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Full text of "Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historiques d'Alsace"

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THE  J.  PAUL  GETTY  MUSEUM  LIBRARY 


BULLETIN 


SOCIÉTÉ  POUR  LA  CONSERVATION 


MONUMENTS  HISTORIQUES 


D  ALSACE 


STRASBOURG,    IMPRIMERIE    DE   VEUVE    BERGER-LKVRAÜLT. 


BULLETIN 


DE   LA 


SOCIÉTÉ  POUR  LA  CONSERVATION 


DES 


MONUMENTS  HISTORIQUES 

D'ALSACE 


IV  SÉRIE  —  DEUXIÈME  VOLUME 

(1863  -  1864) 


PRE9IIEBB    PARTIE  —  PROCÈS-VERBAUX. 

AVEC  GRAVURES  ET  PLANCHES 


VEUVE  BERGER -LEVRAULT  ET  FILS,  LIBRAIRES  -  ÉDITEURS 


PARIS 

RUE  DES  SAINTS-PÈRES  ,  8 


STRASBOURG 

RUE  DES  JUIFS,  26 


1864 


• 


SOCIETE 

POUR  LA 

CONSERVATION  DES  MONUMENTS  HISTORIQUES 
D'ALSACE. 


Séance  du  Comité  du  S  janvier  1865. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


La  séance  est  ouverte  à  11  heures  et  un  quart. 

Sont  présents:  M.  Schirr,  vice-président;  MM.  de  Ring  et  Eissen,  secré- 
taires; MM.  Heitz,  de  Schauenburg,  Oppermann,  Bœrsch,  Straub,  Conratb, 
Petit-Gérard,  Grass,  Morin,  Ringeisen,  Jung  et  Klotz,  membres  du  comité. 

MM.  Sabourin  de  Nanton ,  Bernard  et  l'abbé  Nartz,  membres  libres  de  la 
Société,  assistent  à  la  séance. 

Le  secrétaire  dépose  sur  le  bureau  les  ouvrages  suivants  : 

'V^  Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Forze«^;  11*^  cahier,  novembre  1862; 

2°  De  la  part  de  la  Société  d'histoire  nationale  de  la  Haute-Bavière,  le 
3®  cahier  du  tome  XX,  et  3®  cahier  du  tome  XXI  de  ses  archives,  ainsi  que 
le  trente-troisième  compte  rendu  de  cette  même  Société  pour  l'année  1860. 

Est  admis  au  nombre  des  membres  de  la  Société  pour  la  conservation 
des  monuments  historiques  d'Alsace,  sur  la  proposition  de  M.  le  curé  SifTer, 
M.  Karm  à  Weyersheim. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  lu  par  le  premier  secrétaire,  est 
adopté. 

L'ordre  du  jour  appelle  le  président  à  prendre  la  parole  sur  la  question 
du  renouvellement  du  bureau. 

«  Avant  de  procéder  à  ce  renouvellement,  dit-il,  il  s'agit.  Messieurs,  de 

vider  une  question  préalable.  M.  Ignace  Chauffour,  membre  du  comité, 

à   Colmar,  nous   a   adressé   une   demande    tendant   à   ce  que  tous  les 
II«  SÉRIE.  —  T.  H.  —  (r.-v.)  1 


—  2  — 

membres  tlu  comité  du  Haut-Rhin  soient  convoqués  pour  procéder  à  ce 
renouvellement. 

«  La  demande  de  M.  Chauffour,  parlant  au  nom  de  ses  collègues  du 
Haut-Rhin,  me  semble  si  bien  fondée  et  si  naturelle,  que  j'aurais  convo- 
qué le  sous-comilé  de  Golmar ,  en  vertu  de  mon  pouvoir  discrétionnaire 
de  président,  si  je  n'avais  cru,  dans  une  question  de  cette  gravité,  devoir 
m'entourer  de  toutes  les  garanties  et  de  toute  l'autorité,  puisées  dans 
votre  libre  assentiment. 

((  En  instituant,  dès  1857,  le  comité  du  Haut-Rhin,  nous  avions  l'espoir 
que  quelques-uns  de  ces  messieurs  viendraient  parfois  assister  à  nos 
réunions  ;  ils  étaient  une  fois  pour  toutes  convoqués  pour  le  premier 
lundi  de  chaque  mois,  et  certes,  s'ils  avaient  pu  régulièrement  se  rendre 
auprès  de  nous,  nous  en  aurions  été  très  -  flattés  et  très-heureux;  per- 
sonne n'aurait  songé  à  leur  contester  le  droit  de  prendre  part  à  nos  votes. 

((  En  août  1857,  M.  Véron-Réville  et  un  de  ses  collègues  tirent  acte  de 
présence  pour  constater  leur  bonne  volonté  et  les  droits  que  l'assemblée 
générale  de  la  même  année  leur  avait  conférés. 

t(  Et  de  même  que,  tout  récemment,  nous  avons,  pour  maintenir  l'union 
entre  les  deux  départements,  constaté  le  droit  de  votre  président  non- 
seulement  d'assister  aux  séances  de  Golmar,  mais  de  les  présider  toutes 
les  fois  qu'il  pourrait  s'y  rendre,  nous  devons,  par  la  même  raison,  ac- 
cueillir avec  le  plus  grand  empressement  le  désir  de  nos  collègues  qui 
espèrent ,  aujourd'hui ,  être  avertis  et  convoqués  spécialement  pour  un 
acte  important  d'administration  intérieure, 

«  Mon  avis  est  donc  de  fixer  au  premier  lundi  de  février  le  renouvelle- 
ment du  bureau,  en  prévenant  M.  le  vice-président  du  comité  du  Haut- 
Rhin ,  et  en  le  priant  de  convoquer  MM.  les  membres  en  résidence  à 
Golmar,  à  Mulhouse  et  à  Guebwiller. 

«  Mes  collègues  me  permettront  de  leur  rappeler,  à  cette  occasion,  que 
je  m'étais  prononcé,  en  plusieurs  circonstances,  pour  le  respect  littéral 
des  statuts  et  du  règlement  de  notre  Société.  S'il  n'est  plus  temps,  au- 
jourd'hui, de  retourner  en  arrière  dans  la  voie  où  l'on  s'est  engagé 
pendant  le  dernier  semestre,  il  doit  toujours  être  loisible  et  permis  d'ex- 
horter à  la  conciliation  de  tous  les  intérêts,  de  toutes  les  tendances;  de 
rappeler  que  c'est  par  là  que  notre  Société  a  prospéré,  et  qu'en  ne 
respectant  pas  le  vœu  de  la  majorité  ,  de  quelque  manière  qu'elle  se 
prononce,  nous  détruirons  volontairement  et  briserons  une  œuvre  d'union, 
pour  laquelle  tous  les  Alsaciens  se  sont  donné  fraternellement  la  main.  » 

La  proposition  du  président  est  adoptée;  seulement  pour  donner  à  cette 


convocation  un  caraolère  plus  ofliciel  encore,  le  comilé  décide  (jue  pour 
la  séance  du  mois  de  février,  les  membres  du  Haut-Rhin,  faisant  partie  du 
comité,  seront  individuellement  convoqués;  et  que  pour  les  séances  à 
venir,  si  elles  étaient  tenues  en  dehors  des  premiers  lundis,  M.  le  vice-pré- 
sident du  comilé  de  Golmar  serait  prévenu,  avec  prière  d'en  donner  avis  à 
ses  collègues. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  présente  le  devis  des  frais  auxquels  re- 
viendrait l'impression  de  la  charte  qui  doit  accompagner  le  travail  de  M.  le 
président  de  la  Société,  lu  dans  l'avant-dernière  séance.  Le  président  prie 
instamment  ses  collègues  de  ne  point  voter  les  dépenses  considérables 
qu'occasionnerait  la  reproduction  totale  de  la  charte;  il  fait  d'ailleurs  re- 
marquer que  ce  document  présente  beaucoup  moins  d'intérêt  que  celui  du 
Sindelsberg.  —  Sur  les  conclusions  du  rapporteur,  et  conformément  à  la 
proposition  du  secrétaire,  il  est  décidé  que,  pour  amoindrir  ces  frais,  il  ne 
sera  publié  de  ce  document  en  lithochromie  qu'un  des  fragments  les  plus 
dignes  d'être  reproduits.  Un  crédit  de  200  fr.  est  ouvert  à  ce  sujet  à  M.  le 
baron  de  Schauenburg,  qui  veut  bien  se  charger  de  présider  à  la  confec- 
tion de  cette  planche. 

Le  secrétaire  donne  lecture  d'une  note  de  M.  le  curé  Siffer,  à  Weyers- 
heim,  sur  les  antiquités  des  environs  de  Reichshoffen ,  précédemment  déjà 
signalées  par  l'auteur.  Le  point  le  plus  intéressant  est  la  découverte  d'une 
urne  cinéraire,  portant  le  nom  du  potier,  tracé  en  couleur  rouge  sur  le 
cintre  près  de  l'orifice.  M.  le  curé  Siffer  promet  l'envoi  de  ce  vase  au  musée 
de  la  Société.  —  Remercîments  et  dépôt  dans  les  archives. 

La  séance  est  levée  à  1  heure  moins  un  quait. 


Séance  du  Comité  du  2  février  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


La  séance  est  ouverte  à  11  heures. 

Présents:  MM.  RuTSch  ,  Brièle  ,  Ig.  Chauffour,  Conrath,  Eissen ,  Frantz, 
Guerber,  Grass,  Fleitz,  Jung,  Klotz,  Levrault,  Mayer,  Morin,  Petit-Gérard, 
de  Ring,  Ringeisen,  baron  de  Schauenburg,  Schirr,  Schlumberger-Harl- 
mann.  Straub,  Véron-Réville. 

M.  de  Ring,  l'un  des  secrétaires,  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la 
séance  du  5  janvier  I860.  Le  procès-verbal  est  adopté. 


—  4  — 

Il  dépose  ensuite  sur  le  bureau  les  ouvrages  suivants  : 

1°  Promenades  en  Belgique,  par  M.  d'Otreppe  de  Bouvelte.  1  vol.  in-12; 

"2°  Mémoires  sur  l'importance  pour  l'histoire  intime  des  communes  de 

France  des  actes  mortuaires  antérieurs  à  il 90,  par  M.  Gustave  Saint- 

Joanny,  avocat,  archiviste  -  bibliothécaire  honoraire  de  la  ville  de  Thiers; 

broch,  in-4°; 

3°  Dictionnaire  topographique  de  V arrondissement  de  Sarreguemines , 
par  M.  Jules  Thilloy ,  procureur  impérial  à  Sarreguemines,  in-8°  ; 

A'^  Mittheilungen  der  k.  k.  geographischen  Gesellschaft,  redigirt.von 
Franz  Fœtterle.  V.  Jahrg.  Vienne,  1861.  1  vol.  in-4°; 

5°  Archeologischer  Anzeiger  zur  archeologischen  Zeitung ,  XX®  année, 
déc.  1862. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  dépose  un  spécimen  du  fac-similé  de  la 
charte  de  Surbourg.  Ce  spécimen  devra  passer  encore  par  plusieurs  tirages, 
mais  le  tout  pourra  être  terminé  sous  peu. 

L'ordre  du  jour  appelle  le  renouvellement  des  fonctionnaires  du  bureau, 
selon  la  modification  apportée  aux  statuts  par  la  dernière  assemblée  géné- 
rale. 

M.  le  président  constate  la  présence  de  vingt- trois  membres  du  comité, 
complétant  les  deux  tiers  du  nombre  total  des  membres  exigés  par  les 
statuts  pour  la  validité  du  vote. 

La  réunion  consultée  décide  que  l'on  procédera  immédiatement  au  vote 
par  scrutin  secret. 

Nomination  du  vice-président:  M.  le  grand-vicaire  Schirr  obtient  21  voix. 

Nomination  des  secrétaires  :  M.  le  président  propose  pour  différents 
motifs,  dont  il  donne  le  développement,  de  ne  nommer  qu'un  seul  secré- 
taire. 

Les  deux  secrétaires  objectent  que  les  statuts  exigent  deux  secrétaires 
pour  compléter  le  bureau. 

Le  comité,  après  avoir  entendu  et  discuté  différentes  objections,  décide 
que  l'on  procéderait  à  la  nomination  d'un  seul  secrétaire. 

Votants  :  23.  Deux  bulletins  portent  deux  noms ,  une  fois  Straub  et 
Eissen ,  la  seconde  fois  Eissen  et  Straub.  On  compte  chaque  fois  le  nom 
inscrit  en  tête  du  bulletin.  M.  de  Ring  obtient  3  voix,  M.  Straub,  2, 
M.  Eissen ,  18. 

M.  Eissen  est  proclamé  secrétaire. 

Le  scrutin  pour  la  nomination  du  trésorier  donne  22  voix  à  M.  Klotz , 
et  celui  pour  la  nomination  de  l'archiviste  21  voix  à  M.  Heitz. 
Le  président  déclare  le  bureau  constitué  pour  l'année  1863. 


—  5  - 

L'ordre  du  jour  appelle  la  continuation  des  travaux  ordinaires  du  comité. 
M.  de  Ring  lit  la  note  suivante  sur  un  mémoire  de  M.  le  curé  Siffer: 
«  Dans  la  dernière  séance  du  comité ,  sur  la  proposition  du  président , 
vous  avez  bien  voulu  me  charger  de  vous  rendre  compte  d'un  mémoire 
envoyé  par  M.  le  curé  Siffer,   sur  quelques  traces  de  sépultures,  décou- 
vertes en  1855 ,  au  bord  de  la  forêt  dite  Reubberg ,  prés  de  Zinswiller. 

«  M.  Siffer  n'était  pas  lui-même  sur  les  lieux ,  lorsque  le  hasard  les  fit 
retrouver.  Son  appréciation  ne  porte  donc  que  sur  les  détails  qu'il  a  pu 
recueillir  et  sur  la  vue  de  plusieurs  urnes  qui  ont  été  découvertes  en  cet 
endroit  sous  un  champ  de  culture.  Ces  urnes,  dit-il,  d'une  poterie  noire 
ou  jaune,  remplies  de  cendres  et  d'os  calcinés,  étaient  placées,  les  unes 
au  milieu  d'un  assemblage  de  petites  pierres,  réunies  à  dessein  par  ceux 
qui  avaient  présidé  aux  funérailles;  les  autres  encaissées  debout  dans  des 
pierres  de  grès  d'environ  20  à  30  centimètres  de  hauteur  sur  à  peu  près 
autant  de  diamètre.  Ces  pierres  sont  les  unes  de  forme  carrée,  les  autres 
de  forme  ronde.  La  cavité,  contenant  le  vase  pratiqué  dans  le  centre  de  la 
face  supérieure,  présente  pour  les  unes  et  les  autres  une  forme  sphérique 
simulant  une  coupe. 

.«M.  le  curé  Siffer  demande  si  ces  sépultures  ne  doivent  point  être 
attribuées  aux  Triboques.  Il  est  impossible  de  pouvoir,  avec  ce  peu  de 
données,  répondre  à  cette  question;  ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  qu'à 
Brumath,  la  civitas  Tribocorum  ,  on  a  rencontré  plusieurs  urnes  pareilles, 
soit  en  terre ,  soit  en  verre ,  emboîtées  dans  des  pierres  et  même  scellées 
à  l'aide  de  mortier. 

«  Quoi  qu'il  en  soit,  les  sépultures  du  Reubberg  se  trouvaient  placées, 
comme  celles  de  Reichshoffen  etd'Uttenhoffen,  précédemment  mentionnées 
par  l'auteur  du  mémoire,  à  côté  d'un  ancien  chemin  auquel  on  donne  une 
origine  romaine  et  qui,  d'après  M.  le  colonel  de  Morlet,  traversait  les 
Vosges  par  la  vallée  de  Bœrenthal  pour  se  réunir  à  celui  qui  a  été  signalé 
suivant  la  même  direction  sur  l'autre  versant ,  par  les  archéologues  du 
département  de  la  Moselle.  » 

Il  propose  de  voter  des  remercîments  à  l'auteur,  et  le  dépôt  de  son  tra- 
vail aux  archives  de  la  Société.  —  Le  comité  vote  les  remercîments  et  le 
dépôt. 

Proposition  d'un  nouveau  membre  de  la  Société.  M.  l'abbé  Straub  pro- 
pose l'admission  de  M.  l'abbé  Keller,  rue  du  Bac,  97,  à  Paris.  —  L'admis- 
sion est  prononcée. 

M.  le  président  annonce  que  M.  le  baron  Matthieu  de  Faviers  a  réussi 
dans  les  négociations  dont  il  s'était  chargé  auprès  de  M.  Mannheimer,  pro- 


—  6  — 

priélaire  de  la  ruine  de  Iloli-Kœnigsbourg',  aliii  de  pouvoir  placer  des 
portes  pour  prévenir  les  trop  fréquentes  dégradations  commises  par  les 
visiteurs.  M.  Mannheimer  a  donné  son  consentement  sous  réserve  de  ses 
droits  de  propriétaire. 

M.  lUn/jelsen.  Je  n'ai  pas  assisté  à  la  délibération  du  comité  lorscpi'on  a 
décidé  l'installation  de  ces  portes.  Si  j'avais  été  présent,  j'aurais  appelé 
l'attention  du  comité  sur  les  nombreuses  difficultés  et  même  sur  les  grands 
inconvénients  qui  pourraient  résulter  de  l'adoption  de  cette  mesure.  En 
effet,  la  ruine  est  très-étendue,  et  présente  de  nombreux  points  accessibles. 
Il  faudrait  faire  une  dépense  très-considérable  pour  interdire  absolument 
l'accès  aux  visiteurs  non  autorisés,  et  dès  lors  on  s'exposerait  peut-être  à 
voir  commettre  des  dégâts  plus  nombreux  encore.  Des  visiteurs  entrepre- 
nants finiraient  toujours  par  trouver  un  point  quelconque  pour  s'introduire 
dans  l'intérieur  de  la  ruine,  et  se  vengeraient  ensuite  de  leur  désappointe- 
ment en  se  permettant  des  mutilations  auxquelles  ils  n'auraient  peut-être  pas 
songé,  s'ils  avaient  trouvé  l'accès  entièrement  libre.  Tout  ce  qu'il  me  sem- 
blerait opportun  de  faire,  serait  de  garantir  les  endroits  dangereux,  les 
parties  les  plus  compromises  de  l'édifice  par  des  cloisons  ou  des  bar- 
ricades. 

M.  Bœrsch.  Il  est  évident  que  cette  question  n'a  pas  été  suffisamment 
étudiée.  Je  propose  de  ne  prendre  aucune  décision  à  cet  égard,  avant  que 
M.  Ringeisen,  de  concert  avec  M.  le  baron  Matthieu  de  Faviers,  nous  ait 
soumis  un  rapport  sur  les  mesures  qu'il  conviendrait  de  prendre  dans  l'in- 
térêt de  la  conservation  de  la  ruine. 

Cette  proposition  est  adoptée.  M.  le  président  en  informera  M.  le  baron 
Matthieu  de  Faviers. 

M.  le  ]-)rofesseur  Jung  fait  une  communication  sur  un  certain  nombre 
d'objets  gallo-romains  et  autres,  trouvés,  depuis  une  série  d'années,  à 
Kœnigshofen,  banlieue  de  Strasbourg.  Ce  sont  des  statuettes  en  bronze,  des 
boucles,  des  colliers  d'ambre  et  de  différentes  matières  coloriées,  des  ob- 
jets en  bronze  qu'il  suppose  avoir  été  des  distinctions  militaires,  honorifi- 
ques, etc.  Tous  ces  objets  sont  déposés  sur  le  bureau.  Vu  le  haut  intérêt 
que  présente  cette  communication,  le  comité  prie  M.  le  professeur  Jung 
de  vouloir  bien  la  rédiger  par  écrit,  afin  qu'elle  puisse  être  publiée  dans 
son  Bulletin. 

M.  le  président  annonce  qu'une  réunion  extraordinaire  du  comité  pourra 
devenir  nécessaire  prochainement. 

La  séance  est  levée  à  1  licnre. 


_  7  -~ 

Séance  du  Comité  du  2  mars  1865. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


La  séance  est  ouverte  à  11  heures. 

Sont  présents:  MM.  Bœrsch,  Bissen,  Guerber,  Grass,  Ileitz,  Klotz ,  Morin, 
Petit-Gérard,  baron  de  Sebauenburg,  Straub. 

Le  secrétaire  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  séance  du  2  février, 
qui  est  adopté.  Il  donne  lecture  ensuite  du  procès-verbal  de  In  séance  du 
26  janvier,  tenue  par  le  sous-comité  du  Haut-Rhin  : 

SOUS-COMITÉ  DU  HAUT-RHIN. 


Séance  du  20  janvier  1863. 


Présidence  de  M.  VÉRON- RÉ  VILLE,  vice-président. 

L'an  1863,  le  26  janvier,  à  2  heures  de  relevée,  le  sous-comité  des 
monuments  historiques  pour  le  Haut -Rhin  s'est  réuni  au  lieu  ordinaire 
de  ses  séances. 

Étaient  présents:  MM.  Véron-Réville,  vice-président,  J.  Chauffour,  Liblin, 
Meyer,  Schlumberger- Hartmann,  Huot  et  Brièle,  secrétaire.  MM.  Ham- 
berger,  Stœber  et  Frantz  s'excusent  de  ne  pouvoir  assister  à  la  séance. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et  adopté. 

Dépôt  sur  le  bureau  des  ouvrages  dont  il  est  fait  hommage  au  sous- 
comité. 

Le  vice-président  communique  au  sous-comité  divers' documents,  avec 
dessins  à  l'appui,  relatifs  à  deux  puits  récemment  supprimés  à  Rouffach 
et  qui  dataient,  l'un  du  quinzième  siècle ,  l'autre  de  l'époque  de  la  Renais- 
.sance.  Un  rapport  de  M.  Laubser,  architecte  du  déparlement,  constatant 
que  les  modifications  et  mutilations  subies  par  ces  puits  ont  rendu  impos- 
sible toute  restauration  propre  à  rappeler  le  style  architectural  de  ces  vieux 
monuments,  le  sous-comité  passe  à  l'ordre  du  jour. 

M.  le  Préfet  adresse  au  sous-comité  un  rapport  de  M.  Bogard ,  ingénieur 
des  ponts  et  chaussées,  à  Belfort ,  sur  des  découvertes  de  débris  de 
bâtiments  et  de  constructions,  faites  récemment  à  l'entrée  du  village  de 
BaviUiers ,  à  la  suite  de  déblais  nécessités  par  la  rectification  de  la  route 
impériale  de  Lyon  à  Strasbourg.  Les  portions  de  murs  et  les  débris  de 


—  8  — 

bâtiments  découverts  semblaient  indiquer  qu'ils  avaient  dû  être  détruits 
par  un  incendie.  Dans  les  décombres  on  trouve  des  fragments  d'enduit  ou 
ciment,  des  pavés  en  marbre  blanc,  des  portions  de  frise  en  marbre 
sculpté,  des  tuiles  à  rebord  et  des  fragments  de  poterie,  qui  avaient  fait 
tout  d'abord  croire  à  une  construction  monumentale  de  l'époque  gallo- 
romaine.  Les  fouilles  mirent  également  à  jour  plusieurs  ossements  humains 
carbonisés  et  un  squelette  entier  qui  était  mêlé  aux  décombres.  Toutefois 
un  examen  plus  attentif  donna  bientôt  la  conviction  que  ces  bâtiments 
détruits  n'appartenaient  point  à  une  époque  aussi  ancienne  qu'on  l'avait 
cru  d'abord.  A  défaut  de  données  historiques  positives,  M.  Bogard  dit  avoir 
interrogé  la  tradition  et  tenir  de  vieillards  fort  âgés ,  que  les  vestiges  de 
bâtiments  trouvés  à  l'entrée  du  village  de  Bavilliers  sont  les  ruines  d'un 
ancien  couvent,  détruit  probablement  à  l'époque  de  l'invasion  de  l'Alsace 
par  les  Suédois.  Le  sous  -  comité ,  estimant  qu'il  peut  y  avoir  dans  les 
circonstances  signalées  par  M.  Bogard  un  fait  historique  intéressant  à 
éclaircir ,  renvoie  l'examen  de  la  question  à  M.  le  curé  Zimberlin  et  à 
M.  Bardy,  fils,  membres  de  la  Société. 

Dépôt  opéré  par  M.  Schlumberger  -Hartmann  de  fragments  de  poterie 
et  de  mosaïque  trouvés  par  lui  dans  la  cave  de  la  maison  de  Cicéron ,  à 
Tusculum. 

Communication  par  M.  Huot  d'un  diplôme  de  la  nation  germanique,  de 
l'université  de  Bourges,  délivré  en  1644  à  un  jeune  de  Brinighofen. 

Communication  par  M.  Brièle  d'un  commentaire  du  capitulaire  d'Aix-la- 
Chapelle,  de  Monachis,  document  conservé  dans  les  archives  de  l'abbaye 
de  Murbacb. 

Le  sous-comité  a  reçu  ces  deux  dernières  communications  avec  le  plus 
vif  intérêt. 

M.  Doyen,  juge  de  paix  à  Huningue  et  membre  de  la  Société,  expose 
au  sous-comité  que  la  belle  collection  de  médailles  alsatiques,  laissée  par 
feu  M.  Dorlan,  avocat  à  Schlestadt,  est  sur  le  point  d'être  aliénée  par 
l'héritier  qui  la  détient.  Déjà  ce  dernier  s'est  mis  en  rapport  avec  des  trafi- 
quants de  Paris.  Celte  collection,  unique  dans  son  genre,  réunie  avec  tant 
d'efforts  et  de  sacrifices,  et  qui  vraisemblablement  ne  se  recomposera  plus, 
va  donc  être  dispersée  et  perdue  pour  le  pays  au  sein  duquel  elle  a  été 
formée  et  qui  seul  a  un  intérêt  véritable  à  sa  conservation.  Dans  ces  cir- 
constances, M,  Doyen  demande  au  sous-comité  s'il  ne  serait  pas  urgent 
que  la  Société  prît  l'initiative  et  recherchât  une  combinaison  propre  à 
empêcher  la  dislocation  et  la  dispersion  de  ce  précieux  médaillier  qui  con- 
stitue, dans  son  genre,  pour  l'Alsace  un  véritable  monument  historique. 


—  9  — 

Le  sous-comité,  frappé  de  la  justesse  de  ces  observations  et  reconnaissant 
toute  l'importance  de  la  question  qui  lui  est  soumise,  dit  que  l'examen  en 
sera  porté  et  vivement  recommandé  au  comité  central,  en  sa  prochaine 
séance,  à  laquelle  la  plupart  des  membres  du  sous-comité  se  proposent 
d'assister. 
La  séance  est  levée  à  4  heures. 


Ce  procès-verbal  donne  lieu  à  une  discussion  relative  au  médaillier  de  feu 
M.  Dorlan,  avocat  à  Schlestadt,  (sur  lequel  le  sous-comité  appelle  l'attention 
du  comité,  en  exprimant  le  regret  de  voir  cette  collection  si  éminemment 
alsacienne  sur  le  point  d'être  dispersée,  perdue  à  jamais  pour  la  province 
pour  laquelle  elle  offre  le  plus  puissant  intérêt,  par  suite  de  la  liquidation 
de  la  succession  du  collectionneur. 

Le  président  fait  remarquer,  en  s'appuyant  de  l'opinion  de  M.  le  profes- 
seur Jung,  que  déjà  cette  collection  a  perdu  ses  pièces  les  plus  rares,  que 
dès  lors,  n'étant  plus  complète,  elle  est  loin  d'avoir  la  valeur  que  les  héri- 
tiers lui  attribuent. 

Le  comité  passe  à  l'ordre  du  jour. 

Le  président  dépose  sur  le  bureau  les  ouvrages  suivants  : 

1°  Mémoires  et  documents,  publiés  par  la  Société  d'histoire  et  d'archéo- 
logie de  Genève,  tomes  I-XII  et  XIV,  Genève,  '1841-1862  (13  vol.in-8°); 

2"  Œuvres  historiques  et  littéraires,  de  Léonard  Baulacre,  ancien  biblio- 
thécaire de  la  république  de  Genève  (1728- 178C),  recueilHes  et  mises  en 
ordre  par  Edouard  Mallet,  tomes  1  et  II,  Genève,  1857  (2  vol.  in-8°); 

3''  Congres  archéologique  de  France,  XX VHP  session.  —  Séances  géné- 
rales tenues  à  Reims  en  1861.  Paris,  1862  (1  vol.  in-8°); 

4"  Messager  des  sciences  historiques  de  Belgique,  année  1862,  4^  livrai- 
son (1  broch.  in-8°); 

5'^  Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie,  année  1862, 
n°^  2,  3  et  4(1  broch.  in-8°); 

6°  Miltheilungen  der  antiquarischen  Gesellschaft  in  Zurich ,  Band  XI, 
Heft  3;  Band  Xlll,  Hefte  3,  4,  6  (4  cahiers  in-4°); 

7°  Anzeige  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeil,  18G2,n*'  12  (décembre); 

8*^  Mittheilungen  der  Gesellschaft  für  vaterländische  Alterthümer  in 
Basel,  IX.  Basel,  1862  (1  cahier  in-4°); 

9'^  Mittheilungen  des  historischen  Vereines  für  Steiermark,  eilftes  Heft, 
Gratz,  1862  (1  vol.  in-8°); 

10°  Jahrbücher  für   die  Landeskunde  der  Herzogthümer  Schleswig, 


—  10  — 

Holstein  und  Lauenburf/ ,  Band  V,  Hefte  1,2,  3.  Kiel,  1862  (o  bru- 
chures  in -8"), 

Le  président  informe  le  comité  qu'il  a  écrit  les  lettres  suivantes  depuis 
le  5  janvier  dernier  : 

Correspondance  avec  les  membres  du  Haut-Rhin  au  sujet  du  renouvelle- 
ment du  bureau; 

A  M.  le  Préfet  du  Haut -Rhin,  au  sujet  du  versement  de  la  sub- 
vention votée  par  le  Conseil  général  de  son  département,  pour  l'exer- 
cice 18G2; 

Accusé  de  réception  et  lettre  de  remercîments  pour  la  somme  reçue  ; 

Correspondance  avec  M.  le  baron  Matthieu  de  Faviers,  et  avec  M.  Mann- 
heimer, propriétaire  à  Cohnar,  relativement  aux  clôtures  à  établir  au  châ- 
teau de  Hoh-KœniQsbour^-; 

Lettre  à  M.  Jules  Thilloy,  procureur  impérial  à  Sarreguemines,  au  sujet 
d'un  travail  projeté  par  lui  sur  l'abbaye  de  Herbitzheim; 

Lettre  à  M.  Lefort,  président  de  la  Société  d'histoire  et  d'archéologie  de 
Genève;  remercîments  pour  l'envoi  de  la  collection  des  mémoires  de  cette 
Société;  annonce  de  l'envoi  de  notre  Bulletin; 

A  M.  Véron-Réville  au  sujet  du  médaillier  de  feu  M.  Dorlan  ; 

Au  même,  au  sujet  des  travaux  à  faire  au  château  d'Eguisheim; 

A  M.  Ingold,  à  Cernay,  pour  avoir  des  renseignements  sur  les  travaux 
du  château  d'Engelsbourg,  à  Thann,  et  du  tertre  d'Uiïholtz,  et  le  prier  d'en 
référer  au  sous-comité  de  Colmar; 

A  M.  Louis  Levrault,  à  Obernai,  pour  le  prier  de  surveiller  les  décou- 
vertes faites  dans  cette  localité; 

A  M.  Sichert,  à  Obernai,  lettre  de  remercîments  pour  ses  communica- 
tions relatives  au  même  objet. 

Le  président  annonce  que  la  Société  historique  de  Berne  {Gesellschaft 
für  Geschichtsforschum/)  demande  à  établir  des  relations  avec  la  Société 
d'Alsace.  L'étabhssement  de  ces  relations  est  décidé. 

Il  dépose  sur  le  bureau  une  photographie  dont  M.  Stuber,  architecte,  fait 
hommage  à  la  Société.  Cette  photographie  représente  une  restauration  fort 
intéressante  du  château  de  Landsperg.  Remercîments. 

M.  Klotz  dépose,  au  nom  de  M.  le  docteur  Rouis,  médecin  principal, 
sous-directeur  de  l'École  du  service  de  santé  militaire,  qui  en  fait  hom- 
mage à  la  Société,  deux  fort  beaux  fers  de  lance,  trouvés  à  Ilochfelden, 
accompagnés  d'une  notice  et  d'un  plan  des  lieux. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  le  docteur  Rouis. 

M.  de  Morlct  constate  (juc  ces  objets  se  sont  trouvés  précisément  à  l'en- 


—  M  — 

droit  où  devaienl  se  rencontrer  deux  voies  romaines,  l'une  venant  de  Sa- 
verne,  par  la  rive  doite  de  la  Zorn,  l'autre  de  Bouxwiller. 

M.  le  président  donne  communication  de  la  démission  de  M.  de  Ring, 
comme  membre  de  la  Société,  et  d'une  lettre  de  M.  Liblin,  proposant  comme 
membre,  M.  Constant  Schœllbaum,  architecte  à  Colmar.  L'admission  de 
M.  Schœllbaum  est  prononcée.  La  lettre  de  M.  Liblin  donne  lieu  à  des 
réclamations  de  la  part  du  trésorier.  Selon  la  teneur  de  cette  lettre,  M.  Li- 
blin paraît  supposer  qne  le  comité  a  déjà  voté  un  crédit  de?  à 800  fr. pour 
travaux  aux  châteaux  de  Hoh-Landsperg  et  Plixbourg,  tandis  (jue  ce  vote 
n'a  pas  encore  eu  lieu. 

Quelques  membres  proposent  de  voter  ce  crédit  immédiatement. 

Sur  la  proposition  de  M.  le  président,  ce  vote  est  mis  à  l'ordre  du  jour 
de  la  réunion  générale  qui  se  tiendra  à  Colmar. 

M.  le  président  communique  au  comité  le  programme  des  questions  pro- 
posées par  les  diverses  sections  du  congrès  scientifique  de  France ,  dont  la 
trentième  session  aura  lieu  du  10  au  20  août,  à  Chambéry. 

Il  communique  également  une  lettre  de  M.  le  Ministre  de  l'instruction 
publique  et  des  cultes  annonçant  la  distribution  solennelle  des  prix  ac- 
cordés aux  sociétés  savantes,  qui  aura  lieu  le  il  avril  prochain,  à  la  Sor- 
bonne. 

M.  le  curé  Guerber  demande  la  parole  pour  une  motion  d'urgence. 
«  D'importantes  découvertes  archéologiques,  dit-il,  ont  été  faites  à  l'église 
paroissiale  de  Wissembourg.  Il  serait  d'un  grand  intérêt  de  continuer  les 
travaux  dans  la  direction  suivie  jusqu'ici,  et  d'allouer  à  cet  elîet  une 
somme  de  400  fr.  pour  cet  objet,  dont  la  moitié  serait  consacrée  à  la  re- 
cherche de  ces  peintures  murales  et  l'autre  moitié  à  décalquer  les  dessins 
découverts,  ainsi  que  cela  a  déjà  été  fait.  » 

M.  Klotz  demande  qu'on  ajoute  200  fr.  de  plus  pour  le  rétablissement  de 
l'ancien  niveau  du  sol  de  l'église. 

On  réplique  que  le  régime  des  cours  d'eau  de  Wissembourg  paraît 
s'opposer  d'une  manière  absolue  à  toute  tentative  dans  ce  sens,  l'ancien 
pavé  de  l'église  étant  en  contre-bas  du  niveau  des  canaux  acluels.  La  ques- 
tion est  d'ailleurs  à  l'étude  des  ingénieurs,  et  parait  devoir  entraîner  des 
frais  très-considérables.  11  faudrait  que  la  comnume  de  Wissembourg  inter- 
vînt pour  cela;  dans  ce  cas,  les  200  fr.  votés  par  la  Société  ne  seraient  qu'un 
appoint  illusoire  en  présence  des  sommes  importantes  qu'il  faudrait  consa- 
crer aux  travaux  de  nivellement,  entrepris  simultanément  en  dedans  et  en 
dehors  de  l'église. 

M.  le  baron  de  Schauenbuig  propose  en  conséquence  d'écrire  à  M.  le 


—  12  — 

maire  ou  à  M.  le  curé  de  Wissembourg,  pour  s'informer  de  l'état  de  la 
question,  avant  de  voter  les  200  fr.  proposés  par  M.  Klotz. 

Cette  proposition  est  adoptée. 

Le  comité  vote  ensuite  les  400  fr.  demandés  par  M.  Guerber,  avec  la 
stipulation  expresse  qu'une  moitié  sera  employée  pour  continuer  la  re- 
cherche des  peintures  murales,  et  l'autre  moitié  pour  décalquer. 

M.  le  président  communique  un  mémoire  de  M.  L.  Levrault  sur  les  dé- 
couvertes archéologiques  faites  à  Obernai.  Lecture  est  donnée  de  ce  mé- 
moire, dont  l'impression  dans  le  Bulletin  est  décidée  par  le  comité,  ainsi 
que  la  reproduction  des  dessins  qui  l'accompagnent.  On  décide  en  outre 
que  M.  L.  Levrault  sera  prié  de  s'informer  si  les  recherches  pourraient  se 
continuer,  et  d'envoyer  à  l'examen  du  comité  les  médailles  trouvées. 

M.  le  colonel  de  Morlet  annonce  que  certains  travaux  de  terrassements, 
ainsi  que  la  plantation  d'une  haie,  décidés  dans  l'intérêt  de  la  conservation 
des  ruines  de  Mackwiller,  sont  sur  le  point  d'être  terminés,  grâce  aux  soins 
et  à  l'activité  de  M.  Schmidt,  agent  voyer  à  Drulingen. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M,  Schmidt,  ainsi  qu'une  somme  de 
150  fr.  pour  solde  de  ces  travaux. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  communique  une  lettre  de  M.  Saglio  de 
Walbourg,  demandant  que  le  comité  envoie  une  commission  dans  cette 
localité  pour  examiner  les  travaux  qu'il  conviendrait  d'entreprendre  à 
l'église,  où  des  fresques,  couvertes  par  le  badigeon,  commencent  à  repa- 
raître, et  qui  possède  des  vitraux  d'un  grand  mérite.  La  décision  à  inter- 
venir est  renvoyée  à  la  séance  d'avril. 

M.  le  trésorier  soumet  au  comité  le  relevé  de  quelques  sommes  votées 
dans  l'exercice  précédent,  mais  qui  n'ont  pas  été  employées.  Il  demande 
l'autorisation  de  reporter  d'office  ces  sommes  au  prochain  budget. 

Cette  autorisation  est  accordée. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  dépose  sur  le  bureau  la  photographie  d'une 
fresque  découverte  dans  le  cloître  de  l'ancien  couvent  des  Dominicains  de 
Strasbourg,  11  a  l'espoir  de  pouvoir  conserver  la  peinture  avec  un  fragment 
du  mur  qui  doit  être  démoli,  et  demande  à  être  autorisé  de  procéder  à 
cette  opération,  sauf  à  demander  des  fonds  plus  tard. 

Cette  autorisation  est  accordée. 

M.  le  président,  vu  le  grand  nombre  de  travaux  à  examiner,  demande 
une  réunion  extraordinaire  pour  le  lundi  9  mars. 

Le  comité  se  prononce  dans  ce  sens. 

La  séance  est  levée  à  1  heure. 


—  13  — 

Séance  du  Comité  du  9  mars  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents  :  MM.  de  Schauenbiirg,  de  Morlet,  Ringeisen,  Jung,  Heitz, 
Bœrsch,  Straub,  Petit-Gérard,  Klotz. 

M.M.  Sabourin  de  Nanton,  et  Thomas,  membres  libres,  assistent  à  la  réu- 
nion. 

M.  Jung  invite  ses  collègues  à  descendre  dans  l'emplacement  de  l'ancien 
cloître  des  Dominicains,  pour  y  inspecter  avec  lui  les  découvertes  d'anciens 
tuyaux,  d'un  four  et  de  poteries.  M.  Jung  explique  sur  place  la  direction 
des  tuyaux,  la  disposition  du  four,  et  se  réserve  de  prendre  ultérieurement 
des  conclusions,  ou  d'émettre  un  avis  sur  l'époque  et  la  destination  de  ces 
matériaux. 

La  séance  ordinaire  est  reprise  vers  midi. 

En  l'absence  de  M.  Eissen,  indisposé,  le  président  se  charge  de  tenir  la 
plume. 

M.  Ringeisen  rend  compte  de  la  mutilation  subie  par  une  colonne  mil- 
liaire,  sise  dans  le  champ  d'un  particulier,  près  de  Châtenois.  Il  demande  à 
être  autorisé  à  prendre  avec  le  propriétaire  des  arrangements  pour  le  re- 
placement, la  restauration  et  la  conservation  de  ce  petit  monument  romain. 
—  Le  comité  donne  ses  pleins  pouvoirs  à  M.  Ringeisen. 

M.  de  Morlet  annonce  avoir  pris,  de  concert  avec  M.  Klotz,  des  mesures 
pour  la  confection  des  vitrines,  destinées  à  la  conservation  d'une  partie 
des  objets  de  notre  musée.  Il  demande  l'allocation  d'un  crédit  de  300  fr. 
pour  la  confection  de  ce  mobilier  indispensable.  —  Accordé. 

On  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  séance  du  2  mars,  qui  est  adopté, 
après  quelques  légères  modifications. 

Le  président  annonce  avoir  écrit,  dans  l'intervalle  du  2  au  9  mars,  les 
lettres  suivantes  : 

A  M.  Stuber,  architecte,  pour  le  remercier  du  don  récemment  fait  à  la 
Société; 

A  M.  Louis  Levrault,  à  Obernai,  à  l'occasion  des  fouilles  et  des  décou- 
vertes faites  dans  cette  localité; 

A  M.  Rouis,  sous-directeur  de  l'École  de  santé,  pour  le  remercier  du  don 
de  deux  fers  de  lance  trouvés  à  Mittelhausen  ; 

A  M.  Berger-Levrault,  imprimeur  du  Bulletin^  pour  le  prévenir  que  les 


—  14  — 

cuivres  et  petits  bois  employés  dans  le  texte,  demeurent  la  propriété  de  la 
Société; 

A  M.  Schmitt,  agent  voyer  à  Saar-Union,  pour  le  remercier  des  soins 
donnés  à  la  clôture  des  thermes  de  Mackwiller,  et  pour  établir  le  solde  de 
cette  clôture  ; 

A  M.  Klotz,  pour  le  même  objet  et  pour  diverses  questions  de  comptabilité; 

A  M.  Véron-Réville,  vice-président  du  comité  de  Col  mar,  pour  le  prier 
de  saisir  le  comité  de  la  question  de  déblayer  les  châteaux  de  Hoh-Lands- 
perg  et  de  Plixbourg; 

A  M.  Michel  Saglio,  pour  le  remercier  de  l'invitation  adressée  au  comité, 
à  l'effet  d'examiner  sur  place  les  vitraux  de  Walbourg  ; 

A  MM.  le  curé  de  Wissembourg,  Ohleyer,  Matuszinsky  et  Klotz,  au  sujet 
des  travaux  à  exécuter  dans  l'église  paroissiale  de  Wissembourg; 

A  M.  de  Morlet,  au  sujet  du  moulage  en  plâtre  du  plan  en  relief  des 
thermes  de  Mackwiller; 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin,  pour  le  prier  de  vouloir  bien  mandater  les 
fonds  votés  par  le  Conseil  général  (exercice  1862),  pour  les  monuments 
historiques; 

A  M.  le  président  de  la  Société  historique  générale  de  la  Suisse,  en  rési- 
dence à  Berne',  pour  l'établissement  de  rapports  entre  les  deux  Sociétés; 

A  Son  Excellence  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique,  pour  lui  an- 
noncer la  nouvelle  composition  du  bureau. 

M.  le  professeur  Jung  dépose  sur  le  bureau  des  anneaux  de  bronze,  dé- 
couverts à  Lingolsheim;  il  fait  à  ce  sujet  le  rapport  qui  suit  : 

«  Les  recherches  faites  dans  les  tombeaux  appelés  communément  gallo- 
romains,  ont  le  plus  souvent  conduit  à  la  découverte  d'anneaux  en  bronze, 
ornementation,  à  ce  qu'il  paraît,  assez  commune  qui  a  été  enterrée  avec  le 
défunt,  ou  plutôt  avec  la  défunte. 

«11  y  a  quelques  jours,  un  habitant  de  la  commune  de  Lingolsheim,  oc- 
cupé à  disposer  son  champ  longeant  la  grande  route,  pour  y  bâtir  une 
maison,  a  rencontré  dans  la  couche  de  sable  un  squelette  qui,  par  les  pro- 
portions des  ossements,  doit  avoir  fait  partie  du  corps  d'une  femme  d'une 
constitution  délicate.  On  a  d'abord  mis  à  découvert  les  pieds,  et  les  ouvriers 
sont  arrivés  successivement  aux  bras  et  à  la  tcte.  En  mettant  à  découvert 
les  pieds,  ils  ont  commencé  par  trouver  deux  anneaux  de  bronze  à  chaque 
pied,  le  même  nombre  d'anneaux  a  marqué  les  hras,  enfin,  deux  anneaux 
plus  grands  se  sont  trouvés  à  la  place  du  cou,  en  tout  dix  cercles  de  façon 
égale,  mais  de  diamètres  différents.  Ceux  des  bras  ont  environ  6  centi- 
mètres de  diamètre-,  ceux  des  pieds  entre  8  et  9,  et  ceux  du  cou,  15. 


—  15  — 

«  (juonl  i"i  leur  forme,  ils  ressemblent  à  ceux  qu'on  a  rencontrés  dans 
toutes  ces  tombes;  ils  sont  le  produit  de  la  fonte,  mais  ne  sont  pas  creux 
comme  les  anneaux  de  métaux  plus  précieux.  A  la  jointure,  ils  se  terminent 
par  deux  boutons  qui  étaient  liés  peut-être  par  un  métal  ou  une  autre  ma- 
tière pour  faire  le  cercle.  Les  boutons  qui  se  rattachaient,  sont  précédés 
par  d'autres  plus  petits  et  marqués  par  quelques  rainures.  >> 

Cette  découverte  est  remarquable  en  ce  qu'elle  nous  offre  le  cas  très- 
rare,  peut-être  unique,  d'une  ornementation  complète  dans  ce  genre. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  donne  communication  d'une  lettre  de  M.  de 
Schauenburg,  de  Hochfelden,  au  sujet  des  découvertes  faites  près  de  Mu- 
tzenbausen. 

Le  mème^membre  dépose  sur  le  bureau  un  médaillier  en  bronze,  conte- 
nant la  série  complète  des  ducs  de  Lorraine.  —  Remercîments. 

On  procède  à  la  lecture  des  mémoires  déposés  depuis  quelque  temps 
dans  les  carions  du  comité  : 

1°  De  celui  de  M.  Sabourin  de  Nanton,  sur  la  statue  de  saint  Apollinaire, 
dans  l'église  d'Obermicbelbach.  Ce  travail  est  renvoyé  au  comité  de  Colmar, 
pour  émettre  un  avis  et  prendre  des  mesures  dans  l'intérêt  de  la  conserva- 
lion  de  cet  objet  d'art  ; 

2'^  De  celui  de  M.  le  curé  Siffer,  sur  la  grande  voie  romaine  de  Brumath 
à  Seltz ,  notamment  sur  la  partie  sise  entre  Weitbruch  et  Kaltenhausen. 
Ce  mémoire  trouvera  place  au  Bulletin. 

La  lecture  des  mémoires  sera  reprise  le  16  mars  prochain. 


Séance  extraordinaire  du  Comité  du  16  mars  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Eissen ,  secrétaire,  Grass,  Heitz,  colonel  de  Morlet, 
L.  Levrault,  Petit-Gérard,  baron  de  Schauenburg. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  9  mars  est  lu  et  adopté. 

Le  secrétaire  dépose:  Ânzeir/cr  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit,  t.  X, 
n"  1  ;  —  Mémoires  de  la  Société  académique  d'archéologie ,  sciences  et  arts 
du  département  de  l'Oise,  t.  V,  1'"''  partie. 

M.  Petit- Gérard  dépose  un  dessin  de  M.  N.  Nicklès,  représentant  un 
écusson  sculpté ,  trouvé  à  Benfeld. 


—  16  — 

Le  président  annonce  (|u'il  a  écrit  à  M.  le  maire  de  Wissembourg  au 
sujet  de  l'abaissement  du  dallage  de  l'église  de  Saint-Pierre  et  Saint-Paul; 
—  AM.  Véron-Piéville:  Envoi  d'un  mémoire  de  M.  Sabourin  de  Nanton 
sur  la  statue  de  saint  Apollinaire  à  Obermichelbach,  avec  prière  d'examiner 
la  question  et  de  donner  un  avis. 

En  même  temps  il  expose  au  comité  que,  d'après  son  opinion  ,  la  réunion 
générale  de  Colmar  devra  être  retardée  cette  année  jusqu'à  la  fin  d'avril 
ou  au  commencement  de  mai,  vu  les  fêtes  de  Pâques  et  la  tournée  de  ré- 
vision de  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin,  Il  sera  donné  avis  de  cette  décision  à 
M.  Véron-Réville. 

Lecture  est  donnée  par  M.  le  baron  de  Schauenburg  et  par  M.  Levrault 
d'un  mémoire  de  M.  l'abbé  Gyss  d'Obernai  sur  l'hôtel  de  ville  de  celte 
localité. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Gyss  et  décide  l'impression  dans 
le  Bulletin,  sauf  à  prier  l'auteur  de  vouloir  bien  opérer  quelques  réduc- 
tions exigées  par  les  limites  des  publications  de  la  Société. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  donne  lecture  d'un  mémoire  critique  de 
M.  Coste  sur  l'emplacement  d'Argentovaria. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Coste  et  décide  l'insertion  du 
mémoire  dans  son  Bulletin,  ainsi  que  de  la  carte  qui  l'accompagne. 

La  séance  est  levée  à  i  heure. 


Séance  du  Comité  du  i3  avril  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Eissen,  Grass,  Heitz,  Klotz,  colonel  de  Morlet,  baron  de 
Schauenburg ,  Schirr. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Le  secrétaire  dépose  sur  le  bureau  : 

Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit ,  1863,  n°  2; 

Bulletin  de  la  Société  d' archéologie  et  d'histoire  de  la  Moselle  ; 

Mémoires  de  la  même.  5^  année ,  1862  ; 

Revue  des  Sociétés  savantes  des  départements.  3'^  série ,  t.  I  ; 

Mém,oires ,  lus  à  la  Sorbonne  dans  les  séances  extraordinaires  du  Con- 
seil impérial.  2  vol.,  l'un  intitulé  Archéologie,  l'autre  Histoire,  philologie 
et  sciences  inorales  ; 


-  17  — 

Mémoire  de  la  Société  des  antiquaires  de  France ,  t.  XXV  et  XXVI  ; 
Bulletin  de  la  même  société.  1862.  3^  trimestre. 
Lecture  est  donnée  par  le  secrétaire  du  procès-verbal  suivant  du  sous- 
comité  du  Haut-Rhin  du  16  mars  dernier. 

SOUS-COMITÉ  DU  HAUT-RHIN. 

Séance  du  16  mars  1863. 

Présidence  de  M.  VÉR ON-RÉ VILLE ,  vice -président. 

Présents  :  MM.  Meyer,  J.  Chauffour,  Huot,  Liblin,  Schlumberger-Hart- 
mann,  Frantz,  Brièle,  secrétaire,  membres  du  sous-comité. 

MM.  l'abbé  Reinhart,  Foltz  et  Schœllbaum,  membres  libres  de  la  Société, 
assistent  à  la  séance. 

Lecture  est  donnée  par  le  secrétaire  du  procès-verbal  de  la  séance  pré- 
cédente. Le  vice-président  expose  que,  depuis  la  dernière  séance,  il  a  re- 
cueilli, relativement  au  médaillieralsatique  de  feu  M.  Dorlan,  de  Schlestadt, 
des  renseignements  desquels  il  résulte  que  cette  collection,  après  avoir 
subi  des  phases  diverses  et  passé  par  différentes  mains,  aurait  perdu  une 
grande  partie  de  son  importance  par  suite  de  l'aliénation  ou  de  la  distrac- 
tion de  quelques-unes  de  ses  pièces  les  plus  précieuses.  D'autre  part,  le 
comité  central  semblerait  peu  disposé  à  poursuivre  l'acquisition  de  ce  mé- 
daillier,  dont  le  propriétaire  actuel  demande  un  prix  que  ni  les  ressources, 
ni  les  moyens  dont  peut  disposer  la  Société,  ne  permettraient  de  réaliser. 
En  conséquence,  le  vice-président  propose  de  laisser  au  comité  central,  à 
qui  la  question  a  déjà  été  renvoyée,  le  soin  de  l'apprécier  définitivement , 
sans  que  le  sous-comité  ait  dès  lors  à  s'en  occuper  davantage. 

M.  Liblin  conteste  la  portée  des  documents  produits.  Il  pense,  au  con- 
traire, que  la  question  a  conservé  toute  l'importance  que  lui  avait  reconnue 
la  délibération  précédente  du  sous-comité;  iljnsiste  pour  que  l'examen  du 
médaillier  de  M.  Dorlan  soit  confié  à  une  commission  dont  le  travail  déter- 
minera peut-être  le  sous-comité  à  recommander  plus  vivement  encore  à 
la  sollicitude  du  comité  central,  la  proposition  de  M.  Doyen. 

Le  sous-comité,  sans  juger  nécessaire  de  nommer  une  commission,  dé- 
cide que  MM.  Drion  et  Ringeisen,  membres  de  la  Société,  à  Schlestadt, 
seront  priés  de  vouloir  bien  l'éclairer  sur  la  question  de  l'intégrité  du  mé- 
daillier de  M.  Dorlan,  et  de  sa  valeur  actuelle. 

TI-Skrie.  —  T.  II.  —  (p.-v.;  - 


-   18  — 

Dépôt  est  effectué  sur  le  bureau  tWui  fragment  de  frise  et  de  débris  de 
poterie  et  autres,  trouvés  parmi  les  ruines  de  bâtiments  incendiés,  récem- 
ment mis  à  jour,  à  la  suite  de  fouilles  opérées  près  de  Bavilliers,  par  les 
soins  de  l'administration  des  ponls  et  chaussées.  M.  Schlumberger-IIart- 
mann,  après  avoir  examiné  avec  soin  ces  fragments,  pense  qu'ils  provien- 
nent d'un  établissement  remontant  à  la  période  gallo-romaine.  Celte  appré- 
ciation confirme  celle  de  MM.  Zimberlin  et  Bardy  qui,  consultés  à  ce  sujet, 
ont  répondu  par  deux  lettres  séparées,  dont  il  est  donné  lecture,  et  qui 
aboutissent  à  cette  double  conclusion  contraire  à  l'opinion  exprimée  par 
M.  l'ingénieur  Bogard  :  1°  qu'il  n'y  a  jamais  eu  de  couvent  à  Bavilliers; 
2"  que  les  ruines  qui  y  ont  été  récemment  découvertes  doivent  dater  de  la 
période  romaine  et  qu'elles  prouvent  une  fois  de  plus  ce  qu'avaient  déjà 
révélé  les  découvertes  faites  à  Offemont  et  à  Chàlonvillars,  qu'il  existait,  dans 
celte  partie  de  notre  département,  des  établissements  romains  considé- 
rables. 

Le  sous-comité,  en  remerciant  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin  de  son  inter- 
vention dans  cette  question ,  et  M.  Bogard  des  soins  qu'il  a  bien  voulu  y 
apporter,  décide  que  M.  le  Préfet  sera  prié  de  vouloir  bien  recommander 
aux  agents  de  l'administration  de  laisser,  autant  que  possible,  les  heux 
dans  l'étal  où  ils  se  trouvent  en  ce  moment,  de  manière  à  ce  qu'ils  puissent 
servir  de  point  de  départ,  pour  le  cas  où,  dans  la  suite,  des  investigations 
nouvelles  seraient  tentées  sur  ce  point. 

Le  vice-président  communique  au  sous-comité  une  demande  dont  l'exa- 
men lui  a  été  renvoyé  par  le  comité  central,  et  par  laquelle  M.  Liblin,  en 
proposant  l'admission  comme  membre  de  la  Société,  de  M.  Schœllbaum, 
architecte  à  Colmar,  exprimait  le  vœu  que  cet  homme  de  l'art  fût  chargé 
d'examiner  l'état  dans  lequel  se  trouvent  les  châteaux  de  Hoh-Landsperg 
et  de  Plixbourg ,  et  de  déterminer  la  nature  et  l'importance  des  travaux  de 
réparation  ou  de  consolidation  à  opérer  pour  la  conservation  de  ces  inté- 
ressants monuments.  M.  Schœllbaum,  présent  à  la  séance,  déclare  être  prêt 
à  remplir  cette  mission,  et  promet  de  rendre  compte  du  résultat  de  ses 
soins  à  l'une  des  prochaines  ^éances  du  sous-comité. 

En  acceptant  avec  satisfaction  le  concours  de  M.  Schœllbaum,  le  sous- 
comilé  lui  confie  en  même  temps  les  projets  et  devis  de  MM.  Ortlieb  et  Ring- 
eiscn,  relatifs  aux  travaux  à  effectuer  aux  châteaux  d'Eguisheim,  pour 
lesquels  le  comité  central  a  alloué  une  somme  de  700  fr.,  déposée  entre  les 
mains  de  M.  Brièle.  M.  Schœllbaum  veut  bien  s'engager  également  à  assurer 
l'exécution  de  ces  Iravaux. 


—  19  — 

Le  secrétaire  donne  ensuite  lecture  d'un  rapport  de  M.  Sabourin  de  Nan- 
lon,  relativement  à  des  réparations  d'une  nature  fort  délicate  qu'exigerait  la 
statue  de  saint  Apollinaire,  œuvre  d'art  remarquable  qui  se  trouve  dans  l'église 
d'Obermichelbach.  Le  sous-comité,  tout  en  exprimant  le  regret  de  ne  pou- 
voir prendre  les  mesures  propres  à  l'exécution  de  ces  travaux,  décide  que 
M.  le  Préfet  sera  prié  d'en  faire  prendre  note,  pour  le  cas  où  des  fonds  à 
consacrer  aux  œuvres  d'art  seraient  rais  à  sa  disposition  ;  qu'enfin ,  M.  le 
curé  d'Obermichelbach  sera  prié,  de  son  côté,  de  veiller  à  ce  qu'il  ne  soit 
rien  fait  à  la  statue  dont  il  s'agit,  jusqu'à  ce  que  l'administration  ou  la 
Société  soient  en  mesure  de  confier  à  un  artiste  spécial  l'exécution  de  ces 
travaux. 

Le  vice-président  donne  communication  au  sous-comité  d'une  notice  qui 
lui  a  été  adressée  par  M.  Bardy,  de  Saint-Dié,  sur  le  village  de  Bermont,  et 
d'un  dessin  fort  bien  fait  représentant  la  petite  église  romane  de  ce  vil- 
lage. Le  sous-comité  décide  que  le  tout  sera  transmis  au  comité  central, 
avec  proposition  de  faire  insérer  au  Bulletin  de  la  Société,  le  dessin  de 
l'église  de  Bermont,  ainsi  que  la  partie  de  la  notice  de  M.  Bardy  qui  s'y 
rapporte. 

Communication  est  donnée  par  le  vice-président,  de  trois  fragments 
détachés  d'un  roman  historique,  intitulé:  la  Kaysershurg  d'Alsace,  par  feu 
M.  le  docteur  Richard,  de  Colmar.  La  lecture  de  ces  fragments  qui  donne 
une  idée  de  la  manière  de  l'auteur,  au  point  de  vue  descriptif,  historique 
et  légendaire,  est  écoutée  avec  le  plus  vif  intérêt  par  le  sous-comité. 

La  séance  est  levée  à  4  heures  et  demie. 

Le  président  annonce  qu'il  a  écrit  : 

A  M.  Stoffel,  juge  à  Wissembourg,  au  sujet  de  son  travail  sur  Dœrren- 
bach; 

A  M.  Coste,  lettre  de  remercîments  et  de  félicitations  sur  son  travail 
relatif  à  l'emplacement  d'Argentovaria; 

A  M.  Gyss  à  Obernai ,  lettre  de  remercîments  et  de  félicitations  sur  son 
travail  relatif  à  l'hôtel  de  ville  d'Obernai  ; 

A  M.  Véron-Réville ,  au  sujet  de  l'époque  de  la  convocation  de  l'assemblée 
générale  de  Colmar  ; 

A  M.  le  commissaire  central  pour  recommander  à  sa  sollicitude  la  sur- 
veillance du  petit  musée  placé  entre  les  contre-forts  de  la  Bibliothèque  ; 

A  M.  le  receveur  général  du  Haut  -  Rhin  au  sujet  des  recouvrements  de 
la  Société  dans  son  déparlement. 

Il  communique  la  réponse  de  M.  Véron  -  Réville  ,  qui  annonce  que  M.  le 


—  20  — 

Préfet  du  Haut  -Rhin  veut  bien  accepter  Je  7  mai  prochain  comme  jour  de 
réunion  de  l'assemblée  générale  dans  le  Haut-Rhin  ; 

Une  autre  de  M.  le  receveur  général  du  Haut -Rhin,  qui  veut  bien  se 
charger  des  recouvrements  de  la  Société; 

Une  autre  de  M.  Knoll ,  membre  de  la  Société,  proposant  l'admission 
de  M.  Brumpt,  professeur  de  musique  à  Guebwiller; 

Une  autre  de  M.  le  maire  de  Wissembourg  au  sujet  de  l'abaissement  du 
dallage  de  l'église  de  Saint -Pierre  et  Saint- Paul.  Les  explications  données 
par  cette  lettre  déterminent  le  comité  à  ne  plus  s'occuper  provisoirement 
de  cette  question. 

L'admission  de  M.  Charles  Brumpt  comme  membre  de  la  Société  est 
prononcée. 

M.  le  président  et  M.  le  colonel  de  Morlet  proposent  de  conférer  dans 
la  réunion  générale  du  Haut -Rhin  le  titre  de  membres  honoraires  à 
MM.  Anatole  de  Barthélémy,  ancien  sous-préfet  de  Belfort,  et  Robert, 
directeur  général  de  l'administration  au  ministère  de  la  guerre,  auteur 
d'un  ouvrage  très-estimé  sur  la  numismatique  et  l'archéologie,  membre 
correspondant  de  l'Institut. 

M.  le  colonel  de  Morlet  lit  la  lettre  suivante  de  M.  Goste  : 

«Monsieur  le  Colonel,  le  canton  rural  de  la  banlieue  de  Grussenheim , 
où  l'on  remarque  la  bifurcation  des  deux  voies  romaines,  porte  le  nom 
de  Hengst.  Comme  il  est  d'usage  dans  la  haute  Alsace  d'appeler  ainsi  les 
étalons,  et  que  la  forêt  de  la  Harth  de  Marckolsheim  est  tout  près,  je 
pensais  que  ce  canton  devait  être  un  ancien  pâturage. 

«  La  curiosité  m'a  fait  ouvrir  le  glossaire  de  Schertz  et  j'y  ai  trouvé  que 
Hengst  est  la  même  chose  que  tolleno ,  un  puits  à  bascule,  semblable  à 
celui  qui  est  à  quelques  pas  du  sommet  de  l'angle  formé  par  la  bifurca- 
tion. La  forme  de  ces  puits  est  fort  ancienne,  ainsi  que  me  l'a  prouvé 
une  gravure  du  Dictionnaire  des  antiquités  de  Rieh ,  traduit  sous  la  di- 
rection de  M.  Chéruel.  Les  margelles  de  ces  puits  à  bascule  me  sem- 
blent devoir  être  examinées,  dessinées  et  mesurées,  car  il  est  probable 
qu'il  en  est  de  fort  anciennes.  Je  crois  pouvoir  citer  celles  de  Grussen- 
heim, de  Heidolsheim;  et  une  autre  sur  le  Schmalslrsessel  entre  Benfeld 
et  Kertzfeld. 

«  Ne  pensez-vous  pas  qu'il  serait  utile  d'appeler  sur  ce  point  l'attention 
de  nos  observateurs  les  plus  connus  dans  la  Société?  C'est  une  étude  à 
essayer  comme  bien  d'autres.  » 

Cette  lecture  donne  lieu  à  quelques  observations.  M.  le  baron  de 
Schauenburg  pense  qu'à  raison  des  nombreuses  conditions  d'usure  aux- 


—  21  — 

quelles  les  auges  des  puits  sont  exposées,  et  qui  ne  leur  constituent  qu'une 
durée  assez  limitée,  il  sera  difficile  de  trouver  aujourd'hui  encore  des 
parties  primitives  de  ces  appareils,  et  que,  quant  au  terme  de  Hengst,  il  se 
retrouve  partout  où  l'on  entretenait  des  animaux  reproducteurs,  Hengst- 
matt, Miimmelmatl ,  etc.,  sans  qu'il  s'y  trouve  toujours  des  puits. 

M.  Eissen  tait  remarquer  qu'il  existe  dans  les  champs ,  entre  la  route 
impériale  de  Paris  à  Strasbourg,  et  la  route  départementale  n°  1 ,  à  la 
hauteur  à  peu  près  de  la  propriété  Hurel,  une  auge  de  puits  formée  avec 
un  cercueil  en  pierre,  probablement  déterré  en  cet  endroit  pendant  que 
l'on  creusait  le  puits. 

M.  le  colonel  de  Morlet  rappelle  qu'on  a  découvei't  à  Saint-Léonard  une 
quantité  considérable  de  petites  monnaies. 

M.  deDartein  promet  une  note  sur  cette  trouvaille,  ainsi  que  l'envoi  d'un 
certain  nombre  de  spécimens. 

Le  trésorier  dépose  le  rapport  sur  le  budget  de  1862,  arrêté  avec  un 
reliquat  actif  de  6,546  fr.  40  c. ,  et  les  pièces  de  comptabilité  à  l'appui, 
ainsi  que  le  budget  de  1863,  arrêté  en  recettes  et  en  dépenses  à  la  somme 
de  13,046  fr.  40  c. 

Le  rapport  et  le  budget  de  1863  sont  approuvés. 

Une  commission  composée  de  MM.  le  baron  de  Schauenburg,  Morin  et 
du  secrétaire,  est  chargée  de  la  vérification  des  comptes  des  frais  d'im- 
pression. 

La  séance  est  levée  à  1  heure. 


Séance  extraordinaire  du  Comité  du  20  avril  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents  :  MM,  Eissen,  Heitz,  Klotz,  L.  Levrault,  colonel  de  Morlet, 
Schirr. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Le  secrétaire  dépose  :  Mémoires  de  la  Société  dliistoire  et  d'archéologie 
de  Chalon-sur-Saône ,  t.  IV,  iii*^  partie. 

Le  trésorier  dépose  une  copie  du  budget  de  1863,  dont  il  fait  hommage 
au  comité. 


—  22  — 

Le  président  annonce  qu'il  a  écrit  à  M.  Véron-Réville  relativement  aux 
objets  d'antiquité  qui  doivent  se  trouver  dans  la  succession  de  feu  M.  Zsep- 
fel,  et  à  M.  Jules  Thilloy ,  procureur  impérial  à  Sarreguemines,  pour  le 
remercier  de  l'envoi  de  son  mémoire  sur  Herbitzheim. 

M.  le  grand  vicaire  Schirr  demande  un  crédit  pour  quelques  petits  tra- 
vaux de  terrassement  à  exécuter  sur  le  plateau  de  Sainte-Odile,  pour  faci- 
liter l'accès  des  monuments  druidiques.  Le  comité  prie  M.  Schirr,  auquel 
il  adjoint  M.  L.  Levraulî,  de  faire  un  rapport  au  comité  sur  cette  question. 

Le  président  communique  une  lettre  de  M.  Ringeisen ,  au  sujet  de 
monnaies  du  dix-septième  siècle,  trouvées  dans  la  banUeue  d'Artolsheim. 

M.  Sabourin  de  Nanton,  présent  à  la  séance,  donne  lecture  d'un  mé- 
moire sur  Huningue,  et  le  comité  décide  l'insertion  de  ce  mémoire  dans 
son  Bulletin. 

Le  secrétaire  donne  lecture  d'une  notice  de  M.  SifFer  sur  le  monument 
romain  trouvé  à  Gersthelm,  et  transféré  à  la  bibliothèque  du  temps  de 
Schœpflin,  Il  essaye  une  interprétation  du  nom  inscrit  sous  la  figure  repré- 
sentée sur  ce  monument  et  que  jusqu'ici  on  lisait  Gabro. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Siffer,  ainsi  que  le  dépôt  de  la 
notice  aux  archives. 


Séance  du  Comité  du  4  mai  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Bœrsch,  Eissen,  Heitz,  colonel  de  Morlet,  Petit-Gérard, 
Ringeisen,  baron  de  Schauenburg,  Schirr,  Straub. 

Le  secrétaire  donne  lecture  du  procès -verbal  de  la  dernière  séance  qui 
est  adopté. 

Le  président  dépose  sur  le  bureau  : 

Le  Bulletin  de  la  Société  impériale  des  antiquaires  de  France,  1862  ; 

Arclieologischer  Anzeiger,  n"  169  ; 

La  Notice  sur  la  souscription  pour  la  médaille  de  M.  de  Caumont; 

La  médaille  offerte  à  M.  de  Caumont,  exemplaire  appartenant  à  la  Société, 

Il  annonce  avoir  écrit  à  M.  Ringeisen  pour  s'informer  de  la  possibilité  de 
publier  les  planches  de  son  projet  de  restauration  de  l'église  de  Sainte-Foi 
de  Schlesladt. 


-  28  — 

M.  Kingeisen,  présent  à  la  séance,  répond  que  la  reprotluction  de  ses 
dessins  pourrait  entraîner  à  des  frais  trop  considérables. 

M.  Bœrsch  propose  d'essayer  de  faire  cette  publication  avec  la  participa- 
tion de  la  ville  de  Schlestadt.  Il  pense  que  M.  le  Préfet  voudra  peut-être 
bien  s'intéresser  à  cette  œuvre  et  patronner  l'offre  de  la  Société  auprès  de 
l'administration  municipale  de  cette  ville. 

M.  le  grand  vicaire  Schirr  est  d'avis  qu'il  serait  désirable  de  réserver 
une  plus  large  part  des  fonds  disponibles  aux  travaux  d'entretien  et  de 
consolidation  des  monuments  si  nombreux  qui  en  ont  besoin. 

M.  le  colonel  de  Morlet  répond  qu'il  est  matériellement  impossible  de 
s'occupera  la  fois  d'un  trop  grand  nombre  de  monuments,  parce  qu'il 
n'est  pas  toujours  facile  de  trouver  des  personnes  capables  pour  surveiller 
et  diriger  ces  sortes  de  travaux,  ordinairement  assez  éloignés  des  endroits 
habités,  que  même  les  ouvriers  intelligents  font  souvent  délaut,  et  qu'ainsi 
le  comité  se  voit  dans  la  nécessité  d'échelonner  les  travaux,  afin  de  pou- 
voir les  exécuter  d'une  manière  satisfaisante  et  conforme  au  but  de  la 
Société.  • 

M.  le  baron  de  Schauenburg  pense  qu'en  cherchant  bien  on  trouvera, 
et  cite  à  l'appui  de  son  opinion  l'exemple  de  la  ville  de  Thann,  où  les 
travaux  de  l'Engelbourg  ont  été  exécutés  d'une  manière  fort  satisfaisante. 
II  convient  du  reste  lui-même  que  cette  ruine  doit  être  comptée  au  nombre 
de  celles  qui  sont  le  plus  facilement  abordables. 

M  Bœrsch,  répondant  à  l'observation  de  M.  Schirr,  insiste  sur  la  néces- 
sité de  ne  pas  perdre  de  vue  l'importance  de  l'influence  morale  de  la 
Société,  qui  ne  peut  être  obtenue  et  maintenue  qu'au  moyen  de  ses  pubU- 
cations.  Cette  influence  morale  a  déjà  porté  d'heureux  fruits  en  répandant 
le  goût  de  la  conservation  des  antiquités;  il  ne  fiut  donc  pas  la  laisser 
péricliter,  tout  en  continuant  à  soustraire  à  la  destruction  les  monuments 
qui  ont  droit  à  la  sollicitude  de  la  Société.  Il  croit  que  l'état  financier  de 
la  Société  permet  d'atteindre  ce  double  but. 

M.  le  colonel  de  Morlet  annonce  qu'un  conducteur  de  travaux ,  résidant 
à  Ribeauvillé,  a  offert  de  se  charger  de  la  direction  de  tous  les  travaux  que 
la  Société  voudra  entreprendre. 

Le  comité  charge  M.  Ringeisen  d'examiner  cette  question  et  de  lui  en 
rendre  compte. 

Le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  nécessaires  à  plusieurs 
membres  .du  comité  de  Colmar  pour  l'organisation  de  la  séance  du  7  mai; 

—  une  lettre  de  remercîments  à  M.  le  curé  Siffer  pour  envoi  de  mémoire  ; 

—  et  plusieurs  lettres  relatives  à  des  ([uestions  de  comptabilité. 


—  24  — 

11  annonce  qu'il  a  reçu  une  lettre  de  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin,  qui  sera 
empêché  d'assister  à  la  séance  générale  de  Colmar; 

Une  autre  de  M.  J.  ChaufFour ,  qui  propose  comme  membre  honoraire 
M.  Trouillat  de  Porentruy.  Cette  proposition  figurera  sur  l'ordre  du  jour 
de  la  réunion  générale  de  Colmar; 

Même  décision  pour  une  autre  proposition  de  M.  ChaufTour,  tendant  à 
établir  des  relations  avec  la  Société  jurassienne; 

Une  autre  de  M.  Oppermann ,  toujours  empêché  de  prendre  part  aux 
travaux  du  comité  par  l'état  de  sa  santé,  et  qui  propose  de  voter  une 
indemnité  à  M.  Nicklès,  de  Benfeld,  pour  les  déboursés  qu'il  a  faits  à  l'occa- 
sion de  fouilles  et  de  recherches; 

Une  autre  de  M.  le  trésorier,  relative  à  des  questions  de  comptabilité  que 
le  comité  décide  dans  le  sens  le  plus  large. 

A  l'occasion  de  cette  lettre,  M.  le  baron  de  Schauenburg  fait  la  proposi- 
tion de  décider,  une  fois  pour  toutes,  que  tout  membre  nouvellement 
admis  le  sera  pour  l'année  courante,  si  l'admission  a  lieu  pendant  le  pre- 
mier semestre,  et  pour  l'année  suivante,  si  elle  a  lieu  pendant  le  deuxième. 
En  conséquence  les  membres  de  la  première  catégorie  payeront  leur  coti- 
sation pour  l'année  entière  et  recevront  le  Bulletin ,  tandis  que  ceux  de  la 
deuxième  catégorie  ne  recevront  le  Bulletin  et  ne  payeront  la  cotisation 
qu'à  partir  du  1^*"  janvier  de  l'année  qui  suivra  leur  réception. 

Cette  proposition  est  adoptée  et  sera  notifiée  au  trésorier. 

Une  autre  lettre  des  héritiers  de  feu  M.  Zaepfel,  conservateur  des  forêts, 
annonçant  l'intention  de  ne  pas  se  dessaisir  des  objets  d'antiquité  qui  font 
partie  de  la  succession. 

Le  président  dépose  un  dossier  communiqué  par  la  Conservation  des 
forêts  et  qui  est  relatif  à  des  fouilles  projetées  dans  la  banlieue  de  Wœrth- 
sur-Sauer  pour  le  compte  d'un  particuHer.  M.  le  président  croit  qu'il  faudrait 
déléguer  un  membre  du  comité  pour  assister  à  cette  opération. 

Plusieurs  membres  pensent,  au  contraire,  que  l'autorisation  de  procéder 
à  de  semblables  opérations  par  des  particuliers  sur  les  terrains  de  l'Etat 
ou  des  communes  ne  devrait  pas  être  accordée  sans  le  concours  du  comité. 
Ils  proposent  en  conséquence  de  renvoyer  le  dossier  à  M.  le  Préfet  en 
prenant  des  réserves  dans  ce  sens,  basées,  du  reste,  sur  une  récente 
circulaire  préfectorale. 

Cette  proposition  est  adoptée  et  le  comité  charge  M.  Morin ,  auquel  le 
dossier  est  remis ,  de  faire  les  démarches  nécessaires. 

Le  secrétaire  lit  la  lettre  suivante  de  M.  le  docteur  Taufïïieb  de 
Barr: 


—  25  — 

«  Monsieur  et  très-honoré  confrère ,  je  m'empresse  de  répondre  à  votre 
honorée  lettre  du  28  avril  courant. 

«  Mon  frère  avait  permis,  il  y  a  environ  un  an  ,  au  maire  de  Saint-Nabor 
d'enlever  quelques  pierres  sans  valeur  sur  notre  propriété  de  Niedermünster 
et  en  dehors  des  ruines.  Comme  peu  après  l'on  était  venu  nous  avertir  que 
l'on  était  en  train  d'enlever  aussi  des  pierres  provenant  de  la  ruine,  je  me 
suis  hâté  d'écrire  à  M.  le  Maire  pour  le  prévenir  que  nous  lui  relirions  la 
permission  qui  lui  avait  été  accordée. 

«  Mon  frère  et  moi  nous  nous  sommes  immédiatement  après  rendus  à 
Niedermünster  pour  voir  ce  qui  s'y  était  passé.  Nous  nous  sommes  assurés 
que  l'on  n'avait  enlevé  que  des  moellons  plus  ou  moins  déformés  ou  des 
fragments  de  moellon,  n'offrant  aucune  espèce  d'intérêt.  Ces  matériaux 
faisaient  partie  d'un  énorme  tas  de  pierres  qui  encombre  encore  mainte- 
nant la  ruine  et  qu'il  faudra  faire  enlever  tôt  ou  tard  pour  dégager  le 
monument. 

«  Depuis  cette  épo((ue,  c'est-à-dire  depuis  un  an,  aucune  pierre  n'a  plus 
été  enlevée  à  Niedermünster.  J'y  suis  encore  allé  hier  pour  m'en  assurer 
et,  en  même  temps,  pour  renouveler  au  fermier  la  défense  de  laisser 
enlever  des  pierres  du  monument  de  quelque  nature  qu'elles  soient. 

«Nous  comprenons  et  nous  apprécions,  comme  il  convient,  la  sollici- 
tude avec  laquelle  la  Société  pour  la  conservation  des  monuments  histo- 
riques veille  sur  Niedermünster  et  je  vous  prie  de  croire,  très-honoré 
confrère ,  que  nous  nous  faisons  un  devoir  de  partager  avec  elle  cette 
sollicitude  parfaitement  justifiée ,  d'ailleurs,  par  l'importance  des  ruines 
dont  il  s'agit. 

«  L'un  des  motifs  qui  ont  déteiminé  mon  frère  et  moi  à  acheter  les 
ruines  de  Niedermünster  en  1842,  ce  fut  précisément  le  désir  de  préserver 
ces  belles  ruines  de  la  destruction  qui  les  menaçait  et  qui  était  en  voie  de 
s'accomplir  sous  nos  prédécesseurs. 

«  J'espère  que  les  renseignements  précis  que  j'ai  l'honneur  de  vous  trans- 
mettre, suffiront  pour  dissiper  les  craintes,  heureusement  peu  fondées, 
dont  vous  aviez  été  chargé  de  me  faire  part. 

«  Agréez,  etc.  o 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Taufflieb. 

M.  le  colonel  de  Morlet  expose  des  objets  d'antiquité  trouvés  récemment 
à  Gerstheim  et  ht  la  note  explicative  suivante  : 

«Je  mets  sous  les  yeux  du  comité  plusieurs  objets  d'antiquité,  trouvés 
récemment  à  Gerstheim  (canton  d'Erslein)  dans  la  propriété  du  sieur  Jean 
Briegmann,  tils. . 


—  26  — 

«  Ces  objets  dont  nous  devons  la  connaissance  au  zèle  infatigable  de 
M.  Nicklès,  membre  de  la  Société,  à  Benfeld,  ont  été  trouvés  près  de 
nombreux  squelettes  à  l'",20  environ  au-dessous  du  sol.  Ce  sont  : 

«  1°  Une  fibule  d'or  enrichie  de  pierres  précieuses  et  de  pâtes  coloriées  ; 

«  2°  Une  boule  creuse  en  cuivre  doré,  s'ouvrant  à  charnière  avec  système 
de  suspension  ; 

«  3°  De  nombreux  grains  de  pâte  émaillée  percés  d'un  trou  ; 

«  A^  Un  anneau  et  quelques  fragments  de  cuivre  et  de  bronze; 

<~i  5°  Deux  vases  en  terre ,  dont  l'un  est  en  partie  brisé. 

«.(La  fibule  est  formée  de  deux  plaques  circulaires,  l'une  en  or,  l'autre 
en  cuivre,  séparées  par  une  couche  de  mastic  de  3  millimètres  d'épaisseur; 
la  plaque  d'or  a  40  millimètres  de  diamètre  et  '/,  millimètre  d'épaisseur, 
celle  de  cuivre  la  déborde  un  peu,  elle  a  43  millimètres  de  diamètre  et 
1  millimètre  d'épaisseur;  elles  sont  réunies  solidement  l'une  à  l'autre  par 
six  clous  rivés  en  cuivre ,  placés  à  la  circonférence. 

«  La  plaque  d'or  est  couverte  d'un  semis  irrégulier  de  petits  cercles  de 
i  à  2  millimètres  de  diamètre ,  formés  par  des  filigranes  d'or  roulés  en 
tresses  très -fines;  de  semblables  torsades  en  filigrane  décorent  la  mince 
lame  d'or  qui  entoure  la  fibule  sur  sa  tranche.  Le  centre  de  la  plaque  d'or 
est  orné  d'un  grenat,  et  six  groupes  formés  par  de  petits  grenats  et  des 
pâtes  blanchâtres  sont  disposés  régulièrement  sur  la  circonférence. 

«  Au  revers  de  la  fibule  on  voit  distinctement  le  pivot  mobile  de  l'aiguille, 
ainsi  que  l'arrêt  qui  devait  la  fixer. 

«  En  fabsence  de  termes  de  comparaison  que  les  musées  d'Alsace  ne 
nous  offrent  pas,  il  est  difficile  de  fixer  d'une  manière  précise  la  date  de  ce 
bijou;  cependant,  en  examinant  ces  tresses  de  filigrane  d'or  qui  forment 
sur  notre  fibule  de  si  gracieux  contours ,  je  crois  reconnaître  l'art  de 
Byzance.  De  semblables  ornements  se  voient  encore  sur  des  bijoux  de 
Venise,  où  les  traditions  de  l'Orient  se  sont  maintenues  si  longtemps.  En 
comparant  ce  bijou  avec  ceux  de  même  nature  que  possède  le  cabinet  des 
médailles  de  la  Bibliothèque  impériale  et  dont  la  date  est  déterminée,  je 
serais  porté  à  voir  dans  notre  fibule  un  travail  du  quatrième  ou  du  cin- 
quième siècle. 

«La  boule  creuse,  que  j'ai  citée  en  seconde  ligne,  est  en  cuivre  rouge, 
on  aperçoit  sur  sa  surface  des  parties  dorées;  elle  est  légèrement  aplatie, 
son  plus  grand  diamètre  est  de  47  millimètres ,  le  plus  petit  de  40  milli- 
mètres. Les  deux  calottes  d'égale  dimension  qui  forment  cette  boule  ,  ont 
à  peine  1  millimètre  d'épaisseur;  elles  sont  réunies  par  une  charnière  à 
laquelle  est  adapté  un  système  de  suspension.  A  l'extrémité  opposée  à  la 


—  27  — 

charnière  se  trouve  un  arrèl  mobile  destiné  à  maintenir  à  volonté  la  fer- 
meture de  la  sphère.  Ce  curieux  objet  nous  représente  la  bulla  aurea  que 
les  Romains  suspendaient  au  cou  de  leurs  enfants  jusqu'au  moment  où 
ceux-ci  revêtaient  la  robe  virile.  Des  talismans  destinés  à  préserver  les 
enfants  de  tout  maléfice  étaient  renfermés  dans  ces  boules ,  dont  l'origine 
remonte,  d'après  Pline,  à  Tarquin  l'Ancien.  Cet  usage,  réservé  d'abord 
aux  seuls  patriciens,  s'étendit  ensuite  aux  enfants  de  toutes  les  classes  qui 
portèrent  des  hullœ  formées  de  diverses  matières. 

«  Les  détails  que  donnent  à  ce  sujet  les  auteurs  anciens  et  notamment 
Macrobe,  se  rapportent  très-exactement  à  la  boule  creuse  de  Gerstheim, 
dont  on  retrouve  l'image  sur  plusieurs  bas-reliefs. 

«  On  voit  aussi  des  hullœ  figurées  sur  des  statues  de  dieux  lares  ,  aux- 
quelles les  Romains  les  suspendaient  lorsque  leurs  enfants  atteignaient 
l'âge  viril. 

«  Les  grains  en  pâte  émaillée  sont  semblables  à  ceux  que  l'on  trouve 
habituellement  dans  les  sépultures  franques. 

«Les  fragments  de  cuivre,  de  bronze,  ainsi  que  les  poteries,  n'offrent 
rien  de  bien  caractérisé. 

«  Malheureusement  M.  Nicklès  n'a  pu  recueillir  aucun  renseignement 
précis  sur  la  position  des  squelettes  dont  les  ossements  ont  été  immédiate- 
ment dispersés.  Il  nous  manque  ainsi  un  élément  d'appréciation  fort  important. 

«  De  nouvelles  fouilles  seront  donc  nécessaires  pour  pouvoir  déterminer 
avec  quelque  précision  l'origine  et  la  date  de  ces  sépultures  qui  nous  ont 
offert  à  la  fois  des  preuves  non  douteuses  des  époques  romaine  et  franque. 

«  Gerstheim  est  fort  rapproché  d'une  ancienne  voie  dite  Heidenstrœssel 
qui  aboutissait  à  Eli  {Heluelus),  d'où  partaient  plusieurs  voies  romaines  ou 
celtiques,  entre  autres  Va  Hochstrasse  el  Harweg ,  qui  se  prolongeaient 
jusqu'au  sommet  du  mont  Sainte-Odile.  Ces  communications,  décrites  avec 
une  grande  exactitude  par  M.  Cosle,  rattachent  Gerslheim  au  réseau  des 
voies  antiques  de  l'Alsace. 

«Un  ancien  chemin,  dit  Alt-Weg,  conduit  du  village  sur  les  bords  du 
Rhin,  à  l'emplacement  du  château  féodal  de  Schwanau,  détruit  au  quator- 
zième siècle,  où  l'on  trouve  encore  aujourd'hui  beaucoup  de  poteries  gau- 
loises et  romaines.  Enfin,  c'est  à  Gerstheim  même  qu'a  été  trouvé  au  siècle 
dernier  un  bas-relief  gaulois  sur  lequel  on  lit  le  mot  GLABRO,  et  que  pos- 
sède la  Bibliothèque  de  Strasbourg.  Gerstheim  est  donc  un  lieu  historique 
d'une  haute  importance. 

«  L'on  doit  des  remercîmenls  à  M.  Nicklès  pour  le  zèle  qu'il  a  déployé 
dans  cette  circonstance,  comme  aussi  à  M.  Briegmann  qui  a  bien  voulu 


—  28  — 

consentir  à  céder  au  musée  de  la  Société  ,  les  objets  que  je  viens  de  dé- 
crire. 

«Je  joins  à  cet  exposé  une  note  de  M.  Nicklès  qui  accompagnait  ces  ob- 
jets, et  dans  laquelle  notre  zélé  collègue  a  inséré  un  extrait  du  travail  qu'il 
prépare  sur  Helvetus,  en  ce  qui  concerne  la  position  de  Gerstheim. 

Communication  de  M.  Nicklès. 

«  En  creusant  récemment  une  cave  à  Gerstbeim,  les  ouvriers  ont  ren- 
contré, à  plus  d'un  mètre  sous  terre,  des  squelettes  et  différentes  pièces  de 
poterie.  Le  propriétaire,  rendu  attentif,  se  mit  à  y  veiller.  On  déterra  alors 
un  vase  entier,  des  plaques  en  bronze,  des  grains  de  collier  que  l'on  re- 
cueillit avec  soin,  une  cassolette  et  une  broche  plaquée  d'or.  Une  autre 
broche,  plus  petite  et  plus  belle  encore,  fut  enlevée  par  un  curieux  indis- 
cret, qui  dit  l'avoir  perdue.  Prévenu  par  un  habitant  du  village,  je  me  ren- 
dis sur  les  lieux.  Il  n'était  plus  possible  de  se  rendre  compte  de  la  position 
occupée  par  chaque  pièce;  mais  il  paraît  que  les  squelettes  se  trouvaient 
placés  sans  aucune  orientation. 

c<  L'emplacement  se  trouve  à  quelques  mètres  de  la  route  impériale  de 
Bâle  à  Spire;  c'était  une  cour  suivie  d'un  jardin.  Dans  ce  dernier,  on  a  fait 
une  simple  excavation  pour  y  éteindre  de  la  chaux,  et  à  une  faible  pro- 
fondeur on  a  rencontré  des  pièces  en  céramique  dont  l'une  avait  la  forme 
d'une  bouteille  {lagena).  A  côté  de  la  cave  que  l'on  vient  de  creuser,  on 
en  a  fait  une  il  y  a  vingt-quatre  ans,  et  on  y  a  rencontré  également  des 
squelettes ,  des  vases  et  un  glaive;  mais  aucun  de  ces  objets  n'a  été  con- 
servé. 

«  11  y  a  là,  évidemment,  un  lieu  de  sépulture  qui  mériterait  d'être  exa- 
miné par  des  fouilles  méthodiques. 

«La  plupart  des  vases  trouvés,  d'après  ce  que  l'on  m'a  rapporté,  étaient 
de  forme  ondulée  et  à  grain  grossier,  comme  le  spécimen  ci-joint,  qui 
rapfielle  un  vase  figuré  sur  le  premier  tableau  de  \ Archéologie  céramique 
de  M.  l'abbé  Cochet,  et  qu'il  donne  comme  étant  d'origine  celtique.  Sans 
cette  circonstance,  je  serais  tenté  de  voir  dans  cette  localité,  un  cimetière 
franc.  Je  laisse  d'ailleurs  au  comité  le  soin  de  résoudre  cette  question.  Qu'il 
me  soit  permis  seulement  de  saisir  cette  occasion  pour  lui  communiquer 
ce  que  mes  recherches  m'ont  appris  sur  Gerstheim;  j'emprunte  ces  don- 
nées à  la  notice  qui  doit  accompagner  ma  carte  d'Helvetus  et  de  ses  envi- 
rons, dont  je  joins  ici  également  un  petit  extrait. 

«  §  1*"".  Course  d'eau  :  Près  de  Gerstheim,  le  Rhin  forme  beaucoup  d'îles, 
et  malgré  la  mobilité  de  ces  atterrissements,  il  y  en  a  qui  sont  devenus  assez 


29  

permanents  pour  avoir  reçu  des  noms  particuliers.  Il  est  donc  probable 
qu'aux  environs  de  Scliwanau,  il  y  a  eu  dans  tous  les  temps  des  îles  nom- 
breuses, où  les  Germains  pouvaient  se  i-assembler  avec  leurs  canots  pour 
opérer  leurs  invasions  dans  la  Gaule  rhénane. 

«  §  2.  Hclvelus:  Il  y  a  des  auteurs  qui  ne  considèrent  l'ancien  Helvel  que 
comme  un  lieu  d'étapes  (mansio)^;  d'autres  en  font  un  poste  militaire  de 
surveillance  ^  Il  est  certain  que  la  huitième  légion  y  avait  une  garnison 
(je  possède  une  brique  provenant  d'Ehl ,  et  portant  :  LEG  VIIÏ.  AV);  mais  je 
n'ai  rien  trouvé  qui  autorise  de  classer  cette  localité  parmi  les  villes  forti- 
fiées. S'il  a  existé  un  fori  destiné  à  la  protéger  contre  les  invasions  des 
Germains,  il  a  dû  se  trouver  sur  les  bords  du  Rhin,  près  de  Gerstheim,  à 
la  place  où  fut  construit  plus  tard  le  château  féodal  de  Schivanaii. 

«§3.  Vestiges  cl' établissements  romains,  d'après  les  recherches  faites 
sur  le  terrain:  Schivanau,  près  Gerstheim;  débris  de  poterie  ancienne, 
fragments  de  poterie  romaine  fine  (rare),  tuileaux  et  débris  de  tuiles  à 
rebord  (rares),  substructions  à  petit  appareil  de  la  dureté  du  granit,  que 
les  outils  ne  peuvent  entamer  sans  se  briser.  Je  possède  plusieurs  médailles 
romaines  trouvées  à  Gerstheim,  entre  autres  celles  de  la  colonie  de  Nîmes, 
avec  un  crocodile  enchaîné  à  un  palmier  et  les  effigies  d'Agrippa  et  d'Au- 
guste. Tout  le  monde  connaît  le  bas-relief  du  musée  Schœpflin ,  représen- 
tant un  esclave  gaulois  du  nom  de  Glabro ,  découvert  dans  cette  localité 
au  siècle  dernier.  ^ 

«Que  signifient  ces  vestiges  romains  sur  le  territoire  de  Gerstheim?  Le 
château  féodal  de  Schwanau,  détruit  par  les  Strasbourgeois  en  1333,  ne 
pouvait-il  pas  avoir  été  précédé,  comme  défense  contre  les  Germains,  d'un 
camp  gaulois,  remplacé,  dès  le  commencement  de  l'occupation  romaine, 
par  un  castrum  .^  On  a  vu  (§  V^)  que,  dans  cette  direction,  le  Rhin  a  tou- 
jours dû  former  de  nombreuses  îles,  où  les  Germains  pouvaient  se  rassem- 
bler sans  être  remarqués  et  tenter  un  coup  de  main  contre  les  habitants  de 
la  rive  gauche.  Ce  point  fortifié  avait  donc  toujours  son  utilité,  même  après 
l'établissement  de  la  colonie  gauloise,  sur  la  rive  droite,  des  champs  décu- 
raales,  sous  le  protectorat  des  Romains;  car  les  Germains  étaient  sans  cesse 
des  voisins  incommodes  et  menaçants. 

«  La  voie  de  Burgheim  au  Rhin,  telle  que  je  l'ai  tracée,  ne  s'arrêtait  pas 
à  ces  deux  points.  Tout  le  monde  connaît  sa  prolongation  sur  le  Män- 
nelstein,  le  plateau  de  Sainte-Odile,  dans  l'enceinte  du  mur  païen,  et  il  est 

1 .  steinet".  Codex  inscripl.  romani. 

2.  Strobel. 

3.  Schœpflin.  Alsat.  illiistr.  Tab.  1 ,  lig.  n"  H. 


—  30  — 

probable  qu'elle  communiquait  avec  le  pays  des  Leuciens.  M,  L.  Levraull 
l'a  indiquée,  et  M.  Goste  en  a  donné  la  direction  de  Sainte-Odile  à  Helvet. 
J'ai  trouvé  sa  continuation  d'Helvet  au  Rhin,  et  tout  me  porte  à  croire  que 
cette  voie  transversale  s'étendait  dans  les  champs  décumates  vis-à-vis  de 
Gerstheim,  par  Ottenheim,  Allmansweier,  Dinglingen,  Lahr,  Burgheim , 
pour  passer  près  du  château  de  Géroldseck,  dans  la  vallée  de  la  Kinlzig. 
C'était  le  trait  d'union  entre  Vosagus  et  Ahnoba. 

« Le  Männelstein,  dans  les  Vosges,  et  le  cône  de  Géroldseck,  dans 

la  Forêt-Noire,  sont  deux  points  culminants  qui  dominent  toute  la  partie 
supérieure  de  la  vallée  du  Rhin....  Et  partout,  sur  toute  la  ligne,  on  voit  la 
main  du  grand  peuple  conquérant! 

<i  Emplacements  où  il  y  a  des  vestiges  romains  incontestables  :  Sainte- 
Odile,  Burgheim,  Holzbad-Westhausen,  Ellzach-Kertzfeld,  Benfeld,  Hu- 
senburg,  Sand,  Ehl,  Kohlengraben,  Haberacker,  Kirchströng,  Schwanau- 
Gerstheim,  Mauerfeld-Dinglingen,  Burgheim-Lahr,  etc.  Le  §  4  de  ma  notice 
donne  le  détail  de  tout  ce  que  j'ai  trouvé  sur  la  ligne  de  Burgheim  à 
Schwanau. 

«  Au  dire  des  habitants,  il  y  avait  jadis  des  tumulus  tout  près  de  Gerst- 
heim  ;  ils  ont  été  tous  nivelés ,  il  ne  m'a  plus  été  possible  d'en  reconnaître 
la  place.  11  y  en  avait  peut-être  même  sur  le  terrain  occupé  par  le  village 
qui  ont  disparu  depuis  plusieurs  siècles.  Les  sépultures  de  la  propriété 
Briegmann  étaient  sans  doute  recouvertes  de  tertres  pareils;  mais  c'est  là 
une  question  dont  la  solution  n'est  plus  possible. 

«  Le  bas-relief  de  Glabro  a  fait  supposer  à  Schœpflin  et  à  Schweighaeuser, 
qu'à  l'époque  romaine,  il  devait  y  avoir  une  villa  à  Gerstheim.  Il  m'est  im- 
possible d'admettre  cette  opinion.  Une  villa  est  un  séjour  de  plaisance;  or, 
à  cette  époque,  la  résidence  dans  un  lieu  continuellement  exposé  au  pre- 
mier choc  d'une  invasion  de  barbares,  n'a  pu  offrir  le  moindre  agré- 
ment. » 

M.  le  colonel  de  Morlet,  à  la  suite  de  ces  communications,  reprend  la 
motion  de  M.  Oppermann,  et  propose  d'allouer  à  M.  Nicklès  une  somme 
de  100  fr. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  propose  de  porter  ce  crédit  à  la  somme  de 
400  fr.  pour  permettre  à  M.  Nicklès  d'acquitter  les  travaux  déjà  faits,  et  de 
continuer  les  recherches. 

Le  comité  s'associe  à  cette  proposition,  en  votant  le  crédit  de  400  fr. 

M.  Merk  soumet  au  comité  une  lampe  en  bronze,  suspendue  à  des  chaî- 
nettes, trouvée  lors  de  la  construction  de  l'égout,  près  des  Grandes-Bou- 
cheries, à  trois  mètres  sous  terre.  Il  en  fait  don  au  musée  de  la  Société. 


—  31  — 

Le  comité  vote  tles  reniercîmenls  à  M.  Merk. 

Le  comité  décide  la  reproduction  typographique  en  impression  de  cou- 
leurs par  les  procédés  de  la  maison  Silbermann,  de  la  fibule  et  de  la  bulla 
trouvées  à  Gersiheim. 

Lecture  est  donnée  d'un  mémoire  de  M.  Spach,  intitulé  :  Une  excommu- 
nication à  Mulhouse,  au  treizième  siècle,  destiné  à  la  réunion  générale  de 
Colmar. 

M.  l'abbé  Straub  rend  compte  d'une  trouvaille  faite,  à  Saint-Léonard,  de 
monnaies  du  moyen  âge,  douzième  et  treizième  siècles;  cette  communica- 
tion devra  être  également  repi'oduite  à  Colmar. 

M.  Sabourin  de  Nanton  soumet  le  dessin  de  la  médaiFle  commémorative 
de  Iluningue.  Ce  dessin  sera  reproduit  dans  le  Bulletin, 

Le  secrétaire  rappelle  qu'il  est  devenu  nécessaire  de  compléter  le  comité. 
Renvoyé  à  la  séance  de  juin. 


Assemblée  générale,  tenue  à  Colmar,  le  7  mai  186^. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


La  séance  est  ouverte  à  2  heures,  à  l'hôtel  de  la  Préfecture. 

Environ  soixante  membres  sont  présents.  Le  bureau  est  occupé  par 
M.  Spach,  M.  Véron-Réville,  président  du  comité  de  Colmar;  MM.  Eissen  et 
Brièle,  secrétaires;  M.  le  baron  de  Schauenburg,MM.  l'abbé  Straub,  Ring- 
eisen, le  curé  Meyer,  M,  l'abbé  Joseph  Mury,  de  Strasbourg,  assistent  à 
la  séance. 

Le  président  annonce  l'absence  de  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin,  deuxième 
président  honoraire,  empêché  par  ses  fonctions,  de  prendre  part  à  la 
séance. 

Il  propose  l'admission,  comme  membres  honoraires  de  la  Société,  de 
MM.  Trouillat,  ancien  maire  de  Porentruy,  Robert,  directeur  gvénéral  de 
l'administration  de  la  guerre,  à  Paris,  A.  de  Barthélémy,  ancien  sous- 
préfet  de  Belfort,  ainsi  que  l'établissement  de  relations  régulières  avec  la 
Société  jurassienne  de  Porentruy. 

Ces  diverses  propositions  sont  votées  par  acclamation. 

M.  Ringeisen  propose  l'admission  de  M.  Hartmann,  architecte;  M.  l'abbé 
Reinhard  propose  celle  de  M.  Gerst ,  photographe  à  Colmar. 


—  3^2  — 

Le  comité  prie  les  proposants  de  faire  leurs  demandes  par  écrit,  et  de 
préciser  la  date  de  l'entrée  des  candidats  dans  la  Société. 

Le  président  donne  lecture  d'une  lettre  de  quelques  héritiers  de  feu 
M.  Dorlan,  qui  s'élèvent  contre  certaines  assertions  produites  au  sein  du 
comité,  à  Strasbourg,  au  sujet  du  médaillier  alsatique  réuni  par  feu 
M.  Dorlan. 

M.  le  conseiller  Boyer  fait  observer  que  le  médaillier  en  question  pro- 
vient en  grande  partie  de  M.  le  baron  de  Berstett,  qu'il  contient  certaines 
pièces  mentionnées  et  dessinées  par  cet  éminent  numismate,  et  trouvées  à 
Fessenheim,  avec  des  armures  et  des  objets  mérovingiens.  Le  nom  de 
Strasbourg  y  est  parfaitement  reconnaissable.  Ces  pièces  sout  donc  exces- 
sivement précieuses,  car  Schœpflin  chercha  en  vain  des  monuments  numis- 
matiques  de  celte  époque,  frappés  à  Strasbourg.  Il  donne  ensuite  lec- 
ture d'une  lettre  de  M.  de  Longpérier,  qui  a  examiné  le  médaillier  de  feu 
M.  Dorlan,  et  de  laquelle  il  résulte  que  réellement  cette  collection  a  une 
valeur  très -considérable. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  demande  si  M.  de  Longpérier  a  examiné  le 
médaillier  lui-même,  ou  bien  le  catalogue  seulement. 

M.  Boyer  répond  que  l'un  et  l'autre  ont  été  l'objet  d'un  examen  scrupu- 
leux de  la  part  de  ce  membre  de  l'InstituL 

M.  Ringeisen,  chargé  par  le  comité,  dans  une  de  ses  dernières  séances, 
de  l'examen  de  la  question,  soumet  des  conclusions  desquelles  il  ressort 
qu'effectivement  le  médailher  avait  été  momentanément  dépareillé  à  l'épo- 
que où  le  comité  de  Colmar  a  été  saisi  de  celte  affaire,  mais  qu'il  a  depuis 
été  pleinement  reconstitué,  avec  les  éléments  détournés  un  moment  par 
des  nécessités  pécuniaires.  Les  pièces  les  plus  rares  et  les  plus  précieuses 
y  ont  été  replacées,  et  la  collection  possède  en  tout  deux  mille  trente-hiiit 
médailles. 

Le  président  croit  que  la  Société  devrait  recommander  cette  acquisition 
à  la  ville  de  Schlestadt. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  s'élève  contre  quelques  expressions  de  la 
lettre  lue  par  M.  Boyer,  reprochant  à  la  Société  d'avoir,  par  ses  apprécia- 
tions, causé  un  préjudice  à  la  propriété  des  héritiers.  «  La  Société  n'avait 
point  à  s'occuper  de  détails  semblables;  les  circonstances  dans  lesquelles 
cette  question  s'est  présentée  au  comité,  ont  seules  pu  déterminer  son 
appréciation.  Si  ces  circonstances  ont  changé  depuis,  il  faut  s'en  féliciter.  » 

M.  Liblin.  Quand  la  question  s'est  présentée  à  Colmar,  le  comité  n'avait 
pas  l'intention  de  recommander  l'acquisition  à  la  Société;  le  principal  but 
était  d'empêcher  la  dilapidation  de  la  collection. 


M.  Ehrlen  demande  que  l'assemblée  émette  le  vœu  que  la  collection  soit 
conservée  à  l'Alsace.  Cette  proposition ,  appuyée  par  M.  le  baron  de  Schauen- 
burg,  est  votée  par  acclamation. 

M.  le  baron  de  Scbauenburg,  à  la  prière  du  président,  donne  lecture  de 
la  lettre  suivante  de  M.  Ingold  de  Cernay  : 

«Messieurs, 

«Le  18  août  dernier,  vous  avez  pris  en  très-sérieuse  considération  la 
demande  que  je  vous  ai  faite  d'affecter  quelques  fonds  à  des  travaux  de  déblai 
à  faire  au  château  d'Engelbourg,  près  de  Thann,  et  vous  avez  bien  voulu, 
séance  tenante,  voter  une  somme  de  300  fr.  pour  commencer  ces  tra- 
vaux. 

«  On  s'est  mis  immédiatement  à  l'œuvre  ;  dix  journées  ont  été  employées 
aux  plus  urgents  travaux  de  consolidation,  soixante-une  à  creuser  le  puits 
qui  est  aujourd'hui  complètement  déblayé.  Les  abords  de  cette  partie  im- 
portante de  nos  ruines  sont  remis  dans  leur  état  primitif,  et  l'Engelbourg, 
se  dégageant  de  plus  en  plus  des  décombres  dans  lesquels  il  était  couché 
depuis  bientôt  deux  siècles,  semble  grandir  et  reprendre  son  ancienne 
importance. 

«Les  frais  de  ces  premiers  travaux  se  sont  élevés  à    .     .     .     .       148*^ 
que  le  comité  pourrait  mandater  directement  au  profit  de  l'entre- 
preneur, tout  en  laissant  ouvert  le  crédit  voté  pour  le  solde  de 
la  somme  votée  s'élevant  à 152 


Ensemble.  —  Crédit  alloué     .     .     .      300* 

«  Ce  que  nous  avons  prévu  relativement  à  notre  entreprise  se  réalise  en 
tous  points.  Les  ruines  de  l'Engelbourg  gagnent  en  popularité,  on  s'y  in- 
téresse de  plus  en  plus;  l'administration  municipale  de  Thann,  qui  ne  se 
laisse  jamais  devancer  par  l'opinion  publique  ,  a  fait  faire  à  l'Engelbourg  des 
travaux  non  moins  importants  que  notre  Société  histori(jue.  Elle  a  fait  re- 
mettre en  parfait  état  de  viabilité  les  chemins  qui  y  conduisent,  et  pris  des 
mesures  utiles  à  la  conservation  des  ruines. 

«  Je  crois  devoir  profiter  de  cette  occasion  pour  vous  adresser  : 

«  1°  L'état  des  travaux  exécutés; 

«  2°  Un  calque  du  plan  de  l'Engelbourg  ; 

«  3"^  Un  exemplaire  d'une  ancienne  gravure  représentant  saint  Thiébault, 
et  à  ses  pieds  une  vue  de  Thann  et  de  son  château.  Cette  gravure  se  trouve 
ordinairement  en  tête  de  la  vie  de  saint  Thiébault,  imprimée  en  1723,  à 

II'  SÉRIE.  —  T.  II.  —  (P.-V.)  3 


—  34  — 

Porentruy.  C'est  la  plus  ancienne  représentation  que  nous  connaissions  de 
l'Engelbourg; 

«  4°  Un  calque  d'une  vieille  peinture  faite  il  y  a  quatre-vingts  ans  envi- 
ron, par  Pulfer,  aïeul  d'un  artiste  de  notre  ville. 

«  Cette  peinture  a  été  faite  de  la  place  de  l'église  de  Thann.  Depuis  long- 
temps déjà,  le  château  était  ruiné;  les  toits  n'existaient  plus.  Pour  les  réta- 
blir, l'artiste  s'est  sans  doute  inspiré  de  l'image  ci-jointe,  dont  il  confirme 
ainsi,  en  partie,  l'exactitude.  Mais  il  doit  avoir  fait  fausse  route  à  l'endroit 
delà  grosse  tour,  des  créneaux  et  des  toitures,  lesquelles,  en  général,  étaient 
plus  élancées. 

«  Sous  la  maison  d'Autriche,  le  château  de  Thann,  dit  Schœpflin,  resta 
intact,  défendu  qu'il  était  par  sa  situation  et  ses  ouvrages  d'enceinte'.  Les 
archives  du  département  renferment,  en  effet,  divers  comptes  de  sommes 
affectées  à  son  entretien  et  à  des  réparations  (années  1557,  1593,  1614, 
1618,  1621).  En  1621 ,  l'archiduc  Leopold  d'Autriche  y  fit  établir,  par  son 
fontainier  ordinaire  {unser  brunnen  meister),  Michel  Benck  de  Soultzmatt, 
le  puits  qu'on  vient  de  remettre  au  jour. 

il.  Ce  château  renfermait  une  chapelle  dédiée  à  sainte  Catherine,  qui  était 
richement  dotée.  Le  chapitre  de  Saint-Thiébault,  de  Thann,  en  touchait  les 
revenus  en  vertu  de  son  droit  de  patronage,  et  y  faisait  dire  trois  messes 
chaque  semaine. 

«  Dans  la  Charte  de  1251,  où  le  château  de  l'Engelbourg  fut  offert  à 
l'évêque  de  Strasbourg,  il  est  question,  tant  d'un  nouveau  château ,  que 
d'un  plus  3ncien,vel novo,vcl  antiquo,ce  qui  semble  indiquer  d'importantes 
reconstructions  faites  à  cette  époque  reculée.  On  remarque  dans  les  ruines 
actuelles,  des  débris  d'une  construction  antérieure;  la  continuation  des 
travaux  mettra  peut-être  au  jour  des  médailles  contemporaines  de  ces  pre- 
mières constructions. 

({  Dans  la  guerre  de  Trente  ans,  dit  Silbermann,  l'Engelbourg  a  été  pris 
sept  fois,  et  enfin  détruit  par  les  Français,  en  1674 ^  nonobstant  la  dona- 
tion que  Louis  XIV  en  avait  faite  au  cardinal  Mazarin,  par  lettres  de  don  des 
comtés  de  Ferrette,  seigneuries  de  Belfort,  Delle,  Thann,  Altkirch  et  Isen- 
heim,  en  date  de  Toulouse,  du  mois  de  décembre  1659. 

«  Ce  ne  fut  pas  sans  un  vif  sentiment  de  tristesse  que  les  habitants  de 
la  patriotique  ville  de  Thann  virent  sauter  en  l'air  le  manoir  féodal  qui 
couronnait  d'une  manière  si  pittoresque  leur  cité.  Avaient-ils  conservé  un 

1.  Traduction  Ravenez.  Tome  III,  p.  102. 

2.  Silbermanii,  Merkwüi-digkeiten ,  p.  81. 


reste  d'attachement  pour  la  maison  d'Autriche  qui  avait  constitué  leur  ville 
en  fidèle  gardienne  des  trésors  de  ses  archiducs?  voyaient-ils  dans  l'En- 
gelbourg  un  dernier  refuse  en  cas  de  détresse  ?  Toujours  est-il  qu'ils  criè- 
rent à  la  trahison,  comme  aux  grands  revers,  à  l'intrigue,  à  la  jalousie. 
Ecoutez  leurs  chroniques  : 

«  M.  Poncet  de  la  Rivière,  nommé  premier  président  du  conseil  souve- 
rain d'Alsace,  en  1670,  en  remplacement  de  M.  Charles  Golbert,  était  en 
mauvaise  intelligence  avec  le  cardinal  de  Mazarin;  il  insinua  au  roi  qu'un 
gros  d'ennemis,  se  jetant  dans  l'Engelbourg,  pourrait  compromettre  son 
autorité  encore  mal  affermie  dans  la  haute  Alsace;  puis  il  fit  venir  en  toute 
hâte  des  mineurs  de  Giromagny  qui  mirent  trois  fois  le  feu  aux  poudres. 
La  première  fois,  le  principal  corps  de  logis  et  les  bâtiments  de  service 
s'écroulèrent;  la  seconde  fois,  le  donjon  {der Heidenthurn)  fut  ébranlé;  au 
troisième  feu,  il  fut  renversé.  Le  grand  roi,  mieux  informé,  donna  contre- 
ordre;  c'était  trop  tard,  le  mal  était  fait.  Il  en  eut  du  regret.  Et  depuis, 
notre  antique  forteresse  (unser  uraltes  ScIUoss)  est  là,  couchée  dans  la 
poussière,  comme  vous  pouvez  le  voir  avec  tristesse  (init  Trauren).  » 

L'assemblée,  sur  la  proposition  de  M.  le  baron  de  Schauenburg,  vote 
un  crédit  de  300  fr.  pour  compléter  le  crédit  antérieur. 

M.  Spach  prie  M.  le  président  du  comité  de  Colmar  de  vouloir  bien 
indiquer  à  l'assemblée  les  travaux  déjà  exécutés  ou  projetés  au  château  de 
Hoh-Landsperg. 

M.  Véron  -  Réville  répond  qu'il  regrette  l'absence  de  M.  Schœllbaum, 
architecte  et  membre  de  la  Société,  qui  est  chargé  de  ces  travaux,  qu'il 
va  entamer  au  premier  jour. 

M.  J.  Chauffour  communique  une  lettre  de  M.  Ortlieb  qui  offre  son 
concours  à  M.  Schœllbaum  pour  les  travaux  à  entreprendre  au  château 
d'Eguisheim. 

M.  Straub  dépose  sur  le  bureau  les  médailles  trouvées  à  Saint-Léonard 
et  lit  la  note  suivante: 

«A  la  fin  d'août  1802,  pendant  la  démolition  d'un  ancien  mur  de  clôture 
de  la  collégiale  de  Saint-Léonard,  les  ouvriers  firent  la  découverte  de  2  à 
3,000  anciennes  monnaies  d'argent  de  petit  module. 

«  M.  Laugel,  le  propriétaire  de  cette  partie  de  l'enclos,  nous  en  fit  par- 
venir 125  pièces  prises  au  hasard  dans  le  nombre. 

«  L'examen ,  auquel  nous  nous  hvrâmes,  nous  fit  reconnaître  16  variétés. 
57  présentent  sur  l'avers  un  clerc  avec  une  grande  tonsure  et  la  légende 
BERTRANN",  sur  le  revers  la  main  divine  bénissant.  Entre  les  bras  de  la 
croix,  dont  le  nimbe  est  timbré,  se  trouve  l'épithète  METENSIS.  Il  serait 


—  30  — 

peut  -  être  permis  d'en  conclure  que  ce  petit  trésor  a  été  muré  dans  ce 
réduit  par  un  moine  lorrain. 

«  9  pièces  perlent  sur  l'avers  un  évêque  mitPé ,  à  droite  bénissante  et 
portant  une  croix  dans  la  main  gauche.  Sur  le  revers  un  ange  tenant  une 
croix  à  piédestal  très-prononcé. 

«13  pièces  avec  un  évêque  mitre  et  crosse,  à  droite  bénissante,  au- 
dessus  de  laquelle  on  voit  une  étoile.  Le  revers  est  le  même  que  celui  des 
9  pièces  ci-dessus. 

«D'après  la  forme  des  caractères  et  des  détails  architectoniques,  les 
monnaies  semblent  appartenir  pour  la  plupart  à  la  fin  du  douzième  et  au 
commencement  du  treizième  siècle.  » 

L'assemblée  vote  des  remercîments  à  M.  Laugel  qui  a  offert  lesdites 
médailles  à  la  Société. 

M.  Straub  rend  compte  des  réparations  faites  aux  frais  de  la  Société  au 
mur  d'enceinte  de  Hunawyhr  et  annonce  que  le  crédit  de  300  fr.  a  été 
dépassé  de  13  fr. 

Ce  supplément  est  accordé. 

M.  Ringeisen  soumet  des  médailles  trouvées  à  Artolsheim  et  acquises 
depuis  par  la  ville  de  Schlestadt. 

M.  Ghauffour  dépose  six  photographies  de  tapisseries  exécutées  aux 
quinzième  et  seizième  siècles  d'après  des  dessins  de  A.  Dürer  et  offertes  à 
la  Société  par  M.  II.  Kestner. 

Remercîments  votés  à  M.  Kestner. 

M.  Frantz  dépose  un  dessin  représentant  une  tour  très-remarquable  du 
mur  d'enceinte  d'Ammerschvvyhr,  en  annonçant  que  la  commune  a  décidé 
la  démolition  de  ce  monument.  Il  prie  la  Société  d'intervenir. 

Des  explications  échangées  il  résulte  que  cette  démolition  n'est  com- 
mandée par  aucun  intérêt  majeur,  que  la  tour  en  question  n'est  pas 
un  obstacle  au  passage,  puisque  la  nouvelle  porte  qui  va  être  établie, 
le  sera  dans  un  autre  endroit  et  qu'ainsi  rien  ne  saurait  justifier  la  des- 
truction. ' 

Le  comité  de  Colmar  est  chargé  de  suivre  cette  affaire  auprès  de  l'admi- 
nistration départementale. 

M.  Mossmann  donne  lecture  d'un  travail  sur  d'anciennes  tapisseries  qui 
existaient  autrefois  à  l'abbaye  de  Murbach.  C'est  la  traduction  d'une  lettre 
fort  curieuse  d'un  frère  Sigismond  adressée  à  l'abbé  de  Murbach  et  donnant 
une  description  détaillée  et  raisonnée  de  ces  tapisseries. 

1.  Voir  la  suite  de  cette  affaire  et  la  justiticatioii  de  raiitorifé  d'Animerschwylir  an  procès- 
verbal  de  la  séaijce  extraurdiuaire  du  18  mai  1S63. 


Ce  travail  intéressant  sera  publié  dans  le  Bulletin  de  la  Société. 

Lecture  est  donnée  de  la  lettre  suivante  de  M.  Bardy  : 

«Je  viens  appeler  votre  attention  et  celle  de  nos  collèg-ues  de  la  Société 
sur  la  vieille  église  romane  de  Bermont,  près  de  Belfort,  lieu  devenu 
célèbre  dans  le  pays  par  les  promenades  qu'y  faisait  autrefois  la  belle 
Henriette  de  la  Suze.  Je  ne  reviendrai  pas  sur  ce  sujet  que  j'ai  traité  en 
détail,  l'année  dernière,  dans  une  petite  brochure  dont  j'ai  eu  l'honneur 
de  vous  adresser  un  exemplaire. 

«Je  vous  envoie  un  croquis  à  la  plume,  dessiné  d'après  nature,  au  mois 
de  novembre  dernier,  par  mon  frère. 

«  L'église  de  Bermont  est  mentionnée  pour  la  première  fois  dans  un  titre 
du  5  janvier  1147,  par  lequel  Humbert,  archevêque  de  Besançon,  con- 
firme les  possessions  du  prieuré  deLanthenans  (....  cum  ecclesia  de  Belle- 
monte  et  capella  de  Trestudens ).  On  la  retrouve  encore  dans  un  autre 

titre  du  4  mai  1177,  par  lequel  le  pape  Alexandre  III  confirme  ces  mêmes 
possessions  ( — ecdesiam  de  Bellemonte  cum  capella  sua  de  Trestu- 
dens —  ). 

«  Tout  près  de  Bermont  se  trouve  le  village  de  Châtenois,  qui  remonte 
aussi  à  une  haute  antiquité.  Son  nom  se  trouve  orthographié  dans  les  anciens 
litres  de  différentes  manières  :  Casteneyaco  (5  janvier  1147);  Castiney 
(4  mai  1177);  Schehteney  (8  juillet  1241);  Chestenoy  (15  mai  1282); 
Cliastenoy  (12  mai  1342).  Les  Allemands  le  nommenl  Kestenh oh ,  et  le  patois 
du  pays  Cliâteneu. 

«  Il  s'y  trouvait  autrefois  un  prieuré  sous  la  règle  de  Saint-Augustin,  qui 
fut  uni  en  1435  à  la  collégiale  de  Montbéliard.  Les  terres  qui  composaient 
la  dotation  de  ce  prieuré  furent  exceptées  de  la  mesure  qui  prescrivait  que 
les  biens  immeubles  des  églises  du  comté  de  Montbéliard  seraient  mis 
aux  enchères  publiques ,  et  que  l'argent  provenant  de  cette  vente  serait 
placé  à  intérêts  au  profit  de  la  recette  ecclésiastique.  Celte  mesure 
avait  été  prescrite  par  une  ordonnance  du  comte  Frédéric  du  13  sep- 
tembre 1585. 

«L'histoire  ne  mentionne  qu'un  seul  prieur  de  Châtenois ,  c'est  Jean, 
chanoine  de  Saint-Paul  de  Besançon  ,  qui ,  en  1209,  eut  de  graves  démêlés 
avec  son  collègue  le  prieur  de.Lanthenans. 

«L'église  de  Châtenois,  quoique  ancienne,  n'offre  rien  de  remarquable. 
Il  n'y  existe  qu'une  pierre  tombale  qui  puisse  offrir  (juelque  intérêt.  Je  vous 
en  adresse  le  fac-similé. 


-  38  — 


Pierre  tombale  dans  l'église  de  Châtenois  (Haut-Rhin). 


CY  GIST  LE  CORPS  DE 
FVT  lEAN  DESCOMaEY 
LVY  VIVANT  SIEVRDE  LA 
VALLEY  EN  NORMANDIE 
ET  MARESCHAL  DES  LOGIS 
DE  LA  COÄ^PPAGNIE  DE 
CHEWLX  LEGERS  DE 
MONSIEVR  LE  MARQVIS 
DE  CASTELMORON  CO 
MAMDANT   POVR   SA 
MAIESTE  TRES  CHRES 
TIENNE   A   MONTRELI 
ARD  ET  PAYS  EN  DE 
PENDANTS  LEQVEL  DE 
CEDA  DE  CE  MONDE 
LE  7  JOVR  DV  MOIS 
DE  FEBRVIER  1642 

LA  MORT  EST  LA  FIN 
DE  TOVTES  LES  CHOSES 


«Je  termine  ces  renseignements  sur  Châtenois  en  rappelant  qu'il  s'y 
trouvait  autrefois  un  haut-fourneau  et  une  usine  pour  l'exploitation  des 
mines  de  fer  qui  existent  dans  le  pays.  »  ' 

M.  le  président  lit  un  mémoire  historique  intitulé:  Une  excomiminication 
à  Mulhouse  au  treizième  siècle ,  qui  est  couvert  par  les  applaudissements 
de  l'ossemblée. 

Ce  mémoire  sera  publié  dans  le  Bulletin  de  la  Société, 

La  séance  est  levée  à  5  heures. 


1.  La  description  complète  de  cette  union,  faite  par  Duhamel ,  se  trouve  insérée  dans 
l'ancien  Journal  des  mines  (n°  XXXYII,  vendémiaire  an  VI). 


—  39  — 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  18  mai  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Eissen,  Heitz,  Jung,  baron  de  Schaiienburg,  Schirr. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Le  secrétaire  dépose  les  publications  suivantes,  reçues  dans  l'intervalle 
des  deux  séances: 

Bulletin  de  la  Société  impériale  des  antiquaires  de  France,  1862, 
4^  trimestre; 

Messager  des  sciences  historiques,  ou  Archives  des  arts  et  de  la  biblio- 
graphie de  Belgique,  1863,  V^  livraison; 

Mémoires  et  documents  publiés  par  la  Société  d'histoire  et  d'archéologie 
de  Genève,  t.  XIII; 

Revue  des  Sociétés  savantes  des  départements,  S'' série,  t.  P'",  mars  1863; 

Anzeiger  für  Kunde  der  deidschen  Vorzeit,  X.  Jahrg.,  n°  3. 

Le  président  annonce  avoir  reçu  une  lettre  de  M.  le  sous-préfet  de 
Schlestadt,  proposant  comme  membre  M.  Simonin,  Pierre,  capitaine  au 
S-i*'  régiment  de  ligne. 

Cette  admission  est  prononcée. 

Il  a  reçu  également  une  lettre  de  M.  A.  de  Barthélémy,  faisant  ses  remer- 
cîments  pour  sa  nomination  de  membre  honoraire. 

De  son  côté,  il  a  écrit  à  MM.  Oppermann,  Nicklès  et  au  trésorier,  au 
sujet  des  fouilles  de  Gerstheim,  et  du  vote  auquel  elles  ont  donné  lieu  ; 

A  M.  le  sous-préfet  de  Schlestadt  pour  le  remercier  de  la  présentation 
de  M.  le  capitaine  Simonin; 

Une  deuxième  lettre  au  trésorier,  au  sujet  de  certaines  réclamations 
venues  de  Wissembourg  et  de  Haguenau,  et  de  la  décision  du  comité  qui 
y  a  fait  droit; 

A  M.  Laugel,  entrepreneur,  pour  le  remercier  des  médailles  trouvées  à 
Saint-Léonard,  et  dont  il  a  offert  des  exemplaires  à  la  Société  ; 

AM.  le  Préfet  du  Haut-Rhin,  pour  le  prier  d'intervenir  auprès  de  l'au- 
torité municipale  d'Ammerschwyhr ,  contre  la  démoHtion  projetée  d'une 
ancienne  tour  ; 

A  MM.  Trouillat,  A.  de  Barthélémy  et  Robert,  directeur  de  l'administra- 
tion au  département  de  la  guerre,  pour  leur  annoncer  leur  nomination  de 
membres  honoraires  de  la  Société; 


—  40  — 

A  M.  le  président  de  la  Société  jurassienne  de  Porenlruy,  pour  lui  an- 
noncer que  la  Société  accepte  avec  empressement  l'échange  des  publica- 
tions respectives; 

A  M.  Müller,  agent  voyer  inspecteur,  pour  le  remercier  de  son  rapport 
du  7  mai  sur  les  tombeaux  découverts  le  long  du  chemin  de  fer  vicinal  de 
Molsheim  à  Wasselonne; 

A  M.  le  conservateur  des  forêts,  au  sujet  des  fouilles  deWœrth-sur-Sauer; 
de  plus,  des  lettres  concernant  des  affaires  diverses. 

Le  président  communique  ensuite  une  lettre  de  M.  Mœhler,  notaire  à 
Ammerschwyhr  (Haut-Bhin),  qui  fait  observer  que  l'assemblée  générale  à 
Golmar  a  été  mal  renseignée  au  sujet  du  dessein  qu'on  a  prêté  à  l'adminis- 
tration municipale  de  démolir  une  tour  historique  faisant  partie  de  son  en- 
ceinte. 11  appuie  sa  lettre  d'un  extrait  des  délibérations  du  conseil  municipal, 
duquel  il  appert  qu'effectivement  le  projet  de  destruction  n'a  jamais  existé, 
et  que  tout  se  borne  à  ouvrir,  pour  les  besoins  de  la  circulation,  une  nou- 
velle porte  d'enceinte. 

Le  secrétaire  donne  lecture  de  la  note  suivante  de  M.  Morin,  chargé 
d'examiner  l'affaire  des  fouilles  projetées  à  Wœrth-sur-Sauer. 

M.  Weissacker,  notaire  à  Wœrth,  a  demandé  au  conseil  municipal,  l'au- 
torisation d'exécuter  à  ses  frais  des  fouilles  de  tumuli  dans  la  forêt  de  cette 
commune,  dans  le  but  de  découvrir  des  fragments  antiques. 

Par  délibération  du  12  mars  1863,  le  conseil  municipal  admet  cette  de- 
mande, qui  est  également  appuyée  par  M.  le  garde  général  des  forêts,  sous 
réserve  de  communiquer  les  objets  trouvés  à  la  Société  pour  la  conserva- 
lion  des  monuments  et  à  la  Société  philomalique  de  Niederbronn.  Avant 
de  se  prononcer,  M.  le  conservateur  des  forêts  demande  l'avis  du  comité. 

Par  lettre  du  20  octobre  1859,  M.  le  Préfet  a  ordonné  que  les  inscrip- 
tions, pierres  tombales,  ou  fragments  d'architecture,  ayant  un  intérêt  his- 
torique quelconque,  trouvés  dans  les  fouilles  de  bâtiments  ou  d'anciens 
édifices  quelconques,  resteront  la  propriété  de  la  commune. 

Cette  décision  est  maintenant  insérée  dans  tous  les  cahiers  des  charges 
d'entreprise  des  bâtiments  communaux. 

La  forêt  communale  de  Wœrth  est  soumise,  comme  toutes  les  autres  pro- 
priétés communales,  à  la  tutelle  du  Préfet,  et  la  décision  du  20  octobre 
1859  doit  s'y  appliquer  également. 

Dans  le  cas  particulier,  je  crois  que  les  objets  quelconques  qui  seront 
trouvés  dans  les  fouilles,  resteront  propriété  communale,  et  seront  remis 
au  maire  de  Wœrth. 

La  valeur  de  ces  objets  sera  estimée  par  le  comité  de  la  Société  pour  la 


—  Ai  — 

conservation  des  monuments,  et  l'administration  locale  de  Wœrlh  pourra 
opter  entre  la  conservation  de  ces  objets  avec  remboursement,  à  M.  Weiss- 
acker,  delà  somme  déterminée,  ou  l'abandon  de  ces  mêmes  objets. 

Sur  le  refus  de  la  commune  de  conserver  les  fragments  trouvés ,  et  d'en 
tenir  compte ,  la  Société  des  monuments  sera  autorisée  à  garder  les  frag- 
ments aux  mêmes  conditions  que  la  commune;  mais  dans  ce  dernier  cas, 
la  valeur  en  sera  tlxée  par  expertise  contradictoire. 

Dans  tous  les  cas,  les  fouilles  et  recherches  seront  faites  avec  le  con- 
cours de  la  Société  des  monuments  historiques  d'Alsace ,  qui  sera  avertie 
huit  jours  à  l'avance  du  commencement  des  opérations,  et  s'y  fera  repré- 
senter. 

Le  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  suivante  de  M.  Müller,  agent 
Yoyer  inspecteur  : 

«  Monsieur  le  Président,  j'ai  l'honneur  de  vous  informer  qu'en  faisant 
des  fouilles  sur  le  chemin  de  fer  vicinal  de  Molsheim  à  Wasselonne,  près 
du  grand  pont  sur  la  Bruche,  on  a  découvert  plusieurs  tombes  composées 
de  dalles  grossières  de  fortes  dimensions,  posées  de  champ.  Ces  tombes 
affectent  la  forme  d'un  cercueil  de  quatre  parois  verticales,  mais  sans  être 
ferme  ni  en  bas,  ni  en  haut;  en  les  vidant,  on  n'a  pu  rassembler  que 
quelques  fragments  d'ossements,  et  un  crâne  avec  les  dents. 

«Une  seule  tombe  était  maçonnée  et  fermée,  et  une  autre  avait  une 
longueur  de  plus  de  deux  mètres.  Jusqu'à  présent,  on  n'a  trouvé  dans 
aucune  ni  inscription,  ni  quelque  objet  pouvant  indiquer  jusqu'où  elles 
remontent. 

«  J'ai  recommandé  à  l'agent  voyer  de  Molsheim  de  laisser  intactes,  pen- 
dant quelques  jours,  les  tombes  les  mieux  conservées,  afin  que,  dans  le 
cas  où  vous  jugeriez  à  propos  de  les  faire  examiner,  on  puisse  voir  com- 
ment elles  sont  disposées.  Cet  agent  fournira  aussi  le  dessin  et  un  plan  des 
lieux  que  je  m'empresserai  de  vous  communiquer.» 

Puis  d'une  lettre  ministérielle  annonçant  la  réunion  des  sociétés  savantes 
au  mois  d'avril  1864,  et  indiquant  les  conditions  du  concours',  et  la  valeur 
des  prix  à  décerner  à  cette  occasion  ; 

Et  enfin  du  programme  de  la  trentième  session  du  congrès  archéolo- 
gique de  France,  qui  s'ouvrira  le  28  mai,  à  Alby,  et  le  2  juin ,  à  Rhodez. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  commence  la  lecture  du  mémoire  de  M.  Thil- 
loy,  sur  Herbitzheim. 

La  séance  est  levée  à  1  heure. 


—  42  — 

Séance  du  Comité  du  \''  juiu  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Eissen,  Guerber,  Ileitz,  Klotz,  Levrault,  Matuszinsky, 
Morin  ,  Petit-Gérard,  baron  de  Schauenburg-,  Schirr,  Straub. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Le  procès  -  verbal  de  l'assemblée  générale  de  Golmar  est  lu  et  approuvé. 

Le  secrétaire  dépose  : 

ISotes  sur  les  débris  antiques  recueillis  en  1855  à  Kustendje  (Dobrudja). 
Extrait  des  Mémoires  de  l'Académie  impériale  de  Metz  (1857-1858); 

Numismatique  lorraine.  Tomes  XllI  et  XIV; 

Notes  sur  des  monnaies  austrasiennes  inédites,  par  Ch.  G.  Robert; 

Considérations  sur  la  monnaie  à  l'éfoque  romane  et  description  de 
quelques  triens  mérovingiens  ; 

Jahrbücher  für  die  Landeskunde  der  Herzogthümer  Schleswig -Holstein 
und  Lauenburg,  herausgegeben  von  der  schlesiuig-liolstein-lauenburg- 
schen  Gesellschaft  für  vaterländische  Geschichte ,  redigirt  von  Tli.  Lehmann 
und  IL  Handelmann.  Band  VI.  Heft  1-3; 

Archive  für  Schiveizer- Geschichte ,  herausgegeben  auf  Veranstaltung 
der  allgemeinen  geschichtsforschenden  Gesellschaft  der  Schweiz.  Band  XII 
und  XIII; 

Numismatique  de  Cambrai ,  par  G.  Robert ,  membre  correspondant  de 
la  Société  des  antiquaires  de  France,  etc.; 

Recherches  sur  les  monnaies  et  les  jetons  des  maîtres  -  échevins  et 
description  de  jetons  divers ,  par  G.  Robert. 

Les  ouvrages  de  M.  Robert  sont  un  hommage  de  l'auteur ,  récemment 
reçu  membre  honoraire  de  la  Société. 

MM.  Mœhler,  notaire  à  Ammerschwyhr,  présenté  par  M.  Frantz,  de 
Golmar;  Butsch,  meunier  à  Baldersheim,  présenté  par  M.  Ingold ,  de 
Gernay ,  et  Hartmann,  architecte  à  Golmar,  présenté  par  M.  Ringeisen, 
sont  proclamés  membres  de  la  Société,  pour  prendre  rang  à  partir  du 
r-"  janvier  18G3. 

Le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  suivantes  : 

A  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin  ; 

A  M.  le  Maire  d'Ammerschwyhr  ; 

A.  M.  Frantz,  chef  de  division  à  la  préfecture  du  Haut-Rhin  ; 


—  43  — 

A  M.  J.  Thilloy ,  substitut  du  procureur  général  à  la  Cour  impériale  de 
Metz,  pour  lui  annoncer  que  son  mémoire  sera  publié  dans  le  Bulletin  de 

la  Société  ; 

AM.  le  professeur  Ilidber  à  Berne,  accusé  de  réception  d'un  volume 
de  la  Société  historique  de  Berne  ; 

A  M.  le  Préfet  du  Haut -Rhin,  à  M.  Véron- Réville,  à  M.  l'ingénieur  en 
chef  Coumes,  à  M.  le  Conservateur  des  forêts,  pour  les  prier  de  se  charger 
de  la  distribution,  aux  divers  agents  de  leurs  administrations,  de  la  mono- 
graphie de  M.  de  Morlet  sur  les  tumull  de  Brumath; 

A  M.  Ingold,  au  sujet  de  l'Engelbourg  et  d'une  statuette  de  Vénus,  mise 
en  vente  à  Mulhouse,  et  de  photographies  à  prendre  de  statues  du  Christ 
à  Pfastatt  et  de  saints  à  Cernay  ; 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin ,  relativement  à  des  bracelets  trouvés  à  Ros- 
heim  et  qui  sont  à  réclamer  à  Schlestadt,  auprès  de  l'un  des  agents  voyers. 

Le  président  procède  au  scrutin  pour  compléter  le  comité. 

MM.  Saum,  inspecteur  de  la  librairie  étrangère,  et  Siefïer,  curé  à  Weyers- 
heim,  ayant  obtenu  la  majorité  absolue  des  voix,  sont  proclamés  membres 
du  comité,  sauf  ratification  de  l'assemblée  générale. 

M.  Levrault  donne  lecture  de  son  rapport  sur  le  mémoire  de  M.  Krämer, 
curé  à  Niederhaslach,  sur  le  château  de  Girbaden. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Krämer  et  le  dépôt  de  son  mé- 
moire aux  archives. 

M.  Levrault  dépose  des  objets  antiques  découverts  à  Obernai  pendant 
les  travaux  du  chemin  de  fer  et  offerts  par  M.  Gascoin,  commissaire  de 
police.  C'est  un  flacon  et  une  soucoupe  en  verre,  et  un  bracelet  en  bronze, 
selon  toute  apparence  d'origine  romaine. 

Le  président  communique  la  lettre  de  remercîment  de  M.  Robert,  pour 
sa  nomination  de  membre  honoraire,  et  une  lettre  de  M.  Ingold  de  Cernay, 
annonçant  la  découverte  de  six  statues  en  pierre  d'une  taille  colossale,  qui 
ornaient  le  pourtour  intérieur  de  l'église  de  Cernay. 

Le  même  membre  demande  l'autorisation  de  faire  photographier  la 
statue  du  Christ  de  Pfastatt;  —  accordé.  Il  annonce  la  vente  prochaine,  à 
Mulhouse ,  d'une  statuette  en  marbre  de  Vénus ,  provenant  des  ruines  de 
Mandeure;  il  pense  que  la  Société  devrait  en  faire  Tacquisition.  Le  comité 
ne  croit  pas  pouvoir  prendre  de  décision  à  ce  sujet  avant  d'avoir  des  ren- 
seignements plus  précis. 

Le  président  donne  lecture  du  reste  du  mémoire  de  M.  Thilloy  sur 
Herbitzheim,  ainsi  que  d'une  note  de  M.  Sieffer  sur  les  ruines  d'une  villa 
romaine  à  Oberbronn. 


—  u  — 

M.  le  baron  de  Schauenburg  lil  la  note  suivante  sur  un  camp  romain 
présumé. 

«  L'accident  de  terrain  qui  a  été  signalé  au  comité  par  M.  Schmidt-Ba- 
tiston,  comme  pouvant  être  un  camp  romain,  se  trouve  à  la  lisière  orien- 
tale de  la  forêt  de  Haguenau,  en  face  et  à  une  petite  demi-lieue  du  village 
de  Leutenheim,  dans  le  canton  forestier  dit  Klostenvald,  dénomination  qui 
semblerait  indiquer  une  ancienne  dépendance  de  l'abbaye  de  Kœnigsbruck. 

«  Le  monticule  lui-même  porte  le  nom  de  Hcidenberg,  et  pres(|ue  à  l'ex- 
piration de  sa  plus  grande  pente  coule,  à  l'est,  le  ruisseau,  ou  petite  rivière, 
appelé  Eberbach. 

«  Ce  monticule  est  la  seule  éminence  qui  surgisse  d'une  surface  plane 
très-étendue,  à  peu  près  comme  dans  la  plaine  de  Laon  le  plateau  qui 
porte  la  ville. 

«  C'est  probablement  à  cette  singularité ,  à  son  voisinage  de  la  voie 
romaine  dont  on  recouvre  des  vestiges,  s'élendant  à  l'ouest  entre  Souffïen- 
heim  et  Kœnigsbruck,  à  sa  situation  évidemment  favorable  comme  point 
militaire  d'observation  et  aux  particularités  de  ses  formes,  qu'il  faut  attribuer 
la  supposition  qu'il  aurait  été  élevé  de  main  d'homme  et  aurait  été  un  camp 
romain. 

«  Autant  qu'il  a  été  possible  d'en  juger  par  des  mesures  prises  au  pas 
et  par  des  observations,  rendues  très-difficiles  et,  par  conséquent,  très- 
incertaines  à  raison  de  l'épaisseur  de  la  végétation  forestière,  le  périmètre 
de  sa  base,  de  forme  ovalaire,  déprimée  à  son  grand  côté  ouest,  embrasse 
une  surface  d'environ  trois  hectares. 

«  Son  point  culminant,  qui  porte  le  nom  de  Schlœssel  et  ne  s'élève 
guère  qu'à  une  trentaine  de  mètres  au-dessus  du  niveau  général  de  la 
plaine,  est  un  mamelon  arrondi,  dont  le  plateau  supérieur  a  environ 
2,000  mètres  de  surface ,  à  l'extrémité  nord-ouest  duquel  il  est  situé. 

«  Le  terre-plein,  qui  domine  la  plaine,  tantôt  de  15,  tantôt  de  20  et  de 
25  mètres,  est  entouré  d'un  ravin  présentant  l'aspect  d'un  grand  fossé  et 
est  coupé  vers  la  saillie  sud-ouest  par  une  sorte  de  fossé  intérieur. 

«A  deux  des  angles  saillants,  dont  cinq  se  dessinent  encore  d'une  ma- 
nière assez  sensible,  on  pourrait,  avec  un  certain  effort  d'imagination , 
reconnaître  un  supplément  de  défense. 

«  Le  ravin  principal  forme  un  fossé  continu,  qui  entoure  l'ensemble  des 
terre-pleins  ainsi  que  le  mamelon,  dit  Schlœssel,  qui  n'a  de  ravin  ou  de 
fossé  propre  que  du  côté  du  grand  terre-plein  et  qui ,  à  raison  de  sa  sur- 
élévation et  de  ses  dimensions  restreintes,  pourrait  avoir  fait  à  la  fois 
l'office  de  réduit  et  de  vigie. 


—  45  — 

«  Evidemment  les  espaces  renfermés  dans  les  profils  sont  de  trop  petite 
étendue  pour  que  cet  accident  de  terrain  ait  jamais  pu  jouer  un  rôle  de 
camp  retranché  de  quelque  importance;  mais  sa  forme,  son  étendue,  sa 
situation ,  sa  proximité  d'une  voie  romaine  reconnue ,  permettent  de  penser 
et  de  soutenir,  qu'il  a  pu  et  dû  jouer  celui  d'un  poste  d'observation, 
occupé  dans  des  circonstances  données. 

«  Comme  poste  d'observation ,  il  n'est  guère  possible  de  reconnaître  dans 
\e  Heidenberg  et  le  Sddossherg,  qui  le  domine,  que  les  vestiges,  très- 
bien  conservés,  d'un  ouvrage  en  terre,  formé  en  régularisant  les  accidents 
naturels  du  terrain,  pour  leur  donner  la  forme  et  le  profil  d'un  retranchement. 

«L'absence  de  tout  vestige  de  construction  en  matériaux  solides  et  la 
nature  de  la  végétation  forestière  corroborent  cette  opinion ,  qui  ressort 
déjà  du  peu  d'espace  des  terre-pleins. 

«En  effet,  les  arbres,  d'une  stature  gigantesque,  sont  d'une  vigueur 
peu  ordinaire  et  de  la  plus  belle  venue,  ce  qui  atteste  sufïisamment  que 
leurs  racines  ne  rencontrent  ni  roches ,  ni  substructions  qui  pourraient 
contrarier  leur  développement. 

«  S'il  est  difficile  d'admettre  qu'un  remblai  d'un  cube  aussi  considérable 
ait  pu  avoir  été  entièrement  élevé  de  main  d'homme,  sans  avoir  laissé  à 
proximité  aucune  trace  de  l'excavation  qu'il  aurait  fallu  faire  pour  en  ex- 
traire l'étoffe;  s'il  est  tout  aussi  difficile  d'admettre  qu'une  aussi  grande 
masse  de  terre  ait  été  amenée  de  loin;  il  serait  pour  le  moins  aussi  difficile 
de  prétendre  que  la  nature  ayant  produit,  sur  un  point  marqué  par  un 
intérêt  stratégique  évident,  une  élévation  qui  ne  demandait  qu'un  peu  de 
travail  pour  en  faire  un  poste  d'observation  important  et  un  retranche- 
ment facile  à  défendre ,  l'époque  romaine  ou  le  moyen  âge  n'aurait  pas 
perfectionné  l'ébauche  de  la  nature. 

«Dans  le  même  canton  forestier,  à  2,000  mètres  à  peu  près  au  nord 
du  Heidenberg,  existe,  il  est  vrai,  un  étang,  qui  figure  sur  la  carte  de 
l'état-major,  sur  laquelle  on  ne  découvre  aucune  indication  dudit  Heiden- 
berg; mais  cet  étang  dont  la  surface  est  plus  que  triple  que  celle  du  mon- 
ticule ,  ne  semble  pas  être  une  excavation  artificielle  et  aurait  fourni  trois 
fois  plus  de  matériaux  qu'il  n'en  fallait. 

«Quel  intérêt,  d'ailleurs,  auraient  pu  avoir  les  constructeurs  du  retran- 
chement, à  chercher  de  la  terre,  à  une  si  grande  distance  et  dans  un 
bas-fond,  où  ils  auraient  rencontré  l'eau  presque  à  fleur  de  sol,  quand  ils 
l'avaient  sur  place,  à  la  seule  condition,  peut-être,  de  donner  un  peu  plus 
de  largeur  et  de  profondeur,  en  même  temps  que  plus  de  force,  au  retran- 
chement. 


—  40  — 

«  Toutes  les  données  d'observation  se  réunissent  donc  pour  faire  ad- 
mettre, non  pas  qu'il  y  ait  eu  au  Heidenberg  un  camp  romain,  un  grand 
établissement  militaire  avec  des  constructions  en  matériaux  solides ,  mais 
bien  qu'un  accident  naturel  de  terrain,  existant  sur  un  point  favorable,  a 
été  utilisé  pour  en  faire  un  poste  d'observation,  un  retranchement,  dont 
les  profils  sont  encore  assez  bien  dessinés  aujourd'hui  pour  témoigner  de 
la  destination  à  laquelle  il  a  été  approprié  à  une  époque  plus  ou  moins 
reculée.  » 

M.  l'abbé  Straub  lit  une  note  étendue  sur  l'église  de  Walbourg,  dont 
l'insertion  au  Bulletin  de  la  Société  est  votée,  ainsi  que  la  reproduction 
de  quelques  signes  de  tailleurs  de  pierre  et  d'une  date,  et  celle  du  reli- 
quaire réduit  au  quart  ou  au  cinquième. 

Le  comité  vote  400  fr.  pour  replacer  le  tabernacle  de  Walbourg  à 
l'église  et  y  faire  les  restaurations  les  plus  urgentes. 

La  séance  est  levée  à  1  heure. 


Séance  extraordinaire  du  Comité  du  VS  juin  1861 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents  :  MM.  Eissen ,  Jung,  baron  de  Schauenburg,  Straub. 

Le  secrétaire  donne  lecture  des  procès-verbaux  de  la  séance  extraordi- 
naire du  18  mai  et  de  la  séance  ordinaire  du  1*^'"  juin,  qui  sont  adoptés. 

M.  le  président  annonce  que  M.  Paul  Ristelhueber  a  fait  don  à  la  Société 
d'un  opuscule  intitulé  :  Liber  vagatorum.  —  Remercîments  votés. 

Le  secrétaire  dépose  sur  le  bureau  : 

Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit,  X.  Jahrgang,  n*'  4; 

Neujahrsgabe  den  Mitgliedern  des  Vereins  für  nassauische  Alterthums- 
kunde  und  Geschichtsforschung  in  Wiesbaden.  Jan.  1803; 

Mittheilung  an  die  Mitglieder  des  Vereins  für  nassauische  Alterthums- 
kunde  und  Geschichtsforschung  in  V\^iesbaden ,  ausgegeben  im  Januar 
i863  ; 

Revue  des  Sociétés  savantes  des  départements,  3*^  série,  t.  I.  Avril  1803. 

Le  président  annonce  que  M.  Goste  propose  d'admettre  comme  membres 
de  la  Société  M.  Keller,  pasteur  à  Muttersholz,  et  M.  Hirt,  son  vicaire.  — 
Adopté. 


—  47  — 

Il  annonce  de  plus  qu'il  a  écrit  à  M.  Krämer,  curé  à  Niederhasiach, 
pour  le  remercier  de  sa  monographie  historique,  descriptive,  topogra- 
phique  et  légendaire  du  château  de  Girbaden,  et  pour  le  prier  de  vouloir 
bien  continuer  sa  collaboration  ,  en  s'appliquant  de  préférence  à  des  sujets 
qui  n'ont  pas  encore  été  traités  dans  le  Bulletin  ; 

A  M.  Michel  Saglio,  maire  à  Walbourg,  pour  le  remercier  de  l'accueil 
fait  à  la  commission  delà  Société,  chargée  d'examiner  les  peintures  mu- 
rales du  chœur  de  l'église  de  son  endroit,  et  pour  le  prier  de  réaliser  ses 
généreuses  intentions  au  sujet  de  la  restauration  de  ces  peintures; 

A  M.  Gascoin,  commissaire  de  police  à  Obernai,  pour  le  remercier  du 
don  des  objets  antiques  trouvés  pendant  les  travaux  du  chemin  de  fer; 

A  MM.  Saum,  chef  de  bureau  à  la  Préfecture,  et  Sieffer,  curé  à  Weyers- 
heim,  pour  leur  annoncer  leur  nomination  provisoire  comme  membres 
du  comité. 

Il  communique  une  lettre  de  M.  Zimberlin,  curé  à  Biederthal,  contenant 
des  documents  concernant  le  château  de  Landskron. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  lit  une  note  au  sujet  d'une  pierre  sculptée, 
trouvée  dans  la  maison  n°  10  de  la  rue  Mercière. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Kuntz ,  propriétaire  de  la  susdite 
maison  et  l'insertion  de  la  note  au  Bulletin. 

A  cette  occasion  M.  le  professeur  Jung  rappelle  que  la  maison  d'habita- 
tion, portant  la  plus  ancienne  date  à  Strasbourg,  est  située  rue  des  Bou- 
chers n°  27.  Le  rez-de-chaussée  a  une  porte  d'entrée  ogivale  en  accolade; 
l'ogive  porte  l'inscription   suivante   sculptée  en   relief: 

ts.  liomns.  ricl)tr.  nûcupûtus-  biitscl)munn.  miles-  onno-  bmi-  mccccroij-  o.  ibos-  ûngusti 

Le  rez-de-chaussée  pourrait  être  de  celte  époque;  les  étages  supérieurs 
sont  du  commencement  du  dix-septième  siècle,  car  les  garnitures  de  bois 
sculptées  des  croisées  portent  le  millésime  1607.  11  ajoute  que  pourtant, 
d'après  différents  indices,  la  pierre  qui  porte  l'inscription  pourrait  être  une 
pierre  rapportée,  utilisée,  ou  conservée  en  cet  endroit.  Au  sommet  de 
l'ogive,  entre  les  mots  miles  et  anno,  existe  un  petit  écusson  effacé. 

M.  Straub  annonce  qu'on  songe  à  Altorf  à  faire  restaurer  les  peintures 
murales  de  l'église,  qui  ne  peuvent  pas  rester  dans  l'état  actuel,  parce 
que,  telles  qu'elles  sont,  elles  déparent  l'intérieur  de  l'édifice.  Si  on 
reconnaît  l'impossibilité  de  les  restaurer,  il  vaudrait  mieux  les  couvrir 
d'un  badigeon. 

M.  le  professeur  Jung  lit  une  note  sur  des  médailles  trouvées  à  Ottrott 
et  communiquée  par  M.  le  baron  Léon  de  Bussierre  : 


—  48  — 

Paquet  A.  Onze  médailles  en  argent.  Un  évêque,  donnant  la  bénédiction  ; 
sur  le  revers,  un  ange,  portant  une  croix  double.  Il  est  impossible  de 
reconnaître  des  lettres  sur  le  bord. 

i.  2.  3.  4.  La  crosse  épiscopale  ou  abbatiale  est  sur  le  dos  de  l'évêque. 

5.  6.  Une  croix  sur  le  dos  de  l'évêque. 

Ces  médailles  ressemblent  au  n°  289  de  l'ouvrage  de  M.  de  Berstell, 
qui  dit  que  probablement  elles  appartiennent  à  l'Alsace. 

7.  8.  Un  évêque,  donnant  la  bénédiction;  devant  l'évêque,  une  étoile. 
Une  étoile  se  trouve  sur  la  médaille  n"  300  de  l'ouvrage  cité. 

Les  monnaies  des  abbayes  de  Saint  -  Maximien  à  Trêves  ont  des  étoiles 
semblables. 

9.  10.  H.  Abbé  ou  évêque,  portant  une  croix  ,  sur  le  dos  un  sceptre. 

Paquet  B.  Huit  médailles.  Saint  qui  prie.  BERTRANN  —  (?);  revers: 
main  qui  bénit:  NE  TENSIS'. 


Paquet  G.  Une  médaille,  tour  au-dessus  d'un  mur  crénelé.  Deux  mé- 
dailles indéchiffrables. 

Paquet  D.  Six  médailles.  Abbé  donnant  la  bénédiction.  Grande  tour  sur 
un  mur  crénelé. 

La  connaissance  des  médailles  frappées  par  les  évêques  et  les  abbayes 
en  Allemagne  est  encore  très-incomplète,  et  chaque  découverte  en  produit 
un  certain  nombre  que  les  numismates  ne  savent  où  classer. 

M.  Ringeisen  fait  un  rapport  verbal  sur  sa  tournée  aux  châteaux  d'Eguis- 
heim ,  Hoh-Landsperg  et  Plixbourg. 

La  séance  est  levée  à  1  heure. 


—  49  — 

Séance  du  Comité  du  6  juillet  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 

Présents  :  MM.  Bœrsch,  Eissen,  Heitz,  baron  Matthieu  de  Faviers,  Morin, 
colonel  de  Morlet,  Nicklès,  Pelit-Gérard,  Ringeisen,  Saum,  baron  de  Schauen- 
burg,  Siffer. 

Le  secrétaire  dépose  :  Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit,  zehnter 
Jahrgang  i863,  n°  5,  Mai; 

Annales  de  l'Association  philomatique  vogéso-rhénane,  par  le  professeur 
Kirschleger;  l'"^  livraison,  i'"'^  série; 

Sabourin  de  Nanton,  le  général  Barbanègre  au  blocus  d'Huningue; 

Revue  archéologique.  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Redon  en  Bretagne, 

tirage  à  part; 

Revue  des  sociétés  savantes  des  départements ,  3^  série,  t.  F""; 

Bidletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie,  1863,  n°  i. 

Il  donne  ensuite  lecture  du  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  lequel 
donne  lieu  aux  observations  suivantes  : 

M.  le  baron  de  Schauenburg.  Le  comité  a  bien  voulu  me  confier  la 
mission,  de  concert  avec  M.  l'abbé  Straub,  de  nous  rendre  à  Altorf  pour  l'exa- 
men des  restaurations  de  peintures  murales  qui  y  ont  été  exécutées.  Cette 
mission  n'a  pu  être  remplie,  vu  que  nous  avons  été  devancés,  sans  doute 
par  suite  d'un  malentendu,  et  que  l'on  a  continué,  sans  attendre  notre  avis, 
à  dénaturer  ces  peintures.  D'après  ce  qui  m'a  été  rapporté,  ces  travaux  ne 
sauraient  être  approuvés  ni  au  point  de  vue  archéologique,  ni  au  point  de 
vue  artistique.  Je  serais  d'avis  d'en  informer  M.  le  Préfet,  en  le  priant  d'in- 
tervenir pour  qu'un  travail  aussi  peu  justifiable  ne  se  continue  pas. 

Quelques  membres  proposent  d'en  écrire  d'abord  à  M.  le  maire  d'Altorf, 
ou  bien  à  M.  le  grand-vicaire  Schirr,  vice-président. 

M.  le  président  se  charge  de  l'en  entretenir  verbalement. 

Le  comité  adopte  cet  avis. 

Après  cette  discussion,  le  procès-verbal  est  adopté. 

M.  Véron-Réville  propose  comme  membre,  à  partir  de  1864,  M.  Mat- 
thieu Saint-Laurent,  notaire  à  Colmar, 

Et  M.  Heitz,  M.  Brandhof  er,  ancien  négociant  à  Strasbourg,  qui  demande 
à  faire  partie  de  la  Société  à  partir  du  T""  janvier  1863. 

Admis. 

n*  Sjérie.  —  T.  II.  —  (P.-V.)  4 


-  50  - 

Le  président  annonce  avoir  écrit  à  MM.  Kunlz,  Zimberlin,  Malhyss, 
inspecteur  voyer  à  Sclilestadt,  Trouillal,  à  Purentruy,  Véi'on-Réville,  Ber- 
nard, à  Paris,  et  Merck. 

11  lit  ensuite  une  lettre  adressée  à  M.  le  Préfet  par  M.  de  Ring,  qui  de- 
mande l'autorisation  de  faire  des  fouilles.  Le  conn'té  émet  l'avis  d'être  re- 
présenté pendant  cette  opération. 

Puis  il  communique  des  [lièces  de  comptabilité  des  maisons  Simon  et 
Silbermann,  qui  sont  approuvées. 

Le  colonel  de  Morlet  appelle  l'attention  du  comité  sur  la  chapelle  du 
Haut-Barr,  pour  laquelle  des  fonds  avaient  été  votés.  Il  résulte  de  son  rap- 
port que  la  partie  historiquement  et  archéologiquement  la  plus  intéres- 
sante n'exige  aucune  dépense,  tandis  que  la  partie  la  plus  compromise, 
de  construction  plus  récente,  et  n'offrant  que  fort  peu  d'intérêt,  exigerait 
une  dépense  assez  considérable  pour  être  convenablement  restaurée. 
D'après  ces  motifs  il  propose  de  renoncer  à  ce  travail.  Le  comité  adopte 
cet  avis  et  annule  le  crédit  de  150  fr.  qui  avait  été  alloué. 

M.  de  Morlet  dépose  ensuite  une  agrafe  mérovingienne  (fibule),  des 
colliers,  des  lames  d'épée  franques,  trouvés  dans  des  tombeaux  à  Odratz- 
heim,  par  les  soins  de  M.  Kast,  conducteur  des  travaux  du  chemin  de  fer, 
et  lit  la  note  suivante  sur  cette  trouvaille  : 

«Une  intéressante  découverte  vient  d'avoir  lieu  dans  la  banlieue  d'Odralz- 
heim  (canton  de  Wasselonne). 

«M.  Kast,  agent-voyer  conducteur  des  travaux  du  chemin  de  fer  deMols- 
heim  à  Wasselonne,  en  faisant  exécuter  des  déblais  pour  extraire  du  bal- 
last, a  mis  à  jour  plusieurs  tombeaux  formés  de  dalles  posées  de  champ  et 
recouverts  par  des  pierres  plates.  Leur  forme  est  celle  d'un  trapèze  de 
1'",90  de  longueur  sur  0'",C0  de  largeur  à  la  tête,  et  0'",45  aux  pieds.  Les 
squelettes  placés  horizontalement  sur  le  sol  au  fond  de  la  tombe,  étaient 
toujours  orientés  vers  l'est.  On  a  trouvé  près  d'eux  les  objets  qui  se  ren- 
contrent habituellement  dans  les  sépultures  franques,  savoir:  des  sabres 
en  fer  à  un  tranchant  (scramasaxes),  des  couteaux  et  des  fers  de  lance  du 
même  métal,  des  grains  de  pâte  émaillée,  percés  d'un  trou,  quelques  dé- 
bris de  bronze  et  trois  petites  monnaies  en  bronze  également  percées 
d'un  trou\  —  Une  seule  libule  a  été  découverte,  elle  est  en  argent,  d'un 
travail  analogue  à  celui  de  la  belle  fdjule  d'or  de  Gerstheim  que  j'ai  mise 
sous  vos  yeux  à  la  séance  du  4  mai  dernier. 


1.  Deux  de  ces  monnaies,  quoique  très-frustes,  ont  été  reconnues  par  notre  collègue 
M.  Saum,   pour  être  l'une  de  Gonstantiü,  l'autre  de  Valenlinien. 


BIJOUX  TROUVÉS  EN  I8()5  DANS  DES  SÉPULTURES  ANCIENNES 

à  ODRATZHEIM  (canlon  de  Wasselonne)  el  à  GERSTIIEIM  (cniilon  do  lîeiifeld) 

(CRANDEUR   D'EXÉCUTION). 


Fibule  en  argent  (Odratzheini). 


Fibule  en  or  (Gerstlieim) 


Croix  en  or,  épaisseur  0™, 00025 
(Odratzheim). 


Bulla  en  cuivre  doré 
(Geistbeim). 


Pâtes  émaillées  (Gerstheim  et  Odratzheim). 


flÉ 


^^^t^ 


% 


Voir  les  procès-verbaux  des  séances  du  Comité  du  4  mai  et  du  6  juillet  1803. 


Sliiishoiii j4 ,  ly|inKia|iliic  ili'  I!    Sillicinianii 


—  51  — 

«La  fibule  d'Odratzheim  a  la  forme  d'un  carré  de  0  centimètres  de  côté, 
dont  le  contour  est  découpé  en  buit  festons  alternativement  courbes  et  an- 
gulaires; au  centre  s'élève  une  demi-spbère  de  16  millimètres  de  bauleur, 
d'où  partent  buit  rayons  qui  partagent  la  surface  en  buit  secteurs,  au  mi- 
lieu desquelles  sont  encbàssées  des  pierres  bleues  et  rouges.  —  Des  pierres 
semblables,  mais  de  plus  petite  dimension,  forment  ces  rayons,  et  entou- 
rent la  demi-sphère  centrale  d'un  cercle  colorié.  —  Toute  la  surface  de  la 
plaque  d'argent  est  couverte  de  filigranes  de  même  métal,  délicatement 
tressés  et  formant  des  dessins  réguliers.  —  Au-dessous  de  cette  plaque 
se  trouve  une  coucbe  de  masiic  blanc  de  10  millimètres  d'épaisseur,  repo- 
sant sur  une  plaque  de  cuivre  rouge;  les  deux  plaques,  qui  sont  l'une  et 
l'autre  d'une  épaisseur  d'un  millimètre  à  peine,  sont  réunies  par  des  clous 
rivés  en  cuivre  traversant  le  mastic;  un  de  ces  clous  aboutit  au  sommet 
de  la  demi-spbère  centrale  et  relie  solidement  tout  le  système.  Le  mastic 
est  formé  d'une  terre  alumineuse,  à  laquelle  est  mêlée  une  substance 
grasse  organique.  —  Une  des  pierres  bleues  s'étant  détachée,  on  a  pu 
l'analyser  et  on  a  reconnu  que  c'était  un  verre  à  base  de  soude  coloré  au 
cobalt.  (Cette  analyse  a  été  faite  par  un  habile  chimiste,  M.  Kopp.) 

«Des  fouilles  toutes  récentes  viennent  de  faire  apparaître  ,  parmi  les 
ossements,  une  croix  formée  par  une  mince  lame  d'or;  ses  quatre  branches, 
d'égale  longueur,  sont  percées  de  trous  qui  annoncent  qu'elle  a  dû  être 
cousue  sur  les  vêtements  du  mort. 

«Les  tombeaux  longeaient  un  chemin  rural  dit  Wœhland,  qui  se  dirige 
vers  Molsheim. 

«Cette  découverte  plus  complète  que  celle  de  Gerstheim,  puisque  j'ai  pu 
constater  la  forme  et  l'orientation  des  tombeaux,  se  rapporte  sans  aucun 
doute  à  l'époque  franque,  et  la  fibule  d'Odratzheim,  comme  celle  de  Gerst- 
heim,  paraît  dater  du  quatrième  ou  cinquième  siècle. 

«Nous  retrouvons  dans  les  sépultures  d'Odratzheim  tous  les  caractères 
de  celles  de  Lorentzen,  découvertes  en  1861  par  M.  le  pasteur  Ringel. 
Toutefois  on  remarque  dans  les  premières  la  forme  du  trapèze,  c'est-à- 
dire  la  diminution  de  largeur  de  la  tombe  vers  les  pieds,  qui  annonce  une 
date  moins  ancienne  que  celle  des  tombeaux  rectangulaires  de  Lorentzen, 
dont  la  construction  est  d'ailleurs  plus  grossière. 

«On  peut  juger  d'après  cet  exposé  combien  il  serait  important,  dans  l'in- 
térêt de  l'histoire  de  l'Alsace  pendant  la  période  franque,  d'effectuer  sur 
notre  sol  des  recherches  multipliées  pour  obtenir  la  carte  complète  de  ces 
sépultures  si  bien  caractéiisées.Déjà  trois  jalons  sont  fixés;  le  premier,  près 
de  la  Sarre  à  Lorentzen;  le  deuxième,  sur  le  Khin  à  Gerstheim  ;  et  le  Iroi- 


—  52  - 

sième,  inlermédiaire,  à  Odratzheim,  près  de  Kirchheim  et  de  Marlenheim, 
lieux  célèbres  en  Alsace  par  la  résidence  des  rois  d'Austrasie. 

«M.Kast  m'a  prié  d'offrir  au  comité  la  belle  fibule  d'argent  que  je  viens  de 
décrire  ainsi  que  les  sabres,  couteaux  et  pâtes  émaillées,  recueiUis  par  ses 
soins  dans  ces  tombeaux.  Grâce  à  ce  don,  la  Société  possède  aujourd'hui  un 
nouveau  spécimen  de  l'art  de  la  bijouterie  à  l'époque  franque,  qui  ira 
prendre  place  à  côté  des  bijoux  de  Lorentzen  et  de  Gerstheim  dans  la 
vitrine  qui  vient  d'être  placée,  par  les  soins  de  M.  Klotz,  dans  la  salle  du 
rez-de-chaussée  de  la  Bibliothèque,  que  notre  collègue,  M.  Jung,  a  bien 
voulu  mettre  à  la  disposition  du  comité. 

«M.  Kast,  qui  avait  déjà  donné  à  la  Société  de  précieux  renseignements 
sur  des  sépultures  d'incinération,  découvertes  par  lui  dans  la  vallée  du 
Cronthal,  vient  ainsi  d'acquérir  de  nouveaux  droits  aux  récompenses 
honorifiques  que  la  Société  distribue  lors  de  ses  assemblées  générales.  » 

M.  Bœrsch  informe  le  comité  de  la  découverte  d'anciens  pilotis  sur  la 
place  de  l'Hôpital  civil,  mis  à  nu  pendant  les  fouilles  faites  pour  asseoir  les 
fondations  de  la  Faculté  de  médecine.  11  propose  de  demander  une  note 
sur  ces  découvertes  à  M.  l'architecte  de  la  vihe. 

M.  Nicklès  demande  si  le  comité  entend  faire  l'acquisition  de  toutes  les 
médailles  antiques  qui  seraient  trouvées;  M.  le  président  répond  que  jus- 
qu'ici le  comité  ne  s'est  point  engagé  dans  cette  voie. 

M.  le  colonel  de  Morlet  pense  qu'il  n'en  serait  pas  moins  fort  intéressant 
d'acquérir  toutes  les  médailles  trouvées  dans  les  localités  qui  ont  une  no- 
toriété historique,  surtout  si  on  peut  obtenir  ces  médailles  pour  leur  va- 
leur intrinsèque. 

M.  Saum  ajoute  qu'il  est  utile  que  le  public  sache  que  la  Société  achète, 
afin  que  celle-ci  ne  reçoive  pas  seulement  ce  dont  personne  ne  veut 
plus. 

Le  comité  décide  que  l'on  achètera  en  ce  genre  tout  ce  qui  peut  offrir 
de  l'intérêt. 

M.  Nicklès  dépose  ensuite  un  fragment  de  poterie  romaine,  marqué 
VICTOR.  F.,  un  autre  marqué  BELATVLLVS.  F.  et  des  clefs  en  fer,  trouvés 
sur  l'emplacement  du  château  de  Schwanau,  à  Sand,  etc.,  et  communique 
deux  dessins  de  têtes  trouvées  à  Ehl  et  à  Benfeld.  L'époque  à  assigner  à  ces 
deux  têtes  est  difficile  à  déterminer. 

Le  président  dépose  une  petite  carte  des  environs  d'Obernai  et  de  Ros- 
heim,  et  deux  bracelets  trouvés  pendant  les  travaux  du  chemin  de  fer,  le 
tout  donné  par  M.  Mathyss,  inspecteur  voyer.  —  Remercîments  votés  à 
M.  Mathyss. 


—  Do- 
li communique  un  arrêté  de  M.  le  Préfet  auturisaiit  M.  Weissacker,  no- 
taire, à  faire  des  fouilles  dans  la  forêt  communale  de  Wœrth-sur-Sauer. 

Le  comité  prie  le  président  d'intervenir  ofTiciellement  auprès  de  M.  le 
Préfet  pour  que  la  Société  soit  représentée  pendant  ces  opérations. 

M.  Morin  déclare  qu'il  est  prêt  à  se  charger  de  cette  mission  pour  celte 
fois. 

M.  Sifîer  lit  deux  notes  sur  deux  villas  romaines  aux  environs  d'Ober- 
bronn.  —  Le  comité  vote  l'insertion  de  ces  notes  au  Bulletin. 

M.  Saum  rend  compte  d'une  excursion  dans  la  vallée  de  la  Bruche  au 
Ringelberg-  qui  renferme  trois  monuments  d'origines  diverses  :  un  château 
féodal  dont  la  base  paraît  celtique  ;  une  espèce  de  bastion  en  terre,  nommé 
la  Schantz,  qui  paraît  d'origine  suédoise,  et  une  grande  enceinte  en  pierres 
entourée  de  fossés,  qui  semble  un  camp  romain.  En  tous  ces  endroits  on 
trouverait  sans  doute  des  objets  d'antiquités ,  et,  puisqu'on  y  exécute  en 
ce  moment  des  coupes,  il  conviendrait  peut-être  de  prendre  quelques  me- 
sures conservatrices. 

Le  président  écrira  en  ce  sens  à  M.  le  conservateur  des  forêts. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  dépose  des  débris  trouvés  dans  les  fouilles 
faites  derrière  la  chapelle  de  la  Toussaint,  débris  paraissant  avoir  appartenu 
à  une  frise  sculptée.  M.  de  Schauenburg  pense  qu'ils  proviennent  de  l'an- 
cien couvent  de  la  Toussaint. 

Le  président  annonce  que  M.  Véron-Piéville  demande  une  gratification 
pour  le  concierge  de  la  Préfecture  de  Colmar,  chargé  de  disposer  la  salle 
des  séances  de  l'assemblée  générale  du  Haut-Rhin. 

Le  comité  vote  la  somme  de  30  fr. 

Le  président  communique  une  note  de  M.  Müller  sur  un  écusson  sculpté 
trouvé  à  Benfeld. 

Quelques  membres  engagent  M.  Nicklès  à  chercher  un  endroit  plus  con- 
venable, à  Benfeld,  pour  la  conservation  de  cet  écusson.  M.  Nicklès  répond 
qu'il  ne  s'en  trouve  pas. 

M.  Bœrsch  pense  que,  dans  ce  cas,  et  puisque  l'écusson  provient  d'un 
évêque  de  Strasbourg,  cet  objet  devrait  être  transporté  au  musée  de  la 
Société. 

M.  Ringeisen  répond  que  le  magasin  de  tabacs,  où  cet  écusson  se  trouve 
provisoirement  conservé  par  son  incrustation  dans  le  mur  des  nouvelles 
constructions,  a  été  élevé  sur  l'emplacement  de  l'ancien  château  épiscopal, 
et  qu'au  fond  il  ne  pourrait  être  mieux  placé,  pourvu  que  l'on  eût  des  ga- 
ranties pour  sa  conservation. 

Le  président  met  aux  voix  la  question  de  savoir  si  la  pièce  doit  rester  à 


—  54  — 

Benfeld,  ou  bien  s'il  faut  prendre  des  mesures  pour  la  faire  transporter  à 
Strasbourg. 

Le  comité  décide  qu'elle  restera  dans  la  localité  actuelle,  et  prie  le  pré- 
sident de  recommander  à  qui  de  droit  la  conservation  de  la  pièce. 

M.  Riiigeisen  rend  compte  des  déblais  exécutés  aux  châteaux  d'Eguis- 
heim,  et  communique  la  composition  de  la  commission  qui  préside  à  ces 
travaux.  Ce  sont:  MM.  Véron-Ré ville,  îluot,  conseillers;  Gérard,  avocat; 
Liblin-Ortlieb,,  architecte;  Schœllbaum ,  ingénieur;  Feltz,  Ringeisen, 
M.  Rudler,  maire  d'Eguisheim. 


-  55  — 

SOCIÉTÉ 

POUR  LA 

CONSERVATION  DES  MONUMENTS  HISTORIQIÎES 
D'ALSACE. 


Fin  novembre  1863. 


COMPOSITION  ACTUELLE  DU  COMITE  D'ADMINISTRATION. 

MM.  MiGNERET,  préfet  du  Bas-Rhin,  fondateur  de  la  Société,  premier  président 
honoraire. 
ÜDEM,  préfet  du  Haut-Rhin,  second  président  honoraire. 

Bureau. 

MM.  Spacii  (Louis),  archiviste  de  la  Préfecture,  correspondant  du  Ministère  de 
l'instruction  publique  pour  les  travaux  historiques,  président. 
Schirr,  vicaire  général,  vice-président. 
EissEN,  docteur  en  médecine,  secrétaire. 
Klotz,  architecte  de  l'œuvre  Notre-Dame,  trésorier. 
Heitz,  imprimeur-libraire,  archiviste. 

Membres. 

MM.  ScHAUEXBURG  (barou  de),  membre  du  Conseil  général. 
MoRLET  (de),  colonel  du  génie  en  retraite. 
Straub  (abbé),  professeur  au  petit  Séminaire. 
Bœrsch  (Charles) ,  membre  du  Conseil  général. 
Petit-Gérard  (Baptiste),  peintre  sur  verre. 
Grass,  artiste-statuaire. 
Guerber,  curé  de  Saint-George  à  Haguenau. 
MoRiN,  architecte  du  département. 
Levrault  (Louis),  percepteur  à  Obernai,  correspondant  du  Ministère  de 

l'instruction  publique. 
Oppermann,  directeur  de  l'Ecole  de  pharmacie  à  Stiasbourg. 
Ringeisen,  architecte  de  l'arrondissement  de  Schlesladt. 


—  56  — 

MM.  Faviers  (baron  Matthieu  de),  propriétaire  à  Kintzheim. 
Matuszinski,  arciiitecle  de  l'arrondissement  de  Strasbourg. 
Fürst,  architecte  de  l'arrondissement  de  Saverne,  membre  adjoint. 
CoNRATH,  architecte  de  la  ville  de  Strasbourg,  membre  adjoint. 
Guerre,  ingénieur  en  chef  à  Strasbourg. 
CouMES,  ingénieur  en  chef  des  travaux  du  Rhin  à  Strasbourg. 
Saum,  sous-chef  de  division  à  la  Préfecture. 
Siffer,  curé  à  Weyersheim. 

Sous-Comité  du  Haut-Rhin. 

MM.  Véron-Réville,  conseiller  à  la  cour  impériale  de  Colmar,  vice-président. 
Hamberger,  président  de  chambre  à  la  cour  impériale  de  Colmar. 
Chauffour  (Ignace),  avocat  à  la  cour  impériale  de  Colmar. 
Gérard,  avocat  à  la  cour  impériale  de  Colmar. 
LiBLiN,  directeur  de  la  Revue  d'Alsace  à  Colmar. 
Stœber  (Auguste),  professeur  au  collège  de  Mulhouse. 
Brièle,  archiviste  du  Haut-Rhin  à  Colmar. 
Schlumberger-Hartmann  (fils),  fabricant  à  Guebwiller. 
Frantz,  chef  de  division  à  la  préfecture  du  Haut-Rhin. 
Meyer,  curé  à  Colmar. 
HuoT,  conseiller  à  la  cour  impériale  de  Colmar. 


LISTE  DES  MEMBRES  PAR  DÉPARTEMENTS,  ARRONDISSEMENTS  ET  CANTONS. 


DEPARTEMENT  DU  BAS-RHIN. 

ARRONDISSEMENT  DE  SAVERNE. 

Canton  de  Bouxwiller. 
M.  Schattenmann,  membre  du  Conseil  général  à  Bouxwiller. 

Canton  de  Drulingen. 

MM.  Ringel,  pasteur  à  Diemeringen. 
Schmidt,  agent  voyer  à  Drulingen. 

Canton  de  Hochfelden. 

MM.  CousTANS,  piqueur  au  chemin  de  fer  à  Hochfelden. 
May,  curé  à  Hochfelden. 


—  57  — 

Ganton  de  Marmoutier. 

M.  Hüter,  commissaire  de  police  à  Marmoutier. 

Canton  de  la  Petite-Pierre. 

MM.  Grünsfelder,  médecin  à  Neuwiller. 

TüRCKHEiM  (A.  de),  garde  général  à  Neuwiller. 

Canton  de  Saar-Union. 

MM.  Erhard  (Henri),  géomètre-arpenteur  à  Harskirchen, 
Flurer  (Frédéric),  maire  à  Saar-Union. 
Kremer,  conducteur  des  ponts  et  chaussées  à  Saar-Union. 
MuLOTTE  (Auguste),  notaire,  membre  du  Conseil  général  a  Saar-Union. 
Wehrung  (Charles),  propriétaire  à  Harskirchen. 

Canton  de  Saverne. 

MM.  Arth,  propriétaire  à  Saverne. 
Fischer  (Dagobert),  à  Saverne. 
Fürst,  architecte  de  l'arrondissement  à  Saverne. 
Goldenberg  (Alfred),  fabricant  au  Zornhof  (près  Saverne). 
Lecomte,  pharmacien  à  Saverne. 
Mertian,  sous-préfet  à  Saverne. 
Schauenburg  (de,  fds),  juge. 

ARRONDISSEMENT  DE   SCHLESTADT. 

Canton  de  Barr. 
MM.  Deharbe,  curé  d'Andlau. 

DiEMER,  notaire  honoraire  à  Barr. 

Dietz,  maire  à  Barr. 

Frey,  secrétaire  de  la  mairie  à  Barr. 

Girolt  (Antoine),  brigadier  forestier  à  Barr. 

Schmidt  (Jean),  propriétaire  à  Barr. 

Taufflieb  (Auguste),  négociant  à  Barr. 

Taufflieb,  docteur  en  médecine  à  Barr. 

Nebinger,  maire  à  Heiligenstein. 

Stahl,  propriétaire  à  Heiligenstein. 

Buhlmann,  propriétaire  à  Nothhalten. 

Cœhorn  (baron  de),  député  au  Corps  législatif,  maire  de  Saint-Pierre. 

Canton  de  Benfeld. 

MM.  Meyer,  vétérinaire  à  Benfeld, 

NiCKLÈs  (Napoléon),  pharmacien  à  Benfeld. 

Siffert,  directeur  de  la  manufacture  à  Ehl  (près  Benfeld). 

Stackler,  propriétaire,  membre  du  Conseil  général  à  Benfeld. 


—  58  — 

MM.  WoHLFAUTfï,  juge  (le  paix  à  Denfeld, 
VoLTZ,  curé  à  Herbslieim. 
Walcii,  vicaire  à  Iliittenlieim. 
Heimburger,  propriétaire  et  géomètre  à  Kerlzield. 
Reibel,  notaire  à  Riiinau. 
Albrecht,  propriétaire  de  l'usine  à  Sand. 
Barïhelmé  (Adolphe),  propriétaire  à  Sand. 

Canton  d'Erstein. 

MM.  Bancalis  (Rodolphe  de),  propriétaire  à  Gerstheim. 
Martin,  curé  à  Nordhausen. 

BuLACH  (baron  Zorn  de),  chambellan  de  S.  M.  l'Empereur,  maire  d'Ost- 
hausen. 

Canton  de  Marckolsheim. 

MM.  Strehlé  ((ils),  notaire  à  Marckolsheim. 
Heckmann-Stintzy,  notaire  à  Müttersholz. 
Keller,  ancien  pasteur  à  Müttersholz. 
Hirt,  vicaire  à  Müttersholz. 
Kastler  (Jérémie),  notaire  à  Sundhausen, 

Canton  d'Obernai. 

MM.  Blandin  (César),  notaire  honoraire  à  Obernai. 
Gyss  (abbé),  à  Obernai. 
Hervé,  percepteur  à  Obernai. 
Levrault  (Louis),  percepteur  à  Obernai. 
Mohler  (Adolphe,  père),  à  Obernai. 

Ortlieb,  ancien  curé  de  Sainte-Foi  de  Schlestadt,  à  Obernai. 
Siebert,  pharmacien  à  Obernai. 
Wagner  (Richard),  à  Obernai. 
Reinach  (baron  de),  membre  du  Conseil  général,  maire  à  Niedernai. 

Canton  de  Rosheim. 

MM.  Dartein  (Théodore  de),  propriétaire  et  maire  à  Ottrott. 
Bigeault  (Remi-Marc),  percepteur  à  Rosheim. 
Blumstein,  à  Rosheim. 
Schmidt-Batiston  (Emile),  à  Rosheim. 

Canton  de  Schlestadt. 
MM.  Doverva,  curé  à  Châtenois. 

Faviers  (baron  Matthieu  de)  ,  propriétaire  à  Kintzheim. 
CosTE,  juge  au  tribunal  civil  de  Schlestadt. 
Drion,  président  du  tribunal  civil  de  Schlestadt. 
Lacomble  (de),  receveur  des  finances  à  Schlestadt. 


—  59  — 

MM.  PiiNGEiSEN,  architecte  de  l'arrondissement  à  Schlestadt. 
La  bibliothèque  de  la  ville  de  Schlestadt. 
Vaux,  avocat  à  Schlestadt. 

ARRONDISSEMENT  DE   STRASBOURG. 

Canton  de  Bischwiller. 
M.  Schmitt-Batiston,  avocat,  propriétaire  à  Reschwoog. 

Canton  de  Brumath. 
MM.  ScHNŒRiNGER,  docteur  en  médecine  à  Brumath. 

Trautmann,  membre  du  Conseil  d'arrondissement  à  Brumath. 

FoDÉRÉ  (Raymond),  secrétaire  de  la  direction  de  l'asile  de  Stéphansfeld. 

WiLLiEN  (Henri),  percepteur  à  Geudertheim. 

SciiiFFERSTEiN  (Antoine),  propriétaire  à  Mommenheim. 

ScHAUMANN,  curé  à  Vendenheim. 

Karm,  ancien  notaire  à  Weyersheim. 

SiFFER,  curé  à  Weyersheim. 

Ulrich,  curé  à  Hœrdt. 

Canton  de  Geispolsheim. 
MM.  Carbiener  (George),  notaire  à  Geispolsheim. 

Fuchs,  propriétaire  à  Illkirch. 

Bussierre  (Frédéric  de),  ingénieur  civil  à  Graffenstaden. 

GoLDSCiiMiTT,  médecin  à  l'usine  de  Graffenstaden. 

Messmer,  directeur  de  l'usine  de  Gralfenstaden. 

Canton  de  Haguenau. 
MM.  Guerreu,  curé  de  Saint-George  à  Haguenau. 

Guerber  (abbé),  vicaire  de  Saint-George  à  Haguenau. 
Harter  (abbé),  vicaire  de  Saint-George  à  Haguenau. 
Kleinclaus,  notaire  à  Haguenau. 
Nessel,  propriétaire  à  Haguenau. 

Paganetto,  membre  du  Conseil  d'arrondissement  à  Haguenau. 
Pfundt  (abbé),  vicaire  de  Saint-George  à  Haguenau. 
Sciiouller  (Eugène),  fabricant  au  Geisselbronn,  près  Haguenau. 
Schweissguth  (Louis),  à  Haguenau. 

Canton  de  Molsheim. 
MM.  AuDÉouu,  maire  à  Avolsheim. 
Bausinger,  curé  à  Dachstein. 
Bégel  (de),  ingénieur  en  chef  à  Liitzelhausen. 
Krämer,  curé  à  Niederhaslach. 

Canton  de  Schiltigheim. 
M.  Greiner  ,  pharmacien  à  Schiltigheim. 


—  60  — 

MM.  RouDOLPHi,  membre  du  Conseil  général,  maire  de  Scliilligheim. 
Stahl  ((ils),  marchand  de  bois  à  SchiUigheim. 

Cantons  de  Strasbourg. 

Ville  de  Strasboin-g. 
MM.  Adam  (abbé),  vicaire  à  Saint-Pierre-le-Jeune. 
Apprederis,  aumônier  de  la  colonie  d'Oslwald. 
Arnold,  architecte. 
AuBRY,  doyen  de  la  Faculté  de  droit. 
Baltzer,  professeur  au  Gymnase. 
Barte  de  Sainte-Fare,  conservateur  des  forêts. 
Barth,  propriétaire. 
Bayer,  architecte. 

Berger-Levrault,  imprimeur-libraire. 

Bergmann  (Frédéric-Guillaume),  doyen  de  la  Faculté  des  lettres. 
Bernard  (Joseph-Félix),  receveur  des  hospices  de  Strasbourg. 
Blanck,  entrepreneur. 
Bœckel  (Charles),  libraire. 
Bœrsch  (Charles),  membre  du  Conseil  général. 
Bœsswillwald  ,  négociant. 
Brandhoffer  (Jean-Fréderic),  ancien  négociant. 
Braunwald,  pasteur-président  du  consistoire  de  Saint-Thomas. 
Bruch,  doyen  de  la  Faculté  de  théologie. 
Brunet,  commissaire  central. 
Buchmüller,  marchand  de  bois. 
Chastelain,  propriétaire. 
Conrath,  architecte  de  la  ville. 

CouLAUX,  député  au  Corps  législatif,  maire  de  Strasbourg. 
CouMES,  ingénieur  en  chef. 
CozE  (Léon),  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
Crépîn,  professeur  de  dessin  au  Lycée. 
CuNTz,  négociant. 

Dacheux  (abbé),  professeur  au  petit  Séminaire. 
Dartein  (François-Félix  de),  propriétaire. 
Debenesse,  propriétaire. 
Denecken  (Antoine),  peintre-décorateur. 
DiEHL  (Bernard),  aubergiste. 
DuRRiEU,  receveur  général  des  finances. 
DuvAL-JouvE,  inspecteur  de  l'Académie. 
Ehrmann,  doyen  de  la  Faculté  de  médecine. 
Ehrmann  (Auguste),  propriétaire. 
Ehrmann  (Maurice),  adjoint  au  maire  de  Strasbourg. 


-  61  — 

MM.  Ehrmann  (Edmond) ,  ancien  négociant. 
Bissen,  docteur  en  médecine. 

Engelbacii,  propriétaire,  ancien  conseiller  de  préfecture. 
Fée,  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
FiNCK ,  professeur  à  la  Faculté  des  sciences. 
Frantz,  avocat. 

FuES  (abbé),  professeur  au  grand  Séminaire. 
Georges,  inspecteur  des  forêts. 
GiRARDOT,  chef  de  division  à  la  Préfecture. 
Gœrner  (Jules),  architecte. 
GoGUEL,  officier  de  l'instruction  publique. 
Grass  (Philippe),  artiste-statuaire. 
Guerre  ,  ingénieur  en  chef. 

Hecht  (abbé),  professeur  â  l'établissement  de  Saint-Arbogast. 
Heiser,  professeur  de  maintien. 
Heitz,  imprimeur-libraire. 
Hemberger,  aumônier  de  l'hospice  civil. 
Herrgott,  docteur  en  médecine. 
HiRTZ,  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
Holtzapfel,  avocat. 

HuDER,  imprimeur,  rédacteur  en  chef  de  V Alsacien. 
HtJGELiN  (Ferdinand),  peintre  sur  verre. 
Hugueny,  professeur  au  Lycée. 
JuNDT  (Eugène),  négociant. 
Kablé,  directeur  du  Phénix. 
Kapps,  aumônier  à  la  Toussaint. 
KiRSCHi.EGER,  professcur  à  l'Ecole  de  pharmacie. 
Klose,  banquier,  consul  des  Pays-Bas. 
Klotz,  architecte  de  l'œuvre  Notre-Dame. 
Kœtschel  (abbé),  professeur  au  collège  libre  de  Saint-Arbogast. 
Kratz,  ancien  maire  de  Strasbourg,  membre  du  Conseil  général  et  du  Con- 
seil municipal. 
Küss,  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
Lauth  (Charles),  juge. 
Lebel  (baron),  juge  d'instruction. 
Leblois,  pasteur. 
Lehr  (Paul),  propriétaire. 

Lehr  (Ernest),  secrétaire  général  du  directoire  de  la  Confession  d'Augsbourg. 
Lelièvre,  secrétaire  du  bureau  de  bienfaisance. 
Lemaistre-Chabert,  adjoint  au  maire  de  Strasbourg,  propriétaire. 
Lerbs  (abbé),  professeur  au  petit  Séminaire. 
Lereboullet,  doyen  de  la  Faculté  des  sciences. 


—  02  — 

MM.  Lévy  (Félix),  marchand  d'antiquités. 

Lévy  (Robert),  archilecte. 

LiciiTENFELDKR  (Guillaume),  mécanicien. 

Linder,  avocat. 

M.EDER,  président  du  Consistoire  réformé. 

M.EHN  (Ferdinand),  ferblantier. 

Matuszfnski,  arciiitecte  de  l'arrondissement  de  Strasbourg. 

Mayer,  bomme  de  lettres,  agent  du  chemin  de  fer  de  l'Est  pour  la  corres- 
pondance avec  l'étranger. 

Merck,  rentier. 

MoRiN,  architecte  du  département. 

Morlet  (de),  colonel  du  génie  en  retraite. 

MiJHL,  docteur  en  médecine. 

Müller,  préposé  en  chef  de  l'octroi. 

MtJLLER  (Joseph),  sculpteur. 

MuRY  (Joseph),  professeur  au  petit  Séminaire. 

MuRY  (Pantaléon),  professeur  au  petit  Séminaire. 

Nartz  (abbé),  professeur  au  petit  Séminaire. 

Nœtinger  (Alfred),  avocat. 

Nœtinger,  notaire. 

Oberlin,  professeur  à  l'Ecole  de  pharmacie. 

Oppermann,  directeur  de  l'Ecole  de  pharmacie. 

Perrin,  architecte. 

Petit-Gérard,  peintre  sur  verre. 

Pétiti  (Eugène),  architecte. 

Prost,  membre  du  Conseil  général. 

Rapp,  vicaire  général  du  diocèse. 

Ratisbonne  (Achille),  président  du  Consistoire  Israélite. 

PiAU,  professeur  à  la  Faculté  de  droit. 

Renouard  de  Russierre  (baron  A.),  député  au  Corps  législatif. 

Reussner  (Frédéric),  professeur  au  Gymnase. 

Riciiert,  juge. 

Ristelhueber  (Paul),  licencié  es  lettres. 

Sarourin  de  Nanton,  membre  de  la  Société  d'émulation  des  Vosges. 

Saglio  (Alphonse),  ancien  député. 

Sainte-Suzanne  (baron  Ferdinand  de). 

Salomon,  libraire. 

Saum,  inspecteur  de  la  librairie  étrangère. 

ScHAUENBURG  (barou  de),  membre  du  Conseil  général. 
M""'  Sciieidecker. 
MM.  Schirr,  vicaire  général  du  diocèse. 

Sciilagdenhaufen  (Frédéric),  professeur  agrégé  à  l'École  de  pharmacie. 


—  G3  - 

MM.  ScHNÉEGANS,  licencié  es  lettres,  rédacteur  du  Courrier  du  Bas-Rhin. 
Schnell  (abbé),  aumônier  à  Tinstitution  de  Glaubilz. 
ScHWEBEL,  professeur  agrégé  au  Séminaire  proteslanl. 
Sengenwald  (Jules),  président  de  la  Chambre  de  commerce. 
Silbermann,  imprimeur. 
Simon,  imprimeur-litbograplie. 
Simonin,  capitaine  au  âC  de  ligne. 
Spach  (Louis),  archiviste  du  département. 
Spach  (Gustave),  secrétaire  en  chef  de  la  mairie  de  Strasbourg. 
St.ehling,  négociant. 

Stœder,  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
Stoltz,  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
Stotz  (Jean-Jacques),  propriétaire. 
Straub  (abbé),  professeur  au  petit  Séminaire. 
Teutsch  (Charles),  négociant. 
Thiébaut,  agent  de  change. 
Thomas  (Auguste),  inspecteur  des  douanes. 
Tourbes,  professeur  à  la  Faculté  de  médecine. 
Uhrin  (abbé),  professeur  au  collège  de  Saint-Arbogast. 
Weyer  (André),  architecte. 
Winter  (Charles),  photographe. 
WoLFF,  avoué. 

Wolff  (abbé),  professeur  au  petit  Séminaire. 
Zeysolff  (Charles),  notaire. 
Zimmer,  notaire. 
ZoPF,  négociant. 

Canton  de  Truchtersheim. 
M.  Ohlmann,  curé  à  Truchtersheim. 

Canton  de  Wasselonne. 
MM.  Lallemanû,  percepteur  à  Wasselonne. 

North,  membre  du  Conseil  général,  maire  à  Wasselonne. 

ARRONDISSEMENT  DE  WISSEMBOURG. 

Canton  de  Niederbronn. 
MM.  Dietrich  (Eugène  de),  ancien  député,  à  Niedcrbronn. 

Kuhn,  médecin-inspecteur  de  l'établissement  thermal  de  Niedcrbronn. 
Reichard,  supérieur  de  la  congrégation  des  filles  du  divin  Rédempteur  à 

Niederbronn. 
TüRCKHEiM  (Rodolphe  de),  à  Niederbronn. 
Lehmann,  curé-recteur  h  Roichshoflen. 


—  64  — 

Canton  de  Wissembourg. 

MM.  DuviviER,  sous-préfet  à  Wissembourg. 
Gœtz  (abbé),  vicaire  à  Wissembourg. 
Ohleyer,  professeur  au  collège  de  Wissembourg. 
PuGNiÈRE,  membre  du  Conseil  général,  maire  à  Wissembourg. 
Schaffner  (chanoine),  curé  à  Wissembourg. 
ScHŒLL  (fils),  substitut  du  procureur  impérial  à  Wissembourg. 
Stoffel,  juge  au  tribunal  de  première  instance  à  Wissembourg. 
Wernert  (abbé),  vicaire  à  Wissembourg. 

DÉPARTEMENT  DU  HAUT-RHIN. 

ARRONDISSEMENT   DE   BELFORT. 
Canton  de  Belfort. 
M.  PoiSAT,  architecte  à  Belfort. 

Canton  de  Cernay. 

M"^  Andlau  (baronne  de),  à  Cernay. 
M.  Ingold,  notaire  à  Cernay. 

Canton  de  Massevaux. 

M.  BiAN,  manufacturier  à  Sentheim. 

Canton  de  Thann. 

MM.  Amrein  (docteur),  adjoint  au  maire  à  Thann. 
Bulffer,  peintre  à  Thann. 
Chauffour  (Victor),  à  Thann. 
GscHwiND,  notaire  à  Thann. 
Kästner  (Charles) ,  manufacturier  à  Thann. 
Kult,  entrepreneur  des  travaux  à  Thann. 
Mercklin,  greffier  de  la  mairie  de  Thann. 

MossMANN  (Xavier),  ancien  archiviste,  commis  négociant  à  Thann. 
Müller,  ancien  professeur,  receveur  municipal  à  Thann. 
SiCK,  négociant,  adjoint  au  maire  à  Thann. 
HuHN,  curé  à  Vieux-Thann. 

ARRONDISSEMENT  DE  COLMAR. 

Canton  de  Colmar. 

Ville  de  Colmar. 

MM.  Bartholdy  (Charles),  à  Colmar. 
BiAN,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Bonvalot,  conseiller  à  la  cour  impériale. 


—  65  — 

MM.  Brielle  (Léon),  archiviste  du  Haut-Riiin. 
Brunck  (Eusèbe),  inspecteur  des  forêts. 
BussiERRE  (Paul  de),  receveur  général. 
Ghauffour  (Ignace),  avocat. 

Cherrier,  juge  suppléant  au  tribunal  de  première  instance. 
Dillemann,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Dubois,  président  du  tribunal  de  première  instance. 
Ehrhard,  vicaire. 
Ehrlen  (Gustave),  négociant. 
Faudel,  docteur  en  médecine. 

Fleischhauer,  négociant,  juge  au  tribunal  de  commerce. 
FoLTZ  (Charles),  limonadier. 
Frantz  (George),  chef  de  division  à  la  préfecture. 
Gallimard,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Gérard,  avocat. 

Hamberger  ,  président  de  chambre  à  la  cour  impériale. 
Hartmann,  architecte. 
HuoT,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Huss,  vicaire. 

Junger,  docteur  en  médecine. 
KocH,  avocat. 

KoHLER  (Alphonse),  propriétaire, 
Laurent-Athalin,  propriétaire. 
LiBLiN,  directeur  de  la  Revue  d'Alsace. 
Marquez,  docteur  en  médecine. 
Mathieu-Saint-Laurent ,  notaire. 

Meyblum  (WendeUn,  abbé),  aumônier  de  l'hôpital  militaire. 
Meyer,  curé. 

Meyer,  conseiller  î\  la  cour  impériale. 
Neyremand,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Ostermeyer,  avocat  à  la  cour  impériale. 
Peyrimhof,  maire  de  Colmar. 
Reeb  (Victor),  architecte. 
Reinhard  (abbé),  vicaire. 
Rencker,  notaire. 

Rieff,  premier  président  de  la  cour  impériale. 
Sandherr  (Charles),  avocat, 
Schellbaum  (Constant),  architecte. 
Schirmer,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Schmitt  (-1.  J.),  directeur  de  la  compagnie  r Union. 
Schultz,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
Simottel,  avocat  à  la  cour  impériale. 

Il'  SÉRIE.  —  T.  II.  —  (l'.V.) 


—  00  — 

MM.  Véron-Réville,  conseiller  à  la  cour  impériale. 
ViLMAiN  (abbé),  vicaire. 
Werneh  (abbé),  professeur  au  collège  libre. 
WiMPFEN ,  docteur  en  médecine. 
Winterer  (abbé),  vicaire. 
Z.EPFEL  (Edgard),  conseiller  de  préfecture. 

Canton  de  Guebwiller. 

MM.  Bary  (Frédéric  de),  manufacturier  à  Guebwiller. 
Bary  (Albert  de),  manufacturier  à  Guebwiller. 
BouRCART  (Henri),  manufacturier  à  Guebwiller. 
Braun  (abbé),  ancien  rédacteur  du  Volhsfreund  h  Guebwiller. 
Brumpt  (Charles),  professeur  de  musique  à  Guebwiller. 
Burkard,  fabricant  à  Guebwiller. 
Frey-Bourcart,  manufacturier  à  Guebwiller. 
Frey  (Henri),  fabricant  à  Guebwiller. 
Jung,  imprimeur  îi  Guebwiller. 
Pépin,  notaire  à  Guebwiller. 
ScHLUMBERGER-DoLLFUs  (Jean),  à  Guebwiller. 
Schlumberger-Hartmann  (fds),  fabricant  à  Guebwiller. 

Canton  de  Kaysersberg. 
M.  Mœiiler,  maire  et  notaire  à  Ammerschwihr. 

Canton  de  Münster. 

MM.  Hartmann  (Alfred),  manufacturier  à  Münster. 
Hartmann  (Frédéric),  manufacturier  à  Münster. 
Hartmann  (Henri),  manufacturier  à  Münster. 
Hartmann  (Jacques),  manufacturier  à  Münster. 

Canton  de  Neuf-Brisach. 

MM.  DuFAURE  DE  LA  Prade,  jugc  de  paix  à  Neuf-Brisacb. 
Memminger,  pharmacien  à  Neuf-Brisach. 

Canton  de  la  Poutroie. 

M.  Pernot,  curé  à  Bonhomme. 

Canton  de  Ribeauvillé. 

M.M.  Heitz  (Henri),  pasteur  à  Hunawihr. 

Feltz  (abbé),  aumônier  du  pensionnat  des  sœurs  de  la  Providence  à  Ri- 
beauvillé. 
Hœrter  (abbé),  professeur  à  Ribeauvillé. 
JoRANSON  (Alexandre),  négociant  à  Ribeauvillé. 


—  07  - 

MM.  Lanoih  (Charles),  rentier  à  Ribeauvillé. 
Hosenstiel,  archilecle  h  Ribeauvillé. 
Saltzmann,  maire  à  riibeauvillé, 
Stahl  (Louis-Désiré) ,  adjoint  au  maire  à  Ribeauvillé. 

•       Canton  de  Rouffach. 

MM.  Ganter,  curé  à  Gueberschwibr. 

Metzger,  ancien  principal  du  collège  de  Roullacli. 
Stœckle,  curé  à  Rouffach. 

Canton  de  Sainte-Marie-aux-Mines. 

MM.  Baumgartner  (Léon),  fabricant  à  Sainte-Marie-aux-Mines. 
Landmann  (Léon),  fabricant  à  Sainte-Marie-aux-Mines. 
Lesslin  (Adolphe),  à  Sainte-Marie-aux-Mines. 
RiSLER,  dessinateur  à  Sainte-Marie-aux-Mines. 

Canton  de  Soultz. 

MM.  Noll,  curé  à  Hartmansvviller. 

Cacheux,  curé  à  Isenheim. 

Zeller,  à  la  tuilerie  d'OlIwiller  près  Hartmannswiller. 

Heckeren  (baron  de),  sénateur,  a  Soultz. 

Knoll  (Charles) ,  artiste-vétérinaire  à  Souilz. 
M"*  Waldner  (comtesse  de),  à  Soultz. 

Canton  de  Wintzenheim. 
M.  WiRTH  (abbé),  vicaire  à  Eguisheim. 

ARRONDISSEMENT  DE  MULHOUSE. 


Canton  de  Ferrette. 


MM.  Zimrerlin  ,  curé  à  Biederthal. 
J^ger,  curé  à  Fislis. 

Canton  de  Habsheim. 

MM.  BuTSCii  (Joseph),  meunier  à  Baldersheim. 
Stoffel,  percepteur  à  Ilabsheim. 
Reiniiart,  pharmacien  à  Rixheim. 
Ettlin  (Jacques),  propriétaire  à  Zimmersheim. 

Canton  de  Hirsingeu. 
M.  Tallon,  employé  des  contributions  indirectes  à  Hirsingeu. 


—  68  — 

Canton  de  Huningue. 

MM.  Doyen  (Alphonse),  juge  de  paix  à  Huningue, 
LiTZLER,  curé  à  Liebentzwiller. 

Canton  de  Landser. 
M,  Feurmann  ,  curé  à  Schlierbach. 

Canton  de  Mulhouse. 
MM.  BuRNAT  (Emile),  à  Dornach. 
DoLLFUs  (Edouard),  à  Dornach. 
DoLLFUs  (Eugène),  à  Dornach. 
Engel-Dollfus,  manufacturier  à  Dornach. 

Ville  de  Mulhouse. 

MM.  Bader,  directeur  de  l'école  professionnelle. 
Chacre,  architecte  de  la  ville. 
Chauffour,  avocat. 
DoLL  (Charles),  consul  de  Bade. 
DoLLFUS  (Gustave). 
Dollfus-Galline  (Charles). 
Ehlinger,  dessinateur. 
Ehrsam,  archiviste. 
Grosjean  (Emile) ,  manufacturier. 
Hubert  (abbé),  vicaire. 
.Tancigny  (de),  sous-préfet. 
Kenck  (Auguste),  professeur  au  collège. 
Kestner-Kœchlin,  docteur  en  médecine. 
Kœchlin  (Alfred). 
LiNDiNGER  (Alfred),  pharmacien. 
Maine,  inspecteur  des  douanes. 
Meyblum  (abbé) ,  vicaire. 
Michel,  instituteur  de  l'école  communale. 
MiEG  (G.),  négociant. 
Paraf  (ß.),  négociant. 
RiSLER  (J.  P.),  imprimeur-libraire. 
Saal  (Louis),  chimiste. 
Sandherr,  greffier  du  tribunal  de  commerce. 
Sandherr  ,  notaire  honoraire. 
ScHEiDECKER  (Mathias),  ingénieur  mécanicien. 
Sghlumberger  (Amédée) ,  banquier. 
ScHLUMBERGER  (Eugèuc),  manufacturier. 
Schlumberger-Schlumberger  (Alphonse),  manufacturier. 
Schœnhaupt  (Louis),  président  de  la  société  du  dessin  industriel. 
Stein  (Martin),  fabricant  de  cordages. 


-  69  — 

MM.  Stœber  (Auguste),  professeur  au  collège. 
Thierry  (Charles)  fils,  manufacturier, 
Thierry  (Emile). 
Uhlmann,  curé. 
Wagner,  architecte. 
Weber-Blech  (Emile). 
Zetter-Graf,  rédacteur  du  Samslagsblatt. 
Zuber  (Frédéric),  manufacturier. 

DÉPARTEMENTS  HORS  D'ALSACE. 

MM.  Schleiter  (Eugène),  juge  de  paix  à  Azai-le-Rideau  (Indre-et-Loire). 
Müllenheim  (de),  sous-préfet  à  Pithiviers  (Loiret). 
Metz-Noblat(A.  de),  membre  de  l'Académie  de  Stanislas  a  Nancy  (Meurthe), 
Pugnière,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées  à  Nancy. 
Saladin  (Emile)  père,  manufacturier  à  Bonsecours  (Meurthe). 
Saladin  (Emile)  fils,  manufacturier  à  Bonsecours, 
Saladin  (Jules),  manufacturier  à  Bonsecours. 
Benoit,  maire  à  Berthelming  (Meurthe). 
Ratisbonne  (Edmond),  receveur  général  du  Morbihan  à  Vannes. 
Thilloy,  substitut  du  procureur  général   à   la  cour  impériale   de   Metz 

(Moselle). 
Haigneré  (abbé),  archiviste  de  la  ville  de  Boulogne  (Pas-de-Calais). 
Vallois,  sous-préfet  à  Péronne  (Somme). 
Bardy,  pharmacien  à  Saint-Dié  (Vosges). 
Golbéry  (Philippe  de),  ancien  magistrat  à  Saint-Dié. 
Zetter,  à  Saint-Dié. 

Vaulx  (de),  premier  président  de  la  cour  impériale  d'Alger. 
Kling  (Antoine),  stationnaire  du  télégraphe  à  Gonstantine. 

DÉPARTEMENT   DE   LA   SEINE. 

Ville  de  Paris. 
MM.  Bécourt  (docteur). 

Becquet,  conservateur  des  forêts,  membre  du  Conseil  général  dû  Bas-Rhin. 
M"«  Begin  (veuve). 
MM.  Blanchard  ,  général  de  brigade. 

Bussierre  (baron  Léon  de),  conseiller  d'État. 

DoLLFus  (Charles). 

Felmann,  chef  du  bureau  au  Ministère  de  la  guerre. 

GosciiLER  (abbé). 

Goschler,  chef  de  section  aux  archives  de  l'Empire. 

Grün  (Al.),  chef  de  section  aux  archives  de  l'Empire. 


—  70  — 

MM.  Hallez  de  Claparède  (comte),  membre  du  Conseil  yéjiônil  du  B;is-Uliiii. 
Heim,  membre  de  Fliislitut. 
HiMLY,  professeur  ii  la  Faculté  des  lettres. 
HoFER,  directeur  de  la  Parisienne. 

JoLiAT,  directeur  ij^énéral  de  la  Compagnie  d'assurances  du  Phénix. 
Kastner,  membre  de  l'Institut. 
Keller  (Emile). 
Keller  (abbé). 

Lévy,  médecin  en  chef  au  Val-de-Grâce. 
MoRPAiN  (Alphonse),  docteur  en  médecine. 
Oppermann  (Louis-Charles),  banquier. 

M"'«  PiCART. 

MM.  Ratisronne  (Louis). 

RoMiLLY  (Félix  de). 

Schneider,  archiviste  aux  archives  de  l'Empire. 
jjmes  Singer. 

Érard,  à  Passy. 
MM.  Guibert,  à  Passy. 

Scheffer,  à  Passy. 

MEMBRES  RÉSIDANT  A  L'ÉTRANGER. 

MM.  Klappenbach  ,  ancien  secrétaire  de  la  mairie  de  Barr,  à  Buenos- Ayres 
(Amérique). 
LicHTLÉ,  curé  catholique  à  Christiania  (Norvvége). 
HÜCKEL,  rentier  à  Stuttgart. 

KuHLMANN  (Emile),  chancelier  de  la  légation  de  France  à  Stuttgart. 
Heinemann,  à  Offenbourg  (Bade). 
OcHS,  à  Frauenfeld  (Suisse). 

Ehrhardt  (Charles),  chef  du  dépôt  du  chemin  de  fer  de  Lyon  à  Genève,  à 
Genève. 

^lEMBRIS  HONORAIRES. 

M^  R.ESS  (André),  évêquc  de  Strasbourg. 

MM.  Braun,  président  du  directoire  de  la  Confession  d'Augsbourg. 
Delcasso,  recteur  de  l'Académie  de  Strasbourg. 
Gerhardt    (Edouard) ,    conseiller    intime ,    membre   de   l'Académie   des 

sciences  à  Berlin. 
WiDTMANN,  président  de  la  Société  archéologique  de  Mayence. 
MoNÉ,  directeur  des  archives  grand-ducales  de  Bade,  à  Carlsruhe. 
Keller,  président  de  la  Société  archéologique  de  Zurich. 
LoNGPÉRiER  (DE),  mcmbrc  de  l'Institut  à  Paris. 
MoRiN-l*ONs,  bun(|uier  à  Lyon. 


—  TI- 
MM. FoRCHiiAMMER,  professeiir  (Inrcliéologie  à  Kiel. 
BuuNET  DE  Presle,  iiiembro  de  rinstiluf  à  Paris. 
Robert,  directeur  de  l'administration  au  Ministère  de  la  guerre  à  Paris. 
Barthélémy  (Anatole  de),  membre  de  la  Société  des  antiquaires  de  France 

à  Paris. 
Trouillat,  ancien  maire  et  bibliothécaire  à  Porentruy. 
Lindenschmitt,  conservateur  du  musée,  et  secrétaire  de  la  Société  archéo- 
logique à  Mayence. 

MEMBRE  CORRESPONDAIVT. 

M.  Mougenot,  secrétaire  de  la  Société  archéologique  de  Nancy. 


SOCIÉTÉS  SAVANTES 


AVEC  LESQUELLES  LA  SOCIÉTÉ  POUR  LA  CONSERVATION  DES  MONUMENTS  HISTORIQUES 
D'ALSACE  SE  TROUVE  EN  RAPPORT. 


1.  Société  historique  et  archéologique  de  Darmstadl. 

2.  Bibliothèque  publique  de  Stuttgart. 

3.  Société  archéologique  de  Bade  à  Carlsruhe. 

•4.  Société  d'histoire  et  d'archéologie  rhénane  à  Mayence. 

5.  Société  des  antiquaires  à  Zurich. 

6.  Société  historique  et  archéologique  des  quatre  cantons  forestiers  à  Lucerno. 

7.  Messager  des  sciences  historiques  de  Belgique  à  Gand. 

8.  Institut  archéologique  liégeois  à  Liège. 
U.  Société  des  antiquaires  à  Amiens. 

\0.  Académie  d'archéologie  à  Anvers. 

11.  Société  d'histoire  et  d'archéologie  de  la  Moselle  à  Metz. 

4:2.  Société  impériale  des  antiquaires  de  France  à  Paris. 

13.  Musée  germanique  de  Nuremberg. 

14.  Société  d'émulation  de  Montbéliard. 

15.  Société  d'émulation  des  Vosges  à  Épinal. 

IG.  Société  archéologique  de  Maine-et-Loire  à  Angers. 

17.  Société  des  antiquaires  de  la  Morinie  à  Saint-Omer. 

18.  Société  d'histoire  de  la  haute  Bavière  à  Munich. 
10.  Société  historique  de  Bàle. 

20.  Société  académique  d'archéologie  de  l'Oise  à  Beauvais. 


—  72  — 

:i[.  Société  d'histoire  et  crarchéologie  de  Cliàlon-sur-Saone. 

22.  Société  historique  de  Kiel  (Holstein). 

23.  Société  d'archéologie  de  Lorraine  à  Nancy. 

2i.  Société  dunkerquoise  pour  l'encouragemeni  des  sciences,  des  arts  et  des 
lettres. 

25.  Société  pour  les  recherches  utiles  à  Trêves. 

26.  Société  impériale  de  géographie  à  Vienne  (Autriche). 

27.  Société  archéologique  éduenne  à  Autun. 

28.  Société  archéologique  à  Bonn, 

29.  Société  archéologique  et  d'histoire  de  Nassau  à  Wieshaden. 

30.  Société  nivernaise  des  sciences,  lettres  et  arts  à  Nevers. 

31.  Société  d'histoire  et  d'archéologie  à  Genève. 

32.  Société  jurassienne  à  Porentruy. 

33.  Commission  historique  du  Nord  à  Lille. 

34.  Société  historique  de  Styrie  à  Gratz. 

35.  Société  historique  générale  de  la  Suisse  h  Berne. 


CARTE  I^DIQIA^T  LES  DÉCOIVEIÎTES  AUCHElHOiJIUlES 


La  pliiiiaii  dl-  ces  (k-coiivtrEfs,  sonl  le  rosiillat  des  fouilli 
êes  par  l:i  Sociélé  pour  la  conservalion  des  monumenls  histonqi 
d'Alsace,  sous  la  direction  de  M.  Ringel,  pasteur  à  Diemeringeti 


.ililissemcnis  df  l'époiiue  gallo-i 


Bijou\  Ipfluvés  en  IS02  dnns  dos  tombeaux  francs,  sui*  le  territoire  de  la  commune  de  Lorentzen 


iv'j  sur  le  chaton 


m    m 


SOCIETE 

POlIl    LA 

CONSERVATION  DES  MONUMENTS  HISTORIOUES 
D'ALSACE. 


Séance  du  Comité  du  5  août  1861 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présenls  :  MM.  Bœrscli,  Bissen  ,  ïleitz,  Klotz,  Moi  in,  Ringeisen,  Saum, 
baron  de  Schau enburg-.  Straub. 

Le  secrétaire  rlonne  lecture  du  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  qui 
est  adopté. 

Il  dépose  ensuite  sur  le  bureau  : 

]jC  Bulletin  liistoriqne  de  la  Société  des  an  tiqua  ires  de  la  Morinic  : 
X\\^  année  ,  45*^  et  i6^  livraisons; 

L'hôtel  et  l'épitaplie  de  BaWiasar  d' Haussons illc ,  par  Léon  Mougeol; 

Les  hôtelleries  du  vieux  Nancy,  |)ar  le  même; 

Archeologischer  Anzeiger  zur  archeologischen  Zciiüug  :  .lalii'gaiip-  XXI. 
173,  174; 

Musée  d'art  et  d'archéologie  offert  à  la  province^  par  A.  d'Otreppe  de 
Bouvette;  40^  livraison; 

L'abbaye  de  Wissembourg ,  avec  quelques  châteaux  forts  de  la  Basse- 
Alsace  et  du  Palatinal ;  monographie  historique ,  par  J.  Rheinwald; 

Annales  de  l'Académie  d'archéologie  de  Belgique;  t.  XVIII,  liv.  I  à  H': 

Bévue  des  Sociétés  savantes  des  départements;  t.  P'",  IIP  série. 

M.  le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  suivantes  : 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin,  au  sujet  des  fouilles  à  faire  à  Wœrlli  et  dun^ 

5' 


—  74  — 

d'autres  localités  du  Bas-IUiiu  par  des  particuliers.  La  Société  réserve  ses 
droits,  et  désire  être  représentée  pendant  les  opérations  ; 

A  M.  le  conservateur  des  forêts ,  prière  de  donner  des  instructions  aux 
agents  de  son  administration  à  l'occasion  des  coupes  faites  aux  environs 
du  Ringelberg  et  du  Hiugelstein; 

A  M.  Conratli,  arcliitecte  de  la  ville  de  Strasbourg,  pour  lui  demander 
une  note  au  sujet  des  fouilles  faites  sur  la  place  de  rilôpital  civil  ; 

Au  conservateur  des  forêts,  pour  lui  annoncer  que  la  Société  renonce 
en  ce  moment  à  faire  des  travaux  dans  le  cbàteau  deHaut-Barr,  parce  que 
cette  opération  entraînerait  des  dépenses  trop  considérables.  Prière  de 
transmettre  aux  propriétaires  du  château  les  remercîments  du  comité  pour 
le  concours  libéral  qu'ils  avaient  l'intention  de  lui  prêter; 

A  M.  Véron-Uéville,  vice-président  du  comité  à  Colmar  ,  pour  le  remer- 
cier des  renseignements  transmis  sur  les  travaux  à  entreprendre  dans 
plusieurs  châteaux  des  environs  de  Colmar.  —  Indemnité  votée  pour  le 
concierge  de  la  préfecture  du  Haut-Rhin  ; 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin  :  prière  d'intervenir  auprès  de  l'administra- 
tion des  tabacs,  pour  mesures  de  conservation  à  entreprendre  au  sujet 
d'armoiries  épiscopales,  scellées  dans  le  mur  du  magasin  à  tabac  à  Benfeld; 

A  M.  Müller,  préposé  en  chef  de  l'octroi,  pour  le  remercier  de  la  note 
historique  sur  ces  armoiries; 

A  M.  Kast,  agent  voyer  à  Odratzheim ,  pour  le  remercier  des  objets 
antiques  (fibule  en  argent,  etc.)  dont  il  a  fait  don  au  musée  de  la  Société. 
—  Prière  de  dresser  le  plan  du  palais  mérovingien  de  Kirchheim  ; 

A  M.  Straub:  affaires  confidentielles  d'Altorf  et  d'Eschau; 

A  iM.  Rheinwald ,  professeur  au  collège  de  Wissembourg  :  remercîments 
pour  le  don  de  sa  monographie  sur  Tabbayc  de  Wissembourg; 

A  M.  Bardy,  à  Saint-Dié  :  remercîments  pour  l'annonce  de  la  candidature 
de  M.  Philippe  de  Golbéry; 

A  MM.  les  Préfets  du  Haut-  et  du  Bas-Rhin,  pour  leur  recommander  les 
intérêts  de  la  Société  aux  approches  du  Conseil  général  ; 

A  M.  de  Beausobre,  inspecteur  principal  du  chemin  de  fer  de  l'Est:  re- 
mercîments pour  la  transmission  de  quatre  monnaies  antiques  trouvées  à 
Kœnigshoffen  ; 

A  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique,  pour  une  rectification  à  faire 
dans  le  dernier  numéro  de  la  Bévue  des  Sociétés  suvanlcs. 

Le  secrétaire  dépose  trois  médailles  données  par  M.  le  colonel  de  Morlel 
à  l'appui  de  sa  note  sur  les  tombes  d'Odralzheim. 

M.  Klotz  remet  un  globule  percé  d'un  trou ,  trouvé  près  de  Mutzenhausen 


—  75  — 

et  donné  par  M.  le  docteur  Rouis.  Remercîments  à  M.  Rouis.  —  M.  Lehr 
envoie  quelques  remorques  sur  le  mémoire  de  M.  de  Schauenburg  sur  les 
armoiries  de  Jean  Hammerer.  —  Dépôt  aux  archives. 

Lecture  est  donnée  des  délibérations  suivantes  du  sous-comité  du  Haut- 
Rhin  : 


SOUS-COMITE     DU      HAUT-RHIN. 


Séance  du  51  juillet  1865. 


Présidence  de  M.  VÉRON-RÉVILLE ,  vice -président. 

«Présents:  MAL  Véron-Réville ,  vice-président;  Hambergcr,  CbaufTour, 
Gérard,  Liblin,  Huot,  membres  du  sous-comité;  Brièle,  secrétaire;  Foltz, 
Ortlieb  et  Schelbaum,  membres  libres,  assistent  à  la  séance. 

«Le  procès-verbal  de  la  séance  précédente  est  lu  et  adopté. 

«Lecture  est  donnée  d'un  rapport  de  M.  Ortlieb,  architecte  à  Colmar, 
sur  l'étal  des  travaux  d'entretien  et  de  conservation  exécutés  pendant  une 
première  campagne,  du  22  juin  au  18  juillet  dernier,  au  château  supé- 
rieur d'Eguisheim.  Ces  travaux  avaient  été  arrêtés  en  principe  par  MM.  les 
architectes  Ringeisen,  Ortlieb  et  Schelbaum,  en  présence  de  plusieurs 
membres  du  sous-comité  de  Colmar,  lors  d'une  visite  opérée  sur  les  lieux, 
dans  le  courant  du  mois  de  mai  dernier.  La  plus  grande  partie  des  répa- 
rations convenues  a  été  exécutée.  Sur  certains  points,  des  accidents,  des 
effondrements  de  terrain ,  qu'il  était  impossible  de  prévoir  et  qui  se  sont 
produits  à  la  suite  des  déblais,  ont  forcé  M.  Ortlieb,  après  en  avoir  référé 
à  M.  Ringeisen  ,  à  modilîer  le  projet  primitif  et  à  recourir  à  d'autres  voies 
d'exécution.  Enfin,  quelques-uns  des  travaux  arrêtés  n'ont  pu  être  exé- 
cutés, faute  de  fonds  et  par  suite  de  l'épuisement  du  crédit  de  700  fr. 
alloué.  Pour  l'entier  achèvement  de  l'œuvre,  M.  Ortlieb  termine  son  rap- 
port par  un  devis  détaillé,  duquel  il  résulte  qu'une  allocation  supplémen- 
taire de  325  fr.  serait  nécessaire. 

«Le  sous-comité,  en  remerciant  M.  Ortlieb  des  soins  qu'il  a  apportés 
dans  l'exécution  de  cette  opération  difficile  et  pénible  tout  à  la  fois,  décide 
que  son  rapport  sera  adressé  au  comité  central ,  qui  est  prié  de  vouloir 
bien  accorder  les  fonds  nécessaires,  pour  qu'il  soit  mis  un  terme  à  la  sus- 
pension regrettable  des  travaux  commencés  au  château  supérieur  d'Eguis- 
heim. Le  sous-comité  demande  en  outre  que  celte  allocation  soit  portée  à 


^  76  - 

500  fr.,  à  raison  des  difficultés  imprévues  qui  pourraient  se  produire  encore 
sauf  à  faire  état  de  la  partie  de  ces  fonds  qui  n'aurait  pas  été  employée. 

«  Le  vice-président  est  invité  à  écrire  à  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin ,  pour 
le  prier  d'intervenir  auprès  des  administrations  municipales  des  communes 
d'Éguisheim  et  de  Hiisseren,  sur  le  teiritoire  desquelles  sont  pratiqués  les 
chemins  qui  conduisent  au  château  supérieur,  dont  l'ahord  est  devenu  si 
difficile,  pour  qu'elles  veuillent  bien  prendre  les  mesures  propres  à  l'amé- 
lioration de  ces  voies.  On  rappelle  à  cette  occasion  que  partout  où  des  cas 
semblables  se  sont  présentés,  les  communes  se  sont  empressées  d'accéder 
aux  vœux  exprimés  par  la  Société,  témoin  la  ville  de  Ribeauvillé,  qui,  il  y 
a  quelques  années,  a  donné  sous  ce  rapport  à  ses  sœurs  du  Haut-llhin  le 
plus  digne  exemple. 

«M.  Schelbaum ,  ingénieur  et  architecte  à  Golmar,  expose  dans  un 
rapport  dont  il  donne  lecture  au  sous-comité,  que  par  suite  du  concours 
que  MM.  Ilanhart,  propriétaire  du  château  de  Plixbourg,  et  Manheimer,  pro- 
priétaire du  IIoh-Landsperg,  veulent  bien  prêter  à  la  Société,  les  travaux 
de  déblaiement  et  de  nettoiement,  dont  l'urgence  a  été  reconnue,  à  l'effet 
d'arrêter  le  progrès  des  dégradations  et  de  faciUter  l'accès  de  ces  monu- 
ments ,  devenu  presque  impossible  sur  ceilains  points,  pourront  com- 
mencer dès  que  les  fonds  nécessaires  auront  été  alloués  par  le  comité  cen- 
tral. Il  y  a  plus  encore ,  tel  a  été  l'empressement  de  M.  Hanhart  à  accéder 
au  vœu  de  la  Société,  que  dès  la  semaine  prochaine  et  avant  toute  avance 
de  fonds  de  la  part  du  comité  central ,  il  sera  procédé  à  la  coupe  de  bois, 
qui  a  été  reconnue  nécessaire  et  que  M.  Hanhart  veut  bien  effectuer  à  ses 
frais.  Quant  aux  travaux  qui  doivent  rester  à  la  charge  de  la  Société,  et 
dont  l'urgence  a  été  constatée  par  MM.  les  architectes  Ringeisen,  Orflieb 
et  Schelbaum ,  les  dépenses  évaluées  dans  le  devis  présenté  par  M.  Schel- 
baum pourront  s'élever,  pour  chaque  château,  à  la  somme  de  1,000  fr. 

«  Le  sous-comité  approuve,  dans  ses  termes  et  dans  ses  conclusions,  le 
rapport  qui  lui  est  présenté ,  en  ordonne  l'envoi  au  comité  central  et 
exprime  le  vœu  que  la  somme  de  2,000  fr.  demandée  par  M.  Schelbaum, 
soit  mise  à  la  disposition  de  cet  homme  de  l'art. 

«  M.  Foltz,  membre  de  la  Société ,  présent  à  la  séance,  produit  un  plan 
du  Hoh-Landsperg  et  lieux  circonvoisins,  sur  lequel  il  a  tracé  une  ligne 
pour  indiquer  toute  une  portion  de  terrain  dont  la  sonorité  lui  fait  sup- 
poser  l'existence  d'une  longue  galerie  souterraine  communiquant  avec  le 
château.  Le  sous -comité  invite  M.  Foltz  à  s'entendre  avec  M.  Schelbaum, 
à  l'effet  de  procéder  sur  les  lieux  aux  recherches  et  aux  vérifications  con- 
venables. 


—  77  — 

«Le  vice-président  rappelle  à  ceux  de  ses  collègues  qui  ont  pris  part  à 
l'excursion  du  mois  de  mai  dernier,  qu'en  passant  à  Éguisheim  ils  se  sont 
arrêtés,  quelques  instants,  pour  visiter  le  vieux  château  deDaxbourg',  sis 
au  milieu  de  cette  commune.  Il  leur  rappelle  également  l'impression  que  leur 
a  fait  éprouver  l'aspect  imposant  de  ces  restes,  malgré  l'élat  d'humiliante 
dégradation  où  on  a  laissé  tomher  cet  antique  monument.  Grâce  à  leur 
extrême  solidité ,  les  murs  ont  résisté  jusqu'ici  à  l'action  dévastatrice  dont 
ils  sont  l'objet,  depuis  des  siècles,  par  le  fait  de  l'homme  plus  encore, 
peut-être,  que  par  celui  du  temps.  A  l'intérieur,  le  polygone  formé  par 
les  huit  pans  qui  composaient  son  enceinte ,  a  été  envahi  par  des  habita- 
tions, ou  plutôt  par  des  masures  qui  sont  venues  s'appliquer  contre  ses 
murailles;  il  en  est  de  même  de  son  pourtour  extérieur,  qui  n'est  séparé 
des  maisons  qui  le  pressent  et  l'obstruent  de  toutes  parts,  que  par  une 
sorte  de  Schlupff  sombre  et  infect.  Or,  le  pays  n'est-il  pas  en  droit  de 
demander  compte  à  la  Société  de  l'état  d'abandon  et  de  dégradation  dans 
lequel  elle  délaisse  celui  de  ses  vieux  monuments  qui  offre  peut-être  le 
plus  d'intérêt,  sinon  au  point  de  vue  architectural,  du  moins,  sous  le 
rapport  de  l'antiquité  et  des  souvenirs  qui  s'y  rattachent.  Sans  doute,  il  ne 
saurait  être  question  de  ressusciter  le  vieux  manoir  du  petit-fds  d'Etichon, 
mais  seulement  de  sauver  ce  qui  en  reste,  de  lui  rendre  le  jour  et  la  lu- 
mière. Ainsi  réduite,  la  tâche  de  la  Société  présentera  encore  d'énormes 
difficultés,  mais  peut-être  ces  difficultés  ne  sont-elles  pas  insurmontables, 
et  dans  tous  les  cas  le  sujet  mérite  bien  qu'on  les  aborde  de  front  et  qu'on 
cherche  à  les  vaincre. 

«  En  suite  de  ces  observations ,  le  sous-comité  adjoint  à  son  vice-prési- 
dent MM.  ChaufPour  et  Gérard  ,  à  l'effet  de  former  une  commission  chargée 
de  rechercher  les  voies  et  moyens  propres  à  conserver  ce  qui  reste  du 
vieux  château  d'Eguisheim  et  à  lui  restituer  le  rang  qu'au  point  de  vue 
historique  et  archéologique  il  mérite  d'occuper  parmi  les  anciens  monu- 
ments du  pays.  Le  sous-comité  adjoint  en  outre  à  cette  commission 
MM.  Ringeisen ,  Schelbaum  et  Foltz ,  qui  auront  plus  particulièrement  à 
traiter  la  partie  artistique  de  la  question. 

c(A  la  fin  de  la  séance,  M.  Brièle  donne  lecture  d'un  récit  fort  intéres- 
sant de  la  prise  de  Colmar  par  les  Français,  extrait  d'un  registre  des  actes 
capitulaires  du  Chapitre  de  cette  ville.  » 

A  la  suite  de  cette  lecture  et  après  des  explications  fournies  par  M.  Ring- 
eisen ,  le  comité  vote  la  somme  de  500  fr.  pour  continuer  les  travaux  de 

1 .  C'est  le  nom  qui  est  donné  à  ce  château  sur  un  plan,  de  1 790,  aux  archives  du  Haut-Rhin. 


—  78  — 

déblaiement,  conformément  au  rapport  détaillé  de  M,  Ortlieb.  Il  décide  de 
plus  que  pour  les  châteaux  de  IIoh-Landsperg  et  de  Plixbourg- ,  les  travaux 
de  déblaiement  devront  également  précéder  toute  autre  tentative. 

Il  appuie  cette  décision  d'un  nouveau  vote  de  500  fr.,  pour  préparer  les 
travaux  ultérieurs  dans  la  direction  qui  vient  d'être  indiquée. 

Le  comité  se  montre  on  ne  peut  plus  satisfait  de  la  lucidité  et  de  l'exac- 
titude du  rapport  de  M.  Ortlieb,  et  charge  M.  le  président  de  féUciler  le 
rapporteur  sur  son  consciencieux  travail. 

Le  secrétaire  dépose  une  reproduction  galvano-plastique  du  sceau  de  la 
Société,  exécutée  par  M.  Oppermann,  pharmacien. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Oppermann. 

M.  Straub  dépose  deux  photographies,  représentant,  l'une  l'église  de 
Saint-Guillaume  de  Strasbourg,  et  l'autre  un  reliquaire  appartenant  à 
l'évêché ,  sur  lequel  il  prépare  une  note. 

Remercîments  votés  à  M.  Straub. 

M.  Ringeisen  demande  que  les  sommes  votées  pour  le  château  de  Hoh- 
Kœnigsbourg  soient  mandatées. 

Il  demande  de  plus  un  crédit  de  200  fr.  pour  entreprendre  des  travaux 
au  château  de  Frankenbourg. 

Le  comité  vote  ces  200  fr. 

La  séance  est  levée  à  une  heure. 


Séance  extraordinaire  du  Comité  dn  iO  août  1803. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Bœrsch,  Eissen,  Guerber,  baron  de  Schauenburg,Saum. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Le  secrétaire  dépose  la  Revue  des  Sociétés  savantes  des  départements , 
IIP  série,  t.  P"",  juin  1863. 

Le  président  fait  part  au  comité  du  désir  de  la  Société  historique  de 
Styrie  d'entrer  en  relations  avec  la  Société  d'Alsace. 

L'établissement  de  ces  relations  est  décidé. 

Le  président  annonce  qu'il  a  écrit  depuis  la  dernière  séance  à  M.  Véron- 
Réville  pour  un  envoi  de  fonds  destiné  aux  travaux  des  châteaux  d'ÉguiS' 
beim,  de  Hoh-Landsperg  et  de  Plixbourg; 


—  79  — 

A  MM.  Ortlieb  et  Sclielbaum,  architectes  à  Colmar,  pour  le  concours 
qu'ils  ont  offert  à  ces  travaux; 

A  M.  Oppermann,  pharmacien  à  Strasbourg,  pour  le  remercier  de  l'en- 
voi de  la  reproduction  galvano-plastique  du  sceau  de  la  Société; 

A  M.  de  Beausobre,  ingénieur  principal  du  chemin  de  fer  de  l'Est,  pour 
le  remercier  des  monnaies  offertes  à  la  Société; 

A  M.  le  président  du  consistoire  de  Saint-Guillaume  pour  lui  annoncer 
la  visite  prochaine  de  M.  l'abbé  Straub  à  l'église  de  Saint-Guillaume.  — 
Vérification  des  notices  de  feu  M.  Fries; 

A  M.  le  receveur  général  du  Ilaut-Rhin,  et  à  M.  le  trésorier  pour  affaires 
de  comptabilité. 

Le  comité  décide  ensuite  que  le  Bulletin  de  la  Société  sera  communiqué 
à  M.  le  conseiller  aulique  Warnkœnig  à  Sluttgart,  qui  offre  d'en  rendre 
compte  dans  les  publications  allemandes. 

Le  président  donne  lecture  d'une  note  de  M.  Lehr  à  propos  de  la  note 
de  M.  le  baron  de  Schauenburg  sur  la  maison  de  la  rue  Mercière  attribuée 
à  Jean  Hammerer.  —  Dépôt  aux  archives. 

M.  le  conseiller  Huot  adresse  la  lettre  suivante  au  comité,  dont  l'inser- 
tion au  procès-verbal  est  votée: 

<•<  Monsieur  le  Président,  le  dernier  Bulletin  de  la  Société,  en  rendant  compte 
de  la  séance  dans  laquelle  le  comité  m'a  fait  l'honneur  de  m'admettre 
parmi  ses  membres,  m'attribue  un  mémoire  sur  les  maisons  prébendaires 
du  chapitre  de  Colmar  au  onzième  siècle. 

«Il  y  a  là  une  erreur  peut-être  typographique,  mais  qui,  si  elle  n'était 
pas  rectifiée,  pourrait  tromper  les  lecteurs  soit  sur  l'ancienneté  du  cha- 
pitre de  Saint-Martin,  soit  sur  l'exactitude  des  documents  que  j'ai  con- 
sultés. 

ft  Le  travail  que  j'ai  eu  l'honneur  de  communiquer  au  sous-comité  du 
Haut-Rhin  et  qui  a  été  inséré  dans  les  Curiosités  d'Alsace  (2^  numéro  de 
1863)  porte  pour  titre  :  «  Charte  de  fondation  du  chapitre  de  Saint-Mar- 
tin de  Colmar  (1237).  —  Les  maisons  prébendaires  (1276-1368).  y>  11  faut 
donc  lire  dans  le  rapport  où  il  est  mentionné:  quatorzième  siècle  au  Heu 
de  onzième.  » 


—  80  — 
Séance  du  Comité  du  S  octobre  1863. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Eisscn,  Guerber,  Heitz,  Klotz,  Maluszinski,  Morin,  co- 
lonel de  Morlet,  Ringeisen,  Saum  ,  baron  de  Schanenburg,  Siffer. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  précédente  est  lu  et  adopté. 

Le  secrétaire  dépose  le  n"  6  de  Y  Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen 
Vorzeit,  juin  1863; 

Annales  de  la  Société  d'émvlation  des  Vosges,  1861,  l"^'"  cahier; 

Messager  des  sciences  historiques  de  Belgique,  année  1863,  2^ livraison; 

L'Année  géographique;  Bévue  annuelle,  par  M.  Vivien  de  Saint-Mar- 
tin, première  année,  1863; 

Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie,  année  1863,  n°  2; 

Bévue  des  Sociétés  savantes  des  départements ,  juin,  juillet  et  août  1863; 

Alesia,  par  M.  G.  M.  de  Bouriane.  Toulouse,  1863,  1  broch.  in-8-; 

Considérations  générales  sur  les  tombes  celtiques  de  l' Alsace,  \:>üivU.  Mor- 
PAiN.  Paris,  1863,  1  broch.  in-8'^; 

histruction  sur  l'anthropologie  de  la  France;  rapport  de  M.  Gustave 
Lagneau.  Paris,  1861,  1  broch.  in-8°; 

Bulletin  delà  Société  nivernaise  des  sciences,  lettres  et  arts,  t.  III,  nT); 

Le  château  de  Lamhalle,  par  M.  Anatole  de  Barthélémy,  1  broch. 

in-8'^; 
Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit,  1863,  w^^  7  et  8,  juillet  et 

août; 

Der  Geschichlsfreund,  Mittheilungen  des  historischen  Vereins  der  fünf 
Orte  Uri,  Schwyz,  Untenucdden  und  7A(g,  neunzehnter  Band; 

Schweizerisches  Urkundenregister ,  herausgegeben  von  der  allgemeinen 
geschichtsforschenden  Gesellschaft  der  Schiveiz;  erster  Band,  erstes  Heft; 

Bericht  der  königlichen  Gesellschaft  für  Sammlung  und  Erhaltung  va- 
terländischer AUerthümer ,  Kiel,  1857; 

Zwanzigster  und  dreiundzwanzigster  Bericht  der  königl.  Schleswig-Hol- 
stein -  Lauenhurgiscli  en  Gesellschaft  für  die  Sammlung  und  Erhaltung 
vaterländischer  AUerthümer.  Kiel,  1861  et  1863,  2  broch.  in-8°; 

Ueber  Alterthums-Gegenstände.  Eine  Ansprache  an  das  Puhlicum,  von 
T.  V.  Warnstedt,  Kiel,  1835,  1  broch.  in-8". 

Le  président  annonce  avoir  écrit  depuis  la  séance  du  10  août  dernier  les 
lettres  suivantes: 


—  81  - 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin,  pour  le  prier  de  faire  interrompre  les  tra- 
vaux de  peintui'e  dans  l'église  d'Altorf; 

A  M.  Coste,  juge  à  Schlesladt,  pour  le  prier  de  demander  à  M.  Balden- 
weck,  horloger  à  Schlestadt,  le  prix  qu'il  mettrait  à  la  puhlication,  dans 
notre  Bulletin,  delà  photographie  du  portrait  de  Wimpheling;  2^  lettre, 
même  sujet; 

A  M.  le  professeur  Warnkœnig,  conseiller  aulique  à  Stuttgart;  envoi  du 
Bulletin; 

A  M,  Benoît,  maire  de  Berlhelming  (Meurthe);  annonce  que  son  mé- 
moire sur  «  un  Dieu  inconnu»  a  été  envoyé  pour  examen  et  avis  à  l'un 
des  membres  du  comité; 

A  M.  le  Ministre  de  l'instruction  publique  ;  remercîments  pour  l'alloca- 
tion de  400  fr.  ; 

A  M.  Vivien  de  Saint-Martin;  accusé  de  réception  de  «  l'Année  géogra- 
phique »;  remercîments; 

A  M.  Mougenot  à  Nancy;  accusé  de  réception  de  brochures; 

A  M.  Ohleyer,  professeur  à  Wissemboui'g,  au  sujet  de  la  restauration 
des  fresques  dans  l'éghse  Saint-Pierre  et  Saint-Paul  de  Wissembourg. 

Le  secrétaire  donne  lecture  de  la  lettre  suivante  de  M.  Ohleyer  de  Wis- 
sembourg: 

«Monsieur  le  Président,  j'ai  l'honneur  de  vous  adresser  les  résultats  de 
mon  grattage  dans  notre  église;  je  me  suis  mis  à  l'œuvre  le  21  mai  de  l'an- 
née courante,  et  depuis  ce  jour  jusqu'au  9  septembre,  j'y  ai  consacré  tout 
mon  temps  entre  les  classes  et  mes  vacances.  J'ai  terminé  sur  la  partie 
sud  du  transept,  la  série  des  personnages  du  credo;  seulement  au  lieu 
de  six  autres  apôtres,  j'ai  découvert  six  saintes  femmes  voilées  et  tenant 
chacune  un  livre;  au-dessus  de  chacune  d'elles  se  trouve  un  phylactère 
avec  les  derniers  passages  du  credo,  très-lisibles.  La  forme  des  lettres, 
la  draperie,  les  personnages  et  les  dessins  me  prouvent  que  ces  tableaux 
sont  du  commencement  du  quatorzième  siècle. 

«  J'ai  continué  les  séries  au-dessous  des  apôtres  et  j'ai  mis  au  jour  deux 
rangées  de  tableaux  dont  voici  le  sujet:  •l^'"en  commençant  par  la  gauche, 
la  résurrection  de  Lazare;  2°  l'entrée  de  Jésus  dans  Jérusalem  ou  le  di- 
manche des  Rameaux;  S'' le  lavement  des  pieds  et  la  sainte  cène;  4^  Jé- 
sus au  jardin  des  OHviers  et  la  trahison  de  Judas  qui  le  livre  aux  soldats; 
5^  Jésus  devant  Hérode  et  Kaïphas.  Ces  cinq  tableaux  vous  sont  déjà  con- 
nus de  l'année  dernière.  6^  tableau  :  la  fustigation;  V  le  couronnement 
de  Jésus-Christ;  8^  ecce  homo  ;  le  O'^  tableau  et  les  suivants  se  trouvent 
sur  le  mur  qui  est  d'équerre  avec  la  face  sud  du  transept,  il  y  a  :  Jésus 

11«  Série.  —  T.  II.  —  (P.-V.)  6 


tombe  avec  la  croix;  10*^  Jésus  dépouillé  de  ses  habits;  iV  le  crucifiement 
de  Jésus;  12®  ce  tableau  est  deux  fois  plus  haut  que  les  autres  et  com- 
mence dans  la  série  d'en  bas  pour  se  terminer  au  bord  supérieur  de  celle 
d'en  haut;  on  y  voit  Jésus  et  les  deux  larrons;  13®  et  dernier  tableau  de  la 
séi'ie:  Jésus  sur  les  genoux  de  Marie  ou  la  descente  de  croix.  Le  14®  tableau 
se  trouve,  sur  la  face  sud  du  transept,  le  1®''  de  la  seconde  série  et  repré- 
sente Jésus  au  tombeau;  15®  la  résurrection  de  Jésus;  16®  Jésus  apparaît  à 
ses  apôtres  et  remet  la  clef  à  saint  Pierre;  17®  la  Pentecôte;  18®  le  jugement 
dernier;  19®  et  les  suivants  selon  saint  Matthieu,  ch.  25,  v.  34-41  ;  tableau 
19®:  nourrir  ceux  qui  ont  faim;  20®  donner  à  boire  à  ceux  qui  ont  soif;  21® 
habiller  les  dénudés;  22®  donner  l'hospitalité;  23®  visiter  les  prisonniers; 
24®  guérir  les  malades;  25®  enterrer  les  morts.  Le  tout  dernier  tableau  re- 
présente la  sainte  Vierge  assise  sur  un  trône  au  milieu  des  Chérubins.  A 
la  même  hauteur  que  les  apôtres  du  credo ,  et  sur  le  mur  occidental  du 
transept,  se  trouvent  encore  de  grands  personnages,  d'après  les  propor- 
tions des  pieds.  Toute  cette  partie  reste  encore  à  gratter,  mais  je  ne  pou- 
vais la  terminer  faute  d'échafaudage.  J'ai  donc  commencé  sur  la  partie 
nord  du  transept  du  côté  de  la  sacristie  et  là  j'ai  trouvé:  saint  Jean  dans  la 
chaudière  devant  la  porte  latine;  un  second  tableau  dont  nous  n'avons  pu 
découvrir  le  sens,  et  un  troisième  qui  représente  saint  Jean  dans  l'île  de 
Pathmos;  le  reste  est  plein  de  peintures.  Ce  travail  de  grattage  est  fort  lent 
et  fort  pénible  et  ne  peut  être  confié  qu'à  des  mains  habiles  et  à  un  homme 
dévoué  à  l'art. 

«  Le  chœur  de  l'église  a  été  gratté  aux  frais  de  la  ville,  ainsi  que  la  belle 
coupole.  Nous  avons  remis  le  dallage  du  chœur  sur  son  niveau  primitif,  et 
M.  l'architecte  Morin  a  approuvé  cette  restauration.  Ce  dernier  travail  a  été 
payé  par  M.  le  curé.  Il  nous  reste  encore  à  baisser  le  dallage  du  transept 
au-dessous  delà  coupole;  ce  travail  pourrait  être  fait  avant  la  Toussaint, 
mais  nous  n'avons  pas  assez  d'argent.  J'ai  l'honneur  de  prier  M.  le  Prési- 
dent de  nous  accorder  un  secours  de  200  à  300  fr.  pour  terminer  cette  par- 
tie de  l'église  et  pour  pouvoir  rendre  le  chœur  au  culte.  Nous  avons  retrouvé 
la  place  des  apôtres  qui  se  trouvaient  dans  le  chœur  jusqu'en  1819  ,  et 
saint  Pierre  et  saint  Paul  malheureusement  très-mutilés.  J'ai  surveillé 
comme  par  le  passé  tous  les  travaux  de  restauration  qui  auront  la  pleine 
approbation  de  la  Société  historique.  Comme  nous  sommes  très-pauvres, 
j'ai  laissé  à  M.  le  curé  les  fonds  votés  par  la  Société  historique  pour  les 
tableaux,  cet  argent  a  été  employé  pour  l'abaissement  du  chœur.» 

M.  Morin  lit  la  note  suivante  sur  le  même  objet: 

«  le  dallage  da  l'église  de  Saint-Pierre  et  Saint-Paul  de  Wissembourg' 


avait  été  dans  le  dernier  siècle  exhaussé  de  deux  marches,  soit  pour  as- 
sainir le  sol,  soit  plutôt  pour  diminuer  la  hauteur  de  l'édifice,  qui  à  cette 
époque  devait  paraître  excessive  et  de  mauvaise  proportion.  Le  chœur 
avait  à  son  tour  subi  un  exhaussement  plus  considérable  de  cinq  marches 
au-dessus  de  la  nef;  il  en  résultait  que  les  socles  et  les  bases  étaient  com- 
plètement enterrés.  Ajoutons  que  le  maître-autel,  qui  était  autrefois  au  fond 
de  l'abside,  avait  été  considérablement  avancé  vers  le  transept. 

('  Une  première  opération  exécutée  en  1862  avait  eu  pour  effet  de  ré- 
tablir la  hauteur  primitive  du  dallage  dans  le  double  collatéral  sud.  Un 
travail  analogue  en  cours  d'exécution  a  déjà  abaissé  de  trois  marches  la 
partie  absidiale  de  l'ancien  chœur,  et  on  se  propose,  si  les  ressources  le 
permettent,  d'abaisser  ainsi  toute  cette  partie  de  l'édifice. 

«  A  cette  occasion  un  doute  s'était  élevé  sur  l'emplacement  qu'il  conve- 
nait de  donner  au  maître-autel;  l'avis  que  j'ai  d'abord  donné,  de  le  reporter 
au  fond,  a  été  justifié  par  les  traces  de  ses  anciennes  fondations  qui  ne 
laissaient  qu'un  passage  de  1™,50  entre  l'autel  et  le  mur  du  fond  de  l'ab- 
side. Il  est  probable  que  l'espace  l'éseryé  à  cette  époque  en  arrière  de 
l'autel  était  affecté  au  chapitre;  cette  disposition  n'est  plus  utile  aujour- 
d'hui, elle  perd  un  espace  considérable,  tout  en  amoindrissant  les  formes 
apparentes  de  l'édifice;  je  persiste  donc  dans  mon  avis,  tout  en  réclamant, 
une  discussion  el  un  examen  du  comité. 

«  Les  travaux  de  débadigeonnage  se  poursuivent  et  permettent  déjà 
d'apprécier  les  belles  proportions  de  l'édifice.  De  nouvelles  peintures  mu- 
rales ont  été  découvertes  par  les  soins  et  l'habileté  de  notre  honorable  col- 
lègue M.  le  professeur  Ohleyer. 

«J'ai  fait  récemment  surplace,  et  je  présente  au  comité  une  photogra- 
phie de  quelques  fragments  de  figures  trouvés  dans  les  déblais  et  qui  pa- 
raissent appartenir  à  la  fin  du  quatorzième  siècle.  Les  vêtements  des  deux 
figures  centrales  sont  parsemés  de  losanges  dorés  en  plein  avec  filets  rouges, 
chaque  losange  est  cantonné  de  quatre  palmettes  à  trois  lobes  dont  les 
couleurs  sont  effacées,  les  revers  de  vêtements  sont  d'un  bleu  azur.  La 
première  figure  à  gauche  paraît  être  celle  d'un  fondateur,  il  tenait  dans 
ses  bras  le  modèle  en  relief  de  l'église,  le  fragment  en  a  été  déposé  à 
ses  pieds. 

<(  La  figure  en  suite  est  une  sainte  Vierge  tenant  l'enfant  Jésus,  dont  la 
main  seule  reste  apparente,  les  deux  autres  figures  ne  sont  pas  ca- 
ractérisées, i^ 

Une  discussion  s'ouvre  sur  cette  note. 

M.  Morin  propose  de  choisir  pour  le  m9Îlre-9inel  l'emplacement  de  l'an- 


—  84  — 

den  aulel  de  l'abbé  Edelin  dont  les  fondements  ont  été  retrouvés  et  qui 
était  placé  à  1"\50  du  cbevet  de  l'abside. 

M.  le  curé  Guerber  pense  que  cet  emplacement  ne  pourrait  convenir. 
L'autel  se  trouverait  trop  éloigné  des  fidèles,  et  il  ne  serait  guère  possible  de 
lui  donner  le  développement  qu'il  comporte. 

L'autel  de  l'abbé  Edelin,  placé  tout  au  fond  de  l'abside,  servait  aux  offices 
particuliers  de  la  communauté  bénédictine;  c'était  l'autel  matutinal.  Mais  il 
y  en  avait  un  autre  placé  devant  le  jubé,  ou  même  sur  le  jubé,  qui  servait 
aux  offices  des  fidèles.  Aujourd'hui  comme  alors,  les  exigences  du  culte  et 
l'opportunité  de  le  rapprocher  des  fidèles,  obligent  à  avancer  l'autel  soit 
jusque  sous  l'arc  triomphal,  soit  même  davantage  si  on  le  juge  bon.  En 
tout  cas  l'avant-chœur,  la  partie  du  transept,  qui  faisait  toujours  partie  du 
sanctuaire,  devra  lui  rester  acquis  et  ne  pas  être  livré  aux  fidèles,  à  moins 
d'une  urgence  réelle,  celle  par  exemple  du  manque  de  place. 

M.  de  Schauenburg  n'aimei'ait  voir  l'autel  ni  trop  avancé  ni  trop  en  re- 
traite; à  son  avis,  le  meilleur  emplacement,  c'est  la  première  partie  de  l'ab- 
side, celle  immédiatement  derrière  l'arc  triomphal.  II  y  serait  vu  de  tout  le 
monde,  et  on  pourrait  commodément  placer  le  chœur  des  chantres  derrière 
l'autel. 

Après  plusieurs  observations  faites  à  ce  sujet,  M.  le  président  pense  que 
l'avis  de  M.  le  curé  de  Wissembourg  doit  être  demandé,  et  que  du  reste 
MM.  les  membres  de  la  commission  qui  se  rendront  prochainement  à  Wis- 
sembourg, pourront  s'occuper  sur  place  de  cette  question. 

Le  comité  décide  que  la  note  de  M.  Morin  sera  transmise  à  M.  le  curé  de 
Wissembourg  pour  avoir  son  avis. 

Le  comité  approuve  le  prochain  tirage  du  Bulletin  de  la  Société,  et  pour 
le  compte  de  celle-ci,  au  nombre  de  700  exemplaires. 

M.  Ohleyer,  sur  sa  demande,  est  réadmis  comme  membre  de  la  Société. 

Le  comité  vote  une  somme  de  300  fr.  pour  travaux  supplémentaires  de 
grattage  et  de  calquage  à  l'église  de  Wissembourg. 

M.  Ringeisen  revient  sur  l'afl'aire  des  portes  et  clôtures  à  placer  dans  la 
ruine  de  Hoh-Kœnigsbourg,  cette  question  étant  restée  en  suspens  de- 
puis le  moment  où  il  en  a  été  parlé  pour  la  première  fois.  II  dit  qu'il  se- 
rait facile  de  placer  dans  l'intérieur  de  la  ruine  en  certains  endroits  qui  au- 
raient plus  spécialement  besoin  d'être  protégés  ou  qui  pourraient  cacher 
des  dangers  pour  les  visiteurs  imprévoyants,  les  portes  pour  lesquelles  le 
comité  a  jadis  émis  un  vote. 

Un  membre  est  d'avis  de  ne  rien  précipiter  dans  cette  affaire  et  de  la 
soumettre  encore  à  quelques  études;  il  craint  que  des  obstacles  placés  en 


-  85  - 

certains  endroits  ne  tentent  précisément  la  témérité  ou  les  mauvaises  dis- 
positions de  certaines  classes  de  visiteurs,  et  que  l'on  n'aille  droit  contre 
le  but  que  l'on  se  proposait. 

Le  comité  maintient  son  premier  vote. 

M.  Ringeisen  demande  un  crédit  de  100  fr.  de  plus  pour  le  château  su- 
périeur de  Hoh-Kœnigsljourg-,  ce  qui  portera  la  somme  totale  affectée  à  cette 
ruine  à  200  fr. 

Le  comité  vote  cette  somme. 

M.  le  président  communique  une  nouvelle  lettre  de  M.  Coste  sur  le  por- 
trait photographié  de  Wimpheling-.  —  Le  comité  passe  à  l'ordre  du  jour. 

11  Ht  ensuite  une  lettre  de  M.  le  Préfet  qui  transmet  au  comité,  en  lui  de- 
mandant sa  manière  devoir,  l'avis  suivant  deM.  l'architecte  en  chef  du  dé- 
partement sur  les  peintures  murales  de  l'église  d'Altorf. 

Avis  de  l'architecte  en  citef  sur  les  peintures  de  l'église  d'Altorf. 

V  Les  peintures  murales  de  l'église  d'Altorf  occupent  quatre  grands  pan- 
neaux au-dessous  des  croisées  hautes  de  la  nef  à  l'emplacement  du  trifo- 
rium;  elles  ont  été  trouvées  au-dessous  du  badigeonnagequi  couvrait  l'in- 
térieur de  l'édifice. 

«  Quelle  que  soit  l'époque  de  leur  exécution ,  ces  peintures  avaient  été  faites 
suivant  les  bons  principes  de  l'école  romano-byzantine,  c'est-à-dire  à  l'eau, 
en  teintes  généralement  claires  séparées  par  des  traits  fortement  accentués, 
avec  très-peu  de  modelés  et  point  d'ombres  portées. 

«  Ces  peintures  étaient  assez  intéressantes  et  assez  bien  conservées  pour 
être  ravivées  au  besoin  par  le  même  procédé. 

«  Au  lieu  de  suivre  ce  principe,  l'un  des  quatre  panneaux  a  été  recou- 
vert de  couches  d'huile  fortement  colorées,  modelées  et  ombrées  à  l'excès 
qui  font  tache  dans  l'intérieur  de  l'église,  s'accordent  mal  avec  les  lignes 
d'architecture,  ne  conservent  aucune  trace  des  peintures  primitives  et  n'ont 
aucun  mérite  comme  peinture  moderne.  C'est  un  fait  très-fàcheux  auquel 
on  ne  peut  aujourd'hui  remédier. 

«  Le  parti  le  plus  convenable  serait  de  maintenir  et  réparer  les  trois 
autres  panneaux  par  le  procédé  suivant: 

«  1"^  Calquerles  anciennes  peintures  afin  d'en  conserveries  traces  exactes. 

((  2°  Donner  une  couche  générale  de  colle  très-claire  et  très-transparente 
pour  maintenir  les  anciennes  peintures. 

((  3*^  Reprendre  les  contours  et  traits  de  force  de  toutes  les  figures,  avec 
teintes  à  la  colle  d'un  degré  de  ton  un  peu  inférieur  aux  anciennes  traces. 

K  4"  Enfin  à  l'aide  de  frottés  et  quelques  teintes  plates  à  la  colle  Irès-faiblec 
de  ton ,  rétablir  les  anciennes  couleurs  égrenées  ou  enlevées. 


—  86  - 

('  Le  dernier  panneau  étant  complètement  perdu ,  il  conviendra  de  s'as- 
surer de  l'identité  du  sujet  nouveau  avec  l'ancien,  d'en  faire  sur  place  un 
carton,  de  repiquer  le  mur,  faire  un  nouvel  enduit  et  repeindre  le  pan- 
neau à  la  colle;  du  resie,  l'opération  de  ce  quatrième  tableau  peut  n'être 
faite  qu'après  coup  et  après  que  les  trois  autres  auront  été  réparés.» 

Le  comité  adopte  en  partie  les  conclusions  de  M.  l'architecte  en  chef, 
sauf  à  proposer  la  conservation  des  peintures  au  moyen  du  silicate  de  po- 
tasse, afin  de  pouvoir  les  cacher  par  un  badigeon  si  les  tenlatives  de  con- 
servation ne  devaient  pas  être  satisfaisantes. 

M.  le  Préfet  communique  un  arrêté  préfectoral  autorisant  M.  Maximilien 
de  Ring  à  continuer  les  fouilles  dans  les  tumuli  de  la  forêt  de  Brumath 
avec  l'assistance  de  M.  Morin,  délégué  de  la  Société  des  monuments  his- 
toriques. 

Le  président  lit  une  autre  lettre  de  M.  le  Préfet  relative  aux  armoiries 
épiscopales  de  Benfeld.  Cette  lettre  recommande  la  pierre  sculptée  retra- 
çant ces  armoiries  à  la  sollicitude  de  M.  le  directeur  général  des  tabacs, 
qui  de  son  côté  offre  à  la  Société  de  la  mettre  à  sa  disposition  aux  frais  de 
l'administration. 

Une  lettre  de  M.  Nicklès  relativement  au  même  objet  propose  de  placer 
la  pierre  à  l'église  de  Benfeld. 

Le  comité,  pour  ne  pas  faire  un  anachronisme  ou  donner  lieu  peut-être 
à  des  interprétations  erronées  dans  les  temps  futurs,  préfère  accepter 
l'offre  de  l'administration  des  tabacs. 

Il  vote  des  remercîments  à  cette  administration. 

Lecture  est  donnée  de  la  lettre  suivante  de  M.  Véron-Béville. 

«  Monsieur  le  Président,  j'ai  l'honneur  de  vous  communiquer  ci-joint  une 
lettre  par  laquelle  M.  Geiger,  architecte  à  Colmar,  m'a  fait  connaître  qu'une 
cloche  duquinzièmesiècle,  dont  il  donne  une  description  détaillée,  doit  être 
sous  peu,  à  Lautenbach,  livrée  à  un  fondeur  de  cloches  et  vendue  comme 
vieux  bronze. 

«  Je  me  suis  transporté  hier  sur  les  lieux  avec  mon  collègue  M.  le  con- 
seiller Huot,  et  nous  avons  constaté  que  la  description  de  M.  Geiger  était 
parfaitement  exacte  et  qu'il  n'avait  nullement  exagéré  l'intérêt  que  présente 
cette  cloche  comme  antiquité  et  comme  objet  d'art. 

«  Malheureusement  il  est  deux  autres  points  sur  lesquels  nous  avons  été 
également  édifiés  :  c'est  d'abord,  que  le  son  de  cette  cloche,  par  suite  d'un 
long  usage,  s'est  altéré,  de  manière  à  ce  qu'elle  ne  peut  plus,  sans  disso- 
nance grave,  prendre  part  à  un  concert  de  cloches  quelconques.  M.  le  pro- 
fesseur de  musique  Kintzlé,  de  Guebwiller,  appelée  donner  son  avis,  a  été 


-  87  — 

jusqu'à  affirmer  à  M.  le  curé ,  qu'un  plus  long  usage  de  ceüe  cloche  (son- 
nant avec  d'autres)  finirait  par  fausser  l'oreille  de  toute  la  jeunesse  de  la 
paroisse.  D'un  autre  cùté  la  commune  de  Laulenbach,  qui  n'est  pas  riche 
et  qui  se  saigne,  en  ce  moment,  pour  remplacer  son  disgracieux  clocher  du 
quinzième  siècle  par  deux  lours  en  harmonie  avec  l'architecture  romane  de 
sa  belle  église,  est  hors  d'état  de  conserver  cette  cloche  au  seul  titre  d'ob- 
jet d'art;  elle  est  absolument  obligée  d'en  tirer  un  parti  quelconque.  L'en- 
lèvement a  été  fixé  au  15  octobre  prochain;  toutefois  j'ai  la  certitude, 
grâce  à  l'intervention  de  M.  le  Préfet,  de  pouvoir  faire  proroger  ce  délai  à 
trois  mois. 

«Dans  ces  circonstances  je  viens  vous  prier,  Monsieur  le  Président,  de 
vouloir  bien  appeler  sur  cette  question  la  sollicitude  du  comité  et  particuliè- 
rement des  vénérables  ecclésiastiques  qui  en  font  partie,  de  M.  l'abbé  Straub 
notamment,  si  versé  en  ces  matières.  Celle  cloche  mérite  d'être  conservée, 
elle  conviendrait  paifaitement  à  une  petite  paroisse  dont  elle  composerait 
à  elle  seule  toute  la  sonnerie.  La  commune  de  Lautenbach  la  céderait  au 
prix  qu'en  offre  le  fondeur,  c'est-à-dire  au  prix  du  vieux  bronze.  Le  fait 
pourrait  être  divulgué  par  les  moyens  de  publicité  dont  dispose  la  Société 
dans  les  deux  déparlements.  » 

Le  comité,  considérant  que  l'Alsace  possède  des  cloches  plus  intéres- 
santes que  celle  qui  forme  l'objet  de  cette  lettre,  décide  que  l'on  se  bornera 
à  faire  prendre  le  moulage  de  l'ornementation  de  la  cloche,  et  puis  de  l'a- 
bandonner à  son  sort. 

M.  le  président  est  prié  d'écrire  dans  ce  sens  à  M.  Véron-Réville. 

M.  le  président  dépose  un  mémoire  de  M.  le  baron  de  Lützelbourg.  — 
Ordre  du  jour. 

M.  Guerber  rend  compte  d'un  mémoire  de  M.  Louis  Benoît  qui  lui  a  été 
remis  dans  la  séance  extraordinaire  du  10  août.  Ce  mémoire  s'occupe  de 
l'image  d'une  divinité  inconnue,  peut-être  gallo-romuine,  peut-être  anté- 
rieure à  celle  époque,  peut-être  aussi  déjà  de  l'époque  chrétienne. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  l'auteur  et  le  dépôt  aux  archives. 

Le  comité  examine  une  épreuve  de  la  lithographie  représentant  l'église 
de  Berraont.  Cette  épreuve  n'étant  pas  satisfaisante,  il  décide  que  la  planche 
ne  sera  pas  tirée. 

M.  le  colonel  de  Morlet  rend  compte  de  la  découverte  faite  àSaar-Union 
des  ruines  d'un  établissement  gallo-romain,  qui  renferme  des  restes  fort 
distincts  de  calorifères  construits  sur  le  mode  usité  à  celle  époque.  Il  annonce 
aussi  avoir  été  à  Haslach  el  y  avoir  visité  le  grand  et  le  petit  Ringelstein, 
ainsi  que  le  château  de  Hohenslein,  tous  les  trois  d'un  accès  fort  difficile. 


II  propose  de  faire  une  demande  à  l'adniinistration  forestière  pour  faciliter 
les  abords. 

Le  comité  s'associe  à  ce  vœu  et  vole  à  cet  effet  une  somme  de  200  fr. 

Le  comité  autorise  ensuite  l'échange  de  modèles  en  plâtre  d'objets  an- 
tiques contre  des  modèles  analogues  de  la  collection  de  Mayence. 

M.  le  curé  Silier  donne  lecture  d'une  notice  sur  une  troisième  villa  ro- 
maine découverte  à  Oberbronn. 

M.  Saum  fait  une  communication  au  sujet  d'une  dizaine  de  châteaux 
qu'il  a  visités  le  long  de  la  frontière  du  Palatinat  entre  Niederbronn  et 
Wissembourg,  et  sur  lesquels  il  croit  devoir  appeler  l'attention  de  la 
Société. 

il  signale  plus  spécialement,  outre  les  deux  Windstein  au  fond  de  la  val- 
lée du  Jaegerthal,  le  château  de  Schœneck  situé  entre  Dambach  et  Ober- 
steinbach,  le  petit  château  de  Lützelhard  à  l'ouest  d'Obersteinbach,  qu'une 
coupe  récente  a  entièrement  dégagé,  etplusprès  de  Wissembourg  l'énorme 
rocher  du  Fleckenslein  avec  ses  nombreuses  salles  souterraines,  ses  gale- 
ries, ses  escaliers  et  son  puits  taillés  dans  le  roc  et  ses  ruines  de  toutes 
dates.  Il  appelle  notamment  l'attention  sur  deux  inscriptions  en  caractères 
gothiques  du  quinzième  siècle,  signalés  par  Schweighœuser  et  Golbéry, 
qui,  devenus  frustes,  menacent  de  disparaître  et  qu'il  serait  bon  de  faire 
transcrire  exactement  ou  même  mouler,  si  ce  travail  n'a  pas  été  exécuté 
déjà. 

La  séance  est  levée  à  une  heure. 


Séance  du  Comilé  du  2  novembre  1861 

Présidence  de  M.  SPAGH. 


Présents  :  MM.  Bœrsch,  Eissen,  Grass,  Guerber,  Ilcitz,  Klotz,  baron  Ma- 
thieu de  Faviers,  Morin,  Ringeisen,  Saum,  baron  de  Schauenburg,  Schirr, 
Straub. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Avant  de  commencer  ses  travaux,  le  comité  décide  à  l'unanimité  que  le 
procès-verbal  contiendrait  l'expression  des  regrets  profonds  que  la  mort 
inattendue  de  M.  Jung  a  fait  éprouvera  ses  collègues.  Il  charge  le  président 


d'elle  l'orgaue  de  ses  sentiments  auprès  de  la  famille.  Le  président  fera 
parvenir  à  M'"°  Jung  la  lettre  suivante  : 

«Madame,  dans  la  séance  du  2  novembre  courant,  le  comité  historique, 
vivement  ému  de  la  mort  récente  de  M.  le  professeur  Jung,  a  consigné 
officiellement  dans  le  registre  de  ses  procès-verbaux  les  douloureux  regrets 
qu'éprouvent  tous  les  membres  de  cette  réunion.  M.  Jung  était  à  la  fois 
un  collègue  bienveillant  et  zélé;  il  était  de  plus,  par  son  vaste  savoir  et  sa 
longue  expérience,  l'un  des  soutiens  et  des  promoteurs  les  plus  ardents 
de  la  Société  pour  la  conservation  des  monuments  historiques  d'Alsace. 

«J'ai  pensé,  iMadame,  que,  dans  le  deuil  où  vous  êtes  plongée  par  une 
perte  irréparable,  vous  accueilleriez  avec  indulgence  ce  témoignage  flat- 
teur pour  la  mémoire  de  votre  époux,  et  je  me  suis  empressé  de  vous  en 
transmettre  l'expression ,  affaibhe ,  mais  en  tout  cas  bien  vivement  sentie. 

«Agréez,  Madame,  l'hommage  de  ma  respectueuse  condoléance.  » 

Le  secrétaire  dépose  : 

Bulletin  de  la  Société  impériale  des  antiquaires  de  France,  1^''  et  2^  tri- 
mestres 1863; 

Neunter  Jahresbericht  des  germanischen  National-Museîims  zu  Nürnberg; 

Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit,  18G3,  septembre,  n''  9; 

Jahrbücher  des  Vereins  von  Alterthumsfreunden  im  Rheinlande,  "XXXV, 
18.  Jahrgang. 

Le  président  annonce  avoir  écrit,  entre  autres,  les  lettres  suivantes  de- 
puis le  5  octobre  : 

A  M.  Ohleyer,  professeur  à  Wissembourg;  annonce  des  décisions  prises 
au  sujet  du  grattage  des  fresques  de  l'éghsc  Saint-Pierre  et  Saint-Paul; 
annonce  de  la  prochaine  arrivée  d'une  commission  ; 

A  M.  le  curé  de  Wissembourg;  envoi  de  la  note  de  M.  Morin  sur  la  situa- 
tion de  l'autel  de  l'église  de  Wissembourg; 

A  M.  L.  Benoît,  maire  de  Berthelming;  remercîments  en  retour  de  son 
mémoire  sur  «un  dieu  inconnu»; 

A  M.  le  conservateur  des  forêts;  pour  les  travaux  à  faire  aux  châteaux 
de  Ringelstein  et  de  Hohenstein; 

A  M.  Coste ,  juge  à  Schlestadt,  pour  lui  annoncer  le  refus  du  comité  quant 
aux  propositions  de  M.  Baldenweck; 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin  ;  prière  de  charger  M.  l'architecte  de  l'arron- 
dissement de  Schlestadt  de  transférer  à  Strasbourg  la  pierre  avec  armoiries 
épiscopales  en  ce  moment  à  Benfeld; 

A  M.  Véron-Réville;  prière  de  faire  photographier  la  cloche  de  Lauten- 
bach; 

6* 


—  90  - 

A  M.  Vivien  de  Saint-Mailin,  à  Paris;  envoi  de  nuire  Bulletin; 

A  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin;  avis  du  comité  au  sujet  des  mesures  de 
conservation  à  prendre  pour  les  fresques  d'Altorf; 

Au  même;  remercîments  au  sujet  du  vote  du  Conseil  général  en  faveur 
de  la  Société. 

Le  président  annonce  l'envoi  d'un  mémoire  de  M.  Nicklès,  avec  une 
carte,  sur  Helvetus.  —  Le  comité  vole  l'impression  et  la  reproduction  de 
la  carte  dans  la  prochaine  livraison  du  Bulletin. 

M.  Nicklès  propose  l'admission,  comme  membres  de  la  Société,  de  MM.  Sa- 
ladin,  Emile,  père,  Saladin,  Emile,  fils,  Saladin,  Jules,  manufacturiers  à 
Bonsecours  (Meurthe),  et  de  M.  Charles  Ehrhardt,  chef  de  dépôt  du  chemin 
de  fer  de  Lyon  à  Genève,  résidant  à  Genève; 

Et  M.  Slraub,  celle  de  M.  l'abbé  Hubert,  vicaire  à  Mulhouse. 

Le  comité  prononce  l'admission  de  ces  nouveaux  membres. 

Le  président  annonce  que  M.  Bureau,  membre  de  plusieurs  sociétés  sa- 
vantes, à  Paris,  demande  communication  des  statuts  de  la  Société,  de  la 
liste  des  membres  et  de  l'année  courante  du  Bulletin.  —  Le  comité  accorde 
la  demande. 

Lecture  est  donnée  de  la  lettre  suivante  de  M.  le  curé  de  Wissembourg  : 

«Monsieur  le  Président,  par  une  lettre  que  vous  m'avez  fait  l'honneur 
de  m'écrire,  sous  la  date  du  5  courant,  vous  me  donnez  communication, 
pour  avis,  de  la  note  ci-jointe  sur  l'église  de  Saint-Pierre  et  Saint- Paul,  à 
Wissembourg.  Je  m'empresse  de  répondre  à  votre  invitation. 

c( L'exhaussement  du  dallage,  au  commencement  de  ce  siècle,  n'a  eu 
qu'un  seul  but  :  l'assainissement  de  l'édifice;  différentes  délibérations  du 
conseil  de  fabrique  prises  à  cette  époque  en  font  foi. 

'i  Les  nombreuses  inhumations  faites  dans  les  chapelles  et  les  nefs,  l'élé- 
vation qu'avait  prise  le  sol  extérieur  devenu,  après  la  suppression  du  cha- 
pitre, un  dépôt  de  décombres,  avaient  donné  à  l'éghse  une  atmosphère 
malsaine  et  nauséabonde  à  laquelle  on  attribuait  les  fréquents  évanouisse- 
ments qui  se  produisirent  pendant  la  célébration  des  offices.  Au  lieu  de 
dégager  l'édifice  au  dehors  et  de  pratiquer  des  fouilles  en  dedans  qui  au- 
raient débarrassé  le  sol  de  sa  terre  pourrie,  on  préféra,  pour  y  remédier, 
le  système  d'exhaussement  :  il  laissa  subsister  en  partie  le  mal  et  enterra, 
d'après  l'expression  d'un  de  vos  honorables  membres,  le  géant  jusqu'aux 
genoux. 

'(Une  opération  analogue  à  celle  de  1862,  dont  parle  M.  l'architecte  en 
r-hcf  du  département,  entreprise  dans  l'abside,  a  du  être  interrompue  faute 
de  fonds. 


—  91  — 

(.(Quand  il  nous  sera  possible  de  reprendre  les  travaux  d'abaissement, 
il  s'agira  de  l'emplacement  qu'il  convient  de  donner  au  maître-autel. 

('Les  principes  de  l'architecture  gothique  nous  laissent  ici  toute  liberté, 
puisqu'ils  n'indiquent  pas,  que  je  sache,  une  place  bien  déterminée  pour  cet 
objet  du  culte. 

«Dans  l'église  de  Wissembourg,  l'autel  primilif  servant  aux  exercices 
religieux  de  la  communauté  était  à  i'",50  du  fond  de  l'abside,  et  un  se- 
cond autel  servant  aux  cérémonies  du  culte,  auxquelles  prenaient  part  les 
fidèles  de  la  ville,  se  trouvait  sous  le  jubé. 

«Les  stalles  des  chanoines  étaient  placées,  non  pas  dans  l'abside  der- 
rière l'autel,  mais  verticalement  à  droite  et  à  gauche,  dans  le  transept, 
entre  le  jubé  et  l'abside.  Cette  partie  du  transept,  où  se  trouvaient  les 
stalles,  était  séparée  des  parties  nord  et  sud  par  des  arcatures,  et  le  tran- 
sept, dans  toute  sa  partie  transversale,  était  séparé  des  trois  nefs  par  deirx 
grilles,  aux  extrémités,  et  par  le  jubé  au  milieu. 

«En  1806,  quand  le  jubé  fut  enlevé,  on  démolit  en  même  temps  l'autel 
du  fond  de  l'abside  et  on  le  remplaça  par  un  autre  qui  fut  placé  au  miheu 
de  l'abside.  Plus  tard,  en  1829,  quand  on  fit  subir  un  second  exhausse- 
ment à  l'abside  et  à  la  partie  du  milieu  du  transept,  on  remplaça  l'autel  de 
1806  par  l'autel  actuel,  et  on  lui  assigna  l'emplacement  qu'il  occupe  en- 
core, à  l'heure  qu'il  est,  dans  le  transept. 

«Mon  opinion,  sauf  meilleur  avis,  serait  de  rendre  aux  nefs  la  partie  du 
transept  formant  en  ce  moment  l'avant-chœur,  d'en  ôter  l'autel  et  de  le 
mettre  au  milieu  de  l'abside,  en  laissant  assez  d'espace  entre  l'autel  et  le 
fond  de  l'abside  pour  que  les  chantres  y  trouvent  place.» 

M.  le  curé  Guerber  lit  le  rapport  suivant  sui'  le  même  sujet  : 

«La  commission  désignée  l'an  dernier  pour  examiner  les  travaux  de 
restauration  de  l'église  abbatiale  de  Saint-Pierre  et  Saint-Paul,  à  Wissem- 
bourg, a  été  convoquée  de  nouveau  et  pour  le  même  objet  le  21  octobre 
dernier.  M.  le  baron  de  Schauenburg  et  M.  le  curé  de  Saint-George  de 
Ilaguenau  se  sont  trouvés  au  rendez-vous  et  ont  pris  connaissance  des 
travaux  exécutés  depuis  le  mois  de  novembre  1862.  Le  compte  rendu  que 
nous  avons  l'honneur  de  vous  présenter,  vous  édifiera,  nous  l'espérons, 
sur  leur  importance. 

<i  Restauration  proprement  dite.  Dans  le  beau  cloître  dont  les  mutilations 
nombreuses  ont  été  signalées,  nous  avons  vu  avec  bonheur  un  nouveau 
mur  de  soutènement  établi  à  la  dernière  travée  supérieure.  Cette  partie  du 
cloître  menaçait  de  s'écrouler;  le  mur  qu'on  vient  d'élever  le  met  à  l'abri 
du  danger. 


^  02  — 

«Ell  cléniolissanL  un  autel  lalcial  dans  l'inléiiuur,  on  Irouva  qualre  8ta- 
lues,  dont  les  pliotograpliies  vous  ont  été  soumises;  dans  d'autres  décom- 
bres on  découvrit  les  troncs  de  deux  apôtres,  saint  Pierre  et  saint  Paul.  Les 
)>remières  sont  tort  belles  et  appartiennent  à  la  bonne  époque  de  la  sculp- 
ture chrétienne  du  quatorzième  siècle.  On  y  a  reconnu  une  sainte  Vierge, 
un  empereur  donateur,  un  prophète  ou  apôtre,  et  un  guerrier.  Il  ne  reste 
du  dernier  que  le  tronc,  et  il  est  difficile  d'y  reconnaître,  comme  on  l'a 
voulu,  un  saint  Louis,  roi  de  France.  Nous  admettons  plus  volontiers  que 
la  première  représente  Dagobert,  fondateur  de  l'église  primitive. 

«Les  deux  troncs  figurant  saint  Pierre  et  saint  Paul,  sont  moins  anciens 
et  d'un  mérite  bien  inférieur.  On  suppose  qu'ils  faisaient  partie  des  douze 
apôtres  placés  sur  les  parois  des  colonnes  du  chœur  et  dont  on  a  reconnu 
les  traces.  Il  nous  serait  difficile  de  trouver  l'emplacement  nécessaire  pour 
douze  apôtres;  le  nombre  de  colonnes  du  chœur  ne  le  comporte  pas;  et  il 
est  plus  probable  qu'il  n'y  avait  jadis  que  les  deux  apôtres  nommés,  patrons 
principaux  de  la  basilique,  et  peut-être  quatre  autres  saints,  ceux,  par 
exemple,  (ju'on  a  découverts  dans  l'autel  latéral  susdit. 

a  Abside.  Toute  l'abside  est  débadigeonnée  aujourd'hui,  ainsi  que  la 
coupole  et  les  quatre  niches-pendentifs.  Cette  opération,  lente  et  pénible, 
continue  à  réussir  et  mérite  les  encouragements  de  tous  les  amis  de  l'art 
chrétien.  Le  chœur  se  présente  aujourd'hui  dans  toute  sa  majesté,  avec  la 
pureté  parfaite  de  ses  lignes.  Toutefois,  certaines  pierres  des  quatre  grands 
piliers  qui  portent  le  dôme  et  la  tour,  certaines  autres  des  quatre 
pendentifs  et  de  massifs  qui  supportent  une  partie  de  la  retombée,  sont 
inoins  belles,  d'une  nuance  moins  avantageuse  que  celles  signalées  dans 
d'autres  parties  du  monument.  On  nous  fournit  l'explication  suivante: 
Cette  pierre,  moins  belle,  est  plus  dure  que  l'autre,  et  elle  supporte 
bien  plus  sûrement  l'énorme  charge  de  la  coupole  et  de  la  tour,  qui,  sans 
ces  matériaux  plus  résistants,  eussent  fait  fléchir  les  quatre  appuis  en 
apparence  bien  insuffisants  à  supporter  un  pareil  poids.  La  raison  est 
bonne  et  nous  l'admettons,  tout  en  constatant  la  différence  de  beauté  de 
l'appareil. 

<i  Abaissement  du  sol  intérieur.  Le  collatéral  extrême  sud  est  replacé 
à  son  ancien  niveau.  Il  a  eu  les  prémices  de  cet  acte  de  justice,  puisqu'il 
louche  au  beau  sépulcre  dont  on  désirait  dégager  la  base  tout  ensevelie. 
L'œuvre  a  été  bien  conduite;  on  a  posé  les  dalles  sur  un  fond  parfaitement 
sec,  et  ce  collatéral  est  à  peu  près  au  niveau  du  sol  extérieur. 

«On  en  a  fait  autant  de  l'abside,  c'est-à-dire  depuis  la  ligne  de  l'arc 
triomphal  jusqu'au  chevet.  C'est  le  point  de  départ  pour  le  reste,  et  toute 


—  93  — 

affaire  cessante,  pour  le  centre  du  transept  ou  l'intersection  tle  la  croix. 
Dans  nos  conclusions,  nous  reviendrons  sur  ce  point. 

«Il  a  été  question  du  nouvel  emplacement  du  maître-autel.  M.  le  curé  de 
Wissembourg  a  bien  voulu  demander  notre  avis  sur  cet  objet,  et  quoique 
cela  ne  rentre  pas  directement  dans  nos  attributions,  nous  devions,  par 
déférence  pour  cet  acte  de  confiance,  formuler  notre  opinion.  La  place 
qu'occupent  le  plus  souvent  les  maîtres-autels,  c'est  l'axe  de  l'arc  triomphal 
à  l'entrée  de  l'abside,  en  sorte  que  cet  arc  en  forme  comme  le  couron- 
nement. Nous  disons  que  c'est  la  place  la  plus  ordinaire,  non  pas  exclu- 
sive, car  il  y  a  des  autels  placés  plus  au  fond  de  l'abside,  et  il  en  est  qui 
occupent  le  centre  de  la  coupole.  Examen  fait  des  lieux,  nous  avons  trouvé 
que  la  place  usuelle,  à  l'entrée  de  l'abside,  ne  conviendrait  pas  au  maître- 
autel  de  Wissembourg,  puisque  les  premières  baies  de  l'abside,  qui  de- 
vraient lui  donner  la  lumière,  sont  aveugles.  Il  faudrait  donc  ou  l'avancer 
sous  la  coupole,  ou,  ce  qui  semble  plus  conforme  aux  suffrages  des  hom- 
mes de  l'art,  le  reculer  jusque  sous  la  lumière  des  premières  baies  ouvertes 
sur  le  fond  de  l'abside.  Ce  ne  sera  pas  tout  à  fait  l'emplacement  de  l'ancien 
autel  matulinal  de  l'abbé  Edelin,  maist;e  sera  une  place  convenable  et  qui 
réunira  à  peu  près  les  conditions  tendant  à  satisfaire  les  besoins  liturgiques 
du  culte  et  la  facilité  de  placer  le  chœur  des  chantres.  Ce  sentiment  est  le 
nôtre,  et  c'est  aussi  celui  du  respectable  curé  de  Wissembourg. 

ahnagerie.  M.  Ohleyer  a  dégagé,  en  1863,  le  reste  de  la  surface  sud 
du  transept  méridional  et  une  partie  de  la  surface  orientale  du  même  tran- 
sept. Il  a  trouvé  six  autres  apôtres  qui  complètent  ainsi  la  série  ouverte 
sur  la  droite  du  trône  de  Jésus-Christ.  Il  a  pris  à  tort  ces  six  apôtres  pour 
six  vierges.  Puis  il  a  opéré  la  délivrance  de  la  suite  des  sujets  de  la  passion 
du  Sauveur,  la  flagellation,  le  couronnement  d'épines  jusqu'au  crucifie- 
ment de  Jésus-Christ  et  la  descente  de  la  croix.  Revenant  ensuite  sur  la 
gauche,  il  découvrit  Jésus-Christ  au  tombeau,  sa  résurrection  et  son  appa- 
rition à  Madeleine,  son  ascension,  la  descente  du  Saint-Esprit  et  le  juge- 
ment. Continuant  son  œuvre,  il  mit  au  jour  sept  tableaux  figurant  les  œu- 
vres de  miséricorde.  Ces  sujets  sont  traités  avec  un  sentiment  profondément 
touchant.  Dans  chaque  tableau,  Jésus-Christ  accompagne  invariablement 
les  nécessiteux;  —  ceux  qui  sont  affamés,  altérés,  qui  manquent  de  vête- 
ments, qui  sont  malades,  —  et  sollicite  la  charité  auprès  de  ceux  qui  vont 
leur  ouvrir  les  trésors  de  la  miséricorde  chrétienne.  C'est  l'expression  lit- 
térale des  paroles  :  «Tout  ce  que  vous  donnez  au  dernier  de  mes  frères  en 
«mon  nom,  c'est  à  moi  que  vous  l'aurez  donné.» 

«Un  dernier  tableau  qui  termine  simultanément  la  série  des  sujets  de  In 


—  94  ~ 

passion  et  celle  des  œuvres  de  miséricorde,  n'a  pu  être  déchiffré  encore. 

«Remarquons  quelques  particularités  dans  ces  tableaux  : 

«Dans  la  résurrection,  Jésus-Christ  n'est  point  représenté  sortant  du 
tombeau,  car  personne,  en  effet,  ne  l'a  vu  sortir.  Mais  d'un  côté  on  aper- 
çoit une  feinme  portant  un  pyxide  d'aromates,  d'un  autre  côté,  un  ange 
(jui  ini  apprend  que  le  Sauveur  est  ressuscité.  Mais  dans  le  même  tableau 
on  voit  In  jiremière  apparition  de  Jésus-Christ  à  sainte  Madeleine;  le  Sau.- 
vcur  étend  les  mains  sur  elle,  et  semble  lui  dire  :  Ne  me  touchez  pas. 
L'ascension  n'est  pas  figurée  au  moment  où  le  Sauveur  s'élève  de  terre  et 
va  se  perdre  dans  les  nues;  mais  on  le  voit  donnant  ses  derniers  avis  aux 
disciples,  remettant  la  clef  à  saint  Pierre  et  disant  à  tous:  Allez  enseigner 
toutes  les  nations.  Dans  la  Pentecôte,  le  Saint-Esprit  ne  descend  pas  sous 
forme  de  langues  de  feu,  mais  sous  celle  de  rayons.  Dans  le  jugement,  on 
remarque  aux  côtés  de  Jésus-Christ  Marie,  sa  mère,  et  Jean,  le  précurseur. 
Enfin,  dans  le  tableau  du  crucifiement,  l'artiste,  pour  allonger  suffisam- 
menl  la  lance  du  soldat  qui  perce  le  côté  du  Sauveur,  place  ce  soldat  à  un 
étage  plus  bas  que  les  autres  figures. 

«Il  règne  dans  toutes  ces  compctsitions  la  touchante  naïveté  qu'on  a  pu 
constater  déjà  dans  les  précédentes,  et,  en  tout  cas,  elles  sont  dignes  de  la 
sollicitude  que  notre  Société  leur  a  vouée  et  qu'elle  leur  conservera. 

«Ce  n'est  pas  tout.  Le  transept  sud,  au-dessus  de  la  dernière  série  de 
tableaux  que  nous  venons  de  nommer,  porte  des  traces  d'autres  peintures 
encore  qu'on  se  propose  de  dégager  dans  une  campagne  prochaine. 

«Le  transept  nord,  on  l'a  dit  et  répété,  porte  également  sur  toutes  ses 
surfaces  des  tableaux  muraux ,  mais  le  peu  qu'on  y  a  fait  pour  les  rendre 
à  la  lumière,  ne  permet  point  de  déterminer,  soit  la  série,  soit  la  valeur 
des  sujets  que  recouvre  encore  le  linceul  blanc.  Il  est  probable  pourtant 
qu'on  y  découvrira  un  certain  nombre  de  miracles  opérés  soit  par  le  Sau- 
veur, soit  par  les  apôtres;  peut-être  les  actes  et  le  martyre  de  ces  derniers. 
On  a  constaté  aussi  des  vestiges  de  fresques  sur  la  longue  surface  du  mur 
collatéral  nord.  Espérons  que  le  jour  n'est  pas  loin  où  on  pourra  dire  à 
tous  ces  morts  :  Levez-vous  et  sortez  de  votre  tombe  séculaire! 

«cNous  nous  permettons  de  terminer  notre  rapport  par  une  demande 
adressée  à  la  munificence  de  la  commission  de  notre  Société. 

«La  campagne  de  1863  pour  le  débadigeonnage  est  terminée  et  on  ne 
pourra  reprendre  ce  travail  qu'au  printemps.  11  reste  à  employer,  pour 
décalquer  les  meilleurs  tableaux,  une  somme  de  200  fr.  votée  depuis  un  an; 
de  plus  300  fr.  récemment  votés  pour  continuer  la  découverte  des  pein- 
tures. Mais  un  travail  plus  urgent  et  qui  ne  comporte  guère  de  remise. 


~  95  — 

c'est  l'abaissement  du  niveau  actuel  rie  l'avant-chœur,  pour  le  remettre  en 
harmonie  avec  l'abside.  Celle-ci  est  aujourd'hui  à  un  niveau  plus  bas  que 
l'avant-chœur,  et,  raisonnablement,  cela  ne  saurait  durer.  Ce  travail  rentre 
à  plus  d'un  titre  dans  la  catégorie  de  ceux  que  vous  tenez  à  honneur  d'en- 
courager par  vos  intelligentes  contributions.  Restaurer,  fort  souvent  c'est 
conserver.  L'abaissement  du  chœur  à  son  niveau  primordial  restituera  au 
transept  les  bases  de  ses  piliers  et  de  ses  colonnes ,  les  rendra  à  l'air  et  à 
la  lumière  et  les  soustraira  à  l'humidité  qui  les  ronge.  De  plus,  on  se  pro- 
met, et  les  fouilles  antérieures  autorisent  cet  espoir,  de  découvrir  parmi 
les  décombres  amoncelés  dans  le  transept  d'intéressants  fragments  des  sta- 
tues, des  ornements  provenant  de  l'ancien  jubé,  et  des  inscriptions  tumu- 
laires  qui  abondaient  dans  l'abbaye  de  Wissembourg.  C'est  à  ce  double 
point  de  vue  que  nous  pensons  qu'une  allocation  de  300  fr.  sera  bien  reçue 
et  deviendra  fructueuse.  Le  travail  des  fouilles  pourra  être  entrepris  dans 
la  saison  d'hiver.  C'est  dans  ce  but  que  nous  avons  l'honneur  de  vous  de- 
mander ce  voté,  nous  pouvons  en  toute  sûreté  nous  présenter  comme  or- 
ganes de  la  légitimité  du  vœu  qu'on  nous  a  exprimé  à  Wissembourg. 

«  Notre  Société  patronnera  ainsi  jusqu'à  la  fin  et  dirigera  jusqu'à  un  cer- 
tain point  une  intelligente  et  féconde  œuvre  de  conservation  et  de  restau- 
ration. La  campagne  d'hiver  ne  sera  pas  stérile;  car  on  achèvera  de  rendre 
au  sanctuaire  de  la  basihque  son  niveau  primitif  et  on  pourra  sérieusement 
songer  à  entamer  les  nefs  dans  la  prochaine  campagne  d'été.  Notre  exem- 
ple, on  l'espère,  influera  sur  les  décisions  de  la  municipalité,  qui  voudra 
ne  pas  retirer  son  concours  à  une  entreprise  dont  le  bien  et  l'éclat  rejail- 
lissent sur  la  cité  de  Wissembourg.  » 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  la  commission. 

Le  rapport  cependant  ne  paraît  pas  pouvoir  être  accepté  dans  toutes  ses 
conclusions. 

M.  Morin  fait  observer  que  l'église  de  Wissembourg  est  un  monument 
classé,  et  que  dès  lors  l'abaissement  du  sol  pourrait  être,  de  la  part  de  la 
Société,  un  empiétement  qui  serait  hors  de  ses  attributions  et  auquel  elle 
ne  saurait  pas  être  autorisée  à  contribuer  de  ses  deniers. 

Cette  manière  de  voir  est  partagée  par  M.  Bœrsch. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  estime  que  la  question  est  mal  posée.  Il 
s'agit,  au  fond,  selon  lui,  non  d'un  travail  de  remaniement  d'une  partie  du 
monument,  mais  plutôt  d'un  travail  d'investigation.  Déjà,  en  dégageant  le 
socle  des  piliers,  on  a  trouvé  des  statues  d'une  grande  valeur,  et  en  con- 
tinuant les  recherches ,  il  est  à  peu  près  certain  que  l'on  retrouvera  d'au- 
tres objets  aussi  importants,  notamment,  peut-êtie  la  série  des  dalles  Inmn- 


—  96  - 

laires  des  abbés  de  la  collégiale  de  Wissembourg.  C'est  donc  plutôt  de 
fouilles  que  de  réparations  qu'il  s'agit,  et  dès  lors  la  Société,  en  s'y  inté- 
ressant, ne  saurait  sortir  de  ses  attributions.  C'est  un  crédit  nouveau  et 
non  pas  un  virement  qui  est  demandé.  ^ 

M.  Bœrsch,  tout  en  admettant  la  justesse  des  observations  de  M.  de 
Schauenburg,  émet  le  vœu  que  M.  le  curé  de  Wissembourg  présente  sa 
demande  motivée  dans  le  sens  indiqué. 

Le  secrétaire  fait  observer  que  la  somme  demandée  pourrait  être  attri- 
buée sur  le  chapitre  f^  du  budget,  qui  présente  encore  des  fonds  disponi- 
bles, et  qui  d'ailleurs  est  consacré  aux  allocations  pour  fouilles,  gratifica- 
tions, transports,  etc. 

M.  de  Schauenburg  pense  que  la  ville  de  Wissembourg  s'associera  à 
cette  dépense,  d'autant  plus  que  c'est  en  même  temps  un  travail  de  con- 
servation du  monument,  les  soubassements  des  colonnes  se  détériorant 
de  plus  en  plus  par  la  manière  dont  ils  sont  actuellement  enterrés. 

Le  comité  vole  une  somme  de  300  fr.  pour  les  travaux  projetés,  à  prendre 
sur  le  chapitre  i®""  du  budget. 

M.  Morin  rend  compte  des  fouilles  entreprises  par  M.  Weissacker  dans 
la  forêt  de  Wœrth-sur-Sauer,  auxquelles  il  a  assisté  comme  délégué  de  la 
Société.  Ces  fouilles  n'ont  produit  aucun  résultat  en  sa  présence,  et 
M.  Weissacker,  qui  avait  promis  de  le  tenir  au  courant,  si  postérieurement 
il  devait  trouver  des  objets  de  quelque  intérêt,  n'a  pas  écrit  depuis,  ce  qui 
fait  supposer  que  ses  recherches  sont  restées  stériles. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  annonce  qu'on  a  découvert  une  sépulture 
romaine  entre  Krautweiler  et  Bernolsheim.  C'était  un  dé  en  pierre  avec  un 
vase  en  verre  rempli  de  cendres.  Le  vase  a  été  brisé  par  les  paysans  qui  l'ont 
déterré.  Cette  pierre  a  pu  être  obtenue  par  suite  de  la  superstition  des  pay- 
sans qui  racontent  des  histoires  de  revenants  sur  l'emplacement  où  elle 
était  enfouie,  et  qui  ont  craint  d'attirer  dans  leurs  demeures,  en  l'y  trans- 
portant, les  êtres  mystérieux  signalés  par  la  tradition.  Il  appuie  sa  com- 
munication du  rapport  suivant  de  M.  Beilstein,  agent  voyer,  accompagné 
d'un  dessin  exécuté  avec  le  soin  que  met  ce  fonctionnaire  à  tout  ce  qui 
sort  de  ses  mains  : 

Rapport  de  M.  Beilstein,  agent  voyer,  sur  la  découverte  d'une  sépulture 
romaine,  au  canton  dit:  auf  dem  Hochatzenheimerfeld,  territoire  de  la 
commune  de  Bernolsheim. 

«Dans  le  courant  de  la  journée  de  vendredi,  23  octobre  1863,  des  ou- 
vriers de  Bernolsheim  étaient  occupés  à  extraire  de  la  garance  sur  une 
parcelle  du  sieur  Lagel,  Antoine,  adjoint  au  maire  de  la  susdite  localité, 


—  97  — 

quand,  tout  à  coup,  l'un  d'eux  crut  trouver  de  la  résistance  dans  ses  afTouil- 
lements  et  toucher  un  corps  solide;  il  en  fit  la  remarque  à  ses  camarades, 
et,  redoublant  d'efforts,  ces  ouvriers  réunis  mirent  bientôt  à  jour  une  dalle 
brute  d'environ  O^jlS  d'épaisseur;  ils  la  soulevèrent,  et  une  urne  à  deux 
anses,  posée  dans  l'excavation  d'une  pierre  de  taille  de  f:|^  d'équarris- 
sage  se  présenta  à  leurs  yeux.  Sûrs  d'avance  d'avoir  fait  une  bonne 
journée,  ils  se  mirent  instantanément  à  l'œuvre,  soulevèrent  l'urne, 
la  brisèrent,  et,  au  lieu  de  l'or  qu'ils  cherchaient,  ne  trouvèrent  dans 
l'intérieur  du  vase  que  des  ossements  calcinés,  les  débris  d'un  sablier 
et  un  clou  rouillé,  le  tout  entremêlé  de  cailloutis  et  de  terres  d'infil- 
tration. 

4  On  sortit  néanmoins  la  pierre  sépulcrale  qui  n'avait  pas  moins  de  0",40 
de  hauteur,  et  tout  en  fouillant  à  l'entour,  on  trouva  encore  une  demi- 
douzaine  d'urnes  ordinaires  (terre  jaunâtre),  de  plus  un  petit  vase  en  terre 
rouge  fine  et  un  plateau  de  la  même  matière;  toutes  ces  pièces  eurent  le 
sort  de  l'urne  cinéraire,  toutes  furent  brisées. 

«Informé  de  ce  qui  s'était  passé  au  Hohatienheimerpfad,  un  peu  au- 
dessus  de  la  ferme  Lemaître-Chabert,  je  me  suis  rendu  sur  les  lieux  pour 
y  recueillir  des  renseignements  et  ramasser  quelques  fragments  dispersés 
autour  de  la  tombe. 

«Quant  à  la  tombe  ou  pierre  sépulcrale  elle-même,  j'ai  obtenu  du  sieur 
Lagel  l'autorisation  de  pouvoir  l'enlever  pour  en  faire  don  à  la  Société  pour 
la  conservation  des  monuments  historiques  d'Alsace.  En  attendant  que  je 
puisse  faire  cette  transmission ,  je  soumets  à  la  commission  le  plan  exact 
des  lieux  où  notre  trouvaille  a  été  faite.» 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Beilslein. 

Le  président  donne  communication  du  rapport  suivant  de  M.  Conrath, 
architecte  de  la  ville  de  Strasbourg  : 

«Dans  les  fouilles  faites  depuis  le  mois  de  juillet  dernier  pour  la  recon- 
struction du  pont  Saint-Martin,  j'ai  recueilli  plusieurs  objets  dont  voici  la 
nomenclature  et  la  description  : 

«1°Une  amphore,  vaisseau  en  poterie  de  0'",80"  de  hauteur  et  d'une 
contenance  de  9'",75,  avec  une  anse  des  deux  côtés  et  terminé  en 
pointe.  Ces  vaisseaux  servaient  surtout  à  tenir  le  vin  en  réserve,  on  les  en- 
fonçait en  terre  ou  on  les  appuyait  simplement  à  un  mur.  On  les  transpor- 
tait en  passant  un  bâton  dans  une  courroie  fixée  aux  deux  anses.  Le  bâton 
lui-même  reposait  sur  l'épaule  de  deux  hommes. 

«L'amphore  trouvée  est  de  grandeur  moyenne  et  d'une  pureté  de  forme 
peu  commune  ;  elle  est  complète  sauf  l'extrémité  inférieure  de  la  pointe. 

n«  SÉRIE.  —  T.  n.  —  (p.-v.)  .  7 


—  98  — 

Elle  porte  à  la  partie  supérieure  entre  les  deux  anses  les  traces  d'une  assez 
longue  inscription  que  je  n'ai  pu  déchiffrer. 

((2°  Un  capis,  pot  en  poterie  avec  une  seule  anse  d'une  contenance  de 
0'",65.  En  raison  du  col  étroit  de  ce  pot,  par  lequel  le  liquide  ne  pouvait 
s'écouler  qu'en  petite  quantité  ou  goutte  à  goutte,  on  l'appelait  aussi 
guttus. 

«On  se  servait  de  ces  vases  pour  verser  le  vin  dans  la  paiera  avec  la- 
quelle on  faisait  les  libations. 

«Le  gutlus  trouvé  est  entier,  sauf  un  petit  trou,  la  forme  ne  manque 
pas  de  caractère,  mais  elle  est  commune  et  n'a  ni  la  finesse  ni  la  pureté  de 
galbe  de  l'amphore. 

«  3°  Une  patina,  un  bassin  sans  anse,  moins  creux  que  Voila,  servant  à 
la  cuisson  de  la  viande  et  des  légumes,  et  plus  profond  que  la  paiera  qui 
ressemblait  à  une  soucoupe. 

«  Ces  vases  avaient  souvent  un  couvercle  et  servaient  à  un  grand  nombre 
d'usages,  mais  principalement  aux  opérations  culinaires  et  pharmaceu- 
tiques. 

«  Ce  vase  est  entier,  mais  sa  forme  est  commune. 

«4°  Une  lampe  à  huile  en  terre  cuite  avec  une  petite  poignée  d'un  côté 
et  un  bec  de  l'autre  pour  la  mèche;  au  centre  l'orifice,  servant  à  verser 
l'huile  dans  la  lampe. 

«Cette  petite  lampe,  quoique  fendue,  est  parfaitement  intacte;  elle  est 
d'une  grande  finesse  et  se  distingue  de  l'ordinaire  par  un  petit  bord  ou 
bourrelet  destiné  à  ramener  dans  la  lampe  l'huile  qui  pouvait  sortir  par 
l'ouverture  de  la  mèche. 

«  5°  Plusieurs  débris  d'amphores  de  form.es  différentes  de  celle  restée 
entière,  deux  cols  de  capis  plus  grands  que  les  guttus,  un  guttus  sans  col, 
un  petit  pot  ébréché  d'une  grande  finesse  de  galbe  et  dont  je  n'ai  pu  trou- 
ver ni  le  nom,  ni  l'emploi,  un  morceau  d'un  vase  plat  circulaire  dont  le 
diamètre  extérieur  était  de  0"\84,  et  la  hauteur  de  0"\19.  Ce  plat  me 
paraît  trop  grand  pour  avoir  pu  être  un  cutinus,  sorte  de  vase  sur  lequel 
on  servait  des  légumes,  du  poisson  et  de  la  volaille;  il  paraît  avoir  appar- 
tenu plutôt  à  un  pellavium  ou  bassin  pour  laver  les  pieds. 

«6°  Deux  monnaies  en  cuivre,  dont  l'une  de  l'empereur  Adrien,  la  se- 
conde, plus  petite,  me  paraît  indéchiffrable;  deux  instruments  tranchants, 
auxquels  il  m'est  impossible  d'assigner  une  date  précise. 

«  7°  Trois  morceaux  de  parchemin  paraissant  avoir  appartenu  à  un  missel 
du  quatorzième  ou  quinzième  siècle. 

«Il  esl  impossilile  de  préciser  à  quelle  profondeur  ces  objels  se  Irou- 


—  99  — 

vaient,  ils  pouvaient  avoir  glissé  de  la  surface  ou  à  peu  près  dans  la  fouille, 
et  de  là  à  la  profondeur  où  on  les  a  trouvés. 

«Tous  ces  objets  sont  à  la  disposition  de  la  Société;  je  vous  prie  de 
vouloir  me  désigner  ceux  qui  vous  paraissent  assez  intéressants  pour  de- 
voir être  conservés. 

«  J'ai  indiqué  en  marge  les  croquis  aussi  exacts  que  possible  de  ces  ob- 
jets au  cinquième  de  leur  grandeur.» 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Conrath. 

Le  président  donne  communication  d'un  envoi  transmis  par  M.  le  Préfet; 
c'est  une  demande  de  concours  de  la  Société  Édtienne  qui  a  entrepris  la 
création  d'un  musée  lapidaire. 

Le  comité  passe  à  l'ordre  du  jour. 

Le  président  annonce  au  comité  qu'il  s'agit  de  s'occuper  i^  du  local  pour 
les  réunions  du  comité;  2°  de  la  fixation  du  jour  de  l'assemblée  générale. 

Quant  à  la  première  question,  il  fait  observer  que,  déjà  pour  la  séance 
actuelle,  les  travaux  entrepris  en  ce  moment  à  la  bibliothèque  ont  néces- 
sité le  déplacement  du  comité,  qui  n'a  dû  le  local  qu'il  occupe  en  ce  mo- 
ment qu'à  la  bienveillance  de  M.  le  Préfet.  De  plus,  le  nouveau  bibliothé- 
caire insiste  pour  que  la  Société  reprenne  les  livres  qu'elle  a  déposés  à  la 
bibliothèque,  pour  éviter  toute  confusion  ou  réclamation  ultérieure.  Cette 
mesure  doit,  du  reste,  être  désirée  par  le  comité  lui-même  pour  faire 
cesser  un  état  de  chose  irrégulier,  susceptible  de  porter  préjudice  aux  in- 
térêts de  la  Société.  Les  vitrines  déposées  dans  la  salle  basse  de  la  biblio- 
thèque n'ont  pas  fait  jusqu'ici  l'objet  d'aucun  pourparler.  Le  président  émet 
en  terminant  l'opinion,  que  le  local  de  la  bibliothèque  est  insuffisant,  in- 
commode, ne  présentant  pas  toutes  les  garanties  que  le  comité  doit  désirer, 
et  qu'il  est  dès  lors  urgent  de  prendre  une  décision  à  cet  égard. 

Après  une  discussion  animée,  le  comité  décide  la  nomination  d'une 
commission  pour  s'occuper  de  la  recherche  d'un  local  convenable.  ^  La 
commission  désignée  se  composera  de  M.  le  président,  de  M.  le  colonel  de 
Morlet ,  de  MM.  Morin  et  Ileitz. 

L'ordre  du  jour  appelle  la  fixation  de  l'assemblée  générale.  Le  président 
propose  le  jeudi,  10  décembre.  L'ordre  du  jour  comprendra  les  différents 
rapports  réglementaires,  la  lecture  de  divers  mémoires,  le  remplacement 
ou  la  réélection  des  membres  sortants  du  comité,  la  nomination  de  mem- 
bres honoraires,  la  distribution  et  le  rappel  de  médailles,  et  diverses  mo- 
tions d'ordre. 

Le  comité  adopte  la  journée  du  10  décembre  pour  la  tenue  de  l'assem- 
blée générale,  ainsi  que  l'ordre  du  jour  indiqué  par  le  président,  ot  décide 


—  100  — 

que,  tle  même  que  les  années  précédentes,  il  proposera  une  liste  rie  mem- 
bres pour  remplacer  ceux  dont  les  pouvoirs  ont  expiré,  ou  qui,  par  un 
motif  quelconque,  ont  cessé  de  faire  partie  de  la  Société. 

Le  président  propose,  de  concert  avec  M.  le  colonel  de  Morlet,  la  nomi- 
nation comme 'membre  honoraire  à  l'assemblée  générale  de  M.  Linden- 
schmitt, conservateur  du  musée  de  Mayence.  —  Adopté  à  l'unanimité. 

Quelques  membres  proposent  ensuite  des  médailles  et  des  rappels  de 
médailles  pour  des  personnes  qui  ont  rendu  des  services  à  la  Société. 

Ces  propositions  seront  discutées  à  la  prochaine  séance,  ainsi  que  le 
choix  d'un  membre  du  comité  en  remplacement  de  M.  le  professeur  Jung. 

M.  Ileitz  soumet  au  comité  une  pierre  sculptée  trouvée  dans  la  maison 
de  M.  Hoffmann,  propriétaire,  rue  des  Cordonniers,  et  que  M.  Scherdhn, 
professeur  au  Gymnase,  met  à  la  disposition  de  la  Société.  —  C'est  un  frag- 
ment qui  paraît  provenir  d'un  meneau  de  fenêtre;  il  représente  une  figure 
humaine  tenant  une  espèce  de  gobelet.  Le  style  accuse  le  douzième  siècle. 
C'est  donc  un  des  rares  débris  d'une  habitation  particulière  de  cette  époque 
parvenus  jusqu'à  nous. 

Remercîments  à  M.  Scherdlin.  —  Dépôt  au  musée. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  présente  six  médailles  de  la  part  de  M.  Beil- 
stein,  agent  voyer.  —  Remercîments  à  M.  Beilstein. 

M.  Straub  annonce  que  l'ancienne  église  des  dominicains  de  Guebwiller 
est  devenue  la  propriété  de  la  ville.  On  a  commencé  par  y  enlever  une 
couche  de  badigeon  et  on  a  découvert  des  figures  d'apôtres,  un  gigan- 
tesque saint  Christophe,  enfin,  une  petite  peinture  qui  paraît  représenter 
le  peintre  lui-même  offrant  son  travail  à  l'enfant  Jésus  avec  la  suscription  : 
«  dis  machte  Werlin  zum  hörnen.  » 

Le  comité  prie  M.  Straub  de  rédiger  une  note  sur  ces  découvertes. 

La  séance  est  levée  à  une  heure. 


Séance  du  Comité  du  7  décembre  I86S. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Bœrsch,  Eissen,  Ileilz,  Klotz,  Morin,  colonel  de  Morlet, 
Saum,  Siffer,  Straub. 
Le  procès-verbal  de  la  séance  précédente  est  lu  et  adopté. 


—  101  — 

Le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  suivantes  : 
A  M.  le  Préfet  du  Haut-Rhin ,  pour  le  prier  de  mandalci'  la  somme  de 
500  fr.,  volée  par  le  Conseil  général  du  Haut-Rhin,  en  faveur  de  notre 
Société,  pour  l'exercice  1863; 

AM.  Vincent,  secrétaire  de  la  commission  historique  du  Nord;  annonce 
de  l'envoi  prochain  de  notre  Bulletin ,  par  l'intermédiaire  de  M,  le  Minisire 
de  l'instruction  publique  ; 

A  M.  Scherdlin,  pour  le  remercier  de  l'envoi  d'une  pierre  sculptée  du 
douzième  siècle; 

A  M.  de  Bougerel,  inspecteur  principal  du  chemin  de  fer  de  l'Est;  prière 
de  transmettre  à  M.  Jacqmin,  directeur  de  l'exploitation  à  Paris,  une  de- 
mande de  rabais  de  40  p.  100; 

A  M.  Nicklès,  à  Benfeld;  détails  sur  la  séance  du  2  novembre  quant 
à  son  mémoire  d'Heluehis; 

A  M™^  veuve  Jung;  lettre  de  condoléance; 

A  M.  Véron-Réville,  pour  lui  demander  les  pièces  justificatives  des 
comptes  des  travaux  dans  le  Haut -Rhin,  pour  le  rapport  de  M.  Ringeisen; 

A  M.  l'architecte  de  l'arrondissement  de  Saverne,  pour  lui  demander 
une  note  sur  les  travaux  dans  les  châteaux  des  environs  de  Saverne; 

A  M.  Coste,  juge  à  Schlestadt,  au  sujet  de  sa  carte  des  seigneuries  d'Al- 
sace; 

A  M.  Paul  Risteihuber;  accusé  de  réception  d'un  mémoire  sur  la  marche 
d'Aquilée; 

A  M.  Ringeisen;  —  envoi  du  dossier  de  M.  Ortlieb,  pour  les  châteaux 
d'Eguisheim  (dépenses). 

Le  secrétaire  dépose  :  Oberbayerisches  Archiv  für  vaterländische  Ge- 
schichte von  dem  historischen  Verein  von  und  für  Oberbaijern,  t.  XXII, 
fascicules  1,  2,  3; 

M.  le  colonel  de  xMorlet:  une  carte  des  voies  romaines  qui  convergent 
sur  Mackwiller; 

M.  Heitz  :  Les  Sociétés  politiques  de  Strasbourg  pendant  les  «nnees  1790 
à  1795.  —  Extraits  de  leurs  procès-verbaux,  1  vol.; 

Schriften  der  Universität  zu  Kiel  aus  dem  Jahrgang  i863,  Band  IX. 
Kiel,  1863,  in-8"; 

Bulletin  de  la  Commission  historique  du  département  du  Nord,  t.  V,  VI 
et  VII.  Lille,  1863,  in-8°; 

Mémoires  de  la  Société  d'émulation  de  Montbéliard.  1863,  in-8°; 

Revue  des  Sociétés  savantes  des  départements ,  septembre  et  novembre 
1863,  in-8°; 


—  102  — 

licviie  archéoloijique.  Paris,  1863,  in-8"; 

Anatole  de  Barthélémy,  la  Numismatique  de  1862.  Paris,  1863,  in-8°. 

Le  président  propose,  au  nom  de  M.  Stoffel,  juge  à  Wissenilsourg,  les 
membres  suivants  : 

M.  Auguste  Stoffel,  père,  rentier  à  Schlestadt; 

M.  Jules  Stoffel,  avocat  à  Schlestadt; 

M.Léon  Stoffel,  capitaine  d'artillerie  à  la  manufacture  d'armes  deMulzig. 

Leur  admission  est  prononcée. 

Il  invite  le  comité  à  s'occuper  du  remplacement  de  M.  le  professeur 
Jung  comme  membre  du  comité.  M.  Ueussner,  professeur  au  Gymnase  et 
bibliothécaire  du  Séminaire  protestant,  ayant  réuni  tous  les  suffrages,  est 
proclamé  membre  du  comité,  sauf  ratification  de  l'assemblée  générale. 

Le  président  dépose  une  demande,  signée  de  plusieurs  membres,  à  l'effet 
de  changer  le  jour  et  l'heure  des  réunions  du  comité. 

Le  comité,  n'étant  pas  en  nombre  pour  décider  cette  question,  et  l'assen- 
timent de  l'assemblée  générale  étant  d'ailleurs  exigé  par  le  règlement,  dé- 
cide qu'elle  seia  mise  à  l'ordre  d'une  prochaine  réunion. 

M.  Heitz  soumet  au  comité  une  carte  dressée  par  feu  M.  Godefroi  Schweig- 
hoBuser,  indiquant  les  découvertes  archéologiques  faites  en  Alsace,  dont 
M.  Jung  avait  confié  la  reproduction  à  M.  Simon,  et  destinée  au  Bulletin.  Il 
demande  la  nomination  d'une  commission  pour  examiner  la  meilleure 
manière  d'utiliser  cette  carte  dans  l'intérêt  de  la  Société  et  de  la  science 
archéologique. 

M.  Saum  propose  de  commencer  par  acheter  la  pierre  qui  est  la  pro- 
priété de  M.  Simon,  lithographe.  On  décidera  ensuite  comment  elle  sera 
employée. 

Le  comité  charge  M.  Saum  de  s'aboucher  à  cet  effet  avec  M.  Simon. 

Le  président  annonce  qu'une  nouvelle  démarche  a  été  faite  auprès  de 
lui  pour  l'acquisition  du  médailler  alsatique  de  feu  Doiian.  On  offre  de  le 
céder  pour  20,000  francs,  payables  en  dix  annuités. 

Le  comité  passe  à  l'ordre  du  jour. 

M.  le  colonel  de  Moiiet  présente  un  plan  du  château  mérovingien  de 
Kirchheim,  dressé  par  M. Kast,  agent  voyer  à  Wasselonne.  Ce  travail,  fort 
bien  fait  et  fort  intéressant,  reçoit  toute  l'approbation  du  comité. 

M.  le  colonel  de  Morlet  demande  l'annulation  d'un  crédit  de  200  fr., 
voté  pour  des  travaux  au  Ringelberg,  qui  n'ont  pas  pu  être  entrepris.  Il 
soumet  ensuite  des  dessins  de  découvertes  faites  par  M.  Ringel.  Ce  sont 
des  tombes  i'ranques  sises  près  de  Mackwiller,  et  dont  l'une  a  été  creusée 
dans  un  fragment  de  frise  romaine^ 


—  103  — 

H  demande  que  ce  crédit  de  200  fr.  soil  reporté  aux  reclierclies  entre- 
prises par  M.  Ringel. 

Le  comité,  pour  la  régularité  de  la  comptabilité,  annule  dans  son  bud- 
get ledit  crédit  de  200  fr.,  et  vote  une  somme  de  300  fr.  pour  les  travaux 
de  M.  Ringel. 

Le  colonel  de  Morlet  dépose  des  objets  en  fer  trouvés  par  M.  Kast. 

Le  trésorier  demande  une  somme  de  65  fr.  à  ajouter  aux  300  fr.  votés 
pour  la  confection  d'une  vitrine,  qui  a  dû  recevoir  des  additions,  et  qui, 
par  conséquent,  a  dépassé  le  prix  fixé  dans  le  principe. 

Le  comité  vote  les  65  fr.  demandés. 

Le  trésorier  ajoute,  de  plus,  qu'il  a  présenté  le  compte  de  1802,  dans  la 
séance  du  comité  du  mois  d'avril,  avec  un  excédant  de  recette  de  6,540  fr. 
Depuis  lors,  la  perception  s'exécute  d'après  un  autre  mode.  MM.  les  rece- 
veurs généraux  et  particuliers  et  percepteurs  ont  bien  voulu  prêter  leur 
concours  gratuit,  ce  qui  a  simplifié  et  facilité  infiniment  la  rentrée  des 
cotisations.  Il  demande  à  exprimer  dans  l'assemblée  générale,  et  à  l'occa- 
sion de  son  rapport,  la  reconnaissance  que  ce  bienveillant  concours  a  pro- 
voquée au  sein  du  comité. 

Le  comité  s'associe  avec  empressement  à  cette  proposition. 

Le  président  annonce  que  M.  Coste  demande  à  mettre  la  publication  de 
ses  cartes  sous  le  patronage  de  la  Société. 

Le  comité  accorde  ce  patronage  avec  empressement. 

La  séance  est  levée  à  une  heure. 


Assemblée  générale,  le  10  décembre  1863. 

Présidence  de  M.  MIGNERET,  Préfet  du  Bas-Rhin,  Président  honoraire. 


La  réunion  se  tient  dans  la  salle  du  Conseil  général  du  départenjenl, 
mise  à  la  disposition  de  la  Société  par  M.  le  Préfet  du  Bas-Rhin. 

Dans  la  salle  d'entrée  et  dans  la  salle  des  séances  se  trouvent  exposés 
les  objets  suivants  : 

Un  calque  d'une  partie  des  fresques  de  l'église  Saint-Pierre  et  Saint-Paul 
de  Wissembourg,  par  M.  Ohleyer; 

Une  photographie  d'un  groupe  de  tombes  franques,  découvertes,  en 
1862,  à  Lorentzen,  par  M.  Ringel; 


—  104  — 

Objets  trouvés  dans  les  tombes  de  Lohr  et  Luperg  (Durstel); 

—  —  du  Lechberg; 

—  —  d'Odratzheim  (don  de  M.  Kast)  ; 

—  —  de  Hochfelden  (don  de  M.  Schnœringer)  ; 
Plan  du  palais  mérovingien  de  Kirchheim  (par  M.  Kast); 

Plans  relatifs  aux  recherches  archéologiques  de  M.  Ringel,  surtout  à 
Mackwiller; 

Grandesalle:  objets  (vases,  amphores;  feuillets  manuscrits  du  quinzième 
siècle),  trouvés  près  du  pont  Saint-Martin  à  Strasbourg  (juillet  1863), 
présentés  par  M.  Conratli; 

Reproduction  chromo-Ulhographique  des  bijoux  trouvés  à  Gerstheini  et 
à  Odratzheim  (croix,  fibules,  une  buila;  pâtes  émaillées); 

Objets  envoyés  par  M.  Nicklès,  de  Benfeld: 

Des  kelt,  etc.,  en  pierre,  bronze,  fer,  trouvés  près  de  Benfeld,  sur  l'em- 
placement de  l'ancien  Helvetus  ; 

Urnes  cinéraires,  trouvées  à  Hœrth,  par  M.  de  Schauenburg. 

A  deux  heures,  M.  Migneret,  préfet  du  Bas -Rhin,  président  honoraire, 
prend  place  au  bureau  et  déclare  la  séance  ouverte. 

A  côté  de  lui  prennent  place  au  bureau:  MM.  Braun,  président  du  Di- 
rectoire de  la  Confession  d'Augsbourg;  Delcasso,  recteur  de  l'Académie; 
Barlhe  de  Sainte-Fare,  conservateur  des  forêts,  le  président,  le  secrétaire 
et  le  trésorier  de  la  Société. 

Environ  soixante  membres  se  sont  rendus  à  cette  réunion. 

La  parole  est  donnée  à  M.  le  président  Spach ,  qui  lit  le  discours  sui- 
vant : 

«Messieurs,  je  crois  répondre  à  un  sentiment  général  de  l'assemblée, 
en  commençant  par  payer  un  tribut  de  regrets  et  d'hommages  à  la  mé- 
moire d'un  collègue  qui  nous  a  été  enlevé  d'une  manière  bien  inattendue, 
il  y  a  deux  mois.  Des  paroles  éloquentes  ont  été  prononcées  sur  la  tombe 
de  M.Jung;  et  à  la  rentrée  solennelle  de  l'Académie,  M.  le  recteur  a  retracé 
les  mérites  du  savant  et  de  l'éminent  bibliothécaire  dans  des  termes  qui 
ne  laissent,  en  vérité,  plus  rien  à  dire  après  lui.  C'est  le  digne  couronne- 
ment d'une  laborieuse  existence,  tout  entière  vouée  au  culte  de  la  science 
et  au  service  des  travailleurs  intellectuels  de  tous  les  degrés,  que  cette 
justice  rendue  à  un  noble  défunt  par  ses  pairs,  sur  les  bords  mêmes  du 
sépulcre,  qui  engloutit  la  dépouille  mortelle  seulement,  et  laisse  intacte, 
dans  le  souvenir  des  amis  et  des  parents,  la  forme  immortelle  de  l'esprit. 

«M.  Jung,  vous  ne  l'ignorez  point.  Messieurs,  a  été  l'un  des  fondateurs 
de  notre  Société.  Il  a  pris  part,  dès  le  début,  à  tous  les  travaux  du  comité; 


—  105  - 

il  a,  en  grande  partie,  élaboré  le  règlement  complémenlaire  des  statuts, 
que  nous  avons  pu  présenter  à  voire  acceptation,  en  février  1850,  deux 
mois  à  peine  après  le  premier  appel,  fait  par  M.  Migneret,  aux  sympathies 
des  Alsaciens,  pour  les  monuments  historiques  de  notre  province.  11  a 
dirigé,  dans  nos  commencements  encore  incertains,  les  premiers  pas  de 
celui  qui  a  l'honneur  de  vous  entretenir  de  cette  mémoire  chère  et  vénérée. 
Mes  collègues  et  moi,  nous  n'avons  point  de  couronnes  à  déposer  sur  la 
tombe  à  peine  fermée  du  bibliothécaire  de  la  ville  de  Strasbourg;  ce  serait 
un  hommage  tardif;  —  le  digne  héritier  de  Schœpflin  et  d'Oberlin  est 
placé  dans  une  région  meilleure,  au-dessus  de  nos  éloges;  mais  le  témoi- 
gnage que  nous  lui  rendons  est  le  cri  spontané  qui  s'échappe  de  nos 
cœurs. 

«Notre  Bullethi  porte,  dans  toutes  les  livraisons,  les  traces  de  l'active 
intervention  de  M.  Jung,  au  miheu  de  nos  débats  et  de  nos  travaux.  L'an- 
tiquité romaine,  l'épigraphie,  la  numismatique,  trouvaient  en  lui  un  intel- 
ligent et  ingénieux  interprète.  Le  jugement  critique  porté  par  M.  Jung  sur 
les  découvertes  vraies  et  controuvées  de  Rheinzabern  a  laissé  un  long 
retentissement  dans  le  monde  érudit  de  la  vallée  rhénane  et  des  pays  limi- 
trophes. Infatigable  comme  un  jeune  homme,- il  vérifiait,  jusque  dans  ces 
derniers  temps,  sur  place,  les  débris  du  passé,  et  venait,  dans  ses  impro- 
visations simples,  lucides,  convaincantes,  nous  apporlei'  le  fruit  de  ses 
promenades  et  de  ses  études  archéologiques.  Et  puis,  il  ne  se  bornait  pas 
à  l'exploitation  d'un  seul  champ;  son  savoir  multiple  l'avait  familiarisé  avec 
toutes  les  époques  de  notre  histoire  locale.  Dans  une  remarquable  mono- 
graphie sur  le  château  de  Lœwenstein ,  il  nous  a  pour  ainsi  dire  révélé  la 
sinistre  figure  de  Jean  d'Albc,  qui  restera  désormais  inscrit  dans  notre 
mémoire  comme  l'un  des  représentants  de  l'époque  désastreuse  des  cheva- 
liers-oiseaux de  proie. 

«Dans  les  derniers  temps,  M.  Jung,  bientôt  septuagénaire,  éprouvait, 
sans  vouloir  s'en  rendre  compte  peut-être,  un  déchu  de  ses  forces,  et 
sentait  les  matériaux  accumulés  autour  de  lui  à  la  bibhothèque,  déborder 
son  activité  jusque-là  incessante.  En  transférant  à  la  bibliothèque  nos 
séances  et  une  partie  de  nos  collections,  nous  avons,  je  le  sais  maintenant, 
contribué  à  grossir  ses  embarras,  qui  tenaient  surtout  à  un  manque  d'es- 
pace. Pour  ma  part,  je  lui  demande,  mentalement,  pardon  de  nos  impor- 
tunités  forcées.  L'immense  lacune,  qu'il  laisse  dans  nos  réunions,  et  en 
dehors,  qui  peut  mieux  la  sentir  et  l'apprécier  que  moi?  car  il  était  mon 
conseil  comme  celui  de  plusieurs  de  mes  collègues.  Toujours  nous  nous 
souviendrons  de  l'inépuisable  complaisance  du  bibliothécaire  cncyclopé- 


—  106  — 

dique,  qui  se  prodiguait  à  ses  amis,  et  se  donnait  même  aux  inconnus, 
pourvu  qu'il  entrevît  en  eux  des  travailleurs  sérieux.  C'est,  qu'en  effet,  la 
science  commande  cette  abnégation  et  cet  oubli  de  soi-même  que  prati- 
quait notre  ami,  très-souvent  avec  la  certitude  d'obliger  des  ingrats.  Quant 
aux  membres  du  comité,  on  n'aura  point  à  leur  reprocher  d'avoir,  en  celte 
occasion,  manqué  de  reconnaissance;  ils  l'ont  exprimée  d'une  commune 
voix,  et  se  tiennent  pour  assurés  qu'ils  trouveront  de  l'écho  dans  votre 
assemblée. 

«J'ai  donc  l'honneur,  Messieurs,  de  vous  proposer  de  vouloir  bien  con- 
signer au  procès-verbal  de  votre  réunion  de  ce  jour,  que  feu  M.  le  pro- 
fesseur André  Jung ,  bibliothécaire  de  la  ville  de  Strasbourg,  et  membre 
de  notre  comité  d' administration ,  a  bien  mérité  de  la  Société  pour  la 
conservation  des  monuments  historiques  d'Alsace,  et  qu'il  a  puissamment 
contribué  à  la  prospérité  de  notre  œuvre,  en  répondant,  dès  le  principe, 
avec  une  intelligente  activité,  aux  intentions  du  fondateur  de  notre  asso- 
ciation. 

«Vous  aurez,  Messieurs,  à  vous  prononcer,  dans  le  courant  de  cette 
séance,  sur  l'admission  définitive  des  membres  que  nous  avons  préalable- 
ment admis  au  sein  du  comité,  pour  essayer  de  remplir  les  lacunes  lais- 
sées par  des  circonstances  que  relate  l'ordre  du  jour  imprimé.  Nous  pro- 
posons à  votre  choix  : 

«1°  M.  le  curé  Siffer,  qui,  depuis  la  fondation  de  notre  Société,  a  fait 
preuve  de  bonne  volonté  pour  nous,  en  nous  communiquant  des  mémoires 
sur  les  antiquités  romaines  de  la  Basse-Alsace; 

«2°  M.  Saum,  qui,  à  plusieurs  reprises,  a  doté  nos  archives  de  notices 
sur  les  antiquités  gallo-romaines  et  les  châteaux  des  Vosges; 

<i^^ M.Beussner,  gendre  de  feu  M.Jung,  son  successeur  dans  une  partie 
de  la  bibhothèque,  et  justement  apprécié  dans  le  monde  savant  comme 
philologue,  par  un  mémoire  couronné. 

«  Gomme  les  années  précédentes,  quelques  noms  auront  à  subir  l'épreuve 
de  votre  suffrage,  et  votre  président  doit  déposer  entre  vos  mains  son 
mandat  annuel.  —  Mes  collègues  et  moi,  nous  attendons  avec  confiance 
votre  verdict,  qui  devra  aussi  se  baser  sur  l'appréciation  des  rapports  et 
des  comptes  rendus  que  nous  allons  tout  à  l'heure  vous  soumettre. 

«Quant  à  moi.  Messieurs,  je  n'ai  qu'à  renouveler  ma  profession  de  foi, 
faite  au  sein  de  votre  assemblée,  il  y  a  sept  ou  huit  ans  déjà.  Mon  con- 
cours demeure  offert  à  la  Société,  quelque  place  qu'elle  juge  convenable 
de  m'assigner  au  nombre  de  ses  travailleurs.  J'ai  eu  le  bonheur  jusqu'ici 
de  ne  point  manquer  au  moins  à  la  partie  matérielle  de  mes  fonctions  : 


—   107  — 

sur  120  réunions,  tenues  depuis  décembre  1855  jusqu'à  ce  Jour,  j'ai  pu 
assister  à  H8;  mes  devoirs  officiels,  qui  me  retiennent  à  peu  près  en  per- 
manence à  Strasbourg,  ont  eu,  pour  la  Société,  l'avantage  de  lui  offrir 
un  point  stable  et  central;  mais  l'assiduité  n'est  que  le  devoir  élémentaire 
d'un  président;  et  personne  mieux  que  moi  n'estime  à  toute  leur  valeur 
le  concours  intelligent,  zélé,  que  j'ai  trouvé  dans  tous  mes  collègues,  sans 
lesquels  mon  action  eût  été  frappée  de  stérilité.  Nous  ne  sommes  rien  ou 
peu  de  chose  isolément;  serrés  les  uns  contre  les  autres,  nous  acquérons 
peut-être  quelque  valeur. 

«Vous  me  permettrez  de  rappeler  ici  que  de  nouvelles  relations  ont  été 
établies  avec  plusieurs  sociétés  archéologiques,  françaises  et  étrangères. 
Et,  à  ce  propos,  je  prends  la  liberté  de  proposer,  comme  membre  hono- 
raire à  inscrire  dans  notre  liste,  M.  Lindenschmitt,  conservateur  du  beau 
musée  de  Mayence,  et  secrétaire  de  la  Société  archéologique  de  cette  ville. 
Notre  collègue,  M.  le  colonel  de  Morlet,  a  déjà  entamé  des  rapports  offi- 
cieux avec  ce  savant  archéologue,  qui  promet  à  notre  musée  naissant,  de 
précieux  moulages  d'objets  antiques. 

((Dès  le  mois  de  février  1857,  nous  avons  admis  comme  membre  hono- 
raire, M.  WicUmann,  le  président  de  cette  même  société  de  Mayence.  Ceux 
de  nos  collègues  qui  ont  visité  les  musées  de  la  vallée  rhénane,  n'ont  eu 
qu'à  se  féliciter  de  trouver,  dans  les  cités  allemandes  des  bords  du  Rhin, 
des  liens  déjà  formés,  qui  leur  donnaient  immédiatement  un  droit  d'ad- 
mission et  de  confraternité  dans  ce  monde  savant. 

«Nous  ne  perdons  point  de  vue  l'établissement  définitif  d'un  musée. 
Vous  savez  tous,  Messieurs,  combien  de  difficultés  s'opposent,  dans  notre 
ville,  à  toute  entreprise  de  ce  genre,  combien  les  localités  sont  rares  et 
peu  appropriées  à  un  pareil  emploi.  En  attendant  que  M.  le  Maire  puisse 
réaliser  ses  intentions,  et  abriter  dans  un  édifice  spécial  la  collection  des 
tableaux  et  celle  des  antiques,  nous  aviserons  à  nous  caser  aussi  conve- 
nablement que  possible,  et  à  réunir  nos  livres,  nos  armoires,  nos  vitrines, 
qui  maintenant  sont  placés,  les  uns  aux  Archives,  les  autres  à  la  Biblio- 
thèque. 

«Ceci  me  conduit  à  redire  (jue  nos  collections  se  sont  considérablement 
augmentées,  dans  ces  derniers  temps,  grâce  aux  découvertes  importantes 
de  sépultures  antiques  faites  sur  plusieurs  points  du  département ,  et  dont 
nos  procès -verbaux  ont  rendu  compte  en  temps  utile.  Une  partie  des  mé- 
dailles qui  ont  été  décernées  celte  année  et  les  années  dernières,  se  rap- 
portent à  ces  intéressantes  fouilles.  Je  n'y  reviens  point  ici,  pour  échapper 
aux  redites;  vous  vous  joindrez  à  nous,   Messieurs,  pour  remercier  les 


—  108  — 

liunirnes  zcléb  qui  oui  oauvé  de  la  deslrucliun  ou  do  la  veiilu  les  ubjels 
préeieux  auxquels  je  fais  allusion. 

«Je  ne  puis,  dans  ce  court  aperçu,  rendre  justice  à  chacun;  mais  je 
dois  rappeler  en  première  ligne  les  travaux  incessants  de  M.  le  pasteur 
Ringel,  ceux  de  M.  Nicklès,  ceux  de  M.  Kast.  Vous  en  trouvez  la  preuve 
patente,  sous  vos  yeux,  à  l'entrée  même  de  la  salle  de  nos  réunions. 

((Indépendamment  de  l'antiquité  celtique,  romaine  ou  franque,  le  moyen 
âge  aussi  a  trouvé  des  travailleurs  qui  ont  mis  à  jour  ses  trésors  enfouis 
ou  oblitérés;  les  travaux  sur  les  fresques  de  l'église  de  Wissembourg,  ceux 
dans  l'église  de  Walbourg  ont  attiré  déjà,  je  pense,  votre  attention. 

«Dans  le  Haut-Rhin,  nos  collègues  du  comité  de  Colraar  se  réunissent 
fréquemment,  pour  donner  une  impulsion  incessante  aux  travaux  de  con- 
servation ,  de  découvertes  et  d'érudition.  Notre  Rullelin  vous  familiarise 
avec  leurs  travaux,  auxquels  nous  applaudissons  de  bon  cœur,  convaincus 
(jue  cette  émulation,  sans  nuire  à  notre  confraternité  et  à  notre  action 
unitaire,  tournera  au  profit  du  but  que  la  Société  poursuit. 

«Cependant,  Messieurs,  veuillez  bien  vous  dire  que  les  comités  ne  sont 
(]ue  des  ouvriers  un  peu  plus  fréquemment  en  vue  et  à  l'œuvre  que  les 
autres  membres  de  l'association.  Chacun  de  vous  peut  contribuer,  pour 
une  bonne  part,  à  notre  réussite;  et  notre  prospérité  future  dépendra, 
finalement,  toujours  du  plus  ou  moins  de  sympathie  que  nous  rencontre- 
rons parmi  vous.  Votre  concours  matériel,  moral  et  intellectuel,  constitue 
la  sève  de  l'arbre  que  nous  avons  essayé  de  planter;  sans  vous,  il  languira; 
avec  vous  et  par  vous,  il  jettera  des  racines  de  plus  en  plus  solides  et  se 
couronnei'a  d'un  feuillage  touffu.  Ne  donnez  point,  je  vous  prie,  un  démenti 
à  mes  vœux  et  à  mes  espérances;  et  que  chacun  de  vous,  Messieurs,  con- 
sente à  recruter  des  adhésions  parmi  nos  concitoyens  de  tous  les  points 
de  l'Alsace.» 

Ce  discours  est  couvert  d'applaudissements  et  ses  conclusions  sont  volées 
par  acclamation. 

La  parole  est  donnée  ensuite  à  M.  Eissen,  secrétaire,  pour  le  rapport  sur 
les  travaux  littéraires  et  graphiques  delà  Société  pendant  l'année  1863. 

«^Messieurs,  l'année  qui  vient  de  s'écouler  a  apporté  des  matériaux  nom- 
breux et  remarquables  à  l'édifice  que  nous  élevons  ensemble  à  la  mémoire 
de  nos  prédécesseurs  dans  ces  régions. 

«L'ouverture  des  nouvelles  voies  ferrées,  d'autres  travaux  entrepris 
dans  un  but  archéologique  spécial,  ont  donné  lieu  à  une  foule  de  décou- 
vertes précieuses,  et  ont  motivé,  soit  de  la  part  de  leurs  auteurs,  soit  de 
la  part  de  plusieurs  membres  de  la  Société,  la  rédaction  de  notes  et  de 


—  100  — 

mémoires  du  plus  haut  intérêt.  D'autres  travaux  élaborés  dans  le  silence 
du  cabinet  et  basés  sur  les  renseignemenis  fournis  par  des  cbartes  ou  des 
documents  tirés  de  la  poussière  et  de  l'oubli  sont  éoalenienl  venus  aug- 
menter nos  richesses  littéraires. 

«La  collaboration  si  zélée  de  MM.  les  agents  voyers  a  peuplé  nos  cartons 
d'un  certain  nombre  de  plans  et  de  dessins  entièrement  inédits,  et  exécutés 
avec  la  perfection  qui  est  une  des  nombreuses  qualités  de  ces  utiles  et 
modestes  fonctionnaires,  et  le  Comité  a  souvent  eu  l'occasion  de  leur 
adresser  ses  plus  chaleureux  remercîments.  Vous  trouverez  des  preuves 
nombreuses  de  mon  dire  dans  les  livraisons  du  Bulletin  en  cours  de  pu- 
blication, 

«Nos  relations  avec  des  Sociétés  poursuivant  le  même  but  se  sont  encore 
étendues,  et  nous  avons  à  ajouter  aux  Sociétés  avec  lesquelles  nous  échan- 
geons nos  publications,  la  Société  historique  de  Berne ,  la  Société  juras- 
sienne, de  Porenti'uy,  la  Commission  historique  du  Nord,  à  Lille,  et  la 
Société  historique  de  Styrie,  à  Gratz. 

«Je  vais  avoir  l'honneur.  Messieurs,  de  dérouler  devant  vous  l'énumé- 
ration  des  travaux  littéraires  et  graphiques  accomplis.  Vos  moments  sont 
précieux,  et  je  m'abstiendrai  de  tout  développement  et  de  luute  considé- 
ration générale,  persuadé  que  vous  les  ferez  beaucoup  mieux  (jue  moi 
dans  votre  esprit. 

PÉRIODE    G.\LLO-ROMAINE    ET    TEMPS   ANTÉRIEURS. 

i<  Maximilien  de  Ring.  Mémoire  sur  les  fouilles  entreprises  par  lui  dans 
les  tombelles  celtiques  de  la  forêt  communale  de  Dessenheim,  avec  dessins 
dans  le  texte. 

«  Coste.  Lettre  et  plan  des  fouilles  faites  à  Grussenheim  et  qui  déter- 
minent l'auteur  à  placer  près  de  cette  commune  l'antique  x\rgentovaria. 

(i.e.  F.  Oppermann.  Notice  sur  quelques  antiquités  de  la  montagne  de 
Sainte-Odile  et  des  environs. 

«  Colonel  de  Morlet.  Note  sur  les  tumuli  de  la  forêt  de  Br-imath,  avec  une 
planche  lithographiée. 

•d-Id.  Notice  sur  quelques  monuments  de  l'époque  gallo-romaine,  trouvés 
sur  les  sommités  des  Vosges,  près  de  Saverne,  avec  des  planches  et  des 
dessins  dans  le  texte. 

«/d.  Note  sur  des  objets  d'antiquité  trouvés  à  Gerstheim. 

«Siffer.  Note  sur  des  sépultures  découvertes,  en  1(S55,  au  bord  de  In 
forêt  dite  Bmhherg,  près  de  Zinswiller. 


__  410  — 

«  Si/fer.  Mémoire  sur  la  grande  voie  romaine  de  Brumalh  à  Seltz. 

(ild.  Note  sm'  le  monmiient  romain  de  Gerslheim,  trouvé  du  temps  de 
Schœpflin,  et  déposé  à  la  bibliothèque  de  Strasbourg.  —  Note  sur  une  i;///a 
romaine  à  Oberbronn. 

«L.  LevrauU.  Note  sur  les  découvertes  d'antiquités  faites  à  Obernai. 

«  Jung.  Note  sur  une  ornementation  complète  gallo-romaine  d'un  sque- 
lette trouvé  à  Lingolsheim. 

«A'.  Nicklês.  Mémoire  sur  des  objets  trouvés  à  Gerstheim,  sur  la  localité 
de  Gerslheim  et  sur  Schwanau. 

((Baron  de  Schauenburg.  Note  sur  un  camp  romain  présumé  sur  la 
lisière  de  la  forêt  de  Haguenau. 

«L.  BenoU.  Mémoire  sur  l'image  d'une  divinité  inconnue. 

(<  BeUslein.  Petite  notice  sur  une  sépulture  romaine,  trouvée  près  de 
Krautweiler,  avec  dessin. 

((ConratJi.  Rapport  sur  des  objets  d'antiquité  romaine,  trouvés  dans 
rill,  au  pont  Saint-Martin,  à  Strasbourg. 

«.Ringel.  Dessins  de  constructions  romaines  trouvées  à  Saar-Union. 

MOYEN  AGE. 

«  Spach.  Lettre  d'indulgence  de  dix-sept  cardinaux,  en  faveur  des  églises 
de  Saint-Martin  et  de  Saint -Arbogast,  à  Surbourg,  avec  fac-similé  d'une 
partie  du  document. 

«  Id.  Mémoire  et  documents  sur  une  excommunication  de  la  ville  de  Mul- 
house au  treizième  siècle. 

«  Sabourin  de  Nanlon.  Rapport  sur  les  tableaux  et  les  autels  de  Fol- 
gensburg. 

y  ïd.  Mémoire  sur  la  statue  de  sainte  Apolhnaire  à  Ober-Michelbach. 

(S.  Ring  eisen.  Note  sur  l'importance  des  châteaux  d'Eguisheim. 

<i.Huot.  Mémoire  sur  les  maisons  prébendaires  du  chapitre  de  Colmar 
au  quatorzième  siècle. 

(s-Brièle.  Deux  chartes  originales,  l'une  de  1276,  acte  de  donation  d'une 
censé  (Hof),  dite  de  Sainte -Adélaïde,  à  Steinbrunn,  au  profit  de  l'abbaye 
de  Lucelle;  l'autre  de  1472,  sentence  arbitrale  du  magistrat  de  Strasbourg 
contre  Henri  Beger  de  Geispolsheim. 

<i  Si  ff  er.  Note  sur  l'ancienne  commanderie  leutonique  de  Dhan,  près  de 
Zinswiller. 

c(  Fries.  Églises  de  Sainte-Madeleine,  de  Saint-Louis  et  de  Sainte-Cathe- 
rine à  Strasbourg,  avec  dessins  dans  le  texte. 


—  111  — 

«  Gyss.  Mémoire  sur  l'hôtel  de  ville  d'Obernai. 

(i^lngold.  Notice  sur  le  château  d'Engelburg  à  Thann. 

aMossmann.  Traduction  d'une  lettre  de  Fr.  Sigismond  à  l'abhé  de  Mur- 
bach,  co)ilenant  la  description  raisonnée  d'antiques  tapisseries  que  possé- 
dait ce  monastère. 

aBardîj.  Note  sur  l'église  de  Bermont. 

«  Strauh.  Note  sur  l'église  de  Walburg. 

a  Krämer.  Mémoire  sur  le  château  de  Girbaden. 

aZimberlin.  Documents  sur  le  château  de  Landskron. 

«  Colonel  de  Morlei.  Note  sur  des  tombeaux  francs  à  Odratzheim. 

«  Ortlieb.  Rapport  sur  les  travaux  exécutés  au  château  supérieur  d'Éguis- 
heim, 

«  Ohleyer.  Rapport  sur  les  travaux  de  recherche  de  peintures  murales 
et  de  déblais  à  l'église  de  Wissembourg. 

«  Guerher.  Rapport  fait  au  nom  de  la  commission  de  la  Société  sur  les 
mêmes  travaux. 

d-Morin.  Avis  sur  les  peintures  murales  à  l'éghse  d'Altorf. 

«.Saum.  Note  sur  un  certain  nombre  de  ruines  de  châteaux  à  l'extrémité 
septentrionale  du  Bas-Rhin. 

<iKast.  Note  sur  des  tombes  franques  à  Odratzheim;  don  fait  à  la  So- 
ciété d'une  précieuse  fibule. 

ce  Dessins  intéressants  de  tombes  de  la  même  époque  à  Wasselonne. 

«Fouilles  à  Kirchheim  pour  relever  soigneusement  les  traces  du  palais 
des  rois  mérovingiens,  palais  de  Dagobert,  détruit  depuis  plus  de  dix 
siècles,  et  dont  Beatus  Rhenanus  a  encore  vu  d'imposantes  ruines,  car 
il  dit  au  livre  III  (p.  315)  de  ses  Rer.  German.  :  aVix  ullo  Elsatiœ  loco 
majora  antiquitatls  extare  vesiigia.  Prominent  adhuc,  inter  minas  altis- 
simi  muri,  turrium  instar. i>  M.  Kast  a  réussi  à  déterminer  l'enceinte  com- 
plète de  ce  palais,  qui  remonte  au  septième  siècle  de  notre  ère,  et  à  en 
dresser  un  plan  exact;  il  a  même  pu  établir,  par  des  fouilles  intelHgentes 
et  laborieuses,  la  manière  dont  les  fondations  étaient  assises. 

<■<  Ringel.  A  enrichi  nos  collections  de  dessins  fort  curieux  de  tombes 
franques  trouvées  à  Mackwiller,  dont  l'une  est  creusée  dans  un  fragment 
de  frise  de  l'époque  romaine. 

«Il  est  juste  de  mentionner  ici  que  l'infatigable  activité  de  M.  le  pasteur 
Ringel  a  valu  à  la  Société  une  subvention  du  Gouvernement,  sans  même 
qu'elle  en  eût  fait  la  demande. 


—  112  — 

RENAISSANCE    ET    TEMPS   POSTÉRIEURS. 

«  Müller.  Noie  sur  des  armoiries  sculptées  Irouvées  h  Beiifeld,  et  prove- 
nant de  l'évêque  de  Strasbourg  Li'Opold  (16(17  à  1025),  ou  Léopold-(lnil- 
Inume  (1025-1 002),  les  deux  princes  de  la  maison  d'Autriche. 

aSabonrin  de  Nantou.  Mémoire  sur  Iluningue. 

EMBRASSANT    DIVERSES    PÉRIODES. 

c(  Thilloy.  Mémoire  sur  Herbitzheim. 

«Vous  le  voyez,  Messieurs,  le  zèle  ne  s'est  point  arrêté  à  la  limite  ni  de 
l'une  ni  de  l'autre  des  deux  divisions  administratives  de  l'Alsace;  l'émula- 
lion  a  été  la  même  au  nord  comme  au  midi,  et  l'année  qui  va  se  terminer 
a  donné  ainsi  une  consécration  éclatante  aux  paroles  si  pénétrées  que  nous 
adressa  ici  même,  il  y  a  un  an,  l'éminent  magistrat,  notre  président  hono- 
raire, lorsqu'il  nous  exhorta  à  ne  pas  oublier  que  l'Alsace  remonte  plus 
haut  (|ue  Mulhouse  et  descend  plus  bas  que  Strasbourg.  Les  membres  de 
la  Société  alsatique  ont  continué  à  se  tendre  une  main  fraternelle  d'une 
des  extrémités  à  l'autre  de  leur  beau  pays,  au  plus  grand  profit  de  l'har- 
monie qui  doit  régner  parmi  eux,  au  plus  grand  profit  de  la  gloire  et  de 
l'utilité  de  leurs  travaux.» 

M.  le  Préfet  procède,  après  la  lecture  de  ce  lapport,  à  la  distribution 
des  médailles  votées  par  le  comité.  Il  se  félicite,  en  quelques  mots  partis 
du  cœur,  de  la  prospérité  de  la  Société,  des  sympathies  qu'elle  rencontre 
partout,  et  du  concours  empressé  que  lui  prêtent  de  simples  amateurs, 
ainsi  que  les  fonctionnaires  des  diverses  branches  administratives.  Des 
paroles  aussi  flatteuses  qu'encourageantes  accompagnent  la  remise  de 
chaque  médaille  aux  divers  lauréats. 

Ce  sont:  M. Krämer,  curé  à  Niederhaslach,  médaille  d'argent;  M.  Ohleyer, 
professeur  au  collège  de  Wissembourg,  id.;  M.  Kast,  agent  voyer  à  Wasse- 
lonne,  id.;  MM.  Huss,  Bauer,  Dick,  gardes  forestiers  à  Ochsenstein,  médailles 
de  bronze.  —  Rappel  de  médaille  en  vermeil  et  en  argent:  M.  le  pasteur 
Bingel,  à  Diemeringen,  et  M.  Beilstein,  agent  voyer  à  Brumalh. 

M.  Klotz,  trésorier,  présente  le  rapport  financier  suivant: 


—  118  — 

Exposé  des  Recettes  et  des  Dépenses  de  l'exercice  1862. 

Section  V^.  —  Recettes. 

Chapitre  I* 

ALLOCATIONS  DlSlTAILS. 

du  budget. 

Arl.  1*^''.  Le  reliquat  de  l'e.xer- 

cice  précédeiil,  esîimé  à G,000     î»*^ 

se  compose  : 

1"  Du  solde  du  compte  précé- 
dent   5,774^60«= 

2°  D'un  lesle  du  compte  de 
IIoh-Kœnigsbourg 13  50 


5,788 '"lO'^ 


Chapitre  II. 

Art.  2.  Le  produit  des  cotisa- 
tions de  l'année,  prévu  pour  400 

sociétaires,  à 4,000     » 

s'est  élevé  pour 

275  sociétaires  du  Bas-Rhin, 

156         )i  du  Haut-Rhin, 

30         »  de  Paris, 

14         ))  dediversendroits, 

475'       >^  au  total  de.  .  .  .  4,750     » 

En  y  ajoutant  pour  dix  paye- 
ments afférents  à  l'année  18fi1    .  100     ') 

Ensemble  ....  4,850     > 

Chapitre  III. 

Art.  3.  Les  subventions  émar- 
gées à 1,000     » 

ont  été  : 

A  reporter 11,000'"  »'  1 0.638  •■  10*^ 

1.  Coupons  détachés  du  registre 490 

némissions  et  exercices 11 

Sur  l'exercice  précédent 10 

•Jl 
Nombre  égal 475 

]]•  SÉRIB.  —  T.  II.  —  (H.-V.  1  ° 


—  114  — 

ALLOCATIONS  DÉTAILS. 

du  budget. 

Report 11,000^   »'^ 

1°  Du  ministère  d'État 300     » 

2*^  Du  ministère  de  l'instruction 
publique 400     > 

S^  Du  département  du   Bas- 
Rhin   500     » 

4°  Du  département  du  Haut- 
Rhin 2,000     ^) 

Ensemble  .... 

Total  des  recettes  prévues .  .  .     11,000     >; 

Total  des  recettes  effectuées   . 

Soit  un  excédant  sur  les  prévi- 
sions de 2,838  10 

Section  2^^.  —  Dépenses. 

Chapitre  I. 

Art.  I^"".  Allocation  pour  fouilles, 
gratifications,  transport  de  fragments 
et  achat  de  médailles 1,500^   »*' 

Les  dépenses  ont  été  : 

1°  hidemnité  à  M.  le  pasteur  Ringel 
à  Diemeringen 500^   »' 

2°  A  MM.  de  Morlet  et  Morin,  pour 
transport  de  chapiteaux  et  pierres  tom- 
bales    131  85 

3"  A  M.  Oppermann,  pour  frais  de 
fouilles  aux  monuments  druidiques    .  18  10 

4°  Au  garde  des  ruines  de  Hoh- 
Kœnigsbourg 20     -> 

5°  Acquisition  de  médailles  (extrait 
de  la  note  Berger-Levrault) 43  70 

6°  Au  sieur  Müller,  graveur,  pour 
les  noms  mis  sur  les  médailles,  note 
de  18G1 96  70 

7°  Au  même,  sa  note  de  1862  .  .  .  44  40 

A  reporter 1,500^   »"^ 


10,638^10*^ 


3,200 


13,838  10 


854^75*= 
854^75'= 


—  115  — 

ALLOCATIONS       DÉTAILS.         TOTAUX. 

du  budget. 

'Report 1,500^  ))*-'  854*75' 

Chapitre  11. 

Art.  2.  Frais  de  publication  du  Bul- 
letin de  la  Société 1,500     « 

Bulletin  de  la  Société 2,800     » 

Dépenses  faites  : 

1°  Pour  le  répertoire  des  premiers 
volumes 143  20 

2"  11^  série,  tome  F'",  1''^  livraison  .  1,413  75 

2*^  livraison 964  45 

2,521  40 

Art.  3.  Frais  de  bureaux 500     » 

Fournitures  diverses 120  70 

Remboursement  de  frais  à  M.  Grün 
(pour  circulaires) 20     » 

Affranchissements  de  la  correspon- 
dance et  des  bulletins  du  président .  .  155  25 

Id.  du  secrétaire 6  55 

Ici.  du  trésorier 1 1  80 

Gratifications  : 

Au  sieur  Fastinger  des  archives  .  .  100     » 

Au  gardien  de  la  bibliothèque   ...  30     » 

Aux  garçons  de  bureaux  de  la  Pré- 
fecture    30     » 

480  30 

Art.  4.  Frais  de  perception 100     » 

Au  collecteur  de  la  ville v  .  50     » 

50  » 
Art.  5.  Frais  de  déplacement ....       100     » 

11  n'y  en  a  pas  eu »       » 

Art.  6.  Frais  de  reliure  et  de  mobilier       100     » 

Il  a  été  payé  pour  une  armoire  .     ,  51  50 

51  50 


A  reporter 6,600'"  »*=  3,957  ^95" 


116  - 


ALLOCATIONS 

(lu  budget. 


Total  des  dépenses  prévues 1,100 


Soil  une  diminution  sur  les  prévi- 
sions de 2,808  30 


7fQrvC 


nepori 0,000  •■   »'■  fi,057'^9r. 

Chapitre  111. 

Art.  7.  Ti'ovaux  de  conservation 
émargés  à  la  somme  de 3,500     » 

Sommes  payées: 

1°  A  M.  Ringeisen,  pour  le  château 
de  Hoh-Kœnisbourg 1,200     » 

Id.  de  Landsberg 300     » 

2°  A  M.  Fürst,  pour  les  deux  châ- 
teaux de  Greiffenstein  et  Geroldseck  .  339  40 

3"  A  M.  Morin,  pour  travaux  de  con- 
servation et  de  badigeonnage  aux  égli- 
ses d'Avolsheim 124  30 

4°  A  M.  Straub,  pour  déblais  et 
consolidations  à  l'église  de  Hunawyhr  300     )i 

5''  A  M.  Ringel,  pour  les  fouilles  de 
Mackwiller,  Lorentzen,  etc 800     > 

C)^  A  M.  Rosenstiel,  pour  complé- 
ment de  travaux  au  château  de  Saint- 
Ulrich 170  05 

7"  A  M.  Ohleyer,  pour  travaux  de 
recherches  et  de  déhadigeonnage  à 
l'église  Saint-Paul  de  Wissembourg.  .  100    ,» 


3,333  75 


Total  des  dépenses  effectuées  .  .  .  7,291  70 


RÉSUMK. 

Les  recettes  effectuées  ont  été  de 13,838  10 

Les  dépenses  se  sont  élevées  à 7,291  70 


D'où  résulte  un  excédant  de  recettes  de 6,546  40 

(111  31  mars  1803. 


—  117  — 

Ce  coniple  rendu  clai)t  un  peu  aueieu,  vu  (ju'il  n'a  lappuiL  qu'à  l'exercice 
clos  de  1862  airêlé  au  31  mais  dernier,  il  ne  sera  peut-être  pas  sans  in- 
térêt, Messieurs,  d'y  ajouter,  à  titre  de  renseignement,  un  aperçu  som- 
maire de  nos  opérations  en  '186o,  et  de  vous  faire  connaître  la  situation 
financière  de  la  Société  à  la  veille  même  de  votre  réunion. 

Je  commence  par  les  recettes  : 

Solde  du  compte  de  1862 6,546*40*^ 

Recettes  nouvelles  : 

Cotisations  effectuées  (elles  ne  le  sont  pas  en- 
core toutes) 4,520  '    »  '^ 

Subvention  du  ministère  de  l'instruction  pu- 
blique   ....        400     » 

Subvention  du  département  du  Haut-Rhin  .  .        500     » 

Reliquat  d'un  compte  de  1862  et  divers  ...        183  20 

Total  des  recettes  nouvelles  au  9  décembre  .  5,603  20 

Total  général  des  recettes      ...  12,149  60 

Dépenses  : 

Frais  de  publication  du  Bulletin 2,920  70 

Dépenses  de  conservations,  fouilles,-  etc.,  recherches  votées 
par  le  comité  : 

Fouilles  au  tertre  d'Ufholtz 150     » 

Travaux  à  la  chapelle  du  Bruderhaus    ....  78     » 

Débadigeonnage  pour  recherche  et  conser- 
vation de  peintures  murales  et  fouilles  à  l'église 
Saint-Pierre  et  Saint-Paul  de  Wissembourg,  en  v 

plusieurs  fois 1,000     " 

Recherches,  fouilles  et  travaux  à  Mackwillei' 
et  environs 600     >- 

Travaux  au  château  d'Eguisheim,  supplément       500     » 

Travaux  aux  châteaux  de  Hoh-Landsberg  et 
Plixbourg 500     » 

Travaux  à  l'Engelsbourg  près  Tliann 300     » 

Travaux  au  château  de  Hoh-Kœnigsbourg , 
pour  portes 100     » 

Travaux  au  petit  château  derrière  le  précédent       200     » 
Travaux  au  château  de  P^ranckenbourg  .  .  .       200     » 

A  reporter 3,628     ö*^       2,920^  70  «^ 


—  118  — 

Beport 3,628  f  »'^       2,920^70'^ 

Recherches  à  Gerslheim 400  » 

Replacement  de  la  custode  ancienne  à  la  place 

primitive  dans  l'église  de  Walbourg 100  » 

4,428     » 
Dépenses  pour  transport  d'antiquités  an  musée  de  la  biblio- 
thèque de  la  ville,  confeclion  de  plaques  d'inscription  et  d'une  ^f 

vitrine  pour  les  petits  objets 467  90 

Frais  de  bureau,  d'employés,  de  gardiens;  poris,  affran-  A 

chissements,  reliures  et  autres  menues  dépenses 516  4O 

Total  des  dépenses  au  9  décembre 8,333     » 

Encaisse  ....      3,816  60 

Somme  égale  aux  recettes  ....    12,149  60 

De  ces  deux  résultats,  celui  de  l'exercice  clos  comme  celui  de  l'exercice 
courant,  il  ressort  une  situation  que  l'on  peut  appeler  prospère,  vu  qu'elle 
nous  fait  passer  d'un  exercice  à  l'autre  avec  un  fonds  de  réserve  et  de  rou- 
lement; cette  situation  m'a  permis  d'inaugurer  l'année  1863  par  le  dépôt 
en  compte  courant,  à  la  Recette  générale,  des  sommes  dont  l'emploi 
n'est  pas  immédiat  et  qui  dès  lors  ne  resteront  pas  improduclives. 

Je  dois  encore  porter  à  la  connaissance  de  l'assemblée  une  autre  amé- 
lioration datant  également  de  cette  année  :  elle  concerne  la  perception  des 
cotisations  de  ceux  de  nos  sociétaires  des  départements  du  Haut-  et  du 
Bas-Rhin,  habitant  hors  de  Strasbourg  dans  plus  de  quatre-vingts  locahtés 
différentes,  que  je  dois  à  l'obligeant  concours  de  MM.  les  receveurs  gé- 
néraux et  particuliers  et  à  la  coopération  désintéressée  de  MM.  les  percep- 
teurs de  pouvoir  réaliser  en  temps  opportun  et  sans  aucuns  frais. 

L'assemblée  générale  appréciera  les  avantages  de  cette  excellente  me- 
sure, que  nous  devons  à  l'initiative  de  M.  Durrieu,  receveur  général  de 
notre  département;  elle  consentira,  j'ose  le  croire,  à  rehausser  par  son 
suffrage  les  remercîments  que  je  lui  exprime  pour  un  si  inappréciable  con- 
cours. 

L'assemblée  applaudit  le  résultat  satisfaisant  démontré  par  ce  rapport  et 
vote,  par  acclamation,  les  remercîments  proposés  par  le  trésorier. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  propose  de  voter  des  remercîments  au 
trésorier. —  Acclamation. 

M.  Ringeisen  présente  le  rapport  suivant  sur  les  travaux  techniques 
accomplis  pendant  la  campagne  de  1863: 


—  119  — 

«Messieurs,  vous  savez  avec  quelle  sollicitude  votre  comité  cherche  à 
répondre  à  la  mission  qui  lui  est  dévolue,  de  veiller  à  la  conservation  des 
monuments  historiques  répandus  sur  notre  sol  alsacien.  Leur  nombre  est 
considérable,  les  besoins  sont  incontestés;  et  à  voir  cette  situation  il 
semblerait  qu'il  n'eût  d'autres  embarras  que  de  résister  aux  demandes 
qui  lui  sont  faites  à  cet  effet,  afin  de  rester  dans  les  limites  des  ressources. 

«Il  n'en  est  pas  ainsi  cependant.  Si  jusqu'à  ce  jour  des  besoins  ont  été 
signalés,  le  manque  de  concours  pour  leur  exécution  s'est  souvent  fait 
sentir.  Il  ne  faut  pas  trop  s'en  étonner.  Messieurs.  Lorsqu'on  pense  aux 
obstacles  de  toute  nature  qu'on  éprouve  à  organiser  des  chantiers;  à  les 
surveiller;  à  s'attaquer  avec  les  moyens  les  plus  primitifs,  aux  difficultés 
d'exécution  les  plus  ardues,  les  plus  en  dehors  de  nos  habitudes  modernes; 
on  comprend  qu'il  soit  rare  de  trouver  des  hommes  qui  réunissent  aux 
connaissances  spéciales,  la  bonne  volonté  et  le  temps  nécessaires  pour 
commencer  et  mener  à  bonne  fin  des  entreprises  de  ce  genre. 

«Vous  avez  remarqué,  sans  doute,  que  les  travaux  exécutés  jusqu'à  ce 
jour,  l'ont  été  priicipalement  dans  le  Bas-Rhin.  Cependant  des  sommes 
importantes  avaient  été  mises  à  la  disposition  du  Haut-Rhin  sans  pouvoir 
aboutir;  et  si  nous  exceptons  celles  dépensées  à  Saint-Ulrich  et  plus  ré- 
cemment à  Thann,  les  autres  restaient  sans  emploi. 

«  Nous  sommes  heureux  de  vous  annoncer  que,  cette  année,  la  part  prin- 
cipale revient  au  Haut-Rhin.  Grâce  à  l'initiative  de  M.  Véron-Réville,  vice- 
président  du  sous-comité  de  Colmar,  il  a  été  formé  une  commission  spé- 
ciale composée  de  MM.  Huot,  conseiller  à  la  cour  impériale;  Gérard,  avocat; 
Liblin,  directeur  de  la  Revue  d'Alsace;  Ortlieb,  architecte;  Schœlbaum,  in- 
génieur civil,  et  Foltz,  membre  de  la  Société. 

«Cette  commission  a  bien  voulu  demander  mon  concours.  Elle  s'est 
transportée  sur  les  lieux,  a  débattu  sur  place  les  mesures  les  plus  efficaces 
à  prendre,  pour  donner  une  impulsion  aux  travaux  et  répondre  à  la  bonne 
volonté  du  comité.  Sous  cette  influence,  des  travaux  très-importants  ont 
été  commencés  et  seront  continués  avec  le  même  succès,  nous  en  sommes 
convaincu. 

«Les  travaux  du  Bas-Rhin  ont  été  restreints  par  ce  fait,  sans  cependant 
être  abandonnés.  Ils  seront  repris  en  temps  et  lieu. 

«  Nous  allons  vous  donner  un  compte  détaillé  des  travaux  exécutés  dans 
le  courant  de  l'année  1863. 

Eguisheim,  1200  fr. 

«Il  n'est  personne  qui,  ayant  parcouru  notre  ligne  de  chemin  de  fer,  n'ait 
été  frappé  de  la  disposition  de  ces  trois  tours  qui  se  détachent  sur  nos 


—  120  — 

montagnes  un  j)eu  au-dessus  de  Colmar.  Lorsque,  après  avoir  quille  IJus- 
seren,  on  a  gravi  le  mamelon  qui  le  domine,  on  arrive  sur  un  pelil  plateau 
se  prolongeant  du  nord  au  midi,  sur  lequel  ont  été  plantées  ces  construc- 
tions d'un  autre  âge  qui  étonnent  nos  regards,  et  qui  sont  connus  sous  le 
nom  de  château  d'Eguisheim. 

«C'est  en  vain  que  l'on  chercherait,  à  priori,  les  motifs  qui  ont  déter- 
miné ces  formes  et  ces  dispositions. 

i(Du  reste,  dans  leur  état  actuel,  l'homme  spécial  lui-même  reste  privé 
des  moyens  d'une  appréciation  certaine.  Cependant  il  est  facile  de  recon- 
naître tout  d'abord  trois  constructions  distinctes: 

«  La  première  à  l'extrémité  de  la  pointe  sud,  appelée  Weckmimd,  se  com- 
pose d'une  tour  rectangulaire  en  pierre  de  grès,  de  grand  appareil,  à  bos- 
sages rustiques;  à  côté  sont  quelques  constructions  sans  importance;  le 
tout  séparé  du  reste  du  plateau  par  des  escarpements  factices. 

«La  deuxième  vers  le  centre,  appelée  Wallenbourg^  se  compose  également 
d'une  tour  rectangulaire  autour  de  laquelle  ont  été  élevés,  à  plusieurs 
époques,  diverses  constructions  destinées  à  l'habitation;  elle  est  également 
séparée  en  avant  et  en  arrière  par  des  escarpements  faits  de  main  d'homme. 

«La  troisième  vers  le  nord,  appelée  Bagshourtj,  se  compose  d'un  corps 
de  logis  principal  établi  vers  l'extrémité  du  mamelon,  et  précédé  au  sud 
d'une  tour  rectangulaire  entièrement  isolée.  Toute  cette  construction,  la 
plus  importante  des  trois,  est  de  l'époque  romane,  et  porte  encore  des 
traces  d'architecture  d'un  haut  intérêt. 

«Malheureusement  ces  trois  parties  distinctes  sont  tellement  dévastées, 
les  débris  amoncelés  à  leur  pied  ont  tellement  enfoui  les  soubassements 
sous  des  monceaux  de  décombres,  qu'il  n'est  pas  possible  de  reconnaître 
les  dispositions  principales,  les  accès,  les  communications,  etc.  Les  trois 
tours  seules  surgissent  au  milieu  du  chaos,  et  encore  la  troisième  est-elle 
effondrée  sur  deux  faces. 

«Après  un  mûr  examen  il  a  été  reconnu  : 

«Que,  parmi  les  constructions  encore  debout,  les  unes  étaient  le  résultat 
de  besoins  successifs  et  n'avaient  aucun  caractère  monumental;  les  autres 
au  contraire  formaient  l'essence  môme  du  bâtiment,  et  portaient  en  elles 
le  cachet  de  leur  époque  et  de  leur  destination  ;  que  dans  le  premier  cas 
lorsqu'elles  menaçaient  ruine,  il  n'y  avait  qu'à  laisser  faire  le  temps,  mais 
que  dans  le  deuxième  il  y  avait  lieu  de  conjurer  cette  action,  par  tous  les 
moyens  possibles. 

En  parlant  de  ce  principe  admis  par  la  Société  jusqu'à  ce  jour,  il  a  été 
arrêté  l'exécution  immédiate  des  travaux  suivants: 


—  121  — 

(.(1"  Boucher  la  brèche  de  la  paroi  nord,  du  corps  de  logis  principal,  sous 
la  cheminée  romane;  2°  reprendre  les  deux  brèches  dans  les  parements 
extérieurs,  vers  l'angle  nord -ouest  du  même  corps  de  logis;  3"  réparer 
et  consolider  le  bas  de  la  fenêtre  géminée  ouest  du  même  corps  de  logis, 
terminer  le  mur  en  arrachement  sous  forme  de  contre-fort;  4°  boucliei- 
une  brèche  dans  le  mur  sud  du  soubassement;  5°  arrêter  la  ruine  immi- 
nente du  mur  est  de  la  troisième  tour,  au  moyen  d'un  grand  contre-fort, 
posé  sur  le  soubassement  de  la  face  nord,  et  s'élevant  en  arrachement 
jusque  vers  la  seizième  assise  environ;  6''  déblayer  la  deuxième  et  la  pre- 
mière tour;  dégager  les  deux  brèches  d'accès  et  les  consolider  au  moyen 
de  reprises  en  sous-œuvre  et  en  arrachement,  de  manière  à  en  permettre 
l'entrée,  sans  altérer  le  caractère  de  ces  tours;  7°  en  général  dégager  et 
déblayer  autant  que  possible  les  abords,  ranger  les  matériaux  susceptibles 
d'être  employés;  conserver  précieusement  toute  pierre  taillée;  8°  et  enfin 
pour  l'exécution  des  travaux,  mettre  en  hgne  toutes  les  maçonneries  nou- 
velles, en  ayant  la  précaution  de  bien  garnir  de  mortier  l'intérieur,  mais 
en  évitant  scrupuleusement  de  laisser  apparaître  à  l'extérieur  le  moindre 
mortier  sur  les  lits  et  joints. 

«Ces  travaux  ont  été  exécutés  suivant  ce  programme,  avec  un  soin  qu'on 
ne  saurait  trop  louer,  sous  la  direction  immédiate  de  M.  Orllieb,  ancien 
architecte  à  Colmar,  artiste  aussi  consciencieux  que  modeste.  Ils  ont  par- 
faitement réussi;  et  si  l'on  excepte  la  reprise  sous  la  cheminée  romane, 
où  l'on  a  voulu  trop  bien  faire,  et  à  laquelle  il  sera  du  reste  facile  de  re- 
médier, ils  devront  servir  d'encouragement  pour  l'avenir. 

«Le  crédit  de  1,200  francs  voté  à  cet  effet  a  été  absorbé  jusqu'à  la  somme 
de  1,195  fr.  68  c. 

«Il  reste  encore  à  faire,  pour  compléter  le  programme  ci-dessus,  des 
déblais  et  la  partie  supérieure  du  contre-fort  de  la  troisième  tour. 

«Nous  nous  proposons  de  demander  dans  la  campagne  prochaine,  pour 
ces  travaux  et  pour  d'autres  non  moins  urgents,  les  nouveaux  crédits  né- 
cessaires pour  les  mener  à  bonne  fin. 

Hohlandsberg,  300  fr. 

«  Sur  un  autre  mamelon,  non  loin  des  châteaux  d'Éguisheim  apparaissent 
de  vastes  murailles  d'enceinte,  d'une  étendue  et  d'une  structure  remar- 
quables. Leur  périmètre  affecte  la  forme  d'un  rectangle  presque  régulier, 
sauf  vers  l'angle  ouest,  où  il  s'infléchit  légèrement  entre  deux  tours  rondes, 
presque  entièrement  engagées  dans  les  angles.  Cette  enceinte  n'est  ouverte 
que  sur  deux  points:  l'un  vers  le  nord-ouest  où  il  existe  une  petite  po- 

8* 


—  122  — 

terne;  le  deuxième  vers  le  nord-est,  où  se  trouvait  l'entrée  principale, 
avec  traces  de  pont-levis,  mâchicoulis;  le  tout  d'un  très-grand  caractère 
architectural.  On  pénètre  par  ces  portes  dans  deux  cours  d'entrée  adja- 
centes, précédant  une  troisième  cour,  au  nord  de  laquelle  s'élève  un  mas- 
sif jusqu'à  hauteur  des  murs,  en  partie  formé  de  décombres  qui  laissent 
apercevoir:  des  fragments  d'escaUer;  un  chemin  de  ronde;  une  grande 
tour  carrée,  une  petite  tour  circulaire,  pittoresquement  assise  sur  une 
base  de  rochers;  un  puits,  etc. 

«Ces  dispositions  indiquent  évidemment  l'emplacement  de  l'ancienne  de- 
meure seigneuriale. 

«  La  quatrième  enceinte  à  la  suite  contient,  contre  les  parois  est  eisud, 
des  restes  de  bâtiments  de  dépendances.  Dans  la  cour  et  sous  l'ancienne 
demeure  existent  encore  deux  citernes. 

«Tout  cet  ensemble  est  d'un  très-haut  intérêt;  mais  au  milieu  des  décom- 
bres et  des  massifs  de  végétation  qui  l'obstruent,  il  n'est  guère  possible 
de  se  rendre  un  compte  bien  exact  de  l'ensemble,  ni  des  détails. 

«La  première  chose  à  faire  est  évidemment  de  débarrasser  cette  enceinte 
de  celte  végétation  parasite.  M.  Manheimer,  le  propriétaire  de  ce  domaine, 
s'est  engagé  gracieusement  à  couper,  cet  hiver,  tous  les  bois  jugés  néces- 
saires; et  M.  Schœlbaum,  jeune  ingénieur  à  Golmar,  a  pris  ses  mesures 
pour  commencer  avec  l'ouverture  de  la  campagne  prochaine  les  déblais 
convenus. 

Plixbourg,  200  fr. 

«Un  peu  plus  bas,  sur  un  petit  mamelon  vers  le  val  Saint-Gilles,  s'élève 
une  autre  enceinte  rectangulaiie  avec  une  puissante  tour  ronde  vers  le 
centre,  en  maçonnerie  de  granit  de  petit  appareil.  A  côté  est  une  petite 
construction  souterraine  voûtée;  et  sur  trois  faces  intérieures  de  l'enceinte, 
apparaissent  encore  les  restes  d'anciennes  constructions. 

«Mais  dans  ce  château  comme  dans  celui  de  Hohlandsberg  les  décombres 
et  la  végétation  sont  tellement  intenses  qu'il  est  impossible  d'arrêter  une 
opinion. 

«Il  y  avait  lieu  avant  tout,  comme  dans  le  château  précédent,  d'enlever 
la  plupart  des  arbres  et  arbustes. 

«M.  Hanhardt,  le  propriétaire  de  ce  domaine,  avec  lequel  M.  Schœlbaum 
s'est  mis  en  rapport,  a  bien  voulu  accéder  à  ce  vœu;  et  déjà  ont  commencé 
les  coupes.  M.  Schœlbaum  nous  a  promis  de  mener  de  front  les  déblais 
avec  ceux  de  Hohlandsberg.  Une  fois  ces  premiers  travaux  opérés,  il  sur- 
gira probablement  quelques  travaux  de  consolidation  à  effectuer.  Cepen- 


—  US  — 

dant,  les  parties  intéressantes  qui  ont  échappé  jusqu'à  ce  jour  aux  ravages, 
sont  généralement  en  bon  état  de  conservation. 

«  Resterait  alors  à  faciliter  les  abords  de  ces  trois  châteaux  au  moyen  de 
chemins  qui  permissent  une  pérégrination  agréable  aux  touristes.  Mais 
comme  les  fonds  de  la  Société  ne  sauraient  être  affectés  à  des  travaux  de 
cette  nature,  il  y  aurait  peut-être  lieu  de  s'adresser  à  l'administration  fores- 
tière si  bienveillante,  et  aux  communes  intéressées,  pour  obtenir  d'elles 
ces  améliorations,  ainsi  que  cela  .s'est  pratiqué  d'une  manière  remarquable 
à  Ribeauvillé. 

Hoh-Barr,  150  fr. 

«Il  avait  été  projeté  de  faire  quelques  travaux  de  consolidation  à  la  cha- 
pelle de  Hoh-Barr.  Mais  après  un  examen  approfondi,  M.  Fürst,  notre  col- 
lègue de  Saverne,  chargé  de  ces  restaurations  après  s'être  entendu  avec 
M.  le  colonel  de  Morlet,  reconnut  que  ces  travaux,  pour  arriver  à  un  bon 
résultat,  auraient  mené  trop  loin,  et  comme  du  reste  ils  n'étaient  pas  d'une 
urgence  imminente,  ils  ont  été  ajournés. 

Hoh-Kœnigsbourg,  100  fr. 

«Les  travaux  importants  du  Kœnigsbourg  qui  ont  été  entrepris  jusqu'à 
ce  jour  sur  les  fonds  de  la  Société,  se  maintiennent  parfaitement;  et  quoi- 
qu'ils soient  loini  d'être  achevés,  ils  peuvent  être  impunément  remis.  Géné- 
ralement ils  sont  respectés.  Cependant  nous  avons  eu  à  déplorer  quelques 
dégradations  répétées;  une,  même  assez  regreltable,  le  bris  de  la  rosace 
centrale  de  l'escalier  à  jour  de  la  cour,  qui  avait  été  recueillie  et  disposée 
à  son  pied. 

«Pour  éviter  ces  inconvénients,  il  a  été  décidé  qu'il  serait  établi  deux 
portes  à  l'entrée  du  bâtiment  principal  d'habitation.  Les  clefs  de  ces  deux 
portes  seront  déposées  chez  le  garde  et  seront  confiées  à  tout  visiteur  qui 
en  fera  la  demande.  Les  ouvrages  extérieurs  du  château  resteraient  libres 
comme  précédemment.  Cette  restriction  est  sans  doute  fâcheuse,  mais  elle 
a  été  jugée  nécessaire.  Ces  deux  portes  sont  faites  et  elles  ont  absorbé  le 
crédit  accordé. 

Petit-Kœnigsbourg ,  200  fr. 

«  Le  petit  château  de  Kœnigsbourg,  situé  vers  l'ouest  du  grand ,  forme 
une  construction  complètement  distincte  et  séparée  de  la  première.  Il  est 
entouré  de  fossés  et  d'escarpements  formidables,  ses  murs  extérieurs  percés 
de  baies  ogivales  et  plein  cintre  restent  seuls  debout.  Il  présente  des  par- 


—  1-24  — 

tics  d'un  haut  inlérêt,  mais  enfoui  clans  une  végétation  qui  l'envahissait  et 
d'un  accès  difficile,  il  est  resté  inconnu  à  la  plupart  des  visiteurs. 

«Cette  partie  de  la  forêt  venant  d'être  exploitée,  il  apparaît  maintenant 
aux  yeux  étonnés.  De  plus,  des  chemin^  d'exploitation  ont  été  établis,  qui 
rendent  son  accès  facile  et  permettent  de  suivre  tout  le  contour  du  mame- 
lon du  côté  du  Val  de  Ville. 

((Restait  alors  à  compléter  ce  premier  travail  par  le  déblai  des  masses 
considérables  de  décombres  qui  couvrent  le  pied  des  murs  intérieurement 
et  extérieurement.  La  somme  de  200  francs  affectée  à  ces  travaux  a  été 
presque  entièrement  employée  sans  réaliser  un  grand  résultat.  Ces  travaux 
sont  extrêmement  intéressants;  nous  nous  proposons  de  soHiciter  pour 
l'année  prochaine  de  nouveaux  crédits  pour  les  continuer. 

Frankenbourg,  200fr. 

«Parmi  nos  châteaux,  un  des  plus  intéressants  par  sa  structure  et  surtout 
par  sa  position  exceptionnelle,  est  certainement  le  Frankenbourg.  Après 
avoir  passé  la  gorge  étroite,  commandée  par  les  châteaux  d'Ortenbourg 
et  de  Ramstein  d'un  côté,  par  ceux  de  Kintzheim  et  de  Kœnigsbourg  de 
l'autre,  la  vallée  s'élargit  bientôt  et  se  divise  en  deux  nouvelles  vallées  res- 
serrées entre  de  hautes  montagnes,  se  dirigeant  l'une  vers  Sainte-Marie- 
aux-Mines,  l'autre  vers  Ville.  A  la  bifurcation  de  ces  vallées,  sur  le  sommet 
de  la  première  montagne,  s'élève  le  Frankenbourg  comme  une  sentinelle 
avancée,  pouvant  communiquer  au  loin  au  moyen  de  signaux  avec  Burg- 
heim,  ancien  poste  romain. 

«M.  Coste,  notre  érudit  collègue,  qui  le  premier  nous  a  révélé  nos  an- 
ciennes voies  romaines  et  franques,  attache  une  importance  extrême  à  la 
position  de  ce  château.  Il  ne  balance  pas  à  reculer  l'origine  de  son  établis- 
sement jusqu'à  l'époque  romaine.  Au  premier  aspect  l'époque  romane  seule 
ressort  des  formes  de  son  architecture.  Sa  tour  ronde,  d'un  travail  remar- 
quable, porte  même  des  signes  de  tailleur  de  pierres  qui  feraient  remonter 
sa  date  aux  dernières  années  de  l'époque  romane,  vers  la  transition  ogivale. 
Mais  ses  substructions  imposantes,  qui  peut-être  pourraient  nous  révéler 
des  constructions  plus  anciennes,  sont  tellement  enfouies  sous  les  dé- 
combres, qu'il  est  impossible  de  rien  préciser  à  cet  égard.  Nous  nous  étions 
proposé  d'entreprendre  des  travaux  de  déblai  dans  le  cours  de  cette  cam- 
pagne: malheureusement  le  manque  d'ouvriers  intelligents  et  aussi  diffé- 
rents empêchements  successifs  ont  mis  obstacle  à  ce  désir.  Us  seront  cer- 
tainement exécutés  dans  le  courant  de  la  campagne  prochaine. 

(iEn  résumé,  il  a  été  accordé  cette  année  par  la  Société,  pour  déblais  el 


—  125  — 

consolidation  des  monuments  historiques  d'Alsace,  un  crédit  de  2,300  fr., 
sur  lesquels  350  fr.  restent  encore  à  employer. 

«Pour  ces  travaux,  c'est  le  Haut-Rhin  qui  a  eu  les  honneurs  de  la  cam- 
pagne. Nous  nous  empressons  de  le  proclamer  avec  d'autant  plus  de  bon- 
heur, qu'il  avait  mis  plus  de  temps  à  se  décider  et  que  son  essai  a  été  un 
coup  de  maître.  Sur  ce  terrain  tout  succès  est  une  œuvre  patriotique  qui 
ne  laisse  que  de  douces  jouissances,  et  n'inspire  au  vainqueur  et  au  vaincu 
que  le  désir  plus  vif  de  mériter  vos  suffrages. 

f  A.  Ringeisen. » 

Cet  intéressant  travail  est  couvert  d'applaudissements,  et  les  remercî- 
menls  à  MM.  les  architectes  qui  ont  prêté  leur  concours,  sont  votés  par  ac- 
clamation. 

La  parole  est  donnée  à  M.  Spach,  président  du  comité,  qui  rend  compte 
à  l'assemblée,  en  lui  demandant  sa  sanction,  de  la  nomination  de  trois 
membres  pour  compléter  le  comité;  ce  sont  :  MM.  Siffer,  curé  à  Weyers- 
heim,  Saum,  chef  de  bureau  à  la  préfecture,  et  Reussner,  professeur  au 
Gymnase  protestant. 

Il  prie  également  l'assemblée  de  remplacer  les  trois  membres  sortants 
du  comité  dont  les  fonctions  sont  expirées  d'après  les  statuts,  et  qui  sont  : 
MM.  le  baron  de  Schauenburg,  docteur  Eissen,  et  lui-même,  ou  de  leur 
continuer  leur  mandat  par  une  nouvelle  élection. 

L'assemblée,  par  acclamation,  sanctionne  la  nomination  des  trois  nou- 
veaux membres  du  comité,  et  renouvelle  le  mandat  des  trois  membres 
sortants. 

Le  président  prie  l'assemblée  d'autoriser  le  changement  de  jour  et  d'heure 
des  réunions  du  comité.  —  Accordé. 

M.  Spach  exprime  à  l'assemblée,  en  son  nom  et  en  celui  de  ses  collègues, 
les  sentiments  qui  les  animent,  et  le  prix  qu'ils  savent  attacher  à  l'honneur 
que  l'assemblée  vient  de  leur  faire  en  leur  continuant  sa  confiance. 

Il  propose  de  voter  des  remercîments  aux  deux  Préfets  des  déparle- 
ments alsaciens  et  à  leurs  Conseils  généraux  pour  la  protection  et  les  géné- 
reux encouragements  dont  ils  ne  cessent  d'entourer  la  Société,  remercîments 
auxquels  l'assemblée  s'associe  avec  enthousiasme. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


-  126  — 


Séance  du  Comité  du  4  janvier  1864. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Eissen,  Ileitz,  Klotz,  colonel  de  Morlet,  Saum,  Siffer, 
Slraub. 

Les  procès-verbaux  des  séances  du  7  décembre  et  10  décembre  (assem- 
blée générale)  sont  lus  et  adoptés. 

Le  secrétaire  dépose  :  Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit;  n^  10, 
octobre  1863. 

Der  Doryplioros  des  Polyklet,  XXIII.  Programm  zum  Winkelmannsfest, 
der  archeologischen  Gesellschaft  zu  Berlin,  von  Karl  Friedrichs;  Berlin; 
1863  (transmis  par  M.  le  professeur  Ed.  Gerhard); 

Messager  des  sciences  historiques  ou  Archives  des  arts  et  delà  bibliogra- 
phie de  Belgique;  année  1863,  HP  livraison. 

La  question  mise  à  l'ordre  du  jour  de  la  séance  est  le  changement  de 
l'heure  et  éventuellement  du  jour  des  réunions  du  comité.  La  majorité  s'é- 
tant  prononcée  pour  le  deuxième  lundi  de  chaque  mois  et  pour  deux  heures 
après  midi,  celle  modification  est  adoptée. 

Le  renouvellement  du  bureau  est  remis  à  une  prochaine  réunion,  vu  le 
petit  nombre  des  membres  présents. 

M.  Saum,  après  avoir  rendu  compte  de  sa  mission  auprès  de  M.  Simon, 
au  sujet  de  la  carte  d'Alsace  de  Schvveighaeuser  annotée  par  M.  le  profes- 
seur Jung,  dépose  un  beau  kelt  en  bronze  dont  M.  Gustave  Freyss,  fon- 
deur, fait  hommage  à  la  Société,  et  une  médaille  de  Hanau  du  dix-septième 
siècle  trouvée  au  pont  Saint-Martin  à  Strasbourg. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Freyss. 

M.  le  colonel  de  Morlet  dépose  une  carte  indiquant  les  trouvailles  faites 
pendant  les  travaux  de  la  gare  de  Wasselonne,  et  dressée  par  M.  Kast; 
plus  une  autre  carie  dressée  par  M.  Gœtz,  où  sont  relevées  les  découvertes 
faites  à  Molsheim,  Kirchlieim,Küttolsheim,  etc.  M.  Gœtz  promet  de  rédiger 
une  note  à  l'appui. 

M.  Slraub  explique  la  signification  d'une  croix  trouvée  dans  l'emplace- 
ment du  cimetière  d'Odratzheim  et  qui  lui  a  été  remise  par  M.  le  colonel 
de  Morlet.  C'est,  selon  lui,  une  croix  dite  croix  de  peste.  Pour  établir  la 
comparaison,  il  met  sous  les  yeux  du  comité  un  certain  nombre  d'autres 


—  1^7  — 

croix,  toutes  en  métal,  tirées  de  ses  collections;  ce  sont:  une  croix  caba- 
listique, une  croix  espagnole  dite  de  Caravaca,  une  croix  russe,  une  croix 
patriarcale  de  saint  Benoît,  et  une  croix  de  saint  Udalrich. 

M.  Straub  promet  une  notice  sur  ces  différentes  croix. 

M,  Heilz  soumet  une  planche  gravée  par  Isaac  Brunn,  graveur  strasbour- 
geois,  représentant  la  cathédrale  et  l'horloge  astronomique.  Il  est  fortement 
à  présumer  que  cette  gravure  est  la  première  image  qui  ait  été  publiée  de  celte 
horloge.  Le  comité  décide  qu'il  sera  tiré  un  nombre  suffisant  d'exemplaires 
pour  le  Bulletin  ,  et  qu'on  les  accompagnera  d'une  notice  sur  ce  graveur. 

M.  Heitz  offre  la  planche  à  la  Société,  qui  la  placera  dans  ses  collections. 
Le  comité  vote  à  cet  effet  une  somme  de  26  fr.,  prix  de  la  planche,  et  des 
remercîments  à  M.  Heitz. 

M.  Siffer  lit  la  note  suivante  : 

Notice  suryme  dalle  épigraphique  d'origine  romaine,  chargée  de  denx 
images,  représentant  l'une  Mars,  l'autre  Pcdlas,  et  sur  diverses  autres 
antiquités,  découvertes ,  en  i862,  dans  les  forêts  des  deux  Betschdorf. 

«Au  mois  de  mars  de  l'année  1862,  des  bûcherons,  occupés  dans  la 
forêt  communale  d'Oberbetschdorf  à  extraire  des  souches  au  canton  appelé 
Spechtensee,  distant  d'environ  deux  kilomètres  au  sud  de  Niederbetschdorf, 
ont  mis  à  découvert,  sous  le  cône  d'un  tertre  tumulaire,  une  pierre  votive 
de  80  centimètres  de  haut,  sur  38  centimètres  de  large  et  10  centimètres 
d'épaisseur,  figurant,  sur  la  même  face,  deux  divinités,  l'une  masculine  et 
l'autre  féminine,  placées  côte  à  côte,  la  féminine  à  droite  et  la  masculine  à 
gauche. 

«  Une  inscription  mi-fruste  et  en  partie  illisible ,  gravée  sur  la  doucine 
du  front,  donne  la  première  place  à  la  divinité  masculine  et  nous  apprend 
que  c'est -Mars,  le  dieu  des  batailles,  caractérisé  d'ailleurs  par  la  courte 
tunique  (le  sagum  militaire)  dont  il  est  revêtu;  par  un  bouclier,  qu'il  sou- 
tient près  du  pied,  de  la  main  gauche;  et  par  une  espèce  de  demi-pique, 
qu'il  lève  de  la  main  droite. 

a  Le  tome  IV  du  Bulletin  mentionne,  dans  la  partie  des  mémoires,  page 
90,  une  pierre  épigraphique  trouvée  sur  la  lisière  de  la  forêt  de  Nieder- 
betschdorf vers  la  finde  la  seconde  décade  du  siècle  courant.  Cette  pierre  a 
été  consacrée  à  Pluton  «  Diti  Patri  »  parun  Gaulois,  nommé  Vassorix  dans 
l'inscription;  Mars,  dont  le  titre  principal  était  de  repeupler  sans  cesse 
le  royaume  des  Ombres,  avait  donc,  dans  cette  localité,  son  autel  à  côté 
de  celui  du  dieu  des  morts. 

«La  divinité  féminine  se  dislingue  par  une  chevelure  très- touffue,  for- 
mant sa  coiffure;  puis,  comme  le  dieu  Mars,  par  une  demi-pique  qu'elle 


—  128  — 

lève  de  la  main,  du  côté  gauche;  et  par  une  ample  draperie  dont  elle  est 
enveloppée.  Les  tresses  de  la  chevelure  se  rapprochent  assez  de  celles  que 
l'on  remarque  dans  la  coiffure  moderne  des  jeunes  filles.  Selon  moi,  la  pique 
est  ici  un  attribut  qui  caractérise  Pallas,  déesse  de  la  Victoire;  le  vêtement 
est  identique  à  celui  de  plusieurs  bas-reliefs  que  nous  connaissons  de  cette 
déesse.  Enfin  l'inscription,  malgré  son  état  de  délabrement,  me  permet 
d'asseoir  mon  opinion  d'une  manière  définitive. 

MARSE  :  :  :  :  ;  ;  DAE 

vs. 

((  Analysons  brièvement  ces  lettres.  Tous  les  doutes  sont  levés  en  ce  qui 
concerne  Mars,  seulement  je  fais  observer  que  l'épitaphe  donne  le  nomi- 
natif en  place  du  datif,  c'est  un  barbarisme  qui  se  rencontre  ailleurs.  La 
lettre  E,  qui  est  très-bien  exprimée,  appartient  à  la  copulative  ET.  Les  lettres 
qui  suivent  sont  tronquées  et  très-informes;  je  les  omets  pour  éviter  une 
transcription  fautive,  espérant  toutefois  que  l'un  ou  l'autre  des  membres 
de  la  Société,  à  la  suite  d'un  examen  moins  fugitif  que  le  mien,  parviendra 

à  les  retrouver DAE,  lettres  finales  du  nom  propre  de  la  déesse;  il  y  a 

ici,  à  mon  sens,  encore  un  solécisme:  PALLADAE  pour  PALLADL  Les  deux 
lettres  VS,  placées  au-dessous  sur  l'encadrement  latéral,  expriment  la  for- 
mule «  votum  solvit.  » 

(«Comme  le  culte  de  Mars  était  associé  à  cekii  de  Pallas,  il  n'est  pas  éton- 
nant qu'on  ait  réuni  leurs  noms  sur  une  même  pierre.  L'inscription  se  ré- 
tablirait donc  ainsi  : 

«  Marti  et  Palladœ  votum  solvit.  » 

«  Le  comité  me  pardonnera  ce  déchiffrement  hypothétique,  que  je  suis 
prêt  à  abandonner,  dès  qu'une  explication  meilleure  aura  été  donnée. 

«  Les  deux  figures  sont  hautes  de  30  cenfimètres;  elles  n'occupent  que 
la  partie  supérieure  de  la  pierre.  La  partie  inférieure  ne  montre  ni  sculp- 
tures, ni  caractères;  elle  paraît  avoir  été  réservée  à  dessein  pour  la  dési- 
gnation du  donateur:  l'autel  confectionné  d'avance,  le  tailleur  de  pierre 
gallo-romain  l'aurait  conservé  dans  l'atelier,  pour  l'offrir  tel  quel,  ou  le 
cas  échéant,  pour  le  parachever  d'après  les  indications  de  la  commande. 

«Feu  M.  le  professeur  Jung,  notre  regrettable  collègue,  a  acquis,  à 
prix  d'argent,  cet  intéressant  monument  pour  le  musée  départemental;  sa 
conservation  est  dès  lors  assurée.  Mais  jusqu'ici,  le  Bulletin  n'a  mentionné 
ni  sa  découverte  ni  son  acquisition. 

«  Celte  pierre  et  celle  ronsarrée  au  dieu  des  Enfers  sont  une  nouvelle 


—  129  — 

preuve,  d'après  moi,  que  la  théologie  de  l'Alsace  était,  sous  les  Romains, 
un  mélange  des  diverses  croyances  de  ses  habitants. 

«  Il  est  à  noter  qu'un  poignard  oxydé  a  été  enfoui  sous  la  dalle  qui  nous 
occupe;  que  le  tertre  qui  contenait  ces  deux  objets,  est  situé  à  quelques 
mètres  seulement  d'un  ancien  chemin,  qui  se  raccorde,  dans  la  direction 
de  Kœnigsbriick,  à  la  grande  voie  romaine  de  Brumath  à  Seltz;  et  que  ce 
rayon  a  donné  heu  en  même  temps  à  la  découverte  de  divers  autres  débris 
de  l'époque  romaine,  tels  que  fragments  de  poterie,  restes  de  tuiles  à  re- 
bords, morceaux  de  ciment,  vestiges  de  fondements  qui  annoncent  appa- 
remment une  construction  sacellaire. 

«  Le  chemin  que  nous  indiquons ,  portant  vulgairement  le  nom  de 
Sirœssel,  forme  la  ligne  séparative  des  forêts  d'Ober-  et  de  Nieder-Betsch- 
dorf.  II  est  très-admissible  qu'il  rehait  les  positions  romaines  de  ces  deux 
locahtés  à  la  grande  route  et  à  la  fois  au  camp  romain,  connu  sous  le  nom 
de  Heidenberg,  que  M.  le  baron  de  Schauenburg  a  si  savamment  décrit 
dans  une  notice  insérée  au  procès-verbal  de  la  séance  du  comité  du  PV  juin 
dernier.  Le  tracé  de  ce  chemin  est  donné  comme  incertain  ou  présumé, 
sur  la  carte  romaine  de  M.  le  colonel  de  Morlet,  son  existence  positive  est 
attestée  par  les  découvertes  que  nous  signalons. 

«  L'édicule  sacré  du  Spechtensee  était  à  la  distance  d'environ  6  à  7  kilomè- 
tres du  camp  romain  établi  à  l'extrémité  orientale  de  la  forêt  de  Haguenau. 

«  Je  termine  cette  notice  en  faisant  connaître  que  les  forêts  des  deux 
Betschdorf  possèdent,  sur  différents  points,  un  certain  nombre  de  tertres 
mortuaires  dont  la  plupart  restent  inexplorés;  des  groupes  de  tumuli  sont 
visibles,  dans  la  forêt  d'Oberbetschdorf,  aux  cantons  appelés  Spechtensee 
et  Furlenhübel;  dans  celle  de  Niederbefschdorf,  aux  lieux  dits  Grosshvhel, 
Birchenhühelei  Fnchszipfel.  On  prétend  avoir  rencontré,  sous  quelques-uns 
de  ces  tumuli,  des  traces  de  l'occupation  romaine.  M.  Nessel,  de  Haguenau, 
membre  de  notre  Société,  est  en  possession  de  plusieurs  objets  provenant 
des  tertres  fouillés;  ces  objets,  en  partie  du  moins,  sont  de  l'époque  où  le 
1er  était  déjà  en  usage.  On  ne  saurait  donc,  indistinctement,  faire  remon- 
ter toutes  ces  tombelles  aux  temps  antéromains;  elles  appartiennent  en 
partie  à  mon  avis,  à  la  population  aborigène  qui,  subjuguée,  s'était  fondue 
dans  les  florissantes  colonies  romaines.  Une  fouille,  attentivement  reprise, 
ne  manquerait  pas  d'éclairer  cette  question.  » 

M.  le  président  annonce  avoir  écrit  depuis  le  7  décembre  les  lettres 
suivantes: 

A  M.  Kast,  agent  voyer  à  Wasselonne;  lettre  de  remercîmenls  poni'  le 
plan  du  palais  mérovingien; 

II'  Sbrie.  —  T.  n,  —  (P.-V.)  9 


—  130  — 

A  M.  Barte  de  Sainte-Fare,  conservateur  des  forêts;  prière  de  permettre 
que  l'on  continue  les  fouilles  à  Mackwiller  etRatzwiller; 

A  M™®  Borderieu  à  Schlestadt  au  sujet  du  médailler  de  feu  M.  Dorlan; 

AM.  Goste,  pour  lui  annoncer  que  le  comité  accorde  le  patronage  à  sa 
future  publication  ; 

AM.  Dureau,  à  Paris;  annonce  de  l'envoi  de  trois  livraisons  de  notre 
Bulletin; 

A  M.  Nicklès;  annonce  de  la  lecture  de  son  mémoire  en  assemblée 
générale; 

A  M.  Reussner;  annonce  de  sa  nomination  en  remplacement  de  M.  Jung 
au  comité; 

A  M.  Lindenschmidt  à  Mayence,  pour  lui  annoncer  sa  nomination  comme 
membre  honoraire. 

La  séance  est  levée  à  une  heure. 


Séance  extraordinaire  du  Comité  du  \i  janvier  i 864. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Sont  présents  :  MM.  Conrad,  Heitz,  Matuszinski,  Morin,  de  Morlet,  Reuss- 
ner, Saum,  de  Schauenburg  et  Straub,  membres  du  comité.  M.  Thomas, 
membre  de  la  Société,  assiste  à  la  séance. 

M.  l'abbé  Straub  remplit  les  fonctions  de  secrétaire. 

M.  Morin,  architecte  du  département,  donne  lecture  d'un  rapport  fait 
par  M.  le  curé  Guerber  sur  la  seconde  visite  à  l'égHse  de  Walbourg.  Une 
commission,  composée  de  MM.  Guerber,  curé  de  Haguenau,  Klotz,  de 
Morlet  et  de  Schauenburg,  s'est  rendue  dans  cette  église  dans  le  courant 
de  novembre  1863  pour  examiner  l'ancienne  custode  dont  la  conservation 
avait  été  décidée  par  le  comité  dans  sa  séance  de  juillet. 

M.  Guerber  décrit  l'état  de  ce  remarquable  monument  et  demande  qu'un 
nouveau  crédit  de  300  fr.  soit  ajouté  au  crédit  de  400  fr.  déjà  voté.  Après 
avoir  appelé  l'attention  sur  sept  statues  en  bois  de  la  fin  du  quinzième 
siècle,  remarquables  surtout  par  les  vestiges  d'ancienne  polychromie,  M.  le 
curé  annonce  que  le  débadigeonnage  du  chœvu'  sera  opéré  dans  la  pro- 
chaine campagne  et  insiste  sur  l'assainissement  du  côté  nord  de  l'église, 
dont  le  dallage  est  aujourd'hui  inférieur  au  sol  extérieur. 

M.  l'abbé  Straub  annonce  qu'il  a  examiné  de  plus  près  les  statues  de 


—  131  — 

VValbourg,  aujourd'hui  déposées  au  musée  de  l'Œuvre  Notre-Dame,  et  que 
l'une  d'elles,  celle  de  sainte  Barbe,  porte  le  millésime  1484,  un  écusson 
surmonté  d'une  couronne  et  les  mots  :  m.  demen»  te  bainninH  \  qu'il  consi- 
dère comme  les  noms  du  statuaire.  Il  pense  qu'elles  sont  dues  au  même 
ciseau  qui  a  taillé  plusieurs  statues  appartenant  à  l'église  de  Saint-Pierre 
et  Saint-Paul  à  Neuwiller. 

M.  Spach  prie  M.  le  secrétaire  de  donner  lecture  d'un  rapport  de  M.  P. 
Ristelhuber  sur  la  marche  d'Aquilée,  Le  comité  vole  l'impression  du 
mémoire. 

M.  le  président  communique  ensuite  la  première  partie  de  son  travail 
sur  le  pape  alsacien,  Léon  IX. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


Séance  du  Comité  du  8  février  1864. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents:  MM.  Rœrsch,  Conralh,  Eissen,  Grass,  Klotz,  Morin ,  Ringei- 
sen, baron  de  Schauenburg,  Straub. 

Le  secrétaire  dépose  sur  le  bureau  : 

Helvetns  (Ehl,  près  Benfeld),  par  Napoléon  Nicklès,  1  broch.  in-8°; 

Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie,  année  1863,  n**  o, 
1  broch.  in-8°; 

Bévue  des  sociétés  savantes  des  départements ,  novembre  1863,  1  broch. 
in-8°; 

Carte  de  la  Gaule  sous  le  proconsulat  de  César.  —  Examen  des  obser- 
vations auxquelles  elle  a  donné  lieu,  par  le  général  Creuly.  Paris,  1864, 
1  broch.  in-8°; 

Les  Voies  romaines  en  Gaule,  par  Alexandre  Bertrand.  Paris,  1864, 
1  broch.  in-8"; 

Anzeiger  für  Kunde  der  deutschen  Vorzeit,  novembre  et  décembre  1863; 

Mittheilungen  des  historischen  Vereins  fivr  Steiermark,  zwölftes  Heft. 
Gratz,  1863,  1  broch.  in-8°; 

Jahresbericht  der  Gesellschaft  für  nützliche  Forschungen  zu  Trier  über 
die  Jahre  186i  und  i862.  Trier,  1864,  1  cahier  in-4°. 

Le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  suivantes: 


—  132  — 

A  MM.  Ringel  et  Beilstein,  pour  leur  annoncer  le  rappel,  en  séance  gé- 
nérale du  10  décembre  dernier,  des  médailles  qui  leur  avaient  été  décer- 
nées antérieurement; 

A  M.  Gustave  Freyss,  fondeur,  pour  le  remercier  du  don  d'un  kelt  en 
bronze; 

A  M.  Paul  Ristelhuber;  annonce  de  la  lecture  de  son  mémoire  sur  la. 
marcbe  de  Marmoulier  ou  d'Aquilée,  en  séance  du  18  janvier  1864; 

A  M.  le  curé  Guerber;  annonce  de  la  lecture  de  son  rapport  sur  la  visite 
de  l'église  de  Walbourg; 

A  M.  de  Schauenburg;  prière  de  se  charger  des  dessins  des  antiquités 
de  Stéphansfeld; 

A.  MM.  Greiner  et  Verdin;  renseignements  demandés  au  sujet  des  inten- 
tions de  M.  Verdin  pour  le  don  de  quelques  antiquités; 

A  M.  le  professeur  Warnkœnig,  à  Stuttgart;  remercîments  pour  la  men- 
tion faite  de  notre  Bulletin  et  de  notre  Société  dans  la  Historische  Zeit- 
schrift de  Sybel. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  4  janvier  est  lu  et  adopté. 

M.  l'abbé  Straub  lit  le  procès -verbal  de  la  séance  extraordinaire  du 
18  janvier  qui  est  également  adopté. 

Le  trésorier  présente  le  budget  de  l'année  1864. 

Le  comité  décide  que  le  budget  sera  présenté  et  voté  à  la  séance  du  mois 
de  mai,  alors  que  toutes  les  subventions  auront  été  réalisées  et  que  le 
chiffre  de  report  de  l'exercice  précédent  pourra  être  exactement  déterminé. 

Toutefois,  quoique  le  budget  ne  soit  pas  arrêté,  le  trésorier  est  invité  à 
recevoir  les  cotisations  pour  1864,  et  autorisé  à  payer  les  dépenses  cou- 
rantes qui  rentrent  dans  la  nature  des  crédits  ordinaires,  en  se  renfermant 
dans  leur  hmite. 

M.  le  pasteur  Ringel  propose,  comme  membre  de  la  Société,  M.  J.  Kug- 
1er,  sculpteur  à  Hommarting  (Meurthe). 

L'admission  de  M.  Kugler  est  prononcée. 

Le  président  annonce  que  le  renouvellement  du  bureau  est  à  l'ordre  du 
jour  de  cette  réunion. 

Le  comité  décide  que  cette  opération  devra  être  mise  à  l'ordre  de  la  réu- 
nion du  mois  de  mars,  et  que  les  membres  du  Haut-Rhin  devront  être 
régulièrement  convoqués. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  lit  une  communication  de  M.  le  colonel  de 
Morlet,  qui  fait  connaître  au  comité  que  M,  le  pasteur  Ringel  vient  de  décou- 
vrir dans  la  forêt  de  Mackwiller,  au  lieu  dit  Todtenberg,  un  tumulus  ren- 
fermant au  centre  une  table  en  pierre  (espèce  de  dolmen),  entourée  de 


—  133  — 

deux  cercles  de  grosses  pierres,  entre  lesquels  se  trouvaient  des  tombes, 
disposées  parallèlement  et  orientées  de  l'ouest  à  l'est.  Des  tombes  formées 
de  pierres  brutes,  renfermaient  des  colliers  et  des  bracelets  en  bronze 
qui,  par  leur  position,  indiquent  l'emplacement  de  squelettes,  dont  les 
ossements  décomposés  laissaient  encore  quelques  traces  dans  le  sol. 

Deux  autres  tumulus,  renfermant  des  tombes  semblables,  mais  sans 
cercles  de  pierre  ni  dolmen,  se  trouvaient  près  du  premier. 

Ces  sépultures,  placées  à  côté  des  tombes  franques  du  Todtcnhery,  et 
très-près  des  ruines  gallo-romaines  de  Mackwiller,  offrent  aux  archéologues 
un  grand  intérêt. 

M.  de  Morlet  met  sous  les  yeux  du  comité  les  lettres  et  les  dessins  de 
M.  le  pasteur  Ringel,  qui  vient,  par  cette  découverte,  d'acquérir  de  nou- 
veaux droits  à  la  reconnaissance  des  antiquaires  alsaciens. 

Sur  la  demande  de  plusieurs  membres,  le  Comité  alloue  une  somme  de 
300  fr.  pour  la  continuation  des  fouilles  du  Todtenberg  et  l'achèvement 
des  sondages  de  Mackwiller.  M.  de  Morlet  fera  un  rapport  détaillé  après 
l'achèvement  de  ces  travaux. 

M.  Merck,  membre  de  la  Société,  qui  assiste  à  la  séance,  annonce  qu'il 
possède  un  beau  chapiteau  de  colonne  qui,  selon  l'opinion  de  M.  le  pro- 
fesseur Jung,  daterait  du  troisième  ou  quatrième  siècle  de  notre  ère.  Ce 
chapiteau  est  déposé  dans  son  ancienne  propriété  à  Brumath;  les  proprié- 
taires actuels  (MM.  Gœtz,  frères)  seraient  disposés  à  le  céder  à  la  Société. 

M.  le  président  se  charge  de  se  mettre  en  rapport  avec  MM.  Gœtz,  frères. 
pour  cet  objet.  —  A  cette  occasion,  M.  le  président  rappelle  que  M.  Verdin, 
propriétaire  à  Marlenheim ,  se  propose  de  faire  également  don  à  la  Société 
de  chapiteaux  provenant  de  l'ancienne  éghse  de  Saint -Etienne,  à  Stras- 
bourg. 

Le  comité  vote  des  remercîments  à  M.  Verdin. 

Il  décide  qu'à  l'assemblée  générale  de  Colmar  seront  proposés ,  comme 
membres  honoraires,  MM.  de  Caumont'  et  Warnkœnig.^ 

Le  président  communique  une  lettre  de  M.  Lindenschmidt,  de  Mayence, 
qui  remercie  la  Société  de  sa  nomination  de  membre  honoraire,  et  une 
lettre  de  M.  Nicklès,  deßenfeld,  qui  annonce  la  découverte  d'objets  d'an- 
tiquités gallo-romaines,  à  Kertzfeld  (telles  que  tuiles  à  rebord,  viriole  et 
épingles  à  cheveux  en  bronze),  le  long  d'un  chemin  vicinal  qui  paraît  avoir 
été  une  voie  vicinale  romaine  reliant  Kertzfeld  à  Sermersheim.  La  première 
mention  de  Sermersheim,  selon  M.  Nicklès,  remonterait  à  l'année  770. 

1.  Fondateur  et  directeur  de  la  société  l'rauoaise  d'archéologie. 

2.  Ancien  professeur  de  jurisprudence  à  Tubingue,  conseiller  aulique  à  Stuttgardt. 


—  134  — 

Plusieuis  voies  anciennes  y  conduisent,  et  tout  porte  à  croire  qu'il  y  avait 
en  cet  endroit  un  établissement  gallo-romain. 

M.  Nicklès  a  cherché  en  vain,  jusqu'ici,  à  retrouver  du  côté  de  Matzen- 
heim  la  place  où  Schweighœuser  a  découvert  des  tuyaux  provenant  d!un 
bain  romain.  (Ces  tuyaux  ont  été  déposés  à  la  bibliothèque  de  Strasbourg.) 
Il  serait  d'autant  plus  intéressant  de  retrouver  cette  place,  que  la  décou- 
verte de  Schweighseuser  paraît  venir  en  confirmation  de  la  tradition  locale, 
qui  veut  que  la  source  minérale  de  Holtzbad,  près  de  Westhausen,  ait  été 
conduite  jadis,  à  Ehl,  par  des  tuyaux  souterrains,  dont  on  prétend  avoir 
trouvé  les  fragments,  il  y  a  environ  cinquante  ans,  aux  environs  dudit  bain. 

Le  président  termine  la  lecture  de  son  histoire  de  saint  Léon  IX ,  pape 
alsacien.  —  Le  comité  décide  l'impression  de  cette  monographie. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


SOUS-COMITE    DU    HAUT-RHIN. 


Séance  du  22  février  1864. 


Présidence  de  M.  VÉRON -RÉVILLE,  vice -président. 

Sont  présents  :  MM.  Véron-Réville,  vice-président;  Hamberger,  Gérard, 
Libhn,  Franlz,  Schlumberger- Hartmann,  Huot,  et  Brièle,  secrétaire, 
membres  du  sous-comité. 

MM.  Foltz,  Ortlieb,  Laurent  Althalin,  Hartmann,  Stahl,  membres  libres, 
et  OrtUeb,  architecte^  assistent  à  la  séance. 

Le  secrétaire  donne  lecture  du  rapport  suivant  de  M.  Ortlieb,  architecte, 
relatif  à  la  continuation,  pendant  cette  campagne,  des  travaux  de  restau- 
ration commencés  Tannée  dernière  au  château  supérieur  d'Eguisheim. 

•(Monsieur  le  Vice -Président,  lorsque  nous  avons  visité  ensemble,  le 
19  août  dernier,  peu  de  jours  avant  leur  clôture,  les  travaux  entrepris, 
l'année  dernière,  pour  la  conservation  du  château  supérieur  d'Eguisheim, 
près  Colmar,  à  l'effet  de  reconnaître  ceux  achevés  et  ceux  encore  restant 
à  faire  parmi  ceux  dont  l'exécution  a  été  arrêtée  précédemment  et  d'un 
commun  accord,  d'après  les  indications  de  M.  Bingeisen,  architecte,  j'ai 
appelé  votre  attention  sur  un  de  ces  derniers,  à  savoir,  un  parement  de 
mur  à  rétablir  à  l'un  des  angles  extérieurs  du  bâtiment  d'habitation,  tout 
à  fait  à  l'extrémité  nord  du  château. 


—  135  - 

((Ce  revêtement  de  mur,  auquel  cet  architecte  paraît  attacher  quelque 
importance,  comme  moyen  de  consolidation,  allait  être  entrepris,  lorsque 
je  me  suis  aperçu,  à  temps  encore,  que  la  somme  de  i,200  fr.,  formant 
le  montant  des  deux  crédits  de  700  et  de  500  fr.,  alloués  successivement, 
était  sur  le  point  d'être  épuisée  entièrement  par  les  ouvrages  faits  anté- 
rieurement aux  autres  parties  de  ce  château. 

«Les  prix  élevés  outre  mesure,  qu'en  l'absence  de  toute  concurrence, 
il  a  fallu  accorder  pour  ses  journées  au  sieur  Baumeister,  Joseph,  maçon, 
et  à  ses  aides,  à  Hüsseren,  ont  amené  nécessairement  trop  vite  la  cessation 
des  travaux  qui  n'ont  point  produit  le  résultat  auquel  on  était  en  droit 
de  s'attendre  pour  ces  prix. 

«Dans  le  cas  où  le  comité  se  résoudra  à  la  continuation  de  ces  travaux 
de  conservation,  ce  revêtement  de  mur  devra  être  entrepris  le  premier; 
d'autant  plus  que  le  sol  a  été  arasé  et  nettoyé  déjà  pour  commencer  ce 
revêtement  en  moellons  par  assises  réglées  suivant  l'état  ancien  de  ce  mur. 

«En  second  Heu,  il  y  aurait  à  déblayer  les  décombres  qui  s'étendent, 
entre  la  tour  du  nord  et  le  bâtiment  d'habitation,  sur  une  longueur  de 
10  mètres,  une  largeur  de  8  mètres,  et  une  hauteur  d'environ  4  mètres 
(au  delà  de  oOO  mètres  cubes),  en  commençant  par  le  côté  ouest,  en  dé- 
versant ces  décombres  sur  le  versant  de  ce  côté,  et  en  rangeant  contre  le 
pied  du  mur  de  ce  dernier  bâtiment  toutes  les  pierres  façonnées,  ainsi  que 
celles  de  dimensions  trop  fortes  pour  être  passées  de  la  main  à  la  main. 

«Au  moyen  de  ce  déblai,  également  conseillé  par  M.  Ringeisen,  on  pour- 
rait continuer  jusqu'à  l'angle  nord-ouest  le  revêtement  en  grosses  pierres 
de  la  base  du  mur  septentrional  de  la  tour,  tel  qu'il  a  été  conduit  à  partir 
de  l'angle  nord-est  jusque  vers  le  milieu  de  ce  côté,  où,  comme  je  l'ai  fait 
observer  déjà,  le  noyau  du  mur  était  privé  de  ce  revêtement  par  suite  de 
l'écroulement. 

«En  troisième 'Heu,  afin  de  rendre  le  château  plus  accessible  dans  ses 
abords  immédiats,  établir,  à  la  base  du  rocher  qui  supporte  la  tour  du 
sud  avec  une  partie  de  son  ancienne  enceinte,  une  espèce  d'escalier  rus- 
tique en  pierres  posées  à  sec,  et  le  compléter  vers  le  haut  au  moyen  de 
quelques  entailles  sur  le  rocher;  débarrasser  des  décombres  qui  obstruent 
un  arc  situé  dans  un  angle  du  bâtiment  adjacent  à  la  tour  du  milieu,  et  qui 
paraît  indiquer  l'existence  d'une  porte  de  cave  donnant  sur  un  escalier. 

«Enfin,  ne  conviendrait-il  pas  de  mettre  à  découvert,  au  moyen  de  quel- 
ques déblais  peu  profonds,  et  à  leur  rencontre,  les  murs,  recouverts  en 
beaucoup  d'endroits  de  gazon,  que  l'on  aperçoit  par  ci,  par  là,  notamment 
devant  et  à  l'est  de  la  tour  du  milieu,  afin  de  permettre  un  coup  d'œil  sur 


—  136  — 

l'ensemble  des  anciennes  dispositions  de  cette  localité  et  de  l'aciliter  ainsi 
le  lever  d'un  plan  de  tout  ce  qui  existe  encore  aujourd'hui  sur  ce  point, 
mais  qui  tend  à  disparaître  peu  à  peu,  ainsi  que  j'ai  pu  m'en  convaincre 
depuis  cinquante  ans? 

«Ces  diverses  propositions  pour  la  conservation  et  l'entretien  du  château 
supérieur  d'Éguisheim,  si  elles  sont  admises  en  totalité  par  le  comité  que 
vous  présidez ,  pourront  donner  lieu  à  une  nouvelle  dépense  de  7  à  800  fr. 
au  moins,  même  en  admettant  des  salaires  moins  élevés  que  ceux  payés 
l'année  dernière. 

(.(Gomme  les  divers  travaux  indiqués  ci-dessus  exigent,  pour  les  achevei' 
et  mener  à  bien  dans  une  seule  campagne,  une  surveillance  journalière  et 
incessante ,  7*6  crois  devoir  vous  prévenir,  dès  à  présent,  que  l'état  très- 
variable  de  ma  santé,  ainsi  que  d'autres  circonstances,  m'empêchent  d'of- 
frir et  d'engager  cette  fois  mon  concours  personnel  pour  cette  surveillance. 

«Recevez,  Monsieur  le  Vice-Président,  l'assurance  de  ma  considération 
très-distinguée. 

«Colmar,  le  20  février  1864 

«  D.  Ortlieb.» 

Le  sous-comité  décide  l'envoi  du  rapport  de  M.  Ortlieb  au  comité  central 
et,  en  rendant  hommage  au  zèle  dont  M.  Ortlieb  n'a  cessé  de  donner  des 
preuves,  insiste  auprès  de  lui  pour  qu'il  veuille  bien,  au  moins  pour  cette 
année  encore,  continuer  des  soins  dont  le  comité  se  verrait  privé  bien  à 
regret. 

M.  Véron-Réville  fait  part  au  comité  d'une  légère  difficulté  qui  se  pré- 
sente pour  les  travaux  de  déblai  projetés  au  château  de  Hoh-Landsberg. 
M.  Manheimer,  auquel  on  s'était  d'abord  adressé  pour  obtenir  l'autorisa- 
tion de  faire  ces  déblais  et  de  couper  les  arbres  qui  pourraient  gêner  l'opé- 
ration, a  écrit  qu'il  ne  croyait  pas  pouvoir  prendre  sur  lui  seul  d'accorder 
cette  autorisation  et  qu'il  serait  bon  de  s'assurer  de  l'assentiment  de 
M.  Dreyfuss,  de  Ribeauvillé,  copropriétaire  avec  M.  Manheimer  du  Hoh- 
Landsberg. 

Le  sous-comité  décide  que  le  vice-président  priera  M.  le  Préfet  de  vou- 
loir bien  écrire  de  nouveau  à  M.  Manheimer  qui,  sur  sa  demande,  s'en- 
tendra sans  doute  avec  M.  Dreyfuss,  lequel  ne  lui  refusera  certainement 
pas  son  consentement. 

Le  vice-président  ayant  écrit  à  M.  Schlumberger- Hartmann,  de  Gucb- 
willer,  pour  le  prier  de  se  charger,  s'il  lui  était  possible,  de  la  photogra- 
phie de  la  cloche  de  Lautenbach,  destinée  à  être  vendue,  et  de  faire 


—  137  — 

prendre  l'empreinte  de  l'inscription  qui  s'y  trouvait,  M.  Schlumberger  a 
poussé  l'obligeance  jusqu'à  faire  chercher  à  Laulcnbach  cette  cloche  qui  a 
été  déposée  dans  sa  cour,  à  Guebwiller,  et  dont  la  photographie  a  été  tirée 
à  quatre  exemplaires  que  M.  Schlumberger  dépose  sur  le  bureau.  L'em- 
preinte de  l'inscription,  moulée  en  plomb  par  un  procédé  assez  analogue  à 
celui  du  clichage,  est  ofl'erte  par  M.  Schlumberger  au  musée  de  la  ville  de 
Golmar. 

M.  Huot  se  charge  de  la  lecture  et  de  l'interprétation  de  cette  des- 
cription. 

Distribution  est  faite,  au  nom  de  M.  le  colonel  de  Morlet,  de  Strasboui'g 
à  ceux  des  membres  du  comité  qui  ne  l'ont  pas  encore  reçue,  de  la  photo- 
lithographie  des  tombes  de  Lorentzen;  le  sous-comité  charge  le  secrétaire 
d'adresser  en  son  nom  des  remercîments  à  M.  de  Morlet. 

M.  Véron-Réville  ayant  été  informé,  il  y  a  quelque  temps,  que  des  fouilles 
et  des  extractions  de  pierres  avaient  été  récemment  pratiquées  dans  l'in- 
térieur du  château  de  Winecke  qui  domine  le  village  de  Katzenthal,  s'est 
adressé  à  M.  le  Préfet  pour  faire  cesser  un  état  de  choses  qui,  s'il  conti- 
nuait, compromettrait  gravement  l'existence  d'un  monument  historique 
intéressant;  les  ordres  donnés  à  cet  égard  par  l'administration  préfectorale 
font  espérer  que  les  ruines  du  Winecke  seront  désormais  respectées. 

Une  discussion  intéressante  s'engage  à  ce  propos  sur  les  mesures  les 
plus  efficaces  pour  arrêter  la  destruction,  par  la  main  de  l'homme,  de  nos 
vieux  châteaux.  Quelques  membres  font  observer  que,  dans  bien  des  cas, 
une  prière,  un  appel  à  l'honneur  et  au  patriotisme  ont  produit  de  meilleurs 
résultats  qu'une  défense,  même  formulée  dans  les  termes  les  plus  sévères. 
M.  Schlumberger-Hartmann  communique  au  comité  le  texte  d'un  Avis  au 
public  qu'il  a  fait  mettre  aux  ruines  du  château  de  Winecke-Hugstein,  an- 
cienne demeure  des  abbés  de  Murbach,  dans  la  vallée  de  Guebwiller;  cet 
avis  est  conçu  en  ces  termes  : 

«Tout  citoyen  est  prié  de  respecter  et  de  ménager  ces  ruines  (es  ivird 
Jedermann  gebeten  diese  Allerthümer  zu  verschonen  und  in  Ehren  zu 
halten).  » 

M.  Foltz  rappelle  au  comité  qu'une  somme  de  15,500  fr.  a  été  accordée 
l'année  dernière  par  le  Ministère  de  la  maison  de  l'Empereur  pour  la  res- 
tauration de  l'anciennne  église  abbatiale  de  Murbach,  classée  parmi  les 
monuments  historiques  de  la  France;  il  demande  si  ces  travaux,  reconnus 
dès  lors  comme  très-urgents,  ont  déjà  reçu  un  commencement  d'exécution. 

M.  Frantz,  chef  de  division  à  la  Préfecture,  entre  à  ce  sujet  dans  quel- 
ques détails  et  donne  les  renseignements  suivants  : 

9* 


—  138  — 

Le  Ministère  des  beaux-arts  n'accorde  d'allocations  pour  la  restauration 
des  monuments  historiques  classés,  qu'à  la  condition  que  les  communes, 
propriétaires  de  ces  monuments ,  votent  des  sommes  égales  à  ces  alloca- 
tions; cette  condition  vient  d'être  remplie  par  la  commune  de  Murbach  et 
les  travaux  de  restauration  de  l'église  vont  bientôt  être  entrepris  sous  la 
direction  de  M.  Bœswillwald,  architecte,  attaché  au  Ministère  des  beaux- 
arts  en  qualité  d'inspecteur  des  monuments  historiques.  Ces  travaux,  dont 
le  devis  s'élève  à  30,965  fr.,  comprennent  :  1^  la  dépose  et  la  reconstruction 
du  mur  sud-ouest  du  transept  sud;  2°  le  rétablissement  des  arcades  rom- 
pues du  chœur;  3°  des  réparations  à  la  première  voûte  du  bas  côté  sud, 
4°  la  reprise  à  l'extérieur  des  murs  du  chœur  et  la  reconstruction  de  la 
sacristie. 

M.  Laurent  Atthalin  entretient  le  sous-comité  de  l'intérêt  archéologique 
que  présentent  certaines  portions  de  la  vieille  école  de  la  rue  Saint-Jean , 
située  vis-à-vis  de  l'ancienne  maison  des  chevahers  de  Saint-Jean;  il  croit 
devoir,  au  moment  où  les  projets  de  l'édihté  colmarienne  vont  faire  dispa- 
raître ces  bâtiments,  exprimer  le  vœu  que  les  parties  les  plus  intéressantes, 
notamment  la  tourelle  et  la  porte  d'entrée,  en  soient  conservées. 

Le  même  membre  communique  encore  au  comité  un  projet  qui  tendrait 
à  percer  le  mur  des  Unterlinden  donnant  sur  la  place  l'ieiïel,  et  à  y  pra- 
tiquer des  ouvertures  dans  l'axe  des  deux  galeries  du  doître  perpendicu  - 
laires  à  la  place;  ce  projet,  s'il  était  mis  à  exécution,  aurait  pour  résultat 
de  révéler  l'existence  du  beau  cloître  des  Unterîiuv-Ci:  ?iix  étrangers  qui 
visitent  Colmar  et  qui  souvent  en  repartent  sans  avoir  vu  une  des  choses 
les  plus  intéressantes  que  notre  ville  puisse  offrir  à  la  curiosité  des  touristes 
aussi  qu'à  l'étude  des  archéologues. 

Le  comité  reconnaît  avec  M.  Atthalin  l'utilité  qu'il  y  aurait  à  mettre  à 
jour  l'intérieur  du  cloître  des  Unterlinden  aujourd'hui  complètement  res- 
tauré, et  qui  s'est  récemment  embelli  du  monument  Schœngauer,  une  des 
œuvres  les  plus  importantes  de  M.  Auguste  Bartholdi;  toutefois,  il  se  borne 
à  consigner  dans  son  procès-verbal  les  deux  projets  qui  lui  sont  soumis 
par  M.  Atthalin,  attendant,  pour  formuler  son  avis,  que  le  conseil  muni- 
cipal en  ait  été  saisi. 

La  séance  est  levée  à  trois  heures  et  demie. 


—  139  — 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  22  février  1864. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents  :  MM.  Bœrsch,  Eissen,  Heilz,  Klotz,  colonel  de  Morlet,  Saum, 
baron  de  Schauenburg,  SitTer,  Straub. 

Le  secrétaire  dépose  le  Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  Picardie, 
1863,  nM. 

Il  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la  dernière  séance,  qui  est  adopté. 

Il  communique  ensuite  une  lettre  de  M.  le  docteur  L.  Leclerc,  secrétaire 
de  la  Société  d'archéologie  de  Gonstantine,  qui  offre  d'entrer  en  relations 
avec  la  Société  d'Alsace. 

Le  Comité  décide  que  l'on  fera  parvenir  à  la  Société  de  Gonstantine  tout 
ce  qu'il  y  a  de  disponible  du  bulletin,  et  que  l'on  continuera  désormais  à 
lui  adresser  régulièrement  les  publications  de  la  Société. 

Le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  suivantes  depuis  la  dernière 
réunion  : 

A  M.  Véron-Réville;  convocation  pour  la  séance  du  14  mars  1864,  des- 
tinée au  renouvellement  du  bureau; 

A  M.  Verdin,  propriétaire  à  Strasbourg;  remercîments  de  son  intention 
de  donner  des  objets  antiques  à  la  Société; 

A  MM.  Gœtz,  marchands  de  bois  à  Brumath;  demande  s'ils  veulent  se 
dessaisir  de  quelques  fragments  antiques  déposés  dans  leur  propriété; 

A  M.  Ringel,  pasteur  à  Diemeringen;  remercîments  pour  l'envoi  d'objets 
antiques  récemment  trouvés  à  Mackwiller;  annonce  d'un  vote  de  300  fr. 
pour  continuer  ces  fouilles; 

Envoi  de  la  dernière  livraison  du  bulletin  à  M.  le  Ministre  de  l'intérieur 
et  au  Ministre  secrétaire  d'État; 

AM.  Paul  ilistelhuber;  accusé  de  réception  de  sa  note  sur  le  mémoire 
de  M.  Levrault  ; 

A  M.  Ernest  Lehr,  secrétaire  général  du  Directoire,  au  sujet  de  l'écusson 
de  la  famille  Hammerer; 

A  M.  Véron-Réville;  réponse  à  sa  lettre  du  15;  questions  d'intérieur; 

A  M.  Kast,  agent  voyer  à  Wasselonne;  envoi  de  la  dernière  livraison  de 
notre  bulletin. 

M.  Klotz  soumet  au  Gomité  une  médaille  envoyée  par  M.  Sachs,  ecclé- 


~  140  — 

siasiique  du  grand  -  duché  de  Bade,  à  la  mairie  de  Strasbourg,  et  donne 
lecture  d'une  notice  à  ce  sujet. 

Le  Comité  décide  l'insertion  de  celte  notice  aux  mémoires,  avec  jepro- 
duction  et  traduction  de  la  lettre  d'envoi. 

Il  vote  des  remercînienls  à  M.  Sachs. 

M.  Saum  annonce  que  la  succession  de  feu  M.  Massé  lail  don  à  la  So- 
ciété d'une  dalle  sculptée,  de  provenance  inconnue,  représentant  un  dau- 
phin. —  Remercîments. 

M.  Siffer  donne  lecture  d'une  notice  sur  une  charte  du  quinzième  siècle, 
relative  à  une  affaire  de  dîme,  et  mentionnant  trois  locahtés  qui  n'existent 
plus,  Ramshard,  Kronenbruch  et  Buchhurst,  du  canton  de  Wœrth. 

Le  président  communique  au  Comité  la  lettre  suivante  : 

«Monsieur  le  Président,  le  Comité  de  la  Société  des  monuments  histo- 
riques d'Alsace  vient  de  publier  dans  le  Bulletin  (t.  II,  p.  i06)  une  intéres- 
sante note  de  M.  le  baron  de  Schauenburg  sur  une  pierre  armoriée  trou- 
vée dans  la  maison  n°  10  de  la  rue  Mercière,  à  Strasbourg. 

«M.  de  Schauenburg  a  reconnu  avec  raison  dans  l'un  des  deux  écussons 
gravés  sur  cette  pierre  celui  de  la  famille  Ilammerer,  et  s'appuyant  tant 
sur  l'antiquité  présumée  de  la  maison  dont  il  s'agit  que  sur  les  indications 
de  son  propriétaire  actuel,  il  attribue  et  l'écusson  et  la  construction  de  la 
maison  à  l'ammeister  Jean  Hammerei'. 

«Lorsque,  dans  le  courant  de  l'été  dernier,  le  Cotirrie?'  du  Bas-Rhin 
annonça  la  découverte  de  ce  bas-relief  et  en  donna  la  description  som- 
mah'e,  je  me  permis  déjà  de  vous  soumettre,  par  une  petite  note,  mes 
doutes  sur  l'attribution  qui  en  était  faite  à  l'ammeister  Hammerer.  Mais 
comme  je  n'étais  pas  parvenu  à  me  faire  montrer  la  pierre,  vous  avez  sans 
doute  jugé.  Monsieur  le  Pj'ésident,  que  mon  observation  ne  reposait  pas 
sur  un  fondement  assez  solide,  et  avec  toute  raison,  vous  ne  l'avez  pas  pré- 
sentée au  Comité  à  cette  époque. 

«Aujourd'hui  qu'un  dessin  élégant  me  permet  d'émettre  mon  opinion 
moins  à  la  légère,  je  prends  la  liberté  de  renouveler  mes  respectueuses 
objections.  Selon  moi,  la  pierre  ne  porte  pas  les  armoiries  de  Jean  Ham- 
merer, parce  que  l'écusson  de  droite,  qui  est  un  écusson  d'alliance,  n'est 
celui  d'aucune  des  deux  femmes  successivement  épousées  par  ce  magistral. 
Jean  Hammerer  s'était  marié  en  premières  noces  avec  Dorothée  Pfarrer, 
sœur  d'une  autre  notabilité  strasbourgeoise,  de  l'ammeister  Mathias  Pfarrei', 
qui  seul,  dans  la  longue  liste  de  ces  fonctionnaires,  exerça  sept  fois  la 
régence.  Il  se  maria  en  secondes  noces  avec  Marguerite  Wilhelm,  qui, 
selon  toutes  les  probabilités,  descendait  de  l'ammeister  Gœtz  Wilhelm,  du 


—  U1  — 

milieu  du  quatorzième  siècle.  D'après  une  autre  indication,  Marguerite 
\Yilhelm  appartenait  à  une  famille  différente,  qui  portait:  de  gueules  à  la 
bande  d'ar?ent  chargée  de  trois  elands  au  naturel,  feuilles  de  sinople. 

"Or,  les  armes  des  Pfarrer  et  de  l'arameister  Wilhelm,  si  c'est  de  lui 
qu'est  issue  la  seconde  femme  de  Hammerer,  n'ont  aucune  analogie  avec 
celles  qui  sont  figurées  sur  la  pierre.  Pfarrer  portait  :  d'or  à  la  bande  ondée 
d'azur  (aUas  d'argent),  parti  de  gueules  (Hertzog,  liv.  VIII,  p.  9i).  Wilhelm 
portait  :  de  sable  à  la  face  d'or  accompagné*  de  trois  coquilles  d'argent  2  et  1 . 
(Ibid.,  p.  54.) 

<rEn  réahté,  l'écusson  dont  je  parle  est  celui  d'une  autre  famille  illustre 
dans  les  fastes  de  Strasbourg,  des  Obrecht,  qui  portaient  au  seizième  siècle  : 
d'argent  au  rencontre  de  bœuf  de  sable  et  une  bordure  d'or  (plus  tard,  on 
a  supprimé  la  bordure).  Or,  Henri  Hammerer,  fils  aîné  de  l'arameister,  qui 
siégea  comme  son  père  dans  le  magistrat  sans  cependant  parvenir  à  la 
dignité  suprême,  avait  pour  femme  une  fille  de  Thomas  Obrecht  et  d'Elisa- 
beth Roth,  Rosine  Obrecht,  sœur  cadette  de  l'arameister  Henri  Obrecht 
(né  1536,  7  1606).  Ne  vous  semble-t-il  pas  infiniment  probable.  Monsieur 
le  Président,  que  c'est  à  Henri  Hammerer  que  doit  être  attribuée  la  con- 
struction de  la  maison  de  la  rue  Mercière,  et  que,  s'il  existe  du  contraire 
des  preuves  que  je  ne  puis  discuter,  ne  les  connaissant  pas,  ce  sont  dans 
tous  les  cas  ses  armes  que  représente  le  bas-reUef?  J'ajoute  que  Henri 
Hammerer  paraît  avoir  été  un  grand  amateur  de  bâtisses,  car  il  résulte 
d'une  note  manuscrite  du  chroniqueur  et  généalogiste  Reichard ,  qu'en 
1566,  il  acheta,  au  coin  de  la  Spiessgasse,  probablement  à  côté  de  la  mai- 
son Camraerzell,  trois  baraques  qu'il  fit  démohr,  et  sur  l'emplacement 
desquelles  l'architecte  Martin  Schorndorfer  éleva  pour  lui  une  belle  et  grande 
construction. 

"  Si  vous  pensez  que  ces  renseignements  puissent  oflVir  quelque  intérêt , 
je  vous  serais  obligé  de  vouloir  bien  les  communiquer  au  Comité  dans 
l'une  de  ses  prochaines  séances. 

«  Veuillez  agréer,  Monsieur  le  Président,  l'assurance  de  raa  haute  consi- 
dération et  de  mon  dévouement. 

«Ernest  Lehr.j» 

Le  président  lit  ensuite  une  lettre  de  M.  Paul  Ristelhuber,  qui  conteste 
certaines  étyraologies  et  assertions  contenues  dans  le  dernier  mémoire  de 
M.  L.  Levrault  sur  la  découverte  de  sépultures  antiques  à  Obernai.  Il  pense 
que  l'opinion  de  vouloir  faire  dériver  le  nom  du  village  d'Ingmarsheim, 
disparu  depuis  la  fin  du  treizième  ou  au  commencement  du  quatorzième 
siècle,  d'un  ancien  temple  de  Mars,  est  beaucoup  moins  soutenable  que 


—  142  — 

l'élymologie  qui  ramènernil,  ce  nom  au  mol  de  Mark  ou  Marsch,  justifié, 
selon  lui,  par  le  voisinage  du  payus  mérovingien.  Selon  Schœpflin,  les 
dénominations  franques  des  endroits  se  composent  généralement  de  deux 
vocables,  dont  le  premier  indique  le  plus  ancien  propriétaire,  et  le  second 
la  condition  ou  la  situation  du  lieu.  D'après  cela,  l'étymologie  de  M.  Levraull, 
ainsi  que  celle  qui  se  rapporterait  au  mot  de  Marche,  devrait  s'évanouir 
devant  celle  plus  simple  à'înginar'-s-heim,  demeure  âlngmar  ou  de  Hink- 
mcrr.  D'après  M.  Stoflel,  le  nom»  û'Tngmar  ou  Hinkmar  se  traduirait  dans 
l'allemand  moderne  par  Stammberühmter  (d'origine  célèbre,  illustre).  Ingo 
est,  selon  Grimm,  le  fils  de  Mannus  et  le  père  des  Ingœvones.  A  la  même 
famille  appartiennent  les  Jngilhard,  Jngilrcmim  (Enguerrand),  et  avec  toute 
évidence,  ïngmar  ou  Hincmar.  La  même  remarque  paraît  devoir  être  faite, 
selon  M.  Ristelhuber,  sur  Oltmarsheim ,  pour  laquelle  on  a  aussi  cberché 
des  étymologies  inadmissibles,  et  qui  signifie  simplement  la  demeure 
d'Ottmar. 

Les  monuments  toujours  vivants  de  la  linguistique  paraissent  à  M.  Ristel- 
huber dignes  d'éveiller  tout  l'intérêt  de  la  Société.* 

Le  président  communique  une  lettre  de  S.  Exe.  le  Ministre  de  l'instruc- 
tion publique,  concernant  la  distribution  des  récompenses  aux  Sociétés 
savantes  des  départements,  qui  aura  lieu  le  l'^''  et  le  2  avril. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


Séance  du  Comité  du  Ui  mars  1864. 

Présidence  de  M.  SPACH. 


Présents  :  MM.  Bœrsch,  Brielle,  secrétaire  du  comité  du  Haut -Rhin, 
Eissen,  Grass,  Guerber,  lleilz,  Huot,  membre  du  comité  du  Ilaut-Rhin, 
Klotz,  Morin,  Ringeisen,  baron  de  Schauenburg,  Siffer, 

Le  secrétaire  dépose  : 

Bulletin  de  la  Société  Nivernaise  des  sciences,  lettres  et  arts,  t.  il,  W^  série; 

Bulletin  de  la  Société  impériale  des  antiquaires  de  France,  1863,  IIP  tri- 
mestre; 

Bévue  des  Sociétés  savantes  des  départem^ents,  IIP  série,  t.  R; 

1.  Le  procès-verbal  de  l'une  des  séances  suivantes  contiendra  la  réplique  de  M.  Levraiilt^ 
et  la  rectilication  de  l'erreur,  que  M.  Ristelhuber  lui  impute. 


—  143  — 

Messager  des  sciences  Jiisloriques ,  ou  Archives  des  arts  et  de  la  biblio- 
graphie de  Belgique,  année  1863,  4^  livraison. 

Le  secrétaire  du  comité  du  Haut-Rhin  donne  lecture  du  procès-verbal 
de  la  dernière  séance  de  ce  comité,  qui  sera  inséré  dans  la  prochaine  livrai- 
son du  Bulletin. 

Le  secrétaire  du  comité  du  Bas-Rhin  donne  lecture  du  procès-verbal  de 
la  séance  extraordinaire  du  22  février,  qui  est  adopté. 

Le  président  annonce  avoir  écrit  les  lettres  suivantes  : 

A  M.  Sachs,  doyen  à  Carlsruhe;  remercîments  de  l'envoi  de  la  médaille, 
trouvée  en  1760,  dans  le  maître-autel  de  la  cathédrale  de  Strasbourg; 

A  M.  Leclerc,  secrétaire  de  la  Société  archéologique  de  Constantine; 
acceptation  empressée  de  l'échange  des  Bulletins  entre  les  deux  Sociétés; 

A  M.  Charles  Mehl,  représentant  de  la  succession  Massé;  remercîments 
de  la  remise  d'une  pierre  historiée; 

A  M.  Paul  Ristelhuber,  homme  de  lettres;  annonce  de  la  communica- 
tion faite  au  comité  de  sa  lettre  sur  Ingmarsheim  ; 

A  M.  E.  Lehr,  secrétaire  général  du  Directoire;  annonce  que  sa  lettre 
complémentaire  sur  les  armes  de  la  famille  Hammerer  sera  insérée  au 
Bulletin; 

A  M.  Véron-Réville;  affaires  d'administration  intérieure; 

A  M.  Berger-Levrault;  annonce  que  le  comité  ne  peut  admettre  la  vente 
par  livraisons,  mais  seulement  par  volume,  après  fixation  d'un  prix  de 
nature  à  garantir  les  intérêts  des  membres  de  la  Société  contre  les  simples 
acheteurs  du  Bulletin; 

A  M.  Morin,  architecte  du  département;  prière  de  prendre  l'estampage 
d'une  inscription  à  Pfaffenhoffen  ; 

A  M.  Anatole  de  Barthélémy;  pour  le  prier  de  nous  représenter  à  la 
réunion  générale  des  Sociétés  savantes,  le  2  avril  prochain; 

A  M.  de  Belle-Trauttwein,  bibliothécaire  à  Berlin;  envoi  de  la  2**  série 
de  notre  Bulletin  ; 

A  M.  de  Longpérier,  membre  de  l'Institut;  réponse  explicative  à  sa  lettre 
du  24  février  (au  sujet  du  médailler  Dorlan)  ; 

A  M.  Schneller,  président  de  la  Société  historique  à  Lucerne;  affaires 
d'administration; 

A  M.  Nicklès,  à  Benfeld;  demande  d'envoyer  son  mémoire  sur  Ehl  (Hel- 
vetus); 

A  M.  le  Préfet  du  Haut- Rhin  ;  accusé  de  réception  du  mandat  de  500  (v., 
montant  de  l'allocation  du  Conseil  général  du  Haut -Rhin  pour  l'exer- 
cice 1864. 


—  144  — 

Le  président  informe  le  comité  du  changement  de  résidence  de  M.  le 
Préfet  du  Haut-Pdiin,  deuxième  président  honoraire,  et  se  charge  de  lui 
exprimer  les  regrets  de  la  Société. 

Il  fait  part  des  propositions  suivantes  de  membres  à  admettre: 

MM.  Constant  Limon,  avocat  et  propriétaire,  quai  des  Bateliers,  18,  à 
Strasbourg,  présenté  par  M.  Sabourin  de  Nanton; 

Bürel,  curé  de  Schleithal,  présenté  par  M.  Schaffner,  curé  de  Wissem- 
bourg  ; 

Charles  Geisen,  agent  voyer,  rue  de  l'Écarlate,  5,  à  Strasbourg,  présenté 
par  M.  P.  Ristelhuber; 

Ilildenbrand,  conseiller  à  la  Cour  impériale  de  Colmar,  présenté  par 
M.  Hamberger; 

Wendling,  juge  au  tribunal  civil  de  Colmar,  présenté  par  le  même; 

Méline,  id.  id. 

Ces  diverses  personnes  sont  proclamées  membres  de  la  Société. 

M.  le  président  lit  une  lettre  de  M.  de  Longpérier,  qui  réclame  contre  une 
erreur  commise  par  M.  Boyer,  à  la  dernière  assemblée  générale  de  Colmar; 
il  annonce  avoir  donné  des  explications  à  M.  de  Longpérier. 

Il  communique  une  lettre  de  M.  Schneller,  président  de  la  Société  histo- 
rique de  Lucerne,  Uri,  Schwytz,  Unterwaiden  et  Zug,  qui  demandée  être 
reçu  membre  honoraire  de  la  Société.  Le  président  ajoute  que  ce  savant  a 
publié  un  grand  nombre  de  mémoires  d'une  grande  valeur  et  un  partie 
relatives  à  l'Alsace.  Cette  proposition,  par  décision  du  comité,  sera  soumise 
à  l'assemblée  générale  de  Colmar. 

M.  le  docteur  Wieger  annonce  au  président  qu'il  met  à  la  disposition 
de  la  Société  un  certain  nombre  d'objets  d'antiquités  trouvés  à  Kraut- 
weiler. 

M.  Saum  écrit  au  sujet  de  la  carte  de  Schweighœuser,  annotée  par 
M.  Jung,  que,  pour  le  moment,  M.  Simon  n'est  pas  encore  en  mesure  de 
produire  les  deux  planches  demandées. 

L'ordre  du  jour  appelle  le  renouvellement  réglementaire  du  bureau, 
c'est-à-dire  du  vice-président,  du  secrétaire,  de  l'archiviste  et  du  tré- 
sorier. 

Le  comité  décide  qu'il  votera  par  un  seul  bulletin  d'ensemble  pour  les 
quatre  fonctionnaires.  Le  président  et  le  secrétaire  procèdent  au  dépouil- 
lement du  scrutin. 

Treize  votants.  —  M.  le  grand -vicaire  Schirr  (absent)  obtient  treize  voix 
pour  les  fonctions  de  vice-président. 

M.  le  docteur  Eissen,  douze  voix  pour  les  fonctions  de  secrétaire. 


—  U5  — 

M.  ïïeilz,  dix  voix  pour  celles  d'archiviste. 

M,  Klotz,  douze  voix  pour  celles  de  trésorier. 

En  conséquence,  sont  proclamés  pour  l'année  1804-1865  :  vice-prési- 
dent, M.  Schirr;  secrétaire,  ]\I.  Eissen;  archiviste,  M.  Heitz;  trésorier, 
M.  Klotz. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  propose  de  mettre  désormais  à  la  disposi- 
tion de  MM.  les  collaborateurs  du  Bulletin ,  un  tirage  à  part  de  leurs  tra- 
vaux, à  un  certain  nombre  d'exemplaires,  à  l'instar  de  ce  qui  se  fait  à  la 
Société  hltéraire. 

M.  Huot  propose  de  donner  cinquante  exemplaires,  ce  qui  est  appuyé 
par  M.  Bœrscli  et  par  le  secrétaire.  M.  Bœrsch  espère  que  M.  le  président 
voudra  bien  se  charger  de  prendre  des  arrangements  avec  l'imprimerie 
du  Bulletin  pour  le  prix  de  la  feuille  et  de  la  demi -feuille,  et  d'en  rendre 
compte  au  comité  à  sa  prochaine  réunion. 

M.  le  baron  de  Schauenburg  lit  le  mémoire  suivant  sur  les  antiquités  de 
Stéphansfeld  : 

«  Il  y  a  bien  longtemps  déjà  qu'une  commission,  choisie  dans  le  sein  du 
comité,  et  de  laquelle  j'ai  eu  l'honneur  de  faire  partie  avec  MM.  Jung,  de 
Morlet,  de  Ring  et  Morin,  s'est  rendue  à  l'asile  départemental  de  Stéphans- 
feld, pour  examiner  des  antiquités  découvertes  dans  l'enceinte  même  de 
l'asile,  recueillies  et  conservées  par  les  soins  éclairés  d'un  homme  de  cœur 
et  de  grand  mérite,  M.  David  Richard,  qui  en  était  alors  le  directeur,  et  qui 
a  été  trop  tôt  enlevé  au  bien  immense  qu'il  y  faisait. 

«A  notre  savant  et  profondément  regretté  collègue,  M.  Jung,  revenaient 
de  droit  et  la  présidence  de  la  commission  et  la  tâche  de  faire,  avec  la 
haute  autorité  scientifique  qui  n'appartenait  qu'à  lui,  l'appréciation  judi- 
cieuse et  certaine  de  l'origine,  de  l'âge,  de  la  destination  et  de  l'importance 
archéologique  des  objets  et  de  vous  en  rendre  compte. 

«Malheureusement  les  travaux  sans  nombre  que  son  immense  savoir, 
sa  vaste  érudition  et  ses  utiles  fonctions  accumulaient  incessamment  sur  lui 
n'ont  pas  permis  qu'il  pût  leur  dérober  le  court  loisir  qui  lui  aurait  suffi 
pour  donner  une  forme  attrayante  et  instructive  à  ses  notes  sur  les  anti- 
quités de  Stéphansfeld. 

«  Notre  excellent  et  cher  président,  à  qui  je  ne  sais  rien  refuser,  a  voulu 
que  le  moins  capable  des  membres  de  la  commission  se  chargeât  d'un  tra- 
vail évidemment  au-dessus  de  ses  forces,  n'ayant  pas  même  pour  guide 
les  notes  prises  par  M.  Jung. 

«C'est  vous  dire  assez,  Messieurs,  que  vous  allez  sentir  une  fois  de  plus 
tout  ce  que  vous  avez  perdu  dans  notre  savant  et  excellent  collègue;  c'est 

II'Skrie.  —  T.  II.  —  (P.-V.)  '10 


—  146  — 

vous  dire  aussi  que  je  compte  beaucoup  sur  la  bienveillante  indulgence  à 
laquelle  me  donne  droit  un  évident  sacrifice  d'amour-propre. 

«  Tous  les  objets  formant  la  précieuse  et  riche  collection  dont  j'ai  à  vous 
entretenir  ont  été  découverts  pendant  les  quinze  dernières  années,  à  la 
faveur  des  démolitions  et  reconstructions  successives  qui  ont  fait  de  notre 
asile  départemental  ce  qu'il  est  aujourd'hui,  un  établissement  modèle,  un 
monument  aussi  remarquable  par  sa  grandeur  et  son  élégance  que  par 
l'utihté  de  sa  destination  et  la  manière  dont  il  y  est  approprié. 

«Il  serait  superflu  de  vous  rappeler  ce  qu'a  été  Stéphansfeld  depuis,  1220, 
époque  de  sa  fondation  par  les  comtes  de  Werde,  landgraves  d'Alsace,  et 
trop  scabreux  pour  moi  dem'aventurer  comme  aurait  pu  le  faire  sans  péril 
notre  savant  et  regretté  collègue,  à  la  recherche  de  ce  qu'il  a  pu  être  à 
des  époques  plus  reculées. 

«  Obligé  de  prendre  un  moment  sa  place,  sans  pouvoir  la  remplir,  je  dois 
me  borner  prudemment  à  consigner  ici  la  remarque  d'un  fait  dont  la  signi- 
fication ouvre  un  vaste  champ  aux  suppositions,  à  savoir  que  la  presque 
totalité  des  objets  et  fragments  antiques  découverts  à  Stéphansfeld,  au 
nombre  de  plus  de  200,  remontent  à  l'époque  de  foccupation  romaine  et 
ont  été  trouvés,  à  peu  d'exceptions  près,  dans  un  espace  de  très-peu  d'é- 
tendue, situé  au  sud-est  de  l'abside  de  la  chapelle,  c'est-à-dire  au  centre 
même  de  l'établissement. 

«Là,  en  effet,  les  objets  de  toute  nature  étaient,  pour  ainsi  dire,  accu- 
mulés, comme  pour  témoigner  qu'un  ancien  établissement  d'une  certaine 
importance  occupait  avant  la  fondation  des  comtes  de  Werd  la  place  de 
l'asile  actuel,  et  était  alors,  comme  aujourd'hui,  mais  avec  une  destinalion 
différente,  une  dépendance  de  ßrumath  (Brocomagus),  ville  romaine. 

«  Voici  à  l'appui  de  cette  remarque  la  nomenclature  des  objets  formant  la 
collection: 

«Epoque  romaine: 

«Deux  cercueils  en  pierre  des  Vosges,  creusés  à  angles  droits,  avec 
couvercles  à  pans  inclinés,  dont  l'un  entier  et  l'autre  brisé  en  trois  frag- 
ments; 

«  Un  vasque  en  pierre  des  Vosges,  à  pans  verticaux,  dont  l'un  est  sculpté 
d'un  masque  en  relief,  reproduit  sur  l'une  des  planches; 

^'  Trois  fragments  de  miroir  en  métal  trouvés  dans  un  vase  en  terre  rouge, 
orné  d'une  grecque  et  d'une  élégante  guirlande,  représenté  sur  la  planche; 

«  Un  petit  vase  en  bronze;  • 

i^Une  cuillère  à  broche  en  bronze; 

«  Neuf  fragments  d'anneaux  en  bronze; 


—  147  — 

«Une  monnaie  en  bronze  à  l'efïigie  de  Magnence; 

«Un  anneau  en  fer; 

«Trente  et  un  fragments  d'objets  en  fer; 

«Dix  débris  d'ossements,  recueillis  dans  les  cercueils,  seuls  restes  des 
squelettes  qu'ils  contenaient  et  qui  sont  tombés  en  poussière  au  contact  de 
l'air; 

«  Trois  lacrimatoires  en  verre  ; 

«Trois  vases  en  verre; 

«Dix  fragments  de  vases  en  verre; 

«  Trente-trois  vases  en  poterie  :  argile,  grès,  terre  jaune,  rouge,  noire, 
dont  sept  de  grande  dimension,  entiers  ou  presque  entiers; 

((  Cinquante-neuf  fragments  de  poterie,  dont  quelques-uns  ornés  d'élé- 
gants modelages. 

«  Époques  postérieures  : 

«Cinq  clés  en  fer; 

«Deux  éperons; 

«Un  fer  à  cheval; 

«Deux  parties  d'une  agrafe,  représentant  deux  pigeons  et  qu'on  peut 
supposer  avoir  appartenu  au  costume  de  chœur  des  chanoines  de  l'ordre 
de  Saint-Augustin,  possesseurs  de  l'hôpital  du  Saint-Esprit,  qui  a  remplacé 
à  Stéphansfeld  l'hospice  fondé  par  les  landgraves  d'Alsace; 

«Enfin,  une  dalle  armoriée,  portant  l'inscription  :  a  Anniversarimn  fun- 
dauit  hoc  loco  validus  Ludovicus  Zorn  zum  Kiel,  armiger,  et  Agatha  de 
Hochfelden,  nxor  ejus  légitima,  pro  se  et pareulibits  suis,  anno  Christi.» 

«La  date  manque;  mais  Herzog,  donnant  au  décès  d'Agalhe  de  Hoch- 
felden la  date  précise  du  24  avril  1539,  fixe  approximativement  ainsi 
celles  de  la  fondation  et  de  la  pose  de  la  dalle  retrouvée  parmi  les  débris 
de  l'ancienne  nef  et  replacée  dans  la  chapelle  actuelle. 

t'  Une  description  raisonnée  de  tous  ces  objets ,  qui  serait  devenue  sous 
la  plume  de  M.  Jung  une  savante  et  précieuse  leçon  d'histoire  et  d'archéo- 
logie, courrait  trop  grand  risque  de  devenir  fastidieuse  sous  la  mienne, 
sans  vous  rien  apprendre  que  vous  ne  sachiez  mieux  que  moi;  j'espère  que 
vous  me  saurez  gré  de  vous  en  avoir  fait  grâce,  en  ayant  recours  à  un 
moyen  moins  hors  de  ma  portée  de  vous  faire  connaître  les  objets  les  plus 
intéressants  de  la  collection,  ceux  auxquels  j'ai  cru  devoir  donner  la  pré- 
férence, parce  qu'ils  n'ont  pas,  comme  le  surplus,  dans  les  musées  publics 
et  particuliers,  de  nombreux  similaires,  déjà  décrits  et  reproduits. 

«  L'asile  possède  d'ailleurs  un  portefeuille  contenant  des  dessins  coloriés 
de  tous  les  objets  formant  sa  collection,  dessins  exécutés  avec  le  soin  le 


—  148  — 

plus  minutieux  et  presque  tous  à  la  mesure  même  des  objets,  par  un  pen- 
sionnaire de  l'établissement,  sous  la  direction  de  feu  M.  Richard,  circon- 
stance qui  m'a  déterminé  à  restreindre  le  nombre  des  dessins,  également 
fidèles ,  mais  réduits  à  la  mesure  du  format  de  notre  Bulletin,  que  j'ai  l'hon- 
neur d'offrir  au  comité. 

«  Ayant  fait  ces  dessins  sur  pierre  ,  il  n'en  coûtera  à  notre  budget  que  les 
frais  de  tirage  et  de  papier,  si  le  comité  les  juge  dignes  de  paraître  dans  le 
Bulletin.  »  t 

Le  comité  vote  l'impression  de  ce  mémoire  avec  la  reproduction  des 
planches. 

M.  Huot  rend  compte  des  découvertes  faites  dans  le  Haut-Rhin.  C'est  un 
four  trouvé  près  d'Altkirch,  renfermant  des  moules  à  poterie.  Il  soumet  au 
comité  la  photographie  d'une  cloche  de  Lautenbach,  qui  a  dû  être  refon- 
due; reproduction  que  le  comité  avait  demandée  dans  une  de  ses  précé- 
dentes séances. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


ANTIQUITES        DE         STEPHANSFELD 


.0,06. 


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ANTIQUITES        DE         STEPHANSFELD 


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liUi  E  Simon  à  StrasiourJ. 


ANTIQUITES       DE         STEPHANSFELD 


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Pierre    sculptée. 


aulaie'f'/S^''SSffa!g!li^ 


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0,  37 J'. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


PAGES. 

Séance  du  Comité  du  5  janvier  1863 1 

Séance  du  Comité  du  2  février  1863 3 

Séance  du  Comité  du  2  mars  1863 7 

Séance  du  Sous-Comité  du  Haut-Rhin,  tenue  le  26  janvier  1863 7 

Séance  du  Comité  du  9  mars  1863 13 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  16  mars  1863 15 

Séance  du  Comité  du  13  avril  1863 16 

Séance  du  Sous-Coraité  du  Haut-Rhin,  tenue  le  16  mars  1863 17 

Séance  e.xtraordinaire  du  Comité  du  20  avril  1863 21 

Séance  du  Comité  du  A  mai  1863 22 

Assemblée  générale  tenue  à  Colmar,  le  7  mai  1863 31 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  18  mai  1863 39 

Séance  du  Comité  du  1"  juin  1863 42 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  15  juin  1863,  avec  1  gravure   ....  46 

Séance  du  Comité  du  6  juillet  1863,  avec  1  planche  chromo-lithographiée  40 

Composition  du  Comité  d'administration  (fin  novembre  1863) 55 

Liste  des  membres  par  départements,  arrondissements  et  cantons   ....  56 
Sociétés  savantes  avec  lesquelles  la  Société  pour  la  conservation  des  mo- 
numents historiques  d'Alsace  se  trouve  en  rapport 71 

Séance  du  Comité  du  3  août  1863 74 

Séance  du  Sous-Comité  du  Haut-Rhin,  tenue  le  31  juillet  1863 75 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  10  aoiït  1863 78 

Séance  du  Comité  du  5  octobre  1863 80 

Séance  du  Comité  du  2  novembre  1863 88 

Séance  du  Comité  du  7  décembre  1863 100 

Assemblée  générale  du  10  décembre  1863 103 

Exposé  des  Recettes  et  des  Dépenses  de  l'exercice  1862 113 

Séance  du  Comité  du  4  janvier  1864 126 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  18  janvier  1864 130 

Séance  du  Comité  du  8  février  1864 131 

Séance  du  Sous-Comité  du  Haut-Rhin,  tenue  le  22  février  1864 134 

Séance  extraordinaire  du  Comité  du  22  février  1864 139 

Séance  du  Comité  du  14  mars  1864 142 


BULLETIN 


SOCIÉTÉ  POUR  LA  CONSERVATION 


MONUMENTS  HISTORIQUES 


DALSACE 


STRASBOÜUn  ,    IMPRIMERIE    DE    VEUVE    BERGEK-LEV  RAULT. 


BULLETIN 


DE   LA 


SOCIÉTÉ  POUR  LA  CONSERVATION 


DES 


MONUMENTS  HISTORIQUES 

D  ALSACE 


IP  SERIE  —  DEUXIEME  VOLUME 

(1863  -  1864) 


UECXIEME    PAKTIE  —  ME.^OIRES. 


AVEC  GRAVURES  ET  PLANCHES 


VEUVE  BERGER -LEVRAULT  ET  FILS,  LIBRAIRES  -  ÉDITEURS 


PARIS 

RUE  DES  SAINTS-PÈRES,  8 


STRASBOURG 

RUE  DES  JUIFS ,  26 


1864 


NOTICE 


SUR  QUELQUES  DECOUVERTES  ARCHÉOLOGIQUES 

EFFKCTUÉES  DANS  LES  CANTONS 

DE  SAAR-UNION  ET  DE  DRULL\GEN  (ARRONDISSEMENT  DE  SAVERNE). 


La  partie  de  l'arronclissement  de  Saverne,  désig-née  sous  le  nom  de  Lor- 
raine allemande  ',  qui  s'étend  sur  le  versant  occidental  des  Vosges,  jusqu'à 
la  Sarre,  mérite  une  attention  toute  spéciale  de  la  part  des  archéologues.  Les 
fouilles  qui  y  ont  été  exécutées  par  la  Société  des  monuments  historiques 
d'Alsace,  sous  l'habile  direction  de  M.  le  pasteur  RingeP,  ont  fait  appa- 
raître, sur  une  surface  d'environ  six  lieues  carrées,  une  quantité  considé- 
rable de  ruines  et  de  monuments  dont  la  carte  ci-joinle  donne  l'indication, 
et  que  je  classerai  dans  trois  catégories. 

$  1*^'".  —  Enceintes  fortifiées. 

Die  Burg,  dans  la  forêt  de  Ratzwiller  ; 

Grosse  Schmitz,  forêt  dite  Scheidlwald;  Heidenschantz,  forêt  d'Œrmingen. 

§  2.  —  Villa ,  thermes,  tuileries  et  voies  anciennes. 

Mackîviller ,  thermes,  aqueduc,  etc.; 

Heidenhübel  (forêt  de  Saar-Union),  ruines  d'un  établissement  métallur- 
gique, hypocaustes; 
Gorgelhach  (commune  de  Dehlingen),  ruines,  hypocaustes; 
Lutterbacherhof  (commune  d'Œrmingen),  ruines,  marbres; 
Heidenmauer  (commune  de  Saar-Union),  ruines,  marbres; 
Domfessel,  villa,  marbres,  tuiles  romaines; 
Buscherliof  (commune  de  Saar-Union),  tuilerie,  hypocaustes,  fours. 

1.  Ce  territoire,  qui  comprend  les  cantons  de  Saar-Union  et  de  Prulingen,  n'a  jamais  fait 
partie  de  l'Alsace.  Possédé,  à  part  quelques  enclaves,  jusqu'en  1793  par  deux  branches 
distinctes  de  la  maison  de  iNassau,  il. fut  réuni  à  la  république  française  par  décret  de  la 
Convention  nationale,  en  date  du  14  février  1793,  à  l'exception  de  la  ville  de  Vieux-Saar- 
werden,  qui  appartenait  déjà  à  la  France  comme  dépendance  du  duché  de  Lorraine. 

2.  C'est  à  M.  Ringel,  pasteur  de  Diemeringen,  que  sont  dues  toutes  les  découvertes  dont 
il  est  fait  mention  dans  cette  notice. 

Il«  SÉRIE.  —  T.  H.  —  (M.l  \ 


—  2  — 

$  "3.  —  Sépultures. 

Cimetière  deLorentzen,  canton /?e/w;  cimetière  de  Diemeringen;  canton 
Lechberg;  tombes  de  Hatzwiller;  tombes  de  Todtenberg. 

Je  vais  exposer  rapidement  l'état  d'avancement  des  recherches  effectuées 
dans  les  deux  premières  catégories,  puis  je  parlerai  en  détail  des  sépul- 
tures qui  forment  l'objet  spécial  de  cette  notice. 

'V^  Catégorie.  —  Enceintes  fortifiées. 

Les  recherches  que  j'ai  faites  sur  les  enceintes  fortifiées,  se  sont 
bornées  jusqu'à  présent  au  Burg  de  Ratzwiller ,  où  des  objets  appar- 
tenant à  fàge  de  pierre  ont  été  trouvés;  de  nouvelles  fouilles  seront  né- 
cessaires pour  reconnaître  l'origine  de  ce,  Burg  et  de  la  Gross  Schmitz,  qui 
tirent  l'un  et  l'autre  un  grand  intérêt  de  la  proximité  de  deux  monuments 
druidiques,  le  Breitenstein  et  le  Spilzstein.^ 

2*^  Catégorie.  —  Villa,  thermes,  etc. 

Tous  les  monuments  de  cette  catégorie  sont  de  l'époque  gallo-romaine. 
Le  plus  important  est  celui  des  termes  de  Mackwiller,  découvert  en  1859 
par  M.  le  pasteur  Ringel,  et  dont  on  continue  encore  les  fouilles. 

Des  notices  spéciales,  insérées  au  Bulletin  de  la  Société,  ont  donné 
d'intéressants  détails  sur  la  plupart  de  ces  constructions,  dont  les  mo- 
nographies complètes  seront  sans  doute  rédigées  plus  tard.  Dès  à  présent , 
les  beaux  plans  en  relief  exécutés  par  M.  le  pasteur  Ringel,  font  connaître 
l'importance  de  ces  ruines  qui  sont  groupées  le  long  de  deux  voies  ro- 
maines, dont  un  tronçon  est  encore  intact  entre  Mackwiller  et  Domfessel. 

3^  Catégorie.  —  Sépultures. 
Cimetières  de  Lorentzen  et  de  Diemeringen.  Tombes  de  Ratzwiller. 
Lorsque ,  après  avoir  visité  les  ruines  de  Mackwiller .  on  se  dirige  vers 
Domfessel  en  suivant  la  voie  romaine,  on  remarque,  sur  la  droite,  deux 
monticules  qui  recèlent  de  nombreuses  sépultures.  L'un,  le  plus  rapproché 
de  Mackwiller,  fait  partie  du  territoire  de  Diemeringen,  il  s'appelle  le  Lec/t- 
berg;  l'autre  appartient  à  la  banlieue  de  Lorentzen,  canton  Behs.  Sur 
tous  les  deux,  la  charrue  a  souvent  amené  à  la  surface  des  ossements 

1.  Ces  monuments,  situés  sur  les  contins  de  l'Alsace  et  de  la  Lorraine,  sont  désignés 
par  Schweigh?euser  (Antiquités  d'Alsace)  comme  faisant  partie  des  nombreuses  pierres  levées 
que  Specklin  annonce  avoir  existé  de  son  temps  (XVI''  siècle)  sur  la  crête  des  Vosges,  et 
qui,  d'après  ce  savant  ingénieur,  devaient  marquer  les  limites  des  Triljoques  et  des  Médio- 
matriciens. 


-  3  — 

humains,  des  sabres  en  ter,  des  débris  de  fibules  en  bronze,  et  des  boucles 
en  fer  richement  incrustées  d'argent,  accompagnées  de  grains  d'ambre  et 
de  fragments  de  poterie  grossière. 

Le  mamelon  liehs  de  Lorentzen  ayant  été  en  partie  décapé  en  186 J,  par 
suite  de  travaux  exécutés  par  la  commune,  on  y  a  découvert  un  cimetière 
complet,  dont  nous  devons  la  connaissance  à  M.  le  pasteur  Ringel  qui, 
avec  un  zèle  infatigable,  en  a  relevé  tous  les  détails. 


Fig.  a. 

(1/20  de  la  grandeur  réelle.) 

Les  tombes,  fig.  a,  toutes  orientées  vers  l'est,  sont  de  forme  rectangulaire, 
leurs  parois  en  dalles  de  grès  grossièrement  taillées,  ou  en  pierres  cal- 
caires posées  de  champ;  quelquefois  ces  dernières,  placées  à  plat,  for- 
maient une  véritable  muraille.  Souvent,  une  même  tombe  renfermait  plu- 
sieurs squelettes;  on  a  vu  une  seule  fois  deux  corps  superposés,  un  jeune 
homme  au-dessus  d'un  vieillard. 


%.™-,  J^-^i^  ^^^^g£. 


Fig.  h. 

,1  20  de  l.a  grandeur  réelle.) 


_  4  — 

Les  pierres  qui  recouvraieni,  ces  tombes  étaient  brisées,  à  l'exception 
d'une  seule,  fig.  b.  C'est  une  dalle  en  grès  appuyée  sur  des  moellons  cal- 
caires posés  de  champ. 

Au  milieu  du  champ  funèbre,  on  a  découvert,  à  80  centimètres  au-des- 
sous du  sol,  un  caveau  voûté, entièrement  clos,dont  l'intérieur  était  rempli 


"Vjra 


-^r-^!C=^  -^-^ 


(1/20  de  la  grandeur  réelle.) 


de  chaux  vive,  fig.  c.  Sa  longueur  était  de  5  mètres  sur  2  mètres  de  lar- 
geur, et  -1"\80  de  hauteur  sous  clef,  un  pavé  en  dalles  calcaires  soigneuse- 
ment taillées  et  incliné  vers  l'ouest  couvrait  le  sol.  La  voûte  était  con- 
struite en  pierres  calcaires,  avec  mortier  de  chaux  et  sable  de  la  Sarre. 

On  n'a  trouvé  à  l'entour,  ni  cendres,  ni  trace  de  combustible. 

Les  sabres,  boucles  et  fibules  trouvés  dans  quelques-unes  de  ces  tombes 
étaient  entièrement  semblables  aux  objets  de  même  nature  que  l'on  rencontre 
invariablement  dans  les  sépultures  germaines,  frankes  et  burgondes,  je 
n'en  reproduirai  pas  les  dessins,  et  je  me  bornerai  à  signaler  une  bague 
en  argent  et  une  fibule  ornée  d'une  mosaïque  en  verre  filigrane  qui  sont 
représentées  sur  la  planche  ci-jointe,  avec  une  remarquable  exactitude.  ' 

La  bague  ^  porte  sur  le  chaton  une  inscription  en  caractères  de  l'époque 

1.  Celte  plaiifhe  sort  des  presses  de  notre  liahile  imprimeur  M.  Sill)ermaim. 

2.  Le  niiisée  de  Bonn  possède  une  Ijagne  à  peu  près  semi)lai»le  qni  provient  d'nne  tombe 
franke  des  bords  du  Rliin. 


mérovingienne,  dont  rinterprélation  paraît  diflicile;  des  archéologues  dis- 
tingués ont  lu  CHLODOVEVSC?). 

La  fibule  est  un  produit  de  l'ait  antique,  dont  les  Egyptiens  fiy^ent  les 
inventeurs  et  les  Phéniciens  les  propagateurs ';  celte  mosaïque,  d'uneépais- 
seur  d'un  demi-millimètre  à  peine,  est  formée  par  des  fils  de  verre  colorés, 
réunis  en  faisceau,  étirés  et  soumis  au  feu,de  manière  à  former  une  masse 
vitreuse,  dont  la  section  a  produit  un  dessin  admirable  de  finesse  et  de 
régularité  ^  Des  lignes  rouges  parallèles,  espacées  de  2  millimètres,  parta- 
gent la  surface  en  une  série  réguHère  de  j)etits  carrés  bleus,  dans  lesquels 
paraissent  des  points  blancs;  le  tout  formé  par  des  cubes  de  verre  dont  les 
plus  petits  n'ont  que  7,o  de  millimètre  de  côté,  et  les  plus  grands  7,o  de 
millimètre.  On  aperçoit  dans  la  partie  de  la  mosaïque  qui  est  ébréchée, 
l'empreinte  colorée  de  ces  cubes  sur  le  bronze. 

Ce  bijou,  trouvé  dans  une  tombe  d'enfant,  vient-il  de  Home  ou  de  By- 
zance^?  ou  bien  les  Gaulois  qui  ont  parcouru  en  vainqueurs  la  Grèce, 
l'Asie  Mineure  et  l'Egypte,  l'ont-ils  rapporté  de  leurs  excursions? 

Quelle  que  soit  son  origine,  la  présence  de  cette  belle  mosaïque  dans  les 
tombes  de  Lorentzen  est  un  fait  remarquable;  et  la  Société  pour  la  con- 
servation des  monuments  historiques  d'Alsace  doit  s'estimer  heureuse  de 
posséder  un  de  ces  rares  bijoux  que  les  musées  d'antiquité  de  Naples  offrent 
à  l'admiration  des  archéologues  et  que  Venise  et  Florence  ont  impar- 
faitement imités. 

Un  seul  signe  de  l'ère  chrétienne  a  été  découvert, 
c'est  une  petite  ci'oix  en  plomb,  de  forme  grecque, 
trouvée  dans  le  sol  près  d'une  tombe. 

Aucune  médaille ,  aucune  monnaie  n'a  été  re- 
cueillie. 

Fig,  d.  Tels  sont  les  résultats  des  fouilles  du  cimetière 

Grandeur  d'exécution.         (Je  Lorcutzeu,  OÙ  sc  montrc  une  suitc  remarquable 

de  monuments,  depuis  l'art  antique  représenté  par  la  belle  fibule  mosaïque, 

jusqu'à  la  bague  mérovingienne  de  Chlodoveus  et  la  modeste  croix  de 

plomb  qui  annonce  le  christianisme.  C'est  dans  ce  cimetière  que  j'ai  trouvé 

1.  De  la  Borde,  Notice  sur  les  émaux  et  bijoux  du  Louvre,  p.  22. 

2.  Otto  Müller.  —  Handbnch  der  Archéologie  der  Kansl,  p.  436  et  437.  »Mosaïques : 
«  zusainme)t(jeschmolzc)ie  Glasfäden,  welche  im  Durclischnitt  immer  dasselbe  höchsl  zarte 
«  U7id  glänzende  Bild  geben.« 

3.  Byzance  devint  après  la  chute  de  l'empire  d'Occideat  un  centre  de  fabrication  d  orfèvrerie, 
dont  les  produits  se  répandirent  dans  toute  FEurope. 


6  — 


la  tombe  complélemenl  rectangulaire,  dont  la  date  remonte  sans  doute 
très-loin;  tandis  qu'à  Ralzwilier  et  au  Todtenberg ,  fig.  e,  se  présentent  les 
caractères  d'une  époque  plus  récente,  tels  que  le  rétrécissement  de  largeur 
aux  pieds,  et  la  cavité  destinée  à  recevoir  la  tête  du  mort. 


Fig.  e. 

(1/20  de  la  grandeur  réelle.) 

Dans  cette  série  funèbre,  ne  paraît  pas  la  sépulture  par  incinération', 
que  j'ai  cherchée  en  vain  sur  le  sol  de  cette  partie  de  la  Lorraine  allemande 
où  les  monuments  de  l'époque  gallo-romaine  sont  si  nombreux. 

Colonel  DE  MORLET. 

1.  Une  seule  pierre  pouvant  avoii*  celte  tlestiiiatiou  a  été  trouvée,  dit-on,  il  y  a  près  de 
deux  siècles,  près  de  Domfessel  :  c'est  un  bloc  calcaire  à  peu  près  cubique  de  0^,bO  de  côté 
dans  lerpiel  est  creusée  une  cavité  qui  a  pu  recevoir  des  ossements  et  des  cendres.  — 
Cette  pierre  est  déposée  au  musée  de  Saverne. 


-*»®8^S3^S»o~ 


DÉCOUVERTE 

DE  SÉPULTURES  ANTIQUES  A  OBERNAI. 


En  IS^T  le  rédacteur  de  ces  lignes  soumit  à  M.  de  Salvandy,  ministre 
de  l'instruction  publique,  un  mémoire,  qui  fut  communiqué,  je  crois,  au 
Comité  historique  des  arts  et  monuments  et  qui  signalait  sur  le  territoire 
d'Obernai  des  vestiges  d'une  colonisation  bien  antérieure  aux  souvenirs 
traditionnels  et  aux  documents  historiques  dont  l'accord  permet  d'assigner 
à  XEhnhemium  du  testament  de  sainte  Odile  et  de  l'annaliste  d'Ebersheim 
une  origine  au  moins  contemporaine  de  l'époque  mérovingienne. 

Ce  mémoire,  après  avoir  cité  les  monuments  des  âges  divers  de  l'anti- 
quité ,  épars  dans  les  environs  d'Obernai,  tels  que  le  mur  païen  de 
Hohenbourg,  les  agencements  de  rochers  an  Homhurgerberg ,  les  dolmens 
plus  ou  moins  authentiques  de  la  Bloss,  l'enceinte  du  Kœpfel,  les  fossés 
et  les  amas  de  pierres  sèches  du  Heidenkopf  et  du  Purpiirkopf,  enfin  les 
nombreux  tumuli  (hypothétiques ,  puisqu'ils  n'ont  pas  été  fouillés) ,  dont 
les  tertres  boisés  s'échelonnent  sur  divers  points  de  la  forêt  d'Obernai, 
ainsi  que  des  forêts  contiguës  de  Landsperg,  de  Barr,  de  Strasbourg,  de 
Rathsamhausen,  de  Bœrsch,  de  Rosheim,  de  Bischoffsheim,  relatait  la 
découverte  récente  d'un  kelt  de  pierre,  d'un  anneau  de  bronze,  d'un 
fragment  de  collier  en  oves  d'argile  cuite  et  de  quelques  débris  d'un  vase 
de  même  matière,  déterrés  dans  une  vigne  très  à  proximité  d'Obernai, 
au  canton  dit  Hauel,  à  côté  d'ossements  dont  la  disposition  indiquait 
plutôt  un  squelette  accroupi  qu'un  squelette  étendu  sur  le  dos. 

Depuis  l'envoi  du  mémoire  précité,  d'autres  découvertes  du  même 
intérêt  archéologique  ont  encore  eu  lieu  ,  toujours  dues,  comme  la  pre- 
mière, au  hasard.  C'est  ainsi  que  tout  près  de  ce  canton  vignoble  Hauel, 
dans  la  vigne  dite  Spitelskirche ,  on  trouva  à  deux  reprises  différentes  des 
squelettes  ayant  à  leurs  pieds  des  débris  de  poterie  gallo-romaine,  et  l'un 
d'eux ,  ayant  de  plus  à  sa  droite  quelques  grains  d'argile,  recouverts  d'un 
émail  bleu  et  un  morceau  de  fer  très-oxydé,  dont  la  forme  longue,  sans 
pointe,  pouvait  rappeler  l'épée  gauloise.  Ce  morceau  de  fer  et  la  position 
du  squelette  ,  la  tête  au  nord  ,  les  pieds  au  sud,  semblait  révéler  une  phase 
de  l'antiquité,  diflerente  de  celle  indiquée  par  la  première  découverte, 
l'âge  de  fer  au  lieu  de  l'âge  de  pierre  ou  de  bronze. 


La  situation  du  lieu  de  ces  trois  sépultures,  à  l'est  et  presque  à  côté  du 
chemin  d'Obernai  à  Bischoftsheim ,  mérite  d'être  remarquée.  Le  mémoire 
de  1847  désignait  ce  chemin,  près  duquel  on  a  trouvé  à  différentes  époques 
des  débris  de  briques  minces,  striées  et  de  ciment  très-dur,  comme  pou- 
vant devoir  son  origine  à  l'une  de  ces  voies  hypothétiques  qui  devaient 
sillonner  le  pied  des  Vosges,  parallèlement  à  la  grande  voie  de  Milan  à 
Mayence,  voies  vicinales,  militaires  ou  particulières,  dont  les  recherches 
savantes  de  nos  collègues,  MM.  Coste  et  de  Morlet,  ont  démontré  dans  ces 
dernières  années  l'existence. 

Ce  chemin  d'Obernai  à  Bischoffsheim  pouvait  avoir  sa  raison  d'être 
même  avant  l'ère  gallo-romaine  ,  car  il  longe  le  pied  de  la  colline  à  laquelle 
s'adossent  les  deux  communes  et  s'adossèrent  peut-être  des  habitations 
antiques,  soit  médiomatriciennes,  soit  triboques.  Il  aboutit  aussi  au  heu 
appelé  Ingmarsiieim ,  qui  fut  un  très  -  ancien  village ,  que  ses  habitants 
abandonnèrent  au  commencement  du  quatorzième  siècle,  suivant  Schœpflin, 
ou  peu  après  l'année  1298,  pour  venir  se  fixer  derrière  les  murs  d'Obernai. 
Sans  partager  l'opinion  de  quelques  personnes  qui  veulent  faire  dériver 
ce  nom  d'Ingmarsheim  d'un  ancien  temple  de  Mars  et  tout  en  avouant 
notre  préférence  pour  l'élymologie  des  mots  Mark ,  Marsch ,  étymologie 
que  jus'ifiprait  peut-être  le  voisinage  du  pagus  mérovingien  de  Bishovis- 
heim ,  cité  dans  la  donation  de  Dagobert  II  à  l'église  de  Strasbourg ,  il  y 
a  lieu  de  crohe  que,  soit  à  Ingmarsiieim,  soit  sur  l'emplacement  actuel 
d'Obernai ,  il  exista  à  une  époque  de  l'histoire  encore  indéterminée  un 
rassemblement  d'hommes  assez  considérable  pour  servir  d'explication  à  la 
rencontre  de  ces  tombes  antiques. 

C'est  à  environ  500  mètres  des  vignes  où  furent  trouvées  ces  dernières, 
dans  le  canton  rural  appelé  Grünling,  tout  à  fait  en  plaine,  au  bord  de 
la  route  actuelle  d'Obernai  à  Strasbourg  et  à  près  de  trois  kilomètres 
d'Ingmarsheim ,  que  des  ouvriers  occupés  à  creuser  les  fondations  d'une 
maison  sur  un  terrain  jusqu'alors  en  nature  de  vignes ,  mirent,  il  y  a  quel- 
ques jours ,  à  découvert  une  grande  quantité  d'ossements  appartenant  à 
des  squelettes  qui  paraissaient  avoir  été  fort  symétriquement  alignés  et 
couchés  la  lète  à  l'est  et  même  un  peu  nord-est.  Des  poteries  et  des 
vases  de  veri'e,  dont  un  à  émail  bleu,  étaient  aux  pieds  de  quelques-uns 
de  ces  squelettes ,  pas  de  tous ,  comme  pour  servir  à  désigner  ceux  qui 
provenaient  de  défunts  plus  élevés  en  rang  que  leurs  voisins.       * 

II  y  avait  là  des  vases  de  terre  cuite  plus  ou  moins  rougeâtre  de  formes 
très-variées,  préféricules ,  patères ,  lanx ,  palinœ  et  pö/e^te,  sans  autres 
empreintes  que  quelques  stries  très-peu  apparentes,  la  plupart  brisés, 


4^^W 


iah  Ml f  3cr,iT-U-<yTiiv.lli lils i StrMtoiirj 


YASIS.YIRIOLE  ET  ANNULE  THOUYÉS  A OBERNAI EN  FÉVRIER  1863, 


—  9  — 

quelques-uns  encore  entiers  ou  à  peu  près.  Un  petit  vase  sans  anse ,  large 
à  son  ouverture,  rappelait  cette  sorte  de  préféricules  dont  Millin  cite  la 
description  par  Festus  et  qui  sei'vaient  dans  les  sacrifices  à  Ops  Consiva. 

Les  vases  de  verre  étaient  nombreux,  entre  autres  une  patère  sans 
manche  et  une  petite  fiole  parfaitement  conservées;  des  fragments  d'autres 
fioles,  beaucoup  plus  grandes,  étaient  encore  enduits  à  l'intérieur  d'une 
matière  graisseuse  et  appartenaient  évidemment  au  genre  de  ces  vases 
improprement  appelés  lacrymatolres ,  qui  servaient  aux  huiles  et  aux  on- 
guents funéraires. 

Près  d'ossements  relativement  plus  petits  que  les  autres  et  qu'on  pou- 
vait supposer  être  ceux  d'une  femme  ou  d'un  adolescent,  on  ramassa  une 
viriole  et  une  armille,  les  seuls  objets  en  métal  qui  fussent  parmi  tous  ces 
ossements,  sauf  trois  petites  pièces  de  monnaie,  dont  les  flancs  informes 
et  le  module  rappellent  les  monnaies  gauloises,  mais  trop  oxydées  et  trop 
frustes  pour  pouvoir  être  classées.  Ces  trois  pièces  furent  trouvées  dans  un 
des  vases. 

Un  fragment  de  poterie  noircie  était  aussi  de  ce  côté,  entre  deux  ran- 
gées de  squelettes,  et  pourrait  avoir  appartenu  à  la  partie  inférieure  d'une 
urne,  ou  à  un  réchaud;  le  grain  en  paraît  plus  fin  que  celui  des  autres 
vases  qui  ressemblent,  quant  à  la  couleur  de  la  terre,  aux  fragments  trou- 
vés, il  y  a  quelques  années,  près  du  four  à  potier  de  Burgheim.  Ces  traces 
noires  sont,  d'ailleurs,  avec  celles  moins  bien  marquées  de  deux  autres 
vases,  les  seuls  indices  qui  puissent  faire  penser  aux  rites  de  l'incinération. 
Encore  pour  les  deux  autres  vases,  ces  marques  proviennent-elles  plutôt 
de  cette  couleur  noire,  plus  ou  moins  grossière, dont  étaient  généralement 
peints  les  vases  gaulois  ou  celtiques.  D'ailleurs,  point  de  cendres,  point 
d'apparence  de  couches  de  charbon,  seulement,  au  dire  des  ouvriers,  la 
terre  qui  supportait  les  ossements  était  plus  friable  et  formait  un  lit  presque 
moelleux. 

Un  détail  qui  ne  manque  pas  d'intérêt  est  celui  du  fragment  de  vase  ou 
de  patina,  contenant  encore  des  restes  de  volatile.  On  sait  l'usage  commun 
à  plusieurs  peuples  de  l'antiquité,  et  principalement  aux  races  celtiques,  de 
placer  dans  la  tombe,  à  côté  du  mort,  les  apprêts  de  son  dernier  souper 
et  de  composer  ce  repas  posthume,  soit  du  mets  que  le  défunt  préférait , 
soit  de  celui  plus  spécialement  consacré  dans  les  traditions  du  clan  ou  de 
la  peuplade.  A  ce  dernier  point  de  vue,  le  volatile  placé  dans  ce  vase  mé- 
riterait quelque  attention.  Presque  chaque  clan  ou  chaque  tribu  celtique 
avait  son  oiseau  ou  son  quadrupède  préféré.  L'alouette  est  célèbre,  le  coq, 
à  plus  ou  moins  bon  droit,  ne  l'est  pas  moins.  D'autres  volatiles  avaient  en 


—  10  — 

quelque  sorte  leur  circonscription  d'élection  ou  de  popularité.  Qui  sait  si 
les  restes,  peut-être  vingt  fois  séculaires  du  volatile  placé  dans  le  vase  dont 
nous  parlons,  ne  sont  pas  un  signe,  non-seulement  de  race,  mais  de  mi- 
gration de  race?  Qui  sait  s'ils  n'ont  pas  (bien  entendu,  toutes  propor- 
tions et  toutes  différences  gardées)  quelque  mystérieuse  analogie  avec  ce 
que  des  travaux  récents  nous  apprennent  de  \alca  impennis,  si  chère  aux 
antiques  traditions  du  nord  Scandinave? 

Un  fait  digne  de  remarque, c'est  qu'aucun  morceau  de  fer,  aucune  arme, 
n'ont  été  aperçus  au  milieu  de  ces  ossements,  de  ces  ornements  et  de  ces 
vases.  Cela  donne  à  la  découverte  d'aujourd'hui  un  caractère  différent  des 
découvertes  antérieures.  Les  guerriers  de  race  ou  les  guerriers  improvisés 
pour  la  conquête  ou  la  défense  du  pays,  étaient  d'ordinaire,  comme  tout  le 
monde  sait ,  inhumés  avec  leurs  armes.  Et  pourtant,  aucune  trace  d'armes, 
rien  de  militaire ,  en  cette  nouvelle  nécropole  antique ,  rencontrée  à 
Obernai. 

Nous  disons  nécropole,  et  ce  mot  n'est  peut-être  pas  trop  ambitieux, 
car  il  est  facile  encore  de  voir  que  le  champ  des  morts  ne  finit  pas  où  s'ar- 
rêtent les  travaux  actuels  de  fondations  de  la  maison  en  construction.  Ces 
travaux  n'ont  amené  à  décaper  qu'environ  9  mètres  de  long  sur  à  peu 
près  autant  de  largeur;  or,  là  où  le  terrain  cesse  d'être  décapé,  on  peut, 
non-seulement  deviner,  mais  reconnaître  encore,  sous  le  terrain  que  re- 
vêt la  vigne,  les  indices  et  en  quelque  sorte  le  relief  d'autres  rangées  de 
sépultures. 

Y  avait-il  là,  autrefois,  quelque  tertre  nivelé  lors  de  la  mise  en  culture 
de  cette  partie  du  sol  avoisinant  Obernai?  Gela  serait  probable,  car  l'arran- 
gement symétrique  des  squelettes  semble  indiquer  une  chambre  sépulcrale. 
Ces  squelettes  ont  apparu  à  i'",40  du  niveau  des  vignes  et  par  conséquent 
presqu'à  hauteur  de  la  route  moderne.  La  terre  végétale  n'avait  guère  au- 
dessous  d'eux  qu'environ  1  mètre,  et  le  sous-sol  est  de  sable  d'alluvions. 
Tout  autour,  point  de  tertres,  c'est  la  partie  la  moins  accidentée  de  la  ban- 
lieue d'Obernai. 

A  quelle  époque,  à  quel  peuple,  ou  à  quelle  race  de  l'antiquité  faut- il 
assigner  cette  nouvelle  trouvaille  archéologique?  Cette  question  est  de  celles 
qui  ont  plus  d'importance  peut-être  pour  la  science  historique  que  l'éti- 
quetage des  ustensiles  et  ornements  découverts,  car  ces  ornements  et  ces 
ustensiles  sont  communs  à  plus  d'une  époque  de  l'histoire  de  la  Germanie 
et  de  la  Gaule  rhénanes.  Avant  l'invasion  romaine,  on  plaçait  des  vases, 
des  bijoux,  des  armes,  auprès  des  corps  ensevelis,  et  cet  usage,  qui  fut 
aussi  celui  des  nouveaux  conquérants,  continua,  non-seulement  pendant 


—  li- 
la domiiialioii  romaine,  mais  même  encore  après  elle.  Les  honneurs  rendus 
à  la  flépouille  des  morts,  à  ia  matière  humaine,  s'il  est  permis  de  s'expri- 
mer ainsi,  se  maintinrent  pendant  les  longs  siècles  de  paganisme,  avec 
d'autant  plus  de  persistance  et  de  popnlarité,  que  les  espérances  de  la  foi 
chrétienne  ne  pouvaient  pas  encore  apprendre  aux  survivants  à  accompa- 
gner de  leurs  vœux  dans  une  autre  patrie  la  dépouille  immatérielle  des 
morts  chéris  de  la  famille,  ou  honorés  par  la  conscience  des  peuples. 

Nous  savons  peu  de  chose  de  la  colonisation  de  la  i  ive  gauche  du 
Rhin  supérieur,  contiguë  aux  Vosges  avant  la  conquête  de  Jules  César.  Le 
guerrier-historien  nous  apprend  bien  que  les  Belges,  et  parmi  eux  les  Mé- 
diomatrikes  ou  Médiomatriciens  s'étendaient  avant  la  guerre  d'Arioviste 
sur  les  bords  du  Rhin,  jusqu'au  point  assez  peu  défini  encore,  où  com- 
mençait le  territoire  d'une  race  plus  anciennement  étabUe  dans  les  Gaules, 
celle  des  Celtes  séquaniens  ou  Séquanes.  Il  nous  apprend  aussi  que  les 
Helvètes  envahirent  une  certaine  partie  de  ces  territoires,  mais  il  ne  déter- 
mine pas  les  limites  entre  ces  empiétements  des  Helvètes,  puis  ceux  des 
Triboques  et  les  avant-postes  ou  arrière-postes  des  Médiomatrikes  et  des 
Séquanes. 

Après  Jules  César,  ce  que  les  historiens  romains  rapportent  de  l'établis- 
sement des  Triboques  dans  la  contrée  entre  Vosges  et  Rhin,  reste  pres- 
qu'aussi  vague,  du  moins  quant  à  la  hgne précise  où,  soit  le  rayon,  soit  le 
rempart  même  des  Vosges,  avait  permis  aux  populations  antérieurement 
établies  de  se  retrancher.  Il  parait,  toutefois,  ou  il  appert  des  données  les 
moins  incertaines,  que  la  partie  du  pays  appelée, longtem|)s  après, la  Basse- 
Alsace,  devint,  principalement  sous  les  premiers  Césars,  le  territoire  des 
Triboques  et  que  cette  peuplade  d'envahisseurs  ulti'a-rhénans,  refoulée  un 
instant,  puis  réintégrée,  ne  tarda  pas  à  devenir  assez  vite  sédentaire,  et 
conservatrice,  comme  nous  dirions  aujourd'hui. 

Si  donc  les  découvertes  faites  naguère  à  la  Hauel,  celles  du  kelt  et  des 
armes  surtout,  peuveni  être  attribuées,  sans  trop  de  présomption,  à 
une  tribu,  passagère  sur  notre  territoire,  y  combattant  pour  conquérir  ou 
pour  se  défendre,  et  s'y  étant  cantonnée,  pour  plus  ou  moins  longtemps 
avant  même  la  domination  romaine,  il  y  a  lieu  de  croire  que  l'ère  gallo- 
romaine  doit  être  le  point  de  départ  des  investigations  relatives  aux  ré- 
centes découvertes  d'Obernai,  et  dans  ce  cas,  nous  y  verrions  de  préférence 
un  monument  des  Tiiboques,  non  pas  des  Triboques  d'Arioviste,  mais  des 
Triboques  soumis  à  la  Rome  impériale,  des  Triboques,  race  celtique  d'ou- 
tre-Rhin, arrivée  une  des  dernières  de  la  première  migration  des  peuples 
germaniques  dans  la  Gaule  rhénane,  et  promptemenl  façonnée  aux  dou- 


—    12  — 

ceiirs  (Je  la  paix,  au  bien-èlre  de  la  civilisation  romaine,  au  dédain  peut- 
être,  ou  à  l'oubli  des  armes. 

En  effet,  comme  on  vient  d'en  faire  l'observation,  rien  qui  rappelle  ici 
une  race  conquérante,  militaire,  passant  à  main  armée  sur  le  sol  qui  doit 
servir  de  tombeau  à  quelques-uns  de  ses  guerriers.  Point  de  fer,  rien  que 
des  ustensiles  de  la  vie  domestique,  ou  des  insignes  pacitiques  de  la  posi- 
tion sociale.  Point  de  fer  :  on  serait  tenté  de  croire,  d'après  celte  absence 
si  complète  du  fer,  même  le  plus  oxydé,  que  ces  sépultures  remontent  à 
ce  que  des  arcbéologues  modernes  ont  appelé  l'âge  de  bronze,  c'est-à- 
dire,  pour  ce  qui  concerne  la  Gaule,  à  une  époque  bien  antérieure  à  la. 
conquête  romaine;  mais  quelques-uns  des  objets  trouvés  ont  un  caractère 
trop  gallo-romain  pour  autoriser  à  se  perdre  ainsi  au  delà  des  temps  de 
l'histoire  écrite. 

Rappelons-nous  que  dans  les  deux  premiers  siècles  de  l'Empire  et  dans 
la  plus  grande  partie  du  troisième,  le  pays  entre  Vosges  et  Rhin,  protégé 
par  les  terres  décumates,  n'avait  rien  à  craindre  des  agglomérations  de 
peuples  barbares  déjà  en  fermentation  au  nord  de  la  Germanie.  Les  colons, 
abrités  sous  l'aigle  des  Césars,  pouvaient  à  loisir  se  livrer  aux  travaux  agri- 
coles, et  laisser  enfouies  dans  les  tiimull  des  aïeux,  ces  armes  qui  naguère 
avaient  établi  leur  race  dans  le  pays.  On  comprend  qu'ils  n'aient  pas  fait 
contribuer  le  métal  des  combats  aux  offrandes  pieuses  à  leurs  morts.  Avant 
l'emploi  du  fer,  on  se  battait,  il  est  vrai,  et  l'on  ne  cessait  guère  de  se 
battre  en  Gaule  et  en  Germanie,  mais  alors  on  enterrait  avec  le  guerrier 
sa  hache  de  silex  ou  son  poignard  de  bronze,  et  l'on  ne  se  bornait  pas  à 
déposer  à  ses  pieds  les  gages  du  foyer  paisible. 

Mais,  dira-t-on,  les  Triboques  prirent  assez  vite  toutes  les  coutumes  ro- 
maines, et  dès  lors,  ils  ne  se  bornèrent  plus  à  enterrer  leurs  morts  sous 
un  tertre,  et  ils  élevèrent  des  cippes  et  autres  mausolées  à  l'instar  des  Ro- 
mains. On  connaît  des  monuments  à  inscriptions  commémoratives  de  ci- 
toyens triboques.  Il  est  toutefois  facile  de  répondre  que  les  monuments 
dans  le  goût  romain  ne  furent  jamais  sans  doute  que  l'exception,  un  luxe 
réservé  aux  principaux  membres  de  la  cité.  D'ailleurs,  quelques-unes  des 
formes  et  le  peu  de  valeur  intrinsèque  des  objets  récemment  trouvés  pour- 
raient servir  à  indiquer  cette  époque  transitoire  où,  désarmés  par  les  Ro- 
mains, les  Triboques  ne  s'étaient  pas  encore  laissé  envahir  par  le  luxe  de 
leurs  dominateurs,  et  se  bornaient  à  cultiver,  sous  eux  et  pour  eux,  les 
terres  de  cette  partie  de  la  première  Germanie. 

Sans  doute  ce  qui  vient  d'être  dit  des  Triboques  pourrait  s'appliquer 
aussi  à  d'autres  colons  de  l'époque  gallo-romaine,  établis  après  eux  ou  au 


—  13  — 

milieu  d'eux,  sur  notre  sol.  Le  caprice  du  gouvernement  ou  d'un  grand 
propriétaire  pouvait  installer  dans  tel  ou  tel  coin  de  la  province,  des  tra- 
vailleurs venus  des  contrées  les  plus  éloignées  de  la  Gaule  ou  de  l'Espagne, 
et  de  l'Afrique  ou  de  l'Asie ,  pour  cultiver  le  sol  et  pour  le  garder.  Même 
en  écartant, à  cause  de  l'absence  des  armes, l'hypothèse  de  quelque  cohorte 
auxiliaire  en  garnison  plus  ou  moins  temporaire  sur  cette  partie  du  terri- 
toire, hypothèse  peu  autorisée  par  ce  que  l'on  connaît  des  garnisons  fixes 
de  ces  cohortes,  on  peut  rencontrer  encore  jusque  dans  le  dernier  siècle 
de  l'ère  romaine  des  Gaules,  un  nom  de  race  ou  de  tribu  à  donner  aux 
squelettes  de  la  nécropole  d'Obernai. 

Ainsi,  dans  le  quatrième  siècle  de  notre  ère,  et  après  la  grande  invasion 
du  commencement  du  cinquième  siècle,  les  Burgondes  et  les  Alemans  ont 
pu  fournir  en  ces  lieux  leur  contingent  de  dépouilles  mortelles  enterrées 
avec  de  la  poterie  gallo-romaine.  Les  Burgondes  surtout,  race  agricole , 
durent  fort  vite  imiter  les  anciens  Triboques,  et  négliger  les  instruments 
de  la  guerre  pour  utiliser  en  nos  champs  ceux  du  labour.  Ce  que  nous  sa- 
vons des  coutumes  funéraires  des  Francks  qui  étaient  généralement  enter- 
rés sans  cercueils,  ni  de  pierre,  ni  de  bois,  mais  avec  une  simple  pierre 
sous  la  tête,  peut  s'appliquer  aux  Burgondes,  peuple  de  même  origine  que 
les  Francks,  mais  aux  goûts  plus  simples,  plus  pacifiques,  plus  casaniers, 
s'il  est  permis  d'employer  ce  dernier  mot,  en  parlant  d'un  peuple  barbare. 
Or,  au  moins  dans  la  dernière  période  de  leur  existence  comme  nation 
dans  la  Gaule,  avant  l'époque  mérovingienne,les  Burgondes  étaient  ariens, 
et  cette  circonstance  expliquerait  peut-être  l'absence  de  tout  signe  reli- 
gieux déterminé  dans  les  tombes  qui  nous  occupent,  si  toutefois  elles  sont 
de  la  dernière  époque  gallo-romaine. 

Quel  que  soit,  au  surplus,  le  peuple  depuis  tant  de  siècles  disparu  de  la 
terre,  qui  ait  laissé  en  ces  lieux  cette  marque  de  son  passage,  l'on  est  en 
droit  d'admettre  dès  à  présent  que  là  où  fleurit  dans  le  septième  siècle 
la  villa  ßscalis  du  duc  Ettichon  ou  Atticus,  il  y  eut  déjà  dans  les  siècles 
précédents,  une  population  relativement  nombreuse  et  suivant  toute  appa- 
rence sédentaire. 

Obernai,  20  février  1863. 

L.  Levrault. 


MEMOIRE 

SUR  LA  GRANDE  VOIE  ROMAINE  DE  BRUMATH  A  SELTZ 

POUR  LA  PORTION  DE  WEITBRUCH  A  KALTENHAUSEN. 


II  reste  quelque  chose  à  ajouter  à  ce  qui  a  déjà  été  dit  de  la  grande  voie 
romaine  de  Brumath  à  Sellz.  J'ai  fait,  l'automne  dernier,  une  excursion  sur 
cette  route,  de  Weitbrucli  jusqu'à  Kaltenhausen,  et  c'est  le  résultat  de 
mes  investigations  que  j'ai  l'honneur  de  soumettre  dans  cette  notice  au 
comité  historique  d'Alsace.  Pour  celte  portion,  l'ancienne  voie  peut  très- 
facilement  être  étudiée  :  les  singularités  qu'elle  présente  la  font  recon- 
naître partout. 

Le  point  de  départ  de  ma  course  a  laissé  le  village  de  Weitbruch  à  droite, 
et  le  hameau  de  Birckwald  à  gauche.  Dans  cette  direction,  la  voie  est  entiè- 
rement abandonnée,  sans  doute  depuis  une  longue  suite  de  siècles;  elle  est 
très-élevée,  et  se  montre  par-ci  par-là  à  une  hauteur  d'environ  i  mètre 
au-dessus  (ki  niveau  des  terrains  cultivés  qui  y  aboutissent;  son  tracé  pour- 
suit à  travers  la  forêt  une  ligne  fort  directe  ;  aucun  pavage  ne  la  recouvrait, 
du  moins  on  n'en  trouve  de  débris  nulle  part,  mais  elle  est  encore  recou- 
verte sur  divers  points  d'une  épaisse  couche  de  gravier,  comme  nos  routes, 
ce  qui  prouve  que  le  système  actuel  se  pratiquait  aussi  dans  la  construc- 
tion des  grandes  voies  romaines,  au  moins  par  parties  :  d'ordinaire,  les 
matériaux  employés  parles  Romains  variaient  selon  les  lieux.  C'est  sur  cette 
voie  que  la  commune  de  Weitbruch  prenait  autrefois  le  gravier  pour  le 
chargement  des  chemins  du  village.  On  remarque  qu'elle  était  bombée 
pour  faciliter  l'écoulement  des  eaux,  et  munie,  des  deux  côtés,  de  fossés, 
dont  il  existe  çà  et  là  des  traces;  malgré  de  fréquents  rétrécissements,  elle 
conserve  partout  une  largeur  très-raisonnable,  paraissant  avoir  été  de  12  à 
16  mètres,  entre  fossés;  des  pierres  leugaires  la  jalonnaient  de  distance 
en  distance  :  ces  stèles  la  caractérisent  évidemment  comme  voie  militaire. 

La  colonne  dont  M.  le  colonel  de  Morlet  a  signalé  le  gisement  dans  la 
forêt  de  Weitbruch,  se  trouve  redressée  sur  sa  base,  à  l'endroit  où  elle  a 
été  découverte  par  des  bûcherons.  Je  pense  que  l'on  devrait  lui  conserver 
sa  place  historique.  On  y  a  gravé  le  millésime  de  1859,  relatant  l'année  de 
sa  découverte,  et  dans  un  but  de  préservation,  on  l'a  entourée  d'une  claire- 
voie  en  bois  de  chêne.  Cette  pierre,  de  couleur  blanchâlre,  était  enfouie 
dans  la  partie  carrossable  même  de  la  route:  elle  affecte  la  forme  elliptique 


—  15  — 

et  ne  porte  aucune  cannelure.  C'est  un  pilier  cylindrique,  légèrement 
aminci  vers  le  haut,  sans  chapiteau,  à  base  carrée,  prise  dans  le  bloc;  son 
sommet,  malheureusement  dégradé,  se  termine  en  cône  tronqué,  à  mon 
avis,  par  suite  du  frottement  des  roues,  dans  l'état  de  son  gisement.  En 
examinant  ce  piher  avec  soin,  on  peut  se  convaincre  qu'il  est  entier  dans 
sa  longueur  :  le  fût  mesure  en  hauteur  1"\80;  son  contour,  au  milieu,  est 
de  i'^,95.  La  base,  adhérant  au  fût,  est  écornée  sur  deux  de  ses  angles;  elle 
a  une  hauteur  de  30  centimètres,  sur  une  largeur  de  65  centimètres  de 
chaque  côté.  Ainsi,  la  hauteur  totale  de  la  colonne  est  de  2'",10,  sur  65 
centimètres  de  diamètre.  La  largeur,  de  chaque  côté  de  la  base,  est  égale 
au  diamètre  de  la  colonne  et  à  un  tiers  de  sa  circonférence.  Telles  sont  ses 
proportions  métriques. 

C'est,  ni  plus  ni  moins,  une  véritable  pierre  leugaire,  primitivement 
supportée,  à  n'en  pas  douter,  par  un  socle  maçonné.  Elle  est,  pour  ses 
proportions,  à  peu  près  semblable  à  la  colonne  milliaire  de  Mandeure,  dé- 
crite par  Schœpflin,  tome  I,  page  547,  et,  ce  qui  est  plus  important,  elle 
conserve,  selon  moi,  à  son  sommet,  un  reste  précieux  de  son  indication 
numérique. 

Les  cippes  milliaires,  comme  on  sait,  marquaient  la  distance  de  la  ville 
où  la  route  commençait.  Dans  les  Gaules,  les  distances  étaient  données, 
non  en  milles,  mais  en  lieues;  les  chiffres  y  sont  précédés  des  lettres  LEVG 
(leugœ).  La  colonne  viaire  de  la  forêt  de  Weitbruch  n'indique  plus  rien 
et  ne  paraît  pas  avoir  jamais  indiqué  quelque  chose  du  nom  de  la  ville  d'où 
la  distance  était  comptée;  mais  elle  porte  encore,  dans  sa  partie  fruste 
les  traces  d'un  X  (du  chiffre  dix),  précédé  d'après  une  très-grande  proba- 
bihté  des  lettres  LEVG,  dont  on  ne  remarque,  toutefois,  plus  de  vestiges. 
Si  c'est  là,  comme  tout  m'induit  à  le  croire,  le  seul  chiffre  numérique  gravé 
sur  cette  colonne,  il  indique  juste  la  distance  de  Sli'asbourg;  dix  lieues 
gauloises  font  cinq  Ueues  anciennes  de  Fj-ance,  or,  c'est  là  le  chiffre  donné 
par  la  colonne,  comme  c'est  aussi  la  distance  qui  sépare  le  lieu  de  sa  dé- 
couverte de  l'ancien  Argentorat. 

La  route  aurait  été  suivie  encore  après  la  chute  de  la  colonne,  si  l'on 
attribue  au  contact  des  roues  les  parties  usées  ;  ces  conjectures  me  parais- 
sent fondées,  et  n'ont,  en  aucun  cas,  rien  d'invraisemblable. 

S'il  faut  en  juger  par  des  tuileaux  et  des  restes  de  ciment  romain  que 
l'on  rencontre  clair-semés  dans  le  même  périmètre,  il  existait  en  cet  en- 
droit une  bâtisse  romaine  quelconque,  que  je  m'abstiens,  à  défaut  d'autres 
vestiges,  de  préciser  davantage.  Ce  sont,  peut-être,  des  débris  du  socle 
qui  avait  supporté  la  colonne,  ou  des  restes  de  la  guérite  qui  l'avait  abritée. 


—  16  — 

A  nne  petite  distance  du  même  lieu,  à  proximité  du  hameau  de  Birck- 
wald,  on  a  découvert,  il  y  a  une  vingtaine  d'années,  dans  un  champ  planté 
en  garance,  les  restes  d'une  aire  en  béton,  des  tuiles  à  rebords,  et  beau- 
coup d'antres  débris  de  provenance  romaine,  et  dans  la  même  circonscrip- 
tion, une  médaille  d'argent  et  plusieurs  urnes  cinéraires,  renflées  au  miheu. 
Tout  cela,  et  différents  autres  débris,  restés  surplace,  attestent,  en  ce  lieu, 
l'existence  d'une  villa  romaine. 

Le  tronçon  que  nous  décrivons, est  bordé  d'autres  monuments  des  temps 
passés  :  trois  tertres  tumulaires  inexplorés  se  voient  à  droite  de  la  route, 
dans  la  forêt  de  Wcitbruch,  au  canton  dit  Wœldel;  deux  autres  tumuli, 
aujourd'hui  affaissés  et  nivelés,  se  sont  trouvés,  à  gauche,  dans  la  forêt  dé- 
frichée de  Niederschseffolsheim.  Les  guides  qui  m'ont  accompagné,  m'ont 
aussi  parlé  d'anciennes  poteries  en  argile,  découvertes,  à  diverses  époques, 
par-ci  par-là. 

La  voie  sort  de  la  forêt  de  Weitbruch  pour  entrer,  après  avoir  franchi  le 
Rothbsechel,  dans  celle  de  Marienthal  où  elle  passe,  tout  d'abord,  près  d'un 
ancien  retranchement  militaire,  construit  parles  Autrichiens,  en  1793.  En 
cet  endroit  se  remarquent  divers  restes  portant  le  cachet  de  l'époque 
romaine:  ce  sont  des  substructions  assez  étendues,  des  décombres  variés, 
comprenant  des  briques  striées,  des  tuiles  à  rebords  rayées,  des  morceaux  de 
ciment  à  bain  de  mortier,  de  petites  pierres  entremêlées  de  quelques  moel- 
lons, enfin  des  fragments  de  poterie.  Le  garde  forestier  de  Marienthal  m'a 
assuré  qu'il  avait  retiré  de  ce  lieu,  il  y  a  une  quinzaine  d'années,  une 
grande  quantité  de  moellons  de  grès  maçonnés  dans  un  ciment  fort  dur  et 
beaucoup  de  tuiles  à  rebords,  à  côté  desquelles  il  a  trouvé  des  ferrements 
de  toute  espèce,  rongés,  une  hachette  de  forme  antique,  et  une  grande 
clef  très-massive  en  fer,  ayant  8  pouces  de  longueur  :  il  est  à  regretter 
que  ces  restes  des  temps  anciens  n'aient  pas  été  conservés;  ils  méritaient 
bien  certainement  l'attention  des  archéologues.  De  plus,  selon  le  témoi- 
gnage de  plusieurs  vieillards  que  j'ai  interrogés,  on  a,  vers  1806,  enlevé 
du  même  lieu  des  pierres  de  taille  et  des  briques  très-volumineuses;  on  y 
a  rencontré  des  substructions,  noyées,  pour  me  servii'  de  leur  expression , 
dans  un  mortier  aussi  dur  que  le  grès;  enfin,  on  a  découvert  un  puits, 
maçonné  en  pierres  de  grès.  Leurs  pères  et  grands-pères,  me  dirent-ils, 
leur  ont  souvent  répété  que  c'était  un  bourg,  je  dis  un  castel.  Il  y  avait  là, 
on  ne  peut  en  douter,  une  construction  importante,  une  taverne,  une 
mansion,  une  station  de  halte,  un  relais  public,  un  poste  de  vigie,  peut-être 
tout  cela  à  la  fois.  C'était  très-probablement  le  point  de  jonction  de  la  route 
d'higwiller,  par  Schweighansen,  dont  j'ai  indiqué  le  Iracé  dans  le  mémoire 


—  17  — 

renvoyé,  dans  la  séance  du  comité  du  5  mars  1860,  à  M.  le  colonel  de 
Morlel, chargé  du  travail  sur  la  topographie  romaine  de  nos  contrées.  (  Voy. 
le  Bulletin,  tome  III,  page  14-7.)  Je  dois  faire  ici  une  autre  observation  :  il 
est  très-présumable  qu'au  même  endroit,  un  second  rameau  se  soit  encore 
détaché  de  la  grande  voie,  pour  conduire  dans  les  positions  romaines  si- 
tuées sur  les  bords  du  Rhin.  Enfin,  comme  il  reste  des  constructions  sou- 
terraines sur  place,  je  me  demande  s'il  ne  conviendrait  pas  de  les  signaler 
à  l'attention  des  antiquaires  à  venir.  Si,  tôt  ou  tard,  des  fouilles  étaient 
faites  en  ce  lieu ,  il  est  plus  que  probable  qu'on  ferait  des  découvertes 
assez  importantes. 

Le  rayon  de  Marienthal  offre  d'autres  vestiges  de  l'antiquité  gallo-ro- 
maine; on  voit  sur  différents  points  d'anciennes  glaisières,  que  l'on  pré- 
tend avoir  été  exploitées  déjà  par  le  peuple -roi,  et  dont  on  retire  encore 
aujourd'hui  une  très-bonne  terre  sigillée,  qui  est  propre,  non-seulement  à 
la  fabrication  de  briques  et  de  tuiles ,  mais  aussi  aux  ouvrages  de  poterie. 
Je  sais  que  la  céramique  fut  connue  partout  où  il  y  eut  des  établissements 
romains;  mais  à  défaut  de  tout  autre  certificat  que  la  tradition  sur  l'origine 
de  ces  glaisières,  je  dois  ne  pas  m'y  arrêter  davantage. 

A  quelques  pas  de  la  taverne,  la  voie  coupe,  près  d'une  redoute ,  datant  de 
1792,  le  chemin  appelé  par  les  pèlerins  de  Marienthal,  chemin  de  Schweig- 
hausen. Une  mousse  épaisse  la  couvre  dans  cette  direction,  mais  elle  se 
distingue  parfaitement  dans  l'éclaircie  entre  les  parties  boisées  :  tandis  que 
les  arbres  qui  la  bordent,  élancent  vigoureusement,  des  deux  côlés,leur  cime 
dans  l'air,  le  sol  durci  de  la  voie  ne  produit,  évidemment  à  cause  de  son 
empierrement,  que  des  tiges  rabougries.  Son  tracé  se  dessine  ici,  s'il  m'est 
permis  de  m'exprimer  ainsi,  par  un  tunnel  aérien,  qui  se  prolonge  en 
ligne  droite,  aussi  loin  que  le  regard  peut  s'étendre,  et  dont  le  romantique 
coup  d'œil  n'est  ni  sans  charmes,  ni  sans  originalité. 

La  voie  quitte  la  forêt  au  point  où  se  trouvent,  sur  la  route  de  Hague- 
nau,  les  premières  maisons  de  Marienthal,  d'où  elle  se  dirige  sur  Kalten- 
hausen.  Le  labour  l'a  fait  disparaître  en  partie  dans  cette  direction,  cepen- 
dant elle  est  encore  visible  :  un  sol  plus  haut  et  moins  fécond  que  les 
champs  adjacents,  indique  son  tracé  tout  le  long  jusqu'aux  abords  de  cette 
commune,  où  l'on  dislingue,  à  un  endroit  qu'on  nomme  Près  de  la  croix^ 
les  meines  couches  de  graviers,  comme  près  de  Wcitbruch.  Elle  a  du  pas- 
ser la  Moder,  en  laissant  à  gauche  le  clocher  du  village. 

Jér.  Ans.  Siffer  , 
curé  de  Wei/ersheim. 

II«  SÉRIE.  —  T.  II.  —  (M.)  9 


ARGENTOVARU 

STATION  GALLO-ROMAINE 


RETROUVEE 


A  GRUSSENHEIM  (HAUT-RHIN).' 

(avec  une  carte  LlTIlOCUAPIllICE.) 


La  station  (YArgentouaria  doit  une  certaine  célébrité  à  la  bataille  livrée 
dans  ses  environs,  aux  Allemands-Lentiens,par  les  généraux  de  l'empereur 
Gratien  en  377. 

Ptolémée,  dont  la  géographie  remonte  à  la  première  moitié  du  deuxième 
siècle  de  l'ère  chrétienne,  nous  fournit  la  plus  ancienne  mention  à'Argen- 
tovaria,  comme  ville  des  Rauraques. 

La  seconde  citation  qui  est  la  plus  importante,  puisqu'elle  nous  donne, 
tout  à  la  fois,  et  le  nom  et  l'indication  d'une  station  sur  la  voie  de  Milan 
à  Mayence,  et  ce,  entre  deux  stations  déterminées,  se  trouve  dans  l'itiné- 
raire dit  d'Antonin,  Ce  document  représente,  d'après  le  savant  épigraphiste 
M.  Léon  Renier,  la  géographie  du  monde  romain  au  temps  de  Dioclétien 
(284-305),  c'est-à-dire  à  la  veille  des  incursions  successives  des  Barbares 
qui  ont  dévasté  les  bords  du  Rhin. 

Voici,  d'après  l'édition  de  l'itinéraire  donnée  par  M.  Léon  Renier,  ce  qui 
concerne  Argentovaria  : 

In  itinere  a  Mediolano  Moguntiacum. 

•    Camhele  (Kembs)'. 

Stahulis,  F/ /et/.^.  (Bantzenheim)  l 
Argentovaria,  XVIII iû.  (Grussenheim). 

1.  La  note  insérée  au  Bulletin,  p.  93-94,  nouvelle  série,  et  le  rapport  du  secrétaire 
sur  les  travaux  de  la  Société,  lu  en  assenfl^lée  générale  le  4  décembre  I8G2,  ont  donné 
lieu  à  ce  mémoire,  dans  lequel  j'éviterai,  autant  que  je  le  pourrai,  de  reproduire  ce  que 
j'ai  dit  dans  mon  Alsace  romaine  sur  cette  station. 

2.  Beatus  Rhenanus  dit  ce  qui  suit  de  Kembs  et  de  Bantzenlicim  :  Kembs  :  in  ipso  vico 
mira  vestifjia  murorum  subterraneoriim  apparent. 

3.  Bantzenheim  :  Illic  enim  tantum  vetustatis  indiciorum  reperire  est ,  ut  non  liceat 
palum  infigere  terrce  quin' aliquid  occurrat.  Porrigebaticr  autem  usque  ad  publicani 
illamin  campis  viam  quam  altam  [Eochstrass]  vocant.  Nam  agri  Uli  7-idnas  tegunt  ubi 
subsidens  qnoque.  terra  sarcophagos  lapideos  demonstral.  {Ren/m  germanicaryvi  liber 
tertius.) 


-  19  — 

Helvelum,  XVJ kl  (Ehl-Benfelcl). 

Argenloralo ,  XII '\<\.  (Slrasliourg). 

Si  de  ritinéraire  d'Antonin  nous  passons  au  récil  que  fait  Ammien  Mar- 
cellin  de  la  bataille  d'Ar^e?i/mrt',  nous  rencontrons  encore  une  indication 
complexe,  indivisible  conime  celle  de  l'itinéraii'e  :  c'est  Argentaria  oppidum 
Galliœ,  et  il  en  est  de  même  dans  Orose  et  Aurelius  Victor. 

Au  quatrième  siècle  les  irruptions  des  Alcmanni  deviennent  de  plus  en 
plus  fréquentes,  et,  à  la  fin  de  ce  même  s\è,c\e,Augusta  Rauracorum  ainsi 
qvLArgenlovaria  ou  Argentaria,  comme  on  disait  alors,  ne  figurent  plus 
comme  villes  dans  cette  région  frontière,  dans  le  Littiis  Ducis  Sequaniœ. 

hix  JSotitia  provinciarum,  dont  le  plus  ancien  texte  connu,  remontant 
au  huitième  siècle,  se  trouve  aux  archives  grand-ducales  à  Carlsruhe, 
porte  Castellum  Argentariense,  et  le  texte  donné  par  M.  Guérard  sur  la  col- 
lation de  vingt-neuf  manuscrits,  mais  dont  les  plus  anciens  sont  du 
neuvième  siècle,  donne  CastrumArgentariense,  dans  la  grande  Séquanaise, 
partant  dans  la  Gaule. 

Voilà  ce  que  l'antiquité  nous  a  transmis  sur  la  station  â'Argentovaria 
qui  a  été  ruinée  de  fond  en  comble  et  détruite  par  l'incendie,  ainsi  que 
viennent  l'attester  les  fouilles  de  Grussenheim. 

Avant  d'aller  plus  loin,  il  est  bon  de  faire  remarquer  que  la  Table  de  Peu- 
linger  ou  Théodosienne,  dont  la  meilleure  édition  est  celle  de  1824,  ne 
donne  point  la  station  (ïArgentovaria,  parce  que  le  fragment  sur  lequel  se 
trouve  l'itinéraire  de  Mayence  à  Milan  s'arrête  à  la  hauteur  d'Ohnenheim, 
à  une  station  dont  le  nom  est  perdu,  par  suite  de  la  destruction  de  cette 
partie  de  la  carte. 

Voici  la  copie  figurative  de  cette  portion  de  la  table  qui  donne  la  géogra- 
phie de  la  première  moitié  du  troisième  siècle,  d'après  l'édition  donnée  à 
Leipzig,  en  1824,  par  Mannert: 


Argentoraio 

XI!  Hehllum  ^^j  |  Bord 
1  de  la 
i  Carte. 

\.  Au  quatrième  siècle  beaucoup  de  localités  subissent  des  altératious  de  nom:  c'est 
ainsi  qn'Argrntoraria  devient  Argentaria  dans  Annniou  Marceliin,  Orose,  Aurelius  Victor, 
etc. ,  et  dans  la  notice  des  provinces. 


—  20  — 

C'est-à-dire  de  Sellz  à  Brumath  dix-huit  lieues  gauloises;  de  Brumalh  à 
Strasbourg  sept  lieues;  de  Strasbourg  à  Ebl-Benield  douze  lieues,  etd'Ehl 
à?...  (ruines  d'Ohnenheim)  encore  douze  lieues:  il  est  permis  de  supposer 
qu'il  y  avait  à  quatre  lieues  plus  loin  la  désignation  d'Argentovaria. 

A  l'époque  de  la  renaissance  des  lettres,  l'attention  s'est  aussi  portée  sur 
les  débris  d'antiquité  que  fournit  le  sol,  ainsi  (ju'on  l'a  vu  pour  Kembs  et 
Bantzenheim. 

C'est  alors  que  Ilorbourg,  sans  que  l'on  y  eût  découvert  une  inscription 
donnant  le  nom  iVArgentovaria,  semble  à  Beatus  Rhenanus  devoir  répon- 
dre à  la  ville  citée  par  Ptolémée  :  une  occasion  se  présente  même  de  mani- 
fester cette  opinion,  et,  dans  une  inscription  composée  par  ce  savant  pour 
le  château  du  duc  de  Wurtemberg,  il  explique  comment  ce  château  occupe 
la  place  d'Argentovaria,  faisant  dériver  le  nom  de  Uorhouvg  qY Ar gentova- 
ria  par  un  tour  de  force  étymologique  consigné  dans  une  lettre  à  Erb, 
l'un  de  ses  amis. 

De  Beatus  Rhenanus  à  Schœpflin  il  n'y  a  point  de  contradiction  :  l'impor- 
tance de  Ilorbourg,  dont  le  sol  fournit  un  autel  dédié  à  Apollon,  des  mé- 
dailles, etc.,  etc.,  grandit  à  ce  point  que  l'imagination  en  fait  une  cité  des 
plus  considérables  de  la  vallée  rhénane.  Mais  Schœpflin,  qui  a  lu  les  éclair- 
cissements géographiques  de  d'Anville,  publiés  en  1741,  conçoit  des  doutes 
et  interroge  les  habitants  d'Artzenheim,  village  que  d'Anville  croit  avoir 
succédé  à  la  station  d'Argentovaria,  d'après  les  mesures  que  lui  fournissent 
l'itinéraire  d'Antonin  et  le  texte  de  la  table  de  Peutinger  alors  en  usage;  ce 
n'est  qu'après  avoir  obtenu  une  réponse  négative,  donnée  à  la  légère  par 
des  personnes  incapables  de  discerner  des  débris  antiques  des  fragments  de 
poterie  moderne,  que  Schœpflin  reste  dans  le  sillon  tracé  par  Beatus  Rhe- 
nanus; mais  il  est  à  remarquer  qu'il  le  fait  avec  cette  réserve  formelle,  que 
si  le  sol  d'Artzenheim  recelait  des  débris  antiques,  c'est  là  qu'il  faudrait 
placer  Argentovaria.  * 

Grandidier  a  accepté  l'opinion  reçue  avec  d'autant  plus  d'ardeur  que, 
de  son  temps,  l'on  a  découvert  le  caslnmi  de  Ilorbourg. 

Quant  à  M.  de  Golbéry,  les  distances  fournies  par  les  itinéraii'es  ne  l'ont 
guère  préoccupé,  et,  tout  en  décrivant  avec  le  plus  ^rand  soin,  pour  le 
Haut-Rhin,  la  voie  de  Milan  à  Maycnce,  il  a  oublié  de  remarquer  que  la 
donnée  de  l'itinéraire  d'Antonin  est,  en  soi,  indivisible  et  complexe,  en  ce 

1.  Alsatia  illustrata ,  t.  I,  fol.  p.  193-194,  gg  125  et  128.  —  Walck-enaer,  Géogr.  des 
Gaules,  a  suivi  l'opiaiou  de  d'Anville  et  s'est  préoccupé  d'Artzenheim;  mais  comme  les 
mesures  le  portaient  plus  au  nord  ,  il  a  indiqué  Manchon  {Manchen)  comme  étant  la  posi- 
tion exacte.  (Voir  le  plan  ci-joint.) 


24  

qu'elle  donne,  tout  à  la  fois,  coninie  nous  l'avons  déjà  dit,  le  nom  et  la  po- 
sition cVArgentovaria. 

Examinons  maintenant  la  valeur  de  la  citation  de  Ptolémée  :  ce  géographe 
donne  Argentovaria  comme  une  ville  des  Rauraques,  ce  qui  est  confirmé 
par  la  Notitia  provinciamm,  puisque  la  partie  nord  de  la  Maxima  Sequa- 
norum  comprenait  le  pays  des  Rauraques.  D'un  autre  côté,  il  est  bon  de 
faire  observer  que  Ptolémée  n'a  pas  cité  uniquement  de  grandes  villes,  des 
capitales  de  cités;  il  suffit  de  parcourir  son  œuvre  pour  se  convaincre  du 
contraire  :  je  n'en  donnerai,  pour  abréger,  qu'un  exemple,  voisin  de  la  con- 
trée qui  nous  occupe,  c'est  Tarodunum  (Zarten)  près  de  Fribourg. 

Si  nous  passons  au  récit  de  la  bataille  livrée  par  les  généraux  de  Gratien 
aux  AUemands-Lentiens  en  377,  nous  voyons  que  ces  Barbares,  excités  par 
l'un  des  leurs  qui  avait  pris  du  service  dans  la  garde  de  l'Empereur,  et 
instruits  par  lui  que  Gratien  allait  se  joindre  à  Valens  pour  combattre  les 
Goths  en  Orient,  ils  font  une  première  irruption  sur  le  territoire  romain  et 
sont  repoussés  par  les  Celtes  et  les  Pétulants;  que,  bientôt  après,  ayant  ap- 
pris que  la  majeure  partie  de  l'armée  d'Occident  est  arrivée  en  Illyrie, 
toutes  leurs  tribus,  formant  une  masse  d'environ  quarante  mille  hommes, 
passent  le  Rhin  et  font  irruption  dans  la  Gaule.  C'est  alors  que  Gratien  fait 
rétrograder  ses  troupes,  appelant  à  lui  les  réserves  laissées  dans  la  Gaule, 
et  donne  à  cette  armée  Nannien  et  Mellaubode  pour  chefs. 

Tout  à  coup,  près  d'Argentaria,  les  Romains  se  trouvent  en  présence 
des  Barbares,  et  c'est  dans  une  plaine  où  ils  sont  à  découvert  qu'ils  se 
voient  exposés  à  leurs  coups;  il  n'est  nulle  question  dans  cette  description 
d'un  cours  d'eau  tel  que  l'Ill,  contre  lequel  ils  pouvaient  être  acculés  ou 
rejetés,  ou  bien  duquel  ils  pouvaient  se  couvrir,  mais  d'une  forêt  dans  la- 
quelle ils  prennent  position  à  la  hâte,  et  où  ils  sont  sur  la  défensive  jusqu'à 
l'arrivée  de  la  garde  de  l'Empereur  qui  décide  la  victoire. 

L'armée  de  Gratien  reprend  alors  sa  marche  vers  l'Orient;  mais,  après 
avoir  dépassé  le  coude  que  fait  le  Rhin  près  de  Râle,  les  Romains  tournent 
subitement  à  gauche,  traversent  le  fleuve,  et  là  se  passe  la  seconde  affaire 
dans  un  espace  resserré  où  tout  l'avantage  de  la  position  était  pour  les 
Barbares:  ceux-ci  sont  de  nouveau  défaits,  et  l'armée,  revenant  sur  le  sol 
gaulois,  près  du  lac  de  Constance,  continue  sa  marche  pour  aher  joindre 
Valens.' 

Je  dois  déclarer  ici  qu'en  décrivant  cette  bataille  dans  mon  Alsace  ro- 

1.  Ammien  Marccllia  ,  liv.  31,  g  10.  —  Aurelius  Victor,  E/nlome.  —  Orose,.  liv.  7, 
chap.  33.  —  Moue  ,  ïeilschrift,  Xlll^  vol. ,  a  donné  nne  description  très-détaillée  de  la  ligne 
de  défense  des  Uoniains  dcpnis  Bàlc  jnsqu'à  .'^cliafllionsc. 


22  

tnaine/fai  eu  le  tort  de  considérer  comme  la  principale  affaire  celle  qui 
eut  lieu  dans  le  pays  de  montagnes  voisin  du  lac  de  Constance,  et  que  j'a- 
vais considéré  Langen  Argen,  comme  répondant  h  Argentaria  :  c'était  une 
erreur,  puisqu'il  s'agit  d'une  ville  de  la  Gaule,  oppidum  GaUice,  tandis 
que  Langen  Argen  était  dans  la  Rhétie,  et  (jue  la  plaine  d'Alsace  répond 
bien  mieux  aux  détails  fournis  par  Ammien  Marcellin. 

Quant  aux  autels,  monuments  funéraires,  médailles  et  surtout  Xacastrum 
découverts  à  Ilorbourg-,  je  répondrai  que  ce  n'est  pas  une  raison  pour 
donner  à  cette  ville,  dont  l'importance  est  incontestable,  le  nom  ù'Argen- 
tovaria.  M.  Alfred  Maury,  de  l'Académie  des  inscriptions,  l'un  des  savants 
les  plus  éminents  de  la  France,  m'a  fait,  à  ce  sujet,  l'iionneur  de  m'écrire 
ce  qui  suit  :  «  11  est  clair  que  le  castrum  de  Horbourg  n'est  plus  une  raison 
péremptoire  d'y  placer  Argentovarla,  des  antiquités  se  trouvant  en  bien 
des  points  voisins;  dès  lors,  il  ne  reste  plus  que  les  distances  qui  sont  en 
votre  faveur.  » 

Quant  à  l'inscription  relatée  dans  le  Bulletin, 

G.A.P.R. 
page  94,  qui  a  été  interprétée  comme  il  suit  : 

Genio  Argentovariœ  populi  restitutum  ou  bien  Genio  Argentovariœ  po- 
pulus  restituit,  et  que  M.  le  conseiller  Boyer ,  auteur  d'une  histoire  d'Al- 
sace, qui  est  sur  le  point  de  paraître,  m'a  dit  devoir  être  traduite  comme 
il  suit  : 

Gratianus  Argentovariœ  populus  restituit,  je  me  bornerai,  pour  toute 
réponse,  à  donner  connaissance  de  ce  que  M.  Jules  Quicherat,  professeur 
d'archéologie  à  l'école  des  chartes,  ce  savant  aussi  bienveillant  que  distin- 
gué, a  répondu  à  la  communication  que  je  venais  de  lui  faire  de  cette  in- 
scription :  ((  Je  ne  vois  pas  que  vous  ayez  Heu  d'être  inquiet  du  côté  de  vos 
contradicteurs  tant  qu'ils  n'auront  pas  de  titre  plus  solide  à  vous  opposer 
que  l'inscription  de  Ilorbourg.  Ces  quatre  lettres  peuvent  recevoir  toute 
sorte  d'interprétations,  excepté  celles  qu'ils  en  tirent,  car  ce  n'était  pas 
l'usage  d'écrire  les  dédicaces  uniquement  avec  des  sigles,  et  les  sigles  que 
l'on  rencontre  dans  les  inscriptions  dédicatoires,  n'expriment  les  noms  ni 
de  ceux  qui  ont  fait  la  dédicace,  ni  de  ceux  qui  l'ont  reçue.  S'il  en  était  au- 
trement, l'épigrapbie  ne  serait  qu'un  champ  ouvert  à  la  fantaisie,  et  cha- 
cun y  trouverait  des  noms  propres  à  sa  commodité  pour  le  triomphe  des 
opinions  qu'il  soutient.  » 

11  me  reste  à  prouver,  par  des  autorités  irrécusables, (jue  la  station  à'Ar- 
gentovaria  n'a  pas  été  vainement  recherchée  jusqti'à  présent.  En  effet,  voici, 
à  propos  de  la  découverte  de  Grusscnheim ,  l'opinion  de  la  commission  de 


—  23  — 

topographie  de  la  Gaule  ',  qui  m'a  fait  l'honneur  de  m'adresser  officielle- 
ment, par  l'organe  de  son  secrétaire,  M.  Alexandre  Bertrand,  les  lignes 
suivantes  :  «  La  commission  de  la  topographie  des  Gaules  a  reçu,  par  l'in- 
termédiaire de  M.  le  général  Creuly,  la  note  que  vous  lui  avez  envoyée 
touchant  la  station  ô'Argentovari.a.  La  commission  vous  remercie  de  cette 
communication  qui  l'a  vivement  intéressée,  d'autant  plus  que  vos  rensei- 
gnements viennent  confirmer  la  décision  qu'elle  avait  prise  en  plaçant  Ar- 
rjentovaria  sur  la  voie  romaine,  exactement  au  point  où  vous  avez  trouvé 
des  ruines,  à  Grussenheim.  » 

M.  le  général  Creuly  m'écrivait  à  la  même  date  (20  mars  1862)  :  «  La 
commission  n'hésite  pas  à  placer  la  localité  antique  (YArgentovaria  sur  la 
voie  même,  au  point  môme  qu'elle  avait  trouvé,  au  moyen  des  mesures 
itinéraires,  dans  la  banlieue  de  Grussenheim,  là  où  vous  avez  reconnu  qu'il 
existe  des  restes  d'un  centre  de  population  antique.  Elle  m'a  chargé  de 
vous  exprimer  sa  reconnaissance  pour  celte  utile  communication.  » 

Je  transcris  ces  lettres  pour  répondre  à  ceux  qui  prétendent  que  les 
textes  des  itinéraires  sont  tellement  défectueux,  que  l'on  ne  saurait  étayer 
qu'un  système  purement  problématique,  et  sans  valeur  sur  leurs  données. 
Oui,  assurément,  les  textes  des  itinéi'aires  présentent  bien  des  erreurs; 
cela  est  incontestable.  Mais,  quand  les  savants  les  plus  sérieux  ne  dédai- 
gnent pas  d'y  recourir,  faut-il  jeter  au  rebut  ces  documents  qui  nous 
ont  été  légués  par  l'antiquité?  Non;  et  voici  ma  conclusion  que  je  soumets 
à  tous  ceux  qui  lisent  sans  parti  pris  à  l'avance:  toutes  les  fois  que  les  don- 
nées des  itinéraires  sont  confirmées  par  des  gisements  de  ruines,  il  faut 
reconnaître  qu'il  n'y  a  point  d'erreur  dans  le  texte,  dans  les  manuscrits. 
Appliquons  cela  au  fragment  de  la  voie  que  nous  venons  d'examiner.  La 
Table  de  Peutinger,  qui  donne  la  géographie  du  temps  d'Alexandre  Sévère 
et  d'Auréhen,  place  à  douze  lieues  gauloises  au  sud  cV Argentoratuni  une 
station  appelée  Helellum,  répondant  parfaitement  à  Ehl-Benfeld,ct,  à  douze 
lieues  plus  loin,  une  autre  station  dont  le  nom  est  perdu,  mais  dont  la  po- 
sition concorde  exactement  avec  le  gisement  de  ruines  d'Ohnenheim. 

Quant  à  l'itinéraire  d'Antonin,  postérieur  en  dale,  et  donnant  la  géogra- 
phie au  temps  de  Dioclétien,  nous  y  voyons  encore  Ehl  {Hcluetus),  à  douze 
lieues  au  sud  d' Argentoratuni,  et  à  seize  lieues  plus  loin  Argentovaria,  ré- 
pondant au  gisement  de  Grussenheim  :  la  station  près  d'Ohnenheim  a  pu 

•  I.  Cette  commission  est  ainsi  composée  :  MM.  de  Saiilcy,  président;  Alfred  Manry  et 
Alex.  Bertrand,  secrétaires;  (juigiiant,  Léon  Renier,  général  Creuiy,  Viollet  le  Duc,  Blonde!, 
de  Goynart,  Amédéc  Thierry .  Alfred  Jacobs,  Anatole  de  Barthélémy  et  Gustave  Ronland  , 
membres. 


—  24  — 

être  ruinée  dans  l'inlervalle  de  la  confection  des  deux  itinéraires,  par  une 
incursion  de  Barbares,  puisqu'elle  n'est  plus  indiquée  dans  celui  d'Antonin 
qui  nous  occupe.  A  dix-huit  lieues  au  sud  à'Argentovaria,  est  la  station  de 
Stoôt^/œ,  correspondant  aux  substruclions  de  Bantzenheim  ;  enfin,  à  six 
lieues  plus  loin  se  trouve  Kembs  qui,  outre  un  gisement  considéi'able,  a  re- 
tenu en  partie  son  ancien  nom. 

Je  le  demande,  en  terminant,  comment  pourrait-on,  en  présence  défaits 
aussi  précis,  rejeter  absolument,  comme  erronés  et  problématiques,  les 
deux  itinéi-aires  qui  viennent  d'être  cités,  et  s'obstiner  à  gratifier  Horbourg 
du  nom  cVArgentovaria,  alors  que  ce  nom  ne  touche  en  rien  à  son  impor- 
tance dans  l'antiquité? 

Schlestadt,  20  janvier  1863. 

COSÏE. 


ARGEN  TOVARIA 

Station  dallo-romaine 


Grusseiilieim 


'  S3  Terrain  fouillé. 

h^  Siiktiuctions romaines. 

c  ii:  Delnsromams  sur  les  champs . 

//  Elévation  ie  terrain  assez iDrononcée 


Marckolslieini 


^//  Mxmcheiv 

//       * 
ChapeJle/ . 


^^i.  Moulin  dArtx£nTuim 


U0i»030»i005ùi) 

I    I    I    I    I 


iOOO' 

I 


essejar  Coste. 


ùtiîiU  c  St--^s:n 


NOTICE  HISTORIQUE 


L'HOTEL  DE  VILLE  D'OBERNAI 


LES  ANCIENS  EMPLACEMENTS  JUDICIAIRES  DITS  SEELHOF  ET  LAUBE. 


A  côté  de  ceux  des  monuments  anciens  qui  se  distinguent  par  leur  type 
architectonique  ou  qui  nous  révèlent  les  mœurs  et  les  institutions  des  âges 
les  plus  reculés,  il  y  en  a  d'autres  qui,  pour  avoir  un  caractère  plus  modeste, 
n'en  sont  pas  moins  dignes  d'intérêt,  en  ce  que  le  passé  qu'ils  rappellent, 
mérite  également  d'être  préservé  des  dédains  de  l'oubli.  C'est  dans  cette 
dernière  catégorie  que  nous  croyons  devoir  ranger  l'hôtel  de  ville  d'Ober- 
nai ,  ou  du  moins  la  partie  de  ce  bâtiment  qui  a  élé  conservée  lors  de  la 
dernière  reconstruction  et  qui  renferme  l'ancienne  salle  de  conseil  et  de 
justice. 

Non-seulement  cet  édifice  vit  encore  fonctionner  dans  son  enceinte  le 
régime  municipal  dans  toute  sa  vigueur  première,  mais  dans  le  cours  d'au 
delà  de  trois  siècles  qu'il  a  traversés,  il  fut  aussi  témoin  de  débats  d'un  in- 
térêt plus  général,  en  accueillant  à  mainte  reprise  les  représentants  des 
diverses  autorités  de  la  province. 

Si,  d'un  autre  côté,  nous  voulons  prendre  en  considération  l'emplace- 
ment sur  lequel  s'élève  cette  construction,  nous  trouvons  qu'il  correspond 
à  un  ancien  siège  de  justice  qui  jouissait  autrefois  d'une  grande  importance 
dans  la  contrée,  et  dont  l'origine  se  rattache  peut-être  aux  institutions 
judiciaires  de  l'Alsace  primitive. 

Qu'il  nous  soit  permis  de  préciser  ces  différents  souvenirs,  à  l'aide  de 
renseignements  puisés  dans  des  documents  divers,  mais  principalement 
dans  ceux  qui  se  trouvent  conservés  aux  archives  de  la  ville.  Nous  com- 
mencerons par  les  détails  qui  ont  rapport  au  siège  de  justice,  en  suivant 
ainsi  la  marche  des  .faits ,  puisque  partout  les  institutions  judiciaires  ont 
précédé  de  loin  l'organisation  du  régime  municipal  proprement  dit. 


26 


I. 


Quand,  dans  la  première  moitié  du  quatorzième  siècle,  Obernai  eut  fait 
son  acte  de  soumission  à  l'empereur  Louis  de  Bavière,  après  avoir,  à  l'in- 
slar  d'autres  villes  impériales  d'Alsace,  adhéré  pendant  de  longues  années 
au  parti  de  Frédéric  d'Autriche,  et  pris  part  aux  diverses  expéditions  du 
duc  Leopold,  frère  de  Frédéric,  la  ville  obtint  immédiatement  du  chef  de 
l'empire  la  confirmation  de  tous  les  privilèges  dont  elle  avait  été  gratifiée 
par  ses  prédécesseurs,  et  reçut  en  outre  l'assurance  d'être  dotée  de  nou- 
velles franchises.  Parmi  les  immunités  qu'Obernai  reçut  à  celte  occasion, 
on  remarque  l'exemption  de  la  ville  de  toute  juridiction  étrangère.  Par  let- 
tres datées  de  Bâle,  du  lundi  avant  la  Sainl-Barthélemy  de  l'année  1330, 
l'empereur  Louis  de  Bavière  déclara  «  à  ses  amés  et  féaux,  le  conseil  et  la 
communauté  des  bourgeois  d'Ehenheim  supérieur  »,  «  que  désormais  nul 
habitant  de  la  ville  ne  pourra  être  cité  en  justice  devant  aucun  autre  tri- 
bunal que  celui  du  prévôt  impérial  de  la  ville  même, c'est-à-dire  les  nobles 
au  lieu  dit  Sedltof,  et  les  bourgeois  sous  la  Laube.  »  ' 

Cette  charte  est  le  premier  document  qui  fasse  mention  du  double  tri- 
bunal de  justice  qui  siégeait  d'une  part  sur  la  place  dite  Seelhof,  contiguë 
au  cimetière,  et  de  l'autre  sous  la  halle  ouverte  dite  Laube,  par-dessus  la- 
quelle s'éleva  plus  tard  l'hôtel  de  ville;  il  est  clair,  toutefois,  d'après  les  ter- 
mes de  ce  titre,  qu'à  cette  époque,  celte  institution  judiciaire  fonctionnait 
déjà  de  temps  immémorial.  Le  privilège  de  Louis  de  Bavière  fut  confirmé 
dans  les  mêmes  termes  par  les  empereurs  Charles  IV,  Frédéric  III  et 
Charles  V;  de  plus,  sa  teneur  et  ses  expressions  se  trouvent  reproduites 
dans  toutes  les  lettres  réversales  délivrées  à  la  ville  par  les  UnlerlandvÖgt 
ou  sous-bailhs  provinciaux,  y  compris  ceux  même  de  la  domination  fran- 
çaise. Quand,  en  1714,  le  sieur  Gaspard  d'Halzel  prêta  à  la  ville  d'Obernai 
le  serment  d'usage,  il  dut  encore  jurer  de  respecter  l'ancienne  franchise  de 
la  ville  qui  voulait  «  que  ses  habitants  ne  pussent  être  obligés  à  d'autres 
ressorts  en  première  instance  qu'à  la  justice  qui  se  rend  au  Seelhof  pour  les 
nobles  et  en  la  Laube  pour  les  bourgeois.  »  Pourtant,  il  s'était  déjà  écoulé 
des  siècles,  que  la  place  dite  Sed/io/"  n'avait  plus  vu  se  réunir  dans  son  en- 
ceinte, ni  chevaliers,  ni  écuycrs,  poui"  y  tenir  des  séances  judiciaires; 

1.  Voy.  Albcrli  argcntinensis  chronicon  in  Ursiisio,  pars  II,  p.  122;  puis  les  lettres 
réversales  du  Laiidvogt  Albert  Humélloii  de  Lichtenberg;  et  les  divers  diplômes  de  Louis  de 
Bavière  aux  archives  de  la  ville.  Voici  les  termes  dans  lesquels  s'exprime  le  diplôme  de 
13.30  :  "  So  fjcben  ivir  in  die  vriheit ,  und  wellen  och ,  dasz  dliein  man  oder  frow  der  ze 
'I  Ehen/ieim  hörl,  irirjend  ze  rclil  slan  soll,  wann  die  Edlen  Hit  in  dem  sctliof  und  die 
<'  Bin-ijrr  muter  der  loben  ze  Ehenheiiu  ror  dem  Srlntltheizze.  » 


_  27  

quant  au  Iribiinal  bourgeois  de  la  Lcmbe,  celui-ci,  las  de  siéger  en  plein 
air,  comme  dans  le  bon  vieux  temps,  avait  aussi  abandonné  depuis  fort 
longtemps  cet  emplacement  pour  s'installer  dans  la  salle  de  conseil  actuelle. 
Néanmoins,  les  noms  traditionnels  des  deux  emplacements  s'étaient  encore 
conservés  au  dix-buitième  siècle,  et  ils  se  sont  même  maintenus  jusqu'à 
nos  jours.  En  rappelant  les  faits  qui  s'y  rapportent,  nous  ferons  revivre  le 
souvenir  à  peu  près  effacé  de  ces  anciennes  assises  judiciaires,  dont  les 
actes  occupent  une  si  large  place  dans  les  archives  de  la  ville. 

L'importance  du  tribunal  de  justice  établi  à  Obernai  est  constatée  à  la 
fois  par  celle  de  l'office  de  la  haute  prévôté  dont  le  titulaire  le  présidait, 
par  les  divers  fiefs  attachés  à  ce  tribunal,  et  enfin  par  f étendue  de  la  juri- 
diction de  ce  dernier.  L'office  de  la  haute  prévôté  (OberscJmltheissamt) , 
après  avoir  été  conféré  par  les  empereurs  à  des  seigneurs  divers,  et  un 
instant  impignoré  à  la  ville  même,  tomba,  dans  la  première  moitié  du 
quinzième  siècle,  entre  les  mains  des  comtes  palatins,  qui  en  jouirent  à 
titre  de  gage  de  f  empire,  jusqu'à  ce  qu'au  commencement  du  seizième 
siècle,  la  guerre  palatine  dépouillât  cette  maison  de  tous  ses  fiefs  impé- 
riaux. Ce  fut  alors  que  f  empereur  Maximilien  P''  conféra  cette  charge,  con- 
jointement avec  la  seigneurie  de  Barr,  à  son  vice-chancelier,  Nicolas 
Ziegler,  lequel  reçut  plus  tard  l'une  et  l'autre  à  titre  de  propriété  de  l'em- 
pereur Charles  V,  du  consentement  des  électeurs  de  l'empire.  De  Nicolas 
Ziegler  et  de  ses  fils,  la  seigneurie  de  Barr  et  la  haute  prévôté  d'Obernai 
passèrent  par  voie  d'achat  à  la  ville  de  Strasbourg,  laquelle  finit  par  vendre 
foffice  à  la  ville  d'Obernai  même,  en  1609.  —  Quant  aux  divers  fiefs  qui 
formaient  une  dépendance  du  tribunal  impérial,  ces  fiefs  judiciaires,  con- 
jointement avec  les  fiefs  castraux,  relevant  du  ci-devant  château  impérial 
des  Hohenstaufen,  ne  contribuèrent  pas  peu  à  augmenter  le  nombre  des 
nobles,  autrefois  domiciliés  ou  possessionnés  à  Obernai.  Outre  la  juridic- 
tion criminelle  et  le  droit  de  glaive  (Blutbann)  y  attaché,  qui  restèrent 
constamment  fiefs  de  l'empire,  il  y  avait  le  fief  du  bourreau  ou  Henckers- 
lehen  qui  eut  pour  charge  de  pourvoir  aux  frais  des  exéculions  criminelles 
et  qui  des  nobles  Wepfermann,  ses  possesseurs  primitifs,  passa  aux  Land- 
schaden de  Steinach.Le  fief  dit  Büllelam lichen,  dont  se  trouvaient  investis 
les  nobles  Bcger  de  Geispolsheim,  avait  à  soldei' les  appariteurs  du  tribunal. 
Un  autre  fief  judiciaire  se  trouvait  entre  les  mains  des  Gossmar  d'Ehen- 
heim.  —  Pour  ce  qui  concerne  fétenduedela  juridiction  du  tribunal,  nous 
trouvons  que  celle  du  Seelhof  s'étendait  aux  nobles  de  toute  la  contrée , 
comme  aussi  celle  du  tribunal  bourgeois  de  la  Laube  s'exerçait  uon-scule- 
inent  sur  les  habitants  de  la  ville,  mais  encore   sur  un  grand  nombre  de 


—  28  — 

localités  plus  ou  moins  éloignées;  à  ce  tribunal  ressortissaient,  en  effet,  ainsi 
que  le  constatent  les  procédures  conservées  aux  archives,  les  justices  lo- 
cales de  Barr,  Heiligenstein,  Gertweiler,  Goxweiler,  Mittelbergheim,  Blienswei- 
1er,  Nothalten  et  Zell ,  Krautergersheim  et  Innenheim.  On  y  porta  aussi,  pen- 
dant plusieurs  siècles,  les  appels  des  justices  d'Ottrott-le-lIaut,  Saint-Nabor, 
Blsesheim,  Erstein,  Weslhausen,  Hüttenheim,  Kogenheim,  etc.  Toutefois, 
l'étendue  de  cette  juridiction  se  trouvait  déjà  amoindrie,  quand  la  ville  de 
Strasbourg  fit  l'acquisition  de  la  haute  prévôté,  et  elle  le  fut  encore  bien 
plus,  quand  cette  ville  céda  l'office  à  celle  d'Obernai. 

L'ancienne  importance  du  Beichsgericht,  ou  tribunal  impérial  d'Ober- 
nai, étant  ainsi  dûment  constatée,  ne  serait-il  pas  permis  de  voir  dans  ce 
tribunal  un  débris  de  ce  siège  judiciaire  des  ducs  mérovingiens  d'Alsace 
qui,  d'après  un  document  célèbre,  quoique  d'une  authenticité  très-contro- 
versée, aurait  existé  à  Ehenheim,  dès  les  temps  anciens'  ?  Et,  par  contre, 
si  le  souvenir  de  cette  cour  ducale  et  de  ses  assises  judiciaires  s'était  con- 
servé au  douzième  siècle,  ne  pourrait-il  pas  y  avoir  quelque  connexion 
entre  cette  cour  ducale  primitive,  et  l'origine  du  château  ducal,  puis  impé- 
rial des  Hohenstaufen,  lequel  surgit  à  cette  époque  à  Ehenheim,  château 
connu  par  les  chartes  qu'y  signèrent  les  empereurs  Frédéric  Barberousse 
et  Henri  VI,  et  dans  lequel  le  Minnesänger  Gösli  d'Ehenheim  charmait  par 
les  accords  de  sa  lyre  le  séjour  des  princes  souabes?  Quoi  qu'il  en  soit, 
même  quand  le  château  des  Hohenstaufen  gisait  déjà  en  ruines  à  la  suite 
des  revers  qui  avaient  amené  la  chute  de  cette  race  illustre,  nous  voyons 
encore  s'ouvrir  à  Ehenheim  une  de  ces  hautes  cours  de  justice  qui,  dans 
ces  temps  reculés,  étaient  présidées  par  les  souverains  en  personne.  Une 
charte  d'investiture,  délivrée  en  1283,  par  Rodolphe  de  Habsbourg,  nous 
apprend,  en  effet,  que  cet  empereur  présidait,  alors  à  Ehenheim,  des  co- 

1 .  "  Prêter  curimii  unam  in  Ehenheim  sitam,  ob  cujus  curie  di(j)ii tatou  et  memoriale, 
«  quia  curia  pupplica  Ducis  dicebatur^  et  sedesjudicialis  Ducis  in  Un  erat  ab  antiquitale.» 
Testament  de  S'«  Odile.  —  Quel  que  soit  le  jugement  que  l'on  porte  sur  ce  document,  il 
faut  conveuir  qu'il  est  d'une  haute  autiquité  et  que  dès  lors  il  mérite  d'être  pris  en  consi- 
dératiou  très -sérieuse,  ne  fût-ce  que  parce  qu'il  serait  l'écho  des  traditions  qui  avaient 
cours  à  l'époque  où  il  fut  rédigé.  Au  reste  ,  on  sait  que  Grandidier,  tout  eu  rangeant  parmi 
les  pièces  apocryphes  le  titre  que  Schœpfliu  avait  examiné,  revendique  la  parfaite  authen- 
ticité d'un  autre  exemplaire,  qui  existait  autrefois  aux  archives  épisf^opales  de  Saverne,  et 
déclare  que  ce  dernier  est  le  véritable  original.  Le  célèbre  critique  explique  d'une  manière 
très -plausible  les  raisons  pour  lesquelles  le  titre  véritable  est  resté  dans  l'oubli,  tandis 
que  la  pièce  supposée  a  été  exhibée  au  public  et  a  même  reçu  la  confirmalion  des  empe- 
reurs. (V.  Grandidier,  Hist,  de  l'évêché,  dissertation  sur  le  lestanient  de  S'"  Odile,  1. 1,  p.  90.) 
Mallieiu-ensement  il  parait  que  c'est  encore  la  pièce  apocryphe  seule  qui  a  échappé  au  dé- 
ménagement des  archives  et  qui  se  trouve  maintenant  à  la  l'réfecture. 


—  29  — 

mices  judiciaires,  auxquels  prirent  pari  «  l'évêque  Conrad  de  Lichtenberg 
et  un  grand  nombre  de  comtes,  vassaux, ministériaux  et  autres  personnages 
de  distinction.  »  ' 

Ce  qui  conlirmc  puissamment  notre  hypothèse  sur  l'origine  première  du 
tribunal  de  justice  d'Obernai,  ce  sont  les  prérogatives  que  les  abbayes  de 
Uohcnbourg  et  de  Niederraünsler  exerçaient  sur  ce  tribunal.  D'après  le 
document  mentionné  plus  haut,  la  cour  d'Ehenheim,  qui  aurait  été  le  siège 
judiciaire  des  ducs  d'Alsace,  fut  léguée  par  indivis  aux  deux  monastères 
fondés  par  sainte  Odile,  la(iuelle  avait  obtenu  cette  cour  du  duc  Athic,  son 
père.  Or,  jusqu'au  seizième  siècle,  l'emplacement  où  se  rendait  la  justice 
pour  les  nobles,  la  cour,  dite  Seelhof,  était  la  propriété  des  deux  abbayes, 
lesquelles  nommaient  en  même  temps  les  juges  ou  assesseurs  du  tribunal. 
Le  titre  le  plus  ancien  qui  fasse  mention  de  cette  place,  est  un  acte  de  vente 
de  biens  communaux,  daté  de  1258.  Celte  charte,  qui  est  la  première  qui 
donne  à  Obernai  la  qualification  de  ville,  montre  que  sur  ce  même  empla- 
cement se  débattaient  aussi  les  intérêts  de  la  commune;  elle  se  termine  par 
ces  mots  :  «  Ada  sunt  hœ  in  cimiterio  Ehenheim ->-> .  1  e  mot  «  cimiterhtm  », 
qui  est  la  traduction  latine  de  Seelhof,  désigne  sans  aucun  doute  la  place 
contiguë  au  cimetière  qui  porte  encore  aujourd'hui  ce  nom,  et  qui,  pro- 
bablement, ne  formait  alors  qu'un  seul  et  même  enclos  avec  le  cimetière. 
Quelques  années  plus  tard,  en  1276,  «  la  cour  de  l'abbaye  de  Hohenbourg 
à  Ehenheim,  dite  Seelhof)),  réunit  dans  son  enceinte  les  représentants  de 
la  plupart  des  familles  nobles  d'Obernai  et  du  voisinage,  chargés  de  décider 
les  questions  litigieuses  qui  s'étaient  élevées  au  sujet  des  immunités  des 
cours  franches  que  l'abbaye  de  Hohenbourg  possédait  dans  diverses  loca- 
lités. Cette  assemblée  avait  été  convoquée  par  le  Landvogt  ou  préfet  pro- 
vincial Cunon  de  Bergheim,  sur  les  ordres  de  l'empereur  Rodolphe  de 
Habsbourg  ^  Au  siècle  suivant,  la  cour  dite  Seelhof  devint  elle-même  un 
objet  de  graves  contestations  entre  les  deux  abbayes  de  Hohenbourg  et  de 
Niedermünster.  Comme  le  premier  de  ces  monastères  revendiquait  exclusi- 
vement cette  cour  avec  les  prérogatives  judiciaires  y  attachées,  l'abbesse  de 

I.  "  Préside nlibus  nobis  judieio  apitd  Ehilieim  J'eriâ  sexld  post,  feslum  beall  andreœ 
»aposlo/i,  présente  ocnerubili  argentijœtisi  Episcopo,  el  niultis  uliis  coiuitibus ,  nobi- 
«  libiis  ,  miuislerlalibus  et  vasallis.  •>  Sduepllin,  Aïs.  diplum.,  11°  732.  Scliœpllin  a'iiésile 
pas  à  alliriiier  que  la  localité  nommée  ici  Eiiilieim  n'est  autre  cjue  la  ville  d'Eliealieim  supé- 
rieure avec  son  château.  «  Prociil  dubio  Elmlieim  superiiis  oppidain  imperiale  cum  eoslro.» 

'2.  Il  Qui  {Rudo/phus  rex)  nobis  iajunxit  ut  apud  ciiriam  suam  Ehenheim  quœ  dicitur 
selhoj  venerimus^  etc.»  Archives  de  la  Préfecture,  série  G,  u°  548.  Évèché,  trésor  des 
chartes,  armoire  iiistorique.  —  Une  ancienne  copie  de  cette  charte  se  trouve  aux  archives 
d'Obernai. 


—  m  ~ 

Niedermiinstcr,  Margiicrile  de  Senones,  enl.  recours  à  la  proleclion  de  son 
haut  el  puissant  vassal,  le  duc  Albert  d'Autriche,  lequel  prit  à  tâche  défaire 
constater  solennellement  les  droits  de  sa  protégée.  Par  acte,  daté  du  di- 
manche avant  la  fête  de  saint  Nicolas  de  l'année  1351,  les  évêques  Berthold 
de  Strasbourg,  et  Jean  de  Baie,  Eberhard,  comte  de  Wurtemberg,  et 
Jean,  seigneur  de  Rappolstein,  attestèrent  «qu'étant  réunis  à  Ensisheim , 
dans  le  Burg,  le  sérénissime  prince  Albert,  duc  d'Autriche,  avait  déclaré 
en  leur  présence  qu'il  tenait  des  fiefs  de  l'abbaye  de  Niedermünster,  dont 
il  avait  reçu  récemment  l'investiture,  et  qu'en  même  temps  il  avait  reconnu, 
d'après  les  titres  qu'il  Eivait  vus  et  les  attestations  qu'il  avait  entendues, que 
la  cour,  dite  Seelhof,  à  Ehenheim,  supérieure  avec  la  justice,  les  hommes 
et  tous  les  droits  y  attachés,  appartenaient  par  indivis  aux  deux  abbayes  de 
Ilohenbourg  et  de  Niedermünster.  »  ' 

Que  si  nous  examinons  maintenant  l'organisation  de  ce  tribunal,  nous 
voyons  que  le  même  prévôt  présidait,  au  nom  de  l'empire,  la  justice  noble  du 
Seelhof,  et  la  justice  plébéienne  de  la  Laube;  mais  les  juges  ou  assesseurs 
étaient  différents.  Tandis  que  ceux  de  ce  dernier  tribunal  étaient  élus  parla 
bourgeoisie,  les  premiers  étaient  nommés  par  les  deux  abbayes,  et  choisis  de 
préférence  parmi  leurs  ministériaux  et  employés.  Au  nombre  de  ces  asses- 
seurs figurent  successivement  la  plupart  des  nobles  d'Obernai  et  du  voisi- 
nage, tels  que  les  Schenck,  les  Gossmar,  les  Oberkirch,  les  Landsperg,  les 
Uttenheim  lu  Ramstein,  les  Beger,  les  Zorn,  etc.  Aux  assesseurs  nobles  se 
trouvait  toujours  adjoint  un  certain  nombre  de  plébéiens  choisis  parmi  les 
employés  des  cours  franches  des  deux  abbayes  à  Obernai  et  à  Rosheim  l  La 
juridiction  de  ce  tribunal,  ainsi  que  nous  l'avons  déjcàdit,  s'exerçait  sur  les 
nobles  de  toute  la  contrée,  et  en  outre  sur  les  employés  subalternes  des 
deux  abbayes.  A  ce  dernier  sujet,  la  ville  d'Obernai  eut  de  longues  et  graves 
contestations  avec  ces  deux  maisons  religieuses.  Néanmoins,  à  la  faveur 
des  rescrits  impériaux  qu'elles  obtinrent  à  plusieurs  reprises,  celles-ci 
réussirent  à  maintenir  leur  privilège  qui  voulait  que  tous  leurs  employés, 
même  roturiers,  ne  pussent  être  traduits  devant  aucune  autre  justice  que 

1.  »  Dasz  der  scikof  zu  Obern-Ehenheim  mit  gerichte,  manschafte  und  allen  andern 
u  sinen  rechten  dem  vorgenannten  Closter  Nidernmünster  zu  Hohe nburg  und  demCloster 
«  zu  Obern-Hohenhurg  gemein  zugehorte."  Archives  de  la  Préfecture,  série  G,  n"  3431. 
Évêché,  nova  registratura. 

2.  Voy.  diverses  sentences  rendues  an  Seelhof,  aux  archives  de  la  ville.  Voici  la  formule 
ordinaire  dans  laquelle  elles  sont  rédigées  :  «  Ich  N.  des  Riches  UnterschuUheisz  zu  Obern- 
«  Ehenheim,  als  ich.  öffentlich  zti  Gerichte  sasz  an  des  Riches  Edelgericht  indem  Selhove 
0  zu  Obern-Ehenheim ,  da  kam  für  mich  ....  und  waren  an  disem  Gericht  die  Urtel- 
II  geber  N.  N.  .  .  .  der  gnädigen  Fraiven  von  Hohenburg  und  Nidernmünster  Manne  und- 
i<  Ambahtlüte  ,  etc.  " 


-   31  — 

celle  (les  nobles  au  Seelhof.  La  dernière  sentence  rendue  au  Seelhof  qui 
soit  conservée  aux  archives,  est  de  1507.  L'extinction  de  la  plupart  des 
familles  nobles  d'Obernai  vers  la  fin  du  quinzième  siècle,  et  le  recours  à 
d'autres  juridictions  expliquent  sufiîsamnienl  la  disparition  de  cet  ancien 
tribunal. 

Le  tribunal  bourgeois  de  la  Laube  qui  se  rattache  plus  étroitement  à 
notre  sujet,  avait  emprunté  son  nom  à  la  halle  ou  galerie  ouverte  qui  l'a- 
britait et  par-dessus  laquelle  s'éleva  plus  tard  l'hôtel  de  ville.  Cet  emplace- 
ment figure  encore  dans  les  titres  sous  les  noms  de  Gerichtslmibe  et  Reichs- 
laube.Ce  ne  fut  qu'au  commencement  du  dix-septième  siècle  que  les  séances 
de  ce  tribunal  commencèrent  à  être  tenues  à  huis  clos,  et  que  la  salle  de 
conseil  actuelle  i'ul  appropriée  à  celte  destination  *.  Cette  justice  avait  le 
même  chef  suprême  que  celle  du  Seelhof,  à  savoir  le  grand  prévôt  ou 
Oherschultheiss  qui  tenait  sa  dignité  de  l'empire,  et  était  présidée  par  le 
suppléant  de  ce  dernier,  le  sous-prévôt  ou  Vnterschulthciss  lequel,  en  rai- 
son de  ses  fonctions,  était  aussi  appelé  le  prévôt  résidant  ou  siégeant  {der 
sitzende  Schulthehs).  Ce  fonctionnaire  ne  pouvait  être  choisi  par  le  grand 
prévôt  que  parmi  les  bourgeois  indigènes, et  sa  nomination  dut  êtreagréée 
par  le  magistrat.  Les  assesseurs  de  ce  tribunal  étaient  au  nombre  de  treize; 
ils  sont  désignés  dans  les  documents  sous  la  qualification  des  h.  Reich- 
gericht zu  Obern-Ehenheim  dreyzehn  Richter,  ou  dreizehn  Urthelsprecher. 
Ces  assesseurs  se  renouvelaient  chaque  année  par  la  voie  du  suffrage  pu- 
blic. Le  surlendemain  du  renouvellement  du  magistral,  les  bourguemeslres, 
les  conseillers  et  les  chefs  de  tribu  nouvellement  élus,  procédaient  à  l'élec- 
tion des  treize  juges.  Comme  les  deux  bourguemeslres  de  l'année  précédente 
faisaient  partie  de  droit  du  tribunal,  les  suffrages  ne  portaient  plus  que  sur 
onze  membres,  parmi  lesquels  deux  durent  être  choisis  dans  le  conseil,  et 
un  dans  chacune  des  neuf  tribus.  L'élection  des  juges  était  suivie  de  celle 
des  procureurs  ou  avocats  (Fürsprecher),  chargés  de  porter  la  parole  au 
nom  des  parties,  et  qui  étaient  au  nombre  de  trois-.  JNous  avons  déjà  men- 

1.  Les  titres  de  la  fm  du  seizième  siècle  meiitioiiLent  eucore  la  Reichslaube  comme  le  lieu 
où  se  rendaientles  jugements,  tandis  que  ceux  de  la  première  moitié  du  dix-septième  portent 
déjà  la  suscription  :  «  Geschehen  auf  der  Rathstube  angewohnlichei-  Gerichtstalt.  »  —  Quant 
an  siège  de  justice,  c'était  un  ouvrage  eu  maçonnerie;  il  fut  reconstruit  en  1456.  Une  re- 
construction antérieure  du  Lobium,  à  la  date  de  1370,  est  révélée  par  une  inscription  latine 
qu'on  a  trouvée  lors  de  la  dernière  reconstruction  de  l'Hôtel  de  ville;  malheureusement 
cette  pierre  n'a  pas  été  conservée. 

2.  Voy.  les  Rathsprotokolle  et  les  GerichtsprolokoUe  aux  archives  de  la  ville.  Quant  aux 
sentences  de  la  justice  4e  la  Laube,  voici  les  anciennes  formules  de  ces  sentences  :  «  Ich 
«  N.  des  Riches  UnterschuUheiss  zu  Obern-Ehenheim,  künde  menglichem  mit  diesem 
a  Briefe ,  daz  uff'  mittwoch,  etc.  .  .  als  ich  zu  Gerichte  sos:-  an  des  h.  Riches  Gerichte  unter 


—  c]2  — 

lionne  les  nombreuses  localités  étrangères  qui  relevaient  directement  de  la 
justice  d'Obernai,  ou  qui  y  portaient  leurs  causes  en  appel.  Quant  à  la  ville 
même,  elle  appelait  des  décisions  de  sa  justice  locale  au  jugement  du  ma- 
gistral de  la  ville  impériale  d'Ulm,  en  Souabe,et  le  droit  de  cet  appel  facul- 
tatif lui  fut  conflrméen  1440,  par  l'empereur  Frédéric  III,  avec  la  mention 
expresse  que  cet  usage  existait  de  temps  immémorial.  Ces  appels  étaient 
désignés  sous  le  nom  de  Ulmzüge,elne  cessèrent  qu'à  l'époque  de  la  guerre 
de  Trente  ans. 

Il  ne  serait  peut-être  pas  hors  de  propos  de  donner  ici  quelques  détails 
sur  le  mode  de  procédure  de  notre  justice  locale,  ainsi  que  sur  les  divers 
genres  de  supplices  et  d'exécutions  que  nous  révèlent  nos  documents;  mais 
nous  préférons  mentionner  une  affaire  d'un  intérêt  plus  général,  dont  les 
débats  se  déroulèrent  devant  notre  siège  judiciaire  de  la  Laube.  On  con- 
naît la  première  conspiration  anti-sociale  qui,  sous  le  nom  de  Bundschuh, 
se  trama  au  pied  de  l'Ungersberg,  en  1493,  et  on  sait  le  sort  des  deux 
principaux  chefs  de  l'association,  dont  l'un  fut  écartelé  à  Bàle,  et  l'autre 
subit  le  même  supplice  à  Sclilestadt;  mais  on  connaît  moins  celui  des  affi- 
liés subalternes.  Des  renseignements  puisés  dans  nos  archives  nous  appren- 
nent que  les  sujets  épiscopaux  qui  avaient  pris  part  à  la  conspiration,  fu- 
rent jugés  à  Molsheim  par  un  tribunal  extraordinaire,  composé  d'un  certain 
nombre  de  délégués  des  villes  et  des  seigneurs  de  la  province,  et  convoqué 
par  l'évêque.  Quant  aux  autres  affiliés,  ils  furent  jugés  à  Obernai,  sous  la 
Reichslaîibe;c'élQienides  habitants  de  Blienschweiler, Nothalten  et  Zell,  lo- 
calités qui,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  relevaient  du  tribunal  impérial 
d'Obernai.  Toutefois,  ce  ne  fut  pas  le  corps  des  treize  juges  qui  eut  à  s'oc- 
cuper de  cette  affaire,  mais  également  une  commission  extraordinaire  nom- 
mée par  le  Landuogt,  et  présidée  par  le  grand  prévôt  d'Obernai,  le  gen- 
tilhomme Euchaire  Vœltsch,  lequel  occupait  alors  cette  charge  au  nom  des 
comtes  palatins.  Quant  à  la  commission,  elle  comptait  six  délégués  d'Ober- 
nai, et  un  de  chacune  des  villes  suivantes,  à  savoir  :  Sli'asbourg,  Hague- 
nau,  Golmar,  Schlestadt,  Wissembourg,  Kaysersberg,  Rosheim  et  Barr; 
puis  les  deux  gentilshommes  Bernard  d'Uttenheim  et  Maurice  Jungzorn  , 
Gangolphe  de  Mittelhausen,  prévôt  à  Haguenau,  Emmerich  Ritter,  receveur 
de  la  Landvogtey,  et  maître  Baldung,  prévôt  à  Baden.  A  la  suite  des  débats 
judiciaires,  qui  se  prolongèrent  plusieurs  jours,  et  pendant  lesquels  la  ville 
était  occupée  par  la  force  armée,  les  inculpés,  qui  étaient  au  nombre  de 

i<  lier  iMif/jf,  (la  kam  für  mich  and  das  Ucriclil  der  dry  zehn  Matiiic  und  Urllielspreclier 
»  .  .  .  do  crkannlen  die  drijzeha  Manne,  nachdem  sie  Clag  und  antinirf,  auch  hrieffe  und 
«  Kundschaß  irnd  ir  heiderfei  Fiirbrincjen  gehört,  de. 


—  33  — 

vingt-quatre,  furent  condamnés  à  payer  au  grand  prévôt  d'Obernai  une 
amende  de  cinq  livres  deniers,  et  à  avoir  deux  doigts  coupés.  Cependant, 
ils  obtinrent  grâce  de  la  mutilation,  à  condition  de  la  racheter  à  prix  d'ar- 
gent (die  Finger  sind  abgebeten  tu  or  den ,  aber  bezahlt).^ 

Trente-deux  ans  plus  tard ,  quand  éclata  la  formidable  insurrection  dite 
guerre  des  Paysans,  le  tribunal  de  la  Laube  eut  encore  à  juger  des  conspi- 
rateurs contre  l'ordre  social,  et,  cette  fois-ci,  dans  leur  nombre  se  trou- 
vaient aussi  des  coupables  indigènes.  Cependant  le  magistrat,  dans  l'intérêt 
de  la  pacification  des  esprits ,  suspendit  la  procédure ,  après  s'être  arrangé 
à  l'amiable  au  sujet  des  amendes  avec  le  seigneur  de  Barr  qui  était  alors 
investi  de  la  haute  prévôté. 

L'organisation  du  tribunal  impérial  d'Obernai ,  telle  que  nous  l'avons 
décrite  ,  se  maintint  jusqu'à  la  guerre  de  Trente  ans ,  à  la  suite  de  laquelle 
ce  siège  de  justice  perdit  complètement  son  ancienne  importance.  Les 
appels  facultatifs  avaient  déjà  cessé,  et  quand,  en  1669,  la  ville  de  Stras- 
bourg vendit  à  celle  d'Obernai  l'office  de  la  haute  prévôté,  elle  se  réserva 
la  juridiction  sur  toutes  les  localités  de  la  seigneurie  de  Barr  et  autres  qui 
dépendaient  autrefois  de  la  justice  d'Obernai ,  de  sorte  que  la  compétence 
de  cette  dernière  ne  s'étendit  plus  que  sur  la  ville  et  sur  son  domaine  de 
Bernardswiller.  Un  peu  plus  tard ,  sous  l'administration  française ,  on  sup- 
prima même  la  charge  de  prévôt,  ainsi  que  l'élection  annuelle  des 
juges ,  et  le  magistrat ,  concentrant  dès  lors  l'administration  civile  et  judi- 
ciaire, jugea  en  premier  ressort  les  causes  tant  criminelles  que  civiles, 
tandis  que  les  appels  durent  être  portés  devant  le  Conseil  souverain  d'Al- 
sace. 

U. 

Si  l'emplacement,  sur  lequel  s'élève  l'hôtel  de  ville  d'Obernai,  est  de 
nature  à  évoquer  le  souvenir  des  assises  judiciaires  de  l'Alsace  primitive, 
par  contre  l'édifice  même  nous  rappelle  une  époque  dans  laquelle  fonction- 
nait encore  dans  toute  sa  vigueur  ce  régime  municipal  d'autrefois,  que  la 
bourgeoisie  des  villes  libres  avait  su  créer  de  son  propre  fonds  dans  la 
seconde  période  du  moyen  âge.  Quelques  mots  sur  la  manière  dont  ce 
régime  se  constitua  à  Obernai ,  doivent  trouver  ici  leur  place.  On  sait  que 
l'émancipation  des  villes  impériales  date  de  l'époque  où  ces  villes,  les  unes 
un  peu  plus  tôt,  les  autres  un  peu  plus  tard,  parvinrent  d'un  côté  à 
s'affranchir  de  la  juridiction   civile  des  prévôts  impériaux  (lesquels  ne 

1.  Voy.  à  ce  sujet  les  comptes  communaux  de  1498  et  d'autres  pièces  aux  archives  de 
la  ville.  Les  prévenus  y  sont  désignés  par  la  qualification  «die  gefangene  Buntschuher.  » 

II-  SÉRIE.  _  T.  II.  ~  (M.)  3 


—  3i  — 

conservèrent  plus,  dès  lors,  que  leurs  attributions  judiciaires),  et  de 
l'autre,  à  dominer  l'influence  prépondérante  des  nobles  domiciliés  dans 
leur  enceinte. 

Le  premier  prévôt  ou  Schultheiss  d'Obernai,  dont  il  soit  fait  mention, 
fut  un  nommé  Walther,  qui  apposa  son  sceau  à  une  charte  de  1 178  (volun- 
taie  oduocali  et  sculteti  de  Ehenheim  WaUheri).  Ce  fonctionnaire  impérial 
apparaît  encore -en  première  ligne  dans  les  actes  publics  du  siècle  suivant; 
ce  n'est  qu'à  partir  du  commencement  du  quatorzième  siècle  que  nous  le 
voyons  omis  dans  divers  titres,  tandis  qu'il  figure  encore  dans  d'autres; 
enfin  il  est  mentionné  pour  la  dernière  fois  dans  un  acte  de  1362.  C'est 
que,  entre  le  prévôt  et  les  notables  qui  le  suivaient  immédiatement,  il  avait 
surgi  un  nouveau  fonctionnaire  qui ,  après  avoir  marché  pendant  un  cer- 
tain temps  à  la  suite  du  prévôt,  finit  par  le  supplanter.  Ce  nouveau  chef, 
c'est  le  Meister  ou  maître  des  bourgeois,  choisi  par  ceux-ci  au  sein  du 
conseil  et  chargé  d'administrer  la  communauté  en  leur  nom.  Dès  lors  les 
deux  éléments  essentiels  du  régime  municipal,  magistrat  et  conseil  (Meister 
und  Rath),  sont  constitués.  Les  anciens  notables  (potiores  civitatis),  trans- 
formés en  conseillers  {Bathsherrn) ,  forment  le  corps  délibératif ,  tandis 
que  les  magistrats  ou  maîtres,  appelés  indifféremment ./l/ew/er,  Stetimeister 
ou  Bürgermeister ,  constituent  le  corps  administratif  de  la  cité.  Les  uns 
comme  les  autres  sont  les  délégués  de  la  bourgeoisie  et  exécutent  leur 
mandat  au  nom  de  celle-ci.  Le  chef  de  l'Empire  n'a  plus  droit  qu'au  ser- 
ment d'hommage  et  de  fidélité,  et  encore  les  villes  libres  de  premier  rang 
ne  reconnaissent-elles  pas  même  cette  formalité.  ' 

Telle  fui  la  première  conquête  faite  par  les  villes ,  conquête  toute  paci- 
fique et  qui  paraît  s'être  réalisée  avec  l'assenliment  tacite  de  l'autorité 
suprême.  Il  n'en  fut  pas  de  même  de  la  seconde ,  laquelle  ne  se  fit  qu'au 
prix  de  luttes  violentes ,  à  raison  des  intérêts  opposés  qui  se  trouvaient  en 
présence  immédiate.  A  Obernai ,  comme  ailleurs,  nous  voyons  dans  le 
principe  l'administration  publique  exclusivement  enti-e  les  mains  de  la 
noblesse.  Les  actes  du  treizième  au  quinzième  siècle  portent  la  signature 
non-seulement  des  nobles  indigènes,  tels  que  les  Ehenheim,  les  Schenck, 
les  Gossmar,  les  Oberkirch,  les  MittSlhausen ,  les  Rumersheim,  les Wepfer- 
mann,  les  Marschalk,  les  Wildemann ,  les  Stangen,  les  Lamprecht,  etc., 

1.  Les  modiûcatioiis  que  subit  le  régime  des  villes,  sont  indiquées  par  les  formules  qui 
se  trouvent  à  la  tête  des  actes  publics.  Voici  dans  quel  ordre  se  succèdent  ces  formules 
dans  les  titres  de  la  ville  d'Obernai  :  Scultetus ,  potiores  cioilatis  et  universitas  civium. 
—  Wù'  der  Schultlieiss ,  der  Rath  und.  die  Bürger  (jemeinlich.  —  Wir  der  Schultheiss , 
der  Meister ,  der  Rath  iivd  die  Bürger.  —  Wir  der  Meister .  der  Roth  und  die  Binr/er. 


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mais  encore  celle  de  nobles  non  doraiciliés  dans  la  ville,  mais  qni  y  pos- 
sédaient des  fiefs  ou  qui  étaient  de  véritables  Ussbnrger. 

Ce  fut,  comme  on  sait,  l'organisation  de  la  bourgeoisie  en  tribus  et  corps 
de  métiers  qui  mina  ce  régime  aristocratique  ;  l'élément  plébéien ,  après 
s'être  introduit  petit  à  petit  dans  l'administration  publique,  finit  par  dominer 
l'élément  aristocratique  et  même,  dans  quelques  villes,  à  exclure  complè- 
tement ce  dernier.  Une  première  tentative  de  ce  genre  eqt  lieu  à  Obernai 
en  1339,  quelques  années  après  la  révolution  municipale  qui  s'opéra  à 
Strasbourg  à  la  suite  de  la  rixe  sanglante  entre  les  Zorn  et  les  Müllenheim. 
A  Obernai  on  mit  également  à  profit  une  scission  qui  s'était  déclarée  entre 
j  nobles  au  sujet  de  plusieurs  questions  d'administration  intérieure;  le 
mécontentement  public  se  fit  jour  par  une  émeute,  à  la  suite  de  laquelle  tous 
ceux  parmi  les  nobles,  qui  s'étaient  montrés  hostiles  à  la  bourgeoisie,  furent 
expulsés  de  la  ville,  en  même  temps  que  l'on  procéda  à  l'instituUon  d'un 
nouveau  conseil.  Toutefois,  cette  mesure  profondément  radicale  ne  fut  pas 
couronnée  de  succès  ;  l'empereur  Louis  de  Bavière  intervint  de  tout  le  poids 
de  son  autorité  pour  réprimer  ce  que  le  mouvement  avait  de  trop  exclusif. 
Ce  fut  sur  ses  ordres  que  l'Unterlandvogt  Conrad  duc  d'Ui'selingen,  assisté 
d'un  certain  nombre  d'arbitres,  à  savoir  trois  nobles  du  voisinage  et  quatre 
délégués  des  villes  impériales  de  Colmar,  Schlestadt,  Brisach  et  Rosheim, 
tint  à  Obernai  une  séance  judiciaire  dans  laquelle  il  trancha  les  questions 
litigieuses,  en  donnant  satisfaction  aux  griefs  légitimes  de  la  bourgeoisie, 
mais  en  réintégrant  en  même  temps  les  nobles  expulsés,  non-seulement 
dans  leur  domicile,  mais  encore  dans  tous  les  droits  dont  ils  avaient  joui 
avant  leur  expulsion.  Il  décida,  en  outre,  que  nobles  et  non  nobles  seraient 
admis  désormais  en  nombre  égal  dans  le  conseil.' 

L'essai  tenté  par  la  bourgeoisie  d'Obernai  ne  se  réalisa  qu'un  siècle  plus 
tard.  Les  nobles,  quoique  déjà  réduits  à  partager  le  pouvoir  avec  les  plé- 
béiens, n'en  jouissaient  pas  moins  encore  d'une  influence  prépondérante, 
et  ce  fut  à  la  faveur  de  cette  influence  qu'ils  entraînèrent  la  ville  dans  d'in- 
nombrables conflits,  qui,  bien  souvent,  n'avaient  d'autre  motif  que  la 
satisfaction  de  leurs  rancunes  personnelles.  Les  diverses  luttes  et  guerres 
féodales,  dans  lesquelles  la  ville  se  trouva  engagée  dès  la  seconde  moitié 

1.  Sentence  arbitrale  de  VUnterlandvorjt  Conrad  duc  d'Urselingen,  dn  vendredi  avant  le 
dimanche  Lœtare  1339,  aux  archives  de  la  ville.  Parmi  les  nobles  expulsés  et  réintégrés 
dans  leurs  fonctions,  cette  charte  nonnne  les  suivants,  qui  ilgurent  encore  dans  d'autres 
titres  de  l'époque:  herr  Rudolf  von  Oberkirchc ,  herr  FritcHii,  herr  Landold  Gossmar, 
herr  Jacob  sin  Bruder  Schocke  gênant,  herr  Johann  SchenAe  ritter ,  Johann  von  Oher- 
kirche  herr  sijfrids  seligen  son,  Dietsche  von  Honnenwilr,  Contze  Stangen.  Johannes 
Wililcmrin,  Confz  Wildcmn»  sin  hnider ,  Rudolf  ron  Millelcnhusc  und  lier r  Tuldclin. 


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du  quatorzième  siècle  et  pendant  tout  le  siècle  suivant,  et  qui  nous  sont 
révélées  par  de  nombreuses  lettres  de  défi  ou  Fehdebriefe  et  transactions 
conservées  dans  nos  archives ,  attestent  suffisamment  quelles  graves  per- 
turbations ce  régime  produisait  dans  les  intérêts  publics.  Ce  fut  dans  ces 
circonstances  que  la  bourgeoisie  d'Obernai  songea  à  réformer  son  système 
municipal,  dont  les  divers  éléments  existaient  dès  le  siècle  précédent,  et  à 
s'affranchir  de  toutes  les  entraves  qui  en  gênaient  la  marche.  Une  nouvelle 
constitution,  par  laquelle,  selon  l'observation  de  Schœpflin,  fut  introduit 
à  Obernai  le  régime  franchement  démocratique,  fut  établie  en  1459*.  En 
présence  de  l'Unterlandvogt  Gœtze  d'Adelsheim  et  de  Jean ,  grand  prévôt  à 
Obernai,  les  deux  en  qualité  de  délégués  de  l'Oberlandvogt ,  comte  palatin 
Frédéric,  et  avec  le  concours  de  représentants  extraordinaires  de  la  popu- 
lation tout  «litière,  on  détermina  le  mode  d'élection  des  bourguemestres , 
des  conseillei's ,  des  chefs  de  tribus  et  des  assesseurs  du  tribunal  de  justice, 
ainsi  que  la  part  qui  revenait  à  chacun  de  ces  corps  dans  l'administration 
des  intérêts  publics.  Mais  le  point  capital  de  ce  nouveau  règlement,  ce 
furent  les  conditions  que  l'on  établit  pour  l'admission  aux  emplois  publics. 
II  fut  arrêté  «  que  nul  ne  serait  dorénavant  admis  soit  au  conseil,  soit  au 
tribunal  de  justice  ou  aux  autres  emplois  publics,  à  moins  d'être  bourgeois 
indigène  depuis  cinq  ans  révolus,  et  d'avoir  supporté  toutes  les  charges 
pubhques  à  l'instar  de  tous  les  autres  bourgeois.»  Cet  article  atteignait 
directement  les  nobles,  dont  les  uns,  à  la  faveur  des  fiefs  qu'ils  possé- 
daient dans  la  ville,  jouissaient  du  droit  de  bourgeoisie  sans  y  résider, 
tandis  que  les  autres,  tout  en  y  étant  domiciUés,  s'affranchissaient  des 
charges  publiques  en  vertu  de  leurs  privilèges  et  immunités.  Malgré  le 
conflit  que  provoqua  cette  mesure  entre  la  ville  et  la  noblesse,  elle  fut 
approuvée  sept  ans  plus  tard  par  l'empereur  Frédéric  III,  lequel,  par  lettres 
datées  de  Grsetz  du  hiardi  après  la  Toussaint  de  l'année  1466,  autorisa  la 
ville  d'Obernai  «  à  ne  plus  admettre  dans  son  conseil  et  dans  son  tribunal 
de  justice  que  ses  propres  bourgeois  indigènes ,  vu  que  jusqu'alors  la  ville 
s'était  trouvée  gravement  onérée,  par  cela  même  que  le  conseil  et  la  justice 
avaient  été  occupés  par  les  nobles  tant  indigènes  qu'étrangers.  »  Aussi  à 
partir  de  cette  époque  aucun  noble  ne  figure  plus  sur  la  liste  des  autorités 
de  la  ville.  11  faut  avouer  toutefois  que,  si  celle-ci  y  gagna  en  sécurité  inté- 
rieure, d'un  autre  côté  l'exclusion  complète  de  l'élément  aristocratique  la 
priva  en  grande  partie  de  son  prestige  et  de  son  influence  au  dehors.  Par 

1.  Voy.  Scliœpfliii,  Alsnt.  illust. ,  pars  \U,  sectio  1  a,  §  745.  —  La  nouvelle  constitution 
municipale  de  1459  est  insérée  dans  le  Sladtbuch,  fol.  1",  sous  le  titre  :  dis  ist  die  nuwe 
ordcnunge  ?'on  don  Hute  setzen. 


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contre  le  nouveau  régime  fonctionna  avec  une  régularité  parfaite  pendant 
plus  de  deux  siècles  et  ne  déchut  qu'à  l'époque  où  disparurent  toutes  les 
libertés  municipales.  Voici  en  abrégé  ce  régime  tel  qu'il  fut  introduit  en 
1459  et  que  notre  hôtel  de  ville  vit  encore  fonctionner  dans  toute  sa  vigueur 
primitive. 

La  Saint-Jean  était  l'époque  fixée  pour  le  renouvellement  annuel  du 
magistrat.  La  veille  du  jour  de  l'élection,  les  bourgeois  convoqués  dans 
leurs  curies  respectives  (ces  dernières  étaient  au  nombre  de  neuf:  cinq 
tribus  d'artisans  ou  Zünfte  et  quatre  quartiers  ou  Viertentheile  dans  lesquels 
était  réparti  le  reste  de  la  bourgeoisie)  nommaient  les  délégués  chargés 
d'exprimer  leurs  suffrages.  Ces  délégués  ou  écbevins,  désignés  sous  le 
nom  de  Ordnungsleute,  étaient  au  nombre  de  83  et  constituaient  ce  qu'on 
appelait  le  corps  des  SS  électeurs  (die  83  Manne,  die  den  Rath  zu  besetzen 
haben).  Cette  élection  au  premier  degré  terminée,  lesdits  électeurs  ou 
délégués  des  curies  se  rendaient  à  l'Hôtel  de  ville,  où  ils  procédaient  en- 
semble à  l'élection  du  conseil,  sous  la  présidence  du  bourguemeslre  en- 
core en  fonctions,  chargé  de  recueillir  les  suffrages.  Chacune  des  six 
grandes  curies  avait  à  élire  deux  conseillers,  tandis  que  les  trois  petites 
n'avaient  à  nommer  qu'un  seul  membre,  ce  qui  portait  le  nombre  des  con- 
seillers à  quinze.  Quant  aux  deux  bourguemestres  qui  allaient  se  retirer 
de  leurs  fonctions,  ils  siégeaient  de  plein  droit  dans  le  conseil  l'année  sui- 
vante, et  en  raison  de  cela  on  les  désignait  par  la  qualification  de  Selbst- 
gesetzte. —  Les  quinze  conseillers  ou  Rathsherrn  étant  élus,  il  restait  à 
choisir  dans  leur  sein  les  deux  nouveaux  stettmeister  ou  bourguemestres 
qui  devaient  administrer  la  commune  pendant  le  cours  de  l'année;  car 
ceux  qui  sortaient  de  fonctions  n'étaient  rééligibles  que  l'année  suivante. 
A  cet  effet  les  conseillers  nouvellement  élus  se  retiraient  tous,  et  aux 
83  électeurs  des  curies  venaient  s'adjoindre  quatre  délégués  du  faubourg 
et  dix  du  village  de  Bernardswiller.  Tous  ces  électeurs,  réunis  aux  deux 
anciens  bourguemestres,  nommaient  alors  à  la  pluralité  des  voix,  parmi 
les  quinze  conseillers,  les  deux  nouveaux  bourguemestres  dont  chacun 
avait  à  gérer  les  affaires  de  la  ville  pendant  un  semestre  et  portait  alors  le 
titre  de  bourguemeistre  régent  {regierender  Stettmeister  ou  Amtsburger- 
meister).  —  Le  lendemain  des  élections  avait  lieu  l'installation  solennelle 
des  magistrats  et  conseillers  nouvellement  élus.  Cette  cérémonie  était  dé- 
signée du  nom  de  Ralhshuldigung  ou  Schivörtag,  parce  que  les  nou- 
veaux dignitaires,  ainsi  que  toute  la  bourgeoisie,  prêtaient  alors  le  serment 
d'usage;  elle  était  présidée  par  X Untertan dvo gl,  ou  à  défaut  de  celui-ci, 
par  les  conseillers  de  la  Landvogtey.  La  prestation  du  serment  se  faisait 


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tantôt  dans  la  Rathsstuhe  ou  Salle  de  conseil,  à  portes  ouvertes;  tantôt  sur 
la  place  dite  Seelhof,  et  dans  les  derniers  temps  aussi  dans  la  cour  du 
bâtiment  dit  Burg  qui  occupe  l'emplacement  du  ci-devant  château  impé- 
rial. —  Le  lendemain  du  Schwörtag,  les  bourgeois  se  rassemblaient  de 
nouveau  dans  leurs  curies  respectives  pour  procéder  à  l'élection  des  neuf 
Zunftmeister  ou  chefs  de  tribus.  Immédiatement  après  leur  élection,  ces 
derniers  se  rendaient  à  l'Hôtel  de  ville  pour  prêter  leur  serment  et ,  séance 
tenante,  ils  s'adjoignaient  aux  bourguemeslres  et  aux  conseillers  pour  élire 
les  treize  juges  ou  assesseurs  du  tribunal  de  justice,  ainsi  que  nous  l'avons 
déjà  dit.  Quant  aux  autres  emplois  pubhcs,  ils  étaient  conférés  à  une 
autre  époque  de  l'année  par  le  conseil  et  les  chefs  des  tribus,  à  la  plura- 
lité des  suffrages.  —  Les  chefs  de  tribus  prenaient  part  aux  délibérations 
du  magistrat  et  du  conseil  dans  toutes  les  circonstances  importantes  :  c'est 
ce  qu'on  appelait  :  Halb  dritt  Eatli  gehalten.  Dans  les  circonstances  ma- 
jeures, on  convoquait  même  tout  le  corps  électoral,  d'où  la  formule:  <i  Es 
ist  durcli  Bath ,  ZunfUneisLer  nnd  die  gantze  Ordnung  der  83  Manne  er- 
kannt ivorden,  etc.  »  Les  83  électeurs  ou  échevins  formaient  ainsi  une 
espèce  de  grand  conseil  {der  gemeine  Rath)  qui  passait  pour  être  l'organe 
le  plus  complet  de  la  communauté.  ' 

C'est  de  l'époque  où  le  régime  municipal  était  parvenu  à  son  état  de 
parfait  développement  et  surtout  du  temps  où  la  bourgeoisie  avait  acquis 
sa  part  de  l'administration  pubhque,  que  paraît  dater  l'origine  des  Rath- 
hauser  ou  maisons  de  conseil.  On  sait  que  primitivement  les  affaires  pu- 
bliques se  débattaient  en  plein  air,  sur  les  places  publiques,  ainsi  que  l'at- 
teste la  charte  de  1258  que  nous  avons  citée.  D'un  autre  côté  la  noblesse, 
quand  elle  était  encore  à  la  tête  des  affaires ,  se  réunissait  de  préférence 
dans  ses  poêles  ou  Trinckstuhen ,  pour  y  discuter  ses  intérêts.  Un  autre 
motif  qui  dut  contribuer  également  à  la  construction  de  maisons  commu- 
nes, c'est  l'établissement  des  Cantzleyen  ou  chancelleries:  ce  fut  en  effet 
à  partir  du  quatorzième  siècle  que  l'on  commença  à  faire  dresser  devant 
les  magistrats  locaux  les  actes  privés  de  quelque  importance,  qui  avant  ce 
temps  étaient  presque  tous  rédigés  devant  la  cour  épiscopale.  Quoi  qu'il  en 
soit,  dès  le  milieu  du  quinzième  siècle,  il  y  avait  à  Obernai  une  maison 
commune  qui  tombait  déjà  de  vétusté  ou  qui  était  devenue  insuffisante, 
car  en  MfiS  on  construisit  un  nouveau  Rathhaus,  ainsi  que  nous  l'appre- 
nous  par  les  comptes  communaux  de  cette  année.  L'emplacement  qu'occu- 
pait cet  édifice,  fut  déjà  celui  de  l'ancienne  Reichslaube ,  où  siégeait  le  tri- 

I.   Voy.  iiiix  arcliiv(!S  de  la  ville  le  Slad/bndt  et  les  RalhsprolohoUc  qui  renie  raient  les 
|)rocès-verhaux  ilos  éloctions  et  des  séances  dn  magistrat. 


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bunal  bourgeois  ;  il  était  naturel  en  effet  d'abriter  ce  siège  judiciaire 
dans  le  local  où  devaient  se  débattre  les  intérêts  publics.  Cependant 
cette  nouvelle  construction  étant  encore  deveiuie  insuffisante,  ce  fut  alors 
que  l'on  éleva,  en  1523,  l'édifice  qui  subsiste  encore  de  nos  jours,  ainsi 
que  le  marque  l'inscription  qui  s'y  trouve.  Ce  dernier  édifice,  à  ce  qu'il 
paraît,  ne  fut  qu'annexé  à  celui  du  siècle  précédent  et  il  avait  pour  destina- 
tion de  servir  de  cbancellerie,  car  c'est  sous  la  rubrique  de  Ccmtzleyarheit 
que  les  comptes  communaux  de  1522  en  font  mention.  Maître  Hans  Jüng- 
ling était  alors  Baumeister  ou  architecte  de  la  ville.  Ce  ne  fut  que  plus 
tard  que  la  salle  de  conseil  fut  transférée  dans  ce  même  édifice;  au  com- 
mencement du  dix-sepUème  siècle  cette  salle  fut  appropriée  à  servir  en  même 
temps  de  salle  de  justice,  et  c'est  à  raison  de  cette  double  destination 
qu'elle  figure  tour  à  tour  sous  les  noms  de  Eathsstube  et  Gerichtsshibe.  — 
Celle  salle  offre  encore  maintenant  un  curieux  échantillon  du  style  déco- 
ratif de  l'époque.  Si  l'encadrement  des  portes  et  des  fenêtres,  ainsi  que  les 
deux  belles  colonnes  à  nervures  prismatiques,  par  lesquelles  ces  fenêtres 
se  trouvent  distancées,  rappellent  le  style  de  renaissance  ou  plutôt  de  tran- 
sition du  commencement  du  seizième  siècle,  par  contre  la  décoration  accuse 
déjà  le  siècle  suivant.  On  y  remarque  le  plafond  à  compartiments  ornés  de 
peintures  emblématiques  et  portant  au  milieu  l'aigle  impériale,  puis  les 
lambris  sculptés  qui  encadrent  dix  tableaux  à  fresque  représentant  les  dix 
commandements  de  Dieu  d'après  des  scènes  tirées  de  l'Ancien  Testament. 
Un  autre  tableau  à  côté  de  la  porte  principale  représente  Moïse  avec  les 
tables  de  la  loi  et  porte  la  date  de  1610,  et  un  dernier  tableau  au-dessus 
de  cette  porte  représente  le  jugement  derniei-.  Les  portes  méritent  égale- 
ment de  fixer  l'attention,  surtout  à  cause  de  leurs  seirures  à  jeu  compli- 
qué et  à  exécution  artistique.  Mais  ce  qui  malheureusement  n'existe  plus , 
ce  sont  les  vitraux  peints  qui  garnissaient  la  longue  rangée  de  fenêtres  de 
la  salle  et  qui  offraient  des  scènes  relatives  aux  origines  de  la  ville,  ainsi 
que  les  blasons  des  familles  nobles  autrefois  domiciliées  à  Obernai  ou  qui 
y  tenaient  des  fiefs.  Ces  vitraux  ont  été  supprimés  pendant  la  révo- 
lution et  dispersés  depuis'.  —  Quant  au  bâtiment  même,  il  reçut  une 

1.  Les  comptes  communaux  de  1604  à  1610  nous  fournissent  des  renseignements  sur 
les  artistes  qui  furent  chargés  de  la  décoration  de  cette  salle.  Le  balcon  ou  la  balustrade 
qui  la  longe  à  l'extérieur,  fut  exécuté  par  maître  George  Widemann,  tailleur  de  pierre 
strasbourgeois ,  le  même  qui  avait  construit  en  1579  l'étage  supérieur  du  clocher  dit 
Kapellthurm.  —  Maître  Melchior  Beutel,  peintre  de  Schlestadt,  fut  charge  d'orner  l'Hôtel 
de  ville  de  i)eintures  à  l'extérieur.  —  Les  peintures  qui  décorent  la  salle  même  furent 
exécutées  par  les  peintres  Zébédée  Miller  et  Jean  Bartenschlager.  —  L'exécution  des  vitraux 
fut  confiée  au  peintre  sur  verre  strasbourgeois  Barthélémy  Link.  Il  est  fait  mention  de  ces 


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nouvelle  annexe  en  1626  et  une  dernière  en  1688;  d'où  il  résulta  que 
l'Hôtel  de  ville  d'Obernai  formait  une  agglomération  de  plusieurs  construc- 
tions à  styles  divers,  lesquelles  ont  toutes  disparu  lors  de  la  dernière  re- 
construction, à  l'exception  de  l'édifice  de  1523. 

A  la  suite  de  cet  aperçu  archéologique,  nous  pourrions  citer  quelques- 
unes  des  graves  délibérations  dont  notre  Hôtel  de  ville  fut  témoin  dans  le 
cours  agité  du  seizième  siècle  et  surtout  dans  les  temps  calamiteux  du 
siècle  suivant,  quand  bien  souvent,  dans  des  moments  de  crise  suprême, 
le  corps  municipal  tout  entier  se  réunit  dans  cette  enceinte,  afin  d'aviser 
aux  moyens  de  pourvoir  au  salut  commun.  Mais  le  cadre  limité  de  cette 
notice  ne  nous  permet  pas  cette  digression,  et  au  lieu  de  toucher  à  ce  sujet 
sévère  et  parfois  lugubre,  nous  préférons  mentionner  des  réunions  d'un 
autre  genre,  auxquelles  cet  édifice  donna  accueil;  il  s'agit  de  ces  festivités 
dont  nos  ancêtres  étaient  si  prodigues  au  milieu  d'agitations  et  de  préoc- 
cupations de  toute  nature,  et  qui,  en  raison  des  dépenses  qu'elles  occasion- 
naient, fournissaient  chaque  année,  sous  la  rubrique  de  a  Zehrungen  }>,  un 
large  chapiire  aux  comptes  communaux  du  quinzième  et  du  seizième 
siècle.  Le  renouvellement  du  magistrat  et  le  Schivörtag,  l'apurement  des 
comptes,  la  distribution  des  emplois  publics,  la  publication  des  ordonnan- 
ces du  magistrat  et  des  règlements  d'ordre  public,  la  foire  de  Saint -Gai 
et  les  autres  foires,  le  jour  des  Rois  {Königreich  gehalten)  et  d'autres  oc- 
casions encore  motivaient  autant  de  réunions  festivales ,  dans  lesquelles 
des  tables  somptueuses  se  dressaient  ^u  Rathhaus  pour  les  bourguemestres, 
les  conseillers,  les  chefs  de  tribus  et  tous  les  fonctionnaires  publics;  à  ces 
mêmes  repas  était  aussi  conviée  la  noblesse  de  la  ville  et  du  voisinage.  Ce 
ne  fut  que  lors  de  la  guerre  de  Trente  ans  que  cessèrent  presque  complète- 
ment ces  habitudes  joyeuses.  Cette  terrible  lutte,  qui  bouleversa  de  fond 
en  comble  les  anciennes  institutions,  ne  réagit  pas  moins  sur  le  caractère 

vitraux  en  1G53  ,  dans  la  correspondance  de  François  Pistorius,  député  de  la  ville  à  la  diète 
de  Ratisbonne.  On  lui  avait  demandé  des  renseignements  sur  le  fief  que  les  nobles  Land- 
schaden de  Steinach  possédaient  autrefois  à  Obernai;  sur  quoi  il  répondit:  que  le  blason  de 
cette  famille  figurait  elfeclivement  parmi  les  antres  armoiries  que  représentent  les  vitraux 
de  la  salle  de  conseil,  l'armi  les  divers  sujets  qui  y  étaient  représentés,  on  remarquait  aussi 
la  donation  de  Hohenbourg,  faite  par  le  duc  Atbic  à  sa  fille  sainte  Odile.  Cette  figure,  qui 
porte  en  bas  le  blason  des  comtes  de  Habsbourg,  a  été  reproduite  par  Silbermann,  Be- 
schreihumj  von  Uohenhnrg ,  page  8  ,  et  par  Pfeffinger,  idem  page  40,  planche  V.  La  moitié 
de  cette  verrière  se  trouvait  dans  ces  derniers  temps  encadrée  daus  les  fenêtres  de  Tau- 
berge  d'innenheim  sur  la  route,  et  doit  s'y  trouver  encore.  Une  autre  verrière  qui  se  trouve 
au  presbytère  d'Obernai  et  qui  représente  les  armoiries  de  l'abbaye  de  Niedermünster,  le 
chameau  chargé  de  la  célèbre  croix,  avec  la  légende:  Rozina  zum  Stein,  Äbtissin  zu 
Niedermilnster ,  paraît  être  aussi  un  débris  des  vitraux  peints  de  la  salle  de  conseil. 


—  41  — 

public,  en  bannissant  pour  toujours  la  gaieté  du  cœur  des  populations  qu'elle 
avait  décimées. 

Si  nous  avons  cru  devoir  passer  sous  silence  les  faits  purement  locaux 
qui  se  rattachent  à  notre  Hôtel  de  ville,  par  contre  nous  ne  devons  pas 
oublier  ceux  qui  présentent  un  intérêt  plus  général.  Le  Rathhaus  d'Obernai 
ne  resta  pas  étranger  aux  assemblées  politiques  autrefois  si  fréquentes,  et 
sa  salle  de  conseil,  telle  qu'elle  existe  encore  maintenant,  accueillit  plus 
d'une  fois  les  délégués  des  divers  corps  politiques  de  la  province.  Deux 
ans  après  la  construction  de  l'édifice,  en  1525,  éclata  la  formidable  insur- 
rection connue  sous  le  nom  de  guerre  des  Paysans,  et  alors  s'y  ouvrirent 
à  deux  reprises  des  conférences  qui  avaient  pour  but  d'étouffer  l'émeute 
par  des  voies  pacifiques,  et  auxquelles  prirent  part  rf/n/ertonc/yo^Uacques 
Baron  de  Mœrsperg,  le  maître  d'hôtel  de  l'évêque  Guillaume  de  Honstein, 
Jacques  d'Ûberkirch,  le  comte  de  Hanau-Lichtenberg,  les  délégués  de  la 
ville  de  Strasbourg,  le  seigneur  de  Barr  Nicolas  Ziegler,  le  vice -dôme 
Wolfgnng  de  Landsperg  et  d'autres  seigneurs  de  la  province.  En  1567  les 
délégués  des  cinq  villes  catholiques  de  la  Landvogtey  vinrent  à  Obernai 
s'occuper  des  affaires  religieuses  de  la  ville  de  Haguenau.  En  1584  les  dé- 
putés des  Etats  provinciaux  de  la  basse  Alsace  s'y  réunirent,  afin  d'arranger 
le  différend  qui  s'était  élevé  entre  la  ville  et  le  prince  palatin  Jean -George 
de  Veldentz,  à  l'occasion  de  l'acquisition  faite  par  ce  dernier  de  la  seigneu- 
rie du  Ban  de  la  Roche  et  de  la  cour  seigneuriale  de  Ralhsamhausen  à 
Obernai,  laquelle  en  formait  une  dépendance.  En  1C00  fut  conclu  à  l'Hôtel 
de  ville  d'Obernai  le  traité  par  lequel  le  duc  Frédéric  de  Wurtemberg  re- 
nonça, en  faveur  du  cardinal  de  Lorraine,  aux  droits  qu'il  avait  acquis  sur 
l'évéché  de  Strasbourg  de  la  part  du  prétendant  George,  margrave  de 
Brandebourg.  En  1625,  nouvelle  assemblée  des  États  provinciaux  d'Alsace 
à  Obernai,  dans  le  but  d'organiser  la  défense  du  pays  contre  le  comte  de 
Mansfeld,  lors  que  la  nouvelle  s'était  répandue  que  cet  aventurier  allait 
visiter  de  nouveau  les  contrées  rhénanes;  on  y  vola  la  continuation  des 
mesures  de  défense  déjà  décrétées  à  Schlestadt.  Ces  mêmes  Étals  se  réuni- 
rent encore  à  Obernai  en  1626  et  en  1627,  pour  y  débattre  les  nombreu- 
ses questions  qui  étaient  alors  à  l'ordre  du  jour,  notamment  celle  des  lour- 
des contributions  de  guerre  qui  pesaient  déjà  sur  la  province.  Après  la  guerre 
de  Trente  ans,  en  1654,  on  y  vit  une  assemblée  des  délégués  des  dix  villes  im- 
périales, dans  le  but  d'arranger  le  différend  qui  s'était  élevé  entre  Obernai  et 
les  autres  villes,  au  sujet  des  frais  de  représentation  à  la  diète  deRatisbonne, 
tenue  l'année  précédente.  A  cette  époque  la  situation  critique  des  dix  villes 
se  faisait  déjà  sentir.  Les  prérogatives,  dont  jouissait  le  Landvogt,  fourni- 


—  42  — 

renl  le  terrain  sur  lequel  s'engagea  la  luUe  si  remarquable  que  ces  villes 
soutinrent  pendant  une  série  d'années  contre  le  puissant  monarque,  qui 
dicta  bientôt  des  lois  à  l'Europe  entière.  Quand,  après  la  retraite  du  comte 
d'Harcourt,  le  duc  île  Mazarin,  neveu  du  cardinal,  vint  prendre  possession 
de  la  Landvogtey,  et  que  ce  changement  présageait  déjà  de  nouveaux  con- 
flits, les  dix  villes  crurent  devoir  se  concerter  préalablement,  afin  d'être 
prêtes  à  toute  éventualité.  Les  séances  se  tinrent  à  l'Hôtel  de  ville  d'Ober- 
nai  le  1^"^  et  le  2  juillet  1661,  et  l'on  se  décida  à  envoyer  une  députation 
à  iMayence  pour  recueillir  l'avis  de  l'électeur-chancelier  de  l'empire.  Le 
20  septembre  suivant  on  se  réunit  encore  à  Obernai  pour  prendre  connais- 
sance du  résultat  de  cette  mission.  Douze  ans  plus  tard,  quand  la  guerre 
se  fut  rallumée  dans  notre  province,  les  dix  villes  désarmées,  démantelées 
et  surchargées  de  garnisons  royales,  n'eurent  plus  qu'à  se  soumettre  aux 
volontés  du  maître.  Puis,  après  la  paix  de  Nimègue,  en  1679,  le  baron  de 
Montclar  arriva  à  Obernai  et  y  reçut,  à  l'Hôtel  de  ville,  le  serment  d'hom- 
mage et  de  fidélité  au  roi  de  la  part  du  magistrat  et  de  la  bourgeoisie. 
L'année  suivante  le  corps  équestre  ou  la  noblesse  immédiate  de  la  basse 
Alsace  reçut  également  la  sommation  de  prêter  le  serment  de  fidélité  à  la 
France.  Cet  acte  eut  lieu  à  l'Hôtel  de  ville  d'Obernai,  le  9  octobre  1680, 
en  présence  de  l'intendant  Jacques  de  Lagrange  et  de  sa  suite.' 

A  partir  de  cette  époque,  plus  de  ces  débats  publics  dans  lesquels,  pen- 
dant de  longs  siècles,  les  divers  membres  du  grand  organisme  de  l'Etat 
avaient  su  maintenir  leur  existence  propre  et  s'y  mouvoir  librement,  tout 
en  ne  perdant  pas  de  vue  l'intérêt  général.  Sous  le  régime  autocratique, 
qui  fut  inauguré  dans  notre  nouvelle  patrie,  la  vie  municipale  elle-même 
ne  larda  pas  à  s'éteindre  sous  le  voile  trompeur  des  anciennes  formes  aux- 
quelles toute  sève  vitale  fut  violemment  enlevée.  Aux  discussions  des  âges 
passés  succéda  un  silence  profond;  mais  ce  silence  ne  faisait  que  masquer 
l'agitation  intérieure  qui  fit  explosion  un  siècle  plus  lard.  Ce  fut  au  milieu 
du  mouvement  général  qui  poussait  les  esprits  vers  un  avenir  inconnu  et 
qui  précéda  immédiatement  la  révolution  de  1789,  que  l'ancienne  décapole, 
qui  allait  être  effacée  pour  toujours  de  la  carte  politique  de  l'Europe,  donna 
un  dernier  signe  de  vie  et  marqua  le  terme  de  sa  carrière  par  une  de  ces 

].  Ou  affirme  ordinairement  que  la  prestation  du  serment  de  la  noblesse  eut  lieu  au 
château  des  Landsperg  à  Niedernai;  c'est  une  erreur.  Les  comptes  communaux  d'Obernai 
de  Hi8()  mentionnent  d'une  manière  très-explicite  les  dépenses  faites  par  la  ville  à  l'occa- 
sion de  cette  cérémonie;  sur  les  ordres  de  l'intendant,  celle-ci  dut  même  mettre  en  cam- 
pagne ses  propres  messagers  ou  Lauf  erboten ,  pour  expédier  les  lettres  d'invitation.  L'année 
suivante  le  directoire  de  la  noblesse  fut  transféré  momentanément  de  Strasbourg  à  Niedernai, 
et  c'est  peut-être  ce  fait  qui  a  donné  lieu  à  la  méprise. 


—  43  — 

assemblées  autrefois  si  fréquentes,  dans  lesquelles  elle  avait  jadis  si  ardem- 
ment débattu  ses  intérêts  particuliers.  Ce  fut  l'Hôtel  de  ville  d'Obernai  qui 
recueillit  ce  soupir  de  l'agonie.  Le  2  et  le  3  septembre  1788  «  les  députés 
des  raagisti'ats  des  dix  villes  jadis  impériales  d'Alsace  »  se  réunirent  au 
Rathhaus  d'Obernai,  en  assemblée  générale,  afin  d'y  délibérer  sur  les 
moyens  de  sauvegarder  leur  ancienne  constitution  et  leurs  privilèges,  ga- 
rantis par  les  traités,  contre  l'inslitution  projetée  des  administrations  in- 
termédiaires provinciales,  des  districts  et  des  nouvelles  municipalités.'  — 
Toutefois  cet  appel  au  passé  ne  trouva  plus  d'écbo.  Le  peuple,  qui  ne  re- 
connaissait plus  dans  ses  magistrats  les  représentants  de  ses  intérêts,  leur 
prêta  l'intention  de  vouloir  exploiter  pour  leur  propre  compte  les  ancien- 
nes franchises  qu'ils  revendiquaient,  et  ne  tarda  pas  à  se  déclarer  franche- 
ment pour  les  nouveaux  principes  qui  s'étaient  fait  jour.  L'ancien  régime, 
qui  en  réalité  n'était  qu'un  régime  fort  moderne,  disparut  définitivement 
pour  faire  place  à  un  régime  plus  moderne  encore  et  dont  l'égalité  civile 
est  la  base  principale.  Mais  quelle  que  soit  la  valeur  sociale  de  ce 
nouveau  principe,  qui  attend  l'épreuve  du  temps  pour  pouvoir  être 
jugé  définitivement,  il  n'en  est  pas  moins  vrai,  qu'au  milieu  de  l'uniformité 
tant  soit  peu  désolante  qui  résulte  de  la  fusion  générale  des  mœurs  et  des 
institutions,  on  aime  à  reconstituer  de  nos  jours,  par  la  pensée  du  moins, 
nos  individualités  communales  d'autrefois,  avec  le  cortège  pittoresque  de 
leurs  institutions  dont  l'originalité  offre  tant  de  charme.  Heureuses  sous 
ce  rapport  celles  de  ces  locahtés  qui  ont  conservé  un  édifice  dans  lequel  se 
résume  leur  passé;  les  souvenirs  qui  s'y  rattachent,  attestent  que  là  aussi 
se  mouvait  jadis,  dans  la  plénitude  de  sa  liberté,  une  existence  personnelle, 
ayant  sa  physionomie  propre  et  caractéristique. 

L'abbé  Gvss. 

1.  Voy.  aux  archives  d'Obernai  le  procès-verbal  des  séances  de  cette  assemblée.  Voici 
les  députés  qui  y  assistèrent:  Hagueuau ,  MM.  de  Cointou,  préteur- royal,  et  de  Barth, 
stettmeister  ;  Coliwar,  Delort  et  Buob,  stettmeister  ;  Schlestadt ,  tvœbele,  bourg-uemestre; 
Wissembourg ,  de  .Neubeck,  préteur-royal,  et  Quefemme,  bourguemestre;  Landau,  Gromer, 
préteur-royal,  etilofmaun,  boiu'guemestre  ;  Oberenheini,  Soutag  et  Lander,  bourguemestres; 
Rosheim ,  Braun,  bourguemestre  et  Reyset,  syndic;  KeyserSberg,  Peyerinihoff,  stettmeister; 
Münster,  de  Barth,  préteur-royal,  et  Boyet,  bourguemestre;  Türckheim,  Hübler,  syndic. 


LES  FORTIFICATIONS  D'HUNINGUE. 


J'ai  déjà  eu  l'honneur  de  vous  parler  des  ruines  d'Huningue  et  de  vous 
proposer  de  conserver  le  souvenir  de  ces  restes  imposants  d'un  passé  si 
glorieux  en  les  faisant  reproduire  par  la  photographie  dont  l'inexorable 
précision  nous  tracerait  la  vue.  Je  vous  disais  qu'un  pareil  tableau  méritait 
d'être  conservé  et  que  personne  mieux  que  M.  Braun,  dont  vous  avez  déjà 
pu  admirer  le  mérite,  ne  serait  plus  apte  à  nous  conserver  cette  ceinture 
de  ruines. 

Je  ne  sais  si  ce  travail  a  été  entrepris,  mais  en  attendant  j'ai  pu  me  pro- 
curer le  plan  de  la  ville,  telle  qu'elle  était  avant  la  paix  de  Ryswick,  avant 
d'avoir  été  privée  de  son  pont  sur  le  Rhin  en  1752,  et  considérablement 
réduite  l'an  V,  après  qu'une  grande  partie  de  l'armée  y.  eut  opéré  son  pas- 
sage lors  de  la  belle  et  célèbre  retraite  de  Moreau.  Je  crois  que  ce  plan 
que  j'ai  l'honneur  d'offrir  à  la  Société  et  dont  je  vais  vous  dire  quelques 
mots,  pourrait  être  conservé  dans  vos  archives. 

La  forteresse  d'Huningue,  située  sur  le  Rhin,  à  peu  de  distance  de  Bâle, 
était  un  modèle  achevé  dans  ce  genre.  Son  long  côté  était  sur  le  fleuve. 
M.  de  Vauban,  qui  l'a  fortifiée,  n'avait  rien  oublié  pour  la  mettre  à  couvert 
de  toute  insulte.  Louis  XIV  voulait  qu'Huningue  fût  une  forteresse  redou- 
table et  le  boulevard  de  l'Alsace.  (Note  n"  1.) 

Commencés  en  1680,  les  travaux  furent  poussés  avec  une  ardeur  in- 
croyable; une  année  les  vit  pour  ainsi  dire  commencer  et  terminer.  La  mé- 
moire de  ce  fait  a  été  conservée  par  une  médaille  qui  représente  Huningue 
sous  la  forme  d'une  femme  qui  offre  à  Pallas  le  dessin  de  la  nouvelle  forte- 
resse; le  Rhin,  sous  la  figure  d'un  vieillard,  y  applaudit.  Sur  la  légende  on 
lit  :  Muniti  ad  Rlienum  fines.  Huninga  condita  MDCLXXX  (1080). 

Cette  médaille,  qui  est  très-rare,  se  trouve  au  cabinet  de  la  Bibliothèque 
impéiiale,  c'est  la  seule  que  j'aie  rencontrée  jusqu'ici.  (Note  n°  2.) 

11  est  facile  de  se  rendre  compte  de  ce  qu'était  cette  forteresse.  Pleine 
liberté  avait  été  laissée  à  Vauban,  aucune  règle  absolue  ne  lui  avait  été 
imposée;  il  savait  seulement  qu'il  devait  amener  les  eaux  du  Rhin  à  l'entour 
de  la  place,  y  creuser  le  lit  d'une  rivière  et  rendre  ce  fort  redoutable. 


—  4D   — 


Or,  qu'esl-il  résulté  des  souhaits  exprimés  par  Louis  XIV  et  de  cette 
liberté  laissée  à  l'architecte?  Ce  qui  résulte  toujours  d'une  grande  idée 
quand  son  exécution  est  confiée  à  l'expérience:  une  œuvre  complètement 
réussie,  parfaite  en  tous  points. 


Vauban  en  véritable  artiste  procédait  largement  et  d'une  manière  sai- 
sissante: il  prenait  un  coin  de  terre  ou  un  bois,  bien  uni  de  sol,  sans  vues, 
sans  un  filet  d'eau,  brûlé  par  le  soleil;  et,  d'un  coup  de  baguette,  le  ma- 
gicien vous  le  transformait  si  bien  que  vous  ne  le  reconnaissiez  plus.  La 
forteresse  s'élevait,  une  large  rivière  coulait  à  l'entour,  des  ouvrages  à 
corne,  des  demi-lunes  sortaient  des  ondes  du  vieux  Rhin;  l'œil  embrassait 
tous  ces  travaux,  ces  casernes,  ces  courtines;  les  remparts  et  les  fossés  se 
courbaient,  serpentaient  comme  de  longs  rubans.  L'œuvre  était  achevée. 
Vauban  y  avait  mis  la  main,  il  l'avait  signée  de  son  nom,  le  poëme  était  fait 
(Note  n"  3.) 

Ces  grands  travaux,  sûrement  et  économiquement  conduits,  occupèrent 
pendant  un  an  1,200  ouvriers  et  300  chevaux.  Presque  toutes  les  commu- 
nes des  bailliages  d'Altkirch,  de  Delle,  de  Ferrette  et  de  la  seigneurie  de 
Landser  avaient  été  mises  en  réquisition  pour  transporter  les  pierres  et 
les  bois  propres  à  la  construction. 


—  46  ~ 

Ces  travaux  ont  été  poussés  si  vite  que  toute  l'Alsace,  et  surtout  la  Suisse 
et  le  duché  de  Baden  étaient  étonnés  de  les  trouver  achevés  en  si  peu  de 
temps.  C'est  que  des  centaines  de  bras  creusaient  la  terre,  élevaient  les 
ponts,  fabriquaient  la  brique,  bâtissaient  les  casernes.  Une  égale  activité 
régnait  au  dedans  et  au  dehors  de  la  place  et  préparait  pour  le  printemps 
suivant  un  lever  de  rideau  dont  tout  le  monde  était  aussi  surpris  qu'en- 
chanté. (Note  n°  4) 

On  voyait  d'abord  sur  l'autre  bord  du  Rhin  un  grand  ouvrage  à  corne 
avec  une  demi-lune  devant  la  courtine  et  une  contre-garde  à  côté  de  cha- 
que aile.  Ces  ouvrages  étaient  environnés  d'un  bon  fossé  d'environ  30  mè- 
tres de  longueur,  qui  communiquait  avec  le  Rhin.  Sur  le  milieu  du  fleuve 
à  peu  près,  il  y  avait  un  autre  ouvrage  à  corne  plus  grand,  qui  enfilait 
tous  les  fossés  du  premier.  Sur  le  bord  du  Rhin,  du  côté  de  la  forteresse, 
on  trouvait  d'abord  une  espèce  de  chemin  couvert  plus  long  que  le  front 
de  la  place.  Il  y  avait  un  bastion  sur  le  milieu  pour  défendre  le  passage  du 
Rhin. 

De  tous  les  côtés, -et  à  chaque  extrémité,  il  y  avait  deux  digues  ou  éclu- 
ses pour  retenir  l'eau  dans  les  fossés,  afin  qu'ils  ne  fussent  pas  à  sec,  lors- 
que le  fleuve  venait  à  baisser.  Ce  chemin  couvert  était  séparé  du  corps  de 
la  place  par  un  bon  fossé,  où  l'on  voyait  un  double  ravelin  vis-à-vis  le 
milieu  delà  courtine,  et  une  tenaille  double  pour  la  mousqueterie;  le  reste 
de  la  place,  du  côté  de  la  terre,  n'était  pas  fortifié  avec  moins  de  soin, 
comme  le  plan  nous  l'indique. 

On  peut  remarquer  l'attention  que  Vauban  avait  d'occuper  les  postes  qui 
pouvaient  l'incommoder  par  des  ouvrages  à  corne,  d'y  attirer  l'eau  du 
Rhin  par  un  canal  qui  servait  en  même  temps  d'avant-fossé  à  la  place,  et 
à  la  tète  duquel  il  avait  mis  un  pâté  pour  empêcher  que  l'ennemi  ne  tentât 
d'arrêter  l'eau  par  une  digue,  et  enfin  de  mettre  une  contre-garde  devant 
le  bastion  où  il  n'y  avait  point  d'ouvrages  à  corne,  afin  de  rendre  par  là 
la  force  à  peu  près  égale  sur  tous  les  côtés.  La  forteresse  était  garnie  de 
cent  quarante  pièces  d'artillerie. 

hitérieurement  la  ville  était  régulièrement  bâtie,  elle  renfermait  une 
place  d'armes,  une  église  et  des  logements  pour  douze  cents  habitants. 

L'arsenal  était  bien  distribué  et  à  l'abri  des  bombes.  Les  casernes  vastes 
et  bien  percées  avaient  été  construites  pour  y  loger  de  quatre  à  cinq  mille 
hommes.  Un  hôpital  magnifique  pour  deux  cents  à  trois  cents  malades 
avait  été  construit  et  commodément  installé.  Enfin  rien  n'avait  été  négligé 
par  Vauban,  (|ui  avait  fait  de  cette  forteresse  un  chef-d'œuvre  de  l'art. 
(Note  n"  5.) 


_  47  — 

Sur  la  porte  qui  dominait  Bâle  et  qui  a  été  démolie,  ainsi  que  les  caser- 
nes et  tous  les  bâtiments  de  l'Etat,  par  suite  des  traités  de  1815,  on  lisait 
l'inscription  suivante  sur  une  plaque  de  marbre,  et  au-dessus  des  armes 
de  Louis  XIV  :  Ludoviciis  M.  Rex  christianissimus ,  Belgiens,  Sequanicus , 
Germanicus,  pace  Europa  cnncessa  Himingam  arcem,  sociis  iutelam  Jios- 
tibîts  terrorem  extruxit.  MDCLXXXI  {I68i). 

Sabourin  de  Nanton. 
NOTE]  S. 

Note  n»  1 . 

Vanban  s'empresse  de  répondre  à  la  confiance  dont  l'honore  son  roi.  Sûr  de  sa  protec- 
tion et  de  son  sufTrag-e  ,  il  se  livre  à  toute  l'énergie  de  son  talent,  et  c'est  alors  qu'on  voit 
éclore  un  art  tont  nouveau.  Déjà  tombent  de  toutes  parts  ces  tours  orgueilleuses  élevées 
sur  la  cime  des  rochers,  inaccessibles  peut-être  au  fer  et  au  feu,  mais  non  pas  à  la  famine 
qui  les  assiège.  Une  haie  de  bastions  artisteraent  ménagés  ne  sort  du  rempart  que  pour 
présenter  une  pointe  menaçante  à  l'ennemi  qui  se  trouve  investi  de  feux  qui  se  croisent 
et  le  prennent  dans  tous  les  sens.  Chaque  ouvrage  se  défend  lui-même  ,  et  reçoit  de 
l'ouvrage  voisin  la  défense  qu'il  lui  rend  à  son  tour.  Désormais  les  places  fortes  situées  en 
plaine ,  à  la  portée  des  convois  et  des  subsistances,  secourues  par  les  eaux  dont  les  grandes 
manœuvres  seront  appelées  à  leur  secours,  défendues  par  des  fortilications  rasantes  qui 
bravent  les  foudres  ennemies,  garantiront  les  campagnes  de  l'incendie  et  du  ravage,  et  les 
couvriront  de  leur  feu  protecteur. 

Mais  ces  principes  mêmes  varient  suivant  le  site  et  la  nature  des  lieux,  et  Vauban  ne  suit 
que  l'impulsion  de  son  génie,  et  déclare  qu'il  n'adopte  point  de  manière  exclusive.  Trop 
souvent  l'auteur  d'un  système  vent  tout  ramener,  de  gré  ou  de  force,  à  sa  théorie.  Vauban 
sait  en  changer  suivant  la  différence  locale  des  places  qu'il  doit  fortifier.  D'un  coup  d'œil 
d'aigle,  il  saisit  les  rapports  militaires  et  politiques  qui  fout  la  véritable  valeur  des  places 
fortes,  choisit  ses  positions,  lie  les  postes  entre  eux,  se  plie  aux  divers  accidents  de  la  na- 
ture, maîtrise  les  éléments,  les  irrégularités  du  terrain;  les  obstacles  mêmes  deviennent 
des  moyens  sous  ses  mains  victorieuses,  et  les  fleuves,  les  rochers,  les  marais,  les  mon- 
tagnes et  les  mers,  dociles  à  sa  voix,  s'étonnent  d'entrer  dans  la  grandeur  de  ses  plans  et 
de  se  trouver  tributaires  de  son  génie. 

François-Joseph  Noël, 

professeur  à  l'université  de  Paris,  au  collège  Louis-le-Grand. 

(L'Éloge  du  maréchal  de  Vauban.) 

Note  n"  2. 

Nous  avons  pu  nous  procurer  la  copie  de  cette  médaille,  qui  accompagne  notre  mémoire, 
dans  l'ouvrage  intitulé  :  Médailles  sur  les  principaux  érénemeuls  du  règne  de  Louis  le 
Graïul;  Paris,  imprimerie  royale,  1723. 

Voici  le  texte  qui  suit  la  reproduction  de  cette  médaille:  1680.  Les  fortifications  d'Hu- 
ningue.  Entre  les  divers  soins  que  le  roi  a  toujours  pris  pour  affermir  le  repos  et  le  bonheur 
de  ses  sujets,  un  des  principaux  a  été  de  fortifier  les  frontières  du  royaume,  par  les  en- 
droits qui  paraissaient  faibles  et  ouverts  aux  ennemis.  Entre  Bàle  et  Brisach,  il  n'y  avait  point 
de  place  qui  fermât  aux  Allemands  l'entrée  de  la  haute  Alsace.  Sa  Majesté  ordonna  qu'on 


—  48  — 

fortifiât  Hiiiiiiigue,  petit  village  à  une  deiui-lieue  de  Bàle,  et  en  fit  une  place  très-régulière  à 
cinq  i^astions,  avec  tous  les  dehors  nécessaires. 

C'est  le  sujet  de  cette  médaille.  Ou  y  voit  Pallas,  déesse  de  la  guerre  et  des  arts ,  à  qui 
la  ville  d'Huniugue  présente  le  plan  de  ses  fortifications.  Le  fleuve  du  Rhin  regarde  avec 
joie  ce  nouvel  ornement  que  l'on  ajoute  à  ses  rivages.  Les  mots  de  la  légende,  Muniti  ad 
Rheyium fines,  signifient,  les  frontières  sur  les  bords  du  Rhin  fortifiées.  Ceux  de  l'exergue, 
Huninga  condita  MDGLXXX  :  Huningue,  bâtie  I6SÜ. 

Note  n"  3. 

M.  le  maréchal  de  Vauban  fut  inventeur  dans  le  grand  art  des  dispositions  générales  de 
la  défense  ;  c'est  en  le  voyant  se  plier  à  la  nature  du  sol,  tantôt  ingrat,  et  tantôt  favorable, 
qu'on  reconnaît  l'homme  fécond  en  grandes  vues.  Le  conservateur  des  frontières  fut  en 
même  temps  le  créateur  de  l'art  de  latfaque,  et  il  le  porta  au  dernier  degré  de  perfection. 

M.  de  Vauban  fut  non-seulement  le  plus  grand  artiste  de  son  temps;  mais  tons  les  pro- 
cédés de  détail,  dont  il  fut  l'inventeur  dans  les  constructions  importantes,  servent  encore 
aujourd'hui  de  modèles ,  et  l'on  ne  peut  s'en  écarter  qu'aux  dépens  de  la  consistance  et  de 
la  sohdité ,  qui  doivent  constituer  les  premiers  caractères  des  travaux  publics. 

Les  levées,  les  moles,  les  jetées,  les  écluses,  l'art  des  fondations  sur  les  sols  les  plus 
Ingrats  ;  le  dessèchement  des  marais,  la  réunion  des  plus  vastes  magasins  d'eau,  soit  pour 
la  défense,  soit  pour  alimenter  des  canaux  de  navigation;  les  digues  destinées  à  préserver 
les  campagnes  contre  les  ravages  des  torrents  ;  les  fleuves  resserrés  et  contenus  dans  leurs 
lits  ;  partout  il  déploya  le  grand  art  de  prescrire  des  lois  au  caprice  des  éléments  fougueux, 
et  avec  un  tact  si  sûr  dans  ces  savantes  constructions,  que  les  théories  les  plus  subtiles  de 
rhydrauhque  l'ont  à  peine  remplacé. 

Le  général  d'Arçon. 
{Considérations  sur  l'influence  du  génie  de  Vauban  dans 
la  balance  des  forces  de  l'État.) 

Note  n°  4. 

Ce  succès  étonne;  TAlsace  dont  Vauban  avait  établi  la  sûreté,  en  fortifiant  ses  villes , 
doit  le  respecter  comme  son  bienfaiteur ,  puisqu'il  lui  ouvrit  les  sources  du  commerce ,  par 
la  facilité  des  transports  qui  l'ont  tirée  de  la  langueur  et  l'ont  rendue  une  de  nos  plus 
riches  provinces. 

Sabourin  de  Nanton. 

Note  n"  5. 

Vauban  poussa  les  travaux  avec  une  telle  activité  que  bientôt  Huningue  sortit  du  milieu 
de  ses  retranchements  et  que ,  là  où  deux  ans  auparavant  il  n'y  avait  que  des  cabanes  de 
pêcheurs,  la  puissance  de  la  France  avait  su  créer  une  citadelle  redoutable  défiant  les  in- 
sultes de  l'étranger,  sauvegardant  l'Alsace;  forteresse  d'autant  plus  difficile  à  prendre  que 
sa  droite  était  appuyée  à  un  territoire  neutre  qui  se  défendait  par  lui-même,  et  que  des 
ouvrages  avancés  établis  dans  les  lies  du  Rhin  devaient  protéger  les  approches  du  fleuve 
et  couvrir  un  pont  de  bateaux  qui  relierait  les  deux  rives. 

Le  15  octobre  1681,  Louis  XIV  se  rendit  à  Huningue,  visita  la  nouvelle  place  de  guerre 
et  reçut  les  députés  du  canton  de  Bâle  qui  vinrent  le  complimenter. 

Franck  Latruffe. 


LETTRE  DE  FRERE  SIGISMOND 

A  L'ABBÉ  BARTHÉLÉMY  D'ANDLAU 

SUR  LES  ANCIENNES  TAPISSERIES 
DE  L'ABBAYE  DE  MURBACH. 


En  publiant  dans  la  Revue  d'Alsace  de  1855  le  (<  Catalogue  de  la  biblio- 
thèque de  l'abbaye  princièrc  de  Murbach  » ,  M.  Matter  a  cru  devoir  dire 
quelques  mots  d'un  document  qui  l'accompagne  et  qui,  à  son  avis,  mérite 
d'être  mieux  connu. 

C'est  une  description  des  anciennes  tapisseries  de  l'église  de  Murbach, 
adressée  sous  forme  de  lettre  par  l'auteur  du  catalogue,  frère  Sigismond  , 
à  l'abbé  Barthélémy  d'Andlau ,  lettre  digne ,  en  effet ,  sous  plus  d'un  rap- 
port, de  l'attention  des  antiquaires.  Tout  autant  que  le  catalogue  publié  et 
annoté  par  M.  Matter,  elle  témoigne  du  zèle  de  Barthélémy  d'Andlau  et  de 
son  bibliothécaire  pour  les  choses  de  l'esprit.  En  dépit  des  imperfections 
de  la  langue  et  de  la  barbarie  grammaticale,  on  discerne,  dans  l'enthou- 
siasme de  quelques  passages  et  dans  la  vivacité  de  certains  regrets,  quelque 
chose  du  feu  sacré  de  la  Renaissance.  Pouvons -nous  voir,  sans  un  retour 
sur  nous-mêmes,  cette  curiosité  archéologique  qui  arrache  frère  Sigis- 
mond à  des  travaux  sérieux  et  lui  inspire  l'idée  de  consacrer  une  notice  à 
de  vieilles  tapisseries  qui  l'avaient  frappé?  Ne  tenons-nous  pas  là  un  homme 
et  une  passion?  A  part  tout  intérêt  de  sentiment,  la  lettre  de  frère  Sigis- 
mond est  d'ailleurs  un  document  historique  précieux ,  unique  trace  d'une 
décoration  fort  originale,  qui  remontait  peut-être  à  la  première  moitié  du 
douzième  siècle,  puisque  l'empereur  Henri  V  (1106-1125)  est  le  dernier 
souverain  qui  y  figure.  On  y  trouve  la  mention  sommaire  des  faits  les  plus 
importants  du  passé  de  l'abbaye,  la  commémoration  de  ses  principaux 
bienfaiteurs  et  des  avantages  qu'ils  lui  ont  procurés,  l'analyse  de  titres 

II«  .Skkie.— T.  II.  —  (M.)  A 


—  50  — 

dont  plusieurs  sont  aujourd'hui  perdus,  le  nom  d'un  abbé  inconnu,  con- 
temporain d'Olhon  le  Grand;  tout  cela  peut  servir  à  combler  quelques 
lacunes  dans  l'histoire  de  Murbach  qui  est  toujours  à  faire. 

Ne  dédaignons  même  pas  les  vers  léonins  qui  terminent  la  description. 
En  définissant  les  devoirs  réciproques  des  rois  et  des  pontifes ,  des  pasteurs 
des  peuples  et  des  pasteurs  des  âmes,  le  versificateur  qui  s'est  complu 
dans  ces  puériles  allitérations,  paraît  avoir  voulu  résoudre  à  sa  manière 
le  problème  des  deux  puissances,  que  les  luttes  du  sacerdoce  et  de  l'em- 
pire avaient  fait  surgir.  Cette  observation  confirme,  ce  me  semble,  ma 
supposition  sur  l'âge  de  ces  tapisseries.  Que  ne  les  avons-nous  encore  ! 
Quel  intérêt  n'y  aurait-il  pas  pour  l'histoire  de  l'art  à  les  comparer  à  la 
célèbre  tapisserie  de  Bayeux?  Mais  dès  le  temps  de  Barthélémy  d'Andlau, 
cette  œuvre  curieuse  était  déjà  gravement  endommagée  et  nous  devons  de 
la  reconnaissance  à  frère  Sigismond  pour  ne  l'avoir  point  laissée  périr  tout 
entière. 

On  remarquera  que  les  ouvriers  qui  ont  exécuté  cette  tenture,  y  ont 
mis  leurs  noms,  Ulric  et  Bertold.  Cette  particularité  prouve  qu'au  douzième 
siècle  la  tapisserie  n'était  pas  seulement  une  distraction  pour  les  dames, 
qu'elle  constituait  une  industrie. 

J'ai  déterminé  de  mon  mieux  les  titres  auxquels  sont  empruntées  les 
légendes.  La  description  y  gagne  en  clarté  et  en  précision ,  et  nous  établis- 
sons ainsi  une  sorte  de  récolement  des  diplômes  qui  servaient  à  l'abbaye 
de  Murbach ,  dans  le  courant  du  douzième  siècle,  à  justifier  de  son  impor- 
tance ,  de  son  antiquité ,  de  ses  privilèges  et  de  ses  possessions.  On  peut 
s'assurer  par  là  que  la  série  des  plus  anciennes  pièces  de  ses  archives  n'a 
pas  trop  souffert  des  ravages  des  siècles  depuis  l'époque  de  l'abbé  Erlolfe. 

Quant  au  texte,  je  puis  d'autant  mieux  en  garantir  la  fidélité ,  que  le 
bibUothéeaire  de  la  ville  de  Colmar ,  M.  L.  Hugot  (c'est  tout  dire  en  pareille 
matière) ,  a  bien  voulu  le  coliationner  dans  le  temps  avec  moi ,  et  que  de 
plus,  il  vient  d'être  revu  par  un  de  mes  amis,  excellent  latiniste,  dont  la 
modestie  seule  me  défend  de  produire  le  nom  et  de  reconnaître,  comme 
je  le  voudrais,  mille  obligations  que  lui  ont  mes  études.  Sous  cette  double 
garantie  je  reproduis  la  lettre  de  frère  Sigismond  telle  quelle,  me  bornant 
à  placer  entre  crochets  [  ]  les  corrections  visibles  que  le  sens  impose. 

Thann,  10  mars  1863. 

X.   MOSSMANN. 


—  51 


Lettre  sur  les  anciennes  tapisseries  de  l'abbaye 
de  Murbach. 

Au  très -révérend  père  et  seigneur,  très-digne 
de  tout  honneur,  Barthélémy,  abbé  de  Murbach, 
frère  Sigismond,  dévoué  à  votre  affection,  pré- 
sente l'effort  d'une  sincère  charité  d'obédience. 

Comme  je  sais,  ô  le  meilleur  des  hommes  ,  que 
par  une  industrie  singulière  tu  t'es  fort  appliqué 
depuis  longtemps  à  préserver  de  la  destruction 
et  à  restaurer  tous  les  monuments  de  tes  prédé- 
cesseurs pour  les  étudier,  je  crois  que  pour  te 
faire  atteindre  ce  but,  ma  bonne  volonté  ne  t'a 
pas  fait  défaut:  plaise  à  Dieu  que  ce  soit  avec 
fruit.  Il  est  trop  vrai,  et  l'expérience  nous  l'ap- 
prend, que  la  vétusté  consume  tout  et  que  la  teigne 
de  l'antiquité  réduit  toutes  choses  à  rien;  c'est 
ce  qu'il  nous  a  été  donné  de  voir  par  tant  de  ma- 
nuscrits que  le  grand  soin  et  le  génie  de  nos 
pères  avaient  réunis  dans  le  lieu  très- saint  et 
très-ancien  qui  t'est  confié ,  témoin  le  volume 
que  nous  déroulâmes  hier  et  qui  promet  tant  d'é- 
crits dioérents ,  mais  où  malheureusement  le 
nombre  des  œuvres  perdues  dépasse  celui  des 
œuvres  retrouvées.  Et  plût  à  Dieu  que  le  peu  de 
celles  qui  restent  fussent  parvenues  entre  tes 
mains  dans  leur  intégrité  et  non  maculées  de 
crasse!  Mais  aussi  combien  tes  efforts  te  vaudront 
d'éloges  auprès  des  hommes  de  notre  temps  et 
combien  de  récompense?  de  la  part  de  Dieu,  dis- 
pensateur de  tous  les  biens  (qui  sait  aussi  cela, 
j'en  suis  persuadé,  car  rien  ne  lui  est  caché)  ; 
ta  renommée,  ta  louange  et  ton  nom,  jamais 
rage  ne  les  fera  sortir  de  la  mémoire  de  la  pos- 
térité,  si  du  moins  mes  vers  ont  quelque  pou- 
voir. Si  même  je  me  taisais,  tesœuvres  suffiraient 
pour  proclamer  tes  mérites.  Mais  remettons  cela 
à  plus  tard. 

Maintenant  apprends  eu  peu  de  mots  par  quelle 
causej'ai  entrepris  ceci.  J'ai  éprouvé  aujourd'hui 
un  de  ces  dégoûts  auxquels  on  est  parfois  sujet 
pour  la  besogne  sérieuse.  C'est  pourquoi  je  dé- 
bandai mon  esprit  et  voulus  repaître  mes  yeux  ; 
mais  quoi?  je  tombai  sur  un  travail  plus  pénible. 
J'examinai,  en  effet,  ces  antiques  tapisseries, 
comme  tu  l'as  fait  toi-même  fort  souvent  à  ma 
connaissance  ,  et  bientôt  je  me  demandai  s'il  n'y 
aurait  pas  moyen  de  les  dépeindre  pour  les  trans- 
'  mettre  à  nos  successeurs,  de  peur  qu'elles  ne 
soient  perdues  pour  eux  ,  l'étant  déjà  presque 
pour  nous,  car  en  cela  brillent  le  zèle,  l'appli- 
cation de  l'amour  et  la  sollicitude  diligente  pour 
ce  lieu  de  ceux  qui  ont  voulu  exposer  aux  yeux 
des  hommes,  tissés  dans  cette  étoffe,  les  bienfai- 
teurs de  l'abbaye  pour  en  inspirer  le  respect  aux 
mous  et  aux  pervers  ,  et  pour  servir  d'aiguillon 
aux  excellents  et  aux  zélés.  Quoique  tu  connaisses 
ces  tentures  mieux  ([ue  moi ,  je  n'en  ai  pas  moins 
voulu  les  décrire,  pour  que  celui  qui  souffre  des 
yeux  ou  du  cou  ,  en  s'aidant  de  ce  papier,  puisse 
lire  malgré  la  hauteur  où  elles  sont  suspendues. 


Epistola  de  Tapecijs  antiquis  in  monasterio 
Horbacensi. 

Reuerendo  valde  omnique  honore  dignissimo 
domino  patrique  Bartholomeo  abbati  Morba- 
censi,  frater  Sigismundus  vestre  dilectioni  de- 
uotus  sincère  caritatis  conatum  ad  obedienciam. 

Cum  te  sciam,  virorum  optime,  pro  tua  singu- 
lari  industria  iam  dudum  operam  dédisse  ma- 
gnam,  qua  via  omnia  predecessorum  tuorum 
mouimenta  ne  perditum  irent,  possint  ad  resti- 
tucioncm  deduci  ut  inuestigares,  credo  lit  id 
assequi  in  tam  laudabili  cepto  finem  possis  me 
quoque  non  defuisse  uoluntate,utinam  et  fructn. 
Profecto  verum  experti  sumus  quoduetustas  om- 
nia consummit,  (sic)actinea  antiquitatisconficit 
vniuersa,  idque  licnit  videre  in  tot  codicibiis 
magna  cura  et  ingenio  patrum  in  loco  illo  sanc- 
tissimo  ac  vetustissimo  tibi  commisse  repositis, 
prout  hesternum  quod  reuoluebamus  ostendit  ro- 
tulum,  quod  tot  describit  iamproch!  (sic)  deper- 
dita  opéra  ut  numerum  repertorum  excédant.  Et  o 
vtiuam  et  illa  que  de  tot  supersunt  tuas  ad  ma- 
lins deuenissent  intégra  ac  [nec]  aluuione  at- 
trita.  Ob  quem  tuum  conatum  quanta  assequaris 
preconia  aput  homines  nostri  evi  quantaque  pre- 
miaalargitore  omnium  bonorum  deo  (sibi  notum 
reor  quod  nil  latet)  fama  [famam]  tamen  cciam 
tua  [tuam],  laus  [laudem]  nomenque  nulla  vm- 
quam  eximet  vetustas  posteris  si  quid  mea  car- 
mina  possnut.  Me  tamen  eciam  si  tacente  ipsn 
opéra  clamarent,  sed  hoc  in  aliud  tempus  diffe- 
ramus. 


Nunc  qua  de  causa  hec  cepi  percipe  paucis. 
Tediuniquoddaravtassolet  cepit  mehodicagendi 
aliquid  naviter  ;  ob  hoc  romisi  animiim  ocu- 
losque  volui  pascere  et  maiori  labori  tum  incidi. 
Si  quidem  cortinas  illas  antiquas  inspexi,  quod 
te  fecisse  scio  quam  sepe  ,  moxquc  animum  ap- 
posui  si  ne  ipsa  dcpiota  possint  etiam  posteris 
tradi ,  ne  ,  ut  iam  pêne  factum  est  nobis  ,  sic  et 
ipsis  périrent.  Studij  nempe  eorum  et  in  hoc  re- 
liicet  assiduitas  ,  amoris  diligencijque  [diligen- 
tiseque]  ad  locum  sollicitude,  quando  ante  ocn- 
los  hominum  voluerunt  intcxta  [intextos]  pannis 
eos  proponere  qui  loco  benefecerant,  vt  segni- 
bus  peruersisque  verecundiam,  egregijs  vero  ac 
laborantibus  addercnt  (luoddam  calcar.  Nosti  au- 
tem  me  ipsam  melius,  tamen  scribere  uolui  ut 
qui  iiel  oculis  dolet  aut  collo  ,  nt  alte  suspensa 
non  queat  legere  ,  carte  vtatur  suffragio. 


52 


Donc  les  pères  voulant  transmettre  avec  ordre 
la  suite  exacte  de  la  fondation  et  de  l'accroisse- 
ment de  ton  monastère,  résolurent  de  faire  dé- 
peindre les  princes  accordant  leurs  bienfaits  et 
leurs  privilèges,  et  les  pères  dont  les  mérites  les 
obtinrent.  Le  premier  d'entre  eux  est  ce  duc 
illustre,  notre  fondateur,  qui  debout  et  tourné 
vers  le  très-saint  martyr  et  l'éminent  patron  de 
ce  lieu,  Léger,  lui  adresse  la  parole  par  ces 
vers  : 

oLe  peu  queje  donne,  puissant  et  saint  prélat,  fais  qu'il 
se  multiplie ,  et  fais  de  cet  asile  une  maison  digne  de  toi.  » 

A  la  suite  viennent  les  rois  ,  les  empereurs  et 
les  autres  princes  ,  tenant  chacun  à  la  main  des 
passages  du  privilège  dont  il  dota  ce  lieu. 

Premièrement  le  roi  Thierry,  disant  à  l'abbé 
et  évêque  réformateur  de  ce  lieu,  le  très  -  saint 
Pirmin  :  «  Il  nous  a  plu  de  placer  ton  monastère 
•  sous  notre  défense  et  celle  de  nos  successeurs , 
j  et  tout  ce  que  le  fisc  pouvait  détacher  de  ses 
a  cours  ou  de  son  territoire,  nous  l'accordons  à 
a  ton  église.  '  • 

Suit  Pépin  ,  empereur  auguste ,  disant  à  l'abbé 
Baldebert  :  «  Qu'aucun  juge  ne  prétende  se  mêler 
«  des  affaires  de  ton  église ,  ni  pour  entendre  les 
I  causes ,  ou  exiger  le  fredum  ou  recevoir  les  cau- 
«  tions ,  ni  pour  saisir  les  habitants  libres  ou  serfs, 
t  pour  quelque  motif  que  ce  soit.'  > 

Après  lui  Charles,  empereur  auguste,  dit  à 
Sintpert,  évêque  et  abbé  ,  — que  d'autres  aient 
des  doutes  sur  la  personne  de  ce  Sintpert,  moi  je 
pense  que  c'a  été  cet  évêque  de  l'église  d'Augs- 
bourg,  d'abord  abbé  de  Murbach  ,  dont  la  vie 
fut  merveilleuse  et  qui  fleurit  au  temps  de  Char- 
les; de  nos  jours  son  tombeau  est  illustré  par 
des  miracles  ,  et  l'on  célèbre  sa  fête  par  un  office 
propre  le  treizième  jourd'octobre,  dans  le  cloître 
du  monastère  des  saints  Udalric  et  Afifra,  dans  la 
susdite  ville  où  il  a  été  enterré.  Mais  revenons  à 
no'tre  sujet.  —  Charles  dit  à  Sintpert:  «Que  le 
bienfait  confirmé  à  cette  église  par  l'autorité  de 
nos  prédécesseurs,  subsiste  dorénavant  intact.^  • 

Suit  Louis ,  empereur  auguste ,  disant  à  l'abbé 
Gontram  :  «  Que  nul  ne  prétende  par  autorité 
judiciaire  inquiéter  les  hommes  tenant  les  terres 
de  ton  abbaye  ,  ou  porter  plainte  contre  eux  ou 
les  poursuivre.  '  • 


Patres  igitur  fundacionis  incrementique  mo. 
nasterij  tui  volentes  tradere  ordinem  recto  tra- 
mite  ,  bénéficia,  priuilegiaque  tradentes  princi- 
pes, ac  patres  quorum  meritis  dabantur,  depin- 
gendos  statuerunt.  Quorum  primus  fundator  ille 
inclitus  dux,  stans  versus  almum  loci  ipsius  sanc- 
tissimum  martirem  ac  patronum  Leodegarium , 
eum  alloquitur  per  versus  illos  : 


«Paucum,  summe,  datuni  quod  reddas  mnltiplipalum, 
«  Haue  tibi  fac  sedem  dignam,  presul  sactr,  eJem.  • 

Subsccuntur  illum  reges,  imperatores  ceteri- 
que  principes  quilibet  manu  gestans  verba  sui 
priuilegij  quo  locum  dotauit. 

Primo  Theodericus  rex  dicens  abbati  ac  epis- 
copo  ,  locique  Ipsius  reformatori  sanctissimo 
Pirminio  :    «Placuit  ut  monasterium  tuum  sub 

•  defensione  uostra  successorumque  nostrorum 
«  consistât,  et  quid  fiscus  de  curtis  uel  territorijs 
«  separare  potorat,  ecclesie  tue  indulgemus.  '  » 

Sequitur  eum  Pipinus  imperator  augustus ,  di- 
cens abbati  Baldeberto  :  «  NuUus  iudex  in  res 
«  ecclesie  tue  nec  ad  causas  audiendas  ,  uel  freda 
«exigenda,  uel  fideiussores  tollendum  ,  nec  ho- 

•  mines  tam  ingenuos  quam  et  seruos  de  quibus- 
■  übet  causis  stringendum  ingredi  audeat.'« 

Post  hune  Carolus  imperator  augustus  dicit 
Sintperto  episcopo  et  abbati  —  Quisquis  fuit  ille 
Sinpertus  titubent  alij ,  ego  reor  omnino  fuisse 
hune  episcopum  augustensis  ecclesie  ac  abbatera 
Morbacensem  prius,  cuius  vita  mirifica  fuit  ac 
temporibus  Karoli  floruit,  hodieque  sepulchrum 
eius  miraculis  choruscat,  diesque  eins  vna  cum 
historia  propria  celebratur  infra  septamonasterij 
sanctorum  Vdalrici  et  Affre  vbi  et  sepultus  est, 
in  prefata  ciuitate  terciadecimadie  octobris.  Re- 
deamus  ad  propositum.  —  IsKarolus  dicit  eidam  : 
«  Beneficium  auctoritateantecessorum  nostrorum 
confirmatum  huic  ecclesie  deinceps  per  nostram 
auctoritatem  maneat  inconcussum.' > 

Sequitur  hune  Ludv^icus  imperator  augustus  , 
dicens  Guntramo  abbati  :  «  Nullus  ex  iudioiaria 
potestate  homines  tue  ecclesie  terras  possidentes 
inquietare,  uel  calumpniam  geuerare  vel  con- 
traire temptare  presummat.  '  » 

1.  Le  diplôme  de  Thierry  iV  ,  daté  de  Gondreville  ,  12  juillet  727,  et  confirmant  la  fondation  de  Murbach,  ne  donne 
pas  la  fin  de  ce  passage  telle  qu'elle  est  reproduite  ici  ;  on  y  lit  .  ...  •  et  nulla  publica  judiciaria  poteslas,  nec  prœsente 
nec  futuro  tempore,  in  curtis  vel  territuriis  ,  ubicumqiie  ipsius  monasterii  ad  causas  atidiendum  ,  vel  freda  undique  exigen- 
dum  non  prœsumant  ingredere.  »  (V.  Grandidier,  Histoire  d'Alsace,  t.  I«'' ,  Pièces  justifie.  ,  n°  23  ;  Schœpflin,  Als.  dipl. , 
t.  I^r^  p  7)  Cette  différence  est  très-remarquable:  dans  l'original  il  n'est  question  que  de  l'abandon  des  droits  de 
juridiction  ,  tandis  que  la  tapisserie,  en  employant  les  propres  expressions  du  diplôme  ,  fait  de  ce  texte  une  véritable 
concession  de  territoire. 

2.  Titre  n"  45  des  Pièces  justificatives  de  Grandidier ,  de  l'année  760. 

3.  Ce  diplôme  manque  parmi  les  Pièces  justificatives  de  Grandidier,  mais  il  est  mentionné  dans  sa  «  Notifia  funda- 
tionis  murbacensis  abbatiœ  (Pièces  justifie,  du  t.  Il,  pp.  LXXI-LXXIV)  :  .  .  .  «  Omni«  privilégia  ab  antecessoribus  suis 
....  conccsso  conprynavit  et  phira  superaddidit  Carolus  magmis ,  anno  vigesimo  rcgni  sui  (788).  » 

4.  Tit.  136  des  Pièces  justifie,  de  Grandidier,  22  août  816.  Le  texte  original  ne  s'applique  pas  à  des  tenanciers  ou 
vassaux,  mais  h  des  hommes  libres  justiciables  de  l'abbaye:  ....  «  homines  liberos  qui  ....  ad  prœdiaum  monas- 
terium deservierunt.  •  J'ai  fait  voir  ailleurs  (Musée  pittoresque  et  historique  de  l'Alsace)  qu'encore  en  1310  IWiirbacli  ne 
prétendait  sur  Guebwiller  que  des  droits  de  juridiction  et  non  de  suzeraineté. 


53 


Après  lui,  Charles,  empereur  auguste,  ilit  à 
l'abbé  Frédéric  :  '  Qu'il  soit  permis  aux  teuan- 
ciers  de  tou  église  de  jouir  en  paix  de  leurs  biens 
et  je  leur  concède  tout  ce  que  je  pouvais  en  droit 
tirer  de  notre  fisc.  '  • 

Ensuite  le  roi  Conrad  dit  à  l'abbé  Nantpert  : 
«  En  vertu  de  notre  autorité  royale  nous  te  con- 
firmons la  basilique  de  Saint-Didier  et  de  Sainte- 
Susanne,  ainsi  que  Delle,  avec  tout  ce  qui  eu 
dépend.  *  » 

A  l'extrémité  de  la  première  tapisserie  est  placé 
Hugues,  archevêque  de  Besançon,  parlant  à 
l'abbé  Eberhard,  à  qui  il  dit:  «Nous  te  concé- 
dons, à  toi  et  à  tes  successeurs,  la  faculté  de 
consacrer  les  autels  que  saint  Léger  possède 
dans  notre  diocèse.  '  • 

Cette  tenture  ou  tapisserie  se  termine  de  côté 
de  cette  manière  :  «  Tu  donnes,  Ulvic,  tù  (la  fin), 
Bertolddonne  A(le  commencement)  et  le  milieu.» 
Les  ouvriers,  sans  doute,  ont  apposé  cela.  Il  eu 
est  du  reste  comme  de  la  première  tapisserie  ; 
Otlion,  empereur  auguste,  tient  le  premier  rang 
et  dit  à  l'abbé  Landelohepset  :  •  Nous  confirmons 
à  ton  église  tout  ce  quiluiaété  concédé  dutemps 
d'Eberhard ,  ou  ce  dont  elle  s'est  enrichie  dans  la 
suite,  ou  ce  qui  lui  a  été  ravi  injustement.'  ■ 

Othon  n,  empereur  auguste,  dit  à  l'abbé  Bé- 
ringer  :  •  Conformément  aux  décrets  de  nos  pré- 
décesseurs, nous  ordonnons  sous  notre  sanction 
que -nul  comte  ou  juge,  ou  toute  autre  personne 
de  grande  puissance  ne  prétende  avoir  un  gîte 
dans  les  domaines  de  ton  église,  ou  n'eu  exige 
ses  frais  de  tournée.'  » 

Othon  III,  roi  très-glorieux,  dit  à  l'abbé  Hel- 
meric  :  «  Nous  concédons  à  l'église  de  Murbach 
et  à  ses  religieux  le  droit  d'élire  librement  un 
abbé  qui  ait  puissance  de  présider  aux  domaines 
et  au  gouvernement  des  frères,  autant  qu'il  est 
nécessaire.  *  • 

Henri ,  empereur  auguste  ,  dit  à  l'abbé  Degin- 
hard  :  «  Confoi-mément  aux  concessions  de  nos 
prédécesseurs,  qu'aucun  péage  ne  soit  exigé  des 
vôtres  par  toute  l'étendue  des  frontières  de  no- 
tre royaume,  ni  dans  la  ville  ,  ni  sur  la  route  , 
ni  aux  ponts ,  ni  à  aucune  autre  construction.  '  » 
Conrad  ,  roi  par  la  grâce  de  Dieu  ,  dit  à  l'abbé 
Deginhard  :  »Nous  ordonnons  sous  notre  sanc- 
tion que  nul  comte  ou  juge  ou  toute  autre  per- 


Post  hune  Karolus  Imperator  augustus  dicit 
Friderico  abbati  :  •  Liceat  possessoribus  ecclesie 
tue  res  suas  quiète  possidere,  etquidquid  dejure 
fisci  nostri  habere  poteram,  ipsis  concedimus.  '  • 

DeincepsCuouradusrexdicitNantperto  abbati  : 
t  Basilicam  sancti  Desiderij  et  sancte  Susanne 
et  Dodilam  et  quidquid  ad  ipsam  pependit  regali 
auctoritate  tibi  roboramus.  '  » 

In  fine  prime  cortine  Hugo  archiepîscopus  bi- 
suntinus  ponitïir,  loquens  abbati  Eberharde  di- 
cit :  •  Concedimus  tibi  et  successoribus  tuis  liber- 
tatem  consecrandi  altaria  in  ecclesijs  quas  habet 
sanctus  Leodegarius  in  nostra  diocesi.'  • 

A  latere  vero  taliter  coucluditur  ipsa  cortina 
seu  tapecium  :  <  G)  das,  Volrice,  Berchtoldus  A  da 
mediumque  ,  >  (luod  artifices  forsitan  apposuore. 
Reliqua  vero  ita  habet  se  sicut  prima,  nam  pri- 
mum  locum  tenet  Otto  Imperator  augustus  et  di- 
cit Landelohepset  abbati  :  ■  Omnia  que  tempore 
Bernhardi  [Eberhardi]  concessa  sunt  uel  post 
adaucta  uel  iniuste  abstracta  ecclesie  tue  corro- 
boramus.  '  • 

Otto  2  us  Imperator  augustus  dicit  Beringero  ab- 
bati :  «  Juxta  antecessorum  nostrorum  décréta 
sanccimus  ut  nuUus  cornes  aut  iudex  uel  aliqua 
prepotens  persona  in  locis  ecclesie  tue  mansiones 
habere  uel  paratas  exquirere  presummat.  •  » 


Otto  3  us  gloriosissimns  rex  ait  Helmerico  ab- 
bati: •  Morbacensi  ecclesie  et  eis  [monachis]  eli- 
gendi  abbatem  qui  rebus  fratrumque  regimini 
preesse  possit  quantum  cumque  necesse  sit ,  libe- 
rum concedimus  arbitrium.  "  • 

Hainricus  Imperator  augustus  loquitur  Degin- 
hardo  abbati  :  •  Teloneum  iuxta  antecessorum 
nostrorum  concessiones  per  omnes  regni  fines 
nequeinvrbe,  neque  in  uia,  neque  ad  pontes 
seu  aliquam  structuram  a  uestris  requiratur.  '■ 

Cuonradus  dei  gracia  rex  dicit  Deginhardo  ab- 
bati :  >  Sanccimus  vt  nullus  iudex  uel  comes  seu 
quelibet  prepotens  persona  mansiones  in  loco 


1.  Tit.  209  des  Pièces  justifie. ,  du  7  juillet  S77. 

2.  Diplôme  de  Conrad  I"  du  12  mars  913  (Pièces  justifie,  de  Grandidier,  lit.  251).  La  possession  de  l'église  do 
Sainl-Dizier  et  de  Delle  par  Murbach  remonte  aux  donations  du  comte  Eberhard. 

3.  Ce  privilège  n'est  pas  énoncé  dans  la  charte  de  l'archevêque  Hugues  (6  novembre  1041)  publiée  par  Grandidier, 
Pièces  juslificat. ,  tit.  398,  V.  Dom.  Martenne,  Thés,  anecd. ,  t.  I,  p.  164. 

4.  La  «  \ntitia  fundationis,  •  catalogue  le  plus  complet  des  abbés  de  Murbach,  ne  mentionne  ni  l'ahbé  Landelohepsol, 
ni  le  diplôme  d'Olhon  le  Grand  (930-97;?).  ('»'pendant  on  retrouve  ces  expressions  dans  une  confirmation  d'Othon  II  du 
27  avril  977.  (Pièces  justifie. ,  tit.  312.) 

5.  Diplôme  du  27  avril  977.  (Pièces  justifie,  de  Grandidier,  lit.  312.) 

6.  tdem,  tit.  324  du  24  octobre  988. 

7.  Idem,  tit.  37")  du  2j  septembre  1023. 


—  54  — 


sonne  de  grande  puissauce  ne  prétende  à  un  gîte 
dans  les  domaines  de  ton  église  on  n'en  exige  ses 
frais  de  tournée.  '  • 

Henri ,  empereur  auguste ,  dit  à  l'abbé  Wolfe- 
rad  :  •  Tous  les  domaines  qu'Eberhard  et  Luit- 
frid,  fondateurs  de  ton  monastère,  ont  concédés 
pour  l'usage  des  religieux,  nous  les  confirmons 
en  vertu  de  notre  autorité  impériale.  '  » 

Henri  auguste  dit  en  dernier  lieu  à  l'abbé  Ey- 
lolfe  :  tNous  te  confirmons,  en  vertu  de  notre 
autorité  royale ,  tous  les  domaines  qu'après  la 
construction  de  ton  monastère  nos  prédécesseurs 
ont  concédés  pour  l'usage  des  frères.  ^  » 

Les  noms  des  personnages  se  trouvent  inscrits 
au-dessus  de  la  tète  desdites  figures,  dans  l'ordre 
où  je  les  ai  cités  ;  de  plus,  les  vers  suivants,  qui 
se  rapportent  à  la  fois  aux  princes  et  aux  abbés, 
forment  une  longue  ligne  au  haut  de  l'une  et  de 
l'autre  tenture  : 

•  Les  pères  et  les  rois  émettent  ensemble  les  dogmes , 

•  les  lois  ;  une  double  atfectiou  brille  dans  la  doctrine  des 
«pères  ;  les  rois  soumettent  les  révoltés  de  peur  qu'ils  ne 
«renversent  les  droits;  unis  aux  pères,   oints  du  même 

•  chrême,    ils    enrichissent   les  églises,   détournent  les 

•  maux  de  l'injustice,  par  acte  royal,  vrai  monument, 
«confirmant  aux  pères  ce  qui  est  commis  à  leur  soin  vigi- 
■  lant.  Ces  rois  donnent  largement  aux  pauvres  du  Christ 
lia   culture  humaine  et  la  subsistance  quotidienne.  Les 

•  pasteurs  pourvoient  à  ce  que  les  mœurs  tiennent  tout  en 

•  ordre  et  que,  pieusement  joyeuses,  elles  procurent  le 
«repos  aux  cœurs;  à  ce  qu'on  pleure  les  maux  publics  ou 

•  qu'on  prie  pour  les  rois. 

«Ils  ont  reçu  les  récompenses  célestes  qu'ils  ont  mé- 
«ritées.i» 

Voilà ,  ô  le  plus  illustre  des  hommes  et  mon 
gracieux  seigneur,  quel  a  été  l'emploi  de  mon 
temps  aujourd'hui.  Fais  que  ce  petit  présent  te 
soit  agréable  ,  et  continue  ,  suivant  ta  coutume  , 
à  m'acoorder  tes  faveurs. 

Donné àHugstein,  au  château  de  ta  seigneurie, 
le  mardi  septième  jour  de  juiu  1464. 


ecclesie   tue    aut  paratas    exquirere   présumât , 
etc. ' » 

Hainrieus  Imperator  augustus  dieit  WoU'erado 
abbati  :  «  Omnia  loca  que  Eberhardus  et  Luitfri- 
dus  tui  monasterij  constructiones  [constructores] 
fratrum  usibus  concesserunt ,  imperiali  auctori- 
tate  roboramus.'  • 

Hainrieus  augustus  vltimo  loco  dicit  abbati 
Eylolfo  :  «  Omnia  loca  que  constructo  monaste- 
rio  tuo  vsibus  fratrum  anleccssores  nostri  con- 
cesserunt, regali  auctoritate  confirmamus.  '  • 

In  capitibus  uero  prcfatarum  ymaginum  uo- 
mina  ipsa  personarum  prout  posui  continentur, 
porro  isti  versus  por  longam  lineam  superiorem 
in  ambabus  cortinis  positi  sunt,  tam  de  principi- 
bus  quam  abbatibus  indicantcs  : 

«Paires  et  reges  simul  ornant  dogmata,  leges; 

•  Patruni  doclrina  rutilât  dileccio  bina; 

f  Reges  debellaut  tumidos  ne  iura  refellant  ; 

•  Hi  patrlbus  iuncti ,  parili  carismate  vncti , 

•  Ecclesias  ditanl,  iuiusticie  mala  uitant, 

•  Per  testamentum  régale  qnod  estmonu-mentum, 
«Pervigili  cura  patribus  firmantes  valitura. 

•  Panperibus  Christi  dant  repes  largiler  isti 

•  (Quitus  humanos  et  victus  cottidianos. 
«Curant  pastores  teneant  vt  in  ordine  mores, 
«  Atque  pie  leti  sua  credant  corda  qiiieti  ; 
«Publica  qua  plorent  mala  uel  pro  regibus  orent. 
«Premia  sumi)serunt  celestia  que  meruerunl,  » 


Ecce,  virorum  prestantissime  ac  domine  mi 
graciose,  racioneni  temporis  mei  hodierni.  Tu 
fac  ut  gratuni  tibi  sit  hoc  munusculum,  mcque, 
ut  assoles,  fauoribus  prosequere. 

Datum  in  castro  tue  dominacionis  Hugstein , 
die  martis  septima  junij  [14]64. 


1.  Diplôme  du  27  avril  977;  lit.  ;!78  du  23  juin  lOSo. 

2.  Diplôme  de  l'empereur  Henri  IIl  du  5  juillet  1049.  (Tit.  403  des  Pièces  justifie,  de  Grandidier.) 

3.  L'abbé  LylolCo  ou  Egelolphe  n'est  conlemporain  d'aucun  empereur  du  nom  de  Henri,  puisqu'il  ne  figure  dans  les 
catalogues  qu'après  l'année  1 150.  Au  lieu  de  Lylolfe,  frère  Sigismond  aurait  donc  du  lire  Erlolfe  qui  gouverna  Murbach 
sous  le  règne  de  Henri  V.  Le  diplôme  auquel  la  tapisserie  faisait  allusion,  n'existe  plus,  et  même  la  Nolitia  fundalionis 
n'eu  fait  pas  muutiou. 


UNE  EXCOMMUNICATION  DE  MULHOUSE 

AU  TREIZIÈME  SIÈCLE. 


Dans  l'histoire  spéciale  de  la  ville  de  Mulhouse  {Mülhausen)  la  lutte  des 
empereurs  de  la  maison  de  Souabe,  agissant  comme  ducs  d'Alsace,  avec  les 
évêques  de  Strasbourg,  remplit  une  partie  du  douzième  et  du  treizième 
siècle.  Pendant  l'interrègne,  la  ville  elle-même  se  trouve  entrahiée  à  résister 
aux  évêques,  et  à  appeler  à  son  secours  le  comte  de  Habsbourg,  landgrave 
d'Alsace,  qui  était  réservé  à  de  grandes  destinées. 

Les  dissentiments  entre  l'autorité  épiscopale  et  l'autorité  municipale  con- 
stituent le  premier  acte  de  cette  dramatique  histoire  mulhousienne.  Au 
quatorzième  siècle,  les  guerres  intestines  entre  la  noblesse  et  la  bourgeoi- 
sie; au  quinzième,  des  troubles  analogues  et  des  guerres  avec  la  noblesse 
des  environs,  avec  Charles  le  Téméraire,  etc.;  enfin  les  troubles  religieux 
au  seizième  siècle  forment  une  série  de  violentes  crises,  dont  la  petite  cité 
réussit  toujours  à  se  tirer,  un  peu  meurtrie,  mais  victorieuse  en  définitive. 

De  nos  jours,  des  luttes  pacifiques  ont  remplacé  les  manifestations  d'une 
force  exubérante.  Tout  est  contraste  dans  l'existence  des  individus,  des 
cités  et  des  nations.  Pour  la  ville  de  Mulhouse  de  1860,  telle  que  le  génie 
créateur  du  commerce  et  celui  de  l'industrie  l'ont  faite,  la  cité  municipale  de 
1260,  usant  ses  forces  à  résister  aux  mesures  coërcitives  d'un  prélat  alsa- 
cien, soutenu  par  un  prélat  de  Bâle  et  par  le  pontife  de  Rome,  est  une 
anomahe  et  une  énigme.  Essayons  de  feuilleter  une  partie  de  ces  annales 
du  passé  à  titre  de  spectacle  curieux  ;  remontons  au  point  de  départ  de 
cette  infatigable  vitahté;  recherchons-en  les  premiers  symptômes  sans  ar- 
rière-pensée. L'expansion  se  traduisait  autrement,  il  y  a  six  siècles,  que 
de  nos  jours. 

Les  archives  départementales  du  Bas-Pdiin  contiennent  le  vaste  dossier 
d'une  procédure  ecclésiastique  contre  Mulhouse;  je  me  propose  d'en  indi- 
quer les  principaux  titres,  qui  n'ont  point,  que  je  sache,  été  mis  au  jour. 
Je  tomberais  dans  une  monotonie  oiseuse,  si  je  m'imposais  la  tâche  de  co- 
pier, de  traduire,  et  de  commenter  tous  les  parchemins  qui  se  rattachent 
à  la  sentence  d'excommunication  à  laquelle  je  fais  allusion.  11  suffira  de 
reproduire  les  principales  phases  de  la  lutte;  on  y  verra,  des  deux  côtés, 


—  56  — 

une  égale  persistance  à  défendre  des  droits  ou  des  prétentions  tradition- 
nels, et  comme  toujours,  une  transaction  clore  des  débats  qui  semblaient 
interminables. 

En  1221,  un  arbitrage  prononcé  par  les  abbés  de  Murbach  et  de  Neu- 
bourg,  et  par  le  comte  de  Werde,  avait  attribué  la  ville  de  Mulhouse  à 
Henri  de  Vebringen,  évêque  de  Strasbourg*;  mais  trois  ans  plus  tard,  le 
successeur  de  Henri,  l'évêque  Berthold  de  Teck,  conféra  l'avouerie  {die 
Vogteij)  de  la  ville,  à  titre  de  fief,  à  l'empereur  Frédéric  IP.  En  1236, 
enfin,  le  même  évêque  inféode  au  même  souverain  Mülhausen  avec  tous 
les  droits  de  patronage,  tous  les  revenus,  toutes  les  dépendances.^ 

Cette  charte  de  1236  constitue,  pour  l'histoire  de  Mulhouse,  et  même 
pour  celle  d'Alsace,  l'un  des. documents  les  plus  importants.  On  dirait,  en 
prenant  connaissance  de  ses  dispositions  solennelles  et  détaillées,  que  le 
mal  était  coupé  dans  sa  racine,  que  toute  discussion  allait  devenir  impos- 
sible à  l'avenir.  Ce  n'est  pas  seulement  le  sort  de  Mulhouse  qui  est  réglé; 
parle  même  titre,  l'empereur  acquiert  le  fief  de  Neubourg,  l'avouerie  de 
Molsheim  et  de  Mutzig;  il  échange  le  beau  val  de  la  Bruche  contre  Trsenheim; 
il  acquiert  Wasselonne  contre  l'avouerie  de  Bischoffsheim;  il  obtient  les 
droits  de  l'évêque  à  Offenbourg,  les  hommes  de  WeslhofTen  et  de  Ros- 
heim;  mais  il  renonce  lui-même,  en  faveur  de  l'évêque,  à  Thann-le-Vieux, 
à  Éguisheim,  aux  châteaux  de  Bernstein,  de  Guirbaden,  à  Dagsbourg,  àRhi- 
nau,  à  Dambach,  au  Nouveau-Tliann;  et  pour  solenniser  ce  pacte  d'échange  et 
de  bonne  amitié,  toute  une  série  de  prélats  et  de  grands  seigneurs  laïques 
y  assistent  comme  témoins:  par  exemple,  Conrad,  abbé  de  Saint-Gall, 
Conrad,  burgrave  de  Nuremberg,  des  membres  de  la  famille  de  Hohen- 
lohe  (Hochenloch) ,  de  la  famille  deNifen,  de  Geroldseck,  deLandsperg,  de 
Pappenheim,  de  Winterstetter.  On  devait  croire  que  la  paix  était  assurée 
pour  longtemps.  Mais,  vanité  des  vanités!  Déjà  en  1246,  la  lutte  renou- 
velée entre  l'Empire  et  le  sacerdoce  amena  l'excommunication  de  Frédé- 
ric II,  et,  de  ce  moment,  la  ville  de  Mulhouse  ayant  fait  retour  à  son  sei- 
gneur direct,  Henri  de  Stahleck,  évêque  de  Strasbourg,  on  vit  se  rompre 
la  digue  qui  contenait  la  jeune  et  turbulente  cité.  Henri  de  Stahleck  prit 
de  vive  force  Colmar,  Kaysersperg,  Mulhouse;  un  prévôt  (Schultheiss) , 

1.  Schœpflin,  Als.  diplom.,  p.  347. 

2.  Schœpflin,  ibid.,  p.  351.  —  En  122S  les  Mulhousiens  prennent  part  à  une  lutte  entre 
Bcrthold  de  Teck  et  Ulrich,  comte  de  Ferrette;  ils  sont  les  alliés  du  comte  et  subissent 
avec  lui  une  défaite  entre  Blodelsheim  et  Hcrtzfeld.  Cette  querelle  fut  apaisée  eu  1230. 
Voy.  Grair,  I,  6G. 

3.  Schœpflin,  ibid.,  H,  p.  374-370;  Archiv,  départ,  du  Bas-Rhin,  (1,  486. 


—  57  — 

placé  par  l'évêque  dans  le  châleau  de  cette  dernière  ville,  accabla  les 
habitants  d'exactions  et  de  corvées. 

Bientôt  le  joug  de  l'autorité  épiscopale  devint  insupportable  à  ces  cita- 
dins de  fraîche  date.  L'évêque  Walther  de  Geroldseck,  surtout,  provoqua 
parmi  les  Mulhousiens  des  mécontentements  analogues  à  ceux  qui  ame- 
nèrent la  crise  à  Strasbourg,  et  la  victoire  décisive  de  Hausbergen.  La  cité 
du  Haut-Rhin,  déjà  entourée  de  murs  par  Wœlfelinus,  résista  à  l'autorité 
épiscopale  et  se  donna  en  1261  à  Rodolphe,  comte  de  Habsbourg,  landvogt 
de  la  haute  Alsace,  qui  assiégea  et  détruisit  le  château.  Lorsque  Henri  de 
Geroldseck,  successeur  de  Walther,  voulut  remettre  les  choses  sur  l'ancien 
pied,  il  rencontra  une  opposition  qui  motiva  des  mesures  d'une  extrême 
sévérité;  Mulhouse  fut  excommuniée  (1264  à  1271).  C'est  ici  que  nous 
touchons  à  l'épisode  que  j'ai  annoncé  plus  haut. 

Les  poursuites  dirigées  contre  Mulhouse  commencent  à  la  date  du  11  fé- 
vrier 1265.  C'est  Henri,  évêque  de  Bàle,  délégué  du  prélat  de  Strasbourg, 
qui  ouvre  la  campagne;  il  se  borne  d'abord  à  une  simple  menace,  en  s'a- 
dressant  au  prévôt  (Schullheiss,  scultetus),  et  aux  consuls  de  Mulnhusen. 
Il  dit  avoir  reçu  mission  de  Henri,  évêque  de  Strasbourg,  de  rappeler  les 
griefs  de  ce  seigneur;  il  répète  comme  un  fait  notoire  que  la  localité  et  les 
habitants  de  Mulhouse  appartiennent  à  la  juridiction  de  l'église  de  Stras- 
bourg, et  forment  une  propriété  de  cette  église;  que  pendant  longtemps 
l'évêque  strasbourgeois  n'avait  point  été  troublé  dans  l'exercice  de  ses 
droits;  que  les  habitants  de  Mulhouse  lui  avaient  prêté,  librement,  serment 
de  sujétion  et  d'obéissance;  qu'à  la  vérité,  sous  Walther,  prédécesseur  de 
Henri,  les  habitants  de  Mulhouse,  émus  par  des  procédés  peu  loyaux  et 
parla  dureté  intolérable  de  leur  maître,  s'étaient  temporairement  soustraits 
au  gouvernement  de  l'église  de  Strasbourg;  mais  qu'ils  persévéraient  sans 
raison  dans  ces  errements,  maintenant  que  l'évêque  Henri,  homme  paci- 
fique et  clément  entre  tous,  avait  succédé  à  Walther;  que  le  délit  d'une  seule 
personne  ne  devait  point  porter  dommage  aux  intérêts  imprescriptibles  de 
l'Église. 

Le  prélat  de  Bâle  continue  à  établir  en  principe,  que  le  bon  droit  ne 
peut  être  refusé  à  aucun  souverain;  il  rappelle  le  serment  prêté  à  l'évêque 
strasbourgeois  par  les  habitants  de  Mulhouse,  il  les  engage  à  rentrer  sous 
une  paternelle  domination,  en  recourant  à  la  clémence  de  leur  seigneur;  il 
leur  fixe  un  terme  rapproché  pour  une  transaction,  et,  en  cas  de  refus, 
il  laisse  entrevoir  des  mesures  de  rigueur  qui  ne  seront  au  surplus  adoptées 
qu'après  avoir  pris  conseil  des  chanoines  du  chapitre  de  Bàle,  et  de  qucl- 
(jues  prud'hommes,  de  manière   à  concilier  avec  les  principes  d'équité, 


-  58  — 

applicables  aux  citadins,  le  droit  imprescriptible  de  l'évêque.  (  Voy.  Pièce 
annexée  n°  1.) 

L'effet  suivit  de  près  celte  première  menace;  car  déjà  un  mois  plus  tard 
(aux  ides  de  mars)  le  même  prélat,  usant  de  son  pouvoir  discrétionnaire, 
annonce  à  tous  les  ecclésiastiques  de  son  diocèse  que,  Mulnbusen  refusant 
de  rentrer  sous  l'obédience  de  l'évêque  de  Strasbourg-,  son  seigneur,  et 
dédaignant  même  d'entamer  des  pourparlers  avec  lui,  évêque  de  Bâle, 
lance  contre  eux  une  excommunication  qui  doit  plus  particulièrement  frap- 
per Wezelon  d'Ilzicb,  et  Henri  zum  Thor,  chevaliers,  Pierre  de  Walen  et 
son  (ils;  puis  les  seigneurs  de  Piéguisheim,  ceux  de  Trotenhoven,  Werner 
de  Schermenz  et  son  frère,  enfin  le  cellerier  de  Lutenbach,  tous  citoyens 
de  Mulnbusen.  Dans  le  délai  d'un  mois,  à  partir  de  la  réception  de  la 
présente,  toute  personne  relevant  du  clergé  bâlois  aura  à  s'abstenir  de 
toute  communion  avec  les  personnes  frappées  de  cette  mesure  de  rigueur. 
(  Voy.  Pièce  annexée  n«  2.) 

L'offîcial  de  Besançon  s'adresse,  à  la  même  époque,  aux  doyens  des  cha- 
pitres de  Murbach  et  de  Lutenbach,  pour  confirmer  la  sentence  d'excom- 
munication, «parce  que  les  chevaliers  et  citoyens  de  Mulhouse,  ci-dessus 
«  désignés,  ont  persévéré  dans  leur  désobéissance,  quoiqu'ils  aient  été  dià- 
ment  avertis.  »  (Voy.  Pièce  annexée  n**  3.)* 

Le  même  juge  ecclésiastique  (Gui  de  Foulenis)  mande,  en  sa  quahté  de 
représentant  de  l'autorité  métropolitaine,  au  doyen  et  à  l'écolâtre  de  Luten- 
bach, d'aggraver,  contre  lesdils  habitants  de  Mulhouse, la  sentence  d'excom- 
munication, si  l'évêque  de  Bâle,  chargé  par  eux  de  ce  faire,  se  montrait 
indulgent  ou  retardataire;  «  car  l'insolence  et  le  dédain  des  excommuniés  ne 
méritent  pas  mieux^  »  Dans  le  cas  où  l'un  des  deux  dignitaires  de  Luten- 
bach se  trouverait  empêché,  son  collègue  aurait  plein  pouvoir  de  procéder 
tout  seul.  (  Voy.  Pièce  annexée  n°  4.) 

Une  missive  spéciale,  adressée  à  la  même  époque,  par  l'offîcial  de  Be- 
sançon à  l'évêque  de  Bâle,  met  ce  prélat  au  courant  de  la  situation,  lui 
enjoignant  d'aggraver  la  sentence  lancée  contre  certains  citoyens  de  Mul- 
house, et  rinformant  de  la  mission  qui  compéterait  éventuellement  au 
doyen  et  à  l'écolâtre  de  Lutenbach. 

C'est  à  la  date  du  11  avril  1266  que  l'évêque  de  Bâle  exécute  les  injonc- 
tions qui  lui  ont  été  failes.  Le  prélat,  s'adressant  au  curé  de  Mulhouse  et 

(.  Cil  lie  comprend  pas  trop  re.\trèmc  hâte  que  met  roflîcial  de  Besançon  à  confirmer  et 
ù  renforcer  la  sentence  première;  car  les  pièces  émanées  de  lui  sont  de  la  môme  date  que 
la  sentence  de  l'évêque  de  Bâle. 

2.  P/-oi<l  mrridl  conim  prolervilas  et  coulemplua. 


-  59  - 

au  clergé  du  Sundgau,  rappelle  l'obstinalion  que  mettent  le  prévôt,  les 
consuls,  les  chevaliers  et  citoyens  susnommés  de  Mulhouse,  à  ne  point 
rentrer  sous  le  gouvernement  de  l'évêrpie  de  Strasbourg.  «Non-seulement 
ils  ont  affecté  de  ne  pas  se  rendre  aux  salutaires  avertissements  du  prélat 
(bàlois);  ils  ont  même  dédaigné  d'entrer  en  conférence  avec  l'évêque  de 
Strasbourg, leur  maître  et  seigneur.  »  Les  habitants  de  Mulhouse  sont  som- 
més de  rompre  dans  le  délai  d'un  mois  toute  liaison  avec  les  citoyens  et  les 
magistrats  excommuniés.  «Et  parce  que  lesdits  citoyens,  méprisant  les 
ordres  épiscopaux,  ont  persévéré  dans  leur  dureté  de  cœur,  sans  aucun 
égard  pour  leur  propre  salut  et  pour  leur  repos,  le  prélat  bàlois  a  jugé 
convenable  d'aggraver  la  sentence  qui  devra  être  proclamée  les  dimanches 
et  jours  de  fêle,  au  son  des  cloches,  les  cierges  allumés;  on  interrompra 
toute  relation  avec  les  excommuniés,  et  la  ville  de  Mulhouse  avec  tous  ses 
habitants  et  leurs  colons  sera  mise  sous  l'interdit.  (Foî/.  Pièce  annexée  n°  5.) 

En  attendant  les  deux  partis  s'agitent  pour  arriver  à  un  accommodement. 
Henri  de  Geroldseck,  évêquede  Strasbourg,  nomme  ses  fondés  de  pouvoir 
(29  mai  1260).  Ce  sont  Billung,  juge  de  l'Offîcialité,  et  Werlen  de  Nor- 
dera.  Il  annonce  cette  délégation  à  l'abbé  de  Saint-George  et  au  prévôt  de 
Bischoffszelle,  délégués  apostoliques.  Il  rappelle,  dans  des  termes  déjà 
employés  par  les  rédacteurs  des  documents  précédents,  le  point  de  départ 
du  litige;  puis  l'opposition  formulée  par  les  excommuniés  contr'e  la  sen- 
tence, et  les  lettres  préalables  qu'ils  ont  obtenues  du  saint-siége;  il  supplie 
les  juges  apostoHques  qui  avaient  déjà  commencé  une  instruction  à  Viilingen, 
de  surseoir  et  de  fixer  un  nouveau  lieu  de  rendez-vous  avec  l'abbé  de 
Schultern,  subdélégué  du  prévôt  de  Colmar  (l'un  des  juges  apostohques),  et 
avec  le  prévôt  de  Sainl-Quirin ,  subdélégué  de  l'abbé  de  Saint-George.  Dans 
le  cas  où  l'abbé  de  Saint-George  passerait  outre,  l'évêque  de  Strasbourg 
forme  à  l'avance  opposition  contre  l'absolution  desdites  personnes  déjà 
mentionnées,  vu  qu'il  en  résulterait  un  préjudice  grave  pour  l'église  de 
Strasbourg;  il  en  appelle  dès  ce  moment  au  siège  apostolique. (Fo//.  Pièce 
annexée  n°  6.) 

Au  nombre  des  pièces  justificatives  de  cette  volumineuse  procédure 
ligure  un  certificat,  adressé  à  l'abbé  de  Saint-George,  par  Herrmann  de 
ïhierstein,  custode  du  grand-chapitre,  par  Rodolphe  Crafton,  chanoine  de 
Baie,  et  par  maître  Jean  de  Pertha,  chanoine  de  Rhinfelden,  à  l'effet  de 
constater  que  dans  le  concile  de  Bâlc  la  ville  de  Mulhouse  a  été  légalement 
excommuniée  sur  les  instances  de  l'évoque  de  Strasbourg. 

Pendant  quelque  temps,  les  chances  semblent,  on  ne  sait  sous  l'empire 
de  quelle  influence,  tourner  en  faveur  de  la  cité  rebelle.  A  la  date  des  16  et 


—  60  — 

17  mai,  le  fondé  de  pouvoir  de  l'évêque  de  Strasbourg  est  condamné  aux 
dépens  pour  n'avoir  pas  fourni  de  preuve  suffisante  de  son  assertion,  por- 
tant que  l'abbé  de  Saint-George  n'avait  pas  eu  le  droit  de  subdéléguer  un 
sien  représentant;  et  à  la  date  du  30  juin  1266  l'abbé  de  Saint-George  et 
ses  collègues  (l'abbé  de  Scbuttern  et  le  prévôt  de  Femern,  hnbriacum)  sus- 
pendent provisoirement  l'excommunication.  Cet  acte  important,  émis  dans 
l'église  de  Hornberg  (Forêt-Noire),  porte  que,  les  citoyens  de  Mulhouse 
ayant  fourni  caution,  les  sentences  premières  ont  été  adoucies,  et  les  par- 
ties assignées,  à  nouveau,  dans  l'église  deFribourg  en  Brisgau.(Foî/.  Pièce 
annexée  n"  7^) 

Mais  cette  intermittence  favorable  est  de  courte  durée.  Dès  le  4  décem- 
bre (1266)  l'abbé  de  Saint-George,  qui  semblait  prendre  fait  et  cause  pour 
Mulhouse,  et  qui  avait  dû  ramener  l'évêque  de  Strasbourg  à  l'observance 
stricte  des  formes  légales,  le  même  abbé  déclare  que  la  sentence  d'excom- 
munication a  été  légalement  promulguée,  et  le  17  décembre  suivant,  il 
remet  les  habitants  sous  le  joug  de  l'interdit  dont  ils  avaient  été  préalable- 
ment relevés. 

Les  années  1267  et  1268  s'écoulent  encore  en  discussions  et  en  procé- 
dures. Loin  de  se  laisser  intimider,  les  Mulhousiens  avaient  de  nouveau 
interjeté  appel  auprès  du  Saint-Siège;  deux  fois  ils  avaient  renouvelé  le 
mandat  du  clerc  Conrad  (6  janvier  et  31  mai  1268;  voy.  Pièce  annexée  n°9). 
L'évêque  de  Constance,  le  trésorier  de  l'église  de  Constance,  Walther  de 
Saint-Gall,  chanoine  de  Saint-Étienne  de  Constance,  avaient  fixé  un  terme 
aux  citoyens  de  Mulhouse,  avant  l'expiration  duquel  ils  auraient  à  prouver 
que  leur  appel  était  régulier  (24  mars  1268);  ils  avaient  donné  mandat  au 
curé  de  Saint-Martin  de  Waldkirch,  à  l'effet  d'entendre  des  témoins  dans 
cette  affaire  (juin  1268;  votj.  Pièce  annexée  n°  10),  et  cet  ecclésiastique 
avait  rempli  consciencieusement  sa  mission'.  L'évêque  de  Constance  avait 
prononcé  une  sentence  interlocutoire  (6  juillet  1269);  de  nouveaux  délais 
avaient  été  accordés  aux  citoyens  de  Mulhouse  (1269,  17  et  23  octobre); 
une  citation  avait  été  lancée  par  Conrad,  évêque  de  Constance,  contre 
l'évêque  de  Strasbourg  (16  janvier  1270;  voy.  Pièce  annexée  n^'ll); 
de  longs  plaidoyers  ou  moyens  de  défense  avaient  été  fournis  par  les  deux 

1.  Parmi  les  pièces  marquantes  de  ce  long  procès,  ligure  la  délégation,  donnée  par  la 
ville  de  Mulhouse  à  maître  Conrad  [voy.  Pièce  annexée  n»  8)  et  celle,  donnée  par 
l'évoque  de  Strasbourg  à  maître  Billung  et  à  Conrad  de  Rodcsheim  ;  les  divers  délais  et 
rendez-vous  flxés  par  l'abbé  de  Saint-George  et  ses  collègues ,  etc. 

2.  Une  série  de  délais  accordés  par  lui,  de  mandats  qu'il  donne  et  de  procès-verbaux 
qu'il  dresse,  sont  au  dossier. 


-  Ol  — 

partis  (pancartes  sans  tlale,  probablement  de  1270  ou  1271).  Le  mémoire 
de  la  cité  de  Mulhouse,  basé  sur  des  faits  historiques,  semblait  devoir  faire 
pencher  la  balance  en  leur  faveur. 

«  Le  seigneur,  évêque  de  Strasbourg,  y  est-il  dit,  n'ayant  pas  rempli  les 
conditions  de  son  pacte  avec  les  citoyens  de  Mulhouse,  ceux-ci  ont  pu,  en 
toute  justice,  s'éloigner  de  lui,  car  les  citoyens  ont  prêté  serment  de  fidé- 
lité et  d'obéissance  au  comte  de  Habsbourg  ,  d'après  l'avis  et  sous  les  aus- 
pices de  l'évêque  de  Bâle;  ils  ne  pouvaient  fausser  ce  serment  et  devenir 
parjures,  pour  obéir  à  un  avertissement  épiscopal;  même  s'ils  avaient,  en 
seconde  ligne,  prêté  serment  à  l'évêque,  ce  second  serment  ne  pourrait 
infirmer  le  premier.  Comment  auraient-ils  pu,  de  bon  cœur,  se  laisser  dé- 
tourner de  ce  premier  serment,  prêté  de  l'aveu  même  de  l'évêque;  comment 
une  pareille  sentence  prononcée  par  ce  prélat  serait-elle  juste,  puisqu'elle 
n'est  point  le  résultat  dicté  par  la  justice,  mais  par  la  haine  et  l'inimitié?» 

Ils  concluent  donc  «  à  ce  que  ladite  sentence  d'excommunication  soit 
déclarée  injuste,  et  que  la  partie  adverse  soit  condamnée  aux  dépens.  » 

La  victoire  resta,  du  moins  en  théorie,  à  l'évêque  de  Strasbourg.  Au  mois 
de  mai  1271,  Henri,  évêque  de  Bâle,  parlant  et  agissant  au  nom  du  pape, 
accorde  à  son  collègue  de  Strasbourg  la  faculté  de  réduire  Mulhouse  à  l'o- 
béissance par  le  bras  séculier.  (  Voy.  Pièce  annexée  n°  12.) 

Mais  ce  devait  être,  pour  l'autorité  épiscopale,  une  victoire  stérile.  Henri 
de  Geroldseck  et  son  collègue  de  Bâle  mirent  en  vain  le  siège  devant  Mul- 
house, qui  fit  une  héroïque  et  efficace  résistance  (1271).  De  plus  en  plub 
intimement  bée  à  Rodolphe  de  Habsbourg ,  la  ville  obtint  les  privilèges  de 
cité  libre  et  impériale,  de  la  munificence  de  ce  prince,  qui  avait  été  élu  roi 
des  Romains  pendant  qu'il  assiégeait  Bâle  (1273). 

Ainsi  se  trouvait  terminé,  de  fait,  le  long  litige  entre  l'autorité  épisco- 
pale et  la  jeune  cité,  protégée  de  Frédéric  II  et  de  Rodolphe  de  Habsbourg. 
Cependant  la  question  de  droit  demeurait  en  suspens  aussi  longtemps  que 
l'évêque  de  Strasbourg  n'avait  point,  par  un  nouveau  contrat,  formelle- 
ment renoncé  à  ses  prétentions  antérieures.  Aucun  document  officiel  ne 
nous  dit  à  quelle  époque  cette  terrible  et  cruelle  sentence  d'excommunica- 
tion fut  levée.  Je  dois  croire  que  l'empereur  Rodolphe  de  Habsbourg  eut 
assez  de  crédit  pour  rétabUr  la  paix  et  faire  rentrer  en  grâce  auprès  du 
Saint-Siège  et  de  l'évêque,  les  citoyens  qui  avaient  en  1265  encouru  la 
disgrâce  de  leur  ancien  seigneur,  et  avaient,  pour  sauvegarder  les  franchises 
municipales,  joué  leur  repos  et  en  quelque  sorte  toute  leur  existence. 
'  La  ville  a  dû  rentrer  à  la  fois  dans  le  giron  de  l'Église  (1273)  et  dans 
les  liens  constitutionnels  qui  la  rattachaient  depuis  une  trentaine  d'années 


—  02  — 

à  l'empire  germanique.  A  des  intervalles  rapproehes  les  ('vêques  de  Stras- 
bourg rappelaient  leurs  droits  de  seigneurs;  mais  en  1308,  une  transaction 
formelle  régla  irrévocablement  les  positions  respectives.  Henri  VU,  roi  des 
Romains,  et  Jean  P,  évéque  de  Strasbourg,  convinrent  d'un  acte  d'échange, 
en  vertu  duquel  Mulhouse  et  la  moitié  de  Wasselonne,  restaient  à  l'Empire, 
Molsheim,  Mutzig,  Hermolsheim  el  Wang-en,  à  l'évèché.  L'archichancelicr  de 
l'Empire,  Pierre,  archevêque  de  Mayence,  consentit  à  cet  acte  et  le  corro- 
bora par  une  charte  émise  à  Francfort  le  28  novembre  1308.  (Voy.  Ajxh. 
dép.  du  Bas-Bhln,  G.  77,  etSchœpflin,  Als.  dipl.,  Il,  p.  87-88.)  Des  dispositions 
accessoires  sur  les  Juifs  de  Rouffach  et  de  Souitz,  de  Rhinau  et  de  Mols- 
lieira,  qui  sont  cédés  à  l'évèché,  et  sur  les  Pfahlbürger,  donnent  à  celte 
convention  une  valeur  particulière,  mais  qui  ne  rentre  plus  dans  le  cadre 
du  présent  mémoire. 

Quelles  seraient  les  conclusions  à  tirer  de  cette  lutte  entre  l'épiscopat  de 
Strasbourg  ou  le  pouvoir  clérical,  et  la  jeune  cité  de  Mulhouse?  Il  me  sem- 
ble qu'ici,  sur  un  étroit  théâtre,  nous  voyons  se  répéter  le  spectacle  qui 
s'offre  à  nous  dans  tous  les  siècles  et  dans  tous  les  pays  du  monde.  Des 
intérêts  que,  de  prime  abord,  l'on  dirait  inconciliables,  se  prennent  corps 
à  corps  comme  deux  lutteurs  acharnés,  entrelacés  dans  une  étreinte  vio- 
lente; ils  paraissent  devoir  aboutir  immanquablement  à  la  ruine  des  uns, 
au  triomphe  définitif  des  autres.  Il  n'en  est  rien  pourtant;  les  passions  s'a- 
mortissent, les  angles  s'effacent,  les  prétentions  absolues  se  modifient,  les 
muscles  des  lutteurs  se  fatiguent  et  se  distendent,  l'on  finit  par  s'entendre 
sinon  complètement,  du  moins  par  vivre  côteà  côte, quitte  àrecommencer 
à  nouveau.  Ces  intermittences  de  véhémente  application  et  de  repos  consti- 
tuent la  vie  des  cités  et  des  peuples,  comme  celle  des  individus;  c'est  la 
succession  des  nuits  et  des  jours,  de  la  vie  active  et  du  sommeil.  Peut-être 
trouvera-t-on  aussi  dans  cet  esprit  de  lutte  qui  anime  la  municipalité  de 
Mulhouse,  comme  à  Strasbourg,  contre  le  pouvoir  clérical,  peut-être  y 
trouVera-t-on  les  symptômes  avant-coureurs  de  la  lutte  du  seizième  siè- 
cle. Il  n'est  point  impossible  que  l'habitude  de  s'opposer  à  l'autorité  ecclé- 
siastique pour  des  questions  locales,  ait  prédisposé  ces  populations  à  accueil- 
lir et  à  féconder  les  germes  de  l'opposition  religieuse.  En  émettant  cette 
hypothèse,  j'énonce  plutôt  l'opinion  d'autrui  que  la  mienne  propre,  car  je 
crois  que  les  causes  de  la  Réforme  sont  plus  profondes,  plus  complexes,  el 
surtout  plus  difficiles  à  encadrer  dans  une  seule  et  même  formule. 

Louis  Spach, 
archiviste  au  Bas-Rhin. 


PIÈCES  JUSTIFICATIVES. 


X»  1. 


14  janvier  1265. 

Henricus  dei  gratia  Episcopus  Basiliensis  Di- 
lectis  amicis  suis  sculteto  et  consulibiis  in  Mulu- 
liuseu  salutem  cum  siucerœ  dilcctiouis  affectu. 
Gravera  reverendi  patris  ac  domlni  Henricl  di- 
vine favoie  Argentinensis  Episcopi  querelam 
recepinius  coutiuentcmqnod  cum  notorium  sit  et 
Ijublicum  toti  terrae  locum  vestrum  et  gentem  ad 
jus  et  proprietatcm  argentinensis  ecclcsiaa  libère 
pcrtiuere  :  quam  longo  dudum  tempore  possessio- 
nem  quoque  pacificam  teuuerat  et  quietam  ut- 
pote  oui  concorditer  omnes  juramentum  subjec- 
tionis  et  obedientise  perpetuje  prnestitistis  eo  ta- 
men  quod  felicis  mémorise  predecessoris  sui  ve- 
uerabilis  WaltUeri  qnondam  Argentinensis  Epis- 
copi vestram  lionestatem  minus  honeste  quodam- 
modo  pertractantis  intollerabilem  vobis  duriciam 
fugientes  ad  tenipus  vos  ejusdem  Argentinensis 
ecclesiœ  regimini  subtraxistis. 

Ipsi  revereudo  principi  domino  Henrico  Epis- 
copo  dudum  in  locum  prsemortui  divinitus  sub- 
rogato  quietem  et  pacem  non  tam  suorum  quam 
totius  terrae  generaliter  affectanti  devotione  dé- 
bita subesse  renuitis  ipsius  clementiam  sicut  il- 
lius  duritiam  fugientes  prsesertim  cum  delictum 
personae  in  dampnum  ecclesiss  non  debeat  re- 


Hulhouse  menacée  d'être  excommuniée  par  Henri ,  évêque  de  Bàle- 

dundare.  Licet  itaque  personas  vestras  et  locum 
non  cum  ceteris  nostro  subjectis  regimini  sed 
prie  ceteris  diligamus,  eo  quod  majori  nobis  sitis 
confederationis  vinelo  couniti  quia  tarnen  non 
convenit  ulli  quautomagis  tanto  principi  jvsti- 
ciam  denegarc  devotionem  vestram  moncndam 
duximus  et  hortandam  quatenus  memores  jura- 
mcnti  quod  eidem  dudum  Argcntinensi  ecclesia? 
praestitistis  ad  ipsiiis  fldelitatem  et  obedientiam 
debitam  revertentes  ejusdem  piissimi  principis 
omnem  vobis  impcndere  parati  clementiam  vos 
dominio  submittatis  infra  synodum  uostram  qua- 
dragesimalem  aiit  aliter  componatis  amicabiliter 
cum  eodem.  Alioquin  extunc  de  concanonicorum 
nostrorum  et  aliorum  prudentum  consilio  taliter 
procedemus  quod  nec  vobis  aliquam  faciamus 
injuriam  nec  ipsi  domino  episcopo  justitiam  de- 
negemus.  Datum  anno  domini  1265.  18  kal.  fe- 
bruarii.  Indictionis  octavjc. 

Avec  le  sigillé  détérioré  de  l'évêque  de  Bàle. 
—  Sur  le  revers:  Episcopus  Basiliensis  ut  se  dé- 
bita; obedientiœ  erga  Argentinensem  Episcopum 
submittat  commuuitatem  in  Mulhusen  monet. 
1265.  (14  janvier.) 

Deux  exemplaires. 


1265.  Ides  de  mars.  —  Les  citoyens  de  Mulhouse  sont  excommuniés  par  l'évêque  Henri  de  Bàle. 


Henricus  de igraciaEpiscopus  Basiliensis  omni- 
bus archipresbyteris  deccanis  (sic)  camerariis 
plebanis  et  vicariis  in  nostra  diocesi  constitutis 
salutem  in  domino.  Cum  nos  jam  dudum  gravera 
reverendi  patris  et  domini  Heinrici  dei  gracia 
Episcopi  Argçntinensis  querelam  receperimus 
super  eo  quod  licet  notorium  sit  et  publicum  toti 
terr»  locum  et  gentem  oppidi  Mululius-en  ad  jus 
et  proprietatem  ecclesiae  argentinensis  libère 
pertinere  utpote  quse  jam  longo  tempore  ipsius 
oppidi  possessionem  paciiîcam  tenuerat  et  quie- 
tam et  cui  concorditer  omnes  majores  et  minores 
immo  tota  universitas  ejusdem  oppidi  juramen- 
tum subjectionis  et  obedieutiae  perpetuae  praisti- 
terunt.  Scultetus  tamen  consules  acalii  iuhabita- 
tores  oppidi  prœfati  ex  eo  forsau  quod  venerabi- 
lis  dominus  Waltherus  quondum  Episcopus  Ar- 
gentinensis ipsos  iuhoueste  ac  dure  quodammodo 
pertractavit ,  praedictorum  argentinensis  ecclesiae 
et  domini  Henrici  nunc  ejusdem  Episcopi  quie- 
tem et  pacem  non  tam  suorum  quam  totius  terrae 
generaliter  affectantis  ,  ac  debitam  ipsis  impen- 
dere  parati  clementiam  se  ad  temjjjis  dominio  et 
regiaiini  subtraxerunt.  Nos  scultetum  consules  et 
uuiversitatem  predictos  per  litteras  nostras  mo- 
nuimus  ut  cum  delictum  person.-r  in  dampnum 


ecclesiae  non  debeat  redundare  ,  et  cum  non  sit 
convenions  nos  ulli  quantomagis  tanto  principi 
justitiam  denegare  quatenus  memores  jura- 
menti  quod  dictae  argentinensi  ecclesiae  praesti- 
ternnt  ad  ipsius  fidelitatem  et  obedientiam  rever- 
tentes ejusdem  piissimi  principis  se  infra  certum 
tempus  prout  dignum  erat  dominio  submitterent 
humiliter  ac  devote  ,  alioquin  taliter  procedere- 
mus  quod  nec  ipsis  faceremus  injuriam  nec  pre- 
dicto  principi  videremur  justiciam  denegare. 
Verum  dicti  scultetus  et  consules  mouitis  nostris 
in  hac  parte  licet  salubribus  non  solum  parera 
contempserunt ,  immo  quod  contemptibilius  est 
nulluni  cum  ipso  domino  Episcopo  super  eo  post- 
modum  dignati  sunt  habere  tractatum.  Unde  ex 
parte  dicti  domini  Episcopi  ut  ad  executionem 
aliquam  juxta  monitionem  nostram  proccdere- 
mus  fuit  a  nobis  cum  instancia  requisitum  dei 
etjustitiœ  intuitu.  Quare  vobis  mandamus  et  sub 
penaexcommunicationis  sententiic  quam  ex  nunc 
in  vos  ferimus  si  mandate  nostro  quod  absit  re- 
belles fueritis  in  hac  parte  pr:Ecipimus  quatenus 
praedictos  scultetum  et  consules  et  inter  eos  spe- 
cialiter  Vezzelo7iem  de  llciche ,  Heinricum  zitoine 
Tor,  milites  Petrum  de  Walhen  et  fllium  ejus 
rotrinn  Undolfum  Sifridum  et  Johannom  de  Re- 


64  — 


■vpnsheim,  Buroardum  et Petrinn  de  Trotehoven, 
Wernlierum  de  Schermenz  et  fratrem  suum  et 
cellerarium  de  Luterbach  cives  de  Miilnhusen 
quos  nominatim  et  in  specie  presentibus  excom- 
raunicamus,  omuibus  diebus  dominicis  et  festi- 
vis  excommunicatos  lu  antea  soUempniter  et  pu- 
blice nuutiotis.  Monentes  subditos  vestros  omnes 


ut  a  receptione  presentiuni  usque  ad  uiiiiiD  men- 
senia  dictorumexeommunicatorum  commuuioiie 
se  subtrahant  ne  contra  ipsos  ad  penam  quam 
convenit  pvoccdamus.  Dattim  Basileîe  Idibiis  Mav- 
tii.  Anno  domini  1265. 
Avec  sigillé  épiscopal. 


M»  3. 

1265-  Ides  de  mars-  —  L'offlcial  de  Besançon  s'adresse  aux  doyens  de  Hurbacb  et  de  Lutenbach, 
pour  confirmer  ladite  sentence  d'exécution. 


Officialis  cui-iœ  Bisuntinœ  viris  vencrabilibus 
et  discretis  decanis  Morbacensi  et  Lutenbacensi 
basilieusis  dyocesis  salutem  in  domino.  Ex  parte 
venerabilis  in  Christo  patris  Heurici  dei  gratia 
Argentinensis  Episcopi  propositum  extitit  coram 
nobis  quod  venerabilis  in  Christo  pater  Henricus 
dei  gratia  Basiliensis  episcopus  nominatim  et  in 
specie  in  quosdam  milites  et  cives  opidi  de  Muln- 
husen  suœ  dyocesis  propter  eorum  offensam  ma- 
nifestam  ad  instantianipraînomiuati  Argentinen- 
sis Episcopi  excommunioationis  sententiam  com- 
petenti  monitione  prwniissa  et  juris  ordine  ob- 
servato  promulgavit  et  cum  iidcm  milites  et  cives 
dictam  excommunicationis  sententiam  per  lon- 
gum  tempus  sustinuîssent  et  adhuc  siistinorent 


animonequitor  indurato,  suaî  salutis  immemores 
nobis  liumiliter  supplicavit  ,  ut  nos  sententiam 
ipsam  auctoritate  metropolitana  confirmare  di- 
gnaromur.  Nos  igitur  ipsius  justis  supplicationi- 
bns  anuuentes  sententiam  prsedictam  prout  juste 
et  rite  lata  est  auctoritate  metropolitana  dnximus 
conflrmanrtam. 

Vobis  auctoritate  metropolitana  firmiter  et 
districte  prrooipiendo  mandantes  quatinus  sen- 
tentiam ipsam  observetis  et  observari  faciatis  fir- 
miter per  totam  dyocesin  basiliensem  usque  ad 
sattisfactionem  condignam.  Datum  Iilibus  Martlî 
anno  domini  1265. 

(tUIDO  de  Fenilenis. 

(Sigillé  manque.) 


M«  4. 

1265.  —  L'offlcial  de  Besançon  mande  au  doyen  et  écolàtre  de  Lutenbach ,  d'aggraver  la  sentence 

d'excommunication  contre  les  habitants  de  Mulhouse. 


Officialis  curiœ  Bisuntinœ  viris  venerabilibus 
et  discretis  Decano  et  scolastico  lutembacensi 
salutem  in  domino,  ex  parte  venerabilis  in  Christo 
patris  dei  gratia  argentinensis  Episcopi  propo- 
situm extitit  coram  nobis  quod  cum  venerabilis 
in  Christo  pater  dei  gratia  Basiliensis  episcopus 
ad  instantiam  suam  in  quosdam  milites  et  cives 
de  Mulnhusen  su»  dyocesis  excommunicationis 
sententiam  promulgaverit  propter  ipsorum  ma- 
nifestam  otFensam  ipse  licet  per  annum  et  am- 
plius  dictam  excommunicationis  sententiam  sus- 
tinuerint  et  adhuc  sustineant  in  aggravatione 
dictœ  sententise  est  et  fuit  negligens  et  remissus. 
Hinc  est  quod  vobis  auctoritate  metropolitana 


prœcipimus  et  maudamus  quatinus  ad  ipsum  opis- 
copum  basiliensem  accedentes  ipsum  ex  parte 
nostra  moneatis  ut  sententiam  ips.am  prout  decet 
et  sua  interest  studeat  aggravare  prout  meruit 
eorum  protervitas  et  contemptus.  Et  si  eundem 
in  hoc  inveneritis  remissum  vobis  prasdicta  auc- 
toritate prsecipimus  et  mandamus  quatinus  sen- 
tentiam ipsam  prout  decet  et  justum  fuerit  ag- 
gravantes faciatis  eamdem  per  totam  dyocisim 
basiliensem  firmiter  observari  et  executioni  man- 
dari.  —  Et  si  ambo  hiis  exequendis  non  potueri- 
tis  interesse  ,  alter  vestrûm  nihilominus  exe- 
quatur.  Datum  Idibus  Martii  anno  domini  1265. 
Guido  de  Fenulenis.  (  ?  ) 


11  avril  1266.  —  Excommunication  de  la  ville  de  Mulhouse  par  l'évêque  de  Bàle  sur  les  instances 
de  l'évêque  de  Strasbourg. 


Henricus  dei  gratia  Basiliensis  Episcopus  viro 
discrète  plebano  seu  incurato  vel  vicario  in 
Mulnhusen  salutem  in  domino. 

Quum  nos  jam  dudum  ad  querimoniam  reve- 
rendi  patris  ac  domini  Henrici  dei  gratia  epis- 
copi argentinensis,  ad  cujus  ecclesi»  jus  pro- 
prietatem  et  locus  et  gens  opidi  in  Mulnhusen, 
pront  hoc  est  toti  terrse  notorium  dinoscitur  li- 
bère pertinere,  nos  monueriraus  ac  monere  fece- 
rimusscultetum  eonsulos  et  alios  cives  et  inlial)i- 


tatores  opidi  prfefati  ut  se  infra  certum  tempus 
predicti  domini  dominio  submitterent  ad  ipsius 
et  ecclesise  su»  argentinensis  in  cujus  posses- 
sione  aliquando  fuerint  pacifica  fidelitatem  et 
obedientiam  debitam  revertentes.  Ipsi  tamen  scul- 
tetus  et  consules  ac  alii  cives  opidi  pr:«dicti  mo- 
nitis  nostris  en  hac  parte  licet  salubribus  non 
solum  parère  contempserunt  immo  quod  pejus 
est  nulluni  cum  ipso  domino  Episcopo  predicto 
super  hoc  postmodum  dignati  sunt  habere  trac- 


65  — 


tatum ,  propter  quod  predictos  scultetum  et  con- 
sules  et  inter  eos  specialiter  'Wezelonem  de  II- 
ziche  Henricum  Zemtor  milites  Petrum  de  Wal- 
hen  et  fllium  ojus  Petrum  ,  Rudolfum  Syfridum 
et  Johannem  de  Regensheim ,  Burchardum  et 
Petrum  de  Trotehofen.  Wernerumde  Schermenz 
et  fratrem  suum  cellerai-ium  de  Luterbach  cives 
in  Mulnhusen  excommunicavimus  et  excommu- 
nicatos  mandavimus  publice  et  soleuniter  nun- 
ciari.  Insuper  moneri  fecimus  omnes  inhabita- 
tores  de  Mulnhusen  ut  usque  ad  unum  mensem 
post  receptationem  litterarum  nostrarum  tune 
datarum  a  dictorum  excommunicatorum  com- 
munione  se  penitus  subtraheront  alioquin  scirent 
nos  contra  eos  ad  pœnam  qu;e  esset  convenieus 
processuros.  Verum  cum  prsedicti  cives  propter 
mandata  monita  nostra  vel  etiam  senteutias  ex- 


communicationls  in  ipsos  latas  nec  saluti  suse  vel 
quieti  in  hoc  providere  curantes  mandatis  nos- 
tris  vilipensis  in  sua  duricia  contumaciter  persé- 
vèrent penam  raerito  duximus  agçravandam. 
Mandamus  igitur  universis  ac  singulis  sub  pena. 
suspensionis  jam  in  vos  latœ  ut  contra  pcrsonas 
prsefatas  cumcandelisaccensis  pulsatis  campanis 
excommunicationis  prioris  sententias  exercentes 
singulis  diebus  domiuicis  et  festivis  ipsos  evitetis 
et  facialis  ab  omnibus  artius  evitari.  Locum  vero 
Mulnhusen  propter  contemptum  prsedictum  ec- 
clesiastico  snbponimus  interdicto  familiam  et 
eorum  colonos  inquilinos  dictorum  inhabitato- 
rum  excludimus  et  excludi  prœcipimusa  divinis. 
Datum  Easilese  anno  domini  1266,  tertio  Idus 
Aprilis. 

Avec  sigillé  de  l'évêque  de  Bâle. 


xU»  6. 

1268.  4  des  kal.  de  jnin.  29  mai. 


Henricus  dei  gratia  cpiscopus  argentiiiensis 
honorabilibus  viris  et  amicis  dilectis  abbati 
sancti  G-eorgii  in  nigra  silva  etpreposito  episco- 
palis  celle  Constantin  dyocesis  delegato  sedis 
apostolicse  seusuo  snbdelegato  in  hac  parte  salu- 
tem  et  afifectuosam  ad  servitia  voluntatem.  Inno- 
tuit  nobis  qualiter  venerandus  in  Christo  pater 
et  dominus  Basiliensis  Episcopus  in  sculthetum 
consules  et  inter  eos  nominatim  in  quosdam  de 
universitate  opidi  Mulnhusen  pro  eo  quod  licet 
locus  et  gens  opidi  pr»fati  ad  jus  et  propricta- 
tem  ecclesise  nostr»  argentinensis  prout  hnc  est 
notorium  toti  terrie  libère  dinoscitur  pertinere 
tamen  idem  sculthetus  et  consules  ac  alii  inhabi- 
tatores  opidi  pr^dicti  nostro  et  ecclesiîe  nostr<e 
dominio  ac  regimini  se  temeritate  propria  sub- 
trahentps  usque  ad  terminum  competentem  eis 
prsefixum  nobis  subesse  et  obedire  contempse- 
rnnt.  Compétent!  monitione  prîemissa  excommu- 
nicationis sententiam  auctoritate  ordinaria  pro- 
mulgavit.  Propter  quod  prrenominati  sculthetus 
et  consules  et  inter  eos  nominatim  excommuni- 
cati  falso  suggerentes  dictam  excommunicationis 
sententiam  minus  legitime  prolatam  et  contra 
statuta  concilii  generalis  adprœdictum  dominum 
Basiliensem  episcopum  alioquin  ad  nos  super 
absolutione  sua  in  forma  communi  ut  dicitur  a 
sede  apostolica  litteras  impetraverunt. 

Cum  autem  vos  seu  per  vos  et  subdelegatum 
virnm  domine  preposite  ac  vos  domine  abbasper- 
sonaliter  inceperitis  in  negotio  praîdicto  proce- 
dere  ac  ad  procedendum  iilterius  secundum  re- 
troacta  primo  tertiam  feriam  post  ascensioncm 
domini  secundo  feriam  tertiam  post  Urbani  apud 
Vilingen  terminum  prsefixeritis  Rogamus  vos 
domine  abbas  quatinus  memor  honoris  proprii 
acjustitine  intuitu  cum  sicut  per  vestras  litteras 
apparet  de  oommissione  facta  a  nobis  discreto 
viro  prseposito  sancti  Quirlni  procedere  non  pos- 


sitis  cum  jurisdicfio  jam  apud  alium  resideat, 
quoadabsolutionis  negotium  supradictnm.  Ac  vos 
domine  preposite  et  vestram  habemus  commoni- 
tam  honestatem,autsubdeIegati  vestri  quicunque 
sit  ille  cumsolus  vos  aut  subdelegatus  vester  non 
possitis  judicare  negotio  absolutionis  praîdicto 
seu  causas  supersedere  velitis,  immo  vos  domine 
preposite  aut  subdelegatus  vester  una  cum  hono- 
rabilibus viris  abbate  de  Scutthera  (Schuttern) 
subdelegato  domini  prœpositi  Columbariensis  et 
prfeposito  sancti  Quirini  subdelegato  domini  ab- 
batis  prrodicti  qui  nobis  suas  litteras  nuper  super 
hoc  direxerunt  deloco,  ubi  et  in  quo  congrue 
procedi  possit  velitis  prout  justum  est  et  conve- 
nit  convenire.  Quod  si  forsan  quod  non  credimus 
procedere  prfesumpseritis  quia  nostri  interest 
nos  opponere  absolutioni  supradictarum  perso- 
narum  cum  processus  noster  in  hac  parte  in  nos- 
tram  redundatinjuriam  et  non  modioum  ecclesias 
nostrîB  prsejudicium  etgravamen  exeosentiontes 
nos  indebite  et  contra  justitiam  ac  nostram  gra- 
vari  ecclesiam  scripto  presenti  sedem  apostoli- 
cam  appellamus  appellatos  cum  instantia  postu- 
lantes quos  si  nobis  dare  denegaveritis  iterato 
sedem  eandem  appellamns.  Dantes  qnoque  Bil- 
lungo  judiei  curias  nostrae  et  magistro  'Werlino 
deNordera'  exhibitoribus  presentium  mandatum 
in  solidum  sic  videlicet  quod  occupantis  conditio 
non  sit  melior  in  hac  parte  petendi  a  vobis  prss- 
dicta  et  alla  proponendi  coram  nobis  qua>  citra 
negotium  quod  incumbit  viderint  expedire  et 
vivavocepro  nobis  in  ecclesia  nostra  sedem  pra>- 
dictam  appellandi  et  appellatos  postulandi.  Ra- 
tum  habentes  quidquid  dicti  BilUuigus  et  AVerli- 
nus  aut  alter  eorum  fecerit  in  hao  parte.  In  cujus 
rei  testimonium  sigillum  curiîp  nostra;  poni  feci- 
mus ad  prc-psentes.  Datum  Argentinpe  quarto  kal. 
Junii  anno  domini  126,^. 
1.  Nordrsch. 


Il«  PÉRiE.  —  T.  ir. 


—  66  - 


M»  9. 

1266.  30  Juin.-  Suspension  de  l'excommunication,  par  l'abbé  de  Saint-George  et  ses  codélégués. 


Anuo  domini  1266  iu  crastino  apostolonim 
pétri  et  pauli  in  ecclesia  villîe  Horneberc  supe- 
riori  coram  nobis  abbati  sancti  Georgii  in  nigra 
Silva  Judice  a  sede  apostolica  delegato  et  abbate 
deSchuttera  a  prœposito  Columbarensi  Judice  ab 
eadem  sede  delegato  siibdelegato  ,  nec  non  pre- 
posito  Imbriacensi  (de  Fernem)  subdelegato  pre- 
positi  Episcopalis  celliB  sedis  apostolicre  delegati 
comparontibiis  magistro  Billungo  Reverendi  pa- 
tris  ac  domini  argentinensis  Eijiscopi  procura- 
tore  ex  una  parte  et  Conrado  sacrista  clerico  de 
Mulnhusen  procuratoresculteti  consulum  et  alio- 
rum  civium  quoruudam  predict»  villœ  Mulnhu- 
sen in  autontico  noniinatoriim  ex  altera  in  causa 
absolutionis  ipsorum  et  quibusdam  aliis  quœ  par-. 
tes  predict,"c  invicem  coram  nobis  habere  noscun- 
tur  sic  in  forma  judicii  fuit  a  nobis  recessum 
(juod  nos  in  omnibus  partium  hic  inde  auditis  iu- 
terloquendo  pro3iunciavimus  prœdictos  sculte- 
tum  et  consules  et  cives  recepta  a  procuratore 
ipsorum  qui  ad  hoc  pr«cipue  speciale  mandatum 


habebatjuratoria  in  animas  sculteti  consulum  et 
civium  cautione  de  parendo  juri  coram  nobis  a 
sententia  excommunicationis  a  venerabili  pâtre 
ac  domino  Basiliensi  episcopo  ad  iastantiara  prae- 
fati  domini  Argentinensis  Episcopi  et  ab  aliis 
contra  ipsos  occasione  prefatœ  excommunicatio- 
nis latis  sententiis  absolvere  deberemus  unde 
etiam  juxta  prîedictam  formam  sententias  ipsas 
duximus  relaxandas ,  prfesentibus  partibus  termi- 
num  peremptorium  feriis  messium  expresse  re- 
nunciantibus  et  locum  iu  ecclesia  villas  Friburc 
iu  Brisgaugia  partibus  similiter  enndem  locum 
acceptantibus  duximus  prîefigendum  ad  cognos- 
cendum  utrumprœfatse  sententiœ  excommunica- 
tionis juste  vel  injuste  fueriut  promulgatse  et  ad 
procedendum  etiam  alias  in  ncgotio  sicut  de  jure 
fuerit  procedendum.  Est  autem  terminus  ad  haec 
proxima  tertia  feria  post  festum  beati  Jacobi 
apostoli  assignatns.  Actum  et  datum  loco  et  ter- 
mine subscriptis. 


W«  8, 


1266.  3  des  Ides  de  juin.  —  Le  prévôt  et  les  consuls  de  Mulhouse  nomment  le  clerc  Conrad  leur  fondé 
de  pouvoir  dans  l'affaire  contre  l'évëque  de  Strasbourg- 


Honorabilibus  dominis  divina  permissione  ab- 
bati sancti  Gcorgii  in  Nigra  silvà  Episcopalis 
cellîe  et  Columbariensis  ecclesise  prsepositis  Con- 
stantire  et  Basiliensis  dyocesis  judicibus  a  sede 
apostolica  delegatis  seu  eorum  subdelegatis  .... 
Scultetus  et  consules  villse  de  Mulnhusen  Wezelo 
de  Ilzicha  Henricus  diotus  Zumetor  milites  pe- 
trns  de  Walhen  petrus  filius  ejus  Rudolphus  Si- 
fridus  et  Johannes  de  Reginsheim,  Burchardus 
et  Petrus  de  Trothoven  et  Wernherus  de  Scher- 
mirs  predicta;  villaj  cives  reverentiam  cum  sub- 
jectione  débita  et  devota.  In  causa  quœ  super 
excommunicationis  sententia  quam  venerabilis 
pater  et  dominus  Basiliensis  episcopus  in  nos 
contra  justitiam  prout  credimus  promulgavit, 
inter  ipsum  dominum  Basiliensem  Episcopum 
nec  non  venerabilem  patrem  ac  dominum  Argen- 
tinensem  Episcopum  cujus  ut  asserit  interest 
nostraî  absolutioui  se  opponere,  vitpote  qui 
permanifcsta  offensa  ad  ipsius  instantiam  in  nos 
dictam  sentontiam  asserit  promulgatam  vertitur 
ex  una  et  nos  ex  parte  altera  etiam  iu  causa  prin- 
cipali  Cunradum  clericum  exhibitorcm  presen- 
tium  nostrum  constitutum  procuratorem  et  mi- 
nistrum  (?)  specialem  Dantes  eidem  potestatem 
et  mandatum  agendi  dcfendendi  excipieud:  ro- 
lilicaudi  benoficium   absolutionis  petondi  etju- 


randi  in  animas  nostras  quod  juri  parebimus  ut 
tenemur  item  litem  eontestandi  tam  super  ipsa 
causa  principali  quam  super  incideutibus  seu 
emergentibus  questionibus  intercedere  (?)  et  po- 
tissimum  in  exceptione  manifestfe  offensœ  quam 
pars  adversa  opposuit  et  se  obtulit  probaturam 
et  replicatione  ad  ipsam  si  visum  fuerit  facienda. 
Jurandi  quoque  super  hiis  in  animas  manus  nos- 
tras de  calumpnia  seu  de  veritate  dicenda  et  quod- 
cumque  aliud  sacramentum  prœstandi  si  fuerit 
oportunum.  Item  propositiones  faciendi  et  ad  eas 
respondendi,  instrumenta  testes  producendi  et 
objiciendi  contra  testes  et  instrumenta  si  quse 
aperte  adversa  producantur  et  expensis  pctendi 
quiB  sibi  et  nobis  adjudicat»  sunt  vel  adhuc  ad- 
judicari  possunt.  Ita  omnia  et  singula  qufeque 
faciendi  quse  verns  et  legitimus  procuratorfacere 
potest  et  débet.  Promittentes  sub  ypotheca  rerum 
nostrarum  pro  eodem  Cunrado  procuratore  nos- 
tro  judicatum  solvi  ,  et  ratum  et  gratum  habere 
quicquid  idem  Cunradus  circa  prfcmissa  vel  alia 
quœ  caussB  expedirc  judicet  decreverit  facien- 
dum,  et  hoc  nobis  et  omnibus  aliis  quorum  inter- 
est presentibus  nuutiamus.  In  hujus  roi  cviden- 
tiam  sigillé  universitatis  nostrœ  in  Mulnhusen 
utimur  in  hac  parte.  Datum  Mulnhusen  anno  do- 
mini 1266.  .3.  Idus  Junii.  Indictione  nona. 


67  — 


1268.  6  Janvier.  —  Conrad  nommé  fondé  de  pouvoir  par  le  magistrat  de  la  ville  de  Hulhouse. 


Venerabili  in  Christo  patri  ac  domino  dei  gra- 
tia  Constanciensi  Episcopo  et  discretisvirisTtie- 
saurario  Walthero  de  sancto  Gallo  Canonico 
sancti  Stephani  ecclesiarum  Constanciensiura 
judicibus  in  causa  appellationis  a  sede  apostolica 
delegatis  scultetus  et  consules  et  universitas  de 
Mulnhnsen  reverentiam  tam  debitam  quam  de- 
votam.  In  causa  appellationis  quK  vertitiir  inter 
nos  ex  una  et  venerabilem  in  Christo  patrem  et 
dominum  Argentinensem  Episcopum  ex  parte 
altera. 

Magistrum  Cunradum  exliibitorem  prsesentium 
nostrum  constitutum  proeuratorem  dantes  sibi 
plenariam  potestatem   agendi   defendendi   exci- 


piendi  reconveniendi  replicandi  et  si  necesso 
fuerit  appellandi  et  omnia  faciendi  quas  verus  et 
legitimus  potest  et  débet  facere  procurator,  et 
sacramentum  cujuslibet  generis  in  nostras  ani- 
mas prîestandi.  Promittentes  sub  ypotheca  rerum 
nostrarum  ratum  et  gratum  habere  quicquid  per 
dictum  proeuratorem  quoad  hanc  diem  videlicet 
crastinum  Hilarii  legitime  fuerit  ordinatum.  Pro- 
mittimus  etiam  judicatum  solvi  sub  singulis  clau- 
sulis  et  ut  dictus  procurator  a  satisdatione  rele- 
vetur  duximus  prajsentem  cedulam  sigillo  nostro 
slgillandam  (sic)  roborandam.  Datum  in  Muln- 
hnsen anno  domini  1268.  In  Epiphania  domini. 


1«"  lO. 

1268.  4  juin  —  L'évëque  de  Constance  et  ses  codélégnés  donnent  commission  au  cnré  de  Waldkircb 
d'examiner  les  témoins  produits  par  les  citoyens  de  Mnlhouse. 


Conradus  dei  gratia  Episcopus  Coustantiensis 
Bertoldus  Thesaurarius  majoris  et  magisterWal- 
therusde  Sancto  Gallo  canonicus  sancti  Stephani 
Coustantiensis  judices  in  causa  appellationis  qua; 
vertitur  inter  venerabilem  in  Chresto  dominum 
Episcopum  Argentinensem  ex  una  et  scultetum 
consules  et  uuiversitatem  hominum  de  Muluhu- 
sen  ex  parte  altera ,  a  sede  apostolica  delegati, 
dilecto  in  Christo  plebano  sancti  Martyni  in 
Wallkilche.  Salutem  in  domino. 

Examinationem  testium  quos  viri  discreti  scul- 
tetus consules  et  universitas  hominum  de  Muln- 
husen  producere  proponunt  in  causa  appellatio- 
nis esse  factœ  (sic)  contra  venerabilem  in  Christo 
dominum  episcopum  Argentinensem,  discretioni 


tuœ  duximus  committeudam.  Mandantes  tibi  auc- 
toritate  nobis  commissa  quatinus  personas  sub- 
scriptas  videlicet  magistrum  Cunradum  de  Hu- 
gelnhaim  plebauum  de  Brizzikoven  Eectorem 
ecclesiœ  de  Balderet  magistrum  Cunradum  de 
Burgerawe,  magistrum  Walterum  de  Vilingen,et 
dictum  Lozen  clericum  in  dicta  causa  appellatio- 
nis esse  factae  in  Friburgo  examines  diligenter 
dictaque  ipsorum  sigillo  tuo  interclusa  cum  par- 
tibus  in  crastino  Johannis  Baptiste  remittere  non 
omittas.  Datum  Gotteleben  anno  domini  1268.  II. 
Nouas  Junii. 

Avec  sigillés  du  trésorier  et  du  magister  W.  de 
Saint-Gall.  Le  sigillé  de  l'évëque  manque. 

Sigillum  Bertoldi. 


N°  II. 

1270.  16  janvier.  —  Citation,  délivrée  par  l'évëque  de  Constance,  contre  l'évëque  de  Strasbourg 
sur  l'instance  des  citoyens  et  magistrats  de  Mulhouse. 


Conradus  dei  gratia  Episcopus  Constantiensis 
Bertoldus  Thesaurarius  Ecclesi»  Constantiensis 
et  Waltherus  de  Sancto  Gallo  canonicus  Sancti 
Stephani  Judices  appellationis  a  sede  aijostolica 
delegati  discrète  viro  decano  inter  colles  salutem 
in  domino.  Mandatum  domini  papae  recepiraus 
in  hoc  verbo.  Clemens  (IV)  episcopus  servus  ser- 
vorum  dei.  Venerabili  fratri  Episcopo  et  dilectis 
flliis  Thesaurario  majoris  et  Walthero  de  Sancto 
Gallo  canonico  Sancti  Stephani  ecclesise  Con- 
stantiensis salutem  etapostolieambenedictionem 
Sua  (?)  nobis  scultetus  consules  et  universitas 
hominum  opidi  de  Mulnhnsen  Basiliensis  dyoce- 
sis  petitionc  monstrarunt  quod  licet  ipsi  de  do- 
minio  imperii  Romani  existant  venerabili  tamen 
fratris  nostro  Argentinensi  episcopo  asserente 
quod  iidem  una  cum  prcdicto  opido  ad  Argenti- 


nensem ecclesiam  pertinerent,  venerabilis  frater 
noster  Basiliensis  Episcopus  non  ex  delegatione 
apostolica  mandavit  eisdem  ut  dicto  Argenti- 
nensi Episcopo  se  submitterent  ac  eidem  fideli- 
tatis  jurameutum  prsestarent  et  quia  id  sicut  necne 
etiam  tonebantur  facere  noluerunt  in  eosdem 
scultetum  et  consules  ac  homines  universitatis 
prîedictre  alias  omnino  sufiicienter  monitis  nec 
citatis  nec  se  per  contumaciam  absentantibus  ex- 
communicationis  et  in  ipsum  opidum  interdicti 
sententias  promulgavit.  Porro  dicfi  scultetus  con- 
sules ac  Wezzelo  de  Ilzecha  dictus  Zom  Tore, 
Petrus  de  Walen,  Petrus  filius  ejus  Rudolfus  , 
Syfridus  et  Johannes  de  RegcnsheimBurschardus 
et  Petrus  de  Trothoven  et  Wernerus  de  Scher- 
mcnz  laici  asserentes  dominum  Basyliensem  Epis- 
copum in  eos  communiter,  nulla  compctenti  mo- 


-  68 


nitlone  prjemlssa  sine  causa  rationabili  excom- 
municationis  sententiam  auctoritate  propria  (?) 
promulgasse  contra  statuta  concilii  generalis  ad 
eundem  Basiliensem  Epipcopnm  monitorias  et 
ad  abbatem  monasterii  Sancti  Georgii  in  nigra 
Silva  et  ad  Episcopalis  ccllre  et  Columbariensis 
ecclesiarivm  prïcpositos  Constantiensis  et  Basi- 
liensis  dyocesis  in  consueta  forma  super  relatio- 
nem  sententiarum  dictarum  executorias  litteras 
apostolicas  impetraverunt.  Et  licet  prœdictos  ab- 
bates  et  Irabriacenscm  oui  dictus  Episcopalis 
cellœ  ac  Cellerarius  Sancti  Pétri  cui  dictus  Co- 
lumbariensis ecclesiarum  prepositi  Constantien- 
sis et  Basiliensis  dyocesis  commiserant  totalitär 
vices  suas  primo  dictos  scultetum  consules  ac 
horoinesaprîedicta  excommunicationis  sententia 
duxerint  absolvendos  justitia  exigente. 

Quia  tarnen  idem  abbas  et  cellerarius  postmo- 
dum  in  ipsa  causa  perperam  procedentes  in  eos- 
dem  scultetum  consules  et  homines  dictas  sen- 
tentias  per  pra;fatum  Basiliensem  Episcopura  rit« 
latas  per  unquam  diffinitivam  sententiam  protu- 
lerunt  ex  parte  sculteti  consulum  et  universitatis 
predictorum  ad  nostrum  (sculteti)audientiam  ap- 
pelatum  (?).  Quo  circa  discretioni  vestrœ  per 
apostolica  scripta  mandamus  quatinus  vocatis 
quot  sunt  evocandi  et  auditis  hinc  iude  proposi- 


tis  quod  justum  fuerlt  apellatione  postposita  sta- 
tuatis,  facientes  quod  decreveritis  per  censuram 
ecclesiasticam  firmiter  observari.  Testes  autem 
qui  fuerint  nominati  si  se  gratia  odio  vel  amore 
subtraxerunt  per  censuram  eandem  appelatione 
cessante  rogatis  voritate  testimonium  perhibere. 
Quod  si  non  omnes  hiis  exequendis  potueritis 
interesse  tu  frater  Episcope  ceperis  cum  altere 
ipsorum  ea  nihilominus  exequaris. 

Datum  Viterbii  Non.  April,  pontificatus  nostri 
anno  tertio.  Hujus  igitur  auctoritate  mandatî 
discretione  tuae  sub  pena  ofBcii  prsecipiendo 
mandamus  quatinus  uter  eorum  nobis  Constan- 
tisB  ad  sextam  feriam  post  dominicam  quœ  can- 
tatur  laetare  Jerusalem  venerabilem  in  Christo 
patrem  et  dominum  Argentinensem  Episcopum 
ad  instantiam  sculteti  consulum  ac  universitatis 
de  Mulnhusen  ad  procedendum  in  causa  appel- 
lationis  qu»  vertitur  inter  ipsos  quantum  de  jure 
fuerit  procedendum. 

Datum  Episcopalis  cellse  XVII  kal.  febr.  indic- 
tione  XI.  Reddi  litteras  sigillatas  mandate  exé- 
cute. 

Avec  sigillés  de  l'évêque  de  Constance,  du 
trésorier  de  l'église  de  Constance  et  de  Walther 
de  Saint-Gall. 


TK"  1». 

Mai  1271.  —  Henri,  évêque  de  Bâle,  après  avoir  pris  auprès  de  la  cité  de  Mulhouse  tons  les  moyens 
de  douceur,  autorise  l'évêque  de  Strasbourg  à  recourir  au  bras  séculier. 


Révérende  in  Christo  patri  consanguinee  ka- 
rissime  venerabili  Episcope  Argentinensi.  Hen- 
ricus  dei  gratia  Episcopus  Basiliensis  obsequio- 
sam  voluntatem  ad  beneplacita  cum  salute.  Cum 
sicut  publicum  est  et  notorium  civitas  de  Muln- 
husen et  populus  ejus  ad  jus  et  proprietatem 
ecclesifB  argentinensis  libère  pertinet  quod  que  (?) 
possessionem  eorum  pacificam  et  quietam  ipsa 
Argentinensis  ecclesiaseu  tenuitpaciflce  et  quiè- 
te ,  quia  tamen  ipse  populus  propter  eorum  forsan 
duritiam  qui  a  predecessore  vestro  eorum  regî- 
mini  priefecti  fuerunt  ab  ipsius  predecesseris 
vestri  subjectiene  et  obedientia  se  subtraxit  nos 
laudem  ad  regimen  memoratas  ecclesi»  vobis  vo- 
cato  id  magnam  vostram  instantiam  consules  et 
cives  universos  civitatis  ejusdem  per  litteras 
nestras  diligentermonuimus  et  attente  ut  ipsi  re- 
cognoscentes  se  ad  jus  et  proprietatem  argenti- 
nensis EcclesifB  pertfnere  vobis  in  omnibus  obe- 
dirent  et  intenderent  sicut  consuetudinis  esset 
atquejuris,  verum  quodiidçm  menitionibus  nos- 
tris  semet  iterum  immo  multotiens  eis  factis  mi- 
nime parère  curarunt  nec  aliquid  rationabile 
prepesuerunt  quare  parère  dictis  menitionibus 
non  deberent.  Nos  in  majores  civitatis  prœfatse 
excommunicationis  nominatim  et  interdicti  in 
lecum  ipsum  sententias  justicia  tulimus  exigente. 
Sane  licet  asententiishujusmodi,  ad  sedem  apos- 


tolicam  fueritappellatum  Judicesque  a  dicta sede 
deputati  appellatione  hujusmodi  injusta  pronun- 
ciata  dictas  sententias  confirmarunt  ac  denuo  ab 
eisdem  judicibus  ad  eandem  sedem  fuerit  provo- 
catum  a  censulibus  et  civibus  memoratis  quia 
tamen judicesipsiussedisapostolicse  super  hujus- 
modi appellatione  secundo  obtenti  eadem  appella- 
tione injusta  pronunciata  praslibatas  excommu- 
nicationis et  interdicti  sententias  clerum  confir- 
marunt, dictique  cives  adhuc  in  sua  contumacia 
pertinaciter  persistentes  ad  jus  et  subjectionem 
et  obedientiam  debitam  memorate  Argentinensis 
ecclesiœ  redire  non  curarunt  non  selum  moni- 
tienes  nestras  eis  karitative  factas  immo  etiam 
censuram  ecclesiasticam  penitus  contempnentes 
cum  in  dictis  excommunicationis  et  interdicti 
sententiis  per  triennium  et  amplius  animo  indu- 
rate  perstiterunt  et  persistant  adhuc  iu  non  mo- 
dicum  suœ  salutis  dispendium  et  periculum  ani- 
marum,  (et)  ultra  non  habeat  ecclesia  quid  faciat 
ut  invocato  auxilie  brachii  secularis  memoratos 
consules  et  cives  ad  vestrum  et  dictœ  ecclesiœ 
argentinensis  subjectionem  et  obedientiam  debi- 
tam cheercere  [sic)  possitis  liberam  vobis  aucto- 
ritate prsesentium  in  dei  nomine  concedimus  fa- 
cultatem.  Datum  mense  majo  anne  demini  1271. 
Avec  sigillé  de  Henri,  évêque  de  Bâle. 


HERBITZHEIM. 

(avec   L'NE   CAKTE  LITHOGnAPIllÉE.) 


I. 

A  l'extrémité  la  plus  septentrionale  du  département  du  Bas -Rhin,  le 
canton  de  Saar-Union  pénètre  par  une  pointe  aiguë  jusqu'au  cœur  du  dépar- 
tement de  la  Moselle,  et  son  territoire  s'avance  jusqu'à  5  kilomètres  de  la 
ville  de  Sarreguemines.  ) 

Au  milieu  de  cette  pointe,  le  beau  village  de  Herbitzheim  s'élève  sur  les 
deux  rives  delà  Sarre  à  l'endroit  où  cette  rivière  abandonne  les  magnifiques 
prairies  qu'elle  arrosait  depuis  Ilarskirclien,  pour  s'enfoncer  dans  le  massif 
de  collines,  qui  caiactérise  l'arrondissement  de  Sarreguemines. 

La  commune  de  Herbitzheim  se  compose  de  deux  villages  reliés  entre 
eux  par  les  seize  arches  d'un  antique  pont  de  pierre.  Sur  la  live  droite  le 
véritable  llerbilzheim  ou  Kloster-Ilerbilzheim  s'étage  aux  flancs  d'un  coteau 
assez  abrupt;  sur  la  rive  gauche,  dans  une  plaine  ondulée,  s'étend  Mich- 
lingen,  que  les  chartes  du  seizième  siècle  appellent  aussi  Saint-Michel*  et 
qui  semble  aujourd'hui  perdre  ce  double  nom. 

II. 

Herbitzheim  paraît  avoir  été  bâti  sur  l'emplacement  d'une  station  romai«fe. 
On  y  a  trouvé  jadis  un  monument  en  grès  vosgien,  consacré  à  Mercure,  et 
portant  celte  inscription  : 

IN.  H.  D.  D. 
MERGVRIO. 
SEXIVLIVS. 

Au  rapport  de  Schœpflin,  ce  monument  n'avait  rien  de  remarquable,  et 
il  ne  me  semble  pas  suffisant  pour  que  l'on  puisse  en  conclure  avec  Dom 
Calmet ,  que  Herbitzheim  a  dû  être  considérable  autrefois.^ 

Le  séjour  des  Romains  sur  ce  point  est,  du  reste,  facile  à  comprendre  et 
à  expliquer. 

1.  Du  patron  de  son  église  aujourd'hui  détruite 

2.  Schœpflin,  Als.  illiist.,  1,  460.  —  Sotice  de  Lorraine,  \°  Herbitzheim. 


-^  70  — 

Il esl au joLiid'lmi  établi  qu'une  voie  romaine  venant  de  Saverne  descendait 
la  vallée  de  l'Eichel.  Elle  a  été  retrouvée  intacte  à  Diemeringen  et  reconnue 
jusqu'à  Œrmingen.  De  plus,  il  paraît  certain  qu'elle  devait  se  prolonger  par 
la  vallée  de  la  Sarre  et  se  diriger  sur  Trêves  ^  Or,  l'étude  du  pays  démontre 
que  vers  Œrmingen  la  voie  devait  abandonner  les  vallons  resserrés  et  sinueux 
des  deux  cours  d'eau,  et  très-probablement  elle  s'infléchissait  à  l'ouest, 
coupait  en  biais  la  Porèt  de  Lothringen  et  venait  franchir  la  Sarre  à  Her- 
bitzheim  pour  se  diriger  en  ligne  directe  sur  Sarreguemines,  ainsi  que  le 
fait  encore  la  route  actuelle. 

D'un  autre  côté,  l'on  sait  qu'une  autre  voie  romaine  venant  de  Metz  existe 
encore"  depuis  Bistroff  et  l'Étang  du  Bischwald  (canton  de  Grostenquin); 
—  qu'elle  a  été  reconnue  jusqu'à  Steinbach  ,  hameau  de  la  commune  de 
Guéblange  (canton  de  Sarralbe),  et  retrouvée  dans  le  canton  de  Rohrbach 
entre  Schmittvsiller  et  Hahlingl  II  est  généralement  admis  que  des  hauteurs 
qui  dominent  Guéblange,  cette  voie  se  dirigeait  parKeskastel  sur  Œrmingen 
pour  gagner  le  pays  de  Bitche.  Bien  des  motifs,  trop  longs  à  déduire  ici,  me 
font  rejeter  celte  opinion.  Je  suis  persuadé  que  la  direction  de  la  voie 
était  différente*.  A  mon  avis,  de  Steinbach  elle  gagnait  par  les  hauteurs 
l'Albenerberg  ou  l'Ermitage,  au-dessus  de  Sarralbe^  franchissaitl'Albeetla 
Sarre  sur  ce  point  et  rejoignait  à  Herbitzheim  la  voie  d'Œrmingen  à  Sarre- 
guemines. 

Ilerbilzheim  aurait  donc  été  situé  à  l'intersection  de  deux  voies  im- 
portantes. 

III. 

Les  traditions  populaires  assignent  à  Herbitzheim  une  grande  antiquité. 

Le  presbytère  actuel,  brûlé  et  reconstruit  en  153G,  occuperait,  dit-on, 
l'emplacement  d'un  château,  maison  de  chasse  de  Clovis.  " 

Sans  partager  le  moins  du  monde  les  illusions  des  partisans  d'une  aussi 
illustre  origine,  l'on  ne  peut  se  refuser  à  admettre  que  Herbitzheim  remonte 
à  l'époque  carlovingienne^  et  qu'il  était  déjà  célèbre  au  neuvième  siècle. 

1.  Bulletin  de  la  Société  pour  la  conservation  des  monuments  Iiistoriques  de  l'Alsace, 
IV,  62,  66. 

2.  Carte  du  dépôt  de  la  guerre,  f.  53. 

3.  J.  Tliilloy;  Dict.  topogr.  de  l'arrondissement  de  Sarreguonines ,  v»  Voie  romaine. 

4.  Voy.  la  carte  à  la  fin. 

5.  Bull,  archéol.  de  la  Moselle,  II,  140.  —  Revue  d'Austrasie,  VII,  417. 

6.  Bacquol,  Dict.  de  l'Alsace,  1  59,  v»  Herbitzheim. 

7.  Une  tradition  que  m'a  transmise  M.  le  curé  de  Herbitzheim ,  en  attribue  l'origine  à 
saint  Pirmin,  le  fondateur  de  l'abbaye  de  Hornbach,  près  l'irniasenz  (Pirminislmsa)  vers 
le  milieu  du  huitième  siècle. 


—  71  — 

L'empire  de  Chaiieniagne  venait  de  s'écrouler.  Une  première  fois,  en 
845,  les  fils  de  Louis  le  Débonnaire  avaient  divisé  la  grande  monarchie  et 
y  avaient  créé  le  Lother-reich,  l'empire  de  Lother,  royaume  qui  ne  pouvait 
vivre,  mais  dont  le  nom  devait  être  illustre  pendant  neuf  siècles. 

Dix  ans  plus  tard  (855),  un  nouveau  partage  avait  amoindri  la  Lorraine 
naissante,  et  l'avait  confinée  entre  la  Meuse  et  le  Rhin.  En  870,  enfin,  à  la 
mort  de  Lother  II,  ses  deux  oncles,  Charles  le  Chauve  et  Louis  le  Germanique 
s'emparèrent  du  petit  royaume  et  en  opérèrent  le  partage. 

Le  procès-verbal  de  ce  partage,  connu  sous  le  nom  de  «  Traité  de  paix 
et  de  partage  de  l'an  870,  »  est  parvenu  jusqu'à  nous.  Dansla  longue  nomen- 
clature des  locahtés  attribuées  au  roi  de  Germanie,  parmi  les  monastères 
les  plus  célèbres  des  pays  eis -rhénans,  l'on  voit  figurer  le  nom  de  Heri- 
bodesheim^ 

Rien  n'indique  si,  dès  lors,  Herbitzheim  était  un  monastère  d'hommes  ou 
un  couvent  de  religieuses  ;  mais  il  devait  avoir  de  l'importance,  puisqu'il  est 
cité  nominativement  dans  ce  document,  tandis  qu'il  n'y  est  question,  ni  de 
Saint-Arnould,  ni  de  Sainte-Glossinde  de  Metz,  ni  de  Saint-Avold ,  ni  de 
Longeville,  monastères  qui  tous  existaient  incontestablement  au  neuvième 
siècle.  ^ 

IV. 

Vingt-cinq  ans  plus  tard,  pendant  les  grandes  crises  qui  enfantèrent  la 
féodalité,  nos  provinces  appartenaient  à  trois  frères:  les  comtes  Stephan, 
Gerhard  et  Matfried.  ^ 

Stephan  était  comte  de  deux  pagi  importants  : 

1.  D.  Calmet,  Hist.  de  Lorr.,  pr.  sous  l'an  870,  etc.,  I,  739. 

Ethœc  est  portio  qnamsibi  Hludoviais  recepit  :  ....  Niu-monasterium  (Neiimuuster)  ; 
....  S'  Maximini  (à  Trêves); 

Epternacum  (Echternacli)  ; 

Horream  (Sainte-Marie  d'Horreen  à  Trêves); 

....  Maiiri  monasterium  (Marmoiitiers)  ; 

S'  Stephani  Strasburch  ; 

....  Eeribodesheim  ....  etc. 

Pas  un  seul  commentateur  n'a  émis  un  doute  sur  l'identité  de  Heribodesheim  et  de  Her- 
bitzheim. 

2.  D.  Calmet,  I,  739,  suppose  que  les  abbayes  omises  avaient  été  données  en  lief  anté- 
rieurement à  870  et  que  celles  dont  les  noms  figurent  au  traité  appartenaient  immédiatement 
à  Lother  II. 

C'est  possible,  mais  rieu  ne  l'établit. 

3.  Croll,  Origines  Dipontinœ,  1,  65  seq. 
—  Westricher  Alih(indhingen,\,  13. 


—  72  — 

Le  Pialgüwe  (Biedgau,  PaytisBedensis^)  elhCühnenzgov/  {Pagus  Calvi- 
montensis^). 

11  possédait  en  oulre  l'abbaye  de  Saint-Epore  de  Toul. 

Gerbard  était  comle  de  Metz;  de  plus  il  avait  en  communauté  avec  son 
frère  Malfiied  de  vastes  domaines  dans  le  Biiesgau,  et  ils  détenaient  en- 
semble les  abbayes  de  Saint-Pierre  de  iMetz,  de  Saint-Maximin  et  de  Sainte- 
Marie  d'Horrcen  de  Trêves. 

Gerbard  cnbn  possédait  l'abbaye  de  Heribodesheim. 

Ces  trois  comtes  étaient  en  Lorraine  les  cbefs  et  l'àme  du  grand  parti 
féodal  et  aristocratique,  qui  cbercbait  par  tous  les  moyens  à  renverser  la 
puissance  royale.  En  lutte  ouverte  avec  le  roi  Zuentebold,  privés  par  lui  de 
leurs  domaines  et  exilés,  ils  tirent  alliance  avec  Odaker,  le  puissant  comte 
du  Bliesgau  ,  appelèrent  aux  armes  tous  les  mécontents  et  se  mirent  à  la 
tête  de  la  révolte  qui,  en  899,  enleva  à  Zuentebold  le  trône  et  la  vie. 

Après  la  mort  du  roi  de  Lorraine,  le  comte  Gerbard  épousa  sa  veuve 
Oda^  se  remit  en  possession  du  comté  de  Metz  et  de  tous  ses  immenses 
domaines  parmi  lesquels  Herbitzbeim,  qu'il  ne  paraît  pas,  du  reste,  avoir 
conservé  longtemps,  car  son  indépendance  trop  absolue  le  fit  de  nouveau 
tomber  en  disgrâce. 

Le  28  janvier  908,  le  roi  Louis  l'Enfant,  tils  d'Arnulf ,  roi  de  Germanie, 
lui  enleva  l'abbaye  de  Ilerbitzheim  pour  la  donner  à  l'évêque  Stephan  de 
Liège,  parent  du  comte.  Cette  donation*  est  ainsi  conçue: 

«  Parlier  qiioque  abballam  Heribotesheim  nomine  didam  quœ  a  Ger- 
liardo  quondcnn  comité  proprio  jure  habita  postea  pro  culpa  inßdelitatis 
contra  nostra)ii  sereniiatem  cxhibita,  noslro  cessit  donatui  versa,  quam 
prœlibato  Stephano  ipsiits  proprio  affmi  quando  quidem  mansit  semper 
fidelis  dure  volentes,  tarnen  suce  j am  dictœ  ecclesiœ  ipsius  precato  dedimus 
etc.  .  .  .  Date  V  kal.  febr.  A°  DCCCCVIII  indictione  IX.  Actum  Acquis 
granii  palalio.  » 

A  la  mort  de  Louis  l'Enfant,  le  comte  Gerbard  rentra  de  nouveau  en 
possession  de  tous  ses  biens  et  du  comté  de  Metz.  Il  les  transmit  en  mourant 
à  son  frère  Matfried,  mais  aucun  document  ne  vient  nous  apprendre  quel 
fut  le  sort  de  l'abbaye  d'Hcrbitzheim. 

1.  Le  iiiiJbourg',  vers  Megen,  dans  le  pays  de  Trêves. 

2.  Le  Chaiimontois,  depuis  la  Meurihe  et  la  Moselle,  de  Bayou  aux  Vosges. 

3.  Oda,  lille  du  duc  Olto  de  Saxe. 

4.  MIraîus,  Cod.  don.  piar.  2'o. 

Liinig,  Reichsar chi o ,  Spic.  11,  cap.  IV,  485. 

Eckhard,  Dr  robiix  frrnir.  oj-ient.  L.  XXXII.  c.  .^0.  od  ami.  '.'08. 


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Saarbrücken 


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Seclîen  ran  s  ia  ch 
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\Jiir7viL 


M   E    r    R    T    H    E 


.VoiM  Romaines  retonnues . 
ici.  Siippos^ee^ . 

Rentes  . 

leg  lieux  seiiUffru-s  Apjxxptenaient 
à  L'Mwi/e  Ä-  Herhitzhutn  . 


''ÂUwilhr ^^-^\^/a)\erJm 

KoTslcirchen      fo 

YienASa  arnierden 


"^^^  Frstorf  o   \       B^^ 


'•-.._  J?ü-d£7iJorf  ^   ^~^-^  B^tiwiïïf.r- 

~'      o/      -^  oWolfskir-cluih     \o  \       ^ 


CARTE  DUM  PARTIE 

de  la. 

VALLEE  DE  LA  SARRE 


dressée  paT-  J.  ThiDoy  . 


lu:h  ,,de.r-'-Vj'rjer-lAm-^,dl  ilHS-iStraliM^)^ 


Ta 


«  L'an  965,  dit  le  continuateur  de  Reginon',  l'empereur  (Olto  le  Grand), 
après  avoir  célébré  à  Pavie  la  fête  de  la  nativité  du  Christ,  revint  dans  son 
pays.  Ses  fils  Olto  et  Wilhelm,  l'archevêque,  accoururent  au-devant  de  lui 
jusqu'aux  confins  de  la  France  et  de  FAllemagne,  dans  la  villa  Heimbodes- 
heiin  et  f  accueillirent  avec  de  grandes  manifestations  de  joie.  De  là,  fem- 
pereur  se  rendit  à  Worms. ...» 

Ne  peut-on  pas  supposer  qu'il  s'agit  ici  de  Herbitzheim?  ne  serait-ce  pas 
aux  constructions  de  cette  villa  qu'on  doit  rapporter  les  ruines  d'un  grand 
caractère  que  l'on  voyait  naguère  sur  le  coteau  de  Herbitzheim,  ou  ces 
autres  ruines  que  l'on  retrouve  dans  le  bois  voisin  sous  le  nom  de  Scliloss 
et  qui  accusent  une  origine  féodale? 

C'est  là  une  question  que  je  me  contente  de  poser. 

VI. 

Au  moyen  âge  Herbitzheim  est  une  abbaye  de  femmes  de  l'ordre  de 
Saint-Benoît;  mais  il  ne  nous  reste  rien  de  son  histoire. 

Meurice  n'en  parle  pas. 

Dom  Calmet  lui  consacre  à  peine  quelques  lignes. 

Les  Bénédictins  se  bornent,  pour  ainsi  dire,  à  répéter  ce  qu'en  dit  fabbé 
de  Senones. 

A  fépoque  où  écrivaient  ces  historiens,  l'abbaye  était  détruite  depuis 
longtemps;  ses  archives  avaient  disparu;  le  pays  était  devenu  protestant. 

Ils  ne  cherchèrent  pas  à  reconstituer  à  grand'peine  une  histoire  qui  n'of- 
frait plus  un  intérêt  immédiat.  Ils  se  bornèrent  à  dire:  «  Abbaye  fondée  ap- 
paremment par  les  évoques  de  Metz,  mais  on  ignore  le  nom  du  fonda- 
teur.* » 

Sans  essayer  de  combler  cette  lacune,  entreprise  pour  laquelle  tout 
m'aurait  manqué,  je  me  bornerai  à  transcrire,  par  ordre  chronologique, 
les  rares  indications  que  le  hasard  m'a  fait  trouver,  concernant  le  monas- 
tère de  Herbitzheim,  ses  abbesses  et  ses  voués. 

VII. 

Quelques  documents  du  douzième  siècle  font  mention  de  propriétés 
possédées  par  ce  monastère  et  vendues  par  les  abbesses  à  l'abbaye  de 
Wadgasse,  fondée  par  les  comtes  de  Saarbruck. 

1.  Recjinonia  continuotor  ad  ann.  965^  II,  111. 

2.  Notice  de  Lorraine,  v»  Herbitzheim.  D.  c.  II,  739. 
Bened.  Hist.  de  Metz,  II.  157. 


—  74  — 

La  conßrnialioii  des  l)iens  de  l'abbaye  de  Wadynsse,  l'ailt!  à  l'abbé  Wol- 
fram par  le  pape  Eugène  III,  le  VI  des  Kalendes  de  juin  (27  mai)  1152, 
donne  la  nomenclature  des  biens  possédés  par  celte  abbaye.  On  y  lit  la 
mention  suivante  :  «  ....In  Hesemingen  mansum  unum  et  Leimam  quas  ha- 
betis  ah  ecclesia  de  Herhodesheim,  sub  censu  septem  solidorum  eidem  ec- 
clesice  a  vobis  vestrisque  successoribus  annis  singulis  persoluendo '  » 

La  confirmation  des  biens  de  la  même  abbaye,  faite  à  l'abbé  Gotfried  par 
le  pape  Alexandre  III,  le  3  des  ides  d'avril  (11  avril)  1179,  donne  une  in- 
dication nouvelle:  a In  Caldebach  quœ  habetis  ab  ecclesia  Ilerbodes- 

lie'im  sub  censu  triginla  agnorum  et  tredecim  solidorum  Metensis  nio- 
netœ ^» 

A  la  fin  du  douzième  siècle^  mais  sans  que  la  date  de  cet  acte  soit  in- 
diquée, SopJiie,  abbesse  de  Sainte-Marie  in  Herbodenseim,  concède  à 
perpétuité  à  Gotfried,  abbé  de  Wadgasse*:  a.  Allodium  de  Leminem  et 
Chaldebach  et  Mimicliuuilre  qiùod  prius  rationabiliter  ut  noster  conventus 
aiebat,  multo  tempore  tenebat,  consilio  et  assensu  totius  nostri  capitull  in 
omni  jure  quo  predicta  allodia  Herbodinensis  ecclesia  possidebat,  ea  con- 
ditione  concessimus-quatenus  quotannis  in  medlo  Majo  xxxij  ag^ios  et  in 
assumptione  beatœ  Marie  xiii  solidos  metensis  monete  in  décimas  omnis 
annone  quas  in  predictis  locis  fratres  de  Wadegocenses  adquirerent  pre- 

dicie  ecclesie  nostre  sine  retractatione  darent »  Et  ont  signé  audit  acte  : 

<.<.  Beatrix,  decana,  Lucardis,  sacrista,  Cunigundis ,  Juliana,   Matildis , 
Adeleidis,  etc.  » 

La  date  de  ce  document  n'est  pas  précise,  mais  elle  paraît  postérieure  à 
1179,  car  la  vente  faite  par  l'abbesse  Sophie  comprend  des  biens  à  Munich- 
weiler  qui  ne  sont  point  portés  dans  la  confirmation  faite  par  le  pape 
Alexandre  III. 

VIII. 

En  1251  %  le  monastère  de  Herbozheim  accorde  au  chevalier  Henri  de 
Scharffeneck  un  fief  sur  la  Queich,  à  charge  par  lui  de  payer  chaque  année 
audit  monastère  cent  livres  d'huile. 

Au  mois  d'avril  1271%  Hugo,  comte  de  Lutzelstein,  abandonne  à  l'ab- 
besse et  au  couvent  deHerborsIieim,  «  quidquid  habemus tam  in  grossa 

1.  Hontheim,  Hisi.  treinr.  diplom.  I,  565. 

2.  Kremer,  Geschichte  des  alten  ardennischen  Geschlechts,  11,  299,  301. 

3.  Kremer,  Ardewnsche  Geschichte,  II,  306. 

4.  L'abbé  Gotfried  avait  succédé  à  l'abbé  Wolfram.  Son  nom  est  encore  cité  en  1 197, 

5.  Schœpflin,  Als.  ilL,  II,  256.  Note  t. 

6.  Ms.  diplom.  DCLXVi.  Ch.  abb.  Ilerbitz. 


-  75  — 

décima  quam  lulnuta  parochialis  ecclesiœ  de  Achkcna   metensis  dioce- 

sis ,»   sa  part  des  dixmes  de  la  paroisse  d'Achen ,  canton  de  Rolir- 

baclî. 

Il  semble,  malgré  la  généralité  des  termes,  que  cette  donation  n'ait  pas 
été  absolue.  En  effet,  en  1272,  à  l'octave  de  la  Purification^  le  même 
comte  Hugo  donna  à  l'abbé  Nicolas  et  au  monastère  de  Sturtzelbronn  les 
dixmes  d'Achen,  grosses  et  petites,  et  le  patronage  de  l'église;  et  en  i303^ 
inie  part  de  ces  mêmes  dixmes  appartenait  au  comte  Eberhardt  de  Deux- 
Ponts-Bitche.  Le  monastère  de  Sturtzelbronn  conserva  les  dixmes  d'Achen 
jusqu'en  1621 ,  époque  à  laquelle  le  rachat  en  fut  opéré  par  le  duc  Henri 
de  Lorraine. 

Je  suppose  donc  que  cette  donation  faite  à  l'abbaye  de  Ilerbitzheim  n'eut 
d'effet  que  durant  peu  d'années,  et  que  les  dixmes  d'Achen  furent  rache- 
tées ou  par  le  comte  de  Lutzelstein  ou  par  l'abbé  de  Sturtzelbronn. 

«  A  cette  époque  (1292),  dit  Dom  Calmet%  le  nom  de  l'abbesse  de  Iler- 
bitzbeim  est  indiqué  par  son  initiale  H.  » 

Nous  allons  voir  par  plusieurs  documents  que  ce  nom  est  Hanle,  nom 
que  l'abbé  de  Senones  écrit  un  peu  plus  tard  (1302)  Avole. 

En  1302 %  l'abbesse  de  Ilerbilzheim,  Aule,mel  son  sceau  à  une  vente  de 
prés  situés  au  lieu  dit  Drutlenroch,  faite  à  l'abbé  du  monastère  de  Sturtzel- 
bronn par  Reinfried  dit  Ongel  Dad,  fils  de  feu  Tiedric,  et  Gai  d'Albe,  sa 
fenmie. 

En  1309^  la  quatrième  férié  après  la  nativité  de  la  Vierge,  il  intervient 
une  convention  entre  l'abbesse  de  Herboldsliemi  et  son  couvent,  et  l'abbé 
de  Sturtzelbronn  au  sujet  de  la  perception  des  novales  dans  la  paroisse  de 
Rohrbach.  L'abbé  ne  paiera  rien  pour  les  cinq  dernières  années  écoulées;  il 
ne  paiera  rien  pour  les  cinq  à  venir  si  les  cultures  sont  faites  par  l'abbaye 
ou  à  ses  frais;  mais  si  l'abbé  loue  ses  propriétés,  les  locataires  paieront  les 
novales. 

En  1316',  le  jour  de  la  Saint- Michel,  //«M/e,  par  la  grâce  de  Dieu  abbesse 
de  Herboltzheym,  appose  son  sceau  à  un  acte  par  lecjuel  Barthélémy  de 

1.  Chartul.  Sturzelbronn.  37. 

2.  Ibiâ.  61. 

3.  D.  Calmet,  1,    739. 

4.  hiventaire  des  titres  H  papiers  t,  176.  de  lorraine.  Tous  les  iioni.s  sont  évidem- 
ment incorrects. 

5.  Chartul.  Sturzelbronn.  85,  I  M. 

Je  n'ai  pu  déterniiner  s'il  s'agit  de  l'abbé  Nicolas  qui  vivait  eu  I  305  ou  de  l'abbé  Hermann 
qui  gouvernait  Sturzelbrouu  en  1310. 

6.  Chartul.  Stm-zett^mmi.  260. 


—  76  — 

Raldingen*,  bailli  de  Bitche,  fait  remise  à  l'abbaye  d'une  rente  viagère  en 
grains  (13  viertel  et  2  sester  de  seigle)  qui  lui  était  due  et  pour  le  rachat 
de  laquelle  l'abbaye  lui  a  payé  36  livres  turney. 

IX. 

Herbitzheim  est  situé  à  environ  deux  kilomètres  de  Sarralbe,  dont  les 
salines  étaient  au  moyen  âge  si  célèbres  et  si  fructueuses  pour  leurs  pro- 
priétaires. 

Albert,  dernier  comte  de  Dagsbourg  et  seigneur  d'Albe,  avait,  vers  l'an 
1200,  donné  à  l'abbaye  de  Sturtzelbronn  la  jouissance  d'une  poêle  dans 
ces  salines,  et  tout  fait  croire  que  les  religieuses  de  Herbitzheim  reçurent 
de  lui  une  semblable  libéralité.  Toujours  est-il  certain  que  leur  monastère 
était,  au  siècle  suivant,  en  possession  d'une  poêle  et  que  des  contestations 
à  ce  sujet  s'étaient  élevées  entre  l'abbesse  de  Herbitzheim  et  l'abbé  de 
Sturtzelbronn.  L'évêque  de  Metz,  Rainald  ou  Renaud  de  Bar  (1302 1 1316), 
était  intervenu  dans  cette  discussion,  et  avait  fait  consentir  les  deux  par- 
ties à  une  transaction.  Toutefois  ces  contestations  se  renouvelèrent,  et  en 
1319^,  l'évêque  Henri  Dauphin,  successeur  de  Rainald  de  Bar,  intervint  à 
son  tour  en  sa  triple  qualité  de  seigneur  direct  de  la  terre  d'Albe,  de  pro- 
priétaire des  salines  et  de  supérieur  ecclésiastique.  11  maintint  les  deux 
abbayes  dans  leurs  droits  de  faire  du  sel  et  les  prit  sous  sa  protection  et 
sauvegarde;  mais  il  leur  fit  acheter  ce  double  privilège,  par  l'abandon 
d'une  partie  de  leurs  droits,  ce  qui  fut  dissimulé  sous  cette  phrase  du  chro- 
niqueur: «En  reconnaissance,  l'abbesse  et  l'abbé  l'associèrent  pour  un 
tiers  dans  leur  poêle » 

X. 

En  1323%  le  jour  des  rois,  Haula,  par  la  grâce  de  Dieu  abbesse  de 
Herbotsheym ,  appose  son  sceau  à  un  acte  par  lequel  Claus  de  Raldingen 
reconnaît  que  l'abbaye  a  racheté,  moyennant  36  livres  turney,  la  rente  de 
13  viertel  et  2  sechster  de  seigle  qui  lui  était  due. 

En  1338*,  le  jour  de  la  division  des  apôives,  Elisabeth,  abbesse  de  Her- 
bitzheim, s'accorde  avec  l'abbé  de  Sturtzelbronn,  au  sujet  d'une  dette  de 

1.  Chaïtu].  St7(rzelöron7i.  260. 

Barthélémy  nomme  l'abbesse  meine  gnœdige  frmiwe  ;  il  était  sans  doute  vassal  de  l'abbaye 

2.  D.  G.  Dissertation  sur  les  salines,  xviii.  Notice  ,  v"  Hehbitzheim. 
Bened.  II,  157. 

3.  Ghartul.  Sturtzelbronn.  260,  v"  An  dem  Zivœlfftentag. 
■4.  Inv.  de  lorr. ,  1,  178.  Ce  doit  être  l'abbé  Ysenhard. 


—  77  — 

vingt  livres  qu'ils  doivent  ensemble  à  cause  de  la  saline  d'Albe,  et  que 
l'abbesse  de  Herbilzheim  s'engage  à  payer. 

En  1345^  le  jour  de  saint  Marc  l'évangéliste,  Hi/lleffart,  abbesse  de 
Herbesheym,  est  témoin  d'une  quittance  donnée  et  d'une  donation  faite  à 
l'abbé  Johann  de  Slurtzelbronn  par  Johann,  curé  de  Rohrbach,  et  prében- 
dier  de  Herbesheim, 

XL 

Mais  à  côté  du  pouvoir  spirituel  de  l'abbesse,  il  y  avait  la  puissance  tem- 
porelle du  haut  baron  protecteur,  du  voué,  chargé  des  obligations  féodales 
et  jouissant  des  avantages  attachés  au  fief  ecclésiastique. 

A  défaut  de  preuves  directes  et  irréfutables  ,  la  situation  des  lieux, 
l'usage  général,  l'analogie  avec  les  autres  abbayes,  tout  doit  nous  faire  sup- 
poser que  l'abbaye  de  Herbitzheim  avait  pour  voués  les  comtes  de  Saar- 
werden,  ses  puissants  voisins,  dont  la  belle  baronnie  touchait  immédiate- 
ment les  terres  de  l'abbaye. 

La  maison  de  Saarwerden  se  perd  dans  la  nuit  des  temps  féodaux.' 

En  iioi ,  le  comte  Friederich  était  un  baron  indépendant  dont  le  franc- 
alleu  enclavait  complètement  Vieux-Saarwerden  et  Bouquenom ,  bâtis  sur 
la  terre  de  l'évêché  de  Metz,  et  qu'il  tenait  en  fief  des  évéques. 

Au  quatorzième  siècle ,  ses  descendants  possédaient  la  baronnie  de 
Fénestrange  (Vinstingen)  et  la  seigneurie  de  Kirkel  sur  la  Bliese.' 

Mais  leur  descendance  directe  allait  s'éteindre,  et  en  1396,  la  mort  de 
Henri  II,  le  dernier  comte,  transférait  ces  beaux  domaines  à  Friederich, 
comte  de  Moers,  qui  avait  épousé  Walburge,  sœur  du  comte  Henri,  et 
héritière  du  nom  et  du  comté. 

Tels  étaient  les  barons  que  l'on  croit  avoir  été  les  voués  de  Herbitzheim. 
Toutefois  ,  quelques  documents  contemporains  semblent  établir  que  ce 
privilège  ne  leur  a  pas  toujours  été  exclusif  et  qu'il  a  appartenu  aux  comtes 
de  Saarbruck,  sans  qu'il  soit  possible  de  dire  si  la  vouerie  a  appartenu  à 
ces  comtes  en  totalité  ou  en  partie;  momentanément  ou  d'une  manière 

1.  Chartul.  Sturtzelbronn.  240. 

2.  Voy.  les  Tables  généalogiques  à  la  fin. 

3.  Les  comtes  de  Saarwerdea  tenaient  en  fief:  1"  de  Tempire,  le  péage  des  routes  impé- 
riales à  travers  leurs  domaines  ;  2°  de  l'archevêché  de  Trêves ,  le  château  de  Lorentzen  et 
les  villages  de  Wachten  et  Limbach;  3°  de  Tévêché  de  Metz,  le  château  de  Vieux-Saar- 
werden, la  ville  de  Bockenheim  et  la  cour  de  Wiebersweiler  ,  dans  le  Saargau. 

Dans  le  Bliesgau,  une  branche  de  leur  maison  tenait  de  l'empire  les  seigneuries  de 
Hombourg,  de  Kirkel,  de  Buntenbach  et  Vogelbach.  Ils  avaient  fondé  l'abbaye  de  Wersch- 
weiler  on  Wernerswiller. 


—  78  — 

persistante;  s'ils  l'ont  acquise  par  alliance  ou  par  héritage;  si  elle  leur  avait 
été  cédée  par  engagère,  ou  bien  s'ils  étaient  tout  simplement  les  arrière- 
voués  (le  l'abbaye.' 

Voici  ces  documents: 

En  129 1 ,  le  jour  de  la  Saint-Rémi,  «  en  chief  d'octembre  (1^''  octobre)  »  le 
comte  Simon  IV  de  Saarbruck confirme  le  douaire  que  le  chevalier, lehan  de 
Rozières  avait  constitué  à  sa  fiancée  «  Alh,  fille  monseigvour  Ourri  de 
Fontoi  cheuallier  seignour  de  Bessompierre ,  )^  ce  qu'il  tenait  en  fief  dudit 
comte,  «  et  nommément  la  moitié  de  lawoerie  de  Harhorzheim  et  de  la  ville 
de  Cuistres  (Keskastel) ,  et  son  tiers  de  la  woerie  de  la  ville  d'Oldenges  {01- 
dingen),  et  des  a.ppendises  et  appartenances  des  leuz  devant  dix...,  en  quel- 
que manière  que  ce  soit,  ou  en  autre  lieu  que  de  mon  fie  moueroint^.D  Ce 
document,  d'accord  avec  les  suivants,  montre  que  la  vouerie  de  Herbitz- 
heim  comprenait  Ilerbilzheim,  Keskastel  et  Oldingen,  village  aujourd'hui 
détruit,  qui  était  situé  au  nord  de  Rahling  (canton  de  Rohrbach),  au  lieu  où 
la  carte  du  dépôt  de  la  guerre  indique  une  chapelle  sous  le  nom  de  Alt- 
Kirch.^ 

Le  village  de  Siiltzheim  ou  Siltzheim,  qui  plus  tard  a  appartenu  à  l'ab- 
baye, n'existait  probablement  pas  encore  dans  ces  temps  reculés. 

En  1593*,  Friederich  de  Ettendorf  permit  à  Henri  de  Fleckenstein  de 
constituer  en  douaire  à  sa  femme  «  quinquaginta  marcarum  dotalitium  » 
50  marcs  à  Uerbolsheim  sur  la  Sarre. 

En  1342%  le  mardi  après  la  Saint- Laurent  (13  août),  le  comte  Jean  il 
de  Saarbruck  et  Bœmond,  Jean  et  Nicolas,  sires  de  Dagstoul,  font  un  com- 
promis sur  les  différends  élevés  entre  eux  à  l'occasion  des  fiefs  que  le  sire 
de  Dagstoul,  leur  père,  tenait  du  comte  de  Saarbruck  et  de  ses  ancêtres. 
Parmi  ces  fiefs  se  trouvent  les  cours  et  les  villages  de  Herbisheim,  Keyse- 
castle  et  Oldingen^  et  ce  qui  en  dépend.  Le  comte  Jean  leur  donne  ces 
biens  en  fief  comme  leur  père  les  avait  possédés. 

1.  Ainsi  à  Saint-Avold  les  comtes  de  Saarbruck  ctaiciil.  voués,  et  les  comtes  de  Créhaugc 
arrière-voués. 

2.  Kremer,  A)-d.  Gesch.,  1 ,  195;  II,  376.  II  la  nomme  Adelheid. 

Fr.  Kölluer,  Geschichte  des  Nassem -Saarbruc Aschen  Landes.  112,  l'appelle  "A/ize- 
II  fllle  du  chevalier  de  Fontenai,  sire  de  Bassompierre.  » 

3.  J.  Thilloy  ,  Raines  du  comté  de  Bitche,  27. 

4.  Schrepdin,  Als.  illaslr..  II,  253. 

5.  Kremer,  Ard.  Gesch.,  II,  455.  —  F.  Köllner,   l'il. 

6.  «  Das  ist  zu  toussai  in  den  Ueuhen  -und  Dearßcrn  von  llerhisheim  .  Keijsecastle  tind 
«  Oldingen.  » 


-    79  — 

En  1376',  Arnokl,  sirede  PiUiiigen,  chevalier,  neveu  de  Jean  et  Nicolas 
de  Dagstoul,  Henri  de  Fleckenstein,  Jean  el  Jacob,  frères  de  Ruldingen 
(Raville),  sires  de  Benestorff,  el  Jean  de  Brück,  sire  de  llingesingen  (Ilin- 
guesange),  reçoivent  en  fief  du  comte  Jean  II  de  Saarbruck  tous  les  fiefs 
qu'avaient  possédés  les  sires  de  Dagstoul.  Parmi  ces  fiefs,  Jacob  de  Hul- 
dingen, sire  de  Benestorff,  fait  plus  particulièrement  hommage  pour  les 
cours  de  Herbetzhewi,  Kesecastel  et  Oldingen,  et  les  (i  hohen  »  de  Sainte- 
Marie  dans  la  vouerie  de  Herbitzheim. 

XII. 

La  maison  de  Mœrs  posséda  le  comté  de  Saarwerden  pendant  un  siècle, 
et  elle  brilla  d'un  certain  éclat  dans  l'histoire  locale  de  celte  époque.  Frie- 
derich III,  pelit-fils  de  Friederich  F'',  fui  tué  à  la  bataille  de  Bulgnéville , 
en  1431,  aux  cotés  du  roi  René  d'Anjou,  duc  de  Lorraine.  Il  laissa  un 
jeune  enfant,  lecomle  Jacob,  pendant  la  minorité  duquel  la  vouerie  de 
Herbitzheim  eut  à  supporter  de  cruelles  calamités. 

En  1460^  une  guerre  violente  s'était  élevée  entre  l'électeur  palatin,  Frie- 
derich le  Victorieux,  et  son  parent  Louis  le  Noir,  duc  de  Deux-Ponts. 

Les  soldais  de  Louis  le  Noir,  commandés  par  le  comte  Emich  de  Leinin- 
gen,  pénétrèrent  dans  la  seigneurie  de  Kirchheim  et  Stauf  qui  apparte- 
nait aux  comtes  de  Saarbruck,  et  qui  avait  été  engagée  par  eux  pour  un 
tiers  au  Pfaltzgraf  Friederich.  Peu  de  temps  après  (janvier  1461)  ils  s'em- 
parèrent de  la  ville  de  Kirchheim  et  firent  prisonnier  le  comte  Philippe  III 
de  Nassau-Weilburg,  frère  du  comte  Jean  III  de  Nassau-Saarbruck.  La 
guerre  éclata  aussitôt  entre  Jean  III  et  Louis  le  Noir.  Le  duc  de  Deux-Ponts 
attaqua  vigoureusement  toutes  les  seigneuries  de  son  adversaire,  situées 
dans  le  Westrich,  et  s'avança  vers  la  Bliese, 

Quarante  ans  auparavant  (1421)  le  comte  Henri  de  Fénestrange  avait  en- 
gagé au  comte  Phihppe  F*"  de  Nassau-Saarbruck  (père  de  Philippe  II  et  de 
Jean  III)  la  seigneurie  de  Diemeringen^,  comprenant  le  château  et  la  ville 
de  Diemeringen,  Bütten,  Dellingen,  Wellerdingen  et  Wyher*,  el  cette  en- 
gagère  durait  encore.  Louis  le  Noir  vint  porter  la  guerre  dans  la  seigneu- 
rie de  Diemeringen.  Ses  cavaliers  et  ses  fantassins  ravagèrent  d'une  manière 

1.  Kremcr,  Ard.  Gesch.,  II,  537. 

Uff  den  Sonderg  n/s  man  singet  lœtare  das  ist  zu  haHifasloi  (23  mars). 

2.  F.  Küllner,  209,  210. 

Ad.  Kölincr,  Geschichte  der  Herrschaft  Kirchheim  -  Hotand  vnd  Stauf.  189. 

3.  F.  Köllner,  190  ;  moyennant  4,000  florins. 

4.  Weyer ,  village  détniit  près  do  Raliliiig. 


—  80  — 

épouvantable  tout  le  pays  compris  entre  la  Bliese  et  l'Eichel,  bien  qu'il 
appartînt  au  comté  de  Bitche,  et  portèrent  la  flamme  et  la  dévastation  jus- 
qu'à Herbilzlieim  et  Keskastel. 

C'est  à  celte  guerre  dévasiatrice  que  l'on  peut  attribuer  la  ruine,  et 
peut-être  la  destruction  de  plusieurs  villages  du  canton  de  Bobrbach  qui 
ont  complètement  disparu,  soit  à  cette  époque,  soit  pendant  le  siècle  sui- 
vant.* 

Malgré  un  arbitrage  et  une  paix  intervenus  au  mois  de  juin  1461  ,  la 
querelle  de  ces  princes  dura  longtemps  encore.  Dix  ans  plus  tard  (1471) 
ils  étaient  encore  en  guerre,  et  le  comte  Jean  de  Saarbruck  défiait  le  duc 
de  Deux-Ponts.  Le  chroniqueur  ne  prononce  plus  le  nom  de  Herbitzheim, 
mais  il  n'est  que  trop  probable  que,  pas  plus  en  1471  qu'en  1461,  la  vallée 
de  l'Eichel  n'a  échappé  aux  horreurs  de  la  guerre. 

XIII. 

Le  quinzième  siècle  paraît  avoir  été  pour  l'abbaye  de  Herbitzheim  l'é- 
poque de  sa  plus  haute  prospérité. 

L'abbesse  exerçait  les  droits  seigneuriaux^  dans  les  villages  de  Herbitz- 
heim, Keskastel,  Gersheim  sur  la  Bliese  (Bavière),  Grening,  en  partie, 
Grundwiller  et  Bemering,  dont  les  habitants  étaient  désignés  sous  le  nom 
«  d'enfants  de  Sainte-Marie.  » 

Elle  tenait  Siltzheim  en  vertu  d'une  engagèredes  comtes  de  Saarwerden, 
et  il  paraît  que  cette  engagère  durait  encore  en  1525%  malgré  le  docu- 
ment suivant  que  rapporte  Dom  Calmet:'' 

«En  1518,  Jacob,  comte  de  Mœrs  et  de  Saarwerden,  déclare  qu'en  re- 
connaissance des  services  que  lui  a  rendus  Conrad  Bayer  de  Boppart^  il  lui 
donne  en  fief  héréditaire  tous  ses  droits  au  village  de  Sultzen,  pour  en 
jouir  lui  et  ses  héritiers  en  la  manière  qu'en  jouissait  dame  Benigne  Kreu- 
tzinn,  abbesse  de  Herbitzheim,  à  titre  d'engagère.  » 

Outre  ces  droits  seigneuriaux,  l'abbaye  avait  divers  revenus  ecclésias- 
tiques. «  Elle  jouissait  de  beaux  droits,  dit  l'histoire  de  Metz®,  et  entre  autres 

1.  J.  Thilloy,  Ruines  du  comté  dp.  Bitche.  45. 

2.  Henri  Lepage,  Documents  inédits  si/r  la  guerre  des  Rnstmtds  ,  142.  147,  121  ,  140. 
94,  92  et  134. 

.3.  Henri  Lepage,  134. 

4.  Notice  de  Lorraine,  V  Herditzheim.  Il  s'agit  évidemment  du  comte  Jean  Jacob.  Le 
comte  Jacob,  son  père,  était  mort  avant  I.')12. 

5.  Les  Bayer  de  Boppart  étaient  seigneurs  à  Sarralbe  et  à  Chàteau-Brehain. 

6.  Bened.  H,  158.  Ils  ont  emprunté  ces  détails  à  l'ancien  »polium  metense  ,  tit.  «  Be7ief. 
«  abbatisscp  in  Herhitzkeim  » ,  document  perdu. 


—  81  - 

du  patronage  des  cures  de  Morlene  (Merten  près  Boulay) ,  dans  l'archi- 
prêtré  de  Varize;  de  Remering(près  Puttelange-lès-Sarralbe);  de  Gersheim 
(sur  la  Bliese,  en  Bavière);  de  Balding  ou  Ralding  (Rahling,  canton  de 
Rohrbach);  de  Herbitzheim;  de  Œrmingen  (surl'Eichel),  dans  celui  de  Bou- 
quenom;  de  Rodalben  (près  Pirmasentz,  Bavière);  de  Valmistri  (Volmün- 
ster,  chef-lieu  de  canton);  de  Rohrbach  (chef-lieu  de  canton);  de  Kirch- 
heim  (sur  la  Bhese,  Bavière),  dans  celui  de  Hornbach.  » 

Il  esta  remarquer  que  les  pouillés  du  dix-huitième  siècle  n'ont  pas  gardé 
trace  de  ce  patronage  de  l'abbaye  de  Herbitzheim.  Ils  indiquent  comme 
collateur  de  toutes  ces  paroisses,  le  roi,  ratione  dominii,  aux  droits  du 
duc  de  Lorraine',  tant  au  siècle  dernier  l'on  avait  déjà  perdu  le  souvenir 
de  l'antique  abbaye  de  Herbitzheim. 

XIV. 

La  maison  de  Mœrs  allait  s'éteindre.  Les  comtes  .lean  et  Jacob  H,  qui 
s'étaient  partagé  le  comté  de  Saarwerden,  avaient  laissé  l'un  une  fille,  Ca- 
therine, mariée  au  comte  Jean-Louis  de  Nassau-Saarbruck,  l'autre  un  fils, 
le  comte  Jean-Jacob,  le  dernier  de  sa  race,  et  qui  était  en  état  d'imbé- 
cillité. 

Dès  l'an  1512%  avec  le  concours  de  Beatrix  de  Salm,  mère  de  Jean- 
Jacob,  et  l'assentiment  du  duc  Antoine  de  Lorraine,  le  comte  Jean-Louis 
de  Nassau-Saarbruck,  héritier  pour  moitié  de  ces  beaux  domaines,  prit  la 
tutelle  du  comte  et  l'administration  de  sa  part  de  la  seigneurie,  portion 
dont  il  avait  la  succession  éventuelle.  Mais  avant  que  la  mort  du  comte 
Jean-Jacob  ne  lui  donnât  la  possession  exclusive  du  comté  de  Saarwerden 
et  de  ses  dépendances,  de  bien  graves  événements  devaient  survenir  dans 
la  vouerie  de  Herbitzheim. 

Tous  les  historiens  ont  raconté  la  terrible  jacquerie  qui  éclata,  en  1525, 
sur  les  deux  rives  du  Rhin  et  qui  est  connue  sous  le  nom  de  guerre  des 
Paysans,  des  Rustauds  ou  des  Anabaptistes.  Effroyable  explosion  des  haines 
et  des  rancunes  d'un  peuple  réduit  à  la  plus  horrible  misère  par  deux  siè- 
cles de  guerres  intestines,  et  opprimé  par  des  vexations  intolérables,  elle 
était  la  plus  sauvage  réaction  du  vassal  contre  les  seigneurs,  du  paysan 
contre  le  clergé  et  surtout  contre  les  moines.  Les  nouvelles  doctrines  re- 
ligieuses n'en  étaient  que  le  prétexte.  Luther  avait  prêché  la  suppression 

1.  rouillé  (Je  lovôché  de  Melz. 
Thibaud,  Ma/ières  hctiélicialex.  394. 

2.  F.  Köllner.  232. 

11- SÉRIE.  —  T.  II.  —(M)  6 


—  82  - 

(les  monastères  et  la  confiscation  de  leurs  biens;  il  avait  proclamé  les  princes 

les  lictem'S,  ot  les  bourreaux  de  Dieu Le  peuple  s'empara  de  ces  théories 

qui  flattaient  ses  passions  haineuses  et  sa  soif  de  vengeance;  cette  liberté 
religieuse  dont  on  lui  parlait,  il  en  fit  une  liberté  politique  et  sociale.  Il 
n'eut  plus  qu'un  but,  la  destruction  de  toutes  les  autorités  tyranniques  et  le 
partage  des  biens. 

La  révolte  éclata  en  Alsace  vers  le  milieu  du  mois  d'avril,  et  le  1^''  mai 
suivant,  l'armée  des  insurgés  s'élevait  à  plus  de  60,000  hommes! 

Partout  où  ils  se  soulevaient,  les  paysans  se  jetaient  sur  les  abbayes  les 
plus  voisines,  sur  les  châteaux  sans  défenseurs,  et  les  livraient  au  pillage  et 
à  l'incendie.  Les  cruautés  les  plus  atroces  mêlées  aux  excès  de  tous  genres; 
le  massacre  des  moines,  l'incendie  des  châteaux,  le  pillage  des  couvents  et 
des  églises  signalaient  partout  le  passage  des  bandes  qui  allaient  rejoindre 
la  grande  armée. 

Formée  des  révoltés  accourus  de  tous  les  points  de  l'Alsace,  cette  armée 
se  rassemblait  à  Saverne,  avec  l'intention  hautement  manifestée  de  franchir 
les  Vosges  et  de  donner  la  main  aux  paysans  lorrains. 

Déjà  l'incendie  avait  gagné  les  forêts  du  comté  de  Bitche.  Soulevés  en 
masse,  les  sujets  du  comte  Reinhard  s'étaient  rués  sur  l'abbaye  de  Sturtzel- 
bronn  et  s'y  étaient  installés  après  l'avoir  presque  détruite;  puis,  appelant 
à  eux  les  révoltés  du  Palatinat,  ils  s'étaient  emparés  des  châteaux  de  Lin- 
delbronn  et  de  Graffenstein ,  appartenant  au  comte  Emich  de  Leiningeii; 
enfin,  ils  étaient  allés  à  Wissembourg  rejoindre  le  vigneron  Bacchus  Fisch- 
bach. 

11  fallait  mettre  un  terme  à  ces  épouvantables  désordres.  Les  villes  de 
Strasbourg  et  de  Haguenau,  la  régence  autrichienne  d'Ensishejm  et  le  comte 
Reinhard  de  Deux-Ponts-Bitche  s'adressèrent  au  duc  Antoine  de  Lorraine. 
Le  péril  était  grand;  il  fallait  se  hâter.  Avec  faide  de  son  frère,  le  comte 
Louis  de  Vaudemont,  et  du  duc  Claude  de  Guise,  le  duc  Antoine  rassembla 
promptement  une  armée  et  se  dirigea  à  marches  forcées  vers  les  passages 
des  Vosges. 

Pendant  que  le  principal  corps  d'armée  des  insurgés  occupait  Saverne  et 
menaçait  la  Lorraine  française,  une  troupe  de  4,000  paysans  s'était  dirigée 
vers  Sarrebourg  et,  descendant  la  vallée  de  la  Sarre,  était  venue  détruire  et 
occuper  l'abbaye  de  Ilerbitzheim. 

A  leur  approche,  entraînés  par  les  conseils  et  les  excitations  de  quelques- 
uns  des  sujets  du  comte  Reinhard  de  Bitche,  les  vassaux  de  l'abbessc  s'é- 
taient soulevés,  avaient  couru  se  joindre  aux  bandes  qui  s'approchaient  et 
les  avaient  conviées  au  pillage  du  monastère.  Le  couvent  lui-même  devint 


le  quaiiier-général  d'où  ils  envoyèrent  des  émissaires  dans  tout  le  bailliage 
(rAllemagnc.  C'est  à  Ilerbitzheim  que  vinrent  les  rejoindre  les  paysans  des 
comtés  de  Morhange,  de  Puttelangc,  deForbach,  et  des  chàtellenies  de 
Ilombourg-  et  de  Gemünd  (Sarreguemines).  ^ 

De  son  côté,  le  duc  Antoine  s'était  mis  en  mouvement  avec  son  armée. 
Tandis  que  lui-même  s'avançait  vers  Saverne,  il  avait  envoyé  sur  la  Sarre 
un  corps  détaché,  sous  le  commandement  de  Jean  de  Draubach,  capitaine 
de  Gemünd ,  avec  mission  de  reconnaître  la  position  des  insurgés ,  qui  s'é- 
taient retranchés  à  Ilerbitzheim  ".  Un  premier  engagement  eut  lieu  dans 
les  bois  situés  entre  Herbitzheim  et  Sarreguemines \  Jean  de  Braubach, 
désarçonné  par  accident,  tomba  entre  les  mains  des  insurgés,  qui  le  firent 
conduire  à  Saverne. 

Privée  de  son  chef,  l'avant- garde  lorraine  dut  se  replier  sur  le  château 
de  Gemünd;  mais  peu  de  jours  après,  ralliée  par  de  nouvelles  troupes,  sous 
le  commandement  de  Wolff  de  Hohenfelz  et  Reypoltzkirchen ,  sire  de  For- 
bach,  elle  se  porta  de  nouveau  en  avant. 

Pendant  ce  temps,  le  comte  Jean-Louis  de  Nassau-Saarbruck  et  le  Rhin- 
graff  Jean  VII,  comte  de  Morhange,  s'emparaient  d'Œrmingen.  Les  paysans 
durent  abandonner  leur  camp  de  Ilerbitzheim ,  et  ils  se  retirèrent  sur 
Saverne,  où  ils  ne  tardèrent  pas  à  être  détruits  par  l'armée  du  duc  An- 
toine. 

Cette  crise  avait  porté  un  coup  mortel  à  l'abbnye  de  Ilerbitzheim.  Nous 
n'avons  aucun  renseignement  précis  sur  ce  qu'elle  eut  à  souffrir;  mais  les 
détails  que  les  chroniqueurs  rapportent  du  pillage  des  autres  abbayes,  des 
destructions  sauvages  et  aveugles  de  tous  les  objets  d'art,  des  bibliothèques, 
des  chartriers,  peuvent  nous  donner  une  idée  exacte  de  ce  qui  dut  se  passer 
dans  ce  malheureux  monastère. 

Lorsque,  après  une  occupation  de  trois  semaines ,  les  paysans  furent 
obligés  de  se  retirer,  les  religieuses  reprirent  possession  des  ruines  de  leur 
couvent,  mais  c'en  était  fait  de  l'antique  abbaye;  elle  ne  devait  plus  se  re- 

1.  Henri  Lepage.  Docameids  sur  les  guerres  des  Rustauds.  XII.  M.  Lepage  ostinie  à  en- 
viron 1,800  le  nombre  des  révoltés  de  ces  seignenries,  y  compris  environ  300  vassanx  de 
l'abbaye. 

'2.  ¥.  Kolliier,  AiiO. 
Merian.  Topogr.  imlnlln.  Rheni,  43;  v'"  Sa.vhbrucicen  et  Saarwhrden. 

3.  Ce  combat  paraît  avoir  été  livré  entre  Snltzheim  et  Wittring,  dans  ic  petit  liois  dn 
Kremrich  aiijourdlnii défriché  et  transformé  en  nne  des  plus  belles  fermes  du  pays. 

Lors  du  défrici:ement,  M.  Eusèbe  Houricr ,  propriétaire  du  Kremrich,  trouva  sous  un 
chêne  le  tronçon  d'une  belle  épée  damasquinée  d'argent,  dont  la  forme  et  le  dessin  accusent 
d'une  manière  positive  la  fin  du  quinzième  siècle. 


—  8â  — 

lever  de  cette  crise,  et  il  ne  lui  restait  plus  que  peu  d'années  d'une  exis- 
tence languissante. 

XV. 

Deux  ans  plus  tard  (1527),  Jean-Jacob,  dernier  comte  de  Mœrs  et  Saar- 
werden,  mourut.  Parmi  les  domaines  de  sa  maison,  le  château  de  Vieux- 
Saarwerden,  la  ville  de  Bouquenom  et  la  cour  de  Wiebersvveiler  étaient  fiefs 
de  l'évêché  de  Metz;  le  reste  était  franc-alleu  ou  relevait  de  l'archevêché  de 
Trêves.  Néanmoins,  le  cardinal  Jean  de  Lorraine,  administrateur  de  l'évê- 
ché de  Metz ,  se  hâta  de  revendiquer  comme  suzerain  la  totalité  du  comté, 
foute  d'héritier  mâle.  Le  comte  Jean -Louis  de  Nassau-Saarbruck  résista  à 
ces  prétentions  et  porta  la  question  devant  l'empereur  Charles-Quint*,  qui, 
le  13  juin  1527,  défendit  au  cardinal  de  prendre  possession  de  la  baronnie 
contestée  et  fit  porter  la  question  à  la  chambre  impériale.  Le  cardinal  jugea 
prudent  de  cesser  ses  poursuites;  mais  il  s'empressa  d'accorder  à  son  frère, 
le  duc  Antoine  de  Lorraine^,  l'investiture  du  château  de  Vieux-Saarwerden, 
de  la  ville  de  Bouquenom,  de  la  cour  de  Wiebersweiler,  et  de  tout  ce  qui 
en  dépendait.  Dans  la  pensée  des  deux  frères,  ces  expressions  signifiaient 
le  comté  de  Saarwerden  tout  entier. 

Le  comte  Jean-Louis  s'adressa  de  nouveau  à  l'empereur,  qui,  le  22  oc- 
tobre 1530,  saisit  la  chambre  impériale  d'Augsbourg.  Dès  lors  commença, 
devant  cette  haute  juridiction,  un  procès  qui  dura  un  siècle,  et  dont  nous 
verrons  plus  loin  les  résultats  et  les  conséquences.  Mais  pendant  tout  ce 
temps,  bien  que  son  droit  fût  contesté,  la  maison  de  Saarbruck  demeura 
en  possession  du  comté  de  Saarwerden.  Elle  allait  y  ajouter  la  propriété  de 
l'abbaye  de  Herbitzheim,  dont  elle  revendiquait  la  Vouerie  du  chef  des 
comtes  de  Saarwerden. 

XVI. 

Le  1^''  avril  1544 ^  l'abbesse  de  Herbitzheim,  Amalia  d'Altorff  de  Wol- 
lenschlager \  avec  le  consentement  de  la  seule  professe  (conventualinn) 
encore  vivante,  vendit  au  comte  Jean -Louis  de  Nassau-Saarbruck,  «ileur 
voué  héréditaire»  (Erb-  und  Schirmvogt),  le  monastère  avec  les  villages, 

1.  F.  Külliier,  24ß. 

2.  Notice,  V"  Saarwkroen.  Les  lettres  patentes  sont  datées  de  Gorapièg-ne  le  26  septembre 
1527. 

Meurlssc,  Histoire  des  e'rêqi/es  de  Metz.  G04. 

3.  F.  Kollner,  247. 

Merian.,  48;  v  Saarbruck. 

4.  Famille  dn  Talatinat  établie  en  Alsace,  voy.  Hertzog,  Edclsass.  clironik,  VI,  217. 


-  85  - 

cours,  biens,  rlixines,  rentes,  etc.,  en  tonte  propriété  et  hérédité.  Les 
motifs  de  cette  vente  (ou  plutôt  de  cette  donation)  sont:  «Que  dans  ces 
temps  si  pleins  d'anxiété  et  de  troubles ,  l'état  monastique  est  tombé  en  tel 
discrédit,  mépris  et  déconsidération,  que  personne,  quelle  que  soit  sa  posi- 
tion sociale,  élevée  ou  inférieure,  ne  veut  plus  l'embrasser  ou  le  faire  em- 
brasser à  ses  enfants'.»  Elle  ajoute  que  les  revenus  de  l'abbaye  sont 
tellement  diminués  que  les  religieuses  ne  peuvent  plus  subvenir  à  leurs  be- 
soins. 

Le  comte  Jean -Louis  ne  promettait  aucun  prix  pour  cette  acquisition, 
mais  il  conservait  à  l'abbesse  la  jouissance  des  biens  de  l'abbaye,  l'adminis- 
tration et  le  gouvernement  du  monastère;  il  s'engageait  à  protéger  les 
religieuses,  à  subvenir  à  leurs  besoins  aussi  longtemps  qu'elles  voudraient 
rester  dans  leur  couvent,  et,  lorsqu'elles  l'abandonneraient,  à  leur  donner 
à  Saarbruck  un  asile  et  une  pension. 

Cette  cession,  faite  avec  le  concours  du  vice-légat  Jean  Turgot,  fut  ap- 
prouvée, en  1545,  1548  et  1550,  par  les  papes  Paul  III  et  Jules  III;  mais 
avec  les  réserves  expresses,  prescrites  par  la  bulle  du  pape  Paul  II,  concer- 
nant l'inaliénabilité  des  biens  de  l'Église.'^ 

En  même  temps  et  la  même  année  1544,  l'abbesse  vendit  au  comte  Jean- 
Louis  le  tiers  de  poêle  qu'elle  possédait  aux  salines  de  Saltzbronn ,  près 
d'Albe,  pour  la  somme  de  2,000  florins.^ 

Cette  même  année  1544,  le  mardi  après  Jubilate,  au  mois  de  mai,  le 
comte  Jean-Louis  partagea  ses  domaines  entre  ses  fils.  Il  attribua  la  vouerie 
de  Herbitzheim  à  l'aîné,  Philippe,  qui  héritait  du  comté  de  Saarbruck *. 
Jean-Louis  mourut  le  18  juin  1545,  et  sa  veuve  le  suivit  dans  la  tombe  en 
1547  (vendredi  après  l'exaltation  de  la  croix).  Avec  elle  s'éteignit  la  maison 
de  Saarwerden.  ^ 

XVII. 

Si  l'on  en  croyait  les  termes  d'une  ordonnance  du  duc  François  II  de 
Lorraine,  du  r''  décembre  1630  ^  les  comtes  de  Nassau-Saarbruck  auraient, 
en  1553,  expulsé  les  religieuses  de  Herbitzheim  et  se  seraient  saisis  des 
rentes  et  revenus  de  l'abbaye.  Cette  assertion  ne  paraît  point  exacte.  En 

1.  Kreiacr,  !,  -221 ,  dit  que  l'on  ne  pouvait  plus  trouver  de  novices  pour  peupler  Tabbaye. 

2.  Fr.  Kollner,  '247,  note  20. 

3.  Ibid.  248. 

4.  Ibid.  252. 

5.  Ibid.  252,  255. 

6.  Rogcviile,  Dict.  hislor.;  v"  Colléue,  I,  342. 


—  80  - 

effet,  en  1554,  le  comte  Jean  IV,  qui  venait  de  succéder  à  son  Irèrc  Phi- 
lippe, donna  l'abbaye  de  Herbitzheim  à  sa  sœur  Jeanne. 

Jeanne,  comtesse  de  Nassem- Saarbruck ,  fille  du  comte  Jean-Louis  et  de 
sa  première  femme,  la  pfaltzgTa3finn  Elisabeth,  était  née  le  13  décembre 
1490.  A  fàge  de  seize  ans  (1512),  elle  avait  fait  profession  au  monastère  de 
Rosenthal,  avec  sa  sœur  Anna,  alors  âgée  de  dix-neuf  ans  (t  1505).  Elle  avait 
donc  cinquante-huit  ans  alors  qu'elle  fut  nommée  abbesse  de  Herbitzheim.' 

L'année  suivante  1555-,  elle  vendit,  en  cette  qualité,  au  comte  Jean  IV, 
son  frère,  la  ferme  de  Kirchlieim  sur  la  Bliese  (Bavière)  qui  appartenait  à 
l'abbaye. 

Cette  même  année,  elle  retourna  à  Rosenthal  et  y  mourut  le  12  des  kal. 
de  décembre  1550,  jour  de  saint  Thomas  apôtre  (21  décembre).^ 

A  partir  de  cette  époque  l'abbaye  de  Herbitzheim  n'existe  plus.  . 

Dom  Calmet*  dit  bien  qu'en  1579  un  procès  était  pendant  devant  la 
chambre  impériale  sur  les  plaintes  de  l'abbesse  et  des  religieuses  de  Her- 
bitzheim au  sujet  d'attentats  et  de  violences  commis  par  les  officiers  d'Albe 
contre  quelques-uns  de  leurs  oQîciers  de  Keskastel.  Mais  c'était  évidem- 
ment la  suite  d'une  instance  entamée  depuis  longues  années,  qui  avait 
survécu  aux  abbesses  et  aux  religieuses,  et  qui  se  rattachait  sans  doute  au 
grand  procès  entre  les  ducs  de  Lorraine  et  les  comtes  de  Saarbruck,  pro- 
cès qui  ne  devait  se  terminer  qu'en  1029. 

Dans  les  dernières  années  du  seizième  siècle,  les  comtes  de  Saarbruck 
se  convertirent  au  protestantisme  et  mirent  en  œuvre  tous  les  moyens  à 
leur  disposition  pour  développer  les  idées  nouvelles  dans  le  comté  de  Saar- 
werden  et  la  vouerie  de  Herbitzheim. 

Ce  qui  subsistait  encore  des  revenus  de  l'abbaye,  avec  ceux  de  la  collé- 
giale de  Saint  -  Arnuald ,  également  supprimée,  fut  attribué  par  eux  à  l'en- 
tretien des  ministres  introduits  partout  au  lieu  et  place  des  curés;  aux 
réparations  des  églises  transformées  en  temples;  et  à  l'entretien  de  bour- 
siers (Stipendiaten)  au  gymnase  protestant  de  Saarbruck  (1575). 

Enfin  en  1002^,  le  comte  Louis  donna  à  l'hôpital  de  Saarbruck  une  rente 
de  100  florins  sur  les  biens  de  Herbitzheim 

1.  Fr.  Kolliiei',  350,  351  et  note. 

J.  G.  Hagelgans.  Nassanisckc  GeschlechtstaJ'cl,  53.  11  la  dit  née  le  13  septembre. 

2.  Fr.  liöllner;  25G,  284. 

3.  Orig.  nossoic.  dip/om.  Il,  426;  Necrologium  mo7uist.  vcilHs  Rosarum  :  «  obiil  frauw 
Johanna  grcffin  zu  Nassaime  in  anno  LXVI  (faute  d'impression  :  ce  doit  être  LVI). 

4.  Notice,  v°  Herritzheim.  Siipp. 

5.  Fr.  Küllncr,  2i)0,  312. 
Mcriaii.,  13;  v"  Saakuuuck. 


—  87 


XVIII. 


Le  25  aoûl  1581',  nonobstant  le  grand  procès  relatif  au  connté  fie  Saar- 
werden  et  à  ses  dépendances  qui  se  poursuivait  toujours  devant  la  cham- 
bre impériale ,  le  duc  Charles  III  de  Lorraine  et  le  comte  PhiHppe  III  de 
Nassau-Saarbruck,  firent  un  traité  sur  quelques-uns  des  différends  qui  s'é- 
taient élevés  entre  eux.  Le  duc  céda  au  comte,  «à  perpétuité  et  héréditai- 
rement l'advocatie  et  le  droit  de  haute  justice,  en  cinq  cas  appelés  com- 
munément le  grand  criminel  savoir:  meurtre,  incendie,  vol,  viol,  et  plaies, 
comme  aussi  les  droits  régaliens  et  autres  droits  et  revenus  à  cause  de  sa 
seigneurie  de  Sarralbe  sur  le  monastère  de  Ilerbilzheim  et  dans  les  villages 
de  Hcrbitzheim,  Keskastel,  Saint-Michel,  Remcring  et  Grundviller,  ez  ban? 
sujets,  maisons,  cours,  bois,  moulins  et  autres  profits,  et  émoluments 
dont  il  jouissait  ou  qui  pouvaient  luicompéter  ou  appartenir...  » 

En  un  mot,  le  duc  fit  un  abandon  complet  de  toutes  ses  prétentions  à  la 
.souveraineté  et  seigneurie  de  la  vouerie  de  Herbitzheim. 

Ce  même  traité  de  1581  constate  qu'à  cette  époque  le  seigneur  de  Châ- 
teau-Brehain^  avait  une  part  dans  la  vouerie  de  Herbitzheim. 

«Il  a  été  reconnu,  dit  le  traité,  qu'en  cas  où  nous,  duc  Charles,  vien- 
drions à  acquérir  à  titre  d'achat  ou  autrement  la  part  et  droit  qui  appar- 
tiennent au  sieur  de  Château-Brehain  dans  les  villages  de  Keskastel,  Saint- 
Michel  et  Herbitzheim  ,  nous  en  accommoderons  ledit  comte  Philippe, 
moyennant  d'autres  biens  de  même  valeur  et  aussi  convenables  à  notre 
seigneurie  de  Sarralbe » 

Cette  clause  du  traité  paraît  avoir  reçu  son  exécution,  lorsque,  peu  de 
temps  après,  le  duc  Charles  acquit  du  baron  de  Bopparl  sa  part  de  la  sei- 
gneurie d'Albe  et  de  ses  dépendances. 

XIX. 

Une  clause  spéciale  de  ce  même  traité  de  1581  avait  consacré  la  cession 
et  l'abandon  faits  au  duc  de  Lorraine  par  les  comtes  de  Nassau  de  tous 
leurs  droits  sur  les  salines  de  Sarralbe  et  sur  la  Cour  de  Saltzbronn.  Mais 
plus  tard,  ces  comtes  cherchèrent  à  éluder  ce  traité  et  tentèrent  d'établii- 
une  saline  sur  le  territoire  de  Herbitzheim.  Aujourd'hui  encore  il  existe  sur 
le  ban  de  ce  village  un  filet  d'eau  salée  que  l'on  croit  être  une  dérivation 

I .  Arch.  de  Sarrulbr. 

Fr.  Kölliier,  -'91. 
•-'.  Georges,  baroii  Bayer  de  Bopparl,  général  au  service  de  IKiiipirc,  dernier  de  son 
nom,  tué  d'un  coup  de  canon  au  siège  d'Ofcu  en  1098. 


des  sources  de  Sallzbronu'.  Â  la  suite  des  guerres  du  dix-septième  siècle 
les  salines  de  Sarralbe  demeurèrent  abandonnées  et  inexploitées.  Les  offi- 
ciers des  princes  de  Nassau  profitèrent  de  cet  état  de  choses.  Au  mois  de 
juillet  1737,  un  essai  de  saline  fut  tenté  à  l'aide  de  ce  fdet  à  environ  400 
toises  au-dessous  de  Saltzbronn.  Cette  tentative  semble  ne  pas  avoir  réussi, 
toutefois  elle  amena  des  négociations  avec  le  roi  de  France.  Par  une  con- 
vention du  27  août  i7i1  les  princes  de  Nassau  renoncèrent  à  faire  du  sel, 
dans  leurs  terres  de  Saarwerden,  Saarbruck,  Otlweiler,  Hombourg  etHer- 
bitzheim,  moyennant  l'engagement  pris  par  le  roi  de  leur  donner  annuel- 
lement 400  muids  de  sel  sur  les  salines  de  Lorraine.^ 

XX. 

En  161 9^  un  traité  entre  le  duc  Henri  II  de  Lorraine  et  le  comte  Louis 
de  Nassau-Saarbruck,  régla  diverses  prétentions,  contestations  et  erreurs 
relatives  à  la  vouerie  de  Herbitzheim,  et  deux  ans  plus  tard,  le  3  octobre 
1621 ,  un  autre  traité  régla  un  échange  de  droits  et  de  biens.  Le  duc  Henri 
reçut  les  villages  de  Wiesviller,  Wœlfling,  Remeringet  Grundviller  (arron- 
dissement de  Sarreguemines);  il  abandonna  au  comte  la  part  lorraine  dans 
les  villages  d'Œrmingen,  Siltzheim  et  Zetlingen,  ainsi  que  des  biens  par- 
ticuliers dans  la  vouerie  de  Herbitzheim. 

Le  24  mai  1623*,  le  même  comte  Louis  signa  avec  le  duc  Henri  un  traité 
ayant  pour  but  de  rendre  la  Sarre  navigable  de  Herbitzheim  à  Saarbruck, 
sous  la  réserve  des  droits  de  l'électeur  de  Trêves,  Lothaire  de  Metternich, 
à  qui  appartenait  le  village  de  Welferding,  dépendant  du  bailliage  de  Blies- 
castel. 

Il  est  inutile  d'ajouter  que  ce  traité  ne  fut  suivi  d'aucune  mise  à  exécution. 

XXI. 

Peu  d'années  plus  tard^  et  après  un  siècle  de  plaidoiries,  la  chambre 
impériale  de  Spire  rendit  enfin,  le  7  juillet  1629  (N.  St.),  un  arrêt  par  le- 
quel elle  restituait  au  duc  François  de  Lorraine  les  anciens  fiefs  de  l'évêché 
Vieux-Saarwerden,  Bouquenom  et  Wiebersweiler.  Tout  le  reste  fut  attribué 

1.  Baquoi,  \°  Herritzheim,  159. 

2.  Notice,  v°  Saltzbkonn. 
Durival,  la  Lorraine ,  II,  247. 

L'exploitation  des  salines  de  Saltzbronn  ne  fut  reprise  qu'en  1779. 

3.  Fr.  Köllner,  310. 

•i.  Dom.  Cal.  III;  17S,  pr.  111.  ccccxcij. 
o.  Fr.  Kollner,  320. 
Merian.,  Topnrj.  palalin.  Rheni,  44;  x"  SA.vuwEnnKN.  11  donne  le  texte  de  l'arrêt. 


—  89  - 

au  comte  de  Nassau-Saarbruck.  L'arrêt  était  bref  et  peu  clair.  Le  duc  de 
Lorraine  s'empressa  de  l'interpréter  à  sa  manière.  Le  24  juillet,  le  baron 
de  Serainchamp  notifia  l'arrêt  au  comte  Wilhelm-Louis,  et  six  jours  après, 
à  la  tête  de  quelques  milliers  d'hommes  avec  du  canon,  il  se  mit  en  pos- 
session non  pas  seulement  du  comté  de  Saarwerden  tout  entier,  mais  en- 
core de  toute  la  vouerie  de  Herbitzheirn,  y  compris  Keskastel,  Siltz- 
heim  et  Œrmingen.  Les  officiers  du  comte  de  Saarbruck  furent  expulsés  et 
les  habitants  se  virent  contraints  de  faire  hommage  au  duc. 

En  vain  le  comte  Wilhelm-Louis  obtint-il  de  la  chambre  impériale  de 
Spire  un  mandat  de  restitution*;  le  duc  persista.  Il  fit  arracher  les  armes 
de  Nassau,  ferma  les  temples  de  la  religion  réformée,  et  le  président 
Rousselot  enjoignit,  le  18  août,  à  tous  les  ministres  de  quitter  le  comté  et 
la  vouerie  dans  les  vingt-quatre  heures,  sous  peine  de  mort. 

A  Ilerbitzheim,  en  particulier,  les  fonctionnaires  et  les  ministres  furent 
expulsés;  les  documents,  comptes  et  papiers  de  toute  espèce  enlevés,  et 
toutes  les  propriétés  particulières  du  comte  de  Nassau  confisquées.^ 

Vers  le  même  temps,  le  duc  François  qui  s'occupait  à  fonder  à  Bouque- 
nom  un  collège  de  jésuites  pour  combattre  l'hérésie,  lui  attribua,  par  son 
ordonnance  du  i^''  décembre  1630'  tous  les  revenus  et  rentes  de  Ilerbitz- 
heim qu'il  s'était  fait  donner  par  un  bref  du  pape  Urbain  VIIL 

Le  duc  François  mourut  en  1632,  et  le  t=  octobre  le  duc  Charles  IV, 
son  successeur,  se  fit  rendre  hommage  dans  la  vouerie  de  Herbitzheirn 
aussi  bien  que  dans  le  comté  de  Saarwerden.* 

Mais  la  période  franco-suédoise  de  la  guerre  de  Trente  ans  venait  de 
commencer.  Bientôt  les  provinces  rhénanes  furent  envahies  par  les  troupes 
du  maréchal  Horn,"  et  son  lieutenant  dans  le  Westrich,  le  Rhingraff  Otto- 
Louis,  comte  de  Morhange,  repoussa  les  soldats  lorrains  qui,  depuis  1629, 
occupaient  la  vouerie  de  Herbitzheirn.' 

Dès  lors,  l'histoire  locale  disparaît  dans  cette  terrible  crise  qui  pesa  sur 
nos  provinces,  et  les  querelles  du  duc  de  Lorraine  et  du  comte  de  Saar- 
bruck demeurent  en  suspens  durant  tout  le  temps  de  l'occupation  française. 

Le  traité  d'Osnabruck  du  H  octobre  1648  entre  le  roi  de  Suède  et 
l'empereur,  réserva  les  droits  de  la  maison  de  Nassau  sur  le  comté  de 
Saarwerden,  mais  ce  n'est  que  par  le  traité  de  Nuremberg  du  vf  juillet 

I.  MinulafidH  pœnrile  de  reslilupialo ,  item  de  relnxando.  a/>ducc/tdo  luilite  et  (iniplius 
non  ofTcndendo  smc  clausula  (15  août  1G29). 
•2.  Fr.  KöUiier,  321,  322. 

3.  Rogéville,  Dict.  hist.,  v°  Culléue. 

4.  Mcriaii.  Zugab  ellichc.  oh.  Rheinisch  Craijs  Standen.  17;  v"  Saarwehue.n. 

5.  Fr.  Kölliicr.  321. 


—  00  — 

1650  que  ces  droits  l'ureiil  définitivemenl  consacrés'.  Toulelbis  le  duc 
Charles  IV  réclamait  une  indemnité  d'un  million  de  florins;  d'un  autre 
côté,  les  seigneuries  contestées  étaient  toujours  aux  mains  du  roi  de  France, 
la  restitution  prescrite  par  les  traités  ne  fut  point  opérée. 

En  1659',  le  comte  de  Saarbruck  porta  de  nouveau  ses  réclamations 
devant  la  chambre  impériale;  cette  fois  il  devait  réussir. 

Le  28  février  i66i  ',  un  traité  signé  à  Paris  entre  le  cardinal  Mazarin 
et  le  duc  de  Lorraine  restitua  au  duc  tous  ses  États.  Par  l'article  xxiv  de  ce 
traité,  le  roi,  comme  garant  du  traité  de  Munster,  réserva  tous  les  droits 
du  comte  de  Nassau -Saarbruck  sur  le  comté  de  Saarwerden  et  sur  la  pré- 
vôté de  Herbitzheim,  droits  qui,  du  consentement  du  duc,  devaient  être 
soumis  à  la  chambre  impériale  de  Spire. 

Après  de  longues  et  nombreuses  péripéties ,  la  diète  de  Ratisbonne  obligea 
enfin  le  duc  de  Lorraine  à  restituer  ce  comté  et  cette  vouerie  tant  disputés 
et  à  s'en  tenir  aux  trois  locahtésqui  lui  avaient  été  accordées  par  la  chambre 
impériale  de  Spire,  en  1629,  c'est-à-dire  Vieux -Saarwerden,  Bouquenom 
et  Wiebersvveiler.  '^ 

Le  r^  octobre  1670,  les  commissaires  impériaux  remirent  les  comtes 
de  Nassau  en  possession  officielle  des  domaines  dont  ils  avaient  été  privés 
depuis  trente-cinq  ans.  Les  vassaux  de  Saarwerden  furent  réunis  le  13  à 
Lorentzen;  ceux  de  la  vouerie  furent  rassemblés  à  Herbitzheim  le  14,  el  là, 
en  grand  appareil,  au  son  des  trompettes,  les  commissaires  impériaux  et 
les  cinq  princes  de  Nassau^,  à  cheval,  firent  donner  lecture  de  la  décision 
de  la  diète,  délièrent  leurs  sujets  du  serment  de  fidélité  au  duc  de  Lor- 
raine, reçurent  leur  hommage  et  firent  planter  partout  des  poteaux  à  leurs 
armes. 

Après  quoi,  les  vassaux  furent  «  régalés  de  vin,»  et,  dit  le  chroniqueur, 
«  renvoyés  joyeux  à  la  maison.  »  " 

Mais  lorsque,  à  Herbitzheim  comme  ailleurs,  les  populations  catholiques 
réclamèrent  le  libre  exercice  de  leur  religion  et  le  droit  de  conserver  leurs 
préti-es,  on  leur  répondit  que  les  stipulations  de  la  paix  de  Munster  (1624) 
seraient  suivies;  qu'il  leur  était  parfaitement  loisible  d'aller,  eux  et  les  leurs, 

1.  Fr.  Ivöllaer,  333. 

2.  Ibid.  342. 

3.  Ü.  Calmet.  pr.  III,  Dlxij ,  DIxviij.  , 

4.  Fr.  Köllner,  343. 

5.  Les  comtes  Johann  d'Idstciu,  Jean-Louis  d'Otlwcilcr,  Gustave-Adolph  de  Saarbruck, 
Walrad  de  Usingen  et  Friederich  de  Weilburg. 

6.  üotfried's  flironik ,  l\ ,  rJ7  ap.  Köllner,  341,  345:  «  LusHij  luid  J'ràldich  nach 
haus  ...» 


—  91  — 

aux  églises  où  bon  leur  semblerait;  mais  on  leur  refusa  de  la  manière  la 
plus  absolue  le  droit  de  conserver  un  seul  prêtre  catholique.  ' 

Ainsi  fut  terminée  cette  contestation  plus  que  séculaire.  Les  comtes  de 
Nassau  ne  devaient  pas  jouir  longtemps  de  leur  succès. 

XXII. 

Dès  l'année  suivante  éclata  cette  fameuse  guerre  de  Hollande,  sous  le 
prétexte  de  laquelle  la  France  envahit  de  nouveau  la  Lorraine  et  les  pro- 
vinces rhénanes.  En  1672  et  1673,  les  armées  françaises  se  livrèrent  dans 
les  pays  au  delà  de  la  Sarre  à  ces  horribles  dévastations  dont  les  cruels 
souvenirs  sont  encore  vivants  aujourd'hui  ;  puis,  en  1680,  la  chambre  royale 
de  Metz  rendit  ses  célèbres  Arrêts  de  réunion ,  par  lesquels  elle  revendiqua 
pour  la  couronne  de  France,  à  divers  titres,  une  foule  de  seigneuries,  parmi 
lesquelles  les  comtés  de  Saarbruck  et  de  Saarwerden.  Toutefois,  le  roi  se 
contenta  d'en  réclamer  la  suzeraineté,  et  la  comtesse  Éléonora-Clara,  douai- 
rière du  comte  Gustave-Adolf  de  Nassau-Saarbruck,  dut  faire  hommage  à 
la  chambre  royale  de  Metz,  le  9  janvier  1681,  au  nom  et  comme  ayant  la 
garde  noble  de  ses  enfants  mineurs.  ^ 

Dès  lors,  une  ordonnance  du  bailliage  épiscopal  de  Vie  enjoignit  aux  su- 
jets et  vassaux  du  comté  de  Saarwerden  et  de  ses  dépendances,  de  prêter 
de  nouveau  serment  aux  comtes  de  Nassau-Saarbruck, 

XXIII. 

Une  autre  contestation  allait  s'élever,  moins  menaçante  cependant  que  les 
précédentes. 

Le  duc  Charles  IV  de  Lorraine  avait  eu  de  Beatrix  de  Cusance,  princesse 
de  Cantecroix,  un  fils  naturel,  Charles-Henri,  prince  de  Vaudemont.  Il 
portait  à  ce  fils  une  affection  profonde,  et  il  avait  conçu  l'idée  de  lui  créer 
un  grand  fief  au  milieu  de  ses  États.  Dès  le  19  mars  1667,  il  lui  avait  donné 
le  comté  de  Falkenstein;  le  13  novembre  suivant,  le  comté  de  Bitche;  deux 
jours  après,  il  y  avait  ajouté  le  comté  de  Saarwerden  et  la  baronnie  libre 
de  Fénestrange.  Enfin,  il  avait  joint,  à  ces  beaux  domaines,  les  commu- 
nautés de  Lixheim,  Marmoutier,  Saareck  et  Saaralbe,  et  il  avait  résolu  de 
demander  à  l'Empereur  d'en  former  un  État  souverain  et  d'ériger  ces 
belles  baronnies  en  «  duché  et  principauté  de  Saarland  et  de  l'Empire  ». 

1.  Fr.  Köllner,  3i5. 

2.  Fr.  Küllner,  372:  Eleonora  Clara,  comtesse  de  Holieiilohe  et  Gleichen.  Le  comte 
Friedericli  Ludwig,  comte  d'Ottweiler  (et  eu  1723  de  ^Saarbruck),  lit  hommage  avec  elle  i)uiif 
les  parts  qu'il  possédait  par  indivis  avec  ses  cousins. 


—  92  — 

Charles  IV  étail  mort,  en  1675,  sans  avoir  pu  obtenir  celte  érection; 
mais  le  prince  de  Vaudemont  avait  la  propriété  nominale  de  tons  ces  fiefs. 

En  iG8i,  il  avait  fait  faire  ses  aveu  et  dénombrement  à  la  chambre  royale 
de  Metz,  et  le  IG  janvier,  il  en  avait  obtenu  une  ordonnance  de  mise  en 
possession. 

Armé  de  cette  ordonnance,  il  fit  intimer  aux  baillis  de  Nassau  d'avoir  à 
évacuer  le  comté  de  Saarwerden  et  la  vouerie  de  Herbitzheim.  Une  pro- 
testation fut  opposée  à  ces  prétentions,  et  il  s'éleva  devant  la  chambre 
royale  un  nouveau  procès  qui  était  encore  pendant  en  1683,  époque  à  la- 
quelle le  procureur  général  reçut  du  roi  l'ordre  de  faire  débouter  le  prince 
de  Vaudemont  de  ses  prétentions  sur  le  comté  de  Saarwerden.' 

A  cette  même  époque  (1683)  fut  opérée  la  réunion  à  la  France ,  qui  mit 
sous  le  sceptre  de  Louis  XIV  la  Lorraine  et  ses  enclaves.  Le  comte  Louis- 
Crato  de  Saarbruck  était  au  service  de  la  Hollande,  Tous  ses  domaines 
furent  confisqués  et  suivirent  les  destins  de  la  Lorraine  jusqu'à  la  paix  de 
Ryswick(1607).' 

Par  suite  de  cette  paix,  le  coriitc  de  Saarwerden  et  la  vouerie  de  Herbitz- 
heim revinrent  définitivement  aux  princes  de  Nassau,  furent  possédés  indi- 
visément par  eux,  et,  suivant  le  pacte  de  famille,  les  reprises  en  furent 
faites  par  le  prince-chef  de  la  maison. 

Dès  lors,  le  calme  et  la  paix  revinrent  à  ces  petites  seigneuries  aussi  cruel- 
lement éprouvées  par  les  événements  que  l'avaient  été  leurs  grandes  et 
non  moins  malheureuses  voisines,  l'Alsace,  la  Lorraine  et  les  provinces  rlié- 
nanes. 

XXIV. 

Par  suite  de  différents  pactes  de  famille  intervenus  entre  les  membres  de 
la  maison  de  Nassau,  le  comté  de  Saarwerden  et  la  vouerie  de  Herbitz- 
heim étaient  demeurés  indivis.  Le  27  mai  1745  '\  un  partage  fut  opéré 
entre  les  deux  branches  de  Saarbruck  et  de  Weilburg  dans  la  proportion 
de  deux  tiers  pour  Saarbruck  et  un  tiers  pour  Weilburg.  Le  prince  de 
Nassau -Weilbourg  obtint  Herbitzheim,  Keskastel  et  Sültzheim ,  avec  les 
villages  de  liurbach,  Ey willer,  Pistorff,  Rimsdorf,  Schopperten,  WoUer- 
dingen  et  Zollingen,  Neu-Saarwerden  fut  le  chcf-licu  de  ce  bailliage  et  la 
résidence  seigneuriale.  * 

1.  Fr.  Kolliicr,  oT;'). 

2.  Ibid.  iOl,  4ö2. 

3.  Ibid.  454. 

4.  Barj^iiol ,  ô51. 


—  93  — 

Le  prince  de  Nassau-Saarbruck  établit  son  bailliage  à  llarskirchen  et 
eut  dans  son  lot  toutes  les  autres  communautés  de  l'ancien  comté  de  Saar- 
werden',  sauf  Bouquenom  et  Vieux-Saarwerden ,  qui  appartenaient  au  roi, 
aux  droits  du  duc  de  Lorraine. 

Après  la  mort  du  roi  Stanislas,  duc  de  Lorraine,  et  la  prise  de  posses- 
sion de  la  Lorraine  par  la  France,  deux  traités  intervinrent  entre  le  roi 
Louis  XV  et  les  princes  de  Nassau-Saarbruck  ^  et  de  Nassau-Weilbur"-.  ^ 

Ces  deux  traités  confirmaient  aux  princes  de  Nassau  tous  les  droits  con- 
sacrés par  les  conventions  antérieures,  portaient  rectification  des  frontières 
et  abolition  du  droit  d'aubaine.  Ils  ne  présentent  qu'une  circonstance  que 
nous  ayons  à  relever  :  la  vouerie  de  Herbitzheim  y  est  indiquée  comme 
appartenant  aux  deux  branches  de  la  maison  de  Nassau,  dans  les  propor- 
tions du  partage  de  1745,  c'est-à-dire  deux  tiers  pour  Saarbruck  et  un 
tiers  pour  Weiiburg. 

XXV. 

Les  princes  de  Nassau  conservèrent  la  paisible  possession  de  leurs  do- 
maines jusqu'à  la  Révolution  française.  A  cette  époque,  le  mouvement  qui 
se  produisait  dans  les  esprits  en  Lorraine  et  en  Alsace  ne  pouvait  épargner 
les  enclaves  allemandes.  Les  idées  révolutionnaires  envahirent  ce  petit  pays. 
Les  sujets  de  la  maison  de  Weilburg-  se  firent  surtout  remarquer  par  leur 
esprit  de  révolte  contre  les  officiers  des  princes  de  Nassau. 

Le  décret  du  19  novembre  1792,  par  lequel  la  Convention  engageait 
tous  les  peuples  voisins  de  la  frontière  à  se  soulever  contre  leurs  souve- 
rains fut  entendu.  De  toutes  parts  des  pétitions  furent  adressées  à  la  Con- 
vention et  demandèrent  la  réunion  à  la  France  des  enclaves  relevant  de 
l'Empire.  Dans  sa  séance  du  14  février  1793*,  la  Convention  entendit  un 
rapport  de  Carnot  sur  cette  question  ;  le  comité  diplomatique  proposa  et  la 
Convention  rendit  immédiatement  un  décret  par  lequel  le  comté  de  Saar- 
vverden  et  la  vouerie  de  Herbitzheim  se  virent  réunis  à  la  République  fran- 


1 .  Altwiller. 

Eschwiller. 

Otlwiller. 

Baerendorfl. 

Gocrlingeii. 

Ramvillcr. 

Berg. 

Harskirchen. 

Rexiiigen. 

Bissen. 

Hijisingeii. 

Sicwiller. 

Bust. 

Hirschland. 

Thal. 

Butten. 

Ivirchberg. 

Weyor. 

Diedendorff. 

liOrentzen. 

Willer. 

Domfessel. 

Mackwiller. 

WolirskirclKTn 

Drulingeii. 

OHrmingen. 

2.  Ordonnances  de  Lorruine,  XI,  312  :  15  févr.  1706,  30  avril  17GS. 

3.  Ibid.  XIII,  540  :  24  janvier,  2G  avril  1770. 

4.  Chastellux,  Territoire  de  la  Moselle  ,  102,  103. 


_  u  — 

çaise.  Les  biens  domaniaux,  les  propriétés  privées  des  princes  furent  confis- 
qués, la  maison  de  Nassau  perdit  un  revenu  d'environ  80,000  iloiùns,  et 
toutes  les  réclamations  qu'elle  porta  à  la  barre  de  la  Convention  furent 
considérées  comme  non  avenues.  «  Les  habitants  se  sont  affranchis  eux- 
mêmes,  répondit-elle  en  passant  à  l'ordre  du  jour ,  et  le  peuple  français 
doit  être  favorable  à  tous  ceux  qui  cherchent  la  liberté  !  » 

Jules  Tiiilloy. 


ÂBBESSES  DE  HERBITZHEIM. 


Fin  du  XI 1*^  siècle.  Sophie. 
1292.  II.  (Ilaula): 

citée  en  1302  :  Aule.  - 

—  en  1316:Haula. 

—  en  1323:  Ilaula. 
1338.  Elisabeth. 


1345.  Ilyllegard. 

1518.  Benigne  Kreutzinn  owKreutz. 
Avole.     1544.  Amaha  von  Altorff,  genannt 
Wollenschlägerinn. 
1554.  Johanna,  comtesse  deNassau- 
Saarbrück  1 1556. 


I.  Maison  de  SaarAverden.' 

Fridericus  I ,  cornes  de  Saarwerden,  1131. 
Ux.  Gertrudis. 

Volniarus,  circa  1150. 
Ux.  Stephania. 


Liidovicus  I , 
1172-1185. 


Lutlovicus  II , 
1172-1176. 


Ludovicuslll,  cornes  de  Saarwcrdeu,  Heiiriciis, 

1223-1246.  dorn,  de  Kirkel 

Ux.  Agnes,  comit.  Geminipontis/ f  124-2  improlis. 

Ludovicus  IV,     lienricns, dorn,  de  Kirkel,  1243. 
I  1242.        postpatiis  ol}it.  coin,  de  Saarwerd. 
Ux.  Elisabeth, 
vidua  et  lutrix  1278. 

Johannes  1 ,  com.  Saarw. 
t  1310.  Ux.  Fcniaca. 


N.  Filia 

Ux.  N.  dom.  de 

Siersberg. 

Johannes, 

dom.  de  Siersberg  et 

Kirkel. 

Ux.  Elisabeth. 


Fridericus  II ,  cornes. 

Ux.  Agnes. 

1323-1361. 


Johannes, 
canon.  Spirens. 


Johanna. 
Ux.  Cnno  de 
Falkenstein. 


Nicolans, 
pra^p.  S.  Arnualis. 

Gisela. 
Ux.  N.  de 
Duna. 


Johannes  H , 
cornes  Saarwerd.  1344.  t  a.  1375. 

Ux.  Clara , 
hieres  de  Vinstingen,  vidua  1375. 


Henricus  11,  conies  Saarw. 

1378  t  1397  sine  ha;red. 

Ux.  llerziand ,  filia  ha;res 

Ulrici  de  Rappoltstein. 


Walpiirgis 

nupsit  1376  Friderico 

coni.  in  Mœrs,  Satori 

fam.  Mœrs  et  Novœ  Saarw. 


Fridericus 

archiep.  Colon. 

1370-1414. 


Ilildegardis 
U\.  Job.  de  Limburg. 


1.  Kxtrait  de  Croll,  Orirj.  liipont. ,  I,  p.  12(!-14!i;  tah.  I. 


—  95  - 

Tl.  Maison  de  Mœrs-Saar^verden. 

(essai.)  ' 

Friederich ,  comte  de  Moers  et  Saarwerden. 
Ep.  Walburge,  comtesse  et  héritière  de  Saarwerden. 


Frietlericli,        Jean,  C"*  de  Saarwerden  Tliiedricli,                 Heinrich, 

C"'  de  MceiA                    en  14."2U.  Arch.  de  Cologne      Ev.  de  Munster 

t  s.ins  enfants.  Ep.  Adeiiieid  de  Geroldseck.  14U-1454  f  1450.     UlötüSO. 

Kriedericli ,  Walpurgis 

tué  à  Dulgnéville  en  1431.  Ep.  Jean  de  Lœn-Heinsberg. 

Jacob,  C"^  de  Saarwerden,  1449.  Jean. 

Ep.  1"  Anastasia  de  Leiningen.     S"  Isabel  de  Glynies. 


Nicolas,  G'^  de  Saarwerdeii. 
Ep.  Barbara  de  Vinstingen. 

Johanna  de  Saarwerden. 

Ep.  en  1478  le 

Wild  et  Rheingraf  Jean  VI , 

C''^  de  Morhange. 


Walburgtl46i. 
Ep.  Jacob, 
G'*'  de  Liciiteraberg. 


Jean , 

C'^  de  Saarw. 

t  1507. 

Ep.  Anna  de  Berg 

Katharina  de  Saarw. 

Ep.  en  1506  le 
C"=  Jean-Louis  de 
Nassau-Saarbruck. 


Walrani, 

Ev.  de  Munster 

en  1450. 


Jacob, 

G'"  de  Saarw. 

Ep.  Beatrix 

de  Salni. 

Jean  Jacob , 

dernier  C"^  de 

Saarwerden. 

t  1527. 


III.  Maison  de  Nassau-Saarbruck.^ 

Johann,  comte  de  Nassau  f  1371. 
Ux.  Johanna,  comtesse  de  Saarbruck. 

Philipp  I,  G*«  de  Nassau  et  Saarbruck  t  1429. 
V\   Elisabeth  de  Lorraine,  G'"'*''  de  Vaudeniont  f  1455. 


Philipp,  G'"  de  Weilburg  1418  f  1492. 
Ux.  1"  Margarelha  von  Lœn  f  1440. 
'2"  Veronika  von  Sayn  f  1500. 

Johann  f  1480. 
Ux.  Elisabeth,  Landgriefin  von  Hessen. 

Ludwig  t  1523. 
Ux.  Maria  v.  Nassau-Wiesbaden. 

Philipp!  1559. 
Ux.  1"  Elisabeth  v.  Sayu. 
2°  Anna  v.  Mansfeld. 
3"  Anialia  v.  Isenburg. 


Johann  III,  G'«  de  Saarbruck  1423  |  1472. 

Ux.  1°  Johanna  von  Lœn-Heinsberg  f  1469. 

2«  Elisabeth  von  Wurtemberg  f  1490. 

Johann  Ludwig  1472  f  1545. 
Ux.  Katharina,  G"'*«''  de  Saarwerden  f  1547. 


Philipp  II 

Johann  IV 

Adolf 

Johanna 

t  1554. 

t  1574. 

t  1559. 

t  1550. 

G'«"  de  Saar- 

Ottweiler- 

Kirchheim- 

Abbesse  de 

bruck. 

Honiburg. 

Saarwerden. 

Herbitz- 

Cle 

de  Saarbruck. 
1554. 

heim. 

Philipp  III  t  1602. 

Weilburg,  Saarbruck,  Saarwerden. 

Ux.  1»  Erika  v.  Manderschcidt  f  1581. 

2»  Elis.  V.  Nassan-Katzenellenbogen. 


Wilhelm  f  1597. 


Johann  Gasiniir  |  1602. 


Albrecht  t  1593. 

Weilburg,  Ottweiler,  Homburg, 

Kircbheim ,  Lahr. 

Ux.  Anna  v.  Nassau-Katzcnellenbogen. 

Ludwig  t  1627. 
Ottweiler,  Homburg,  Kirkel,  Lahr, 

Weilburg,  1602.  Saarbrücken, 

Saarwerd.  1605.  Wiesbaden, Idstein. 

Ux.  Anna  Maria  Elisabeth , 

Landgrœfin  v.  Hessen. 

1.  Les  éléments  de  cet  essai  ont  été  extraits  de  divers  actes  et  documents  rapportés  par  le.s  auteurs 
déjà  cités  et  aussi  d'un  mémoire  intitulé  :  .  Kurzgefasste  Geachichte  des  Wild-  und  lleingi-iiflirhen 
Hanses,  etc.  1760.  • 

2.  Fr.  Kœllner  ,  passhn.  —  Jlorori  ,  v"  NASSAf. 


96 


IV.  Maison  de  Nassau-Saarbruck  (suite). 

Ludwig,  comte  de  Nassau  et  Saarbruck,  etc.  f  1629. 
Ep.  Anna  Maria  Elisabeth ,  Landgraefin  von  Hessen. 


Wilhelm  Ludwig 

1 1640. 

Saaibruck,  Herbitzheim,  Saarwerden  ,  etc. 

Ep.  Anna  Amalia 

V.  Baden. 


Gust.  Adolf 

^    t  1677. 
C"  lie  Saarbr. 

Ep.Eleonora 
Clara 

V.  Hohciilolie. 


Joh.  Ludw. , 

Otiweiler 

t  1 690. 

Ep.  Doroth. 

Katharina 

Pfaltzgiœfin. 

Friedrich 
Ludwig 

ti728. 
Ep.   1°  Christ. 

V.  Ahlefeld. 

2°  Luise Sopli. 

V.  Hanau. 


Carl  t  1"75. 
Prince  de  Usingen. 
Ep.  Christiana  Wilhelmina, 
Herzogin  zu  Sachsen-Eisenach. 

Carl  Wilhelm     Friedr.  Aug. 
t  1803.  Duc. 

Duc  her.  de  Saar-    f  1816. 
brücken. 


Walrad 

t  1702. 
Uüingen. 

1°  Catherine 

de  Ciov. 

S^Magdal. 

de  Lœweiist. 


Johannes 

t  1688. 
Id.iitein,  Wiesbad.,  Saaiw 

Ep.  -loSybilla  Magdaleina 

V.  Baden-Douilach, 

2»  Anna  v.  Leiningen. 

G.  A  Samuel 

t  172L 

Prince  de  Idstein. 

Henriette  Dorothea 

V.  Œltingen. 


Ludwig 

Carl 

Crato 

Ludw 

t  17l5. 

1  172.3. 

C."  de 

C'de 

Saar- 

Saar- 

bruck. 

bruck. 

Wilhelm  Heinrich 

t  1718. 
Prince  de  Usingen. 

Ep.  Ch.  Amalia 
•.  Nassau-Dillemhurf 

"Wilhelm  Heinrich  t  1"68. 
Prince  de  Saarbrücken, 
Saarwerden,  etc. 
Ep.  Sophia  Erdmuth  v.  Erbach. 

Ludwig  t  1794. 
Prince  de  Saarbrücken 
Ep.  1°  Wilhelmina  v.  Schwartzen- 
burg-Rudolstadt. 
2°  Katharina,  gr.  v.  Oltweiler. 

Heinrich  Karl  Albrecht  f  1797, 
dernier  prince  de  Saarbrücken. 
Ep.  Marie-F*<"-Maximilienne , 

pr.  de  S'-Maurice  Montbarrey. 


Ernst  Casimir  f  1G55. 

Weilburg,  Kirchlieim,  Saar- 
Avejdeu,   Ilombur;;. 

Ep.  Anna  Maria 
V.  Sayn  Wittgenstein. 


Friedrich  f  1675. 

Comte  de  Weilburg. 

Ep.  Elisab.  Christ,   v.  Sayn 

Wittgenstein. 

Johann  Ernst  f  1719. 

Comte  de  Weilburg. 

Ep.  Maria  Polyxena  v.  Lei- 

ningen-Hartenburg. 

Carl  Auguste  f  1753. 

Prince  de  Weilburg. 

Ep.  A.  Frider.  W.  deNassa^i- 

Idstein. 

Carl  Christian  f  1788. 

Prince. 

Ep.  Carol.  de  Nassau-Orange. 

Friedrich  Wilhelm  t  18 IG- 

Duc  de  Nassau. 
Ep.  L.  Isab.  A.  A.  de  Kirch- 
berg. 


Wilhelm  Georg  t  1839. 

Duc. 

Ep.  Duch.  Louise  de  Saxe- 

Altenbourg  f  1825. 


Adolf,  né  24  juillet  181' 
Duc  régnant  de  Nassau. 


L'ÉGLISE  DE  WALBOURG. 


L'abbaye  de  Walbourg-  eut  une  origine  bien  modeste.  S'il  faut  en  croire 
une  ancienne  tradition,  conservée  par  Bernard  Herzog,  l'an  1074,  sous  le 
pontificat  de  Grégoire  VII,  deux  moines  bénédictins,  se  sentant  appelés  à 
l'apostolat  de  la  prière  pendant  la  lutte  qui  était  alors  engagée  pour  l'affran- 
chissement de  l'Eglise,  vinrent  demander  à  Thierry,  comte  de  Montbéliard, 
un  coin  de  terre  où  ils  pussent  servir  Dieu  dans  la  retraite  la  plus  profonde. 
A  cette  époque  la  forêt  de  Haguenau  s'étendait  bien  au  delà  de  ses  limites 
actuelles,  et  abritait  depuis  des  siècles  nombre  de  pieux  solitaires,  qui 
avaient  fui  le  bruit  des  hommes;  c'est  là  que  le  comte  Thierry  fît  conduire 
les  deux  moines,  qui  établirent  leur  cellule  près  d'une  source,  consacrée  à 
sainte  Walpurge,  et  défrichèrent  le  sol  autour  de  leur  habitation.  Grâce  aux 
libéralités  de  l'empereur  Henri  V,  de  Frédéric,  duc  de  Souabe  et  de  son  fils, 
Frédéric  Barberousse,  la  cellule  fit  bientôt  place  à  un  monastère,  auquel  le 
dernier  de  ces  princes  donna  le  rang  d'abbaye. 

Mon  but  n'est  pas  de  tracer  l'historique  de  cette  maison  religieuse.  Je  me 
bornerai  à  dire  que  sa  décadence  coïncide  avec  la  désastreuse  guerre  des 
Paysans;  en  1544,  elle  fut  incorporée  au  chapitre  de  Wissembourg;  en 
1685,  un  arrêt  du  Conseil  d'Etat  assura  la  propriété  de  ses  biens  au  sémi- 
naire de  Strasbourg,  qui  en  jouit  jusqu'à  la  révolution. 

Arrêtons  maintenant  les  yeux  sur  l'église,  la  seule  construction  qui  reste 
de  l'ancienne  abbaye.  Quelques  débris  de  sculptures,  qu'on  voit  à  l'extérieur 
de  la  nef  du  côté  sud,  sont  les  seules  traces  de  l'édifice  roman,  dans  lequel 
le  père  de  Barberousse,  le  grand  protecteur  du  jeune  monastère,  avait  trouvé 
sa  dernière  demeure.  L'église  actuelle  fut  élevée  par  l'abbé  Burckard  de 
Müllenheim  en  1456  ,  comme  l'indique  la  date  sculptée  à  l'entrée  du 
chœur,  au  bas  de  l'un  des  piliers  qui  soutiennent  la  tour.  C'est  une  con- 
struction très -simple  dont  le  chœur  seul  est  voûté,  et  qui,  malgré  les  dé- 
vastations de  tout  genre,  offre  une  série  d'objets  d'art  dignes  du  plus  grand 
intérêt. 

n«  SÉRIE.  —  T.  II.  —  (m.)  7 


—  98  — 

Je  commenc(3  i)ar  son  plus  précieux  Irésor,  pnr  les  vitraux  qui  garnissent 
cinq  fenêtres  du  chœur.  Une  légende  en  majuscules  qui  se  rapprochent  du 


caractère  romain,  nous  en  indique  la  date  et  nomme  le  donataire  des  Irois 
fenêtres  absidales  : 

M  •  CCGG  .  LXI  •  JOR  •  WRDEN  •  DISE  •  FENSTEB  . 
GEMACHT  •  IN    DISEN  •  KOR  • 

«L'an  1461,  on  exécuta  ces  vitraux  pour  ce  chœur.» 
La  plupart  des  panneaux  distribués  dans  les  deux  fenêtres,  qui  avoisinent 
celles  du  fond  de  l'abside,  sont  d'une  autre  main  et  paraissent  postérieurs 
de  quelques  années.  Un  grand  sujet  figurant  la  tentation  de  saint  Antoine 
porte  l'écusson  de  Pierre  Schwartz,  qui  fut  abbé  de  Walbourg  depuis  1479 
à  1519. 

Lors  du  congrès  archéologique  de  Strasbourg  en  1859,  j'ai  donné  une 
description  assez  détaillée  de  cette  belle  collection  de  verrières'.  Je  me 
bornerai  donc  aujourd'hui  à  dire  un  mot  de  leur  état  de  conservation  et 
d'émettre  nn  vœu  au  sujet  d'un  classement  plus  rationnel  qu'on  pourrait 
donner  aux  panneaux  des  deux  fenêtres  extrêmes. 

Les  trois  grandes  verrières  du  fond  de  l'abside ,  consacrées  à  la  légende 
de  la  sainte  Vierge  d'après  le  naïf  récit  des  évangiles  apocryphes,  à  la  vie 
de  Jésus-Christ  et  à  celle  de  saint  Jean-Baptiste  ,  ont  très-peu  souffert  et 
n'offrent  que  de  petites  lacunes  faciles  à  remplir. 

Il  n'en  est  pas  de  même  des  deux  baies  adjacentes,  dont  les  sujets  infé- 
rieurs occupent  seuls  la  place  primitive  et  n'ont  pas  été  avariés  par  suite  de 
transports  et  de  déclassements  toujours  funestes  et  regrettables.  Les  frag- 
ments, rapportés  probablement  de  la  nef,  appartiennent  à  la  représentation 
des  douze  apôtres,  à  une  série  de  saints  et  à  un  vitrail  figurant  les  quinze 

1.  Voy.  Co))!/rès  nrdiéol.  de  France  ,  session  XXVI  ,  p.  344-863. 


—  99  — 

signes  précurseurs  du  jugement  dernier.  Les  six  panneaux  qui  restent  de 
ce  sujet  fort  curieux,  et  dont  je  ne  connais  pas  d'autre  exemple  en  Alsace, 
ont  été  le  plus  maltraités,  mais  pourraient  encore  devenir  l'objet  d'une 
restauration.  Ils  garnissaient  primitivement  la  fenêtre  occidentale  de  la  nef, 
au-dessus  delà  tribune  des  orgues,  et  n'auraient  jamais  dû  quitter  cette 
place,  où  depuis  le  treizième  siècle,  les  peintres  à  l'intérieur  des  églises,  les 
statuaires  à  l'extérieur  de  la  façade,  aimaient  à  retracer  l'émouvante  scène 
des  dernières  assises  du  Christ. 

S'il  faut  abandonner  l'idée  de  les  y  replacer,  parce  que  les  ressources  de 
la  commune  ne  permettent  pas  de  songer  à  une  restauration  complète  du 
vitrail,  on  pourra  du  moins  les  disposer  dans  l'une  des  fenêtres  adjacentes 
du  chœur,  aujourd'hui  garnies  de  verre  blanc.  On  procéderait  de  même  avec 
les  neuf  grandes  figures  de  saints,  placés  au  bas  des  fenêtres,  dont  la  partie 
supérieure  pourrait  être  garnie  de  grisailles  ou  de  mosaïques  en  harmonie 
avec  le  ton  des  sujets  historiés.  Ces  précieux  restes,  qui  sont  pêle-mêle  et 
dont  plusieurs  sont  devenus  presque  méconnaissables  par  suite  de  malheu- 
reux remplissages,  reprendraient  leur  valeur,  non-seulement  pour  l'artiste 
elle  connaisseur,  mais  encore  pour  le  simple  fidèle.  J'ajouterai  que  sous  le 
rapport  de  l'exécution  artistique  et  du  goût  qui  a  présidé  à  la  composition 
des  cartons,  la  plupart  de  ces  fragments  sont  bien  supérieurs  aux  petits 
sujets  des  trois  fenêtres  absidales,  et  rappellent  tout  le  fini  de  nos  riches 
verrières  de  Sainte-Marie-Madelcine  à  Strasbourg.  D'après  la  tradition  locale, 
les  vitraux  de  Walbourg  furent  exécutés  dans  les  propriétés  de  l'abbaye 
même,  dans  un  canton  désigné  encore  de  nos  jours  sous  le  nom  de  «  Glas- 
platz.  » 

Aux  peintures  sur  verre  qui  décoraient  l'église  de  Sainte- Walpurge,  l'art 
chrétien  avait,  comme  dans  la  plupart  de  nos  anciennes  églises ,  ajouté  les 
peintures  murales.  Il  y  a  cinq  ans,  lors  d'une  visite  que  je  fis  à  l'église  de 
Walbourg,  je  crus  entrevoir  à  travers  le  badigeon  du  chœur  une  série  de 
nimbes,  que  je  supposais  appartenir  aux  douze  apôtres,  si  fréquemment 
représentés  dans  le  sanctuaire*.  Quelques  essais  de  débadigeonnage,  opérés 
il  y  a  peu  de  jours,  ont  justifié  les  prévisions  que  je  formulais  alors  timide- 
ment, et  ont  fait  paraître  à  la  lumière  la  série  des  apôtres,  ainsi  que  les  quatre 
docteurs  de  l'Église  latine.  Ces  derniers  occupent  les  angles  formés  par  la 
rencontre  des  pans  de  l'abside,  tandis  que  les  apôtres  sont  rangés  des  deux 
côtés  de  l'avant-chœur,  au-dessus  des  stalles.  La  série  commence  du  côté 
de  l'épître.  Autour  de  chaque  apôtre,  un  long  phylactère  jiorte  le  verset  du 

1.  Voy.  Congrès  ni-chéol.  de.  France,  session  \XV,  ji.  -lis. 


—  100  — 

Credo,  dont  une  antique  tradition  lui  attribue  la  composition.  Ainsi  la  ban- 
derole de  saint  Pierre  donne  en  beaux  caractères  minuscules  les  mots: 

crtbD  in  unum  beum  patrcm  omnipotentem  creotorcm  celi  et  terre 

Saint  Paul,  le  treizième  apôtre,  placé  à  la  fin  de  la  série  après  saint  Ma- 
thias et  vis-à-vis  de  saint  Pierre,  a  l'inscription  suivante: 

ego  ultimns  upostolorum  qnt  oent,  (upoütotus)  non  sum  bipns  oocari 

Les  quatre  docteurs  de  l'Eglise,  de  dimensions  un  peu  plus  grandes,  pa- 
raissent d'une  autre  main  et  ofTrent  plus  de  mérite  artistique.  Saint  Grégoire 
porte  Ja  tiare  ornée  de  trois  couronnes  et  la  croix  à  trois  branches ,  dont 
celle  du  milieu  est  plus  longue  que  les  deux  autres.  Par  une  erreur  assez 
curieuse  à  signaler,  le  peintre  a  omis  la  colombe  divine  qui  accompagne 
toujours  ce  père  de  l'Eglise  dans  les  anciennes  images,  et  a  donné  ce  symbole 
du  Saint-Esprit  à  saint  Augustin.  Ce  docteur  est  le  mieux  conservé,  quanta 
l'ensemble  des  contours.  Comme  saint  Ambroise,  dont  la  majestueuse  figure 
se  dessine  près  de  lui,  il  tient  d'une  main  un  livre,  de  l'autre  la  crosse  au 
volute  richement  ouvragé  et  muni  du  sudarium.  Le  quatrième  est  saint  Jé- 
rôme vêtu  en  cardinal  et  tenant  une  croix  double. 

Chacun  des  phylactères  qui  se  déroulent  autour  de  ces  images  présente 
une  inscription  ayant  rapport  à  la  sainte  Eucharistie.  Les  images  n'étant 
pas  entièrement  débadigeonnées,  je  n'ai  pu  hre  exactement  que  les  deux 
inscriptions  du  fond,  appartenant  à  saint  Augustin  et  à  saint  Ambroise.  Les 
voici: 

ficet  fignro  pnnts  et  ntni  ntbentnr  nil  tomen  nlinïi  quom  coro  cljristi 
et  songnts  post  conoersionem  crebeubo  est  •  3  •  Jlugustinns  boct'  ■  * 

Jn  5inplî8  porcionib'  cl)rist'  îiomtn'  tot'  est,  non  per  singnlûs 
minnitur,  seD  tntegrnmin  singulis  tenemus-  S-  Jlmbrosins  boctor-  ' 

Espérons  qu'en  opérant  avec  soin  le  débadigeonnage  de  toutes  ces  figures, 
les  deux  autres  inscriptions  dont  je  n'ai  que  des  fragments  qui  m'en  donnent 
bien  le  sens  général,  mais  ne  me  permettent  pas  d'offrir  une  transcription 
authentique,  seront  entièrement  lisibles.  Il  est  possible  qu'au-dessus  des 
quatre  pères  de  l'Église,  on  trouvera  les  symboles  des  évangélistes  que  l'on 

1.  «  Quoique  l'œil  n'aperçoive  que  rtapparence  du  pain  et  du  vin ,  après  la  consécration , 
la  foi  ne  doit  admettre  autre  chose  sous  ce  voile  que  le  corps  et  le  sang  de  Jésns-Christ. 
Saint  Augustin  docteur.» 

2.  «  Le  Seigneur  Jésus-Christ  est  tout  entier  dans  chaque  parcelle  de  l'hostie,  il  ne  perd 
rien  par  la  fraction,  dans  chacune  nous  recevons  le  Sauveur  tout  entier.  Saint  Ambroise 
docteur.  » 


—  101  — 

aimait  mettre  en  rapjjort  avec  les  docteurs.  Nuus  eu  avons  un  bel  exemj)le 
dans  la  chapelle  de  Saint-Michel  à  Kaysersberg,  qui  date  à  peu  près  de  la 
même  époque  que  l'église  de  Walbourg.  * 

On  découvrira  peut-être  également  les  inscriptions  dont  parle  Herzog. 
Quelques  essais  de  débadigeonnage  que  je  fis  au-dessus  de  la  porte  de  la 
sacristie  actuelle  m'ont  fait  reconnaître  celle  qui  parle  de  la  fondation  de 
l'abbaye,  une  autre,  décorant  la  face  occidentale  de  la  sacristie  et  que  j'ai 
trouvée  cachée  sous  le  plâtre,  est  maintenant  lisible  à  l'exception  des  deux 
derniers  mots.  En  voici  la  transcription,  qui  constate  que  celte  construction 
a  été  primitivement  une  chapelle  des  anges  : 

|)resens  saccUnm 
in  l)onore  3anctorum  ^iBirlinelis  (ßubritlis 

lii)pt)aclis  et  oTm  ûngclorum 
in  odua  opostolorum  yctri  et  |)ault 
a  e3acoba  tfo  supraMcto 

(consccrtttum  est)' 

Une  des  inscriptions  mentionnées  par  Herzog  el  (ju'on  retrouvera  sans 
doute  sous  le  badigeon  du  chœur ,  nous  apprend  que  ce  prélat  Jacques 
était  évêque  de  Bethlehem  m  pf/r//6?«,  et  vicaire  général  de  l'évèque  de 
Strasbourg.  Ladite  chapelle,  dont  les  murs  sont  encore  ornés  des  croix  de 
consécration  ,  est  construite  entre  trois  contre-forts  et  présente  tous  les 
caractères  de  la  seconde  moitié  du  quinzième  siècle.  La  porte  sculptée  offre 
au  milieu  de  délicates  ciselures  architectoniques,  deux  écussons  dont  l'un 
appartient  au  constructeur  de  l'église,  l'abbé  Burckard  de  Müllenheim;  le 
second ,  portant  trois  roses  posées  deux  et  une  et  séparées  par  une  fasce, 
ne  m'est  pas  connu. 

1.  I^es  docteurs  de  l'Église  y  sont  représentés  dans  les  iiualre  seclioiis  Iriangiilaires  de 
l'une  des  voûtes.  Au-dessus  de  chacun  d'eux  ou  voit  une  des  ligures  du  tétraniorphe  avec 
une  inscription  qui  donne  les  sens  du  symbole.  Voici  les  légeudes ,  moins  une  ,  presque 
complètement  effacée  : 

^0m(j  siptficat  l)omanitntfm  cristt*  solutus  ^îlntljcus  — 

Au-dessous  de  riioninie  ailé,  S.  Amhroise. 

P0US  (sic)  signifient  pnssionem  crtsti  *  sanctns  fucns  euinnoelisto 

Au  bas  du  veau  de  sacrilice,  S.  Augustin. 
^qnila  signifient  nsrensionrm  rristi  «  snnctns  ^o|)nnnes 

Au-dessous  de  l'aigle ,  S.  Jérôme. 

2.  «  Cet  oratoire  a  été  consacré  en  l'honneur  de  saint  Michel ,  de  saint  Gabriel ,  de  saint 
Raphaël  et  de  tous  les  saints  anges ,  dans  roctave  de  la  fête  des  apôtres  saint  Pierre  et 
saint  l'aul  par  l'évèque  Jacques  susnommé.  » 


—   102  — 

Les  sciilplures  de  celte  iiiléressante  porte  ne  sont  pas  les  seules  ni  les 
plus  importantes  de  l'église.  Oulre  plusieurs  statues  en  bois*,  aujourd'hui 
reléguées  sur  les  deux  petites  tribunes,  qui  se  trouvent  à  l'entrée  du  chœur 
contre  les  parois  du  clocher,  je  signalerai  les  stalles  du  quinzième  siècle  et 
surtout  un  charmant  petit  reliquaire  qui  décore  l'autel  de  Sainte- Walpurge. 

Les  stalles  du  chœur ,  d'un  dessin  qui  rappelle  les  meilleures  traditions 
du  commencement  du  quinzième  siècle,  n'ont  pas  subi  de  mutilation  no- 
table. Un  s'est  borné  à  remplacer  les  banquettes  de  devant  par  un  travail 
moderne  et  de  les  peindre  en  noyer. 

Les  autels  latéraux  sont  restés  intacts ,  à  l'exception  des  deux  grandes 
statues  qui  ont  reçu  une  couche  de  peinture.  Ces  autels  sont  semblables  et 
ne  manquent  pas  d'une  certaine  élégance  de  forme.  Deux  colonnes  corin- 
thiennes reçoivent  la  retombée  d'un  arc,  qui  forme  une  espèce  de  dôme 
au-dessus  de  la  figure  décorant  l'autel.  C'est  d'un  côté  la  sainte  Vierge,  de 
l'autre,  sainteWalpurge  en  costume  d'abbessc.  Les  socles  de  ces  deux  grandes 
statues,  qui,  tout  en  se  ressentant  du  goût  de  l'époque  où  elles  furent  exé- 
cutées, trahissent  la  main  d'un  bon  maître,  présentent  chacun  une  sculpture 
en  bas-relief,  dont  l'une,  représentant  la  sainte  Cène,  peut  être  considérée 
comme  un  chef-d'œuvre.  C'est  une  composition  pleine  de  vie  et  de  mouve- 
ment qui  rappelle  la  sainte  Cène  de  Léonard  de  Vinci,  sans  en  être  une  imi- 
tation servile.  Je  pense  que  ce  travail  remonte  au  milieu  du  siècle  passé. 
La  chaire  est  d'un  goût  moins  pur.  Au-dessus  de  l'abat-voix  on  remarque 
un  ange  joulïlu  prenant  l'essor  et  embouchant  la  trompette. 

Le  dessin  ci-joint  du  reliquaire  de  sainte  Walpurge  me  dispense  d'entrer 
dans  le  détail  d'une  description  de  ce  beau  meuble  d'église. 

Tout  porte  à  croire  qu'il  y  avait  autrefois  un  jubé  à  l'entrée  du  chœur. 
En  montant  au  clocher,  on  voit  encore  la  porte  qui  menait  à  cette  tribune 
transversale,  et  l'œil  peut  suivre,  le  long  des  premiers  piliers  de  la  tour,  la 
trace  des  pierres  qui  en  formaient  l'arceau. 

Un  autre  monument  a  disparu  de  l'église  :  c'est  la  remarquable  custode 
en  pierre  dont  les  débris  se  trouvent  actuellement  dans  le  jardin  de  M.Saglio 
et  ont  été  adossés  contre  le  mur  extérieur  de  la  nef  Cette  œuvre  gracieuse, 
moins  g^rande  et  moins  riche  de  sculptures  que  celle  de  Haguenau  ou  de 
Baden,  l'emporte  sur  ces  deux  tabernacles  par  la  pureté  du  dessin  et  par 
l'exquise  élégance  de  forme.  La  Société  pour  la  conservation  des  monuments 
historiques  de  l'Alsace  voudra  s'associer  au  vœu  que  je  forme  de  voir 
bientôt  ce  charmant  édicule  replacé  dans  l'église,  après  être  devenu  l'objet 

1.  On  remai-qne  parmi  ces  slatucs  une  sainte  Vierge  et  une  sainte  Catlicrine,  qui  ne  sont 
pas  sans  morilc. 


-  103  — 


—  104  — 


1_ 

d'une  restauration  relativement  peu  coûteuse.  Le  socle  offre  une  série  de 
pénétrations  de  plans  d'une  richesse  de  combinaison  et  d'une  originalité 
telles  que  ne  les  présentent  que  les  plus  belles  œuvres  de  la  seconde  moitié 
du  quinzième  siècle.  Tout  près,  on  remarque  également  dans  le  mur  extérieur 
de  l'église  un  joli  bénitier  en  pierre  portant  l'écusson  de  la  famille  des 
Brechter, 

Je  termine  ma  notice  par  la  communication  des  signes  lapidaires  que 
j'ai  observés  dans  la  tour,  et  par  un  mot  sur  les  deux  grandes  pierres  tom- 
bales, qui  sont  dressées  contre  le  mur  de  l'église,  près  de  la  porte  d'entrée. 


1 


L'une  appartient  au  constructeur  de  l'église  actuelle,  à  l'abbé  Burckard  de 
Müllenheim,  dont  la  figure  taillée  en  bas-relief  est  abritée  sous  un  pinacle 
aux  formes  tourmentées  de  l'époque. 

L'inscription  donnée  par  Herzog  dans  son  troisième  livre,  folio  56,  a  été 
mal  copiée,  comme  on  verra  par  ma  transcription  que  voici  : 

+  Jlnn  •  btti  •  m''  •  cccc  ■  Irrir  •  nj  |  falûs  •  ^ulij  •  ©  •  Dencrûbtlis  • 
ûc  •  religiosus  •  pr  •  bus  •  |urcKI)arbits  1  be  •  Jïlnlnl)eim  •  <?lbbûs  1 
l)ijius    cenobij  ■  €uius  •  spus  •  ûput  •  3upcros  •  foeltcitcr  •  recnbct  * 

Un  hvre  est  placé  sous  la  tête  du  prélat,  preuve  que  la  pierre  était  étendue 
sur  le  sol.  Cela  nous  explique  pourquoi  la  dernière  partie  de  l'inscription 
est  devenue  presque  illisible.  Lors  d'un  nettoyage  fait  avec  des  ciseaux,  on  a 
malheureusement  dénaturé  la  première  lettre  du  mot  apud,  ce  qui  rend  la 
légende  presque  indéchiffrable. 

La  seconde  pierre  tombale  est  celle  du  successeur  de  Burckard,  de  l'abbé 
Pierre  Schwartz,  qui  présida  à  l'abbaye  pendant  quarante  années.  Sur  ce 

1.  «L'an  du  Seigneur  1479,  le  20  juin,  décéda  le  vénérable  et  pieux  seigneur  père  abbé  de 
ce  monastère  Burckard  de  Müllenheim.  Que  son  âme  repose  auprès  des  saints  et  jouisse 
du  bonheur  éternel.» 


—  105  — 

monument  la  tête  seule  est  en  bas-relief;  le  reste  de  la  figure  n'est  exécuté 
qu'au  Irait.  Deux  inscriptions  la  décorent;  l'une  en  caractères  minuscules, 
courant  tout  autour  de  la  pierre,  donne  les  litres  du  défunt,  la  date  de  sa 
mort  et  termine  par  une  nouvelle  variation  de  la  clausule  ordinaire;  l'autre, 
en  lettres  romaines,  se  trouve  sur  une  longue  banderole ,  enlacée  dans  le 
pinacle  qui  abrite  la  tête  de  l'abbé. 

+  Jlnn0.  îini-  1519  •  ipso-  liie-  |  tritt-  regnm-  obiit-  in  Jtpo  reuerenb' 

patfr  et  îins  petr'Stoürtj  t)nius  -  monastcrit  abbas-  in-  I  regimint 

(juabrûgîta  ûnuis  -  qui  •  felicit  ■  pfroûtur  -  tUtnis  ■  ' 

qVISqS  •  APVD  •  TVMVLVM    pétri    SPACIABERE  •  NIGRI  • 
DIC  -  SALTEM   DVLCIS  -  SIT  -  TIBI  •  ABBA  -  QVIES. 

FRIGIDA  ■  PETRI  •  LAPIS  -  HIC  •   TEGIT  ■  OSSA  -  ABBATIS  - 
FESSA  •  TERRIS  -   ANIMA  •  CELI  •  REQVIESCAT  -   IN  •  ARGE  •  ' 

Ces  deux  pierres  tombales  sont  avec  une  troisième  du  quatorzième  siècle, 
aujourd'hui  coupée  en  deux  et  servant  de  marches,  les  seuls  monuments 
funéraires  de  Walbourg  qui  aient  échappé  aux  ravages  du  temps.  Quanta  la 
tombe  de  Frédéric,  duc  de  Souabe ,  père  d'un  des  plus  puissants  em- 
pereurs du  Saint-Empire,  il  n'en  reste  plus  même  le  moindre  souvenir  dans 
la  localité. 

1.  «L'an  du  Seigneur  1519,  le  jour  même  des  trois  mages,  décéda  en  Jésus-Christ  le 
vénérable  seigneur  Pierre  Schwartz,  père  abbé  de  ce  monastère,  après  une  administration 
de  quarante  années.  Qu'il  jouisse  de  la  félicité  éternelle.  » 

2.  «  Qui  que  vous  soyez,  qui  viendrez  au  tombeau  de  Pierre  Schwartz,  dites  du  moins: 
Abbé,  jouissez  d'un  doux  repos  ! 

«  Cette  pierre  recouvre  les  ossements  glacés  de  l'abbé  Pierre.  Puisse  son  àrae  fatiguée 
du  monde  reposer  dans  la  retraite  du  ciel.  » 

L'abbé  A.  Straub, 
professeur  au_  Petit-Séminaire. 


NOTE 


U  PIERRE  AUX  ARMES  DE  JEAN  IIAMERER. 


Ainsi  que  notre  collègue,  M.  Morin,  vous  en  a  informés  dans  noire 
dernière  réunion,  on  a  retrouvé,  en  faisant  une  réparation  ou  plutôt  une 
addition  à  la  maison  n''  10  de  la  rue  Mercière,  une  pierre  sculptée,  qui 
a  été  employée,  probablement  lors  de  la  confection  des  trottoirs,  pour 
former  une  partie  de  seuil,  sous  celle  des  arcades  qui  donnait  entrée  au 
magasin  de  M.  Kuntz ,  propriétaire  actuel  de  la  maison. 

La  pierre  a  dû  avoir  primitivement  0'",85  de  haut,  sur  O'^jßS  de  large, 
et  a  été  diminuée  du  haut  de  0'",05  et  d'un  côté  deO^,iD,  pour  la  réduire 
à  la  mesure  de  la  place  qu'elle  devait  occuper  comme  seuil. 

Heureusement  la  mutilation,  qui  n'a  porté  que  sur  une  sorte  d'encadre- 
ment, s'est  arrêtée  là,  et  la  pierre  ayant  été  couchée  dans  un  bain  de  mor- 
tier, du  côté  sculpté,  le  relief,  qui  était  alors  déjà  assez  émoussé,  a  été 
préservé  de  toute  nouvelle  dégradation. 

Il  a  suffi  d'un  peu  d'acide  muriatique,  étendu  d'eau,  et  d'une  certaine 
dose  de  patience  pour  la  débarrasser  du  mortier  qui  s'était  logé  dans  tous 
les  creux  de  la  sculpture. 

On  y  reconnaît  parfaitement  des  armoiries  conjugales,  dont  l'écu  mas- 
culin désigne  une  notabilité  strasbourgeoise,  honorablement  mentionnée 
dans  nos  chroniques ,  Jean  Ilamerer ,  de  la  tribu  des  cordonniers ,  trois 
fois  Ammeister  (1554,  1559  et  1565),  et  dont  l'écu  féminin  porte  une  tête 
de  bœuf  aux  cornes  dressées  et  aux  oreilles  pendantes. 

Les  deux  écus  sont  embrassés  en  haut  par  des  lambrequins  d'un  fort 
relief  et  surmontés  d'un  seul  heaume,  ayant  pour  cimier  un  vol  à  six 
plumes ,  timbré  des  pièces  de  l'écu  masculin. 

Selon  l'usage  du  temps ,  le  sculpteur  n'a  pas  marqué  les  émaux  ;  mais 
l'écu  de  Jean  Ilamerer  est  figuré  au  8^  livre ,  page  99  de  la  chronique  de 
Herzog  qui  indique  l'azur  pour  le  champ,  et  l'oi*  pour  le  chevron  et  la 
croix. 


—   107  — 

D'après  les  renseignemenls  recueillis  auprès  du  propriétaire  actuel,  qui 
s'est  empresse  d'olïrir  la  pierre  pour  enrichir  le  musée  de  la  Société,  c'est 


l'Ammeister  Jean  Hamerer  qui  a  fait  bâtir  la  maison,  dont  la  construction 
remonte  ainsi  au  commencement  de  la  seconde  moitié  du  seizième  siècle. 
Des  témoins  matériels  irrécusables  attestent  qu'elle  avait  lors  de  sa  con- 
struction et  qu'elle  a  dû  avoir  encore  longtemps  après  et  probablement 
jusqu'en  1809,  époque  à  laquelle  un  vœu  manifesté  par  l'Empereur  a  dé- 
terminé l'élargissement  de  la  rue  Mercière,  outre  la  façade  actuelle,  re- 
marquable par  la  solidité  de  sa  construction,  son  rez-de-chaussée  à  arcades 
en  plein  cintre  et  sa  tourelle  en  saillie,  portée  j)ar  une  puissante  el  mas- 


—  108  — 

sive  console,  une  aulre  façade,  ayant  vue  sur  la  place  et  le  grand  portail 
de  la  cathédrale. 

On  reconnaît  encore  à  l'intérieur  des  jours  de  cette  façade,  aujourd'hui 
cachée  par  des  constructions  nouvelles,  et  notamment,  aurez-de-chaussée, 
la  porte  qui  ouvrait  sur  la  place  de  la  cathédrale. 

D'après  les  souvenirs  du  propriétaire,  cette  façade,  aujourd'hui  obstruée, 
aurait  été  plus  richement  décorée  que  celle  qui  est  en  voie  de  se  modifier 
à  son  tour,  sous  l'empire  de  ces  fatales  nécessités  qui  effacent  chaque  jour 
quelque  trait  de  la  physionomie  particulière  de  notre  antique  cité. 

Si  cette  façade  masquée  pouvait  être  découverte ,  elle  montrerait  un 
certain  luxe  d'ornementation  sculpturale,  des  chambranles  ornés,  des  têtes, 
des  fleurons,  etc.,  et  ce  ne  serait  pas  une  supposition  bien  basardée  que 
celle  qui  marquerait  sur  cette  façade,  au-dessus  de  sa  principale  porte,  la 
place  de  la  pierre  retrouvée  au  seuil  de  la  façade  encore  visible. 

L'intérieur  de  la  maison  présente  encore,  comme  remarquables ,  une 
pièce  voûtée  au  rez-de-chaussée  et  un  escalier  tournant  en  pierre ,  à  limon 
vide  en  spirale,  très-spacieux  et  qui  a  cela  de  particulier  qu'il  s'élève  à 
quatre  étages ,  ainsi  à  une  hauteur  à  peu  près  double  de  celle  de  l'escaher 
de  l'œuvre  Notre-Dame  et  des  autres  escaliers  tournants  en  pierre  qui 
existent  encore  dans  d'anciennes  maisons  à  Strasbourg. 

II  ne  se  trouve  sur  aucune  partie  de  la  maison,  ni  inscription  de  date, 
ni  monogramme  de  maître-ouvrier,  sauf  celui  du  sculpteur,  qui  se  voit 
sur  la  pierre  armoriée,  au-dessus  de  l'écu  masculin,  et  que  j'ai  eu  soin  de 
reproduire  sur  le  dessin  joint  à  cette  note. 

Le  comité  s'empressera ,  je  n'en  doute  pas  ,  de  voter  des  remercîments 
au  donataire  de  cet  intéressant  souvenir  de  notre  histoire  locale  et  de 
décider  l'inscription  de  son  nom  au-dessus  de  la  pierre ,  déposée  dans 
notre  naissant  musée. 

Baron  de  Schauenburg. 


NOTES 


LES  RUINES  DE  VILLAS  ROMAINES 

PRÈSD'OBERBRONN. 


Les  positions  romaines  du  canton  de  Niederbronn  sont  loin  d'être  toutes 
connues  ;  il  en  est  une  à  l'est  d'Oberbronn ,  au  canton  rural  dit  Eber- 
schœtzcl,  à  côté  d'un  ancien  chemin  de  traverse,  qui  relie  cette  commune 
à  celle  de  Reichshoffen.  C'était,  selon  moi,  une  splendide  villa;  nous  en 
avons  au  reste  la  preuve,  dans  les  substruclions  qu'on  y  a  découvertes, 
et  dans  les  objets  variés  qui  en  ont  été  retirés. 

L'enlèvement  des  décombres,  accumulés  depuis  des  siècles,  amis  au 
jour  des  tuileaux  à  rebords,  des  restes  de  ciment  antique  ,  des  pierres  de 
grès  taillées,  des  fragments  de  sculpture,  des  morceaux  de  colonnes,  des 
débris  de  chapiteaux.  Parmi  les  fragments  sculptés,  je  mentionnerai  un 
morceau,  en  lui-même  assez  insignifiant,  mais  qui  à  raison  de  son  sujet 
mérite  d'être  coniui  :  c'est  une  tablette  de  grès  des  Vosges,  où  l'on  voit  la 
sculpture  d'un  paon,  provenant  vraisemblablement  d'une  figure  de  Junon; 
ce  morceau ,  travaillé  il  y  a  quinze  à  dix-huit  siècles ,  fait  partie  de  la  col- 
lection d'antiquités  de  M.  le  docteur  Schnœringer,  à  Brumath.  Sous  les 
décombres  on  a  rencontré  une  pièce  carrée,  dont  le  parquet  se  composait 
d'un  carrelage  en  briques  romaines.  Les  travaux  de  déblaiement  ont  amené 
en  outre  la  découverte  de  deux  autres  pièces,  l'une  goudronnée  de  béton 
romain,  l'autre  pavée  à  la  manière  antique. 

Une  observation  me  semble  devoir  trouver  ici  sa  place.  Le  carre- 
lage en  briques  était  très-usité  dans  celte  contrée  à  l'époque  romaine  ;  on 
en  a  rencontré  ailleurs.  Ces  sortes  de  parquets,  encore  si  communs  il  y  a 
moins  de  deux  siècles,  pourraient  fort  bien  nous  être  venus  d'usages  do- 


-    110  — 

niesliques,  que  nos  pères  auraient  Iraditionnellemenl  conservés  des  anciens 
Gallo-Romains. 

Une  importante  construction  romaine  avait  encore  existé  au  sud-est 
d'Oberbronn,  à  la  lisière  orientale  de  la  forêt  dite  Frorott.  Des  recherches, 
faites  sur  cel  emplacement  à  diverses  reprises,  ont  eu  pour  résultat  une 
récolte  d'antiquités,  conservées  pour  la  plupart  au  cabinet  Schnœringer, 
à  Brumalh;  elles  sont  intéressantes  au  point  de  vue  des  usages  domestiques 
des  anciens  Gallo-Romains. 

A  part  quelques  outils,  dont  l'usage  est  difficile  à  indiquer,  il  a  été  retiré 
de  ce  lieu  différents  objets  métalliques  et  une  foule  de  vaisselle  en  terre 
cuite:  un  morceau  en  bronze  d'un  fourreau d'épée  ou  d'un  étui  quelconque, 
travaillé  avec  élégance,  plusieurs  agrafes  de  bronze ,  en  forme  de  boutons, 
de  différentes  grandeurs,  un  ciseau  en  fer  battu,  une  espèce  d'alêne  à  pointe, 
une  hachette  d'une  très-belle  forme,  dont  la  douille  retient  encore  le  bout 
du  manche  en  bois  méconnaissable,  un  style,  des  clous,  des  ferrailles  oxy- 
dées, plusieurs  pièces  de  monnaie  romaine-;  des  tas  de  tuiles  et  de  briques, 
des  carreaux  à  rebords  latéraux,  des  tuyaux  d'argile,  des  tessons  de  poterie 
rouge,  des  vases  de  terre  vernissés,  de  forme  et  de  couleur  variées,  parmi 
lesquels  une  espèce  de  gamelle  mérite  une  mention  particulière  :  elle  est 
percée  de  petits  trous,  tant  au  fond  que  dans  la  partie  basse  de  son  contour; 
l'on  présume  qu'elle  a  servi  à  griller  des  châtaignes;  elle  porte  encore  des 
traces  du  feu.  En  outre,  on  a  trouvé  plusieurs  énormes  défenses  de  sanglier 
et  une  trentaine  de  dents,  des  fragments  de  verre  blanc  et  d'un  blanc  ver- 
dâtre,  un  torse  d'une  sculpture  brisée,  représentant  une  partie  du  devant 
du  corps  d'une  divinité  drapée,  qu'il  est  impossible  de  déterminer,  faute 
d'attributs.  Enfin,  on  a  rencontré  dans  les  déblais  des  morceaux  de  crépi 
couverts  de  lignes  de  couleurs  différentes,  rouge,  verte  et  jaune  sur  fond 
blanc,  des  plaques  coloriées  des  mêmes  nuances;  ce  sont  là,  à  n'en  pas 
douter,  des  restes  de  peintures  murales  ou  à  fresque,  qui  permettent  de 
conclure  à  un  compartiment,  qui  a  dû  se  faire  remarquer  par  son  élégance. 

Les  tranchées  pratiquées  dans  les  ruines  ont  mis  à  jour,  à  côté  d'un 
grand  amas  de  décombres,  une  fournaise  posée  à  terre  et  construite  en 
briques,  avec  des  couches  de  cendre  et  de  charbons,  d'où  le  feu  a  pénétré 
souterrainement  dans  des  tubes  d'argile,  lesquels  transmettaient  la  chaleur 
dans  les  appartements  habités.  Dans  les  Gaules,  comme  chacun  le  sait,  le 
chauffage  avait  lieu  le  plus  communément  au  moyen  de  tuyaux  en  terre 
cuite,  placés  dans  les  murailles,  ou  appliqués  en  forme  de  cheminée.  Ainsi, 
les  tubes  d'argile  des  fournaises  à  terre  chauffaient  anciennement  les  habi- 
tations, comme  les  tuyaux  de  tôle  des  fourneaux  en  fonte  ou  en  faïence 


—  111  - 

( 

chauffent  aujourcrhui  les  poêles.  Toutefois,  je  ne  repousse  point  l'opinion 
qui  considère  ces  tubes  aussi  comme  des  conduits  dans  lesquels  la  chaleur 
montait  pour  chauffer  une  baignoire;  chez  les  Romains,  tout  citoyen  aisé 
avait  dans  sa  maison  un  cabinet  de  bain,  et  ces  calorifères  pouvaient  bien 
être  à  double  usage. 

Il  est  très-présumahle  que  des  fouilles,  reprises  convenablement,  donne- 
raient de  nouveaux  éclaircissements. 

Jér.  Ans.  Siffer, 
curé  de  Weyersheim. 


I 


H  E  LVE  TUS 

.    ET  SES  ENVIRONS 

(EHL,     PRÈS     BENFELD 

AU  CINQUIÈME  SIÈCLE. 


AVANT-PROPOS. 

Les  inaléiiaux  (jui  font  le  sujet  de  ce  mémoire  et  qui  ont  servi  à  établir 
la  carie  qui  l'accompagne',  ont  été  recueillis  sur  le  terrain,  la  pioche  et  le 
décamètre  en  main  ;  j'y  ai  consacré  mes  loisirs  d'été  de  plusieurs  années. 
J'ai  visité  successivement  une  trentaine  de  localités,  compulsant  les  archives 
des  mairies,  les  cadastres,  les  livres  terriers,  questionnant  les  vieillards, 
les  maires,  les  instituteurs,  les  gardes  champêtres.  Je  suis  heureux  de  pou- 
voir dire  que  partout  j'ai  trouvé  un  accueil  empressé  et  bienveillant,  grâce 
à  la  popularité  dont  jouit  la  Société  des  monuments  historiques  d'Alsace. 
En  passant  par  les  comnmnes,  j'ai  toujours  consulté  les  traditions  locales; 
car  toute  tradition  rationnelle  me  paraît  aussi  digne  d'être  recueillie  que 
les  monuments  en  céramique,  en  pierre  ou  en  métal. 

L'année  dernière  j'eus  l'honneur  d'adresser  à  M.  le  Ministre  de  l'instruc- 
tion publique  un  petit  extrait  de  ce  travail  sous  ce  titre  :  Hdvetus  au  cin- 
quième siècle,  —  que  Son  Excellence  voulut  bien  faire  admettre  parmi  les 
mémoires  de  la  Sorbonne.  A  l'invitation  de  M.  le  Président  de  notre  société, 
je  présentai,  à  la  séance  générale  du  10  décembre  1863,  une  courte  notice 
sur  le  même  sujet.  Ces  deux  petites  publications  n'étaient  destinées  qu'à 
donner  une  idée  sommaire  de  la  ville  gallo-romaine  dont  je  cherche,  en 
quelque  sorte,  à  refaire  le  squelette.  Le  présent  mémoire  {Helvehis  et  ses 
environs)  renferme  tout  ce  que  j'ai  vu,  observé,  appris,  découvert,  jusqu'à 
ce  jour,  dans  un  rayon  de  15  à  16  heues  carrées.  Au  travail  de  pionnier 
j'ai  ajouté  tout  ce  que  j'ai  pu  trouver  d'important  sur  la  matière  dans  les 
auteurs  que  j'ai  eus  à  ma  disposition.  Je  n'ai  pas  la  prétention  de  faire  une 

1.  I'üur  la  partie  graphique,  j'ai  été  secondé,  avec  autant  d'obligeance  que  de  talent,  par 
M.  Anthon,  ancien  agent  voyer  à  Benfeld,  actuellement  architecte  de  la  liiature  du  Bas-Rhin. 
Qu'il  en  reçoive  ici  l'expression  de  toute  ma  gratitude. 

U«  SÉEIB.  —  T.  II.  —  (M.)  8 


—  1i4  — 

monographie  complète;  mon  but  principal,  en  me  livrant  à  ces  investi- 
gations, est  de  reconnaître  l'état  où  se  trouvait  ce  coin  de  terre  avant  l'in- 
vasion des  hordes  barbares  qui  ont  renversé  la  domination  romaine,  et  de 
contribuer  ainsi  à  la  topographie  de  l'ancienne  Gaule. 

En  remuant  ces  ruines  d'un  autre  âge  et  d'une  autre  civilisation,  je  ne 
puis  résister  à  la  tentation  d'en  tirer  quelque  fruit  pour  l'histoire:  c'est 
ainsi  que  je  me  suis  laissé  entraîner  à  quelques  hypothèses  que  je  soumets 
aux  hommes  compétents;  ils  sauront  distinguer  le  bon  grain  de  l'ivraie,  et 
ils  feront  de  mes  conjectures  le  cas  qu'elles  méritent.' 

Benfeld,  mai  1864. 


CHAPITRE  1. 

Topographie. 

Je  ne  répéterai  point  ici  ce  qui  se  trouve  dans  les  ouvrages  qui  traitent 
de  la  topographie  de  l'Alsace;  mon  seul  but  est  de  donner  une  idée 
approximative  de  l'état  des  lieux  dans  le  anciens  temps,  et  de  décrire 
succinctement  la  contrée  qui  a  fait  le  sujet  de  mes  explorations. 

$  F'.  —  Elu  et  ses  environs. 

Ehl  ou  EU  est  un  hameau  sur  la  rive  droite  del'lll;  il  dépend  en  majeure 
partie  de  Benfeld  (chef-lieu  de  canton,  arrondissement  de  Schlesladt,  dé- 
partement du  Bas-Rhin);  quelques  maisons  occupent  la  banlieue  de  la  com- 
mune de  Sand.  La  tradition  populaire  regarde  Ehl  comme  le  reste  d'une 
ancienne  ville  romaine;  tous  les  historiens  sont  d'accord  pour  placer  en 
ce  lieu  la  ville  gallo-romaine  d'Hellelum  ou  Helvetus,  qui,  sur  la  table  théo- 
dosienne  et  sur  l'un  des  itinéraires  d'Antonin,  figure  enlre  Argentovaria  et 
Argentoralum,  et  entre  u/o?î5  Brisiacns  et  Argenlorainm  sur  deux  auti'es  de 
ces  itinéraires. 

Sur  ma  carte  j'ai  indiqué,  au  liait  rouge,  une  bande  de  terre,  baignée 
par  trois  cours  d'eau,  représentant  une  longueur  d'environ  \%  kilomètre, 
d'une  largeur  moyenne  de  300  à  400  mètres,  ayant  le  hameau  à  son  ex- 
trémité nord:  c'est  à  peu  près  cette  superficie  que  les  archéologues  consi- 
dèrent ordmairement  comme  ayant  été  occupée  par  la  ville  romaine.  Nous 
verrons  plus  loin  que  ce  point  pouvait  être  le  quartier  principal  de  la  ville, 

1.  Il  demeure  bien  entendu  que  c'est  sous  sa  responsabilité  personnelle  que  l'auteur 
rmet,  dans  ce  travail,  des  opinions  hypothétiques  qui  pourraient  être  ultérieurement  rec- 
lifiées  ou  complétces  par  de  nouvelles  découvertes. 


-  115  — 

mais  non  la  ville  tout  entière.  Dans  le  cours  de  ce  travail  je  désignerai  cette 
bande  de  terre  sous  le  nom  de  territoire  d'Eltl  ;  on  reconnaîtra  son  impor- 
tance archéologique  au  chapitre  II. 

La  contrée  que  j'ai  explorée,  et  dont  Ehl  occupe  le  centre,  forme  une 
petite  section  de  la  plaine  de  la  vallée  du  Rhin,  entre  la  rive  gauche  de  ce 
fleuve  et  le  pied  des  montagnes.  Au  nord,  ma  limite  est  sur  la  ligne  de  Meis- 
tratzheim  à  Kraffl;  au  sud  sur  celle  d'Ebersmünster  à  Rhinau.  Cette  étendue 
comprend  environ  15  lieues  carrées.  Ma  circonscription  est  indépendante 
de  la  division  politique  actuelle;  pourtant  le  canton  de  Renfeld  s'y  trouve 
en  entier,  le  reste  est  emprunté  par  fractions  aux  cantons  d'Erslein,  d'Ober- 
nai  et  de  Barr.  Cette  plaine  est  sillonnée  de  plusieurs  cours  d'eau  et  l'on  y 
remarque  deux  zones  de  terrains  marécageux:  l'une  entre  la  Scheer  et 
l'Andlau,  qui  probablement  a  été  plus  humide  jadis  qu'aujourd'hui;  l'autre 
entre  le  Zembs  et  le  Rhin,  qui  sans  aucun  doute  a  été  moins  marécageuse 
à  l'époque  qui  nous  occupe.  Entrelarive  gauche  de  l'ill  et  la  première  zone 
paludéenne,  la  terre  est  d'une  fertihté  exceptionnelle  et  l'on  peut  admettre 
hardiment  qu'elle  a  dû  être  exploitée  par  l'agriculture,  dès  que  les  peu- 
ples eurent  renoncé  à  la  vie  nomade  pour  se  tixer  dans  ces  cantons.  11  est 
probable  que  le  terrain  situé  entre  la  rive  droite  de  l'IU  et  le  Rhin  a  été 
en  nature  de  pâturages  et  de  forêts  riches  en  chênes,  où  les  premiers 
habitants  ont  pu  élever  leur  bétail  et  leurs  porcs'.  Dans  les  bois  aux  en- 
virons d'Ehl,  il  y  a  beaucoup  de  vignes  sauvages;  je  suis  tenté  de  les  re- 
garder comme  des  restes  de  viticulture  de  l'époque  de  l'empereur  Probus, 
dont  les  ceps  sont  redevenus  sauvageons. 

§  2.  —  Cours  d'eau  encore  existants. 

Lesplusimporlantsde  ces  cours  d'eau  sont:  le  Rhin,  le  Zembs,  la  Lutter, 
l'Ill,  la  Scheer,  l'Andlau. 

Le  Rhin  (Rhenus).  —  Dans  les  temps  primitifs,  le  Rhin  formait  trois 
bras  entre  Râle  et  Bingen;  mais  déjà,  à  l'arrivée  des  Romains,  ces  trois  bras 
se  trouvaient  réduits  à  un  seul,  à  celui  du  milieu.  Il  n'est  guère  possible 
de  savoir  si  ce  changement  a  été  opéré  par  la  nature  ou  par  la  main  de 
^homme^  Avant  les  travaux  d'endiguemcnt,  le  fleuve  avait  un  large  ter- 

t.  L'élat  de  l'agriculture  sur  la  rive  droite  du  Rhin  ,  sous  les  Romains,  se  trouve  parfai- 
tement décrit  dans  Moue,  Urgeschichte  des  hüdischen  Landes.  Celte  description  peut,  sans 
aucun  doute,  s'appliquer  ù  la  rive  gauclie. 

2.  Pour  ne  pas  trop  charger  ma  carte,  j'ai  négligé  tous  les  travaux  d'art  modernes,  tels 
que  chemin  de  fer,  canal  du  Rhône  au  Rhin  etc.  Le  Rhin  est  emprunté  à  la  carte  de  l'état- 
major. 

3.  Mone,  Urgeschichte  des  badischeii  Landes,  t.  II,  p.  143. 


—    116  — 

l'ain  pour  éleMiIre  sa  nappe  d'eau;  dans  beaucuiip  d'endroils  on  le  passait  à 
^iié  pendant  la  sécheresse.  Entre  Bàle  et  Spire  il  y  avait  toujours  des 
faux-bras,  quantité  d'îles  et  d'îlots  où  les  peuplades  germaines  avaient  la 
facilité  de  se  rassembler  avec  leurs  barques,  lorsque  le  guéage  était  impos- 
sible, pour  se  jeter,  à  un  moment  donné,  sur  la  rive  gauche  et  envahir  la 
(iaule  rhénane'.  Ce  fleuve  a  toujours  divagué;  encoj-e  aujourd'hui  son 
Thalweg  change  tous  les  ans,  des  îles  disparaissent  et  d'autres  se  forment; 
mais  malgré  la  mobilité  de  ces  atterrissements,  il  y  en  a  (jui  sont  de- 
venus assez  permanents  pour  avoir  reçu  des  noms  propres.  (Voir  la  carte.) 
11  est  donc  tout  à  fait  naturel,  qu'entre  le  pays  des  Rauraqucs  et  celui  des 
Némètes,  on  ait  étabh,  le  long  du  Rhin,  une  série  de  forts,  môme  assez 
rapprochés,  et  il  est  probable  qu'il  existait  un  casirum  ou  un  casteUttm 
pour  chaque  ville  romaine  un  peu  importante.  On  verra  plus  loin  (jue  je 
crois  avoir  trouvé  le  castrum  protecteur  de  cette  contrée,  à  la  place  où 
fut  construit  plus  tard  le  castel  féodal  deScInucnuai,  et  ce  fort  romain  même 
a  pu  être  précédé  d'un  poste  de  défense  gaulois.' 

Le  grand  changement  du  cours  du  Hhinqui,  d'après  la  chronique  des 
Dominicains  de  Golmar,  a  eu  lieu  en  1295  et  qui  a  placé  (le  vieux)  Brisach 
sur  la  rive  droite,  a  dû,  entre  cette  ville  et  Rhinau,  enlever  une  large  bande 
de  terre  et  |)roduire  sur  toute  la  zone  comprise  entre  leZembs  et  le  fleuve, 
des  bas-fonds  et  des  infdtrations  qui  n'existaient  pas  avant  cet  événement 
géologique.  Le  fait  est  importaiit  à  noter.  On  verra  i?  8,  qu'il  a  dû  occa- 
sionner la  destruction  d'une  grande  partie  de  la  chaussée  d'iielvet  à  Mont- 
Brisach,  puis  il  servira  à  expliquer  comment,  à  l'époque  romaine,  une  nom- 
Itreuse  population  a  pu  exister  dans  une  contrée  aujourd'hui  marécageuse. 
Les  découvertes  laites  à  Schwanau  et  à  Gerstheim ^  prouvent  (jue  cette  par- 
tie des  bords  du  Rhin  a  été  épargnée  parla  catastrophe  de  1295'.  Le  fleuve 
charrie  du  sable  aurifère  ([ui  a  été  exploité  dès  les  temps  les  plus  reculés 
par  des  orpailleurs.'' 

Le  Rhin  a  quelques  petits  bras  appelés  Ischeti,  Brunnwasser ,  etc.,  j'ai 
cru  pouvoir  les  négliger. 

Le  Zemhs  (Gebus)  est  un  ruisseau  tranquille  qui  déborde  rarement;  son 

1.  .Moiic,  loc.  cil. ,  t.  I! ,  1).  '.'Si. 

2.  Voy.  ggôet  11. 

3.  Voy.  U  5  et  7. 

i  Â 11  quatorzième  siècle,  le  Rliiu  causa  de  nouveaux  dOgàts  à  la  ville  de  liliiuau  qu'il 
enleva  successivemeot  avec  son  couvent.  Par  les  basses  eaux,  on  voit  encore  des  pans  de 
inurs  inclinés  en  aval.  Je  lésai  vus ,  le  10  février  1858,  du  côté  de  la  rive  badoise. 

5.  Voy.  Daubrée,  Deacripiio^i  gdoloriiqne  et  mmt'rulorjiqKe  du  Bus-Bhhi ,  p.  308.  On  verra 
an  ê  4  la  mention  d'une  médaille  gauloise  qui  peut  avoir  été  l'aile  avec  cet  or  du  liliin. 


—  117  — 

eau  limpide  et  poissonneuse,  était  bien  de  nature  à  attirer  l'attention  des 
populations  prinnitives,  et  surtout  à  plaire  aux  Germains.  Sur  la  ligne  de 
l'ancienne  voie  des  Vosges  au  lihin,  on  remarque,  dans  son  lit,  les  vestiges 
d'un  pont  qui  paraît  dater  d'une  époque  fort  reculée. 

La  Lutter  n'a  sans  doute  joué  aucun  rôle  particulier.  Elle  prend  sa  source 
dans  la  banlieue  de  Hültenbeim,  près  de  l'ancien  cbâteau  de  Husenburg  ou 
Heidenscbloss.  Ce  ruisseau  fend  visiblement  à  se  dessécher;  il  a  déjà  perdu 
plusieurs  petits  faux-bras  et  son  lit  diminue  en  largeur  et  en  profondeur. 

L'Ill  (Ellus).  —  Cette  rivièrS  navigable,  quia  donné  son  nom  à  l'Alsace  (et 
peut-être  même  à  notre  ville  romaine),  a  eu  certainement  une  grande  im- 
portance pour  les  anciens  peuples  qui  ont  habité  ses  rives.  Sur  la  carte  je 
n'en  ai  indiqué  que  le  cours  principal.  A  Erstein  il  existe  un  bras  de  cette 
rivière,  qui  sous  le  nom  de  Kro(ft  et  de  Krafftivasser,  se  dii"ige  dans  le  Rhin. 
Ce  n'est  qu'un  cours  d'eau  artificiel  qui  a  été  creusé  en  lo92  par  l'évêque 
Frédéric  II*,  qui  faisait  alors  la  guerre  aux  Strasbourgeois;  son  but  était 
de  priver  cette  ville  des  eaux  de  l'HP.  J'omets  ce  canal  et  je  fais  de  même 
pour  tous  les  canaux  usiniers.  Il  est  certain  qu'aux  environs  de  Benfeld,  le 
régime  des  eaux  a  été  complètement  modifié  par  l'établissement  des  fortifi- 
cations de  celte  ville  au  moyen  âge.  Entre  Benfeld  et  Sand  les  eaux  de  l'Ill 
sont  actuellement  divisées  en  trois  bras:  le  canal  du  moulin  de  Sand,  un 
autre  canal,  dit  Pidu  er  graben ,  qui  jadis  desservait  un  moulin  à  poudre, 
puis  le  cours  de  la  rivière  proprement  dite.  Au  siècle  passé  il  y  avait  en- 
core un  quatrième  bras  qui  se  trouvait  entre  ces  deux  derniers.  Comme 
un  certain  fossé  célèbre  de  Strasbourg,  qui  était  dénommé  d'après  son 
origine,  celui-ci  l'était  d'après  sa  destination  :  an  moyen  âge  on  y  trempait, 
dit-on,  les  filles  de  mœurs  trop  légères. 

Tout  me  porte  à  croire  qu'à  l'époque  qui  nous  occupe,  la  rivière  n'avait 
qu'un  seul  bras  aux  environs  d'Ehl  et  qu'alors  elle  était  telle  qu'elle  se  pré- 
sente encore  aujourd'hui  à  un  demi-kilomètre  plus  loin,  au-dessous  de 
l'usine  de  Sand. 

Sur  la  ligne  du  tracé  hypothétique  de  Hochstrass  à  Ehl,  on  voit,  par  les 
basses  eaux,  sortir  du  lit  de  la  rivière,  les  tèles  corrodées  d'un  grand  nombre 
de  pieux  Irès-rapprochés,  en  bois  de  chêne  norci  jusqu'au  cœur.  La  tradition 

1.  Kœiiigshoveii ,  Eis.  u.  slrasb.  Chronicke,  An))ie)-/,ir//(/('ii  cou  ScIiiKer,  p.  7G4,  et 
Scliœpllin.  Alsat.  iUnstr. .  f.  Il,  p.  16i.  G'esl  sans  doute  rétablissement  de  ce  cours  d'eau 
artificiel  qui  a  coupé  la  voie  païenne  n°  3  et  l'a  mise  hor.s  d'usage  dans  la  direction  de 
Nordhausen.  V.  §8. 

2.  Kn  1791,  le  génie  militaire  lit  établir  un  grand  barrage,  protégé  iiar  une  batterie  de 
canons,  pour  rejeter  les  eaux  de  la  Kraflt  dans  l'Ill  et  augmenter  ainsi  les  moyens  de  dé- 
fense de  la  place  de  Strasbourg. 


—  118  — 

—  d'accord  avec  les  probabilités  —  considère  ces  pilotis  comme  vestiges 
d'un  pont  qni,  à  l'époque  romaine,  reliait  les  deux  rives.  Leur  rapprocbe- 
ment  permet  de  présumer  que  ce  sont  des  matériaux,  demeurés  sur  place, 
de  constructions  successives  de  ponts  détruits  et  rétablis  suivant  les  cir- 
constances. Les  charpentiers  de  la  localité  vont  extraire  ces  pieux  pour  di- 
vers usages  de  construction. 

La  Scheer  n'est  ni  navigable  ni  flottable;  son  rôle  paraît  avoir  été  tou- 
jours passif.  Pourtant  à  Kertzfeld  il  y  avait  des  établissements  importants 
sur  ses  rives. 

UAndlmi.  —  Ce  ruisseau  porte  le  nom  ô'AncUau  jusqu'au  moulin  dit 
Bntchwült t ;  au-àessous,  '\üS(\u' à  son  embouchure, il  est  vulgairementappelé 
Schifjbach  (rivière  à  bateau).  D'après  Horrer',  qui  s'appuie  du  témoignage 
de  Sébastien  Brandt^  cette  rivière  a  été  rendue  navigable  au  moyen  d'un 
canal  artificiel.  Mais  ce  fait  ne  paraît  pas  remonter  jusqu'à  l'époque  gallo- 
romaine. 

$  3.  —  Cours  d'eau  disparus. 

Je  les  ai  rétablis  sur  la  carte  d'après  les  traces  qui  en  sont  restées. 

Brunnwasser  et  Hanfgraben.  —  Sur  le  plan  du  siège  de  Benfeld  par  les 
Suédois  en  1632',  on  voit  un  cours  d'eau,  à  l'est  d'Ehl,  sans  indication  de 
nom.  La  présence  de  plusieurs  îlots  prouve  sa  qualité  de  cours  d'eau  na- 
turel; il  a  disparu  en  majeure  partie,  mais  il  est  permis  d'admettre  qu'à 
l'époque  romaine,  il  a  bordé  Helvelus  de  ce  côté-là.  Sa  source  principale, 
que  j'ai  eu  beaucoup  de  peine  à  retrouver,  existe  dans  une  forêt  dite  Brunn- 
%vald;  elle  était  grossie  par  un  faux-bras  du  Zembs.  Ce  cours  d'eau  paraît  avoir 
porté  à  Benfeld  le  nom  de  Brunmvasser ;  il  existe  encore,  sous  forme  de 
ruisseau,  dans  les  banlieues  de  Sand  et  de  Matzenheim ,  où  il  prend  le  nom 
Ae  Hanf  graben ,  et  se  jette  dans  l'Ill  près  du  château  de  Wœrlh.  Sur  la  carte 
de  Beaurain,  dressée  pour  la  campagne  de  Turenne,  en  1674  et  1675,  on 
voit  figurer  un  Brunnwasser ,  qui  correspond  en  partie  avec  notre  cours 
d'eau;  seulement  l'auteur,  égaré  sans  doute  par  le  grand  nombre  de  fossés 
dont  ce  terrain  est  sillonné,  lui  a  donné  une  embouchure  impossible.  La 
source  dite  de  Saint-Materne''  se  trouve  sur  la  ligne  parcourue  jadis  par  ce 
ruisseau;  elle  en  a  peut-être  occupé  un  des  îlots. 

Le  Quer.  —  C'est  un  bras  de  l'Ill  qui  se  dirigeait  vers  Kertzfeld  pour  s'em- 
boucher avec  la  Scheer.  Des  travaux  hydrauliques,  faits  par  la  filature  du 

1.  Dictionn.  f/éogrupf/.,  histor.  et  polit,  de  fA/soce,  p.  I7G. 

2.  Theatnim  eîiropœum  ^  t.  11 ,  p.  G38. 

3.  Voy.  gg  Ü  et  12. 


—  119  — 

Bas-Rhin,  à  Hüttenheim,  l'ont  barré  et  mis  à  sec,  à  la  grande  satisfaction 
des  habitants  de  Kertzfeld,  auxquels  il  occasionnait  parfois  de  redoutables 
inondations.  Le  Quer  a  été  probablement  navigable  à  l'époque  romaine  et 
a  pu  servir  de  moyen  de  communication  entre  les  possessions  des  bords 
de  riU  et  celles  des  bords  de  la  Scheer. 

CHAPITRE  II. 
Recherches    archéologiques.  * 

Dans  mes  travaux  sur  les  lieux ,  j'ai  eu  quelques  résultats  négatifs  qui , 
je  crois,  méritent  d'être  rappelés,  car  ils  pourront  prévenir  dorénavant 
des  recherches  inutiles.  Ainsi,  j'ai  essayé  de  découvrir,  dans  nos  forêts, 
ces  excavations  circulaires  qu'on  appelle  margelles,  fosses  à  loup,  sur  les-  ' 
quelles  étaient  assises  les  cabanes  des  populations  primitives;  mais  sans 
aucun  succès.  Dans  les  banlieues  de  Herbsheim  (près  des  lumulus  e)  et  de 
Friesenheim  {Königsherberg ^),  on  m'a  signalé,  dans  les  prairies,  des  places 
où  le  sol  est  ondulé  comme  sur  un  ancien  cimetière,  et  que  les  habitants 
appellent  Grœher  (tombeaux).  Je  les  ai  examinées  et  fouillées  jusqu'à  la 
nappe  d'eau  souterraine,  sans  aucun  résultat  archéologique.  La  régularité 
des  couches  superposées  dans  ce  terrain  d'alluvion  moderne,  m'a  d'ailleurs 
prouvé  que  la  main  de  l'homme  n'y  avait  jamais  touché.  Il  est  probable 
que  ces  ondulations  ont  été  produites  par  le  parcours  du  bétail  et  que  le 
nom  a  été  donné  par  analogie.  ^ 

'Quoique  mes  recherches  s'arrêtent  à  la  lin  de  l'époque  gallo-romaine, 
j'ajouterai  dans  ce  chapitre  toutes  les  données  ultérieures  qui  peuvent  pré- 
senter de  l'intérêt.  J'indiquerai  surtout,  pour  les  localités  principales,  les 
premières  mentions  d'après  Scbœpflin  et  Grandidier. 

§  4.  —  Observations  et  découvertes  faites  sur  le  territoire  d'Elu. 

La  lene  et  l'eau  de  ce  petit  point  d'environ  60  hectares,  recouvre  des 
restes  de  presque  tous  les  âges;  mais  les  plus  nombreux  sont  ceux  de 
l'époque  romaine.  Presque  partout  des  deux  côtés  de  la  voie  païenne  n°  1, 
on  trouve,  parfois  à  fleur  de  terre,  des  tuiles  à  rebords,  des  tuileaux, 
des  faîtières,  des  briques  striées,   de   la   poterie,  des  subslruolions,  du 

1.  Je  conserve  dans  ma  coUeclioii  des  specmiens  de  prescjuc  loiilos  les  trouvailles  qui 
soiil  iiientionii('C.<  dans  re  chapitre.  Les  matériaux  les  plus  abondants  sont  les  produits  de 
la  céramique. 

2.  Yoy.  §  6. 

3.  Voy.  Bulletin  de  la  Société  .  t.  111,  p    11  ,  P.  V. 


—  120  — 

ciment,  des  objets  en  métal,  et  principalement  des  médailles  en  bronze, 
argent  et  or.  Parmi  la  céramique,  on  distingue  surtout  la  poterie  rouge 
fine  avee  moulures  en  relief;  puis,  plus  fréquemment,  de  la  poterie  romaine 
ordinaire  à  pâte  rougeâtre,  rosâtre,  blanche,  grise,  noirâtre;  parfois 
aussi  de  la  poterie  gauloise  sableuse  et  micacée,  et  une  poterie  à  pâte 
grise  cendréeet  jaunâtre,  qui  est  probablement  germaine.  11  y  a  des  débris 
de  vases  de  toutes  les  formes  et  de  toutes  les  dimensions.  Les  vases  entiers 
sont  rares,  et  lorsqu'il  s'en  trouve,  les  ouvriers  les  brisent.  Ce  n'est  qu'avec 
peine  que  j'ai  pu  en  sauver  quelques-uns  d'espèce  commune.  Ce  ter- 
rain étant  livré  à  la  culture,  je  n'ai  jamais  pu  y  faire  des  fouilles  métho- 
diques sur  une  grande  échelle;  mais  j'ai  soin  de  suivre,  autant  que  pos- 
sible, les  travaux  des  champs  et  de  recueillir  tous  les  objets  qui  présentent 
quelque  intérêt. 

A  gauche  de  la  voie  païenne  qui  traverse  Ehl,  à  la  place  marquée  d'une 
petite  croix  avec  le  chiffre  I,  on  a  fait  des  fouilles,  il  y  a  environ  vingt -huit 
ans,  et  on  a  rencontré  les  restes  d'un  four,  des  cendres  et  des  charbons, 
deux  coins  en  fer,  des  objets  en  bronze,  des  scories  avec  paillettes  d'or, 
des  morceaux  informes  de  métal  fondu.^  C'est  là,  sans  aucun  doute,  qu'était 
située  la  fabrique  de  bronze  {ofjßcina  œraria)  dont  parlent  quelques  auteurs 
modernes.  A  environ  50  mètres  de  là  se  trouve  la  place  de  l'ill,  où  l'on  a 
mis  au  jour,  il  y  a  environ  quarante  ans,  ce  grand  gisement  de  médailles  et 
d'objets  en  bronze,  dont  les  spécimens  se  sont  répandus  dans  presque  toutes 
les  collections  de  l'Europe.  Cette  partie  de  la  rivière  est  jonchée  de  restes 
de  constructions:  moellons,  tuiles  à  rebords,  ciment  etc.  Par  les  basses 
eaux,  les  pêcheurs  en  retirent  des  pierres  à  bâtir.  L'endroit  le  plus  riche 
en  matériaux  de  ce  genre  se  trouve  vis-à-vis  de  l'ancien  couvent  qui,  d'après 
la  tradition  et  les  auteurs,  occupe  la  place  du  temple  païen  que  saint  Ma- 
terne aurait  fait  démolir  \  M.  Barthelmé,  de  Sand  (membre  de  la  Société), 
possède  la  partie  inférieure  d'un  autel  votif  brisé,  qui  a  été  retirée  ici  de 
la  rivière;  il  est  à  quatre  faces,  sur  chacune  desquelles  se  trouve  une 
figure  incomplète.  Il  n'est  pas  probable  que  les  médailles  et  objets  en  métal 
aient  été  jetés  directement  dans  l'eau;  en  cet  endroit,  le  courant  est  ordi- 
nairement très-fort  et  a  une  tendance  à  corroder  la  rive  droite:  on  pour- 
rait donc  présumer  qu'ils  ont  été  enfouis  dans  la  terre  et  enlevés  peu  à 
peu  par  des  érosions. 

Je  collectionne  tout  ce  que  je  puis  me  procurer  de  la  localité  d'Ehl,  tant 
par  des  fouilles  directes  et  des  draguages  dans  l'Ill,  que  par  des  dons  et 

1.  Voy.  gg  7,  Il  et  page  122  pour  la  description  des  coins. 

2.  Voy.  sur  la  carte  l'eniplaceiTient  de  ce  temple  indiqué  par  un  signe  particulier. 


—  121  — 

(les  acquisitions.   Voici  à  peu  près  les  objets  les  plus  intéressants  que  je 
suis  parvenu  à  réunir  jusqu'ici  : 

Des  pierres  meulières  de  dinërents  calibres,  entre  autres  une  paire  de 
meules  entières  {mola  momtaria),  avec  pivot  en  plomb;  des  débris  de  sta- 
tues; une  plintbo  portant  LEG  VIII  AV;  beaucoup  de  poterie  de  toute 
espèce,  brisée  en  majeure  partie;  deux  fonds  de  vases  en  céramique  ro- 
maine rouge  fine,  avec  noms  de  potiers  accompagnés  de  fecil,  comme  suit  : 

VICTOR. F  BEL4TVLLVSF 

Victor  est  le  nom  d'un  potier  rauraque;  Belakdlus  me  paraît  inédit. 

En  bronze  :  une  hache  sans  entaille,  moulée  à  peu  près  sur  la  forme  de 
celles  de  l'âge  de  pierre,  un  kelt  (à  manche  plat),  des  virioles,  des  bagues, 
des  fibules,  des  boutons,  des  épingles,  une  pointe  de  flèche  {sagiîta  ha- 
mata),  un  petit  instrument  qui  paraît  appartenir  à  la  chirurgie,  sans  doute 
un  specillum\  des  clefs,  etc. 

En  fer:  une  hache  (ascia),  des  clefs,  des  lames,  des  pointes  de  flèche, 
des  clous  de  toute  dimension,  parmi  lesquels  des  pièces  de  très-grand  ca- 
libre, etc. 

Je  n'ai  pas  encore  trouvé  de  statuettes. 

Les  monuments  les  mieux  représentés  à  Ehl,  ce  sont  les  médailles  ro- 
maines; malgré  la  quantité  énorme  déjà  enlevée,  on  en  trouve  toujours, 
mais  elles  deviennent  de  plus  en  plus,  rares.  Celles  que  je  rencontre  le  plus 
souvent  appartiennent  aux  empereurs  du  troisième  et  du  quatrième  siècle, 
et  les  plus  nombreuses  sont  celles  de  la  famille  des  Constantin.  La  plupart 
sont  en  bronze  (souvent  très-frustes);  j'en  ai  quelques-unes  en  argent  et  une 
seule  en  or,  c'est  un  Arcadins  à  fleur  de  coin.  Il  y  a  également  des  mé- 
dailles gauloises.  J'ai  recueilli  une  de  ces  pièces  en  or,  concaves-convexes, 
que  les  Allemands  appellent  Begenhogensclmsselchen  {smtellœ  iridis). 

Je  crois  inutile  d'énumérer  les  médailles  que  j'ai  recueillies  jusqu'ici, 
ce  catalogue  serait  trop  incomplet  pour  présenter  un  intérêt  spécial.  Quel- 
ques mots  seulement  sur  la  question  assez  peu  connue  des  liegenbogen- 
achüsselcheii.  Ce  mot  signifie  littéralement  soucoupes  d'arc-en-ciel.  Voici  ce 
que  dit  le  docteur  Schreiber  de  ces  médailles":  On  les  trouve  partout  où 
il  y  avait  des  peuples  de  race  celtique;  elles  abondent  en  Rohême  où  l'on  a 
découvert,  près  du  village  de  Podmokl,  en  1771,  une  chaudière  en  bronze 
qui  contenait  plus  de  40  kilogrammes  de  ces  pièces  d'or.  Leur  nom  vient 
de  ce  qu'elles  apparaissent  principalement  après  les  pluies  battantes,  qui 

1 .  \oy.  Dicf.  (les  antiq.  yrecq.  et  roin. ,  par  Ricli ,  publié  sons  la  direction  de  M.  Cliéniel. 

2.  Tascheiibucli  für  Geschichte  v.  AHerthUmei-  in  Siiihlevtschland .  1839,  p.  211. 


—  122  — 

ravinent  et  enlèvent  la  terre,  par  conséquent,  dans  les  moments  où  se 
montrent  les  arcs-en-ciel.  Les  paysans  s'imaginent  alors  que  c'est  ce  phé- 
nomène qui  les  produit;  ils  croient  que  partout  où  un  arc-en-ciel  a  touché 
terre,  on  trouve  une  de  ces  pièces.  Ils  leur  prêtent  même  des  vertus  médi- 
cinales: l'eau  dans  laquelle  on  les  fait  tremper  passe  pour  guérir  la  fièvre, 
etc.  Les  auteurs  attribuent  ces  médailles  de  la  Bohême  aux  anciens  Boïens. 

Un  autre  savant  allemand,  M.  le  prof.  Franz  Streber,  a  pubhé  tout  ré- 
cemment un  traité  ex  professa  sur  cette  question  encore  assez  obscure  des 
médailles  creuses'.  D'après  les  données  de  cette  intéressante  dissertation,  il 
m'est  permis  d'admettre  l'hypothèse,  que  ma  pièce  provient  des  Helvétiens 
et  qu'elle  a  été  faite  avec  l'or  des  sables  du  Rhin.  Elle  ne  se  trouve  pas 
parmi  le  grand  nombre  de  figures  que  donne  M.  Streber.  En  voici  en  peu 
de  mots  la  description:  Or  pâle;  concavité  peu  prononcée;  côté  convexe: 
tête  laurée;  côté  concave:  conducteur  de  char,  tenant  en  main  un  stimulus 
au-dessus  de  la  tête  du  cheval;  sous  le  ventre  du  cheval,  je  crois  recon- 
naître un  B.  Poids:  l^^OGO.' 

La  bibliothèque  de  la  ville  de  Strasbourg  possède  un  grand  nombre  de 
monuments  provenant  d'Ehl:  plusieurs  autels  votifs,  une  inscription  aux 
déesses  Mères,  des  statuettes  en  bronze  de  Mercure  et  autres  divinités,  des 
anneaux,  des  fibules  en  bronze,  un  anneau  en  fer  avec  cachet  d'or  portant 
un  lion,  des  kelt  en  pierre,  en  bronze  et  en  fer,  un  moule  à  kelt,  des  mé- 
dailles en  bronze,  en  argent  et  en  or,  etc.  Rappelons  encore  les  deux  coins 
en  fer,  dont  il  a  été  question  ci-dessus,  et  qui  paraissent  être  un  avers  et 
un  revers  de  la  même  médaille.  L'avers  donne  le  buste  avec  diadème  de 
Valentinien  F''  tourné  vers  la  droite;  le  revers  est  trop  fruste  pour  pouvoir 
être  déterminé  avec  certitude. 

Du  temps  de  Beatus  Rhenanus,  Ehl  était  encore  très-riche  en  monuments 
romains  de  toutes  sortes  l  Dans  le  couvent  on  conservait  beaucoup  de 
figures  scellées  dans  les  murs,  entre  autres  les  images  de  Mercure,  de 
Diane  et  autres  divinités.  Beaucoup  de  ces  monuments  ont  été  employés 
aux  fortifications  de  Benfeld.  Le  hameau  d'Ehl  ayant  été  fortifié  lui-même 
par  les  Suédois,  en  1632,  pour  l'investissement  de  cette  place,  il  est  cer- 
tain qu'on  n'aura  épargné  aucune  antiquité  propre  à  cet  usage.  C'est  ainsi 

1.  Voy.  Abhandlungen  der  philosoph/sch-pluloloyischen  Classe  der  konUjlich-bayeri scheu 
Kkadcmie  der  Wissenschaften,  1860,  Münclien.—  i'oiir  le  poids  de  ces  pièces,  voy.  l'ii.  t)iss, 
Beslimmunç/  des  Goldgewichls  der  sog.  Rcgenbogen-Sch.,  München,  1861. 

2.  Me  proposant  de  faire  un  travail  spécial,  avec  figures,  sur  les  antiquités  trouvées  à 
Elit,  je  prie  les  personnes  qui  possèdent  des  pièces,  autlientiquemeul  originaires  de  cette 
localité,  de  vouloir  bien  m'en  communiquer  des  descriptions  ou  des  dessins, 

3.  Beati  Rhenani  reruin  gerinmiicar. ,  11b.  lit,  p.  170,  edit.  MDLI. 


—  123  — 

qu'un  grand  nombre  de  monumenls  précieux,  que  le  savant  de  Schlestadt 
(du  seizième  siècle)  a  connus  et  qu'il  aurait  dû  nous  décrire  avec  plus  de 
détail,  ont  été  brisés  et  dispersés. 

Schœpnin'  a  décrit  et  figuré  un  cippe  quadrilatère  bien  conservé  qui 
s'est  trouvé  dans  la  sacristie;  on  y  dislingue  parfaitement  Mercure,  Hercule, 
Vesla  et  Pallas.  Schweigbœuser'  parle  de  deux  autres  autels  votifs,  prove- 
nant du  même  couvent,  sur  lesquels  on  reconnaît  les  ligures  de  Mercure, 
d'Hercule,  de  Minerve,  de  Junon,  etc.  —  Ces  trois  pièces  se  trouvent  à  la 
bibliothèque  de  Strasbourg. 

Tous  les  auteurs  qui  s'occupent  d'archéologie  et  d'histoire  d'Alsace,  par- 
lent des  antiquités  d'Ehl.  Celui  qui  le  premier  y  a  signalé  l'existence  d'une 
ofjßcina  œraria,  est  le  D'"  Schreiber.  Il  parle  ionguement  des  trouvailles 
qui  ont  été  faites  dans  cette  localité,  et,  d'après  lui,  les  médailles  ro- 
maines que  l'on  y  recueille  s'étendent  sur  toute  l'époque  des  empereurs.' 

L'épigraphie  lapidaire  n'est  représentée  que  par  une  seule  pièce,  celle 
dont  il  a  été  parlé  plus  haut  et  qui  se  trouve  à  la  bibliothèque  de  Stras- 
bourg. Je  ne  saurais  omettre  cette  inscription  qui  est  l'un  des  monumenls 
les  plus  impoi-lanls  de  l'ancien  Ilelvct.  Je  la  reproduis  d'après  Schœpflin.' 

MATRABVS  AGRV 
EX  MACERIE  CIRG 

VMDVCTVM  SEXT 

VS  CLEMENTIS  FIL 

V.  S.  L.  L.  M. 

Malrabus  Agnim  ex  nmcerie  circvmductuin  Sextus  Clementis  ßlhis  (de- 
dii),  voHwi  solvens  lubens  libero  mimere.^ 

il  est  certain  que  le  territoire  d'Ehl  formait  à  peu  près  le  centre  de  la 
ville  gallo-romaine  Helveim  ou  Hellehim,  appelée  par  Ptolémée  EXxeßoc. 
Après  la  chute  de  l'Empire  romain,  ces  noms  ont  subi  diverses  modifications, 
tout  en  conservant  leur  radical.  Ainsi  on  trouve  dans  les  chai-tes  et  dans  les 
auteurs  :  Helkeb,  Helvel,  Elcebus,  Hellemw,,  Hchs,  Helius,  Elveto,  Eletdo, 
Allerica,  Elvos,  Aleye,  Eliglum,  Eiigia,  Elegia,  Eley,  Ehly ;  puis,  comme 
variantes  usitées  de  nos  jours  :  El,  EU  et  Ehl  La  première  mention,  sous 

1.  Loc.  cit.,  Tab.  V. 

2.  Antiquités  do  l'Alsace,  pag.  3«. 

3.  Loc.  cit.  p.  192. 

4.  Loc.  cit. ,  t.  I ,  p.  478. 

5.  Le  D""  Steiuer  [Codex  inscriptionuvi  romanantm  Rheni.  Darmsiadt,  1837  p  85) 
donne  une  leçon  un  peu  différente;  il  interpréle  ainsi  les  sigles  de  la  dernière  lione- 
votim  solvit  lœtm  Übender  merito;  ^Mh.  dans  l'inscription ,  il  sépare  les  mots  parades 
points 


—  124  - 

le  nom  à'Alege,  date  de  1050.  Une  antre  mention,  de  1336,  parle  d'nne 
église  paroissiale  à  Eley,  ce  qui  prouve  qn'nn  moyen  âge  celte  localité  avait 
encore  une  certaine  importance. 

Notre  savant  et  obligeant  bibliophile,  M.  Ileilz,  m'a  communiqué  un 
exemplaire  de  Merian,  Topogrnpliie  des  Elsasses  (1063),  portant  des  noies 
marginales  manuscrites.  Dans  une  de  ces  notes,  il  est  dit  que  le  pape 
Léon  IX,  en  revenant  du  synode  de  Maycnce,  consacra  l'église  d'Elily', 
qui  était  livrée  au  culte  depuis  huit  siècles  sans  avoir  reçue  aucune  consé- 
cration. Je  possède  un  fragment  de  lût  de  colonne  avec  chapiteau,  qui 
porte  sur  deux  de  ses  faces  des  croix  grecques,  sculptées  par  une  main 
peu  exercée  et  certainement  faites  à  la  baie.  Cette  pièce  a  été  trouvée  vis- 
à-vis  de  l'ancien  couvent,  il  y  a  une  vingtaine  d'années,  à  plus  d'un  mètre 
sous  terre.  Des  connaisseurs  font  remonter  ce  chapiteau  à  une  très -haute 
antiquité.  Serait-ce  une  colonne  de  cette  égbse  consacrée  par  le  saint  pon- 
tife alsacien  dans  une  visite  faite  en  Alsace? 

D'après  une  autre  note  manuscrite  du  même  livre,  le  roi  Clovis  aurait 
fait  restaurer  l'église  d'Elil  au  commencement  du  sixième  siècle  ;  l'auteur 
anonyme  ajoute  que  dans  les  murs  on  trouve  les  idoles  de  Mercure  et  de 
Diane. 

Sans  être  positivement  historiques,  ces  données  peuvent  avoir  quelque  in- 
térêt et  j'ai  cru  devoir  les  mentionner  ici.  On  verra  plus  loin'  la  tradition  de 
l'apostolat  de  saint  Materne,  tradition  populaire  très-vraisemblable,  d'après 
laquelle  cet  apôtre  aurait  fait  démolir  le  temple  païen  pour  le  remplacer 
par  une  église  et  un  couvent.  On  ne  sait  rien  du  couvent  primitif;  au 
moyen  âge  il  y  avait  d'abord  des  Prémontrés  qui,  plus  tard,  furent  rem- 
placés par  des  Récollets. 

^  5.  —  Vestiges  d' établi ssemenls  romaiiïs  trouvés  dans  la  contrée. 

Je  considère  comme  vestiges  d'établissements  de  ce  genre,  les  substruc- 
tions  et  la  céramique  portant  un  cachet  romain,  principalement  les  tuiles 
à  rebords.  Il  y  a  des  places  où  je  n'ai  rencontré  que  des  débris  de  tuiles  ; 
je  n'ai  pas  hésité  à  les  considérer  comme  vestiges  d'établissements  romains. 
Quoiqu'il  soit  prouvé  que  les  tuiles  à  rebords  aient  été  usitées  encore  à 
l'époque  mérovingienne,  je  ne  crois  pas  avoir  fait  fausse  route  en  présence 
d'un  centre  romain  positivement  reconnu. 

La  plupart  de  ces  places  sont  occupées  par  l'agriculture,  qui  fait  succes- 

1.  Ce  lait  ii'esl  constaté  par  aucun 'loruiiu'iit.  i\I.S[ia(;li.  dans  l'intéressante  notic»^  .sur 
Leon  IX,  lue  dans  la  séance  dn  1(J  décembre  1863,  n'en  lait  pas  mention. 
?.  Voy.  g  12. 


—  125  — 

sivcment  dispyiaîlrc  jusqu'aux  dernières  (races  de  ces  vestiges.  Il  y  a  des 
emplaceuieiils  qui  niérileraienl  d'être  étudiés  par  des  fouilleg  méthodiques 
et  complètes,  qu'on  ne  peut  exécuter  qu'en  hiver  lorsque  le  sol  est  lihre; 
je  les  signalerai  aux  archéologues  qui  auraient  le  loisir  de  suivre  des  tra- 
vaux de  ce  genre. 

.  L'étendue  de  ces  places,  indiquées  sur  la  carte  par  des  carrés,  n'est  (jue 
relative;  l'échelle  est  trop  petite  pour  une  précision  complète.  J'ai  désigné 
par  leurs  noms  vulgaires  les  places  dont  j'aurai  à  parler.  Toutes  sont  reliées 
entre  elles  par  des  voies  anciennes.  Il  eut  été  intéressant  de  déterminer  le 
rôle  de  chacun  des  établissements  dont  j'ai  trouvé  les  vestiges;  mais  j'ai  du 
me  borner  à  quelques  conjectures.  Il  y  en  a  probablement  qui  n'étaient 
(|ue  des  lieux  de  sépulture. 

Bargheim.  —  Tuiles  à  rebords,  débris  de  poterie  romaine  rouge,  noi- 
râtre, etc.  Voilà  ce  que  j'y  ai  recueilli  lors  d'un  passage  rapide.  Le  titre  de 
place  romaine  étant  acquis  à  Burgheim  d'une  façon  notoire,  je  n'ai  pas 
poussé  plus  loin  mes  recherches.  Sachant  d'ailleuis  que  M.  Ringeissen  a 
soumis  cette  localité  à  une  étude  spéciale,  j'ai  fait  appel  à  son  obligeance, 
et  voici  ce  qu'il  m'a  communi(]ué:  «Le  tertre  sur  lequel  est  construite  l'é- 
glise romane  de  Burgheim  a  diÀ  servir  autrefois  de  poste  d'observation  ou 
de  chàteau-fort  ;  on  y  trouve  les  traces  de  constructions  souterraines  à 
petit  appareil  qui  peuvent  dater  de  l'époque  romaine;  j'y  ai  déterré  des 
tuiles,  tuileaux,  fragments  de  vases,  monnaies,  épingles,  une  petite  plaque 
de  bronze,  ouvragée  dans  le  genre  de  celle  trouvée  par  M.  Valois,  à  Hei- 
dolsheim,  et  publiée  dans  le  Bulletin;  des  ferrailles,  des  charbons  en 
gi'ande  quantité,  indiquant  un  fort  incendie,  le  tout  de  l'époque  romaine. 
On  trouve  encore  sur  les  teirains  environnanîs  des  médailles,  des  objets 
de  bronze,  des  multitudes  de  débris  de  poteries  fines,  noires,  rouges, 
irisées,  etc.;  des  meules,  des  substructions  de  four,  etc.» 

La  première  mention  de  Burgheim  {Burcheim)  date  de  770.  D'après 
Specklin,  il  y  avait  une  commanderie  de  Templiers. 

A  Valf,  qui  se  trouve  à  proximité,  je  n'ai  rencontré  aucun  vestige 
lomain.  Cette  commune  est  très-ancienne  aussi;  sa  première  mention  date 
de  778,  sous  le  nom  de  Walahu.  Stotzheim  (Stolesheiin)  est  mentionné 
pour  la  première  fois  en  814,  et  Zellwiller  [Zincilla)  en  893. 

Hollzbad,  prés  Westhausen  (canton  dit  Ziegelhof  ).  —  Débiùs  de  tuiles,  à 
rebords,  fragments  de  poterie  romaine.  Il  y  a  environ  vingt  ans,  le  sol  était 
encore  jonché  de  ces  débris,  les  soins  de  la  culture  les  ont  fait  disparaître 
en  majeure  partie.  Il  y  a  une  source  d'eau  minérale,  très-abondante,  uti- 
lisée depuis  un  tenq)s  immémorial.  On  sait  (|u'elle  était  déjà  fréquentée  au 


—  126  — 

dixième  siècle'.  Y  avait -il  un  bain  romain?  C'est  une  question  insoluble 
pour  le  moment.  Une  tradition  locale  veut  que  jadis  des  tuyaux  souterrains 
conduisaient  l'eau  de  cette  source  à  Ebl;  on  dit  en  avoir  trouvé  il  y  a  en- 
viron cinquante  ans.  Les  tuyaux  de  bains  romains  recueillis  par  Schweig- 
bœuscr,  près  de  Malzenheim,  donnent  quelque  poids  à  cette  opinionl  On 
parle  aussi  de  médailles  romaines  trouvées  aux  environs  de  IIoKzbad. 

La  première  mention  de  Westliausen  date  de  07G.  Il  y  avait  une  famille 
noble  de  ce  nom  qui  s'est  éteinte. 

Elkach,  Eltzen  ou  Eisten,  près  de  Kerlzfeld.  —  Les  liabitants  du  village 
disent  ville  d'Ellzach.  Jadis  pâturage,  ce  terrain  est  maintenant  livré  à  la 
culture.  On  y  remarque  des  substructions,  des  fi'agments  de  tuiles  à  rebords 
et  de  poterie  romaine,  dispersés  sur  une  étendue  d'environ  100  hectares. 
Cet  emplacement  est  traversé  par  une  belle  route  pavée  en  galets  du  Rhin\ 
On  m'a  fait  remarquer  la  place  d'un  puits  qu'on  avait  comblé,  après  en 
avoir  extrait  les  matériaux,  parmi  lesquels  j'ai  trouvé  des  tuiles  à  rebords. 
C'était  certainement  un  tolleno. 

Le  nom  d'Kllzacb  ne  se  trouve  dans  aucun  ouvrage  sur  l'histoire  d'Al- 
sace*. Serait-ce  peut-être  Hilciacvm  dont  Schœpflin  ne  sait  trop  que  faire^? 
Ellzacli,  Eltzen  ressemblent  tellement  à  Hclkebus,  Elcebus,  etc.,  qu'on  ne 
peut  presque  pas  s'empêcher  d'adhérer  à  la  tradition  populaire  (jui  veut 
que  la  ville  gallo-romaine  se  soit  étendue  jusque-là. 

Filij  ou  Filli/,  autre  canton  rural  près  Kertzfeld,  à  côté  du  Qiœr,  ancien 
bras  de  l'Ill.  —  Tuiles  à  rebords,  viriole  et  épingle  {ncus  comatoria)  en 
bronze. 

Sur  le  territoire  du  village  même,  on  rencontre  des  médailles  romaines, 
j'y  ai  recueilli  un  Constance  en  bronze. 

En  creusant  les  fondations  d'une  nouvelle  église,  il  y  a  quelques  années, 
on  a  déterré  plusieurs  sarcophages  mérovingiens.  La  pi'emière  mention  de 
Kertzfeld  (Kercenveli)  ne  date  que  de  1187.  Famille  noble  éteinte. 

Bitzen^  (commune  de  Sand).  —  Tuiles  à  rebords,  poterie  blanchâtre, 
grise,  rouge  commune,  ossements.  C'est  M.  Barthelmé  qui  a  trouvé  ces 
objets  en  faisant  décaper  une  prairie. 

1.  Hydrographie  mèdiculc  Oe  S/rasbourç) ,  1862,  p.  217. 

2.  Voy.  g  7. 

3.  Voy.  g  8,  Vtehweg  ou  AUwerb. 

4.  On  raconte  à  Kertzfeld  que,  en  1815,  les  Autricliiens  ont  reclierché  cette  place  qu'ils 
avaient  marquée  sur  une  de  leurs  cartes. 

5.  Alsat.  illu&tr. ,  t.  ]",  p.  C92. 

6.  Ce  nom  désigne  un  canton  rural  et  on  le  retrouve  dans  d'autres  communes.  Ainsi 
l'OEuvre  de  Aotre-Dame  possède  des  biens  dans  le  canton  Ditzen  de  la  commune  de  Still. 


.—  127  — 

La  première  mention  de  Sand  {Sandt)  date  de  1292. 

Ancienne  voirie  (banlieue  de  Benfeld).  —  Tuiles  à  rebords.  Il  y  a  une 
vingtaine  d'années,  en  décapant  une  prairie,  on  a  déterré  beaucoup  de 
tuiles  à  rebords  qui  ont  été  dispersées.  Je  n'en  ai  plus  rencontré  que  quel- 
ques pièces.  C'était  la  voirie  où,  au  moyen  âge,  on  jetait  les  corps  des  sup- 
pliciés qui  étaient  pendus  au  gibet,  placé  à  quelque  distance  de  là. 

Benfeld.  —  Tuiles  à  rebords  et  autre  céramique  romaine;  médailles.  Dans 
un  mur  de  l'ancienne  église  se  trouvait  scellé  un  bas-relief  très-antique, 
qui  passait  pour  la  figure  d'un  Gaulois.  Dans  une  maison  au  millésime  de 
1566,  des  ouvriers  ont  rencontré,  tout  récemment,  une  figure  mutilée  d'un 
Mercure  gaulois  qui  avait  servi  comme  moellon.  Mercure  était  le  premier 
des  dieux  gaulois  et  on  lui  dédiait  beaucoup  de  statues',  A  côté  de  la  voie 
ancienne  (jui  ti'averse  Benfeld  on  a  trouvé  une  pierre  avec  une  excavation 
qui  contenait  des  cendres.  — Tombeau  romain? 

En  creusant  les  fondations  de  la  nouvelle  église,  on  a  découvert  des  sar- 
cophages mérovingiens.  Benfeld  passe  pour  avoir  été  bâti  à  l'aide  des  ruines 
(ÏHelvetus.  Sa  première  mention,  sous  le  nom  de  Beneveldim,  date  de  763. 
Une  famille  noble  éteinte  portait  ce  nom. 

Heidenschloss  ou  Husenburg,  près  Hüttenheim'.  —  Tuiles  à  rebords  trou- 
vées dans  les  décombres  de  cet  ancien  château  féodal,  auquel  Sclnveig- 
hœuser,  dans  ses  manuscrits,  donne  également  une  origine  romaine.  Ces 
décombres  amoncelés  formèrent  une  espèce  de  colline.  En  1818  ou  1820 
on  les  enleva  pour  les  disperser  et  le  sol  du  château  fut  converti  en  prairie. 
C'était  probablement  un  castellum.  D'après  la  tradition,  la  poste  se  trouvait 
à  proximité.  On  sait  que  les  mansions  étaient  quelquefois  fortitiées  pour 
veiller  à  la  sûreté  des  voies  et  les  protéger  contre  le  brigandage.  Ce  fort 
pouvait  en  même  temps  avoir  pour  mission  de  couvrir  la  navigation  de  Till 
et  être  la  demeure  du  maître  de  poste  (manceps  perfectissimatus.y 

Au  moyen  âge,  ce  castel  fut  habité  par  des  brigands,  dont  les  habitants 
de  Jlüttenheim  ont  conservé  le  souvenir.  D'après  la  tradition  locale,  ils  pil- 
lèrent surtout  les  bateliers  de  l'ill,  et  pour  leur  donner  le  change,  ils  eurent 
recours  à  la  ruse  en  ferrant  leurs  chevaux  en  sens  inverse.  D'après  Bern- 
hardt Hertzog',  les  Strasbourgeois  brûlèrent  ce  castel  en  1428;  alors  il 
appartenait  à  un  nommé  Jean  Mans.  Schœpflin"  dit  qu'il  avait  pour  proprié- 

1.  Cœsar,  De  bello  gallico ,  lib.  VI ,  cap.  xvii. 

2.  Bulletin  de  la  Soc.  des  mon.  hist.  d'Alsace ,  t.  IV,  p.  iOG ,  P.  V. 

3.  Voy.  g  6,  Heidenpost.  Pour  les  postes  fortifiés,  voy.  Mone,  loc.  cU. ,  t.  II,  p.  215. 

4.  Edelsäss.  Chronick ,  lib.  IV.  p.  109. 
5    Alsat.  illustr.,  t.  11,  p.  152. 


—  128  — . 

taire  Adam  Rytï,  de  Strasbourg,  qui  spoliait  les  marchands  naviguant  sur 
rill,  et  que  les  Strasbourgeois  détruisirent  ce  repaire  en  1465  et  jetèrent 
le  coupable  en  prison. 

La  première  mention  de  liüttenheim  date  de  727.  P'amille  noble  éteinte. 

Pferche^}.  —  Tuiles  à  rebords  et  substructions.  On  parle  d'une  dalle  avec 
ligures  déterrée  dans  la  forêt;  elle  n'a  pas  été  conservée. 

Rosenfeld.  —  Tuiles  à  rebords,  tuileaux,  poterie  ancienne.  On  j»arlc  de 
médailles  et  d'armes  trouvées  sur  ce  terrain,  lorsqu'on  a  commencé  à  le 
défricher  il  y  a  une  quarantaine  d'années.  La  tradition  y  place  un  temple 
et  une  ferme  appelée  Rosenfeld,  qui  par  corruption,  a  donné  au  village 
voisin  le  nom  de  Rossfeld. 

Première  mention  de  Rossfeld  (Rosenvell)  1358. 

Rebhurst.  —  Tuiles  à  rebords,  poterie  ancienne,  médailles  romaines 
frustes,  une  johe  tibule  en  argent  pareille  à  celle  que  M.  de  Ring-  a  trouvée 
dans  la  forêt  de  Brumalh  et  qu'il  a  figurée  dans  le  Bulletin'.  Cette  localité 
a  été  découverte  par  M.  fabbé  Voltz,  curé  à  Merbsheim  (membre  de  la 
Société). 

Truli.  —  Tuiles  à  rebords,  poterie  ancienne,  substructions.  On  remar- 
quera la  position  de  celte  place  à  côté  d'une  voie  païenne  tout  près  d'un 
groupe  de  turaulus.  C'était  peut-être  un  castellum  pour  surveiller  cette 
route. 

Hafneracker.  —  Tuiles  à  rebords,  débris  de  poterie  romaine  rosàtre, 
grise,  blanche,  etc.,  substructions,  traces  de  feu.  On  parle  d'un  grand  nombre 
de  vases  de  terre,  parfaitement  rangés,  à  environ  un  demi-mètre  de  pro- 
fondeur. —  Tombeaux  romains  ? 

llafneracker  (ou  champ  de  potier)  fait  partie  d'un  canton  rural  appelé 
Mörderfeld  (champ  des  meurtriers).^ 

Kirchsträng  (Kirch,  église;  Strôeng-,  Strangacker,  pièce  de  terre  longue 
et  étroite,  Striga  des  Romains).  —  Tuiles  à  rebords  en  quantité,  poterie 
jaune,  grise,  rougeâtre,  rouge  fine  (rare),  fragments  de  vases  de  grande 
dimension  {jarres,  amphores),  briques  striées,  ciment  fait  avec  briques 
pilées  {testa  tusa),  à  surface  peinte  en  couleur  jaune,  rouge  et  verte,  sub- 
structions, traces  de  feu,  pavés,  deux  médailles  de  bronze  de  GalHen  et 
une  médaille  gauloise.  J'ai  fait  beaucoup  de  fouilles  sur  cette  place  qui,  après 
Ehl,  est  la  plus  riche  en  vestiges  antiques'.  —  Castellum  romain? 

D'après  la  tradition  locale  de  Herbsheim,  le  village  se  trouvait  à  celte 

1.  2*^  série,  l'"'  vol,  p.  89. 

•l.  Bulletin,  t.  lit,  p.  10,  P.  V. 

3.  il  y  a  aussi  do  la  ccramiquc  du  moyen  âge. 


Topo.^raphique  et   archéologique 

D H EL VET l   S 

et  dp  ses  PiivuHms.  lElil  pies  Benfeld 

f/ii   /  /  Siècle 

:XAP0Lè0X  XICKLÈS 
186-1. 


^Iln\1rittz//ri7/i 


vers   S''0(Hh 


S*  Maguei'ifc 

I  Légende. 

3       Tftnpie   'h-    yt/rrrure    hl  après    lu   ira</ilioTt  / 

I     l'i-sfiqes    d  r'tdl'hsscnients    ro/iinins. 
(2)     /'lares   îiolcrs  pnar  iite/aaife 
+      Découvertes  dircrsr.s. 

■  loirs  anci.rrmcs   /lilrs  /w/r/,'//i?yi  Heidenstraessel 
u.sitcfs  comme  rhemins. 

P(ii-ti('s   lie  rares   /y//r//v^«/°.yl  Heidenslraesselou  Altstvass  I 

fr/rore  l'tsil'/es  mais  hors  d iisaqc 

=^  l'oii-s  (larinnirs pirolal'les    usilées    romme 
chemins  ou  s  ni  tiers. 

Jnterriipfinns    rf  Ira  ci' s  /u/j]olhétrquts .  ^. 

. /oies  modi'poe.s.  ^^ 

•       Ta  ni  If /a  S. 


'  Simon,  Str^sd'i 


—  p}^  — 

place  à  l'époque  où  il  fit  partie  de  la  graiule  ville  située  à  Ehl.  Plus  tard  il 
y  avait  une  église  et  un  château  avec  quelques  huttes  de  paysans;  le  château 
et  le  village  ayant  été  brûlés,  on  les  a  rebâtis  plus  près  du  ruisseau,  à  la  place 
où  se  trouve  le  village  actuel,  et  le  seigneur  du  château  a  donné  son  nom  au 
village.  (Il  s'appelait  sans  doute  Herholt,  dont  on  a  fait  HerboUzhcim  et  }tar 
corruplion  Herbsiteim  on  He7'bsen.)  D'après  Bernhardt  Hertzog*,  Ilerbollz- 
heim  a  été  brûlé  par  lesSfrasbourgeois  en  'li28,  donc  à  la  même  époque  où 
fut  détruit  Husenburg.  Le  village  appartenait  alors  à  Jacob  Duschmaïui. 
Schœpflin^  rapporte  qu'à  Herboltzheim,  vulgairement  Herbsen,  les  Dorn- 
hajusser  avaient  un  domaine  et  un  château  qui  fut  détruit  au  milieu  du 
seizième  siècle.  Engagé  d'abord  aux  Greiffenstein ,  il  fut  racheté  en  1347. 
Il  n'est  pas  fait  mention  de  Herbsheim  antérieurement  à  cette  date. 

Je  rapporte  ces  faits  tels  que  je  les  trouve;  il  serait  oiseux,  sans  doute, 
de  les  discuter  dans  ce  (ravail.  Près  du  village  actuel,  au  bord  du  Zembs, 
il  y  a  un  terrain  entouré  d'un  fossé  qu'on  appelle  Sch  los  s  garten  (jardin  du 
château).  J'y  ai  fait  des  fouilles  avec  M.  Voltz,  mais  sans  résultat. 

Forêt  de  Sand.  —  Tuiles  à  rebords  et  poterie  ancienne.  La  plupart  des 
matériaux  trouvés  à  cette  place  ont  été  employés,  il  y  a  quelques  années, 
pour  construire  un  chemin  d'exploitation. —  Castelkun  pour  couvrir  la  voie 
d'Argentorat,  rive  droite?. 

Kohlengruben.  —  Tuiles  à  rebords,  poterie  romaine  rouge  line  et  aulie, 
bri(|ues  circulaires,  substructions,  traces  de  feu  et  des  charbons,  d'où  le 
nom  qui  veut  dire  fosses  à  charbons. 

Schwanaii,  près  Gersiheim.  —  Fragments  de  tuiles  à  l'ebords,  tuileaux, 
débris  de  poterie  rouge  line  et  autre  poterie  ancienne,  substructions  à 
petit  appareil  de  la  dureté  du  granit,  une  clef  romaine  et  une  médaille  de 
bronze  d'Adrien.  Les  débris  à  cachet  romain  sont  fort  rares,  ils  ont  dû  dis- 
paraître en  majeure  partie  par  les  constructions  féodales,  ou  ètie  enfouis 
sous  les  décombres  de  celles-ci. 

Tout  le  monde  connaît  le  bas -relief  de  Glabro  du  musée  Schoepilin,  dé- 
couvert à  Gerstheim  au  siècle  dernier,  décrit  et  figuré  dans  XAlsatia  illus- 
trala^.  Je  possède  des  médailles  romaines  trouvées  dans  cette  localité,  enti'c 
autres  celle  de  la  colonie  de  Nîmes  (bronze)  avec  le  crocodile  et  le  palmier, 
et  une  Faustine  (argent)  avec  le  temple  à  six  colonnes  au  revers.  Tout  me 
porte  à  croire  (|ue  ce  point  a  joué  ini  rôle  important  dès  les  temps  primitifs; 
et  je  ne  crains  pas  d'admettre  l'hypothèse  que  le  château  féodal  de  Schvva- 

1.  Ub.  iv,  ij.  lou. 

2.  toc.  cit. ;  t.  Il,  p.  158. 

3.  Msaf.  iUfisfr..  Tai>.  I.  lig.  u"  11. 

ii'.SÉRit.  —  T.  11.  —  ^M.)  y 


—  130  — 

nau  a  été  précédé  d'un  castrum  romain,  que  ce  fort  était  une  sentinelle 
avancée  pour  défendre  Helvetus  contre  les  Germains.  Ces  peuples  ayant  été 
sans  cesse  des  voisins  incommodes  et  menaçants,  ce  poste  de  défense  avait 
toujours  sa  raison  d'être,  à  l'époque  gauloise  aussi  bien  qu'à  l'époque 
gallo-romaine. 

On  verra  plus  loin'  la  description  d'autres  découvertes  du  plus  liaul  in- 
térêt qui  viennent  d'être  faites  à  Gerstheim.  Au  dire  des  habitants,  on  a 
déjà  trouvé,  au  village  et  dans  les  environs,  beaucoup  d'antiquités,  telles 
que  vases,  armes,  colliers,  bracelets,  médailles,  qu'on  a  gaspillées  sans  en 
connaître  l'importance.  Il  y  avait  plusieurs  tumulus  qui  ont  disparu;  il  ne 
m'a  plus  été  possible  de  les  pointer  sur  la  carte. 

Il  y  a  quelques  années  un  douanier,  en  péchant  à  la  ligne,  dans  le  Rhin 
près  de  Schwanau,  retira  un  vase  en  bronze  qui  s'était  accroché  à  l'hame- 
çon. C'est  un  gobelet  de  la  contenance  d'un  litre  environ.  Il  porte  au  milieu 
le  monogramme  du  Christ,  entourée  d'une  couronne,  avec  les  lettres  a 
et  G).  Autour  du  bord  se  trouve  cette  inscription:  Septlnius  Theodalus  cor- 
recior  Venitice  et  Islriœ  ex  ac.  Ce  précieux  monument,  qui  paraît  dater  du 
quatrième  siècle,  a  été  acquis  parla  bibliothèque  de  Strasbourg. 

Le  bas-relief  de  Glahro  a  fait  supposer  à  Schweighœuser*  qu'à  l'époque 
romaine  il  y  avait  une  villa  à  Gerstheim.  11  m'est  imj)0ssible  d'admettre 
cette  opinion.  Une  villa  est  un  séjour  de  plaisance;  qr,  à  cette  époque,  la 
résidence  dans  un  lieu  continuellement  exposé  au  premier  choc  d'une 
invasion  de  barbares,  n'a  pu  offrir  le  moindre  agrément.  Une  villa  franque 
serait  plutôt  admissible. 

Le  castel  féodal  de  Schwanau  a  été  pris,  en  1333,  sur  Walther  de 
Geroldseck,  par  les  Strasbourgeois,  qui  l'ont  détruit.^ 

Krittwalcl,  près  Krafft.  • —  Tuiles  à  rebords  et  tuileaux.  Cette  place  est 
une  prairie  sur  la  lisière  de  la  forêt;  on  l'a  décapée  et  les  matériaux  ont 
été  dispersés  et  jetés  à  l'eau.  Je  n'ai  recueilli  que  quelques  débris  portant 
un  caractère  romain.  Il  est  possible  qu'il  y  ait  eu  là  un  relais  de  poste 
{mutatio),ce  point,  se  trouvant  sur  la  ligne  hypothétique  d'une  voie  d'Helvet 
à  Argentorat,  qui  passe  par  une  place  appelée  Krœmergœssel.  ^ 

La  route  moderne  du  Rhin ,  de  Râle  à  Spire,  avait  toujours  un  relais  de 
poste  dans  le  hameau  de  Krafft. 

1.  Voy.  g  7,  VII,  Gersllieim, 

2.  Schœpflin,  traducl.  Uaveiièz,  f.  i",  p.  Gui. 

3.  Voy.  Kœiiigslioven,  Eis.  u.  strassb.  Chronick ,  p.  3'2I.  —  Scliœpfliii ,  kls.  illust. ,  t.  II, 
p.  444,  et  surtout  Schweigliceuser,  Antiq.  d'Alsace ,  Bas-Rhin  _,  p.  39.  Schwanau  appartient 
à  la  famille  Zorn  de  Bulach. 

4.  Voy.  ce  mot,  g  6. 


—  131  — 

Erstein.  —  11  y  a  quelques  années,  en  ci-eusant  les  fondations  de  la 
nouvelle  église,  on  a  déterré  divers  objets  de  l'époque  romaine:  tuiles  à 
rebords,  débris  de  vases,  pierres  meulières,  etc.  Ces  objets  sont  conservés 
par  M.  Ringeissen,  architecte.  J'ai  vu,  dans  mon  enfance,  les  urnes  ro- 
maines en  terre  rouge  qui  ont  été  trouvées  (à  peu  près  en  1 820),  dans  renclos 
de  l'ancien  couvent,  et  que  Schweighaeuser  cite  dans  ses  Antiquités  d'Al- 
sace, page  40.'  On  parle  de  médailles  romaines  rencontrées  dans  celte 
localité. 

A  la  même  place  de  l'église,  on  a  découvert  un  sarcophage  mérovingien. 
Les  rois  francs  avaient  un  palais  et  une  villa  à  Erstein.  Au  moyen  âge,  ce 
bourg  avait  le  titre  de  ville  qui  était  fortifiée;  cette  forteresse  a  été  détruile 
par  les  Strasbourgeois  en  même  temps  que  Scbwanau. 

Il  existe  à  la  mairie  une  chronique  manuscrite  du  seizième  siècle  dans 
laquelle  cette  localité  est  appelée  Erstheim.  Sa  première  mention,  sous  le 
nom  de  Herinstein,  date  de  818.  Famille  noble  éteinte. 

Wasserloch,  près  d'Uttenheim.  —  Je  n'y  ai  trouvé  que  deux  fragments 
de  tuiles  à  rebords.  D'après  la  tradition  locale,  il  y  avait  jadis  beaucoup 
de  débris  de  ce  genre  et  des  substructions;  tout  cela  a  été  enlevé  par  des 
travaux  de  défrichement.  A  côté  du  chemin  dit  Nordivegse  trouvait  un  puits 
qui  a  été  supprimé  en  1815;  lorsqu'on  en  a  extrait  les  moellons,  on  y  a  trouvé 
une  belle  médaille  de  César,  qui  a  été  recueillie  par  un  officier  autrichien. 

Il  existait  à  Ultenheim  un  château  féodal  qui  a  été  démoli  et  dont  la 
famille  s'est  éteinte.  Sa  première  mention  date  de  817  (Utenheim). 

Les  deux  communes  voisines  sont  également  très-anciennes.  Bolsenheini 
(Bosenheim)  est  mentionné  pour  la  première  fois  en  845  et  Schaeiïersheim 
(Scasevisheim)  en  768. 

Leimengnih^  près  Osthausen.  —  Tuiles  à  rebords,  tuileaux,  faîtières, 
quelques  rares  débris  de  poterie  ordinaire  et  rouge  fine.  Un  propriétaire 
parle  de  grains  de  collier  qu'il  a  trouvés  en  labourant  son  champ.  A  environ 
500  mètres  de  cette  place,  dans  la  propriété  de  M.  le  baron  Zorn  deBulach, 
on  a  découvert  les  restes  d'un  tombeau  romain." 

Osthausen  est  un  ancien  fief  de  la  famille  Zorn,  qui  y  possède  encore 
aujourd'hui  un  château  ^  La  première  mention  de  ce  village  date  de  735. 


1.  D'après  M.Spach  (Descr/pt.  du  départ,  du  Bas-Rhin,  introd.  hïslor..  p.  10)  il  y  aurait 
eu  à  Erstein  une  poterie  comme  à  Heiligenberg  etc.;  pourtant  je  ne  saclie  pas  qu'on  y  ait 
jamais  rencontré  des  restes  de  four. 

2.  Voy.  I  7,  IV. 

3.  C'est  de  cette  famille  qu'est  issu  Gp.orrje-Louix ,  l'héroïque  défenseur  de  Benfeld,  contre 
les  Suédois,  en  1632. 


—  132  — 

5  (I.  —  Places  notées  pour  niénwtre. 

Ce  sont  des  lieux  (jui  oiiL  joué,  ou  qui  paraisseiil  avoir  joué  uu  rôle  à 
répo(|ue  romaine,  sans  que  j'aie  pu  le  constater  par  des  monuments. 
Plusieurs  de  ces  noms  ne  sont  que  traditionnels  mais  je  les  crois,  signi- 
ficatifs. 

Allmansweier.  —  Village  du  grand-duché  de  Bade.  Je  ne  le  cite  que 
parce  que  son  nom  vient  à  l'appui  d'une  hypothèse  que  je  dévelopi)erai 
[)lus  loin  \  à  savoir,  que  c'est  en  cette  contrée  que  les  Alémans  s'étaient 
réfugiés  dans  les  îles  du  Pdiin  d'où  Julien  les  a  chassés,  d'après  la  narration 
d'Ammien  Marcellin,  et  que  ces  Alémans  ont  donné  naissance  à  ce  village, 
au(juel  ils  ont  laissé  leur  nom. 

Ehersmünster  (Novientum ').  —  On  signale  des  vestiges  de  constructions 
romaines  aux  environs  de  ce  village,  surtout  sur  la  rive  droite  de  l'Ill.  Il  y 
a  itlusieurs  grands  tumulus  dans  une  foret  de  ce  côté  appelée  Todtenkopf 
(tête  de  mort).  L'église,  de  construction  moderne,  se  distingue  par  ses 
trois  clochers,  dont  fun,  qui  occupe  seul  le  côté  de  f orient,  est  appelé 
Heidenthurm  (tour  païenne);  c'était  peut-être  un  sacellnm.  Il  y  avait  sans 
nul  doute  uu  étahlissemenl  romain  d'une  certaine  importance  dans  cette 
localité;  elle  mériterait  d'être  le  sujet  d'un  travail  spécial.  Il  y  aurait  sur- 
tout  des  études  intéressantes  à  faire  dans  la  direction  de  llilsenheim  par 
VVillerhof,  où  il  y  a  un  grand  tumulus,  et  où  l'on  a  déjà  déterré  heaucoup 
d'objets  antiques. 

La  première  mention  de  Novienlum  date  de  77(1. 

Heidenheck  est  un  terrain  boisé  en  majeure  partie  que  l'on  traverse  en 
allant  de  Heidenpost  à  Heidenschloss.  —  On  n'y  a  pmdh  vkn  trouvé  de  par- 
ticuliei'. 

Heidenpost,  à  côté  de  la  voie  païenne  n"  1,  banlieue  de  llültenheim.  — 
C'est  une  place  carrée,  d'environ  3  ares,  qui  est  propriété  particulière  sise 
au  milieu  d'un  terrain  comnumal.  Elle  appartenait  originairement  à  l'évêché 
de  Strasbourg  et  a  été  vendue  avec  les  biens  natienaux.  On  l'appelle 
aussi  Todtenkœpfel  (tête  de  mort)  ou  Postplœtzel  (place  de  la  poste), 
et  la  tradition  veut  qu'il  y  ait  eu  une  poste  à  l'époque  romaine:  de  là  le 
nom  de  Heidenpost  (poste  païenne).  On  en  a  extrait  beaucoup  de  pierres 
à  bâtir,  il  y  a  longtemps  déjà.  Les  touilles  y  sont  difficiles,  à  cause  des 
broussailles  dont  le  sol  est  couvert;  aussi  n'ai-je  rien  pu  y  découvrir.  Ce 
point  se  trouve  près  d'un  croisement  de  route  {compitwn),  à  4'/,  kilo- 

•l.Voy.  gl2. 
5.  Voy.  Scliœptlin  .,  foc.  c/t. ,,  t.  I"',  p.  58. 


—  133  ~ 

mètres  de  l'emplacement  probable  du  temple  de  Mercure  à  Ehl.  Il  y  a  plu- 
sieurs localités  à  vestiges  romains  aux  environs;  il  est  fort  possible  que  la 
poste  se  soit  trouvée  là  et  que" Heidenscliloss  ail  été  un  casleUimi  et  en 
même  temps  la  demeure  du  maître  de  poste  (mcmceps).  ' 

Königsherberg  (gîte  du  roi).  —  Dans  la  banlieue  de  Friesenheim,  et  en 
partie  dans  celle  de  Hossfeld,  sur  la  voie  païenne  n"  4  de  la  carte,  il  y  a  un 
grand  canton  rural  qui  porte  ce  nom.  D'après  une  tradition  locale,  un  roi 
aurait  jadis  campé  là;  on  parle  d'armes,  de  fers  à  cheval  trouves  dans  ce  lieu. 
J'ai  soigneusement  exploré  ce  terrain  par  des  fouilles  multipliées,  mais  sans 
aucun  résultai  archéologique.  La  supposition  d'un  camp  élabli  dans  cette 
plaine  par  un  roi  aléman,  au  quatrième  siècle,  ne  me  paraît  pas  invrai- 
semblable. Je  développerai  cette  hypothèse  plus  loin.' 

Krämergässel  (rue  des  Merciers).  —  Ce  nom  est  donné  à  un  bois  qui  se 
trouve,  près  de  KrafÛ,  entouré  de  plusieurs  tumulus,  sur  la  continuation 
hypothétique,  vers  Plobsheim ,  de  la  voie  païenne  n°  3.  D'après  une  tradi- 
tion locale,  il  y  avait  jadis  des  habitations.  Les  tumulus  l'attestent  jusqu'à 
un  certain  point.  Une  végétation  forestière  très-touffue  m'a  empêché  d'y 
faire  des  fouilles. 

Serrnersheim.  —  Plusieurs  voies,  partant  d'établissements  romains,  se 
rencontrent  à  Sermersheim,  et  je  suis  convaincu  qu'il  y  avait  là  un  point 
occupé  dès  les  temps  les  plus  reculés;  mais  malgré  toutes  mes  recherches, 
je  n'ai  rien  trouvé  qui  me  permette  de  l'affirmer  d'une  manièie  foimelle. 
Comme  dans  d'autres  localités,  le  hasard  décidera  peut-être  une  fois  la 
({uestion. 

Sermersheim,  jadis  fortifié,  est  l'une  des  plus  anciennes  commîmes  de 
la  contrée;  il  en  est  fait  déjà  mention  dans  une  charte  de  708. 

A  Kogenheim,  village  voisin,  il  y  avait  une  famille  noble  aujourd'hui 
éteinte;  sa  première  mention  date  également  de  708. 

Source  de  Sahit-Materne.  —  Bassin  d'environ  30  mètres  de  circonfé- 
rence^  Il  paraît  avoir  occupé  un  îlot  d'un  cours  d'eau  disparu;  je  l'ai  noté 
sur  la  carte  sous  le  nom  de  Brwvnwasser,  se  croisant  avec  la  voie  d'Helvet 
au  Rhin,  à  l'endroit  où  cette  voie  s'appelle  f^ôc'/W; /«'er/.  On  dit  qu'en  curant 
ce  bassin,  il  y  a  envii'on  vingt-cinq  ans,  on  en  a  extrait  des  médailles 
romaines. 

C'est  dans  cette  source  que  saint  Materne,  d'après  la  tradition,  aurait  ad- 
ministré le  baptême  à  ses  nouveaux  prosélytes  vers  la  fin  du  troisième  siècle. 

1.  Voy.  g  5  Heidenscliloss  011  Husenbiirg. 

2.  Voy.  g  12. 

3.  Voy.  gg  3el  12. 


—  134  — 

§  1.  —  Découvertes  diverses. 

I.  Elil.  —  Restes  d'un  four;  des  cendres,  des  charbons,  deux  coins  en 
fer,  des  objets  en  bronze,  des  scories  avec  paillettes  d'or,  etc.'.  C'est,  sans 
nul  doute,  l'emplacement  de  Vofjßcina  œraria  que  le  D''  Schreiber  a  mis  en 
lumière.'  La  tradition  locale  en  a  conservé  le  souvenir,  mais  elle  en  fait 
surtout  un  établissement  monétaire. 

II.  Figurine  grossièrement  faite  en  terre  mal  cuile  et  trouvée  près  de 
Herbsheim,  non  loin  d'une  voie  ancienne  appelée  Hohweg,  au  fond  d'un 
puits  comblé,  dans  une  couche  de  cendres.  —  La  pièce  était  entière  lors- 
qu'on l'a  retirée;  mais  elle  a  été  brisée  et  il  n'en  reste  que  le  buste.  Elle 
pouvait  avoir  une  hauteur  de  8  centimètres.  C'est  une  figure  de  femme 
ayant  les  cheveux  en  torque  autour  de  la  tête,  avec  deux  tresses  pendantes 
par  derrière,  coiffure  qui  est  en  usage  encore  aujourd'hui  parmi  les 
femmes  de  la  Forêt-Noire*.  Le  puits  était  .sans  doute  un  lolleno ,  et  il  ne 
serait  pas  impossible  que  la  figurine  (idole  ou  joujou  d'enfant?)  ne  fût  un 
produit  de  l'art  des  Alémans. 

La  population  actuelle  de  la  Forêt -Noire  {Silva  marciana)  passe  pour 
descendre  de  cette  nation  et  on  sait  avec  quelle  persistance  les  us  et  cou- 
tumes se  maintiennent  parmi  les  gens  du  peuple;  je  ne  crains  donc  pas  de 
déduire  de  cette  ressemblance  de  coiffure,  les  conséquences  historiques 
que  l'on  trouva  plus  loin.^ 

III.  Graviere  près  de  Rossfeld.  — Deux  vases  fendus  et  brisés,  de  poterie 
gris  noirâtre,  sans  lustre.  A  côté  de  l'un  se  trouvait  une  épingle  en  bronze 
{actis  comaloria);  l'autre  était  accompagné  d'une  lame  de  même  métal. 
Il  y  a  dans  le  sous -sol  de  cette  contrée  des  bancs  de  gravier  très-com- 
pacts (appelés  Heuschinen);  les  vases  étaient  placés  sur  un  de  ces  bancs, 
à  1  mètre  de  profondeur,  mais  entourés  d'une  terre  fine,  qui  a  été  cer- 
tainement passée  au  crible.  A  la  même  place,  on  a  trouvé  antérieurement 
beaucoup  d'autres  objets  antiques  qui  ont  été  dispersés. 

Serait-ce  un  lieu  de  sépultures  gauloises  de  l'époque  de  l'incinération? 

IV.  Enclos  du  château  de  M.  le  baron  Zorn  de  Bulach,  à  Osthausen.  — 
Pierre  avec  excavation  ayant  contenu  un  vase  en  verre  avec  des  cendi'es. 
Tombe  romaine? 

V.  Près  d' Uttenlieim.  —  Hache  en  bronze  grossièrement  fondue,  trouvée 
dans  une  graviere,  au  bord  de  la  Scheer. 

1.  Pour  plus  de  détails,  voy.  gg  4  et  1 1,  puis  p.  122.  Cette  découverte  est  due  au  D""  Er- 
hardt,  de  Beafetd,  qui  a  fait  don  des  deux  coius  à  la  bibliothèque  de  Strasbourg-. 

2.  Schreiber,  Loc.  cit.,  p.  191. 

3.  Voy.  Bvlletin,  t.  III,  P.  V. ,  p.  lu. 

4.  Voy.  Il  9  et  12. 


—  135  — 

VI.  Canton  dit  Mittelbruch,  près  de  Meistratzheim.  —  Hache  en  pierre 
polie,  non  percée,  trouvée  sous  les  racines  d'un  saule.  C'est  une  de  ces 
haches,  dites  celtiques,  de  l'âge  de  pierre.  Le  vulgaire  les  appelle  Don- 
nerœxe  ou  Donnerkeil  (haches  ou  coins  de  tonnerre);  les  paysans  sont 
convaincus  qu'elles  tombent  avec  la  foudre  et  ils  y  attachent  des  idées  su- 
perstitieuses. * 

La  première  mention  de  Meistratzheim  date  de  880. 

VII.  Gerstheim.  —  Fibule  ronde  (de  la  forme  des  broches  que  les  dames 
portent  aujourd'hui)  plaquée  et  filigranée  d'or,  avec  semis  de  pierres  fines 
et  d'émaux  de  différentes  couleurs;  hilla  en  cuivre  doré  à  charnière;  dif- 
férentes plaques  en  bronze;  un  pot  entier  avec  bec  et  plusieurs  vases  de 
forme  ondulée,  à  grain  grossier;  grains  de  collier  en  terre  cuite,  de  diffé- 
rentes formes,  émaillés  de  dessins  et  de  couleurs  variés;  ossements  prove- 
nant de  plusieurs  squelettes.  Ces  objets  ont  été  trouvés  à  environ  1  mètre 
sous  terre  en  creusant  une  cave;  je  les  ai  recueillis  pour  les  déposer  au 
musée  de  la  Société;  malheureusement  je  suis  arrivé  trop  tard  pour  con- 
stater l'orientation  des  squelettes  et  la  place  respective  occupée  par  chaque 
objet.  On  a  fait  beaucoup  de  trouvailles  de  ce  genre  à  cet  endroit,  mais 
elles  ont  été  dispersées.  11  est  présumable  que  ce  sont  des  sépultures 
franques,  c'est  du  moins  l'opinion  des  hommes  compétents,  entre  autres 
de  M.  le  colonel  de  Morlet\ 

Quoiqu'il  ne  soit  pas  prouvé  que  ces  objets  datent  de  l'époque  gallo-ro- 
maine, la  découverte  est  trop  intéressante  pour  que  je  la  puisse  passer  sous 
silence.  Du  reste  on  a  vu  que  cette  localité  mérite  en  fous  cas  de  figurer 
parmi  les  places  romaines.'' 

La  première  mention  de  Gerstheim  ne  date  que  de  1050.  La  famille  de 
Bock  y  avait  un  château. 

VIII.  Canton  dit  Grossrieth,  entre  Rossfeld  et  Witternheim.*  —  Kelt  en 
bronze  avec  manche  creux  et  oreillon  latéral,  trouvé  en  creusant  un  fossé^ 

IX.  Friesenheim.  —  Médaille  d'argent  d'Antonin  et  une  autre  de  bronze 
de  Constantin.  On  a  conservé  le  souvenir  d'un  grand  tumulvs  qui  a  été  ni- 

1.  Yoy.  Jacob  Grimm,  Deutsche  Mythologie ,  3^  édit. ,  p.  104.  La  croyance  que  ces  haches, 
conservées  dans  nne  maison  la  préservent  de  la  foudre,  trouve  encore  beaucoup  de  parti- 
sans en  Alsace. 

2.  Voy.  Bulletm,  18Gi,  p.  25^  P.  V.,  et  51  (M.).  Plusieurs  de  ces  objets  ressemblent  à  des 
figures  données  par  M.  Uoiri  Baudot,  dans  son  intéressant  ouvrage  sur  les  sépultures  de 
l'époque  mérovingieune  découyertes  en  Bourgogne.  Dijon  1860.  (Planche  XXIII,  N<>13,  pot 
ondulé;  pi.  XXV.  A"  9,  pot  à  bec,  etc.) 

3.  V.  §  5.  Schwanau. 

4.  Ce  n'est  pas  loin  de  Königsherberg.  Voy.  g  6. 

5.  Un  instrument  pareil  se  trouve  figuré  dans  Museum  Schcrpfli?»! .  tabul.  XIY.  flg.  XIII. 


—  136  — 

vêlé  et  qui  ne  contenait  rien;  puis  on  m'a  indiqué  une  place  dans  un  jardin 
où  l'on  a  découvert  de  la  poterie  ancienne  qui  a  été  perdue\  Cette  loca- 
lité romaine  paraît  avoir  été  en  communication,  par  une  chaussée,  avec 
les  deux  voies  consulaires.  (V.  la  carie.) 
Première  mention:  803. 

X.  Qîier.  —  Médaille  en  bronze  de  Claude  le  Gothique;  fer  à  cheval  de 
forme  antique;  faîtières,  mais  point  de  tuiles  à  rebords. 

XI.  Canton  dit  Sauweid,  près  Benfeld.  —  Grand  cube  en  grès,  avec  une  ex- 
cavation renfermant  un  vase  rond,  en  verre,  qui  contenait  des  cendres  el  des 
ossements  calcinés,  le  tout  recouvert  d'une  dalle.  A  la  même  place:  débris 
de  statues,  entre  autres  un  museau  de  lion  grossièrement  taillé  en  grès 
rouge.  Toutes  ces  pièces  se  trouvaient  sous  terre  et  ont  été  rencontrées 
par  le  soc  d'une  charrue. 

C'était  sans  doute  un  tombeau  romain  gardé  par  un  lion. 

XII.  Canton  dit  Städtacker,  près  Malzenheini.  —  Tuyaux  carrés  en  terre 
cuite,  briques  circulaires,  fer  de  lance  très-oxydé.  Schweighäuser  a  lui- 
même  constaté  ces  trouvailles  sur  place,  c'était  à  peu  près  en  1826,  Il  a 
emporté  trois  fragments  de  ces  tuyaux  qui  se  trouvent  encore  h  la  biblio- 
thèque de  Strasbourg^  Il  en  parle  dans  ses  Antiquités  d'Alsace'  et  les  re- 
garde comme  provenant  d'un  bain  romain. 

On  a  vu  au  §  5,  article  HoHzbad,  une  tradition  d'après  laquelle  l'eau  mi- 
nérale de  celte  source  aurait  été  jadis  dirigée  à  Ehl  par  des  conduits  sou- 
terrains. 

A  environ  50  mètres  de  cette  place  de  Städtacker ,  il  y  avait  un  grand 
tertre  qui  passait  pour  un  tunmliis;  il  a  été  nivelé  il  y  a  plusieurs  années, 
mais  je  ne  sache  pas  qu'on  y  ait  fait  une  découverte  digne  d'intérêt.  Dans 
la  terre  enlevée  j'ai  pourtant  remarqué  quelques  fragments  de  poterie 
ancienne. 

Première  mention  de  Matzenheim,  734-  (Mathinheim);  (nmlWe  noble 
éteinte.  D'après  la  tradition  il  y  avait  une  léproserie  au  moyen  âge. 

On  reconnaîtra  facilement  sur  la  carte  les  places  indiquées  dans  ce  para- 
graphe, en  suivant  les  numéros  d'ordre  que  je  leur  ai  donnés.  Toutes  ces  in- 
dications ont  été  constatées  sur  place  et  je  possède  la  plupart  des  objets 
mentionnés. 

1.  Voy.  Ravenèz,  Traclucl.  de  l'Ah.  must.,\.  Ht,  p.  G4. 

2.  Ces  renseignements,  de  même  que  ceux  du  n"  XI,  m'ont  été  donnés  par  M.  le  D""  Elir- 
hardt.  Il  m'a  en  outre  gratifié  des  débris  de  statue  et  du  vase  en  verre  qui  est  mallieureu- 
sement  brisé. 

3.  P.  39.  Il  les  pince  prè:<  do  Heussern.  mais  le  point  do  la  trouvaille^  est  plus  près  de 
Matzenheim. 


—  137  - 

<Ç  8.  —  Voies  anciennes. 

Par  voies  anciennes  j'entends  celles  qui  onl  joué  un  rôle  avant  le  cin- 
quième siècle.  Je  considère  comme  tels,  tous  les  chemins  et  tous  les  scn- 
liers  qui  relient  entre  eux  des  points  où  les  peuples  de  cotte  époque  ont 
laissé  des  traces  de  séjour,  soil  pour  les  vivants,  soit  pour  les  morts;  en 
un  mot,  les  voies  de  communication  qui  alors  avaient  une  raison  d'être. 
Les  chemins  appelés  Heiden fitrœsse/ ,  Bœmer strass,  Hochstrass,  Hoinveg, 
Altstrass,  Alhveg ,  etc.,  noms  auxquels  Schweighfeuser ,  M.  Mone  et 
M.  Coste  attachent  un  sens  traditionnel,  se  sont  classés  tout  naturellement 
dans  mon  cadre.  Si  j'ai  adopté  un  trait  spécial  pour  indiquer  sur  ma  carte 
les  voies  désignées  comme  païennes  (Heidenstrœssel),  c'est  que  je  considère 
leur  antiquité  comme  hors  de  toute  contestation,  non-seulement  à  cause 
de  leur  nom  et  les  monuments  qui  les  accompagnent,  mais  surtout  parce 
qu'elles  ont  relié  entre  elles  des  localités  qui  figurent  sur  la  tahie  théodo- 
sienne  et  les  itinéraires  d'Antonin. 

De  toutes  les  questions  d'archéologie,  l'une  des  plus  étudiées  est  certai- 
nement celle  des  voies  anciennes;  aussi  dans  tous  les  travaux  de  ce  genre, 
anciens  et  modernes,  il  est  fait  mention  de  celles  iXHelvetus.  Il  me  serait 
impossible  de  discuter  les  différentes  opinions  émises  à  ce  sujet:  d'abord 
le  cadre  de  cette  notice  ne  le  comporterait  pas;  puis  on  voudra  bien  ne  pas 
perdre  de  vue  que  ce  travail  est  d'un  pionnier  plutôt  que  d'un  érudit.  Toutes 
les  voies  anciennes  tracées  sur  cette  carte  sont  prises  sur  le  terrain, 
les  lignes  sont  d'une  exactitude  géométrique,  je  les  ai  indiquées  dans  l'état 
où  je  lésai  trouvées,  avec  leurs  interruptions,  et  mes  tracés  hypothétiques 
sont  basés  sur  la  tradition  et  la  probabilité. 

Un  fait  singulier  et  qui  frappe  tous  ceux  qui  visitent  la  contrée,  est  que 
les  voies  dites  païennes,  que  je  regarde  comme  consulaires ,  traversent  un 
pays  marécageux  depuis  un  temps  immémorial.  On  a  vu  plus  haut'  que  ce 
pays  n'était  certainement  pas  aussi  humide  avant  le  changement  du  cours 
du  Rhin;  puis  il  est  de  toute  évidence  que  le  principal  mouvement  militaire, 
des  Gaulois  comme  des  Romains,  a  dû  nécessairement  se  concentrer  vers 
le  point  le  plus  menacé,  qui  était  la  rive  gauche  du  Rhin. 

Comme  il  y  a  plusieurs  voies  païennes  {Heidenslrœssel)  sui*  ma  carte, 
je  les  distingue  par  des  numéros  d'ordre;  les  autres  chaussées  anciennes 
y  sont  également  désignées  par  leurs  noms  traditionnels.  Je  les  décrirai 
en  commençant  par  les  voies  longitudinales. 

I.  Yoy.  §2. 


—  138  — 

Voie  païemie  n°  1.  —  Usitée  comme  chemin  d'intérêt  commun,  traver- 
sant le  territoire  d'Ehl  pour  se  souder  au  chemin  vicinal  de  Sand  à  Oben- 
heim;  elle  sépare  la  banlieue  de  Rossfeld  d'avec  celles  de  Sermersheim  et  de 
JliUlenheim.  Largeur:  8  mètres.  Tumuliis  is^ôls  des  deux  côtés,  au  dire  des 
habitants;  ils  ont  été  nivelés.  Tombe  romaine. 

Voie  païenne  n°  2.  —  Continuation  de  la  précédente;  n'existe  plus  que 
par  petits  tronçons  à  peine  encore  visibles;  ne  joue  aucun  rôle  comme 
limite;  traverse  les  terrains  communaux  de  Sand,  Matzenheim,  Osthausen. 
Largeur  H  mètres  environ.  Groupe  de  tumulus  dans  cette  dernière  ban- 
lieue. 

Voie  paimne  n*^  o.  —  Continuation  de  la  précédente;  commence  dans 
la  forêt  d'Osthausen  où  elle  est  parfaitement  accusée;  hors  d'usage  comme 
chemin  (excepté  dans  la  banlieue  d'Erstein,  sur  une  longueur  d'environ 
l'/gkilom.);  couverte  alternativement  de  bois  et  d'herbage;  propriété  com- 
munale, formant  une  bande  au  milieu  des  propriétés  particulières.  Largeur 
entre  deux  pierres  bornes  9'",40.  Tumulus  peu  nombreux.  Aux  environs 
d'Erstein  on  a  gardé  souvenir  de  plusieurs  qui  ont  été  nivelés  il  y  a  envi- 
ron quarante  ans.' 

D'après  la  tradition  et  selon  toutes  les  probabihtés,  c'est  à  ce  point  que 
se  réunissaient  les  deux  voies  païennes  venant  du  sud,  n"  2  et  n°  4%  pour 
gagner  Argentorat  par  Krafft  et  Notre-Dame  du  Chêne,  près  Plobsheim, 
rive  droite  de  l'ill.  Elle  a  été  sans  doute  interrompue  et  mise  hors  d'usage 
par  le  canal  dit  Krafftwasser,  établi  en  -1392.'' 

Voie  païenne  n°  4.  —  Tronçon  engazonné  qui  commence  dans  un  canton 
rural  appelé  Kœnigsherberg\  et  se  perd  près  des  tumulus  de  Bœhllagen; 
sépare  les  banlieues  de  Friesenheim  et  de  Booftzheim  de  celles  de  Rossfeld, 
Herbsheim  et  Obenheim;  elle  paraît  avoir  été  déli'uite  partout  où  son  rôle 
de  limite  a  cessé.  Largeur  8  mètres.  Tumulus  nombreux.  A  dû  se  souder 
à  la  voie  d'Helvet  à  Argentorat,  rive  droite  de  l'Ill,  comme  on  vient  de  le 
voir,  et  paraît  s'être  prolongé  vers  le  sud,  comme  nous  le  verrons  plus 
loin. 

Ces  voies  païennes  sont  faites  simplement  de  gravier;  je  les  ai  toutes 

1.  M.  Ravenèz,  dans  sa  Traduction  de  Schœpflin ,  t.  II,  p.  64,  parle  de  celle  voie,  mais 
en  la  plaçant  au  midi  du  hameau  d'Ehl  et  sur  la  rive  gauche  de  l'Ill.  Pourtant  elle  est  assez 
bien  indiquée  sur  la  carte  qu'il  a  ajoutée  à  ce  travail. 

2.  M.  Goste,  sur  sa  carte  romaine ,  a  déjà  indiqué  ces  voies  avec  le  même  point  de  réu- 
nion. J'ai  été  amené  à  cette  concordance  par  des  recherches  minutieuses  sur  le  terrain  el 
en  interrogeant  partout  les  traditions. 

3.  Voy.  g  2,  111. 

4.  Vuy.  g  G. 


—  139  — 

examinées  par  des  entailles  el  je  n'y  ai  rien  trouvé  qui  ressemble  à  une 
construction  romaine.  M.  de  Matliy  de  Latour  a  également  fait  faire  des 
fouilles  sur  celle  marquée  n*^  1,  et  son  résultat  a  été  pareil  au  mien.  D'a- 
près les  traditions,  ces  voies  avaient  des  pierres  de  bordure  qui  ont  été 
enlevées  successivement  par  les  habitants  et  employées  à  des  constructions. 

Un  fait  frappant,  c'est  la  présence  de  deux  voies  païennes  parallèles  à  une 
si  faible  distance  (environ  4  kilom.),  l'une  et  l'autre  d'une  largeur  qui 
prouve  qu'elles  étaient  faites  pour  un  service  important.  C'est  un  pro- 
blème qui  m'a  beaucoup  préoccupé.  Je  n'en  ai  trouvé  la  solution  qu'en 
admettant  qu'elles  devaient  partir  chacune  d'un  point  différent  pour  se  réu- 
nir à  Helvet,  et  en  examinant  avec  attention  les  itinéraires  d'Antonin,  j'ai 
compris  qu'il  s'agissait  de  deux  voies  consulaires  qui  se  rapprochent  pour 
se  fondre  en  une  seule. 

Ainsi,  voie  païenne  n°  1 ,  avec  ses  continuations  n^^  '^  et  ?>:  c'est  celle 
de  la  carte  théodosienne;  puis  elle  figure  sur  l'itinéraire  de  Milan  par 
les  Alpes  pennines  à  Mayence,  en  passant  par  Argenlouaria,  Helvelus  et 
Argentoratum. 

Voie  païenne  n°  4,  se  soudant  à  celle  n"  3,  à  la  hauteur  de  Gerstheim; 
elle  figure  sur  deux  itinéraires  :  1''  d'Augsbourg  à  Spire;  2"  de  Milan  par 
les  Alpes  grecques  à  Argentoraf,  et  chaque  fois  en  passant  par  Mons-Bri- 
siacus  et  Helvetus. 

La  première  est  la  voie  connue  depuis  longtemps,  qui  reliait  Helvet  avec 
Argentorat  et  Argentouar;  la  seconde  est  la  voie,  à  peu  près  inconnue, 
qui  reliait  Helvet  avec  Argentorat  et  Mont-Brisac.  Cette  dernière  doit  avoir 
été  parallèle  au  Rhin  jusqu'à  Augusta  Rauracorum ;  mais  le  changement 
du  cours  de  ce  fleuve,  survenu  en  1295,  qui  a  placé  (vieux)  Brisac  sur  la 
rive  droite,  a  dû  faire  disparaître  cette  chaussée,  à  l'approche  de  celte 
ville,  sur  une  longueur  de  plusieurs  lieues.  Cette  interprétation  me  paraît 
tellement  vraisemblable,  que  je  l'avance  avec  la  conviction  qu'elle  sera 
confirmée  par  des  recherches  sur  une  plus  grande  étendue. 

D'Helvet  à  Argentorat,  rive  gauche  de  l'Ill.  —  Helvelus  communiquait  avec 
Argentoratum  au  moyen  de  deux  routes  presque  parallèles,  mais  séparées 
par  l'Ill.  Nous  venons  de  voir  celle  de  la  rive  droite.  Pour  prendre  celle  de 
la  rive  gauche,  on  passait  le  pont,  dont  il  a  été  parlé  plus  haut\  Je  n'ai  pas 
examiné  la  construction  de  cette  voie;  sa  largeur  est  variable  et  ce  n'est 
plus  qu'un  simple  chemin  vicinal.  Je  ne  l'ai  poursuivie  que  jusque  vers 
Nordhausen,  mais  elle  a  dû  passer  près  de  Saint-Ludan,  pour  aller  en 
ligne  droite  vers  la  Chartreuse,  à  Strasbourg. 

I.  Voy.  §2,  m. 


—  140  — 

Bühhtrass.  —  Au  suri,  celle  même  voie  se  prolonge  vers  Benfeki,  pour 
gagner  Ilüüenheim  par  im  Carthmmenweg,  et  Sermersheim  par  un  Quer- 
weg,  se  confondre  avec  la  route  impériale  n"83  et  aboutir  à  Kogenheim  à  un 
tronçon  dévoie  dp\)e\éBnhlstrass  (route  des  collines),  La  tradition  en  indique 
la  direction  vers  Scliervillé,  et  on  peut,  à  une  assez  grande  distance,  en 
suivre  le  tracé  à  travers  champs,  où  elle  a  laissé  une  traînée  de  gravier. 
Le  titre  de  voie  ancienne  de  l'époqne  gallo-romaine  que  je  donne  à  celte 
ligne,  n'est  plus  justifié  par  aucun  vestige  d'antiquité,  une  fois  qu'on  a 
dépassé  Benfeld;  pourtant  je  n'ai  pas  hésité  à  la  considérer  comme  telle: 
1"  parce  qu'il  faut  bien  admettre  qu'Helvetus  ail  eu  une  communication 
avec  une  gorge  des  Vosges  par  laquelle  on  pouvait  se  rendre  dans  le  pays 
des  Leuciens;  2°  à  cause  du  nom  de  Biihhtrass  qui  est  significatif;  S**  parce 
que  celle  voie  paraît  être  celle  indiquée  par  M.  Coste*  comme  ayant  relié 
Helvet  avec  le  val  de  Ville. 

D'après  les  apparences  du  tronçon  dit  Bühlstrass,  cette  voie  n'était  faite 
que  de  gravier,  comme  les  voies  païennes,  et  sa  largeur  paraît  avoir  été  de 
8  mètres. 

Schmalstrœssel ,  etc.  —  Ce  chemin  paraît  avoir  servi  à  mettre  en  com- 
munication l'établissement  d'Uttenheim  avec  Biildstrass;  sur  ce  petit  trajet 
il  change  trois  fois  de  nom:  Viehiveg,  Hohiveg,  Schmalstrœssel.  11  est  pro- 
bable que  cette  voie  s'est  continuée  sur  la  rive  droite  de  la  Scheer  vers  Hin- 
disheim,  etc. 

Dans  l'angle  sud-ouest  que  forme  le  Schmalslrässel  avec  la  l'oute  dépar- 
tementale n°  11 ,  il  y  a  un  ancien  puits  que  M.  Cosle®  pense  être  un  tolleno. 

Kaijserstrass ,  au  pied  des  Vosges.  —  N'ayant  fait  figurer  celte  voie  que 
comme  point  d'attache,  je  ne  l'ai  soumise  à  aucune  élude  spéciale.  Il  y  a 
du  reste  plusieurs  Kayserslrass  qui  aboutissent  à  Epfig. 

Des  Vosges  an  Bhin.  —  La  principale  voie  transversale  qui  figure  sur 
ma  carte,  est  celle  des  Vosges  au  Rhin.  Les  auteurs  l'ont  déjà  indiquée 
entre  Sainte-Odile  et  Ehl,  et  M.  Gosfe  a  admis  celte  ligne  sur  sa  carte  ro- 
maine. Mais  si  la  continuation  de  cette  route  vers  le  Rhin  est  resiée  incon- 
nue, c'est  que,  entre  Ehl  et  le  canal  du  Rhône  au  Rhin  (qui  ne  figure  pas 
sur  ma  carte),  elle  n'existe  plus  qu'à  l'étal  de  tronçons  de  sentier.  Je  ne  l'ai 
entrevue  que  lorsque  les  nombreux  vestiges  romains  de  Kirchsträng  et  de 
Ilafneracker  m'ont  forcé  de  chercher  une  voie  de  communication  inévi- 
table entre  ces  points  et  le  centre  de  la  ville  romaine.  Son  existence  me 
paraît  tellement  incontestable  que  je  crois  toute  discussion  inutile.  Des 

1.  Alsace  romaine ,  p.  107. 

2.  Staiici'  du  comitùdii  13  avril  1863. 


—  141  — 

deux  ligiiL'6  de  comiiiunicalion  enive  Helvetus  et  son  castnim  des  bords  du 
Hhiu,  celle-ci  a  été  probablement  la  plus  importante. 

Sa  largeur  paraît  avoir  été  de  8  mètres;  mais  sa  construction  était  dillc- 
rente  de  celle  des  autres  voies.  Ainsi  près  de  HoUzhad,  où  ce  chemin  s'ap- 
pelle vulgairement  Bomerstrass,  on  a  trouvé  dans  son  ancienne  aire  des 
moellons  en  grès  des  Vosges;  en  fouillant  un  tronçon  qui  en  reste  au- 
dessous  d'Ehl,  j'y  ai  rencontré  des  morceaux  de  grès  rouge  presque  cu- 
biques, de  8  à  iO  centimètres  de  côté;  plus  loin,  dans  Kirchsträng,  on 
rencontre  des  pavés.  Entre  la  source  de  Saint-Materne  et  le  Zembs,  le 
tracé  de  cette  voie  sépare  la  banlieue  de  Sand  de  celles  de  Benfeld  et  de 
Herbsheim.  Avant  l'établissement  du  nouveau  chemin  vicinal  de  Sand  à 
Obeidieim,  les  piétons  suivaient  toujours  la  ligne  du  Oberchlweg  et  de 
\'1lkveg  pour  se  rendre  à  Obenheim  et  à  Gerslheim. 

Je  ne  crois  pas  établir  une  hypothèse  invraisemblable  en  admettant,  à 
l'époque  romaine,  une  grande  et  importante  voie  ayant  relié  les  Vosges 
avec  la  Forêt-Noire  par  Helveius,  pour  mettre  la  ville  romaine  en  commu- 
nication avec  les  champs  décumales. 

La  route  qui  part  de  la  rive  droite  du  Uhin,  du  village  d'Ottenheim,  vis- 
à-vis  de  Schwanau,  est  bien  visiblement  une  continuation  de  XAltwey;  elle 
se  dirige,  en  ligne  droite,  sur  Burgheim,  en  passant  près  d'Allmansweier, 
Hugsweier,  Dinglingen,  Lahr,  pour  monter  vers  le  château  de  Geroldseck 
et  gagner  la  vallée  de  la  Kintzig.  Elle  s'appelle  Wiwlisiveg  et  passe  géné- 
ralement pour  très-ancienne.  A  Dinglingen  il  y  a  un  champ  appelé  Maner- 
feld  (champ  des  murailles),  d'une  étendue  d'environ  10  heclai'cs,  où  abon- 
dent les  substructions  et  les  débris  de  cérami(|ue  romaine,  parmi  laquelle 
on  cite  de  la  poterie  rouge  une,  des  tuiles  à  lebords  et  des  plinthes  portant 
Leg.  VIII  avec  diverses  variantes,' 

M.  Mone  signale  le  clocher  de  Burgheim  comme  ayant  été  bâti  sur  un 
saceUiuu'- ;  les  ruines  de  Geroldseck  passent  pour  occuper  l'emplacement 
d'un  poste  romain,  et  partout  dans  cette  contrée,  jusque  dans  la  vallée  de 
la  Kintzig,  on  trouve  des  antiquités.  Le  Mœnnelstein  dans  les  Vosges,  et  le 
cône  de  Geroldseck  dans  la  Forêt-Noire,  sont  d'ailleurs  deux  points  culmi- 
nants qui  dominent  toute  cette  partie  de  la  vallée  du  Uhin.  Cette  voie  était  donc 
le  trait  d'union  entreles  deux  chaînes  de  montagnes  :  sur  toute  la  ligne  on  la  voit 
jalonnée  d'établissements  romains  et  partout  apparaît  la  main  du  grand  peuple! 

1.  Voy.  Gcsvlihide  h.  Resc/ire/bit/ifj  der  Stadt  Lahr  ii.  ihrer  ImyebutKjeu  ,  von  t'r.  Slciii , 
1827.  Je  dois  ce  livre,  devenu  très-rare,  et  tous  les  reiisoigneuients  qui  concernent  la  rive 
droite  du  Rhin,  à  l'obligeance  de  M.  Sieffert,  de  Lahr  (membre  de  la  Société). 

2.  leilschrijt  f>n-  die  Geschichte  des  Oher>  lie' ns  ,  1862.  p.  48. 


—  142  — 

J'ai  été  forcé  de  limiter  mes  recherches  sur  le  terrain  entre  ßurgheim  et  le 
Rhin;  mais  la  partie  de  cette  route  que  j'ai  tracée  sur  ma  carte  suffira  pour 
en  faire  apprécier  l'importance.  Elle  se  compléterait  par  les  points  suivants: 

Vosges:  BurgJieim,  Heiligenstein,  Barr,  MœnneUtein,  mur  païen  de 
Sainte-Odile,  Heidenkopf,  etc.; 

Forêt -iNoire:  Burgheim,  Heiligenzell,  Lahr,  Mauerfeld,  Geroldseck,  etc. 

On  ne  peut  s'empêcher  de  voir  certains  rapprochements  entre  plusieurs 
de  ces  noms  des  deux  rives  du  Rhin. 

Voie  d'Ellzach.  —  Le  chemin  d'Ehl  à  Ellzach  (Kertzfeld)  a  disparu  en 
partie;  il  existait  encore  à  l'époque  de  la  guerre  de  Trente  ans,  car  sur  le 
plan  du  siège  de  Benfeld ,  il  figure  entier  et  bordé  d'arbres.  Ce  qui  en 
reste  n'est  plus  qu'un  simple  chemin  d'exploitation  rurale. 

Viehweg  ou  Alttverb,  à  travers  Ellzach.  —  Voie  pavée  bien  conservée  sur 
quelques  parties;  largeur  10  mètres.  Elle  est  faite  uniquement  de  galets  et 
de  gravier. 

Altstrass,  près  d'Ellzach.  —  Hors  d'usage',  plantée  de  beaux  chênes  de 
60  à  100  ans;  largeur  10  mètres.  La  bande  formant  cette  voie  est  propriété 
communale,  les  parties  avoisinantes  sont  propriété  particulière.  Elle  forme 
un  dos  d'âne  uniquement  fait  avec  de  la  terre,  sans  gravier  ni  galets. 

Diverticulum  sur  Burgheim  par  Bruchmiihl.  —  Avant  la  mise  en  culture 
des  communaux  de  Zellwiller,  on  prenait  volontiers  cette  ligne  pour  se 
rendre  à  Barr.  Je  n'ai  fait  aucune  étude  de  ce  chemin  et  je  ne  le  fais  figurer 
que  dans  la  supposition,  qu'à  l'époque  romaine,  il  a  pu  y  avoir  \fa  diverti- 
culum ayant  mis  Ellzach  en  communication  directe  avec  Burgheim. 

Autres  voies.  —  J'ai  parlé  du  chemin  rehant  Friesenheim  avec  les  deux 
voies  consulaires^;  aux  environs  de  Neunkirch,  il  a  dû  former  un  compitum 
avec  la  voie  des  Rauraques.  J'ai  restitué  à  ce  chemin  la  ligne  droite  qu'il 
avait  avant  l'étabhsseraent  du  canal  du  Rhône  au  Rhin.  J'en  ai  fait  de  même 
pour  le  chemin  de  Gerstheim  à  Oslhausen. 

A  Herbsheim,  il  y  a  un  Schlittweg  à  côté  d'iin  Wildeweg.  Je  n'ai  trouvé 
aucun  caractère  d'ancienneté  à  ce  dernier.  Son  nom  veut  dire  simplement 
chemin  inculte,  sans  tracé  régulier.  Il  n'y  a  que  quelques  années  qu'on  en 
a  fait  un  chemin  vicinal. 

Quant  aux  autres  voies  anciennes,  elles  ne  sont  devenues-  l'objet  d'aucune 
observation  particulière. 

Les  voies  qui  figurent  sur  cette  carte  sont-elles  romaines?  J'en  ai  fouillé 

1.  Ce  tronçon  ayant  beaucoup  de  ressemblance  avec  les  voies  païennes  hors  d'usage,  je 
l'ai  marqué  sur  la  carte  comme  ces  dernières. 

2.  Voy.  g  7. 


—  143  — 

les  principales  et  nulle  part  je  n'ai  trouvé  les  quatre  couches  classiques  He 
statunien,  de  rudus,  de  nucleus  et  de  summa  crusta.  Pourtant  une  seule 
pourrait  l'être,  c'est  celle  des  Vosges  au  Rhin,  les  matériaux  trouvés  dans 
son  aire  sont  très-probablement  des  restes  de  riiclvs.  Peut-être  pourrait-on 
encore  admettre  comme  romaine  la  voie  pavée  d'Ellzach.  Du  reste,  n'a- 
buse-t-on  pas  un  peu  trop  du  mot  «voie  romaine»?  F^aut-il  laisser  tout 
le  mérite  de  la  viabilité  aux  conquérants? 

A  l'arrivée  des  Romains,  la  Gaule  n'était  pas  un  pays  sauvage  et  inculte, 
elle  jouissait  déjà  d'une  civilisation  avancée.  Les  Gaulois  avaient  un  com- 
merce florissant  et  leur  richesse  avait  passé  en  proveibe'.  Les  plus  rap- 
prochés du  Rhin,  les  Belges,  réputés  comme  les  plus  courageux  de  la  na- 
tion %  étaient  d'excellents  cavaliers  et  de  bons  conducteurs  de  chars,  et 
certes,  pour  faire  avancer  leurs  Coivinn^  (lourds  chariots),  il  leur  fallait 
de  bonnes  routes;  puis  un  commerce  florissant  ne  peut  subsister  qu'avec 
des  moyens  de  communication  nombreux  et  faciles. 

Dans  quelles  catégories  faut-il  classer  ces  voies? 

J'essayerai  d'établir  cette  classification  en  adoptant  le  cadie  de  iM.  le  co- 
lonel de  Morlet/ 

Voies  consulaires  :  toutes  celles  qui  figurent  sous  le  nom  de  païennes; 

Voies  mililaires  secondaires  :  celle  des  Vosges  au  Rhin,  par  Helvet; 
Voies  commerciales  :  1°  celle  d'Helvet  à  Argentorat,  rive  gauche  de  l'ill; 
T  celle  d'Helvet  au  val  de  Ville  (Bühlstrass); 

Voies  vicinales  :  toutes  les  autres. 

Par  ce  réseau  de  routes  qui  enlaçait  le  territoire  d'Helvetus,  cette  ville 
jouissait  d'une  large  vicinalité  et  se  trouvait  en  relation,  au  moyen  de 
communications  faciles  et  directes  : 

Avec  les  Séquanais  par  sa  voie  (Y Argentouaria ; 

Avec  les  Rauraques  et  les  Helvétiens  par  sa  voie  de  Mons-Brisiacus  : 

Avec  les  Leuciens  par  sa  voie  du  val  de  Villé^; 

Avec  les  champs  décumates  par  sa  voie  du  Rhin; 

Avec  les  Vosges  par  deux  (même  trois)  voies; 

Et  par  deux  voies  avec  Argentoratum,  la  métropole. 

Toutes  ces  voies,  usitées  comme  chemins  ou  sentiers,  cpie  je  qualifie 
cYanciennes,  ont  eu  leur  raison  d'être  à  l'époque  (|ui  nous  occupe;  j'ai  la 

1.  Amédée  Tliieny,  Histohe  des  Gaulois ,  t.  l".  p.  470. 
1.  Strabo,  lib.  IV. 

3.  Amédée  Tliierry,  loc.  cit.,  p.  452. 

4.  Bullemi ,  t.  IV,  p.  46. 

5.  Et  sans  doute  aussi  par  celle  de  Sainte-Odile. 


—  144  — 

convicliun  que  déjà  alors  elles  onl  existé  et  que  leur  maiutien  est  dû  à  la 
force  de  V accoutumance.^ 

Voici  un  tableau  de  ces  voies  anciennes  qui  portent  des  noms  autres  (jue 
ceux  des  cours  d'eau  ou  des  communes  qu'elles  desservent: 

AUstrass  (vieille  route),  à  Kertzfeld  ; 

Altweg  (vieux  chemin),  à  Gerstheini; 

Binnenweg  (chemin  intérieur),  à  Westhausen  et  à  Nordhausen; 

Bühlstrass  (chemin  des  collines),  à  Kogenheim; 

Carlltaunenweg  (chemin  de  la  grosse  artillerie,  nom  originaire  sans 
doute  de  la  guerre  de  Trente  ans),  à  Benfeld; 

Heidenslrœssel  (voies  païennes  au  nombre  de  4),  entre  l'ill  et  le  Uhin; 

Hochstrass  (route  haute),  à  Sand; 

Hohiveg  (chemin  haut),  à  Herbsheim  et  à  Uttenheim; 

Hochiverb  (digue  haute),  à  Kertzfeld; 

Kayserstrass  (route  de  l'Empereur),  à  Stotzheim; 

Nordiveg  (chemin  du  Nord),  à  Uttenheim; 

Römerstrass  (route  l'omaine),  à  Westhausen; 

Schlillweg  (chemin  de  schlittage),  à  Herbsheim; 

Sclunalstrœssel  (petite  chaussée  étroite),  à  Benfeld  ; 

Viehweg  (chemin  du  bétail),  à  Kertzfeld,  à  Uttenheim  et  à  Rossfeld  {Ro- 
seiifeld). 

On  remarquera,  en  examinant  la  carte,  qu'il  y  a  peu  de  chemins  qui 
n'aient  eu,  en  tout  ou  en  partie,  un  rôle  à  jouer  à  l'époque  gallo-romaine. 
Les  routes  impériales  n"  68  (de  Baie  à  Spire)  et  n''  83  (de  Lyon  à  Stras- 
bourg), datent  d'une  époque  éloignée;  mais  rien  ne  prouve  que  leur  tracé 
actuel  remonte  au  delà  du  moyen  âge.  Pourtant,  sur  chacune  de  ces  deux 
routes,  j'ai  rencontré  un  tronçon  qui  s'est  incorporé  dans  une  de  mes 
lignes  de  voies  anciennes.  Il  en  a  été  de  même  de  la  route  départementale 
n°  11  et  du  chemin  vicinal  de  Sand  à  Obenheim.  Le  fait  se  représentera 
certainement  dans  d'autres  locahtés.  Les  auteurs  qui  s'occupent  de  géo- 
graphie ancienne,  prennent  ordinairement  la  route  n"  83  comme  la  ligne 
d'IJelvet  à  Argentorat  qui  figure  sur  la  carte  de  d'Anville,  au  moins  jusqu'à 
Fegersheim;  cela  est  évidemment  une  erreur.  La  ligne  à  suivre  pour  cette 
voie  de  la  rive  gauche  de  l'Ill,  se  trouve  naturellement  indiquée  par  les 
vestiges  romains  de  Maizenheim,  d'Osthausen  et  d'Erstein.  Ce  n'est  qu'entre 
Saint-Ludan  et  Fegersheim,  que  la  roule  impériale  paraît  de  nouveau  être 
assise  sur  une  ancienne  voie  romaine.  .M.  Coste  a  démontré  sa  continuation 
en  ligne  droite  de  Fegersheim  à  Strasbouig.  Je  ne  vois  aucune  raison 

I.  "  l/aTonlnmanoe  est  une  PCi'ontic  iiafiirc.  "  (Monlaig-iic.) 


—  145  — 

d'être,  à  l'époque  qui  nous  occupe,  pour  la  partie  de  la  route  impériale 
n"  83  comprise  entre  le  Quer  et  Sainl-Ludan.^ 

S  9.  —  Tumulns. 

Les  gens  du  pays  appellent  les  tumulus  Heidenbückel  (buttes  païennes). 
Ce  sont  des  élévations,  faites  uniquement  en  terre,  sans  aucune  pierre  et 
sans  aucun  caillou,  reposant  sur  une  base  circulaire.  Il  y  en  a  dont  la  forme 
se  rapproche  de  la  demi-boule,  d'autres  sont  aplaties,  sans  doute  par  suite 
de  nivellements  incomplets.  Leur  diamètre  varie  entre  15  et  70  mètres 
et  leur  relief  entre  60  centimètres  et  3™,50.  J'en  ai  pointé  90  sur  la  carte. 
Il  y  a  un  certain  nombre  de  ces  tertres  dont  la  qualité  n'est  pas  tout  à  fait 
prouvée  et  que  je  n'ai  admis  que  par  analogie.  La  plupart  sont  réunis  par 
groupes;  les  buttes  isolées  sont  probablement  des  restes  de  groupes  qui  ont 
échappé  à  des  travaux  de  nivellement.  D'après  la  dispersion  et  le  groupe- 
ment des  tumulus  qui  restent,  on  peut  se  faire  une  idée  de  la  quantité 
innombrable  de  ces  tombeaux  qui  jadis  a  dû  exister  dans  celte  contrée.  Leur 
superficie  est  en  majeure  partie  en  nalure  d'herbage.  On  sait,  par  souvenir 
ou  par  tradition,  que  ceux  qui  sont  cultivés  ou  boisés,  étaient  jadis  en  pâ- 
turages. Les  tumulus  engazonnés  doivent  leur  conservation  à  la  bonne  vé- 
gétation qui  les  recouvre;  en  effet,  leur  élévation  les  mettant  à  l'abri  de 
l'humidité,  ils  produisent  principalement  des  Graminées  et  des  Légumi- 
neuses, tandis  que  le  terrain  ambiant,  bas  et  humide,  est  couvert  le  plus 
souvent  de  Cypéracées  et  de  Joncées. 

J'ai  marqué  avec  des  lettres  minuscules  les  tumulus  isolés  ou  les  groupes 
dont  j'aurai  à  parler,  et  je  rapporterai  successivement  les  données  que  je 
possède.  Il  y  en  a  plusieurs  qui  ont  été  nivelés  complètement  dans  le  der- 
nier quart  de  siècle;  mais  les  ayant  encore  connus,  je  puis  en  parler  el  les 
pointer  sur  la  carte. 

a)  Maternushuckel  ou  Heidenkcmtzel  (butte  de  saint  Materne  ou  chaire 
païenne),  dans  un  pré  aux  environs  d'Ehl.  —  D'après  la  tradition,  c'est  sur 
ce  tumulus,  qui  était  très-élevé,  que  saint  Materne  a  prêché  l'Evangile  aux 
habitants  ù'Helvetus^.  Il  a  été  nivelé  en  1856,  et  M.  Dietz  (membre  de  la 
Société)  en  a  fait  le  sujet  d'une  communication  au  cornilé\  On  y  a  trouvé 
des  ornements  en  bronze,  virioles,  anneaux,  épingles  à  cheveux,  etc.  Il 
n'est  pas  fait  mention  de  poterie.  11  avait  40  mètres  de  diamètre  el  3  mè- 
tres de  relief. 

1.  J'ai  fait  figurer  les  principaux  clicniiiis  vicinaux  niodci'nes  comme  poinls  de  repère, 

2.  Voy.  g  12. 

3.  Voy.  Bulletin,  t.  1^"",  séances  du  3  mars  et  du  7  avril  et  Aug. Slocber,  Der  Hüneihübel 
toid  der  Weiler  Ell ,  1859,  p.  66. 

u« .SÉRIE.  —  T.  ir.  —  (M.)  10 


—  146  — 

b)  A  côté  de  la  voie  païenne  n°  2.  —  Tumulus  nivelé  par  M.  Baiihelmé,  de 
Sand  (membre  de  la  Société).  Voici  l'inventaire  de  ce  qui  y  a  été  recueilli: 
restes  d'un  squelette  humain,  ossements  de  cheval,  poterie  rougeâtre  et 
autres  pièces  de  céramique  sans  caractère  déterminé;  deux  grands  cou- 
lants en  jais,  une  petite  clochette  en  fer,  un  bout  d'anneau  de  même  mé- 
tal, un  fragment  de  fer  à  cheval;  divers  objets  en  bronze,  tels  que  deux 
virioles  d'avant-bras,  huit  autres  virioles,  quatre  grands  anneaux,  une 
fibule,  un  petit  morceau  de  cuivre  très-oxydé  qui  paraît  être  le  flanc  d'une 
médaille.  La  plupart  de  ces  objets  ont  une  ressemblance  complète  avec  ceux 
des  tumulus  de  Heidolsheim  figurés  par  M.  Max.  de  Ring  dans  le  Bulletin 
de  la  Société  de  1858.  Ce  tertre  était  déjà  déformé  par  la  charrue,  et  les 
ouvriers,  par  un  excès  de  zèle,  ont  malheureusement  opéré  sans  attendre 
l'arrivée  du  maître. 

c)  Canton  dit  Ballol,  près  de  Herbsheim,  au  bord  du  Zembs,  dans  un 
pré.  —  Ligne  de  tertres  très-aplatis,  dont  plusieurs  ont  été  nivelés  com- 
plètement; dans  l'un  des  derniers  de  la  ligne  on  a  recueilli,  en  ]SS6,  un  kelt 
(à  manche  plat),  comme  celui  figuré  dans  le  Bulletin  cité  ci-dessus.*  Une 
autre  butte  nivelée  plus  tard  ne  contenait  rien. 

d)  Groupe  de  Herrenhok.  —  Tumulus  boisés,  mais  le  terrain  était  jadis 
pâturage.  Un  de  ces  tertres  a  été  fouillé  il  y  a  environ  vingt-cinq  ans,  mais 
on  n'y  a  rien  trouvé  qu'un  squelette  très-décomposé  et  de  la  poterie  gros- 
sière. Rien  n'en  a  été  conservé.'^ 

e)  Groupe  de  Bœhltagen,  banlieue  d'Obenheim;  prés  avec  quelques  vé- 
gétaux ligneux  (de  Bœhl  ou  Billil,  colline,  et  Tagen,  journée  de  prés  :  ces 
tertres  font  l'effet  de  collines).  —  Ce  groupe  est  le  plus  considérable  et  le 
mieux  conservé  de  la  contrée.  J'y  ai  levé  25  tertres  qui  ont  été  pointés 
exactement  sur  la  carte.  J'en  ai  fouiUé  deux  par  une  simple  tranchée  qui  a 
été  comblée  chaque  fois  pour  rendre  sa  forme  primitive  au  monument. 

Voici  les  résultats  des  deux  opérations: 

l''^  opération^  Dans  un  cercle  marqué  par  une  traînée  de  cendres  de 
3  mètres  de  diamètre  environ ,  à  côté  du  point  central  indiqué  par  des 
traces  de  feu:  squelette  très-décomposé,  couché  sur  le  dos,  sur  un  lit  de 
cendres,  dans  le  sens  du  N.-O.  au  S.-E,,  la  figure  regardant  les  Vosges; 
deux  morceaux  informes  de  succin  ou  ambre  rouge  dans  la  région  du  cou; 
aucune  trace  d'objets  en  métal;  aux  pieds  du  squelette,  un  pot  en  argile  mal 

1.  La  môme  figure  se  trouve  dans  Mus.  Schœpflini,  tab.  XIV,  flg.  XI. 
?    Le  bois  étant  très-toiiffu ,  il  m'a  été  impossible  de  pointer  ces  tertres  avec  une  exac- 
litiide  complète. 

3.  Voy.  liiUletix,  l.  lit,  p,  10,  P.  V. 


-   147  — 

cuite,  rempli  de  terre,  fendillé  en  tous  sens,  sans  rebord,  à  venire  Irès- 
renflé,  sans  stries  indiquant  l'action  d'une  estèque.  C'est  évidemment  de  la 
céramique  toute  primitive,  faite  simplement  à  la  main,  sans  le  secours  de 
la  tournette. 

Ce  squelette,  d'après  sa  taille  et  la  petitesse  des  dents,  pouvait  bien  être 
celui  d'une  femme. 

2®  Operation.  Squelette  très-décomposé,  couché  sur  un  lit  de  cendres, 
la  face  contre  terre,  la  tête  fortement  relevée  en  arrière,  dans  le  sens  du 
N-N.-O.  au  S-S.-E, ,  les  pieds  vers  les  Vosges;  point  d'ambre,  nulle  trace  de 
métal;  pot  en  argile  mal  cuite,  rempli  de  terre,  fendu  et  fortement  déprimé 
d'un  côté,  sans  rebord,  à  ventre  très-renflé.  Cette  dernière  fouille  avait 
pour  but  principal  d'obtenir  un  crâne  entier  pour  des  études  ethnogra- 
phiques; malheureusement  les  parties  les  plus  importantes  de  la  boîte 
osseuse  étaient  en  miettes. 

La  position  des  squelettes  permet  de  croire  que  ces  inhumations  étaient 
dirigées  par  une  pensée  d'orientation  du  levant  au  couchant.  Les  deux  pots 
portent  tous  les  caractères  de  la  céramique  germaine. 

f)  Groupe  du  canton  dit  Taspelmatt,  banlieue  d'Obenheim,  en  nature  de 
pré.  —  Ce  groupe  paraît  n'être  qu'une  continuation  du  précédent;  je  l'ai 
pris  comme  jalon  de  la  ligne  hypothétique  de  la  voie  païenne  n°  4.  Je  n'y 
ai  fait  aucune  recherche.  Le  terlre  placé  à  côté  de  la  lettre  /,  est  le  plus 
élevé  de  la  contrée  (c'est  celui  qui  a  3'^,50  de  relief).  On  dit  qu'il  se  trou- 
vait là  encore  beaucoup  d'autres  buttes,  qui  ont  disparu  lors  de  l'établisse- 
ment du  canal  du  Rhône  au  Rhin  et  du  chemin  vicinal  de  Sand  à  Oben- 
heim. 

g)  Canton  dit  Daxloclier,  banlieue  de  Herbsheim,  en  nature  de  pré.  — 
Tertres  très-aplatis,  sans  doute  par  un  nivellement  incomplet,  considérés 
généralement  comme  lumuhis  et  figurant  sous  ce  nom  dans  le  cadastre. 
Non  étudiés. 

h)  Communaux  û'Osthcmseii,  mis  en  culture  depuis  environ  vingt  ans. — 
Tumulus  nombreux  jadis,  ils  diminuent  d'année  en  année  par  les  travaux 
du  sol.  J'en  ai  examiné  deux,  mais  sans  résultat;  ils  étaient  très-plats  et  il 
est  à  présumer  que  leur  contenu  avait  été  enlevé  précédemment  par  des 
déblais.  Je  sais  d'ailleurs  que  sur  ce  terrain  on  a  déjà  trouvé  un  kelt,  des 
anneaux  et  des  virioles,  en  bronze.  Ces  tertres  commencent  à  être  telle- 
ment déformés  par  la  charrue,  qu'on  a  de  la  peine  à  les  distinguer.  Je  n'ai 
pu  les  pointer  qu'approximativement. 

i)  Lieberain  (gazon  de  l'amour),  tumulus  près  de  Witternheim,  à  côté 
de  la  voie  ancienne  transversale  qui  relie  la  voie  païenne  n''  1  avec  Frie- 


—  148  — 

senheini.  —  Ce  tumulus  éUiil  Irès-célèbre  dans  toute  la  eontrée.  Surmonte 
d'un  vieux  tilleul,  il  servait  de  salon  de  danse  à  la  jeunesse  de  l'endroit.  Il 
a  été  complètement  nivelé  il  y  a  environ  vingt-cinq  ans,  et  je  n'ai  pu  me 
procurer  aucun  renseignement  positif  sur  son  contenu.  D'après  la  place 
qu'il  a  occupée  et  mes  souvenirs,  il  doit  avoir  eu  au  moins  4  à  5  mètres  de 
relief  et  80  mètres  de  diamètre  à  sa  base. 

A  quels  peuples  faut-il  attribuer  ces  sépultures? 

Celte  question  m'a  beaucoup  préoccupé  pendant  le  cours  de  mes  recber- 
ches;  je  me  suis  arrêté  à  une  hypotbèse  que  je  soumets  à  l'appréciation 
des  archéologues.  Mais  rappelons  d'abord  les  opinions  de  nos  devanciers. 
D'après  Schweigha?user',  tous  les  tertres  lumulaires  de  l'Alsace  sont  ger- 
mains. M.  Max.  de  Ring-  pense  que  ces  buttes  recouvrent  des  dépouilles 
celtes  (mot  mal  délini  qui  sans  doute  doit  signifier  gaulois).  Sans  avoir  la 
prétention  de  résoudre  le  problème  mieux  que  ces  deux  maîtres,  je  crois  pou- 
voir les  mettre  d'accord,  du  moins  en  ce  qui  concerne  les  tumulus  d'Ehl  et 
de  ses  environs  :  j'ai  la  conviction  qu'il  y  en  a  de  l'un  et  de  l'autre  peuple. 

Les  tumulus  que  j'ai  étudiés  se  divisent  naturellement  en  deux  catégo- 
ries: i"^  ceux  qui  sont  complètement  dépourvus  de  métaux  et  de  parures; 
2"  ceux  qui  renferment  des  ornements  et  des  métaux.  Les  premiers  ne  peu- 
vent appartenir  qu'à  un  peuple  pauvre,  ou  à  un  peuple  qui  méprisait  le 
luxe  et  la  parure,  qui  avait  peu  de  métaux^  ou  à  un  peuple  étranger  au 
pays,  qui  n'était  que  de  passage,  (jui  ne  pouvait  donner  à  ses  morts  qu'un 
vase  grossièrement  fait  à  la  main,  à  peine  cuit,  contenant  le  dernier  repas. 
Les  seconds  doivent  appartenir  à  un  peuple  riche,  aimant  le  luxe  et  la 
parure,  qui  savait  bien  travailler  les  métaux'',  qui  avait  des  bijoux  à  pio- 
fusion,  dont  les  funérailles  étaient  somptueuses".  Dans  la  première  calé- 
gorie,  il  est  impossible  de  méconnaître  le  peuple  Germain;  dans  la  seconde, 
on  voit  clairement  la  nation  Gauloise.  L'on  m'objectera  sans  doute  que  l'un 
des  tumulus  de  la  première  catégorie  contenait  deux  morceaux  d'ambre 
rouge,  en  grande  vénération  chez  les  peuples  gaulois  comme  talisman'';  mais 
qu'on  n'oublie  pas  que  la  race  germanique  aussi  faisait  grand  cas  du  gless 
qu'elle  allait  avec  soin  recueillir  dans  la  mer^  Les  premiers  se  trouvent 
exclusivement,  à  ce  qu'il  paraît,  entre  le  Zembs  et  le  Rhin,  le  long  de  la 

1.  ScIiœplUn-Ravenèz ,  t.  III,  p.  72. 

2.  BaUelin,  passiiii . 

3.  Tacit.  Gerinan. ,  cap.  v  et  m,  et  Grcsar,  tk'  hello  r/oll.,  Vûk  VI ,  caii.  xxii. 

4.  Strabo ,  lib.  IV. 

h,  Csesar,  loc.  cit.,  cap.  xix. 

5.  Amédée  Thierry,  üist.  des  Gaulois .  t.  I''',  p.  i9l, 

6.  Tacit.,  loc.  cit.,  cap.  xi.v. 


—  149  — 

voie  la  plus  rapprochée  du  fleuve,  que  je  regarde  comme  une  voie  consu- 
laire venant  de  la  Rauracie;  les  seconds  se  rencontrent  principalement 
entre  l'Ill  et  le  Zembs,  aux  abords  de  la  voie  consulaire  venant  de  la 
Séquanaise. 

L'existence  de  sépultures  gauloises  sur  le  territoire  d'une  ville  gallo- 
romaine  s'explique  tout  naturellement;  mais  comment  expliquer  ce  grand 
nombre  de  sépultures  germaines?  A  quelle  race  faut-il  les  attribuer?  Ces 
tombeaux,  encore  très-nombreux  aujourd'liui,  et  qui,  d'après  leur  disper- 
sion, paraissent  être  des  restes  de  plusieurs  nécropoles,  recouvrent-ils  des 
Germains  qui,  suivant  leur  coutume,  avaient  vécu  là,  en  dehors  de  la  ville 
romaine,  dans  les  forêts,  aux  bords  du  Zembs,  ruisseau  aux  eaux  limpides'? 
Ou,  ne  proviendraient-ils  pas  plutôt  d'une  bataille?  Le  squelette,  couché 
sur  le  ventre,  du  groupe  de  Bœhitagen,  indicjue  une  inhumation  préci- 
pitée; il  y  a  donc  beaucoup  de  probabihté  pour  attribuer  les  morts  de 
cette  nécropole  à  une  bataille,  d'autant  plus  qu'elle  se  trouve  au  bord  même 
de  cette  voie  consulaire  et  à  côlé  d'une  place  à  vestiges  romains  (dite  Trnli), 
qui  peut  avoir  été  un  castellwn  pour  la  proléger.  Quelle  est  cette  bataille? 
A  quelle  époque  a-t-elle  eu  lieu?  L'histoire  est  muette;  nous  en  sommes 
réduits  aux  hypothèses,  et  la  seule  qui  me  paraisse  admissible  est,  que  ces 
tumulus  ont  été  faits  par  les  Alémans,  ces  Numides  ou  Kabyles  du  Nord, 
comme  les  appelle  fort  judicieusement  M.  Spach",  qu'ils  proviennent  d'une 
action  militaire  entre  les  Romains  et  ces  barbares,  qu'ils  se  rattachent  à 
un  fait  raconté  par  Ammien-Marcellin,  et  si  mon  sentiment  est  juste,  nous 
aurons  pour  ces  monuments  une  date  certaine,  l'année  357,  illustrée  par 
la  campagne  de  Julien  contre  les  Alémans. 

Du  reste,  les  Alémans  occupaient  la  rive  gauche  du  Rhin,  dans  la  partie 
supérieure  de  l'Alsace,  pendant  six  ans  (de  351  à  357^);  Herbsheim,  point 
situé  aux  bords  d'un  cours  d'eau,  entre  une  ville  romaine  et  le  Rhin,  et 
autour  duquel  on  rencontre  principalement  ces  sépultures  de  la  première 
catégorie,  peut  bien  avoir  été  occupé  par  ces  peuples;  la  figurine  en  (erre 
cuite,  trouvée  près  de  ce  village ^  semble  d'ailleurs  l'attester. 

Quoi  qu'il  en  soit,  je  crois  qu'il  est  permis  d'admettre,  sans  lémérilé,  que 
les  tumulus  dépourvus  d'ornements,  que  j'attribue  à  une  race  germaine, 
sont  des  sépultures  alémaniques  qui  datent  du  milieu  du  quatrième  siècle. 

Je  développerai  ce  sujet  au  chapitre  suivant.  ^ 

1.  Tacit.  Germon.,  cap.  xvi. 

2.  Descript.  du  dép.  du  Bas-Min,  hitroductioii  h/sfor/qi/e ,  1858,  p.  H. 

3.  Moue.  hc.  cit..  t.  II,  p.  319. 

4.  Yoy.  g  7. 

5.  Voy.  g  12. 


—  150  — 

CHAPITRE  III. 
Helvetus,  ville  gallo-romaine, 

L'exislence  d'une  ville  romaine,  succédant  à  un  établissement  gaulois, 
à  l'endroit  où  se  Irouve  le  hameau  d'Elil,  est  un  fait  admis  par  tous  les 
historien.s  de  notre  province  et  consacré  par  la  tradition. 

Dans  les  paragraphes  qui  vont  suivre,  j'en  rapporterai  la  synonymie  et 
l'étymologie;  puis,  je  chercherai  à  établir  l'importance  de  celte  ville  et  j'es- 
sayerai de  suppléer  au  silence  que  les  auteurs  anciens  ont  gardé  sur  son 
histoire,  en  retraçant  quelques-uns  des  principaux  faits  de  ses  annales. 
Cette  dernière  partie  de  mon  programme  pourra  d'abord  paraître  une  en- 
treprise téméraire;  mais  en  cherchant  à  faire  revivre  un  passé  de  quinze  à 
vingt  siècles,  ce  ne  sera  pas  sur  des  données  vagues  que  je  m'appuierai, 
mais  bien  sur  des  inductions  historiques  qui  me  paraissent  avoir  une  haute 
probabilité  scientifique.  Si  je  réussis  à  faire  jaillir  une  petite  étincelle  de 
lumière,  on  pardonnera  ma  témérité. 

§  10.  —  JSoms  et  élymoloyies. 

Ptolémée,  qui  écrivait  à  Alexandrie  vers  l'an  130,  est  le  seul  géographe 
grec  faisant  mention  de  cette  ville  qu'il  appelle  EXxTjßoc  et  qu'il  attribue 
aux  Triboques;  la  table  théodosienne  l'indique  entre  Argentouaria  et  Ar- 
gentoralnm,  sous  le  nom  de  Hellehim  ou  Hellelns;  elle  figure  trois  fois 
sur  l'itinéraire  d'Antonin  sous  celui  à'Helvekis.  Schœpflin,  notre  historien 
classique,  a  adopté  cette  dernière  dénomination,  et  je  ne  saurais  mieux 
faire  que  de  suivre  son  exemple. 

Ce  sont  les  seules  mentions  faites  de  cette  localité  par  les  auteurs  de 
l'époque  romaine.  Selon  toute  vraisemblance,  Helvet  était  la  première  ville 
importante  que  l'on  rencontrait  en  quittant  le  territoire  des  Séquanais 
pour  se  rendre  chez  les  Médiomatriciens  (qui,  plus  tard,  furent  remplacés 
par  les  Triboques). 

D'après  Kœnigshoven',  rE>^x'ifißoc  de  Ptolémée  signifie  EL-KEW  ou  Illgau. 
Beatus  Rhenanus^,  préoccupé  du  soin  d'illustrer  sa  ville  natale  qui  au 
moyen  âge  s'appelait  Selcestadt,  en  la  faisant  descendre  de  notre  ville 
romaine,  convertit  arbitrairement  le  nom  donné  par  le  géographe  grec, 

1.  Elsüssische  und  slrassburgische  Chronicke ,  p.  1065. 

2.  Rer.  Germon  .  lib.  lil,  p.  286,  edit.  MDLI. 


—  151  - 

en  Elcebus ,  qu'il  croit  provenir  der  deux  coiu's  d'eau  qui  l'entourent: 
Ellus  (111)  et  Kehus  ou  Cehus  (Zembs).  Schœpflin*  pense  qu  Hclvetus  peut 
dériver  du  mot  celtique  Helv,  qui  signifie  chasse,  tout  en  admettant  la 
possibilité  que  ce  nom  puisse  avoir  pour  origine  Ael  ou  El  qui,  chez  les 
Celtes,  signifiait  bord  et  sourcil,  cette  ville  ayant  été  assise  sur  les  bords 
d'une  rivière.  D'après  Grandidier',  Hell  veut  dire  clôture  ou  enclos,  Helu, 
chasse  :  l'ancien  Helvet  ayant  été  un  endroit  propre  à  la  chasse  et  entouré 
de  bois.  StrobeP  dit  qu'Helvet  signifie  riche  herbage,  et  il  compose  ce 
nom  de  Hel,  prairie,  et  de  wd,  grand.  D'autres  étymologies  ont  été  pro- 
duites, je  crois  pouvoir  les  passer  sous  silence. 

N'y  a-t-il  pas  un  peu  trop  de  celticisme  dans  ces  étymologies?  Ne  serait- 
il  pas  plus  simple  et  plus  naturel  d'admettre  (comme  le  font  d'ailleurs 
Kœnigshoven  et  en  partie  Beatus  Rhenanus)  que  la  ville  ait  été  nommée 
d'après  la  rivière  ///,  EU,  Ellus  qui  baigne  son  territoire  et  dont  le  radical 
se  retrouve  dans  tous  les  noms,  anciens  et  modernes,  donnés  à  cette  loca- 
lité? Je  dois  confesser,  du  reste,  que  je  goûte  fort  l'opinion  de  Schweig- 
haeuser*  qui,  en  parlant  de  la  fréquence  des  communications  entre  Helvetus 
et  le  pays  des  Helvétiens,  voit  une  certaine  correspondance  dans  ces  deux 
noms, 

§11.  —  Importance  de  cette  ville. 

Jérôme  Guebviller^  parle  du  village  d'Ehl  (Elegia)  comme  d'un  lieu  très- 
connu  pour  avoir  servi  aux  pratiques  religieuses  des  Gentils;  il  croit  qu'il 
y  avait  là  un  bois  sacré.  La  tradition  populaire  place  un  temple  païen,  cé- 
lèbre dans  toute  la  contrée,  à  l'endroit  où  fut  construit  plus  tard  un  cou- 
vent. D'après  les  monuments  trouvés,  les  historiens  de  l'Alsace  pensent  que 
ce  temple  était  dédié  à  iMercure  {Tentâtes  des  Gaulois,  et  Wodan  des  Ger- 
mains), divinité  très-vénérée  dans  la  Gaule  rhénane.  J'en  ai  indiqué  la  place 
probable  sur  la  carte;  on  remarquera  qu'il  y  avait  là  un  compitum,  formé 
par  deux  grandes  voies,  point  parfaitement  approprié  à  un  établissement 
religieux.  On  peut  donc  admettre,  avec  assez  de  vraisemblance,  qu'en  ce 
lieu  les  peuples  primitifs  célébrèrent  leur  culte  en  plein  air,  sous  l'ombre 
d'un  grand  chêne  et,  peut-être,  en  versant  le  sang  humain!  que  plus  lard, 

1.  Alsat.  iliustr.,  t.  T"",  p.  54. 

2.  Histoire  ecclésiastique  ,  militaire ,  etc.,  de  la  province  d'Alsace,  p.  15. 

3.  Vaterlùfidische  Geschichte  des  Elsasses ,  t.  l",  p.  12  ,  et  note  6,  2*^  édit.,  1851. 

4.  Schœpflin-Raveûèz,  t.  11,  p.  62. 

5.  Schœpflin  ,  /oc.  cit..  t.  I",  p.  87. 


—  152  — 

avec  le  progrès  de  la  civilisalion,  sans  cloute  après  l'arrivée  des  Romains, 
le  vieux  chêne  fut  remplacé  par  un  temple.* 

Le  grand  nombre  d'autels  volifs,  l'inscription  aux  déesses  Mères,  les 
statues  de  différentes  divinités,  etc.,  trouvés  en  ce  lieu;  les  nombreuses 
idoles  scellées  dans  les  murs  dont  parlent  les  anciens  auteurs  :  tous  ces 
monuments  prouvent  qu'il  y  avait  là  un  centre  religieux  très-important. 

Au  point  de  vue  civil,  Helvet  était  un  lieu  d'étapes  {mansio),  les  itiné- 
raires et  la  carte  tbéodosienne  en  font  foi;  et  au  point  de  vue  militaire, 
nous  savons  rpie  la  VHP  légion  {augusta)  y  tenait  garnison  et  qu'il  y  avait 
un  poste  militaire  de  surveillance. 

Cette  ville  était-elle  fortifiée?  —  C'est  une  question  qu'il  me  serait  im- 
possible de  résoudre.  Sur  la  carte  tbéodosienne,  Argentorat  figure  avec 
deux  lours,  Helvet  y  est  simplement  indiqué  sous  le  nom  d'Hellehmi.  Pour- 
tant il  n'est  guère  probable  que  sa  proximité  du  Rhin  n'ait  pas  nécessité 
des  moyens  de  résistance  contre  un  ennemi  toujours  prêt  à  l'attaque;  je 
regarde  donc  comme  certaine  l'existence  d'un  castrum  du  côté  du  Rhin,  et 
ce  casinim,  je  crois  l'avoir  trouvé  sur  l'emplacement  où  fut  construit,  plus 
lard,  le  château  féodal  de  Schivanau,  près  Gerstheim^  11  y  avait  encore 
deux  autres  châteaux  féodaux  aux  environs,  dont  les  emplacements  recèlent 
des  débris  romains  :  Kirchstrâng,  près  Herbsbeim,  et  Heidenschloss,  \)rès 
Hüttenheim'';  peut-être  y  avait-il  là  des  caslella.  Parmi  les  emplacements 
romains  qui  se  trouvent  autour  d'Ehl,  il  y  en  avait  sans  doute  encore  d'au- 
tres qui  étaient  des  postes  de  défense,  comme  par  exemple  celui  de  Trulî, 
à  côté  d'une  voie  consulaire  et  près  d'un  groupe  de  tumulus.* 

En  parlant  de  la  topographie,  nous  avons  jeté  un  coup  d'œil  sur  l'agri- 
culture d'Helvet;  nous  allons  essayer  maintenant  de  donner  une  idée  de 
l'importance  industrielle  et  commerciale  de  cette  ville. 

Le  principal  fleuron  de  l'industrie  à'Helvetus  était,  sans  contredit,  sa 
fabrique  de  bronze  (officina  œraria),  dont  les  produits  fournissaient  toute 
la  contrée  et  qui  a  laissé  des  spécimens  si  remarquables  dans  les  tombeaux 

1.  Sur  ce  sujet,  la  tradition  va  jusqu'à  la  légende.  Elle  vent  qu'une  idole  de  grandeur 
humaine  {Ufidenr/olD,  en  or  massif  avec  des  yeux  en  diamants,  ait  jadis  orné  ce  temple. 
Au  moment  d'une  invasion  subite,  voulant  sauver  cette  précieuse  statue  des  mains  des  bar- 
bares, on  l'emporta  pour  la  mettre  eu  lieu  sûr;  mais  chemin  faisant  on  la  laissa  tomber 
dans  un  marais,  d'où  il  n'a  plus  été  possible  de  la  retirer.  C'est  une  thèse  inépuisable  pour 
l'imagination  populaire  et  un  but  constant  pour  les  infatigables  chercheurs  do  trésors.  Ou 
a  été  jusqu'à  consulter  l'oracle  des  tables  tournantes! 

2.  Yoy.  U  2  et  5. 

3.  Yoy.  g  5. 

4.  Voy.  gg  5  et  9. 


—  153  — 

gollo-romalns,  qui  abondent  sur  les  deux  rives  du  RliinV  Cet  élablissement 
métallurgique  a  dû  être  très-florissant  pendant  les  quelques  siècles  de  calme 
dont  jouissait  le  pays  sous  la  domination  romaine.  La  tradition  en  a  conservé 
le  souvenir,  mais  elle  en  fait  principalement  un  atelier  monétaire.  Les  deux 
coins  en  fer,  décrits  plus  liaut%  fournissent  un  appui  solide  à  cette  tiadi- 
tion;  pourtant  on  ne  connaît  aucune  médaille  portant  le  nom  ô'Helvehis, 
ou  un  sigle  ou  une  exergue  qui  le  représente.  Ne  pourrait-on  pas  admettre 
que  cette  ville  ait  eu  une  monnaie  déjà  à  l'époque  gauloise,  et  que  cet  éta- 
blissement ait  continué  de  fonctionner,  par  une  espèce  de  tolérance,  sous 
la  domination  romaine? 

Si  le  grand  nombre  de  pièces  sculptées,  trouvées  parmi  les  monuments 
d'Ehl,  confirme  l'existence  d'un  centre  religieux  important,  ne  pourrait-on 
pas  aussi  en  induire  la  présence  d'une  autre  industrie  artistique,  celle  de 
la  sculpture?  A  côté  de  l'art  de  Yœrarius  et  du  borbaricarivs  pouvait  bien 
fleurir  aussi  celui  du  Inpidnrins  et  du  sculptor. 

La  tradition  locale  parle  d'une  grande  foire  annuelle  qui  se  tenait  à  Ebl 
au  temps  des  païens  et  à  laquelle  affluaient  les  marcbnnds  des  pays  les  plus 
éloignés.  Pendant  tout  le  moyen  âge  et  même  encore  au  plus  fort  de  sa 
décadence,  Ebl  avait  deux  foires  très-fréquentées,  dont  l'une  était  spécia- 
lement réputée  pour  le  chanvre,  son  fil  et  ses  tissus.  Il  y  a  quarante  ans, 
elles  ont  été  transférées  à  Benfeld. 

La  culture  du  chanvre  remonte  à  une  très-haute  antiquité.  Il  est  probable 
qu'il  a  été  importé  par  la  migration  des  premiers  peuples  qui  sont  venus 
se  fixer  dans  nos  contrées.  Cette  plante  est  originaire  des  montagnes  de 
l'Himalaya,  entre  le  Gange  et  l'indus,  et  la  race  Kimris,  qui  est  venue  ha- 
biter les  bords  du  Rhin,  est  descendue  de  la  haute  Asie.  Du  reste,  il  paraît 
que  les  Triboques  avaient  une  certaine  réputation  pour  cette  culture,  car 
encore  au  temps  de  Grandidicr  on  désignait,  à  Metz,  le  chanvre  d'Alsace 
sous  le  nom  de  chanvre  de  Tréboc^.  Les  Triboques  comme  les  Kimris  pas- 
sent pour  être  issus  d'une  race  indo-européenne. 

Ilelvet  était  sillonné  d'un  réseau  de  voies,  que  mainte  cité  industrielle 
de  nos  jours  pourrait  lui  envier.  Ces  moyens  de  communication,  qui  met- 
taient notre  ville  gallo-romaine  en  relation  facile,  non -seulement  avec  les 
villes  et  les  provinces  limitrophes,  mais  encore  avec  les  pays  les  plus  loin- 
tains, prouvent  jusqu'à  l'évidence  que  c'était  un  lieu  de  grand  passage  et 

1.  Voy.  g  4.  et  Sclireiber,  loe.  cit.* 

2.  Voy.  §8  4  et  7. 

.3.  Grandidier,  loc.  cit. ,  p.  68.  —  D'après  le  m^nie  autour  (ibid.] ,  la  l)asse  Alsace  est  ap- 
pelée, en  langue  vulgaire,  à  Belfort,  payx  de  Tréliay. 


—  154  — 

de  mouvement.  A  côté  de  cette  grande  voirie  il  y  avait  encore  un  large 
système  de  vicinalité. 

D'après  une  tradition  populaire  de  la  contrée,  Benfeld,  Kertzfeld,  Hüt- 
tenheim, Rossfeld,  Herbsheim,  Sand,  Matzenheim,  Weslhausen,  avaient 
jadis  fait  partie  de  la  grande  ville  romaine.  En  considérant  les  vestiges 
d'établissements  romains  trouvés  à  proximité  de  toutes  ces  localités,  et  les 
preuves  de  haute  antiquité  qui  résultent  de  leurs  premières  mentions  dans 
les  chartes,  on  est  tenté  d'adhérer  à  la  tradition,  malgré  l'étendue  hors  de 
proportion  qu'on  donnerait  ainsi  à  une  ville  qui,  dans  tous  les  cas,  n'était 
pas  de  premier  ordre.  La  tradition  ne  parle  pas  de  Gerstheim  ;  mais  Schœpflin 
cite  un  auteur*  qui  pense  qu'Elcebus  élait  situé  sur  le  Pdiin. 

11  faut  naturellement  distinguer  entre  la  ville  et  son  territoire  ou  sa  ban- 
lieue. Rien  n'empêche  de  regai'der  comme  territoire  d'Helvetus  l'étendue 
qui  résulte  de  la  tradition;  on  peut  même  y  ajouter  Gerstheim.  Sur  ce  ter- 
ritoire, il  pouvait  y  avoir  des  chaumières  ou  cabanes  (casœ)  dispersées, 
habitations  des  coloni  qui  exploitaient  le  sol,  avec  d'autres  établissements 
d'une  construction  plus  solide,  dont  on  retrouve  les  vestiges.  Quanta  l'aire 
occupée  par  la  ville  proprement  dite,  il  serait  difficile  de  la  préciser.  Le 
territoire  d' Eh l,  avec  une  certaine  étendue  de  la  rive  gauche  de  l'ill,  en 
formait  sans  doute  le  centre.  Ce  n'était  pas  d'ailleurs  une  ville  romaine 
{urbs),  bâtie  d'après  les  règles  de  cette  nation,  mais  simplement  un  éta- 
blissement gaulois,  approprié  par  les  conquérants.  Tout  ce  que  l'on  peut 
conclure  avec  quelque  certitude  des  recherches  qui  précèdent,  c'est  qu'Hel- 
vetus  était  une  ville  industrielle,  commerciale  et  agricole  populeuse,  grou- 
pée autour  d'un  centre  religieux  très-important. 

§  12.  —  Considérations  historiques. 

L'histoire  est  à  peu  près  muette  sur  Helvefns ;  il  paraîtrait  qu'il  ne  s'y  est 
jamais  passé  aucun  événement  assez  saillant  pour  être  jugé  digne  de  l'at- 
tention des  écrivains,  contemporains  de  sa  splendeur.  C'est  une  lacune  re- 
grettable; nous  verrons  plus  loin  si  elle  peut  être  comblée.  Mais  rappelons 
d'abord  le  seul  fait  important  dont  les  historiens,  venus  plus  tard,  fassent 
mention  :  c'est  l'apostolat  de  saint  Materne.  Cet  apôtre  aurait  prêché  l'Evan- 
gile dans  cette  ville  et  y  aurait  fait  de  nombreuses  conversions.  D'après 
Schœpflin^',  le  premier  hagiographe  qui  ait  parlé  de  saint  Materne,  estHe- 
riger,  qui  a  écrit  vers  la  fin  du  dixième  siècle.  Les  habitants  de  Benfeld 
et  de  Sand  parlent  de  cette  mission  apostolique  comme  d'une  vieille  tra- 

1.  Wilibald  l'ircitiieimer.  A/sof.  illnstr..  1.1"  p.  193. 

2.  Loc.  cit.,  t.  1",  p.  33U. 


—  l.-)5  — 

dilion,  sans  y  rien  ajouter  de  fabuleux.  L'ajjôlre  aurait  prêché  sur  un  grand 
iLirnulus,  connu  sous  les  noms  de  Heidenkanzel  et  de  Maternîisbîickel  (chaire 
païenne  et  butte  de  saint  Materne);  trois  mille  païens  se  seraient  convertis 
à  la  foi  nouvelle  et  il  leur  aurait  donné  le  baptême  dans  une  source  voisine, 
appelée  depuis,  source  de  saint  Materne.  C'est  un  bassin  peu  profond  d'en- 
viron 30  mètres  de  circonférence;  le  baptême  ainsi  administré,  implique 
l'idée  du  baptême  par  immersion,  usité  dans  les  temps  primitifs,  ce  qui 
donne  à  cette  tradition  un  certain  cachet  d'authenticité. 

L'apostolat  de  saint  Materne  est  d'ailleurs  un  fait  admis  par  les  historiens 
de  l'Alsace.  Grandidier  place  cet  événement  vers  la  Un  du  troisième  siècle, 
sous  le  règne  de  Constance  Chlore*.  11  faut  croire  que  la  fable  de  Kœ- 
nigshoven  sur  le  voyage  apostolique  de  saint  Materne  avec  Euchaire  et 
Valère*,  dès  le  premier  siècle,  sa  mort  et  sa  résurrection  miraculeuse, 
réduite  à  sa  juste  valeur  par  le  savant  abbé,  n'est  qu'une  amplification, 
dans  le  goût  du  temps,  de  la  tradition  populaire. 

11  n'est  pas  possible  qu'Helvet  n'ait  joué  un  certain  rôle  dans  les  guerres 
contre  les  Alémans  au  quatrième  siècle.  Ammien-Marcellin  parle  d'Ârgen- 
toratmn^  où  l'empereur  Julien  a  remporté  une  victoire  éclatante  sur  ces 
barbares  en  357,  et  à'Argenturia  (ou  Argent  avaria^),  où  Cralien  a  défait 
les  Lentiens,  tribu  alémanique,  eu  378,  mais  il  ne  fait  aucune  mention  de 
notre  ville.  Qu'il  me  soit  permis  de  suppléer  au  silence  de  l'histoire  par 
une  hypothèse  qui  ne  paraîtra  peut-être  pas  trop  hasardée. 

Après  que  Julien  eût  rassemblé  son  armée  à  Heims,  il  se  porta  vers  le 
Rhin  dans  l'espoir  d'écraser  les  Alémans.  Ce  plan  fut  contrarié  par  la  tra- 
hison de  Barbalion,  général  de  l'infanterie,  qui  occupa  le  pays  des  Raura- 
ques....  Lorsque  le  César  s'approcha  du  Rhin,  les  Alémans,  qui  s'étaient 
fixés  en  Alsace,  se  retirèrent  dans  les  Vosges  où  ils  se  retranchèrent  avec 
des  abattis,  ou  aussi  dans  les  îles  du  Rhin,  lorsqu'ils  étaient  plus  rappro- 
chés du  fleuve.  Là  les  Alémans  se  montrèrent  plus  irrités  que  jamais,  et 
comme  Julien  n'avait  point  de  barques ,  il  en  demanda  sept  à  Barbation , 
afin  d'établir  de  petits  ponts  pour  franchir  les  faux  brns  du  Rhin,  qui  sépa- 
rent ces  îles  et  pour  en  chasser  les  ennemis.  Barbation,  toujours  traître, 
fit  brûler  ses  barques.  Mais  des  prisonniers  alémans  ayant  indiqué  à  Julien 

1.  Voyez  son  iiitéreasaiiledisserlalioi).  ajoutée  par  M.  Havenèz  à  sa  Irad.  de  f.Ms.  Hiuatr.. 
t.  m,  p.  271. 

2.  Chronick,  p.  269. 

3.  I.ib.  XVI,  cap.  xn. 

4.  Lib.  XXXI,  cap.  x.  D'après  plusieurs  auteurs  anciens,  cette  ville  romaine  se  trouvait  à 
la  place  de  Goimar;  Scliœptliu  la  place  à  Horbourg,  et  M.  Goste  à  Gruseuheim.  Voy.  Bullt- 
tin,  1864,  p.  19. 


—  156  — 

un  endroit  où  l'eau  du  fleuve  était  peu  profonde,  celui-ci  envoya  des  troupes 
légères  qui  passèrent  à  gué,  y  massacrèrent  tout,  hommes,  femmes,  enfants, 
bétail,  s'emparèrent  des  barques,  ravagèrent  de  même  d'autres  îles  et  re- 
vinrent chargés  de  butin.  Les  Alémans  qui  purent  échapper  s'enfuirent 
avec  leurs  provisions  sur  la  rive  droite  du  Rhin,  dans  le  Brisgau  et  l'Ortenau. 
L'infidélité  de  Barbation  ayant  empêché  Julien  de  donner  suite  à  son 
projet  de  passer  le  Rhin,  il  se  repha  sur  Saverne  et  fortifia  cette  place, 
afin  de  couper  à  l'ennemi  le  passage  des  Vosges.  On  sait  que  cette  cam- 
pagne se  termina  par  la  bataille  des  sept  rois  alémans  près  d'Argentoral, 
la  victoire  de  Julien  et  la  prise  de  Chnodomaire. 

.  J'ai  rapporté  la  narration  de  Thistoriographe  romain  d'après  l'interpré- 
tation que  lui  donne  M.  Mone,  de  Carlsruhe. ^  Eh  bien,  ce  qui  précède 
s'applique  parfaitement  à  la  contrée  qui  fait  le  sujet  de  cette  étude.  Il  ne 
manque  que  le  mot  Helvetus,  qu'Ammien-Marcellin  a  omis  dans  son  laco- 
nisme souvent  désespérant.  Les  localités  nommées  par  notre  historien 
sont:  Augustci  (Augst  près  Râle),  Tres-Tabernœ  (Saverne)  et  Argento- 
raium  (Strasbourg);  Helvelus  (Ehi)  occupe  presque  le  centre  de  ces  loca- 
lités. M.  Mone  dit  que  les  Alémans  se  réfugièrent  dans  le  Brisgau  et  l'Or- 
tenau: or,  ces  deux  pagus  ont  leur  séparation  sur  la  ligne  du  territoire 
d'Helvetus.  Et  vis-à-vis  de  Gerstheim  se  trouve  un  village  appelé  All- 
mansweier  ! 


Y  aurait-il  de  l'invraisemblance  à  admettre  que  les  îles  du  Rhin  où  se  sont 
réfugiés  les  Alémans,  et  d'où  Julien  les  a  fait  chasser  par  un  corps  de  vélites, 
commandé  par  Bainobaudes,  tribun  des  Gornutes,  sont  celles  qui  se  trouvent 
entre  Gerstheim  et  le  village  badois;  que,  refoulés  sur  la  rive  droite,  ils  s'y 
sont  fixés  pour  donner  naissance  à  cette  commune  qui  a  conservé  leur  nom? 

A  l'autorité  de  M.  Mone,  je  puis  en  ajouter  une  autre  qui  vient  encore  à 
l'appui  de  ma  thèse.  M.  Spach,  dans  une  intéressante  histoire  du  Bas-Rhin ^ 
dit  :  «Après  cette  retraite  de  Lyon,  les  barbares  occupaient  les  îles  du  Rhin, 
grandes  et  petites,  le  long  de  l'Alsace  d'aujourd'hui.  Du  sein  de  ces  re- 
paires, ils  lançaient  des  imprécations  contre  Julien,  etc.» 

C'est  donc  en  m'appuyant  sur  deux  autorités  imposantes  que  je  me  per- 
mets d'appliquer  à  Helveliis  un  passage  d'Ammien -Marcellin%  auquel 

1.  Urç/exchichte,  etc.  t.  II,  p.  296. 

2.  Desc7yp(.  du  dép.  du  has-Rhhi,  /oc.  cil. 

.3.  Voici  ce  passage  d'Ammien-Marcellin:....  I/sdem  diehus  excrcittmm  advenlu  perlerrid 
barhari,  qui  domicilia  fixere  eis  Rhenum,  partim  difficiles  vias ,  elst(op(e  naturo  clivosos 
concœdibns  vlavsere  snllerter ,  arborions  immensi  roboris  ca'sis  :  al  H  occupât  is  insvlis , 
sparsis  crebro  per  ßumen  Rhenum  ,  ululantes  lugubre  conviens  et  Romanos  incesscbant 
et  Cœsarem  etc.  Lib.  XVI,  cap.  xi. 


—  157  — 

Scliœpfliu  avait  dumic  une  signification  tout  à  fait  diflérentc.'  En  effet, 
adoptant  l'opinion  de  Guilliman",  il  place  ce  fait  d'armes  près  de  Rhinau, 
en  Suisse  (canton  de  Zurich).  L'assertion  de  fauteur  suisse  est  contraire  à 
toute  vraisemblance  et  ne  repose  sur  aucune  base.  Les  restes  de  fortifica- 
tions dont  il  parle  ne  prouvent  rien,  ils  peuvent  avoir  une  autre  oiiginc. 
Le  couvent  de  Bénédictins,  de  Rhinau  (Suisse),  a  été  fondé  en  778,  il  est 
possible  qu'il  ait  été  précédé  d'un  établissement  romain.  D'ailleurs,'l'historien 
romain  ne  parle  que  de  retranchements  faits  avec  des  arbres  et  non  de 
fortifications  murées.^ 

En  parlant  des  tumulus*,  j'en  ai  signalé  qui  me  paraissent  appartenir 
aux  Alémans  et  que  j'ai  cru  pouvoir  attribuer,  en  partie  du  moins,  à  des 
morts  tombés  dans  une  bataille.  Eh  bien,  cette  bataille  a  pu  avoir  lieu 
lorsque  les  Romains  sont  venus  refouler  les  barbares  au  delà  du  Rhin. 
M.  L.  Levrault^  parle  de  «nombreux  hirindl  dont  les  tertres  boisés  s'éche- 
lonnent sur  divers  points  de  la  forêt  d'Obcrnai,  ainsi  que  des  forêts  conti- 
guës  de  Landsperg,  Barr,  etc.»  Ne  seraient-ce  pas  des  sépultures  de  ces 
mêmes  peuples,  attaqués  et  tués  par  les  Romains  dans  leurs  retranchements 
des  Vosges?  Peut-être  y  ena-t-il  aussi,  comme  je  le  suppose  pour  les 
environs  de  Herbsheim,  qui  recouvrent  des  personnes  mortes  naturelle- 
ment pendant  les  six  années  que  les  Alémans  ont  occupé  fAlsace. 

La  voie  de  la  Rauracie,  le  long  de  laquelle  sont  disséminés  les  tumulus 
que  je  regarde  comme  alémaniques,  traverse  un  canton  rural  qui  porte  le 
nom  de  Könyjsherberg  (gîte  du  roi).  D'après  une  tiadition  locale,  un  roi 
campait  ici  jadis  avec  son  armée;  on  dit  que  des  armes  et  surtout  des  fers 
à  cheval  y  ont  été  mis  à  jour.  J'y  ai  fait  des  fouilles  sans  résultat®  et  me 
suis  borné  à  noter  cette  place  pour  mémoire.  Mais  je  crois  qu'il  n'y  aurait 
rien  d'invraisemblable  à  admettre  qu'un  roi  alémaii  ait  campé  en  ce  lieu, 
à  proximité  de  la  ville  romaine  et  non  loin  du  Rhin,  et  que  son  camp  ait 
formé  le  centre  d'une  population  alémanique,  dont  nous  avons  vu  des  traces 
assez  caractéristiques  à  Herbsheim. 

En  résumé,  les  Alémans  avaient  intérêt  à  posséder  toutes  les  villes  ro- 

l.  Alsat.iUustr.,  t.  Y\  p.  401. 

1.  Francisci  Guilliiiiaimi,  De  Beb.  Helvet. ,  p.  96,  1598. 

o.  J'avais  conçu  l'iiypotbése  (pie  je  viens  de  développer  avant  d'avoir  eu  connaissance 
des  travaux  de  M.  Moue  et  de  M.  Spacli  ;  il  m'a  encore  été  donne  d'en  entretenir  notre 
savant  et  bien  regretté  confrère,  feu  M.  le  professeur  Jung-,  qui  a  beaucoup  approuvé  mon 
idée,  et  c'est  d'après  ses  conseils  que  j'ai  pousuivi  l'étude  de  cet  infére.ssant  problème. 

4.  Voy.  g  9. 

5.  Voy.  Bulleim,  I8G4.  p.  7. 
G.  Voy.  l  6. 


—  158  — 

manies  des  bords  du  Rhin;  ils  se  sont  battus  pour  avoir  Argentoratum  et 
Argentouaria,  pourquoi  auraient-ils  négligé  Helvetus? 

Helvetus  a  dû  partager  la  destinée  iV Argentoratum.  Gomme  cette  der- 
nière ville,  ïlelvet  est  classé  par  les  historiens  parmi  les  villes  des  Médio- 
matriciens  d'abord,  puis  parmi  celles  des  Triboques.  La  première  population 
gauloise  qui  ait  laissé  des  traces  dans  nos  contrées ,  doit  avoir  appartenu 
aux  Kimris-Belges,  dont  les  Médiomatrikes  faisaient  partie.  Ce  fut  environ 
l'an  600  avant  J.-C.  que  les  Kimris  passèrent  le  Rhin,  sous  la  conduite  de 
Hu  ou  Hésus  le  Puissant,  chef  de  guerre,  législateur  et  prêtre'.  Dès  le 
deuxième  siècle  de  notre  ère,  il  n'est  plus  fait  mention  des  Médiomatrikes; 
ils  furent  refoulés  dans  les  Vosges  par  les  Triboques. 

Après  la  défaite  d'Arioviste  par  César,  dans  le  pays  des  Séquanais,  La- 
biénus  soumit  les  Médiomatriciens,  qui  dès  lors  furent  incorporés  à  l'em- 
pire romain  (56  ans  avant  J.-C).  L'ordre  nouveau,  administratif  et  civil, 
fut  établi  par  l'empereur  Auguste  (26  ans  avant  J.-C),  et  la  partie  de  l'Al- 
sace qui  correspond  à  peu  près  au  département  du  Bas-Rhin,  reçut  la  dé- 
nomination de  Germanie  supérieure,  et  au  quatrième  siècle,  sous  le  règne 
de  Constantin,  celle  de  Germanie  première. 

Helvetus  paraît  avoir  péri  au  cinquième  siècle.  Dans  les  années  403  et 
suivantes,  Stilicon,  Vandale  d'origine,  régent  sous  la  minorité  d'Honorius, 
fils  de  Théodose,  dégarnit  successivement  les  frontières  du  Rhin  des  lé- 
gions qui  les  gardaient.  Dans  l'espoir  de  satisfaire  une  secrète  ambition,  il 
sut,  par  des  manœuvres  habiles,  décider  les  Germains  à  une  invasion  dans 
l'empire  romain.  Le  dernier  jour  de  décembre  406,  des  hordes  de  Quades, 
de  Vandales,  de  Sarmates,  d'Alains,  de  Gépides,  de  Hérules,  de  Saxons, 
de  Bürgendes,  d'Alémans,  etc.,  vinrent  franchir  les  frontières  dégarnies. 
Saint  Jérôme%  dans  une  épître  célèbre,  parle  avec  une  véhémente  élo- 
quence de  ce  désastre,  et  parmi  les  villes  détruites  il  cite'Argentorat.  Quoi- 
qu'il ne  fasse  pas  mention  d'Helvet,  il  y  a  tout  lieu  de  penser  que  cette 
ville  subit  le  même  sort,  ou  que,  si  elle  échappa  en  partie  à  l'invasion 
germanique,  elle  succomba  plus  taixl  entièrement  lors  de  celle  d'Attila, 
en  451 . 


1.  Amédée  Thierry,  Hist.  des  Gaulois,  t.  1",  p.  143. 
5.  Epistola  XI,  ad  Ageruchiam. 


INapoLÉGN  NlCKLÈS, 


ronespondant  de  l'académie  de  Stanislas,  de  la  sociAté 
iiidastrielle  de  Mulhouse,  etc.  etc. 


SAINT    I.EON   IX 

LE   PAPE   ALSACIE.N. 


Le  8  août  1048,  le  pape  Damase  11  moiirul  subitement,  empoisonné, 
dit-on,  par  Benoît  IX,  après  vingt-trois  jours  de  pontificat,  qu'il  avait 
passés  hors  des  murs  de  Rome,  dans  l'antique  cité  de  Préneste  ou  de  Pa- 
lestrine.  Au  moment  de  son  décès,  l'empereur  d'Allemagne,  palrice  de 
Rome,  exerçait  une  influence  majeure  sur  les  élections  papales.  Les  députés 
romains  se  rendirent  à  Freisingen,  auprès  de  Henri  111,  pour  le  prier  de 
leur  désigner  un  candidat.  Le  clioix  de  l'empereur  tomba  sur  son  parent 
Bruno,  évêque  de  Toul. 

En  ceignant  la  tiare ,  Bruno  prit  le  nom  de  Léon  IX ,  qu'il  immortalisa 
par  l'éclat  de  ses  vertus. 

Léon  IX  est  un  pape  alsacien.  Avant  de  raconter  l'histoire  de  son  pon- 
tificat, il  est  indispensable  de  rappeler  son  origine ,  et  de  retracer  en  quel- 
ques lignes  la  situation  du  clergé,  de  l'Eglise,  et  de  l'Europe  centrale,  au 
moment  où  le  précurseur  de  Grégoire  VII  monta  sur  le  saint-siége. 

Je  n'apporte  point  de  documents  nouveaux  et  inédits  à  cette  esquisse. 
Schœpflin  a  publié  trois  chartes  concernant  le  voyage  de  Léon  IX  en  Al- 
sace ;  nos  archives  du  Bas-Rhin  conservent  deux  de  ces  titres.  J'aurai  soin 
de  les  encadrer  dans  mon  récit;  ils  en  formeront,  sinon  le  point  culmi- 
nant ,  du  moins  un  épisode,  qui  aura  quelque  chance  de  fixer  votre  intérêt, 
puisqu'il  y  est  question  de  l'éghse  d'Altorf  et  du  couvent  de  Hohenbourg, 
c'est-à-dire  de  deux  locahtés  chères  aux  archéologues  et  aux  fidèles. 

Si  j'entreprends  la  tâche  téméraire  de  faire  revivre  à  vos  yeux  cette 
sainte  figure,  sans  légitimer  mon  dessein  par  une  révélation  trouvée  dans 
quelque  document  inédit  du  onzième  siècle ,  j'espère  du  moins  conquérir 
votre  indulgence  par  la  sincérité  de  mon  admiration  pour  cet  illustre  pon- 
tife; admiration  qui  n'exclut  point,  —  vous  le  verrez  tout  à  l'heure ,  —  un 
jugement  impartial.  A  défaut  de  sources  inconnues ,  j'ai  pu  trouver ,  pour 
le  respect  que  m'inspire  Léon  IX,  des  points  d'appui  dans  plusieurs  au- 
teurs modernes,  qui  ont  voué,  comme  moi,  un  culte  à  ce  grand  réforma- 
teur. Des  écrivains  catholiques  et  protestants  ont  été  également  émus,  en 


—  160  — 

liant  connaissance  à  travers  les  âges,  avec  ce  représentant  de  toutes  les 
vertus  évangéliques ,  avec  l'intrépide  luttenr,  (jui  avait  voué  au  vice  une 
implacable  haine ,  et  qui  sacrifia  bravement  sa  vie  dans  une  guerre  à  mort 
contre  les  méchants. 

Bruno  est  né ,  le  21  ou  le  22  juin  '1002,  dans  le  comté  de  Dabo ,  scloti 
les  uns;  dans  le  château  mérovingien  d'Eguisheim,  selon  les  autres;  in 
(inibus  dnlcis  Elizatiœ,  sur  les  confins  de  la  douce  Alsace,  dit  Wibertus  ; 
cette  expression  pourrait  s'appliquer  à  la  rigueur  aux  deux  localités.  Dabo 
ou  Dagsbourg,  le  pays  où  naquit  Heilwigdis,  la  mère  de  saint  Léon ,  est 
situé  près  des  frontières  de  l'Alsace,  mais  sur  le  versant  occidental  des 
Vosges.  Éguishcim,  où  résidait  Hugues  IV,  comte  du  Nordgau  et  père  du 
futur  pontife  ,  se  trouvait  aussi  près  des  frontières  de  la  province,  en  ad- 
mettant que  le  Sundgau  ou  Sudgau  fût  considéré,  à  l'époque  dont  nous 
nous  occupons,  comme  un  district  indépendant  de  V Elizatia  de^Nihcrlua. 

La  question,  au  surplus,  est  oiseuse,  aussi  longtemps  qu'un  document 
positif  n'aura  point  précisé  le  lieu  de  naissance  de  Bruno.  Par  sa  mère,  il 
rattachait  son  origine  aux  anciens  comtes  de  Dabo,  et  par  une  tante  ma- 
ternelle, il  se  trouvait  parent  de  l'empereur  Conrad  le  Salique.  —  S'il 
m'était  permis  de  hasarder  une  hypothèse,  je  pencherais  à  placer  son  ber- 
ceau plutôt  à  Dagsbourg  qu'à  Éguisheim.  Son  père,  le  comte  Hugues,  se 
trouvait  incessamment  impliqué  dans  les  guerres  locales  qui,  pendant  la 
première  moitié  du  onzième  siècle,  infestaient  la  vallée  du  Rhin.  Regin- 
bald ,  l'un  des  seigneurs  de  Rappoltstein ,  avait  dévasté  ses  domaines;  dans 
l'une  de  ces  rencontres,  Gérard,  le  frère  amé  de  Bruno ,  avait  péri.  N'est- 
il  point  probable  que  pendant  ces  troubles,  Heilwige  ,  la  fille  de  Louis  de 
Dabo,  ait  cherché  temporairement  un  abri  dans  la  maison  paternelle,  et 
que  pendant  l'une  de  ces  pérégrinations  forcées ,  elle  ait  donné  le  jour  à 
l'enfant  qui  devait  valoir  à  sa  maison  une  éclatante  renommée?....  Ce  qui 
semble  venir  à  l'appui  de  ma  thèse,  c'est  qu'à  l'âge  de  cinq  ans  déjà,  l'édu- 
cation de  Bruno  fut  confiée  à  un  prélat  lorrain,  à  l'évêque  Berthold  de 
Toul,  qui  avait  deviné  dans  le  caractère  studieux  et  méditatif  de  cet  enfant 
précoce,  une  des  gloires  futures  de  l'Église.  La  mère  de  Bruno  était  un 
modèle  de  piété;  elle  avait,  de  concert  avec  son  mari,  fondé  le  couvent 
de  Sainte-Croix,  près  WofTenheim,  et  l'Œlenberg,  dans  le  Sundgau.  De 
huit  enfants,  issus  de  son  mariage  avec  le  comte  Hugues,  deux  filles, 
Odile  et  Gebba,  prirent  le  voile,  et  devinrent,  l'une,  abbesse  de  ce  môme 
couvent  de  Woftenheim,  et  l'autre  abbesse  de  Neuss.  Les  traditions  de  la 
famille  —  peut-être  des  documents  aujourd'hui  perdus  —  plaçaient  parmi 
les  gloires  de  la  maison,  à  l'extrême  limite  de  l'âge  mérovingien,  une 


—  161  — 

abbesse  de  Hoheiiboiirg ,  dojit  le  nom  allait  être  inscrit  par  Léon  IX  dans 
le  calendrier  chrétien. 

Les  premières  leçons,  données  par \nie  j)ieuse  mère,  avaient  déposé 
dans  le  cœur  de  Bruno  le  germe  des  bonnes  pensées  et  des  fortes  résolu- 
tions. Jeune  homme ,  il  partageait  ses  journées  entre  l'élude  des  sciences 
ecclésiastiques,  la  visite  des  hôpitaux  et  des  prisons.  Journellement,  il 
donnait  des  preuves  de  son  humilité,  en  prafi(juant  des  œuvres  d'abnéga- 
tion; sa  pureté  angélique  devenait,  pour  un  monde  dépravé,  un  modèle 
idéal.  Autour  de  lui  le  vice  marchait  le  front  levé;  la  majeure  partie  du 
clergé  était  engagée  dans  des  liens  illicites:  les  charges  ecclésiastiques 
étaient  vendues  au  plus  offrant  ;  les  princes  et  les  seigneurs  en  disposaient 
pour  leurs  créatures,  'pour  leurs  parents,  pour  leurs  enfants  illégitimes. 
Sans  aucun  doute,  les  passions  mauvaises  sont  de  tous  les  temps  et  de  tous 
les  pays;  mais  il  est  des  époques  exceptionnelles  où  le  frein  de  toute  dis- 
cipHne  est  brisé,  où  le  masque  de  l'hypocrisie  même  est  jeté  de  côté  comme 
une  gène  inutile.  Ce  sont  les  époques  des  grandes  rénovations  qui  se  prépa- 
rent et  s'accomplissent,  soit  par  la  violence,  soit  par  quelque  main  ferme, 
qui  porte  le  fer  et  le  feu  sur  la  gangrène  sociale.  On  a  toujours  remarqué 
qu'en  face  de  la  corruption,  à  côté  des  caractères  criminels,  se  dévelop- 
pent, par  la  force  même  du  contraste,  les  vertus  les  plus  éclatantes.  Les 
martyrs  chrétiens  sont  nés  au  milieu  d'une  société  en  décomposition.  Je 
m'exphque  parfaitement  le  caractère  de  Bruno  par  la  haine  vigoureuse 
que  devait  lui  inspirer  l'aspect  d'un  siècle  violent,  sensuel,  cherchant  à 
oubher  dans  les  orgies  les  fj-issons  que  la  crainte  de  la  fin  présumée  du 
monde  venait  de  lui  donner. 

L'empereur  Conrad  le  Salique  avait  appelé  lo  jeune  lévite  à  sa  cour. 
Bruno  resta,  sans  ailectalion ,  austère  au  miHeu  des  plaisirs,  recueilli  au 
milieu  de  la  vie  dévorante  des  affaires.  Dans  ses  loisirs,  il  sacrifia  au  culte 
des  muses  latines  :  très-jeune  déjà  il  avait  célébré  son  aïeule  Odile.  Lors- 
qu'en  1056,  Herrmann,  évêque  de  Toul,  vint  à  mourir,  l'empereur  jeta 
les  yeux  sur  son  parent  et  lui  conféra  cet  évèché.  Bruno  ne  se  refusa 
point  à  une  tâche  dont  il  ne  soupçonnait  peut-être  pas  toutes  les  difficultés. 
A  peine  âgé  de  vingt-quatre  ans,  il  n'avait  pas  encore  acquis  la  triste 
expérience  de  la  vie,  qui  apprend  à  l'homme  à  se  méfier  de  ses  propres 
forces,  et  à  se  voiler  la  tête  en  face  du  mal.  Bruno,  selon  le  témoignage 
de  plusieurs  auteurs  contemporains,  avait  adopte,  pour  sa  vie  intime,  la 
règle  de  Saint-Benoît;  il  conserva,  sur  le  siège  épiscopal ,  toutes  ses  aus- 
térités premières;  en  face  de  son  clergé,  il  développa  une  sévérité,  une 
fermeté,  qu'on  ne  s'était  point  attendu  à  trouver  dans  ce  jeune  homme 

n«  SÉRIE,  —  T.  n.  —  (M.)  1 1 


-  162  — 

doux  et  humble ,  qui  s'était  constamment  effacé  devant  les  autres  et  qui 
avait  paru  poursuivre  une  sanctification  purement  personnelle.  Gomme 
évéque,  il  essaya  les  forces  dont  il  devait  trouver  l'emploi  près  de  trente 
ans  plus  tard  sur  une  scène  infiniment  plus  vaste.  11  entama  avec  son  clergé 
prévaricateur  ou  impudique  une  lutte  incessante,  chassant  les  abbés  in- 
capables ou  infidèles,  rétabhssant  la  discipline  à  Senones ,  à  Saint-Dié, 
à  Estival,  à  Moyenmoulier;  composant  des  hymnes  dans  ces  moments 
qu'on  appelle  perdus;  opposant  le  silence  du  mépris  et  la  sérénité  d'un 
front  pur  aux  calomnies  qui  osaient  s'attaquer  à  son  irréprochable  exis- 
tence ;  descendant  des  hauteurs  de  la  méditation ,  lorsque  les  ordres  de 
l'empereur  lui  confiaient  des  soins  politiques,  et  alliant,  dans  ces  rares 
occasions ,  la  prudence  du  serpent  à  la  simplicité  de  la  colombe. 

Ainsi,  il  était  parvenu  à  réconciher  Conrad  le  Salique  et  Robert,  roi  de 
France;  il  avait  rétabli  la  paix  en  Lorraine,  après  la  mort  d'Eudes,  comte 
de  Champagne,  et  nous  allons  le  voir,  comme  pape,  proclamer  en  Alsace 
la  trêve  de  Dieu.  Peu  de  temps  avant  sa  grande  élévation,  il  avait  (en  1045) 
restauré  le  couvent  de  Hohenbourg,  détruit  par  un  incendie,  et,  dans 
cette  existence  toute  vouée  à  son  Sauveur,  il  aspirait  plutôt  à  descendre 
((u'à  monter,  plutôt  à  entrer  dans  un  couvent  de  Bénédictins  qu'à  réunir 
sur  sa  tête  de  nouvelles  dignités  ecclésiastiques,  lorsque  l'empereur  lui 
annonça,  dans  les  derniers  jours  de  1048 ,  que  la  diète  de  Worms  l'appe- 
lait, par  un  vœu  unanime,  à  la  chaire  ponUficale  vacante. 

L'effi'oi  de  Bruno  fut  sincère  ;  il  entrevit  du  premier  coup  d'œil  l'im- 
mense responsabilité  qui  allait  peser  sur  lui  ;  il  demanda  à  se  recueillir, 
passa  plusieurs  jours  dans  le  jeûne  et  la  prière,  et,  au  sortir  de  cette  re- 
traite, il  déclara  qu'il  se  sentait  incapable  de  porter  le  fardeau  qu'on  vou- 
lait lui  imposer  ;  il  confessa  publiquement  devant  la  haute  assemblée  ses 
faiblesses,  ses  péchés,  son  indignité  personnelle.  Mais  cette  humihté,  qui 
n'était  que  l'expression  et  le  résultat  de  ses  convictions  chrétiennes,  lui 
gagna  d'autant  plus  le  cœur  de  tous  les  assistants;  sa  componction  fut  plus 
éloquente  que  ne  l'aurait  été  un  discours  cicéronien.  Les  instances  de 
l'empereur,  son  ami  et  son  maître,  finirent  par  ouvrir  les  yeux  du  modeste 
candidat  sur  le  danger  que  courait  la  chrétienté,  si  l'on  renvoyait  les 
députés  romains  soit  avec  une  réponse  négative,  soit  avec  la  nomination 
d'un  pontife  moins  apte  à  prêcher  d'exemple  à  celte  Rome  plongée  dans 
les  excès  de  l'anarchie  et  de  la  débauche.  Lorsque  les  délégués  des  nobles, 
du  clergé  et  du  peuple  de  Rome  s'étaient  présentés  à  la  cour  de  l'empe- 
reur d'Allemagne ,  à  Freisingen ,  les  Allemands  s'étaient  d'abord  détournés 
avec  un  mouvement  d'effroi  et  d'horreur;  pg'sonne  n'osait  aspirer  à  cette 


—  168  — 

tiare,  qui  portait  la  mort  avec  elle.  Et  si  jamais  une  assemblée  délibérante 
avait  été  bien  inspirée,  ce  fut  cette  diète  convoquée  par  l'empereur  à 
Worms;  car,  de  l'aveu  de  tous  les  contemporains  —  et  ce  jugement  pre- 
mier a  été  ratifié  par  la  postérité  —  le  choix  qu'on  y  fit  d'un  pape  ne  pou- 
vait tomber  sur  un  prêtre  plus  digne  que  ne  l'était  l'évèque  de  Toul. 

Bruno ,  à  la  lin  convaincu  qu'un  appel  d'en  haut  lui  arrivait  dans  l'una- 
nimité de  cette  réunion  diélale,  Bruno  accepta,  sous  condition  qu'une 
élection  canonique  confirmerait,  à  Rome,  l'élection  improvisée  à  Worms. 
Avec  lui ,  la  papauté  ruinée  va  se  relever  rapidement,  et  devenir  une  puis- 
sance véritablement  universelle.  Le  règne  de  Léon  IX  ouvre  une  ère  fé- 
conde en  soudaines  et  salutaires  métamorphoses. 

Au  moment  où  le  nouveau  pape  s'acheminait  vers  la  cité  éternelle,  le 
bâton  du  pèlerin  à  la  main,  comme  les  apôtres  ses  prédécesseurs,  Rome 
sortait  d'un  état  anarchique,  dont  j'oserai  à  peine  indiquer  quelques 
contours. 

De  même  qu'à  la  tin  du  dixième  et  au  commencement  du  onzième  siècle 
la  puissante  famille  des  Grescentius  avait  disposé  de  la  tiare,  ce  fut,  dans 
les  temps  un  peu  antérieurs  à  l'époque  où  nous  sommes  arrivés,  la  famille 
ambitieuse  des  comtes  de  Tusculuin,  qui  tyrannisait  le  municipe  de  Rome 
et  qui  pourvoyait  ses  membres  de  toutes  les  dignités  lucratives  de  l'Eglise, 
sans  en  exempter  la  papauté.  La  pohtique  impériale  favorisa ,  pendant 
assez  longtemps ,  un  état  de  choses  qui  assurait  sa  prépondérance  sur  les 
affaires  de  l'Italie  du  centre;  il  fallut  que  le  scandale  arrivât  à  un  degré 
inouï,  pour  mettre  un  terme  à  cette  coupable  incurie,  ou  à  cette  iniiitelh- 
gente  connivence.  Un  enfant  de  douze  ans,  le  fils  du  comte  Albéric,  avait 
été  placé,  en  1033,  sur  le  trône  pontifical;  l'un  de  ses  frères,  Grégoire, 
fut  pourvu  de  la  dignité  de  patrice.  A  partir  de  ce  moment,  un  mystérieux 
nuage  descend  sur  l'Eglise  de  Rome  et  enveloppe  la  ville  sainte  d'une 
sinistre  obscurité,  sillonnée  par  moments  d'éclairs  plus  sinistres  encore. 
Benoît  IX,  à  mesure  qu'il  grandissait,  semblait  réunir  dans  sa  nature 
démoniaque  les  vices  de  Galigula  et  d'Héliogabale.  Les  péchés  capitaux 
régnaient  impunément  sous  ses  auspices  et  sous  son  égide  ;  l'antique  palais 
du  Latran  avait  été  transformé  par  lui  en  un  lieu  de  plaisirs  mondains. 
Lorsque,  excédée  de  tant  d'insolence ,  la  partie  saine  du  clergé  et  du  peuple 
essayait  d'y  porter  remède  en  procédant  à  l'élection  de  pontifes  moins 
indignes,  ces  essais  n'aboutissaient  qu'à  une  confusion  plus  grande;  il  y 
eut  un  moment  où  trois  papes  siégeaient  à  Rome,  l'un  au  Vatican,  le 
second  à  Sainte-Marie-Majeure,  un  troisième  au  Latran.  Des  luttes  à  mort 
ensanglantaient  les  rues  de  la  ville;  Benoît  IX,  tantôt  fugitif,  tantôt  Iriom- 


—  164  — 

phant,  finit  par  céder  la  liare  à  prix  d'argent,  et  continua,  dans  une  re- 
traite profane,  hors  des  murs  de  Rome,  sa  vie  de  débordements.  Telle 
était  la  situation  de  f Église  au  centre  de  la  chrétienté,  telle  avait  été  Rome 
au  moment  où  Léon  IX  allait  frapper  aux  portes  de  Saint-Pierre. 

Sa  marche,  de  Toul  à  travers  l'Allemagne  et  l'Italie,  avait  été  une  marche 
triomphale.  Peuple,  prêtres  et  nobles  accouraient  sur  le  passage  de  l'évèque 
qui  marchait  nu-pieds,  comme  le  dernier  des  pèlerins,  mais  qui  portait 
sa  mission  régénératrice  écrite  sur  son  front.  Son  cortège  était  aussi 
simple  que  lui-même;  mais  au  nombre  des  amis  qui  s'étaient  attachés  à  sa 
nouvelle  destinée,  et  qui  allaient  courir  avec  lui  tous  les  dangers  d'un 
combat  à  outrance,  se  trouvait  un  simple  moine,  qui  valait  une  légion 
d'adhérents.  J'ai  nommé  Hildebrand,  le  moine  de  Cluny ,  le  chapelain  de 
Grégoire  VI,  de  l'un  des  concurrents  de  Benoît  IX,  Hildebrand,  qui  avait 
puisé  dans  le  spectacle  même  des  infamies  romaines  la  volonté  et  le  cou- 
rage de  réformer  et  de  relever  cette  Éghse  déchue.  Ce  sont  les  orgies  de 
Benoît  IX  qui  ont  provoqué,  qui  ont  légitimé  les  rigueurs  de  Grégoire  VII; 
la  mission  providentielle  de  ce  pape,  préparée  par  les  pontilicats  de  Léon  IX 
et  de  Nicolas  II,  avait  été  révélée  à  ce  génie  incomparable  sur  les  bords 
mêmes  de  l'ahmie,  où  menaçaient  d'être  englouties  les  traditions  des  pre- 
miers papes  martyrs  et  des  pontifes  contemporains  de  Constantin  et  de 
Charleniagne.  Hildebrand  était  fhomme  d'une  nouvelle  époque,  encore 
caché  aux  yeux  du  monde,  mais  intronisant  déjà,  sous  le  nom  de  Léon  IX, 
un  nouveau  système. 

Léon  IX  lit  son  entrée  à  Rome,  au  chant  des  hymnes,  entouré  par  le 
clergé  cl  par  le  peuple.  Il  alla  en  droite  ligne  prier  sur  le  tombeau  de 
l'apôtre  saint  Pierre,  puis  il  déclara,  devant  un  innnense  concours  de 
fidèles,  n'avoir  accepté  qu'à  contre-cœur  la  dignité  pontificale  et  être  prêt 
à  retourner  dans  sa  patrie  *,  si  le  choix  préalable  de  la  diète  allemande 
n'était  pas  ratifié  par  les  habitants  de  la  ville  éternelle. 

Évidemment,  la  confirmation  populaire  que  réclamait  Léon  IX  était  une 
affaire  de  pure  forme;  mais  le  principe  même,  énoncé  par  le  pape,  lui  ga- 
gnait l'affection  du  peuple;  il  semblait,  en  réclamant  l'assentiment  des 
Romains,  condamner  lui-même  la  dictature  de  l'empereur'.  A  pailir  de 
ce  moment,  l'Église  s'appliqua  nécessairement  à  reconquérir  la  liberté  du 
choix  dans  les  élections  papales. 

Le  2  février  1049,  jour  de  la  Purification,  il  fut  consacré  i)ar  les  trois 
cardinaux-évêques,  et  de  ce  jour,  l'Église  sentit  le  souille  vivifiant  d'un 

l.  11  ne  s'était  point  démis  de  ses  fonctions  d'évêque. 

i.  (ircgorovins.  Uistoire  de  Rome  au  moyen  dr/c ,  t.  IV,  passini. 


—  105  — 

;iir  de  réforme;  c'était  la  bise  du  nord  qui  venait  enlever  les  miasmes  ma- 
lécageux  de  la  campagne  romaine. 

Les  annales  ecclésiastiques  mettent  en  lumière  l'activité  dévorante  du 
nouveau  pape ,  qui  convofjua  concile  sur  concile ,  et  parcourut  inces- 
samment FEurope  centrale,  pour  extirper  la  simonie  et  le  concuhinage  , 
poui'  relever  l'épiscopat  amoindri,  et  imprimer  une  vie  nouvelle  à  des 
règlements  oubliés  ou  méconnus.  Le  pape  Victor  III  a  dit  de  lui,  avec 
toute  raison  :  nb  eo  omnia  ecdesiasiica  sludia  renovata ,  novnqite  lex  visa 
est  exoriri.  h  peine  assis  sur  le  siège  pontifical,  il  émet  une  bulle  en  faveur 
de  l'église  de  Saint-Pierre  ,  et  attribue  à  la  restauration  et  à  l'ornement  de 
celte  basilique  tous  les  dons  faits  par  les  fidèles.  Dès  le  mois  de  mars  i049, 
il  se  rend  à  l'égbse  de  Saint-Micbel,  sur  le  mont  Gargano  qui  domine 
l'Adriatique.  Sa  pensée  pieuse  et  ardente  erre  au  delà  de  celte  mer  jusqu'à 
Byzance  et  appelle  la  lumière  d'en  baut  sur  les  Grecs  schismatiques;  de 
là,  il  se  rend  au  couvent  du  Mont-Cassin ,  fondé  par  saint  Benoît,  le  guide 
spirituel  de  son  enfance  et  de  sa  jeunesse.  11  croyait  devoir  à  ce  protecteur 
invisible  sa  guérison  dans  une  maladie  mortelle,  et  il  venait  maintenant 
s'acquitter  d'un  devoir  de  reconnaissance  dans  le  sanctuaire  même  où 
Benoît  avait  vécu.  Le  pape,  quoique  pompeusement  reçu  par  l'abbé  Ricbe- 
rius ,  dîna  dans  le  réfectoire  à  la  table  des  moines,  et  gagna  les  cœurs  par 
cette  bumilité  qui  chez  lui  semblait  une  grâce  d'état.  Il  éprouvait  instincti- 
vement le  besoin  de  s'appuyei-  sur  quelque  affection,  puisqu'il  allait  être 
obligé  de  froisser  les  intérêts  et  les  passions. 

Dès  le  premier  concile  qu'il  convoqua  à  Rome  en  avril  1049,  il  pût 
se  convaincre  que  s'il  voulait  agir  avec  une  vigueur  extrême ,  renverser 
tous  les  obstacles,  frapper  tous  les  coupables,  les  églises  de  Rome  reste- 
raient sans  prêtres.  Hildebrand,  maintenant  son  sous-diacre  et  recteur  de 
Saint-Paul ,  le  dirigeait  à  la  fois  avec  énergie  et  modération.  Kilian,  évêque 
de  Sutri ,  accusé  de  plusieurs  vices ,  avait  cherché  à  se  défendre  en  faisant 
admettre  de  faux  témoins;  mais  à  la  voix  du  pape,  il  était  tombé,  frappé 
d'apoplexie ,  comme  Ananias ,  sous  l'impression  d'une  terreur  panique  qui 
s'était  emparée  de  tous  les  assistants.  Léon  prétendait  établir  la  règle  que 
tous  les  prêtres  qui  auraient  été  consacrés  par  un  évêque  simoniaque  se- 
raient privés  de  leur  dignité.  L'effroi  fut  universel.  C'est  alors  que  Hilde- 
brand  intervint  et  fit  établir,  comme  règle  normale,  les  ordonnances  moins 
sévères  de  Clément  IL  Mais  Léon  IX  se  montra  implacable  contre  les  ma- 
riages incestueux  et  contre  les  ecclésiastiques  concubinaires. 

Pur,  lui-même,  de  tout  péché  chainel,  il  s'indignait  contre  les  coupables 
qui  avaient  violé  le  vœti  de  chasteté.   Les  femmes  convaincues  d'avoii 


—    166  — 

cohabité  avec  des  prêtres  furent  piivées  de  leur  état  civique  et  condam- 
nées à  l'état  de  serves  du  palais  de  Latran.  Celte  antique  demeure  des 
papes,  qui,  sous  Benoît  IX,  avait  été  un  lieu  de  débauches,  fut  exorcisée 
par  le  saint  pontife  et  rendue  à  sa  destination  première;  les  admirables 
hymnes  de  l'Église  primitive  retentirent  de  nouveau  sous  ces  voûtes  pu- 
rifiées. 

Dès  son  entrée  en  fonctions,  le  pape  reçut,  de  la  part  de  saint  Pierre 
Damiani ,  un  livre ,  fruit  d'une  longue  et  terrible  expérience ,  un  volume 
portant  le  titre  significatif  et  néfaste  de  Gomorrhianus ,  qui  signalait  au 
père  des  fidèles  les  vices  hideux  dont  laïques  et  cléricaux  se  souillaient , 
et  qui  le  sommait  d'extirper  ces  excroissances  du  corps  social.  Le  pape 
répondit  eatégoriquement  au  jeune  anachorète  pour  le  remercier  de  ses 
tristes  révélations  et  prit  l'engagement  d'y  porter  remède  dans  la  mesure 
de  ses  forces.  A  l'un  des  successeurs  de  Léon  IX,  au  pape  Alexandre  II, 
l'œuvre  de  Damiani  parut  offrir  des  sujets  de  scandale  tels ,  qu'il  crut  de- 
voir l'enfermer  dans  une  cassette  sous  triple  clef,  L'Eglise,  depuis  ce  temps, 
a  permis  l'impression  de  cette  anatomie  du  vice;  car  la  morale  publique 
n'est  point  engagée  dans  les  publications  de  cette  nature ,  et  elle  ne  court 
point  de  danger  par  des  crudités  physiologiques.  C'est  la  poésie  du  crime 
qui  fausse  les  intelligences  et  pervertit  les  cœurs. 

Dès  le  début  de  son  pontificat,  Léon  IX  avait  à  lutter  avec  d'autres  dif- 
ficultés matérielles  ;  les  caisses  des  égUses  avaient  été  vidées  par  le  mon- 
strueux Benoît  IX  ;  dès  lors  comment  nourrir  la  petite  cour  pontificale?  Il 
songeait  déjà  à  vendre  jusqu'au  dernier  de  ses  ornements,  et  ses  amis 
d'Allemagne  étaient  sur  le  point  de  mettre  leurs  vêtements  en  vente,  afin 
de  pouvoir  retourner  dans  leur  patrie ,  lorsqu'un  don  inespéré  airiva  de 
la  cour  lombarde  de  Bénévent.  On  a  remarqué  que  pendant  les  soixante- 
dix  années  qui  ont  précédé  le  pontificat  de  Léon  IX,  et  sous  son  règne 
même,  on  ne  frappa  point  de  monnaie  papale.  Le  peuple  romain  cepen- 
dant vivait  d'aumônes,  comme  il  vit  aujourd'hui  du  produit  des  étrangers; 
par  une  coïncidence  heureuse ,  dans  cette  détresse  publique ,  on  vit  se 
présenter  à  Rome  un  roi  d'Ecosse,  illustré  bien  plus  par  la  tragédie 
shakespearienne  que  par  les  annales  contemporaines.  Macbeth,  meurtrier 
de  son  prédécesseur  Duncan,  avait  «i  se  faire  pardonner  cet  assassinat,  et  il 
répandit  avec  profusion  des  aumônes  et  des  largesses  de  toute  nature.  Le 
peuple  fut  satisfait  et  attribua  ce  secours  inattendu  à  l'influence  du  pape. 

En  général,  la  ville  de  Rome  resta  calme  sous  Léon  IX,  qui  s'appliquait 
à  ne  pas  attaquer  les  formes  de  la  constitution  urbaine.  La  piété  réelle  du 
pape  inspirait  aux  habitants  un  respect  involontaire ,  et  l'union  intime  qui 


—  167  — 

régnait  alors  entre  l'empire  et  la  papauté,  contribuait  aussi  au  maintien  de 
la  paix  dans  les  rues  de  la  ville  et  dans  les  châteaux  de  la  campagne.  Mais 
Léon  ne  parvint  jamais  à  se  sentir  à  l'aise  dans  une  cilé  qui  avait  été  ré- 
cemment souillée  par  tant  de  meurtres  perfides  et  de  combats  publics.  Le 
séjour  de  Rome  lui  inspirait  une  involontaire  répugnance  ;  en  additionnant 
les  mois  qu'il  a  passés  au  Latran,  on  n'arriverait  probablement  pas  au 
quart  des  années  de  son  pontificat. 

Déjà  pendant  l'automne  de  1049,  nous  trouvons  le  pape  en  route  pour 
le  Nord.  A  Passignano,  en  Toscane,  il  est  rejoint  par  saint  Jean-Gualbert, 
ce  chevalier-moine,  fondateur  du  couvent  de  Vallombreuse,  et  l'un  des 
lieutenants  les  plus  aclit's  du  pape  dans  l'œuvre  de  la  réforme.  Il  traverse 
.Pavie,  passe  le  Saint-Bernard  et  se  rend  à  Clugny,  partout  conciliant, 
confirmant  ou  concédant  des  privilèges.  Puis  il  entre  un  instant  à  Cologne, 
où  un  accueil  magnifique  l'attend  ;  à  Aix-la-Chapelle  il  reçoit  la  soumission 
de  Godefroi,  duc  de  Lorraine,  qui  avait  saccagé  et  incendié  la  ville  de 
Verdun ,  et  qui  maintenant  faisait  amende  honorable  sur  le  théâtre  même 
de  ses  méfaits,  en  se  laissant  frapper  de  verges  et  en  consentant  à  faire 
l'office  de  manœuvre  pour  la  reconstruction  de  l'église  qu'il  avait  brûlée. 

Un  synode  avait  été  convoqué  à  Reims  pour  le  3  octobre  1049;  Henri  P', 
roi  de  France,  circonvenu  par  des  évèques  simoniaques,  avait  voulu  dé- 
tourner le  pape  de  son  projet  d'entrer  en  Champagne.  Léon  IX  persista 
dans  son  dessein;  un  immense  concours  de  tous  les  points  de  l'Europe 
centrale  et  de  l'Angleterre  lui  prouva  qu'il  n'avait  pas  trop  présumé  de  son 
influence  morale.  —  La  foule  des  pèlerins  dans  l'église  de  Saint-Remy,  où 
l'on  avait  exposé  les  reliques  du  saint,  fut  telle  qu'il  y  eut  des  malheurs  à  déplo- 
rer. Le  pape  fut  obligé  de  se  réfugier  dans  un  couvent  contigu  à  l'église,  que 
l'on  évacua  de  force  pour  pouvoir  célébrer  les  cérémonies  de  la  consécration. 

Le  synode  fut  tenu  dans  le  temple ,  qui  venait  d'être  restauré  et  livré  au 
culte  ;  une  longue  série  de  mesures  disciplinaires  marqua  chaque  jour  de 
cette  active  assemblée.  L'archevêque  de  Reims ,  accusé  de  simonie ,  mais 
habilement  défendu  par  l'évêque  de  Senlis,  fut  assigné  à  comparaître,  en 
1050,  devant  un  concile  à  Rome.  D'autres  dignitaires  inculpés  furent 
moins  heureux  ;  l'abbé  de  Pontières  (dans  le  diocèse  de  Langres)  qui  s'était 
refusé  de  payer  le  denier  de  Saint-Pierre  et  s'était  rendu  coupable  d'actes 
honteux,  fut  solennellement  déposé.  L'évêque  de  Langres,  accusé  de  crimes 
multiples,  crut  devoir  se  soustraire  par  la  fuite  au  prononcé  du  jugement, 
qui  le  mettait  hors  du  sein  de  rÉghse. 

Cette  terrible  sentence  de  l'excommunication  fut  prononcée,  dans  le 
même  synode,  contre  plusieurs  prélats  prévaricateurs;  les  anciennes  près- 


—  168 

criptions  contre  la  chasse  et.  le  mariage  des  prêtres  furent  renouvelées,  et 
lorsque,  après  une  étonnante  activité  déployée  pendant  le  concile,  le  pape 
fit  ses  adieux  à  Reims ,  il  put  se  rendre  le  témoignage  d'avoir,  sur  le  sol 
de  la  France,  et  en  face  d'un  roi  malveillant,  déployé  la  même  énergie 
qu'à  Rome ,  en  face  d'une  faction  de  puissants  dynastes. 

Un  concile  était  convoqué  à  Mayence ,  pour  le  11  octobre,  et  l'empe- 
reur d'Allemagne  devait  s'y  rencontrer  avec  le  pape.  Avant  de  s'y  rendre, 
Léon  IX  consacra  l'église  de  Sainte-Madeleine  à  Verdun,  et  versa  des 
larmes  sur  les  ruines  des  temples  et  des  demeures  qui  avaient  été  saccagés 
par  Godefroi  de  Lorraine.  On  vit  à  Mayence  se  produire  des  scènes  ana- 
logues à  celles  de  Reims.  Un  évêque  de  Spire,  Sibico,  accusé  d'adultère, 
essaya  de  se  défendre;  sa  mâchoire  fut  subitement  paralysée,  et,  de  ce 
moment,  l'assistance  ne  douta  plus  de  l'influence  irrésistible  d'un  pontife, 
qui  était  visiblement  assisté  par  le  Seigneur. 

De  Mayence,  le  pape  retourna  sur  ses  pas  en  Lorraine,  et  arriva  en 
novembre  à  Moyenmoutier,  «cette  pépinière  de  saints;»  du  fond  de  la 
vallée  lorraine,  il  se  dirigea  vers  Andlau,  en  Alsace.  Je  laisse  à  penser 
quelle  dut  être  son  émotion  ,  lorsqu'il  toucha  ce  sol ,  où  il  avait  sans  doute 
plus  d'une  fois  passé  comme  jeune  lévite  pour  visiter  soit  Hohenbourg, 
soit  le  monastère  d'Altorf ,  fondé  par  ses  ancêtres.  Le  couvent  de  Saint- 
Fabien  et  Sainte-Félicité  à  Andlau  le  reçut  dans  son  enceinte;  il  y  consacra 
le  maître-autel  dans  l'église  nouvellement  reconstruite  par  l'abbesse  Ma- 
thilde ,  et  y  plaça  les  reliques  de  sainte  Richarde.  Les  droits  et  les  privi- 
lèges de  l'abbaye  furent  renouvelés  à  cette  occasion,  sous  réserve  d'une 
redevance  de  trois  pièces  de  toile  pour  étoles ,  que  l'abbesse  aurait  à  en- 
voyer annuellement  au  saint-siége.  Le  souvenir  de  la  sainte  impératrice 
devait  être  sympathique  à  Léon  IX,  qui  cultivait,  comme  sainte  Richarde , 
les  muses  latines,  et  qui  aimait,  sans  doute,  comme  elle,  ce  pittoresque 
vallon.  J'ai  tout  lieu  de  penser  que  le  pape  ne  passa  point  aux  pieds  de 
Hohenbourg ,  dont  il  avait  restauré  le  couvent  quatre  ans  auparavant, 
sans  faire  une  courte  station  au  haut  de  la  montagne;  toutefois,  le  do- 
cument qui  constate  d'une  manière  officielle  sa  sollicitude  pour  le  saint 
asile  et  pour  le  nom  de  son  aïeule,  n'a  été  émis  qu'un  an  plus  tard,  en 
1050;  nous  aurons  à  y  revenir. 

Arrivé  à  l'église  de  Saint-Cyriaque,  à  Altorf,  où  ses  parents  étaient 
enterrés ,  le  pape  consacra  le  maître-autel ,  y  déposa  une  grande  quantité 
de  reliques,  entre  autres  le  bras  de  saint  Gyriaque,  et  resta  plongé  dans 
un  long  recueillement  sur  la  pierre  sépulcrale  des  auteurs  de  ses  jours. 
Quels  eussent  été  les  transports  de  la  pieuse  Heilwige,  si  elle  avait  vécu 


-  169  — 

■  assez  longtemps  pour  voir  le  cortège  qui  accompagnait  le  pape  dans  son 
pèlerinage  et  si  elle  avait  pu  recevoir  des  mains  H'nn  fils  la  bénédiction  de 
Tun  des  plus  dignes  successeurs  de  saint  Pierre! 

Pour  le  coup,  le  pontife  laissa  un  témoignage  officiel  de  son  séjoui- 
temporaire  dans  le  couvent  de  Saint-Cyriaque.  Une  bulle  datée  du  28  no- 
vembre 1049^  rappelle  les  origines  du  couvent  fondé  par  les  parents  du 
pape ,  qui  veut  «  baser  l'avenir  de  ce  lieu  vénérable  sur  des  privilèges  apos- 
toliques, en  retirer  pour  lui-même  des  moyens  de  salut  et  assurer  aux 
moines  un  appui  tutélaire.  »  Répondant  aux  vœux  de  son  cousin  (pcdruelis) 
Adalbéron  ,  chanoine  de  l'église  de  Toul ,  il  reproduit  les  premiers  actes 
de  la  fondation  de  ce  monastère,  et  prescrit  les  premiers  défrichements 
dans  les  alentours.  Le  comte  Eberhard,  un  ancêtre  du  pape,  y  venant 
fréquemment,  l'avait  déjà  trouvé  propre  à  la  fondation  d'un  couvent;  mais 
il  avait  été  arrêté  dans  ses  projets  par  la  maladie  et  par  la  mort.  Son  fds, 
Hugues  l'Enroué  {aUquantuhm  raucus),  connaissant  les  intentions  du 
comte,  commença  dans  cette  localité  à  construire  une  église  en  l'honneur 
de  saint  Barthélémy  et  de  saint  Grégoire.  Sur  la  demande  du  même  Hugues, 
l'èvêque  Erkenbold  consacra  l'église,  et  Hugues  fit  don  à  cette  jeune  fon- 
dation des  dîmes  d'Altorf,  et  en  même  temps  des  dîmes  de  la  campagne 
située  autour  du  Burcbcrck- ,  avec  celles  de  Mollkirch,  Grendelbruch, 
Schirmeck  et  Bœrenbach.  La  consécration  a  lieu  en  présence  de  l'abbé  de 
Clugny  et  de  plusieurs  prélats.  Léon  IX,  dans  cette  même  bulle,  confirme 
les  dons  et  les  privilèges  accordés  par  ses  parents  à  l'église  d'Altorf,  par 
exemple,  le  droit  de  battre  monnaie,  le  droit  de  péage,  et  celui  d'un 
marché,  autrefois  octroyé  par  l'empereur  Othon.^ 

t.  Voy.  Scliœpdin  ,  ^4/5.  d/pJ. ,  I,  p.  164  à  105. 

2.  Burgberg,  montagne  du  château,  probablement  de  Gnirbaden. 

3.  Il  n'est  point  dit  si  c'est  Olhon  1,  H  ou  III ,  qui  avait  accordé  celte  faveur.  La  bulle 
n'existe  point  en  original  dans  notre  collection  du  Bas-Rbin  ;  nous  ne  possédons  qu'un 
simple  Vidbmis  ùc  l'ofTicialité  de  1462.  ScLœpflin  ne  connaissait  pas  plus  que  nous  !a 
charte  primitive;  il  a  travaillé  sur  le  Vklhmi^. 

On  lisait  sur  le  dos  de  la  charte,  que  l'èvêque  Werner  attribua,  lors  de  la  consécration 
de  cette  église,  à  l'autel  de  Saint-Cyriaque  les  dîmes  de  dix-sept  manses  (terra  salica  — 
Selegeicmlc)  provenant  soit  du  comte  Eberhard,  soit  du  cf  mte  Hugues,  soit  de  leurs  frères 
Gérard  et  WafTrid;  puis  les  dîmes  de  rOsternforst,  à  Dereberde  et  Demosand  [sic]  ;  enfin  les 
dîmes  de  la  forêt  de  Berenbach  et  Grendelbach  [Groidelbriicli),  commençant  par  le  cours 
d'eau  de  Rotaho  [In  BnœJie  à  Rothmi] ,  et  se  terminant  à  Surebac  (Satierhach?). 

La  même  note  contient  encore  d'autres  renseignements  sur  les  mutations  survenues  dans 
ces  rentes.  Ce  sont  des  détails  passablement  confus;  ils  se  rapportent  à  des  biens  sis  à  To- 
rolfesheim  {Dorlisliehn) ,  donnés  par  Gontram ,  fils  de  Hugues  ,  pour  le  salut  de  son  âme  et 
une  partie  des  dîmes  sur  des  terres  queMefridl.w'c),  l'oncle  de  ces  seigneurs,  avait  données 
à  l'autel  de  Saint-Étienno,  à  Metz.  La  comtesse  Berthe,  épouse  d'Ebcrhard,  avait  livré  et 
donné  à  l'autel  de  la  Sainte-Vierge  à  Strasbourg  une  partie  des  dîmes ,  attribuées  dans  le 
principe  à  l'église  d'Altorf  par  Gontram. 


-  170  — 

Le  premier  voyage  du  pape  Léon  IX  en  Alsace  est  encore  marqué  par. 
une  bulle ,  émise  le  17  novembre  1049  *  en  faveur  du  monastère  de  Sainte- 
Croix  fondé  par  ses  parents  à  Woffenbeim,  dans  le  Haut-Rbin. 

Après  une  invocation  à  l'instrument  du  marlyre  du  Sauveur,  Léon  rap- 
pelle que  l'église  en  question  a  été  fondée  par  ses  parents  Hugues  et  Ileil- 
wigdis  ;  il  dit  qu'en  souvenir  d'eux  et  de  ses  deux  frères  Gérard  et  Hugues, 
déjà  décédés ,  et  pour  son  propre  salut ,  il  soumet  l'église  en  question  à 
l'autorité  et  à  la  protection  du  saint-siége.  A  l'avance,  il  réprouve  toute 
usurpation  éventuelle,  même  si  elle  avait  lieu  dans  un  but  religieux;  il 
permet  à  l'évoque  du  diocèse  d'y  faire  gratuitement  des  consécrations  d'au- 
tels ou  de  religieuses,  mais  sous  aucun  prétexte  il  ne  saurait  admettre 
qu'un  roi,  empereur,  archevêque  ou  évêque  y  fasse  un  acte  impliquant 
une  autorité  domaniale  ou  d'advocatie.  Il  rappelle  avoir  confié  l'advocatie 
à  son  neveu  Henri,  possesseur  du  château  d'Egensheim  {Egvislieim) ,  et 
lui  confère,  à  ce  titre,  l'usufruit  des  rentes  d'Orbeis.  Après  sa  mort,  le 
plus  âgé  des  copropriétaires  d'Eguisheim  succédera  à  l'advocatie ,  aux 
mêmes  conditions.  A  leur  défaut,  l'abbesse  et  la  congrégation  des  reli- 
gieuses de  Sainte-Croix  pourront  au  besoin  élire  l'avoué  parmi  les  copro- 
priétaires d'Eguisheim.  S'il  n'y  a  point  d'héritier  à  Eguisheim ,  les  religieuses 
choisiront  dans  la  famille  ou  parenté  du  fondateur,  de  manière  à  prendre 
toujours  de  préférence  le  plus  proche  parent,  et  à  maintenir  l'avouerie 
dans  la  famille  (m  génère). 

Suil  une  réglementation  de  ce  que  l'avoué  pourra  percevoir,  si  les 
domaines  du  monastère  allaient  augmenter;  c'est  toujours,  indépendam- 
ment des  revenus  du  fermage  d'Orbeis,  la  douzième  partie  des  nouveaux 
revenus  ;  mais  il  faudra  pour  cela  attendre  que  le  couvent  ail  acquis 
douze  nouvelles  manses.  Si  l'avoué  percevait  plus  qu'il  ne  lui  est  dû,  sur 
les  biens  meubles  et  immeubles  du  couvent,  l'abbesse,  après  une  admo- 
nestation et  un  délai  de  douze  semaines,  aura  droit  d'en  appeler  au  saint- 
siége. 

«Après  la  mort  de  l'abbesse,  que  le  pape  lui-même  venait  de  bénir,  les 
religieuses  devaient  être  libres  dans  leur  choix  ;  elles  devront  de  préfé- 
rence en  prendre  une  dans  leur  propre  sein,  capable  et  douée  de  bonté; 
dans  le  cas  où  ces  conditions  ne  se  trouveraient  pas,  on  aurait  à  en  choisir 
une,  hors  du  rayon  du  couvent.  11  réserve  au  saint-siége  seul  la  bénédic- 
tion ou  la  consécration  de  l'abbesse  élue. 

«  En  retour  de  toutes  ces  faveurs,  l'abbesse  enverra  tous  les  ans  à  Saint- 
Pierre  de  Rome  une  rose  d'or  de  la  valeur  de  deux  onces  romaines ,  ou 

1.  Scliœpflin  ,  Als.  dipl. ,  I,  p.  163  et  suiv. 


-  171  - 

bien  la  valeur  même ,  pour  en  faire  conteclionnor  une  ;  el  ceci  aura  lieu 
en  temps  de  carême,  le  dimanche  d'Oculi.  ■(> 

Le  pape  institue  formellement  «ce  mémorial  des  immunités  accordées 
au  couvent  de  Sainte-Croix,  pour  qu'à  Rome  même,  où  tout  acte  religieux 
prend  son  origine,  et  où  ,  malgré  moi ,  j'ai  accepté  les  fonctions  de  vicaire 
de  l'apôtre,  le  monastère  situé  sur  mes  domaines  paternels  et  largement 
doté  par  moi,  ne  tombe  point  en  oubli.)^ 

<'  Fait  le  14  des  Kalendes  de  décembre,  y  —  Au  bas  de  l'acte,  conservé 
aux  archives  de  Colmar,  se  trouve  le  visa  de  Conrad,  évoque  de  Stras- 
bourg. 

Le  pape  s'était-il  rendu  lui-même  à  Wofîenheim,  en  venant  de  Moyen- 
moutier,  et  avant  d'aller  à  Andlau,  ou  après  cette  tournée?  C'est  ce  qu'il 
est  difficile  d'affirmer  ou  de  préciser  maintenant.  En  tout  cas,  il  ne  semble 
guère  probable  que  Léon  IX ,  une  fois  en  Alsace,  n'ait  pris  quelques  jours 
pour  visiter  les  fondations  de  ses  parents,  d'autant  plus  que  Woffenheim 
était  dans  le  voisinage  d'Eguisheim  et  de  son  château  paternel.  ' 

Au  soilir  d'Alsace,  nous  trouvons  le  pape  dans  le  comté  de  Calw,  en 
Souabe,  tenu  par  son  neveu  Adalbert.  —  Aux  environs  do  Calw  ,  les  ruines 
du  couvent  de  IJirschau  attirèrent  son  attention;  il  y  fit  faire  des  fouilles 
et  découvrit  les  reliques  de  saint  Aurèie.  A  la  suite  de  cette  heureuse 
trouvaille,  il  enjoignit  à  son  neveu  et  à  la  comtesse  Viltrude  de  relever  les 
murs  du  couvent  et  de  le  remettre  entre  les  mains  des  Bénédictins. 

Vers  la  fin  de  novembre  1049,  il  arrive  à  Reichenau,  dont  il  avait  sou- 
tenu l'abbé  contre  l'évéque  de  Constance  ;  dans  cette  île  aux  anciennes 
basiliques,  il  célèbre  la  fête  de  saint  Clément.  De  là  il  se  rendit  à  Augs- 
bourg,  puis  passa  au  cœur  de  l'hiver  par  les  Alpes  du  Tvrol,  et  fut  de 
retour  à  Rome  vers  le  commencement  du  carême  de  1050,  Je  ne  saurais 
mieux  exprimer  l'immense  changement  qui  venait  de  s'opérer  dans  la 
situation  générale,  qu'en  traduisant  les  paroles  d'admiration  qu'inspire  à 
C.  Hœfler  cette  rentrée  du  pape  dans  les  Etats  de  l'Église,  après  la  première 
excursion  apostolique  en  France  et  en  Allemagne. 

«  En  moins  d'un  an,  le  pape  avait  réussi  à  arracher  l'Église  à  un  état  de 
détresse  et  à  la  relever  de  son  abaissement.  Le  partisan  le  plus  enthou- 
siaste des  promesses  divines  n'aurait  pu  espérer  un  semblable  résultat. 
L'Espagne  se  trouvait  rattachée  au  saint-siége;  en  France,  l'esprit  d'oppo- 

l.  L'abbé  Hmitler  place,  à  celte  même  épociiie,  une  loiiniéc  dn  pape  au  monastère  de 
.Saint-Sigismond  à  Roiiffacli ,  de  plus,  la  consécration  des  églises  de  Bergliolzzell ,  d'ÖElen- 
berg  et  d'Ottmarsheim.  Je  ferai  ans.si  remarquer  que  les  chartes  concernant  Sainte-Croix  et 
Altorf  nesont  point  datées  de  ces  localités  mêmes  ;  c'est  probablement  en  route  pour  l'Italie 
que  le  pape  les  a  fait  expédier. 


—  172  — 

sition  du  roi  et  des  évêques  était  brisé  ;  l'Eglise  d'Angleterre  était  plus 
intimement  que  jamais  unie  à  l'Eglise  de  Rome;  en  Allemagne,  les  germes 
d'une  dissolution  prochaine  étaient  étoufiés;  en  Italie,  la  transformation 
était  complète;  dans  l'Occident  tout  entier,  l'esprit  apostolique  primitif 
était  rajeuni,  les  préceptes  canoniques  fortifiés.  Plus  avait  été  grand  à 
Home  l'esprit  de  perdition ,  plus  brillant  était  aujourd'hui  le  modèle  qui 
montrait  à  tous  les  peuples  le  chemin  de  la  vie  et  du  salut.  Les  princes  de 
la  terre  rendaient  hommage  de  nouveau  au  successeur  de  l'apôtre;  les 
évêques  de  tous  les  pays  de  l'Occident  entendaient  de  nouveau  sa  voix. 

«  Beaucoup  d'évêques  avaient  été  pourvus  d'excellents  pasteurs  ;  les 
moines  et  les  prêtres  étaient  ramenés  à  la  vie  disciplinaire ,  les  laïques 
bridés ,  les  récalcitrants  punis  ;  et  ce  résultat  était  obtenu  sans  l'emploi  de 
la  violence,  malgré  l'opposition  et  l'inimitié  des  puissants  de  la  terre;  sans 
conseil,  sans  assistance,  par  un  seul  homme  faible  et  désarmé,  mais  pé- 
nétré de  l'esprit  de  Dieu,  de  la  foi  apostolique,  de  l'espérance  dans  le 
secours  d'en  haut,  et  de  l'amour  qui  le  poussait  à  laisser  sa  vie  pour  son 
troupeau.  » 

A  peine  descendu  à  Saint-Jean  de  Lalran,  le  pape  préside  le  concile  qui 
décida  la  condamnation  de  la  doctrine  de  Déranger  de  Tours',  sur  l'Eu- 
charistie, et  ce  jugement  fut  confirmé  quelques  mois  plus  lard  par  le 
concile  de  Vercelli. 

Jusqu'ici,  Léon  IX,  absorbé  par  les  soins  de  la  réforme  du  clergé,  n'a- 
vait pu  s'occuper  de  la  situation  politique  et  territoriale  du  saint-siége; 
mais  maintenant  il  éprouva  l'impérieux  besoin  de  faire  honneur  aux  tra- 
ililions  de  Rome  pontificale;  pour  lui,  comme  pour  quelques-uns  de  ses 
grands  prédécesseurs  du  huitième  siècle,  le  pape  devait  être  un  ponlife- 
roi;  l'humilité  de  son  cœur  n'obscurcissait  point  sa  vue  comme  homme 
d'Etat;  peut-êlre  aussi  puisait-il,  pour  cette  partie  de  son  activité,  toutes 
ses  inspirations  chez  le  moine  Hildebrand,  dont  nous  avons  vu  l'austère 
figure  au  milieu  du  cortège  qui  avait  suivi  l'évêque  de  Toul  à  Rome.  De- 
puis Charlomngne,  la  curie  romaine  convoitai!  la  Fouille  et  la  Campanie, 
et  faisait  remonter  ses  prétentions  ou  ses  droits  jusqu'à  la  donation  de 
Constantin.  Ces  desseins  du  pape  se  poi'Iaient  sur  l'Italie  méridionale,  qui 
(»fh'ait  à  cette  époque  un  singulier  aspect^  Les  empereurs  d'Orient  et  d'Oc- 
cident aspiraient  à  y  dominer;  les  princes  lombards  continuaient  à  régner 
en  maîtres  souverains  dans  plus  d'une  ville;  les  cités  maritimes  étaient  à 
peu  près  indépendantes,  et  à  travers  ce  dédale  de  seigneuries,  les  Nor- 

1.  Il  niait  la  présence  réelle. 

2.  Voy.  Grcgoroviiis  IV,  p.  77-78, 


—  173  — 

mands,  récemmcnl  arrivés,  se  mcUaient  au  serviro  de  Ions  les  partis  pour 
les  tromper  les  uns  après  les  autres. 

Dans  cet  état  à  peu  près  anarchique,  le  pape  devait  apparaître  comme 
une  providence.  A  Saleine,  il  fut  accueilli  avec  déférence  par  le  prince 
Guaymar  IV;  à  Melfi,  il  eut  une  conférence  avec  les  princes  normands,  et 
dans  le  duché  de  Bénévent,  que  l'empereur  Henri  III  avait  en  partie  accordé 
aux  Normands,  le  pape  prépara  la  voie  à  une  conquête  pacifique.  La  ville 
de  Bénévent  chassa  l'année  suivante  ses  maîtres  lombards,  et  se  donna 
aux  souverains  ecclésiastiques  de  Rome  (25  juin  1051). 

Dans  l'automne  de  1050,  Léon  IX  s'achemina  de  nouveau  vers  les  con- 
trées du  Nord,  ({ui  lui  étaient  si  chères;  le  19  octobre  il  visita  Toul,  et 
employa  quinze  jours  à  revoir,  dans  les  environs,  toutes  les  localités,  où, 
pendant  son  enfance  studieuse  et  sa  jeunesse  active,  il  avait  déjà  vécu  de 
cette  vie  de  sainteté,  qui  faisait  m.aintenant  l'orgueil  et  l'admiration  des 
peuples  catholiques.  Il  y  eut  une  alfluence  considérable  de  pèlerins  et  de 
dignitaires  de  l'Église,  qui  vinrent  du  fond  de  la  Hongrie,  de  l'Allemagne, 
de  l'Angleterre,  de  la  France,  porter  leurs  lioumiages  à  ce  pape,  redres- 
seur des  torts  et  digue  héiitier  de  la  succession  de  saint  Pierre. 

Pendant  son  séjour  dans  son  ancienne  résidence  épiscopale,  Léon  IX 
honora  les  reliques  de  saint  Gérard,  dont  le  corps  avait  été  trouvé  intact 
après  cinquante-six  ans,  écoulés  depuis  son  ensevelissement.  De  Toul,  il 
se  rendit  sur  les  confins  de  la  Lorraine,  au  couvent  de  Hesse,  près  Sarre- 
bourg,  dont  il  confirma  les  privilèges;  puis  il  redescendit,  dans  l'arrière- 
saison,  en  Alsace.  Ce  fut  pendant  cette  seconde  tournée  pontiticale  qu'il 
émit  le  remarquable  document,  dans  lequel  il  constate  la  présence  des 
reliques  de  sainte  Odile  au  couvent  de  Hohenbourg.  Ici,  je  ne  puis  mieux 
faire  que  de  liaduire  textuellement  une  charte  qui  constitue  pour  le  mo- 
nastère, situé  au  sud-ouest  de  Strasbourg,  sur  une  sommité  des  Vosges, 
un  véritable  titre  de  noblesse  :' 

0.  Léon,  évêque,  serviteur  des  serviteurs  de  Dieu,  au  nom  du  Seigneur, 
à  l'église  de  Sainte-Marie,  mère  de  Dieu ,  à  Ilohenburch,  où  repose  le  corps 
de  la  sainte  vierge  Odile  et,  par  son  enti'emise,  salut  aux  religieuses  qui  à 
tout  jamais  y  feront  le  service  divin. 

"Pendant  que  nous  parcourions,  poussé  par  un  pieux  devoir,  la  contrée 
d'Alsace,  il  nous  arriva  de  visiter  Ilohenburch,  et  puisque  nous  portons 
une  pieuse  sollicitude  à  toutes  les  églises,  une  dévotion  spontanée  nous 
aurait  porté  vers  ces  lieux,  sans  compter  que  le  souvenir  de  nos  parents, 

1.  Cette  bulle  est  placée  iniproprement  par  Schœpilin  (.4/.s.  (///;/. .  I ,  p.  lüii-löü) ,  eu  lOôl, 
au  lieu  de  lUoU. 


—  174  - 

qui  dévotement  y  ont  servi  le  Christ  et  y  reposent  en  paix,  nous  a  poussé 
à  consacrer  de  nouveau,  comme  résidence  du  Saint-Esprit,  ladite  église, 
que  nous  avons  trouvée  pour  ainsi  dire  abandonnée.  Et  nous  l'avons  fait 
ainsi  qu'il  convient.  Or,  à  ce  temple  dédié  à  la  sainte  vierge,  mère  de  Dieu, 
et  à  saint  Nicolas,  la  vénérable  abbesse  Berthe  a  livré  un  bien  avec  des 
serfs  qu'elle  possédait  près  d'Arcenheim  (Artzenlieim)  et  près  de  Meinol- 
desheim  (Mœnolsheim) ,  Sahsenheim,  Uhresheim  (Ursheim),  Gersheim 
(Gerstheim).  Nous  avons  de  plus  statué  que  sur  les  deux  autels,  dont  l'un 
est  placé  au-dessus  de  la  tète  de  sainte  Odile,  et  l'autre  dans  l'église  prin- 
cipale, personne  ne  célèbre  la  solennité  de  la  messe,  si  ce  n'est  l'évêque 
du  diocèse  même,  et  les  semainiers  attitrés  de  l'église  même;  et,  en  outre, 
toute  personne  capable  qui  se  présenterait,  mais  toujours  avec  l'autorisa- 
tion et  l'assentiment  de  l'abbesse  ou  de  la  congrégation  dans  le  cas  où  l'ab- 
besse  ne  serait  pas  présente.  On  aura  de  plus  soin  de  se  pourvoir  d'un 
prêtre  religieux  qui  desservira  journellement  l'autel  de  sainte  Odile  et  rem- 
plira dignement  l'office  de  chapelain  auprès  de  l'abbesse.  Et  puisqu'il  con- 
vient à  nos  devoirs  de  régent  apostolique  de  porter  une  bienveillance  com- 
palissante  à  qui  brille  dans  l'exercice  de  la  piété,  ainsi  que  le  portent  les 
lettres-privilèges  accordées  par  nos  prédécesseurs,  il  nous  a  semblé  aussi 
juste  et  convenable  de  nous  rendre  aux  désirs  de  cette  église  et  des  reli- 
gieuses qui  s'y  vouent  au  service  du  Seigneur.  Or  donc,  nous  concédons 
en  vertu  de  notre  autorité,  et  à  tout  jamais,  ledit  privilège,  statuant  sous 
réserve  de  la  censure  apostolique,  et  en  invoquant  le  jugement  de  Dieu, 
que  ladite  église  devra  inviolablement  posséder  le  bien  susmentionné,  et 
tous  ceux  qui  ont  déjà  été  concédés  par  les  fondateurs  de  l'église  ou  par 
d'autres  fidèles  serviteurs  du  Christ;  par  exemple  :  Rodesheim  (Rosheim), 
Torolfcsheim  (DorUsheim) ,  Avelsheim  {Avolshemi) ,  Sahsolsheim  {Sœssols- 
heim),  Bladensheim  (Blœsheim),  Scafersheim  {Schœffersheim),  Ehnenheim 
[Obernai),  Illenkirchen  {Illkirdi),  Ingemarsheim,  Ehenheim  {sic,  Nieder- 
nai),  Egensheim  {Eguislieim),  Sigolsesheim  (Siffolslieim),  Alege  (Ehl),  Sunt- 
hausen  (Sundhausen),  Argersheim  {Ergersheim) ,  Scopfheim  {Schopfheim), 
GieYsheixa  {Gerstheim) ,  Bircheim  {Bergheim- Mittelbcrgheim?) ,  Tulhngen. 
Quant  à  la  terre  salique  de  Saint-Nabor,  et  de  tout  ce  qui  serait  ultérieu- 
rement concédé,  que  personne  ne  se  permette  dorénavant  d'en  enlever  ou 
de  lâcher  une  parcelle;  mais  que  le  tout  demeure  intégralement  aux  reli- 
gieuses vouées  en  ce  lieu  au  service  du  Seigneur.  • 

«Nous  avons  aussi  résolu  de  confirmer  auxdiles  religieuses  la  faculté 
d'élire,  toutes  les  fois  qu'une  abbesse  viendra  à  décéder,  sans  contradiction, 
une  abbesse  qui  prendra  la  direction  du  couvent.  Ordonnons  aussi  qu'elles 


—  175  — 

élisent  de  préférence  dans  leur  propre  sein,  si  elles  peuvent  y  trouver  une 
digne  et  religieuse  abbesse,  sinon  qu'elles  acceptent  la  meilleure  qu'elles 
pourront  trouver  autre  part  et  qu'elles  amènent  l'élue  devant  l'évêque , 
pour  qu'il  la  consacre,  et  que  l'abbesse,  à  son  tour,  fasse  régulièrement 
consacrer  par  l'évêque  les  religieuses  soumises  à  son  régime. 

«Nous  décrétons  aussi  que  toute  la  superficie  (area)  de  la  montagne, 
qui,  du  temps  de  sainte  Odile,  était  possédée  par  les  religieuses  seules, 
ainsi  qu'il  est  constaté  par  une  ancienne  tradition,  soit  soumise  à  l'abbesse, 
de  telle  manière  que  personne  ne  s'avise,  sans  son  assentiment,  de  cul- 
tiver ou  d'occuper  la  montagne  qui  s'étend  au-dessous  de  l'enceinte  du 
mur  païen  («'»//"m  septa  gentilis  muri)  et  que  personne  ne  se  hasarde  d'en- 
freindre et  de  violer,  de  quelque  façon  que  ce  soit,  la  paix,  qui  doit,  selon 
notre  volonté,  régner  perpétuellement  en  ces  lieux.  Décrétons  en  outre 
que  pas  une  personne,  de  quelque  condition  qu'elle  soit,  n'exige  quelque 
chose  de  ladite  église  par  force  ou  par  violence,  mais  qu'elle  puisse  tou- 
jours, calme  et  tranquille,  vaquer  aux  louanges  de  Dieu;  voulons  aussi 
que  l'abbesse  ne  dissipe  point  les  biens  du  couvent  avec  une  prodigalité 
insouciante,  mais  que,  fidèle  dispensatrice  du  suprême  empereur,  elle 
s'applique  à  conserver  diligemment  et  à  garder  prudemment  tous  les  re- 
venus qui  devront  servir  aux  pauvres  du  Christ  et  à  l'avantage  de  l'église, 
non  à  la  vanité  du  monde,  de  manière  que  les  brebis  du  Christ,  qu'elle 
doit  paître  selon  l'esprit  et  la  chair,  ne  manquent  jamais  de  pâturage  tem- 
porel et  puissent  s'appliquer  sans  souci  à  la  recherche  et  à  l'acquisition 
des  choses  de  l'éternité.  Si  elle  contrevenait  à  ses  devoirs,  et  si,  avertie 
une,  deux  ou  trois  fois,  elle  ne  venait  pas  à  résipiscence,  nous  prescrivons 
qu'elle  soit  déposée  selon  les  règles  canoniques,  et  devant  l'église,  en 
vertu  d'une  censure  judiciaire. 

ftOr  donc,  en  vertu  de  l'autorité  qui  nous  conipète  conmie  successeur 
de  saint  Pierre,  nous  décidons  irrévocablement  qu'il  ne  sera  permis  à 
aucun  empereur,  roi,  archevêque  ou  personnage  quelconque,  grand  ou 
petit,  d'agir,  de  quelque  façon  que  ce  soit,  à  l'opposite  de  cette  lettre  con- 
firmative.  Quiconque  y  contreviendrait,  nous  voulons  qu'il  demeure  frappé 
de  notre  anathème  apostolique,  jusqu'à  ce  (Jue,  humblement,  il  vienne  à  s'en 
repentir.  Mais  celui  qui  gardera  {ces  préceptes),  nous  voulons  qu'il  participe 
de  la  vie  éternelle.  Frappé  sera  du  même  anathème  tout  semainier  ou  tout 
autre  prêtre  qui  se  hasarderait  à  accabler  l'égHse  de  Hohenburch  par  des 
contestations  ou  des  violences.  Les  semainiers  aussi  ne  posséderont  sur  la 
montagne  que  les  maisons  nécessaires  à  leur  habitation,  qui  leur  auront 
été  concédées  par  l'abbesse  à  titre  de  bénéfice. 


—  176  — 

«  Fait,  le  16  des  kalendes  de  janvier  {le  17  décembre  1050),  de  la  main 
d'Odon  in,  priniicerius  de  Toul,  chancelier  et  bibliothécaire  du  siège  apos- 
tolique, pendant  la  seconde  année  du  règne  de  Léon  IX,  pape,  indic- 
lion  IV^  » 

.le  pense  que  tout  commentaire  pâlirait  à  la  suite  de  ce  document,  té- 
moin de  la  sollicitude  du  saint  pontife  pour  l'Alsace  et  pour  ses  illustra- 
tions religieuses.  Mes  lecteurs  auront  été  saisis,  sans  que  j'insiste  sur  cette 
circonstance,  par  les  termies  affectueux  qui  révèlent  l'attachement  du  pape 
pour  le  pays  de  ses  ancêtres.  Ils  doivent  aussi  être  frappés  de  la  descrip- 
tion des  localités,  et  des  termes  relatifs  à  l'enceinte  celtique,  témoin  muet 
d'un  long  passé,  qui,  à  l'époque  de  saint  Léon  déjà,  exerçait  sur  l'imagi- 
nation du  peuple  une  mystérieuse  influence. 

Un  historien  d'Alsace,  que  nous  avons  tous  connu  et  apprécié,  feu 
Slrobel,  place  ici  la  visite  de  saint  Léon  dans  le  Haut-Rlnn  et  à  Strasbourg. 
—  Dans  la  capitale  de  l'Alsace,  le  pape  visita  la  cathédrale  romane,  dont 
la  reconstruction,  commencée  sous  l'évêque  Wernher,  avançait  alors  ra- 
pidement. Léon  approuva  les  plans  qu'on  lui  soumit.  Puis  il  consacra  l'église 
de  Saint-Pierre-le-Jeune,  et,  à  la  demande  des  fidèles,  il  y  laissa  son  cou- 
vre-chef, que  l'on  montrait  pendant  longtemps  à  titre  de  rehque,  le  mer- 
credi de  la  semaine  sainte.  —  Cependant,  au  milieu  des  soins  donnés  aux 
églises  et  aux  monastères,  il  ne  perdit  point  de  vue  le  but  majeur  de  son 
voyage  dans  le  Nord,  la  pacificatio7i  du  pays. 

Depuis  que  l'empereur  Gom-ad  II  avait  déclaré  les  fiefs  héréditaires ,  il 
s'était  formé  dans  les  pays  rhénans,  comme  dans  l'Allemagne  centrale,  un 
nombre  considérable  de  petites  seigneuries  indépendantes,  souche  et  ori- 
gine de  la  noblesse  inférieure.  Le  premier  effet  de  cette  mesure,  dictée  par 
des  circonstances  impérieuses,  fut  de  donnei'  lieu  à  des  frottements  con- 
stants de  seigneur  à  seigneur,  et  de  seigneur  à  ville;  la  paix  publique  était 
journellement  troublée;  le  pape  avait  lui-même,  pendant  son  jeune  âge, 
éprouvé,  par  les  malheurs  de  sa  propre  famille,  les  terribles  suites  de  cet 
état  anarchique.  Le  trouble  qui  régnait  dans  l'Eghse  s'était  communiqué 
à  toutes  les  relations  politiques  et  civiles.  Pour  lutter  avec  le  mal,  le  pape 
s'appliqua  de  son  mieux  à  faire  adopter  en  Alsace  la  paix  de  Dieu,  qui  avait 
déjà  obtenu  force  de  loi  dans  d'autres  parties  de  l'Eui'ope  centrale. 

Une  convention,  jurée  en  1051,  par  les  seigneurs  et  les  villes,  couvrit 
de  sa  protection,  depuis  le  mercredi  soir  jusqu'au  lundi  matin,  les  ecclé- 
siastiques, les  femmes,  les  marchands,  les  chasseurs,  les  pèlerins,  les 
agriculteurs  allant  aux  champs  ou  revenant  de  leur  labour.  Tous  les  parti- 
cipants à  ce  traité  s'engageaient  à  ne  point  porter  des  armes  pendant  les 


—  177  — 

jours  fériés,  et  pendant  les  jours  de  la  semaine,  fixés  par  la  trêve  sainte. 
La  peine  de  mort  était  prononcée  contre  la  personne  libre  qui  violait  le 
traité;  le  serf  coupable  perdait  la  main.  Toute  provocation  violente  était 
punie;  tout  accusé  subissait  l'épreuve  de  l'eau  froide.  On  plaça  la  paix  de 
Dieu  sous  la  surveillance  du  clergé,  et  lecture  publique  était  donnée  des 
articles  de  la  convention,  chaque  dimanche,  dans  les  éghses.  Le  son  des 
cloches  annonçait,  le  soir  du  mercredi,  que  toute  hostilité  devait  cesser 
pendant  quatre  jours. 

Ce  fut  un  immense  bienfait;  dans  les  campagnes,  on  dut  bénir  le  nom 
de  Léon  IX,  qui  valait  à  son  pays  natal  cet  armistice  régulier  et  qui  per- 
mettait aux  opprimés  de  respirer  un  peu  plus  librement. 

Au  commencement  de  lOôi,  le  pape  se  rend  à  Trêves,  puis,  pour  la 
seconde  fois,  à  Augsbourg.  Dans  cette  ville,  un  pénible  devoir  l'attendait  : 
il  avait  cité  à  comparaître  devant  lui  l'archevêque  de  Ravenne,  accusé  de 
machinations  séditieuses  contre  la  personne  même  de  Léon.  Sur  les  in- 
stances des  évèques  présents,  le  pape  pardonna  et  donna  au  pénitent  hypo- 
crite l'absolution  dans  la  mesure  de  sa  contrition.  Un  sourire  sardonique 
infernal,  effleura  la  figure  du  prêtre  rebelle;  il  retourna  impunément  à 
Havenne;  mais  il  y  mourut  d'une  mort  subite,  et  la  croyance  populaire 
attribua  celte  fin  soudaine  à  la  main  vengeresse  de  Dieu. 

Pour  la  célébration  des  fêtes  de  Pâques  (1051),  Léon  IX  fut  de  retour  à 
Rome;  il  y  guérit  pendant  le  service  divin,  par  la  seule  influence  de  sa 
parole  et  de  son  regard,  une  pauvre  possédée;  des  faits  analogues  se  ré- 
pétèrent dans  plusieurs  circonstances  et  servirent  plus  tard  de  preuves  à 
l'appui  de  la  canonisation  du  pape. 

Pendant  cette  année  1051,  Léon  IX  se  rendit  de  nouveau  dans  le  sud 
de  l'Italie,  où  les  Normands  continuaient  à  commettre  des  cruautés  inouïes. 
Pour  y  arriver,  il  suivit  d'abord  la  route  de  Subiaco,  et  visita,  dans  cette 
belle  vallée  alpestre,  les  monastères  illustrés  par  saint  Benoît.  Il  usa  de 
rigueur  envers  l'abbé  du  Sacro  Speco,  qui,  se  sentant  coupable,  s'était 
réfugié  à  Trevi;  puis  il  examina  les  documents  des  habitants  de  Subiaco, 
et  fit  impitoyablement  brûler  les  titres  apocryphes.  Je  cite  cette  circon- 
stance, parce  qu'elle  jette  rétrospectivement  quelque  lumière  sur  la  ma- 
nière de  procéder  qu'a  dû  employer  le  pape  pour  le  couvent  de  Hohen- 
bourg.  Il  est  évident  que,  avant  de  faire  cette  consécration,  son  examen 
s'était  porté  sur  les  ütres  de  famille  que  le  monastère  avait  conservés,  et 
que  l'acte  solennel,  qu'il  accompht  pour  constater  la  vénération  séculaire 
dont  jouissait  sa  sainte  aïeule,  n'avait  été  décidé  qu'après  un  consciencieux 
recueillement. 

Il«  .SÉRIE.  —  T.  II.  —(M.  12 


—  178  — 

En  arrivant  dans  l'Italie  méridionale,  il  reçut  définitivement  la  soumis- 
sion de  Bénévent;  il  fit  son  entrée  dans  cette  ville,  le  jour  même  de  l'As- 
somption. Alors  les  instances  les  plus  vives  lui  arrivèrent  du  catapan  grec 
Argyroüs,  qui  représentait  le  reste  de  l'influence  byzantine  dans  la  Fouille. 
Le  pape  commença,  en  effet,  à  faire  des  préparatifs  et  des  armements  pour 
châtier  les  chevaliers-bandits  de  la  Normandie;  mais,  abandonné  dès  ce 
moment  par  Guaymar,  prince  de  Salerne,  il  résolut  de  s'adresser  à  l'em- 
pereur Henri  III,  avoué  de  l'Église  de  Rome;  car  en  s'appuyant  sur  l'Alle- 
magne, il  pouvait  espérer  en  finir  avec  les  Normands,  abriter  contre  leurs 
attaques  Bénévent,  sa  nouvelle  acquisition,  et  sauver  les  habitants  de  la 
Fouille,  torturés,  mutilés  par  les  bandes  des  fils  de  Tancrède  de  Haute- 
ville. 

Four  décider  l'empereur  à  lui  fournir  des  secours  efficaces,  il  fallut, 
une  troisième  fois,  s'acheminer  vers  le  Nord.  Il  se  rend  en  Allemagne,  en 
'1051 ,  et  commence  par  intervenir  dans  la  lutte  engagée  entre  Henri  III  et 
les  rois  André  et  Bêla  de  Hongrie.  Ses  efforts  sont  couronnés  de  succès; 
puis  il  passe  à  Ratisbonne,  y  rend  les  honneurs  dus  aux  rehques  de  l'évêque 
AYolfgang,  qui,  d'après  la  tradition,  avait  rendu  la  vue  à  sainte  Odile,  con- 
sacre le  couvent  de  Saint- Emeran,  transporte  à  Bamberg  les  ossements 
du  pape  Clément  II,  et  arrive  à  Worms  en  décembre.  Son  séjour  dans  cette 
ville  est  marqué  par  la  promesse  d'un  secours  contre  les  Normands,  qu'il 
arrache  à  l'empereur,  auquel  il  cède  l'évêché  de  Bamberg  et  l'abbaye  de 
Fulde  contre  la  propriété  définitive  de  Bénévent. 

Aucun  document  ne  conserve  la  trace  d'une  visite  que  le  pape  aurait 
faite  à  sa  chère  Alsace,  maintenant  qu'il  se  trouvait  non  loin  de  cette  pro- 
vince pour  la  troisième  fois  depuis  son  avènement  au  trône  pontifical.  En 
1052,  nous  le  trouvons  à  Padoue,  confirmant  les  privilèges  des  églises  et 
consacrant,  dans  celle  de  Sainte-Justine,  la  découverte  des  corps  de  trois 
saints';  puis  à  Mantoue,  où  il  avait  convoqué  un  concile  pour  donner 
suite  à  ses  actes  de  rigueur  contre  des  mœurs  dissolues.  Ici,  il  rencontra 
pour  la  première  fois  une  résistance  à  main  armée  de  la  part  du  clergé  et 
du  peuple,  et  se  vit  obligé  de  faire  un  pas  rétrograde.  11  doit  être  permis 
de  proclamer  que  l'œuvre  légitime,  entreprise  par  Léon  IX,  fut  entravée 
et  échoua  devant  l'aveugle  opposition  d'une  société  corrompue.  Le  mal 
devait  encore  progresser  et  provoquer  la  venue  du  grand  moissonneur 
Hildebrand,  qui  allait  extirper,  d'un  seul  coup,  la  mauvaise  herbe  dont 
l'Église  était  couverte. 

De  retour  à  Rome,  le  pape  eut  la  douleur  de  perdre ,  par  un  empoison- 

1.  Saint  Julien  ,  saint  Maxime  et  sainte  Félicité. 


—  179  — 

nement,  Halynard,  aichevêque  de  Lyon,  el  Hugues,  ëvêque  de  Langres. 
A  la  même  époque  (7  mai  1052),  Boniface,  marquis  de  Toscane,  le  sou- 
tien et  le  conseiller  du  saint-siége,  mourut  assassiné  à  Salerne,  le  prince 
Guaymar  succombait  à  la  suite  d'une  conspiration  ;  mais  il  restait  à  Léon  IX, 
pour  l'accomplissement  de  sa  sainte  mission,  une  phalange  de  pieux  ana- 
chorètes; il  avait  saint  Pierre  Damiani  à  Ponte-Avellana;  près  de  Vicence, 
saint  Théobald  le  Champenois;  à  Vallombreuse,  saint  Romuald;  entre  les 
golfes  de  Salerne  et  de  Tarente ,  cent  vingt  couvents  abritant  trois  mille 
disciples  de  saint  Alfer....,  que  de  motifs  d'espérance  et  de  confiance  dans 
l'avenir!  Les  Pisans,  protégés  et  encouragés  par  lui,  venaient  de  conquérir 
la  Corse  et  la  Sardaigne  sur  les  Sarrasins;  le  pape  crut  y  voir  la  main  de 
Dieu  qui  l'invitait  à  chasser  les  Normands  de  l'Itahe  méridionale. 

En  juin  1053,  il  se  met  en  campagne  avec  une  petite  armée,  comman- 
dée par  Rodolphe,  recteur  de  Bénévent,  et  par  Werner,  un  chevalier 
souabe,  qui  lui  amenait  le  secours  si  longtemps  attendu  du  fond  de  l'Alle- 
magne. Le  pape  se  dirigea  d'abord  sur  le  mont  Gassin,  de  là  à  San-Ger- 
mano  et  à  Capoue,  avec  un  brillant  cortège  clérical  et  laïque.  Sur  les  bords 
du  Volturno,  il  lient  une  cour  de  justice;  mais  déjà  de  sinistres  présages 
commencent  à  circuler.  Jean,  archevêque  de  Salerne,  avait  eu,  dans  son 
église,  sur  le  tombeau  de  l'apôtre  Matthieu,  une  vision  qui  lui  annonçait 
que  la  Pouille  et  la  Calabre  resteraient  aux  Normands.  On  comprend  que 
ce  songe,  qui  pouvait  aussi  n'être  (|u'une  hallucination  ou  une  inspiration 
de  l'esprit  du  mal,  ne  détourna  pas  le  pape  d'un  projet  longuement  médité. 
La  position  des  chevaliers  normands  était  cruelle;  excommuniés  par  le 
pape,  détestés  par  les  populations,  en  proie  à  la  famine,  en  face  d'une 
levée  générale  du  pays,  ils  devaient  se  montrer  prêts  à  tous  les  sacrifices. 
Lorsque  les  deux  armées  se  trouvèrent  en  présence  dans  la  Capitanate , 
près  de  Civitella,  ils  demandèrent  instamment  à  négocier.  Mais  les  cheva- 
liers allemands,  forts  et  d'une  taille  élevée,  méprisaient  les  Normands, 
petits  et  grêles;  ils  comptaient  en  avoir  facilement  raison,  et  rapporter  au 
delà  des  Alpes  des  dépouilles  opimes. 

Léon  IX  se  confiait  dans  la  supériorité  du  nombre  :  il  comptait  dans  son 
armée  au  moins  sept  mille  combattants,  à  pied  et  à  cheval;  les  Normands 
ne  comptaient  que  trois  mille  cavaliers;  mais  c'étaient,  selon  l'expression  de 
Gregorovius,  autant  de  démons  incarnés,  de  vrais  Centaures,  prompts  à 
l'attaque  et  redoutables  même  en  fuyant.  A  leur  tête  se  trouvaient  trois 
braves:  Richard,  comte  d'Averse,  le  comte  Humfroi  et  Robert  Guiscard, 
l'Ulysse  de  ces  temps  héroïques. 

La  bataille  qui  allait  se  livrer  entre  Civitella  et  Dragonara,  le  18  juin 


—  180  — 

1053,  est  l'un  des  faits  guerriers  les  plus  remarquables  dans  les  annales 
de  la  papauté  temporelle;  involontairement  on  est  porté  à  faire  un  paral- 
lèle entre  cette  rencontre  et  le  combat  de  Castelfidardo. 

Le  pape,  du  haut  des  créneaux  de  Civitella,  bénit  son  armée,  ne  doutant 
pas  un  seul  instant  de  la  victoire. 

Les  chevaliers  et  les  soldats  allemands,  couverts  de  leurs  boucliers  et 
armés  de  leurs  glaives,  repoussèrent  facilement  l'attaque  de  Humfroi,  de 
ses  tireurs  d'arc  et  de  ses  lanciers;  mais  les  troupes  italiennes  se  déban- 
dèrent à  la  première  attaque  de  Richard  d'Averse;  alors  Robert  Guiscard 
se  mit  à  entamer  immédiatement  le  flanc  des  Allemands.  Ces  braves  se 
formèrent  en  carré  et  tombèrent  un  à  un,  jusqu'au  dernier.  C'est  un  des 
sacrifices  les  plus  héroïques  de  l'histoire  du  moyen  âge. 

Les  vainqueurs  se  précipitèrent  contre  les  murs  de  Civitella;  ils  voulaient 
s'emparer  du  pape.  Le  faubourg-  de  Civitella  est  en  feu;  l'assaut  est  donné 
contre  les  remparts.  Dans  l'intérieur  de  la  petite  forteresse,  les  bourgeois, 
mobiles  et  infidèles,  se  mettent  à  piller  les  bagages  pontificaux  et  à  chasser 
le  pape  lui-même  hors  des  murs. 

Dans  cette  extrémité,  le  pape  envoie  des  négociateurs  vers  les  chefs  nor- 
mands, et  se  met  à  couvert  sous  le  boucher  invisible  de  l'apôlre  saint  Pierre 
il  échange  le  rôle  d'un  chef  d'armée  inhabile  et  malheureux  contre  celui 
du  bon  berger*.  Les  guerriers  victorieux  et  sauvages  sont  appi'ivoisés, 
miraculeusement  convertis;  ils  s'agenouillent  devant  leurs  prisonniers 
baisent  humblement  les  sandales  apostohques,  enveloppent  le  pape  de  leur 
escadron  chevaleresque  et  promettent  de  lui  faire  escorte  fidèle  jusqu'à 
Bénévent,  au  besoin  jusqu'à  Rome. 

Pendant  deux  jours,  Léon  IX  resta  plongé  dans  une  douleur  profonde 
et  dans  la  prière  pour  l'âme  des  combattants  qui  venaient  de  se  sacrifier 
pour  l'indépendance  temporelle  du  saint-siége.  Puis  il  les  fit  enterrer  so- 
lennellement. L'aspect  du  champ  de  bataille  de  Dragonara  brisa  son  cœur 
sympathique  :  il  ne  se  releva  plus  de  ce  coup  funeste,  et,  sans  aucun  doute, 
dans  le  silence  des  nuits  d'insomnie  qu'il  passait  maintenant,  il  devait  s'a- 
dresser quelque  reproche  d'avoir  laissé  sacrifier  le  sang-  des  fidèles  pour 
une  cause  poHtique.  Il  déchna  visiblement;  sa  carrière  était  terminée. 

Lorsque,  sous  l'escorte  des  chevaliers  vainqueurs,  il  fit  son  entrée  à 
Bénévent,  les  sanglots  de  la  population  répondirent  aux  larmes  qu'il  ver- 
sait lui-même.  La  nouvelle  de  la  défaite  pontificale  s'était  répandue  avec 
une  effrayante  rapidité  dans  toute  l'Europe  chrétienne;  le  blâme  et  la  cri- 
tique ne  firent  pas  défaut.  Bruno  de  Segni,  Saint-Romuald,  le  chroniqueur 

I.  (iregoroviiis. 


—  181   — 

d'Amalfi,  Saint-Pierre  Damiani  lui-même  sont  unanimes  dans  le  jugement 
qu'ils  portent  sur  cette  campagne  contre  les  Normands;  car,  à  cette  époque, 
I  idée  du  domaine  temporel  du  pape  n'avait  pas  encore  atteint  le  degré  de 
certitude  qu'on  semble  lui  accorder  de  nos  jours,  où  des  hommes  d'Elat 
protestants  se  sont  rangés  au  nombre  de  ses  défenseurs. 

Les  Normands  venaient  d'obtenir,  par  leur  éclatant  succès,  un  litre  qui 
légalisait  .leurs  conquêtes.  Le  pape  leva  l'interdit  qui  pesait  sur  eux;  il  pro- 
mit très-probablement  de  reconnaître  leur  conquête;  et  les  prétentions  de 
la  papauté,  d'exercer  une  suzeraineté  complète  sur  le  royaume  de  Naples, 
datent  de  cette  défaite  de  Dragonara. 

De  quelques  soins  que  les  chefs  normands  entourassent  le  pape,  il  resta 
inconsolable'.  Une  seule  pensée  l'obsédait  encore,  celle  d'avoir  trop  vite 
cédé  à  la  force  et  de  n'être  pas  mort  à  côté  ou  au  milieu  de  ses  fidèles 
défenseurs.  De  sa  prison  splendide  de  Bénévent,  il  envoya  les  cardinaux 
Frédéric  de  Touraine  et  Humbert  à  Constantinople,  avec  mission  de  som- 
mer l'empereur  Constantin  Monomaque  de  se  concerter  avec  Henri  III , 
empereur  d'Allemagne,  à  l'effet  de  reconquérir  au  profit  derÉgUse  l'Italie 
méridionale.  Était-ce  une  impulsion  spontanée,  ou  suivait-il,  en  cela,  les 
conseils  de  Hildebrand?  Qui  peut  le  savoir,  à  la  distance  où  nous  sommes 
de  la  catastrophe  de  Dragonara,  et  dans  la  pénurie  de  documents  précis. 
Nous  possédons  toutefois  la  lettre  du  pape  à  l'empereur  de  Byzance;  pour 
le  pousser  à  intervenir  en  Italie,  il  s'appuie  surtout  sur  la  donation  de 
Constantin  le  Grand,  il  ajoute  :  «  Tu  juxta  nominis  lui  elymologiam  con- 

stanter  adjuva  recuperare ,  retinere  et  defendere Fais  honneur  à  ton 

nom,  aide-nous  vaillamment  à  reconquérir,  à  conserver  et  à  défendre 
notre  héritage.» 

Lorsqu'il  écrivait  cette  épître  pressante,  ses  jours  étaient  déjà  comptés; 
vers  les  derniers  temps  de  son  séjour  à  Bénévent,  il  ne  prenait  plus  de 
nourriture;  une  fois  encore,  se  ranimant,  il  y  célébra  la  messe  en  public. 
Puis,  il  se  mit  en  route  pour  Rome.  C'était  le  12  mars  1054,  un  peu  plus 
de  huit  mois  après  la  fatale  bataille.  Son  état  d'épuisement  le  força  de 
s'arrêter  douze  jours  à  Capoue.  ïlumfroi  l'avait  accompagné  jusque  dans 
cette  ville;  ici,  le  pape  le  congédia  ainsi  que  son  escorte  normande.  Il  ar- 
riva à  Saint-Jean-de-Lalran,  dans  la  société  du  fidèle  abbé  du  Mont-Cassin. 

De  plus  en  plus  brisé,  il  sentit  approcher  sa  fin  et  se  fit  transporter  à 
Saint-Pierre,  à  la  date  du  13  avril  1054.  A  peine  les  habitants  de  Rome 
eurent-ils  appris  cette  nouvelle,  qu'une  partie  de  cette  hideuse  populace, 

1.  Les  Annales  de  Lambert  porleut  :  ctinctos  dies  quibus  supervixit  tantœ  calamiiaii  in 
luctu  et  mœrore  egit. 


—  182  — 

liabituée  depuis  de  longues  années  au  désordre  des  rues  et  au  carnage,  se 
précipita  vers  le  palais  de  Latran,  avec  l'intention  de  le  piller;  puis  elle 
s'arrêta  tout  à  coup,  frappée  d'une  mystérieuse  terreur,  aux  pieds  des  esca- 
liers. La  sainte  figure  de  Léon  IX  protégeait,  invisible,  ce  séjour  d'une 
longue  série  de  ses  prédécesseurs. 

En  attendant,  le  pape  luttait  avec  la  mort.  11  avait  fait  placer,  près  de  son 
lit  de  repos,  le  sarcophage  qui  devait  recevoir  sa  dépouille  mortelle;  ap- 
puyé sur  ses  serviteurs,  il  s'approcha  de  ce  dernier  asile,  et  dit  aux  assis- 
tants à  haute  et  intelhgible  voix  :  «  Voyez,  mes  frères,  combien  est  misé- 
rable et  transitoire  la  grandeur  humaine!  Que  chacun  de  vous,  s'il  est 
destiné  à  jouir  des  honneurs  de  ce  monde,  me  prenne  pour  exemple! 
Voici  que,  élevé  du  néant  jusqu'au  faîte  des  grandeurs  humaines,  je  suis 
de  nouveau  réduit  à  néant;  la  cellule  que  j'ai  habitée  comme  moine,  je  la 
letrouve  dans  l'étroitesse  de  ce  cercueil.  Tout  à  l'heure  j'y  serai  couché, 
recouvert,  au  lieu  d'ornements,  du  fil  de  l'araignée;  en  ce  moment  déjà , 
je  suis  une  pâture  préparée  pour  les  vers.»  — Puis  il  bénit  le  sarcophage, 
en  prononçant  encore  des  paroles  (|ui  arrachèrent  des  sanglots  à  toute 
l'assemblée.  Pendant  cette  lente  agonie  de  quatre  à  cinq  jours,  on  l'en- 
tendit plusieurs  fois  faire  sa  prière  en  allemand  ;  il  demandait  à  Dieu  de 
l'enlever  rapidement,  si  telle  était  sa  volonté,  ou  de  le  guérir  par  un 
miracle. 

Léon  IX  était  alors  dans  sa  cinquante-deuxième  année.  Un  plus  long 
avenir  lui  semblait  garanti;  mais  les  soucis  du  pouvoir  spirituel  et  temporel 
usent  vite.  —  Le  19  avril,  de  bon  matin,  sentant  décidément  approcher 
sa  fin,  il  se  fit  porter  vers  l'autel  de  Saint-Pierre,  se  jeta  contre  terre,  pria 
en  silence  pendant  une  heure ,  prit  le  sacrement  des  mourants ,  et  puis  se 
recoucha  pour  s'endormir  paisiblement  du  dernier  sommeil.  C'était  la  neu- 
vième heure  du  jour. 

La  cloche  de  Saint-Pierre  commença  à  tinter  sans  qu'une  main  d'homme 
l'eût  ébranlée,  à  ce  que  rapporte  la  tradition  contemporaine.  • 

L'ensevelissement  se  fit  le  jour  même,  selon  la  volonté  du  pape.  Des 
guérisons  nombreuses  s'opérèrent  sur  sa  tombe,  et  l'Eglise  reconnaissante 
couroima  de  l'auréole  de  la  sainteté  le  front  du  pieux  réformateur. 

Victrix  Roma  dolet  nono  viduata  Leone , 
Ex  muUis  talent  vix  habitura  patrem.  ' 

Des  églises  furent  élevées  en  son  honneur  :  à  Toul,  dont  il  avait  admi- 
nistré le  diocèse  pendant  vingt-deux  ans;  à  Bénévent,  qu'il  avait  conquis 

1.  Rünie  victorieuse  s'afflige  d'ôtre  veuve  de  Léon  IX  ,  car  dans  une  longue  suite  de  pon- 
tifes ,  elle  retrouvera  difficilement  un  père  qui  lui  ressemble 


—  183  — 

pour  le  saint-siége.  Les  témoignages  contemporains  exaltèrent  la  bonté  de 
son  cœur,  sa  pureté,  son  abnégation,  son  humilité,  sa  soumission  aux 
décrets  divins,  son  désir  de  répandre  le  règne  de  Dieu  sur  terre.  Les  papes 
Victor  111  et  Grégoire  Vil,  Lanfranc,  le  primat  d'Angleterre,  Bruno,  évêque 
de  Segni,  se  firent  les  organes  éloquents  de  leur  siècle.  Pour  Léon  IX,  la 
canonisation  n'était  que  le  verdict  d'un  jury  d'élite,  qui  lui-même  avait 
puisé  son  jugement  dans  un  écho  de  la  voix  pubhque. 

Je  n'ai  point  cherché  à  effacer  ni  à  dissimuler  l'ombre  que  l'expédition 
contre  les  Normands  jette  sur  cette  noble  figure.  Mais  ses  qualités  et  ses 
vertus  évangéliques  rayonnent  d'un  éclat  tel  qu'il  demeure,  en  tout  état 
de  cause,  l'un  des  ornements  du  saint-siége.  L'Alsace  revendique  avec 
fierté  cette  gloire  de  l'Eghse;  les  noms  de  Hohenbourg  et  de  sainte  Odile 
ne  sont  point  prononcés  sans  que  le  souvenir  de  Léon  IX  s'y  rattache.  Ce 
pape  a  délivré  les  lettres  patentes  qui  constatent  et  consacrent  les  origines 
du  pittoresque  monastère,  de  cet  asile  placé  au-dessus  des  nuages  et  des 
bruits  de  la  terre.  11  a  pour  ainsi  dire  frayé  le  chemin  que  devait  suivre  un 
siècle  plus  tard  Frédéric  de  Hohenstauffen,  et  que  devaient  prendre  pen- 
dant huit  siècles  après  lui,  des  princes,  des  prélats,  des  hommes  illustres 
et  des  pèlerins  obscurs,  femmes,  enfants  et  vieillards,  qui  allaient  cher- 
cher, à  travers  ces  forêts  de  sapin ,  dans  l'air  pur  des  montagnes  et  dans 
la  chapelle  sépulcrale  de  la  sainte  abbesse,  des  secours  spirituels  et  maté- 
riels, la  santé  de  l'âme  et  du  corps,  le  charme  des  souvenirs  historiques 
et  légendaires.'  L.  Spach. 

1.  J'ai  fait  usage  pour  cette  esquisse,  indépendamment  des  chartes,  relatives  à  saint 
Léon,  et  éditées  par  Schœpflin  :  de  i'Hisioù-e  d'Alsace,  par  Strobel ,  t.  1",  p.  274  et  sui- 
vantes; je  lui  dois  la  traduction  de  la  trêve  de  Dieu;  de  VHisloire  des  saints  d' Alsace  ,  par 
l'abbé  Hunckler;  de  l'ouvrage  capital  de  Constantin  Hœfler  :  Les  Papes  allemands,  2*  sec- 
tion  :  Léon  IX,  Victor  II,  Etienne  IX,  Nicolas  IL  Ratisbonne,  1839;  de  Gregorovius,  His- 
toire de  la  ville  de  Rome,  au  moyen  âge,  vol.  IV,  p. 71  ef  suivantes.  Cet  auteur  protestant  se 
distingue  par  son  impartialité ,  l'élévation  de  ses  vues ,  ses  aperçus  ingénieux  ,  sa  diction 
à  la  fois  simple  et  éloquente. 

Constantin  Hœfler,  en  traitant  l'histoire  spéciale  de  Léon  IX,  pouvait  se  donner  libre 
carrière;  il  a  usé  d'un  nombre  infini  de  chartes,  que  Gregorovius  a  probablement  négli- 
gées de  propos  délibéré ,  carie  pontificat  de  Léon  IX  n'est  pour  lui  qu'un  épisode  très- 
court  ,  dans  un  ouvrage  qui  embrasse  plus  de  dix  siècles. 

Ces  deux  écrivains  se  complètent;  l'auteur  catholique  est  plus  détaillé ,  plus  précis,  plus 
enthousiaste;  l'auteur  protestant  plus  incisif,  plus  entraînant;  tous  les  deux  professent 
pour  ce  saint  pontife  une  admiration  sympathique  qui  se  transmet  naturellement  au 
lecteur. 


LA  MARCHE  D'AOUTLÉE 


La  Marche  cCAqnilée  esl  une  expression  donl  je  n'ai  trouvé  d'explication 
nulle  part  et  (jue  je  voudrais  tâcher  d'éclaircir.  «La  Marche  de  Marmou- 
tier,  a  dit  Schœpflin,  portait  aussi  le  nom  de  Marca  Aquileiensis;  mais 
malgré  toutes  mes  recherches,  je  n'ai  pu  savoir  pourquoi.  Les  chartes  de 
cette  abbaye,  les  manuscrits,  la  tradition  n'ont  rien  pu  m'apprendre  à  ce 
sujet.  Le  révéï'endissime  abbé  Placide  Schweighaîuser,  qui  gouverne  cet 
étabhssement  avec  tant  de  sagesse  et  de  prudence,  m'a  avoué  n'en  rien 
savoir.»  Ravenèz  accompagne  cet  ahnéa  de  la  note  suivante  : 

«Les  Traditiones  possessionesque  Wizenburgenses  publiées  à  Spire,  en 
4842,  par  Ch.  Zeuss,  nous  font  connaître  un  pagîis  Aculinse,  Aquilense, 
Achilgoîve,  qui  tirait  son  nom  de  la  rivière  Aquila.  Une  charte  du  22  avril 
713,  p.  193,  dit  :  a  Hoc  est  in  pago  Actdinse  super  pluviolas  Aquilas  infra 
fine  Druclegisomarca  et  in  marca  Bettune  suh  ambas  ripas  Aquilas.  » 

Une  autre  du  15  mai  755,  p.  212,  porte  :  «  In  loco  nuncupante  Bochil- 
dingaSy  in  pago  Aquilense,  super fluvio  Aquila.)') 

Enfin,  une  troisième  de  l'année  846,  p.  261,  porte  :  «  Quod  trado  in 
Gisalvingun  quod  est  in  pago  Achilgouue  predium  meum.  »  Je  vais  es- 
sayer d'établir,  au  sujet  de  ce  pagus,  une  hypothèse  de  laquelle  on 
pourrait  déduire  l'origine  du  nom  ô'Aquileia.  La  villa  Gisalvingun  dont 
il  vient  d'être  parlé  est  dite  située  in  pago  Achilgoîve,  mais  dans  d'autres 
chartes,  Gisolvinga,  Gisalolfincomarca  est  dite  située  in  pago  Saroinse; 
voy.  les  n°'  273,  206,  208,  209,  216,  249.  Ce  pagus,  qui  tirait  son  nom 
de  la  Sarre,  était  limitrophe,  vers  le  sud,  avec  la  Marche  de  Marmoutier. 
Or,  si  le  Gisalvingun  des  chartes  de  Wissembourg  se  trouve  tantôt  dans  le 
pagus  Saroinsis,  tantôt  dans  la  Marche  Aqiiileia,  on  peut  admettre  avec 
quelque  apparence  de  raison  que  cette  dernière  est  la  même  que  la  Marche 
de  Marmoutier.  Son  nom  à'Aquileia  dériverait  ainsi  d'une  des  petites  ri- 
vières qui  coulent  sur  son  territoire.» 

Ravenèz  s'en  est  tenu  là,  laissant  à  d'autres  le  soin  de  pousser  plus  loin 
les  conjectures;  il  n'a  pas  cherché  à  savoir  quelle  était  la  petite  rivière  en 
question,  et  il  n'a  pas  déterminé  le  territoire  de  la  Marche,  deux  opéra- 
tions auxquelles  il  faut  procéder. 


—  185  — 

Le  territoire  de  la  Marche  est  censé  détaillé  dans  un  diplôme  de 
Thierry  IV,  confirmatif  de  donations  de  Childebert  If,  Théodebert  II,  Cio- 
taire  II,  Dagobert  II,  Sigebert  II  et  Dagobert  III;  la  charte  concède  à  Mau- 
rns  :  «  tout  ce  que  Léobard  avait  occupé  dans  le  désert  comme  terrain  de 
culture  ou  comme  lieu  d'habitation,  depuis  le  petit  pont  de  Scliweinheim 
jusqu'à  la  roule  pubhque  de  Saverne  et  jusqu'à  celle  de  Marlenheim,  en- 
suite depuis  la  source  Cisternata  et  les  environs  jusqu'au  ruisseau  de 
Gunsinen,  et  de  là  jusqu'au  mont  Cuoberg,  à  travers  une  frênaie,  jusqu'au 
lieu  dit  Aschowa,  et  ainsi  le  long  de  la  Zorn  jusqu'à  la  croix  de  pierre,  et 
enfin  au  ruisseau  de  Maur.  » 

Le  fons  Cisternata,  c'est,  d'après  Grandidier,  le  Griesbach  qui  se  jette 
dans  la  Zinsel,  le  Gunsmus  rivus,  c'est  la  Zinsel  qui  se  jette  dans  la  Zorn 
près  de  Steinbourg,  et  le  iMaiiri  rivus  est  un  petit  ruisseau  qui  coule  près 
de  l'ancienne  abbaye  et  qu'on  appelle  aujourd'hui  Muerbächlein. 

Mais  le  territoire  de  la  Marche  a  varié  en  étendue.  Ainsi,  une  charte  de 
1120  nous  apprend  que  le  mont  Sindenus  ou  Sindelsberg  se  trouve  infra 
Marcham  sen  provinciam;  une  autre  de  1128,  que  l'abbaye  possède  trois 
manses  à  Hambach  et  deux  à  Adamswiller,  ainsi  que  cinq  à  Dhann  près 
Phalshourg. 

Avant  1150,  la  Marche  comprenait  le  château  de  Lutzelbourg,  en  échange 
duquel  l'abbaye  reçut  le  prieuré  de  Saint-Quirin,  et  en  1170,  l'évêque  Ro- 
dolphe, voulant  fortifier  davantage  le  château  deHaut-Barr,  acquit,  par  voie 
d'échange,  de  l'abbé  de  Marmoutier,  un  rocher  situé  au  midi  du  château. 

Ce  n'est  pas  tout  :  nous  possédons  un  état  des  biens  de  Marmoutier 
dressé  vers  1120;  cet  état  comprend  six  sortes  de  biens  :  V  les  villages  qui 
forment  la  Marche  :  villœ  quœ  vocantur  Moresmarcha ;  2°  les  biens  en  de- 
hors de  la  Marche,  mais  dans  le  pagiis,  extra  marcJtam  in  pago  ;  S°  les 
biens  allant  du  pagiis  Saroinsis  à  la  cellule  de  Saint-Quirin;  4°  les  droits 
et  servitudes  anciennement  institués  en  l'honneur  de  saint  Martin;  5°  les 
aumônes  concédées  aux  moines  de  l'abbaye;  6"  les  cens  que  les  minis- 
tériaux  ne  recueillent  pas. 

Nous  nous  retrouvons  ainsi  en  présence  de  ce  pagus  Saroinsis  que  Ra- 
venèz,  dans  sa  note,  associe  à  un  pagus  Aguilensis.  Les  villages  du  pagus 
Saroinsis,  appartenant  à  Marmoutiei',  portent  des  noms  qui  demandent  à 
être  traduits:  Dotenvilarc,  Ottwillei';  Erlenwinivilare,  Eschwiller;  Raper- 
tivillare,  Reipertswiller;  Sidelinesdorf,  Siltzheim;  Bucilonisvilla ,  Biist; 
Vilderadingas ,  Vœllerdingen;  Ratraminivilare,  Ratzwiller;  Duristoldas, 
Düi'stel;  Suliclienvilare,  Siewiller;  Gundelingas,  Gungwiller;  Widerohii- 
villa,  Weiterswiller. 


—  186  — 

D'autre  part,  la  note  de  Ravenèz  renferme,  comme  faisant  partie  du 
pagus  Aquilensis,  un  Dructegisomarca ,  Drulingen;  et  un  Betlune,  Bütten; 
la  traduction  de  Bochildingas  et  de  Gisalvlngun  nous  échappe.  De  même 
que  le  pagus  Saroinsis  est  le  pagus  de  la  Sarre,  le  pagus  Aquilensis  est 
le  -pagus  de  VAquila,  c'est-à-dire  de  l'Eichel.  Deux  ruisseaux,  dont  l'un  sort 
de  l'étang  de  Ilaslach  dans  les  forêts  de  La  Petite-Pierre,  et  l'autre  de  l'é- 
tang de  Frolimiihl,  se  joignent  à  Tieffenbach  (pluviolas  Aquilas ,  atnbas 
ripas  Aquilas)  et  forment  l'Eichel,  qui  traverse  les  bans  d'Adamswiller, 
Piexingen,  Mackwiller,  liambach,  Diemeringen,  Lorentzen,  Vœllerdingen , 
Œrmingen,  et  se  jette  dans  la  Sarre  au-dessous  de  celte  dernière  com- 
mune près  de  la  limite  du  département  de  la  Moselle.  Les  villages  que 
Marmoutier  possédait,  au  douzième  siècle,  dans  le  pagus  Saroinsis,  sont 
donc  la  plupart  tout  aussi  bien  situés  dans  le  pagus  Aquilensis,  car  ils  font 
partie  de  la  vallée  de  l'Eichel.  VAquila,  l'Eichel,  serait-elle  donc  la  rivièj-e 
qui  aurait  servi  à  former  le  nom  à'Aquileiaf  Mais  remarquons  ici  que  nous 
avons  parlé  d'un  pagus  Aquilensis  et  non  d'une  marca  Aquileia,  de  plus 
que  la  charte  de  1120,  où  il  est  question  du  pagus  Saroinsis,  commence 
ainsi  :  Hœc  charta  antiquilus  est  in  Aquileia  Maurimonasterio  fada.  Istœ 
sunt  villw  quœ  vocantur  Moresmarclia.  Ti'aduction  littérale  :  cette  charte  a 
été  anciennement  dressée  dans  Aquilée-Marmoutier,  voici  les  villages  qui 
forment  la  Marche  de  Maur.  Il  ne  faut  pas  traduire  :  Marmoutier  dans  la 
Marche  d'Aquilée,  en  sous-entendant  marca  et  en  faisant  d' Aquileia  un 
adjectif,  il  faut  voir  ici  une  expression  double  dont  le  second  substantif 
forme  apposition  au  premier,  et  quant  à  la  Marche,  elle  s'appelle  Marche 
de  Maur  tout  simplement. 

La  même  charte  dit  encore:  Ad  Aquileiam  Maurimonasterium ,  apiid 
Aquileiam  Mcmrimonasteriuni ,  apud  Aquileiam  Maurivillam.  Enfin,  une 
autre  de  1144  dit  :  Jura  quœdam  hujus  loci  beati  Martini  Aquileiœ  Mau- 
rimonasterii:  les  droits  d'Aquilée-Marmoutier  de  Saint-Martin.  Aquileia  est 
donc  le  nom  primitif  de  Marmoutier,  le  nom  que  portait  le  terrain  où  s'est 
élevé  Marmoutier  avant  que  Maur  ne  vînt  s'y  étabhr  (740).  Mais  ce  n'est 
pas  là  une  réponse  à  l'hypothèse  de  Ravenèz  faisant  dériver  Aquileia  d'une 
des  petites  rivières  qui  coulent  sur  le  territoire  de  la  Marche. 

Nous  avons  vu  dans  la  charte  de  724  la  mention  d'un  Mauri  riuus  qui 
coule  près  de  l'abbaye  et  qu'on  appelle  par  corruption  Muerbächlein.  Ce 
ruisseau  n'a  pas  pu  s'appeler  ruisseau  de  Maur  avant  l'arrivée  de  Maur  dans 
la  contrée,  mais  il  avait  toujours  un  nom,  au  moins  le  nom  simple  ou  qua- 
hfié  de  l'élément  même.  Eh  bien!  cherchons  dans  le  celtique,  nous  trou- 
verons que  e  signifie  étroit,  et  cuit  ruisseau;  ecuil,  latinisé,  a  fait  aquila; 


-  187  — 

germanisé,  eichet;  et  francisé,  aigle,  aiglelte  (rAigletle,  près  de  Laon  , 
voy.  Mabillon,  De  re  dipl.  576).  De  même  que  Marmoutier  s'est  appelé 
Aquilée  avant  l'arrivée  de  Maur  et  de  Léobard,  de  même  le  ruisseau  de 
Maur  a  dû  se  nommer  Aquila,  et  d'Aquila  dérivent  les  deux  premières 
syllabes  d'Aquileia;  quant  à  leia,  c'est  la  forme  germano-latinisée  du  cel- 
tique lie,  place,  endroit,  Aquileia  est  donc  la  place,  l'endroit  près  du  petit 
~  ruisseau.  Un  exemple  de  formation  tout  analogue  se  présente  dans  Marleia 
(Marlenheim),  dérivé  de  mcnvr,  grand,  et  lie,  endroit.  Le  suffixe  eia  n'a 
rien  de  latin,  mais  il  garde  la  trace  de  l'articulation  mouillée  lie. 

Nous  pouvons  étendre  le  bénéfice  de  ces  observations  à  la  ville  d'Aqui- 
leia,  en  Illyrie,  située  à  6  kilomètres  S.-O.  des  lagunes  {ecuil)  de  Marano. 
L'illyrie  fut  ainsi  appelée  des  Pélasges  Illyres  (voy.  Appian.  Illyr.,  II, 
780),  qui  étaient  de  race  celtique,  et  Aquileia,  avant  d'être  colonie  ro- 
maine ,  fut  la  capitale  des  Garni,  dont  le  nom  correspond  au  gaébque 
carnanach  (montagnard). 

Si  nous  retournons  en  Alsace,  nous  ferons  encore  observer  que  Mar- 
moutier n'est  pas  la  seule  localité  qui  a  échangé  son  ancien  nom,  son  nom 
profane  ou  naturel  contre  celui  de  quelque  pieux  personnage:  Doroangus 
(la  maison  grande)  est  devenu  Saint-Amarin,  le  monastère  du  Confluent 
(Münster)  est  devenu  celui  de  Saint-Grégoire;  par  contre,  certaines  colo- 
nies, après  avoir  porté  un  nom  de  personnes,  se  sont  baptisées  du  cours 
d'eau  voisin  :  le  Vivier  des  Pèlerins,  Vivarius  Peregrinorum,  s'effaça  défi- 
nitivement devant  Murbacli. 

Ajoutons  enfin  que  saint  Maur  et  ses  compagnons,  les  héritiers  des  tra- 
ditions irlandaises  ou  gaéliques,  devaient  attacher  quelque  prix  à  la  con- 
servation de  termes  qui  leur  prouvaient  leurs  liens  avec  des  ancêtres  peut- 
être  bien  éloignés  et  j-amenaient  en  eux  le  souvenir  de  l'antique  patrie  : 
car  l'ascétisme,  la  vie  extatique  a  beau  vous  enlacer  de  ses  bras  souples  et 
puissants,  il  est  des  jours  où  l'homme  le  plus  mystique  fait  un  retour  al- 
langui  vers  la  franche  nature,  et  il  suffît  alors  souvent  d'un  mot,  d'un  nom 
pour  le  fortifier,  sinon  pour  le  guérir. 

P.  RiSTELHUBER. 


•>Ko 


NOTIGE 

SUR   LES   CIMETIÈRES  GAULOIS   ET  GERMANIQUES 

DÉCOUVERTS  DANS  LES  ENVIRONS  DE  STRASBOURG. 


Après  avoir  étudié  dans  mes  précédentes  notices^  les  traces  de  l'occupa- 
tion romaine  en  Alsace,  je  vais  essayer  de  pénétrer  dans  l'obscurité  qui 
enveloppe  encore  l'histoire  de  notre  province  pendant  les  années  qui 
virent  s'écrouler  l'empire  d'Occident. 

PREMIÈRE  PARTIE. 

Découvertes  archéologiques. 

L'exploration  des  cimetières  de  Lorentzen  et  de  Diemeringen,  dont  j'ai 
rendu  compte  dans  un  récent  mémoire"^,  a  pu  jeter  quelque  lumière  sur 
l'établissement  d'une  population  germanique  qui  se  serait  étendue  des  rives 
du  Rhin  jusque  sur  le  versant  occidental  des  Vosges;  à  ce  premier  jalon 
planté  sur  les  bords  de  la  Sarre,  je  viens  en  ajouter  un  second  placé  au 
milieu  de  la  fertile  plaine  qui  entoure  Strasbourg. 

Le  fragment  de  carte  dessiné  sur  la  planche  lithographiée  ci-jointe  donne 
l'indication  de  ces  découvertes  que  je  classerai  en  deux  catégories'  bien 
distinctes,  savoir: 

1''^  Catégorie.  —  Sépultures  gauloises. 

Squelettes  enfouis  dans  le  sol. 

(Bracelets  et  anneaux  en  bronze,  poteries.) 

A  l'exception  d'un  cimetière  considérable,  découvert  en  1862  à  Obernai, 
et  décrit  par  noire  collègue  M.  Levrault*,  les  sépultures  de  cette  catégorie 
sont  rares  dans  la  basse  Alsace;  elles  ne  renferment  pas  d'armes,  on  n'y 

1.  Notice  sur  les  voies  romaines  du  Bas-Rliin.  I8G1 ,  Bulletin,  t.  IV.  —  Notice  sur  l'en- 
ceinte d'Argentoratum.  1861 ,  Bullecin,  t.  IV.  —  Notice  sur  les  monuments  gallo-romains 
des  environs  de  Saverne.  1862,  Bulletin,  1. 1",  2'^  série.  - 

2.  Notice  sur  cfuelques  découvertes  archéologiques  effectuées  dans  les  cantons  de  Saar- 
Union  et  de  Druliugen  (Lorraine  allemande).  1864,  Bulletin,  t.  II,  2"  série. 

3.  Entre  les  deux  époques  caractérisées  par  ces  monuments  doit  se  placer  la  période 
gallo-romaine  représentée  par  les  nombreuses  sépultures  par  incinération,  dont  j'ai  fait 
mention  dans  ma  notice  sur  les  voies  romaines. 

4.  Découvertes  de  sépultures  antiques  à  Obernai,  par  M.  L.  Levrault,  1804,  Bulletin, 
t.  II ,  2*  série. 


—  189  — 

trouve  généralement  que  des  anneaux  et  des  bracelets  en  bronze  et  quel- 
ques poteries. 

La  découverte  la  mieux  caractérisée  est  celle  de  Lingolsheim  ',  où  l'on 
a  trouvé,  en  18G3,  un  squelette  bien  conservé  ayant  à  chaque  membre 
deux  anneaux  en  bronze  et  deux  autres  plus  grands  autour  du  cou,  en 
tout  dix  cercles  de  même  facture,  qui  ont  été  mis  sous  nos  yeux  par 
notre  collègue  si  regretté,  M.  le  professeur  Jung. 

Des  anneaux  semblables  ont  été  trouvés  près  de  Bischolfsheim^  i^V  de 
Roshehn,  dans  les  déblais  exécutés  pour  la  construction  des  chemins  de 
fer  vicinaux. 

A  Eschau,  un  grand  collier  en  bronze,  découvert  en  1863,  rappelle 
exactement  le  beau  collier  incrusté  d'ambre  des  tumulus  de  Heidolsheim , 
décrits  par  M.  de  Hing.' 

Si  l'on  y  ajoute  un  kelt  en  pierre,  trouvé  il  y  a  plusieurs  années  près 
d'Obernai,  et  mentionné  par  M.  Levrault,  on  aura  une  idée  sommaire  des 
sépultures  de  cette  catégorie  qui  appartiennent  probablement  à  des 
époques  diverses,  dont  la  limite  la  plus  éloignée  est  indiquée  par  le  kelt  de 
pierre,  et  la  plus  rapprochée  par  les  poteries  de  forme  romaine  du  cime- 
tière d'Obernai, 

Dans  aucune  de  ces  sépultures  n'apparaissent  les  caractères  bien  connus 
des  tombes  germaniques  :  on  y  voit  beaucoup  d'analogie  avec  les  tertres 
celtiques*  de  Heidolsheim ,  de  Schlestadt  et  de  la  forêt  de  Brumath  qui  ont 
fait  l'objet  d'une  élude  spéciale  de  la  part  de  M.  de  Ring,  et  dont  l'origine 
paraît  se  rapporter  aux  premiers  temps  de  l'occupation  romaine  ou  à 
l'époque  qui  la  précède  immédiatement. 

2°  Catégorie.  —  Sépultures  germaniques. 

Tombes  formées  par  des  dalles  de  grés.  —  Tombes  creusées  dans  l'argile. 
(Armes  oi/er,  bronze ,  bijoux  en  or,  argent  et  pierres  précieuses ,  poteries.) 

Tombes  en  dalles  de  grès. 

Ces  tombes  dont  les  parois  et  le  couvercle  sont  en  dalles,  forment 
divers  cimetières  qui  s'étendent  de  Molsheim  vers  Brumcdh.  Ceux  de  Mols- 
lieim,  de  Sonllz-les-Bains,  û'Odrakhehn  et  de  Wasselonne  sont  pour 
ainsi  dire  groupés  autour  de  Kirchheim  et  de  Marlenheim,  lieux  célèbres 

1.  Séance  du  coniitc  chi  9  mars  1863.  Bulletin,  i.  II,  '2*^  série. 

1.  Séance  du  comité  du  r''juin  1863.  Ces  anneaux  ont  été  donnés  à  la  Société  par  le 
service  des  chemins  vicinaux. 

3.  Bulletin  de  la  Société,  t.  II,  V^  série. 

4.  Bulletin  de  la  Société  .  t.  I ,  Il ,  r*"  série. 


—  \m  — 

dans  l'histoire  d'Alsace  par  le  séjour  des  rois  d'Austrasie;  ils  ont  été  décou- 
verts sous  mes  yeux  en  1862  et  1863,  je  puis  donc  en  donner  une  exacte 
description. 

L'orientation  des  lombes  est  constante  de  l'ouest  à  l'est.  A  l'exception 
du  cimetière  de  Wasselonne,  où  leur  foime  est  rectangulaire,  elles  pré- 
sentent généralement  une  diminution  de  largeur  aux  pieds. 

Outre  un  grand  nombre  de  couteaux,  de  sabres  en  fer  à  un  tranchant 
(scramasaxe),  de  pointes  de  flèches  en  fer,  on  y  a  trouvé  des  fibules,  des 
boucles  en  bronze  d'un  travail  délicat,  des  pâtes  émaillées  percées  d'un 
trou  et  diverses  poteries. 

Je  citerai  parmi  les  objets  les  plus  curieux: A  Odralzlieim\  une  belle 
fibule  en  argent,  une  croix  en  or,  un  bracelet  en  bronze  et  des  monnaies 
de  Constantin.  La  fibule  présente  à  son  centre  une  demi-sphère  d'où 
partent  des  rayons,  qui  partagent  toute  la  surface  en  huit  secteurs,  au 
miheu  desquels  sont  enchâssées  des  pierres  bleues  et  rouges  qu'entourent 
de  délicates  torsades  en  filigranes  d'argent.^  Ce  bijou,  qui  rappelle  l'art  de 
Byzance,  paraît  dater  du  cinquième  siècle;  la  croix  en  or  est  sans  doute 
moins  ancienne,  elle  a  été  trouvée  en  dehors  des  tombes. 

A  Molsheim^^  une  jolie  boucle  en  bronze  délicatement  travaillée.  (Voir  la 
planche  lithographiée  ci-jointe.) 

A  Soullz-les- Bains,  rien  de  remarquable  que  les  tombes  elles-mêmes 
placées  sur  le  penchant  d'un  coteau  qui  a  été  coupé  à  pic,  de  sorte  que 
leur  section  transversale  reste  encore  visible. 

A  Wasselonne ,  l'organisafion  du  cimetière  offre  des  particularités  singu- 
lières. Placées  dans  le  fond  de  la  vallée,  les  tombes  reposent  sur  un  solide 
béton  de  0'",3Ü  d'épaisseur,  qui  s'étend  à  l'entour,  en  formant  une  bande 
d'environ  15  mètres  de  largeur.  Le  petit  nombre  de  squelettes  qui  ont  été 
mis  au  jour  se  trouvaient  dans  des  tombes  en  dalles  complètement  rectan- 
gulaires; on  y  a  recueilli  un  anneau  en  bronze,  quelques  fragments  de 

1.  Les  découvertes  d'Odralzlieira  et  de  Wasselonne  sont  dues  à  M.  Kast,  agent  voyer,  qui 
a  lait  don  à  la  Société  de  la  fibule  en  arg-ent  et  de  la  croix  en  or;  le  bracelet  en  bronze  fait 
partie  de  la  collection  de  M.  Piblingre  de  \\'asselonne,  qui  a  bien  voulu  le  mettre  à  ma  dis- 
position pour  le  reproduire  sur  la  planche  ci-jointe. 

2.  D'après  l'analyse  faite  par  un  habile  chimiste,  M.  Kopp  de  Saverne,  les  pierres  bleues 
sont  des  verres  à  base  de  soude  colorés  probablement  au  cobalt,  et  le  mastic  placé  entre  la 
plaque  d'argent  et  celle  de  cuivre  est  formé  par  une  terre  alumineuse  mélangée  avec  une 
matière  organique. 

Voir  la  planche  lithographiée  ci-jointe  ainsi  que  le  procès-verbal  delà  séance  du  G  juillet 
I8G3  et  la  planche  chromo-lithographique  qui  y  est  annexée. 

3.  Les  découvertes  de  Molsheim  et  de  SouItz-lcs-Bains  sont  dues  à  M.  Kopp,  agent  voyer. 
La  Société  possède  plusieurs  sabres ,  boucles  et  poteries  qui  en  proviennent,  et  qui  lui  ont 
été  donnés  par  MM.  Audéoud,  maire  d'Avolsheim ,  et  Camille  Vernett,  de  Molsheim. 


—   191  — 

même  métal,  un  grand  morceau  d'ambre  percé  d'un  trou  et  une  monnaie 
en  bronze  de  Trajan,  également  percée.  (Voir  la  planche  lithograpbiée  ci- 
jointe.) 

Le  cimetière  de  Wasselonne  touche  la  voie  de  la  vallée  de  la  Mossig ,  le 
long  de  laquelle  ont  été  trouvées  des  urnes  remplies  de  cendres  et  d'osse- 
ments brûlés,  des  tuiles  à  rebord  et  des  fragments  de  belles  poteries 
romaines. 

Ici  s'arrête  la  description  des  tombes  découvertes  sous  mes  yeux.  Quant 
à  celles  de  Dorlislieim ,  Fessenhehn ,  Marlevhehn,  Hùrtighem ,  Kilitolft- 
heim,  Neiigartheim ,  Avenheim,  Buringen,  Gimbrett  et  Brv.mntli,  qui 
étaient  formées  comme  les  précédentes' par  des  dalles  de  grès,  je  ne  les 
connais  que  par  les  renseignements  que  j'ai  recueillis,  mais  l'examen  que 
j'ai  fait  des  armes  et  des  divers  objets  qui  en  proviennent  me  permettent 
de  les  classer  dans  la  même  catégorie  en  leur  attribuant  une  commune 
origine. 

Tombes  creusées  dans  l'argile  sans  entourage  de  pierres. 

Ces  sépultures  sont  entièrement  semblables  aux  précédentes  en  ce  qui 
concerne  leur  orientation,  les  armes  et  les  objets  divers  qu'elles  renfer- 
ment, elles  ont  été  rencontrées  à  Hochfelden ,  Mihichhausen ,  Konigshofen 
et  Gerslheim. 

A  Hochfelden,  les  tombes  sont  creusées  dans  le  banc  d'argile  qui  re- 
couvre le  calcaire  basique,  exploité  pour  la  confection  de  la  chaux  hydrau- 
lique; ce  cimetière  a  fourni  depuis  plusieurs  années,  en  grande  abondance, 
des  vases  en  verre  et  en  terre  finement  travaillés,  des  boucles  en  bronze, 
des  pâtes  émaillées  et  des  sabres  en  fer  de  toutes  dimensions;  le  musée  de 
Saverne  possède  un  de  ces  sabres  deO'",00  de  longueur,  a  deux  tranchants 
{spatha)\  donné  par  M.  le  docteur  Schnœringer  de  Brumath,  dont  le  ca- 
binet est  si  riche  en  antiquités  romaines  et  germaniques;  c'est  à  cet  ar- 
chéologue qu'appartient  une  plaque  en  bronze  d'une  ornementation  bizarre 
qui  a  été  trouvée  sous  le  crâne  d'un  squelette^  et  où  l'on  croit  voir  les 
têtes  de  quatre  serpents  se  détacher  d'un  tronc  commun.  (Voir  la  planche 
lithograpbiée  ci-jointe.) 

Münchhausen,  situé  en  face  d'Hoclifelden  sur  l'autre  rive  de  la  Zorn,  a 

t.  Cette  arme  (spafka)  appartenait  à  la  cavalerie  franque  et  alémane,  qui  était  souvent 
employée  comme  auxiliaire  par  les  généraux  romains.  Des  épées  semblables  ont  été  trou- 
vées dans  les  sépultures  alémaniques  de  Nordendorf  (Bavière). 

2.  On  remarque  sur  ce  crâne,  que  possède  M.  Schnœringer,  la  trace  verdàtre  produite 
par  le  contact  du  bronze. 


~  192  ~ 

fourni  des  objets  semblables;  le  musée  de  la  Société  possède  de  beaux  fers 
de  lance  qui  en  proviennenl.' 

GerstheiïH  :  on  a  trouvé  dans  cette  localité  plusieurs  sépultures  dont  je 
n'ai  pu  constater  le  nombre  ni  l'orientation.  Cette  découverte,  qui  est  due 
au  zèle  de  M.  Niklès  de  Benfeld,  a  augmenté  la  collection  de  la  Société  de 
plusieurs  objets  fort  intéressants,  entre  autres  une  fibule  en  or  et  wnebulla 
en  cuivie  doré.^  La  fibule  est  formée  d'une  plaque  d'or,  séparée  d'une 
seconde  plaque  en  cuivre  rouge  par  une  couche  de  mastic,  le  tout  main- 
tenu par  six  clous  rivés.  Ce  bijou,  qui  est  orné  de  grenats'  et  de  filigranes 
d'or,  offre  beaucoup  d'analogie  avec  la  fibule  d'argent  d'Odratzheim  et 
paraît  dater,  comme  celle-ci,  du  cinquième  siècle:  Les  musées  d'Allemagne 
possèdent  des  bijoux  semblables  trouvés  dans  des  tombes  germaniques. 
(Voir  la  fibule  n°7i8  du  musée  de  Stuttgard.) 

La  bulla  est  une  boule  creuse  en  cuivre  doré,  dont  les  deux  hémisphères 
s'ouvrent  à  charnière  et  se  ferment  par  un  arrêt  mobile;  elle  était  sans 
doute  destinée,  comme  celles  que  les  Romains  suspendaient  au  cou  de 
leurs  enfants,  à  renfermer  des  talismans  préservatifs  de  tous  maléfices.'^ 

Une  bulla  semblable  en  cuivre  a  été  trouvée  dans  le  cimetière  germa- 
nique de  Fr'idolßny  an  der  Salza,  dans  la  Bavière  supérieure,  elle  a  été 
découverte  sur  la  poitrine  d'un  squelette  et  renfermait  un  bronze  de  Max- 
Hercule. 

KönigsJtofen  [Begis  uilla  des  rois  francs),  situé  aux  portes  de  Stras- 
bourg. Ce  cimetière  que  j'ai  visité  avec  notre  savant  collègue  feu  le  profes- 
seur Jung,  n'offrait  aucune  régularité  dans  la  disposition  des  sépultures; 
celte  confusion  tenait  peut-être  à  la  précipitation  avec  laquelle  les  inhuma- 
tions avaient  eu  heu;  quoi  qu'il  en  soit,  on  y  a  trouvé  des  statuettes  en 

1.  Ces  fers  de  lauce  ont  été  donnés  à  la  Société  par  M.  le  docteur  Duruy,  soiis-direc- 
fenr  de  l'école  de  médecine  militaire. 

2.  Voir  le  procès  -  verbal  de  la  séance  du  comité  du  4  mai  1863  et  la  planche  chromo- 
lithographique. 

3.  Les  anciens  ont  connu  les  principales  variétés  de  grenat ,  telles  que  leur  ntbis  uirlhayi- 
)iois  et  Vescarboucle  qui  brillait  dans  l'obscurité  comme  un  charbon  ,  de  là  le  nom  de  cur- 
hiuiculus  (Pline).  «  Incidit  in  oculos  el  splendit  instar  carbunculi.  »  (l'et. ,  Sat.  35). 

4.  D'après  Pline  (XXXllI,  I),  cet  usage  remonterait  h  Tarquin  l'Ancien.  11  paraît  que  ces 
bulla  étaient  suspendues  au  cou  des  dieux  lares ,  lorsque  les  enfants  prenaient  la  toge  : 
"  hiiUaque  succinctis  Laribtis  donuta  pepend/l.  »  (Pet. ,  Sut.)  Il  y  a  plusieurs  exemples  de 
statues  d'autres  divinités  qui  étaient  décorées  de  bulles  d'or.  (Voir  une  inscription  de  Gruter 
relative  à  une  bullu  consacrée  à  Junon.jMacrobc  fait  mention  de  la  bulle  d'or  des  triompha- 
teurs ;  «Bulla  gestamen  erat  IriuDiphantlmn...  » 

Les  bulla  creuses  sont  très-rares  dans  les  musées  de  France.  Celles  que  l'on  a  trouvées 
jusqu'à  présent  dans  les  tombeaux  francs  étaient  généralement  en  or  on  argent  massifs , 
recouvertes  de  dessins  et  ornées  de  grenats;  elles  faisaient  sans  doute  partie  des  cuillers. 
(  Voir  les  ouvrages  de  l'abbé  Cochet,  notamment  le  lombeau  de  Cliilpéric,  p.  333.) 


—  198  — 

bronze,  des  boucles,  des  colliers  d'ambre,  et  une  foule  de  sabres  en  fer 
(scramasaxe),  qui  ont  été  mis  sous  les  yeux  du  comité  par  M.  le  professeur 
Jung  dans  la  séance  du  2  février  1863. 

D'après  cette  description  on  ne  peut  méconnaître,  dans  toutes  les  sépul- 
tures de  la  2^  catégorie,  les  caractères  distinctifs  des  races  germaniques 
tels  qu'ils  se  présentent  dans  les  tombes  alémaniques,  burgondes,  fran- 
ques  et  saxonnes,  qui  ont  été  mises  au  jour  en  Allemagne,  en  France,  en 
Suisse ,  en  Belgique  et  en  Angleterre. 

L'étude  des  sépultures  germaniques  a  fait,  depuis  quelques  années,  des 
progrès  tels  qu'il  n'est  plus  possible  aujourd'hui  de  les  confondre  avec 
celles  des  autres  peuples.  Des  points  de  comparaison  incontestables  nous 
sont  donc  fournis,  savoir  : 

En  France',  dans  les  cimetières  francs  de  la  Normandie  et  de  la  Lor- 
raine, et  dans  les  sépultures  burgondes  de  la  Côte-d'Or; 

En  Suisse^  dans  les  tombes  de  Bel-Air; 

En  Belgique',  dans  celles  de  Tombois,  près  de  Namur. 

En  Allemagne*,  dans  les  cimetières  francs  de  Sehen,  dans  les  sépultures 
alémaniques  de  Fridolßng  et  de  Nordendorf  en  Bavière ,  du  mont  Lupfen 
de  l'ancienne  Souabe,  et  dans  celles  découvertes  près  de  Fribourg  en 
Brisgau,  qui  offrent  une  grande  analogie  avec  les  cimetières  alsaciens. 

1.  France  :  Normandie  souterraine.  Sépultures  gauloises,  etc.,  par  M.  l'abbé  Cochet.  — 
Cimetière  de  Gharnay  (Saône-et-Loire),  par  M.  H.  Baudot. —  Cimetière  de  Faréberswiller  (Mo- 
selle), par  M.  Bufresne.  —  Cimetière  de  Vendliuile,  près  de  Saint-Quentin,  par  M.  Gomart. 

—  Tombeaux  du  Haut-de-Saussy,  par  M.  Bottin  (Meurtbe).  —  Bulletin  monumetital ,  de 
M.  de  Caumont,  —  Mémoires  des  antiquaires  de  France,  de  Normandie  et  des  sociétés 
d'émulation  des  Vosges  et  de  Montbéliard  etc.  etc. 

2.  Suisse  :  Description  des  tombeaux  de  Bel-Air,  par  M.  Troyon.  —  Recueil  d'antiquités 
suisses,  par  M.  de  Bonstetten. 

3.  Belgique  :  Cimetières  de  l'époque  franque  aux  lieux  dits  le  Tombois  et  les  minières, 
près  de  Namur.  {Annales  de  la  Société  archéologique  de  Namttr.) 

4.  Allemagne  :  Das  gei-maiiische  Todtenlager  bei  Selzen ,  par  le  docteur  Lindenscbmitt. 

—  Die  Heide?igrœber  am  Lupfen  bei  Oberflacht,  im  würtembergischen  Amte  Tuttlingen 
par  V.  Durrich  et  D.  Menzel.  —  Das  Todtenfeld  bei  Fridolfmg  an  der  Salza  in  Oberbaiern, 
München  1847.  ^  Die  tiralten  Grabstätte  bei  Nordendorf ,  par  Seidmayer.  —  Die  neuent- 
deckten tiiinengrüber  zu  Ebri7igen  im  Breisgau ■,  par  le  docteur  Schreiber,  1826.  —  Die 
heidnischeTodtenbestattung inDeutschland,  parK.  Weindhold,  Vienne  1859. 

Dans  ce  dernier  ouvrage,  qui  a  été  publié  par  l'académie  impériale  des  sciences  de  Vienne, 
M.  le  docteur  Weindhold  présente  un  tableau  complet  des  découvertes  archéologiques 
effectuées  en  Allemagne,  en  ce  qui  concerne  les  sépultures  anciennes,  et  il  rectifie  l'opi- 
nion du  docteur  Schreiber  qui  attribuait  une  origine  celtique  aux  Hunefigrùber  du  Brisgau, 
tandis  que  ces  tombes  appartiennent  à  la  race  alémanique.  "  Es  geschah  dies  hiernach  vofi 
«  Alema7ien  und  insbesondere  von  dem  Stamme  der  Brisigawer....  ich  setze  die  Gräber 
'I  von  Ebringen  in  das  vierte  oder  fünfte  Jahrhundert.»  (P.  119.)  Cette  découverte  de 
tombes  alémaniques  sur  la  rive  du  Rhin  opposée  à  l'Alsace  mérite  une  mention  toute 
spéciale. 

11«  SÉRiB.  —  T.  ir.  —  (M.)  1 3 


_  i9/i.  — 

DEUXIÈME    PARTIE. 

Rech erch  os  historiques. 

Le  type  germanique  étant  bien  démontré,  il  faudrait  pouvoir  dire  quelle 
est  la  tribu  qui  repose  dans  chacun  de  nos  cimetières  et  quelle  est  la  date 
de  son  établissement  en  Alsace.  Ici  les  indices  matériels  nous  manquent;  il 
faut  recourir  aux  historiens. 

Cette  question  qui  se  rattache  aux  origines  de  la  nation  française*  et  à 
l'histoire  locale  de  l'Alsace,  offre  un  haut  intérêt:  si  je  ne  puis  la  résoudre, 
je  vais  essayer  du  moins  de  résumer  les  faits  historiques  qui  peuvent 
l'éclaircir. 

Deux  grandes  confédérations  germaniques,  les  Francs  et  les  Alémans,  se 
formèrent  à  la  fin  du  deuxième  siècle.  Après  avoir  forcé  le  Valium^,  qui 
défendait  les  terres  décumates,  ces  deux  peuples,  auxquels  se  joignirent 
plus  tard  les  Burgondes,  passèrent  le  Rhin  en  corps  de  nation  l'an  286  de 
l'ère  chrétienne;  repoussés  et  rejetés  sur  la  rive  droite  par  Maxime,  ils  re- 
nouvelèrent pendant  toute  la  durée  du  quatrième  siècle  leurs  sanglantes 
incursions. 

L'histoire  nous  apprend  que  ce  furent  les  Alémans,  dont  le  territoire 
faisait  face  à  l'Alsace,  qui  portèrent  à  notre  province  les  coups  les  plus  ter- 
ribles. Raltus  maintes  fois  par  Constance  (296-316),  par  Constantin  et  son 
fils  Crispus  (320),  par  Julien  (356-357),  par  le  Franc  Hariett,  comte  des 
deux  Germanies  (366),  et  poursuivis  jusque  sur  le  Necker  par  Valentinien 
(369),  ils  furent  enfin  presque  entièrement  détruits,  en  378,  à  la  bataille 

1.  Les  historiens  français  du  siècle  de  Louis  XIV  ont  vu,  dans  la  coalition  des  peuples 
germaniques,  les  alliés  des  Gaulois  contre  les  Romains.  En  s'appuyant  sur  l'émigration  de 
Sigovèse  et  deBellovùse(Vl«  siècle  avant  Jésus-Glirist),  et  sur  celles  desSequauais  et  d'autres 
Gaulois  dans  les  terres  décumates  (IP  siècle  après  Jésus-Christ),  ces  auteurs  ont  regardé  les 
klémans  et  les  ¥runcs  comme  d'anciens  Gaulois  qui  venaient  combattre  les  Romains  pour 
délivrer  leur  première  patrie.  (Voir  Dom  Martin,  Mezerai,  Audigier  et  le  Journal  des  sa- 
vn7its,(\el6n.)  Cette  opinion,  qui  flattait  l'orgueil  national,  fut  combattue  par  les  auteurs 
allemands  et  surtout  par  Leibnitz  (dans  une  dissertation  publiée  en  1715),  elle  le  fut  aussi 
en  France  par  un  savant,  dont  le  nom  mérite  d'être  conservé,  par  Nicolas  Fréret;  sou  mé- 
moire, qui  fait  aujourd'hui  autorité  parmi  les  historiens ,  fut  présenté  à  l'Académie  en  1714 
et  lui  valut  une  détention  de  six  mois  à  la  Bastille. 

De  nos  jours,  Augustin  Thierry  et  Guizot  ont  porté  sur  cette  question  de  nouvelles 
lumières  :  ils  ont  définitivement  restitué  aux  Francs  et  aux  Alémans  leur  origine  germa- 
nique, et  rehabilité  dans  notre  histoire  l'influence  civilisatrice  des  Romains  ;  puis  Henri 
Martin  est  venu  classer  et  coordonner  tous  les  travaux  des  écrivains  français  et  allemands 
avec  une  admirable  clarté ,  c'est  lui  qui  m'a  servi  de  guide  dans  cette  étude. 

2.  Le  Valium  est  un  retranchement  élevé  par  les  Romains  entre  le  Rhin  et  le  Danube; 
ses  ruines  sont  encore  visibles ,  et  sont  connues  en  Allemagne  sous  le  nom  do  Pfahlyraben. 


—  195  — 

(ÏArgentoarta,  par  les  armées  de  Gratien,  commandées  par  le  Franc  Mellu- 
baudes.^ 

Pendant  toute  la  durée  de  ce  siècle,  nous  voyons  l'Alsace  dévastée, 
Argentoratum  et  Brocomagus  pillés  et  détruits,  et  toujours  l'hydre  ger- 
manique se  redressant  après  chaque  revers. 

Dans  ce  sanglant  conflit,  on  n'aperçoit  aucune  période  pendant  laquelle 
une  trihu  germanique  aurait  pu  former  en  Alsace  un  établissement  de 
quelque  durée. 

Au  commencement  du  cinquième  siècle^  règne  d'abord  un  moment  de 
calme  dû  à  l'habileté  de  Stilicon^  (général  d'IIonorius),  qui,  à  l'aspect  des 
hordes  de  Vandales  et  de  Suèves  prêtes  à  briser  les  faibles  barrières  de 
l'empire,  traite  avec  les  Francs  et  les  Alémans,  et  à  prix  d'or,  obtient  leur 
concours  pour  arrêter  cette  menaçante  invasion;  mais  le  calme  fut  de 
courte  durée  :  le  31  décembre  406  les  Vandales  et  les  Suèves,  après  avoir 
repoussé  les  Francs,  passent  le  Rhin  entraînant  les  Burgondes  à  leur 
suite*;  Mayence  est  détruit,  les  villes  rhénanes  et  notamment  Strasbourg  et 
Spire  sont  dévastées,  et  leurs  habitants  traînés  en  Germanie.^ 

A  partir  de  cette  époque  Rome  est  vaincue,  le  Germain  ne  sera  plus 
rejeté  dans  ses  forêts  et  régnera  bientôt  en  maître  dans  les  Gaules. 

Les  Burgundes.^  —  Cinquième  siècle. 

Dès  412,  Gunter,  chef  des  Burgondes,  allié  à  Odoacre,  chef  des  Alains, 
fait  couronner  Jovinus,  empereur  d'Occident,  à  Mayence,  et  obtient,  en 

1.  Flavius  Melobaudes  ou  Merobaudes  fut  nommé  consul  Tan  375,  sous  Gratiamis 
Aug.  IV.  Au  siècle  dernier  ou  a  prétendu  faire  dériver  de  ce  nom  l'origine  des  Mérovin- 
giens. (Gibert,  Mémoh-e  à  V Académie.) 

2.  Voir  les  preuves  de  ces  détails  historiques ,  pendant  le  quatrième  et  le  cinquième 
siècle,  dans  les  auteurs  contemporains,  savoir  :  Ammien  Marcellin;  —  Lettre  de  Julicu  aux 
Athéniens;  —  Chroniques  de  saint Prosper  d'Aquitaine,  de  Prosper  Tiro  et  de  Cassiodore; 
—  les  OEuvres  de  Claudicn,  de  Salvien,  de  saint  Jérôme,  de  Zosime; —  ÏHistoriarum 
adversiis  Pacjcmos ,  lib.  VIII,  d'Orose,  disciple  de  saint  Augustin;  et  chez  les  modernes, 
Bûcher,  Laguille,  Schœpflin,  Henri  Martin,  etc. 

3.  Stilicon  , Vandale  d'origine,  était  maître  des  milices  dans  les  préfectures  des  Gaules  et 
d'Italie.  —  Claudien,  dans  sou  panégyrique  d'Honorius,  célèbre  cet  état  de  paix  sur  la  rive 
du  Rhin  que  les  Germains  n'osaient  franchir  quoiqu'elle  fût  dépourvue  de  garnisons. 

• ncc  transcat  amnem, 

•  Incustodltam  metucns  attingerc  ripam.  (De  BeHo  Getic.) 

4.  Orose,  lib.  VII  :  «Ipso  simul  motu  iminclsorum  Burgundionum.  » 

5.  Saint  Jérôme,  dans  sa  lettre  à  Ageruchie,  peint  d'une  manière  effrayante  la  dévasta- 
tion de  l'Alsace  :  «  Magontiacum ,  noblUs  quondam  civitas ,  capta  atque  subversa  est... 
n  Tornatiis,  Nemetes,  Avfjentoratus ,  trans/ati  in  Gennaniam.  »  [Alsat.  illustrât  V^.Perio- 
dus  romana,  g  169.) 

6.  Tiui-gundiones,  Burgundi.  Ammien  Marcellin  dit  (liv.  XVIIl,  chap.  u)  que  leur  territoire 
touchait  celui  des  Alémans  <i  Terminales  lapides  Alemanorum  et  Burgwidio)iuni  confinia 
n  distinguebat.  »  D'après  le  uième  auteur,  ce  peuple  prétendait  descendre  des  Romains  : 
"  Burgundi  se  esse  sobulevi  romunam  sciant.  »  (Lib.  XXVllI,  cap.  v.) 


—  196  — 

413,  la  concession  d'un  territoire  le  long  du  ^hin.  (n  Biirgondiones  partem 
«  Gallice  Rheno  conjunctam  lenerey>,  Chroniques  de  Gassiodore  et  de  Pros- 
per  d'Aquitaine,  etc.) 

Les  commentateurs  sont  divisés  d'opinion  sur  l'interprétation  de  ce 
texte.  Bûcher',  Guilliman^,  Laguille^  et  Henri  Martin"  désignent  l'Alsace, 
mais  d'après  Scliœpflin^  ce  serait  la  Suisse.  Quoi  qu'il  en  soit,  les  Bur- 
gondes  essayèrent  de  s'étendre  dans  l'intérieur  de  la  Gaule  Belgique®,  prin- 
cipalement dans  la  vallée  de  la  Moselle;  mais  après  plusieurs  combats  ils 
furent  vaincus,  en  438,  par  yElius  (général  de  Valentinien  III),  qui  avait 
les  Huns^  pour  auxiliaires.  A  la  suite  de  cette  défaite,  ils  furent  transportés, 
en  436®  ou  443,  dans  la  Savoie  (Sabaudia) ,  de  sorte  que  leur  séjour  en 
Alsace  n'aurait  dans  tous  les  cas  duré  que  23  ou  30  ans. 

Les  Alémans.^  —  Cinquième  siècle. 

Quant  aux  Alémans,  l'histoire  est  à  peu  près  muette  à  leur  égard  depuis 
la  fin  du  quatrième  siècle  jusqu'en  495  où,  unis  aux  Suèves,  ils  envahi- 
rent le  territoire  des  Ripuaires  dans  la  première  Belgique. 

Il  est  de  fait  que  les  auteurs  contemporains  qui  énumèrent  avec  assez 
de  détails  tous  les  combats  livrés  par  ^Etius  pendant  le  cinquième  siècle 
dans  l'est  de  la  Gaule,  contre  les  Burgondes  et  les  Francs,  ne  parlent  en 
aucune  façon  des  Alémans.  Malgré  ce  silence  des  historiens,  constaté  par 
Schœpflin  lui-même*",  ce  savant  antiquaire  ne  peut  admettre  que  le  peuple 

1.  Bûcher  [Belg.  rom.,  lib.  XIV,  cap.  iy)  :  «  T«  Germania  sedes  Ulis  [Burgundiones] 
«  datœ.  » 

2.  Gmllima.n  {Habspicrgiaca)  :  «Elesatiam,  certe  siiperiorem,  si  tion  iciraqice ,  Burgimdi 
«  occupaverunt.  » 

3.  Laguille  (t.  I",  liv.  III,  p.  35)  :  «  C'est  dans  l'Alsace  et  daas  une  partie  de  la  Germanie 
'<  supérieure  que  les  Bourguignons  s'établirent  du  consentement  des  Romains.  » 

4.  Henri  Martin  (t.  I",  p.  343)  :  n  En  même  temps  (413),  les  Bourguignons  s'étendent  en 
"  corps  de  nation  dans  la  première  Germanie  de  Mayence  à  la  Séquanie.  » 

5.  Als.  illustr.  (t.  ^^  p.  258).  Schœpflin  rejette  formellement  les  Burgondes  de  l'Alsace  : 
"  Burgundiones  ex  Alsatia  ubi  commiiniter  ponuntur  relegandi  sunt  forte...  « 

6.  Sidoine  Ap.  (Panégyrique  d'Avitus)  :  «  Belgam  quem  trux  Burgimdio  presserat.  » 

7.  Gassiodore,  Chr.  :  «  Quem  non  multo  post  Himni  peremerunt.  » 

8.  Bûcher  fixe  l'an  436  ;  mais  d'après  Henri  Martin  (t.  P"",  p.  358),  ce  serait  en  443  que  les 
Burgondes  auraient  été  transportés  dans  la  Sabaudia  ou  Sapaudia  (AMM.M.),  qui  s'étendait 
de  l'Isère  au  lac  de  Neuchatel,  embrassant  une  partie  de  la  Séquanie,  ce  nom  n'a  été  usité 
qu'a  partir  du  IY*'  siècle,  avant  cette  époque  la  Savoie  s'appelait  Saboia. 

9.  Le  nom  (ÏAlemania  figure  sur  la  carte  théodosienne  le  long  de  la  rive  droite  du  Rhin, 
depuis  Bregentz  [Brigantium]  jusqu'à  Argentouaria  (lieu  situé  entre  Schlestadt  et  Colmar). 
Ce  territoire  comprend  la  Souabe  transdanubienne,  le  Brisgau  et  les  villes  forestières. 

10.  Als.  illustr.,  t.  I",  §  174,  p.  220  :  «  Chronographi  illius  œtatis  quotqiiot  supersunt , 

«  Prosper  Aquitantis ,  etc Multiplia  a  Aetit  cum  Burgundionibus,  Francis,  Gothis,  qui 

"Ulis  tcmporibus  âiversas  Galliœ  partes    insederant ,  bclla  recensent,  sed  nulla   cum 
«  Alemanis....  » 


—  197  — 

qui  habitait  la  rive  du  Rhin  opposée  à  l'Alsace,  n'ait  pas  profité  de  l'invasion 
des  Vandales  pour  s'emparer  de  cette  fertile  province  si  souvent  arrosée  de 
son  sang.  Schœpflin  appuie  son  opinion  sur  quelques  vers  de  Sidoine 
Apollinaire*  dans  le  panégyrique  d'Avilus,  qui  montrent  le  Franc  maître 
de  la  première  Germanie  et  de  la  deuxième  Belgique  et  l'Aléman  établi  en 
vainqueur  sur  les  deux  rives  du  Rhin.  Je  ferai  remarquer  que  ces  vers, 
écrits  en  455,  ne  détruisent  pas  la  possibilité  de  l'occupation  de  l'Alsace 
par  les  Bourguignons  de  413  à  443,  je  puis  donc  admettre  la  probabilité 
de  cette  occupation  avec  tous  les  historiens  anciens  et  les  commentateurs 
modernes:^  Bûcher,  Laguille  et  Henri  Martin. 

Toutefois,  ainsi  que  le  dit  Schœpflin,  l'Alsace  a  conservé  une  empreinte 
alémanique  incontestable;  aussi  je  serais  porté  à  admettre  que  les  Alémans 
encore  meurtris  et  épuisés,  à  la  suite  des  nombreuses  défaites  que  les  Ro- 
mains leur  ont  fait  subir  au  quatrième  siècle,  ont  pu  rester  quelques  années 
immobiles  et  profiter  ensuite  de  l'invasion  des  Vandales  pour  occuper  sans 
bruit  quelques  cantons  de  la  deuxième  Germanie,  s'y  établir  concurrem- 
ment avec  les  Bourguignons,  puis  à  leur  départ  s'étendre  dans  toute  la 
province  à  la  faveur  de  l'invasion  des  Huns^  Cette  occupation  de  l'Alsace, 
sans  combats,  aurait  pu  être  facilement  omise  par  les  auteurs  contem- 
porains. 

Les  Francs.  —  Cinquième  siècle. 

Les  Francs,  entrés  en  406  dans  les  Gaules,  à  la  suite  des  Vandales  qu'ils 
avaient  un  instant  arrêtés  sur  le  Rhin,  envahirent  la  seconde  Belgique  et 
la  première  Germanie,  puis  vaincus  par  vEtius  en  428,  ils  se  retirent  dans 
les  forêts  marécageuses  de  la  Tongrie  et  des  environs  de  Cologne  où  ils 
trouvaient,  après  chaque  nouvelle  excursion,  un  refuge  assuré  contre  les 
armées  romaines.  Rien  n'annonce  qu'ils  aient  pénétré  dans  la  deuxième 
Germanie  jusqu'au  moment  où,  vainqueurs  des  Alémans  et  des  Suèves  à 
Tolbiac  en  496,  ils  furent  définitivement  les  maîtres  de  l'est  de  la  Gaule. 

1.  Sidoine  Ap.  [Carminé  Vil)  : 

'  Franc  us  Qermanum  primunx,  BeJgamque  secvndam, 
•  Sternehat,  Rhenumque  ,  ferox  AUemane  ,  bibebas 
t  Romanis  ripis  ,  et  iitroqiie  superbus  in  agro 
t  Yel  civis,  vel  victor  er  as." 

Trad.  de  Ravenèz  :  «  Le  Franc  opprimait  la  Germanie  première  et  la  seconde  Belgique,  et 
«toi, féroce  Aléman,  tu  buvais  les  eaux  du  Rhin  sur  les  rives  romaines  et  tu  apparaissais 
«superbe  sur  les  deux  bords  comme  citoyen  et  comme  vainqueur.  » 

Ce  panégyrique  fut  écrit  en  455,  sous  Avitus,  empereur. 

2.  Parmi  les  archéologues  allemands  qui  ont  adopté  cette  opinion  je  citerai  le  D'' Linden- 
schmitt ((  im  folgenden  jähre  (413)  wurde  den  Burgîoideti  die  gegend  um  Mainz  und  des  be- 
«  nachharten  Galliens  zu  ihren  Sitzen  eingeräumt')  (das  germanisch  Todtenlager,  etc.p.45.) 

3.  Beatus  Rhenanus  {Ilisloria ,  pars  I,  seculo  V,  p.  258),  fixe  au  temps  d'Attila  l'entrée 
des  Alémans  dans  les  Gaules 


—  198 


CONCLUSION. 

Je  conclurai  de  cet  exposé  que  l'Alsace  paraît  avoir  été  occupée  au  cin- 
quième siècle,  d'abord  parles  Burgondes  en  vertu  d'un  traité,  puis  par  les 
Alémans  qui  s'y  seraient  introduits  sans  combats,  enfin  par  les  Francs, 
vainqueurs  en  496  des  Alémans;  c'est  donc  à  ces  trois  peuples  que  l'on 
peut  attribuer  les  sépultures  germaniques  dont  j'ai  donné  la  description. 

Les  cimetières  qui  entourent  les  ruines  des  palais  des  rois  d'Austrasie, 
depuis  Molsheim  jusqu'à  Wasselonne  et  qui  se  distinguent,  comme  celui 
d'Odratzheim  surtout,  par  la  régularité  et  la  bonne  construction  de  leurs 
tombes  ainsi  que  par  la  richesse  des  armes  et  des  bijoux,  annoncent  évi- 
demment un  peuple  victorieux,  établi  à  demeure  sur  le  sol  qu'il  a  con- 
quis; par  ce  motif  ils  doivent,  ce  me  semble,  appartenir  à  la  race  franque 
et  dater  de  la  fin  du  cinquième  ou  du  commencement  du  sixième  siècle. 

Dans  les  cimetières  de  Hochfelden  et  de  Kœnigshoven  où  j'ai  reconnu  les 
armes  du  cavalier  germain,  je  serais  porté  à  voir  des  guerriers  francs  ou 
alémans  auxiliaires  des  Romains. 

Quant  aux  tombes  qui  s'étendent  dans  le  canton  du  Kochersberg-,  de 
Küttolsheim  à  Brumath ,  les  renseignements  que  j'ai  recueillis  ne  sont  pas 
sufTisanls  pour  préciser,  d'une  manière  positive,  la  tribu  germanique  à  la- 
quelle elles  appartiennent. 

Toutefois,  je  ferai  remarquer  que  la  population  agricole  du  Kochersberg 
qui  s'est  maintenue,  jusqu'à  nos  jours,  dans  une  sorte  d'isolement  au  milieu 
de  l'Alsace,  a  un  caractère  et  des  mœurs  qui  offrent  beaucoup  de  rapport 
avec  ceux  que  les  auteurs  anciens  attribuent  aux  Burgondes'  qui,  «  malgré 
«leur  taille  colossale,  leur  voix  rauque,  leur  figure  rude  et  grossière, 
«étaient  pacifiques,  faciles  à  vivre,  et  n'avaient  ni  l'arrogance,  ni  la  fureur 
«guerrière  des  Francs»;  d'après  Orose  (liv.  VU,  chap.  xxxii)  :  «ils  Irai- 
«taient  les  Gaulois,  parmi  lesquels  ils  vivaient,  moins  en  sujets  qu'en 
«  frères.  » 

Ce  caractère  tout  particulier  de  l'habitant  du  Kochersberg,  déjà  signalé 
par  plusieurs  archéologues^,  me  porterait  à  y  voir  un  indice  pour  attribuer 
les  tombeaux  que  ce  canton  renferme,  à  une  tribu  Burgonde  dont  le  sé- 
jour en  Alsace  aurait  pu  se  prolonger  après  le  départ  du  gros  de  la  nation, 
à  la  faveur  des  troubles  incessants  de  cette  époque. 

1;  Henri  Martin,  Histoire  de  France,  1. 1",  p.  353.  —  Augustin  Thierry,  Lettres  sur  l'his- 
■  toire  de  Fra?ice,  p.  101. 

2.  Scliweighaeuser,  Mémoires  manuscrits  de  la  bibliothèque  de  Strasbourg. 


—  199  — 

Tels  sont  les  résultats  de  cette  élude  que  je  soumets  à  l'appréciation  du 
comité  et  sur  laquelle  j'appelle  les  rectifications  des  archéologues. 

Dans  l'esquisse  que  je  viens  de  tracer  des  événements  qui  firent  naître, 
au  cinquième  siècle,  l'assimilation  des  races  gauloises  et  germaniques  dans 
l'est  de  la  Gaule,  j'ai  cherché  non  pas  à  comhler  la  lacune  signalée  par 
notre  savant  Schœpflin ',  dans  l'histoire  de  l'Alsace  de  cette  époque;  cela 
eût  été  au-dessus  de  mes  forces;  mais  j'ai  essayé  seulement  de  résumer  le 
dire  des  auteurs  contemporains  et  de  coordonner  les  appréciations  des 
commentateurs  sur  cette  page  si  obscure  de  notre  histoire. 

1.  Als.  illustr. ,  t.  l".  Periodus  romanus ,  §§4,6:  "  Post  hœc  ingens  Alsaticœ  historiœ 
«  hiatus  exoritur.  » 

Colonel  DE  MORLET. 


ANALYSE  D'UNE  CHARTE 

DATÉE  Du  26  MAI  141S, 

FAISANT  MENTION,  ENTRE  AUTRES, 

DE  RAMSHARDT,  DE  CRONENBRUCH  ET  DE  BUCHHURST, 

TROIS  LIEUX  HABITÉS  DANS  LE  CANTON  DE  WOERTH,  QUI  N'EXISTENT  PLUS. 


La  mairie  de  Laubach  est  en  possession  d'un  acte  notarié,  écrit  en  latin 
sur  parchemin,  qui  n'est  point  sans  intérêt;  il  remonte  au  commencement 
du  quinzième  siècle,  portant  la  date  du  26  mai  1415.  C'est  une  enquête 
publique,  rédigée  à  la  requête  de  Symondus  Krieg,  abbé  de  Walbourg,  et 
particulièrement  de  Jean  Stapp,  hôtelier  de  la  même  abbaye,  à  la  suite 
d'une  comparution,  à  Bâle,  devant  Rudolphe  de  Terwiler,  doyen  du  Cha- 
pitre de  la  cathédrale ,  juge  assermenté  pour  la  conservation  des  droits  et 
privilèges  de  l'abbaye  de  Seltz,  qui  les  avait  cités,  dans  cette  ville,  pour 
une  affaire  de  dîme.  —  Le  lointain  et  dispendieux  déplacement  a  eu  heu 
non  sans  d'amères  doléances  de  la  part  des  intimés. 

Le  parchemin  constate  que  Laubach,  Ramshardt,  Cronenbruch,  Buch- 
hurst,  la  cour  appelée  Ackerhoff,  ainsi  que  celle  dite  Spittalhoff,  étaient 
exempts,  francs  et  hbres  de  toute  dîme  envers  le  monastère  de  Sainte- 
Adélaïde,  de  l'ordre  de  Saint-Benoît,  à  Seltz.  Il  n'indique  point  la  position 
topographique  de  Ramshardt,  mais  il  fait  connaître  que  ce  lieu  était  pourvu 
d'une  bergerie,  et  que  la  dîme  du  sang  en  était  réclamée  par  l'abbaye  de 
Seltz  :  le  berger  seul  donnait  la  dîme,  mais  seulement  de  ses  propres 
agneaux.  Cronenbruch  se  trouvait,  d'un  côté,  près  de  la  forêt  Sainte,  de 
l'autre,  près  de  la  rivière  appelée  Eberbach.  Buchhurst  était  situé  sur  le 
bord  de  la  Sure,  à  l'opposite  de  Morsbronn,  près  de  Gunstett.  La  cour  dite 
Ackerhoff,  ainsi  que  celle  dite  Spittalhoff,  se  trouvaient  dans  les  dépen- 
dances de  l'abbaye  de  Walbourg.  De  tous  ces  heux,  il  n'existe  plus  que 
le  village  de  Laubach. 

Suivant  une  autre  charte,  datée  du  troisième  jour  des  calendes  de  sep- 
tembre de  l'an  1378,  conservée  aux  archives  de  la  même  mairie,  en  vertu 
de  laquelle  l'abbaye  de  Walbourg  avait  acquis  de  l'abbaye  de  Neubourg  le 


—  201   — 

village  de  Lowpbach  (Laubach)  au  prix  numéraire  payé  comptant  de  quinze 
cents  livres  deniers,  valeur  de  Strasbourg,  l'abbaye  de  Walbourg  fournis- 
sait annuellement  à  l'abbaye  de  Seltz  douze  rézaux  de  froment,  mesure  de 
Pfaffenhoffen ,  en  place  de  la  dîme  de  Laubach.  Il  est  très-vraisemblable 
que  la  mesure  de  capacité  de  Pfaffenhoffen  servait  à  cette  époque  pour  dé- 
terminer les  mesures  normales  dans  les  transactions  publiques;  cette  charte 
tendrait  au  moins  à  le  prouver. 

Peut-être,  n'est-il  pas  hors  de  propos  de  noter  ici  que  l'on  voit  encas- 
trées, sur  l'une  des  façades  de  la  maison  commune  de  Pfaffenhoffen,  deux 
inscriptions  trois  fois  séculaires,  année  par  année,  en  langue  allemande, 
taillées  dans  deux  pierres  que  l'on  a  retirées  des  murs  d'enceinte  du  bourg; 
en  voici  le  sens  :  en  1563,  le  rézal  de  seigle  a  été  vendu  trois  florins  et 
demi;  en  1564,  il  l'a  été  huit  schillings.  Sur  les  deux  pierres,  le  prix  est 
indiqué  en  signes  usités  alors.  Une  transcription  exacte  des  deux  inscrip- 
tions aurait,  ce  me  semble,  un  certain  intérêt. 

Les  deux  chartes  que  nous  venons  de  citer  ne  laissent  pas  de  doute 
sur  la  culture  de  la  vigne,  à  Mertzwiller,  aux  quatorzième  et  quinzième  siè- 
cles. Elles  parlent  notamment  de  six  arpents,  désignés  sous  le  nom  de 
Busen-Reben,  du  nom  d'un  certain  colon,  appelé  Busen,  qui  les  avait 
plantés  :  ce  vignoble  se  trouvait  au  pied  ou  sur  la  déclivité  occidentale  de 
la  montagne  de  Laubach.  La  charte  de  1378  nous  apprend  que  l'abbaye  de 
Walbourg  était  tenue  d'en  servir  au  vice-pléban  d'Oberhoffen  une  rente 
annuelle  et  perpétuelle  d'une  charge  de  vin  {redditiis  unius  carratœ  vini), 
prise  du  pressoir  à  la  vendange,  et  d'en  fournir  annuellement  au  château 
des  Sigelmann,  à  Ueberach,  un  sol  denier,  valeur  de  Strasbourg,  et  deux 
poulets  noirs  :  ce  manoir  est  le  même  que  celui  connu  sous  le  nom  de 
Niedermodernburg. 

Le  document  de  1415  annote  en  termes  formels  la  vacance  du  saint- 
siége  en  mai  de  ladite  année.  Ainsi,  ni  Pierre  de  Lune,  qui  portait  la  tiare 
sous  le  nom  de  Benoît  XIII,  ni  Grégoire  XII,  qui  se  disait  également  sou- 
verain pontife,  ni  Jean  XXIII,  qui  occupait  en  même  temps  la  chaire  de 
Saint-Pierre,  aucun  de  ces  trois  n'est  reconnu  ici  comme  pontife  légitime. 
Au  reste,  Jean  XXIII,  que  l'histoire  ecclésiastique  admet  comme  le  vrai 
pape,  avait  déclaré,  le  2  mars  précédent,  dans  une  session  du  concile  de 
Constance,  renoncer  au  pontificat  pour  la  paix  de  l'Église,  dans  ces  temps 
malheureux  du  schisme  d'Occident. 

De  plus,  ce  document  atteste  l'existence  d'une  hôtellerie  à  Walbourg  : 
on  sait  que,  dans  les  grandes  abbayes,  on  appelait  ainsi  le  corps  de  logis 
destiné  aux  étrangers;  ce  bâtiment  portait  aussi  le  nom  de  divcrsorinm. 


—  202  — 

Enfin,  il  [)roduit  les  noms  d'une  série  de  témoins,  parmi  lesquels  un  cen- 
tenaire, de  Griesbach,  de  Mertzwiller,  de  Forstheim,  de  Morsbronn ,  de 
Ramshardt,  de  Dürrenbach  et  de  Gunstett. 

L'audition  des  témoins  et  la  rédaction  de  l'acte  ont  eu  lieu  au  réfectoire 
de  l'abbaye  de  Walbourg,  vers  une  heure  de  l'après-midi,  en  présence  de 
Symondus  Lapistidus*,  archiprêtre  du  Chapitre  rural,  résidant  à  Pfaffen- 
lioffen,  de  Jean  Wernherus  dit  aussi  Hirsemann,  chanoine  de  l'église  de 
Saint-Arbogast,  de  Surbourg,  de  Jean  Cuncmann,  recteur  de  l'église  pa- 
roissiale de  Gumprechteshoffen,  de  Jean  Rasor\  chapelain  de  la  chapelle 
de  Saint-Léodegar,  àHiittenheim,  de  Jean  Kyelendorff  et  de  Fritschemann 
Rasor',  ces  deux  derniers  de  Ilaguenau.  Les  trois  premiers  ont  appendu 
leurs  sigillés,  présentement  enlevés  de  la  pièce. 

La  mention  faite  ici  de  cachets  propres  aux  recteurs  des  paroisses  n'a 
rien  qui  puisse  étonner,  puisque  nous  savons  que,  dès  l'an  1238,  le  con- 
cile de  Cognac  ordonna,  par  son  seizième  canon,  que  chaque  église  pa- 
roissiale aurait  son  sceau  propre.  Le  canon  porte  en  titre  :  JJt  qmlibet  sa- 
cerdos  habeat  suum  sigillum  :  que  chaque  prêtre  (curé -recteur)  ait  son 
sceau. 

L'acte  a  été  reçu  par  Albert  Vogel,  d'Essling,  notaire  apostolique  du 
palais  épiscopal,  demeurant  à  Strasbourg,  aptiblicus  imperiali  audoritate 
ac  curiœ  argentinensis  juratus  notarius;))  il  se  qualifie  en  outre  de  cle- 
ricus  conjugatus  Constantiensis  diœcesis. 

La  périphérie  graphique,  mise  au  bas,  me  paraît  digne  de  remarque  : 
c'est  une  espèce  de  vase  fait  avec  la  plume,  sur  le  pied  duquel  se  ht  le  nom 
du  notaire  en  ces  lettres:  S.Alberti  Vogel,  c'est-à-dire  Signum  Alberli  Vogel. 
La  partie  haute  du  vase  forme  une  figure  orbiculaire,  au  milieu  de  laquelle 
est  dessiné  un  oiseau,  tenant  du  bec  un  fil  auquel  est  suspendue  la  minus- 
cule a.  Le  monogramme  symbohque  était  en  usage  chez  d'autres  notaires 
du  moyen  âge. 

La  pièce  n'est  pas  revêtue  d'autre  signature;  à  cette  époque,  l'apposition 
des  sceaux  suffisait  encore  pour  donner  aux  titres  la  forme  authentique. 
La  lettre  initiale  du  parchemin  ne  mérite  aucune  observation. 

1.  Nom  patronymique,  très  vraisemblablement  latinisé  selon  l'usage  du  temps. 

Jér.  Ans.  Siffer, 
curé  de  Weyershcim. 


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SÉPllTURES  ANCIENNES  DÉCOUVERTES  DANS  LES  ENVIRONS  DE  STRASBOURG. 


FIBULE  EN  ARGENT,  Vi 

Tomlies  d'Odratziieim.)  voirPl  ChromoliLli''"^ 

l"  livraison 


ANNEAU  EN  BRONZE, Vi. 
iTomlies  d'OàraUlieim). 


bûi  Tk.Siegfnaä.i'iie  de  IQulre,*  aSlraôhour? 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


PAGES. 


Notice  sur  quelque,?  découvertes  archéologiques  effectuées  dans  les  can- 
tons de  Saar-Union  et  de  Drulingen;  par  M.  le  colonel  de  Morlet, 

avec  gravures  et  une  planche  chromo-lithographiée 1 

Découverte  de  sépultures  antiques  à  Obernai;  par  M.  L.  Levrault 7 

Mémoires  sur  la  grande  voie  romaine  de  Brumath  à  Sellz  pour  la  portion 

de  Weitbruch  à  Kaltenhausen,  par  M.  Jér.  Ans.  Siffer 14 

Argentovaria,  station  gallo-romaine  retrouvée  à  Grusenheim;  parM.  Coste, 

avec  une  gravure  et  une  carte  lithographiée 18 

Notice  historique  sur  l'hôtel  de  ville  d'Obernai  et  sur  les  anciens  empla- 
cements judiciaires  dits  Seelhof  el  Laube;  par  M.  l'abbé  Gyss  ...       25 
Les  fortifications  d'Huningue  ;   par  M.  Sabourin  de  Nanton ,  avec  une 

gravure 44 

Lettre  de  frère  Sigismond  à  l'abbé  Barthélémy  d'Andlau  sur  les  anciennes 

tapisseries  de  l'abbaye  de  Murbach;  par  M.  X.  Mossmann 49 

Une  excommunication  de  Mulhouse  au  treizième  siècle  ;  par  M.  Louis  Spach.      55 

Herbitzheim  ;  par  M.  Jules  Thilloy,  avec  une  carte  lithographiée 69 

L'église  de  Walbourg;  par  M.  l'abbé  Straub,  avec  trois  gravures 97 

Note  sur  la  pierre  aux  armes  de  Jean  Hammerer;  par  M.  le  baron  de 

Schauenburg,  avec  une  gravure 106 

Notes  sur  les  ruines  de^villas  romaines  près  d'Oberbronn;  par  M.  Siffer.  .     109 
Helvetus  et  ses  environs  (Ehl  près  ßenfeld)  au  cinquième  siècle;  par 
M.  Napoléon  Nicklès  : 

Avant-Propos 113 

Chapitre  L  — Topographie 114 

Chapitre  IL  —  Recherches  archéologiques 119 

Chapitre  IIL  —  Helvetus,  ville  gallo-romaine 150 

Saint  Léon  IX,  le  pape  alsacien,  par  M.  L.  Spach 159 

La  Marche  d'Aquilée,  par  M.  P.  Ristelhuber 184 

Notice  sur  les  cimetières  gaulois  et  germaniques  découverts  dans  les  en- 
virons de  Strasbourg,  par  M.  le  colonel  de  Morlet 188 

Analyse  d'une  charte  datée  du  26  mai  1415,  faisant  mention,  entre  autres, 
de  Ramshardt,  de  Cronenbruch  et  de  Buchhurst;  par  M.  Jér.  Ans. 
Siffer 200 


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