenu à réunir jusqu'ici :
Des pierres meulières de dinërents calibres, entre autres une paire de
meules entières {mola momtaria), avec pivot en plomb; des débris de sta-
tues; une plintbo portant LEG VIII AV; beaucoup de poterie de toute
espèce, brisée en majeure partie; deux fonds de vases en céramique ro-
maine rouge fine, avec noms de potiers accompagnés de fecil, comme suit :
VICTOR. F BEL4TVLLVSF
Victor est le nom d'un potier rauraque; Belakdlus me paraît inédit.
En bronze : une hache sans entaille, moulée à peu près sur la forme de
celles de l'âge de pierre, un kelt (à manche plat), des virioles, des bagues,
des fibules, des boutons, des épingles, une pointe de flèche {sagiîta ha-
mata), un petit instrument qui paraît appartenir à la chirurgie, sans doute
un specillum\ des clefs, etc.
En fer: une hache (ascia), des clefs, des lames, des pointes de flèche,
des clous de toute dimension, parmi lesquels des pièces de très-grand ca-
libre, etc.
Je n'ai pas encore trouvé de statuettes.
Les monuments les mieux représentés à Ehl, ce sont les médailles ro-
maines; malgré la quantité énorme déjà enlevée, on en trouve toujours,
mais elles deviennent de plus en plus, rares. Celles que je rencontre le plus
souvent appartiennent aux empereurs du troisième et du quatrième siècle,
et les plus nombreuses sont celles de la famille des Constantin. La plupart
sont en bronze (souvent très-frustes); j'en ai quelques-unes en argent et une
seule en or, c'est un Arcadins à fleur de coin. Il y a également des mé-
dailles gauloises. J'ai recueilli une de ces pièces en or, concaves-convexes,
que les Allemands appellent Begenhogensclmsselchen {smtellœ iridis).
Je crois inutile d'énumérer les médailles que j'ai recueillies jusqu'ici,
ce catalogue serait trop incomplet pour présenter un intérêt spécial. Quel-
ques mots seulement sur la question assez peu connue des liegenbogen-
achüsselcheii. Ce mot signifie littéralement soucoupes d'arc-en-ciel. Voici ce
que dit le docteur Schreiber de ces médailles": On les trouve partout où
il y avait des peuples de race celtique; elles abondent en Rohême où l'on a
découvert, près du village de Podmokl, en 1771, une chaudière en bronze
qui contenait plus de 40 kilogrammes de ces pièces d'or. Leur nom vient
de ce qu'elles apparaissent principalement après les pluies battantes, qui
1 . \oy. Dicf. (les antiq. yrecq. et roin. , par Ricli , publié sons la direction de M. Cliéniel.
2. Tascheiibucli für Geschichte v. AHerthUmei- in Siiihlevtschland . 1839, p. 211.
— 122 —
ravinent et enlèvent la terre, par conséquent, dans les moments où se
montrent les arcs-en-ciel. Les paysans s'imaginent alors que c'est ce phé-
nomène qui les produit; ils croient que partout où un arc-en-ciel a touché
terre, on trouve une de ces pièces. Ils leur prêtent même des vertus médi-
cinales: l'eau dans laquelle on les fait tremper passe pour guérir la fièvre,
etc. Les auteurs attribuent ces médailles de la Bohême aux anciens Boïens.
Un autre savant allemand, M. le prof. Franz Streber, a pubhé tout ré-
cemment un traité ex professa sur cette question encore assez obscure des
médailles creuses'. D'après les données de cette intéressante dissertation, il
m'est permis d'admettre l'hypothèse, que ma pièce provient des Helvétiens
et qu'elle a été faite avec l'or des sables du Rhin. Elle ne se trouve pas
parmi le grand nombre de figures que donne M. Streber. En voici en peu
de mots la description: Or pâle; concavité peu prononcée; côté convexe:
tête laurée; côté concave: conducteur de char, tenant en main un stimulus
au-dessus de la tête du cheval; sous le ventre du cheval, je crois recon-
naître un B. Poids: l^^OGO.'
La bibliothèque de la ville de Strasbourg possède un grand nombre de
monuments provenant d'Ehl: plusieurs autels votifs, une inscription aux
déesses Mères, des statuettes en bronze de Mercure et autres divinités, des
anneaux, des fibules en bronze, un anneau en fer avec cachet d'or portant
un lion, des kelt en pierre, en bronze et en fer, un moule à kelt, des mé-
dailles en bronze, en argent et en or, etc. Rappelons encore les deux coins
en fer, dont il a été question ci-dessus, et qui paraissent être un avers et
un revers de la même médaille. L'avers donne le buste avec diadème de
Valentinien F'' tourné vers la droite; le revers est trop fruste pour pouvoir
être déterminé avec certitude.
Du temps de Beatus Rhenanus, Ehl était encore très-riche en monuments
romains de toutes sortes l Dans le couvent on conservait beaucoup de
figures scellées dans les murs, entre autres les images de Mercure, de
Diane et autres divinités. Beaucoup de ces monuments ont été employés
aux fortifications de Benfeld. Le hameau d'Ehl ayant été fortifié lui-même
par les Suédois, en 1632, pour l'investissement de cette place, il est cer-
tain qu'on n'aura épargné aucune antiquité propre à cet usage. C'est ainsi
1. Voy. Abhandlungen der philosoph/sch-pluloloyischen Classe der konUjlich-bayeri scheu
Kkadcmie der Wissenschaften, 1860, Münclien.— i'oiir le poids de ces pièces, voy. l'ii. t)iss,
Beslimmunç/ des Goldgewichls der sog. Rcgenbogen-Sch., München, 1861.
2. Me proposant de faire un travail spécial, avec figures, sur les antiquités trouvées à
Elit, je prie les personnes qui possèdent des pièces, autlientiquemeul originaires de cette
localité, de vouloir bien m'en communiquer des descriptions ou des dessins,
3. Beati Rhenani reruin gerinmiicar. , 11b. lit, p. 170, edit. MDLI.
— 123 —
qu'un grand nombre de monumenls précieux, que le savant de Schlestadt
(du seizième siècle) a connus et qu'il aurait dû nous décrire avec plus de
détail, ont été brisés et dispersés.
Schœpnin' a décrit et figuré un cippe quadrilatère bien conservé qui
s'est trouvé dans la sacristie; on y dislingue parfaitement Mercure, Hercule,
Vesla et Pallas. Schweigbœuser' parle de deux autres autels votifs, prove-
nant du même couvent, sur lesquels on reconnaît les ligures de Mercure,
d'Hercule, de Minerve, de Junon, etc. — Ces trois pièces se trouvent à la
bibliothèque de Strasbourg.
Tous les auteurs qui s'occupent d'archéologie et d'histoire d'Alsace, par-
lent des antiquités d'Ehl. Celui qui le premier y a signalé l'existence d'une
ofjßcina œraria, est le D'" Schreiber. Il parle ionguement des trouvailles
qui ont été faites dans cette localité, et, d'après lui, les médailles ro-
maines que l'on y recueille s'étendent sur toute l'époque des empereurs.'
L'épigraphie lapidaire n'est représentée que par une seule pièce, celle
dont il a été parlé plus haut et qui se trouve à la bibliothèque de Stras-
bourg. Je ne saurais omettre cette inscription qui est l'un des monumenls
les plus impoi-lanls de l'ancien Ilelvct. Je la reproduis d'après Schœpflin.'
MATRABVS AGRV
EX MACERIE CIRG
VMDVCTVM SEXT
VS CLEMENTIS FIL
V. S. L. L. M.
Malrabus Agnim ex nmcerie circvmductuin Sextus Clementis ßlhis (de-
dii), voHwi solvens lubens libero mimere.^
il est certain que le territoire d'Ehl formait à peu près le centre de la
ville gallo-romaine Helveim ou Hellehim, appelée par Ptolémée EXxeßoc.
Après la chute de l'Empire romain, ces noms ont subi diverses modifications,
tout en conservant leur radical. Ainsi on trouve dans les chai-tes et dans les
auteurs : Helkeb, Helvel, Elcebus, Hellemw,, Hchs, Helius, Elveto, Eletdo,
Allerica, Elvos, Aleye, Eliglum, Eiigia, Elegia, Eley, Ehly ; puis, comme
variantes usitées de nos jours : El, EU et Ehl La première mention, sous
1. Loc. cit., Tab. V.
2. Antiquités do l'Alsace, pag. 3«.
3. Loc. cit. p. 192.
4. Loc. cit. , t. I , p. 478.
5. Le D"" Steiuer [Codex inscriptionuvi romanantm Rheni. Darmsiadt, 1837 p 85)
donne une leçon un peu différente; il interpréle ainsi les sigles de la dernière lione-
votim solvit lœtm Übender merito; ^Mh. dans l'inscription , il sépare les mots parades
points
— 124 -
le nom à'Alege, date de 1050. Une antre mention, de 1336, parle d'nne
église paroissiale à Eley, ce qui prouve qn'nn moyen âge celte localité avait
encore une certaine importance.
Notre savant et obligeant bibliophile, M. Ileilz, m'a communiqué un
exemplaire de Merian, Topogrnpliie des Elsasses (1063), portant des noies
marginales manuscrites. Dans une de ces notes, il est dit que le pape
Léon IX, en revenant du synode de Maycnce, consacra l'église d'Elily',
qui était livrée au culte depuis huit siècles sans avoir reçue aucune consé-
cration. Je possède un fragment de lût de colonne avec chapiteau, qui
porte sur deux de ses faces des croix grecques, sculptées par une main
peu exercée et certainement faites à la baie. Cette pièce a été trouvée vis-
à-vis de l'ancien couvent, il y a une vingtaine d'années, à plus d'un mètre
sous terre. Des connaisseurs font remonter ce chapiteau à une très -haute
antiquité. Serait-ce une colonne de cette égbse consacrée par le saint pon-
tife alsacien dans une visite faite en Alsace?
D'après une autre note manuscrite du même livre, le roi Clovis aurait
fait restaurer l'église d'Elil au commencement du sixième siècle ; l'auteur
anonyme ajoute que dans les murs on trouve les idoles de Mercure et de
Diane.
Sans être positivement historiques, ces données peuvent avoir quelque in-
térêt et j'ai cru devoir les mentionner ici. On verra plus loin' la tradition de
l'apostolat de saint Materne, tradition populaire très-vraisemblable, d'après
laquelle cet apôtre aurait fait démolir le temple païen pour le remplacer
par une église et un couvent. On ne sait rien du couvent primitif; au
moyen âge il y avait d'abord des Prémontrés qui, plus tard, furent rem-
placés par des Récollets.
^ 5. — Vestiges d' établi ssemenls romaiiïs trouvés dans la contrée.
Je considère comme vestiges d'établissements de ce genre, les substruc-
tions et la céramique portant un cachet romain, principalement les tuiles
à rebords. Il y a des places où je n'ai rencontré que des débris de tuiles ;
je n'ai pas hésité à les considérer comme vestiges d'établissements romains.
Quoiqu'il soit prouvé que les tuiles à rebords aient été usitées encore à
l'époque mérovingienne, je ne crois pas avoir fait fausse route en présence
d'un centre romain positivement reconnu.
La plupart de ces places sont occupées par l'agriculture, qui fait succes-
1. Ce lait ii'esl constaté par aucun 'loruiiu'iit. i\I.S[ia(;li. dans l'intéressante notic»^ .sur
Leon IX, lue dans la séance dn 1(J décembre 1863, n'en lait pas mention.
?. Voy. g 12.
— 125 —
sivcment dispyiaîlrc jusqu'aux dernières (races de ces vestiges. Il y a des
emplaceuieiils qui niérileraienl d'être étudiés par des fouilleg méthodiques
et complètes, qu'on ne peut exécuter qu'en hiver lorsque le sol est lihre;
je les signalerai aux archéologues qui auraient le loisir de suivre des tra-
vaux de ce genre.
. L'étendue de ces places, indiquées sur la carte par des carrés, n'est (jue
relative; l'échelle est trop petite pour une précision complète. J'ai désigné
par leurs noms vulgaires les places dont j'aurai à parler. Toutes sont reliées
entre elles par des voies anciennes. Il eut été intéressant de déterminer le
rôle de chacun des établissements dont j'ai trouvé les vestiges; mais j'ai du
me borner à quelques conjectures. Il y en a probablement qui n'étaient
(|ue des lieux de sépulture.
Bargheim. — Tuiles à rebords, débris de poterie romaine rouge, noi-
râtre, etc. Voilà ce que j'y ai recueilli lors d'un passage rapide. Le titre de
place romaine étant acquis à Burgheim d'une façon notoire, je n'ai pas
poussé plus loin mes recherches. Sachant d'ailleuis que M. Ringeissen a
soumis cette localité à une étude spéciale, j'ai fait appel à son obligeance,
et voici ce qu'il m'a communi(]ué: «Le tertre sur lequel est construite l'é-
glise romane de Burgheim a diÀ servir autrefois de poste d'observation ou
de chàteau-fort ; on y trouve les traces de constructions souterraines à
petit appareil qui peuvent dater de l'époque romaine; j'y ai déterré des
tuiles, tuileaux, fragments de vases, monnaies, épingles, une petite plaque
de bronze, ouvragée dans le genre de celle trouvée par M. Valois, à Hei-
dolsheim, et publiée dans le Bulletin; des ferrailles, des charbons en
gi'ande quantité, indiquant un fort incendie, le tout de l'époque romaine.
On trouve encore sur les teirains environnanîs des médailles, des objets
de bronze, des multitudes de débris de poteries fines, noires, rouges,
irisées, etc.; des meules, des substructions de four, etc.»
La première mention de Burgheim {Burcheim) date de 770. D'après
Specklin, il y avait une commanderie de Templiers.
A Valf, qui se trouve à proximité, je n'ai rencontré aucun vestige
lomain. Cette commune est très-ancienne aussi; sa première mention date
de 778, sous le nom de Walahu. Stotzheim (Stolesheiin) est mentionné
pour la première fois en 814, et Zellwiller [Zincilla) en 893.
Hollzbad, prés Westhausen (canton dit Ziegelhof ). — Débiùs de tuiles, à
rebords, fragments de poterie romaine. Il y a environ vingt ans, le sol était
encore jonché de ces débris, les soins de la culture les ont fait disparaître
en majeure partie. Il y a une source d'eau minérale, très-abondante, uti-
lisée depuis un tenq)s immémorial. On sait (|u'elle était déjà fréquentée au
— 126 —
dixième siècle'. Y avait -il un bain romain? C'est une question insoluble
pour le moment. Une tradition locale veut que jadis des tuyaux souterrains
conduisaient l'eau de cette source à Ebl; on dit en avoir trouvé il y a en-
viron cinquante ans. Les tuyaux de bains romains recueillis par Schweig-
bœuscr, près de Malzenheim, donnent quelque poids à cette opinionl On
parle aussi de médailles romaines trouvées aux environs de IIoKzbad.
La première mention de Westliausen date de 07G. Il y avait une famille
noble de ce nom qui s'est éteinte.
Elkach, Eltzen ou Eisten, près de Kerlzfeld. — Les liabitants du village
disent ville d'Ellzach. Jadis pâturage, ce terrain est maintenant livré à la
culture. On y remarque des substructions, des fi'agments de tuiles à rebords
et de poterie romaine, dispersés sur une étendue d'environ 100 hectares.
Cet emplacement est traversé par une belle route pavée en galets du Rhin\
On m'a fait remarquer la place d'un puits qu'on avait comblé, après en
avoir extrait les matériaux, parmi lesquels j'ai trouvé des tuiles à rebords.
C'était certainement un tolleno.
Le nom d'Kllzacb ne se trouve dans aucun ouvrage sur l'histoire d'Al-
sace*. Serait-ce peut-être Hilciacvm dont Schœpflin ne sait trop que faire^?
Ellzacli, Eltzen ressemblent tellement à Hclkebus, Elcebus, etc., qu'on ne
peut presque pas s'empêcher d'adhérer à la tradition populaire (jui veut
que la ville gallo-romaine se soit étendue jusque-là.
Filij ou Filli/, autre canton rural près Kertzfeld, à côté du Qiœr, ancien
bras de l'Ill. — Tuiles à rebords, viriole et épingle {ncus comatoria) en
bronze.
Sur le territoire du village même, on rencontre des médailles romaines,
j'y ai recueilli un Constance en bronze.
En creusant les fondations d'une nouvelle église, il y a quelques années,
on a déterré plusieurs sarcophages mérovingiens. La pi'emière mention de
Kertzfeld (Kercenveli) ne date que de 1187. Famille noble éteinte.
Bitzen^ (commune de Sand). — Tuiles à rebords, poterie blanchâtre,
grise, rouge commune, ossements. C'est M. Barthelmé qui a trouvé ces
objets en faisant décaper une prairie.
1. Hydrographie mèdiculc Oe S/rasbourç) , 1862, p. 217.
2. Voy. g 7.
3. Voy. g 8, Vtehweg ou AUwerb.
4. On raconte à Kertzfeld que, en 1815, les Autricliiens ont reclierché cette place qu'ils
avaient marquée sur une de leurs cartes.
5. Alsat. illu&tr. , t. ]", p. C92.
6. Ce nom désigne un canton rural et on le retrouve dans d'autres communes. Ainsi
l'OEuvre de Aotre-Dame possède des biens dans le canton Ditzen de la commune de Still.
.— 127 —
La première mention de Sand {Sandt) date de 1292.
Ancienne voirie (banlieue de Benfeld). — Tuiles à rebords. Il y a une
vingtaine d'années, en décapant une prairie, on a déterré beaucoup de
tuiles à rebords qui ont été dispersées. Je n'en ai plus rencontré que quel-
ques pièces. C'était la voirie où, au moyen âge, on jetait les corps des sup-
pliciés qui étaient pendus au gibet, placé à quelque distance de là.
Benfeld. — Tuiles à rebords et autre céramique romaine; médailles. Dans
un mur de l'ancienne église se trouvait scellé un bas-relief très-antique,
qui passait pour la figure d'un Gaulois. Dans une maison au millésime de
1566, des ouvriers ont rencontré, tout récemment, une figure mutilée d'un
Mercure gaulois qui avait servi comme moellon. Mercure était le premier
des dieux gaulois et on lui dédiait beaucoup de statues', A côté de la voie
ancienne (jui ti'averse Benfeld on a trouvé une pierre avec une excavation
qui contenait des cendres. — Tombeau romain?
En creusant les fondations de la nouvelle église, on a découvert des sar-
cophages mérovingiens. Benfeld passe pour avoir été bâti à l'aide des ruines
(ÏHelvetus. Sa première mention, sous le nom de Beneveldim, date de 763.
Une famille noble éteinte portait ce nom.
Heidenschloss ou Husenburg, près Hüttenheim'. — Tuiles à rebords trou-
vées dans les décombres de cet ancien château féodal, auquel Sclnveig-
hœuser, dans ses manuscrits, donne également une origine romaine. Ces
décombres amoncelés formèrent une espèce de colline. En 1818 ou 1820
on les enleva pour les disperser et le sol du château fut converti en prairie.
C'était probablement un castellum. D'après la tradition, la poste se trouvait
à proximité. On sait que les mansions étaient quelquefois fortitiées pour
veiller à la sûreté des voies et les protéger contre le brigandage. Ce fort
pouvait en même temps avoir pour mission de couvrir la navigation de Till
et être la demeure du maître de poste (manceps perfectissimatus.y
Au moyen âge, ce castel fut habité par des brigands, dont les habitants
de Jlüttenheim ont conservé le souvenir. D'après la tradition locale, ils pil-
lèrent surtout les bateliers de l'ill, et pour leur donner le change, ils eurent
recours à la ruse en ferrant leurs chevaux en sens inverse. D'après Bern-
hardt Hertzog', les Strasbourgeois brûlèrent ce castel en 1428; alors il
appartenait à un nommé Jean Mans. Schœpflin" dit qu'il avait pour proprié-
1. Cœsar, De bello gallico , lib. VI , cap. xvii.
2. Bulletin de la Soc. des mon. hist. d'Alsace , t. IV, p. iOG , P. V.
3. Voy. g 6, Heidenpost. Pour les postes fortifiés, voy. Mone, loc. cU. , t. II, p. 215.
4. Edelsäss. Chronick , lib. IV. p. 109.
5 Alsat. illustr., t. 11, p. 152.
— 128 — .
taire Adam Rytï, de Strasbourg, qui spoliait les marchands naviguant sur
rill, et que les Strasbourgeois détruisirent ce repaire en 1465 et jetèrent
le coupable en prison.
La première mention de liüttenheim date de 727. P'amille noble éteinte.
Pferche^}. — Tuiles à rebords et substructions. On parle d'une dalle avec
ligures déterrée dans la forêt; elle n'a pas été conservée.
Rosenfeld. — Tuiles à rebords, tuileaux, poterie ancienne. On j»arlc de
médailles et d'armes trouvées sur ce terrain, lorsqu'on a commencé à le
défricher il y a une quarantaine d'années. La tradition y place un temple
et une ferme appelée Rosenfeld, qui par corruption, a donné au village
voisin le nom de Rossfeld.
Première mention de Rossfeld (Rosenvell) 1358.
Rebhurst. — Tuiles à rebords, poterie ancienne, médailles romaines
frustes, une johe tibule en argent pareille à celle que M. de Ring- a trouvée
dans la forêt de Brumalh et qu'il a figurée dans le Bulletin'. Cette localité
a été découverte par M. fabbé Voltz, curé à Merbsheim (membre de la
Société).
Truli. — Tuiles à rebords, poterie ancienne, substructions. On remar-
quera la position de celte place à côté d'une voie païenne tout près d'un
groupe de turaulus. C'était peut-être un castellum pour surveiller cette
route.
Hafneracker. — Tuiles à rebords, débris de poterie romaine rosàtre,
grise, blanche, etc., substructions, traces de feu. On parle d'un grand nombre
de vases de terre, parfaitement rangés, à environ un demi-mètre de pro-
fondeur. — Tombeaux romains ?
llafneracker (ou champ de potier) fait partie d'un canton rural appelé
Mörderfeld (champ des meurtriers).^
Kirchsträng (Kirch, église; Strôeng-, Strangacker, pièce de terre longue
et étroite, Striga des Romains). — Tuiles à rebords en quantité, poterie
jaune, grise, rougeâtre, rouge fine (rare), fragments de vases de grande
dimension {jarres, amphores), briques striées, ciment fait avec briques
pilées {testa tusa), à surface peinte en couleur jaune, rouge et verte, sub-
structions, traces de feu, pavés, deux médailles de bronze de GalHen et
une médaille gauloise. J'ai fait beaucoup de fouilles sur cette place qui, après
Ehl, est la plus riche en vestiges antiques'. — Castellum romain?
D'après la tradition locale de Herbsheim, le village se trouvait à celte
1. 2*^ série, l'"' vol, p. 89.
•l. Bulletin, t. lit, p. 10, P. V.
3. il y a aussi do la ccramiquc du moyen âge.
Topo.^raphique et archéologique
D H EL VET l S
et dp ses PiivuHms. lElil pies Benfeld
f/ii / / Siècle
:XAP0Lè0X XICKLÈS
186-1.
^Iln\1rittz//ri7/i
vers S''0(Hh
S* Maguei'ifc
I Légende.
3 Tftnpie 'h- yt/rrrure hl après lu ira</ilioTt /
I l'i-sfiqes d r'tdl'hsscnients ro/iinins.
(2) /'lares îiolcrs pnar iite/aaife
+ Découvertes dircrsr.s.
■ loirs anci.rrmcs /lilrs /w/r/,'//i?yi Heidenstraessel
u.sitcfs comme rhemins.
P(ii-ti('s lie rares /y//r//v^«/°.yl Heidenslraesselou Altstvass I
fr/rore l'tsil'/es mais hors d iisaqc
=^ l'oii-s (larinnirs pirolal'les usilées romme
chemins ou s ni tiers.
Jnterriipfinns rf Ira ci' s /u/j]olhétrquts . ^.
. /oies modi'poe.s. ^^
• Ta ni If /a S.
' Simon, Str^sd'i
— p}^ —
place à l'époque où il fit partie de la graiule ville située à Ehl. Plus tard il
y avait une église et un château avec quelques huttes de paysans; le château
et le village ayant été brûlés, on les a rebâtis plus près du ruisseau, à la place
où se trouve le village actuel, et le seigneur du château a donné son nom au
village. (Il s'appelait sans doute Herholt, dont on a fait HerboUzhcim et }tar
corruplion Herbsiteim on He7'bsen.) D'après Bernhardt Hertzog*, Ilerbollz-
heim a été brûlé par lesSfrasbourgeois en 'li28, donc à la même époque où
fut détruit Husenburg. Le village appartenait alors à Jacob Duschmaïui.
Schœpflin^ rapporte qu'à Herboltzheim, vulgairement Herbsen, les Dorn-
hajusser avaient un domaine et un château qui fut détruit au milieu du
seizième siècle. Engagé d'abord aux Greiffenstein , il fut racheté en 1347.
Il n'est pas fait mention de Herbsheim antérieurement à cette date.
Je rapporte ces faits tels que je les trouve; il serait oiseux, sans doute,
de les discuter dans ce (ravail. Près du village actuel, au bord du Zembs,
il y a un terrain entouré d'un fossé qu'on appelle Sch los s garten (jardin du
château). J'y ai fait des fouilles avec M. Voltz, mais sans résultat.
Forêt de Sand. — Tuiles à rebords et poterie ancienne. La plupart des
matériaux trouvés à cette place ont été employés, il y a quelques années,
pour construire un chemin d'exploitation. — Castelkun pour couvrir la voie
d'Argentorat, rive droite?.
Kohlengruben. — Tuiles à rebords, poterie romaine rouge line et aulie,
bri(|ues circulaires, substructions, traces de feu et des charbons, d'où le
nom qui veut dire fosses à charbons.
Schwanaii, près Gersiheim. — Fragments de tuiles à l'ebords, tuileaux,
débris de poterie rouge line et autre poterie ancienne, substructions à
petit appareil de la dureté du granit, une clef romaine et une médaille de
bronze d'Adrien. Les débris à cachet romain sont fort rares, ils ont dû dis-
paraître en majeure partie par les constructions féodales, ou ètie enfouis
sous les décombres de celles-ci.
Tout le monde connaît le bas -relief de Glabro du musée Schoepilin, dé-
couvert à Gerstheim au siècle dernier, décrit et figuré dans XAlsatia illus-
trala^. Je possède des médailles romaines trouvées dans cette localité, enti'c
autres celle de la colonie de Nîmes (bronze) avec le crocodile et le palmier,
et une Faustine (argent) avec le temple à six colonnes au revers. Tout me
porte à croire (|ue ce point a joué ini rôle important dès les temps primitifs;
et je ne crains pas d'admettre l'hypothèse que le château féodal de Schvva-
1. Ub. iv, ij. lou.
2. toc. cit. ; t. Il, p. 158.
3. Msaf. iUfisfr.. Tai>. I. lig. u" 11.
ii'.SÉRit. — T. 11. — ^M.) y
— 130 —
nau a été précédé d'un castrum romain, que ce fort était une sentinelle
avancée pour défendre Helvetus contre les Germains. Ces peuples ayant été
sans cesse des voisins incommodes et menaçants, ce poste de défense avait
toujours sa raison d'être, à l'époque gauloise aussi bien qu'à l'époque
gallo-romaine.
On verra plus loin' la description d'autres découvertes du plus liaul in-
térêt qui viennent d'être faites à Gerstheim. Au dire des habitants, on a
déjà trouvé, au village et dans les environs, beaucoup d'antiquités, telles
que vases, armes, colliers, bracelets, médailles, qu'on a gaspillées sans en
connaître l'importance. Il y avait plusieurs tumulus qui ont disparu; il ne
m'a plus été possible de les pointer sur la carte.
Il y a quelques années un douanier, en péchant à la ligne, dans le Rhin
près de Schwanau, retira un vase en bronze qui s'était accroché à l'hame-
çon. C'est un gobelet de la contenance d'un litre environ. Il porte au milieu
le monogramme du Christ, entourée d'une couronne, avec les lettres a
et G). Autour du bord se trouve cette inscription: Septlnius Theodalus cor-
recior Venitice et Islriœ ex ac. Ce précieux monument, qui paraît dater du
quatrième siècle, a été acquis parla bibliothèque de Strasbourg.
Le bas-relief de Glahro a fait supposer à Schweighœuser* qu'à l'époque
romaine il y avait une villa à Gerstheim. 11 m'est imj)0ssible d'admettre
cette opinion. Une villa est un séjour de plaisance; qr, à cette époque, la
résidence dans un lieu continuellement exposé au premier choc d'une
invasion de barbares, n'a pu offrir le moindre agrément. Une villa franque
serait plutôt admissible.
Le castel féodal de Schwanau a été pris, en 1333, sur Walther de
Geroldseck, par les Strasbourgeois, qui l'ont détruit.^
Krittwalcl, près Krafft. • — Tuiles à rebords et tuileaux. Cette place est
une prairie sur la lisière de la forêt; on l'a décapée et les matériaux ont
été dispersés et jetés à l'eau. Je n'ai recueilli que quelques débris portant
un caractère romain. Il est possible qu'il y ait eu là un relais de poste
{mutatio),ce point, se trouvant sur la ligne hypothétique d'une voie d'Helvet
à Argentorat, qui passe par une place appelée Krœmergœssel. ^
La route moderne du Rhin , de Râle à Spire, avait toujours un relais de
poste dans le hameau de Krafft.
1. Voy. g 7, VII, Gersllieim,
2. Schœpflin, traducl. Uaveiièz, f. i", p. Gui.
3. Voy. Kœiiigslioven, Eis. u. strassb. Chronick , p. 3'2I. — Scliœpfliii , kls. illust. , t. II,
p. 444, et surtout Schweigliceuser, Antiq. d'Alsace , Bas-Rhin _, p. 39. Schwanau appartient
à la famille Zorn de Bulach.
4. Voy. ce mot, g 6.
— 131 —
Erstein. — 11 y a quelques années, en ci-eusant les fondations de la
nouvelle église, on a déterré divers objets de l'époque romaine: tuiles à
rebords, débris de vases, pierres meulières, etc. Ces objets sont conservés
par M. Ringeissen, architecte. J'ai vu, dans mon enfance, les urnes ro-
maines en terre rouge qui ont été trouvées (à peu près en 1 820), dans renclos
de l'ancien couvent, et que Schweighaeuser cite dans ses Antiquités d'Al-
sace, page 40.' On parle de médailles romaines rencontrées dans celte
localité.
A la même place de l'église, on a découvert un sarcophage mérovingien.
Les rois francs avaient un palais et une villa à Erstein. Au moyen âge, ce
bourg avait le titre de ville qui était fortifiée; cette forteresse a été détruile
par les Strasbourgeois en même temps que Scbwanau.
Il existe à la mairie une chronique manuscrite du seizième siècle dans
laquelle cette localité est appelée Erstheim. Sa première mention, sous le
nom de Herinstein, date de 818. Famille noble éteinte.
Wasserloch, près d'Uttenheim. — Je n'y ai trouvé que deux fragments
de tuiles à rebords. D'après la tradition locale, il y avait jadis beaucoup
de débris de ce genre et des substructions; tout cela a été enlevé par des
travaux de défrichement. A côté du chemin dit Nordivegse trouvait un puits
qui a été supprimé en 1815; lorsqu'on en a extrait les moellons, on y a trouvé
une belle médaille de César, qui a été recueillie par un officier autrichien.
Il existait à Ultenheim un château féodal qui a été démoli et dont la
famille s'est éteinte. Sa première mention date de 817 (Utenheim).
Les deux communes voisines sont également très-anciennes. Bolsenheini
(Bosenheim) est mentionné pour la première fois en 845 et Schaeiïersheim
(Scasevisheim) en 768.
Leimengnih^ près Osthausen. — Tuiles à rebords, tuileaux, faîtières,
quelques rares débris de poterie ordinaire et rouge fine. Un propriétaire
parle de grains de collier qu'il a trouvés en labourant son champ. A environ
500 mètres de cette place, dans la propriété de M. le baron Zorn deBulach,
on a découvert les restes d'un tombeau romain."
Osthausen est un ancien fief de la famille Zorn, qui y possède encore
aujourd'hui un château ^ La première mention de ce village date de 735.
1. D'après M.Spach (Descr/pt. du départ, du Bas-Rhin, introd. hïslor.. p. 10) il y aurait
eu à Erstein une poterie comme à Heiligenberg etc.; pourtant je ne saclie pas qu'on y ait
jamais rencontré des restes de four.
2. Voy. I 7, IV.
3. C'est de cette famille qu'est issu Gp.orrje-Louix , l'héroïque défenseur de Benfeld, contre
les Suédois, en 1632.
— 132 —
5 (I. — Places notées pour niénwtre.
Ce sont des lieux (jui oiiL joué, ou qui paraisseiil avoir joué uu rôle à
répo(|ue romaine, sans que j'aie pu le constater par des monuments.
Plusieurs de ces noms ne sont que traditionnels mais je les crois, signi-
ficatifs.
Allmansweier. — Village du grand-duché de Bade. Je ne le cite que
parce que son nom vient à l'appui d'une hypothèse que je dévelopi)erai
[)lus loin \ à savoir, que c'est en cette contrée que les Alémans s'étaient
réfugiés dans les îles du Pdiin d'où Julien les a chassés, d'après la narration
d'Ammien Marcellin, et que ces Alémans ont donné naissance à ce village,
au(juel ils ont laissé leur nom.
Ehersmünster (Novientum '). — On signale des vestiges de constructions
romaines aux environs de ce village, surtout sur la rive droite de l'Ill. Il y
a itlusieurs grands tumulus dans une foret de ce côté appelée Todtenkopf
(tête de mort). L'église, de construction moderne, se distingue par ses
trois clochers, dont fun, qui occupe seul le côté de f orient, est appelé
Heidenthurm (tour païenne); c'était peut-être un sacellnm. Il y avait sans
nul doute uu étahlissemenl romain d'une certaine importance dans cette
localité; elle mériterait d'être le sujet d'un travail spécial. Il y aurait sur-
tout des études intéressantes à faire dans la direction de llilsenheim par
VVillerhof, où il y a un grand tumulus, et où l'on a déjà déterré heaucoup
d'objets antiques.
La première mention de Novienlum date de 77(1.
Heidenheck est un terrain boisé en majeure partie que l'on traverse en
allant de Heidenpost à Heidenschloss. — On n'y a pmdh vkn trouvé de par-
ticuliei'.
Heidenpost, à côté de la voie païenne n" 1, banlieue de llültenheim. —
C'est une place carrée, d'environ 3 ares, qui est propriété particulière sise
au milieu d'un terrain comnumal. Elle appartenait originairement à l'évêché
de Strasbourg et a été vendue avec les biens natienaux. On l'appelle
aussi Todtenkœpfel (tête de mort) ou Postplœtzel (place de la poste),
et la tradition veut qu'il y ait eu une poste à l'époque romaine: de là le
nom de Heidenpost (poste païenne). On en a extrait beaucoup de pierres
à bâtir, il y a longtemps déjà. Les touilles y sont difficiles, à cause des
broussailles dont le sol est couvert; aussi n'ai-je rien pu y découvrir. Ce
point se trouve près d'un croisement de route {compitwn), à 4'/, kilo-
•l.Voy. gl2.
5. Voy. Scliœptlin ., foc. c/t. ,, t. I"', p. 58.
— 133 ~
mètres de l'emplacement probable du temple de Mercure à Ehl. Il y a plu-
sieurs localités à vestiges romains aux environs; il est fort possible que la
poste se soit trouvée là et que" Heidenscliloss ail été un casleUimi et en
même temps la demeure du maître de poste (mcmceps). '
Königsherberg (gîte du roi). — Dans la banlieue de Friesenheim, et en
partie dans celle de Hossfeld, sur la voie païenne n" 4 de la carte, il y a un
grand canton rural qui porte ce nom. D'après une tradition locale, un roi
aurait jadis campé là; on parle d'armes, de fers à cheval trouves dans ce lieu.
J'ai soigneusement exploré ce terrain par des fouilles multipliées, mais sans
aucun résultai archéologique. La supposition d'un camp élabli dans cette
plaine par un roi aléman, au quatrième siècle, ne me paraît pas invrai-
semblable. Je développerai cette hypothèse plus loin.'
Krämergässel (rue des Merciers). — Ce nom est donné à un bois qui se
trouve, près de KrafÛ, entouré de plusieurs tumulus, sur la continuation
hypothétique, vers Plobsheim , de la voie païenne n° 3. D'après une tradi-
tion locale, il y avait jadis des habitations. Les tumulus l'attestent jusqu'à
un certain point. Une végétation forestière très-touffue m'a empêché d'y
faire des fouilles.
Serrnersheim. — Plusieurs voies, partant d'établissements romains, se
rencontrent à Sermersheim, et je suis convaincu qu'il y avait là un point
occupé dès les temps les plus reculés; mais malgré toutes mes recherches,
je n'ai rien trouvé qui me permette de l'affirmer d'une manièie foimelle.
Comme dans d'autres localités, le hasard décidera peut-être une fois la
({uestion.
Sermersheim, jadis fortifié, est l'une des plus anciennes commîmes de
la contrée; il en est fait déjà mention dans une charte de 708.
A Kogenheim, village voisin, il y avait une famille noble aujourd'hui
éteinte; sa première mention date également de 708.
Source de Sahit-Materne. — Bassin d'environ 30 mètres de circonfé-
rence^ Il paraît avoir occupé un îlot d'un cours d'eau disparu; je l'ai noté
sur la carte sous le nom de Brwvnwasser, se croisant avec la voie d'Helvet
au Rhin, à l'endroit où cette voie s'appelle f^ôc'/W; /«'er/. On dit qu'en curant
ce bassin, il y a envii'on vingt-cinq ans, on en a extrait des médailles
romaines.
C'est dans cette source que saint Materne, d'après la tradition, aurait ad-
ministré le baptême à ses nouveaux prosélytes vers la fin du troisième siècle.
1. Voy. g 5 Heidenscliloss 011 Husenbiirg.
2. Voy. g 12.
3. Voy. gg 3el 12.
— 134 —
§ 1. — Découvertes diverses.
I. Elil. — Restes d'un four; des cendres, des charbons, deux coins en
fer, des objets en bronze, des scories avec paillettes d'or, etc.'. C'est, sans
nul doute, l'emplacement de Vofjßcina œraria que le D'' Schreiber a mis en
lumière.' La tradition locale en a conservé le souvenir, mais elle en fait
surtout un établissement monétaire.
II. Figurine grossièrement faite en terre mal cuile et trouvée près de
Herbsheim, non loin d'une voie ancienne appelée Hohweg, au fond d'un
puits comblé, dans une couche de cendres. — La pièce était entière lors-
qu'on l'a retirée; mais elle a été brisée et il n'en reste que le buste. Elle
pouvait avoir une hauteur de 8 centimètres. C'est une figure de femme
ayant les cheveux en torque autour de la tête, avec deux tresses pendantes
par derrière, coiffure qui est en usage encore aujourd'hui parmi les
femmes de la Forêt-Noire*. Le puits était .sans doute un lolleno , et il ne
serait pas impossible que la figurine (idole ou joujou d'enfant?) ne fût un
produit de l'art des Alémans.
La population actuelle de la Forêt -Noire {Silva marciana) passe pour
descendre de cette nation et on sait avec quelle persistance les us et cou-
tumes se maintiennent parmi les gens du peuple; je ne crains donc pas de
déduire de cette ressemblance de coiffure, les conséquences historiques
que l'on trouva plus loin.^
III. Graviere près de Rossfeld. — Deux vases fendus et brisés, de poterie
gris noirâtre, sans lustre. A côté de l'un se trouvait une épingle en bronze
{actis comaloria); l'autre était accompagné d'une lame de même métal.
Il y a dans le sous -sol de cette contrée des bancs de gravier très-com-
pacts (appelés Heuschinen); les vases étaient placés sur un de ces bancs,
à 1 mètre de profondeur, mais entourés d'une terre fine, qui a été cer-
tainement passée au crible. A la même place, on a trouvé antérieurement
beaucoup d'autres objets antiques qui ont été dispersés.
Serait-ce un lieu de sépultures gauloises de l'époque de l'incinération?
IV. Enclos du château de M. le baron Zorn de Bulach, à Osthausen. —
Pierre avec excavation ayant contenu un vase en verre avec des cendi'es.
Tombe romaine?
V. Près d' Uttenlieim. — Hache en bronze grossièrement fondue, trouvée
dans une graviere, au bord de la Scheer.
1. Pour plus de détails, voy. gg 4 et 1 1, puis p. 122. Cette découverte est due au D"" Er-
hardt, de Beafetd, qui a fait don des deux coius à la bibliothèque de Strasbourg-.
2. Schreiber, Loc. cit., p. 191.
3. Voy. Bvlletin, t. III, P. V. , p. lu.
4. Voy. Il 9 et 12.
— 135 —
VI. Canton dit Mittelbruch, près de Meistratzheim. — Hache en pierre
polie, non percée, trouvée sous les racines d'un saule. C'est une de ces
haches, dites celtiques, de l'âge de pierre. Le vulgaire les appelle Don-
nerœxe ou Donnerkeil (haches ou coins de tonnerre); les paysans sont
convaincus qu'elles tombent avec la foudre et ils y attachent des idées su-
perstitieuses. *
La première mention de Meistratzheim date de 880.
VII. Gerstheim. — Fibule ronde (de la forme des broches que les dames
portent aujourd'hui) plaquée et filigranée d'or, avec semis de pierres fines
et d'émaux de différentes couleurs; hilla en cuivre doré à charnière; dif-
férentes plaques en bronze; un pot entier avec bec et plusieurs vases de
forme ondulée, à grain grossier; grains de collier en terre cuite, de diffé-
rentes formes, émaillés de dessins et de couleurs variés; ossements prove-
nant de plusieurs squelettes. Ces objets ont été trouvés à environ 1 mètre
sous terre en creusant une cave; je les ai recueillis pour les déposer au
musée de la Société; malheureusement je suis arrivé trop tard pour con-
stater l'orientation des squelettes et la place respective occupée par chaque
objet. On a fait beaucoup de trouvailles de ce genre à cet endroit, mais
elles ont été dispersées. 11 est présumable que ce sont des sépultures
franques, c'est du moins l'opinion des hommes compétents, entre autres
de M. le colonel de Morlet\
Quoiqu'il ne soit pas prouvé que ces objets datent de l'époque gallo-ro-
maine, la découverte est trop intéressante pour que je la puisse passer sous
silence. Du reste on a vu que cette localité mérite en fous cas de figurer
parmi les places romaines.''
La première mention de Gerstheim ne date que de 1050. La famille de
Bock y avait un château.
VIII. Canton dit Grossrieth, entre Rossfeld et Witternheim.* — Kelt en
bronze avec manche creux et oreillon latéral, trouvé en creusant un fossé^
IX. Friesenheim. — Médaille d'argent d'Antonin et une autre de bronze
de Constantin. On a conservé le souvenir d'un grand tumulvs qui a été ni-
1. Yoy. Jacob Grimm, Deutsche Mythologie , 3^ édit. , p. 104. La croyance que ces haches,
conservées dans nne maison la préservent de la foudre, trouve encore beaucoup de parti-
sans en Alsace.
2. Voy. Bulletm, 18Gi, p. 25^ P. V., et 51 (M.). Plusieurs de ces objets ressemblent à des
figures données par M. Uoiri Baudot, dans son intéressant ouvrage sur les sépultures de
l'époque mérovingieune découyertes en Bourgogne. Dijon 1860. (Planche XXIII, N<>13, pot
ondulé; pi. XXV. A" 9, pot à bec, etc.)
3. V. § 5. Schwanau.
4. Ce n'est pas loin de Königsherberg. Voy. g 6.
5. Un instrument pareil se trouve figuré dans Museum Schcrpfli?»! . tabul. XIY. flg. XIII.
— 136 —
vêlé et qui ne contenait rien; puis on m'a indiqué une place dans un jardin
où l'on a découvert de la poterie ancienne qui a été perdue\ Cette loca-
lité romaine paraît avoir été en communication, par une chaussée, avec
les deux voies consulaires. (V. la carie.)
Première mention: 803.
X. Qîier. — Médaille en bronze de Claude le Gothique; fer à cheval de
forme antique; faîtières, mais point de tuiles à rebords.
XI. Canton dit Sauweid, près Benfeld. — Grand cube en grès, avec une ex-
cavation renfermant un vase rond, en verre, qui contenait des cendres el des
ossements calcinés, le tout recouvert d'une dalle. A la même place: débris
de statues, entre autres un museau de lion grossièrement taillé en grès
rouge. Toutes ces pièces se trouvaient sous terre et ont été rencontrées
par le soc d'une charrue.
C'était sans doute un tombeau romain gardé par un lion.
XII. Canton dit Städtacker, près Malzenheini. — Tuyaux carrés en terre
cuite, briques circulaires, fer de lance très-oxydé. Schweighäuser a lui-
même constaté ces trouvailles sur place, c'était à peu près en 1826, Il a
emporté trois fragments de ces tuyaux qui se trouvent encore h la biblio-
thèque de Strasbourg^ Il en parle dans ses Antiquités d'Alsace' et les re-
garde comme provenant d'un bain romain.
On a vu au § 5, article HoHzbad, une tradition d'après laquelle l'eau mi-
nérale de celte source aurait été jadis dirigée à Ehl par des conduits sou-
terrains.
A environ 50 mètres de cette place de Städtacker , il y avait un grand
tertre qui passait pour un tunmliis; il a été nivelé il y a plusieurs années,
mais je ne sache pas qu'on y ait fait une découverte digne d'intérêt. Dans
la terre enlevée j'ai pourtant remarqué quelques fragments de poterie
ancienne.
Première mention de Matzenheim, 734- (Mathinheim); (nmlWe noble
éteinte. D'après la tradition il y avait une léproserie au moyen âge.
On reconnaîtra facilement sur la carte les places indiquées dans ce para-
graphe, en suivant les numéros d'ordre que je leur ai donnés. Toutes ces in-
dications ont été constatées sur place et je possède la plupart des objets
mentionnés.
1. Voy. Ravenèz, Traclucl. de l'Ah. must.,\. Ht, p. G4.
2. Ces renseignements, de même que ceux du n" XI, m'ont été donnés par M. le D"" Elir-
hardt. Il m'a en outre gratifié des débris de statue et du vase en verre qui est mallieureu-
sement brisé.
3. P. 39. Il les pince prè:< do Heussern. mais le point do la trouvaille^ est plus près de
Matzenheim.
— 137 -
<Ç 8. — Voies anciennes.
Par voies anciennes j'entends celles qui onl joué un rôle avant le cin-
quième siècle. Je considère comme tels, tous les chemins et tous les scn-
liers qui relient entre eux des points où les peuples de cotte époque ont
laissé des traces de séjour, soil pour les vivants, soit pour les morts; en
un mot, les voies de communication qui alors avaient une raison d'être.
Les chemins appelés Heiden fitrœsse/ , Bœmer strass, Hochstrass, Hoinveg,
Altstrass, Alhveg , etc., noms auxquels Schweighfeuser , M. Mone et
M. Coste attachent un sens traditionnel, se sont classés tout naturellement
dans mon cadre. Si j'ai adopté un trait spécial pour indiquer sur ma carte
les voies désignées comme païennes (Heidenstrœssel), c'est que je considère
leur antiquité comme hors de toute contestation, non-seulement à cause
de leur nom et les monuments qui les accompagnent, mais surtout parce
qu'elles ont relié entre elles des localités qui figurent sur la tahie théodo-
sienne et les itinéraires d'Antonin.
De toutes les questions d'archéologie, l'une des plus étudiées est certai-
nement celle des voies anciennes; aussi dans tous les travaux de ce genre,
anciens et modernes, il est fait mention de celles iXHelvetus. Il me serait
impossible de discuter les différentes opinions émises à ce sujet: d'abord
le cadre de cette notice ne le comporterait pas; puis on voudra bien ne pas
perdre de vue que ce travail est d'un pionnier plutôt que d'un érudit. Toutes
les voies anciennes tracées sur cette carte sont prises sur le terrain,
les lignes sont d'une exactitude géométrique, je les ai indiquées dans l'état
où je lésai trouvées, avec leurs interruptions, et mes tracés hypothétiques
sont basés sur la tradition et la probabilité.
Un fait singulier et qui frappe tous ceux qui visitent la contrée, est que
les voies dites païennes, que je regarde comme consulaires , traversent un
pays marécageux depuis un temps immémorial. On a vu plus haut' que ce
pays n'était certainement pas aussi humide avant le changement du cours
du Rhin; puis il est de toute évidence que le principal mouvement militaire,
des Gaulois comme des Romains, a dû nécessairement se concentrer vers
le point le plus menacé, qui était la rive gauche du Rhin.
Comme il y a plusieurs voies païennes {Heidenslrœssel) sui* ma carte,
je les distingue par des numéros d'ordre; les autres chaussées anciennes
y sont également désignées par leurs noms traditionnels. Je les décrirai
en commençant par les voies longitudinales.
I. Yoy. §2.
— 138 —
Voie païemie n° 1. — Usitée comme chemin d'intérêt commun, traver-
sant le territoire d'Ehl pour se souder au chemin vicinal de Sand à Oben-
heim; elle sépare la banlieue de Rossfeld d'avec celles de Sermersheim et de
JliUlenheim. Largeur: 8 mètres. Tumuliis is^ôls des deux côtés, au dire des
habitants; ils ont été nivelés. Tombe romaine.
Voie païenne n° 2. — Continuation de la précédente; n'existe plus que
par petits tronçons à peine encore visibles; ne joue aucun rôle comme
limite; traverse les terrains communaux de Sand, Matzenheim, Osthausen.
Largeur H mètres environ. Groupe de tumulus dans cette dernière ban-
lieue.
Voie paimne n*^ o. — Continuation de la précédente; commence dans
la forêt d'Osthausen où elle est parfaitement accusée; hors d'usage comme
chemin (excepté dans la banlieue d'Erstein, sur une longueur d'environ
l'/gkilom.); couverte alternativement de bois et d'herbage; propriété com-
munale, formant une bande au milieu des propriétés particulières. Largeur
entre deux pierres bornes 9'",40. Tumulus peu nombreux. Aux environs
d'Erstein on a gardé souvenir de plusieurs qui ont été nivelés il y a envi-
ron quarante ans.'
D'après la tradition et selon toutes les probabihtés, c'est à ce point que
se réunissaient les deux voies païennes venant du sud, n" 2 et n° 4% pour
gagner Argentorat par Krafft et Notre-Dame du Chêne, près Plobsheim,
rive droite de l'ill. Elle a été sans doute interrompue et mise hors d'usage
par le canal dit Krafftwasser, établi en -1392.''
Voie païenne n° 4. — Tronçon engazonné qui commence dans un canton
rural appelé Kœnigsherberg\ et se perd près des tumulus de Bœhllagen;
sépare les banlieues de Friesenheim et de Booftzheim de celles de Rossfeld,
Herbsheim et Obenheim; elle paraît avoir été déli'uite partout où son rôle
de limite a cessé. Largeur 8 mètres. Tumulus nombreux. A dû se souder
à la voie d'Helvet à Argentorat, rive droite de l'Ill, comme on vient de le
voir, et paraît s'être prolongé vers le sud, comme nous le verrons plus
loin.
Ces voies païennes sont faites simplement de gravier; je les ai toutes
1. M. Ravenèz, dans sa Traduction de Schœpflin , t. II, p. 64, parle de celle voie, mais
en la plaçant au midi du hameau d'Ehl et sur la rive gauche de l'Ill. Pourtant elle est assez
bien indiquée sur la carte qu'il a ajoutée à ce travail.
2. M. Goste, sur sa carte romaine , a déjà indiqué ces voies avec le même point de réu-
nion. J'ai été amené à cette concordance par des recherches minutieuses sur le terrain el
en interrogeant partout les traditions.
3. Voy. g 2, 111.
4. Vuy. g G.
— 139 —
examinées par des entailles el je n'y ai rien trouvé qui ressemble à une
construction romaine. M. de Matliy de Latour a également fait faire des
fouilles sur celle marquée n*^ 1, et son résultat a été pareil au mien. D'a-
près les traditions, ces voies avaient des pierres de bordure qui ont été
enlevées successivement par les habitants et employées à des constructions.
Un fait frappant, c'est la présence de deux voies païennes parallèles à une
si faible distance (environ 4 kilom.), l'une et l'autre d'une largeur qui
prouve qu'elles étaient faites pour un service important. C'est un pro-
blème qui m'a beaucoup préoccupé. Je n'en ai trouvé la solution qu'en
admettant qu'elles devaient partir chacune d'un point différent pour se réu-
nir à Helvet, et en examinant avec attention les itinéraires d'Antonin, j'ai
compris qu'il s'agissait de deux voies consulaires qui se rapprochent pour
se fondre en une seule.
Ainsi, voie païenne n° 1 , avec ses continuations n^^ '^ et ?>: c'est celle
de la carte théodosienne; puis elle figure sur l'itinéraire de Milan par
les Alpes pennines à Mayence, en passant par Argenlouaria, Helvelus et
Argentoratum.
Voie païenne n° 4, se soudant à celle n" 3, à la hauteur de Gerstheim;
elle figure sur deux itinéraires : 1'' d'Augsbourg à Spire; 2" de Milan par
les Alpes grecques à Argentoraf, et chaque fois en passant par Mons-Bri-
siacus et Helvetus.
La première est la voie connue depuis longtemps, qui reliait Helvet avec
Argentorat et Argentouar; la seconde est la voie, à peu près inconnue,
qui reliait Helvet avec Argentorat et Mont-Brisac. Cette dernière doit avoir
été parallèle au Rhin jusqu'à Augusta Rauracorum ; mais le changement
du cours de ce fleuve, survenu en 1295, qui a placé (vieux) Brisac sur la
rive droite, a dû faire disparaître cette chaussée, à l'approche de celte
ville, sur une longueur de plusieurs lieues. Cette interprétation me paraît
tellement vraisemblable, que je l'avance avec la conviction qu'elle sera
confirmée par des recherches sur une plus grande étendue.
D'Helvet à Argentorat, rive gauche de l'Ill. — Helvelus communiquait avec
Argentoratum au moyen de deux routes presque parallèles, mais séparées
par l'Ill. Nous venons de voir celle de la rive droite. Pour prendre celle de
la rive gauche, on passait le pont, dont il a été parlé plus haut\ Je n'ai pas
examiné la construction de cette voie; sa largeur est variable et ce n'est
plus qu'un simple chemin vicinal. Je ne l'ai poursuivie que jusque vers
Nordhausen, mais elle a dû passer près de Saint-Ludan, pour aller en
ligne droite vers la Chartreuse, à Strasbourg.
I. Voy. §2, m.
— 140 —
Bühhtrass. — Au suri, celle même voie se prolonge vers Benfeki, pour
gagner Ilüüenheim par im Carthmmenweg, et Sermersheim par un Quer-
weg, se confondre avec la route impériale n"83 et aboutir à Kogenheim à un
tronçon dévoie dp\)e\éBnhlstrass (route des collines), La tradition en indique
la direction vers Scliervillé, et on peut, à une assez grande distance, en
suivre le tracé à travers champs, où elle a laissé une traînée de gravier.
Le titre de voie ancienne de l'époqne gallo-romaine que je donne à celte
ligne, n'est plus justifié par aucun vestige d'antiquité, une fois qu'on a
dépassé Benfeld; pourtant je n'ai pas hésité à la considérer comme telle:
1" parce qu'il faut bien admettre qu'Helvetus ail eu une communication
avec une gorge des Vosges par laquelle on pouvait se rendre dans le pays
des Leuciens; 2° à cause du nom de Biihhtrass qui est significatif; S** parce
que celle voie paraît être celle indiquée par M. Coste* comme ayant relié
Helvet avec le val de Ville.
D'après les apparences du tronçon dit Bühlstrass, cette voie n'était faite
que de gravier, comme les voies païennes, et sa largeur paraît avoir été de
8 mètres.
Schmalstrœssel , etc. — Ce chemin paraît avoir servi à mettre en com-
munication l'établissement d'Uttenheim avec Biildstrass; sur ce petit trajet
il change trois fois de nom: Viehiveg, Hohiveg, Schmalstrœssel. 11 est pro-
bable que cette voie s'est continuée sur la rive droite de la Scheer vers Hin-
disheim, etc.
Dans l'angle sud-ouest que forme le Schmalslrässel avec la l'oute dépar-
tementale n° 11 , il y a un ancien puits que M. Cosle® pense être un tolleno.
Kaijserstrass , au pied des Vosges. — N'ayant fait figurer celte voie que
comme point d'attache, je ne l'ai soumise à aucune élude spéciale. Il y a
du reste plusieurs Kayserslrass qui aboutissent à Epfig.
Des Vosges an Bhin. — La principale voie transversale qui figure sur
ma carte, est celle des Vosges au Rhin. Les auteurs l'ont déjà indiquée
entre Sainte-Odile et Ehl, et M. Gosfe a admis celte ligne sur sa carte ro-
maine. Mais si la continuation de cette route vers le Rhin est resiée incon-
nue, c'est que, entre Ehl et le canal du Rhône au Rhin (qui ne figure pas
sur ma carte), elle n'existe plus qu'à l'étal de tronçons de sentier. Je ne l'ai
entrevue que lorsque les nombreux vestiges romains de Kirchsträng et de
Ilafneracker m'ont forcé de chercher une voie de communication inévi-
table entre ces points et le centre de la ville romaine. Son existence me
paraît tellement incontestable que je crois toute discussion inutile. Des
1. Alsace romaine , p. 107.
2. Staiici' du comitùdii 13 avril 1863.
— 141 —
deux ligiiL'6 de comiiiunicalion enive Helvetus et son castnim des bords du
Hhiu, celle-ci a été probablement la plus importante.
Sa largeur paraît avoir été de 8 mètres; mais sa construction était dillc-
rente de celle des autres voies. Ainsi près de HoUzhad, où ce chemin s'ap-
pelle vulgairement Bomerstrass, on a trouvé dans son ancienne aire des
moellons en grès des Vosges; en fouillant un tronçon qui en reste au-
dessous d'Ehl, j'y ai rencontré des morceaux de grès rouge presque cu-
biques, de 8 à iO centimètres de côté; plus loin, dans Kirchsträng, on
rencontre des pavés. Entre la source de Saint-Materne et le Zembs, le
tracé de cette voie sépare la banlieue de Sand de celles de Benfeld et de
Herbsheim. Avant l'établissement du nouveau chemin vicinal de Sand à
Obeidieim, les piétons suivaient toujours la ligne du Oberchlweg et de
\'1lkveg pour se rendre à Obenheim et à Gerslheim.
Je ne crois pas établir une hypothèse invraisemblable en admettant, à
l'époque romaine, une grande et importante voie ayant relié les Vosges
avec la Forêt-Noire par Helveius, pour mettre la ville romaine en commu-
nication avec les champs décumales.
La route qui part de la rive droite du Uhin, du village d'Ottenheim, vis-
à-vis de Schwanau, est bien visiblement une continuation de XAltwey; elle
se dirige, en ligne droite, sur Burgheim, en passant près d'Allmansweier,
Hugsweier, Dinglingen, Lahr, pour monter vers le château de Geroldseck
et gagner la vallée de la Kintzig. Elle s'appelle Wiwlisiveg et passe géné-
ralement pour très-ancienne. A Dinglingen il y a un champ appelé Maner-
feld (champ des murailles), d'une étendue d'environ 10 heclai'cs, où abon-
dent les substructions et les débris de cérami(|ue romaine, parmi laquelle
on cite de la poterie rouge une, des tuiles à lebords et des plinthes portant
Leg. VIII avec diverses variantes,'
M. Mone signale le clocher de Burgheim comme ayant été bâti sur un
saceUiuu'- ; les ruines de Geroldseck passent pour occuper l'emplacement
d'un poste romain, et partout dans cette contrée, jusque dans la vallée de
la Kintzig, on trouve des antiquités. Le Mœnnelstein dans les Vosges, et le
cône de Geroldseck dans la Forêt-Noire, sont d'ailleurs deux points culmi-
nants qui dominent toute cette partie de la vallée du Uhin. Cette voie était donc
le trait d'union entreles deux chaînes de montagnes : sur toute la ligne on la voit
jalonnée d'établissements romains et partout apparaît la main du grand peuple!
1. Voy. Gcsvlihide h. Resc/ire/bit/ifj der Stadt Lahr ii. ihrer ImyebutKjeu , von t'r. Slciii ,
1827. Je dois ce livre, devenu très-rare, et tous les reiisoigneuients qui concernent la rive
droite du Rhin, à l'obligeance de M. Sieffert, de Lahr (membre de la Société).
2. leilschrijt f>n- die Geschichte des Oher> lie' ns , 1862. p. 48.
— 142 —
J'ai été forcé de limiter mes recherches sur le terrain entre ßurgheim et le
Rhin; mais la partie de cette route que j'ai tracée sur ma carte suffira pour
en faire apprécier l'importance. Elle se compléterait par les points suivants:
Vosges: BurgJieim, Heiligenstein, Barr, MœnneUtein, mur païen de
Sainte-Odile, Heidenkopf, etc.;
Forêt -iNoire: Burgheim, Heiligenzell, Lahr, Mauerfeld, Geroldseck, etc.
On ne peut s'empêcher de voir certains rapprochements entre plusieurs
de ces noms des deux rives du Rhin.
Voie d'Ellzach. — Le chemin d'Ehl à Ellzach (Kertzfeld) a disparu en
partie; il existait encore à l'époque de la guerre de Trente ans, car sur le
plan du siège de Benfeld , il figure entier et bordé d'arbres. Ce qui en
reste n'est plus qu'un simple chemin d'exploitation rurale.
Viehweg ou Alttverb, à travers Ellzach. — Voie pavée bien conservée sur
quelques parties; largeur 10 mètres. Elle est faite uniquement de galets et
de gravier.
Altstrass, près d'Ellzach. — Hors d'usage', plantée de beaux chênes de
60 à 100 ans; largeur 10 mètres. La bande formant cette voie est propriété
communale, les parties avoisinantes sont propriété particulière. Elle forme
un dos d'âne uniquement fait avec de la terre, sans gravier ni galets.
Diverticulum sur Burgheim par Bruchmiihl. — Avant la mise en culture
des communaux de Zellwiller, on prenait volontiers cette ligne pour se
rendre à Barr. Je n'ai fait aucune étude de ce chemin et je ne le fais figurer
que dans la supposition, qu'à l'époque romaine, il a pu y avoir \fa diverti-
culum ayant mis Ellzach en communication directe avec Burgheim.
Autres voies. — J'ai parlé du chemin rehant Friesenheim avec les deux
voies consulaires^; aux environs de Neunkirch, il a dû former un compitum
avec la voie des Rauraques. J'ai restitué à ce chemin la ligne droite qu'il
avait avant l'étabhsseraent du canal du Rhône au Rhin. J'en ai fait de même
pour le chemin de Gerstheim à Oslhausen.
A Herbsheim, il y a un Schlittweg à côté d'iin Wildeweg. Je n'ai trouvé
aucun caractère d'ancienneté à ce dernier. Son nom veut dire simplement
chemin inculte, sans tracé régulier. Il n'y a que quelques années qu'on en
a fait un chemin vicinal.
Quant aux autres voies anciennes, elles ne sont devenues- l'objet d'aucune
observation particulière.
Les voies qui figurent sur cette carte sont-elles romaines? J'en ai fouillé
1. Ce tronçon ayant beaucoup de ressemblance avec les voies païennes hors d'usage, je
l'ai marqué sur la carte comme ces dernières.
2. Voy. g 7.
— 143 —
les principales et nulle part je n'ai trouvé les quatre couches classiques He
statunien, de rudus, de nucleus et de summa crusta. Pourtant une seule
pourrait l'être, c'est celle des Vosges au Rhin, les matériaux trouvés dans
son aire sont très-probablement des restes de riiclvs. Peut-être pourrait-on
encore admettre comme romaine la voie pavée d'Ellzach. Du reste, n'a-
buse-t-on pas un peu trop du mot «voie romaine»? F^aut-il laisser tout
le mérite de la viabilité aux conquérants?
A l'arrivée des Romains, la Gaule n'était pas un pays sauvage et inculte,
elle jouissait déjà d'une civilisation avancée. Les Gaulois avaient un com-
merce florissant et leur richesse avait passé en proveibe'. Les plus rap-
prochés du Rhin, les Belges, réputés comme les plus courageux de la na-
tion % étaient d'excellents cavaliers et de bons conducteurs de chars, et
certes, pour faire avancer leurs Coivinn^ (lourds chariots), il leur fallait
de bonnes routes; puis un commerce florissant ne peut subsister qu'avec
des moyens de communication nombreux et faciles.
Dans quelles catégories faut-il classer ces voies?
J'essayerai d'établir cette classification en adoptant le cadie de iM. le co-
lonel de Morlet/
Voies consulaires : toutes celles qui figurent sous le nom de païennes;
Voies mililaires secondaires : celle des Vosges au Rhin, par Helvet;
Voies commerciales : 1° celle d'Helvet à Argentorat, rive gauche de l'ill;
T celle d'Helvet au val de Ville (Bühlstrass);
Voies vicinales : toutes les autres.
Par ce réseau de routes qui enlaçait le territoire d'Helvetus, cette ville
jouissait d'une large vicinalité et se trouvait en relation, au moyen de
communications faciles et directes :
Avec les Séquanais par sa voie (Y Argentouaria ;
Avec les Rauraques et les Helvétiens par sa voie de Mons-Brisiacus :
Avec les Leuciens par sa voie du val de Villé^;
Avec les champs décumates par sa voie du Rhin;
Avec les Vosges par deux (même trois) voies;
Et par deux voies avec Argentoratum, la métropole.
Toutes ces voies, usitées comme chemins ou sentiers, cpie je qualifie
cYanciennes, ont eu leur raison d'être à l'époque (|ui nous occupe; j'ai la
1. Amédée Tliieny, Histohe des Gaulois , t. l". p. 470.
1. Strabo, lib. IV.
3. Amédée Tliierry, loc. cit., p. 452.
4. Bullemi , t. IV, p. 46.
5. Et sans doute aussi par celle de Sainte-Odile.
— 144 —
convicliun que déjà alors elles onl existé et que leur maiutien est dû à la
force de V accoutumance.^
Voici un tableau de ces voies anciennes qui portent des noms autres (jue
ceux des cours d'eau ou des communes qu'elles desservent:
AUstrass (vieille route), à Kertzfeld ;
Altweg (vieux chemin), à Gerstheini;
Binnenweg (chemin intérieur), à Westhausen et à Nordhausen;
Bühlstrass (chemin des collines), à Kogenheim;
Carlltaunenweg (chemin de la grosse artillerie, nom originaire sans
doute de la guerre de Trente ans), à Benfeld;
Heidenslrœssel (voies païennes au nombre de 4), entre l'ill et le Uhin;
Hochstrass (route haute), à Sand;
Hohiveg (chemin haut), à Herbsheim et à Uttenheim;
Hochiverb (digue haute), à Kertzfeld;
Kayserstrass (route de l'Empereur), à Stotzheim;
Nordiveg (chemin du Nord), à Uttenheim;
Römerstrass (route l'omaine), à Westhausen;
Schlillweg (chemin de schlittage), à Herbsheim;
Sclunalstrœssel (petite chaussée étroite), à Benfeld ;
Viehweg (chemin du bétail), à Kertzfeld, à Uttenheim et à Rossfeld {Ro-
seiifeld).
On remarquera, en examinant la carte, qu'il y a peu de chemins qui
n'aient eu, en tout ou en partie, un rôle à jouer à l'époque gallo-romaine.
Les routes impériales n" 68 (de Baie à Spire) et n'' 83 (de Lyon à Stras-
bourg), datent d'une époque éloignée; mais rien ne prouve que leur tracé
actuel remonte au delà du moyen âge. Pourtant, sur chacune de ces deux
routes, j'ai rencontré un tronçon qui s'est incorporé dans une de mes
lignes de voies anciennes. Il en a été de même de la route départementale
n° 11 et du chemin vicinal de Sand à Obenheim. Le fait se représentera
certainement dans d'autres locahtés. Les auteurs qui s'occupent de géo-
graphie ancienne, prennent ordinairement la route n" 83 comme la ligne
d'IJelvet à Argentorat qui figure sur la carte de d'Anville, au moins jusqu'à
Fegersheim; cela est évidemment une erreur. La ligne à suivre pour cette
voie de la rive gauche de l'Ill, se trouve naturellement indiquée par les
vestiges romains de Maizenheim, d'Osthausen et d'Erstein. Ce n'est qu'entre
Saint-Ludan et Fegersheim, que la roule impériale paraît de nouveau être
assise sur une ancienne voie romaine. .M. Coste a démontré sa continuation
en ligne droite de Fegersheim à Strasbouig. Je ne vois aucune raison
I. " l/aTonlnmanoe est une PCi'ontic iiafiirc. " (Monlaig-iic.)
— 145 —
d'être, à l'époque qui nous occupe, pour la partie de la route impériale
n" 83 comprise entre le Quer et Sainl-Ludan.^
S 9. — Tumulns.
Les gens du pays appellent les tumulus Heidenbückel (buttes païennes).
Ce sont des élévations, faites uniquement en terre, sans aucune pierre et
sans aucun caillou, reposant sur une base circulaire. Il y en a dont la forme
se rapproche de la demi-boule, d'autres sont aplaties, sans doute par suite
de nivellements incomplets. Leur diamètre varie entre 15 et 70 mètres
et leur relief entre 60 centimètres et 3™,50. J'en ai pointé 90 sur la carte.
Il y a un certain nombre de ces tertres dont la qualité n'est pas tout à fait
prouvée et que je n'ai admis que par analogie. La plupart sont réunis par
groupes; les buttes isolées sont probablement des restes de groupes qui ont
échappé à des travaux de nivellement. D'après la dispersion et le groupe-
ment des tumulus qui restent, on peut se faire une idée de la quantité
innombrable de ces tombeaux qui jadis a dû exister dans celte contrée. Leur
superficie est en majeure partie en nalure d'herbage. On sait, par souvenir
ou par tradition, que ceux qui sont cultivés ou boisés, étaient jadis en pâ-
turages. Les tumulus engazonnés doivent leur conservation à la bonne vé-
gétation qui les recouvre; en effet, leur élévation les mettant à l'abri de
l'humidité, ils produisent principalement des Graminées et des Légumi-
neuses, tandis que le terrain ambiant, bas et humide, est couvert le plus
souvent de Cypéracées et de Joncées.
J'ai marqué avec des lettres minuscules les tumulus isolés ou les groupes
dont j'aurai à parler, et je rapporterai successivement les données que je
possède. Il y en a plusieurs qui ont été nivelés complètement dans le der-
nier quart de siècle; mais les ayant encore connus, je puis en parler el les
pointer sur la carte.
a) Maternushuckel ou Heidenkcmtzel (butte de saint Materne ou chaire
païenne), dans un pré aux environs d'Ehl. — D'après la tradition, c'est sur
ce tumulus, qui était très-élevé, que saint Materne a prêché l'Evangile aux
habitants ù'Helvetus^. Il a été nivelé en 1856, et M. Dietz (membre de la
Société) en a fait le sujet d'une communication au cornilé\ On y a trouvé
des ornements en bronze, virioles, anneaux, épingles à cheveux, etc. Il
n'est pas fait mention de poterie. 11 avait 40 mètres de diamètre el 3 mè-
tres de relief.
1. J'ai fait figurer les principaux clicniiiis vicinaux niodci'nes comme poinls de repère,
2. Voy. g 12.
3. Voy. Bulletin, t. 1^"", séances du 3 mars et du 7 avril et Aug. Slocber, Der Hüneihübel
toid der Weiler Ell , 1859, p. 66.
u« .SÉRIE. — T. ir. — (M.) 10
— 146 —
b) A côté de la voie païenne n° 2. — Tumulus nivelé par M. Baiihelmé, de
Sand (membre de la Société). Voici l'inventaire de ce qui y a été recueilli:
restes d'un squelette humain, ossements de cheval, poterie rougeâtre et
autres pièces de céramique sans caractère déterminé; deux grands cou-
lants en jais, une petite clochette en fer, un bout d'anneau de même mé-
tal, un fragment de fer à cheval; divers objets en bronze, tels que deux
virioles d'avant-bras, huit autres virioles, quatre grands anneaux, une
fibule, un petit morceau de cuivre très-oxydé qui paraît être le flanc d'une
médaille. La plupart de ces objets ont une ressemblance complète avec ceux
des tumulus de Heidolsheim figurés par M. Max. de Ring dans le Bulletin
de la Société de 1858. Ce tertre était déjà déformé par la charrue, et les
ouvriers, par un excès de zèle, ont malheureusement opéré sans attendre
l'arrivée du maître.
c) Canton dit Ballol, près de Herbsheim, au bord du Zembs, dans un
pré. — Ligne de tertres très-aplatis, dont plusieurs ont été nivelés com-
plètement; dans l'un des derniers de la ligne on a recueilli, en ]SS6, un kelt
(à manche plat), comme celui figuré dans le Bulletin cité ci-dessus.* Une
autre butte nivelée plus tard ne contenait rien.
d) Groupe de Herrenhok. — Tumulus boisés, mais le terrain était jadis
pâturage. Un de ces tertres a été fouillé il y a environ vingt-cinq ans, mais
on n'y a rien trouvé qu'un squelette très-décomposé et de la poterie gros-
sière. Rien n'en a été conservé.'^
e) Groupe de Bœhltagen, banlieue d'Obenheim; prés avec quelques vé-
gétaux ligneux (de Bœhl ou Billil, colline, et Tagen, journée de prés : ces
tertres font l'effet de collines). — Ce groupe est le plus considérable et le
mieux conservé de la contrée. J'y ai levé 25 tertres qui ont été pointés
exactement sur la carte. J'en ai fouiUé deux par une simple tranchée qui a
été comblée chaque fois pour rendre sa forme primitive au monument.
Voici les résultats des deux opérations:
l''^ opération^ Dans un cercle marqué par une traînée de cendres de
3 mètres de diamètre environ , à côté du point central indiqué par des
traces de feu: squelette très-décomposé, couché sur le dos, sur un lit de
cendres, dans le sens du N.-O. au S.-E,, la figure regardant les Vosges;
deux morceaux informes de succin ou ambre rouge dans la région du cou;
aucune trace d'objets en métal; aux pieds du squelette, un pot en argile mal
1. La môme figure se trouve dans Mus. Schœpflini, tab. XIV, flg. XI.
? Le bois étant très-toiiffu , il m'a été impossible de pointer ces tertres avec une exac-
litiide complète.
3. Voy. liiUletix, l. lit, p, 10, P. V.
- 147 —
cuite, rempli de terre, fendillé en tous sens, sans rebord, à venire Irès-
renflé, sans stries indiquant l'action d'une estèque. C'est évidemment de la
céramique toute primitive, faite simplement à la main, sans le secours de
la tournette.
Ce squelette, d'après sa taille et la petitesse des dents, pouvait bien être
celui d'une femme.
2® Operation. Squelette très-décomposé, couché sur un lit de cendres,
la face contre terre, la tête fortement relevée en arrière, dans le sens du
N-N.-O. au S-S.-E, , les pieds vers les Vosges; point d'ambre, nulle trace de
métal; pot en argile mal cuite, rempli de terre, fendu et fortement déprimé
d'un côté, sans rebord, à ventre très-renflé. Cette dernière fouille avait
pour but principal d'obtenir un crâne entier pour des études ethnogra-
phiques; malheureusement les parties les plus importantes de la boîte
osseuse étaient en miettes.
La position des squelettes permet de croire que ces inhumations étaient
dirigées par une pensée d'orientation du levant au couchant. Les deux pots
portent tous les caractères de la céramique germaine.
f) Groupe du canton dit Taspelmatt, banlieue d'Obenheim, en nature de
pré. — Ce groupe paraît n'être qu'une continuation du précédent; je l'ai
pris comme jalon de la ligne hypothétique de la voie païenne n° 4. Je n'y
ai fait aucune recherche. Le terlre placé à côté de la lettre /, est le plus
élevé de la contrée (c'est celui qui a 3'^,50 de relief). On dit qu'il se trou-
vait là encore beaucoup d'autres buttes, qui ont disparu lors de l'établisse-
ment du canal du Rhône au Rhin et du chemin vicinal de Sand à Oben-
heim.
g) Canton dit Daxloclier, banlieue de Herbsheim, en nature de pré. —
Tertres très-aplatis, sans doute par un nivellement incomplet, considérés
généralement comme lumuhis et figurant sous ce nom dans le cadastre.
Non étudiés.
h) Communaux û'Osthcmseii, mis en culture depuis environ vingt ans. —
Tumulus nombreux jadis, ils diminuent d'année en année par les travaux
du sol. J'en ai examiné deux, mais sans résultat; ils étaient très-plats et il
est à présumer que leur contenu avait été enlevé précédemment par des
déblais. Je sais d'ailleurs que sur ce terrain on a déjà trouvé un kelt, des
anneaux et des virioles, en bronze. Ces tertres commencent à être telle-
ment déformés par la charrue, qu'on a de la peine à les distinguer. Je n'ai
pu les pointer qu'approximativement.
i) Lieberain (gazon de l'amour), tumulus près de Witternheim, à côté
de la voie ancienne transversale qui relie la voie païenne n'' 1 avec Frie-
— 148 —
senheini. — Ce tumulus éUiil Irès-célèbre dans toute la eontrée. Surmonte
d'un vieux tilleul, il servait de salon de danse à la jeunesse de l'endroit. Il
a été complètement nivelé il y a environ vingt-cinq ans, et je n'ai pu me
procurer aucun renseignement positif sur son contenu. D'après la place
qu'il a occupée et mes souvenirs, il doit avoir eu au moins 4 à 5 mètres de
relief et 80 mètres de diamètre à sa base.
A quels peuples faut-il attribuer ces sépultures?
Celte question m'a beaucoup préoccupé pendant le cours de mes recber-
ches; je me suis arrêté à une hypotbèse que je soumets à l'appréciation
des archéologues. Mais rappelons d'abord les opinions de nos devanciers.
D'après Schweigha?user', tous les tertres lumulaires de l'Alsace sont ger-
mains. M. Max. de Ring- pense que ces buttes recouvrent des dépouilles
celtes (mot mal délini qui sans doute doit signifier gaulois). Sans avoir la
prétention de résoudre le problème mieux que ces deux maîtres, je crois pou-
voir les mettre d'accord, du moins en ce qui concerne les tumulus d'Ehl et
de ses environs : j'ai la conviction qu'il y en a de l'un et de l'autre peuple.
Les tumulus que j'ai étudiés se divisent naturellement en deux catégo-
ries: i"^ ceux qui sont complètement dépourvus de métaux et de parures;
2" ceux qui renferment des ornements et des métaux. Les premiers ne peu-
vent appartenir qu'à un peuple pauvre, ou à un peuple qui méprisait le
luxe et la parure, qui avait peu de métaux^ ou à un peuple étranger au
pays, qui n'était que de passage, (jui ne pouvait donner à ses morts qu'un
vase grossièrement fait à la main, à peine cuit, contenant le dernier repas.
Les seconds doivent appartenir à un peuple riche, aimant le luxe et la
parure, qui savait bien travailler les métaux'', qui avait des bijoux à pio-
fusion, dont les funérailles étaient somptueuses". Dans la première calé-
gorie, il est impossible de méconnaître le peuple Germain; dans la seconde,
on voit clairement la nation Gauloise. L'on m'objectera sans doute que l'un
des tumulus de la première catégorie contenait deux morceaux d'ambre
rouge, en grande vénération chez les peuples gaulois comme talisman''; mais
qu'on n'oublie pas que la race germanique aussi faisait grand cas du gless
qu'elle allait avec soin recueillir dans la mer^ Les premiers se trouvent
exclusivement, à ce qu'il paraît, entre le Zembs et le Rhin, le long de la
1. ScIiœplUn-Ravenèz , t. III, p. 72.
2. BaUelin, passiiii .
3. Tacit. Gerinan. , cap. v et m, et Grcsar, tk' hello r/oll., Vûk VI , caii. xxii.
4. Strabo , lib. IV.
h, Csesar, loc. cit., cap. xix.
5. Amédée Thierry, üist. des Gaulois . t. I''', p. i9l,
6. Tacit., loc. cit., cap. xi.v.
— 149 —
voie la plus rapprochée du fleuve, que je regarde comme une voie consu-
laire venant de la Rauracie; les seconds se rencontrent principalement
entre l'Ill et le Zembs, aux abords de la voie consulaire venant de la
Séquanaise.
L'existence de sépultures gauloises sur le territoire d'une ville gallo-
romaine s'explique tout naturellement; mais comment expliquer ce grand
nombre de sépultures germaines? A quelle race faut-il les attribuer? Ces
tombeaux, encore très-nombreux aujourd'liui, et qui, d'après leur disper-
sion, paraissent être des restes de plusieurs nécropoles, recouvrent-ils des
Germains qui, suivant leur coutume, avaient vécu là, en dehors de la ville
romaine, dans les forêts, aux bords du Zembs, ruisseau aux eaux limpides'?
Ou, ne proviendraient-ils pas plutôt d'une bataille? Le squelette, couché
sur le ventre, du groupe de Bœhitagen, indicjue une inhumation préci-
pitée; il y a donc beaucoup de probabihté pour attribuer les morts de
cette nécropole à une bataille, d'autant plus qu'elle se trouve au bord même
de cette voie consulaire et à côlé d'une place à vestiges romains (dite Trnli),
qui peut avoir été un castellwn pour la proléger. Quelle est cette bataille?
A quelle époque a-t-elle eu lieu? L'histoire est muette; nous en sommes
réduits aux hypothèses, et la seule qui me paraisse admissible est, que ces
tumulus ont été faits par les Alémans, ces Numides ou Kabyles du Nord,
comme les appelle fort judicieusement M. Spach", qu'ils proviennent d'une
action militaire entre les Romains et ces barbares, qu'ils se rattachent à
un fait raconté par Ammien-Marcellin, et si mon sentiment est juste, nous
aurons pour ces monuments une date certaine, l'année 357, illustrée par
la campagne de Julien contre les Alémans.
Du reste, les Alémans occupaient la rive gauche du Rhin, dans la partie
supérieure de l'Alsace, pendant six ans (de 351 à 357^); Herbsheim, point
situé aux bords d'un cours d'eau, entre une ville romaine et le Rhin, et
autour duquel on rencontre principalement ces sépultures de la première
catégorie, peut bien avoir été occupé par ces peuples; la figurine en (erre
cuite, trouvée près de ce village ^ semble d'ailleurs l'attester.
Quoi qu'il en soit, je crois qu'il est permis d'admettre, sans lémérilé, que
les tumulus dépourvus d'ornements, que j'attribue à une race germaine,
sont des sépultures alémaniques qui datent du milieu du quatrième siècle.
Je développerai ce sujet au chapitre suivant. ^
1. Tacit. Germon., cap. xvi.
2. Descript. du dép. du Bas-Min, hitroductioii h/sfor/qi/e , 1858, p. H.
3. Moue. hc. cit.. t. II, p. 319.
4. Yoy. g 7.
5. Voy. g 12.
— 150 —
CHAPITRE III.
Helvetus, ville gallo-romaine,
L'exislence d'une ville romaine, succédant à un établissement gaulois,
à l'endroit où se Irouve le hameau d'Elil, est un fait admis par tous les
historien.s de notre province et consacré par la tradition.
Dans les paragraphes qui vont suivre, j'en rapporterai la synonymie et
l'étymologie; puis, je chercherai à établir l'importance de celte ville et j'es-
sayerai de suppléer au silence que les auteurs anciens ont gardé sur son
histoire, en retraçant quelques-uns des principaux faits de ses annales.
Cette dernière partie de mon programme pourra d'abord paraître une en-
treprise téméraire; mais en cherchant à faire revivre un passé de quinze à
vingt siècles, ce ne sera pas sur des données vagues que je m'appuierai,
mais bien sur des inductions historiques qui me paraissent avoir une haute
probabilité scientifique. Si je réussis à faire jaillir une petite étincelle de
lumière, on pardonnera ma témérité.
§ 10. — JSoms et élymoloyies.
Ptolémée, qui écrivait à Alexandrie vers l'an 130, est le seul géographe
grec faisant mention de cette ville qu'il appelle EXxTjßoc et qu'il attribue
aux Triboques; la table théodosienne l'indique entre Argentouaria et Ar-
gentoralnm, sous le nom de Hellehim ou Hellelns; elle figure trois fois
sur l'itinéraire d'Antonin sous celui à'Helvekis. Schœpflin, notre historien
classique, a adopté cette dernière dénomination, et je ne saurais mieux
faire que de suivre son exemple.
Ce sont les seules mentions faites de cette localité par les auteurs de
l'époque romaine. Selon toute vraisemblance, Helvet était la première ville
importante que l'on rencontrait en quittant le territoire des Séquanais
pour se rendre chez les Médiomatriciens (qui, plus tard, furent remplacés
par les Triboques).
D'après Kœnigshoven', rE>^x'ifißoc de Ptolémée signifie EL-KEW ou Illgau.
Beatus Rhenanus^, préoccupé du soin d'illustrer sa ville natale qui au
moyen âge s'appelait Selcestadt, en la faisant descendre de notre ville
romaine, convertit arbitrairement le nom donné par le géographe grec,
1. Elsüssische und slrassburgische Chronicke , p. 1065.
2. Rer. Germon . lib. lil, p. 286, edit. MDLI.
— 151 -
en Elcebus , qu'il croit provenir der deux coiu's d'eau qui l'entourent:
Ellus (111) et Kehus ou Cehus (Zembs). Schœpflin* pense qu Hclvetus peut
dériver du mot celtique Helv, qui signifie chasse, tout en admettant la
possibilité que ce nom puisse avoir pour origine Ael ou El qui, chez les
Celtes, signifiait bord et sourcil, cette ville ayant été assise sur les bords
d'une rivière. D'après Grandidier', Hell veut dire clôture ou enclos, Helu,
chasse : l'ancien Helvet ayant été un endroit propre à la chasse et entouré
de bois. StrobeP dit qu'Helvet signifie riche herbage, et il compose ce
nom de Hel, prairie, et de wd, grand. D'autres étymologies ont été pro-
duites, je crois pouvoir les passer sous silence.
N'y a-t-il pas un peu trop de celticisme dans ces étymologies? Ne serait-
il pas plus simple et plus naturel d'admettre (comme le font d'ailleurs
Kœnigshoven et en partie Beatus Rhenanus) que la ville ait été nommée
d'après la rivière ///, EU, Ellus qui baigne son territoire et dont le radical
se retrouve dans tous les noms, anciens et modernes, donnés à cette loca-
lité? Je dois confesser, du reste, que je goûte fort l'opinion de Schweig-
haeuser* qui, en parlant de la fréquence des communications entre Helvetus
et le pays des Helvétiens, voit une certaine correspondance dans ces deux
noms,
§11. — Importance de cette ville.
Jérôme Guebviller^ parle du village d'Ehl (Elegia) comme d'un lieu très-
connu pour avoir servi aux pratiques religieuses des Gentils; il croit qu'il
y avait là un bois sacré. La tradition populaire place un temple païen, cé-
lèbre dans toute la contrée, à l'endroit où fut construit plus tard un cou-
vent. D'après les monuments trouvés, les historiens de l'Alsace pensent que
ce temple était dédié à iMercure {Tentâtes des Gaulois, et Wodan des Ger-
mains), divinité très-vénérée dans la Gaule rhénane. J'en ai indiqué la place
probable sur la carte; on remarquera qu'il y avait là un compitum, formé
par deux grandes voies, point parfaitement approprié à un établissement
religieux. On peut donc admettre, avec assez de vraisemblance, qu'en ce
lieu les peuples primitifs célébrèrent leur culte en plein air, sous l'ombre
d'un grand chêne et, peut-être, en versant le sang humain! que plus lard,
1. Alsat. iliustr., t. T"", p. 54.
2. Histoire ecclésiastique , militaire , etc., de la province d'Alsace, p. 15.
3. Vaterlùfidische Geschichte des Elsasses , t. l", p. 12 , et note 6, 2*^ édit., 1851.
4. Schœpflin-Raveûèz, t. 11, p. 62.
5. Schœpflin , /oc. cit.. t. I", p. 87.
— 152 —
avec le progrès de la civilisalion, sans cloute après l'arrivée des Romains,
le vieux chêne fut remplacé par un temple.*
Le grand nombre d'autels volifs, l'inscription aux déesses Mères, les
statues de différentes divinités, etc., trouvés en ce lieu; les nombreuses
idoles scellées dans les murs dont parlent les anciens auteurs : tous ces
monuments prouvent qu'il y avait là un centre religieux très-important.
Au point de vue civil, Helvet était un lieu d'étapes {mansio), les itiné-
raires et la carte tbéodosienne en font foi; et au point de vue militaire,
nous savons rpie la VHP légion {augusta) y tenait garnison et qu'il y avait
un poste militaire de surveillance.
Cette ville était-elle fortifiée? — C'est une question qu'il me serait im-
possible de résoudre. Sur la carte tbéodosienne, Argentorat figure avec
deux lours, Helvet y est simplement indiqué sous le nom d'Hellehmi. Pour-
tant il n'est guère probable que sa proximité du Rhin n'ait pas nécessité
des moyens de résistance contre un ennemi toujours prêt à l'attaque; je
regarde donc comme certaine l'existence d'un castrum du côté du Rhin, et
ce casinim, je crois l'avoir trouvé sur l'emplacement où fut construit, plus
lard, le château féodal de Schivanau, près Gerstheim^ 11 y avait encore
deux autres châteaux féodaux aux environs, dont les emplacements recèlent
des débris romains : Kirchstrâng, près Herbsbeim, et Heidenschloss, \)rès
Hüttenheim''; peut-être y avait-il là des caslella. Parmi les emplacements
romains qui se trouvent autour d'Ehl, il y en avait sans doute encore d'au-
tres qui étaient des postes de défense, comme par exemple celui de Trulî,
à côté d'une voie consulaire et près d'un groupe de tumulus.*
En parlant de la topographie, nous avons jeté un coup d'œil sur l'agri-
culture d'Helvet; nous allons essayer maintenant de donner une idée de
l'importance industrielle et commerciale de cette ville.
Le principal fleuron de l'industrie à'Helvetus était, sans contredit, sa
fabrique de bronze (officina œraria), dont les produits fournissaient toute
la contrée et qui a laissé des spécimens si remarquables dans les tombeaux
1. Sur ce sujet, la tradition va jusqu'à la légende. Elle vent qu'une idole de grandeur
humaine {Ufidenr/olD, en or massif avec des yeux en diamants, ait jadis orné ce temple.
Au moment d'une invasion subite, voulant sauver cette précieuse statue des mains des bar-
bares, on l'emporta pour la mettre eu lieu sûr; mais chemin faisant on la laissa tomber
dans un marais, d'où il n'a plus été possible de la retirer. C'est une thèse inépuisable pour
l'imagination populaire et un but constant pour les infatigables chercheurs do trésors. Ou
a été jusqu'à consulter l'oracle des tables tournantes!
2. Yoy. U 2 et 5.
3. Yoy. g 5.
4. Voy. gg 5 et 9.
— 153 —
gollo-romalns, qui abondent sur les deux rives du RliinV Cet élablissement
métallurgique a dû être très-florissant pendant les quelques siècles de calme
dont jouissait le pays sous la domination romaine. La tradition en a conservé
le souvenir, mais elle en fait principalement un atelier monétaire. Les deux
coins en fer, décrits plus liaut% fournissent un appui solide à cette tiadi-
tion; pourtant on ne connaît aucune médaille portant le nom ô'Helvehis,
ou un sigle ou une exergue qui le représente. Ne pourrait-on pas admettre
que cette ville ait eu une monnaie déjà à l'époque gauloise, et que cet éta-
blissement ait continué de fonctionner, par une espèce de tolérance, sous
la domination romaine?
Si le grand nombre de pièces sculptées, trouvées parmi les monuments
d'Ehl, confirme l'existence d'un centre religieux important, ne pourrait-on
pas aussi en induire la présence d'une autre industrie artistique, celle de
la sculpture? A côté de l'art de Yœrarius et du borbaricarivs pouvait bien
fleurir aussi celui du Inpidnrins et du sculptor.
La tradition locale parle d'une grande foire annuelle qui se tenait à Ebl
au temps des païens et à laquelle affluaient les marcbnnds des pays les plus
éloignés. Pendant tout le moyen âge et même encore au plus fort de sa
décadence, Ebl avait deux foires très-fréquentées, dont l'une était spécia-
lement réputée pour le chanvre, son fil et ses tissus. Il y a quarante ans,
elles ont été transférées à Benfeld.
La culture du chanvre remonte à une très-haute antiquité. Il est probable
qu'il a été importé par la migration des premiers peuples qui sont venus
se fixer dans nos contrées. Cette plante est originaire des montagnes de
l'Himalaya, entre le Gange et l'indus, et la race Kimris, qui est venue ha-
biter les bords du Rhin, est descendue de la haute Asie. Du reste, il paraît
que les Triboques avaient une certaine réputation pour cette culture, car
encore au temps de Grandidicr on désignait, à Metz, le chanvre d'Alsace
sous le nom de chanvre de Tréboc^. Les Triboques comme les Kimris pas-
sent pour être issus d'une race indo-européenne.
Ilelvet était sillonné d'un réseau de voies, que mainte cité industrielle
de nos jours pourrait lui envier. Ces moyens de communication, qui met-
taient notre ville gallo-romaine en relation facile, non -seulement avec les
villes et les provinces limitrophes, mais encore avec les pays les plus loin-
tains, prouvent jusqu'à l'évidence que c'était un lieu de grand passage et
1. Voy. g 4. et Sclireiber, loe. cit.*
2. Voy. §8 4 et 7.
.3. Grandidier, loc. cit. , p. 68. — D'après le m^nie autour (ibid.] , la l)asse Alsace est ap-
pelée, en langue vulgaire, à Belfort, payx de Tréliay.
— 154 —
de mouvement. A côté de cette grande voirie il y avait encore un large
système de vicinalité.
D'après une tradition populaire de la contrée, Benfeld, Kertzfeld, Hüt-
tenheim, Rossfeld, Herbsheim, Sand, Matzenheim, Weslhausen, avaient
jadis fait partie de la grande ville romaine. En considérant les vestiges
d'établissements romains trouvés à proximité de toutes ces localités, et les
preuves de haute antiquité qui résultent de leurs premières mentions dans
les chartes, on est tenté d'adhérer à la tradition, malgré l'étendue hors de
proportion qu'on donnerait ainsi à une ville qui, dans tous les cas, n'était
pas de premier ordre. La tradition ne parle pas de Gerstheim ; mais Schœpflin
cite un auteur* qui pense qu'Elcebus élait situé sur le Pdiin.
11 faut naturellement distinguer entre la ville et son territoire ou sa ban-
lieue. Rien n'empêche de regai'der comme territoire d'Helvetus l'étendue
qui résulte de la tradition; on peut même y ajouter Gerstheim. Sur ce ter-
ritoire, il pouvait y avoir des chaumières ou cabanes (casœ) dispersées,
habitations des coloni qui exploitaient le sol, avec d'autres établissements
d'une construction plus solide, dont on retrouve les vestiges. Quanta l'aire
occupée par la ville proprement dite, il serait difficile de la préciser. Le
territoire d' Eh l, avec une certaine étendue de la rive gauche de l'ill, en
formait sans doute le centre. Ce n'était pas d'ailleurs une ville romaine
{urbs), bâtie d'après les règles de cette nation, mais simplement un éta-
blissement gaulois, approprié par les conquérants. Tout ce que l'on peut
conclure avec quelque certitude des recherches qui précèdent, c'est qu'Hel-
vetus était une ville industrielle, commerciale et agricole populeuse, grou-
pée autour d'un centre religieux très-important.
§ 12. — Considérations historiques.
L'histoire est à peu près muette sur Helvefns ; il paraîtrait qu'il ne s'y est
jamais passé aucun événement assez saillant pour être jugé digne de l'at-
tention des écrivains, contemporains de sa splendeur. C'est une lacune re-
grettable; nous verrons plus loin si elle peut être comblée. Mais rappelons
d'abord le seul fait important dont les historiens, venus plus tard, fassent
mention : c'est l'apostolat de saint Materne. Cet apôtre aurait prêché l'Evan-
gile dans cette ville et y aurait fait de nombreuses conversions. D'après
Schœpflin^', le premier hagiographe qui ait parlé de saint Materne, estHe-
riger, qui a écrit vers la fin du dixième siècle. Les habitants de Benfeld
et de Sand parlent de cette mission apostolique comme d'une vieille tra-
1. Wilibald l'ircitiieimer. A/sof. illnstr.. 1.1" p. 193.
2. Loc. cit., t. 1", p. 33U.
— l.-)5 —
dilion, sans y rien ajouter de fabuleux. L'ajjôlre aurait prêché sur un grand
iLirnulus, connu sous les noms de Heidenkanzel et de Maternîisbîickel (chaire
païenne et butte de saint Materne); trois mille païens se seraient convertis
à la foi nouvelle et il leur aurait donné le baptême dans une source voisine,
appelée depuis, source de saint Materne. C'est un bassin peu profond d'en-
viron 30 mètres de circonférence; le baptême ainsi administré, implique
l'idée du baptême par immersion, usité dans les temps primitifs, ce qui
donne à cette tradition un certain cachet d'authenticité.
L'apostolat de saint Materne est d'ailleurs un fait admis par les historiens
de l'Alsace. Grandidier place cet événement vers la Un du troisième siècle,
sous le règne de Constance Chlore*. 11 faut croire que la fable de Kœ-
nigshoven sur le voyage apostolique de saint Materne avec Euchaire et
Valère*, dès le premier siècle, sa mort et sa résurrection miraculeuse,
réduite à sa juste valeur par le savant abbé, n'est qu'une amplification,
dans le goût du temps, de la tradition populaire.
11 n'est pas possible qu'Helvet n'ait joué un certain rôle dans les guerres
contre les Alémans au quatrième siècle. Ammien-Marcellin parle d'Ârgen-
toratmn^ où l'empereur Julien a remporté une victoire éclatante sur ces
barbares en 357, et à'Argenturia (ou Argent avaria^), où Cralien a défait
les Lentiens, tribu alémanique, eu 378, mais il ne fait aucune mention de
notre ville. Qu'il me soit permis de suppléer au silence de l'histoire par
une hypothèse qui ne paraîtra peut-être pas trop hasardée.
Après que Julien eût rassemblé son armée à Heims, il se porta vers le
Rhin dans l'espoir d'écraser les Alémans. Ce plan fut contrarié par la tra-
hison de Barbalion, général de l'infanterie, qui occupa le pays des Raura-
ques.... Lorsque le César s'approcha du Rhin, les Alémans, qui s'étaient
fixés en Alsace, se retirèrent dans les Vosges où ils se retranchèrent avec
des abattis, ou aussi dans les îles du Rhin, lorsqu'ils étaient plus rappro-
chés du fleuve. Là les Alémans se montrèrent plus irrités que jamais, et
comme Julien n'avait point de barques , il en demanda sept à Barbation ,
afin d'établir de petits ponts pour franchir les faux brns du Rhin, qui sépa-
rent ces îles et pour en chasser les ennemis. Barbation, toujours traître,
fit brûler ses barques. Mais des prisonniers alémans ayant indiqué à Julien
1. Voyez son iiitéreasaiiledisserlalioi). ajoutée par M. Havenèz à sa Irad. de f.Ms. Hiuatr..
t. m, p. 271.
2. Chronick, p. 269.
3. I.ib. XVI, cap. xn.
4. Lib. XXXI, cap. x. D'après plusieurs auteurs anciens, cette ville romaine se trouvait à
la place de Goimar; Scliœptliu la place à Horbourg, et M. Goste à Gruseuheim. Voy. Bullt-
tin, 1864, p. 19.
— 156 —
un endroit où l'eau du fleuve était peu profonde, celui-ci envoya des troupes
légères qui passèrent à gué, y massacrèrent tout, hommes, femmes, enfants,
bétail, s'emparèrent des barques, ravagèrent de même d'autres îles et re-
vinrent chargés de butin. Les Alémans qui purent échapper s'enfuirent
avec leurs provisions sur la rive droite du Rhin, dans le Brisgau et l'Ortenau.
L'infidélité de Barbation ayant empêché Julien de donner suite à son
projet de passer le Rhin, il se repha sur Saverne et fortifia cette place,
afin de couper à l'ennemi le passage des Vosges. On sait que cette cam-
pagne se termina par la bataille des sept rois alémans près d'Argentoral,
la victoire de Julien et la prise de Chnodomaire.
. J'ai rapporté la narration de Thistoriographe romain d'après l'interpré-
tation que lui donne M. Mone, de Carlsruhe. ^ Eh bien, ce qui précède
s'applique parfaitement à la contrée qui fait le sujet de cette étude. Il ne
manque que le mot Helvetus, qu'Ammien-Marcellin a omis dans son laco-
nisme souvent désespérant. Les localités nommées par notre historien
sont: Augustci (Augst près Râle), Tres-Tabernœ (Saverne) et Argento-
raium (Strasbourg); Helvelus (Ehi) occupe presque le centre de ces loca-
lités. M. Mone dit que les Alémans se réfugièrent dans le Brisgau et l'Or-
tenau: or, ces deux pagus ont leur séparation sur la ligne du territoire
d'Helvetus. Et vis-à-vis de Gerstheim se trouve un village appelé All-
mansweier !
Y aurait-il de l'invraisemblance à admettre que les îles du Rhin où se sont
réfugiés les Alémans, et d'où Julien les a fait chasser par un corps de vélites,
commandé par Bainobaudes, tribun des Gornutes, sont celles qui se trouvent
entre Gerstheim et le village badois; que, refoulés sur la rive droite, ils s'y
sont fixés pour donner naissance à cette commune qui a conservé leur nom?
A l'autorité de M. Mone, je puis en ajouter une autre qui vient encore à
l'appui de ma thèse. M. Spach, dans une intéressante histoire du Bas-Rhin ^
dit : «Après cette retraite de Lyon, les barbares occupaient les îles du Rhin,
grandes et petites, le long de l'Alsace d'aujourd'hui. Du sein de ces re-
paires, ils lançaient des imprécations contre Julien, etc.»
C'est donc en m'appuyant sur deux autorités imposantes que je me per-
mets d'appliquer à Helveliis un passage d'Ammien -Marcellin% auquel
1. Urç/exchichte, etc. t. II, p. 296.
2. Desc7yp(. du dép. du has-Rhhi, /oc. cil.
.3. Voici ce passage d'Ammien-Marcellin:.... I/sdem diehus excrcittmm advenlu perlerrid
barhari, qui domicilia fixere eis Rhenum, partim difficiles vias , elst(op(e naturo clivosos
concœdibns vlavsere snllerter , arborions immensi roboris ca'sis : al H occupât is insvlis ,
sparsis crebro per ßumen Rhenum , ululantes lugubre conviens et Romanos incesscbant
et Cœsarem etc. Lib. XVI, cap. xi.
— 157 —
Scliœpfliu avait dumic une signification tout à fait diflérentc.' En effet,
adoptant l'opinion de Guilliman", il place ce fait d'armes près de Rhinau,
en Suisse (canton de Zurich). L'assertion de fauteur suisse est contraire à
toute vraisemblance et ne repose sur aucune base. Les restes de fortifica-
tions dont il parle ne prouvent rien, ils peuvent avoir une autre oiiginc.
Le couvent de Bénédictins, de Rhinau (Suisse), a été fondé en 778, il est
possible qu'il ait été précédé d'un établissement romain. D'ailleurs,'l'historien
romain ne parle que de retranchements faits avec des arbres et non de
fortifications murées.^
En parlant des tumulus*, j'en ai signalé qui me paraissent appartenir
aux Alémans et que j'ai cru pouvoir attribuer, en partie du moins, à des
morts tombés dans une bataille. Eh bien, cette bataille a pu avoir lieu
lorsque les Romains sont venus refouler les barbares au delà du Rhin.
M. L. Levrault^ parle de «nombreux hirindl dont les tertres boisés s'éche-
lonnent sur divers points de la forêt d'Obcrnai, ainsi que des forêts conti-
guës de Landsperg, Barr, etc.» Ne seraient-ce pas des sépultures de ces
mêmes peuples, attaqués et tués par les Romains dans leurs retranchements
des Vosges? Peut-être y ena-t-il aussi, comme je le suppose pour les
environs de Herbsheim, qui recouvrent des personnes mortes naturelle-
ment pendant les six années que les Alémans ont occupé fAlsace.
La voie de la Rauracie, le long de laquelle sont disséminés les tumulus
que je regarde comme alémaniques, traverse un canton rural qui porte le
nom de Könyjsherberg (gîte du roi). D'après une tiadition locale, un roi
campait ici jadis avec son armée; on dit que des armes et surtout des fers
à cheval y ont été mis à jour. J'y ai fait des fouilles sans résultat® et me
suis borné à noter cette place pour mémoire. Mais je crois qu'il n'y aurait
rien d'invraisemblable à admettre qu'un roi alémaii ait campé en ce lieu,
à proximité de la ville romaine et non loin du Rhin, et que son camp ait
formé le centre d'une population alémanique, dont nous avons vu des traces
assez caractéristiques à Herbsheim.
En résumé, les Alémans avaient intérêt à posséder toutes les villes ro-
l. Alsat.iUustr., t. Y\ p. 401.
1. Francisci Guilliiiiaimi, De Beb. Helvet. , p. 96, 1598.
o. J'avais conçu l'iiypotbése (pie je viens de développer avant d'avoir eu connaissance
des travaux de M. Moue et de M. Spacli ; il m'a encore été donne d'en entretenir notre
savant et bien regretté confrère, feu M. le professeur Jung-, qui a beaucoup approuvé mon
idée, et c'est d'après ses conseils que j'ai pousuivi l'étude de cet infére.ssant problème.
4. Voy. g 9.
5. Voy. Bulleim, I8G4. p. 7.
G. Voy. l 6.
— 158 —
manies des bords du Rhin; ils se sont battus pour avoir Argentoratum et
Argentouaria, pourquoi auraient-ils négligé Helvetus?
Helvetus a dû partager la destinée iV Argentoratum. Gomme cette der-
nière ville, ïlelvet est classé par les historiens parmi les villes des Médio-
matriciens d'abord, puis parmi celles des Triboques. La première population
gauloise qui ait laissé des traces dans nos contrées , doit avoir appartenu
aux Kimris-Belges, dont les Médiomatrikes faisaient partie. Ce fut environ
l'an 600 avant J.-C. que les Kimris passèrent le Rhin, sous la conduite de
Hu ou Hésus le Puissant, chef de guerre, législateur et prêtre'. Dès le
deuxième siècle de notre ère, il n'est plus fait mention des Médiomatrikes;
ils furent refoulés dans les Vosges par les Triboques.
Après la défaite d'Arioviste par César, dans le pays des Séquanais, La-
biénus soumit les Médiomatriciens, qui dès lors furent incorporés à l'em-
pire romain (56 ans avant J.-C). L'ordre nouveau, administratif et civil,
fut établi par l'empereur Auguste (26 ans avant J.-C), et la partie de l'Al-
sace qui correspond à peu près au département du Bas-Rhin, reçut la dé-
nomination de Germanie supérieure, et au quatrième siècle, sous le règne
de Constantin, celle de Germanie première.
Helvetus paraît avoir péri au cinquième siècle. Dans les années 403 et
suivantes, Stilicon, Vandale d'origine, régent sous la minorité d'Honorius,
fils de Théodose, dégarnit successivement les frontières du Rhin des lé-
gions qui les gardaient. Dans l'espoir de satisfaire une secrète ambition, il
sut, par des manœuvres habiles, décider les Germains à une invasion dans
l'empire romain. Le dernier jour de décembre 406, des hordes de Quades,
de Vandales, de Sarmates, d'Alains, de Gépides, de Hérules, de Saxons,
de Bürgendes, d'Alémans, etc., vinrent franchir les frontières dégarnies.
Saint Jérôme% dans une épître célèbre, parle avec une véhémente élo-
quence de ce désastre, et parmi les villes détruites il cite'Argentorat. Quoi-
qu'il ne fasse pas mention d'Helvet, il y a tout lieu de penser que cette
ville subit le même sort, ou que, si elle échappa en partie à l'invasion
germanique, elle succomba plus taixl entièrement lors de celle d'Attila,
en 451 .
1. Amédée Thierry, Hist. des Gaulois, t. 1", p. 143.
5. Epistola XI, ad Ageruchiam.
INapoLÉGN NlCKLÈS,
ronespondant de l'académie de Stanislas, de la sociAté
iiidastrielle de Mulhouse, etc. etc.
SAINT I.EON IX
LE PAPE ALSACIE.N.
Le 8 août 1048, le pape Damase 11 moiirul subitement, empoisonné,
dit-on, par Benoît IX, après vingt-trois jours de pontificat, qu'il avait
passés hors des murs de Rome, dans l'antique cité de Préneste ou de Pa-
lestrine. Au moment de son décès, l'empereur d'Allemagne, palrice de
Rome, exerçait une influence majeure sur les élections papales. Les députés
romains se rendirent à Freisingen, auprès de Henri 111, pour le prier de
leur désigner un candidat. Le clioix de l'empereur tomba sur son parent
Bruno, évêque de Toul.
En ceignant la tiare , Bruno prit le nom de Léon IX , qu'il immortalisa
par l'éclat de ses vertus.
Léon IX est un pape alsacien. Avant de raconter l'histoire de son pon-
tificat, il est indispensable de rappeler son origine , et de retracer en quel-
ques lignes la situation du clergé, de l'Eglise, et de l'Europe centrale, au
moment où le précurseur de Grégoire VII monta sur le saint-siége.
Je n'apporte point de documents nouveaux et inédits à cette esquisse.
Schœpflin a publié trois chartes concernant le voyage de Léon IX en Al-
sace ; nos archives du Bas-Rhin conservent deux de ces titres. J'aurai soin
de les encadrer dans mon récit; ils en formeront, sinon le point culmi-
nant , du moins un épisode, qui aura quelque chance de fixer votre intérêt,
puisqu'il y est question de l'éghse d'Altorf et du couvent de Hohenbourg,
c'est-à-dire de deux locahtés chères aux archéologues et aux fidèles.
Si j'entreprends la tâche téméraire de faire revivre à vos yeux cette
sainte figure, sans légitimer mon dessein par une révélation trouvée dans
quelque document inédit du onzième siècle , j'espère du moins conquérir
votre indulgence par la sincérité de mon admiration pour cet illustre pon-
tife; admiration qui n'exclut point, — vous le verrez tout à l'heure , — un
jugement impartial. A défaut de sources inconnues , j'ai pu trouver , pour
le respect que m'inspire Léon IX, des points d'appui dans plusieurs au-
teurs modernes, qui ont voué, comme moi, un culte à ce grand réforma-
teur. Des écrivains catholiques et protestants ont été également émus, en
— 160 —
liant connaissance à travers les âges, avec ce représentant de toutes les
vertus évangéliques , avec l'intrépide luttenr, (jui avait voué au vice une
implacable haine , et qui sacrifia bravement sa vie dans une guerre à mort
contre les méchants.
Bruno est né , le 21 ou le 22 juin '1002, dans le comté de Dabo , scloti
les uns; dans le château mérovingien d'Eguisheim, selon les autres; in
(inibus dnlcis Elizatiœ, sur les confins de la douce Alsace, dit Wibertus ;
cette expression pourrait s'appliquer à la rigueur aux deux localités. Dabo
ou Dagsbourg, le pays où naquit Heilwigdis, la mère de saint Léon , est
situé près des frontières de l'Alsace, mais sur le versant occidental des
Vosges. Éguishcim, où résidait Hugues IV, comte du Nordgau et père du
futur pontife , se trouvait aussi près des frontières de la province, en ad-
mettant que le Sundgau ou Sudgau fût considéré, à l'époque dont nous
nous occupons, comme un district indépendant de V Elizatia de^Nihcrlua.
La question, au surplus, est oiseuse, aussi longtemps qu'un document
positif n'aura point précisé le lieu de naissance de Bruno. Par sa mère, il
rattachait son origine aux anciens comtes de Dabo, et par une tante ma-
ternelle, il se trouvait parent de l'empereur Conrad le Salique. — S'il
m'était permis de hasarder une hypothèse, je pencherais à placer son ber-
ceau plutôt à Dagsbourg qu'à Éguisheim. Son père, le comte Hugues, se
trouvait incessamment impliqué dans les guerres locales qui, pendant la
première moitié du onzième siècle, infestaient la vallée du Rhin. Regin-
bald , l'un des seigneurs de Rappoltstein , avait dévasté ses domaines; dans
l'une de ces rencontres, Gérard, le frère amé de Bruno , avait péri. N'est-
il point probable que pendant ces troubles, Heilwige , la fille de Louis de
Dabo, ait cherché temporairement un abri dans la maison paternelle, et
que pendant l'une de ces pérégrinations forcées , elle ait donné le jour à
l'enfant qui devait valoir à sa maison une éclatante renommée?.... Ce qui
semble venir à l'appui de ma thèse, c'est qu'à l'âge de cinq ans déjà, l'édu-
cation de Bruno fut confiée à un prélat lorrain, à l'évêque Berthold de
Toul, qui avait deviné dans le caractère studieux et méditatif de cet enfant
précoce, une des gloires futures de l'Église. La mère de Bruno était un
modèle de piété; elle avait, de concert avec son mari, fondé le couvent
de Sainte-Croix, près WofTenheim, et l'Œlenberg, dans le Sundgau. De
huit enfants, issus de son mariage avec le comte Hugues, deux filles,
Odile et Gebba, prirent le voile, et devinrent, l'une, abbesse de ce môme
couvent de Woftenheim, et l'autre abbesse de Neuss. Les traditions de la
famille — peut-être des documents aujourd'hui perdus — plaçaient parmi
les gloires de la maison, à l'extrême limite de l'âge mérovingien, une
— 161 —
abbesse de Hoheiiboiirg , dojit le nom allait être inscrit par Léon IX dans
le calendrier chrétien.
Les premières leçons, données par \nie j)ieuse mère, avaient déposé
dans le cœur de Bruno le germe des bonnes pensées et des fortes résolu-
tions. Jeune homme , il partageait ses journées entre l'élude des sciences
ecclésiastiques, la visite des hôpitaux et des prisons. Journellement, il
donnait des preuves de son humilité, en prafi(juant des œuvres d'abnéga-
tion; sa pureté angélique devenait, pour un monde dépravé, un modèle
idéal. Autour de lui le vice marchait le front levé; la majeure partie du
clergé était engagée dans des liens illicites: les charges ecclésiastiques
étaient vendues au plus offrant ; les princes et les seigneurs en disposaient
pour leurs créatures, 'pour leurs parents, pour leurs enfants illégitimes.
Sans aucun doute, les passions mauvaises sont de tous les temps et de tous
les pays; mais il est des époques exceptionnelles où le frein de toute dis-
cipHne est brisé, où le masque de l'hypocrisie même est jeté de côté comme
une gène inutile. Ce sont les époques des grandes rénovations qui se prépa-
rent et s'accomplissent, soit par la violence, soit par quelque main ferme,
qui porte le fer et le feu sur la gangrène sociale. On a toujours remarqué
qu'en face de la corruption, à côté des caractères criminels, se dévelop-
pent, par la force même du contraste, les vertus les plus éclatantes. Les
martyrs chrétiens sont nés au milieu d'une société en décomposition. Je
m'exphque parfaitement le caractère de Bruno par la haine vigoureuse
que devait lui inspirer l'aspect d'un siècle violent, sensuel, cherchant à
oubher dans les orgies les fj-issons que la crainte de la fin présumée du
monde venait de lui donner.
L'empereur Conrad le Salique avait appelé lo jeune lévite à sa cour.
Bruno resta, sans ailectalion , austère au miHeu des plaisirs, recueilli au
milieu de la vie dévorante des affaires. Dans ses loisirs, il sacrifia au culte
des muses latines : très-jeune déjà il avait célébré son aïeule Odile. Lors-
qu'en 1056, Herrmann, évêque de Toul, vint à mourir, l'empereur jeta
les yeux sur son parent et lui conféra cet évèché. Bruno ne se refusa
point à une tâche dont il ne soupçonnait peut-être pas toutes les difficultés.
A peine âgé de vingt-quatre ans, il n'avait pas encore acquis la triste
expérience de la vie, qui apprend à l'homme à se méfier de ses propres
forces, et à se voiler la tête en face du mal. Bruno, selon le témoignage
de plusieurs auteurs contemporains, avait adopte, pour sa vie intime, la
règle de Saint-Benoît; il conserva, sur le siège épiscopal , toutes ses aus-
térités premières; en face de son clergé, il développa une sévérité, une
fermeté, qu'on ne s'était point attendu à trouver dans ce jeune homme
n« SÉRIE, — T. n. — (M.) 1 1
- 162 —
doux et humble , qui s'était constamment effacé devant les autres et qui
avait paru poursuivre une sanctification purement personnelle. Gomme
évéque, il essaya les forces dont il devait trouver l'emploi près de trente
ans plus tard sur une scène infiniment plus vaste. 11 entama avec son clergé
prévaricateur ou impudique une lutte incessante, chassant les abbés in-
capables ou infidèles, rétabhssant la discipline à Senones , à Saint-Dié,
à Estival, à Moyenmoulier; composant des hymnes dans ces moments
qu'on appelle perdus; opposant le silence du mépris et la sérénité d'un
front pur aux calomnies qui osaient s'attaquer à son irréprochable exis-
tence ; descendant des hauteurs de la méditation , lorsque les ordres de
l'empereur lui confiaient des soins politiques, et alliant, dans ces rares
occasions , la prudence du serpent à la simplicité de la colombe.
Ainsi, il était parvenu à réconciher Conrad le Salique et Robert, roi de
France; il avait rétabli la paix en Lorraine, après la mort d'Eudes, comte
de Champagne, et nous allons le voir, comme pape, proclamer en Alsace
la trêve de Dieu. Peu de temps avant sa grande élévation, il avait (en 1045)
restauré le couvent de Hohenbourg, détruit par un incendie, et, dans
cette existence toute vouée à son Sauveur, il aspirait plutôt à descendre
((u'à monter, plutôt à entrer dans un couvent de Bénédictins qu'à réunir
sur sa tête de nouvelles dignités ecclésiastiques, lorsque l'empereur lui
annonça, dans les derniers jours de 1048 , que la diète de Worms l'appe-
lait, par un vœu unanime, à la chaire ponUficale vacante.
L'effi'oi de Bruno fut sincère ; il entrevit du premier coup d'œil l'im-
mense responsabilité qui allait peser sur lui ; il demanda à se recueillir,
passa plusieurs jours dans le jeûne et la prière, et, au sortir de cette re-
traite, il déclara qu'il se sentait incapable de porter le fardeau qu'on vou-
lait lui imposer ; il confessa publiquement devant la haute assemblée ses
faiblesses, ses péchés, son indignité personnelle. Mais cette humihté, qui
n'était que l'expression et le résultat de ses convictions chrétiennes, lui
gagna d'autant plus le cœur de tous les assistants; sa componction fut plus
éloquente que ne l'aurait été un discours cicéronien. Les instances de
l'empereur, son ami et son maître, finirent par ouvrir les yeux du modeste
candidat sur le danger que courait la chrétienté, si l'on renvoyait les
députés romains soit avec une réponse négative, soit avec la nomination
d'un pontife moins apte à prêcher d'exemple à celte Rome plongée dans
les excès de l'anarchie et de la débauche. Lorsque les délégués des nobles,
du clergé et du peuple de Rome s'étaient présentés à la cour de l'empe-
reur d'Allemagne , à Freisingen , les Allemands s'étaient d'abord détournés
avec un mouvement d'effroi et d'horreur; pg'sonne n'osait aspirer à cette
— 168 —
tiare, qui portait la mort avec elle. Et si jamais une assemblée délibérante
avait été bien inspirée, ce fut cette diète convoquée par l'empereur à
Worms; car, de l'aveu de tous les contemporains — et ce jugement pre-
mier a été ratifié par la postérité — le choix qu'on y fit d'un pape ne pou-
vait tomber sur un prêtre plus digne que ne l'était l'évèque de Toul.
Bruno , à la lin convaincu qu'un appel d'en haut lui arrivait dans l'una-
nimité de cette réunion diélale, Bruno accepta, sous condition qu'une
élection canonique confirmerait, à Rome, l'élection improvisée à Worms.
Avec lui , la papauté ruinée va se relever rapidement, et devenir une puis-
sance véritablement universelle. Le règne de Léon IX ouvre une ère fé-
conde en soudaines et salutaires métamorphoses.
Au moment où le nouveau pape s'acheminait vers la cité éternelle, le
bâton du pèlerin à la main, comme les apôtres ses prédécesseurs, Rome
sortait d'un état anarchique, dont j'oserai à peine indiquer quelques
contours.
De même qu'à la tin du dixième et au commencement du onzième siècle
la puissante famille des Grescentius avait disposé de la tiare, ce fut, dans
les temps un peu antérieurs à l'époque où nous sommes arrivés, la famille
ambitieuse des comtes de Tusculuin, qui tyrannisait le municipe de Rome
et qui pourvoyait ses membres de toutes les dignités lucratives de l'Eglise,
sans en exempter la papauté. La pohtique impériale favorisa , pendant
assez longtemps , un état de choses qui assurait sa prépondérance sur les
affaires de l'Italie du centre; il fallut que le scandale arrivât à un degré
inouï, pour mettre un terme à cette coupable incurie, ou à cette iniiitelh-
gente connivence. Un enfant de douze ans, le fils du comte Albéric, avait
été placé, en 1033, sur le trône pontifical; l'un de ses frères, Grégoire,
fut pourvu de la dignité de patrice. A partir de ce moment, un mystérieux
nuage descend sur l'Eglise de Rome et enveloppe la ville sainte d'une
sinistre obscurité, sillonnée par moments d'éclairs plus sinistres encore.
Benoît IX, à mesure qu'il grandissait, semblait réunir dans sa nature
démoniaque les vices de Galigula et d'Héliogabale. Les péchés capitaux
régnaient impunément sous ses auspices et sous son égide ; l'antique palais
du Latran avait été transformé par lui en un lieu de plaisirs mondains.
Lorsque, excédée de tant d'insolence , la partie saine du clergé et du peuple
essayait d'y porter remède en procédant à l'élection de pontifes moins
indignes, ces essais n'aboutissaient qu'à une confusion plus grande; il y
eut un moment où trois papes siégeaient à Rome, l'un au Vatican, le
second à Sainte-Marie-Majeure, un troisième au Latran. Des luttes à mort
ensanglantaient les rues de la ville; Benoît IX, tantôt fugitif, tantôt Iriom-
— 164 —
phant, finit par céder la liare à prix d'argent, et continua, dans une re-
traite profane, hors des murs de Rome, sa vie de débordements. Telle
était la situation de f Église au centre de la chrétienté, telle avait été Rome
au moment où Léon IX allait frapper aux portes de Saint-Pierre.
Sa marche, de Toul à travers l'Allemagne et l'Italie, avait été une marche
triomphale. Peuple, prêtres et nobles accouraient sur le passage de l'évèque
qui marchait nu-pieds, comme le dernier des pèlerins, mais qui portait
sa mission régénératrice écrite sur son front. Son cortège était aussi
simple que lui-même; mais au nombre des amis qui s'étaient attachés à sa
nouvelle destinée, et qui allaient courir avec lui tous les dangers d'un
combat à outrance, se trouvait un simple moine, qui valait une légion
d'adhérents. J'ai nommé Hildebrand, le moine de Cluny , le chapelain de
Grégoire VI, de l'un des concurrents de Benoît IX, Hildebrand, qui avait
puisé dans le spectacle même des infamies romaines la volonté et le cou-
rage de réformer et de relever cette Éghse déchue. Ce sont les orgies de
Benoît IX qui ont provoqué, qui ont légitimé les rigueurs de Grégoire VII;
la mission providentielle de ce pape, préparée par les pontilicats de Léon IX
et de Nicolas II, avait été révélée à ce génie incomparable sur les bords
mêmes de l'ahmie, où menaçaient d'être englouties les traditions des pre-
miers papes martyrs et des pontifes contemporains de Constantin et de
Charleniagne. Hildebrand était fhomme d'une nouvelle époque, encore
caché aux yeux du monde, mais intronisant déjà, sous le nom de Léon IX,
un nouveau système.
Léon IX lit son entrée à Rome, au chant des hymnes, entouré par le
clergé cl par le peuple. Il alla en droite ligne prier sur le tombeau de
l'apôtre saint Pierre, puis il déclara, devant un innnense concours de
fidèles, n'avoir accepté qu'à contre-cœur la dignité pontificale et être prêt
à retourner dans sa patrie *, si le choix préalable de la diète allemande
n'était pas ratifié par les habitants de la ville éternelle.
Évidemment, la confirmation populaire que réclamait Léon IX était une
affaire de pure forme; mais le principe même, énoncé par le pape, lui ga-
gnait l'affection du peuple; il semblait, en réclamant l'assentiment des
Romains, condamner lui-même la dictature de l'empereur'. A pailir de
ce moment, l'Église s'appliqua nécessairement à reconquérir la liberté du
choix dans les élections papales.
Le 2 février 1049, jour de la Purification, il fut consacré i)ar les trois
cardinaux-évêques, et de ce jour, l'Église sentit le souille vivifiant d'un
l. 11 ne s'était point démis de ses fonctions d'évêque.
i. (ircgorovins. Uistoire de Rome au moyen dr/c , t. IV, passini.
— 105 —
;iir de réforme; c'était la bise du nord qui venait enlever les miasmes ma-
lécageux de la campagne romaine.
Les annales ecclésiastiques mettent en lumière l'activité dévorante du
nouveau pape , qui convofjua concile sur concile , et parcourut inces-
samment FEurope centrale, pour extirper la simonie et le concuhinage ,
poui' relever l'épiscopat amoindri, et imprimer une vie nouvelle à des
règlements oubliés ou méconnus. Le pape Victor III a dit de lui, avec
toute raison : nb eo omnia ecdesiasiica sludia renovata , novnqite lex visa
est exoriri. h peine assis sur le siège pontifical, il émet une bulle en faveur
de l'église de Saint-Pierre , et attribue à la restauration et à l'ornement de
celte basilique tous les dons faits par les fidèles. Dès le mois de mars i049,
il se rend à l'égbse de Saint-Micbel, sur le mont Gargano qui domine
l'Adriatique. Sa pensée pieuse et ardente erre au delà de celte mer jusqu'à
Byzance et appelle la lumière d'en baut sur les Grecs schismatiques; de
là, il se rend au couvent du Mont-Cassin , fondé par saint Benoît, le guide
spirituel de son enfance et de sa jeunesse. 11 croyait devoir à ce protecteur
invisible sa guérison dans une maladie mortelle, et il venait maintenant
s'acquitter d'un devoir de reconnaissance dans le sanctuaire même où
Benoît avait vécu. Le pape, quoique pompeusement reçu par l'abbé Ricbe-
rius , dîna dans le réfectoire à la table des moines, et gagna les cœurs par
cette bumilité qui chez lui semblait une grâce d'état. Il éprouvait instincti-
vement le besoin de s'appuyei- sur quelque affection, puisqu'il allait être
obligé de froisser les intérêts et les passions.
Dès le premier concile qu'il convoqua à Rome en avril 1049, il pût
se convaincre que s'il voulait agir avec une vigueur extrême , renverser
tous les obstacles, frapper tous les coupables, les églises de Rome reste-
raient sans prêtres. Hildebrand, maintenant son sous-diacre et recteur de
Saint-Paul , le dirigeait à la fois avec énergie et modération. Kilian, évêque
de Sutri , accusé de plusieurs vices , avait cherché à se défendre en faisant
admettre de faux témoins; mais à la voix du pape, il était tombé, frappé
d'apoplexie , comme Ananias , sous l'impression d'une terreur panique qui
s'était emparée de tous les assistants. Léon prétendait établir la règle que
tous les prêtres qui auraient été consacrés par un évêque simoniaque se-
raient privés de leur dignité. L'effroi fut universel. C'est alors que Hilde-
brand intervint et fit établir, comme règle normale, les ordonnances moins
sévères de Clément IL Mais Léon IX se montra implacable contre les ma-
riages incestueux et contre les ecclésiastiques concubinaires.
Pur, lui-même, de tout péché chainel, il s'indignait contre les coupables
qui avaient violé le vœti de chasteté. Les femmes convaincues d'avoii
— 166 —
cohabité avec des prêtres furent piivées de leur état civique et condam-
nées à l'état de serves du palais de Latran. Celte antique demeure des
papes, qui, sous Benoît IX, avait été un lieu de débauches, fut exorcisée
par le saint pontife et rendue à sa destination première; les admirables
hymnes de l'Église primitive retentirent de nouveau sous ces voûtes pu-
rifiées.
Dès son entrée en fonctions, le pape reçut, de la part de saint Pierre
Damiani , un livre , fruit d'une longue et terrible expérience , un volume
portant le titre significatif et néfaste de Gomorrhianus , qui signalait au
père des fidèles les vices hideux dont laïques et cléricaux se souillaient ,
et qui le sommait d'extirper ces excroissances du corps social. Le pape
répondit eatégoriquement au jeune anachorète pour le remercier de ses
tristes révélations et prit l'engagement d'y porter remède dans la mesure
de ses forces. A l'un des successeurs de Léon IX, au pape Alexandre II,
l'œuvre de Damiani parut offrir des sujets de scandale tels , qu'il crut de-
voir l'enfermer dans une cassette sous triple clef, L'Eglise, depuis ce temps,
a permis l'impression de cette anatomie du vice; car la morale publique
n'est point engagée dans les publications de cette nature , et elle ne court
point de danger par des crudités physiologiques. C'est la poésie du crime
qui fausse les intelligences et pervertit les cœurs.
Dès le début de son pontificat, Léon IX avait à lutter avec d'autres dif-
ficultés matérielles ; les caisses des égUses avaient été vidées par le mon-
strueux Benoît IX ; dès lors comment nourrir la petite cour pontificale? Il
songeait déjà à vendre jusqu'au dernier de ses ornements, et ses amis
d'Allemagne étaient sur le point de mettre leurs vêtements en vente, afin
de pouvoir retourner dans leur patrie , lorsqu'un don inespéré airiva de
la cour lombarde de Bénévent. On a remarqué que pendant les soixante-
dix années qui ont précédé le pontificat de Léon IX, et sous son règne
même, on ne frappa point de monnaie papale. Le peuple romain cepen-
dant vivait d'aumônes, comme il vit aujourd'hui du produit des étrangers;
par une coïncidence heureuse , dans cette détresse publique , on vit se
présenter à Rome un roi d'Ecosse, illustré bien plus par la tragédie
shakespearienne que par les annales contemporaines. Macbeth, meurtrier
de son prédécesseur Duncan, avait «i se faire pardonner cet assassinat, et il
répandit avec profusion des aumônes et des largesses de toute nature. Le
peuple fut satisfait et attribua ce secours inattendu à l'influence du pape.
En général, la ville de Rome resta calme sous Léon IX, qui s'appliquait
à ne pas attaquer les formes de la constitution urbaine. La piété réelle du
pape inspirait aux habitants un respect involontaire , et l'union intime qui
— 167 —
régnait alors entre l'empire et la papauté, contribuait aussi au maintien de
la paix dans les rues de la ville et dans les châteaux de la campagne. Mais
Léon ne parvint jamais à se sentir à l'aise dans une cilé qui avait été ré-
cemment souillée par tant de meurtres perfides et de combats publics. Le
séjour de Rome lui inspirait une involontaire répugnance ; en additionnant
les mois qu'il a passés au Latran, on n'arriverait probablement pas au
quart des années de son pontificat.
Déjà pendant l'automne de 1049, nous trouvons le pape en route pour
le Nord. A Passignano, en Toscane, il est rejoint par saint Jean-Gualbert,
ce chevalier-moine, fondateur du couvent de Vallombreuse, et l'un des
lieutenants les plus aclit's du pape dans l'œuvre de la réforme. Il traverse
.Pavie, passe le Saint-Bernard et se rend à Clugny, partout conciliant,
confirmant ou concédant des privilèges. Puis il entre un instant à Cologne,
où un accueil magnifique l'attend ; à Aix-la-Chapelle il reçoit la soumission
de Godefroi, duc de Lorraine, qui avait saccagé et incendié la ville de
Verdun , et qui maintenant faisait amende honorable sur le théâtre même
de ses méfaits, en se laissant frapper de verges et en consentant à faire
l'office de manœuvre pour la reconstruction de l'église qu'il avait brûlée.
Un synode avait été convoqué à Reims pour le 3 octobre 1049; Henri P',
roi de France, circonvenu par des évèques simoniaques, avait voulu dé-
tourner le pape de son projet d'entrer en Champagne. Léon IX persista
dans son dessein; un immense concours de tous les points de l'Europe
centrale et de l'Angleterre lui prouva qu'il n'avait pas trop présumé de son
influence morale. — La foule des pèlerins dans l'église de Saint-Remy, où
l'on avait exposé les reliques du saint, fut telle qu'il y eut des malheurs à déplo-
rer. Le pape fut obligé de se réfugier dans un couvent contigu à l'église, que
l'on évacua de force pour pouvoir célébrer les cérémonies de la consécration.
Le synode fut tenu dans le temple , qui venait d'être restauré et livré au
culte ; une longue série de mesures disciplinaires marqua chaque jour de
cette active assemblée. L'archevêque de Reims , accusé de simonie , mais
habilement défendu par l'évêque de Senlis, fut assigné à comparaître, en
1050, devant un concile à Rome. D'autres dignitaires inculpés furent
moins heureux ; l'abbé de Pontières (dans le diocèse de Langres) qui s'était
refusé de payer le denier de Saint-Pierre et s'était rendu coupable d'actes
honteux, fut solennellement déposé. L'évêque de Langres, accusé de crimes
multiples, crut devoir se soustraire par la fuite au prononcé du jugement,
qui le mettait hors du sein de rÉghse.
Cette terrible sentence de l'excommunication fut prononcée, dans le
même synode, contre plusieurs prélats prévaricateurs; les anciennes près-
— 168
criptions contre la chasse et. le mariage des prêtres furent renouvelées, et
lorsque, après une étonnante activité déployée pendant le concile, le pape
fit ses adieux à Reims , il put se rendre le témoignage d'avoir, sur le sol
de la France, et en face d'un roi malveillant, déployé la même énergie
qu'à Rome , en face d'une faction de puissants dynastes.
Un concile était convoqué à Mayence , pour le 11 octobre, et l'empe-
reur d'Allemagne devait s'y rencontrer avec le pape. Avant de s'y rendre,
Léon IX consacra l'église de Sainte-Madeleine à Verdun, et versa des
larmes sur les ruines des temples et des demeures qui avaient été saccagés
par Godefroi de Lorraine. On vit à Mayence se produire des scènes ana-
logues à celles de Reims. Un évêque de Spire, Sibico, accusé d'adultère,
essaya de se défendre; sa mâchoire fut subitement paralysée, et, de ce
moment, l'assistance ne douta plus de l'influence irrésistible d'un pontife,
qui était visiblement assisté par le Seigneur.
De Mayence, le pape retourna sur ses pas en Lorraine, et arriva en
novembre à Moyenmoutier, «cette pépinière de saints;» du fond de la
vallée lorraine, il se dirigea vers Andlau, en Alsace. Je laisse à penser
quelle dut être son émotion , lorsqu'il toucha ce sol , où il avait sans doute
plus d'une fois passé comme jeune lévite pour visiter soit Hohenbourg,
soit le monastère d'Altorf , fondé par ses ancêtres. Le couvent de Saint-
Fabien et Sainte-Félicité à Andlau le reçut dans son enceinte; il y consacra
le maître-autel dans l'église nouvellement reconstruite par l'abbesse Ma-
thilde , et y plaça les reliques de sainte Richarde. Les droits et les privi-
lèges de l'abbaye furent renouvelés à cette occasion, sous réserve d'une
redevance de trois pièces de toile pour étoles , que l'abbesse aurait à en-
voyer annuellement au saint-siége. Le souvenir de la sainte impératrice
devait être sympathique à Léon IX, qui cultivait, comme sainte Richarde ,
les muses latines, et qui aimait, sans doute, comme elle, ce pittoresque
vallon. J'ai tout lieu de penser que le pape ne passa point aux pieds de
Hohenbourg , dont il avait restauré le couvent quatre ans auparavant,
sans faire une courte station au haut de la montagne; toutefois, le do-
cument qui constate d'une manière officielle sa sollicitude pour le saint
asile et pour le nom de son aïeule, n'a été émis qu'un an plus tard, en
1050; nous aurons à y revenir.
Arrivé à l'église de Saint-Cyriaque, à Altorf, où ses parents étaient
enterrés , le pape consacra le maître-autel , y déposa une grande quantité
de reliques, entre autres le bras de saint Gyriaque, et resta plongé dans
un long recueillement sur la pierre sépulcrale des auteurs de ses jours.
Quels eussent été les transports de la pieuse Heilwige, si elle avait vécu
- 169 —
■ assez longtemps pour voir le cortège qui accompagnait le pape dans son
pèlerinage et si elle avait pu recevoir des mains H'nn fils la bénédiction de
Tun des plus dignes successeurs de saint Pierre!
Pour le coup, le pontife laissa un témoignage officiel de son séjoui-
temporaire dans le couvent de Saint-Cyriaque. Une bulle datée du 28 no-
vembre 1049^ rappelle les origines du couvent fondé par les parents du
pape , qui veut « baser l'avenir de ce lieu vénérable sur des privilèges apos-
toliques, en retirer pour lui-même des moyens de salut et assurer aux
moines un appui tutélaire. » Répondant aux vœux de son cousin (pcdruelis)
Adalbéron , chanoine de l'église de Toul , il reproduit les premiers actes
de la fondation de ce monastère, et prescrit les premiers défrichements
dans les alentours. Le comte Eberhard, un ancêtre du pape, y venant
fréquemment, l'avait déjà trouvé propre à la fondation d'un couvent; mais
il avait été arrêté dans ses projets par la maladie et par la mort. Son fds,
Hugues l'Enroué {aUquantuhm raucus), connaissant les intentions du
comte, commença dans cette localité à construire une église en l'honneur
de saint Barthélémy et de saint Grégoire. Sur la demande du même Hugues,
l'èvêque Erkenbold consacra l'église, et Hugues fit don à cette jeune fon-
dation des dîmes d'Altorf, et en même temps des dîmes de la campagne
située autour du Burcbcrck- , avec celles de Mollkirch, Grendelbruch,
Schirmeck et Bœrenbach. La consécration a lieu en présence de l'abbé de
Clugny et de plusieurs prélats. Léon IX, dans cette même bulle, confirme
les dons et les privilèges accordés par ses parents à l'église d'Altorf, par
exemple, le droit de battre monnaie, le droit de péage, et celui d'un
marché, autrefois octroyé par l'empereur Othon.^
t. Voy. Scliœpdin , ^4/5. d/pJ. , I, p. 164 à 105.
2. Burgberg, montagne du château, probablement de Gnirbaden.
3. Il n'est point dit si c'est Olhon 1, H ou III , qui avait accordé celte faveur. La bulle
n'existe point en original dans notre collection du Bas-Rbin ; nous ne possédons qu'un
simple Vidbmis ùc l'ofTicialité de 1462. ScLœpflin ne connaissait pas plus que nous !a
charte primitive; il a travaillé sur le Vklhmi^.
On lisait sur le dos de la charte, que l'èvêque Werner attribua, lors de la consécration
de cette église, à l'autel de Saint-Cyriaque les dîmes de dix-sept manses (terra salica —
Selegeicmlc) provenant soit du comte Eberhard, soit du cf mte Hugues, soit de leurs frères
Gérard et WafTrid; puis les dîmes de rOsternforst, à Dereberde et Demosand [sic] ; enfin les
dîmes de la forêt de Berenbach et Grendelbach [Groidelbriicli), commençant par le cours
d'eau de Rotaho [In BnœJie à Rothmi] , et se terminant à Surebac (Satierhach?).
La même note contient encore d'autres renseignements sur les mutations survenues dans
ces rentes. Ce sont des détails passablement confus; ils se rapportent à des biens sis à To-
rolfesheim {Dorlisliehn) , donnés par Gontram , fils de Hugues , pour le salut de son âme et
une partie des dîmes sur des terres queMefridl.w'c), l'oncle de ces seigneurs, avait données
à l'autel de Saint-Étienno, à Metz. La comtesse Berthe, épouse d'Ebcrhard, avait livré et
donné à l'autel de la Sainte-Vierge à Strasbourg une partie des dîmes , attribuées dans le
principe à l'église d'Altorf par Gontram.
- 170 —
Le premier voyage du pape Léon IX en Alsace est encore marqué par.
une bulle , émise le 17 novembre 1049 * en faveur du monastère de Sainte-
Croix fondé par ses parents à Woffenbeim, dans le Haut-Rbin.
Après une invocation à l'instrument du marlyre du Sauveur, Léon rap-
pelle que l'église en question a été fondée par ses parents Hugues et Ileil-
wigdis ; il dit qu'en souvenir d'eux et de ses deux frères Gérard et Hugues,
déjà décédés , et pour son propre salut , il soumet l'église en question à
l'autorité et à la protection du saint-siége. A l'avance, il réprouve toute
usurpation éventuelle, même si elle avait lieu dans un but religieux; il
permet à l'évoque du diocèse d'y faire gratuitement des consécrations d'au-
tels ou de religieuses, mais sous aucun prétexte il ne saurait admettre
qu'un roi, empereur, archevêque ou évêque y fasse un acte impliquant
une autorité domaniale ou d'advocatie. Il rappelle avoir confié l'advocatie
à son neveu Henri, possesseur du château d'Egensheim {Egvislieim) , et
lui confère, à ce titre, l'usufruit des rentes d'Orbeis. Après sa mort, le
plus âgé des copropriétaires d'Eguisheim succédera à l'advocatie , aux
mêmes conditions. A leur défaut, l'abbesse et la congrégation des reli-
gieuses de Sainte-Croix pourront au besoin élire l'avoué parmi les copro-
priétaires d'Eguisheim. S'il n'y a point d'héritier à Eguisheim , les religieuses
choisiront dans la famille ou parenté du fondateur, de manière à prendre
toujours de préférence le plus proche parent, et à maintenir l'avouerie
dans la famille (m génère).
Suil une réglementation de ce que l'avoué pourra percevoir, si les
domaines du monastère allaient augmenter; c'est toujours, indépendam-
ment des revenus du fermage d'Orbeis, la douzième partie des nouveaux
revenus ; mais il faudra pour cela attendre que le couvent ail acquis
douze nouvelles manses. Si l'avoué percevait plus qu'il ne lui est dû, sur
les biens meubles et immeubles du couvent, l'abbesse, après une admo-
nestation et un délai de douze semaines, aura droit d'en appeler au saint-
siége.
«Après la mort de l'abbesse, que le pape lui-même venait de bénir, les
religieuses devaient être libres dans leur choix ; elles devront de préfé-
rence en prendre une dans leur propre sein, capable et douée de bonté;
dans le cas où ces conditions ne se trouveraient pas, on aurait à en choisir
une, hors du rayon du couvent. 11 réserve au saint-siége seul la bénédic-
tion ou la consécration de l'abbesse élue.
« En retour de toutes ces faveurs, l'abbesse enverra tous les ans à Saint-
Pierre de Rome une rose d'or de la valeur de deux onces romaines , ou
1. Scliœpflin , Als. dipl. , I, p. 163 et suiv.
- 171 -
bien la valeur même , pour en faire conteclionnor une ; el ceci aura lieu
en temps de carême, le dimanche d'Oculi. ■(>
Le pape institue formellement «ce mémorial des immunités accordées
au couvent de Sainte-Croix, pour qu'à Rome même, où tout acte religieux
prend son origine, et où , malgré moi , j'ai accepté les fonctions de vicaire
de l'apôtre, le monastère situé sur mes domaines paternels et largement
doté par moi, ne tombe point en oubli.)^
<' Fait le 14 des Kalendes de décembre, y — Au bas de l'acte, conservé
aux archives de Colmar, se trouve le visa de Conrad, évoque de Stras-
bourg.
Le pape s'était-il rendu lui-même à Wofîenheim, en venant de Moyen-
moutier, et avant d'aller à Andlau, ou après cette tournée? C'est ce qu'il
est difficile d'affirmer ou de préciser maintenant. En tout cas, il ne semble
guère probable que Léon IX , une fois en Alsace, n'ait pris quelques jours
pour visiter les fondations de ses parents, d'autant plus que Woffenheim
était dans le voisinage d'Eguisheim et de son château paternel. '
Au soilir d'Alsace, nous trouvons le pape dans le comté de Calw, en
Souabe, tenu par son neveu Adalbert. — Aux environs do Calw , les ruines
du couvent de IJirschau attirèrent son attention; il y fit faire des fouilles
et découvrit les reliques de saint Aurèie. A la suite de cette heureuse
trouvaille, il enjoignit à son neveu et à la comtesse Viltrude de relever les
murs du couvent et de le remettre entre les mains des Bénédictins.
Vers la fin de novembre 1049, il arrive à Reichenau, dont il avait sou-
tenu l'abbé contre l'évéque de Constance ; dans cette île aux anciennes
basiliques, il célèbre la fête de saint Clément. De là il se rendit à Augs-
bourg, puis passa au cœur de l'hiver par les Alpes du Tvrol, et fut de
retour à Rome vers le commencement du carême de 1050, Je ne saurais
mieux exprimer l'immense changement qui venait de s'opérer dans la
situation générale, qu'en traduisant les paroles d'admiration qu'inspire à
C. Hœfler cette rentrée du pape dans les Etats de l'Église, après la première
excursion apostolique en France et en Allemagne.
« En moins d'un an, le pape avait réussi à arracher l'Église à un état de
détresse et à la relever de son abaissement. Le partisan le plus enthou-
siaste des promesses divines n'aurait pu espérer un semblable résultat.
L'Espagne se trouvait rattachée au saint-siége; en France, l'esprit d'oppo-
l. L'abbé Hmitler place, à celte même épociiie, une loiiniéc dn pape au monastère de
.Saint-Sigismond à Roiiffacli , de plus, la consécration des églises de Bergliolzzell , d'ÖElen-
berg et d'Ottmarsheim. Je ferai ans.si remarquer que les chartes concernant Sainte-Croix et
Altorf nesont point datées de ces localités mêmes ; c'est probablement en route pour l'Italie
que le pape les a fait expédier.
— 172 —
sition du roi et des évêques était brisé ; l'Eglise d'Angleterre était plus
intimement que jamais unie à l'Eglise de Rome; en Allemagne, les germes
d'une dissolution prochaine étaient étoufiés; en Italie, la transformation
était complète; dans l'Occident tout entier, l'esprit apostolique primitif
était rajeuni, les préceptes canoniques fortifiés. Plus avait été grand à
Home l'esprit de perdition , plus brillant était aujourd'hui le modèle qui
montrait à tous les peuples le chemin de la vie et du salut. Les princes de
la terre rendaient hommage de nouveau au successeur de l'apôtre; les
évêques de tous les pays de l'Occident entendaient de nouveau sa voix.
« Beaucoup d'évêques avaient été pourvus d'excellents pasteurs ; les
moines et les prêtres étaient ramenés à la vie disciplinaire , les laïques
bridés , les récalcitrants punis ; et ce résultat était obtenu sans l'emploi de
la violence, malgré l'opposition et l'inimitié des puissants de la terre; sans
conseil, sans assistance, par un seul homme faible et désarmé, mais pé-
nétré de l'esprit de Dieu, de la foi apostolique, de l'espérance dans le
secours d'en haut, et de l'amour qui le poussait à laisser sa vie pour son
troupeau. »
A peine descendu à Saint-Jean de Lalran, le pape préside le concile qui
décida la condamnation de la doctrine de Déranger de Tours', sur l'Eu-
charistie, et ce jugement fut confirmé quelques mois plus lard par le
concile de Vercelli.
Jusqu'ici, Léon IX, absorbé par les soins de la réforme du clergé, n'a-
vait pu s'occuper de la situation politique et territoriale du saint-siége;
mais maintenant il éprouva l'impérieux besoin de faire honneur aux tra-
ililions de Rome pontificale; pour lui, comme pour quelques-uns de ses
grands prédécesseurs du huitième siècle, le pape devait être un ponlife-
roi; l'humilité de son cœur n'obscurcissait point sa vue comme homme
d'Etat; peut-êlre aussi puisait-il, pour cette partie de son activité, toutes
ses inspirations chez le moine Hildebrand, dont nous avons vu l'austère
figure au milieu du cortège qui avait suivi l'évêque de Toul à Rome. De-
puis Charlomngne, la curie romaine convoitai! la Fouille et la Campanie,
et faisait remonter ses prétentions ou ses droits jusqu'à la donation de
Constantin. Ces desseins du pape se poi'Iaient sur l'Italie méridionale, qui
(»fh'ait à cette époque un singulier aspect^ Les empereurs d'Orient et d'Oc-
cident aspiraient à y dominer; les princes lombards continuaient à régner
en maîtres souverains dans plus d'une ville; les cités maritimes étaient à
peu près indépendantes, et à travers ce dédale de seigneuries, les Nor-
1. Il niait la présence réelle.
2. Voy. Grcgoroviiis IV, p. 77-78,
— 173 —
mands, récemmcnl arrivés, se mcUaient au serviro de Ions les partis pour
les tromper les uns après les autres.
Dans cet état à peu près anarchique, le pape devait apparaître comme
une providence. A Saleine, il fut accueilli avec déférence par le prince
Guaymar IV; à Melfi, il eut une conférence avec les princes normands, et
dans le duché de Bénévent, que l'empereur Henri III avait en partie accordé
aux Normands, le pape prépara la voie à une conquête pacifique. La ville
de Bénévent chassa l'année suivante ses maîtres lombards, et se donna
aux souverains ecclésiastiques de Rome (25 juin 1051).
Dans l'automne de 1050, Léon IX s'achemina de nouveau vers les con-
trées du Nord, ({ui lui étaient si chères; le 19 octobre il visita Toul, et
employa quinze jours à revoir, dans les environs, toutes les localités, où,
pendant son enfance studieuse et sa jeunesse active, il avait déjà vécu de
cette vie de sainteté, qui faisait m.aintenant l'orgueil et l'admiration des
peuples catholiques. Il y eut une alfluence considérable de pèlerins et de
dignitaires de l'Église, qui vinrent du fond de la Hongrie, de l'Allemagne,
de l'Angleterre, de la France, porter leurs lioumiages à ce pape, redres-
seur des torts et digue héiitier de la succession de saint Pierre.
Pendant son séjour dans son ancienne résidence épiscopale, Léon IX
honora les reliques de saint Gérard, dont le corps avait été trouvé intact
après cinquante-six ans, écoulés depuis son ensevelissement. De Toul, il
se rendit sur les confins de la Lorraine, au couvent de Hesse, près Sarre-
bourg, dont il confirma les privilèges; puis il redescendit, dans l'arrière-
saison, en Alsace. Ce fut pendant cette seconde tournée pontiticale qu'il
émit le remarquable document, dans lequel il constate la présence des
reliques de sainte Odile au couvent de Hohenbourg. Ici, je ne puis mieux
faire que de liaduire textuellement une charte qui constitue pour le mo-
nastère, situé au sud-ouest de Strasbourg, sur une sommité des Vosges,
un véritable titre de noblesse :'
0. Léon, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, au nom du Seigneur,
à l'église de Sainte-Marie, mère de Dieu , à Ilohenburch, où repose le corps
de la sainte vierge Odile et, par son enti'emise, salut aux religieuses qui à
tout jamais y feront le service divin.
"Pendant que nous parcourions, poussé par un pieux devoir, la contrée
d'Alsace, il nous arriva de visiter Ilohenburch, et puisque nous portons
une pieuse sollicitude à toutes les églises, une dévotion spontanée nous
aurait porté vers ces lieux, sans compter que le souvenir de nos parents,
1. Cette bulle est placée iniproprement par Schœpilin (.4/.s. (///;/. . I , p. lüii-löü) , eu lOôl,
au lieu de lUoU.
— 174 -
qui dévotement y ont servi le Christ et y reposent en paix, nous a poussé
à consacrer de nouveau, comme résidence du Saint-Esprit, ladite église,
que nous avons trouvée pour ainsi dire abandonnée. Et nous l'avons fait
ainsi qu'il convient. Or, à ce temple dédié à la sainte vierge, mère de Dieu,
et à saint Nicolas, la vénérable abbesse Berthe a livré un bien avec des
serfs qu'elle possédait près d'Arcenheim (Artzenlieim) et près de Meinol-
desheim (Mœnolsheim) , Sahsenheim, Uhresheim (Ursheim), Gersheim
(Gerstheim). Nous avons de plus statué que sur les deux autels, dont l'un
est placé au-dessus de la tète de sainte Odile, et l'autre dans l'église prin-
cipale, personne ne célèbre la solennité de la messe, si ce n'est l'évêque
du diocèse même, et les semainiers attitrés de l'église même; et, en outre,
toute personne capable qui se présenterait, mais toujours avec l'autorisa-
tion et l'assentiment de l'abbesse ou de la congrégation dans le cas où l'ab-
besse ne serait pas présente. On aura de plus soin de se pourvoir d'un
prêtre religieux qui desservira journellement l'autel de sainte Odile et rem-
plira dignement l'office de chapelain auprès de l'abbesse. Et puisqu'il con-
vient à nos devoirs de régent apostolique de porter une bienveillance com-
palissante à qui brille dans l'exercice de la piété, ainsi que le portent les
lettres-privilèges accordées par nos prédécesseurs, il nous a semblé aussi
juste et convenable de nous rendre aux désirs de cette église et des reli-
gieuses qui s'y vouent au service du Seigneur. Or donc, nous concédons
en vertu de notre autorité, et à tout jamais, ledit privilège, statuant sous
réserve de la censure apostolique, et en invoquant le jugement de Dieu,
que ladite église devra inviolablement posséder le bien susmentionné, et
tous ceux qui ont déjà été concédés par les fondateurs de l'église ou par
d'autres fidèles serviteurs du Christ; par exemple : Rodesheim (Rosheim),
Torolfcsheim (DorUsheim) , Avelsheim {Avolshemi) , Sahsolsheim {Sœssols-
heim), Bladensheim (Blœsheim), Scafersheim {Schœffersheim), Ehnenheim
[Obernai), Illenkirchen {Illkirdi), Ingemarsheim, Ehenheim {sic, Nieder-
nai), Egensheim {Eguislieim), Sigolsesheim (Siffolslieim), Alege (Ehl), Sunt-
hausen (Sundhausen), Argersheim {Ergersheim) , Scopfheim {Schopfheim),
GieYsheixa {Gerstheim) , Bircheim {Bergheim- Mittelbcrgheim?) , Tulhngen.
Quant à la terre salique de Saint-Nabor, et de tout ce qui serait ultérieu-
rement concédé, que personne ne se permette dorénavant d'en enlever ou
de lâcher une parcelle; mais que le tout demeure intégralement aux reli-
gieuses vouées en ce lieu au service du Seigneur. •
«Nous avons aussi résolu de confirmer auxdiles religieuses la faculté
d'élire, toutes les fois qu'une abbesse viendra à décéder, sans contradiction,
une abbesse qui prendra la direction du couvent. Ordonnons aussi qu'elles
— 175 —
élisent de préférence dans leur propre sein, si elles peuvent y trouver une
digne et religieuse abbesse, sinon qu'elles acceptent la meilleure qu'elles
pourront trouver autre part et qu'elles amènent l'élue devant l'évêque ,
pour qu'il la consacre, et que l'abbesse, à son tour, fasse régulièrement
consacrer par l'évêque les religieuses soumises à son régime.
«Nous décrétons aussi que toute la superficie (area) de la montagne,
qui, du temps de sainte Odile, était possédée par les religieuses seules,
ainsi qu'il est constaté par une ancienne tradition, soit soumise à l'abbesse,
de telle manière que personne ne s'avise, sans son assentiment, de cul-
tiver ou d'occuper la montagne qui s'étend au-dessous de l'enceinte du
mur païen («'»//"m septa gentilis muri) et que personne ne se hasarde d'en-
freindre et de violer, de quelque façon que ce soit, la paix, qui doit, selon
notre volonté, régner perpétuellement en ces lieux. Décrétons en outre
que pas une personne, de quelque condition qu'elle soit, n'exige quelque
chose de ladite église par force ou par violence, mais qu'elle puisse tou-
jours, calme et tranquille, vaquer aux louanges de Dieu; voulons aussi
que l'abbesse ne dissipe point les biens du couvent avec une prodigalité
insouciante, mais que, fidèle dispensatrice du suprême empereur, elle
s'applique à conserver diligemment et à garder prudemment tous les re-
venus qui devront servir aux pauvres du Christ et à l'avantage de l'église,
non à la vanité du monde, de manière que les brebis du Christ, qu'elle
doit paître selon l'esprit et la chair, ne manquent jamais de pâturage tem-
porel et puissent s'appliquer sans souci à la recherche et à l'acquisition
des choses de l'éternité. Si elle contrevenait à ses devoirs, et si, avertie
une, deux ou trois fois, elle ne venait pas à résipiscence, nous prescrivons
qu'elle soit déposée selon les règles canoniques, et devant l'église, en
vertu d'une censure judiciaire.
ftOr donc, en vertu de l'autorité qui nous conipète conmie successeur
de saint Pierre, nous décidons irrévocablement qu'il ne sera permis à
aucun empereur, roi, archevêque ou personnage quelconque, grand ou
petit, d'agir, de quelque façon que ce soit, à l'opposite de cette lettre con-
firmative. Quiconque y contreviendrait, nous voulons qu'il demeure frappé
de notre anathème apostolique, jusqu'à ce (Jue, humblement, il vienne à s'en
repentir. Mais celui qui gardera {ces préceptes), nous voulons qu'il participe
de la vie éternelle. Frappé sera du même anathème tout semainier ou tout
autre prêtre qui se hasarderait à accabler l'égHse de Hohenburch par des
contestations ou des violences. Les semainiers aussi ne posséderont sur la
montagne que les maisons nécessaires à leur habitation, qui leur auront
été concédées par l'abbesse à titre de bénéfice.
— 176 —
« Fait, le 16 des kalendes de janvier {le 17 décembre 1050), de la main
d'Odon in, priniicerius de Toul, chancelier et bibliothécaire du siège apos-
tolique, pendant la seconde année du règne de Léon IX, pape, indic-
lion IV^ »
.le pense que tout commentaire pâlirait à la suite de ce document, té-
moin de la sollicitude du saint pontife pour l'Alsace et pour ses illustra-
tions religieuses. Mes lecteurs auront été saisis, sans que j'insiste sur cette
circonstance, par les termies affectueux qui révèlent l'attachement du pape
pour le pays de ses ancêtres. Ils doivent aussi être frappés de la descrip-
tion des localités, et des termes relatifs à l'enceinte celtique, témoin muet
d'un long passé, qui, à l'époque de saint Léon déjà, exerçait sur l'imagi-
nation du peuple une mystérieuse influence.
Un historien d'Alsace, que nous avons tous connu et apprécié, feu
Slrobel, place ici la visite de saint Léon dans le Haut-Rlnn et à Strasbourg.
— Dans la capitale de l'Alsace, le pape visita la cathédrale romane, dont
la reconstruction, commencée sous l'évêque Wernher, avançait alors ra-
pidement. Léon approuva les plans qu'on lui soumit. Puis il consacra l'église
de Saint-Pierre-le-Jeune, et, à la demande des fidèles, il y laissa son cou-
vre-chef, que l'on montrait pendant longtemps à titre de rehque, le mer-
credi de la semaine sainte. — Cependant, au milieu des soins donnés aux
églises et aux monastères, il ne perdit point de vue le but majeur de son
voyage dans le Nord, la pacificatio7i du pays.
Depuis que l'empereur Gom-ad II avait déclaré les fiefs héréditaires , il
s'était formé dans les pays rhénans, comme dans l'Allemagne centrale, un
nombre considérable de petites seigneuries indépendantes, souche et ori-
gine de la noblesse inférieure. Le premier effet de cette mesure, dictée par
des circonstances impérieuses, fut de donnei' lieu à des frottements con-
stants de seigneur à seigneur, et de seigneur à ville; la paix publique était
journellement troublée; le pape avait lui-même, pendant son jeune âge,
éprouvé, par les malheurs de sa propre famille, les terribles suites de cet
état anarchique. Le trouble qui régnait dans l'Eghse s'était communiqué
à toutes les relations politiques et civiles. Pour lutter avec le mal, le pape
s'appliqua de son mieux à faire adopter en Alsace la paix de Dieu, qui avait
déjà obtenu force de loi dans d'autres parties de l'Eui'ope centrale.
Une convention, jurée en 1051, par les seigneurs et les villes, couvrit
de sa protection, depuis le mercredi soir jusqu'au lundi matin, les ecclé-
siastiques, les femmes, les marchands, les chasseurs, les pèlerins, les
agriculteurs allant aux champs ou revenant de leur labour. Tous les parti-
cipants à ce traité s'engageaient à ne point porter des armes pendant les
— 177 —
jours fériés, et pendant les jours de la semaine, fixés par la trêve sainte.
La peine de mort était prononcée contre la personne libre qui violait le
traité; le serf coupable perdait la main. Toute provocation violente était
punie; tout accusé subissait l'épreuve de l'eau froide. On plaça la paix de
Dieu sous la surveillance du clergé, et lecture publique était donnée des
articles de la convention, chaque dimanche, dans les éghses. Le son des
cloches annonçait, le soir du mercredi, que toute hostilité devait cesser
pendant quatre jours.
Ce fut un immense bienfait; dans les campagnes, on dut bénir le nom
de Léon IX, qui valait à son pays natal cet armistice régulier et qui per-
mettait aux opprimés de respirer un peu plus librement.
Au commencement de lOôi, le pape se rend à Trêves, puis, pour la
seconde fois, à Augsbourg. Dans cette ville, un pénible devoir l'attendait :
il avait cité à comparaître devant lui l'archevêque de Ravenne, accusé de
machinations séditieuses contre la personne même de Léon. Sur les in-
stances des évèques présents, le pape pardonna et donna au pénitent hypo-
crite l'absolution dans la mesure de sa contrition. Un sourire sardonique
infernal, effleura la figure du prêtre rebelle; il retourna impunément à
Havenne; mais il y mourut d'une mort subite, et la croyance populaire
attribua celte fin soudaine à la main vengeresse de Dieu.
Pour la célébration des fêtes de Pâques (1051), Léon IX fut de retour à
Rome; il y guérit pendant le service divin, par la seule influence de sa
parole et de son regard, une pauvre possédée; des faits analogues se ré-
pétèrent dans plusieurs circonstances et servirent plus tard de preuves à
l'appui de la canonisation du pape.
Pendant cette année 1051, Léon IX se rendit de nouveau dans le sud
de l'Italie, où les Normands continuaient à commettre des cruautés inouïes.
Pour y arriver, il suivit d'abord la route de Subiaco, et visita, dans cette
belle vallée alpestre, les monastères illustrés par saint Benoît. Il usa de
rigueur envers l'abbé du Sacro Speco, qui, se sentant coupable, s'était
réfugié à Trevi; puis il examina les documents des habitants de Subiaco,
et fit impitoyablement brûler les titres apocryphes. Je cite cette circon-
stance, parce qu'elle jette rétrospectivement quelque lumière sur la ma-
nière de procéder qu'a dû employer le pape pour le couvent de Hohen-
bourg. Il est évident que, avant de faire cette consécration, son examen
s'était porté sur les ütres de famille que le monastère avait conservés, et
que l'acte solennel, qu'il accompht pour constater la vénération séculaire
dont jouissait sa sainte aïeule, n'avait été décidé qu'après un consciencieux
recueillement.
Il« .SÉRIE. — T. II. —(M. 12
— 178 —
En arrivant dans l'Italie méridionale, il reçut définitivement la soumis-
sion de Bénévent; il fit son entrée dans cette ville, le jour même de l'As-
somption. Alors les instances les plus vives lui arrivèrent du catapan grec
Argyroüs, qui représentait le reste de l'influence byzantine dans la Fouille.
Le pape commença, en effet, à faire des préparatifs et des armements pour
châtier les chevaliers-bandits de la Normandie; mais, abandonné dès ce
moment par Guaymar, prince de Salerne, il résolut de s'adresser à l'em-
pereur Henri III, avoué de l'Église de Rome; car en s'appuyant sur l'Alle-
magne, il pouvait espérer en finir avec les Normands, abriter contre leurs
attaques Bénévent, sa nouvelle acquisition, et sauver les habitants de la
Fouille, torturés, mutilés par les bandes des fils de Tancrède de Haute-
ville.
Four décider l'empereur à lui fournir des secours efficaces, il fallut,
une troisième fois, s'acheminer vers le Nord. Il se rend en Allemagne, en
'1051 , et commence par intervenir dans la lutte engagée entre Henri III et
les rois André et Bêla de Hongrie. Ses efforts sont couronnés de succès;
puis il passe à Ratisbonne, y rend les honneurs dus aux rehques de l'évêque
AYolfgang, qui, d'après la tradition, avait rendu la vue à sainte Odile, con-
sacre le couvent de Saint- Emeran, transporte à Bamberg les ossements
du pape Clément II, et arrive à Worms en décembre. Son séjour dans cette
ville est marqué par la promesse d'un secours contre les Normands, qu'il
arrache à l'empereur, auquel il cède l'évêché de Bamberg et l'abbaye de
Fulde contre la propriété définitive de Bénévent.
Aucun document ne conserve la trace d'une visite que le pape aurait
faite à sa chère Alsace, maintenant qu'il se trouvait non loin de cette pro-
vince pour la troisième fois depuis son avènement au trône pontifical. En
1052, nous le trouvons à Padoue, confirmant les privilèges des églises et
consacrant, dans celle de Sainte-Justine, la découverte des corps de trois
saints'; puis à Mantoue, où il avait convoqué un concile pour donner
suite à ses actes de rigueur contre des mœurs dissolues. Ici, il rencontra
pour la première fois une résistance à main armée de la part du clergé et
du peuple, et se vit obligé de faire un pas rétrograde. 11 doit être permis
de proclamer que l'œuvre légitime, entreprise par Léon IX, fut entravée
et échoua devant l'aveugle opposition d'une société corrompue. Le mal
devait encore progresser et provoquer la venue du grand moissonneur
Hildebrand, qui allait extirper, d'un seul coup, la mauvaise herbe dont
l'Église était couverte.
De retour à Rome, le pape eut la douleur de perdre , par un empoison-
1. Saint Julien , saint Maxime et sainte Félicité.
— 179 —
nement, Halynard, aichevêque de Lyon, el Hugues, ëvêque de Langres.
A la même époque (7 mai 1052), Boniface, marquis de Toscane, le sou-
tien et le conseiller du saint-siége, mourut assassiné à Salerne, le prince
Guaymar succombait à la suite d'une conspiration ; mais il restait à Léon IX,
pour l'accomplissement de sa sainte mission, une phalange de pieux ana-
chorètes; il avait saint Pierre Damiani à Ponte-Avellana; près de Vicence,
saint Théobald le Champenois; à Vallombreuse, saint Romuald; entre les
golfes de Salerne et de Tarente , cent vingt couvents abritant trois mille
disciples de saint Alfer...., que de motifs d'espérance et de confiance dans
l'avenir! Les Pisans, protégés et encouragés par lui, venaient de conquérir
la Corse et la Sardaigne sur les Sarrasins; le pape crut y voir la main de
Dieu qui l'invitait à chasser les Normands de l'Itahe méridionale.
En juin 1053, il se met en campagne avec une petite armée, comman-
dée par Rodolphe, recteur de Bénévent, et par Werner, un chevalier
souabe, qui lui amenait le secours si longtemps attendu du fond de l'Alle-
magne. Le pape se dirigea d'abord sur le mont Gassin, de là à San-Ger-
mano et à Capoue, avec un brillant cortège clérical et laïque. Sur les bords
du Volturno, il lient une cour de justice; mais déjà de sinistres présages
commencent à circuler. Jean, archevêque de Salerne, avait eu, dans son
église, sur le tombeau de l'apôtre Matthieu, une vision qui lui annonçait
que la Pouille et la Calabre resteraient aux Normands. On comprend que
ce songe, qui pouvait aussi n'être (|u'une hallucination ou une inspiration
de l'esprit du mal, ne détourna pas le pape d'un projet longuement médité.
La position des chevaliers normands était cruelle; excommuniés par le
pape, détestés par les populations, en proie à la famine, en face d'une
levée générale du pays, ils devaient se montrer prêts à tous les sacrifices.
Lorsque les deux armées se trouvèrent en présence dans la Capitanate ,
près de Civitella, ils demandèrent instamment à négocier. Mais les cheva-
liers allemands, forts et d'une taille élevée, méprisaient les Normands,
petits et grêles; ils comptaient en avoir facilement raison, et rapporter au
delà des Alpes des dépouilles opimes.
Léon IX se confiait dans la supériorité du nombre : il comptait dans son
armée au moins sept mille combattants, à pied et à cheval; les Normands
ne comptaient que trois mille cavaliers; mais c'étaient, selon l'expression de
Gregorovius, autant de démons incarnés, de vrais Centaures, prompts à
l'attaque et redoutables même en fuyant. A leur tête se trouvaient trois
braves: Richard, comte d'Averse, le comte Humfroi et Robert Guiscard,
l'Ulysse de ces temps héroïques.
La bataille qui allait se livrer entre Civitella et Dragonara, le 18 juin
— 180 —
1053, est l'un des faits guerriers les plus remarquables dans les annales
de la papauté temporelle; involontairement on est porté à faire un paral-
lèle entre cette rencontre et le combat de Castelfidardo.
Le pape, du haut des créneaux de Civitella, bénit son armée, ne doutant
pas un seul instant de la victoire.
Les chevaliers et les soldats allemands, couverts de leurs boucliers et
armés de leurs glaives, repoussèrent facilement l'attaque de Humfroi, de
ses tireurs d'arc et de ses lanciers; mais les troupes italiennes se déban-
dèrent à la première attaque de Richard d'Averse; alors Robert Guiscard
se mit à entamer immédiatement le flanc des Allemands. Ces braves se
formèrent en carré et tombèrent un à un, jusqu'au dernier. C'est un des
sacrifices les plus héroïques de l'histoire du moyen âge.
Les vainqueurs se précipitèrent contre les murs de Civitella; ils voulaient
s'emparer du pape. Le faubourg- de Civitella est en feu; l'assaut est donné
contre les remparts. Dans l'intérieur de la petite forteresse, les bourgeois,
mobiles et infidèles, se mettent à piller les bagages pontificaux et à chasser
le pape lui-même hors des murs.
Dans cette extrémité, le pape envoie des négociateurs vers les chefs nor-
mands, et se met à couvert sous le boucher invisible de l'apôlre saint Pierre
il échange le rôle d'un chef d'armée inhabile et malheureux contre celui
du bon berger*. Les guerriers victorieux et sauvages sont appi'ivoisés,
miraculeusement convertis; ils s'agenouillent devant leurs prisonniers
baisent humblement les sandales apostohques, enveloppent le pape de leur
escadron chevaleresque et promettent de lui faire escorte fidèle jusqu'à
Bénévent, au besoin jusqu'à Rome.
Pendant deux jours, Léon IX resta plongé dans une douleur profonde
et dans la prière pour l'âme des combattants qui venaient de se sacrifier
pour l'indépendance temporelle du saint-siége. Puis il les fit enterrer so-
lennellement. L'aspect du champ de bataille de Dragonara brisa son cœur
sympathique : il ne se releva plus de ce coup funeste, et, sans aucun doute,
dans le silence des nuits d'insomnie qu'il passait maintenant, il devait s'a-
dresser quelque reproche d'avoir laissé sacrifier le sang- des fidèles pour
une cause poHtique. Il déchna visiblement; sa carrière était terminée.
Lorsque, sous l'escorte des chevaliers vainqueurs, il fit son entrée à
Bénévent, les sanglots de la population répondirent aux larmes qu'il ver-
sait lui-même. La nouvelle de la défaite pontificale s'était répandue avec
une effrayante rapidité dans toute l'Europe chrétienne; le blâme et la cri-
tique ne firent pas défaut. Bruno de Segni, Saint-Romuald, le chroniqueur
I. (iregoroviiis.
— 181 —
d'Amalfi, Saint-Pierre Damiani lui-même sont unanimes dans le jugement
qu'ils portent sur cette campagne contre les Normands; car, à cette époque,
I idée du domaine temporel du pape n'avait pas encore atteint le degré de
certitude qu'on semble lui accorder de nos jours, où des hommes d'Elat
protestants se sont rangés au nombre de ses défenseurs.
Les Normands venaient d'obtenir, par leur éclatant succès, un litre qui
légalisait .leurs conquêtes. Le pape leva l'interdit qui pesait sur eux; il pro-
mit très-probablement de reconnaître leur conquête; et les prétentions de
la papauté, d'exercer une suzeraineté complète sur le royaume de Naples,
datent de cette défaite de Dragonara.
De quelques soins que les chefs normands entourassent le pape, il resta
inconsolable'. Une seule pensée l'obsédait encore, celle d'avoir trop vite
cédé à la force et de n'être pas mort à côté ou au milieu de ses fidèles
défenseurs. De sa prison splendide de Bénévent, il envoya les cardinaux
Frédéric de Touraine et Humbert à Constantinople, avec mission de som-
mer l'empereur Constantin Monomaque de se concerter avec Henri III ,
empereur d'Allemagne, à l'effet de reconquérir au profit derÉgUse l'Italie
méridionale. Était-ce une impulsion spontanée, ou suivait-il, en cela, les
conseils de Hildebrand? Qui peut le savoir, à la distance où nous sommes
de la catastrophe de Dragonara, et dans la pénurie de documents précis.
Nous possédons toutefois la lettre du pape à l'empereur de Byzance; pour
le pousser à intervenir en Italie, il s'appuie surtout sur la donation de
Constantin le Grand, il ajoute : « Tu juxta nominis lui elymologiam con-
stanter adjuva recuperare , retinere et defendere Fais honneur à ton
nom, aide-nous vaillamment à reconquérir, à conserver et à défendre
notre héritage.»
Lorsqu'il écrivait cette épître pressante, ses jours étaient déjà comptés;
vers les derniers temps de son séjour à Bénévent, il ne prenait plus de
nourriture; une fois encore, se ranimant, il y célébra la messe en public.
Puis, il se mit en route pour Rome. C'était le 12 mars 1054, un peu plus
de huit mois après la fatale bataille. Son état d'épuisement le força de
s'arrêter douze jours à Capoue. ïlumfroi l'avait accompagné jusque dans
cette ville; ici, le pape le congédia ainsi que son escorte normande. Il ar-
riva à Saint-Jean-de-Lalran, dans la société du fidèle abbé du Mont-Cassin.
De plus en plus brisé, il sentit approcher sa fin et se fit transporter à
Saint-Pierre, à la date du 13 avril 1054. A peine les habitants de Rome
eurent-ils appris cette nouvelle, qu'une partie de cette hideuse populace,
1. Les Annales de Lambert porleut : ctinctos dies quibus supervixit tantœ calamiiaii in
luctu et mœrore egit.
— 182 —
liabituée depuis de longues années au désordre des rues et au carnage, se
précipita vers le palais de Latran, avec l'intention de le piller; puis elle
s'arrêta tout à coup, frappée d'une mystérieuse terreur, aux pieds des esca-
liers. La sainte figure de Léon IX protégeait, invisible, ce séjour d'une
longue série de ses prédécesseurs.
En attendant, le pape luttait avec la mort. 11 avait fait placer, près de son
lit de repos, le sarcophage qui devait recevoir sa dépouille mortelle; ap-
puyé sur ses serviteurs, il s'approcha de ce dernier asile, et dit aux assis-
tants à haute et intelhgible voix : « Voyez, mes frères, combien est misé-
rable et transitoire la grandeur humaine! Que chacun de vous, s'il est
destiné à jouir des honneurs de ce monde, me prenne pour exemple!
Voici que, élevé du néant jusqu'au faîte des grandeurs humaines, je suis
de nouveau réduit à néant; la cellule que j'ai habitée comme moine, je la
letrouve dans l'étroitesse de ce cercueil. Tout à l'heure j'y serai couché,
recouvert, au lieu d'ornements, du fil de l'araignée; en ce moment déjà ,
je suis une pâture préparée pour les vers.» — Puis il bénit le sarcophage,
en prononçant encore des paroles (|ui arrachèrent des sanglots à toute
l'assemblée. Pendant cette lente agonie de quatre à cinq jours, on l'en-
tendit plusieurs fois faire sa prière en allemand ; il demandait à Dieu de
l'enlever rapidement, si telle était sa volonté, ou de le guérir par un
miracle.
Léon IX était alors dans sa cinquante-deuxième année. Un plus long
avenir lui semblait garanti; mais les soucis du pouvoir spirituel et temporel
usent vite. — Le 19 avril, de bon matin, sentant décidément approcher
sa fin, il se fit porter vers l'autel de Saint-Pierre, se jeta contre terre, pria
en silence pendant une heure , prit le sacrement des mourants , et puis se
recoucha pour s'endormir paisiblement du dernier sommeil. C'était la neu-
vième heure du jour.
La cloche de Saint-Pierre commença à tinter sans qu'une main d'homme
l'eût ébranlée, à ce que rapporte la tradition contemporaine. •
L'ensevelissement se fit le jour même, selon la volonté du pape. Des
guérisons nombreuses s'opérèrent sur sa tombe, et l'Eglise reconnaissante
couroima de l'auréole de la sainteté le front du pieux réformateur.
Victrix Roma dolet nono viduata Leone ,
Ex muUis talent vix habitura patrem. '
Des églises furent élevées en son honneur : à Toul, dont il avait admi-
nistré le diocèse pendant vingt-deux ans; à Bénévent, qu'il avait conquis
1. Rünie victorieuse s'afflige d'ôtre veuve de Léon IX , car dans une longue suite de pon-
tifes , elle retrouvera difficilement un père qui lui ressemble
— 183 —
pour le saint-siége. Les témoignages contemporains exaltèrent la bonté de
son cœur, sa pureté, son abnégation, son humilité, sa soumission aux
décrets divins, son désir de répandre le règne de Dieu sur terre. Les papes
Victor 111 et Grégoire Vil, Lanfranc, le primat d'Angleterre, Bruno, évêque
de Segni, se firent les organes éloquents de leur siècle. Pour Léon IX, la
canonisation n'était que le verdict d'un jury d'élite, qui lui-même avait
puisé son jugement dans un écho de la voix pubhque.
Je n'ai point cherché à effacer ni à dissimuler l'ombre que l'expédition
contre les Normands jette sur cette noble figure. Mais ses qualités et ses
vertus évangéliques rayonnent d'un éclat tel qu'il demeure, en tout état
de cause, l'un des ornements du saint-siége. L'Alsace revendique avec
fierté cette gloire de l'Eghse; les noms de Hohenbourg et de sainte Odile
ne sont point prononcés sans que le souvenir de Léon IX s'y rattache. Ce
pape a délivré les lettres patentes qui constatent et consacrent les origines
du pittoresque monastère, de cet asile placé au-dessus des nuages et des
bruits de la terre. 11 a pour ainsi dire frayé le chemin que devait suivre un
siècle plus tard Frédéric de Hohenstauffen, et que devaient prendre pen-
dant huit siècles après lui, des princes, des prélats, des hommes illustres
et des pèlerins obscurs, femmes, enfants et vieillards, qui allaient cher-
cher, à travers ces forêts de sapin , dans l'air pur des montagnes et dans
la chapelle sépulcrale de la sainte abbesse, des secours spirituels et maté-
riels, la santé de l'âme et du corps, le charme des souvenirs historiques
et légendaires.' L. Spach.
1. J'ai fait usage pour cette esquisse, indépendamment des chartes, relatives à saint
Léon, et éditées par Schœpflin : de i'Hisioù-e d'Alsace, par Strobel , t. 1", p. 274 et sui-
vantes; je lui dois la traduction de la trêve de Dieu; de VHisloire des saints d' Alsace , par
l'abbé Hunckler; de l'ouvrage capital de Constantin Hœfler : Les Papes allemands, 2* sec-
tion : Léon IX, Victor II, Etienne IX, Nicolas IL Ratisbonne, 1839; de Gregorovius, His-
toire de la ville de Rome, au moyen âge, vol. IV, p. 71 ef suivantes. Cet auteur protestant se
distingue par son impartialité , l'élévation de ses vues , ses aperçus ingénieux , sa diction
à la fois simple et éloquente.
Constantin Hœfler, en traitant l'histoire spéciale de Léon IX, pouvait se donner libre
carrière; il a usé d'un nombre infini de chartes, que Gregorovius a probablement négli-
gées de propos délibéré , carie pontificat de Léon IX n'est pour lui qu'un épisode très-
court , dans un ouvrage qui embrasse plus de dix siècles.
Ces deux écrivains se complètent; l'auteur catholique est plus détaillé , plus précis, plus
enthousiaste; l'auteur protestant plus incisif, plus entraînant; tous les deux professent
pour ce saint pontife une admiration sympathique qui se transmet naturellement au
lecteur.
LA MARCHE D'AOUTLÉE
La Marche cCAqnilée esl une expression donl je n'ai trouvé d'explication
nulle part et (jue je voudrais tâcher d'éclaircir. «La Marche de Marmou-
tier, a dit Schœpflin, portait aussi le nom de Marca Aquileiensis; mais
malgré toutes mes recherches, je n'ai pu savoir pourquoi. Les chartes de
cette abbaye, les manuscrits, la tradition n'ont rien pu m'apprendre à ce
sujet. Le révéï'endissime abbé Placide Schweighaîuser, qui gouverne cet
étabhssement avec tant de sagesse et de prudence, m'a avoué n'en rien
savoir.» Ravenèz accompagne cet ahnéa de la note suivante :
«Les Traditiones possessionesque Wizenburgenses publiées à Spire, en
4842, par Ch. Zeuss, nous font connaître un pagîis Aculinse, Aquilense,
Achilgoîve, qui tirait son nom de la rivière Aquila. Une charte du 22 avril
713, p. 193, dit : a Hoc est in pago Actdinse super pluviolas Aquilas infra
fine Druclegisomarca et in marca Bettune suh ambas ripas Aquilas. »
Une autre du 15 mai 755, p. 212, porte : « In loco nuncupante Bochil-
dingaSy in pago Aquilense, super fluvio Aquila.)')
Enfin, une troisième de l'année 846, p. 261, porte : « Quod trado in
Gisalvingun quod est in pago Achilgouue predium meum. » Je vais es-
sayer d'établir, au sujet de ce pagus, une hypothèse de laquelle on
pourrait déduire l'origine du nom ô'Aquileia. La villa Gisalvingun dont
il vient d'être parlé est dite située in pago Achilgoîve, mais dans d'autres
chartes, Gisolvinga, Gisalolfincomarca est dite située in pago Saroinse;
voy. les n°' 273, 206, 208, 209, 216, 249. Ce pagus, qui tirait son nom
de la Sarre, était limitrophe, vers le sud, avec la Marche de Marmoutier.
Or, si le Gisalvingun des chartes de Wissembourg se trouve tantôt dans le
pagus Saroinsis, tantôt dans la Marche Aqiiileia, on peut admettre avec
quelque apparence de raison que cette dernière est la même que la Marche
de Marmoutier. Son nom à'Aquileia dériverait ainsi d'une des petites ri-
vières qui coulent sur son territoire.»
Ravenèz s'en est tenu là, laissant à d'autres le soin de pousser plus loin
les conjectures; il n'a pas cherché à savoir quelle était la petite rivière en
question, et il n'a pas déterminé le territoire de la Marche, deux opéra-
tions auxquelles il faut procéder.
— 185 —
Le territoire de la Marche est censé détaillé dans un diplôme de
Thierry IV, confirmatif de donations de Childebert If, Théodebert II, Cio-
taire II, Dagobert II, Sigebert II et Dagobert III; la charte concède à Mau-
rns : « tout ce que Léobard avait occupé dans le désert comme terrain de
culture ou comme lieu d'habitation, depuis le petit pont de Scliweinheim
jusqu'à la roule pubhque de Saverne et jusqu'à celle de Marlenheim, en-
suite depuis la source Cisternata et les environs jusqu'au ruisseau de
Gunsinen, et de là jusqu'au mont Cuoberg, à travers une frênaie, jusqu'au
lieu dit Aschowa, et ainsi le long de la Zorn jusqu'à la croix de pierre, et
enfin au ruisseau de Maur. »
Le fons Cisternata, c'est, d'après Grandidier, le Griesbach qui se jette
dans la Zinsel, le Gunsmus rivus, c'est la Zinsel qui se jette dans la Zorn
près de Steinbourg, et le iMaiiri rivus est un petit ruisseau qui coule près
de l'ancienne abbaye et qu'on appelle aujourd'hui Muerbächlein.
Mais le territoire de la Marche a varié en étendue. Ainsi, une charte de
1120 nous apprend que le mont Sindenus ou Sindelsberg se trouve infra
Marcham sen provinciam; une autre de 1128, que l'abbaye possède trois
manses à Hambach et deux à Adamswiller, ainsi que cinq à Dhann près
Phalshourg.
Avant 1150, la Marche comprenait le château de Lutzelbourg, en échange
duquel l'abbaye reçut le prieuré de Saint-Quirin, et en 1170, l'évêque Ro-
dolphe, voulant fortifier davantage le château deHaut-Barr, acquit, par voie
d'échange, de l'abbé de Marmoutier, un rocher situé au midi du château.
Ce n'est pas tout : nous possédons un état des biens de Marmoutier
dressé vers 1120; cet état comprend six sortes de biens : V les villages qui
forment la Marche : villœ quœ vocantur Moresmarcha ; 2° les biens en de-
hors de la Marche, mais dans le pagiis, extra marcJtam in pago ; S° les
biens allant du pagiis Saroinsis à la cellule de Saint-Quirin; 4° les droits
et servitudes anciennement institués en l'honneur de saint Martin; 5° les
aumônes concédées aux moines de l'abbaye; 6" les cens que les minis-
tériaux ne recueillent pas.
Nous nous retrouvons ainsi en présence de ce pagus Saroinsis que Ra-
venèz, dans sa note, associe à un pagus Aguilensis. Les villages du pagus
Saroinsis, appartenant à Marmoutiei', portent des noms qui demandent à
être traduits: Dotenvilarc, Ottwillei'; Erlenwinivilare, Eschwiller; Raper-
tivillare, Reipertswiller; Sidelinesdorf, Siltzheim; Bucilonisvilla , Biist;
Vilderadingas , Vœllerdingen; Ratraminivilare, Ratzwiller; Duristoldas,
Düi'stel; Suliclienvilare, Siewiller; Gundelingas, Gungwiller; Widerohii-
villa, Weiterswiller.
— 186 —
D'autre part, la note de Ravenèz renferme, comme faisant partie du
pagus Aquilensis, un Dructegisomarca , Drulingen; et un Betlune, Bütten;
la traduction de Bochildingas et de Gisalvlngun nous échappe. De même
que le pagus Saroinsis est le pagus de la Sarre, le pagus Aquilensis est
le -pagus de VAquila, c'est-à-dire de l'Eichel. Deux ruisseaux, dont l'un sort
de l'étang de Ilaslach dans les forêts de La Petite-Pierre, et l'autre de l'é-
tang de Frolimiihl, se joignent à Tieffenbach (pluviolas Aquilas , atnbas
ripas Aquilas) et forment l'Eichel, qui traverse les bans d'Adamswiller,
Piexingen, Mackwiller, liambach, Diemeringen, Lorentzen, Vœllerdingen ,
Œrmingen, et se jette dans la Sarre au-dessous de celte dernière com-
mune près de la limite du département de la Moselle. Les villages que
Marmoutier possédait, au douzième siècle, dans le pagus Saroinsis, sont
donc la plupart tout aussi bien situés dans le pagus Aquilensis, car ils font
partie de la vallée de l'Eichel. VAquila, l'Eichel, serait-elle donc la rivièj-e
qui aurait servi à former le nom à'Aquileiaf Mais remarquons ici que nous
avons parlé d'un pagus Aquilensis et non d'une marca Aquileia, de plus
que la charte de 1120, où il est question du pagus Saroinsis, commence
ainsi : Hœc charta antiquilus est in Aquileia Maurimonasterio fada. Istœ
sunt villw quœ vocantur Moresmarclia. Ti'aduction littérale : cette charte a
été anciennement dressée dans Aquilée-Marmoutier, voici les villages qui
forment la Marche de Maur. Il ne faut pas traduire : Marmoutier dans la
Marche d'Aquilée, en sous-entendant marca et en faisant d' Aquileia un
adjectif, il faut voir ici une expression double dont le second substantif
forme apposition au premier, et quant à la Marche, elle s'appelle Marche
de Maur tout simplement.
La même charte dit encore: Ad Aquileiam Maurimonasterium , apiid
Aquileiam Mcmrimonasteriuni , apud Aquileiam Maurivillam. Enfin, une
autre de 1144 dit : Jura quœdam hujus loci beati Martini Aquileiœ Mau-
rimonasterii: les droits d'Aquilée-Marmoutier de Saint-Martin. Aquileia est
donc le nom primitif de Marmoutier, le nom que portait le terrain où s'est
élevé Marmoutier avant que Maur ne vînt s'y étabhr (740). Mais ce n'est
pas là une réponse à l'hypothèse de Ravenèz faisant dériver Aquileia d'une
des petites rivières qui coulent sur le territoire de la Marche.
Nous avons vu dans la charte de 724 la mention d'un Mauri riuus qui
coule près de l'abbaye et qu'on appelle par corruption Muerbächlein. Ce
ruisseau n'a pas pu s'appeler ruisseau de Maur avant l'arrivée de Maur dans
la contrée, mais il avait toujours un nom, au moins le nom simple ou qua-
hfié de l'élément même. Eh bien! cherchons dans le celtique, nous trou-
verons que e signifie étroit, et cuit ruisseau; ecuil, latinisé, a fait aquila;
- 187 —
germanisé, eichet; et francisé, aigle, aiglelte (rAigletle, près de Laon ,
voy. Mabillon, De re dipl. 576). De même que Marmoutier s'est appelé
Aquilée avant l'arrivée de Maur et de Léobard, de même le ruisseau de
Maur a dû se nommer Aquila, et d'Aquila dérivent les deux premières
syllabes d'Aquileia; quant à leia, c'est la forme germano-latinisée du cel-
tique lie, place, endroit, Aquileia est donc la place, l'endroit près du petit
~ ruisseau. Un exemple de formation tout analogue se présente dans Marleia
(Marlenheim), dérivé de mcnvr, grand, et lie, endroit. Le suffixe eia n'a
rien de latin, mais il garde la trace de l'articulation mouillée lie.
Nous pouvons étendre le bénéfice de ces observations à la ville d'Aqui-
leia, en Illyrie, située à 6 kilomètres S.-O. des lagunes {ecuil) de Marano.
L'illyrie fut ainsi appelée des Pélasges Illyres (voy. Appian. Illyr., II,
780), qui étaient de race celtique, et Aquileia, avant d'être colonie ro-
maine , fut la capitale des Garni, dont le nom correspond au gaébque
carnanach (montagnard).
Si nous retournons en Alsace, nous ferons encore observer que Mar-
moutier n'est pas la seule localité qui a échangé son ancien nom, son nom
profane ou naturel contre celui de quelque pieux personnage: Doroangus
(la maison grande) est devenu Saint-Amarin, le monastère du Confluent
(Münster) est devenu celui de Saint-Grégoire; par contre, certaines colo-
nies, après avoir porté un nom de personnes, se sont baptisées du cours
d'eau voisin : le Vivier des Pèlerins, Vivarius Peregrinorum, s'effaça défi-
nitivement devant Murbacli.
Ajoutons enfin que saint Maur et ses compagnons, les héritiers des tra-
ditions irlandaises ou gaéliques, devaient attacher quelque prix à la con-
servation de termes qui leur prouvaient leurs liens avec des ancêtres peut-
être bien éloignés et j-amenaient en eux le souvenir de l'antique patrie :
car l'ascétisme, la vie extatique a beau vous enlacer de ses bras souples et
puissants, il est des jours où l'homme le plus mystique fait un retour al-
langui vers la franche nature, et il suffît alors souvent d'un mot, d'un nom
pour le fortifier, sinon pour le guérir.
P. RiSTELHUBER.
•>Ko
NOTIGE
SUR LES CIMETIÈRES GAULOIS ET GERMANIQUES
DÉCOUVERTS DANS LES ENVIRONS DE STRASBOURG.
Après avoir étudié dans mes précédentes notices^ les traces de l'occupa-
tion romaine en Alsace, je vais essayer de pénétrer dans l'obscurité qui
enveloppe encore l'histoire de notre province pendant les années qui
virent s'écrouler l'empire d'Occident.
PREMIÈRE PARTIE.
Découvertes archéologiques.
L'exploration des cimetières de Lorentzen et de Diemeringen, dont j'ai
rendu compte dans un récent mémoire"^, a pu jeter quelque lumière sur
l'établissement d'une population germanique qui se serait étendue des rives
du Rhin jusque sur le versant occidental des Vosges; à ce premier jalon
planté sur les bords de la Sarre, je viens en ajouter un second placé au
milieu de la fertile plaine qui entoure Strasbourg.
Le fragment de carte dessiné sur la planche lithographiée ci-jointe donne
l'indication de ces découvertes que je classerai en deux catégories' bien
distinctes, savoir:
1''^ Catégorie. — Sépultures gauloises.
Squelettes enfouis dans le sol.
(Bracelets et anneaux en bronze, poteries.)
A l'exception d'un cimetière considérable, découvert en 1862 à Obernai,
et décrit par noire collègue M. Levrault*, les sépultures de cette catégorie
sont rares dans la basse Alsace; elles ne renferment pas d'armes, on n'y
1. Notice sur les voies romaines du Bas-Rliin. I8G1 , Bulletin, t. IV. — Notice sur l'en-
ceinte d'Argentoratum. 1861 , Bullecin, t. IV. — Notice sur les monuments gallo-romains
des environs de Saverne. 1862, Bulletin, 1. 1", 2'^ série. -
2. Notice sur cfuelques découvertes archéologiques effectuées dans les cantons de Saar-
Union et de Druliugen (Lorraine allemande). 1864, Bulletin, t. II, 2" série.
3. Entre les deux époques caractérisées par ces monuments doit se placer la période
gallo-romaine représentée par les nombreuses sépultures par incinération, dont j'ai fait
mention dans ma notice sur les voies romaines.
4. Découvertes de sépultures antiques à Obernai, par M. L. Levrault, 1804, Bulletin,
t. II , 2* série.
— 189 —
trouve généralement que des anneaux et des bracelets en bronze et quel-
ques poteries.
La découverte la mieux caractérisée est celle de Lingolsheim ', où l'on
a trouvé, en 18G3, un squelette bien conservé ayant à chaque membre
deux anneaux en bronze et deux autres plus grands autour du cou, en
tout dix cercles de même facture, qui ont été mis sous nos yeux par
notre collègue si regretté, M. le professeur Jung.
Des anneaux semblables ont été trouvés près de Bischolfsheim^ i^V de
Roshehn, dans les déblais exécutés pour la construction des chemins de
fer vicinaux.
A Eschau, un grand collier en bronze, découvert en 1863, rappelle
exactement le beau collier incrusté d'ambre des tumulus de Heidolsheim ,
décrits par M. de Hing.'
Si l'on y ajoute un kelt en pierre, trouvé il y a plusieurs années près
d'Obernai, et mentionné par M. Levrault, on aura une idée sommaire des
sépultures de cette catégorie qui appartiennent probablement à des
époques diverses, dont la limite la plus éloignée est indiquée par le kelt de
pierre, et la plus rapprochée par les poteries de forme romaine du cime-
tière d'Obernai,
Dans aucune de ces sépultures n'apparaissent les caractères bien connus
des tombes germaniques : on y voit beaucoup d'analogie avec les tertres
celtiques* de Heidolsheim , de Schlestadt et de la forêt de Brumath qui ont
fait l'objet d'une élude spéciale de la part de M. de Ring, et dont l'origine
paraît se rapporter aux premiers temps de l'occupation romaine ou à
l'époque qui la précède immédiatement.
2° Catégorie. — Sépultures germaniques.
Tombes formées par des dalles de grés. — Tombes creusées dans l'argile.
(Armes oi/er, bronze , bijoux en or, argent et pierres précieuses , poteries.)
Tombes en dalles de grès.
Ces tombes dont les parois et le couvercle sont en dalles, forment
divers cimetières qui s'étendent de Molsheim vers Brumcdh. Ceux de Mols-
lieim, de Sonllz-les-Bains, û'Odrakhehn et de Wasselonne sont pour
ainsi dire groupés autour de Kirchheim et de Marlenheim, lieux célèbres
1. Séance du coniitc chi 9 mars 1863. Bulletin, i. II, '2*^ série.
1. Séance du comité du r''juin 1863. Ces anneaux ont été donnés à la Société par le
service des chemins vicinaux.
3. Bulletin de la Société, t. II, V^ série.
4. Bulletin de la Société . t. I , Il , r*" série.
— \m —
dans l'histoire d'Alsace par le séjour des rois d'Austrasie; ils ont été décou-
verts sous mes yeux en 1862 et 1863, je puis donc en donner une exacte
description.
L'orientation des lombes est constante de l'ouest à l'est. A l'exception
du cimetière de Wasselonne, où leur foime est rectangulaire, elles pré-
sentent généralement une diminution de largeur aux pieds.
Outre un grand nombre de couteaux, de sabres en fer à un tranchant
(scramasaxe), de pointes de flèches en fer, on y a trouvé des fibules, des
boucles en bronze d'un travail délicat, des pâtes émaillées percées d'un
trou et diverses poteries.
Je citerai parmi les objets les plus curieux: A Odralzlieim\ une belle
fibule en argent, une croix en or, un bracelet en bronze et des monnaies
de Constantin. La fibule présente à son centre une demi-sphère d'où
partent des rayons, qui partagent toute la surface en huit secteurs, au
miheu desquels sont enchâssées des pierres bleues et rouges qu'entourent
de délicates torsades en filigranes d'argent.^ Ce bijou, qui rappelle l'art de
Byzance, paraît dater du cinquième siècle; la croix en or est sans doute
moins ancienne, elle a été trouvée en dehors des tombes.
A Molsheim^^ une jolie boucle en bronze délicatement travaillée. (Voir la
planche lithographiée ci-jointe.)
A Soullz-les- Bains, rien de remarquable que les tombes elles-mêmes
placées sur le penchant d'un coteau qui a été coupé à pic, de sorte que
leur section transversale reste encore visible.
A Wasselonne , l'organisafion du cimetière offre des particularités singu-
lières. Placées dans le fond de la vallée, les tombes reposent sur un solide
béton de 0'",3Ü d'épaisseur, qui s'étend à l'entour, en formant une bande
d'environ 15 mètres de largeur. Le petit nombre de squelettes qui ont été
mis au jour se trouvaient dans des tombes en dalles complètement rectan-
gulaires; on y a recueilli un anneau en bronze, quelques fragments de
1. Les découvertes d'Odralzlieira et de Wasselonne sont dues à M. Kast, agent voyer, qui
a lait don à la Société de la fibule en arg-ent et de la croix en or; le bracelet en bronze fait
partie de la collection de M. Piblingre de \\'asselonne, qui a bien voulu le mettre à ma dis-
position pour le reproduire sur la planche ci-jointe.
2. D'après l'analyse faite par un habile chimiste, M. Kopp de Saverne, les pierres bleues
sont des verres à base de soude colorés probablement au cobalt, et le mastic placé entre la
plaque d'argent et celle de cuivre est formé par une terre alumineuse mélangée avec une
matière organique.
Voir la planche lithographiée ci-jointe ainsi que le procès-verbal delà séance du G juillet
I8G3 et la planche chromo-lithographique qui y est annexée.
3. Les découvertes de Molsheim et de SouItz-lcs-Bains sont dues à M. Kopp, agent voyer.
La Société possède plusieurs sabres , boucles et poteries qui en proviennent, et qui lui ont
été donnés par MM. Audéoud, maire d'Avolsheim , et Camille Vernett, de Molsheim.
— 191 —
même métal, un grand morceau d'ambre percé d'un trou et une monnaie
en bronze de Trajan, également percée. (Voir la planche lithograpbiée ci-
jointe.)
Le cimetière de Wasselonne touche la voie de la vallée de la Mossig , le
long de laquelle ont été trouvées des urnes remplies de cendres et d'osse-
ments brûlés, des tuiles à rebord et des fragments de belles poteries
romaines.
Ici s'arrête la description des tombes découvertes sous mes yeux. Quant
à celles de Dorlislieim , Fessenhehn , Marlevhehn, Hùrtighem , Kilitolft-
heim, Neiigartheim , Avenheim, Buringen, Gimbrett et Brv.mntli, qui
étaient formées comme les précédentes' par des dalles de grès, je ne les
connais que par les renseignements que j'ai recueillis, mais l'examen que
j'ai fait des armes et des divers objets qui en proviennent me permettent
de les classer dans la même catégorie en leur attribuant une commune
origine.
Tombes creusées dans l'argile sans entourage de pierres.
Ces sépultures sont entièrement semblables aux précédentes en ce qui
concerne leur orientation, les armes et les objets divers qu'elles renfer-
ment, elles ont été rencontrées à Hochfelden , Mihichhausen , Konigshofen
et Gerslheim.
A Hochfelden, les tombes sont creusées dans le banc d'argile qui re-
couvre le calcaire basique, exploité pour la confection de la chaux hydrau-
lique; ce cimetière a fourni depuis plusieurs années, en grande abondance,
des vases en verre et en terre finement travaillés, des boucles en bronze,
des pâtes émaillées et des sabres en fer de toutes dimensions; le musée de
Saverne possède un de ces sabres deO'",00 de longueur, a deux tranchants
{spatha)\ donné par M. le docteur Schnœringer de Brumath, dont le ca-
binet est si riche en antiquités romaines et germaniques; c'est à cet ar-
chéologue qu'appartient une plaque en bronze d'une ornementation bizarre
qui a été trouvée sous le crâne d'un squelette^ et où l'on croit voir les
têtes de quatre serpents se détacher d'un tronc commun. (Voir la planche
lithograpbiée ci-jointe.)
Münchhausen, situé en face d'Hoclifelden sur l'autre rive de la Zorn, a
t. Cette arme (spafka) appartenait à la cavalerie franque et alémane, qui était souvent
employée comme auxiliaire par les généraux romains. Des épées semblables ont été trou-
vées dans les sépultures alémaniques de Nordendorf (Bavière).
2. On remarque sur ce crâne, que possède M. Schnœringer, la trace verdàtre produite
par le contact du bronze.
~ 192 ~
fourni des objets semblables; le musée de la Société possède de beaux fers
de lance qui en proviennenl.'
GerstheiïH : on a trouvé dans cette localité plusieurs sépultures dont je
n'ai pu constater le nombre ni l'orientation. Cette découverte, qui est due
au zèle de M. Niklès de Benfeld, a augmenté la collection de la Société de
plusieurs objets fort intéressants, entre autres une fibule en or et wnebulla
en cuivie doré.^ La fibule est formée d'une plaque d'or, séparée d'une
seconde plaque en cuivre rouge par une couche de mastic, le tout main-
tenu par six clous rivés. Ce bijou, qui est orné de grenats' et de filigranes
d'or, offre beaucoup d'analogie avec la fibule d'argent d'Odratzheim et
paraît dater, comme celle-ci, du cinquième siècle: Les musées d'Allemagne
possèdent des bijoux semblables trouvés dans des tombes germaniques.
(Voir la fibule n°7i8 du musée de Stuttgard.)
La bulla est une boule creuse en cuivre doré, dont les deux hémisphères
s'ouvrent à charnière et se ferment par un arrêt mobile; elle était sans
doute destinée, comme celles que les Romains suspendaient au cou de
leurs enfants, à renfermer des talismans préservatifs de tous maléfices.'^
Une bulla semblable en cuivre a été trouvée dans le cimetière germa-
nique de Fr'idolßny an der Salza, dans la Bavière supérieure, elle a été
découverte sur la poitrine d'un squelette et renfermait un bronze de Max-
Hercule.
KönigsJtofen [Begis uilla des rois francs), situé aux portes de Stras-
bourg. Ce cimetière que j'ai visité avec notre savant collègue feu le profes-
seur Jung, n'offrait aucune régularité dans la disposition des sépultures;
celte confusion tenait peut-être à la précipitation avec laquelle les inhuma-
tions avaient eu heu; quoi qu'il en soit, on y a trouvé des statuettes en
1. Ces fers de lauce ont été donnés à la Société par M. le docteur Duruy, soiis-direc-
fenr de l'école de médecine militaire.
2. Voir le procès - verbal de la séance du comité du 4 mai 1863 et la planche chromo-
lithographique.
3. Les anciens ont connu les principales variétés de grenat , telles que leur ntbis uirlhayi-
)iois et Vescarboucle qui brillait dans l'obscurité comme un charbon , de là le nom de cur-
hiuiculus (Pline). « Incidit in oculos el splendit instar carbunculi. » (l'et. , Sat. 35).
4. D'après Pline (XXXllI, I), cet usage remonterait h Tarquin l'Ancien. 11 paraît que ces
bulla étaient suspendues au cou des dieux lares , lorsque les enfants prenaient la toge :
" hiiUaque succinctis Laribtis donuta pepend/l. » (Pet. , Sut.) Il y a plusieurs exemples de
statues d'autres divinités qui étaient décorées de bulles d'or. (Voir une inscription de Gruter
relative à une bullu consacrée à Junon.jMacrobc fait mention de la bulle d'or des triompha-
teurs ; «Bulla gestamen erat IriuDiphantlmn... »
Les bulla creuses sont très-rares dans les musées de France. Celles que l'on a trouvées
jusqu'à présent dans les tombeaux francs étaient généralement en or on argent massifs ,
recouvertes de dessins et ornées de grenats; elles faisaient sans doute partie des cuillers.
( Voir les ouvrages de l'abbé Cochet, notamment le lombeau de Cliilpéric, p. 333.)
— 198 —
bronze, des boucles, des colliers d'ambre, et une foule de sabres en fer
(scramasaxe), qui ont été mis sous les yeux du comité par M. le professeur
Jung dans la séance du 2 février 1863.
D'après cette description on ne peut méconnaître, dans toutes les sépul-
tures de la 2^ catégorie, les caractères distinctifs des races germaniques
tels qu'ils se présentent dans les tombes alémaniques, burgondes, fran-
ques et saxonnes, qui ont été mises au jour en Allemagne, en France, en
Suisse , en Belgique et en Angleterre.
L'étude des sépultures germaniques a fait, depuis quelques années, des
progrès tels qu'il n'est plus possible aujourd'hui de les confondre avec
celles des autres peuples. Des points de comparaison incontestables nous
sont donc fournis, savoir :
En France', dans les cimetières francs de la Normandie et de la Lor-
raine, et dans les sépultures burgondes de la Côte-d'Or;
En Suisse^ dans les tombes de Bel-Air;
En Belgique', dans celles de Tombois, près de Namur.
En Allemagne*, dans les cimetières francs de Sehen, dans les sépultures
alémaniques de Fridolßng et de Nordendorf en Bavière , du mont Lupfen
de l'ancienne Souabe, et dans celles découvertes près de Fribourg en
Brisgau, qui offrent une grande analogie avec les cimetières alsaciens.
1. France : Normandie souterraine. Sépultures gauloises, etc., par M. l'abbé Cochet. —
Cimetière de Gharnay (Saône-et-Loire), par M. H. Baudot. — Cimetière de Faréberswiller (Mo-
selle), par M. Bufresne. — Cimetière de Vendliuile, près de Saint-Quentin, par M. Gomart.
— Tombeaux du Haut-de-Saussy, par M. Bottin (Meurtbe). — Bulletin monumetital , de
M. de Caumont, — Mémoires des antiquaires de France, de Normandie et des sociétés
d'émulation des Vosges et de Montbéliard etc. etc.
2. Suisse : Description des tombeaux de Bel-Air, par M. Troyon. — Recueil d'antiquités
suisses, par M. de Bonstetten.
3. Belgique : Cimetières de l'époque franque aux lieux dits le Tombois et les minières,
près de Namur. {Annales de la Société archéologique de Namttr.)
4. Allemagne : Das gei-maiiische Todtenlager bei Selzen , par le docteur Lindenscbmitt.
— Die Heide?igrœber am Lupfen bei Oberflacht, im würtembergischen Amte Tuttlingen
par V. Durrich et D. Menzel. — Das Todtenfeld bei Fridolfmg an der Salza in Oberbaiern,
München 1847. ^ Die tiralten Grabstätte bei Nordendorf , par Seidmayer. — Die neuent-
deckten tiiinengrüber zu Ebri7igen im Breisgau ■, par le docteur Schreiber, 1826. — Die
heidnischeTodtenbestattung inDeutschland, parK. Weindhold, Vienne 1859.
Dans ce dernier ouvrage, qui a été publié par l'académie impériale des sciences de Vienne,
M. le docteur Weindhold présente un tableau complet des découvertes archéologiques
effectuées en Allemagne, en ce qui concerne les sépultures anciennes, et il rectifie l'opi-
nion du docteur Schreiber qui attribuait une origine celtique aux Hunefigrùber du Brisgau,
tandis que ces tombes appartiennent à la race alémanique. " Es geschah dies hiernach vofi
« Alema7ien und insbesondere von dem Stamme der Brisigawer.... ich setze die Gräber
'I von Ebringen in das vierte oder fünfte Jahrhundert.» (P. 119.) Cette découverte de
tombes alémaniques sur la rive du Rhin opposée à l'Alsace mérite une mention toute
spéciale.
11« SÉRiB. — T. ir. — (M.) 1 3
_ i9/i. —
DEUXIÈME PARTIE.
Rech erch os historiques.
Le type germanique étant bien démontré, il faudrait pouvoir dire quelle
est la tribu qui repose dans chacun de nos cimetières et quelle est la date
de son établissement en Alsace. Ici les indices matériels nous manquent; il
faut recourir aux historiens.
Cette question qui se rattache aux origines de la nation française* et à
l'histoire locale de l'Alsace, offre un haut intérêt: si je ne puis la résoudre,
je vais essayer du moins de résumer les faits historiques qui peuvent
l'éclaircir.
Deux grandes confédérations germaniques, les Francs et les Alémans, se
formèrent à la fin du deuxième siècle. Après avoir forcé le Valium^, qui
défendait les terres décumates, ces deux peuples, auxquels se joignirent
plus tard les Burgondes, passèrent le Rhin en corps de nation l'an 286 de
l'ère chrétienne; repoussés et rejetés sur la rive droite par Maxime, ils re-
nouvelèrent pendant toute la durée du quatrième siècle leurs sanglantes
incursions.
L'histoire nous apprend que ce furent les Alémans, dont le territoire
faisait face à l'Alsace, qui portèrent à notre province les coups les plus ter-
ribles. Raltus maintes fois par Constance (296-316), par Constantin et son
fils Crispus (320), par Julien (356-357), par le Franc Hariett, comte des
deux Germanies (366), et poursuivis jusque sur le Necker par Valentinien
(369), ils furent enfin presque entièrement détruits, en 378, à la bataille
1. Les historiens français du siècle de Louis XIV ont vu, dans la coalition des peuples
germaniques, les alliés des Gaulois contre les Romains. En s'appuyant sur l'émigration de
Sigovèse et deBellovùse(Vl« siècle avant Jésus-Glirist), et sur celles desSequauais et d'autres
Gaulois dans les terres décumates (IP siècle après Jésus-Christ), ces auteurs ont regardé les
klémans et les ¥runcs comme d'anciens Gaulois qui venaient combattre les Romains pour
délivrer leur première patrie. (Voir Dom Martin, Mezerai, Audigier et le Journal des sa-
vn7its,(\el6n.) Cette opinion, qui flattait l'orgueil national, fut combattue par les auteurs
allemands et surtout par Leibnitz (dans une dissertation publiée en 1715), elle le fut aussi
en France par un savant, dont le nom mérite d'être conservé, par Nicolas Fréret; sou mé-
moire, qui fait aujourd'hui autorité parmi les historiens , fut présenté à l'Académie en 1714
et lui valut une détention de six mois à la Bastille.
De nos jours, Augustin Thierry et Guizot ont porté sur cette question de nouvelles
lumières : ils ont définitivement restitué aux Francs et aux Alémans leur origine germa-
nique, et rehabilité dans notre histoire l'influence civilisatrice des Romains ; puis Henri
Martin est venu classer et coordonner tous les travaux des écrivains français et allemands
avec une admirable clarté , c'est lui qui m'a servi de guide dans cette étude.
2. Le Valium est un retranchement élevé par les Romains entre le Rhin et le Danube;
ses ruines sont encore visibles , et sont connues en Allemagne sous le nom do Pfahlyraben.
— 195 —
(ÏArgentoarta, par les armées de Gratien, commandées par le Franc Mellu-
baudes.^
Pendant toute la durée de ce siècle, nous voyons l'Alsace dévastée,
Argentoratum et Brocomagus pillés et détruits, et toujours l'hydre ger-
manique se redressant après chaque revers.
Dans ce sanglant conflit, on n'aperçoit aucune période pendant laquelle
une trihu germanique aurait pu former en Alsace un établissement de
quelque durée.
Au commencement du cinquième siècle^ règne d'abord un moment de
calme dû à l'habileté de Stilicon^ (général d'IIonorius), qui, à l'aspect des
hordes de Vandales et de Suèves prêtes à briser les faibles barrières de
l'empire, traite avec les Francs et les Alémans, et à prix d'or, obtient leur
concours pour arrêter cette menaçante invasion; mais le calme fut de
courte durée : le 31 décembre 406 les Vandales et les Suèves, après avoir
repoussé les Francs, passent le Rhin entraînant les Burgondes à leur
suite*; Mayence est détruit, les villes rhénanes et notamment Strasbourg et
Spire sont dévastées, et leurs habitants traînés en Germanie.^
A partir de cette époque Rome est vaincue, le Germain ne sera plus
rejeté dans ses forêts et régnera bientôt en maître dans les Gaules.
Les Burgundes.^ — Cinquième siècle.
Dès 412, Gunter, chef des Burgondes, allié à Odoacre, chef des Alains,
fait couronner Jovinus, empereur d'Occident, à Mayence, et obtient, en
1. Flavius Melobaudes ou Merobaudes fut nommé consul Tan 375, sous Gratiamis
Aug. IV. Au siècle dernier ou a prétendu faire dériver de ce nom l'origine des Mérovin-
giens. (Gibert, Mémoh-e à V Académie.)
2. Voir les preuves de ces détails historiques , pendant le quatrième et le cinquième
siècle, dans les auteurs contemporains, savoir : Ammien Marcellin; — Lettre de Julicu aux
Athéniens; — Chroniques de saint Prosper d'Aquitaine, de Prosper Tiro et de Cassiodore;
— les OEuvres de Claudicn, de Salvien, de saint Jérôme, de Zosime; — ÏHistoriarum
adversiis Pacjcmos , lib. VIII, d'Orose, disciple de saint Augustin; et chez les modernes,
Bûcher, Laguille, Schœpflin, Henri Martin, etc.
3. Stilicon , Vandale d'origine, était maître des milices dans les préfectures des Gaules et
d'Italie. — Claudien, dans sou panégyrique d'Honorius, célèbre cet état de paix sur la rive
du Rhin que les Germains n'osaient franchir quoiqu'elle fût dépourvue de garnisons.
• ncc transcat amnem,
• Incustodltam metucns attingerc ripam. (De BeHo Getic.)
4. Orose, lib. VII : «Ipso simul motu iminclsorum Burgundionum. »
5. Saint Jérôme, dans sa lettre à Ageruchie, peint d'une manière effrayante la dévasta-
tion de l'Alsace : « Magontiacum , noblUs quondam civitas , capta atque subversa est...
n Tornatiis, Nemetes, Avfjentoratus , trans/ati in Gennaniam. » [Alsat. illustrât V^.Perio-
dus romana, g 169.)
6. Tiui-gundiones, Burgundi. Ammien Marcellin dit (liv. XVIIl, chap. u) que leur territoire
touchait celui des Alémans <i Terminales lapides Alemanorum et Burgwidio)iuni confinia
n distinguebat. » D'après le uième auteur, ce peuple prétendait descendre des Romains :
" Burgundi se esse sobulevi romunam sciant. » (Lib. XXVllI, cap. v.)
— 196 —
413, la concession d'un territoire le long du ^hin. (n Biirgondiones partem
« Gallice Rheno conjunctam lenerey>, Chroniques de Gassiodore et de Pros-
per d'Aquitaine, etc.)
Les commentateurs sont divisés d'opinion sur l'interprétation de ce
texte. Bûcher', Guilliman^, Laguille^ et Henri Martin" désignent l'Alsace,
mais d'après Scliœpflin^ ce serait la Suisse. Quoi qu'il en soit, les Bur-
gondes essayèrent de s'étendre dans l'intérieur de la Gaule Belgique®, prin-
cipalement dans la vallée de la Moselle; mais après plusieurs combats ils
furent vaincus, en 438, par yElius (général de Valentinien III), qui avait
les Huns^ pour auxiliaires. A la suite de cette défaite, ils furent transportés,
en 436® ou 443, dans la Savoie (Sabaudia) , de sorte que leur séjour en
Alsace n'aurait dans tous les cas duré que 23 ou 30 ans.
Les Alémans.^ — Cinquième siècle.
Quant aux Alémans, l'histoire est à peu près muette à leur égard depuis
la fin du quatrième siècle jusqu'en 495 où, unis aux Suèves, ils envahi-
rent le territoire des Ripuaires dans la première Belgique.
Il est de fait que les auteurs contemporains qui énumèrent avec assez
de détails tous les combats livrés par ^Etius pendant le cinquième siècle
dans l'est de la Gaule, contre les Burgondes et les Francs, ne parlent en
aucune façon des Alémans. Malgré ce silence des historiens, constaté par
Schœpflin lui-même*", ce savant antiquaire ne peut admettre que le peuple
1. Bûcher [Belg. rom., lib. XIV, cap. iy) : « T« Germania sedes Ulis [Burgundiones]
« datœ. »
2. Gmllima.n {Habspicrgiaca) : «Elesatiam, certe siiperiorem, si tion iciraqice , Burgimdi
« occupaverunt. »
3. Laguille (t. I", liv. III, p. 35) : « C'est dans l'Alsace et daas une partie de la Germanie
'< supérieure que les Bourguignons s'établirent du consentement des Romains. »
4. Henri Martin (t. I", p. 343) : n En même temps (413), les Bourguignons s'étendent en
" corps de nation dans la première Germanie de Mayence à la Séquanie. »
5. Als. illustr. (t. ^^ p. 258). Schœpflin rejette formellement les Burgondes de l'Alsace :
" Burgundiones ex Alsatia ubi commiiniter ponuntur relegandi sunt forte... «
6. Sidoine Ap. (Panégyrique d'Avitus) : « Belgam quem trux Burgimdio presserat. »
7. Gassiodore, Chr. : « Quem non multo post Himni peremerunt. »
8. Bûcher fixe l'an 436 ; mais d'après Henri Martin (t. P"", p. 358), ce serait en 443 que les
Burgondes auraient été transportés dans la Sabaudia ou Sapaudia (AMM.M.), qui s'étendait
de l'Isère au lac de Neuchatel, embrassant une partie de la Séquanie, ce nom n'a été usité
qu'a partir du IY*' siècle, avant cette époque la Savoie s'appelait Saboia.
9. Le nom (ÏAlemania figure sur la carte théodosienne le long de la rive droite du Rhin,
depuis Bregentz [Brigantium] jusqu'à Argentouaria (lieu situé entre Schlestadt et Colmar).
Ce territoire comprend la Souabe transdanubienne, le Brisgau et les villes forestières.
10. Als. illustr., t. I", § 174, p. 220 : « Chronographi illius œtatis quotqiiot supersunt ,
« Prosper Aquitantis , etc Multiplia a Aetit cum Burgundionibus, Francis, Gothis, qui
"Ulis tcmporibus âiversas Galliœ partes insederant , bclla recensent, sed nulla cum
« Alemanis.... »
— 197 —
qui habitait la rive du Rhin opposée à l'Alsace, n'ait pas profité de l'invasion
des Vandales pour s'emparer de cette fertile province si souvent arrosée de
son sang. Schœpflin appuie son opinion sur quelques vers de Sidoine
Apollinaire* dans le panégyrique d'Avilus, qui montrent le Franc maître
de la première Germanie et de la deuxième Belgique et l'Aléman établi en
vainqueur sur les deux rives du Rhin. Je ferai remarquer que ces vers,
écrits en 455, ne détruisent pas la possibilité de l'occupation de l'Alsace
par les Bourguignons de 413 à 443, je puis donc admettre la probabilité
de cette occupation avec tous les historiens anciens et les commentateurs
modernes:^ Bûcher, Laguille et Henri Martin.
Toutefois, ainsi que le dit Schœpflin, l'Alsace a conservé une empreinte
alémanique incontestable; aussi je serais porté à admettre que les Alémans
encore meurtris et épuisés, à la suite des nombreuses défaites que les Ro-
mains leur ont fait subir au quatrième siècle, ont pu rester quelques années
immobiles et profiter ensuite de l'invasion des Vandales pour occuper sans
bruit quelques cantons de la deuxième Germanie, s'y établir concurrem-
ment avec les Bourguignons, puis à leur départ s'étendre dans toute la
province à la faveur de l'invasion des Huns^ Cette occupation de l'Alsace,
sans combats, aurait pu être facilement omise par les auteurs contem-
porains.
Les Francs. — Cinquième siècle.
Les Francs, entrés en 406 dans les Gaules, à la suite des Vandales qu'ils
avaient un instant arrêtés sur le Rhin, envahirent la seconde Belgique et
la première Germanie, puis vaincus par vEtius en 428, ils se retirent dans
les forêts marécageuses de la Tongrie et des environs de Cologne où ils
trouvaient, après chaque nouvelle excursion, un refuge assuré contre les
armées romaines. Rien n'annonce qu'ils aient pénétré dans la deuxième
Germanie jusqu'au moment où, vainqueurs des Alémans et des Suèves à
Tolbiac en 496, ils furent définitivement les maîtres de l'est de la Gaule.
1. Sidoine Ap. [Carminé Vil) :
' Franc us Qermanum primunx, BeJgamque secvndam,
• Sternehat, Rhenumque , ferox AUemane , bibebas
t Romanis ripis , et iitroqiie superbus in agro
t Yel civis, vel victor er as."
Trad. de Ravenèz : « Le Franc opprimait la Germanie première et la seconde Belgique, et
«toi, féroce Aléman, tu buvais les eaux du Rhin sur les rives romaines et tu apparaissais
«superbe sur les deux bords comme citoyen et comme vainqueur. »
Ce panégyrique fut écrit en 455, sous Avitus, empereur.
2. Parmi les archéologues allemands qui ont adopté cette opinion je citerai le D'' Linden-
schmitt (( im folgenden jähre (413) wurde den Burgîoideti die gegend um Mainz und des be-
« nachharten Galliens zu ihren Sitzen eingeräumt') (das germanisch Todtenlager, etc.p.45.)
3. Beatus Rhenanus {Ilisloria , pars I, seculo V, p. 258), fixe au temps d'Attila l'entrée
des Alémans dans les Gaules
— 198
CONCLUSION.
Je conclurai de cet exposé que l'Alsace paraît avoir été occupée au cin-
quième siècle, d'abord parles Burgondes en vertu d'un traité, puis par les
Alémans qui s'y seraient introduits sans combats, enfin par les Francs,
vainqueurs en 496 des Alémans; c'est donc à ces trois peuples que l'on
peut attribuer les sépultures germaniques dont j'ai donné la description.
Les cimetières qui entourent les ruines des palais des rois d'Austrasie,
depuis Molsheim jusqu'à Wasselonne et qui se distinguent, comme celui
d'Odratzheim surtout, par la régularité et la bonne construction de leurs
tombes ainsi que par la richesse des armes et des bijoux, annoncent évi-
demment un peuple victorieux, établi à demeure sur le sol qu'il a con-
quis; par ce motif ils doivent, ce me semble, appartenir à la race franque
et dater de la fin du cinquième ou du commencement du sixième siècle.
Dans les cimetières de Hochfelden et de Kœnigshoven où j'ai reconnu les
armes du cavalier germain, je serais porté à voir des guerriers francs ou
alémans auxiliaires des Romains.
Quant aux tombes qui s'étendent dans le canton du Kochersberg-, de
Küttolsheim à Brumath , les renseignements que j'ai recueillis ne sont pas
sufTisanls pour préciser, d'une manière positive, la tribu germanique à la-
quelle elles appartiennent.
Toutefois, je ferai remarquer que la population agricole du Kochersberg
qui s'est maintenue, jusqu'à nos jours, dans une sorte d'isolement au milieu
de l'Alsace, a un caractère et des mœurs qui offrent beaucoup de rapport
avec ceux que les auteurs anciens attribuent aux Burgondes' qui, « malgré
«leur taille colossale, leur voix rauque, leur figure rude et grossière,
«étaient pacifiques, faciles à vivre, et n'avaient ni l'arrogance, ni la fureur
«guerrière des Francs»; d'après Orose (liv. VU, chap. xxxii) : «ils Irai-
«taient les Gaulois, parmi lesquels ils vivaient, moins en sujets qu'en
« frères. »
Ce caractère tout particulier de l'habitant du Kochersberg, déjà signalé
par plusieurs archéologues^, me porterait à y voir un indice pour attribuer
les tombeaux que ce canton renferme, à une tribu Burgonde dont le sé-
jour en Alsace aurait pu se prolonger après le départ du gros de la nation,
à la faveur des troubles incessants de cette époque.
1; Henri Martin, Histoire de France, 1. 1", p. 353. — Augustin Thierry, Lettres sur l'his-
■ toire de Fra?ice, p. 101.
2. Scliweighaeuser, Mémoires manuscrits de la bibliothèque de Strasbourg.
— 199 —
Tels sont les résultats de cette élude que je soumets à l'appréciation du
comité et sur laquelle j'appelle les rectifications des archéologues.
Dans l'esquisse que je viens de tracer des événements qui firent naître,
au cinquième siècle, l'assimilation des races gauloises et germaniques dans
l'est de la Gaule, j'ai cherché non pas à comhler la lacune signalée par
notre savant Schœpflin ', dans l'histoire de l'Alsace de cette époque; cela
eût été au-dessus de mes forces; mais j'ai essayé seulement de résumer le
dire des auteurs contemporains et de coordonner les appréciations des
commentateurs sur cette page si obscure de notre histoire.
1. Als. illustr. , t. l". Periodus romanus , §§4,6: " Post hœc ingens Alsaticœ historiœ
« hiatus exoritur. »
Colonel DE MORLET.
ANALYSE D'UNE CHARTE
DATÉE Du 26 MAI 141S,
FAISANT MENTION, ENTRE AUTRES,
DE RAMSHARDT, DE CRONENBRUCH ET DE BUCHHURST,
TROIS LIEUX HABITÉS DANS LE CANTON DE WOERTH, QUI N'EXISTENT PLUS.
La mairie de Laubach est en possession d'un acte notarié, écrit en latin
sur parchemin, qui n'est point sans intérêt; il remonte au commencement
du quinzième siècle, portant la date du 26 mai 1415. C'est une enquête
publique, rédigée à la requête de Symondus Krieg, abbé de Walbourg, et
particulièrement de Jean Stapp, hôtelier de la même abbaye, à la suite
d'une comparution, à Bâle, devant Rudolphe de Terwiler, doyen du Cha-
pitre de la cathédrale , juge assermenté pour la conservation des droits et
privilèges de l'abbaye de Seltz, qui les avait cités, dans cette ville, pour
une affaire de dîme. — Le lointain et dispendieux déplacement a eu heu
non sans d'amères doléances de la part des intimés.
Le parchemin constate que Laubach, Ramshardt, Cronenbruch, Buch-
hurst, la cour appelée Ackerhoff, ainsi que celle dite Spittalhoff, étaient
exempts, francs et hbres de toute dîme envers le monastère de Sainte-
Adélaïde, de l'ordre de Saint-Benoît, à Seltz. Il n'indique point la position
topographique de Ramshardt, mais il fait connaître que ce lieu était pourvu
d'une bergerie, et que la dîme du sang en était réclamée par l'abbaye de
Seltz : le berger seul donnait la dîme, mais seulement de ses propres
agneaux. Cronenbruch se trouvait, d'un côté, près de la forêt Sainte, de
l'autre, près de la rivière appelée Eberbach. Buchhurst était situé sur le
bord de la Sure, à l'opposite de Morsbronn, près de Gunstett. La cour dite
Ackerhoff, ainsi que celle dite Spittalhoff, se trouvaient dans les dépen-
dances de l'abbaye de Walbourg. De tous ces heux, il n'existe plus que
le village de Laubach.
Suivant une autre charte, datée du troisième jour des calendes de sep-
tembre de l'an 1378, conservée aux archives de la même mairie, en vertu
de laquelle l'abbaye de Walbourg avait acquis de l'abbaye de Neubourg le
— 201 —
village de Lowpbach (Laubach) au prix numéraire payé comptant de quinze
cents livres deniers, valeur de Strasbourg, l'abbaye de Walbourg fournis-
sait annuellement à l'abbaye de Seltz douze rézaux de froment, mesure de
Pfaffenhoffen , en place de la dîme de Laubach. Il est très-vraisemblable
que la mesure de capacité de Pfaffenhoffen servait à cette époque pour dé-
terminer les mesures normales dans les transactions publiques; cette charte
tendrait au moins à le prouver.
Peut-être, n'est-il pas hors de propos de noter ici que l'on voit encas-
trées, sur l'une des façades de la maison commune de Pfaffenhoffen, deux
inscriptions trois fois séculaires, année par année, en langue allemande,
taillées dans deux pierres que l'on a retirées des murs d'enceinte du bourg;
en voici le sens : en 1563, le rézal de seigle a été vendu trois florins et
demi; en 1564, il l'a été huit schillings. Sur les deux pierres, le prix est
indiqué en signes usités alors. Une transcription exacte des deux inscrip-
tions aurait, ce me semble, un certain intérêt.
Les deux chartes que nous venons de citer ne laissent pas de doute
sur la culture de la vigne, à Mertzwiller, aux quatorzième et quinzième siè-
cles. Elles parlent notamment de six arpents, désignés sous le nom de
Busen-Reben, du nom d'un certain colon, appelé Busen, qui les avait
plantés : ce vignoble se trouvait au pied ou sur la déclivité occidentale de
la montagne de Laubach. La charte de 1378 nous apprend que l'abbaye de
Walbourg était tenue d'en servir au vice-pléban d'Oberhoffen une rente
annuelle et perpétuelle d'une charge de vin {redditiis unius carratœ vini),
prise du pressoir à la vendange, et d'en fournir annuellement au château
des Sigelmann, à Ueberach, un sol denier, valeur de Strasbourg, et deux
poulets noirs : ce manoir est le même que celui connu sous le nom de
Niedermodernburg.
Le document de 1415 annote en termes formels la vacance du saint-
siége en mai de ladite année. Ainsi, ni Pierre de Lune, qui portait la tiare
sous le nom de Benoît XIII, ni Grégoire XII, qui se disait également sou-
verain pontife, ni Jean XXIII, qui occupait en même temps la chaire de
Saint-Pierre, aucun de ces trois n'est reconnu ici comme pontife légitime.
Au reste, Jean XXIII, que l'histoire ecclésiastique admet comme le vrai
pape, avait déclaré, le 2 mars précédent, dans une session du concile de
Constance, renoncer au pontificat pour la paix de l'Église, dans ces temps
malheureux du schisme d'Occident.
De plus, ce document atteste l'existence d'une hôtellerie à Walbourg :
on sait que, dans les grandes abbayes, on appelait ainsi le corps de logis
destiné aux étrangers; ce bâtiment portait aussi le nom de divcrsorinm.
— 202 —
Enfin, il [)roduit les noms d'une série de témoins, parmi lesquels un cen-
tenaire, de Griesbach, de Mertzwiller, de Forstheim, de Morsbronn , de
Ramshardt, de Dürrenbach et de Gunstett.
L'audition des témoins et la rédaction de l'acte ont eu lieu au réfectoire
de l'abbaye de Walbourg, vers une heure de l'après-midi, en présence de
Symondus Lapistidus*, archiprêtre du Chapitre rural, résidant à Pfaffen-
lioffen, de Jean Wernherus dit aussi Hirsemann, chanoine de l'église de
Saint-Arbogast, de Surbourg, de Jean Cuncmann, recteur de l'église pa-
roissiale de Gumprechteshoffen, de Jean Rasor\ chapelain de la chapelle
de Saint-Léodegar, àHiittenheim, de Jean Kyelendorff et de Fritschemann
Rasor', ces deux derniers de Ilaguenau. Les trois premiers ont appendu
leurs sigillés, présentement enlevés de la pièce.
La mention faite ici de cachets propres aux recteurs des paroisses n'a
rien qui puisse étonner, puisque nous savons que, dès l'an 1238, le con-
cile de Cognac ordonna, par son seizième canon, que chaque église pa-
roissiale aurait son sceau propre. Le canon porte en titre : JJt qmlibet sa-
cerdos habeat suum sigillum : que chaque prêtre (curé -recteur) ait son
sceau.
L'acte a été reçu par Albert Vogel, d'Essling, notaire apostolique du
palais épiscopal, demeurant à Strasbourg, aptiblicus imperiali audoritate
ac curiœ argentinensis juratus notarius;)) il se qualifie en outre de cle-
ricus conjugatus Constantiensis diœcesis.
La périphérie graphique, mise au bas, me paraît digne de remarque :
c'est une espèce de vase fait avec la plume, sur le pied duquel se ht le nom
du notaire en ces lettres: S.Alberti Vogel, c'est-à-dire Signum Alberli Vogel.
La partie haute du vase forme une figure orbiculaire, au milieu de laquelle
est dessiné un oiseau, tenant du bec un fil auquel est suspendue la minus-
cule a. Le monogramme symbohque était en usage chez d'autres notaires
du moyen âge.
La pièce n'est pas revêtue d'autre signature; à cette époque, l'apposition
des sceaux suffisait encore pour donner aux titres la forme authentique.
La lettre initiale du parchemin ne mérite aucune observation.
1. Nom patronymique, très vraisemblablement latinisé selon l'usage du temps.
Jér. Ans. Siffer,
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TABLE DES MATIÈRES.
PAGES.
Notice sur quelque,? découvertes archéologiques effectuées dans les can-
tons de Saar-Union et de Drulingen; par M. le colonel de Morlet,
avec gravures et une planche chromo-lithographiée 1
Découverte de sépultures antiques à Obernai; par M. L. Levrault 7
Mémoires sur la grande voie romaine de Brumath à Sellz pour la portion
de Weitbruch à Kaltenhausen, par M. Jér. Ans. Siffer 14
Argentovaria, station gallo-romaine retrouvée à Grusenheim; parM. Coste,
avec une gravure et une carte lithographiée 18
Notice historique sur l'hôtel de ville d'Obernai et sur les anciens empla-
cements judiciaires dits Seelhof el Laube; par M. l'abbé Gyss ... 25
Les fortifications d'Huningue ; par M. Sabourin de Nanton , avec une
gravure 44
Lettre de frère Sigismond à l'abbé Barthélémy d'Andlau sur les anciennes
tapisseries de l'abbaye de Murbach; par M. X. Mossmann 49
Une excommunication de Mulhouse au treizième siècle ; par M. Louis Spach. 55
Herbitzheim ; par M. Jules Thilloy, avec une carte lithographiée 69
L'église de Walbourg; par M. l'abbé Straub, avec trois gravures 97
Note sur la pierre aux armes de Jean Hammerer; par M. le baron de
Schauenburg, avec une gravure 106
Notes sur les ruines de^villas romaines près d'Oberbronn; par M. Siffer. . 109
Helvetus et ses environs (Ehl près ßenfeld) au cinquième siècle; par
M. Napoléon Nicklès :
Avant-Propos 113
Chapitre L — Topographie 114
Chapitre IL — Recherches archéologiques 119
Chapitre IIL — Helvetus, ville gallo-romaine 150
Saint Léon IX, le pape alsacien, par M. L. Spach 159
La Marche d'Aquilée, par M. P. Ristelhuber 184
Notice sur les cimetières gaulois et germaniques découverts dans les en-
virons de Strasbourg, par M. le colonel de Morlet 188
Analyse d'une charte datée du 26 mai 1415, faisant mention, entre autres,
de Ramshardt, de Cronenbruch et de Buchhurst; par M. Jér. Ans.
Siffer 200
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