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Full text of "Dictionnaire de la Bible ..."

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Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/pt1dictionnaired05vigo 


DICTIONNAIRE 

DE    LA    BIBLE 


TOME    CINQUIEME 
PE         Z 


ENCYCLOPEDIE 

DES 


SCIENCES    ECCLÉSIASTIQUES 

Il il      l'Ail 

LES  SAVANTS  CATHOLIQUES  LES  PLUS  ÉMINENTS 
DE    FRANCE    ET    DE    L'ÉTRANGER 


1°   DICTIONNAIRE  DE  LA   BIBLE 

Publié  par  F.  VIGOUROUX,  prêtre  de  Saint-Sulpice 

1  '  [nsl atlioliquc  de  Paris,  Secrétaire  «le  la  f  ommissiu/t  biblique 


T   DICTIONNAIRE   DE  THÉOLOGIE  CATHOLIQUE 

Commencé  sous  la  direction   de  A.  VACANT,  prof,  au  Sein,  de  Nancy, 
Continué  sous  celle  de  Eug.   MANGENOT,  professeur  à  l'Institut  catholique  de  Pans. 


3°  DICTIONNAIRE  D'ARCHEOLOGIE  CHRÉTIENNE 

ET   l>K    LITURGIE 

Publié  par  le  R"'    dom  Fcrn.  CABROL,  abbe  de  Farnborough,  et  doni  H.   LECLERCQ. 

i"   DICTIONNAIRE    D'HISTOIRE   ET  DE  GÉOGRAPHIE 

ECCLÉSIASTIQUES 

Public  par  Mgr  Alfred  BAUDRILLART,  recteur  de  l'Institut  catholique  du  Pans 
Albert  VOGT,  docteur  es  lettres,  et  Urbain  ROUZIÈS. 

.">"   DICTIONNAIRE   DE   DROIT  CANONIQUE 

En  préparation) 


DICTIONNAIRE 

DE  LA   BIBLE 


C  O  N  T  F  .\"  A  .N  T 

TOUS    LES    NOMS    DE    PERSONNES,    DE    LIEUX,    DE    PLANTES,    DANIMAUX 

MENTIONNÉS    DANS    LES    SAINTES    ÉCRITURES 

LES    QUESTIONS    THÉOLOGIQUES,    ARCHÉOLOGIQUES,    SCIENTIFIQUES,    CRITIQUES 

RELATIVES    A    L  ANCIEN    ET    AU    NOUVEAU    TESTAMENT 

ET    DES    NOTICES    SUR    LES    COMMENTATEURS    ANCIENS    ET    MODERNES 


PU  11  LIE     PAH 


F.  VIGOUROUX 


PUETKE    LIE    SUiNT-SULPICE 


AVEC    l,E    CONCOURS    D'UN    GRAND    NOMBRE    DE    CO 1. 1,  ALSOR  ATEUKS 


TOME   CINQUIÈME 

CONTENANT     .'ili!)     ILLUSTRATIONS 


PE 


/ 


BIBLIOTHÈQUES 


PARIS  ^,ty  of  <*^ 

LETOUZEY    ET    ANE,    ÉDITEURS 

76'"%     RUE     DES     SAINTS-PÈRES,      VIIe 


1912 

nus    int  n  it s   mis  i:  iiv  es 


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Ottaviens^* 


^ 


H 

Kl 


TRANSCRIPTION  DES  CARACTÈRES  HÉBREUX  EN  CARACTÈRES  LATINS 


Alepli 

Reth 

Gliimel 

Daleth 
Bé 

Yav 

Zaïn 

llelh 

Teth 

Iod 

Caph  - 

Lamed 


s       '  (esprit  doux) 
=      6 

:      g  (doitseprononcer 
toujours  dur) 

-,      ,1 
-      h 


h  (aspiration  forte) 

y  (consonne),  i 

k 

I 


Mero  d,  - 

Nun  7,  : 
Samedi  : 
Ain 

Pé  s 

Phé     -.  z 
Tsadé  y.  S 
Qoph        - 
Resch 
Sin  f 

Schin      tf 

Thav        n 


(esprit  dur! 


(ts) 


S  (rli,  comme  dans 
citerai) 

! 


K  a  met  s 

T 

à 

Patach 



a 

Ségol 

-^~ 

è 

Cliirek  gadol 

•  — 

i 

Chirek  qaton 

— — 

i 

Cholern 

• 

ii 

Kamets  katoupli 

T 

a 

Schoureq 

1 

Ct 

ou  long) 

Kibbouts 

-T— 

k 

(ou  bref) 

Scheva  mobile 

— 

e 

Chateph  patacb 

— — 

â 

Chateph  ségol 

-TT— 

r 

Chateph  kamets 

-=— 

ii 

TRANSCRIPTION    DES   CARACTÈRES   ARABES    EN    CARACTÈRES    LATINS 


S 
9 
10 
11 
12 
13 
14 

15 

10 
17 
18 
19 
20 
21 
22 
23 
2i 
25 
26 
27 


NOM 


Élif  .  . 

Ra.  .  . 

Ta.   .  . 

Ta.   .  . 

Djim.  . 

Ha.  .  . 
Ha.  . 
Dal  . 

Dal  .  . 

Ra.  .  . 

Za.    .  . 

Sin  .  . 

Schin  . 

Sàd  .  . 

Pâd  .   . 

Ta.    .  . 

Zâ.    .  . 

Ain  .  . 

Ghaïn  . 

Fa.    .  . 

Qoph  . 

Kaph  . 
Là  m 

Mim.  . 

Noun  . 

Ha    .  . 
Ouaou. 

Va.  .  . 


FORME 


Fatha  .  . 
Kesra  .  . 
Dhamma. 


1 

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1 

l 

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PRONONCIATION 


(//(  ou  y 

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h 
1 

m 
h 
h 
h 


esprit  doux. 

b. 

t. 

Ili  anglais  dur,  le  6  grec. 

g  italien  de  giorno.  En  Egypte  et  dans  quelques 

parties  de  l'Arabie,  comme  g  dans  garçon. 
aspiration  forte. 

aspiration  gutturale,  j  espagnol,  ch  allemand. 
d. 

lit  anglais  doux,  le  S  grec, 
r. 
z. 

s  dur. 

eh,  dans  citerai. 
s  emphatique,  prononcée  avec  la  partie  antérieure 

de  la  langue  placée  contre  le  palais, 
d  emphatique. 
t  emphatique. 
/.  emphatique. 

esprit  rude  :  7  hébreu,  son  guttural. 
r  grasseyé, 
f. 

k  explosif  et  très  guttural, 
k. 
1. 
m. 
n. 

aspiration  légère, 
ou  français,  w  anglais. 

■-y- 


voyeli.es 

n,  é  avec  élif,       =   ''. 

i,  é  avec  i/o.  i- 

ou,  o         avec  ouaou,  =  où. 


LISTE   DES   COLLABORATEURS 


Dll    TOME   CINQUIÈME 


MM. 

lUTiFFOi    Pierre  (Mo').  l"''^'1  ,Il'  la  Maison  de  Sa  S,ain" 
BuKo^«thW^e  et  è.lettfe.,.«c«n  recteur 

de  I  Institut  catholique  de  roulouse. 
BEDRLin  Emile    ;■  .  docteur  es  lettre  ,  curé  de  Notre- 
Dame  d'Auteuil,  à  Paris. 
Bliard  Pierre,  bibliographe,  à  Paris. 
Corrierri  .  à  Paris. 

FF.™   (J.-J-),  chanoine  prémontré,  à  Overboae  (Bel- 
gique). 

, ,  Louis-Claude,  prêtre  de  Saint-Sulpice,  profes- 

,,,  honoraire  à  l'Institut  catholique,  Pans. 

I .  I;l  .,  (le  r,  p.),membi e  la  Commission  biblique,  à 

R  ime. 
Hkid„  Louis,  ancien    professeur  à  l'école  des  Etudes 

bibliques,  à  .Jérusalem. 
HBIffiRniu  (li.  P.  dom  Benjamin),   bénédictin  de^a 
I ,,    ationdeFrance.à  Ravenswood  Ryde  (Angle- 
terre). 
Hv  Félix,  professeur  de  botanique  à  la  Faculté  catho* 
lique  d'Angers. 

In ii  (Augustin),  prêtre  à  Colmar. 

Ugier(R.  P.  Camille),  s.  J.,au  collège  de  la  Sainte- 
Famille,  au  Caire  (Egypte). 
L,  r,AC]  ancien  aumônier  de  la  Marine. 
I  egi  mt.k  Alphonse  (Mur),  docteur  en  théologie,  doyen 

de  la  Faculté  de  théologie  d'Angers. 
i,    ;  ,,,,  Henri,  curé  de  Saint-Étienne-du-Mont,  Paris. 

I.,  Vl  . , , ,  ,  Eugène,  prêtre  de  Saint-Sulpice,  professeur 
d'Écriture  Sainte  ■  l'école  supérieure  de  théologie, 
Paris. 


MM. 
Mangenot  Eugène,  professeur  d'Écriture  Sainte  à  l'Ins- 
titut catholique  de  Paris. 
Marie  Jules,  professeur  d'Écriture  Sainte  à  l'École  supé- 
rieure de  théologie,  à  Ba-yeux. 
Marucchi    Horace,   professeur  au  séminaire  pontffical 
de   l'Apollinaire,  à  Home,  bibliothécaire  a  la  Biblio- 
thèque vaticane. 
Miskgian  Jean  (Ma'))  Constantinople. 
MOLINl  (H.   P.  Augustin),  Frère  mineur,  à  Home. 
Montagne  (J.),  à  Blackburn  (Angleterre). 
N'au  François,    professeur   à    l'Institut    catholique   de 

Paris. 
Pannier  Eugène,  professeur  d'archéologie  et  de  lan- 
gues orientales  à  la  Faculté  catholique  de  Lille. 
Parisot  (li.  P.  Jean),  à  Plombières-les-Bains. 
PEREIRA  José  liasilio,  chanoine,  Bahia    Brésil  . 
!,,.  0nne     le   P..   P.   dom),   bénédictin,    Ravenswood 

Ryde  (Ile  de  Wight). 
Pp.at  Ferd., ancien  professeur  d'Écriture  Sainte,..  Paris. 
Régnier  Adolphe,  bibliothécaire  à  l'Institut  de  France, 

à  Paris. 
K,  gnier  Alphonse,  bibliothécaire  al'lnstitul  de  France. 

Paris. 
Uiv  Octave,  du  clergé  de  Paris. 
SEDLACEK  .laroslaus,  professeur  à  Prague. 
Toi  SSAINT  Constantin,  professeur  à  l'Université  catho- 
lique, à  Lille. 
Van   DEN  GllEYN  (H.    P.   Joseph),   de  la   Compagnie  ,1e 
Jésus,  conservateurdes  Manuscrits  de  la  Bibliothèque 
royale,  à  Bruxelles. 


DICTIONNAIRE 

DE  LA  BIBLE 


PÉ,  s,  dix-septième  lettre  de  l'alphabet  hébreu.  Son 
nom  signifie  «  bouche  ».cf.  le  grec  lit,  mais  les  formes 
primitives  de  ce  caractère  dans  l'alphabet  sémitique 
n'ont  rien  qui  rappelle  la  forme  de  la  bouche.  Cette 
lettre  a  toujours  eu  chez  les  Hébreux  une  double  pro- 
nonciation, l'un  aspirée,  comme  celle  du  ?  grec  par 
exemple  dans  -t-n.  'Ofir,  Ophir,  et  celle  du  p,  ainsi 
que  l'attestent  les  transcriptions  grecques  des  mots 
--:-z.  -i'/lxï,  «  concubine;  .1  -:■:".  ïâffiti?,  «  jaspe;   » 

V  v  ■  V  :  T 

D2-2,  y.ij>7toc;o;;  :i:,  Perse.  Les  Massorètes  distinguent 
t  :  -  -  t 

le  Plié  aspiré,  s,  du  Pé,  par  un  daguesch  doux,  2.  Saint 
Jérôme  transcrit  le  p  dur  comme  le  plié  par  ph  dans  les 
noms  propres,  Phihahiroth,  Phithom,  au  lieu  de  Pi- 
hahïrôt,  Pithorn,  etc.,  excepté  dans  le  premier  élément 
du  nom  de  Putiphar  (Septante  :  nereçpifjs)  dans  Palx- 
stini,  Exod.,  xxm,  31,  etc.,  paradisus,  pascha,  Persa, 
Perses,  Persis. 

PEARCE  Zacharie,  théologien  anglican,  né  à  Lon- 
dres le  8  septembre  1690,  mort  à  Little-Ealing  le 
29  juin  1774.  Ses  premières  études  se  firent  à  West- 
minster, puis  il  alla  au  collège  de  la  Trinité  à  Cam- 
bridge.  Il  s'appliqua  tout  d'abord  à  l'étude  des  clas- 
siques et  se  distingua  comme  philologue.  Il  publia  une 
édition  du  traité  De  sublimitate  de  Longin  et  des  deux 
ouvrages  de  Cicéron  De  oratore  et  De  officiis.  Entré 
dans  les  rangs  du  clergé  anglican,  il  fut  chapelain  du 
lord  chancelier  Parker.  Après  avoir  rempli  divers  minis- 
tères il  devint  en  1739  doyen  de  Winchester,  puis  en 
1748  évêque  de  Eangor  et  en  1756  de  Rochester  et  doyen 
de  Westminster.  Le  seul  ouvrage  que  nous  ayons  à 
mentionner  de  cet  auteur  est  le  suivant  :  A  Commen- 
tant with  notes  on  the  four  Evangelists  and  tke  Aels 
of  the  Apostles,  together  wilh  a  new  translation  of  St. 
Paul's  firsl  Epistle  to  the  Corinthians,  with  a  para- 
phrase and  notes  to  which  areadded  other  theologieal 
pièces,  2  in-4°,  Londres,  1774.  En  tête  de  cet  ouvrage 
se  trouve  une  vie  de  L.  Pearce  par  Jean  Derby.  —  Voir 
W.  Orme,  Bibliotlieea  biblica,  p.  343. 

B.  Heurtebize. 
PEARSON  Jean,  théologien  anglican,  né  en  1613 
à  Great  Snoring  dans  le  comté  de  Norfolk,  mort  à 
Chester  le  16  juillet  1686.  Il  étudia  au  collège  d'Eton 
puio  à  Cambridge  et  entra  dans  les  ordres  en  1639.  Il 
obtint  une  prébende  à  Salisbury  et  devint  chapelain  du 
lord  chancelier  Finch,  puis  ministre  à  Tborrington 
dans  le  comté  de  Sullolk,  et  à  Saint-Clément  de  Lon- 
dres. Dans  ce  dernier  poste  il  prononça  une  série  de 
sermons  publiés  sous  le  titre  de  Exposition  of  the 
Creed  qui  le  rendirent  célèbre.  Charles  II  le  combla 

DICT.  DE  LA   BIBLE. 


d'honneurs.  En  1660  il  avait  une  prébende  à  Ely,  puis 
devenait  archidiacre  du  Surrey,  maître  du  collège  de 
la  Trinité  à  Cambridge,  et  en  1673  évêque  de  Chester. 
Outre  son  Exposition  of  the  Creed,  in-4°,  Londres, 
1659,  on  a  de  J.  Pearson  des  Annales  Paulini  ou  disser- 
tation critique  sur  la  vie  de  saint  Paul,  ouvrage  publié 
après  sa  mort  dans  ses  œuvres  posthumes,  in-4",  Londres, 
1688.  Une  édition  en  a  été  publiée  sous  le  titre  :  An- 
nales of  St.  Paul,  translatai  with  geographical  and 
crilical  notes,  in-12,  Cambridge,  1825.  —  Voir  W. 
Orme,  Bibl.  biblica,  p.  343;  Chamber's  Encijlopœdia, 
t.  vu  (1901),  p.  828.  B.  Heurtebize. 

PEAU  (hébreu  :  'ôr,  et  une  fois,  Job,  xvi,  16  :  géléd; 
Septante  :  5epu.ce;  Vulgate  :  cutis,  pellis),  membrane 
appliquée  sur  la  surface  du  corps  de  l'homme  et  d'un 
grand  nombre  d'animaux. 

1"  La  peau  de  l'homme.  —  Dieu  a  revêtu  l'homme 
de  peau  et  de  chair.  Job.  x.  11.  La  peau  de  l'homme  a 
sa  couleur  propre,  suivant  les  races,  et  l'Ethiopien  ne 
saurait  changer  la  couleur  de  sa  peau.  ,1er. ,  xm,  23. 
Job,  xvi,  16,  a  cousu  un  sac  sur  sa  peau,  c'est-à-dire  ne 
fait  plus  qu'un  avec  le  deuil  et  la  souffrance.  La  mala- 
die fait  que  les  os  sont  attachés  à  la  peau  et  à  la  chair  et 
que  l'on  n'a  que  la  peau  sur  les  dents,  Job,  xi.x,  20, 
expressions   qui    indiquent    une    excessive    maigreur. 
Dans  le  même  sens,  l'épreuve   use  la   chair  et  la  peau. 
Lam.,  m,  4.  La  faim  la  rend  brûlante  comme  un  four, 
Lam.,    v,    10,    à  cause    de  la  fièvre  qu'elle   engendre. 
Cicéron,  Pro  leg.  agrar.,  11,  34,  93,  dit  que  l'affamé  est 
macie  torridus,  brûlé,  desséché  de  maigreur,   et  Quin- 
tilien,  Declam.,  12,  parle  de  Yignea  famés,  une  faim 
brûlante.  Michée,  m,  2,  3,  accuse  les  riches  cupides  et 
injustes  d'arracher  la  peau  du  corps  aux  pauvres  gens. 
Le  prophète  emploie  ici  cette  expression  dans  le  sens 
ligure,   pour  montrer  qu'on  enlève  aux  faibles  ce  qui 
leur  appartient   le   plus   indiscutablement,  ce  qui  fait 
partie  de  leur  propre  substance.  Les  Assyriens  se  plai- 
saient à  écorcher  en  réalité  leurs  ennemis  vaincus;  ils 
ont  plusieurs   fois  reproduit  sur  leurs  monuments  ce 
cruel   spectacle  (fig.   1).   Cf.  Botta,  Le  monument   de 
Ninive,  t.  11,  pi.   120.  Voir  aussi  t.  1,  lig.  66,  col.  990, 
des  chefs  élamites  écorchés  vifs  après   la  bataille   de 
Toulliz,  d'après  Layard,  The  monuments  of  Nineveh, 
t.   11,   pi.   47.   D'après  une  légende,   l'apôtre  saint  Bar- 
thélémy   aurait   été    écorché    vif.    Voir    Barthélémy, 
t.  I,  col.    1472.  Job,  XIX,  26,  affirme  sa  certitude  d  être 
un  jour  de  nouveau  revêtu  de  sa  peau   et  de  voir  son 
vengeur  vivant.   —  Après  avoir  éprouvé'  Job  dans  ses 
biens  extérieurs,  Satan  explique  sa  constance  en  disant  : 
«  Peau  pour  peau  !  L'homme  donne  tout  ce  qu'il  pos- 

V.  -  1 


PEAU    —    PÈCHE 


pour  conserver  sa  vie.  »   Job,  It,   i    La  loculion 
provti  au  pour  peau      -i-nifie  donc  ici  que 

l'homme  tien)  3   sa   vie,   i  à  sa  p  mme  on  dit 

vulgairement,  plus  qu'à  tout  le  reste,  mais  que,  quand 
il  sera  permis  de  toucher  à  ce  bien,  Job  changera  d'atti- 
tude. Satan  demande  que  la  peau,  la  vie  même  de  Job 

soit  attaqie 
._>    /  , ,  sert  de  vêtement 

à  l'homme.  Après  leur  péché,  Adam  el  Eve  sont  ri 

de  tuniques  de  peau.  Gen..  ni.   21.  Rêbecca  couvre  de 

peau  velue  de   chevreau  les  mains  et  le  cou  de  Jacob, 

alin  qu'Isaac   le   prenne    pour   Ésaû.  Gen.,   xxvu,   16. 

Parmi  les  premiers  chrétiens,  il  v  en  eut  qui  durent 

lv   -JIIIO--J.::.    in   melotis,   «   dans  des  peaux  de 

dans  des  peaux  de  chèvres  ».  11.1...  XI,  37. 

—  Pour  dissimuler   l'absence  de  David.   Michol  plaça 

le   lit  nue   peau  de  chèvre  à  l'endroit  de  sa  tète, 


■if     A    "Jmhr  3  - 

r==L  i —  i-"-'  a    t;    "H  —-—         r 


1.  —  Valouliid  de  Hamath  écorclié  vif.  D'après  Botta, 
Monument  de  Ninive,  \ 

une  couverture  par-dessus,  un  téraphim  figurant 

le  reste  du  corps.  I  Reg.,   \i\.  13.  —  Les  peaux  servant 

pour  I.    ..l- ni.nl  mi   I  .inuul.lem.nl  pouvaient  conlrac- 

uillures  ou  une  sorte  de  lèpre.  II  fallait 

1       .  xi.  32;  xn.   18;  xv.  17;  xvi,  27. 

peaux   d'animaux   à   recouvrir 

1,1  T-'1  lie.  On  utilisa  pour  cet  usage  des 

peaux  de  bélier!  a  rougi     el   les  peaux  d'un 

mammifère   marin,  ce nun°  dans  la   mer  Rouge,   le 

G,  t.  Il,  col.  1511.  Ces 
ll''1""'  1  .  I  .'paisses  et  plus  résistantes  que  les 
autres,  étaient  placées  par-dessus.  Exod.,  x.xv,  ô:  x.xvi. 
14;  «xxv,  7,  23;  xxxvi,  19;  xxxix.  33;  Nu.,,..  1 

at  faites  avec  des  peaux.  De 

as  parlent  de  peaux  quand  il  est 

question  de  tenlei    II  Reg.,  vu,  2;  I Par.,  xvn,  I  ;  Ps.  civ 

1.    ',  .  .1. ,  i  0        tti  29. 

liai...  111,  7.  -  La  |»au  du  crocodile  est  si  dure  qu'on  né 

Pt'»1  'a  1'"  '      Job,  XI  .  26  (31).   -  3    Mans  les 

on  commeni  ">  par  enlevi  1  la  peau  d 

1   6.  Les  |.i.  In  |u r  de  ce- 

soin;    mais,  quand  les  victimes  étaient  par  trop  nom- 
leuses,  les  lévites  les  suppléaient.  Il    Par.,  x.xix.  31; 


xxxv.  11.  La  peau  de  la  victime  ofl'erle  en  holocauste 
appartenait  au  prêtre  qui  célébrait  le  sacriGce.  Le\ ..  vu,  S. 
Mais  on  brûlait  la  victime  tout  entière  avec  sa  peau 
dans  le  sacrifice  pour  le  péché,  Lev.,  iv.  11;  xvi,  27. 
dans  le  sacrifice  pour  la  consécration  des  prêtres, 
Lev..  vin,  17;  ix.  II.  et  dans  le  rite  de  la  vache  rousse. 
Niiiu..  xix.  5.  —  Les  victimes  étaient  égorgées  dans  le 
e,  puis  écorchées.  Pour  faciliter  cette  opération, 
on  avait  élevé  au  nord  de  l'autel  huit  colonnes  de 
pierre  qui  supportaient  des  traverses  de  cèdre.  Les 
victimes  étaient  suspendues  à  ces  traverses  par  les  pieds 
de  derrière.  La  peau  suivait  le  sort  de  la  chair  des 
victimes,  et,  en  conséquence,  elle  était  soit  brûlée  avec 
la  chair,  dans  les  sacrifices  énumérës  plus  haut,  soit 
attribuée  aux  prêtres,  dans  les  holocaustes  et  les  autres 
sacrifices  dont  les  victimes  devaient  être  mangées  par 
les  prêtres,  soit  laissée  à  ceux  qui  avaient  apporté  la 
victime,  dans  les  sacrifices  de  moindre  importance.  Cf. 
Siphra,  f.  '20.  2:  f.  82.  I:  Zebachim,  xu.  3.  Au  nord  du 
sanctuaire,  à  coté  de  la  chambre  du  sel,  il  y  en  avait  une 
autre  où  l'on  salait  les  peaux,  afin  de  les  empêcher  de 
se  corrompre.  Cf.  Gem.  Pesachim,  57.  1  ;  Reland,  Anti- 
quitates  sac/se.  Utrecht,  1741,  p.  52. 1(13.  — 1  Les  p.  aux 
des  animaux  furent  encore  utilisées  comme  matière  pro- 
pre à  recevoir  l'écriture.  Au  11e  siècle  avant  Jésus-Christ, 
sous  le  roi  Eumène  II.  à  Pergame,  on  perfectionna 
beaucoup,  si  on  ne  l'inventa  pas  alors,  la  préparation 
des  peaux  d'animaux  pour  suppléer  au  papyrus.  On  se 
servait  surtout  des  peaux  de  bouc,  de  chèvre  et  de  ehe- 
111,  d'une,  de  veau  et  d'agneau.  Les  peaux  ainsi  pré- 
parées furent  connues  sous  le  nom  de  prrgamena  ou 
parchemins.  Saint  Paul  écrivait  sur  des  parchemins.  II 
demande  à  Timolhée  de  lui  envoyer  de  Troade  son  man- 
teau, ses  livre-  el  surtout  u.eu.ëpiva{,  menibranas,  «  ses 
parchemins  .  »  II  Tim.,  iv,  13.  Josèphe,  .!/</.  jud.,  III, 
xi.  tj:  XII.  11.  II.  parle  ainsi  de  peau  apprêtée,  8ii>8*pa, 
■  1. 'Ht  les  Juifs  se  servaient  pour  écrire,  quelquefois 
même  en  lettres  d'or.  Voir  LIVRE,  t.  IV.  Col.  302. 

H.  Lesêtre. 

PÊCHE  (hébn  u  :  dûgâh;  Luc,  v,  9  :  ïyp0  '■'/.'>'■-<•>•>'■ 
Vulgate  :  captura  piscium),  emploi  de  moyens  appro- 
priés pour  prendre  des  poissons.  Le  mot  hébreu  dûgâh, 
dérivé  de  dâg,  ..  poisson,  1  comme  tous  les  autres  mots 
qui  se  rapportent  à  la  pèche,  ne  se  lit  que  dans  Am*o. 
iv.  2  ;  t  On  enlèvera  vos  enfants  avec  des  sirot  dûgdh, 
épines  de  pêche  ou  hameçons.  Voir  Hameçon,  t.  111. 
col.  108.  Les  versions  ne  rendent  pas  le  mot  dûgdh. 

I  I  lillérents  procédés  étaient  employés  pour  la  pêche. 
1.  I.a  ligne,  terminée  par  un  hameçon  qui  portait  l'ap- 
pât, était  usitée  partout,  en  Egypte,  ,-n  Assyrie,  voir 
t.  m,  lig,  97,  98,  col.  107,  el  en  Palestine,  ("est  avec  la 
.  hameçon  1  e  sainl  Piern  prend  dans  le  lac  de 
Tibériade  le  poisson  porteur  du  statère.  Matth.,  xvn, 
26.  Isaïe,  \ix.  8,  parle  de  ceux  qui  pèchent  a  la  ligne 
dans   le   Nil.   Ilalaeue.  i.   Il .   |."i,  suppose  l'emploi 

ligne  à  la  mer.  Ame-,  n.  2,  compare  les  ennemis  d'Is- 
raël a  des   pécheurs  qui  prendront   les  enfants  à    l'ha- 
ll, —  2.   La  nasse  et  le  harpon  sont  a  l'usaç 
urs  égyptiens.  Les  monuments  représentent  des 
pêcheurs  qui    relèvent   la    nasse,  au   milieu  de  nom- 
breuses  scènes  de  pêche  (fig.  2).  Cf.  Maspero,  //< 
ancienne  les  /.•  "/.'es  .'e  l'Orient  classique,  Paris,  1895. 
t.  1.  p.   61,  297.  —  3.  Le  filet  de  différentes  e-; 
Voir  Filet,  t.  11.  col.  2218-2249.  L'homme,  qui  n. 
nait  pas  son  heure,  est  comparé  au  poisson  que  le  filet 
saisit    à    l'improvisle.    Eccle..    ix,    12.    Les   Chaldi  1  us 
prennent  les  Israélites  comme  des  poissons  dan- 
Blets;    ils   sont   si  enchantés    de  ces    filets  qui 
traitent  comme  des    divinités,    leur   sacrifient   el    leur 
offrent  de  l'encens.  IIal...i,  li-17.  Les  Apôtres  péchaient 

an  filet  dans  le  lac  de  Tibériade.  Du  haut  de  leurs  bar- 
ques, ils  jetaient  leurs  filets  en  forme  d'éperviers  ou 
enfermaient  les  poissons  dans  une  seine  pour  les  Irai- 


PÈCHE 


6 


ner  jusqu'au  rivage.  Matth.,  iv,  18;  xm.  i7;  Luc,  v,  4; 
.loa.,  xxi,  6.  Aujourd'hui,  «  le  filet  employé  est  ordi- 
nairement l'épervier;  dans  les  endroits  profonds,  il  est 
lancé  de   la   barque;   ou   bien,  s'il  y  a  peu  d'eau,  le 


ne  prissent  rien  du  tout,  quand  les  poissons  se  tenaient 
enfoncés  dans  les  profondeurs.  Luc,  v,  5;  .loa.,  xxi.  :!. 
Il  est  vrai  aussi  qu'alors  le  lac  était  sillonné  de  bar- 
ques de  pêche,  tandis  qu'aujourd'hui,  à  Tibériade.  il 


La  pêche  en  Egypte.  Musée  Guimet. 


pécheur  descend  sur  le  rivage,  entre  dans  le  lac  jus- 
qu'à mi-jambes,  et  jette  alors  le  filet  sur  les  bandes  de 
poissons  qui  se  trouvent  autour  de  lui.  Ce  bassin  est  si 
peuplé  que.  dans  l'espace  de  quelques  minutes,  nous 


n'en  existe  plus  que  quelques-unes.  —  L'Évangile  fait 
plusieurs  fois  allusion  aux  pèches  des  Apôtres,  Matth., 
îv,  18;  Marc,  i,  16;  Luc,  v,  2;  .loa.,  xxi,  3;  de  plus, 
il    relate  deux    pèches    miraculeuses.    Une   première 


3.  —  La  pèche  sur  la  cote  de  Syrie.  D'après  une  photographie  de  M.  L.   Heidet. 


avons  vu  chaque  jour  notre  bateau  rempli  jusqu'au 
bord  par  des  milliers  de  poissons  de  toute  grandeur.  » 
Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui,  Paris,  1881,  p.  506. 

2»  A  l'époque  évangélique,  la  pêche  n'était  pas  toujours 
aussi  fructueuse.  Il  n'était  pas  rare  que  des  hommes  du 
métier,  travaillant  pendant  la  nuit,  qui  est  cependant 
le  moment  le  plus  favorable  pour  la  pèche  à  l'épervier, 


fois,  le  Sauveur  voit  au  bord  du  lac  deux  barques  dont 
les  pécheurs  lavent  leurs  filète.  Il  monte  dans  l'une 
d'elles,  de  là,  prêche  au  peuple,  puis  commande  d'aller 
au  large  et  de  pêcher.  La  pêche  est  si  abondante,  après 
toute  une  nuit,infructueuse,que  les  poissons  remplissent 
les  deux  barques.  Luc,  v.  2-7.  Une  autre  fois,  après  la 
résurrection,   Jésus,   de   la  rive   du  lac,   ordonne  aux 


PÈCHE    —   PÉCHÉ 


8 


Apôtres  de  jeter  le  li lot.  Ceux-ci,  qui  n'ont  rien  pris 
la  nui!  précédente,  obéissent  et,  d'un  coup  de  filet, 
prennent  cent  cinquante-trois  grands  poissons.  Joa.,  xxi, 
6-11 .  Une  parabole  évangélique  fait  allusion.  Match.,  xm. 
17-48,  à  un  genrede  pèche  qu'on  voit  encore  fréquem- 
tnenl  pratiquer  sur  la  c  te  de  Syrie.  Les  pêcheurs,  re- 
produits dans  la  figure  3,  tirent  le  filel  sagena)  qu'avec 
un  bateau  on  a  étendu  à  une  assez  courte  distance  dans 
la  mer,  et  lorsqu'il  arrive  sur  le  rivage,  les  pécheurs  re- 
jettenl  dansl'eau  le  mauvais  poisson.  —  La  pèche  mari- 
time n'était  pas  pratiquée  par  les  Israélites,  qui  n'ont 
marins.  Les  Phéniciens  au  contraire  s'y 
livraient  avec  activité;  l'une  de  leurs  principales  villes 
porte  le  nom  de  Sidon,  c'est-à-dire  «  pêcherie  ».  Voir 
SlDON.  IL  LESÉTRE. 

PÉCHÉ  (hébreu  :  bête',  fintâ'âh,  hattaàli,  halhi't. 
»ta'iii.  oéSa,  èêt,  Segî'dh,  fahâlâh;  chaldéen  : 

avyà  ;  Septante  :  àuaprîa,  àvo|i(a,  àvô- 
:ir,aa.  Ttapaurwp»  ;  Vulgate  :  peccatum,  culpa,  iniqui- 
tas,  offensa,  offensio,  delictum,  scelus),  transgression 
volontaire  de  la  loi  divine,  naturelle  ou  positive. 

I  Sa  genèse.  —  I.  Le  péché  apparaît  pour  la  pre- 
mière fois  au  paradis  terrestre,  sous  la  forme  d'un 
acte  de  volonté  humaine  en  opposition  avec  la  volonté 
souveraine  du  Créateur.  Dieu  défend  un  acte  sous 
peine  de  mort.  Ce  qui  a  été  dit  de  l'homme  créé  à 
l'image  île  liieu.  Gen..  i.'Jli.  27,  la  notion  d'un  Dieu  puis- 
sant, sage  et  juste,  qui  ressort  des  premiers  récits  du 
Livre  sacré,  et  la  défense  imposée  à  l'homme  par  ce 
Dieu  souverainement  hon  et  parfait,  supposent  néces- 
sairemenl  que  l'homme  jouit  d'une  volonté  libre,  intel- 
ligente et  par  conséquent  responsable.  Malgré  la 
défense  divine,  un  acte  extérieur  est  accompli.  Bien 
que  le  i  '  il  sacré  ne  raconte  que  ce  qui  se  voit,  dans 
Cel  acte  et  ses  conséquences,  il  va  de  soi  qu'il  faut 
aller  i  i  au  delà  de  la  lettre.  Le  mal  n'est  pas  dans 
l'acte  extérieur,  mais  dans  la  volonté  qui  désobéit  ;  le 
coupable  n'est  pas  la  main  qui  exécute,  mais  l'âme 
libre  qui  commande  aux  organes.  Celte  conclusion 
n  orl  clairement  du  châtiment  imposé  au  coupable. 
Pour  encourir  un  pareil  châtiment  de  la  part  il  un 
Dieu  juste,  il  a  fallu  qu'il  y  eut  dans  le  péché,  non 
seulement  un  acte  extérieur,  tuais  encore  et  surtout 
un  acte  intérieur,  celui  d'une  volonté  consciemment  et 
librement  en  opposition  avec  la  volonté  du  Maître  tout- 
puissant.  Il  est  vrai  qu'un  autre  être  intervient  pour 
incliner  dans  le  sens  de  la  désobéissance  la  volonté  de 
la  femme  et,  par  elle,  celle  de  l'homme.  Mais  cette 
influence,  >i  perverse  el  si  forte  qu'elle  soit,  n'a  d'ac- 
tion sur  la  volonté  libre  qu'autant  que  celle-ci  le  veut 
bii  n.  Elle  peul  diminuer  sa  responsabilité,  elle  ne  la 
supprime  pas,  parce  que  la  volonté  de  l'homme  est 
suffisamment  maltresse  d'elle-même.  C'est  ce 
qu'il  faul  i  ncore  conclure  de  la  sentence  de  condamna- 
tion, mitigée  el  laissant  la  porte  ouverte  à  l'espérance 
du  pardon,  mais  cependant  sévère  et  supposant  une 
eulpabilil  les  deux  coupables.  Gen.,  m,  1- 
19  2  Vprès  avoir  ainsi  l'ait  son  apparition  dans 
l'humanité,  le  péché  s'j  perpé ,  par  des  actes  volon- 
taire-.. :.  travers  toutes  les  générations.  Le  meurtre 
,!  M>(  !  I  l  I  lin  a  sans  doute  été  précédé  par  bien 
d'autres  fautes  moins  graves.  Toujours  est-il  qu'avanl 
rime  le  meurtrier  reçoit  un  avertissement  qui 
marque  I     litudi    que  doit  avoir  l'homme   en  face  du 

bien   el  à al,  quelle     que  soient   la  fureur  de  ses 

passions   el   les  sollicitations  de   la  tentation   :    i    Si   tu 

1  ■"    '  " '"■  ""  seras-tu  ,  | fais  pas 

bien,  le  péché  ne  se  lient-il  pas  à  ta  porte-'  Son  désir 
il ll!  _  ira  toi;  mai  i  i,  tu  doi  dominer  sur  lui.  i 
Gen  -  n.  T.  Le  premiei  phi  a  im  ai  se  passe  dan,  la 
conscience  de  l'homme,  quand  il  a  cessé  de  faire  le 
bien,   c  esl  à  dire   de    confor r  sa  vi  lie  de  ' 


Dieu.  Il  sent  qu'il  n'est  plus  agréable  à  son  Créateur, 
qu'il  ne  peut  plus  lever  la  tète  vers  lui  avec  assurance. 
Déjà  le  péché  est  à  là  porte,  comme  une  bête  fauve  qui 
cherche  à  forcer  l'entrée;  il  veut  contracter  une  sorte 
d'union  avec  l'homme;  mais  celui-ci  reste  le  maître,  il 
peut  et  doit  dominer.  Sa  liberté  reste  suffisante,  sa 
volonté  demeure  assez  armée  pour  se  défendre  et 
triompher.  Caïn  ne  sut  pas  faire  triompher  sa  volonté. 
—  3.  Saint  Jacques,  I,  lci-15,  analyse  l'acte  ordinaire 
du  péché,  tel  qu'il  se  produit  dans  l'homme.  «  Que 
nul.  lorsqu'il  est  tenté,  ne  dise  :  C'est  Dieu  qui  me 
tente.  Car  Dieu  ne  saurait  être  tenté  de  mal  et  lui- 
même  ne  tente  personne.  »  On  sait  qu'Adam  avait  es- 
sayé de  faire  remonter  jusqu'à  Dieu  la  responsabilité' 
de  son  péché,  en  disant  :  «  La  femme  que  vous  m'avez 
donnée  pour  compagne  m'a  présenté  le  fruit  de  l'arbre,  i 
Gen.,  m,  12.  L'excuse  e>t  vaine  et  injurieuse  à  Dieu. 
L'apôtre  ajoute  :  «  Chacun  est  tenté  par  sa  propre  con- 
voitise, qui  l'amorce  et  l'entraine.  Ensuite  la  convoitise, 
lorsqu'elle  a  conçu,  enfante  le  péché,  et  le  péché, 
lorsqu'il  est  consommé,  engendre  la  mort,  i  Ainsi,  il  y 
a  tout  d'abord,  issu  du  fond  même  de  la  nature  hu- 
maine, un  désir  immodéré  et  désordonné,  qui  se 
porte  vers  une  apparence  de  bien  créé.  Ce  désir  prend 
peu  à  peu  une  forme  précise  et  consentie,  bien  que 
reconnue  répréhensible  par  la  conscience;  la  volonté 
s'ébranle  et  veut  positivement  ce  bien  apparent,  qui 
est  un  mal  réel.  Dès  cet  instant,  il  y  a  péché  et  l'âme  est 
frappée  à  mort.  La  tentation  peut  se  produire,  prove- 
nant des  êtres  extérieurs;  le  péché  n'est  possible  que 
si  la  convoitise  intérieure  entre  en  ligne  et  décide  la 
volonté.  C'est  ce  qui  permet  â  saint  Augustin,  De  Gen. 
ad  lit.,  xi,  30,  t.  xxxiv,  col.  445,  et  à  saint  Thomas, 
Sum.  theol.,  I,  q.  xi.iv.  a.  i,  ad  lum,  de  dire  que  la  ten- 
tation n'aurait  pas  eu  de  prise  sur  Eve  si  celle-ci  n'avail 
péché  au  préalable  par  un  amour  coupable  de  sa  propre 
excellence.  —  -i.  Le  récit  de  la  Genèse,  III,  5,  montre 
que  cette  pensée  de  complaisance  personnelle  fut  d'ail- 
leurs aidée  par  l'habile  tentateur  :  «  Vous  serez  comme 
Dieul  »  De  là,  à  la  source  de  tout  péché,  l'orgueil,  la 
pensée  de  l'indépendance,  l'idée  que  la  créature  peul 
se  suffire  à  elle-même  et  entend  mieux  son  bien  propre 
que  le  Créateur. 

L'orgueil  commence  quand  l'homme  se  sépare  du  Seigneur, 
Et  quand  le  cœur  s'éloigne  de  celui  qui  l'a  lait  : 
Car  le  commencement  île  l'orgueil,  o'est  le  péché, 

ou,  d'après  la  Vulgate  : 

Le  commencement  de  tout  péché,  c'est  l'orgueil... 
Le  malheur  de  l'orgueilleux  esl  sans  remède. 

i  ■•!■  I.i  l'huile  iln  i.crlié  a  jeté  en  lui  ses  racines. 

Eccli..  x,  15;  m,  30. 

En  réalité,  orgueil  et  péché  sont  corrélatifs  et  s'appellent 
l'un  l'autre.  Cf.  Is.,  xm.  11.  —  5,  Cel  orgueil  lui-même, 
qui  est  le  premier  instigateur  de  la  convoitise  et  du 
péché,  a  sa  cause  dans  la  nature  de  l'être  Créé,  alors 
même  qu'il  n'est  pas  encore  déchu.  La  Sainte  Ecriture 
ne  le  dit  pas  formellement;  mais,  avant  de  raconter  la 
chute,  elle  eoiiiineiiee  par   montrer  que  l'homme  est  un 

être  créé.  Or,  pins  un  être  ère  a  reçu  de  dons  de  la 
munificence  du  Créateur,  plus  il  a  de  motifs  pour  se 
complaire  en  ce  qu'il  est  et  en  ce  qu'il  a,  si  sa  volonté 
vient  à  dévier  de  la  rectitude  parfaite.  Ainsi  a  pu  Se 
produire  le  péché  des  anges  et  ensuite  celui  de  l'homme. 
Voir  Mal,  t.  IV,  col.  598-600. 

2°  Sa  nature.  —  1.  Le  péché  consiste  essentiellement 
dans  l'opposition  de  la  volonté  de  l'homme  à  la  volonté 
de  Dieu.  C'est  ce  que  montrent  les  textes  précédents. 
Le  péché  n'est  donc  pas  dans  l'acte  extérieur,  tel  que  le 
voient  les  hommes;  il  est   dans  l'une,  telle    qu'elle  ap- 

parall  auxyeui  de  Dieu.  I  Reg.,xvi,  7.  Par  conséquent, 
les  sentiments  el  les  pensées  peuvent  être  coupables. 


-9 


PECHE 


10 


Le  dernier  précepte  du  Décalogue  proscrit  les  simples 
convoitises  mauvaises,  Exod.,  xx,  17,  et  Notre-Seigneur 
déclare  que  du  cœur  sortent  les  pensées  mauvaises. 
Matth.,  xv,  19;  Marc.,  vu,  21.  11  aflirme  en  outre  que 
certains  désirs  sont  coupables,  comme  les  actes  eux- 
mêmes. Matth..  v,  28.  Ainsi  les  actes  extérieurs  ne  suffi- 
sent pas  à  constituer  le  péché.  Dans  leur  confession 
négative,  qui  forme  le  chapitre  cxxv  du  Livre  des 
Morts,  cf.  W.  Pleyte,  Élude  sur  le  chapitre  cxxv  du 
Rituel  Itinéraire,  Leyde,  1866;  Maspero,  Histoire 
ancienne  des  peuples  de  l'Orient  classique,  Paris, 
1895,  t.  î,  p.  189,  les  Égyptiens  ne  savent  s'accuser 
que  de  fautes  extérieures  d'ordre  moral,  social  ou  par- 
fois purement  liturgique.  Les  Babyloniens  ont  une 
confession  analogue,  où  il  est  question  d'adultère, 
d'homicide,  de  vol,  d'autres  fautes  contre  la  morale  ou 
la  liturgie,  mais  sans  allusion  aux  actes  intimes  de  la 
-conscience.  Cf.  Zimmern,  Beitràge  îur  Kenntniss  der 
babylonischen  Religion,  Leipzig,  1901,  Surpu,  II,  1.  47- 
51;  Lagrange,  Éludes  sur  les  religions  sémitiques, 
Paris,  1905,  p.  225,  226;  Revue  .biblique,  1906,  p.  657. 
Cf.  Ézéchiel,  xvm.  14-17.  Autrement  significative  est  la 
confession  qui  se  lit  dans  Job,  XXXI,  4-37.  L'auteur  y 
énumëre  les  principales  fautes  contre  la  morale  qui  se 
pouvaient  commettre  dans  son  milieu.  Mais  il  y  joint 
ici  et  là  des  remarques  comme  celles-ci  : 

Dieu  ne  connaît-il  pas  mes  voies, 

Ne  compte-t-il  pas  tous  mes  pas? 

si  mon  cœur  a  suivi  mes  yeux... 

Si  j'ai  mis  dans  l'or  mon  assurance... 

si.  in  voyant  le  soleil  jeter  ses  feux, 

Et  la  lune  s'avancer  dans  su  splendeur, 

Mon  cœur  s'est  laissé  séduire  en  secret... 

Si  j'ai  été  joyeux  de  la  ruine  de  mon  ennemi... 

Si  j'ai,  comme  font  les  hommes,  déguisé  mes  fautes, 

Et  renfermé  mes  iniquités  dans  mon  sein... 

—  2.  En  effet,  la  conscience  morale,  telle  que  la  sup- 
pose la  religion  du  vrai  Dieu,  obéit  à  cette  règle  posée 
à  Abraham  ;  <•  Marche  devant  ma  face  et  sois  irrépro- 
chable. "  tien.,  xvii,  1.  C'est  devant  la  face  du  Seigneur, 
sous  son  regard  auquel  rien  n'échappe,  qu'on  est  cou- 
pable ou  irréprochable,  et,  si  l'on  est  coupable,  c'est 
tout  d'abord  dans  l'âme  elle-même  que  le  péché  existe. 

0  Dieu,  tu  connais  ma  folie, 

Et  mes  fautes  ne  te  sont  pas  cachées.    Ps.  lxix  u.xviii),  6. 

Cf.  Ps.  x,  15;  Eccli.,  xv,  21.  —  3.  Le  péché  outrage 
toujours  Dieu,  alors  même  qu'il  semble  viser  exclusi- 
vement le  prochain.  Num.,  v,  6. 

Je  reconnais  mes  transgressions, 

Et  mon  péché  esl  constamment  devant  moi; 

(  :'est  contre  toi  soûl  que  j'ai  péché, 

J'ai  t'ait  ce  qui  est  mal  à  tes  yeux, 

dit  le  Psalmiste,  Ps.  li  (l),  5-6,  avouant  que  ses  trans- 
gressions de  toute  nature  ont  avant  tout  offensé  Dieu. 
De  même  le  prodigue,  qui  a  tant  outragé  son  père,  se 
reconnaît  coupable  contre  lui,  mais  avant  tout  «  contre 
le  ciel  ».  Luc,  xv,  18.  «  En  péchant  contre  vos  frères 
et  en  violentant  leur  conscience  encore  faible,  vous 
péchez  contre  le  Christ,  »  dit  saint  Paul.  I  Cor.,  vm, 
12.  —  4.  Le  péché  est  un  acte  par  lequel  l'homme 
s'écarte  et  s'éloigne  de  Dieu,  en  mettant  sa  volonté  en 
opposition  avec  celle  de  Dieu,  connue  soit  par  la  con- 
science, soit  par  la  loi  positive,  qui  rend  mauvais  des 
actes  qui  ne  le  seraient  pas  toujours  par  eux-mêmes. 
Roin.,  m,  20;  vu,  7.  «  Être  infidèles  à  Jéhovah  et  le 
renier,  nous  retirer  loin  de  notre  Dieu,  »  voilà  comment 
Isaïe,  lix,  13,  caractérise  le  péché.  Cette  idée  d'éloigne- 
ment  de  Dieu  par  le  péché  revient  souvent.  Deut.,  xi, 
16;  xxxii,  15;  ,Ios.,  XXII,  16;  Job,  XXI,  li;  XXII,  17; 
Sap.,  m,  10;  Bar.,  m,  8;  Dan.,  ix,  5,  9,  etc.  Kn  ouisé- 
•  quence,    la  sagesse  qui   vient   de  Dieu  ne  peut  habiter 


dans  un  être  soumis  au  péché,  Sap.,  I,  4,  et  cet  «Hic, 
ainsi  séparé  de  Dieu,  ne  peut  manquer  d'agir  parfois 
par  l'inspiration  du  démon.  I.loa.,  m,  8,  et  d'en  faire  les 
œuvres,  qui  sont  des  œuvres  de  péché.  Joa.,  vm,  41.  Si 
Dieu  hait  tant  le  péché,  Ps.  v,  5,  7,  c'est  parce  qu'il  y  voit 
nécessairement  un  attentat  contre  sa  souveraineté  inalié- 
nable. —  5.  Saint  Jacques,  II,  10,  dit  que  «  quiconque 
aura  observé  toute  la  loi,  s'il  vient  à  faillir  en  un  seul 
point,  est  coupable  de  tous  ».  Ce  texte  fait  l'objet  d'une 
consultation  adressée  à  saint  Jérôme  par  saint  Augustin, 
Ep.  i  xxxi,  t.  xxn,  col.  1138-1147.  Ce  dernier  propose 
sa  solution  en  ces  termes,  col.  1145  :  «  Celui  qui  trans- 
gresse un  précepte  est  coupable  envers  tous,  parce 
qu'il  agit  contre  la  charité  de  laquelle  dépend  toute  la 
loi.  Il  est  coupable  de  tout  parce  qu'il  agit  contre  celle 
dont  tout  dépend.  »  Saint  Jérôme,  Ep.  cxxxiv,  t.  xxn, 
col.  1161,  s'excuse  de  ne  pas  répondre  et  dit  qu'il  n'a 
rien  à  reprendre  à  la  solution  proposée.  Saint  Thomas, 
Sum.  l/ieol..  1»  11»-,  q.  lxxiii,  a.  1,  ad  1""\  explique  que 
l'Apotre  parle  ici  des  péchés,  non  par  rapport  à  l'objel 
vers  lequel  ils  portent  et  qui  est  variable,  mais  par 
rapport  à  celui  dont  ils  détournent  et  qui  est  toujours 
Dieu.  Tout  péché  comporte  le  mépris  de  Dieu.  Quand 
on  faillit  en  un  point  on  est  coupable  de  tous  en  ce 
sens  qu'on  encourt  le  châtiment  que  mérite  le  mépris 
de  Dieu,  mépris  et  châtiment  communs  à  tous  les  pé- 
chés. Les  péchés  demeurent  donc  distincts,  bien  que 
le  principe  et  les  conséquences  de  tous  soient  les 
mêmes,  et  l'on  peut  en  commettre  un  sans  commettre 
les  autres.  La  pensée  de  saint  Jacques  revient  à  ceci 
que,  quand  on  transgresse  un  commandement,  on  est 
è'voxoç,  passible  de  la  peine  qui  châtie  toutes  les  autres 
transgressions,  non  en  quantité,  mais  en  qualité,  car 
dans  tous  les  cas,  c'est  l'auteur  même  des  lois  qui  est 
offensé  et  qui  est  obligé  de  sévir.  —  6.  Tous  les  péchés 
ne  sont  pas  mis  sur  le  même  rang  dans  la  Sainte  Ecri- 
ture, bien  que  tous  supposent  l'opposition  de  la  volonté 
de  l'homme  avec  celle  de  Dieu.  Il  y  a  des  péchés  plus 
particulièrement  graves,  l'adultère,  Gen.,  xx,  9;  xxvi, 
10;  l'apostasie,  Exod.,  xxxn,  21  ;  la  profanation  du  sacer- 
doce et  le  scandale,  I  Reg.,  Il,  17;  l'idolâtrie,  .1er.,  xix, 
11  ;  le  péché  contre  le  Saint-Esprit,  Matth.,  xn,31  ;  Marc, 
in,  28;  la  trahison  du  Fils  de  Dieu,  Joa.,  xix,  11,  etc. 
Notre-Seigneur  note  lui-même  une  gradation  entre  cer- 
tains péchés  contre  la  charité.  Matth.,  v,  22.  Il  y  a  des 
péchés  qui  sont  commis  par  ignorance,  sans  pleine 
conscience  ou  sans  volonté  complète.  Lev.,  IV,  2,  27; 
v,  17;  Num.,  xv,  27,  etc.  Saint  Paul  s'excuse  sur  son 
ignorance  des  persécutions  qu'il  a  exercées  contre  les 
chrétiens.  I  Tim.,  i,13.  Mais,  dans  la  Sainte  Écriture,  on  ne 
trouve  pas  mention  de  ces  culpabilités  inconscientes  et 
fatales,  s'attachant  inéluctablement  à  des  êtres  qui  n'ont 
rien  fait  pour  les  encourir,  ainsi  que  cela  se  rencontre 
dans  les  religions  païennes,  ni  de  ces  fautes  commises 
sans  connaissance  et  sans  volonté  dont  les  idolâtres  se 
croyaient  si  fréquemment  coupables  dans  le  culte  de 
leurs  dieux,  par  l'omission  de  formalités  insignifiantes 
ou  puériles.  —  7.  Puisque  rien  n'échappe  aux  regards 
de  Dieu  et  que  Dieu  hait  le  péché,  la  conséquence 
s'impose  :  «  Tous  les  jours  de  ta  vie,  aie  Dieu  présent 
à  ta  pensée,  et  garde-toi  de  consentir  jamais  au  péché.  •> 
Tob.,  iv,  6;  cf.  i,  10. 

Fuis  le  péché  comme  le  serpent, 

Car.  si  tu  en  approches,  il  te  mordra.  Eccli.,  xxi,  2. 

Et  pour  déterminer  sa  volonté'  à  s'éloigner  du  mal, 
l'homme  doit  songer  à  la  fin  de  sa  vie  et  au  compte 
qu'il  devra  rendre  à  Dieu,  Eccli.,  vu,  4-0,  sans  se  lais- 
ser tromper  par  les  charmes  du  présent  ni  par  la  pa- 
tience divine,  car 

La  voie  des  pécheurs  est  pavée  de  p. erres. 

Mais  à  son  extrémité  est  l'abîme  de  L'Hadès.  Eccli.,  sxi,  H- 


11 


PÉCHÉ   —    PÉCHÉ    oP.K.HNEL 


12 


nces.  —  1.  Le  péché  sépare  1  àme  d'avec 
Dieu,    Is.,  iix.  2.  Si   l'homme  meurl  dans  son  péché, 
I;  su,  13;  .Toa..  vm,  21,  etc.,  cette  sépara- 
tion d      i  al  définitive,  e  Lu  justice  du  juste  ne  le  sau- 
vera   pas    au  jour   de   sa   transgression,...  le  juste  ne 
vivre  parsa  justice  le  jour  où  il  péchera.  » 
Ezech.,  xxxiu,  [2.  —  2.  Par  suite  de  l'affaiblissement 
moral  que  cause  l'éloignement  de  Dieu,  celui  qui  com- 
met le  péché  fini)  par  devenir  esclave  du  péché,  et  il  a 
le  difficulté  à  se  soustraire  à  sa  tyrannie. 
lu    Ê3    Rom.,  vi,  17.  c  Le  méchant  est  saisi   par 
m  péché,    n   Prov.,  v.  22;  Eccli.,  xxi,  3. 
Le    trouble   et    le    inalaise    régnent   dans    son    .'une. 
l's.  xxxviii  (xxxvli),  i.  19.  Ainsi     ceux  qui  commettent 
i    1  iniquité  sont  leurs    propres  ennemis  d. 
Tob.,    mi.   10.  Le  péché  peul  se  généraliser  dans  une 
on. 

La  justice  êU  ve  une  nation. 

Mais  le  péché  est  l'opprobre  des  peuples. Prov.,  xiv,  34. 

—  3.  D  ice  el  poursuit  le  péché  îles  rigueursde 

sa  justice.  Exod.,  xxxii,  34;  Lev.,  xx.  20;  Num.,  xxxn. 
23;  Jos.,  xxiv,  19  :  «  Jéhovah  esl  un  Dieu  saint,  un  Dieu 
jaloux  :  il  ne  pardonnera  pas  vos  transgressions  et  vos 
péchés,...  il  se  retournera,  vous  maltraitera  el  mois 
consumera.  o  Ps.  i.xxxix  (lxxxvhi),  33;  Prov.,  xxn, 
S;  Ezech.,  xvm,  î;  Dan.,  ix.  11;  II  Mach.,  vu,  18,  etc. 
La  justice  de  Dieu  contre  le  péché  s'exerce  d'ailleurs 
par  différents  moyens,  par  les  ('preuves  dans  la  vie 
c.  v,  25,  etc.,  voir  Mai.,  t,  iv.  cul.  601,  par 
les  satisfactions  volontaires,  voir  Pénitence,  et  pai  les 
sanctions  «le  l'autre  vie.  Sap.,  v,  '2- IL  Voir  Enfer, 
t.  ii,  col.    1792;   Pi  rgatoire.  —  1.  Le  péché  a  de  plus 

i    i    rcussion  prévue  sur  les  générations  qui  suivent 

celui    qui    l'a   Commis,    de    même  que    la    fidélité-   a    la 

-e  un.     i*,   h    le   fail   répéter  plusieurs  fois  :  «  Je  suis 

Jéhovah,  ton  Dieu,  un  Dieu  jaloux,  qui  punis  l'iniquité 

sur  les   enfants,  sur  la   troisième  et  sur  la 

quatrié génération  à  l'égard  de  ceux  qui  me  haïssent, 

et  qui  fais  miséricorde  jusqu'à  mille'générations  à  ceux 
qui  m'aimenl  et  qui  gardent  mes  commandements.  » 
!  I.,  xx,  5-6;  cf.  xxxiv,  7;  Num.,  xiv,  18;  Deut.,  v, 
xxxii,  in;  l.mi..  v.  7.  etc.  Cette  répercussion, 
que  l'expérience  justifie  fréquemment  encore,  m-  l'ail 
enfants  une  peine  injuste.  Elle  suppose 

[ui   ces  derniers  imitent  les  péchés  de  leurs  pères,  «m 

l  OU    i pour  i  ux  une  épreuve  temporelle  destinée  soit 

a  les  ramener  au  bien,  soit  à  perfectionner  leur  vertu 

1  ■>  au  I   m-  méi  il.-  définitif.   Dieu  se  réservait 

d'appliquer  cette  sanction;  mais  il  n'a  pas  autorisé  les 

à     '-i      i-nfanls  a  cause  d--  leurs  pères. 

xxiv,   H;;   IV  Reg.,    xiv,    6;    Il    Par.,  xxv,  i.  Le 

10  20,  explique  la  conduite  de 

11 -       impie  lui-même,  1.-  fils  de  l'im- 

115    el    fidèle,    il    \il    el    Ile 

imenl  qu'ont  attiré'  les  crimes  de  -ou 
pèl  e. 

'     S  il.   —  Dieu  est  un  jugi  n  os  il 

n'esl  i  ,    - ,        o 

131.  Il  reul  rdoni  er  le  péi  hé. Job,  mi,  21  ; 

PS.    XX\     KXIV),    Il  ;    XXXII  (XXXI),    I;    LXXIX   (LXXVIIl),  9; 

J-xxxv   uxxxiv),  ,„i  25;jer.,  xxxi, 

'■'•''■      "  i  mt,   pour  pardonner   I.-  péché, 

"'eu    -  ,|    ,|    o |    |'aveUi 

1  *xvi,    10;    il    i   ,i..    i\.  -j;   job,   xxxi,   33,  34; 

Matth.,  iii.il.  Marc  .  t,  ."..  I  Joa.,  i,  'a.  etc.  Voir  Confes- 
sion, i   n,  coi.  907.  _  :!.  n  veu|    ,,   ,,,,,  ,,   regrel  sin. 
loel  .  n.  13,  i  le    Voir  1  i  ;,  rtaines 

Dii  u   el  i  achètent  le 
i      i       Voir  Ai  mOne,   t.   i.    roi.    1252  i.   n 

«1    II  i  ne,  t.  m.  col.  1528;  Saci        i         5  h., us  ^ 

Nouveau   ["estament,  )-  ,,,  ,|„ 

Mallh.,  vi,  Il   15  .  25;  Lue.,  m.   j    pai 


le  Fils,  Matth.,  ix,  2-fi;  Marc,  il,  5-10;  Luc,  v,  -20- i9 r 
etc,  qui  envoie  ses  Apôtres  prêcher  cette  rémission, 
Luc,  x.xiv,  27;  Joa.,  xx,  23,  et  qui  leur  donne  le  pou- 
voir de  l'accorder  dans  le  sacrement  de  pénitence, 
Joa.,  xx,  23,  et  dans  celui  d'extrême-onction.  Jacob.,  v, 
15.  —  6.  Le  pardon  du  péché  est  accordé  en  vertu  de  la 
rédemption  opérée  sur  la  croix.  Daniel,  ix,  21.  avait 
annoncé  que  le  Messie  mettrait  lin  au  péché,  c'est-à- 
dire  à  son  inlluence  irréparable.  Jésus-Christ,  par  sa 
croix,  obtint  à  l'homme  le  pardon  du  péché.  Matth.,  I, 
21  ;  xxvi,  28;  Joa.,  i,  29;  Rom.,  vi,  ti  ;  1  Cor.,  xv,  3; 
II  Cor..  v.2l;i;.,l.,i,  i:  Eph.,  i.  7:  Col.,  i,  11;  Heb.,  ix. 
28;  I  Pet.,  m,  18:  I  Joa.,  i.  7;  Apoc,  i,  5,  etc.  Ce 
pardon  peut  même  atteindre  les  âmes  dans  l'autre  vie, 
au  purgatoire.  II  Mach..  XII,  -'i6.  —  7.  Les  écrivains 
sacrés  et  Notre-Seigneur  se  servent  de  différentes  ex- 
pressions caractéristiques  pour  marquer  la  réalité  de 
la  rémission  du  péché  :  «  pardonner,  »  par  conséquent 
ne  plus  tenir  rigueur.  Il  Reg.,  XII,  13;  III  Reg.,  vm, 
3i;  Tob.,  m,  13,  etc.;  »  remettre,  »  par  conséquent  ne 
plus  rien  exiger  à  ce  sujet,  l's.  xxxn  (xxxi),  1  ; 
Matth..  ix.  2;  Luc.  vu.  18,  etc.;  ■•  ne  pas  imputer,  » 
ne  pas  mettre  au  compte  du  pécheur  repentant,  Num., XII, 
I  I  .  Rom.,  iv,  7,  8.  etc.  ;  •  ne  plus  se  rappeler,  »  tenir 
pour  non  avenu,  Ezech.,  xxxui,  10;  u  couvrir,  i  de 
manière  qu'on  ne  le  voie  plus,  Ps.  i.xxxv  M.xxxiv),  3; 
«  fermer  les  veux.  »  parce  qu'on  ne  veut  plus  voir, 
Sap  .  m.  24;  -  effacer,  purifier,  laver,  »  comme  une 
tache  que  l'on  veut  faire  disparaître,  Ps.  u  in.  1. 
Is.,  xi. ni,  20  i-  enlever,  b  Is.,  VI,  -7;  faire  disparaître 
comme  de  la  glace  qui  se  fond.lxcli..  m,  17,  comme  un 
nuage  qui  -e  dissout,  Is.,  .xi.iv,  22;  «  ni'  plus  trouver,  o 
comme  une  chose  qui  n'existe  plus.  .1er.,  i.,  20; 
«  d'écarlate,  rendre  blanc  comme  neige.  -  c'est-à-dire 
remplacer  la  tarin-  du  péché  par  quelque  chose  qui  en 
est  l'oppos  '.  u.,  i.  is,  jeter  derrière  son  dos ,  -  comme 
une  chose  qu'on  d  daigne  et  qu'on  ne  reverra  plus. 
Is.,  xxxvill,  17:  »  mettre  sous  -os  pieds,  comme  une 
chose  méprisable  qu'on  veul  détruire,  et  -  jeter  au  fond 
de  la  mer  »,  comme  ce  qui  doit  périr  définitivement. 
Mich.,  vu,  li).  etc.  Ézéchiel,  xxxui,  14-46,  exprime 
sans  ligure  et  de  la  manière  la  plus  positi\.-  l'effet  de 
la  rémission  du  péché  :  Lors  même  que  j'aurai  dit  au 
méchant  :  Tu  mourras!  s'il  s,,  détourne  de  sou  péché  el 
fait  ce  qui  est  juste  el  droit,...  on  ne  se  rappellera  plus 
aucun  des  péchés  qu'il  a  commis  :  il  a  fait  ce  qui  est 
droit  et  juste,  il  vivra,  d  La  réalité  objective  de  la  rémis- 
sion du  péché  est  d'ailleurs  démontrée  par  la  conduite 
de  Pieu  à  l'égard  de  grands  pécheurs,  Adam.  Sap..  x. 
I.  David,  Marie-Madel  ine,  saint  Pierre,  saint  P. ml.  etc. 

11.  Lesêtri  . 

PÉCHÉ  ORIGINEL,  péché  commis   par    Ad. nu.  a 

l'origine  d.-  Il anité,   ■  ■!  par  suite   duquel   tous  ses 

descendants  naissent  dans  un  état  de  déchéance  et  de 
péché, 

1»  Lai  mm  initiale.  I.  Le  récit  de  l'épreuve  im- 
posée à  Adam,  de  la  tentation,  de  la  chute  el  du  châti- 
ment, esl  consigné  dans  la  G  nèse,  m.  1-19.  Ce  i  il 
peut  être  interprété  avec  une  en  laine  largeur,  à  condi- 
tion de  respecter  la  réalité  du  fait.  Voir  Adam,  t.  i, 
col,  17.".;  Eve,  t.  n.  col.  2119.  Les  Pères  l'onl  générale- 
ment entendu  dans  son  sens  littéral,  mais  l'Egli 
pas  condamné  lecardinal  Cajetan  qui  l'a  expliqm 
goriquement.  lu  Sacram  Scripturam  Commenlarii, 
5in-f -,  Lyon    1639, 1. 1,  p.  22,20.  Voir  Vigouroux,  lia 

,-.  12  édit.,  i.  i,  pi.  564.  —  2.  Rien  dans  le  rêcil 

n'avertit  formellement  que   le    premiei   I une  ail    igi 

comme  repn   -  ntanl  de  toute  su  race.  Il  esl  seulement 

le  premii  r  de  lous  les  ho tes.  Mais  c'esl  de  lui  que 

les très  recevront  la  vie,  et,  étant  données  les  lois 

ordinaires  de  la  nature  que  l'auteur  sacré  suppose 
connues  de  ses  lecteurs,  il  fallait  s'attendre  à  ce  qu'Adam, 
avei  i  i  vie  •  '■  •  -  conditions  essentielles,  transmit  à  ses 


13 


PÉCHÉ    ORIGINEL 


14 


descendants  quelque  chose  de  ce  qu'il  était  devenu  lui- 
même,  par  l'abus  qu'il  avait  fait  des  dons  extraordi- 
naires de  son  Créateur.  Toutefois  ce  n'est  pas  dans  la 
concupiscence  que  consiste  à  proprement  parler  le  péché 
originel,  niais  dans  la  privation  de  la  grâce.  L'avenir 
de  l'humanité  est  indiqué  dans  l'inimitié  annoncée 
entre  la  postérité  de  la  femme  et  celle  du  serpent  et 
dans  les  conditions  de  vie  imposées  à  Adam  et  à  Eve, 
et  par  là  même  à  leurs  descendants.  Du  récit  de  la 
se,  les  théologiens  ont  déduit  que  nos  premiers 
parents  avaient  été  élevés  à  un  état  surnaturel,  et 
qu'ayant  perdu  par  leur  faute  l'intégrité  primitive,  ils 
étaient  déchus  de  leur  état  et  avaient  transmis  leur 
mce  à  leurs  enfants. 
-  Dans  l'Ancien  Testament.  —  1.  Les  écrivains  ins- 
pirés de  l'Ancien  Testament  ne  parlent  du  péché  origi- 
nel qu'en  termes  généraux.  Job,  XIV,  4,  à  propos  de 
l'homme  né  de  la  femme,  que  Dieu,  semble-t-il,  ne 
peut  citer  en  justice  sans  s'abaisser  lui-même,  remarque  : 
«  Qui  peut  tirer  le  pur  de  l'impur?  Personne.  »  La 
Vulgate  traduit  un  peu  différemment  :  «  Qui  peut 
rendre  pur  celui  qui  a  été  conçu  dans  l'impureté? 
N'est-ce  pas  vous  seul?  *  Les  Septante  ajoutent  au  texte 
les  premiers  mots  du  verset  suivant  :  «  Qui  peut  être 
pur  de  souillure?  Personne,  pas  même  celui  dont  la  vie 
que  d'un  jour  sur  la  terre.  »  Les  Pères  ont  eom- 
menté  le  texte  ainsi  formulé.  L'idée  principale  est  que 
l'homme  appartient  à  une  race  pécheresse  et  impure. 
et  que  l'on  ne  doit  pas  s'étonner  qu'il  soit  si  peu  digne 
de  l'attention  divine,  ayant  hérité  d'ancèlres  pécheurs. 
—  Au  Psaume  u  (l),  7,  on  lit  ces  paroles  : 

Je  suis  né  dans  l'iniquité, 

Et  ma  mère  m'a  conçu  dans  le  péché. 

Comme  pour  le  passage  précédent,  la  doctrine  du 
péché  originel,  sans  être  formulée  d'une  façon  tout  à  fait 
explicite,  donne  seule  à  ces  paroles  tout  leur  sens.  —  On 
trouve  ces  autres  paroles  dans  l'Ecclésiastique,  xxv,  33  : 

i   est  par  une  femme  que  le  péché  a  commencé, 
i   e=t  à  cause  d'elle  que  nous  mourons  tous. 

Le  texte  accuse  avec  raison  Eve  d'avoir  commencé  la 
première  à  pécher  et  d'être  la  première  cause  de  la 
mort  de  tous.  Mais  Adam,  et  non  pas  Eve,  était  le  chef 
de  l'humanité,  et  par  lui  ont  été  transmis  le  péché  et  ses 
conséquences.  —  11  n'y  a  pas  à  s'arrêter  au  texte 
d'Isaïe,  xliii,  27,  disant  à  Israël  :  «  Ton  premier  père  a 
péché  :  car  il  s'agit  ici  de  Jacob.  Cf.  t  ise..  xu.  3-5.  — 
L'auteur  de  la  Sagesse,  vin,  18-20,  prenant  le  person- 
nage de  Salomon,  s'exprime  dans  des  termes  dont  on 
pourrait  s'étonner,  s'il  fallait  les  prendre  absolument  à 
la  lettre  :  u  J'étais  un  enfant  d'un  bon  naturel,  et  j'avais 
reçu  en  partage  une  bonne  âme,  ou  plutôt,  étant  bon, 
je  vins  à  un  corps  sans  souillure.  »  Celte  aflirmation  ne 
peut  porter  que  sur  la  vie  purement  naturelle.  Un 
autre  texte  parait  plus  signilicatif  :  «  Vous  saviez  bien 
qu'ils  sortaient  d'une  souche  perverse,...  car  c'était  une 
i  ii  maudite  des  l'origine.  »  Sap.,  xn,  10,  11.  Toute- 
fois, comme  il  s'agit  ici  des  Chananéens,  il  est  clair 
que-  la  malédiction  dont  parle  l'auteur  sacré  est  celle 
qu'encourut  Chanaan.  Gen.,  ix,  25.  —  2.  liais  si  les 
textes  sont  peu  explicites,  on  sent  que,  pour  ainsi  dire, 
tout  le  poids  du  péché  originel  pèse  sur  l'Ancien  Tes- 
tament. Souvent  les  auteurs  sacrés  constatent  le  règne 
général  du  péché.  «  Tous  sont  égarés,  tous  sont  perver- 
tis; pas  un  qui  fasse  le  bien,  pas  un  seul!  o  Ps.  XIV 
(Xiii).  3;  lu  an).  4.  «  Qui  dira  :  J'ai  purifié  mon  cœur, 
-  nel  de  mon  péché?  o  Prov..  xx,  9.  L'autre  vie, 
dont  l'attente  aurait  dû  réjouir  les  justes,  ne  leur  appa- 
raît que  sous  de  sombres  couleurs.  Ils  se  rendent 
compte  que,  mémo  dans  le  sclièùl,  la  paix  ne  sera  pas 
encore  faite  entre  eux  et  Dieu,  parce  que,  dans  le 
passé  lointain  de  l'humanité  comme  dans  ses  généra- 


tions successives,  il  y  a  quelque  cho«e  qui  empêche 
une  réconciliation  complète  et  définitive.  Cette  réconci- 
liation, les  anciens  l'attendent  dans  la  personne  du 
Messie  futur.  Au  lieu  de  porter  leurs  regards  vers 
celui  qui  fut  l'origine  de  l'humanité,  ils  les  tendent  vers 
celui  qui,  dans  l'avenir,  en  sera  le  réparateur  et  le 
Sauveur.  N'ayant  qu'une  idée  confuse  du  péché  originel 
et  de  ses  suites,  ils  sont  peu  capables  par  là  même 
de  se  faire  une  notion  exacte  de  ce  que  sera  la  rédemp- 
tion. Néanmoins  cette  attente  du  Messie  libérateur  est, 
dans  l'Ancien  Testament,  la  forme  la  plus  concrète  et 
la  plus  positive  sous  laquelle  on  puisse  reconnaître  la 
tradition  du  péché  originel. 

S0  Dans  l'Évangile.  —  Quelques  passages  de  l'Évan- 
gile font  allusion  au  péché  originel;  mais  cette  allu- 
sion ne  peut  être  comprise  que  si  l'on  a  présente  à 
l'esprit  la  notion  de  la  chute  et  de  ses  conséquences. 
Ainsi  la  lumière  du  Verbe  «  luit  au  milieu  dc^s 
ténèbres  »,  Joa.,  i,  5;  le  Sauveur  vient  éclairer  ceux 
«  qui  sont  assis  dans  les  ténèbres  et  à  l'ombre  de  la 
mort  ».  Luc,  i,  79.  Saint  Jean-Baptiste  présente  Notre- 
Seigneur  comme  «  l'Agneau  de  Dieu,  celui  qui  enlève 
le  péché  du  monde  »,  Joa.,  i,  29,  c'est-à-dire  ce  péché 
dont  les  conséquences  pèsent  sur  le  monde  entier.  Si 
on  ne  renaît  de  nouveau,  on  ne  peut  voir  le  royaume  de 
Dieu.  »  Joa..  m,  3.  C'est  donc  que  la  vie  transmi 
Adam  ne  suffit  pas  pour  conduire  l'homme  au  salut. 
Les  justes  de  l'ancienne  loi  en  font  l'expérience  dans 
le  scltëôl;  mais  «  l'heure  vient  où  ceux  qui  sont  dans 
les  sépulcres  entendront  la  voix  du  Fils  de  Dieu,  et 
ceux  qui  ont  fait  le  bien  en  sortiront  pour  ressusciter 
à  la  vie  t..  Joa.,  v,  25,28,  29.  Le  Sauveur  fait  annoncer 
que  «  le  royaume  de  Dieu  approche  »,  Luc,  x,  9,  par 
conséquent  que  l'état  de  choses  antérieur,  même  sous 
li-  régime  île  la  Loi,  n'était  pas  le  royaume  de  Dieu,  la 
vraie  voie  du  salut.  Il  dit  aux  Juifs,  qui  se  glorifiaient 
d'être  enfants  d'Abraham  :  o  C'est  seulement  si  le  Fils 
vous  délivre,  que  vous  serez  vraiment  libres.  »  Joa_, 
vin,  36.  Une  servitude  générale  s'imposait  donc  à  tous 
les  hommes.  Enfin,  par  deux  fois,  Joa..  xn.  31;  xiv.  30, 
le  Sauveur  appelle  Satan  le  «  prince  de  ce  monde  ». 
Satan  y  règne  en  maître,  en  effet,  depuis  sa  victoire  sur 
le  premier  homme;  mais  «  il  va  être  chassé  dehoi- 
d'aflleurs  il  n'a  rien  à  lui  en  Jésus,  qui  a  pris  la  des- 
cendance mais  non  la  servitude  d'Adam.  —  On  ne  peut 
tirer  aucune  conclusion,  touchant  le  péché  originel, 
du  texle  de  Joa.,  ix,  2.  Voir  Mal,  t.  îv,  col.  601, 
i».  Quand  les  pharisiens  disent  à  l'aveugle  guéri  qu'il 
est  «  né  tout  entier  dans  le  péché  »,  ils  ne  songent 
pas  au  péché  originel,  car  ils  ne  s'appliquent  certes 
pas  cette  remarque  à  eux-mêmes.  Joa..  IX,  34. 

4  Dans  saint  Paix.  —  1.  Saint  Paul  dégage  la  notion 
du  péché  originel  avec  précision  dans  son  Épiti 
Romains.  Pour  faire  ressortir  toute  la  signification  de 
la  rédemption,  il  établit  un  parallèle  entre  Jésus-Christ 
et  Adam,  et  il  écrit  :  '<  Ainsi  donc,  comme  par  un  seul 
homme  le  péché  est  entré  dans  le  monde,  et  par  le 
péché  la  mort,  ainsi  la  mort  a  passé  dans  tou-^  les 
lien, mes,  parce  que  (È<p'<?)  tous  ont  péché  (Vulgate  : 
in  quo,  «  en  qui  »  ou  «  en  quoi  »  tous  ont  péché)... 
Par  la  faute  d'un  seul,  tous  les  hommes  sont  moi 
Le  jugement  a  été  porté'  a  cause  d'une  seule  faute  pour 
la  condamnation...  Par  la  faute  d'un  seul,  la  mort  a 
régné  par  ce  seul  homme...  Par  la  faute  d'un  seul.  la 
condamnation  est  venue  sur  tous  les  hommes...  Par  la 
!   sobéissance  d'un  seul  homme,  tuu-  cuit  été  constitués 

pécheurs.     ■    Rom.,    v,    12-19.   Cel    en-,  ign nt   de 

l'Apôtre  éclaire  le  récil   de  la  Genèse.  Au  paradis  ter- 
restre. Adam  était  doue,  dans    I.'    pensée  de   Dieu,  I 
repn  -entant  de  l'humanité,  repn  sentant  dont  l'huma- 
nité serait  mal  venue  à  se  plaindre,  puisqu'il  jouissait 
de  l'innocence  et  de  tous  les  dons  divin-,.  Adam  subi 
sail  l'épreuve  au  nom  de  toute  sa  postérité.  Seul   il  a 


15 


PECHE   ORIGINEL 


PECHEUR 


16 


péché  personnellement,  mais  en  lui  et  par  lui.  Uni- 
on! péché,  tous  ont  désobéi,  tous  ont  encouru  la  mort 
et  la  condamnation.  En  cela,  Adam  a  été  la  figure  de 
celui  qui  doit  venir.  7,-0:  roû  |AÉX).ovtoç,  forma  fuluri, 
Rom.,  v,  li  ;  il  a  été  pour  l'humanité,  au  point  de  vue 
du  péché  et  de  la  condamnation,  ce  que  Jésus-Chrisl  a 
été  au  point  de  vue  de  la  réconciliation  et  de  la  vie.  Con- 
formément  à  cette  doctrine,  l'Église  enseigne  que  l.i 
rication  d'Adam  a  nui,  non  à  lui  seul,  mais  à  sa  des- 
cendance; qu'il  a  perdu  à  la  fois  pour  lui  et  pour  nous  la 
sainteté  et  la  justice  qu'il  avait  reçues  de  Dieu:  que 
souillé  lui-même  par  son  péché  de  désobéissance,  il  a 
transmis  à  tout  le  genre  humain,  non  seulement  les 
-  du  corps,  mais  aussi  le  péché  qui  est  la  mort  de 
l'âme   ■.   Conr.    Trid.,   sess.    v,   De  pecc.  ov\g.t   2.   — 


voir  Tunnel,  Histoire  de  la  théologie  positive,  Paris, 
1904,  p.  87,  2-26,  412.  H.  Lesètre. 

PÉCHERESSE  de  l'Évangile.  Luc,  vu.  37.  39.  Voir 
Marie-JIadeleine,  t.  1,  col.  810. 

PÊCHEUR  (hébreu   :   davvdg,   dayyâg;  Septante  : 

i)t£Jç  ;  Vulgate  :  piscalor),  celui  qui  fait  métier  de 
pécher  des  poissons.  —  1  Isaïe,  xi.x.  5-8,  décrit  la  déso- 
lation des  pêcheurs  égyptiens  lorsque  le  châtiment 
frappera  leur  pays,  que  le  Heine  et  les  canaux  tariront 
et  que  la  pêche  deviendra  impossible.  Les  pêcheurs 
égyptiens  faisaient  de  superbes  captures.  Sur  une  pein- 


1        Pêcheurs  du  tombeau  di   Rahotep  à  Meidoum. 
O'oprèf  1    ndei     Pétrie,  Meidum,    n-4»,  Londres,  1892,  pi.  xn 

2.  Dans  d'autres  passages,    saint    Paul  se  réfère  à  la 

môme  doctrine.  Il  appelle  »    vieil  homme   »  l'homme 

lit  d'Adam.  Itom..  vi,  ti;  Eph.,  i\.  22 . 

Col.,  111,  9.  Il  écrit  aux  Corinthiens  que  «  par  un  homme 

1  morl  ».  [Cor.,  xv,  22.  Aux  Ephésiens,  11,  2- 

::  offenses  el  vus  péi  hi  », 

ls  vous  marchiez  auti  1  foi    selon  le  train  de 

ce  monde,  selon  le  pi  ince  de  la  puissance  de  l'air,  de 

l'espi  h  qui  agit  maintenanl  dans  les  Bis  de  la  désobéis- 

•  lions    par    nature   enfants   de  colère, 

'' "'   les    autres.    «    Fils   d  Idam    prévaricateur  el 

volontairemenl  1 -,    di    1  e    m le,   1rs 

hommes    ne    peuvent   qu  -  tre   tl  antipa- 

thiques .1  D 
Le  péché  originel,  qui  souille  loul  homme  venanl  en 

ce   nde,    n  1   p.. s   alteinl   le   Fils    de   Dieu   incarné. 

1  Pet.,  11,  22;  I  Joa.,   m,  5;  .1-....  vin,  16.  L'Église  a 
di  i""  que  la  v  linte  Vii  rge,  en  mi,-  de    mérites  d 
,llxi"  Ffoi                                                   ,,,,..  e|   ,,  , 
pas  cessé  d  être  un  seul   instant  1   pleine  de   gi 
auxyeuxde  son  Créateur.  Luc,  1,  28.    -    Sur  l'inter- 
i"'  '■ les  Pèi  ....     du    , 


5.  —  Pêcheurs  de  nos  jours,  à  Ain  Tobagba,  sur  les  bords 

iln  lac  de  Tibériade.  —  D'après  photographie  de 

M.  L.  Ilcidct  (1899 

Un'  de  Mridonm.  on  voit  trois  pécheurs;  deux  d'entre 
rux  transportent  un  latus  presque  aussi  grand  qu'eux 
(fig.  V}.  Sur  un  tombeau  de  Beni-Hassan,  un  pécheur 
lient  deux  poissons  qu'il  a  piqués  d'un  seul  coup  de 
fourche,  cf.  Rosellini,  Monument)  civi'i,  pi,  xxv,  1,  et 
sur  le  tombeau  de  Ti.  six  pécheurs  montés  sur  deux 
barques  sont  occupés  à  relever  une  nasse.  Voir  PÉCUE, 
lie.  2,  col.  5.  .léhovah  appelle  contre  les  Israélites  infidèles 

i  des  pêcheurs  pour  les  pécher  .  c'esl  à-dire  des  enne- 
mis pour  s'emparer  d'eux  el  les  tenir  en  captivité.  .1er., 

\\  1.  Iii.  Ëzéchiel,  xi.vn,  9-10,  prédit  que,  dans  la  nouvelle 
Terre  Sainte,  les  eaux  de  la  mer  Morte  seront  assainies, 
qu'il  >  abondera  des  poissons  de  toute  1  spèce,  que  des 
pécheurs  se  tiendront  sur  ses  bonis  el  qu'ils  jetteront 
leurs  filets  d'Engaddi  à  Engallim.  Cela  signifie  que, 
dans  le  royaume  du  Messie,  il  n'j  aura  point  de  pays 
deshérité  et  abandonné,  mais  que  la  vie  de  la  grâce 
se  répandra  partout.  —  -2  Plusieurs  des  Apôtres 
exerçaient  le  métier  de  pécheurs  sur  le  lac  de  Tibériade 
(fig  ô  quand  le  Sauveur  les  appela  à  sa  suite.  Tels 
étaient  André,  Pierre,  Joa.,  1.  W  il,  Jacques  le  Majeur 


17 


PECHEUR    —    PECTORAL 


18 


•et  Jean.  Mat  th.,  iv,  21.  Pendant  la  vie  publique  de 
Notre- Seigneur,  et  même  après  sa  résurrection,  ils 
continuèrent  à  pêcher  quand  l'occasion  s'en  présenta. 
Matth.,  iv,  IS;  Marc,  i,  16;  Luc,  v,  2;  Joa.,  xxi,  3.  — 
3°  En  les  appelant  à  lui,  Notre-Seigneur  leur  signi- 
fia qu'il  voulait  faire  d'eux  des  pécheurs  d'hommes. 
Matth.,  iv,  19;  Marc,  i.  17.  Les  Apôtres  devaient  donc 
consacrer  à  la  conquête  des  âmes  un  labeur,  une  adresse, 
une  patience  analogues  à  ce  qu'exigeait  d'eux  la  pèche 
des  poissons.  En  souvenir  de  cette  mission,  les  pre- 
miers chrétiens  représentèrent,  dans  les  catacombes, 
saint  Pierre  sous  la  figure  d'un  pécheur  dont  la  ligne 
tire  de  l'eau  un  poisson   (lig.  6).   Quant  à  l'anneau  du 


<3.  —  Saint  Pierre,  pêcheur  d'âmes.  Cimetière  de  Saint-Calliste. 

D'après  Allard,  Rome  chrétienne,  pi.  vi. 

pêcheur,  dont  se  sert  le  Souverain  Ponlife,  on  ne  com- 
mence à  en  faire  mention  qu'au  xiii"  siècle.  Cf.  Dict. 
d'archéologie  chrétienne,  t.  i,  col.  -2-210. 

H.  Lesètre. 

PÉCHEUR,  PÉCHERESSE(hébreu:/m((d',pos:;m, 
haltaàh;  Septante  :  â[iapT<o>.o;  ;  Vulgate  :  peccator, 
peccatrix),  celui  ou  celle  qui  commet  habituellement 
le  péché  et  y  persévère. 

ln  II  y  a  différentes  sortes  de  pécheurs  :  celui  qui  est 
perverti  dès  le  sein  de  sa  mère,  Ps.  lviii  (lvii).  4;  celui 
qui  fait  le  mal  pendant  une  longue  vie  de  cent  ans, 
Is.,  lxv,  20;  celui  qui  entasse  péchés  sur  péchés, 
Eccle..  vm,  12;  Eccli.,  m,  -29;  v,  5,  6;  vu.  8;  celui  qui 
boit  l'iniquité  comme  l'eau,  Job.  XV,  1(5;  celui  qui  se  rit 
du  péché,  l'rov..  XIV,  9;  Eccli.,  XXVII,  11,  et  se  glorifie 
de  ses  passions,  Ps.  X,  3;  celui  que  la  vue  du  juste  fait 
entrer  en  fureur,  Ps.  exil  (CXI),  10;  celui  qui  fait  com- 
mettre le  mal  aux  autres,  III Reg.,  xv.  31;  xvi.  19;  voir 
Scandale;  celui  qui  abuse  de  la  patience  de  Dieu  en 
disant  :  «  J'ai  péché,  que  m'est-il  arrivé  de  fâcheux?  » 
Eccli.,  v,  3;  celui  qui  se  vante  de  sa  prospérité, 
Ps.  xciv  (xcin),  3,  4;  voir  Impie,  t.  m,  col.  846;  le  pé- 
cheur hypocrite  qui  a  sur  les  lèvres  les  préceptes. 
Ps.  L  (xlix),  16,  ou  la  louange  de  Dieu,  Eccli.,  xv,  9; 
le  pécheur  impénitent,  Joa.,  vin,  21,  etc.  ;  le  pécheur 
persécuteur,  Matth.,  xxvi,  45;  Marc,  xiv,  41  ;  Luc,  xxiv, 
7;  et  d'autre  part  le  pécheur  humble  et  pénitent, 
Luc,  v,  8;  xvin,  13,  alors  même  que  sa  pénitence  est 
tardive.  II  Reg.,  xn,  13;  Luc,  xxin,  42,  etc.  —  2°  Le 
pécheur,  haï  de  Dieu  à  cause  de  son  péché,  Eccli.,  XII, 
7,  peut  fleurir  comme  l'herbe,  ii  sera  exterminé  à 
jamais,  Ps.  xcn  (xci),  8;  le  péché  même  le  fera  périr, 
Ps.  xxxiv  (xxxin),  22;  Prov.,  xm,  6,  21,  et  des  maux 
de  toutes  sortes  s'abattront  sur  lui.  Ps.  xxxn  (xxxi), 
10;  i.xxv  (lxxiv),  9;  xci  (xc),  8;  cxxix  (cxxvin),  4; 
cxlvi,  6;  Prov.,  xi,  31;  Eccli.,  v,  7;  XL,  8;  Is.,  i,  28; 
Am.,  ix,  10,  etc.  Le  Psaume  xxxvn  (xxxvi),  12-34,  décrit 
longuement  le  sort  malheureux  qui  attend  le  pécheur. 
Le  livre  de  la  Sagesse,  n,  1-25;  m,  10-13;  IV,  16-20; 
v.  1-14,  met  en  scène  les  pécheurs  d'abord  dans  leurs 
joies  coupables  sur  la  terre,  ensuite  dans  leur  déses- 
poir de  l'autre  vie.  —  3°  Le  juste  ne  doit  pas  fréquenter 


le  pécheur.  Ps.  I,  1;  Tob.,  iv,  18,  etc.  Ils  ne  sont  pas 
plus  faits  pour  aller  ensemble  que  le  loup  et  l'agneau. 
Eccli.,  xm,  21.  Aussi  mieux  vaut  habiter  sur  le  seuil  de 
la  maison  de  Dieu  que  sous  les  tentes  des  pécheurs. 
Ps.  lxxxiv  (lxxxih),  11.  —  4°  Dans  l'Évangile.  Notre- 
Seigneur,  sans  cesser  de  condamner  le  péché,  prend 
compassion  du  pécheur  dont  il  veut  sauver  l'âme.  Il 
permet  aux  pécheurs  de  venir  à  lui,  Matth.,  ix.  10; 
Luc,  xv,  1;  mange  avec  eux,  Matth.,  ix.  11;  Marc,  n, 
15,  16;  Luc,  v,  30;  xv,2;  xix,  7;  se  laisse  appeler  leur 
.uni,  Matth.,  xi,  19;  Luc,  vu,  34;  déclare  qu'il  est  venu 
pour  les  sauver,  Matth..  ix,  13;  Marc,  n,  17;  Luc,  v, 
32;  I  Tim.,  i,  15,  et  que  leur  conversion  cause  grande 
joie  au  ciel.  Luc,  xv,  7,  10.  Traité  lui-même  comme 
un  pécheur  par  les  Juifs,  Joa.,  îx,  10,  il  est  défendu 
avec  beaucoup  d'énergie  et  de  bon  sens  par  l'aveugle 
qu'il  a  guéri.  Joa.,  ix,  30-33.  Il  appuie  lui-même  ses 
déclarations  en  faveur  des  pécheurs  par  la  conduite 
qu'il  tient  envers  la  Samaritaine.  Joa.,  iv,  1-12;  Matthieu, 
Matth.,  ix,  9-17;  Marc,  II,  13-22;  Luc.  v,  27-39;  la 
pécheresse,  Luc,  vu,  36-50;  la Chananéenne,  Matth.,  xv, 
21-28;  Marc,  vu,  24-30;  la  femme  adultère,  Joa.,  vin, 
2-11  ;  Zacliée,  Luc,  xix,  1-10;  le  bon  larron,  Luc,  XXIII, 
43;  Pierre,  Joa.,  xxi,  15-18;  Paul.  Act.,  ix,  3-6,  etc. 
Tous  les  hommes  sont  pécheurs,  à  des  degrés  divers, 
Rom.,  v,  8,  19;  Gai.,  Il,  15  17;  mais  la  volonté  du  Sau- 
veur est  que  tous  soient  sauvés.  I  Tim.,  Il,  4. 

H.  Lesétre. 
PECTORAL  (hébreu  :  hosén,  et  plus  habituellement  : 
hosèn  ham-niiSpat ;  Septante   :   i.ri-^.'yi  Tôiv    -/.ptirstov,  et 


fefea 


l 


^mmmmmwirv:^i 


^ 


7.  —  Pectoral  égyptien  en  or,  avec  un  scarabée  bleu  au  milieu 
et  un  encadrement  de  pierres  précieuses.  Musée  du  Louvre. 

une  fois,  Exod.,  xxvm,  4;  nîpc<7iiî9io7  ;  Vulgate  :  ralio- 
nale  judicii),  ornement  que  le  grand-prêtre  portait  sur 
sa  poitrine  quand  il  devait  entrer  dans  le  sanctuaire. 
On  l'appelle  aussi  en  français  le  rational.  —  1°  L'origine 
du  mot  hosén  est  incertaine.  D'après  l'arabe  haSan, 
«  être  beau,  »  il  pourrait  avoir  le  sens  d'  «ornement  ; 
niais  les  versions  ne  favorisent  pas  cette  étymologie. 
Dans  le  premier  passage  où  il  soit  question  du  hosén, 
Exod.,  xxv,  7,  l'auteur  sacré  en  parle,  sans  aucune 
explication,  comme  d'une  chose  bien  connue  et  suffi- 
samment désignée  par  son  nom.  Comme  l'objet  parait 
être  d'origine  égyptienne  (fig.  7),  il  est  assez  probable 
que  le  nom  l'est  aussi.  Beaucoup  de  personnages  de 
l'ancienne  Egypte  sont  représentés  avec  un  pectoral 
(fig.  8),  sorte  d'ornement  trapézoïdal  qui  se  porte  sus- 
pendu au  cou.  Cf.  Lepsius,.Oas  Todtenbuch  :1er  Aegyp- 
ter,  Leipzig,  1812,  c  125,  pi.  l;  Mariette,  Monuments 
divers  recueillis  en  Egypte  cl  en  Xtibic,  Paris,  IS72, 
pi.  24,  7i.  92;  Maspero,  Histoire  ancienne  des  peuples 
de  l'Orient  classique,  Paris,  1895,  t.  i,  p.  239.  Le  pec- 
toral trouvé  sur  la  momie  de  la  reine  Aah-Hotep,  mère 


1<J 


PECTORAL 


20 


du  premii  i  roi  de  la  XVIII1  dynastie,  antéi  ieur  à  Moïse, 
,  i  décrit  par  Mariette,  Notii  e  des  monuments  du 
musée  de  i  263-264:      La  forme  générale  du 

monument  est  celle  d'un  petit  )iaos...  Au  cintre,  Amo- 
sis  est  représenté  debout  sur  une  barque.  Deux  divini- 
tés, Ammon  et  Phré,  lui  versent  sur  la  tête  l'eau  de  pu- 
rification.   Deux   éperviers   planent    au-dessus   de    la 
comme  des    symboles  du  soleil  vivifiant.  Le  tra- 
vail de  ce  monument  esl   tout  à   fait  hors    ligne.   Le 
figures  est  découpé  à  jour;  les   figures  elles- 
sonl    dessinées    par    des    cloisons    d'or   dans 
lesquelles  on  a  introduit  des  plaquettes  de  pierres  dures: 
cornalines,  turquoises,   lapis,  pâte  imitant  le  feldspath 
vert.  Ainsi  disposée,  celte  sorte  de  mosaïque,  où  cha- 
rée  de  celle  qui  l'avoisine  par  un 


8.  —  Grand  tn     i  ter  i    \  ptien  poi  tant  le  |  ectoral. 
\ï\  -  )  ptien  du  I 

1  i  ill  in!  lîlel  d'or,  i  li  ii,  m-  un  ensemble  aussi  harmonieux 
'!"'■  M.;  i  i  \i  ouroux,  La  Bible  et  les  découvertes 
1  i  dit.,  i.  m.  p.  543;  Les  Livres  s, nuis  ri  la 
criliq  .  :■  édit.,  l.  m,  p,  123.  Dieu  vou- 
lut que  fi'  ;.  imuiI  prêtre  de  son  peuple  portai  nu  orne- 
ment nal  i  celui  qui  distinguail  1rs  grands  per- 
so               ptiens.  1  .  ques  l'appellent, 

'in!-  de  /■,-  ',,-.   i    parole,  i  ci 

tept<rri  Jio        :     q itoure   la  poitrine;  «  Josèphe, 

ni-  vu.  5,  ii  les  autr         rsion    j  recques  : 
fmmaque  :  Bâytov,  i   réceptacle.  t 

1  linàti ii du  pec- 

poitrine  du  grand-prêtre,  ren 

fermait     .il    i  i.  immim   au  moyen  duquel  Dieu 

1      ti île,  adopté 

par  la   \  ul  ad  .  vise  à  tradu  ,  en   le  dérivanl 

;<   lieu  di    .        ,  i   ,,. i,,,!,  .    i  \ 

■     ugement,  i 
n     que  Dieu  rendait 

;i"  moyen  de  ce  qu i  n  lil  le  pi  i  loral.      2    I  e  te  li 

lonne  uni   d  a  minutieuse  di   i  doit 

,I|V  '•'  I l,|,''l-    Il  '■ pi  il     mi   arli  ravaillé 

•  I    'I"    même    lissu   que  l'i  pbod,   comprenant   l'oi     la 

i"  "M  re  violetl  rouge,  le  1 1 isi  el  le  lin.  Voir 

1  i  ' i  '■  il  col.   1865.  Il    i  [uadrai    ulaire, 


mais  pas  nécessairement  celle  d'un  carre  parfait;  il  est 
double,  c'est-à-dire  replié  sur  lui-même  de  manière  à 
former  une  sorte  de  poche  renfermant  l'Urim  et  le 
Thummim;  sa  longeur  et  sa  largeur  sont  d'un  zéref  ou 
empan,  mesure  comprise  entre  les  extrémités  du  petit 
doigt  et  du  pouce  étendus.  Il  porle  quatre  rangées  de 
pierres  précieuses,  toutes  différentes  et  au  nombre  de 
trois  par  rangée,  Chacune  de  ces  pierres,  enchâssée 
dans  une  rosette  d'or,  représente  une  des  douze  tribus 
d'Israël  dont  le  nom  est  gravi'  sur  elle  (fig.  9).  L'or- 
dre dans  lequel  ces  noms  étaient  disposés  n'est  pas 
indiqué.  Josèphe,  ibid.,  pense  que  l'ordre  suivi  était 
celui  de  la  naissance,  et  c'est  en  effet  ce  qui  parait  le 
plus  naturel.  Des  chaînettes  et  des  anneaux  d'or  ser- 
vaient à  fixer  le  pectoral,  deux  en  haut  et  deux  en 
bas,  aux  épaulettes  de  l'éphodj   de  manière  qu'il    fût 


Wïémwmm 


9,       Pectoral  du  grand-prètre  juif.  Essai  de  restituti t'aprèi 

Schuster,  dans  Fillion,  Atlas  archèolog.,  2  édit.,  pi.  m  r,  fig.  12. 

maintenu  au-dessus  de  la  ceinture  de  l'épliod.  Josèphe, 
ibid.,  lii  que  le  i  dorai  rempli  suii  ainsi  sur  la  poi- 
trine l'espace  laissé  libre  par  l'éphod  (fig.  10).  Lé  grand- 
prêtre  ne  pouvait  entrer  dans  le  sanctuaire  sans  porter 
ainsi  sur  son  cœur  les  noms  des  fils  d'Israël,  g  en  sou- 
venir perpétuel  devanl  Jéhovah.  o  Exod.,  wvm.  15-29; 
\wi\.  s-Jl  :  l.e\..  mii.s.  Voir  Grand-prètre,  t.  m,  fig.  64. 
col.  296.    -  Dans  l'Ecclésiastique,  xlv,  12,  11!,  lepectonal 

est  ntionné  parmi  les  ornements  d'Aaron.  Le  texte 

hébreu  dil  que  Dieu  lui  lit  porti  r  i  le  pectoral  du  juge- 
ment, l'i  pi  n  ni  el  la  ceinture,  ouvrages  lissés  de  cramoisi, 
les  pierres  précieuses  sur  le  pectoral,  gravées  comme 
.les  cachets  pour  1  inauguration  (d  Aaron  .  chaque  pierre 
ayant  une  écriture  gravée  en  souvenir,  suivant  le  nombre 
,les  tribus)  d'Israël  i .  Les  Septante  rendent  bemillu  im, 

g   pour  l'inauguration,  »  par  (pyta  î.tôoOpyoxJ,  uvre 

du  graveur,  g  l.e  texte  hébreu  esl  d'ailleurs  peu  sûr  dans 
ce  passage,  el  le  premier  des  deux  versets  esl   - 

par   les  versions  avec  des  variantes  aSSeZ   COnsidl  l'ailles. 

3°  Les  matièn  qui  entrent  dans  la  fabrication  du 
pectoral,  or,  Bis  richement  teints  el  pierres  précieuses, 
symbolisent  la  dignité  du  grand-prêtre  el  surtout  la 
royauté  suprême  du  Dieu  donl  il  esl  le  ministre.  Aaron 
porte  le  pectoral  o  sur  les  deux  i  paules  i  el  i  sur  te 
cœur  ',  Exod.,  xxxui.  li,  30,  i  en  souvenir  perpétuel 


21 


PECTORAL 


PEINTURE 


22 


devant  Jéhovah,  »  comme  pour  représenter  devant  le 
Seigneur  tout  le  peuple  qui  lui  est  consacré.  Les  pierres 
précieuses  rellètent  la  lumière  du  ciel,  dont  Jéhovah 
est  aussi  le  souverain.  Elles  sont  disposées  sur  le  pec- 
toral quadrangulaire  à  peu  prés  comme  les  Israélistes 
eux-mêmes  le  sont  dans  leur  camp.  Voir  Camp,  t.  n. 
col.  95.  Il  est  évidemment  impossible  de  déterminer 
quelle  relation  symbolique  pouvait  exister  entre  chaque 
pierre  et  la  tribu  dont  elle  portait  le  nom.  Il  n'y  en 
avait  pas  moins  là  une  expression  saisissante  de  cette  idée 
que,  dans  la  personne  du  grand-prêtre,  les  douze  tribus 
étaient  présentes  pour  rendre  hommage  à  Jéhovah  et 
recevoir  ses  oracles.  —  Cf.  Braun.  De   véstitu  sacérdo- 


10.  —  Le  pectoral  et  l'éphod.  —  Essai  de  reconstitution 
d'après  les  monuments  égyptiens,  par  V.  Ancessi,  Atlas 
biblique,  in-4%  Paris,  1870,  pi.  VI. 

lum  Hebrseorum,  Leyde,  1680,  n,  0,  7;  Bâhr,  Symbolik 
des  mosaischen  Quitus,  Heidelberg,  18)19,  t.  n.  p.  104- 
110,127-136.  H.  Lesètre. 

PEIKHART  François,  commentateur  autrichien, 
né  à  Vienne  le  14  janvier  16S4,  mort  dans  cette  ville  le 
•29  mai  1752.  Il  entra  dans  la  Compagnie  de  Jésus  en 
1698  et  fut  longtemps  professeur  et  prédicateur.  Nous 
a\ >.ii -  de  lui.  en  allemand,  de  longs  commentaires  sur 
le-  quatre  Evangiles  :  Erklârung  der  Evangelischen 
/':  hreibung  der  IV  Evangelischen.  Ils  parurent 
d'abord  à  Vienne  en  1752-1754,  fuis  à  Munich  et  à  In- 
golsladt  en  1753.  L'édition  de  Munich  est  en  1  in-f°. 

P.  I!i  ivp.d. 

PEINES,  châtiments.  Voir  Pénalités. 

PEINTURE,  art  d'imiter,  à  l'aide  des  couleurs  appli- 
quées sur  une  surface,  l'apparence  naturelle  des  êtres 
vivants  ou  des  objets.  —  La  loi  qui  proscrivait  toute 
image  taillée  et  toute  figure  d'être  animé,  Exod.,  xx,  1, 


.  fut  toujours  prise  par  les  Hébreux  dans  le  sens  le  plus 
strict.  Ils  s'en  inspirèrent  dans  leurs  monuments.  De 
plus,  étant  donnée  la  nature  des  matériaux  employés 
dans  leurs  grandes  constructions  et  leur  caractère  suffi- 
samment décoratif,  on  peut  dire  que  la  peinture  leur  fut 
à  peu  près  étrangère.   Aussi,   pour  exprimer  l'idée  de 

peindre  »,  sont-ils  obligés  de  se  servir  du  verbe  liâqâh 
qui  veut  surtout  dire  «  sculpter  ■•  et  o  graver  ».  Il  est 
bon  néanmoins  d'avoir  quelque  idée  de  ce  que  fut  la 
peinture  chez  les  Égyptiens,  les  Assyriens,  les  Perses, 
et  les  Grecs,  à  cause  de  quelques  allusions  bibliques  et 
aussi  des  illustrations  qu'on  en  tire  pour  l'explication 
du  texte  sacré. 

1°  Chez  les  Egyptiens.  —  Les  statues  étaient  souvent 
complètement  peintes  des  pieds  à  la  tète.  Dans  les  bas- 
reliefs,  les  personnages  et  les  figures  étaient  enluminés, 
sur  un  fond  laissé  à  l'étal  naturel.  Pour  exécuter  ces 
peintures,  on  se  servait  de  couleurs  dont  la  variété 
s'accuse  déplus  en  plus  avec  le  temps.  Les  couleurs  trop 
coûteuses  se  remplaçaient  par  des  imitations  plus  simples, 
comme  le  bleu  du  lapis-lazuli  par  du  verre  coloré  et  réduit 
en  fine  poussière.  On  délayait  la  couleur  dans  de  l'eau 
additionnée  de  gomme  adragante,  et  on  l'étalait  à  laide 
d'un  calame  ou  d'une  brosse.  Pour  les  surfaces  planes, 
sur  lesquelles  on  tenait  à  fixer  des  scènes  plus  ou 
moins  compliquées,  on  commençait  par  dégrossir  la 
paroi  à  décorer  et  l'on  appliquait  sur  la  muraille  encore 
rugueuse  un  crépi  d'argile  noire  et  de  paille  hachée 
menu,  mélange  qui  produisait  un  enduit  analogue  à  la 
composition  de  la  brique.  La  peinture  fixée  sur  les  sur- 
f.ices  ainsi  préparées  constituait  de  l'enluminure  beau- 
coup plus  que  de  la  peinture.  L'artiste  procédait  par 
teintes  plates,  juxtaposées  mais  non  fondues.  Tout  en 
obéissant  à  l'inspiration  de  la  nature,  il  ne  s'écartait 
p  i  'pendant  de  certaines  formules  de  convention  qui 
caractérisent  les  procédés  égyptiens  de  la  première  à 
la  dernière  époque.  On  indiquait  dans  les  ateliers  la 
couleur  qui  convenait  à  tel  être  ou  à  tel  objet,  et  l'on 
s'en  tenait  à  celte  donnée  traditionnelle.  Ainsi  l'eau  est 
toujours  d'un  bleu  uni  ou  strié  de  zigzags  noirs.  Les 
chairs  sont  brunes  chez  les  hommes  et  d'un  jaune  clair 
chez  les  femmes,  sauf  un  certain  nombre  d'exceptions 
qui  ne  se  constatent  guère  qu'à  de  rares  et  courtes  pé- 
riodes. Voir  1. 1,  fig.  616,  col.  193-2;  t.  n,  fig.  384,  col.  1067. 
La  perspective  est  à  peu  près  inconnue.  Les  objets 
représentés  sont  là,  mais  à  leur  place  conventionnelle, 
un  canal,  par  exemple,  à  mi-hauteur  du  tronc  des  pal- 
miers qu'il  traverse,  un  bassin  avec  les  plantations 
dressées  perpendiculairement  sur  les  quatre  faces, 
des  masses  de  soldats  figurées  par  la  reproduction 
multipliée  et  identique  du  même  individu,  les  diffé- 
rentes scènes  d'une  même  action  juxtaposées  ou  super- 
posées pour  ne  négliger  aucun  détail,  etc.  L'artiste  lais- 
sait au  spectateur  le  soin  d'interpréter,  ce  qui  d'ailleurs 
était  facile,  puisque  tous  connaissaient  parfaitement  la 
convention  traditionnelle  qui  réglait  l'œuvre  des  pra- 
ticiens. La  représentation  de  l'être  humain  ne  s  car- 
tait  qu'assez  rarement  de  certaines  lois  artistiques  en 
contradiction  avec  celles  de  la  perspective,  mais  per- 
mettant de  caractériser  facilement  les  principales 
parties  du  corps.  Ainsi  presque  toujours  la  tète,  munie 
d'un  œil  de  face,  se  présente  de  profil.  1''  buste  de  face, 
le  tronc  de  trois  quarts  et  les  jambes  de  profil,  o  Les 
maîtres  égyptiens  continuèrent  jusqu'à  la  lin  à  déformer 
la  figure  humaine.  Leurs  hommes  et  leurs  femmes  sont 
donede  véritables  monstres  pour  l'anatomiste,  eteepen- 
danl  il-  ur  sont  ni  aussi  laids  ni  aussi  risibles  qu'on  esl 
porté  à  le  croire,  en  étudiant  les  copies  malencontreuses 
que  nos  artistes  en  ont  faites  souvent.  Les  membres 
défectueux  sont  alliés  aux  corrects  avec  tant  d'ail 
qu'ils  paraissent  être  soudés  comme  naturellement. 
I.  !s  lignes  exactes  el  les  fictives  se  suivent  et  se  com- 
plètent si  ingénieus  imenl  qu'elles  semblenl  se  déduin 


23 


PEINTURE    -      PÈLERINAGES 


24 


nécessairene-nl  les  unes  des  autres.  La  convention  une  i 
ibis  reconnue  el  admise,  on    ne  saurait  trop  admirer 
l'habileté  technique  dont  témoignent  beaucoup  de  mo- 
numents... Chaque  mur  est   traité  comme  un  tout,  et 
l'harmonie  d.-s  couleurs  s'y  poursuit  à  travers  les  re- 

■  superpos  -  :  tantôt  elles  sont  reparties  avec 
rythme  el  symétrie,  d'étage  en  étage,  et  s'équilibrent 
l'une    par   l'autre,    tantôt   l'une   d'elles    prédomine   et 

une  une  tonalité  générale,  à  laquelle  le  reste 
est  subordonné.  L'inti  i  ensemble  est  toujours 

proportionnée  à  la  qualité  et  à  la  quantité  de  lun 
que  le  tableau  devait  recevoir.  Dans  les  salles  entière- 
ment sombres,  le  coloris  est  poussé  aussi  loin  que 
possible;  moins  fort,  on  l'aurait  à  peine  aperçu  à  la 
vacillante  des  lampes  et  clés  torches.  Aux  murs 
d'enceinte  el  ^m-  la  face  des  pylônes,  il  atteignait  la 
puissance  qu'au  fond  des  hypogées;  si  brutal 
qu'on  le  fit,  le  soleil  en  atténuait  l'éclat.  11  est  doux  et 
discret  dans  les  pièces  où  ne  pénètre  qu'un  demi-jour 
voilé,  sous  le  portique  des  temples  et  dans  l'antichambre 
des  tombeaux.  La  peinture  en  Egypte  n'était  que 
l'humble  servante  de  l'architecture  et  delà  sculpture.» 
Maspero,  L'archéologie  égyptienne,  Paris,  1887.  p.  ITu. 
198.  Pendant  leur  séjour  en  Egypte,  les  Hébreux  avaient 
eu  l'occasion  de  contempler  certaines  de  ces  peintures 
d  un  caractère  fréquemment  idolâtrique  et  dans  les- 
quelles les  dieux  étaient  habituellement  représentés 
avec  des  têtes  d'animaux.  Il  était  donc  utile  de  I 
munir  contre  tout.'  idée  d'imitation.  Plus  tard,  l'auteur 
de  la  Sagesse,  xv,  i.  se  moquera  de  ces  idoles  qui  ont 
une  figure  barbouillée  de  diverses  couleurs,  vain 
travail  d'un  peint]  I 

2°  Chez  les  Assyriens.  —  Les  assyriens  enduisaient 

leurs   maisons  d'un  stuc   blanc,   fait   de  plâtre  et  de 

el  assez  souvent   le  décoraient  de  peintures  en 

détrempe,   à    teintes   plates  et    sans   modelé-  dans   les 

Perrot,  Histoire  de  l'an,  t.  n.  p.  291.  Plu- 

-  de  ces  peintures  remontent  à  la  plus  liante  anti- 
quité chaldéenne.  On  a  retrouvé'  d'élégantes  rosaces 
formées  par  l'application  sur  le  stuc  de  couleurs  très 
trancli —     des    bordures    décoratives   avec    taureaux 

-  en  blanc  sur  fond  jaune  et  silhouettes  ai  eus  es 
par  un.'  large  bandi  noire,  créneaux  bleus  et  restons 
multicolores,  etc.    Les  tours  .'i   étages  ont   les  degt    - 

ls,  a   partir  du    bas,  en    blanc,   noir,   rouge,  jaune. 

"ermillon,  .,,-.  a  i  intérieurdes  salles,  les  bas- 

rehefseux-mêmes  étaient  décorés  en  couleur,  de  sorteque 

s  *l'"'~  '  '  itures  p. naissaient  en  être  la  conti- 

l""li""  '  '  le  prolonge nt,  ce  qui  évitait  un  contraste 

111,1  entre  la  blancheur  des  sculptures  et  la  colo- 

1  •'•-  -  stucs.  Cf.    Babi  Ion,  Arche*  mtale, 

1888,  p.   lit;.   La  brique  émaillée  entrai!  aussi 

Jupdansla décoration  desédifices.  VoirÉMMi . 

['    "''"'■    '''-•    "'"is  une   de  srs    visions,    mi  pays  des 

•'l:'1,1'  ""-■   !  "  chiel,  vin,  10,   mii,_..  ;,  ces  peintures, 

dèles,  quand  il  décrit,  dans 
■jpesalle  retirée,  i  ti  i  iresde  reptiles  et 

'  /'""uaux  ii mdes,  el  toutes  les  idoles  de  la  maison 

'"'"  '  '''  ssinées  sur  la  muraille  tout  autour,  t  Dans 
'"'"  vision,  il  voil  Ooliba,  c'est-à  dire  Jérusalem, 
brulanl  d  amour  pour  les  fils  .1"  l'Assyrie  repn  si  nti  - 
en  peintur,  surla  muraille  avec  une  couleur  vermillon. 
I./'-i'"  .  wiii.  li.  i,,,.,  Jérémie,  xxii.  11.  avait  sligma- 
lls';  '  rois   de  Juda  qui  s'élevaieni  de  vastes 

"''"""'  i  a  vermillon. 

"  ■'!''  syriaque  el   arabe,  il 

rail  ici    non  pas 
mais  de 

levi  rmillon,  ..:,-  Cf.  Plii      //.  N.,  \\w 

6,  13. 

•i    Chez  1rs  Perses.   -  A  Sus.,   la   décoration  poly- 
chrorae  a  l'extérieur  des  -,■  composait  de 

briques  émaillées  ,mx  vives  couleurs,  avec  d'- 


en relief  pour  imiter  la  sculpture  assyrienne.  ■  L'inté- 
rieur de  l'apadàna  parait  avoir  été  simplement  colorié  à 
l'aide  d'un  stuc  rouge  monochrome  que  dissimulaient 
d'ailleurs,  à  peu  près  complèlement,  les  riches  tapis 
et  les  draperies  brodées  dont  les  parois  de  toutes  les 
salles  étaient  tendues.  »  Babelon,  Archéologie  orientale, 
p.  184.  Le  livre  d'Esther,  I,  6,  mentionne  ces  tentures, 
et  non  des  peintures,  comme  traduisent  les  versions. 
1  Chez  les  Grecs.  —  La  polychromie  des  édifices  et 
des  maisons  était  en  grand  honneur  chez  les  Grecs. 
L'inlluence  s'en  fit  naturellement  sentir  en  Palestine  à 
l'époque  des  Séleucides.  On  en  a  une  preuve  dans  une 
remarque  faite  en  passant  par  l'auteur  du  second 
livre  des  Machabées,  n,  30  :  «  De  même  que  l'architecte 
d'une  maison  nouvelle  doit  embrasser  dans  sa  pensée 
tout  l'ensemble  de  la  construction,  tandis  que  celui  qui 
se  charge  de  la  décorer  et  d'y  peindre  des  ligures  doit 
se  préoccuper  de  ce  qui  regarde  l'ornementation... 
Kn  tous  cas,  cet  art  ne  pénétra  jamais  dans  le  Temple, 
où  la  couleur  ne  figurait  que  dans  les  tapisseries 
S  ou.  à  l'état  naturel,  dans  les  riches  matériaux 
plus  ou  moins  ouvragés  qui  entraient  dans  la  construc- 
tion, pierre,  cèdre,  bronze,  or.  etc.  .loséphe,  Bell.jud., 
Y.  v.  i.  note  que  même  dans  l'ornementation  des  por- 
tiques du  Temple,  aucun  peintre  de  ligures,  j.rji;^:. 
n'avait  eu  à  travailler.  La  peinture  décorative,  la  seule 
dont  il  puisse  être  question,  était  donc  exclue  de  l'édi- 
Bce  sacré.  Différents  textes  semblent.au  moins  dans  les 
versions,  se  rapporter  à  la  peinture.  11  lteg..  VI,  29,  32  : 
Prov..  vu,  16;  Jer..  iv,  30;  Ezech-.,  xi  .  ti;  Eccli.,  XXXVIII, 
is.  En  réalité,  il  n'y  est  question  que  de  sculpture  ou 
de  teinture.  H.  Leslthe. 

PEIRCE  James,  controversiste  protestant,  né  à 
Londres  en  1673,  mort  à  Exeter  le  30  mars  1726.  Il  étu- 
dia en  Hollande,  à  Utrecht  et  à  Leyde.  De  retour  en 
Angleterre,  il  prêcha  à  Londres,  et  en  1713  devint  mi- 
nistre d'une  église  non  conformiste  à  Exeter.  Cinq  ans 
plus  tard  il  devait  renoncer  à  ce  poste  à  cause  de  ses 
doctrines  sur  la  Trinité:  mais  peu  après  il  ouvrait  un 
nouveau  temple  dans  la  même  ville.  Prédicateur  cé- 
lèbre, il  eut  de  longues  discussions  avec  les  anglicans 
et  presque  tous  ses  écrits  ont  Irait  à  ces  controverses. 
Nous  devons  cependant  mentionner  l'ouvrage  suivant  : 
1  |  araphase  and  notes  on  ihe  Epistles  of  St.  l'aul  to 
llie   Colossians,  Philippians  and  Hebrews,  after  the 

teroj  Mr.  Locke  to  wich  are annexederilical dis- 
sertations on  parlicular  tes  (s  o/  Si  ripture.  With  a  pa- 
raphrase and  notes  on  the  three  lasl  chapter»  of  the 
Hebrews,  left  uni  nUhed  >"i  Mr.  Peirce;  andati 
/,,  discover  tin-  autor  of  the  Epislle,  and  language  En 
with  il  was  written,  '<;/  Joseph  Hallel,  '-"  édition,  m-1  '. 
Londres,  1733.  Cet  ouvrage,  dont  la  1"  édition  avait 
paru  en  1725-1727,  fut  traduit  en  latin  par  Michaëlis  en 
1717.  —  Voir  W'.ilrli,  Bibliolh.  theologica,  t.  iv.  p.  H7.">. 
736;  W.  Orme,  Biblioth.  biblica,  p,  344. 

P.   llll  l'.ll  1:1/1. 

PELAGE  (hébreu  :  hàbarbiti  ô( .  Septante  :  scoixf)  ax-x: 

Vulgate  .  oarietales  .  la  robe  d'un  fauve,  donl  les  poils 

diversement  colorés  donnent  an  aspect  spécial  à  chaque 

espèce.  —   Le  mot  hébreu,  exactement   rendu  par  les 

i-.  .1  isigne  les  tache-   noires  qui   sont  dissémi- 

sur  le  dos  jaune  du  léopard.  L'Ethiopien  ne  peu! 
pas  plu-  changer  sa  peau  que  le  léopard  les  taches  *\r 
son  pelage.  1er  .  xm,  23.  Von-  Ni  cri  s,  t.  ix.  col 

Sur  le  procédé  employé  par  Jacob  pour  obtenir  d'-s 
brebis  tachetées  de  différentes  nuances,  Gen.,  xx\.  37- 
;:;,  voir  Bri  bis,  1. 1,  col.  1918.  II.   Lesi 

PÈLERINAGES,  voyages  que  les  Israélites  étaient 

obligés  de  faire  à  Jérusa len  aux   trois  fêtes  principales. 

I    La  Loi  obligeait  tous  les  ho tes  à  se  présenter 

trois  fois  l'an  devant  Jéhovah,  Exod.,  xxiit.  17:  xxxiv. 


25 


PELERINAGES 


PELICAN 


2G 


23,  à  la  fêle  des  azymes  ou  Pàque,  à  la  fête  des  se- 
maines ou  Pentecôte  et  à  la  fête  des  Tabernacles.  La 
loi  ajoutait  qu'en  ces  occasions  il  ne  fallait  pas  venir 
les  mains  vides,  mais  que  chacun  devait  apporter  ses 
offrandes  selon  les  bénédictions  que  Dieu  lui  avait 
accordées.  Deut.,  xvi,  16-17.  Cf.  II  Par.,  vin,  13.  Voir 
Fêtes  juives,  t.  n,  col.  2218.  —  Sur  la  manière  dont  les 
pèlerins  se  rendaient  à  Jérusalem,  voir  Caravane,  t.  n, 
col.  249. 

2"  L'obligation  légale  ne  visait  que  les  hommes.  Pra- 
tiquement, on  déclarait  exempts  de  cette  obligation  les 
sourds,  les  faibles  d'esprit,  les  enfants,  les  orphelins, 
les  femmes,  les  esclaves,  les  estropiés,  les  aveugles,  les 
malades,  les  vieillards,  et  en  général  tous  ceux  qui  ne 
pouvaient  faire  le  chemin  à  pied.  Cf.  Chagiga,  I,  1.  Par 
enfant,  on  entendait,  d'après  Schammaï,  celui  qui  ne 
pouvait  plus  être  transporté  de  Jérusalem  au  mont  des 
Oliviers  que  sur  les  épaules  de  son  père,  et  d'après  llillel, 
celui  qui  n'aurait  pu  faire  ce  chemin  en  tenant  la  main 
de  son  père.  Du  récit  de  saint  Luc,  II,  42,  il  ressort 
que  l'enfant  n'entreprenait  le  pèlerinage  qu'à  sa  dou- 
zième année.  Encore  faut-il  tenir  compte  de  la  dis- 
tance à  laquelle  il  se  trouvait  de  Jérusalem.  Les 
docteurs  étaient  plus  sévères  pour  la  fête  des  Taber- 
nacles, î  es  femmes,  les  esclaves  et  les  enfants  en 
étaient  exempts.  Mais,  parmi  ces  derniers,  l'obligation 
s'imposait  à  ceux  qui  pouvaient  se  passer  de  leur  mère 
et  qui  étaient  capables  d'agiter  le  rameau  de  la  fête  ou 
lulnli.  Cf.  Sukka,  n,  8; m,  15.  Les  Israélites  de  l'étranger 
ne  se  dispensaient  pas  de  ces  pèlerinages;  ils  venaient 
à  la  ville  sainte  au  moins  de  temps  en  temps.  Ils  arri- 
vaient par  milliers  de  tous  les  points  cardinaux,  les 
uns  par  terre,  les  autres  par  mer.  Cf.  Philon,  De 
inonarch.,  n,  1,  édit.  Mangey,  t.  n,  p.  223.  Cf.  Josèpbe, 
Ant.  jud.,  XVII.  Il,  2;  XVIII,  ix,  1;  Yoma,  vi,  4; 
Taanith,  1,  3. 

3°  Un  mois  avant  chacune  de  ces  trois  fêtes,  on  com- 
mençait  à  instruire  le  peuple  de  tout  ce  qui  concernait 
la  solennité.  Quinze  jours  plus  tard,  ou  procédait  à  la 
décimation  des  troupeaux,  on  recueillait  le  montant  de 
l'impôt  et  l'on  tirait  du  trésor  du  Temple  ce  qui  était 
nécessaire  à  l'usage  commun  pendant  la  fête.  Cf.  Sche- 
kalin,  m,  1.  Tout  était  préparé  dans  le  pays  pour 
l'utilité  et  la  sécurité  des  pèlerins,  les  chemins  remis 
en  état,  les  puits  débarrassés  de  leurs  pierres,  les 
sépulcres  reblanchis,  les  ponts  consolidés,  les  places  et 
les  rues  de  Jérusalem  laissées  à  la  disposition  de  ceux 
qui  devaient  y  camper.  Là  où  il  y  avait  lieu  de  le  faire, 
on  donnait  l'eau  de  jalousie  à  boire  aux  femmes  sus- 
pectes d'adultère  (voir  t.  n.  1522),  on  immolait  et  on 
consumait  la  vache  rousse  (voir  t.  n  col.  407)  et  l'on 
perçait  les  oreilles  des  esclaves  (voir  t.  IV,  col.  1857). 
Deux  ou  trois  jours  avant  la  fêle  on  purifiait  soigneuse- 
ment les  vases  et  les  ustensiles  qui  devaient  servir  ce 
jour-là. 

4°  Dans  la  Mischna,  le  traité  Chagiga  s'occupe  de 
l'obligation  d'aller  à  Jérusalem  aux  trois  grandes  fêtes 
et  des  devoirs  qui  s'imposaient  alors  à  l'Israélite;  le 
traité  Moed  katan  a  pour  objet  les  jours  intermédiaires 
de  la  fête,  et  le  traité  Beza  ou  Yom  tob  indique  ce 
qu'il  est  permis  de  faire  les  jours  de  fête'  ou  de 
sabbat.  On  voit  dans  ces  traités  que  les  Juifs  recon- 
naissaient six  jours  de  fête  majeure,  appelés  yâmîm 
lohhn.  «  jours  bons  »  ou  «  grands  jours  »  :  le  premier 
et  le  septième  de  la  Pàque,  celui  de  la  Pentecôte,  le 
premier  et  le  huitième  des  Tabernacles,  et  le  premier 
de  tischri  ou  commencement  de  l'année  civile.  Cf.  Bosch 
haschana,  î,  1.  En  ces  jours,  le  travail  était  défendu, 
mais  moins  strictement  qu'au  jour  du  sabbat,  car  il  était 
permis  de  cuire  les  aliments  préparés  la  veille. 
Cf.  Gem.  Jerus.  Yebamoth,  8,  4.  Sur  ces  six  jours,  i! 
y  en  avait  quatre,  le  premier  de  la  Pàque,  celui  de 
la    Pentecôte,    le    huitième    des    Tabernacles     et    le 


premier  de  tischri  qui  se  distinguaient  des  autres 
par  les  sacrifices  qu'on  offrait  et  les  festins  aux- 
quels on  se  livrait.  Saint  Jean,  vu,  37,  remarque 
que  le  dernier  jour  de  la  fête  des  Tabernacles  était 
«  le  jour  le  plus  solennel  ».  Les  jours  intermédiaires  de 
la  Pàque  et  de  la  fête  des  Tabernacles  étaient  moins 
solennels.  Saint  Jean,  vu.  H,  fait  encore  allusion  à  l'un 
de  ces  jours.  On  y  pouvait  terminer  les  travaux  qui  ne 
seraient  pas  restés  en  souffrance  sans  inconvénient  ou 
dommage.  Cf.  Sota,  ix,  10.  Il  était  également  permis 
de  se  livrer  à  des  travaux  d'utilité  publique  et  immé- 
diate, comme  le  blanchissage  des  sépulcres  à  la  chaux, 
ou  à  d'autres  couvres  urgentes,  comme  l'arrosage  d'un 
champ  desséché,  etc. 

5»  On  profitait  de  ces  fêtes  pour  offrir  un  grand  nom- 
bre de  sacrifices,  qu'on  réservait  jusqu'à  cette  occasion, 
comme  ceux  qui  étaient  prescrits  aux  femmes  devenues 
mères,  à  ceux  qui  étaient  atteints  de  flux,  etc.  Cf.  Joa. 
m,  .V)  [ut  sanciificarent  seipsos).  De  plus,  la  Loi  or- 
donnait expressément  de  ne  pas  se  présenter  les  mains 
vides  devant  le  Seigneur.  Exod.,  xxm,  15;  Deut.,  xvi. 
10.  17.  Chacun  se  faisait  donc  un  devoir  d'offrir  un 
holocauste  pendant  le  cours  la  fête,  et,  le  premier 
jour,  un  sacrilice  pacifique  dont  on  pouvait  manger 
ce  jour-là,  la  nuit  et  le  jour  qui  suivaient.  Ces 
sacrifices  prenaient  le  nom  de  hagignh,  ou  sacrifices 
de  la  fêle.  Celui  qu'on  offrait  le  14  nisan  poi 
être  mangé  avant  l'agneau  pascal.  Si  ces  deux  saeri- 
lices  n'avaient  pas  été  offerts  dès  le  premier  jour,  on 
pouvait  les  offrir  les  autres  jours  de  la  fêle,  et,  pour 
la  fête  de  la  Pentecôte  qui  ne  durait  qu'un  jour,  pen- 
dant les  six  jours  suivants.  Cf.  Moed  kalon,  m,  6; 
Chagiga,  î,  6. 

6»  A  ces  sacrifices  devaient  s'ajouter  des  festins  de 
joie  et  de  reconnaissance.  Deut.,  xxvn,  7.  L'Israélite 
devait  inviter,  au  moins  à  la  fête  de  la  Pentecôte,  outre 
son  lils,  sa  fille,  son  serviteur  et  sa  servante,  le  lévite 
l'étranger,  l'orphelin  et  la  veuve.  Deut.,  xvi,  11,  il. 
On  y  mangeait  ce  qui  avait  été  offert  dans  les  sacri- 
fices pacifiques  de  la  fête  et  même  ce  qui  provenait  de 
la  (lime  des  animaux.  Les  prêtres  célébraient  leurs  fes- 
tins avec  ce  qui  leur  revenait  de  ces  sacrifices.  On  re- 
gardait les  femmes  comme  obligées  à  prendre  part  à 
ces  festins. 

7»  On  profitait  de  l'affluence  amenée  par  ces  fêtes 
pour  exécuter  les  criminels,  afin  d'inculquer  à  tous 
une  crainte  salutaire.  Deut.,  xvn,  13;  xix,  20.  Cf. 
Sanhédrin,  xi,  4.  On  ne  procédait  cependant  à  l'exécu- 
tion qu'avant  le  commencement  de  la  fête,  comme  il 
fut  fait  pour  Notre-Seigneur,  ou  après  son  dernier  jour, 
comme  Hérode  Agrippa  se  le  proposait  pour  saint 
Pierre.  Act.,  xil,  4.  Cette  aflluence  et  ces  festins 
n'allaient  pas  sans  occasionner  parfois  certains  dé- 
sordres, surtout  à  l'époque  de  la  domination  romaine. 
Cf.  Josèpbe,  Bell,  jud.,  I,  m,  2-4  ;  Matth.,  xxvi,  5.  Aussi 
les  procurateurs  avaient-ils  coutume  d'être  eux-mêmes 
présents  à  Jérusalem  pendant  les  fêtes  avec  toute  leur 
garnison,  et  même  ils  postaient  une  cohorte  en  armes 
sous  les  portiques  du  Temple  afin  de  maintenir  l'ordre 
et  d'obvier  à  toute  tentative  de  troubles.  Cf.  Josèpbe, 
Ant.  jud..  XX,  v,  3.  —  Reland,  Antiquilates  sacras, 
Utrecht,  1731,  p.  224-228;  Iken,  Antiquilates  hebraicœ, 
Brème,  1741,  p.  305-307.  —  Sur  les  voyages  entrepris 
pour  porter  les  prémices  à  Jérusalem,  voir  Prémices. 

II.  Lesètre. 

PÉLICAN  (hébreu  :  qd'af;  Septante  :  t.i'i  t/.i/ :  Yul- 
gate  :  pellicanus,  onocrotalus),  oiseau  palmipède,  type 
de  la  famille  des  pélécanidés  (lig.  11).  —  Le  pélican 
est  un  oiseau  dont  la  taille  atteint  quelquefois  deux 
mètres.  Son  bec  seul  a  près  de  cinquante  centimètres; 
il  est  droit,  large,  déprimé,  avec  une  mandibule  infé- 
rieure composée  de  deux  branches  osseuses  qui  servent 
de  soutien  à  une  grande  poche   nue  et  dilatable,  dans 


27 


PÉLICAN    -    PÉLUSE 


28 


laquelle  l'oiseau  amasse  une  forte  quantité  d'eau  el  de 
poissons.  Le  p'lican  fréquente  les  bords  des  fleuves, 
de  la  mer.  il  nage  avec  une  merveilleuse 
té  et  est   en    mesure  de    foire  une   chasse   très 
active  aux    poissons  qui   composent  sa  nourriture.  Le 
,,  atifiqui  ittribué  au  pélican 

à  cause  d'une  certaine   ressemblance  entre  son  ci  i  et 
1,    braimenl   de  l'âne.  Sur  le  bord  du  lac  de  Tibériade, 
on  trou-  fréquemmenl       le  pélican,  pelecanus  ono- 
tienl  ordinairemenl   en  troupes  nom- 
plusieurs  centaines  d'individus,  près  de  l'en- 
droit où  le  Jourdain  forme  un  estuaire.  Ces  gros  oiseaux 
ici  ut    i  ii    cercles    immenses   sur   un    seul    rang 
ii  rement  disposés  el  espacés, 
se  livn  ni  à   une  pêche  active,  la  tête  toujours  dirigée 
vers  le  centre  du  cercle.  Ils  sont  trop  sauvages  pour  se 


il. 


Le  pélican. 


laisser    voir   de  prés,    mais  avec  la   longue-vue   nous 
avons  pu  souvent  examiner  leurs  manœuvres  singu- 
lières. Lorsque  la  pèche  a  élé  fructueuse  et  leur  poche 
cervicale  convenable menl  remplie    de  poissons,  ils  se 
retirent  au   milieu    des  roseaux,  dans  quelque    golfe 
t,  pour  se    livrer  alors  en  paix  au  travail  de  la 
mastication  et   de  la    digestion     ».    Lortet,    La   Syrie 
urd'hui,  Paris,   1884,  p.  511.  Le  pélican  dégorge 
1rs  provisions  qu'il  a  amassées  en  pressant  sa  mandi- 
irentre.  il  semble  alors  les 
hi  breu   de  qà'af,  tiré  du  verbe 
vomir,  i  11  agit  ainsi,  soit  quand  il  est  alarmé  el 
pour  fuir  plus  aisément,  il  se  débarrasse  du  far- 
deau qui    '   tardi  rail     a   cour  e,    s, .il  quand   il    veul 

doi '   '  man  ■  r  à  ■  ■  -  pi  til     D'une  observation  incom- 

d ip  Tte  te  pélican,  on  a 

conclu  qu'il  s'ouvrait  lui-même  le  ventre  pour  nourrir 
ses  petits.  Saint  Augustin,  \n  Ps.t  r,8,t.xxxvil,col.l299, 
enregistre  la  tous  la  forme  suivante  :  l'oiseau 

tue  ses  petit    à  coups  de  becetensuite  porte  leur  deuil 

dans  - ml  pendant  trois  jours;  au  bout  de  ce  In,, p. 

'■ -r*  se  t'ait  i  e  un      ,  lve  blessure  et  ré- 

pand bob  sanj  sut  pi  tits,  qui  aussitol  reprennenl 
la  vie.  '          .    qui  rend  la  |  im  ,g,  ,i„  sang 

du  Sauveur.  La  légende  el  son  application  se  sonl  géné- 
raliséesau  moye et  ont  pris  place  dans  l'iconogra- 
phie chrétienne.  Le  pélican  Ml,,  ent0Uré 


de  ses  petils  et  les  nourrissant  au  moyen  d'une  bles- 
sure qu'il  s'est  faite.  Saint  Thomas,  dans  l'hymne 
,1c',  ,ro  te,  appelle  Jésus-Christ  g  compatissant  pélican  ■•; 
mais,  dans  le  développement  de  cette  idée,  il  reste 
lidèle  à  la  donnée  de  saint  Agustinet  considère  l'acte  de 
l'oiseau  symbolique  comme  destiné  à  purifier  et  à  vivi- 
fier au  moyen  du  sang  et  non  à  nourrir.  —  La  Sainte 
Écriture  parle  du  pélican  pour  défendre  de  l'employer 
dans  l'alimentation.  Lev..  xi,  18;  Deul.,  xiv,  17.  Lie  fait, 
sa  chair  n'est  pas* mangeable.   Un  Psalmiste.  en  proie 

à  de  dures  épreuves,  se  c pare  au  pélican  du    ; 

et  au  hibou  des  ruines.  Ps.  cil  (Cl),  7.  Le  pélican  au 
repos  a  un  air  grave  et  mélancolique  qui  ligure  bien 
les  apparences  du  chagrin.  Le  désert  qu'il  habite  est 
naturellement  situé  sur  le  bord  des  eaux,  puisque  cet 
oiseau  ne  vit  que  de  poisson.  La  présence  du  pélican 
d  m-  des  endroits  précédemment  habités  indique  que 
ces  lieux  sonl  devenus  déserts  et  en  ruines.  Il  en  si  l  i 
ainsi  du  pays  d'L'dom,  dont  les  torrents  seront  dessé- 
chés, Is..  xxxiv,  9,  11,  el  de  Ninive.  Soph.,  II,  li.  A 
Ninive,  les  pélicans  trouvèrent  à  vivre  dan-  les 

du  Tigre.   Ils  sont  nombreux  en  Egypte  sur  les  I Is 

du  Nil  et  dans  les  marécages  du  Delta.  En  Iilumée.  ils 
n'auront  à  leur  disposition  que  les  eaux  de  la  mer 
Morte  et  du  golfe  Êlanitique.  Mais  il  faul  observer 
qu'ici  le  prophète  Isaïe  prend  Edom  comme  type  de 
toutes  les  nations  condamnées  par  la  justice  divine  et 
attribue  à  leurs  territoires  en  général  les  signes  de 
désolation  qui  ne  conviennent  qu'à  certains  d'entre 
eux.  Les  Septante  traduisent  qà'at  dans  lsaie  par 
opvsov,   «  oiseau,    »  et   dans  Sophonie  par  y_a\i.aù.èov, 

0  caméléon.  »  II.  LesÉTRIî. 

PELLEGRINI  Alexandre,  commentateur  italien,  né 

à  Matelica  en  1600,  mort  à  Home  en  ltii7.  II  entra  au 
noviciat  de  la  Compagnie  de  Jésus  en  ll'.Jl  el  remplit 
diverses  charges  dans  son  Ordre.  Il  nous  reste  de  lui 
un  commentaire  assez  long  el  assez  original  :  Evange- 
lium  secundum  Matthxnm  paradoxis  illustralutn.  11 
comprend  deux  volumes  parus  le  premier  à  Rome  0 
1638  et  le  second  à  Lorette  en  1745.       P.  lii.i.utti. 

PÉLUSE  (hébreu  :Sin;  Septante:  lié/,  Su^v-j),  ville 
d'Egypte.  —  I.  Nom  kt  siti:.  —  Le  nom  que  la  Vulgate 
rend  par  Péluse  est  Sin  en  hébreu.  Les  Septante  le  tra- 
duisent parSâ't'v,  Ezech.,  xxx.  15,  el  Su^vrj,  16.  Le  I 
Alexandrinus  porte  Tâviv  Su  lieu  de£âïv,le  Afarc/iaHa- 
iius  a  Sais  aux  deux  endroits.  Cela  semble  indiquer  que, 
pour  les  Septante,  ou  du  moins  pour  les  copistes  des 
plus  anciens  codices,  le  mot  Sin  n'offrait  rien  de  précis 
et  qu'on  étaii  embarrassé  pour  l'identifier.  Évidemment 
--,1,1c,  est  ici  fautif  :  il  ne  traduit  pas  Sin.  mais   s 

tn'li,   Ezech.,  xxix,    10.  xxx.  0.   la   li>  K._.  >  -m  des 

Egyptiens,  la  cof&Ji  des  Coptes,  la  Syène  des  Romains, 

l'Assouan  des  Arabes.  11  faut  en   dire  autan    i 

•■       f- \ 

qui  est  le  nom  grec  de        1     n, Zdn ou Djan,  en hi 

So'an.  Ezech.,  xxx,  14.  Cf.  Is..  \i\.  i;  Ps.  xi.vii  (xlviii), 
12,  13.  C'esl  la  moderne  S.'im  cl-llaggai  .  Huant  à  Eiïv,  ce 
pourrait  être  l'accusatif  de  -   ...  et  alors  nous  aurions  la 

ville  de  ?  jk^?'  ®ai  S'"s-  aujourd'hui  Sa  eUHaggar, 
capitale  ifi1  la  xwi  dynastie  et  située  sur  la  branche  de 
Rosette,  dan-  le  Delta  occidental.  .Mais  le  contexte 
d'Ezéchiel  nous  interdit  de  songer  à  une  pareille  iden- 
tification. Contre  les  ennemis  qui  doivent  venir  de  l'Asie, 
Sin  est  désignée  comme     la  force  dou  i  le  remparl  de 

1  Egypte  »,  \\\.  15,  el  cela  vise  de  façon  assez  claire  la 
frontière  orientale  du  Delta.  C'est  en  cet  endroit  qu'il 
nous  faut  la  chercher.  Siïv  pourrait  encore  à  la  rigueur 
être  un  mot  indéclinable  et,  dans  ce  cas.  rendre  tant 

bien  que  mal   Sin  qui   relève  du   dialecte  chaldaïque  et 

devient  Seydn  dans  le  dialecte  aramaïque,  Or  Sin,  *i-yii>. 


20 


LU-1 


PELUSE 


30 


■emporte  le  sens  Ue\£feoue  »,  tout  connue  n^.ouaiov 
qui  en  serait  alors  l'équivalent  greÔ^-Féluse  était  située 
à  l'extrémité  nord  du  Dèka^orienjéwf  à  la  bouche  même 
de  la  brandie  du  Xil  à  laquelle  elle  donna  son  nom,  la 
Pélusiaque.  Les  marais  et  les  fondrières  l'entouraient. 
«  Son  nom,  dit  Strabon,  XVII,  i.  21,  lui  vient  précisé- 
ment de  la  boue  et  des  marais  :  (ovo[i3ea7xi  5'»7;rj  to-j 
7a)XoO  y.a'i  tiuv  -ù.ii.ituiv.  »  C'est  appuyé  sur  cette  analo- 
gie, peut-être  aussi  sur  quelque  texte  plus  pur  des 
Septante  et  sur  quelque  tradition  juive,  que  saint  Jérôme 
aura  rendu  Sin  par  Péluse.  On  n'a  guère  contesté  cette 
assimilation  de  noms,  assimilation  que  rappelle  encore 
aujourd'hui  la  dénomination  de  Tinéh,  «boue,  »  donnée 
par  les  Arabes  à  un  fort  en  ruines  de  Péluse.  Cf.  d'An- 
ville,  Mémoires  sur  l'Egypte  ancienne  et  moderne, 
1700,  p.  90-97;  Steindorlï,  Beitràge  :ur  Assyriologie, 
t.  i,  1890,  p.  589,-  Griffith,  art.  Sin,  dans  Hastings,  Dic- 
tionary  of  the  Bible,  t.  iv.  p.  336. 

II.  Son  importance.  —  Doublement  importante  était 
Péluse,  comme  station  commerciale  et  comme  poste 
militaire.  Par  la  mer  arrivaient  à  elle  les  vaisseaux 
phéniciens,  cypriotes  et  grecs.  De  là  ils  pénétraient  dans 
l'intérieur  du  pays,  surtout  depuis  Psammétique  Ier 
(663-609  avant  J.-C.)  qui  avait  favorisé  l'établissement 
des  Grecs  dans  la  région  extrême  de  la  branche  pélusia- 
que. Hérodote,  H,  154.  Par  terre,  six  à  sept  jours  de 
marche  seulement  séparaient  Péluse  de  Gaza  :  elle 
était  donc  le  confluent  des  caravanes  et  un  point  central 
du  trafic  entre  l'Asie  et  l'Afrique.  En  conséquence,  elle 
était  aussi  le  poste  le  plus  exposé  aux  ennemis  de  l'est  : 
Péluse  prise,  les  conquérants  tenaient  la  clef  de  l'Egypte, 
et  la  route  de  Memphis  s'ouvrait  devant  eux.  Mais  sa 
ceinture  de  marais  la  rendait  difficilement  abordable. 
«  On  s'explique  par  cette  disposition  des  lieux  comment 
l'entrée  de  l'Egypte  est  si  difficile  du  coté  du  Levant, 
c'est-à-dire  par  la  frontière  de  Phénicie  et  de  Judée, 
seule  route  pourtant  que  puisse  prendre  le  voyageur  qui 
vient  du  pays  des  Nabatéens,  bien  que  cette  partie  de 
l'Arabie,  la  Nabatée,  soit  elle-même  contiguë  à  l'Egypte. 
Tout  l'espace  compris  entre  le  Xil  et  le  golfe  Arabique,  dont 
Péluse  se  trouve  former  le  point  extrême,  appartient  en 
effet  déjà  à  l'Arabie  et  n'offre  qu'un  désert  ininterrompu 
qu'une  armée  ne  saurait  franchir.  »  Strabon,  XVII,  i, 
'21,  traduction  Amédée  Tardieu,  t.  m,  p.  426.  C'est 
pourquoi  les  Pharaons  qui  se  souvenaient  des  campagnes 
d'Asarhaddon  et  d'Assurbanipal  durent  mettre  à  profit 
cette  situation  avantageuse,  ce  chemin  nécessaire  des 
envahisseurs,  et  en  faire  le  boulevard  contre  lequel, 
dans  leur  pensée,  viendrait  se  briser  la  vague  des 
peuples  asiatiques.  Quelques  années  après  la  première 
campagne  de  Xabuchodonosor  (583),  Amasis  en  éloigna 
même  les  mercenaires  grecs  et  leurs  colonies  par 
crainte  de  les  voir  faire  cause  commune  avec  l'ennemi, 
et  les  remplaça  par  des  troupes  plus  sûres.  Hérodote, 
il,  154.  Xabuchodonosor  menaçait  de  nouveau  l'Egypte. 
Dès  571,  Ézéchiel,  xxix,  1,  avait  annoncé  le  retour  du 
Chaldéen.  Malheureusement  les  documents  égyptiens 
que  l'on  possède  nous  laissent  ignorer  jusqu'au  nom  de 
Péluse.  Hérodote  nous  permet  d'y  suppléer.  Il  a  connu 
la  branche  pélusiaque.  n,  17,  151;  il  nous  raconte  l'en- 
trée en  Egypte  de  Cambyse  en  525,  sous  le  règne  de 
Psammétique  III.  Le  Pharaon  vint  attendre  le  Grand- 
Roi  à  Péluse,  mais  ne  put  empêcher  la  ville  d'être  em- 
portée après  une  journée  de  lutte.  Memphis  ouvrit 
bientôt  ses  portes  et  la  Haute-Egypte  se  plia  docilement 
au  joug  du  vainqueur.  Hérodote,  m.  10-13.  C'est  à  peu 
pics  ce  qui  dut  se  passer  quarante  ans  plus  tôt,  en  568, 
dans  la  deuxième  campagne  de  Xabuchodonosor.  Voir 
No-Amon,  t.  iv,  col,  1652,  3».  A  n'en  pas  douter,  Péluse 
était  déjà  ce  que  nous  la  voyons  être  sous  Psammétique 
III.  Quelques  années  avant  cette  même  date,  Dieu  par 
la  bouche  d'Ézéchiel  pouvait  donc  mettre  Péluse  en 
parallèle  avec  Memphis  et  Thèbes,   et   dire   en   toute 


vérité  :  ■■  Je  verserai  mon  indignation  sur  Péluse,  la 
force  de  l'Egypte,  j'exterminerai  la  multitude  de  Xo 
(Thèbes).  Et  je  mettrai  le  feu  dans  l'Egypte.  Péluse 
sera  à  la  torture  comme  une  femme  en  travail.  No 
(Thèbes)  sera  détruite  et  Memphis  sera  chaque  jour 
dans  l'angoisse.  »  Ezech.,  xxx,  15-16.  Apres  Xabuchodo- 
nosor et  Cambyse,  d'autres  envahisseurs  venus  par  la 
route  d'Asie  devaient  montrer  encore,  dans  l'ère  an- 
cienne, qu'au  sort  de  Péluse  était  lié  d'ordinaire  le  sort  de 
Memphis  et  de  la  Haute-Egypte.  Qu'il  suffise  de  rappeler 
Xerxès  I«,  en  490,  Artaxèrxes  I^en  460,  Artaxerxès  III 
ou  Ochus  en  344,  Alexandre  en  331,  Gabinius  et  son 
lieutenant  Marc-Antoine  en  55,  Octave  en  30.  C'est  en 
vue  de  Péluse  que  Pompée  fut  lâchement  assassiné  (48). 
III.  La  fin  de  PÉLUSE.  —  A  l'époque  romaine.  Péluse 
devint  la  métropole  de  l'Augustamnique.  Lequien, 
Oriens  Chrislianus,t.  n,  p.  340.  Longtemps  encore  elle 
compta  parmi  les  places  principales  du  Delta,  bien  que 
dès  lors  l'attention  se  portât  surtout  vers  l'occident  de 
l'Egypte.  Au  ive siècle,  ses  monastères  eurent  du  renom. 
Saint  Isidore  le  Pélusiote  (350-435  environ)  nous  a 
laissé  un  nombre  considérable  de  lettres  d'où  l'on 
pourrait  tirer  le  piquant  tableau  d'une  ville  gréco- 
romaine  d'Egypte.  Pour  les  Coptes,  elle  s'appela 
nepeju.O'yii.  Parmi  les  évêques  d'Éphèse,  on  rencontre 
Eusèbe  de  Peremoun.en  grec  Ilr\lov<jtov.  Labbe,  Sacro- 
sancta  Concilia,  t.  m,  col.  1084.  Comparant  le  copte 
Peremoun  avec  l'égyptien  Am,  capitale  du  XIXe  nome 
de  la  Basse-Egypte,  Brugsch  crut  avoir  retrouvé  dans 
ce  dernier  le  nom  de  Péluse  par  l'entremise  de  OWie 
«  boue  ».  Dictionnaire  géographique  de  l'Egypte  an- 
cienne, Supplément,  18S0,  p.  1091;  Die  Acgyplologie, 
1891,  p.  452.  Mais  en  1886  les  fouilles  de  Tell-Nebeshéh 
ont  révélé  le  site  de  Am  à  cinquante-cinq  kilomètres 
environ  à  l'ouest  de  Péluse  et  à  mi-chemin  entre  Taniset 
Salahieh.  Cf.  Pétrie,  Tanis,  Part,  n,  Tell-Nebesheh,  1888, 
p.'.l-37  (Ve  Mémoire  de  YEgypt' Exploration  Fund).  Pour 
les  Arabes,  Pélusefut£Y-F<,>rmâ  ou  Farrnâ.  «  La  liste  des 
évèchés  coptes  donne  l'égalité  suivante  :  neAcrciOT  = 
nepeju.O'yii  =  El-Fermâ.  »  Amélineau,  La  géographie 
de  l'Egypte  à  l'époque  copte,  1893,  p.  317;  cf.  d'Anville, 
loc.  cit.;  Quatremère,  Mémoires  géographiques  et  his- 
toriques sur  l'Egypte,  1811,  t.  i,  p.  259-260;  Cbampol- 
lion,  L'Egypte  sous  les  Pharaons,  1811-1814,  t.  n,  p. 
82-87.  —  Renouvelant  les  exploits  des  Assyriens  et  des 
anciens  conqnérants,  les  troupes  de  Chosroés  prirent 
Péluse  en  IJ16;  Amrou  s'en  empara  en  640.  Baudouin  I« 
la  brûla  en  1117.  11  n'en  est  plus  question  après  le  xne 
siècle.  La  branche  pélusiaque  abandonnée  à  elle-même 
finit  par  s'envaser;  la  mer  que  l'eau  du  fleuve  ne  refou- 
lait plus  pénétra  dans  les  marécages,  y  détruisit  les 
bandes  cultivées  et  rendit  la  région  déserte.  «  La  plaine 
saline  de  Péluse...  vaste  et  unie  comme  ia  surface  des 
eaux  d'un  lac  tranquille,  dont  elle  oll're  une  parfaite 
image,  est  formée  d'un  sable  humide  et  gras  à  la  marche. 
Toutes  les  parties  n'en  sont  pas  également  fermes;  car 
il  en  est  de  fangeuses  et  de  mouvantes,  dans  lesquelles 
il  serait  dangereux  de  s'engager.  »  J.-M.  Lepère,  Mé- 
moire sur  le  canal  des  deux  mers,  dans  Description  de 
l'Egypte,  t.  XI,  2e  édit.  1822,  p.  334.  A  partir  de  Port- 
Saïd,  sur  une  longueur  de  trente  kilomètres,  le  canal 
de  Suez  sépare  aujourd'hui  cette  plaine  du  lacMenzaléh. 
Au-dessus  de  la  morne  étendue  seules  deux  grandes 
buttes  persistent,  dont  l'une,  celle  de  l'ouest,  s'allonge 
à  deux  kilomètres  de  la  mer,  à  vingt  stades,  comme 
Strabon,  XVII,  i,  21,  le  disait  de  Péluse.  Elle  lui  est 
parallèle  et  porte  les  débris  d'un  temple  dans  une  large 
enceinte  de  briques  rouges.  Ce  sont  des  ruines  d'époque 
romaine  ou  byzantine  qui  recouvrent  la  vieille  cité  égyp- 
tienne. Leur  éloignement  de  tout  centre  habité,  la  diffi- 
culté de  s'y  ravitailler  ont  empêché'  jusqu'à  ce  jour  d'y 
entreprendre  des  fouilles.  Ces  fouilles  cependant 
peuvent  seules,  dans  un  sens  ou  dans  l'autre,  lever  les 


31 


PÉLUSE   —   PÉNALITÉS 


32 


doutes  que  la  version  des  Septante  laisse  malgré  lout 
,i    ister  i    "    notre  esprit  au  sujet  de  l'identification  de 
sin  avec  Péluse.  C  Lagier. 

PENIBLE  Guillaume,  théologien  anglais,  puritain, 
né  vers  1591,  morl  en  1623.  Il  étudia  à  Oxford  au  col- 
lège  de  la  Madeleine  et  se  lit  promptement  remarquer 
comme  théologien  et  comme  prédicateur.  Dans  ses 
œuvres  publiées  à  Londres,  in-f°,  1635,  on  remarque  : 
Salomon's  recantation  and  repentanee,  or  the  book  of 
/.;,.,./,.  plained ;  The  period  of  t/ie  Persian  mo- 

narchy  wherein  sundry  places  of  Ezra.  Nehemiah 
and  Daniel  are  cleared  ;  A  short  and  sw'eet  Exposi- 
tion upon  the  /irsl  nine  chapters  of  Zecharia.  —  Voir 
Walch,  Bibliolh.  theologica,  t.  iv,  p.  479,  480:  AV. 
Orme,  Biblioth.  biblica,  p.  345. 

B.  Hf.urtf.hize. 

PÉNALITÉS  (hébreu   :   bir/qoivt,  pequddâh,  fôke- 
h.l.iihal;  Septante   :  immrm-r\,    é'J.syuoç,    hz"(%6i\ 
Vulgate  :  castigatio,  increpatio,  plaga),  sanctions  por- 
tées contre  les  transgresseurs  d'une  loi. 

I.  l'i  NALITÊS  MOSAÏQUES.  —  1°  Comme  toutes  les  lois, 
la  loi  mosaïque  avait  pour  sanction  des  châtiments  des- 
tin.s  a  punir  le  coupable  qui  n'avait  pas  eu  assez  de 
fermeté  dans  la  conscience  et  la  volonté  pour  recon- 
naltre  le  caractère  impératif  de  la  loi  et  s'y  soumettre. 
L'application  du  châtiment  servait  en  même  temps  de 
leçon  aux  autres  ;  sollicités  par  les  avantages  apparents 
de  la  transgression,  ils  devaient  être  retenus  par  les 
conséquences  onéreuses  qu'elle  entraînait.  Dieu  lui- 
même  a  voulu  donner  le  premier  l'exemple  d'une  péna- 
lité annexée  a  nu  précepte,  Au  paradis  terrestre,  il  dé- 
rendil  aux  premiers  êtres  humains  de  toucher  à  un 
fruil  sous  peine  de  mort.  Gen.,  Il,  17.  L'homme,  sur- 
tout quand  il  étaitdans  l'état  d'innocence,  pouvait  obéir 
au  commandement  par  le  seul  amour  du  bien.  Dieu 
jugea  pourtant  que,  même  alors,  la  crainte  du  chàli- 
in,  i,'  ,',.iii  pas  inutile  pour  maintenir  la  volonté  hu- 
maine dans  la  rectitude.  Cette  crainte  elle-même  fut 
loin  de  suffire  toujours.  —  2°  La  nation  hébraïque  est 

CHi-liluéi'  ru  Ihécicralii'.  Il  suit  de  là  que  les  lois  reli- 
gieuses sont  lois  d'Ktat  au  même  titre  que  que  les  lois 
civiles  H  qu'à  leur  transgression  sonl  allachées  des 
pénalités  analogues.  Aussi  Dieu  intervient-il  directe- 
ment, soit  pour  prescrire  ces  pénalités,  soit  pour  les 
appliquer  au  besoin.  Exod.,  xxn.  18;  .\um..xxv,  4,  11; 
xxxv,  il  ;  Lev.,  XX,  2.  i;  lient.,  XVII,  •">,  etc.  —  3°  Tout 
le  peuple  esl  intéressé  au  châtiment  du  coupable,  afin 
que  le  mal  soit  olé  d'Israël.  Dent.,  xvn,  7.  12,  elc. 
Co le  un  crime  ne  peut  rester  sans  auteur  responsa- 
ble el  sans  châtiment,  si  le  coupable  est  inconnu,  les 

hou -  du  pays   où  le  mal  a   été  commis  doivent  se 

disculper  publiquement  et  offrir  une  expiation. 
Deut.,  xxi,  1-9.  La  pénalité  infligée  au  coupable  doit 
à  tout  le  peuple.  Dent.,  xvn,  7;  xix, 
20;  XXI,  21.  —  'i  En  principe,  la  responsabilité  est 
pei  onni  lie  el  les  enfants  ne  sont  pas  punis  pour  les 
fautes  îles  pères,  lient.,  xxiv,  l(i;  IV  Reg.,  xv,  ô;  Il  Par., 
xxv,  4.  Cependant,  en  ci  ri  dn  cas,  l'iniquité  îles  pères 
était  punie  dans  les  lils,  soit  par  une  pénalité  précise, 
Nimi,,  xvi,  27,  32;  Jos.,vii,24;  IV  Reg.,  x,  7,  soit  par 
une  malédiction  divine  qui  entraînait  le  malheur  d'une 

famille.   Exod.,    \x.  .">.     etc.    Il    s'agissait   surtout    alors 

■  i,  i  '  nue- 1  o is  contre  Dieu.  Le  code  d'Hammourabi 

esl  beaucoup  moins  humain  sous  ce  rapport.  Il  permet 

île tire  i  morl  la  fille  d'un  injuste  agresseur  qui  a  l'ait 

périr  une  fem libre  (art.  2lll),  le  [ils  d'un  architecte 

dont  la  négligence  a  eau  ié  la  morl  du  fils  d'un  proprié- 
taire (  11  il  -  230  .  etc.  Chez  le-  Perses .  on  avail  j  ardé  la 
coutume  de  fane  mourir  avec  certains  condamnés  toute 
leur  famille.  Deut.,  vi,  24  ;  Esth.,  ix,  7-10. 

II.  lui  mu  mi  -  pénalités.  Les  pénalités  prévues 
parla  loi  mosaïqui    "ni  les  suivantes  :  —  I    Peine  de 


mort,  contre  le  blasphème,  Lev..  xxiv,  15,  16;  cf.  III 
Reg.,  xxi.  10,  13;  Matth.,  xxvi.  65,  66;  la  profanation 
du  sabbat,  Exod.,  xxxi,  14;  xxxv,  2;  X11111.,  xv,  32-36; 
la  pratique  de  l'idolâtrie  par  les  sacrifices  aux  idoles, 
la  divination,  la  nécromancie,  etc.,  Exod.,  xxn,  18,  20; 
Lev.,  xx,  2,  27;  Deut.,  xm,  6,  10,  15;  xvn,  2-7;  la 
prétention  illégitime  à  la  prophétie,  Exod.,  xxn.  IS; 
Lev.  xx,  27;  Deut.,  xm,  5 ;  xvm,  20;  I  Reg.,  xxvm,  9; 
—  les  coups  ou  la  malédiction  sur  les  parents, 
Exod.,  xxi,  15.  17;  l'adultère,  Lev.,  xx,  10;  Deut.,  xxn, 
22;  cf.  Joa.,  vin,  5;  la  fornication  découverte  après  le 
mariage,  Dent.,  xxn,  21,  commise  par  une  fiancée, 
Deut.,  xxn,  23,  ou  la  lî lie  d'un  prêtre,  Lev.,  xxi,  9;  le 
rapt,  Deut.,  xxn,  25;  l'inceste  et  les  fautes  contre  na- 
ture, Exod.,  xxn,  19;  Lev..  xx,  11.  14,  16;  l'homicide, 
Exod.,  xxi,  12;  Lev.,  xxiv.  17;  la  vente  de  son  semblable, 
Exod.,  xxi,  16;  Deut.,  xxiv,  7;  le  faux  témoignage  con- 
cluant à  la  mort  de  l'innocent.  Deut.,  xix,  16-19.  — 
Tous  ces  crimes  étaient  graves,  soit  au  point  de  vue 
religieux,  soit  au  point  de  vue  moral.  Plusieurs  d'entre 
eux,  même  parmi  ceux  qui  ne  se  rapportent  pas  aux  de- 
voirs religieux,  n'encourent  pas  la  mort  dans  nos  légis- 
lations modernes.  Par  contre,  le  code  d'Hammourabi 
est  beaucoup  plus  rigoureux  que  celui  de  Moïse.  Il  con- 
damne à  mort  le  sorcier  malveillant  (art.  1),  le  témoin 
injurieux  (art.  3),  le  voleur  et  le  receleur  (art.  6-8), 
celui  qui  a  favorisé  la  fuite  d'un  esclave  (art.  15.  16),  le 
brigand  pris  en  flagrant  délit  (art.  22),  l'architecte  homi- 
cide par  imprudence  (art.  229),  etc.  La  loi  de  Moise 
avait  plus  de  respect  pour  la  vie  humaine;  elle  ne  la 
sacrifiait  que  quand  le  cas  était  vraiment  grave  au  point 
de  vue  de  la  religion,  de  l'intérêt. familial  ou  social  et 
des  mœurs.  —  Sur  l'application  de  la  peine  de  mort, 
voir  Goel,  t.  III,  col.  260;  LAPIDATION,  t.  iv,  col.,  89; 
Penii.visuN,  Si  in  11:1  s. 

2°  Retranchement ,  sorte  d'excommunication,  c'est-à- 
dire  exclusion  du  peuple  de  Dieu  et  perte  des  droits 
religieux  et  civils.  Celui  qui  n'appréciait  pas  suffisam- 
ment l'honneur  d'appartenir  au  peuple  de  Dieu  et  con- 
trevenait à  certaines  lois  graves  imposées  à  ce  peuple, 
méritait  bien  d'en  être  exclu.  Le  retranchement  était 
prononcé  dans  les  cas  suivants  :  omission  de  la  circon- 
cision, Gen.,  xvn,  14;  Exod.,  iv,  24;  omission  delà 
Pâque,  Xum..  ix.  13;  omission  de  la  fête  de  l'Expiation 
ou  travail  exécuté  ce  jour-là,  Lev.,  x.xin,  29,  30;  nian- 
ducation  de  pain  levé  pendant  les  Azymes,  Exod..  xn. 
15,  19;  occision  d'un  animal,  à  l'époque  de  l'exode, 
sans  l'amènera  l'entrée  du  Tabernacle,  Lev., xvn.  4,9; 
manducation  de  la  graisse  des  sacrifices  ou  du  sang  des 
animaux,  Lev.,  vil,  25,  27;  XVII,  14;  manducation  d'une 
victime  après  le  second  jour,  Lev.,  VII,  18;  xix.  7.  S; 
manducation  d'une  victime  pacifique  sans  être  en  état 
île  pureté,  Lev.,  vu,  20;  contact  des  choses  saintes  par 
un  prêtre  qui  est  impur.  Lev.,  xxn,  3;  usage  profane 
de  l'huile  sainte  et  du  parfum  de  l'autel.  Exod.,  XXX, 
33,  38;  omission  de  la  purification  après  le  contact  d'un 
mort,  Num.,  xi.x.  20;  travail  exécuté  le  jour  du  sabbat, 
Exod.,  x.xxi,  I  i:  consultation  des  devins  el  des  nécro- 
manciens, Lev..  xx.  6;  mépris  habituel  îles  préceptes 
divins,  Num.,  xv,  30,  31;  —  quinze  cas  d'unions  pros- 
crites par  la  Loi.  Lev.,  xvm,  29;  xx,  9-21.  —  Au  retran- 
chement se  rattache  la  menace  de  mourir  sans  enfants, 
Lev..  xx,  21;  cette  peine  est  appliquée  directement  par 
Dieu,  et  elle  aboutit  au  retranchement  d'une  famille  à 
courte  échéance,  —  Sur  le  retranchement,  voir  ANA- 
TIII.MF.  t.  I,  Col.,  ôiô;  EXCOMM1  N1CAT10N,  t.  II,  col.,  2132. 

3°  Talion,  peine  consistant  à  subir  un  mal semblabh 
à  celui  qu'on  a  infligé  à  un  autre.  Exod.,  xxi,  21.  25. 
Voir  T ai  ion. 

1  Flagellation,  imposée  pour  certaines  fautes  de 
moindre  gravité.  Voir  Flagellation,  t.  h,  col.  2281. 

ô  Amende,  ou  compensation  en  argent  pour  le  tort 
causé.    Comme     il    n'y    avait    pas    de    fisc    hébraïque, 


33 


PÉNALITÉS    -    PENDAISON 


24 


l'amende  se  payait  à  la  personne  lésée.  Voir  Amende, 
t.  i,  col.  476:  Dommage,  t.  h,  col.  148-2.  Le  débiteur 
insolvable  était  sujet  à  la  saisie  de  ses  biens  ou  même 
pouvait  être  réduit  en  esclavage,  lui  et  ses  enfants. 
Voir  Dette,  t.  n,  col.  1395. 

6"  Prison,  non  en  usage  chez  les  anciens  Hébreux, 
et  employée  seulement  à  l'époque  des  Rois.  Voir 
Prison. 

'«Sacrifice  expiatoire,  à  la  suite  de  certains  délits. 
Voir  Sacrifice. 

En  somme,  la  loi  mosaïque  était  relativement  douce 
dans  ses  pénalités.  Elle  ne  connaissait  ni  la  torture, 
deslinée  à  provoquer  les  aveux  du  coupable,  ni  ces 
supplices  atroces  que  les  autres  peuples  infligeaient 
sans  pitié,  les  mutilations  de  toute  nature.  la  perfora- 
tion des  yeux,  l'écorcliemeat,  le  pal,  l'exposition  aux 
bètes.  la  crucifixion,  le  travail  des  mines,  la  déporta- 
tion, etc.  Quand  ils  infligeaient  la  peine  de  mort,  les 
Hébreux  ne  cherchaient  pas  à  prolonger  ni  à  augmenter 
les  souffrances  du  condamné;  ils  s'appliquaient  au 
contraire  à    l'exécuter   le    plus  rapidement   possible, 


PENC1NI  Innocent,  théologien  dominicain,  né  à 
\emse  vers  1621,  mort  en  1689  ou  1690.  Entré  dans 
l'ordre  des  Frères-Prêcheurs,  il  fut,  en  1644.  à  l'âge  de 
23  ans,  choisi  pour  professeur  de  philosophie  à  l'uni- 
versité de  Padoue.  Il  a  publié  parmi  d'autres  écrits  . 
Nova  veleris  Legis  myslico-sacra  Gala.,-,,,  >,,, 
m  cselo  angelici  prxceploris  Kcclesiseque  doctoris  D. 
Thomse  .1./.  phœbeo  signai,'  excursu,  cingulo  / 

lacteo,  gemrnis  instrata  stellis,  h.  e.  luculenta  C 

mentaria  m  Genesim,  Exodum,  Leviticum,  Numéros, 
Deuteronomium,  in  quibus  potissima,  quse  ubivis  dis- 
persit  allie  sapientiœ  sporades  decuriatim  in  eoaclas 
phalanges  candicant  et  collucent,  lilteralis,  moralis, 
allegoricus,  anagogicus  micant  sensus;  controversia- 
rum  qusestionum  coit  lumen,  in-f»,  Venise,  1670; 
A'ora  evangelicx  legis  mystico-sacra  Galaxia  Scrip- 
turse...  h.  e.  luculenta  commentaria  in  Matthœum, 
Marcum,  Lucam  et  Joannem...,  2  in-f°,  Venise,  1678- 
1685  :  l'ouvrage  demeuré  inachevé  devait  avoir  4  vo- 
lumes; Commentarius  in  Cantica  canticorum  sub 
nom i ne •  D.  Tliomx  Aq.  e  ms.  codiee  primum   typis 


12 


-  Criminels  auxquels  on  met  la  corde  au  cou  pour  les  pendre.  D'après  Rosellini.  Monum.  civili  deW  Ecjitto,  1834,  pi.  cxxiv. 


comme  on  le  remarque  dans  leur  manière  de  faire  mou- 
rir par  lapidation,  le  supplice  presque  exclusivement 
usité  chez  eux.  Voir  t.  iv,  col.  90. 

III.  Dans  le  Nouveau  Testament.  —  I»  Plusieurs 
des  pénalités  mosaïques  sont  rappelées,  la  lapidation, 
Joa.,  vin,  5,  le  retranchement,  Joa.,  ix,  22,  la  flagella- 
tion. Matth.,  x,  17.  etc.  —  2»  Il  y  est  aussi  question  de 
pénalités  étrangères  à  la  législation  juive,  la  décapita- 
tion, Marc,  vi,  27;  Act..  xii,  2,  etc.;  la  crucifixion, 
Matth.,  XXVII,  35,  etc.  ;  l'exposition  aux  bètes,  I  Cor.,  xv, 
32:  II  Tim.,  iv,  17:  différents  supplices  infligés  par 
les  païens,  Heb.,  xt,  35-38;  la  prison  pour  "dettes, 
Matth.,  v,  25:  xvm,  34;  la  prison  préventive,  Act.,  iv, 
3;  v,  1S;  xn,  4;  xvi,  ,23,  etc.;  la  garde  militaire, 
Act..  xxviii,  16:  les  coups.  Matth.,  xxiv,  51;  Luc,  XII, 
46-48,  etc.  -  3»  Enfin,  il  y  est  fait  allusion  à  diffé- 
rentes peines  spirituelles,  temporelles  ou  éternelles, 
devant  servir  de  sanction  aux  prescriptionsévangéliques, 
la  dénonciation  à  l'Église  et  l'excommunication  du 
coupable  opiniâtre,  Matth.,  xvm.  17:1  Cor.,  v,  2-5.  9-1 1  ; 
I  Tim.,  i,  20;  TH.,  ni,  10;  la  géhenne  du  feu  pour  l'in- 
sulteur  de  son  frère,  Matth.,  v,  21,  22,  voir  Géhenne, 
t.  m,  col.  155;  les  ténèbres  extérieures  dans  lesquelles 
les  coupables  sont  jetés  pieds  et  poings  liés,  Matth.,  xxn. 
13;  xxv.  30,  ténèbres  qui  figurent  les  supplier-  de 
l'autre  vie;  la  non-rémission  des  péchés  à  certains 
F  heurs,  Joa.,  xx,  23,  et  l'irrémissibilité  du  péché 
contre  le  Saint-Esprit,  même  en  l'autre  inonde 
Matth.,  xn,  31,32;  l'enfer,  Luc,  xvi.  22,  avec  son  sup- 
plice éternel.  Matth.,  xxv.  46.  De  plus,  en  conférant 
à  ses  Apôtres  le  pouvoir  de  lier,  Matth.,  xvi,  19; 
XVIII,  18,  Xotre-Seigneur  a  autorisé  son  Église  à 
instituer  des  pénalités  spéciales  pour  le  bien  spirituel 
de  ses  enfants.  H.  Lesètre. 

DICT.   DE  LA    BIBLE. 


éditas,  in-f°,  Lyon,   1652.  —   Voir  Echard,  Scripton  •■ 
Ord.  Prœdicatorum,  t.  n,  p.  726. 

D.  Hedrtebize. 
PENDAISON  (hébreu  :  tâlàh,  «  pendre,  »   yâqa'  ; 
Septante  :   xpe[iâa8o-i;  Vulgate   :   suspende,  crueiflgo), 
suspension    d'un    corps    humain    à     un    poteau,     une 
potence,  une  branche  d'arbre,  etc.  —  1»  La  pendaison 
était  ordinairement  un   supplice.   Elle  est  infligée  au 
chef  des   panetiers    du  pharaon,    qui    se    trouvait   en 
prison  avec  Joseph,  mais  elle  est  précédée  pour  lui  de 
la  décapitation,  Gen.,  xl,  19;   xli,   13,  de  sorte  qu'elle 
servait    surtout    à   exposer  aux  regards   le  cadavre  du 
coupable.  En  Egypte,  «  la  pendaison  était  le  supplice  or- 
dinaire pour  la  plupart  des  grands  crimes.  »  Wilkinson, 
Manners    and    Customs    of    the   ancienl    Egyptians, 
2e  édit.,  t.  i,  p.    307.  On   voit  sur  les  peintures  des 
criminels  auxquels  on  met  la  corde  au  cou  (fig.   12>. 
Rosellini,   Monumenti  civili,  pi.   cxxiv.  —  Au  désert. 
Dieu    ordonne  de    pendre  les    chefs    du    peuple    qui 
avaient  commis  le  mal  avec  les  filles  de  Moab.  Xum., 
xxv.  4.  Il  est  probable  que  les  coupables  furent  aupara- 
vant   percés    du   glaive   et   que   leurs  cadavres  furent 
ensuite  pendus  pour  l'exemple.  Ainsi  le  comprennent 
les  Septante  :  itxpa5î:--ij.âxt7ov,  «  montre  en  exemple.  » 
La  suspension  dut  avoir   lieu   «  à  la  face  du  soleil  o, 
c'est-à-dire  pendant  le  jour.  Plus  tard,  une  loi  défendit 
de  laisser  des  cadavres  à  la  potence  après  le  coucher 
du  soleil,  car  le  pendu  était  l'objet  de  la  malédiction  de 
Dieu,  à  cause  du  crime  qui  lui  avait  mérité  le  châti- 
ment. Deut.,  xxi,  23;  Gai.,  m,  13.  Les  Hébreux  n'em- 
ployaient pas  la  pendaison  pour  donner  directement  !a 
mort  ;  ils  se  contentaient  de  suspendre  le  cadavre  du  sup- 
plicié pour  l'exposer  aux  regards  et  inspirer  aux  specta- 
teurs de  salutaires  réflexions.  Deut.,  xxi,  21,  22.   Voir 

V.  -  2 


35 


PENDAISON    —    PENDANTS    D'OREILLE 


36 


Lapidation,  col.  90;  Potence.  -  Josuéfait  pendre  à  un 
arbre  jusqu'au  soir  le  roi  d'Haï,   .los..   vm,  29, 

avoir  frappés  de  l'épée,  les  cinq  rois  pris 
dans  la  caverne  de  Macéda.  los.,  x.  26.  —  Les  Philis- 
tin- pendent  aux  murailles  de  Bethsan  les  cadavres  de 
Saûl  et  de  son  tîls.  I  Reg.,  x.\xi.  10-1-2.  -  Quand 
Béchab  et  lîaana  appui-lent  à  David  la  tête  d'Isboseth 
qu'ils  ont  tué,  le  roi  les  fait  mettre  à  mort,  puis  on 
■  -nd,  pieds  et  mains  coupés,  au  bord  de  l'étang 
d  Hébron.  II  Reg.,  IV,  12.  —  Les  Gabaonites  pendent 
sur  la  monl  Jéhovah    »,  c'est-à-dire   en 

Jéhovah,  cf.  Num.,  xxv,  4.  deux 
tîls  et  cinq  petits-fils  de  Saûl,  et  Respha,  mère  des 
deux  premiers,  veille  sur  leurs  cadavres  pendant  foute 
une  saison  pour  empêcher  les  bètes  de  les  dévorer. 
Il  Reg.,   xxi.  8-10.   —    Jérémie  dit  que  les  Chaldéens 


13.  -  '    oui-.  .Musée  du  Loi 

pendirent   d'1  leurs   propres   mains  les  chefs   d'Israël. 
Lam.,  v.  12.  Il  s'agit  sans  doute  des  fils  de  Sédécias  et 
de   Juda  que    Nabuchodonosor    avait  fait 
r.    ,li t.,    xxxix,    (i,    et  aux    cadavres  desquels    il 
a  ensuite  l'ignominie  de  ta  pendaison.  —  ASuse, 
us  eunuques  qui  ont  comploté  contre  le  roi  sont 
pendu  .  i    th.,  n,  23.  Quelque  temps  après,   Aman  esl 
pendu  à  une  potence  d     cinquante  coudées  qu'il  avail 
fait  pi  our  Mardochée,    l-.sth..   vu.    10,   et    les 

Juifs  obtiennent  is  Bis  d'Aman  soient  pendus 

comme  leur  père.  Esth.,  tx,  13-14.  La  suspension  au 
gibet  est  mentionnée  par  Hérodote,  vi,  30;  vu,  238, 
comme  étant  pratiquée  chez  les  Perses.  —  En  Pales- 
tine pandanl  la  persécution  d'Antiochus,  on  suspend  au 
-  u  .hi\  mam  I  -  ,  afants  qui  ont 

été  cii  -ci   du    haut  des 

murailles    I  Mach.,  i,  64;  Il  Mach.,  vi,   10.  —   2'   La 
pendaison  esta  dont  la  che- 

velure se  prend  i  hes   il  un  térébinthe, 

P  mdant  qu'il  fuyait  ilté  se  trou\t 

ainsi  suspendu  sai  :   Joab  vient 

li'  iiiii  en  le  perçan  svm,  '.<- 1  i. 

—  3"  La  pendaison  Ii  pi  traître 

m  t  la  corde  au  ci  pend  à    in  ai  ;  i      Matth., 


xxvn.ô.  puis  n  il  tombe  en  avant,  rompt  par  le  milieu 
et  toutes  ses  entrailles  se  répandent  g.  Aet.,  i,  18.  La 
corde  ou  la  branche  d'arbre  cassent  sous  le  poids, 
probablement  quand  Judas  est  déjà  mort,  que  son 
ventre  se  gonlleet  que  la  putréfaction  a  déjà  coup 
son  œuvre.  Dans  ces  conditions,  il  n'est  pas  étonnant 
que,  par  suite  de  la  chute,  la  peau  déjà  entamée  se 
rompe  et  laisse  échapper  les  entrailles. 

II.  Lesétre. 
PENDANTS   D'OREILLE    hébreu   :    âgxl,  m 
nézém;  Septante  :  èvûttov;   Vulgate  :    inawis),  orne- 


14,       Pendants    d'  reille    assyriens.   Moules  assyriens  pou 
pendants  d'oreille  en  or  et  en  argent  trouvés  i  K 
i    Nimroud.   D'après  Layard,   Discoveries  in   A 
.      L853    [    597 

ment    qui  se  suspend   aux   oreilles     lîg,    13).    —    Les 
pendants  d'oreille,  comme  toutes  les  autres  parures, 

mit  de  tout  temps  été  du  yoùt  des  Orientaux.  Les 
Égyptiens  en  portaient.  On  en  voit  aux  oreille-  des 
personnes  assises  à  un  festin,  voir  I.  n.  fig.  649, 
col.  2214.  La  reine  Xofritari.  femme  de  Ramsès  II. 
porte  des  anneaux  aux  oreilles.  Cf.  Lepsius,  Denk- 
.  ni.  189  &.  En  Babylonie  et  en  Assyrie,  les 
pendants     d'oreille      étaient      familier-  .      même      aux 

hommes.  Sargon  et  son  premier  ministre  en  ont  de 
considérables.  Cf.  Botta,  Le  monument  de  Ninive,  i.  i. 
pi.  12.  il  en  est  de  même  pour  Assurbanipal,  t.  i, 
Ile.  312,  319,  col  1 1 16,  1 157.  Les  Phéniciens  fabriquaii  nt 
pour  le  commerce  des  pendants  d'oreille  dont  un 
certain  nombre  de  modèles  ont  été  conservi  s.  Cf,  Ba- 
leli.n.  Archéologie  orientale,  Paris.  1888,  p.  310.  — 
Les  formes  de  pendants  d'oreille  étaient  très  divei 
(fig.   Il  .  On  suspendait  aux  oreilles  tantôt  un  anneau, 


37 


PENDANTS    D'OREILLE 


PENITENCE 


38 


voir  t.  !,  fig.  284,  col.  1058;  t.  n,  fig.  619,  col.  2009, 
tantôt  dos  bijoux  plus  compliqués  (fig.  15).  Avant  de 
se  rendre  à  Béthel,  Jacob  se  fit  remettre  les  dieux 
étrangers  qui  se  trouvaient  dans  sa  famille  et  les 
anneaux  que  ses  gens  avaient  aux  oreilles  et  il  enfouit 
le  tout  sous  un  chêne  à  Sichem.  Gen.,  xxxv,  2-4. 
Ceci  donne  à  supposer  que  ces  anneaux  présentaient 
un  caractère  idolàtrique  ou  superstitieux.  Pour  fa- 
briquer le  veau  d'or,  Aaron  demanda  les  anneaux 
d'or  qui  étaient  aux  oreilles  des  femmes  d'Israël,  de 
leurs  fils  et  de  leurs  filles.  Exod.,  xxxn,  2-3.  —  Les 
Israélites  possédaient  aussi  de  vrais  pendants  d'oreille. 
Ils  en  trouvèrent  dans  le  butin  fait  sur  les  Madia- 
nites,  Xum.,  xxxi,  50,  et  les  offrirent  à  Jéhovah.  Il 
y  en  eut  également  dans  un  autre  butin  fait  sur  les 
mêmes  Madianites  par  Gédéon.  Jud.,  vin,  26.  Isaïe, 
m.  20,  nomme  les  netîfôt  dans  son  énumération  des 
bijoux  des  femmes  de  Jérusalem.  Dans  Ézécbiel,  xvi, 
12,  Jéhovah  rappelle  à  Jérusalem  les  soins  dont  il  l'a 


Pendants  d'oreille  assyriens.  Musée  du  Louvre. 


entourée.  Il  a  mis  un  nézém  à  ses  narines  et  des 
'âgîlim  à  ses  oreilles.  Les  versions  traduisent  à  tort  ici 
nézém  par  «  pendants  d'oreille  »  et  le  second  mot  par 
«  boucles  ».  Le  premier  mot  désigne  certainement  la 
parure  du  nez  et  le  second  celle  des  oreilles.  Judith, 
x,  3,  avait  des  pendants  d'oreille.  —  Dans  quelques 
autres  passages,  les  versions  appellent  «  pendants 
d'oreille  »  des  anneaux  de  nez,  Gen.,  xxiv,  22,  30,  47, 
ou  des  anneaux  dont  l'usage  n'est  pas  déterminé. 
Exod.,  xxxv,  22;  Jud.,  VIII,  24,  25;  Job,  xr.il,  11. 
Prov.,  xxv,  12, Ose.,  Il,  13.  Cf.  K.  Hadaczeh,  Der  Ohr- 
tchmuck  der  Griechen  und  Etrusker,  dans  les  Abliand- 
lungendes  arch.-epigr.  Seminarsder  Unversitat  Wien, 
xiv,  lleft,  in-'f.  Vienne,  1903."  H.  Lesètre. 

PÉNITENCE  (hébreu  :  nôham,  Sûbâh,  «  conver- 
sion: »  Septante  :  jjeiivo'.a;  Vulgate  :  pœnitentia), 
regret  intérieur  et  effectif  du  mal  que  l'on  a  commis. 

I.  Appels  À  la  pénitence.  —  1°  Dans  le  Temple.  — 
Au  jour  de  la  consécration  du  Temple,  Salomon  adressa 
une  prière  solennelle  au  Seigneur  pour  lui  demander 
de  p ordonner  à  son  peuple  toutes  les  fois  que,  châtié  à 
cause  de  ses  péchés,  il  viendrait  dans  ce  Temple  im- 
plorer son  pardon  et  ferait  pénitence.  III  Reg.,  vin, 
33-52;  II  Par,,  VI,  24-39,  Le  Seigneur  daigna  s'engager 
à  pardonner  quand  le  peuple  serait  sincèrement  péni- 
tent. II  Par.,  vu,  13-15. 


2»  Par  les  'prophètes.  —  Isaïe,  xuv,  22,  invite 
Israël  à  revenir  au  Dieu  qui  l'a  racheté,  en  lui  assurant 
que,  s'il  se  tourne  vers  lui,  il  sera  sauvé,  Is.,  xlv,  22, 
et  que  Dieu  fera  grâce  au  méchant  qui  se  convertira. 
Is.,  lvii,  7.  Jérémie,  m,  14;  iv,  1;  xvm,  11,  renouvelle 
l'appel  divin.  Il  déclare  que  si  la  nation  revient  de  sa 
méchanceté,  Dieu  se  repentira  du  mal  qu'il  voulait 
lui  faire.  Jer.,  xvm,  8.  Ézéchiel,  xiv.  6;  xvm,  21,  30; 
xxxiii,  14,  appelle  le  pécheur  à  la  pénitence  en  disant 
que,  s'il  se  repent,  il  vivra  et  ne  sera  pas  maltraité. 
Dieu  dit  par  sa  bouche  :  «  Prendrai-je  plaisir  à  la 
mort  du  méchant0  N'est-ce  pas  plutôt  à  ce  qu'il  se 
détourne  de  ses  voies  et  qu'il  vive?  »  Ezech.,  xvm.  23. 
32;  xxxiii,  11.  Le  prophète  a  reçu  mission  de  prêcher 
la  pénitence  au  pécheur,  et  il  sera  responsable  de  la 
perte  de  ce  dernier  s'il  ne  parle  pas  pour  le  détourner 
du  mal.  Ezech.,  n,  18,  19;  xxxiii,  8,  9.  Osée,  xiv.  2; 
Joël,  n,  12,  13.  et  Zacharie,  i,  4,  répètent  la  même 
invitation  aux  pécheurs. 

3°  Par  les  saints  personnages.  —  Tobie,  xin,  8, 
exhorte  les  pécheurs  de  son  temps  à  faire  pénitence. 
Judith,  v,  19,  remarque  que  le  Seigneur  a  toujours 
aidé  les  Israélites  repentants,  et  que,  comme  il  est 
patient,  il  pardonnera  si  on  fait  pénitence  avec  larmes. 
Judith,  vm,  14.  Le  Psalmiste  pénitent  s'engage  à  en- 
seigner les  méchants  pour  qu'ils  se  convertissent  au 
Seigneur.  Ps.  u  (l),  15.  Dans  le  livre  de  l'Ecclésias- 
tique, on  lit  qu'il  ne  faut  pas  tarder  de  se  convertir 
au  Seigneur,  Eccli.,  v,  8,  que  Dieu  ménage  un  large 
pardon  à  ceux  qui  reviennent  à  lui,  Eccli.,  xvn,  28,  et 
qu'il  est  beau  de  se  repentir  quand  on  a  été  repris. 
Eccli.,  xx,  4.  L'auteur  de  la  Sagesse  dit  que  Dieu 
ferme  les  yeux  sur  les  péchés  des  hommes  pour  les 
amener  à  la  pénitence,  parce  qu'il  aime  toutes  ses 
créatures,  et  qu'il  pardonne  à  tous  parce  que  tout  est 
à  lui  et  que  les  âmes  sont  l'objet  de  son  amour.  Sap., 
xi,  24-26.  Il  ne  punit  que  par  degrés,  pour  laisser  le 
temps  de  faire  pénitence  et  ne  pas  désespérer  ses 
enfants.  Sap.,  XII,  10,  19. 

4°  Par  saint  Jean-Baptiste.  —  Le  précurseur 
prêche  dans  le  désert  le  baptême  de  pénitence,  c'est-à- 
dire  le  repentir  et  la  purification  du  cœur  dont  son 
baptême  est  le  symbole.  Matth.,  m,  2;  Marc,  i,  4; 
Luc,  m,  3.  Il  invite  les  hommes  à  faire  de  dignes  fruits 
de  pénitence,  par  conséquent  à  témoigner  par  une 
conduite  nouvelle  la  sincérité  de  leur  repentir.  Matth. 
m,  8;  Luc,  m,  8;  cf.  i,  16;  Act.,  xm,  24;  xix,  4. 

5°  Par  Jésus-Christ.  —  Le  Sauveur  lui-même 
appelle  les  hommes  à  la  pénitence.  Matth.,  IV,  17; 
xvm.  3;  Marc,  i,  15.  Il  est  venu  pour  appeler  les  pé- 
cheurs à  la  pénitence,  Luc,  v,  32;  déclare  que  tous 
périront  s'ils  ne  font  pénitence,  Luc,  xm,  3,  5;  parle 
de  la  joie  que  cause  au  ciel  la  pénitence  d'un  seul 
pécheur,  Luc,  xv,  7,  10;  ordonne  à  chacun  de  par- 
donner à  son  frère  repentant,  Luc,  xvn,  3,  4;  invite  à 
la  pénitence  par  ses  paraboles  de  la  brebis  perdue, 
Luc,  xv,  1-7,  de  la  drachme  égarée,  Luc,  xv,  8-10, 
de  l'enfant  prodigue,  Luc,  xv,  11-32,  du  pharisien  et  du 
publicain,  Luc,  xvm,  9-14,  et  par  l'accueil  qu'il  fait  aux 
pécheurs,  voir  Péchelti,  col.  18;  et  enfin,  après  sa  ré- 
surrection, il  envoie  ses  Apôtres  dans  le  monde  pour  y 
prêcher  la  pénitence.  Luc,  xxiv,  27. 

6"  Par  les  Apôtres.  -  Initiés  à  cette  prédication 
par  leur  divin  Maître,  Marc,  vi,  12,  les  Apôtres  pro- 
clament la  nécessité  de  la  pénitence.  Act.,  ri,  38;  m, 
19,  26;  VIII,  22,  etc.  Ils  montrent  comment  le  Sauveur 
est  venu  pour  aider  les  hommes  à  faire  une  pénite  ice 
salutaire.  Act.,  v,  31;  xi,  18;  XVII,  30.  Saint  Paul 
exhorte  à  la  pénitence.  Act.,  xx,  21;  xxvi,  20.  Il  parle 
de  la  bonté  de  Dieu  amenant  les  hommes  à  se  repentir, 
Rom.,  n,  4.  et  rappelle  que  le  devoir  des  ministres 
sacrés  est  de  conduire  leurs  frères  à  la  pénitence. 
Il  Tim.,  il,  25.  Saint  Pierre  dit  que  si  Dieu  patiente 


39 


PÉNITENCE 


40 


c'est  pour  que  le?  hommes  fassent  pénitence.  II  Pet., 
,,,    g    cf.  A<  i..  ii,  18.  Saint  Jacques,  v,  -20.  enseigne 

, celui  qui  convertit  un  pécheur  sauve  son 

la    multitude    des    péchés.    Enfin   saint  Jean 
multiplie  les   appels  à  la  pénitence.   Apoc,  il,  o,    to, 

-'■  22;  i"-  :;'  19-  ,    ,        •   -,™™ 

1 1    ,  de  la  pénitence.  -  1"  La  pénitence 

comporte    toujours,    pour    celui    qui    y    est    soumis 

quel! chose  d'afflictif.  On   le     oïl   par  les  exemples 

Je  ,,.  parents,   Gen.,  in,   16-19;  de  David, 

Il    Reg.,  m,    11-11;    xxiv,   10-14,  etc.   -  2»  Mais  elle 

implique  nécessairement  un  acte  de  la  volonté  qui  a 

péché  en    se  détournant  de    Dieu  et  qui   ne   peut  se 

repenti.'  efficacemenl  qu'en  se  retournant  vers  Dieu.  Le 

Seigneur  pi tel    son  pardon   à    celui    qui    remplira 

quatre  i dilions  :  s'humilier,  prier,  chercher  sa  face 

i lu  mal.  Il  Par.,  vu,  14.  Judith,  vin, 

14-17     .nage    ses    compatriotes    qui    veulent    obtenir 

|eur  pardon  à     humilier  et  à  prier  avec  larmes.  Dans 

I  |  c,  lé  ...  tique,  ivn,  20,  21,  les  conditions  de  la  péni- 
tence sont  ainsi  indiquées  : 

Tourne-toi  vers  le  Seigneur  et  quitte  tes  péchés, 
Prie  devant  sa  face  et  diminue  tes  offenses, 
l;       „    au  Très-Haut,  détourne-toi  de  l'injustice 
El  déteste  fortement  ce  qui  est  abominable. 

II  ne  suffit  donc  pas  de  quitter  le  mal,  il  faut  le 
détester  el  donner  comme  preuve  de  repentir  les  efforts 
qui  aboutissent  à  une  diminution  des  offenses.  — 
3  Le  prophète  Joël,  h,  12-17,  énumère  les  conditions 
que  doit  remplir  le  peuple  coupable  qu'il  appelle  à  la 
pénitence  : 

i;,.  em  i  ,,  moi  de  tout  votre  cœur, 

\n  r  .les  jeûnes,  des  larmes  et  des  lamentations; 

Déchire!  iras  cœurs  et  non  vos  vêtements... 

Que  les  prêtres,  ministres  de  Jéhovah,  pleurent 

Entri  le  portique  el  l'autel, 

!..  ,i,  i  ni     Jéhovah,  épargnez  votre  peuple. 

Une  vraie  contrition  doit  saisir  le  cœur  el  le  déchirer; 
le  jeûne  el  la  prière  achèveront  l'œuvre  de  la  péni- 
tence. Sans  doute,  il  existait  sous  l'ancienne  loi  des 
sacrifices  pour  le  péché.  Mais  ni  les  sacrifices,  ni  les 
œuvres  itérieures,  comme  le  jeune,  ne  constituaient 
une  pénitence  valable  sans  les  sentiments  du  cœur  el 
le  renoncement  au  mal. 

Le  Très  Haut  u'agrée  pa    l.     oflrandes  des  impies,    [chés... 
pas  sur  la  quantité  des  victimes  qu'il  pardonne  lespé- 

,, qui  nïtiepour  ses  péchés,  s  il  va  les  renouveler, 

a  prière,  que  lui  sert  son  humiliation? 

I  ecli.,  xxxv,  19,26. 

le  Psalmiste  termine-t-il   son  cantique  de  péni 
trmr  i..  disant,  Ps,  Ll  (l),  18,  19  ; 

Tu  neé  te  saci  B.     .  je  t'en  offrirais, 

Tu  m-  prend*  |      plaisir  aus  holocaustes; 

Le  sa.  nespritni 

0  Dieu,  tu  ne  dédaignes  ■<  brisé  et  contrit. 

i  aussi   .'h  .m  .  i    que   ces  sentiments   inté- 
rieurs ;...      Psaume     de   pénitence  babyloniens.    Les 

Bupplianl     ne       [u'i    manifester  leur  peur 

,l,s  maui  que  peul  leur  causer  une  divinité  irritée 
,i   ini  lie  les  biens  qui   contribuent  au  bon- 

neur  de  la  fie.  Cl  .  ni  il,  P  aume  de  pénitence 
chaldéen,    dan      I  1896,    p.   7.'.  77  ; 

Dhorme,    Di !ea  ■    '  y  o-babylonien$, 

dans  la   Revue  i  1906,  p.  274-285;  Fr.  Martin, 

Texte»    religieux  ns  et    babyloniens,  l"  sér., 

Paris,  1903,  p.  57.  I  La  prière  est  indiquée  comme 
condition  nécessaire  à  1 1  p.  nitence  Dieu,  en  effet, 
n'imposi  pas  son  pardon;  il  convient  qu'on  le  lui 
demande.       lais-moi   revenir,  et  je  reviendrai       dil 


j  Éphraïm  au  Seigneur.  Jer.,  XXXI,  18.  a  Faites-nous 
revenir  et  nous  reviendrons,  »  disent  les  Juifs  de  Jéru- 
salem. Lam.,  V,  21.  «  Ayez  pitié-  de  moi  qui  suis  un 
pécheur,  »  dit  le  publicain.  Luc.  IVIII,  13.  «  Remettez- 
nous  nos  dettes,  »  c'est-à-dire  «  pardonnez-nous  nos 
offenses  »,  nous  fait  dire  le  divin  Maître.  Matlh.,  vi, 
12.  —  5"  Dans  la  parabole  de  l'enfant  prodigue,  Luc, 
xi,  21,  Xotre-Seigneur  montre  quelles  sont  les  condi- 
tions de  la  vraie  pénitence  ;  le  malheureux  prodigue 
rentre  en  lui-même,  regrette  la  perte  des  biens  de  la 
maison  paternelle,  prend  la  résolution  d'aller  retrouver 
-on  père,  île  lui  faire  l'aveu  de  son  crime  et  de  se 
soumettre  ensuite  au  sort  le  plus  humiliant,  abandonne 
effectivement  la  vie  indigne  à  laquelle  il  se  trouvait 
réduit,  reprend  le  chemin  qui  ramène  à  son  père,  lui 
fait  son  aveu  et  implore  son  pardon.  —  6»  Ce  qui 
montre  que  la  pénitence  est  véritable,  ce  sont  les 
«  dignes  fruits  »  qu'elle  porte.  Mattb.,  III,  S.  Parmi  ces 
fruits,  saint  Jean-Baptiste  indique  aux  foules  la  pratique 
de  la  charité,  aux  publicains  et  aux  soldats  la  justice  et 
la  fidélité  dans  l'accomplissement  de  leurs  devoirs 
d'état.  Luc.  III,  10-14.  Xotre-Seigneur  recommande  de 
ne  plus  pécher.  Joa.,  v,  11  :  VIII,  1 1. 

III.  Exemples  de  pénitence.  -  1  Adam  lit  pénitence 
de  son  péché,  Sap.,  X,  2,  probablement  eu  supportant 
avec  humilité  et  résignation  l'épreuve  à  laquelle  il  fut 
condamné.  —  Enoch  fut  pour  les  nations  un  exemple 
de  pénitence.  Eccli.,  xuv.  10.  -  Au  temps  de  Noé,  il 
v  eut  des  esprits  rebelles  qui  tirent  pénitence  à  la  me 
du  châtiment,  puisque  le  Christ  put,  après  sa  mort, 
leur  prêcher  dans  la  prison  où  ils  étaient  détenus. 
I  Pet.,  XIX,  20.  —  2»  L'époque  îles  Juges  fut  pont  les 
Israélites  une  succession  d'infidélités  à  Dieu  et  de  repen- 
tirs. Jud.,  m,  9;  iv,  3;  vi,  7;  x,  10,  etc.  -  Job  lit  péni- 
tence dans  la  poussière,  après  avoir  reconnu  sa  pré- 
somption. Job,  xi. ii.  ti.  -  3°  A  la  suite  de  son  double 
crime,  David  resta  près  d'une  année  sans  écouter  La 
voix  de  sa  conscience;    mais  ensuite  il  se  repentit  sin- 

cèrement  à   l'appel  de   Nathan.   11  Reg.,  xn.  13;  xvi. 
12.    —    .losias   amena    la   nation   au   repentir.    Eccli., 
xux,  3.  —  Captif  à    Babylone,  Manassé  s'humilia  el 
demanda  pardon  au  Seigneur.   Il   Par.,  iixm,  12,  13. 
—     t"    Pour     obtenir     leur    délivrance,    les    Juifs    se 
livrèrent    à    .bs    actes  de    pénitence    à    Suse,    sur  la 
demande  d'Esther.  Esth.,  tv,  16.  -  A  la  prédication  de 
Jonas,  le  roi  de  Ninive  se  soumit  avec  ses  sujets  a  une 
pénitence    rigoureuse    comprenant     un    jeûne    absolu 
pour  tout    être    vivant,  homme  ou  bêle,  l'usage  du  sac 
et  de  la  cendre,  la  prière  instante  adressée  à  Dieu  et  le 
renoncement  au  mal.   .Ion.,  lu,    5-9.    -   5»  Une  longue 
protestation  de  repentir  fut   signée  par  les  principaux 
personnages  et  acceptée  par  tout  le  peuple,  au  temps  de 
Néhémie.  II    Ksd.,  ix,  1-38.   -  6«  Dans   le    Nouveau 
Testament,  on  trouve  les  exemples   de   pénitence  des 
luil's  a  la  prédication  de  saint  Jean-Baptiste,   Matlh., 
m    7.    Luc.  ni.  7;   de  la  pécheresse  chez  Simon  le 
pharisien,   Luc,   vu,  37,  38,  18;  du  publicain,  Luc, 
xviii,  13;  de  Zachée.Luc,  irx,  8;  de  saint  Pierre  pleu- 
ranl  amèremenl  après  son  reniement.  Matth.,  xxvi,  75; 
Marc     xiv   72;  Luc  xxn;  62;  du  bon  larron  se  repen- 
tant sur  la  croix,  Luc.  ixill,  M-42;  des  Juifs  qui  par- 
tirent du    Calvaire   en    se    frappant  la    poitrine.    Luc, 
xxin,  48.  -  7"  Notre-Seigneur  lui-même  donne  1  exemple 
de  la  pénitence,  è  son  jeune  du  désert,  Matth.,  iv,  2; 
lue    îv  ■'    pendant  son  ministère  évangéhque,  n  ayant 
pas  toujours  le  temps  de  prendre  sa  nourriture,  M  rc, 
Il    90    ni  où  reposer  sa  tète,  Matlh..  VIII,  20;   Luc.  ix. 
58'  et   suru.ui  pendant    sa    passion.         *"  Plusieurs 
milliers  de   Juifs   font    pénitence  à   la  voix   de   sainl 
Pierre     \ct..  Il,  38,  il.  -  Saint   Paul  se  convertit  et. 
pendant  le  reste  de  sa  vie,  accepte  en  esprit  de  péni- 
tence l'accomplissement  de  la  prédiction  du  Sauveur  à 
son  sujet  :  -  Je  lui  montrerai  tout  ce  qu'il  doit  souilnr 


41 


l'KMTEXCE 


la 


4: 


pour  mon  nom.  ••  Acl..  ix,  16.  —  A  l'appel  des  Apôtres, 
on  fait  pénitence  à  Lydda  et  à  Saron,  Act..  îx.  35;  à  An- 
tioche,  Act.,  si,  il  :  à  Éphèse,  où  l'on  brûle  une  multi- 
tude de  livres  de  superstition,  Act.,  xix.  18.  19:  xx.  21: 
à  Corinthe,  II  Cor.,  vu.  9.  10.  Cf.  I  Pet.,  n,  25. 

IV.  Exemples  d'impénitence.  —  1°  Beaucoup  de  pé- 
cheurs se  sont  refusés  à  faire  pénitence.  Tels  furent 
Caïn,  Gen.,  iv.  10-13;  la  plupart  des  contemporains  de 
Xoé.  Gen.,  vi.  ô,  6;  les  habitants  de  Sodome  et  des 
villes  coupables,  Gen.,  xix.  12,  13;  le  pharaon  d'Egypte 
qui  se  repentait  un  moment  pour  s'obstiner  ensuite, 
Exod.,  vin.  -25.  32,  ix,  27,  35;  x,  16,  20,  24,  27:  xn,  31; 
xiv,  ô:  les  Israélites  révoltés  qui  furent  condamnés  à 
périr  au  désert,  Xum..  xiv,  27-33;  les  fils  d'Héli,  I  Reg.,  iv. 
11;  Saul,  I  Reg.,  xm.  14;  xvi,  35;  les  contemporains 
du  prophète  Élie,  Eccli.,  xlviii,  16;  les  rois  et  le  peuple 
d'Israël,  IV  Reg.,  xvii.  7-1S;  une  grande  partie  des  rois 
et  du  peuple  de  Juda.  IV  Reg.,  xxrv,  3.  4.  En  vain 
.lérémie  multiplia  ses  appels  à  la  pénitence;  on  ne  vou- 
lut pas  se  convertir.  .1er.,  m.  1-22;  v,3;  vin,  6.  —  Plus 
tard,  le  roi  persécuteur.  Antiochus  Épiphane,  frappé 
par  la  justice  île  Dieu,  sembla  vouloir  se  repentir  du 
mal  qu'il  avait  causé;  mais  sa  pénitence  n'était  ni  sin- 
cère ni  désintéressée.  Il  Mach.,  ix.  11-29. 

2  A  plusieurs  reprises,  il  est  dit  que  Dieu  endurcit 
le  cœur  de  ceux  qui  ne  veulent  pas  se  convertir. 
Exod..  iv.  21:  vu.  3;  ix.  12;  x,  1,  20,  27:  XIV,  i,  8,  17; 
Deut.,  n.  30:  Is.,  i.xin.  17;  Rom.,  ix,  18.  D'autre  part, 
on  lit  dans  Isaïe.  vi.  10  :  «  Appesantis  le  cœur  de  ce 
peuple,  rends  ses  oreilles  dures  et  bouche-lui  les  yeux, 
en  sorte  qu'il  ne  voie  point  de  ses  yeux,  n'entende 
point  de  ses  oreilles,  ne  se  convertisse  point  et  ne  soit 
point  guéri.  »  Cet  oracle  est  répété  par  Xotre-Seigneur. 
Matth.,  xm,  15;  .Marc,  iv,  12;  Joa.,  xn,  40,  et  par  saint 
Paul.  Act..  xxvin.  27.  A  prendre  les  termes  à  la  lettre, 
Dieu  semble  ainsi  l'auteur  de  l'inipénitence  qu'ensuite 
il  châtie.  —  .Mais  il  y  a  là  une  manière  de  parler  des- 
tinée  à  faire  comprendre  avec  quelle  certitude  Dieu 
prévoit  l'endurcissement  et  lui  donne  occasion  de  se 
produire  en  vue  d'un  bien  supérieur.  Saint  Augustin, 
Qusest.  in  Heptat.,  n.  18,  t.  xxxiv,  col.  601-602,  expli- 
que ainsi  le  cas  du  pharaon  :  «  La  malice  qui  est  au 
cœur  d'un  homme,  c'est-à-dire  sa  disposition  au  mal. 
tient  à  sa  propre  faute  et  n'existe  que  par  le  fait  de 
sa  volonté  libre.  Toutefois,  pour  que  cette  disposition 
mauvaise  agi--,  il  m-  un  sens  ou  dans  l'autre,  il  faut  des 
causes  qui  mettent  l'esprit  en  mouvement.  Or  il  ne  dépend 
pas  du  pouvoir  de  l'homme  que  ces  causes  existent  ou 
non  ;  elles  proviennent  delà  providence  cachée,  mais  très 
juste  et  très  sage,  du  Dieu  qui  règle  et  gouverne  l'uni- 
vers qu'il  a  créé.  Si  le  pharaon  avait  un  cœur  tel  que  la 
patience  de  Dieu  le  portât,  non  à  la  religion,  mais  bien 
plutôt  à  l'impiété,  c'était  par  sa  propre  faute.  .Mais  si 
les  événements  se  produisirent  de  telle  manière  que 
son  cœur,  si  mauvais  par  sa  faute,  résista  aux  ordres  de 
Dieu,  ce  fut  le  résultat  de  la  sagesse  divine.  »  Pour 
expliquer  le  passage  d'Isaïe,  VI,  10,  saint  Jérôme,  In 
Is.,  m,  6,  t.  xxix,  col.  100,  s'appuie  sur  la  doctrine  de 
l'Epilre  aux  Romains,  ix,  14-18,  et  dit  que  l'aveugle- 
ment volontaire  des  .luifs  a  procuré  l'illumination  des 
autres  nations  :  «  Ce  n'est  pas  par  cruauté,  mais  par 
miséricorde,  que  Dieu  permet  la  perte  d'une  nation 
pour  le  salut  de  toutes  les  autres.  Une  parlie  des  Juifs 
n'ont  pas  vu  clair,  pour  que  le  monde  entier  put  voir.  » 
3°  D'autres  exemples  d'impénitence  se  rencontrent 
dans  le  Nouveau  Testament.  Les  villes  de  Corozaïn, 
Betlisaïde  et  Capharnaum  ont  refusé  de  se  convertir. 
dans  des  condi lions  qui  auraient  décidé  T\r  et  Sidon  à 
faire  pénitence.  Matth.,  xi,  20-24;  Luc,  x,  13-15.  La 
génération  contemporaine  du  Sauveur  a  montré  le 
même  endurcissement,  alors  que  Xinive  s'est  convertie 
à  la  voix  de  Jonas.  Matth.,  xn.  il;  Luc,  xi,  32.  Jérusa- 
lem s'est  dérobée  aux  appels  du   Sauveur   qui  voulait 


rassembler  ses  enfants  comme  la  poule  rassemble  ses 
poussins  sous  ses  ailes.  .Matth..  xxm,  37.  Après  avoir 
refusé  d'obéir,  les  pécheurs  ont  fait  pénitence;  après 
avoir  promis  fidélité,  les  Juifs  ont  refusé  de  faire  péni- 
tence. Matth..  xxi,  28-32.  —  Même  si  un  mort  ressusci- 
tait, certains  pécheurs  ne  se  convertiraient  pas.  Luc,  xvi, 
31.  —  Juda  fut  saisi  de  repentir,  mais  sa  pénitence  fut 
dépourvue  de  confiance  en  Dieu  et  ne  le  sauva  pas. 
-Matth.,  xxvii,  3-10.  —  La  résurrection  du  Sauveur 
laissa  dans  l'inipénitence  la  plupart  des  Juifs.  Matth., 
xxvni,  11-15.  —  La  pénitence  de  Simon  le  magicien  fut 
intéressée  et  sans  valeur.  Act.,  vin,  13,  18-24.  —  Beau- 
coup de  pécheurs  ont  continué  à  refuser  la  pénitence. 
II  Cor.,  xn.  21  ;  Apoc.  ix.  20-21;  XVI,  9,  11. 

V.  Le  sacrement  de  pénitence.  —  1°  Jésus-Christ 
dit  à  saint  Pierre  :  o  Jeté  donnerai  les  clefs  du  royaume 
des  cieux  :  tout  ce  que  tu  lieras  sur  la  terre  sera  lié 
dans  les  cieux,  et  tout  ce  que  tu  délieras  sur  la  terre 
sera  délié  dans  les  cieux.  »  Matth.,  xvi,  19.  Il  dit  en- 
suite à  tous  ses  Apôtres  en  général  :  «  Tout  ce  que  vous 
lierez  sur  la  terre  sera  lié  dans  le  ciel,  et  tout  ce  que 
vous  délierez  sur  la  terre  sera  délié  dans  le  ciel.  «.Matth., 
xvill,  19.  Les  Apôtres  reçoivent  par  là  le  pouvoir  il  ta- 
blir  ou  de  supprimer  des  obligations  dans  le  domaine 
spirituel.  Voir  Lien,  t.  iv,  col.  218.  Le  soir  même  de  sa 
résurrection,  le  divin  Maître,  qui  vient  de  payer  sur  la 
croix  la  rançon  du  péché,  applique  à  un  point  spécial 
le  pouvoir  qu'il  a  précédemment  accordé  :  «  Recevez  le 
Saint-Esprit.  Ceux  à  qui  vous  remettrez  les  péchés,  ils 
leur  seront  remis;  et  ceux  à  qui  vous  les  retiendrez,  ils 
leur  seront  retenus.  »  Joa.,  xx.  22,  23.  Les  Apôtres  re- 
çoivent donc  ce  jour-là,  de  celui  qui  a  le  pouvoir  de 
remettre  les  péchés,  Matth.,  ix,  5,  la  transmission  de  ce 
pouvoir.  Saint  Paul  l'entend  bien  ainsi  quand  il  dit  : 
«  Dieu  nous  a  réconciliés  avec  lui  par  Jésus-Christ,  et 
nous  a  confié  le  ministère  de  la  réconciliation.  »  II  Cor., 
v,  18.  Ce  ministère  de  la  réconciliation,  c'est  l'ordre  et 
le  pouvoir  de  remettre  les  péchés  dans  le  sacrement  de 
pénitence.  Le  Concile  de  Trente,  Sess.  xiv.  can.  2,  3,  a 
défini  que  les  paroles  dites  parle  Sauveur  le  jour  de  sa 
résurrection  doivent  s'entendre  du  pouvoir  de  remettre 
et  de  retenir  les  péchés  dans  le  sacrement  de  pénitence, 
comme  l'Église  catholique  l'a  toujours  entendu  depuis 
l'origine,  et  qu'on  ne  peut  les  détourner  contre  l'insti- 
tution de  ce  sacrement  en  les  appliquant  au  pouvoir  de 
prêcher  l'Évangile. 

2    Le  sacrement  de  pénitence  précise  et  facilite  les 
conditions  nécessaires  à  la  rémission  du  péché  sous  la 
Loi   ancienne.   1.    La  contrition   réclame   toujours  les 
même  qualités  qu'autrefois;   il  faut  qu'elle  soit  au  fond 
du  cœur,  qu'elle  soit  sincère  et  détache  effectivement 
la  volonté   du  péché.  Voir  col.  39.  Un  nouveau   motif 
s'ajoute  aux  précédents   pour  la   faire  naître   dans  le 
cœur;   c'est  la  pensée  de  la  rédemption  et  de  tout  ce 
que  le  Sauveur  s'est  imposé  de  souffrances  pour  l'expia- 
tion  du  péché.   —  2.   La  confession   prend  une  forme 
plus  précise,  dont  l'obligation   se  déduit  des   paroles 
mêmes  qui  instituent  le  sacrement.  Voir  Confession, 
t.  n,  col.  907-919.  —  3.  La  satisfaction  demeure  néces- 
saire comme  autrefois,  même  après  la  rémission  du 
péché,  du  moins  pour  l'ordinaire.  Cf.  Xum..   xx.  12: 
Deut..  xxxii,  49-51;  II  Reg..  XII,    14.  etc.  Saint  Paul 
déclare  qu'il   «   complète  en  sa   propre   chair  ce    qui 
manque  aux  souffrances   du  Christ,  pour  son   corps, 
qui  est  l'Église   ».  Col.,  i,  24.  —  i.  Enfin  Vabsol" 
est  une  grâce  nouvelle  que  l'Ancien  Testament  ne  con- 
naissait pas.  Nathan  put  bien  exceptionnellement  dire 
a  David  :   i  Jéhovah  a  pardonné  ton  péché.  «  II  Reg.,  xn, 
13.  Les  autres  pécheurs,  si  repentants  qu'ils  lussent, 
ne  pouvaient  présumer  leur  pardon.  Xotre-Seigneur, 
qui  dit  lui-même  à  plusieurs  pécheurs  :  «  Tes  péchés 
te  sont  remis,  »  Matth..  ix,  2;  Luc,  v,  20;   vu,  47,  48, 
donna  à  ses  Apôtres,  en   vertu  des  paroles  de  l'institu- 


43 


PÉNITENCE   —   PENSEE 


44 


lion,  le  pouvoir  non  seulement  de  déclarer  les  péchés. 
remis,  mais  de  les  remettre  effectivement  :  i  C 
i|ui  vous  remettrez  les  péchés,  ils  leur  seront  remis. 
Leur  pouvoir  s'étend  donc  plus  loin  que  celui  de  Na- 
than, cpii  ne  lit  que  déclarer  à  David  que  son  péché 
était  pardonné.  —  Cette  rémission  comporte  reflet 
déjà  énoncé  dans  divers  passages  de  la  Sainte  Écriture 
par  Dieu.  Le  péché,  en  vertu 
de  l'absolution,  esl  i  couvert»,  Ps. lxxxv (lxxxiv),  3,  et 
«  non  imputé  ,  Num.,  mi.  11  :  Rom.,  iv,  7,  8,  non  pas 
as  qu'il  existe  toujours,  quoique 
:  eu  dai  ne  n'en  plus  tenir  compte.  Il  est  réellement 
effacé,  enlevé,  radicalement  détruit,  comme  le  déclarent 
les  autres  textes  inspirés.  Voir  Péché,  4°,  col.  11.  En  un 
mot,  en  vertu  des  paroles  évangéliques,  il  est  «  remis  ». 
comme  une  dette  qui  n'existe  plus  et  ne  peut  plus 
revivre,  quand  le  créancier  a  rendu  au  débiteur  le  titre 
qui  liait  ce  dernier. 

3°  Le  pouvoir  conféré  par  Xotre-Seigneurà  son  Église 
n'est  pas  limité  par  sa  déclaration  sur  le  péché  contre 
le  Saint-Esprit.  Matth.,  xn,  32;  Marc,  m,  28.  Voir 
Blasphème,  t.  i,  col.  1809.  —  On  lit  aussi  dans  l'Épitre 
aux  Hébreux,  vi,  4-6  :  «  Il  est  impossible  pour  ceux  qui 
ont  été  une  fois  éclairés,  qui  ont  goûté  le  don  céleste, 
qui  ont  eu  pari  au  Saint-Esprit,  qui  ont  goûté  la  dou- 
ceur de  la  parole  de  Dieu  et  les  merveilles  du  monde 
à  venir,  et  qui  pourtant  sont  tombés,  de  les  renouveler 
econde  fois  en  les  amenant  à  la  pénitence.  »  De 
ce  texte,  plusieurs  Pères,  Clément  d'Alexandrie,  Strom., 
2,  13,  t.  vin,  col.  293;  Tertullien.  De  psenit.,  7,  9,  t.  i, 
col.  1241,  1243;  Origène,  In  Levit.,  Hom.  xv,  2,  t,  xn, 
col.  565;  S.  Ambroise,  De  psenit.,  u,  95,  t.  xvi, 
col.  520  ;  S.  Augustin,  Ep.  Chili,  7.  t.  xxxm,  col.  656, 
ont  conclu,  sans  justifier  autrement  leur  assertion. 
qu'il  n'y  a  qu'une  pénitence,  comme  il  n'y  a  qu'un 
baptême.  Novatien  et  ses  partisans  s'appuyaient  même 
sur  ce  texte  pour  nier  la  possibilité  du  pardon  des 
graves.  Cf.  Socrate,  H.  E..  i,  10.  t.  i.xvii. 
col.  69.  Au  moyen  âge,  on  l'eniendit  de  la  pénitence 
solennelle,  qui  en  effet  n'était  jamais  réitérée.  Cf.  Tur- 
mel,  Histoire  de  la  théologie  positive,  Paris,  1904, 
p.  461.  Il  esl  évident  que  l'auteur  de  l'Épitre  n'a  guère 
pu  songer  à  la  pénitence  publique.  On  explique  assez 
souvent  son  texte  de  la  difficulté  et  même  de  l'impossi- 
bilité meule  fini  empêche  pratiquement  l'apostat  de 
se  repentir  avec  efficacité.  .Mais  plusieurs  Pères  pré- 
fèrent une  autre  explication.  Ils  font  porter  l'idée  prin- 
cipale de  l'auteur  sur  le  mot  s  renouveler  »  ;  il  est  im- 
possible, disent-ils,  qu'une  Sme  soit  renouvelée  par  la 

pénitence  coi Ole  l'est  par  le  baptême,  i  11  n'exclui 

pas  les  pécheurs  de  la  pénitence,  mais  il  montre  qu'il 
n'j  a  dans  l'Église  catholique  qu'un  baptême,  et  non 
lui  qui  fait  pénitence  cesse  de  pécher,  mais 
s  blessures,  tandis  que  celui 
d  ipouille  le  vieil  homme  et  est  renou- 
velé par  I i    du   Saint-Esprit  qui   lui  donne  une 

naissanci  »  S.  Athanase,  Epist.  iv  ad  Sera- 

13        ••    i   .  .i    ici;.  Ii  au  1res  pensent  que  l'écri- 

eul  seulement  montrer  qu'il  n'y  a  pas  clans 

Juifs,    plusieurs    baptêmes 

Ifier  des  souillures.  Cf.  S.  Thomas, 

theol.,  m,  ,|.  cxxxiv.  a.  10,  ad  I"1".  En  toute  hy- 
pothèse,   le  li    ;  tion  n'apporte  donc  aucune 
restrii  ti   n  à  la  rémissibilité  des  péchés. 
VI.  1                          Dieu.  -  La  Sainte  Êcritun    dil 

T"'  '  oti  d'avoir  fait  l'h me  sur  la  terre, 

G  "  ■  n,  6;    ir  établi  roi  Saiil,  i  i;  ,..  xv.  II.  35; 

d'avoir    voulu    faire    du    mal    à    son    peuple   infidèle, 
Jer.,  xxvi,  3, 13, 19,  et  auxNinh  blés.  .Ion.,  m, 

10.  D'autres  fois,  on  annonc  i  que  Diei se  repentira 

pas.  I  tv,  28;  xx,  16.  Ci      ml  la  de 

inthro] os  qui  prétenl  à 

S,  mais 


qui  présentent  sous  une  forme  relative  ce  qui  est 
absolu  en  Dieu.  Le  repentir  est  impossible  à  Dieu, 
qu'il  a  tout  prévu  à  l'avance,  le  bon  ou  mauvais 
usage  que  l'homme  ferait  de  ses  dons  et  la  conduite 
qu'il  tiendrait  lui-même  en  conséquence.  Samuel 
exprime  ce  qu'il  y  a  d'immuable  dans  la  volonté  de 
Dieu,  quand  il  dit  à  Saiil  :  «  Celui  qui  est  la  splendeur 
d'Israël  ne  ment  point  et  ne  se  repent  point,  car  il 
n'est  pas  un  homme  pour  se  repentir.  »  I  Pie::.,  xv.  29. 
Et  saint  Paul,  parlant  des  anciennes  promesses  faites 
aux  Juifs,  dit  que  «  les  dons  et  la  vocation  de  Dieu 
sont  sans  repentance  ».  Rom.,  xi,  29. 

H.  Lesètre. 
2.  PÉNITENCE  D'ADAM,  livre  apocryphe.  Voir  APO- 
CRYPHES, t.  i,  col.  710. 

PÉNITENTIAUX  (PSAUMES),  nom  donné  aux 
sept  Psaumes,  vi,  xxxi,  xxxvn,  l,  ci,  cxxix  et  cxi.m,  à 
cause  des  sentiments  de  pénitence  qu'ils  expriment. 
L'usage  de  réciter  ces  Psaumes  pour  demander  à  Dieu 
pardon  de  ses  péchés  est  très  ancien  dans  l'Église. 

PENSÉE  hébreu  :  hâgûf,  de  hâgâh,  «  parler  dou- 
cement, méditer;  t  lamnidh,  mezimmdh,  de  lâmam, 
même  sens;  yesèr,  de  yâsar,  «former;  »  aifûf,  éstowjt, 
de  «sot,  "  former,  imaginer;  »  rêa  ,  àere'dh,»  penser;» 
iêah,  de  xiah,  «  parler,  méditer;  i  se'i/fim,  ie'iffim, 
de  sàaf,  «  diviser;  »  tar'affim;  chaldéen  :  harhor,  de 
hdrdh,  «  concevoir;  i  va'iôn,  de  re'dh,  •  penser; 
Septante  :  ô'.a)o-'.T,u.ô;.  Sitxvoia,  Ëvvota,  èv8-jp.^a:{,  \xtii-.r,  ; 
Vulgate  :  cogitatio,  cogitatus.  amsilium),  combinaison 
d'idées  formée  intérieurement  par  l'intelligence.  — 
Cette  combinaison  peut  être  spontanée  ou  voulue, 
mais  rapide;  c'est  la  pensée  proprement  dite.  Elle 
exprimée  extérieurement  par  la  parole.  Voir  PAROLE. 
L'intelligence  peut  s'y  arrêter  avec  attention,  c'est  la 
réflexion,  ou  même  faire  effort  pour  examiner  la  pensée 
plus  longuement  et  sous  divers  aspects,  c'est  la  médi- 
tation, sihdh,  u.iii-.-r,.  meditatio.  La  pensée  peut  ensuite 
passer  dans  le  domaine  de  la  volonté,  pour  devenir 
projet,  dessein  ou  résolution,  et  être  communiquée  à 
d'autres,  sous  forme  de  conseil,  peur  les  diriger.  — 
Dans  le  langage  biblique,  le  cœur  est  habituellement 
considéré  comme  le  siège  de  la  pensée.  Voir  COEl  R, 
t.  n,  col.  823. 

I  Les  pensées  de  Dieu.  —  Elles  sont  d'une  profondeur 
qui  déconcerte  l'homme.  Ps.  xcn  (xci),  6.  Elles  ne 
sont  pas  celles  des  hommes,  Is.,  LV,  8,  et  les  dépassent 
autant  que  le  ciel  est  au  dessus  de  la  terre.  Is..  LV,  9. 
Personne  ne  peut  changer  la  pensée  de  Dieu,  .lob,  xxin, 
13.  Iiieu  a  des  pensées  de  paix  à  l'égard  de  son  peuple. 
.1er.,  xxix,  11.  Les  nations  ne  connaissent  pas  ses  pen- 
sées. Mich.,  iv,  12. 

2»  i-es  pensées  de  l'homme.  —  l.  Dieu  les  connaît 
toutes;  il  les  sonde.  I  Par.,  xxvm.  9;  Ps.  xi  iv  (xcin), 
11;  exxxix  (cxxxvm),  :'.;  Sap.,  VI,  i;  I  eeli.,  xi.n,  20; 
Is..  î.xvi,  IS;  Ezech.,  xj,5;  I  Cor.,  ni,  20;  Heb.,iv,  12; 
il  les  juge,  Sap.,  i.  9,  et  les  révèle.  Luc.  n.  X>.  11  a 
horreur  des  pensées  mauvaises,  Prov..  XV,  26.  et  son 
Esprit  s'éloigne  de  celles  qui  manqui  nid.'  sen<.  Sap..  i. 
5.  Notre-Seigneur  lisait  dans  les  cœurs  le-  pensées  de 
-es  interlocuteurs,  et  les  étonnait  profondément  en  les 
l.ur  révélant.  Matth.,  ix.  i;  xn.  25;  Marc,  il,  6,  8; 
Lue.,  v,  22;  VI,  S;  i\.  17;  xi.  17:  x.xiv,  38.  —  2.  L'espril 
de  l'homme  a  des  pensées  multiples.  Sap..  ix.  15.  Ces 
pi  ii-. es  sont  incertaines.  Sap.,  IX.  li.  et  parfois  Cl 
grand  trouble  ;,  l'homme.  Dan.,  IV,  16;  v,  6:  m 
Il  ne  faut  pas  s'élever  dans  ses  pensées,  Eccli.,  vi.  2. 
mais  demande]- a  Iiieu  qu'il  en  donne  de  bonnes,  car, 
-m- -en  inspiration,  nous  ne  soie  capables  de 

concevoir  quelque   chose  par  nous-mêmes,  au    moins 
dan-  l'ordre  du  salut.    II  Cor.,  m,  5.  -  :i.  Les  bonnes 
rencontrent  chez  le  juste.  Ps.  xi.ix    xi.vm), 


45 


PENSEE 


PENTAPOLE 


46 


4  ;  Prov.,  xii,  5.  En  lui,  la  charité  ne  pense  pas  le  mal. 

I  Cor.,  xm,  5.  Lui-même  pense  à  Dieu  dans  toutes  ses 
voies.  Prov.,  m,  6.  Le  chrétien  doit  s'armer  delà  pen- 
sée de  Jésus  crucifié.  I  Pet.,  iv.  1.  En  dehors  de  là, 
l'objet  ordinaire  de  ses  pensées  sera  «  tout  ce  qui  est 
honorable,  juste,  pur,  de  bonne  renommée,  conforme 
à  la  vertu  et  digne  d'éloge  ».  Phil.,  iv,  S.  —  i.  Les  mau- 
vaises pensées,  que  fuit  le  juste,  Job,  xxxi,  1,  sont 
celles  des  méchants  :  pensées  impies  contre  Dieu, 
Sap.,  m.  14;  pensées  idolàtriques,  Ezech.,  xx.  32; 
pensées  égoïstes,  Deut.,  xv,  9;  pensées  intéressées, 
Act.,  vin,  22;  pensées  d'erreur,  Sap.,  H,  21,  d'injus- 
tice, Jacob.,  il,  4,  d'adultère,  Dan.,  xm,  28,  d'orgueil 
Dan.,  il,  29,  30,  d'homicide,  Gen.,  xxxvn,  18;  I  Reg., 
xxiv,  11;  pensées  perverses  de  toute  nature.  ;Is.,  LV, 
7;  i.ix,  7;  I  Reg.,  xvm,  25;  Judith,  v,  26;  Sap.,  m,  10  ; 
xvm,  5;  II  Esd.,  vi,  2;  Lsth.,  ix,  24;  Matth.,  xv.  19; 
Marc,  VII,  21.  Depuis  la  chute  des  premiers  parents, 
toutes  les  pensées  de  l'homme  inclinent  vers  le  mal. 
Gen..  vi,  .">;  vin,  21.  Les  philosophes  eux-mêmes  n'ont 
abouti  qu'à  des  pensées  vaines.  Rom.,  i,  21.  En  se  con- 
duisant au  gré  de  leurs  pensées,  Is.,  lxv,  2;  Jer.,  xvm. 
12;  Eph.,  il,  3,  les  méchants  se  séparent  de  Dieu,  Sap., 
i,  o,  se  couvrent  de  honte,  Sap.,  Il,  14,  attirent  sur 
eux  le  malheur,  Jer.,  vi,  19.  et  se  préparent  de  terribles 
remords  pour  l'autre  vie.  Sap.,  iv,  20.  —  5.  L'insensé 
n'a  que  des  pensées  volages,  qui  se  succèdent  sans 
réflexion. 

L'intérieur  de  l'insensé  est  comme  une  roue  de  chariot, 
Et  sa  pensée  comme  un  essieu  qui  tourne.  Eccli.,  xxxm.  5. 

II  v  a  certaines  pensées  qu'il  faut  garder  pour  soi. 

Même  dans  ta  chambre  ne  dis  pas  de  mal  du  puissant; 
Même  dans  ta  pensée  ne  maudis  pas  le  roi. 
L'oiseau  du  ciel  emporterait  ta  voix 
Et  le  volatile  publierait  tes  paroles.  Eccle.,  x,  20. 

—  6.  La  Sainte  Ecriture  loue  comme  «  une  pensée 
sainte  et  pieuse  »  celle  qui  porta  Judas  Machabée  à 
faire  offrir  des  sacrifices  pour  les  morts,  et  qui  lui  fut 
inspirée  par  >•  la  pensée  de  la  résurrection  ».  II  Mach., 
xii,  43.  45. 

3°  La  réflexion.  —  1.  Tout  homme  agit  avec  ré- 
flexion. Prov.,  xm,  16.  La  réflexion  doit  précéder 
toute  action,  si  l'on  ne  veut  pas  avoir  à  se  repentir. 
Eccli.,  xxxil,  24;  xxxvn,  20.  Il  est  bon  de  fréquenter 
ceux  qui  réfléchissent.  Eccli.,  xxvii,  13.  L'enfant  pense 
en  enfant.  I  Cor.,  xm,  11.  —  2.  Les  pharisiens  réflé- 
chissent à  ce  qu'ils  répondront  à  Notre-Seigneur. 
Matth.,  xxi,  25;  Marc,  xi,  31;  Luc,  xx,  5.  Ca'iphe  dit 
aux  membres  du  sanhédrin  qu'ils  ne  réfléchissent  pas 
que  la  mort  d'un  seul  est  avantageuse  à  tout  le  peuple. 
Joa.,  XI,  50.  —  3.  Le  juste  réfléchit  quand  il  est  néces- 
saire. Judith,  x,  13;  II  Esd.,  v,  7;  II  Mach.,  vi,  23; 
etc.  Marie  réfléchit  aux  paroles  de  l'ang'e,  Luc,  i.  29; 
Joseph,  à  ce  qu'il  doit  faire  par  rapport  à  Marie, 
Matth..  i,  20;  les  Apôtres,  aux  paroles  que  leur  a  dites 
le  Sauveur,  Matth.,  XVI,  7,  8;  Marc,  |VIII,  16,  17;  saint 
Pierre,  à  sa  vision  de  Joppé.  Act.,  x,  19.  —  4.  Le  cœur 
du  juste  médite  sur  ce  qu'il  doit  répondre.  Prov.,  xv, 
28.  Cependant,  Notre-Seigneur  recommande  à  ses  dis- 
ciples de  ne  pas  réfléchir  sur  ce  qu'ils  répondront  de- 
vant les  tribunaux,  parce  que  l'Esprit  de  Dieu  le  leur 
nspirera.  Matth.,  x.  19. 

4°  La  méditation.  —  1.  On  médite  sur  ce  qui  inté- 
resse la  vie  présente.  Dans  la  maison  du  deuil,  le  vivant 
médite  sur  sa  destinée.  Eccle.,  vu,  3.  Isaac  sortait  dans 
les  champs  pour  méditer,  d'après  la  Yulgate.  Gen., 
xxiv,  63.  Un  a  beau  méditer  et  s'ingénier,  on  ne 
peut  allonger  d'une  coudée  sa  taille,  ou  plutôt  la  durée 
de  sa  vie.  Matth.,  vi,  27;  Luc,  xn,  25.  Le  riche  fermier 
médite  sur  les  moyens  de  serrer  sa  récolte  abondante, 
Luc,  xn,  17;  l'architecte,  sur  les  ressources  qui]  lui 


faut  pour  achever  son  édifice,  Luc,  xiv,  28;  le  roi,  sur 
les  forces  dont  il  dispose  pour  entreprendre  la  guérie. 
Luc,  xiv,  31.  En  général,  la  méditation  habituelle  des 
gens  de  métier  porte  sur  l'exécution  de  leur  travail. 
Eccli.,  xxxviii,  24-34.  —  2.  Le  méchant  médite  le  mal 
sur  sa  couche,  Ps.  xxxvi  ixxxvi,  5.  et  ne  songe  qu'à 
tendre  des  embûches.  Ps.  xxxvm  (xxxvii),  13.  Il  ferme 
les  yeux  pour  méditer  la  tromperie.  Prov.,  xvi,  30.  — 
3°  Il  faut  méditer  jour  et  nuit  sur  la  loi  du  Seigneur. 
Jos.,  i,  8,  sur  ses  commandements,  Eccli.,  VI,  37.  sur 
la  sagesse,  Sap.,  vi,  16;  vut,  17.  Sur  sa  couche,  pendant 
ses  veilles,  le  juste  médite  sur  Dieu  et  sur  ses  œuvres. 
Ps.  uni  (lxii),  7,  13;  lxxvii  (lxxvi),  7.  Son  cœur  s'en- 
flamme à  la  méditation  de  la  fragilité  de  la  vie.  Ps.  xxxix 
I  xxxvm),  4.  Heureux  qui  médite  ainsi!  Ps.i,2;  Eccli.,  xiv, 
22,  28.  L'auteur  du  Psaume  exix  icxvm)  revient  jus- 
qu'à douze  fois  (16,  27,  47,  70,  77,  92,  97.  99,  117,  143, 
118,  174)  sur  cette  idée  que  la  loi  de  Dieu  est  l'objet 
assidu  et  très  aimé  de  sa  méditation.  —  Marie  conser- 
vait et  méditait  dans  son  cœur  tout  ce  qu'elle  voyait  et 
entendait  au  sujet  de  l'enfant  Jésus.  Luc,  II,  19,  51.  La 
vierge  n'a  pas  d'autre  souci  que  de  songer  aux  choses 
de  Dieu.  I  Cor.,  vu,  34.  Saint  Paul  recommande  à 
Timothée  de  méditersur  les  conseils  qu'il  lui  a  donnés. 
!  Tim..  iv,  15. 

5°  Les  projets.  —  Souvent  on  dit  qu'on  'pense  à  une 
chose  pour  signifier  qu'on  a  le  dessein  de  l'exécuter. 

1.  Ainsi  Dieu  a  ses  pensées,  c'est-à-dire  ses  projets  sur  le 
juste,  Sap.,  iv,  17;  contre  l'Assyrie,  Is.,  xiv,  26,  et  en 
face  de  ses  desseins,  ceux  de  l'homme  ne  tiennent  pas. 
Prov.,  xxi,  30.  Saint  Paul  a  annoncé  aux  Éphésiens 
tous  les  desseins  de  Dieu.  Act.,  xx,  27.  Quand  les 
Apôtres  persistent  à  prêcher  Jésus-Christ,  Gamaliel  dit 
au  sanhédrin  que  si  cette  idéevientde  Dieu,  elle  s'exé- 
cutera malgré  eux.  Act.,  v,  38.  Salomon  pense  à  bâtir 
une  maison  à  Jéhovah.  III  Reg.,  v,  5;  vm,  IN;  1 
Par.,  xxviu,  2.  Le  navigateur  pense  à  prendre  la  mer. 
Sap.,  xiv,  1.  Beaucoup  d'autres  pensées  ne  sont  autre 
chose  que  des  desseins  qu'on  veut  exécuter.  Cf.  Judith, 
il,  3;  Esth.,  xn,  2;  Ps.  v,  il;  xxxm  (xxxn),  10;  î.vi 
(lv),  6;   Prov.,  xvi,  3;  xix,   21;  Is.,  xxix,   16;  etc.  — 

2.  Très  fréquemment,  ces  desseins  sont  mauvais. 
Exod.,  x,  10;  Ps.  x,  2;  xxi  (xx),  12;  xi.i  ixi  .  8; 
Jer.,  xvm,  11,  18;  xlviii,  2,  etc.  Tels  sont  en  particu- 
lier ceux  de  se  révolter  contre  le  Seigneur,  Ps.  n,  1; 
Act.,  lv,  25:  de  s'emparer  du  Sauveur,  Matth.,  xxvi,  4; 
de  le  mettre  à  mort,  Joa.,  xi,  53;  de  traiter  de  même  les 
Apôtres,  Act..  v.  33,  etc.  Zacharie,  vu,  10;  vm,  17,  re- 
commande de  ne  pas  méditer  le  mal  les  uns  contre  les 
autres.  Un  jour,  du  reste,  Dieu  manifestera  tous  les 
desseins  des  coeurs.  I  Cor.,  îv,  5. 

6°  Le   conseil    (hébreu   :    zimmâh,    ésâh,   fxiHyâh; 
Septante  :  fio\i\rt  ;  Vulgate  :  cogitatio,  consilium).  —  C'est 
la  manifestation  de  la  pensée,  pour  la  direction   des 
autres.   Des  conseils,   bons  ou  mauvais,   sont  souvent 
donnés.  II  Reg.,  xvn,  7;  III  Reg.,  xx,  25;  Esth.,  i,  20; 
Ezech.,  xi,  2,  etc.  Il  faut  chercher  conseil  auprès  fles 
hommes  sages.  Tob.,  lv,  19;  Prov.,  xix,  20.  La  sage  - 
est  avec  ceux  qui  se  laissent  conseiller.  Prov..  xm,  10. 
Grâce  aux  conseils  reçus,  leurs  projets  s'affermissent. 
Prov.,  xx,  18.    Les  conseils  de  l'amitié  réjouissent  le 
cœur.  Prov.,  xxvii,  9.  Mais,  même  les  conseils  de  l'étran- 
ger   ne    sont   pas    dédaignés    de    l'homme    de 
Eccli.,  xxxn.  22.  —  Saint  Paul  conseille  la  virgi 
I    Cor.,    vu,    25.    Voir    CONSEILS    ÉVANGÉMQ.BES,    1.    II, 
col.  922.  H-  Lesétre. 

PENTAPOLE  (grec  :Uv^x-6,:;.  «  les  cinq  villes 
désigne,  Sap.,  x,  6,  la  région  où  étaient  Sodome  el  les 
autres  villes  qui  furent  condamnées  par  la  justice  di- 
vine à  disparaître,  à  cause  de  leurs  iniquités. 

I    Les  cinq  villes.  —  Dans  les  divers  passages  où  il 
est  fait  allusion  à  la  catastrophe,  Sodome  #t  Gomorrhe 


47 


PENTAPOLE 


48 


sont  le  plus  souvent  nommées  ensemble  à  l'exclusion 
des  autres  villes;  ainsi  Gen.,  mu,  10:  l'ont..  xxxn.  32; 
Is.,  i.  9:  mil  19;  .1er.,  xxin,  14;  xux.  18;  l.  40;  Amos, 
iv.  Il  ;  Soph.,  il.  9;  Math.,  x,  15;  Rom.,  ix,  29;  Juda, 
jor  i'sl  désignée  comme  une  des  villes  coupables 
el  condamnée,  mais  épargnée  à  cause  de  la  prière  de 
Lot.  Gen..  xix,  18-23,  29-30.  Les  deux  autres  Adama  et 
Séboïm  sont  citées  avec  Sodome  et  Gomorrhe,  Deut., 
xxix.  23.  et  seules,  Ose.,  xi,  8.  Sodome  est  parfois  pré- 
ile,  soit  parce  qu'elle  était  la  principale 
d'entre  les  cinq  par  son  importance  ou  sa  suprématie 
■  H  bien  parce  qu'elle  fut  la  plus  coupable.  Cf.  1s.,  m.  9; 
ï  hren.,  iv.  (>;  Lzech..xvi;  Matlh.,xi,23.  Les  autres  villes 
sont  appelées  «  les  filles  »,benô(,ie  Sodome,  Ezech.,xvi, 
16.  IS.  19,  53,  55,  expression  qui.  dans  la  Bible,  in- 
dique la  dépendance  et  les  suppose  dans  une  même 
-  .in.  Cette  situation  réciproque  est  attestée  d'ail- 
,1er.,  m  ix,  18;  l,  40,  où  ces  villes  sont  toutes 
'es  «  voisines  »;  Juda,  7,  où  elles  sont  dites 
i    villes    des   alentours    »,    par   rapport   à  Sodome  et 

i  • orrhe. 

2   Situation,  étendue  et  description  de  la  région.  — 
li   Pentapole  appartenait  à  la  terre  du  Kikkâr,  c'est-à- 
dire  au  bassin  du  Jourdain.  Gen.,  xix,  28.  Cf.  JOURDAIN, 
t.  m,  col.  1712.  Les  anciens  commentateurs  ont  assez 
ralement  cru  à  l'identité  de  la  Pentapole  avec  «  la 
vallée   de    Siddim,    vallis    Silvestris,  qui  est   la   mer 
Salée  »,   Gen.,  xiv,   8,    10,    où  les  cinq  rois  des  cinq 
villes  se  rangèrent  en  bataille  pour  soutenir  l'attaque 
de  Chodorlahomor  et  de  ses  alliés;  ils  ont  admis,  en  con- 
séquence, qu'elle  occupait   tout  le  territoire   recouvert 
aujourd'hui  par  les  eaux  de  la  mer  Morte.  Cette  con- 
certainement  les  données   bibliques. 
La  vallés  de  Siddim  où  les  cinq  rois  s'assemblèrent 
pour  attendre  leurs  ennemis  n'est  pas  présentée  comme 
identique  à   la  Pentapole  ni  même  comme  en  faisant 
partie,  puisque    les  rois  «  sortent  »  pour  s'y  rendre, 
.IV.  S;   et  si  la  vallée  est  devenue  partie  de  la 
ni'  r  Salée,   la   Pentapole  au  contraire   «  est  une  terre 
brûlée  par  le  soufre  elle  sel,  inapte  à  être  semée  et  où 
iien    ne  germe   plus,  et  où  l'herbe  ne  pousse  plus  ». 
xxix,  23;   c'est  une  terre   déserte  et   fumante, 
produisant  des  fruits  étranges,  où   est  demeurée  une 
stèle  de    sid,  monument  attestant   l'incrédulité  de  la 
de  Lot.  .Sap.,  x.  7.  Cf.   .Ter.,  xlix,  18;  i..   10: 
Soph.,  il.  9:  Amos,  iv,  11.  La  vallée  de  Siddim,  appe- 
li  '     par  Josèphe    >    la   vallée    des   puits  de  Bitume   ». 
faisait,  suivant   lui.  partie  du  territoire  de  Sodome, 
■/x?i  £68o|ia,   et  devint   le   lac   Asphaltite,    mais  ne  se 
confondait  pas  avec  la  Pentapole.  Celle-ci,  désignée  par 
l'historien  sous  le  nom  de  Sodomitide,  subsistait  encore 
de   son   temps,  mais  privée  de  sa  splendeur  passée  et 
de  sa  fertilité,  ne  produisant  que  des  fruits  inutilisables, 
portant  les  indices  du  feu  qui  l'avait  frappée  et  ne  gar- 
dant plus  que  des  restes  informes  des  villes  brillantes, 
ni'eiises  et  qui  en  avaient  été  la  gloire.  Ilrll. 
/'»■'..  IV,  vin,    i;   ..lu/.   ,„,/.,   [.   ix,  xi,  3.'cf.  Tacite, 
Hi  '  .  \.  7;  Solin,  Polyhistor,  38;  Reland,  Palmslina, 
logues  modernes  sont  unanimes  d'ail- 
iffirm  i   la  préexistence  de  la  mer  Morte  ..   ta 
trophede  la  Pentapole,  sauf  A  reconnaître  qu'une 
rritoire  a  pu  postérieurement  être  en- 
iix  du  lac,  à  la  suite  d'un  affaissi 
de  -.1.  Voir  Morte  [Mer),  t.  iv,  col.  1303-1307. 

Mai  :    couvert    par    les  eaux  de   la    mer 

Morie  ne  peul  avoir  été,  en  général  du  moins,  le  terri- 
de  la  Pentapole,  où  faut-il  chercher  celui-ci?  Une 

partie,  celle  qui  en  fui  !..  p  ,„-,  se  lr011v;M|  |a 

métropole  Sodome,  occupai!  certainement  la  régionqui 

id    m  sud  de  t.,  ,,..  r  >  j  es|  ||n 

indique  Zoara  d'Arabie,  identique  avec 

Zoar  de  la  Bible.  Bell.  ;»</.,  IV.viii,  Cf.  Moab, 

I.  iv,  col.  1158,  et  Si,, on.  Celle  ville  où  Lot  arrivait  an 


lever  du  soleil,  en  venant  de  Sodome  qu'il  avait  quitté 
aux  premières  heures  du  jour,  Gen.,  xix,  15.  23. 
use  le  site  de  cette  rivière,  non  loin  et  dans  la  même 
région  méridionale.  Le  nom  de  Sodome  reste  encore 
attaché,  c'est  ce  que  l'on  reconnaît  généralement,  à  une 
petite  chaine  de  collines,  le  Djebel  Esdoum,  qui  s'étend 
à  l'extrémité  sud-ouest  du  lac,  en  face  du  ghôr  Sâfiéh, 
où  l'on  doit  chercher  le  site  de  Ségor.  La  ville  elle- 
même,  on  n'en  peut  douter,  se  trouvait  dans  le  terri- 
toire voisin  de  la  montagne.  Tandis  que  le  Ghôr  Sâfiéh 
n'a  presque  jamais  cessé,  jusqu'à  nos  jours,  de  former 
une  riante  et  riche  oasis,  avec  des  plantatioDS  de  pal- 
miers et  diverses  autres  cultures,  toute  la  région  qui 
s'étend  depuis  le  djebel  Esdoum,  à  l'ouest,  jusqu'aux 
abords  de  ce  ghôr,  sur  une  largeur  de  sept  kilomètres 
et  une  longueur  de  dix  depuis  l'extrémité  sud  de  la  mer 
Morte,  n'est  qu'une  plaine  désolée  dont  le  sol  est  une 
marne  mélangée  de  sel  et  fangeuse  connue  sous  le  nom 
de  Sebkliali,  «  terre  salsugineuse.  »  Les  abords  du 
djebel  Esdoum,  le  p;/io>  Sâfiéh,  et  la  partie  de  la 
Sebkhah  s'étendant  entre  les  deux,  ont  nécessairement 
été  une  portion  de  la  Pentapole,  mais  jusqu'où  se  déve- 
loppait-elle au  delà  ? 

Outre  l'ancienne  opinion  voyant  dans  la  mer  Morte 
la  Pentapole  recouverte  par  les  eaux,  trois  autres  hypo- 
thèses ont  chacune  leurs  partisans.  —  1.  Les  explorateurs 
anglais  croyant  qu'on  pourrait  reconnaître  le  nom  de 
Gomorrhe  dans  celui  de  Atnr  porté  par  une  vallée 
située  au  nord-est  de  la  mer  Morte,  celui  de  Zoar  dans 
celui  du  Tell eSSaghûr  que  l'on  trouve  à  l'est  du  Tell 
er-Raâméh,  dans  les  ancienne^  Araboth  à  quelques  mi- 
nutes de  Moab,  et  le  nom  Adama,  dans  celui  de  Damiéh 
donné  à  des  ruines  qui  se  voient  non  loin  de  l'embouchure 
du  Zerqà  (Jaboc),  inclinent  à  localiser  ainsi  la  Pentapole 
tout  entière  au  nord  de  la  mer  Morte,  Cf.  Armstrong, 
Wilson  et  Couder,  Names  and  places  in  the  OUI  Testa- 
ment,  Londres.  1887.  p.  4,  71,  178,  186;  Conder,  Band- 
book  lo  the  Bible,  Londres,  1887,  p.  238-241—2.  M.  Cler- 
mont-Ganneau.  au  contraire,  pense  que  le  nom  de  Ghamr 
étvmologiquement  identique  à  celui  de  Gomorrhe.  men- 
tionné par  la  géographie  arabe  d'EI  Moqaddasi  [Géogra- 
phie, édil.  Goije,  Leyde.  1873.  p.  2ô3)surla  route  de  Suq- 
qariélt  à  Allah,  à  deux  journées  de  marche  au  nord  de 
cette  dernière,  et  que  l'on  retrouve  aujourd'hui  encore 
dans  celui  de  otn  Ghamr,à  quatre-vingts  kilomètres  en- 
viron au  sud  de  l'extrémité  méridionale  delà  mer  Morte, 
propose  de  prolonger  la  Pentapole,  fort  loin  vers  le  sud, 
dans  YArâbah.  Cf.  lu.,  Recueil  d'archéologie  oriei 
Paris,  1888,  t.  i.  p.  163.  —  3.  Pour  Guérin  et  d'autres, 
la  Pentapole  se  développai)  autour  de  Sodome  dont  le 
djebel  Esdoum  est,  de  l'avis  général,  le  représentant 
incontestable.  Elle  comprenait,  dans  ses  limites,  au 
sud,  la  Sebkab,  peut-être  entière  :  au  nord  toute  la  pointe 
méridionale  de  la  mer  Morte,  depuis  la  presqu'île  du 
Lisàn,  sur  une  longueur  de  17  kilomètres  et  une  lar- 
geur de  13.  avec  les  terrains  qui  bordent  l'une  et 
l'autre  à  l'est  et  à  l'ouest.  Cette  partie  inférieure  de  la 
mer  Morte  est  une  lagune  dont  la  plus  grande  profon- 
deur dépasse  à  peine  sept  mètres.  Les  terrains  se 
seraient  affaissés  n  ia  suite  de  la  catastrophe  el  auraient 
été  postérieurement  envahis  par  les  eaux  de  la  mer 
Morte.  Dans  CI  Me  partie  devait  se  trouver  la  vallée  de 
Siddim  devenue  partie  intégrante  du  lac  el  c'est  dans 
son  voisinai:e  que  se  voyaient  les  diverses  villes  de  la 
Pentapole.  Ct  \  Guérin,  Samarie,  p.  291-298;  Adama, 
t.  i,  col.  207;  Gomorrhe,  t.  m.  coi.  273;  Mo 
col.  1307,  13i  is. 

La  première  opinion  a  le  toit  de  ne  pas  tenir  compte 
des  traditions  onomastiques  et  historiques  locales,  les 
premières  sources  d'information  après  la  Bible,  qui 
n'ont  cessé  de  voir  le  nom  de  Sodome  dans  celui  du 
djebel  Esdoum  el  démontrer  presque  jusqu'à  nos  jours 
Ségor  et  c  le  pays  du  peuple  de  Lot  »,  diydr  (/uni  Loi, 


40 


PENTAPOLE  —  PENTATEUQUE 


50 


c'est-à-dire  des  Sodomites,  au  sud-est  et  au  sud  de  la 
mer  Morte.  Cf.  Guy  Le  Strange,  Palestine  under  tltc 
Moslems,  Londres.  1890.  p.  286-29-2.  Dans  la  seconde 
hypothèse,  le  territoire  de  la  Pentapole  est  prolongé 
beaucoup  plus  loin  au  sud  que  ne  le  comportent,  sem- 
ble-t-il,  les  données  de  la  Bible  et  la  conformation  du 
sol  :  Ségor  était,  en  effet,  de  ce  coté  la  limite  de  la 
région  arrosée  par  les  eaux  du  Jourdain,  choisie  par 
Lot  pour  son  habitation.  Gen.,  xm,  10-12.  Et  au  delà 
de  la  Sebkhah,  le  sol  se  relève  et  commence  le  seuil 
devant  lequel  le  Jourdain  devait  s'arrêter.  Les  diverses 
locutions  par  lesquelles  sont  indiquées  les  relations  ou 
la  position  des  autres  villes  par  rapport  à  Sodome, 
dont  elles  sont  les  «  filles,  les  voisines,  les  villes  du 
pourtour  ...  déterminent  aussi  le  rayon  du  cercle  dans 
lequel  on  peut  les  chercher.  La  troisième  opinion  ne 
parait  pas  sortir  de  ces  limites.  On  pourrait  seulement 
lui  contester,  admise  la  préexistence  de  la  mer  Morte 
jusqu'à  la  hauteur  du  Lisân,  la  possibilité  pour  le 
Jourdain  de  conserver  ses  eaux  aptes  pour  l'arrosage 
des  cultures  de  la  Pentapole.  Mais  si  les  raisons  sur 
lesquelles  elle  s'appuie  sont  incontestables  comme  il  le 
semble,  elle  demeure  inébranlable  et  elles  font  de 
cette  possibilité  une  certitude  ou  sont  la  preuve  de  la 
formation  ultérieure  de  la  mer  Morte;  c'est  la  question 
des  origines  de  ce  lac. 

3»  Histoire.  —  En  principe,  la  Pentapole  apparaît  ha- 
bitée par  des  peuplades  chananéennes  de  race  ou  d'as- 
similation. Gen.,  x,  19;  Num.,  xm,  30.  Arrosée  par  le 
Jourdain,  jusqu'à  Ségor,  elle  ressemblait  alors  à  l'Egypte 
et  formait  un  jardin  divin;  sa  beauté  et  sa  fertilité  ten- 
tèrent Lot.  qui  la  choisit  pour  sa  résidence,  quand 
Abraham  lui  proposa  de  se  retirer  chacun  à  part.  Gen., 
xm,  8-13.  Vers  ce  temps  ou  peu  avant,  les  cinq  rois  de 
la  Pentapole  avaient  été  vaincus,  dans  une  bataille  livrée 
dans  la  vallée  de  Siddim  par  Amraphel,  roi  de  Sennaar, 
Arioch,  roi  d'Ellasar,  Chodorlahomor,  roi  d'Élam,  et 
ïhadal,  roi  de  Goïm  (Gutium).  Ils  avaient  subi  leur  joug 
pendant  douze  ans,  quand,  fatigués  de  le  porter,  la  trei- 
zième année,  ils  avaient  repris  leur  indépendance.  L'an- 
née suivante,  Chodorlahomor  et  ses  alliés,  après  avoir 
ravagé  tous  les  pays  des  alentours,  s'avancèrent  de  nou- 
veau contre  les  rois  de  la  Pentapole.  Ceux-ci  avaient 
rangé  leur  armée  en  bataille  dans  la  vallée  de  Siddim. 
Battus  cette  fois  encore  et  obligés  de  fuir,  leurs  troupes 
tombèrent  dans  les  puits  de  bitume,  nombreux  dans  la 
région.  Ceux  qui  purent  échapper  gagnèrent  les  monta- 
gnes. La  Pentapole  fut  livrée  au  pillage  et  la  popula- 
tion emmenée  en  captivité.  Parmi  les  captifs  se  trou- 
vait Lot.  Averti,  Abraham  se  mit  à  la  poursuite  de 
l'armée  victorieuse.  Il  tomba  sur  elle  à  l'improviste,  la 
mit  en  déroute,  reprit  tout  le  butin  et  ramena  les  pri- 
sonniers. Gen.,  xiv.  Bans  l'oisiveté  et  les  jouissances  de 
la  table  que  leur  permettait  l'abondance  de  tous  les 
biens  produits  presque  spontanément  par  le  sol  le  plus 
fécond,  aveuglés  par  les  richesses  et  l'orgueil,  les  habi- 
tants de  la  Pentapole  ttaient  descendus  au  dernier  degré 
de  la  perversion  morale  et  s'étaient  livrés  aux  dé- 
sordres les  plus  infâmes.  Gen.,  xm,  13;  xvm,  20;  xix, 
11-21  ;  Ezech.,  xvi,  49.  Le  Seigneur  les  punit  en  anéantis- 
sant la  Pentapole  avec  ses  habitants.  Gen.,  xvm,  20-xix. 
30;  Beut.,  xxix.  23,  etc.  —  Cette  terre  riante  et  fortunée 
devint  un  désert  inhabitable.  Des  monts  de  Judée,  elle 
apparaît,  pendant  l'été  surtout,  par  suite  de  l'évapora- 
tion  extraordinaire  de  la  mer  Morte,  semblable  à  une 
entrée  fumante  et  plongée  dans  les  brouillards.  Les 
quatre  villes  brûlées  n'ont  plus  jamais  été  relevées.  Si 
on  en  voyait  encore  les  débris  au  temps  de  l'historien 
Josèphe,  aujourd'hui  on  ne  sait  plus  même  où  les 
chercher.  La  statue  de  sel  à  laquelle  les  auteurs  sacrés 
font  allusion,  Gen.,  xix,  26,  et  Sap.,  x,  6,  aurait  existé 
encore  au  premier  siècle  de  l'ère  chrétienne,  s'il  faut 
en  croire  Josèphe  qui  assure  l'avoir  vue.  Anl.  jud.,  I, 


xi,  4.  On  la  montrait  longtemps  après  encore  et  aujour- 
d'hui  même  un  bloc  de  sel  du  Djebel  Esdoum  est 
appelé  bent  seik  Lout,  ■<  la  fille  (au  lieu  de  la  femme) 
de  Lot.  »  Il  est  douteux  que  ce  soit  le  même  dont  par- 
laient les  anciens.  Voir  Lut  i  La  femme  de),  t.  m,  col. 
365.  L.  Heidet. 

PENTATEUQUE,  nom  donné  aux  cinq  premiers 
livres  de  la  Bible. 

I.  Noms.—  1° De  la  collection.  —  Le  nom  de  Penta- 
teuque  n'est  pas  original.  Il  suppose  la  division  en 
cinq  livres  qui,  elle-même,  n'est  pas  primitive.  Sa  plus 
ancienne  attestation  se  trouve  dans  Philon,  De  Abra- 
hamo,  1,  Opéra,  Paris,  1610.  p.  249;  cf.  De  [migratione 
Abralianii,  3,  ibid.,  p.  390,  et  dans  Josèphe,  Cont. 
Apion.,  i,  8,  Opéra,  Amsterdam,  1726,  t.  n,  p.  441. 
Quelques  critiques  l'attribuent  aux  Septante,  voir  t.  IV, 
col.  313-314;  d'autres  pensent  qu'elle  leur  était  anté- 
rieure. Saint  Jérôme,  Epist.  LU,  ad  Paulin.,  8. 
t.  xxii,  col.  545,  croyait,  mais  sans  raison  suffisante, 
semble-t-il,  que  saint  Paul,  I  Cor.,  xiv,  19,  y  faisait 
allusion.  Elle  résulte  peut-être  de  la  distribution  d'an 
rouleau  trop  volumineux  en  cinq  rouleaux  ou  en  cinq 
codices  plus  petits,  à  peu  près  d'égale  dimension.  Le 
premier  emploi  du  nom  grec  Kvrca-e.v/ôç,  signifiant 
littéralement  «  cinq  étuis  »  (ts-j/o;  étant  l'étui  dans 
lequel  on  plaçait  chaque  rouleau),  se  rencontre  dans 
la  lettre  du  valentinien  Ptolémée  (vers  150-175)  à  Flora. 
S.  Épiphane,  Hser.,  xxxm,  4,  t.  xli,  col.  560.  On 
croyait  l'avoir  rencontré  clans  un  passage  de  saint  Hip- 
polyte,  édité  par  de  Lagarde,  Leipzig  et  Londres.  1858, 
p.  193,  dans  lequel  le  Psautier,  divisé  en  cinq  livres, 
était  dit  y.xi  otùrà  ïUov  îesvtoitsoxov.  Mais  ce  passage 
est  de  saint  Épiphane.  Hippolylus,  dans  Die  grieschi- 
schen  Schriftsteller  der  ersten  drei  Jahrhunderte, 
Leipzig,  1897,  t.  i.  p.  143.  Origène,  Comment,  in  Ev. 
Joa.,  tom.  Il  (fragment),  t.  xrv,  col.  192,  emploie  ce 
nom,  et  ibid-,  tom.  xm.  n.  26,  col.  441,  il  parle  de  t?,; 
IIîvtïTsO/oy  Mioudéioç.  Saint  Athanase,  Epist.  ad  Mar- 
cellin.,  5,  t.  xxvn,  col.  12,  s'en  sert.  Saint  Epiphane 
l'emploie  plusieurs  fois.  De  mens,  et  point..  ;..">,  t.  xi.ni. 
col.  244.  En  latin,  ce  nom  apparaît  pour  la  première 
fois  sous  la  forme  masculine  :  Pentateuchus,  dans  Ter- 
tullien,  Adv.  Dfarcion.,1,  10,  t.  n,  col.  257.  Il  a  la  forme 
neutre  :  Pentateuclntm,  dans  saint  Isidore  de  Séville, 
Etym.,  VI.  n.  1,  2.  t.  lxxxii,  col.  230.  Les  cri- 
tiques ne  s'accordent  pas  sur  le  point  de  savoir  si,  a 
l'origine,  il  était  un  adjectif,  qualifiant  (5£6Xoî  ou  liber 
sous-entendu,  ou  bien  un  substantif,  ayant  par  lui-même 
la  signification  d'ouvrage  en  cinq  volumes.  Voir  t.  iv. 
col.  314.  Quoi  qu'il  en  soit,  les  anciens  employaient  des 
termes  analogues,  formés  d'une  manière  identique. 
Ainsi  Eusèbe,  Prsep.  evang.,  i,  10,  t.  xxi,  col.  88,  men- 
tionne un  écrit  d"Oorôviiç,  intitulé  :  'OxTiïs-j-/o;.  Cer- 
tains manuscrits,  contenant  les  huit  premiers  livres  de 
la  Bible,  furent  aussi  désignés  plus  tard  par  le  nom 
d"0/.^i-.ijy_rjt.  Pitra.  Analecta  sacra,  Frascati,  1881, 
t.  H,  p.  412;  de  Lagarde,  Sepluagintastudien,  Gcettin- 
gue,  1892,  t.  n,  p.  60.  Ce  nom  est  employé  couramment 
aujourd'hui  pour  désigner  les  manuscrits  grecs  conte- 
nant huit  livres.  Swete,  An  introduction  to  the  Old 
Testament  in  Greek,  Cambridge,  1900,  p.  148-154.  Des 
noms  analogues  étaient  usités  chez  les  Latins  pour  dé- 
signer des  manuscrits  contenant  les  sept  ou  huit  premiers 

livres  de  la  Bible.  Saint  Arnbroise,  In  Ps.  cxvill  expo- 
sitio,  serm.  xxi.  12,  t.  xv.  col.  1506,  parle  d'un  Hep- 
lateuchus,  comprenant  Genèse-Juges.  Le  canon  de 
Cheltenham,  de  359,  après  les  Juges,  signale  les  livres 
précédents  comme  formant  une  première  collection  : 
Fiunt  libri  Vil.  Sanday,  dans  Si*  a  et  eccle- 

siastica,  Oxford,  189È  t.  m.  p.  222.  Les  critiques  mo- 
dernes donnent  le  nom  à'He.catcuque  aux  livres  du 
Pentateuque  en  y  joignant  le  livre  de  Josué,  qu'ils  re- 


51 


PENTATEUQUE 


gardent  comme  faisant  parlii-  il.'  I;i  même  teuvre  unique. 
Les  Juifs  anciens  n'onl  ni  connu  ni  employé  le  nom 
de  Pentateuqne.  Les  rabbins  l'ont  adopté  équivalemment 
plus  tard  quand  ils  onl  appelé  les  livres  de  Moïse  les 
■  cinq  cinquièmes  de  la  Thora  »,  minn  "-"P"~  ntfpn, 
ou  «  les  cinq  cinquièmes  »,  DHjtoiri  n^nn.  Les  anciens 
se  servaient  d'autres  dénominations.  Comme  les  livres 
de  Moïse  son!  en  grande  partie  législatifs,  les  Juifs  en 
Dommaii  m  le  recueil,  d'après  la  partie  principale  du 
un.  --T-.  i  la  Loi,  »  .los.,  vm,  34;  I  Esd.,  x,  3; 

Il  I  sd.,  mu.  2.  14;  x.  35,  37;  II  Par.,  xxv,  4,  et  plus 
tard  min,  »  Lui.  -  sansarticle.  Voirt.iv,col.329.Quandils 
considéraient  le  législateur  ou  le  rédacteur  de  cette  loi, 
ils  disaient  nsfia  min,  b  Loi  de  Moïse,  ■>  .los.,  vin,  32; 
I  (III)  Reg.,  il.  3;  H  (IV)  Reg.,  xxm,  25;  Dan.,  IX,   11; 

I  Esd.,  m.  2;  vil,  ti:  H  Par.,  xxm,  18;  xxx,  16;  ou 
plus  clairement  encore.  minn  -:c,  «  livre  de  la  Loi,  » 

.los.,  i,  8;  vin.  34;  Il   Esd.,  vm,  3;  ou  rr&a  min  "isp, 

»   livre  de  la  Loi  de  .Moïse  ».  Jos.,  VIII,  31;  xxm,  6; 

II  (IV)  Reg.,  xiv.  li:  Il  Esd.,  vm,  1;  ou  plus  brièvement, 
-•i-^  -rr,  "  livre  de  Moïse  »,  I  Esd.,  vi,18;  II  Esd..  sm, 

'1  ;  II  Par.,  XXV,  i  ;  wxv,  12.  Mais,  lorsqu'on  avait  en  vue 
l'origine  divine  el  la  révélation  de  la  Loi  mosaïque,  on 
la  nommait  ---•  min,  «  Loi  de  Jéhovah,  »  I  Esd..  vu, 

T   :       I 

10;  I  Par.,  xvi.  10;  II  Par.,  xxxi,  3;  xxxv,  26;  ou  bien 
r'n'-s  min,  «  Loi  d'ÉIohim,  »  II  Esd.,  vm,  18;  x,  29, 
30;  ou  nin'  min  -".  «  livre  de  la  Loi  de  Jéhovah,  » 
II  Par.,  xvn,  î);  xxxiv,  14;  ou  dtY-n  rnin  -z=.  «  livre 
de  la  Loi  d'ÉIohim,  »  Jos.,xxiv,  26;  il  Esd.,  vm,  18;  ou 
encore  cn'-N  ou  ni-i  min  -,ed,  «  livredela  loi  de  Jého- 
vah Élohim.  »  11  Esd.,  ix,  3.  Les  Septante  ont  traduit 
ces  passages  par  h  v<S[jw>î  ou  vojj.o;  sans  article.  Dans  le 
Nouveau  Testament,  les  livres  de  Moïse  sont  désignés 
aussi  parles  mots  âv&po;,  Matth.,v,  L7;Rom.,u,  12, etc., 
on  bien  6  vô(io5  Mwtialco;,  Luc,  II,  22;  xxiv.  il; 
Ael  .  xxvm,  23;  cf.  Joa.,  1,17;  ou  bien  Bî6Xoç  Muuoéuç, 
Mu...  xn,  26;  ou  simplement  Mortirîj;!  Luc,  xxiv.  27; 
Act..  xv,  21.  Dans  le  ïalmud  et  chez  les  rabbins,  les 
livres  île  Moïse  sont  nommés  rnin  -z:,  «  le  livre  de  la 
Loi.  »  Buxtorf,  Lexicon  ckaldaicum  talmudicum  rab- 
binicum,  p.  791  ;  Levy,  Chaldâisches  Worterbucli, 
1).  268.   Le   nom   ar.iméen   de    la   collection    est    n: M, 

rtorf,  op.  cit.,  p.  983;  Levy,  op.  cil.,  p.'  16; 

Aicher,  Dos  aile  Testament  in  der  Mischna,  Fri- 
bourg-en-Brisgau,  1906,  \>.  16. 

2«  De  chaque  livre.  —  Les  Juifs  de  Palestine  et 
d  Alexandrie  uni  donné  à  chacun  des  cinq  livres  des 
noms  différents.  Dans  la  Bible  hébraïque,  les  premiers 
mots  du  texte  -ni  servi  à  désigner  chaque  livre  :  le 
i"''' '  '   i  'i  ■■ !  -:-s-:.  le  2»,  niDtf  --x-  ou  nioitf, 

'"  ':-  *■"-'"■  le  '',  -z--,  el  le  .V.  :-"n  n'-s  ou  =  -;-. 
Cf.  Origène,  /»  /'s.  ,,  i.  xn,  col.  108i;' et  d'ans  Eusebe, 
H.  /■..,  vi.  25,  i.  u  ( -, , i .  580;  s.  Jérôme,  Prologus galea- 
'«*,  t.  xxvm,  col.  552;  s.  Isidore  de  Séville,  Etym., 
[■  VIi  •'■  '•  n.  i.  t.  i  xxxn.  col.  229.  Voir  Biblische 
'"/'.    1905,    I.    [II,    p.     149-150.    Les   rabbins    ,,„! 

trois  derniers  de  ces  livres  des 

'i»i  résument  leur  contenu  :  ainsi  ils  appelaient 

'"•'     -  ;":  rI"r-   '  loi  le  ;-,  ompsn  u-:-. 

i a  transcription  d'Ori- 

■  H.  E.,  vi,  25,  t.  xx,  col.  580, 
-v-  sa,  .  dans  le  désert,  » 

''      '''  ~""r  ".:-':■     répétiti le  la  Loi,»  d'après  une 

lion  -i    lient.,  XVII,  18,  qui  parle  seule- 
ment d'un  exemplaire  de  celte  loi,  c'est-a-dire  du  Deu- 


téronome,  désigné  sous  le  nom  de  min.  On  a   aussi 

considéré  ce  livre  comme  une  mischnah,  une  SeuTépu- 
/>'.;  to-j  vo|ioù,  une  récapitulation  de  la  législation  pré- 
cédente. Cf.  Jos.,  xiii,  32.  Les  titres  :  m>x>  nsD,  «  livre 

de  la  création,  a  et  J'p'M,  «  dommages,  «  ne  dési- 
gnaient pas,  comme  on  l'a  cru  parfois,  le  premier  et  le 
second  des  cinq  livres,  mais  seulement  des  sections 
particulières,  à  savoir  le  récit  de  la  création  et  les  lois. 
Exod.,  x.xi,  xxii.  Voir  J.  Fûrst,  Der  Kanon  des  A.  T. 
nach  den  Ueberlieferungen  im  Talmud  und  Midrasch, 
Leipzig,  1868,  p.  5-6;  Buxtorf.  Lexicon  chald.,  p.  671. 

Les  Juifs  alexandrins  dans  la  version  à  leur  usage, 
dite  version  des  Septante,  ont  désigné  les  cinq  livres 
par  des  noms  qui  conviennent,  sinon  à  tout  leur  con- 
tenu, du  moins  au  sujet  traité  au  commencement  du 
livre.  Ainsi  le  1er  est  désigné  par  son  déduit  révsot; 
■/.od".oj,  ou  simplement  Téveu:;;  le  2e  de  même  '  EÇoSo; 
AÎ-,"j7i7o\j  ou  "EÇoôoç  seulement;  le  3°  AsVEtttxdv  ou 
Aeumxrfv;  le  4e  'Àpt6u.ot,  et  le  5e  ÂEUTepovtfpiov.  Pbilon 
nomme  les  trois  premiers  :  yâveo;;,  ÈÇaywf'l  ou  ÈSoSor, 
Aeuruxôv  ou  A.EUiTixti  fitg>.oç.  Les  chrétiens  ont  adopté 
ces  noms;  les  Latins  ont  cependant  traduit  àpi6u.oî  par 
Numeri.  Cf.  Origène  et  S.  Jérôme,  toc.  cit.;  les  Philo- 
sophoumena,  vi,  15-16,  t.  xvi,  col.  3215,  3218.  Théo- 
dulfe,  évêque  d'Orléans,  les  a  expliqués  en  vers.  Car- 
mina,  II,  I,  t.  cv,  col.  299.  Ils  ont  passé  dans  loutes 
les  langues  par  l'intermédiaire  des  versions  faites  sur 
la  Vulgate  latine.  —  Sur  les  sections  massorétiques  du 
texte  hébreu,  voir  t.  H,  col.  559, 

IL  Analyse.  —  Le  Pentateuque,  dans  >on  ensemble, 
est  un  livre  en  partie  historique,  en  partie  législatif, 
qui  raconte  l'histoire  du  peuple  d'Israël  depuis  la 
création  du  monde  jusqu'à  la  mort  de  Moïse  el  qui  re- 
produit la  législation  civile  et  religieuse  de  ce  peuple 
au  cours  de  la  vie  du  législateur  lui-même.  En  tenant 
compte  du  sujet  traité  et  même  partiellement  de  la 
forme  littéraire,  le  Pentateuque  se  diviserait  tout  natu- 
rellement en  trois  parties.  La  Genèse,  avec  ses  subdi- 
visions généalogiques,  sert  d'introduction  aux  quatre 
autres  livres,  et  raconte  l'histoire  juive  des  origines 
jusqu'à  la  sortie  d'Egypte.  Le  Deutéronome,  composé 
principalement  de  discours,  contient  la  récapitulation, 
faite  au  pays  de  Moab,  de  la  législation  du  Sinaï  et  ter- 
mine l'histoire  d'Israël  sous  la  conduite  de  Moïse. 
L'Exode,  le  Lévitique  et  les  Nombres,  dits  les  trois 
livres  du  milieu,  présentent  les  mêmes  caractères:  ils 
racontent  les  pérégrinations  d'Israël  dans  le  désert  et 
contiennent  la  législation  donnée  aux  Hébreux.  Ce  plan 
général  présente  donc  une  indéniable  unité  d'ensemble. 
Cf.  F.  Vigouroux,  Les  Livres  Sainte  et  la  critique  ratio- 
naliste, 5-  édit.,  i  aris,  1902,  I.  m,  p.  17-25. 

1"  Genèse.  —  Ce  livre  est  construit  suivant  un  plan 
particulier,  qui  a  été  remarqué  pour  la  première  fois 
par  Kurtz,  Die  Einheit  der  Genesis,  Berlin,  I8i(i, 
p.  i.xvii-i. xviii.  Il  se  partage  en  dix  sections  d'inégale 
longueur  et  d'inégale  importance,  qui  débutent  par  une 
formule  identique  :  r-i~r  n-s.  n,  i;  v,  1;  vi.  9;  x,  1; 

xi.  27;  xxv,  12;  xxv,  I9;xxxvi.l;  xxxvil,  2.  La  variante  : 
nVn"tr  ":-  m,  v,  l.qui  est  synonyme  de  la  précédente, 
cl  le  double  emploi,  xxxvi,  1.  9.  dans  la  notice  d'Ésaû, 
dont  le  second  n'est  qu'une  transition,  ne  changent  pas 
le  résultat, qui  a  été  voulu  et  recherche'' pour  lui-n 
Le  contenu  des  sections  sert  à  indiquer  le  sens  de  fôldôf. 

Ce   mot  signifie  étymologiquement  générations;  il   a 

une  autre  signification  dans  les  tiln  di  se  lion  i  la 
Genèse,  si  ces  titres  n'étaient  suivis  que  de  la  généa- 
logie des  personnages  nommés,  le  mot  (aidât  signi- 
fierait seulement  table  généalogique.  Mais  com la 

plupart  des  sections  contiennent  plus  que  de  simples 
énumérations  de  noms,  le  sens  réel  du  mol  est  plus 
compréhensif.  On  pense  généralemi  ni  que  de  la  signi- 


53 


PENTATEUQUE 


ûcation  dérivée  :  généalogie,  l'auteur  a  passé  à  celui 
dliistoire.  Le  titre  de  ces  récits  indique  donc  leur 
genre  littéraire.  -Non  pas  qu'il  signifie  :  «  histoire  rela- 
tant des  traditions  populaires.  »  comme  l'a  prétendu 
le  P.  de  Hummelauer,  Exegetisches  zur  Inspirations- 
frarje,  dans  les  Siblische  Studien,  Fribourg-en-Bris- 
gau,  1901,  t.  ix,  fasc.  i,  p.  26-32  ;  mais  bien  histoire, 
fondée  sur  les  généalogies,  développées  par  des  récit?. 
parce  que  les  généalogies  constituaient  la  partie  prin- 
cipale et  le  cadre  de  l'histoire  primitive.  Cl',  abbé  de 
Broglie,£es;7<;ii!:<(/<><7<es  bibliques,  dans  le  Congrès  scien- 
tifique international  des  catholiques,  Paris,  1889,  t.  i, 
p.  94-101.  Voir  t.  m,  col.  160.  Le  sens  d'histoire  une 
fois  admis,  l'auteur  l'a  appliqué  même  aux  choses  ina- 
nimées, auxcieux  et  à  la  terre,  II,  i,  dont  il  racontait  la 
création. 

Après  une  introduction  sur  la  création  du  monde  en 
six  jours,  i.  1-n,  3,  voir  t.  n,  col.  1034-1054,  la  Genèse 
se  divise  donc  en  dix  sections,  débutant  par  le  même 
titre  :  1°  Histoire  du  ciel  et  de  la  terre,  n,  4-iv,  26. 
Après  le  titre,  II,  4,  cette  section  raconte  la  création 
spéciale  de  l'homme  et  de  la  femme,  u,  5-25;  la  ten- 
tation et  la  chute  d'Adam  et  d'Eve,  leur  expulsion  du 
paradis  terrestre,  m,  1-21;  la  naissance  de  Cain  et 
d'Abel,  les  caractères  différents  de  ces  deux  fils  d'Adam, 
le  meurtre  d'Abel  parCaïnet  la  punition  du  meurtrier, 
iv.  1-16;  l'histoire  de  la  postérité  de  Caïn  et  la  nais- 
sance de  Seth,  iv.  17-26.  —  2°  Histoire  d'Adam,  v,  1-vi,  8. 
Cette  section  donne  la  généalogie  des  dix  patriarches 
antédiluviens  depuis  Adam  jusqu'à  Noé,  v,  1-31,  et  ra- 
conte la  perversion  de  l'humanité  primitive,  perver- 
sion qui  attire  sur  la  terre  les  châtiments  de  Dieu.  VI, 
1-8.  —  3°  Histoire  de  Noé,  VI,  9-ix,  29.  Noé,  parce  qu'il 
est  juste,  trouve  grâce  devant  Dieu  qui  lui  ordonne  de 
construire  une  arche,  destinée  à  le  sauver  du  déluge, 
lui.  sa  famille  et  un  couple  de  chaque  espèce  d'ani- 
maux, vi.  9-22.  Il  entre  dans  l'arche,  vu,  1-9.  La  pluie 
tombe  pendant  quarante  jours  et  quarante  nuits  et  les 
eaux  qui  couvrent  et  détruisent  tout  demeurent  sur  la 
terre  durant  150  jours,  vu,  10-24.  Après  la  cessation  de 
la  pluie,  les  eaux  diminuent  progressivement  et  Xoé 
sort  de  l'arche,  VIII,  1-14.  Voir  Déluge.  I!  offre  un  sa- 
crifice à  Dieu  qui  le  bénit  et  fait  alliance  avec  lui,  vm, 
15-ix,  17.  Il  plante  la  vigne,  maudit  Cham,  bénit  Sem 
et  .lapheth,  et  meurt,  îx.  18-29.  —  4»  Histoire  des  fils  de 
Xoé.  x.  1-xi.  9.  Elle  se  réduit  à  la  table  des  peuples 
issus  de  Japheth,  de  Sem,  x,  1-32,  à  laquelle  est  joint 
le  récit  de  la  construction  de  la  tour  de  Babel  et  de  la 
confusion  des  langues,  xi,  1-9.  —  5"  Histoire  de  Sem, 
xi.  10-26.  C'est  la  répétition  de  la  généalogie  de  Sem  et 
sa  continuation  jusqu'à  Tharé,  père  d'Abraham.  — 
ti  Histoire  de  Tharé  et  d'Abraham,  xi,  27-xxv,  11.  La  vie 
de  Tharé  et  de  ses  enfants  ayant  été  résumée,  xi,  27- 
32,  l'histoire  spéciale  d'Abraham  commence  par  le  récit 
de  sa  vocation  et  de  sa  migration  de  Haran  au  pays  de 
Chanaan,  xn,  1-9,  et  par  celui  de  son  séjour  en  Egypte 
et  de  la  préservation  de  Sara,  son  épouse,  xn,  10-20. 
Revenu  en  Chanaan.  Abraham  se  sépare  de  Lot,  son 
neveu, xili,  1-13,  et  Dieu  promet  de  donner  le  pays  à  sa 
postérité,  xi. i.  1.4-18.  Quatre  rois  confédérés  envahissent 
la  Pentapole  et  emmènent  Lot  qui  habitait  à  Sodome, 
xiv,  1-12;  Abraham  poursuit  les  envahisseurs  et  leur 
ravit  le  butin  qu'ils  avaient  enlevé.  Melchisédech  bénit 
Abraham  et  celui-ci  rend  au  roi  de  Sodome  tout  son 
bien,  xiv,  13-24.  Dieu  conclut  une  alliance  solennelle 
avec  Abraham,  à  qui  il  prédit  les  destinées  de  sa  race, 
x>,  1-21.  Abraham  épouse  Agar,  qui  enfante  Ismaël, 
avoir  fui  au  désert  pour  échapper  aux  mauvais 
traitements,  que  Sara,  sa  maîtresse,  lui  infligeait,  XVI, 
1-16.  Dieu  change  le  nom  d'Abram  en  celui  d'Abraham, 
renouvelle  ses  promesses,  institue  la  circoncision  et 
prédit  la  naissance  d'un  lils  de  Sara,  xvn,  1-22.  Abra- 
ham se  circoncit  et  avec   lui  toute    sa   famille,  xvn, 


13-27.  Trois  anges  lui  apparaissent,  lui  renouvellent 
l'annonce  d'un  lils  de  Sara  et  le  préviennent  Je  la  ruine 
de  Sodome  et  de  Gomorrhe,  qu'ils  vont  accomplir 
malgré  l'intervention  d'Abraham,  xvni,  l-i;::.  Récit  du 
crime  des  Sodomiles  et  de  la  délivrance  de  Lot,  xix, 
1-29;  naissance  incestueuse  de  Moah  et  d'Ammon.xix. 
30-38.  Aventure  de  Sara  chez  Abimélech,  roideGérare, 
xx,  1-18.  Xaissance  d'Isaac  et  expulsion  d'Ismaël,  xxi, 
1-21.  Alliance  d'Abraham  avec  Abimélech,  XXI,  22-34. 
Abraham  se  dispose  à  immoler  Isaac  sur  l'ordre  de 
Dieu,  qui,  satisfait  de  sa  bonne  volonté,  arrête  sa  main 
et  renouvelle  les  promesses  précédentes,  xxn.  1-19. 
Postérité  de  Xachor,  xxin,  20-24.  Mort  et  sépulture  de 
Sara  dans  le  champ  d'Éphron,  xxm,  1-20.  Abraham 
envoie  un  de  ses  serviteurs  en  Mésopotamie  chercher 
une  femme  à  Isaac,  xxiv,  1-9;  prière  de  ce  serviteur 
qui  rencontre  Rébecca,  xxiv,  10-28;  il  la  demande  en 
mariage  pour  son  jeune  maître,  xxiv,  29-51.  et  la  ra- 
mène, xxiv,  55-61.  Mariage  d'Isaac,  xxiv.  62-67.  Abra- 
ham épouse  Cétura,  partage  ses  biens  entre  ses  enfants, 
meurt  et  est  enseveli  avec  Sara,  xxv,  1-11  —  7°  Histoire 
d'Ismaël,  xxv,  12-18.  Elle  se  réduit  à  l'indication  de  sa 
postérité  et  au  récit  de  sa  mort.  —  8»  Histoire  d'Isaac, 
xxv,  19-xxxv,  29.  Xaissance  d'Ésaii  et  de  Jacob,  xxv.  19- 
26.  Ésaii  vend  son  droit  d'aînesse,  xxv,  27-31.  Au  temps 
d'une  famine,  Isaac  va  chez  Abimélech,  reçoit  des  pro- 
messes divines  et  fait  passer  Rébecca  pour  sa  sœur, 
xxvi,  1-11.  Ses  richesses  excitent  l'envie  des  habitants, 
qui  bouchent  les  puits  qu'il  a  creusés,  xxvi,  12-22. 
A  Bersabée,  Dieu  lui  apparaît  de  nouveau,  et  Abimélech 
vient  contracter  alliance,  xxvi,  23-33;  double  mariage 
d'Ésaii,  xxvi,  31,  35.  Jacob  obtient  la  bénédiction  de 
son  père  à  la  place  d'Ésaii,  xxvn.  1-29;  Ésaii  est  béni  à 
son  tour,  xxvn,  30-40.  Jacob  va  en  Mésopotamie  pour 
échapper  à  la  colère  de  son  frère  et  pour  chercher  une 
femme  de  sa  race,  xxvn,  41-xxvni,  5.  Ésaii  épouse  une 
troisième  femme,  xxvm.  6-9.  Sur  le  chemin  de  Haran, 
Jacob  a  une  vision  à  Béthel,  xxvm.  10-22.  Il  rencontre 
Rachel,  fille  de  Laban;  il  l'épouse  ainsi  que  Lia,  sa 
sœur,  xxix,  1-30.  Xaissance  de  onze  fils  et  d'une  fille, 
xxix,  31-xxx,  24.  Jacob  fait  avec  Laban  des  conventions, 
et  il  s'enrichit  habilement,  xxx,  2543.  Parce  que  les  fils 
de  Laban  le  jalousaient,  il  quitte  furtivement  Haran  et 
Laban  le  poursuit,  xxxi,  1-21.  Ils  contractent  ensemble 
une  alliance,  xxxi,  25-55.  Jacob  envoie  des  présents  à 
Ésaii,  xxxu,  1-21  ;  il  lutte  avec  un  ange,  xxxn,  22-32. 
I.sau  lui  fait  bon  accueil,  xxxm,  1-17.  Jacob  passe  à 
Salem  et  achète  le  champ  d'Hémor  à  Sichem,  xxxiil, 
18-20.  Enlèvement  de  Dina  par  les  Sichémites  et  ven- 
geance de  ses  frères,  xxxiv,  1-31.  Dieu  apparaît  de 
nouveau  à  Jacob  et  lui  ordonne  de  lui  élever  un  aulel 
à  Béthel,  xxxv,  1-7.  Mort  de  Débora,  nourrice  de  Ré- 
becca, et  changement  du  nom  de  Jacob  en  celui  d'Israël, 
xxv,  S-15.  Xaissance  de  Benjamin  et  mort  de  Rachel, 
xxxv,  16-20.  Inceste  de  Ruben,  liste  des  fils  de  Jacob 
et  mort  d'Isaac,  xxxv,  21-29.  —  9»  Histoire  d'Ésaii, 
xxxvi,  1-42.  Elle  n'est  que  le  tableau  généalogique  de 
sa  postérité.  —  10"  Histoire  de  Jacob,  xxxvn,  1-l,  25. 
Joseph,  le  fils  préféré  de  Jacob,  est  jalousé  par  ses 
frères,  xxxvn,  2-11.  Envoyé  pour  les  rejoindre  à  Do- 
thain,  il  est  vendu  par  eux  à  des  Ismaélites  qui  le  re- 
vendent à  Putiphar,  xxvn.  12-36.  Les  fils  de  Juda,  spé- 
cialement à  la  suite  de  ses  relations  avec  Thamar,  sa 
bru,  xxxviii,  1-30.  Joseph  chez  Putiphar;  accusé  par  la 
femme  de  son  maître,  il  est  jeté  en  prison,  xxxis,  1-2:!. 
Il  interprète  les  songes  du  panetier  et  de  l'écha 
du  Pharaon,  xi.,  1-23;  puis  ceux  du  Pharaon  lui-même, 
xli,  1-36  :  c'esl  pourquoi  il  est  mis  à  la  tête  île  l'Egypte, 
xli,  37-16.  Les  sept  années  de  fertilité;  naissance  des 

fils  de  Joseph,  xii.  W-52.  Co tenci  tnenl  de  la  famine, 

xli,  53-57.  Jacob  envoie  ses  lils  en  Egypte;  Joseph  les 
reconnaît,  retient  Siméon  en  capthité  et  renvoie  les 
autres  à   leur  père,  xlii,  1-25.  Leur  retour;  Jacob  re- 


:,:> 


PENTATEUQUE 


Û6 


fuse  de  laisser  partir  Benjamin,  xlii,  26-38.  Contraint 
par  la  famine,  il  consent  au  départ  de  Benjamin,  xi.in. 
1-15.  Ses  fils  sont  reçus  par  le  chef  de  la  maison  de 
Joseph,  puis  par  Joseph  lui-même,  xliii,  15-34.  La  coupe 
i  mise  à  dessein  dans  le  sac  de  Benjamin; 
Joseph  veut  punir  le  ravisseur;  Judas  s'offre  à  la  place 
de  son  jeune  frère,  xi.iv,  l-3i.  Joseph  se  fait  reconnaître 
et  \ .ut  faire  venir  son  père  en  Egypte,  xly,  1-28.  Arri- 
vée de  Jacob  en  Egypte,  et  liste  de  ses  enfants  et  petits- 
enfant-,  xlvi,  1-27.  Rencontre  de  Joseph  et  de  son  père, 
xlvi,  28-34.  Joseph  obtient  de  Pharaon  la  terre  de  Ges- 
sen,  xlvii,  [-12.  Les  Égyptiens  achètent  des  vivres, 
xi.vii.  13-26.  Après  17  ans  de  séjour  en  Egypte,  Jacob 
fait  à  Joseph  ses  dernières  recommandations,  XLVII,  27- 
31.  Devenu  malade,  il  adopte  les  deux  fils  de  Joseph  et 
les  bénit,  xi.vin.  1-22.  Il  bénit  tous  ses  fils  et  meurt, 
xi.ix,  1-32.  Joseph  le  fait  ensevelir  en  Chanaan,  L,  1-12. 
Ses  frères  lui  demandent  pardon;  il  leur  promet  ses 
bonnes  grâces.  Sur  le  point  de  mourir,  il  demande  que 
ses  ossements  soient  un  jour  emportés  au  pays  de  Cha- 
naan. Il  meurt  et  il  est  enterré  en  Egypte,  L,  13-25. 

On  a  prétendu  que,  dans  la  pensée  de  l'auteur,  le 
nombre  des  dix  sections  avait  une  valeur  symbolique 
et  signifiait  l'universalité  ou  la  perfection  de  l'histoire 
primitive  de  la  théocratie.  Mais  cette  idée  symbolique, 
imaginée  par  les  critiques  modernes,  n'est  probable- 
ment jamais  entrée  dans  l'esprit  de  cet  auteur. 
Le  «  schématisme  »,  comme  on  dit,  de  la  Genèse  ne 
manifeste  pas  seulement  dans  ce  sectionnement  en 
dix  parties  ayant  le  même  titre;  on  le  remarque  encore 
clans  la  disposition  des  sections  et  dans  le  procédé, 
identiquement  suivi  pour  chaque  section.  Les  (ôldôf  sont 
disposées  dans  l'ordre  de  leur  importance.  Il  y  en  a  de 
deux  sortes,  en  effet,  celles  de  la  ligne  directe  d'Adam 
à  Jacob,  et  celles  des  lignes  latérales,  au  nombre  de 
trois,  à  savoir,  celles  des  enfants  de  Noé,  d'Ismaël  el 
d'Ésaù.  Ces  dernières,  qui  ont  moins  d'importance, 
sont  plus  courtes  et  elles  précèdent  toujours  les  branches 
parallèles  de  la  ligne  principale.  Elles  sont  donc  inten- 
tionnellement placées  en  avant  et  peu  développées  en 
raison  de  leur  moindre  importance.  Les  branches  secon- 
daires sont  ainsi  éliminées, el  ne  reparaissent  plus  qu'ac- 
cidentellement, quand  elles  sont  mêlées  à  l'histoire 
de  la  branche  principale.  Du  reste,  ce  procédé  d'éli- 
mination est  employé  dans  tout  le  livre,  dont  le  con- 
tenu se  restreint  toujours  de  plus  en  plus.  L'histoire. 
d'universelle  qu'elle  était  au  début,  se  particularise 
progressivement  pour  n'être  plus  que  l'histoire  reli- 
gieuse <l  Israël.  Caïn  et  sa  race  sont  éliminés  dans 
I  histoire  d'Adam;  les  descendants  de  Seth,  sauf  Noé,  i 
partir  de  l'histoire  de  ce  dernier;  Cham  et  Japheth 
disparaissent  de  l'histoire  de  Sem;  les  autres  fils  de 
Sem  sont  exclus  de  l'histoire  de  Tharé  et  d'Abraham. 
A  partira  Ismaël,  les  branches  secondaires,  qui  forment 
iales,  sonl  vite  laissées  hors  d'obser- 
vation /,;/  île  Jacob  commence  l'histoire 
uple  élu,  du  peuple  théocratique. 
D  autre  part,  l'écrivain  suit  un  ordre  déterminé  dans 
i"  ments  de  i  haque  section.  Le  titre  est 
sum  ipitulalion  de  la  section  prê- 
te. Ainsi  Gen.,  n,  1.  résume  l'introduction,  i.  l-n, 
:;:  v.  i.  ,,  pèie  i.  27;  xxv,  12,  ri  su  me  xvi,  I.  3,  15,  16; 
xxv,  19,  condense  svii;  wi.  2  ...  Au  début  des  autres 
"-•  i'  ^  a  un  poinl  de  repère  avec  ce  qui  précède  : 

1,   10  les  noms  des  Mis  de  Noé,  v.  32,  el  les 

causes  du  déluge,  xi.  1-5;  x,  1,  est  la  répétition  de  tx, 
18,  19;  si,  27,  reproduil  le  irersel  qui  termine  la  section 

i"1  cédente;  xxxvi,  2,3,  réi  apitule  tes  i s  des  femmes 

d'Esaû,  xxvi,  34;  xxvm,  9;  xxxvii,  1,  esl  la  rép 
de   kxxv,  27.   Ce  procédé  récapitulatif,  remarqué  par 
liai.. m  Maur,  Comment,  in  Gen.,  I.  Il,  c.  xn,  t.  cvn, 
col.  531  532    donne  I  -  des  répétitions  signa 

lées  par  les  critiques  connue  indice  île  la  diversité  di  - 


sources.  Les (ôldôf  d'un  patriarche  embrassent  toujours 
tout  le  développement  qu'a  pris  sa  maison  de  son 
vivant.  Ainsi  celles  d'Abraham  comprennent  l'histoire 
d'Ismaël  et  d'Isaac,  qui  sont  réunis  pour  ensevelir  leur 
père,  xxv,  9;  celles  d'Isaac  racontent  l'histoire  d'Ésaii, 
qui,  lui  aussi,  se  joint  à  Jacob  pour  ensevelir  Isaac, 
xxxv,  29;  celles  de  Jacob  comprennent  l'histoire  de  ses 
fils  jusqu'à  sa  mort,  l,  12.  et  à  celle  de  Joseph.  L,  25. 
La  vie  du  patriarche  est  plus  ou  moins  développée. 
Elle  est  réduite  parfois  à  quelques  mots,  v,  xi  ;  ou  à 
quelques  lignes,  xi,  28-31  ;  pour  Noé,  Abraham  et  Jacob, 
elle  raconte  de  nombreux  faits.  Quand  elle  est  détaillée, 
elle  se  termine  d'une  manière  à  peu  près  uniforme  : 
l'écrivain  indique  la  durée  totale  de  la  vie  du  héros  et 
sa  sépulture  avec  ses  ancêtres,  ix,  29;  xi,  32:  xxv.  7; 
xxxv,  28;  xlvii,  28.  Le  total  des  années  des  patriarches 
est  aussi  indiqué  au  c.  v;  mais  il  ne  l'est  pas  au  c.  xi, 
10-26. 

Ce  plan  suivi  est  indéniable  et  prouve  que  la  Genèsi 
a  été  rédigée  dans  un  but  déterminé  et  d'après  un  ordre 
fixé.  Les  critiques  modernes  l'attribuent  au  rédacteur 
définitif  du  Pentateuque  qui,  selon  eux,  aurait  emprunté 
au  code  sacerdotal  le  cadre  généalogique  et  le  schéma- 
tisme, lesquels  seraient  une  des  caractéristiques  de 
cette  source.  Il  montre,  atout  le  moins,  l'unité  actuelle 
de  ce  livre,  compris  comme  un  vaste  tableau  généalo- 
gique, embrassant  les  détails  connus  de  l'histoire  pri- 
mitive et  de  l'histoire  patriarcale.  Cf.  P.  Débattre,  Plan 
de  la  Genèse,  dans  la  Revue  des  questions  historiques, 
juillet  1876,  t.  xx,  p.  5-43;  Id.,  Le  plan  de  la  Genèse 
cl  1rs  générations  du  ciel  et  de  la  terre,  dans  la  Scieur,' 
catholique  du  15  octobre  1891,  t.  v,  p.  978-989;  P.  de 
Broglie,  Elude  sur  les  généalogies  bibliques,  dans  le 
Congrès  scientifique  international  des  catholiques  de 
t888,  Paris,  1889,  t.  i,  p.  94-101;  P.  Julian,  Étudi  cri- 
tique sur  la  composition  de  la  Genèse,  Puis.  1888, 
p.  232-250. 

A  ne  considérer  que  le  contenu  de  la  Genèse,  on  a 
proposé  des  divisions  logiques  en  deux  ou  huit  parties. 
Dans  le  premier  cas,  le  livre  raconte  :  I»  l'histoire  de 
l'humanité  depuis  la  création  jusqu'à  la  vocation 
d'Abraham,  ri,  1-xi.  26:  2"  l'histoire  dis  patriarches 
Abraham.  Isaac  et  Jacob,  ancêtres  du  peuple  juif,  jus- 
qu'à la  mort  de  Jacob  et  de  Joseph  en  Egypte,  xi.  27-L, 
25.  Chacune  de  ces  parties  principales  se  subdiviserait 
en  cinq  sections,  commençant  par  (ôldôf.  Cf.  R.  Cor- 
nel\.  Tntroductio  speciàlis  in  historiées  V.  T.  libres, 
Paris.  INS7,  t.  n,  p.  8-10.  Beaucoup  de  critiques  mo- 
dernes acceptent  cette  division  etséparent  l'histoire  pri- 
mitive, i.  I-XI,  9,  de  l'histoire  des  patriarches,  XI,  28-L, 
2H.  reliée  à  la  première  par  la  généalogie  de  Sem.  XI, 
10-27.  Dans  le  see  ml  cas.  0n  distingue  :  l"  la  création 
du  monde  et  de  l'homme,  i.  I-m,  21;  2  l'histoire  de 
1  humanité  jusqu'au  déluge  et  l'alliance  conclue  entre 
Dieu  et  Noé  après  le  cataclysme.  IV.  1-IX.  17:  3  11 
trois  fils  de  Noé  considérés  comme  pères  de  l'humanité 
postdiluvienne,  ix.  lS-x.  32;  V  la  séparation  des 
le. mines  au  point  de  vue  des  langues,  la  formation 
des  nations,  et  la  généalogie  de  Sem,  XI  :  5°  l'histoire 
d'Abraham,  père  du   penple  de  la  promesse.  XII.  l-xx\. 

11:  G    la  généalogie  d'Ismaël.  xxv.  12-18,  et  l'histoire 
d'Isaac, xxv,  19  \\x\.  39;  7  la  généalogie  d'Ésaû,  xxxvi: 
8'  l'histoire  de  Jacob,  xxxvn-L. 
2    Exode.  —  Après  la  mort  de  Joseph,  l'histoire  du 

peuple  d'Israël  ne  procède  plus  par  généalogies.  Israël 
est  devenu  un  peuple  et  son  histoire,  sous  la  cou 
de  'luise,  est  celle  de  sa  constitution  nationale  el  i  'i- 
gieuse.  i  lie  se  poursuit  dans  les  quatre  autres  livre  I) 
Pentateuque,  qui  sont  à  la  fois  historiques  el  législa- 
tifs. La  séparation  des  trois  livres  du  milieu  esl  un  peu 
arbitraire;  elle  n'a  eu  peut-être  d'autre  raison,  comme 
nous  l'avons  déjà  dit,  que  la  nécessité  de  diviser  en 
parts    à    peu  près  égales   un   rouleau    qui,    autrement. 


57 


PENTATEUQUE 


58 


aurait  été  trop  volumineux.  Les  faits  qu'ils  racontent 
se  suivent  et  se  complètent.  On  peut  néanmoins  consi- 
dérer chacun  d'eux  comme  un  tout  séparé. 

L'Exode,  après  un  court  préambule,  i,  1-7,  qui  est 
comme  la  récapitulation  des  tôldôt  de  Jacob,  peut  se 
diviser  en  trois  parties  très  distinctes  :  la  première  partie 
raconte  les  événements  qui  ont  précédé  et  préparé  la 
sortie  d'Egypte,  i,  S-xn,  36,  à  savoir,  l'oppression  des 
Israélites  par  un  nouveau  Pharaon,  qui  n'avait  pas 
connu  Joseph,  i,  8-22:  l'histoire  de  Moïse  avant  sa  voca- 
tion, il,  1-25;  la  vocation  de  Moïse  comme  sauveur  de 
son  peuple,  son  retour  en  Egypte  et  l'accueil  que  lui 
font  les  Israélites,  m,  1-iv,  31;  les  premières  tentatives 
de  Moïse  et  d'Aaron  auprès  du  roi  d'Egypte,  v,  I-vi, 
13;  une  généalogie  des  fils  de  Ruben,  Siméon  et  Lévi, 
précédant  et  préparant  la  généalogie  de  Moïse,  vi,  14- 
30;  une  nouvelle  mission  divine  de  Moïse  et  la  descrip- 
tion des  neuf  premières  plaies  d'Egypte,  vin,  1-x,  29; 
la  prédiction  de  la  dixième  plaie,  xi,  1-10;  l'institution 
et  la  célébration  de  la  première  Pàque,  xn,  1-28,  la 
mort  des  premiers-nés  des  Égyptiens  et  les  préparatifs 
de  la  sortie  d'Egypte,  29-36.  La  seconde  partie  rapporte 
les  faits  accomplis  depuis  la  sortie  d'Egypte  jusqu'à 
l'arrivée  des  Israélites  au  pied  du  Sinaï,  xn,  37-xvm, 
27.  Le  récit  du  départ  des  Israélites  est  suivi  de  la 
législation  concernant  la  Pàque  future,  souvenir  et 
anniversaire  de  la  première  et  la  consécration  des 
premiers-nés.  xn.  37-xm.  16.  Viennent  ensuite  le  récit 
des  premiers  campements  des  Israélites,  la  poursuile 
de  l'armée  égyptienne,  qui  serre  les  fugitifs  sur  les 
bords  de  la  mer  Rouge,  xm,  17-xiv,  14.  Les  Israélites 
passent  la  mer  à  pied  sec,  et  les  Égyptiens  sont  englou- 
tis dans  les  Ilots,  xiv,  15-31.  Cantiques  de  Moïse  et  de 
Marie,  sa  sœur,  ST,  1-21.  Les  stations  dans  le  désert 
sont  ensuite  spécifiées  avec  les  événements  qui  s'y 
rattachent  :  à  Sur,  à  Mara,  à  Élim,xv,  22-27,  au  désert 
de  Sin  avec  l'envoi  des  cailles  et  de  la  manne,  xvi,  1- 
36,  à  Raphidim,  où  l'eau  sort  du  rocher,  xvn,  1-7,  et 
où  les  Israélites  battent  les  Amalécites,  8-16.  La  visite 
de  Jéthro,  beau-père  de  Moïse,  sert  d'occasion  à  l'institu- 
tion des  juges  du  peuple,  XVIII,  1-27.  La  troisième 
partie  débute  par  le  voyage  de  Raphidim  au  pied  du 
Sinaï.  xix,  I.  2.  A  cette  longue  station  se  rattache  une 
portion  de  la  législation  mosaïque,  de  sorte  que  l'on- 
vrage,  d'historique  qu'il  était,  devient  code  législatif. 
Moïse  monte  au  sommet  du  mont  Sinaï,  où  Dieu  lui 
indique  les  préparatifs,  puis,  trois  jours  après,  les  dis- 
positions extérieures  de  la  promulgation  de  ce  qu'on  a 
appelé  son  alliance  avec  Israël,  xix,  3-25.  Suit  la  pro- 
mulgation du  Décalogue  et  des  conditions  de  l'alliance 
qui  forment  le  livre  de  l'alliance,  xx,  1-xxm,  33.  Ce 
livre,  ainsi  nommé,  XXIV,  7,  comprend  la  loi  de  l'autel, 
xx,  24-26,  des  lois  sur  les  esclaves,  xxi,  1-11,  sur  l'homi- 
cide et  les  rixes,  12-27,  sur  les  dommages  causés  par 
les  animaux,  28-36,  sur  les  voleurs,  xxn,  1-4,  lesdamni- 
ficatetirs,  5,  6,  les  dépositaires  négligents,  7-13,  sur  le 
prêt.  14,  15,  sur  des  points  de  morale  ou  de  religion, 
xxii.  16-xxin,  9,  sur  l'année  sabbatique  et  le  sabbat, 
10-12,  et  les  trois  fêtes  annuelles,  13-19.  Des  promesses 
sont  attachées  à  l'observation  de  ces  lois,  20-33.  Voir 
t.  i,  col.  388.  L'alliance,  fondée  sur  ces  conditions,  est 
conclue  entre  Dieu  et  Israél.  xxiv,  1-8.  Dieu  se  manifeste 
aux  anciens  du  peuple,  puis  à  Moïse  seul  qui,  pendant 
quarante  jours  et  quarante  nuits  au  sommet  de  la  mon- 
tagne, reçoit  du  Seigneur  une  description  précise  de 
l'arche  d'alliance,  de  la  table  des  pains  de  proposition, 
du  candélabre  à  sept  branches,  du  tabernacle  et  de 
l'autel  des  holocaustes,  des  vêtements  sacerdotaux,  des 
rites  de  la  consécration  des  prêtres,  diverses  lois,  la 
désignation  des  constructeurs  du  tabernacle  et  une  loi 
relative  à  l'observance  du  sabbat,  xxiv,  9-xxxi,  18.  Le 
récit  historique  reprend.  Pendant  l'absence  prolongée 
de  Moïse,  le  peuple  adore  le  veau  d'or.  Dieu  s'en  irrite; 


.Moïse  intercède  pour  le  peuple,  brise  les  tables  de  la 
loi,  renverse  l'idole,  punit  les  coupables,  intercède  de 
nouveau  auprès  du  Seigneur,  qui  fait  grâce  au  peuple 
repentant,  xxxii,  1-xxxin,  6.  Moïse  transporte  le  taber- 
nacle hors  du  camp  et  Dieu  propose  de  renouveler 
l'alliance  rompue  par  l'infidélité  des  Israélites.  Mm-, 
taille  de  nouvelles  tables,  reçoit  une  seconde  fois  de 
Dieu  les  conditions  de  l'alliance,  après  40  jours  de 
séjour  au  sommet  du  Sinaï,  rapporte  les  tables  de  la 
loi,  gravées  de  sa  propre  main,  et  reparait  le  visage 
resplendissant  de  la  gloire  divine,  xxxm,  7-xxxiv,  35. 
Les  ordres  divins  au  sujet  de  la  construction  du  taber- 
nacle et  des  instruments  du  culte  s'accomplissent  :  les 
Israélites  apportent  leurs  dons;  les  ouvriers  désignés 
les  emploient  à  la  construction  du  tabernacle,  de  l'arche, 
de  la  table  des  pains  de  proposition,  du  candélabre, 
des  autels  et  des  vêtements  sacerdotaux,  xxxv,  I-xxxix 
29.  Tout  le  travail  achevé  est  béni  par  Moïse.  Dieu  or- 
donne d'ériger  le  tabernacle,  de  vêtir  et  d'oindre  les 
prêtres.  Ses  ordres  sont  exécutés,  et  la  nuée  du  Sei- 
gneur couvre  le  tabernacle,  xxxix,  30-xl,  36. 

3"  Lévitique.  —  Ce  livre  est  presque  en  entier  légis- 
latif et  continue  l'exposé  des  lois,  données  par  Dieu  à 
Moïse  au  Sinaï.  Les  nombreuses  lois  qu'il  contient  sont 
codifiées  sans  ordre  logique.  Il  y  a  cependant  certains 
groupements  de  dispositions  concernant  le  même  sujet. 
Une  première  section,  l-vn,  est  consacrée  aux  sacrifices: 
holocaustes,  i,  1-17;  oblations.  H,  1-16;  sacrifices  paci- 
fiques, m,  1-17;  sacrifices  pour  le  péché  involontaire, 
iv.  I-v,  13,  et  pour  le  délit  volontaire,  v,  14-vi,  7.  Sui- 
vent les  préceptes  concernant  les  prêtres  dans  l'offrande 
de  ces  divers  sacrifices,  vi,  8-10,  puis  de  nouvelles  pres- 
criptions au  sujet  des  sacrifices  pacifiques  entrecou- 
pées par  la  défense  réitérée  de  manger  la  graisse  et  le 
sang,  vu,  11-34,  et  terminées  par  une  conclusion  géné- 
rale, 35-38.  Une  seconde  section  raconte  en  détails  la 
consécration  d'Aaron  et  de  ses  fils,  vm,  1-36,  et  l'inau- 
guration de  leurs  fonctions,  ix,  1-24.  Suit  l'épisode  de 
la  punition  de  Nadab  et  d'Abiu,  coupables  d'un  man- 
quement dans  le  service  divin,  x,  1-27.  Enfin  vient  la 
défense  faite  aux  prêtres  de  boire  du  vin  et  des  liqueurs 
enivrantes,  et  une  prescription  relative  à  la  manduca- 
tion  des  restes  du  sacrifice,  x.  8-20.  Une  troisième 
section  réunit  les  lois  de  la  pureté  légale,  xi-xv  :  les 
animaux  purs  el  impurs,  XI,  1-47;  la  purification  de  la 
femme  en  couches,  xn,  1-8;  la  lèpre  des  hommes,  xm, 
1-ili,  des  habits,  xm,  47-59;  la  purification  du  lépreux, 
xiv,  1-32;  la  lèpre  des  maisons,  33-53;  récapitulation, 
54-57;  les  impuretés  sexuelles,  xv,  1-33.  Une  quatrième 
section  expose  les  rites  de  la  fête  annuelle  de  l'expia- 
tion, XVI,  1-34.  Après  une  loi  spéciale  sur  l'immolation 
des  victimes  el  la  défense  de  manger  le  sang  et  les 
bêtes  mortes,  xvn,  1-16,  une  cinquième  section  groupe 
les  lois  concernant  la  pureté  extérieure  et  inté- 
rieure, xvin,  1-5,  à  savoir  les  mariages  interdits,  xvm, 
6-30;  les  devoirs  envers  Dieu  et  le  prochain,  xix,  1-18, 
et  différents  préceptes  de  même  nature,  xix,  19-37.  Des 
peines  sévères  sont  portées  contre  les  violateurs  de  ces 
dispositions,  xx,  1-27.  Lois  spéciales  sur  la  sainteté  des 
prêtres,  irrégularités  sacerdotales,  xxi,  1-24.  Conditions 
à  remplir  par  les  prêtres  et  les  membres  de  leurs 
familles  pour  pouvoir  manger  les  choses  saintes,  xxn. 
1-1G.  Qualités  que  doivent  avoir  les  victimes  des  sacri- 
fices, 17-30.  Conclusion,  31-33.  Liste  des  fêtes  à  célébrer, 
xxiii,  1-44.  Loi  sur  l'huile  du  tabernacle  et  les  pains 
de  proposition,  xxiv,  1-9.  A  l'occasion  d'un  fait  parti- 
culier, peine  portée  contre  les  blasphémateurs,  xxiv, 
10-23.  L'année  sabbatique  et  le  jubilé,  xxv,  1-55.  Pro- 
messes et  menaces  pour  l'observation  ou  la  violation  de 
la  loi  divine,  xxvi,  1-45.  Loi  sur  les  vœux  et  les  dimes, 
xxvil,  1-34. 

4°  Nombres.  —  Ce  livre  reprend  le  récit  du  séjour 
des  Israélites  dans  le  désert,  récit  qui  avait  été  inter- 


59 


PENTATEUQUE 


60 


rompu  par  l'exposé  il t-  la  législation  donnée  par  Dieu  à 
Moïse  sur  le  Sinaï.  Il  le  reprend  au  départ  du   Sinaï, 

-   de  la  seconde  année  après  la  sortie 

d'Egypte,  et  il  le  conduit  jusqu'au  onzième  mois  de  la 
quarantième  année  du  séjour  dans  le  désert.  Mais 
l'histoire  de  ces3  n'esl  pas  racontée  en  détail; 

seuls,  les  évi  a  m    il     du  début  et  de  la  lin  de  cette 

i.   sonl  rapportés.  Des  lois  nouvelles  sont  ins 

!  des  faits.  Les  Nombres  peuvent  donc  se  di- 
viser en  trois  parties  :  —  I-  partie.  Événements  qui  se 
lits  depuis  les  préparatifs  du  dépari  du  Sinaï 
.  ondamnaiion  divine  du  peuple  révolté,  i-xiv. 

le  se  subdivise  en  deux  sections  :  —  i">  section. 
Préparatifs  du  départ  :  1"  recensement  du  peuple  d'où 
le  livre  a  pris  son  nom,  et  office  des  lévites,  i,  1-54; 
2°  ordre  des  campements,  h,  l-3i;  3° généalogie,  office, 
recensement  et  place  dis  lévites,  m,  1-39;  recense- 
ment di  pri  miers-nés  que  remplacent  les  lévites.  40- 
51;  offices  de  chaque  famille  de  lévites,  iv,  1-33;  réca- 
pitulation, 31-49;  1°  lois-particulières,  dont  la  première 
concerne  la  pureté'  du  campement,  v,  1-vi.  27;  5°  re- 
tour en  arrière  i  récil  de  ce  qui  s'est  passé  au  premier 
mois  de  la  seconde  année,  lors  de  l'érection  du  taber- 
nacle, cf.  Exod.  xi.,  I  ;  offrande  de  chariots  pour  porter 
le  tabernacle,  et  autres  offrandes  des  princes  de  chaque 
tribu,  Num.,  vu.  1-89;  loi  relative  au  candélabre,  VIII, 
1-4;  consécration  des  lévites  et  durée  de  leur  ministère, 
VIII,  5-2G  ;  la  Pàque  de  la  seconde  année,  avec  une 
Pàque  extraordinaire,  ix,  1-14;  signaux  de  la  levée  du 
camp,  la  nuée  lumineuse  et  le  son  des  trompettes,  i\. 
15-x,  10.  —  IIe  section.  Départ  du  Sinaï  jusqu'à  la  dé- 
faite des  Israélites  par  les  Amaléciles  :  le  22  du  second 
mois  de  la  deuxième  année,  levée  du  campement  et 
ordre  de  la  marche,  x,  ll-'28;  Moïse  invile  llobab  à  le 
suivre,  29-32;  après  trois  jours  de  marche,  murmure 
du  peuple  puni  par  l'incendie  d'une  partie  du  camp.  XI, 
I  peuple  venu  d'Egypte,  las  de  la  manne,  veut  de 

la  viande;  Dieu  donne  à  Moïse  des  aides  pour  gouverner 
et  envoie  des  cailles,  xi,  6-34;  reproches  d'Aaron  et  de 
Marie  contre  Moïse;  Marie  est  couverte  de  lèpre,  XII; 
1-15.  De  Pharan,  Moïse  envoie  au  pays  de  Chanaan  des 
explorateurs  dont  le  récit,  à  leur  retour,  provoque  une 
sédition  du  peuple,  xin,  l-xiv.  10;  Dieu  fait  périples 
explorateurs  coupables  et  condamne  les  Israélites  ré- 
voltés a  séjourner  quarante  ans  dans  le  désert,  xiv,  1 1- 

:;s.   le  peuple   prend    les   armes,  mais   est   IjattU  parles 

taialécites,  xiv,  39-45.  —  II''  partie.  Quelques  épisodes 
des  quarante  ans  du  séjour  dans  le  désert.  —  Lois  di- 
verses, w.  I  :il  :  un  violateur  du  sabbat  lapidé'.  XV,  32- 
:;ti;  loi  des  franges  aux  vêtements,  xv,  37-41.  I!é\olte 
if'  Coré,  '!'■  Dathan  r\  d'Abiron,  xvi,  1-40;  punition  îles 
murmures  du  peuple,  xvi,  11-50;  la  verge  d'Aaron 
fleurit,  xvn,  1-13.  Offices,  droits  et  charges  des  prêtres 
wni.  1-32;  immolation  de  la  vache 
rousse,  el  li.>is  de  purification,  xix,  1-22.  —  III1-'  partie. 
Derniers  événements  delà  lin  du  séjour  dans  le  désert. 
—  Apres  la  mort  de  Marie,  révoltée  Cad.  s  ;  Moïse  frappe 
deux  fois  le  rochei  I  13;  ambassade  au  roi  d'Édom 
qui  refuse  le  pas>;i-,.  sur  ses  terres,  xx,  14-21;  morl 
Uor,  \\.  22  30;  vi<  toire  remportée  sur  le  roi 
les  Israélites  i  onl nenl  1  [dumée     e 

plaigD  '    I   ■  mil    punis    par  des   serpents  de 

i  u  m.  1-9;  itinéraire  suivi  jusqu'à  l'Arnon;  chant  de 
l'Arien  du  puits,  xxi.  10-20;  expédition  contre 

Séon  et  i  d'Hi     bon,  xxi,  21  30     ictoire  remportée 

sur  i';:,  xxi.  31-35    u  ,,,-.  h-  champs  di   Moal    i idic 

lions  el  oracles  de  Balaam,  \\n.  l-xxiv,  25;  crime  de. 
Israélites,   tèle  de   Phinées  el  ordre  d'exterminer  les 

Madianites,  xxv,  1-18.  Nouveau  r&  i  n  I uple 

xxvi,  1-65.  Loi  sur  les  filles  héritii  rcs  a  l'occa  ion  des 
filles  de  Salphaad,  xxvn.   1-11.  Josué  esl  institu 

cesse ur  de   Moïse,  xxmi.  12-23    Lois  sur  les     acr ■-. 

les  el  les  vœux,  sxviii,  1-xxx,  17.  Victoire  sur  les 


Madianites,  xxxi.  1-54.  Attribution  du  pays  situé  à  l'est 
du  Jourdain  aux  tribus  de  Ruben  et  de  Gad  et  à  la 
demi-tribade  Manassé.  xxxn,  1-42.  Résumé  des  stations 
des  Israélites  dans  le  désert,  xxxm,  1-19.  Ordre  donné 
par  Dieu  d'exterminer  les  Chananéens,  xxxm,  50-56. 
Limites  de  la  Terre  Promise  et  noms  des  hommes  qui 
feront  le  partage  du  pays  conquis,  xxxiv,  1-29.  Villes 
lévitiques  et  villes  de  refuge,  xxxv,  1-15.  Lois  sur 
l'homicide  volontaire  et  involontaire  et  sur  le  mariage 
des  filles  héritières,  xxxv,  16-xxxvi,  12.  Conclu- 
sion, y.  13. 

L'analyse  précédente,  qui  est  tout  à  fait  objective, 
montre  clairement  que  si,  dans  les  livres  du  milieu, 
Exode,  Lévitique  et  Nombres,  le  récit  historique  se 
développe  d'une  façon  assez  cohérente  pour  l'ensemble, 
dans  un  cadre  à  la  fois  chronologique  et  géographique, 
tracé  par  les  stations  ou  campements  successifs  des 
Israélites  dans  le  désert,  et  que  si  la  législation  sinai- 
tique  s'y  insère  naturellement  à  sa  date,  cependant  les 
lois  sont  souvent  groupées  en  codes  ou  recueils  distincts, 
qui  sont  juxtaposés  plutôt  que  coordonnés,  el  les  pres- 
criptions elles-mêmes  de  chaque  code  ne  sont  pas  tou- 
jours logiquement  distribuées;  beaucoup  semblent  être 
des  lois  complémentaires  ou  explicatives  des  précé- 
dentes. U  y  a  donc,  dans  ces  livres  et  dans  leurs 
parties,  un  certain  ordre;  mais  il  n'esl  pas  toujours 
apparent,  et  la  disposition  actuelle  trahit  certaines 
répétitions,  qui  proviennent  de  la  manière  dont  la  loi 
mosaïque  a  été  promulguée.  Elle  n'a  pas  été-  faite  d'un 
seul  coup,  mais  progressivement  et  au  jour  le  joui'.  Le 
législateur  est  revenu  plusieurs  fois  sur  les  mêmes 
sujets,  en  expliquant  ou  complétant  ses  premières 
ordonnances.  Voir  t.  IV,  col.  337-339.  Pour  les  divisions 
logiques  de  la  législation  mosaïque,  voir  t.  IV,  col.  327- 
332. 

5°  Deuté 'ronome.  —  Ce  livre  a.  dans  le  Pentateuque, 
une  physionomie  à  part.  Il  ne  se  rattache  pas  aux 
Nombres  comme  ceux-ci  aux  deux  livres  précédents,  et 
il  se  distingue  des  autres  parties  du  Pentateuque  en 
ce  qu'il  se  compose  principalement,  non  de  récits, 
mais  de  discours  prononcés  par  Moïse  dans  les  plaines 
de  Moab,  le  onzième  mois  de  la  10    année  du  séjour  au 

désert.  D'autre  part,  il  forme,  dans  l'ensemble,  un  tout 
complet.  Son  plan  est  simple.  Indépendamment  du 
litre,  i.  1-4,  il  comprend  quatre  discours.  —  Le  pre- 
mier, i.  6-1V,  io.  sert  d'introduction  au  livre  entier.  On 
\  distingue  :  I"  un  résumé  historique  des  fàrits  qui  ont 
suivi  la  promulgation  de  la  Loi  au  Sinaï,  i.  ti-in,  29; 
2»  une  exhortation  à  observer  cette  Loi,  iv,  1-10.  Ce 
premier  discours  est  suivi  de  deux  enclaves  :  I"  un 
fragment  historique  sur  les  villes  de  refuge  situées  à 

l'est  du  Jourdain.  IV,  H -43;  2"  un  préambule  historique 
préparant  le  discours  qui  va  suivre,  iv,  14-49.  —  Le 
second  discours,  \-XXVI.  fait  le  fond  du  livre.  Il  débute 
par  un  rappel  de  la  Lui  sinailiqiie  el  il  reproduit  le 
décalogue,  v,  1-vi.  3.  Il  se  subdivise  ensuite  en  deux 
parties  :  la  première,  m.  'i  xi.  32,  est  parénélique;  elle 
expose  les  motifs  que  les  Israélites  mit  d'obéir  à  la  loi 
et  elle  les  exhorte  à  l'obéissance.  On  a  signalé',  x.  ti.  7, 
un  passage  qui  semble  'ire  une  interpolation.  Le  ver- 
gel  S  l'ait  naturellement  suite  au  verset  Te  Même  consi- 
dérés   comme    une    parenthèse,    les    \rrsets    11    et    7  ne 

s'expliquent  guère  el  rompent  1res  malencontreusement 
lr  résumé  historique,  au  milieu  duquel  ils  s.. ni  intro- 
duits.  La   seconde  partie  du  discours,   xil,   l-xx\i.  15, 
contient  un  code  de  lois,  essentiellement  morales  et  ri  ' 
gieuses,  qu'on   a   diversement    groupées   :    I"   Lois   ri'li- 

gieuses  :  unité  du  culte,  xti,  2-27;  interdiction  de  l'ido- 
lâtrie, xii.  28-xiH,  18;  prohibition  de  quelques  u  a 
païens  ei  distinction  des  animaux  purs  et  impurs,  xiv, 
1-21;  paiement  de  la  dime.xiv,  22-29;  l'année  sabbatique, 
xv.  l-l!S:  offrande  des  premiers-nés  des  troupeaux,  xv. 
19-2:1;  les  trois  fêtes  annuelles.  Pàque,   Pentecôte  el 


Gl 


PENTATEUQL'E 


62 


Tabernacles,  xvi,  1-17:  2°  institutions  publiques  :  les 
juges,  xvi,  18-xvn.  13;  le  roi  futur,  xvn,  14-20;  les 
prêtres  et  les  lévites,  xvm,  1-8;  les  faux  et  les  vrais 
prophètes,  xvm,  9-22;  3"  la  justice  criminelle  :  les 
villes  de  refuge,  xix,  1-13;  le  déplacement  des  bornes 
des  champs,  xix;  14;  les  témoins,  xix,  15-21;  4"  la 
guerre,  les  exempts  et  la  manière  de  traiter  les  enne- 
mis, XX,  1-20;  5°  meurtre  dont  les  auteurs  sont  incon- 
nus, xxi,  1-9  :  6  traitement  des  femmes  prises  à  la 
guerre,  xxi,  10-11:  7"  droit  privé  :  droit  d'ainesse.  xxi. 
15-17;  conduite  à  l'égard  d'un  lils  rebelle,  xxi,  18-21; 
coupables  punis  de  mort,  xxi,  22,  23;  animaux  et  objets 
perdus,  xxn.  1-4;  vêtements,  nids  d'oiseaux,  construc- 
tion des  maisons,  mélanges  disparates,  franges,  xxn, 
5-12:  des  vierges,  xxn,  13-30;  de  ceux  qui  ne  peuvent 
faire  partie  d'Israël,  xxm,  1-8;  hygiène  des  camps, 
xxiii,  9-14;  esclaves  fugitifs,  prostituées,  usure,  vœux, 
droit  de  prendre  dans  les  vignes  et  les  moissons,  xxm, 
15-25;  divorce,  xxiv.  1-4;  le  nouveau  marié,  5;  droits 
des  pauvres.  6-22;  la  flagellation,  xxv,  1-3;  le  bœuf  qui 
foule  l'aire,  4;  loi  du  lévirat,  5-10;  poids  et  mesures,  13- 
16:  extermination  des  Amaléciles,  17-19;  les  prémices 
et  les  dîmes,  xxvi,  1-15.  Péroraison  :  exhortation  à 
observer  ces  lois,  16-19.  —  Dans  le  troisième  discours, 
xxvii-Xxvm,  Moïse  ordonne  aux  Israélites,  lorsqu'ils 
auront  passé  le  Jourdain,  d'élever  un  autel  sur  lequel 
ils  graveront  le  Deutéronome,  et  il  leur  trace  les  béné- 
dictions et  les  malédictions  à  prononcer  ce  jour-là, 
xxvii.  1-26.  Moïse  prononce  lui-même  les  bénédictions 
réservées  aux  observateurs  de  la  loi  et  les  malédictions 
qui  frapperont  les  rebelles,  xxvm,  1-68.  Le  verset  69 
de  l'hébreu  (Yulgate,  xxix,  1)  sert  de  conclusion  à  ce 
discours.  —  Un  quatrième  discours,  xxix,  1  (Yulgate  2) 
xxx,  20.  résume  les  bienfaits  de  Dieu  envers  Israël, 
exhorte  à  observer  l'alliance  jurée  et  à  ne  pas  y  être  in- 
fidèle,  annonce  le  pardon  aux  coupables,  montre  que  la 
loi  est  facile  à  observer  et  réitère  les  bénédictions  et  les 
malédictions. 

Le  recueil  de  ces  quatre  discours  est  complété  par 
une  conclusion  historique,  relatant  les  derniers  événe- 
ments de  la  vie  de  Moïse,  xxxi-xxxiv.  Moïse  choisit 
Josné  comme  son  successeur,  ordonne  de  lire  la  loi  au 
peuple  tous  les  sept  ans  et  d'en  déposer  le  texte  dans 
l'arche,  xxxi.  1-27;  il  fait  rassembler  les  anciens  et 
récite  son  cantique,  xxxi,  28-xxxn,  47;  il  contemple  de 
loin  la  Terre  Promise,  xxxn,  48-52.  Il  bénit  les  tribus 
d'Israël,  xxxiii.  1-29.  Sa  mort,  sa  sépulture,  son  éloge, 
xxxiv,  1-2.  Ces  derniers  chapitres  ne  sont  pas  très 
étroitement  rattachés  l'un  à  l'autre  et  sont  comme  des 
appendices  ajoutés  au  Pentateuque  entier. 

III.  Authenticité.  —  Nous  revendiquons  l'authenti- 
cité mosaïque  du  Pentateuque  et  avec  la  tradition  juive 
il  chrétienne  nous  pensons  que  Moïse  est  l'auteur  du 
livre  qui  porte  son  nom.  Mais,  avant  de  faire  la  démons- 
tration de  cette  thèse  et  de  résoudre  les  objections 
qu'on  lui  oppose,  il  est  bon  de  déterminer  dans  quel 
sens  nous  entendons  maintenir  l'authenticité  mosaïque 
du  Pentateuque  et  d'indiquer  la  part  que  Moïse  a  prise 
à  la  rédaction  du  livre. 

/.  NATDRB  bi:  L'AUTHENTICITÉ  MOSAÏQUE.  —  D'abord, 
nous  ne  disons  pas  avec  Joséphe,  Philon  et  quelques 
rabbins  juifs,  dont  les  témoignages  seront  rapportés 
plus  loin,  que  Moïse  a  personnellement  écrit  ou  dicté 
le  l'entateuque  entier,  y  compris  le  récit  de  sa  mort. 
Deut.,  sxxiv,5-12.  Déjà,  des  Juifs  dans  le  Talmud  attri- 
I  lient  à  Josué  les  huit  derniers  versets  de  la  loi.  Au 
rapport  d'Abenesra  (f  1167),  le  rabbin  Isaac  ben  Jasus 
(y  1057)  soutenait  que  Gen.,  xxxvi,  31,  avait  été'  écrit 
sous  le  règne  de.Iosaph.it.  Abenesra  lui-même  disait  en 

i es  voilés  que  les  passages,  Gen.,  \n.  6;  xxn.  li: 

Deut.,  i,  1.5;  m.  11;  xxxi,  9.  étaient  des  additions  faites 
au  texte  primitif  ou  en  contenaient.  Cf.  D.  Spinoza. 
Trait,  theolog.  polit;,  c.  vin,  dans  Opéra,  2"  édit.   Van 


Vloten  et  Land,  La  Haye,  1895,  I.  il,  p.  56-58:  Richard 
Simon,  Critique  de  la  Bibliothèque  des  auteurs  i 
siastiques,  Paris,  1730,  t.  m,  p.  195-221.  André  M.isius. 
Josuee  imperatoris  historia  illustrata,  Anvers,  1574, 
prœf.,  p.  2,  dans  Migne,  Cursus  completus  Script. 
Sac,  t.  vu,  col.  853,  affirma  que  le  Pentateuque  avait 
été  expliqué  et  complété  longtemps  après  Moïse  et  il 
signala  le  nom  d'Hébron,  substitué  à  Cariath-Arbé. 
comme  un  exemple  de  ce  travail  d'adaptation  posté- 
rieure. Les  jésuites  Benoit  Pereira,  Comment,  et  disp. 
in  Gen.,  Lyon,  1594,  t.  i,  p.  13-14;  Jacques  Bonfrère, 
Pentateuchus,  Anvers,  1625,  p.  93-94 ;  Tirin.  Comment, 
in  V.  et  A'.  T.,  cité  dans  Jean  de  la  Haye,  Biblia 
maxima,  Paris,  1669,  t.  m,  p.  582,  reconnaissaient 
dans  le  texte  actuel  des  additions,  faites  par  des  scribes 
inspirés  après  Moïse,  etils  citaientGen.,  xiv,  li;  Num., 
xii.  M:  \xi,  14,  15.  Jansénius,  évêque  d'Ypres,  Penta- 
teuchus, Louvain,  1685,  pr;ef.,  p.  2,  admettait  aussi 
quelques  additions  de  cette  nature.  Corneille  de  la 
Pierre,  Comment,  in  Pent.,  arg.,  dans  Comment,  in 
V.  etN.  T.,  Lyon,  1732,  t.  i,  p.  18,  émit  même  l'hypo- 
thèse que  Moïse  avait  rédigé  le  Pentateuque  par  ma- 
nière de  journal  et  d'annales,  et  que  Josué  ou  un  autre 
avait  mis  en  ordre  ces  annales  en  y  insérant  quelques 
additions,  telles  que  le  récit  de  la  mort  de  Moïse,  son 
éloge,  -Num.,  xii,  3,  et  en  modifiant  ou  complétant 
certains  détails,  comme  Gen.,  xiv,  li  :  Num.,  xxi,  14. 
15.  27.  Au  siècle  suivant,  un  autre  jésuite,  le  P.  Veith, 
Sacra  Scriptura  contra  incredulos propugnata,  part.  1, 
sect.  i,  q.  m,  n.  8,  9,  dans  Migne,  Cursus  completus 
Script,  sac.,  t.  iv,  col.  22,  note;  2e  édit.,  col.  195-196, 
est  du  même  sentiment  que  Corneille  de  la  Pierre. 
Bellarmin,  Controversise,  Milan,  1721,  t.  i,  p.  166, 
attribuait  à  Esdras  une  revision  du  Pentateuque,  coin- 
prenant  l'addition  du  dernier  chapitre  du  Deutéronome 
et  l'insertion  de  quelques  détails  dans  le  texte.  Dom 
Calmet,  Commentaire  littéral,  2e édit.,  Paris,  1724, 1. 1, 
p.  9;  t.  n,  p.  401,  admettait,  avec  l'addition  finale, 
l'introduction  de  quelques  gloses  dans  le  texte  origi- 
nal. C'est  devenu  au  xixe  siècle  l'enseignement  des 
exégètes  et  des  théologiens  catholiques  que  l'œuvri  de 
Moïse  a  subi  des  changements  de  noms  propres  et  des 
altérations  de  nombres,  des  additions  et  des  modifica- 
tions de  détails,  et  même  qu'elle  a  reçu  peut-être  dans 
sa  partie  législative  certaines  dispositions  complémen- 
taires. Haneberg,  Histoire  de  la  révélation  biblique, 
trad.  franc.,  Paris,  1856,  t.  i,  p.  222-223;  J.-T.  Lamy, 
Comment,  in  lib.  Geneseos,  Malines,  18S3,  t.  t,  p.  36- 
39;  F.  Kaulen,  Einleit-ung  in  die  heilige  Schrift, 
■1  =  édit.,  Fribourg-en-Brisgau,  1890.  p.  172-'l79;  F.  Vi- 
goureux, Manuel  biblique,  12e  édit.,  Paris,  1900,  t.  i? 
p.  463-477;  Ch.  Pesch,  Apparatus  ail  historiam  cox- 
vam  doctrinse  inspirationis  pênes  catholicos,  Rome, 
1903,  p.  75:  F.  Prat,  Le  code  du  Sinaï,  Paris,  [904, 
p.  46-60;  Hôpfl,  Die  hôhere  Bibelkritik,  Paderborn, 
1902,  p.  35.  Voir  t.  iv,  col.  337-339.  Quelques-uns  de  ces 
critiques  ont,  en  outre,  admis  que  Moïse  s'était  servi 
de  documents  antérieurs  pour  la  rédaction  de  la  Genèse, 
et  d'autres  ont  renouvelé  encore  l'hypothèse  de  l'emploi 
de  secrétaires,  choisis  par  Moïse  et  contrôlés  par  lui, 
sinon  personnellement  inspirés,  comme  l'avait  pensé 
Richard  Simon.  .1.  Brucker,  Authenticité  des  livres  de 
Moïse,  dans  les  Études,  1888,  t.  xxm,  p.  327,340;  card. 
Meignan,  De  l'Éden  à  Moïse.  Paris,  1895,  p.  OS-77  : 
lil.,  David,  roi.  psalmiste,  prophète,  Paris,  1889,  intro- 
duction, p.  XXXIV-I.XV. 

M.  Hoberg,  Ueber  négative  und  positive  Pentateuch- 
kritik,  dans  Biblische  Sludien,  Fribourg-en-Brisgau, 
1901.  t.  vi,  fasc.  1  et  2.  p.  7-9;  Moses  und  dei  l'enla- 
teuch,  Fribourg-en-Brisgau,  1905,  g  17-69,  él  ndjayan- 
tage  le  champ  des  additions  historiques  el  législatives 
lai  li-  .ni  Pentateuque  postérieurement  ;>  Moïse.  Il  signal* 
au  nombre   des  premières  la   conclusion  du  Deutéro- 


63 


PEXTATEUQUE 


64 


nome,  xxxi-xxxiv.  ajoutée  peut-être  par  Josué  ;  des  listes 
complétées,  telles  que  celle  de  Gen..  xxxvi.  poussée  jus- 
qu'au temps  de  David  ou  de  Salomon  :  Exod..  xxxvi,  S- 
XXXix,  43,  qui  ne  serait  qu'une  répétition  retouchée 
d'Exod..  xxv,  10-xxxin,  43;  Exod.,  xxx  ;  N'uni.,  x.  29- 
32,  35,  36:  xxvn.  14:  Deut.,  in,  86,  11.  14;  iv.  41-43: 
pi  ut-élre  aussi  Gen.,  xxn,  146;  certainement  Deut..  x. 
6-9;  xxi.  'i  :  peut-être  les  deux  chants,  N'uni.,  xxi.  136- 
15;  16  6-18;  certainement  les  introductions,  Deut.,  I, 
1-5;  iv.  1 1- 49.  11  est  plus  difficile  de  discerner  les  ad- 
ditions législatives.  Quelques  exemples  de  transforma- 
tions paraissent  admissibles  :  ainsi  la  loi  sur  la  dîme 
qui  se  présente  sous  cinq  formes  différentes.  Exod.. 
xxn,  28;  Xurii.,  xvm,  21-32;  Deut..  xn.  6.  11,  17;  xiv  : 
22-29;  xxvi.  12-15.  Toute  disposition  qui  suppose  une 
habitation  fixe,  comme  Lev.,  xxv.  32-34,  est  vraisem- 
blablement, selon  M.  Hoberg,  d'origine  postérieure  à 
.Moïse.  D'autre  part,  les  réflexions  générales,  les  titres  et 
les  conclusions  des  sections  appartiendraient  rarement 
au  texte  original.  Moïse  n'a  donc  pas  écrit  chaque  mot. 
chaque  phrase  du  Pentateuque  ;  il  en  est  l'auteur;  mais 
son  œuvre  a  pu  recevoir  au  cours  des  siècles  quelques 
additions  et  modifications,  depuis  le  temps  de  sa  com- 
position jusqu'après  le  retour  en  Palestine  des  Juifs 
captifs  à  Babylone. 

La  Commission  biblique  a  reconnu  la  légitimité  de 
cette  manière  d'envisager  l'authenticité  mosaïque  du 
Pentateuque.  Le  27  juin  1906.  Pie  X  approuvait  les  solu- 
tions qu'elle  avait  données  à  quatre  questions  soumises 
à  son  examen.  Elle  maintient  d'abord  l'authenticité  de 
ce  livre;  les  trois  autres  réponses  en  expliquent  la 
nature  :  II.  Utrum  mosaica  authentia  Pentateuchi 
lalemnecessario  poslulet  redactionem  totius  operis,  ut 
prorsus  tenendum  sit  Moysen  omnia  et  singula  manu 
sua  scripsisse  vel  anianuensibtis  dictasse  ;  an  etiam 
eoruni  hypothesis  permilti  possit  qui  existimant eum 
opus  ipsum  a  se  sub  divines  inspirationis  afflatu 
-  ,.,,.  e\  lum  alteri  vel  pluribus  scribendum  commisisse, 
Ha  tamen  ut  sema  sua  fideliter  redderent,  nikil 
siuuu  voluntatem  scriberent,  nihil  omitterent;  ae  tan- 
dem opus  hoc  ratione  confectum,  al>  eodem  Moyse 
principe  inspiratoque  auctore  prolatum,  ipsiusmet 
nomme  vulgaretur?  Resp.  Négative  ad  primatn  par- 
tent, affirmative  ad  secundam.  —  III.  Utrum  absque 
prsejudicic  mosaics  authenlUe  Pentateuchi  concedi 
possit  Moysen  ad  suum  conficiendum  opus  fontes  ad- 
liibuisse,  scripta  videlicet  documenta  vel  orales  tradi- 
tiones,  ex  quibus,  secundum  peculiarem  scopum  sibi 
tub  divinte  inspirationis  afflatu,  non- 
nulla  hauserit  eaque  ad  aerbum  vel  quoad  sententiam, 

'fia  vel  ampli ficala ; ipsi  o]>rr>  insm  i 

Affirmative.    —    IV.     Utrum,    salva    substantialiter 
mosaica   authenlia    et    integritate    Pentateuchi,    ad 
possit  tant  longo  sœculorum  dei  tmullas 

ei  modificationes  obvenisse,  mi  :addimenta  post  Moysi 
em  vel  ab  auctore  impirato  appi  glossas 

et  explicationes  textui  interjectas,  vocabula  qusedam 
et  formas  se>  mone  antiquato  in  serti 
rem  translatas  ;  mendosas  demum  lectiones  vitii 
nuensium  adscribendas,  de  quibus  fas  *it  ad  normas 
arlis  criticœ  disguirere  et  judicaref  Resp.  Affirma- 
tive, salvo  Ecclesise  judicio. 

C'est  sous  la  triple  réserve  :  I  de  l'emploi  de  secré- 
is,  choisis  et  contrôlés  par  Moïse,  qui  aurait  publié 
sous  sa  garantie  personnelle  le  travail  commandé  i 
surveillé  par  lui;  2°  du  recours  à  des  documents  écrits 
ou  à  des  traditions  orales,  reproduits  ou  utilisés  par 
lui  dans  son  œuvre  personnelle  et  pour  les  événements 
antérieurs  à  son  époque;  3°  de  quelques  modifications 
postérieures,  introduites  après  coup  dans  le  Penta- 
teuque achevé,  que  nous  soutiendrons  l'authenticité 
un  aïque  de  ce  livre.  Pour  attribuer  à  Moïse  le  Penta- 
teuque, nous  ne  tenons  donc   pas  comme  nécessaire 


qu'il  ait  écrit  lui-même  ou  dicté  mot  à  mot  à  des  co- 
pistes tout  le  contenu;  il  suffit  que  tout  ait  été  publié 
sous  sa  responsabilité  et  reproduise  fidèlement  et  exac- 
tement ce  qu'il  avait  ordonné  à  ses  secrétaires  d'écrire 
en  son  nom.  De  même  encore,  les  additions,  telles  que 
le  récit  de  la  mort  de  Moïse,  des  gloses  introduites 
dans  le  texte,  soit  pour  expliquer  des  usages  anciens, 
soit  pour  remplacer  des  termes  archaïques  par  des 
formes  plus  récentes,  enfin,  les  fautes  de  transcription 
ne  nuisent  pas  plus  à  l'authenticité  qu'à  l'intégrité  sub- 
stantielle du  Pentateuque.  Xonobstant  ces  additions  et 
modifications,  le  Pentateuque  reste  l'œuvre  de  Moïse 
auteur  responsable  et  inspiré,  ayant  peut-être  fait  rédi- 
ger par  ses  secrétaires  une  partie  de  ses  récits  ou  de 
ses  lois. 

//.  PREUVE?  DE  L'AUTHENTICITÉ  MOSAÏQUE  DU  PBNTA- 
VBUQUE.  —  Que  Moïse  ait  écrit  le  Pentateuque,  qui 
porte  son  nom,  c'est  un  fait  attesté  :  1°  par  différents 
témoignages  bibliques  ;  2°  par  le  sentiment  perpétuel 
des  Juifs;  3°  par  la  tradition  constante  de  l'Église  ca- 
tholique ;  et  4J  confirmé  par  des  indices  fournis  par  le 
livre  lui-même. 

1°  Témoignages  bibliques  de  l'activité  littéraire  de 
Moïse.  —  Si  on  ne  lit  nulle  part  dans  la  Bible  l'affir- 
mation explicite  et  formelle  que  Moïse  a  rédigé  le  Pen- 
tateuque entier,  il  y  a  cependant,  en  différents  livres 
des  deux  Testaments,  des  indications  et  des  affirmations 
desquelles  il  résulte  que  Moïse  a  écrit  des  faits,  des  lois 
qui  sont  contenus  dans.le  Pentateuque.  —  1.  Témoignage 
du  Pentateuque  lui-même.  —  Le  livre  entier  ne  se  pré- 
sente pas  expressément  comme  ayant  été  composé  par 
Moïse.  Outre  qu'il  contient,  dans  son  élat  actuel,  le  récit, 
évidemment  postérieur,  de  la  mort  de  Moïse,  il  raconte 
la  vie  du  législateur  hébreu  à  la  troisième  personne  et  en 
style  indirect,  et  les  quatre  derniers  livres  n'ont  pas  la 
forme  littéraire  de  Mémoires  du  héros  dont  ils  font 
l'histoire.  Toutefois  le  caractère  impersonnel  du  récit 
peut  fort  bien  se  concilier  avec  la  rédaction  par  Moïse. 
On  peut  dire  que  la  formule  :  g  Dieu  dit  à  Moisi  . 
si  souvent  employée,  en  tête  des  lois,  qui  prouve  l'ori- 
gine divine  ou  la  révélation  faite  à  Moïse,  de  cetle  légis- 
lation, ne  signifie  pas  nécessairement  que  Moïse  lui- 
même  a  codifié  dans  le  Pentateuque  les  lois  qu'il  a 
promulguées.  Mais  le  Pentateuque  cependant  donne 
des  indications  formelles  sur  l'activité  littéraire  de 
Moïse.  Après  la  bataille  contre  les  Amalécites  à  Raphi- 
ilim,  le  chef  des  Hébreux  reçut  île  Dieu  l'ordre  suivant  : 
»  Écris  cela  en  souvenir  dans  le  livre  et  inculque-le 
dans  les  oreilles  de  Josué.  »  Exod..  xvn.  14.  L'ordre 
divin  est  certainement  restreint  à  la  victoire  sur  Ama- 
lec,  dont  Israël  devait  garder  le  souvenir.  Deut..  xxv. 
17-19,  et  dont  le  réc  l'ut  rédigé  pai  Moïse  afin  de  con- 
serverla  mémoire  de  l'événement.  Selon  la  leçon 

qui  .  -:::    Dieu  ordonne  à  Moïse  d'écrire  dans  le 

livre,  c'est-à-dire  comme  on  l'interprète  communémi  n1 
dans  un  livre  déjà  commence'' et  connu,  dans  un  registre 
ou  journal  où  Moïse  notait  les  faits  mémorables  de 
l'histoire  d'Israël. En  ponctuant  ainsi  le  texte,  les 
sorètes  eux-mêmes  voulaient  vraisemblablement  dési- 
gner, non  pas  le  livre  des  justes,  F.  de  Hummelauer, 
Exodus  et  Leviticus,  Paris,    1897,   p.  182;  Deut 

Paris,  1901,  p.    152,  mais  le  Pentateuque  lui- 
.  Cependant  le^  Septante  ne  lisaient  pas  l'article  dé- 
fini, puisqu'ils  ont  traduit  ce  mot  :  ei;  |5i6X(ov  ou  êv  [i\- 
■•...  I  e  texte,  à  leur  sentiment,  désignai!  donc  un  livre 
indéterminé.  J.  Kley,  Die  Pentateuchfrage,  Munster. 

1903,  p.  217.  a  prétendu  que  cette  dernière  signification 

i  ii  isc  -■.',  employée  dans  ce  sens.  Deut.. 

xvn.  18:  xxxi.  21:  Is.,  xxx.  8;  .1er..  x\\.  2;  xxxvi.  2. 
Néanmoins  la  leçon  massorétique,  lut-elle  originale,  ne 
désignerait  pas  nécessairement  le  Pentateuque  com- 
mencé; elle  conviendrait  suffisamment  à  un  livre,  dans 


•65 


PENTATEUQUE 


66 


lequel  Moïse  aurait  joint  ce  récit  à  des  récits  précé- 
dents et  qui  serait  reproduit  dans  le  Pentateuque.  Plus 
loin,  Exod.,  xxiv,  4,  il  est  dit  que  Moïse  écrivit  toutes 
les  paroles  de  Jéhovah.  Or  il  ne  s'agit  naturellement 
pas  de  toutes  les  révélations  faites  par  Dieu  à  Moïse, 
•puisqu'elles  n'étaient  pas  terminées,  ni  même  de  toutes 
les  communications  divines  antérieures,  mais  seule- 
ment des  paroles  qui  précèdent  immédiatement  et  qui 
contiennent  les  conditions  de  l'alliance  conclue  entre 
Dieu  et  les  Israélites,  Exod.,  xx-xxm,  du  «  livre  de 
l'alliance  »,  que  Moïse  lut  au  peuple.  Exod.,  xxiv,  7. 
Cf.  Ileb.,  ix,  "19,  20. 

Les  deux  témoignages  précédents  prouvent  déjà  que 
Moïse  avait  rédigé  un  récit  historique  et  un  code  légis- 
latif, celui  de  l'alliance.  Un  autre  petit  code  de  l'alliance 
est  encore  expressément  attribué  à  Moïse.  De  nouveau, 
Dieu  ordonna  au  législateur  d'écrire  les  paroles  qu'il 
vient  de  prononcer,  Exod.,  xxxiv,  10-26,  et  qui  con- 
tiennent les  bases  de  l'alliance  proposée  à  Israël,  Exod., 
xxxiv.  27.  et  Moïse  écrivit  les  dix  paroles  de  l'alliance 
sur  deux  tables  qu'il  avait  préparées,  Exod.,  xxxiv,  1, 
4,  qu'il  tenait  en  mains  à  la  descente  du  Sinaï  et  dont 
il  imposa  le  contenu  aux  Israélites.  Exod.,  xxxiv,  28, 
29,  32.  Le  petit  livre  de  l'alliance,  comprenant  le  Déca- 
logue,  Exod.,  xxxiv,  10-26.  a  donc  été  rédigé  de  la  main 
de  Moïse. 

Un  autre  ordre  de  Dieu  impose  à  Moïse  de  décrire 
les  marches  et  les  stations  d'Israël  dans  le  désert. 
Num.,  xxxiii,  1,  2.  On  a  interprété  cet  ordre  de  deux 
façons  différentes.  Selon  les  uns,  Dieuaurait  ordonné  à 
Moïse  d'écrire  le  récit  de  l'exode,  en  suivant  l'ordre 
des  stations  et  des  campements  des  Israélites.  Dans 
cette  interprétation,  Moïse  serait  l'auteur  de  la  narra- 
tion détaillée  dont  la  liste  des  campements  dressée, 
Num.,  xxxiii,  3-49,  ne  serait  que  le  résumé.  Mais  comme 
cette  liste  ne  résume  pas  la  narration  précédente, puis- 
qu'elle indique  un  plus  grand  nombre  de  stations,  dont 
quelques-unes  sont  différentes,  il  vaut  mieux,  semble- 
t-il,  avec  d'autres,  restreindre  cet  ordre  à  la  liste  elle- 
même  des  stations  qui.  suivant  cette  explication,  serait 
l'œuvre  de  Moïse. 

Parce  que  les  témoignages  précédents  n'attribuent 
pas  explicitement  à  Moïse  la  rédaction  du  Pentateuque 
entier,  et  ne  lui  en  rapportent  que  des  portions  seule- 
ment, les  critiques  modernes  veulent  en  conclure 
qu'ils  restreignent  la  composition  mosaïque  à  ces  par- 
ties et  qu'ils  excluent  celle  du  tout.  Mais  cette  conclu- 
sion n'est  pas  légitime.  La  rédaction  des  passages  men- 
tionnés est  toujours  exécutée  par  ordre  divin.  En 
ordonnant  à  Moïse  d'écrire  le  récit  des  événements  les 
plus  notables  pour  en  garder  le  souvenir  et  les  dispo- 
sitions fondamentales  de  son  alliance  avec  Israël,  Dieu 
ne  lui  interdisait  pas  de  relater  l'histoire  entière  des 
Israélites  au  désert  ni  de  rédiger  toutes  les  lois  qu'il 
l'avait  chargé  de  porter.  Son  ordre  de  mettre  par  écrit 
les  faits  et  les  lois  les  plus  importants  est  loin  d'exclure 
la  relation  des  autres  événements  et  des  autres  disposi- 
tions législatives. 

Le  Deutéronome,  composé  de  discours  prononcés  par 
Moïse,  nous  fournit  une  indication  sur  l'activité  litté- 
raire de  Moïse  dans  l'épilogue,  xxxi.  Sur  le  point  de 
mourir,  Moïse,  après  avoir  institué  Josué  son  succes- 
seur, remet  aux  prêtres  et  aux  anciens  cette  loi-ci  qu'il 
avait  écrite  et  il  leur  ordonne  de  la  faire  lire  tous  les 
sept  ans  au  peuple  assemblé  pour  que  tous  en  con- 
naissent et  en  observent  les  préceptes,  9-13.  Ayant 
acuevé  d'écrire  «  les  paroles  de  cette  loi  dans  un  livre  », 
il  ordonne  aux  lévites  de  porter  ce  livre  auprès  de 
l'arche  d'alliance,  pour  qu'il  serve  de  témoignage  contre 
ceux  qui  en  violeront  les  dispositions,  24-26. On  ne  peut 
pas  affirmer  avec  certitude  que  cette  loi  est  le  Pentateuque 
entier,  car  elle  peut  n'être  que  celle  à  laquelle  le 
c.  xxxi  est  rattaché  :  la  législation  du    Deutéronome 

DICT.   DE   LA   BIBLE. 


Ce  livre  se  donne  comme  une  législation  spéciale  pro- 
mulguée par  Moïse  au  pays  de  Moab,  iv,  1-40,  44-49; 
V,  1  sq.  ;  xii,  1  sq.  Au  début  de  leur  règne,  les  futurs 
rois  d'Israël  devaient  recevoir  des  prêtres  a  un  exem- 
plaire de  cette  loi-ci  »,xvn,  18,  19,  pour  qu'ils  la  lisent 
et  l'observent,  et  les  termes  de  la  recommandation  sont 
identiques  à  ceux  de  Deut.,  xxxi,  12,  13.  La  même  loi, 
ou  au  moins  une  de  ses  parties,  est  encore  visée  dans 
l'ordre  donné  aux  anciens  de  la  transcrire  sur  la  pierre, 
lorsqu'ils  renouvelleront  l'alliance  à  l'ouest  du  Jour- 
dain, xxvn,  1-8.  De  même  encore,  «  les  paroles  de 
cette  loi-ci  qui  sont  écrites  dans  ce  volume,  »  xxvm, 
5S,  qui  comprenaient  les  malédictions  et  les  peines, 
portées  en  ce  chapitre  contre  les  violateurs  de  la  loi, 
cf.  j .  (il,  et  rappelées  de  nouveau,  xxix,  20,21,  27, aussi 
bien  que  les  bénédictions  qui  y  sont  jointes  en  faveur 
des  observateurs  de  la  même  loi,  xxxn,  46,  47,  dési- 
gnent le  Deutéronome.  Ce  livre  législatif  est  donc  de 
la  main  de  Moïse.  On  attribue  encore  à  Moïse  la  com- 
position d'un  cantique  que  Dieu  lui  avait  ordonné 
d'écrire,  Deut.,  xxxi,  19,  et  qui  est  cité,  xxxn,  1-43. 

Des  commentateurs  catholiques  concluent  de  Deut., 
I,  5,  où  il  est  dit  que  Moïse  va  expliquer  la  loi,  que  la 
législation  antérieure,  dont  le  Deutéronome  n'est  qu'une 
explication  et  une  répétition,  est  d'origine  mosaïque.  Mais 
toutefois  la  loi  que  Moïse  va  expliquer  ou  mieux  re- 
commander parait  être  plutôt,  non  celte  qui  précède  et 
qui  est  contenue  dans  les  livres  du  milieu,  mais  celle  qui 
suit  et  qui  est  promulguée  au  delà  du  Jourdain.  Il  faut 
reconnaître,  du  reste,  que  si  l'introduction  avait  la  si- 
gnification qu'on  lui  donne,  elle  affirmerait,  non  pas 
que  la  législation  précédente  a  été  rédigée  par  Moïse, 
mais  seulement  qu'elle  a  été  promulguée  par  lui.  Or, 
de  la  promulgation  de  la  législation  hébraïque  par 
Moïse  on  ne  peut  conclure  rigoureusement  à  sa  rédac- 
tion par  Moïse  dans  l'état  où  elle  se  trouve  actuelle- 
ment dans  le  Pentateuque.  Celle-ci  est  possible,  vrai- 
semblable même,  mais  elle  n'est  pas  démontrée  par  le 
seul  fait  de  la  promulgation  mosaïque. 

2.  Témoignages  des  outres  livres  de  l'Ancien  Testa- 
ment. —  Le  livre  de  Josué  parle  à  plusieurs  reprises 
d'une  loi,  provenant  de  Moïse.  D'abord,  Dieu  ordonne 
à  Josué  d'observer  lui-même  et  de  faire  observer  aux 
autres  la  loi  de  Moïse  et  il  lui  recommande  de  méditer 
le  volume  de  cette  loi.  Jos.,  i,  7-8.  Si  les  termes  de 
cet  ordre  ne  disent  pas  explicitement  qu'il  s'agit  de 
tout  le  Pentateuque,  ils  ne  l'excluent  pas  non  plus.  Le 
renouvellement  de  l'alliance,  accompli  conformément 
aux  ordres  de  Moïse  tels  qu'ils  sont  écrits  dans  le  livre 
de  la  loi  de  Moïse,  Jos.,  vm,  30-35,  vise  directement 
les  prescriptions  de  Deut.,  xxvn,  1-8,  avec  les  bénédic- 
tions et  les  malédictions  contenues  Deut.,  xxvn,  9- 
xxvin,  68;  mais  la  manière  dont  parle  l'auteur  sacré 
suppose  qu'il  y  a  aussi  autre  chose  dans  le  livre  de  la 
loi.  Avant  de  mourir,  Josué  exhorte  les  Israélites  à 
observer  tout  ce  qui  est  écrit  dans  le  volume  de  la  loi 
de  Moïse,  Jos.,  xxm,  6,  ce  qui  désigne,  en  le  prenant 
dans  le  sens  le  plus  restreint,  le  Deutéronome.  Enfin, 
après  l'alliance  solennelle  conclue  à  Sichem,  Josué 
dressa  un  statut  et  une  ordonnance,  et  il  écrivit  toutes 
ces  paroles  «  dans  le  livre  de  la  loi  de  Dieu  ».  Jos., 
xxiv,  25-26.  Ce  texte  signifie  que  Josué  a  ajouté  ses 
ordonnances  en  les  écrivant  à  la  suite  du  livre  où 
étaient  contenues  celles  de  Moïse.  La  législation  de 
Moïse  était  donc  écrite  et  révélée  par  Dieu.  Voir  Ho- 
berg,  Ueber  den  Vrsprung  des  Pentalenchs,  dans  Bi- 
blische  Zeitschrift,  1906,  t.  iv,  p.  310,  qui  pense  que 
ce  volume  de  la  loi  de  Dieu  est  le  Pentateuque.  Il 
désigne  au  moins  le  Deutéronome. 

Les  livres  des  Juges  et  de  Samuel  ne  parlent  pas  en 
propres  termes  du  Pentateuque,  mais  ils  suppDsent 
son  existence.  Voir  Jud.,  i,  5,  et  Exod.,  xxxm,  2, 
xxxiv,   11;  Deut.,   vu,   1,  etc.;  Jud.,  n,  1-3,  et  Exod.; 

V.  -  3 


67 


PENTATEUQUE 


68 


xxxiv  12-13;  Deul.,  vu.  2,  5;  Exbd.,  xxiii,  32;  Deut., 
xii,  3;  Num.,  xxxm,  35,  etc.;  Jud.,  xi,  15, el  Num.,xx, 
14-21;  xxi,  21-24,  etc.';  I  Reg.,l,  3;  n.  13,  et  Deut.,xvni, 
•;  |  Reg  xv  29,  el  Num.,  xxiii,  19;  I  Reg-,  xii,  3,  et 
Num.,  xvi,  L5;  Lev.,  v,  13,  etc.  Les  livres  des  Rois  (III 
et  IV  i  composés  vers  l'époque  de  la  captivité,  parlent 
plusieurs  fois  de  la  loi  de  Mois,  el  c  ist  sans  raison 
suffisante  qu'on  veut  restreindre  cette  expression  au 
D  ,  ronome  seul.  1  (lin  Reg.,  n,  3;  x,  31.  L'auteur 
Pque  qu'Amasias,  quand  il  lit  périr  les  meurtriers 

péri      | il"  m      ufant£     selon  cequiesl  écril 

il    IVi  Reg.,  xiv.  6.  Les  étran- 

exportés  i  Samarie,  n'observaient  pas  les  ordon- 

qU     Dieu  avail  données  aux  Qls  de  Jacob.  Le 

Israélite  qui  fui  envoyé  pour  les  insh  i li  ur 

,,,,..  i,  i  l'observance  di  -  lois  écrites  que  Dieu  avail  im- 
posées aux  Israélites.  II  (IV)  Reg.,  xvii,  34-39.  Les 
i,..l  itants  du  royaume  de  îuda  ont  été  séduits  par  Ma- 
I,  m  roi  idolâtre,  et  n'ont  pas  tenu  compte  des 
magnifiques  promesses  que  Dieu  avail  faites  à  David  el 
mon  si  leurs  sujets  observaient  fidèlement  toute 
|a  loi  que  Moïse  avail  e.  II  (IV)  Reg.,  xxi,  y. 

Cf.  1  illli  Reg.,  ix,  6-9. 

La   [8  année  du  règne  di    I  621),  en  restauranl 

I,  i  mple  de  Jérusalem  on  retrouva  mïnn  usa,  II  (IV) 
Reg.,  xxn.  8.  Il,  cf.  xxiii,  '21.  appelé  enaore  nnan  -iso, 
xxiii,  2,  et  c'csl  conformément  à  cette  loi  retrouvée 
roi  accomplit  une  importante  réforme  religieuse. 
II  (IV)  Reg.,  xxiii,  1-24.  Voir  t.  m,  col.  1680-1681.  Or 
cette  loi  étail  la  loi  de  Moïse,  puisqu'il  est  dit,  xxiii  25, 
cun  roi  ni  avant  ni  après  ne  ressembla  à  Josias 
pour  l'observation  complète  de  celle  loi.  Mais  quelle 

.lut  cette  loi  Saïque  retrouvée  au  Temple?  Plusieurs 

i de  l'Église  onl  remarqué,  justement  semble-t-il, 

que    c  étail   le   Deuti  ronome.   S.   Aihanase,  Epist.    ad 

;/,,,  ,  lin  .  32,  i.  xxvii,  col.   44;  s.  Jérôme,  Adv.  Jo- 

,.,  I.  5,  t.  xxiii,  col.  -217:  Comment,  in  Ezech., 

,.     |.    |.    xxv,    col.     17;     S.    Chrysu-L lu     Mullli.. 

nom'.  IX,  i,  t.  ivn,  col.  181  j  In  1  Coi:,  hom.  vu, 
3]  i.  ,\i,  col.  58;  Procope  de  Gaza,  t'otiiwien*.  !» 
/), ■../  .  xvii,  18,  t.   iaxwii,   col.  916.  La  pluparl  des 

critiques  dernes reconnaissent  aussi  clan- c  code  le 

Deutéronome  tout  entier,  ou  au  moins  en  partii     I. 

-m  lesquels  s'est  faite  la  réforme  :  1°  l'abolition 
des  cultes  étrangers  el  de  leurs  infiltrations  dans  le 
culte  de  Jéhovah;  2°  la  centralisation  du  culte  de  .lé- 
hovah  au  Temple  de  Jérusalem;  3  la  célébration  cor- 
recte de  la  fête  de  Pâqne,  sonl  spécialement  recom- 
mandés par  le  Deutéronome,  xu.  --:'>- :  xvi,  1-8.  En 
outre,  bien  que  ce  livre  ne  soil  pas  nommé  i  livre  de 
l'alliance  »,  il  a  été  rédigé  en  vue  de  renouveler 
l'alliance  contractée  à  l'Horeb  entre  Dieu  et  le  peuple 
d'Israël,  v,  -J.  3;  xxvi,  17-19;  x\i\.  8,  el  les  1er: 
i  aiii  mi  -  renouvi  léi  pai  li  is  ,  Il  <I\  >  Reg.,  xxw,  3, 
.,,i,i  des  expressions  deutéronomiques.  Enfin,  la  ré- 
ponse de  la  prophéti     i    llolda  vise  les  malédictions, 

Deut.,   xxviii .  i n!'  ou    !■ .  islatif  du  livre  n 

esl  désigné  par  les  termes  usités  Deut.,  iv,  45;  vi,  20, 
,  i  | ,  loge  du   roi  i    I  fail   aussi  en  termes  deul 
miques.  Le  livre  retrouvé  étail  donc  bien  le  Deutéro- 
nommé  la   loi  de   Moïse.   F.  de   Hummelauer, 
/,  mium,  Paris,   1901,  p.   16-60,  83-87.  Cepen- 

dant, quelque     exégèl       i  itboliques,  Clair,   l.- 
des  Rois,  Paris,  1884,  t.  u.  p.  557-558;  Hoberg,   \£oset 

Pentateucli,  lui rg-en-Brisgau,  1905,  p.  17- 

8  .  Ueberden  '  <  dansiî 

Zeilschrift,  1906,  I.  iv,  p.  338340,  pensent  que  le  livre 
luvéétail  le  Pentateuque  entier,  ils  s'appuient  sur 
le  ,.  cil  parallèle,  Il  Par.,  xxxiv,  8-xxxv,  19,  qui  certai- 
uemi  ol  parle  du  Pentateuqi  •  ,  ntiei  (voir  plus  loin), 
sur  ce  que  les  pai  ticulariti  -  de  la  réforme  déci  ites, 
xxiii.  -i,  ne  convienncnl  pas  seulement  à  Dent.,  xvm, 


1(1-1 1.  mais  aussi  à  Lev.,  xix.  31  :  xx.  6,  27;  sur  ce  que  le 
style  de  ce  verset  ressemble  à  celui  de  Lev..  xix,  31; 
xx  6,  27;  Gen.,  xxxi,  19,  34,  3ô,  et  enfin  sur  le  senti- 
ment de  Josèphe,  .1»-/.  jud.,  X,  iv,  2,  dans  Opéra, 
Amsterdam,  17-21.  t.  ...  p.  517,  qui  dit  que  Helcias 
itUYYÔvev  -x.--f,x\:  pfêîiotçTOÙ  MiMJrâoî.Ces preuves  ne 
sont  pas  décisives.  L'auteur  des  Paralipomenes  a  dé- 
crit les  rites  de  la  Pâque  d'après  les  livres  du  milieu. 
Les  prophètes  antérieurs  à  la  captivité  ne  parlent  pas 
de  h  loiécriti  de  Moïse.  Ils  parlent  souvent,  il  esl  vrai, 
de  la  loi  de  Dieu.  Visent-ils  un  code  écrit  et  notaui- 
,,,,.„!  I,.  ivntaioiiquev  lieaucoup  d'exégètes  le  pensent 
i  i  signalent  toute  mention  de  la  loi  divine  par  les  pro- 
ph<  i.  s  comme  un  indice  certain  de  l'existence  du  Pen- 
tateuque. Mais  il  faut  se  rappeler  la  double  signification 

i tôt  fôrâh.  Son  sens  propre  esl  celui  d'instruction 

,.t  désigne  strictement  toute  expression  i 
volonté  divine.Ce  n'estque  par  extension  que  ce  terme 
a  servi  à  nommer  les  cinq  premiers  livres  de  la  Bible, 
dans  lesquels  l'élémenl  législatif  prédomine.  Or,  on  ne 
sait  pas  nu  juste  a  quelle  date  cette  seconde  significa- 
tion est  entr ans  l'usage,  et  c'est  précisément  ce 

qu'il  faudrait  fixer.  11  faut  donc  étudier  les  cas  parti- 
culiers. A -.   Il,    ï.  5,   parle   une  fois  et   d'une  façon 

générale  de  la  loi  de  Jéhovah  et  de  ses  commandements, 
dont  la  violation  attirera  sur  .Iuda  les  punitions  du 

1 1 vin,  2,  reproche  aux  Israélites  d'avoir  transgresse 

l'alliance  divine,  cf.  vi.  7,  et  violé  la  loi;  ils  en  - 
punis,  et  Dieu  ne  leur  écrira  plus  de  multiples  loi-  qui 
leur  demeurent  étrangères,  v.  12.  11  est  évidemment 
question  de  nombreuses  lois  divines  écrites,  et  on  a  le 
droit  d'y  voir  une  allusion  au  Pentateuque.  Pour 
la  loi  est  sa  propre  prophétie,  r,  10;  v,  24;  vin,  16.  20;. 
la  loi  de  Dieu  est  la  parole  des  prophètes,  xx\.  SU,  ou 
la  révélation  future  aux  temps  messianiques.  H,  d.  Cf. 
Mich  iv.  -2.  La  transgression  des  lois  divines  et  la  vio- 
lation de  l'alliance,  reprochées  v,  24;  xxiv,  5,  ne  con- 
cernenl  pas  uécessairemenl  des  lois  écrites;  s  il  avail 
en  vue  un  code,  le  prophète  ne  dit  rien  de  son  Ol 

lïque.  Sophonie,  111,4,  reproche  aux  prêtres  de  son 

temps  d'avoir  violé  la  loi.  Jérémie  n'envisa 
parole  de  Dieu  en  général,  vi,  19,  et  la  prédication 
prophétique,  xxvi,  4-5.  Mais  il  parle  d'une  loi  divine 
et  de  préceptes,  violés  par  ses  contemporains  et  leurs 
es,  i\.  13;  xvi.  11.  12;  xxxn,  23;  xi.iv,  10,  23; 
,1  une  loi  que  les  prêtres  tenaient  dans  leurs  mains, 
n.   S;    XVIII,    IS;    el   d'une    loi  écrite,   qu'il    oppose 

plume  mensongère  des  scribes,  vin,  8-  H  rappelle 
l'alliance  contractée  par  les  Israélites  avec  Dieu  après 
la  sortie  d'Egypte,  xi,  2-8;  mais  elle  n'imposail 
i  offrande  des  holocaustes  cl  des  sacrifices,  vu,  21-25. 

era  remplacée  par  une  alliance  nouvelh 
laquelle  Dieu  éi   ira  sa  loi  dan.-  les  cœurs,  xxxi,  31-33. 
Il  y  a   ici  encore  opposition  à  une  loi  écrite,  qui  ne 
peut  être  que  celle  de  Moïse. 

Pendant    la    captivité,   Baruch,  n,    2.    28,    mu.. me 
,  spressémenl  la  loi  écrite  par  Moïse;  les  I 

il    correspondent  assez,   bien  au  Deutéronome. 

xxviii,  15,53,62-64,  sans  toutefois  lui  convenir  exclu- 
sivement, «  l  on  j  trouve  des  allusions  aux  autres  malé- 
dictions contenues  dans  le  Pentateuque.  Le  même 
prophète,  in, 9-14, 35-lv,  i.  rait  l'éloge  de  la  sagesse  con- 
tenue dans  le  livre  des  préceptes  de  .léhovah,  en  des 
trail    analogues  à  ceux  du  Deutéronome,  xxx,  11-14. 

de  Hummelauer.  Deu ter onomium,  p.   101-102. 

I.  qui,  en  vue  de  la  restauration  future  d'Israël, 
rédi  <■■'  '•  ii  cérémonielle,  fait  peu  d'allusions  à  une 
législation  antérieure.  Comme  Jérémie,  xvm,  18,  il 
prédit  que  les  prêtres  laisseront  périr  la  loi  qu'ils  ont 
dan  les  mains,  vu,  20;  il  accuse  les  plein-  de  Jérusa- 
lem d'avoir  méprisé  la  loi  de  Dieu,  d'avoir  souill 
sanctuaires,  de  n'avoir  passa  distinguer  entre  les  choses 

es  et  les  choses  sacrées,  les  puretés  et  les  impu- 


69 


PENTATEUQUE 


retés,  et  d'avoir  détourné  le  peuple  de  la  célébration  du 
sabbat,  xxn.  26.  Daniel  parle  de  la  loi  divine,  promul- 
guée par  les  prophètes  et  violée  par  Israël;  il  ajoute 
que  cette  violation  de  la  loi  a  attiré  sur  les  coupables 
la  malédiction  écrite  dans  le  livre  de  Moïse,  i.x,  10-13. 
Après  la  captivité,  Zacharie.vn,  12,  mentionne  la  loi! 
Malachie  reproche  aux  prêtres  d'avoir  rompu  le  pacte 
conclu  entre  Dieu  et  Lévi  et  d'avoir  négligé  la  connais- 
sance de  la  loi  et  le  devoir  delà  faire  observer,  ri,  4-9; 
il  reproche  aussi  à  Jnda  d'avoir  transgressé  l'alliance 
divine  et  le  menace  des  châtiments  divins,  ir,  10-16. 
Mais  il  fait  davantage;  il  rappelle  le  souvenir  de  la  loi 
de  Moïse,  donnée  par  Dieu  sur  le  mont  Horeb.  loi  qui 
contenait  des  préceptes  et  des  ordonnances  pour  tout 
Israël,  iv,  I  (hébreu,  tu,  22).  Josué  etZorobabel,  rentrés 
a  Jérusalem,  y  élevèrent  un  autel  pour  offrir  des  holo- 
caustes conformément  aux  dispositions  écrites  de  la  loi 
de  Mo.se.  et  ils  célébrèrent  la  fête  des  Tabernacles 
comme  il  est  écrit  de  le  faire.  I  Esd.,  m,  2  i  Quand 
I-  temple  fut  rebâti  et  consacré,  on  établit  les  prêtres 
et  les  lévites  dans  leurs  fonctions,  comme  il  est  écrit 
dans  le  livre  de  Moïse.  I  Esd..  vi.  18.  Esdras,  au  témoi- 
gnage d  Artaxerxès  lui-même,  rapporta  à  Jérusalem  le 
livre  de  la  loi  de  Dieu.  I  Esd.,  vu.  li.  Néhémie,  à  la 
cour  d  Artaxerxès.  fait  à  Dieu  l'aveu  des  prévarications 
de  ses  pères,  qui  n'ont  pas  observé  les  préceptes,  les 
cérémonies,  ordonnées  par  Moïse;  il  rappelle  aussi  la 
menace  contre  les  prévaricateurs,  et  la  promesse  de 
les  rétablir,  s  ils  se  convertissaient  et  pratiquaient  les 
préceptes,  menace  et  promesse  faites  à  Moïse.  II  Esd.  i 
/-9.  La  reforme  d'Esdras  fut  entreprise  à  la  suite  de  là 
lecture  et  de  l'explication  du  livre  de  la  loi  de  Moïse 
et  la  fête  des  Tabernacles  fut  célébrée  conformément 
aux  dispositions  écrites  dans  cette  loi.  II  Esd  vin 
1-18.  On  continu  .  la  lecture  du  volume  de  la  loi  de 
Jehovah.  II  Esd.,  ix,  3.  I.e  renouvellement  de  l'alliance 
fut  fait  aussi  conformément  à  la  loi  divine,  donnée  par 
Mo.se,  II  Esd.,  x,  29,  ainsi  que  la  fourniture  du  bois 
destine  aux  sacrifices.  II  Esd.,  x,  36.  Plus  tard.  Néhé- 
mie régla  encore  la  question  des  mariages  mixtes  en 
conformité  avec  ce  qu'il  avait  h,  dans  le  volume  de 
Moise.  I  Esd.,  xiii.  1-3.  Or,  ce  volume  n'était  pas  seu- 
lement le  code  sacerdotal,  comme  le  prétendent  les 
grafiens,  celait  le  Pentateuque  entier,  puisque  le  livre 
contenait  des  prescriptions  du  Lévitique,  xxm,  et  du. 
Deuteronome,  vu,  2-4  ;  xv,  2.  Enfin,  Esdras  et  Néhémie 
par  les  désignations  qu'ils  donnaient  de  ce  livre  ne 
voulaient  pas  parler  seulement  du  volume  qui  conte- 
nait la  législation  divine,  promulguée  par  Moïse,  mais 
bien  le  livre  de  la  loi  de  Dieu,  écrit  par  Moïse.  C'est 
[interprétation  la  plus  naturelle  et  la  plus  commune 
de  leurs  écrits. 

L'auteur  du  livre  des  Paralipoménes,  qu'on  regarde 
généralement  comme  le  rédacteur  des  livres  d'Esdras 
etdeNehemie,  a  utilisé  le  Pentateuque  pour  dresser  ses 
genea  og.es  I  Par  ws.  Vûir  l>xAuLi*EsZ^ 
ses  descriptions  du  culte  divin  concordent  avec  les 
prescnptions-du  Pentateuque.  Il  signale  explicitement 

Téhûv?!0"  M."  "  ""V  qUi  6Sl  écrit  dans  ,a  loi  de 
„  ':  '  ' "' "■•  '"''  40'  ^'ns  la  1^  de  Moïse.  II  Par., 
xxm,     b;   xxxi,  S.   H   parie   évidemment  de  la  loi   de 

i  expression  „wn  va,  ,,„  ,|  emploie,  II  Par.,  xxxm,  8, 
n:;  signifie  pas  nécessairement  que  Moïse  a  rédigé  la 
loi  de  sa  propre  main,  puisque,  dans  d'autres  passages 
ou  .1  est  question  de  la  loi  mosaïque,  Lev.,  xxvi  46 - 
Num  xxxv,.  13,  elle  désigne  une  disposition  prise  par 
ICo.se,  sans  indication  de  rédaction  écrite.  Cf.  I  Par.,xL 
•  Mais  .1 est  tout  naturel  de  l'entendre  ici  de  la  Iégis- 
ation   écrite  par  Moïse.  De  même,  dans  le  récit  de'  la 

de  UlTiïv?™!?*  S°US  le  rè=ne  de  Josias.  Ie  "vre 
de  la  oi  de  Moise,  II  Par.,  xxxiv.  l4;  xxxv,  12,  pour- 
rait a  la  rigueur  désigner  seulement  le  livre  qui  conte- 


70 


sens  „,   S        °n  Prrm]ëU'e  Par  Moïse-  dans  l«  même 

sens  que  «   les  paroles  que  Jéhovah  a  dites  par  l'inter- 

m(f ,a" "   Moïse    ..  Il   Par.,  xxxv.  6.  Mais   le  sans 

naturel  est  que  cet  écrivain  entendait  parler  du  Penta- 
teuque rédigé  par  Moïse. 

Enfin,  l'auteur  de  l'Ecclésiastique,  xxiv,  33;  i.xv.  6 
neiiiT,  f  Joïse.?ue  com™e  législateur;  mais  son 
petit-fils,  dans  la  préface  qu'il  mit  en  tête  de  sa  traduc- 
tion grecque,  nomme  à  trois  reprises  la  Loi,  qu'il  place 
a  cote  des  prophètes  et  des  autres  livres  et  qu'il  consi- 
dère ainsi  comme  un  recueil  distinct:  il  désigne  sous 
ce  nom  les  cinq  livres  du  Pentateuque.  L'auteur  du 
second  livre  des  Machabées,  vu,  0,  cite  le  cantique  de 
Moïse,  Deut.,  xxxn,  30.  comme  oeuvre  de  Moïse 

Ainsi  les  premiers  témoignages  de  l'Ancien  Testa- 
ment attribuent  explicitement  à  Moïse  la  composition  de 
quelques  parties  du  Pentateuque  actuel,  récits  ou  lois 
et  notamment  le  Deuteronome.  Esdras,  Néhémie  et  l'au- 
teur des  Paralipoménes  lui  reconnaissent  formellement 
la  rédaction  du  Pentateuque  entier.  La  tradition  juive  la 
plus  ancienne  a  donc  signalé  le  législateur  hébreu 
comme  auteur  du  Pentateuque. 

3.  Témoignages  d„  Nouveau  Testament.  -  Notre- 
keigneur  et  ses  Apôtres  ont  parlé  à  diverses  reprises 
de  Moïse  comme  écrivain  et  de  la  Loi  comme  son  œuvre 
Lorsque  les  sadducéens  interrogent  Jésus  sur  la  résur- 
rection ils  citent  la  loi  du  Iévirat  comme  écrite  par 
Moïse.  Malll,.,  xxn,  24;  Marc,  xn,  19;  Luc  xx  o8 
Jésus  n  examine  pas  cette  affirmation,  émise  incidem- 
ment et  comme  moyen  de  preuve  ;  il  se  borne  à  réfuter 
par  1  Ecriture,  Matth.,  xxu,  29;  Marc,  xn,  24,  l'erreur 
de  ses  interrogateurs,  et  il  cite  un  passage  du  livre  de 
Moïse  Matth.,  xxn.  31;  Marc,  xn,  26;  Luc,  xx,  37 
bon  affirmation  porte  directement  sur  le  caractère 
scripturaire  plutôt  que  sur  l'origine  mosaïque  de  ce 
passage.  Notre-Seigneur  emploie  plusieurs  fois  l'ex- 
pression usuelle  «  la  Loi  i  pour  désigner  le  Pentateuque  • 
son  apposition  à  la  désignation  technique  :  «  les  Pro- 
phètes. »>  le  montre  bien.  Luc,  xiv,  16,  17.  Dans  la  pa- 
rabole du  riche  et  de  La/are.  c'est  «  Moïse  »  qu'il  place 
a  cote  des  «  prophètes  »,  et  il  entend  bien  Moïse  et  les 
prophètes  dans  leurs  livres.  Luc,  xvi,  29,31.  De  même 
pour  montrer  aux  disciples  d'Emmaûs  que  sa  passion 
et  sa  mort  avaient  été  prédites,  il  commença  par 
«  Moïse  »  et  continua  par  «  tous  les  prophètes  »,  inter- 
prétant tout  s  les  Ecritures  qui  parlaient  de  lui.  Luc, 
xxiv,  27.  Dans  ses  dernières  recommandations  aux 
Apôtres,  il  leur  rappelle  qu'il  était  nécessaire  que  s'ac- 
complit tout  ce  qui  était  écrit  de  lui  dans  la  loi  de 
-Moïse,  les  prophètes  et  les  Psaumes;  il  leur  ouvrit  l'in- 
telligence pour  comprendre  les  Écritures  et  il  leur  dit 
qu'il  était  écrit  que  le  Christ  devait  souffrir  et  ressus- 
citer le  troisième  jour.  Luc,  xxiv,  44-46.  Dans  tous  ces 
passages,  Notre-Seigneur  se  bornait  à  désigner  ce  livre 
par  les  dénominations  ordinaires.  De  plus,  il  ne  visait 
pas  expressément  tout  le  contenu  du  livre,  mais  seule- 
ment ses  prophéties  messianiques.  Mais  ailleurs,  il 
envisage  plus  directement  l'écrit  de  Moïse.  Dans  une 
discussion  avec  les  Juifs  qui  niaient  sa  divinité,  il  en 
appela  aux  Écritures  qui  lui  rendaient  témoignage. 
Joa.,  v,  39.  Si  donc  ses  adversaires  demeurent  incré- 
dules, Moïse,  le  législateur  en  qui  ils  ont  mis  leur  espé- 
rance, sera  leur  accusateur  auprès  du  Père.  Joo  ,  v.  15. 
8  Si,  en  effet,  continue-t-il,  vous  croviez  à  Moïse,  vous 
croiriez  peut-être  à  moi  aussi,  car  ii  a  écrit  sur  moi. 
.Mais  si  vous  ne  croyez  pas  à  ses  écrits,  comment  croi- 
riez-vous  à  mes  paroles?  ,,  Joa.,  v.  10,  17.  Jésus  met 
donc  en  parallèle  ses  propres  paroles  avec  le  livre  de 
Moïse,  avec  ceque  .Moïse,  le  législateur  d'Israël,  a  écrit 
sur  lui  :  les  écrits  de  ce  législateur  rendent  témoignage 
à  Jésus  que  les  Juifs  repoussaient;  si  les  Juifs  ne 
croient  plus  au  témoignage  écrit,  rendu  par  leur  légis- 
lateur, il  n'est  pas  étonnant  qu'ils  ne  croient  pas   à  la 


PENTATEUOIK 


parole  de  Jésus.  Notre-Seigneur  parle  de  Moïse  comme 
écrivain,  au  sujet  des  prophéties  messianiques  conte- 
nues dans  le  Pentateuque.  S.  Irénée,  Cont.  hser.,  îv, 
•2,  n.  3,  1,  t.  vu,  col.  977-978;  Origène,  In  Num.,  liom. 
x.wi,  n.  3.  t.  xii.  col.  771  ;  Éuthymius,  Panoplia  dog- 
malica,  tit.  xxiv.  t.  cxxx,  col.  1225. 

Les  Apôtres  ont  parlé  aussi  de  Moise  écrivain.  Phi- 
lippe annonce  à  Nalhanaël  qu'il  a  rencontré  en  Jésus 
h'  Messie  sur  lequel  Moïse  a  écrit  dans  la  Loi  et  dont 
parlent  les  prophètes.  Joa.,  i,  45.  Saint  Pierre,  Act., 
m,  22,  cite  Deut.,  xviii,  15,  comme  parole  de  Moïse. 
Saint  Jacques  rappelle  qu'on  lit  Moïse  le  samedi  dans 
1rs  synagogues.  Act.,  xv,  '21.  Saint  Paul  relate  le  même 
fail.  II  Cor.,  m,  15.  Le  même  apôtre  nomme  ailleurs 
1.,  Lui  de  Moïse.  Act.,  xm,  33;  I  Cor.,  ix.  9.  Il  prêche 
Jésus  d'après  la  Loi  de  Moïse  et  les  prophètes.  Act., 
xxviii,  23.  Il  cite  différents  passages  du  Pentateuque 
comme  paroles  écrites  île  Moïse.  Puni.,  x.  5-8,  19. 
L'Apocalypse,  xv.  3,  parle  du  cantique  de  Moïse. 

Si  quelques-uns  des  témoignages  précédents  peuvent 
être  restreints  aux  prophéties  messianiques  du  Penta- 
teuque, il  reste  établi  que  Jésus  et  ses  Apôtres,  pour 
parler  du  livre  entier,  ont  employé  les  désignations 
usuelles  à  leur  époque  el  par  suite  ont  parlé,  indirec- 
tement an  moins,  de  la  Loi  comme  étant  l'œuvre  de 
Moïse.  Ils  partageaient  donc  la  croyance  commune  de 
leurs  contemporains  au  sujet  de  l'origine  mosaïque  du 
Pentateuque  et  ils  l'ont  manifestée, sinon  par  des  affir- 
mations directes  et  formelles,  du  moins  indirectement 
et  en  termes  équivalents.  Toutes  les  fois  qu'ils  ont  eu 
à  parler  de  l'auteur  du  Pentateuque,  ils  l'ont  attribuée 
Hoïse.  La  critique  n'exige  pas  et  ne  peut  pas  exiger, 
pour  établir  que  la  tradilion  a  attribué  un  écrit  à  un 
auteur  déterminé,  que  les  écrivains  qui  l'ont  cilé  aient 
cilé  un  ouvrage  tout  entier,  mais  il  lui  suffit  qu'ils  lui 
aient  attribué  les  parties  dont  ils  ont  eu  occasion  de 

usage.   On    n'a  pas  le  droit  d'exiger   de    Notre- 

Seigneur  el  des  Apôtres  ce  qu'on  n'exige  pas  des  auteurs 
profanes. 

2°  Le  sentiment  perpétuel  du  peuplejuif.  —  Ladis- 
eussion  précédente  des  textes  de  l'Ancien  Testament  a 
prouvé  que  la  plus  ancienne  tradition  d'Israël,  repro- 
duite dans  le  Pentateuque  lui-même  et  dans  les  livres 
suivants,  rapportait  à  Moïse  au  moins  la  rédaction  de 
Certains  récits  et  de  certaines  lois,  qui  sont  contenus 
dans  h-  Pentateuque. Le  livre  des  Rois,  rédigé  pendant 
la  captivité, attribue  à  Moïse  le  Deuléronome,  découvert 
dans  le  Temple  du  temps  de  Josias.  En  revenant  à  Jé- 
rusalem, Esdras  rapportait  le  livre  de  la  Loi,  qu'il  lit 
et  présente  comme  l'œuvre  de  Moise.  Néhémie,  Mala- 
chie,  l'auteur  des  Paralipomènes  regardaient  Moïse 
comme  l'auteur  du  Pentateuque  entier.  Les  auteurs 
juifs  de  la  version  grecque  dite  des  Septante  partageaient 
relie  conviction.  Voir  col.  52.  Tous  les  contemporains 
,le  Notre-Seigneur,  à  quelque  secte  qu'ils  appartinssent, 
admettaient  cette  tradition,  dont  Jésus  se  sert  pour 
convaincre  les  sadducéens.  Jésus  el  ses  Apôtres,  eu 
employant  les  dénominations  usitées  de  leur  temps, 
ont  bien  admis  le  sentiment  commun  de  leurs  coreli- 
gionnaires juifs.  La  tradition  ancienne,  qui  attribue  à 
Moïse  la  composition  du  Pentateuque,  s'est  perpétuée 
dans  la  Synagogue  jusqu'à  nos  jours,  sauf  de  très  rares 
et  toutes  récentes  exceptions. 

Pour  le  rr  siècle  de  notre  ère,  Josèphe  et  Philon  re- 
présentent les  ileu\  fractions  du  judaïsme,  palestinien 
et  alexandrin.  L'historien  Josèphe,  qui  riait  de  Pales- 
tine, place  en  trie  des  vingt-deux  livres  que  les  Juifs 
reconnaissent  comme  divins  et  inspirés,  les  cinq  livres 
de  Moïse  qui  contiennent  l'histoire  îles  origines  et  de 
l'humanité  depuis  la  création  jusqu'à  la  morl  de  l'au- 
teur. Cont.  Apion.,  1,  8.  Dans  ses  Antiquités  judaï- 
ques, 1.  Proam.,  '<■  il  se  propose  de  résumer  les  livres 
de  Moïse  a  partir  de  la  création  du  monde.  A  la  lin  de 


son  exposé,  IV,  vin.  3-i8.  il  rapporte  que  Moïse. 
avant  de  mourir,  remit  aux  Israélites  qu'il  avait  tirés 
de  l'Egypte  le  livre  qui  contenait  la  législation  divine 
i't  qu'il  avait  écrit  lui-même.  Or,  au  sentiment  de  Jo- 
sèphe, il  ne  s'agit  pas  seulement  du  Deutéronome. 
mais  bien  du  Pentateuque  entier,  puisque  le  résumé 
logique  qu'il  en  donne  comprend  toutes  les  lois  du 
Pentateuque.  Il  attribue  même  explicitement  au  légis- 
lateur hébreu  le  récit  de  son  trépas.  I  r  lignant,  dit-il, 
qu'on  ne  prétendit  qu'à  cause  de  sa  grande  vertu  Dieu 
ne  l'avait  ravi  auprès  de  lui,  il  raconta  lui-même  dans 
les  Livres  saints  sa  propre  mort.  »  Le  philosophe 
alexandrin  Philon  cite  constamment  le  Pentateuque 
comme  étant  de  Moïse.  La  Thora  est  de  tous  les  Livres 
saints  celui  qu'il  cite  le  plus  souvent.  Elle  possède  à 
ses  yeux  une  valeur  exceptionnelle  et  il  proclame 
Moïse  son  auteur,  le  prophète  par  excellence,  un  arehi- 
prophète.  Les  écrits  qu'il  a  composés  comprennent 
des  récits  historiques  et  des  lois.  L'histoire  mosaïque 
remonte  à  la  création  du  monde.  De  vila  Mosis,  1.  II, 
Opéra,  Genève,  1613,  p.  511.  Philon  raconte  la  vie  de 
Moïse  d'après  les  écrits  de  son  héros,  et  parvenu  au 
terme  de  son  ouvrage,  1.  III.  p.  538.  il  rapporte  comme 
une  merveille  que  Moïse,  sur  le  point  de  mourir,  lit 
par  inspiration  divine  le  récit  prophétique  de  sa  mort 
Une  beraïtha  du  Talmud  de  Babylone,  traité  Baba- 
Bat/ira,  voir  t.  n,  col.  140,  reproduit  l'enseignement 
des  Juifs  demeurés  au  pays  de  la  captivité  :  «  Moïse, 
dit-elle,  écrivit  son  livre  (c'est-à-dire  le  Pentateuque)  et 
la  section  de  Balaam  et  Job.  Josué  écrivit  son  livre  et 
huit  versets  de  la  Loi,  »  ceux  qui  font  le  récit  de  la 
mort  de  Moïse.  Deut.,  xxxiv,  5-12.  Les  rabbins,  dont 
l'opinion  est  ici  reproduite,  jugeant  que  le  neit  de  la 
mort  de  Moïse  n'avait  pu  être  rédigé  par  le  défunt, 
l'attribuaient  à  son  successeur.  Celait  notamment  le 
sentiment  de  Rabbi  Juda.  Cette  opinion  est  répétée, 
traité  Makkôth,  fol.  lin.-  traité  Menachôth,  fol.  30a. 
Mais  au  rapport  d'une  autre  beraïtha  du  même  traité, 
c.  h'ania,  Rabbi  Siméon  objectait  "qu'il  ne  pouvait  man- 
quer une  seule  lettre  au  livre  de  la  Loi.  Aussi  con- 
cluait-il que  jusqu'à  Deut.,  xxxiv,  i,  «  Dieu  dictait, 
Moïse  répétait  et  écrivait;  à  partir  de  là,  Dieu  dictait, 
et  Moïse  écrivait  en  pleurant.  »  L.  Wogue, Histoire  de 
la  Bible  et  de  l'exégèse  biblique  jusqu'à  nos  jours, 
Paris,  1881,  p.  21  ;  C.'  Wildeboer,  De  la  formation  du 
canon  de  l'A.  T.,  trad.  franc..  Lausanne,  s.  d.,  p.  H. 
Le  Talmud  de  Jérusalem  mentionne  seulement  l'attri- 
bution des  cinq  livres  du  Pentateuque,  avec  mention  à 
part  de  la  section  de  Balaam  et  de  Balac,  mais  sans 
allusion  au  récit  de  la  mort  de  Moïse.  Traité  Sota, 
V,  5,  trad.  Schwab,  Paris,  1885,  t.  vu,  p.  290.  D'ailleurs, 
les  rabbins,  en  disant  :  «  la  lui  de  Moïse,  »  en  regar- 
daient Moïse  comme  le  rédacteur;  aussi  l'appelaient-ils 
lui-même  »  le  grand  écrivain  d'Israël  ".  Tous  les  doc- 
teurs d'Israël  sont  demeurés  fidèles  a  >  lit  ion  de 
leurs  pères,  et  ont  unanimement  reconnu  que,  sauf  les 
douze  derniers  versets  ajoutés  par  Josué,  Moïse  a  écrit 
le  Pentateuque  sous  l'inspiration  divine.  J.  Furst, 
lier  Knnini  des  Alten  Testaments  naeh  den  Ueberlia- 
fenmgen    un   Talmud    md  Midrasch,    Leipzig,  IS68, 

p.  7-9.  Seuls  Isaac  ben  .lasus.  au  xi"  siècle,  et  Ahenesra, 
au  XIIe.  ont  admis  dans- les  livres  de  Moïse  quelques 
additions  postérieures.  Voir  col.  61.  A  la  même  époque 
Maimonide  énonça  en  ces  termes  le  huitième  article  de 
la  foi  juive  ;  «  11  faut  croire  que  la  loi  que  nous  possé- 
dons est  la  loi  qui  nous  a  été  donnée  par  Moïse... 
Moïse  écrivit  ce  qui  lui  fut  dicté  sur  l'histoire  et  sur 
les  lois.  »  Comment,  in  lr.  Sanhédrin,  c.  ix,  cil  •  par 
Abarbanel,  SépherRosch  'Amanah,  c.  i,  trad.  de  Yors- 
tius,  in-i°,  Amsterdam,  163S.  p.  (i.  Cf.  Surenhusius, 
MUchna  cum  commentariU  integris  Maimonidis  et 
Bartenorœ, Amsterdam,  1702,  t.  iv,  p.2l>i.  Auxnr  siècle. 
R.  Becchai  admettait  que  Moïse  avait  écrit  la  loi  depuis 


PENTATEUijUE 


74 


le  premier  mol  de  la  Genèse  jusqu'au  dernier  du  Deuté- 
ronome.  Joseph  Karo  enseignait  aussi  que  le  Pentateu- 
que  entier  venait  immédiatement  de  Dieu  et  que  Moïse 
n'en  avait  écrit  aucune  parole  de  lui-même.  Au 
XV  siècle,  Abarbanel  répétait  la  même  chose  et  rejetait 
le  sentiment  de  ceux  qui  attribuaient  à  .losué  les  douze 
derniers  versets  du  Deutéronome.  Cf.  Richard  Simon, 
Critique  de  la  Bibliothèque  des  auteurs  ecclésiastiques 
de  E.  Dupin,  Paris.  1730.  t.  m,  p.  215-220.  Le  premier 
parmi  les  Juifs,  Baruch  Spinoza,  au  XVIIe  siècle,  rejette 
l'authenticité  mosaïque  du  Pentateuque  qu'il  déclare 
bien  postérieur  à  Moïse,  puisque  Esdras  en  est  peut- 
être  l'auteur.  Tractatus  theologico-polilicus,  c.  vm, 
édit.  lauchnitz,  t.  in,  p.  125;  trad.  Saisset,  2"  édit., 
Paris,  1861,  t.  h.  p.  151-173.  Quelques  Juifs  modernes 
ont  admis  plus  ou  moins  complètement  les  conclusions 
des  critiques  modernes.  S.  Munk,  La  Palestine,  Paris, 
1881,  p.  132-112,  attribue  la  Genèse,  sauf  un  petit 
nombre  d'interpolations,  à  Moïse  qui  en  a  puisé  le  fond 
dans  des  documents  antérieurs,  émanés  de  diflérents 
auteurs;  il  lui  attribue  aussi  toute  la  législation  du 
Pentateuque,  qui  formait  peut-être  le  «  livre  de  l'al- 
liance »,  bien  que  sa  rédaction  ait  pu,  avec  le  temps, 
subir  quelques  modilications.  Le  reste  du  Pentateuque, 
a  savoir  les  parties  historiques  des  quatre  derniers 
livres,  est  foriné  de  documents  qui  étaient  postérieurs  à 
•Moïse,  mais  dont  il  est  impossible  de  fixer  l'âge  avec 
précision.  «  Le  recueil  a  dû  être  achevé  et  exister  dans 
sa  forme  actuelle  à  l'époque  de  Josias,  et  c'est  à  cette 
même  époque  qu'il  a  pu  être  reçu  par  les  Samaritains. 
Le  Pentateuque  peu  1  donc  être  appelé  avec  raison  un 
livre  mosaïque,  bien  qu'il  ne  soit  pas  émané  en  entier 
de  Moïse.  S'il  manque  d'unité  dans  le  plan  et  la  méthode, 
il  va  unité  dans  l'idée,  »  p.  142.  Les  Juifs  croyants  ont 
donc  toujours  admis  et  admettent  encore  l'authenticité 
mosaïque  du  Pentateuque.  La  tradition  était  si  stricte 
qu'elle  a  porté  les  rabbins  à  accepter  même  des  exagé- 
rations et  des  fables  pour  la  défendre. 

3»  La  tradition  perpétuelle  de  l'Eglise  catholique. 
—  La  tradition  juive,  introduite  par  Jésus  et  ses  Apôtres 
dans  l'Église,  s'y  manifeste  de  bonne  heure  et  se  conti- 
nue sans  interruption  de  siècle  en  siècle  jusqu'à  nos 
jours.  Il  suffit  de  constater  son  existence  dans  les  pre- 
miers siècles,  car  personne  ne  nie  sérieusement  sa 
persévérance  et  son  unanimité.  Les  Pères  apostoliques 
citent  assez  souvent  des  passages  du  Pentateuque 
comme  paroles  d'Écriture  inspirée,  sans  nommer  l'au- 
teur, conformément  à  leur  manière  habituelle  de  citer 
la  Bible,  mais  ils  ne  sont  pas  cependant  tout  à  fait  muets 
sur  l'activité  littéraire  de  Moïse.  Ainsi  le  pseudo-Bar- 
nabe, s'il  rapporte,  Epist.,  x,  1-12,  dans  Funk,  Patres 
apostolici,  2"  édit.,  Tubingue,  1901,  t.  i,  p.  60-70,  plu- 
sieurs lois,  et  xir.  2-9.  p.  74-76,  plusieurs  paroles  de 
Moïse,  ne  considère  pas  ce  personnage  exclusivement 
comme  législateur  et  comme  chef  d'Israël.  Il  cite  sous 
le  nom  du  prophète  Moïse  une  parole  prononcée  par 
Dieu  lui-même,  F.xod..  xxxiii,  1,  3,  parce  que  le  prophète 
l'avait  entendue  et  relatée  dans  son  récit.  Epist.,  vi,  S, 
10,  13,  p.  54,56.  De  même  encore  le  jeune  de  Moïse  sur 
le  mont  Sinaï  est  cité  comme  une  parole  du  prophète. 
Epist.,  xvi,  2.  p.  80.  Saint  Clément  de  Rome  cite,  lui 
aussi,  plusieurs  passages  du  Pentateuque  comme  Écri- 
ture sainte.  Il  affirme  une  fois  que  xa'i  6  jiaxipioî  tiiittô; 
liz^i-or/  vi  oui)  -r<;  o'.'/.'i»  Ma>ij<77j;  ~v.  5iaxay(JLÉva  aijîw 
— ivTa  !<7r,|iEia>aaT0  h  --j.::  iîpsî;  fSio/a;;.  1  Cor.,  XLI,  1, 
ibid.,  p.  152. 

Les  Pères  apologistes  apprennent  aux  païens,  à  qui  ils 
s'adressent,  que  Moïse  a  écrit  sous  l'inspiration  divine, 
qu'il  est  le  premier  des  prophètes  et  le  plus  ancien  de 
tous  les  écrivains  et  qu'il  a  raconté  par  l'esprit  pro- 
phétique la  création  du  monde.  S.  Justin,  Apol.,  1.  59, 
t.  vi,  col.  416;  Cohort.  ad  Grxc.,  28,  30,  33,  34,  ibid., 
col.  293,296-297,  361;  S.  Théophile,  Ad  Aulol.,  m,  23, 


ibid.,  col.  1156.  Saint  Justin,  Apol.,  i,  32,  54,  il>ul., 
col.  377,  409,  cite  la  prophétie  de  Jacob,  Gen.,  xi.ix, 
10,  comme  écrite  par  l'esprit  prophétique.  Il  rappelle 
à  Tryphon,  Dial.,  29,  ibid.,  col.  537,  que  Moïse  a  écrit 
dans  les  lettres  juives.  L'auteur  de  la  Cohort.  ad  Grœcos, 
9,  ibid.,  col.  257,  prouve  l'antiquité  du  prophète  et 
du  législateur  juif  par  le  témoignage  des  philosophes 
grecs.  Moïse  a  écrit  au  sujet  du  tabernacle,  ibid.,  29, 
col.  296;  et  Platon  a  fait  des  emprunts  à  sa  divine  his- 
toire, ibid.,  33,  col.  301.  Si  les  origines  de  l'humanité 
nous  sont  connues,  c'est  que  le  Saint-Esprit  nous  les  a 
apprises,  lui  qui  a  parlé  par  Moïse  et  les  autres  pro- 
phètes, de  sorte  que  nos  lettres  sont  plus  anciennes 
que  tous  les  écrivains  et  tous  les  poètes.  S.  Théophile, 
Ad  Aulol.,  il,  30,  ibid.,  col.  1100.  Aussi  tous  les  apo- 
logistes s'accordent-ils  à  dire  que  les  philosophes  et 
les  législateurs  païens  ont  fait  des  emprunts  à  Moïse 
et  lui  ont  volé  leur  sagesse. 

Tous  les  Pères  subséquents  citent  le  Pentateuque 
sous  le  nom  de  Moïse.  Ils  affirment  aussi  à  l'occasion 
que  Moïse  a  composé  le  Pentateuque.  On  retrouve  de 
ces  témoignages  formels  dans  toutes  les  Églises  chré- 
tiennes. Saint  Irénée,  Cont.  hier.,  I,  II,  6,  t.  vu, 
col.  715-716,  attribue  à  Moïse  le  récit  de  la  création  du 
monde.  Cf.  H,  22.  n.  3,  col.  783.  A  Rome,  saint  Hippo- 
lyte  commentait  Deut.,  xxxi.  9,  24.  25,  qui  attribue  â 
Muise  la  rédaction  de  ce  livre.  Achelis,  Arabische  Frag- 
mente :utii  Pentateuch, dans Hippolylus, Leipzig,  1897 
t.  i,  p.  118.  Cf.  Philosophoumena,  vm,  8;  x,  33,  t.  xvt 
col.  3350,  3149.  A  Cartbage,  Tertullien  provoquait  Her- 
mogène  ad  originale  inslrunientuin  Moysi,  à  propos 
de  la  création  du  monde.  Adv.  Hermogenem ,  xix,  t.  n, 
col.  214.  Cf.  Adv.  Marcion.,  iv.  22,  ibid.,  col.  414. 
A  Alexandrie,  Origène  tenait  Moïse  non  seulement 
comme  législateur,  mais  aussi  comme  écrivain,  puisque 
les  lettres  qu'il  employa  pour  écrire  ces  cinq  livres, 
tenus  pour  sacrés  chez  les  Juifs,  sont  différentes  des 
lettres  égyptiennes.  Cont.  Cels.,  m,  5-6,  t.  XI,  col.  928. 
Il  parle  des  écrits  de  Moïse,  livres  clairs  et  sages,  que 
Moïse  ou  plutôt  l'Esprit  divin  qui  .'lait  en  Moïse  et 
dont  l'inspiration  l'a  fait  prophète,  a  écrits.  Ibid.,  IV,  55i 
col.  1120.  Cf.  In  Gen..  hom.  nu,  n.  2,  t.  xu,  col.  231; 
In  Num.,  hom.  xxvi,  3,  ibid., col.  774.  Eusèbe  de  Césa- 
rée  parle  du  grand  Moïse,  le  plus  ancien  de  tous  les 
prophètes,  qui  a  décrit  sous  l'inspiration  divine  la  créa- 
tion du  monde  et  l'histoire  des  premiers  hommes.  H.  E., 
i,  2.  t.  xx,  col.  56;  cf.  3,  col.  69.  Saint  Euslhate  d'An- 
tioche.  De engastrimylhacontra  Origenem,  21,  t.  xviu, 
col.  656,  reproche  à  Origène  d'appeler  fables  ce  que  Dieu 
a  fait  et  ce  que  le  très  fidèle  Moïse  a  consigné  par  écrit. 
Cf.  pseudo-Eusthate,  In  Hexaenieron,  ibid.,  col.  708 
Marius  Victorin,  De  verbis  Script.,  Factum  est,  1, 
t.  vin,  col.  1009,  déclare  que  Moyses  nos  docuit  librû 
Geneseos.  Saint  Athanase,  Epist.  ad  Marcellin,  5,  32, 
t.  XXVII,  col.  17,  20,  44,  rappelait  que  Dieu  avait 
ordonné  à  Moïse  d'écrire  un  cantique  et  le  Deutéro- 
nome tout  entier.  Diodore  de  Tarse  déclare  que  Moïse  a 
écrit  le  récit  de  la  création.  Fragmenta  in  Gen. 
t.  xxxiii,  col.  1561-1562.  Didyme  d'Alexandrie,  De  Tri- 
nitate,  II,  vu,  3,  t.  xxxtx,  col.  565,  expliquant  .■  Fa- 
ciamus  hominem  ad  imaginem  nostram,  dit  qui 
Moïse  dans  la  Genèse  par  la  personne  du  Père  et  du 
Fils  parle  au  Saint-Esprit.  Saint  Grégoire  de  Nysse 
attribue  à  Moïse  les  deux  premiers  chapitres  de  la 
Genèse  qui,  de  prime  abord,  paraissent  contraires.  In 
Hcxaemeron,  proo-m.,  t.  xliv,  col.  61.  Saint  Ambroise, 
llexaemeron,  VI,  n,  8.  t.  xiv,  col.  245,  déclare  que 
Moïse,  quoiqu'il  fut  instruit  dans  toute  la  sagesse  de6 
Égyptiens,  a  méprisé,  parce  qu'il  était  inspiré,  la 
vaine  doctrine  des  philosophes  et  a  décrit  la  création 
du  monde.  Saint  Épiphane,  User.,  xxvt,  3,  t.  xi.j, 
col.  337,  dit  que  ce  législateur  était  inspiré'  pour  rédi- 
ger la  loi  contre  les  parricides,  et  XXXIII,  n.  9,  col.  572. 


75 


PENTATEUQUE 


76 


pour  écrire  loulcc  qu'il  [a  écrit.  Faustin,  De  Trinilate, 
c.  i.  5-7.  i.  «H,  col.  il.  42,  attribue  à  Moïse  le  début 
de  la  Genèse,  et  fait  des  emprunts  aux  livres  de  .Moïse. 
Saint  llilaire  de  Poitiers,  De  Trinitale,  i,  5.  t.  x. 
col.  28,  parle  des  livres,  quos  a  Moyse  alque  proplie- 
tis  sciiptos  esse  Hel-,  Iradebat.    Saint 

Chrysostome,  In  Gen.,  hom.  n.  '2-3.  t.  lui,  col.  -27.  28. 
reconnaissait  dans  le  début  de  la  Genèse  les  paroles  du 
bienheureux  .Moïse  qui,  pour  se  faire  comprendre  des 
Juifs,  parlait,  comme  plus  tard  sain!  Paul,  un  langage 
ier.  11  attribuait  aussi  à  Moïse  le  récit  du  déluge 
et    il  expliquait  comment   Cet  écrivain    n'a  rien  dit  des 
soixante-dix  premières  années  de  Xoé.  Ail  Stagirium  a 
dxtnone  vexât  uni,  n.  (i.  t.  xlvii.  col.  457.  Saint  .Jérôme 
dit  expressément  que  le  Pentateuque  est  de  Moïse.  Prx- 
falio  in  lib.  Josue,  t.  xxvm.  col.  ïtil  :  Prologus  galea- 
ius,  ibid.,  col.  548.  Il  énumère  les  cinq  livres  :  Genèse, 
Exode.   Lévitique,    N'ombres    et   Deutéronome   comme 
étant   de  Moïse  ainsi  que   les  onze  Psaumes  i.xxxix- 
xcix.  Epist.  '  XL,  2,  t.  xxii,   col.   1167.  La  parole  sou- 
vent citée  contre  l'authenticité  du   Pentateuque  :  Sive 
Moi/sen   dicere   vivais    auclorem  Pentaleuchi,    sive 
Esdram  ■  ejusdem   instauratorenx   operis    mm   reeuso 
\De  perpétua   virginitale  B.    Mariée  liber   advenus 
Belvidium,  n.   7,  t.  xxm,  col.   199),  ne  concerne  pas 
!.•    livre    entier,  mais   seulement    la   glose   :    usque    in 
Uodiemum  diem,  Gen.,  xxxv,  i:  Deut.,  xxxtv,  6  (selon 
ptante),  que  le  saint  docteur  refuse  de  rapporter 
soit  à  Moïse  soit  à  Esdras.  Saint  Augustin  voit  les  cinq 
livres  de  Moïse  figurés  par  les  cinq  pierres  que  David 
choisit   dans    le    torrent    pour    en   armer    sa  fronde. 
m ,  xxxi,  c.  v.  vu,  t.  xxxviii.  col.  198,  199,  et  dans 
les  cinq  portiques  de  la  piscine  de   Bethsaïde.   Serm., 
cxxiv,  c.  m.  ibid.,  col.  687.  11  enseigne  que  le  récit  de 
la  création,  dont  le  sens  l'a  préoccupé  durant  toute  sa 

vie,   i  l  ;••"'  Moïse.  Conf.,  il,  3;  xn,  il.  30, 

I.  xxxn.  col.  811,832,  Ni.!;  1'.   Gen.  m  i,,.,  VIII .  m.  7; 
IX,  mm.  2:;.  t.  xxxiv.  col.  375,  W2;  Decivilate  Dei,  XI, 
iv,    1,  t.  xii.  col.   319.    Théodore   de  Mopsueste  tient 
Moïse  pour   l'auteur  de  la  Genèse.  Sachau,   Tl, 
Mu}<  agmenla  syriaca,  Leipzig,  1869,  p.  s.  9. 

Cf.  Kilm.  Theodor  m,,   \Iopsue  I  milita  Afri- 

canw  Fribourg-en-Brisgau,  1880,  p.  98. 

Saint  Cyrille  d'Alexandrie,  Cont,  Julian.,  I.  t.  i.xxvi. 
col.  524  525,  prouve  que  Moïse  a  précédé  tous  les  sages 
delà  Grèce  qui  l'ont  connu  et  estimé,  et  il  explique 
que  le  contenu  de  ses  récits  est  admirai. le.  parce  que 
l'écrivain  était  inspiré  de  Dieu.  Saint  Isidore  de  Péluse, 
Epist. ,\.  IV.  epist.  CLXxvi.t.  i.xxvm.  col.  1268,  explique 
pourquoi  Moïsea  fait  précédei  ion  d'un  récit 

historique.    Thi  Mala,  h  .    arg.,    t.    i.xxxi, 

col.  i960,  déclare  que  Moïse,  le  grand  li  gislateui 
premier  qui  mai-  ail  laissi   par  •  cril  des  oracles  divins, 
l'rocope  de  Gaza,  In  Gen.,  prolog.,  t.  i.wxvii,  col.  24, 
affirme  que  le  livre  qu'il  entreprend  de  commenter  est 
de  Mo        I  iplications  qu'il  donne  montrent  bien 

qu'il  regardait  la  législation,  contenu.-  dans  les  livres 

do  ""i"  "•  par  cet  écrivain.  D'ailleurs, 

il  déclare  expressémi  ni  que  le  Deutér 

des  livres  précédi  m    estdi  la  main  de  Moi       In  Deut  . 

ibid.,  eol.  ,893-894.  Junilius,  /<•-  partibus    I 

I.  1,  c.  vin.  1.  ixvm.  col    28;  cf.   Kihn,  op.  cit.,  p.  480, 

ex  ti  aditù  ne  velerum,  que  Moi  1    a  écrit  li 
premiers  livres  historiques  de  l'Ancien   r/esl  iment,  bien 
que  leurs  titres  ne  contiennent  pas  son  nom.  .  i  que 
lui-même  ne  dise  pas  :  Dixit  Uomii  ,  .  mais. 

''"' '     s'il     parlait    ilun   autre   :    0  nus    ad 

Voyten.  De  son  côté,  saint  Isidore  de  Séville  .-1  tri  - 
explicite  dans  les  attributions  du  Pentateuque 

■  VI,  1.  i:  11,  I.  t.  1  xxxii.col.  229,  230.  Il  indique 

""' '   <•  mps  mis  par  Moïse  à  rédiger  le  D 

Quml    ii    V.  1  .  in  Detit.,  1,2,  1    1  xxxm.  col.  . 
Il  est  inutile  de  multiplier  les  citations.  On  a  conti- 


nué dans  l'Église  à  admettre  l'authenticité  mosaïque 
du  Pentateuque.  Pour  le  moyen  âge  et  les  temps  mo- 
dernes, voir  Hoberg.  iloses  und  der  Pentalemli.-p.'ï- 
73.  Personne  jusqu'au  xvr  et  au  XVIIe  siècle  n'a  émis 
le  moindre  doute  à  ce  sujet.  Nous  exposerons  plus 
loin  les  doutes  et  les  négations  des  critiques  modernes. 
La  masse  des  exégètes  et  des  théologiens  catholiques 
aussi  bien  que  des  fidèles  est  demeurée  attachée  à 
l'ancienne  tradition,  et  aujourd'hui  encore,  nonobstant 
le  travail  de  la  critique,  admet  l'authenticité  mosaïque 
du  Pentateuque.  L'enseignement  traditionnel  a  été  vé- 
ritablement unanime,  ininterrompu  et  perpétuel  dans 
l'Église  catholique. 

i  Critères  internes  ou  caractères  mosaïques  du 
Pentateuque.  —  Ils  sont  tirés  du  fond  même  ou  de  la 
forme  littéraire  du  livre.  Par  eux-mêmes,  ils  sont  in- 
suffisants à  prouver  l'authenticité  mosaïque  du  Penta- 
teuque, mais  ils  continuent  la  tradition  |ui\e  et  chré- 
tienne. —  1.  Caractères  mosaïques  du  fond.  —  a) 
ur  du  Pentateuque  connaît  exactement  les 
choses  d'Egypte.  —  Ilien  que  les  nombreux  documents 
hiéroglyphiques  de  l'ancienne  Egypte,  déchiffrés  ré- 
cemment, ne  fournissent  aucune  preuve  directe  des 
faits  racontés  par  Moïse  dans  l'histoire  de  Joseph,  la 
venue  des  Israélites  en  Egypte,  leur  séjour  au  pays  de 
Gessen,  leur  oppression  et  leur  exode,  ils  donnent  ce- 
pendant des  preuves  indirectes  de  la  vraisemblance  et 
de  l'exactitude  des  récits  qui  rapportent  ces  événe- 
ments. Sur  le  voyage  d'Abraham  en  Egypte,  voir  F.  Yi- 
gouroux,  La  Bible  cl  les  découvertes  modernes,^'  édit.. 
Paris,  1S96.  t.  1,  p.  153  180  ,  11  l'histoire  de  Joseph, 
voir  op.  cit.,  t.  11,  p.  1-213:  ÈciMNSON,  t.  H,  col.  1558- 
1559;  Joseph,  t.  m.  col.  1657-1669;  pour  b-  s.  jour  des 
Israélites  en  Egypte,  leur  oppression  et  leur  exode, voir 
t.,  t.  11,  p.  215-439;  Briqi  e,  t.  1,  col.  1981-1934; 
Gessen,  t.  m,  col. 218-221  .  Corvée,  1. 11,  col.  1030-1031. 
Les  plaies  d'Egypte,  sans  perdre  leur  caractère  miracu- 
leux, sont  conformes  aux  phénomènes  naturels  delà 
contrée  et  sont  des  maux  propres  au  pays.  La  couleur 
égyptienne  de  ces  récils  est  indéniable.  Or,  elle  ne 
prouve  pas  seulement  leur  .....  ontre  aussi, 

au  moins  indirectement,  leur  authenticité  mosaïque, 
Tous  les  détails  sont  ~i  ,  tacts,  si  égyptiens,  qu'ils  n'ont 
pu  être  inventés  après  coup,  qu'ils  ont  dû  plutôt  être 
ri  latés  par  un  Israélite  qui,  comme  Moïse,  avait  été 
élevé  en  Egypte.  La  tradition,  eût-elle  reçu  dès  l'origine 
une  forte  empreinte  égyptienne,  aurait  perdu  de  sa 
fraîcheur  et  de  son  coloris,  si  elle  avait  été  conservée 
longtemps  dans  la  mémoire  du  peuple  avant  d'être 
consignée  par  écrit.  L'n  rédacteur  postérieur,  fût-il 
bien  au  courant  de  la  situation  particulière  de  l'Ef 
de  ses  usages  et  1  ses  coutumes,  n'aurait  pu  rend 
narration  aussi  conforme,  dans  les  plus  petits  détails, 
à  la  réalité  historique  que  les  découvertes  égyptolo- 
giques  nous  ont  révi  lée  Seul,  un  Israélite,  ayant  vécu 
nips  en  Egypte,  a  été  capable  de  donner  au  récit 
l'exactitude  minutieuse  qu'on  v  constate, 

Les  critiques  modernes  ne  contestent  guère  celte 
couleur  égyptienne  des  ié,  it~.  et  ils  reconnaissent  que 
l'auteur  du  document  qu'ils  appellent  élohiste  était  très 
au  courant   dis  .  .    pticiines.   Il    reproduit  deux 

mots  égyptiens   fortement   simili-  !..  voir  t.  I, 

col.  90-91.  et  Sdfenat  pa'etl  ^- x  | .1  i. -11  donné- .1 

Joseph.  Gen.,  xi.i.  13.  15.  11  nomme  Puliphar,  Gen., 
xxxvii,  36,  etc.,  Séphora  et  l'hua,  les  sages-femmes 
égyptiennes,  Exod.,  1.  15,  les  villes  de  Phithom  et  de 
Ramessès,  Exod.,  1.  II.  et  la  mer  Rouge.  Exod.,  vu. 
18;  xv,  22.  H  connaît  exactement  la  constitution  de 
l'armée  égyptienne.  Exod.,  xiv,  7.  Paul  de  Lagarde  et 
Steindorll  s'appuyaient  sur  une  interprétation  contes- 
table du  nom  égyptien  de  Joseph,  du  nom  de  sa  femme 
Aseneth  et  de  celui  de  Puliphar  pour  rapporter  l'his- 
toire d.-  Joseph  dans  le  document  1  lohiste  a  l'époque 


77 


PEXTATEUQIi; 


de  la  seconde   djnastie  saïte,  après   Psammétique  Ier 
(655-610).  Mais  M.  Naville  a  réfuté  les  explications  don- 
nées.  Proceedings  of  tlie  Society  of  biblical  Archxo- 
togy,  mars   1903,  p.   157.  Cf.  t.  i,  col.  771.  10S2-10S3; 
t.  m,  col.  1668.  La   conclusion  qu'on  en  tirait  relative- 
ment à  la  date  tardive  du  document  élohiste  n'estdonc 
pas  fondée.  Les  autres  critiques  qui  la  remontent  plus 
haut  ne  dépassent  pas  l'époque  des  rois  d'Israël,  et  ils 
pensent  que  l'auteur  avait  eu  personnellement  à  cette 
époque  une  connaissance  directe  de  l'Egypte  à  la  suite 
des  alliances  des  rois  d'Israël  avec  les  Pharaons.  Ils  en 
concluent  qu'on  ne  peut  discerner  dans  ses  descriptions 
ce  qui  convient  à    l'époque  des  faits  de  ce  qui  se  rap- 
porte à  son  temps.  >.'ais  la  couleur  égyptienne  n'est  pas 
spéciale  aux   récits  du  soi-disant  document   élohiste; 
elle  se  remarque  dans  l'ensemble  du  Pentateuque,  sans 
distinction  des  sources;  elle  est  tout  aussi  réelle  pour 
les  plaies  d'Egypte,  par  exemple,   dans  les  parties  du 
récit  que  les  critiques  attribuent  au  document  jéhoviste, 
et  plusieurs  traits  ne  sont  justes  que  pour  l'époque  des 
événements  et  ne  conviennent  pas  à  l'Egypte  des  Pha- 
raons, contemporains  des  rois  et  des  prophètes  d'Israël. 
On  a  constaté,   en  effet,  que  l'Egypte,  décrite  dans 
l'histoire  de  Joseph,  du  séjour  des  Israélites  et  de  leur 
exode,  est  l'Egypte  du  xv«  siècle  avant  notre  ère.  Ce  qui 
est  dit  de  l'état  du    pays,   des  principales  villes  de  la 
frontière,   de  la  composition    de   l'armée,  est  vrai  de 
l'époque    des  Ramsès.  Ce   pays  y  apparaît   comme  un 
royaume   unique,    placé   sous  le    gouvernement  d'un 
seul  roi;  elle  n'est  pas  encore  morcelée  en  douze  petits 
Etats,  comme  elle  l'était  au  temps  d'Isaïe,  xix.  2.  Voir 
t.  Il,  col.  1612.  Les  villes  de  Phithom  et  de  Ramessès, 
bâties  par  les  Israélites,  Exod.,  i.  11.  ont  eu   réelle- 
ment Ramsès   II.  sinon  comme  premier  fondateur,  du 
moins  comme  restaurateur.  Il  n'est  parlé  ni  de  Migdol 
ni  de  Tapîmes  et  on  n'y  relève  aucun  des  noms  sémi- 
tiques de  villes  qui  furent  usités  sous  la  dynastie  buba- 
tiste  contemporaine  de  Salornon.  L'armée  est  composée 
•de  chars  de  guerre.  Exod.,  xiv,  7.  Voir  t.  n,  col.  567- 
570.  Elle  ne  comptait  pas  encore  de  mercenaires  étran- 
gers, pareils  aux  Lubim,  qui   en  faisaient  partie  plus 
tard.  ,1er..  xlvi,  9;    Il  Par.,  xil,  3.  Voir  t.  i.  col.  992- 
994;  t.   iv.  col.  238-241.  Les  relations  de  l'Egypte  avec 
les  pays  étrangers  supposent  aussi  une  époque  ancienne. 
Il  n'est  parlé   ni  du  royaume   d'Ethiopie  qui  dominait 
l'Egypte  sous  le  règne  d'Ézéchias,  ni  des  rois  assyriens 
qui  conquirent  l'Egypte  sous  la  dynastie  éthiopienne. 
Voir  t.  il,  col.  1612.  Cf.  R.  S.  Poole,  Ancient  Egypt, 
•dans  la  Contemporary  Review,  mars  1879,  p.  757-759 
De  cet  accord  entre  le  Pentateuque  et  les  anciens  do- 
cuments égyptiens  on  peut  conclure  que  les  récits  ont 
été  rédiges  peu  après  les  événements  et  à  l'époque  où 
le  souvenir  des  faits  était  encore  récent. 

Cette  conclusion  est  confirmée  par  la  ressemblance, 
purement  extérieure  il  est  vrai,  mais  très  réelle,  des 
institutions  rituelles  et  sacerdotales,  établies  par  Moïse 
au  désert  avec  les  rites  égyptiens.  Voir  t.  iv,  col.  335. 
L'arche  d'alliance,  placée  dans  le  tabernacle,  ressem- 
blai  en  quelque  chose  au  naos  des  temples  égyptiens. 
Voir  t.  i.  col.  912.  Le  tabernacle  présentait  lui-même, 
•dans  son  ensemble,  les  mêmes  dispositions  que  ces 
temples.  Les  divergences  provenaient  de  la  diversité 
des  matériaux  employés  et  de  la  nécessité  d'avoir, 
durant  le  séjour  au  désert,  un  temple  portatif.  Le  ratio- 
nnai d'Aaron  est  pareil  au  pectoral  des  prêtres  égyptiens. 
Le  sacrifice  des  colombes,  Lev.,  i,  14-17,  se  rapproche 
du  sacrifice  des  oiseaux  en  Egypte.  F.  Vigoureux,  La 
Hible  et  les  découvertes  modernes,  6* édit.,  Paris,  1896. 
1.  il,  p.  529-547;  Les  Livres  Saints  et  la  crilii/ue 
valiste,  Paris,  1902,  t.  m,  p.  86-99;  Sa\c.'.  La 
ère  nouvelle  apportée  par  les  monuments  an- 
trad.  ïrochon,  Paris,  1888.  p.  77-98:  .1.  Ileyes, 
Bibel    and   Aegypten,   Munster,    ISJOt,   p.     142.    Cer- 


tains usages  pharaoniques  sont  mentionnés  dans  le 
Deutéronome  :  l'arrosage  avec  les  pieds,  vi,  10,  mode 
d'irrigation  particulier  à  l'Égyptej  voir,  t.  ni,  col.  926- 
929;  les  soterim,  xx,  5,  dont  le  nom  lui-même  se 
rapproche  de  celui  des  scribes  égyptiens;  la  bastonnade, 
infligée  à  la  mode  égyptienne,  xxv,  2,  voir,  t.  i, 
col.  1500;  les  pierres  enduites  de  chaux,  dont  on  se 
sert  pour  écrire,  xxvn,  1-8.  De  tout  cet  ensemble  il 
résulte  manifestement  que  l'auteur  du  Pentateuque 
connaissait  les  mœurs  de  l'Egypte,  ses  usages,  se  s 
coutumes,  d'une  manière  si  parfaite  qu'il  a  dû  vivre 
longtemps  dans  ce  pays  et  précisément  à  l'époque  des 
événements  qu'il  raconte. 

b)    L'auteur   a    écrit  son  livre  pour  les  Israélites, 
sortis  île  l'Egypte  et  n'occupant  pus  encore  le  pays 
île  Chanaan.  —  Le  souvenir  de  l'Egypte  est  Fréquem- 
ment rappelé    aussi  bien  dans  les   lois    que  dans    les 
récits  historiques  des  quatre  derniers  livres  du  Pi  nta- 
teuque.  L'oppression  que  les  Israélites  y  avaient  subie 
était    un  motif  souvent  indiqué  de   ne    pas   retourner 
dans  un  pays  où  l'on  avait  tant  souffert  et  la  délivrance 
delà  servitude  est  un  événement  récent  et  Iris  impor- 
tant pour  Israël.  Le  récit  de  ces  événements  est  écrit 
sous  le  coup  de  l'impression   profonde  qu'ils   avaient 
laissée.  L'anniversaire  de  l'exode  est  célébré  par  une 
fête   solennelle,  la  fête  de  la    Pàque,   qui   en   rappelle 
les    circonstances    historiques.    La    consécration   dus 
premiers-nés  au  Seigneur  se  rattache  aussi  à  la  dixième 
plaie  d'Egypte,  dont  les  Israélites  avaient  été  exemptés. 
La  fête  des  Tabernacles  est  destinée  à  remémorer  aux 
Hébreux   que   leurs   ancêtres   ont   habité  sous  la   tente 
dans    le    désert,    quand    Dieu     les    tira    de    la    terre 
d'Egypte.     Lev.,    xxm.     43.    Quand     les    Israélites    se 
révoltent  et  murmurent  contre  Moïse,  ils  regrettent  la 
vie  facile   qu'il  menaient  en   Egypte  comparativement 
aux    privations    qu'ils   subissent  au   désert,   el  ils  vou- 
draient   retourner   dans    ce  pays    d'abondance.  Moïse 
lutte    constamment    contre    ces    désirs     insensés    du 
peuple,  et  il   cherche  à  éloigner  le  plus  possible  les 
Israélites  du  pays  de  leur  servitude.  Pour  répondre  à 
leurs  plaintes,  il  déclare  que  ce  n'est  pas  lui,  que  c'est 
Dieu  qui  les  a  fait  sortir  d'Egypte.  Il  recommande  de 
de  pas   agir   conformément  aux    usages    de    l'Egypte. 
Lev.,   xvin,   3.  Pour  calmer  Dieu  irrité  contre  Israël. 
Aloïse    fait  valoir  l'opinion  îles   Égyptiens.  Num.,  xiv. 
13,  14.  Plusieurs  dispositions  législatives  sont  portées 
à  cause  de  l'Egypte  qu'on  vient    de   quitter.  La  loi  sur 
l'étranger,  qu'il   ne   faut  ni   contrister  ni  affliger,  est 
motivée  parle  fait  que  les  Israélites  ont  été  étrangers 
en    Egypte.    Exod.,    xxn.   21.    L'Israélite  ne  sera  pas 
esclave  de  ses   frères  à  perpétuité,   parce  que  pieu  a 
affranchi    tout    Israël    de    la    servitude   de  l'Egypte. 
Lev.,  xxv,  42,  55.  Les  sculptures  sont  interdites,  de  peur 
qu'elles    ne  séduisent  et  n'entraînent  à  l'idolâtrie  le 
peuple  choisi,   tiré   par  Dieu    de  l'Egypte.   Deut.,  IV, 
15-20.   On  recommande  au  roi  futur,   qui  régnera  en 
Israël,   de    ne  pas    ramener    son    peuple  en    Egypte. 
Deut..  xvn.  16.  La  délivrance  de  la  servitude  égyptienne 
est    un  des  plus  puissants  motifs,   invoqués  et  répétés 
dans    le    Deutéronome   pour    inciter    les  Israélites    à 
observer  fidèlement   les  prescriptions  données  par  le 
Seigneur  qui  avait  sauvé  Israël.  Si  les  Israélites  sont 
fidèles    aux  prescriptions    divines,    ils  ne  souffriront 
aucun  des    maux   que  Dieu  a  infligés  aux   Égyptiens. 
Exod.,  xv,  26;   Deut..  vu.   15.   S'ils  sont  infidèles,  ils 
subiront  comme  châtiment    les  mêmes   maux  dont   ils 
avaient  déjà  été  aflligés  en  Egypte,  Deut..  xxvm,  27.  60; 
xxix,  25.  L'exode  est  donc  pour  le  narrateur  comme 
pour  le  législateur  un  fait  récent,  dont  le  souvenir  est 
encore  très   vivant   et    très  capable  de   produire  une 
forte  impression.  Écrit  longtemps  après  les  événements, 
le  récit  n'aurait  pas  eu  un    accent    -i    saisissant,   et    la 
sortie    d'Egypte    n'aurail    pas  été    le   seul    et   unique 


79 


PENTATEUQUE 


80- 


bienfait  <li \  in,  rappelé  à  la  mémoire  des  descendants 
d'Israël.  C'était  de  ceux-là  mêmes  qni  avaient  été  oppri- 

ii  Egypte  et  qui  venaient  d'être  délivrés  que 
l'auteur  ravivait  des  souvenirs  récents  et  communs. 
Leurs  descendants  éloignés  n'auraient  pas  pu  cire 
frappés  à  ce  point  par  la  mémoire  de  faits,  dont  ils 
n'avaient  s  témoins  oculaires 

1'  tut rt-  part,  rien  dans  le  Pentateuque  n'indique  que 
les  Israélites  aient  déjà  occupé  définitivement  le  pays 
de  Chanaan.  Leurs  ancêtres,  Abraham,  Isaac  et  ] 
qui  avaient  quitté  la  Chaldéè,  n'y  ont  vécu  qu'en 
nomades  et  en  étrangers.  Dieu  leur  avait  seulemenl 
promis  de  donner  à  leur  postérité  la  terre  où  ils 
vivaient.  Les  prom.  <se>  réitérées,  faites  aux  patriarches, 
sont  mentionnées  pour  rappeler  les  droits  d'Israël  à  la 
possession  future  de  la  'J'erre  promise.  Si  .Jacob  vient 
en  Egypte  pendant  la  famine,  c'est  avec  le  dessein  de 
retourner  en  Chanaan.  Gen.,  mvi.  i.  Il  demanda  d'être 
enseveli  avec  ses  pères  au  champ  d'Ephron.  Gen.,  xux. 
29-31,  et  son  désir  fut  accompli.  Gen.,  l.  '«-13.  Joseph 
demanda  aussi  que  ses  ossements  fussent  emportés  par 
si  -  frères,  lorsqu'ils  retourneraient  au  pays  de  la 
promesse.  Gen.,  i.  23-24.  Dieu  confia  à  Moïse  la  mission 
de  faire  sortir  son  peuple  de  l'Egypte  et  de  le  conduire 
dans  la  terre  des  Chananéens.  Êxod.,  in.  S:  VI,  2-8. 
Quand,    irrité  contre  Israël,   il   veut   l'exterminer  tout 

Moïse  lui  rappelle  la  promesse  faite  aux  pa- 
triarches   et    obtient    ainsi    la    grâce    des    coup 

xxxii,  13;  xxxiii,  I.  Le  Seigneur  promet  la  pos- 
m  di  Chanaan  aux  Israélites,  s'ils  pratiquent  Gdè- 
Lev.,  xx,  24.  Cette  promesse  est  fré- 
quemment lans  le  Deutéronome.  Les  livres  du 
milieusonl  le  récil  de  la  marche  d'Israël  vers  la  ren 
Promise.  Moïse  y  conduit  son  peuple  et  il  compare  la 
terre,  qu'il  faudra  conquérir,  à  l'Egypte.  Deut.,  xi,  10. 
Dieu  lavait  caractérisée  comme  une  terre  où  coule  le 

lail  •■'  :    : I)  Exod.,  iii,8,  17,  et  les  espions,  de  retour 

de    leur  exploration,  décrivent   le  pays  par  ce  trait. 
Num.,  xiii,  L2X.  Les  Israélites  sont  donc  en  route 
Terre  Promise.  Une  des  pli  préocupations  tli 

esl  de  les  déterminer  à  j  entn  r  et  à  en  : 
conquête.  Ils  devaient  gagner  rapidi  ment  le  pays 
séjournenl  quarante  ans  au  désert,  c'est  en  punition  de 
la  révolte  qui  sui\it  le  retour  des  espions  envoj 
Palestine.   Le  délai  écoulé,   Moïse    conduit   le   peuple 
jusqu'aux  frontières,  et  choisit,  avant  de  mourir,  Josué 
comme  chef  de  l'armée,  et  le  charge  de  faire  la  conquête, 
Cf.  F.  Vigoureux,  Les  Livr,  t  la  critique  ratio- 

naliste, Paiis.  1902,  t.  m.  p.  28  16 

Le  récit  n'est  pas  composé,  comme  on  l'a  prétendu,  par 
un  écrivain  qui  habite  à  l'ouest  du  Jourdain,  c'est-à-dire 
dans  la  Palestine  où  Moïse  n'a  jamais  pénétré.  En  effet 

ssion  be'êber  hay-yardèn  ne  désigne  pas  néces- 

''  '•'  Située  sur  la   ri\e  gauchi   du  Jour- 
dain. La  signification  doit  être  déterminée  par  le  con- 

1 1  dans  le  mé verset,  Num.,  xxxii,  19  (hébreu 

elledèsigni  successive ni  les  deux  rives.  F.  Vigourou) 

tel  biblique,  12"  édit.,  Paris,  1906,  t.  i.  p.  167-468 
On   n  dans  le  Pentateuque  aucune  allusion 

certaine  à  la  situation  historique  qui  a  suivi  la  conquête, 
Rien  i  fait  supposer  que  le  peuple  habite  dan-  des 
villes  et  dan-  des  maisons;  la  législation  convient  à  des 
nomades,  vivant  au  désert  et  son-  la  tente.  Il  n'estparlé 

ni  de  lérus  ili  m  ni  de  la  royauté  c te  existante.  Les 

allusions.  signalées  par  1rs  critiques,  notamment  dans 
b^  morceaux  poétiques  et  prophétiques,  visent  l'avenir, 
si  le  plus  souvent  par  m.  pn  jugé  contre  la  pro 
phétie   qu'on  y  voit  un  indii 

de  II  iode  et  du  Lévitique  onl  l'empreinte  du 
désert  à  un  degré  tel  que  leur  rédaction  à  une  autre 
époque  ri  en  un  autre  lieu  esl  haute ni  invraisem- 
blable. Leur  cadre  invariabl i  le  camp  d  Isra 

nacle,  par  exemple,  est  portatif  et  répond  à  la 


situation  de  nomades,  qui  ne  peuvent  avoir  de  sanctuaire 
lixe.  Prétendre,  comme  le  font  les  critiques,  qu'il 
n'est  qu'une  projection  du  Temple  de  Jérusalem 
dans  le  passé,  c'est  une  hypothèse,  qui  est  commandé 
par  les  besoins  do  la  cause  et  qui  ne  rend  pas  compte 
de  tous  b-s  détails  de  la  construction  et  du  service. 
D'ailleurs,  il  faut  pour  cela  attribuer  à  l'auteur  du  code 
sao  r  dotal,  qui  l'aurait  construit  de  toutes  pièces,  une 
imagination  créatrice  qui  ne  répond  guèreauxcarai 
qu'on  lui  prête.  On  prétend  aussi  que  la  couleur  locale 
des  lois  du  désert  est  l'oeuvre  du  même  auteur,  qui  se 
reportait  en  esprit  à  l'époque  mosaïque.  Le  principal 
argument,  sur  lequel  on  appuie  cette  explication,  est  la 
promulgation  de  la  plupart  de  ces  lois  sacerdotales  au 
pied  du  Sinaï.  Or,  à  ce  moment,  rien  n'était  plus  étran- 
ger à  la  pensée  de  -Moisi-  que  la  prévision  d'un  séjour 
prolongé  d'Israël  au  désert.  Moïse  n'a  donc  pu  rédiger 
les  lois  sinaïtiques  en  vue  d'une  situation  qu'il  De 
prévoyait  pas  encore.  Mais  la  rédaction  définitive  de 
ces  lois  a  bien  pu  être  faite  après  la  révolte  dont  le 
séjour  dans  ledéserl  pendant  quarante  ans  fut  la  puni- 
lion:  elle  aurait  par  suite  été  rendue  conforme  à  cette 
situation  nouvelle.  Ainsi,  quand  le  temps  de  l'épreuve 
est  écoulé,  quand  la  législation,  temporaire  et  locale. 
du  désert  touche  à  sa  lin.  Moïse  promulgue;!  la  généra- 
tion nouvelle  qui  va  traverser  le  Jourdain  et  conquérir 
le  pays  de  Chanaan.  des  lois  appropriées  à  la  vie 
-.dentaire  et  agricole  qu'elle  va  mener  dans  la  Terre 
isi  .  Du  reste,  à  vrai  dire,  seules  les  lois  qui 
concernent  les  campements  et  li  transfert  de  l'arche  et 
du  tabernacle,  présentent  ce  caractère  temporaire  et 
provisoire.  Primiti  ement,  elles  ne  devaient  être  appli- 
que pendanl  le  voyage.  Le  législateur,  parvenu 
au  pays  de  Chanaan.  les  aurait  abrogées  et  reinpl 
par  des  dispositions  nouvelles.  La  révolte  des  Israélites 
après  le  retour  des  espions  a  changé  la  situation,  et  des 
prescription-  |    mr  une  dune  fort  limitée,  ont  pu 

être  appliquées  pendant  quarante  ans.  Celles  qui  regar- 
la   descendance  el  les  sacrifices  pouvaient  être 
pratiquées  partout  et  en  tout  temps,  hors  du  camp  aussi 
bien  que  il,.!,  11  n'y  a  plus  donc,    de  ce   chef. 

de  difficulté,  et  l'empreinte  du  désert  que  conservent 
les  lois  du  culte  israélite  demeure  un  indice  de  la  date 
de  leur  promulgation  et  de  la  rédaction  du  code  qui 
les  contient.  1  ■'.  Vigouroux,  Les  Livres  Saints  et  lacri- 
laliste,  t.  ni.  p.  7;i-Si>  :  R. Cornely,  Inlroduc- 
tio  specialis  in  hist.  V.  T.  Iihrox,  part.  I.  Paris. 
P  57-60. 

D'ailleurs,  la  forme  elle-même  de  la  législation  du 
Pentateuque  témoigne  de  son  origine  mosaïque.  Il  n'y 
a  pas  d'ordre  rigoureux  dans  la  disposition  des  lois. 
L'auteur  les  enregistre  à  l'occasion,  en  racontant  les 
faits  qui  les  ont  amenées.  Klles  ne  constituent  pas  un 
code  systématique.  Elles  ont  été  prises  au  jour  le  jour. 
suivant  les  occurrences.  En  dehors  de  la  loi  morale  et 
use,  révélée  par  Dieu  d'un  seul  coup,  ou  à  de- 
dates  fixes,  beaucoup  di  règles  civiles  sont  le  résultat 
de  consultations  adressées  à  Moïse.  Des  cas  spéciaux 
exigent  des  solutions  nouvelles  et  précisent  l'applica- 
tion des  lois  générales.  Des  lois  complémentaires 
retouche-,  des  répétitions  dépendent  de  circonstances 
parfois  imprévues.  Les  premières  lacunes  sont  ainsi 
comblées.  Néanmoins  la  législation  n'est  pas  comp 
L'organisation  politique  n'est  pas  réglée.  La  loi  sur  la 
royauté  est  pleine  de  lacunes  el  ne  vise  qu'un  avenir 
éloigné.  Aussi  Israël,  après  la  conquête  de  la  Palestine, 
pas  de  chef  commun;  chaque  tribu  sera,  pour 
ainsi  dire,  isolée  el  indépendante.  Josué.  n'esl  cl 
que  de  conquérir  et  de  partager  la  Terre  Promise.  Ces 
caractères  de  la  législation  du  , Pentateuque  ne  peuvent 

convenir  qu'à  Moïse  el  au  temps  du  séjour  d'Israël  au 
désert.  Il-  confirment  donc  l'origine  mosaïque  des  lois 
israélites  et  du   livre   qui  les  contient.  F.  Vigouroux. 


81 


PENTATEUQUE 


82 


op.  cit.,  t.  m,  p.  09-79;  R.  Corn  'ly,  loc.  cit.,  p.  64-66. 
2.  Caractères  mosaït/ws  de  la  l'arme  littéraire.  — 
La  langue  du  Penlaleuque,  malgré  l'immobilité  relative 
de  l'hébreu,  présente  des  particularités,  qui  ne  se  ren- 
contrent déjà  plus  dans  le  livre  de  Josué.  Ce  sont  des 
mots  ou  des  formes  qui  ont  vieilli  et  sont  tombés  en 
désuétude  ou  ont  été  modifiés.  On  y  reconnaît  donc  des 
archaïsmes,  indices  assurés  de  l'antiquité  du  livre.  Voir 
t.  I,  col.  911.  Ce  sont  le  pronom  masculin  hu,  employé 
155  fois  sur  206  pour  la  forme  féminine  hi';  na'ar,  au 
masculin,  pour  désigner  une  jeune  plie:  les  pronoms 
hait  au  lieu  de  'ellêh,  et  hallêzéh.  R.  Graflin,  Étude 
sur  certains  archaïsmes  du  Pentateuque,  dans  le 
Compte  rendu  du  Congrès  scientifique  des  catholiques, 
Paris,  1888,  t.  i,  p.  lôi-165  ;  F.  Vigouroux,  Manuel  bi- 
blique, 12»  édit., Paris,  1906,  t.  i,  p.  434-435;  Les  Livres 
Saints  et  la  critique  rationaliste,  Paris,  '1902,  t.  III, 
p.  122-126.  Les  critiques  ont  cherché  à  échapper  à  cet 
argument  linguistique  de  différentes  façons.  La  plupart, 
rencontrant  les  archaïsmes  dans  le  code  sacerdotal,  la 
source  la  plus  récente,  selon  eux,  du  Pentateuque,  pré- 
tendent que,  fussent-ils  réels,  ils  ne  prouvent  pas  l'an- 
tiquité du  document  qui  les  contient;  un  écrivain  récent 
peut  à  dessein,  par  amour  de  l'archaïsme  et  pour  vieillir 
son  œuvre,  employer  desexpressions  anciennes,  tombées 
de  son  temps  en  désuétude.  Mais  d'autres  ne  reconnais- 
sent pas  même  dans  ces  particularités  du  Pentateuque 
des  archaïsmes  réels, ils  n'y  voient  que  des  singularités 
d'orthographe  et  d'écriture, introduites  par  les  massorètes 
dans  leur  édition  du  texte  du  Pentateuque.  Ainsi  pen- 
dant longtemps  la  voyelle  du  pronom  s'-  n'était  pas 
écrite,  de  telle  sorte  que,  dans  tous  les  livres  de  la  Bible, 
on  avait  pour  les  deux  genres  les  simples  lettres  «-; 
seule,  la  lecture  différenciait  le  masculin  du  féminin.  La 
présence  du  i  dans  le  pronom  féminin  n'est  pas  an- 
cienne, et  les  quiescentes  i  et  >  n'ont  été  ajoutées  qu'à 
une  époque  assez  récente.  En  transcrivant  le  Wîl  fémi- 
nin, les  massorètes  ont  marqué  sous  le  n  le  point  de  la 
voyelle  i ;  ils  lisaient  donc  hï  et  non  hû'.  S'ils  ont  con- 
servé l'anomalie  N--,  c'est  par  un  respect  exagéré  pour 
l'unique  manuscrit  du  Pentateuque  qu'ils  ont  transcrit 
et  ponctué,  et  la  leçon  de  leur  manuscrit  s'explique  par 
le  fait  que,  vers  le  commencement  de  notre  ère,  l'écri- 
ture hébraïque  ne  mettait  que  peu  ou  pas  de  différence 
entre  le  i  et  le  >.  Ces  affirmations  sont  loin  d'être  cer- 
taines, voir  t.  m,  col.  501-505;  rien  ne  donne  droit 
d'accuser  les  massorètes  d'être  des  faussaires.  Les 
massorètes,  au  rapport  du  Talmud  de  Jérusalem,  traité 
Taanilh,  iv,  2,  trad.  Schwab,  Paris,  1883,  t.  VI,  p.  179- 
180,  consultèrent  trois  manuscrits  du  Pentateuque  et 
maintinrent  les  onze  exceptions  de  la  forme  féminine 
N'n  sur  le  témoignage  de  deux  de  ces  manuscrits. 
L'emploi  du  masculin  -y:  pour  le  féminin  mv:  pourrait 

bien  n'être  aussi,  dit-on,  qu'une  simple  irrégularité 
d'orthographe  ;  à  supposer  qu'il  soit  un  idiotisme  ancien, 
il  ne  serait  pas  à  lui  seul  une  marque  de  haute  anti- 
quité. Les  pronoms  archaïques  ne  seraient  non  plus 
que  des  différences  orthographiques.  A.  Loisy,  Histoire 
critique  du  texte  et  des  versions  de  la  Bible,  dans 
L'enseignement  biblique,  Paris,  1892,  t.  i.  p.  51-56. 
Comment  se  fait-il  donc  qu'ils  n'existent  que  dans  le 
Pentateuque? 

En  outre  des  formes  archaïques,  on  signale  encore 
dans  le  Pentateuque  des  mots  anciens,  tels  que  inn 
""zi  et  nrin,  Gen.,  i,  2,  et  la  tournure  y-it<-  n»n,  Gen., 

i,  25,  des  expressions  et  des  phrases  plus  tard  inusitées  : 
dbilj.a  épi,  »  et  le  premier  mois  de  l'année,  voir  t.  i, 
coi.  46;  bànàh,  dans  le  sens  de  concevoir;  kib'san, 
s  four;  »  kdsas,  «  compter;  »  mékés,  <<  somme  comp- 
tée; »  miksdh,  g  compte;  n  yê'dsef  el-'ammav,  (i  être 
réuni  à  ses  peuples,  »  ou  simplement  yê'âsef,  >■  être 
réuni.  »  Certaines  phrases  poétiques,  telles  que  «  cou- 


vrir l'œil  de  la  terre  »,  Exod.,  x,  5,  15;  Num.,  XXII,  5, 
11,  signifiant  couvrir  la  surface  de  la  terre,  sont  très 
antiques.  Les  mots  orner  et  issdron  ne  se  lisent  aussi 
que  dans  le  Pentateuque.  Voir  t.  m,  col.  273.  Enfin,  en 
plus  des  mots  égyptiens  déjà  mentionnés,  on  trouve 
dans  le  Pentateuque  des  expressions  hébraïques  qui 
ne  sont  que  des  transcriptions  de  mots  égyptiens. 
Ainsi  têbdh,  désignant  l'arche  de  Noé  et  la  nacelle 
dans  laquelle  Moïse  fut  exposé  sur  le  Nil,  est  l'égyptien 
tba,  ou  teb,  tep,  qui  signifie  «  coffre,  bateau,  berceau  ». 
Les  roseaux  dont  était  faite  la  têbdh  de  Moïse  sont 
appelés  goméh  ;  c'est  l'égyptien  kani,  qui  est  la  même 
chose  que  gain,  «  jonc.  »  L'enfant  fut  exposé  sur  la 
«  lèvre  du  Nil  »  ;  or  la  lèvre  exprimait  métaphorique- 
ment en  égyptien  le  rivage.  Yeor  est  le  nom  même  du 
Nil.  Les  vaches  grasses  du  songe  de  Pharaon  paissaient 
des  ahu,  expression  égyptienne  qui  signifie  «  verdure, 
roseaux  ».  Joseph  est  revêtu  de  lin,  SeS,  mot  usité  dans 
la  Genèse  comme  sur  les  monuments  hiéroglyphiques. 
Voir  t.  m,  col.  1668.  Le  roseau  que  les  Israélites  em- 
ploient pour  fabriquer  des  briques  est  nommé  de  son 
nom  égyptien  qas.  Sur  les  hartummim,  voir  t.  n, 
col.  1443-1444.  L'arbuste  dans  lequel  Moïse  voit  Dieu  à 
l'Horeb  est  appelé  senéh,  qui  est  le  sent  des  inscrip- 
tions et  des  papyrus  de  la  XIX»  dynastie.  Le  tambour, 
(of,  dont  Marie,  sœur  de  Moïse,  se  sert,  porte  un  nom 
égyptien,  teb,  tep.  Le  vase,  dans  lequel  on  dépose  la 
manne,  sinsénef,  les  pots  de  viande,  que  regrettent  les 
Israélites,  sir,  sont  des  mots  égyptiens  sennu,  seri, 
qu'on  ne  retrouve  plus  dans  les  autres  livres  de  la 
Bible.  La  corbeille  destinée  à  contenir  les  prémices, 
téné,  est  la  tena,  «  corbeille,  »  des  Égyptiens.  F.  "Vi- 
gouroux, La  Bible  et  les  découvertes  modernes,^'  édit., 
Paris,  1896,  t.  n,  p.  586-591.  Toutes  ces  particularités 
linguistiques  réunies  sont  des  indices  évidents  de  l'an- 
tiquité du  Pentateuque;  elles  confirment  par  suite 
l'authenticité  mosaïque  de  ce  livre. 

lit.   OBJECTIONS    CONTRE    L'AUTBENTICITÉ    MOSAIQOE 

nu  pentatedque.  —  l"  Histoire  de  ces  objections.  — 
1.  Les  précurseurs  des  critiques  modernes.  —  Les 
gnostiques,  qui  rejetaienttout  l'Ancien  Testament  comme 
étant  l'œuvre  du  mauvais  principe,  ne  niaient  pas 
l'authenticité  mosaïque  du  Pentateuque,  ils  soutenaient 
seulement  que  le  mauvais  principe  avait  trompé  Moïse. 
Ptolémée,  disciple  de  Valentin,  distinguait  dans  la- 
législation  mosaïque  les  lois  divinement  révélées,  les 
lois  portées  par  Moïse  de  sa  propre  autorité  et  les  lois 
promulguées  par  les  anciens  du  peuple.  Il  ne  niait 
pas  explicitement  que  cette  législation  ait  été  rédigée 
par  Moïse.  Lettre  à  Flora  reproduite  par  saint  Epiphane, 
Hier.,  xxxiii,  8,  t.  xli,  col.  560-561.  D'après  le  même 
saint,  Hœr.,  xvm,  1,  ibid.,  col.  257,  et  saint  Jean 
Damascène,  Hser.,  xix,  t.  xciv,  col.  689,  les  nazaréens 
prétendaient  que  les  livres  de  Moïse  avaient  été  fabri- 
qués et  que  la  loi,  donnée  aux  Juifs  par  ce  législateur, 
différait  de  celle  du  Pentateuque.  Au  m"  siècle,  l'auteur 
des  Homélies  clémentines,  hom.in,47,t.  u, col.  141, 144, 
faisait  dire  à  saint  Pierre  que  la  loi,  donnée  par  Dieu 
à  Moïse,  avait  été  confiée  oralement  aux  anciens,  mise 
par  écrit  après  la  mort  de  Moïse,  perdue,  retrouvée  et 
enfin  brûlée  au  temps  de  Nabuchodonosor.  Le  récit  de 
la  mort  de  Moïse  n'ayant  pu  être  écrit  par  le  défunt,  le 
Pentateuque  qui  le  contenait  était  par  suite  d'une 
autre  main.  A  part  cette  dernière  observation  qui  est 
vraie,  les  objections  des  hérétiques  n'ont  rien  de  scien- 
tifique et  sont  de  pures  inventions  sans  valeur. 

Il  faut  passer  jusqu'au  temps  de  la  Réforme  pour 
rencontrer  de  nouveaux  doutes  sur  l'authenticité  mo- 
saïque du  Pentateuque.  Carlstadt,  De  canonicis  Scrip- 
turis  libellus,  Wittemberg,  1520.  en  vint  parle  même 
raisonnement  que  l'aut  ui  des  Homélies  clémentines, 
à  douter  que  Moïse  ait  rédigé  les  récits  historiques  du 
Pentateuque.    Moïse   n'a  pu   raconter   sa  mort.  Or    le 


83 


PENTATEUQUE 


84 


sujet  de  celte  narration  est  identique  à  celui  des  récils 
précédents.  Tous  ces  récils  sont  donc  d'une  même 
main,  qui  n'est  pas  celle  de  Moïse,  ni  celle  d'Esdras, 
mais  celle  d'un  inconnu.  La  législation  venait  de  Moïse, 
€t  le  Penlateuque  n'en  demeurait  pas  moins  le  plus 
saint  de  tous  les  livres  de  la  Bible.  Au  XVIIe  siècle,  les 
■doutes  se  multiplièrent.  Le  philosophe  anglais  llohbes, 
Levialhan,  1.  III,  c.  xxxm.  Londres,  1051,  déclarait 
d'abord  que  le  titre  :  «  les  cinq  livres  de  Moïse,  »  ne 
voulait  pas  dire  que  Moïse  en  était  l'auteur,  mais  seu- 
lemenl  qu'il  en  était  le  sujet  principal.  Le  récit  de  la 
mort  de  Moïse  est  une  addition  postérieure.  L'ensemble 
■du  Pentateuque  est  plus  récent  que  Moïse,  qui  en  a 
cependant  rédigé  quelques  parties,  notamment  Deut., 
xi-xxvn.  Isaac  de  la  Peyrère,  Syslema  theologicum  ex 
Prseadamitarum  hypolhesi,  1.  IV,  s.  1.,  1655,  p.  173- 
182,  ne  regardait  pas  non  plus  le  Pentateuque  actuel 
comme  l'œuvre  originale  de  Moïse.  Les  derniers  ver- 
sets du  Deutéronome,  certains  passages.  Ximi.,  xxn. 
14-15;  Deut.,  i,  I;  m.  11.  li.  sont  des  additions;  les 
détails  -m-  S, 'ii.  Deut.,  il,  conviennent  à  l'époque  de 
David;  les  obscurités,  les  confusions,  les  lacunes  et  les 
altérations  du  texte  actuel  ne  proviennent  pas  de 
Moïse.  Celui-ci  cependant  avait  écrit  l'histoire  des  Juifs 
à  partir  de  la  création  du  monde  et  rédigé  sa  propre 
législation:  mais  son  livre  a  été  abrégé,  retouché  el 
modifié,  comme  le  prouve  l'étude  du  lexte.  Ce  n'est  pas 
encore  la  négation  de  l'origine  mosaïque  du  Penta- 
teuque. 

Baruch  Spinoza  (1634-1677),  Tractatus  theologieo- 
tpoliticus,  c.  vin,  i\,  dans  Opéra,  2-  édit.  de  Van  Vlo- 
ten  et  Land,  La  Haye,  1895,  t.  II,  p.  56-69,  rejette 
l'authenticité  mosaïque  du  Penlateuque.  Il  reproduit 
les  objections  d'Abenesra  ri  il  les  interprète  dans  le 
s. -us  de  la  négation  de  l'authenticité  mosaïque.  Il  y 
joint  ses  observations  personnelles  :  1«  Il  est  parlé  de 
Moïsi  à  la  troisième  personne,  Num.,  xn,3;  xxxi,  14; 
Deut.,  xxxm.  1,  tandis  que  .Moïse  parle  à  la  première 
personne  de  la  loi  qu'il  avail  promulguée  et  écrite. 
Deut.,  il,l-17,  etc.  A  la  lin  du  Deutéronome,  le  ré-cil 
reprend  à  la  troisième  personne;  ce  qui  prouve  que  le 
livre  dans  son  étal  actuel  esl  d'une  nuire  main  que  de 
celle  de  Moïse.  2  Le  récit  do  la  mort,  de  la  sépulture 
el  du  deuil  de  Moïse,  l'éloge  de  ce  prophète  supérieur 
aux  autres  prophètes,  faits  au  pa^é,  lémoignent  d'une 
époque  postérieure  de  rédaction.  :i-  Certaines  localités, 
telles  que  Dan,  Gen.,  xiv,  14,  portent  les  noms  qu'elles 
eurent  longtemps  après  Moïse  s,  ni.  nient.  4"  Parfois  le 
récit  historique  dépasse  la  vie  de  Moïse.  Ainsi,  la  ces- 
sation   de  la  manducalion  do  la   manne,  Exod.,  xvj,  14, 

n'eut  lieu  qu'à  l'arrivée  dos  Israélites  aux  frontières  du 
pays   do    Chanaan.    .les.,    v,    12.   Les    rois    iduméens 

ii'11 is  Gen.,  xxxvi,  31,  vont  jusqu'à  David,  qui  sub- 

iugua  leur  royaume.  Il  Sam.,  vm,  li.  De  tout  cela  il 
"  oit  plus  clair  que  le  jour  que  le  Pentateuque  a  été 
rédigé  par  un  écrivain  postérieur  à  Moïse.  Mois.-  tou- 
tefois a  écrit  des   livres,   mentionnés  dans  le  Penta- 

h'i'q I  différents  do  ce  livre,  à  savoir  :  1»  le  livre 

dos  .noires  de  Dieu,  Num.,  xxi,  li,  qui  contenail 
doute  l''  récil  .h-  la  défaite  d  Imalec,  Exod.,  xvn, 
li-  et  toutes  les  stations  décrites  par  Moïse.  Num., 
xxxm,  2;  2»  le  livre  de  l'alliance,  Exod.,  x\i.  1.  7.  ré- 
duit   aux   lois.    Exod.,    \\.    22  \\m.  33;    ::     un   livre 

d'exphci h  do  toutes  les  lois  mosaïques,  Deut.,  i.  .">, 

lois  qu'il  avail  impo  ées  de  nouveau,  Deut.,  x\i\  il 
livre  qu'il  avail  écril  m  j  relatanl  la  rénovation  de 
l'alliance,  Deut.,  xxxi,  9;  c'esl  h-»  livre  de  la  loi  », 
augmenté  par  Josué,  Jo  .  sxiv,  25,  26,  livre  perdu, 
mais  inséré  partiellemenl  dans  le  Pentateuque,  avec  lé 

cantique.  Deut.,  xxxn.  i. iqu'il  soil  vraisemblable  que 

Moïse  an  écril  d'autres  loi  .  on  no  peul  cependant 
I  affirmer,  car  les  aurions  pouvaienl  les  avoir  rédigées 
eux-mêmes  et  l'auteur  >\r  la  vie  de  Moïse  les  avoir  in- 


sérées dans  son  livre.  Quant  au  Penlateuque,  il  n'a 
formé  d'abord  qu'un  écrit  avec  Josué,  les  Juges.  Iiuth. 
les  livres  de  Samuel  et  des  Rois,  œuvre  d'un  historien 
qui  racontait  l'histoire  juive  depuis  la  création  jusqu'à 
la  ruine  de  Jérusalem  par  Xabuchodonosor.  Son  auteur 
est  probablement  Esdras,  le  seul  scribe  dont  le  zèle 
pour  la  Loi  soit  mentionné  dans  l'Écriture.  Esdras  a  au 
moins  rédigé  le  livre  de  la  Loi  ou  le  Deutéronome,  qu'il 
a  lu  et  fait  expliquer  au  peuple.  II  Esd..  vm,  9.  Plus 
tard,  Esdras  prit  soin  d'écrire  l'histoire  complète  des 
Juifs,  en  y  insérant  le  Deutéronome  à  sa  place.  Peut- 
être  même  a-t-il  intitulé  les  cinq  premiers  livres  de 
celle  histoire  «  livres  de  Moïse  »,  parce  qu'ils  conte- 
naient surtout  la  vie  de  ce  personnage.  Mais  Esdras  n'a 
pas  mis  la  dernière  main  à  cette  histoire.  Faisant  une 
simple  compilation  de  documents  antérieurs,  il  les  a 
seulement  transcrits,  sansles  ordonner.  C'est  pourquoi, 
dans  le  Pentaleuque.  les  lois  et  les  récils  historiques 
sont  mélangés  sans  ordre  logique  ou  chronologique; 
les  mêmes  faits  sont  répétés,  et  parfois  diversement. 
Cf.  P.  L.  Couchoud,  Benoit  de  Spinoza,  Paris,  1902, 
p.  102-101.  Les  additions  el  recherches  dans  l'œuvre 
de  Moïse  sont  faciles  à  expliquer  comme  un  complé- 
ment apporté  dans  la  suite  des  temps  à  l'ouvrage  pri- 
mitif. Les  autres  assertions  de  Spinoza  ne  reposent 
sur  rien  de  positif. 

Pour  répondre  aux  objections  ,b-  Spinoza  et  défendre 
l'autorité  historique  et  divine  des  livres  de  Moïse, 
Richard  Simon  a  émis  des  hypothèses  nouvelles  sur  la 
composition  du  Pentateuque.  Il  attribuait  à  Moïse  per- 
sonnellement toute  la  partie  législative  de  ce  livre.  Quant 
aux  récits  historiques,  il  reconnaissait  que  ce  législa- 
teur lui-même  avail  rédigé-,  mais  d'après  d'anciens 
mémoires,  la  Genèse  entière.  L'histoire  de  son  temps, 
il  ne  l'avait  pas  écrite  de  sa  main:  il  l'avait  fait  écrire 
par  des  scribes  publics,  dont  l'existence  est  constatée 
plus  tard  et  qui  étaient  chargés  officiellement  de  rédi- 
ger les  Annales  d'Israël.  Bien  que  leur  institution  par 
.Moïse  ne  soit  pas  mentionnée  dans  le  Pentaleuque.  rlle 
est  néanmoins  vraisemblable.  An  sentiment  do  Richard 
Simon,  ces  scribes  publics  étaient  inspirés  pour  abré- 
ger, en  les  ordonnant,  les  modifiant  el  les  complétant, 
les  Annales  officielles.  Connue  ils  résumaient  celles-ci, 
ils  onl  laisse-  dans  leurs  abrégés  des  répétitions  en  vue 
de  ne  pas  trop  modifier  les  actes  publics.  Ayant  été 
exécuté  par  ordre  de  Moïse,  leur  travail  pouvait  légi- 
timement être  attribué  à  ce  dernier.  Certaines  incolié- 
rences  du  texte  actuel  proviennent,  en  outre,  d'un 
déplacement  de  feuillets,  opéré  à  l'époque  où  les  livres 
de  la  Bible  avaient  la  forme  de  rouleaux.  Elles  ne 
prouvent  rien  contre  l'autorité  divine  et  l'origine 
mosaïque  du  Pentateuque.  Voir  Histoire  critique  du 
Vieux  Testament,  préface  non  paginée,  et  le  1.  I,  c.  i-vi, 
Rotterdam,  1685,  p.  l-iô:  Réponse  au  livre  intitulé: 
Sentimens  de  quelques  théologiens  ''<-  Hollande,  c.  vi- 
i\.  Rotterdam,  1686,  p.  55-94;  De  l'inspiration  des 
livres  sacrés,  etc..  Rotterdam,  1687,  p.  20-oi.  114-125, 
1:17-117,  150  sq.;  Lettres  choisies,  lettres  xwiu-xxx, 
2  édit.,  Paris,  1,173(1,  t-  m.  p. 206-236;  Critique  de  lu 
Bibliothèque  des  auteurs  ecclésiastiques,  Paris,  17:10. 
t.  11,  p.  149;  t.  m,  p.  154-247.  Cf.  A.  Hennis,  Richard 
Simon,  Lausanne,  1869,  p.  78-80,  s:i-S!i:  il.  Margival, 
Richard  Simon  et  la  critique  biblique  au xvn> siècle, 
dans  la  Reçue  d'histoire  el  de  littérature  religieuses, 
ls:i7.  1   11,  p.  540-515. 

L'arminien  Jean  Leclerc,  sous  le  voile  de  l'anon 
attaqua  Richard  Simon  et  nia  l'authenticité  mosaïque 

du  Penlateuque.  Il  signalait  dans  les  livres  de  Mois,  (JeS 
détails  et  des  chapitres  entiers  qui.  d'après  lui, 
supposent  une  époque  postérieure  a  Moïse.  Dans  son 
étal  actuel,  le  Penlateuque  esl  une  compilation,  non 
pas  d'ouvrages  officiels,  extraits  des  archives  publiques. 
mais  bien  d'écrits  privés,  dont  quelques-uns,  comme 


«5 


PENTATEUQUE 


86 


celui  des  guerres  de  Dieu,  Niiin..  xxi.  11,  étaient  anté- 
rieurs à  Moïse.  Celui-ci  n'a  rédigé  que  la  partie  princi- 
pale des  livres  que  la  tradition  lui  a  attribués.  L'auteur 
du  Pentateuque,  si  au  courant  des  choses  chaldéennes, 
a  dû  vivre  en  Chaldée.  Or,  les  Juifs  n'avaient  pas  passé 
l'Euphrate  avant  la  captivité.  L'auteur  a  donc  vécu 
après  722;  mais  il  n'est  pas  Esdras,  puisque  les  Sama- 
ritains possédaient  auparavant  le  Pentateuque.  C'est 
plutôt  le   prêtre   israélite,  envoyé   par  le  roi  d'Assyrie 


aux  Samaritains,  1\'  Reg 


24-28,  qui  a  composé  le 


livre  de  la  loi  pour  leur  instruction.  Son  travail  a  éti 
commencé  après  la  découverte  de  la  loi  dans  le  Temple 
sous  Josias.  Plus  tard,  les  prêtres  de  Jérusalem  ont  mis 
leur  loi  d'accord  avec  le  Pentateuque  samaritain.  Sen- 
timent de  quelques  théologiens  de  Hollande  sur  l'His- 
toire critique  du  Vieux  Testament,  Amsterdam,  1085, 
p.  107-129;  Défense  des  Sentimens  de  quelques  théolo- 
giens de  Hollande,  lettre  vif.  Amsterdam,  1686,  p.  166- 
1SS.  Plus  tard,  Leclerc  atténua  son  premier  sentiment. 
Tout  en  maintenant  que  le  Pentateuque  dans  son  état 
actuel  était  postérieur  à  Moïse,  il  déclarait  que  les  addi- 
tions étaient  si  peu  considérables  qu'on  ne  pouvait  refu- 
ser à  Moïse  la  composition  du  livre.  Genesis  sive  Mosis 
ju-op/ielse  liber  primus,  proleg.,  diss.  III,  Amsterdam, 
1693.  En  1686,  Antoine  Van  Dale  soutint  qu'Esdras 
liait  l'auteur  du  Pentateuque,  mais  qu'il  avait  utilisé  le 
livre  de  la  loi,  découvert  au  Temple,  et  d'autres  écrits, 
historiques  et  prophétiques. 

2.  Hypothèse  documentaire.  —  La  première  systé- 
matisation de  la  composition  du  Pentateuque  consista 
-dans  la  supposition  de  sources  diverses,  compilées  et 
utilisées  par  l'auteur.  Jean  Astruc,  Conjectures  sur  les 
mémoires  originaux  dont  il  parait  que  M"<se  s'est 
servi  pour  composer  le  livre  de  la  Genèse,  Bruxelles 
{Paris),  1753,  détermina  le  premier  le  contenu  et  la 
nature  des  mémoires  antérieurs  que  Moïse  avait  em- 
ployés pour  rédiger  la  Genèse,  et  les  parties  du  récit 
actuel  qui  leur  avaient  été  empruntées.  Les  répétitions 
et  les  divergences  des  récils  lui  servirent  de  point  de 
départ  dans  le  discernement  des  sources,  et  la  diversité 
des  noms  divins,  Ëlohim  et  Jéhovah,  lui  Ht  désigner  les 
-deux  principales  sources  combinées  par  Moïse,  l'une 
éloliiste  et  l'autre  jéhoviste.  Une  troisième  nommait 
Dieu  Jéhovah-Élohim.  Astruc  distinguait  encore  neuf 
autres  sources,  qui  n'étaient  que  fragmentaires.  Il 
supposait  enlin  que  Moïse  avait  disposé  sur  quatre 
nés  les  matériaux  préexistants,  et  que  les  copistes 
avaient  mêlé  et  confondu  ces  quatre  récits;  de  là  pro- 
venaient les  répétitions  et  les  incohérences  de  la  Genèse 
actuelle.  Voir  t.  i,  col.  1196-1197.  Eichhorn,  Einleitung 
m  dos  A.  T.,  Leipzig,  1780.  t.  t.  étendit  la  distinction 
des  sources  éloliiste  et  jéhoviste  aux  deux  premiers 
chapitres  de  l'Exode.  Il  a,  en  outre,  caractérisé  ces 
sources,  non  seulement  par  l'emploi  des  noms  divins. 
mais  encore  par  leur  contenu  et  leur  style.  Il  ne  se 
croyait  pas  en  mesure  de  déterminer  leur  origine.  Il 
pensait  d'abord  que  Moïse  avait  rédigé  la  Genèse  et  le 
début  de  l'Exode,  en  les  combinant;  plus  tard,  il  ne 
i  plus  que  d'un  rédacteur.  Le  reste  du  Pentateuque, 
sauf  quelques  interpolations,  comprenait  la  législation 
el  If  journal  de  voyage  de  Moïse.  Charles  David  Ilgen, 
Die  Vrkunden  des  jerusaleniischen  Tempelarchivs  in 
ihrer  Urgestalt,  Halle,  t.  i  (seul  paru),  distingua  trois 
documents,  deux  élohistes  et  un  jéhoviste,  ayant  leur 
genre  propre  de  rédaction.  En  les  combinant,  le  rédac- 

iii'  a  dû  les  modifier  pour  les  mettre  d'accord.  Aussi 
n'est-il  pas  facile  d'en  discerner  dans  le  texte  actuel 
tous  les  éléments  constitutifs. 

3.  Hypothèse  fragmentaire.  —  Un  nouveau  courant 
se  dessina  bientôt,  suivant  lequel  le  Pentateuque  était 
un  conglomérat  de  fragments  détachés  el  disparates. 
Alexandre  Geddes  (voir  t.  m.  col.  145),  prêtre  catholique 
interdit,  The  Iwly  Bible  or  the  /.''«.As  aecounled  saered 


bt/Jewsand  Chrislians,  Londres,  1792  ;Crilical  remarks 
on  the  Hebrew,  Londres,  1800,  t.  i.  parla  le  premier  de 
nombreux  fragments  plus  ou  moins  étendus,  divergents 
et  même  contradictoires,  réunis  et  mis  en  ordre  par 
un  rédacteur  pour  former  le  Pentateuque  actuel.  Ces 
fragments  se  groupaient  en  deux  séries,  caractérisées 
parles  noms  divins,  Ëlohim  et  Jéhovah.  Vater.  Commen- 
tar  iiber  den  Penlaleuch,  3  in-S»,  Halle.  1802-1805, 
répandit  celte  nouvelle  hypothèse  en  Allemagne.  Moïss 
a  bien  pu  rédiger  quelques-uns  des  fragments,  entrée 
dans  la  composition  du  Pentateuque;  mais  il  n'est  pas 
le  compilateur  du  recueil.  Celui-ci  n'a  fait  que  juxtapo- 
ser dans  l'ordre  chronologique  des  fragments  d'époques 
différentes,  qui  sont  demeurés  dispara  tes. Les  lois  en  par- 
ticulier avaient  été  promulguées  selon  les  occurrences. 
La  première  collection,  le  Deutéronome,  existait  déjà 
au  temps  de  David  et  de  Salomon  ;  on  la  retrouva  sous 
Josias.  Les  fragments  historiques  et  législatifs,  compo- 
sés dans  l'intervalle,  y  furent  joints.  Le  Pentateuque 
avait  été  terminé  à  une  date  inconnue,  peut-être  dans 
les  derniers  temps  du  royaume  de  Juda.  De  Wette  se 
rallia  à  cette  hypothèse.  Dissertatio  critica  qua  aprio- 
ribus  Deuleronomium  Pcntateuchi  libris  diversum 
aliud  cujusdam  reeenlioris  aucloris  opus  esse  mons- 
tratur,  in-K  Iéna,  1805;  Beitrâge  :ur  Einleitung  in 
dos  A.  T.,  Halle,  1807,  t.  n.  Pour  lui.  la  Genèse  et 
l'Exode  sont  l'épopée  nationale  des  Israélites,  formée, 
comme  les  œuvres  d'Homère,  de  fragments  mythiques 
divers.  Voir  t.  IV,  col.  1377.  Le  Lévitiqué  est  le  recueil 
des  lois  attribuées  à  Moïse  et  soi-disant  données  au 
Sinaï.  Les  Nombres  forment  un  appendice,  sans  plan, 
ajoutés  aux  trois  premiers  livres  qu'ils  continuent.  Le 
Deutéronome  comprend  des  lois  postérieures,  censées 
promulguées  par  Moïse  au  pays  de  Moab  et  différentes 
de  la  législation  sinaïtique.  La  collection  des  cinq  livres 
est  postérieure  à  la  découverte  du  Deutéronome  sous 
Josias.  Plus  tard,  il  fixa  au  temps  de  la  captivité  a 
Babylone  la  composition  du  Deutéronome  et  la  dernière 
rédaction  du  Pentateuque.  Lehrbuch  der  historisch- 
kritische  Einleitung  in  A.  T.,  3"  édit.,  Berlin,  1829. 
Pour  L.  Berthold,  Historisch-krilische  Einleitung. 
Erlangen,  1813,  part.  III,  p.  768-812,  quelques  frag- 
ments, dont  le  Pentateuque  est  composé,  pouvaient  être 
de  Moïse  lui-même  ou.  au  moins,  étaient  de  son  temps. 
La  plupart  ont  été  rédigés  au  commencement  du  règne 
de  Saûl.  Les  recueils  se  sont  formés  progressivement 
par  le  travail  de  quatre  ou  cinq  écrivains.  La  collection 
complète  n'a  été  faite  que  sous  Salomon.  Hartmann. 
Historisch-krilische  Forschungen  cher  die  Bildung, 
das  Zeitalter  und  der  Plan  der  fùnf  Bûcher  Moses, 
Rostock,  1831,  p.  552-700,  prétendait  que  Moïse  ne 
savait  pas  écrire  et  que  les  Israélites  n'avaient  connu 
l'écriture  que  sous  les  Juges.  Selon  lui,  les  plus  an- 
ciennes parties  du  Pentateuque  sont  postérieures  à  Sa- 
lomon, et  les  recueils  écrits  de  lois  appartiennent  aux 
derniers  temps  de  la  royauté.  Les  éléments  les  plus 
importants  du  Pentateuque  existaient  à  l'époque  de 
Jérémie  et  d'Ézéchiel.  On  n'y  fit  plus  tard  qu'un  petit 
nombre  d'additions,  d'ailleurs  bien  reliées  au  reste. 
L'état  actuel  du  texte  est  contemporain  de  la  captivité 
à  Babylone.  P.  von  Bohlen,  Genesis,  Kœnigsberg,  1835, 
introduction,  adopta  les  conclusions  de  Hartmann  avec 
cette  seule  différence  qu'il  regardait  le  Deutéronome, 
découvert  sous  Josias,  comme  la  partie  la  plus  ancienne 
du  Pentateuque. 

't.  Hypothèse  complémentaire.  —  L'hypothèse  frag- 
mentaire n'eut  guère  de  succès.  Par  réaction  contre 
lémiettement  des  fragments,  on  en  arriva  à  considérer 
le  Pentateuque  comme  l'œuvre  d'un  premier  écrivain, 
complétée  plus  tard  par  un  rédacteur,  comme  une  his- 
toire complète  et  suivie  à  laquelle  on  rattacha  en  guise 
de  suppléments  des  lambeaux  de  toute  sorte.  Kelle, 
Verurthcilsfreie    Wûrdigung  der  mosaischen  Schrif- 


87 


PENTATEUQUE 


88 


ten,  Freyberg,  1812.  soutint  que  la  Genèse  était  un  livre 
primitivement  bien  ordonne'1,  mais  dont  les  récits  avaient 
été  déformés  et  le  plan  disloqué  par  des  interpolations 
successives.  ||.  Ewald,  Die  KomposUion  der  Genesis, 
Brunswick,  1823,  en  raison  du  plan,  de  l'unité  du 
style  et  de  l'origine  du  fond,  soutint  que  la  Genèse  était 
l'œuvre  non  pas  de  Moïse,  il  est  vrai,  mais  d'un  seul 
auteur  qui  n'avait  recouru  ni  à  des  documents  ni 
même  à  (1rs  fragments  antérieurs.  Le  même  critique, 
rendant  compte  de  l'ouvrage  de  Stàhelin,  Kritische 
V ntersuchung  liber  die  Genesis,  1830,  favorable  à  l'hy- 
pothèse (loeiimenlaire,  déclara  que  le  Pentateuque  en- 
tier avait  à  sa  base  un  écrit  unique,  élohiste,  compre- 
nant quelques  morceaux  antérieurs  tels  que  leDécalogue 
et  le  livre  de  l'alliance,  et  dans  lequel  un  rédacteur 
inséra  comme  compléments  des  extraits  d'un  écrit  jé- 
hoviste  postérieur.  Sludien  und  Kritiken,  1831, p. 595- 
606,  I ■'.  Bleek,  abandonnant  l'hypothèse  documentaire, 
enseigna  que  l'écrit  élohiste  primitif  avait  été  complété 
par  nu  rédacteur  jéhoviste  au  moyen  de  ses  propres 
récits  et  d'autres  compléments.  Le  Deutéronome  est 
plus  récenl  el  a  été  joint  à  l'écrit  primitif  complété 
sous  lr  règne  de  Manassé  dans  la  première  moitié  du 
vu*  siècle.  De  libri  Geneseos  origine  aùque  indole  his- 
toricœ  observationes,  1836. 

Le  principal  tenant  de  l'hypothèse  complémentaire 
fut  F.  'l'utli.  Commentar  ûber  die  Genesis,  Halle, 1838. 
A  son  sentiment,  ['élohiste  esi  le  Grundschrift,  o  écrit 
fondamental,  "comprenant  toute  la  partie  législative  et 
les  principaux  récils  historiques  et  dérivant  de  source-; 
écrites.  Il  a  été  complété  par  le  rédacteur  jéhoviste, 
peut-être  d'après  un  autre  document,  mais  certaine- 
ment d'après  la  tradition  orale  et  des  sources  écrites. 
L'élohiste  est  antérieur  à  Salomon,  et  le  jéhoviste  con- 
temporain de  ce  roi.  De  W'ette  accepta  cette  hypothèse 
dans  les  .Y  ei  6'  éditions  de  son  Einleitung,  1840, 1845. 
Stàhelin  l'adopta  aussi  et  l'appliqua  à  tous  les  livres 
nommés  dans  le  titre  de  son  ouvrage.  Kritische  Vnter- 
suchungen  ûber  den  Pentateuch,  die  Bûcher  Josua, 
Bichter,  Samuelis  und  der  Kônige,  Bàle,  1813.  Il  rap- 
portait  l'élohiste  au  e mencemenl   de  l'époque  îles 

Juges  et  le  jéhoviste  au  règne  de  Saùl.  C.  von  Lengerke, 
Kanvan,  Volks  und  Religionsgeschichle  Israels  bis 
:io>)  Tod  des  Josua,  Kœnigsberg,  1844,  modifia  les 
dates,  rapportant  l'élohiste  au  début  du  règne  de  Salo- 
mon et  le  jéhoviste  à  l'époque  des  rapports  de  Juda 
avec  l'Assyrie,  vers  le  règne  d'Ézéchias.  Franz  Delitzsch, 
Die  Genesis,  Leipzig,  1852,  se  rallia  aussi  momentané- 
ment à  cette  hypothèse. 

5.  Xouvelle  hypothèse  doeunienlaire.  —  Cependant 
l'ancienne  hypothèse  des  sources  avait  été'  reprise. 
Gramberg,  Libri  Geneseos  secundum  fontes  rite  di- 
gni isi \endo s  adunibralio  nova,  1828,  el  Stàhelin,  Kri- 
tische Vntersuchung  ûber  die  Genesis,  1830,  distin- 
guaient dans  la  Genèse  deux  documents  élohiste  et 
jéhoviste,  compiles  plus  lard.  F.  Bleek,  Beitrâge  :u  <len 
Forschungen  ûber  den  Pentateuch,  dans  Sludien  und 
Kritiken,  1831,  p.  188-524,  prétendit  que  lllexateuque 
actuel  avait  eu  au  moins  deux  rédacteurs  :  l'auteur  de 
la  Genèse  qui,  avant  le  schisme  vies  dix  tribus,  avait 
11  é,  si  Ion  le  plan  de  l'Hexateuque,  une  histoire  dans 
laquelle  il  avait  reproduil  littéralement  des  chants,  des 

narrai it  des  lois  antérieurs, en  les  combinant  avec 

les  données  de  la  tradition  orale;  l'auteur  du  Deutéro- 
nome qui,  ver,  |a  iin  ,iu  royaume  de  Juda,  a  inséré 
son  œuvre  dan,  le  premier  récit,  qu'il  modifiait  et 
complétait  surtout  dans  la  partie  qui  forme  le  livre 
actui  I  de  Josué.  II.  Ewald,  abandonnant  l'hypothèse 
fragmentaire,  distingua  cinq  documents  :  a)  le  livre 
des  alliances,  écrit  historique,  rédigé  au  temps  de 
Samson,  qui  allait  d'Abraham  à  l'époque  des  Juges; 
6)  le  livre  des  origines,  le  Grundschrift  élohiste,  œuvre 
d'un  lévite  du  début  du  règne  de  Salomon,  qui  conte- 


nait l'histoire  depuis  la  création  jusqu'à  la  consécration 
du  Temple  de  Salomon;  y)  un  récit  composé  par  un 
Éphraïmite  du  x«  ou  du  ix«  siècle,  contemporain  d'Élie 
ou  de  Joël,  qui  racontait  l'histoire  de  Moïse  d'après 
le  premier  document;  8)  un  récit  de  la  fin  du  1X«  ou 
du  commencement  du  vine  siècle;  e)  un  écrit  jéhoviste, 
œuvre  d'un  judéen  de  la  première  moitié  ou  du  milieu 
du  VIIe  siècle,  sous  Osias  ou  Joatham.  Ce  dernier  est  le 
rédacteur  de  l'Hexateuque.  Le  Deutéronome  formait  un 
livre  à  part,  rédigé  dans  la  première  partie  du  règne 
de  Manassé  par  un  juif  qui  vivait  en  Egypte  et  com- 
plété sous  .losias  par  la  bénédiction  de  Moïse,  xxxtv. 
Geschichte  Israels,  Gœttingue,  18'i3,  1815,  t.  i,  p.  60- 
164;  t.  il,  p.  1-25.  Dans  les  éditions  suivantes,  2e,  Gœt- 
tingue, 1851,  1853,  t.  i,  p.  80-175;  t.  h,  p.  L4-45;  3», 
Gœttingue,  1864,  t.  i,  p.  94-193,  le  Deutéronome  de  la- 
lin  du  vil'  siècle  a  été  retouché  par  le  dernier  rédac- 
teur de  l'Hexateuque,  qui  y  a  ajouté  la  bénédiction  de 
Moïse.  Seul,  Michel  Nicolas,  Éludes  critiques  sur  la 
Bible.  Ancien  Testament,  Paris.  1802,  p.  46-94,  a 
adopté  une  partie  des  conclusions  d'Ewald. 

Les  vues  de  Knobel  n'ont  pas  eu  plus  de  succès.  Ce 
critique  distinguait  trois  documents  :  a)  le  Grundschrift 
élohiste,  composé  sous  Saùl  au  moyen  de  sources  anté- 
rieures; b)  le  livre  du  droit,  Rechtsbuch,  moins  com- 
plet que  le  précédent  et  fait  d'après  lui,  contenant  des 
lois  morales  et  la  législation  théocratique,  œuvre  d'un 
lévite  du  royaume  du  nord,  qui  vivait  à  l'époque  où  ce 

poyi ie   a  été  détruit  par   les   Assyriens;  c)    le   livre 

des  guerres,  Kriegsbuch,  ainsi  comme  en  raison deses 
nombreux  récits  de  bataille,  composé  d'après  le  livre 
du  juste  et  le  Grundschrift.  Ce  dernier  document  n'a 
jamais  eu  une  existence  séparée.  Son  auteur  qui  em- 
ployait le  nom  de  .léhovah,  un  judéen  du  temps  de  Jo- 

saphat,  un  lévite  probablement,  a  complété  l'ouvrage 
entier  par  des  traditions  et  des  légendes  populaires 
pour  l'histoire  primitive  et  à  l'aide  de  documents  pour 
l'histoire  patriarcale,  Le  Deutéronome,  qui  est  un  ou- 
vrage distinct,  est  plus  récent,  son  auteura  vécu  sous 
Josias  et  sa  langue  ressemble  à  celle  de  .lérémie.  Kri- 
tik  îles  Pentateuch  und  Josua,  p.  189-599. 

II.  llupl'elil.  Die  Quelle»  der  Genesis  und  die  Ait 
ihrer  Zusamntensetzung,  Berlin,  1853,  a  fait  entrer 
l'hypothèse  documentaire  dans  une  voie  nouvelle,  que 
les  critiques  ont  depuis  lors  généralement  suivie.  Il  a 
distingue  dans  la  Genèse  trois  documents  indépendants: 
ni  le  premier,  élohiste,  qui  est  l'ancien  Grundschrift, 
au  moins  dans  son  ensemble;  l»  un  second,  élohiste, 
qui  raconte  l'histoire  des  patriarches;  e)  le  jéhoviste 
dont  le  contenu  se  rapproche  beaucoup  du  précédent. 
I  n  rédacteur  les  a  réunis  et  harmonisés  de  façon  à  for- 
mer une  histoire  ci  uplele  el  suivie.  K.  Bôhmer  a  con- 
firmé les  vues  de  llupfeld,  son  maître.  Liber  Gel 
pentateuchicus,  Halle,  1860;  Das  ers  te  Buch  der 
Thora,  1862,  Étendant  ses  recherches  au  l'enlateuque 
entier,  Th.  Noldeke,  Unleesuehungen  zur  h'ritil.  des 
A.  T.,  Kiel,  1809,  p.  1-144;  Histoire  littéraire  de  VA. 
T.,  trad.  franc.,  Paris,  1873,  p.  17-59,  distingua  quatre 
documents  :  le  jéhoviste,  un  second  jéhoviste  plus 
ancien,  le  Grundschrift  (élohiste),  et  le  Deutéronome 
le  plus    récent  des   quatre.  Les  quatre  premiers  livres 

du  Pentateuque  et  Josué  avaient  été'  formés  avant  la  ré- 
daction du  Deutéronome.  E.  Schrader,  Einleitung  de 
de  Welle.  8"  ■'■•lit..  Berlin,  1809.  ne  reconnaissait  que 
deux  doci nts  principaux  :  a)  l'élohiste  ou  Grund- 
schrift, œuvre  d'un  prêtre  de  Juda  contemporain  de 

David;  h]  le  second,  élohiste,  composé  par  un  Israélili 
du  nord  peu  après  le  schisme  des  dix  tribus.  Le  jého- 
viste les  réunit  en  les  remaniant  et  en  y  ajoutant  de 
nouveaux  morceaux,  entre  825  et  800,  sous  le  règne  de 
Jéroboam  11.  Le  Deutéronome,  iv.  ii-xxvm,  09,  formait 
un  ouvrage  spécial,  rédigé'  peu  avant  sa  découverte  an 
Temple  par  un  écrivain  qui  touchait  de  très  près  a  Je- 


■•89 


PENTATEUQUE 


90 


rérnie.  Pendant  la  captivité,  il  fut  joint  aux  quatre  pre- 
miers livres;  il  subit  alors  des  retouches  et  reçut  des 
additions. 

Un  revirement  d'opinion  modifia  ensuite  les  dates 
attribuées  à  deux  de  ces  documents  :  le  Grundschrift, 
considéré  comme  le  plus  ancien,  passa  pour  le  plus 
récent  et  le  Deutéronome  ne  tint  plus  la  dernière  place. 
La  théorie  du  développement  religieux  en  Israël,  pro- 
posée par  Reuss  en  1S30  et  1S34,  puis  par  Vatke.  Die 
Religion  îles  A.  T.  tiach  den  kanonischen  Bûchern 
enlwickelt,  Berlin,  1835,  t.  i,  et  par  George,  Die  alté- 
rai jûdischen  Fesle  mit  einer  Kritik  der  Gesetzge- 
bung  des  Pentateuchs,  Berlin,  1835,  fut  reprise  par 
Graf,  Die  geschichtliehen  Bûcher  des  A.  T.,  Leipzig, 
1865.  1866,  et  dans  Merx,  Archiv  fur  wissenschâftliche 
Erforschung  des  A.  T..  Halle,  1869,  t.  i,  p.  3(Hl-i77. 
et  appliquée  à  la  critique  littéraire  de  l'IIexateuque. 
Elle  a  donné  naissance  au  système  des  quatre  docu- 
ments qui  est  aujourd'hui  prédominant  parmi  les  cri- 
tiques, adversaires  de  l'authenticité  mosaïque  du  Pen- 
tateuque.  En  voici  le  résumé  : 

a)  Document  élohiste,  E.  —  Nommé  ainsi,  parce  que 
son  auteur  s'abstient  systématiquement,  avant  la  révé- 
lation de  .léhovah  à  Moïse  au  Sinaï,  d'employer  ce  nom 
révéli-,  et  désigne  Dieu  sous  le  nom  d'Élobim,  ce  docu- 
mentes! le  moins  étendu  et  le  moins  important  des  quatre. 
Il  n'a  été  inséré  dans  l'Hexateuque  que  par  lambeaux, 
et  par  suite  on  a  discuté  sur  son  point  de  départ.  On 
pense  généralement  qu'il  ne  contenait  pas  d'histoire 
<les  origines  et  qu'il  débutait  par  l'histoire  des  patriar- 
ches. On  lui  attribue  Gen..  xx,  1-17;  xxi,  6-32a;  xxii. 
l-ll.  lit;  xxviii,  11.  12,  17,18,  20-22;  xxix,  1,  15-23,25- 
28,  30;  xxx,  l-3a,  6,  8,  17-20a,  21-23  ;  xxxi,  2,  4-18a,  19- 
15,  47,  5I-.V,;  xxxn,  1-3,  146-22,  24;  xxxm,  186-20; 
xxxv,  1-8,  16- -vi;  x.xxvn,  26,  5-11,  lia,  L5-18a,  19,  20, 
22,  236, 21,  28a,  29,  30,316,32a,  34,  36;  XL,  1-xlii,37; 
xi. m,  14,  236;  xi. v,  1-xlvi,  5a;  xlvii,  12;  xi.vm,  1.  2, 
8-22;  l,  15-26;  Exod., i,  15-11,14;  m,  1-6,  9-15,21,  22;  iv, 
17.  18,  206,  21; vu, 206,21a,  24;ix,  22,  23a,  35;  x,8-13a, 
20-27.  xi.  1-3;  xil,  31-36,  376-39:  xv,  1-21  ;  xvn,  3-6, 
8-xvm,  27;  xix,  26-19;  xx.  1-21;  xxi,  1-xxiit,  33;  xxiv. 
3-8,  1245a,  1S6,xxxi,  186-xxxn,  8,  15-xxxm,  23.  Dans 
le  livre  des  Nombres,  le  partage  entre  l'élohiste  et  le 
jéhoviste  est  si  difficile  à  opérer  que  les  plus  récents 
critiques  renoncent  à  le  faire  et  se  bornent  à  attribuer 
à  JE  les  passages  qu'ils  distinguent  du  code  sacerdo- 
tal, à  savoir  Num.,  x,  29-xn,  15;  xm,  176-20,  22-24,266- 
31,  326.  33;  xiv,  3,  4,  8,  9,  11-25,  31-33,  39-45;  xvi,  16, 
2a,  12-15,  25,  26,  276-32a,  33,  34;  xx,  16,  3a,  5,  14-21  ; 
xxi,  1-3,  46-9,  12-35;  xxii,  2-xxv,  5;  xxxn,  1-17,  20-27, 
3S-42.  Quelques  versets  du  Deutéronome,  x.  6,  7;  xxvn, 
5-7a;  xxxi,  14,  15,  23;  xxxm,  1-28;  xxxiv,  5,  6,  provien- 
draient de  E,  et  xxxiv,  10-12,  de  JE.  Certains  critiques 
retrouvent  un  élohiste  dans  les  livres  de  Josué,  des 
Juges,  de  Samuel  et  des  Rois.  Son  récit  irait  jusqu'à  la 
mort  de  Saiil  (Cornill)ou  même  jusqu'au  temps  d'Achab 
(Bacon). 

C'était  donc  un  livre  historique,  commençant  à  Abra- 
ham et  racontant  l'histoire  de  Moïse  et  de  la  conquête 
de  la  Palestine  d'après  une  tradition  différente  de  celle 
qu  .i  reproduite  le  document  jéhoviste.  Elle  comprenait 
le  Décalogue  et  le  livre  de  l'alliance. comme  législation 
donnée  à  Moïse  sur  le  mont  Horeb.  Ses  récits  seraient 
très  objectifs  et  très  précis.  L'auteur,  qui  était  au  cou- 
rant des  choses  égyptiennes,  était  déjà  dominé  par  les 
vues  religieuses  des  premiers  prophètes  d'Israël.  Il  ré- 
digeait une  histoire  théocratique  plutôt  qu'une  histoire 
nationale.  Il  employait  des  expressions  spéciales,  et  son 
style  parait  uni  et  coulant,  quoique  parfois  peu  châtié. 
Comme  presque  toutes  les  traditions  qu'il  rapporte  se 
rattachent  à  des  localités  du  royaume  d'Israël,  on  pense 
généralement  qu'il  était  de  ce  royaume.  O.  Procksch, 
Das  nordhebràisches  Sagenbuch.   Die  Elohimquelle, 


Leipzig,  1906.  Quelques  critiques  ont  aie  l'unité  litté- 
raire de  son  œuvre  et  distingué  plusieurs  élohistes, 
deux  au  moins,  sinon  trois,  E1,  E-,  lv.  Dans  l'école  de 
Wellhausen,  on  prétend  que  l'élohiste  est  plus  récent, 
d'une  centaine  d'années,  que  le  jéhoviste.  Les  traditions 
de  celui-ci  paraissent,  dit-on,  plus  fraîches,  plus  simples 
et  plus  naïves.  Mais  d'autres  critiques,  Dillmann,  Kittel, 
Kônig  et  même  Winckler,  pour  des  raisons  différentes, 
soutiennent  la  priorité  de  E.  Les  dates  proposées  sont 
donc  divergentes;  elles  s'échelonnent  du  IXe au VIIIe siè- 
cle avant  notre  ère.  Toutefois,  l'auteur  aurait  inséré 
dans  son  œuvre  des  documents  antérieurs:  morceaux  poé- 
tiques, tirésdu  livre  des  guerres dejéhovah, Num. ,xxxi, 
li,  15,  et  du  livre  du  juste  ou  des  justes,  Jos.,  x,  12,  13, 
voir  t.  m,  col.  1873—1875,  à  savoir  le  chant  du  puits, 
Num.,  xxi,  17,  18.  voir  t.  i,  col.  154S,  et  léchant  d'Iié- 
sébon,  Num.,  xxi,  27-30,  voir  t.  m,  col.  660,  et  peut-être 
aussi  le  cantique  de  Moïse  après  le  passage  de  la  mer 
Rouge,  Exod.,  xv,  1-18,  voir  t.  iv,  col.  1211-1212;  en 
outre,  les  oracles  de  Balaam,Num.,  xxm,  xxiv  (au  moins 
en  partie), et  la  bénédiction  des  tribus  d'Israël  parMoïse, 
Deut.,  xxxm,  voir  t.  IV,  col.  1213-1214;  lois  morales,  le 
Décalogue,  Exod.,  xx,  1-17;  lois  civiles  et  rituelles,  le 
livre  de  l'alliance,  Exod.,  xxi,  1-xxiii,  33,  voir  t.  i, 
col.  388,  code  Israélite  le  plus  ancien,  dit-on.  qu'on  a 
rapproché  du  code  d'Hammourabi,  récemment  décou- 
vert. Voir  t.  iv,  col.  335-336. 

6)  Document  jéhoviste,  J.  —  On  lui  a  donné  ce  nom, 
parce  que  son  auteur  a  constamment  employé  le  nom  de 
•léhovah,  même  avant  sa  révélation  sur  le  Sinaï.  C'est 
encore  un  livre  historique;  mais  il  remonte  jusqu'aux 
origines  de  l'humanité,  et  après  l'histoire  primitive,  il 
raconte  l'histoire  des  patriarches,  ancêtres  d'Israël,  et 
du  peuple  juif  au  moins  jusqu'après  la  conquête  de  la 
Terre  Promise.  On  lui  attribue  les  passages  suivants 
du  Pentateuque  :  Gen.,  H,  46-iv,  26;  v,  29;  vi,  1-8;  vu, 
1-5,  7-10,  12,  166,  17,  22,  23;  vm,  26,  3a,  6-12,  136,  20- 
22;  ix,  18-27;  x,  8-19,  21,  24-30;  xi,  1-9,  28-30;  xn,  l-'.a, 
6-20;  xm,  1-5,  7-lla,  126,  20-22;  ix,  18-27;  x,  8-19,  21, 
24-30;  xi,  1-9,  28-30;  xn,  l-4a,  6-20;  xm,  1-5,  7-lla, 
126-18;  xv;  xvi,  16,  2,  4-14;  xvnr,  l-.xix,  28.  30-38;  xxi, 
la,  2a,  33;  xxii,  15-18;  xxiv,  1-xxv,  6,  116,  18,  21-26a, 
27-xxvi.  33;  xxvn,  1-45;  xxviii.  10.  13-16,  19;  xxix,  2-14, 
31-35;  xxx,  36-5.  7,9-16,  24-xxxi,  1,  3,  46,  48-50;  xxxn, 
3-13a,  22,  21-xxxiii,  17;  xxxiv.  26,  3.  5,  7,  11,  12,  19, 
j:..  26,  30,  31;  xxxv.  14,  21,  22a;  xxxvn,  3,  i,  12,  13, 
146,  186,  21,  23a,  25-27,  286,  31a,  326,  33,  35;  xxxvm; 
xxxix;  xlii,  38;  xliii,  1-13,  15-23a,  24-XLIV,  3i;  xlvi, 
2S-xi.vii,  6,  13-27a,  29-31;  xlix,  16-28a,L,  1-11,  14; 
Exod.,  i,  6,  8-12;  II,  15-23a;  m,  7,  8,  16-20;  iv,  1-16, 
19.  20a,22-vi,  1  ;  vu,  14-18,  23,  25-29;  vm,  4-1  la,  10-ix, 
7,  13-21,  236-34;  x,  1-7,  136-19,  28,  29;  xi,  4-8,  21-27, 
29,  30;  xm,  3-22;  xiv,  5-7,  10-14,  19,  20,  216,  24,  25, 
276,  30,  31  ;  xv,  22-27;  xvi,  4;  xvn,  16,  2,  7;  xix,  20-25; 
xx.  22-26;  xxiv,  9-11;  xxxn,  9-14;  xxxiv,  1-28.  Pour  les 
Nombres,  la  part  du  jéhoviste  est  si  étroitement  mêlée 
à  celle  de  l'élohiste  qu'on  ne  peut  les  distinguer  avec 
certitude,  voir  col.  89.  Dans  le  Deutéronome,  on 
n'attribue  au  jéhoviste  que  xxxiv,  16-4.  Le  jéhoviste 
racontait  aussi  l'histoire  de  la  conquête  de  la  Palestine, 
si  même  il  ne  parlait  pas  des  Juges.  J.  Lagrange,  Le 
livre  des  Juges,  Paris,  1903,  p.  xxm-xxxii. 

Ce  document  envisageait  les  faits  qu'il  rapportait  au 
point  de  vue  religieux  et  moral,  et  l'histoire  qu'il  con- 
tient est  à  la  fois  nationale  et  religieuse.  Pour  la  période 
primitive,  il  a  reproduit  la  tradition  populaire  et  quel- 
ques chants  de  l'âge  héroïque  :  le  chant  de  Lamech, 
Gen.,  il,  23,  24,  voir  t.  iv,  col.  41-42,  et  la  bénédiction 
de  Jacob  mourant.  Gen.,  xlix.  Cf.  J.  Lagrange,  La  pro- 
phétie de  Jacob,  dans  la  Revue  biblique,  1898,  t.  vu, 
p.  539-540;  FI.  de  Moor,  La  bénédiction  de  Jacob, 
Bruxelles,  1902.  L'histoire  des  patriarches  est  foncière- 
ment la   même  que  dans  l'écrit  élohiste;  elle  ne   se 


91 


PEXTATEUQUE 


92 


diversifie  que  par  quelques  particularités.  De  plus  no- 
tables divergences  sont  signalées  dans  l'histoire  de 
.Moïse  et  de  la  conquête  île  l  llianaan.  L'auteur  reproduit, 
Exod.,  xxxiv,  1 1-26,  une  forme,  exclusivement  religieuse 
et  rituelle,  ilu  Décalogue,  Révélé  au  Sinaï,  ou  au  moins 
un  fragmenl  d'un  écrit  législatif.  Dans  le  récit  des  faits, 
cet  historien  suil  l'ordre  clironologique.  Il  se  plait  à 
indiquer  réhmologi.:  des  noms  de  personnes  et  de 
lieux,  et  il  rapporte  des  détails  qui  lui  sont  propres.  Il 
envisage  l'histoire  de  l'humanité  et  d'Israël  en  confor- 
mité avec  les  idées  religieusesel  morales  des  prophètes. 
Jéhovah  est  I"  Dieu  du  monde  entier,  le  Dieu  tout-puis- 
sant, la  providence  de  son  peuple  de  choix.  Les  critiques 
déclarent  que  le  jéhoviste  est  le  meilleur  narrateur  de 
tout  l'Ancien  Testament.  Son  livre  est  une  sorte  d'épo- 
pée nationale.  Parce  que  le  théâtre  des  événements 
dont  on  lui  attribue  le  récit  est  souvent  Ilébron  ou  ses 
environs,  un  r     irde  généralement  l'auteur  comme  un 

jndéen.  Toutefois,  on  s'esl  d indé  si  l'ouvrage  était 

d'un  seul  jet,  et  plusieurs  critiques  ont  cru  y  recon- 
naître des  traces  d'au  moins  deux  mains  différentes, 
.1'  ct.l-.  Voir  Kuenen,  Histoire  critique  des  livres  de 
VA.  T.,  trad.  franc.,  Paris,  1866,  t.  i,  p.  151-158,162- 
[63;  Budde,  Die  biblische  l'egeseliiehie.  Giessen,  1883, 
p.  521-5!!l  .  Corail],  Einleilung  in  das  A.  T..  '■',  el 
V  édil..  Fribourg-en-Brisgau  el  Leipzig,  1896,  p. 48-46; 
C.  Bruston,  Les  deux  jékovistes,  Montauban,  1S85. 
Quant  à  la  date  de  la  composition,  on  la  fixe  commu- 
nément au  ix*  siècle'  vers  850,  au  moins  pour  J'.  Quant 
à  J-,  pour  ceux  qui  admettenl  son  existence,  il  serait 
du  vin'  ou  il 1 1  mi   siècle. 

c  Le  Deutéronome,  D.  —  Lescritiques  ont  longuement 
discuté  sur  le  contenu  primitif  de  cetle  législation  qui 
se  présente  comme  ayanl  été  promulguée  par  Moïse  au 
pays  de  Moab  avant  l'entrée  des  Israélites  dans  la  Terre 
Promise.  Considérant  le  caractère  disparate  du  contenu, 
visible  malgré'  l'unité'  apparente  ilu  livre,  ils  ont  pensé 
i|i.  •  I  ■  Deutéronome  actuel  n'esl  pas  une  œuvre  homo- 
gène, mais  qu'il  comprend  un  fond  primitif,  complété, 
remanié  et  finalement  arrangé  pour  servir  de  conclu- 
sion au  Pentateuque.  Les  plus  modérés  conservent  au 
Deutéronome  primitif,  D,  l'ensemble  des  c.  i-xxxi.  re- 
touchés par  un  rédacteur,  Hj.  Cf.  F.  Montet,  Le  Deuté- 
ronome et  lu  question  de  l'Hexateuque,  Paris,  1891, 
p.  49-110;  Driver,  Einleilung  in  die  Literatur  des 
A.  T.,  trad.  allemande,  Berlin,  1890,  p.  98-103;  Deute- 
ronomy,  Londres,  1895;  A.  Van  Iloonacker,  L'origine 
i/es  quatre  piv  miers  chapitres  du  Deutéronome,  Lou- 
vain,  1889.  D'autres  restreignent  le  noyau  à  v-xxvi. 
avec  iv,  15-49,  comme  introduction,  et  une  conclusion, 
qui  varie  elon  les  individus  (Kuenen,  Kônig,  Reuss, 
Renan,  Westphal).  Cf.  Bertholet,  Deuteronomium, 
Tubingue,  1899.  Un  troisième  groupe  le  réduit  à  xn, 
l-xxvi.  19.  Wellhausen,  Die  Composition  des  He&  t- 
leuchs,  Berlin,  1889,  p.  189-210,  pensait  qu'on  en  avail 
fait  plus  tard  deux  éditions  différentes,  comprenant,  la 
première,  i.  1-iv,  ii:  xii-xxvi;  xxvii,  et  la  seconde,  tv, 
'i.j-xi,  39;  xii-xxvi;  xxvni-xxx,  finalement  combinées 
par  le  rédacteur  qui  a  inséré  le  Deutéronome  dans 
l'Hexateuque.  Cornill.  Kmleilmirj,  p.  27-28,  a  disposé 
un  peu  autremenl  la  pari  de  chaq 'iliiion.  Wilde- 
Oie  LiU  ratur  des  I  7  .  ■:  ■  ■  1 1 1 . .  Gcellingue, 
1905,  p.  177  ;  Holzinger.  Einleilung  in  den  Bexateuch, 
Fribourg-en-Bri  gau  el  Leipzig,  1893,  p.  274-275,  el 
'-•  (Jautii  i  \'A.  T.,  Lausanne,  1906,  1. 1. 
p.  7'J-81.  L.  Horst,  Éludes  sur  le  Deutéronome,  dans 
ii  Revue  de  l'histoire                   rts,  1887,  t.  xvi,  p.  28- 

65,  a  considi  ré  le  code  lui  n xh-xxvi,  comme  an 

recueil  ou  plutôt  une  compilati l'éléments  préexis- 
tant .  1 1  uni  ans  ordre  el  i  mme  au  hasard. 
si. h  1 1..  Dos  /'•  uteronot  titi  ,  Leipzig,  1894,  el  Steuer- 
nagel,  Der  Rahmen  d.  i  D<  ium,  H  il  e,  1894  : 
Die  i               r  d                  nomisclien  Geselzes,  Halle, 


1896,  ont  isolé',  mais  d'une  façon  divergente,  dans  le 
code  les  passages  dans  lesquels  le  législateur  emploie 
le  singulier  [tu)  et  ceux  où  il  se  sert  du  pluriel  {vous).. 
i  !f.  Steuernagel,  Deuteronomium  und  Josua,  Gœttingue, 
1900,  p.  iii-vi.  Tous  les  critiques  admettent  par  suite. 
non  pas  un   seul  écrivain  deutéronomiste,    mais  toute 

i.  'le.  animée  nu  même  esprit.  Ils  discernent  donc, 
en  dehors  du  Deutéronome  primitif,  D1,  des  couches,, 
secondaires.  D-'.  D  ,qui  ont  pénétré  aussi  dans  le  livre 
de  Josué.  Cf.  F.  de  llummelauer,  Josue,  Paris,  1903, 
p.  57-60. 

Le  Deutéronome  dépend  des  documents  précédents 
et  pour  l'histoire  et  pour  la  législation.  Dans  les  intro- 
duction- historiques  et  dans  les  allusions  que  contien- 
nent les  exhortations,  il  résume  les  faits  racontés  dans 
l'élohiste  et  le  jéhoviste.  Cf.  l'r.  de  llummelauer, 
Deuteronomium,  Paris.  1902,  p.  119-158.  Les  détails 
nouveaux  qu'il  donne  proviennent  peut-être  des  frag- 
ments perdus  de  ces  deux  histoires.  Il  n'impose  pas 
non  plus  une  législation  nouvelle.  Il  exhorte  ses  audi- 
teurs à  pratiquer  fidèlement  la  législation  donnée  par 
Dieu  au  Sinaï  ou  à  l'Iloreb,  iv,  9-15,  à  garder  l'alliance 
contractée  avec  Dieu  et  à  observer  le  Décalogue,  v,  1-33. 
Le  code  lui-même  s'inspire  du  livre  de  l'alliance,  en 
développe  les  dispositions,  en  tire  les  conséquences  et 
y  ajoute  des  ordonnances  nouvelles,  parce  qu'il  est 
adapté  à  une  situation  difïérente.  Toutefois,  c'est  plus 
qu'une  mise  au  point  de  l'ancien  droit  religieux;  c'est 
aussi  une  réaction  contre  le  passé  et  l'introduction  d'un 
esprit  nouveau  dans  les  mœurs  et  les  pratiques  popu- 
laires. 11  va  à  rencontre  du  livre  de  l'alliance,  et  s'il 
s'en  rapprochi  c'est  pour  prendre  sa  place.  Il  se 
donne  c ne  le  code  complet  et  homogène,  promul- 
gué par  Moïse  au  juins  de  Moab,  comme  le  code  de 
l'avenir  que  les  Israélites  devront  observer  quand  ils 
seront  établis  en  Cbanaan.  Le  livre  de  l'alliance  repré- 
sente aux  yeux  de  son  auteur  le  culte  ancien  de 
l'époque  où  chacun  faisait  ce  qui  lui  semblait  bon. 
Tout  en   sanctionnant   quelques  usages  d'autrefois,   il 

s'écarte   forte ni  du  pissé'  par  la  centralisation  du 

culte,  à  laquelle  il  rattache  et  la  célébration  des 
et  les  fonctions  des  ministres  sacrés,  s'il  n'esl  pas  une 
fiction  pure,  il  est  ou  bien  un  précipité  et  une  cristal- 
lisation des  idées  des  prophètes  précédents,  qu'il  con- 
dense et  codifie  en  les  attribuant,  en  toute  bonne  foi,  à 
Moïse,  le  premier  des  prophètes,  ou  bien  la  codifica- 
tion des  coutumes  anciennes.  ayant  reçu  par  l'usage  force 
de  lois,  ou  enfin,  pour  quelques  critiques,  l'utilisation 
de  sources  écrites  .intérieures.  Le  seul  élément  nou- 
veau consiste  dans  l'exhortation  ou  parénése  à  observer 
la  loi,  surtout  dans  les  motifs  d'obéir  à  Dieu  :  la  fidé- 
lité à  garder  l'alliance  contractée  avec  Dieu  et  l'amour 
de  ce  Dieu,  qui  a  ta  il  aimé  son  peuple  choisi.  L'écrivain 
a  aussi  ses  expressions  propres  et  un  style  très  carac- 
téristique. Les  locutions  spéciales  correspondent,  du 
reste,  au  contenu  et  au  genre  littéraire.  Le  Deutéro- 
nome est  un  code  de  lois,  exposé  et  expliqué'  dans  une 
homélie;  c'est  une  série  de  discours  prononcés  pour 
encourager  à  la  pratique  de  la  loi  divine.  Les  ordon- 
nai:.■.  s  portent  des  noms  techniques,  et  l'homéliste  a 
îles  formules  préférées  qu'il  répète  constamment  et  qui 

- n  ni  comme  des  refrains.  C'est  un  prédicateur  qui 

exhorte  avec  onction  et  persuasion.  Il  parle  clairement 
pour  être  compris  du  peuple;  il  s'insinue  doucement 
dans  l'esprit  de  ses  auditeurs  et  il  ne  se  lasse  pas 
d'insister  sur  l'observation  fidèle  de  la  loi  divine.  Son 
exhortation  traîne  même  en  longueur;  il  veut  toujours 
arriver  au  fait  et  il  n'y  parvient  jamais.  Il  revient  in 
arrière  el  répète  ce  qu'il  a  dit.  Son  style  n'est  pas  con- 
cis,  el  l'uniformité  des  formules  finit  par  le  rendre 
fastidieux. 

Quant  à  la  date  de  la  composition  du  Deutéronome, 
.11  i     il  très  diverse  selon  les  divers  critiques.  Le  point 


93 


PENTATEUQUE 


94 


de  dépari  de  sa  détermination  est  le  fait  de  la  décou- 
verte de  ce  livre  au  Temple  de  Jérusalem,  à  la  18e  année 
du  règne  de  Josias.  II  Reg.,  xxn.  3-xxm,  23.  Quelques 
critiques  français  ont  dénié  toute  valeur  historique  au 
récil  de  ce   fait  et  prétendu    qu'il  avait   été  fabriqué 
d'après  le  Deutéronome.  dont  ils  rabaissaient  la  publi- 
cation après  le  retour  de  la  captivité,  sinon  même  sous 
la  domination  perse.  L.  Havet,  Le  christianisme  et  ses 
origines,  Paris,   187S,  t.  m,  p.  137-137 :  G.  d'Eichtbal, 
Éludes  sur  le  Deutéronome,  dans   ses  Mélanges  de 
critique  biofigue, Paris,  1886,  p.  85-108;  Hoort,  Eludes 
sur  le  Dent*-,'",  mie,  dans  la  Revue  de  l'histoire  des 
religions.    1888.  t.  xvn.  p.    11-22;  t.  xvnr,  p.  320-334; 
M.  Verne*.  Une  nouvelle  hypothèse  sur  la  composition 
du  Pentateuque.  Examen  des  vues  de  M.  G.  d'Eichthal, 
Paris,  1887;  Précis  d'histoire  juive,  Paris,  1889,  p.  795. 
Mais    la    vérité    historique    du    récit    est    démontrée, 
cf.  Piepenbring,  La  réforme  et  le  code  de  Josias,  dans 
la  Revue  de  l'histoire  des  religions,  t.  xxix.  el  admise, 
pour  le  fond  au  moins,  par  tous  les  critiques.  Ils  en 
concluent  que  D1  est  antérieur  à  621.  puisqu'il  a  été  re- 
trouvé celte  année-là.  Mais  le  désaccord  le  plus  profond 
règne  sur  la  date  précise  de  sa  composition.  La  plupart 
des  critiques  de  l'école  de  Wellhausen  ne  la  remontent 
guère  avant  021.  Selon  eux,  la  trouvaille  n'a  été  ni  for- 
tuite ni  imprévue;  elle  a  été  préméditée  et  faite  en  vue 
de  réaliser  une  réforme  religieuse.  Le  livre  avait  donc 
été  rédigé  dans  ce  dessein,  caché  et  présenté  comme 
l'œuvre  de  .Moïse.  Pu  reste,  il  apparaît  comme  un  com- 
promis entre  le  parti  prophétique  et  le  parti  sacerdotal 
ou,  au  moins,  comme  le  programme  religieux  et  poli- 
tique du  parti  prophétique  du  temps.  Mais  si  le  code 
avait  été  fabriqué  en  vue  de  la  réforme,  il  ne  devrait 
contenir  que  les  lois  propres  à  amener  la  réforme.  Or 
il  comprend  beaucoup  d'ordonnances  qui  n'ont  aucun 
rapport   à   ce  projet.   Cf.   P.   Martin,  De   l'origine  du 
Pentateuque  (lithog.),  Paris,  1887-1888,  t.  u,  p.  243-270. 
Aussi  Cornill  et  Bertholet  tiennent-ils  le  Deutéronome 
pour  un  produit  et  un  résumé  de  l'enseignement  des 
prophètes,  comme  un  précipité  et  une  cristallisation  de 
leurs  vues.  Colenso  et  Renan  en  attrihuaient  la  pater- 
nité au  prophète  Jérémie.  Mais  les  critiques  pensent 
plutôt  que  Jérémie  a  connu  le  Deutéronome,  dont  il  a 
partiellement  pris  l'esprit  et  imité  le  stylo.  Voir  t.  m, 
col.  1278.  Pour  quelques-uns,  le  livre  serait  pourtant 
du  temps  de  ce  prophète.  D'autres,  rejetant  l'hypothèse 
d'une    fraude  et    de   la   fabrication  intentionnelle   du 
Deutéronome,  pensent   que  ce  code  a   été  réellement 
perdu  de  vue  à  la  fin  du  vni"  siècle  et  qu'il  aurait  été 
rédigé  au  cours  de  ce  siècle  sous  les  règnes  d'Ézéchias 
ou  de  Manassé.  Pour  exclure  le  temps  d'Ézéchias,  plu- 
sieurs  constatent    i'absence    de   points   de   contact  et 
d'affinité  entre  le  Deutéronome   et  le  prophète  Isaïe, 
contemporain  et  conseiller  de  ce  roi.  Le  Deutéronome 
tend  plutôt  à  réaliser  les  vues  d'Osée  et  d'Isaïe.  On  y 
voit  dès  lors  un  programme  de  réforme  religieuse  éla- 
boré sous  le  long  règne  de  Manassé  par  réaction  contre 
l'idolâtrie  introduite  par  ce  roi   en  Juda.  Voir  t.   îv, 
col.  612.  Quelques-uns  néanmoins  ont  pensé  à  la  ré- 
forme d'Ézéchias,  II  Reg.,  xviii,  4-0,  quoique,  en  dehors 
de  la  suppression  des  hauts-lieux,  elle  ne  présente  au- 
cun caractère  deutéronomiste.  Voir  t.  il.  col.  2142-2144. 
Klostermann  a  reconnu  le  Deutéronome  dans  le  livre 
lu  au  peuple  sous  Josaphat.  II  Par.,  xvn,  9.  Mais  ce 
pieux  roi  n'a  pas  détruit  les  hauts-lieux,  I  Reg..  xxn, 
44;  aussi  d'autres  critiques  pensent-ils  que  le  livre  de 
l'alliance  fut  la  règle  de  sa  réforme.  Voir  t.  m,  col.  1048. 
Kleinert  rapportait  le  Deutéronome  a  la  tin  de  l'époque 
des  Juges. 

d)  Le  code  sacerdotal,  P.  —  C'est  l'ancien  élohiste 
ou  premier  élohiste  ou  encore  le Grundschrifl,  nommé 
enfin  par  Wellhausen  Prieslercodex  (d'où  le  sigle  P)  ou 
•  code  sacerdotal  »,  parce  qu'il  contenait  la  législation 


sacerdotale  et  rituelle  des  livres  du  milieu.  Cette  déno- 
mination ne  convient  qu'à  la  partie  principale  du  do- 
cument, qui  est  à  la  fois  un  livre  historique  et  un  t 
elle  a  été  néanmoins  adoptée.  Ce  document,  qui  a 
fourni  au  dernier  rédacteur  le  cadre  de  l'Heiateuque, 
a  été  conservé  en  entier,  sauf  de  rares  lacunes;  aussi, 
reconstitué  à  part,  forme-t-il  un  tout  suivi  et- coor- 
donné, i  in  attribue  à  son  auteur  la  division  de  la  Genèse 
en  fôldôf,  ou  tableaux  généalogiques.  Voici  la  paît  qui 
lui  revient  dans  la  Genèse  :  i,  1-H,  4a;  v,  1-28,  30-32; 
m,  9-22;  vu,  0.  11,  1316a,  18-21,  21;  vm.  l-2a,  36-5r 
13a,  14-19;  ix.  1-17.  28,  29;  x,  1-7,  20,  22,  23,  31,  32; 
M.  10-27,31,  32;  xn,  M.  5;  au,  6,  11 6-12 o;  xvi,  la. 
3,  15,  10:  XVII;  xix.  29;  xxi,  16,26-5;  xxm  ;  xxv. 
7-1  lo.  12-17.  19,  20,  206;  xxvi,  34,  35;  xxvn,  46- 
XXVIH,  9:  xxix.  24,  29;  xxxi,  186;  xxxm,  18a;  xxxiv, 
1,  2a,  4,6,8-10,  13-18,  20-24,  27-29;  xxxv,  9-13.  15.  226- 
xxxvn,  2a;  xi.vi.  56-27;  xi.vn.  7-11,  27  6,  28:  xi.vin, 
3-7;  M  i\.  1,7,  2.S6-33:  L,  12,  13.  Dans  la  suite, Exod.,  I, 
1-5,  7.  13.  11:  ii,  236-25:  vi,  2-vn.  13.  19,  20a,  216, 
22;  vm,  1-3,  116-15;  ix.  8-12;  xi,  9-xn.  20.  28,  37a, 
40-xiii,  2:  xiv,  1-1,  8.  9,  15-18,  21a,  2lc-23,  26,  27». 
28,  29;  xvi,  13.  5-xvn.  la;  six,  1.  2a;  xxiv.  1.  2.  15  6- 
ISa;  xxv.  l-xxxi,18a;  xxxiv, 29.  —  Num.,  x.  28(y  com- 
pris le  Lévitique);  xm,  1-I7a.  21,  25.  26a,  32a;  xiv, 
1,  2.  5-7,  10,  20-30,  34-38;  xv,  1-xvi,  la.  26-11,  10-21. 
27a.  326,  35-xx,  la, 2,  36,  4,  0-13,  22-29;  xxi,  4a,  10, 
11;  xxn,  1  ;  xxv,  0-xxxi,54;  xxxn,  18,  19,  28-33;  xxxm, 
1-xxxvi,  13;  Deut.,  îv,  41-43;  xxxu,  48-52;  xxiv,  la. 
Le  récit  de  P  se  poursuivait  dans  le  livre  de  Josué. 
S'il  fournissait  peu  de  détails  sur  la  conquête,  il  étak 
plus  étendu  sur  le  partage  du  pays  de  Chanaan. 

Dans  ce  document,  la  législation  est  plus  développée 
que  l'histoire;  celle-ci,  d'ailleurs,  n'est  que  le  cadre 
historique  des  institutions  religieuses  d'Israël.  Elle  re- 
monte jusqu'aux  origines  et  présente  les  premiers 
temps  de  l'humanité  comme  les  débuts  du  peuple  théo- 
cratique,  dont  l'institution  commence  à  la  sortie 
d'Egypte.  Elle  n'est  pas  très  détaillée  :  les  événements 
principaux  sont  longuement  racontés;  mais  pour  les 
faits  intermédiaires,  l'auteur  procède  par  tableaux  gé- 
néalogiques ou  se  borne  à  indiquer  les  stations  d'Israël 
au  désert.  La  préparation  de  l'histoire  de  Moïse  com- 
prend trois  alliances  de  Dieu  avec  Adam,  Xoé  et  Abra- 
ham. Si  on  y  joint  l'histoire  de  Moïse,  qui  rapporte 
l'alliance  du  Sinaï,  le  code  se  divise  en  quatre  périodes, 
qui  lui  ont  fait  donner  par  Wellhausen  le  nom  de  Vier- 
bundesbuch,  «  le  livre  des  quatrealliances.  »  Laqualrième 
alliance  embrasse  toute  la  législation  mosaïque.  Celle-ci 
est  essentiellement  sacerdotale  et  rituelle,  et  elle  a 
pour  but  d'établir  le  peuple  saint  par  excellence  (hiéro- 
cratie)  et  la  société  religieuse  en  Israël.  Voir  t.  iv, 
col.  330-332.  Bien  que  le  code  sacerdotal  règle  princi- 
palement les  manifestations  extérieures  du  culte,  il 
n'exclut  pas  les  lois  morales,  dont  il  suppose  l'obser- 
vation exacte.  Sa  terminologie  est  très  nettement  carac- 
térisée,  et  elle  comprend  naturellement  de  nombreu- 
ses expressions  techniques  qui  désignent  les  choses  du 
culte.  L'auteur  répète  souvent  les  mêmes  formules  dans 
ses  récits  aussi  bien  que  dans  ses  recueils  de  lois. 
Quelques-unes  sont  stéréotypées.  Il  a  le  souci  de  l'exac- 
titude et  de  la  précision,  mais  il  tombe  dans  la  prolixité. 
Son  style  est  peu  imagé,  et  sa  langue  est  abstraite. 

Le  code  sacerdotal  était  lui-même  une  compilation. 
L'enchainement  des  matériaux  parait  brisé  par  de 
longues  additions  intercalées  ;  certaines  lois  sont  répé- 
tées ;  quelques  dispositions  sont  divergentes.  Tous  les 
morceaux  cependant  ont  le  même  esprit,  le  même  ca- 
ractère général  et  le  même  style;  s'ils  viennent  de  la 
même  école,  ils  ne  sont  pas  de  la  même  main.  Ausei 
les  critiques  ont-ils  distingué  dans  le  code  trois  couches 
différentes  :  a)  un  écrit  historique  et  législatif,  appelé 
priesterliche  Grundschrifl,  «  l'écrit  fondamental  sacer- 


95 


PENTATEUQUE 


96 


•dotal,  »  P1  ou  Pa,  parce  qu'il  fait  le  fond  du  code; 
P)  un  recueil  particulier  des  lois,  que  Klostermann  a 
nommé  Heiligeilsgeselz,  o  loi  de  sainteté,  »  11,  P-  ou 
P1',  Lev.,  xvn-xxvi,  parce  qu'il  traite  spécialement  de 
la  sainteté  lévitique,  code  plus  ancien  (contemporain 
d'Ézéchiel,  ou  un  peu  postérieur,  sinon  même,  selon 
quelques-uns,  l'œuvre  de  ce  prophète),  incorporé  pos- 
térieurement dans  l'écrit  fondamental  sacerdotal; 
f)  des  parties  secondaires.  P  .  P4,  P»,  selon  Kuenen, 
Ps  ou  P»  selon  d'autres  critiques,  retouches  et  addi- 
tions qui  proviendraient  peut-être  de  couches  superpo- 
sées et  seraient  l'œuvre  d'une  école  plutôt  que  d'une 
seule  main.  Bertholet  et  Baentsch  ont  distingué,  en 
outre,  deux  recueils  de  lois  :  «)  un  rituel  de  sacrifices, 
Opferthora,  P",  Lev..  i-vn;  p)  des  préceptes;  relatifs  à  la 
pureté  légale,  Reinheitsvorschriften,  P',  Lev.,  xi-xv, 
qui  auraient  été  insérés  dans  HPo  réunis,  avant  que  le 
travail  de  Ps  ait  commencé. 

Selon  les  partisans  de  la  première  hypothèse  docu- 
mentaire, le  Grundschrift,  qui  correspond  presque 
entièrement  au  code  sacerdotal,  passait  pour  la  partie 
la  plus  ancienne  du  Pentateuque.  C'était  le  livre  du 
mosaïsme,  le  document  qui  reilétait  le  mieux  l'esprit 
de  Moïse,  son  auteur.  Quelques  critiques  cependant,  tels 
queC.  Bruslon,  L'histoire  sacerdotale  et  le  Deutéronome 
primitif,  Paris.  1906,  el  A.  Dillmann,  Ueber  die  Com- 
position des  Hexateuch,  dans  Die  Bûclter  Numeri, 
Deuteronomium  und  .losita,  2*  ■  -  dit.,  Leipzig,  188fi. 
tiennent  le  code  pour  antérieur  au  Deutéronome  et  pla- 
cent sa  composition  au  moins  au  milieu  du  vtne  siècle, 
à  une  époque  où  les  deux  royaumes  de  .luda  et  d'Israël 
étaient  encore  puissants.  Le  comte  de  Baudissin  rahaisse 
sa  date  vers  la  moitié  du  VIIe  siècle.  Die  Geschichte  der 
alttestamentlichen  Prietterthvmis,  1S89;  Einleitung 
ie  Bûcher  îles  A.  T.,  Leipzig,  1901.  Mais  la  plu- 
part des  critiques  font  du  code  sacerdotal  le  docu- 
ment le  plus  récent  qui  soit  entré  dans  la  composition 
di  i  Bexateuque.  Ils  prétendent  qu'aucun  des  livres 
bibliques,  rédigés  avant  ou  pendant  la  captivité,  n'a 
connu  la  législation  si  compliquée  de  ce  code.  Les 
institutions  religieuses  ou  les  pratiques  rituelles,  que 
signalent  ces    livres,  prouvent    bien   l'existence  d'un 

cuit 'ganisé;  mais  elles  n'ont  point  de  rapport  avec  le 

rituel  minutieux  de  P.  Quelques-unes  même,  telles  que 
l'offrande  des  sacrifices  en  tout  lieu,  et  par  d'autres 
personnes  que  par  des  prêtres,  sont  opposées  aux 
prescriptions  formelles  du  code  et  en  particulier  à  la 
concentration  du  culte  qu'il  règle  et  sanctionne.  Si  le 
code  existait,  on  le  violait  sans  scrupule,  et  les  histo- 
riens sacrés  n'ont  pas  un  mot  de  hlâme  pour  ces  viola- 
tions de  la  loi.  Ce  silence  s'explique  par  la  non-exis- 
tence du  code,  animé,  d'ailleurs,  d'un  autre  esprit  que 
celui  qui  se  manifeste  dans  ces  livres.  Les  premiers 
rapprochements  de  fond  et  de  forme  avec  le  code  se 
remarquent  dans  .lérémie;  mais  la  ressemblance,  lors- 
qu'elle existe,  ii.  s  i  pas  complète,  et  il  est  plus  vrai- 
semblable que  l'auteur  du  code  a  fait  des  emprunts  au 
prophète.  Il  en  est  de  même,  dit-on,  avec  Ézéchiel. 
Pour  ne  parler  que  du  nouveau  culte  organisé  par  ce 
prophète,  xi.iv,  10-xi.vt,  15,  il  tient,  sous  le  rapport  du 
sacerdoce,  des  fêtes  et  des  sacrifices,  le  milieu  entre  D 
et  P,  puisque  ses  descriptions  sont  plus  détaillées  que 
celles  du  Deutéronome  et  plus  simples  que  celles  du 
code.  Il  en  résulte  que  le  programme  du  prophète,  ré- 
digé en  573  ou  572,  voir  t.  il.  col.  2152,  est  antérieur 
au  code  qui  e^t  plus  complet  et  plus  perfectionne  On 
a  cherché  à  continuer  cette  conclusion  par  l'étude  de  la 
langue  de  P,  qui  serait  plus  récente  et  contiendrait  des 
aramaïsmes.  .Mais  de  lions  juges,  Driver,  Journal  of 
philology,  t.  xi,  p.  201-296;  Einleitung,  p.  146-146, 
168-170,  ont  reconnu  qu'on  n'en  pouvait  rien  conclure 
au  sujet  de  l'âge  du  code.  Quant  à  la  date  précise  de  sa 
rédaction,  au  moins  pour   P»,  l'accord  n'est  pas  fait. 


Les  disciples  de  Wellhausen  la  fixent  après  le  retour 
de  la  captivité.  Certains  indices,  tirés  du  contenu  du 
livre,  la  comparaison  du  code  avec  la  législation  reli- 
gieuse d'Ézéchiel  et  avec  les  prophètes  qui  ont  suivi  ce 
retour,  tendent,  à  leur  jugement,  à  reporter  le  code  après 
le  retour  des  Juifs  à  Jérusalem.  Esdras  en  particulier 
aurait  lu  au  peuple  le  code  sacerdotal,  II  Esd.,  ix.  1-x, 
39,  qu'il  avait  apporté  de  Babylonie  et  dont  il  serait, 
sinon  l'auteur  unique,  du  moins  le  principal  inspira- 
teur. Cf.  G.  Wildeboer,  De  la  formation  du  canon  de 
l'A.  T.,  trad.  franc.,  p.  78-79.  Donc  Pa  a  été  composé 
au  plus  tôt  à  la  fin  de  la  captivité  à  Babylone.  sinon 
même  en  Palestine  après  le  retour.  Mais  les  critiques 
qui  pensent  avec  raison  qu'Esdras  a  lu  au  peuple  le 
Pentateuque  entier,  voir  col.  69,  estiment  que  le  code 
avait  été  rédigé  antérieurement,  après  Ézéchiel,  mais 
avant  le  retour  des  premiers  captifs  (53fi). 

Si  le  code  est  de  date  si  tardive,  à  quelles  sources 
ont  été  puisés  les  matériaux  mis  en  œuvre?  Tous  les 
critiques  reconnaissent  que.  pour  ses  récits  historiques, 
l'auteur  dépend  de  J  et  de  E.  probablement  déjà  com- 
binés.  Il  en  a  extrait  des  tableaux  généalogiques  et  son 
schème  historique  jusqu'à  la  sortie  d'Egypte; 
selon  les  disciples  de  Wellhausen,  il  a  manipulé  les 
matériaux  employés  conformément  à  son  but  et  à  son 
plan.  Ilolzinger,  Einleitung  inden  Hexateuch,  Eribeurg- 
en-Brisgau,  1893,  p.  358-376.  Dillmann  et  Driver 
pensent  toutefois  que  l'auteur  a  recouru  à  d'autres 
sources  historiques  que  JE;  qu'il  n'a  pas  inventé  les  faits 
qu'il  est  seul  à  rapporter  et  qu'il  n'a  pas  non  plus  fal- 
sifié de  parti-pris  la  tradi'ion  Israélite.  Quant  à  la 
législation  spéciale  de  P,  l'école  de  Wellhausen  la 
regarde  comme  la  constitution  à  priori  de  la  hiérocra- 
tie  juive,  tracée  pour  servir  de  règle  à  la  restauration 
religieuse  qui  suivit  le  retour  à  Jérusalem,  projetée 
dans  le  passé  et  attribuée  à  Moise.  Mais  d'autres  cri- 
tiques pensent  que  les  auteurs  du  code  n'ont  pas  créé 
de  toutes  pièces  leur  système  liturgique,  qu'ils  y  ont 
introduit  un  grand  nombre  d'éléments  empruntés  au 
culte  ancien  et  qu'ils  ont  ordonné  systématiquement 
les  usages  préexistants  en  les  développant  et  en  les 
adaptant  à  une  situation  nouvelle.  La  tradition  orale 
fut  codifiée  à  l'aide  sans  doute  de  règlements  écrits 
avant    la  captivité'. 

e)  Les  rédacteurs  et  la  composition  définitive.  —  Ces 
quatre  documents,  qui  sont  entrés  dans  la  trame  de 
l'Hexateuque.  n'ont  pas  été  mêlés  et  combinés  par  une 
seule  main;  plusieurs  rédacteurs  y  ont  travaillé  et,  à 
en  croire  les  critiques,  sauf  Dillmann  qui  a  un  système 
spécial,  la  rédaction  du  texte  actuel  a  passé  par  trois 
stades  principaux  :  ai  Un  premier  rédacteur  jéhoviste, 
It-1"  ou  Ri,  a  combiné  .1  et  E.  en  les  remaniant  pour 
les  harmoniser  et  les  adapter  au  point  de  vue  prophé- 
tique, à  l'époque  deutéronomiste,  avant  ou  plus  ou 
moins  longtemps  après  la  rédaction  du  Deutéronome.  — 
p)  Quand  le  Deutéronome  eut  été  complètement  acl 
c'est-à-dire  pendant  la  captivité  (vi*  siècle),  un  rédacteur 
mimé  du  même  esprit  que  ce  livre  H1,  incorpora  D  9 
Il  .  en  faisant  subir  à  ce  dernier  quelques  modifications 
aires  pour  accorder  ses  récits  avec  la  loi  deuté- 
ronomique.  Probablement  même,  plusieurs  écrivains 
de  la  même  école  travaillèrent  à  cette  rédaction.  — 
•;  i  l'n  dernier  rédacteur,  pénétré  de  l'esprit  et  de  la 
lettre  ducode,  Rf,  combine  JED  avec  P,  en  retouchant 
les  deux  écrits  pour  les  raccorder.  Le  nombre  et 
l'étendue  des  retouches,  la  nature  des  remaniements  ne 
sont  pas  déterminés  avec  certitude.  La  table  des  peu- 
ples, Gen.,  xiv.  quelle  que  soit  ~.i  date,  aurait  éteint  sé- 
duite alors  pour  la  première  fois  dans  le  Pentateuque. 
Selon  Kuenen,  la  division  en  cinq  livres  aurait  été- 
faite  par  ce  rédacteur,  qui  est  le  dernier  et  définitif 
rédacteur  du  Pentateuque.  Ce  travail,  œuvre  d'une 
école  de  scribes  plutôt  que  d'un  seul  individu,  serait, 


97 


PENTATEUQUE 


PS 


pour  les  disciples  de  Wellhausen,  postérieur  à  la  pro- 
mulgation du  code  par  Esdras  en  144,  et  aurait  été 
terminé  à  la  fin  du  ve  siècle.  D'autres  critiques,  nous 
l'avons  dit  déjà,  pensent  que  le  code  d'Esdras  était  le 
Pentateuque  actuel  (hormis  quelques  additions  posté- 
rieures), formé  par  son  école  et  sous  sa  direction  en 
vue  d'harmoniser  tous  les  documents  législatifs  d'Israël 
et  île  constituer  un  code  complet  et  unique.  La  der- 
nière rédaction  du  Pentateuque  aurait  donc  été  exécu- 
tée en  [ialiylonie.  peu  avant  le  retour  à  Jérusalem  et 
en  vue  de  la  restauration  prochaine. 

En  outre  des  ouvrages  cités,  voir  Reuss,  L'histoire 
sainte  et  la  lai,  Paris,  1879,  t.  m,  de  La  Bible;  Driver. 
Einleitung  in  die  Literatur  des  alten  Testaments, 
trad.  Rothstein,  Berlin,  1896,  p.  1-170;  Cornill.  Ein- 
leitung  in  das  A.  T.,  3e  et  4e  édit.,  Fribourg-en-Bris- 
gau.  1890,  p.  16-79;  A.  Westphal,  Les  sources  du 
Pentateuque,  2  in-8",  Paris,  1888,  1892;  Holzinger, 
Einleitung  in  das  Hexateuch,  2  in-8".  I'rihourg-cn- 
Brisgau.  1S93;  Wildeboer,  Die  Lileratur  des  A.  T., 
Gœttingue,  1895;  2e  édit.,  1905,  passim;  Addis,  Tlie 
•  tenls  of  the  Hexateuch,  2  in-8°,  Londres,  1892, 
1893;  Briggs,  The  higher  crilicism  of  tlie  Hexateuch, 
2"  édit..  New- York,  1897;  Steuernagel,  Allgenieine 
Einleitung  in  den  Hexateuch,  Gœttingue,  1900; 
Carpenter  et  Harford-Battersly,  The  Hexateuch,  2  vol., 
Londres,  1900;  Carpenter,  The  Composition  of  the 
Hexateuch,  Londres,  1902;  Gautier,  Introduction  à 
l'A.  T.,  Lausanne,  1906, 1. 1,  p.  53-253;  Strack,  Einleitung 
1.  /'..  f,  .dit..  Munich,  1906, p.  15-67. Cf.  E.  Man- 
genot.  L'authenticité  mosaïque  du  Pentateuque,  Paris. 
1907.  p.  16-201. 

2»  Réponse  aux  principales  objections  critiques.  — 
Il  est  impossible  et  inutile  de  discuter  ici  en  détail 
toutes  les  difficultés  que  les  critiques  modernes  ont 
accumulées  contre  l'authenticité  mosaïque  du  Penta- 
teuque. Plusieurs,  du  reste,  ont  déjà  été  ou  seront 
résolues  dans  des  articles  spéciaux  de  ce  Dictionnaire, 
auxquels  nous  renverrons.  Après  avoir  dit  un  mot  de 
la  méthode  et  des  conclusions  des  critiques,  nous  exa- 
minerons les  principaux  arguments  généraux  ou  parti- 
culiers contre  l'origine  mosaïque  du  Pentateuque. 

1.  Méthode  suivie  et  incertitude  des  conclusions.  — 
Les  critiques  modernes  ne  tiennent  aucun  compte  de 
la  tradition  juive  et  chrétienne,  qui  attribue  à  Moïse 
la  composition  des  cinq  livres  de  Pentateuque,  quoique 
la  tradition  et  l'histoire  ne  puissent  sur  ce  point  être 
négligées.  C'est  au  livre  lui-même  et  à  son  contenu 
seul  qu'ils  demandent  l'explication  de  son  origine.  Ils 
analysent  minutieusement  le  texte,  relèvent  et  exa- 
gèrent lesinconséquences,  les  contradictions  apparentes 
et  les  répétitions  pour  conclure  à  la  diversité  des 
sources.  La  méthode  suivie  est  juste  en  principe,  et 
rien  ne  s'opposeà  la  distinction  de  documents  différents 
que  Moïse  aurait  réunis  et  combinés  pour  rédiger 
l'histoire  antérieure  à  son  temps,  contenue  dans  le 
livre  de  la  Genèse.  Mais  les  critiques  étendent  la  dis- 
tinction des.  sources  à  l'Hexateuque  entier  et  pré- 
tendent que  ces  livres  dans  leur  état  actuel  sont  formés 
de  documents  postérieurs  de  beaucoup  à  Moïse.  Ils 
s'appuient  sur  les  anomalies  du  texte  actuel,  anomalies 
la  plupart  du  temps  insignifiantes,  qui  disparaissent  à  la 
simple  lecture  du  teste  et  qui  ne  peuvent  être  des  signes 
certains  de  documents  distincts.  Aussi,  d'accord  pour 
nier  l'origine  mosaïque  du  Pentateuque,  ils  ne  peuvent 
s'entendre,  l'histoire  de  leurs  travaux  en  fait  foi,  sur  la 
ii.  tinction  des  sources  elles-mêmes,  sur  leurs  caractères 
et  la  date  de  leur  apparition.  Les  solutions  les  plus  diver- 
gentes ont  vu  le  jour  et  se  sont  succédé  rapidement. 
Chacun  abondait  dans  son  sens  et  proposait  avec  assu- 
rance une  explication  nouvelle,  qu'un  autre  déclarai! 
bientôt  inacceptable  et  insuffisante.  Les  disciples  d'une 
même    école  sont  assurément  d'accord  sur   quelques 

DICT.   DE   LA  BIBLE. 


résultats  qu'ils  croient  acquis;  leur  consensus  est  très 
restreint  et  ils  se  séparent  les  uns  des  autres  sur  un 
plus  grand  nombre  de  points  particuliers,  parce  que 
leurs  principes  de  critique  sont  arbitraires  et  leurs 
appréciations  subjectives.  La  nouvelle  théorie  docu- 
mentaire, malgré  la  fière  assurance  avec  laquelle  on 
l'affirme  démontrée,  n'a  pas  rallié  tous  les  suffrages, 
et  des  esprits  indépendants,  même  en  dehors  du  catho- 
licisme et  dans  la  catégorie  des  hébraïsants,  en  sont 
les  adversaires  résolus.  J.  Halévy,  L'histoire  des  ori- 
gines d'après  la  Genèse,  dans  les  Recherches  bibliques, 
Paris,  1895  et  suiv.,  t.  i  et  h;  Green,  The  higher  Criti- 
çism  of  the  Pentateuch,  1895;  Rupprecht,  Die  Kritik 
nach  ihren  Redit  und  Unrecht,  1897;  B.  Jacob.  Dèr 
Pentateuch.  Exegetisch-hritische  Forschungen,  Leip- 
zig, 1905;  Orr,  The  problem  of  the  Old  Testament, 
Londres,    1906. 

Sur  la  part  qui  revient  dans  le  texte  actuel  à  chaque 
document,  sur  la  date  des  diverses  sources  et  sur  le 
travail  des  rédacteurs,  il  y  a  presque  autant  de  senti- 
ments que  de  critiques.  On  a  renoncé  à  distinguer 
l'élohiste  du  jévohiste  dans  une  partie  des  récits  des 
Nombres;  leur  part  d'attribution  est  moins  nettement 
délimitée  que  les  indications  données  plus  haut  le  laissent 
supposer;  nous  avons  dû  nous  borner  aux  conclusions 
principales.  La  continuité  des  documents  n'est  pas  non 
plus  démontrée;  il  reste  des  lacunes,  des  trous  qui  ne 
sont  pas  comblés.  Les  critiques  reconnaissent  n'être 
d'accord  qu'en  gros  et  pour  l'ensemble;  mais  les  diver- 
gences sont  plus  notables  qu'on  le  dit;  les  tables  d'Hol- 
zinger,  auxquelles  on  en  appelle,  en  font  foi.  Sur  l'âge 
des  documents,  les  manières  de  voir  sont  très  divergentes. 
Sans  doute,  les  critiques  placeront  tous  D  après  E.  mais 
ce  sera  le  seul  point  où  l'accord  sera  parfait.  Sur 
l'autorité  de  E  et  de  J,  sur  celle  de  D  et  de  P,  les  avis 
demeurent  partagés.  Cf.  W.  de  Baudissin,  Einleitung 
in  die  Rucher  des  A.  T.,  Leipzig,  1901,  p.  72-77,  cité 
par  M.  Yigouroux,  Manuel  biblique,  12e  édit.,  Paris, 
1906,  t.  i,  p.  440-414.  Les  parties  dites  rédactionnelles 
sont  plus  discutées  encore.  A  peine  s'entend-on  à  les 
discerner;  mais  on  ne  sait  le  plus  souvent  à  qui  les 
attribuer.  Stàbelin  et  Kittel  ont  supprimé  le  pre- 
mier stade  de  rédaction  de  l'Hexateuque  et  ont 
attribué  au  rédacteur  deutéronomiste,  Ra,  la  réunion 
simultanée  de  J.  de  E  et  de  D.  A.  Dillmann  a  proposé 
trois  autres  stades  de  rédaction  du  Pentateuque  : 
o]  union  de  Pu  avec  E  et  J  ;  b)  union  de  PoEJ  avec  D  ; 
c)  union  de  PjEJD  avec  P1'.  Toutes  ces  divergences, 
que  les  critiques  cherchent  à  atténuer,  prouvent  à 
l'évidence  que  les  conclusions  ne  sont  pas  certaines  et 
que  la  théorie  documentaire  n'est  qu'une  hypothèse, 
très  savamment  échafaudée,  incapable  cependant  d'in- 
firmer et  de  remplacer  la  tradition  constante  des  Juifs 
et  des  chrétiens  en  faveur  de  l'authenticité  mosaïque  du 
Pentateuque. 

2.  Les  arguments  généraux  contre  Vantiquité  et 
l'unité  du  Pentateuque  ne  prouvent  pas  la  non-authen- 
ticité mosaïque  de  ce  livre.  —  a)  Il  n'est  plus  nécessaire 
aujourd'hui  de  démontrer  contre  les  anciens  critiques 
l'existence  de  l'écriture  à  l'époque  de  Moïse,  ni  même 
la  connaissance  que  les  Hébreux  en  avaient  et  l'usage 
qu'ils  en  faisaient  à  l'époque  de  leur  sortie  d'Egypte. 
Voir  t.  il,  col.  1574-1575.  —  Mais,  en  dehors  du  Deuté- 
ronome,  dans  lequel  le  discours  direct,  placé  dans  la 
bouche  de  Moïse,  est  un  simple  procédé  littéraire,  I 
Pentateuque,  dit-on,  ne  se  présente  pas  comme  l'œuvre 
de  Moïse;  le  style  y  est  impersonnel,  et  il  y  est  parlé  île 
lui  comme  du  héros  de  l'histoire  d'une  façon  objective. 
Exod.,  vi,  26,  27;  xi,  3;  Num.,  XV,  22,  23;  Deut.,  xàxiii. 
4.  Son  éloge,  Num.,  XII,  3,  provient  d'une  plume  étran- 
gère; il  est  fait  en  des  termes  qui  ne  peuvent  convenir 
à  une  autobiographie.  On  répond  que  Moïse,  écrivant 
des  Annales  plutôt  que  ses  Mémoires,  aurait  fort  bien 

V.  -  4 


99 


PENTATELtM'I-: 


100 


pu  parler  de  lui-même  à  la  troisième  personne,  dresser 
sa  généalogie  comme  celle  d'un  étranger  et  se  louer  en 
termes  modérés.  Mais  ces  particularités  peuvent  bien 
aussi  être  attribuées  aux  scribes  ou  secrétaires  qui  écri- 
vaient sous  sa  direction. 

b)  Quant  aux  indications  historiques  et  géographi- 
ques, qui  seraient  des  anachronismes  au  temps  de 
Moïse,  quelques-unes, déjà  signalées  par  Alienesra,  sont 

lées  par  beaucoup  d'exégètes  comme  des  gloses 
insérées  plus  tard  dans  le  récit  de  Moïse,  par  exemple 
Gen.,  xn,  6;  XIII,  7;  xix,  37-38;  Deut.,  III,  11.  L4. 
Voir  col.  61.  Elles  ne  prouvent  pas  la  composition  tar- 
dive du  Pentateuque;  avant  l'invention  de  l'imprimerie, 
les  additions  et  la  mise  au  point  de  certains  détails  dans 
la  transcription  des  manuscrits  était  chose  facile  et  na- 
turelle. On  pense  généralement  aussi  que  la  liste  des  rois 
d'idumée,  Gen.,  xxxvi,  31,  a  été  continuée  jusqu'à 
l'époque  de  David.  Voir  t.  m,  col.  834.  La  cessation  de 
la  manducation  de  la  manne,  Exod.,  xvi.  35,  qui  n'arriva 
qu'après  le  passage  du  Jourdain,  Jos.,  v,  12,  a  bien  pu 
être  mentionnée  par  Moïse,  peu  avant  sa  mort,  alors 
que  les  Israélites  étaient  déjà  sur  les  contins  de  la 
Palestine.  Les  livres  des  guerres  de  Jéhovah  el  du  Juste 
étaient  des  anthologies  de  poèmes.  Commencés  avant 
Moïse,  qui  \  lit  des  emprunts,  ils  ont  été  enrichis  de 
pièces  plus  récentes,  telles  que  l'élégie  de  Saûl  el  do 
Jonathan  par  David.  Il  Reg.  (Sam.),  i,  18.  Les  noms  an- 
ciens de  plusieurs  localités  ont  été  remplacés  par  ceux 
qu'elles  eurent  après  la  conquête  du  pays  de  Chanaan. 
Ainsi  Dan,  voir  t.  il,  col.  1244-1245,  et  Cariath-Arbé, 
voir  t.  i,  col.  88't;  t.  m,  col.  55'ï.  Dans  le  cantique  de 
Moïse,  Exod.,  XV,  16-17,  le  pays  de  Chanaan  n'est  pas 
expressément  désigné  sous  le  nom  de  terre  des  Hébreux, 
et  sa  possession  par  les  Israélites  n'est  que  future. 

c)  Les  douldos  récits  de  la  Genèse,  s'ils  étaient  cons- 
tatés, prouveraient  seulement  que  Moïse  aurait  utilisé 
des  documents  différents,  par  exemple  pour  la  création 
i  i  le  déluge.  Voir  t.  n,  col.  1345.  Mais  l'existence  de 
tous  ceux  que  les  critiques  signalent  est  loin  d'être 
démontrée.  Ainsi  on  affirme  gratuitement  que  les 
relations  d'Abraham  et  d*Isaac  avec  Abimélech,  roi  de 
('rerare,  ne  sont  que  le  même  fait  dédoublé;  les  circons- 
tances différentes  des  récits  prouvent  la  distinction  des 
deux  événements,  répétés  dans  des  situations  analogues 
pour  le  pore  el  pour  le  lils.  Voir  t.  t.  col.  54.  Il  en  est  de 
même  des  deux  enlèvements  de  Sara,  voir  t.  i,  col.  Il),  et 

h    cas  analogue  survenu  àRébecca.  La  fuite  d'Agar  ne 

peut  être  e parée  à  son  expulsion.  Voir  t.  i,  col.  262. 

La  pi esse  d'un  lils  fut  réitérée  par  Dieu  à  Abraham 

dans  des  occasions  différentes.  Voir  t.  i,  col.  78.  Les 
prétendues  étvmologies  multiples  des  noms  propres 
de  personnes  ou  de  lieux  s'expliquent  aisément. 
Voir  Beb  mi',  t.  i,  col.  1629-1638;  Béthel,  col.  1672- 
1671;  GALAAD,  I.  ni,  col.  15;  MviivvUM,  t.  IV,  col.  571; 

Issachar,  t.  m,  col.  1005-1006;  Joseph,  col.  1655; 
/mj  i.o\.  il  en  esl  de  même  dans  l'Exode  et  les 
Nombres,  Les  prétendus  doubles  récits  concernant  des 
faits  qui  se  sont  réellement  produits  deux  l'ois,  tels 
que  le  double  envoi  des  railles,  voir  t.  n,  col.  33,  et  le 

double  miracle  du   rocher  frappé.  D'autres,  ci ne  la 

double  vocation  de  Moïse  el  la  double  révélation  du  nom 
de  Jéhovah,  Exod.,  m,  2-1  i;  vi,  2-13,  voir  i.  m. 
col.  1230-1231,  I2:i:'.;  la  double  désignation  d'Aaron 
comme  interprète  île  son  fine,  Exod.,  i\.  Il  16;  vi,  30- 
vii,  2,  ne  soûl  que  des  répétitions  faites  par  Dieu  des 
mêmes    pn tsses.   Pour    l'organisation  successive  des 

anciens  et  des  juges  au  désert,  voir  1.  1.  col.  554-555. 
Quant  aux  diversités  de  détails  qui  prouveraient  la 
distinction  des  récits,  la  plupart  sont  de  simples  anoma- 
lies, qui  ne  sont  pas  inconciliables  et  qui  n'empêchenl 
pas  une  heureuse  harmonisation  de  l'ensemble,  Sur  les 
femmes   d'Esaû,   voir  Aux.  1.  1,  col.    165;  Dasemath, 

col.   Ii.t2;  sur  le  beau-père  de  Moïse,  voir  IloliAIl,  t.  III, 


col.  725-726:  JÊTHRO,  col.  1521-1522.  De  même,  certaines 
lois  qu'on  oppose  comme  provenant  de  codes  différents, 
se  sont  que  des  dispositions  successives  et  complémen- 
taires. Voir  t.  iv,  col.  338. 

3.  Arguments  particuliers  tirés  de  la  législation 
hébraïque  gui  prouveraient  et  la  diversité  des  codes  et 
leur  promulgation  postmosaïque.  —Les  critiques  ont 
cherché  à  établir  la  distinction  des  trois  codes  hébraïques: 
livre  de  l'alliance.  Deutéronome  et  code  sacerdotal,  par 
la.  diversité  de  leurs  principales  dispositions  religieuses, 
et  leur  succession  dans  cet  ordre  par  la  progression 
successive  de  ces  dispositions  et  leur  observance  tardive 
de  la  part  des  Israélites.  Sans  parler  de  la  loi  morale 
ou  du  Décalogue,  qu'on  trouve  sous  trois  formes 
spéciales  :  censé,  d'après  eux,  promulgué  au  Sinal  dans 
le  document  élobiste,  Exod.,  xx,  1-17,  puis  dans  le 
documentjéhoviste,  Exod.,xxxiv,  14-26,  enfin  promulgué 
à  l'Horeb,  Deut.,  v,  6-18,  les  institutions  religieuses 
d'Israël  auraient  passé  par  trois  phases  el  si'  seraient 
développées,  non  pas  dans  l'intervalle  des  40  années  du 
séjour  au  désert,  mais  bien  au  cours  des  àps  et  sous 
des  influences  variées,  notamment  sous  l'action  des 
prophètes,  qui  épuraient  et  spiritualisaient  progressive- 
ment les  idées  de  leur  peuple.  Passons  en  revue  à  ce 
point  de  vue  les  principales  dispositions  législatives, 
dans  lesquelles  le  progrès  serait  le  plus  nettement 
marqué. 

a)  La  pluralité  îles  autels  et  l'unité  île  sanctuaire.  — 
Le  livre  de  l'alliance  permettait  de  dresser  des  autels 
en  tout  lieu  où  Dieu  avait  manifesté  son  nom,  pourvu 
que  l'autel  soit  de  terre  on  de  pierres  brutes  et  non 
taillées,  et  à  la  condition  aussi  qu'il  n'ail  pas  , le  degrés 
de  peur  que  le  sacrificateur,  en  les  -i  tvissant,  ne  dé- 
couvre sa  nudité  en  présence  de  Dieu.  Exod.,  xx,  24-26. 
Si  les  Israélites  n'ont  pas  la  liberté  d'ériger  des  autels 
partout  où  il  leur  plaît,  puisqu'il  est  nécessaire  que  le 
lieu  ail  déjà  été  sanctilié  par  une  intervention  divine, 
cependant  il  n'y  a  ni  sanctuaire  unique  ni  lieu  fixé 
pour  tous.  L'unité  de  sanctuaire  est  imposée  soi-disant 
par  Moïse  et  pour  l'avenir  seulement,  quand  Israël  aura 
pénétré'  dans  le  pays  de  Chanaan  et  que  Dieu  aura 
manifesté  le  lieu  unique  où  il  veut  être  honoré. 
Deut.,  xn,  5.  Enfin,  cette  unité  que  le  Deutéronome 
présentait  comme  un  buta  réaliser  est  supposée  dans 
le  code  sacerdotal  comme  ayant  toujours  existé.  Elle 
n'est  pas  prescrite  explicitement;  mais  loute  l'organi- 
sation du  culte  autour  du  tabernacle  exige  sa  réalisation, 
puisque  ce  code  ne  soupçonne  pas  qu'un  sacrifice  put 
être  offert  ailleurs.  L'histoire  d'Israël  conlirme  par  les 
faits  celle  superposition  de  lois  relatives  à  l'autel.  A 
l'époque  des  .luges,  nonobstant  l'existence  du  sanctuaire 
de  Silo,  OÙ  lare'  e  esl  déposée,  I  Sam.,  1.  (J  ;  111,  2.  11.  15; 
Jer.,  vu.  12,  on  offre  ailleurs  des  sacrifices,  .lud..  VI, 
26-28;  xi,  11,  :il  :  ZIII,  15-23.  Michas  a  une  maison  de. 
Dieu,  XVII,  5.  Les  Danites  établissent  un  sanctuaire  à 
Laïs qu'ils  onl  conquise,  xvm,  Il  sq.  Apres  que  l'arche 
eul  1  té  prise  par  les  Philistins,  on  sacrifiait  en  diverses 
localités,  è  Maspiiatli.a  lia  mai  lia,  a  Galgala,etc.l  Sam.,vT, 
14,  15;  VII,  S».  17:  ix.  12;  XI,  15;  XIII,  \l  12:  xvi.  2.:!; 
xx.  211;  xxi,  I.  6;  XXII,  b'.  13;  Il  Sam..  VI,  12,  13,  17. 
18;  xxiv,  18-25.  Même  après  la  construction  du  Temple 
I,  Jérusalem,  on  sacrifiait  sur  les  b. mis-lieux  enjqda, 
I  lit  Reg.,  m.  2-4;  xv,  11;  XXII,  il;  Il  (IV)  lie::.,  xn, 
:i;  xiv,  1  ;  w.  1.  35,  el  dans  le  royaume  d'Israël,  a  Béthel 

et'a  C.algala.  I  (III)  Reg.,  XII,  26-33;  Anios,  m.  11  ;  1  v.  1.5; 

v,5;vn,  13;  Ose.,  iv,  13;  i\.  15;  xn,  M.  Êlie  el   1  Usée 

ne  réclament  pas  contre  la  pluralité  des  autels:  ils 
blâment  seulement  le  culte  idolâtrique  qui  estaccoi  .pli 
sur  les  hauts-lieux.  Élie  se  plaint  de  la  destruction  des 
autels  de  Jéhovah,  1  (111)  Reg.,XIX,  10,  11;  il  dresse  lui- 
même  un  autel  de  pierres  au  Carmel,  XVIII,  30,  3'2,  et 
Elisée  sacrifie  chez,  lui,  xix,  21.  La  loi  de  l'unité  de 
sanctuaire    n'a    été    oliscrvee    a   Jérusalem    qu'après   la 

yjb\V«fSlta, 


PIBUOTHECA 


101 


PENTATEUQL'E 


102 


clmte  de  Samarie  et  en  application  de  la  loi  deutéro- 
nomique.  Elle  n'est  donc  pas  mosaïque.  Telle  est 
l'objection. 

La  succession  des  ordonnances  relatives  à  l'autel 
s'explique  et  s'harmonise  avec  les  faits  de  l'histoire 
israélite,  sans  qu'elles  cessent  d'avoir  été  portées  par 
Moïse.  Au  pied  du  Sinaï,  avant  que  le  tabernacle  n'ait 
élé  dressé,  Moïse  avait  permis  d'élever  à  Dieu  des 
autels  simples  et  sans  degrés  en  tout  lieu  où  le  Sei- 
gneur manifesterait  son  nom.  Après  l'adoration  du 
veau  d'or  et  quand  le  tabernacle  eut  été  érigé,  pour 
prévenir  les  rechutes  dans  l'idolâtrie,  Moïse  avait 
ordonné  aux  Israélites  d'offrir  des  sacrifices  et  d'im- 
moler, même  les  animaux  destinés  à  la  boucherie, 
auprès  du  sanctuaire  unique  du  désert.  Lev.,  xvn,  3-9. 
Voir  Chair  des  animaux,  t.  n,  col.  491-498.  Cette  loi 
n'a  pu  être  pratiquée  qu'au  désert,  à  l'époque  où  Israël, 
réuni  au  camp,  pouvait  aller  facilement  au  tabernacle. 
Elle  n'a  pu  être  imaginée  au  temps  d'Esdras.  alors  qu'il 
n  'y  avait  ni  camp  ni  tabernacle.  Sur  le  point  d'introduire 
Israël  au  pays  de  Chanaaa,  le  sage  législateur  abrogea 
l'obligation  d'immoler  tous  les  animaux  auprès  de 
l'arche,  en  maintenant  pour  l'avenir  la  loi  du  sanc- 
tuaire unique  au  lieu  que  Dieu  devait  choisir.  Er.  atten- 
dant que  Dieu  eût  fait  choix  de  Jérusalem,  il  n'était 
pas  interdit  de  lui  offrir  des  sacrifices  en  dehors  du 
sanctuaire  où  reposait  l'arche.  Voir  Hauts-lieux,  t.  m. 
col.  453-4.54.  Même  après  l'érection  du  Temple  de  Jéru- 
salem, la  loi  de  l'unité  du  sanctuaire  n'était  pas  si  ri- 
goureuse qu'il  ne  fût  permis  d'ériger  d'autres  autels  et 
d'y  offrir  des  sacrifices  légitimes.  Au  Temple,  se  faisait 
le  service  régulier,  quotidien,  prescrit  par  la  loi  mo- 
saïque. Dans  les  circonstances  extraordinaires,  on  pou- 
vait dresser  des  autels;  les  prophètes  et  les  rois  les 
plus  pieux  le  faisaient  sans  scrupule  et  ne  pensaient  pas 
manquer  à  une  loi  divine  qui  n'avait  pas  une  significa- 
tion si  absolue  et  si  restrictive  qu'on  le  prétend.  Voir 
Autel,  t.  î,  col.  1266-1268.  Il  n'est  donc  pas  nécessaire 
de  soutenir  avec  M.  Poels,  Examen  critique  de  l'his- 
toire du  sanctuaire  de  l'arche,  Louvain,  1897,  t.  i 
(seul  paru),  en  dépit  de  la  géographie,  que  le  haut-lieu 
de  Gabaon  est  identique  à  Masphath,  à  Kiriath-.Iarim  et 
à  Xob,  cf.  Poels,  Le  sanctuaire  de  Kirjalh  Jearim, 
Louvain,  1894,  ni  avec  M.  Van  Hoonacker,  Le  lieu  du 
culte  dans  la  législation  rituelle  des  Hébreux,  clans  le 
Muséon,  avril-octobre  1894,  t.  xm,  p.  195-204,  299-320. 
533-541;  t.  xiv,  p.  17-38,  de  distinguer  dans  les  trois 
codes  un  sanctuaire  unique  servant  de  demeure  à 
Jéhûvah  et  de  centre  exclusif  du  culte  public  et  natio- 
nal, et  des  autels  multiples,  consacrés  au  culte  privé  et 
domestique  pour  l'immolation  ordinaire  du  bétail, 
accompagnée  de  rites  religieux  que  tout  Israélite  pou- 
vait accomplir.  Le  Deutéronome  ordonnait  de  détruire 
seulement  les  hauts-lieux  avant  servi  au  culte  des  idoles. 
Sans  doute,  cette  prescription  ne  fut  pas  observée  fidè- 
lement, Jud.,  n,  2,  3,  et  les  hauts-lieux  détruits  furent 
relevés,  parce  que  les  Israélites  retombèrent  fréquem- 
ment dans  l'idolâtrie.  De  même,  le  culte  de  Jéhovah 
sur  les  hauts-lieux,  quoique  illicite  après  la  construc- 
tion du  Temple  de  Jérusalem,  continua,  non  seulement 
dans  le  royaume  schismatique  d'Israël,  mais  même 
dans  celui  de  Juda.  L'usage  en  était  tellement  invétéré 
que  les  rois  les  plus  pieux  durent  le  tolérer.  On  y  mêla 
même  parfois  des  pratiques  idolàtriques  au  culte  de 
Jéhovah.  Les  prophètes  s'élevèrent  avec  vigueur  contre 
ci  mite  mixte,  et  leur  enseignement  finit  par  faire 
abolir  tardivement  tous  les  hauts-lieux,  conservés 
malgré  la  loi  et  au  détriment  de  la  pureté  du  culte. 
Voir  Hauts-lieux,  t.  iv,  col.  455-457;  Idolâtrie, 
col.  810-813.  L'histoire  de  la  multiplicité  des  autels  et 
du  sanctuaire  unique  de  Dieu  en  Israël  ne  prouve  donc 
rien  contre  la  législation  mosaïque  qui  les  concerne. 
b)  Les  sacrifices.  —  Le  livre  de  l'alliance  exigeait 


les  prémices  des  fruits  de  la  terre  et  les  premiers-nés 
des  bestiaux,  ainsi  que  le  rachat  du  premier-né  de 
l'homme.  Exod.,xxn,  28-29  (hébreu,  xxm,  19).  Il  deman- 
dait qu'aux  jours  de  fête,  quand  il  se  présentait  devant 
Dieu.  Israël  ne  vint  pas  les  mains  vides.  Kxod..  xxm, 
15.  On  ne  devait  mélanger  rien  de  fermenté  aux  sacri- 
fices ni  rien  conserver  des  victimes  pour  le  lendemain. 
Exod.,  xxm,  19.  Les  sacrifices  paraissent  donc  être  une 
ollrande  spontanée  des  biens  de  la  terre  au  Seigneur 
et  leur  cérémonial  est  réduit  au  minimum.  Le  Deuté- 
ronome précise  et  développe  les  lois  sur  les  premiers- 
nés  des  animaux,  xv,  19-23,  les  prémices,  xxvi,  1-11 
et  les  dîmes,  xxvi,  12-15.  L'offrande  des  prémices  est 
rattachée  au  souvenir  de  la  sortie  d'Égvpte  et  de  la  pris, 
de  possession  du  pays  de  Chanaaa,  et  elle  présente 
comme  celle  de  la  dime,  le  caractère  d'une  œuvre  de 
bienfaisance  pour  les  pauvres,  les  veuves,  les  orphe- 
lins et  les  lévites.  Le  code  sacerdotal  enfin  distingue 
différentes  espèces  de  sacrifices  et  décrit  minutieuse- 
ment tous  leurs  rites.  A  l'holocauste  et  au  sacrifice 
d'actions  de  grâces  il  joint  la  simple  oblation  et  les  sa- 
crifices pour  le  péché  et  le  délit.  Il  introduit  encore 
l'offrande  de  l'encens.  L'idée  du  sacrifice  est  elle-même 
changée  :  au  lieu  de  l'offrande  familiale,  spontanément 
faite  à  Dieu,  du  repas  joyeux  auquel  prennent  part  les 
pauvres,  il  est  une  institution  officielle  et  publique,  un 
service  commandé,  soumis  à  des  rites  minutieux.  Or, 
ce  rituel  détaillé  du  Lévitique  n'apparaît  nulle  part 
observé  avant  la  captivité.  On  offrait  assurément  des 
sacrifices,  des  holocaustes,  mais  librement  et  simple- 
ment pour  honorer  Dieu  et  se  le  rendre  favorable.  On 
ne  se  préoccupait  pas  de  savoir  quelle  victime  devait 
être  immolée,  quand,  où,  par  qui  et  comment  elle  de- 
vait être  offerte.  Bref,  le  code  sacerdotal  n'était  pas 
observé,  par  la  raison  bien  simple  qu'il  n'existait  pas 
encore. 

Les  faits  ne  répondent  pas  à  la  théorie,  et  les  livres 
historiques  ne  sont  pas  muets,  comme  on  le  prétend, 
sur  l'offrande  publique  et  solennelle  des  sacrifices.  Ils 
mentionnent  en  particulier  des  holocaustes.  Voir  t.  m, 
col.  732.   S'ils  ne  parlent  pas  du  sacrifice   quotidien, 
s'ils  ne   décrivent  pas  les  rites,  on  n'est  pas  en  droit 
de  conclure  de  leur  silence  que  ce  service  ne  se  prati- 
quait  pas    et    que   les    rites    n'étaient   ni    observés    ni 
appliqués.  On  peut  légitimement  supposer  que  le  ser- 
vice ordinaire  se  faisait  régulièrement  à  Silo,  et  plus 
tard  à  Jérusalem,  auprès  de  l'arche.  Il  y  avait  là  un 
sacerdoce  en  permanence.  Les  historiens  n'enregistrent 
que  les  faits,  supposant  les  rites  connus  de  tous.  D'ail- 
leurs, si  les  prophètes  les  plus  anciens,  Anios  et  Osée, 
protestent    si    énergiquement    contre    le    formalisme 
excessif  des  pratiques  rituelles  de  leur  temps  et  prê- 
chent le  culte  en  esprit  et  en  vérité,  c'est  une  preuve 
péremptoire  que  les  rites  se  pratiquaient  alors,  puisque 
les  prêtres  et  le  peuple  y  attachaient  plus  d'importance 
qu'aux  dispositions  intérieures.  Si  Dieu  blâme  les  sa- 
crifices réitérés  à  Béthel,  c'est  que  leur  ollrande  n'em- 
pêche pas  l'impiété  et  la   multiplication   des   péchés. 
Amos,  iv,  4,  5.  S'il  hait  leurs  fêtes,  leurs  holocaustes 
et  leurs  vœux,  Amos,    v,   21,    22,   c'est  parce  que  les 
Israélites  sont  coupables.  La  maison  d'Israël  ne  lui  a- 
t-elle  pas  offert  des  victimes  durant  les  quarante  années 
de  son  séjour  au  désert?  Amos,  v,  25,  et  pourtant  elle 
a  été  punie,  parce  qu'elle  était  infidèle.  Ou  mieux  peut- 
être  faut-il  lire  ce  verset  difficile  ainsi  :  «   Avez-vous, 
alors  que  vous  m'offriez  des  sacrifices  dans  le  désert 
pendant  quarante  ans,  porté  aussi  Sakkout  et  Kion?  o 
Le  crime  actuel  des  Israélites  est  plus  grand  que  leur 
rébellion  au  désert;  elle   sera  punie,   nonobstant   les 
sacrifices  qu'ils  offrent  au  Seigneur.  Celle  interpréta- 
tion suffit  à  enlever   la    prétendue    opposition    qu'on 
trouve  entre  cette  parole  du  prophète  et  le  code  sacer- 
dotal, qui  mentionne  l'offrande  quotidienne  des  sacri- 


l'ENTATEUQUE 


103 

lices  au  désert.  A  moins  encore  qu'Amos  ne  fasse 
allusion  à  l'apostasie  d'Israël  à  Cadès.  Voir  t.  ry, 
col  1-X)3-1204.  De  même,  la  parole  de  Jéremie,  vil,  -1- 
"3  suivant  laquelle  Jéhovah,  à  la  sortie  d'Egypte, 
n'aurait  pas  exigé  d'holocaustes  et  de  sacrifices,  ne 
prouverait  pas  la  non-existence  du  code  sacerdotal.  Le 
prophète  fait  peut-être  simplement  allusion  à  la  propo- 
sition que  Dieu  fit  aux  Israélites  en  Egypte  de  les  dé- 
livrer de  la  servitude,  proposition  qui  ne  contenait  pas 
encore  la  mention  des  sacrifices  et  qui  fut  d'abord  re- 
Exod.,  vi,  6-9.  Ou  bien,  sans  nier  la  loi  sur  les 
sacrifices,  le  prophète,  par  un  contraste  saisissant, 
insiste  sur  l'obligation  de  la  loi  morale,  et  sur  la  fidé- 
lité à  cette  loi,  dont  l'inobservation  sera  châtiée,  malgré 
l'observance  des  rites  qui,  sans  elle,  ont  peu  de  valeur 
;nix  veux  de  Dieu. 

L'holocauste  et  le  sacrifice  pacifique  ont  donc  tou- 
jours été  en  usage,  quoique  leurs  rites  ne  soient  pas 
décrits  dans  les  livres  historiques.  Le  sacrifice  pour  \e 
péché  n.i  pas  été  imaginé  par  Ézéchiel,  xi.v.  22-25. 
Osée,  iv,  8,  el  Michée,  vi,  7,  le  nomment  expressément, 

puisi manger  le  haltàt  signifie  clairement  manger 

les  victimes  offertes  pour  le  péché;  il  est  aussi  men- 
tionné dans  le  Ps.  xxxix  ixi.  .  7.  L'idée  en  avait  été 
-  [primée  bien  auparavant.  I  Sam.,  III,  14.  Le  sacrifice 
pour  le  délit  n'est  pas  toujours  nettement  distingué  du 
sacrifice  pour  le  péché.  U  l'est  formellement  toutefois 
dans  le  passage  relatif  aux  revenus  des  prêtres  sous  le 
règne  de  Joas.  II  (IV)  Reg.,  xu,  16.  Déjà,  à  l'époque 
des  Juges,  les  Philistins,  punis  pour  s'être  empares  de 
l'arche,  renvoyèrent  cette  arche  avec  des  'âSâm  pour 
obtenir  le  pardon  de  leur  faute.  1  Sam.,  VI,  3-15.  Le 
icrifice  pour  le  délit  est  aussi  nommé  dans  Isaïe, 
i.m.  -10.  Les  quatre  espèces  de  sacrifices  étaient  donc 
connues  en  Israël  avant  Ézéchiel,  et  si  le  code  sacer- 
dotal bs  distingue  pour  la  première  fois,  c'est  qu'il  a 
été  promulgué  par  Moïse  au  désert. 

i     Les  /.'tes.   —  Le  livre  de  l'alliance.  Exod..  xxm. 
U-17.  ordonne  la  célébration  de  trois  fêtes  annuelles 
la  fête   des  azymes,  qui  dure  sept  jours  et  qui  est  déjà 
rattachée  au   souvenir  de  la  sortie  d'Egypte,  mais  sans 
être  encore  la  Pâque;  la  fête  de  la  moisson  et  celle  de 
la  récolte  des  fruits.  Ces  deux  dernières  ont  un  i  arai 
1ère  nettement  et   exclusivement  agricole,  et  on  peut 
penser  que  la  première,  qui    a    lieu  au   printemps,  se 
rapportait  aussi  à  l'agriculture.   La  durée  de  celles-ci 
n'est  pas  non  plus  fixée.  Le  Deutéronome,  xvi,  1-17,  ne 
connaît  encore  que  trois   fêtes  annuelles,  qui  doivent 
célébrées  au  sanctuaire  unique.  La  première  réunit 
l.i  solennité  de  la  Pàque  à  la  fêle  clos  azymes-  La  célé- 
bration delà  seconde  est  fixée  à  sept  Bemaines  après  la 
première.  La   troisième  est  nommée  i  fête  des  taber- 
nacles   ,  el  sa  durée  esl  de  septjonrs.  Leur  cai 
est  différent  :  ce  sont  des  fêtes  de  joie,  de  reconnais- 
sance el  de  charité  fraternelle.  Dans  le  code  sacerdotal, 
ces  trois  fêtes  rentrent  dans  un  cycle  plus  complet  de 
cinq  solennités,  dont  les  rites  sont  minutieusement  dé- 
crits. Lev.,  xxm,  4-44.  Il  ajoute  la  fête  des  trompettes 
ri  relie  du  grand-pardon,  et  il  modifie  le  caractère  des 
fêtes  de  la  Pentecôte  el  >les  tabernacles,  en  1rs  ratta- 
chant    '  un  souvenir  historique.  Toutes  sont  célébrées 
au   sanctuaire   unique;    leur  date,  leur  durée   el  leurs 
moniessont  fixées  dans  les  moindres  détails,  Enfin, 
:,  bration  de  ces   fêtes  n'est  pas  signalée  dan-  les 
livres  historiques  les  plus  anciens.  Une  fête,  solennisée 
par  des  danses  de  jeunes  filles,  avait  lieu  chaque  année 
.,   silo.  Jud.,  xxi.   19.  Les  parents  de  Samuel  allaient 
chaque  année  honorer  Dieu  en  ce  sanctuaire,  1  Sam., 
1,  3,  7.  -il  ;  n,  19.  Jéroboam  l«  établit  dans  son  royaume 
au    huitième   mois  une    fête   pareille  à  celle   qui    avail 
lieu  en  Juda.  1  lllll  Reg.,  XII,  32,  33.  Les  anciens  pro- 
phètes. Amos  et  Osée,  parlent   plusieurs  fois  de   Etes 
religieuses,  mais  sans  les  désigner  par  des  noms  par- 


104 


ticuliers.  Après  la  découverte  du  Deutéronome,  la  Pâque 
est  célébrée  pour  la  première  fois  conformément  aux 
rites  prescrits  dans  ce  livre.  II  (IV)  Reg.,  xxm,  21-23. 
Pendant  la  captivité.  Ézéchiel,  xi.v,  18-25.  ne  connaît 
encore  que  trois  solennités,  avec  un  sacrifice  d  expia- 
tion au  premier  jour  du  premier  et  du  septième  mois. 
Le  code  sacerdotal  avec  ses  cinq  fêtes  est  donc  posté- 
rieur à  la  captivité,  concluent  les  critiques  négatifs. 

Les  anciennes  fêtes  ne  sont  mentionnées  dans  le» 
litres  historiques  que  quand  les  circonstances  en  ont 
fourni  l'occasion,  et  l'on  ne  peut  arguer  de  la  rareté  de 
leur  mention  contre  leur  non-existence.  Leur  périodi- 
cité régulière  n'avait  pas  besoin  d'être  signalée  par  h  s 
historiens  qui  relatent  seulement  les  circonstances  ex- 
traordinaires, comme  celle  de  la  Pàque  sous  le  règne 
de  Josias.  La  coutume  de  monter  à  Jérusalem  oll ru- 
des sacrifices  existait  à  l'époque  du  schisme  des  dix 
tribus  puisque  Jéroboam  1"  élève  des  autels  a  Dan  et 
à  Béthel,  pour  empêcher  ses  sujets  d'aller  à  Jérusalem, 
I  (III)  Reg.,  xii.  26-31,  et  il  établit  au  moins  uni 
pour  remplacer  celles  de  Juda.  Plusieurs  commenta- 
teurs ont  pensé  qu'après  l'établissement  des  Hébreux 
au  pays  de  Chanaan,  l'usage  s'était  introduit  de  ne 
faire  qu'un  seul  pèlerinage  chaque  année  ausanctuaiM 
du  Seigneur.  Voir  t.  u,  col.  2219.  Osée,  XII,  9,  fait  allu- 
sion à  la  fête  des  Tabernacles  et  à  sa  signification  histo- 
rique; Isaïe,  xxix,  1;  xxx,  29,  parle  du  cycle  des 
Ézéchiel  rappelle  seulement  les  trois  fêtes  qui  exigeaient 
l'assemblée  relisieuse  de  tout  Israël  au  Temple.  Voir 
t  i  col  1129-1130.  La  fête  de  l'Expiation  n'est  pas  men- 
tionnée dans  l'Ancien  Testament  en  dehors  du  Penta- 
teuqne.voir  t.  h,  col.  2139.  et  sa  célébration  n'est  relalce 
par  Josepheque  sous  Jean  llyrcan  ou  Hérode.  En  faut- 
il  conclure  qu'elle  n'avait  pas  lieu  auparavant,  an 
moins  depuis  le  retour  des  Juifs  en  Palestine/  Le  si- 
lence des  anciens  écrivains  ne  prouve  pas  davantage  sa 
non-célébration. 

cl)  Les  prêtres  et  les  lévites.  -  Le  code  de  1  alliance. 
promulgue  avant  l'institution  du  sacerdoce  aaronique, 
ne  parle  pas,  objecte-t-on,  de  prêtres,  et  l'alliance  dont  il 
contient  les  dispositions  est  conclue  par  des  sacrifices, 
immolés  par  de  jeunes  Israélites.  Exod..  xxiv,  o.  Le 
Deutéronome  mentionne  fréquemment  les  prêtres  - 
les  lévites.  Il  établit  leurs  droits,  XVIII,  1-8,  mais  il  ne 
reconnaît  pas  de  distinction  hiérarchique  entre  eux. 
Il  ignore  le  grand-prêtre.  11  distingue  seulement,  \.  .. 
le  l'exile  qui  habite  dans  le  pays  du  lévite  attache  au 
service  du  sanctuaire  unique.  Le  premier  est  ordinaire- 
ment classé  avec  la  veuve,  l'orphelin,  l'indigent  et 
l'étranger  pour  recevoir  les  largesses  du  pieux  Israélite. 
Les  lévites,  éloi  nés  du  sanctuaire,  n'avaient  donc  pas 
encore  de  revenus  fixes.  Dans  le  code  sacerdotal,  le  sa- 
Cl  ni,,,  eesl   I institution  -on, ,1e.  hiérarchisée, dont  les 

droits  et  les  fonctions  sont  déterminés  très  exactemenl 

La  hiérarchie  comprend  le  grand-prêtre,  fils  aîné  et 
successeur  d'Aaron,  et  le-  lévites,  membres  de  la  tribu 
de  Lévi.  Les  prêtres  sont  richement  dotés.  Les  lévites, 
n'avanl  pas  eu  de  domaine  distinct  dans  le  parla 
la  Palestine,  habitent  des  villes  spéciales  et  sont  entre- 
tenus eux  et  leurs  familles,  par  le  prélèvement  des 
prémices  el  le  paiement  de  la  dlme.  En  tout  cela,  ce 
code  est  manifestement  en  progrès  sur  le  Deutéronome; 
il  lui  est  donc  postérieur. 

D'antre  part,  on  prétend  que  l'histoire  d  Israël  con- 
tinue cette  progression  de  la  législation  sacerdotale. 
Dans  les  documents  élohiste  et  jéhoviste,  Aaron  n  ap- 
paraît comme  prêtre  que  dans  l'épisode  du  veau  d  or, 
Exod  xxxii,  5,  6,  et  la  tribu  de  Lévi,  qui  punit  les 
coupables,  n'y  a  pas  de  droits  spéciaux.  A  l'époque  des 
Ju»es  il  n'est  fait  mention  d'aucun  prêtre;  il  est  ques- 
tion de  lévites  dans  deux  épisodes,  racontés  en  appen- 
dice Jud.,  xvn-xxi.  A  Silo,  il  y  a  cependant  une 
famille  sacerdotale,  celle  d'Héli,  1   Sam.,    I,   U,  mais 


105 


PENTATEUQUE 


106 


sans  lien  avec  Aaron.  L'arche  renvoyée  par  les  Philis- 
tins est  reçue  par  les  lévites,  I  Sam.,  VI,  15;  mais 
Éléazar,  fils  d'Abinadab,  est  consacré  pour  la  garder 
dans  la  maison  de  son  père.  I  Sam.,  vu,  1.  Samuel, 
fils  d'un  Éphraïmite,  joue  un  rôle  sacerdotal.  Il  offre 
des  sacrifices,  aussi  bien  que  les  rois  Saiil,  David  et 
Salomon,sans  prêtres.  Absalom  en  offre  aussi.  II  Sam., 
xv,  12.  A  la  cour  de  David,  il  y  avait  des  prêtres,  Sadoc 
et  Abiatbar.  II  Sam.,  vin,  17;  xx,  25.  Les  fils  de  David, 
II  Sam.,  vin,  18,  et  le  Jaïrite,  II  Sam.,  xx,  26,  men- 
tionnés comme  prêtres,  ne  faisaient  pas  partie  du  sacer- 
doce, si  la  leçon  massorétique  kolivu  n'était,  comme  on 
l'a  pensé,  qu'une  altération  de  sôkên,  désignant  un  chef 
ou  un  officier.  Is.,  xxn,  15.  Salomon  destitua  Abiathar. 

I  (III)  Reg.,  il,  20.  27.  A  la  dédicace  du  Temple,  c'est 
le  roi  qui  sacrifie,  bénit  l'assemblée  et  prononce  la 
prière  de  la  consécration;  les  prêtres  et  les  lévites 
portent  simplement  l'arche  et  les  ustensiles  sacrés.  I 

(III)  Reg..  vin.  3,  4.  Jéroboam  I™  établit  dans  le 
royaume  d'Israël  des  prêtres  pris  parmi  le  peuple  et 
n'appartenant  pas  aux  fils  de  Lévi.  I  (III)  Reg..  xn.  31. 

II  y  avait  donc  des  prêtres  et  des  lévites,  mais  pas 
encore  de  grand-prêtre.  Plus  tard,  Joïada,  ordinaire- 
ment qualifié  «  prêtre  »,  II  (IV)  Reg.,  xi,  9,  15,  18; 
xii,  2,  7,  9,  est  dit  o  grand-prêtre  »  une  seule  fois.  II 

(IV)  Reg..  vn.  10.  Sous  Achaz,  Urie  est  dit  aussi  sim- 
plement prêtre.  II  (IV)  Reg.,  xvi,  10-16.  Sous  Josias, 
Helcias  est  appelé  «  grand-prêtre  »,  II  (IV)  Reg.,  xxn, 
i.  8;  zxiii,  4,  et  «  prêtre  •>  tout  court.  II  (IV)  Reg., 
xxn.  10.  12,  14.  Saraia  est  nommé  «  premier  prêtre  ». 
II  (IV)  Reg.,  xxv,  18;  Jer.,  ni.  21.  Auprès  d'Helcias, 
figurent  des  a  prêtres  en  second  »,  II  (IV)  Reg.,  xx  m.  i, 
et  à  coté  de  Saraia,  Sophonie,  «  prêtre  en  second.  » 
II  (IV)  Reg..  xxv.  18;  .1er.,  lu.  24.  Durant  la  captivité,  le 
prêtre  Ézéchiel  distingue  les  prêtres,  fils  de  Sadoc,  des 
prêtres  lévitiques;  mais  cette  distinction  est  faite  en  vue 
de  l'avenir;  c'est  une  innovation  introduite  pour  des 
raisons  historiques.   Les  lévites  seront  des  prêtres  dé- 

s  de  leurs  fonctions  anciennes  en  punition  de 
leur  idolâtrie;  ils  seront  réduits  au  rôle  de  serviteurs 
des  prêtres  et  de  portiers  du  nouveau  Temple.  Ezech., 
xi. iv.  10-11.  Les  prêtres  et  les  lévites,  fils  de  Sadoc, 
qui  sont  demeurés  fidèles,  continueront  leurs  fonctions 
i  i  seront  astreints  à  des  règles  de  pureté  déterminées. 
Ils  n'auront  pas  de  propriété,  vivront  de  l'autel,  rece- 
vront les  prémices  et  habiteront  des  domaines  tracés 
au  cordeau  au  milieu  de  la  Terre  Sainte.  Ezeoli.,  xliv, 
15-xi.v.  5.  Le  prophète  ne  connaît  pas  encore  le  grand- 
prêtre.  Le  code  sacerdotal  avec  sa  hiérarchie  à  trois 
degrés,  avec  sa  distinction  des  prêtres  et  des  lévites 
dès  l'origine.  Num.,  m,  5-13,  est  postérieur  à  Ézéchiel. 
Sa  législation  détaillée  sur  les  fonctions  et  les  revenus 
des  deux  classes  est  en  progrès  sur  le  prophète  orga- 
nisateur  Je  l'avenir.  Ses  villes  lévitiques  remplacent 
les  domaines  imaginés  par  Ézéchiel. 

On  a  démontré  ailleurs,  voir  t.  IV,  col.  200-203.  qu'il 
y  eut  en  Israël  dès  l'origine  du  peuple  une  tribu  de 
Lévi.  à  qui  Dieu  lit  attribuer  les  fonctions  sacerdotales 
un  récompense  de  sa  fidélité  lors  de  l'adoration  du  veau 
d'or.  Exod.,  xxxn,  26-29.  On  a  prouvé  aussi,  ibid., 
col.  203-205,  que  cette  tribu  comprit  deux  catégories  de 
ministres  sacrés  :  les  prêtres  et  les  simples  lévites.  On 
a  raconté  enfin,  ibid.,  col.  208-211,  l'histoire  des  des- 
cendants de  Lévi  jusqu'à  la  lin  de  la  captivité.  Quant 
au  plan  de  restauration  religieuse  d'Ézéchiel,  voir  t.  H, 
col.  2155-2156,  était-ce  une  réforme  pratique  ou  seu- 
lement une  restauration  purement  idéale,  irréalisable 
et  irréalisée?  Si  l'on  admet  la  seconde  alternative,  qui 
ne  peut  même  être  niée,  il  en  résulte  que  le  prophète 
n'est  pas  l'auteur  de  la  distinction  entre  prêtre-  et 
lévites.  Loin  de  la  créer,  il  la  suppose  existante;  il  lui 
emprunte  le  cadre  de  ses  institutions  futures.  S'il  dé- 
. grade  les  prêtres  coupables  d'idolâtrie,  ce  n'est  pas  en 


créant  une  caste  inférieure,  exclusivement  composée 
d'eux;  il  les  réduit  au  rang  de  simples  lévites,  de  ces 
lévites,  dont  le  nom  et  les  fonctions  étaient  connus  et 
déterminés  par  la  tradition.  Ézéchiel,  xlviii,  11,  dis- 
tingue ces  deux  classes,  et  il  avait  mentionné  aupara- 
vant, xl,  45,  des  gardiens  du  temple,  et  des  ministres 
de  l'autel,  xl,  46.  Les  fils  de  Sadoc,  à  qui  il  réserve 
les  fonctions  sacerdotales  à  cause  de  leur  fidélité,  étaient 
eux-mêmes  des  fils  de  Lévi,  xliii,  19;  xliv,  15.  Quand 
il  élabore  son  programme  de  restauration  future,  il  en 
emprunte  le  cadre  aux  institutions  existantes,  mais  il  y 
introduit  des  matériaux  de  sa  création.  Il  maintient 
donc  les  deux  grandes  classes  des  ministres  du  culte; 
mais  divisant  ceux-ci  sous  le  rapport  de  leur  fidélité  à 
Dieu,  il  n'admet  au  ministère  de  l'autel  que  les  prêtres 
demeurés  fidèles,  en  les  désignant  comme  fils  de  Sa- 
doc, et  il  réduit  au  simple  rang  de  serviteurs  des 
prêtres  les  anciens  ministres  infidèles.  Le  caractère 
idéal  de  la  réforme  laissait  au  prophète  la  liberté  d'ex- 
clure les  lévites  et  d'omettre  le  grand-prêtre,  comme 
la  fête  de  la  Pentecôte  sans  nuire  à  leur  réalité  histo- 
rique. A.  Van  Hoonacker, Les  prêtres  el  les  lévites 
le  livre  d'Ézéchiel,  dans  la  Revue  biblique,  1899,  t.  vin, 
p.  180-1S9,  192-194.  Voir  t.  n,  col.  2155,  2156,  2161. 
Quant  au  grand-prêtre,  il  est  mentionné  dans  les  livres 
historiques,  chaque  fois  qu'il  est  intervenu  dans  les 
affaires  publiques.  Son  institution  remonte  à  Aaron  et 
n'est  pas  une  création  artificielle  de  l'auteur  du  code 
sacerdotal.  Voir  t.  m,  col.  295-308. 

Les  redevances,  versées  aux  prêtres  et  aux  lévites, 
ne  sont  pas  non  plus  une  invention  récente.  On  pré- 
tend bien  que  les  prêtres  n'avaient  primitivement 
aucun  droit  à  recevoir  une  part  de  la  victime  des 
sacrifices,  ceux-ci  étant  des  repas  sacrés  auxquels  les 
particuliers  qui  les  offraient  invitaient  les  prêtres  du 
sanctuaire  où  avait  eu  lieu  l'immolation.  Le  Deutéro- 
nome,  xvm,  1-8,  leur  attribua  des  parts  déterminées. 
Le  code  qu'on  appelle  sacerdotal  les  augmenta  notable- 
ment et  distingua  ce  qui  revenait  au  grand-prêtre,  aux 
prêtres  et  aux  lévites.  Lev.,  vu.  28-3i:  Num.,  v.  8-10; 
xvm, 8-32.  Quant  aux  villes  lévitiques,  Num.,  xxxv.  I- 
8;  Jos.,  xxi,  1-40,  l'idée  en  a  été  suggérée  par  Ézéchiel, 
XLVIII,  10-14.  En  fait,  les  livres  historiques  mentionnent 
en  quelques  circonstances  les  redevances  dues  aux 
prêtres.  Les  fils  d'IIéli  n'étaient  prévaricateurs  qu'en 
ce  qu'ils  n'observaient  pas  les  prescriptions  légales  et 
dé]  assaient  11  ur  droit  en  s'attribuant  ce  qui  leur  plai- 
sait des  victimes  offertes.  I  Sam.,  n,  12-17.  Et  l'homme 
de  Dieu  qui  reproche  à  leur  père  sa  faiblesse,  règle 
quels  seront  à  l'avenir  les  revenus  des  prêtres  de  Silo. 
Ibid.,  36.  Sous  le  règne  de  Joas,  les  revenus  des  prê- 
tres se  payaient  en  argent.  II  (IV)  Reg.,  XII,  4-16.  A  la 
réforme  religieuse  de  Josias,  les  prêtres  infidèles 
furent  privés  des  revenus  du  culte  et  ne  gardèrent  pour 
vivre  qu'une  partie  de  leurs  droits.  II  (IV)  Reg.,  xxm, 
9.  Sur  la  dime,  voir  t.  n,  col.  1432-1435,  et  sur  les 
villes  lévitiques,  t.  iv,  col.  216-221. 

e)  Loi  sur  les  bctes  mortes.  —  Le  livre  de  l'alliance 
interdit  absolument  aux  Israélites,  qui  forment  un 
peuple  saint,  de  manger  les  bêtes  mortes,  et  ordonne 
de  les  abandonner  aux  chiens.  Exod.,  xxn,  31.  Le  Deu- 
téronome,  xiv,  21,  autorise  à  les  donner  ou  à  les  ven- 
dre aux  étrangers.  Le  code  sacerdotal  ne  voit  plus  dans 
l'acte  de  manger  une  bête  morte  qu'une  impureté  lé- 
gale, exigeant  une  simple  ablution.  Lev.,  xvn,  15-16. 
Ces  dispositions  diverses  ne  s'excluent  pas.  La  prohi- 
bition, fondée  sur  la  sainteté  spéciale  des  Israélites, 
demeure,  nonobstant  les  remarques  successives  qui  s'y 
ajoutent.  Quand,  au  désert,  il  n'y  a  pas  d'étrangei  au 
milieu  d'Israël,  il  faut  laisser  aux  chiens  toute  bête 
morte;  lorsque  Israël  aura  au  milieu  de  lui  ou  à  côté 
de  lui  des  étrangers,  qui  ne  sont  pas  obligés  à  la  sain- 
teté spéciale  des  Israélites,  on  pourra  leur  donner  ou 


107 


PENTATEUQUE 


108 


leur  vendre,  selon  les  cas,  les  bêles  mortes.  Enfin, 
l'Israélite  qui  aura  manqué  à  celte  prescription  n'aura 
encouru  qu'une  impureté  légale  que  l'ablution  fera 
disparaître.  Les  ordonnances  différentes  visent  des  cas 
différents  et  ne  constituent  pas  des  codes  successifs. 

/')  Loi  sur  les  esclaves.  —  Selon  le  livre  de  l'alliance, 
l'esclave  hébreu  ne  peut  être  acheté  que  pour  six 
années;  il  est  nécessairement  libéré  pour  la  septième: 
et  s'il  veut  se  lier  à  perpétuité,  une  cérémonie  spé- 
ciale doit  le  constater.  Exod.,  xxt,  2-6.  Le  Deutéro- 
Dome,  xv.  12-18,  reproduit  cette  loi,  mais  l'explique, 
en  obligeant  le  maître  à  faire  des  présents  à  l'esclave 
libéré  et  en  spécilbnt  que  ces  dispositions  s'appliquent 
à  la  femme  esclave.  La  loi  nouvelle  du  prétendu  code 
sacerdotal,  Lev.,  xxv,  39-46,  ne  fixe  qu'un  cas  particu- 
lier. En  déterminant  les  privilèges  de  l'année  du  ju- 
bilé, elle  règle  que,  cette  année-là  survenant,  tout  es- 
clave hébreu  est  libéré,  même  si  les  six  années  de  son 
engagement  ne  sont  pas  révolus.  Voir  t.  m,  col.  1750- 
Is.M.  Jérémie,  xxxiv,8-22,  annonce  seulement  la  puni- 
tion encourue  par  la  violation  d'une  loi  de  libération, 
imposée  après  la  délivrance  de  la  servitude  d'Egypte. 
Voir  t.  il,  col.  1921-1923. 

i.  Arguments  philologiques  invoqués  e»  faveur  de 
la  diversité  des  documents.  —  Nous  ne  reviendrons 
pas  sur  la  diversité  des  noms  divins,  Élohim  et  Jého- 
vah,  qui  a  servi  de  point  de  départ  à  la  distinction  des 
documents  élohiste  et  jéhoviste.  Elle  a  perdu  beaucoup 
de  son  imporlance  première  et  elle  n'est  plus  aujour- 
d'hui pour  les  critiques  qu'un  des  nombreux  exemples 
de  la  variété  du  vocabulaire  des  écrivains  qui  ont  rédigé 
les  sources  de  l'Hexateuque.  Voir  d'ailleurs  Élohim, 
t.  il,  col.  1701-1703.  et  Jéiiovaii,  t.  m,  col.  1230-1234. 
Au  sentiment  des  critiques,  chaque  document  a  ses 
expressions  propres,  ses  tournures  spéciales  et  son 
style  distinctif.  Voir  E.  Mangendt,  L'authenticité 
mosaïque  du  Pentateuque,  Paris,  P.I07,  p,  56-58,  85-87, 
111-11.").  144-147.  .Mais  il  importe  de  remarquer  par 
quelle  méthode  on  les  a  déterminés.  On  a  choisi  un 
certain  nombre  de  morceaux  qui  présentaient  des  dillé- 
rences  de  langue  plus  marquées;  on  a  étudié  leurs 
particularités  le\ire",i\i|>liii|ues  el  grammaticales,  et  on 
a  discerné  ainsi  les  termes  soi-disant  caractéristiques, 
qui  ont  servi  à  reconnaître  les  autres  morceaux  appar- 
tenant à  la  même  source.  Le  procédé  a  paru  quelque 
peu  arbitraire.  On  range  dans  une  série  tous  les  pas- 
sages qui  présentent  les  mêmes  caractères  linguistiques 
et  dans  une  autre  ceux  qui  ont  d'antres  caractères.  Les 
deux  séries  -uni  par  suite  différentes.  Mais,  on  ne  tient 
pas  compte  d'un  nombre  plus  considérable  d'expres- 
sions communes,  employées  partout.  Quant  à  l'appré- 
ciation des  expressions  dites  caractéristiques,  il  faudrait 
considérer  la  diversité  des  matières  et  du  genre  litté- 
raire,  l'n   code  législatif  ne  se   rédige  pas  dans    le 

n -  termes  qu'un  récit  historique  OU  qu'un  discours 

parénétique.  La  Genèse  et  les  parties  narratives  des 
livres  du  milieu  sont  naturellement  différentes  de  la 
législation.  Le  législateur  n'emploie  pas  les  mêmes 
mots  qu'un  historien  ou  un  [indicateur.  Ainsi,  il  n'est 
pas  étonnant  que  la  législation  mosaïque  ait  des  termes 
techniques,  concernant  les  choses  du  culte,  qui  ne  se 
retrouvent  pas  ailleurs.  On  peul  admettre  toutes  les 
particularités  de  vocabulaire  el  -te  style,  remarquées 
dans  le  Deutéronome,  sans  qu'elles  prouvent  que  les 
discours,  qui  composent  ce  livre,  n'ont  pas  été  rédigés 
par  Moïse  lui-même.  Le  genre  litti  raire  choisi  et  le  ton 
parénétique  exigeaient  ces  différences.  Cf.  P.  Martin, 
Introduction' à  la  critique  générale  de  l'A,  '/'.,  Paris. 
1886-1887  (lithog.),  I.  i.  p.  576-604.  Les  critiques  ont 
renoncé'  à  démontrer  la  modernité  du  code  sacerdotal 
par  sa  langue  propre;  l'étude  de  cette  langue  apprend 
commenl  l'auteur  écrivait,  elle  n'indique  pas  la  date  du 
livre.  Du  reste,  la  diversité  du  style  s'explique  tout  na- 


turellement dans  l'hypothèse  que,  pour  composer  le 
Pentateuque,  Moïse  a  employé  différents  secrétaires  ou 
scribes  écrivant  sous  sa  direction.  Chacun  d'eux  avait 
son  style  propre,  et  la  diversité  du  langage  n'est  pas 
surprenante  dans  une  œuvre  à  laquelle  plusieurs  mains 
ont  collaboré.  Pour  la  Genèse  en  parliculier,  certaines 
particularités  de  style  et  de  lexique  peuvent  aussi  pro- 
venir des  sources  utilisées  et  reproduites  sans  retouches. 
Enfin,  le  texte  hébreu  actuel  ne  représente  pas  absolu- 
ment l'original;  il  a  pu  êlre  remanié, et  toutes  les  par- 
ticularités linguistiques  ne  peuvent  fournir  un  argu- 
ment certain  de  la  prétendue  diversité  des  documents. 
Cf.  F.  de  Hummelauer,  Deuteronomium,  Paris,  l'.iol, 
p.  138-144.  Ainsi  expliqué,  l'argument  philologique, 
qui  ne  prouve  rien  à  lui  seul,  perd  toute  sa  force 
probante  en  faveur  de  la  distinction  des  sources  du 
Pentateuque. 

L'authenticité  mosaïque  du  Pentateuque  a  été  soute- 
nue par  de  nombreux  critiques  et  défendue  contre  les 
attaques  des  adversaires.  Nous  signalerons  en  terminant 
les  principaux  ouvrages  ou  articles  consacrés  à  cette 
démonstration  ou  à  la  polémique  avec  les  critiques 
allemands  :  Hengstenberg,  Die  Bûcher  Moses  und 
Aegypten,  Berlin,  1841;  W.  Smith,  The  Book  of  Moses 
or  the  Pentateuch  in  ils  aulhorship,  credibility  and 
civilisation,  2  in-8°,  Londres.  1868;  Ch.  Schœbel,  Dé- 
monstration de  l'authenticité  du  Deutéronome,  Paris, 
186S;  Démonstration  de  l'authenticité  mosaïque  du 
Lévitique  el  des  Nombres,  Paris,  1869;  Démonstration 
du  l'authenticité  mosaïque  de  l'Exode,  Paris,  1871; 
Démonstration  de  l'authenticité  de  la  Genèse,  Paris, 
1873;  Le  Moïse  historique  et  la  rédaction  moi 
du  Pentateuque,  Paris.  1875 (ces travaux  ont  paru  d'abord 
en  articles  dan-  les  Annales  de  philosophie  chréti 
1867-1875)  ;  Knabenbauer,  Dei  Pentateuch  und  à 
glâubige  Bibelkritik,  dans  Stimmen  ausMaria-Laach, 
1873,  t.  iv  ;  Bredenkamp,  (iesetz  >md  l 'ropheten,  Erlan- 
gen,  1881;  C.  Elliot,  Vindication  of  the  Mosaic  au- 
thorship  oj  the  Pentateuch,  Cincinnati,  1884;  E.  C  I  ;  i  s  - 
sel,  The  Pentateuch,  ils  origin  and  structure,  New-Yorl . 
1885;  l'.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  12-  édit.,  Paris, 
1906,  i.  i,  p.  397-478;  Les  Livres  Saints  el  la  crii 

rali tliste,  Paris.  1902,  t.  m.  p.  1-220;   t.  iv.  p.  239- 

253;  105-415;  Ubaldi,  Introduclio  in  Sacram  Scripltt- 
ram,  2"  édit.,  Rome,  1882,  t.  i.  p.  152  509;  R.  Cornely, 
Introduclio  specialis  in  historicos  Y.  T.  lil>ros,  Paris, 
1887,  p.  19-160;  .1.  P.P.  Martin.  Introduction  à  la  cri- 
tique  générale  de  l'A.  T.  De  l'origine  du  Pentateuque, 
3  in-4»,  Paris.  1886-1889  (lithog.);  (i.  Vos.  .Vos,,,, 
origin  of  the  Pentateuchal  rodes,  Londres.  1886; 
\\ .  II.  (iieon.  Moses  and  the  Prophets,  New-York, 
1883;  The  Uebrew  Veasts,  New-York,  1885;  The  Penta- 
teuchal  question,  dans  Vosniru,  Chicago,  1880-18112, 
t.  v-xm;  The  higher  Criticism  of  the  Pentateuch, 
New-York,  1895;  The  unity  of  the  book  of  Ger, 
New  York,  1895;  cardinal  Meignan,  Dei'Éden  à  Moïse, 
Paris.  1895,  p.  1-88;  La  a,  or  the  Law  of  Moses 

oud  the  higher  criticism  (Essais  de  Sayce,  Rawlinson, 
Trench,  Lias,  Wace,  etc.),  Londres,  1894;  Baxter, 
Sanctuary  and  sacrifice,  Londres,  1890;  Ed.  Bohlj 
/ m,!  Gesete  und  zum  Zeugnits,  Vienne,  1883;  A. Zahn, 
Emste  Blicke  m  den  Wahn  dermodernen  Krilikdes 
A.  T..  Gûtersloh,  1893;  Dat  Deuteronomium,  1890; 
Israelitische  und  jùdische  Geschichte,  1895;  Ed.  ltup- 
precht.  Die  Atuchauung  der  krit.Schule  Wellhau 
vom  Pentateuch,  Leipzig,  1893;  Dos  Râlhteldes  Fûnf- 
b  uchesM  ose  und  seine  falsche  Los  un  g,  Gùtersloh,  1894; 
Dos  Ràlhsels  LOsung  oder  Beitràge  zur  richtigen  i  ■ 
sung  des  Pentaleuchrâthsels,  3  vol.,  1897;  Die  Kritih 
nachihrem  Rechl  und  Unrecht,  1897;  abbé  de  Broglie, 
Questions  bibliques,  édit.  Piat,  Paris.  1897,  p.  89-lti'é, 
J.  B.  l'elt.  Histoire  de  l'A.  T., 3  édit.,  Paris,  1901, 1. 1, 
p.  291-326;  J.  Kiev.   Die  Penlateuchfrage.  Ihre  Ge- 


109 


PENTATEUQUE 


110 


schichle  und  ihre  Système,  Munster,  1903;  J.  Thomas, 
The  organic  unity  of  the  Pentateuch,  Londres,  1904; 
G.  11.  Iiouse,  The  OUI  Testament  in  New  Testament 
light.  Londres,  1905;  H.  A.  Redpath,  Modem  criticism 
ami  the  book  of  Genesis,  Londres.  1905;  G.  Hoberg, 
Moses  und  der  Pentateuch,  Fribourg-en-Brisgau.  1905; 
H.  M.  Wiener,  Studies  in  biblical  Law,  Londres,  1904; 
,1.  Orr.  Tlie  problem  of  (lie  Old  Testament  considered 
vit  h  référence  to  récent  criticism,  Londres,  1900. 
Cf.  II.  Hôpfl,  Die  hôhere  Bibelkritik,  Paderborn,  1902, 
p.  1-96. 

///.  .YOZ'£  THÙOLOGIQVE  DE  if  AUTHENTICITÉ  MO- 
SAÏQUE Tir  PEyrATEUQUE.  —  L'authenticité  mosaïque 
du  Pentateuque  reposant  principalement  sur  le  témoi- 
des  écrivains  inspirés,  sur  la  parole  de  Jésus- 
Christ  et  des  Apôtres  et  sur  la  tradition  catholique,  il 
y  a  lieu  de  se  demander  si,  étant  affirmée  par  l'Écriture 
et  la  tradition  ecclésiastique,  elle  rentre  dans  le  do- 
maine de  la  révélation  divine,  ou  bien  si,  n'étant  pas 
formellement  enseignée  par  Dieu  aux  hommes,  elle 
n'a  pas  été  révélée  et  par  suite  peut  librement  être 
discutée  par  les  catholiques  et  abandonnée  sans  détri- 
ment pour  la  foi  qui  ne  sera  pas  en  cause. 

Depuis  1S87.  un  certain  nombre  d'exégètes  et  de 
critiques  catholiques,  prêtres  séculiers  ou  religieux, 
avaient  exprimé  publiquement,  avec  la  tolérance  de 
leurs  supéi  leurs  et  sans  avoir  été,  avant  1900,  blâmés 
ou  repris  par  l'autorité  ecclésiastique,  que  la  thèse 
de  l'authenticité  mosaïque  du  Pentateuque  ne  s'impo- 
sait pas  à  la  foi  des  chrétiens  et  pouvait  être  librement 
débattue  ou  contestée,  parce  qu'elle  ne  faisait  pas  partie 
de  la  révélation  divine.  A  leur  sentiment,  l'origine 
mosaïque  du  Pentateuque  n'est  pas  formellement 
révélée  dans  l'Écriture  ni  enseignée  par  l'Eglise  comme 
certaine. 

Les  théologiens  qui  n'admettent  pas  ce  sentiment  ne 
sont  pas  cependant  d'accord  entre  eux.  Pour  les  uns. 
l'authenticité  mosaïque  du  Pentateuque,  bien  que  n'étant 
pas  explicitement  révélée,  l'est  implicitement  et  for- 
mellement, exprimée  qu'elle  est  dans  la  révélation  en 
termes  équivalents,  puisqu'elle  se  tire  des  formules  ré- 
vélées par  simple  explication  et  sans  qu'il  soit  besoin  de 
recourir  à  une  déduction  proprement  dite.  La  négation 
de  cette  vérité  serait  donc  une  erreur,  et  la  contradic- 
toire serait  erronea  in  pile.  Méchineau,  L'origine  mo- 
saïque du  Pentateuque,  p.  31.  Pour  les  autres,  l'authen- 
ticité mosaïque  du  Pentateuque  est  seulement  une 
vérité  certaine  (theologice  certa),  parce  qu'elle  se 
déduit  nécessairement  des  textes  bibliques  et  parce 
que  la  tradition  catholique  appuie  et  confirme  cette 
conclusion.  Elle  n'est  énoncée  dans  la  révélation  que 
ellement;  on  l'en  tire  par  déduction  ou  raisonne- 
ment. Par  suite,  conformément  à  l'enseignement 
commun  des  théologiens,  elle  ne  s'imposerait  pas  à 
l'adhésion  comme  de  foi  divine.  Mais  rattachée  à  la 
révélation,  enseignée  par  l'Église,  dans  son  magistère 
ordinaire,  elle  est  certaine  théologiquement,  et  sa 
négation  pourrait  être  dite  erronée,  ou  au  moins 
téméraire  ;  elle  ne  serait  pas  hérétique,  puisqu'elle 
n'a  pas  été  jusqu'ici  condamnée  expressément  comme 
telle  >ar  1  Église.  .1.  Brucker,  Authenticité  des  livres 
de  Moïse,  dans  les  Études,  mars  1888,  p.  327.  Cf.  ibid., 
janvier  IS97,  p.  122-123:  E.  .Mangenot,  L'authenticité 
mosaïque  du  Pentateuque,  p.  207-310. 

IV.  Texte.  —  Le  texte  original  de  Moïse  ne  nous  est 
pas  parvenu  dans  toute  sa  pureté  première,  il  a  subi  des 
retouches  de  diverse  nature.  Voir  plus  haut.  col.  63. 
La  seule  comparaison  du  texte  massorétique  avec  le 
Pentateuque  samaritain  et  la  version  des  Septante  suf- 
firait à  le  démontrer.  On  sait  que  ces  trois  recensions 
présentent  entre  elles  des  différences  nombreuses.  Les 
plus  saillantes  concernent  les  chiffres  de  l'âge  des  pa- 
triarches antédiluviens,  Gen.,  v,  1-31,  et  postdiluviens, 


Gen.j  xi,  10-26;  elles  ont  donné  lieu  à  trois  chronolo- 
gies différentes  de  l'histoire  primitive,  sans  qu'il  soit 
possible  de  déterminer  laquelle  des  trois  se  rapproche 
le  plus  de  l'original.  Voir  Chronologie,  t.  n,  col.  721- 
724.  Mais  les  nombres  ne  sont  pas  seuls  divergents  dans 
ces  trois  recensions.  Le  Pentateuque  samaritain  con- 
tient, en  outre,  des  additions  et  des  modifications,  dont 
les  trois  plus  célèbres  substituent  Garizirn  à  Hébal. 
Exod.,  xx,  17;  v,  21:  xxvn,  4.  5.  Voir  t.  m,  col.  461; 
t.  iv,  col.  127ii,  1274.  Or,  on  ne  peut  décider  si  ce  sont 
des  interpolations  faites  par  les  Samaritains  dans  l'in- 
tention d'autoriser  le  culte  célébré  à  leur  temple  de 
Garizirn,  ou  si  les  Juifs  auraient  changé  Garizim  en 
Hébal,  Dent.,  xi,  29,  dans  un  but  polémique.  B.  Kenni- 
eott,  The  State  of  the  printed  hebrevi  Text  of  the 
t)ld  Testament  considered,  1753-1759,  t.  i,  p.  21-117,  a 
donné  la  préférence  au  texte  samaritain;  mais  Gesenius, 
De  Penlateuchi  samaritani  origine,  indole,  auclorï- 
tate,  Halle,  1815,  le  croyait  plus  altéré  que  le  texte  hé- 
breu et  rejetait  en  bloc  toutes  ses  leçons  propres. 
Cependant  le  Pentateuque  samaritain  a  probablement 
quelques  bonnes  leçons.  Il  a,  du  reste,  des  rapports 
étroits  avec  le  texte  grec  des  Septante  et  tous  deux 
représentent  certainement  un  texte  hébreu  ancien  et 
différent  du  texte  massorétique;  ce  qui  s'expliquerait 
>i  le  texte  samaritain  ne  remontait  guère  plus  haut 
que  l'époque  d'Alexandre  le  Grand,  quand  les  Samari- 
tains, ayant  rompu  définitivement  avec  les  Juifs,  orga- 
nisèrent leur  culte  sur  le  mont  Garizim.  Voir  Garizim, 
t.  m,  col.  111-112.  Cf.  L.  Gautier,  Introduction,  t.  H, 
p.  556-557.  De  son  côté,  la  version  des  Septante,  com- 
parativement au  texte  massorétique,  présente  des  addi- 
tions, des  omissions,  des  transpositions,  des  lectures 
différentes,  qui  ne  sont  pas  toutes  le  fait  des  traducteurs, 
mais  qui  proviennent  souvent  de  l'état  antérieur  du 
texte  hébreu.  Voir  Swete,  An  Introduction  to  the  Old 
Testament  in  Greek,  Cambridge,  1900.  p.  234-236,  243, 
142,  'i  46.  Enfin,  le  texte  massorétique,  quoique  tradi- 
tionnel dans  sa  vocalisation,  ne  représente  pas  absolu- 
ment l'original;  il  a  reproduit,  du  reste,  dans  les  keri 
un  certain  nombre  de  variantes  antérieures,  voir  t.  IV, 
col.  856,  858,  et  il  conserve  dans  sa  teneur  actuelle  des 
indices  d'altération,  par  exemple,  Deut.,  x,6,  voir  Mu- 
sera, ibid.,  col.  1318;  Exod.,  xi.  3.  et  des  transpositions, 
comme  Exod..  xxx,  1-10,  qui  devrait  être  plutôt  après 
Exod.,  xxvi,  35.  De  cet  état  des  trois  recensions,  il  faut 
conclure  que  le  texte  du  Pentateuque  a  subi,  au  cours 
séculaire  de  sa  transmission,  des  retouches  et  des  altéra- 
tions. Or,  celles-ci  ne  semblent  pas  être  exclusivement 
l'œuvre  des  copistes,  mais  parfois  de  reviseurs.  Nous 
n'avons  donc  plus  le  texte  du  Pentateuque  dans  sa  pureté 
complète;  il  nous  est  parvenu  remanié,  retouché  dans 
des  détails  qui,  sans  atteindre  à  la  substance  du  fond, 
permettent  aux  critiques  modernes  de  reconnaître  dans 
le  texte  actuel  des  gloses  et  des  modifications.  P.  Mar- 
tin, Introduction  à  la  critique  générale  de  l'A.  T., 
Paris,  1886-1887  (lithog.),  t.  i,  p.  17-129;  J.  Brucker, 
Authenticité  des  livres  de  Moïse,  dans  les  Etudes, 
1888,  t.  xlix,  p.  332-33S. 

V.  Style.  —  Le  style  du  Pentateuque.  nous  l'avons 
déjà  remarqué,  n'est  pas  uniforme,  et  il  n'y  a  en  cela 
rien  de  surprenant  si.  comme  il  est  légitime  de  le  sup- 
poser, Moïse  a  reproduit  des  documents  antérieurs  et 
a  pu  confier  à  des  secrétaires  la  rédaction  d'une  partie 
de  son  œuvre. 

On  peut  distinguer  dans  ce  livre,  sous  le  rapport  du 
style,  trois  sortes  de  passages.  Il  y  a  d'abord  des 
tableaux  statistiques  et  des  recueils  de  lois,  qui  n'exigent 
que  de  l'exactitude  et  de  la  précision.  On  ne  reprochera 
pas  à  l'écrivain  la  sécheresse  des  généalogies,  de  la 
table  ethnographique,  de  la  liste  des  stations  du  désert, 
et  autres  morceaux  analogues.  Pareillement,  les  lois 
étaient  formulées  en  termes  juridiques,  clairs,  précis, 


111 


PENTATEUQUE 


112 


et  codifiées  dans  des  cadres  ressemblants,  sinon  iden- 
tiques. Le  législateur  n'a  d'autre  souci  que  la  précision 
et  la  clarté. 

Le  narrateur  est  ordinairement  simple  et  naturel. 
mais  il  a  aussi  les  qualités  du  conteur  oriental.  Les 
récits  sont  vivants  et  saisissants.  11  excelle  à  peindre 
le  caractère  des  personnages;  il  exprime  leurs  senti- 
i ■  i •  nts  intimes,  multiplie  les  dialogues.  Il  aime  la 
mise  en  scène,  et  il  décrit  les  événements  en  quelques 
traits  bien  frappés.  Son  histoire  est  le  plus  souvent 
anecdotique.  Elle  renferme  de  fort  belles  pages.  Sans 
parler  du  récit  delà  création,  qui  a  une  forme  spéciale, 
on  a  admiré  de  tout  temps  l'achat  du  champ  d'Héraor 
par  Abraham  comme  une  scène  pittoresque  des  mœurs 
patriarcales,  l'histoire  si  émouvante  de  Joseph  et  en 
particulier  sa  reconnaissance  par  ses  frères,  la  narra- 
tion dramatisée  des  plaies  d'Egypte  et  de  la  délivrance 
des  Israélites, 

Le  Deutéronome  appartient  à  un  genre  littérairi 
spécial.  C'est  un  corps  de  lois,  exposé  et  expliqué 
dans  une  série  de  discours.  Si  la  législation  a  sa  forme 
particulière,  les  exhortations  dans  lesquelles  elle  est 
encadrée  ont  leur  style  propre.  L'orateur  ne  se  borne 
pas  à  rapporter  les  prescriptions  législatives;  il  veut 
surtout  porter  ses  auditeurs  à  les  pratiquer.  Il  les 
justifie  donc  et  y  joint  souvent  les  motifs  de  les  obser- 
ver. C'est  un  prédicateur  et  un  homéliste.  Il  expose 
longuement  son  sujet,  en  phrases  pleines  et  riches, 
en  périodes  bien  remplies.  Il  aime  à  revenir  sur  les 
recommandations  qu'il  répète,  elles  mêmes  manières 
de  dire  se  pressent  constamment  sur  ses  lèvres.  Les 
formules  spécial.-,  très  caractéristiques,  qui  font  partie 
de  ce  que  les  critiques  nomment  le  style  deutérono- 
miste,  reparaissent  continuellement,  et  constituentdes 
sortes  de  refrains.  Ses  longues  périodes  ne  s'ach.  venl 
pas  toujours,  et  on  a  signalé  des  anacoluthes,  vi.  10-12; 
VIII,  11-17;  IX,  9-11;  xi,  '2-7;  XXIV,  l-i.  .Moïse  ici  a  le 
ton  du  prédicateur.  Ses  qualités  dominantes  sont  l'onc- 
tion et  la  persuasion.  Quoiqu'il  ne  manque  pas  d'éni  r- 
-i  il  n'a  pas  la  véhémence  des  prophètes.  Il  s'exprime 
avec  clarté  pour  être  compris  du  peuple  auquel  il 
s'adresse.  Il  s'insinue  doucement  d.ms  l'esprit  de  ses 
auditeurs,  el  il  ne  se  lasse  pas  d'insister  sur  l'observa- 
tion fidèle  de  la  loi  divine.  L'abondance  de  son 
exhortation  tourne  parfois  en  longueurs.  Il  remonte 
en  arrière  et  répète  ce  qu'il  vient  de  dire. 
VI.   Prophéties   messianiques.   —    Le   Pentateuque 

contient  les  plus  anciennes  prophéties  messianiques. 
—  1"  Le  protévangile.  —  La  première  a  été  promulguée 
au  paradis  terrestre  pai  Dieu  lui-même  à  Adam  et  à 
après  leur  péché.  Elle  est  renfermée  dans  la  mys- 
térieuse sentence,  prononcée  contre  le  serpent  séduc- 
eur  :  o  J'établirai  une  inimitié  entre  toi  et  la  femme, 
entre  ta  descendance  el  sa  descendance;  celle-ci  te  bri- 
sera la  tète  et  tu  lui  briseras  le  talon.  Gen.,  m,  15. 
Ces  paroles  ne  s'adressent  pas  au  serpent  et  elles  ne 
ignifienl  pas  l'aversion  naturelle,  instinctive,  des 
hommes  pour  les  serpents.  Le  serpent  avait  servi 
d'instrument  à  un  être  intelligent  et  méchant,  à  un 
esprit  marnais  qui  l'avait  fait  parler  avec  perfidie  el 
perversité-.  Les  .luifs  ont  reconnu  en  lui  le  démon  ten- 
tateur de  la  femme.  Sap.,  u.  24;  Apoc,  \n.  9;  \\,  2; 
lleb..  u,  14.  Voir  i.  u.  col.  1368,  2119  \ussi  la  sen- 
tence divine  s'i  ti  ad  '  Me  plus  loin  que  1"  serpent  visible 
el  atteint-elle  directemi  ni  l'espril  tentateur,  Un  jour, 
Dieu  étal. lira  entre  lui  .i  la  femme  une  inimitié  mo- 
rale, telle  qu'elle  peul  exister  entre  deux  êtres  raison- 
nables ennemis  l'un  de  l'autre,  Num.,  xxxv.  21,  22, 
entre  Dieu  etl'hommi     I  \w.  15;  xxxv,  5.  Cette 

inimitié,  qui  diffère  de  l'horreur  naturelle  que  les 
hommes  éprouvent  pour  les  serpents,  régnera  entre  le 
démon  et  la  femme,  non  pas  le  sexe  féminin  en  géné- 
ral, quoique  l'expression  hébraïque,  --'s-,  avec  l'ar- 


ticle, puisse  avoir  ce  sens,  mais  une  femme  déterminée, 
et  d'après  tout  le  récit  biblique,  dans  lequel  le  mot 
femme  précédé  de  l'article  désigne  constamment  Eve, 
la  femme  séduite  par  le  serpent,  plutôt  qu'une  femme 
future,  présente  seulement  à  la  pensée  divine,  une 
femme  unique  en  son  genre  et  très  excellente,  la  mère 
du  Messie.  La  même  inimitié.  Dieu  l'établira  aussi 
entre  la  descendance  du  serpent  et  la  descendance  de 
la  femme.  Puisqu'il  s'agit  d'une  inimitié  morale,  on 
d.jit  exclure  la  postérité  du  serpent.  Appliquée  au 
démon,  l'expression  «  descendance  »  est  nécessaire- 
ment métaphorique.  Elle  désigne  ou  les  esprits  mau- 
vais,  donl  Satan  est  le  chef,  ou  les  hommes  pervers, 
qui  se  sont  mis  sous  l'empire  du  démon.  Mat  th.,  xxm, 
33;  Joa.,  VIII,  44.  Si  telle  est  la  descendance  du  ser- 
pent séducteur,  la  rigueur  du  parallélisme  semble 
exiger  que  la  i  descendance  »  de  la  femme  ait  aussi  un 
sens  collectif  et  désigne  la  postérité  de  la  femme,  qui 
sera  en  haine  et  en  lutte  avec  la  lignée  du  serpent,  le 
genre  humain,  qui  sera  un  jour  victorieux  du  démon. 
Mais  plusieurs  exégètes,  s'appuyant  sur  l'autorité  des 
Pères  qui  ont  reconnu  dans  la  femme,  figurée  par  I  ve, 
la  mère  du  Messie.  S.  Justin,  Dial.  cum  Tryph.,  100, 

I.  vi.  col.  709-712;  s.  Irénée,  '.'..»/.  fta?i\,  111.  xxm. 
7;  V.  xix.  1;  c.  xxi.  1.  t.  vu.  col.  964,  1175-1176. 
1179;  S.  Cyprien,  Testim.  adv.  Judseos,  11.  îx,  t.  iv. 
col.  704;  S.  Épiphane.  Hœr.,  lxxvii,  18,  19,  t.  Xl.ll, 
col.  729;  S.  Léon  le  Grand.  Serai.,  xxil,  t.  i.iv, 
col.  729;  pseudo-Jérôme,  Epist.  vi,  a.'  amicum  segro- 
Inm  de   viro   perfecto,  t.  xxx,   col.  8-2-83:  S.  Isidore 

i  Péluse,  Epist.,  1.  I,  epist.  ccccxxvi,  t.  i.xxvni, 
col.   il7;  s.   Fulbert  d         ai       -.  Set  m.  1 1  .  de  nat. 

II.  V..  t.  cxi.i.  col.  320-321;  S.  Bernard,  Hom.,  H, 
super  Missus  est,  i.  t.  ci.xxxiit.  col.  63,  l'entendent 
d'un  «  rejeton  »  unique,  le  Messie.  Ils  observent  que, 
lorsque  ïTt  présente  un  sens  collectif,  le  pronom  qui 

s'j  rapporte  se  met  régulièrement  au  pluriel,  lien.,  xv, 
m  8,  9,  etc.  On  ne  signale  que  trois  exceptions 
i  cette  règle.  Gen.,  xvi,  10;  xvu,  17;  xxiv,  60.  Or  ici  le 
pronom  est  au  singulier.  Le  nom  si-nilie  donc  un  re- 
jeton en  particulier,  sens  qu'il  a  Gen.,   IV,  25  :  Il 

mi.  12.  13;  I  Par.,  xvu,  11.  12. 

Le  résultat  final  de  cette  inimitié  sera  une  lutte, 
diversement  décrite  dans  la  Vulgate  et  le  texte  hébreu. 
Tandis  que  la  Vulgate.  après  les  Septante,  attribue  la 
\ei, .ire  sur  le  démon  à  la  femme  :  Ipsa  conXeret  caput 
luum,  le  texte  original  la  rapporte  à  sa  descendance 
postérité  ou  rejeton).  La  leçon  latine  est  fautive  et  on 
I  explique  souvent  par  une  erreur  de  copie.  Tous  les 
manuscrits  hébreux  sauf  trois,  les  anciennes  versions, 
tous  les  l'eus  grecs  et  la  plupart  des  latins  ont  le  mas- 
culin ipse.  le  premier  verbe  hébreu  est  d'ailleurs  à  la 

troisième  lier-. une'  ou  masculin,  et  le  pronom  -nflixo  du 
second  verbe  est  aussi  masculin.  Le  pronom  sin  se  rap- 
porte donc  à  •,— t  et  non  à  ton.  En  outre,  dans  le  texte 

lui. l'eu,  la  lutte  est  exprimé.'  par  le  même  verbe,  ré- 
pété dans  les  deux  membres  de  phrase.  La  signi- 
fication de  ce  verbe  --_•  a  ité  discutée.  Il  ne  se  rencontre 
qu'ici  et  Job,  ix.  7;  Ps.  cxxxix,  11.  On  le  traduit  ou 
Lien  ■  briser,  écraser  s,  ou  bien  ■  dresser  des  embûches, 

observer,  épier,  Chercher  à  atteindre  ».  Les  Septante. 
les  Pères  grecs  qui  ont  cité  leur  version  et  Onkelos  ont 
adopté  la  seconde  interprétation,  géni  ralement  ae. 
l  o  les  critiques  modernes.  Quoique  saint  Jérôme,  Li- 
ber quiest.  hebr.  in  Genesim,  t.  xxn.  col.  913,  pi 
la  signification  :  conterere,  il  a  traduit  le  second  verbe 
par  insidiaberis.  Suivant  cette  interprétation,  les  com- 
battants s'observent,  s'épient  et  s'apprêtent  a  s  attaqu  r 
conformément  à  leur  nature.  La  race  de  la  femme  cherche 
à  écraser  la  tête  du  serpent,  car  c'est  lui,  et  non  sa  des- 
cendance,  qui  est  attaqué',  el  le  serpent,  qui  rampe  sur 
la  terre,  vise  le  talon  de  l'homme  et  cherche  à  le  mordre. 


113 


PENTATEUQUE 


114 


Suivant  la  première  interprétation,  la  descendance  de  la 
femme  brisera  donc   la  tète  du  serpent  et  celui-ci  lui 
mordra  le  talon.  L'expression  est  évidemment  métapho- 
rique.   Dans   l'Écriture,  briser    la   tête   de   quelqu'un 
signifie  briser  ses  forces,  sa  puissance,  le  rendre  inca- 
pable de  nuire,  le  vaincre.  Amos,  il,  7;  Ps.  lxvii,  22; 
ci.x,  6.  La  postérité  de  la  femme  brisera  donc  la  puis- 
sance de  Satan  et  détruira  son  empire  tyrannique.  La 
métaphore  est  continuée   dans  la  suite  du  verset.  Le 
serpent,  écrasé  par  le  pied  de  son  adversaire,   se  re- 
tournera  contre    lui    et    l'attaquera    au    seul    endroit 
qu'il  puisse  atteindre  encore,  au  talon  qu'il  cherchera 
à  atteindre  par  ses  morsures  venimeuses.  Dans  les  suites 
de  la  lutte,  il  y  a  toute  la  différence  d'un  talon  blessé  et 
d'une  tète  broyée.  Les  commentateurs  catholiques,  qui 
reconnaissent  dans  la  descendance  de  la  femme  un  re- 
jeton spécial,  qui  est  le  Messie,  voient  dans  l'écrasement 
de  la  tète  du  serpent  la  victoire  définitive  remportée  par 
le  Fils  divin  de  la  Vierge  Marie,  qui,  par  sa  mort  sur  la 
croix,  a  véritablement  brisé  la  tète  du  serpent  infernal. 
Joa.,  xn,  31  ;  Col.,  Il,  15;  I  Joa.,  m,  8,  et  dans  la  mor- 
sure du  serpent  au  talon  du  Christ,  la  mort  sur  la  croix, 
œuvre    des    suppùts   de    Satan,   mais   cette  morsure, 
quoique  mortelle,  est  suivie  de  la  résurrection  du  vain- 
queurdu  démon.  Cal  met,  Commentairelittéralsurla  Ge- 
nèse, S" édit.,  Paris,  1721.  t.  la,  p.  39-40;  Patrizi,  Bibli- 
carum  quseslionum decas,  Rome,  1877.  p.  47-53;  Id..  De 
n--.  hoc  est  de  immaeulata  Maria  Virgine  a  Deo  prsc- 
dicta,  Rome,  1S53;  C.  Passaglia,  De  immaeulata  Dei- 
parœ  conceptu,  Rome,  1853,  t.  n,  p.  812-954;  Mo'  Gilly, 
d'introduction,   .N'imes,   1867,  t.   H,  p.  345-356; 
Msr  Lamy,  Comment,  in  Genesim,  Malines,  1883,  t.  i, 
p.  235-236;  F.  Vigouroux,  Manuel   biblique,    12°  édit., 
Paris,  1906,  t.  i,  p.  567-571;  Fillion,  La  sainte  Bible, 
Paris,  1888.   t.   i,  p.  32;  E.  Mangenot,  Les  prophéties 
ianiques.  Le  protévangile,  dans  Le  prêtre,  Arras, 
1894-1895,  t.  vi,  p.  802-808.  Pour  eux,  le  protévangile 
est  messianique  au  sens  littéral.  Pour  d'autres,  il   ne 
l'est  qu'au   sens  spirituel;   la   prophétie  vise  directe- 
ment  Eve  et  sa  descendance,  qui  sont  des  figures  du 
Messie  et  de  sa  mère,  vainqueurs  du  démon.  Les  targums 
d'Onkelos  et  de  Jérusalem  avaient  compris  le  sens  mes- 
sianique général  de  cette  prophétie.  Clément  d'Alexan- 
drie, Cohort.  ad  génies,  i,  t.  vin,  col.  64,  y  avait  vu 
seulement  l'annonce  prophétique  du  salut.  Saint  Chry- 
sostome,   Hom.,  xvn.  in    Gen..  n.  7,  t.  lui,  col.  143; 
saint  Augustin,  De  Genesi  contra   manichœbs,  1.    II. 
c.  xviii,  i.  xxxiv,  col.  210;  saint  Jérôme,  Liber  quœst. 
hebr.  in  lien.,  t.  xxin,  col.  943;  saint  Éphrem,  Opéra 
syriaea,    Rome,    1732,  t.  I,   p.    135;   saint  Grégoire  le 
Grand,  Moral,  in  Job,  I.  I,  c.  xxxvi,  n.  53,  t.  lxxv, 
col.  552,  l'ont  entendue  de  la  lutte  des  hommes  avec  le 
serpent  infernal  et  de  leur  triomphe  par  leurs  bonnes 
œuvres  sur  les  perverses  suggestions  de   Satan.  Cor- 
neille de   la  Pierre,  Comment,   in    Gen.,   Lyon,  1732, 
p.  66-67;  Hengstenberg,  Christologie  des  A.  T.,  Berlin, 
1829,  l.  i,  p.  26-46;  Reinke,  Beitràge  :ur   Erklârung 
I      7'.,    Giessen,    1857,   t.  n,   p.   272   sq.;   Corluy, 
Spicilegiuni    dogmatico-biblicum,    Gand,    1884,    t.   i, 
p.  847-372;  card.  Meignan,  De  VÉde>i  à  Moïse,  Paris, 
1811.-,    ,,.    1 0." - 1  '.  1-2  ;    Crelier.   La     Genèse,    Paris,    1889, 
\>    5  4-56;  F.  de  Hummelauer,  Comment,  in  Genesim, 
Paris,  1895,  p.  159-167,  ont  vu  dans  Eve  et  sa  postérité 
les  ligures  du  Messie  et  de  sa  mère.  Que  la  signification 
messianique  du  protévangile  soit  littérale  ou  spirituelle 
seulement,  le  trait  initial  qui  commence  à  donner  la 
physionomie  du  Messie,  c'est  qu'il  sera  un  fils  d'Eve,  un 
descendant  de  la  femme  coupable,  un  membre  de  cette 
humanité  qu'il  arrachera  à  l'empire  du  démon. 

2°  La  bénédiction  de  Sem.  Gen.,  ix,  26,  27.  —  Après 
avoir  maudit  Chain,  son  fils  irrespectueux,  dans  la 
personne  de  Chanaan,  voir  t.  n,col.  513-514,  532,  Noé 
bénit  Sem  et  Japheth,  ses  lils  respectueux.  La  béné- 


diction de  Sem  est  exprimée  sous  forme  optative  : 
«  Béni  soit  Jéhovah,  l'Élohim  de  Sem  !  Que  Chanaan 
soit  son  esclave!  »  Jéhovah,  le  Dieu  de  la  révélation, 
de  la  grâce  et  du  salut,  est  appelé  l'Élohim  de  Sem. 
C'est  la  première  fois  que,  dans  l'Écriture,  Jého- 
vah est  dit  l'Élohim  d'un  homme.  Plus  tard,  il  se 
nommera  lui-même  l'Élohim  d'Abraham,  d'Isaac  et  de 
Jacob.  Gen..  xxvm,  13;  Exod.,  m,  6.  Cette  dénomination 
exprime  les  rapports  tout  particuliers  de  Dieu  avec  ces 
patriarches  :  il  est  le  Dieu  de  leur  famille;  il  a  con- 
tracté alliance  perpétuelle  avec  eux  et  il  leur  réserve  à 
eux  et  à  leur  postérité  des  bénédictions  spéciales.  Or, 
ces  bénédictions  ne  sont  qu'une  conséquence  de  celle 
de  Sem.  Le  fait  .que  Jéhovah  est  dit  l'Élohim  de  Sem, 
signifie  donc  que  ce  fils  de  Noé  aura  comme  apanage 
d'avoir  avec  Dieu  des  relations  spéciales  et  de  conserver 
la  vraie  religion.  De  sa  race  viendra  le  salut  et  le  ré- 
dempteur promis  à  l'humanité  pécheresse. 

3°  Promesses  faites  aux  patriarches  Abraham,  Isaac 
et  Jacob.  —  Deux  promesses  faites  par  Dieu  à  Abraham 
et  renouvelées  par  lui  à  Isaac  et  à  Jacob,  avaient  une 
portée  messianique.  —  1.  Promesse  d'une  nombreuse 
postérité.  —  Après  avoir  ordonné  à  Abraham  d'émigrer 
au  pays  de  Chanaan,  Dieu  promit  au  patriarche  de  faire 
sortir  de  lui  un  grand  peuple.  Gen.,  XII,  2.  Les  réitéra- 
tions de  cette  promesse  divine  en  ont  précisé  le  sens, 
puisque  la  postérité  d'Abraham  devait  être  aussi  nom- 
breuse que  la  poussière  de  la  terre,  Gen.,  XIII,  16,  et 
les  étoiles  du  ciel.  Gen.,  xv,  5.  Aussi  le  nom  d'Abram 
est-il  changé  par  Dieu  en  celui  d'Abraham,  «  père  de 
la  multitude.  »  Dieu  rendra  le  patriarche  chef  de  nations 
et  fera  sortir  des  rois  de  lui..  Gen.,  xvn,  4-6.  Cette  nom- 
breuse postérité  lui  viendra  non  d'Ismaèl,  mais  d'Isaac, 
fils  de  Sara.  Gen.,  xvn,  16;  xvm,  10-15;  xxn,  17.  Cf.  Heb., 
xi,  12.  Cette  promesse  est  réitérée  presque  dans  les 
mêmes  termes  à  Isaac,  Gen.,  xxvi,  4,  et  à  Jacob,  Gen., 
xxvm,  14,  et  elle  a  été  réalisée  par  la  nombreuse  lignée 
d'Isaac.  Mais  plusieurs  Pères  ont  pensé  que  la  promesse 
divine  n'avait  pas  son  accomplissement  parfait,  si  l'on  ne 
considérait  pas  dans  la  postérité  d'Abraham,  sou  rejeton 
le  plus  illustre,  Jésus-Christ,  Mat  th.,  i,  1,  et  les  lils  qu'il 
lui  a  engendrés  par  la  foi.  Rom.,  iv,  16,  17.  Cf.  S.  Iré- 
née,  Conl.  hier.,  IV,  vu,  1,  2.  t.  vu,  col.  991-992; 
S.  Ambroise,  De  Abraham,  I,  m,  20-21,  t.  xiv, 
col.  428;  S.  Cyrille  d'Alexandrie,  Glapit,  in  Gen., 
III,  2,  t.  lxix,  col.  113;  Raban  Maur,  Comment,  in 
Gen..  n,  12,  17,  t.  cvn,  col.  533,  541;  Rupert,  De  Tri- 
nitale  et  operibus  ejus,  xv,  10,  18,  t.  cxlvii,  col.  375, 
383.  —  2.  Promesse  d'être  une  source  de  bénédictions. 
—  Elle  est  exprimée  dans  le  texte  hébreu  en  ces 
termes  :  «  Sois  bénédiction.  »  Gen.,  XII,  2.  L'impératif 
a  le  sens  du  futur.  Elle  est  expliquée  par  le  verset  sui- 
vant :  «  Je  bénirai  ceux  qui  te  béniront;  je  maudirai 
ceux  qui  te  maudiront;  et  toutes  les  familles  de  la  terre 
seront  bénies  en  toi.  »  Elle  s'est  réalisée  du  vivant  même 
d'Abraham  :  Lot,  Gen.,  xtv,  16,  Ismaël,  Gen.,  xvn,  20, 
sont  bénis  à  cause  de  lui;  Pharaon,  Gen.,  xn,  17,  et 
Abimélech,  Gen.,  xx,  7,  17,  ont  été  châtiés  par  Dieu  à 
son  occasion.  Elle  devait  enfin  être  universelle.  On  a 
voulu,  il  est  vrai,  la  restreindre  aux  tribus  ebananéennes 
et  aux  populations  voisines,  qui  étaient  en  relations 
avec  le  patriarche.  Mais  rien  ne  justifie  la  restriction,  et 
la  réitération  de  cette  promesse  n'a  fait  qu'accentuer  sa 
portée  universelle.  D'autre  part,  elle  ne  se  réduisait  pas 
à  des  bénédictions  temporelles.  Le  verbe  bdraq  est  em- 
ployé ici  à  la  forme  niphal  ou  passive.  Plusieurs 
commentateurs,  après  saint  Cbrysostome,  In  Gen., 
hom.  xxxi,  n.  4,  t.  lui,  col.  288,  l'entendent  comme 
s'il  était  à  la  forme  hithpahel  ou  réfléchie,  nnployée 
Gen.,  xxn,  18;  xxvi,  4  :  «  Toutes  les  tribus  de  la  terre 
désireront  pour  elles  ton  sort  heureux.  »  Les  Septante, 
les  targums,  la  version  syriaque,  la  Vulgate,  les  Pères 
grecs  et  latins  maintiennent  le  sens  passif,  cité  par- 


115 


PENTATEUOUE 


1IG 


saint  Pierre,  Act.,  m,  25,  et  par  saint  Paul.  Gai.,  m,  8. 
La  préposition  :,  unie  à  la  forme  passive,  désigne  l'au- 
teur ou  l'instrument  et  signifie  ici  en  toi  ou  par  toi,  de 
sorte  que  la  bénédiction  divine,  qui  se  répandra  sur 
les  familles  de  la  terre  sera  en  la  personne  d'Abraham 
ou  viendra  par  son  intermédiaire.  Paint  Paul  a  expli- 
qué le  sens  de  cette  promesse.  Gai.,  m,  7  9.  Abraham 
ayant  été  justifié  par  la  l"i,  Gen.,  xv,  G;  Rom.,  IV,  3; 
.lac,  h,  23,  tous  les  croyants  sont  ses  fils.  Rom.,  rv,  1 1, 
12.  Or  l'auteur  de  l'Écriture,  décidant  de  justifier  les 
gentils  par  la  foi,  a  annoncé  d'avance  à  Abraham  que 
toutes  les  nations  seront  bénies  en  lui,  si  elles  ont  la 
foi  et  bien  qu'elles  ne  pratiquent  pas  la  loi  mosaïque. 
11  en  résulte  donc  que  tous  les  gentils,  qui  sont  fils 
d'Abraham  parce  qu'ils  partagent  sa  foi,  auront  part  à 
sa  bénédiction.  Cf.  .1.  Boehmer,  Das  biblische  «  1m 
Namen  »,  Giessen,  1898,  p.  50.  Le  P.  Cornely,  Com- 
ment.  in  Epist.  ad  L'or,  alteram  et  ad  Gai.,  Paris, 
1892,  p.  i80,  l'étend  à  tout  le  salut  messianique.  Or, 
cette  bénédiction  les  gentils  la  recevront  par  Abraham 
el  le  Christ  son  rejeton. 

i-  La  bénédiction  de  Jacob  mourant  à  Juda.  Gen., 
Xl.ix,  8-10.  —  Elle  est  certainement  dans  la  bouche  de 
Jacob  une  prophétie  en  même  temps  qu'un  testament. 
Juda  obtient  la  prééminence,  refusée  à  Ruben.  à  Si- 
méon  el  à  Lévi,  ses  frères  aines,  à  cause  de  leurs 
fautes.  Voir  t.  m,  col.  1073;  t.  iv,  col.  201.  Le  premier 
en  Israël,  il  aura  gloire,  force  et  souveraineté.  11  don- 
nera des  rois  à  son  peuple  à  partir  de  David.  «  Le 
sceptre  ne  sortira  pas  de  Juda,  ni  le  bâton  de  com- 
mandement d'entre  ses  pieds,  jusqu'à  ce  que  vienne 
o  celui  auquel  il  appartient  »,  à  qui  est  (due)  l'obéissance 
1,1  peuples!  •  v.  10.  La  première  partie  du  verset  est 
claire.  Il  s'agit  du  bâton  de  commandement  et  du  bâton 
de  justice,  qui  sonl  les  symboles  de  l'autorité  civile  el 
judiciaire  de  la  tribu  de  Juda.  Les  Égyptiens  et  les  Assy- 
riens avaient  de  ces  long  bâtons  entre  les  pieds.  Voir 
t.  i,  col.  1510-1512.  Seule,  la  seconde  partie  du  verset 
est  obscure,  au  moins  dans  le  I.  .1,  massorétiqne.  La 
leçon  ri-'-;-.  Silo,  n'a  aucune  signification  pour  la 
lnl'"  de  Juda,  qui  ne  s'est  jamais  établie  en  ce  lieu. 
Voir  Sun.  Ce  n'est  que  par  pure  conjecture  qu'on  a 
substitué  à  ce  nom  celui  de  Salem,  qu'aucun  texte  n'a 
conservé'.  D'ailleurs,  la  liaison  locale  avec  le  premier 
membre  de  la  phrase  n'a  pas  de  sens;  on  ne  compren- 
drait guère  que  le  sceptre  que  Juda  tient  entre  ses 
pieds  n'en  m, rie  pas  jusqu'à  ce  qu'il  soit  arrivé  en  un 
heu,  puisqu'il  est  an  repos  et  pas  en  marche.  Cette 
leçon,  entendue  dans  le  sens  de  «  paix  o,  ne  se  justifie 
guère  au  point  de  vue  philologique  et  elle  ne  s'harmo- 
"'•''  pas  avec  le  conteste,  car  Juda,  déjà  au  repos  après 
le  pillage,  v.  9,  ne  peut  pas  perdre  le  sceptre,  en  -  éta- 
blissant pacifiquement  sur  son  territoire,  Il  ne  reste- 
rait, si  l'on  maintient  ta  leçon  --■--,  qu'à  en  faire  un 
nom  symbolique  du  Messie,  signifiant  i  le  pacifique  », 
Mais   la   leçon  --\r.  appuyée  par  lOUS    les  anciens,  sauf 

par  saint  Jérôme,  parait  préférable.  On  la  traduit,  en 
sous-entendanl  s--  :  »  celui  à  qui  le  sceptre  appartient. 
Ézéchiel,  xxi,  32  (Vulgate,  27),  a  une  formule  analogue, 
quoique  plus  explicite.  Le  sens  esl  ainsi  1res  clair  : 
Juda  conserve  le  sceptre  jusqu'à  ce  que  vienne  celui  à 
qui  il  esl  destiné  el  à  qui  les  peuples  rendront  obéis- 
sance. Celui-là  est  vraisemblablement  un  rejeton  de 
Juda,  qui  prendra  le  sceptre,  conservé  longtemps  dans 
sa  tribu,  et  qui  régnera  sur  les  peuples.  Cette  pro- 
phétie  a  été  réalisée  par  l'empire  universel  de  Jésus- 
Christ;    le    Messie,    sorti    île  .Inila.  a    M'aiment  conquis 

l'obéissance  de  tous  les  peuples.  Voir  t.  m,  col.  1770- 
•1771.  Cf.  Reinke,  Die  Weissagung  Jacobs,  Munster, 
1849;  F.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  12  .'dit..  Pans. 
1906,  t.  i,  p.  733-739;  Patrizi,  Biblicarum  qusestionum 
deçà  .  p.  69-1 18;  A.  Lémann,  Le  sceptre  de  la  tribu  de 


Juda,  Lyon,  1S80;  Corluy,  Spicilegium  dogmatico- 
biblicum,  t.  i,  p.  456-474;  La  m  y,  dans  le  Dictionnaire 
apologétique  de  la  foi  catholique  de  Jaugey,  col.  1624- 
1649;  card.  Meignan,  De  l'Éden  à  Moïse,  p.   135-464; 

Lagrange,  La  prophétie  de  Jaeob,  dans  la  Revue  bi- 
blique, 1898,  I.  vu,  p.  530-531,  510;  F.  de  Hummelauer, 
Comment,  in  Gen.,  p.  592-597. 

5»  La  prophétie  de  Balaam.  —  Voir  tl  i,  col.  1392- 
1397.  Cf.  Patrizi,  Biblicarum  qusestionum  decas,  p.  118- 
160;  F.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  t.  I,  p.  775-779; 
card.  Meignan,  De  Moïse  à  David,  Paris,  1890.  p.  194- 
282. 

6°  Le  prophète  annoncé  par  Moïse.  Iteut.,  XVIII,  15- 
19.  —  Moïse,  parvenu  au  terme  de  sa  vie,  rappelle  aux 
Israélites  la  promesse  que  Dieu  lui  avait  faite  de  sus- 
citer du  milieu  d'eux  un  prophète  semblable  à  lui.  Ce 
prophète  ne  peut  être  Job,  comme  l'ont  prétendu 
quelques  rabbins,  ciJosué  qui  était  peut-être  déjà  institué 
comme  successeur  de  Moïse,  Num.,  xxvil,  18-23,  pour 
conduire  Israël,  mais  pas  pour  continuer  sa  mission 
prophétique.  Les  commentateurs  catholiques  se  sont 
partagés  en  deux  camps  dans  l'interprétation  de  cet 
oracle  messianique.  Le  plus  grand  nombre  s'appuyant 
sur  la  tradition  juive  qui,  au  temps  de  Jésus,  recon- 
naissait dans  ce  prophète  le  Messie  lui-même,  Joa.,  I, 
21;  vi.  M  ;  vu.  40,  devant  annoncer  aux  hommes  toutes 
choses,  Joa.,  iv,  25;  cf.  Dent.,  xvm,  18,  prédit  par 
Moïse,  Joa.,  I,  45,  v.  i5,  16;  sur  l'interprétation  de 
saint  Pierre,  Act.,  m.  22,  23,  de  saint  Etienne,  Act.,  vn, 
37,  et  de  la  plupart  des  Pères,  l'ont  entendu  du  Me 
m  il  et  de  sa  mission  prophétique.  Patrizi,  Biblica 
qusestionum  decas,  p.  161-175;  F.  Vigouroux,  Manuel 
biblique,  t.  i,  p.  779;  Corluy,  Spicilegium  dogmatico- 
biblicum,  i.  i,  p.  147-455.  Mais,  à  partir  de  Nicolas  de 
Lyre,  un  autre  courant  s'est  produit,  qui  voit  dans  ce! 
oracle  l'annonce  prophétique  de  toute  la  série  des  pro- 
phètes d'Israël,  y  compris  le  Messie,  le  dernier  des 
prophètes  et  l'objet  principal  des  oracles  messianiques 
île  ses  devanciers.  Moïse,  en  ellet,  quand  il  prononça 
cet  oracle,  voulait  montrer  aux  Juifs  qu'ils  ne  devaient 
pas  consulter  les  devins,  puisque  Dieu  leur  avait  promis 
une  suite  continue  de  véritables  prophètes,  qui  leur 
feront  connaître  les  volontés  divines  cl  leur  annonce- 
ront toutes  choses.  Si  les  contemporains  de  Jésus  et 
ses  Apôtres  appliquent  cet  oracle  au  Messie  seul,  c'est 
que  la  série  des  prophètes  antérieurs,  qui  l'avaient 
préparé,  était  close;  c'est  que  le  Messie  était  vraiment 
le  dernier  des  prophètes,  dont  on  attendait  alor  I 
venue  prochaine.  Ael..  III,  22-26.  Corneille  de  la  Pierre, 

Comment,  in  lient.,  Lyon,  1732,  p.  764;  Calmet,  Coni 
mentaire  attend,  t.  i  b,  p.   197-498;  card.  Meignan, 

Ile   MoïSC   à    David,    p.    292-31.'!;    F.    de    Hun 

Comment,    ni    Deui        Paris.    1901,   p.  371-377.    Dans    les 

deux  interprétations,  le  sens  est  identique  :  le  Messie 
sera  »\\  prophète  israélite,  pareil  à  Moïse,  qui  annon- 
cera aux  hommes  toutes  les  volontés  divine  . 

VII.  Commentaires.  —  Ils  sont  très  nombreux;  nous 
n'indiquerons  que  les  principaux.  —  I  De  V époque 
patristique.  —  1.  Pères  grecs  et  syriens.  —  S.  llippo- 
lyte,  Fragmenta  in  Hexaemeron  (Gen.,  Num.),  t.  x, 
col.  583-606; dans DieGriechi  chen  christlichen Schrif- 
testeller,  Leipzig,  1897,  t.  i.  p.  51-119  (chaîne  arabe); 
Bonwetsch,  Die  georgisch  erhaltene  Schriften  von 
Hippolytus  :  lier  Segen  Jakobs,der  Segen  Moses,  etc., 
dans  Texte  und  Unlersuch.,  Leipzig,  1904,  t.  xi, 
l'ase.  I,  p.  1-78;  Origène,  Selecta  in  tienesim,  t.  mi. 
col.  91-1 15;  Homiliœ  in  Genesim,  ibid'.,  col.  145-262; 
Selecta  et  Homilim  in  Exod.,  Lev..  Num.  et  Dent 
ibid.,  col.  263-818;  Fragmenta,  I.  xvn.  col.  11-36 
s.  Basile,  Homilisein  Hexaemeron,  t.. xxix,  col.  3-208; 
s.  Grégoire  de  Nysse,  lu  Hexaemeron,  t.  vin,  col. 61- 
124;  De  hominis  opificio,  ibid.,  col.  124-297;  De  uita 
Uoysis,  ibid-,  col.  297-430;  S.  Jean  Cl-.rysostorne,  Homi- 


117 


PENTATEUQUE 


118 


lise  lxtii  in  Genesim,  t.  lui,  i.iv,  col.  23-580;  Saumonés 
a  in  Genesim,  t.  liy,  col.  581-630;  Sévérien  de  Cabales, 
Orationes  in  mundi  creationem,  t.  lvi,  col.  429-500; 
Homilia  de  serpente,  ibid.,  col.  499-516;  S.  Éphrem, 
Comment,  in  Pentateuchum,  dans  Opéra  syriaca,  t.  i, 
p.  1-115:  le  commentaire  qui  suit.  p.  116-295,  a  été  revu 
par  Jacques  d'Édesse  ;  S.  Cyrille  d'Alexandrie,  De  ado- 
ratione  in  spiritu,  t.  lxviii,  col.  133-1125;  Glaphyra, 
t.  lxix,  col.  13-677:  Théodore!,  Qusestiones  in  Gen., 
Exod.,  Lev.,  Kum.,  Deut.,  t.  lxxx.  col.  76-456;  Diodore 
de  Tarse,  Fragmenta  in  Gen.,  Exod.,  t.  i.xvi,  col.  633- 
648;  Procope  de  Gaza,  Comment,  in  Octaleuchum, 
I.  lxxxvii,  col.  21-992;  Photius.  Amphilochia,  t.  ci, 
col.  4S  sq.;  Nicéphore,  Catena  in  Octateuchum  et  li- 
bros  Regum,  Leipzig,  1772.  Sur  les  chaînes  grecques 
du  Pentateuque,  voir  Faulhaber,  Die  Katenenhand- 
schriflen  der  spanischen  Bibliotheken,  dans  Biblische 
Zeitschrift,  1903,  t.  i,  p.  151-159.  246-247. 

2.  Pères  latins.  —  S.  Ambroise,  In  Hexaemeron, 
t.  xiv,  col.  123-274;  De  paradiso  terreslri,  ibid., 
col.  275-314;  De  Gain  et  Abel,  ibid.,  col.  315-360;  De 
Noe  et  arca,  ibid.,  col.  361-416;  De  Abraham,  ibid., 
cri.  H9-500;  De  lsaac  et  anima,  ibid.,  col.  501-534; 
De  Joseph  patriarcha,  ibid.,  col.  641-672;  De  benedi- 
clionibus  patriarcharum,  ibid.. col.  673-694  ;  S.Jérôme, 
Liber  hebraicarum  quasstionum  in  Genesim,  t.  xxm, 
col.  935-1010;  s.  Augustin,  De  Genesi  contra  Mani- 
cheos  libri  duo,  t.  xxxiv,  col.  173-220;  De  Genesi  ad 
Utteram  in  liber,  ibid.,  col.  219-246;  1.  XII, 

ibid.,  col.  245-486;  Qusestionesin  Beptateuchum  (pour 
le  Pentateuque).  ibid.,  col.  517-776;  Paulin,  De  bene- 
dictionibus patriarcharum  libellas,  t.  xx,  col.  715-732; 
Rufin,  De  benedictionibus  partriarcharum  libri  </».'. 
t.  xxi,  col.  295-336;  pseudo-Jérôme,  De  benedictionibus 
Jacob  patriarcha;,  t.  xxm,  col.  1307-1318;  S.  Isidore  de 
Séville.  Qusestioa  s  in  V.  T.  Pentateuch.,  t.  lxxxiii, 
col.207-370;  S.  Patère, Expositio  Y.  et  X.  T..  t.  lxxxix, 
col.  685-784  (pour  le  Pentateuque);  S.  Bédé,  Hexaeme- 
ron, t.  SCI,  col.  9-190;  In  Pentateuchum  commentarii. 
ibid.,  col.  189-394;  De  tabernaculo  et  vasibus  ejus  et 
vestibus  sacris,  ibid..  col.  393-498;  pseudo-Béde,  De  sex 
dierumereatiane,  t.  xcm,  col.  207-234 ;  Qusestiones  su- 
per Pentateuchum,  ibid.,  col.  233-416;  Alouin,  Inter- 
rogationes  et  responsiones  in  Genesim,  t.  c,  col.  515- 
506;  Raban  Maur,  Comment,  in  Gen.,  t.  cvn,  col.  443- 
6/0:  Comment.  in  Exod.,  Lev.,  Num.  et  Deut.,  t.  cvm, 
col. 9-998;  Walafrid  Strabon,  Glossa  ordinaria,  t.  cxm, 
col.  67-506  (pour  le  Pentateuque);  Angelome,  Comment. 
i.,  t.  cxv.  col.  107-244. 

2  Du  moyen  âge.  —  S.  Bruno  d'Asti,  Expositio  i» 
Pentateuchum,  t.  ii.xiv,  col.  147-550;  Rupert  de  Deutz. 
De  SS.  Trinitale  et  operibus  ejus,  t.  clxvii,  col.  197- 
1000  tpour  le  Pentateuque)  ;  Hugues  de  Saint-Victor. 
Adnotationes  elttcidatoriœ  in  Pentateuchum,  t.  clxxv, 
col.  29-86;  Honorius  d'Autun,  Hexaemeron,  t.  clxxii. 
col.  253-266;  De  decem  plagis  jEgypti,  ibid.,  col.  265- 
270;  Abélard,  Expositio  in  Hexaemeron,  t.  CLXXVUI, 
col.  731-781;  Ernaud.  Tractatus  in  Hexaemeron, 
t.  ct.xxxix.  col.  1515-1570;  Hugues  de  Rouen,  Frag- 
Uexaemeron,  t.  excu,  col.  1247-1256;  Tho- 
mas, Pastilla  seu  expositio  aurea  in  librum  Geti 
(ifi-ea,  Paris,  1876;  t.  xxxi.  p.  1-194;  Hugues  de 
Saint-Cher,  Postilla,  Venise,  1588.  t.  i:  Nicolas  de  Lyre, 
Postilla,  Rome,  1471,  t.  i;  Tostat,  Opéra,  Venise,  1728, 
t.  i-iv;  Denys  le  chartreux,  Comment,  in  Pentateuchum, 
Opéra  omnia,  Montreuil,  1896,  1897,  t.  i,  II. 

ii  Des  temps  modernes.  —  1.  Protestants.  —  Sans 
parler  dis  commentaires  de  Luther  et  de  Mélanclithon 
sur  la  Genèse,  de  Calvin  sur  le  Pentateuque,  etc., 
notons  ceux  de  J.  Gerhart  (-j-1637),  In  Gen.,  Deut.; 
d'Abraham  Calov,  In  Gen.,  de  Jean  Drusius,  Louis  de 
Dieu,  Louis  Cappel,Coccéius  et  Grolius.  au  xvne  siècle: 
de  Jean-Henri  Michaelis,  Jean  Le  Clerc  (1710  et  1735;. 


de  Rosenmuller,  Scholia  in  Y.  T.,  dont  les  deux  pre- 
miers volumes  concernent  le  Pentateuque;  3e  .Mit.. 
1821, -1824;  Scholia  in  Y.  T.  in  compendium  redacta, 
1828,  t.  i  (Pentateuque).  Au  xix«  siècle,  le  Pentateuque 
a  été  souvent  commenté  par  les  protestants,  dont  plu- 
sieurs ont  entièrement  versé  dans  le  rationalisme.  —  En 
Allemagne,  Tuch,  Commentai-  ùber  die  Genesis,  Halle, 
1S38;  2e  édit.  par  Arnold  et  Merx,  1871;  Baumgarten, 
Theologischer  Commentai-  zum  A.  T.,  Kiel,  1843-1844, 
t.  i;  dans  le  Kurzgefasstes  exegetisches  Handbuch  zum 
A.  T.,  Leipzig,  A.  Knobel  avait  expliqué  la  Genèse, 
1852,  l'Exode  et  le  Lévitique,  1857,  les  Nombres,  le 
Deutéronome  et  Josué.  1861;  à  partir  de  la  3e  édition, 
la  Genèse  fut  refondue  par  A.  Dillmann  (6e  édit.,1892); 
trad.  anglaise,  2  vol.,  Edimbourg,  1897;  une  2e  édition 
de  l'Exode  et  du  Lévitique  fut  l'aile  par  le  même,  1850, 
et  une  3«  par  Ryssel,  1897;  une  2e  édition  des  Nombres, 
du  Deutéronome  et  de  Josué  par  Dillmann  parut  en 
18S6.  Le  Theologisch-homiletisches  Bibelwerk,  édité  à 
Bielefeld  et  Leipzig,  contient  un  commentaire  de  la 
Genèse,  par  Lange,  2e  édit.,  1877,  de  l'Exode,  du  Lévi- 
tique et  des  Nombres  par  le  même,  1874,  du  Deutéro- 
nome, par  Schrôder,  1866;  28  édit.  par  Stosch.  1902. 
Le  BMischer  Commenta,-  nier  das  A.  T.,  de  Keil  et 
de  Franz  Delitzsch,  contient  la  Genèse  et  l'Exode  com- 
mentés par  Keil.  3e  édit..  Leipzig,  1878;  du  Lévitique, 
des  Nombres  et  du  Deutéronome,  par  le  même, 2e  édit., 
1870;  trad.  anglaise,  3  in-8°,  Edimbourg,  1881,  1885;  le 
Kurzgefasster  Kommenlar  n<  den  heiligen  Schriflen 
A.  und  X.  T.,  de  Strack  et  de  Zôckler,  Munich,  com- 
prend l'explication  des  quatre  premiers  livres  du  Pen- 
tateuque par  Strack,  1894  (la  Genèse  a  paru  à  part  en 
2«  édition,  en  1905), et  celle  du  Deutéronome,  de  Josué 
et  des  Juges  par  Œttli,  1893.  Le  Handkommentar  zum 
A.  T.  de  Nowack,  publié  à  Gœttingue,  contient  la  Ge- 
nèse de  Gunkel,  1901;  2«  édit..  1902;  l'Exode,  le  Lévi- 
tique et  les  Nombres  de  Baentscb,  1903,  et  le  Deutéro- 
nome de  Steuernagel,1900.  Le  KurzerHand-Kommentai 
zum  A.  T.,  de  Marti,  édité  à  Fribourg-en-Brisgau,  ren- 
ferme  les  commentaires  de  la  Genèse.  1898,  de  l'Exode, 

1900,  des  Nombres,  1903,  par  Holzinger;  du  Lévitique, 

1901,  et  du  Deutéronome,  1899,  par  Bertbolet.  Com- 
mentaires spéciaux  de  la  Genèse,  par  Franz  Delitzsch, 
Leipzig,  1852;  i'  édit.,  1872;  5>'  édit.  sous  le  titre  ■ 
Neuer  Commenta;-  uber  die  Genesis,  1887;  Gossrau, 
Commentai-  zur  Genesis.  llalbersladt,  1887;  Schultz, 
Das  Déute  -onomium  erklârt,  Berlin,  1859;.!.  Bobiner. 
Das  ersti-biieh  Mose,  Stuttgart,  1905.  -  En  Angleterre, 
The  Hohj  Bible  according  lo  the  authorized  Version, 
éditée  par  Cook  à  Londres,  contient  le  Pentateuque  en 
2  in-8»,  Londres,  1877,  t.  i  et  II.  The  Pulpil  Commen- 
tary,  édité  par  Spence  et  Exell  à  Londres,  contient  la 
Genèse,  par  Whitelaw;  l'Exode,  par  Rawlinson;  \<-  Lé- 
vitique, parMeyrick;  les  Nombres  par  Winterbotham, 

et  le  Deutéronome  par  Alexander,  1897.  Tlu-    Ex} - 

tor's  Bible,  de  Londres,  renferme  la  Genèse  de  Dods, 
1887,  l'Exode  de  Chadwick,  1890,  le  Lévitique  de  Kel- 
logg, 1891,  les  Nombres  de  Watsun.  1889,  et  le  Deuté- 
ronome de  Harper.  1895.  La  Cambridge  Bible  fur 
Schools  and  Collèges  et  The  Century  Bible  n'ont  pas 
encore  de  commentaires  du  Pentateuque.  The  interna- 
tional critical  commentary  on  the  Holy  Scriptures  of 
the  Oldand  New  Testaments,  d'Edimbourg,  comprend 
déjà  les  Nombres  de  Gray,  1903,  et  le  Deutéronome  de 
Driver,  1895.  Commentaires  particuliers  :  Wright,  The 
book  of  Gem-sis  in  liebrcio,  Londres,  1859;  2«  édtt. 
1896;  G.  Y.  Garland.  Genesis  with  notes,  Londres.  1878; 
Spurrell,  Notes  on  the  hebrew  text  of  the  book  of  Ge- 
nesis, Oxford,  1887;  2«  édit..  1896;  Driver,  The  book  of 
Genesis,  Londres,  1901  ;  Levilicus,  Leipzig,  1891;  l.ms- 
burg,  The  third  book  of  iloses,  called  Levilicus,  Lon- 
dres, 1884;  Howard.  The  books  of  Numbers  and  Deu- 
teronomy    according  lo  the  LXX  u-ith  critical  notes, 


119 


PENTATEUQUE 


PENTECOTE 


120 


Cambridge,  1857;  Maclaren,  The  books  of  Exodas,  Le- 
iticus  and  Numbers,  Londres,  1906;  Id.,  Books  of 
Deuteronomy,  etc.,  Londres,  1906.  —  En  France,- Ed. 
Reuss,  L'histoire  sainte  et  la  loi,  2  vol.,  Paris,  1S79, 
dans  La  Bible,  traduction  nouvelle  arec  introduction 
et  < nmmentaires.  —  En  Hollande, Het  Oude  Testament, 
par  Kuenen,  Hosykaas,  Kosters  et  Oort.  2  vol.,  Levde, 
1900,  1901. 

2.  Juifs.  —  Les  commentaires  de  Raschi  (1040-1150), 
Abenesra  (1092-1167)  ci  de  David  Kimclii  (1160-1235)  sur 
le  1  'entateuque  sont  réunis  dans  les  Bibles  rabbiniques. 
Celui  d'Abarbanel  a  été  édité  à  Venise,  l'an  5539  du 
monde  (1579  de  i'ère  chrétienne,  in-f°,  voir  t.  i. 
col.  16).  S.  Cahen  a  traduit  le  Pentateuque  hébraïque 
en'français,  Paris,  1831;  Kalisch,  Historical  and  cri- 
tical  commentary  on  Ihe  old  Test,  viith  «  neu>  transla- 
tion, Londres  :  Genèse,  1885;  Exode,  1855;  Lévitique, 
1867,  1872;  llirsch,  Dec  Pentateuch  ûberselzt  und 
erlâutert,  -J  .dit..  2  in  s-.  Francfort-sur-le-Main,  1893, 
1895;  Hoffmann,  Dos  Buch  Leviticus  ùbersetzt  und 
erklârt,  Berlin,  1906. 

3.  Catholiques.  —  Cajetan,  Commentarii  in  quinque 
mosaicos  libros,  in-f»,  Rome,  1531;  Jérôme  Oleaster, 
Comment,  in  Penlaleuchum,  i  in-f",  Lisbonne,  1556; 
Aug.  Steuchus  d'Eugubio,  V.  T.  ad  hebraicam  verita- 
tem  recognitio,  sive  m  Pentateuchum  annotaliones, 
in-'r,  Venise,  1529;  Santé  Pagnino,  Catena  argentea 
in  Pentateuchum,  in-f",  Anvers,  1565;  Louis  Lippo- 
in.ui,  Catena  in  Genesim,  Paris,  1546;  in  Exodum, 
Paris,  I55(i;  G.  Hammer,  Commentationes  in  Genesim, 
in-f",  Dillingen,  1564;  Benoit  Pereira,  Comment,  ri 
■disputationes  in  Genesim,  in-f",  Rome,  1589;  Dispu- 
tationes centum  viginti  septem  in  Exodum,  [ngolstadt, 
1601  .  A-.. un-  Martinengus,  Glossse  magnec  in  Genesim, 
2  in-f".  Padoue,  1597;  .Iran  Lorin,  Comment,  in  Levi 
loi, m,  Lyon,  1619;  in  Numéros,  Cologne,  1623;  in 
Deuteronomium,    Anvers,    1625;   .1.   Tirin,   Comment. 

"  V.  n  ,Y.  t..  Anvers,  1632;  Corneille  de  la  Pierre, 
Comment,  m  Y.  ri  \.  T.,  Lyon,  1732,  i.  i;  réédité  par 
Migne, . Cursus  complet  us  Scripturœ  sacrée,  i.  v-vn; 
Corneille  Jansénius,  Penlaleuchus,  Louvain,  1641; 
J.  Bonfrère,  Pentateuchut  Mrs, s  commentaric  illu- 
stratus,  in-f»,  Anvers.  1625;  Cl. Frassen, Disquisitiones 
in  Pentateuchum,  in-4°,  Rouen,  1705;  Calmel,  Com- 
mentaire  littéral  sur  tous  les  livres  dr  l'A.  ri  du  A'.  T., 

lit.,  Paris,  172'/.  l.  i  et  n;  Brentano,  Dereser  et 
Scholz,  Die  heilige  Schrift  des  .1.  und  A'.  /'.,  Franc- 
fort-sur-le-Main,  1820,  t.  i  -ni  ;   La  Sainte   Bible,  édi- 

i  Paris,  contient  la  Genèse  par  Crelier,  1889; 
l'Exode  ci  le  Lévitique,  par  le  même,  1886;  les  Nombres 

l-i  le  Deutérono par  Trochon,  1887,  1888.  Le  Cursus 

Scripturœ  sacrai  des  jésuites  allemands,  édité  à  Paris, 
contient  ln,    eiiininentaii'e  du  l'entaleiupie  par  le  P.  île 

Hummelauer:  in  Genesim,  1895;  in  Exodum  et  Levi- 
ticum,  1897;  m  Numéros,  1899;  m  Deuteronomium, 
' ■  " '  1  •  Commentaire-  particuliers  ;  Fr.  de  Schrank, 
Commentarius  lilteralis  in  Genesin,  1835;  Th.  .1.  Lamy, 
Comment,  in  librum  Geneseos,  2  in-8»,  Matines.  1883, 
1884  ;  A.  Tappehorn,  Erklàrung  der  Genesis,  Paderborn, 
1NJS8;  G.  Hoberg,  JUr  Genesis  nach  dem  Literalsinn 
erklârt,  Fribourg-en-Brisgau,  1899;  i:.  Neteler,  Das 
Buch  Genesis  der  Vulgala  und  des  hebraisehes  Textes 
ùbersetzt  und  erklârt,  'Munster.  1905;  billion.  LaSainte 
Bible,  Paris,  1888,  t.  i.  E.  Mam.knot. 

PENTECOTE  (grec   ;  tiev.  v/ost/,;  Vulgate    :   Peti- 
te), la  seconde  di      trois  grandes  fêles  des  .luifs. 
I«  Xoms.  —  La  fête  est  appelée  hag  haq-qdsir  bik- 
kûrë,    loprri    OeptapoC    rcpuTOYevviiu.diTuv,    solemnitas 
niessis  primitivorum,      I.  le  de  la  moisson  et  des  pré- 
mices, i  lixod.,  xxm.  16;  hag  iâbu'ôt,  loptri  iêSouiouv, 
solemnitas   hebdomadarum,    i    fête    des    semaines,  » 
Jixod.,  xxxiv,  22;  lient.,  xvi,  10:  yom  hab-bikkûrim, 


T,u.fp3L  tiôv  'lit.n.  dies  primitivorum,  «  jour  des  prémi- 
ces. »  Num.,  XXVIII,  26.  Le  mot  nEVTiptoor^,  supposant  en 
hébreu  hamissim,  i  cinquante  »  ou  «  cinquantième  «, 
est  employé  de  différentes  manières,  dans  Tobie.  n.  1  : 
vi  ÉopTr,  irevTYixoatr,,  «  la  fêle  (de)  Pentecôte;  »  dans 
II  Mach.,  xii.  32;  I  Cor.,  xvi,  8.  et  dans  .loséphe,  Bell, 
jud.,  II,  m,  1  :  irevTï|xo<rnî,  s  Pentecôte;  »  dans  les 
Actes,  n,  ];  xx,  16  :  ^jiÉpa  Tr,;  rUvcY]XO<rrî)ç,  »  jour  de 
la  Pentecôle.  »  —  Les  Juifs  ont  ensuite  appelé  plus 
communément  la  Pentecôte  âséréf,  en  chaldaïque 
àsarfâ',  dans  Josèphe,  Anl.  jud.,  III.  s,  6,  iaœpôâ, 
s  nom  qui  signifie  Pentecôte.  Cf.  Erachin,  XI,  3; 
Midr.  Koheletli,  110,  2.  etc.  Ce  nom  vient  de  âsar,  qni 
signifie  «  clore  »  et  «  rassembler  »,  d'où  le  sens  de 
i  clôture  i  ou  d'  «  assemblée  ■  peur  âsérét.  Gesenius, 
Thésaurus,  p,  1059,  soutien!  que  le  mot  veut  toujours 
dire  assemblée,  comme  .1er.,  IX,  2;  le-.,  i,  li;  I  Reg., 
X,  20,  etc.  Cependant  les  Septante  l'on!  traduit  plu- 
sieurs fuis  par  IÇôStôv,  "  dénouement,  clôture,  >  Lev., 
xxm,  36.  Vulgate  :  cottus,  t  assemblée;  i  Num.,  \\i\. 
35,  où  la  Vulgate  ne  traduit  pas  'àsérêf;  lient.,  x\i.  8, 
Vulgate  :  collecta,  -assemblée.  ■  Tonj.  mis  est-il  que  les 
docteurs  juifs  ont  pris  ce  mot  dans  le  st  us  de  «  clôture  i 
et  l'onl  consacré  a  désigner  spécialement  la  Pentecôte, 
considérée  surtout  comme  la  clôture  du  temps  de  la 
Pàque. 

2»  Date.  —  D'après  la  Loi,  la  date  de  la  Pentecôte 
était  ainsi  fixée  :  à  partir  du  lendemain  du  sabbat  de 
la  Pàque,  où  l'on  avait  offert  la  gerbe  nouvelle.  DO 
comptai!  cinquante  jours,  et.  le  lendemain  de  la  sep- 
tii  me  semaine,  on  offrait  une  oblation  nouvelle. 
Lev..  xxm,  15,  16.  Les  Caraïles  utendaient  par  ce  sab- 
bat   celui    qui    tombait   dans   le    cours    des    fêles  de  la 

Pàque.  D'après  leur  manière  de  comprendre  le  texte, 
les  sept  semaines  d,  la  Pentecôte  pouvaient  donc  com- 
mencer du  second  au  huitième  jour  après  la  Pâque. 
Les  sadducéens  professaient  la  même  opinion.  Cf. 
Uenacholh,  x,  3;   Schûrer,  Geschich  ischen 

Volkes  in  Zeit.  J.  C,  Leipzig,  t.  n.  1898,  p.  H3,  '.11. 
D'après  l'interprétation  la  plus  commune,  qui  pratique- 
ment a  prévalu  parmi  les  Juifs,  ce  sabbal  n  était  autre 
que  le  15  nisan.  Le  lendemain  du  sabbat  ou  16  iii-.hi 
commençaie  ni  l  >s  sept  semaines  au  lendemain  desquelles 

on  fêlait  la  l'culecôle.  De  la  série,  il  ;  avait  sept  se- 
maines pleines  entre  la  Pâque  et  ta  Pentecôte.  P 

les  Caraïles,  la  Pentecôte  tombait  toujours  le  lende- 
main du  sabl.al.  Cf.  Chagiga,  n,  i;  Siphra,  f,  248,  1. 
Elle  ne  coïncidai!  avec  celle  îles  autres  Israélites  que 
quand  la  Pàque  tombait  un  vendredi. 

3°  Le  rituel  de  la  fête.  —  1.  Ce  jour-là.  il  y  avait 
assemblée  du  peuple  et  le  travail,  sauf  celui  de  la  pré- 
paration des  aliments,  était  interdit,  comme  au  premier 
et  au  septième  jour  lé  la  Pâque.  L'offrande  caractéris- 
tiqu  de  la  Pentecôte  êtail  celle  de  deux  pains  levés,  On 
j  ajoutait  en  holocauste  sept  agneaux  d  un  an,  un  jeune 
taureau  et  deux  béliers,  et  en  plus  un  bouc  et 
uni  aux  d'un  an  en  sacrifice  pour  le  péché.  Lev.,  xxm, 
15-21.    D'après    les  Nombres.   XWII1.  26-31,  l'holocauste 

se  composait  de  sept  agneaux,  deux  jeunes  taureaux  et 
un  bélier.  —  2.  En  principe,  la  fête  ne  durait  qu  un 
jour.  Mais,  depuis  la  captivité,  les  Juifs  qui  résidaient 
hors  île  la  Palestine  la  célébraient  deux  jours  de  suite. 
Cf.  Gem.  Pesachim,  52,  1;  Gem.  Rosch  haschana,5 

1.  Peut-être  agissaient-ils  de  la  sorti-  dans  la  crainte  de 

se  tremper  sur  le  vrai  jour  de  la  fête.  Josèphe,  Int. 
jud.,  III.  \.  6,  dit  qu'on  immolai!  ce  jour-là  en  holo- 
causte trois  jeunes  taureaux,  deux  béliers  et  quatorze 
agneaux,  ce  qui  représente,  à  un  bélier  près,  le  total 
de  ce  que  prescrivent  chacun  de  leur  côté  le  Lévitique 
et  les  Nombre8.  Les  victimes  indiquées  par  les 
Nombres  étaient  offertes  à  titre  supplémentaire. 
Cf.  Wenacholh,  iv,  2.  —  3.  Les  deux  pains  à  offrir 
devaient  être  faits  avec  de  la  farine  de  froment  nouveau 


121 


PENTECiiTK 


122' 


récolté  en  terre  israélite.  Sur  le  soir  de  la  Pentecôte, 
ou,  si  le  jour  suivant  était  le  sabbat,  après  la  fin  du 
sabbat,  on  achetait  aux  frais  du  trésor  trois  mesures  de 
froment,  on  les  passait  à  la  meule  et  ensuite  à  travers 
douze  cribles.  On  retirait  deux  dixièmes  d'éphi  de 
farine,  on  y  ajoutait  de  l'eau  chaude  et  du  levain  et 
l'on  confectionnait  les  deux  pains.  Ils  devaient  avoir 
sept  palmes  de  long,  sept  palmes  de  large  et,  aux  extré- 
mités, des  cornes  de  quatre  doigts.  Le  matin  du  jour 
suivant,  à  la  suite  des  sacrifices  publics,  on  offrait  les 
deux  pains  à  l'est  du  parvis  intérieur,  mais  on  ne  les 
portait  pas  jusqu'à  l'autel,  à  cause  du  levain  qu'ils 
renfermaient.  L'un  des  deux  pains  était  ensuite  donné 
au  grand-prêtre,  s'il  le  voulait;  l'autre  se  partageait 
entre  les  prêtres,  qui  le  mangeaient  dans  le  Temple. 
Ces  deux  pains  constituaient  des  prémices.  A  partir  de 
leur  présentation,  il  était  permis  d'apporter  au  Temple 
dos  offrandes  provenant  des  récoltes  de  l'année. 
Cf.  Uenachoth,  xi,  9;  Erachin,  n,  2.  —  Sur  le  céré- 
monial suivi  pour  présenter  les  prémices  au  Temple, 
voir  Prémices.  —  4.  Après  l'offrande  des  différents  sa- 
crifices prescrits,  le  peuple  était  invité  à  se  réjouir 
dans  des  festins,  auxquels  on  invitait  les  lévites  et 
tous  ceux  qui  vivaient  dans  l'entourage  du  chef  de  la 
famille.  Deut.,  xvi.  11.  —  5.  La  fête  delà  Pentecôte 
étaii  célébrée  partout  par  les  Israélites,  même  hors  de 
Jérusalem  et  de  la  Palestine.  Tob.,  ti,  1  (texte  greci. 
On  omettait  alors  naturellement  ce  qui  était  spécial  à 
la  liturgie  du  Temple.  Judas  Machabée  rentra  à  Jéru- 
salem avec  son  armée  victorieuse  pour  célébrer  la  fêle 
des  semaines  ou  Pentecôte.  II  Mach.,  xii,  30.  La 
Pentecôte  qui  suivit  la  résurrection  de  XotreSeigneur 
avait  amené  à  Jérusalem  «  des  hommes  pieux  de  toutes 
les  nations  qui  sont  sous  le  ciel  »,  c'est-à-dire  des 
divers  pays  ensuite  énumérés.  Act.,  H,  5-11.  Du  temps 
de  saint  Paul,  on  fêtait  encore  la  Pentecôte  à  Éplièse. 
I  Cor.,  xvi,  8.  —  Cf.  Reland,  Antiquitates  sacra?, 
Utrecht,  1741,  p.  237-240;  Iken,  Antiquitates  hébraicse, 
Brème,  1741,  p.  316-319. 
4°  La  Pentecôte  et  la  loi  du  Sinaï.  —  1.  Partis  de 
pte  le  quinzième  jour  du  premier  mois,  Exod., 
xii.  26-34,  les  Hébreux  arrivèrent  au  Sinaï  le  premier 
jour  du  troisième  mois,  Exod..  xix,  I,  et  trois  jours 
après,  Exod.,  xix,  16.  Dieu  commença  à  manifester  sa 
présence  sur  le  Sinaï,  par  des  nuées,  des  éclairs  et  des 
tonnerres.  Il  s'écoula  donc  quarante-huit  ou  quarante- 
neuf  jours  entre  la  Pàque  d'Egypte  et  la  promulgation 
de  la  Loi  au  Sinaï.  Malgré  cette  coïncidence  entre  la 
promulgation  de  la  Loi  et  la  fête  de  la  Pentecôte,  les 
textes  qui  prescrivent  la  célébration  de  la  fête  ne  font 
jamais  allusion  aux  événements  du  Sinaï,  et  même, 
dans  le  rituel  mosaïque,  rien  n'est  destiné  à  commé- 
morer ces  événements.  Philon  et  Josèphe  n'établissent 
nulle  part  aucune  corrélation  entre  la  fête  et  le  don 
de  la  Loi.  La  promulgation  de  la  Loi  nouvelle  à  la 
fête  de  la  Pentecôte  donna  probablement  aux  chrétiens 
l'idée  de  rattacher  à  la  même  fête  le  souvenir  de  la 
promulgation  du  Sinaï.  Saint  Jérôme,  Ep.,  Lxxvm.  12, 
ad  FabioV.,  t.  xxn,  col.  707,  établit  la  coïncidence 
entre  l'événement  du  Sinaï  et  la  Pentecôte,  qui  en 
célèbre  le  souvenir.  Saint  Augustin,  Cont.  Faust., 
xxxn,  12,  t.  xlii,  col.  503,  affirme  la  même  relation  et 
voit  dans  la  promulgation  de  la  Loi  au  Sinaï  la  figure 
de  la  descente  du  Saint-Esprit  à  la  Pentecôte. 
Saint  Léon,  De  Pentecost.,  serin,  i,  t.  Liv,  col.  400, 
pense  comme  les  précédents.  Les  auteurs  juifs  posté- 
rieurs ne  connaissent  pas  plus  que  leurs  anciens  la 
célébration  d'une  fête  pour  rappeler  la  manifestation 
du  Sinaï.  Ils  admettent  la  coïncidence  signalée  par 
saint  Jérôme.  «  La  fête  des  semaines  est  le  jour  où  la 
Loi  fut  donnée.  Ce  qui  constitue  l'honneur  de  ce  jour. 
c'est  que  sa  date  dépend  de  la  fête  solennelle  précé- 
dente, la  Pàque.  >  Maimonide,  More  nevochim,  m,  11. 


Mais  ils  ajoutent  :  s  La  Loi  divine  n'a  pas  besoin  d'un 
jour  saint  dans  lequel  on  rappelle  avec  honneur  son 
souvenir.  Le  motif  de  la  fête  des  semaines  est  le  com- 
mencement de  la  moisson  du  froment...  Il  est  indiscu- 
table que  la  Loi  a  été  donnée  le  jour  de  la  fête  des 
semaines,  mais  il  n'a  pas  été  institué  de  fête  pour  la 
rappeler.  »  Abarbanel,  In  Leg.,  f.  26-2.  Cependant,  les 
auteurs  juifs  plus  modernes  n'hésitent  pas  à  attribuer 
à  la  Pentecôte  un  sens  historique  et  à  célébrer  ce 
jour-là  la  promulgation  de  la  Loi.  Cf.  Munk,  Pales- 
tine. Paris,  1881.  p.  188.  Pour  beaucoup  même,  cette 
idée  devient  d'autant  plus  prééminente  que  l'objet  pri- 
mitif de  la  fête  a  moins  de  raison  d'être  dans  les  pays 
où  ils  vivent  dispersés.  Dans  l'enseignement  populaire, 
on  s'exprime  ainsi  :  «  La  Pentecôte  ou  fêle  des 
semaines  est  célébrée  le  cinquantième  jour  à  compter 
du  second  jour  de  la  Pàque,  le  six  du  mois  de  sivan 
(troisième  mois).  C'est  l'anniversaire  de  la  promulga- 
tion de  la  loi  sur  le  mont  Sinaï.  Cette  fête  dure  deux 
jours.  »  Wogue,  Catéchisme,  Paris,  1872,  p.  59. 

5°  Symbolisme  de  la  fête.  —  1.  La  Pentecôte  con- 
sacre solennellement  la  fin  de  la  moisson,  qui  avait  été 
inaugurée  le  lendemain  de  la  Pàque.  Elle  est  ainsi 
comme  une  suite  de  la  solennité  précédente,  de 
laquelle  elle  dépend  par  sa  date.  Elle  rappelait  à  l'Israé- 
lite que  le  Dieu  qui  l'avait  tiré  de. la  servitude  d'Egypte 
avait  promis  de  le  conduire  «  dans  une  terre  fertile  et 
spacieuse,  dans  une  terre  où  coulent  le  lait  et  le 
miel  ».  Exod..  m,  8,  que  ce  Dieu  avait  tenu  sa  pro- 
messe, et  que  chaque  année  il  donnait  à  son  peuple 
l'abondance  des  moissons  et  des  bénédictions  ter- 
restres. C'était  donc  une  fête  d'actions  de  grâces.  — 
2.  La  caractéristique  de  la  fête  consistait  dans  l'offrande 
de  deux  pains  levés.  A  la  Pàque,  on  avait  offert  les- 
prémices  d'une  moisson  qui  commençait,  mais  qu'on: 
ne  pouvait  guère  encore  utiliser  pour  l'alimentation  de 
l'homme.  A  la  Pentecôte,  la  moisson  se  terminait  et 
l'on  pouvait  en  présenter  à  Dieu  le  résultat  définitif, 
tel  que  l'industrie  humaine  le  traitait  pour  l'approprier 
à  la  nourriture.  On  apportait  au  sanctuaire  deux  pains 
levés,  mais  par  respect  pour  la  loi  qui  ne  permettait 
pas  l'introduction  du  levain  dans  le  culte  du  Seigneur, 
voir  Levain,  col.  198,  on  ne  les  offrait  pas  sur  l'autel.. 
—  3.  Les  pains,  au  nombre  de  deux,  n'étaient  sans 
doute  pas  sans  rapport  avec  les  deux  jours  de  fête  dont 
l'un  commençait  et  l'autre  terminait  le  temps  de  la 
moisson;  les  deux  jeunes  taureaux  ou  les  deux  béliers 
représentent  la  même  idée,  tandis  que  les  sept  agneaux 
se  rapportaient  aux  sept  semaines  du  temps  de  la  mois- 
son. Le  jeune  taureau  ou  le  bélier,  seul  de  son  espèce, 
pouvait  rappeler  l'idée  du  Dieu  unique  auquel  était 
offert  l'holocauste.  Cf.  Bâhr,  Symbolik  des  mosaischen 
Cultus,  Heidelberg,  1839,  t.  Il,  p.  645-652. 

6°  La  Pentecôte  du  Nouveau  Testament.  —  1.  C'est 
le  jour  même  de  la  Pentecôte  juive,  à  la  troisième 
heure,  c'est-à-dire  vers  neuf  heures  du  matin,  que  le 
Saint-Esprit  descendit  sur  les  Apôtres  et  les  disciples 
rassemblés  au  nombre  de  cent  vingt.  Act.,  Il,  15.  Des 
phénomènes  extérieurs  analogues  à  ceux  du  Sinaï 
signalèrent  sa  venue  et  furent  remarqués  par  la  multi- 
tude qui  se  trouvait  dans  la  ville.  Act.,  il,  6.  Le  Saint- 
Esprit  apparut  sous  forme  de  langues  de  feu.  Voir 
Langue,  t.  iv,  col.  74.  Il  communiqua  aux  Apôtres  le 
don  des  langues.  Voir  Langues  (Don  des),  t.  iv, 
col.  74-81.  —  2.  L'ancienne  Pentecôte  était  la  fête  de  la 
moisson;  avec  la  nouvelle  commence  la  moisson  évan- 
gélique,  et  dès  le  jour  même  saint  Pierre  fait  une 
récolte  d'environ  trois  mille  âmes.  Act.,  n,  41.  La  Loi 
nouvelle  est  promulguée  ce  jour-là,  cinquante  jours 
après  la  rédemption,  comme  l'avait  été  jadis  la  loi  du 
Sinaï,  cinquante  jours  après  la  délivrance  de  la  servi- 
tude d'Egypte.  C'est  ce  qui  fait  dire  à  saint  Jérôme, 
Epis  t.  lxxvm,  12,  ad  Eabiul.,  t.  xxn,  col.  707,  qu'  ~  on 


123 


PENTECÔTE 


PERCNOPTÈRE 


124 


célèbre  la  solennité  de  la  Pentecôte  et  qu'ensuite  le 
mystère  évangélique  rec;oit  son  complément  dans  la 
ate  du  S;iint-Esprit  ■.  Cf.  .1.  C.  Harenberg,  De 
miraculo  pentecpstali,  dans  le  Thésaurus  de  Hase  et 
Iken,  Leyde,  1732,  t.  n,  p.  5G9-59i;  Kellner,  Heorlolo- 
gie,  Fribourg-en-B.,  1901,  p.  72-75. 

H.  Lf.sétre. 

PEQOD  (hébreu  :  Peqôd),  nom  qui  se  lit  dans  deuj 
passages  de  la  Bible  :  ,1er.,  i.,  21,  et  Ezech.,  xxm.  23. 
Les  anciens  commentateurs  en  ont  fait  généralement 
un  nom  commun.  Ils  ont  traduit  ce  mot  dans  Jérémie 
dans  le  sens  de  «  Visitation  s  divine,  c'est-à-dire  de 
châtiment,  et  ont  cru  que  le  prophète  appelait  ainsi 
symboliquement  Babylone  pour  annoncer  le  châtiment 
que  Dieu  allait  lui  infliger.  Dans  Ezéchiel,  ils  ont  donné 
à  Peqôd  le  même  sens  que  pâqîd,  e  chef,  préfet. 
Il  Esd.,  XI,  9;  xiv,  22:  xn,  i2.  La  Vulgate  a  traduit,  dans 
.l.i.  mie,  Peqôd  par  visita,  et  dans  Ezéchiel  par nobilei 
Dieu  dit  dans  Jérémie  au  futur  vainqueur  de  Babylone, 
saint  Jérôme  :  a  Monte  contre  le  pays  des  Do- 
minateurs et  visite  (châtie)  ses  habitants,  t  —  Depuis 
que  bs  documents  cunéiformes  nous  ont  mieux  fait 
connaître  la  géographie  assyro-bab\  Ionienne,  on  ne  peut 
plus  douter  qu'il  ne  faille  traduire  ainsi  ce  passage  : 
»  .Monte  contre  la  terre  de  Merâlaim  région  du  sud 
de  la  Babylone,  Frd.  Delitzsch,  ll'o  lag  das  Parodies, 
p.  il,  182),  et  contre  les  habitants  de  Peqod.  »  —  Dans 
I  zéchiel,  d'après  la  Vulgate,  Dieu  dit  à  Ooliba,  person- 
nification  de  Jérusalem  et  du  royaume  de  Juda  :  -  Je 
susciterai  contre  toi...  les  fils  de  Babylone  et  tous  les 
Chaldéens,  nobles,  rois  et  princes,  o  11  faut  traduire 
l'hébreu  :  «  Je  ferai  venir  contre  toi  les  fils  de  Baby- 
lone et  tous  les  Chaldéens,  Peqôd,  Sô'a  et  Qôa  (Sutu 
ou  Su  il  ijiilii  ou  qu,  tribus  voisines  de  la  Babylonie, 
Frd.  Delitzsch,  IFo  lag  das  Paradies,  p.  233).  »  La  ver- 
sion des  Septante,  qui  avait  pris  les  noms  propres  pour 
des  noms  communs,  dans  Jérémie,  de  même  que  la 
\  uL  I.  ,  a  reconnu  ici  des  noms  propres  qu'elle  a  trans- 
crits par  $axoux  [Alexandrinus  :  x.a\  $ou8),  Sous  et 
'  \'/yjï.  Symmaque  et  Théodotion  avaient  fait  de  même: 
$axoùS  y.-x\  Eouè  xa!  Koui.  Origène,  Uexapl.,  Ezech., 
xxiii,  23,  t.  xvi,  :s,  col.  2557.  saint  Jérôme  a  sui\i  dans 
li  traduction  de  ce  passage  la  version  d'Aquila  et  s'il  n'a 
pas  accepté  l'interprétation  des  Septante  et  des  autres 
traducteurs  grecs,  c'est,  dit-il,  M  Ezech.,  xxm,  23, 
t.  xxv,  col.  219,  parce  qu'on  ne  trouve  pas  les  noms  de 
Phacud,  Sue  et  Cue  comme  noms  de  peuples  dans 
l'Écriture;  ce  qui  n'est  pas  exact  pour  Peqôd  et  ne 
peut  rien  prouver  d'ailleurs  contre  l'existence  de  ces 
tribus  orientales,  la  Bible  n'ayant  pas  eu  occasion  de 
les  nommer  ailleurs. 

Peqôd  est  le  nom  d'une  tribu  de  la  Babylonie  méridio- 
nale et  de  la  contrée  où  elle  habitait,  prés  de  l-'embou- 


avec  les  Elamites,  leurs  voisins,  et  les  rois  d'Assyrie, 
Saigon  et  Sennachérib,  leur  firent  plusieurs  fois  la 
guerre.  Les  inscriptions  cunéiformes  appellent  cette 
tribu  Puqûdu.  E.  Scbrader.  Keilinschriften  und  Ge- 
schichtsforschung,i838,rj.  108,  Il  I.  113;  Frd.  Delitzsch, 
Wo  lag  das  Paradies,  p.  182.  195,  2  in  La  tribu  de 
Puqùdu  dut  être  soumise  à  la  domination  de  Xabucho- 
donosor  et  lui  fournir  des  soldats  quand  son  armée 
assiégea  et  prit  Jérusalem,  ainsi  que  l'annonce  Ezéchiel. 
Plus  tard,  quand  Cyrus  s'empara  de  Babylone,  Peqôd 
dut  être  soumise  aux  Perses  et  punie,  selon  la  prédic- 
tion de  Jérémie.  du  mal  qu'elle  avait  fait  aux  Juifs  dans 
l'armée  de  Xaluicbodonosor.  F.  Viooir.oix. 


PERCNOPTERE 

nopfjpt'wv  ;  Vulgate  : 


hébreu    :    râlfâm    ;    Septante   : 
porphyrion),  espèce  de  vautour, 


' 


X, 


16.  —  Le  percnoptêre. 

rangé  parmi  les  oiseaux  impurs.  Lev..  xi.  18;  Deut.,  xiv, 
17.  —  Les  versions  font  du  râhâm  un  porphyrion, 
espèce  d'oiseau  qui  appartient  à  l'ordre  issiers. 

Voir  Porphyrion.  Mais   ce  nom  désigne    le  vautour 


i ..       Pi  i   noptère  planant  et  tenant  deus  chasse-moucli.  serres. 

I  •  i  >.  Histoire  ancienne  île  l'Orient,  t.  I,  p.  791. 


chure  du   fleuve    Uknu.  Les  gens  de  Peqôd  étaient  de 

race  araméenne  ;  ils  s'allièrent  en  diverses  circonstances 


d'Egypte,  vultur  ou  neophron  percnoplerus,  «  à  ailes 
noires,  >>  connu  des  Arabes  sous  le  nom  de  rahmah. 


125 


PERCNOPTERE 


PERDRIX 


12G 


Cet  oiseau,  long  d'une  soixantaine  de  centimètres,  a  le 
plumage  blanc  mêlé  de  brun  et  de  roussàtre,  les 
grandes  plumes  des  ailes  noires,  les  pieds  jaunes  ;  la  tête 
est  dénudée  et  de  couleur  jaune  clair  (lig.  16).  Le 
percnoptére  et  moins  fort  que  les  autres  rapaces  de  son 
espèce  ;  aussi  évite-t-il  de  se  mêler  à  eux.  Il  vit  ordinai- 
rement par  paires  et  sa  ponte  est  de  deux  œufs,  rare- 
ment  de  trois.  Ce  qui  distingue  surtout  cet  oiseau,  c'est 
son  genre  d'alimentation.  Il  se  nourrit  de  cadavres 
d'animaux  et  de  détritus  de  toute  nature,  débarrassant 
ainsi  le  sol  de  tout  ce  qui  pourrait  empester,  et,  à  ce 
titre,  méritant  la  protection  dont  l'homme  l'entoure. 
On  le  trouve  dans  les  parties  chaudes  de  l'ancien 
monde,  des  Pyrénées  au  sud  de  l'Inde,  et  dans  presque 
toute  l'Afrique.  Il  est  très  commun  en  Egypte;  on  le 
voit  représenté  sur  les  monuments  (lig.  17).  En  Pales- 
tine, on  le  rencontre  en  été,  jamais  en  hiver.  Il  y  vit 
familièrement  dans  le  voisinage  de  l'homme  et  s'abat 
sans  crainte  jusque  dans  les  villages,  pour  chercher  sa 
nourriture  dans  les  tas  d'immondices.  On  comprend 
que  le  percnoptére,  malgré  les  services  qu'il  rend,  ait  été 
rangé  parmi  les  oiseaux  impurs.  Cf.  Trislram,  The  natu- 
ral  [history  of  the  Bible,  Londres,  1889,  p.  180.  — 
Michée,  i,  16,  dit  à  sa  nation  :  i  Fais-toi  chauve  comme 
li  né'éér,  car  (tes  enfants)  s'en  vont  en  captivité  loin  de 
toi.  ■>  Le  mot  hébreu  désigne  ordinairement  l'aigle;  mais 
c'est  un  floral  générique  qui  a  une  signilication  géné- 
rale et  ici  il  se  rapporte  au  vautour  percnoptére,  qui 
seul  est  chauve;  il  en  est  de  même  dans  Job,  xxxix, 
27;  Prov.,  xxx.  17,  où  il  est  dit  qu'il  se  nourrit  de 
cadavres.  Cf.  Buhl,  Gesenius'  Handwôrt.,  p.  550. 

II.  Lesêtre. 
PERCY  Thomas,  théologien  anglican,  né  à  liridg- 
north  en  17-28,  mort  à  Dromore  le  30  septembre  1811. 
D'une  condition  modeste,  il  prit  ses  grades  à  Oxford  et 
entra  dans  les  ordres.  Chapelain  du  duc  de  Northmn- 
berland  et  du  roi,  il  devint  doyen  de  Carlisle  en  1778, 
et  quatre  ans  plus  tard,  évêque  de  Dromore  en  Irlande. 
Parmi  ses  écrits  on  remarque  :  The  Song  of  Salomon 
netl'ly  translatée!  frotn  the  original  Hebrew  :  with  a 
nentary  ami  annotations,  in-12,  Londres,  1764; 
et  un  manuel  souvent  réimprimé  qui  a  pour  titre  :  A 
Kexj  of  Uie  New  Testament  giving  an  aec.  uni  of  the 
severalbooks,  their  contents,  their  authors,  and  of  the 
times  places  and  occasions,  on  which  they  were  wr'tt- 
ten,  in-12,  Londres,  1765.  —  W.  Orme,  Biblioth.  bi- 
blica,  p.  3i6.  B.  Heurtebize. 

PERDRIX  (hébreu  :  gorê';  Septante:  népSiÇ;  Vul- 
gate  ;  perdue),  oiseau  de  l'ordre  des  gallinacés,  que 
caractérise  l'absence  d'ergots,  remplacés  par  une  simple 
saillie  tuberculeuse  du  tarse.  L'espèce  perdrix  comprend 
les  perdrix  proprement  dites,  les  cailles  (voir  t.  n, 
col.  3i),  les  francolins,  etc. 

I  Description.  —Les  perdrix  proprement  dites  (lig.  18) 
ont  à  peu  près  la  taille  du  pigeon.  Elles  portent  un 
plumage  gris,  mélangé  de  diverses  couleurs,  ont  la 
tète  petite,  le  corps  ramassé,  les  ailes  courtes,  se  nour- 
rissent d'herbes,  de  graines,  d'insectes,  de  vermisseaux, 
a  de  fourmis,  etc.,  vivent  en  compagnies  de  plu- 
sieurs individus,  nichent  à  terre,  ordinairement  dans 
les  sillons,  et  y  pondent  de  douze  à  vingt  œufs  que  la 
femelle  est  seule  à  couver.  Elles  sont  timides  et  délian- 
tes et,  d'un  vol  saccadé  et  bruyant,  changent  continuel- 
lement de  séjour,  bien  qu'elles  n'entreprennent  que 
rarement  de  longs  voyages.  Elles  font  entendre  un  cri 
guttural,  dur  et  sec.  Ce  cri  a  valu  à  la  perdrix  son 
nom  hébreu  de  qorc",  du  verbe  qàrd',  «  crier.  »  La  per- 
drix «st  activement  chassée  par  les  oiseaux  de  proie, 
les  renards  et  l'homme,  qui  la  recherche  à  cause  de 
ses  qualités  comestibles.  A  l'approche  de  l'ennemi,  le 
mâle  s'envole  d'un  côté  pour  attirer  l'attention;  la 
femelle  part  d'un  autre,  puis  revient  en  courant  auprès 


de  ses  perdreaux  pour  les  rassembler  en  lieu  sur.  — 
La  perdrix  grecque  ou  bartavelle,  caccabis  saœatilis, 
abonde  en  Palestine,  dans  les  régions  rocheuses  du 
désert  de  Judée  et  dans  les  gorges  de  la  forêt  du  Carmel. 
Elle  se  plait  dans  les  pays  montagneux.  On  en  trouve 
aussi  très  fréquemment  dans  les  parties  sauvages  de  la 
Galilée,  courant  par  compagnies,  comme  des  poules 
domestiques,  au  milieu  des  rochers.  Les  bandes  en  sont 
nombreuses  en  automne;  elles  se  dispersent  en  hiver, 
sans  doute  pour  se  procurer  plus  facilement  leur  nour- 
riture. La  grosse  perdrix  rouge,  perdix  sehukkar,  s'en- 
vole ou  court  rapidement  devant  les  cavaliers,  qui  la 
poursuivent  à  fond  de  train  et  arrivent  à  la  tuer  quand 
elle  est  fatiguée.  La  perdrix  du  désert,  ammoperdix 
heyii,  a  des  nuances  plus  délicates.  Elle  est  grosse  à 
peu  près  deux  fois  comme  une  caille,  et  a  le  plumage 
d'un  gris  jaunâtre,  le  mâle  seul  portant  aux  joues  une 
sorte  de  col  d'un  blanc  de  neige.  «  Cette  perdrix  a 
tellement  la  couleur  du  sol  environnant,  qu'on  lui 
marche  presque  sur  le  corps  avant  de  l'apercevoir... 
Ces  perdrix,  fort  peu  sauvages,  constituent  un  manger 
délicat...  On  parvient  à  les  prendre  avec  la  main  en  les 


18.  —  La  perdrix. 

poursuivant  dans  les  trous  des  rochers  où  elles  vont  se 
retirer.  Lorsqu'elles  sont  ainsi  pourchassées  pendant 
quelques  instants,  elles  restent  parfaitement  immobiles 
en  cachant  leur  tête  et  souvent  même  une  partie  de 
leur  corps  entre  deux  pierres  ou  dans  la  fente  d'un 
rocher...  Cet  oiseau,  qui  est  loin  cependant  d'être  inin- 
telligent, croit  évidemment  ne  plus  être  vu  parce  qu'il  ne 
peut  plus  voir  ce  qui  se  passe  autour  de  lui.  Cette 
manière  d'agir  est  une  exception  pour  les  espèces  de 
ce  groupe.  »  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui,  Paris, 
I88'i-,  p.  403,  406,  469.  On  rencontre  ce  genre  de  per- 
drix dans  l'Arabie  pétrée,  le  bassin  de  la  mer  Morte,  le 
désert  de  Judée  et  surtout  les  environs  de  la  grotte 
d'Odollam.  Comme  tous  les  autres  oiseaux,  elles 
aiment  à  se  réfugier  à  l'abri  des  tamaris  et  des  zizy- 
phus.  Dans  les  riches  plaines  de  Géhézareth,  d'Acre  et 
de  Phénicie,  le  genre  perdrix  est  principalement  repré- 
senté par  le  francolin,  francolihus  vulgœris,  bien 
connu  dans  l'Inde  et  dans  quelques  rares  régions  du 
sud  de  l'Europe.  Le  mâle  est  un  bel  oiseau,  avec  sa 
poitrine  noire,  ses  lianes  largement  mouchetés  de 
blanc  et  son  collier  châtain  frangé  de  taches  noires  et 
blanches.  Le  francolin  se  cache  dans  les  herbes  épaisses 
et  dans  les  cultures  des  plaines  marécageuses,  de  telle 
sorte  qu'il  est  bien  plus  aisé  de  l'entendre  que  de  l'aper- 
cevoir. —  Au  nom  hébreu  de  qorë  se  rattache  aussi 
un  autre  gallinacé,  le  coq  de  bruyère  des  sables,  plero- 
cles,  très  abondant  dans  les  districts  arides  de  la 
Palestine.  Cet  oiseau  ressemble  assez  au  pigeon  et 
fréquente  par   myriades    les    terrains   sablonneux    de 


127 


PERDRIX 


PERE 


128 


l'Asie  et  de  l'Afrique.  On  en  voit  jusque  dans  le  nord 
de  l'Espagne  et  dans  les  Landes  françaises.  Le  coq  des 
sables  commun,  pterocles  arenatïus,  le  khudry  des 
Arabes,  se  trouve  dans  le  désert  de  Judée.  Une  autre 
espèce  le  pterocles  setarius,  le  kata  des  Arabes,  se 
montre  de  temps  en  temps  par  milliers  dans  les  parties 
découvertes  de  la  vallée  du  Jourdain  et  dans  le  désert 
qui  est  à  l'est.  Le  désert  de  Judée  et  les  abords  de  la 
mer  Morte  sont  encore  fréquentés  par  deux  autres 
espèces,  le  pterocles  exustus  et  le  senegalensis,  dont  le 
plumage  présente,  avec  des  traits  délicats,  une  tonalité 
générale  en  harmonie  avec  celle  du  terrain.  De  là  vienl 
que  les  oiseaux  du  genre  perdrix  échappent  si  facile- 
ment à  la  vue  de  leurs  ennemis.  Cf.  Tristram,  The 
MituralhUtory  of  the  Bible,  Londres,  18S'.I,  p. 224-229. 
2»  La  perdrix  dans  l'Écriture.  -  La  Sainte  Ecriture 
fait  trois  fois  mention  de  la  perdrix.  David  constate  que 
Saiil  le  poursuit  a  comme  on  poursuivrait  une  perdrix 
dans  les  montagnes  ».  I  Reg.,  XXVI,  20  Cette  comparai- 
Bon  est  parfaitement  justifiée.  On  a  vu  plus  haul 
comment  les  perdrix  des  différentes  espèces  commune* 
en  Palestine  sont  poursuivies  à  travers  les  rochers  et 
finissent  par  se  laisser  prendre,  quand  la  fatigue  les  a 
harassées.  Ainsi  Saûl  comptait  épuiser  les  forces  de 
David  par  une  poursuite  acharnée  et  finir  pars'empan  r 
de  |„i.  _  On  lit  dans  l'Ecclésiastique,  XI,  32  (28)  : 

Comme  la  perdrix  de  chasse  dans  sa  cage, 
\m-,i  est  le  cœur  de  l'orgueilleux, 
li  comme  l'espion  il  guette  la  ruine. 
Changeant  le  bien  en  mal,  il  dresse  des  pièges. 

Celte  perdrix  de  chasse,  TilpotE  brfltvcrfi,  esl  celle  q i 

employait  comme  appeau.  On  dressait  pour  cet  usage 
des  alouettes,  des  linottes,  des  pigeons,  des  cailles  et 
surtout  des  perdrix.  Celles-ci  étaient  ensuite  placées 
dans  une  cage  qu'on  dissimulait  en  partie  au  moyen 
d'un  couvert  di  feuillage.  En  avant  de  la  cage,  un  filet 
manœuvré  par  un  chasseur  caché,  pouvait  s'abattre  sur 
les  oiseaux  qu'attiraient  les  cris  des  perdrix  prison- 
nières, ou  les  empêtrer  de  telle  sorte  qu'il  était  ensuite 
aisé  ,le  les  prendre  à  la  main.  Cf.  Tristram,  The  natu- 
',.„;  hislnrij.  p.  Hi3-I6i.  L'orgueilleux  méchant  et  per- 
fide esl  comparé  à  l'oiseau  qui  serl  d'appeau  :  il 
attire  auprès  de  lui,  mais  pour  perdre  et  faire  tomber 
dans  ses  pièges.  —  Enfin,  .lérémie,  xvii,  11,  emprunte 
;iux  ,,,,,-urs  iie  la  perdrix  cette  autre  comparaison  : 

Une  perdrix  couve  (des  œufs)  qu'elle  n'a  pas  pondus; 

t  L'homme  qui  acquiert  des  richesses  injustemi  nt 
\u  milieu  de  ses  jours,  il  doit  les  quitter, 
I  |  à  sa  lin  il  n'est  plus  qu'un  insensé. 

Ce  texte  semble  supposer  que  la  perdrix  va  s'en 
d'œufs  d'oiseaux  d'une  autre  espèce,  qu'elle  les  couve  et 
,|„  èii-iule  les  poussin*  abandonnent  cille  qui  n'est  pas 
leur   mère.  Celle  dernière    se    Irouvrrail   alors   dans  le 

CaS  de  la  poule  qui  a  couvé  des  œufs  de  canards, 
comme  on  dit  proverbialement  en  français.  Lechaldéen 
traduit  :  «  Voici,  comme  la  perdi  ix  rassemble  des  œufs 
qui  ne  s. .ut  pas  h  elle,  et  en  les  chauffant  couve  des 
poussins  qui  pourtant  ne  la  suivent  pas.  ainsi  en  est-il 
de  tout  méchant  qui  possède  des  richesses  mal  acquises,  i 
On  lit  dans  les  Septante  :  «  La  perdrix  a  crié,  elle  a 
rassemblé  ceux  qu'elle  n'a  pas  engendrés,  i   el  dans  la 

Vulgate  La  perdrix    a    couvé  ceux    qu'elle  n'a  pas 

î,  endrés.  i  Saint  Ambroise,  qui  a  toute  une  lettre 
sur  les  mœurs  de  la  perdrix,  Ep.  \\.\/M.  xvi, col.  1 009- 
UI71.  accepté  le  fait  de  la  perdrix  s'emparant  d'œufs 
étrangers.  Cf.  Bexaem.,  n,  3,  t.  xiv.  col.  246.  Saint 
Jérôme,  lu  'fer.,  m,  17,  t.  xxiv,  col.  789.  pour  justifier 
celle  assertion,  s'appuie  sur  les  auteurs  d'histoire  natu- 
relle, qu'il  cite  d'ailleurs  assez  vaguement.  Saint  Augus- 
tin, Cont.  Faust.,  XIII,  12,  t.  xi.ii,  col.  289,  explique  le 
même    texte,  mais    sans  s'arrêter   au    rapt  des    œufs 


étrangers.   Il  est  à  remarquer  que  le  texte   hébreu  ne 
suppose  nullement   que  des   œufs  soient   pris  par   la 
perdrix  à  d'autres  oiseaux.  D'ailleurs  les  faits  ne  justi- 
fient pas    cette   affirmation.  Le   coucou  va  porter  ses 
œufs  dans   le  nid  d'un   autre  oiseau  qui    les  couve  à 
son  insu,  mais  on  ne  cite  pas  d'oiseau  qui  aille  s'empa- 
rer des  œufs  d'un  autre  pour  les  couver  lui-même.  Le 
texte  hébreu  dit   seulement  :  qorê'   dâgàr  velu'  yàlâd, 
<•  la  perdrix  a  couvé  et  n'a  pas  engendré.  »  En  suppo- 
sant les  deux  termes  de  la  phrase  unis  par  un  pronom 
relatif,  8  la  perdrix  a  couvé  (ce  qu'elle)   n'a   pas  engen- 
dré, t.  il  suffirait,  pour  justifier  l'assertion, de  dire,  non 
pas  que  la  perdrix  a  pris  des   œufs,  mais  qu'on  lui  en 
a  mis  à  couver  qu'elle  n'avait  pas  pondus,  et  que  ces 
nuls,  appartenant  à    des  oiseaux  qui    n'étaient   pas  de 
son  espèce,  ont  donné  des  poussins  qui  l'ont  abandonnée 
pour  se  livrer  à  leurs  allures  propres.   Ainsi  l'homme 
acquiert  injustement   des  richesses  qui,  à  un  moment, 
l'abandonnent  et   sont  perdues  pour  lui,  par  un  juste 
retour  des  choses.  Le  verbe  dàgâr\eu\  dire  i  amasser  » 
pour  couver,  quand  il  s'agit  des  oiseaux.  Mais  sa  signi- 
fication ne  s'étend  pas  jusqu'à  l'idée  d'aller  chercher  di  - 
œufs   ailleurs  que  dans  le    nid  où    ils   sont    déposés. 
Quant  au  verbe    yàlâd,    il    signifie    «    engendrer  »  et 
o  pondre  »,  en  parlant  des  oiseaux.  Mais  comme  ce  pas- 
sage de  Jérémie   est   le  seul   où  yàlâd  soit  employé  à 
propos  d'oiseaux,  on  ne  voit  pas  pourquoi  ce  verbe  ne 
pourrait   pas   signifier  «  engendrer    »  dans  le   sens  de 
o  faire  éclore  »,  d'où  la  traduction  possible  :  <•  La  per- 
drix a  couvé  et  n'a  pas  fait  éclore,  •  c'est-à-dire  n'a  pas 
mené   à  terme  sa  couvée.   Cf.  Yatahle,  dans  le  Script. 
Sacr.    cursus   conipl.    de   Migne,   Paris.     1841,    t.    xix. 
col.  175.  "  Sur  ce  passage  de  Jérémie,  écrit  Tristram, 
The  nalural  history,  p,  225,  on  a   propos.'  plusieurs 
commentaires  ingénieux,  dont  quelques  uns  sont  con- 
traires aux    faits.   On    a  affirmé  que  la   perdrix    dérobe 
les   œufs  d'autres  oiseaux,  les  couve  pour  son  propre 
compte,  d'où  la  traduction  du  passage  :    Elle  rassemble 
des  œufs  qu'elle  n'a  pas  pondus.  Mais  il  n'est  pas  vrai 
que   la  perdrix  dérobe  les  couvées  des  autres.  Il   n'\  a 
qu'une  vraie   interprétation.    La  perdrix    pond    un    1res 
grand  nombre  d'œufs.   l'ne  fois,  j'ai  trouvé    un  nid    de 
trente-six  œufs  dans  désert  de  Judée.  Mais  elle  a  beau- 
coup   d'ennemis,  parmi  lesquels  l'homme  n'est  pas  le 
moindre,  qui  recherchent  son  nid  el  lui  dérobent  ses 
œufs.  Les  œufs  de  perdrix  sont  assidûment  recherchés 
par  les  Arabes  qui  en  font  leur  nourriture.  Ils  sont  aisés 
à  trouver  el  la  quantité  détruiteannuellementestsurpre- 
nanie.  Durant  un  printemps,  en  Palestine,  près  de  huit 
cents  œufs  de  perdrix  grecque,  caccabii  saxatilis,  ont  été 
apportés  à  noire  camp;  nous  avions  l' ha  blinde  de  les  utili- 
ser chaque  jour,  encore  tout  frais,  pour  faire  des  

lottes.  Autrefois  OU  les  ramassait  sans  doute  dans  le  même 
but.  La  pensée  du  prophète  est  donc  que  l'homme 
devenu  riche  par  des  moyens  injustes  n'aura  guère  la 
jouissance  de  sa  prospérité  mal  acquise,  mais  qu'il  la 
perdra  prématurément,  comme  la  perdrix  qui  commen- 
.  couver,  mais  est  rapidement  dépouillée  de  tout 
espoir  de  couvée.  ■  La  comparaison  poil,  rail  ainsi,  non 

-m  la  manière  dont  les  richesses  injustes  sont  acquises, 
mais  sur  la  rapidité  avec  laquelle  elles  disparaissent. 
Il  faudrait  donc  traduire  : 

La  perdrix  couve,  sans  mener  à  tenue: 
Ainsi  l'homme  qui  acquiert  des  richesses  injustement 

11.  L.ESÈTHE. 

PÈRE  (hébreu  :  'ab;  Septante  :  ic«Tifa;  Vulgate  : 
pater),  celui  qui  a  engendré  des  enfants  avec  le  concours 
de  la  mère.  Le  nom  de  père  est  employé  par  la  s  linte 
Ecriture  dans  des  sens  divers,  tantôt  par  rapport  aux 
hommes  tantôt  par  rapport  à  Dieu. 

[,  |'m;  euppom  mx  HOMMES.  —  1°  Père  au  sens 
naturel.  Coll.,  H.  21;  IX.  18,  etc.  —  Sur  les  droits  du 
père,  voir  FàMIIXE,  t.  n.   col.  2170.  Les  devoirs  envers 


129 


PERE 


130 


sont  souvent  rappelés  aux  enfants.  Exod.,  xx,  12; 
Matth.,  xv.  I;  xix,  5;  Mare.,  vu,  10;  x,  19;  Luc.,  xviu, 
'20;  Eph.,  vi,  2,  etc.  Les  coups  ou  les  malédictions 
adressés  au  père  étaient  punis  de  mort.  Exod.,  XXI,  lô, 
17.  Voir  MÈRE,  t.  iv,  col.  995. 

2°  Grand-père.  —  Ahraham  est  appelé  père  de  Jacob, 
bien  qu'Isaac  sépare  l'un  de  l'autre.  Gen.,  xxvm,  13. 
Jacoli  appelle  pères  Abraham  et  Isaac.  Gen.,  xux,  29. 

::  Ancêtres.  —  Gen.,  xlvi,  34;  Num.,  xiv,  18,  etc., 
et  particulièrement  ceux  d'un  peuple.  Très  fréquem- 
ment, il  est  parlé  aux  Israélites  de  leurs  pères,  c'est-à- 
dire  des  premiers  hommes  de  leur  race  qui  ont  reçu  les 
promesses  divines  et  ont  été  témoins  des  merveilles 
de  la  puissance  de  Dieu.  Exod.,  m,  15;  xiil,  5;  Num., 
xx.  15;  Ruth,  iv.  17;  III  Reg.,  xiv,  15;  IV  Reg.,  xiv,  3; 
XVIII,  3;  Tob.,  m,  13;  Judith,  v,  7;  Ps.  xxn  (xxi),  5; 
xi.iv  (xuii),  2;  Is.,  i.i,  2;  xlhi,  27;  Jer.,  xvi,  11.  12; 
1  Mach.,  x,  52;  II  Mach.,  i,  25;  Joa.,  vu,  22;  Acl.,  m, 
13,  etc.  Quelquefois,  on  donne  le  nom  de  père  à  un 
ancêtre  très  éloigné.  Adam  est  le  père  commun  de  tous 
les  hommes.  Eccli.,  xl,  1  ;  xlix,  19.  David  est  le  père 
du  roi  Asa,  III  Reg.,  xv,  11,  et  ensuite  du  Christ.  Luc, 
i.  32.  —  Rejoindre  ses  pères,  dormir  avec  ses  pères, 
c'est  mourir  et  passer  dans  une  autre  vie  où  l'on  re- 
trouve les  ancêtres.  Gen.,  xv,  15;  xi.vii,  30;  Deut.,  xxxi. 
16;  II  Reg.,  vu,  12;  III  Reg.,  n,  "10;  xiv,  20;  xvi,  6; 
xxu.  10;  IV  Reg.,  xxi,  18;  î  Mach.,  H,  69,  etc.  Le  roi 
Anliochus  Eupator  exprime  cette  idée  sous  la  forme 
païenne  quand  il  écrit  que  son  père  a  été  »  transféré 
parmi  les  dieux  ».  II  Mach.,  xi,  23. 

i  Souche  d'un  peuple.  —  Sera  est  le  père  de  tous 
les  fils  d'Héber,  Gen.,  x,  21;  Abraham,  celui  d'une 
multitude  de  nations,  Gen.,  xvn,  4;  Eccli.,  xliv,  20; 
Moab,  celui  des  Moabites,  et  Ben-Ammi,  celui  des 
Ammonites,  Gen..  xix,  37;  Esaii,  celui  des  Iduméens. 
(mu.,  xx.wi.  il,  13,  etc.  Ézéchiel,  xvi,  3,  dit  que  le 
père  îles  Israélites  était  un  Amorrhéen,  afin  de  signifier 
que  les  fils  de  Jacob  sont  partis  de  Chanaan  pour  aller 
en  Egypte,  où  ils  sont  devenus  un  peuple.  Les  Israélites 
revendiquent  souvent  comme  pères,  c'est-à-dire 
comme  fondateurs  de  leur  nation,  Abraham,  Matth., 
m.  9;  Luc,  i,  73;  m,  8;  xvi,  21;  Joa.,  un,  39,  53,  56; 
Act.,  vu,  2;  Rom.,  iv.  1;  12,  16;  Jacob.,  n.  21;  Isaac, 
Rom.,  ix.  H);  Jacob,  Joa.,  IV,  12,  et  même  David. 
Marc.  XI.   Kl;  Act.,  IV,  25. 

.")■'  Instituteur  d'un  genre  de  vie.  —  Jabel  est  le  père 
i  ceux  qui  habitent  sous  la  tente  et  au  milieu  des 
troupeaux,  Jubal  le  père  de  ceux  qui  jouent  des  instru- 
ments. Gen.,  iv,  20,  21.  Jonadab,  fils  de  Réchab,  est 
le  père  des  Réchabites,  qui  s'abstiennent  de  vin.  Jer., 
xxxv.  6,  8.  Phinées  est  le  père  de  ceux  qui  se  montrent 
zélés  pour  la  cause  de  Dieu.  I  Mach.,  il,  54. 

<'i"  Maître.  —  Michas  demande  à  un  lévite  d'être  son 
père  et  son  prêtre.  Jud.,  xvn,  10;  xvin,  19.  David 
appelle  Saùl  son  père.  I  Reg.,  xxiv,  12.  Elisée  donne 
ce  nom  à  Elie,  IV  Reg.,  u,  12,  et  lui-même  le  reçoit 
du  roi  d'Israël,  IV  Reg.,  vi,  21;  xm,  14,  et  du  roi  de 
Syrie.  IV  Reg.,  vin,  9,  Les  serviteurs  de  Naaman  l'ap- 
pellent père.  IV  Reg.,  v,  13.  Les  relations  de  maître  à 
disciple  sont  assimilées  aux  relations  de  père  à  fils. 
Voir  Fils,  t.  H,  col.  2252.  Saint  Paul  dit  aux  Corin- 
thiens qu'ils  pourraient  avoir  dix  mille  maîtres,  mais 
qu'ils  n'ont  qu'un  père,  l'apotre  qui  les  a  engendrés 
en  Jésus-Christ.  I  Cor.,  iv,  15. 

7  Bienfaiteur.  —  Job,  xxix,  16,  a  été  le  père  des 
pauvres.  L'homme  de  bien  doit  dire  comme  un  prie 
pour  les  orphelins.  Eccli.,  iv,  10.  Razias  était  «  ap- 
i.  '•'  le  père  des  Juifs  à  cause  de  sa  bienfaisance,  o 
U  Mach.,  xiv,  37.  i-.liacim.  intendant  d'Ézéchias,  devait 
être  un  père  pour  h  is  habitants  de  Jérusalem,  Is.,  xxn. 
21,  mais  il  ne  sut  pas  conserver  sa  situation. 

8°  Conseiller.  —  1.  En  Egypte,  losrpli  est  constitué 
père  du  pharaon.  Gen.,  xi.v,  x.  «  Les  traducteurs  de  ce  pas- 

LIICT.    DE  I.A  BIBLE. 


sage,  à  commencer  par  les  Septante,  ontcru  y  reconnaître 
le  mot  hébreu  ieab,  «  père  »,  Ce  sont  les  textes  égyptien  i 
qui  nous  informent  que,  loin  d'être  hébreu,  le  titre  de  ab 
pu  piriio  désigne  un  inspecteur  ou  intendant  royal  atta- 
ché tout  spécialement  à  la  maison  pharaonique.  Plu- 
sieurs des  précieux  papyrus  historiques  du  temps  de  la 
XIX"dynastie,dont  les  textes,  sous  forme  desimpies  let- 
tres et  communications,  ont  été  composés  par  des  scribes 
et  employés  de  la  cour,  se  rapportent  à  ces  ab  en 
pirâo,  ces  officiers  supérieurs  du  pharaon  dont  le  haut 
rang  est  clairement  indiqué  par  le  style  plein  de  res- 
pect de  la  part  de  ces  scribes  de  rang  inférieur.  •• 
Brugsch,  L'Exode  et  1rs  monuments  égyptiens,  1875, 
p.  17.  On  ne  voit  pas  que  le  titre  de  «  père  »  ait  été 
employé  dans  le  protocoIeegyptien.il  y  avait  seulement, 
à  la  cour  du  pharaon,  des  rokhou  ou  «  commis  »  du  roi, 
qui  pouvaient  traiter  avec  lui  sans  intermédiaire  et  qui, 
descendants  éloignés  des  princes  et  des  princesses  de 
jadis,  étaient  plus  ou  moins  apparentés  au  souverain 
régnant;  puis  des  samîrou  ou  «  amis  »,  anciens  com- 
pagnons du  prince  dont  ils  avaient  partagé  l'éducation 
et  les  jeux.  Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne  de  l'Orient 
classique,  1. 1,  p.  280,  281.  On  peut  s'étonner  que  Joseph 
ait  pris,  vis-à-vis  de  ses  frères,  un  titre  purement  égyp- 
tien et  probablement  inconnu  d'eux;  mais  ce  titre  était 
suffisamment  expliqué  pour  eux  par  ceux  qui  suivent, 
'lidûn,  «  seigneur  »,  et  moSêl,  «  prince  »,  de  toute 
l'Egypte.    Le    Samaritain    traduit    ici     '.<//     par     rê'éh, 

«  ami,  conseiller  ».  En  égyptien,  I   I  ♦,<*&,  voulant  dire 

«  cœur  »,on  pourrait  expliquera  titre  dans  le  sens  d'ami. 

Mais,  "5\  àb,  signifie  aussi  «  préposé,  inspecteur  »;  pe 

ahu  n  pirao,  «  les  inspecteurs  royaux,  »  Papyrus  Anas- 
tasi,  v,  24;  ce  qui  convient  à  la  fonction  de  Joseph.  — 
2.  Le  roi  Assuérus  appelle  Aman  son  «  second  père  », 
c'est-à-dire  son  ministre  et  son  conseiller.  Esth.,  xm,  6. 
—  3.  La  même  appellation  était  en  usage  à  la  cour  dis 
rois  syriens.  I  Mach.,  xi,  32.  Matathias  mourant  recom- 
mandait à  ses  fils  d'avoir  confiance  en  leur  frère  Simon 
homme  de  conseil  et  destiné  à  être  pour  eux  un  père. 
I  Mach.,  n,  32. 

9°  Auteur.  —  Job,  xxxvm,  28,  parle  du  père  de  la 
pluie,  c'est-à-dire  de  celui  qui  l'a  créée.  Les  chefs 
d'Israël,  devenus  idolâtres,  disent  au  bois  :  a  Tu  es  mon 
père,  »  et  à  la  pierre  :  «  Tu  m'as  mis  au  monde,  g  Jer., 
u,  2/.  c'est-à-dire  attribuent  leur  existence  aux  idoles 
.1.    boi    "n  de  pierre. 

lll"  l'ère  adoptif.  —  Saint  Joseph  est  appelé'  père  de 
Jésus,  en  ce  sens  qu'époux  de  Marie,  il  a  été  appelé  à 
remplir  les  fonctions  de  père  adoptif  auprès  du  divin  En- 
fant. Luc,  11,33,48.  Les  Juifs  ont  adopté  le  diable  pour 
père,  en  se  comportant  à  son  égard  comme  des  enfants 
dociles  et  en  obéissant  à  ses  inspirations.  Joa.,  vin,  44. 

Il»  Vieillard.  —  A  raison  de  son  âge,  il  doit  être 
traité  comme  un  père.  I  Tim.,  v,  1.  —  La  Vulgate 
ajoute  à  Bacchus  le  nom  de  père,  qui  ne  se  lit  pas 
dans  le  texte  grec  II  Mach.,  xiv,  33.  —  Dans  Job, 
xxxiv,  36,  'âbi  ne  signifie  pas  «  mon  père  »,  comme 
traduit  la  Vulgate;  c'est  un  mot  de  sens  douteux  ou 
une  simple  interjection  dont  les  Septante  n'ont  pas 
tenu  compte.  —  Le  mot  'db  entre  dans  la  composition 
de  beaucoup  de  noms  propres.  Voir  An,  t.  i,  col.  12. 

II.  l'Ali  rapport  A  Dieu.  —  Dieu  est  le  père  par  ex- 
cellence  et  toute  paternité  a  en  lui  son  origine.  Eph., 
m.  15.  .Mais  Dieu  est  père  à  des  titres  divers.  — 
1»  Père  de  tous  les  hommes.  —  Celte  idée  n'apparait 
qu'aux  temps  voisins  de  l'Évangile.  »  0  Père,  c'est  votre 
Providence  qui  gouverne  »  le  vaisseau  sur  la  mer. 
Sap.,  xiv,  3.  Notre-Seigneur  apprend  aux  hommes  à 
reconnaître  le  Père  céleste,  le  Père  qui  est  dans  les 
cieiiN.  Matth.,  v,  10,  48,  etc.,  qui  s'occupe  de  tous  et 
fait  lever  sou  soleil  sur  les   méchants   comme  sur  les 


131 


PÈRE    —    PEREE 


132 


lions.  Mal  th.,  v.  45.  11  leur  enseigne  à  l'invoquer  en 
l'appelant  »  notre  Père  ».  Matth.,  vi,  9;  Marc,  xi,  25; 
Luc.  M,  ■-,  13.  11  veut  qu'on  ne  donne  à  personne  le 
nom  de  père,  c'est-à-dire  en  l'entendant  dans  le  sens 
de  créateur  et  de  souverain  Maître,  parce  que  les 
hommes  n'ont  qu'un  seul  Père,  celui  qui  est  dans  les 
cieux.  Matth..  mu,  9.  —  2°  Père  des  Israélites.  — 
Jéhovah  est  le  père  et  le  créateur  d'Israël.  Deut., 
xxxn,  6.  Les  prophètes  le  rappellent,  Is.,  lxiv,  8; 
.1er.,  m,  i;  xxxi,  9,  parfois  pour  reprocher  aux  Israé- 
lites de  ne  pas  faire  honneur  à  cette  paternité.  Mal.,  I, 
6.  Isaïe,  lxiii,  10,  va  jusqu'à  dire,  en  s'adressant  à 
Dieu  :  «  Vous  êtes  notre  père;  car  Abraham  nous 
ignore  et  Israël  ne  nous  connaît  pas,  »  ce  qui  signifie 
que  la  paternité  d'Abraham  et  de  Jacob  est  absolument 
néj;li".eahle  en  iv-:ni]  de  celle  de  Hicu,  el  que  d'ailleurs 
les  patriarches  ne  peuvent  rien  pour  leurs  descendants. 
—  3"  Père  du  juste.  —  David  invoque  Dieu  comme  son 
père.  Ps.  lxxxix  (lxxxviii),  27.  Jéhovah  promet  d'être 
un  père  pour  Salomon,  si  ce  prince  lui  est  fidèle. 
II  Reg.,  vu,  14;  I  Par.,  xvii,  13.  Le  fils  de  Sirach  s'adresse 
à  Dieu  comme  au  souverain  Maître  de  sa  vie.  Eccli., 
XXIII,  1,  i.  Il  lui  dit  :  «  Seigneur,  tu  es  mon  père!  » 
ce  que  les  versions  traduisent  par  :  «  Seigneur,  père  de 
mon  Seigneur.  »  Eccli.,  Ll,  10.  Dans  la  Sagesse,  II,  16, 
les  impies  constatent  que  le  juste  se  glorifie  d'avoir 
Dieu  pour  père.  —  4°  Père  du  chrétien.  —  Dieu  est 
un  père  pour  le  chrétien,  en  vertu  de  l'adoption  divine 
méritée  par  le  Fils  et  opérée  par  le  Saint-Esprit,  Rom., 
vm,  15;  Gai.,  IV,  6,  par  conséquent  dans  un  sens  bien 
supérieur  à  celui  de  la  paternité  qui  s'exerce  envers 
les  hommes  en  général,  les  Israélites  ou  les  justes  de 
l'ancienne  Loi.  —  5"  Père  de  son  Fils  éternel.  —  Vis-à- 
vis  de  ses  créatures,  Dieu  est  père,  sans  distinction  de 
personnes  divines,  par  droil  de  création,  de  conserva- 
tion, d'élection,  de  rédemption  et  d'adoption.  Mais, 
au  sein  même  de  l'auguste  Trinité,  l'une  des  personnes 
a  le  titre  de  Père  vis-à-vis  d'une  autre  personne  qui  a 
li  i  tre  de  Fils  el  qui  esl  éternellement  engendrée  par 
la  première.  Notre-Seigneur  esl  ce  Fils  du  Père,  et  sa 
filiation  éternelle  n'est  en  rien  modifiée  par  son  incar- 
nation. II  parle  du  l'ère  céleste,  qui  exerce  sa  puissance 
et  sa  bonté  sur  toutes  les  créatures  en  tant  que  Dieu 
unique  ri  indivisible;  mais  il  nomme  aussi  très  sou- 
vent un  être  divin  qu'il  appelle  «  mon  Père  »,  devant 
lequel  il  s'abaisse  en  tant  qu'homme,  Joa.,  xvn,  4; 
Matth.,  xxvi,  39;  Marc,  xiv,  36;  Luc,  xxn,  42,  etc., 
mais  avec  lequel  il  revendique,  en  tant  que  Dieu,  les 
droits  d'égalité.  Joa.,  x,  30;  xiv,  9;  Matth.,  xxvm,  19, 
etc.  Notre-Seigneur  parle  continuellement  de  son  Père 
dans  ce  sens  qui  lui  est  personnel.  Matth.,  xxiv,  36; 
XXVI,  39,  12;  Luc,  n,  4-9;  x,  21;  xxn,  29;  xxm,  34, 
Hi:  tua..  1,14;  ii,  16;  m,  35;  v.  17;  vm,  27;  xiv,  6,  9, 
etc.  Les  Juifs  le  comprenaient  si  bien  en  ce  sens  qu'ils 
lui  reprochaient  de  t  dire  que  Dieu  étail  son  père,  se 
faisant  lui-même  l'égal  de  Pieu.  »  Joa.,  v,  18.  Voir 
Fils  di  Dieu,  i.  ti,  col.  2254;  Jésus-Christ,  t.  m, 
col.  1501-1503.  Cf.  Lepin,  Jésus  Vessie  et  Fils  de  Dieu 
d'après  les  Évangiles  synoptiques,  Paris,  1905,  p.  267- 
337.  IL  Lesêtre. 

PÉRÉE  (Llepafa),  »  région  au  delà  »  et  à  l'est  du 
Jourdain,  nom  d'une  province  de  Palestine  au  temps 
du  Sauveur. 

I.   Nom   m    lcceptio  -    Employé    par  Josèphe, 

Bell.  jud.,  III.  ni.  3,  ce  i corre  pond  à  la  locution 

Ttspxv  to-j  'IopSdwov,  o  au  delà  du  Jourdain  »,  commu- 
nément usitée  dans  tesSeptante  pour  traduire  l'expres- 
sion èber  hay-Yardên  du  texte  hébreu,  souvent  em- 
ployée pour  désigner  toute  la  région  orientale  occupée 
par  les  Israélites.  Dans  l'Ancien  Testament  en  général 

et  parfois  dans  le  Nouveau,  co e  Joa.,  i,  28.  m,  26; 

x,  10  ei  Math.,  iv,  15,  où  l'Évangéliste  reproduit  le  moi 


d'Isaïe,  vm,  23  (Vulgate,  IX,  1),  la  locution  est  prise 
comme  un  véritable  nom  propre  équivalant  au  nom  de 
Pérée,  ou  Transjordane.  de  l'historien  juif.  Elle  rem- 
place, depuis  la  captivité,  le  nom  de  Galaad,  pour  dé- 
signer de  même  quedans  les  temps  anciens  toute  la  partie 
orientale  de  la  terre  d'Israël.  Dans  l'énumération  des 
régions  dont  les  populations  accouraient  pour  écouter 
la  parole  de  Jésus,  la  «  Transjordane  »  ou  Pérée  est 
citée  après  la  Galilée,  la  Décapole,  Jérusalem  et  la  Judée. 
Matth.,  iv,  25;  cf.  Marc,  ni,  7-8. 

II.  Limites  et  étendue.  —  Josèphe  recense  la  Pérée 
avec  la  Judée,  la  Samarie  et  la  Galilée,  comme  une  des 
quatre  grandes  divisions  de  la  terre  d'Israël.  Elle  est 
beaucoup  plus  vaste  que  la  Galilée,  mais  aussi  plus 
accidentée  et  plus  sauvage,  quoiqu'encore  abondante 
en  fruits,  couverte  d'arbres,  spécialement  de  vignes, 
d'oliviers,  de  palmiers  et  bien  arrosée  par  des  sources  et 
des  cours  d'eau  permanents.  Elle  s'étend  en  longueur 
du  sud  au  nord,  de  Machéronte  [Menhour)  ou  de  la 
Moabitide  et  de  l'Arnon  à  Pella,  et  du  Jourdain,  à 
l'ouest,  à  la  frontière  d'Arabie  ou  jusqu'à  Hésébon 
iljesbdn),  Philadelphie  (Amman)  el  Gérasa  (DjéraS), 
à  l'orient.  Bell,  jud.,  III,  m,  3.  Ainsi  limitée,  la  Pérée 
comprend  seulement  la  partie  méridionale  extrême  de 
la  Décapole,  si  même  elle  ne  l'exclut  pas  tout  entière. 
Il  s'agit  sans  doute  de  la  Perte  politique,  telle  qu'elle 
fut  quand  Pompée  déclara  libres  les  principales  villes 
de  la  Décapole,  ou  quand,  à  la  mort  d'Hérode  l'ancien, 
Auguste  les  annexa  à  la  province  de  Syrie.  Cf.  Ant. 
jud.,  XIV,  iv,  4;  XVII,  xi,  4;  Bell,  jud.,  I,  vu,  7.  La 
Pérée  était  en  cette  condition  au  temps  du   Sauveur. 

Cependant  l'historien  juif,  en  appelant  Gadara  la 
métropole  de  la  Pérée,  Bell,  jud.,  IV,  vu,  3,  en  recule 
ainsi  la  frontière  septentrionale  jusqu'au  Yarmouk, 
aujourd'hui  le  Serî'at  el-Menâderéh,  limite  du  terri- 
toire de  Gadara  (Umm-Keis).  Dans  ces  limites,  outre 
cette  dernière  ville,  étaient  enclavées  Pella  (Fahêl), 
Dion  (Khirbet)  et  Capitoliade  (Beil  er-Râs),  el  Gérasa 
DjéraS),  c'est-à-dire  la  moitié  des  villes  de  la  liéca- 
pole.  C'était  à  peu  pies  tout  le  territoire  des  anciennes 
tribus  de  Gad  et  de  Ruben,  le  pays  de  Adjloûn  actuel 
et  la  Belqà  septentrionale  au  nord  de  Vouadi  Môdjib, 
l'ancien  Arnon,  divisé  en  deux  parties  à  peu  près 
•'-aies  par  la  Zerqâ,  l'ancien  Jaboc.  Les  Talmuds,  qui 
considèrent  la  Perée  au  point  de  vue  des  observances 
légales,  y  l'ont  entrer  encore  plusieurs  localités  du  Mau- 
ran  et  du  Djédour,  comme  Nève  (Ndoua),  Édréi  [ed- 
Dera'a)  et  quelques  autres  qui  appartenaient  à  la  tribu 
de  Manassé  orientale.  Cf.  Mischna,  Baba  Bat  ru.  111,  2; 
Ketouboth,  xin,  9;  Tosil'tha,  même  traité  à  la  lin; 
Talmud  Bab.,  Sanhédrin,  h,  b,  etc.  Cf.  A.  Neubauer, 
Géographie  du  Talmud,  in-8°,  Paris,  1868,  p.  56,  241- 
251.  Voir  la  carte  de  Gad,  t.  ni,  col.  28. 

III.  Population.  —  Au  temps  du  Sauveur.  la  Pérée 
était  occupée  par  les  races  les  plus  diverses.  —  Les 
Moabiles,  qui  avaient  profilé  de  la  scission  du  royaume 
d'Israël     pour    se     réinstaller    dans    la     partie 

entre  l'Arnon  et  le  Jaboc.  ne  l'avaient  plus  quittée. 
Les  Ammonites  s'étaient  avances  vers   l'om  iu 

temps  des  Machabées  ils  occupaient  Jaser  el  les  alen- 
tours. I  Mach.,  v.  6-9.  A  eux  s'étaient  mêlés  les  Nabu- 
Ihéensel  diverses  autres  branches  ismaélites  OU  arabes. 
Cf.  1  Mach..  x,  25;  îx.  35,36;  Ant.jud.,  XII,  iv,  11, etc. 
Après  la    déportation    en    Assyrie  des  tribus  orientales 

•  i  Israël,   les   Syriens    de    Damas   avaient  pu  occuper 

c plètemenl  la  contrée.  Josèphe,  Bell,  jud.,  xvin,  I, 

nous  les  montre  peuplant  les  villages  delà  Pérée,  tant 
au  sud  qu'au  nord  du  Jaboc,  et  son  récit  les  suppose,  si- 
non formant  le  fond  de  la  population,  du  moins  no  n- 
breux  dans  les  principales  villes  du  pays,  à  Philadelphie 
mi  Amman,  a  Hésébon,  à  Gérasa,  à  Pella,  à  Gadara.  — 
A  ces  éléments  purement  orientaux  et  sémites,  était 
venu  se  joindre  lors  de  l'invasion  gréco-macédonienne 


133 


PEREE   —   PERGA.ME 


134 


l'élément  occidental  ou  japhétique.  Pella  de  Pérée, 
comme  son  homonyme  d'Apamée,  doit  sans  doute  son 
origine  à  des  soldats  de  l'armée  d'Alexandre  qui.  s'étant 
arrêtés  au  pied  des  monts  de  Galaad,  et  non  loin  au  nord 
du  Carith  (ouadi  Yâbis),  avaient  voulu  donner  à  leur 
ville  le  nom  delà  patrie  de  leur  maître.  Elle  aurait  pour 
fondateur,  ainsi  que  Lion,  s'il  faut  en  croire  Etienne 
de  Byzance.  Alexandre  lui-même  (332  avant  J.-C).  Cf. 
Reland,  Palœstina,  p.  736-737.  Les  autres  villes  de  la 
Décapole  dont  les  noms  sémitiques  indiquent  une  ori- 
gine plus  ancienne  durent  être  relevées  ou  agrandies  et 
embellies,  pour  recevoir  des  colonies  de  même  genre. 
Vers  la  même  époque,  les  Juifs  trop  à  l'étroit  dans  la 
Judée  étaient  revenus  dans  cette  Transjordane  que  leur 
avait  donnée  Moïse.  Devant  la  fureur  des  autres  popu- 
lations toutes  païennes,  les  Machabées  avaient  dû  ra- 
ter  leurs  frères  dans  la  terre  de  Juda,  I  Mach.,  v, 
15.  Après  les  conquêtes,  en  cette  région,  de  Jean  Hyrcan 
135-107  .  d'Alexandre  Jannée  I  106-391  et  de  son  fils  Hyr- 
can (79-40i,  les  Juifs  s'établirent  de  nouveau  dans  un 
grand  nombre  de  villes  de  la  Pérée  où  se  trouvaient 
des  Syriens  et  en  relevèrent  un  grand  nombre  d'autres 
qui  avaient  été  ruinées.  Josèphe,  Aut.  jud.,  XIII,  4. 
De  gré  ou  de  force,  une  multitude  de  païens  embras- 
sèrent alors  la  religion  des  Juifs.  Cf.  Ant.  jud.,  XIII, 
XV,  i:  Bell,  jud.,  II.  xnii,  1.  Pompée,  en  63,  soustrait 
Gadara.  Pella,  Dion  à  la  domination  des  Juifs  et  déclare 
leurs  habitants  autonomes.  Aut.  jud..  XIV,  IV,  2,  4. 
C'était  sans  doute  le  même  motif  qui  détermina  plus 
lard  Auguste,  après  la  mort  d'Hérode  (40-11,  à  enlever 
Gadara  à  Ilérode  Antipas  (4-39),  et  à  la  rattacher  à  la 
Syrie,  parce  que  cette  ville  était  «  grecque  ».  Ant., 
XVII,  xi.  4.  Elles  étaient  toutefois  plus  grecques,  par 
leur  caractère  extérieur  et  la  religion,  que  par  le  nom- 
bre de  leurs  habitants  hellènes,  puisque  l'historien. 
Ant.,  XIII,  xv,  4,  nomme  Gadara  même  une  ville  «  de 
Syrie  g  et  qu'au  commencement  des  troubles  de  Judée 
(61),  les  Juifs  se  jettent  sur  elle  pour  venger,  par  le 
massacre  des  Syriens,  leurs  frères  traités  de  même  à 
Césarée.  Bell.  jud..  II,  xvm,  I.  —  Telle  était  la  popu- 
lation de  la  Pérée  quand  le  Christ  commença  la  pré- 
dication de  l'Évangile.  Les  foules  qui  accouraient  de  là 
et  de  la  Décapole  pour  l'entendre  étaient,  -ans  doute, 
pour  le  plus  grand  nombre,  des  Juifs  de  la  région  et 
c  des  judaïsants  »  ou  convertis.  Voir  Reland,  Palsestîna, 
Utrecht,  1714,  p.  197-200.  Cf.  Décapole,  t.  h,  col.  1333- 
1336;  Galaad.  t.  m,  col.  45-59;  MOAB,  t.  iv,  col.  1138- 
117?.  L.  1Ilil.lt. 

PEREIRA  DE  FIGUEIREDO  Antonio,  théologien 
portugais  né  au  bourg  de  Macao.  le  14  février  I7J">. 
mort  à  Lisbonne,  le  14  août  1797.  Il  lit  ses  études  au 
collège  des  Jésuites  à  Villa-Viçosa  et  entra  en  I7ii  à 
l'Oratoire  de  Lisbonne,  où  il  enseigna  la  grammaire 
1752  .  la  rhétorique  (1755),  et  la  théologie  (1761),  Dans 
le  conllit  qui  s'éleva  entre  le  Portugal  et  le  Saint-Siège 
il  défendit  d'abord  l'Église,  mais  Pombal  le  gagna  à  sa 
cause  et  le  combla  d'honneurs.  Il  quitta  l'habit  reli- 
gieux et  attaqua  violemment  le  Pape  et  les  doctrines 
les  dans  une  foule  de  publications.  Xous  n'avons 
à  mentionner  parmi  ses  écrits  que  sa  traduction  des 
Écritures  :  O  VelhoeNovo  Testaniento  em  Portuguez, 
23  in-8\  Lisbonne.  1778-1790.  Les  notes  qu'il  a  jointes 
à  sa  version  ne  sont  pas  toujours  orthodoxes.  Voir 
Portugaises  (Versions)  de  la  Bible. 

PEREYRA  Benoit,  exégète  espagnol,  né  vers  1535, 
pr. .-  de  Valence,  mort  à  Rome  le  6  mars  1610.  Il  entra 
au  noviciat  de  la  Compagnie  de  Jésus  en  1552,  pi 

iups  la   philosophie,   la   théologie    et    l'Écriture 

Sainte  et  se  fit  une  grande  réputation  par  son  savoir  et 

son  érudition.  Xous   lui  devons  :  l«   L'n  long  coinmen- 

1  diverses  dissertations  sur  la  Genèse,  en  4  in-f°  : 


Ben.  Pererii,  Valentini,  commentariorum  et  dispu- 
tationum  in  Genesim  tomi  quatuor.  Cet  ouvrage 
d'abord  imprimé  à  Rome.  1591-1595,  le  fut  ensuite  plu- 
sieurs fois  à  Lyon  et  à  Cologne.  —  2"  Un  commen- 
taire sur  Daniel,  en  16  livres,  dédié  au  cardinal  Caraffa, 
in-f°,  Rome,  1587  :  Ben.  Pererii,  Valentini,  commen- 
tariorum in  Danielem  proplietam  libri  sexdecim.  Il 
fut  réimprimé  à  Lyon  l'année  suivante,  à  Anvers  en 
1594.  Les  éditions  de  Trêves  (1618  et  1625)  ne  donnent 
que  la  4e  partie  de  ce  travail.  —  3»  Des  Dissertations 
considérables  sur  l'Exode,  Ingolstadt.  in-4",  1601  ;  L\on. 
1602  et  1607;  sur  l'Évangile  de  S.  Jean,  Lyon,  in-4», 
1608  et  1610;  sur  l'Apocalypse,  Lyon,  in-4»,  1606;  Ve- 
nise. in-8".  1607;  sur  VÉpitre  aux  Humains,  Ingolstadt. 
in-4»,  1603;  Lyon,  1604;  Ben.  Pererii,  Valentini,  sele- 
ctarum  disputalionum  in  Sacram  Scripturam  tomi 
quatuor.  Ses  autres  ouvrages  d'exégèse  restés  manus- 
crits sont  :  1°  In  B.  Matthœi  et  B.  Lucie  Evangelia 
commentant;  2°  Passio  secundum  IV  Evangelistas 
ea -jilirala  ;  3»  Explicatio  aliquot  capitum  S.Evangelii 
secundum  ilatthivum  et  Lucam;  4°  Prolegomena  m 
Epistolam  Divi  Pauli  ad  Romanos;  5°  Expositio 
Evangelii  S.  Joannis;  6"  Diverses  dissertations  sur  îles 
points  spéciaux.  P.  Bliard. 

PEREZ  DE  VALENCE  Jacques,  théologien  espa- 
gnol, né  à  Ayora,  diocèse  d'Orihuela,  mort  en  1490  ou 
1491.  Religieux  augustin.  il  occupa  les  premières  char- 
ges de  son  ordre  avant  de  devenir  évêque  de  Chrysopolis 
et  sufïragant  de  Frédéric  Rorgia,  cardinal  de  Valence, 
plus  tard  pape  sous  le  nom  d'Alexandre  VI.  On  a  publié 
de  Jacques  Perez  :  Expositio  in  caput  ut  Threnorum, 
in-f»,  Paris.  1482;  Centum  et  quinquaginta  Psalnii 
cum  diligentissima  eliam  titulorum  omnium 
sitione,  in-f»,  Valence,  1484;  Expositio  in  Cantica 
canticorum,  in-f°,  Venise,  1498;  Expositio  in  Exodum, 
in-f°,  Paris,  1533.  —  Voir  N.  Antonio,  Biblioth.  Bis- 
pana  vêtus,  t.  i,  p.  329.  R.  Heertebize. 

PERGAME  (grec  :  rô  IhV-xaov,  ^  Tléoya^oç;  ce 
nom  n'apparaissant  qu'au  datif  et  à  l'accusatif  dans  le 
Nouveau  Testament,  sans  article,  on  ignore  quel  genre 
lui  attribuait  l'écrivain  sacré',  ancienne  capitale  de  la 
Mysie,  dans  le  district  de  Teuthranie.  région  accidentée 
et  montagneuse;  puis  métropole  de  la  province  romaine 
de  l'Asia  propria,  en  Asie  Mineure.  Aujourd'hui. 
Bergamo  ou  Bergama  (tig.  19i.  Pergame  est  mention- 


19.  —  Monnaie  de  Pergame. 
Têtes  affrontées  de  Tibère  et  de  Livie.  CebaCTOI  Etn  nETP(Q- 
NIOrj.—^.eEONCEBACTONnEPrASIHNOI.  Temple  d'Auguste. 

née  en  deux  endroits  du  Nouveau  Testament  :  l»  Apoc. 
t.  11.  dans  la  liste  de  sept  Églises  d'Asie  Mineure 
auxquelles  saint  Jean  reçut  l'ordre  d'adresser  le  récil 
de  ses  visions  de  Patmos;  2°  Apoc,  II,  12,  en  tête  de 
la  troisième  des  sept  lettres  écrites  par  l'Apôtre  à  ces 
mêmes  Églises,  de  la  part  de  N.-S.  Jésus-Christ. 

I.  Topographie.  —  Au  dessus  d'une  plaine  ondulée, 
traversée  par  deux  cours  d'eau,  se  dresse  une  colline 
très  remarquable,  haute  d'environ  300  mètres,  a  la 
forme  arrondie,  qui,  vue  d'en  bas,  ressemble  à  un  cône 
de  pin  et  que  les  anciens  surnommaient  pour  ce  motif 
rtpo60io£i8lc.  Slrabon,  XIII,  iv,  1.  C'est  au  sommet  de 
cette  masse  de  trachyte  que  fut  bâtie  la  cité  primitivi 
de  Pergame,  avec  une  citadelle  ou  acropole  extrême- 


135 


PERGAME 


136 


ment  forte.  Plus  lard,  une  ville  beaucoup  plus  considé- 
rable s'étala  peu  à  peu  au  pied  de  la  montagne. 

Le  Kétéios  (aujourd'hui  Kestel-tchaï)  et  le  Sélinos 
Bergama-tchaî),  venant  tous  deux  du  nord,  coulent 
dans  des  ravins  profonds  et  abrupts.  Le  premier  longe 
simplement  la  ville;  comme  autrefois,  le  second  la 
traverse  sur  une  étendue  d'environ  800  mètres.  Pline, 
//.  .Y.,  v.  126.  Ils  vont  se  jeter,  l'un  et  l'autre,  à  quelques 
Kilomètres  au  sud  de  Pergame,  dans  le  Caïcos,  aujour- 
d'hui Sakyr-tchaï,  la  rivière  principale  de  la  région, 
qui  arrose  une  vallée  d'une  grande  beauté,  large  et 
fertile.  Strabon,  XIII,  iv,  2;  et  qui  a  son  embouchure  à 
environ  25  kil.  1 120  stades)  de  Pergame.  dansla  mer  Egée, 
près  de  l'ancienne  ville  d'Élaïa,  aujourd'hui  Tchanderlik. 


thère  (284-263);  Eumène  I"  263-2H);  Mtale  I"  241- 
L97  .  Eumène  il     197  159  .  Attale  II  (159-138);   Attale 

111  138-133).  Nous  ne  relèverons  que  les  traits  princi- 
paux de  leur  histoire,  en  tant  qu'elle  peut  intéresser 
leur  capitale. 

Apres  la  mort  d'Alexandre  le  Grand.  Pergame  tomba 
sous  la  domination  de  Lysimaque.  l'un  de  ses  généraux 
et  successeurs.  La  ville"  ne  consistait  alors  qu'en  une 
citadelle,  bâtie,  avec  un  certain  nombre  de  maisons,  au 
sommet  delà  montagne  isolée  qu'enserrent  le  Kétéios 
et  le  Sélinos.  Lysimaque  y  mit  en  sûreté  son  riche  trésor 
de  9  000  talents  (environ  44  000  000  de  francs  i.  dont  il 
confia  la  garde  à  l'eunuque  Philétère.  Celui-ci,  mettant 
à  profit  les  troubles   politiques    qui   régnaient   alors. 


20. 


Vue  de  l'Acropole  de  Pergame.  D'après  une  photographie. 


Le  Caïcos  était  autrefois  navigable.  A  Pergame,  le  K 

est  presque  toujours  à  sec;   le  Sélinos  a  un  peu 

qui  arrose  quelques  jardins.  Ou  sommet  de  l'acropole, 

la  vue  s'étend  jusqu'à  la  mer  et  jusqu'à  Mitylène. 

II.  Il,  GA.HE.  —  1"  A  l'origine.  —  anté- 

rieurement à  la  dynastie  qui  établit  la  puissance  de 
P  mie,  cette  ville  n'a  qu'une  histoire  assez  obscure. 
ou  presque  toute  légendaire.  Elle  paraît  avoir  été  fondée 
par  des  colons  grecs,  qui,  d'après  la  tradition  la  plus 
mblable,  étaient  orignaires  d'Arcadie.  Yoirllessel- 
iii,  m  •"    garni  l  i«  B 

1885;    E.  Chrœmer,  P  Leipzig,  1888.  La 

première  mention  faite  de  Pergame  dans  un  texte  his- 
torique ne  remonte  qu'au  début  du  iv>  siècle  avant 
,1,-C.   Xénophon  VII,  vm,  8;   Ilellenic,  III, 

i,  6.   Les  pins    anciennes  qu'on    ail  d'elle 

datent  des  années  ISO  I vant  notre 

:   Sous  1rs  prit  le  des  A t laies.   —  Au 

commencement   du    in    sii  I.-C,    Pergame 

1   tout  à  coup  une  grai  ,  il.',  grâce  à  ses 

rois,  les  Attalides,  dont  voici  la  liste  :  Philé- 


réussit  à  s'i  api  i  iu  trésor  "etïde  la  citadelle,  qu'il 
transmit  à  son  neveu  Eumène,  petit  dynastedes  environs, 
fondateur  de  la  brillante  famille  des  attalides.  attale  I  r 
reçut  d'Eumène  un  territoire  considérablement  agrandi, 
.  des  victoires  remportées  soit  sur  Antiochus  de 
Syrie,  soit  sur  les  Gaulois,  ou  Galates.  qui  envahirent 
1  Vsie  Mineure  en  279.  11  prit  le  titre  de  roi.  après  avoir 
battu  à  son  tour  ces  demi  rs  240  :  et  voyant  l'avantage 
qu'il  y  aurait  à  profiter  de  l'amitié  des  Romains,  dont 

l'influence  c mi  ni  ail  à  se  faire  sentir  en  Asie  Mineure, 

se  fil  leur  fidèle  allié.  Sous  son  règne,  Pergame  devint 
non  seulement  la  capitale  d'un  royaume  considérable 
et  l'une  des  villes  les  plus  importantes  de  l'Asie  anté- 
rieure, maisaussi  un  grand  centre  commercial  et  artis- 
tique,  et  une  métropole  d'une   magniùence    vraiment 

I  ,   prospérité   et   la   splendeur  de  la   citi 
crurent  encore  sous  Eumène II,  Strabon,  XIII,  iv,  2,  qui 
y  multiplia  les  monuments  somptueux,  sacrés  ou  pro- 

II  l'enrichit    notamment    d'une    bibliothèque 

ad  mirai, le  pour  l'époque,  où  l'on  comptait  plus  de 
•200  000  volumes  ou  rouleaux;  grâce  à  elle,  Pergame  fut 


137 


PERGAME 


138 


aussi  le  centre  d'un  grand  mouvement  littéraire  et 
scientifique.  Elle  fut  transportée  plus  tard  à  Alexandrie, 
Antoine  en  ayant  fait  présent  à  Cléopàtre.  Pline,  //.  N., 
[Il,  2.  Eumène  donna  également  aux  arts  une  impul- 
sion considérable,  et  établit  à  Pergame  une  école  de 
sculpture  très  illustre,  qui  posa  la  base  de  l'art  dit 
pergaménien.  La  ville  avait  alors,  comme  autre  source 
de  richesses,  la  fabrication  des  parfums  et  des  coupes 
d'argile,  le  travail  de  l'ivoire,  la  taille  des  pierres  fines, 
et  surtout  la  préparation  des  parchemins.  A  cette  époque, 
en  effet,  on  n'exportait  pas  encore  les  papyrus  d'Egypte, 
et  l'on  se  servait  en  Asie,  pour  les  livres,  de  peaux  de 
moutons,  de  chèvres  et  de  veaux,  auxquelles  on  faisait 
subir  une  préparation  spéciale.  Comme  l'art  de  préparer 
ces  peaux  atteignit  à  Pergame  une  perfection  particu- 
lière, on  ne  tarda  pas  à  leur  donner  le  nom  de  charta- 
pergamenm,  qui  subsiste  encore  sous  la  forme  de 
«  parchemin.  »  A  la  mort  d'Eumène  II,  son  frère 
Attale  II  prit  les  rênes  du  gouvernement,  comme  tuteur 
du  jeune  Attale  III,  fils  du  roi  défunt.  Il  est  question 
d'Attale  II  au  premier  livre  des  Machabées,  xv,  22. 
Voir  Attale  II.  t.  i,  col.  1227-1228.  Attale  III  mourut 
sans  héritier  en  133,  après  avoir  légué  son  royaume 
aux  Romains,  par  un  testament  que  Salluste  soup- 
çonne d'avoir  été  simulé,  Histor.,  v;  cf.  Horace,  Ud.,  II, 
xviii,  .">,  mais  dont  on  reconnaît  aujourd'hui  la  sincérité. 
—  Ces  divers  princes  battirent  successivement  monnaie. 
et  Pergame  continua  ensuite,  jusqu'à  la  fin  du  IIIe  siècle 
de  notre  ère,  d'user  de  ce  privilège.  Ses  monnaies  les 
plus  courantes  sont  les  cistophori,  ainsi  nommées 
parce  qu'elles  portaient  gravée  la  cista  mystica,  avec 
d'autres  objets  rappelant  le  culte  de  Bacchus.  On  y  voit 
aussi  les  insignes  des  trois  autres  grandes  divinités  de 
Pergame  :  Zeus,  Athéné,  Esculape. 

3»  Sous  la  domination  romaine.  —  Après  la  mort 
d'Attale  III,  le  royaume  de  Pergame  fut  incorporé  à 
l'empire  romain,  sous  le  nom  d'Asia  propria,  et,  pen- 
dant deux  siècles  encore  (jusqu'en  129  de  l'ère  chré- 
tienne', la  ville  demeura  la  capitale  de  la  province. 
Strabon,  XIII,  vi,  23,  l'appelle  littyxvriç  noXi;.  Cf.  Pline, 
H.  N.,  v,  30.  Elle  était  le  siège  d'un  tribunal  su- 
prême ;  elle  avait  à  sa  tète,  comme  d'autres  villes 
d'Asie,  un  asiarque,  sorte  de  magistrat  municipal  indé- 
pendant, qui  présidait  les  fêtes  civiles  et  religieuses. 
On  y  avait  installé  une  école  de  médecine,  dont  sortit 
le  célèbre  Galien.  Les  Romains  continuèrent  les  tradi- 
tions artistiques  des  Attalides,  et  contribuèrent  aussi 
beaucoup  à  orner  soit  l'acropole,  soit  la  ville  basse,  qui 
leur  durent  de  beaux  monuments.  Pergame  ne  demeura 
donc  pas  alors  sans  gloire,  bien  qu'Éphèse  etSmyrne  se 
fussent  développées  à  ses  dépens  et  l'eussent  peu  à  peu  re- 
dans  l'ombre.  Vers  la  fin  du  premier  siècle  après 
ï.-C,  à  l'époque  où  fut  composée  l'Apocalypse,  Éphèse 
lui  ravit  même,  sinon  officiellement,  du  moins  dans  l'ap- 
préciation populaire,  son  titre  de  capitale  de  la  province; 
c'est  pour  cela  sans  doute  que  Pergame  n'est  citée  qu'au 
troisième  rang  parmi  les  sept  églises,  à  la  suite 
d'Éphèse  et  de  Smyrne.  Apoc,  il.  Voir  W.  M.  Ramsay, 
dans  le  Diction,  of  the  Bible  de  Hastings,  t.  ni,  p.  750- 
751.  Au  second  siècle  de  notre  ère,  elle  avait  encore 
120060  habitants;  mais,  plus  tard,  elle  dépérit  graduel- 
lement, surtout  sous  les  empereurs  byzantins.  Elle 
compte  aujourd'hui  environ  14  500  habitants,  Turcs, 
Grecs.  Arméniens,  etc. 

III.  Pergame  et  le  christianisme.  —  Xous  ignorons 
dans  quelles  circonstances  spéciales  le  christianisme 
a  lit  pénétré  à  Pergame.  Ce  fut  peut-être  dès  l'époque 
de  saint  Paul.  Cf.  Act.,  xix,  10.  Du  moins,  le  passage 
('  l'Apocalypse  qui  la  concerne  suppose  qu'elle  possé- 
dait, à  la  fin  du  premier  siècle,  une  chrétienté  considé- 
rable, fervente  et  parfaitement  organisée,  bien  que, 
malheureusement,  la  secte  impure  des  Xicolaïtes,  voir 
A'icolaïtes,  t.  iv,  col.  1616-1617,  y  eût  un  certain  nom- 


bre d'adhérents,  comme  à  Éphèse.  Apoc,  n,  6.  —  Les 
interprètes  se  demandent,  sans  pouvoir  se  mettre 
entièrement  d'accord,  pourquoi,  dans  la  lettre  de  saint 
Jean  à  «  l'ange  »  de  Pergame,  cette  ville  est  appelée  à 
deux  reprises,  Apoc,  H,  13,  «  le  trône  (ou  l'habitation) 
de  S.itan.  »  La  pensée  générale  est  claire:  ces  mots 
signifient  évidemment  que  l'évêque  de  Pergame  exerçait 
son  ministèredans  un  endroit  qui  présentait  des  difficul- 
tés particulières;  mais  il  est  difficile  d'indiquer  avec 
certitude  le  motif  pour  lequel  Satan  était  censé  avoir 
son  siège  à  Pergame  plutôt  qu'ailleurs.  —  1»  D'après 
d'assez  nombreux  commentateurs,  cela  viendrait  de  ce 
que  l'esprit  de  persécution,  qui  est  vraiment  un  espri 
satanique,  Apoc,  n,  10,  faisait  alors  rage  à  Pergame 
plus  que  dans  aucune  autre  ville  d'Asie;  un  passage  de 
la  lettre,  Apoc,  n,  13,  mentionne  le  martyre  du  «  témoin 
fidèle  »  Antipas.  —  2»  Une  autre  interprétation  se  rattache 
au  culte  vraiment  extraordinaire  dont  le  dieu  Esculape 
fut  l'objet  à  Pergame,  à  toutes  les  époques  de  son  his- 
toire, mais  surtout  sous  la  domination  romaine.  C'est, 
en  effet,  sous  les  Romains  que  fut  bâti,  dans  la  ville 
basse,  aux  frais  de  l'Asie  entière,  Philostrate,  Apoll.,n,i, 
le  célèbre  Asclépéion 'ou  temple  d'Esculape,  dont  les 
dépendances  étaient  considérables,  et  qui  jouissait  du 
droit  d'asile.  Les  malades  y  accouraient  de  très  loin,  dans 
l'espoir  d'obtenir  des  guérisons  miraculeuses  ;  ils  atten- 


5t.  —  Monnaie  de  Pergame. 
Tête  d'Esculape  à  droite.  —  n).  Serpent.  ACKAEniOV  [COTHJPOC. 

daient  que  le  dieu  leur  dictât  en  songe  des  ordonnances 
infaillibles.  Tacite,  Ann.,  m,  63;  Pausanias,  III,  xxvi, 
8.  Esculape  était,  d'après  Martial,  IX,  xvi,  2,  le  per- 
gamcnus  rfeus  par  excellence.  Or,  ce  dieu  avait  pour 
emblème  le  serpent,  comme  on  le  voit  par  de  nom- 
breuses monnaies  de  l'antiquité  (fig.  21).  D'un  autre 
côté,  Satan  est,  dans  la  Bible,  le«  serpent  antique  ».  Cf. 
Gen.,  m,  1  sq.;  Apoc,  xn.  9  ;  xxn,  2,  etc.  —  3°  Selon 
d'autres,  l'allusion  porterait  spécialement  sur  ce  fait  que 
Pergame  était  devenue,  dès  le  règne  d'Auguste,  un 
centre  du  culte  rendu  à  Rome  et  aux  empereurs.  — 
4"  On  a  pensé  aussi  tout  spécialement  à  l'autel  gigantes- 
que qui  fut  érigé  en  l'honneur  de  Zeus  Soter  sur  le 
plateau  de  l'acropole,  par  les  soins  d'Eumène  II,  entre 
les  années  183  et  174  avant  J.-C.  Il  était  tout  entouré  de 
colonnades,  et  avait  près  de  35  m.  de  longsur37m.de 
large.  Sa  façade  extérieure  était  ornée  d'un  haut-relief 
qui  représentait  la  lutte  des  géants  avec  les  dieux,  en 
souvenir  des  victoires  que  les  Attalides  avaient  rem- 
portées sur  les  Galales  (fig.  22).  —  5°  Enfin,  et  telle  est 
peut-être  l'interprétation  la  plus  naturelle,  on  a  supposé 
que  si  Pergame  estappelée  le  «  trônede  Satan», ce  n'est 
pas  seulement  pour  un  de  ces  motifs  particuliers,  mais 
surtout  parce  qu'elle  était  devenue  chaque  jour  davan- 
tage, depuis  le  commencement  du  ni"  siècle  avant  notre 
ère,  un  centre  général  d'idolâtrie.  A  côté  du  culte  rendu 
à  Rome  et  à  l'empereur,  à  Esculape  et  à  Jupiter,  il  \ 
avait  celui  qu'on  offrait  à  Athéna  Polias  Niképhoros,  à 
Bacchus,  à  Vénus,  etc.,  comme  l'indiquent  encore  les 
ruines  de  vingt  temples  divers,  échafaudés  sur  la  mon- 
tagne et  éparpillés  dans  la  ville  basse.  Par  ce  culte  et 
par  les  orgies  qui  s'y  associaient,  Pergame  était  vrai- 
ment devenue  le  trône  de  Satan. 

IV.  Etat  actuel  des  monuments   de  Pergame.  — 
Jusqu'aux  vingt  dernières  années  du   XIX0   siècle,  les 


139 


PEU G A  ME 


PERGE 


140 


ruines  de  Pergame,  malgré  leur  étendue  considérable. 
ne  disaient  presque  rien  aux  peu  nombreux  voyageurs 
qui  allaient  les  visiter.  Mais  le  gouvernement  prussien 
entreprit  en  1S78,  sous  l'habile  direction  de  JIM.  Hu- 
mann, Bohn,  Conze,  etc.,  des  fouilles  importantes,  qui 
durèrent  jusqu'à  l'année  1886.  Elles  nous  ont  livré  le 
plan  complet  des  monuments  de  l'acropole  et  de  la  ville, 
en  même  temps  qu'elles  mettaient  à  jour  des  débris 
très  précieux  d'architecture,  de  sculpture,  etc.  En  bas 
de  la  colline,  on  voit  les  restes  plus  ou  moins  bien  con- 
servés des  remparts,  d'un  aqueduc  souterrain,  de  quais, 
de  ponts,  d'un  stade,  de  thermes,  d'un  théâtre,  d'un 
amphithéâtre,  de  PAsclépéion,  etc.  En  haut,  sur  les 
quatre  terrasses  superposées  du  plateau  de  l'acropole, 
on  admire  les  restes  d'un  gymnase,  de  l'autel  de  Jupiter, 
de  plusieurs  des  temples  mentionnés  ci-dessus,  d'un 
pilais  royal,  de  la  bibliothèque  d'Euméne  II,  d'un 
théâtre,  etc.  De  nombreuses  sculptures,  statues,  etc., 
sont  devenues  les  richesses  opimes  du  musée  de  Berlin. 


Amazonengruppe des  Attalischeti  Weihgeschenks,  eine 
Studie  zur  Pergamenischen  Kunstgeschichte,  Berlin, 
1890;  .1.  L.  Ussing,  Pergamos,  dens  Historié  og  Monu- 
menten,  Copenhague,  1897;  Conze,  Pro  Pergamo, 
Berlin,  189S:  E.  Sehweizer,  Grammatik  der  Pergame- 
nischen Inschriften,  Beilrâge  :«/•  Laut-und  Fles'ions- 
lehre  der  gemein-griechischen  Sprache,  Berlin.  1898, 
E.  Pontremoli  et  M.  Colignon,  Pergame,  restauratù  n 
el  description  des  monuments  de  l'Acropole,  Paris.  1900; 
VY.  Dôrpfeld,  Der  sûdliche  T/ior  von  Pergamon, 
Berlin,  1901,  dans  les  Abliandhtngen  der  h 
preussisch.  Akademie  der  Wissenschaften  :  Conze.  /ne 
Kleinfunde  ans  Pergamon,  dans  le  même  recueil. 
Berlin,  1902;  G.  Cardinali,  11  regno  di  Pergamo,  Ri- 
cerche  di  storia  e  di  diritto  pubblico,  Rome,  '1900; 
enfin  la  grande  publication  artistique  Altertûmer  von 
Pergamon,  dont  les  parties  suivantes  ont  été  publii 
t.  ii,  Das  Heiliglum  der  Athena  Polias  Nikephoros,  par 
R.  Bohn,  Berlin,  1897;   t.    m,  1»  partie,   J.  Schrara- 


22.  —  Autel  de  Jupiter  à  Pergame.  Reconstitution. 
D'après  Baumeister,  DenkmSIer  des  klassischen  Altertums,  t.  n.  p.  1216.  Gg.  1404. 


V.  Bibliographie;  —  l»  Auteurs  classiques  :  Strahon, 
xiii.  i;  Martial,  ix,  17;  Pline.  //.  .Y.,  XXXV.  rv,  10; 
Tife-Live,  XXXII.  wxin.  i;  Polybe,  xvi.  I;  xxxn.  23; 
Ptolémée,  V,  11,14  ;Josèphe,  Ant.jud.,Xl\.  —2» Auteurs 
modernes  :  Macfarlane,  Pisii  to  the  seven  Apocalyptic 
Churches,  I s: i-j ,  Arundell,  Discoveries  in  Asm  Minor, 
t.  n.  p.  302-307;  von  Prokesch-Osten,  Denkuiûrdig- 
n  tind  Erinnerungen  uus  dem  Orient,  Stutt- 
gart, 1836-1837,  t.  m.  p.  304  sq.;  von  Schubert,  Reise 
m's  Morgenland,  -  édit.,  Erlangen,  1840.  t.  i.  p.  :!l(i 
318;  Van  Capelle,  Commentatio  de  regibus  et  anti- 
quitatibus  Pergamenis,  Amsterdam,  1842;  Welcker, 
Tagebuch  einei  grie*  hi  i  hen  Reise,  Berlin.  1865,  t.  u, 
p    193  sq.;  Ergebnisse  der   lusgrabungen  su   Perga- 

on,  trois  rapports  publiés  sur  les  fouilles  allemandes 
par  MM.  Humann,  Conze  el  Bohn,  en  ISSU.  1882  el  ISSS. 
dan  le  Jahrbuch  der  kônigl.preussischen  Kunstsamm- 
lungen  ;Thii  rsch,  Die  Kônigsburg  von  Pergamon,  Stutl 
gart,  1883;  i  plich  Pe  yamon,  Geschichte  und  Kunst, 
Leipzig,  1883;  i  Reclus,  Nouvelle  géograpl 
selle,  i.  i\.  /.  Ai  Paris,  1884,  p.  598-612; 

Humann,  Fûhrer  durch  die  Ruin<  i  von  Pergamon, 
Berlin.    1885;   Fabricius    el    Trendelenburg,    l'article 
mon  dans  les    Denkmàler  de*  hlassisch 

lertums  de    B leisler,    t.  n.  p.    1206-1287,  Berlin. 

1889;  l'.  Pedroli,  U  >   gi  o  di  Pergamo.,  Studi  e  ricer- 

che,   rurin,  1896;  E.   Le  Ci s.    Les  sept  Églises  de 

l'Apocalypse,  Paris.   1896,  p.  247-264;  G.   Habich,  Die 


îuen.  Der  (p-osse  Altar,  der  obère  Markt,  Berlin.  1906; 
l.  iv.  Die  Théo. ter-Terrasse,  par  R.  Bohn.  Berlin,  iNtiii; 
t.  v,  2'  partie,  Pas  Trajaneum,  par  H.  Stiller,  Berlin. 
1895;  t.  vin.  Die  Inschriften  von  Pergamon,  par 
Max  Frânkel,  avec  la  collaboration  de  E.  Fabricius  el 
C.  Schuchhardt,  Berlin.  1895.  L.  FlLLION. 


PERGÉ     (Grec     nia 


■y],    Vni  ia),  ville  de 


Pamphylie,  située  à  l'ouest  du  Cestrus,  à  environ 
00  stades  (12  kil.)  de  l'embouchure.  Strahon,  XIV.  iv.  2 
(flg  23).  Saint  Paul  et  saint  Barnabe  dans  leur  pre- 
mière mission  viennent  de  Papbos  à  Pergé  en  pi 
i.mi  le  Meuve.  Act.,  xi  ii  ,  13-14.  Les  Apôtres  j  séjour- 
nèrent probablement  peu  et  ne  paraissent  pas  \  avoir 
prêché.  Conybeare  el  Howson,  The  Life  and  Epistles  o/ 
st.  Paul,  in-8°,  Londres,  1891,  p.  131,  suivis  par 
C.  Foûard,  S.  Paul  el  ses  missions,  in-80,  Paris,  1892, 
p,  26-28,  croient  que  saint  Paul  et  ses  compagnons 
arrivèrent  à  Pergé  à  l'époque  où  les  habitants  fuient 
les  plaines  malsaines  du  rivage  pour  se  réfugier  sur 
les  hauteurs  du  Taurus:  \V.  Ramsay,  The  Church  in 
the  Roman  empire,  1893,  p.  16-18,  croit  au  contraire 
que  cette  m  ig  rat  ion  esi  de  date  récente  et  qu'elle  n'i  | 
pas  antérieure  aux  Turcs.  C'est  à  Pergé  que  .ban  Marc 
quitta  saint  Paul  et  s'en  retourna  à  Jérusalem.  Act.,  xm, 
13.  Voir  .Ii: an  Marc,  t.  m,  col.  J166.  A  leur  retour  de 
Pisidie,  saint  Paul  prêcha  à  Pergé.  Act.,  \iv.  24. 
Pergé  était  la  seconde  ville  de  Pamphylie.  le  centre  d  - 


LU 


T  E  R  G  E 


PERIBOLE 


14'2 


indigènes,  tandis  qu'Attalie  était  une  colonie  grecque. 
A  Pergé  se  trouvait  un  temple  célèbre  d'Artémis,  la 
même  divinité  que  l'Artémis  d'Ephèse.  Les  monnaies 
lui  donnent   le   titre  de  reine  de  Pergé,    Piva^T*,  en 


23.  —  Monnaie  de  Pergé.  —  Tète  laurée  d'Artémis  à  droite.  — 
£.  âPTEMIâ  iieitai.  Artémis  en  chiton  court,  debout  à 
gauche,  le  carquois  sur  l'épaule,  appuyée  sur  un  sceptre  et  te- 
nant une  couronne  de  laurier.  A  ses  pieds  une  bicbe  ;  dans 
le  champ  I. 

dialecte  pamphylien  et  plus  communément  celui  d'Ar- 
t. mis  de  Pergé,  C.  Lankoronski,  Les  villes  de  Pam- 
phylie  et  de  Pisidie,  in-f°,  Paris,  1S90-1891.  t.  i. 
p.  17-37.  39.  i'.l.  (32.  Inscription,  n.  33  et  36,  p.  172-173. 
W.  Ramsay  dans  le  Journal  of  hellenic  Sludies,  1880, 
p.  147-971;  llill.  Calalog.  of  Bvilis/i  Muséum.  Pam- 
phylia,  in-8  .  Londres,  1897,  p.  129-131'.  Le  temple  d'Ar- 
témis  était  silué  près  de  la  ville  sur  une  hauteur.  On 


34    —  Plan  de  Pi 
D'après  Lanl.  iroski,  Las  villes  de  Pamphylie,  t.  i.  p.  174. 

y  tenait  chaque  année  une  grande  assemblée.  Strabon, 
XIV  îv.  2.  11  en  reste  quelques  ruines.  Le  temple  et 
son  enceinte  axaient  droit  d'asile.  Arck.  Epigraph. 
Miltheilungen  ans  Oesterreich,  1897.  p.  67;  C.  Lanko- 
ronski, Les  Villes  de  Pamphylie,  t.  i.  p.  171.  n.  39;  llill. 
Catalogue  of  the  Greek  coins  of  Lycia,   Pamphylia, 


1897,   p.  119-142.   Pergé  porte   aujourd'hui  le  nom  de 
Murtana.  E.  Beurlier. 

PERIBOLE  (hébreu   :  gédér,    «  mur;    d  Septante  : 
TrepfmxToç,  7U£p(6oXoç;  Vulgate  :  peribolus),  enceinte,  mur 
formant  enceinte.  —  Ézéchiel,  xui,  7,  10,  parle  d'un  mur 
extérieur,  long  de  cinquante  coudées  et  parallèle  aux 
chambres  du  Temple,  de  manière  à  laisser  un   espai 
vide  entre  les  chambres  et  le  mur.  Les  Septante  tra- 
duisent par  Tispf-aTo;,  «   lieu  où  l'on  se  promène.   "  ce 
qui  convient  à  l'espace  vide  et  non   au  mur.  La  Vul- 
gate emploie  le  mot  peribolus,  de   neptSoXo;,  qui  veut 
toujours   dire    «  enceinte   »  ou   «   clôture  ».    —  Sous 
Simon  Machabée,  on  grava  sur  des  tables  d'airain  le 
récit  de  ce  qui  avait  été  fait  pour   l'indépendance  et 
la  gloire  de  la  nation,  et  on  plaça  ces  tables  sur  le  pé- 
ribole: du  Temple,  en  un  lieu  apparent.  I  Mach.,  xiv. 
1<S.  Il  est  à  croire  que  le  mot  péribole  ne  désigne  pas 
ici  le  mur  même  du  Temple,  à  distance  duquel  étaient 
tenus  les   gentils,   mais  un    mur  d'enceinte   donnant 
sur  le  parvis  des  gentils  et  ménageant  le  lieu  apparent 
qui  permettait  à  tous  de  lire  l'inscription.  —  Dans  le 
Temple   d'Hérode,   le  parvis  des   gentils  contenait  un 
péribole,   ou  mur  d'enceinte,  probablement  à  la  place 
du  péribole  machabéen.  Josèphe,  Bell,  jud.,  V,   v,  2, 
en  parle  en  ces  termes  :  A  l'intérieur  des  portiques, 
«  tout  l'espace  à  ciel  ouvert  était   dallé  de   pierres  de 
toutes  sortes.  Quand  on  se  rendait  par  là  au  second 
Temple,  tout  autour  s'élevait  une   barrière   en  pierre. 
Spùçaxxoç  XiOivo;,   de    trois    coudées    de  hauteur,    fort 
élégamment  construite.   A  intervalles  égaux,  se  dres- 
saient   des    colonnes    pour    rappeler,    les    unes    en 
caractères  grecs,  les  autres  en  latins,  la  loi  de  pureté 
en  vertu  de"  laquelle  il  n'est  permis  à  aucun  étranger 
d'entrer  dans  l'fry/ov    (le  saint),  car  le  second  Temple 
était  appelé  Syiov  (le  saint).    >>    Pareille   défense  était 
déjà   en    vigueur    au    temps    d'Antiochus    le   Grand, 
puisque  ce  prince   reconnaît    «    qu'il  n'est   permis  à 
aucun  étranger  de  pénétrer  dans  le  péribole  du  Temple, 
interdit  aux  Juifs  eux-mêmes  quand   ils   n'ont  pas  été 
purifiés    conformément    à    la  loi    de   leurs    pères.     » 
Josèphe,  Ant.  jud.,    XII,   m,  4.   L'historien   juif  dit 
ailleurs,  Ant.  jud.,  XV,  xi,  5;  Bell.  jud..  VI,  n,  4,  que 
l'infraction  à  cetle  défense  comportait  la  peine  de  mort, 
et  que  l'autorité  romaine  avait  sanctionné  l'application 
de  cette  loi  même  à  des  Romains.   Cf.  Philon,  Légat, 
ad  Caium,  3!,  édit.  Mangey,  t.   n,  p.  577;  Middoth, 
n,  3;   Kelim,  i,  S.  On  a  révoqué  en  doute   l'assertion 
de  Josèphe  concernant  la  peine  de  mort  infligée  aux 
étrangers  qui  franchissaient  le  péribole.  Mais,  en  1871, 
la   vérité  de  l'assertion  a    dû    être    reconnue,   lorsque 
Clermont-Ganneau,  Revue  archéologique,  nouv.  sér., 
t.  xxin,  1872,  p.  214-234,  290-296,  pi.  x.  retrouva  une 
colonne  de  pierre  portant,  en  grec,  l'une  des  inscrip- 
tions   mentionnées    par    Josèphe.    Cette    inscription, 
actuellement    à    Constantinople,   au    musée    Tschnili- 
Kiôschk,  et  dont  le  musée  judaïque  du  Louvre  pos-  d 
un  moulage,  est  ainsi  conçue  : 

MH0ENA  AAAOTENH   ElInO 
PEYEZOAI   ENTOZ  TOY  nE 
PI   TO   IEPON   TPYdîAKTOY  KAI 
nEPIBOAOY   OZ  A  AN   AH 
cb0H   EAYTQI  AITIOI  El 
TAI  MA  TO   EIAKOAOY 
OEIN  0ANATON 

«  Que  nul  étranger  ne  pénétre  au  dedans  de  la  barrière 
qui  entoure  l'hpov  (les  parvis  réservés)  et  du  péribole; 
celui  qui  serait  pris  serait  cause  pour  lui-même  que 
la  mort  s'ensuivrait.  »  Cf.  Schurer,  Geschichte  de 
dischen  Volkes  im  Zeit.  J.  C.  Leipzig,  t.  II,  1898,  p.  271- 
275.  En  conséquence  <!<•  cette  défense,  les  Juifs  surveil- 
laient avec  soin  les  mirées  du  péribole.  Aussi  s'émurent- 


143 


PÉRIBOLE   —   PERLE 


144 


ils  violemment  quand  ils  crurent  que  saint  Paul  avait 
lait  franchir  l'enceinte  sacrée  à  un  gentil,  Trophime 
d'Éphèse.  Ils  entraînèrent  l'Apôtre  hors  du  Temple  dont 
ils  firent  aussitôt  fermer  les  portes.  Act.,  xxi,  29,  30. 
Le  péribole  était  appelé  soreg  et  l'on  donnait  le  nom 
de  hel  à  l'espace  compris  entre  cette  barrière  et  les 
bâtiments  du  Temple  lui-même.  Cf.  Middoth,  n.  3. 
Ce  traité-  de  la  Mischna  n'attribue  à  la  barrière  que  dix 
palmes  (0"'67)  de  hauteur;  l'indication  de  Josèphe, 
Bell,  jud.,  V,  v,  2,  parlant  de  trois  coudées  (lm57). 
parait  plus  vraisemblable.  L'espace  circonscrit  par  le 
péribole  s'élevait  de  quelques  degrés  au-dessus  du 
terre-plein  du  parvis  des  gentils.  Cf.  Josèphe,  A  m. 
jud..  XV,  xi,  5.  Treize  portes  donnaient  accès  dans  le 
hel  et  devant  chacune  se  dressait  l'une  des  colonnes 
mentionnées  plus  haut.  Saint  Paul  semble  faire  al- 
lusion à  ce  mur  de  séparation,  médium  parietem 
maceria  .  dans  son  Épître  aux  Éphésiens,  H,  14.  Voir 
Temple.  H.  Lesëtre. 

PÉRIL    (grec    :    xtvSuvoç;    Vulgate    :    periculum), 

risque  de  perdre  la  vie.  —  L'hébreu  n'a  pas  de  mot 
particulier  pour  rendre  l'idée  de  péril.  11  se  sert  des 
locution-  benéféS,  i  pour  la  vie  t,  au  risque  de  la  vie, 
II  Reg.,  xviii,  13  [qéri);  uni,  17;  III  Reg.,  u,  23; 
Lam.,  \.  9;  Prov.,  vu,  23,  et  beroVSênû,  i  pour  notre 
tête  »,  au  risque  de  notre  tète.  I  Par.,  xn,  19.  L'Ecclé- 
siastique XXXIV,  13,  dit  qu'il  a  été  plusieurs  fois  en 
péril  de  mort,  mais  qu'il  en  a  été  tiré  par  son  expé- 
rience, Vulgate  :  «  par  la  grâce  de  Dieu  ».  Dans  deux 
autres  passages  de  ce  livre,  on  peut  recourir  au  texte 
hébreu  pour  \  trouver  ce  qui  correspond  à  l'idée  île 
péril.  On  lit  dans  les  Septante  et  la  Vulgate.  m.  27  : 
«  Qui  aime  le  péril  y  périra.  »  Il  y  a  dans  l'hébreu  : 
»  Qui  aime  les  richesses,  tôbô(,  soupirera  après  elles.  » 
Plus  loin,  xi.m,  2G,  les  versions  traduisent  :  «  Ceux 
qui  naviguent  sur  la  nier  en  racontent  le  péril.  »  Il  y 
a  '1  ins  l'hébreu  :  «  Ceux  qui  descendent  sur  la  mer  en 
raconteront  l'extrémité, qdsàh,  -diront,  s'ils  le  peuvent, 
jusqu'où  elle  s'étend.  Tobie,  iv,  1,  rappelle  à  son  lils  les 
périls  que  sa  mère  a  courus  pendant  qu'elle  le  portait 
dans  son  sein.  Eslher,  xiv,  1,  4,  en  péril  de  mort,  de- 
mande à  liieu  son  assistance.  Plusieurs  fois,  il  est  ques- 
tion des  périls  affrontés  par  les  princes  Machabées 
et  leurs  compatriotes.  I  Macli.,  XI, 23;  xiv,29;  II  Mach., 
i,  11;  xi.  7;  xv,  17.  —  Les  Apôtres  étaient  en  péril 
sur  la  barque  pendant  la  tempête.  Luc,  vm,  23.  Saint 
Paul  a  été  en  péril  à  toute  heure.  I  Cor.,  xv,  30.  U 
énumère  tous  ceux  par  lesquels  il  a  passé.  II  Cor.,  XI, 
Jli.  Dieu  l'en  a  délivré.  Il  Cor.,  i,  10.  D'ailleurs  au- 
cun péril  ne  le  détachera  de  l'amour  du  Christ.  Rom., 
vin,  35.  11.  Lesêtre. 

PER1PSEMA  (grec  :   ncptyviua),  qualificatif  que  se 

donne  saint  Paul,  I  Cor.,  iv.  13:  «  Nous  sommes  ci 

les  Tispi/.aOipuKTa  <lu  monde  et  le  7iep:^r,p.a  de  tous.  » 
Le  mot  iteptxaOâpuaTa  désigne  le  produit  d'un  nettoyage 
complet,  les  balayures  d'une  maison,  et  le  mot 
-n,\-Vi,\ix.  de  ;cepi<|»â<<),  «  frotter  tout  autour,  »  le  résidu 
ou  la  raclure  d'un  nh|ei  <pi     n  a  remis  en  état.  L'Apôtre 

1 Irait  donc  dire  qu'il  >'si  traité  par  la  plupart  des 

hommes  commi  la  balayure  e1  le  rebut  de  l'humanité. 
Cf.  1s.,  un,  3.  Cependant  les  deux  mots  grecs  sont 
susceptibles  i!  un  autre  sens.  Le  premier  est  un 
composé  de  xaOapu.<x.  nom  donné  à  des  misérables  que 
l'on  entretenait  à  Athènes  aux  liais  de  l'État,  pour  en 
faire  des  victimes  expiatoires  en  cas  de  malheurs 
publics,  C.l\  Aristophane,  Plut.,  154;  /.'/..  1133;  Dôllin- 

Paganisme  et  Judaïsme,  trad.  J.  deP.,  Bruxelles, 
1858,  t.  i.  |>.  315,  Dans  l'ancienne  Italique,  TtepixâBaoua 
était    rendu    par    lustratnentum,    peur    lustramen, 

jet  expiait. ire.  d  Cf.  S.  Ambroise,  ///  Ps.  t  wtti, 
vm.    7,   t.   xv.   col.    1297.   Dans  les  Proverbes,  xxj,  [8  : 


o  Le  méchant  sert  de  rançon  pour  le  juste,  »  les  Sep- 
tante rendent  kofér,  «  rançon,  »  par  TtEptxdtBaptia.  Le 
mot  Trtp (■!/?] u.ct  se  prête  également  à  un  sens  analogue. 
Dans  l'édition  sixtine  du  livre  de  Tobie,  v,  1S,  on  lit  : 
«  Que  l'argent  devienne  le  mçi^iw-a  de  notre  enfant.  » 
c'est-à-dire  sa  rançon.  D'après  Hesychius  et  Suidas, 
les  Athéniens  jetaient  à  la  mer  l'homme  dont  ils  fai- 
saient leur  victime  expiatoire  en  disant  :  o  Sois  notre 
-sp  ;!//,yx.  »  Cf.  Cornely.  1  Epis  t.  ad  Cor.,  Paris.  1S90, 
p.  111.  Dans  l'idée  de  saint  Paul,  les  Apôtres  seraient 
donc  comme  des  victimes  expiatoires,  rejetées  par  le 
monde  et  associées  au  Christ  pour  compléter  ce  qui 
manque  à  ses  souffrances.  Col.,  i,  24.  Leur  abjection 
participerait  ainsi  à  celle  du  Messie,  dont  il  est  dit 
dans  Isaïe.  lui,  3,  5  : 

Il  était  méprisé  et  abandonné  des  hommes... 

-Mais  c'étaient  vraiment  nos  maladies  qu'il  portait... 
Il  a  été  transpercé  à  cause  de  nos  péchés. 

Saint  Paul  serait  à  la  fois  o  balayure  et  rebut  »  et  en 
même  temps  «  rançon  et  victime  expiatoire  »,  à 
l'exemple  du  Messie.  Le  second  sens  est  rendu  pro- 
bable par  la  gradation  que  suit  l'Apôtre  :  les  prédica- 
teurs de  l'Évangile  sont  traités  «  comme  les  derniers 
des  hommes,  comme  des  condamnés  à  mort  »;  après 
le  dénuement,  les  coups,  les  malédictions,  les  persécu- 
tions, les  calomnies,  l'idée  d'expiation  parait  se  pré- 
senter plus  logiquement  que  celle  du  mépris  et  de 
l'humiliation.  I  Cor.,  iv,  9-13.  II.  LESÊTRE. 

PERKtNS  Guillaume,  théologien  calviniste,  né  en 
1558  à  Warton  dans  le  coin!  de  Warwick,  mort  en 
1C02.  Il  étudia  à  l'université  de  Cambridge.  Ministre 
calviniste,  il  acquit  une  grande  réputation  connue 
prédicateur.  Dans  ses  œuvres  publiées  à  Londres,  1616, 
3  in-f",  on  remarque  :  A  digest  or  harmonie  of  the 
old  and  new  Testament  :  Exposition  of  GalatiatlS, 
Exposition  of  <:/irist's  sermon  on  the  Mount  ;  Commen- 
tary  on  Hebr.  xi;  Exposition  of  Jude;  Exposition  of 
Révélation  /,  //,  and  m.  —  Voir  W.  Orme,  Bibliotheca 
biblica,  p.  3i7;  Waleh,  Biblioth.  theologica,  !.  iv. 
p.  701,  758,  857.  B.  HEURTEBIZ!  . 

PERLE  (grec  :  y.xpytxpi;r,  ;  Vulgate  :  margarita), 
substance  qui  se  forme  dans  l'intérieur  de  plusieurs 
espèces  île  coquilles  marines.  —  1»  l"n  certain  nombre 
de  coquilles  sont  tapissées  intérieurement  par  une 
substance  calcaire  argentée,  sécrétée  par  le  manteau  du 
mollusque,  comme  la  coquille  elle-même  dont  la  com- 
position chimique  est  identique.  Cette  substance  s'ap- 
pelle nacre.  Parfois,  à  la  suite  d'une  blessure  faite  an 
mollusque  par  la  piqûre  d'un  petit  ver,  par  un  grain  de 
sable  ou  un  petil  corps  étranger  introduit  et  enfermé 
dans  la  coquille,  il  se  produit  une  concrétion  isolée 
de  matière  nacrée,  sous  forme  ronde,  oblongue  ou  irré- 
gulière. C'est  la  perle.  Elle  esl  généralement  adhérente 
à  la  coquille,  mais  peut  au-  i  se  sécréter  à  l'intérieur 
du  manteau  et  des  organes.  D'abord  tn-s  petite,  elle 
s'accroil  par  couches  annuelles.  Ce  qui  l'ail  son  prix, 
c'est  sa  grande  dureté,  sa  dimension  et  surtout  son 
éclat  chatoyant  qui  reproduit  celui  de  la  nacre.  Sa  colo- 
ration va  du  blanc  azuré  au  blanc  jaunâtre,  au  jaune  d'or 
et  au.  noir  bleuâtre;  on  trouve  même  des  perles  roses. 
bleues  el  lilas.  Les  principales  coquilles  perlieies  sont 
Vavicula  margaritifera  (fig.  25),  la  meleagrina  mar- 
gai  itifei  n ,  appelée  aussi  prinlailiiie  ou  more-perle,  la 
pinna  marina,  l'unio  margaritiferus,  mulette  oumou- 
lette  perlière,  etc.  On  trouve  aussi  des  perles  dans  les 
huîtres  et  les  moules  ordinaires;  mais  elles  sont  ternes 
et  sans  valeur.  Les  Chinois  et  les  Indiens  l'ont  produire 
îles     perles    d'un    certain     prix     à    îles    moules   et    des 

huîtres,  en  introduisant  dans  le  manteau  de  ces  bivalves 
de  petits  corps  durs  qui  déterminent  la  sécrétion  nacrée. 


145 


PERLE   —   PERSANES    (VERSIONS)    DE   LA   BIBLE 


146 


Les  anciens  recueillaient  les  coquilles  perlières  clans  la 
mer  Bouge,  dans  la  mer  des  Indes,  cf.  Pline,  fl.  N.,  ix, 
51;  \xxiv,  48;  Strabon,  xv,  717,  et  dans  le  golfe  Per- 
sique,  aux  environs  de  l'île  de  Tylos.  Cf.  Pline,  H.  A'., 
vi,  32;  Strabon,  XVI,  707;  Athénée,  m,  93;  Élien,  Hist. 
animal. ,  x,  13.  Les  perles  ont  été  estimées  à  très  haut 
prix  dans  l'antiquité.  Pline,  H.  .Y.,  ix,  54,  dit  qu'elles 
occupent  le  sommet  parmi  les  choses  précieuses. 
Cf  Pline,  //.  A".,  vi.  24;  ix,  56,58;  xxxm,  12;  xxxiv, 
48:  xxxvn,  0.  Les  Romains  en  faisaient  grand  cas.  La 
femme  de  Caligula,  l'impératrice  Lollia  Paulina,  en 
possédait  dans  sa  parure  pour  40  millions  de  sesterces 
(près  de  10  millions  de  francs).  On  en  mettait  à  toutes 
les  parties  du  costume.  Cléopâtre,  dans  une  fête  donnée 
par  Marc-Antoine,  en  avala  une  qui  valait  des  centaines 
de  mille  francs.  Horace,  Sat.,  II,  m,  238-240,  parle 
d'un  personnage  qui  prit  une  perle  à  l'oreille  de  Metella 
et  la  lit  dissoudre  dans  du  vinaigre,  pour  avaler  tout 
d'un  trait  un  million  de  sesterces  (près  de  250000  francs). 
Le  goût  de  ces  objets  coûteux  s'était  également  répandu 
on  Grèce  et  en  Orient. 
2»  Les  perles  ont  été  certainement  connues  en  Pales- 


3»  Dans  le  Nouveau  Testament,  la  mention  des  perles 
est  très  claire.  Xotre-Seigneur  compare  le  royaume 
des  cieux  à  un  marchand  qui  trafique  sur  les  perles' 
En  ayant  rencontré  une  de  grand  prix,  il  vend  tout  ce 
qu'il  a  pour  l'acheter.  Matth.,  xui,  45,  46.  Il  ne  craint 
pas  d'engager  momentanément  toute  sa  fortune,  parce 
qu'il  est  sûr  de  revendre  la  perle  avec  gros  bénéfice  à 
quelque  riche  amateur.  Saint  Paul  recommande  aux 
femmes  chrétiennes  d'éviter  le  luxe  dans  leur  parure 
et  de  savoir  se  passer  de  perles.  I  Tim.,  il,  9.  La  femme 
qui  représente  la  grande  Babylone  est  ornée  de  perles. 
Apoc.,  xvii,  4;  xvin,  16.  Babylone  faisait  commerce  de 
ces  précieux  objets.  Apoc,  xvin,  12.  —  Le  Sauveur 
défend  de  jeter  les  perles  devant  les  pourceaux,  qui  les 
fouleraient  aux  pieds.  Matth.,  vu,  6.  La  doctrine  et  la 
grâce  de  l'Évangile  ne  doivent  pas  être  communiquées 
à  des  âmes  indignes  qui  les  profaneraient. 

II.   LesètRE. 

PERSANES  (VERSIONS)  DE  LA  BIBLE.  - 
1°  Sous  les  rois  de  Perse,  Cyrus  et  ses  successeurs, 
un  grand  nombre  de  Juifs  s'établirent  dans  toutes  les 
parties  de  leur  empire,  et  il  est  à  croire  que  dans  les 


Avicula  Margaritifera. 


Une,  au  moins  depuis  l'époque  de  Salomon.  Mais  on  ne 
sait  pas  d'une  manière  certaine  quel  mot  pouvait  les 
er.  Le  mot  gains  est  le  nom  du  cristal,  probable- 
ment du  cristal  de  roche,  et  non  des  perles.  Voir 
Cristal,  t.  II,  col.  1119.  Les  peninim  ne  sont  que  des 
pierres  précieuses,  d'après  les  versions.  Prov.,  m.  15' 
vin,  Il  ;  x\.  15:  xxxi,  10.  Ces  pierres  précieuses  peuvent 
sans  doute  être  des  perles,  puisque  ces  dernières  sont 
des  sécrétions  calcaires;  elles  pourraient  être  aussi  du 
corail  rouge  ou  une  substance  analogue.  Voir  Corail, 
t.  n,  col.  957.  A  Suse,  il  y  avait  dans  le  palais  royal 
un  dallage  fait  avec  de  l'émeraude  et  du  dar.  Esth.,  i, 
6.  Le  mot  dar  est  le  nom  des  perles  en  arabe.  Les  Sep- 
tante traduisent  par  XîOo?  itîvvivoç,  «  pierre  de  pinne,  » 
i!i  linna  marina,  ce  qui  indiquerait  une  incrustation 
de  i  acre  provenant  des  coquilles  du  mollusque  perlier. 
LaVulgaterend  dar  par  lapis  parius,  «  pierre  de  Paros,  » 
marbre.  Il  est  assez  probable  en  etlet  qu'il  s'agissait  de 
marbre  translucide  et  nuancé  comme  les  perles  ou  la 
nacre.    Dans    le   Cantique,    I,    10,    on    dit  à   l'Épouse  : 

Nous  le  ferons  des  tôrim  avec  des  hàrûzîm.  »  D'après 
les  versions,  il  s'agit  de  «  chaînes  d'or  marquetées  d'ar- 
gent •>.  Il  est  possible  que  les  deux  mots  hébreux 
désignent   des   colliers    dans   la   composition   desquels 

Miraient  les  perles,  le  corail  et  les  pierres  précieuses. 
Ils  ne  se  rencontrent  pas  ailleurs,  et  ce  sens  leur  con- 
vient bien,  par  comparaison  avec  les  termes  arabes 
correspondants.  Cf.  Buhl.  Gesenius'  Handwôrterbuch, 
p.  278,  885. 


synagogues  on  expliqua  les  Écritures  dans  la  langue  du 
pays.  Nous  savons  du  moins  par  le  Talmud,  ijota, 
i9\  que  les  Israélites  qui  habitaient  en  Perse,  en  par- 
laient la  langue  en  même  temps  que  l'hébreu.  Mais  s'il 
a  existé  des  traductions  persanes  de  l'Écriture  à  leur 
usage,  il  ne  nous  en  est  rien  parvenu.  On  ne  possède 
rien  non  plus  des  anciennes  versions  du  Nouveau  Tes- 
tament, qui  ont  dû  être  faites  d'assez  bonne  heure, 
puisque  le  christianisme  se  répandit  en  Perse  dés  les 
premiers  siècles.  Saint  Jean  Chrysostome,  Hom.  n,  2, 
in  Joa.,  t.  lix,  col.  32,  dit  expressément  que  de  son 
temps  l'Évangile  de  saint  Jean  était  traduit  en  persan, 
et  Théodoret  de  Cyr,  Grsec.  affect.  curât.,  ix,  t.  î.xxxm, 
col.  1045,  dit  que  les  Perses  «  vénèrent  les  écrits  de 
Pierre,  de  Paul,  de  Jean,  de  Matthieu,  de  Luc  ri  de 
Marc,  comme  venant  du  ciel,  »  ce  qui  semble  indiquer 
qu'ils  étaient  traduits  en  leur  langue.  De  toutes  ces 
versions  primitives,  rien  n'a  survécu. 

2"  Le  Penlateuque.  —  Maimonide  parle  d'une 
traduction  persane  du  Pentateuque  antérieure  à  .Maho- 
met. L.  Zunz,  Die  gottesdiensllichen  Vortràge  der 
Juden  historisch  entwickelt,  Berlin,  1&32,  p.  9.  Celle 
que  nous  possédons  est  bien  moins  ancienne.  Elle  a  été 
imprimée  pour  la  première  fois  à  Constantinople  en 
1546,  en  caractères  hébreux,  et  réimprimée,  en  carac- 
téres  perses,  dans  la  quatrième  partie  de  la  Polyglotte 
de  Walton.  Elle  a  pour  auleur  Rabbi  Jacob  ben-Joseph 
Taous  («  le  Paon  »),  qui  vivait  à  Constantinople  dans 
la  première  moitié  du  xvr"  siècle.  Quelques  critiques 


147 


PERSANES    (VERSIONS)    DE   LA   BIBLE 


148 


ont  voulu  la  faire  romonter  plus  haut,  mais  il  est 
impossible  de  lui  donner  une  origine  antéislamique, 
parce  qu'elle  est  écrite  en  néo-perse  et  abonde  en 
mots  arabes,  ce  qui  ne  se  rencontre  que  dans  les 
livres  écrits  depuis  la  conversion  de  la  Perse  au  malio- 
métisme.   De  plus.   Babel,  Gen.,  x,  10,  est  traduit  par 

Bagdad  »;  or  Bagdad  ne  fut  bâtie  qu'en  763  (l'an 
145  de  l'Hégire).  A.  Kohut,  Krilische  Beleuchtung  der 
persischen  Pentateuch-Vebersetzung  des  Jacob  Ben- 
Joseph  Tavus  unter  stetiger  Rïicksiclitsname  auf  die 
âltesten  Bibelversionen,  in-8°,  Leipzig  et  Heidelberg, 
1871,  de  même  que  Lorsbach,  dans  le  Ienaer  AU.  Lit. 
Zeitung,  1S16,  n,  58;  Zunz.  dans  Geiger  Wissensehaft- 
liche  Zeitschrift,  1839,  t.  îv,  p.  391,  et  Munk,  Notice 
sur  Rabbi  Saadia  Garni.  Paris,  1838,  p.  62-87,  s'ac- 
cordent à  faire  naître  R.  Jacob  vers  1510.  La  traduc- 
tion, faite  sur  l'hébreu,  est  d'une  liltéralité  excessive  : 
Taous  évite  les  anthropomorphism.es  et  emploie  des 
euphémismes;  il  se  sert  du  Targum  d'Onkelos  et  de  la 
version  arabe  de  Saadia,  des  commentaires  de  Kirnehi 
et  d'Aben  Ezra;  dans  plusieurs  passages,  il  laisse 
l'hébreu  sans  le  traduire.  Gen.,  vu,  11;  xn,  6,  8,  etc.; 
Exod.,  m,  14;  xvn,  7;  Nûm.  xxi,  28,  etc.,  Deut.,  m, 
10,  etc.  Son  œuvre  a  peu  de  valeur  critique.  «L'auteur 
de  cette  traduction,  étant  juif,  dit  Richard  Simon,  llisl. 
critique  dit  vieux  Testant.,  p.  307,  a  affecté  partout 
les  hébraïsmes,  et  c'est  ce  qui  fait  qu'elle  ne  peut 
pas  être  d'un  grand  usage,  si  ce  n'est  dans  les 
synagogues  des  Juifs  de  Perse.  » 

3"  Manuscrits  de  diverses  traductions  persanes  de 
livres  de  l'Ancien  Testament.  —  Il  existe  en  manuscrit 
des  traductions  persanes  de  plusieurs  livres  de  l'Ancien 
Testament.  La  Bibliothèque  nationale  de  Paris  en  possède 
plusieurs.  Le  Catalogue  des  manuscrits  hébreux,  Paris, 
in-4°,  186e!,  signale  les  suivants  (cf.  Catalogus  codicum 
manuscriptorum  Bibliothecse  regiœ,  in-f°,  t.  i,  Paris, 
1739,  Codices  hebraici,  p.  4-5)  :  —  N°  10  (ancien  54), 
lieu,"  ■  el  Exode,  renfermant  l'hébreu  original  et,  après 
chaque  verset,  la  version  persane,  de  même  que  le 
n»  11  (ancien  :',.'>)  qui  contient  le  Lévitique,  les  Nombres 
et  le  Deutéronome.  Cette  version  persane,  écrite  en 
caractères  hébreux,  reproduit  la  paraphrase  chaldaïque 
d'Onkelos;  elle  est  dillérente  de  celle  qui  a  été  impri- 
mée dans  la  Polyglotte  de  Constantinople  et  dans  le 
t.  vi  de  la  Polyglotte  de  Walton.  -  N"  00  (ancien  38), 
Josué,  lis  Juges,  liuth.  Esdras  et  Néhémie,  en  caractères 
ii  I  i  un.  Traduction  très  littérale  sur  l'hébreu.  Écrit  en 
1601.  —  X»  01  (ancien  30).  Livres  de  Samuel,  des  Rois 
et  'li  i  Paralipomènes,  en  caractères  hébreux.  Écrit 
dans  la  ville  de  Làr,  comme  le  précédent,  en  1601.  — 
N  '.>',  (ancien  44).  Isaïe,  Jérémie  et  Ézéchiel,  en  carac- 
tères lu  breux.  Ézéchiel  s'arrête  au  ch.  x,  i.  I.a  version 
ite  sur  le  texte  massoi'élique,  d'après  la  paraphrase 
chaldaïque  de  Jonathan,  Écrit  au  commencement  du 
xvi«  siècle.  —  \'  100  (ancien  25).  Jérémie,  en  carac- 
tères hébreux.  La  version  est  très  différente  de  celle  du 
ii"9;;  elle  a  été  faite  sur  la  paraphrase  chaldaïque.  — 
N"  tOl  (ancien  V7).  Lamentations  et  les  douze  petits 
prophètes,  en  caractères  hébreux.  Traduction  faite  sur 
lr  'exte  hébreu,  mais  avec  de  nombreux  contre-sens.  — 
.\"  116  (ancien  43).  Proverbes,  Cantique  des  Can- 
tiques, Ruth,  Ecclesiaste.  Esther,  texte  hébreu  ponctué' 
accompagné  verset  pal  verset  .le  la  ha. ludion  persane, 
l'ail,  sur  l'hébreu  et  écrite  en  caractères  hébreux.  — 
.Y  //:  (ancien  113  .  Proverbes,  Ecclesiaste  etCantique 

avec    traduction    persi suivant    versel    par   verset, 

l'hébreu  qui  est  ponctué.  Elle  esl  -  crit  en  caractères 
hébreux.  En  général,  .Ile  s'accorde  avec  celle  du 
n"  116,  mais  avec  beaucoup  de  variantes,  c  est  |e  ma- 
nuscrit donl  s'est  occupé  Hassler,  dans  les  Theolo- 
gische  Studien  und  Kritiken,  1829,  p.  169-480.  — 
X"   118  .ancien    }0).  Job   ei  les   Lamentations,  texte 

hébreu    ponctué    avec    traduction   persane,    verset    par 


verset,  en  caractères  hébreux.  —  N»  120  (ancien  42). 
Job,  du  même  traducteur,  mais  avec  de  nombreuses  va- 
riantes. Hébreu  et  persan  comme  au  n°  118.  —  X°  123 
(ancien  41).  Job  (incomplet).  La  traduction  est  presque 
toujours  d'accord  avec  la  précédente.  — N»  121  (ancien 
224),  Esther,  texte  hébreu  ponctué,  suivi  verset  par 
verset  de  la  traduction  persane,  en  caractères  hébreux. 
En  tête  du  manuscrit  se  trouve  un  calendrier  litur- 
gique qui  finit  à  l'année  1523.  —  X»  128  (ancien  45). 
Daniel,  avec  une  histoire  apocryphe  de  ce  prophète 
(cette  histoire  a  été  publiée  en  caractères  hébreux  avec 
une  traduction  allemande  par  Zotenberg.  dans  Ad.  ilerx, 
Archiv  fur  wissenschaflliclie  Erforschung  des  Allen 
Testamentes,  1869,  t.  i,  p.  385-427.  —  X»  120  (ancien 
46).  Daniel.  Cette  version  s'accorde  avec  celle  du  n"  128. 
—  X"  130  (ancien  236).  Livres  deulérocanoniques,  en 
caractères  hébreux.  La  traduction  de  Tobie  est  faite 
d'après  le  texte  hébreu  publié  pour  la  première  fois  à 
Constantinople  en  1516  et  reproduit  dans  le  t.  iv  de  la 
Polyglotte  de  Londres.  Judith  est  traduit  d'après  le  texte 
hébreu  publié  à  Venise  vers  1650.  Bel  el  le  dragon, 
d'après  l'hébreu  contenu  dans  le  même  volume  où  se 
trouve  l'hébreu  de  Judith. 

Parmi  les  manuscrits  persans,  écrits  en  persan,  la 
Bibliothèque  nationale,  Catalogue  des  manuscrits  per- 
sans de  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  in-8», 
1905,  possède  les  traductions  suivantes  de  livres  de 
l'Ancien  Testament  :  N"  1.  Une  traduction  persane  des 
Psaumes,  d'origine  juive,  copiée  en  1316  sur  un  manus- 
crit judéo-persan  du  Làr.  avec  les  variantes  de  deux 
autres  manuscrits.  —  X°  2.  Proverbes,  Ecclesiaste,  Can- 
tique des  Cantiques,  Esther.  Ruth.  Écrit  a  Agra  en  1604 
d'après  un  manuscrit  judéo-persan.  —  N°  3.  Proverbes, 
Ecclesiaste,  Cantique  des  Cantiques,  Esther  (non  achevé). 
La  traduction  est  la  même  que  la  précédente,  avec 
quelques  variantes.  —  X»  4.  Isaïe,  Jérémie,  Lamentations 
(deux  versions),  Baruch.  Copié  en  1606  à  Hamadan 
d'après  un  manuscrit  judéo-persan.  —  N°  5.  Judith, 
traduit  sur  la  Vulgate,  par  le  P.  Gabriel,  capucin  (com- 
mencement du  xvn"  siècle), 

La  Bibliothèque  impériale  de  Saint-Pétersbourg  pos- 
sède aussi  plusieurs  versions  persanes  qui  faisaient 
partie  de  la  collection  du  karaïte  Abraham  Firkowitz 
et  de  la  sociélé  d'Odessa.  Cf.  A.  llarkavy  et  II.  L.Strack, 
Catalog  der  hebraïschen  Bibel-Randschriften  in 
Sl-Petersburg,  in-8",  Saint-Pétersbourg  et  Leipzig, 
1875.  —  X°  139.  Petits  prophètes,  contenant  Midi.  e. 
i,  13,  jusqu'à  Malachie,  m,  2.  —  X»  140.  llaphtaroth, 
en  hébreu  ponctué,  avec  la  traduction  persane  ;  la  ver- 
sion persane  esl  écrite  en  caractères  arabes.  —  X"  141. 
Pentateuque  hébren  et  persan.  L'hébreu  esl  ponctué, 
mais  d'une  l'a.  ..n  p  rliculière.  I.a  ■  ersion  est  écrite  en 
petits  caractères  et  suit  l'original  verset  par  verset, 
mais  elle  est  très  différente  do  la  version  de  II.  Jacob 
Taous.  —  N°  142.  Fragments  de  Job. 

Wallon,  dans  les  Prolégomènes  de  sa  Poli/glotte,  xvi. 

®,  p.  694.  mentionne  deux  Psautiers  manuscrits  traduits 
sur  la  Vulgate. 

La  bibliothèque  du  British  Muséum  à  Londres  pos- 
sède (voir  Margoliouth,  Catalogue  of  the  Hebreui  and 
Samaritain  manuscripts  ut  the  British  Muséum,  in-'r. 
Londres,  part.  I.  1899)  :  V  "  159,  version  persan.  .1  rs 
Psaumes  par  Baba  ben  Xurial,  faite  à  Ispahan  vers 
1740,  par  ordre  de  Nadir  Chah.  Cette  traduction  e-t 
précédée  du  texte  hébreu  du  Pentateuque  el  suivie  de 
divers  poèmes  en  caractères  persans  rabbiniques.  — 
\"  Itill,  même  version  persane  des  Psaumes.  I 
tères  rabbiniques  persans  du  xuir ou  xi.\"  siècle. 

La   Bibliothèque  bodléienne  d'Oxford  possède  trois 

exemplaires  (N"-  1827-1829)  de  la  traduction  persane 
.les  psaumes  faite  par  un  religieux  portugais,  le  P.  Juan, 
1610;  deux  exemplaires  (un  incomplet)  d'une  autre 
traduction   dillérente  des   Psaumes  (NM   1830-I831)i 


149 


PERSANES    (VERSIONS:    DE    LA    BIBLE    —    PERSE 


150 


une  traduction  de  Judith,  d'après  la  Vulgate  (X"  ISS?). 

;  Traductions  persanes  des  Evangiles.  —  1.  Impri- 
mées. —  Les  chrétiens  des  provinces  occidentales  de 
la  Perse,  se  rattachant  à  l'Église  syriaque,  se  servirent 
d'abord  de  la  Peschito.  Aussi  une  des  premières  traduc- 
tions des  Évangiles  qui  fut  faite  en  persan  dérive-t-elle 
de  la  Peschito.  Elle  a  été  publiée  dans  la  Polyglotte  de 
Wallon,  d'après  un  manuscrit  appartenant  à  Pococke  et 
écrit  en  1341,  avec  une  traduction  latine  de  Sain.  Clericus 
et  de  Thom.  Grovius.  La  traduction  latine  a  été  réimpri- 
mée par  Bode.  in-4\  Helmstadt,  1751,  avec  une  préface 
historique  et  littéraire.  Une  seconde  traduction  des 
.les.  faite  sur  le  texte  grec,  fut  publiée  d'après  deux 
manuscrits,  l'un  de  Cambridge,  l'autre  d'Oxford;  avec 
les  variantes  du  manuscrit  de  Pococke  traduit  d'après 
la  Peschito.  par  un  professeur  arabe  de  Cambridge. 
Abraham  Wheloc,  et  par  Pierson.  Quatuor Evangeliorum 
versio  persica,  in-!' .  Londres,  1652-1657.  L'Ile  est  accom- 
e  d'une  traduction  latine.  —  Nadir  Schah  fit  faire 
i  n  1710,  par  les  jésuites  Duhan  et  Desvignes,  une  nou- 
velle traduction  persane  des  quatre  Évangiles,  qui  a  été 
publiée  par  Dorn  à  Saint-Pétersbourg  en  1848.  Voir 
Dorn,  dans  Hall.  Allg.  Literaturzeilung,  1848,  t.  n. 
p,  164.  —  Colebrooke  a  fait  imprimer  à  Calcutta  en  1804 
une  version  des  Évangiles.  De  même  L.  Sebastiani  à 
Séramporeen  1812.  11.  Martyn  a  édité  à  Londres  en  1821 
The  New  Testament,  translated  fron\  the  Greek  into 
m.  —  La  société  biblique  a  publié  depuis  diverses 
traductions  persanes  complètes  ou  partielles  des  Écri- 
tures. 

2.  Manuscrites.  —  Le  fonds  persan  de  la  Bibliothèque 
nationale  de  Paris  contient  les  manuscrits  suivants  : 
X  6.  Les  quatre  Évangiles.  Traduction  anonyme,  copiée 
en  1750.  —  X°  7.  Traduction  des  quatre  Évangiles, 
dont  il  est  parlé  plus  haut,  faites  par  des  missionnaires, 
-  docteurs  arméniens  sur  la  Vulgate  par  l'ordre 
qu'en  donna  le  roi  de  Perse  Xadir  Schah,  en  1736.  Copie 
de  l'original,  faite  par  les  soins  de  P.  Lagarde  (j  1750). 
—  X°  S.  Autre  traduction  des  Évangiles,  faite  sur  le  grec, 
écrite  pour  le  roi  Louis  XIII  en  1616,  par  un  mission- 
naire français.  —  X"  0.  .Même  traduction  avec  quelques 
is  divergences.  Écrite  en  1631.  —  X"  10.  Evangile 
de  saint  Matthieu.  Copié  sur  un  très  ancien  manuscrit  du 
Vatican.  Cette  version  se  rapproche  beaucoup  de  celle 
qui  est  contenue  dans  le  n1  9.  — -  X°  11.  Autre  copie 
(incomplète)  de  l'Évangile  de  saint  Matthieu,  faite  sur 
niiscrit  précédent.  —  X»  11.  Évangéliaire  pour  le 
commun  du  temps.  Copié  en  1374. 

La  Bibliothèque  bodléienne  possède  le  Xouveau  Tes- 
tament  traduit  par  le  R.  H.  .Martin,  deux  exemplaires 
(X  1833-i834)et  plusieurs  traductions  plus  ou  moins 
complètes  des  Évangiles  (X"!  i835-i840).  VoirSachauet 
Ethe,  Catalogue  of  the  Persian  manuscripts  in  the 
ion  Library,  in-4  .  Oxford,  1889,  col.   1050-1056. 

La  Bibliothèque  de  Berlin  possède  le  manuscrit  d'une 
traduction  persane  de  l'Évangile  de  saint  Matthieu 
X  1096  qui  est  pour  le  fond  la  même  que  celle  qui 
■<  été  publiée  à  Londres  par  Whelock,  in-f»,  1657.  Le 
X  luQl  contient  entre  autres  choses  la  traduction  des 
douze  premiers  chapitres  de  saint  .Matthieu,  faite  en 
1799.  Voir  \\ .  Pertsch,  Verzeichniss  der  persischen 
Handschriften,  t.  iv  des  Handschriften  Verzeichnisse 
der  h.  Biblioth  A  zu  Berlin,  in-4»,  Berlin,  1888, 
p.  1043-1046. 

Voir  Rosenmûller,  De  versione  Pentateuchi  persica 

comment.,  in-4  .  Leipzig,    1813:  .1.  Fûrst,  Bibliotheca 

■'.  l.  m.  p.  153;  J.  M   Clintock  et  .1.  Strong,  Cyclo- 

•  '•/'  Biblical  Literature,  t.  vu.  New-York,   1889, 

I  :  The  Bibleof  every  Land,  in-i»,  Londres,  1860, 

P-  &-71.  F.  ViGOURonx. 

PERSE    i hébreu;  Paras;   Septante    :    llipai;;    Vul- 
/'  i  si»),  contrée  d'Asie.  Le  nom  de  la  Perse  est, 


dans  les  inscriptions  cunéiformes,  Pârça,    en   perse, 
Pars  et  Fdrs,  en  arabe,  Fâris. 

I.  Géographie.  —  La  Perse  proprement  dite  ifig.  26) 
occupait  primitivement  la  partie  la  plus  méridionale  de 
la  grande  chaîne  de  montagnes  qui  s'étend  de  la  mer 
Xoiiv  an  golfe  Persique  tout  le  long  de  la  rive  gauche 
du  Tigre.  Le  pays  était  borné  au  sud  et  au  sud-ouest 
par  le  golfe  Persique,  au  nord-ouest  et  au  nord  par  la 
Susiane  et  la  Médie.  à  l'est  par  de  grands  déserts.  La 
région  qui  avoisine  la  mer  se  compose  de  bancs  d'ar- 
gile et  de  sable  parallèles  au  rivage;  elle  a  été  modi- 
fiée sur  plusieurs  points  par  le  travail  des  alluvions. 
Le  sol  est  tantôt  marécageux,  tantôt  rocheux  et  mal 
arrosé,  partout  malsain  et  stérile.  Cf.  Pline,  H.  N.,  xn, 
20.  Au  delà,  plusieurs  chaînes  de  hauteurs  s'élèvent 
graduellement  l'une  derrière  l'autre,  dans  toute  la 
longueur  du  pays,  pour  atteindre  le  plateau.  Cette 
région  moyenne  est  ordinairement  boisée  et  fertile  en 
céréales,  sauf  dans  plusieurs  cantons  du  nord  et  de 
l'est.  Cf.  Strabon,  XV,  727.  Quelques  rivières  seulement. 
I'Oroatis,  PAraxès,  le  Bagradas,  parviennent  à  traver- 
ser les  hauteurs  et  les  sables  et  à  se  jeter  dans  le  golfe. 
D'autres  n'ont  pas  d'écoulement;  leurs  eaux  forment 
au  fond  des  vallées  des  lacs  dont  le  niveau  varie  avec 
les  saisons.  La  partie  montagneuse  se  découpe  en  pics 
aigus,  couverts  de  neige,  séparés  par  des  ravins  aux 
parois  presque  verticales,  au  fond  desquels  se  préci- 
pitent de  furieux  torrents.  Le  sommet  le  plus  élevé,  le 
Kouh-i-Dina,  au  nord,  atteint  5200 m  ;  au  sud,  le 
Djebel   Boukoun  monte  jusqu'à  3230'". 

Sur  le  haut  plateau,  le  climat  se  ressent  de  la  séche- 
resse du  sol  et  de  l'absence  de  rivières.  La  pureté  de 
l'atmosphère  est  telle  qu'on  peut  distinguer  à  l'œil  nu 
les  satellittes  de  Jupiter;  la  planète  elle-même  y  jette 
de  si  vifs  rayons  qu'elle  porte  une  ombre  très  nette  sur 
une  surface  claire.  On  s'explique  ainsi  le  goùl  des 
anciens  mages  pour  l'observation  des  astres  et  le  culte 
qu'ils  rendaient  à  certains  d'entre  eux.  Voir  MAGE, 
t.  iv.  col.  544.  Par  contre,  comme  cette  pureté  de 
l'atmosphère  n'oppose  aucun  obstacle  aux  rayons 
solaires  et  au  rayonnement  nocturne,  on  peut  passer, 
en  moins  de  quelques  heures,  de  7  à  62  degrés  centi- 
grades. En  hiver,  avec  des  tourbillons  de  neige,  la 
température  peut  descendre  à  —  30". 

La  race  était  endurcie  à  la  fatigue  par  la  vie  dans  la 
montagne.  Élancés  et  robustes,  la  tète  fine  sous  leur 
l-  lèse  eliex  dure  et  leur  barbe  bouclée  (fig.  27),  les 
Perses  étaient  intelligents  et  passionnés  pour  la  guerre. 
Plusieurs  tribus  se  partageaient  le  pays  :  les  Pasa- 
gardes,  les  Maraphiens  et  les  Maspiens,  qui  exerçaient 
la  prépondérance,  les  Panthialéens,  les  Dérousiéens  et 
les  Carmanes,  qui  menaient  la  vie  sédentaire,  les 
Daens,  les  Mardes,  les  Dropiques  et  les  Sagartiens, 
qui  préféraient  l'état  nomade.  De  gros  villages  avaient 
été  bâtis  sur  le  bord  de  la  mer,  Armouza,  Sisidona. 
Apostana,  Gogana  et  Taoké,  ce  dernier  possédant  un 
palais  royal.  Cf.  Hérodote,  i.  125:  Néarque,  dans 
Arrien,  Hist.  indic.,  xxxvn.  5.  7,  8;xxxix,  3;  Strabon. 
XV,  m.  3.  A  l'intérieur  s'élevaient  les  villes  de  Carma- 
na,  au  nord-est,  cf.  Ptolémée,  vi,  8,  de  Gabœ,  an  nord. 
avec  un  palais,  cf.  Plotémée.  vi.  4;  Strabon,  XV.  m. 
3,  de  Persépolis  et  de  Pasagardes.  au  centre  du  pays. 
Cf.  E.  Reclus,  Géographie  universelle,  t.ix.  p.  108-187; 
Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  ni.  p.  450-559. 

II.  Histoire.  —  Les  Perses  ne  sont  pas  nommés  dans 
la  table  ethnographique,  mais  ils  étaient,  comme  le> 
Mèdes,  japhétites  et  de  race  iranienne.  Gen.,  x.  2.  Pri- 
mitivement confinés  dans  leurs  vallées  ardues,  ils 
avaient  dû  s'étendre  au  nord-ouest  aux  dépen  i\ 
l'Élam,  au  moment  où  ce  pays  avait  été  affaibli  par  la 
puissance  assyrienne.  Voir  Élam,  t.  Il,  col.  1038.  Ils 
élisaient  leurs  rois  dans  la  famille  d'un  de  leurs  chefs 
primitifs,  Akhâmanisch,  l'Akhéménès  des  Grecs,  donl 


151 


PERSE 


152 


la  légende  s'est  emparée.  Cf.  Élien,  Var.  kist.,  xn,  21. 
Tchaispi  ou  Téispès,  son  successeur  et  peut-être  son 
fils,  prolita  de  la  ruine  de  Suse  par  Assurbanipal  pour 
s'emparer  de  la  partie  orientale  de  l'Elam.  C'était  le 
pays  d'Ansàn,  et  lui-même  prit  dès  lors  le  titre  de  roi 
d'Ansân.  Cf.  Hérodote,  vu.  11,  et  l'inscription  de  Bé- 
histoun,  col.  I,  lig.  5,  6.  Ce  titre  est  attribué  à  Cyrus 
et  à  ses  trois  prédécesseurs  par  les  monuments  babylo- 
niens de  Cyrus,  Cylindre,  lig.  20,  21,  dans  les  Bei- 
tràge  :ur  Assyriologie,  t.  n.  p.  20,  21,  d'où  l'on  con- 
clut que  la  conquête  du  pays  d'Ansàn  est  bien  l'œuvre 
de  Téispès,  et  qu'il  n'existe  pas  de  lacune  dans  la  série 
chronologique  tnlre  ce  dernier  et  Akhéménès. 
Pbraorle,   roi   des  Mèdes   (647-625),   qui    songeait  à 


lig.  18.  Dans  la  Bible.  Daniel  parle  toujours  des  .Mèdes 
et  des  Perses,  Dan.,  v.  28;  VI,  8,  12.  15;  le  livre  d'Esther, 
i,  3,  14.  18,  19,  nomme  au  contraire  les  Perses  et  les 
Mèdes,  sauf  dans  nn  endroit  où  il  est  question  du  livre 
des  rois  de  Médie  et  de  Perse,  Esth.,  x,  2,  qui  conte- 
nait les  annales  du  royaume  commencées  sous  les 
anciens  rois.  Voir  Cyrus,  t.  Il,  col.  1191-1194.  —  Les 
rois  de  Perse  se  succédèrent  dans  l'ordre  suivant, 
jusqu'à  la  conquête  d'Alexandre  le  llrand   : 

Cyrus ■  550  Artaxerxès  I ■■ 465 

Cambyse 529  Darius  II 424 

Smerdis  le  Mage.   .   .   .  522  Artaxerxès  11  Mnémon  .  405 

Darius  I" 521  Artaxersès  III  Oclms     .  359 

Xentès  I" .  485  Darius  III  Codoman  ...  336 


EMPIRE  DES  PERSES 

Échelle 

ZOO        WO       600       800      1000 


6 ibo zoo 


26.  —  Carte  de  la  Perse. 


l'attaque  de  l'Assyrie,  commença  par  s'annexer  ses  voi- 
Mi  il  soumit  les  Perses,  dont  les  princes  devinrent 
désormais  vassaux  de  la  Médie.  Cf.  Hérodote,  i,  102. 
Il  fut  vaincu  et  périt  dans  son  attaque  contre  les  Assy- 
riens. Son  lils  Cyaxare  (624-585),  pour  s'assurer  la  vic- 
toire, réorganisa  son  armée,  composée  de  Mèdes  et  de 
Pi  rses.  Cf.  Hérodote,  vil,  62.  Ces  derniers  prirent  part 
à  la  lutte  contre  Assurbanipal,  à  la  prise  de  Ninive, 
el    aux   diverses  campagnes   du  roi  des   Mèdes.   Voir 

M t.  iv.  col.  919. 

A  réispès  avait  succédé  Cambyse,  et  à  Cambyse  son 
in-  Cyrus,  vers  559.  Celui-ci  pensa  que  les  Perses,  au- 
trefois  dominés  par  les  Mèdes,  pouvaient  et  devaient  à 
leur  tour  exercer  la  souveraineté  dans  l'empire  médo- 
I n  553,  il  se  révolta  contre  Astyage,  lils  et  suc- 
cesseur de  Cyaxare;  il  le  défit,  s'empara  d'Ecbatane  et 

substitua  une  administration  perse  au  gouvern. ni 

mède.  L'empire  n'était  pas  changé  extérieurement; 
mais  tandis  que  les  rois  précédents  avaient  été  les  chefs 
des  Mèdes  el  des  Perses,  Cyrus  el  ses  successeurs 
furent  rois  des  Perses  et  des  Mèdes.  Voir  l'inscription 
le  Béliistoun.  col.  i,   lig.  :tî,  :d,   Ht.  il.   ii'',   17;   cul.  n, 


Sur  ces  rois,  voir  MÉDIE,  t.  iv.  col.  920;  Caubi 
t.  n,  col.  89;  it.\  hjs  I",  col.  1299;  Assuérus  (Xerxès 
I"  i.  t.  t.  col.  1141;  Artaxerxès  1"'.  col.  1089;  Daru  s  11. 
i.  il, col.  1306;  Artaxerxès  II.  t.  i,  col.  1042;  Daru  s  III, 
t.  ii,  col.  1306.  —  Alexandre  le  Grand,  roi  di  I 
doine,  conquit  l'empire  des  Perses  en  331.  Voir  Alexan- 
dre le  Grand,  t.  i,  col.  345.  Après  sa  mort,  la  Perse 
lit  partie  du  royaume  de  Syrie,  gouverné  par  les  Séleu- 
cides.  Voir  Syrie.  Mais  ensuite  les  rois  Parthes  la 
disputèrent  à  ces  dernii  rs  et  Arsace  VI  finit  par  s'en 
emparer  en  138.  Voir  Ai. -mi  .  t.  i,  col.  1034.  Les  Arsa- 
cides  j  régnèrent  jusqu'en  226  après  J.-C. 

III.  Mœurs  et  coutumes  des  Perses.  —  Hérodote,  i, 
131-140,  fournit  quelques  détails  sur  la  manière  de 
vivre  des  Perses.  Les  Pris.-  pratiquaient  la  polygamie, 
épousant  plusieurs  femmes  el  ayant  en  outiv  des 
concubines  en  grand  nombre.  Ils  se  ('.lisaient  n 
d'avoir  beaucoup  d'enfants;  mais  1rs  hommes  ne  s'en 
occupaient  qu'à  l'âge  de  cinq  ans;  jusqu'à  vingt,  ils 
leur  apprenaient  à  monter  à  cheval,  à  tirer  de  l'arc  et 
à  dire  la  vérité.  Assez  sobres  du  coté  de  la  nourriture, 
il-  l'étaient    beaucoup   moins  dans  l'usage   du    vin  et 


153 


PERSE 


loi 


-  enivraient  à  tout  propos,  même  quand  il  s'agissait  de 
délibérer  sur  des  choses  sérieuses.  Les  grands  festins 
donnés  par  Xerxès  l"  répondaient  parfaitement  au 
goût  de  ses  sujets.  Le  vin  royal  y  était  servi  en  abon- 
dance. Esth.,  i,  5-11.  Le  texte  sacré  remarque  que  «  le 
vin  avait  mis  la  joie  au  cœur  du  roi,  »  et,  s'il  observe 
que  ■  chacun  buvait  sans  que  personne  lui  fit  violence,  » 
c'est  que  sans  doute  l'utilité  de  cette  violence  ne  se 
faisait  nullement  sentir.  Curieux  des  usages  de  l'étran- 
ger, ils  adoptaient  tout  ce  qui  pouvait  contribuer  à 
leurs  plaisirs.  Aussi  leurs  mœurs  s'efféminèrent  au 
point  que,  malgré  leur  nombre  et  leurs  ressources,  ils 
Furent  incapables  de  tenir  tête  aux  Grecs.  S'estimant 
eux-mêmes  au-dessus  de  tous  les  autres  peuples,  ils 
méprisaient  ces  derniers  à  proportion  de  leur  éloigne- 
ment.  On  s'explique  ainsi  qu'ils  se  soient  montrés  si 
outrés  de  la  conduite  des  Grecs  à  leur  égard  et  se 
soient  imaginé  qu'ils  les  réduiraient  aisément. 

Leur  législation  ne  permettait  à  personne,  pas  même 


•27.  —  Perses  de  Persépolis. 
D'après  G.  Rawlinson,  The  five  great  Monarchies,  t.  v,  p.  179, 191. 

au  roi.  de  faire  mourir  un  homme  pour  un  seul  crime. 
Le  mensonge  leur  était  odieux  et  ils  trouvaient  hon- 
teux de  faire  des  dettes.  Ils  se  donnaient  des  marques 
de  respect  proportionnées  à  la  condition  de  chacun.  Ils 
ne  pouvaient  supporter  les  lépreux,  dont  ils  attribuaient 
la  maladie  à  un  péché  commis  contre  le  soleil.  Cf. 
Ctésias,  Res  persic.,  il.  On  sait  par  la  Bible,  Dan.,  vi, 
8;  Esth.,  vm,  8,  qu'un  décret  signé  de  l'anneau  royal 
était  irrévocable,  et  que,  pour  l'empêcher  d'avoir  son 
effet,  il  fallait  un  autre  décret  qui  rendit  le  premier 
impraticable.  Esth.,  vm,  10,  11.  Cf.  I  Esd.,  VI,  11.  Hé- 
rod  île,  ix,  108,  110,  montre  Xerxès  se  refusant  à  révo- 
nne  parole  donnée,  malgré  le  plus  grave  incon- 
vénient, et  ajoute  que  la  loi  ne  permet  pas  au  roi  de 
refuser  les  grâces  qu'on  lui  demande  le  jour  du  festin 
royal.  Sur  les  courriers  des  rois  de  Perse,  voir  Anga- 
RJER,  t.  i,  col.  575.  Les  archives  du  royaume  étaient 
tenues  avec  grand  soin.  I  Esd.,  iv,  15,  19;  Esth.,  vi,  1  ; 
\.  2.  Sur  l'écriture  perse,  voir  Vigouroux,  La  Bible  et 
1rs  découvertes  modernes,  6e  édit.,  t.  i,  p.  137-146.  Sur 
la  monnaie,  voir  DARIQUE,  t.  n,  col.  1294.  Sur  l'admi- 
nistration provinciale,  voir  SATRAPE. 

Les  rois  perses  tenaient  à  habiter  dans  de  magni- 
fiques palais.  Le  site  austère  de  l'antique  Pasargades  et 
la  simplicité  de  la  demeure  royale  de  Cyrus  ne  conve- 


naient plus  à  leurs  goûts  raffinés.  Ils  s'y  rendaient 
pour  ceindre  la  couronne,  après  la  mort  de  leur  pré- 
décesseur, cf.  Plutarque,  Artaxerxès,  3,  mais  ils  n'y 
demeuraient  pas.  Darius  Ier  préféra  le  séjour  de  Persé- 
polis; il  développa  la  ville,  y  éleva  de  splendides  bâti- 
ments et  tint  même  à  ce  que  son  tombeau  fût  creusé 
dans  les  rochers  à  pic  des  environs,  où  plusieurs  de 
ses  successeurs  vinrent  le  rejoindre  (lig.  28).  Cf. 
Al.  Dieulafoy,  L'arl  italique  de  la  Perse,  t.  n,  pi.  x; 
Flandin-Coste,  La  Perse  ancienne,  pi.  173-176.  Voir 
Persépolis.  Xerxès  Ier  agrandit  et  orna  le  palais  de 
Persépolis.  Artaxerxès  I"  préféra  Suse.  Il  y  édifia  un 
palais  plus  vaste  que  tout  ce  qu'on  avait  fait  jusqu'alors. 
Cf.  Dieulafoy,  L'acropole  de  Suse,  p.  274-358. 

Les  rois  perses  recevaient  leurs  vassaux  et  les  am- 
bassadeurs étrangers  sur  leur  trône  d'or,  au  fond  de 
leur  apadana  ou  salle  de  réception.  Voir  Palais,  t.  iv, 
col.  1972.  On  ne  les  apercevait  qu'un  instant.  Ils  por- 
taient une  robe  de  pourpre  avec  des  broderies  d'or. 
Plutarque,  Artaxerxès,  24,  estime  un  de  ces  vêtements 
à  12  000  talents  (70  millions  de  francs).  Une  bandelette 
bleue  et  blanche  formait  diadème  autour  de  la  kidaris 
du  roi.  On  ne  l'entrevoyait  lui-même  qu'à  l'ombre  d'un 
parasol  et  au  vent  d'un  chasse-mouches.  Il  ne  parais- 
sait d'ailleurs  en  public  qu'à  cheval  ou  sur  son  char, 
entouré  de  sa  garde.  Les  hommes  de  sa  famille  et  des 
six  anciennes  familles  princières  pouvaient  l'aborder  à 
toute  heure  et  composaient  son  conseil.  Esth.,  i,  14. 
Une  lettre  d'Artaxerxès  à  Esdras  mentionne  ces  sept 
conseillers.  I  Esd.,  vu,  14.  Ce  droit  conféré  à  six  fa- 
milles venait  de  ce  que  sept  Perses  s'étaient  concertés 
pour  tuer  Smerdis  le  Mage  et  faire  désigner  l'un  d'eux 
pour  roi,  à  condition  que  chacun  des  six  autres  aurait 
toujours  libre  accès  auprès  de  l'élu  et  que  celui-ci  ne 
pourrait  prendre  femme  que  dans  la  famille  de  ses 
compagnons.  Ce  fut  Darius  qui  devint  roi  et  la  conven- 
tion fut  observée.  Hérodote,  m,  76,84.  La  fréquentation 
de  leur  harem,  la  chasse  et  quelquefois  la  guerre  occu- 
paient le  temps  de  ces  monarques.  Cf.  Maspero,  His- 
toire ancienne,  t.  ni,  p.  736-716. 

Sur  la  religion  des  Perses,  voir  Mage,  t.  iv,  col.  544; 
Médie,  col.  921;  Michel,  col.  1069.  Il  ne  faut  pas  juger 
de  cette  religion,  à  l'époque  des  Achéménides,  par  la 
forme  systématique  et  philosophique  qui  lui  a  été  im- 
posée par  Zoroastre  ou  les  réformateurs  désignés  sous 
ce  nom,  et  n'a  triomphé  que  bien  des  siècles  plus  tard. 
D'après  Hérodote,  i,  131,  132,  les  Perses  ne  représen- 
taient pas  tes  dieux;  mais,  sur  le  sommet  des  mon- 
tagnes, ils  offraient  des  sacrifices  à  la  divinité  suprême, 
qui  est  le  ciel,  au  soleil,  à  la  lune,  à  la  terre,  au  feu,  à 
l'eau  et  aux  vents.  Ils  y  joignirent  ensuite  la  déesse 
Mylitta  des  Assyriens.  Ils  sacrifiaient,  sans  autel  ni  feu, 
et  coupaient  la  victime  par  morceaux  qu'ils  faisaient 
bouillir,  ils  invoquaient  le  dieu,  avec  le  secours 
d'un  mage,  pour  la  prospérité  du  roi  et  celle  de 
tous  les  Perses  en  général,  et  disposaient  ensuite  de  la 
victime. 

Les  Achéménides  étaient  certainement  polythéistes. 
On  les  voit  invoquer  Ormuzd,  le  dieu  bon,  Mithra, 
Anahala,  et  aussi  Ahriman,  le  principe  du  mal  concré- 
tisé pour  eux  sous  forme  du  dieu  malfaisant.  C'est 
parce  que  les  fourmis,  les  serpents  et  d'autres  reptiles 
ou  volatiles  étaient  l'œuvre  de  ce  dieu,  que  les  mages 
les  tuaient  de  leurs  propres  mains.  Hérodote,  i,  lin. 
Les  Perses  croyaient  à  la  survivance  de  l'âme.  Après  la 
mort,  l'âme  se  trouvait  exposée  à  des  dangers,  contre 
lesquels  les  vivants  pouvaient  la  défendre  par  des  sa- 
crifices offerts  aux  dieux  protecteurs.  Plus  tard,  ces 
dangers  se  spécialisèrent  dans  un  jugement  subi  sur 
le  pont  Cinvât,  et  à  la  suite  duquel  les  âmes  étaient 
envoyées  au  bonheur,  ou  à  l'enfer,  ou  à  un  état  inter- 
médiaire. A  la  fin  du  monde,  tous  ressuscitent, 
subissent  une  nouvelle  épreuve  qui  purifie  les  pécheurs 


155 


PERSE 


156 


et  arrivent  enfin  à  être  sauvés, à  l'exception  d'Àhriman 
et  de  quelques  autres. 

Les  Perses  connaissaient  aussi  certains  cas  d'impu- 
reté; il  leur  était  défendu  de  souiller  l'eau,  parce  que 
l'impureté  se  communique  surtout  par  elle.  Ils  ne  vou- 
laient pas  non  plus  souiller  la  terre  avec  le  contact  des 
cadavres.  Ils  laissaient  dévorer  ceux-ci  par  les  oiseaux 
et  les  chiens,  ou  ne  les  inhumaient  qu'enduits  de  cire 
pour  empêcher  le  contact,  cf.  Hérodote,  i,  140,  et  plus 
tard  les  déposaient  dans  les  tours  du  silence.  Ces  pra- 
tiques se  conciliaient  avec  leur  foi  à  la  résurrection. 

On  a  souvent  cherché  à  établir  des  relations  d'influence 
réciproque  ou  de  dépendance  sur  certains  points  entre 
la  religion  des  Perses  et  celle  d'Israël.  Ces  relations 
sont  difficiles  à  préciser  et  surtout  à  justifier.  ■•  En 
fait,  presque  tous  les  points  où  l'on  croit  voir  des  rap- 
ports étroits,  même  la  résurrection,  appartiennent 
selon  nous  à  la  réforme.  Que  si  l'on  compare  le  judaïsme 


tions  a  quelque  lieu  d'étonner,  surtout  dans  le  premier 
passage.  Les  Lydiens  d'Asie  Mineure  et  les  Libyens  du 
nord  de  l'Afrique  étaient  en  communication  facile  avec 
Tyr  par  mer.  Les  Perses  au  contraire  auraient  eu  à 
traverser  la  Médie,  la  Babylonie  et  la  Syrie  pour 
atteindre  cette  ville.  Aussi  se  pourrait-il  que  le  mot 
paras  désignât,  dans  le  premier  texte,  les  Pharusiens, 
de  l'île  de  Pharos,  à  l'embouchure  du  Nil,  qui  étaient 
d'excellents  archers.  Dans  le  second  texte,  il  s'agit 
d'une  armée  idéale,  dans  laquelle  la  présence  des 
Perses  étonne  moins  à  coté  des  Scythes,  des  Armé- 
niens, des  Ethiopiens  et  des  Libyens.  Pourtant,  comme 
les  Perses  sont  associés  à  ces  deux  derniers  peuples 
africains,  on  peut  douter  qu'ici  encore  paras  désigne 
la  Perse. 

3°  Daniel,  v,  28,  annonça  à  Baltasar  que  son  royaume 
allait  être  donné  aux  Modes  et  aux  Perses.  La  nuit  même, 
Cyrus  prit  la  ville.  Le  prophète  se  trouva  ensuite  un 


Vue  des  ruines  de  Persépolis.  D'après  F.  Justi,  Geschichte  des  alten  Persiens,  p.  102. 


à  la  réforme  elle  même,  l'influence  des  Perses  ne  sau- 
raii  être  antérieure  aux  environs  de  l'an  150 avant  J.-C. 
Or  il  est  constant  qu'à  celle  époque  le  judaïsme  élait 
déjà  dans  une  fermentation  extraordinaire,  en  possession 
île  toutes  les  idées  qu'on  dit  empruntées  au  mazdéisme.  » 
Lagrange.  La  religion  des  Perses.  Paris.  1904,  p.  i5,  iti. 
IV.  Les  Perses  dans  la  Bible.  —  1"  Dans  son  cantique 

de  victoire,  Judith  dit  que  «  les  Perses  ont  frémi  de  sa 
vaillance  et  les  Mèdes  de  son  audace,  s  Judith,  xvi,  12. 
Les  faits  ramilles  dans  le  livre  de  .liuliib  doivent  se  pla- 
cer vraisemblablement  sous  les  règnes  d'Assurbanipal. 
en  Assyrie,  et  de  Manassé,  en  Juda.  Voir  t.  III,  col.  1830, 
A  celte  époque,  Phraorte,  roi  des  Mèdes,  s'apprêtait  à 
entrer  en  campagne  contre  le  monarque  assyrien. 
Judith  parle  donc  des  Persesel  des  Mèdes,  non  comme 
de  vassaux,  mais  comme  de  rivaux  des  Assyriens.  Elle 
nomme  ceux-ci  au  troisième  rang,  les  Mèdes  au  second 
el  les  Perse!  au  premier,  ce  qui  donnerait  à  penserque 
le  cantique  a  été  composé  à  une  époque  où  l'Assyrie 
avail  été  soumise  par  les  Mèdes  et  où  ceux-ci  subissaient 
la  domination  des  Perses. 

.:   Ezéchiel,  xxvu,  lu,  dit  que  les  Perses,  les  Lydiens  el 
les  Libyens  servaient  dans  l'armée  de  Tyr  el  <  taienl  ses 

>""" s   de  guerre.    Ailleurs,   xxxvm.  5,    il  met   dans 

l'armée  de  Gog  des  Perses,  des  Éthiopiens  et  des 
Libyens.  La   présence  des  Perses  dans  ces  énuméra- 


rapport  avec  Darius  le  Mède,  qui  gouvernait  la  Babylo- 
nie au  nom  de  Cyrus  le  Perse,  mais  d'après  la  loi  des 
Medes  il  des  Perses,  plusieurs  lois  invoquée.  Dan.,  vi, 
S,  12.  13,  28.  Voir  Darius  le  Mède,  i.  ii.  col.  1298.  - 
Dans  une  de  ses  visions  «  pour  le  temps  de  la  lin,  » 
c'est-à-dire  ici  pour  le  temps  qui  doit  aboutira  l'époque 
messianique,  le  pu  ihète  mit  suci  ssivement  un  bélier 
à  deux  cornes,  qui  figure  l'empire  des  Mèdes  el  des 
Perses,  ri  un  bouc  velu,  qui  figure  la  monarchie 
grecque.  Dan.,  un,  20-22.  —  La  troisième  année  de 
Cyrus,  roi  de  Perse,  le  prophète  a  une  autre  \ision  sur 
les  destinées  du  peuple  d'Israël.  Cette  visiun  a  lieu 
deux  ans  après  ledit  qui  a  autorisé  le  retour  des  Israé- 
lites en  Palestine.  I  Esd.,  i.  1-3,  Daniel  n'a  pas  profité 
de  l'autorisation  et  la  plupart  des  exilés  sont  demeurés 

volontairement  en  Ilabvlonio.  L'ange  qui  lui  apparait 
lui  dit  :  i  Le  chef  du  royaume  il"  l'erse  m'a  résisté 
vingl  et  un  jours,  el  Michel,  un  des  premiers  chefs,  est 
venu  à  mon  secours,  et  je  suis  demeuré  là  auprès  des 
mi- de  Perse.  Pan.,  \.  13.  L'ange  qui  parle  au  pro- 
phèle  es|   probablement  Cabriel,  qui  s'était  déjà  montré 

à  lui.  Pan.,  ix.  21.  Le  chef  du  roya e  de  Perse  n  i   t 

pas  un  homme,  mais  un  far, comme  Michel,  tandis  que 
les  rois  sont  appelés  malké  Paras,  s  il  résiste  vingt  el 

un  jouis,  eesi  qu'il  souhaite  que  tous  les  Israélites  ne 
quittent  pas  le  royaume  <lr  Perse,  où  leur  présence  est 


157 


PERSE 


PERSEPOLIS 


158 


avantageuse.  Michel,  qui  est  le  protecteur  du  peuple  de 
Dieu,  vient  cependant  en  aide  au  premier  ange  pour 
faire  cesser  l'opposition  de  l'ange  des  Perses.  Voir 
Mi-  in  l.  t.  iv.  col.  1068-1069.  Cf.  Rosenmuller,  Daniel, 
Leipzig.  1832,  p.  348-351.  L'ange  révèle  ensuite  au  pro- 
phète les  destinées  de  la  Perse  :  a  II  y  aura  encore 
trois  rois  en  Perse;  le  quatrième  posssèdera  de  plus 
grandes  richesses  que  tous  les  autres,  et  quand  il  sera 
puissant  par  ses  richesses,  il  soulèvera  tout  contre  le 
royaume  de  Javan.  Et  il  s'élèvera  un  roi  vaillant,  qui 
aura  une  grande  puissance  et  fera  ce  qui  lui  plaira...  » 
Dan.,  xi.  2,  3.  Ces  trois  rois  qui  doivent  suivre  Cyrus 
sont  Cambyse,  Darius  I"  et  Xerxès  Ier,  en  négligeant 
l'éphémère  Smerdis.  Le  quatrième,  à  partir  de  Cyrus, 
est  Xerxès  Ier,  puissant  par  ses  richesses  et  qui  mit 
tout  en  mouvement  contre  la  Grèce.  Les  cinq  autres 
rois  ne  sont  pas  nommés  dans  la  prophétie:  mais  avec 
eux  la  Perse  perdit  peu  à  peu  de  sa  puissance.  Deux 
grands  princes  sont  surtout  mis  en  relief  :  Xerxès  Ier 
qui  alla  porter  le  déli  aux  Grecs  jusque  chez  eux. 
Alexandre  le  Grand  qui  releva  le  défi  au  cœur  même  de 
l'empire  perse.  Voir  Daniel,  t.  n,  col.  1275. 

4»  La  délivrance  des  Israélites  exilés  fut  l'œuvre  de 
Cyrus,  roi  de  Perse,  dès  la  première  année  de  son 
arrivée  au  pouvoir  souverain.  II  Par.,  XXXVI,  22.  23; 
I  Esd.,  1-11.  Le  livre  d'Esdras  raconte  ensuite  ce  qui 
fut  fait  par  les  rois  de  Perse  au  sujet  des  Juifs  :  l'au- 
torisation de  rehàtir  le  Temple,  I  Esd.,  m,  7;  IV,  3; 
les  tentatives  hostiles  des  ennemis  des  Juifs  auprès  de 
Xerxès  et  d'Artaxerxès,  I  Esd..  IV,  7:  la  lettre  d'Ar- 
taxerxès  interdisant  la  restauration  de  la  ville,  I  Esd.,  iv, 
18-22;  l'édil  de  Darius  confirmant  l'autorisation  donnée 
par  Cyrus  de  rebâtir  le  Temple  et  assignant  des  redevances 
pour  les  sacrifices,  I  Esd.,  VI,  6-12;  le  retour  d'Esdras 
sous  Arlaxerxès.  I  Esd..  vil,  1-0.  et,  en  général,  la 
bienveillance   dont    firent    preuve   les  rois  de   Perse. 

I  Esd.,  IX,  9.  Néhéjnie  remplissait  les  fonctions  d'échan- 
son  auprès  d'Artaxerxès,  quand  il  obtint  de  revenir  à 
Jérusalem  pour  en  relever  les  murailles.  II  Esd.,  il, 
1-10. 

5°  Tous  les  événements  rapportés  dans  le  livre  d'Esther 
se  passent  à  Suse  et  dans  le  royaume  des  Perses,  sous 
le  règne  de  Xerxès.  Voir  Assuébus,  t.  i,  col.  11  il; 
Estiier,  t.  n,  col.  1973;  Mardochée,  t.  iv,  col.  753. 

6°  La  victoire  d'Alexandre  le  Grand  sur  Darius,  roi  des 
Perses  et  des  Mèdes,  est  rappelée  I  Mach.,  i,  1.  On 
raconte  ensuite  comment  Néhéniie,  renvoyé  en  Judée 
par  le  roi  de  Perse,  retrouva  une  eau  épaisse  à  l'en- 
droit où  l'on  avait  jadis  caché  le  feu  sacré,  que  cette 
eau,  répandue  sur  le  sacrifice,  s'était  enflammée,  et  que 
le  roi  de  Perse,  informé  de  l'événement,  fit  enclore  le 
lieu  où  l'on   avait  trouvé  l'eau  et  ainsi  le  rendit  sacré. 

II  Mach.,  i.  19-35.  Voir  Naphthar,  col.  1597.  —  En 
Perse  s'élevaient  les  temples  que  les  deux  rois  Antio- 
chus  III  et  Antiochus  IV  cherchèrent  en  vain  à  piller. 
I  M.,ch.,  vi.  1-1  :  II  Mach.,  i,  13-16;  ix,  1,  2;  voir  Nanée, 
t.  iv,  col.  1473.  —  Enfin,  c'est  de  Perse  que  les  liages 
arrivèrent  pour  adorer  l'enfant  Jésus.  Matth..  n,  1-12. 
Voir  Mage,  t.  iv,  col.  543-545.  —  Les  Perses  ne  sont 
pas  nommés  dans  le  Nouveau  Testament,  mais  seule- 

les  Mèdes.  Act.,  II.  9. 
Bibliographie.  —  Hérodote,  I;  Xénophon,  A)iabasis, 
Hellenica,  Cyropxdia;  .1.  Gilmore,  Fragments  of  the 
Persika  of  Ctesias,  in-8»,  Londres.  18S9;  .1.  Malcolra, 
Bistory  of  Persia  from  the  earliest  Ages  to  the  pré- 
sent  Times,  2  in- 4°,   Londres,   1815;  1S.  Brisson,  De 
regio  Persarum   principatu,   1091:   in-S°,  Strasbourg, 
1710;  J.  H.  G.  Kern,  Spécimen  historiarum  contai, -n* 
ptores  griecos  de  rébus  persicis  Aclisemenidarum 
tumentis    collatos,   in-8",    Liège    (1855i;   M.  Dieu- 
lafoy,    L'art    antique    de    la    Perse,    2    in-f».    Paris, 
1884-1889;  L.  l'errot  et  Chipiez,  Histoire  de  l'art  dans 
l'antiquité,  t.  vi,  Perse,  1890,  p.  503-897;  G.  Hawlin- 


son,  The  five  cjreat  monarchies  of  the  ancien!  eastern 
World,  fifth  Monarc.hxj,  t.  iv.  1807;  G.  W.  Benjamin, 
Persia,  in-12,  Londres,  18S8;  F.  Justi,  Geschichte  des 
alten  Persiens,  in-8°,  Berlin.  1879;  A.  von  Gutschmid, 
Geschichte  Irans  imcl  seiner  Nachbarlânder  von 
Alexander  dem  Grossen  bis  zum  Untergang  der  Ar- 
saciden,  in-8»,  Tubingue,  1888;  Ker  Porter,  Travt 
Georgia,  Persia,  with  numerous  engravings,  2  in-1  . 
Londres,  1821-1828;  Flandin  et  P.  Coste,  Voyage  en 
Perse  (Perse  ancienne),  Paris,  texte,  in-8°;  planches, 
in-f»,  1843-1854.  II.  Lesétre. 

PERSEE  (grec:  Ilspcre'j;),  le  dernier  roi  de  Macédoine 
(fig.  29).  La  Vulgate  l'appelle:  Persen  Celseorum  regem. 
Il  succéda  à  Philippe  V,  qui  passait  pour  son  père,  mais 
on  ignore  s'il  était  son  fils  légitime  ou  illégitime  ou 
supposé  1 179  avant  J.  Ci.  En  171,  il  lit  la  guerre  avec 
plus  de  bravoure  que  de  succès.  Il  la  soutint  d'abord 
habilement,  mais  en  168  il  fut  défait  à  Pydna,  près  de 
VAzam    actuel,   sur  la  côte    occidentale   du  golfe   de 


29.  —  Monnaie  de  Persée,  roi  de  Macédoine. 

Tète  de  Persée  à  droite,  diadémée.  —  R%  Dans  une  couronne, 
aigle  éployé,  tenant  un  foudre.  Dans  le  champ  :  DALI  AEQI 
IIEP  j  leci:  et  un  monogramme. 

Salonique,  par  L.  Emilius  Paulus.  Il  se  rendit,  avec  sa 
famille,  à  Samothrace,  entre  les  mains  du  vainqueur 
qui  l'emmena  à  Rome  et  le  fit  figurer  à  son  triomphe. 
Avec  lui  finit  le  royaume  de  Macédoine.  Après  un  court 
emprisonnement,  il  fut  autorisé  à  se  retirer  à  Albe  où 
il  mourut.  Le  bruit  de  sa  défaite  arriva  jusqu'en  Pales- 
tine et  contribua  à  donner  aux  Juifs  une  haute  idée 
de  la  puissance  militaire  des  Romains.  I  Mach.,  vm,  5. 

PERSEPOLIS  (grec  :  ElEfxrâtoAic),  une  des  capitales 
du  royaume  de  Perse  sous  les  Achéménides.  Elle  est 
nommée  une  fois,  II  Mach.,  ix,  2,  d'après  un  grand 
nombre  de  commentateurs.  Antiochus  IV  Épiphane,  à 
court  d'argent,  tenta  de  piller  le  temple  de  cette  ville, 
d'après  ces  commentateurs,  mais  les  habitants  le  forcèrent 
à  fuir  honteusement.  —  Alexandre  le  Grand  avait  déjà 
mis  le  feu  à  Persépolis,  lors  de  sa  guerre  contre  les 
Perses,  pour  venger,  dit-on,  la  prise  d'Athènes  par 
Xerxès.  Clitarque,  dans  Athénée,  xin,  p.  570;  Diodore 
de  Sicile,  XVII,  lxxi,2,  3;  Lxxn,6;Plutarque,  Alexand., 
38;  Quinte-Curce,  v,  7,  3.  D'après  Diodore  de  Sicile, 
loc.  cil.,  et  quelques  autres,  Arrien,  m,  18,  11;  Pline, 
//.  -Y.,  vi,  20.  la  ville  entière  aurait  élé  la  proie  des 
flammes;  d'après  Strabon,  XV,  m,  6,  et  Plutarque, 
loc.  cit.,  le  palais  royal  aurait  été  seul  détruit.  Une 
partie  de  ses  monuments  avait  certainemsnt  échappé  à 
la  destruction.  Ptolémée,  vi,  44;  vu,  5,  13.  On  y  voit 
encore  des  mines  importantes.  Strabon,  XV,  m,  6,  dit 
que  Persépolis  était,  après  Suse,  la  plus  riche  des  villes 
de  l'erse,  quand  elle  fut  incendiée  par  Alexandre,  et  ses 
ruines  attestent  encore  son  ancienne  splendeur;  il  est 
douteux,  malgré  les  suppositions  contraires,  qu'elle  se 
soit  relevée  jamais  de  ce  désastre. 

Persépolis  était  située  près  de  la  plaine  de  Merdaseht, 


159 


PERSÉPOLIS    —    PESTE 


160 


au    confluent    de    l'Araxe    (Bendamir)    et    du    Médus 

tPulouan),  à  40  kilomètres  environ  de  Pasargades,  la 
capitale  primitive  de  la  Perse,  avec  laquelle  on  l'a  au- 
trefois confondue  à  tort.  Darius,  fils  d'Hystaspe,  fut  le 
premier  roi  qui  y  établit  sa  cour.  D'après  Athénée,  Deip- 
nosoph.,  xtt,  p.  513,  les  rois  de  Perse  résidaient  à  Per- 
sépolis  pendant  trois  mois  en  automne,  mais  son  affirma- 
tion n'est  pas  confirmée  par  les  autres  écrivains  anciens. 
Xénophon,  Cyrop.,  vm,  p.  22;  Plutarque,  De  exil.,  xn- 
édit.  Didot,  t.  îv,  p.  730;  Zonaras,  m,  26.  Quoi  qu'il  en 
soit  de  ce  point,  il  est  certain  que  Persépolis,  depuis 
Harius  I",  fut  avec  Suse  une  des  résidences  royales.  La 
magnificence  de  ses  ruines  (fig.  28,  col.  155),  remplit  les 
voyageurs  d'admiration.  Elles  portent  aujourd'hui  le  nom 
de  Ghel  Minar  «  les  quarante  colonnes  ».  On  y  voit  en- 
core les  restes  de  deux  superbes  palais  élevés  par  Darius 
fils  d'Hystaspe  et  par  son  fils  Xerxès,  en  même  temps 
que  le  reste  d'autres  édifices.  —  Voir  M.  Dieulafoy,  L'art 
antique  (le  la  Perse,  in-f«,  t.  m,  1885;  G.  N.  Curzon, 
Persia,  2  in-8",  Londres,  1892,  t.  Il,  p.  115-196. 

La  ville  de  Persépolis  est-elle  réellement  la  ville  dont 
parle  l'auteur  du  second  livre  des  Machabées?Il  y  a  des 
raisons  d'en  douter.  Le  premier  livre  des  Machal.ées, 
vi,  1.  place  l'événement  qui  est  rapporté  II  Mach.,  ix, 
2.  en  Élvinaide,  et  non  dans  la  Perse  proprement  dite 
où  se  trouvait  Persépolis.  On  peut  traduire  le  nom  de  Per- 
sépolis «  ville  ou  capitale  des  Perses  »  et  entendre  par  là 
Suse.  Voir  ÉLYMAïDE,  Lu,  col.  1712.  Le  temple  que  voulait 
piller  le  roi  séleucide  était  dédié  à  Nanée.  II  Mach..  i\.  2. 
Xanée  était  une  déesse  élamite  qui  devait  être  honorée 
à  Sn-e  et  non  à  Persépolis.  Voir  NanÈe,  t.  IV,  col.  1 173. 

PERSIDE  (grec  :  lh^i;,  féminin  de  Ilepai  ,.. 
i  Perse  ;  Vulgate;  Pevsis),  chrétienne  de  Rome,  saluée 
par  saint  Paul,  Rom.,xvi,  12:  Saluez  Perside,  la  bien- 
aimée,  qui  a  travaillé  beaucoup  pour  le  Seigneur.  » 
On  ne  sait  plus  rien  sur  elle.  Le  nom  de  Persis  se  lit 
comme  celui  d'une  affranchie,  Corpus  inscript.  Int., 
t.  vi,  n.  23959. 

PERSONNE  (hébreu  :  pânêh;  Septante  : icpéaiùicoi ; 

Vulgate  :  jiersuna),  tout  être  intelligent,  divin  ou  hu- 
main.  —  L'idée  abstraite  de  personne  est  étrangère  ■  • 
l'hébreu.  On  \  emploie  h'  mot  pânêh,  »  face  .  pour 
désigner  une  personne  en  particulier.  La  face  de 
ili  est  prise  pour  sa  personne  même.  Exod.,  xxxm, 
1',;  Deut.,  IV,  37:  l's.  x \ i  i x x i .  10;  i.xxx  (lxxix).  17; 
Lam.,  i\.  16;  ls.,  LXIII,  9.  Saint  Paul  pardonne  «  à  la 
face  »  du  Christ,  c'est-à-dire  à  cause  de  la  personne  du 
Christ.  II  Cor.,  n,  10.  —  D'autres  fois,  le  mot  panai, 
s  ma  face  i .  m-  prend  dans  le  sens  de  «  ma  personne  . 
II  Ree.,  xvii.  Il;  ls..  m,  15,  etc.  Une  seule  fois  le  mot 
personne  se  lit  avec  le  sens  que  nous  lui  donnons  ni 
français.  11  Cor.,  i,  11.  —  Le  plus  souvent,  les  versions 
se  servent  du  mol  npôsMirov,  persona,  pour  rendre  les 
locutions  hébraïques  ndsa'  pdnîm,  «  lever  la  fai  e 
hikkir  pdnim,  s  regarder  la  face.',  gùr  mip-penê, 
i  craindre  devant  la  face  »,  qui  signifient  en  réalité  : 
juger  quelqu'un  d'après  l'extérieur  et  se  laisser  influen- 
cer plus  que  de  raison  par  les  apparences.  Les  versions 
traduisent  un  peu  servilement  par  pÀÉTOiv  ï't?  7ipo<7(u-ov, 
respicere  personam,  o  regarder  au  visage  »,  Xa(i6ctvetv 
Kp6au>itov,  accipere  personam,  recevoir  la  personne». 
Il  est  vrai  que  les  deux  mots  grec  et  latin  désignent 
originairement  la  ligure  et  le  masque,  et  se  rapprochent 
ainsi  du  -eus  de  pânêh.  Les  auteurs  sacrés  rappellent 
fréquemment  que  Iiieu  ne  juge  pas  les  hommes  selon 
les  apparences,  ou,  comme  nous  traduisons  en  français, 

0  ne  fait  pas  acception  i  des  personnes.  Deut.,  \.  16; 
Il  Par.,  six,  7;  .lob.  xxxiv,  10;  Sar.,  vi,  8; Act.,  x,34; 
Rom.,    n.    H  ;    Cal.,  n.    11;    Eph.,   vi,   9;   Col 2.".: 

1  Pet.,  1.  17.  On  voit  que  les  Apôtres  reviennent  sou- 
vent sur  celle  idée  pour  l'opposer  suit  aux  prétentions 


des  Juifs  qui  se  regardaient  comme  des  privilégiés, 
soit  à  l'erreur  des  païens  qui  refusaient  à  l'esclave  les 
droits  de  l'homme  libre.  Les  ennemis  de  Notre-Seigneur 
reconnaissent  eux-mêmes  qu'il  ne  juge  pas  les  hommes 
sur  leur  extérieur.  Malth.,  xxn,  16;  Luc.  xx.  21.  Il  est 
prescrit  de  ne  porter  aucun  jugement  en  tenant  compte 
de  l'extérieur  des  personnes,  de  leur  puissance,  de  leur 
richesse,  etc.  Lev..  xix,  15:  Deut.,  i.  17;  xvi,  19; 
•lob,  xxxn,  21  ;  Prov.,  xvin,  ô:  xxiv.  23;  Jacob.,  Il,  1.  9. 
Par  contre,  il  faut  avoir  égard  à  la  personne  du  vieillard 
pour  le  respecter.  Lev.,  xix,  32.  11.  Lesltre. 

PESCHITO.  Voir  Syriaques  (Versions)  de  la  Bible. 

PESTE  (hébreu  :  dél/ér,  qétéb,  fpttéh,  mâcct,  rêsef; 
Septante  :  quelquefois  Xotu.ôç,  mais  presque  toujours 
OâvexTOç,  '•  mort  »  ;  Vulgate  :  pestilenlia,  pestis),  mala- 
die épidémique  qui  se  propage  rapidement  dans  une 
population  et  fait  périr  les  hommes  en  grand  nombre. 

I.  Nature  delà  peste.  —  1»  Son  origine.  —La  peste 
est  due  à  un  bacille  très  court,  à  bouts  arrondis,  qu'on 
trouve  dans  le  pus  des  bubons  pesteux,  dans  le  foie, 
la  rate  et  le  sang  des  pestiférés.  Ce  bacille  à  été  décou- 
vert en  1894,  à  Hong-Kong,  par  ïersin,  de  l'Institut 
Pasteur.  Cf.  Yersin.  Ann.  de  l'Institut  Pasteur,  Paris 
sept.  1891,  p.  662:  Xetler.  La  peste  et  son  microbe, 
Paris,  1900.  Il  ne  résiste  pas  à  une  dessiccation  prolon- 
gée pendant  trois  ou  quatre  jours,  ni  aune  température 
de  58°  pendant  quelques  heures  ou  de  100°  pendant 
quelques  minutes,  ni  à  l'action  des  désinfectants  habi- 
tuels. 

2°  Sa    transmission.  —   La    peste   est   une    maladie 
contagieuse  qui  se   transmet  par  le  contact  due. 
la  malade  ou  avec  des  objei  par  lui.  L'air  ne 

transporte  pas  le  germe  infectieux,  sinon  à  très  faible 
distance;  l'isolement  est  donc  une  cause  d'immunité.  Le 
sol  conserve  le  bacille,  mais  en  atténuant  sa  virulence. 
Certains  animaux  contractent  et  transmettent  facile- 
ment la  peste.  Les  rats  et  les  souris  sont  les  premiers 
atteints  et  succombent  en  masse  à  la  veille  OU  au  débul 
d'une  épidémie.  Puis  viennent  les  buffles,  les  porcs, 
les  chiens,  les  poules,  etc.  Les  mouches  paraissent  être 
des  i^ents  directs  de  transmission  Le  bacille  pesteuj 
pénètre  dans  l'économie  surtout  par  les  lésions  de  l'en- 
veloppe cutanée,  mais  aussi  en  partie  par  les 
piratoires  et  le  tube  digestif.  Il  s'attaque  à  toute  l'hu- 
manité, sans  distinction  de  race,  de  sexe  OU  d'âge.  Sa 
propagation  est  favorisée  par  la  famine,  la  misère,  la 
malpropreté,  le  manque  d'hygiène,  les  excès,  i  encom- 
brement qui  multiplie  les  points  de  contact.  L'altitude 
et  la  température  n'ont  que  peu  d'intluence  sur  le  déve- 
loppement et  la  durée  des  épidémies. 

3°  Son  développement  dans  l'organisme.  —  Après 
une  période  d'incubation  de  trois  à  dix  jours,  quel- 
quefois de  vingt-quatre  lu  uns  seulement,  la  maladie 
débute  par  des  frissons,  un  violent  mal  de  tête  el  une 
fièvre  intense,  accompagnée  de  délire  et  d'accablement, 
Au  bout  de  deux  ou  trois  jours,  si  le  i  nin,  la 

convalescence  commence.   Le  plus  souvent,   la  ] 
le  délire  et  l'insomnie   augmentent.    Les    bubons,  ou 

gonllemenls   ganglionnaires,  apparaissent  a  l'aine,  puis 

à  l'aisselle  et  enfin  au  . -  grossissent  et  suppurent 

du    huitième  au  dixième  jour.    En  même   temps  ou  peu 

après,  les  charbons,  ou  tumeurs  gangreneuses  entou- 
rées d'une  zone  très  rouge,  se  montrent  et  se  développent, 
de  préférence  aux  jambes  el  su  cou.  La  mort  peut 
arriver  à  cette  période.  Le  durée  de  la  maladi 
d'environ  huit  jours,  bienquela  mort  se  produise  par- 
fois des  le  deuxième  ou  troisième  jour,  ou    même  plus 

tôt.  La  prédominance  des  bubons  fait  doi rà  la  m     i- 

die  le  nom  de  peste  bubonique.  Elle  devient  peste 
pneumonique  m  le  mal  se  localise  surtout  sur  l'appareil 
pulmonaire.    lies   hémorragies   sous-cutanées    peuvent 


161 


PESTE 


162 


produire  des  lâches  noires  sur  la  peau;  c'est  alors  la 
peste  hémorragique  ou  mort  noire.  Quand  les  symptômes 
de  dépression  s'accentuent,  la  maladie  ressemble  à 
une  grave  fièvre  typhoïde  et  prend  le  nom  de  peste 
typhoïdique.  11  y  a  donc  différentes  variétés  de  pestes, 
les  unes  malignes,  les  autres  bénignes  et  moins  conta- 
gieuses. La  peste  est  souvent  foudroyante,  notamment 
au  début  des  épidémies;  elle  tue  alors  ses  victimes  en 
quelques  heures.  Parfois,  au  contraire,  elle  est  si  at- 
ténuée que  les  malades  peuvent  continuer  à  vaquer  à 
leurs  occupations.  C'est  alors  la  peste  ambulatoire. 

4°  Ses  ravages.  —  La  peste  est,  avec  la  fièvre  jaune, 
la  plus  meurtrière  des  maladies.  Au  début  de  l'épidé- 
mie, presque  personne  n'échappe;  on  estime  qu'ensuite 
la  mortalité  est  en  moyenne  de  50  à  60  pour  cent,  pou- 
vant aller  cependant  à  90  ou  95  pour  cent.  La  période 
d'activité  de  l'épidémie  est  de  huit  mois  environ; 
ensuite  la  mortalité  baisse  lentement.  Depuis  la  peste 
d'Athènes,  décrite  par  Thucydide,  Bell.  Pelop.,  Il,  48, 
l'histoire  a  enregistré  un  certain  nombre  de  pestes  très 
meurtrières.  La  peste  noire,  qui  sévit  en  Asie  et  en 
Europe  de  1346  à  1361,  coûta  la  vie  à  '21  millions 
d'hommes  en  Europe,  et  probablement  à  un  plus  grand 
nombre  en  Asie.  Quelques  détails  empruntés  à  la  des- 
cription de  la  peste  de  Marseille,  en  1720.  donneront 
une  idée  de  ce  qui  devait  se  passer  dans  les  villes  de 
l'antiquité  quand  l'épidémie  les  visitait.  «  Marseille 
présente  alors  le  plus  épouvantable  spectacle;  cent 
mille  personnes  se  craignent,  veulent  se  fuir  et  se 
rencontrent  partout.  Les  liens  les  plus  sacrés  sont 
rompus.  Tout  ce  qui  languit  est  déjà  réputé  malade, 
tout  ce  qui  est  malade  est  regardé  comme  mort.  On 
s'échappe  de  sa  propre  maison,  où  quelques  parents 
rendent  le  dernier  soupir;  on  n'est  reçu  dans  aucune 
autre.  Les  portes  de  la  ville  sont  encombrées  d'une 
foule  empressée  de  se  dérober  au  souffle  empoisonné. 
Les  gens  du  peuple  campent  sous  des  tentes...  lien  est 
qui  vont  chercher  un  refuge  sur  le  sommet  des  collines 
ou  dans  le  fond  des  cavernes.  Les  marins  se  croient 
plus  heureux  parce  qu'ils  vivent  dans  des  barques  sur 
le  port.  Mais  la  mer  et  les  ruisseaux,  les  collines  et 
les  cavernes  ne  protègent  point  contre  les  atteintes  de 
la  contagion...  Toutes  les  boutiques  fermées,  le  com- 
merce arrêté,  les  travaux  interrompus,  toutes  les  rues, 
toutes  les  places,  toutes  les  églises  désertées;  ce  n'est 
encore  là  qu'un  premier  coup  d'œil  de  la  dévastation 
de  Marseille.  Quelques  jours  après,  l'aspect  de  Marseille 
était  effrayant.  De  quelque  coté  qu'on  jette  les  yeux,  on 
voit  les  rues  jonchées  des  deux  côtés  de  cadavres  qui 
s'entretouchent  et  qui,  étant  presque  pourris,  sont 
hideux  et  effroyables  à  voir.  Comme  le  nombre  des 
forçats  qu'on  a  pour  les  prendre  dans  les  maisons  est 
beaucoup  inférieur  pour  pouvoir  dans  tous  les  quartiers 
les  retirer  journellement,  ils  y  restent  souvent  des  se- 
maines entières  et  ils  y  resteraient  encore  plus  long- 
temps, si  la  puanteur  qu'ils  exhalent  et  qui  empeste 
les  voisins  ne  les  déterminait,  pour  leur  propre  conser- 
vation, de  faire  un  effort  sur  eux-mêmes  et  d'aller  les 
retirer  des  appartements  où  ils  sont  pour  les  traîner 
sur  le  pavé.  Us  vont  les  prendre  avec  des  crocs  et  les 
tirent  de  loin  avec  des  cordes  jusqu'à  la  rue;  ils  font 
cela  pendant  la  nuit  pour  être  libres  de  les  traîner  le 
plus  loin  qu'ils  peuvent  de  leurs  maisons  et  de  les 
laisser  étendus  devant  celle  d'un  autre  qui  frémit,  le 
lendemain  matin,  d'y  trouver  ce  hideux  objet  qui 
l'infecte  et  lui  porte  l'horreur  et  la  mort.  On  voit  tout 
le  cours,  toutes  les  places,  tout  le  port,  traversés  de  ces 
cadavres  qui  sont  entassés  les  uns  sur  les  autres.  Sous 
chaque  arbre  du  cours  et  des  places  publiques,  sous 
l'auvent  de  chaque  boutique,  on  voit  entre  tous  ces 
cadavres  un  nombre  prodigieux  de  pauvres  malades  et 
même  des  familles  tout  entières,  étendus  misérablement 
sur   un  peu   de  paille  ou  sur  de  mauvais   matelas.  » 

DICT.    DE  LA  BIBLE. 


A.  Boudin,  Histoire  de  Marseille,  cité  par  L.  Lamelle, 
La  peste  dans  l'état  actuel  de  la  science,  dans  la  Revue 
des    questions   scientifiques,    Bruxelles,    juillet    1897, 
p.  41-43.  Voir  tout  l'article,  p.  39-73,  et  E.  Deschamps, 
Peste,    dans    le    Traité    de   médecine   de    Brouardel, 
Paris,  1903,    t.  il,    p.   52-58.  Tel  était  le   spectacle  que 
devaient  présenter  équivalemment  les  villes  anciennes 
quand   la    peste   y    éclatait.   Les   rares    victimes   de   la 
peste  qui  échappent  à  la  mort  demeurent  languissantes, 
plus  ou  moins  paralysées  et  atteintes  dans  leur  intelli- 
gence.   La    peste,  qui  se  répandait  dans   tout   l'ancien 
monde,  est  aujourd'hui  confinée  dans  quelques  foyers, 
en  Afrique,  la  Cyrénaïque,  et  en  Asie,  l'Assyrie,  l'Irak- 
Arabie,  la  Perse,  leTurkestan,  l'Afghanistan,  l'Hindous- 
tan  et  la  Chine.  Elle  ne  détermine  pas  toujours,  dans 
les  endroits  où  elle  est  endémique,  les  mêmes  désastres 
qu'autrefois  en  Europe.   Mais  elle  a  eu  de  temps  en 
temps  des  réveils  terribles,  et  l'on  a  pu  constater  que 
sa  virulence  ne  s'était  pas  atténuée  avec  les  siècles.  En 
1894,  elle   fit  à  Canton,  en  quelques  semaines,  60  000 
victimes.  En  revanche  elle  n'a  jamais  envahi  l'Améri- 
que. —  Voir  H.  F.  Millier,  Die  Pest,  in-8»,  Vienne,  1900. 
II.  La  peste  dans  la  Bible.  —  1°  Ses  caractères.  — 
La  peste   apparait  dans  la  Bible  comme  un  mal  qui 
effraie   par  sa   soudaineté   et  ses   ravages.   Sa   nature 
infectieuse  ressort  de  ce  faitqu'elle  accompagne  souvent 
la    famine  dans  les  villes  assiégées,  où  toute  hygiène 
est    rendue  impossible.  Mais  les   écrivains  sacrés  ne 
fournissent  aucun  détail  permettant  d'identifier  la  pesle 
dont  ils  parlent.  Les  noms  qui  la   désignent  en  hébreu 
sont  des  termes  généraux,  impliquant  l'idée   de  mort, 
mais  convenant  à  diverses  calamités.  Pour  rendre  ces 
différents  termes,  les  Septante  n'ont  guère  que  le  mot 
eàva-roç,  «  mort  »,  dont  la  signification  est  très  étendue. 
Cf.  Ose.,  xin,  14.  Il  est  donc   à  croire  que  les  termes 
du  texte  hébreu   visent  des   affections  morbides  assez 
diverses,  n'ayant  de  commun  que   leur  caractère  viru- 
lent,  leur  extension  rapide  et  la  multiplicité  de  leurs 
ravages.  Le  typhus,  la  peste  noire,  le  choléra,  et  d'autres 
épidémies  analogues  ont  donc  pu  sévir  sur  les  Israé- 
lites et  leurs  voisins,  sans  qu'il  soit  possible  de  préci- 
ser, en  aucun  cas,   la    nature  spécifique  du   mal.   Cf. 
W.  Ebstein,    Die  Medizin  im  Alten  Testament,  Stutt- 
gart, 1901,  p.  100-101. 

2°  Pestes  mentionnées  dans  la  Bible.  —  1.  Après  la 
peste  du  bétail,  qui  constitue  la  cinquième  plaie 
d'Egypte,  Exod.,  ix,  3-6,  un  autre  genre  de  peste 
s'abattit,  sous  forme  de  pustules,  sur  les  hommes  et 
les  animaux.  Exod.,  IX,  8-11.  Ce  fut  la  sixième  plaie. 
Voir  Pustules.  Sur  le  mal  épidémique  qui  frappa  les 
Philistins  détenteurs  de  l'Arche,  voir  Ofalim,  t.  iv, 
col.  1757.  —  2.  La  peste  signalée  sous  David,  à  la  suite 
du  dénombrement,  dura  trois  jours  et  fit  périr  70  010 
hommes.  Reg.,  xxiv,  15  ;  I  Par.,  xxi,  12-14.  L'exécution 
de  la  sentence  divine  est  alors  confiée  à  un  ange,  «  qui 
promène  la  mort  dans  tout  le  territoire  d'Israël.  » 
Celte  peste  est  présentée  comme  un  châtiment  divin, 
que  David  lui-même  préféra  à  une  famine  de  trois  ans 
et  à  une  guerre  de  trois  mois.  Elle  commence  et  elle 
s'arrête  sur  l'ordre  de  Dieu.  Il  y  a  donc  là  une  épidé- 
mie qui  peut  être  naturelle  en  elle-même  et  analogue 
à  celles  qui  sévissaient  de  temps  en  temps,  mais  qui 
fut  surnaturelle  dans  ses  circonstances.  —  3.  Sous  le 
roi  Ézéchias,  l'ange  de  Jéhovah  fit  périr  en  une  nuit 
185000  hommes  de  l'armée  de  Sennachérib,  aux  environs 
de  Jérusalem.  IV  Reg.,  xix,35;  Is.,  xxxvn,  36.  Josèphe, 
Ant.  jud.,  X,  i,  5,  attribue  ce  ravage  à  une  peste, 
Xoijuxt)  v'jno;.  Mais  les  textes  ne  donnent  aucun  détail 
permettant  de  reconnaître  le  genre  de  maladie.  Il  ne 
serait  pas  impossible  que  l'agent  employé  par  Dieu  ait 
été  le  hphus,  qui  se  distingue  de  la  peste  par  l'absence 
de  bubons  et  de  charbons,  mais  dont  on  a  observe'' 
fréquemment  le  développement  au  milieu  des  armées 

V.  -  6 


163 


PESTE   —   PETAI* 


164 


en  campagne,  au  point  de  lui  faire  donner  le  nom  de 
typhus  des  camps.  «  Le  typhus  est  une  des  affections 
les  plus  graves,  les  plus  meurtrières.  La  proportion  de 
mortalité  ne  saurait  être  calculée;  elle  varie  essentielle- 
ment suivant  les  lieux,  les  circonstances  au  milieu 
desquelles  la  maladie  éclate.  Ainsi,  dans  quelques  épi- 
démies, presque  tous  les  malades  succombent,  ou  bien 
la  mortalité  en  enlève  la  moitié,  les  deux  tiers.  >■ 
Grisolle,  Traité  de  pathologie  interne,  Paris,  1874,  t.  i, 
p.  71.  L'intervention  de  Dieu  aurait  rendu  le  mal  parti- 
culièrement meurtrier  pour  les  soldats  de  Sennacbérib. 
Hérodote,  il,  141,  confirme  le  fait,  tout  en  le  dénatu- 
rant. D'après  cet  historien,  l'armée  assyrienne  campait 
devant  Péluse,  dans  le  delta  du  Nil,  quand  une  multi- 
tude de  rats  rongèrent  dans  le  cours  d'une  nuit  les 
carquois,  les  arcs  et  les  courroies  des  soldats,  si  bien 
que,  devenus  incapables  de  se  servir  de  leurs  armes, 
les  Assyriens  n'eurent  plus  qu'à  prendre  la  fuite  le 
lendemain-  Cette  invasion  de  rats  est  curieuse  à  noter. 
Peut-être  pourrait-elle  être  l'indice  d'une  peste  à 
laquelle,  comme  il  arrive  d'ordinaire,  ces  rongeurs  au- 
raient succombé  les  premiers.  —  Sur  la  maladie  du  roi 
Ezéchias,  voir  Ulcère.  —  4.  Amos,  iv,  10,  mentionne 
une  peste  qui  sévit  de  son  temps,  sous  le  roi  Jéroboam 
II,  bedéréh,  «  à  la  manière  »  de  la  peste  d'Egypte,  et 
non  êv  iSoi,  in  via,  «  sur  le  chemin  »  de  l'Egypte,  comme 
traduisent  les  versions,  qui  ont  pris  dérék  dans  son 
sens  ordinaire  de  «  route  ».  Le  prophète  fait  également 
illusion  à  la  puanteur  des  camps  montant  jusqu'aux 
narines,  ce  qui  permet  de  penser  que  l'épidémie  s'éten- 
dit surtout  sur  les  armées  de  Jéroboam.  —  Bien  d'au- 
tres pestes  que  celles-là  se  produisirent  sans  nul  doute 
dans  le  cours  de  l'histoire  d'Israël.  La  plupart  furent 
limitées,  moins  meurtrières  et  dues  à  des  causes  pure- 
ment naturelles.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XV,  vu,  7,  cite 
une  peste  qui,  au  temps  d'IIérode,  lit  périr  beaucoup 
d'hommes  du  peuple  etde  courtisans.  Quelques  années 
plus  tard,  la  disette  fut  accompagnée  d'une  nouvelle 
pes  •  .  le  double  mal  se  prolongea  durant  deux  ans  et 
causa  de  grands  ravages.  Ant.  jud.,  XV,  ix,  1.  Nôtre- 
Seigneur  avail  prédit  que  des  pestes  et  des  famines 
précéderaient  la  ruine  de  Jérusalem.  Matth.,  xxiv,  7; 
Luc,  xxi,  11.  Pendant  le  siège  de  la  ville,  la  peste  ne 
put  manquer  de  se  joindre  aux  autres  maux,  quand  il 
fallut  laisser  les  cadavres  sans  sépulture  dans  les  rues, 
dans  les  maisons  et  autour  des  murailles.  Cf.  Josèphe, 
Bell.  jud.,  V,  XII,  3;  xm,  7;  VI,  i,  1,  etc. 

:!'  Les  menace»  de  peste.  —  1.  Le  Seigneur  menace  les 
Israélites  infidèles  de  trois  fléaux  :  l'épée.  c'est-à-dire  la 
guerre,  la  peste  et  la  famine.  Lev.,  xxvi,  25.  Après  une 
i  il  le  du  peuple  au  désert,  Jéhovah  veut  le  détruire  par 
la  peste  elne  pardonne  que  sur  les  instances  de  .Moïse, 
en  stipulant  cependant  qu'aucun  des  coupables  ne  verra 
la  Terre  Promise.  Num.,  xiv,  12,  23.  La  menace  delà 
peste  et  de  toutes  surir  de  maladies  est  encore  rappelée 
dans  le  Deutéronome,  x.xvm,  21-26.  Dans  son  cantique, 
Moïse  \  juinl  la  mention  de  la  famine,  desbétes  féroces 
ri  del'épée.  Deut.,xxxn,  24,25.  Cette  menace  répondait 
à  une  crainte  déjà  ancienne  parmi  les  Hébreux.  Quand 
Moïse  se  présenta  pour  la  première  fois  devant  le  pha- 
r.ion,  il  lui  demanda  l'autorisation  d'emmener  son 
peuple  à  trois  jours  (le  marche  dans  le  désert,  «  pour 
ollïir  des  sacrifices  à  Jéhovah, afin  qu'il  ne  nous  frappe 
pas  de  la  peste  ou  de  l'épée.  Exod.,  v,  3.  —2.  Des 
;  i  i  les  sont  adressées  au  Seigneur  dans  le  Temple  de 
Salomon,  pour  qu'il  préserve  les  Israélites  de  la  peste 
el  de>  autres  fléaux,  III  Reg.,  un,  37;  il   Par.,  vi.  28, 

et  le  Seigneur  pro i  de  les  exaucer.  Il  Par.,  vu.  13. 

des  prières  sonl  réitérées  sous  Josaphat,  Il  Par.,  \x.  9. 
Du  reste,  la  peste  est  le  châtiment  de  l'infidélité;  quant 
au  juste,  qui  met  sa  confiance  dans  le  Seigneur,  il  est 
■i  l'abri  t  de  la  peste  funeste  »,  mid-débér  havvôf,  et 
non  mid-ddbâr,  iitô  \6yov  rapa^uSouç,  «  verbo  aspero, 


«   de  la  parole  funeste   ».   comme  ont  lu   les  versions. 
Il  n'a  à  craindre,  Ps.  xci  (xc),  3,  6  : 

Ni  la  peste  (dèbèr)  qui  marche  dans  les  ténèbres, 
Ni  la  contagion  (qètêb)  qui  ravage  en  plein  midi. 

Deux  prophètes,  Jérémie  et  Ézéchiel,  reviennent  fré- 
quemment sur  la  menace  de  la  peste.  Ils  joignent  ordi- 
nairement trois  fléaux  :  l'épée,  la  famine  et  la  peste. 
Jer.,  XIV,  12;  x.xi,  7,9;  xxiv,  10;  xxvn,  8,  13;  xxix,  17- 
18;xxxu,  24,  36;  xxxiv,  17;  xxxvm,  2;  xlii.  17.  22; 
xi.iv.  13;  Ezech..  vu.  lô;  XII,  16.  Dans  une  ville  assié- 
gée, bs  trois  lléaux  s'appellent  l'un  l'autre.  L'ennemi 
empêche  le  ravitaillement  et  souvent  accapare  les 
sources;  la  famine  et  les  maladies  infectieuses  sont 
bientôt  la  conséquence  du  siège.  C'est  là  ce  dont  les 
prophètes  menacent  Jérusalem.  Ézéchiel.  xxviii,  33, 
appelle  contre  Sidon  la  peste  et  l'épée;  il  ne  parle  pas 
de  famine,  parce  que  la  ville  pouvait  se  ravitailler  par 
mer.  Une  autre  fois,  faisant  écho  à  la  menace  de  Moïse, 
il  annonce  l'envoi  contre  Jérusalem  de  ■  quatre  châti- 
ments terribles,  l'épée,  la  famine,  les  bêtes  malfaÎ! 
et  la  peste.  »  Ezech.,  xiv,  19,  21.  La  mention  des  trois 
principaux  lléaux  s'est  perpétuée  dans  l'Eglise.  L'une 
des  invocations  des  litanies  des  Saints  demande  encore 
que  les  fidèles  soient  préservés  a  peste,  (urne  et  belle 

4°  La  peste  des  animaux.  —Jérémie,  xxi,  6,  prédit 
qu'à  Jérusalem  Dieu  frappera  de  la  peste  hommes  et 
bêtes.  Les  animaux  d'Egypte  furent  atteints  par  les  pus- 
tules de  la  sixième  plaie,  ix,  9-10.  La  plaie  précédente 
avait  été  particulière  à  ceux  qui  se  trouvaient  dans  les 
champs,  chevaux,  ânes,  chameaux,  bœufs  el  brebis. 
Exod.,  ix.  3,  6.  Les  animaux  domestiques  ont  toujours 
été  extraordinairement  nombreux  dans  les  champs  de 
la  Basse-Egypte  et  parfois  les  épizooties  y  exercent  de 
prodigieux  ravages.  Cf.  Vigouroux,  La  Bible  el  les 
découvertes  modernes,  6e  édit.,  t.  H,  p.  329.  Le  lexte 
sacré  ne  permet  pas  de  préciser  le  genre  de  pesle  qui 
constitua  la  cinquième  plaie.  Le  typhus  du  gros  bétail, 
la  fièvre  charbonneuse,  la  péripneumonie  contagieuse 
ou  d'autres  causes  infectieuses  ont  pu  facilement  entrer 
en  activité  sur  l'ordre  de  Dieu,  tout  en  résultant  natu- 
rellement de  la  putréfaction  engendrée  par  les  ca- 
davres des  grenouilles  de  la  seconde  plaie,  ou  des  pi- 
qûres envenimées  des  cousins  et  des  mouches  des  deux 
plaies  suivantes.  Cette  plaie  n'atteignit  du  reste  qui 
animaux  laissés  dehors,  dans  les  champs.  Cf.  S.  Augus- 
tin, lu  Beptat.,  il,  33,  t.  xxxiv,  col.  608.  Les  autres 
devaient  être  frappés  par  la  sixième  plaie,  sans  cepen- 
dant en  périr.  C'est  ce  qui  permit  ensuite  au  pharaon 
de  pouvoir  atteler  sa  charrerie  pour  la  mettre  à  la 
poursuite  des  Hébreux.  Exod.,  xiv,  6-9.  —  5°  Les  ver- 
sions parlent  quelquefois  de  pestilence,  Ps.  I,  1,  et 
d'homme  pestilent.  Prov.,  xv,  12;  xix.  2.">;  \xi.  11; 
XXIX,  8;  1  Mach.,  \,  61;  XV,  '■>.  21,  dans  des  passages 
où  il  n'est  question  que  d'impiété  ou  d'impies.  Les 
Juifs  appellenl    sainl   Puni    i    une  pesle    »,  rbv   StvSpa 

TOÛTOV  Xoip.o'v,   hunC  Imminent  pest  i  féru  m ,  Aet.,  XXIV,  5, 

c'est-à-dire  un  homme  qu'ils  jugent  dangereux  comme 
la  peste.  H.  LesÉTRE. 

PÉTASE  igrec  :  :rÉTa<roç)t  chapeau  à  fond  bas  el  à 
larges  bords  dont  était  coiffé  le  dieu  Mercure.  II  Mach., 
IV,  12,  dans  le  lexte  grec.  Voir  MERCUBE,  2  »,  t.  IV,  col.  992. 

PETAU  Denis,  théologien    français,    né   à   Orléans 

en  l.">83,  mort  à  Palis  le  11  décembre  I0.V2,  entre  au 
Doviciat  de  Nancy  en  160.").  professa  d'abord  la  rhéto- 
rique puis,  pendant  22  ans.  la  théologie  dogmatique  au 
collège  de  Clermont  à  Paris  avec  un  rare  su 
Petau  n'appartient  à  l'exégèse  que  par  la  paraphrase  en 
vers  grecs  de  tous  les  Psaumes  de  David  et  des  can- 
tiques de  la  Bible  :  Aiovuvfou  roî  Wiza6(o'J...  Ttapa- 
fpioi?  ïu.u.ETpo;  àtivTwv  tûv  to0  Aï-Ji'îo'j  U'a).p.<ï>v,  xai 


165 


PETAU 


PÉTRA 


166 


T(ôv  èv  -*-.;  \iç,x\;  êtoXoiç;  celte  paraplirase  est  accom- 
pagnée d'une  sorte  de  traduction  latine  pour  la  commo- 
dité de  ceux  qui  ne  savent  pas  le  grec.  In-12.  Paris, 
1637.  —  On  peut  signaler  aussi  ses  commentaires  sur 
Job  et  Osée  restés  manuscrits,  ainsi  qu'une  paraphrase 
en  vers  grecs  sur  les  Lamentations  de  Jérémie  et  des 
remarques  sur  Jérémie.  Ézéchiel  et  Daniel. 

P.  Bliard. 
PETERSEN  Jean  Guillaume,  théologien  protestant 
et  visionnaire  allemand,  né  à  Osnabruek  en  1619,  mort 
près  de  Magdebourg  le  31  janvier  1727.  Après  avoir 
étudié  à  Lubeck,  à  Giessen  et  à  Rostock.  il  fut  nommé 
pasteur  à  Hanovre,  puis  surintendant  dans  le  diocèse 
de  Lubeck.  Ministre  à  Lunebourg,  il  fut  accusé  de 
renouveler  les  erreurs  des  Millénaires  et  forcé,  en  1692, 
de  renoncer  à  la  prédication.  On  lui  reprochait  en  outre 
de  regarder  toutes  les  religions  comme  également 
bonnes.  Il  se  retira  alors  près  de  Magdebourg,  conti- 
nuant avec  l'aide  de  sa  femme  à  propager  toutes  ses 
erreurs.  Xous  citerons  parmi  les  écrits  de  ce  vision- 
naire :  Psalmen  Davids,  nach  dem  Maas  der  ertheilten 
Gabe  Christi,  in  dem  reichesten  prophetiscltcn  Sinne, 
durcit  den  Schlussel  Davids  aufgesehlossen,  in-4c, 
Francfort  et  Leipzig.  1719;  Zeugniss  Icsu  aus  dem  kô- 
niglichen  Propheten  Jesaia  durcit  den  Geist  der 
Weissagung,  von  Capitel  :u  Capitel  erklârt,  worin- 
nen  gezeiyt  wird,  dass  der  Geist  Gottes  nebst  der 
vergangenen,  auch  attf  die  gegenwârtige,  ingleichen 
au f  die  naelifolgende  Zeit  nach  seinem  vôlligen  Sinn 
gedeutel  habe,  in-i  .  Francfort,  1719;  Zeugniss  lesti 
in  dem  Propheten  Ieremia,  in-4».,  Francfort.  1719; 
Zeugniss  Iesu  aus  dem  Propheten  Ezechiel,  durcit 
den  Geist  der  Weissagung  dargethan,  in-i",  Franc- 
fort, 1719;  Sinn  des  Geistes  in  dent  Propheten  Daniel, 
in-4  .  Francfort.  1720;  Apostolischer  Z  usant  ntenhang , 
darinne»  das  verkUirle  Evangelium  so  tvoltl  in  der 
Apostelgeschichte  :  als  in  allen  Epîsleln  Paulli,  Pétri, 
îs,  lacobi  attd  ludse  in  der  Connexion,  als  dem 
Schlussel  der  wahren  Exegesis  und  Erforsehung  des 
Sinnes  und  des  Geistes  hervorleuchtel  undgezeigetist 
in-4»,  Francfort.  1722;  Erklàrung  der  zwôlf  kleiuen 
Propheten,  in-4  .  Francfort,  1723.  Erklàrung  des  Ho- 
henliedes  Salomonis,  in-8°.  Budingen,  1728.  J.-G.  Pe- 
tersen  écrivit  lui-même  sa  biographie  :  Lebensbe- 
schreibung  J.  W.  Petersen's,  derheiligen  Scltrift  Doc- 
toris,  vannais  Professons  :u  Rostock,  in-8»,  Halle.  1717. 
et  sa  femme  deux  ans  plus  tard  l'imita  en  publiant  : 
Leben  Frauen  J.  E.  Pelersen,  Gebohrner  von  und 
:■<  Merlau,  lie,  un  D'  J.  W.  Petersen's  Eheliebsten, 
in-8»,  s.  1.  Halle),  1719.  —  Voir  en  outre  Walch. 
Biblioth.  théologien,  t.  îv,  p.  496,  528,  538,  545,  552, 
557,  etc.  C.  Heuriebize. 

PETHOR  (hébreu  :  Petùr;  Septante  :  <I>a(iivpi  : 
Alexandrinus  :  BaOo-jfi),  ville  de  Mésopotamie,  patrie 
de  Balaam.  La  Vulgate  a  traduit  ce  nom  de  lieu  par 
ariolunt,  »  devin,  »  dans  Nurn..  xxn.  5,  tandis  que  les 
Septante  l'ont  conservé  comme  nom  propre.  Dans  le 
second  passage  où  le  texte  hébreu  mentionne  cette  ville, 
ixm,  i  l  Vulgate,  5),  il  est  omis  par  les  Septante  et 
parsaii  I  Jérôme.  C'est  à  Pethor  que  Balac,roi  de  Moab. 
envoya  chercher  Balaam,  afin  de  lui  faire  maudire  les 
enfanls  d'Israël,  Voir  Balaam.  t.  i.  col.  1319.  Le  Deuté- 
ronome  nou>  apprend  que  Pethor  était  une  ville  d'Aram 
Naharaïm  ou  Mésopotamie  et  les  N'ombres,  qu'elle  était 
située  sur  (  le  lleuve  du  pays  des  fils  de  son  peuple  » 
(Vulgate  par  erreur  :  des  lils  d'Ammon)  c'est-à-dire  de 
Urate.  Le  nom  de  cette  ville,  en  assyrien  Pitrtt,  se 
lit  sur  l'obélisque  de  Salmanasar.  Voir  Eb.  Schrader, 
Ke  nschriften  and  Geschichtforschung,  1878,  p.  140, 
220,  231.  Elle  était  située  sur  le  haut  Euphrate,  au 
conlluent  de  ce  fleuve  et  du  Sagur.  qui  vient  de  l'ouest, 
à  une  centaine  de  kilomètres  au  nord-est  d'Alep,  à  plus 


de  600  kilomètres  de  la  Palestine.  Thothmès  III  s'était 
déjà  emparé  de  Pethor,  lors  de  ses  conquêtes  dans  l'Asie 
antérieure,  comme  on  le  voit  sur  les  listes  de  Karnak 
où  le  pharaon  enumère  ses  victoires.  H.  Brugsch,  Ge- 
schichte  Aegtjptens,  1877,  p.  454,  n.  280;  W.  M.  Mflller, 
Asten  und  Europa  nach  allâgypttschen  Denkmâlem, 
1893,  p.  291.  Cf.  J.  Menant,  Annales  des  rois  d'Assy- 
rie, 1874,  p.  98;  Eb.  Schrader,  Keilinschrifiliche  Bi- 
blwthek.t.  i,  p.  133,  lig.  37-40;  p.  163,  lig.  36;  p.  173. 
lig.  Sô-86.  C'est  à  tort  que  J.  Marquart,  Fundamente 
israelilischcr  und  jûdischer  Geschichte,  1896,  p.  74. 
et  H.  Winckler,  dans  Schrader,  Keilinichriften  und 
das  alte  Testament,  3*  édit.,  p.  118.  prétendent  que 
Pethor  était  en  Egypte. 

PETRA  (hébreu  :  ySo,  Séla',  «  pierre  »;  employé 
parfois  sans  article,  Is.,  xvi.  1  :  xt.n.  11.  quelquefois  avec 
l'article,  ySsn,  has-Séla',  Jud.,  i,  36;  IV  Reg.,  xiv.  7: 
Septante  :  EUrpa,  r,  Uï-ox;  Vulgate  :  Petra  .  ville  de 
l'Idumée  (tig.  30).  Voir  Ed.  Robinson,  Biblical  Resear- 
ches,  2e  édit.,  1856,  t.  Il,  note  xxxvii,  p.  521-521.  D'après 
le  sentiment  général  des  interprètes,  il  est  question  de 
cette  ville  dans  les  quatre  passages  bibliques  cités  plus 
haut,  et  probablement  aussi  II  Par.,  xxv,  12.  texte  paral- 


30. 


Monnaie  de  Pétra. 


Buste  d'Hadrien  à  droite,  tète  laurée,  épaules  drapées.  ArTO- 
KPATCOP.  —  R..  Pétra  assise  sur  un  rocher  tenant  daus  la  main 
gauche  un  trophée.  Dans  la  droite  un  patère.  I1ETPAMHTPC- 
no.uc. 

lèle  à  IV  Reg.,  xiv,  7.  —  Le  texte,  Jud.,  i,  36,  mentionne 
simplement  Pétra  comme  formant  la  limite  du  territoire 
des  Amorrhéens.  —  IV  Reg.,  xiv,  7,  il  est  dit  qu'Amasias, 
roi  de  Juda,  «  battit  10000  Iduméens  dans  la  vallée  du 
Sel,  »  c'est-à-dire  de  la  mer  Morte,  et  qu'  «  il  s'empara 
de  Séla'  »  ou  Pétra.  —  II  Par.,  xxv.  11-12,  nous  lisons 
qu'après  cette  victoire  d'Amasias,  ses  troupes  se  saisi- 
rent d'un  grand  nombre  d'Iduméens.  qu'ils  menèrent 
sur  la  hauteur  de  Pétra  (hébreu,  Séla'  ;  Vulgate  :  ad 
prœruptum  cujusdam  pétrie),  d'où  ils  les  précipitèrent. 

—  Isaïe,  xvi.  1.  suppose  idéalement  que  les  Moabites,  bat- 
tus par  les  Hébreux  et  réfugiés  à  Pétra,  envoient  de  là  le 
tribut  au  roi  de  Jérusalem,  pour  faire  leur  soumission; 
xlii,  11,  le  même  prophète  invite  les  habitants  de  Séla 
à  chanter  avec  tout  l'univers  la  gloire  du  Dieu  d'Israël. 

—  Le  prophète  Abdias  fait  au  moins  allusion  à  Pétra 
aux  v.  2-4  de  sa  prophétie  : 

[Édom],  je  te  rendrai  petit  parmi  les  nations... 
L'orgueil  de  ton  cœur  t'a  égaré, 

Toi  qui  habites  le  creux  des  rochers  (s 

Qui  t'assieds  sur  les  hauteurs. 

Et  qui  dis  en  toi-même  : 

Qui  me  précipitera  jusqu'à  terre  ? 

Quand  tu  élèverais  ton  aire  comme  l'aigle, 

Quand  tu  la  placerais  au  milieu  des  étoiles, 

Je  t'en  précipiterai,  dit  Jéhovah. 

I.  Identification.  —  Il  n'y  a  pas  de  doute  que  l'an- 
cienne Séla'  ne  corresponde  à  la  Pétra  des  Grecs  et 
des  Romains.  Les  passages  de  la  Bible  qui  la  mention- 
nent la  placent  tous  dans  l'Idumée  et  font  d'elle  une 
ville  importante  de  cette  région.  Lrs  caractères  de  Pétra 
conviennent  fort  bien   à  ce  que  les   écrivains   sacrés 


1G7 


PETRA 


168 


nous  disent  de  Séla  :  aussi  est-ce  d'une  manière  à 
peu  près  unanime  qu'on  a  identifié  de  tout  temps  les 
deux  localités.  Voir  Eusèbe,  Onomastica  sacra,  Gœttin- 
gue,  1870,  p.  147,  286.  L'ancien  nom  hébreu  de  Pétra 
semble  avoir  été  conservé  sous  la  l'orme  Sal,  que  l'écri- 
vain arabe  Yalkoût  emploie  pour  désigner  une  forteresse 
Mime  précisément  dans  l'ouadi  Mouça,  sur  l'empla- 
cement de  Pétra.  Nôldeke,  Der  arabische  Nanie  von 
Petra,  dans  la  Zeitschrifl  der  deutschen  morgenlân- 
dis,  hén  Gesellschaft,  1871,  t.  xxv,  p.  259-260.  Les  ruines 
de  Pétra  sont  situées  dans  la  vallée  que  les  Arabes  ap- 
pellent Ouadi  Mouça,  t  Vallée  de  Moïse,  »  et  ils  lui  ont 
attribué  ce  nom  parce  qu'ils  placent  en  ce  lieu  l'un  des 
rochers  qui,  frappés  par  Moïse,  fournirent  aux  Hébreux 
une  eau  miraculeuse  durant  leur  marche  à  travers  le 
désert.  «  Le  fond  de  la  cuvette  où  était  autrefois  la  ville 
elle-même,  est  bossue,  mamelonné;  l'ouadi  Mouça  la 
coupe  sensiblement  par  le  milieu  en  allant  de  l'est  à 
l'ouest.  Ce  nom  de  Ouadi  Mouça  a  été  donné  par  les 
Arabes  à  l'ensemble  de  Pétra  et  à  son  débouché  vers 
l'Arabah.  »  .1.  de  Kergorlay,  Pétra,  dans  la  Revue  des 
deux  mondes,  15  avril  1907,  p.  902.  —  Pélra  a  donné 
son  nom  à  l'Arabie  Pétrée;  en  effet,  l'épithète  «  Pétrée  » 
n'a  pas  le  sens  de  pierreuse,  rocheuse;  il  s'agit  du  dis- 
trict de  l'Arabie  dont  Pétra  était  la  capitale  :  f|  xoreà 
IU'-pav  'Apa6e'a.  Agathemerus,  Geographix  expositio 
campendiara,  VI,  21,  dans  C.  Mûller,  Geograplii  grseci 
minores,  édit.  Ilidot,  t.  Il,  p.  499. 

II.  Situation  géographique.  —  Pétra  était  située  par 
30»  19  de  latitude  N.  et  35»  31  de  longitude  E.,  au  cœur 
des  montagnes  d'Édom,  à  peu  près  à  mi-chemin  entre 
l'extrémité  sud  de  la  mer  Moite  et  la  pointe  nord  du 
golfe  d'Akabah.  Voir  la  carte,  t.  in,  col.  330.  On  compte 
cinq  jours  de  marche  pour  la  première  partie,  six  pour 
la  seconde  ;environ  100  kil.  à  partir  de  la  pointe  d'Aka- 
bah. Pélra  se  trouvait  à  500  milles  romains  de  Gaza, 
Pline,  //.  A'.,  vi.  22,  au  pied  du  mont  llor,  Josèphe, 
A. ii.  jud.,  [V, rv,  7, sur  les  contreforts  orientaux  de  la 
I  i  .ne  et  profonde  vallée, nommée  Arâbah,qui  unit  la 
mer  Morte  à  la  nui'  Rouge.  Elle  appartient  maintenant 
à  la  province  du  lledjaz.  Elle  était  comme  isolée  du 
reste  du  monde  par  la  ceinture  de  rochers  gigantesques 
qui  l'entourait.  «  A  l'est,  à  l'ouest,  se  dressent  des 
parois  abruptes;  au  nord,  les  hauteurs  découpées  par 
des  ravins  parallèles  limitent  l'horizon  d'une  arête 
continue;  au  sud,  les  pentes  sont  plus  douces,  mais 
la  aussi  une  muraille  de  grès  forme  le  rebord  du  bas- 
sin. »  E.  Reclus,  Nouvelle  grogr.  universelle,  t.  ix, 
1884,  p.  797.  Le  cirque  au  milieu  duquel  s'étalaient  les 
habitations  et  les  monuments  de  Pétra  n'est  aisément 
abordable  que  de  deux  côtés.  On  peut  \  pénétrer 
par  le  sud-ouest,  en  suivant  nu  sentier  de  montagne 
rude  et  escarpé.  L'entrée  la  plus  naturelle,  comme 
aussi  la  plus  pittoresque,  est  do  coté  de  l'est;  elle 
consiste  dans  un  long  défilé,  qui  porte  le  nom  arabe 
de  Sîk.  Rien  n'est  plus  saisissant  que  cette  gorge 
étroite  et  sinueuse,  aux  parois  perpendiculaires,  haute 
il  80,  100  et 200  mètres,  qu'on  suit  pendant  plus  d'une 
heure,  en  longeant  le  cours  d'eau  principal  de  Pétra, 
auquel  le  Sik  sert  de  lit.  Strabon,  XVI,  tv.  21,  et  Pline, 
//.  A'.,  vi.  32,  mentionnent  aussi  cet  étrange  couloir, 
où  parfois  deux  chameaux  chargés  ont  de  la  peine  à 
passer  de  front,  et  dont  mainte  portion  est  inaccessible 
au  soleil.  Les  tombes  et  les  temples  taillés  dans  le  roc 
v  font  leur  apparition  assez  longtemps  avant  qu'on 
n'arrive  a  i 

En  sortant  du  Sik,  on  se  trouve  dans  le  bassin  où 
était  bâtie  la  ville.  Sa  forme  est  à  peu  près  quadran- 
gulaire,  D'après  Pline,  //.  A'.,  vi,  32,  sa  largeur 
était  de  deux  milles  n. mains  ;  ce  qui  correspond  assez 
exactement  aux  mesures  indiquées  par  les  voyageurs 
plus  récents  :  de  150X1  à  1800  m.  du  S.  au  N.  ;  de 
iOOOà  1200  de  l'E.  a  l'O.  La  nature  esl  déchirée,  tour- 


mentée; les  moindres  ravins  sont  des  précipices.  Les 
rochers  nus  qu'on  voit  de  toutes  parts  consistent  parfois 
en  calcaire;  mais  le  plus  habituellement  en  grès,  et 
ces  grès  ont  des  colorations  merveilleuses,  dont  les 
visiteurs  parlent  avec  enthousiasme  :  le  rouge  et  le 
jaune  dominent;  mais  on  rencontre  toutes  les  nuances, 
depuis  le  rouge  presque  noir  jusqu'au  rose  tendre,  et 
depuis  le  jaune  foncé  jusqu'au  jaune  citron;  au  lever 
et  au  coucher  du  soleil  ces  teintes  sont  très  agréables 
à  contempler.  Autrefois,  la  vallée  était  cultivée  avec 
soin;  elle  est  maintenant  sans  culture  aucune,  quoique 
l'eau  y  soit  abondante.  Sur  les  pentes,  les  restes  de 
murs  de  soutènement  prouvent  qu'on  avait  des  jardins 
en  terrasses. 

Le  grès  est  très  friable  de  sa  nature  ;  aussi  les  mon- 
tagnes de  Pétra  n'ont-elles  pas  échappé  à  l'érosion  du 
temps,  et  elles  continuent  de  se  désagréger  chaque 
jour;  en  s'eflritant  ainsi,  elles  prennent  les  formes  les 
plus  variées,  les  plus  bizarres.  Lorsque  d'en  haut  on 
jette  un  coup  d'œil  sur  le  sommet  des  rochers,  on 
dirait  une  mer  étrange,  dont  les  vagues  se  seraient 
figées.  Emplacement  singulier,  sans  doute,  pour  y  ins- 
ta'ler  une  ville  importante.  L'histoire  de  Pétra  va  nous 
faire  comprendre  pourquoi  il  fut  choisi. 

III.  Histoihe  de  la.  ville.  —  Un  profond  mystère 
enveloppe  la  fondation  de  Séla',  qui  se  perd  dans  les 
temps  les  plus  reculés.  A  l'origine,  les  habitants  de 
la  contrée  étaient  les  Horréens  (voir  IIorréens,  t  m. 
col.  757-758),  c'est-à-dire  des  Troglodytes.  Ils  sont  men- 
tionnés Gen.,  xiv,  6,  à  l'époque  d'Abraham  et  de  Chodor- 
lahomor.  C'est  par  eux  que  doivent  avoir  été  creusées 
les  premières  grottes  de  Pétra,  qui  n'étaient  encore  que 
de  grossières  cavités.  Plus  tard,  les  Horrhéens  furent 
supplantés  par  les  Édomites,  qui  descendaient  d'Ésaû, 
Peut,  n,  12,  22.  Grâce  à  ceux-ci,  Séla'  acquit  alors  une 
importance  nouvelle,  bien  qu'elle  ne  fut  pas  leur  capi- 
tale; cet  honneur  appartenait  à  Bosra.  Voir  BoSRA  1. 
t.  i,  col.  1859.  Vers  la  fin  du  ix«  siècle  avant  notre  ère, 
elle  fut  conquise  par  Amasias  de  Juda.qui  la  détruisit 
en  partie  et  lui  donna  le  nom  de  Jectéhel.  Voir  JeCTÉHEL, 
I.  ut,  col.  1216.  Aussi  n'est-il  plus  question  d'elle  pen- 
dant quelque  temps  dans  les  saints  Livres.  Amos,  i, 
12,  ne  menlionne  pas  Séla'  parmi  les  villes  du  pays 
d'Édom.  Toutefois,  elle  était  trop  bien  située,  pour  ne 
pas  redevenir  une  ville  très  importante. 

C'est  aux  Nabuthéens  qu'elle  dut  la  période  la  plus 
florissante  de  son  histoire.  Ce  petit  peuple  d'origine 
sémitique,  voir  Nabuthéens,  t.  iv,  col.  1414,  venu 
d'Orient  on  ne  sait  pas  au  juste  à  quelle  époque,  était 
beaucoup  plus  trafiquant  que  guerrier.  Il  possédail  de- 
richesses  énormes,  et  il  avait  besoin,  sur  l'un  des  che- 
mins fréquentés  par  les  caravanes,  d'un  endroit  sur, 
difficilement  accessible,  à  l'abri  d'un  coup  de  main  des 
maraudeurs  ara  BS,  oui  pût  sei  ir  d'entrepôt  à  se- 
ebandises,  et  de  résidence  aux  vieillards,  aux  femmes 
et  aux  enfants,  durant  ses  déplacements  commerciaux. 
Pétra  convenait  admirablement  pour  ce  but.  D'un  côté, 
par  sa  situation  même,  elle  était  facile  à  défendre  contre 
une  invasion;  de  l'autre,  elle  se  trouvait  au  centre  des 
roules  les  plus  fréquentées  d'alors  par  le  commerce  : 
roule  d'Egypte  a  Damas,  route  de  Gaza,  route  d'Akabah, 
roule  du  'golfe  Persique.  etc.  Pline,  //.  A'.,  VI,  32  De 
nombreux  marchands  romains  et  étrangers  s'\  étaient 
installés  à  l'époque  de  Strabon,  (oc  cit.,  et  Diodore  de 
Sicile,  \i\,  98,  compare  à  des  armées  les  caravanes  qui 
traversaient  ces  parages.  Vers  l'an  300  av.  J.-C,  et 
même  un  peu  plus  têt,  Pétra  nous  apparaît  donc  tout  à 
coup  comme  la  capitale  des  Nabuthéens,  qui  -  eu 
étaient  emparés  à  leur  tour,  peut-être  au  v  i  u  au 
n  siècle.  A  deux  reprises  au  moins,  les  Séleucides, 
qui  gouvernaient  alors  la  Syrie,  essayèrent  de  la  réduire, 
<  richesses  les  tentaient;  mais  ils  furent  repou! 
usement.  Diodore  de  Sicile,  xix,  95.  Joseplie 


169 


PETRA 


170 


nous  apprend  que,  vers  l'an  70  avant  notre  ère,  elle 
servait  de  résidence  à  l'un  des  princes  arabes  nommés 
Arélas,  et  qu'elle  fournit  ensuite  un  refuge  à  Hyrcan  II, 


siècle  plus  tard,  105  après  J.-C,  Trajan  l'incorpora  à 
l'empire;  il  l'agrandit  et  l'embellit  considérablement. 
Dion  Cassius,  lxviii,  14.  Son  successeur,  Adrien,  la  prit 


roi  de  Jérusalem.  Josèpbe,  Ant.  jud.,  XIV,  II,  3;  Bell, 
jud.,  I,  vi,  2. 

A  l'époque  de  Pompée,  Pétra  devint  tributaire  de  Rome, 
comme  tout  le  reste  du  territoire  des  Nabuthéens.  Un 


en  affection  singulière,  lui  donna  son  nom,  «  lladriana  », 
et  tailla  dans  ses  énormes  rocbers  de  nouveaux  édi- 
fices. Mais,  peu  de  temps  après,  le  commerce  se  détourna 
\ers    Palmyre;   les   Nabutbéens    cessèrent    d'avoir  le 


171 


PETRA 


172 


monopole  des  transports  et  la  décadence  de  Pétra 
commença.  Sous  les  empereurs  byzantins,  ce  n'était 
plus  qu'une  simple  bourgade.  Les  Arabes  achevèrent 
sa  ruine  au  vu0  siècle,  lorsqu'ils  en  furent  devenus 
maîtres,  et  elle  devint  bientôt  un  lieu  de  désolation 
complète.  Au  moyen  âge,  entre  les  années  1260  et 
1277,  elle  reçut  la  visite  du  sultan  d'Egypte  Bibars,  qui 
fut  frappé,  lui  aussi,  de  la  coloration  de  ses  rochers  et 
de  ses  monuments  taillés  dans  le  roc.  Voir  Quatre- 
mère,  Mémoire  sttr  les  Nabatéens,  dans  le  Journal 
asiatique,  1835,  t.  xv,  p.  31-34.  Puis  on  la  perdit 
complètement  de  vue.  Elle  n'a  été  retrouvée  qu'en  1812, 
par  le  célèbre  explorateur  allemand  Bnrckhardt.  Ce 
furent  deux  Français,  L.  de  Laborde  et  Linant  de  Bel- 
lefonds  qui  levèrent,  en  1830,  le  premier  plan  exact 
des  ruines;  non  sans  péril,  car  les  Bédouins  qui  habi- 
tent ou  fréquentent  ces  parages  sont  agressifs,  supers- 
titieux et  pillards.  On  compte  les  visiteurs  qui  s'y  sont 
succédé  à  d'assez  rares  intervalles.  Voir  leur  liste  dans 
l.ihhey,  The  Jordan  Valley,  t.  Il,  p.  325.  L'antique 
Séla'  n'est  plus  habitée  aujourd'hui  que  par  quelques 
misérables  familles,  qui  vivent  dans  les  tombes.  Elle 
s  eu  sa  part  de  la  malédiction  lancée  contre  l'Idumée. 
Cf.  Jer.,  xlix,  14-19.  —  Au  commencement  du  Ve  siècle 
de  notre  ère,  Pétra  était  un  siège  métropolitain,  qui 
dépendait  du  patriarcat  de  Jérusalem.  On  ignore  à 
quelle  époque  et  dans  quelles  circonstances  le  christia- 
nisme y  avait  pénétré.  La  tradition  d'après  laquelle 
saint  Paul  serait  venu  à  Pétra  lorsqu'il  se  retira  en 
Arabie  après  sa  conversion,  cf.  Gai.,  i,  17,  pourrait 
bien  n'être  qu'une  légende. 

IV.  État  actuel.  —  Bien  que  Pétra  ne  soit  plus 
aujourd'hui  qu'  «  un  immense  tombeau  »,  E.  Reclus, 
loc.  cit.,  p.  797.  ses  ruines  comptent  parmi  les  plus  re- 
marquables que  nous  ait  léguées  l'antiquité. 

De  la  cité  même,  bâtie  dans  la  vallée,  il  ne  reste  à 
peu  près  rien.  Elle  a  été  o  tellement  bouleversée, 
qu'en  certains  endroits  il  est  difficile  de  rctromer  les 
-  des  rues,  des  places  ou  des  carrefours.  Un  grand 
temple  bien  délabré,  les  débris  des  décorations  qui 
ornaient  la  voie  triomphale  sur  les  bords  d'un  oued 
desséché,  des  culées  de  ponts,  quelques  colonnes  et 
des  dizaines  d'hectares  de  pierres  culbutées  pêle-mêle, 
sous  lesquelles  s'abritent  des  légions  de  serpents  et 
de  scorpions,  voilà,  à  l'heure  présente,  l'antique  ville  » 
de  Pétra.  Voir  la  Revue  des  deux  mondes,  avril  1IHI7, 
p.  82  i, 

Dans  la  partie  méridionale  de  l'emplacement  de  la 
cité',  on  dislingue  en  particulier  une  plate-forme  qui 
parait  avoir  été  l'agora  ou  le  forum,  les  restes  d'un 
temple,  un  arc  de  triomphe  et  surtout,  tout  à  fait  à 
l'ouest,  le  Qasr  Fir'aoùn  ou  i  Château  de  Pharaon  o, 
vaste  édifice  curé'  qui  était  probablement  un  temple. 
C'est  l'édifice  le  mieux  conservé  île  la  ville  proprement 
dite;  mais  son  six !■•  n'a  rien  d'extraordinaire,  el  il  date 
sans  don  te  d'une  époque  relativement  tardive.  Au  sud-esl 
on  admire,  entièrement  taillé  dans  le  roc.  un  amphi- 
théâtre qui  a  jusqu'à  33  rangées  de  gradins,  et  qui  pou- 
vait contenir  : ï 01 K )  spectateurs.  Dans  la  partie  septen- 
trionale, au  nord  de  la  rivière,  spécialement  du  côté 
de  l'est,  on  voit  quelques-uns  des  monuments  les  plus 
si.mpliieux  de  Pétra.  Ce  sent  des  tombeaux  également 
creusés  el  sculptés  dans  le  rocher  :  entre  autres,  une 
grande  tombe   à   trois    étages  de   colonnes  —  on   en 

i pte  jusqu'à  dix-sept  an    second  étage  —  une  tombe 

corinthienne,  un  autre  tombeau  muni  d'une  terrasse 
il  de  nombreuses  colonnes  doriques.  Dans  toutes  les 
directions,  el  particulièrement  au  nord  et  à  l'ouest  du 
parallélogramme  formé  par  la  vallée,  les  montagnes 
qui  entourent  Pétra  sont  remplies  de  tombes  plus  sim- 
ples, taillées  elles  aussi  dans  le  rocher  et  ne  pré  i  o- 
tanl  aucun  ornement  extérieur.  On  peut  les  compter 
par  milliers.  Les  tombes  plus  riches  sont  élégamment 


ornées  de  façades,  de  colonnes  ou  de  pilastres,  de  fron- 
tons, etc.  Le  tout  est  monolithe,  le  grès  se  prêtant  aisé- 
ment, par  la  souplesse  de  son  grain,  à  toutes  sortes  de 
sculptures.  L'architecture  de  ces  divers  édifices  est 
extrêmement  variée  :  on  y  trouve  les  styles  égyptien, 
syrien,  grec,  romain.  Les  tombes  sont  souvent  super- 
posées et  elles  atteignent  presque  les  sommets  les  plus 
élevés  des  montagnes;  on  avait  pratiqué  des  escaliers 
dans  le  roc,  pour  arriver  jusqu'à  elles.  En  un  endroit, 
on  voit  un  vrai  colombarium.  Quelques  tombeaux  ont 
10,15,20  in.de  hauteur.  Parfois,  la  chambre  sépulcrale 
était  de  dimensions  considérables;  une  entre  autres, 
qui  a  de  10  à  12  m.  de  haut  et  18  m.  de  large. 

Quelques-uns  des  monuments  de  Pétra  sont  en  dehors 
de  son  enceinte.  Dans  le  Sik,  à  une  certaine  distance 
de  la  ville,  on  aperçoit  tout  à  coup,  avec  une  légitime 
admiration,  à   un  tournant   du  délilé,  le  Kaznéh  Fir- 


32.  —Kaznéh  Firaoùn.  D'après  une  photographie. 

aoûn  ou  «  trésor  de  Pharaon  »,  taillé  dans  la  paroi 
rose  du  rocher  et  orné  de  deux  rangées  de  colonnes 
superposées,  avec  des  bas-reliefs  dans  l'intervalle;  il 
est  dans  un  état  de  conservation  remarquable,  et  c'est 
une  véritable  merveille  dans  ce  déserl  C'est 
une  tombe  d  ordre  corinthien:  les  salles  intérieures 
sont  très  simples.  Dans  la  direction  opposée,  au  nord- 
est  et  environ  à  une  heure  de  marche  de  la  ville,  on 
trouve  le  Deir,  le  «  couvent  »,  qui  repi  oduil  en  grand  et 
avec  moins  de  grâce  le  plan  du  Ka:n*  Ses  propor- 
tions sont  colossales  :  15  m.  de  développement  sur  10 
de  hauteur;  l'église  de  la  Madeleine  à  Paris  n'est  pas 
aussi  grande.  Ainsi  qu'il  a  été  dit  plus  haut,  quelques- 
unes  des  tombes  remontent  vraisemblable ni  jusqu'à 

l'époque  lointaine  des  llorréens.  lieux  Hauts-Lieux, 
découverts  récemment,  l'un  au  sommet  d  une  montagne 
qui  domine  la  vallée  de  Pétra,  l'autre  à  l'ouest,  du 
côté  du  mont  Hor,  sont  pareillement  1res  anciens.  Sur 
le  premier,  voir  Palestine  Exploration  Fund  Quarlerty 
Statement,  octobre  1900;  ililtheilungen  des  deutsch, 
Palâstina  Vereins,  1904,  n.  2,  p.  21,  et  surtoul  la 
biblique  internationale,  t.  xn.  avril  1903,  p.  2S 
La  plupart  des  édifices  proprement  dits  ne  datent  que 
du  dernier  siècle  antérieur  à  notre  ère  ou  des  deux 
premiers  siècles  après  J.-C. 


173 


PÉTRA    —    PETROPOLITAXUS    (CODEX) 


174 


V.  Bibliographie.  —  Reland,  Paliestina  ex  monu- 
mentis  veteribus  illustrata,  1711:  Burckardt,  Reisen 

in  Syrien,  1823.  t.  n,  p.  703-708:  Léon  de  Laborde  et 
Linant  de  Bellefonds,  Voyage  dans  l'Arabie  Pétrée, 
Paris,  1830-1834;  E.  Robinson,  Palœstina  und  die  si'ul- 
lich  angrenzenden  Lânder,  Halle,  1842,  t.  m,  p.  60. 
128,  el  7(50:  .1.  Wilson,  The  Lands  of  the  Bible  visi- 
led  and  described,  Edimbourg,  1847,  t.  i,  p.  291-336; 
A.  Stanley,  Sinai  and  Palestine,  Londres,  1860,  p. 87-98; 
K.  Ilitter,  The  comparative  geography  of  Palestine  and 
the  Sinaitic  Peninsula,  trad.  angl.,  Edimbourg.  1866, 
t.  f,  p.  421-125,  434-451;  E.  II.  Palmer,  The  Désert  of 
Exodus,  Londres.  1871,  t.  n;  duc  de  Luynes,  Voyage 
loratùm  à  la  mer  Morte  et  sur  la  rive  gauche  du 
Jourdain,  à  Pétra,  etc.,  Taris,  1871,  p.  271;  Yisconti, 
Viaggio  in  Arabia  Petrea,  1872;  Ebers  et  Guthe, 
Palseslina  in  Bild  und  Wort,  nebst  der  Sinaihalbin- 
sel...,  Stuttgart,  1881,  t.  Il,  p.  233-250:  V.  Guérin,  La 
Terre  Sainte,  2« partie,  Paris.  1884,  p.  313-323;  E.Hull, 
M, mut  Seir,  Sinai  and  Western  Palestine,  dans  le 
Palestine  Exploration  Fund  Quarterly  Stalement, 
Londres,  1886;  H.  E.  llart,  Some  Account  of  the 
l'anna  and  Flora  of  Sinai,  Petra  and  Wady  Arabah, 
Londres,  1891;  G.  Dalman,  Petra  und  seine  Felshei- 
ligthùmer,  in-8»,  Leipzig,  1908.;  F.  Buhl,  Geschichte 
der  Edomiler,  Leipzig,  1893;  A.  Sargerton-Galichon, 
Sinai,  Ma' an,  Pétra  :  sur  les  traces  d'Israël  et  chez  les 
Nabatéens,  Paris,  1904;  Brunnow  et  von  Domoszweski, 
Die  Provincia  arabica,  t.  i,  Strasbourg,  1904;  W.  Lib- 
bey,  The  Jordan  Valley  and  Petra,  New-York,  1905. 

L.'FlI.LlOX. 

PÉTREL, oiseau  de  mer.  Voir  Molette,  t. iv,  col.  1327. 

PETRI,  PEETERS  Barthélémy,  théologien  belge 
catholique,  né  vers  1517  à  Op-Linter  près  Tirlemont, 
mort  à  Douai  le  26  février  1630.  Après  avoir  pendant 
dix  ans  enseigné  la  philosophie  à  Louvain,  il  fut  forcé 
en  1580  par  les  guerres  de  chercher  un  refuge  à  Douai 
où  il  fut  pourvu  d'un  canonicat  dans  l'église  Saint-Amé 
et  d'une  chaire  de  théologie  où  il  enseigna  jusqu'à  sa 
11  publia  :  Actus  Apostolorum  a  S.  Luca  con- 
scripti  et  in  eosdem  Actus  commentarius  perpétuas, 
in-'i".  Douai,  1622.11  termina  après  la  mort  de  Guillaume 
Estius  la  publication  des  commentaires  de  ce  théolo- 
gien sur  les  Epitves  :  In  omnes  divi  Pauli  et  septem 
calholicas  Apostolorum  Epistolas  commentarii,  2  in-f". 
Douai,  1614-1616.  Les  notes  sur  le  chapitre  v  de  la  pre- 
mière Epitre  de  saint.Jean  et  sur  les  deux  autres  Épitres 
d    c  t  Apôtre  sont  de  Barthélémy  Pétri.  Voir  Paquot,  Mé- 

oires  pour  servir  à  l'histoire  littéraire  des  Pays-Bas, 
t.  vin,  p.  76;  Valère  André,  Bibliollieca  Belgica,  p.  109. 

D.  Heurtebize. 

PETRIN  (hébreu  :  mis'erét),  ustensile  dans  lequel 
on  pétrit  la  farine  (fîg.  33).  —  Les  grenouilles  de  la 
deuxième  plaie  d'Egypte  montèrent  jusque  dans  les  fours 
elles  pétrins.  Cf.  Exod.,  vn,28(Vulgate,  vin,  3).  LesEgxp- 
tiens  se  servaient  de  pétrins  plus  longs  que  larges.  Voir 
t.  iv.  6g.  512,  col.  32,  un  autre  pétrin  dans  lequel  deux 
hommes  à  la  fois  pétrissaient  le  pain  avec  les  pieds.  Il 
était  facile  aux  grenouilles  de  s'introduire  dans  ces 
as  posés  à  terre.  Les  Septante  rendent  les  mots 
hébreux  par  pupctiurea  xa!  x.Xi6âvot,  »  les  masses  de 
pâte  et  les  fours  •>,  et  la  Vulgate  par  «  les  fours  et  les 
restes  d'aliments  ».  —  Au  départ  d'Egypte,  les  Hébreux 
emportèrent  leur  pâte  avant  qu'elle  fût  levée,  serrèrent 
dans  leurs  manteaux  les  pétrins  qui  la  contenaient  et 
les  mirent  sur  leurs  épaules.  Exod.,  xn,  31.  Il  s'agit 
■ci  évidemment  de  ces  pétrins  plus  petits,  de  forme 
ronde,  qu'on  posait  sur  un  support  et  dans  lesquels  un 
seul  homme  debout  pétrissait  avec  les  mains.  Voir 
t.  i.  fîg.  590,  col.  1891.  Tous  ces  pétrins  paraissent  fa- 
briqués en  jonc  ou  en  osier,  comme  les  corbeilles  ordi- 
naires. Dans  ce  second  passage  les  versions  ne  rendent 


pas  le  mot  miS'érét  et  font  envelopper  directement  la 
pâte  dans  les  manteaux.  —  Suivant  la  conduite  des 
Israélites,  Dieu  bénira  ou  maudira  leur  téné'  et  leur 
miS'érét,  c'est-à-dire  leur  corbeille  à  provisions,  cf. 
t.  n,  col.  963,  etleur  pétrin.  Deut.,  xxvtn,  5,  17  (dans  les 
Septante  :  .<  tes  magasins  et  tes  restes  »,  et  dans  la 
Vulgate  :  «  tes  greniers  et  tes  restes  »).  Les  versions 
n'ont  compris,  dans  aucun  des  quatre  passages,  la 
signilication  du  mot  mis'érët.  Ce  mot,  d'ailleurs,  ne 
se  retrouve  plus  en  dehors  de  ces  passages.  Les  Israé- 


33.  —  Pétrin  égyptien.  Tombeau  de  Rekhmara. 
«  Au-dessus  d'un  vase  de  farine,  on  lit  :  cuisson  des  pain*,  lu 
homme  délaie  la  farine  avec  une  pelle  d  dans  le  pétrin;  a  un 
autre  verse  l'eau  (?)  avec  une  outre  (?).  La  pâte  est  déposée 
en  forme  de  cube  sur  une  planche  épaisse.  Deux  hommes, 
assis  sur  des  escabeaux,  la  pétrissent  sur  des  planches  en 
forme  de  pains  coniques.  »  Ph.  Virey,  Le  tombeau  de  I:  kh- 
mara,  p.  47. 

lites  ont  continué  sans  nul  doute  à  se  servir  de  pétrins; 
mais  les  auteurs  sacrés  n'ont  plus  eu  l'occasion  de  les 
mentionner.  II.   Lesétre. 

PÉTRINISME.  Voir  Baor,  t.  i,  col.  1523. 

PETROPOLITANUS  (CODEX),  lieux  manus- 
crits, l'un  de  l'Ancien  Testament,  l'autre  du  Nouveau, 
sont  généralement  connus  sous  ce  nom. 

1.  Le  premier  est  un  palimpseste  de  88  feuillets  in- 
octavo  :  les  feuillets  primitifs  au  nombre  de  44  ont  été 
plies  en  deux.  Il  contient  des  fragments  du  Livre  des 
Nombres  selon  la  version  des  Septante  :  i,  1-30;  i,  40- 
ii,  14;  II,  30-m,  26;  v,  13-23;  VI,  6-viI,  7:  vu,  41-7S; 
vill,2-16;xi,3-xill,ll;xill,28-xiv.:;i;xv.:;-2S;xv,.'!2-xvi. 
31  j  xvi,  ii-xviii.  4;  xviii,  15-26;  XXI,  15-22;  xxn,  30- 
11;  xxili,  12-27;  xxvi,  54-xxvn,  15;  xxvih,  7-xxix,  36; 
xxx.  9-xxxi,  48;  xxxn,  7-xxxiv,  17;  xxxvi,  1-13.  Tis- 
chendorf  qui  l'a  édité  dans  ses  Monumenta  sacra  ined  . 
nova  coll.,  t.I,  Leipzig,  1855,  l'attribue  au  VIe  siècle,  à  cause 
des  abréviations  qu'il  renferme,  bien  que  l'écriture  ait 
un  aspect  plus  archaïque.  On  le  désigne  en  critique 
par  la  lettre  II. 

II.  L'autre  Petropolitanus  consiste  en  un  seul 
feuillet  arraché  à  la  couverture  de  bois  d'un  manuscrit 
syriaque.  11  est  du  vnc  siècle  et  contient  Acl.,  Il,  15-ni. 
S.  Tischendorf  dans  sa  huitième  édition  du  Nouveau 
Testament  l'appelle  G  (lettre  qui  désignait  autrefois  le 
manuscrit  des  Actes  de  la  Bibliothèque  Angelica, 
désigné  maintenant  par  L).  Von  Soden  lui  attribue 
le  svmbole  -x  1002.  F.  Prat. 


175 


PEUPLIER 


PEVERELLI 


176 


PEUPLIER  (hébreu  :  libnéh;  Septante  :  pàgSoç 
cnupavfar,,  Gen.,  xxx.  .'■'  :  Xsâxi),  Ose.,  rv,  13:  Vulgate  : 
populea,  populus),  un  des  grands  arbres  de  la  Palestine. 

I.  Description.  —  Les  Peupliers  composent  avec 
les  Saules  toute  la  famille  des  Salicinées,  arbres 
et  arbrisseaux  caractérisés  par  les  fleurs  dis- 
posées en  chatons  dioïques.  Les  graines,  à  la  maturité, 
s'échappent  en  grand  nombre  d'une  capsule  bivalve, 
emportées  par  le  vent  sous  la  forme  de  flocons  blancs 
-i  aux  poils  soyeux  dont  elles  sont  revêtues.  Les 
Peupliers  se  distinguent  par  leur  taille  franchement 
arborescente,  leurs  feuilles  à  limbe  élargi  et  porté-  sur 
un  pétiole  comprimé  suivant  le  plan  médian,  leurs 
>  tamines  enfin  plus  nombreuses  dans  chaque  fleur. 

Dans  aucun  autre  genre,  peut-être,  le  dimorphisme 
sexuel  n'est  plus  accentué,  au  point  que  le  vulgaire 
donne  souvent  des  noms  différents  aux  pieds  mâles  et 
femelles  de  la  même  espèce.  Les  premiers  sont  aussi 
préférés  et  presque  exclusivement  propagés  par  la  cul- 
ture à  cause  de  leur  croissance  rapide,  de  leur  tipe  plus 
élevée,  de  leur  végétation  de  tout  pointplus  vigoureuse 


34.  —  Populus  alba. 
Rameau,  fleurs  et  chatons  dioïques;  graines. 

les  feuilles  paraissant  plus  vile  au  printemps,  et  tombant 
plus  tard  en  automne.  En  outre,  ils  n'ont  pas  l'inconvé- 
nient passager  mais  très  réel  des  plantes  fructifères  au 
moment  où  se  dispersent  les  semences  cotonneuses. 

Les  espèces  de  Palestine  se  répartissent  en  trois  séries 
distinctes.  1"  La  plus  commune  au  bord  des  eau»  dans 
toute  la  plaine  littorale  rie  Syrie,  l'Ypreau,  Populus  alba 
de  Linnée  (6g.  34),  est  facile  à  reconnaître  au  feutre 
couleur  blanc  de  neige  qui  revêt  les  jeunes  rameaux  el 
le  dessous  des  feuilles,  Dans  la  région  montagneuse  du 
Nord  on  trouve  aussi  le  Tremble,  Populus  tremula, 
de  la  même  section  des  Peupliers  blancs,  pour  les 
squames  ciliées  de  ses  chatons,  mais  â  feuilles  vertes 
sur  les  deux  faces,  et,  en  pins,  une  race  intermédiaire 
entre  les  deux  précédentes,  dont  elle  est  probablement 
un  produit  hybride,  le  P.  canescens  ou  Grisaille,  à  bois 

uai  e,  tronc  élancé,  el  feuillage  cendré.  2°  Le  curieux 
Peuplier  de  l'Euphrate,  si  remarquable  par  le  polymor- 
phisme de  ses  feuilles,  tantôt  larges  et  deltoïdes,  tantôt 
étroites  au  point  de  simuler  un  Saule,  esl  un  arbre  de 
ion  désertique  à  rameaux  étalés  avec  une  cime 
-'""i1"'-  disséminé  depuis  l'Afrique  septentrionale 
jusqu'à  l'Himalaya,  mais  surtout  abondant  dans  la 
dépression  du  Jourdain  et  en  Mésopotamie.  11  ressemble 
aux  Peupliers  blancs  par  ses  bourgeons  velus  el  ses 
squames  lanciniées,  mais  possède  lesélamines  indéfinies 
de  la  section  suivante.  3«  Dans  les  vallées  du  Liban  le 
Peuplier  noir  est  aussi  répandu,  surtout  sous  la  forme 
pyramidale,  que  dans  l'Europe  moyenne,  quoique  de 


spontanéité  douteuse.  Les  jeunes  rameaux  et  les  feuilles 
sont  glabres,  comme  chez  toutes  les  espèces  de  la  sec- 
tion Aigirus,  avec  les  bourgeons  visqueux  et  le*  .la- 
mines au  nombre  de  12  à  30.  F.  Hy. 

II.  Exkiièse.  —  Les  anciens  et  les  modernes  sont 
également  partagés  sur  le  sens  du  mot  libnéh  :  les  uns 
y  voient  le  styrax  of/icinalis,  l'aliboufier;  les  autres  le 
peuplier  blanc.  L'étymologie  ne  saurait  trancher  le  dif- 
férend. Libnéh  vient  de  la  racine  làban.  %  être  blanc.  » 
Ce  nom  peut  s'appliquer  an  styrax  comme  au  peuplier. 
L'aliboufier  donne  une  sorte  de  lait  blanchâtre  qui  se 
coagule  et  forme  la  gomme  ou  résine  de  stvrax.  Cette 
résine  blanche  aurait  pu  donner  son  nom  à  l'arbre  lui- 
même,  comme  en  arabe  où  (_j--^',  lobna,  désigne  l'ali- 
boufier et  son  produit.  Le  nom  de  libnéh  convient  aussi 
et  mieux  encore  au  peuplier,  à  cause  de  la  blancheur 
de  ses  jeunes  rameaux  et  du  dessous  de  ses  feuilles- 
Parmi  les  traductions  anciennes  on  trouve  une  grande 
divergence  d'interprétation.  Si  pour  Gen.,  xxx.  37,  les 
Septante,  suivis  par  l'arabe  de  Saadias  et  par  l'éthiopien, 
traduisent  par  pàSSoc  crrupaxivii  branche  d'aliboulier; 
dans  Ose.,  iv,  13.  ils  rendent  libnéh  par  Xevxt),  le  peu- 
plier. La  Vuigate  traduit  dans  les  deux  endroits  par 
populus,  populea,  peuplier.  Les  exégètes  modernes 
comme  Gesenius,  Thésaurus,  p.  740;  Michaêlis,  Supplé- 
ment, ad  Lexica  hebraica,  t.  n.  p.  1404  ;  E.  Fr.  C.  Rosen- 
mûller,  Hamlbuch  <ler  biblischen  Alterthumskunde, 
in-8'\  Leipzig,  1830,  t.  iv,  p.  261,  préfèrent  la  traduction 
styrax,  à  cause  du  rapprochement  de  l'hébreu  libnéh 
avec  l'arabe  lobna.  D'autre  pari  0.  Celsius,  liierobo- 
lanicon,  in-8",  Amsterdam,  1748,  t.  i,  p.  292;  II.  B.  Iris- 
tram,  The  natural  History  of  Ihe  Bible,  in-12, 
Londres,  1889,  p.  389,  préfèrent  la  traduction  peuplier 
blanc.  Le  contexte  est  plutôt  en  faveur  de  ce  dernier 
sentiment.  Dans  Gen.,  xxx,  37,  e  Jacob  prit  des  ba- 
guettes vrrles  de  libnéh,  d'amandier  et  de  platane.  Il 
y  pela  des  bandes  blanches,  en  mettant  à  nu  le  blanc 
des  baguettes;  puis  il  plaça  les  baguettes  ainsi  pelées 
en  face  des  brebis  dans  les  rigoles.  »  Sans  doute  des 
rameaux  d'aliboulier  pouvaient  servir  aussi  bien  que 
des  branches  de  peuplier  à  cet  usage.  Mais  près  des 
deux  grands  arbres  mentionnés,  l'amandier  et  le  pla- 
tane, un  grand  arbre  comme  le  peuplier  blanc  semble 
plus  naturellement  placé  qu'un  arbuste  comme  le 
styrax  officinales.  Le  second  passage.  Ose.,  tv,  13,  est 
plus  décisif  encore.  Il  s'agit  de  l'idolâtrie  d'Israël. 
«  Ils  offrent,  dit  le  prophète,  des  sacrifices  sur  les 
sommets  des  montagnes:  ils  brûlent  de  l'encens  sur 
les  collines  sous  le  chêne,  le  libnéh,  et  le  térébinthe, 

parce   que  I In-age  en  est  bon.    »   Le  chêne   et    le 

térébinthe  sont  de  grands  arbres  à  t'ombrage  épais,  près 
desquels  on  serait  étonné'  de  trouver  mentionné'  on 
arbuste  connue  l'aliboufier,  tandis  que  le  beau  et 
peuplier  blanc  trot  re  une  place  naturelle.  Peut-être 
que  les  exégètes  qui  ont  préféré  traduire  libnéh  par 
l'aliboufier,  en  rejetant  le  peuplier,  ont-ils  pensé  sur- 
tout au  port  élancée)  peu  touffu  du  peuplier  pyramidal. 
Mais  le  peuplier  blanc  a  tout  un  autre  port  et  n'esl  pas 
déplacé  [nés  du  chêne  et  du  t.rebintbe  aux  frais  om- 
brages. Aussi  préférons-nous  traduire  libnéh  par 
peuplier  blanc.  Voir  Styrax.  E.  Levksq 

PEUR.  Voir  Frayeur,  t.  n,  col.  2399. 

PEVERELLI  Barthélemi,  exégète  italien,  né  à  Vé- 
rone en  1695,  mort  à  Modène  le  22  octobre  1766,  entra 
au  noviciat  de  la  Compagnie  de  Jésus,  le  29  octobre  1713. 
enseigna  d'abord  les  humanités  puis  l'Écriture  Sainte  è 
Modène.  Ses  leçons  sur  les  Actes  des  Apôtres  :  Le: 
sacre  e  nioruli  sopra  il  santo  libro  de  gli  AUi  Apost  - 
lici,  Vérone,  1766-1777,  2  in-4»,  sont  tout  à  la  fois  une 
œuvre  de  science  et  une  oeuvre  de  piété  ;  elles  s'adressent 
à  l'intelligence  et  au  cour.  P.  Ri.iard. 


177 


PEZRON 


PHACEE 


178- 


PEZRON  Paul,  savant  chronologiste  de  l'ordre  de 
Citeaux,  né  en  1639  à  Hennebont  en  Bretagne,  mort  a 
Chessy  le  10  octobre  1706.  Il  fut  admis  dans  l'ordre  de 
Citeaux  à  l'abbaye  de  Prières  et  y  exerça  les  fonctions 
de  maître  des  novices.  En  1677  il  fut  nommé  sous- 
prieur  du  collège  des  Bernardins  à  Paris,  où  il  se  fit  rece- 
voir docteur.  Il  enseigna  ensuite  la  théologie  jusqu'en 
1690  et  fut  alors  choisi  comme  visiteur  de  son  ordre. 
En  1697  il  fut  élu  abbé  de  la  Charmoye;  mais  quelques 
années  plus  tard,  en  1703,  il  se  démit  de  cette  charge 
afin  de  pouvoir  se  livrer  plus  facilement  à  la  prière  et 
à  l'étude.  Il  a  publié  :  Essay  d'un  commentaire 
littéral  et  historique  sur  les  Prophètes,  in-1'2,  Paris, 
1693  :  l'auteur  entreprend  d'y  expliquer  les  prophètes 
selon  l'ordre  chronologique;  Histoire  évangélique  con- 
firmée par  ta  Judaïque  et  la  Romaine,  2  in-12,  Paris, 
1696.  Dom  Pezron  est  surtout  connu  par  son  ouvrage  : 
L'Antiquité  îles  temps  rétablie  et  défendue  contre  les 
Juifs  et  les  nouveaux  chronologistes,  où  l'on  prouve 
que  le  texte  hébreu  a  été  corrompu  parles  Juifs,  avec 
un  canon  chronologique  depuis  le  commencement  du 
le  jusqu'il  Jésus-Christ,  in-4",  Paris,  1687.  Dom 
Pezron  y  rétablit  la  chronologie  du  texte  des  Septante. 
Ses  conclusions  furent  attaquées  par  dom  Martianay, 
de  la  congrégation  de  Saint-Maur  et  par  Le  Quien- 
Il  leur  répondit  par  la  Défense  de  l'antiquité  du  temps 
contre  le  P.  Jean  Martianay  :  où  l'on  soutient  la  tra- 
dition des  Pères  et  des  Églises  contre  celle  duTalmud 
etoii  l'on  fait  voir  la  corruption  de  l'Hébreu  des  Juifs, 
in-4».  Paris,  1691.  Dom  Pezron  publia  en  outre  dans 
les  .Mémoires  de  Trévoux  :  Dissertation  touchant  l'an- 
cienne demeure  des  Chananéens  et  de  l'usurpation 
qu'ils  ont  faite  sur  les  enfants  de  Sem,  1704,  p.  15; 
Dissertation  sur  les  anciennes  et  véritables  bornes  île 
la  terre  promise,  1705,  p.  1015.  —Voir  D.  François, 
Biblioth.  générale  des  écrivains  de  l'Ordre  de  S.  Be- 
noit, t.  il,  p.  387.  B.  Heurtebize. 

PFAFF  Christophe  Matthieu,  exégète  protestant,  né 
à  Stuttgart  le  25  décembre  1686,  mort  le  19  novembre 
1760.  Docteur  et  professeur  de  théologie  à  Tubingue, 
il  fut  chancelier  de  l'Université  de  cette  ville  et  membre 
de  l'Académie  des  sciences  de  Berlin.  Parmi  les  nom- 
breux écrits  de  cet  auteur  on  remarque  :  Notse  exege- 
tiese  in  Evangelium  Malthœi  quibus  sensus  ejusdem 
litteralis  perspicue  breviterque  evolvitur,  in-4».  Tubin- 
gue,  1721.  —  Voir  C.  P.  Leporin,  Verbesserte  Nachrichl 
von  C.  M.  Pfaffen's  Leben,  Controversien  und  Schrif- 
ivn.  in-4»,  Leipzig.  1726;  Walch,  Bibl.  theologica,  t.  iv, 
p.  390,  637,  915,  917.  B.  Heurtebize. 

PFEFFINGER  Daniel,  théologien  protestant,  né 
vers  1661,  mort  le  2i  novembre  1724.  Professeur  de 
théologie  et  de  langues  orientales,  il  publia  :  Notai  in 
prophetiam  Haggai,  in-i",  Strasbourg,  1703;  Disser- 
taliones  in  Epistolam  ad  Ephesios,  in-8»,  Strasbourg, 
1721.  —  Voir  J.  Wieger,  Programma  in  J.  D.  Pfejfingeri 
a,  in-f»,  Strasbourg,  1724;  Walch,  Bibl.  theolo- 
gica, t.  iv,  p.  591,  702.  B.  Heurtebize. 

PFEIFFER  Auguste,  théologien  et  orientaliste  pro- 
testant, né  à  Lauenbourg  le  27  octobre  1640,  mort  à 
Lubeck  le  11  janvier  1698.  Archidiacre  de  l'église  Saint- 
Thomas  à  Leipzig,  professeur  de  langues  orientales  et 
de  théologie,  puis  surintendant  des  églises  de  Lubeck, 
Auguste  Pfeifler  publia  un  grand  nombre  d'ouvrages, 
parmi  lesquels  nous  devons  citer  :  Commentarius  in 
Obadiam,  prxter  genuini  sensus  evolutionem  et  colla- 
tionem,  interprelum  exhibens  versionem  latinam  et 
•  en  commenlarii  1s.  Abarbanelis  Judœi  doctis- 
,  sed  christianis  infensissimi  et  inter  alia  al/ster- 
gens  indignissimam  Judœorum  calumniam,  christia- 
nos  esse  ldumœos  eosque  manere  pœnas  Idumseis  in 


sacro  Codice  denuntiatas,  in-4°,  Wittenberg,  1666;  Prse- 
lectiones  in  prophetiam  Jonse  recognitse  et  in  justum 
commenlurium  redactx,  quibus  emphases  vocun\ 
eruuntur,  verus  Sacrie  Scriptural  sensus  exjionitur, 
sententise  variai  et  Judœorum  et  christianoriini  addu- 
cuntur,  falsse  re/elliintur  cl  qusestiones  dubiœ  resol- 
vuiiiur.  in-4»,  Wittenberg,  1671;  Dubia  vexala  Scrip- 
tural Sacrai,  sive  loca  difficiliora  Veteris  Testamenti 
succincte  decisa,  in-4°,  Dresde,  1679;  Criticasacra  de 
sacri  Codicis  partitione,  editionibus  variis,  linguis 
orientalibus,  in-8»,  Dresde,  1680:  Theologia  mystica 
Veteris  Testamenti  per  typos  rariores  promulgala  et 
ad  historiam  Novi  Testamenti  adplicata,  in-8»,  Stral- 
sund,  1727.  —  Voir  .1.  E.  Pfeill'er,  Memoria  A.  Pfeifferi, 
theologi  Lubecensis,  in-4»,  Rostock,  1700;  Walch,  Bihl. 
theologica,  t.  IV,  p.  233,  577,  581,791. 

B.  Heurtebize. 

PHACÉE  (hébreu  :  Peqah;  Septante  :  <ï>a-/.eé), 
dix-huitième  roi  d'Israël  (759-739,  ou  750-731).  Phacée 
était  fils  de  Romélie,  personnage  inconnu  ou  peut-être 
décrié,  comme  le  donnerait  à  supposer  l'affectation  avec 
laquelle  Isaïe,  vu,  4,  5,  9;  vin,  6,  appelle  le  roi  d'Israël 
simplement  «  le  fils  de  Romélie  ».  Phacée  n'entra 
d'ailleurs  dans  l'histoire  que  par  la  porte  du  crime.  Il 
était  officier  de  Phacéia,  ëalisô,  «  son  officier  »,  par 
conséquent  attaché  à  sa  personne.  Il  ne  tarda  pas  à 
conspirer  contre  lui  pour  le  faire  disparaître  et  prendre 
sa  place,  comme  avaient  fait  récemment,  dans  ce  mal- 
heureux royaume  d'Israël,  Sellum  pour  Zacharie,  et 
Manahem,  père  de  Phacéia,  pour  Sellum.  Phacéia  ne 
régnait  que  depuis  deux  ans,  quand  Phacée  réussit  à 
le  frapper  à  Samarie,  dans  la  tour  de  la  maison  royale. 
Avec  le  roi  périrent  deux  de  ses  officiers  fidèles,  àrgob 
et  Arié.  Pour  réussir  dans  son  entreprise  criminelle, 
le  meurtrier  s'était  assuré  le  concours  de  cinquante 
Galaadites.  D'après  la  Vulgate,  ces  derniers  sont  au 
contraire  du  parti  de  Phacéia  et  périssent  avec  lui. 
Leur  nombre  précis  indique  des  conjurés  plutôt  que 
des  victimes.  Josèphe,  Ant.jud..  IX,  xi,  1,  on  ne  sait 
sur  quelle  donnée,  dit  que  le  crime  eut  lieu  au  milieu 
d'un  festin.  IV  Reg.,  xv,  25. 

Devenu  roi  dans  de  telles  conditions,  Phacée  ne 
pouvait  que  favoriser  en  Israël  les  habitudes  idolàtriques 
mises  en  honneur  par  ses  prédécesseurs.  Il  n'y  manqua 
pas.  IV  Reg.,  xv,  28.  Il  régnait  depuis  deux  ans  à  Sa- 
marie, quand,  à  Jérusalem,  un  jeune  prince  de  vingt- 
cinq  ans,  Joatham,  succéda  à  son  père,  Ozias,  qui  avait 
régné  cinquante-deux  ans.  D'autre  part  régnait  en  Syrie 
Rasin  II,  qui  jadis,  en  même  temps  que  Manahem, 
avait  été  obligé  de  prêter  hommage  au  roi  d'Assyrie, 
Téglathphalasar  III,  quand  celui-ci  avait  soumis  la 
Syrie  septentrionale.  Phacée  et  Rasin,  au  lieu  de 
s'entendre  avec  le  roi  de  Juda  pour  faire  face  ensemble 
aux  incursions  assyriennes,  préférèrent  comploter  tous 
les  deux  contre  leur  voisin  du  sud.  Dés  le  temps  de 
Joatham,  leurs  entreprises  hostiles  se  dessinèrent. 
IV  Reg.,  xv,  37.  Cependant  elles  ne  prirent  corps  que 
quand  un  jeune  roi  de  vingt  ans,  Achaz,  fut  monté  sur 
le  trôné  de  Jérusalem,  la  dix-septième  année  de  Phacée. 
Rasin  et  ce  dernier  se  portèrent  ensemble  contre  la 
capitale  de  Juda  pour  l'attaquer.  Leur  projet  n'allait 
à  rien  moins  qu'à  détrôner  Achaz  pour  mettre  à  sa 
place  le  fils  de  Tabéel,  personnage  inconnu,  peut-être 
Rasin  lui-même,  en  tous  cas  un  prince  tenu  par  la 
Syrie  dans  une  étroite  dépendance.  Is.,  vu,  6.  Voir 
Tabèel.  L'armée  syrienne  s'avançait  à  travers  le  ter- 
ritoire d'Éphraïm.  A  l'approche  des  ennemis,  Achaz 
et  tout  son  peuple  furent  saisis  d'épouvante.  Le  pro- 
phète Isaïe  s'efforça  de  les  rassurer  contre  les  menaces 
de  Rasin  et  du  fils  de  Romélie,  «  ces  deux  bou's  de 
tisons  fumants  »,  dont  le  dessein  ne  devait  pas  avoir 
d'effet,  et  sur  lesquels  allaient  s'abattre  bientôt  les 
fureurs  de  l'Assyrie.  Is.,  vit,  1-9;  VIII,  1-4.  Malgré  leurs- 


179 


PHACEE 


PHADAÏA 


180 


efforts,  les  rois  de  Syrie  et  de  Samarie  ne  purent 
vaincre  Achaz  à  Jérusalem.  Ils  se  tournèrent  alors 
chacun  de  leur  côté.  Rasin  alla  s'emparer  d'Élath,  sur 
la  mer  Rouge  et  fit  dans  le  royaume  de  Juda  un  grand 
nombre  de  prisonniers  qu'il  déporta  à  Damas.  IV  Reg., 
xvi,  6;  Il  Par.,  xxvm,  5.  Phacée,  opérant  pour  son 
compte,  Ijattit  l'armée  d'Achaz  et  lui  tua  cent  vingt 
mille  hommes  en  un  jour.  Zéchri,  guerrier  d'Éphraïm. 
mit  à  mort  Maasias,  fils  du  roi,  Eyrica,  intendant  de  la 
maison  royale,  et  Elcana,  le  premier  ministre.  En 
toutes  ces  rencontres,  les  Israélites  firent  à  leurs  frères 
deux  cent  mille  prisonniers,  femmes,  fils  et  filles, 
qu'ils  emmenèrent  à  Samarie  avec  un  butin  considérable. 
II  Par.,  xxvm,  6-8.  Sur  la  valeur  de  ces  chiffres,  voir 
Nombre,  t.  iv,  col.  1682-1683. 

Dieu  ne  permit  pas  cependant  que  des  frères  se 
traitassent  comme  des  étrangers.  L'armée  Israélite 
revenait  à  Samarie  avec  ses  captifs  et  son  butin,  quand 
un  prophète  de  Jébovah,  nommé  Oded,  se  présenta  au- 
devant  d'elle  et  lui  reprocha  la  fureur  avec  laquelle  elle 
avait  tué  tant  d'hommes  de  Juda.  On  allait  maintenant 
réduire  en  esclavage  des  milliers  de  survivants.  Mais 
Ephraïiu.  lui  aussi,  n'était-il  pas  coupable  envers 
Jéhovah?  Le  prophète  concluait  au  renvoi  des  prison- 
niers, si  l'on  voulait  échapper  à  la  colère  de  Dieu.  Son 
observation  était  trop  juste  pour  ne  pas  éveiller  la  pitié 
dans  l'âme  des  vainqueurs.  Quelques-uns  des  chefs 
d'Ephraïm  appuyèrent  énergiquement  les  paroles 
d'Oded.  L'armée  abandonna  ses  captifs  et  son  butin. 
Par  les  soins  des  chefs,  on  fournit  aux  prisonniers  des 
vêtements  et  des  chaussures;  on  les  fit  manger  et  boire, 
on  les  oignit,  on  fit  monter  sur  des  ânes  ceux  qui 
défaillaient  et  on  les  reconduisit  tous  à  Jéricho,  oi'ï~ôn 
les  remit  aux  mains  de  leurs  compatriotes.  Il  Par., 
xxvm,  9-15.  Ce  jour-là,  grâce  à  l'initiative  du  prophète 
et  à  l'intelligence  des  chefs,  un  grand  acte  de  frater- 
nité l'ut  accompli  en  Israël.  L'intervention  de  Phacée 
n'apparait  pas  dans  cet  événement.  Peut-être  tout  se 
fit-il  à  son  insu,  ou  du  moins  n'osa-t-il  pas  s'opposer  à 
un  mouvement  qui  entraînait  tout  son  peuple. 

Lescbosesn'enrestèrentpaslà.  Achaz,  effrayé  de  la  cam- 
pagne menée  si  rudement  contre  lui  par  1rs  deux  alliés, 
prit  alors  un  parti  désastreux  pour  l'indépendance  natio- 
nale. Il  envoya  des  messagers  a  Téglathphalasar  pour 
lui  dire  :  «  .le  suis  ton  serviteur  et  ton  fils;  monte  et 
délivre-moi  de  la  main  du  roi  de  Syrie  et  de  la  main 
du  roi  d'Israël,  qui  se  sont  levés  contre  moi.  »  IV  l;.-_ 
xvi.  7.  Il  faut  ajouter  que  les  Iduméens  et  les  Philis- 
tins avaient  attaqué  Judaà  leurtour,  lui  avaient  emmené 
des  captifs  et  pris  des  villes.  Il  Par.,  xxvm,  16-18.  Le 
roi  d'Assyrie  se  hâta  d'acquiescer  à  une  demande  qui 
répondait  merveilleusement  à  ses  ambitieux  projets.  En 
vain  Isaïe  cherrha-t-il  à  faire  tomber  les  illusions  d'un 
peuple  qui  «   se  réjouissait   au   sujet  de   Rasin   el    Mu 

fils   de     Homélie    «.    narés   par    l'Assyrien.    En    vain 

prédit-il  que  ce  sauveur  deviendrait  pour  Juda  un 
envahisseur  et  un  conquérant.  Is.,  vm,  6,  7.  Téglath- 
phalasar  descendit  et  s'abattit  d'abord  sur  le  royaume 
d'Israël,  sans  que  le  roi  de  Syrie  osât  venir  au  secours 
de  son  allié.  Arrivant  par  la  vallée  de  l'Oronte,  du 
Léontès  et  du  haut  Jourdain,  il  prit  successivement 
les  villes  d'Ajon,  d'Abel-Beth-Machaa,  de  Janoé,  de 
Cédés,  d'Asor,  puis  Galaad,  la  Galilée  et  tout  le  pays  de 

Nephthali.  c'est-à-dire  toute  la  partie  septentrionale  du 
royaume  d'Israël,  et  il  en  déporta  les  habitants  en 
Assyrie.  Il  Reg.,  XV,  29.  Il  est  dit  ailleurs,  1  l'ai-.,  v. 
■26,  que  Téglathphalasar  emmena  captifs  les  Rubénites, 
les  Gadites  et   la  demi-tribu  de   Manassé,  et  qu'il  les 

conduisit  à  liala,  a  C.liabor,  à  Ara  et  au  Meuve  de  Gozan. 
Après  les  Israélites,  le  roi  d'Assyrie  tomba  sur  les 
Philistins,  ces  autres  ennemis  de  Juda,  el  sur  les 
Sm  ions,  contre  lesquels  il  fil  deux  campagnes.  Tous  ces 
nents  se  passèrent  dans  les  années  731-732.  Le 


roi  de  Juda  eut  ensuite  son  tour,  comme  il  fallait  s'y 
attendre  et  comme  Isaïe  l'avait  annoncé.  II  Par., 
xxvm,  20. 

Une  des  inscriptions  de  Téglathphalasar,  Cuneiform 
Inscriptions  of  Western  Asia,  I.  m.  pi.  x,  2;  cf. 
\igouroux,  La  Bible  el  les  découvertes  modernes, 
6e  édit.,  t.  m.  p.  522.  523,  raconte  la  campagne  contre 
la  terre  de  Pilasta.  la  Palestine.  Parmi  les  villes  prises 
à  l'entrée  de  la  terre  de  Bêl-Ilu-u,n-rt.  maison  d'Amri 
ou  d'Israël,  on  a  cru  reconnaître  celles  de  Galaad  et 
d'Abel-Beth-Maacha  (Abiilakka).  Mais  il  est  possible 
qu'il  Taille  lire  plutôt  Galza  et  Abilakka.  Cf.  Rost,  Die 
Keilschrifttexle  Tiglat-Pilesers  III,  1. 1.  p.  78-79.  L'ins- 
cription ajoute,  lig.  26-2S  :  «  La  terre  de  Bèt-l.lu-um-ri... 
la  totalité  de  ses  habitants,  avec  leurs  biens,  je  trans- 
portai en  Assyrie.  » 

Phacée  avait  échappé  à  la  déportation,  probablement 
en  se  cachant  dans  les  montagnes.  Il  ne  survécut 
guère  au  désastre.  Parvenu  à  la  royauté  par  l'assassi- 
nai, il  fut  assassiné  à  son  tour  par  Usée,  fils  d'Éla,  qui 
régna  à  sa  place.  II  Reg..  xv.  30.  L'inscription  de  I- - 
glalhphalasar  relate  le  fait.  Voir  Osée,  t.  iv.  col.  L905. 
Ce  qui  se  dégage  de  ces  récits,  c'est  que  Phacée  fut  un 
ambitieux  sans  scrupule,  qui  ne  recula  pas  devant  l'al- 
liance avec  les  étrangers  pour  l'oppression  de  ses  frères 
de  Juda,  mais  qui  ne  sut  et  ne  put  lien  faire  pour  la 
défense  de  son  propre  royaume,  qu'il  vit  le  premier 
très  sérieusement  entamer  par  les  conquérants  assyriens. 

H.  Lesltre. 

PHACÉIA  (hébreu  :  Peqabyâh  ;  Septante  :  $oc/.E(ria;), 
dix-septième  roi  d'Israël  (761-759,  ou  752-751).  Il  était 
fils  de  Manahein,  a  la  mort  duquel  il  devint  roi.  Son 
règne  de  deux  ans  se  résun.  en  ces  mois,  si  souvent 
redits  au  sujet  des  rois  d'Israël  :  «  Il  lit  ce  qui  est  mal 
aux  veux  de  Jéhovah  et  ne  se  détourna  pas  dos  péchés 
deJéroboam,  fils  de  Nabat,  qui  avait  fait  pécher  Israël,  a 
II  Reg'..  \v,  21.  Il  est  possible  que  le  tribut  payé 
naguère  au  roi  d'Assyrie,  et  que  Manahein  avait  fait 
peser  sur  les  riches,  ait  indisposé  ces  derniers  contre 
son  fils.  Un  des  officiers  du  roi  le  mit  à  mort  et  frappa 
avec  lui  deux  personnages  dont  le  nom  a  été  conservé, 
Argob  et  Arié,  fidèles  à  Phacéia  et.  à  ce  titre,  partagi  anl 
probablement  son  impopularité.  II  Reg..  xv.  25.  Voir 
Phacée,  col.  178.  Il*  Lesétri 

PHADAÏA  (hébreu  :  Pedâyâh,  une  fois  Pedà- 
yâkiï;  t  Jéhovah  rachète  ou  délivre  »),  nom  de  six  ou 
sept  Israélites.   M.  Bliss  a  trouvé'  au  sud  de  la  colline 


35.  —  Cachet  dan  Phadaîa. 

m>TS  -*•;-:-•.  !>,. !  Pedayahu. 

d'Ophel,  à  Jérusalem,  un  cachet  scarabéoïde  qui  porte 
le  nom  de  Phadaîa  écrit  en  hébreu  ancien  (lig.  35). 
Voir  Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres, 
Comptes  rendus,  23  juillet  1897,  p.  374. 

1.  PHADAIA    i  Septante    :   $aâafct;    Alexandrinus  : 

EUSSiagc),  père  de  la  rein.'  Zébida,  mère  du  roi  Joakim. 

Il  .'tait  originaire  de  Ruma.  IV  Reg.,  xxni.  36. 

2.  PHADAIA  (Septante  :  $aSaia;),  fils  du  roi  de    ad 
Jéchonias  el   père  de   Zorobabel.  I   Par.,   m,  IS-l!r.  le 
Vaticanus  et  V Alexandrinus,  I  Par.,  m,  lit.  indiquent 
Salathiel    comme    père    de    Zorobabel,   comme    le   font 
d'ailleurs  Agg.,   i,    1,  etc.;  I  Esd.,  m,  2,  etc.;   Néhé- 


181 


PHADAÏA    —    PHALEG 


182 


mie,  II  Esd.,  xii.  1;  Matth.,  i,  12;  et  Luc,  ni.  27:  il 
est  ainsi  le  neveu,  non  le  fils  de  Phadaïa.  Il  faut  donc 
ou  que  le  texte  I  Par.,  m,  27,  soit  altéré  ou,  comme  on 
l'a  supposé,  que  Zorobabel  fût  le  fils  de  Phadaïa  et  de 
la  femme  de  Salatliiel  qui  serait  devenue  son  épouse 
après  la  mort  de  son  frère,  en  vertu  de  la  loi  du  lévi- 
rat.  Voir  Zorobabel.  Phadaïa  était  probablement  né  à 
Babylone  où  son  père  avait  été  emmené  en  captivité. 

3.  PHADAÏA  (hébreu  :  Peddyâhû;  Septante  :  <I>a8a'.a), 
père  de  Joël.  Joël  fut  mis  par  David  à  la  tête  de  la 
demi-tribu  de  Manassé  cisjordanique.  I  Par.,  xxvn,  '20. 

■4.  PHADAÏA  (Septante  :  $aSaîct),  lils  de  Pharos  qui, 
du  temps  de  Néhémie,  travailla  à  la  reconstruction  des 
murs  de  Jérusalem.  II  Esd.,  ni,  25. 

5.  phadaïa  (Septante  :  *aSaia;),  Israélite  qui  se  tint 
à  la  gauche  d'Esdras,  lorsque  celui-ci  fit  au  peuple  la 
lecture  de  la  loi  à  Jérusalem.  II  Esd-,  vin,  4.  Quelques 
interprètes  le  confondent  avec  Phadaïa  4,  d'autres  avec 
Phadaïa  7. 

6.  PHADAÏA  (Septante  :  4>aSot'ta),  fils  de  Colaïa,  de  la 
tribu  de  Benjamin,  ancêtre  de  Sellum  qui  habita  à  Jéru- 
salem au  retour  de  la  captivité.  II  Esd.,  XI,  7.  Dans 
I  Par.,  ix,  il  ne  figure  pas  parmi  les  ancêtres  de  Sel- 
lum. 

7.  phadaïa  Septante  :  <Pa&i:a),  lévite  à  qui  Néhé- 
mie  confia,  en  même  temps  qu'à  quelques  autres 
Israélites,  la  garde  des  magasins  qui  contenaient  le  pro- 
duit de  la  dime  du  blé,  du  vin  et  de  l'huile.  II  Esd., 
xiii.  13.  Divers  commentateurs  pensent  que  ce  Phadaïa 
est  le  même  que  Phadaïa  4  ou  Phadaïa  5,  mais  on  ne 
peut  ni  l'affirmer,  ni  le  nier  avec  certitude;  quoi  qu'il 
en  soit,  Néhémie  avait  choisi  Phadaïa  comme  repré- 
sentant des  lévites  et  défenseur  de  leurs  intérêts. 

PHADASSUR  (hébreu  :  Pedâhçûr,  ^celui  que]  le 
rocher  délivre  »;  Septante  :  <ï>aoao'o-jp,  «t'aSautro-jp), 
chef  d'une  famille  de  la  tribu  de  Manassé  et  père  de 
Gamaliel,  du  temps  de  l'exode.  Num.,  i,  10;  n,  20;  vu, 
51,  50:  x.  23.  Voir  Gamaliel  1.  t.  ni,  coi.  102. 

PHADON  (hébreu  :  Pâdôn,  <•  délivrance  »;  Sep- 
tante :  $oc8ûv),  chef  d'une  famille  de  Nathinéens.  qui 
revint  en  Palestine  avec  Zorobabel  après  la  captivité 
de  Babylone.  1  Esd.,  il,  44;  II  Esd.,  vu,  17. 

PHAHATH  MOAB  (hébreu  :  Paliat  Mô'ab,  «  gou- 
verneur de  Moab  o;  Septante  :  «l'aàô  Mwtiê),  chef 
d'une  des  principales  familles  de  la  tribu  de  Juda.  On 
explique  ordinairement  ce  nom  comme  signifiant 
iverneur  (ou  pacha)  de  Moab  ».  Pour  expliquer 
celte  signification,  on  a  fait  toutes  sortes  d'hypothèses, 
dont  aucune  n'est  pleinement  satisfaisante.  La  plus  na- 
turelle, si  le  nom  n'est  pas  altéré,  consiste  à  supposer 
que  le  chef  de  la  famille  exerça  réellement  un  certain 
pouvoir  dans  le  pays  de  Moab.  Il  est  question,  I  Par., 
n,  21-22,  des  descendants  de  Séla,  fils  de    Juda,   qui 

dominèrent  sur  Moab  ».  Quoi  qu'il  eu  soit,  les  des- 
cendants de  Phahath-Moab  formaient  une  des  princi- 
pales familles  juives  au  retour  de  la  captivité  de  Baby- 
lone :  elle  est  nommée  la  quatrième  dans  les  deux 
listes  de  captifs  qui  revinrent  en  Palestine  du  temps  de 
Zorobabel,  I  Esd.,  n,  6;  II  Esd.,  vu,  11  ;  et  le  cinquième 
dans  la  liste  des  compagnons  d'Esdras,  I  Esd.,  vm,  4; 
son  chef  signa  le  second  l'alliance  du  temps  de  Néhé- 
mie parmi  les  chefs  du  peuple.  II  Esd.,  x,  14.  Elle  était 
aussi  très  importante  par  le  nombre  de  ses  membres, 
la  plus  nombreuse  après  celle  de  Sénaa  le  Benjamite. 
Celle-ci  comptait  près  de  1000  membres,  I  Esd.,  n,  35; 


II  Esd.,  VU,  38;  celle  de  Phahath  Moab  en  avait  2S18. 
II  Esd..  vu,  11  (2812,  d'après  I  Esd.,  n,  6).  Elle  se 
composait  de  deux  branches,  celle  de  Josué  et  celle  de 
Joab,  comme  on  le  lit  expressément,  II  Esd.,  vu,  11, 
<  fils  de  Josué  et  de  Joab  »  (la  conjonction  et  manque 
dans  II  Esd.,  n,  6,  mais  on  doit  très  vraisemblablement 
l'y  suppléer).  Nous  ignorons  ce  qu'étaient  ce  Josué  et 
ce  Joab;  nous  connaissons  seulement  un  Joab  descen- 
dant de  Juda,  nommé  I  Par.,  iv,  14,  cf.  Il,  54,  sans 
pouvoir  dire  si  c'est  celui  dont  il  est  parle''  dans  Esdras 
et  dans  Néhémie.  Esdras,  à  son  retour  en  Palestine, 
emmena  avec  lui  218  hommes  «  des  fils  de  Joab  », 
I  Esd.,  vm,  9;  il  les  énumère  à  part,  après  avoir 
compté  plus  haut,  au  y.  4,  deux  cents  hommes  de 
Phahath-Moab. 

Tout  ce  que  nous  savons  des  descendants  de  Phahath 
Moab,  lorsqu'ils  furent  revenus  dans  leur  patrie,  se  ré- 
sume dans  ces  trois  points  :  —  1°  Esdras  obligea  huit 
d'entre  eux  qui  sont  nommés  par  leurs  noms,  à  répu- 
dier  les    femmes    étrangères  qu'ils  avaient  épousées. 

I  Esd.,  x,  30.  —  2°  Hasub,  qui  était  probablement  un 
des  chefs  de  la  famille,  travailla  à  la  réparation  d'une 
partie  des  murs  de  Jérusalem  et  de  la  tour  des  Four- 
neaux ou  des  Fours  (t.  n,  col.  2344).  Quelques  com- 
mentateurs confondent  cet  Hasub  avec  celui  qui  répara 
une  autre  partie  des  murs  de  Jérusalem,  II  Esd.,  m, 
23,  mais  c'est  sans  raison.  —  3"  Lorsque  les  principaux 
d'entre  les  Juifs  signèrent  avec  Néhémie  l'alliance  que 
le  peuple  fit  avec  Dieu,  le  représentant  de  la  famille 
de  Phahath  Moab  signa  après  Pharos,  le  second  sur 
quarante-quatre  parmi  les  chefs  du  peuple.  II  Esd.,  x, 
li. 

PHALAIA  (hébreu  :  Pelà'ydh,  »  Jéhovah  fait  des 
choses   admirables  »  ;    Septante    :    $eXloc,    omis   dans 

II  Esd.,  vm,  7),  un  des  lévites  qui  aidèrent  Esdras  à 
expliquer  la  loi  au  peuple,  II  Esd.,  vm,  7,  et  qui 
signèrent  plus  tard,  avec  Néhémie,  l'alliance  contractée 
entre  Dieu  et  son  peuple.  II  Esd.,  x,  10.  —  Un  fils 
d'Élioénaï,  de  la  race  royale  de  David,  appelé  Pelàydh 
dans  le  texte  hébreu,  porte  le  nom  de  Phéléia  dans  la 
Vulgate.  I  Par.,  m,  24. 

PHALANGE,  ordre  de  bataille  usité  chez  les  Grecs, 
consistant  en  la  disposition  des  troupes  par  colonnes, 
en  files  espacées  pour  la  marche,  rapprochées  pour  la 
charge  et  serrées  pour  l'attaque.  La  Vulgate  a  traduit  par 
ce  mot  «  phalanges  »,  I  Reg\,  xvn.  8,  l'hébreu  maarkot 
(Septante:  ■Ka.pi-nxhi),  qui  désigne  l'armée  d'Israël  rangée 
en  ordre  de  bataille  par  Saûl  contre  les  Philistinselcontre 
Goliath.  —  Sur  la  manière  dont  les  Syro-Macédoniens 
disposaient  leur  ordre  de  bataille,  voir  I  Mach.,  vi, 
35. 

PHALÉA  (hébreu  :  Pilha;  Septante  :  d>ay),ai[).  un 
des  chefs  de  famille  qui  signèrent  l'alliance  entre  Dieu 
et  son  peuple  au  temps  de  Néhémie.  II  Esd.,  x,  24. 

PHALEG  (hébreu  :  Pclég,  «  division  «;  Septante  : 
1>i>sx  ;  Josèphe,  Ant.  jud.,  I,  xi,  .">),  descendant  de 
Sem,  fils  d'Héber,  frère  aine  de  Jectan  et  père  de  Réii, 
un  des  ancêtres  d'Abraham.  Gen.,  x,  25;  xi,  16,  17,  18, 
19;  I  Par.,  i.  19,  25.  Il  fut  appelé  Phaleg,  dit  la  Genèse, 
x,  25,  «  parce  qu'en  ses  jours  la  terre  fut  divisée.  »  On 
a  donné  de  cette  phrase  les  explications  les  plus  diverses. 
Les  uns  l'ont  entendue  de  la  dispersion  des  peuples 
dont  parle  la  Genèse  à  propos  de  la  construction  de  la 
tour  de  Babel,  xi,  9;  d'autres,  du  partage  de  la  terre  par 
Xoé  entre  ses  petits-fils  ou  bien  de  la  séparation  des  en- 
fants d'Héber  dont  les  uns  seraient  allés  en  Arabie, 
pendant  que  les  autres  demeuraient  en  liabylonie.  Ces 
explications  sont  peu  vraisemblables,  de  même  que  l'opi- 
nion de  ceux  qui  voient  dans  cette  division  une  allusion 


183 


PHALEG 


PHANUEL 


184 


à  une  catastrophe  terrestre,  tremblement  de  lerre,  érup- 
tion volcanique,  au  commencement  de  la  canalisation 
en  Babylonie,  etc.  Les  expressions  du  texte  sacré  sont 
si  vagues  qu'on  ne  peut  aujourd'hui  en  préciser  le  sens 
avec  certitude  :  si  elles  semblent  plutôt  faire  allusion  à 
la  dispersion  du  peuple,  Gen.,  XI,  9,  il  faut  remarquer 
que  la  Genèse,  xi,  4,  8,  9,  emploie  le  verbe  pus,  o  dis- 
perser »,  et  non  le  verbe  pdlag,  «  diviser  »,  pour  marquer 
cette  dispersion.  —  Divers  commentateurs  ont  voulu 
sans  raison  suflisante  prendre  le  nom  de  Phaleg  comme 
un  nom  ethnographique  ou  un  nom  géographique  et 
ils  l'ont  rapproché  de  celui  de  la  ville  de  Pliatiga, 
mentionnée  par  Isidore  de  Charax  comme  située  au 
confluent  du  Chaboras  et  de  l'Euphrate,  mais  il  n'est 
nullement  question  de  cette  ville  avant  cet  auteur,  qui 
vivait  seulement  au  iii«  siècle  avant  J.-C.  —  Phaleg  en- 
gendra Réû  à  l'âge  de  30  ans  et  mourut  à  l'âge  de 
'239  ans,  laissant  des  fils  et  des  lilles.  Gen.,  xi,  18-19.  Il 
esl  nommé  dans  la  généalogie  de  Notre-Seigneur  en 
saint  hue,  ni,  35. 

PHALEL  (hébreu  :  Pâlàl,  »  [Dieu]  juge  »;  Septante  : 
i'i/iy;  Alexandrinus  :  <I>a/.o(£),  fils  d'Ozi.  Du  temps  de 
Néhémie,  il  rebâtit  une  partie  des  murs  de  Jérusalem, 
■•  vis-à-vis  de  l'angle  et  de  la  hante  tour  qui  fait  saillie 
en  avant  de  la  maison  du  roi,  près  de  la  cour  de  la 
prison.  »  II  Ksd.,  ni,  25. 

PHALET  (hébreu  :  Pélét,  ti  délivrance,  évasion  ..  ; 

Septante  :  <I>a)ix  ;  Alexandrinus  :  <\'-x\i-,  I  Par.,  n,  47), 
nom  de  deux  Israélites,  dans  le  texte  hébreu.  Dans  la 
Vulgate,  le  nom  de  l'un  des  deux  est  écrit  l'hall,  t. 
1  Par.,  xn,  3.  Le  Phalet  de  notre  version  latine  était 
de  la  tribu  deJuda  et  de  la  famille  de  Galeb  ITlesro- 
nite,  le  quatrième  des  six  fils  de  Johaddaï.  I  Par.,  n, 47. 

PHALETH  (hébreu  :  Péléf;  Septante:  'l'aXÉO).  nom 
de  deux  Israélites,  dans  le  texte  hébreu.  La  Vulgate 
écrit  le  nom  de  l'un  d'eux  Phéleth,  Num.,  \vi,  I.  Celui 
qu'elle  écrit  Phalet  était  de  la  tribu  de  .luda,  lils  de 
Jonathan,  de  la  descendance  de  Jéraméel.  1  Par.,  Il,  33. 

PHALLET  (hébreu  :  Pélét  ;  Septante  :  '\,.^aii-; 
Alexandrinus:  'baUrjt),  lils  d'Azmoth  et  frère  de  Jaziel, 
de  la  tribu  de  Benjamin.  Les  deux  frères  sont  comptés 
parmi  les  gibborîm  de  David.  Ils  étaient  allés  se  joindre 
à  lui  à  Sicelcj;.  1  Par.,  XII,  3. 

PHALLONITE  (hébreu  :  hap-Pelôni,  I  Par.,  xi,  27, 
36;  XXVII,  III;  Septante  :  à  *eXuvî:  I  l'ai'.,  x.  '27  ;  6  *eX- 
n.vii,  \.  36;  6  èx  «l'aX/.o-j; ;  Vulgate  :  PAallonites,  I  Par., 
xxvn,  10;  Phalonites,  I  Par.,  xi,  27;  Phelonites,  )>.  36), 
originaire  de  Bethphaleth,  d'après  un  certain  nombre 
de  commentateurs.  Deux  des  gibborim  de  David, 
Hellés  ou  Hélés  (t.  m,  col.  567),  i  Par.,  XI,  27;  xxvn. 
10,  et  Ahia  1  (t.  i.  col.  291),  I  Par.,  XI,  36,  sont  dits 
l'hallonites  ou  Pélonites.  Cette  dénomination  semblerait 
désigner  une  ville  de  Péloni  ou  Pélon,  mais  connue 
on  ne  connaît  aucune  ville  de  ce  nom  et  que  dans 
n  Reg.,  xxm,  26,  Hélés  esl  appelé  hap-Palti,  a  le 
Phaltite  »  (Vulgate  :  de  Plialli),  beaucoup  de  critiques 
croienl  que  la  leçon  de  II  Reg.  esl  la  meilleure  el  que 
hap-Palti  veul  dire  que  Hélés  étail  originaire  de 
(Beth)phaleth  (t.  i,  col.  1709),  ville  du  Négeb  an  sud  de 
la  Palestine,  dans  la  tribu  de  .luda.  Il  y  a  cependant 
contre  celte  identification  une  difficulté  sérieuse  qui 
n'est  pas  résolue:  c'est  que  Hélés  étail  Êphraîmite, 
d'après  11  Par.,  xxvn.  10,  et  que  Bethphaleth  était  une 
ville  de  .luda,  nom  d'Épbraiin.  On  a  imaginé  d'autres 
hypothèses,  mais  toutes  sont  purement  conjecturales, 

PHALLU  (hébreu  :   PalhY ;  Septante  :  *«X).4«,  'l'a'/- 
second  fils  de  Ruhen.  le  lils  aîné  de  Jacob.  Gen., 


xlvi,  9;  Kxod.,  vi.  14:  Num.,  xxvi,  5;  I  Par.,  v,  3.  Il 
eut  pour  fils  Éliab  et  devint  le  chef  de  la  famille  des- 
Phallonites.  On  compte  parmi  ses  descendants  Dathan 
et  Abiron.  Num.,  xxvi,  5,  8. 

PHALLUITES  (hébreu  :  Itap-Pallui;  Septante  : 
6  o?|[).o;  xoù  foxXXouî;  Vulgate  :  Phalluitm),  descendants- 
de  Phallu.  Num.,  xxvi,  5. 

PHALONITE,  dans  la   Vulgate,  I  Par.,  xi,  27.  Voir 

PlIALLONITE. 

PHALTI  (hébreu  :  Palti ;  Septante  :  $aXvi),  nom  de 
deux  Israélites  et  nom  ethnique.  Phalti, nom  d'homme, 
signifie  «  (Dieu)  est  mon  libérateur  i 

1.  PHALTI,  fils  de  Raphu.  de  la   tribu  de  Benjamin. 

Il  fut  l'un  des  douze  espions  que  Moïse  envoya  dans  la 
terre  de  Chanaan  pour  l'explorer.  Num.,  xm,  9. 

2.  PHALTI,  lils  de  Laïs,  de  Gallim.  Saûl  lui  donna  en 
mariage  sa  fille  Michol  qu'il  avait  déjà  mariée  avec 
David.  I  Reg.,  xxv,  44.  Après  la  mort  de  Saûl,  David  se 
fit  rendre  Michol  par  Abner.  Phalti  la  suivit  en  pleu- 
rant jusqu'à  Bahurim  où  Al. ner  l'obligea  de  retourner 
chezlui.  Il  Reg.,  ni.  15.  Dans  ce  dernier  passage.  Phalti 
est  appel.'  Phaltiel,  ce  qui  est  la  forme  complète  de  son 
nom,  El  (Dieu)  élant  sous-entendu  dans  Phalti. 

3.  PHALTI,  pour  Phaltite.  II  Reg..  xxm,  26.  Hélés  est 
désigné  dans  ce  passage  comme  étant  t  de  Phalti  », 
selon  la  traduction  de  la  Vulgate.  Ailleurs  il  est  dit 
Phellonile.  Voir  PHALLONITE. 

PHALTI  AS  (hébreu  :  Pelatydh,  «  Yah  est  mon  libé- 
rateur; i  Pelatyâhû,  sous  une  l'orme  plus  complète  dans 
Êzéchiel,  xi,  I,  13).  nom  de  quatre  Israélites  dans  le 
texte  hébreu.  11  ne  diffère  que  par  le  nom  divin,  qui  est 
ici  exprimé,  de  Phalti  et  de  Phaltiel  ou  Phalthiel. 
Dans  la  Vulgate.  deux  de  ces  noms  sont  écrits  Phallias 
(dans  quelques  exemplaires  Pbalthias),  le  troisième  esl 
écrit  Pheltias,  Ezech.,  xi,  1, 13,  et  le  quatrième  l'heltia. 
II  Esd.,  x,  22. 

1.  PHALTIAS  (Septante  :  <I>»).£iTi'a),  descendant  de 
David,  fils  d'Hananiaset  père  de  Jésaïas.  I  Par.,  m,  21. 

2.  PHALTIAS  (Septante  :  $âXsETTfa},  le  premier 
nommé'  des  quatre  Bis  de  Jési,  de  la  tribu  de  Siméob. 
Ils  se  mirent  à  la  tête  de  cinq  cents  hommes  de  leur 
tribu,  pour  aller  combattre  dans  la  montagne  de  S.ir 
les  restes  des  Amalécitcs  qui  s'y  étaient  réfugiés  rt.  les 
ayant  vaincus,  s'y  établirent  à  leur  place.  1  Par.,  iv,  12-43, 

[PHALTIEL  (hébreu  :  Palti'êl,  voir  Phaltia;  Sep- 
tante :  'l'a'/Tir,'/ 1,  nom  de  deux  Israélites. 

1.  PHALTIEL,   lils    d'O/.an,  chef  de    la   tribu    d'IsSa- 

char.  qui  l'ut  choisi  par  .Moïse  pour  représenter  sa  tribu 
dans  le  partage  de  la  Terre  Promise.  Num.,  x.xxiv,  26. 

2.  PHALTIEL,  le  même  que  Phalti,  le  mari  de 
Michol.  II  Reg.,  m.  15.  Voir  l'uu  n  2. 

PHANUEL  1.  i  i.  :  Penû'êl,  i  race  de  Dieu:  »  Sep 
tante  :  $avouqX),  nom  de  trois  Israélites  el  nom  de  lieu. 

1.  PHANUEL,  lils  d'IIur  el  pelil-lils  de  .luda.  11  fut  le 
père  de  Gédor.  I  Par.,  IV,  i 

2.  PHANUEL,  le  dernier  nommé  des  onze  lils  de  Sésac, 
de  la  tribu  de  Benjamin,  qui  s'établirent  à  Jérusalem 
I  Par.,  vin ,  25. 


185 


PHANUEL 


PHARA 


186 


3.  PHANUEL,  de  la  tribu  d'Aser,  père  de  la  prophé- 
tesse  Anne.  Luc,  II,  36.  Voir  Anne,  5,  t.  i,  col.  630. 

PHANUEL  (hébreu  :  Peni'él,  «  face  de  Dieu,  » 
Gen.,  xxxii,  30,  31;  Penû'èl,  ibid.,  32;  Jud.,  vin,  8,  17; 
1  (III)  Reg.,  xii,  25;  Septante  ;  sïôo;  0eoO,  Gen.,  xxxn, 
30;  EtBoç  toî  0eoC,  32;  *avour,>,  partout  ailleurs),  lo- 
calité située  sur  les  rives  du  Jaboc  où  Jacob  lutta  avec 
l'ange  et  où  s'éleva  une  ville  du  même  nom.  Elle  est 
mentionnée  sur  les  monuments  égyptiens  sous  la  forme 

"    VI  *mI  -** '  Penual"-  W.  M.  Millier,  Asien  und 

Europa,  p.  168. 

I.  Identification  et  description.  —  Phanuël  était  à 
l'est  du  Jourdain  et  de  Socoth,  puisque  Gédéon  fran- 
cliit  le  lleuve  et  passa  par  Socoth  avant  d'arriver  à 
Phanuël.  Cf.  Jud.,  vin,  4,  5,  8.  Il  était  sans  doute  en 
vue  et  non  loin  du  Jourdain,  dont  Jacob  disait  en  arri- 
vant au  Jaboc  :  «  J'ai  passé  ce  Jourdain.  »  Gen.,  xxxn, 
10.  Le  même  arrivant  de  Galaad  et  Mahanaïm  qu'il  faut 
chercher  au  nord  du  Jaboc,  la  rive  opposée,  où  il  allait 
passer  le  lendemain  et  rencontrer  l'ange,  est  néces- 
sairement la  rive  gauche  ou  méridionale  du  Jaboc, 
aujourd'hui  le  Nahr-Zerqâ.  Cf.  Gen.,  xxxn,  13,  21-23. 
Phanuël  parait  être  oubliée  depuis  longtemps,  car 
VOnomasticon  se  contente  de  l'indiquer  «  près  du  Ja- 
boc »,  et  les  anciens  écrivains  juifs  n'en  font  plus  men- 
tion. Les  savants  anglais  pensent  qu'on  doit  chercher 
ce  lieu  probablement  sur  les  pentes  septentrionales  du 
Djebel  Osa  .  Armstrong,  Wilson  et  Conder,  Names  and 
Places  in  the  Old  Testament,  Londres,  18S7,  p.  138; 
Conder,  Hetli  and  Moab,  Londres,  1887,  p.  177-179. 
Ricb.  von  Riess  le  croit  plutôt  sur  la  rive  septentrionale 
du  Jaboc.  c'est-à-dire  du  coté  opposé.  Bibel-Atlas,  Fri- 
bourg-en-Brisgau.  1887,  p.  231.  M.  Mer  il],  Easl  of  Jour- 
dan,  2e  édition,  New-York,  1883,  p.  38i,  le  suppose  au 
Teloul  ed-clehab,  au  nord  de  la  rivière  et  non  loin  de 
sa  sortie  des  montagnes.  M.  Gotl.  Schumacher  préfère 
Medouar-Nôl,  village  situé  à  une  heure  et  quart  au  nord- 
est  d'un  excellent  gué  de  la  Zerqâ,  se  trouvant  au  nord 
de  Aïn es-Zerqâ. Dans  Miitheilungen  und  Nachrichten 
des  deutschen  Palâstina-Vereins,  1901,  p.  2.  Quelques 
autres  auteurs  ont  proposé,  quoique  en  hésitant  beau- 
coup, le  Tell  Deralla.  Cf.  Buhl,  Géographie  des 
alle-u  Palôslina,  Leipzig.  1896.  p.  260.  La  simililude  de 
ce  nom  avec  Tar'élâh  identifiée  dans  les  Talmuds  avec 
Succoth,  a  fait  penser  qu'il  s'agit  de  la  même  localité. 
Ibid.  Cf.  A.  Neubauer,  Géographie  du  Talmud,  Paris, 
1860,  p.  218-219;  Schumacher,  loc.  cit.,  1889,  p.  21; 
Ariiistrong,  etc.,  loc.  cit.,  p.  166.  L'identilication  de 
Deralla  avec  Tarehi.lt  n'est  pas  sans  vraisemblance, 
mais  celle  de  Tar'eldh  avec  Socoth  est  contestable. 
L'itinéraire  de  Gédéon  poursuivant  les  Madianites. 
Jud.,  vin,  i-5,  parait  indiquer  cette  localité  tout  près 
du  Jourdain  et  Phanuël,  où  «  il  monta  »  de  Socoth. 
plus  à  l'est  et  plus  près  de  la  montagne.  Il  semble  tou- 
tefois qu'il  y  ait  là  un  souvenir  des  faits  racontés 
Gen.,  xxxn.  Cette  identilication.  si  elle  n'est  pas  d'une 
certitude  absolue,  parce  que  les  données  positives  font 
défaut  pour  désigner  ce  tell,  me  semble  d'une  très 
grande  probabilité.  Les  diverses  indications  bibliques 
s'appliquent  parfaitement  à  lui  et  on  ne  trouve  d'autres 
sites  ou  d'autres  vestiges  de  villes  auxquels  on  puisse 
les  rapporter  de  même. 

Le  Tell  Derilla  est  un  grand  tell  au  sommet  aplati, 
s'élevant  de  sept  à  huit  mètres  au-dessus  de  la  plaine 
environnante,  où  l'on  constate  des  restes  d'anciennes 
constructions,  et  semblable  à  tous  ces  anciens  tell  que 
l'on  a  reconnu  être  formés  de  débris  d'anciennes  cités. 
11  est  à  deux  kilomètres  et  demi  environ  vers  le  sud 
à'Abou  Obeidah,  où  les  musulmans  vénèrent  le  tom- 
beau du  général  de  ce  nom,  compagnon  deMahoinetjà  la 
lisière  orientale  du  Ghôr,  et  à  deux  ou  trois  cents  mètres 


seulement  des  montagnes  d'où  sort  le  Zerqâ,  sur  le 
chemin  qui  monte  de  la  vallée  aux  montagnes,  se 
dirigeant  vers  Sait,  Djebéhat  et  Amman,  voie  que  dut 
prendre  Gédéon  poursuivant  les  Madianites  et  les 
Benê-Qédem.  Ce  qui  parait  avoir  fait  hésiter  les  pales- 
tinologues,  c'est  que  le  nahr  ez-Zerqd  passe  à  un 
kilomètre  au  sud  du  tell,  alors  que  la  Bible  indique 
Phanuël  au  sud  de  la  rivière;  mais  son  cours  actuel 
est  un  cours  nouveau  que  l'eau  s'est  frayé  à  travers  les 
siècles.  L'ancien  lit  de  la  rivière,  large  de  vingt  mètres 
et  profond  de  cinq  ou  six,  se  voit  au  nord  du  tell  qui 
est  immédiatement  sur  la  rive  méridionale.  De  là  on 
aperçoit  à  trois  kilomètres  vers  l'ouest  et  non  loin  du 
Jourdain  un  autre  tell  de  même  forme.  C'est  à  celui-ci, 
semble-t-il,  qu'il  faut  placer  Socoth. 

II.  Histoire.  —  Jacob,  venant  de  Mésopotamie  et 
ayant  quitté  Mahanaïm  pour  s'avancer  vers  le  Jourdain, 
était  arrivé  sur  la  rive  du  Jaboc,  où  il  avait  établi  son 
campement.  De  là  il  envoya  en  avant  ses  serviteurs 
avec  les  présents  destinés  à  apaiser  son  frère  Ésaù 
qui  s'avançait  à  sa  rencontre.  S'étant  levé  pendant  la 
nuit,  il  fit  passer  le  gué  du  Jaboc  à  toute  sa  famille  et  à 
ses  troupeaux,  et  le  passa  après  eux.  Resté  seul  sur  le 
bord  de  la  rivière,  un  personnage  mystérieux,  que 
la  Genèse  appelle  un  homme,  "t$,  xxxn,  23,  et  le  pro- 
phète Osée,  xn,  3-4,  un  ange,  se  présenta  et  se  mit  à 
lutter  avec  lui  jusqu'au  lever  de  l'aurore.  En  quittant 
Jacob,  l'ange  lui  donna  le  nom  d'Israël,  et  Jacob  en 
souvenir  du  fait  appela  l'endroit  Phanuël,  disant  : 
«  Jai  vu  mon  Dieu  face  à  face  et  mon  àme  a  été  sauvée.  » 
Gen.,  xxxni.  Levant  les  yeux,  Jacob  vit  son  frère  Ésaù 
qui  s'avançait  vers  lui.  De  là,  il  se  retira  à  l'endroit 
qu'il  appela  Socoth  et  où  il  s'établit  avant  de  monter 
vers  Sichem.  Gen.,  xxxm.  —  Dans  le  partage  de  la  Terre 
Promise,  Phanuël  dut  échoir,  avec  Socoth  et  toute  la 
partie  orientale  de  la  vallée  du  Jourdain,  à  la  tribu  de 
Cad.  Cf.  Jos.,  xni,  27.  —  Phanuël  était  devenue  une 
ville  forte  au  temps  de  Gédéon.  Le  libérateur  d'Israël 
poursuivant  les  Madianites,  ayant  franchi  le  Jourdain, 
demanda  aux  habitants  de  Socoth  du  pain  pour  ses 
hommes  fatigués,  afin  de  pouvoir  continuer  la  pour- 
suite de  l'ennemi.  Ceux-ci  refusèrent  en  ajoutant  à 
leur  refus  le  mépris  et  l'injure.  Les  habitants  de  Phanuël 
firent  de  même.  «  Quand  je  reviendrai  victorieux, 
j'abattrai  cette  tour,  »  jura  Gédéon.  A  son  retour,  il  tint 
son  serment  et  mit  à  mort  les  principaux  habitants 
de  la  ville.  Jud.,  vm,  4-17.  —Jéroboam  Ier.  après  avoir 
resti  iiré  Sichem,  fit  de  même  pour  Phanuël.  III  Reg., 
xn,  25.  D'après  Josèphe,  Ant.  jud.,  VIII,  vm,  4,  il  s'y 
fit  construire  un  palais.  Il  n'est  plus  question  depuis 
de  Phanuël.  L.  Heidet. 

PHARA,  nom  d'un  Israélite  et  d'une  ville. 

1.  PHARA  (hébreu  :  Purdh,  «  rameau  »;  Septante  : 
•tapa),  serviteur  de  Gédéon.  Il  alla  pendant  la  nuit  avec 
son  maître  dans  le  camp  des  Madianites.  Jud.,  vu,  10-1 1 . 

2.  PHARA  (Septante  :  <I>apa8wvt),  ville  de  Judée,  for- 
tifiée par  Bacchide  pendant  la  guerre  contre  Jonathas. 
I  Mach.,  ix,  50.  Le  nom  de  cette  ville  est  douteux.  La 
Vulgate  distingue  deux  villes,  Thamnatha  et  Phara;  de 
même  Josèphe,  Ant.  jud.,  xm,  i,  3,  0ot|j.va8à  xal  $a- 
paOra  ;  et  aussi  la  version  syriaque.  Les  Septante  ne  font 
qu'une  seule  ville  de  tt|v  ©auvaOà  $apatl<dvi.  Si  la  leçon 
du  grec  était  la  véritable,  ce  qu'on  peut  contester,  nous 
n'aurions  dans  l'Écriture  aucune  autre  trace  de  l'exis- 
tence de  Phara,  mais  si  l'on  admet  la  distinction  de 
Tamnatha  et  de  Phara  ou  Pharathon,  nous  retrouvons 
le  nom  de  cette  dernière  dans  le  livre  des  Juges,  xn,  13, 
15,  et  dans  l'histoire  des  rois.  II  Reg..  XXIII,  30;  I  Par.. 
xi,  :'.l  ;  mu;  14.  Sur  cette  identification  et  sur  la  ville 
même,  voir  Pharathon,  col.  204. 


187 


PHARAÏ 


PHARAN 


188 


PHARAÏ  (hébreu  :  Pa'ùrai;  Septante  :  Oùpjcospyi, 
par  corruption  de  "faapai  !,  'Apêi),  un  des  vaillants  sol- 
dats de  David.  II  Reg.,  xxm,  35.  Dans  I  Par.,  xi,  37,  il  est 
appelé  Naaraî.  Voir  Na.vraï,  col.  "1428.  Il  était  d'Aral., 
ville  de  la  tribu  de  Juda,  de  Arbi,  dit  la  Vulgate. 
II  Reg.,  xxm,  35.  Voir  Arbi,  t.  i,  col.  886. 

PHARAM  (hébreu  :  Pir'âm;  Septante  :  «ÊcooW; 
Alexandrinus  :  d'ssxiu.),  roi  amorrhéen  de  Jérimotb. 
du  temps  de  Josué,  qui  avec  trois  autres  rois  du  sud  de 
la  Palestine  répondit  à  l'appel  d'Adonisédecroi  de  Jéru- 
salem et  marcha  avec  eux  contre  les  Gabaonites  qui 
-  étaient  soumis  aux  Israélites.  Jos.,  x,  3.  Ils  furent  tous 
battus  par  Josué  devant  Gabaon  et  s'étant  enfuis,  ils  se 
réfugièrent  dans  la  caverne  de  Macéda,  mais  ils  y 
furent  pris  et  mis  à  mort,  après  qu'on  leur  eut  mis  le 
pied  sur  le  cou  (voir  Pied),  par  ordre  du  vainqueur. 
puis  pendus  à  cinq  poteaux  et  enfin  ensevelis  dans  la 
caverne.  Jos.,  x,  10,  20-27. 

PHARAN  (hébreu  :  Pâ'rân;  Septante  :  <t>apàv), 
nom  d'un  désert  de  l'Arabie  Pétrée,  d'une  chaîne  de 
montagnes  et,  d'après  certains  commentateurs,  d'une 
localité. 

1.  PHARAN  (DÉSERT  DE)  (hébreu  :  midbdr-Pd'ran, 
Gen.,  xxi,  21  ;  Xnm.,  x,  12;  xm,  1,  4,  27  (hébreu  :  xn. 
16;  xm,  3,26);  1  Reg.,  xxv,  i  ;  Septante  :  èpr,y.'j;  «Papiv, 
Num.,  xm,  4,  27;  roO  $<xpâv,  Xum.,  x,  12;  xm,  1;  Gen., 
xxi,  21;  Septante  :  $apôcv  AïyiSiteou),  désert  de  l'Arabie 
Pétrée,  appelé  aujourd'hui  Badiet-et-Tih,  «  désert  de 
l'Égarement  »,  parce  que  les  Israélites  y  errèrent  plu- 
sieurs années.  Num.,  xiv,  32-33. 

I.  Identification.  —  Le  désert  de  Pharan  est  formé 
par  le  large  plateau  de  l'Arabie  Pétrée  qui  est  borné  à 
l'est  par  la  partie  de  la  vallée  de  l'Arabah,  s'étendant 
du  sud  de  la  mer  Morte  au  golfe  Élanitique  (voir  Ara- 
bah,  t.  i,  col.  821);  à  l'ouest  par  le  désert  de  Sur,  Gen. 
xvi,  7  (voir  Sur);  au  sud  par  le  Djebel  et-Tih,  et  au 
nord  par  les  montagnes  des  Amorrhéens,  c'est-à-dire 
par  la  frontière  méridionale  du  pays  de  Chanaan. 
Deut.,  i,  19-20,  ou  de  la  Palestine,  aux  environs  de 
Rersabée.  Voir  H.  S.  Palmer,  Sinai  from  the  fourlh 
Egyptian  dynasty  to  the  présent  day,  Londres,  1878, 
p.  19S,  205;  E.  11.  l'aimer,  The  désert  of  the  Exodus, 
1831,  t.  ii.  p.  508-510. 

II.  Description.  —  Le  Bctdiet  et-Tih  est  un  grand 
plateau  désert  qui  compte  emiron  deux  cent  quarante 
kilomètres  de  longueur,  du  sud  au  nord,  et  à  peu  pris 
autant  de  largeur.  Dans  sa  longueur  il  est  coupé  par 
l'ouadi  el-Arisch,  qui  le  divise  ainsi  en  deux  parties. 
La  partie  orientale,  plus  élevée  que  la  partie  occiden- 
tale, est  un  plateau  calcaire  d'une  surface  irrégulière, 
une  contrée  montagneuse  coupée  de  grands  et  de  petits 
ouadis  dont  beaucoup  se  dirigent  vers  le  nord.  Le  coté 
méridional  se  termine  en  un  long  escarpement,  abrupt 
vers  le  sud  et  s'abaissant  doucement  vers  le  sud-est. 

La  surface  du  plateau  est  aride,  sans  physionomie 
marquée,  el  son  aspect  n'est  relevé  que  par  quelques 
groupes  isoles  de  montagnes.  La  contrée  est  presque 
sans  eau,  à  l'exception  de  quelques  sources,  entourées 
de  tamaris  et  d'acacias  el  fréquentées  par  les  gazelles 
dans  les  grands  ouadis;  l'eau  De  s'obtient  souvent  dans 
le  lil  des  ouadis  qu'en  ci  eusant  de  petits  puits,  thémail, 
et  en  la  puisant  avec  la  main.  A  peu  près  partout,  le 
terrain  esl  1res  dur  et  recouvert  de  petits  cailloux. 
Malgré  l'aridité  du  sol,  une  grande  quantité  d'herbes 
biaiiu  -  el  de  ...m  éparses  à  la  surface,  et  four- 

nissent un  combustible  pour  le  campement.  Pendant  la 
plus  grande  partie  de  l'année,  le  terrain  semble  brûlé 
et  mort;  mais  il  arrive,  avec  la  pluie,  à  une  vie  sou- 
daine. Pans  les  ouadis,  la  végétation  est  beaucoup 
plus  abondante  que  dans  les  plaines.  Là,  il  y  a  toujours 


des  pâturages  suffisants  pour  les  chameaux;  çà  et  là 
même,  quelques  endroits  sont  susceptibles  de  culture. 
E.  H.  Palmer,  The  Désert  oflhe  Exodus,  t.  n,  p.  327- 
348. 

III.  Histoire.  —  1"  Le  nom  de  Pharan  est  mentionné 
pour  la  première  fois  dans  la  Genèse,  xiv,  6.  L'auteur 
sacré  indique  dans  son  récit  la  limite  septentrionale 
du  désert  et  l'extrême  point  sud  qu'atteignit  l'expédition 
de  Chodorlahomor  et  de  ses  alliés  contre  les  rois  de 
la  Penlapole  et  les  pays  voisins.  Après  avoir  battu  les 
Raphaïm,  les  Zuzim  et  les  Éinim,  les  confédérés  battirent 
aussi  «  les  Chorréens  ou  Horréens,  dans  les  montagnes 
de  Séir,  jusqu'à  El-Pdrân,  qui  est  près  du  désert.  »  La 
Vulgate  traduit  El-Pdrân,  par  campeslria  Pharan, 
o  plaine  de  Pharan  »,  les  Septante,  par  r,  Tsplêivôo;  to-j 
■ï>apiv,  «  le  térébinthe  de  Pharan  ».  Plusieurs  savants 
modernes  croient  que  'Êl-Pâr&n  désigne  la  ville  d'Aila 
ou  Élath.  Voir  Élath,  t.  n,  col.  1643.  Le  texte  est  trop 
peu  précis  pour  qu'on  puisse  trancher  la  question  avec 
certitude.  WEl-Pàrân,  les  envahisseurs  n'ayant  rien  à 
piller  dans  le  désert  de  Pharan.  ne  poussèrent  pas  plus 
loin  vers  le  sud;  ils  se  dirigèrent  vers  la  fontaine  de 
Masphatb  ['En  Mispât),  qui  est  le  même  lieu  que  Cadès, 
Gen.,  xiv,  7,  situé  dans  le  désert  de  Pharan.  Cadès 
est  placé  plusieurs  fois  dans  le  désert  de  Sin,  Xum., 
xx,  1;  XXVII,  14;  xxxm,36;  Deut.,  xxxn,  51,  mais  Sin 
était  le  nom  particulier  de  la  partie  septentrionale  du 
désert  de  Pharan.  Cf.  Num.,  xm,  27  (2fi).  Voir  Cadès  1, 
t.  n,  col.  21.  —  2°  Dans  le  désert  de  Pharan  habita  Is- 
maël,  fils  d'Abraham  et  de  sa  servante  Agar,  que  Sara 
fit  chasser  afin  qu'Isaac  devint  seul  héritier  des  biens 
paternels.  Gen.,  xxi,  10,  21.  —  3"  Mais  le  désert  de  Pha- 
ran doit  sa  principale  renommée  à  ce  que  les  Israélites 
y  ont  erré  pendant  trente-huit  ans  :  il  a  été  ainsi  le 
théâtre  des  événements  les  plus  remarquables  de  l'his- 
toire du  peuple  de  Dieu  pendant  cette  période.  Voici  les 
principaux.  Mais  tout  d'abord,  comme  semblent  l'exiger 
les  textes  bibliques,  prenons  le  désert  de  Pharan  dans 
un  sens  moins  restreint  et  étendons-le  jusqu'au  massif 
du  Sinaï.  —  Le  premier  épisode  saillant  est  l'incendie 
d'une  partie  du  camp  d'Israël  à  Tab'êrâh,  Num.,  xi.  1-3, 
en  punition  des  murmures  du  peuple  contre  Dieu  et 
contre  Moïse.  Voir  Embrasement,  t.  Il,  col.  17211,  et  In- 
cendie, t.  m,  col.  864.  Plusieurs  sont  d'avis  qu'on  pour- 
rait l'identifier  avec  la  station  Qibrôf-Battadvah.  Cf.  La- 
grange,  L'itinéraire  des  Israélites,  dans  la  Revue  bi- 
bliqtte,  1900,  p.  275.  —  Qibrôf-Battadvah  était  en  tout 
cas  dans  le  voisinage.  Cette  localité  fut  ainsi  appelée, 

Sépulcres  .le  concupiscence  »,  comme  traduit  la  Vul- 
gate,  à  cause  des  nombreux  Israélites  qui  y  furent 
frappés  par  la  main  de  Dieu,  à  la  suite  de  leurs  mur- 
mures contre  la  manne,  lors  du  second  envoi  des 
cailles.  Num.,  xi,  4-6,  31-34.  Voir  Sépi  LCRES  m 
cipiscence.  —  De  Qibrôf-Hattaâvah  les  Hébreux  se 
mirent  en  marche  pour  Haséroth,  autre  endroit  du 
désert  de  Pharan.  pris  dans  un  sens  plus  large.  Voir 
Haséroth,  t.  m.  col.  445.  C'est  là  que  Marie,  sœur  de 
Moïse,  de  concert  avec  Aaron.  parla  contre  son  frère. 
Frappée  de  la  lèpre,  elle  fut  séquestrée  sept  jours  hors 
du  camp,  et  le  peuple  dut  attendre  sa  guérison  pour  se 
remettre  en  voyage.  Num.,  xn.  —  Partant  d'Haséroth 
les  Israélites  gagnèrent  le  Sommet  du  plateau  d'et-Tih, 
et  allèrent  planter  leurs  tentes  dans  le  désert  de  Pha- 
ran, au  sens  strict  du  mot,  c'est-à-dire  dans  la  partie 
de  cette  solitude  qui  renfermait  Cadès  [Aïn-Qatlis).  Il 
ne  fallut  pas  moins  de  dix-neuf  ('tapes  pour  atteindre 
ce  terme  final.  Les  dix-neuf  stations,  dont  plu 
nous  restent  inconnues,  sont  énumérées  Num.,  x.wui. 
17-36.  Cf.  Lagrange,  L'itinéraire  des  Israélites,  d;  n 
Revue  biblii/ue,  191)0,  p.  277;  L.  de  Laborde,  Comment 
taire  géographique  sur  l'Exode  et  les  Nombres,  in-f°, 
Paris,  1841,  p.  120-127.  A  Cadès,  située  dans  la  partie 
septentrionale  du  désert  de  Pharan  qu'on  appelle  aussi 


189 


PHARAN 


PHARAON 


190 


quelquefois  désert  de  Sin,  Moïse  reçut  de  Dieu  l'ordre 
d'envoyer  dans  la  Terre  Promise,  les  douze  espions 
chargés  de  l'explorer.  Sur  la  route  qu'ils  suivirent, 
cf.  E.  H.  Palmer,  The  Désert  of  the  Exodm,  t.  n, 
p.  510-513,  351.  Voir  Espion,  2",  t.  Il,  col.  1966.  A  leur 
retour,  le  rapport  décourageant  qu'ils  firent  au  peuple 
provoqua  une  révolte.  Dieu  la  punit  en  condamnant 
tous  les  Israélites  âgés  de  vingt  et  un  ans  lors  de  leur 
sortie  d'Egypte,  à  mourir  dans  le  désert.  Caleb  et  Josué 
furent  seuls  exceptés  de  cette  peine.  Le  peuple,  cons- 
terné de  celte  sentence  et  passant  alors  de  l'abattement 
à  la  présomption,  voulut,  malgré  Moïse,  envahir  le  pays 
de  Chanaan  et  il  se  lit  tailler  en  pièces,  par  les  Ama- 
léciles  et  les  Chananéens  dans  les  environs  d'Horma. 
Voir  IlORMA  1.1.  ni,  col.  755.  Il  fut  refoulé  sur  Cadès. 
Num.,  xin-xiv.  Alors  commença  pour  les  enfants  d'Is- 
raël,  du  côté  de  la  mer  Rouge,  celte  vie  errante  de 
trente-huit  ans,  dans  le  désert. 

Les  derniers  incidents  du  séjour  des  Israélites  dans 
le  désert  de  Pharan,  depuis  que  la  génération  cou- 
pable y  eut  semé  ses  ossements,  eurent  encore  lieu  à 
Cadès.  Marie,  sœur  de  Moïse  y  mourut;  Moïse  donnant 
suite  aux  plaintes  amères  du  peuple  à  cause  du  manque 
d'eau,  y  frappa  le  rocher  et  en  fit  jaillir  une  source 
abondante  d'eau,  qu'on  appela  Mê-Merîbâh  ou  «  Eaux 
de  contradiction  ».  Voir  Eaix  de  contradiction,  t.  n, 
col.  1523.  De  Cadès,  Moïse  envoya  des  messagers  au 
roi  d'Édom  pour  obtenir  la  permission  de  traverser 
son  territoire,  afin  de  gagner  ainsi  les  frontières  de  la 
Terre  Promise  :  mais  Édom  refusa  formellement.  Quel- 
que temps  après,  se  rapprochant  de  la  Terre  Promise 
dans  la  direction  de  l'est,  les  enfants  d'Israël  quittèrent 
définitivement  le  désert  de  Pharan.  Num.,  xx,  1-22. 

Le  nom  de  Pharan  ne  parait  plus  que  deux  fois  dans 
l'histoire  sainte.  David,  persécuté  par  Saûl,  se  réfugia 
dans  le  désert  de  Pharan.  après  la  mort  de  Samuel, 
I  Ileg.,  xxv,  1,  d'après  le  texte  hébreu,  le  Codex 
Alexandrinus  et  la  Vulgate.  Le  Codex  Valicanus  lit 
Maon,  à  cause  de  la  suite  du  récit.  Voir  Maon,  t.  iv. 
col.  703.  —  Adad  l'Iduméen,  fuyant  devant  Joab,  tra- 
versa avec  ses  hommes  le  désert  de  Pharan  et  emmena 
avec  lui  plusieurs  habitants  du  pays  qui  l'accompa- 
gnèrent en  Egypte  où  il  se  réfugia.  III  Reg.,  m.  1S. 

A.  Molini. 

2.  PHARAN  (hébreu  :  'Èl-Pà'rdn  ;  Septante  :  «pé6iv- 
9o<  roû  $otpâv;  Vulgate  :  catnpestria  Pharan,  Gen., 
xiv,  6),  l'extrême  point  méridional  de  l'expédition  de 
Cliodorlahomor  contre  les  rois  de  la  Pentapole.  Êl- 
Pharan,  d'après  les  Septante  et  la  Vulgate,  était  dans 
le  désert;  d'après  l'hébreu,  près  du  désert.  L'appellation 
de  Pharan  lui  vient  probablement  du  désert  du  même 
nom,  dont  il  aurait  été  dans  des  temps  très  reculés  la 
dernière  limite  ori.enlale.  D'après  les  Septante,  'êl  dési- 
gne un  térébinthe  qui  était  connu  et  célèbre  dans  le 
pays.  Beaucoup  de  commentateurs  croient  que  cette 
traduction  est  exacte.  D'après  d'autres,  'êl  serait  le  nom 
antique  de  la  ville  d'Élath,  mais  ce  n'est  qu'une  con- 
jecture. Voir  plus  haut,  col.  188. 

A.  Molini. 

3.  PHARAN  (MONTAGNE  DE)  (hébreu:  har  Pd'rân; 
Septa  ite  :  opo«  $ap<xv),  montagne  du  désert  de  Pharan. 
Elle  est  nommée  dans  deux  passages  de  l'Écriture  : 
li>  ut.,  xx xiii,  2;  Hab.,  m,  3.  L'un  et  l'autre  font  allusion, 
en  langage  poétique,  aux  merveilles  opérées  par  Dieu 
à  l'époque  de  la  sortie  d'Egypte.  Dans  l'exorde  du  can- 
tique où  il  bénit  les  tribus  d'Israël.  -Moïse  s'écrie  : 

Jébovah  est  venu  du  Sinaï, 

Il  s  es)  levé  pour  eux  de  Séîr, 

11  a  resplendi  des  montagnes  de  Pharan, 

Il  esl  sorti  du  milieu  des  saintes  myriades. 

De  sa  droite  jaillissaient  sur  eux  des  jets  de  lumière. 

Habacuc,  m,  3.  supplie  Dieu  de  renouveler  l'œuvre 


de  miséricorde  et  de  justice  acccomplie  dans  le  passé  en 
se  montrant  de  nouveau  à  son  peuple  : 

Dieu  vient  de  Théman 

Et  le  Saint  de  la  montagne  de  Pharan. 

Les  données  de  ces  textes  sont  trop  vagues  pour 
nous  permettre  d'établir  avec  certitude  l'identité  des 
monts  de  Pharan.  D'où  la  divergence  d'opinion  parmi 
les  savants.  Les  uns  les  identifient  avec  le  Djebel 
Moukrah  (1050  mètres  d'élévation)  à  46  kilomètres  au 
sud  d'Aîn-Qadis,  à  80  kilomètres  à  l'ouest  d'Édom,  et  à 
200  kilomètres  au  nord  du  Sinaï.  Le  Djebel  Moukrah 
occupe  la  partie  méridionale  du  plateau  accidenté 
qu'habitent  aujourd'hui  les  Arabes  A  zdz  ime'A.W.  Schultz, 
Dos  Deuteronomium  erklârt,  1859;  Palmer,  The  Désert 
of  the  Exodus,  p.  510,  288,  344-345.  —  D'autres,  au 
contraire,  retrouvent  les  montagnes  de  Pharan  dans  la 
chaîne  qui  du  Sinaï  se  projette  vers  le  nord-est,  tout 
le  long  de  la  côte  ouest  du  golfe  Élanitique  jusqu'à 
Édom.  Driver,  Deuteronomy,  Edimbourg,  1902,  p.  391. 
—  Har-Pd'rdn  peut  signifier  aussi  «  la  région  monta- 
gneuse et  sauvage  qui  est  située  au  sud  de  la  Pales- 
tine, 'i  L.-CI.  Fillion,  Bible  commentée,  t.  vi,  p.  520. 

A.  Molini. 

I.  PHARAON  (hébreu  :  Pare'ôh;  Septante  :  $«. 
paw),  titre  des  rois  d'Egypte.  —  I.  Signification.  —  Le 
sens  du  terme  pharaon  n'est  point  douteux  dans  la  Bible  : 
c'est  le  nom  générique  des  rois  d'Egypte,  au  temps  d'Abra- 
ham, de  Moïse  et  de  l'Exode,  des  rois  et  des  prophètes. 
Gen.,  xn,  15-20  ;Exod.,  vi,  11;  III  Reg.,  ix,  16;  Is.,  xxxvi, 
6,  etc.  Pour  deux  d'entre  eux  seulement  le  nom  géné- 
rique se  rencontre  à  côté  du  nom  propre  :  «  Pharaon 
Néchao  »  et  «  Pharaon  Ephrée  »,  de  la  XXVIe  dynastie. 
Quatre  autres  sont  désignés  simplement  par  leur  nom 
propre,  dont  deux  de  la  XXIIe  dynastie,  Sésac  et  Zara  ; 
et  deux  de  la  XXVe,  Sua  et  Tharaca.  Voir  ces  noms. 
Ces  exceptions  n'infirment  en  rien  l'usage  général  et 
l'on  peut  dire  que  pour  les  auteurs  sacrés  tout  roi 
d'Egypte  s'appelait  Pharaon,  de  la  même  manière  que 
plus  tard  toute  reine  d'Ethiopie  s'appela  Candace,  que 
dans  les  temps  modernes  tout  empereur  de  Russie 
s'appelle  tsar. 

II.  Étysiologie..  —  L'origine  du  mot  pharaon  est 
égyptienne.  'O  $apa<ôv  xar'  Aï^uicrfouç  (izv.'/ix  m)u.a!- 
v£;.  Josèphe,  Anl.  jud.,  vm,  6,  2,  nous  en  avait  déjà 
prévenus.  Rosellini,  Monumenti  storici,  1832,  i,  p.  116- 
117;  Lepsius,  Die  Chronologie  der  Aegypter,  1849, 
p.  336,  et  Chabas,  Le  papyrus  magique  Harris,  1860, 
p.  1860.  p.  173,  note  2,  ont  proposé  successivement 
comme  origine  du  mot  pharaon  l'expression  égyptienne 

yè  f  J>  Va  rci>  "  'e  soleil,  le  dieu  Râ  ».  Avec  plus 
d'apparence  de  raison,  Stern,  Koptische  Grammatik, 
1880,  p.  92,  et  Zeitschrift  fur  dg.  Sprache,  t.  xxn,  1884, 

p.  52,  a  affirmé  que  Pharaon  était  identique  à  ^£rl)l> 

pa  our  àa.  «  le  grand  prince  ».  Mais  ce  titre  fréquent, 
qu'on  rencontre  en  particulier  dans  le  traité  entre 
Ramsès  II  et  les  Khétas  et  dans  une  stèle  du  temps  de 
Scheschanq  IV,  «  était  celui  que  la  chancellerie  égyp- 
tienne donnait  aux  princec  asiatiques  ou  africains,  soit 
qu'ils  reconnussent,  soit  qu'ils  ne  reconnussent  pas  la 
suzeraineté  des  Pharaons.  »  Maspero,  Sur  deux  stèles 
récemment  découvertes,  dans  Recueil  des  travaux  re- 
latifs ù  la  philologie  et  à  l'archéologie  égyptiennes  et 
assyriennes,  t.  xv,  1893,  p.  85.  De  bonne  heure  cepen- 
dant, E.  de  Rougé,  Note  sur  le  mot  Pharaon,  dans  le 
Bulletin  archéologique  de  l'Alliéneum  français,  1856, 
p.  66-68,  avait  indiqué  l'étymologie  vraie  de  ce  mot  en 


le    dérivant   de 


m 


per  fia,  «  la  grande  maison,  le 

palais  ».  Il  se  rencontrait  avec  l'oh.Oi  :ir;x:  de  la  tra- 
dition grecque  conservée  par  Horapollon,  Hierogly- 
phica,  i.  61,  .'dit.  Leemans.  1835,  p.  58.  Cf.  Maspero, 


191 


PHARAON 


192 


Histoire  ancienne  de  l'Orient  classique,  t.  I,  1895, 
p.  263,  note  4.  Pour  les  autres  appellations  royales, 
voir  Erman.  Aegypten  und  âgyptisches  Leben,  édit. 
anglaise,  1895,  p.  58,  et  Maspero,  loc.  cit.,  p.  263-264. 
Aujourd'hui  tout  le  monde  est  d'accord  que  Pharaon, 
Pare'ùh,  est  la  forme  hébraïsée  de  per  ôa,  comme  le 

|^*|» — ■Lw.4'*-— 1^11  Ier'  Bi-ir-'-u  de  Sargon  parait 
en  être  la  forme  assyrianisée.  Cf.  Oppert,  Mémoire  sui- 
tes rapports  (le  l'Egypte  et  de  l'Assyrie,  1869,  p.  15. 
L'étude  des  textes  égyptiens  de  plus  en  plus  nombreux 
nous  a  fourni  sur  l'expression  per  âa  et  sur  son  évolu- 
tion dans  la  langue  des  données  d'un  haut  intérêt  pour 
la  Bible. 

III.  Historique.  —  Ici  nous  avons  pour  guide  principal, 
sans  nous  y  astreindre  de  tous  points  et  sans  nous  dis- 
penser de  recourir  aux  sources,  un  remarquable  article 
de  Griffith  :  Chronological  value  of  Egyptian  words 
found  in  the  Bible,  dans  les  Proceedings  of  the  Society 
of  biblical  archwology,  t.  xxm.  1901,  p.  72-76.  Sous 
l'Ancien    Empire   où    les   inscriptions   officielles    sont 

les  seuls  témoins  de  la  langue,  le  mot  ~"  est  pris  au 
sens  littéral  de  «  grande  maison  »,  palais  du  souverain  : 
j-  J  L  ,  per  âa  n  souten.  Mariette,  Mastabas,  C  1, 

p.  112.  Il  entre  surtout  en  composition  avec  toute  une 
série  de  titres  :  «  Ami  unique  de  la  faveur  de  la 
grande  maison  »,  ibid.,  C  25,  p.  160;  «  connu  de  la 
grande  maison  »,  ibid.,  D  51,  p.  314;  «  médecin  de  la 
grande  maison  »,  ibid.,  D  11,  p.  203;  «  surintendant 
du  jardin  »  ou  «  domaine  de  la  grande  maison  s,  In- 
scription d'Ouni,  dans  E.  de  Bougé,  Recherches  sur 
les  monuments  qu'on  peut  attribuer  aux  six  pre- 
mières dynasties,  pi.  vu,  lig.  9.  Dans  tous  ces  titres 
nous  voyons  per  âa  s'écarter  de  son  sens  primitif, 
une  métonymie  s'ébauche,  si  bien  que  partout  nous 
pourrions  le  traduire  par  «  roi  ».  Pourtant  ce  n'en  est 
pas  encore  le  synonyme  adéquat,  ce  n'en  est  qu'une 
paraphrase  respectueuse,  quelque  ehose  comme  le 
Saint-Siège  pour  le  pape,  la  Sublime  Porle  pour  le 
sultan.  Cf.  W.  M.  Muller,  art.  Pharaoh,  dans  Cheyne, 
Encyclopedia  biblica,  t.  m,  col.  3687.  —  Au  moyen 
empire,  XII  -XV11-  dynastie,  avec  les  papyrus  nous 
sortons  des  textes  officiels  et  de  leurs  artilices.  hésor- 
mais  c'est  l'idiome  populaire,  plus  fidèle  interprète  de 
la  nature  du  langage  et  de  ses  particularités,  qui  va 
nous  fournir  des  exemples.  Là  encore  per  âa  se  mon- 
tre tantôt  avec  un  sens  franchement  littéral,  tantôt 
avec  un  sens  plus  vague  derrière  lequel  se  cache  le 
roi.  Ainsi,  à  la  XII*  dynastie,  il  est  question  de  taxes 
sur  le  bétail  pour  «  la  grande  maison  ».  Griffith,  Hie- 
ratic  Papyri  from  Kalmn  and  Gurob,  1898,  pi,  xvi.  el 
p.  30.  A  la  XIIIe  dynastie  on  parle  de  «  la  porte  de  la 
promenade  du  roi  dans  In  grande  maison  .  Mariette, 
Papyrus  égyptien»  du  musée  de  Boula/],  t.  u,  1878, 
n.  XVIII,  pi.  xxit ;  de  provisions  envoyées  à  la  grande 
maison  »,  ibid.,  pi.  xxxin.  Dans  un  document  qui  est 
pour  le  moins  de  la  fin  du  moyen  empire,  nous  lisons 
encore  :  «  la  cour  de  la  grande  maison  »,  Erman,  Die 
Marchai  des  Papyrus  W'eslcar,  189(1,  pi.  VIII  ri  p.  Kl. 
Deux  remarques  sont  à  faire  sur  les  textes  de  cette 
période  :  I"  Le  mot  per  âa  s'y  trouve  ordinairement 
au  duel,  "  ,  per(oui)  âa{oui),  «  les  deux  grandes 
maisons  »,  particularité  qui  tient  à  ce  que  l'Egypte  fut 
de  tout  temps  divisée  en  deux  terres,  la  terre  du  Sud 
et  la  terre  du  Nord.  L'union  des  deux  terres  se  Faisait 
dans  la  personne  du  roi,  qui  devenait  ainsi  le  double 
roi,  le  roi  de  la  Haute  et  le  roi  de  la  Basse-Egypte,  et, 
par  suile,  ce  qui  se  rapportait  à  lui  revêtait  un  carac- 
tère de  dualité  pour  répondre  à  sa  double  personnalité. 
Ainsi  «  la  Maison  Blanche  (magasin  royal)  i  était  «  la 
double  Maison   Blanche  »,  le   Palais  était  «  la  double 


grande  maison  ».  Cf.  Erman.  Aegypten,  loc.  cit.,  et 
Maspero,  Les  contes  populaires  de  l'ancienne  Egypte, 
3*  édit.  (1905).  p.  14,  notel. 

2°  Per  âa  à  cette  époque  est  presque  toujours  suivi 
du  souhait  royal  par  excellence  •£  j  ïï.ânk  oudjasenb, 
«  vie,  santé,  force!  »  ce  qui  est  un  signe,  dans  le  fond, 
que  la  métonymie  prend  corps  de  plus  en  plus,  que  le 
nom  du  palais  marche  vers  une  personnilicalion  et  va 
être  attribuée  au  maître  lui-même  du  palais.  En  effet, 
la  personnilicalion  est  un  fait  accompli  sous  le  nouvel  . 
empire.  —  A  la  XVIII*  dynastie,  une  lettre,  adressée 
à  Aménophis    IV   (Khounaton),    porte    en    suscription 

0  iH,   per  âa   ânk  oudja  senb  Neb  :  «  Pharaon  v.  s. 

f .  !  le  Maître!  »  tandis  qu'à  l'intérieur  la  titulature 
complète  du  roi  remplit  les  trois  premières  lignes. 
Griffith,  Hieratic  Papyri,  etc.,  pi.  xxxvm  et  p.  92.  A  la 
XIX'   dynastie,  per  âa  prend  le  déterminatif  personnel 

-  J  T  \  \  '  "  P''araon  v-  s-  f  "  et  devient  une  ex- 
pression courante  pour  désigner  le  roi,  comme  dans  le 
Conte  des  deux  frères,  écrit  au  temps  de  Ramsès  II. 
Birch,  Select  papyri,  t.  il,  1860,  pi.  x,  lig.  8,  9,  10; 
pi.  xi,  lig.  1,  3,  4,  etc.  Et,  remarque  importante,  le  mot 
«  Pharaon  »  se  présente  toujours  sans  être  accompagné 
du  nom  royal  jusqu'à  la  XXII*  dynastie.  A  cette  époque 
seulement  on  commence  à  le  faire  suivre  du  nom  du 
roi.  De  ce  fait  l'un  des  Scheschanq  (Sésac)  est  le  premier 

exemple,  dans  une  stèle  hiératique  •  J  J  T  I    ' 

IIIlIV,^lIIIV'^V•Ti[1',,  le  Pharaon  v- s-  f- 

Shashaka  v.  s.  f.  ».  Spiegelherg.  Eine  Stèle  ans  der  Oase 
Dacliel,  dans  Recueil  des  travaux,  t.  xxi,  1899,  p.  13.  A 
la  XXVe  dynastie  abondent  les  documents  légaux  et  dans 
les  dates  des  papyrus  de  l'époque  de  Taharqa  on  trouve 
per  âa  précédant  le  nom  royal.  Revillout,  Quelques  textes 
démotiques  archaïques,  papyrus  3228  du  Louvre.  A 
partir  de  ce  moment  jusqu'à  la  fin  de  la  période  païenne, 
tous  les  rois  en  démotiques  sont  intitulés  «  Pharaon  », 

L  -I ,   L  J  L  J,  ou  avec  le  cartouche  (    '--'  1.    —    Chez 

les  Coptes,  l'ancien  per  âa  perdit  le  aï»  et  devint  nepo, 
Griffith,  Stories  of  the  high  pries/  of  Memphis,  1900, 
p.  73,  note  7;  puis  le  n  initial,  considéré  à  tort  comme 
l'article,  disparut  à  son  tour  et  il  resta  epo,  ppo,  OTpio. 
Steindorff,  Zeitschrift  fur  ây.  S/iraclie,  t.  xxvn,  1889, 
p.  107;  Sethe,  Dos  âgyptische  Verhum,  I.  i,  1899,  p.  22. 
IV.  Le  mot  pha.ra.on  et  la  critique  i>e  la  Bible.  — 
On  a  voulu  tirer  contre  l'authenticité  du  Pentateuque 
une  objecliori^de  la  manière  dont  y  ligure  le  mot  Pha- 
raon. Les  uns  ont  dit  :  a  I  ie  la  part  d'un  homme  (Moïse) 
élevé  à  la  cour  du  roi,  nous  aurions  pu  nous  attendre... 
à  des  renseignements  plus  précis  sur  les  noms  propres... 
Il  y  en  a  si  peu  que,  dans  toute  cette  histoire  (l'Exode  . 
il  est  toujours  question  du  roi  Pharaon,  qu'il  s'agisse 
de  celui  dont  la  tille  recueillit  l'enfant  dans  le  fleuve, 
ou  de  celui  devant  lequel  le  vieillard  octogénaire  se 
présente  pour  demander  la  liberté  de  son  peuple.  Le 
rédacteur  n'éprouve  pas  le  moindre  besoin  de  distinguer 
par  leurs  noms  îles  personnages  si  importants.  La  no- 
tice qu'il  survint  un  autre  roi  qui  ne  savait  rien  de  Jo- 
seph... n'est  pas  précisément  l'indice  d'un  témoignage 
immédiat.  »  lieiiss,  L' histoire  sainte  et  la  loi,  t.  Il, 
1879,  p.  80-81.  Sans  nous  arrêter  à  relever  l'expression 
inexacte  «  roi  Pharaon  »,  cf.  Vigouroux,  Les  Livres 
Saints  et  la  critique  rationaliste,  t.  IV,  1902,  '>•  édit., 
p.  375-376,  il  nous  suffira  de  remarquer,  qu'en  ne  dési- 
gnant le  roi  que  par  son  titre  générique  de  Pharaon 
Moïse  est  en  parfait  accord  avec  les  usages  d'Egypte  à 
son  époque.  Il  nomme  le  roi  comme  on  le  nommait  du 


193 


PHARAON    D'ABRAHAM 


194 


temps  de  Ramsès  II,  comme  faisait,  par  exemple,  l'au- 
teur du  Conte  des  deux  Frères.  On  ne  peut  donc  lui 
demander  une  meilleure  mise  au  point.  «  Ce  fut  surtout 
au  temps  des  Ramsès,  quand  le  peuple  d'Israël  était 
prisonnier  en  Egypte,  que  ces  mots  [per  âa)  servirent  à 
dénommer  le  roi  du  Delta  et  de  la  Thébaïde. ..  Lorsque 
nous  donnons  aujourd'hui  à  Ramsès  le  nom  de  Pha- 
raon, nous  employons  l'expression  même  dont  se  ser- 
vaient ses  contemporains  pour  le  désigner.  »  V.  Loret, 
L'Egypte  a><  temps  des  Pharaons,  Î889.  p.  18.  Par 
cetle  simple  observation  nous  voyons  aussi  le  cas  qu'il 
faut  faire  de  cette  autre  affirmation,  au  sujet  du  séjour 
d'Abraham  en  Egypte,  Gen.,  xn.  15  sq.  :  «  Le  récit 
contient  une  pâle  représentation  des  choses  d'Egypte; 
il  ne  connait  ni  le  nom  du  Pharaon  ni  le  nom  de  sa 
capitale.  »  Gunkel,  Genesis,  1901,  p.  156.  Sans  doute, 
au  temps  d'Abraham,  per  âa  n'était  pas  encore  devenu 
l'expression  usuelle  pour  désigner  le  roi.  Mais  rappe- 
lons-nous que  Moïse  vit,  écrit  et  meurt  en  pleine 
époque  ramesside.  Voudrait-on  qu'il  eût  fait  de  l'ar- 
chaïsme ou  du  style  de  basse  époque!  El  précisément, 
ce  qui  fait  que  le  Pentateuque,  en  ce  qui  concerne  le 
mot  Pharaon  —  seul  point  en  question  ici  —  est  pour 
nous  l'œuvre  de  Moïse,  c'est  que  le  mot  Pharaon  reste 
indéterminé  sous  sa  plume.  Le  préciser  par  l'adjonc- 
tion d'un  prénom  serait  nous  rejeter  au  moins  à  la 
XX11  dynastie,  c'est-à-dire  après  l'an  1000.  C'est  juste- 
ment pour  placer  la  composition  du  Pentateuque  vers 
cette  date  que  d'autres  ont  émis  des  conjectures  d'ap- 
parence plus  scientifique.  Ils  veulent  hien  que  le  titre 
i  Pharaon  >  soit  employé  familièrement  dans  la  litté- 
rature populaire  du  Nouvel-Empire,  liais  c'est-  plus 
tard  seulement,  affirment-ils,  qu'il  devient  le  mot  usuel 
pour  «  roi  »  et  se  substitua  aux  anciennes  expressions 
comme  lionef,«  sa  majesté  »,  et  souten.  Par  conséquent 
les  Hébreux  ne  purent  le  recevoir  qu'après  l'an  1000 
avant  J.-C.  W.  M.  Mflller,  art.  Pharaoh,  lue.  cit.  M.  Vf. 
H.  Mûller  oublie  que  l'évolution  du  mot  lier  âa  est 
complète  sous  la  XVIII8  dynastie,  témoin  l'adresse  de 
la  lettre  à  Ainénophis  IV.  Pharaon  est  donc  dès  lors  le 
mot  usuel,  le  terme  courant  et  à  la  portée  de  tous  qu'un 
historien  emploiera  de  préférence,  lit  pourquoi  les  Hé- 
breux vivant  en  Egypte  et  mêlés  aux  Égyptiens,  pour- 
quoi Moïse  surtout,  élevé  dans  le  palais  royal  juraient- 
ils  ignoré  ce  fait  et  parlé  autrement  que  les  gens  qui 
les  entouraient?  Ce  raisonnement  garde  toute  sa  valeur 
même  dans  l'hypothèse  peu  recevable  de  ceux  qui 
veulent  faire  coïncider  l'Exode  avec  les  temps  troublés 
d'Aménophis  IV.  \V.  M.  Millier,  loc.  cit.,  prétend  tirer 
une  confirmation  de  son  dire  dans  le  fait  qu'en  Asie.au 
Xiv"  siècle,  le  mot  Pharaon  est  absent  des  Lettres  cunéi- 
formes de  Tell  Amarna  adressées  à  Aménophis  III  et  à 
Aménophis  IV  de  la  XVIIIe  dynastie.  Mais  on  ne  peut 
établir  de  parité  entre  les  auteurs  de  ces  lettres,  des 
roitelets  syriens,  vivant  en  dehors  de  la  vie  égyptienne, 
et  les  Hébreux  habitant  la  terre  même  des  Pharaons, 
et  Moïse  surtout  g  instruit  dans  toute  la  sagesse  des 
Egyptiens  »,  Act.,  VII,  22,  et  auquel  nous  ramène  à 
chaque  instant,  comme  à  l'auteur  du  Pentateuque,  ce 
que  nous  révèle  l'égyptologie.  Cf.  Heyes,  Bibel  und 
Aegyp  en,  1904,  p.  24.  C.  Lacier. 

2.  PHARAON  D'ABRAHAM.  —  1"  C'est  le  premier  que 
mentionne  la  Bible.  Gen.,  xn,  15.  Avec  Ebers,  Aegijpten 
und  die  Bûcher  Mose's,  t.  i,  p.  256-258,  et  d'autres,  ce 
Pharaon  doit-il  èlre  cherché  parmi  les  Aménémhatou  les 
Osortésen  de  la  XIIe  dynastie,  c'est-à-dire  aux  environs 
de  l'an  2000?  Il  n'y  aurait  pas  d'hésitation  possible  si 
nous  devions  admettre  comme  certaine  la  récente  chro- 
nologie basée  par  Ed.  Meyer,.rleo;;/p(isc/fe  Chronologie, 
dans  les  Abhandlungen  der  kôniglichen  preussischen 
Akademie,  100'k  sur  un  leverde  Sothis  découvert  dans 
un  papyrus  de  Kabun  par  Borchardt.  Zeitschrifl  fur 

DICT.   DE  LA   BIBLE. 


ag.  Sprache,  t.  xxxvtt,  1899,  p.  99-101.  .1.  H.  Breasted, 
A  history  of  Egypt,  in-8°,  New- York,  1905,  et  Ancienl 
Records  of  Egypt,  t.  i,  1906,  p.  25-39,  accepte  de  con- 
liance  cette  chronologie.  Mais  ainsi  que  le  remarque 
Maspero,  Revue  critique,  nouvelle  série,  t.  LXII,  1906, 
p.  112,  «  lors  même  qu'on  admettrait  l'authenticité  des 
calculs  élevés  sur  cette  observation,  la  réduction  systé- 
matique du  nombre  de  siècles  assignés  aux  dynasties 
antérieures  à  la  XVIIIe  n'est  qu'une  affaire  de  senti- 
ment. M.  Borchardt  ayant  à  choisir  pour  l'époque  delà 
XIIe  dynastie  entre  deux  périodes  sotbiaques  dont  l'une 
le  reportait  au  début  du  troisième  millénaire  avant 
J.-C,  et  l'autre  au  début  du  quatrième,  a  choisi  la 
première  a  priori  parce  que  l'autre  ne  lui  convenait 
pas,  et  Ed.  Mayer  s'est  rangé  à  cette  façon  de  penser 
sur  l'autorité  de  Borchardt  :  en  bonne  critique  ils  au- 
raient dû  se  borner  à  poser  l'alternative  et  à  indiquer 
leur  opinion  personnelle  sans  l'ériger  en  axiome  ne 
varietur.  »  Voir  dans  Arehseological  Report,  1904-1905, 
de  YEgypt  Exploration  Fund,  p.  13-44,  un  résumé  de 
la  question  et  des  discussions  qu'elle  a  soulevées 
entre  Allemands.  Faut-il  maintenant  avec  d'autres 
relarder  l'arrivée  d'Abraham  en  Egypte?  t.  es)  en  parti- 
culier l'opinion  de  Sayce,  The  Egypt  of  the  Hebrews 
and  Herodotos,  3e  édit,  1902,  p.  16  sq.  Il  faut  l'en 
croire  si  l'on  accepte  les  calculs  de  Flinders  Pétrie, 
Researches  in  Sinai,  Londres,  1906,  c.  xn,  p.  103- 
185.  Celui  ci  reprend  résolument  la  période  sothiaque 
abandonnée  par  Borchardt  et  Ed.  Meyer,  tâche  de 
l'étayer  à  l'aide  de  dates  trouvées  au  Sinai,  et  assigne 
comme  origine  à  la  XIIe  dynastie  l'an  3459.  Reste  alors 
l'espace  suffisant  pour  caser  entre  la  XIIe  dynastie  (3459- 
3246)  et  la  XVIIIe,  qu'on  admet  de  part  et  d'autre  com- 
mencer vers  1580,  pour  caser,  dis-je,  la  longue  XIIIe  dy- 
nastie et  les  suivantes  qui  comprennent  la  période  des 
Ilyksos.  Reste  aussi  pour  les  dynasties  XI1I-XVII,  si 
peu  connues,  «  assez  de  jeu  dans  la  chronologie  relative 
de  l'Egypte  pour  que,  dit  Maspero,  ioc.  cit.,  nous  y 
puissions  ranger  les  faits  nouveaux  sans  être  obligés  à 
démolir  et  à  reconstruire  un  système  rigoureux  à 
chaque  découverte  d'un  règne  inconnu.  »  Etant  données 
ces  incertitudes  de  la  chronologie  générale,  qui 
s'aggravent  encore  dans  les  détails,  il  n'est  donc  pas 
possible  actuellement  d'identi lier  le  Pharaon  d'Abraham 
ni  même  la  dynastie  contemporaine.  Mais  ce  Pharaon 
n'en  rappelle  pas  moins  la  vallée  du  Nil.  Quoi  qu'on  en 
ait  dit,  il  agit  et  parle  en  roi  égyptien.  L'exactitude  de 
l'écrivain  sacré  et  la  confiance  qu'il  mérite  ressortent 
pleinement  du  récit. 

2°  Le  pharaon,  dit  la  Genèse,  xu.  16,  lit  bon  accueil  à 
Abraham.  Ce  n'était  pas  la  première  fois  que  des  Sémites 
trouvaient  faveur  en  Egypte.  Le  tombeau  de  Khnoum- 
hotep  à  Beni-Hassan  nous  fournit  un  tableau  d'immigrants 
asiatiques  qui  peut  servir  d'illustration  à  la  descente 
d'Abraham,  des  enfants  de  Jacob  et  de  Jacob  lui-même 
en  Egypte.  Voir  t.  n,  la  planche  entre  les  colonnes 
1067-1070.  La  caravane  compte,  hommes,  femmes,  en- 
fants, trente-sept  personnes.  Quand  même  l'inscription 
ne  le  dirait  pas,  on  ne  peut  se  tromper  sur  la  race  à 
leurs  traits,  à  leurs  vêtements  multicolores,  à  leurs 
armes.  Ils  ont  le  nez  fortement  aquilin,  la  barbe  des 
hommes  est  noire  et  pointue,  leurs  armes  sont  l'arc,  la 
javeline,  la  hache,  le  casse-tête  et  le  boumerang.  Si  la 
plupart  des  hommes  n'ont  pour  vêtement  que  le  pagne 
bridant  sur  la  hanche,  le  chef  porte  un  riche  manteau, 
les  femmes,  de  longues  robes  de  bon  goût  et  de  belle 
élégance,  le  tout  rayé,  chevronné,  quadrillé  de  dessins 
bleus  sur  fond  rouge  ou  rouges  sur  fond  bleu,  semé  de 
disques  blancs  centrés  de  rouge.  Des  ânes  portent  le 
mobilier.  Un  autre  âne  est  muni  d'une  sorte  de  selle  a 
bords  relevés  où  sont  assujettis  deux  enfants.  C'est  le 
grand  veneur  Néferhotep  qui  a  rencontré  ces  Amou,  le 
scribe  royal  Khéti  lésa  aussitôt  inscrits  et,  en  les  pré- 

V.  -  7 


195 


PHARAON    DE    JOSEPH 


196 


sentant  à  son  maître,  il  lui  transmet  la  requête  du  chef 
de  la  tribu,  Abescha.  Celui-ci  demande  à  s'établir  sur  les 
terres  de  Pharaon.  En  signe  de  soumission,  il  offre  les 
produits  du  désert,  du  kohl.  un  bouquetin  et  une 
gazelle.  Knoumhotep  le  reçoit,  lui  et  les  siens,  avec 
!i  ci  rémonia]  usité  pour  les  personnages  de  distinc- 
tion. Ceci  se  passait  sous  la  XIIe  dynastie,  en  l'an  VI 
d'Osorlésen  11.  avant  la  venue  d'Abraham  en  Egypte. 
Cf.  Newberry,  Beni-Hasan,  part.  i.  pi.  xxxi.  xxxvm  et 
p.  69  (Mémoire  i  de  VArchteological  Survey 

3»  Abraham  avait  une  raison  de  plus  d'être  bien 
traité  :  il  .tait  accompagné  de  Sara. 'remarquable  par  sa 
beauté,  et  qu'il  faisait  passer  pour  sa  sœur.  Les  sujets 
du  Pharaon  en  préviennent  aussitôt  leur  maître.  Et 
Sara  enlevée  est  placée  dans  le  harem  royal.  EnÉgypte, 
comme  dans  tout  l'Orient,  le  roi.  outre  l'épouse  prin- 
cipale, avait  un  harem  où  il  s'arrogeait  le  droit  (l'in- 
troduire toute  femme  libre  a  sa  convenance.  Un  grand 
officier  en  était  le  gouverneur.  Il  avait  sous  lui  un 
scribe  et  divers  fonctionnaires.  Cl".  Erman,  Aegypten 
und  âgyplisches  Leben,  ''lit.  anglaise,  p.  74.  Tout  ce 
monde  était  attentif  à  prévenir  les  désirs  et  les  passions 
de  leur  seigneur,  comme  les  courtisans  du 
deua  Frères.  Une  boucle  de  cheveux  parfumés  a  été 
apportée  par  le  Nil.  Les  scribes  et  les  sorciers  s'écrièrent 
aussitôt  :  «  Cette  boucle  de  cheveux  appartient  à  une 
fille  de  Phra-Armachis  qui  a  en  elle  l'essence  de  tous  les 
dieux!  »  Des  messagers  à  la  hâte  se  mettent  en  cam- 
pagne et  l'on  amené  la  personne  que  le  Pharaon  salue 
grande  favorite.  Maspero,  Les  coules  populaires  de 
ne  Egypte,  3«  ('dit.  (1905),  p.  13-1  4.  Mais  les 
préférences  des  Égyptiens  allèrent  de  tout  temps  aux 
filles  de  l'Asie.  Dans  l'Ostracon  2262  du  Louvre  nous 
voyons  le  prince  Samentou,  fils  de  Ramsès  II.  accepter 
dans  son  harem  une  Bile  sémite  de  basse  naissance, 
t  suivant  une  ancienne  coutume  pratiquée  par  les  Pha- 
raons comme  par  les  sujets.  Spiegelberg,  Ostraca 
hiératiques  i  re,  dans  Recueil  des  travaux, 
t.  xvi,  1894,  p.  Si  65.  Les  roitelets  syriens  pour  se  faire 
bien  venir  du  Pharj sous  la  XVIII»  dynastie,  ne  man- 
quent pas  de  le  pourvoir  de  le tes  esclaves  el  se  pré 

valent  du  pi  isent.  C'est  ainsi  qu'Abkhiba  de  Ji  rusalem 
rappelle  qu'il  a  envoyé  au  Pharaon  vingt  et  une  esclaves. 
Winckler,  Die  Thontafeln  von  Tell-elrAmarna,  n.  181, 
[i  309.  Aménophis  II  admit  dans  son  harem  au  moins 
trois  princesses  sémite-,  dent  rime,  comme  suite, 
n'amena  pas  moins  de  dois  cent  dix-sepl  com] 
choisies.  Pétrie,  .1  history  of  Egypt,  t.  il,  3'  édit., 
1889,  p.  181-182.  Ces  quelques  exemples  que  l'on  pour- 
i  ni  multiplier,  suffisent  à  prouver  que  l'enlèvement  de 
Sara  était  un  geste  vraimenl  pharaonique.  On  sail  ce 
qui  en  résulta.  -  1  t  Pharaon  appela  Abraham  el  lui 
dii  :  Qu'est-ce  que  tu  as  l'ait'.'  Pourquoi  ne  m'as-tu  pas 
oir  que  c'étail  la  femme  1  Pour  quel  motif  m'as- 
tu  dit  qu'elle   était   la  sœur,  de  telle  sorte  qu 

pour  femmef  »  Gen.,  xn,  18-19.  Il  semble  que  les 
grandes  plaies  dent  Dieu  frappa  le  Pharaon  à  cause  de 
Sara  aient  réveilli  dans  so mr  la  crainte  de  l'adul- 
tère. Tout  (P  l'uni  avâil  en  effel  à  ré] Ire  à  ses  juges 

sur  cei  article  el  la  porte  du  séjour  des  dieux  lui  i  tail 
fermée  s'il  ue  pouvait  due  ;     Je  n'ai  pas  eu  con 
avec  une  femme  mariée.     Pierret,  Le  I 
des  anciens  Égyptiens,  c.  i  \xv.  p.  374. 

i-  Sara  fui  donc  rendue  à   Vbraham  et  celui-ci  avec 
tous  ses  bien-  ei  les  |u'. isents  qu'il  avail  e    u    remonta 

vers  la  région  méridionale...   I  t  il  était  très  t  ii 
possédait  beaucoup  d  or  el  d  argent.  »  Gen.,  xm.  I.  2. 
i  ei    or  ne  lui   renail   pas  delà  terre  de  Chanaan  qui 

n'en  produisait  pas.  ni;u-  de  l.i  munificence  du  PI 

De  tout  temps  l'or  abonda  en  Egypte  apporté  parles 
Nomades,  et  le  Pharaon  en  était  l'unique  dispensateur. 
Il  \  abonda  surtout  à  partir  de  la  XII"  dynastie  lorsque 
les  limites  de  l'empire  lurent  reportées  par  la  conquête 


à  la  seconde  cataracte,  jusqu'à  Semnéh,  et  que  les 
districts  de  l'or  furent  ouverts  aux  expéditions  annuelles. 
Nous  apprenons  par  la  tombe  d'Améni  que  cet  officier 
dirigea  deux  expéditions  aux  mines  de  l'Etbaye,  suivi  la 
première  fois  d'une  escorte  de  quatre  cents,  la  seconde 
fois  de  six  cents  hommes.  A  chaque  fois  il  ramena  au  " 
Pharaon  Osorlésen  l"  tout  l'or  qui  lui  avait  été 
demandée  Newberry,  loc.  cit.,  pi.  vin,  p.  21-26.  Au 
retour  d'une  de  ses  campagnes  en  Nubie,  Osortésen 
III  délégua  à  Abydos  son  trésorier  Ichernefret  pour 
orner  le  sanctuaire  d  Osiris,  ses  barques  et  tout  le  mobi- 
lier avec  l'or  rapporté.  Stèle  1204  de  Berlin,  publiée 
par  11.  Schaefer,  dan-  les  Untersuchungen  :«<■  Ge~ 
schichte  und  Alterlhumskunde  Aegyptens  de  Sethe, 
t.  iv,  fascic.  2,  1905.  Les  prodigieux  trésors  découverts 
à  Dahchour  par  M.  de  Morgan  confirment  cette  abon- 
dance de  l'or  sous  la  Xlb  dynastie  Fouilles  à  Dahchour, 

1894,  pi.  xv-\.\v  et  p.  60-72;  Fouilles  à  Dahchour,  1894- 

1895,  pi.  v-siii  et  p.  51  53,  58  65,  67-68.  Sous  la  XVIII' 
dynastie  celte  richesse  excitera  Vauri  sacra  fanu*  des 
roitelets  syriens.  11  leur  faut  de  l'or,  de  l'or  pur,  ils  y 
reviennent  sans  cesse  dans  leur  correspondance.  Que 
mon  frère,  écrit  l'un  d'eux  à  Aménophis  III.  m'envoie 
de  l'or  en  grande  quantité,  sans  mesure;  qu'il  m'en 
envoie  plus  qu'il  n'a  fait  à  mon  père.  Cardans  la  tene 
de  mon  frère  l'or  est  aussi  commun  que  la  poussière.  » 
Winckler,  loc.  cit.,  n.  25. 

Quant  à  l'objection  tirée  de  la  présence  du  chameau 
parmi  les  dons  du  Pharaon  à  Abraham,  voir  CHAMEAU, 
t.  n,  col.  524-525.  Ajoutons  que  les  études  et  les  fouilles 
récentes  confirment  sur  ce  point  les  données  de  la  Bible. 
Le  musée  de  Berlin  possède  un  vase  en  terre  cuite  re- 
utant  un  chameau  accroupi,  chargé  de  quatre 
ne  e(  m,, nt,'.  par  si  n  conducteur.  Von  Bissing,  Zur 
Geschichte  des  Kamei  \s,  dans  la   Zeilschrift  /'■ 

Sprache,  t.  xxxvm,  1900,  p.  68-69,  esti |ue  eel  objel 

re nte  aux  dernier-  Ramessides,  1100-1000  avant  J.-C. 

rs  Pétrie,  dans  ses  fouilles  de  !!K)7,  '.'*':< 
/,'i/e/i,  p.  23,  ,i  trouvé  aux  environs  d'Assiout,  dans  une 
tombe  de  la  XIX'  dynastie,  la  représenlation  bien  au- 
thentique d'un  chameau.  Le  même  FHnders  Pétrie, 
Ibydos,  part,  n,  1903,  pi.  x.  u.  224  et  |>.  27.  19  (Mé- 
moire xxiv  de  V Egypt  Exploration  Fund)  avail  déjà 
trouvé  en  Abydos  une  tète  de  chameau  en  terre  cuite, 
contemporaine  des  ol  i<  i-  de  la  P   dyn 

C.  Lagier. 

3.  PHARAON  DE  JOSEPH.  -  1  lai  admettant,  connue 
on  le  l'ail  généralement  aujourd'hui,  que  l'Exode  eut 
lieu  dans  les  premières  années  de  Menephtah  qui  com- 
mença de  régner  vers  1225,  et  en  ajoutant  à  ce  chiffre 
les  i:m  m-  que  le-  Hébreux  passèrent  en  Egypte, 
l  sod.,  su,  M),  nous  obtenons  la  date  approximative  de 
1655,  époque  de  leur  arrivé,-  dans  la  terre  de  Gessen, 
époque  aussi  d  -  Hyksos  égy|  tianisés,  mais  à  leur  dé- 
clin. Cela  e erde  avec  la  tradition.  Jean  d'Antioche, 

fragm.,  fragm.  :n>.  édit.  Didot,  t.  îv, 
p  555.  i  h',  parmi  les  derniers  rois  Hyksos,  XVIe  ou 
Wll  dynastie,  se  trouvenl  les  Vpapi,  et  c'esl  précisé- 
ment sous  un  Apapi,  d'après  la  tradition  encore,  que 
h  devint  vizir  d'Egypte  :  ~/-:-;o-j->:  t..-.:...  :™  teràpTip 
stei  trjç  ,^™:li;  DCJtoî  A -<•'-■.:)  rôv  'Itoar.i  èXSeïv  :':: 
\ev-T.,,  SoÛXov.  OÙTOJ  y.-x-.il-.r^l  tôv  'IcoOïjÇ  xÛplOV 
\\-'.--.vj  xai  Itâarfi  -.'c,:  ^i:);:i:  ï'-toC  t»  iÇ'  ï-.i:  Tf,; 
àpKîjC  aùtoO.   Sym  I  ■■,.■.       édit.  Dindorf, 

1829,  p.  204.  L'un  des  Apapi,  peut-être  id 

donc  le  Pharaon  d<  Joseph.  Voir  Joseph,  t.  m.  col.  1657, 
Contre  ce  calcul  on  a  invoqué  la  stèle  de  Menephtah; 
Voir  Menephtah,  t.  n.  col.  956-957.  En  l'an  V  de  M* 

liephtah,     disent    quelques  un-,    le-     Hébreux     -,  et     en 

Palestii u  Us  -e  trouvenl  en  conllit  avec  le-  Égyp- 
tiens, ce  qui  permet  à  Menephtah  d'affirmer  qu'  i  Israël 
est  déraciné':  qu'il  n'y  en  a  plu-  de  graine  ou  de 
postérité  ».  W.  Mûlli  t  I    3688;  Steindorff, 


197 


PHARAON    DE    JOSEPH 


198 


Zeitschrift  fiirdie  Alttestamentliehe  Wissenschaft,t.  xv. 
1896,  p.  330,  etc.  A  cela  on  a  fait  deux  réponses  princi- 
pales :  —  a)  Les  troupes  de  Ménephlali,  si  tant  est  qu'elles 
poussèrent  jusqu'en  Palestine,  purent  y  trouver  des 
Israélites,  mais  non  ceux  de  l'Exode.  Jacob  en  effel  des- 
cendit en  Egypte  seulement  avec  ses  fils  et  leur  famille, 
au  nombre  de  soixante-dix  personnes,  Gen.,  xi.vi.  -27; 
mais  une  partie  de  la  tribu,  de  cette  tribu  qui  avait 
déjà  fourni  à  Abraham  trois  cent  dix-huit  hommes  pour 
combattre  Cbodorlahomor,  Gen.,  xiv.  11,  resta  au  pays. 
D'autres  Israélites  durent  revenir  dans  l'intervalle.  Tout 
ce  monde  campait  dans  la  région  d'Hébron.  autour  du 
tombeau  d'Abraham  où  Joseph  avait  ramené  le  corps  de 
son  père.  Gen.,  i.,  13.  Pendant  que  les  Israélites  de 
Gessen  poursuivaient  leur  marche  au  désert,  c'est  dans 
ce  lieu  de  ralliement  des  groupes  épars  que  Menephtah 
put  écraser  les  Hébreux  restés  dans  le  pays  ou  revenus 
pte  soit  après  la  lin  de  la  disette,  soit  lors  du 
voyage  de  Joseph,  soit  à  d'autres  époques.  Cf.  Daressy, 
Bévue  archéologique,  3"  série.  1898,  t.  xxxm.  p.  262- 
266.  —  6)  «  Il  me  semble,  dit  Edouard  Xaville,  que  nous 
avons  là  une  allusion  très  courte  au  fait  que  l'Exode  a 
eu  lieu,  »  que  nous  avons  aussi  «  la  version  égyptienne, 
ou  plutôt   le  nom  que  les  Égyptiens    donnaient  à  cet 


36.  —  Anneau  (sceau  portant  le  nom  d'Apapi  I",  le  9  bon-roi 
Aaouserra,  donnant  la  vie  d.  Le  chaton,  en  stéatile  vernissée 
de  vert,  est  taillé  en  forme  de  scarabée  avec  une  tête  d'homme, 
et  sertie  dans  une  légère  monture  d'or.  Sur  la  base  du  chaton 
en  intaille  et  dans  un  cartouche  le  nom  du  roi.  In 
lii  d'or  fixe  le  chaton  à  la  monture.  D'après  Newbi  rr 
-pice. 

événement  :  l'anéantissement  des  Israélites.  le  ne  vois 
rien  là  qui  aille  à  rencontre  de  l'ancienne  idée  qui 
plaçait  l'Exode  au  commencemeni  du  règne  de  Me- 
nephtah, c'est-à-dire  peu  avant  le  moment  où  la  stèle  a 
Israélites  étaient  dans  le  désert  mar- 
chant vers  la  Terre  Promise...  Pour  les  Égyptiens  ils 
n'existaient  plus,  ils  avaient  disparu  dans  le  déserl  el 
ils  n  avaient  laissé  den  ière  eux  aucune  postérité-.  Cette 
explication  me  semble  en  harmonie  avec  le  langage 
habituel  des  Pharaons.  Dans  la  bouche  du  roi  d'Egypte 
ou  de  ses  écrivains  officiels,  la  sortie  des  Israélites  ne 
pouvait  être  que  leur  destruction».  Lesdernières  lignes 
de  la  stèle  mentionnant  les  Israélites,  dans  1; 
des  travaux,  t.  x\,  1898,   p.  37.   Cf.   fi 

t.  ix,  1900,  p.  111.  Le  Pharaon  de  Joseph  était 
donc  probablement  Apapi   II   (lig.  36).  Qu'il  soit  égyp- 

.    il    le    montre    par    sa    manière    de    faire. ""  En 

•_  Ce  pharaon  célèbre  le  jour  de  sa  naissance.  Gen.,  xl, 
20.  Les  théogamies  des  temples,  expression  d'une  tra- 
dition antique  et  commune  à  tous  les  Pharaons,  nous 
disent  de  reste  qu'un  pareil  jour  devait  être  tout  à  la 
joie.  Ne  rappelait-il  pas  le  jour  où  les  déesses  accou- 
cheuses avaient  reçu  dans  leurs  bras  le  pharaon 
l'oauf  ».  le  dit  n  nouveau-né,  et  l'avaient  présenté  à  son 
père  selon  le  sang,  Ra  ou  Arnon,  tout  le  ciel  étant 
dans  la  jubilation  ?  Cf.  A.  Moret,  hu  caractère  religieux 
de  la  royauté  pharaonique,  1902,  p.  48-55,  66-67; 
Prisse  d'Avennes.  Monuments  de  l'Egypte,  pi.  xxi, 
lig.  3-4.  Les  Ptolémées,   gardiens  des  croyances  et  des 


coutumes  pharaoniques,  fêleront  de  même  «  le  jour  de 
la  naissance  du  dieu  bon  »  Épiphane,  Pierre  de  Ro- 
sette, texte  hiérogl.  lig.  10,  «  la  fête  de  la  nouvelle 
année  —  za  yevéOXta  —  de  Sa  Majesté,  »  le  dieu  Éver- 
gète  I".  Décret  de  Canope,  lig.  3.  Et  ces  jours  solennels 
sont  une  occasion  de  faveurs  pour  leurs  sujets,  Pierre 
de  Rosette,  lig.  47.  comme  pour  l'échanson  du  Pha- 
raon de  Joseph,  Gen  ,  xl,  21,  comme  pour  les  prison- 
niers à  l'avènement  de  Ramsès  IV,  Maspero,  Notes  sur 
quelques  points  de  grammaire  et  d'histoire,  dans 
Recueil  des  travaux,  t.  n.  1880,  p.  115-117,  ou  ceux  de 
la  Pierre  de  Rosette,  lig.  1  i.  Ce  dernier  passage  semble 


>,  v 


37.  —  Amënothès,  architecte  sous  Aménophis  III,  célèbre  surtout 
dans  la  science  des  formules  magiques  et  dqf  ce  chef  devenu 
plus  tard  dieu  ptolémaïque.  Il  était  à  ce  double  titre  conseiller 
de  son  maître.  —  Musée  du  Caire.  —  Découvert  à  Karnal  par 
M.  Legrain  en  1901. 

exclure  des  faveurs  certains  coupables.  Le  grand  pane- 
tier  devait  avoir  à  se  reprocher  un  grand  crime,  car  le 
Pharaon  le  condamne  à  la  décapitation,  comme  Horem- 
heb  plus  tard,  à  côté  d'autres  criminels  châtiés  moins 
sévèrement,  condamnera  au  même  supplice  le  receveur 
qui  avait  enlevé  à  un  homme  de  peine  la  barque  et  le 
chargement  qu'il  convoyait  pour  le  service  d'un  maître. 
Revue  égyptologique,  t.  vin,  1898,  p.  120-121.  Puis, 
en  exemple,  on  suspendit  à  un  gibet  le  cadavre  du 
panelier,  Gen.,  xl,  19,  22,  comme  fera  Aménophis  II 
pour  sept  chefs  syriens  révoltés,  tués  de  sa  main, 
et  suspendus  l'un  aux  murs  de  Napata,  les  autres 
aux  murs  de  Thèbes.  Maspero,  Histoire  ancû 
t.  n,  p.  292.  Cf.  Capart,  Note  sur  la  décapitation 
en  Egypte,  dans  Zeitschrift  fur  âgyptische  Sprache, 
t.  xxxvt.  1N98,  p.  125-126.  Sur  les  plus  anciens  monu- 
ments de  l'Egypte  se  trouvent  des  exemples  de  décapita- 


199 


PHARAON    DE    JOSEPH 


200 


lion.    Quibell,  [Hierakonpolis,  part.  i.  1900,  pi.   xxix. 

3«  Deux  ans  après,  le  pharaon  cul  le  double  songe  des 
sept  vaches  grasses  et  des  sept  vaches  maigres,  des 
sept  épis  pleins  et  des  sept  épis  desséchés.  L'esprit 
<<  frappé  »,  il  convoque  ses  conseillers,  comme  cela 
arrive  dans  toutes  les  grandes  circonstances  :  les  sages 
et  les  magiciens.  Gen.,  xli,  1-8.  C'est  ainsi  qu'Osorté- 
sen  Ier,  songeant  à  reconstruire  le  Temple  dlléliopolis. 
assemble  son  conseil  et  expose  son  plan  que  tous 
approuvent.  L.  Stern,  Urkunde  ûber  den  JSau  des 
Sonnentempels  :u  On,  pi.  i,  lig.  1-17,  dans  Zeitschrift 
fur  àg.  Sp.  t.  xil,  1874,  p.  85  sq.  C'est  ainsi  encore 
que  Ramsès  II,  d'après  là  stèle  de  Kouhan,  sollicité 
d'assurer  l'eau  aux  caravanes  des  mines  d'or,  s'inspire 
de  ses  conseillers  pour  la  construction  de  nouvelles 
citernes.  Prisse  d'Avennes,  loc.  cil.,  pi.  xxi.  Si  le  cas 
étail  ardu,  ce  n'était  plus  seulement  les  sages  ou 
hakamim  qu'on  appelai!  en  délibération,  mais  aussi  les 
magiciens  ou  hartumim.  Voir  Divination,  t.  Il,  col.  1443- 
lii'ï  ;  MAGIE,  t.  rv,  col.  563.  «  La  sorcellerie  avait  sa  place 
dans  la  vie  courante  aussi  bien  que  la  guerre,  le  com- 
merce, la  littérature,  les  métiers  qu'on  exerçait,  les  di- 
vertissements qu'on  prenait...  Le  prêtre  était  un  magi- 
cien... Pharaon  en  avait  toujours  plusieurs  à  côté  de  lui... 
efqui  étaient  ses  sorciers  attitrés,  i  Maspero,  Lescontes, 
préface,  p.  xlvi.  Ils  possédaient  les  secrets  de  Thot,  gar- 
daient soigneusement  les  écrits  hermétiques  par  lesquels 
ils  avaient  puissance  sur  la  nature.  Cf.  Maspero,  loc.  cit., 
p.  102-103,  et  Histoire  ancienne,  I.  i.  p.  145-146,  279-280. 
Ce  sont  ces  mêmes  conseillers,  sages  ou  devins  (lig.  37), 
dont  le  prophète  raillera  plus  tard  l'impuissance  à 
sauver  le  pharaon  et  l'r.gyple  des  Assyriens.  Is..  xix 
11-13.  Le  pharaon  de  Joseph  ne  fit  donc,  en  convo- 
quant les  sorciers,  qu'agir  suivant  la  pratique  courante. 
C'est,  d'après  la  tradition,  ce  même  Apapi  qui  ayant 
construit  un  temple  à  Soutek  rêva  d'imposer  aux  Thé- 
bains  le  culte  de  son  dieu.  Les  grands  ou  sages  ne 
purent  lui  dire  quel  moyen  employer,  tandis  que  le 
collège  des  devins  et  des  scribes  trouva  un  expédient 
qui  lui  plut.  Maspero,  Les  contes,  p.  238-242.  Mais  cette 
fois  les  devins  furent  impuissants  à  résoudre  le  cas. 

4"  L'échanson  rétabli  dans  sa  charge  se  souvinl  alors 
de  Joseph  qui  expliqua  le  double  songe.  «  Puisque 
Dieu  t'a  montré  tout  ce  que  tu  as  dit,  lu  seras  établi 
sur  ma  maison  et  au  commandement  de  ta  bouche 
tout  le  peuple  obéira,  je  ne  serai  plus  grand  que  toi 
que  par  mon  trône,  »  ditle  Pharaon  à  Joseph,  tien.,  xli. 
39-40.  Le  fait  d'appeler  Joseph  à  une  si  grande  charge 
n'a  rien  que  de  très  naturel  de  la  part  d'un  roi 
Hyksos,  puisque  sous  les  dynasties  indigènes  la  même 

I ,] sepréS'  ute.  AlacourdeMénephtah,  leChananécn 

Ben-Matana  est  le  premier  porte-parole  du  Pharaon.  Ma- 
riette, Abydos,  t.  il,  pi.  l;  Catalogue  général  des  monu- 
ments d'Abydos,  p.  422,  n.  1145.  Nésamon  et  Néferka- 
ram-per-Amon,  sous  leurs  noms  égyptianisés,  sont  deux 
esclaves  arrivés  à  être  l'un,  surintendant  des  domaines 
d'Amon-Ba,  l'autre,  procureur  du  Pharaon,  Papyrus Ab- 
bot,  pi.  iv  et  passim.  Ce  qui  avait  lieu  pour  des  esclaves 
pouvait  à  plus  forte  raison  avoir  lieu  pour  des  étrangers 
de  marque.  A  la  cour  de  ïhèbes,  sous  la  X  VHP  dynas- 
tie, étaient  élevés  à  l'égyptienne  et  comblés  d'honneurs 
les  fils  des  princes  syriens,  qu'on  renvoyait  ensuite  i 
l'occasion  commander  dans  leur  pays.  Mariette,  Karnak, 
pi.  XVII.  Un  chef  de  Gaza,  Yabitiri,  avait  été  conduit 
tout  jeune  en  fcgypte  par  un  inspecteur  égyptien.  »  Je 
m'attachai  au  roi  mon  maître,  écrit  Yabitiri  au  Pharaon 
et  je  demeurai  à  la  porte  du  roi  mon  maître...  Le  joug 
du  roi  mon  maître  est  à  mon  cou  et  je  le  porterai.  ■ 
Winckler,  Die  Thonlafeln  von  Tell  el-Amarna,  n.  211. 
Ce  sera  plus  tard  le  cas  de  lladad  l'Iduméen  «lui,  nous 
l'avons  vu,  épousa  la  sœur  de  la  reine  el  dont  le  fils 
lut  élevé  parmi  les  princes  du  sang.  Jéroboam  sera 
accueilli  de  même  par  Sésac.  III  Reg.,  XI,  40. 


5°  Quand  la  Bible  fait  dire  à  Joseph  par  le  Pharaon  : 
«  De  ta  bouche  dépendra  tout   mon  peuple,   »  elle  ne 

fait  que  traduire  un  titre  égyptien  "^   ▼      "  .ra-heri 

ou  ro-hevi,  «  bouche  supérieure.  »  Le  fonctionnaire 
qui  portait  ce  titre  était  le  premier  intermédiaire  entre 
les  fonctionnaires  et  le  Pharaon  :  toutes  les  affaires 
passaient  par  lui.  Un  certain  Rahotep  était  «  la  bou- 
che du  roi  de  la  Haute-Egypte  et  l'oracle  du  roi  de 
la  Basse-Egypte  ».  Brugsch,  Wôrlerbuch,  t.  vi.  p.  671. 
Tenouna  de  la  XVIII"  dynastie  s'intitule  «  grande  bou- 
che supérieure  du  pays  tout  entier  »,  Id.,  Recueil  des 
monuments,  pi.  lxvi  a.  Avant  d'être  roi,  Ramsès  111 
fut  élevé  par  son  père  à  la  dignité  de  «  grande  bouche 
supérieure  de   tous   les  pays  d'Egypte  ».  Chabas,  Re- 


sp^lSUâ^s! 


M1 


38.  _  Tradition  du  sceau.  —  Au  nom  de  Toutankhainon,  le  (;rand 
chancelier  remet  au  prince  Houi  le  sceau  de  gouverneur  ou 
vice-roi  d'Ethiopie.  XVIII"  dynastie.  L'inscription  se  traduit  : 
a  Remise  du  sceau  de  la  dignité  de  royal  lits  par  te  grand 
chancelier,  afin  que  prospère  la  dignité  du.  royal  fils  de  Kj  asch 
Houi.  »  (Son  commandement)  va  de  Nekhen  (El-Kalo  i  Kerl 
(Djebel  Barkal).—  D'après  Newberry,  Scarabs,  pi.  II.  I  ■  ■  a- 
neau  et  son  chaton  sont  colorés  en  jaune  pour  indiquer  qu'ils 
sont  en  or.  Les  deux  |  ersonnages  portent  la  relie  de  lin  lin. 
Tombe  de  Ileiii  à  Thebes.  Colline  de  Kcuinet  alourai,  près  du 
petit  temple  de  l'eir  el-Medinet. 

,hrrrl,es  sur  la  XIX'  dynastie  p.  14,  27.  Mais  cette 
fonction  n'entraînai!  pas  nécessairement  avec  elle  celle 
de  vizir.  Même  dans  le  Papyrus  Hood-Wilbour,  lig  14, 
elle  ne  vient  qu'après  la  fonction  de  maréchal  de  la 
cour.  Cf.  Maspero.  Éludes  égyptiennes,  t.  n,  p.  25-36. 
C'est  pourquoi  après  avoir  établi  Joseph  sur  toute  sa 
maison,  le  Pharaon  qui  veut  faire  mieux  encore  dit  de 
nouveau  :  «  Voici  que  je  t'ai  établi  sur  toute  la  tare 
d'Egypte.  »  Et  en  même  temps  il  lui  fait  la  tradition 
du  sceau  royal  et  de  la  robe  de  fin  lin  que  mus 
voyons  portée  par  Bekhmara,  vizir  de  Thotbmès  III, 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions.  Chez  Newberry,  The 
life  of  Rehhmara,  pi.  xu,  Rekhmara  est  assis  dans 
la  longue  robe  de  vizir;  pi.  xu  et  xxm,  il  fail  BCel- 
ler  les  provisions  du  temple  d'Amoii,  et  il  noir,  dit, 
pi.  XVII,  lig.  3.  (lue  lui-même  il  scelle  de  son  sceau  les 
portes  du  Trésor.  Dans  une  tombe  thébaine,  Toutan- 
khamon nommait  Houi  à  la  dignité  de  \ice-roi  de  Chus 


201 


PHARAON    DE    JOSEPH 


202 


et  lui  remettait  en  grande  pompe  le  sceau  royal  sous  la 
forme  d'un  anneau  d'or  massif  (lig.  38).  Joseph  reçoit 
de  plus  un  collier  d'or.  Voir  Collier,  t.  h.  fig.  308, 
col.  SoT.  C'était  la  récompense  royale  par  excellence. 
La  scène  se  reproduit  souvent  dans  les  tombeaux  des 
grands  fonctionnaires  et  les  inscriptions  ne  manquent 
pas  de  noter  le  nombre  de  fois  que  le  Pharaon  gratifia 
de  la  sorte  le  défunt.  Ahmès  d'El-Kab,  le  bras  droit  de 
son  homonyme  Ahmès  Ier  dans  l'expulsion  définitive 
des  Hyksos.  reçut  jusqu'à  sept  fois  l'or  de  la  vaillance. 
E.  de  Rougé,  Mémoire  sur  le  tombeau  d'Ahmès,  1819, 
p.  61.  Il  suffira  de  renvoyer  à  Newberry,  Rock  Tombs 
of  el-Amama,  part,  ri,  1905,  pi.  xxxm  et  p.  36-37 
(Mémoire  xiv  de  l'Archeological  Survey),  où  Mérira  est 


aujourd'hui  encore  les  sais  des  équipages  cairotes. 
Cf.  en  particulier  Newberry,  The  rock  tombs  of  el- 
Amarna,  loc.  cit.,  pi.  xm,  xv,  xvi,  xvn,  où  Khounaton 
sur  son  char  est  suivi  de  la  reine  et  de  ses  filles  éga- 
lement  sur  leurs  chars.  —  Sur  abrek,  du  héraut  de 
Joseph,  cf.  Spiegelberg,  Aegyptologische  Randglossen 
zum  Allen  Testament,  1904,  p.  14-18,  et  voir  Abrek, 
t.  i,  col.  90;  sur  le  nom  donné  à  Joseph,  voir  Çafnat 
Pa'néah.  En  changeant  le  nom  de  Joseph,  le  Pharaon 
se  conformait  à  une  coutume  égyptienne.  Plus  haut 
nous  avons  déjà  rencontré  portant  des  noms  égyptiens 
plusieurs  étrangers.  Un  certain  Sarebibina,  grand- 
prêtre  d'Amon  et  prêtre  de  Baal  et  d'Astarté,  sous  Amé- 
nophis  IV,  s'appelait  en  égyptien  Abat.  Lepsius,  Denk- 


—  Triomphe  d'Aménophis  III.  Stèle  découverte  dans  le  temple  funéraire  de  Ménephtah.  Musée  du  Caire  1377.  —  Le  tableau  est 
double.  La  partie  de  gauche,  incomplète  ici,  monU'e  le  pharaon  sur  son  char  marchant  sur  les  Syriens.  —  La  partie  de  droite  est 
complète  :  le  pharaon  foule  sous  son  char  les  vils  Éthiopiens  dont  les  chef»  sont  liés  sur  les  chevaux.  En  légende,  on  lit  : 
I  Dieu  bon)  maître  du  glaive,  puissant  à  les  enchaîner  ises  ennemis  du  Sud);  détruisant  la  race  de  la  vile  Kous,  ame- 
nant leurs  chefs  en  prisonni  ers  vivants,  o 


accablé  d'or  littéralement,  et  à  la  stèle  C  i23  du  Louvre 
où  Séti  I«  de  son  balcon  tend  les  mains  vers  son  favori 
Horkhem  pendant  qu'on  passe  au  cou  de  celui-ci  le 
collier  d'or.  Cf.  Vigouroux,  La  Bible  et  les  décou- 
vertes modernes,  6e  édit.    t.  n,  p.  128-129. 

6°  Il  fallait  que  le  peuple  qui  devait  obéir  à  Joseph 
connût  aussi  son  élévation,  et  c'est  pourquoi  Pharaon 
le  fait  monter  sur  son  second  char.  Gen.,  xli,  43.  Ce 
n'était  plus  la  litière  des  anciens  temps  portée  à  épaules 
d'hommes  ou  assujettie  entre  deux  ânes,  mais  le  vrai 
char  asiatique  introduit  en  Egypte  avec  le  cheval  par 
les  Ihksos.  ,\  partir  de  cette  époque  les  monuments  re- 
présentent partout  le  Pharaon  paradant,  combattant  et 
triomphant  sur  un  char  enlevé  par  de  grands  chevaux 
(lig.  39).  11  en  est  de  même  pour  les  hauts  fonction- 
naires. Naturellement  la  hiérarchie  des  chars  suivait  la 
hiérarchie  des  personnages,  et  comme  Joseph  était 
éiair.i  le  premier  après  le  roi,  il  devait  marcher  immé- 
diatement après  lui.  Cf.  lleyes,  Bibel  und  Aegypten, 
i  p.  250-253,  r.ràce  aux  tombes  de  Tell  el-Amarna, 

il  n'est  pas  difficile  de  reconstituer  Pharaon  sur  s. m 
char  et  son  cortège,  s'avançant  au  vent  des  grands  éven- 
tails,   précédé  de   ses  coureurs    que  nous    rappellent 


mâlerausAegyptenundAethiopien, publiés  parNaville, 
Sethe  et  Borchardt,  t.  i,  p.  16-17.  Un  chef  des  orfèvres, 
Kertana,  devint  Nefer-renpit.  Naville,  Das  âgyptische 
Totenbuch  der  18-20  Dynastie,  1886,  Introduction 
p.  64.  Ben-Matana,  que  nous  connaissons,  fut  pour 
tous  les  Égyptiens  Ramsès-m-per-ra,  «  Ratnsès  dans  le 
temple  de  Ha  »  avec  le  surnom  de  Mer-on  «  aimé 
d'Héliopolis  ».  La  princesse  héthéenne  qu'épousa  Ram- 
sès  II  ne  nous  est  connue  que  par  le  nom  égyptien 
que  lui  imposa  le  Pharaon  :  Our-ma-neferou-ra,  «  la 
grande  qui  voit  les  beautés  de  Ra  ».  Maspero,  Histoire 
ancienne,  t.  n,  p.  405-406. 

7  Quant  au  mariage  de  Joseph  avec  une  lille  d'un 
prêtre  d'Héliopolis,  il  était  des  plus  honorables.  Le 
sacerdoce  d'Héliopolis  occupait  l'un  des  premiers  rangs 
par  son  antiquité  et  par  la  qualité  de  son  dieu.  A  défaut 
de  ses  filles,  le  Pharaon  alliait  ses  favoris  à  des  filles 
de  prêtre.  Lui-même  ne  croyait  pas  déroger  en  choisis- 
sant parmi  elles  son  épouse  principale.  La  femme 
d'Amasis,  la  mère  de  Psammétique  111,  'lait  île  race 
sai  erdotale.  Wiedemann,  AegyptischeGeschichte,  1880, 
p.  659. 

8°  On  ne  pouvait  entrer  en  Egypte  ou  en  sortir  sans 


PHARAON    DE  JOSEPH   -   PHARATHON 


203 

l'assentiment  du  Pharaon.  Aux  immigrants  autorisés  i 
ablir  était  assignée  la  place  qu'ils  devaient  habiter. 
Nous  avons  vu  les  Ainou  du  tombeau  de  Khnumhotep 
demandera  se  Dxer  en  Egypte.  Mes  Schasou  au  temps 
de  Menephtah  ne  pénètrent  avec  leurs  troupeaux  dans 
les  pâturages  laissés  libres  par  le  dépari  des  Hébreux 
qu'avec  l'autorisation  des  gardes  qui  veillaient  à  la 
iv,  et  aussitôl  le  Pharaon  en  est  prévenu.  Ana*- 

tati     VI,  pi.   VI,   î.   Halls   le   traité  entre    le    roi   liéll,.  ,n 

Khéta  ar  et  Elamsés  11,  les  contractants  s'engageaient 
réciproquement  à  s.-  rendre  les  transfuges.  Lig.  22  25, 
dans  Record» 0/  thepast,  l"  série,  t.  rv,  p.  30.  L'Egyp- 
tien Sinouhit  réfugié  chei  les  tribus  voisines  du  Sinal 
ne  peut  rentrer  en  Egypte  que  sur  l'invitation  du  Pha- 
raon alors  régnant.  Maspero,  Les  contes,  p.  -l-.:i.  Nous 
ne  sommes  donc  pas  surpris  de  voir  le  Pharaon  de 
Josi  pli  autoriser  Jacob  et  sa  famille  à  demeurer  en 
Egypte  el  leur  désigner  un  territoire,  Gen  .  xlyii,  l  6, 
pas  plus  que  nous  ne  serons  surpris  de  voir  Menephtah 
résistei  au  dépari  des  Israélites  jusqu'à  la  dixième 
plaie.  C.  Lagieb 

\.     PHARAON     DE    L'  OPPRESSION       .     ExOd.,     I, 

m.  etc.  Voir  RamsI  -  II. 


204 


5.  PHARAON    DE   L'EXoDE. 

col.  955-8 


Voir  MENEPHTAH,    t.    1\. 


<>.  pharaon  (fille  du).  1  Par.,  tv,  18.  Dans  une 
généalogie,  il  est  question  d'une  Bile  de  Pharaon  :  Hi 
autem  filii  Belhim  filiss  Pharaonis  que  ■      Me- 

red,  Mered  avail  peul  être  rendu  de  grands  suai.',  s  au 
Pharaon  Dan  I  histoire  de  l'Egypte,  il  n'est  pas  rare 
de  voir  le  roi  récompenser  ses  serviteurs  en  les  mariant 
,i  l'une  de  ses  nombreuses  Biles.  Bethta  Berait-elle  un» 
Bile  ■!.'  Ramsès  II  ?  Convertie  à  s,,n  mariage,  elle  aurail 
reçu  un  nom  nouveau,  rvro,  Bityah,*  la  fille  de 
\.di  ...  iiuiii  d'autant  plus  auguste  que  s. m  r..n 
plu ,  i  levé.  Voir  Bethia,  t.  t,  col.  1686;  Ji  daïa,  t.  m, 

Col.   ITTS;  Ml  RED,  t.  [V,  Col.  996 

7.  LE  PHARAON  CONTEMPORAIN  DE  DAVID.  - 

Quand  l'armée  de  David  battit  les  [duméens,  A. Lui.  de 
i.,  race  royale  d'1  dom  chercha  un  refuge  auprès  du 
Pharaon.  111  Reg.,  m.  15-22.  Ce  Pharaon  était  probable- 
ment P  oui  enm    [I,  Voir  Adad  3,  t.  t,  col.  166, 

8.  LE    PHARAON  BEAU-PÈRE   DE    SALOMON.    -    l  11 

Pharaon  donna  è  Salomon  sa  Bile  en  mariage.  III  Reg., 

m.  I.   Voir  Su  hm.in. 

9.  LE    PHARAON    DE  JÉROBOAM    ET    DE    ROBOAM. 

—  Voir  Sesac.  L'Écriture  lui  donne  le  titre  de  roi  al 
n  m  celui  île  Pharaon. 

Kl.   LE    PHARAON    ENNEMI    O'ASA.  Il    6S|    appelé 

g  roi  ^  i  thiopie  .  H  Par  .  uv,  9,  mais  il  était  sans 
doute  aussi  roi  d  Egypte.  Voir  Zaba 

11.  LE     PHARAON     CONTEMPORAIN     D'OSEE,    ROI 

dmsrael.       il  est  appelé  roi  d'Egypte.  IV  Reg.,  svn, 

i    \  oir  Si  » 

12.  LE     PHARAON     CONTEMPORAIN     D'EZECHIAS, 

ennemi  de  Si  nnachi  ril    Is     xxxvi,  6.  Voir  f/HARAi  i 

13.  LE   PHARAON    CONTEMPORAIN    DE   JOSIAS. 

Voii  Nêciiao   col 

I  '..   LE    PHARAON    CONTEMPORAIN    DE    SÊDECIAS. 

dont   il  est  question  dans  li  réml    .  t  dans  i 
Voii  t    n,  col.  1882.  ||  t' 


PHARATHON   (hébreu  :  Pir'âfin  ;  Septante  :  *a- 
i  Irinus  :   *poa8civ),    ville   d'Êphraïm, 

patrie  du  juye  Abdon,  lils  .1111.1.  où   il  fut  enseveli. 
,lud..  xii,  13-15.  De  là  fut  aussi  Banalas,  un  des  vaillants 
i  i  .  i    di    i  armée  de  David.   Il   Reg.,  xxiii,  30;  1  I 
xi,  31;  xxvii,  11.  Cette  ville  était  bâtie  sur  la  montagne 

.1  Amal.  e.  Voir  Asi.vi  i:<  .  I.  I,  col.    127.   Elle  l'ut  plus  lard 

fortifiée,  munie  de  murs  élevés,  de  portes  et  de  serrures, 
par  Bacchide,  général  de  l'armée  d'Antochius.  1  Mach., 
ix,  50.  Quelques  commentateurs  ont  douté  si  la  *apa- 
.  Machabées  Alexandrin»»  .-t  Sinaiticus  *  : 
<Pap«8iiv;  Vulgate  :  Phara;  Josèphe,  Ant.  ./«•'..  X.IIÏ, 
i,  3  :  *apaO<i)  étail  identique  i  la  Pharathon 
Juges,  parce  que   les  villes  fortifiées   par  le  général 

syrien  sonl  attribuées  à  la  Judée.  Mais  la  pi 

peut  -  interpréter  différemment  :  Il  bâtit  des  villes  fortes 
eD  Judée  et  [en  outre]  les  forteresses  de  Jéricho, 
ou  bien  la  Judi  e  est  prise  ici  dans  l  acception  plus  géné- 
rale qui  lui  ..  été  souvent  attribuée  de     pays  d  Isi 
Thamnata  el  Thopo  (Taphua  citées  en  ce  pas 

n'appartiennent  pas  non  plus  à  la  province  de  Judée. 
Pharatha,  d'après  le  rabbin  Estôriha  Parchi  (xm  siècle), 
étail  située     à  environ  six  heures  de  Sichem,  à  l'ouest 
déclinant  un  peu  au  sud  .'t  appelée  Fer'attS.  i  Caftor 
ua-Phérach,  .dit.  Luncx,  Jérusalem,  1897-1899,  p 
«  -i  aujourd'hui  un  petit  village  de  moin 
deux  cents  habitants,   a  douze   kilomètres   environ   ■ 
l'ouest-sud-ouesl  de  Naplouse,  l'ancienne  Sichem.  On 
-,  r.n.i.i,  cette  ville  par  doux  sentiers  escarpés,  dif- 
ficiles et  formant  de  nombreux  ,1  lou  "1S 
dont.'  ces  difficultés  qui  ont  induit  l'écrivain  juif  en 
erreur  sur  la  distani  e  réelle  entre  i       deu 
car  on  ne  peul  contester  qu  II  ne  désigne  la  mêmi 
lité,   Fer'atà    s'élève  sur   une  colline   de   555   mèti 
d'altitude  ..n  di  bsus  du  niveau  de  la  mer  Médite! 

elles  pierres,  régulii  remenl  taillées  qui   1  on  voit 
dan-  les  murs  des  liai, dations  modernes  ou  que 
trouve  éparsi  -  aux  alentours,  attestent  que  le  villa 

lui  I,     ,i      i|  n  de    rhamns  d  I  phi  iïm   comme  per t 

de  le  croire  l'ordredes  villes  procédant  du  sud  au  nord, 
B  accédé  è  une  localité  antique  de  quelque  importance. 
On  rencontre  aussi  des  sarcophages  en  pierre  de 
tyla  rec  el  di  s  tombes  antiques.  A  sept  ou  huit  cents 
au  nord-est  du  village,  un  petit  sanctuaire 
musulman  di  dié  à  Vouély  Abou-Djoud  est  i  n  grande 
vénération  dans  le  pays.  L'identification  d'Estôn  repro- 
duite par  le  rabbin  Jos.  Schwarx,  Tebuoth  ha-'Amz, 
.dil.  l.une/.  Jérusalem,  1900,  p.  187,  a  été  adopl 

tomson^euebiblischcForschungenin  Polos  !. 
Berlin  1887,  p.  175;  Guérin,  Samorie,  t.  n.  P-  179-180, 
el  t..  plupart  des  palestinologues.  Cl.  R.  Conder  cepen- 
danl  identifie  Far'alfà  avec  Éphra,  Jud.,  vi,  11,  et 
propose  de  voir  Pharathon  dans  Fir'aûn.  The 
Western  Palestine,  Mmmrs,  t.  n,  p  16 
104,  Cf.    Armstrong,  Wilson  el   Conder,    > 

!  in   //,,■  Old  Testament,  Londres,   1887,  p 

l  m,  grand  village  de  Bepl  à  huit  .vois  habi- 
lants.situi  à  trois  kilomètres  au  sud  di  m.sur 

une  des  collines  qui  bordenl  la  plaine  côtière  méditer- 
,,,..  s, ,n  nom  procède  sans  doute  de  la  même 
étymologie  que  Fi  r'atd',  mais  tandis  que  celui-ci  con- 
la  forme  historique  arabisée  du  nom  de  Fer'aton, 
comme  Anàfd,  par  exemple,  celle  de  Anafdf,  on 
s'expliquerait  dirflcilement  comment  contrairemenl  au 
fan  |c  plus  constant  dans  la  modification  des  noms 
anciens  en  Palestine,  ce  serait  le  i  intermédiaire  qui 

aurait   disparu    lout    en    laissant     subsister    la    sOla  .e 

lin  do  on.  La  Chronique  samaritaine  (xu«  siècle] 
le  nom  de  Fer'atà  dans  sa  forme  actuelle 
el  en  rail  remonter  l'origine  à  l'époque 
Suivanl  ....  récit  légendaire,  le  lieu  aurait  été  ainsi 
I,  ,  ,i,.  |a  racine  fdra  .  parce  que  là,  à  loeei.le.it 
du  mont  sacré  de  Garixiin,  les  Israélites  dissidents  par 


a  e 


I-IIA  r:ATirON  -    PHARISIENS 


206 


rapport  à  i    i    multipliés   à 

lin-:  aux  d'un  arbre  touffu   ».  Chron.  sa- 

marit.,  cb.  .vu,  édit.  Juynboll,  Leyde,  1848,  p.  H. 

L.  IIeidet. 
PHARATHON1TE  (hébreu       ftajj  Sep- 

tante    i    1  A  4apa$<d 

rathon,  l'n  des  juges  d  Israël,  Abdon,  Jud.,  mu,  13,  15, 
et  Banaîas,  un  des  vaillants  soldats  de  David,  (1 
ixiii,  30;  I  Par.,  Il,  31;  cf.  xxvii,  14,  Phara 

thon.  Voir  PnARATHON. 

PHARES  ite,  de  deux  Israélites 

qui  ont  .1  texte  hébreu. 

1.  phares   hébreu      Pcré        brèche    :  Septante  : 

'I'-jl-J.:  .  til-  i|>-  Jnda  el  de  ;  jumeau   de 

Zara     Voir  ThaMAR.    Au  me 

nia  le  premier  la  main  et  la  rage-femme  j  attacha 
un  til  entra  on  frère,  qui 

fut  appelé  pour  cela    Phares,  sorti)  le  premiei 
xxxvni.  :>>  i  lils  sont  donnés  par  : 

de  l'importance  des  droits  d  oits  pa- 

!  donnés  à  Phares,  car  il  est  toujours 

nommé  le  premier  dan  i  Ien., 

xi.vi,  12;  \ui,i..  xxvi,  20;  I  Par  ,  n,  l;  Matth.,  i.  3.  Ses 

notants  furent  bénis  d  I  m  le  souhait  des 

pares  Ruth,  iv.  12,  i 

brenx ,  Phares  fut  la  ti  royale  de  David 

et  l'ancêtre  de  Nol  Matth.,  1,3;  Luc,  m,  33. 

La  postérité  de  Juda  forma  qnati  principale  . 

et  Phares  fui  la  souch  |]i   des 

mites   et   i 
Hesron  et  Hamul.  Num.,  xxvi.  20.  Les  deux  auti 
de  Juda  ne  furent  chefs  qo  mille  chacun,  Séla 

de  ee  desZaréi       Num., 

SX',  i.  20.   I  les  descend  mts  de  Phai 

donnée.  Ruth,  i  plus  en  détail, 

I  Par.,  h,  5,  9-m,  24,  iptivité  de  Baby- 

lone.  de  Juda,  cendants    de 

Phares,  les  livres    historiques  de  l'Ancien  Testament 
nous  font  connaître  parmi  les  Pharésil 
de  David,  Jesboam,  I  Par.,  rxvn,  :;.  ainsi  que  Joab  et 
..    tils   :1e   Sarvia,   sœur  de 
I  Par.,   ii.    16,    qui  .  ai  de  Phares  au 

moins  par  |  nommé    nulle 

part  dans  l'Écriture,  lui   i  Zorobabel,  468  des 

Bis  fie  Phares   habitèreni  II  Esd.,   xi.  Mi. 

Cf.  I  Par.,  ix.   '». 

■i     phapes    hébreu   :   l-  ante  :  *ap 

premier  no  fils  que  Machir  eut  de  Maacha.  Il 

était  de  la  tribu  de  Hanassé.  I  Par.,    ii.  16. 

3.   PHARES,   DD 

écrits  sur  la  muraille  de  la  salle  .lu  festin  de  Daltassar. 
Voir  Baltassah  ■>,  t.  i,  col.  [421-1422. 

PHARÉSITES  '<.  bren  hap-Parfî;  Septante  :  3rj[io< 

ndants  de  PI 
.  I. 

PHARIOA  ix  57;  Perûdâ  , 

n, 55;  Septante:  4>2p:3i,  Ii  :  <7;<J>a8oupâ, 

I  Es<i.,  h,  55  .  é| 

Salornon  <  qui  r  :  captivité  d 

en  Pal  .  il.  1  Esd.,  n.  55;  Il  Esd-,  ix. 

'" 

conformément  à    l'or'  iriginal.  Les 

Vathinéens. 
Voir  N'athini.i.n-.  t.  iv,  col. 

PHARISIENS.  —  Tout  ce  que 

nous  —  ou  à    peu  prés  —   nous 


phe,  du  Palmud  el  du  Nou  reau  i  e  lament. 
pai  le    ouvenl  des    pharisiens  el  le    p  i 
qui    sur  ni     onl   surtout   à  étudii  r  :    Bell,  iud.,  II. 
vm,   Ii      Anl    jud.,    Mil,    ■..  9;   XIII,   \,  5-6;   XVII. 
n.  1;  XVIII,  i,  2-4;  Viio,  2,38.  !..■  portrail  .pi. 

doublement  précieo  -..  parce  qu'il  e  i  d'un 
contem  I  nu  homme  qui  fut   quelque 

Malheureu  lement,  i  hi  toi  ien 
juif,  désireux  d'être  compri  de  ses  lecteurs  païens, 
nous  les  présente  cornu  de  philosophique,  les 

■      oile  a  i  le    roel  eon  it; lenl  en  oppo 

sition  avec  le     ladducéens  el  l<    e    éniens, qui seraienl 

d'après  lui  des  du  mé un    Ce 

faites,  le    détail  :  qu  il  nou    donne    onl  forl 
instructifs  el  trouvent  dans  les  laits  leur  confirmation, 
Le    i  almud  contient   de  noml  lils    mr  le 

iens,  principalement    dans  leur  eonl  raste 

il   le  vulgaire  l  am  hâ  ârès  .  '  '"  trou- 
i  mi     Schûrer,   Geschichte  des  jùdischen   i 
2   i  dil  .  i    ii.  Leipzig,  1898,  p.  384-388,  les  t. 
Mischna  njet.  Bien    que   la    Mischna    n'ail    été 

n  .li  ée    i  .n.       h,     Eal  actuel  que  vers  la  lin  du  si 

par  Juda  le  Saint,  beaucoup  de  parties  lonl  an- 
térieure el  supposent  l'existence  du  temple.  Ma 
qu'il  v  .i  dans  le  Talmud  Mi  chna,  Ghemara  et  Mi- 
.].■  plu  .  intéressant  que  le  te  i  te  particuliers, 
e'c  i  i-'  pril  phari  </.././.■  donl  il  esl  imprégné  d  nu 
boul  i  l'autre.  Non  seulement  le  Talmud  esl  l'œuvre 
mais   il    peu  ird      •  omme 

mi.-  ,-t  1  incarnation  du  ph  u  Les 

m   Nouveau    I  e  I: ni  au  i   pharis  ien 

■    les  informations  .pi  elle    nou 
,.it  le  plus  souvent  qu'indirectes.  Mais 
tient  un  tel  rôle  dans  l'histoil 
lique  -'i  apostolique  que  cette    source   de   ren 

ni  pour  nous  d'une  '■*  impoi  ta  m  e. 

.■.r..  de  I  I. ..i..   ile  éclairent  d'un 

jour  Ire-.  \  il    1rs  .1 

fdles  le  ntaire  et  leur  explication. 

II.  Les  f  OMS  m  Le  mot  «t  pharisien 

hébreu   D'tfns,  un  araméen  •■-■-:,  étal  empha- 
tique swis,  d'où  vient  L-  grec  'Pxpiacdoi.  C'esl  donc 
i  de  z-z.  parai,  •  léparer  s ,  ri  la  ieule 
:  oir  si  les  pharisien    ion!  air  ii  appelés 
parce  qu'ils  s'éloignent  des  choses  impures,  caj 
ouillure  légale,  ou  parce  qu'il 

.      |e      roi..: 

.1  adopter  le  prem 

é  -;"-i  ou  r- .  ' 

ni  drs  choses  impures,  I  exemption  de  toute 
ireté.  Mais  drs  raisons  plus  puissantes  milil    I 

i,  :      ns.D  aboi  d  i  éloignemenl  d 
iinpiii e  ,,     n.    e     iii   menl       loignemenl 

st-â-dire  de  celles  qui  n'observent 

relatives   ai 
contai  Ensuite  toute  l'hi 

nous  les  monti  lire  el  foi 

m.'.  Enfin  l"    écrivain 
ption.  Cle 
t.  n,  roi.  296  (les  phari  si 
.    .  -,  ,  ifiôfia       .      Ori  ène,  In  Matth.,  \xiii, 
2,  t.  xin.  col.  ltill     dividunl  [uasi    melioi 

rnultis...    qui   interpretantui  \egregati);  In 

Matth.,  xxiii. u:;.  t.xin,  col.  1626;  Ibid.,  xzin,  29, t. xm, 
col.  163  :isi); 

13,  t..    xiv.    col.    240     - 
/■j.:    axaa  Ibid.,    xm,   54,    t.    xiv,     col.    504 

l.i    lin    du    I)r  i 

teript.,  t.  n.  col.  61     a  r  ad- 

.    ...     Cent. 
hser.,  xvi,  1,   t.   xi.i.    col.   249  .     •    Se   *apM7*ÏM 

',:u  -',  v  ..:  îtv«!  xirtoiii  ■/-•>  zâ  <  '///'.>. j.  S.  .le- 


207 


PHARISIENS 


208 


ro Adv.  Luciferian.,  23,  t.  xxiii,  col.  178  (Pharisaei 

;i  Judaeis  divisi,  propter  quasdara  observaliones  super- 
fluas,  QOmen  quoque  a  dissidio  susceperunti:  lu 
Malth.,  xxn,  23,  t.  xxvi.col.  163  (unde  et  divisi  vocaban- 
tur  a  populo).  Le  Talmud  donne  de  l'étymologie  du 
nom  des  pharisiens  la  même  explication.  On  peut  voir 
les  passages  dans  le  Lexique  de  Buxtorf  et  la  définition 
des  pharisiens  dans  VAruch.  —  Le  sens  du  mot  pha- 
risien »  étant  «  séparatiste  »,  il  n'est  guère  probable 
que  les  pbarisiens  eux-mêmes  se  soient  donné  ce  nom  ; 
ils  finirent  par  l'accepter;  mais  tout  porte  à  croire  qu'il 
leur  fut  attribue  d'abord  par  leurs  adversaires.  En  effet, 
selon  toute  apparence,  les  pbarisiens  apparaissent  pour 
la  première  Ibis  dans  l'histoire  sous  le  nom  de  D>"HDn, 
Jfâsidim,  «  les  hommes  pieux  »,  lors  du  soulèvement  des 
Mâcha  bées.  Le  nom  de  pharisiens  est  encore  relativemenl 
rare  dans  la  Mischna  et  presque  toujours  (sauf  deux 
fois),  il  est  mis  dans  la  bouche  des  sectes  hostiles.  En- 
fin nous  savons  que  les  pbarisiens  s'appelaient  entre 
eux  onan,  luthérint,-  associés  ou  compagnons  ».  —  Un 
fait  très  digne  de  remarque  et  trop  peu  remarqué, c'esl  la 
synonymie  apparente,  dans  le  Nouveau  Testament,  entre 
scribes  et  pharisiens.  Non  seulement  les  scribes  et  les 
pharisiens  sont  très  souvent  nommés  ensemble  comme 
une  classe  à  part,  mais  ce  qu'un  Évangile  attribue  à 
un  pharisien  est  par  un  autre  Évangile  attribué  à  un 
scribe  ou  réciproquement.  C'est  que,  à  l'époque  néo- 
testamentaire, les  scribes  appartenaient  en  général  au 
parti  pharisien;  aucun  scribe  sadducéen  n'a  laissé  un 
nom  dans  l'histoire  et  cela  n'est  pas  pour  surprendre, 
car  les  sadducéens  rejetant  toute  tradition,  le  métier  de 
scribe  était  chez  eux  presque  réduit  à  rien.  Tous  les 
pharisiens  n'étaient  pas  scribes,  puisqu'on  distinguait, 
même  parmi  les  pharisiens,  l'ignorant  (îsinn)  et  le  sa- 
vant (rrn),  mais  à   peu  près    tons  les   scribes  étaient 

T  T 

pbarisiens.  Cependant  les  Évangélistes  ont  conscience 
que  les  mots  «  scribes  et  «  pharisiens  o  ne  sont  pas 
pleinement  synonymes,  puisque,  assez  souvent,  ils  men- 
tionnent les  pharisiens  à  côté  des  scribes,  Matth.,xn,38; 
xv,  1;  xxiii,  2.  13,  14,  15,  2:!.  25,  27.  29;  Marc,  vu,  1, 
5;  Luc,  V,  21.  30;  VI,  7;  xi.  53;  xv,  2;  cL  Àct.,  \.  :'»i. 
Ils  signalent  même  quelquefois  les  scribes  appartenant 
au  parti  .pharisien,  Marc,  h,  t;  (ol  ypa(i(iavEtç  ;»■<  <l>api- 
Taii.wi;  cf.  Lue,  v.  30.  Saint  Jean  ne  parle  pas  des 
scribes,  sauf  une  fois  dans  l'épisode  de  la  femme  adul- 
tère,  Mil.  '.'<.  Sainl  Luc  emploie  le  mot  YpxiJ.ij.aTcJ;  con- 
curremment avec  vrj'.xo:  et  vOjioSiSâffxa/tac.  Voir  Sctu- 
BES  el   Saiuii  CÉENS. 

III.  Historique.  —  1°  Origine  des   pharisiens.  — 

L'esprit  de  séparation,  si  caractéristique  des  pbarisiens, 
commence  à  se  manifester  chez  les  Juifs  revenus  de 
l'exil  de  Babylone  avec  Zorobabel  et  Esdras.  lies  cette 
époque,  la  terminologie  usitée  dans  la  suite  entre  en 
vigueur,  quoique  clan-  un  sens  différent.  Obéissant  aux 
exhortations  d  I  sdras  el  de  Néhémie,  les  Israélites  dé 
vols  se  séparenl  des  habitants  du  pays  ('om  hâ  ârés), 
c'est-à  dire  des  païens  ou  des  Juifs  infidèles  qui  étaient 
restés  en  Judée  après  la  déportation.  I  Esd.,  vi,  21; 
IX.  I;  \.  Il;  Il  Esd.,  i\,  2.  \.  29.  Mais  ks  pharisiens 
proprement  diis,  qui  se  séparent  de  la  masse  du  peuple 
trop  peu  zélée  puni  1  observation  rigoureuse  de  la  loi, 
ne  remontent  pas  si  haut.  Leur  première  apparition  a 
lieu  Un-  île  la  grande  persécution  entreprise  par  les 
H,i-  de  Syrie  en  vue  d'helléniser  la  Palestine.  Lu  mon- 
lanl  sur  le  trône  L75avanl  J.-C),  Ântiochus  Épiphane 
avait  juré  d'exterminer  la  religion  juive,  et  il  lui  puissam- 
ment secondé  dans  ce  dessein  par  la  lâcheté  el  l'ambition 
d  un  certain  nombre  de  personnages  influents  apparte- 
nant an  sacerdoce,  entre  autres  les  grands-prêtres 
.  surnommé  Jason,  el  Ménélas.  En  170,  le  monarque 
ilège  avail  pénétré  dans  le  lieu  saint  et  enlevé  le 
i  du  Temple,  l'eu  de  temps  après  il  interd 


circoncision,  la  célébration  du  sabbat,  les  sacrifice-,  en 
un  mot  tout  le  culte  judaïque.  Le  15  du  mois  de  cas- 
leu,  un  autel  de  Jupiter  Olympien  remplaça  dans  le 
Temple  l'autel  de  Jéhovah,  et  le  25  du  même  mois  on  y 
immolait  des  victimes.  Cette  profanation  fit  éclater  le 
soulèvement  des  Machabées  qui  trouvèrent  bientôt  un 
ferme  appui  dans  un  parti  qui  s'était  formé  un  peu 
auparavant  pour  résister  à  l'hellénisme  et  pour  mainte- 
nir intacte  la  religion  mosaïque.  Les  Assidéens,  a'TDn, 
ol  'Airiôatoi,  «  les  hommes  pieux  »  —  c'est  ainsi  qu'on 
les  nommait  et  qu'ils  s'étaient  peut-être  nommés  eux- 
mêmes  —  sont  les  ancêtres  des  pharisiens  ou  pour 
mieux  dire  ils  ne  se  distinguent  pas,  au  nom  près,  des 
pharisiens.  Depuis  Wellhausen,  .Die  Pharisâer  tutti 
die  Sadducàer,  Greifswald,  1874,  p.  78-80.  l'identitéesl 
généralement  admise.  Cf.  I  Macli.  i,  65-ti(>;  H,  42:  vu, 
12-13;  II  Mach.  xiv.  G.  Cohen,  Les  Pharisiens,  t.  i. 
p.  10b',  émet  l'hypothèse  que  les  assidéens,  en  dispa- 
raissant, donnèrent  naissance  aux  deux  sectes  des  pha- 
risiens et  des  esséniens  :  o  Une  fraction  (les  assid, 
restant  fidèle  à  la  tradition  naziréenne,  se  réfugia, 
contre  les  orages  de  ces  temps  malheureux,  dans  un 
ascétisme  obstiné.  L'autre  fraction  (les  pharisiens)  —  et 
ce  fut  la  plus  nombreuse  —  se  séparant  de  ses  frères 
en  doctrine  et  les  laissant  dans  la  retraite,  marcha  en 
avanl  d'un  pas  résolu,  aspirant  ouvertement  i  diriger 
dans  les  voies  nouvelles  le  judaïsme  réformé.  »  Si  l'ori- 
gine assignée  aux  esséniens  est  très  contestable,  la 
descendance  des  pbarisiens  du  vieux  parti  assidéen 
semble  établie. 

2°  Les  pharisiens  sous  les  Asmonéens.  —  C'est  sous 
le  roi  Jean  Hyrcan'  (135-105)  que  les  pharisiens  appa- 
raissent pour  la  première  fois  dans  l'histoire  -eus  la 
dénomination  de  pbarisiens.  Voici  comment  Josèphe, 
Ant.  jtttl.,  XIII,  x,  5-6,  raconte  l'anecdote.  Dans  un 
festin,  où  les  principaux  d'entre  les  pharisiens  étaient 
invités,  le  roi  pria  les  convives  de  ne  pas  lui  ménager 
leurs  conseils.  Pendant  que  les  autres  se  récriaient, 
en  exaltant  à  l'envi  les  \eiius  du  monarque,  un  des 
assistants,  nommé  Éléazar,  lui  dit  que  ce  qu'il  aurait 
de  mieux  à  faire  pour  plaire  à  Dieu  serait  de  se  dé- 
mettre du  souverain  pontifical.  Comme  le  roi  en  de- 
mandait la  raison  :  «  C'est,  ajouta  l'autre,  qu'au  rap- 
port des  anciens  ta  mère  a  été  captive.  »  t'n  saddu- 
céen, présent  à  la  scène,  lui  insinua  alors  que  pour 
sonder  les  véritables  sentiments  des  pharisiens  à  son 
égard  il  n'avait  qu'à  leur  demander  quel  supplice  mé- 
ritait l'insolent.  Tous  opinèrent,  non  pas  pour  la  mort, 
mais  pour  la  prison  ou  la  peine  du  fouet;  el  le  roi 
jugeant  par  la  qu'ils  lui  étaient  hostiles  et  qu'ils  pre- 
naient secrètement  parti  pour  le  coupable,  si'  déclara 
désormais  contre  eux  et  se  jeta  dans  les  bras  îles  sail- 
ducéens.  D'après  le  Talmud  de  Babylone  le  lait  se 
serait  passé  sous  Alexandre  Jannéi  (104-76).  Sur  l'avis 
d'un  sailil  ne,  en  du  nom  d'Éléazar,  le  roi  au  rail  le  ml  de 

vouloir  se  démettre  du  pontificat  afin  de  savoir  ce  que 
les  pharisiens  pensaient  de  lui.  Un  pharisien, donnanl 
dans  le  .piège,  lui  aurai!  dit  :  i  O  roi,  i  ontenle  toi  de  la 
couronne  royale  ei  laisse  la  couronne  de-  pontifes  aux 

descendants  d'Aaroii.  A  ces  mots,  Ali  vanille  .lannée 
aurait  l'ail  mettre  a  morl  iuns  les  pharisiens,  l'es  deux 
mi  dotes  la  dernière  est  certainement  la  plus  invrai- 
semblable. Voir  I..  Montet,  Le  premier  conflit  entre 
pharisiens  et  sadd  u éens  d'après  trtjis  documenté 
orientai/.',  Paris,  issT.  Ces  récits  légendaires  peuvent 
contenir  un  fond  de  vérité.  Le-  pharisiens  d 
raient  pas  voir  de  bon  œil  le-  Asmonéens  usurpei  el 
retenir  dans  leur  maison  le  souverain   pontificat.  Les 

visées    profanes    et  les  ambitions   m I -de  Jean 

Hyrcan  n'étaient  poinl  pour  leur  plaire.  Les  cruautés 
de    Si  S  deux  lil-    el  successeurs  i aliats,    Aristulmle 

el  Uexandre,  n'étaienl  pas  non  plus   de  nature  à  les 
lier  et  ils  avaient  centre  ces  deux  princes  un  grief 


209 


PHARISIENS 


210 


nouveau,  celui  d'avoir  ajoute-  à  la  qualité  de  pontife  le 
titre  de  roi  que  Jean  IJyrcan  n'avait  pas  osé  prendre. 
A  la  mort  d'Alexandre  Jannée,  les  pharisiens  rentrèrent 
en  faveur.  Ici  encore  il  faut,  dans  le  récit  de  Josèphe,  j 
faire  la  part  de  la  légende,  Sur  le  conseil  du  monarque 
expirant,  sa  femme  Alexandra  se  serait  livrée  aux 
mains  des  pharisiens,  leur  permettant  de  réparer  à  leur 
gré  les  injustices  de  son  mari,  sans  épargner  sa 
mémoire  ni  même  son  cadavre.  Touchés  de  ces 
avances,  les  pharisiens  auraient  accordé  au  roi  défunt 
de  magnifiques  funérailles  et  pris  sous  leur  protection 
ses  deux  enfants  Aristohule  et  Hyrean  qui  lui  succé- 
daient, celui-ci  comme  roi,  celui-là  comme  pontife. 
Ant.  jud.,  XIII.  xv.  5;  xvi,  2;  Bell,  jud.,  I,  v,  1-2. 
Mais  les  pharisiens,  abusant  de  leur  pouvoir,  tirèrent 
une  terrible  vengeance  de  tous  ceux  dont  Alexandre 
Janm'e  s'était  servi  pour  les  persécuter.  Les  massacres 
et  les  exils  arbitraires  leur  aliénèrent  bientôt  lescœurs 
et  furent  pour  beaucoup  dans  la  révolution  qui  fit  pas- 
ser le  sceptre  des  mains  d'Hyrcan  II  à  celles  d'Aristo- 
bule  et  qui  amenèrent,  avec  l'intervention  de  Pompée, 
la  perte  de  l'autonomie  juive.  Dans  les  temps  troublés 
qui  suivirent  on  n'entend  plus  parler  des  pharisiens. 
Ils  rentrent  en  scène  à  l'avènement  d'IIérode  auquel 
six  mille  d'entre  eux  refusent  le  serment  de  fidélité. 
Frappés  d'une  forte  amende  et  plusieurs  même  punis 
de  mort,  ils  restent  en  défaveur  durant  tout  ce  règne; 
mais  leur  crédit  auprès  du  peuple  n'en  devenait  que 
plus  grand.  Ant.  jud.,  XVII,  II,  i.  A  partir  d'ici  les 
pharisiens,  grâce  au  Nouveau  Testament  et  au  Talmud, 
apparaissent  en  pleine  lumière  historique  ;  mais  toute 
la  période  précédente  est  fort  obscure,  parce  que  les 
pharisiens,  qui  par  leurs  scribes  et  leurs  légistes  se 
trouvaient  maîtres  de  la  littérature,  ont  enseveli  dans 
un  silence  systématique  la  dynastie  des  Asmonéens. 
Judas  Machabée  Ini-même  est  a  peine  nommé  dans  le 
Talmud  et  l'on  ne  fait  exception  que  pour  le  chef  de 
la  famille  Matathias.  Voir  Gaster.  The  Scroll  of  the 
Hasmonxar.s(MegillathJBene  Hashmunai),  dans  Trans- 
actions of  the  ninth  internat.  Congress  of  Orienlalists, 
t.  H,  Londres,  1893,  p.  3-32. 

IV.  Doctrines  des  pharisiens.  —  1°  Les  pharisiens 
et  les  traditions.  —  Los  pharisiens,  dit  Josèphe,  se 
faisaient  remarquer  par  leur  exacte  interprétation  de 
la  Loi,  Bell,  jud.,  II,  vin,  14  :  oî  yi-z  i/pië£:'a;  Boxoûv- 
tï;  Èçïry  et  <r8ai  -j.  vo;x:eia.  Cf.  Yita,  38;  Ant.  jud.,  XVII, 
H,  4.  Nous  le  savions  déjà  par  saint  Paul  qui  s'ex- 
prime presque  dans  les  mêmes  termes.  Act.,  xxn,  3; 
xxvi,  5;  Phil..  m.  5.  Mais  ce  qui  les  distinguait  des 
sadducéens,  c'était  l'admission  de  la  tradition  orale  qui 
interprétait  et  au  besoin  complétait  la  Loi,  tandis  quo 
les  sadducéens,  en  principe  du  moins,  refusaient- de 
rien  reconnaître  en  dehors  de  la  Loi  écrite.  Josèphe, 
Ant.  jud..  XIII,  X,  6  :  Nûp.tu.â  Ttva  -apé3o<7av  T(T>  cr^-M 
o\  'bapto-atot  èx  Tia7£paiv  StaSoYrjç,  arcep  eux  àvavéypaTï-rat 
lv  toîç  Muvœéwç  v<5u.oiç.  Les  Évangélistes  mettent  aussi 
en  relief  ce  caractère  des  pharisiens.  Matth.,  xv,  2; 
Marc,  vu,  3.  Le  Talmud  va  jusqu'à  dire  qu'on  est  moins 
coupable  en  allant  contre  la  Thora  qu'en  rejetant  les 
pr- scriptions  des  scribes.  Sanhédrin,  xi.  3;  cf.  Abolh, 
m,  1 1  ;  v,  8.  Repousser  ces  traditions  c'était  rompre 
ouvertement  avec  les  pharisiens.  Ant.  jud-,  XIII, 
xvi.  2.  Geiger,  Sadducâer  und  Pharisâer,  dans  Jûd. 
Zeilschrift,  t.  n,  ISG3,  est  donc  bien  mal  inspiré  lors- 
qu'il prétend  que  le  pharisaïsme  était  l'image  anticipée 
du  protestantisme.  —  Les  traditions  se  divisaient  en  tra- 
ditions juridiques  (Halacha)  et  en  traditions  historiques 
[llagada).  Voir  MlDRASCH,  t.  iv,  col.  1078-1079.  Sur  les 
unes  et  sur  les  autres  on  peut  consulter  Schûrer,  Ges- 
clnchle  des  jiidischen  Yolkes,  3e  édit.,  t.  m,  1898,  p.  330- 
350.  Pour  constater  à  quelles  minuties  puériles  descen- 
dait la  casuistique  des  pharisiens,  il  n'y  a  qu'à  parcourir 
l'ouvrage  de  J.  de.Pauly  et  Neviasky,  Rituel  du  judaïsme, 


Orléans,  1898-1901,  surtout  fasc.  vi  :  Des  aliments  pré- 
parés par  un  païen.  De  la  ruisselle  d'un  païen. 

2"  Les  pharisiens  et  la  théologie.  — -  Les  pharisiens 
et  les  sadducéens  étaient  en  désaccord  sur  trois  points 
principaux  :  l'immortalité  de  l'àme,  la  résurrection  des 
justes  et  le  libre  arbitre.  —  .4)  L'immortalité  de  l'âme. 
—  Les  sadducéens  étaient  matérialistes  :  ils  n'admet- 
taient ni  anges,  ni  esprits.  Act.,  xxiii,  8.  Ils  affirmaient 
que  l'àme  périt  avec  le  corps.  Josèphe,  Bell,  jud.,  II, 
VIII,  14;  Ant.  jud.,  XVIII,  I,  4:  EaSSouxaîoiç  ri;  ■l-jyx;<j 
).6yoç  o-jvaçaviÇet  toï;  o-wpia'îtv.  Les  pharisiens  au  con- 
traire  étaient  spiritualistes   :    ils  admettaient  la  survi- 
vance des  âmes,  celles  des  méchants  comme  celles  des 
bons.  Josèphe,  Ant.  jud..  XVIII,  i,  3:   'ABâvortov  î^y/jv 
taT;  -{.oyat;  ttitti;  a-j-rot;  £-.vït.    —   B)   La   résurrection 
des  justes.  —  Il  est  évident  que  pour  les  sadducéens  il 
ne  pouvait  être  question  de  résurrection,  puisque  l'âme 
ne  survivait  pas.  Matth.,  xxn,  23;  Marc.,xn,  18,  Luc.,xx, 
27;  Act.,  xxiii,  8.  Les  pharisiens,   de  leur  coté,  ensei- 
gnaient bien  que  les  méchants  sont  punis  dans  l'autre 
monde,  mais  ils  réservaient  aux  justes  seuls  le  privi- 
lège   de    la    résurrection.    Josèphe    exprime    cela    en 
termes  qui  rappellent  la   métempsychose  des  platoni- 
ciens (mais  non  pas  celle  des   pythagoriciens),  Bell, 
jud.,  II,  vin,  14  :  •V^yv/  tSo-av  [ièv  xçOccp-rov  p.E-raëatvetv 
Se  et;  erepov  a'op.a  TT|V  àvaôùjv  (j.ôvr,v,  Ta;  5è  :wv  çoc'jXcov 
àvôim  Tijjuopïa  xo).i"eo-8at.  Mais  ce  texte  est  mis  en  lu- 
mière par  le  rapprochement  de  Ant.  jud., XVIII,  i,  3,  qui 
présente  le  dogme  de   la    résurrection  sous  un  jour 
orthodoxe,  le  seul  qui  cadrât  avec  les  idées  juives.  — 
C)  Le  libre  arbitre.  —  Ici  la  description  de  Josèphe 
est  des  plus  confuses,  parce  qu'il  revêt  les  concepts 
sémitiques  d'une  terminologie  hellénique.  A  l'en  croire, 
les  esséniens  auraient  fait  tout  dépendre  du  destin  :  les 
sadducéens,  tout  rapporté  au  libre  arbitre;  les  phari- 
siens, partie  au  libre  arbitre  et  partie  au  destin,  Ant.  jud., 
XIII,  V,  9  :  Ttvà  xai  o-j  Ttdtv-ra  tîjç  el^apu-évï);  ep-fov  etvat 
).éyovaiv  Ttvà  S'èp'  lau-raiç  onàpY_erv  ffuu.6atveiv  te  xa't  p.r) 
vi'iza'1%'..  Sans  même  parler  de  ce  schématisme  suspect, 
la  notion  du  destin  est  tellement  contraire  aux  idées 
sémitiques  qu'il  est  difficile  de  deviner  ce  que  Josèphe 
a  voulu  dire.  Peut-être  se  rapprocherait-on  de  la  vérité 
en  remplaçant  le  destin  par  la  grâce  et  le  secours  de 
Dieu  ou  encore  par  la  providence  et  la  prédestination. 
Que  tel  soit  bien  le  sens,  le  passage  suivant  le  prouve, 
Bell,  jud.,  II,  vin,  14  :  eificcp(j.évï]  te   xai  t'eû  «posàn- 
-ro-jfft  rcàvTa,  xai   to  jj.èv  jrpàfTerv  rà  Sîxata  xàl  jj.ri  xa-à 
zh    icXetorov    eut    Totç   avpôumot;    xei<r9ai,    (ior^stv    SE   ei; 
ï/.xn-0-i  xai  -r,'i  £caap(x£vr)v.  D'après  cela,  les  esséniens 
auraient  été  fatalistes  ou  mieux  prédestinationistes,  les 
sadducéens  auraient  été  rationalistes  et  précurseurs  de 
Pelage,  les  pharisiens  auraient  tenu  le  juste  milieu  et 
sauvegardé  le  libre  arbitre  de  l'homme  tout  en  recon- 
naissant la  nécessité  du  concours  divin.  Mais,  encore 
une  fois,  il  convient  de  se  défier  de  ce  schématisme. 
3°  Les  pharisiens  et  la  ]>olitique.  —  Aux  yeux  des 
pharisiens  la  religion  primait  tout  :  aussi  ne  furent-ils 
jamais,  à  proprement   parler,  un  parti  politique.   Les 
assidéens,  leurs  ancêtres,  s'étaient  ralliés  aux  Macha- 
bées  aussi  longtemps  que  l'indépendance  de  la  patrie 
fut  une  condition  essentielle  de  la  liberté  religieuse. 
Ce  résultat  obtenu,  ils  se   retirèrent  peu  à  peu  de  la 
lutte  et  ne  suivirent  jamais  les  Asmonéens  dans  leurs 
visées  ambitieuses  de  domination  et  d'agrandissement. 
Il  n'est  pourtant  pas  tout  à  fait  exact  de  dire  que  les 
pharisiens,  par  principe  et  comme  parti  religieux,  tai- 
saient  abstraction   de   la  politique.   Il   y  eut   toujours 
parmi  eux  deux  courants  opposés  :  les  uns  acceptaient 
le  fait  accompli   et  se  soumettaient  à  la   domination 
étrangère,  comme  à  un  châtiment  divin,  aussi  longtemps 
que  la  liberté-  religieuse  leur  était  accordée,  n'attendant 
un  sort  meilleur  que  d'un  événement  providentiel;  les 
autres,  regardant  le  joug  de  l'étranger  comme  essentiel- 


211 


PHARISIENS 


212 


lement  contraire  à  la  théocratie  judaïque  et  aux  privi- 
lèges d'Israël,  épiaient  toutes  les  occasions  de  révolte 
et  comptaient  parmi  les  zélotes  les  plus  ardents.  On  vit 
ces  deux  tendances  rivales  se  manifester  lors  de  l'avè- 
nement d'Hérode  et  au  moment  du  grand  soulèvement 
national  de  l'an  66  de  notre  ère. 

Y.  Lts  PHARISIENS  ET  l'Évangile.  —  1»  Prélude  aux 
hostilités  entre  Jésus  et  les  pharisiens.  —  A)  Saint 
Jean-Baptiste.  —  Jaloux  de  conserver  leur  influence,  les 
pharisiens  étaient  les  ennernis-nés  de  quiconque  ga- 
gnait l'estime  ou  les  sympathies  du  peuple.  Leur  atti- 
tude à  l'égard  du  Baptiste  fut  une  sourde  défiance  et 
peut-être  une  hostilité  déclarée.  Pendant  que  toutes 
les  classes  de  la  société  accouraient  en  masse  au  Jour- 
dain pour  y  recevoir  le  baptême  du  Précurseur,  les 
pharisiens  et  les  sadducéens  s'y  rendaient  aussi,  mais 
pour  l'épier  et  le  prendre  en  faute.  C'est  du  moins 
l'impression  laissée  par  le  récit  de  saint  Matthieu  rap- 
portant les  paroles  sévères  que  leur  adresse  Xotre-Sei- 
gneur,  m,  7  :  t  Race  de  vipères,  qui  vous  a  enseigné  à 
fuir  la  colère  imminente?  Faites  donc  de  dignes  fruits 
de  pénitence.  »  Dans  saint  Luc,  m,  7,  ces  paroles  sont 
adressées  a  la  foule  en  général  ;  mais  le  premier  Évan- 
gile nous  montre  qu'elles  visaient  principalement  les 
pharisiens  et  les  sadducéens.  Nous  ne  voyons  pas  ce- 
pendant qu'ils  aient  trempé  dans  le  complot  contre  la 
vie  du  Baptiste  :  les  rancunes  d'Hérode  Antipas  et  la 
haine  d'Ilérodiade  prévinrent  leur  vengeance. 

/.'  <>,  njine  du  conflit  entre  Jésus  et  des  pharisiens. 
—  Le  solennel  témoignage  que  Jean  rendit  à  Jésus 
dut  rendre  celui-ci  suspect  aux  pharisiens:  mais  il 
n'était  pas  besoin  de  cela  pour  exciter  leur  antipathie. 
Il-  ne  pouvaient  manquer  de  s'apercevoir  que  la  popu- 
larité- du  nouveau  thaumaturge  amoindrissait  leui 
influence  et  que  sa  doctrine  était  le  contrepied  de  leur 
enseignement.  Le  discours  sur  la  montagne  contii  ut 
déjà  la  condamnation  de  leur  formalisme,  v.  20  :  i  Je 
vous  le  dis,  si  votre  justice  n'est  pas  plus  abondante 
que  celle  des  scribes  et  des  pharisiens,  vous  n'entrerez 
pas  dans  le  royaume  des  cieux.  »  L'autorité  avec  la- 
quelle Jésus  enseignait  faisait  l'admiration  des  foules 
qui  ne  pouvaient  s'empêcher  de  la  mettre  en  contraste 
avec  la  manière  sournoise  et  embarrassée  des  scribes 
et  des  pharisiens.  Matth..  vu,  18-29:  cf.  .Marc.  i.  22. 
Ceux-ci  avaient  du  remarquer  dans  tout  le  Sermon  sur 
la  montagne,  en  particulier  dans  le  parallèle  entre 
l'ancienne  et  la  nouvelle  loi.  Matth.,  v.  17-48,  un  anta- 
gonisme latent  dirigé  contre  eux.  et  la  déclaration  de 
qu'il  n'était  pas  venu  abolir  la  loi  mais  l'accom- 
plir ou  la  compléter,  n'était  pas  fruit-  p  m  les  rassurer, 
nilit,  désormais  inévitable, éclata  à  l'occasion  de  la 
guérison  du  paralytique.  Avant  de  lui  rendre  la  santé 
du  corps,  Jésus  lui  avait  dit  :  «  Alun  Mis.  1rs  péchés  te 
sont  remis.  »  Et  les  pharisiens  présents  de  s'écrier 
aussitôt  :  «  Celui-là  blasphème  :  qui  peut  remettre  les 
;  i  lieu  seul?    A  la  vérité,  sainl  Matthieu, 

Vin,  3,  et  saint  Marc,  il,  6,  ne  mentionnent  en  cet  endroit 
que  les  scribes,  mais  sainl  Luc  nomme  expressément  les 
scribes  et  les  pharisiens,  v.  21.  on  ce  qui  est  pour  lui  la 
chose  les  pharisiens  et  les  docteurs  de  la  loi 
lâoxaXoi),  et  il  ajoute  qu'ils  étaient  venus  de  la 
Galilée,  de  la  Judée  el  de  Jérusalem,  v,  17.  sans  aucun 
doute  dans  des  vues  malveillantes. 

2»  Lutte  ouverte  entre  Jésus  et  les  pharisiens.  — 
A)  Les  griefs  des  pharisiens.  —  Les  trois  griefs  princi- 
paux -ont  rapportés  par  les  Synoptiques  dans  le  même 
ordre  et  rattachés  aux  mêmes  circonstances  extérieures; 
mais  comme  saint  Matthieu  intercale,  entre  les  deux 

derniers,   divers  événe nts,  il  n'est  pas  sûr  que  les 

i  ■■listes  entendent  marquer  une  succession  chro- 

que.       a   Premier  grief:  <  les  péchés. 

La  guérison  du  paralytique  amena  le  premier  conflit 
entre  Jésus  et  les  pharisiens.  Quand  Jésus  ditàl'infii 


■  Confiance,  mon  tils,  tes  péchés  te  sont  remis,  »  ils 
s'écrièrent  :  «  Celui-là  blasphème  !  et  le  miracle  fait  in- 
continent par  le  Sauveur  ne  leur  dessilla  point  les  veux. 
Matth.,  îx.  1-8:  Marc.  n.  1-12:  Luc.  v.  11-26.  Saint'Mat- 
thieu  et  saint  Marc  attribuent  cette  réflexion  aux  scribes  ; 
saint  Luc.  aux  scribes  et  aux  pharisiens  :  la  variante 
est  sans  importance.  —  b)  Deuxième  grief  :  fréquen- 
tation des  pécheurs.  Peu  de  temps  après,  Jésus  et  ses 
disciples  assistaient  au  festin  donné  par  saint  Matthieu 
récemment  converti.  Les  pharisiens  se  scandalisèrent 
de  les  voir  en  compagnie  de  païens  et  de  publicains  ; 
mais  Jésus  leur  ferma  la  bouche  par  ces  paroles  :  «  Ce 
ne  sont  pas  les  hommes  bien  portants  qui  ont  besoin 
du  médecin,  mais  les  malades...  Je  suis  venu  appeler 
les  pécheur-  [à  la  pénitence)  et  non  pas  les  justes.  » 
Matth.,  ix.  9-13:  Marc,  n,  13-17;  Luc.  v,  27-32.  Ici 
saint  Matthieu  ne  nomme  pas  les  pharisiens;  les  deux 
autres  Synoptiques  nomment  les  pharisiens  et  les 
scribes.  Bans  la  même  occasion,  on  fit  un  grief  i  Jésus 
de  ne  pas  jeûner,  lui  et  ses  disciples.  Saint  Matthieu, 
il  est  vrai,  IX,  11,  attribue  ce  reproche  aux  disciples  de 
Jean-Baptiste;  mais  la  manière  dont  le  grief  est  for- 
mulé montre  que  ces  disciples  de  Jean-Baptiste  étaient 
de  connivence  avec  les  pharisiens  ou  qu'ils  étaient  pha- 
risiens eux-mêmes.  En  effet,  Marc.  Il,  18,  et  Luc.  v,  33, 
mentionnent  expressément  les  pharisiens.  —  c)  Troi- 
sième  grief  :  violation  </«  sabbat.  Il  est  très  vraisem- 
blable que  les  pharisiens,  si  pointilleux  sur  l'observa- 
tion exacte  du  sabbat,  incriminèrent  souvent  la  con- 
duite de  Jésus.  Les  Synoptiques  rapportent  à  ce  sujet 
deux  faits  caractéristiques,  qu'ils  racontent  dans  le 
même  ordre  et  à  peu  prés  dans  les  mêmes  tenue-.  1  n 
jour  de  sabbat,  les  disciples  traversant  un  champ  di  blé 
presque  rnùr  arrachaient  quelques  épis  pour  apaiser  leur 
faim  et  les  mangeaient  après  les  avoir  broyés  dans  leurs 
doigts.  Aussitôt  les  pharisiens  de  crier  à  la  violation  du 
repos  sabbatique.  Ils  ne  se  scandalisent  pas  de  voir  les 
disciples  cueillir  quelques  épis  dans  un  champ  étran- 
ger —  car  l'usage  et  la  Loi  elle-même  le  permettaient 
—  mais  de  les  voir  préparer  leur  nourriture  un  jour 
de  sabbat,  contrairement  à  leur  absurde  interprétation 
de  la  Loi.  Jésus  leur  répond  qu'ils  ne  comprennent 
rien  à  l'esprit  de  la  législation  :  Misericordiam  oola 
et  non  sacrificium ;  que  la  Loi  n'est  pas  faite  pour  les 
cas  de  nécessité,  comme  le  prouve  l'exemple  de  David 
consommant  les  pains  de  proposition;  que  d'ailleurs 
le  I  ils  de  l'Homme  est  maître  du  sabbat  et  peut  en  dis- 
penser qui  il  veut.  Matth.,  zii,  1-8;  Marc.,  n.  23-28;  Luc, 
vi,  1-6.  —  L'autre  fait  met  encore  plus  en  relief  l'aveugle 
prévention  des  pharisiens.  Jésus  allai!  guérir  un  | 
I  y  tique  :  il  lui  suffisait  pour  cela  d'une  parole  el 
d'un  acte  de  volonté.  Or,  les  pharisiens  s'indignaient 
d'avancede  cette  prétendue  violation  du  i         Sau- 

veur les  confond  en  leur  rappelant  qu'ils  n'hésitent 
pas  eux-mêmes  à  relever  une  brebis  tombée  dans  un 
fossé.  Combien  [dus  est-il  permis  de  soulager  un 
malheureux.  Matth..  zii,  9-1  i  :  Marc,  m,  1-6:  Luc.  vi. 
6-11. 

li)  Les  embûches  des  pharisiens.  —  Plusieurs  fois  les 
pharisiens,  soit  seulssoit  nnisaux  sadducéens,  essayé]  i  al 
de  prendre  Jésus  en  défaut  et  de  le  faire  tomber  dans 
un  piège.  Apres  le  miracle  de  la  multiplication  des  sept 
pains,  ils  lui  demandent  un  signe  du  ciel  ».  Marc  et 
Matthieu  noient  expressément  que  c'était  pour  le 
tenter  t.  Marc,  \ ni.  Il  (jtEtpiÇovTe;  otùrév);  Matth., 
XVI,  I.  Jésus,  qui  accomplissait  sous  leurs  yeux  pr. 
sur  prodige,  refusa  de  satisfaire  leur  curiosité  malveil- 
lante et  mil  aussitôt  en  garde  ses  disciples  contre 
levain  des  pharisiens  el  d'Hérode  ■  .  comme  parle  Marc, 
vin,  15,  ou  contre  le  levain  îles  pharisiens  et  des 
sadducéens  »,  comme  s'exprime  Matthieu,  xvi.  6,  ce 
qui  montre  que  les  ennemis  du  Sauveur  s'étaient  déjà 
coalisés.  II?-  esp  i  dent,  si   Jésus  ne  fai.-.dt  pas  droit  à 


213 


PHARISIENS 


214 


leur  requête,  persuader  aux  foules  que  c'était  un  faux 
prophète,  incapable  de  prouver  sa  mission  divine.  —  La 
seconde  embûche  fut  encore  mieux  tendue.  Ils  lui  deman- 
dèrent s'il  était  possible  de  renvoyer  sa  femme  pour 
n'importe  que!  motif.  Ils  étaient  sûrs  de  sa  réponse  né- 
gative et  par  conséquent  assurés  de  le  mettre  en  con- 
tradiction avec  la  loi  de  Moïse  qui  avait  autorisé  le 
divorce,  Marc,  x,  2-11;  Matth.,  xix,  1-9;  Jésus  répéta 
ce  qu'il  avait  dit  dans  son  sermon  sur  la  montagne, 
Matth.,  v,  31-32;  cf.  Luc,  xvi,  18,  rejetant  la  tolérance 
du  divorce  sur  l'imperfection  de  la  loi  mosaïque  et  sur 
la  dureté  de  cœur  des  Juifs.  —  La  conspiration  la  mieux 
ourdie  fut  cependant  la  troisième.  Fallait-il  ou  non 
payer  le  tribut  à  César?  Matth.,  xxn,  15-22;  Marc,  xn, 
13-17;  Luc,  xx,  20-26.  En  disant  non.  Jésus  se  posait 
en  adversaire  de  l'ordre  de  choses  établi  et  devenait 
criminel  politique;  en  disant  oui,  il  s'aliénait  les  sym- 
pathies d'un  grand  nombre  de  ses  auditeurs.  On  pourrait 
deviner,  alors  même  que  saint  Matthieu,  xxn,  16,  et 
saint  Marc,  xn,  13,  n'en  feraient  pas  mention  expresse, 
que  les  partisans  d'Hérode  étaient  ici  de  concert 
avec  les  pharisiens.  Mais  les  sadducéens  eux-mêmes 
n'étaient  pas  loin  ;  car  ils  vinrent  à  la  rescousse  dès 
que  Jésus  eut  fermé  la  bouche  à  ses  autres  adversaires 
et  essayèrent  de  l'embarrasser  sur  le  dogme  de  la  ré- 
surrection en  lui  posant  le  cas  d'une  femme  qui  aurait 
eu  successivement  sept  maris.  Matth.,  xxn, 34-40 ;  Marc, 
xn,  28-34;  Luc,  xx,  39-40.  Presque  aussitôt  après,  un 
scribe  ou  légiste  voulut  savoir  quel  était  le  plus  grand 
des  commandements.  Le  récit  de  saint  Marc,  xn,  28,  34, 
ne  fait  pas  supposer  d'intentions  malveillantes,  mais 
celui  de  saint  .Matthieu,  xxn,  35-40,  note  le  dessein  de 
prendre  Jésus  en  défaut  (mipriÇiov  x\k6\).  A  partir  de 
ce  jour  les  scribes  et  les  pharisiens  cessèrent  de  «  ten- 
ter Jésus.  Matth.,  xxn,  16.  Mais  la  mesure  de  leurs 
iniquités  était  comble  et  leur  condamnation  était  prête 
à  fondre  sur  eux.  Cf.  Luc,  xvm,  10-14. 

3°  Le  dénouement  de  la  lutte.  —  A)  Le  grand  dis- 
cours contre  les  pharisiens.  —  Ce  fut  seulement  deux 
ou  trois  jours  avant  sa  passion,  que  Jésus  prononça  le 
terrible  réquisitoire  enregistré  par  les  Évangélistes.  Ce 
discours  est  placé  par  les  trois  Sypnoptiques  en  oon- 
nexion  avant  la  dernière  tentative  des  pharisiens  ;  mais 
tandis  que  saint  Marc  et  saint  Luc  se  contentent  de 
l'indiquer  sans  le  reproduire,  Marc,  XII,  38-40,  Luc, 
xx,  15-57,  saint  Matthieu  lui  donne  un  développement 
et  une  forme  schématique,  où  l'on  ne  peut  nier  le  des- 
sein de  résumer  et  de  coordonner  les  principales  ac- 
cusations du  Sauveur  contre  ses  perfides  ennemis.  Sept 
fois  Jésus  renouvelle  ses  objurgations  en  commençant 
toujours  par  la  formule  :  «  Malheur  à  vous,  scribes  et 
pharisiens  hypocrites.  »  Matth.,  xxm,  13,  15,  23,  25,  27, 
29.  Une  seule  fois,  y.  16,  la  formule  change  :  Vœ  vobis 
duces  cseci.  Le  huitième  vas  qui  se  trouve  dans  la  Yul- 
gate  et  dans  un  certain  nombre  de  manuscrits  grecs, 
y.  14,  est  très  probablement  interpolé  d'après  .Marc,  xn, 
20,  et  Luc,  xx,  47;  en  effe-t,  non  seulement  il  fait  défaut 
dans  les  meilleurs  manuscrits,  mais  il  interrompt  évi- 
demment la  suite  des  idées.  —  Jésus-Christ  reproche 
aux  Pharisiens  :  1°  de  fermer  aux  autres  le  royaume 
des  lieux,  c'est-à-dire  l'accès  de  l'Église,  sans  y  entrer 
eux-mêmes;  2°  de  parcourir  la  terre  et  les  mers  à  la 
recherche  d'un  prosélyte  pour  en  faire  un  fils  de  per- 
dition; 3°  d'enseigner  que  le  serment  fait  par  le 
Temple  ou  par  l'autel  est  invalide  et  que  le  serment 
fait  par  l'or  du  Temple  ou  par  la  victime  posée  sur 
l'autel  est  valide;  4»  de  payer  exactement  la  dîme  de  la 
menthe,  de  l'anis  et  du  cumin  et  de  négliger  la  justice 
et  la  miséricorde  ;  5"  de  laver  soigneusement  les  vases 
et  les  ustensiles  et  de  compter  pour  rien  l'impureté  de 
l'âme;  6"  de  ne  faire  attention  qu'à  l'extérieur  et  aux 
dehors  et  d'être,  au  fond  du  cœur,  comme  des  sépul- 
cres   blanchis;   7°    d'élever    aux    prophètes    de     ma- 


gnifiques tombeaux  et  de  les  persécuter  ou  de  les 
mettre  à  mort.  Il  termine  par  cette  accablante  apos- 
trophe :  «  Serpents,  race  de  vipères,  comment  échap- 
perez-vous  à  la  condamnation  de  la  géhenne?  »  On 
peut  lire  dans  les  commentaires  de  Knabenbauer,  de 
Schegg  ou  de  Schanz,  les  textes  rabbiniques  justifiant  et 
expliquant  ces  imputations  du  Sauveur.  Voir  M"  Klin- 
tock,  Cyclopœdia  of  biblical...  Litcrature,  t.  vin,  1889, 
p.  69-70,  des  détails  curieux  sur  les  cas  d'impureté  lé- 
gale et  le  payement  des  dîmes. 

B)  La  revanche  des  pharisiens.  —  Une  circonstance 
assez  significative  c'est  que,  dans  les  jours  qui  précèdent 
immédiatement  la  passion,  les  pharisiens  cessent  de  se 
montrer.  Dans  le  récit  même  de  la  passion,  les  Évangé- 
listes ne  les  nomment  plus  (sauf  Jean,  xvm,  3,  pour 
l'expédition  nocturne  de  Gethsémani  et  Matthieu,  xxvn, 
62,  quand  il  s'agit  de  faire  garder  le  sépulcre).  Il  les 
remplacent  par  ,les  scribes,  c'est-à-dire  par  les  repré- 
sentants des  pharisiens  au  sein  du  sanhédrin.  11  est 
remarquable  que  les  sadducéens  s'effacent  aussi  et  que 
les  princes  des  prêtres,  c'est-à-dire  les  chefs  du  parti 
sadducéen,  qui  entraient  dans  le  sanhédrin,  prennent  leur 
place.  Maintenant  les  scribes  et  les  princes  des  prêtres 
sont  pleinement  d'accord  contre  leur  commun  adversaire. 
Ils  ont  su  gagner  les  anciens,  les  notables  qui  ne  sont 
ni  scribes  ni  prêtres  et  qui  forment  un  tiers  du  san- 
hédrin. La  coalition  des  adversaires  de  Jésus  datait  de 
loin.  Dés  le  début  du  ministère  public,  les  pharisiens 
s'étaient  concertés  avec  les  hérodiens  sur  les  moyens  de 
le  perdre.  Matth.,  xxn,  16;  Marc,  m,  6;  cf.  XII,  13.  Pour 
atteindre  ce  but,  les  pharisiens  et  les  sadducéens  ou- 
bliaient leurs  rivalités  et  leurs  querelles.  Matth.,  XVI, 
1,  6,  11,  12  ;  xxn,  31-.  Mais,  en  ce  moment,  leur  entente 
est  parfaite  et  leur  plan  arrêté.  «  Les  princes  des  prê- 
tres, dit  saint  Luc,  xix,  47-48,  et  les  scribes  et  les  pre- 
miers du  peuple  cherchaient  à  le  perdre  ;  mais  ils  ne 
savaient  comment  faire,  car  tout  le  peuple  était  sus- 
pendu à  ses  lèvres,  o  Désormais  les  trois  fractions  du 
sanhédrin  marchent  toujours  ensemble.  Luc,  XX,  1; 
xxn,  66;  Marc,  xiv,  43,  53;  Matth.,  xxvn,  41.  Mais  on 
voit  que  l'aristocratie  sacerdotale  joue  le  rôle  principal 
et  dirige  l'action. 

4°  Les  pharisiens  et  l'Église  naissante.  —  La  mort 
de  Jésus  semble  avoir  assouvi  les  rancunes  des  phari- 
siens, tandis  que  la  haine  des  sadducéens,  loin  de 
s'apaiser,  ne  cessait  de  croître.  Ceux-ci,  vivant  du  temple 
et  de  l'autel,  étaient  profondément  remués,  nonobstant 
l'indifférentisme  religieux  d'un  grand  nombre  d'entre 
eux,  par  tout  ce  qui  menaçait  la  religion  nationale.  Les 
disciples  n'eurent  pas  d'ennemis  plus  irréconciliables. 
Dans  le  contlit  qui  ne  tarda  pas  à  se  produire,  ce  fut  un 
pharisien,  Gamaliel,  qui  prit  publiquement  la  défense 
des  Apôtres  et  lit  entendre  raison  à  leurs  persécuteurs  : 
au  contraire,  l'aristocratie  sacerdotale,  composée  de 
sadducéens  (Act.,  v,  17  :  Princeps  sacerdotum  et  omnes 
qui  cian  illo  erant  :  <jnse  est  hseresis  Sadducseorum ;  cf. 
v,  24j,  avait  pris  l'initiative  des  mesures  de  rigueur. 
Act.,  v,  17-42.  Plus  tard  saint  Paul,  poursuivi  pour  in- 
fraction à  la  Loi  qui  interdisait  d'introduire  des  étran- 
gers dans  le  Temple,  s'appuya  résolument  sur  le  parti 
des  pharisiens  et  se  fit  gloire  d'avoir  été  jadis  pharisien 
lui-même.  Act.,  xxm.  6-10;  cf.  xxn,  3.  Il  ne  faut  pas 
méconnaître  ce  qu'il  y  avait  de  sérieux  dans  le  phan- 
saïsme.  Si  le  zèle  des  pharisiens  était  souvent  aveugle 
ou  mal  éclairé,  il  n'en  était  pas  moins  sincère.  Les  con- 
victions fortes  au  service  de  la  passion  sont  plus  faciles 
à  tourner  au  bien  qu'un  scepticisme  armé  d'indifférence. 
Saint  Paul  dépassait  tous  ses  compatriotes  par  l'ardeur 
de  son  pharisaïsme  :  malgré  cela  —  ou  plutôt  a  cause 
de  cela  —  la  grâce  divine  eut  vite  raison  de  lui.  Il  est 
à  croire  qu'une  partie  de  l'église-mère  de  Jérusalem 
se  recruta  au  sein  des  pharisiens.  Ainsi  s'explique  l'at- 
tachement aux  pratiques  de  l'ancienne  Loi  qui  la  carac- 


215 


PHARISIENS 


216 


térisa  si  longtemps.  Act..  il,  16-47  :  m,  1  ;  xxi.  20,  etc. 
Ce  fut  un  très  grand  danger  pour  l'Église  au  berceau. 
perçut  bientôt  que  les  pharisiens,  en  embrassant 
la  religion  du  Christ,  n'avaient  pas  dépouillé  le  parti- 
cularisme c|ui  était  leur  caractère  dominant.  L'assem- 
blée des  Apùtres  à  Jérusalem  fut  rendue  nécessaire  grâce 
à  leurs  agissements;  tout  l'ait  penser  que  le  conllit 
d'Antioche  fut  provoqué  par  eux,  et  l'on  peut  san-  té- 
mérité les  soupçonner  d'être  entrés  dans  les  complots 
qui  essayèrent  d'entraver  l'œuvre  de  Paul  et  l'admission 
des_ Gentils  dans  l'Église.  Act.,  xv,  5.  Cf.  J.  Thomas, 
L'Église  et  les  judaîsants  ù  l'âge  apostolique,  dan-;  les 
Mélanges  d'histoire  et  de  littérature  religieuse,  in-8», 
Paris,  1899,  p.  1-190. 

VI,  Traits  caractéristiques  du  pharisien.  —  o  I  li- 
veloppée  comme  d'un  étroit  réseau  par  les  six  cent 
treize  prescriptions  du  code  mosaïque  renforcées  de 
traditions  sans  nombre,  la  vie  du  pharisien  était  une 
intolérable  servitude.  Les  purifications  rituelles  pres- 
crites à  la  suite  des  souillures  que  causait  le  seul  con- 
tact d'objets  impurs,  remplissent  plusieurs  traités  du 
Talmud  :  par  exemple  tout  le  sixième  et  dernier  seder 
de  la  Mischna  intitulé  Teharôth  et  comprenant  douze 
traités.  Impossible  de  quitter  sa  maison,  de  prendre  de 
la  nourriture,  de  faire  une  action  quelconque,  sans 
s'exposer  à  mille  infractions.  La  peur  d'y  tomber  para- 
lysait l'esprit  et  oblitérait  le  sens  supérieur  de  la  mo- 
ralité naturelle.  Toute  la  religion  dégénérait  en  un 
formalisme  mesquin.  L'homme  était  tenté  de  se  croire 
l'artisan  de  sa  propre  justice;  il  ne  devait  rien  qu'à 
lui-même;  il  devenait  le  créancier  de  Dieu.  A  quoi  bon 
le  repentir,  la  prière  ardente  et  humble,  les  soupirs 
vers  le  ciel  du  pécheur  et  du  publicain?  N'était-il  pas. 
lui,  le  juste  qui  jeûnait  deux  fois  par  semaine,  le  lundi 
et  le  jeudi,  selon  la  coutume  de  sa  secte,  qui  payait 
exactement  la  dîme  de  la  menthe,  de  l'aniset  du  cumin, 
qui  n'oubliait  jamais  aucun  rite  traditionnel?  Le  pha- 
risaïsme  nourrissait  l'amour-propre,  la  présomption  et 
l'orgueil.  Il  fomentait  aussi  l'hypocrisie.  L'idéal  du  pha- 
risien était  élevé,  mais  il  n'avait  pour  l'atteindre  que  son 
orgueil.  Ce  mobile  ne  suffisant  pas,  sa  seule  ressource 
était  de  dissimuler  ses  défaillances  et  de  les  tourner 
en  vertus  devant  le  vulgaire  i  oui  hâ-ârés),  objet  de  ses 
craintes  et  de  ses  mépris.  Quels  stratagèmes  decasuiste 
retors  pour  tempérer  la  rigueurdu  jeûne,  puni-  modérer 
l'incommodité  du  repos  sabbatique  !  Ainsi  le  traite  Er\  - 
'•m  permet  «le  placer  un  domicile  fictif  au  terme  du 
autorisé  un  jour  de  sabbat  pour  le  prolonger 
d'autant  et  d'unir  fictivement  plusieurs  domiciles  pour 
porter  des  aliments  de  l'un  dan»  l'autre,  sans  enfreindre 

la  loi  du  repos,  i  Voir  F.  Prat,  77 gie  de  saint 

p.  33-34,  el  comparer  Bousset,  Die  Religion  des  Juden- 
tums,  Berlin,  1903,  Vie  Frommen,  p.  161-168.  Les  pré- 
tentions   exclusives  des    pharisiens   a   la  justice  I 

leur  suffisance,  leur  présomption,  li  ur  ostentation,  leur 
i   en    un    mot.   ne  sont  gui  tés.   Sur  ce 

point,  les  accu  ations  de  I  Évangile  el  h   n  quisitoire  de 
sainir. ml  surtout  Rom.,ix,31-32;  x,  1-4)  se  trouvent  plei- 
nement justifiés.  -Mais  il  s'esl   trouvé  des  ailleurs  pour 
nier  la  sincérité  du  portrait  que  l'Évangile  nousti 
leur  hypocrisie.  Il  ne  sera  donc  pas  hors  de  propo 

autorité   du  Talmud  qui  est,  comme  nous 
l'avons  dit,  l'œuvre  de  pharisiens,  Le  Talmud  de  Jéru- 

i   bien  que  Celui  de    Uahv  h. ne.  distingUl 
espèces  de  pharisiens  dont    la    dernière  seulement,   ou 
luplu    h      di  :.    dei  nii  i  es .  sonl  exemptes  de  du  - 
.  Voici  d'abord  le  passage  du  Talmud  de  J 
lem,  d'après  M.  Schwab,  /  ••  Berakholk,  Paris, 

1871,  p.  I7l  :  g  11  ;  a  sepl  pharisiens  :  I  celui  qui 
accepte  la  loi  comme  un  fardeau;  -  celui  qui  agit  par 
intérêt  ;.'>■  celui  qui  se  frapj  outre  le  murpour 

éviter  la  vue  d'une  fen 
talion  ;   5°  celui  qui  prie  de  lui  indiquer  une  bonne 


action  à  accomplir;  6"  celui  qui  agit  par  crainte  et 
7»  celui  qui  agit  par  amour.  En  voici  une  explication 
plus  détaillée  :  le  premier  ressemble  à  quelqu'un  qui 
chargerait  les  commandements  divins  sur  les  épaules 
pour  les  transporter;  le  deuxième  à  celui  qui  dirait  : 
prêtez-moi  de  l'argent  pour  que  j'accomplisse  le  pré- 
* .  pN  :  le  troisième  :  je  vais  accomplir  ce  devoir  reli- 
gieux, puis  me  permettre  une  transgression  légale  et 
les  contrebalancer  l'un  par  l'autre;  le  quatrième  semble 
dire  :  je  me  rends  compte  de  tout  ce  que  j'ai  el 
par  bonne  volonté  que  j'obéis  à  la  religion  :  le  cin- 
quième qui  a  conscience  de  ses  devoirs,  tâche  d'( 

liés  par  sa  bonne  conduite:  le  sixième  agit  par 
crainte  comme  Job;  le  septième  par  amour  comme  Abra- 

:  ce  dernier  degré  est  le  meilleur  de  tous,  i  Les 
explications  du  Talmud  de  Babylone,  Sota,  22  b  et  les 
définitions  de  VA ruch  diffèrent  très  sensiblement. Voir 
Lightfoot,  Horœ  hebraicss  et  talmudicse,  sur  Mat  th..  m, 
7,  Works,  Londres,  I684,  t.  n.  p.  125.  Les  énonciations 
sibyllines  des  deux  Talmuds  sont  diversement  inter- 
prétées. Le  nom  de  la  première  classe,  par  exemple, 
>" -•  ons,  est  dérive  par  le  Talmud  de  Babylone  de  DSW, 
o  Sichem  u,  et  non  de  D3~,  Sekém,  «  épaule  »,  et  expliqué  : 
«  qui  accomplit  la  loi  à  contre-cœur,  comme  les  Sichémi- 
tes,  Gen.,  xxxiv,  10,  reçurent  la  circoncision.  »  La  se- 
conde •:-:  ons,  «  le  pharisien  qui  hésite  »,  désignerait 
le  pharisien  qui  dirait  à  celui  qui  demande  un  ser- 
vice :  «  Attendez  un  peu;  je  suis  occupé  à  faire  une  bonne 
action,  a  La  cinquième  classe  voudrait  dire  d'après 
VAruch  :  ■  Personne  ne  peut  me  montrer  que  j'ai  mal 

i.'uoi  qu'il  en  soit  de  ces  commentaires,  non- 
vons  conclure  de  ces  textes  que  beaucoup  de  ceux  qui 
se  disaient   pharisiens  obéissaient  à   des  mobiles  peu 
avouables. 
Les  jugements  des  auteurs  sur  les  pharisiens  sont 

divergents.   Pour  certains,  le  pharisaïsme  aurait 
représenté   l'orthodoxie  juive.   «  Les  Pharisiens 
taienl  fidèlement   les  aspirations,  les  idées  du  pi 
et  d'un  autre  côté  ils  exerçaient,  par  leur  en 
et  leur  autorité,  sur  ces  mêmes  idées    une  inlluence 
très  grande.  Toutes  les  faces  du   caractère    national, 
favorables  et  défavorables,  toutes  les  nuances  de  l'es- 
prit public  se  retrouvaient  en  eux.  »  Dollinger,  l'aga- 

el  judaïsme,  trad.  frain;.,  Bruxelles,  1858,  t.  IV, 
p.  130.  Selon  d'autres,  les  sadducéens  auraient  été  les 
conservateurs  tandis  que  les  pharisiens  auraient  incarné 
l'idée  de  progrès.  Kohler,  dans  The  Jeuish  Luc; 
dut.  t.  ix.  1905,  p.  662-665,  Ces  vues  en  apparence  con- 
tradictoires ne  sont  pas  inconciliables.  Sur  beaucoup 
de  points,  les  sadducéens,  s'attachant  à  la  lettre  de  la 
Loi,  pouvaient  passer  pour  plus  conservateurs;  tandis 
que  les  traditions  phaiisiennes.  entendues  au  sens  large 
comme  enseignement  ou  opinion  des  sages,  avaient  l'air 
d'innovations.  Dans  le  droit  criminel  par  exemple,  les 
saddui  nt  plus  rigorishs;    ils    appliquaient, 

sans  distinction  el  sans  miséricorde,  la  peine  du  lalion  : 
les  pharisiens  tempéraient  cette  rigueur  et  admettaient 
des  compensations  pécuniaires.  Comparez  Josèphe, 
Ant.  />"l..  XIII,  x.  6  :  A/>.t,>;  -z  v.x:  pûaei  irpbç  -x;  /.',- 
/.iffci;  i-:i:v.&>;  ë/outjiv  ol  $aptcratoi.  lieli.  jitd.,  II,  vin, 
sadducéens  sonl  inoins  sociables  et  plus  rudes 
i  apports)  \Ant.ju  '.,  XX,  ix,  1  :  tïcri  (ol  Ea8- 
S'jxatoi  itsp'i  -1:  xv.7£'.:  i'o|ioi  r.xyx  -xi-x:  -.'i^;  'IouSafouf. 
—  D'un  autre  côté,  les  pharisiens  faisaient  appel  à  leurs 
traditions  pour  atténuer  l'incommodité  du  repo 
batique  i  t  pour  écarter  l'obligation  des  l .  m  pie 

prescrites  par  la    Loi,   Leur  but   était  de  transformer 
ejour  du  Seigneur  en  jour  de  fête  et  en  jour  de  joie, 
dont  nous  avons  parlé  plus  haut  étaient 
destinées  à  les  j  aider.  En  tout  cela,  les 

surtout  de  la  fréquentation  et  du  service 
voulaient  qu'on  s'en  tint  à  la  lettre  de  la 
Thora. 


217 


PHARISIENS   —   PHAROS 


218 


VII.  Bibliographie.  —  Ugolini,  Trihasresium  sive 
dissertatio  de  tribus  sectis  Judseorum  (dans  Thésaurus 
antiq.  sacr.,  t.  xxip.  et  Triglandius,  Trïum  scriptorum 
illustrium  de  tribus  Judseorum  sectis  syntagma, 
1703,  ont  recueilli  un  certain  nombre  d'anciennes  dis- 
sertations sur  les  pharisiens;  Carpzov,  Apparatus  hi- 
ttorico-crilicus  antiquitatum  sacri  Codicis,  rlelmstedt, 
L748,  p.  173-215,  en  donne  la  bibliographie.  Parmi  les 
monographies  plus  récentes  on  peut  citer:  Grossmann, 
De  Pharisseistno  Judseorum  Alexandrino,  Leipzig, 
1816-1830;  De  collegio  Pharisseorum,  Leipzig,  1851; 
Biedermann,  Pharisâer  und  Sadducàer,  Zurich,  1S54; 
Wellhausen,  Die  Pharisâer  und  Sadducàer,  Greifs- 
wald,  1874;  Cohen,  Les  Pharisiens, 2 in-80,  Paris,  1877; 
Montet,  Essai  sur  les  origines  des  partis  sadducêen  et 
pharisien  et  leur  histoire  jusqu'il  la  naissance  de 
Jésus-Christ,  Paris,  1883;  Narbel,  Étude  sur  le  parti 
pharisien,  son  origine  et  son  histoire,  Paris,  1891; 
Elbogen,    Die  Religionsanschauung   der    Pharisâer, 


Encyclopsedia,  t.  ix,  1905,  p.  661-666.  —  Comme  ar- 
ticles de  revues,  nous  devons  nous  borner  à  signaler  : 
Montet,  Le  premier  conflit  entre  Pharisiens  et  Saddu- 
céens,  dans  le  Journal  asiatique,  1887,  p.  U 5-423; 
Hanne,  Die  Pharisâer  und  Sadducàer  als  politische 
Parteien,  dans  Zeitschrift  fur  wissensch.  Theol.,  Halle, 
1867;  Muller,  Pharisâer  und  Sadducàer  oder  Judais- 
mus  und  Mosaismus,  dans  les  comptes'remlus  de  l'Acad 
de  Vienne,  philos,  et  hist.,  t.  xxxv,  1860,  p.  95-164;Gei- 
ger,  Sadducàer  und  Pharisâer,  dans  Jûd.  Zeitschrift, 
I.  il,  1863.  p.  11-51;  Krûger,  Beitrâge  zur  Kenntniss 
der  Pharisâer  und  Essener,  dans  Theolog.  Quartal- 
.si7iri/'/,Tubingue,  1891.  p.  431-496.  V.   Pbat, 

PHARMACIEN  (hébreu  :  rôqêah;  Septante  :  à 
[i-jpv]/6;;  Vulgate  :  unguentarius),  celui  qui  prépare  les 
remèdes  (fig.  40).  Le  nom  est  le  même  que  celui  du 
parfumeur,  à  cause  des  préparations  à  l'huile  dont  l'un 
et  l'autre  s'occupaient  principalement.  Le  mot  rôqêah 


40.  —  Préparation  et  administration  des  remèdes.  —  Une  peinture  découverte  dans  la  maison  des  Vettii  à  Pompéi  représente 
sous  la  forme  d'Amorini,  te  niedicus  qui  chez  les  anciens  préparait  et  administrait  les  remèdes.  —  A  droite  est  un  pres- 
soir d'où  jaillit  l'huile  médicinale  dans  un  petit  bassin  circulaire.  De  chaque  côté  deux  Amorini  tiennent  un  gros  marteau 
dont  ils  frappent  des  coins  de  bois  qui,  en  pénétrant  au  dedans,  font  descendre  les  planches  mobiles  du  pressoir,  lequel  écrase 
les  matières  d'où  est  extraite  l'huile  médicinale.  —  Plus  loin,  une  Psyché  assise  remue  avec  une  longue  cuiller  l'huile  posée  sur 
un  trépied  dans  un  petit  bassin.  Deux  Amorini  debout  en  font  autant.  —  A  gauche  un  petit  Amorino  est  au  comptoir  et  tient  une 
grosse  bouteille.  Sur  le  comptoir  est  placée  une  balance.  Sur  le  côté  postérieur  du  comptoir  est  un  rouleau  de  papyrus  contenant 
le  formulaire.  A  côté  est  une  armoire  avec  des  vases  de  verre  et  une  statuette  d'Apollon,  dieu  de  la  santé.  —  A  gauche  est  une 
Psyché  dont  le  maintien  indique  une  malade.  Un  Amorino,  tenant  un  vase  et  une  cuiller,  va  lui  administrer  le  remède  qui  y 
est  contenu.  Derrière  Psyché  est  la  servante  de  la  malade.  Voir  Domus  Vettiorum,  in-f%  Naples,  1898,  p.  6,  pi.  xn'I. 


Berlin,  1904.  —  En  dehors  des  monographies,  les 
quatre  ouvrages  suivants  donnent  des  renseignements 
précieux  :  Geiger,  Urschrift  und  Uebersetzungen  der 
Bibel,  Breslau,  1857,  p.  101-158;  Weber,  Jùdische 
Théologie  auf  Grund  des  Talmud  und  verwandten 
Schriflen,  Leipzig,  1890,  p.  10-14,  44-46  (seconde  édition 
d'un  ouvrage  publié  d'abord  sous  un  autre  titre); 
Schûrer,  Geschichte  des  jùdischen  Yolkes  im  Zeilalter 
JesuChristi,  3'  édit,  t.  n,  Leipzig,  1892,  p.  380-419; 
Bousset,  Die  Religion  des  Judenlhums,  Berlin,  1903, 
p.  161-168.  —  Toutes  les  encyclopédies  bibliques  ont  sur 
les  pharisiens  des  articles  d'importance  et  de  valeur 
im  gale  :  Twisleton,  dans  le  Dictionary  of  the  Bible  de 
Smith;  Ginsburg,  dans  Cyclopsedia  of  biblical  Lilera- 
ture  île  Kitto;  Reuss,  dans  Real-Encyclop.  de  Herzog, 
1"  édit.;  Sieffert,  lbid.,  2e  et  3e  édit.;  Daniel  dans 
Allgemeine  Encyclop.  de  Ersch  et  Gruber;  Hamburger, 
dans Realeneycl.  fur  Ribelund  Talmud;  Kaulen.  dans 
Kirchenlexicon,  lrc  et  2e  édit.;  Hausrath.  dans  Bibel- 
lexikon  de  Schenkel;  J.  Strong,  dans  Cyclopsedia  nf 
biblical,  theological  and  ecclesiastical  Lileralure, 
New- York,  t.  vin,  1891,  p.  68-76;  Eaton,  dans  Hastings, 
Dictionary  of  the  Bible,  Edimbourg,  t.  ni,  1900, 
p.  821-829;  Prince,  article  Scribes  and  Pharisees, 
dans  Encyclopsedia  biblica,  Londres,  t.  îv,  1903, 
col.    1321-4329;    Kaufmann   Koliler.   dans   Tlie  Jeicish 


ne  se  trouve  que  dans  le  texte  hébreu  de  l'Ecclésias- 
tique, xxxviii,  8,  avec  le  sens  de  pharmacien.  On  lit 
en  effet  dans  ce  passage  : 

Le  Seigneur  fait  produire  à  la  terre  ses  remèdes, 

Et  l'homme  sensé  ne  les  dédaigne  pas... 

H  a  donné  aux  hommes  la  science 

Pour  qu'ils  se  lissent  un  nom  par  ses  dons  merveilleux. 

Par  eux  l'homme  procure  la  guérison 

Et  il  parvient  à  enlever  la  douleur. 

Le  pharmacien  en  fait  des  médicaments, 

Et  son  œuvre  est  à  peine  achevée 

Que  par  lui  la  santé  se  répand  sur  la  terre. 

Eccli.,  xxxviii,  4-8. 

Cf.  Ezech.,  xxx,  21.  Le  pharmacien  n'était  pas  d'ordi- 
naire distinct  du  médecin.  —  Sur  les  remèdes  employés 
par  les  pharmaciens  israélites  et  cités  dans  la  Sainte 
Écriture,  voir  Médecine,  t.  iv,  col.  912,  913. 

H.  Lesiïtre. 
PHARNACH  (hébreu  :  Parnâk;  Septanle  :  l'apviy), 
zabulonite.  père  d'Élisaphan.  Celui-ci  était  le  chef  de 
la  tribu  de  Zabulon  du  temps  de  Moïse,  un  des  douze 
Israélites  qui  furent  chargés  de  présider  au  partage  de 
là  Terre  Promise.  Nom.,  xxxiv,  25. 

PHAROS  (hébreu  :  Par'ùS,  «  mouche  »;  Septante  : 
'Popô;;  dansIEsd.,11,3,  <Papéç),  chef  d'une  famille  dont 


219 


PHAROS    -      PHASELIDE 


220 


41.  —  Pierre  gra- 
vée au  nom  de 
Pharos. 


les  descendants  au  nombre  de  2172,  I  Esd.,  Il,  3;  II  Esd., 
vu,  8,  retournèrent  de  Babylonie  en  Palestine  avec 
Zorobabel.  Un  autre  groupe,  comprenant  150  hommes, 
sous  leur  chef  Zacharie,  revint  plus  tard  en  Judée  avec 
Esdras.  I  Esd.,  vm,3.  Sept  des  «  fils 
de  Pharos  «  avaient  épousé  des  fem- 
mes étrangères  et  Esdras  les  obligea 
à  les  répudier.  I  Esd.,  X,  25.  —  Pha- 
daïa  «  fils  de  Pharos  »,  répara  une 
partie  des  murs  de  Jérusalem.  II  Esd., 
(11,25.  —  Parmi  les  chefs  du  peuple 
qui  signèrent  l'alliance  que  Néhémie 
lit  renouveler  entre  Dieu  et  les 
Israélites,  le  premier  nommé  est 
Pharos,  probablement  le  représen- 
tant de  la  famille  de  ce  nom.  II  Esd.. 
x,  14.  Un  sceau  antique  en  cornaline  porte  le  nom  de 
Pharos  gravé  en  lettres  phéniciennes  (fig.  11 |.  Voir 
\V.  von  Landau.  Beilràge  zur  Altertumskunde  des 
Orients,  t.  IV,  in-S",  Leipzig,  1905,  p.  13. 

PHARPHAR  (hébreu  :  Parpar;  Septante  :  «Sapipâp; 
Alexandrinus  :  iapyapà),  la  seconde  des  rivières  qui 
arrosent  la  ville  de  Damas.  Elle  est  mentionnée  par 
Naaman,  qui,  dans  IV  Reg.,  v,  12.  répond  au  prophète 
Elisée,  lorsque  celui-ci  lui  conseille  d'aller  se  laver 
dans  le  Jourdain  pour  se  guérir  de  la  lèpre  :  .<  L'Abana 
et  le  Pharpbar,  les  rivières  de  Damas,  ne  sonl-ils  pas 
meilleurs  que  toutes  les  eaux  d'Israël?  »  —  Le  Phar- 
pbar s'appelle  aujourd'hui  Nahr  el-Aouadj,  voir  Aba- 
na,  t.  I,  col.  li.  el  un  de  ses  affluents  porte  encore 
le  nom  de  Barbai:  Il  a  deux  sources  principales, 
l'une  sur  la  pente  orientale  de  l'Hermon,  au-dessous 
du  pic  central;  l'autre,  à  quelques  kilomètres  au  sud, 
près  du  village  de  Beit  Djatm.  Les  deux  cours  d  eau 
se  réunissent  près  de  Sasa  et,  par  un  lit  profond 
creusé  au  milieu  des  rochers,  vont  se  jeter  dans  la  direc- 
tion de  l'est  dans  un  lac  marécageux,  le  Bahrel  Uidja- 
néh,  à  mx  kilomètres  environ  au  sud  du  lac  où  débouche 
le  Barada,  l ien  Abana.  L'Aouadj  ue  passe  pas  à  Da- 
mas même,  mais  à  douze  kilomètres  de  la  ville  ;  il  mérite 

néanmoins  le  nom  de  fleuve  de  Damas,  parce  qu'il 
arrose  toute  la  plaine  qui  porte  le  nom  de  la  ville,  et, 
par  d'anciens  canaux,  ses  eaux  en  arrosent  les  champs 
et.  les  jardins  presque  jusqu'aux  murailles  de  la  cité. 
Le  cours  du  Nahr  el-Aouadj  esl  d'une  soixantaine  de 
kilomètres  el  son  volume  d'eau  esl  à  peu  près  le  quart 
de  celui  du  Barada.  —  Voir.).  L.  Porter,  Five  years  in 
Ddmascus,  3  in-12,  Londres.  1855,  t.  î,  p.  299,  311-312, 
318-321,389;  t.  h,  p.  12-14,247-248;  ld..  The  Rivers 
oj  Damascus,  dans  te  Journal  of  sacred  Literatx  i 
t.  v,  octobre  1853,  p.  45-57;  Ed.  Bobinson,  Notes  on 
biblical  Geography,  the  A'waj,  dans  la  Bibliotheca 
sacra,  t.  VI,  1849,  p.  366-371,  F.  VlGOUROl  \. 

PHARSANDATHA  (hébreu  ParSanddtà  ;  Sep- 
tante :  $ap<ravvéc;  Alexandrinus  :  «tapo-avcirrdiv),  le 
premier  nommé  des  dis  Ris  d'Aman  qui  furent  mis  à 
mort  à  Suse  par  les  Juifs  le  13  du  douzième  mois 
appelé  Ad. ir  après  la  chute  el  l'exécution  de  leur  père 
Esther,  ix.  7.  Le  nom  de  Pharsandatha  esl  en  perse, 
d'après  certains  philologues,  Fraçna-data,  ■<  dôme  par 
prière  o.  Cf.  J.  Oppert,  Commentaire  du  livre  d'Esther, 
1801.  p.  21. 

PHARUDA.  1  Esd..  h,  55.  Voir  Piiarida,  col.  205. 

PHARUÉ  (hébreu  .  Parùafy;  Septante:  $ova?otS8; 
Alexandrinus  :  $ocppou;  Lucien  :  Bapiaoûy),  père  de 

.losapbat.    Salomon   chargea    .losapha!    de    la    levée    des 
tributs  sur  la  tribu  dlssachar.  III   Iteg..  iv.    17. 


PHARUR1M  (bel neii  :  Parvàrim;  Septante  :  $xpou- 
pi(i),  partie  des  dépendances  du  Temple.  IV  Reg.,xxin, 
11.  L'auteur  sacré  raconte  dans  ce  passage  que  le  roi 
Josias  «  fit  disparaître  les  chevaux  que  les  rois  de  Juda 
avaient  dédiés  au  soleil  à  l'entrée  de  la  maison  de 
Jéhovah,  près  de  la  chambre  de  Nathanmélech,  l'eunuque 
qui  était  à  Parvàrim  ».  Au  premier  livre  des  Parali- 
pomènes,  x.xvi.  10-18.  nous  lisons  au  sujet  des  portiers 
du  sanctuaire  :  o  A  Séphim  et  à  Hosa  [échut  la  garde 
du]  côté  de  l'occident,  avec  la  porte  Sallékéj  sur  le 
chemin  montant  (Vulgate  :  juxta  portant  quse  durit  ad 
riant  ascensionis)...  Il  y  avait...  au  Parbdr,  à  l'occi- 
dent quatre  [lévites]  sur  le  chemin,  deux  au  Parbdr.  •> 
(Vulgate  :  lu  cellulis  quoque  janilorunt  ad  oa  idenlem 
quatuor  in  ria,  binique  per  cellulas.)  Le  Parbdr  dont 
il  est  question  ici,  d'après  le  contexte,  était  situé  à 
l'ouest  du  Temple,  près  de  la  porte  appelée  Sallëkéf 
{dejectio),  à  l'endroit  peut-être  où  est  la  Bab  Silsilis 
actuelle.  Le  chemin  mentionné'  conduisait  du  Temple 
à  la  colline  appelée  aujourd'hui  le  mont  Sion,  en  Ira- 
versant  la  vallée  du  Tyropoeon.  —  On  ne  s'entend  pas 
sur  la  signification  précise  du  mot  parbdr.  La  plupart 
croient  que  ce  mot  est  le  même  que  celui  de  parvàrim 
(au  singulier  parvâr),  les  deux  ne  diffèrent  entre  eux 
que  par  une  lettre,  a,  6,  et  i,  v.  La  Vulgate  a  traduit 
parbdr  par  «  cellules  .  Gesènius,  Thésaurus,  p.  1123, 
entend  par  parvàrim  des  portiques  ou  des  colons  li 
ouvertes  qui  entouraient  le  Temple;  il  rapproche  ce 
mot  du  perse  farouar,  t  maison  d'été,  kiosi] 
D'autres  ont  traduit  parbdr  par  faubourgs  .  parce 
que  c'est  le  sens  donné  par  les  Targuens  et  le  Talmud 
aux  mots  paryârin  et  parvilin.  Buxtorf,  Lexicon  cttal- 
daicum,  1640,  p.  1801,  1805.  Cf.  Josèphe,  Ant. 
XV,  xi,  5,  qui  dit  que  deux  dos  portes  du  Temple 
d'Hérode  débouchaient  à  l'ouest  i[;  -'■,  ^ojt:::'//.  dans 
le  faubourg  de  la  ville.  Voir  Temple.  —  Les  six  portiers 
dont  parle  I  Par.,  xwi,  10.  avaient  leur  poste,  quatre 
probablement  en  dehors  de  la  porte,  du  côté  du  chemin, 
et  deux  à  l'intérieur  de  la  porte.  —  Pour  les  chevaux  du 
soleil  qui  étaient  à  Pharurim,  voir  Nathanmélech, 
col.  1185. 

PHASE,  nom  donne  a  la  Pàque,  dans  la  Vulgate, 
dans  Ions  les  livres  de  l'Ancien  Testament.  E\od.,  XII, 
11.  etc.,  excepté  Ezech.,  xi.v,  21,  et  1  Ksd..  vi,  19,  l 
cette  fête  esl  appelée  Pascha,  comme  dans  tout  le  Nou- 
veau Testament,  lorsqu'elle  n'esl  pas  désignée  par  son 
autre  nom  de  »  fête  des  Azymes  .  Voir  Paque,  t.  iv. 
col.  2094,  ei  Azymes,  2»,  t.  i,  col.  1313. 

PHASÉA  [hébreu  :  Paséah,  o  boiteux  »;  Septante  : 
Œokjt,),  chef  d'une  famille  de  nathinéens  qui  retourna 
de  captivité  en  Palestine  avec  Zorobabel,  I  Esd.,  n.  19; 
III    Esd.,   vu.  51.    l'n   des  membres  de  celle   famille 

appelé  Joïada  restaura  avec  Mosollam  la  porte  Ancienne 
de  Jérusalem.  Il  Esd.,  m.  0.  Certains  commentateurs 
font  cependant  di    Pha     i      i"  re  de  Joïada  d  un  per- 

-.  .un .ige  distinct  du  chef  de  la  famille  nalhiiiooune.  — 

Le  texte  hébreu  mentionne  un  descendant  de  Juda  qui 
porte  le  même  nom.  mais  la  Vulgate  l'a  écrit  Phi  ssé, 
I  Par.,  iv.  12. 

PHASELIDE  (grec  :  '\'xir,).:;),  ville  de  l'Asie  Mineui  . 
située  sur  les  confins  de  la  Lveie  el  de  la  Pamphylie 
(fig.    42).    C'était   une    colonie    dorienne.   Hérodote,    il, 

I7.S.  Sa  position  était  Ires  favorable  pour  le  con 

Bâtie  dans   un    isthme,  (die   n'avait   pas    moins  d 

ports.  C'était  la  première  terre  qui  apparaissait  au  na- 
vigateur dans  le  voyage  (le  Cilicie  à  Rhodes.  Tite  I  ivi 
XXX VII,  23;  Cicéron,  Vcrr.,  iv,  10  (22).  Dès  le  il  siècle 
avant  .l.-C,  sous  le  règne  d'Amasis,  elle  avait  à  Naucra- 
tis,  en  Egypte,  une  part  dans  l'Hellénium,  qui  était  une 
sorte  de  bourse  de  commerce  pour  les  tirées.  Hérodote, 


221 


PHASELTDE    —    PHASGA 


222 


il.  178.  Son  trafic  était  très  considérable.  Strabon.  XIV. 
m.  9;  Thucydide,  II,  69;  vin,  88;  Polybe.  xxx.  9.  Le 
mont  Solyme,  au-dessous  duquel  elle  était  située,  ser- 
vait comme  de  phare  aux  navires  qui  se  dirigeaient 
vers  Phasélide.  s  Sur  la  cote  orientale  de  Lycie.  dit 
Reclus.  Nouvelle  géographie  universelle,  t.  v, 
1884,  p.  180,  se  dresse,  à  '2375  mètres,  la  montagne  de 
Takh  talou,  le  Solyma  des  anciens,  à  la  base  entaillée 
de  gorses,  aux  pentes  moyennes  couvertes  d'arbrisseaux  ; 

sur  le  versant  méridional  de  ce  pic  superbe  que 
brûle  jour  et  nuit  la  Chimère  dont  parlent  les  géogra- 

jrrecs  et  romains  etqui  adonné'  lieu  à  tant  de  fables 
La  source  du  feu.  le  Fanai- ou  Yanar-tach,  jaillit  d'une 
ouverture  profonde  d'un  mètre  environ,  au-dessus  de 
laquelle  s'élèvent  les  débris  d'un  temple.  Aucune  fumée 
n'accompagne  la  flamme;  à  quelques  mètres  de  dis- 
tance, la  roche  serpentineuse  d'où  s'élance  le  feu 
mystérieux  n'a  pas  une  température  supérieure  à  celle 


42. 


Monnaie  de  Phasélide. 


Poupe  de  galère:  dans  le  champ  *AEH.  —  u.  Minerve  Proma- 
chos. A  droite  un  monogramme  dans  un  cercle,  à  gauche  <t>. 

des  terrains  environnants;  des  arbres  croissent  dans 
le  voisinage  et  un  ruisseau  serpente  sous  l'ombrage... 
Une  autre  ouverture  du  rocher,  semblable  à  celle  du 
Vanar.  est  maintenant  éteinte.  —  Phasélide  à  l'époque 
il.  -  Romains,  devint  un  repaire  de  pirates.  P.  Servilius 
les  attaqua  et  détruisit  la  ville.  Cicéron,  Vèrr.,  iv.  10  : 
Elle  perdit  son  indépendance  en  72-75  avant  J.-C.  Llle 
fut  restaurée,  mais  elle  ne  recouvra  jamais  sa  première 
prospérité.  On  y  voit  encore  des  ruines  de  ses  anciens 
monuments:  son  port  est  devenu  un  marais  d'où  s'exha- 
lent des  miasmes  délétères.  Elle  porte  aujourd'hui  le 
nom  de  Tekrova. 

C'est  à  l'époque  où  la  piraterie  ne  prédominait  pas 
encore  à  Phasélide  que  les  Romains  écrivirent  aux  habi- 
tants de  cette  ville  et  de  quelques  autres,  situées  la  plu- 
part sur  la  route  que  suivait  le  commerce  maritime  de 
la  Lycie  en  Italie,  pour  leur  demander  de  porter  aide 
et  appui  à  Simon  Maehabée  et  aux  Juifs.  I  Mach.,  xv, 
23.  Phasélide  avait  donc  une  colonie  juive  vers  139  avant 
notre  ère.  —  Voir  Fr.  fieaufort.  Karamania  or  descrip- 
tion of  the  south  Coasl  of  Asia  minor,  in-8°,  Londres, 
1S17.  p.  53-65;  Ch.  Texier.  Asie  Mineure,  in-12,  Paris, 
1862,  p.  697-699;  G.  F.  Ilill.  Catalogue  of  Gr,  '  - 
in  the  Jlrit.  Muséum,  Lycia,  1897,  p.  i.xvii. 

F.    VlGOUROUX. 

PHASÉRON  (grec  :  $a?tpcov),  nom  d'une  tribu  na- 
buthéenne,  «  les  fils  de  Phaséron,  9  qui  fut  battue  par 
Jonathas  Maehabée,  I  Mach..  ix,  66,  dans  les  environs 
de  Bethbessen.  Cette  tribu  est  inconnue. 

PHASGA  (hébreu  :  Pisgdh),  montagne  du  pays  de 
Moa  >.  Dans  le  texte  hébreu,  ce  nom  est  toujours  pré- 
cédé de  l'article  :  hap-  Pisgdh.  Il  n'est  jamais  employé- 
seul,  mais  précédé  tantôt  de  ros,  s  sommet  du  Phasga  », 
tantôt  de  asdût,  mot  qui  est  diversement  interprété. 
On  n'est  pas  d'accord  sur  le  point  de  savoir  si  Pisgdh 
est  un  nom  propre  ou  un  nom  commun  ;  les  deux  opi- 
nions ont  des  partisans.  La  Vulgate  l'a  toujours  consi- 
déré comme  un  nom  propre;  les  Septante  lont  rendu 
tantôt  comme  un  nom  propre  et  tantôt  comme  un  nom 
commun:  $a<rvâ  dans  Deut..  ni.  67;  xxxiv.  1:  .Ins.. 
xii.  3:  xin, -20;  et  xopuqw]  roî  Xeiageuuivo'j,  t  sommet 
du  (mont)  taillé  ».  escarpé,  dans  Xum..  xxi,  20;  xxin. 


14.  Saint  Jérôme.  Onotnast.,  édit.  Larsovv,  1S62.  p.  73 
et  227.  explique  aussi  le  sens  de  Phasga  par  ahscissum 
et  excisum.  On  peut  l'interpréter  par  >•  section,  partie». 
Gesenius,  Thésaurus,  p.  1114.—  Sur  les  'asdôt  Pisgdh, 
mentionnées  Deut.,  m,  17;  iv.  49;  Jos.,  xn.  3;  xm.20, 
voir  A.SÉDOTH,  t.  i.  col.  1076. 

1°  L'Écriture  dit  expressément  que  le  Phasga  est  dans 
le  pavs  de  Moab,  Xum..  xxi.  20;  vis-à-vis  de  Jéricho, 
Deut.,  xxxiv,   1,  et  du  désert  de  Jésimoth,  Xum.,  xxi, 
20,  à  l'est  de  la  pointe  septentrionale  de  la  mer  Morte. 
Deut.,  iv,  49;  Jos..  xn.  3.  —  Le  mont  Phasga  fait  partie 
de  la  chaîne  des  Abarim.  Deut..  xxxn,  19,  comparé  avec 
xxxiv,  1.  Les  monts  Abarim  s'étendent  du  nord  au  sud, 
à  l'est  de  la  mer  Morte,  depuis  l'ouadi  Hesban  jusqu'au 
Zerka  Main.  Voir  Abarim,  t.  i,  col.  17.  Le  mont  Nebo 
était  un  des  pics  des  Abarim.  VoirNÉBO  2.  t.  iv,  col  1544. 
Phasga  est-il  un  autre  nom  de  la  chaîne  ou  d'une  partie 
de  la  chaîne  des  Abarim.  ou  bien  un  des  pics  du  mont 
Xébo   ou   bien  enfin   simplement    un   nom    commun, 
désignant  le  sommet  du  mont  Nébo?   Dans   ce   der- 
nier cas,  la  phrase  du  Deutéronome,  xxxiv.  !.  i  Moïse 
monta  sur  le   mont  Xébo.   au  sommet  du   l'hasga,  » 
devrait   se    traduire    :    «    Moïse    monta   sur   le    mont 
Xébo,  au  sommet  de  la  hauteur.   »  On  peut  alléguer 
en  faveur   de   cette   version,   outre   les   passages   des 
Septante    rapportés   plus   haut,   le     ["argum    de  Jéru- 
salem et  celui  du  Pseudo-Jonathan  qui  rendent  inva- 
riablement  Pisgdh  par  rama/a,  i  colline,  élévation  », 
et  ne  le  regardent  pas   comme  un   nom    propre.  Cette 
explication  est  difficile  à  concilier  avec  les   textes   qui 
représentent  le  Phasga  comme  une    montagne  au  pied 
de  laquelle  campèrent  les  Israélites,  cf.  Xum..  xxm.  14 
et  xxiv.  2,  et  d'où  jaillissaient  des  sources  d'eau.  Deut., 
ni,  17;  iv,  49;  Jos..  xn,  3;  xm,  26.  Les  divers  passages 
dans  lesquels  l'Écriture  nomme  le  mont  Phasga  semblent 
s'expliquer  plus  commodément  en  admettant  que  c'était 
une  montagne  de  la  chaîne  des  Abarim  distinguée,  par 
ce  nom  propre,  des  autres  parties  de  la  chaîne.  C'est  du 
mont  X.'lio  que  Moïse.  Deut..  xxxil,  49,  contemple  la 
Terre  Promise  avant  de  mourir.  Or  nous  lisons,  Deut., 
xxxiv,  1.  i  Moïse  monta  des  plaines  de  Moab  sur  le 
mont  Xébo,  au  sommet  du  Phasga  :   i  ce  dernier  som- 
met parait  donc  bien  n'être  qu'un  pic  du  Xébo,  mais, 
à  cause  de  son  élévation,  il  désignait  sans  doute  aussi 
toute  la  montagne.  —  Les  voyageurs  modernes  n'ont  pas 
trouvé  de  traces  du  nom  de  Phasga  dans  la  Moabitide, 
Quelques -uns  d'entre  eux  identifient  le  Phasga  avec  le  Dje- 
bel ou  Rds  Siaghah,  C.R.Conder.  Palestine,  lSS9,p.259, 
mais  le  /<     'iel  Neba,  à  l'est  du  Siaghah  est  plus  élevé. 
2°  Le  mont  Phasga  est  nommé  pour  la  première  fois 
dans  les  Nombres,  xxi,  20.  En  s'approchantde  la  Terre 
Promise  pouren  faire  la  conquête,  les  Israélites  allèrent 
camper  «  de  Bamoth  (voir  Bamoth-P.aai..  t.  i.  col.  1423) 
à  la  vallée  qui  est  dans  le  pays  de  Moab  au  sommet  du 
Phasga,  en  vue  du  désert  (de  Jésimon)  a.  De  là.  Moïse 
fit  demander  à  Séhon,  roi  des  Amorrhéens,  qui  régnait 
à  Hésébon,  dans  le  voisinage,  l'autorisation  de  Irai 
pacifiquement  son  territoire.  Séhon  ne  l'accorda  point, 
mais,  au  contraire,  attaqua   Israël.  11   fut  battu    et    les 
Israélites  allèrent  camper  sur  la  rive  orientale  du  Jour- 
dain vis-à-vis  de  Jéricho.  —  Balac.  roi  de  Moab,  ne  se 
sentant  pas  de  force  à  les  arrêter,  eut  recours  à  Balaam, 
et  lui  demanda  de  maudire  ses  ennemis,  afin  qu'il  pût 
ainsi  les  mettre  en  fuite.  Balaam  prononça  son  second 
oracle,  au  sujet  d'Israël,  du   champ  de   Sofim    [Vul- 
gate :  «  d'un  lieu  élevé,     in  locum  subliment),  au  som- 
met du  Phasga.   Xum..   xxm,  11-24.  —   Le   Phasga  est 
nommé  ensuite  plusieurs  fois  comme  marquant  la  fron- 
tière  orientale  de  la  Terre  Promise  qui  doit  s'étendre  à 
l'est  «  jusqu'à  la  mer  de  sel  ou  mer  Morte  o  au  pied  de 
ASdot  hap-Pisgâh.  Deut.,  ni,  17;  iv.  19;  Jos.,  xu.  3. 
—  Moïse  donna  'A Sdôl  hap-Pisgâh  à  la  tribu  de  Ruben. 
Jos.,  xm.   20.   —  Enfin   Moïse,    sur   l'ordre   de   Dieu, 


223 


PIIASGA 


PHATURÈS 


224 


«  monta  des  plaines  de  Moab  sur  le  mont  Nébo,  au 
sommet  du  Phasga.  «  Deut.,  xxxiv,  1.  C'est  là  qu'il 
contempla  la  Terre  Promise  et  qu'il  mourut.  —  Quant 
à  la  vue  dont  on  jouit  de  cette  montagne  sur  la  Pales- 
tine, voir  Nébo,  t.  iv,  col.  lôii. 

PHASHUR  (hébreu  :  PaShûr;  Septante  :  $o<reoûp), 
chef  d'une  famille  sacerdotale.  II  Esd.,  VII,  41.  Sou 
nom  est  écrit  Pheshur  I  Esd.,  il,  38;  x,  22;  II  Esd.. 
x,  3,  dans  la  Vulgate.  «  Les  fils  de  Pbasbur  »  retour- 
nèrent de  Babylonie  en  Palestine  avec  Zorobabel  au 
nombre  de  1247.  I  Esd..  n.  38;  II  Esd.,  vu,  il.  Six 
d'entre  eux  sont  nommés  par  leur  nom  dans  I  Esd..  x. 
22,  comme  ayant  épousé  des  femmes  étrangères, 
qu'Esdras  les  obligea  à  répudier.  —  Pbasbur  (Pheshur), 
ou  le  chef  de  la  famille  de  ce  nom,  signa  du  temps  de 
Néhémie  l'alliance  conlractée  entre  Dieu  et  son  peuple. 
II  Esd.,  x,  3.  —  Dans  le  texte  hébreu,  plusieurs  autres 
Ismaélites  sont  nommés  aussi  PaShûr.  La  Vulgate  écrit 
les  noms  de  trois  d'entre  eux  qui  furent  contemporains 
de  Jérémie  Phassur  \\o\v  ce  mot)  et  Pheshur,  dans 
Il  Esd.,  xi,  12,  celui  qu'elle  appelle  Phassur  dans  I  Par., 
ix,  12.  —  Certains  commentaires  identifient  h-  Pbasbur 
dont  les  (Ils  revinrent  à  la  captivité  avec  un  des  Phas- 
sur nommés  par  Jérémie  :  ce  n'est  pas  impossible,  mais 
peu  probable.  Voir  PHASSUR  2. 

PHASPHA  (hébreu  :  Pispâh;  Septante  :  $ao^à), 
second  fils  de  Jélher,  un  des  principaux  chefs  de 
famille  de  la' tribu  d'Aser.  I  Par.,  vu,  38. 

PHASSUR  (hébreu  :  PaShûr),  nom  de  six  Israélites. 
I..i  Vulgate  écrit  le  nom  de  deux  d'entre  eux  Phashnr 
cl  Pheshur.  Voir  ces  deux  noms. 

1.  PHASSUR  (Septante  :  Haa/tôp),  prêtre,  fils  d'Em- 
mer.  Un  des  oracles  de  Jérémie,  xx,  1-G,  est  dirigé 
contre  lui.  Phassur  était  inspecteur  en  chef  (hébreu  : 
pdqû  nàgîd;  Vulgate  :  princeps)  un  intendant  du  temple 
cl,.  Jétusalem.  Ayant  entendu  Jérémie  prophétise!1  la 
ruine  de  Jérusalem  et  du  Temple,  il  le  frappa  et  le  lit 
mettre  aux  ceps  dans  le  Temple  à  la  porte  Haute  de 
Benjamin.  Il  ne  le  délivra  que  le  lendemain.  Jérémie 
lui  dit  alors  .  «  Jéhovah  ne  l'appelle  plus  Phassur 
(étymologie  incertaine;  Gesenius,  Thésaurus,  p.  1135, 
l'explique  par  «  sécurité  tout  autour  »),  mais  Mâgôr 
Missâbib  [terreur  tout  autour),  parce  que  voici  ce  que 
dit  Jéhovah.  «  Je  te  livrerai  à  la  terreur  toi  et  tous  tes 
amis.  »  Tous  ses  amis  seront  frappés  par  l'ennemi, 
Juda  sera  livré  au  roi  de  Babylone,  et  Phassur  et  les 
siens  seront  emmenés  en  captivité.  Jérémie,  v.  6,  ter- 
mine sa  prophétie  en  reprochant  au  fils  d'Emmer 
d'avoir  prophétisé  des  mensonges.  Il  devait  donc  avoir 
prédit  qui'  Juda  serait  délivré  des  attaques  des  Chal- 
déens.  Le  texte  sacré  ne  nous  dil  rien  de  plus  sur  le 
sort  de  Phassur  et  de  sa  famille,  mais  on  ne  saurait 
douter  que  la  prophétie  qu'il  avait  faite  contre  eux  nul 

été  réalisée.  -  Phassur,  lils  d'Emmer,  peut  être  le 
même  que  Phassur,  père  de  Gédélias.  Voir  Phassur  3. 

2.  PHASSUR  (Septante  :  IIï^/moi.  lils  de  Melchias, 
contemporain  de  Jérémie  comme  le  précédent,  prêtre 
selon  les  uns,  cf.  1  Par.,  ix,  12.  prince  du  peuple,  sel, m 
les  autres.  Il  fut  mêlé  à  deux  événements  de  la  vie  de 

Jérémie.  Le  roi  Sédécias  lVnvova  auprès  ,1e  prophète 
avec  le  prêtre  Sophonie  pour  lui  demander  de  consulter 
Jéhovah  au  sujet  de  la  guerre  que  lui  faisait  les  Chal- 
déens,  dans  l'espoir  d'en  obtenir  une  prédiction  favo- 
rable, mais  Jérémie  annonça  la  prise  de  Jérusalem. 
Jer.,  xxi,  1.  —  Plus  tard,  nous  retrouvons  le  lils  de 
Melchias,  .1er.,  xxxviii,  1,  parmi  les  grands  de  la  cour 
qui.    ayant   entendu    Jérémie    prophétiser  la    ruine    de 

Jérusalem,  pendant  qu'il  était  dans  la  cour  de  la  prison, 


pressèrent  le  roi  de  le  faire  mettre  à  mort  et  obtinrent 
de  lui  de  le  jeter  dans  la  citerne  boueuse  de  Melchias 
d'où  il  fut  retiré  par  l'eunuque  éthiopien  Abdémélech. 
Jer.,  xxxviii,  1-13.  —  Ce  Phassur  est  peut-être  le  même 
que  le  i  Phassur,  lils  de  Melchias  -.  qui  est  nommé 
I  Par.,  ix,  12,  et  II  Esd.,  xi,  12,  comme  aïeul  d'Adaïas, 
lequel  ligure  parmi  les  prêtres  qui  habitèrent  Jéru- 
salem au  retour  de  la  captivité,  mais  on  ne  peut  établir 
qu'il  soit  le  chef  éponvme  des  «  lils  de  Pbasbur  »  qui 
revinrent  de  captivité  avec  Zorobabel.  Voir  PHASHUR, 
col.  223.  —  Quelques  commentateurs  croient  aussi  que 
le  fils  de  Melchias  esl  le  père  de  Gédélias,  .1er.,  xxxviii, 
1,  mais  ce  n'est  guère  vraisemblable,  Gédi  lias  lils  de 
Phassur  »  étant  nommé  dans  ce  \.  31.  avant  i  Phassur, 
(ils  de  Melchias  »,  et  sans  l'indication  d'aucun  lien  de 
parenté.  Le  nom  de  »  Phassur,  lils  de  Melchias  », 
manque,  il  est  vrai,  dans  les  Septante,  mais  il  se  lit 
dans  l'hébreu  comme  dans  la  Vulgati 

3.  phassur  [Septante  :  Qaax<>>p),  père  de  Gédélias. 

Gédélias  fut  un  des  ennemis  de  Jérémie.  .1er..  XXXVIII, 
1.  Certains  commentateurs  confondent  ce  Phassur  avec 
l'un  des  précédents.  Voir  PHASSt  R   1  et  2. 

4.  phassur  (Septante  :  <Pa.ayi!>p),  père  de  Jéroham, 
aïeul  d'Adaïas el  lils  de  Melchias.  I  Par.,  ix.  12.  Quelques 

commentateurs  le  prennent  pour  un  personnage  diffé- 
rent de  Phassur  2.  mais  la  distinction  des  deux  n'est 
pas  certaine.  Le  livre  de  Néhémie,  Il  Esd..  xi,  12, 
mentionne  aussi  Phassur  (dont  elle  écrit  le  nom  Peshur), 

fils  de    Melchias.    c me   ancêtre   du  prêtre  Adaïa.   fils 

,le  Jéroham.  Seulement  dans  ce  passage  la  généalogie 
est  plus  complète;  elle  contient  quelques  noms  qui 
sont  omis  dans  I  Par.,  ix,  12. 

PHATAIA  i  hébreu  :  Pefahyâh,  o  Jéhovah  délivre  »; 
Septante  :  $eèeïa),  un  des  Lévites  qui  avaient  épousé 
une  femme  étrangère.  Esdras  l'obligea  à  la  répudier. 

I  Esd.,  x,  23.  Nous  le  retrouvons  dans  II  Esd..  t\.  .Y  le 
dernier  de  ceux  des  Lévites  qui  du  temps  de  Whéiiiie 
adressèrent  à  Dieu  une  longue  prière  pour  le  renou- 
vellement de  l'alliance  entre  lui  et  son  peuple.  Dans  ce 
passage,  les  Septante  omettent  son  nom  et  la  Vulgate 
l'écrit  Phathahia.  —  Le  texte  hébreu  mentionne  deux 
autres  Petahyàh  qui  sont  appelés  dans  notre  version 
latine  Phétéia.  I  Par.,  xxiv,  1G,  et  Phathahia,  II  Esd., 
xi,  2i. 

PHATHAHIA  (hébreu  :  Pefahyâh),  nom  de  deux 
Israélites  dans  la  Vulgate.  Voir  Piiataïa. 

1.  PHATHAHIA  (Septante  omettent  son  nom),  lévite. 

II  Esd.,  IX,  5.  C'est  le  même  que  la  Vulgate  appelle 
Phat.ua.  I  Esd.,  x,  23. 

2.  PHATHAHIA   i 'I>ï(p»V»1,   fils  d,     Mesézebel,  di 
dant    de  /.ara.   de    la   tribu   de    Juda.  contemporain   de 
V  le  mie.  Il  était  «  sous  la  main  du  roi  a  Artaxerxi  - 

c'est-à-dire  son  représentant  ou  son  mandatairi son 

conseiller  pour  toutes  les  affaires  qui  concernaient  les 
Juifs.  II  Esd..  xi.  21. 

PHATHUEL  hébreu  .  P'eftYêl;  Septante  :  Ba8oui$X), 
père  du  prophète.  Joël  Joël.  I,  I.  On  ne  connaît  que 
son  nom,  et  encore  ce  nom  est-il  diversement  écrit  dans 
les  manuscrits  grecs  et  dans  les  versions.  Voir  .loti.  15, 
t.  m,  col.  1582 

PHATURÈS,  PHATHURÈS,  PHÉTROS  (hébreu  : 

Pafrôs;   Septante  :  yf[  llaOouff,;  et  -,  -r,   'l'a'io-^pr,;;  Vul- 

ate     Phatures,  dans  Jérémie,  xnv.  I.  lô;  Phathures, 

dans  Ëzéchiel,  xxix,  14;  xxx,  11;  Phetros,  ls.,  xi,  11), 

la  Haute  Egypte. 


225 


PHATURES 


226 


I.  Étymologie  et  signification.  —  Phathurès  ou  Phé- 
tros  est  un  mot  égyptien  hébraïsé.  11  se  décompose   de 

l'avis  général,  enpn  ta  risi,  JC.TTI    3.    V  ,ou  P-to-res, 

»  la  terre  du  sud  »,  et  il  désigne  la  Haute  Egypte,  la 
Thébaïde  des  Grecs,  le  Sàïd  des  Arabes,  par  opposition 
à  pa  ta  mehil,   ^t  •••..    .ou  P-to-mehet,  «  la  terre 

du  nord  »,  la  Basse  Egypte,  le  Delta.  Pour  ces  noms  et 
leurs  variantes,  voir  Brugsch,  Dictionnaire  géogra- 
phique de  l'ancienne  Egypte,  Supplément,  1880, 
p.  1399.  La  plus  ancienne  histoire  de  l'Egypte  est  una- 
nime à  nous  montrer  la  division  du  pays  en  deus 
terres  et  en  même  temps  son  union  dans  les  mains 
d'un  seul  chef.  Déjà  les  rois  des  premières  dynasties 
font  l'union  des  deux  terres  et  la  ligurent  par  \esam-looui, 
c'est-à-dire  la  ligature  du  lotus,  emblème  de  la  Haute 
Egypte,  et  du  papyrus,  emblème  de  la  Basse  Egypte. 
Quibeli,  Bierakonpolis,  part.  I,  1900.  pi.  xxxvii-xxxviu 
et  p.  11.  Chaque  région  avait  sa  couronne  propre,  cou- 
ronne blanche  pour  la  Haute  Ég\pte,  couronne  rouge 
pour  la  Basse  Egypte.  Les  deux  couronnes  réunies  for- 
maient le    pschent  (fig.  43).  Le  royaume  du  sud  com- 


43.  —  Couronnes  d'Egypte, 
t.  Couronne  blanche.  —  2.  Couronne  rouge.  —  3.  Pschent. 

mençait  plus  ou  moins  loin  de  Memphis,  suivant  les 
époques,  et  se  terminait  à  Bigeh  et  à  Philae.  Dès  l'An- 
cien Empire,  il  eut  ses  gouverneurs  dont  la  résidence 
ne  parait  pas  avoir  été  fixe.  Ouni,  que  Mérenra  de  la 

VI5  dynastie  nomma  à  la  dignité  de  —    V        *  «L,  hatj- 

â  mer  res,  «  chef  gouverneur  du  midi  »,  résidait  à  la 
cour.  Le  territoire  de  la  province  méridionale  descen- 
dait alors  jusqu'à  Memphis.  E.  de  Rougé,  Recherches 
sur  les  monuments  qu'on  peut  attribuer  aux  si.r  pre- 
mières dynasties,  p.  135.  Hirkhouf  qui  eut  le  même 
honneur  après  Ouni  était  gouverneur  d'Éléphantine. 
J.  de  Morgan,  Catalogue  des  monuments  et  inscrip- 
tions de  l'Egypte  antique,  t.  i,  p.  172.  Quand  plus  tard 
Thèbes  eut  obtenu  la  suprématie  et  fut  devenue  Nout- 
Risit,  o  la  ville  par  excellence  du  sud  »,  la  grande 
capitale,  c'est  là  que  résida  le  gouverneur  du  midi.  A 
une  époque  où  les  Hébreux  vivaient  encore  tranquilles 
en  Egypte,  Rekhmara,  nomarque  de  Thèbes,  vizir  de 
Thotmès  III,  etc..  joignait  à  ses  autres  charges  celle  de 

gouverneur  du  midi.  Mais  alors    \        ,  Resit,\a  région 

du  midi,  si  elle  allait  toujours  jusqu'à  Bigeh,  ne 
descendait  plus  que  jusqu'à  Siout,  puisque  c'est  dans 
ces  limites  que  Rekhmara  perçoit  les  taxes  de  son 
commandement.  Newberry,  The  life  of  Rekhmara, 
1900.  pi.  v-vi  et  p.  '26.  Après  les  Ramessides  et  la 
disparition  des  rois  prêtres,  les  Bubastites  de  la 
XXIIe  dynastie  firent  de  la  Thébaïde  déchue  un  apa- 
nage royal  et  la  maintinrent  de  la  sorte  sous  leur  dé- 
pendance, avec  des  alternatives  toutefois.  Cf.  Maspero, 
histoire  ancienne  des  peuples  de  l'Orient,  6e  édit., 
1904,  p.  476.  Elle  ne  tarda  pas  de  tomber  aux  mains 
des  Ethiopiens  et,  sous  ces  derniers,  vers  la  fin  du 
viii"  siècle,  puis  sous  les  Saïtes,  VIIe  et  vie  siècles,  elle 
devint  une  principauté  théocratique  régie  par  des 
femmes  de  sang  royal.  Toutes  ces  péripéties  contribuè- 

DICT.   DE  LA   BIBLE. 


rent  politiquement  à  rendre  réelle,  de  nominale  qu'elle 
était  auparavant,  la  démarcation  déjà  si  tranchée  par  la 
nature  elle-même,  entre  la  Haute  et  la  Basse  Egypte. 
Le  nom  d'Egypte  ou  Mesraïm  se  restreignit  à  la  dernière. 

II.    LA  TERRE  DU  SUD  CHEZ  LES   PROPHÈTES.  —   1°  l'aie, 
xi,  11,  prophétisant  la  venue  du  Messie,  annonce  qu'il 
apportera  au  inonde  le  règne  de  la  justice,  et  spéciale- 
ment qu'«  il  étendra  de  nouveau  sa  main  »,  comme  il 
avait  déjà  fait  pour  la  sortie  d'Egypte,  et  qu'«  il  rappel- 
lera le  reste  de  son  peuple  »  dispersé  aux  quatre  points 
cardinaux.  Il  le  rappellera  en  particulier  du  sud,  c'est- 
à-dire  de  l'Egypte,  de  Phétros  et  de  l'Ethiopie.  On  ne 
s'explique  pas  que  les  Septante  lisent  ici  ànô  Ùx£'j).wvia; 
pour  a  Phetros,  contrairement  au  texte  hébreu  suivi 
par  la  Vulgate.  Quoi  qu'il  en  soit,  Phétros  est  le  même 
mot  que  Phaturès.  Jer.,  xliv,  1,  15.  Isaïe  est  pleinement 
d'accord  avec  l'état  de  choses  existant  en  Egypte  de  son 
temps,  lorsqu'il  distingue  la  terre  du  sud  de   Mesraïm 
devenue  au  sens  restreint  l'Egypte  proprement  dite.  De 
plus  il  suit  l'ordre  géographique,  allant  du  nord  au  sud 
jusqu'à  l'r.thiopie,  jadis  soumise  à  l'Egypte,  maintenant 
indépendante  d'elle  et  parfois  la  dominant.  Asarhadon 
ne  fait  pas  autrement  quand  il  se  déclare  «   le  roi  des 
rois  d'Egypte  (Musar),  de  la  Haute  Egypte  (Paturisi)  et 
de  l'Ethiopie  (Kusi).  »  Budge,  The  history  of  Esarad- 
don,  n»  5,  p.  16  19.  —  2°  Jérémie,  xliv,   1  :  «  Parole 
qui  fut  transmise  par  Jérémie  à  tous  les  Juifs  qui  habi- 
taient le  pays  d'Egypte,  à  Magdal,  à  Taphnès  et  dans 
Memphis,  et  dans  la  terre  de  Phaturès.  o-if.  15  :  «  Et 
tout  le  peuple  de  ceux  qui  habitaient  en  Egypte  (et)  à 
Phaturès,  répondirent  à  Jérémie...  «Jérémie  suit  aussi 
l'ordre  géographique  et  met  en   parallèle  Mesraïm  et 
Phaturès,  soit  qu'il  annonce  aux  Juifs  réfugiés  et  dis- 
persés en  Egypte  le  châtiment  de  leur  idolâtrie  par  la 
main  de  Nabuchodonosor,  soit  qu'il  cite  la  réponse  de 
ces  mêmes  Juifs  opiniâtres  dans  leur  incrédulité.  Tous 
ceux  de  Mesraïm  et  ceux  de  Phaturès  (f.  15),  Dieu  les 
atteindra  en  Mesraïm  où  ils  occupent  trois  villes,  Mag- 
dal à  la  frontière  orientale,  Taphnis  un  peu  plus  haut 
dans  les  terres  et  enfin  Memphis  à  la  pointe  de  Delta  ; 
il  les  atteindra  pareillement  en  Haute  Egypte  (S'.  l);d'un 
mot,  dans  les  deux  régions  distinctes  où  s'étend  la  dis- 
persion. Cf.  Ézéchiel,  xxx,  13- 1 1,  où  l'on  voit  la  même 
opposition  entre  Mesraïm  et  Phaturès.  —  3°  Dans  Ézé- 
chiel, xxx,  14,  le  Seigneur  prédit  la  dispersion  de  la 
terre  de  Phaturès.  Au  chap.  xxix,  12-13,  le  Seigneur  vient 
de  dire  :  «  Je  disperserai  les  Égyptiens  parmi  les  na- 
tions, et  je  les  séparerai  dans  tous  les  pays...  Après  qua- 
rante ans  je  rassemblerai  les  Egyptiens  du  milieu  des 
peuples  parmi  lesquels  ils  avaient  été  dispersés.  »  Il 
ajoute,  f.  14  :  «  Je  ramènerai  les  captifs  d'Egypte;  je  les 
placerai  dans  la  terre  de  Phaturès, dans  la  terre  de  leur 
naissance,  et  ils  y  feront  un  royaume  humilié.  »  Dans 
l'état  actuel  de  nos  connaissances,  la  réalisation  de  cette 
prophétie  reste  obscure  par  plus  d'un  coté.  Ni  les  docu- 
ments assyriens  et  égyptiens,  ni  Josèphe  et  les  autres 
écrivains  ne  font  la  lumière  sur  ces  quarante  années 
suivies  du  rétablissement  de  l'Egypte  dans  un  royaume 
limité  à  la  terre  du  sud.  Cf.  W.M.  Mùller,  art.  Pathros, 
dans  Hastings,  Dictionary  of  the  Bible,  t.  m,  p.  693. 
Une  seule  chose  est  certaine  :  après   les  invasions  des 
Assyriens,  l'Egypte  était  frappée  à  mort,  et  malgré  son 
renouveau  sous  Amasis,  elle  était  bien  «  un  royaume 
humilié  ».  Les  Perses  allaient  venir.  Peut-être  est-ce 
dans  la  période  qui  va  d'Amasis  aux   Perses  (570-525) 
qu'il  faudra  placer  la  restauration  signalée  par  le  pro- 
phète'.' Il  y  eut  là,  semble-t-il,   un  moment  d'accalmie 
et  de  paix  relative,  surtout  dans  la  Haute  Egypte  déli- 
vrée des  Éthiopiens.  Mais  il  est  un  point  de  la  prophétie 
où  nos  connaissances  nous  permettent  de  vérifier  l'exac- 
titude d'Ézéchiel.  11  dit  expressément  que  Phaturès  est 
la  terre   d'origine    des     Égyptiens,    terra    nativitalis 
suse.  En  cela  il  est  d'accord  avec  la  tradition  égyptienne 

V.  -  8 


227 


PHATURKS    —    PHÉXICIE 


228 


consignée  par  Hérodote.  Il,  4,  15,  et  Diodore  II,  50, 
Thinis,  / — >  1      ,  Tlteni,  dans  la  Haute-Éevpte,  fut  en 

effet  le  berceau  et  la  première  capitale  de  l'Egypte,  Menés, 
le  premier  roi  historique,  en  était  originaire,  les  deux 
premières  dynasties  sont  appelées  thinites.  Brugsch, 
Histoire  d'Egypte,  1"  partie,  -  édit.,  Leipzig,  1875, 
p.  29-30.  De  plus,  les  inscriptions  attestent  la  priorité' 
du  sud  en  le  plaçant  toujours  avant  le  nord  ;  ainsi,  par 
exemple,  le  Pharaon  est  constamment  en  premier  lieu 
roi  de  la  Haute  Egypte.  Enfin  Amélineau  a  découvert 
(1895-1898)  les  lombes  des  plus  anciens  rois  à  Abydos, 
nécropole  de  Thinis,  et  cette  découverte  est  venue 
donner  à  la  tradition  la  plus  éclatante  confirmation. 
Cf.  Pétrie,  The  royal  Tombs,2  in-8-\  1900-1901  Mé- 
moires XVIII  et  XXI  de  VEgypt  Exploration  Fioul). 
Venus  d'Asie  par  la  mer  Rouge  et  l'ouadi  Hammàmàt, 
suivant  l'opinion  la  plus  probable,  les  Égyptiens  s'éta- 
blirent donc  dans  les  environs  d'Abydos.  Ce  fut  là 
qu'ils  naquirent  en  quelque  sorte  comme  peuple  et 
d'où  ils  s'étendirent  au  sud  et  au  nord  sur  toute  la 
vallée  du  Nil.  Cf.  .T.  de  Morgan.  Recherches  sur  les 
origines  de  l'Egypte,  t.  il,  1897.  p,  214  sq. 

C.  Lai,  1ER. 
PH  AU  (hébreu:  ws,  Pâ'û,  Gen.,xxxvi,39;  >ys,  l'a  i, 

T  "T 

I  Par.,  i,  50;  Septante  :  $uyuip),  ville  d'Idumée  où 
résidait  Adar  (appelé  Adad  I  Par.,  i,  50),  roi  d'Édom. 
Le  site  de  cette  ville  est  inconnu.  U.  J.  Seetzen,  Reisen 
durch  Syrien,  Palàstina,  t.  m.  I.und.  1835,  p,  18,  pro- 
pose de  reconnaître  Phâû  dans  Phauaca.  F.  Buhl, 
Geschichte  der  Edomiter,  1893,  p.  38,  combat  cetle 
identification. 

PHÉ,  lettre  hébraïque.  Voir  PÉ,  col.  1. 

PHEDAEL  (hébreu  :  Pedâh'êl  t  Dieu  délivre  »; 
Septante  :  $a8o^X),  lils  d'Ammiud,  de  la  tribu  de  Neph- 
thali.  Il  fut  chef  de  sa  tribu  et  Moïse  le  chargea  de  la 
représenter  dans  le  partage  de  la  Palestine,  avec  les 
chefs  des  autres  tribus  israélitss.  Xiim.,  xxxiv,  28. 

PHEGIEL  (hébreu  :  Pag'ïêl,  Septante  :  •]•<,-; x:r,, . 
>]'x:;ir:'>).  lils  d'Ochran,  chef  de  la  tribu  d'Aser,  du 
temps  de  Moïse.  Il  offrit  au  Tabernacle  les  menu-  pré- 
sents et  les  mêmes  sacrifices  que  les  autres  chefs  de 
tribus.  Num.,  I,  13;  il,  27;  vu.  72.  77.  Il  marchait  à  la 
tète  des  Asérites.  Num.,  x,  26. 

PHELDAS  [Pildâë;  Septante  :  $aXSÉç),  le  sixième 
des  huit  fils  de  Nachor,  frère  d'Abraham  el  de  Melcha. 
sa  nièce.  Gen..  XXII,  22.  Le  nom  mnbs  a  été  trouvé 
dans  les  inscriptions  nabuthéennes.  M.  A.  Levy,  Ueber 
die  nabalâischen  Inschriften,  dans  la  Zeitschrift  der 
deutschen  morgeniândischen  Gesellschaft,  t.  xiv.  1860, 
p.  440. 

PHÉLÉIA  ih.d. reu  :  Pelâ'ydh  [voirPHALAïA,  col.  182]; 
Septante  :  $a5ass;  A lexandrinus  :  $aXafa),  troisième 

lils   d'Elioénaï.  de   la   race  royale  île    David.   I    l'ai.,  m. 


PHÉLÉLIA  (bel, i-eii  :  Pelalyâh,  Jéhovah  jiig.-  j; 
Septante  :  $sXaXiâ),  prêtre,  Sis  d'Amsi  el  père  de 
.h'-roham  qui  était  lui-même  père  cl  \daïa,  contempo- 
rain de  \eleiiiie.  Il  Esd..  XI,  12.  C'était  un  des  des- 
cendants de  Pheshur  ou  l'hassur,  fils  de  Melchias. 

PHÉLETH  (hébreu  :  Pélcf,  Septante  :  *aX£6),  père 
de  Hon,  de  la  tribu  de  Ruben.  Hon  prit  pari  à  la  ré- 
volte de  Coré  ei  des  deux  autres  Rubénites  Dathan  et 
Abiron  contre  Moïse  el  Aaron,  Num.,  xvi,  I.  les  Sep- 
tante el  le  texte  samaritain  appellent  Phéleth  Bis  de 
q,  —  In  descendant  de  Jéraméel  de  la  tribu  de 


Juda,  qui  est  aussi  appelé'  Pélét  dans  le  texte  hébreu, 
est  appelé  Phalelh,  dans  ia  Vulgate.  I  Par.,  H,  33. 

PHÉLÉTHIENS   (hébreu  :   hap-Pelêti;   Septante   : 

ci  $eXe$ï),  gardes  du  corps  du  roi  David.  II  Reg.,  vm, 
18;  xv,  18;  III  Reg.,  i.  38,  44;  I  Par.,  xvilt,  17.  La  Vul- 
gate nomme  aussi  les  Phéléthiens,  IV  Reg.,  XI,  19, 
parmi  les  gardes  qui  accompagnèrent  le  roi  Joas  lors  de 
son  intronisation,  mais  l'hébreu  et  les  Septante  n'en 
font  pas  mention  et  parlent  seulement  des  Céréthiens. 
Dans  tous  les  autres  passages  cités  plus  haut,  les  Phé- 
léthiens sont  toujours  joints  aux  Céréthiens  et  nommés 
à  leur  suite.  On  croit  communément  que  leur  nom 
n'est  qu'une  variante  de  celui  de  Philistin.  Cf. 
Ezech.,  xxv,  15;  Soph.,  Il,  5.  Voir  CÉRÉTHIENS,  t.  u. 
col.  411. 

PHÉLONITE.  I  Par..  XI,  3G.  Voir  Piial  i.onite, 
col.  183. 

PHELTI  (hébreu  :  Pillai:  Septante:  •!■;> et- i,  repré- 
sentant de  la  famille  sacerdotale  de  Miaminet  Moadiadu 
temps  du  grand-prêtre  Joacim.  II  Esd..  xn,  17.  Voir 
Miamin  3,  col.  1058. 

PHELTIA  (hébreu  :  l'elatyâh  |\oir  PhaltiaS, 
col.  184];  Septante  :  $aX-ridt),  un  des  chefs  du  peuple 
qui  du  temps  de  Néhémie  signèrent  l'alliance  entre 
Dieu  et  les  Israélites.  II  Esd.,  x,  22. 

PHELTI  AS  c  hébreu  :  Pelatyâh  et  Pelatyâhû  [voir 
Piiai.tias.  col.  184]  ;  Septante  :  <t>aX-riâç),  fils  de  Banaïas, 
contemporain  d'Ézéchiel,  un  des  chefs  du  peuple.  Le 
prophète,  dans  une  vision,  XI,  1^13.  fui  transporte  .i  la 
porte  orientale  du  Temple  de  Jérusalem  et  il  vil  là 
vingt-cinq  honiines  au  milieu  desquels  étaient  Jézonias. 
fils  d'Azur, et  Pheltias.  Dieu  lui  ordonna  de  prophétiser 
contre  eux  el  comme  il  prophétisait,  Pheltias  mourut. 

PHÉNENNA  i  hébreu  :  Peninndh,t  corail  ou  perle:  a 
Septante  :  $evvâva),  seconde  femme  d'Eleana,  père  de 
Samuel.  Elle  avait  des  enfants  el  Anne,  la  première 
femme  et  la  femme  préférée  d'Eleana,  n'en  avait  point, 
l'h.'nenna.  jalouse  sans  doute  de  la  préférence  que  mon- 
trait son  mari,  reprochait  sa  stérilité  à  Anne  qui  était 
humiliée  el  blessée  de  ses  reproches.  I  Reg.,  i.  1-8. 
Quand  ses  prières  lui  eurent  obtenu  de  Dieu  un  lils  qui 
fui  Samuel,  Anne  s'écria  dans  son  cantique,  à  l'adresse 
de  l  hénenna,  I  Reg.,  u,  5  : 

La  stérile  enfante  sept  fois, 
Et  celle  qui  avait  beaucoup  de  lils  est  flétrie. 

PHÉNICE  (grec  :  *oïvtÇ;  Vulgate  :   Phœnice),  porl 

de  Crète.  Act..  XXVIIj  12.   Voir  PhŒNICE. 

PHÉNICtE,  nom  donné  à  la  cote  de  Syrie  et  au  terri- 
toire compris  entre  le  mont  Liban  à  l'est  et  la  mer  Mé- 
diterranée à    l'ouest.  Sa    longueur   a   été   très  différente 

selon  les  diverses  époques.  Elle  s'étendait  depuis  Gébaj 
ou  Byblos  jusqu'à  Dur  ou  Tantourah,  mais  on  l'a  pro- 
longé.- aussi  jusqu'à  .loppé  .-I  même  llhinoeolure,  à  la 
frontière  de  l'Egypte,  avant  l'établissement  des  Philistins 
dans  la  Séphélah.  Jamais  elle  n'a  désigné  un  État  unique, 

gouverné  par  un  même  chef;  elle  fui  toujours  divisé,    eu 
un  certain  nombre  de  villes  possédant  chacune  un  terri- 
toire particulier  et  une  domina  lion  pi  us  ou  moins  étend  ne. 
1.  NOM,  —   I    Le  nom  de  Pln-nieie  nous  vient  des  Grecs 

et  non  des  Phéniciens  eux-mêmes.  La  forme  grecque 
.->!  $oiv(x*),  Odyt.,  iv,  83;  Hérodote,  m,  .">;  Thucy- 
dide, n,69;  Strabon,  XVI,  u,  21:  Ptolémée,  \.  15,  .1. 
et  la  forme  latine.  Phœnice.  Cicéron,  Acad.,  u.  20; 
Tacite,  But.,  v,  6;  Pomponius  Mêla.  i.  12:  Pline. 
//.  A'.,  V,  13.  Les  auteurs  latins  plus  récents  écrivirent  le 


229 


PHENICIE 


230 


nom  Phœnicia  et  celte  forme  a  prévalu  parmi  les  mo- 
dernes, mais  elle  ne  se  trouve  pas  dans  l'Écriture.  Ce 
nom  ne  se  lit  que  dans  les  livres  écrits  en  grec, 
puisqu'il  est  d'origine  grecque,  c'est-à-dire  dans  le  se- 
cond livre  des  Machabées,  m,  5,  8;  iv,  4,  22;  vin,  8;  x, 
11,  tt  dans  les  Actes,  xi,  19;  xv,  3;  xxi,  2;  xxvii,  12  : 
'î'oivi/.r)  etPfiœnice.  Saint  Marc,  vu,  26,  mentionne  une 
Syro-phénicienne  i^upoçoivtaaa,  Syrophœnissa. 

2°  L'Ancien  Testament,  en  dehors  de  II  Mach.,  ne 
désigne  pas  autrement  la  Phénicie  que  par  le  nom 
général  de  terre  de  Chanaan.  Gen.,  x,  19;  Is.,  xxm, 
11;  Abd.,  20.  CI'.  Matth.,  xv,  22,  appelant  «  Chana- 
néenne  »  la  femme  que  saint  Marc,  vu,  26,  appela 
Syro-phénicienne,  et  les  Septante  rendant  (quelquefois 
à  tort),  Jos.,  v,  12,  la  locution  «  terre  de  Chanaan  »  par 
■rt  $otv£x7]  ou  r,  y^ôpx  -wv  $om'xo)v.  Exod.,  xvi,  3,  5;  Jos., 
v,  1;  Is.,  xxin,"2;  Job,  xl,  15  (30).  Cf.  Dent.,  m,  9. 
Voir  Chanaan  2,  I.  n,  col.  537.  Mais  il  faut  observer 
que  ce  nom  de  Chanaan  n'est  pas  réservé  seulement  à 
la  Phénicie;  il  esl  plus  étendu  et  s'applique  à  des  ter- 
ritoires et  à  des  peuples  qui  n'étaient  pas  phéniciens. 
L'absence  d'un  nom  général  pour  la  Phénicie  provient 
de  ce  que  les  cités  phéniciennes  étaient  indépendantes 
les  unes  des  autres  et  n'étaient  unies  par  aucun  lien 
politique.  La  table  ethnographique  de  la  Genèse,  x,  15- 


44.  —  Monnaie  de  Laodicée  du  Liban. 
Ti-te  di&démée  et  radiée  d'Antioohus,  à  droite.  —  û;.  BASIAEQS 
ANTIOXOr.  ^eL,-^^     y  w     W  \\  Whh'  Neptune,   de- 

boul.  do  face,  drapé  aux  trois  quarts  dans  sa  chlamyde,  tenant 
une  patère  de  la  main  droite  et  le  trident  de  la  main  gauche. 
Dans  le  champ  à  gauche,  VA  (pour  Laodicée);  à  droite,  un 
monogramme. 


IS.  énumère  séparément  Sidon,  l'Aracéen,  l'Aradien,  le 
Samaréen,  et  les  écrivains  hébreux  ne  désignent  jamais 
les  Phéniciens  par  un  nom  ethnique  spécial,  mais  par 
les  noms  des  villes  auxquelles  ils  appartiennent  :  les 
gens  de  Sidon,  les  gens  de  Tyr,  I  Esd.,  m,  7;  les 
Giblites,  III  Reg.,  v,  18;  les  gens  d'Arad,  Ezech.,  xxvii, 
11:  les  Aracéens,  les  Sinéens,  les  Samaréens,  Gen.,  x, 
17.  18;  les  habitants  d'Acho,  d'Achzib  et  d'Aphec.  Jud., 
i,  31.  En  englobant  d'ailleurs  la  Phénicie  dans  la  terre 
de  Chanaan,  les  écrivains  hébreux  parlaient  comme  les 
Phéniciens  eux-mêmes.  Une  monnaie  de  Laodicée  du 
Liban  (fig.  44),  frappée  au  nom  d'Antiochus  IV  Épi- 
phane,  nous  montre  que,  à  cette  époque  encore  (175- 
164  avant  J.-C),  on  donnait  au  pays  le  nom  de  Cha- 
naan. On  y  lil  en  ell'et  jy»a  zn  n:-în'-'-,  «  De  Laodicée, 
mère  (métropole)  de  Chanaan.  »  Gesenius,  Phœnicise 
monumenta,  t.  n,  p.  267.  Etienne  de  Byzance,  De 
urbibus,  édit.  Dindorf,  Leipzig,  1835,  t.  i,  p.  464,  dit 
formellement  :  Xvà,  ovtcûç  r,  4'otviVr,  èxcO.eÏto.  Cf.  la 
citation  de  Philon  de  Byblos  dans  Eusèbe,  Prsep. 
evaiig.,  I,  10,  t.  xxi,  col.  84  :  'A8s).ço;  Xvà  toO  -Kpuno-j 
u.ETOvou.a(r8évToç  'l'oivi/.oç.Chna  est  une  forme  apocopée 
de  Chanaan.  Dans  le  papyrus  Ilarris,  I,  9,  lig.  1  et  suiv.,  la 
Phénicie  estappelée  aussi  Kanaan.  Voir  \V.  M.  Mùller, 
.1m.  .  und  Europa,  1893,  p.  181.  Saint  Augustin  nous 
apprend  que  de  son  temps  les  paysans  carthaginois,  en 
latin.  Pœni,  dénomination  qui  n'est  pa's  différente  de 
Phœnices,  s'appelaient  eux-mêmes  Chanani  :  Interio- 
gali  rustwi  nostri  quid  sinl,  dit-il,  In  Rom.  inch. 
Expos.,  13,   t.   xxxv,   col.  2096,   punice    respondenles 


Chanani...  Cf.  Gesenius," Thésaurus,  p.  696;  Schrb- 
der,  Die  phônizische  Sprache,  in-8»,  Halle,  1869,  p.  6 
(et  les  citations,  ibid.).  Sur  le  nom  Chanaan-Phénicie, 
voir  W.  -M.  Millier,  Asien  und  Europa,  p.  205-208. 
Le  nom  géographique  de  Chanaan  ne  désigne  pas  direc- 
tement le  peuple  qui  habitait  sur  la  côte,  mais  le  pays 
lui-même  d'après  son  caractère  physique.  Chanaan 
signifie  «  le  pays  bas  »,  qui  longeait  la  Méditerranée, 
par  opposition  au  pays  haut,  Aram  ou  la  Syrie,  formée 
par  les  montagnes  qui  s'élevaient  à  l'ouest.  Cw 
dicta  sit  terra  Chanaan  interpretatio  hujus  nominis 
aperit.  Chanaan  quippe  interprétatif  Humilis, 
dit  saint  Augustin,  Enarr.  in  Ps.  CIV,  7,  t.  xxxvn, 
col.  1394. 

3»  L'étymologie  du  mot  grec  *otviÇ  est  controversée. 
Le  nom  de  la  Phénicie  parait  tiré,  d'après  les  uns,  du 
nom  de  ses  habitants.  Les  Grecs  les  appelèrent  $oïvixeç, 
d'où  les  Latins  tirèrent  Phœnices  et  Pœni,  à  cause  de  la 
couleur  rouge-brun  de  leur  peau  (cpotvô;).  R.  Pietsch- 
mann,  Gesdiichte  der  Pkônizier,  Berlin,  1889,  p.  13. 
D'après  d'autres,  les  Hellènes  antérieurs  à  Homère 
donnèrent  au  pays  situé  à  l'ouest  du  Liban  le  nom  de 
•ÊoivixYi,  parce  que  ce  qui  les  frappa  le  plus  quand  ils 
le  visitèrent,  ce  fut  le  palmier  qui  y  est  indigène  et 
élève  sa  couronne  de  palmes  au-dessus  de  l'olivier,  du 


'i."..  —  .Monnaie  de  Tyr. 

Tète  diadémée  d'Antiochus  IV,  adroite.  —  15.  BAEIAEQE 
ANTIOXOï.  Un  palmier. 

figuier  et  du  grenadier;  Phénicie  veut  dire  le  pays  des 
palmiers,  çoïve!  signifiant  «  palmier  »  en  grec.  G.  Raw- 
linson,  Hislory  of  Phœnicia,  1SS9,  p.  1.  Cet  arbre 
figure  sur  des  monnaies  de  Tyr  (fig.  45)  et  de  plu- 
sieurs autres  villes  phéniciennes.  Babelon,  Les  rois  de 
Syrie,  Paris,  1890,  p.  xcix,  75  (n»  577,  578),  pi.  xm, 
n»  12.  Voir,  pour  d'autres  monnaies  phéniciennes  re- 
produisant le  palmier,  Sehroder,  Phônizische  Sprache 
pi.  xvill,  fig.  11,  12,  14. 

.II.  Origine  des  Phéniciens.  —  La  table  ethnogra- 
phique de  la  Genèse,  x,  15-18,  fait  descendre  les  Phé- 
niciens de  Chanaan,  fils  de  Noé.  Elle  énumère  parmi 
les  fils  de  Chanaan,  Sidon,  son  premier-né,  l'Aracéen, 
le  Sinéen,  l'Aradien  et  le  Samaréen,  c'est-à-dire  que 
Sidon,  Arca  (voir  Aracéen,  t.  1,  col.  866),  Arad  ou 
Arvad  et  Simira,  qui  comptaient  parmi  les  principales 
villes  de  Phénicie,  furent  fondées  et  habitées  par  les 
descendants  de  Chanaan.  Sidon  fut  en  effet  tout  d'abord 
la  ville  la  plus  florissante  du  pays,  et  Tyr,  qui  n'est  pas 
nommée  dans  le  Pentateuque  et  n'apparaît  que  dans  le 
livre  de  Josué,  xix,  29,  n'acquit  que  plus  tard  la  préé- 
minence. Voir  Tyr,  Sidon. 

On  croit  généralement  que  les  Phéniciens  ont  émi- 
gré des  bords  du  golfe  Persique  sur  les  rives  de  la 
Méditerranée  environ  3000  ans  avant  notre  ère.  Héro- 
dote, 1,  1  ;  vu,  89;  Strabon,  XVI,  m,  2;  Justin,  XVIII, 
m,  2.  Ce  dernier,  abréviateur  de  Trajan  Pompée,  dit  : 
«  La  nation  syrienne  fut  fondée  par  les  Phéniciens,  qui 
étant  troublés  par  un  tremblement  de  terre,  quittèrent 
leur  pays  d'origine  et  s'établirent  d'abord  sur  les  bords 
du  lac  Assyrien  (probablement  le  Balir  Nedjif,  dans  le 
voisinage  de  Babylone)  et  puis  sur  les  bords  de  la 
Méditerranée,  où  ils  bâtirent  une  ville  qu'ils  appelèrent 
Sidon,  à  cause  de  l'abondance  du  poisson,  car  les  Phé- 
niciens appellent  le  poisson  sidon  ».  Ces  affirmations 


231 


PHÉNICIE 


232 


ont  été  contestées,  mais  le  fond  parait  exact.  G.  Rawlin- 
son,  History  of  Phœnicia,  p.  54.  Quel  a  été  leur  ber- 
ceau primitif'/  Nous  l'ignorons.  On  en  fait  assez  générale- 
ment aujourd'hni  un  peuple  sémitique,  surtout  à  cause 
de  sa  langue,  qui  diffère  très  peu  de  l'hébreu  et  est 
apparentée  aux  autres  langues  sémitiques,  mais  il  ne 
résulte  pas  de  là  nécessairement  que  les  Phéniciens 
fussent  des  descendants  de  Sem  et  que  l'origine  chami- 
tique  qui  leur  est  attribuée  par  la  Genèse  soit  controu- 


16.    —   Carie  de  la  Phénicie. 

vée.  Les  Phéniciens,  commerçants  par  goût  et  par  tem- 
pérament, ont  pu  adopter  la  langue  des  nations  et  des 
tribus  avec  lesquelles  ils  étaient  en  affaires.  Il  est  pos- 
sible aussi  que  Sémites  el  Cbamites  aient  parlé  long- 
temps ta  même  langue  et  que  les  Phéniciens  vivant  au 
milieu  des  Sémites  aient  toujours  parlé  un  idiome 
semblable  à  celui  de  leurs  plus  proches  voisins.  Cf.  Th. 
.1.  Ditmar,  Ueber  dos  Vaterland  der  Phônizier,  in-12, 
Merlin  (1889). 

III.  Le  pays.  —  I"  Étendue.  —  La  longueur  de  la 
Phénicie  a  varié  aux  diverses  époques  et  les  anciens 
géographes  n'ont  eu  qu'une  idée  assez  vague  de  ses  di- 
mensions. Si  on  l'étend  du  cap  Possidi  à  Rhinocolure, 
elle  eut  en  I i^m-  droite,  environ  <>lo  kilomètres  de  lon- 
gueur, mais,  en  général,  les  Phéniciens  n'onl  pas  de 
beaucoup  dépassé  le   mon!   Carmel,  Pomponius  Mêla, 


Chorogr..  i,  11-12.  édit.  Teubner,  p.  15-16,  en  remon- 
tant du  sud  au  nord  la  fait  commencer  à  Joppé  (fig.  46). 

De  la  frontière  d'Egypte  au  mont  Carmel,  sur  une 
longueur  de  '240  kilomètres,  on  ne  rencontre  aucun 
promontoire,  aucune  baie  digne  de  ce  nom.  Du  Carmel 
qui  s'avance  assez  avant  dans  la  mer  et  oll're  un  refuge 
aux  navires,  jusqu'à  Beyrouth,  pendant  146  kilomètres, 
la  côte  est  presque  régulière.  Ce  n'est  qu'au  nord  de 
Beyrouth  que  la  ligne  de  côtes  devient  accidentée.  De 
celte  ville  à  Tripoli,  elle  est  coupée  par  plusieurs  pro- 
montoires et  plusieurs  baies.  A  partir  de  là.  de  Tripoli 
à  Tortose  (Antaradus),  la  mer  fait  une  forte  échancrure 
dans  les  terres.  Jusqu'au  delà  de  Gabala,  la  côte  remonte 
vers  le  nord  avec  peu  de  sinuosités,  mais  ensuite,  jus- 
qu'au cap  l'ossidi,  elle  est  très  irrégulière;  les  monts 
Bargylus  etCasiusse  prolongent  dans  la  mer  et  forment 
des  promontoires  dont  le  cap  Possidi  est  le  plus  remar- 
quable. 

La  largeur  du  territoire  occupé  par  les  Phéniciens 
sur  le  rivage  de  la  Méditerranée  variait  île  12  à  15  kilo- 
mètres à  50.  La  frontière  orientale  était  l'arête  monta- 
gneuse qui  sépare  les  eaux  qui  se  déversent  dans  la 
nier  à  l'ouest,  de  celles  qui  se  déversent  à  l'est  dans 
l'Oronte,  le  Litany  et  le  Jourdain.  Entre  ces  montagnes 
et  la  mer,  on  trouve  des  plaines  d'alluvion  et  sur  le 
rivage  même  une  bande  de  sable  blanc,  plus  ou  moins 
large,  qui  se  distingue  par  sa  finesse  et  par  son  excel- 
lente qualité  siliceuse,  spécialement  dans  le  voisinage 
de  Sidon  et  au  pied  du  mont  Carmel. 

2"  Plaines  el  montagnes.  —  Les  plaines  les  plus 
remarquables  sont  celles  de  Saron,  d'Accbo,  de  Tyr,  de 
Sidon  et  de  Marathus.  Les  montagnes  qui  appartiennent 
ou  se  rattacbentà  la  Phénicie  sont  le  Carmel.  le  Casius, 
le  Bargylus  et  le  Liban.  Voir  Carmei.  2,  t.  Il,  col.  290,  et 
Liban,  t.  iv,  col.  1277.  Le  Bargylus  des  anciens,  Ansay- 
riéb  ou  Nasariyéh  des  modernes  s'étend  de  l'Oronte 
près  d'Antioche  à  la  vallée  de  l'Éleuthérus.  L'eau  y 
abonde  et  là  prennent  naissance  le  Nahr-el-Kebir  qui 
a  son  embouchure  près  de  Latakiéh,  le  Nahr-el-Melk, 
le  Nalir-Aini  il.  le  Nahr-Kublé.  le  Nahr-el-Abrath,  etc. 
Le  Liban  était  la  chaîne  la  plus  importante,  la  défense 
naturelle  la  plus  forte  de  la  Phénicie;  les  armées  étran- 
gères n'osaient  guère  s'aventurer  à  l'ouesl  de  ses  cimes. 

'■'•■  Climat.  —  Le  climat  de  la  Phénicie  est  très  varié, 
à  cause  de  l'étendue  de  ses  côtes  el  de  la  diversité  des 
altitudes.  Pendant  l'hiver,  les  tempêtes  sont  nombreuses 
et  la  pluie  abondante,  la  navigation,  interrompue  el 
même  impossible,  mais  de  mai  à  octobre,  le  baromètre 
varie  fort  peu,  le  ciel  est  sans  nuage  et  sans  pluie. 

4°  Productions.  —  Le  sol  produit  le  palmier  qui, 
autrefois  surtout,  était  très  abondant,  le  sycomore,  le 
pin  maritime,  le  platane,  sur  la  côte;  et  dans  les  mon- 
tagnes le  cèdre,  «  la  gloire  du  Liban  »,  le  pin  d'Alep,  le 
cyprès,  etc.,  le  chi  ne,  le  noyer,  le  peuplier  et  le  ca- 
roubier. Les  arbres  fruitiers  indigènes  dans  le  pays 
sont  l'olivier,  la  vigne,  le  daitier,  le  noyer  el  le  liguier. 
Voir  ces  mots.  On  trouve  sur  la  côte  les  coquillages 
dont  les  Phéniciens  tiraient  la  couleur  pourpre.  Voir 
POl  RPRE. 

5°  Villes  principales.  —  Les  principales  villes  de 
Phénicie,  depuis  Laodicée  au  nord  jusqu'à  Joppé  an 
sud,  étaient  au  nombre  île  vingt-cinq  :  Laodicée, 
Gabala,  Balança,  Paltos;  Arad  on  Arvad,  Gen.,  \.  18; 

I  /e,  li.,  xxvti,  8,  avec  Antaradus.  Marathus.  Simya, 
Ortbosiade  et  Area;  Tripoli,  Calamus,  Tri.  ris  et  Botrys; 
Gébal  (Byblos),  Ezech.,  \xvn.  9;  111  lie,:.,  v.  18  32  ; 
Aphaca;  Béryte,  voii  Béroth,  t.  t.  col.  1625;  Sidon, 
Sarepta  el  Ornithopolis;  Tyr  el  Ecdippe;  Accho  et  Por- 

phyrton;   Dor  et  Joppé.    Sarepta    est    imée    dans 

l'Écriture,  111   &eg.,  svii,  9-24;  Abd.,  20;  Lui 
ainsi  qu'Orthosiade,  I  Mach.,  xv,37,  Accho,  Dor,  Joppé 
et  surtout  Tyr  el   Sidon.  Voir  ces  mots.  La  plaine  de 
l.i  Phénicie  d'ans  le  sens  strict  s'étendait  du   Pronu 


233 


PHENICIE 


234 


riuni  Albion  des  anciens  illàs  d-Beyad  ou  Alii/ail  des 
modernes),  à  huit  kilomètres  environ  au  sud  de  Tyr 
jusqu'à  l'ancien  Bostrenus(Nahrel-Avly  des  modernes) 
à  deux  kilomètres  au  nord  de  Sidon,  Robinson.  Bibli- 
cal  researches,  2*  édit.,  1S56.  t.  n.  p.  473,  occupant  une 
plaine  ondulée  de  450  kilomètres  de  longueur. 

IV.  Le  commerce.  —  Les  Phéniciens  sont  surtout  cé- 
lèbres par  leur  commerce,  leur  industrie  et  leurs  navi- 
gations. Doués  du  génie  du  négoce,  leur  trafic  nous 
explique  toute  leur  histoire.  Il  leur  avait  procuré  de 
grandes  richesses  qui  les  avaient  rendus  célèbres. 
Cf.  Ps.  xliv  ixi.vi.  13;  lxxxvi  (lxxxvh),  4;  Ezech., 
XXVII ;  Ose.,  ix,  13.-Z.ioli..  ix,  2-3. 

«  Ce  petit  peuple,  attaché  à  la  frange  d'un  littoral, 
possédait  le  monopole  des  grandes  navigations  dans  la 
.Méditerranée  et  fournissait  à 
tous  ses  voisins  les  objets  pré- 
cieux importés  des  extrémités 
du  monde,  aussi  bien  par  les 
voies  de  terre  où  cheminaient 
les  caravanes,  que  par  les  voies 
de  mer.  pratiquées  des  navi- 
res. Les  Phéniciens  avaient 
acquis  des  ports  sur  la  mer 
Rouge,  atin  de  s'élancer  vers 
l'océan  des  Indes  et  de  visiter 
les  cotes  de  l'Afrique,  de  l'A- 
sie, même  de  l'Insulinde. 
ainsi  qu'en  témoignent  nom- 
bre d'inscriptions  phénicien- 
nes trouvées  à  Rejang.  dans 
l'île  de  Sumatra,  et  datant  de 
vingt-deux  à  vingt-trois  siè- 
cles... Pour  aller  chercher 
l'étain  qu'ils  vendirent  d'abord 
aux  Égyptiens,  puis  aux  Hel- 
lènes,  de  la  Petite  et  de  la 
Grande  Grèce,  les  Phéniciens 
avaient  même  osé  franchir  les 
portes  d'Hercule,  et  s'aventu- 
rer sur  la  g  mer  Ténébreuse  />. 
Enfin,  devançant  de  vingt  siè- 
cles les  Diaz  et  les  Vasco  de 
Gaina,  n'avaient-ils  pas,  par 
ordre  du  roi  d'ugypte,  Né- 
chao  II.  accompli  la  circum- 
navigation complète  du  con- 
tinent d'Afrique?  Le  récit  des 
navigateurs  affirmant  qu'ils 
avaient  vu  le  soleil  d'abord  à 
leur  droite,  puis  à  leur  gau- 
che, pendant  ce  long  périple, 
entraine  Hérodote  à  douter  de  l'authenticité  de  ce  voyage 
et  c'est  précisément  ce  dire  sur  lequel  s'appuient  main- 
tenant les  géographes  pour  conclure  à  la  réalité  de 
l'événement.  Elisée  Reclus,  La  Phénicie  et  les  Phéni- 
ciens, in-8°,  Neuchatel,  1900,  p.   15-16. 

Les  Phéniciens  firent  leur  apprentissage  de  la  navi- 
gation lorsqu'ils  habitaient  sur  les  bords  du  golfe  Per- 
sique.  en  voyageant  au  moyen  de  radeaux  d'une  ile  à 
Ion  la  tradition  antique.  Pline,  H.  S.,  VII. 
î.vi,  206,  édit.  Teubner,  1870.  t.  n,  p.  52.  Quand  ils  se 
furent  établis  sur  le  territoire  qu'on  a  appelé  de  leur 
nom,  ils  perfectionnèrent  peu  à  peu  leurs  moyens  de 
transport.  La  situation  du  pays  le  rendait  très  favorable 
pour  le  commerce.  Pomponius  Mêla.  ï.  12;  I.  Kenrick. 
Phœnicia,  Londres,  1855,  p.  186-187.  Le  Liban  leur 
i -sait  en  abondance  un  excellent  bois  de  construc- 
tion pour  les  navires;  Chypre,  tous  les  matériaux  néces- 
saire pour  le  grément  du  vaisseau,  de  la  quille  jusqu'aux 
voiles.  Nous  ne  connaissons  pas  en  détail  le  navire 
phénicien,  mais  nous  savons  qu'il  faisait  l'admiration 
des  Grecs.  Dans  Xénophon,  Œconom.,  vin.  Ischomachos 


47.  —  Fia.  il  de  verre  phé- 
nicien, à  parfums,  trouvé 
à  Camiros,  dans  l'île  de 
Rhodes.  —  D'après  l'en  t 
et  Chipiez,  Histoire  de 
l'art,  t.  m,  (1g. 522, p. 741. 


dit  qu'il  n'avait  jamais  vu  de  navire  mieux  disposé  qu'un 
vaisseau  phénicien.  Voir  Navire,  t.  iv.  lîg.  405,  col.  2427. 
Ezëchiel,  xxvn,  a  tracé  un  tableau  célèbre  du  commerce 
de  T\r,  qui  était  celui  de  tous  les  Phéniciens.  Cf.  Is.. 
xxm,  2-8.  Ils  fournissaient  à  l'ancien  monde  des  pro- 
duits textiles  renommés.  Damas  et  l'Arabie  lui  ven- 
daient  la  laine  à  tisser.   Ezech.,  xxvn,   18,   21.  Leurs 


-  Peigne  phénicien  en  ivoire,  trouvé  en  Espagne. 
Musée  du  Louvre. 

tissus  étaient  estimés  par-dessus  tous  les  autres,  lliad., 
vi,  290.  à  cause  de  la  beauté  et  de  l'éclat  de  leurs  cou- 
leurs et  aussi,  souvent,  à  cause  de  la  délicatesse  et  de  la 
richesse  de  leurs  broderies.  Voir  Perrot,  Histoire  île 
l'art,  t.  m,  p.  877.  Leurs  étoffes  de  pourpre  jouissaient 
d'une  grande  réputation.  Voir  Pourpre. 
Le  \erre  était  avec  les  tissus  un  des  principaux  objets 


49.  —  Bus'e  de  femme  ornée  de  ses  bijoux.  Sculpture  gréco- 
phénicienne,  trouvée  à  Elché  (ancienne  Ilici)  en  Espagne 
Musée  du  Louvre. 

du  commerce  des  Phéniciens.  Voir  Verre.  Les  Égyp- 
tiens le  connaissaient  avant  eux,  mais  quoiqu'ils  n'aient 
pas  été  les  premiers  à  le  connaître,  ils  l'exploitèrent 
sur  une  large  échelle  et  avec  le  plus  grand  succès.  Sidon, 
Tyr  et  Sarepta  se  distinguèrent  par  leurs  manufactures. 
11  fut  exporté  dans  tout  le  inonde  ancien  et  l'on  en  a 
retrouvé  de  très  beaux  échantillons,  transparents  ou 
demi-transparents  et  diversement  colorés  (fig.  17). 

L'art  céramique  en  Phénicie  fut  loin  d'égaler  celui 
du  verre,  mais  ils  fabriquaient  de  la  poterie  à  bon 
marché  et  la  répandirent  ainsi  très  loin.  Strabon,  III,  v, 


235 


PHÉNICIE 


236 


11;  Scylax,  Periplus,  112,  dans  Geogr.  min.,  édit.  Di- 
dot,  t.  r,  p.  94.  Ils  fabriquaient  aussi  des  objets  de  toi- 
lette, comme  le  peigne  en  ivoire  qui  a  été  retrouvé  en 
Espagne  (fig.  48),  et  des  bijoux  de  toute  sorte  (fig.  49). 
Les  ouvriers  phéniciens  étaient  aussi  habiles  en  mé- 
tallurgie, comme  ils  le  montrèrent  dans  la  fabrication 
des  deux  colonnes  du  temple  de  Salomon,  voir  III  Reg., 
vu,  21  ;  et  des  ustensiles  en  bronze  destinés  au  service, 
du  même  temple,  III  Reg.,  vu,  14;  II  Par.,  n,  14.  Ils 


l'Assyrie,  la  Mésopotamie  (Haran),  l'Arménie  (Thogor- 
mah),  l'Asie  Mineure,  l'Ionie,  Cypre,  l'Ilellade  (.lavan), 
l'Espagne  (Tbarsis).  Avec  les  uns,  les  Phéniciens  fai- 
sant leur  commerce  par  terre;  avec  les  autres,  par  mer. 
Grâce  à  leurs  découvertes  géographiques  et  à  leurs  dé- 
couvertes astronomiques  qui  leur  permirent  de  navi- 
guer en  pleine  mer,  sans  s'astreindre  à  longer  seule- 
ment les  côtes,  ils  élargirent  sans  cesse  le  cercle  de 
leur  commerce.    Ils    établirent   un    peu   partout    des 


5ii 


Coupe  de  travail  phénicien,  trouvée  dans  l'ile  de  Chypre.  Mum't  du  Louvre. 


fabriquaient  pour  l'exportation  de  nombreux  objets  en 
métal,  statuettes,  coupes,  patères,  etc.,  et  les  vendaient  à 
l'étranger  (fig.  50).  lliad., xxm,  740-744;  Odys.,  i\,  615; 
xv.  115.  Leur  art  est  de  qualité  inférieure;  c'est  une 
imitation  un  peu  gauche  et  maladroite  de  l'art  assyrien 
et  surtout  de  l'art  égyptien,  mais  ces  oeuvres  n'en  fai- 
saient pas  moins  leur  chemin  à  travers  le  monde  qui, 
en  dehors  des  bords  de  l'Euphrate  et  du  Nil,  ne  con- 
aaissaient  rien  de  mieux  dans  ces  temps  antiques.  Voir 
(..   IVrrot,   Histoire  de  l'art  daim    l'antiquité,   t.   m, 

p.   403-439.   518-535;   Clern t-Ganneau,   L'imagerie 

phénicienne,  Paris,  1880,  p.  2. 

l'./échiel, dans  son  chapitre  \x\n,  ('•minière  une  partie 
des  pays  avec  lesquels  .trafiquait  la  ville  de  Tyr:  la  Syrie 
Damas,  la  Palestine,   l'Egypte,   l'Arabie,  la    liabylonie, 


comptoirs  qui  facilitèrent   leur  négoce.  Voir  A.  Dauza 
Recherches  sur  les  emporia  phéniciens,  dans  leZeugir 
et  le  Bysacium,  in-8°,  Paris.  1869. 
Les  Phéniciens  achetaient  en  Palestine  les  chênes  de 

Basan,    pour   en    faire  des  rames.    Ezech.,    XXVII,   (i,  le 

froment  de  Mennith  (voir  Mennith,  t.  iv,  col.  972).  le 

baume,  le  miel,  l'huile  et  ta  résine,  X.  17,  les  ceintures 

fabriquées  par  [es  femmes  Israélites,  Prov.,  xxxi,  24,  et 
sans  (toute  toutes  les  productions  du  pays.  Cf.  Joël, 
III,  3-6.  lui  échange,  ils  donnaient  les  étoffes  et  les 
bijoux  de  leurs  artistes  ili^.  ôl);  les  'J'xriens  alla  ni 
vendre  leur  poisson  jusqu'à  Jérusalem,  avec  toute  es]    < 

de  marchandises,  otnnia  venalia,  et  ce  ne  fut  pas  sans 
peine  que  Néhémie  les  obligea  à  respecter  le  repos  du 
sabbat.  Il  Esd.,  xtn.  16-21. 


237 


PHEXICIE 


238 


Les  Phéniciens  n'exercèrent  pas  toujours  leur  com- 
merce sans  violer  les  lois  de  la  justice.  Ils  s'étaient 
souvent  rendus  odieux  par  leurs  pirateries  et  par  leurs 
rapines.  Ils  enlevaient  par  la  ruse  et  la  violence  tous 
ceux  qu'ils  pouvaient  surprendre,  hommes,  femmes, 
entants,  pour  les  vendre  comme  esclaves.  La  fraude, 
izxTr.îiï,   Odyss.,   xiv,  883,  était  pour  eux,   en  mémo 


51.  —  Bijoux  phéniciens  sur  une  statue  de  femme  drapée,  trou- 
vée dans  les  ruines  du  temple  de  Curium  en  Chypre.  Pierre 
calcaire.  Le  vêtement  forme  des  plis  très  marqués.  La  tète 
manque.  Autour  du  cou,  une  petite  chaîne  à  laquelle  était  sus- 
pendu un  objet  brisé.  Au-dessous  un  collier  à  gros  grains; 
plus  bas.  deux  autres  grands  colliers  auxquels  sont  suspendus 
des  ornements  en  forme  de  glands;  entin,  traces  d'un  qua- 
trième collier  qui  parait  porter  un  ornement  en  forme  de  tète 
de  taureau.  Une  longue  chaîne,  travaillée  avec  beaucoup  d'art, 
descend  du  cou  jusqu'au-dessous  de  la  main  droite;  quatre 
anneaux  sont  attachés  a  l'ornement  en  forme  de  lyre  que  deux 
-  d'aspic  nouent  à  la  chaîne.  Aux  bras,  un  bracelet.  — 
I   aprùF  ili  Cesnola,  Allas,  in-l  .  part.  2.  pi.  ex,  fig.  588. 

temps  que  la  vente  de  leurs  marchandises,  un  moyen 
de  s'enrichir.  Hérodote,  H,  56;  v,  58:  Odyss.,  xiv,  290; 
x\.  115-484;  Cieéron,  Dr  Hrp.,  m,  .'ili;  Thucydide,  i,  8. 
Le  mensonge  leur  était  familier  pour  dissimuler  leurs 
voyages  et  las  sources  de  leurs  profils.  Le  ■]>vjiu.x 
■'••',:, v/.:/.vi  élait  devenu  proverbial,  Strabon,  III,  v,  5, 
Étymologic.  Macjn.,  édit.  Craisford,  Oxford,  8,  48, 
p.  797.  Cf.  Hérodote,  m,  107,  110.  111,  115.  Un  capi- 
taine phénicien,  qui  allait  de  Cadix  au  pays  de  l'étain 
(Cassitérides),  s'étant  aperçu  qu'il  élait  suivi  par  uu 
navire  romain,  n'hésita  pas  à  aller  briser  le  sien  sur  la 


côte  pour  ne  pas  révéler  le  pays  où  il  allait  s'approvi- 
sionner. L'État  le  dédommagea  de  sa  perte  volontaire. 
Les  Phéniciens  réussirent  ainsi  à  conserver  longtemps 
l'empire  de  la  mer.  On  comprend  sans  doute  que  ce 


52.  —  Buste  supposé  de  Melkarth.  Musée  du  Louvre. 

peuple  de  marchands  ne  négligeât  rien  pour  cacher  à 
ceux  qui  seraient  devenus  leurs  concurrents  les  routes 
qui  leur  servaient  à  faire  fortune,  mais  il  eût  été  dési- 
rable pour  leur  honneur  qu'ils  n'eussent  employé  que 
des  moyens  honnêtes  dans  leur  trafic.  Il  faut  d'ailleurs 
reconnaître  qu'ils  rendirent  aussi  de  véritables  services. 
Malgré'  leur  rapacité  et  leurs  pillages  trop  fréquents, 
les  marchands  phéniciens  étaient  ordinairement  reçus 
avec  bienveillance  par  les  pays  qu'ils  visitaient  et  à  qui  ils 
vendaient  des  objets  estimés,  qu'ils  étaient  seuls  à  four- 
nir. Ils  méritaient  ce  bon  accueil,  parce  qu'ils  achetaient 


53.  —  Autel  phénicien  de  Hagiar  Kim.  Malte. 
D'après  Penot,  Histoire  de  l'art,  t.  m,  p.  304,  fig.  229. 

aux  indigènes  leurs  produits,  qu'ils  les  intéressaient  et  les 
instruisaient  par  les  récits  plus  ou  moins  fabuleux  de 
leurs  voyages  et  leur  apportaient  un  luxe  et  des  élé- 
ments de  bien-être  inconnus.  Le  premier  vaisseau,  a-t- 
on dit,  qui  partit  du  port  de  Sidon  pour  aller  trafiquer 
à  l'étranger,  emportait  dans  ses  lianes  la  civilisation  et 
le  progrès.  Progrès  très  relatif,  il  est  vrai,  mais  progrès 


239 


PHENICIE 


240 


cependant,  quoique  matériel  surtout.  Quand  ils  inven- 
tèrent l'écriture  alphabétique  et  la  communiquèrent  aux 
Grecs,  ils  devinrent  les  bienfaiteurs  de  l'humanité  et 
ils  supplantèrent  peu  à  peu  toutes  les  écritures  impar- 
faites imaginées  jusque-là.  Voir  Alphabet,  t.  i,  col.  402. 
Ils  ne  nous  ont  guère  laissé  d'ailleurs  que  quelques 
inscriptions,  la  plupart  religieuses,  et  point  de  littéra- 
ture, absorbés  qu'ils  étaient  par  leurs  opérations  mer- 
cantiles. L'existence  de  Sanchoniaton  est  révoquée  en 
doute,  Pliilon  de  Bjblos  et  les  autres  écrivains  anciens 
qu'a  produits  la  Phénicie  ne  sont  pas  antérieurs  au 
commencement  de  notre  ère. 
V.  Relwion.  —  La  religion  des  Phéniciens  eut  une 


54.  —  Prêtre  carthagi s.  Musée  Lavigerieà  i  .iriliage. 

grande  influence  sur  1rs  Israélites,:'!  toutes  les  époques  (le 

leur  histoire  et  particulièrement  à  l'époque  d'Achab,  où 
hi  reine  Jézabel,  Phénicienne  d  origine,  el  fille d'Ithobal, 
grand-prêtre  d'Astarthé  (Ménandre  d'Éphèse,  l'ragm.  1, 
dans  les  Hist.  grsec.  fragm.,  édit.  Didot,  t.  iv,  p.  146),  vou- 
lut la  faire  dominer  par  la  force  dans  le  royaume  des 
dix  tribus.  Le  voisinage  el  la  prospérité  de  la  Phénicie 
ne  pouvaient  manquer  d'exercer  une  fâcheuse  influence 
sur  les  Israélites,  déjà  enclins  par  eux-mêmes  à  l'ido- 
lâtrie. Aussi  adorèrent-ils  les  dieux  de  Tyr  el  de  Sidon 
el  pratiquèrent-ils  les  rites  de  leur  religion.  Jud.,  x.  6. 
A  la  tête  du  panthéon  phénicien  liaient  le  dieu  Baal 
et  sa  compagne,  la  déesse  Astarthé  ou  Astoreth.  Voir 
Baal,  t.   i.  col.  1315,  el  Astarthé,  col,  1180.  Chaque 

h   l!\.\i  :  île  là  les  llaalim.  .lud.,  il,  1 1  ;  m,  7: 


x,  6,  etc.,  Raal-samin  ou  des  cieux,  Baal  des  mouches, 
voir  Béelzébub.  t.  i,  col.  1547,  etc.  Les  autres  prin- 
cipales divinités  phéniciennes  furent  El,  Melkartb 
(Bg.  52),  Dagon,  t.  n,  col.  1204;  Hadad,  t.  m,  col.  391. 
Adonis,  voir  Thahhuz,  Sydik,  Eschmûn,  les  Cabires. 
Onca,  Tanith,  Tanata  ou  Anaïtis.  Baalith,  Baaltis  ou 
Beltis.  On  honorait  ces  divinités  par  des  sacrifices  et 
par  des  hymnes,  des  processions  et  des  offrandes  votives. 
On  élevait  îles  temples  et  des  autels  en  leur  honneur 
(lig.  53).  Des  prêtres  (fig.  54)  et  des  prêtresses  ifig.  55) 
étaient  attachés  à  leur  service.  Leur  culte  était  désho- 
noré par  des  sacrifices  humains,  Porphyre,  Vc  abstin., 


Prêtresse  carthaginoise.  Musée  Lavigerie  à  Caiths 

n,  56;  Quinte  Curce,  iv.  15;  cf.  Jer.,  xix,  i-5;  Mich.,  vi, 

7;  IV  liée...  m.  27;  svi,  3;  sxi,  6,  el  par  des  pratiques 
licencieuses.  Ovide,  .uViiim.,  x,  240;  Hérodote,  l,  199; 
Justin,  xvin.  .">:  Eusèbe,  Vita  Const.,  m,  55,  3,  1.  xx, 
col.  1120;  Lucien,  /><'  Dea  Syra,50-52;  Corpus  inscript. 
s, •mit.,  t.  i.  fasc.  1,  p.  92.  Les  Phéniciens  n'avaient 
qu'une  idée  vague  de  l'immortalité  de  l'âme,  mais  ils  fai- 
saient des  provisions  pour  la  vie  d'outre  tombe,  Après 
la  pluie  le  soleil  brille  de  nouveau,  ••  lit-on  sur  une  in- 
scription funéraire.  Gesenius,  lionum.,  p.  11.-  Ils 
étaient  très  religieux  à  leur  façon  et  ils  faisaient  fré- 
quemment des  vieux  à  leurs  dieux,  comme  le  promeut 

spécialement   les    nombreuses  stèles    votives  trouvées  à 

Carthage,  voir  Corpus  inscript,  semit.,  part,  i,  t.  i.  et 
les  ex-votos  trouvés  en  grande  quantité  en  Chypre,  où 
le  temple  de  Golgi  a  fourni  à  ceux  qui  l'ont  fouille  228 


241 


PHENICIE 


242 


statues  votives,  et  une  seule  chambre  du  trésor  de  Cu- 
rium  plus  de  trois  cents  objets  consacrés,  en  argent  ou 
argentés,  Di  Cesnola,  Cyprns,  p.  146,  3-25,  306-334. 

VI.  Histoire.  —  ;.  caractère  de  leur  gouverne- 
mi:  \i  .—  Les  villes  phéniciennes  étaient  autonomes,  lors- 
qu'elles apparaissent  dans  l'histoire,  et  sous  le  gouver- 
nement d'un  roi;  pendant  la  période  de  la  prépondé- 
rance égyptienne,  de  1600 à  1350  environ,  aucune  d'elles 
ne  parait  avoir  prédominé  sur  les  autres.  Elles  tenaient 
surtout  à  la  liberté  de  leur  commerce;  le  reste  semble 
leur  avoir  importé  peu;  elles  n'ont  jamais  eu  le  goût 
des  conquêtes;  elles  se  soumettaient  même  sans  trop 
de  difficulté  aux  rois  d'Egypte  et  d'Assyrie  plus  forts 
qu'elles  et  leur  payaient  tribut,  quand  ils  faisaient  cam- 
pagne contre  leur  territoire.  Une  inscription  égyptienne 
antérieure  à  Moïse  est  à  ce  sujet  très  significative. 

Sur  le  tombeau  de  Rekhmara  qui  fut  préfet  de  Thébes 
sous  Thothmés  111  (XVIIIe  dynastie),  on  voit  le  défunt 
recevant  au  nom  du  Pharaon  les  hommages  des  nations 
tributaires.  Parmi  elles  sont  représentés  les  Phéniciens 
(tig.  56i.  <  Viennent,  dit  l'inscription,  et  sont  les  bien- 
venus les  princes  de  Phénicie  et  des  iles  qui  sont  au 


und  Europa,  p.  208-212,  nie  que  les  Fenh  =  Fenkliu  des 
textes  hiéroglyphiques  soient  lesPhéniciens  mais,  quoi 
qu'il  en  soit  de  ce  nom,  les  guerres  des  Pharaons  contre 
le  pays  sont  historiques. 

;//.  SUPRÉMATIE  DE  SIDON.  —  Ce  qu'ils  faisaient  à 
l'égard  des  Egyptiens,  auxquels  ils  payaient  tribut  dans 
l'intérêt  de  leur  commerce,  les  Phéniciens  le  firent  à 
l'égard  de  presque  tous  leurs  vainqueurs,  à  toutes  les 
périodes  de  leur  histoire.  Après  avoir  été  à  peu  près 
égales  entre  elles,  les  cités  phéniciennes  acquirent  ce- 
pendant plus  ou  moins  d'importance.  Aradus  (Arvad) 
et  surtout  Sidon  exercèrent  d'abord  une  certaine  supré- 
matie. Du  temps  d'Homère,  tous  les  marchands  de  Phé- 
nicie n'étaient  connus  que  comme  Sidoniens.  Iliad., 
xxiii,  743-748;  VI,  290-295;  Odys.,  iv,  613-619;  xv,  460. 
Avec  le  déclin  de  la  puissance  égyptienne,  après 
Ramsès  II,  du  temps  de  Moïse,  Sidon  se  lit  connaître 
comme  «  Sidon  la  grande  ».  Jos.,  xi,  8;  xix,  28.  Son 
territoire  s'étendit  jusqu'à  Laïs  (Dan).  ,Iud.,  xvm, 
7-8.  Ce  fut  sans  doute  la  crainte  qu'inspirait  son  pou- 
voir qui  empêcha  les  Hébreux,  lors  de  la  conquête  de  la 
Terre  Promise,  de  s'emparer  de  villes  qui  n'auraient 


56.  —  Phéniciens  apportant  leur  tribut  en  Egypte.  Tombeau  de  Rekhmara. 
Mémoires  de  la  mission  du  Caire,  t.  v,  fasc.  1,  pi.  v. 


milieu  de  la  Grande  Verte  (la  mer),  à  l'état  de  courbés 
et  d'inclinés  pour  les  volontés  de  sa  majesté  le  roi  du 
midi  et  du  nord.  Ramenkheper,  vivilicateur  éternelle- 
ment. Ses  victoires  sur  tous  les  pays  [ont  porté]  chez 
eux  le  dégoût  |de  combattre  (?)].  Leurs  apports  sur  leur 
dos,  ils  présentent  l'hommage  [pour  que  leur  soient 
donnés]  les  souffles  de  vie,  comme  désireux  de  subsister 
par  l'émanation  de  sa  majesté...  »  Ph.  Virey,  Le  tom- 
beau de  Rekhmara,  dans  les  Mémoires  de  la  mission 
du  Caire,  t.  v.  fasc.  1,  p.  33.  Les  Égyptiens  avaient  de 
bonne  heure  envahi  la  Phénicie. 

//.  la  vin.  \u  ib  SOI  S  LES  ÉGYPTIENS.  —  La  plus  an- 
cienne inscription  égyptienne  qui  mentionne  la  Phé- 
nicie la  nomme  Dahé  ou  Zahi.  W.  Max  Muller,  Asien 
und  Europa,  p.  176-182.  D'après  ses  calculs,  entre  1587 
et  1562  avant  notre  ère,  Aahmés  atteignit  son  territoire. 
Il  nomme  des  Fenkhu  qui  travaillaient  dans  des  car- 
rières. Thothmés  1er,  vers  1541-1516,  envahit  toute  la 
Syrie  jusqu'à  l'Euphrate.  Thothmés  III,  vers  1503-1449, 
mentionne  la  23"  année  de  son  règne  une  victoire  sur 
i  et  les  autres  habitants  de  la  Syrie  ;  la  29e  an- 
née, il  fait  une  campagne  contre  les  Rutennu,  Tunep, 
Arvad  t  Zahi  el  s'empare  d'un  riche  butin;  sa  30»  an- 
née, il  prend  Cédés,  Simyra  et  Arvad:  sa  3ic  année,  il 
fait  payer  tribut  au  pays  de  Zabi,  de  Rutennou  et  d'Asi 
(Cypre).  Aménophis  [II,  vers  1414-1379,  tient  sous  sa 
domination  la  Phénicie  et  la  Syrie  tout  entière.  Les  let- 
tres de  Tell  el-Amarna  nom  ment  les  gouverneurs  de  Tyr, 
ryte,  de  Simyra,  de  Gebal,  d'Accho,  de  Sidon,  etc.. 
qui  représentaient  le  Pharaon  dans  ces  villes  à  cette 
époque.  Voir  Keilinschriflliche  Bibliothek,  t.  v,  1896, 
p.  131,  133,  151,  267,  271,  etc.  Ramsès  II  envahit  à  son 
tour  le  pa\s  et  une  inscription  de  lui  se  voit  encore  près 
du  Nahr-el-Kelb  (le  Lycusj.    -  M.  W.  M.  Muller,  Asien 


pu  leur  résister  par  leurs  propres  forces.  Accho,  Acha- 
zib,  Aphec,  Jud.,  i,  31;  cf.  Eccli.,  xlvi,  21.  et  qui  avaient 
été  attribuées  à  Aser,  lors  du  partage  de  la  Terre 
Sainte.  Cf.  Jos..  xix,  26. 

Les  cités  du  voisinage  de  Sidon,  Sarepta,  Heldun, 
peut-être  Réryte  (Beyrouth  i,  Ecdippe  el  Accho  acceptèrent 
sa  suzeraineté.  Elle  se  distingua  particulièrement  pen- 
dant cette  période  par  ses  progrés  dans  les  arts,  dans  la 
guerre  i  !  dans  la  navigation.  Les  premiers  navigateurs 
grecs  les  rencontrèrent  dans  toutes  les  parties  de  la 
Méditerranée  où  ils  s'aventuraient,  et  l'on  savait  qu'ils 
fréquentaient  de  plus  des  régions  inconnues  àl'Héllade. 
Une  guerre  qu'ils  eurent  à  soutenir  contre  les  Philis- 
tins, qui  s'étaient  établis  au  sud  de  leur  pays  sur  les 
rives  de  la  Méditerranée,  leur  mérita  une  grande  répu- 
tation d'audace,  mais  elle  fut  pour  eux  un  échec  fatal 
à  leur  puissance.  Les  Philistins,  conduits  par  le  chef 
des  Ascalonites,  assiégèrent  Sidon  par  terre,  la  bloqués 
rent  et  voulurent  la  forcer  à  se  rendre,  mais  ses  habi- 
tants se  sauvèrent  par  mer  et  se  réfugièrent  à  Tyr,  Jus- 
tin, Hist.  Philipp., xvili,  3.  Avant  cette  défaite,  à  l'époque 
des  Juges  et  antérieurement  à  la  judicature  de  Jephté, 
les  Sidoniens  avaient  opprimé  les  Israélites,  Jud.,  x, 
12,  mais  nous  n'avons  aucun  détail  à  ce  sujet. 

IV.  suprématie  de  tyr.  —  L'hégémonie  passa  alors 
à  Tyr.  C'était  vers  1250  avant  notre  ère.  Voir  .1.  Kenrick, 
Phœnicia,  p.  343.  Elle  dura  jusqu'en  877.  Du  temps  de 
.losué.  Tyr  est  appelée  «  une  ville  forte  »,  Jos..  xix.  29 
et  elle  ne  le  cédait  probablement  alors  qu'à  Sidon  en 
importance.  L'arrivée  dans  ses  murs  des  Sidoniens 
vaincus  lui  assura  la  suprématie.  Dans  le  Vui/at/e  a'uii 
Égyptien,  trad.  Chabas,  1866,  p.  169,  vers  1350,  elle  est 
mentionnée  comme  un  port  a  plus  riche  en  poissons 
qu'en    sable    ».    Vers     11311,    la    colonisation    de    Cades 


243 


PHENICIE 


244 


(lig.  57),  au  delà  des  colonnes  d'Hercule,  sur  le  rivage 
de  l'Atlantique,  marque  un  nouvel  élan  et  une  hardiesse 
plus  grande  qu'auparavant  dans  les  entreprises  commer- 
ciales et  dans  le  rayon  d'action  de  la  Phénicie.  Ce  fu- 
rent les  Tyriens  qui  effectuèrent  les  plus  longs  voyages. 
Hérodote,  i.  1.  el  qui  cherchèrent  à  nouer  le  plus  de 
relations  pour  ouvrir  à  leur  commerce  toute  espèce  de 
débouchés.  L'histoire  sainte  nous  en  fournit  des  exem- 
ples remarquables.  Lorsque  David  fut  acclamé  roi  à 
Hébron,  Abi-Baal  occupait  le  trône  de  Tyr  (fig.  58).  Dius, 


57.  —  Monnaie  de  Gadès. 

Tête 'd'Alexandre  le  Grand.  —  ii.  Meba'alé  Agadir. 

i  ■  .i.  Gadès   ».  Deux  poissons. 

Fragm.  il;  Ménandre,  Fragm.  i,  dans  Eistor.  Grsee. 
fragm..  édit.  Didot,  I.  rv,  p.  398,  446.  Cf.  .losèphe, 
Cont.  Apion.,  I,  17.  1S.  Il  eut  pour  successeur  son 
lils  Hiram,  âgé  de  dix-neuf  ans.  lbid.  Celui-ci  semble 
avoir  discerne''  promptement  les  hautes  qualités  de  Da- 
vid et  le  profit  qu'il  pourrait  tirer  de  son  alliance.  Peu 
après  la  prise  de  Jébus  par  le  jeune  roi,  il  lui  envoya 
des  ambassadeurs  avec  des  cèdres  du  Liban,  des  maçons 
et  des  charpentiers  pour  lui  bâtir  un  palais.  I  Par.,  xiv, 
1.  Cf.  II   Reg.,   vu.   •-'.  Les   bonnes  relations  durèrent 


58.  — Sceau  en  sardoine  avant  appartenu  -72  *2s~  à  a  Abi-Baal.  d 
Mu  sée  de  Florence.  Grossi  au  double. 

pendant  tout  leur  règne.  III  Reg.,  v.  I.  Lorsque  David 
prépara  les  matériaux  pour  la  construction  du  temple 
de  Jérusalem,  1rs  sujets  d'Hiram,  Sidoniens  et  Tyriens, 
«  lui  apportèrent  beaucoup  de  cèdres.  0  I  Par.,  xxn,  4. 

Sous  son  lils  Salnhi 1rs  rapports  devinrent  encore 

plus  étroits,  A  la  mort  de  David,  Hiram  lui  envoya  une 
ambassade.  III  Reg.,  v,  l ;  .losèphe,  Ant.  jud.,  VIII, 
11,  6,  el  Salomon  en  profita  pour  lui  demander  son 
concours  dans  l'œuvre  de  la  construction  du  Temple. 
Josèphe  reproduit  les  lettres  qu'il  dit  avoir  été  échan- 
gées entre  les  deux  monarques  en  cette  circonstance;  il 
assure  qu'elles  étaient  conservées  dans  les  archives  de 
Tyr  el  de  Jérusalem.  Ant.  jud.,  VIII,  11,  7-8.  Il  leur 
fut  facile  de  s'entendre.  Les  Phéniciens  avaient  tout  in- 
térêt à  rendre  leur  bois  du  Liban  et  à  recevoir  en 
échange  les  denrées  qui  abondaient  en  Palestine,  et  dont 
li  Phénicie  avait  besoin  pour  sa  nombreuse  popula- 
tion. L'accord  fut  conclu  a  ces  conditions  :  Salomon 
fournirait  annuellement  .pendant  la  durée  du  contrat. 
20000  cors  d'orge,  autant  de  froment,  20000  haths 
d'huile  el  la  même  quantité,  de  vin.  111  Reg.,  v,  3-12, 


Les  Phéniciens  donneraient  en  échange  les  bois  néces- 
saires et  les  ouvriers  qui  dirigeraient  et  exécuteraient 
les  travaux  de  construction  et  de  décoration.  Hiram 
avait  fait  élever  lui-même  des  temples  à  ses  dieux. 
Melkarth  et  Astoreth.  Ménandre.  Fragm.  1,  p.  446;  il 
envoya  au  roi  d'Israël  un  excellent  architecte  qui  s'ap- 
pelait aussi  Hiram. 

La  construction  du  temple  de  Jérusalem  et  au  palais 
royal  dura  vingt  ans.  III  Reg.,  VI,  38;  vu,  1;  cf.  i\.  10, 
Quand  tout  fut  achevé.  Salomon,  pour  reconnaître  les 
services  que  lui  avait  rendu*  Hiram,  lui  céda  de  son 
propre  gré  vingl  villes  de  Galilée,  dans  le  voisinage 
d'Acho,  qui  faisait  probablement  partie  du  royaume  de 
Tyr.  A  cause  de  ce  voisinage,  elles  semblaient  donc 
devoir  être  à  la  convenance  du  roi  phénicienn,  mais 
elles  étaient  placées  sur  un  plateau  nu  et  désolé,  qui 
déplut  au  prince  lyrien;  il  exprima  son  mécontente- 
ment en  donnant  au  territoire  le  nom  de  Chabul,  «  re- 
but, balayures.  1  I|[  Reg.,  ix,  10-13.  Voir  CiiAI.ir.  t.  II. 
col.  473.  Leur  amitié  mutuelle  n'en  fui  pas  d'ailleurs 
rompue  pour  cela.  Paint  Justin.  Dial.  cum  Tryph.,  34, 
t.  xi,  col.  549,  reproche  à  Salomon  d'avoir  adoré  les 
idoles  à  Sillon.  Ménandre,  Fragm.  n,  p.  447  (dans 
Clément  d'Alexandrie,  Strom.  i,  21,  t.  vin ,  col.  8'»0). 
raconte  que  le  roi  de  Tyr  lui  donna  une  de  ses  tilles  en 
mariage.  Cf.  III  Reg..  xi,  1  (Sidoniennes).  Quoi  qu'il 
en  soit  de  ces  faits,  il  est  certain  que  les  deux  rois 
s'entendirent  pour  aller  faire  un  commerce  fructueux  à 
Ophir.  Voir  Oi'inr;  '2,  col.  1289.  Les  Phéniciens  étaient 
les  maîtres  de  la  Méditerranée,  mais  il  ne  l'étaient  pas 
de  la  mer  Rouge.  Ils  fournirent  des  matelots  au  roi  de 
Juda  qui  mit  à  profit  leur  habileté  dans  le  golfi  Per- 
sique,  III  Reg..  ix,  2b.  ce  qui  les  enrichit  les  uns  el  les 
autres. 

Hiram  mourut  à  l'âge  de  53  ans,  après  un  règne  de 
33  ans,  Il  eut  pour  successeur  son  Ois  Baléazar.  Ménandre 
Fragm.  i.  p.  146.  Après  lui,  le  Irène  fui  occupé'  par 
Abd.-Asboreth,  qui  périt  de  mort  violente.  Dans  l'espace 
de  34  ans,  trois  rois  moururent  assassinés  el  la  dy- 
nastie régnante  fui  changée  trois  fois,  Ithobal  ou  Eth- 
Baal,  en  montant  sur  le  trône,  j  ramena  la  tranquil- 
lité. Il  était  en  même  temps  grand-prêtre  d'Astoreth. 
11  lit  alliance  avec  Achab,  roi  d'Israël,  et  lui  donna  sa 
tille  Jézabel  en  mariage.  III  Reg.,  XVI,  31.  Ménandre  lui 

attribue  la  fondation  de  Botrys,  sur  la  cote,  au  nord  de 
Gebal.  Fragm.  i\.  p.  447,  En  fondant  cette  ville,  Ithobal 

avait  peut-lire  pour  but  de  se  défendre  contre  l'Assy- 
rie  qui  était  alors  pour  la  Phénicie  une  menace  per- 
pétuelle. 

Ithobal  eut  pour  successeur  son  lils  Balezor  ou 
Baal-asar,  et  celui-ci.  son  lils  Malgen  ou  Mali. m.  lu 
était  alors  diviséi  entre  le  parti  aristocratique  et  le 
parti  populaire.  Justin,  But.  Phil.,  xvin.  .">.  Hattan 
craignait  que  le  parti  populaire  ne  l'emportât.  Pour 
l'empêcher,  il  donna  sa  fille  l'.lisa  à  «on  l'i'en  Si- 
charbas,  grand-prêtre  de  Melkarth,  qui  épousa  ainsi 
sa  nièce  et  de  la  soi  te  devint  l'héritier  présomptif  du 
royaume.   A  s ort,    Mattan    laissait  un  lils  appelé 

Pygmalion,  âgé  de  8  OU  '.)  ans.  Le  parti  populaire  le 
choisit  pour  son  roi.  et  Sicharbas  el  Ëlisa  rentn  <  al 
dans  la  vie  privée.  An  boni  de  sept  ans.  le  jeune  Pyg- 
malion lit  tuer  son  beau-frère,  qui  était  en  même  temps 
son  oncle.  Êlisa  (Didon),  sa  sœur,  réussit  à  lui  échap- 
per et  se  saiiva  avec  un.-  flotte  il'abord  en  Chypre,  puis  '  u 
Afrique  ou  elle  bâtit  la  ville  devenue  si  célèbre  sous  le 
nom  de  Cartilage.  L43  ans  après  la  construction  du 
temple  de  Jérusalem,  raconte  .losèphe,  Cmit.    l/.ion.,  I, 

18.  Sur  ce  récit,  cf.  la  critique  de  O.  Meltzer,  Geschichte 
der  Karthager,  1870.  p.  111-141;  G.  Rawlinson,  Pha  à- 
cia,  p.  122-126. 

Voici  la  lisl.  des  mis  de  Tvr  depuis  Hiram  jusqu'à 
Pygmalion,  avec  les  années  de  leur  règne,  d'après  Piet- 
schmann.  Geschichte  der  Phônixier,  p.  299.  Ménandre, 


24: 


PHENICIE 


246 


d'où  sont  tirés  ces  chiffres,  loc.  cit.,  ne  les  donne  que 
jusqu'à  Pygmalion. 

Avant  .1    i 

Hiram 969-936 

Baalbazer 935-919 

Alidaslai-t 918-910 

Metuastart 909-898 

Astharymos 897-889 

Phellés  (8  mois) —  888 

Ithobaal SsT-856 

Baalazar.          855-850 

Mettenos 849-821 

Pygmalion 820-774 

r.  la  pbÉnicib  sors  LES  ASSYRIENS.  —  Quand  les 
Phéniciens  avaient  été  affranchis  des  invasions  égyp- 
tiennes, ils  n'avaient  pas  tardé  longtemps  à  avoir  à  re- 
douter celles  des  Assyriens.  Il  est  possible  que  vers  l'an 
1 1 10.  Xabucliodonosor  Ie1,  roi  de  Babylone,  ait  fait  déjà 
une  incursion  en  Phénieie.  Cf.  Winckler,  Geschichte 
Babyloniens  und  Assyriens,  189-2,  p.  95  et  note  18,p.  329, 
mais  les  Assyriens  devaient  être  pour  ce  pays  un  ennemi 
bien  plus  à  craindre.  Théglathphalasar  I",  vers  1100, 
poussa  ses  troupes  jusqu'à  la  Méditerranée  près  d'Arvad. 
Au  IXe  siècle,  vers  877,  sous  le  règne  d'Ithobal,  Assurbani- 
pal  pilla  le  pays.  Eb.  Schrader,  Keilinschriftliche  Biblio- 
thek,  t.  i.  1889,  p.  122.  La  Phénieie  n'eut  pas  moins  à 
souffrir  qu'Israël  sous  les  successeurs  de  ce  prince. 
Parmi  les  tributaires  de  Salmanazar  II  tigurent  Tyr, 
Sidon,  Gebal,  et  Arvad,  de  même  que  Jéhu  d'Israël. 
Mattanbaal  d'Arvad  combattit  contre  les  Assyriens  avec 
àchab  d'Israël  à  la  bataille  de  Karkar  (854 avant  J.-C). 
Au  VIIIe  siècle,  Théglathphalasar  III,  qui  ravagea  Israël, 
reçut  aussi  le  tribut  d'Arvad,  de  Tyr  et  de  Gébal,  à  qui 
il  fit  plusieurs  fois  la  guerre.  Voir  Pietschmann,  Ge- 
schicttte  der  Phônizier,  p.  299  sq.,  Salmanasar  IV, 
d'après  un  fragment  de  Menaudre,  dans  Joséphe,  Ant, 
jud.,  IX,  xiv.  2,  assiégea  Tyr  pendant  cinq  ans.  Les 
ennemis  les  plus  redoutables  d'Israël  et  puis  de  Juda. 
il  Sennachérib,  Asarhaddon,  Assurbanipal  tinrent 
la  Phénieie  sous  leur  joug.  Au  vi«  siècle,  le  vainqueur 
de  Jérusalem,  .Xabucliodonosor  II,  assiégea  Tyr  et  Sidon. 
Sidon  fut  prise  après  avoir  perdu  par  la  peste  la  moi- 
tié «le  ses  défenseurs.  Ezech.,  XXVIII,  21-23.  Tyr  résista 
pendant  treize  ans.  Ménandre,  loc.  cit.  Cf.  E/.echiel,  XXVI, 
2.  8-12,  17-18,  vers  585.  Les  prophéties  contre  la  grande 
ville  phénicienne  commençaient  ainsi  à  s'accomplir. 

Les  habitants  de  la  Palestine  avaient  eu  plus  d'une  fois 
à  se  plaindre  de  la  cupidité  et  des  violences  des  Phéni- 
II.  Ps.  i.xxxn  ii.xxxim,  8;  Ezech.,  xxvi,  2;  Joël,  m, 
3-6;  Amos,  i,  9;  I  Mach.,  v,  15;  II  Mach.,  vm,  10.  Les 
prophètes  avaient  prédit  le  châtiment  que  Dieu  infligerait 
à  Tyr  et  à  Sidon.  Is.,  xxm.  1-17;  Jer.,  XXV,  22;  xxvu, 
3;  xi.vii,  1;  Ezech.,  xxvi-xxvm;  Use.,  ix,  13-15;  Joël,  III, 
i -S;  Amos,  i,  9-10;  Zach.,  ix,  3-7.  Ces  menaces  ne  de- 
vaient cependant  s'exécuter  complètement  que  plus  tard. 
—  La  Phénieie  passa  du  joug  de  Babylone  sous  celui  de 
Cvrus,  vainqueur  de  Nabonide  et  de  Baltassar. 

VI.      LA     PHÉNICIB    SOUS     LA     DOMINATION    PERSE    El 

GRBCQUB.  —  Les  Phéniciens  n'eurent  pas  alors  à  se 
plaindre  de  la  domination  perse.  Cyrus  ne  les  inquiéta 
Cf.  Hérodote,  m,  19,  44.  Vers  cette  époque  ils 
pur  mt  fournir  des  matériaux  aux  Juifs  pour  la  recon- 
struction du  temple  de  Jérusalem,  I  Esd.,  m,  7,  et  ils 
furent  pays  en  blé  et  en  vin.  Cambyze  les  comprit 
dans  la  même  satrapie  que  la  Palestine,  la  Syrie 
et  Cypre,  et  ii  eut  recours  à  leur  marine.  Héro- 
dote, m,  19.  Il  n'essaya  pas  de  les  forcer  à  le 
servir  contre  Carthage.  Leurs  marins  aidèrent  les 
i  erses  contre  les  Grecs,  jusqu'en  351  où  Sidon  se  ré- 
volta. Ochus  les  soumit  bientôt.  —  Ils  conservèrent  leurs 
rois  jusqu'après  la  bataille  d'Issus  (333),  où  ils  furent 
asservis  par  Alexandre  le  Grand,  qui  infligea  un  long 
siège  et  un  dur  châtiment  à  Tyr.   Voir  Tyr.  Après  la 


mort  d'Alexandre,  la  Phénieie  échut  à  Laomédon,  en 
320  à  Ptolémée  Lagus,  en  31  i  à  Antigone.  En  287,  elle 
fut  de  nouveau  soumise  à  Ptolémée  Lagus,  et  elle  de- 
meura pendant  près  de  70  ans  sous  la  domination  des 
Lagides  qui  les  gouvernèrent  avec  sagesse,  jusqu'au 
règne  de  Philopator.  Ce  roi  monta  sur  le  trône  en  222,  et 
se  montra  faible  et  mauvais  administrateur.  Antiochus  III 
en  profita.  En  219,  il  chassa  les  Égyptiens  de  Séleucie, 
le  port  d'Antioche,  et  prit  possession  de  Tyr  et  d'Accho 
qui  avait  reçu  alors  le  nom  de  Ptolémaïde.  En  198.  à  la 
suite  de  la  victoire  d'Antiochus  sur  Scopas,  Polybe,  XVI, 
18;  Josèphe.  Ant.  jud.,  XII.  m,  3,  la  Phénieie  devint 
définitivement  la  possesion  des  Séleucides.  La  fonda- 
tion d'Alexandrie  l'avait  rendue  jalouse  de  l'Egypte  ; 
elle  s'accommoda  fort  bien  du  gouvernement  des  rois  de 
Syrie,  qui  la  traitèrent  avec  faveur,  participèrent  à  ses 
fêtes,  Il  Mach.,  iv,  18,  visitèrent  ses  principales  villes, 
Il  Mach.,  iv,  il— 50.  Elle  les  paya  de  retour.  Tito 
Live,  xxvu,  30.  Pendant  le  règne  d'Antiochus  Épiphane, 
ce  prince,  ayant  condamné  injustement  à  la  mort,  à  Tyr 
même,  les  Juifs  qui  avaient  dénoncé  les  crimes  de  Mé- 
nélas,  voir  t.  iv,  col.  964,  les  Tyriens  touchés  de  leur 
sort,  leur  donnèrent  une  sépulture  honorable,  II  Mach., 
i\.  19.  mais  il  n'en  avait  pas  toujours  été  ainsi.  Ils 
s'étaient  joints  aux  ennemis  des  Juifs  au  commencement 
de  la  persécution.  I  Mach.,  v,  15.  Plus  tard,  entraînés 
par  leur  avidité  mercantile,  ils  acceptèrent  les  propo- 
sitions des  généraux  d'Antiochus,  quand  ils  leur  offrirent 
de  leur  vendre  à  bas  prix  les  prisonniers  qu'ils  espé- 
raient faire  dans  la  guerre  contre  Judas  Machabée,  ce  qui 
leur  assurerait,  en  les  revendant,  un  gain  considérable. 
II  Mach.,  vm.  11.  Ils  accoururent  en  foule  à  la  suite  de 
l'armée  syrienne,  I  Mach.,  m,  il,  apportant  avec  eux 
une  grande  quantité  d'or  et  d'argent.  Nicanor  avait 
compté  payer  avec  le  bénéfice  de  la  vente  des  esclaves 
juifs  les  deux  mille  talents  d'argent  que  son  maître 
Antiochus  devaitpayer  aux  Romains.  II  Mach.,  vm.  10. 
Voir  ANTIOCHUS  IV,  t.  i,  col.  698.  Il  fut  complètement 
battu  par  Judas  Machabée.  Les  cupides  marchands 
phéniciens  eurent  la  vie  sauve,  mais  il  leur  fallut  don- 
ner au  vainqueur  l'argent  qu'ils  avaient  apporté. 
II  Mach..  vm,  25;  Josèphe,  Ant.  jud.,  XII,  vu,  4. 
C'est  le  dernier  événement  dans  lequel  les  Phéniciens 
se  trouvent  mêlés  à  l'histoire  juive.  —  Ils  s'hellénisèrent 
de  plus  en  plus  sous  le  gouvernement  des  Séleucides. 
Leurs  monnaies  portèrent  des  légendes  grecques  à  côté 
des  légendes  phéniciennes,  les  noms  grecs  devinrent  à 
la  mode.  Antipater  et  Apollonius,  philosophes  stoïciens 
de  Tyr,  Strabon  XVII,  II,  22,  Philon  de  Byblos,  Dius, 
Théodote,  Philostrate,  Boéthus  et  Diodote,  péripatéci- 
ciens  de  Tyr,  Hermippe  de  Bénte  étudièrent  la  phi- 
losophie grecque,  Strabon,  XVII,  n,  22;  leurs  littéra- 
teurs écrivirent  leurs  ouvrages  en  grec. 

VII.  LA    PBÉNICIB    EST    SOI    UISE       U   !     ROMAINS.    — 

Le  royaume  des  Séleucides  prit  lin  l'an  83  avant  J.-C. 
et  la  Phénieie  dut  alors  se  soumettre  à  Tigrane,  le  roi 
d'Arménie  contemporain  de  Lucullus  et  de  Pompée.  Ce 
ne  fut  pas  pour  longtemps.  Les  Romains  attaquèrent 
Tigrane  en  69  et  ne  tardèrent  pas  à  le  déposséder  de 
la  Syrie  et  de  la  Phénic;e.  Ce  fut  alors  la  fin  pour  tou- 
jours de  son  indépendance.  La  Phénieie  fit  partie  de  la 
province  de  Syrie  sous  un  proconsul  ou  un  propréteur. 
Cependant  Tyr,  Sidon  et  Tripoli  restèrent  cités  libres. 
Les  Actes,  xn,  20-23,  supposent  cette  autonomie  relative. 
Ils  nous  apprennent  qu'Hérode  Agrippa  était  en  dis- 
cussion l'an  4i  avec  Tyr  et  Sidon  et  que  ces  deux  villes 
lui  envoyèrent  une  ambassade  à  Césarée  pour  calmer  sa 
colère.  Hérode  ne  leur  aurait  point  cherché  querelle,  si 
ces  cités  avaient  été  complètement  gouvernées  par  Rome, 
car  autrement  il  aurait  eu  sur  les  bras  les  Romains 
eux-mêmes,  ce  à  quoi  il  n'aurait  eu  garde  de  s'exposer. 

VIII.  LE    CHRISTIANISME   E  \    PBÉNICIB.    —   Le   chris- 
tianisme ne  tarda  pas  à  s'implanter  en  Phénieie,  comme 


247 


PHENICIE 


PHERATH 


248 


l'avaient  prédit  les  prophètes.  Ps.  lxxxvi  (i.xxxvii  .  i; 
cf.  Zach..  ix.  4.  .Vôtre-Seigneur  avait  daigné  visiter  le 
pays  de'fyr  et  de  Sidon,  dont  il  avait  déclaré  l'incrédu- 
lité moins  coupable  que  celle  des  Juifs.  Matth.,  xi.  21-22; 
Luc.  X.  13-14,  et  il  avait  guéri  la  tille  de  la  Chananéenne 
qui  était  possédée.  Matth.,  xv.  21  ;  Marc,  vu.  24-31.  Des 
Phéniciens  avaient  été  témoins  de  ses  miracles,  Luc.  vi, 
17  Quelques-uns  des  nouveaux  chrétiens  qui  avaient 
quitté  Jérusalem  après  le  martyre  de  saint  Etienne  se 
dispersèrent  en  Phénicie  et  y  prêchèrent  la  foi  aux 
Juifs  qui  habitaient  le  pays.  Act..  xi,  19.  Quand 
saint  Paul,  lors  de  son  troisième  voyage  de  mission 
(an  58).  se  rendant  en  Palestine  à  son  retour  de  Grèce 
et  d'Asie  Mineure,  débarqua  àTyr.  il  y  trouva  une  église 
déjà  établie  et  y  séjourna  pendant  sept  jours,  bien  ac- 
cueilli par  les  nouveaux  chrétiens,  hommes,  femmes 
et  enfants.  Act.,  xxt,  3-6.  Le  christianisme  fut  florissant 
dans  cette  ville  pendant  les  deux  premiers  siècles. 
Origène  s'y  retira  vers  250  et  c'est  là  qu'il  mourut. 

VU.  Bibliographie.  —  Cor/nts  inscriptionum  semiti- 
carum,  in-f»,  part.  i.  t.  i,  Paris,  1881-1889;  Scylax,  Peri- 
plus,  dans  C.  Millier,  Geographi  minores,  édit.  Didot. 
in-4  .  Paris,  1855-1861,  t.  i;  Ealconer,  Voyageof  Hanno, 
Londres.  1797;  F.  C.  Movers,  Die  Phônizier,  2  tomes  en 
4in-8".  lionn.  1841-1856;  Walpole,  Ansayrii,  in-8»,  Lon- 
dres, 1851;  John  Kenrick,  Phœnicia,  in-8»,  Londres, 
1855 ;W.  Gesenius,  Scripturse  linguœque  Phœnicim  mo- 
numenla,  3  in-4",  Leipzig,  1857;  E.  Renan.  Mission  de 
Phénicie,  in-i'.  Paris,  1864;  Voyage  d'un  Egyptien 
en  Syrie,  en  Phénicie,  traduit  par  Chabas,  in-4»,  Paris, 
1866;  Dans  Prutz,  Ans  Phônizten.  Geographische 
Skizzen  uni)  historische  Studien,  in-8",  Leipzig,  1876; 
di  Cesnola,  Cyprus,  in-8",  Londres,  1877;  ld.,  Salami- 
nia.  in-8»,  Londres,  1882;  G.  Perrot  et  Chipiez,  Histoire 
de  l'art  dans  l'antiquité,  t.  ni,  1885;  <i.  Rawlinson, 
History  of  Phœnicia,  in-8",  Londres,  1889:  ld..  Phœ- 
nicia, dans  Stonj  of  the  Sain, us,  in-8",  Londres.  1889: 
B.  Pietschmann,  Geschichle der  Phônizier, in-8»,  Berlin, 
1889:  A.  Mayr,  Ans  den  phônischen  Kekropolen  von 
Malta,  in-4»,  Munich, 19115,;  W.  von',Landau,  Die  Bcden- 
tung  der  Phônizierim  Vôlkerleben,  in-8",  Leipzig,  1906. 

F.  Vigodroi  v. 

PHÉNIX,  oiseau  fabuleux,  dont  les  auteurs  anciens 
font  souvent  mention.  Cf.  Métrai.  Le  Phénix,  Paris. 
1824.  D'après  Hérodote,  H,  73.  le  phénix  arrivait  d'Ara- 
bie, tous  les  cinq  cents  ans.  apportai!  avec  lui  le  corps 
de  son  père,  enveloppé  de  myrrhe,  et  le  déposait  dans 
le  temple  du  soleil.  Lucien.  Herniot.,  53;  Pline,  //.  A.. 
x.  2;  Ovide,  Amor.,  n.  6,  54;  Melam.,  xv.  391;  Clau- 
dien,  Laud.  Stit  .  II,  117;  llorapollon.  M.  57,  etc.  font 
aussi  mention  du  phénix.  Tacite,  Annal.,  VI,  28,  rap- 
porte différentes  traditions  à  son  sujet,  en  concluant  que 
«  tout  esl  incertain  et  augmenté  de  fables    .  mais  que 

du  moins  «  il  est  sur  qu'un  voit  quelquefois  eel  oiseau 
en  Egypte.  On  a  voulu  reconnaître  le  phénix  dans 
l'oiseau  d'Osiris,  le  bonou;  mais  cet  oiseau  esl  un  van- 
neau ou  une  espèce  de  luron.  Cf.  Maspero,  llis*  '■■ire 
ancienne  des  peuples  de  l'Orient,  t.  i.  p.  131.  note  2. 
Les  premiers  écrivains  ecclésiastiques  ont  fait  grand 
état  de  la  fable  du  phénix,  parce  qu'ils  y  voyaient  un 
symbole  de  la  résurrection.  Voici  la  forme  que  prend  la 
fable  .l.uis  la  m, lus,-,, lie.  20,  trad.  Nau,  Taris.  [902, 
p.  108  :  Le  phénix  i  est  unique,  car  s'il  avait  une  fe- 
melle,  les  lu. mines   en    verraient    bientôt    beaucoup, 

tandis  que  maintenant  on  n'en  \oit  qu'un  qui  entre  en 
bgypte  tous  Us  cinq  cents  ans,  el  va  à  l'autel  qui  est 
ippelé  .lu  Soleil.  Il  rassemble  du  cinnamome,  puis, 
priant  vers  l'orient,  le  feu  s'allume  de  lui-même,  le 
brûle  ei  le  réduit  en  cendre;  puis,  de  cette  cendre,  il 
se  forme  un  ver,  qui  croit  semblable  à  lui  el  devient  un 
phénix  parfait;  puis  il  s'éloigne  et  retourne  d'où  il  est 
venu.  Cf.  lbid.,  p.  166.  La  même  légende  se  retrouve 
dans     S.    Clément.    /     Cor.,    25,    t.    I.     col.     261;    les 


Constitutions  apostoliques,  v.  7,  t.  i,  col.  846;  Tertul- 
lien,  De  resur.  corn.,  13.  t.  n,  col.  811;  S.  Ambroise, 
De  excès,  fralr.,  ir,  59,  t.  xvi,  col.  1331,  etc.  Ces  au- 
teurs font  séjourner  le  phénix  en  Arabie  ou  dans  l'Inde; 
il  n'apparait  en  Egypte  que  pour  y  périr  et  y  renaître. 
—  Dans  un  passage  où  il  parle  de  ses  espérances  de 
longue  et  heureuse  vie.  Job.  xxix,  18,  s'exprime  ainsi  : 

Je  disais  :  Je  mourrai  dans  mon  nid, 
J'aurai  des  jours  nombreux  comme  le  hôl. 

Le  mot  hùl,  fréquemment  employé  dans  la  Bible 
hébraïque,  y  a  toujours  le  sens  de  «  sable  »,  et  la  com- 
paraison du  sable  est  usitée  pour  donner  l'idée  d'un 
peuple  nombreux,  Gen.,  xxii.  17;  Jos..  xi,  4;I  Reg., 
xiii,  5;  Is.,  x,  22,  etc..  et  aussi  d'un  petit  nombre 
d'années  que  l'on  assimile  à  un  grain  de  sable.  Eccli  , 
xvn.  8,  9.  Dans  ce  dernier  passage,  cent  ans  sont  com- 
pares à  un  grain  de  sable;  Job,  au  contraire,  se  pro- 
mettait des  jours  nombreux  comme  le  sable.  Cependant 
les  massorètes  ont  noté  ici  le  mot  hôl  d'un  signe  indi- 
quant qu'il  n'a  pas  le  même  sens  que  dans  les  autres 
passages.  Les  Septante  l'on  traduit  primitivement  par 
?oîvi£,  qui  veut  dire  à  la  fois»  palmier»  et  »  phénix  9. 
Comme  le  palmier  se  nomme  en  hébreu  tàmdr  et  non 
pas  hôl,  les  Septante  avaient  donc  eu  en  vue  tout  d'abord 
le  phénix.  Pour  corriger  l'amphibologie  du  mot  grec,  on 
substitua  ensuite  l'expression  ati'tcy  ot  pofvixo;,  «  tronc 
de  palmier  ».  Les  talmudistes  assurent  que  dans  ce 
passage  de  Job  il  est  question  du  phénix.  Sanhédrin, 
fol.  108,  2,  et  les  commentateurs  rabbiniques  affirment 
la  même  chose.  D'après  eux.  le  phénix  serait  le  seul 
de  tous  les  animaux  qui  aurait  refusé  de  partager  le 
fruit  défendu  avec  Eve,  et  plus  tard  Noé  aurait  souhaité' 
au  phénix  une  vie  sans  fin.  Cf.  Buxlûrf,  Le.ric.  lah 
col.  720.  Le  phénix  aurait  été  appelé  holi  par  les  Egyp- 
tiens, si  l'on  en  croit  les  hiéroglyphes  interprétés  par 
G.  Seyffarth,  dans  la  Zeitschrift  der  deulsch.  morgenl. 
Gesellseh,  t.  m,  p.  64,  et  les  mots  allôê  ou  alloê,  repro- 
duisant hùl,  sont  traduits  dans  les  glossaires  coptes- 
arabes  par  semendel  ou  semendar,  noms  communs 
aux  deux  animaux  qui  échappent  à  l'action  du  feu,  la 
salamandre  et  le  phénix.  L'idée  d'oiseau  parait  appelée 
dans  le  texte  de  Job  par  celle  du  nid,  mentionne  au 
vers  précédent,  et  le  phénix  était  dans  l'antiquité  le 
symbole  de  la  longue  vie;  on  disait  proverbialement  : 
poc'vixoc  ërt\  fiioOv,  »  vivre  les  années  du  phénix  ». 
Lucien.  Hennel..  03.  11  faut  observer  cependant  qu'au 
lieu  de  qinnî,  »  mon  nid  ».  les  Septante,  Saint  Ephrem 
et  Barhebrseus  ont  lu  qànai  pour  qdnéh,  t  roseau  ». 
dans  le  premier  vers,  ce  qui  rendrait  moins  probable 
la  mention  d'un  oiseau  dans  le  second.  Rosenmûller, 
Jobtts,  Leipzig,  1806,  t.  »,  p.  694;  Welle,  Dos  Buch  Job, 
Fribourg-en-B.,  1849,  p.  283;  Delitzsch,  Dos  Buch  lob, 
Leipzig,  1876,  p.  381-383;  Knabenbauer,  In  Job,  Paris, 
1886,  p.  342,  etc..  regardent  comme  possible  ou  même 
probable  la  désignation  du  phénix  par  le  mol  hùl.  Elle 
ne  peut  étonner  delà  pari  d'un  auteur  familier  avec  li  s 
choses  de  l'Egypte  et  de  l'Arabie.  La  mention  d'un 
mythe,  pris  comme  simple  terme  de  comparaison  par 
un  écrivain  sacré,  ne  soulevé  pas  non  plus  de  difficulté, 
cette  mention  n'impliquant  à  aucun  degré  la  réalité  du 
mythe  allégué.  Cependant  cette  explication  ne  s'impose 
pas.  D'autres  interprètes  se  contentent  d'entendre  le 
mot  hôl  dans  son  sens  habituel  de  i  sable  »,  adopté 
par  la  Vulgaie.  Cf.  Oesenius,  Thésaurus,  p.  454;  Le 
1 1  il-.  Le  livre  de  Job.  Paris.  IN73.  p.  354. 

11.    1.1  sITRIi. 

PHERATH  (hébreu  ;  Perâfâh,  avec  le  hé  local  ; 
Septante  :  1. ..•-/:,-,;:  Vulgate  ;  Euphrates),  lien  où 
Jérémie,  sur  l'ordre  de  Dieu,  alla  cacher  dans  le  creux 
d'un  rocher  la  ceinture  neuve  qu'il  venait  d  acheter,  où 
il  la  trouva  ensuite  toute  pourrie.  1er.,  xm,  1-7.  Les 
anciens  interprètes  et  commentateurs  ont  généralement 


249 


PHERATEI 


250 


cru  qu'il  était  là  question  du  Neuve  de  l'Euplirate. 
Bochart  cependant,  Geographia  sacra,  3=  édit.,  Opéra, 
1692,  t.  i,  col.  956,  et  quelques  autres  après  lui,  y  ont 
vu  plutôt  la  petite  ville  d'Éphrata.  Cf.  Knabenbauer,  In 
Jer.,  1889,  p.  183-186.  Les  paleslinologues  modernes 
contes'ent  l'ancienne  identification  et  voient  le  Pherath 
ou  plutôt  Phârah  de  n,  (,  n'étant  que  le  n  transformé 
par  la  présence  du  n  local!  de  .lérémie  dans  YOuadi 
Fdrah.  ou  vallée  de  Phârah,  avec  l'article  haf-Fârah 
(Septante:  $>%oi;  Vulgate,  Aphara).  ios.,  xviu,  23.  Voir 
AriiARA,  t.  i,  col.  721.  Sur  une  trentaine  de  fois  que  les 
auteurs  nomment  l'Euplirate,  à  l'exception  de  deux  ou 
trois  cas  isolés,  c'est  presque  toujours  «  le  lleuve  d'Eu- 
phrate  »,  où  sa  nature  est  déterminée  par  le  contexte  : 


I  Reg.,  xiii,  6,  et  auxquelles  faisaient  allusion  ces  en- 
nemis d'Israël,  xiv,  11,  en  voyant  Jonalhas  monter  de 
la  vallée  qui  est  sous  Machinas,  c'est-à-dire  de  YOuadi- 
Soueinît,  l'un  des  affluents  de  YOuadi-Fârah,  qu'il  re- 
joint un  peu  plus  bas.  C'est  probablement  dans  l'une 
d'elles  que  Jérémie  cacha  sa  ceinture.  Les  juifs  fidèles, 
au  temps  de  la  persécution  d'Antiocbus,  durent  cher- 
cher avec  Mathathias  et  ses  fils  un  refuge  dans  cette 
même  vallée  et  les  circonvoisines.  Cf.  I  Mach.,  i,  56; 
II,  26,  31.  Au  temps  de  la  guerre  de  Judée,  Simon  ben 
doras  ne  trouvait  pas  de  cachette  plus  sûre  que  ces 
grottes,  pour  y  renfermer  ses  trésors,  et  que  la  vallée 
pour  y  séjourner  avec  ses  partisans.  Bell,  jud.,  IV.  îx, 
4.  .losèphe  appe'le  l'endroit  Pharan,  mais  le  n  est  sans 


59. 


Vue  de  l'ouadi  Farâh.  au  nord-est  de  Jérusalem,  nun  loin  d'Anatoth.  D'après  une  photographie  de  M.  L.  Heidet . 


en  Jérémie,  xm,  sur  quatre  fois  que  le  nom  est  répété 
de  suite,  non  seulement  cet  appositif  ne  lui  est  pas  ad- 
joint, mais  c'est  celui  de  «  rocher  »  ou  «  région  ro- 
cheuse ».  «  Prends  la  ceinture  que  tu  as  achetée  et  qui 
ceint  tes  reins;  lève-toi  et  va  à  Perâtha  et  cache-la  dans 
un  creux  du  rocher,  »  b'vnqîq  has-sdla'.  Jer.,  xm,  4. 
Quand  le  Seigneur  veut  instruire  le  peuple  par  un 
symbole  prophétique,  pour  frapper  davantage  son  atten- 
tion, c'est  toujours  sous  ses  yeux  qu'il  le  fait  exposer;  il 
ser.  it  étrange,  en  ce  cas,  qu'il  envoyât  Jérémie  à  une 
dislance  de  près  de  trente  jours  de  marche. 

Formé  par  la  jonction  de  Youâd'  er-Redeidàh  et  de 
Youad'  ibn  Idd,  appelé  encore  ouddi-  Andld,  parce 
qu'il  passe  sous  cette  localité  qui  est  l'antique  Ana- 
thotb.  patrie  de  Jérémie,  Youadi-Fdrah  commence  à 
trois  kilomètres  au  nord-est  de  Andtd  (fig.  39).  De 
chaque  coté  de  la  vallée  s'élèvent,  à  une  hauteur  de 
plus  de  cent  mètres,  de  gigantesques  rochers  percés 
d'innombrables  grottes,  les  unes  naturelles,  les  autres 
artificielles.  Plusieurs  d'entre  elles  sont  sans  doute  de 
celles  où  se  cachèrent  les  Israélites  fujant  devant 
les  Philistins,  aux  premiers  temps  du  règne  de  Saûl, 


doute  le  signe  de  l'accusatif.  En  ces  mêmes  lieux,  où 
les  Assidéens  avaient  accueilli  les  Machabées  et  les 
fugitifs  d'Israël  plutôt  qu'ils  ne  s'étaient  joints  à  eux, 
I  Mach.,  il,  42,  et  II  Mach.,  xiv,  67,  les  âmes  redoutant 
les  dangers  du  monde  vinrent,  au  Ve  siècle  de  l'ère 
chrétienne,  y  reprendre  la  vie  de  mortification  des 
Esséniens,  comme  sous  l'ancienne  loi.  C'est  à  Fârah,  à 
six  milles  à  l'ouest  de  Jérusalem,  que  les  Chariton,  les 
Euthyme,  les  Théoctiste,  les  pères  de  la  vie  cénobitique, 
l'inaugurèrent  en  Palestine.  Cf.  Cyrille  Scytb.,  Yila 
S.  Euthymii,  n.  12,  41,  114,  184;  Acta  sanct.,  ja- 
nuarii  t.  n,  p.  668,672,  686,  691;  Vila  S.  CharitonU, 
ïbid.,  septembris  t.  vu,  p.  576. 

A  cette  époque,  la  ville  de  Phara,  qui  avait  vraisem- 
blablement pris  son  nom  de  la  vallée,  le  portait  encore, 
à  quelques  stades  en  aval  des  grottes  qui  formaient  la 
Laure  de  Phara  ou  Pharan;  ses  ruines  sont  connues 
aujourd'hui  sous  le  nom  seulement  de  Khirbel  el- 
Qoreini.  Au  pied  des  grands  rochers,  jaillit  une  source 
pure  et  abondante  qui  se  déverse  dans  des  bassins 
naturels  où  se  jouent  de  nombreux  petits  poissons,  des 
crabes  et  des  grenouilles  et  forme  un  ruisseau  qui  va 


251 


PHERATH 


PHICOL 


252 


s'unir,  environ  six  kilomètres  plus  bas,  au  Nahr  el- 
Kelt.  Au-dessus  de  la  fontaine,  des  moines  russes  ont  jeté 
en  1905,  là  où  se  voient  les  restes  de  l'ancienne  église,  les 
fondements  d'un  nouveau  monastère  et  occupent  les  an- 
ciennes grottes.  —  Voir  Schick,  dans  Zeitschrift  des  deut- 
schen  Palâstina  Vereins,  t.  m,  p.  6 ;Buhl,  Géographie  des 
alten  Palàstina,  in-8»,  1896.  p.  99-100. 

L.  Heidet. 
PHÉRÉZÉEN  (hébreu  :  hap-Perizzi;  Septante  : 
■fcepeÇatoc,  dans  la  Genèse  en  général  et  en  quelques 
endroits;  plus  communément  $Epc;<xïo;,  au  sing., 
correspondant  à  l'hébreu  qui  conserve  partout  ce 
nombre.  La  Vulgate  emploie  quatorze  fois  Pherezœus 
et  huit  fois  Pheresœi),  peuplade  du  pays  de  Cbanaan 
dont  le  territoire  fut  promis  à  Abraham  et  conquis  par 
les  Israélites.  Le  Phérézéen  est  nommé  seul  avec  le 
Cbananéen,  Gen.,  xm,  7;  xxxiv,  30,  et  Jud.,  I,  4,  pour 
désigner  avec  ce  dernier  toutes  les  populations  du  pays. 
Serait-ce  pour  spécifier  une  classe  particulière  d'entre 
elles?  Selon  Gesenius,  Thésaurus,  p.  1126,  Perizzi  a  la 
même  signification  que  Perthi,  «  campagnard,  paysan  o. 
Ce  nom  serait  ainsi  l'équivalent  de  celui  de  fellah,  fel- 
lahht,  employé  aujourd'hui  pour  désigner  la  classe  des 
cultivateurs  par  opposition  à  toutes  les  autres  classes. 
Quelle  que  soil  la  signification  étymologique  du  nom,  on 
ne  peut  cependant  admettre  que  dans  les  cas  précités 
le  Phérézéen  désigne  ainsi  une  catégorie,  tandis  que 
le  Chananéen  représenterait  la  population  des  villes  ou 
celle  exerçant  les  professions  industrielles  et  libérales. 
Dans  la  plupart  des  cas  le  Phérézéen  est  cité  parmi 
toutes  les  autres  populations  comme  une  d'entre  elles, 
c'est-à-dire  comme  une  tribu  ou  une  nation.  De  plus, 
s'il  désignait  ainsi  toute  une  catégorie,  il  devrait  repré- 
senter les  «  campagnards  »  de  toute  la  Terre  Promise, 
ceux  de  la  plaine  comme  ceux  de  la  montagne,  ceux 
de  la  région  septentrionale  comme  ceux  du  midi, 
tandis  qu'il  est  expressément  donné  pour  une  des 
peuplades  de  la  montagne  seulement.  i)i  montants, 
Jos.,  XI,  3,  et  de  la  partie  méridionale1,  in  meridie, 
ibid.,  su,  8.  L'opposition  du  Phérézéen  au  Chananéen 
ne  l'indiquerail-elle  pas  plutôt  comme  le  représentant 
des  populations  autochtones,  tandis  que  le  Chananéen 
représenterait  la  race  conquérante  et  dominatrice, 
comme  le  fellah  représente  aujourd'hui  la  race  abori- 
gène et  le  turc  l'étranger  dominateur'.'  Si  aucune  indi- 
cation positive  n'appuie  cette  conjecture,  on  peut  re- 
marquer toutefois  que  le  Phérézéen  n'est  pas  nommé 
dans  la  table  ethnographique  de  la  Genèse,  x,  6-20, 
parmi  les  tribus  descendant  de  Chanaan  ou  de  Cham. 
La  population  phérézéenne  paraît  avoir  été  concentrée 
dans  la  partie  montagneuse  qui  devint  le  partage  des 
fils  de  Joseph,  Éphraïm  et  Manassé,  c'est-à-dire  dans  la 
contrée  qui  forma  plus  tard  la  province  de  Samarie. 
Jacob  étant  encore  à  Sicbem.  disait  à  Siméon  el  à  Lévi, 
ses  fils,  qui  venaient  de  massacrer  les  habitants  de  la 
ville  :  "  Vous  me  metie/ 1 1 . 1 1 1 s  le  plus  grand  embarras,  en 
me  rendant  odieux  aux  babil. mis  de  ce  pays,  aux  Cha- 
nanéens  et  aux  Phérézéens.  »  Gen.,  x.xxiv,  .'!U.  nuanil 
les  fils  de  Joseph,  d'Ephraïm  et  de  Manassé  se  plai- 
gnaient de  manquer  d'espace  pour  s'établir,  Josm  leur 
répondait  :  «  Puisque  vous  êtes  un  peuple  nombreux, 
moule/  à  la  foret  et  faites-vous  là  de  l'espace  dans  le 
pays  des  Phérézéens  cl  des  Ilaphaïui,  puisque  la  mon 
tagne  à  Éphraïm  est  étroite  pour  vous.  Jos.,  xvn,  14- 
10.  Abraham  les  avait  trouvés  établis  jusqu'aux  alentours 

de  Béthel.  Kn  parlant  de  la  rixe  survenue  entre  les 
pasteurs  du  patriarche  et  de  Lot  son  neveu,  'loi- 
établi  entre  Béthel  el  liai  :  o  Kn  ce  temps,  fait  remar- 
quer l'auteur  sacré,  le  Chananéen  et  le  Phérézéen  ha- 

ii  ii  ni  ce  pays.  Gen.,  xill,  7.  Les  fils  de  .luda  et  de 
Siméon,  trouvèrent  les  Chananéens  et  les  Phérézéens 
devant  eux  quand  ils  faisaient  la  conquête  de  leur  ter- 
ritoire particulier.  Jud.,   i,  1-5.  Il  est  possible  toutefois 


qu'en  ce  passage  le  nom  de  Phérézéen  ait  une  signifi- 
cation générique  pour  désigner  les  autres  habitants  de 
la  contrée,  distincts  des  Chananéens  proprement  dits, 
car  ce  sont  ordinairement  les  Amorrhéens  qui  sont  pré- 
sentés comme  les  habitants  du  territoire  qui  deviendra 
celui  de  Juda  et  de  Siméon.  Cf.  Gen.,  xiv,  7,  13;  Deut., 
i,  7.  19,  '27,  «;  Jos.,  x,  5,  6,  12;  Jud.,  i,  36.  —  Les 
Phérézéens  furent  vaincus  avec  les  autres  peuplades 
de  Chanaan  et  en  partie  exterminés  par  .losué  et  les 
Israélites.  Jos.,  m.  10;  ix,  I  ;  xi,  3,  8;  xn,  8:  xxiv.  11  ; 
Judith,  v,  20.  Ce  qui  en  resta  fut  soumis  au  tribut  et  à 
la  corvée;  on  les  retrouve  dans  cette  condition  sous  le 
règne  de  Salomon,  travaillant  aux  constructions  élevées 
par  ce  roi.  III  Reg.,  ix,  20;  II  Par.,  vin.  7.  Ils  sont 
signalés  encore  en  général  avec  les  éléments  chana- 
néens, après  la  captivité,  et  on  reproche  aux  Juifs  peu 
fidèles  à  la  loi  de  prendre  de  leurs  filles  en  mariage. 
I  Esd.,  ix,  1.  I..  IIkioet. 

PHERMESTA  (hébreu  :  Paraa,si,i  ;  Septante  :  Metp- 

|j.aatu.i).  le  septième  des  lils  d'Aman,  qui  fut  mis  à  mort 
par  les  Juifs  de  Susc.  Esther,  in.  9.  D'après  .1.  Oppert, 
ParmaSta'  est  le  perse  Paramaistd,  «  celui  qui  se  met 
au  premier  rang.  »  Commentaire  du  livre  d'Esther, 
1864,  p.  22. 

PHESDOMIM  (hébreu  :  Pas  Dammini;  Septante  : 
$a<;oSauiv;  Alexandrinus  :  <I>aso8o[j.t),  localité  de  Juda. 
I  Par., xv, 13.  Le  nom  complet  esVEfés  Dammini, comme 
ilselitlSaiu.il  Reg.),  xvu,  1  (Vulgate  :  in  flnibus Di  •■- 
mini).  L'aleph  initial  de  ce  nom  propre  parait  avoir 
disparu  devant  l'article  dans  I   Par.,  XI,  13  :  c-;.  bap- 

Paz,  pour  be-hap-Paz,  Voir  Do.m.mim,  t.  Il,  col.  1483. 

PHESHUR.  I  Esd.,  h,  38;  x.  22;  11  Esd.,  x,  3.  Voir 
PHASHUR,  col.  223.  —  Il  Esd.,  XI.  12.  Voir  PlIASSDB  i, 
col.  224. 

PHESSÉ  (hébreu  :  Paséah  [voir  Piiaséa.  col.  220]  ; 
Septante  :  Btua^e;  Alexandrinus  :  <t>c.a<rf\),  second  fils 
d'Esthon,  de  la  tribu  de  Juda  et  de  la  famille  de  Caleb. 
1   Par.,  IV,   l'2. 

PHÉTÉIAi hébreu  :  Petahyâh  [voir  Phataïa,co1.224J; 
Septante  :  ■fceraia),  prêtre,  contemporain  de  havid,  chef 
de  la  dix-neuvième  famille  sacerdotale.  I  Par.,  xxiv.  16. 

PHÉTHROS  (hébreu  :  Pafrôs),  la  llauie  Egypte. 
Is.,  xi,  11.  Les  Septante  traduisent  dans  ce  passage  \\x- 
ëvùwvia,  mais  ils  ont  rendu  ailleurs  le  mol  hébreu  par 

"PocOr.ipr,;.  de  nièi rue   la   Vulgate  l'a  rendu   par  l'ba- 

turès.  Voir  PiiATinÈs,  col.  224. 

PHÉTRUSIM  (hébreu:  Pa(rusim;  Septante:  Ilarpo- 

frci>viei|i),  descendants  de  Mesraïm.  Gen..  x,  13-1  i; 
I  Par.,  i.  12.  La  forme  plurielle  du  mol  indique  qu'il 
s'agit  ici  d'un  nom  ethnique  désignant  une  collectivité 
d'hommes.  Phelrusim  g  esl  évidemment  formé  avec  le 
mol  Patros  on  l'on  a  reconnu  depuis  longtemps  p-to- 
res,  «  le  pays  du  midi  ».  la  Théhaide.  »  Y,,  de  Itougé. 
Recherclies  sur  les  monume  ils  qu'on  peut  attribuer 
aux  six  premières  dynasties,  p.  S.  Les  Phétrusim  sont 
donc  les  habitants  de  Phalurès  ou  Phetros,  la  terre  du 
sud,  la  Haute  Egypte.  Voir  Phati  RI  s. 

C.    I.AI.IEH. 

PHICOL  (hébreu  :  Pikôl; Septante  ;  *ix4>  el  $ix<ô)  I, 
chef  de  l'armée  d'Âbimélech,  roi  de  Gérare.  L'étymolo- 
gie  de  ce  nom  est  inconnue;  il  est  probablement  chana- 
néen. On  ne  sait  si  c'esl  un  nom  propre  ou  un  titre  de 
dignité.  Si  l'on  admel  .née  beaucoup  de  commentateurs 
que  la  Genèse  parle  de  deux  Phicol,  et  non  d'un  seul. 

il  est  plus  naturel  de  supposer  que  ce  mot  est  simple- 
ment le  titre  du  général  qui  commandait  les  soldats  d'Abi- 


253 


l'HICOL 


PHIHAIIIROTH 


254 


mélech.  La  Genèse,  xxv,  22,  dit  que  Phicol  ou  le  Phicol 
accompagna  le  roi  de  Gérare,  lorsqu'il  alla  trouver  Abra- 
hara  pour  faire  alliance  avec  lui.  Nous  retrouvons  les 
deux  mêmes  personnages  ou  deux  personnages  dési- 
gnés par  le  même  nom,  Gen.,  xxvi,  26,  qui  vont  l'aire 
alliance  avec  Isaac.  Si  l'Abimélech  du  temps  d'Isaac 
était  le  fils  de  celui  qui  avait  fait  alliance  avec  Abraham, 
il  est  vraisemblable  que  le  Phicol  de  Gen.,  xxvi,  -26. 
était  le  successeur  de  celui  de  Gen.,  xxi,  22,  et  c'est  le 
sentiment  le  plus  vraisemblable.  Voir  Abimélech  1  et  2, 
t.  i,  col.  53,  54. 

PHIGELLE,  chrétien  d'Asie.  II  Tim.,  i,  15.  Voir 
Phygelle. 

PHIHAHIROTH  (hébreu,  Pi  Hahirôt ;  Hatiîrôt; 
Septante  :  'Empti8,   EipiiO,  gitocAt;),  localité  d'Egypte. 

I.  De  Ramessès  a  Phihahiroth,  —  Réunis  à  Rames- 
sès. quelque  part  à  l'entrée  de  l'Ouadi  Toumilat,  les 
Israélites  s'engagèrent  dans  l'Ouadi  le  long  du  canal 
et  vinrent  camper  à  Socolh  dans  les  environs  de  Phi- 
thom.  Voir  Phithoh.  Exod.,  xn,  37.  Là  ils  touchaient 
à  l'extrémité  nord  du  lac  Timsah  et  au  désert.  Deux 
routes  s'ouvraient  devant  eux  :  la  route  du  nord,  la 
plus  courte,  longeant  d'abord  les  terres  cultivées,  puis 
le  bord  de  la  Méditerranée, et  de  là,  courant  en  droiture 
au  pays  des  Philistins  et  à  la  côte  syrienne,  la  route  du 
sud,  plus  longue  et  plus  difficile,  à  cause  des  montagnes 
qu'il  faut  traverser,  route  que  suivaient  encore  les  Bé- 
douins avant  le  percement  de  l'isthme.  C'est  par  cette 
seconde  route  que  les  Hébreux  devaient  marcher.  «  Par- 
tis de  Socoth,  ils  campèrent  à  Etham,  aux  confins 
extrêmes  du  désert.  •>  Exod.,  xm.  17.  i8,  20.  Voir 
Etham,  t.  Il,  col.  2002-2003.  Maintenant,  comme  l'armée 
de  Pharaon  approche,  et  que  Dieu  veut  sauver  son 
peuple,  et  le  sauver  par  un  prodige  capital  dans  l'his- 
toire des  Juifs,  il  lui  fait  abandonner  la  route  d'Etham 
qui  contournait  vraisemblablement  le  lac  Timsah  par 
son  extrémité  septentrionale,  et  le  ramène  en  arrière 
sur  le  bord  occidental  et  vers  le  sud  pour  placer  la  mer 
entre  lui  et  le  désert.  11  le  fit  campera  Phihahiroth,  entre 
Magdala  et  la  mer.  vis-à-vis  de  Béelsephon.  Exod.,  xiv, 
1-2.  C'était  une  folie  au  point  de  vue  humain,  puisque 
les  Hébreux  allaient  être  pris  entre  la  mer,  les  mon- 
tagnes et  l'armée  de  Pharaon.  Mais  Dieu  avait  ses  vues. 

II.  Le  nom  et  le  site.  —  1»  On  a  cherché  l'étymolo- 
gie  de  Phihahiroth  du  côté  de  l'hébreu.  Le  Targum  et 
la  Peschito  regardent  'ï,  pi,  dans  ce  nom  comme  l'état 

construit  de  -s,  péh,  <■  bouche  »,  tandis  que  pour  le 

premier  mm,  hirôt,  signifie  montagne  ou  rocher,  et  pour 
le  second,  «  fossé  »  ou  «  canal  ».  Cf.  S.  Jérôme,  Episl. 
ixxvw,  ad  Fabio'am,  t.  xxn.  col.  702.  Mais  Phihahiroth 
étant  unnom  égyptien, il  faut  nous  en  tenir  à  l'égyptien. 
Dans  ses  fouilles  de  Tell  el-Maskhouta,  N'avilie  a  ren- 
contré sur  une  stèle  de  Ptolémée  Philadelphie  le  nom  de 

!   )       ,  Pikeheret  ou  Pikereliet,  «  la  demeure  du 

serpent  sacré  ■>.  S  tore-Ci  ty  of  Pitliom,  4e  édit.,  1903. 
pi.  vm,  IX,  lig.  7,  x  lig.  26.  Pikeheret  était  un  sanctuaire 
d  i  isiris  dans  la  terre  de  Socoth.  Il  joue  un  rôle  impor- 
tant dans  la  st.le.  Les  listes  géographiques  des  temples 
donnent    aussi   Pikeheret   sous   la    forme   Askeheret, 

I  8  .  E.-J.  de  Rougé,  Inscriptions  et  notices  re- 
cueillies à  Edfou  (Haute  Egypte),  t.  II,  pi.  cxlv.  Elles 
la  nomment  alternativement  avec  Pi-tum  et  parlent  de 
son  serpent  sacré-,  Dûmiçhen,  Geographisehe  Inschrif- 
ten,  t.  m.  pi.  xxxm,  et,  comme  la  stèle  de  Philadelphe, 
la  placent  dans  la  région  de  Socoth.  Il  y  avait  donc 
deux  temples  dans  le  VIIIe  nome,  proches  l'un  de 
l'autre,  Pi-turn  et  Pikeheret,  ce  dernier  dans  le  voisi- 
nage de  la  mer.  Sans  doute  Pikeheret  ne  se  rencontre 


que  sur  des  monuments  ptolémaïques.  Mais  on  peut 
croire  que,  là  comme  ailleurs,  les  Grecs  n'innovèrent 
pas;  ils  restaurèrent  un  ancien  culte,  agrandirent  ou 
reconstruisirent  le  temple,  respectant  une  tradition 
locale  et  antique.  Par  suite,  il  reste  probable  qu'Osiris, 
dès  la  plus  ancienne  époque,  eut  un  sanctuaire  à  Pike- 
Jieret,  Store-City  of  Pithov.  p.  30.  Et  Pikeheret  sem- 
blerait être  le  même  mot  que  la  Phihahiroth  de  la 
Bible. 

2"  Mais  où  placer  Phihahiroth?  Ici  la  Bible  ne  nous 
fournit  qu'un  point  de  repère  :  la  retraite  des  Hébreux 
vers  le  sud  par  le  bord  occidental  du  golfe  arabique. 
Mais  dans  l'Exode  station  et  jour  de  marche  n'étant 
pas  synonymes,  nous  ne  savons  combien  ils  marchèrent 
dans  cette  direction.  De  plus,  nous  ne  savons  pas  da- 
vantage la  position  de  Magdala  et  de  Béelsephon.  Les 
théories  sur  l'étendue  de  la  mer  à  l'époque  de  la 
XIXe  dynastie  viennent  encore  compliquer  la  question. 
Certains  savants  veulent  que  la  mer  ait  alors  commu- 
niqué non  seulement  avec  les  lacs  Amers,  mais  aussi 
avec  le  lac  Timsah,  au  moins  par  intermittences,  ce 
qui  permettrait  de  chercher  Phihahiroth  sur  les  bords 
de  ce  dernier  lac  et  Béelsephon  en  face  sur  le  bord 
oriental  où  se  trouve  la  colline  actuelle  de  Toussoum  : 
c'est  la  théorie  de  Naville,  D'autres,  et  c'est  le  grand 
nombre,  nient  qu'on  puisse  attribuer  cette  extension 
aux  temps  historiques;  ce  serait  dans  la  pré-histoire 
que  la  mer  en  se  retirant  aurait  laissé  derrière  elle  le 
lac  Timsah,  peut-être  même  les  lacs  Amers,  suivant 
quelques-uns.  Par  conséquent,  Phihahiroth  serait  à 
reculer  vers  le  sud,  jusqu'au  seuil  de  Chalouf,  Lecoin- 
tre,  La  campagne  de  Moïse  pour  la  sortie  d'Egypte 
(1882);  et  même  jusqu'à  Adjroud  qui  n'est  pas  sans 
rappeler  vaguement  Phihahiroth.  Ebers,  Durch  Gosen 
zum  Sinai,  2»  édit.,  1881,  p.  509. 

III.  Hypothèse  de  M.  Naville.  —  1»  Le  savant  égypto- 
logue  regarde  comme  difficile  de  ne  pas  admettre  qu'au 
temps  de  Ranisès  II,  le  golfe  s'étendit  beaucoup  plus  au 
nord  qu'aujourd'hui.  La  mer  Bouge  ne  comprenait  pas 
seulement  les  lacs  Amers,  mais  aussi  le  lac  Timsah.  Il 
appuie  son  dire  du  témoignage  des  anciens,  confirmé 
suivant  lui  par  les  études  géologiques  des  modernes. 
Eu  conséquence,  l'ancien  canal  aurait  été  borné  à 
l'ouadi  Toumilat,  ou  à  peu  près.  Tout  d'abord  Strabon, 
XVII, 3,  20,  place  Héroopolis  à  l'extrémité  du  golfe  ara- 
bique. Pline,  H.  N.,  VI.  xxxm,  2,  dit  que  sur  le  golfe 
d'.Êant  (arabique)  se  trouve  Héroum.  Tous  les  écri- 
vains de  l'antiquité,  même  les  plus  récents  d'entre  eux, 
parlant  d'IIéroopolis,  semblent  supposer  le  voisinage 
de  la  mer.  Agathémère  fait  commencer  le  golfe  ara- 
bique à  Héroopolis  :  'ApaBéoç  xôXtcoç..,  xpxETac  iitô 
'Hpaliiiv  jio).iw;.  Mùller,  Geographi  grœci  minores, 
édit.  Didot,  t.  II,  p.  465.  Artémidore  affirme  que  les 
navires  partaient  d'IIéroopolis  pour  la  terre  desTroglo- 
dytes,  dans  Strabon  XVI,  iv,  5.  D'où  l'on  peut  sûre- 
ment conclure  que  non  seulement  au  temps  de  l'Exode, 
mais  même  sous  les  Romains,  le  golfe  s'étendait  jusque 
dans  le  voisinage  d' Héroopolis,  à  l'ouest  d'Ismaïliah. 
Store-City  of  Pitliom,  p.  10,  25-26.  Nous  verrons  tout 
à  l'heure  ce  qu'il  faut  penser  de  ces  textes. 

Ce  point  lui  semblant  acquis,  M.  N'avilie  cherche  àsi- 
tuer  en  conséquence  Pikeheret-Phihahiroth.  Parla  stèle 
de  Philadelphe  et  par  les  textes  géographiques,  on  a  vu 
que  Pikeheret  était  un  sanctuaire  d'Osiris.  Les  Grecs, 
par  suite,  durent  l'appeler  Sérapéum,  Or,  l'Itinéraire 
d'Antonin,  édition  Wesseling,  p.  170,  mentionne  un 
Sérapiu  ou  Sérapéum  à  dix-huit  milles  d'Ero  ou  Héroo- 
polis, et  ce  ne  peut  être  que  Pikeheret,  puisque  c'est 
le  seul  sanctuaire  d'Osiris  que  l'on  connaisse  dans  le 
voisinage  d'IIéroopolis.  Si  l'on  cherche  maintenant  la 
place  qu'il  a  dû  occuper,  elle  nous  est  indiquée  au  pied 
du  Djebel  Maryam,  falaise  plate  qui  forme  comme  le 
fond  du  lac  Timsah  sur  la  rive  occidentale.  A  sa  base 


255 


['HIHAHIROTH 


256 


et  sur  les  bords  du  canal  se  trouve  un  vaste  emplace- 
ment romain,  en  partie  recouvert  par  les  lagunes.  Il 
ne  concorde  pas  tout  à  fait  avec  la  distance  de  l'Itiné- 
raire, mais  l'Itinéraire  ne  mérite  pas  une  confiance 
absolue.  Là  seulement  put  être  le  Sérapéum,  et  non  à 
buit  kilomètres  plus  loin,  endroit  que  les  ingénieurs 
français  ont  appelé  de  ce  nom.  Ce  dernier  endroit  por- 
tait bien  une  stèle  de  Darius,  mais  s'il  y  a  place  pour 
une  tour  de  garde,  un  migdol,  il  n'y  a  pas  trace  d'ha- 
bitations. Store-City  of  Pithom,  p.  25.  Que  ce  soit  bien 
là  la  situation  de  Pikelieret,  les  textes  égyptiens  et  la 
version  des  Septante  le  confirment.  La  stèle  de  Phila- 
delphe  parle  de  taxes  annuelles  en  chevaux  ou  en  bé- 
tail affectées  au  sanctuaire  de  Pikeheret,  pi.  x,  Iig.l7-2U. 
D'autre  part,  le  Papyrus  Anastasi  VI,  pi.  IV,  nous  a 
appris  que  sous  Ménephtah  les  Shasou  d'Atuma  deman- 
dèrent à  conduire  leurs  troupeaux  dans  les  pâturages 

qui  appartenaient  au  domaine  ou  à  la  ferme  I  S  CTl 

ah,  de  Pbaraon,  dans  la  terre  de  Socoth.  Ce  mot  ah 
désigne  un  domaine  avec  pâturages  où  l'on  élève  et 
nourrit  les  cbevaux  et  tout  bétail.  Si  nous  passons 
maintenant  à  l'Exode,  nous  trouvons  que  les  Septante 
ont  rendu  vis-à-vis  de  Phihahiroth,  de  l'bébreu  et  de 
la  Vulgate,  par  iTtevàvn  tyj;  ÈrcauXcu;,  «  devant  le  do- 
maine, la  ferme  »,  l'équivalent  exact  de  l'égyptien  ah. 
Ainsi,  tandis  que  l'bébreu  donne  le  nom  propre  du 
sanctuaire  d'Osiris,  les  Septante  nous  parlent  du  do- 
maine que  le  Papyrus  Anastasi  VI  nous  a  fait  connaî- 
tre comme  étant  dans  la  terre  de  Socoth  où  se  trouve 
Pikeheret.  Nous  avons  ainsi  le  cadre  du  campement  des 
Israélites  :  au  nord-ouest,  Phihahiroth-Pikeherel  sur 
le  lac  ïimsab,  non  loin  de  Phithom,  proche  de  l'actuel 
Djebel  Maryam  :  au  sud-est,  Migdol  ou  Magdala,  la  bulle 
marquée  par  la  stèle  des  Perses,  à  peu  de  distance  de 
l'actuelle  stalion  du  Sérapéum  sur  le  canal;  à  l'est,  la 
mer  et,  au  delà,  sur  la  rive  asiatique,  Béelsepbon, 
l'actuelle  colline  de  Toussoum.  Voilà  ce  qui  semble 
probable  à  M.  Naville.  Store-City  of  Pithom,  p.  31. 

2°  La  géographie  de  l'isthme,  selon  M.  Naville,  a 
contre  elle  le  témoignage  d'Hérodote  qui  vit  l'Égyptè 
sous  les  Perses.  A  lui  tout  seul  cet  auteur  suffit  à 
ruiner  la  thèse  que  nous  venons  d'exposer.  Il  dit  du 
canal  qu'il  avait  «  quatre  journées  de  navigation...  i  lu 
commença  à  le  creuser,  poursuit-il,  dans  cette  partie 
de  la  plaine  d'Egypte  qui  est  du  côté  de  l'Arabie.  La 
montagne  qui  s'étend  vers  Memphis,  et  dans  laquelle 
sont  les  carrières,  est  au-dessus  de  cette  plaine  cl  lui 
est  contiguë.  Le  canal  commence  donc  au  pied  de 
la  montagne;  il  va  d'abord  pendant  un  long  espace, 
d'occident  ci)  orient,  il  passe  ensuite  par  les  gorges 
de  cette  montagne  et  se  porte  au  midi  dans  le  golfe 
d'Arabie.  »  il,  158.  «  La  signification  du  passage  et 
l'intention  de  l'auteur  sont  visibles  :  Hérodote  décrit 
les  deux  directions  du  canal,  l'une  de  l'ouest  à  l'est 
dans  le  sens  de  l'(  luadi  Tourailat,  l'autre  de  l'est  au  sud, 
dans  le  sens  des  lacs  Amers.  La  montagne  dont  il  parle 
est  le  versant  méridional  de  la  chaîne  qui  longe  l'Ouadi, 
et  la  gorge  de  cette  montagne  correspond  à  l'ouverture 
septentrionale  du  bassin  qui  contient  les  lacs  Amers. 
La  topographie  de  l'historien  ne  s'accorde  en  aucune 
far,  n  avec  la  carie  de  .M.  Naville  qui  place  l'ancien  i  i- 

de  la  mer  Rouge  entre  Pikeheret  et  le  lacTimsah, 
ne  laissant  ainsi  aucun  moyen  de  tracer  le  coude  dé- 
cril  par  le  canal  de  l'est  au  sud,  ni  de  comprendre  en 
outre,  comment  les  vingl  lieues  de  l'Ouadi  Toumilal 
auraient  exigé  quatre  jours  de  voyage,  quand  la  journée 
de  navigation,  en  Egypte,  était  de  treize  à  quatorze 
lieues,       du  remarquera  que  la  description  d'Hérodote 

est  confirmée  de  plusieurs   manières,  et    notam ni 

par  les  traces  du  canal  creusé  ou  recreusé  par  les 
Perses  depuis  les  lacs  Amers  jusqu'aux  environs  de 
ïue/..  Entre  ces  deux  points  la  Commission  d'Egypte  a 


découvert  des  ruines  et  des  inscriptions,  surtout  dans 
le  voisinage  de  Chalouf,  près  de  l'ancien  canal  (appelé 
aujourd'hui  canal  des  Pharaons),  qui  fut  retrouvé  par 
le  général  Bonaparte.  »  E.  Lefébure,  Les  fouilles  de 
M.  Naville  o  Pithom,  dans  la  Revue  des  religions,  t.  xi, 
1885,  p.  322.  Les  traces  de  ce  dernier  canal  semblent 
montrer  que  cinq  cents  ans  avant  J.-C.  les  lacs  Amers  et 
le  lac  Tiinsah  étaient  séparés  et  ne  différaient  guère  de 
ce  qu'ils  sont  aujourd'hui.  —  Strabon,  XVII,  i,  26,  fait 
franchir  au  canal  les  lacs  Amers  :  Siappîï  ôè  y.a't  6;ï  nSv 
mxpûv  xaXoupivuv  >i;ivwv.  Et  il  nous»  représente  ces 
lacs  comme  dessalés  par  le  canal  soit  qu'il  prenne 
quelque  partie  pour  le  tout,  soit  qu'il  confonde  les  lacs 
avec  le  canal  lui-même,  qui  était  large  et  poissonneux.  >■ 
E.  Lefébure,  loc.  cit.,  p.  323.  —  Pline,  qui  suit  Slrabon 
et  d'autres  auteurs,  compile  sans  bien  comprendre  et 
semble  même  faire  partir  le  canal  de  la  mer  Rouge 
pour  venir  aboutir  aux  lacs,  usr/ue  ad  foules  amaros. 
H.  X.,  vi,  33.  Quoi  qu'il  en  soit,  Strabon  et  Pline  nous 
montrent  le  canal  se  prolongeant  bien  plus  loin  que 
l'Ouadi  Toumilat  à  travers  des  lacs  qu'ils  distinguent 
de  la  mer  Rouge.  Philadelphe.  dans  la  stèle  de  Phi- 
thom, parle  du  s  Grand  lac  noir  »,  Kenmur.ei  du  «  lac 
du  Scorpion  »  (Tiinsah  actuel)  comme  étant  navigables  et 
communiquant  par  le  canai  avec  la  mer  Rouge,  ce 
qui  permettait  aux  marchandises  du  pays  des  Troglo- 
dytes de  venir  débarquer  dans  le  lac  Timsah,  pi.  x. 
On  ne  peut  donc  accorder  à  M.  Naville  que  le  canal 
se  soit  borné  à  l'ouadi  Toumilat.  Les  lacs  Amers  de 
Pline  et  de  Strabon  ne  peuvent  se  placer  que  dans  le 
site  actuel  de  ce  nom  et  ils  correspondent,  semble-t-il, 
au  grand  lac  noir  de  Ptoléraée  II.  Par  conséquent,  si 
plus  loin  Strabon,  XVII,  m.  20.  dit  qu'Héroopolis  est 
sur  le  golfe  arabique,  si  Pline  le  répète  avec  lui,  loc. 
cit.,  nous  ne  devons  pas  les  prendre  à  la  lettre,  pas 
plus  que  nous  ne  prenons  à  la  lettre  Josèphe  disant 
que  la  mer  Rouge  s'étend  jusqu'à  Coptos,  qui  est  sur 
le  Nil.  De  Bell,  jud.,  IV,  x,  5.  «  Les  Anciens,  qui 
appelaient  mer  toute  grande  étendue  d'eau,  ont  regardé 
les  lacs  Amers  et  leur  canal  tantôt  comme  faisant 
partie  et  tantôt  comme  ne  faisant  pas  partie  de  la  mer 
Rouge,  (hi  ne  peut  même  comprendre  autrement  le 
passage  où  Aristotedit  que  Sésoslris,  le  premier.  e 
de  canaliser  la  mer  Rouge,  tv.v  ÈpuOpàv  BoXatrav  ï-an- 
ptifir,  BiopircEtv,  Melereolog.  i,  14.  Les  lacs  Amers 
étaient  une  mer  intérieure  à  peine  séparée  de  l'autre, 
si  bien  que  l'on  pouvait  les  réunir  toutes  les  deux  sous 
un  même  nom,  quand  le  sujet  n'exigeait  pas  une  pré- 
cision d'ailleurs  peu  conforme  aux  habitudes  de  l'anti- 
quité. »  E.  Lefébure,  loc.  cit.,  p.  321.  Quant  aux  auteurs 
qui  avec  Artémidorc  font  partir  les  navires  d'Héroo- 
polis  pour  la  terre  des  Troglodytes,  cela  ne  préjuge  en 
rien  la  question  des  lacs.  Héroopolis  était  la  dernière 
ville  d'Egypte,  la  plus  connue,  que  l'on  rencontrait 
avant  de  s'engager  dans  les  lac-  reliés  a  la  mer  Ri 
On  pouvait  donc  dire  que   la  navigation  eomniein   ni    i 

cette  place.  Il  n\  a  pas  d'autre  conséquence  à  en  tirer. 
i  in  ne  peut  rien  tirer  non  plus  du  Clysma  que  la  se- 
conde inscription  latine  de  Phithom  place  a  neuf 
milles  d'Ero.  Clysma  signifie  port  et  pouvait  convenir 
à  bien  des  localités  différentes,  comme  les  mots  Migdol 

et  Sérapéum,  Ce  Clysma    tait  quelque  part  sur  le  lac 

Timsah   et   différait   de   l'autre  Clysma  que   l' Itinéraire 

d'Anlonin  place  sur  la   mer   Rouge  a  soixante    huit 

milles  d'Iléroupolis.  Reste  le  texte  d'Agalhénière  qui 
pourrait  recevoir  la  même  explication  que  les  autres 
I extes.  Mais  il  faut  remarquer  de  plus  que  cet  auleur 
copie  Eratosthène.  Celui-ci.  dans  Strabon,  \VI.  iv,  i. 

dit  que  l'on  a  à  sa  droite  la  Troglodytique  quanu  n 
longe  la  Cote  depuis  Héroopolis  :  «t£p  è<7Tiv  êv  ô:;ii 
irroitXéo-jffiv  iro  'ilpwioy  iraXewc.  H  fait  donc  simple- 
ment Héroopolis  le  point  de  départ  de  la  navigation, 
tandis    qu'Agalhémère    change    les    mots    concernant 


257 


PHIIIAHIROTH    —    PHILADELPHIE 


258 


Héroopolis  dont   il   fait   le    commencement   du   golfe 
arabique.  Son  témoignage  en  perd  toute  sa  valeur. 

Mais  peut-être  que  la  géologie  donnera  raison  à  M.  Na- 
ville?  Linant  de  Rellefonds  lui  est  tout  entier  favorable 
et  il  s'en  prévaut  à  plusieurs  reprises.  Sfore-City  of 
Pithom,  p.  25,  '26,  etc.  Partant  d'un  point  communé- 
ment admis,  savoir  que  la  mer  Rouge  et  la  mer  Médi- 
terranée ont  communiqué  dans  lestempspréhistoriques, 
il  signale  trois  atterrissements  successifs  intervenus 
entre  les  deux  mers.  Le  premier  est  antérieur  à  l'his- 
toire, c'est  celui  qui  existe  entre  les  lagunes  les  plus 
au  sud  du  lac  Menzaleh  et  le  lac  Timsah,  nommé  seuil 
de  Gisr.  Le  second  se  trouve  entre  le  lac  Timsah  et  les 
lacs  Arners.  c'est  le  seuil  du  Sérapéum.  Le  troisième 
est  situé  entre  les  lacs  Amers  et  le  fond  du  golfe  actuel, 
c'est  le  seuil  de  Chalouf.  Selon  l'auteur,  l'atterrissement 
du  Sérapéum  s'est  produit  après  Moïse,  à  plus  forte 
raison  celui  de  Chalouf,  et  il  explique  dans  ce  sens  les 
textes  des  anciens.  Linant,  Mémoires  sur  les  princi- 
paux travaux  d'utilité  publique  exécutés  en  Egypte 
depuis  la  plus  haute  antiquité  jusqu'à  mis  jours, 
Paris,  1872-1873,  p.  178-194,  surtout  p.  195-197,  où  l'au- 
teur se  résume.  Les  autres  géologues  sont  moins  affir- 
matifs.  Ils  s'accordent  en  général  pour  dire  que  la 
mer  Rouge  n'a  pas  dû  dépasser  le  Sérapéum  depuis  les 
temps  historiques.  Mais  ils  admettent  par  contre  que 
les  lacs  Amers,  à  une  époque  récente,  n'ont  fait  qu'un 
avec  la  i.vr  Rouge.  Cf.  Lecointre,  La  campagne  île 
Moïse  pour  la  sortie  d'Egypte  (1882),  p.  37-38.  La  dif- 
liculté  int  donc  tout  entière  dans  le  seuil  de  Chalouf 
Par  sa  nature,  il  est  hors  de  doute  qu'il  est  bien  an- 
térieur à  .Moïse,  puisqu'il  est  d'origine  tertiaire.  Cf. 
0.  Fraas.  Aus  dem  Orient  :  geologische  Beobac/tlun- 
gie»  oui  Nil,  auf  der  Sinai-Halbinsel  und  in  Syrien, 
1867,  p.  170-173;  O.Rilt,  Histoire  de  l'Isthme  de  Suez, 
p.  5.  Mais  ce  seuil  a  pu  être  soulevé  par  les  modernes 
tremblements  de  terre  ou  les  mouvements  du  sol. 
C'est  l'opinion  de  M.  Rilt,  loc.  cit.,  p.  4-5.  11  n'insiste 
pas  et  passe  à  des  preuves  d'un  autre  ordre,  aux 
mesures  données  par  les  anciens  sur  la  largeur  de 
l'isthme.  ■  Hérodote,  dit-il,  rapporte  que  la  distance 
du  mont  Casius,  formant  cap  sur  la  Méditerranée,  à  la 
mer  Erythrée  était  de  mille  stades,  c'est-à-dire  d'envi- 
ron cent  kilomètres,  le  stade  unitaire  employé  par  le 
savant  historien  dans  toutes  ses  observations  équivalant 
à  peu  près  à  cent  mètres.  Or,  d'après  l'examen  de  la 
carte,  la  distance  du  cap  Casius  à  la  mer  Rouge  est  un 
peu  supérieure  à  la  plus  petite  largeur  de  l'isthme.  Il 
résulte  donc  de  l'assertion  d'Hérodote,  que  l'isthme  de 
Suez  n'avait  pas  plus  de  quatre-vingt-dix  à  quatre-vingt- 
quinze  kilomètres  de  large,  il  y  a  deux  mille  ans;  c'est- 
à-dire  que  la  mer  Rouge  devait  faire,  à  cette  époque, 
une  pointe  d'environ  cinquante  kilomètres  dans  l'inté- 
rieur de  l'isthme.  Loc.  cit.,  p.  5.  Cf.  Linant,  loc.  cit., 
p.  161-165.  M.  Vigouroux  répond  que  M.  Rilt  «  suppose 
que  le  stade  d'Hérodote  n'était  que  de  trois  cents  pieds  ; 
en  réalite,  il  était  du  double,  c'est-à-dire  de  six  cents, 
comme  nous  le  lisons  formellement  dans  la  description 
du  lac  Moeris,  où  il  est  dit  que  le  stade  équivaut  à 
cent  oryges  et  l'oryge  à  six  pieds.  Hérodote,  n.  149.  Le 
stade  était  donc  de  six  cents  pieds.  Par  conséquent  la 
distance  du  mont  Casius  au  golfe  de  Suez,  était,  non 
pas  de  quatre-vingt-quinze,  mais  de  cent  quatre-vingt- 
cinq  kilomètres  :  c'est  plus  que  la  distance  actuelle,  la- 
quelle ne  dépasse  pas  cent  treize  kilomètres  environ.» 
La  Bible  et  les  découvertes  modernes,  t.  n,  6^  édit., 
1896,  p.  397-398  et  p.  390-396,  utilisées  ci-dessus.  C'est 
même  trop,  et  nous  restons  perplexes  sur  la  nature  du 
-:  le  employé  ici  par  un  auteur  qui  change  à  ce  sujet 
'l'une  page  à   l'autre.   Lecointre,  loc.  cit.,  p.  93-99.  Les 

hiffres  d'Hérodote,  répond-on,  confirmés  par  ceux  de 
Strabon,  XI,  i.  5,  0;  XVII,  1,21,  de  Pline,  H.  X.,\, 
■>.  de  {'Itinéraire,    s'appliquent  sans  doute  à  la  route 

DICT.   DE  LA  BIBLE. 


suivie,  et  c  ette  route  avait  ses  circuits  et  ses  détours 
Nous  aurions  ainsi  l'explication  de  la  différence  enlre 
ces  distances  et  celles  des  modernes  qui  mesurent  en 
ligne  droite.  Vigouroux,  loc.  cit.,  p.  399. 

V.  Conclusion.  —  Que  conclure  maintenant  par  rap- 
port à  Phihahiroth'?  Évidemment,  il  faut  reculer  celte 
station  plus  au  sud  que  ne  le  fait  Naville,  que  ne  le 
suppose  Linant.  Mais  combien  plus  au  sud  la  reporler? 
En  admettant  qu'au  temps  d'Hérodote,  c'est-à-dire  au 
ve  siècle  avant  J.-C,  la  largeur  de  l'isthme  ait  répondu 
à  peu  près  à  ce  qu'elle  est  aujourd'hui,  s'ensuit-il  qu'au 
temps  de  l'Exode,  c'est-à-dire  au  xme  siècle  avant. I.-C, 
il  en  ait  été  de  même?  Le  seuil  de  Chalouf,  par  son 
origine  tertiaire,  semble  nous  l'assurer.  Mais  ce  seuil 
est  un  soulèvement,  de  l'avis  de  tous  les  géologues:  et, 
suivant  l'ingénieur  Lecointe,  ce  soulèvement  qui  corres- 
pond à  un  affaissement  du  coté  de  la  Méditerranée,  se 
poursuit  toujours,  puisque  le  fond  du  canal  recreusé 
par  Amrou  est  resté  par  places,  à  Chalouf  spécialement, 
«  dans  un  état  de  conservation  vraiment  merveilleux  ; 
les  talus  sont  réguliers,  les  arêtes  vives,  le  fond  de 
cailloux  et  d'argile  parfaitement  plat  et  sans  trace  d'en- 
sablement... Sa  cote  est  de  17™76,  tandis  que  celle  de  la 
hauteur  de  la  mer  Rouge  est  de  •18m36  :  il  n'aurait 
donc  plus  aujourd'hui  que  soixante  centimètres  à  demi 
marée,  et  resterait  toujours  à  sec  à  marée  basse  :  par 
suite  le  canal  serait  hors  de  service.  »  Loc.  cit.,  p.  3S. 
Le  même  auteur  en  déduit  que  le  seuil  a  dû  se  relever, 
au  minimum,  de  quatre  mètres  vingt  depuis  Ptolémée 
Philadelphe  et  «  qu'à  l'époque  de  Moïse,  il  devait  être 
profondément  submergé  ».  Loc.  cit.,  p.  39.  Il  s'en  faut 
que  tous  se  soient  ralliés  à  cette  opinion.  Le  dernier 
mot  sur  la  question,  controversée  entre  savants  qui  ne 
cherchent  pas  à  supprimer  le  caractère  miraculeux  du 
passage  de  la  mer  Rouge,  le  dernier  mot  est  aux  fouilles 
nouvelles  et  à  leurs  révélations.  En  attendant,  on  peut 
penser  avec  les  uns  que  Phihahirot  se  trouvait  en  face 
des  lacs  Amers,  avec  les  autres,  qu'elle  était  vers 
Adjroud,  en  face  de  la  mer  Rouge  proprement  dite. 
Cette  dernière  opinion  repose  sur  la  tradition  juive 
alexandrine.  acceptée  par  les  premiers  chrétiens,  et 
qui  peut  n'être  qu'une  accommodation  aux  conditions 
géographiques  de  l'époque.  Peut-être  encore  nous 
forcerait-elle  à  reporter  trop  haut  Phihahiroth  pour 
que  son  identification  si  séduisante  avec  Pikeheret  n'en 
souffrît  pas.  Pourtant,  qui  sait?  L'innombrable  multi- 
tude des  Hébreux  avec  leurs  troupeaux  et  leurs  bagages 
occupait  une  immense  place  et  le  «  vis-à-vis  de  Phiha- 
hiroth  »  peut  nous  donner  de  la  marge. 

C.  Lagier. 
PHILADELPHIE  (grec  :  *aeeSiâ<pia),  ville  ancienne 
de  Lydie,  en  Asie  Mineure,  sur  la  rive  méridionale  du 
Kogamos,  aflluent  de  l'Hemius,  actuellement  Alachehr, 


CO.  —  Monnaie  rie  Philadelphie  (dernière  partie  du  r'  siècle  de 
notre  ère).  =  Tète  de  Diane,  à  gauche,  avec  un  carquois.  — 
fi,.  Apollon  jouant  de  la  lyre  :  *IAAAEA*EON  EPMinnoC 
APXIEPEYC. 

c'est-à-dire  «  la  bigarrée  »,  dans  le  vilayel  d'Aïdin, 
dans  le  pachalik  d'Anatolie,  à  118  kil.  de  Smyrne,  qui 
lui  est  reliée  par  une  ligne  de  chemin  de  fer.  Elle  était 
bàiie  sur  les  derniers  contreforts  du  mont  Tmolus,  au 
bord  du  haut  plateau  central  de  l'Asie  Mineure 
(lig.  60).  Voir  la  carte  de  Lydie,  I.  iv.  col.  448.  Elle  esl 
mentionnée  deux  fois  dans  le  Nouveau  Testament  ; 
Apoc.  i,   11,  dans  la  liste  des  sept    Églises  de   l'Asie 

V.  -  9 


259 


PHILADELPHIE 


260 


proconsulaire  auxquelles  saint  Jean  devait  envoyer  le 
livre  de  ses  visions;  Apoc.,  m,  7,  en  tête  de  la  lettre 
adressée  à  l'ange,  c'est-à-dire  à  l'évèque  de  la  ville.  Elle 
fut  fondée  par  Attale  II  Philadelphie  (voir  ATTALE  II,  1. 1, 
col.  1227-1228;,  roi  de  Pergame  entre  les  années  159- 
138  avant  J.-C,  auquel  appartenait  son  territoire  et 
dont  le  surnom  servit  à  la  désigner.  En  133  avant  J.-C, 
elle  passa  sous  la  domination  romaine,  avec  tout  le 
royaume  de  Pergame.  Voir  Pergame.  t.  îv.  col.  137. 
Située  tout  auprès  de  la  région  volcanique  nommée 
Katakékaitniènè,  «  district  brûlé,  »  qui  est  très  exposé 
aui  tremblements  de  terre,  elle  eut  beaucoup  à  souf- 
frir de  ce  fléau;  elle  était  presque  en  ruines  à  l'époque 
de  Strabon,   XIII,  iv,  10.   Mais  elle  ne  tarda  pas   à  se 


sur  laquelle  elle  se  dresse  est  couverte  de  jardins  et 
d'arbres;  la  plaine  est  un  champ  immense,  bien  cul- 
tivé, que  traversent  de  nombreux  canaux  d'irrigation. 
La  population  s'occupe  beaucoup  d'agriculture,  comme 
au  temps  de  Strabon,  qui  comparait  son  sol  à  celui  de 
Catane,  en  Sicile,  sous  le  rapport  de  la  fertilité. 
Cf.  Strabon.  xn,  8;  xm,  4.  Son  vin  était  déjà  très 
renommé  dans  les  temps  anciens,  Virgile,  Georg.,  il,  98, 
et  elle  en  exportait  de  grandes  quantités;  ses  monnaies 
portaient  souvent,  pour  ce  motif,  la  tête  de  Bacchus  ou 
celle  d'une  bacchante.  Les  ruines  de  l'ancienne  cité 
sont  peu  nombreuses;  elles  consistent  dans  les  restes 
d'un  théâtre,  d'un  stade,  de  deux  enceintes,  etc.  Mais 
nous  devons  à  Philadelphie  une  lettre  de  l'Apocalypse 


61.  —  Vue  d'Alachehr.  D'après  une  photogi 


relever.  Elle  porta  pendant  quelque  temps,  au  i«  siècle 
de  l'ère  chrétienne,  le  nom  de  Néocésarée,  qu'on  lit 
sur  des  monnaies  contemporaines  des  règnes  de 
Tilièri-,  de  Caligula  et  de  Claude.  Sous  Yespasien,  elle 
reçut  l'épithète  de  Flavia.  On  lui  donna  aussi,  à  l'époque 
île  ni  plus  jji'.-iiidc  prospérité,  le  titre  de  «  petite 
Athènes  »,  à  cause  du  grand  nombre  de  ses  temples 
i  de  -es  l'êtes.  Cf.  J.  G.  Droysen,  Gesclrichte  des  Bel- 
lenismus,  2"  édit.,  3  vol.,  in-N",  Gotha,  1878,  t.  m, 
2e  partie,  p.  276.  A  l'époque  byzantine,  c'était  encore 
une  ville  grande  et  peuplée,  qui  faisait  un  commerce 
considérable.  Philadelphie  eut  la  gloire  de  ne  tomber 
au  pouvoir  des  Turcs  qu'en  1390,  après  huit  années  de 
vigoureuse  résistance,  alors  que  toutes  les  autres  \illcs 
d'Asie  Mineure  étaient  déjà  entre  leurs  mains. 

[lachehr  (fig,  61),  qui  a  succédé  à  la  cité  antique, 
est  ;\  -J( K)  mètres  au-dessus  du  niveau  de  la  mer,  et  domine 
une  vaste  et  fertile  plaine.  De  loin,  elle  a  un  aspect 
imposant;  mais  elle  est  mal  bâtie  et  très  malpropre, 
Comme  la  plupart  des  villes  orientales.  Son  activité 
commerciale  est  encore  très  importante.   La  terrasse 


m,  7-13,  qui  ne  mourra  jamais.  s,iu  évéque  s 

de  grands  éloges,  i nue  celui  de  Smyrne,  Apoc.  Il,  8- 

II.  et  pas  un  seul  î    proche.  La  communauté  chrétienne 

qu'elle  abritait    était  peu  considérable  enc ipoc. 

ui,8,  et  les  Juifs  essayaient  de  la  troubler,  Apoc,  m 
9;  mais  pasteurs  et  fidèles  résistaient  vaillamment  a 
cette  «  synagogue  de  Satan  ».  Notre- Seigneur  n'a 
donc  qu'à  les  Kmer.  à  leur  promettre  une  brillante 
récompense  el  à  leur  recommander  de  conserver  avec- 
soin  le  don  précieux  qu'ils  ont  reçu.  Apoc..  m,  10-11. 
Pans  l'épitre  intéressante  qu'il  leur  écrivit  quelques 
années  plus  tard,  saint  Ignace  d'Anlioche  met  égale- 
ment les  chu  tiens  de  Philadelphie  en  garde  contre 
les  juifs.  Cf.  l'uni,.  Die  apostolisclten  Vâler,  in-8°, 
Tubingue,  1901,  p.  98-102.  Aujourd'hui  encore,  l'élé- 
ment chrétien  esl  de  beaucoup  prépondérant  parmi 
la  population  d'Alachehr;  la  bénédition  du  Chris) 
a  porté  bonheur  à  cette  Eglise  comme  à  celle  de 
Smyrae. 

Nous  ne  savons  pas  dans  quelles  circonstances  spé- 
ciales le    christianisme  avait    pénétré  à   Philadelphie. 


261 


PHILADELPHIE    —    PHILEMON    (ÉPITRE    A) 


262 


D'après  les  Conslitut.  Aposl.,  vu,  46,  t.  i,  col.  1053,  son 
premier  évèque,  nommé  Démétrius,  aurait  été  institué 
par  saint  Pierre  lui-même.  L'apologiste  saint  Miltiade, 
dans  Eusèbe,  //.  E.,  v,  17,  t.  xx,  col.  173,  mentionne 
une  prophétesse,  nommée  Ammia,  qui  aurait  appar- 
tenu à  l'Église  primitive  de  Philadelphie.  Durant  la 
période  byzantine,  cette  ville  était  le  siège  d'un  évêché 
qui  dépendait  du  centre  métropolitain  de  Sardes.  — 
Voir  Arundell,  Discoveries  in  Asia  Minor,  in-8\  t.  i, 
p.  34;  Curtius.  Naclitrag  ru  den  Beitrâgen  zur  Ge- 
schichte  und  Topographie  Kleinasiens,  dans  les 
Abhandlungen  der  Berliner  Akademie,  1873;  Ramsay, 
Ihstorical  Geography  of  Asia  Minor,  in-8°,  Londres, 
1890,  p.  86;  Id.,  Cities  and  Bishoprics  of  Phrygia, 
2  in-S<\  t.  i,  p.  196;  t.  il,  p.  353;  Ms'  Le  Camus,  Les 
sept  Églises  de  l'Apocalypse,  in-i»,  Paris,  18'.I6,  p.  203- 
216.  L.  Fillion. 

PHI L ARQUE  (grec  :  !>  z.-S>,â9w,  Vulgate  :  Philar- 
ches),  chef  de  tribu,  chef  de  troupes  comme  çuXâp^oç. 
Cf.  £.zpt&&pyrr\ç,  I  Mach.,  x.  65.  Nos  éditions  de  la  Vul- 
gate donnent  ce  mot  comme  un  nom  propre,  et  beaucoup 
de  commentateurs  acceptent  cette  interprétation,  mais 
la  phrase  grecque  :  tov  8s  ^■j'iAo/t^  tùv  t.so':  TqiôÔEov, 
s'entend  plus  naturellement  du  «  commandant  ou  chef 
de  ceux  qui  étaient  avec  Timothée  »,  c'est-à-dire  de  ses 
soldats.  II  Mach.,  vin,  32;  cf.  y.  30.  Le  texte  sacré  nous 
dit  que  .ludas  Machabée  ayant  battu  Timothée  et  Bac- 
cliide.  les  vainqueurs  mirent  à  mort  le  philarque. 
i'  homme  très  pervers,  qui  avait  fait  aux  luifs  beaucoup 
de  mal.  o 

1.  PHILEMON  (grec,  $tA^|i&>v),  riche  chrétien  de 
Colosses  à  qui  saint  Paul  écrivit  une  de  ses  lettres. 
Le  nom  qu'il  portait  était  très  répandu  en  Phrvgie, 
comme  le  témoignent  Ovide,  Metani,,  vin,  631  ;  Aristo- 
phane, Aves,  762,  et  de  nombreuses  inscriptions. 
Wieseler.  Chron.  des  Apost.  Zeitalt.,  1881,  p.  152, 
a  pi'étendu  conclure  d'un  passage  de  l'Épitre  aux 
Colossiens,  iv,  7,  que  Philémon  était  originaire  de 
Laodicée,  et  que  la  lettre  qui  lui  est  adressée  était  celle 
que  l'Apôtre  envoya,  par  les  soins  de  Tychique,  à  cette 
dernière  Église,  Col.  iv,  16.  Mais  il  est  plus  naturel  de 
supposer  que  Philémon  habitait,  comme  son  esclave 
Onésime,  Col.,  IV,  9,  «  l'un  d'entre  vous,  »  la  ville  de 
Colosses.  On  y  montrait  encore  sa  maison  au  temps  de 
Jhéodorel,  In  Episl.  ad  Philem.,Proa'm.,l-^\\i,co\.GO\, 
et  les  Constitutions  apostoliques,  iv,  46,  t.  i,  col.  1053, 
en  font  l'évêque  de  cette  cité.  D'après  les  Menées 
grecques  du  22  novembre,  il  aurait  subi  là  le  martyre 
en  compagnie  d'Appia,  d'Archippe  et  d'Onésime.  J.-B. 
Lightfoot,  The  Apostolic  Fathers,  Ignatius,  Londres, 
1884,  t.  il,  p.  535.  Saint  Paul  n'ayant  jamais  été  à  Co- 
losses, il  est  probable  que  Philémon  et  les  siens  l'avaient 
connu  dans  un  voyage  à  Éphèse.  Act.,  xix,  26;  I  Cor., 
xvi,  19.  En  tout  cas,  c'est  à  l'Apôtre  lui-même,  qu'il 
devait  sa  conversion,  jr.  19. 

Philémon  parait  avoir  joui  d'une  certaine  fortune  : 
il  a  des  esclaves;  il  reçoit  de  nombreux  amis  dans  sa 
maison,  y.  22;  il  est  connu  par  sa  libéralité  envers  les 
pi  nvres,  v.  5-7;  la  communauté  chrétienne  se  réunit 
lui,  \.  2.  L'épithète  de  c-jvsoyôî,  que  lui  donne 
Paul,  y.  1.  laisse  entendre  qu'il  servait  avec  zèle  la 
cause  de  l'Évangile  parmi  ses  compatriotes.  C'était  une 
âme  généreuse,  droite,  loyale,  toute  dévouée  à  la  per- 
sonne de  l'Apôtre,  jf.  13,  17,  22.  —  Les  traditions  le 
présentent  tantôt  comme  prêtre,  tantôt  comme  évèque 
ou  comme  diacre;  les  martyrologes  grecs  l'appellent 
simplement  «  un  saint  apôtre  ».  Lightfoot,  lgnathis, 
il,  p.  535.  Philémon  semble  avoir  été  marié  :  sa  femme 
esl  »ans  doute  cette  Appie  qui  figure  avec  lui,  dans 
l'adresse  d»  l'Épitre  à  côté  d'Archippe  lequel,  vraisem- 
blablement, était  leur  Bis.  C.  Toussaint. 


2.  PHILÉMON  (ÉPITRE  A).  —  Cette  lettre  se  distin- 
gue des  autres  Épitres  de  l'Apôtre  par  des  caractères 
tout  particuliers.  C'est  d'abord  la  plus  courte  :  elle  n'a 
que  quelques  lignes.  Elle  semble,  de  plus,  avoir  été 
écrite  tout  entière  de  la  main  de  Paul,  il.  19,  cas  fort 
rare  pour  les  Épitres  de  saint  Paul.  Enlin  elle  n'est 
adressée  ni  à  une  église,  ni  à  un  chef  d'église  comme 
les  lettres  pastorales,  mais  à  une  famille,  plus  exacte- 
ment encore,  à  un  ami  personnel,  pour  une  affaire 
d'ordre  privé. 

I.  Contenu  de  l'Épitre.  —  Malgré  son  peu  d'étendue, 
ce  billet  présente  les  divisions  habituelles  des  grandes 
épitres;  préambule,  corps  du  sujet,  épilogue.—  {"Préam- 
bule, v  17.  —  Il  se  compose  de  l'adresse  et  de  l'action  de 
grâces.  L'adresse  mentionne  en  première  ligne  Philé- 
mon, le  chef  de  famille,  à  qui  la  lettre  est  principa- 
lement destinée.  Elle  y  ajoute  les  noms  d'Appia  sa 
femme  et  d'Archippe  son  fils.  Les  autres  membres  de 
la  famille  du  riche  Colossien  sont  désignés  par  ces 
mots  «  l'église  qui  se  réunit  dans  ta  maison  •■.  L'action 
de  grâces,  en  louant,  d'une  façon  délicate,  la  foi  et  la 
charité  de  Philémon,  prépare  la  requête  que  l'Apôtre 
va  lui  présenter,  y  1-7. 

2»  Corps  de  l'Épitre,  y.  8-21.  —  Saint  Paul  y  sollicite 
le  pardon  d'Onésime,  avec  un  art  consommé.  L'Apôtre 
n'aborde  son   sujet  qu'avec  mille  précautions.  11  n'é- 
nonce pas  de  suite  l'objet  de  sa  demande.  Il  rappelle 
d'abord  à  Philémon  quel  est  celui  qui  la  lui  adresse, 
f   8-9,  c'est  Paul    lui-même.   Au    besoin,   il   pourrait 
commander,   il   aime    mieux,  par  amour,  le  supplier 
et  demander,  comme  service  personnel,  ce  qu'il  pour- 
rait  exiger  comme   apôtre.  Comment  Philémon  pour- 
rait-il refuser    cette    grâce  à   celui   qui    passe   sa   vie 
au    service  des  gentils,   qui  endure,    en    ce    moment 
même,  toutes  les  souffrances  de  la  captivité,  et  qui  est 
arrivé  à  l'âge  de  la  vieillesse?  A  ces  motifs,  Paul  joint 
ceux  qu'il  trouve  dans  la  personne  de  son  client,  }  10- 
16.  Celui  en  faveur  de  qui  il  intercède  est  son  «  fils 
spirituel   »,   qu'il  a  enfanté  dans   sa  prison;  c'est  cet 
Onésime  qui,  jusqu'ici,  il  est  vrai,  n'a  guère  justifié  la 
signification  de  son  nom   (Onésime,  en  grec,  signifie 
«  utile  »)  mais  qui,  désormais,  en  est  tellement  digne, 
que  Paul  l'aurait  volontiers  gardé  auprès  de  lui  pour 
l'aider  dans  l'œuvre  de  l'Évangile  et  faire  pour  lui  tout 
ce  que  Philémon  ferait  lui-même  s'il  étaitjprésent,  mais 
Paul  n'a  voulu  devoir  cette  précieuse  assistance  qu'à  la 
bonne  volonté  de  Philémon  lui-même.   De  plus,  celui 
pour  qui  parle  l'Apôtre  n'est  plus  un  simple  esclave, 
c'est  «  un  frère  »et  un  frère  pour  l'éternité,  frère  aimé 
de  Paul  et,  à  plus  forte  raison,  de  Philémon  qui  l'avait 
aimé  autrefois  comme  maître,  en  sorte  que  si  Onésime 
a  été  séparé  de  Philémon  pour   un   temps,   c'est  afin 
qu'il  le  recouvre  pour   l'éternité,  non  plus  comme  un 
esclave,  mais  comme  un  frère  bien-aimé.  L'Apôtre  pro- 
nonce alors  le  mot  décisif  :  «  Reçois-le,  f.  17-21,  comme 
tu  me  recevrais  moi-même.  »  Il  est  vrai  qu'Onésime  ne 
s'est  pas  enfui  seulement  de  chez  son  maître,  mais  qu'il 
lui  a  causé  quelque  grave  dommage.  Mais  Paul  s'offre 
pour  le  réparer.  Il  s'engage,  par  écrit,  à   indemniser 
Philémon,  bien  qu'au  fond  celui-ci  soit  son  débiteur 
puisqu'il  lui  doit  son  salut.  Cette  idée  remplit  l'âme  de 
Paul  de  confiance.  Il  reproduit  sa  prière,  au  y.  20,  sur 
un  ton  qui  écarte  jusqu'à  la  possibilité'  d'un  refus.  Bien 
plus,  au  verset  suivant,  il  attend  de  Philémon  quelque 
chose  de  mieux  encore.  Quoi  donc  '.'  Le  tour  de  phrase 
est  général  et  laisse  aux  interprètes  la  place  à  diverses 
hypothèses.  Les  uns  supposent  un  bienfait  quelconque 
en  plus  du  bon  accueil   réservé  à   Onésime,  d'autres 
(De  VVette,  Oltramare,  Reuss,  Godet),  l'affranchissement 
pur  et  simple. 

3°  Épilogue,  22-25.  —  L'Apôtre  prie  Philémon  de  lui 
préparer  un  logement,  car  il  espère  suivre  de  près 
Onésime  à  Colosses.  Les  autres  versets  contiennent  les 


263 


PHILÉMON    (ËPITRE   A) 


264 


salutations  des  compagnons  de  Paul,  ce  sont  les  mêmes 
noms  que  dans  l'Epitre  aux  Colossiens,  à  part  celui  de 
Jésus  Justus  qui  probablement  n'était  pas  connu  de 
Pbilémon.  Par  contre,  Épaphras  est  mentionné  le  pre- 
mier de  tous,  étant  l'ami  personnel  de  Philémon.  Il 
était  alors  à  Rome  et  partageait  l'appartement  que  le 
prisonnier  Paul  avait  loué.  Col..  îv,  10-12. 

II.  Lieu  et  date  de  la  composition  de  l'Épïtre.  — 
De  l'aveu  de  presque  tous  les  critiques,  l'Épïtre  à  Phi- 
lémon a  été  rédigée  en  même  temps  que  les  Épitres  aux 
Colossiens  et  aux  Kphésiens.  «  Ces  trois  lettres,  dit 
Sabatier,  forment  un  groupe  distinct  dans  l'ensemble 
des  Épitres  de  la  captivité  et  ne  doivent  point  être 
séparées.  Écrites  en  même  temps,  poitées  en  Asie 
Mineure  par  les  mêmes  messagers,  elles  gardent  des 
traces  frappantes  de  cette  parenté  d'origine.  Philem., 
10,  et  Col.,  îv,  9;  Philem.,  23,  24,  et  Col.,  n,  10,  12,  14; 
Philem.,  2,  et  Col.,  iv,  17.  Ces  Épitres,  en  effet,  se  sup- 
posent l'une  l'autre.  A.  Sabatier,  L'Apôtre  Paul,  3e  édit., 
1896,  p.  233.  D'après  leur  contenu,  elles  ont  été  certai- 
nement écrites  durant  une  des  deux  captivités  de  Paul. 
Mais  est-ce  celle  de  Rome  ou  celle  de  Césarée?  Les 
exégètes  modernes  ne  sont  point  d'accord  sur  ce  point. 
Voir  leurs  arguments,  pour  ou  contre,  à  l'article  Co- 
lossiens (Épître  ai  x),  t.  n,  col.  867. 

III.  Authenticité.  —  On  ne  trouve  pas  de  traces  cer- 
taines de  l'Épïtre  à  Philémon  chez  les  Pères  aposto- 
liques. Rr.  V.  Westcott,  Canon  of  the  N.  T.,  1884, 
p.  48.  Les  premières  citations  formelles  de  l'Epïtre  à 
Philémon  viennent  d'Origène  qui  l'attribue  à  Paul  et 
en  extrait  plusieurs  passages.  In  Jerem.,  nom.  xix,  2; 
Comm.  séries  m  Matth.,  |  66,  72,  t.  xm,col.  501.  1707, 
1715.  Tertullien,  Adv.  Marc,  v,  11,  t.  n,  col.  254,  re- 
marque que  la  brièveté  de  cet  écrit  l'a  mis  à  l'abri 
des  falsifications  de  Marcion.  D'après  saint  Épiphane, 
Hœi:,  xi.ii,  9,  t.  xi.i,  col.  708,  la  lettre  à  Philémon  occu- 
pait dans  le  recueil  de  Marcion  l'avant-dernière  place, 
après  les  Épitres  aux  Colossiens  et  aux  Laodicéens  et 
avant  celle  aux  Philippiens,  tandis  que,  d'après  Tertul- 
lien, elle  venait  après  celle-ci,  comme  la  dernière.  On 
la  trouve  mentionnée  dans  le  canon  de  Muratori,  à  côté 
des  trois  Epitres  pastorales.  Voir  t.  il,  col.  170.  Les 
deux  anciennes  versions  syriaque  et  latine  la  conte- 
naient. Saint  Jérôme,  Comm.  in  Epis  t.  Philem., 
Proœm.,  I.  XXVI,  col.  601,  observe  pourtant  que  plu- 
sieurs ne  la  croyaient  pas  écrite  par  saint  Paul  ou  que, 
si  elle  était  de  lui,  elle  n'était  pas  inspirée,  car  elle  ne 
contenait  rien  pour  l'édification  :  c'était  plutôt  une 
lettre  de  recommandation  qu'une  lettre  doctrinale.  A 
quoi  l'illustre  exégète  répondait  :  on  trouve,  dans  toutes 
les  lettres  de  Paul,  des  détails  se  rapportant  aux  choses 
de  la  vie,  par  exemple,  II  Tim.,  IV,  13,  où  l'Apôtre 
donne  l'ordre  de  lui  rapporter  son  manteau  et  ses  livres, 
et   d'ailleurs  jamais   cette  lettre  n'aurait    été   renie    par 

toute  l'Église,  si  l'on  n'avait  pas  cru  qu'elle  fût  de  Paul. 
Saint  Chrysostomc,  In  Philem.  Prol.,  t.  i.xn,  col.  702, 
reproduit  à  peu  près  les  mêmes  raisons  contre  ceux  qui 
considéraient  cette  Épltre  au-dessous  de  la  dignité  du 
grand  Apôtre.  A  partir  de  ce  moment,  l'authenticité  de 
notre  Épître  n'a  laissé  aucun  doute  dans  les  esprits. 
Elle  n'a  été  mise  en  question  que  par  Christian  liaur 
qui  lui  dénia  son  origine  paulinienne,  opinion  plus  ou 
moins  adoptée  par  Weizsâcker,  Pfleiderer,  Stock,  von 
Manpn.  Pour  ces  critiques,  l'Épïtre  à  Philémon  est  l'em- 
bryon  à  un  roman  chrétien  analogue  à  celui  dos  Réco- 
gnitions clémentines,  destinéesâ  mettre  en  exemple  la 
'.elle  idée  chrétienne  que  chaque  fidèle  se  retrouve  lui- 
même  dans  chacun  de  ses  frères.  Cette  hypothèse  n'a 
aueun  lôiidomonl. 

La  lettre  à  Philémon  est  d'une  telle  originalité  el  l'âme 
de  Paul  l'a  si  bien  marquée  dé  son  empreinte  ineffaça- 
ble, qu'on  ne  peut  douter  de  son  authenticité.  Voir 
P.  Sabatier.  l'Apôtre   Paul,  3«  édit..  p.   235,  236;  Re- 


nan, Saint  Paul,  1869,  introd.,  p.  xi.  Von  Soden,  dans 
le  Hand-Commentar  zum  N.  T.,  t.  m,  part,  i,  Frihourg- 
en-B.,  1893,  p.  73,  admire,  dans  cette  lettre,  un  témoi- 
gnage charmant  de  la  délicatesse  et  de  l'humour  de 
l'Apôtre,  et  tout  à  la  fois  de  l'élévation  de  sentiment  et 
de  langage  avec  laquelle  il  savait  traiter  les  choses  con- 
crètes de  la  vie.  Les  objections  tirées  du  vocabulaire 
de  l'Epitre  méritent  à  peine  de  retenir  l'attention.  Les 
sept  âuaÇ  J.eyopiEva  qu'on  y  signale,  àvairltwiEiv,  ânott- 
veiv,  <xy_pr,<7TO;,  £TTtT.i<7T£tv,  ;sv!x,  ov(vaO"6at,  npotroçefAElv, 
n'enlèvent  pas  l'impression  générale  que  le  style  de 
l'Epitre  ne  soit  celui  de  Paul,  en  particulier  celui  des 
autres  Epitres  de  la  captivité.  On  retrouve,  en  effet, 
plusieurs  des  expressions  favorites  de  Paul  :  iTti'vvaxri;, 
ïtxpp^m'a,  7capâxAi]?ic-  La  belle  métaphore  5v  èyévvr.ia 
èv  toïç  Se(I(j.oîc,  f.  10,  rappelle  I  Cor.,  iv,  15,  l'adverbe 
-■'■x/'x,  f.  15,  l'Épïtre  aux  Romains,  v,  7.  Il  y  a,  en  outre, 
nombre  de  coïncidences  verbales  avec  les  Epitres  aux 
Colossiens,  aux  Éphésiens,  aux  Philippiens,  par  exem- 
ple, g£<t|jlco;  Xptffxo'j  'Ir|O-o0,  il,  1,  9;  Eph.,  m,  1  ;  <7uv£pY<S; 
et  <nj<7TpanwTri;,  v,  1,  2;  Phil.,  n,  25;  àvr,xov,  v,  8; 
Eph.,  v,  4;  Col.,  ni,  18;  tjuvaixy.i>wTo;,  v,  23;  Col., IV, 
10;  àôe).?oç  àYeunrtrfc,  v,  16;  Eph.,  VI,  21;  Col.,  IV,  7. 

IV.  Mérite  littéraire.  —  Tous  les  critiques  s'accor- 
dent à  reconnaître,  dans  l'Epitre  à  Philémon,  un  vrai 
petit  chef-d'œuvre  de  l'art  épistolaire.  Erasme.  I»  Phi- 
lem., 20,  défie  même  Cicéron  de  dépasser  l'éloquence 
de  ces  quelques  lignes.  On  ne  sait  ce  qu'il  faut  le  plus 
admirer  dans  cette  page,  unique  en  son  genre  parmi 
les  écrits  de  Paul,  la  finesse,  la  grâce,  la  délicatesse  de 
sentiment  et  de  langage,  les  tournures  heureuses,  les  in- 
sinuations habiles,  les  sous-entendus  pleins  de  tact  et 
d'à-propos.  Cette  Épitre  nous  révèle  la  souplesse  du 
génie  de  Paul.  «  Ce  ne  sont,  dit  Sabatier,  que  quelques 
lignes  familières,  mais  si  pleines  de  grâce,  de  sel,  d 
tion  sérieuse  et  confiante,  que  cette  courte  Epitre 
brille,  comme  une  perle  de  la  plus  exquise  finesse, 
dans  le  riche  trésor  du  Nouveau  Testament.  Jamais 
n'a  mieux  été  réalisé  le  précepte  que  Paul  lui-même 
donnait  à  la  fin  de  sa  lettre  aux  Colossiens  :  «  Que  votre 
«  parole  sorte  toujours  revêtue  de  grâce,  assaisonnée  de 
«  sel,  de  manière  à  savoir  comment  vous  devez  répondre 
«à  chacun.  Col.,  IV,  6  .1  L'Apôtre  Pau  l,  3"  édit.,  p.  234, 
236.  La  conservation  de  cette  Epître  est  due  sans  doute 
au  respect,  à  l'affection,  au  culte  de  la  famille  de  Phi- 
lémon pour  tout  ce  qui  émanait  de  l'Apôtre  Paul. 

V.  La  question  de  l'esclavage.  —  On  a  parfois  re- 
proché à  Paul  d'avoir  renvoyé  Onésime  à  son  maître 
au  lieu  de  prendre  occasion  de  cet  incident  pour  pro- 
clamer, au  nom  de  l'Évangile,  l'émancipation  des 
esclaves.  Il  faut,  au  contraire,  louer  l'Apôtre  de  ne 
s'être  point  pose  en  Spartacus  imprudent  et  d'avoir 
traité  avec  une  si  grande  sagesse  un  point  de  doctrine 
si  grave  et  si  délicat  On  doil  lui  savoir  gré  d'avoir 
tracé  la  ligne  de  conduite  que  le  christianisme  devait 
prendre  à  l'égard  d'une  institution  qui  tenait,  par  tant 
de  liens  intimes,àla  vie  politique,  sociale,  économique, 
des  sociétés  anciennes.  En  renvoyant  l'esclave  à  son 
maître,  Paul  reconnaît,  respecte  l'institution  existante 
mais  il  ne  lui  donne  pas,  connue  on  l'a  prétendu,  une 
sorte  de  consécration  qui  la  rende  intangible.  Il  pose, 
au  contraire,  les  principes  qui  doivent,  dans  un  avenir 
plus  ou  moins  rapprochera  faire  disparaître  du  monde 
civilisé.  Parle  fait  qu'il  fait  de  l'esclave  chrétien  le 
frère  de  son  maître  et  qu'il  efface  dans  le  Christ  toutes 
les    différences    sociales,    il    ruine,    par    la    base,    celle 

oppression  de  l'homme  par  l'homme.  Voir  Onésime, 

t.  iv,  eol.  1812. 

VI.  Uni i:m'iiie.    —    .l.-li.    LiiJiifooi.    S.    Paul'» 

Epistles  to  the  Colossians  nml  to  Philémon,  in  s  . 
Londres,  1892;  11.  K.  von  Soden,  Die  Briefe  an  die 
Kolosser,  Epheser,  Philémon,  Fribourg,  1893,  p.  73; 
Heyer,  Comment,  ûber  die  Briefe  an  die  Kolos.  und 


265 


PHILÉMON    (ÉPITRE   A)    —   PHILIPPE   II   HÉRODE 


266 


Phil.,  t.  vm,  ix ;  H.  Oltramare,  Comment,  sur  les 
Épitres  de  saint  Paul  aux  Colossiens,  aux  Éphcsiens 
et  à  Philétnon,  in-8".  Paris,  1891;  Vincent,  dans 
lntern.  Critic.  Commentai-]),  Episl.  tothe  Philip. and 
to  Philemon,  p.  1Ô7,  Edimbourg,  1897;  Holtzmann, 
Dey  Brief  an  Philemon,  krilisch  untersucht  dans 
Zeitschrift  fin-  wissenschaftliche  Théologie,  1873, 
p.  428441.  C.  Toussaint. 

PHILÈTE  (grec  :  «^iX/itoî,  «  aimé  a),  chrétien,  infi- 
dèle à  sa  foi  qui  partagea  l'hérésie  d'Hyménée,  en  disant 
que  la  résurrection  était  déjà  accomplie.  II  Tim.,  II, 
17-18.  Voir  Hyménée,  t.  m,  col.  391.  On  ne  sait  rien 
autre  chose  de  certain  sur  sa  vie.  Ce  qu'on  lit  dans  le 
Pseudo-Abdias,  Apostolicœ  historiée,  iv,  2-3,  dans  J.  A. 
Fabricius,  Codex  apocryphus  Novi  Testantenli,  1719, 
t.  il,  p.  517-5'20,  sur  ses  rapports  avec  l'apôtre  saint 
Jacques,  fils  de  Zébédée,  est  fabuleux.  On  trouve  sépa- 
rément les  noms  d'Hyménée  et  de  Philète  parmi  ceux  de 
la  maison  de  César  dont  les  cendres  avaient  été  dépo- 
sées dans  des  Columbaria  de  Rome.  Voir  .1.  G.  Walch, 
De  Hijmenseo  et  l'hilelo,  dans  ses  iliscellanea  sacra, 
Amsterdam,  171  i.  p.  81-121;  J.  Ellicott,  The  Pastoral 
Epistles  of  St.  Paul,  4e  édit.,  Londres,  1860,  p.  133-134. 

PHlLÎPPE  (grec  :  '{•;'/  imtoç,  «  ami  des  chevaux  »),  nom 
de  deux  rois  de  Macédoine,  d'un  oncle  d'Antiochus 
Épiphane,  de  deux  Hérodes,  d'un  apôtre  et  d'un  diacre. 

1.  Philippe  il,  fils  d'Amyntas  (fig.  62)  roi  de  Macé- 
doine (360-336 avant  J.-C),  et  père  d'Alexandre  le  Grand. 


62.  —  Monnaie  de  Philippe  II,  roi  de  Macédoine. 

Tète  de  Jupiter  laurée,  à  droite.  —  R).  *IAinn01C  Cavalier 

marchant  à  droite  et  portant  une  palme. 

C'est   seulement   en    cette    dernière    qualité  qu'il    est 
nommé  I  Mach.,  i,  1;  vi,  2. 

2.  PHILIPPE  V,  roi  de  Macédoine  (220-179  avant 
J.-C.)  (fig.  63).  Il  était  fils  de  Démétrius  II,  et  lui  suc- 
céda sur  le  trône.  Voulant  agrandir  son  royaume,  il 
entra  on  conllit  avec  les  Romains  pendant  qu'ils 
étaient  en  guerre  avec  Carthage  et  profita  de  la  cir- 


63.  —  Stature  de  Philippe  V,  roi  de  Macédoine. 

Tète  de  Philippe  V,  diadémée,  à  droite.  —  Ri.  DAriAEQl!.] 
<t»IAIIinoi\  Hercule  debout,  à  gauche,  portant  sa  massue  et 
une  corne  d'abondance. 

constance  pour  consolider  son  pouvoir.  Mais  lorsque 
la  victoire  de  Zama  eut  permis  aux  Romains  de 
l'attaquer  à  leur  gré,  en  200,  il  ne  put  leur  résister 
longtemps,  malgré  sa  bravoure.  11  lutta  contre  eux 
jusqu'en  198,  où  l'arrivée  de  T.  Q.  Flaminius  lui  fut 
fatale.   Celui-ci    le    battit    en    197    à   Cynoscéphale  en 


Thessalie  et  lui  imposa  uue  paix  humiliante.  Philippe 
termina  sa  vie  en  vains  efforts  pour  regagner  une  partie 
de  sa  puissance  perdue.  Le  premier  livre  des  Maclia- 
bées,  vm,  5,  rappelle  la  défaite  de  Philippe  V  et  celle 
de  Persée  comme  une  preuve  de  la  grande  force  des 
Romains. 

3.  PHILIPPE,  <  Phrygien  d'origine,  »  et  par  caractère 
plus  cruel  qu'Anliochus  IV  Épiphane  lui-même  qui 
l'avait  nommé  gouverneur  de  Jérusalem,  170  avant  J.-C. 
II  Mach.,  v,  22.  Il  fit  brûler  dans  les  cavernes  des  en- 
virons de  Jérusalem  les  Juifs  qui  s'y  étaient  réfugiés 
pour  célébrer  le  sabbat  et  qui  ne  se  défendirent  point 
pour  respecter  le  repos  de  ce  jour.  II  Mach.,  vi,  11. 
Plus  tard,  effrayé  de  la  résistance  et  des  progrès  de 
Judas  Machabée  qui  avait  battu  Apollonius  et  Séron, 
généraux  d'Antiochus,  Philippe  demanda  des  secours 
contre  lui  à  Ptolémée,  gouverneur  syrien  de  la  Cœlé- 
syrie  et  de  la  Phénicie,  qui  lui  envoya  Nicanor,  fils  de 
Patrocle  et  Gorgias.  Voir  Nicanor,  t.  IV,  col.  1613,  et 
Gorgias,  t.  m,  col.  277.  II  Mach.,  vm,  8-9. 

Philippe  était  frère  de  lait,  o-ivrpoçoç,  collactaneus, 
d'Antiochus  IV  Épiphane.  II  Mach.,  ix,  29.  Le  pre- 
mier livre  des  Machabées,  vi,  14,  l'appelle  «  un  des 
amis  »  du  roi.  Sur  ce  titre,  voir  Ami  2,  7",  t.  i,  col.  480. 
Quand  Antiochus  IV  entreprit  sa  campagne  en  Perse, 
il  voulut  emmener  son  familier  avec  lui.  Là,  sentant  sa 
fin  approcher,  il  le  chargea  de  la  régence  et  lui  remit 
son  diadème,  ses  insignes  royaux  et  son  anneau,  afin 
qu'il  les  transmit  à  son  fils,  Antiochus,  encore  mineur 
(163  avant  J.-C).  I  Mach.,  vi,  li-15.  Mais  à  la  nouvelle 
de  la  mort  d'Épiphane,  Lysias  qui  était  en  Syrie  s'em- 
para du  pouvoir  au  nom  du  jeune  Antiochus  qui  n'était 
qu'un  enfant  et  dont  il  était  le  tuteur  (voir  Antiochus  V, 
t.  i,  col.  700)  et  lui  donna  le  nom  d'Eupator.  I  Mach.,  vi, 
17.  Philippe,  qui  ne  se  sentait  pas  le  plus  fort,  n'osa 
pas  revenir  aussitôt  à  Antioche.  Il  se  rendit  en  Egypte, 
emportant  avec  lui  le  corps  d'Antiochus  IV,  auprès  de 
Ptolémée  Philométor,  afin  de  lui  demander  appui  contre 
Lysias.  II  Mach.,  ix,  29.  Il  réussit  sans  doute  dans  ses 
démarches  et  pendant  que  Lysias  faisait  la  guerre  en 
Judée  contre  Judas  Machabée,  Philippe,  avec  l'aide  des 
troupes  syriennes  qui  étaient  revenues  de  Perse  et  de 
Médie,  occupa  Antioche.  I  Mach.,  VI,  56;  II  Mach.,  xm, 
23.  Lysias,  informé  de  cet  événement,  s'empressa  de 
faire  la  paix  avec  les  Juifs  (voir  Lysias  1,  t.  iv,  col.  458)  et 
de  retourner  avec  son  armée  en  Syrie';  il  reprit  Antioche, 

I  Mach.,  vi,  63,  et  d'après  Josèphe,  Ant.  jud.,  XII,  ix, 
7.  s'empara  de  la  personne  de  Philippe  et  le  fit  mettre 
à  mort.  —  Un  certain  nombre  d'historiens  distinguent 
le  frère  de  lait  d'Antiochus  Épiphane  de  Philippe  le 
Phrygien,  mais  plus  communément  on  admet  que  c'est 
un  seul  et  même  personnage.  Quelques  critiques  veu-  • 
lent  révoquer  en  doute  le  voyage  de  Philippe  en  Egypte, 

II  Mach.,  ix,  29,  parce  qu'il  n'est  pas  mentionné 
I  Mach.,  vi,  56.  La  prétention  de  I  Mach.,  vi,  56,  ne 
prouve  nullement  que  le  voyage  n'ait  pas  eu  lieu.  —  Tite 
Live,  xxxvn,  41,  mentionne  un  Philippe  qui  avait  le 
commandement  des  éléphants  dans  l'armée  syrienne  à 
la  bataille  de  Magnésie  (190  avant  J.-C),  mais  rien 
n'autorise  à  l'identifier  avec  celui  dont  parlent  les  livres 
des  Machabées. 

4.  PHILIPPE  Ie'  HÉRODE,  premier  mari  d'Hérodiade 
et  père  de  Salomé.  Les  Évangélistes  ne  le  désignent  que 
sous  le  nom  de  Philippe.  Mat  th.,  xiv,;'.;  Marc,  VI,  17; 
Luc,  m,  19.  Voir  Hérode  4.  t.  m,  col.  619. 

5..  PHILIPPE  II  HÉRODE,  tétrarque  de  Trachonitide 
et  dlltirée.  Luc,  ni,  1.  Il  rebâtit  l'ancienne  Panéas, 
qui  prit  de  lui  son  nom  de  Césarée  de  Philippe. 
Matth.,  xvi,  13;  Marc,  vm,  27.  Voir  Ulrode  5,  t.  m, 
col.  649-650. 


267 


PHILIPPE    (SAINT)    APÔTRE 


268 


6.  PHILIPPE  (SAINT),  un  des  douze  Apôtres  {fig.6i). 

I.  Saint  Philippe  d'après  les  Évangiles.  —  Il  était 
originaire  de  Bethsaïde  en  Galilée,  comme  Simon  Pierre 
et  André, 'Joa.,  i.  li;  mi,  21.  Cette  communauté  d'ori- 
gine explique  comment  il  était  particulièrement  lié 
avec  saint  André.  Joa.,  xii,  22;  vi,  5-8.  C'était  aussi  un 
ami  de  Nathanaël  ou  Barthélémy.  Joa.,  i,  4546.  Saint 
Philippe  est  nommé  le  cinquième  dans  toutes  les  listes 
des  Apôtres  et  les  trois  Évangélistes  nomment  immé- 
diatement après  lui  son  ami  Barthélémy.  Matth.,  x,  3; 
Marc,  m,  18;  Luc,  VI,  14;  cf.  Act.,  i,  13.  Cet  apôtre 
est  donc  placé  immédiatement  après  les  deux  frères 
Pierre  et  André  et  les  deux  fils  de  Zébédée,  et  ce  rang  lui 
revient  historiquement,  parce  qu'il  fut  un  des  premiers 
disciples  du  Sauveur.  Lorsque  saint  Jean-Baptiste  eut 


C4. 


L'apôtre  saint  Philippe.  Type  traditionnel. 
D'après  Albert  Durer. 


révélé  à  André,  qui  était  son  disciple,  ce  qu'était  Jésus, 
André  s'empressa  de  communiquer  la  grande  nouvelle 
à  son  frère  Simon  cl  il  l'annonça  aussi  sans  doute  à 
son  ami  Philippe  qui  ('lait  probablement  comme  lui 
disciple  de  Jean-Baptiste.  Ces  faits  se  passaient  à  Bétha- 
nie  au  delà  du  Jourdain.  Joa.,  i,  28.  Le  lendemain  Jésus, 
ayant  rencontré  Philippe,  lui  dit  :     Suis-moi.  ■>  Joa., i, 

13  el  l'heureux  élu  se  mil  aussitôt  à  sa  suite,  ayant  été 
appelé  directement  le  premier  de  tous  les  Apôtres.  Il  ne 
tarda  pas  à  faire  part  de  sun  bonheur  à  son  ami  Na- 
thanaël et  l'amena  à  son  nouveau  Maître.  Joa.,  1,  £5,48. 
i  i  lanière  dont  Philippe  parle  a  Nathanaël  du  «  pro- 
phète  qu'avait  prédit  Moïse  el  qu'il  venait  de  rencon- 
trer semble  indiquer  m1"'  la  enue  du  Messie  avait  été 
déjà  auparavant  un  sujet  d'entretien  entre  les  deux 
amis.  Comme  Nathanaël  était  de  Cana,  Joa.,  xxi,  2,  on 
esl  porté  à  croire  que  c'est  à  son  arrivée  dans  cette 
ville  que  Philippe  rencontra  Nathanaël.  Cf.  Joa..  n.  1. 
ci  ne  put  croire  d'abord  que  quelque  chose  de 
bon  pûl  venir  de  Nazareth  :  i  Viens  et  vois,  >  lui  dit 
Philippe,  et  son  ami  fui  bientôt  convaincu.  Joa.,  i,  46- 
19.  Philippe  avait  d'ailleurs  mal  renseigné  son  ami, 
n'étant  pas  encore  bien  instruit  lui-même,  en  lui  par- 
lant de  Jésus  comme  fils  de  Joseph  et  originaire  de 
Nazareth.  Joa.,  i,  i"> 
Les  trois  synoptiques  se  contentent  de  nommer  Phi- 


lippe dans  leur  catalogue  des  Apôtres,  mais  saint  Jean, 
né  comme  lui  sur  les  bords  du  lac  de  Tibériade,  nous 
fournit  sur  sa  personne,  outre  le  récit  de  sa  vocation, 
quelques  renseignements  particuliers  propres  à  inté- 
resser ses  lecteurs'd'Asie  Mineure.  Philippe  assista  aux 
noces  de  Cana,  car  il  doit  être  compris  parmi  «  les 
disciples  »  qui  y  avaient  été  invités  avec  Jésus.  Joa.,  II, 
2.  Clément  d'Alexandrie,  dans  ses  Stromates,  m,  i. 
t.  vin,  col.  1129,11e  nomme  [comme  étant  le  disciple  à 
qui  Jésus  aurait  dit  :  «  Laisse  les  morts  ensevelir  leurs 
morts  »,  Matth.,  VIII,  22,  quand  ce  disciple,  que  l'Kvan- 
géliste  ne  désigne  pas  par  son  nom,  lui  aurait  demandé 
d'aller  ensevelir  son  père.  Le  Maître  aurait  voulu  le 
former  ainsi  au  détachement  nécessaire  à  un  apôtre, 
mais  nous  ignorons  sur  quel  fondement  Clément 
d'Alexandrie  appuie  son  identification. 

Ce  qui  est  certain,  c'est  que  Notre-Seigneur  voulut 
lui  inspirer  pleine  confiance  en  lui.  lors  du  miracle  de  la 
multiplication  des  pains.  A  la  vue  de  la  foule  qui  l'en- 
tourait, Jésus  lui  demanda  :  «  Ou  achèterons-nous  du 
pain,  pour  que  ce  monde  puisse  mangei  '.'  lesus,  ajoute 
l'Évangéliste,  «  disait  cela  pour  l'éprouver,  car  il  savait 
ce  qu'il  allait  faire.  »  Philippe  s'attendait  si  peu  à  un  mi- 
racle, qu'il  lui  répondit  :  «  Deux  cents  deniers  de  pain 
ne  suffiraient  pas  pour  que  chacun  en  eut  un  mor- 
ceau. »  Joa.,  vi,  5-7.  Saint  Jean  Chrysostome  conclut 
de  là  que  Philippe  avait  particulièrement  besoin  des 
instructions  du  Sauveur.  Hom.  xlii,  1,  in  Joa.,  t.  i.ix. 
col.  239.  Tentât  (idem  Philippi,  consilium  peter, 
nime  indigens,  dit  J.  Corluy,  Comment,  in  Ev.  Joan- 
nis,  2e  édit.,  dand,  1880,  p.  135.  Des  commentateurs 
modernes  ont  supposé,  en  se  plaçant  à  un  point  de  vue 
plus  positif,  que  si  Philippe  avait  été  interrogé  directe- 
ment, c'est  parce  qu'il  était  chargé  des  provisions  et 
que  s'il  avait  parlé  de  deux  cents  deniers,  c'est  parce 
que  c'était  la  somme  qui  était  alors  dans  la  possession 
des  Apôtres.  Cl.  Fillion,  Évangile  selon  saint  Jean, 
1887,  p.  IIS. 

Saint  Jean  nous  a  conservé  dans  son   Évangile  deux 
autres  épisodes  on  l'apôtre  Philippe  joua  un  rôle.  Parmi 

les  pèlerins  qui  s'étaienl  rendus  à  Jérusalem  à  l'occa- 
sion ib;  la  fête  de  Pâques,  il  y  avait  des  prosélytes  grecs 
qui  désiraient  voir  Jésus.  Attirés  peut-être  par  le  nom 
grec  de  Philippe  ou  bien  le  connaissant  auparavant,  ils 
s'adressèrent  à  lui  afin  qu'il  les  présentât  au  Maître. 
Philippe  semble  n'avoir  pas  osé  le  faire  lui  seul.  Il 
appela  son  ami  André  qui  était  moins  timide  et  les 
deux  ensemble  prévinrent  Notre-Seigneur  qui  adressa 
à  la  foule  un  discours,  confirmé  par  une  voix  du  ciel. 
Joa.,  xn,  20-30.  —  Une  autre  fois,  et  c'est  la  quatrième 
où  saint  Jean  parle  nommément  de  saint  Philippe,  dans 
le  discours  après  la  Cène,  Jésus  dit  à  ses  Apôtres 
qu'ils  avaient  vu  son  Père.  Philippe  ne  comprit  pas  ce 
que  le  Maille  entendait  par  là,  qu'ils  avaient  vu  le  l'ère 
dans  le  Fils  qui  est  un  avec  lui,  et  alla,  haut  à  ces 
paroles  un  sens  matériel,  il  répondit  à  Jésus  dans  I  es 
poir  de  voir  quelque  théophanie  connue  les  patriarches. 
Seigneur,  montrez-nous  le  Père  et  cela  nous  suffit.  » 

«   Il   \   a  longtemps  que  je  suis  avec  vous,  et  tu  ne  m'as 

pa-  connu?  répliqua  le  Sauveur  (d'après  le  texte  grec). 
«  Philippe,  celui  qui  m'a  vu  a  vu  aussi  le  Père.  Comment 
peux-tu  dire  :  Montrez-nous  le  Père.  Necrois-tu  pas  que 
je  suis  dans  le  Père  el  que  le  Père  est  en  moi'.'  » 
.Lia..  \iv,  7-10.  La  demande  faite  par  Philippe  avec  la 
simplicité'  de  son  caractère  fournit  ainsi  à  Jésus-Chrisl 
l'occasion  de  donner  à  ses  Apôtres  sur  son  union  avec 
son  Père  céleste  une  leçon  profonde  qui  resta  profon- 
dément gravée  dans  la  mémoire  de  saint  Jean. 

Philippe  étant  natif  de  Bethsaïde  et,  lié'  comme   il 
L'était  avec  les  fils  île  Zébedée  et  Nathanaël,  dut  être  l'un 

I      ,1,  u      di-i  ipl  es,   tua.,  xxi.  2,  à  qui  Jésus 

ressuscité-  apparut  sur  les  bonis  de  la  mer  de  Galilée; 
ce  n'est  toutefois  qu'une  hypothèse.  —  Cet  apôtre  n'est 


269 


FHILIPPE    (SAINT)    L'ÉVANGÉLISTE 


270 


nommé  qu'une  autre  fois  dans  le  Nouveau  Testament, 
avec  les  dix  autres  qui  étaient  rassemblés  dans  le  Cé- 
nacle, après  l'Ascension,  Act.,  i,  13,  et  il  reçut  avec  eux  le 
Saint-Esprit  le  jour  de  la  Pentecôte.  Act.,  ir,  1-3. 

II.  Saint  Philippe  d'après  la  tradition.  —  A  partir 
de  ce  moment  nous  ne  savons  plus  rien  sur  cet  apôtre 
que  par  les  témoignages  de  la  tradition  qui  ne  sont 
pas  en  tout  concordants.  Les  plus  anciens  écrivains 
ecclésiastiques  ne  l'ont  pas  toujours  distingué  exacte- 
ment de  l'Evangéliste  Philippe,  un  des  sept  diacres. 
Voir  Philippe  7.  Eusèbe  lui-même,  H.  E.,  m,  31, 
t.  xxi.  col., '281,  les  confond  ensemble. 

Ce  qui  se  dégage  avec  le  plus  de  certitude  des  tradi- 
tions anciennes,  c'est  que  saint  Philippe  évangélisa  la 
Phrygie.  D'après  le  Bréviaire  romain  et  plusieurs  marty- 
rologes, il  avait  évangélisé  d'abord  la  Scythie  et  la  Lydie. 
Tous  les  monuments  sont  d'accord  pour  lui  faire  passer 
les  dernières  années  de  sa  vie  à  Hiérapolis  en  Phrygie, 
Polycrate,  évêque  d'Éphèse  dans  la  dernière  partie  du 
IIe  siècle,  qui  avait  tous  les  moyens  d'être  bien  informé, 
dit  dans  sa  lettre  au  pape  Victor  dont  un  fragment 
nous  a  été  conservé  par  Eusèbe,  H.  E.,  m,  31,  t.  xx. 
col.  280  :  «  ...Philippe,  qui  fut'un  des  douze  Apôtres,  et 
mourut  à  Hiérapolis,  ainsi  que  deux  de  ses  tilles  qui 
avaipnt  vieilli  dans  la  virginité.  Son  autre  fille...  fut 
enterrée  à  r.phése.  »  Cf.  Théodoret  de  Cyr,  In  Ps.  CXVI, 
1,  t.  lxxx,  col.  1808:  Nicéphore,  H.  E.,  il,  44,  t.  cxi.v, 
col.  880;  dans  les  œuvres  de  S.  Jérôme,  De  vilis 
apost.,  t.  xxiii,  col.  721.  D'après  tous  ces  auteurs  à 
rencontre  de  Caîus,  voir  Philippe  6,  l'apôtre  saint  Phi- 
lippe fut  marié  et  eut  trois  filles,  dont  deux  restèrent 
vierges  et  dont  la  troisième  mourut  à  Éphèse  où  elle 
était  probablement  mariée.  Papias,  qui  fut  évêque 
d'Hiérapolis,  connut  les  filles  de  l'apôtre  et  apprit  d'elles, 
au  rapport  d'Eueébe,  qu'un  mort  avait  été  ressuscité  de 
son  temps,  par  leur  père  sans  doute.  Eusèbe,  H.  E.,  m, 
39,  t.  xx,  col.  297;  Nicéphore,  H.  E.,  m,  2,  t.  cxlv, 
col.  937.  Cf.  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  m, 6, t.  toi, 
col.  1156.  L'antique  nécropole  d'Hiérapolis,  dont  les 
nombreux  tombeaux  ont  été  conservés  par  les  eaux  pé- 
trifiantes de  la  ville,  au  milieu  desquelles  ils  sont  in- 
crustés, contient  une  inscription  où  il  est  fait  allusion  à 
une  église  dédiée  à  saint  Philippe,  en  souvenir  de  son 
apostolat:  roO  £vS6!io*j  'Aitoor6Xou  y.x:  BsoXôyou  $iXcte7tou. 
W.  M.  Ramsay,  TkeCities  und  Bishoprics  of  Phrygia, 
Londres.  1895-1897.  p.  552.  Les  restes  de  l'Église  qu'on 
voit  encore  à  Hiérapolis,  au  nord  à  l'entrée  de  la  grande 
nécropole,  près  des  anciens  tombeaux,  sont  peut-être 
ceux  de  l'Eglise  qui  avait  été  consacrée  à  la  mémoire 
du  saint  apôtre.  Voir  E.  Le  Camus,  Voyage  aux  sept 
Églises  de  l'Apocalypse,  in-t",  Paris,  1896,  p.  189-190. 
Cf.,  dans  le  Dictionnaire,  \e  plan  d'Hiérapolis,  fig.  147, 
t.  m.  col.  705. 

La  mort  de  saint  Philippe  est  racontée  de  façons  très 
diverses.  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  iv,  9,  t.  vm, 
col.  1281,  dit  faussement  que  les  apôtres  Matthieu, 
Philippe  et  Thomas  moururent  de  mort  naturelle.  Le 
Pseudo-Hippolyte,  De  duodecini  Apostolis,  t.  x.  col.  952, 
et  la  plupart  des  documents  anciens  disent  que 
saint  Philippe  fut  martyrisé  sous  Domitien  à  Hiérapolis, 
et  qu'il  fut  crucifié  la  tète  en  bas.  Il  devait  avoir  envi- 
ron 87  ans.  Voir  Acla  sanctofum,  maii  t.  i,  p.  10. 
Sa  sœur  Marianne  et  ses  deux  filles  qui  étaient  avec  lui 
à  Hiérapolis  furent  enterrées  plus  tard  à  côté  de  lui. 
d'après  les  Ménologes  grecs.  Dans  un  sermon  attribué 
à  saint  Jean  Chrysostome,  Hom.  de  XII  Apost.,  t.  lix, 
col.  495,  on  lit  que  «  Philippe  conserve  Hiérapolis  par 
ses  miracles  ».  Les  reliques  du  saint  ont  été  depuis 
iransportées  à  Rome  dans  l'église  des  Saints-Apôtres, 
où  elles  sont  placées  avec  celles  de  saint  Jacques  le 
Mineur,  fils  d'Alphée,  sous  le  grand  autel.  L'Église 
latine  célèbre  la  fête  de  ces  deux  Apôtres  le  1"  mai.  — 
Il  existe  des  Actes  apocryphes  de  saint  Philippe  qui  ne 


contiennent  guère  que  des  fables.  Voir  Actes  apocryphes 
des  apôtres,  vu,  Acta  S.  Pkilvppi,  t.  i,  p.  164.  Sur  un 
prétendu  Evangile  de  saint  Philippe,  voir  ÉVAWGIEES 
apocryphes,  ii,  50,  t.  m,  col.  2117. 

F.  Vigouroix. 

".PHILIPPE  (SAINT)  L'ÉVANGÉLISTE  (grec  :  >}>•}■-- 
nos  o  E0aYve).t<rri)ç),  un  des  sept  premiers  diacres.  Il 
est  nommé  pour  la  première  fois  dans  les  Actes,  vi,  5, 
le  second  des  sept  diacres  que  les  Apôtres  chargèrent 
de  s'occuper  des  veuves  des  juifs  hellénistes  convertis  à 
la  foi.  Il  est  distingué  de  l'apôtre  du  même  nom,  dans 
le  livre  des  Actes,  xxi,  8,  par  le  titre  d'évangéliste. 
Voir  Évangéliste,  t.  ii,  col.  2057.  Ce  fut,  après 
saint  Etienne,  celui  des  sept  diacres  qui  joua  le  rôle  le 
plus  important.  Il  annonça  le  premier  l'Évangile  aux 
Samaritains  et  baptisa  le  premier  Gentil. 

La  persécution  qui  suivit  la  lapidation  de  saint  Etienne 
l'obligea  à  quitter  Jérusalem.  Act.,  vu,  1.  Il  se  rendit  à 
la  ville  de  Samarie,  y  prêcha  Jésus-Christ  et  y  opéra 
de  nombreux  miracles.  Il  fit  de  nombreuses  conver- 
sions et  conféra  le  baptême  à  beaucoup  de  Samaritains, 
hommes  et  femmes,  et  aussi  à  Simon  le  Magicien.  Les 
Apôtres,  ayant  appris  à  Jérusalem  qne  Samarie  avait 
reçu  la  parole  de  Dieu,  Pierre  et  Jean  s'empressèrent 
d'aller  administrer  aux  nouveaux  fidèles  le  sacrement 
de  confirmation.  Simon  le  Magicien  toutefois  se  montra 
indigne  de  la  grâce  en  offrant  à  saint  Pierre  d'acheter 
pour  de  i'argent  le  pouvoir  de  conférer  le  Saint-Esprit. 
Act.,  vin.  5-24. 

21  Un  ange  du  Seigneur  commanda  alors  au  diacre 
Philippe  de  se  diriger  vers  le  midi  de  la  Judée,  sur  la 
route  de  Jérusalem  à  Gaza.  Là,  il  rencontra  l'eunuque 
de  Candace,  reine  d'Ethiopie.  Voir  Candace,  t.  n, 
col.  131.  Tous  les  détails  de  la  rencontre  sont  donnés 
par  les  Actes,  vm,  26-29.  Saint  Luc  avait  pu  les  appren- 
dre delà  bouche  même  du  diacre  évangéliste,  pendant 
le  séjour  qu'il  fit  plus  tard  dans  sa  maison  avec 
saint  Paul  à  Césarée,  et  il  les  dépeint  au  vif.  L'Éthio- 
pien, assis  sur  son  char,  lisait  le  chapitre  Lin  d'Isaïe, 
mais  il  ne  le  comprenait  pas.  Philippe  l'accoste,  monte 
avec  lui  sur  le  char,  lui  explique  le  sens  messianique 
de  la  prophétie,  l'évangélise,  et  arrivé  auprès  d'une 
fontaine,  sur  la  demande  du  néophyte,  lui  confère  le 
baptême.  Une  tradition  identifie  cette  fontaine  avec 
celle  A'él-Haniéh,  entre  Ain  Karim  et  Bethléhem;  et  on 
l'appelle  la  Fontaine  de  saint  Philippe.  Liévin,  Guide 
Indicateur  de  la  Terre  Sainte,  4e  édit.,  1897,  t.  n, 
p.  29-30.  Cf.  V.  Guérin,  Judée,  t.  i,  p.  109.  o  La  tradi- 
tion qui  rattache  à  l'Aïn-el-Haniéh  les  souvenirs  (de 
saint  Philippe)  est,  je  l'avoue,  dit  V.  Guérin,  Judée. 
t.  m,  p.  293-29i,  depuis  longtemps  consacrée,  en  quel- 
que sorte,  par  les  témoignages  presque  unanimes  de 
tous  les  pèlerins  qui  l'ont  visitée...  Mais  cette  tradi- 
tion, qui  ne  parait  pas  remonter  à  une  époque  anté- 
rieure à  celle  des  Croisades,  doit  évidemment  céder  le 
pas,  pour  tout  esprit  impartial,  à  la  tradition  primitive, 
telle  qu'elle  est  consignée  dans  le  Pèlerin  de  Bordeaux, 
dans  Eusèbe  et  dans  saint  Jérôme  (qui  placent  la  fon- 
taine de  saint  Philippe  à  VAhi  ed-Dirouéh)  au-dessous 
de  Bethsur,  Onomast.,  édit.,  Larsow  et  Parthey,  1862, 
p.  104,  105,  (et  qui  sont)...  les  plus  sérieuses  autorités 
que  l'on  puisse  consulter  en  pareille  matière...  En  outre, 
les  circonstances  elles-mêmes  du  récit  des  Actes  des 
Apôtres  relativement  à  ce  baptême  semblent  s'opposer 
matériellement  à  l'hypothèse  qui  place  à  l'Ain  el-Ha- 
niéh  le  lieu  de  cet  événement.  Le  texte  sacré  nous  dit 
que  l'eunuque  de  la  reine  d'Ethiopie  était  sur  un  char... 
Or  la  route  qui  passe  près  de  l'Ain  el-  Haniéh  ne  pa- 
rait pas  avoir  été  jamais  carrossable.  Au  contraire, 
la  route  à  côté  de  laquelle  coule  l'Ain  ed-Dirrouéh 
conserve  encore  çà  et  là,  les  traces  d'un  ancien  passage.  » 
Saint  Jérôme,  dans  l'Épitaphe  de  sainte  Paule,  t.  xxii, 
col.  886,   dit  qu'elle  visita   la  fontaine  sur  la  <i  vieille 


271 


PHILIPPE    (SAINT)    LÉVANGÉLISTE   —   PHILIPPES 


272 


roule  »  qui  mène  à  Gaza,  o  L'épithète  de  vêtus,  vieille, 
donnée  par  saint  Jérôme  à  la  roule  conduisant  à  Gaza 
par  Hébron  explique  très  bien,  dit  V.  Guérin,  p.  293,1e 
sens  que  l'on  doit  donner  à  celle  de  déserta,  déserte, 
employée  dans  les  Actes  pour  désigner  la  même  voie.  Il 
ne  faut  pas  prendre  ce  dernier  mot  à  la  lettre  et  croire 
<[iie  cette  route  était  réellement  déserte,  puisqu'elle 
traversait  des  villes  et  des  villages;  elle  était  seulement 
abandonnée  alors  par  la  plupart  de  ceux  qui  se  ren- 
daient à  Gaza,  lesquels  en  prenaient  une  autre  plus 
occidentale,  comme  le  font  encore  les  caravanes 
d'aujourd'hui.  » 

La  fontaine  d'Ain  ed-Dirrouéb  est  sur  le  bord  de  la 
route  actuelle  de  Jérusalem  à  Hébron,  au  bas  de  la 
colline  sur  laquelle  sont  les  restes  de  l'antique  Bethsur. 
L'eau  de  la  fontaine  s'écoule  à  un  mètre  environ  au- 
dessus  de  la  chaussée,  à  l'est,  par  un  bloc  de  marine 
rouge  cannelé,  dans  un  réservoir  fait  en  partie  de  sar- 
cophages. Le  filet  d'eau  est  assez  abondant.  Les  femmes 
des  environs  vont  y  puiser  de  l'eau  dans  des  outres  et 
laver  leur  linge  dans  le  réservoir.  Les  ruines  d'une 
vieille  église  bâtie  au-dessus  de  la  source  conservent  le 
souvenir  du  baptême  de  l'eunuque  éthiopien.  L'eau 
est  absorbée  sur  place  dans  la  terre  comme  l'observe 
saint  Jérôme.  Onomast.,  p.  105  (Notes  prises  sur  les  lieux 
en  mars  1888).  Après  que  l'eunuque  eut  été  baptisé,  le 
nouveau  converti  et  l'apotre  se  séparèrent.  Les  fonctions 
que  l'Éthiopien  remplissait  à  la  cour  de  la  reine  Can- 
dace  font  croire  qu'il  était  réellement  eunuque.  Le 
•  des  Actes  ne  permet  pas  de  supposer  que  c'était 
un  juif  né  en  Ethiopie;  il  devait  être  un  prosélyte  de 
la  porte,  Is.,  li,  4-5,  son  état  l'empêchant  d'être  un 
prosélyte  de  justice.  Deut.,  xxni.  1.  Ce  fut.  comme  le 
remarque  Eusèbe,  H.  E.,  u,  1.  t.  xx,  col.  137,  irpàrroç 
è;  I8v(5v,  o  le  premier  des  gentils  converti  »  et  à  ce 
titre  l'acte  de  saint  Philippe  est  particulièrement  mé- 
morable. 11  remplit  bien  en  cette  circonstance  ses 
fonctions  d'évangéliste.  En  conférant  le  baptême  à  un 
descendant  de  Cham,  à  un  homme  de  cette  race  mé- 
prisée, à  un  eunuque  et  à  un  Ethiopien,  cf.  Amos,  ix, 
7,  il  montrait  que  Jésus-Christ  était  le  Sauveur  de  tous 
1rs  hommes  et  qu'il  n'excluait  personne  de  son  royaume. 
Cet  événement  accompli  sans  témoins,  el  en  faveur  d'un 
prosélyte  qui  quitta  aussitôt  la  Palestine,  eut  moins 
d'éclal  que  plus  lard  la  conversion  du  centurion  Cor- 
neille, mais  elle  en  était  comme  le  prélude.  De  retour 
en  Ethiopie,  le  néophyte,  d'après  la  tradition,  y  prêcha 
l'Évangile  et  convertit  la  reine  elle-même.  Eusèbe, 
7/.  E.,  H,  2,  t.  xx,  col.  137;  s.  Jérôme,  In.  Is..  lui, 
t.  xxiv, col. 509;  Nicéphore, B. E.,u, 6, t. cxlv, col.  709. 
Quanl  à  Philippe,  <  l'Esprit  du  Seigneur  le  ravit  à  la  vue 
de  l'eunuque,  »  Act.,  vin,  39,  et  il  prêcha  l'Évangile  à 
Azot,  dans  les  villes  philistines  el  sur  toute  sa  route 
jusqu'à  Césarée,  \.  40,  où  habitait  probablement  sa 
famille. 

:;  s, nui  Philippe  reçoit  saint  l'uni  à  césarée. — 
Nous  ne  retrouvons  le  diacre  Philippe  que  plusieurs 
années  plus  tard,  el  c'esl  la  dernière  fois  qu'il  est  nom- 
mé dans  les  Acies.  wi,  8.  Saint  Paul  venant  de  l'iolé- 
maïde  el  allant  à  Jérusalem,  à  la  lin  de  sa  troisième 
mission,  reçut  chez  lui  l'hospitalité  comme  chez  une 
ancienne  connaissance.  L'apôtre  des  gentils  devait 
s'entendre  pleinement  avec  celui  qui  avail  baptisé  le 
premier  gentil.  Il  demeura  plusieurs  jours  à  Césarée 
ivec  ses  compagnons  dans  la  maison  du  diacre  Philippe 

el  c'esl  là  que  le  prophète  \ Mois  annonça  à  saint  Paul 

i  prochaine  captivité.  Sainl  Eue  nous  apprend,  Act.,  \\i. 
9,  que  leur  hôte  avait  quatre   filles   i    qui   prophéti- 

aienl  .  el  qui  instruisaient  sans  doute  ceux  qui  vou- 
laient se  convertir  au  christianisme,  aidant  leur  père 

dans  soi ire  d'évangéliste.  C'esl  la  mention  de  ces 

quatre  lilles  qui  a  : né  la  confusion  des  traditions 

relatives  à   Philippe  l'apôtre  et  à   Philippe  l'évangé- 


liste.  Les  témoignages  anciens  qui  attribuent  trois  lilles 
à  l'apotre  et  le  font  évëque  d'Hiérapolis,  ont  été  rap- 
portés plus  haut.  Voir  Philippe  6,  col.  269.  Un  passage 
de  Caïus,  cité  par  Eusèbe.  //.  E..  ni,  31.  t.  xx, 
col.  281,  attribue  au  diacre  Philippe  ce  qui  regarde  en 
réalité  l'Apôtre  du  même  nom.  Cet  écrivain  ecclésias- 
tique était  contemporain  du  pape  Zéphyrin  (202-219). 
Eusèbe,  H.  E.,  u,  25,  col.  208.  D'après  l'histoire  lilté- 
rairede  la  France,  t.  i,  I,  p.  356,  il  était  originaire  de 
la  Gaule.  Il  eut  à  Rome  une  discussion  publique  avec 
le  montaniste  Proclus.  qu'il  publia  plus  tard  sous  le 
titre  de  AiâXoyo;  Ttpb;  lUoy./.ov;  c'est  dans  ce  dialogue 
que  nous  lisons  :  j  Après  cela  les  quatre  filles  de  Phi- 
lippe furent  prophétesses  à  Hiérapolis  en  Asie,  où  l'on 
voit  leur  tombeau  et  celui  de  leur  père  Philippe.  »  Ce 
nombre  de  quatre  et  le  titre  de  prophétesses  montrent 
qu'il  faut  entendre  par  là  Philippe  l'Évangéliste. 
Act.,  xxi,  S.  Caïus  est  la  seule  autorité  ancienne  qu'on 
puisse  citer  en  faveur  de  cette  opinion,  qui  compte  en- 
core aujourd'hui  des  défenseurs.  Cependant  la  plupart 
des  critiques  reconnaissent  que  le  témoignage  de  Caïus 
n'a  pas  la  valeur  de  celui  de  Polycrate  qui  écrivait  avant 
lui  et  vivait  non  loin  d'Hiérapolis.  Voir  J.-B.  Lightfoot, 
St.  Paul's  Epistles  to  the  Colossiaus  and  to  Pliilctnon, 
Londres,  1875,  p.  45. 

Un  Ménologe  grec,  dans  Lipsius,  Die  apokryphen 
Apostelgeschichlen,  1889-1890,  t.  m,  p.  3,  appelle  les 
quatre  lilles  de  saint  Philippe  Hermione,  Cliaritine, 
haïs  et  Eutychiane.  D'après  les  traditions  les  plus  an- 
ciennes, leur  père  devint  évéque  de  Tralles  et  il  y  mou- 
rut de  mort  naturelle.  Acta  Sam  .  junii  I.  i.  p.  609. 
Des  martyrologes  plus  récents  le  font  mourir  à  Ces 
Du  temps  de  saint  Jérôme,  on  montrait  encore  dans 
cette  dernière  ville,  la  maison  où  le  diacre  Philippe 
avait  reçu  suint  Paul  et  les  chambres  de  ses  quatre  lilles. 
Le  saint  docteur  raconte  que  sainte  Paule  >  lit  un 
pèlerinage.  Epist.  cvm,  8.  t.  XXII,  col.  82.  L'J 
célèbre  la  fête  de  l'évangéliste  saint  Philippe  le  6  juin. 

F.    VlGOUBOUX. 

PHILIPPES    [grec  :  ftXncnoi;   Vulgate,   Philippi), 

ville  très  ancienne  et  citadelle  très  forte  de  la  Macé- 
doine (lig.  65).  Elle  était  située  entre  les  monts  llérnus 


65.  —  Monnaie  de  Phil  | 
[•ICLAUDIUS  CAESAR.  ait..  PM.  TRP    imP.  Tète  de  l'em- 
pereur Claude,  à  gauche.  —  $.  COL  AUG IUL  PHILIP.  Entre 
deux  Clppes,  statues  de  Jules  e, 
un  piédestal  sur  lequel  on  lit  Dl\  US  AUG, 

et  Pangée,  à  l'est  du  fleuve  Strymon,  près  de  la  fron- 
tière de  Thrace  el  de  la  rivière  Gangès  ou  Gangitès,  sur 
une  colline  élew'v  :lig.  liti).  Cf.  Appien,  De  bellis 
iv,  106.  Elle  dominait  une  vaste  plaine,  d'une  grande 
fertilité,  mais  dont  quelques  parlies-sonl  marécageuses. 
Elle  n'était  séparée  de  la  mer  Egée  que  par  environ 
trois  heures  de  marche,  et  avait  pour  port  la  petite 
ville  de  Néapolis  Hat. 'mon.  aujourd'hui  Cavalla 
\i  iPOLlS,  t.  iv,  col.  1542.  Ce  fui  d'abord  nue  colonie 
fondée  par  les  habitants  de  l'île  de  Thasos,  située  non 
loin  de  là.  Elle  porta  en  premier  lieu  le  nom  de 
Krénidès,  ou  o  Fontaines  »,  à  cause  des  source-  très 
abondantes  qui  l'arrosent.  En  356  avant  .1. -('..,  elle  l'ut 
conquise  par  Philippe  11  de  Macédoine,  père  d'Alexandre 


273 


FIIIL1PPKS 


-'7i 


le  Grand,  qui  l'agrandit  considérablement,  la  fortifia 
et  lui  donna  son  propre  nom.  Sa  situation  stratégique 
était  fort  importante,  car  elle  commandait  tout  à  la 
fois  les  routes  de  Grèce  et  de  Thrace.  De  plus,  on  avait 
découvert  des  gisements  très  riches  d'or  et  d'argent 
dans  la  montagne  voisine,  le  Pangée.  et  ces  deux 
motifs  réunis  avaient  excité  la  convoitise  du  roi  Phi- 
lippe. La  recherche  de  l'or  fut  la  grande  affaire  de 
toute  la  région  pendant  plusieurs  siècles,  et  la  ville 
en  obtint  un  redoublement  de  prospérité. 

Dès  l'année  I6S  avant- J.-C,  elle  tomba  sous  la  domi- 
nation de  Rome.  C'est  dans  sa  vaste  plaine  qu'en  42 
avant  notre  ère  Octave  et  Antoine,  héritiers  de  César, 


l'année  53.  Appelé  en  Macédoine  par  une  vision  surna- 
turelle, Act.,  xvi,  9.  l'apôtre  des  gentils  traversa  la  mer 
Egée,  et  vint  en  droite  ligne  à  Philippes,  avec 
Silas,  Timothée  et  saint  Luc.  Durant  un  séjour  rapide, 
il  réussit  à  fonder  une  chrétienté  vaillante  et  généreuse, 
malgré  l'opposition  des  Juifs  et  des  autorités  romaines. 
Voir  Paul  (Saint),  t.  iv,  col.  2-209.  C'était  la  première 
fois  que  Paul  annonçait  l'évangile  en  Europe.  La  per- 
sécution qui  éclata  après  son  départ  contre  les  néophytes 
ne  fit  qu'exciter  davantage  leur  zèle.  I  Thess.,  H,  2. 
Saint  Paul  fit  à  Philippes  une  seconde  visite  plus  pro- 
longée, pendant  son  troisième  voyage,  vers  l'année  58, 
après  avoir  quitté  Éphèse.  Act.,  xx.  1-2.  Cette  fois,  la 


66.  —  Vue  de  la  plaine  de  Philippes.  D'après  une  photographie  de  M.  H.  Cambournac. 


remportèrent  une  victoire  décisive  sur  Brutus  et  Cassius, 
les  derniers  défenseurs  de  la  république.  Devenu  em- 
pereur, Octave  établit  à  Philippes  une  colonie  de  ' 
rans,  et  lui  donna  le  nom  de  Colonia  Augusta  Julia 
Philippensium.  Cf.  Pline.  H.  A'.,  îv,  18;  Act.,  xvi. 
12.  Ce  fut  un  quatrième  élément  apporté  à  la  popula- 
ti  in,  qui  se  composait  déjà  de  Macédoniens,  de  Grecs 
et   il.'  \près    la   bataille    d'Actiurn.   31    avant 

J.-C.  d'autres  vétérans  furent  envoyés  à  Philippes. 
Cf.  Dion  Cassius,  LI,  iv,  6.  Il  n'est  donc  pas  étonnant 
qu'on  ait  trouvé  sur  l'emplacement  de  la  ville  de  nom- 
breuses monnaies  et  inscriptions  latines  (fig.  66).  Phi- 
lippe reçut  alors  le  ■  jus  italicurn  »,  qui  accordait  à  ses 
habitants  des  droits  et  des  privilèges  presque  égaux  à 
ceux  des  citoyens  de  Rome.  Voir  Marquardt.  Rômische 
Siaatsverwaltung,  2  in-S\  Leipzig,  t.  i,  1873,  p.  187. 
débuts  du  christianisme  à  Philippes  sont  ra- 
contés tout  au  long,  dans  les  termes  les  plus  drama- 
tiques, au  livre  des  Actes,  xvi,  12-40.  Rien  de  plus 
modeste,  et  aussi  rien  de  plus  touchant.  C'était  pen- 
dant le  second  voyage  apostolique  de  saint  Paul,  vers 


ville  n'est  pas  mentionnée  nommément  par  l'historien 
sacré;  mais  le  texte  suppose  de  la  façon  la  plus  évi- 
dente que  Paul  vit  alors  toutes  les  chrétientés  de  Ma- 
cédoine. Il  y  revint  encore  une  troisième  fois,  de 
Corinthe,  pendant  ce  même  voyage,  Act.,  xx.  3-6,  vers 
la  Pàque  de  l'année  59.  De  Rome,  à  la  fin  de  sa  pre- 
mière captivité,  il  écrivit  aux  Philippiens  une  de  ses 
lettres  les  plus  intimes,  voir  Philippiens  (Éiùtre  aux), 
qui  montre  à  quel  degré  il  leur  était  attaché  et  combien 
il  .tait  pavé  de  retour.  Cf.  Phil..  i,  1;  n,  12;  IV,  3,  10; 
II  Cor.,  xi.  8-9. 

Un  passage  des  Actes,  xvi.  12,  relatif  à  la  ville  de 
Philippes,  a  de  tout  temps  créé  quelque  difficulté  aux 
interprètes.  Le  texte  présente  en  cet  endroit  plusieurs 
variantes,  qui  prouvent  qu'on  ne  le  comprenait  pas 
très  bien  et  que  les  copistes  cherchaient  à  le  rendre 
plus  clair.  On  lit,  d'après  la  leçon  la  plus  commune, 
qui  est  vraisemblablement  la  meilleure  :  tU  $iXt'mtouç, 
■}-'.;  lorîv  grpc&TY]  -rt-  uspioo:  t/;  MaxsSovtac  "'>>::,  y.o/w- 
vfa.  Vulgate  :  Philippos,  quse  est  prima  partis  Mace- 
doniœ  civilas,  colonia.  Le  Codex  B  supprime  l'article 


275 


PHILIPPES 


276 


devant  [i£p:oo;;  le  Codex  D  substitue  xeçaXVj,  a  capitale,  i 
aux  mots  tcjhoty)  tt,;  u.Epi5o;.  Cf.  E.  Nestlé,  Xovi  Tesla- 
menti  supplementum,  in-8°,  Leipzig,  1896,  p.  60.  Ce 
passage  peut  avoir  deux  sens,  auxquels  se  ramènent 
les  principales  interprétations  des  commentateurs  : 
1»  Philippes  était  une  ville  macédonienne  de  premier 
rang;  2°  c'est  la  première  des  villes  de  Macédoine 
qu  atteignit  saint  Paul.  Le  premier  sens  serait  contraire 
à  l'histoire,  si  l'on  prétendait,  avec  quelques  auteurs, 
que  Philippes  était  alors  la  capitale  de  la  province  de 
Macédoine  :  c'est  Thessalonique  qui  possédait  ce  privi- 
lège. D'autres  interprètes  se  sont  souvenus  que,  dès  l'an- 
née 167  avant  J.-C,  la  Macédoine  avait  été  distribuée  en 
quatre  districts,  dont  les  inscriptions  mentionnent  clai- 


1895,  h.  I.,  lit  Ttpii-r,;  au  lieu  de  îtpu>Tr|  rijç  :  d  Ville  de 
la  première  région  de  la  Macédoine.  »  MM.  Westcott  et 
Hort,  The  New  Testament  in  the  original  Greek,  Cam- 
bridge. 2  in-12.  1S82,  t.  n,  p.  96-97,  transforment 
jiepCSo;  en  UiEptSo;  :  <■  Ville  chef-lieu  de  la  Macédoine 
Piéride.  »  On  nommait  ainsi  la  région  à  laquelle  appar- 
tenait Philippes.  Cf.  Hérodote,  vu.  212;  Thucydide,  n. 
99.  Mais  ce  ne  sont  là  que  de  simples  conjectures. 
D'autres,  spécialement  W.  Meyer  dans  son  commen- 
taire de  ce  passage,  Kritisch-exegelisch.  Commentât 
iïber  das  Neue  Test.,  part,  m,  Die  Apostelgeschichte, 
8»  édit.,  in-8»,  Gœttingue.  1899,  p.  278,  280.'  rattachent 
le  mot  koXIc  à  xoXrovCa,  et  traduisent  :  «  La  première 
ville  colonie  fondée  dans  ce  district.  »  Mais  cette  asso  ■ 


67.  —  Ruines  du  Direkeir  à  Philippes.  D'après  une  photographie. 


rement  l'existence,  voir  Macédoine,  t.  iv.  col.  475  — 
MaxéSovuv  itpbnr)c,  M.  Seure'paç,  M.  letâpTrjç,  c'est-à-dire 
(monnaie)  des  Macédoniens  de  la  première,  de  la 
seconde,  de  la  quatrième  (division)  —  et  ils  ont  dit 
que  Philippes  était  la  première  ville,  le  chef-lieu  de 
la  Macedonia  prima,  dont  elle  faisait  partie.  Mais 
cela  aussi  est  inexact,  car  la  métropole  officielle  de  ce 
district  était  Amphipolis.  Cf.  Tite-Live,  xi.v.  29-30.  Peut- 
être  pourrait-on,  avec  quelques  commentateurs,  regarder 
les  mots  7tp(ÔTt]  T'r,;  [lepeSoç...  comme  un  de  ces  titres 
d'honneur  que  les  villes  grecques  convoitaient  alors 
si  ardemment  et  qu'elles  aimaient  à  se  faire  octroyer 
par  les  Ko  mai  ns;  dans  ce  cas,  le  sens  serait  :  Philippes 
('•tait  une  ville  importante,  jouissant  de  grands  privi- 
lèges, etc.  Cf.  C.  T.  Kuinoel,  Acla  Apostolorum, 2  édit,, 
in-8°,  Leipzig,  1827,  p.  542.  On  trouve,  en  effet,  d'an- 
ciennes monnaies  sur  lesquelles  la  cité  porte  le  titre 
de  itpÙT>],  Voir  Rettig,  Quiestiones  Philippenses,  in-8», 
Giessen,  1831,  p.  5.  On  a  proposé  aussi  quelques  modi- 
fications au  texte,  en  vue  de  le  rendre  plus  clair. 
M.  l'rd.   Lilass,  Acla  Apostolorum,   in-8°,   Gcettingue, 


ciation  ne  saur,  il  être  justifiée  sous  le  rapport  de  la 
syntaxe.  Il  resterai!  à  dire  que  ta  proposition  aurait 
une  signification  locale    :    pour   saint    Paul,  arrivant  du 

côté  de  la  mer  Egée  et  de  l'ile  de  Samothrace,  Phi- 
lippes était  la  première  ville  proprement  dite  di 
{loi ne  placée  sur  sa  route  ;  car  le  port  de  Néapolis ,  aji 
i  on, aurait  appartenue  la  Thrace, non  à  la  Macédoine. 
Voir  van  Steenkiste,  Actus  Apostolorum  breviter 
cati,  in-8»,  'r  édit,  Bruges,  1882,  p.  246;  J.  Felten,  Die 
Apostelgeschichte   ùbersetzt    ufjrf   erklârt,  in-8".    Iri- 
bourg-en-Brisgau,  1892,  p.  :>ll-:;'12.  Cf.  Neapolis,  t.  iv, 
col.  1542.  Cette   interprétation   supprime    la   »i i 1 1 . . 

mais  elle  est   difficile   a  justifier. 

La  chrétienté  de  Philippes  a  eu  aussi  1  honneur  de 
recevoir  une  lettre  de  saint  Polycarpe.  Cf.  Punk,  Oie 
apostolischen  V&ter,  in-S",  Tuhingue,  1901,  p.  110-116. 
La  ville  s'est  maintenue  durant  tout  le  moyen  âge;  elle 
est  souvent  mentionnée  dans  l'histoire  des  guerres  du 
mv  siècle.  Tins  lard,  elle  fui  détruite  par  les  Turcs. 
Les  ruines,  complètement  inhabitées,  portent  le  nom 
.1    Filibedjik,  Elles  consistent  dans  les  substructions 


277 


PHILIPPES    —    PHILIPPIENS    (EPITRE    AUX) 


278 


d'un  amphithéâtre  el  dans  les  restes  d'un  stade,  d'un 
temple  de  Claude,  etc.  Elles  ont  fourni  des  inscrip- 
tions très  intéressantes.  —  Voir  Leake,  Travels  in  nor- 
thern  Greece,  1835,  t.  ni,  p-  214-225;  Heuzey,  Explora- 
tion archéologique  de  Macédoine,  Paris,  1864-1876; 
W.  Ramsay,  St.  Paul  thé  Traveller  and  the  Roman 
Citizen,  in-S",  5'  édit.,  1900,  p.  206-226;  Id.,  The  Church 
in  the  Roman  Empire,  in-8»,  1896,  p.  156-158;  F.  Vi- 
gouroux,  Le  Nouveau  Testament  et  les  découvertes 
archéologiques  modernes,  2e  édit.,  p.  211-229;  Corpus 
inscriptionum  latinarum,  t.  m,  lre  partie,  p.  633-707, 
el  le  Supplementum,  7337-735S. 

L.  Fillion. 
PHILIPPI  Henri,  chronologiste,  né  aux  environs 
de  Saint-Hubert  (grand-duché  de  Luxembourg)  le 
30  mars  1575,  mort  à  Ratisbonne  le  30  novembre  1636. 
Admis  le  26  août  1597  dans  la  Compagnie  de  Jésus,  il 
professa  plusieurs  années  les  belles-lettres,  la  théologie 
et  l'Écriture  Sainte  aux  universités  de  Gratz,  Vienne  et 
Prague.  Le  P.  Philippi  s'occupa  surtout  de  chronologie. 
Ses  travaux  en  cette  matière,  qui  se  rapportent  à  l'exé- 
peuvent  encore,  même  à  notre  époque,  être  con- 
sultés avec  profit.  Ce  sont  d'abord  des  ouvrages  géné- 
raux :  1°  Generalis  synopsis  sacrorum  temporum... 
intelligentiœsacraruni  litterarum  accommodata,  in-4°, 
Cologne,  1Ô24;  2°  Manuale  chronologicum  veteris  Te- 
stament}, in-8",  Anvers,  1635;  "à"  Chronologie  veteris  Te- 
stamenti  accuratum  examen,  Cologne,  1637.  —  On  peut 
signaler  ensuite,  comme  traités  plus  particuliers  : 
Rota?  et  </uœstiones  chronologies'  in  Pentateuchum 
Moysis,  in-'i  ,  Vienne,  1633;  —  Inlibros  J 'osue ,  Judicum , 
Rulh,  Regum,  Paralipomenon,  Esclrse,  Nehemise,  in-4°, 
Cologne,  1637;  —  In  libros  Tobiœ,  Judith,  Estlier, 
Prophetarum,  in-4°,  Cologne,  1637;  —  In  duos  libros 
Machabxorum,  in-4°.  Cologne,  1637.       P.  Rliard. 

PHILIPPIENS  (ÉPITRE  AUX).  -  I.  Importance. 
—  Cette  lettre,  la  plus  épislolaire  entre  les  Epitres,  est 
une  de  celles  qui  oll'rent,  à  divers  points  de  vue,  le 
plus  d'intérêt  parmi  les  écrits  de  saint  Paul.  Ce  qui 
charme  d'abord  le  lecteur,  c'est  le  ton  intime  et  fami- 
lier, l'abandon  touchant  avec  lequel  l'Apôtre  épanche 
ses  joies,  ses  tristesses,  ses  espérances.  L'épître  aux 
Philippiens  est  une  lettre  d'ami.  Aucune  discussion  ni 
argumentation  théologique.  Si  l'Apôtre  parle  des  judaï- 
sants,  ce  n'est  pas  avec  une  intention  de  polémique, 
mais  pour  prémunir  son  troupeau,  i,  17;  m,  2,  18.  De 
même  le  beau  passage  sur  la  kénose  (exiuanivit)  du 
Christ,  II,  7,  si  riche  en  conclusions  dogmatiques,  n'est 
là  que  pour  appuyer  une  exhortation  pratique  à  l'abné- 
gati  h  el  au  dévouement.  L'àme  de  Paul  se  rellcte  donc 
ici  dans  ce  qu'elle  avait  de  merveilleusement  tendre,  dé- 
licat, affectueux,  reconnaissant,  pour  une  communauté 
répondant  à  peu  prés  à  son  idéal.  On  s'attend  à  ce  qu'une 
lettre  écrite  dans  de  pareils  sentiments  exprime  mieux 
que  toute  autre  la  situation  personnelle  de  l'auteur. 
Les  Philippiens  tenaient  à  être  mis  au  courant  de 
tout  ce  qui  concernait  leur  apôtre  bien-aimé.  De  fait, 
la  prés>  nie  I.pitre  est  le  meilleur  document  pour  com- 
bler les  lacunes  de  la  fin  du  livre  des  Actes.  L'his- 
torien y  peut  recueillir  des  données  certaines  sur  les 
derniers  mois  de  la  captivité  de  Paul  à  Rome.  Il  con- 
sulte les  progrès  de  l'Évangile  dans  la  cité  et  jusque 
dans  la  maison  de.;  Césars,  l'effet  produit,  dans  les 
prétoires,  par  les  chaînes  du  vaillant  prisonnier,  les 
luttes  qu'il  soutient  contre  des  ennemis  envieux  et 
jaloux  qui  essaient  d'exciter  les  Juifs  contre  lui  et 
d'aggraver  une  position  déjà  si  pénible,  les  espoirs 
mêlé!  d'inquiétudes  qui  traversent  l'esprit  de  Paul  et 
donnent  à  sa  lettre  un  fond  de  mélancolie  qui  con- 
traste avec  1rs  autres  sentiments  exprimés  dans  la 
lettre,  enfin  les  projets  qu'il  nourrissait  dans  le  cas  où 
il   serait   rendu  à  la   liberté.  Mais   tout  cela  n'est  rien 


auprès  de  la  valeur  qui  s'attache,  pour  la  théologie,  au 
chap.  il  de  cette  lettre,  encore  qu'il  ait  été  écrit  sans 
aucune  préoccupation  dogmatique,  dans  le  seul  but  de 
proposer  en  exemple  le  renoncement  du  Verbe  fait 
chair.  La  conception  christologique  de  l'Apôtre  a  su 
trouver,  à  cet  endroit,  des  expressions  qui  surpassent 
en  clarté  et  en  précision  toutes  celles  des  autres 
Epitres.  A  ce  point  de  vue  seul  l'Épitre  aux  Philippiens 
serait  déjà  hors  de  pair. 

II.  Les  relations  de  saint  Paul  avec  l'Église  de 
Piiilippes.  —  Aucune  Église  n'a  été  en  rapports  aussi 
étroits  et  aussi  suivis  avec  l'Apôtre;  aucune  ne  lui  a 
donné  autant  de  consolations.  Il  l'appelle  lui-même 
«  sa  joie  et  sa  couronne  ».  iv,  1.  C'est  vers  l'automne 
de  l'an  52,  dans  son  second  voyage,  que  saint  Paul 
prêcha  l'évangile  à  Philippes  et  y  fonda  la  première 
communauté  chrétienne  de  Macédoine  en  compagnie 
de  Silas,  de  Timothée  et  de  l'auteur  des  Actes.  Voir 
Act.,  xvi.  Les  premières  et  les  plus  nombreuses  conver- 
sions paraissent  s'être  produites  parmi  les  femmes 
d'un  certain  rang,  déjà  affiliées  au  judaïsme.  La  plus 
connue  est  Lydie,  riche  marchande  de  pourpre,  origi- 
naire d'Asie  Mineure,  qui  fut  baptisée  par  Paul  avec 
toute  sa  maison  et  donna  l'hospitalité  à  la  troupe  apos- 
tolique. Voir  Lydie,  col.  447.  Ce  fut  là  le  commence- 
ment de  l'Église  de  Philippes.  On  sait  à  la  suite  de  quels 
événements  Paul  et  Silas  durent  quitter  la  commu- 
nauté naissante.  Act.,  xvi,  16-40.  Voir  Paul,  t.  iv,  col.  2208, 
La  nouvelle  Église  devait  compter  peu  de  Juifs;  elle 
était  surtout  composée  de  gentils,  les  femmes  paraissent 
y  avoir  tenu  une  place  considérable.  Leur  influence  s'y 
maintint  longtemps,  puisque  dans  cette  lettre  l'Apôtre 
regarde  la  mésintelligence  de  deux  d'entre  elles, 
Evodie  et  Syntyque,  comme  un  sérieux  danger  pour 
l'Église  de  Philippes  tout  entière,  iv,  2,  3. 

Il  paraît  qu'en  Macédoine  les  femmes  jouèrent,  de 
tous  temps,  un  rôle  social  plus  considérable  que  par- 
tout ailleurs.  C'est  ce  qu'attestent,  en  grand  nombre, 
lis  inscriptions  de  ce  pays.  La  jeune  Église,  après  le 
départ  précipité  de  l'Apôtre,  ne  cessa  de  croître  et  de 
prospérer.  Saint  Luc,  que  plusieurs  critiques  supposent 
originaire  de  cette  ville,  voir  Luc,  col.  376,  y  continua 
pendant  près  de  cinq  ans  l'œuvre  de  son  maître.  Les 
persécutions  ne  parvinrent  pas  à  ébranler  les  généreux 
néophytes,  II  Cor.,  vin,  2  ;  ils  restèrent  fidèles  à  Paul 
et  à  son  Évangile.  L'Apôtre  ne  revit  probablement  ses 
chers  Philippieus  qu'àson  départ d'Ephèse  vers  l'an  58, 
lors  de  son  troisième  voyage  à  Corinthe.  Il  se  rendit 
alors  en  Macédoine  pour  l'œuvre  des  collectes.  On  croit 
qu'il  écrivit  à  Philippes  sa  seconde  lettre  aux  Corin- 
thiens,  II  Cor.,  H,  13;  vu,  5;  vm,  1;  ix,  2,  4.  11  avait 
sous  les  yeux  le  spectacle  de  leur  foi,  de  leur  généro- 
sité, de  leur  ardeur.  Ils  étaient  prêts,  dit-il,  non  seule- 
ment à  donner  leurs  biens,  mais  à  se  donner  eux- 
mêmes,  II  Cor.,  vm,  1-5,  pour  l'œuvre  du  Seigneur.  Au 
printemps  de  l'année  suivante,  en  se  rendant  à  Jérusa- 
lem pour  y  porter  la  collecte,  saint  Paul  passa  la  se- 
maine de  Pâques  à  Philippes.  Act.,  xx,  5,  6  ;  il  y  retrouva 
saint  Luc.  Les  Epitres  pastorales  surtout,  1  Tim.,  13, 
laissent  entendre  que  l'Apôtre  réalisa  le  vœu  qu'il  énon- 
çait dans  sa  lettre  aux  Philippiens,  1, 26;  II,  2i,  et  qu'après 
sa  première  captivité  il  revit  sa  chère  Église.  Durant  les 
intervalles  plus  ou  moins  longs  qui  séparèrent  ces  di- 
vers séjours,  les  relations  les  plus  amicales  ne  cessèrent 
jamais  entre  la  communauté  de  Philippes  et  son  fonda- 
teur. A  diverses  reprises,  les  Philippiens  envoyèrent 
des  secours  d'argent  à  leur  père  bien-aimé,  deux  fois  à 
Xhessalonique,  iv,  16;  une  fois,  à  Corinthe,  II  Cor.,  xi, 
<.),  et  a  Rome,  l'bih.iv,  18.  Cette  dernière  fois,  ils  ne  se 
contentèrent  pas  de  secours  matériels,  ils  envoyèrent 
Épaphrodite,  le  chef  de  leur  église,  auprès  du  prison- 
nier.  Paul,  qui  connaissait  les  sentiments  élevés  de 
ces  âmes  généreuses,  ne  craignait  pas  d'accepter  d'eux 


279 


PHILIPPIENS    (ÉPURE   AUX) 


280 


un  service  qu'il  aurait  refusé  de  la  part  d'autres  Eglises. 
Il  trouvait  aussi  là,  chaque  fois,  l'occasion  de  leur  en- 
voyer des  remerciements  et  des  nouvelles  de  ses  tra- 
vaux. Aussi  a-t-on  supposé,  avec  quelque  vraisemblance, 
qu'il  leur  écrivit  d'autres  lettres  que  celles  que  nous 
possédons.  Dans  son  Épître  aux  Philippiens,  Polycarpe 
semble  y  faire  allusion  quand  il  dit  que  le  bienheureux 
et  glorieux  Paul  leur  écrivit  «  des  lettres  »,  èmtrroXaf. 
AdPhU.,u\,  t.  v,  col.  1008.  Il  se  peut  toutefois,  comme  le 
remarque  Lightfoot,  que  ce  pluriel,  suivant  l'usage  des 
Grecs  et  des  Latins,  puisse  être  circonscrit  à  une  lettre 
unique.  Quoi  qu'il  en  soit,  un  passage  de  la  présente 
Epitre  de  Paul,  m,  I,  parait  sous-entendre  d'autres 
lettres  antérieures. 

III.  Lieu  et  datk  de  composition.  —  La  lettre  aux 
Philippiens  a  été  écrite  en  prison,  i,  7,  13,  14,  17. 
Est-ce  à  Home  ou  à  Césarée?  L'opinion  générale  des 
critiques,  même  de  ceux  qui  datent  de  Césarée  les 
Epitres  aux  Colossicns,  aux  Ephésiens,  à  Philémon, 
penche  pour  la  première  hypothèse.  On  a  définitivement 
abandonné  celle  de  Paulus  (1799),  Bôttger  (1837),  Rilliet 
(1841),  Thiersch  (1879),  qui  plaçaient  à  Césarée  la  rédac- 
tion de  cette  Épître.  Les  termes  mêmes  de  la  lettre 
lui  sont  défavorables.  Le  prétoire  tout  court,  i,  13,  s'en- 
tend mieux  de  la  cour  impériale  que  du  palais  d'Hérode 
à  Césarée,  Act.,  xxm,  35;  la  maison  de  César,  iv,22,  ne 
peut  s'appliquer  à  la  maison  du  gouverneur  Félix;  les 
prédicateurs  envieux  et  jaloux  dont  se  plaint  l'Apôtre, 
I,  17,  supposent  une  église  bien  plus  considérable  que 
celle  de  Césarée.  Son  espoir  d'être  bientôt  rendu  à  la 
liberté,  i,  25,  27;  n,  24,  son  projet  de  revenir  à  Phi- 
lippes,  se  conçoivent  mieux  à  Rome  qu'après  l'appel  à 
César.  Le  point  difficile  est  de  savoir  si  cette  lettre  a 
précédé  ou  suivi  les  Épitres  aux  Colossiens,  aux  Éphé- 
siens,  à  Philémon,  ou,  en  d'autres  termes,  si  elle  a  été 
écrite  au  commencement  ou  à  la  lin  des  deux  ans  de 
Captivité  donl  parlent  les  Actes,  xxvm,  30.  Ici  les  opi- 
nions se  parlagent.  La  majorité  des  critiques  (Meyer, 
Weiss,  Godet,  ■Lipsius,  lloltzmann,  Zahn,  Jûlicher, 
Ramsay)  penchent  vers  la  seconde  manière  de  voir.  Ils 
font  remarquer  qu'on  ne  peut  expliquer  sans  un  long 
séjour  à  Rome  les  succès  de  la  prédication  de  Paul 
dans  le  prétoire,  i,  12,  dans  la  maison  de  César,  iv,22. 
Il  faut,  de  plus,  un  temps  suffisant  pour  les  deux 
voyages,  aller  et  retour,  entre  Rome  et  Philippes,  indi- 
qués dans  l'Épltre;  message  de  Rome  à  Philippes  pour 
annoncer  la  captivité  de  l'Apôtre,  voyage  dV.paphrodilc 
de  Philippes  à  Rome,  annonce  de  sa  maladie  en  Macé- 
doine, lettre  au  messager  qui  apprend  à  Épaphroùite 
et  à  Paul  l'inquiétude  des  Philippiens  au  sujet  de  cette 
maladie;  toutes  ces  allées  el  venues,  ces  échangée  de 
nouvelles,  ces  envois  de  secours  exigeaient  alors  un 
intervalle  assez  long.  Qu'on  ajoute  à  cela  le  fond  de 
tritesse,  presque  de  découragement,  qui  se  détache  de 
la  lettre,  l'absence  de  Luc  el  d'Aristarque,  a,  20,  en- 
voyés sans  doute  en  mission  par  l'Apôtre,  l'isolemenl 
où  s.'  trouve  le  prisonnier,  l'attente  imminente  de  son 
procès,  l'incertitude  de  plus  en  pins  grande  sur  l'issue 
de  son  appel  à  César,  la  possibilité  d'une  condamna- 
tion à  mort,  on  trouvera  là  lous  les  indices  d'une  cap- 
tivité déjà  longue  qui  touche  à  sa  fin.  A  ces  arguments, 
Lightfoot  répond  qu'il  n'y  a  pas  de  verset  décisif,  pas 
même,  i,  12,  en  faveur  d'une  longue  détention;  que 
les  succès  de  Paul  dans  Home,  i,  1347,  peinent  avoir 
eu  lieu  des  les  premiers  mois  de  son  arrivée  dans  la 

Ville   éternelle,  qui'   l'absence  de  salutations,  de  la  part 

de  Lucel  d'Aristarque  ne  prouve  rien,  les  arguments  a  si- 
lentio  étant,  par  eux-mêmes,  toujours  très  précaires  ; 
que  le  ton  général  de  la  lettre  est  celui  de  la  joie  et  de 
la  confiance,  n lelui  de  la  tristesse  et  de  l'abatte- 
ment; enfin,  que  les  1200  kilomètres  entre  Rome  el 
Philippes,  par  la  voie  Egnalienne,  peuvent  être  par- 
Courus  dans  l'espace   d'un  mois.   Farrar  insiste,  à  son 


tour  sur  les  analogies  entre  cette  épitre  et  celle  aux 
Romains,  comme  si,  remarque  von  Soden,  il  n'y  en 
avait  pas  de  plus  frappante  encore  avec  l'Épitre  aux 
Corinthiens.  Le  même  auteur  allègue  encore  l'absence 
de  toute  controverse  avec  le  judaïsme  semi-gnostique 
combattu  dans  l'Épitre  aux  Colossiens,  prétendant  qu'il 
est  contraire  à  toute  psychologie  de  ne  pas  prolonger 
jusque  dans  l'Epitre  aux  Philippiens,  une  préoccupation 
aussi  envahissante,  si  cette  Epitre  avait  été  écrite,  en 
réalité,  après  l'Épitre  aux  Colossiens.  Or,  remarque 
excellemment  Ramsay,  Paul  n'avait  pas  à  envoyer  à 
Philippes  un  traité  contre  des  hérésies  qui  ne  s'y  étaient 
jamais  montrées.  Aussi  l'opinion  de  Lightfoot  et  de  Farrar 
qui  est  aussi  celle  de  Hort  et  de  Sanday,  est-elle  de 
moins  en  moins  acceptée  des  exégètes.  11  semble  donc, 
d'après  la  chronologie  la  plus  reçue,  que  l'Épitre  aux 
Philippiens  date  de  la  fin  de  l'an  63,  tout  au  plus  des 
premiers  mois  de  l'an  64. 

[V.  Authenticité.  —  Les  témoignages  en  faveur  de 
de  l'origine  paulinienne  de  la  lettre  aux  Philippiens  sont 
à  peu  près  les  mêmes  que  pour  les  grandes  Épitres. 
Dès  la  fin  du  Ier  siècle,  Clément  de  Rome  parait  s'être 
inspiré  du  passage  christologique  déjà  cité,  Phil.,  n,G-8, 
quand  il  écrit  :  «  Le  Christ  appartient  à  ceux  qui  ont 
des  sentiments  humbles  et  qui  ne  s'élèvent  pas  au- 
dessus  de  son  troupeau.  Le  sceptre  de  la  majesté  de 
Dieu,  le  Seigneur  Jésus-Christ  n'est  pas  venu  avec  la 
jactance  de  l'orgueil,  l'arrogance,  quoiqu'il  l'ait  pu. 
Phil.,  n,  6-8,  mais  avec  des  sentiments  humbles. 
Voyez,  frères  bien-aimés,  quel  exemple  nous  est  pro- 
posé, car  si  le  Seigneur  a  eu  de  tels  sentiments  d'humi- 
lité, que  ferons-nous,  nous  qu'il  a  amenés  sous  le  joug 
de  sa  grâce?  »  1  Cor.,  xvi,  1.  On  trouverait  encore 
d'autres  réminiscences  en  comparant  entre  eux  : 
/  '.'or., xlvii,  =  Phil.,  iv,  15;  ib.,\\i  -  Phil.,  1,  27;  ib.,0 
=  Phil.,  i,  40;  n,  15.  Diverses  expressions  des  épitres 
de  saint  Ignace  offrent  des  ressemblances  caractéristi- 
que avec  l'Épitre  aux  Philippiens,  Rom.,ll  =  Phil.,  n. 
17;  l'Inlad.,  vm  =  Phil.,  Il,  3;  Smyrn.,  i\  =  Phil.,  IV, 
18;  )'6.,XI  =  Pliil.,in.  1,");  et  surtout  :  U>.,II,3=  Phil., III, 
15,  10,  ..  Etant  parfaits,  aspire/,  aussi  aux  choses  par- 
faites. »  —  L'épître  de  Polycarpe  aux  mêmes  Philip- 
piens, n,  l.est  encore  plus  explicite  :  «Le  glorieux  Paul 
qui,  étant  personnellement  parmi  vous,  vous  a  ensi 
exactement  et  sûrement  la  parole  de  la  vérité;  lequel 
aussi  étant  absent  vous  a  écrit  des  lettres  ion  une  lettre) 
que  vous  n'avez  qu'à  étudier  pour  être  édifiés  dans  la 
foi  qui  vous  a  été  donnée.  »  Or  une  de  ces  lettres  est 
certainement  celle-ci,  car  le  même  Polycarpe  semble 
y  avoir  fait  des  emprunts  :  i  =  Phil.,  iv,  10;  n  = 
Phil.,  n,  10;  ix  =  Phil.,  n.  Ili;  x  -  Phil.,  n,2,5;Xli  = 
Phil.,  m,  ly.  On  rencontre  des  réminiscences  sembla- 
bles dans  le  Pasteur  d'Hermas,  dans  les  Testaments 
des  douze  patriarches,  dans  l'épître  a  Diognête,  t.  Il, 
cul.  1168;  dans  Théophile  d'Anti'oche,  cité  par  S.  ,lé- 
rôme,  Epist.  cxxi,  6,  ad  Algas.,  t.  xxh,  col.  1020,  enfin 
dans  la  belle  lellre  des  Églises  de  Vienne  et  de  Lyon, 
!  n  i  be,  //.  F...  v,  1,  2.  t.  xx.  eol.  133,  où  se  trouve 
reproduit  le  passage  sur  les  abaissements  du  Christ,  11,6. 
Il  parait,  d'après   les    PhiloSOphumena,  \.   11.  t-  XVI,  3, 

col.  3120,  que  les  Séthiens,  se  servaient  de  Phil.,  n, 
6,  7,  pour  expliquer  leurs  doctrines.  Des  écrits  il 

lenlinien  Théodote,  Clé ni  d'Alexandrie,  Strom.,  m, 

i,  i.  xiii,  col.  I  196,  a  conserve  deux  citations  de  l'Épitre 
aux  Philippiens,  n.  7.  Elle  a  sa  place,  avec  Imites  les  au- 
tres.dans  les  versions  syriaque  el  latine  el  elle  se  trou- 
\  ,iil  thins  le  recueil  de  Marcion.  Mentionnée  par  i> 

deMuratori,  voirCANON,  t.  n,  col.  170,  elle  est  attril 

à  saint  Paul,  à  la  lin  du  n'  siècle,  par  saint  Irénée,  Cont. 
heer.,iv,  18;  v.  13,  t.  vu,  col.  1026,  1158.  Tertullien,  De 
resur.,  23;  Cont.  Marc,  \.  20;  /<■■  presser.,  26,  I.  n, 
roi.  S-Jll  Si!!,  522.  557;  Clément  d'Alexandrie,  Piedag.,  I, 
524,  t.  vm,  col.  312,  408;  Strom,  iv,  12,  13,  94,  t.  vm, 


281 


PHILIPP1ENS    (ÉPITRE    AUX) 


282 


col.  1196.  Origène  et  Eusébe  reconnaissent  aussi  son  ori- 
gine paulinienne  qui  a  été  admise  par  toute  l'antiquité. 
Les  premiers  doutes,  à  ce  sujet,  ne  commencent  qu'avec 
Schraderqui  attaque  l'authenticité  d'une  partie  delà 
présente  Épitre,  m,  1-iv.  9.  En  1845,  Baur  et  ses  dis- 
ciples la  rejettent  complètement.  Voici  leurs  griefs.  Cet 
écrit,  disent-ils,  est  dépourvu  de  toute  originalité  : 
c'est  une  imitation  des  autres  Epitres.  On  y  trouve,  de 
plus,  des  idées  semi-gnostiques,  une  doctrine  sur  la 
justification  qui  n'est  pas  celle  de  Paul,  des  anachro- 
nismes  évidents  comme  l'existence  de  l'épiscopat  et  du 
diaconat,  autant  d'indices  de  l'époque  réelle  où  ce  pas- 
tiche aurait  été-  composé,  c'est-à-dire  au  second  siècle, 
quand  s'opère  la  réconciliation  des  deux  partis  en  lutte 
dans  l'Église,  partis  symbolisés  ici  par  les  deux  diaco- 
nesses, Évodie  et  Syntyque,  iv,  2.  Le  nom  de  Clément 
dont  la  tradition  faisait  un  ami  de  Pierre  et  que  l'au- 
teur de  l'Epitre  présente  comme  un  collaborateur  de 
Paul,  n'est  qu'un  mythe  destiné  à  concourir  à  cette 
œuvre  de  conciliation. 

Ces  difficultés  de  E;iur  ne  présentent  guère  plus  qu'un 
intérêt  purement  historique  depuis  les  travaux  de  Lù- 
neinann,  Pauli  ad  Phil.  Ep.  contra  Baunum  défen- 
dit, 1S47;  B.  Brûckner,  Ep.  ad  Phil.  Paulo  auctori 
vindicata  contra  Baurium,  1848;  Ernesti,  dans  les  Stu- 
and  Kritiken,  ISIS.  p.  858-924;  Schenkel,  Bibel- 
lexicon,  1878}  t,  iv,  p.  531.  Cependant,  après  plusieurs 
années,  l'Epitre  aux  Philippiens  fut  de  nouveau  com- 
battue  parllitzig.  1870;  Kneucker,  1881;  Huisch,  1873; 
Hœkstra,  1875;  Bindermann,  1885,  et  surtont  par 
Holsten  qui  reprit  l'attaque  avec  plus  d'ardeur;  aban- 
donnant les  arguments  ruineux  de  son  maître,  les  rap- 
prochements imaginaires  avec  le  gnosticisme  et  les 
allusions  aux  légendes  du  second  siècle,  il  prétendit 
prouver  que  la  langue  et  les  doctrines  de  l'Epitre  aux 
Philippiens  n'étaient  pas  celles  des  autres  écrits  de 
l'Apôtre.  Il  dressa  un  catalogue  très  minutieux  des  ex- 
pressions propres  à  cette  Épitre  et  les  mit  en  regard 
des  locutions  habituelles  aux  grandes  Épitres  de  saint 
Paul,  Voir  Lightfoot,  dans  le  Speaker's  Commentary 
on  Phil.,  p.  43.  On  y  trouve  une  quarantaine  d'hapax  le- 
gomena,  mais  cela  ne  prouve  rien.  On  en  compte  plus 
de  cent  dans  l'Epitre  aux  Romains  et  plus  de  deux  cents 
dans  la  première  Épitre  aux  Corinthiens.  «  Toutes  les 
i  isons  avancées  dans  ce  domaine  contre  l'authenticité 
n'ont  de  valeur  que  pour  celui  qui'fait  de  l'apôtre  Paul, 
cet  esprit  le  plus  vivant  et  le  plus  mobile  de  tous  ceux 
que  le  monde  a  jamais  vus,  un  homme  d'habitude 
et  de  routine,  qui  devait  écrire  chacune  de  ses  lettres 
coin  me  toutes  les  autres,  ne  faire  que  répéter  dans  les 
suivantes  ce  qu'il  avait  dit  dans  les  précédentes,  et  le 
redire  toujours  de  la  même  manière  et  dans  les  mêmes 
termes.  Dès  que  l'on  a  renoncé  à  cette  manière  de 
voir,  toutes  les  objections  contre  l'authenticité  de  la 
lettre  aux  Philippiens  tombent  d'elles-mêmes.  »  Schû- 
rer,  dans  la  Lilteratur  Zeitung,  1877.  D'ailleurs,  la 
terminologie  paulinienne  n'est  pas  absente  de  notre 
Épitre.  On  y  relève  une  vingtaine  de  mots  exclu- 
sivement employés  par  sair.t  Paul,  tels  que  (Spaëefoy, 
3oxt(tT|,  £>8ei(i;,  xevoûv,  etc.,  étrangers  aux  autres 
livres  du  Nouveau  Testament.  De  plus,  nombre  de 
tournures  de  phrases,  de  figures,  de  procédés  de  style, 
certaines  répétitions  de  mots  rappellent  les  grandes 
I-  pitres  les  plus  authentiques.  «  Cette  lettre,  dit  Schen- 
kel, dans  Bit.  Lexik.,  1872.  t.  iv,  p.  531,  porte  la  ga- 
rantie de  son  authenticité'  dans  son  style  et  ses  expres- 
sions mêmes,  dans  la  fraîcheur  du  sentiment  intime 
qui  l'a  dictée,  dans  la  sérénité  d'esprit  et  la  tendresse 
de  co'Ui  qui  s'y  expriment  de  la  manière  la  plus  natu- 
relle, et  sans  la  moindre  trace  d'alfectation.  » 

Quant  aux  divergences  de  doctrine,  Holsten,  dans 
Jahrb.  fur  prot.  Tlicl.,  t.  i,p.  125;  t.  n,  p.  58,  282,  en 
allègue  deux  principales.  I»  La  christologie.  —  Holsten 


trouve  une  opposition  entre  le  Christ  de  l'Épilre  aux 
Philippiens  et  celui  de  la  première  Épitre  aux  Corin- 
thiens, xv,  45.  D'après  celle-ci,  dit-il,  saint  Paul  conçoit 
le  Christ  dans  sa  préexistence,  comme  un  homme 
céleste,  SvBpuitoî  êisoûpocvioç,  alors  que  dans  l'antre 
Épitre,  il  en  fait  un  être  purement  divin,  i-,  [Loozif,  Oeoû 
-iraip'/wv,  qui  ne  devient  homme  que  par  l'Incarnation, 
appartenant,  par  suite,  à  un  ordre  d'êtres  plus  élevé 
que  l'humanité,  même  céleste.  —  Il  suffit,  pour  lever 
la  contradiction,  de  replacer,  dans  son  contexte,  le 
passage  allégué  de  l'Epitre  aux  Corinthiens,  où  l'Apô- 
tre parle,  non  de  la  préexistence  du  Christ,  comme 
dans  l'Epitre  aux  Philippiens,  mais  du  Christ  après 
sa  résurrection,  revêtu  du  corps  spirituel,  incorrup- 
tible et  lumineux  qu'est  celui  des  justes  qui  ressus- 
citent. La  doctrine  christologique  de  cette  'Épitre  n'est 
pas  davantage  en  opposition  avec  celle  des  autres  Épi- 
tres pauliniennes.  Seulement  elle  reproduit,  sous  une 
forme  peut-être  plus  philosophique,  ce  qu'avait  ensei- 
gné l'Epitre  aux  Galates,  IV,  4  :  <c  Or,  quand  le  temps 
est  venu,  Dieu  a  envoyé  son  Fils,  né  d'une  femme;  » 
l'Epitre  aux  Romains,  vin,  3  :  «  Dieu  a  envoyé  son 
propre  Fils  dans  une  chair  semblable  à  la  chair  du 
péché;  »  la  IIe  Épitre  aux  Corinthiens,  vm,  9:  «  Jésus- 
Christ,  lui  qui,  étant  riche,  s'est  fait  pauvre  à  cause  de 
nous.  » 

2»  La  justification.  —  On  a  encore  objecté  que  celui 
qui,  dans  les  Épitres  aux  Galates  et  aux  Romains,  a  si 
énergiquement  opposé  entre  elles  la  justification  par 
Dieu,  Sixatoaûvq  rt  i/.  Osoû,  et  la  justification  par  la  foi, 
Stxatoaûv'f]  ett'i  ■zr,  ict'trcst,  n'a  pu  dire,  comme  le  fait 
l'Epitre  aux  Philippiens,  m,  6,  que  sa  justice  légale 
était  à'(j.£(j.7cto;,  «  irréprochable.  »  Mais  il  est  facile  de 
voir  que  l'Apôtre  se  place,  en  cet  endroit,  au  point  de 
vue  juif,  extérieur,  charnel  qu'il  combat  lui-même.  Ra- 
contant son  passé,  il  veut  rappeler  son  zèle  pour  le 
judaïsme  et  montrer  qu'il  n'était,  sur  ce  point,  inférieur 
à  aucun  de  ses  contemporains.  Il  a  donc  recherché  avec 
ardeur  la  justice  légale,  mais  c'est  pour  en  avoir  expé- 
rimenté l'impuissance  qu'il  l'a  plus  tard  rejetée  avec 
tant  d'énergie.  Aussi,  même  les  auteurs  qui  tiennent  en 
défiance  les  Epitres  aux  Éphésiens  et  aux  Colossiens 
(Jiilicher,  Hilgenfeld,  Plleiderer,  Lipsius,  Holtzmannl 
sont  unanimes  à  défendre  celle-ci.  L'authenticité  de 
l'Epitre  aux  Philippiens  est  donc  un  résultat  défini- 
tivement acquis  dans  le  domaine  de  la  critique  scien- 
tifique. Voir  Knowling,  The  witness  of  the  Epistles, 
p.  63. 

V.  Intégrité.  —  L'expression  x'o  Xotitov,  au  reste, 
qui  ouvre  le  c.  m  de  l'Epitre,  a  donné  lieu  à  divers 
doutes  sur  l'unité  de  l'Epitre  tout  entière.  Clemen  sou- 
tient que  l'épitre  actuelle  se  compose  de  deux  lettres 
de  l'Apôtre  à  l'église  de  l'hilippes,  la  seconde  compre- 
nant n,  19-24;  m,  2-iv,  3;  iv,  8,  9.  Seulement  c'est 
l'éditeur  et  non  Paul  lui-même,  qui  aura  fondu  les 
deux  lettres  en  une  seule.  Die  Einheil  d.  pantin. 
Briefe,  1894.  Pour  Spitta,  Zur  Geschichte  und  Litt. 
d.  Urchristenlhums,  1893,  l'Epitre  actuelle  est  inter- 
polée :  il  n'y  verrait  de  la  main  de  l'Apôtre  que  les 
passages  suivants  :  i,  1-7,  12-14,  18-26;  n,  17-29;  iv, 
10-21,  23;  tous  les  autres  auraient  été  ajoutés  par  une 
main  étrangère.  —  Toutes  ces  hypothèses  n'arrivent 
pas  à  expliquer  pourquoi  saint  Paul  n'a  pas  encore 
remercié  les  Philippiens  de  leur  envoi  d'argent,  auquel 
il  a  déjà  fait  allusion,  I,  5,  II;  n,  30.  La  lettre  ne 
doit  donc  pas  se  terminer  au  ch.  ni.  La  locution  -h 
XotTtov  n'est  pas,  en  soi,  la  conclusion  obligée  de  toute 
letlre  de  Paul;  elle  lui  sert  assez  souvent  de  transition 
pour  passer  d'un  sujet  à  un  autre;  I  Cor.,  vu,  29; 
Phil.,  iv,  8;  I  Thés.,  iv,  I;  II  Thés.,  in,  I.  Voir  Jacquier, 
Histoire  des  livres  du  N.  T.  t.  i,  p.  352,  1903;  Light- 
foot, St.Paul's  Epistle  to the Philippians,  'redit.,  1885, 
p.  G9. 


283 


PHILIPPIENS    (EPITRE   AUX; 


284 


VI.  Occasion  et  but  de  l'Épitre.  —  La  lettre  aux 
Philippiens  est,  avant  tout,  une  lettre  de  remerciement. 
Si  l'Apôtre  réserve  pour  la  fin  sa  dette  de  reconnais- 
sance c'est  pour  mieux  marquer  combien  elle  lui  tient 
à  cœur.  Quand  on  écrit  pour  un  objet  déterminé,  on 
peut  le  traiter  soit  en  commençant,  soit  en  finissant. 
Comme  il  s'agissait,  d'autre  part,  d'une  atïaire  d'argent, 
Paul  aura  préféré  débuter  par  les  nouvelles  et  les 
exbortations.  Pourtant  il  fait  allusion,  par  trois  fois, 
l  5-11  '  H,  30,  dans  le  courant  de  la  lettre,  aux  secours 
que  les  Philippiens  lui  avaient  envoyés,  II,  25;  iv,  18. 
comme  on  l'a  vu  plus  haut,  col.  278.  Épaphrodite 
s'acquitta  de  sa  mission  avec  le  plus  grand  dévouement. 
En  même  temps  qu'il  remettait  à  l'Apôtre  l'offrande 
des  fidèles,  il  lui  donnait  les  nouvelles  les  plus  conso- 
lantes de  l'Église  de  Philippes.'A  part  quelques  rivali- 
tés de  peu  d'importance,  rien  n'était  venu  troubler  la 
paix.  La  persécution  n'avait  fait  que  montrer  la  patience 
des  fidèles.  Les  judaïsants  essayaient  en  vain  de  les 
surprendre  :  l'autorité  de  Paul  était  là  trop  vénérée 
pour  qu'on  put  oser  quelque  chose  contre  lui.  S'il  y 
avait  des  scandales  de  chrétiens  relâchés,  c'était  assu- 
rément en  dehors  de  Philippes.  L'état  de  l'Église  était 
donc  des  plus  satisfaisants.  L'Apotre  dut  en  ressentir 
une  grande  joie.  Mais  une  nouvelle  épreuve  vint  obscur- 
cir cette  éclaircie.  Épaphrodite  qui  s'était  associé  aux 
travaux  de  l'Apotre  captif  tomba  dangereusement  malade 
et  faillil  mourir,  II,  26.  On  l'apprit  à  Philippes  avec  un 
vif  chagrin  et  l'on  souhaita  son  retour.  Épaphrodite  dési- 
rait lui-même  revoir  sa  patrie  pour  calmer  les  inquié- 
tudes de  ses  amis.  Aussi,  quand  il  eut  repris  assez  de 
forces  pour  pouvoir  se  remettre  en  route,  l'Apotre  vou- 
lant faire  cesser  au  plus  tôt  les  craintes  de  tous,  s'eni- 
pressa  de  congédier  le  convalescent,  lui  remettant, pour 
[es  Philippiens,  cette  Épitre  pleine  de  tendresse  écrite 
,1,.  la  m. un  de  lïmothée,  n.  25, -28,  lettre  toute  intime 
d'un  père  qui  écrit  à  sa  famille ponr  la  remercier  d'une 
marque  d'affection,  lui   donner  de  ses   nouvelles,    lui 

sser  des  exhortations  et  des  conseils,  lui  faire      p 
rer  son  prochain  retour,  n,  24.  Telle  est  la  situation 
d'où  est  sortie  cette  Épitre. 

VII.  Analyse  de  l'Épitre.  —  Bien  que  l'unité  de 
cette  lettre  vienne  plutôt  de  la  logique  des  sentiments 
que  de  celle  des  idées,  on  peut  cependant  y  trouver  les 
trois  grandes  divisions  des  autres  Epitres. 

I  Prologue,!,  1-11.  —  11  renferme  l'adresse,  l'action 
de  grâces  et  les  vœux  de  l'Apôtre  pour  sa  chère  com- 
munauté  •  I •  -  Philippes.  L'adresse,  y.  1-2,  a  ceci  de  spé- 
cial qu'elle  mentionne  les  ëauV/.onoi  et  les  Siâxovoi 
comme  fis  deux  éléments  essentiels  de  l'organisation 
eci  lésiastique  à  Philippes.  L'action  de  grâces,  \.  3-8, 
prend  les  Ions  les  plus  délicats,  les  plus  affectueux 
pourexprimeraux  Philippiens  la  joie  que  Pauléprouve 
de  leur  /cl  •  pour  la  prédication  de  l'Evangile,  depuis 
le  jour  de  leur  conversion  jusqu'à  cette  heure  où  ils 
viennent  de  prêter  leur  concours  à  l'œuvre  apostolique 
Aussi  l'Apôtre  demande-t-ïl  à  Dieu,  9-11,  pour  eux.  fis 
dons  surnaturels  les  plus  excellents  en  charité.,  ,u 
science,  ni  pureté-  morale. 

2°  Corps  de  l'Épitre,  i,  12-iv,  9.  —  Les  nouvelles  -. 
alternent  avec  les  exhortations.  On  ne  peut  donc  songer 
à  un  ordre  méthodique.  Mais  comme  les  nouvelles  pré- 
dominent au  début  de  la  lettre  et  ses  exhortations 
vers  la  lin,  on  la  divise-  généralement  en  deux  parts  à 
peu  pics  .'-aies.  —  .1 1  Partie  historique,  t.  12-it.  'M.  Elle 
comprend  diversmorceaux.  —  a) Nouvelles  personnelles, 
i,  12-26.  L'Apôtre  s  empresse  de  rassurer  les  Philippiens; 
v.i  situation  présente  tourne  de  plus  en  plus  aux  intérêts 
et  au  progrès  de  l'Evangile.  Son  arrivée  à  Home  a  été  le 
point  de  départ  d'un  redoublement  de  zèle  dans  la  pré- 
dication de  l'Évangile.  La  prison  de  Paul  est.  en  un  sens, 
plus  féconde  que  ne  l'avait  été  sa  libre  activité.  Ses  chaî- 
nes, traînées  au  prétoire,  sont  à  elles  seules  comme  une 


prédication.  A  son  exemple,  et  animés  par  la  façon 
dont  il  supportait  sa  captivité,  ses  disciples  et  les  autres 
chrétiens  de  Rome  prêchaient.  Il  n'y  a  pas  jusqu'à  la  ja- 
lousie de  ses  ennemis,  sans  doute  les  judaïsants,  qui  n'ai- 
dât au  progrès  de  l'Évangile.  Car  cette  émulation  aboutit, 
à  la  lin,  à  étendre  la  connaissance  du  Christ.  Aussi  Paul 
s'en  réjouit-il  sincèrement.  Pour  lui,  le  Christ  est  tout. 
Que  lui  importe  l'avenir?  Il  est  sûr  que  de  toute  façon 
le  Christ  sera  glorifié,  soit  par  sa  vie,  soit  par  sa  mort, 
\ .  19-21. 11  s  en  remet  donc  au  choix  de  Dieu.  Il  attend 
avec  confiance  1  issue  de  son  procès,  car,  en  toute  hy- 
pothèse, il  est  sur  d'\  trouver  son  profit.  En  effet,  s'il 
est  condamné:  à  mort,  il  sera  réuni  au  Christ;  s'il 
recouvre  la  liberté,  il  en  profitera  pour  de  nouvelles 
conquêtes  apostoliques.  Il  croit  pourtant  que  celte 
seconde  alternative  est  la  plus  probable,  qu'il  pourra 
revoir  les  Philippiens,  travailler  à  leur  perfectionne- 
ment et  se  procurer  ainsi  un  surcroit  d'honneur,  au 
jour  de  la  Parousie,  v.  21-26. 

0)  Exhortation  à  l'union,  à  la  concorde,  à  la  fidé- 
lité dans  toute  leur  conduite,  I,  27-n,  18.  —  Après  ces 
premiers  épanchements  d'amitié,  l'Apôtre  en  vient  au 
seul  reproche  que  méritât  l'Église  de  Philippes  ou,  plus 
exactement,  une  portion  minime  de  cette  Eglise.  Il 
s'était  récemment  passé  une  querelle  d'amour-propre 
entre  deux  personnes  de  qualité,  Évodie  et  Syntyque  — 
peut-être  deux  diaconesses  —  qui  avait  quelque  temps 
troublé  les  esprits  et  divisé  les  cœurs.  Le  cas  avait  été 
de  peu  d'importance.  Aussi  l'Apôtre  n'y  fait-il  qu'une 
légère  allusion.  Il  va  droit  à  l'obstacle  de  l'union  fra- 
ternelle :  l'égoïsme  qu'il  faut  combattre  par  l'humilité 
et  le  renoncement.  11  faut  entrer  dans  l'esprit  d'abné- 
gation dont  le  Christ  nous  a  donné  un  exemple  si 
sublime.  Lui  qui  jouissait  d'un  étal  divin  et  qui  eût  pu, 
par  conséquent,  paraître  ici-bas  dans  une  gloire  égalé 
à  celle  de  Dieu, il  n'a  pas  jugé  opportun  de  s'approprier 
un  tel  honneur,  mais,  au  contraire,  il  s'est  dépouillé  de 
cet  état  divin  en  entrant  dans  l'état  deserviteur,  vivant 
en  tout  à  la  manière  humaine  et  poussant  même 
I  abaissement  jusqu'à  mourir  sur  une  croix.  Mais  plus 
il  s'est  abaissé,  plus  il  a  été  élevé,  n,  5-11.  A  celte  ex- 
hortation  spéciale  à  l'abnégation  volontaire,  saint  Paul 
ajoute  trois  recommandations  qui  se  rapportent  à  la 
fidélité  chrétienne  en  général,  lu  première  en  vue  du 
salut  des  lecteurs  eux-mêmes,  \.  12.  l:i,  la  seconde, 
pour  l'édification  du  monde  extérieur,  \.  li.  15:  la  troi- 
-i-iue.  en  vue  de  leur  Apôtre,  y.  17-18. 

c)  Nouvelles  de  Timolhée  et  d' Épaphrodite,  ri,  19- 
liO.  —  Après  l'exhortation  d'autres  nouvelles.  Elles  con- 
cernent les  deux  compagnons  d'œuvre  de  saint  Paul,  qui 
sont  actuellement  avec  lui  :  Timolhée  qui  avait  travaillé 
avec  lui  à  la  fondation  de  li  ur  église  et  qu'il  se  propose 
de  leur  envoyer  sou--  ju-i i    pin-   I  ;  i    leur  mes- 

sager auprès  de  lui.  Il  enverra  Timothée  dès  qu'il 
aura  vu  la  tournure  que  prendra  son  procès,  il  espère 
b-  suivre  sans  retard.  \.  19-24.  Quant  à  Épaphrodite,  il 
ne  veut  pas  tarder  un  instant  à  le  leur  rendre.  Il  ra- 
conte la  grave  maladie  qu'il  a  c  :  Romi  sa 
convalescence  inespéré,-.  I  aei-m-il  empressé  qu'ils  de» 
\ronl  faire  à  un  homme  qui  lui  a  été  si  utile!  \ .  25-30. 

B)  Partie  morale,  m.  1-iv,  9.  —  Au  dernier  moment, 
Paul,  qui  peut-être  songeait  à  abréger  sa  lettre,  revient 
aux  divers  avis  qu  il  juge  utiles  aux  Philippiens.  Il  les 
met  en  garde  :  —  <i  judaïsants  qu'il  traiti 

la  plus  grande  sévérité  el  une  énergie  d'expressions 
toute  sémitique,  m,  2-14.  Il  montre,  par  son   propre 
exemple,  lecas  qu'il  faut  faire  de  la  justice  légale  :  elle 
n'est  que  pous-ieie  et  ordure  auprès  de  la  \  raie  justice, 
qui  est  celle  du  Christ.  —  6)  Contre  les  mauvais 
pies  de  chrétiens  mondains  et   s, -usuels  dont  lApôtre 
parle  avec   larmes.  Ces   exemples   ne  venaient    pa 
leur  Kglise.  Ces  ennemis  de  la  croix  du  Christ  qui  à< 
honorent,  par  leur  vie  sensuelle,  sans  doute  par  l'ivro- 


285 


PH1LIPPIENS    (ÉPITR1-:    AUX1 


PHILISTINS 


286 


gnerie,  le  nom  chrétien,  étaient  étrangers  à  la  commu- 
nauté, 18,  19.  —  c)  Contre  les  dissensions,  iv,  29. 
L'Apotre  touche  d'un  mot  le  cas  qu'il  visait  plus  haut, 
d'une  manière  générale,  il,  2-11,  celuides  deux  femmes, 
Évodie  et  Synlyque,  qui,  sans  doute,  avaient  joué 
un  rôle  important  dans  la  fondation  de  l'Église  de  Phi- 
lippes. 

3°  Épilogue,  iv,  10-23.  —  Saint  Paul  remercie,  dans 
les  termes  les  plus  délicats,  la  générosité  des  Philip- 
piens.  Suivent  quelques  salutations.  Il  charge  l'assem- 
blée de  saluer  elle-même  tous  ses  membres  et  il  la  sa- 
lue de  la  part  des  collaborateurs  qui  l'entourent  ainsi 
que  de  la  part  des  membres  de  l'Église  de  Rome,  sur- 
tout de  ceux  de  la  maison  de  l'empereur. 

VIII.  Texte.  —  Cette  Épitre  ne  présente  pas  de  dif- 
ficultés spéciales  au  point  de  vue  du  texte.  Elle  se 
trouve  dans  les  manuscrits  suivants  :  N,  A,  B,  C,  D,  F, 
G,  K,  L,  P,  17,  31,  37,  47,  67,  80,  137,  et  dans  les  ver- 
sions latines,  égyptiennes  (copte,  memphitique,  sahi- 


Agar  Beet,  A  commentant  on  St.  Paul's  Epis/les  to  tlie 
Philippians,  1891;  'K.  A.  Lipsius,  Briefe  an  die  Gala- 
ter,  Borner,  Philipper,  dans  le  Handcommentar  zum 
Neuen  Testament,  bearbeitet  von  Holtzmann,  Lipsius, 
Schmiedel,  von  Soden,  2e  édit.,  t.  n,  part.  2,  Kribourg- 
en-B.,  1892.  c.  Toussaint. 

PHILIST1E,  pays  des  Philistins.  La  Vulgate  appelle 
exceptionnellement  Philisthœa  le  territoire  occupé  par 
les  Philistins,  Is.,  xiv,  29,  31,  comme  elle  appelle  aussi 
quelquefois  ses  habitants  Palsestini,  Gen.,  xxi,  33,  etc. 
Dans  le  passage  d'Isaïe,  saint  Jérôme  a  rendu  par  Phi- 
listhœa le  nom  hébreu  Pelését  qui  là  et  ailleurs,  Ps.  lx, 
10;  lxxxiii,  8;  lxxxvh,  4;  cvm,  10,  etc.,  désigne  pro- 
prement  le   pays  des    Philistins.   Voir  Philistins,    i. 

PHILISTINS,  peuple  qui  habitait  le  sud-ouest  delà 
Palestine  (lig.  68). 

I.  Nom.  —  Les  Philistins  sont  appelés  en  hébreu  or. 


mm 


''-■  ~~  Types  philistins  sur  les  monuments  égyptiens  de  Médinet-Abou. 


dique),  syriaque,  arménienne,  gothique,   éthiopienne. 
UViss.  Kritiscke  Teœt  Vntersuchungen  und  Text 
BertteUung,  1896. 

IX.  Bibliographie.  —  S.  Jean  Chrysostome,  In  Phi- 
lipp.   Itom.,   t.  lxii,  col.  205-298;  Théodore   de   Mop- 
.    In    Epist.    B.    Pauli    commentaria,   t.    lxvi, 
col.  922-926;  Théodoret,  Opéra,  t.  lxxxii,  col.  557-589; 
Pseudo-Athanase,  Synops.,  t.  xxvm,  col.  420;  Œcumé- 
nius,   t.   CXVIII,  col.   1256-1325;  Théophylacte,   t.  cxxiv, 
col.   1140-1204;   S.    Thomas   d'Aquin,   In    onines   dir'i 
Pauli    Apostoli    Epistolas    commentaria;   Estius,    /» 
omnes  Pauli  Apostoli  Epistolas  commentarii.  —  Com- 
mentateur!; modernes :' Henry  Alford,    Greek   Testa- 
.  :849-1861  ;  'de  Wette,  Kurzgefasstes  exegetisches 
Handbuch  zum  Neuen  Testament,  1836-1848;  -H.  A. 
Meyer,    Kritisch-exegetisches    Handbuch     ûber    die 
Briefe  an  die  Philipper,  5e  édit.,   1886;  .1.   Beelen, 
menlarius  in  Epistolam  ad  Philippenses,  in-4»' 
Loiivain.    hs.52;  'C.  J.  Ellicott,    .4   critical   and  gram- 
matical Commentait)  on  St.  Pauls'  Epislles  t<>  //',,■  Phi- 
ans,  1888;  'H.  von  Soden,  Der  Brief  des  Aposlels 
\san  diePhilipper,1889;'J.-B.Lig\ittoot,St.Paul's 
Epistle  m  the  Philippians,  12»  édit.,  1896;  'B.  Weiss, 
Der  Philipperbrief  ausgeselzl ,  1859;  'A.  Kbipper,  Der 
Brief  des  Apost'eU Paulus  an  die  Philipper,  1883;  M. 


dinairement  PeliSlîm:  quelquefois Pelisfiyim ;  au  sin- 
gulier, Pelisti.  Ces  mots  désignent  les  habitants  du 
pays  lui-même,  lequel  est  appelé  aussi  Pelését.  Les 
Septante  appellent  les  Philistins  «ÊuXeoTiefp.  (variante  : 
*i).t<mei'pi)  dans  le  Pentateuque,  Josué  et  l'Ecclésias- 
tique, XL VI,  18;  xlvii,7;  L,26;  IMach.,  m,  24;  'AXXiçuXot, 
«  étrangers,  »  dans  les  autres  livres  de  l'Ancien  Testa- 
ment. Ils  ne  sont  pas  nommés  dans  le  Nouveau.  La 
Vulgate  les  appelle  Pliilistseus,  Philisliim,  Philistini, 
Palsestini.  Les  documents  égyptiens,  d'après  l'opinion 
la  plus  répandue  parmi  les  égyptologues,  les  appellent 

.  "  .  ,  -*    l|  *-àJt,  Purusati  =  Pulusati  (1rs  Égyptiens 

transcrivaient  la  lettre  l  par  un  r,  parce  qu'ils  ne  dis- 
tinguaient pas  les  deux  sons  l'un  de  l'autre  dans  leur 
langue  et  dans  leur  prononciation). 

II.  Origine  des  Philistins.  —  Elle  a  été  longtemps 
très  controversée  et  aujourd'hui  encore  on  ne  peut  la 
déterminer  avec  une  entière  certitude.  L'Écriture  ne 
l'indique  nulle  part  d'une  manière  explicite,  mais  elle 
les  fait  venir  de  Caphtor.  Nous  lisons  dans  le  Deuté- 
ronome,  n,  23:  «  Les  Hévéens,  qui  habitaient  dans  des 
villages  jusqu'à  Gaza  (c'est-à-dire  dans  le  pays  qui  de- 
vint celui  des  Philistins)  furent  détruits  par  les  Caph- 
torim,  qui,  étant  sortis  de  Caphtor,  s'établirent  à   leur 


287 


PHILISTINS 


288 


place,  s  La  Vulgate  appelle  les  Caphtorim  Cappadoeiens 
et  Caphtor.  la  Cappadoce.  Ainos,  IX,  6.  met  à  son  tour 
dans  la  bouche  de  Dieu  ces  paroles;  «  X'ai-je  pas  fait 
venir  les  Philistins  de  Caphtor  i  Vulgate  :  Paùestinos  de 
Cappadocia)  ?  »  Jérémie,  xi.vi,  4.  appelle  aussi  les 
Philistins  o  les  restes  de  l'île  de  Caphtor  »  (Vulgate  : 
Palsesthinos  reliquias  insulœ  Cappadociss).  Mais  l'Ecri- 
ture ne  précise  pas  la  situation  de  Caphtor.  La  table 
ethnographique,  Gen.,  x.  13-14,  nous  apprend  seule- 
ment que  les  Caphtorim  étaient  des  descendants  de 
Mesraïiri.  Cf.  I  Par.,  I,  12.  Le  texte  de  la  Genèse,  dans 
sa  forme  actuelle,  représente  les  Philistins  comme  issus 
des  Casluim  et  ne  signale  aucun  rapport  de  pa- 
renté directe  entre  eux  et  les  Caphtorim  :  Chasluim, 
de  quibus  egressi  sunt  Philisthiim  et  Caphtorim, 
comme  traduit  la  Vulgate.  D'après  les  autres  textes 
scripturaires  qui  ont  été  rapportés,  il  est  très  vraisem- 
blable qu'il  y  a  une  transposition  dans  le  v.  14  de 
Gen.,  x.  ri  que  c'est  après  le  mot  Caphtorim  et  non 
avant,  qu'il  faut  lire  l'incidente  :  o  et  d'où  sont  sortis  les 
Philistins.  >.  Quoi  qu'il  en  soit,  et  de  quelque  manière 
qu'on  interprète  le  passage  de  la  table  ethnographique. 


Les  Septante  et  la  Vulgate  ont  traduit  le  nom  de 
Caphtor  par  o  Cappadoce  ».  Sur  l'identification  du  nom 
hébreu,  voir  Caphtorim.  t.  il,  col.  211.  D'après  les  ren- 
seignements  fournis  par  les  documents  égyptiens,  les 
Philistins,  ou  au  moins  une  partie  d'entre  eux.  durent 
donc  venir  de  la  cote  méridionale  de  l'Asie  Mineure,  en 
longeant  les  cotes  de  Syrie,  peut-être  avec  les  Hélhéens. 
et  s'établir  finalement  dans  la  Séphéla. 

Des  savants  modernes  ont  voulu  identifier  Caphtor 
avec  l'île  de  Crète  et  considèrent  les  Philistins  comme 
des  Cretois  d'origine.  Ils  s'appuient  principalement 
sur  le  nom  de  Céréthéens  donné  a  une  tribu  philis- 
line  et  à  une  partie  des  gardes  du  corps  de  David.  Voir 
Céréthéens,  t.  ii,  col.  141.  De  la  distinction  qu'établit 
plusieurs  fois  le  texte  sacré  entre  le  Céréthéen  et  le 
Phéléthien  =  Philistin,  I  Reg.,  xxx.  Il:  Il  Reg.,  vin, 
18;  xv,  18;  xx,  3,  7,  23;  III  Reg.,  i,  38,  44;  IV  Reg.. 
xi.  19;  I  Par.,  xvm,  17,  et  du  parallélisme  ou  de  la 
synonymie  qu'établissent  entre  les  Céréthéens  et  les 
Philistins,  Sophonie,  n,  5  (hébreu  :  g<>i  Kerêfim;  Sep- 
tante :  nàpoixot  Kpi)T<âv;  Vulgate  :  gens perditorv 
Ézéchiel,  xxv.  16  (hébreu :Kerê(îm;  Septante  :  Kpr,Tar; 


l'origine  chamitique  des   Philistins  n'en  demeure  pas 
moins  établie  par  son  témoignage. 

Les  documents  égyptiens  ont  fourni  de  nouvelles  ln- 
mières  sur  ce  peuple.  Le  nom  de  Purusati  donné  par  les 
Égyptiens  aux  Philistins  porte  à  croire  que  c'était  là  leur 
nom  national  et  qu'on  ne  doit  pas  en  chercher  l'étymo- 
logie,  comme  on  l'a  fait  souvent  jusqu'à  nos  jours,  dans 
une  racine  sémitique.  La  manière  dont  ils  sont  représen- 
tés sur  les  monuments,  leur  costume,  leur  armure,  leur 
type  sont  ceux  que  les  documents  égyptiens  attribuent 
aux  peuples  de  la  cùle  méridionale  de  l'Asie  Mineure  et 
des  îles  de  la  mer  Egée.  \V.  M.  Millier.  Asien  unit  Eii- 
ropa,  p.  342,  Mii'i.  Les  inscriptions  égyptiennes  appellent 
la  cote  méridionale  de  l'Asie  Mineure  Kefto  el  même 
Kptàr,  W.  M.  Mùller,  Die  Urheimath  der  Philistâer, 
dans  S/m/,  zur  vorderas.Geschichte,  1900,  p. 5;  H.  Savce. 
The  higher  Crilicism  and  the  verdict  of  the  Monu- 
ments. 2  édit.,  p.  13,  et  ce  nom  rappelle  le  Caphtor 
biblique.  De  tout  cela  on  peut  conclure  que  les  Phéni- 
ciens n'étaient  pas  de  race  sémitique,  à  rencontre  de 
plusieurs  savants,  tels  que  Schwalley,  Die  liasse  der 
Philistâer,  dans  la  Zeitschrift  fur  wissenschaftliche 
Théologie,  1891,  p.  103-108.  On  a  voulu,  sans  autre 
preuve  qu'une  coïncidence  fortuite,  expliquer  le  nom 
des  Philistins  dans  te  sens  d'à  émigrants  »,  en  le  déri 
vaut  de  la  racine  •--:,  pU,  «  émigrer,  b  qui  existe 
encore  en  éthiopien,  mais  celle  élymologie  suppose 
que  c'est  un  nom  qui  leur  a  été  donné  par  les  habi- 
tants du  pays  où  ils  ont  émigré  et  nous  avons  vu  qu'il 
est  probable  que  C  est  au  contraire  leur  nom  primitif. 
il  est  vrai  que  les  Septante,  dans  quelques  livres  de 
l'Écriture,  col.  28G,  ont  traduit  leur  nom  par  à).X<5çu).oi, 
mais  ce  nom  qu'on  peut  rendre  par  o  étrangers  l  n'est 
pas  nécessairement  la  traduction  du  mot  g  Philistins  v. 


Vulgate  inlerfertores),  on  doit  conclure  qu'il  J  avail 
en  effet  des  Philistins  d'origine  Cretoise  cl  îles  Phi- 
listins venus  d'autres  contrées.  Les  découvertes  de 
M.  Arthur, I.  Evans  en  Crète  ont  montré  que  cette  Ile 
était  un  ancien  foyer  de  civilisation  très  avancé.  Evans, 
Cretan  Pictograph  and  prœ-Phœnician  Script,  in-8». 
Londres,  1895;  ld.,  The  Mycentean  Tree  ami  Pillar 
EnltanditsMediterranean Relations, with  illustrations 
front  recrut  Cretan  finds,  in-4«,  Londres.  1901;  ld.. 
Theprehistoric  Tombs  of  Knossos,  in- 1",  Londres,  190f>. 
La  présence  de  diverses  tribus  philistines  dans  la  Sé- 
phéla s'explique  facilement  par  l'arrivée  successive  dans 
celle  contrée  de  divers  émigrants  qui  se  sont  ensuite 
plus  ou  moins  unis  ou  fendus  ensemble  par  suite  de  la 

c mnauté  d'intérêts.  Les  Céréthéens  semblent  avoir 

habité  l'extré  ilté  méridionale  de  la  Palestine.  I 
(Sam.),  xxx,  14.  Mais  les  détails  nous  font  défaut  sur 
l'histoire  de  ces  diverses  émigrations.  Nous  savons  ce- 
pendant qu'une  -.les  invasions  principales  eut  lieu  sona 
le  règne  du  pharaon  Ramsès  III.  Les  monuments 
(fig,  69)  de  ce  roi   nous  les  montrent  emmenant  avec 

eux,  sur  des  chars  traînés  par  des  bieufs.  leurs  femmes 
et  leurs  enfants.  W.  M.   Muller.   A  sien   und   Ew 

p,  ;;<;<;. 

On  a  essayé  de  faire  des  inductions  sur  l'origine 
des  Philistins  d'après  leur  langage.  Malheureusement 
la  langue  que  parlaient  primitivement  les  Philistins 
ne  nous  est  pas  connue,  <  in  sait  que  le  roi  de  G-eth,  du 
temps  de  David  el  de  Salomon,  s'appelait  Achis  (hébreu  : 
AkiS);  les  inscriptions  assyriennes  d'Asarhaddon  et 
d'Assurbanipal  nommentun  Ikausu,  roi  d'Accarop,  qui 
rappelle  le  nom  d'Achis  cf.  W.  M.  Muller.  /';<■  Urhei- 
math der  Philister,  dans  Studien  zur  vorderasiati- 
schen  Geschichte,  1900,  p.  9);  un  roi  de  Dor  est  nommé 


289 


PHILISTINS 


290 


Bidir  dans  le  papyrus  Golénischefl",  ibid.,  p.  37.  On 
peut  supposer  que  le  titre  de  sérén  (seranim)  donné 
dans  l'Écriture  aux  chefs  des  cinq  principales  villes  des 
Philistins  est  un  mot  de  leur  langage  primitif.  Mais  ces 
données  sont  trop  maigres  pour  en  tirer  quelque  con- 
clusion sur  la  nature  de  leur  langue  originelle.  Après 
leur  arrivée  en  Palestine,  ils  semblent  avoir  adopté 
assez  vite  le  langage  du  pays;  leurs  noms  dans  l'Ancien 
Testament  et  dans  les  documents  cunéiformes,  sont 
pour  la  plupart  sémitiques  ou  chananéens. 

II.  GÉOGRAPHIE.  —  L'étendue  du  pays  occupé  par  les 
Philistins  n'a  pas  été  la  même  aux  diverses  époques  de 
leur  histoire.  Leur  territoire,  après  l'occupation  de  la 
Terre  Promise  par  les  Hébreux,  embrassait  surtout  la 
plaine  maritime  de  la  Sêphélah  qui  s'étendait  d'Ascalon 
au  nord  jusqu'au  désert  de  Gaza  au  sud  et  des  posses- 
sions de  la  tribu  de  Juda  à  l'est  à  la  mer  Méditerranée 
à  l'ouest.  Jos.,  xin,  2-3;  I  Reg.  (Sam.),  VI,  12;  Is.,  ix, 
12  (hébreu.  11).  C'était  la  Philistie  propre.  Les  Grj.cs 
employaient  ce  nom,  dont  nous  avons  fait  Palestine, 
dans  un  sens  imprécis  et  il  s'étendit  peu  à  peu  jusqu'au 
Jourdain.  Reland,  Palœstina,  1714,  p.  38.  Les  Philis- 
tins, malgré  les  conquêtes  qu'ils  firent  à  diverses 
époques,  demeurèrent  toujours  eux-mêmes  renfermés 
dans  leur  territoire,  qui  comprenait  cinq  villes  princi- 
pales, leur  servant  de  centre  :  Gaza,  Azot.  Ascalon, 
Geth  et  Accaron,  I  Reg.  (Sam.),  VI,  17;  Jos.,  xm,  3; 
.1er.,  xxv,  20;  Soph.,  n,  4-7,  etc.  (voir  ces  noms),  et 
quelques  autres  bourgs  ou  villages  fortifiés  ou  non 
murés,  Jabné  ou  Jamnia,  II  Par.,  xxvi,  6;  Siceleg, 
I  Reg.  (Sam.),  xxvil,  5,  et  autres.  Dent.,  n,  23;  I  Reg. 
(Sam.),  vi,  18. 

La  plaine  de  la  Séphélah  est  plate  et  unie,  avec  de  lé- 
gères ondulations;  suffisamment  arrosée,  fertile  et 
presque  partout  cultivable.  Voir  SÉPHÉLAH.  La  côte,  de- 
puis le  Carmel  jusqu'à  Gaza,  formée  de  dunes  et  de  col- 
lines de  sable  peu  élevées,  ne  possède  pas  de  grands  ports 
naturels.  Les  villes  maritimes,  Azot,  Ascalon,  Gaza, 
avaient  de  petits  ports  (|iaiov(iï;),  mais  peu  sûrs,  et  les 
Philistins  ne  purent  jamais  rivaliser  pour  leur  com- 
merce avec  les  Phéniciens.  En  revanche,  la  roule  qui 
longeait  la  mer  avait  une  importance  capitale  pour  les 
caravanes  qui  devaient  passer  à  Gaza  pour  se  rendre 
en  Egypte,  ou  en  Phénicie,  et  pour  remonter  en  Syrie, 
en  Rabylonie  et  en  Assyrie.  Les  conquérants  égyptiens 
étaient  obligés  de  suivre  cette  voie  pour  porter  leurs 
armes  au  nord  et  sur  les  bords  de  l'Euphrate  et  du 
Tigre;  les  rois  de  Ninive  et  de  Babylone  devaient  faire 
de  même,  en  sens  contraire,  pour  soumettre  la  vallée 
«lu  Xil.  Les  invasions  égyptiennes  dans  l'Asie  antérieure 
et  les  invasions  babyloniennes  en  Egypte  remontent  à 
une  antiquité  reculée. 

III.  Organisation  politique.  —  1°  Gouvernement.  — 
Les  Philistins  étaient  un  peuple  assez  avancé  en  civi- 
lisation. Ils  avaient  une  organisation  supérieure  à  celle 
des  tribus  qui  habitaient  à  leur  arrivée  la  terre  de 
Chanaan,  et  leur  supériorité  militaire  les  mit  en  état  de 
iblir  avec  solidité  sur  le  territoire  dont  ils  s'empa- 
rèrent. Voir  W.  M.  Mùlier,  Asien  und  Europa,  p.  361- 

l'hilistins  avaient  cinq  seranim  ou  chefs  parti- 
culiers. On  peut  supposer  que  c'était  parce  qu'ils  appar- 
tenaient à  cinq  tribus  différentes  d'origine.  Toutes  ces 
tribus  avaient  sans  doute  des  liens  de  parenté  et  elles 
avaient  pu  être  attirées,  à  la  même  époque  ou  à  des 
époques  différentes,  par  les  besoins  de  l'émigration,  sur 
la  cote  occidentale  de  la  Palestine.  Les  Pulusati  étaient 
peut-être  venus  les  premiers,  les  Cércthéens  ensuite. 
Cf.  W.  M.  Mùller,  Die  Chronologie  der  PhilUterein- 
•vanderung,  lue.  cit.,  p.  30-42.  —  Le  nom  général  de  se- 
ranîmdonné  à  leurs  chefs  leur  est  particulier  et  doit  être 
un  reste  de  leur  langue  primitive.  Il  n'est  jamais  em- 
ploie qu'au  pluriel.  On  n'en  a  pas  encore  découvert 

DICT.   DE  LA  BIBLE. 


d'étymologie  satisfaisante.  Les*  Septante  [traduisent  ce 

nom  le  plus  souvent  par  Ty.ryy-.x..  1  Reg.  (Sam.),  v.  8, 
11;  VI,  4.  12,  16,  18;  vu,  7;  xxix,  2.  0,  7;  et  Tx-ymi-.i., 
Jos.,  XIII,  3;  Jud.,  ni,3;  aussi  par  ïpyovTeç,  Jud.,  XVI, 
5,  8,  18,  23,  27,  et  par  <rrpaTï]Yo<,  I  Par.,  XII,  19.  La 
Vulgale  a  reguli,  Jos.,  xm.  3:  satrapx,  Jud.,  m.  3;  xvi. 
8:  I  Reg.,  v.  s.  11.  vi,  12,  16;  vu,  7;  \xix,  2.  (i,  7.  prin- 
cipes, Jud.,  xvi.  5,  18,  -'■'■  27;  I  Par.,  xu,"l9:  provincise, 
I  Reg.,  vi,  5,  18.  Seranim  désigne  donc  certainement 
le  chef  de  chacune  des  cinq  grandes  villes  pliilistines, 
Gaza,  Azot,  Ascalon,  Geth  et  \ccaron.  los..  xm,  3. 

Ces  chefs  avaient  tout  à  la  fois  une  autorité  militaire 
et  civile.  Ils  avaient  sous  leurs  ordres  des  sarim  ou 
commandants  de  troupes,  I  Reg.  (Sain.),  xviii,  30  [man- 
que dans  les  Septante;  Vulgate  ;  principes);  xxix,  3 
(aa-pà-ac,  uipatriYOt;  principes  .en  temps  de  guerre.  Les 
textes  parlent  tantôt  «  desarmées  »,  IReg.  (Sam.),  xxm, 
3;  xxix,  1,  et  tantôt  «  de  l'armée  »,  xxviu,  1.  Chacun  des 
seranim  avait  sans  doute  se«  troupes  personnelles,  cf. 
I  lie:;.  (Sam.),  xxvm,  1;  xxix,  2,  mais  ils  agissaient 
toujours  ensemble  et  d'un  commun  accord.  Leurs  forces 
étaient  divisées  par  groupes  de  mille,  subdivisés  en 
centaines.  I  Reg.  (Sam.),  xxix,  2.  C'est  tantôt  le  chef 
de  Gaza,  nommé  le  premier,  Jos.,  xm,  3;  Arnos,  i,  6-7, 
tantôt  le  chef  d'Azot,  tantôt  celui  de  Geth  ou  d'une  autre 
des  cinq  villes  qui  parait  avoir  été  à  la  tête  des  Philis- 
tins. I  Reg.  (Sam.),  v,  1;  vi,  17;  I  Par.,  xx,  6.  Chaque 
sérén,  gouvernait  outre  sa  ville  capitale,  les  dépen- 
dances du  voisinage.  I  Par.,  xvm.  1:  I  Ri  _.  (Sam.),  v,  6|; 
Jos.,  xv,  45-47. 

On  ne  sait  si  la  dignité  des  seranim  était  héréditaire 
ou  élective  et  si  le  titre  de  roi,  donné  quelquefois  aux 
chefs  philistins,  implique  une  fonction  particulière.  Ce 
n'est  pas  probable.  Aucun  des  rois  nommés  dans  l'Écri- 
ture ne  régnait  sur  toutes  les  villes  de  la  Philistie  et 
ceux  qui  sont  nommés  dans  les  documents  cunéiformes 
sont  à  la  tête  des  villes  où  nous  savons  qu'il  y  avait  des 
seranim.  Jer.,  xxv,  20;  Zach.,  ix,  5.  La  division  du 
pays  en  cinq  districts,  qu'on  retrouve  dès  le  commen- 
cement, peut  avoir  été  le  résultat  de  la  manière  dont 
les  émigrants  avaient  fait  la  conquête  du  pays,  peut-être 
successivement.  Leur  politique  semble  avoir  consisté 
surtout,  dans  leurs  rapporls  avec  les  Israélites,  non 
pas  à  s'emparer  de  leur  territoire,  mais  aies  empêcher 
de  former  un  tout  compact  dont  ils  auraient  eu  à  re- 
douter la  puissance.  Dès  que  les  Israélites  veulent 
s'unifier  sous  Héli  et  Samuel,  il  les  attaquent.  I  Reg. 
(Sam.),  vu,  7;  de  même  du  temps  de  Saûl,  xm-xiv; 
quand  David  ne  règne  que  sur  le  sud  de  la  Palestine, 
ils  le  laissent  en  paix;  dès  que  les  douze  tribus  se  sou- 
mettent à  lui,  ils  lui  font  la  guerre.  II  Reg.,  v,  17.  Pour 
dominer  plus  sûrement  les  Israélites,  au  moment  où  ils 
faisaient  effort  pour  s'unir  entre  eux,  les  Philistins  leur 
imposèrent  le  désarmement  et  leur  interdirent  la  fabri- 
cation des  armes,  au  commencement  du  règne  de  Saûl. 

I  Reg.  (Sam.),  xm,  19-23.  La  supériorité  de  leur  orga- 
nisation militaire  les  mettait  d'ailleurs  en  état  d'imposer 
leur  volonté  à  leurs  voisins. 

2"  L'armée  philistine.  —  Les  Philistins  se  distin- 
guaient par  leur  valeur  guerrière.  On  comptait  parmi 
eux  des  soldats  redoutables,  surtout  par  leur  force 
exceptionnelle.  Voir  Goliath,  t.  m,  col.  268.  L'histoire 
de  David.  II  Reg.  (Sam.),  xv,  18,  19,  22,  et  ce  qui  nous 
est  raconté  des  Céréthéens  et  des  Phélétiens  (voir  ces 
mots),  attestent  qu'ils  avaient  le  goût  des  armes  et  qu'ils 
•  ■n  faisaient  métier.  Ils  étaient  divisés  et  groupés  d'une 
manière  régulière,  I  Reg.,  xxix,  2,  armés  de  l'arc,  XXXI, 
3;  I  Par.,  X,  3,  mais  ce  qui  faisait  surtout  leur  force 
et  mettait  Israël  dans  l'impossibilité  de  leur  résister 
en  plaine,  c'étaient  leurs  chars.  I  Reg.  (Sam.),  xm,  5; 

II  Reg.  (Sam.),  i,  0;  cf.  Jud.,  i,  19.  Leurs  fantassins 
avaient  des  armes  défensives  comme  des  armes  offen- 
sives, le  bouclier,  le  casque,  la  cuirasse,  l'arc,  la  lance, 

V.  -   10 


291 


PHILISTINS 


292 


la  pique  el  l'épée  large  et  courte  (fig.  69).  I  Reg..  xvn, 
5-7.  Ils  étaient  aussi  marins  et  l'histoire  enregistre 
quelques-unes  de  leurs  campagnes  navales.  Des  navires 
partis  d'Ascalon,  au  commencement  de  leur  séjour  dans 
I  i  Séphélah,  battirent  les  vaisseaux  de  Sidon  et  sacca- 
gèrent la  ville  pendant  les  premières  années  du  XIIe  siècle 
avant  notre  ère.  Justin,  XVIII,  m,  5.  Les  monuments 
de  Ramsès  III  nous  ont  conservé  la  forme  de  leurs 
navires  (voir  fig.  230,  t.  rv,  col.  861)  et  aussi  le  souvenir 
de  leur  défaite  par  ce  pharaon  qui  les  battit  sur  terre  et 
sur  mer  avec  leurs  confédérés,  soit  que  cette  défaite  eût 
ralenti  leur  ardeur,  soit  surtout  qu'ils  trouvassent  plus 
de  profit,  avec  moins  de  danger,  à  rester  tranquilles  dans 
leur  riche  plaine,  et  à  se  contenter  du  commerce  intérieur 
ou  cotier,  ils  semblent  avoir  renoncé,  d'ailleurs  d'assez 
bonne  heure,  aux  expéditions  aventureuses  sur  mer. 

agriculture  et  commerce.  —  Les  Philistins,  tout 
en  -  exerçant  à  la  guerre,  ne  négligeaient  pas  l'agri- 
culture. Ils  cultivaient  le  blé.  dans  leur  riche  plaine  de 
la  Séphélah,  qui  l'a  toujours  produit  en  abondance.  Jud., 
xv.  .">;  cf.  IV  Reg.,  vin.  2.  Ils  s'adonnaient  aussi  sans 
doute  au  commerce,  la  situation  de  leur  territoire, 
comme  nous  l'avons  vu  col.  289,  le  rendait  un  lieu 
de  passage  pour  les  caravanes  qui  trafiquaient  entre 
l'Éypte  et  les  pays  asiatiques  et  ils  devaient  mettre  à 
profit  celte  circonstance  si  avantageuse. 

i  Religion.  —  En  s'établissant  sur  la  côte  occiden- 
tale  de  la  Méditerranée,  les  Philistins  y  apportèrent 
avec  eux  la  religion  de  leurs  pères.  Le 
culte  de  Dagon,  Jud.,  xvi.  23;  I  Reg. 
Sam.),  v,  2:  IPar.,x,10;IMaeh.,x,84; 
xi,  i:  voir  Dagon,  t.  n,  col.  1204,  et 
celui  de  Béelzébub,  IV  Reg.,  i,  2,  3,  6, 
16;  voir  Béelzébub,  t.  i,  col.  1547.  leur 
était  propre,  comme  celui  de  Derkéto, 
cou u u  par  Piodorede  Sicile, il, 4  (fig. 70). 
.Mais  selon  la  coutume  de  la  plupart  des 
anciens  peuples,  à  leur  culte  national 
ils  durent  joindre  dans  la  Séphélah  le 
tulle  des  dieux  déjà  adorés  dans  le 
pays.  Peut-être  Astoreth  ou  les  Astarthés 
furent-elles  du  nombre  des  divinités 
adoptées;  peut-être  aussi  vénéraient-ils  déjà  ces  déesses, 
compagnes  de  leurs  dieux,  avant  leur  émigration. 
I  lie;:.  (Sam.),  XXXI,  10;  Hérodote,  I,  105.  Ils  avaient 
de-  temples  consacrés  à  Dagon  et  l'on  y  vénérait  sa 
statue.  I  Reg..  \.  2-5;  XXXI,  9-10;  I  Par..  X,  10;  I  Macb.. 
\.  83-84;  en  lui  offrait  des  sacrifices  zébah.  Jud.,  xvi, 
2-3.  Des  prêtres,  kohànim,  étaient  voués  à  son  culte. 
I  Reg.  Sam.),  VI,  2.  Un  lui  demandait  conseil  dans 
1  ■•  circonstances  difficiles,  i  Reg.  Sam.),  vi,  2.  On 
consultait  aussi  les  devins  [gôsmim;  Vulgate  :  divini), 
qui  paraissent  avoir  joui  d'un  grand  crédit,  vi,  2.  Leurs 
'ônenim  [Vulgate  :  augure»  'tient  renommés.  Is-, 
n,  (i.  Les  Philistins  avaient  une  coutume  religieuse 
singulière  a  A/ot.  A  la  suite  de  la  chute  de  la  Statue  de 
Dagon,  d.ms  le  temple  fameux  de  cette  ville,  quand 
l'arche  \  axait  été  déposée,  ils  ni'  marchaient  pas  sur 
le  seuil  de  la  porte,  mais  le  franchissaient  d'un  bond. 

I  Reg.  Sam.),  \.  1.  Cf.  Soph.,  i.  9.  Ils  emportaient 
avec  eux  dans  leurs  guerres  les  statues  de  leurs  dieux 
['àfabèhém;  Septante  :  BeoS;  Vulgate  :  sculptUia  sua). 

II  Ri  -     Sam.),  v,  21.   Voir  I 20  .  t.  m,  col.  821. 

Ils  attribuaient  leurs  victoires  à  la  protection  de  leurs 
divinités  et  consacraient  leurs  trophées  dans  leurs 
temples,  l  Reg  (Sam  \.  1-2:  xxxi,  9.  Ils  ne  prati- 
quaient pas  la  cire ision,  ce  qui  les  distinguait  des 

autres  habitants  de  la  Palestine  el  des  Kgyptiens,  el 
les  faisait  mépriser  par  les  Israélites  qui  les  appelaient 
a  i  dédain  incirconcis  .  Jud..  xrv,  :'.;  xv.  18:  I  Reg. 
(Sam.),  siv,  6;  xvit,  26,  36;  ïxxi,  i:  Il  Reg.  (Sam.),  i, 
20. 

IV.  Histoire,  —  l«  Avant  l'établissement  des  Israé- 


lites en  Palestine.  —  Nous  ne  savons  rien  de  l'histoire 
des  Philistins  avant  leur  arrivée  en  Palestine.  Nous 
ignorons  aussi  l'époque  de  cette  arrivée.  Du  temps 
d'Abraham,  il  y  avait  déjà  des  Philistins  [Palsestini  dans 
la  Vulgate)  dans  la  terre  de  Chanaan,  Gen.,  xxi.  33,  34, 
mais  ils  paraissent  avoir  habité  alors  plus  au  sud  que  les 
émigranls  du  même  nom  qui  s'établirent  plus  tard 
dans  la  Séphélah.  Ils  avaient  à  leur  tète  un  chef  qui 
portait  le  titre  de  roi.  mélék,  et  s'appelait  Abimélech. 
Il  demeurait  à  Gérare.  Gen.,  xxxvt.  I.  au  sud  de  Gaza. 
Sur  les  rapports  du  roi  de  Gérare  avec  Abraham  et 
Isaac,  voir  Abimélech,  t.  i,  col.  53,  54,  et  Gérare,  t.  m, 
col.  200.  Il  faut  observer  que  quelques  savants  ne 
croient  pas  qu'Abimélech  fût  un  véritable  Philistin:  ils 
supposent  que  le  titre  de  «  roi  des  Philistins  lui  est 
attribué,  non  pas  parce  qu'il  était  de  leur  race,  mais 
parce  qu'il  habitait  dans  la  contrée  qui  reçut  plus  tard 
le  nom  de  Philistie.  Quoi  qu'il  en  soit,  tout  le  monde 
admet  que  des  Philistins  étaient  en  possession  de  la 
Séphélah  du  temps  de  Moïse,  etles  Israélites,  sur  l'ordre 
de  Dieu,  évitèrent  de  se  rendre  dans  la  Terr 
«  par  le  chemin  du  pays  des  Philistins,  •>  quoiqu'il  fût 
le  plus  court,  parce  qu'ils  n'étaient  pas  capables  de  forcer 
le  passage  et  de  lutter  contre  des  hommes  aguerris  tels 
que  les  habitants  du  pays.  Exod.,  XIII,  17.  Les  Caph- 
torim  (Philistins)  avaient  déjà  chassé  auparavant  les 
Ilévéens  de  Gaza,  à  une  époque  de  date  inconnue.  Deut., 
n.  -i:;. 

L'histoire  antérieure  du  pays  ne  nous  est  connue  que 
très  imparfaitement  et  d'une  manière  tout  à  fait  frag- 
mentaire, an  moyen  des  rares  renseignements  épais 
dan-  les  documents  cunéiformes  et  hiéroglyphique-. 
Depuis  longtemps  déjà  les  plaines  qui  s'étendent  sur 
le  rivage  occidental  de  la  Méditerranée  avaient  été  té- 
moins des  grands  conflits  qui  avaient  mis  aux  prises 
l'Afrique  septentrionale  avec  l'Asie  occidentale. 

Les  lettres  de  Tell  el-Amarna  fournissent  la  preuve 
qu'antérieurement  au  v.  siècle  avant  notre  ère  la  civili- 
sation babylonienne  et  probablement  sa  domination 
-  il  lient  implantées  sur  la  cote  palestinienne  et  dan- 
toute  la  Palestine.  Sous  la  xvnr  dynastie  égyptienne, 
le  pays  de  Chanaan  faisait  partie  de  l'empire  pharao- 
nique sous  le  nom  de  Haru.  Les  noms  des  villes  pbilis- 
tines  et  de  nombreuses  villes  palestiniennes  reviennent 
constamment  dans  les  lettres  de  Tell  el-Amama,  Gaza, 
Ascalon,  Joppé,  Lachis,  Geth,  Gazer.  Aîalon,  Jérusalem, 
etc.  Thothmès  III.  Séti  I",  Ramsès  II.  Ménephtah 
avaient  cherché'  à  s'assurer  la  possession  du  pays 
et  entretenu  des  soldats  à  Gaza.  Maspero,  Histoire  an- 
tienne  tin  peuples  de  l'Orient,  i"  édit.,  1884,  p.  313; 
II.  Brugscb,  Geschichle  Aegyptens,  1877,  p.  529,  581 
Ramsès  11  lit  le  siège  d'Ascalon.  11  nous  en  a  laissé  la 
représentation  sur  les  murs  du  grand  temple  de  Karnak. 
voir  t.  i.  fig.  286,  col.  1061,  et  elle  nous  montre  qi 
Philistins  n'y  étaient  pas  encore  établis;   du   moins  les 

hommes  que  combat  le  pharaon  ne  ressemblent-ils  en 
aucune  façon  à  ceux  que  va  nous  (aire  connaître 
-  111.  —  C'est  du  temps  de  ce  derner  roi  qu'eut 
lieu  la  plus  grande  invasion  philistine.  Ramsès  III  nous 
a  conservé  sur  les  bas-reliefs  de  Médinet-Abou  les 
principaux  épisodes  de  la  grande  campagne  que  les 
7'ii/i?sot!eld'autres  peuples  de  la  mer  entreprirent  contre 
l'Egypte  sous  son  règne.  Le  texte  qui  accompagne  les 
tableaux  de  la  guerre  est  peu  explicite  el  très  incom- 
plet, mais  nous  voyons  par  l'ensemble  que  les  confé- 
dérés lurent  battus  sur  terre  (fig.  71)  et  sur  mer  (voir 
col.  291),  et  il  leur  lit  des  prisonniers  (fig.  72).  Néan- 
moins pour  se  débarrasser  d'eux,  le  roi  d'ÉgypU  leur 
lit  des  concessions  et  il  accorda  aux  Pulusali  la  pi  line 
de  la  Séphélah  pour  s'y  établir.  Les  nouveaux  venus 
trouvèrent  des  émigrants  déjà  établis  dans  le  pays; 
ils  s'unirent  à  eux  et  apportèrent  aux  anciens  occu- 
pants un  accroissement  de  force  considérable  dont  les 


293 


PHILISTINS 


294 


conséquence  ne  tardèrent  pas  à  se  faire  sentir  pour  les 
Israélites. 

2°  Histoire  des  Philistins  depuis  l'époque  de  Josué 
jusqu'au  règne  de  Saut  —  Lorsque  les  douze  tribus 
avaient  conquis  la  Terre  Promise,  elles  avaient  dû  renon- 
cer à  s'emparer  de  la  plaine  des  Philistins,  n'étant  ni 
assez  fortes  ni  assez  bien  armées  pour  en  chasser  les 
possesseurs.  Celle  plaine  faisait  partie  de  leur  héritage. 
.los.,  xv.  i.   i.ViT.  mais  au  moment  du  partage  du  pays 


le  gouvernement  d'Héli  que  les  Philistins  commencèrent 
à  attaquer,  et  de  façon  redoutable,  les  Israélites  dont 
ils  furent  dès  lors  les  ennemis  acharnés  pendant  des 
siècles.  Ils  avaient  peu  redouté  les  descendants  de  Jacob, 
tant  que  ceux-ci  étaient  restés  divisés  en  tribus  séparées 
et  indépendantes,  mais  quand  elles  travaillèrent  à  former 
un  seul  peuple  uni  et  fort,  dont  la  cohésion  devinait 
un  péril  pour  les  habitants  de  la  Séphélah,  les  Philistins 
les  combattirent  avec  acharnement.   Ils  remportèrent 


71.  —  Pulusali  battus  sur  terre  par  le  pharaon  Ramsès  III.  Bas-relief  de  Médinet-Abou. 
D'après  Champollion,  Monuments  de  l'Egypte,  pi.  120. 


elle  n'était  pas  encore  entre  leurs  mains.  Jos.,  xm.  2-3; 
Jud.,  m,  3.  La  tribu  de  Juda,  à  qui  elle  avait  été 
allril  lée,  lit  quelques  tentatives  pour  s'y  établir,  et  rem- 
porta quelques  succès  contre  Gaza,  Ascalon  et  Accaron, 
Jud.,  i.  18.  mais  elle  ne  put  s'y  maintenir.  Les  Philis- 
tins, qui  ne  se  sentaient  pas  sans  doute  encore  assez 
forts  à  cette  époque,  ne  semblent  d'ailleurs  avoir  rien 
fait  en  ce  moment  pour  s'opposer  à  l'établissement  des 
Israélites  dans  la  terre  de  Chanaan.  Ils  eurent  même 
d'abord  des  relations  de  bon  voisinage,  Jud.,  xiv,  1,  7,  10, 
1 1.  Ce  ne  fut  que  lorsque  l'arrivée  de  nouveaux  émigrants 
du  temps  de  Ramsès  III  eut  augmenté  leur  puissance, 
qu'ils  se  mirent  à  harceler  les  Hébreux.  Jud.,  x,  6,  7, 
11.  Samgar  frappa  six  cents  d'entre  eux.  Jud.,  m,  31. 
S.inison  eut  à  lutter  contre  eux  pendant  toute  sa  vie. 
Jud..  xiv-xvi.   Voir   Samson.  Mais  ce  fut  surtout   sous 


contre  Israël  d'éclatantes  victoires  à  Aphec  à  la  fin  de  la 
judicature  d'Héli  et  s'emparèrent  de  l'arche  sainte. 
I  Reg.  (Sain.),  iv,  1-11.  Voir  Aphec  3,  t.  i,  col.  728; 
Arche  d'alliance,  t.  i,  col.  920.  Les  châtiments  divins 
obligèrent  les  vainqueurs  à  renvoyer  l'arche  à  Israël. 
1  Reg.  (Sam.),  v-vi.  Samuel  ayant  succédé  à  Héli  comme 
juge  d'Israël  rassembla  tout  le  peuple  à  Masphath.  Les 
Philistins  en  prirent  ombrage  et  marchèrent  de  nouveau 
en  armes  contre  eux,  mais  cette  fois,  ils  furent  battus  à 
Ében-Ézer  (La  Pierre  du  Secours).  Le  succès  des 
Israélites  fut  tel  qu'ils  recouvrèrent  les  places  qu'ils 
avaient  perdues  et  que  leurs  ennemis  les  laissèrent  en 
paix  jusqu'à  l'avènement  de  Saûl,  vu,  5-13. 

3°  Guerres  des  Pltilistins  contre  Saûl.  —  L'élection 
d'un  roi  qui  réunit  sous  son  pouvoir  les  douze  tribus 
d'Israël    était  propre  à  inspirer   des   inquiétudes  aux 


295 


PHILISTINS 


296 


Philistins  pour  leur  indépendance.  C'était  spécialement 
contre  rus  que  la  royauté  avait  été  établie,  vin,  20.  Aussi 
luttèrent-ils  avec  acharnement  contre  Saûl  pendant 
toute  sa  vie  et  ne  furent-ils  satisfaits  qu'après  avoir 
anéanti  sa  puissance  à  Gelboé  et  lavoir  réduit  a  se 
donner  la  mort.  Pendant  cette  longue  guerre  qui  dura 
tout  le  règne  de  Saûl,  c'esW-dire  pendant  quarante  ans, 
il  y  eut  des  deux  côtés  alternatives  de  succès  et  de 
revers,  mais,  quoique  Saûl  eûl  fait  de  grands  efforts  pour 
i  ,l:, .,.  une  armée,  les  Philistins  furent  le  plus  souvent 
vainqueurs.  Saûl  entreprit  d'abord  de  les  chasser  des 
environs  de  sa  trille  natale,  Gabaa,  qui  lui  servait  de 
résidence  et  où  ses  ennemis  s'étaient  étal  dis,  x,  5;  XII,  9; 
xiii,  3.  Grâce  à  la  bravoure  de  Jonatbas,  fils  aine  de  Saûl, 
les  Philistins  furent  battus  à  Gabaa,  et  Saûl  appela  aus- 


la  tribu  de  Juda  et  campèrent  à  Épbès  Dommim,  entre 
Socho  et  Azéca.  Saiil,  pour  les  arrêter,  se  porta  avec 
son  armée  dans  la  vallée  du Térébinthe,  à  une  vingtaine 
de  kilomètres  au  sud-ouest  de  Jérusalem.  Là  le  géant 
Goliath  défia  les  Israélites.  Le  jeune  David  releva  le 
défi,  le  tua.  et  entraîna  ainsi  la  défaite  de  toute  l'armée 
phil'istine.  xvii.  Voir  Goliath,  t.  m,  col.  268.  Les 
Israélites  poursuivirent  leurs  ennemis  jusqu'à  Geth  et 
à  Accaron,  mais  ils  les  laissèrent  en  paix  dans  leur 
territoire,  xvm.  David  put  se  réfugier  chez  Acliis,  le 
roi  de  Geth,  pendant  la  persécution  de  Saûl  et  il  \  fut. 
ainsi  qu'ensuite  à  Siceleg,  à  l'abri  des  poursuites  de 
son  ennemi,  xxi,  10-15;  xxvii.  La  paix  n'était  pas 
cependant  établie  entre  Israël  et  la  Pliilistie.  Il  y  avait 
sans  doute  de  temps  en  temps 


des  incidents   de  fron- 


72.  -  Pulusati  prisonniers  de  Rarasés  III.  Bas-relief  de  Médinet-ALou.  D'après  une  photographie. 


sitôt  tout  le  peuple  à  prendre  les  armes  contre  les  Phi- 
listins, XIII,  2-4.  Ces  derniers  ne  perdirent  pas  de  temps 
pour  répondre  à  ces  menaces.  Avec  trois  mille  chars 
(nombre  marqué  par  une  m. te  de  la  Massore,  quoique 
le  texte  porte  trente  mille,  chiffre  trop  élevé,  par  erreur, 
et  en  contradiction  avec  le  chiffre  suivant  qui  porte 
six  mille  cavalier^.,  c'esl  à-diresix  mille  soldats  montes 
sur  des  chars)   et  de  nombreux  fantassins,  ils    allèrent 

camper  ■<  Machinas  et  remplirent  de  terreur  les 
Israélites  qui  coururent,  en  foule  se  cacher  dans  les  envi- 
rons et  même  se  réfugier  au  delà  du  Jourdain.  XIII,  5- 
7.  Cependant  les  Philistins,  après  qu  un  de  leurs  avant- 
postes  eût  été  battu  par  la  vaillance  de  Jonathas  et  eût 
porté,  la  frayeur  dans  tout  leur  camp,  furent  défaits 
depuis  Machinas  jusqu'à  Aïalon,  XIII,   Hi-XIY,  21. 

Ce    ne   lut    qu'au    bout  de   plus  de  vingt  ans  que  les 

Philistins  purent  reprendre  l'offensive.  Saûl,  après  sa 

victoire,   axait   aussi    battU   les  Alnah ■cites,   mais   à  cause 

de  sa  désobéissance  aux  ordres  de  Dieu,  il  avail  été 
rejeté  el  David  avait  été  sacré  secrètement  à  sa  place. 
Ce    dernier    événement    venait    de  s  accomplir,  lorsque 

les  Philistins  rassemblèrent  leurs  troupes  à  Socho  dans 


tière  et  des  escarmouches  comme  dans  l'épisode  de 
Céilah,  xxin,  1-5,  mais  ce  ne  l'ut  qu'à  la  lin  du  n 
de  Saiil  que  la  guerre  entre  les  deux  peuples  recom- 
mença avec  violence.  Cette  fois  le  théâtre  de  la  bataille 
fut  le  nord  do  la  Palestine,  à  l'extrémité  occidentale  de 
la  plaine  d'Esdrelon.  Les  Philistins  avaient-ils  été 
attirés  en  cet  endroit  par  le  désir  de  faire  une  razzia 
fructueuse  dans  la  riche  plaine,  comme  autrefois  tes 
Madianites  au  temps  deGédéon,  OU  par  l'espoir  d'y  battre 
plus  facilement  les  ennemis  en  terrain  plat  avec  le 
secours  de  leurs  chars,  ou  pour  couper  en  deux  le  terri- 
toire du  royaume  et  en  briser  la  foire,  on  est  réduit  aux 
conjectures,  Quoi  qu'il  en  soit,  Saûl  avait  cherché  B6 
protéger  contre  eux  en  s'adossant  au  mont  Gelboi 
tandis  que  les  Philistins  campaient  à  Sunam.  mais  ce 
fut  en    vain,    la   défaite    d'Israël  fui    complète,  Saûl  et 

Jonathas  périrent  dans  la  bataille,  les  vainqueurs  s'em- 
parèrent des  villes  qu'abandonnèrenl  leurs  bah  lents 
e1  pénétrèrent  jusqu'au  delà  du  Jourdain.  SXVIII,  I- 
XXIX,  1-2;  XXXI,  1-10.  Si  les  Philistins  avaient  voulu 
diviser  les  douze  tribus  pour  briser  leur  force,  ils 
avaient  pleinement  réussi.  Les   luttes  intestines  qu'a- 


29^ 


PHILISTINS 


298 


mena  la  mort  de  Saùl  ne  pouvaient  que  fortifier  la 
suprématie  des  Philistins.  Ils  cherchèrent  à  la  mainte- 
nir en  attaquant  David  sans  retard. 

4°  Du  règne  de  David  à  celui  d'Achaz.  —  Dès 
que  David  eut  été  reconnu  comme  roi  par  les  douze 
tribus  et  que  l'unité  du  royaume  eut  été  ainsi  recon- 
stituée, ils  s'avancèrent  en  armes  dans  la  vallée  de 
Raphaïm  au  sud-ouest  de  Jérusalem  et  établirent 
même  un  poste  à  Bethléhem.  I  Par.,  xi.  16.  Les 
Israélites  réunis  pouvaient  lutter  avantageusement 
contre  eux.  et  avec  un  chef  comme  David,  ils  battirent 
deux  fois  leurs  ennemis  à  Raphaïm  et.  dans  la  seconde 
rencontre,  les  poursuivirent  depuis  Gabaa  jusqu'à  Gé- 
zer.  II  Reg.  (Sam.),  v,  17-25:  I  Par.,  xiv,  8-16. 

Sept  ans  plus  tard  environ,  la  situation  des  belligé- 
rants était  tellement  changée  que  ce  fut  David  qui  prit 
l'offensive  et  s'empara  de  Geth.  I  Par.,  xvm,  1.  La 
puissance  des  Philistins  était  désormais  brisée.  L'Écri- 
ture mentionne  encore  quatre  combats  contre  les  Phi- 
listins, qui  eurent  lieu  vers  la  fin  du  règne  de  David  ou 
à  des  dates  inconnues,  II  Reg.  (Sam.),  xxi,  15-22.  mais 
ils  furent  sans  grande  importance  et  servirent  surtout 
à  faire  éclater  la  bravoure  de  quelques-uns  des  soldats 
d'Israël. 

Sous   le    règne    de  Salomon,   les  villes  philistines. 
en  conservant   leur  autonomie,    III    Reg.,   n,   39,  lui 
payèrent  ;ans  doute  tribut.  III  Reg..iv,  21,  24;  II  Par., 
ix.  26,  mais  le  schisme   des  dix  tribus  leur  permit  de 
relever  la  tête.  Roboam  pour  les  arrêter  fortifia  contre 
eux    Geth   et  les  villes  limitrophes  de  leur  territoire. 
II  Par.,  xi,  S.  Ils  réussirent  à  prendre  Gebbéthon  et  à 
s'y   établir.  Cette  place  commandait  les  défilés  qui  me- 
naient delà  plaine  de  SaronàSamarie.  Voir Gebeéthox, 
t.  m,  col.  142.   Les  rois  d'Israël  Nadafa  et  Baasa  tirent 
donc  de  longs  efforts  pour  la  leur  reprendre.  III  Reg., 
xv,    27:  xvi.    15.    17.    Du   temps  de  Josapbat,   roi   de 
Juda.  quelques  Philistins  lui  payaient  encore  tribut, 
II  Par.,  xvn,  11,  mais  sous  son  fils  Joram,  s'étant  joints 
à  des  pillards  arabes,  ils  saccagèrent  le  palais  du  roi, 
xxi,  16-17.   Du  temps  de  Joas,  Hazaèl.  roi  de  Damas, 
prit   la  ville  de   Geth.   IV  Reg.,  xn.  17.  Les  Philistins 
parvinrent  sans  doute  à  la  reprendre  après  son  départ, 
car  Ozias,  en  leur  faisant  la  guerre,  détruisit  les  murs 
de  cette  ville  avec  ceux  de  Jamnia  et  d'Azot.  II  Par., 
xxvi,  6.  Cf.   Amos,  VI,  2.  La  haine  des  habitants  de  la 
Séphélah  contre  les  Israélites  s'en  augmentait  toujours. 
Nous    apprenons    par    les    prophètes,    Joël,     m,    i-6: 
Amos.    i,  6-10.  que,  unis  aux  Iduméens  et  aux  Phéni- 
ciens, ils  avaient  fait  la  traite  des  esclaves  et  vendu  les 
Juif*    dont    ils    s'étaient    emparés.    Pendant  le    règne 
d'Achaz,  ils  mirent  à    profit  les  embarras  que  les  Idu- 
méens et  les  Syriens  causaient  à  ce  roi  pour  s'emparer 
des  villes  de  Juda  qui  étaient  dans  leur  voisinage.  II  Par.. 
XXVIII,  18.  Cf.  Is.,   ix.  11.  Mais  le  moment   approchait 
où  les  habitants  de  la  Séphélah  allaient  avoir  affaire  à 
des  ennemis  plus  redoutables  que  Juda.  aux  Assyriens, 
selon  la  prophétie  d'Isaïe.    xiv.    28-31.   Ils  avaient  eu 
déjà    à  soullrir   de    leur    part    lors  de  leurs  premières 
invasions  contre  le    royaume  du  nord  de  la  Palestine. 
5>  Les  Philistins  aux   prises  avec  les  Assyriens.  — 
s  'Us  Philistins  avait   été  soumis  au  tribut  [ai- 
les rois  d'Assyrie  en  même  temps  qu'Israël  et  l'Idnmée 
par    Raminannirar   III.  Téglathphalasar  III  comptait, 
vers    734.    parmi     ses    vassaux.     Mitinti    d'Ascalon    et 
Hanon  de  Gaza,   qui  avaient   pris  put  avec  Rasin  de 
■    d'Israël  à  la    révolte   contre  Xinive 
734-732  .  Rukipti  succéda  à  son  père  Mitinti  comme  roi 
d  .'.  calon  et  fit  sans  doute  sa  soumission  au  roi  d'Assy- 
rie.  A    l'approche   des  Assyriens,  Hanon  de  Gaza  s'en- 
fuit en  Egypte,  et  sa  capitale  fut  prise  et  pillée.  Après 
le  départ  des  vainqueurs,  il  y  revint,  et  en  720  nous  le 
trouvons  parmi  les   alliés  du  su  ou   Sévé,  le   Scbabak 
égyptien,  qui  avait  promis  son  appui  à  Osée  d'Israël, 


IV  Reg.,  xvn.  4.  mais  ne  l'avait  pas  sauvé.  Il  fut  battu 
et  fait  prisonnier  à  Raphia  par  Sargon,  le  vainqueur  de 
Samarie.  Sargon  déposa  aussi  Azuri,  roi  d'Azot,  et  le 
remplaça  par  son  frère  Ahimiti;  mais  quand  Sargon 
se  fut  éloigné,  les  habitants  d'Azot  chassèrent  Ahimiti 
et  le  remplacèrent  par  Yamani.  Le  roi  de  Xinive 
marcha  en  711  contre  les  rebelles  et  s'empara  d'Azot, 
Is..  xx,  I,  de  Geth,  etc.,  déporta  les  habitants  du  pays, 
les  remplaça  par  des  colons  qu'il  fit  venir  de  l'est  de 
l'Assyrie  et  les  plaça  sous  le  gouvernement  d'un  Assy- 
rien. Ce  fut  pour  peu  de  temps.  Sous  le  règne  de 
Sennachérib,  Mitinti  d'Azot  figure  parmi  les  tributaires 
de  Sennachérib.  Ezéchias.  qui  avait  secoué  le  joug  des 
Assyriens,  avait  battu  les  Philistins,  IV  Reg..  xvm,  8. 
et  les  avait  entraînés  en  partie  dans  sa  révolte. 

Quand  Sennachérib  porta  la  guerre  en  Palestine. 
Sidqa  d'Ascalon,  l'un  des  chefs  philistins,  fut  défait  par- 
ce roi  et  envoyé  captif  en  Assyrie;  Sarludari,  fils  d'un 
ancien  roi  d'Ascalon,  fut  mis  sur  le  trône  à  sa  place.  Le 
roi  d'Accaron.  Padi.  avait  refusé  de  se  révolter  contre  le 
roi  de  Xinive.  Ses  sujets  l'avaient  saisi  et  envoyé  captif 
à  Ezéchias  roi  de  Juda.  Sennachérib  obligea  le  roi  de 
Juda  à  le  lui  rendre  et  le  rétablit  sur  le  trône.  Il  sac- 
cagea en  même  temps  plusieurs  villes  des  Philistins. 
Depuis  lors  ces  derniers  semblent  être  restés  fidèles 
aux  Assyriens.  Asarhaddon  et  Assurbanipal  énumèrent 
parmi  leurs  tributaires  Silbel  de  Gaza,  Mitinti  d'As- 
calon, Ikausu  d'Accaron.  Ahimilki  d'Azot.  Quand  l'Egypte 
voulut  secouer  le  joug  de  l'Assyrie  sous  le  règne  de 
Tharaka,  les  Philistins  restèrent  fidèles  aux  Assyriens. 
Hérodote,  n,  157,  raconte  que  le  roi  d'Egypte  Psammé- 
tique  assiégea  Azot  pendant  29  ans.  Cf.  Jer..  xxv,  20. 
Le  temple  d'Ascalon,  dédié  à  «  Aphrodite  Urania  »,  dit 
Hérodote,  I,   105,  fut  pillé  par  les  Scythes. 

6°  Les  Philistins  tributaires  des  Clialde'ens  et  des 
Perses.  —  Après  la  chute  de  l'empire  assyrien,  lorsque 
Xéchao  II  porta  la  guerre  sur  l'Euphrate  (608),  il  prit 
Gaza  à  son  passage.  Hérodote,  n,  159.  Sa  défaite  à 
Carchamis  ne  tarda  pas  à  amener  Xabuchodonosor  en 
Egypte  et  il  semble  n'avoir  rencontré  aucune  résistance 
dans  le  pays  des  Philistins,  fort  maltraité  pendant  toutes 
ces  guerres.  Soph..  Il,  4-7;  Jer.,  xvn,  1-7;  Ezech.,  xxv, 
15-17.  Xabonide  fit  lever  des  tributs  jusqu'à  Gaza  pour 
la  construction  du  grand  temple  de  Sin  à  Harran.  Keil- 
inschriftliche  Bibliothek,  t.  m,  2,  p.  98. 

Lorsque  Babylone  fut  tombée  au  pouvoir  des  Perses 
et  que  Cambyse   marcha  contre  l'Egypte,  Gaza  fut   la 
seule    ville    philistine    qui    s'opposa   à    son    passage. 
Polybe,  xvi,  40.  Quand  Darius  organisa  son  empire,  les 
Philistins,  avec   la  Palestine,  firent  partie  de  la  cin- 
quième satrapie.  Hérodote,  m,  91.  Ils  fournirent  leur 
contingent  à   la   flotte  de  Xerxès.    Hérodote,  vu.   89. 
Pendant  quelque  temps.  Ascalon  parait  avoir  été  sou- 
mise  à    Tyr,    du    moins,    Sc\bx.    dans    son    Périple. 
l'appelle  «  une  ville  tyrienne.  »  Geographi  min.,  édit. 
Didot,  t.  1,  p.  79.  Gaza  jouit  alors  d'une  grande  pros- 
périté. Hérodote,  m.   15.  On  ne  sait  rien   de  précis  sur 
les  villes  philistines  pendant  les  dernières  années  de  la 
monarchie  perse.  Mais  le  livre  de  Néhémie,  II  Esd.,  xin. 
nous   apprend  que,   de  son   temps,   la  commu- 
nauté de  malheurs  avant  atténué  sans  doute  la  haine 
qui   divisait    Philistins    et    Israélites,    plusieurs    Juifs 
avaient    épousé    des    femmes    philistines,    originaires 
d'Azot,  qui  avaient  appris  à  leurs  enfants  à  parler  la 
de  cette  ville,  de  sorte  qu'ils  ne  connaissaient 
même  pas  la  langue  juive. 
7»  Les  Philistins  à  l'époque  des  Lagides  et  des  Sé- 
s.  —  Sous  Alexandre  le  Grand  et  ses  successeurs, 
la  Philistie  soutint  de  fréquentes  guerres,.  Alexandre 
assiégea  Gaza,  qui  lui  refusait  le  passage,  quaud  il  se 
rendait  de  Tyr  en  Egypte,  et  la  traita  dure: 
Diodore   de    Sicile.   XVII,    XLViii.    7;   Arrien,    n,    265: 
Q.  Curce,  iv,  67.  —  Après  sa  mort,   la  S;  rie  échut  à 


299 


PHILISTINS 


PHILOX 


300 


Laomédon.  En  320,  Ptolémée  Ir  s'empara  de  Gaza  et 
de  Joppé.  Anligone  les  prit  en  315.  t'Iolémée  les  reprit 
en  315.  Diodore  de  Sicile,  xix.  80,  mais  il  en  fut  chassé 
l'automne  suivant  par  Démétrius  et  Antigone.  Diodore, 
xrx,  93.  Ptolémée  lit  une  nouvelle  tentative  en  302  et 
elle  fut  i'n  partie  couronnée  de  succès.  La  Philislie 
resta  à  ses  successeurs.  Antiochus  le  Grand,  en  219, 
entreprit  de  la  reprendre.  11  s'empara  de  Gaza  et  c'est 
dans  cette  ville,  en  218.  qu'il  prépara  l'invasion  de 
.  pie.  1  ne  grande  bataille  fut  livrée  à  Raphia  en  217, 
le  roi  de  Suie  fut  battu  et  Ptolémée  recouvra  les  villes 
philistines.  Polybe,  v,  82-86.  Un  nouvel  effort  d'An- 
tiochus  en  201  le  rendit  maître  de  Gaza,  les  Egyptiens 
furent  battus  à  Pbanéion  en  200  et  toute  la  Syrie 
tomba  ainsi  au  pouvoir  des  Séleucides. 

La  domination  des  successeurs  d'Alexandre  contribua 
beaucoup  à  la  diffusion  de  la  civilisation  grecque  en 
Philistie.  Déjà  auparavant,  sous  les  rois  perses,  les 
rapports  commerciaux  des  Philistins  avec  les  I 
avaient  introduit  dans  les  villes  pbilislines  des  mon- 
naies du  tvpe  atbénien.  E.  Schùrer,  Geschichle  di 

s  im  Zeitalt.  J.  C,  3"  édit.,  t.  n,  1898,  p.  84; 
E.  Babelon,  Les  Perses  Achéménides,  1893.  p.  lv-i.xiv. 
47-52.  pi.  VIII.  Sous  les  Séleucides,  on  se  mit  à  parler 
grec,  on  donna  aux  dieux  les  noms  des  dieux  grecs, 
on  imita  les  institutions  grecques.  Antiochus  Épiphane, 
qui  cherchai  helléniser  les  Juifs,  ne  dut  éprouver  aucune 
difficulté  à  établir  les  mœurs  grecques  dans  la  Sépbélab. 

8»  Histoire  des  Philistins  à  l'époque  des  Machabées. 
Leur  assujettissement  par  les  Romains.  —  1.  Du  temps 
des  Machabées,  les  Syriens  eurent  d'ordinaire  les  Phi- 
listins comme  auxiliaires  dans  leur  lutte  contre  les 
Juifs;  ils  en  avaient  dans  leurs  armées,  ils  partaient 
souvent  de  la  Séphélah  pour  attaquer  les  fils  de  Matha- 
tïas;  les  Philistins  achetaient  comme  esclaves  les  pri- 
sonniers juifs.  1  Mach.,  m.  il.  Les  Hasmonéens  eurent 
ainsi  souvent  à  les  combattre.  Judas  Machabée  prit 
Azot  et  la  pilla.  I  Mach..  v.  08.  Cacchide  fut  obligé,  pour 
éviiLr  ces  incursions,  de  fortifier  Emmaûs,  Béthoron, 
Thamnatha,  Pharathon,  Gézer.l  .Mach.,  ix,  50-52.  Jona- 
thas,  ayant  pris  le  parti  d'Alexandre  Balas  contre  Dé- 
métrius, essaya  en  147  de  s'emparer  de  Joppé,  mais  sans 
succès;  il  battit  cependant  Apollonius  près  d'Azot  et 
brûla  le  temple  de  Dagon.  I  Mach.,  x.  75-85;  cf.  XI,  i. 
Ascalon  lui  ouvrit  ses  portes.  I  .Mach..  x,  80.  Il  reçut 
en  don  Accaron  d'Alexandre  Balas.  I  Mach.,  x,  89.  Plus 
lard.  Jonathas  soumit  Ascalon  et  obligea  Gaza  à  traiter 
avec  lui  [146-143  .  I  Mach..  xi.  60-02.  Simon  Machabée 
prit  à  son  tour  Joppé  et  y  établit  ensuite  des  Juifs, 
ainsi  qu'à  Gaza.  I  Mach.,  xn.  :»".;  xil,  II, 
Jean  Hvrcan  semble  avoir  perdu  ces  villes  qui  lui 
furent  enlevées  pur  Antiochus  Sideles,  mais  ce  dernier 
dut  les  lui  rendre  à  cause  de  l'intervention  de  R 
Alexandre  Jannée  se  rendit  maître  de  Raphia,  d'Anthé- 
don  et  de  Gaza,  .losèphe,  Anl.jud.,  XIII,  xm.  '■'•:  Bel. 
jud.,  I,  iv.  2.  —  2.  Pompée  rendit  leur  autonomie  aux 
villes  philistines,  mais  il  les  incorpora  dans  la  province 
de  Syrie  (63  avant  .1.  C.  .  Josèphe,  Hell.  jud.,  I,  vu.  7. 
Gahinius  i57-55a\ant  .1.  C.  rebâtit  les  villes  détruites  ou 
ailées  par  les  Juifs.  Josèphe,  Aid.  jud.,  MIL  xiv. 
53;  Bell,  jud.,  I,  vtii,  1.  Gésar  rendit  Joppé  aux  Juifs. 
Ant.  jud.,  XIV,  \.  6.  Antoine  donna  à  Cléopâtre  toute  la 
cote  de  la  Méditerranée  depuis  l'cgypte  jusqu'au  fleuve 
Éleuti  ception  de  Tyr  et  de  Sidon  (36  avant 

J.  C).  Plutarque.  Anton.,  36;  Josèphe,  Bell,  jud.,  I. 
xvm.  5.  Auguste  (30  avant  J.  C.)  donna  à  Hérode  Gaza, 
Anthédon,  Joppé  et  la  tour  de  Straton  dont  Hérode  fil 
Césarée.  —  3.  Quand  le  royaume  d  n  rode  fut  divisé,  Gaza 
fut  sons  la  dépendance  directe  du  gouverneur  de  Syrie;  il 
en  fut  de  même  pour  Joppé  et  Césarée  à  la  déposition 
d'Archéiaus  (6  de  notre  ère).  Azol  et  Jamnia  Eurent  don- 
nées à  Salomé;  leurs  revenus, après  la  mort  de  Salomé, 
furent  attribués  à  l'impératrice  I.ivie  et  plus  tard  à  Ti- 


bère. Josèphe,  Ant.  jud.,  XVII.  XI,  4-5;  XVIII,  H,  2; 
vi.  3;  Bell,  jud.,  IL  vi.  :);  ix.  1:  E.  Schùrer,  Gesch. 
des  jùd.  Volkes  im  Zeitall.  .J.  C.  3«  édit.,  t.  Il,  1898, 
p.  78.  —  Pendant  toutes  ces  révolutions.  Ascalon  conserva 
ses  franchises,  conquises  en  104  avant  J.  C.  —  4.  En  66 
de  notre  ère,  au  commencement  de  la  révolte  des  Juifs 
contre  Rome,  les  Juifs  de  Césarée  furent  égorgés  par 
les  autres  habitants  de  la  ville,  avec  la  connivence  du 
procurateur  Gessius  Florus.  Des  massacres  eurent  lieu 
aussi  à  Ascalon.  Josèphe,  Bell,  jud.,  IL  xvm,  5.  Les 
Juifs  révoltés  brûlèrent  de  leur  côté  Ascalon,  détruisirent 
Anthédon  et  Gaza.  Bell,  jud.,  IL  xvm.  1.  Cestius  Gallus 
prit  Joppé  et  en  massacra  la  population  juive,  ma 
Juifs  la  reprirent  et  s'y  tinrent  jusqu'à  ce  qu'elle  fut 
détruite  par  Yespasien.  Bell,  jud.,  IL  xvm,  10;  xx,  i; 
III.  ix,  2.  Ainsi  s'était  accomplie  peu  a  peu  la  ruine  de 
la  Philistie.  Cf.  Zach.,  x.  5-7.  Le  nom  des  Philistins 
n'apparaît  plus  dans  le  Nouveau  Testament. 

V.  Bibliographie.—  Ftisch,  De  origine,  diiê  et  terra 
Palsfstinorum,  Tubingue,  1090;  Wolf.  Apparatus 
PhilistsBOrum  bellicorum, Wittenberg,  1711;  F.  Hitzig, 
Urgeschichte  und  Mythologie  der  Philistâer,  Leipzig, 
1845;  Berlheau,  Z\n-  Geschichle  der  Isrealiten,  Gœt- 
tingue,  1842.  p.  186-200,  280-285,  306-308;  G.  Bour,  Der 
Prophet  Amos,  Giessen,  1S47,  p.  76-94;  Knobel,  Die 
VôVtertafel  der  Genesis,  Giessen.  1850,  p.  215-225;  l'r. 
\V.  Schultz.  dans  Herzog,  Real-EncylUopàdie,  2*  édit., 
t.  xi,  1883,  p.  618-630;  Kneucker.  dans  Schenkel.  Bibrl- 
Lexicon,  t.  iv.  1872.  p.  541-559;  Ritter,  Erdkunde,  t.  xvn, 
Berlin.  1852,  p.  168-192;  Stark,  Gaza  und  die  philis- 
tàische  Ki'iste,  Iéna,  1852:  Hanneker,  Die  Philit 
Eichstadt,  1872;  V.  Guérin,  Judée,  t.  n,  1869,  p.  i 
Schwally.  l)ie  Basse  der  Philistâer,  dans  Hilgenfeld, 
Zeitschrift  \  nschaftliche  Théologie,  t.  xxxiv, 

1890,  p.   103,  265;  W.  M.  Mûller,  Asien  und  Europa 
nach  altâgyptischen  Denkmâlern,  1893,  p.  386-390. 

F.  Vigouroux. 

PHILOLOGUE  grec  :  *iXô>.oyoî),  chrétien  de  Rome, 
salué  par  saint  Paul.  Rom.,  xvi,  15.  Ce  num  était 
commun  parmi  les  esclaves  et  les  affranchis  de  la 
maison  impériale.  Corpus  inscript,  lot.,  t.  vi.  4116; 
Pape,  Wôrterbuch  der  griechischen  Eigennamen, 
3e  édit.,  t.  n,  col.  1026.  Origène  suppose  qu'il  pouvait 
être  le  mari  de  Julie,  nommée  avec  lui.  Voir  Julib, 
t.  m.  col.  1S66.  Le  pseudo-Dorothée.  De  septuaginta 
discip.,  41,  Patr.  Gr.,  t.  xm,  col.  1063,  dit  qu'il  était 
un  des  soixante-dix  disciples  et  que  saint  André 
évêque  de  Sinope  dans  le  Pont.  Cf.  Pseudo-Hippolyte, 
De  septuaginta  Apostolis,  41,  t.  x.  col.  955,  qui  répète 
les  mêmes  choses.  On  célèbre  sa  fête  le  4  noven 
Voir  Acta  sanctorum,  novembris  t.  n,  1894.  p.  222-224. 

PHILOMÉTOR,  «  aimant  sa  mère,  i  surnom  donné 
par  antiphrase  à  Ptolémée  VI,  rui  d'Egypte,  qui    ; 
tait  sa  mère.  II  Mach..  iv.  21:  ix.  29;  \.  13.  Voir  Pto- 
LÉMÈE  VI. 

PHILON,   écrivain   juif,    contemporain    de 
Christ, 

I.  Sx  vie.  —  On  n'a  que  forl  peu  de  rensi  ignemenls 
surlaviedePhilon.il.  èphe,  Ant.  jud.,  XVIII, 

rai,  1  ;  cf.  Eusèbe,  //.  /-.'..  n,  i.  t.  xx,  col.  148,  il  appar- 
tenait à  une  famille  distinguée;  son  frère  Alexandre  ou 
plutôt  le  fils  de  son  frère,  Evvald,  Geschichle  des  Volk-it 
Israrls,  3*  édit.,  Gœttingue,  1868,  t.  vi,  p  259  exerçait 
actions  d'alabarque,  probablement  de 
fermier  général  des  impôts  sur  la  rive  droite  du  Nil, 
fonctions  qui  furent  plusieurs  fois  confiées  à  de  i 
Juifs.  Saint  Jérôme,  l>c  vir.  Ht.,  11.  t.  xxm,  col.  625.  dit 
que  Philon  était  de  famille  sacerdotale;  mais  cette  indi- 
cation ne  trouve  sa  confirmation  chez  aucun  historien, 
pas  même  chez  Eusèbe.  et  les  écrits  de  Philon  ne  font 
aucune  allusion  à  ce  point.  Ils  sont  d'ailleurs  très  sobres 


301 


PHILON 


302 


de  détails  concernant  leur  auteur.  Celui-ci  y  mentionne 
seulement  ses  fréquentes  retraites  dans  le  désert  pour  y 
jouir  de  la  comteniplation,  sans  un  grand  résultat,  Leg. 
altegor.,  ti,  21,  édit.  Mangey,  t.  i,  p.  81;  la  part  qu'il 
prenait  aux  festins  des  fêtes,  Leg.  allegor.,  m,  53,  t.  i, 
p.  118;  le  soin  avec  lequel  il  s'adonnait  à  la  philosophie, 
De  spécial,  leg.,  il,  1,  t.  Il,  p.  299,  et  son  voyage  pour  les 
fêtes  à  Jérusalem.  Fragm.  de  Provident.,  t.  n,  p.  646. 
Le  seul  événement  historique  auquel  ait  été  mêléPhilon 
est  l'ambassade  à  Caligula,  en  l'an  40  après  J.-C.  On  sait 
que  quand  Caligula  se  mit  en  tête  de  se  faire  rendre 
partout  les  honneurs  divins,  et  même  d'installer  sa  sta- 
tue dans  le  Temple  de  Jérusalem,  les  Juifs  s'ahstinrent 
partout  de  participer  à  ce  culte.  Malmenés  à  celte  occa- 
sion par  leurs  concitoyens  gréco-égyptiens,  les  Juifs 
d'Alexandrie  envoyèrent  à  Rome  une  députation  à  la 
tête  de  laquelle  fut  placé  Philon;  une  députation  con- 
traire suivit  la  première,  sous  la  conduite  d'Apion, 
ennemi  déclaré  des  Juifs.  Philon  et  ses  collègues  trou- 
vèrent l'empereur  à  Pouzzoles  et  ne  purent  l'aborder. 
A  Rome,  ils  furent  reçus  par  Caligula  dans  la  maison 
de  Mécènes,  eurent  à  y  subir  toutes  sortes  d'affronts  et 
finalement  se  virent  congédier  sans  avoir  rien  obtenu. 
Peu  de  temps  après,  l'assassinat  de  l'empereur  résolut 
la  difficulté.  Philon  a  fait  lui-même  le  récit  de  son 
ambassade,  De  légat,  ad  Caium,  t.  n,  p.  545-000.  Cf. 
Beurliei.  Le  culte  impérial.  Paris,  1S91,  p.  264-271.  Au 
début  de  cet  écrit,  Philon  dit  de  lui-même  qu'il  était 
alors  un  vieillard,  fépiov.  On  en  conclut  que  sa  nais- 
sance remontait  à  une  vingtaine  d'années  avant  Jésus- 
Christ.  D'après  Eusèhe,  //.  E.,  H,  17,  t.  xx,  col.  173, 
que  saint  Jérôme  reproduit  dans  sa  notice,  t.  xxm, 
col.  627,  Philon  se  serait  rendu  une  seconde  fois  à 
Rome,  sous  Claude,  et  y  aurait  connu  saint  Pierre;  à 
Alexandrie,  il  aurait  été  en  rapport  'avec  les  chrétiens 
de  saint  Marc.  Ces  derniers  renseignements  sont  re- 
gardés comme  sujets  à  caution.  On  ignore  la  date  de  la 
mort  de  Philon.  A  la  lecture  de  ses  écrits,  on  voit  que 
Philon  n'avait  rien  de  l'étroitesse  du  pharisien,  attaché 
principalement  à  la  lettre  de  la  Loi.  Il  était  au  contraire 
homme  de  mysticisme  et  de  culte  intérieur.  Cf.  De  che- 
rub.,  27.  t.  i,  p.  155,  156;  De  plantât.,  30,  t.  i,  p.  348; 
Desomn.,  i,  42,  t.  î.  p.  657.  Il  avait  un  sentiment  très 
le  piété  et  d'obéissance  envers  Dieu  et  il  profes- 
sait que  délaisser  son  service,  c'était  renoncer  au 
bonheur.  Cf.  Ritter,  Philo  und  die  Halacha,  Leipzig, 
1879. 

II.  Ses  écrits.  —  Philon  a  laissé  de  nombreux  écrits, 
dont  quelques-uns  se  sont  perdus.  Eusèhe,  H.  E.,  Il, 
18,  t.  xx,  col.  183,  et  saint  Jérôme,  De  vir.  ill.,  11, 
t.  xxm,  col.  628,  donnent  le  catalogue  de  ceux  qu'ils 
connaissaient.  On  peut  les  classer  comme  il  suit  : 

/.  QUESTIONS  et  SOLUTIONS.  —  Dans  le  projet  de 
Philon,  elles  devaient  porter  sur  tout  le  Pentateuque. 
Eusèhe  ne  connaît  que  ce  qui  concerne  la  Genèse  et 
l'Exode.  Une  version  arménienne  a  conservé  la  plus 
grande  partie  des  questions  sur  la  Genèse  et  l'Exode; 
une  ancienne  version  latine,  ignorée  des  premiers  édi- 
teurs du  texte  grec  de  Philon,  reproduit  les  questions 
sur  la  Genèse;  en  grec,  on  ne  possède  qu'un  très  grand 
nombre  de  fragments  épars  dans  les  Pères,  les  Chaînes 
et  les  anciens  recueils  de  commentaires. 

II.  COMMENTAIRES  ALLÉGORIQUES  .StT)  ;..l  GENÈSE.  — 
Ils  se  composent  de  différents  traités  :  l"  Allégories  des 
lois,  trois  livres  sur  Gen.,  n.  1-17;  u,  18-111  1;  III,  8-19, 
édit.  Mangey,  t.  i,  p.  43-137.  —  2.  Des  chérubins  et  du 
glaive  de  flamme,  sur  Gen.,  m,  24;  iv,  1,  t.  i,  p.  138- 
IM  —  3.  Des  sacrifices  d'Abel  et  de  Gain,  sur  Gen.,iv, 
3-4,  t.  i,  p.  163-190.  Saint  Ambroise  s'est  beaucoup  servi 
de  ce  traité  dans  son  De  Caïn  et  Abel,  t.  xiv,  col.  315- 
360.  —  V.  Que  le  pire  cherche  à  nuire  au  mieux,  sur 
Gen.,  iv,  8-15,  t.  i,  p.  191-225.  —  5.  De  la  postérité  de 
Gain  qui  se  croit  sage  et  de  son   changement  de  de- 


meure, sur  Gen.,  tv,  16-25,  t.  i,  p.  226-261.  —  6.  Des 
géants,  sur  Gen.,  VI,  1-4,  t.  i,  p.  272-299.  —  7.  De  l'agri- 
culture, sur  Gen.,  ix,  20,  t.  i,  p.  300-328,  avec  un  second 
livre  intitulé  :  De  la  plantation  de  Noé,  sur  Gen..  ix,  20, 
t.i,p.  329-356.  —  8.  De  l'ivresse,  sur  Gen.,  ix,  2t.  t.  i, 
p.  357-391.  Eusèbe  et  saint  Jérôme  indiquent  deux 
livres;  il  n'en  reste  qu'un,  probablement  le  premier.  — 
9.  De  la  sobriété,  sur  Gen.,  ix,  24  27,  t.  i,  p.  392-403, 
intitulé  dans  Eusèbe  et  saint  Jérôme  :  De  ce  qu'un  esprit 
sobre  souhaite  et  maudit.  —  10.  De  la  confusion  des 
langues,  sur  Gen.,  XI,  1-9.  t.  i,  p.  404-435.  —  U.Dela 
migration  d'Abraham,  sur  Gen.,  XII,  1-6,  t.  I,  p.  436- 
472.  —  12.  De  l'héritier  des  choses  divines,  sur  Gen., 
xv,  2-18,  t.  i,  p.  473-518.  —  13.  De  l'union  à  contracter 
pour  s'instruire,  sur  Gen..  XVI,  1-6,  t.  I,  p.  519-545.  — 
14.  Des  exilés,  sur  Gen.,  xvi,  6-14,  t.  i,  p.  546-577. 
Saint  Ambroise  utilise  ce  traité  dans  son  De  fuga  sse- 
culi,l.  xiv,  col.  569-596.  —  15.  Du  changement  de  noms, 
sur  Gen.,  xvn,  1-22,  t.  i,  p.  578-619.  —  16.  Des  songes, 
sur  Gen.,  xxvm,  12;  xxxi,  11,  et  xxxvn,  40,  41,  t.  i, 
p.  620-699.  Eusèbe  et  saint  Jérôme  indiquent  cinq  livres 
sur  ce  sujet;  il  y  en  aurait  donc  trois  de  perdus  et 
ceux  qui  restent  sont  probablement  le  troisième  et  le 
quatrième. 

III.  EXPOSITION  DE  LA  LÉGISLATION  MOSAÏQUE.'—  1.  De 
la  création  du  monde,  t.  i.  p.  1-42,  comme  base  natu- 
relle de  toute  la  législation.  —  2.  Sur  Abraham,  t.  Il, 
1-40,  la  vie  des  patriarches  montrant  en  action  la  loi 
non  écrite.  —  3.  Sur  Joseph,  t.  u,  p.  41-79.  Philon 
avait  écrit  sur  Isaac  et  Jacob  des  livres  qui  sont  perdus 
et  auxquels  il  fait  allusion  au  début  du  traité  sur  Joseph. 

—  4.  Du  décalogue,  t.  u,  p.  180-209.  —  5.  Des  lois  spé- 
ciales, en  quatre  livres  comprenant  plusieurs  traités  : 
I.  De  la  circoncision,  t.  u,  p.  210-212  ;  De  la  monarchie, 
en  deux  livres,  traitant  de  l'unité  de  Dieu.  t.  Il,  p.  213- 
232;  Des  honoraires  des  prêtres,  t.  u,  p.  232-237;  Des 
victimes,  t.  u,  p.  237-250;  De  ceux  qui  offrent  les  vic- 
times, t.  u,  p.  251-264.  —  II.  Sur  les  troisième,  qua- 
trième et  cinquième  préceptes,  t.  u,  p.  270-277,  et 
spécialement  Du  septennaire,  t.  u,  p.  277-298.  Le  traité 
Des  devoirs  envers  les  parents  manque.  La  plus  grande 
partie  en  a  été  éditée  par  Mai,  De  cophini  feslo  et  de 
colendis  parenlibus,  Milan.  1818;  tout  le  texte  l'a  été 
par  Tischendorf,  Philonea,  Leipzig,  1868,  p.  1-83.  — 
III.  Sur  les  sixième  et  septième  préceptes,  t.  Il,  p.  299- 
331.  —  IV.  Sur  les  trois  derniers  préceptes,  t.  u, 
p.  335-358,  et  De  la  justice,  t.  u,  p.  358-374.  —  6.  Des 
trois  vertus,  De  la  force,  t.  u,  p.  375-383;  De  la  cha- 
rité, t.  u,  p.  383405;  De  la  pénitence,  t.  n,  p.  405- 
407;  il  faut  y  joindre  le  morceau  Sur  lanoblesse,  dont 
la  source  est  la  vertu,  non  la  naissance,  t.  u,  p.  437-444. 
Les  vertus  se  rapportent  au  décalogue  parce  qu'elles 
aident  à  en  accomplir  les  préceptes.  —  7.  Des  récom- 
penses et  des  peines,  t.  u,  p.  408-428,  et  Des  exécra- 
tions, t.  u,  p.  429-437,  formant  un  seul  traité. 

IV.  écrits  spéciaux.  —  1.  Vie  de  Moïse,  en  trois 
livres,  t.  Il,  p.  80-133,  134-144,  145-179.  Eusèbe  ne  cite 
pas  cet  écrit,  mais  seulement  un  traité  Sur  le  taber- 
nacle, qui  n'en  est  qu'une  partie.  —  2.  Que  tout  homme 
de  bien  est  libre,  t.  Il,  p.  445-470.  —  3.  Contre  Flaccus, 
t.  u,  p.  517-544,  et  De  l'ambassade  à  Caïus,  t.  II,  p.  545- 
600,  deux  livres  qui  se  rapportent  aux  persécutions 
auxquelles  furent  en  butte  les  Juifs  d'Alexandrie,  sur- 
tout sous  Caligula.  —  4.  De  la  Providence,  seulement 
en  arménien  et  traduit  en  latin  par  Aucher,  Philonis 
Judsei  sermones  très,  Venise,  1822,  p.  1-121.  —  5.  Sur 
Alexandre  et  que  les  animaux  ont  une  raison  à  eux, 
également  en  arménien,  cf.  Aucher,  p.  123-172.  — 
('..  Hypothétiques,  apologie  des  Juifs,  qu'on  a  tout  lieu 
de  croire  identique  au  traité  suivant.  —  7.  Sur  les  Juifs. 
ou  apologie  des  Juifs.  On  n'en  a  que  des  fragments  dans 
Eusèbe,  Prsepar.  evang.,  vm,  6,  7,  t.  xxi,  col.  606-611. 

—  8.  De  la  vie  contemplative,  t.   u,  p.   171-486.  C'est 


303 


PIULON 


304 


une  description  de  la  Nie  des  thérapeutes,  qui  avaient 
transporté  l'essénisme  aux  environs  d'Alexandrie.  Eusèbe 
pensait  que  ces  contemplatifs  étaient  des  chrétiens,  dis- 
ciples de  saint  Marc.  Saint  Jérôme  le  croit  aussi,  et  à 
leur  suite,  beaucoup  d'auteurs  l'ont  admis.  Cf.  Mont- 
faucon,  Le  livre  de  Philon  de  la  vie  contemplative, 
Paris,  1709.  On  fait  valoir  contre  l'authenticité  de  l'ou- 
vrage que  Philon  ne  fait  allusion  à  cette  colonie  de 
thérapeutes  dans  aucun  autre  endroit  de  ses  écrits,  que 
le  persiflage  du  Banquet  de  Platon  qu'on  y  rencontre, 
De  vit.  contempl.,  7,  ne  concorde  guère  avec  l'admi- 
ration professée  par  Philon  pour  le  grand  philosophe 
grec,  que  l'ascétisme  décrit  dans  cet  ouvrage  n'est,  à 
proprement  parler,  ni  juif,  ni  chrétien,  etc.  Néanmoins, 
ces  raisons  ne  sont  pas  absolument  convaincantes,  et 
l'authenticité  du  traité  a  encore,  parmi  les  modernes, 
de  nombreux  partisans,  tels  que  Delaunay,  dans  la 
Revue  archéologique,  t.  xxii,  1870,  p.  268-282;  t.  x.wi, 
1873,  p.  12-22;  Renan,  dans  le  Journal  des  savants, 
1892,  p.  83-9:;.  Massebieau,  dans  la  Revue  de  l'histoire 
des  religions.  I.  xvi,  1887,  p.  170-198,  28i-319;  Conybeare, 
Philo  aboul  the  contemplative  Life,  Oxford,  1895; 
Wendland,  Die  Thérapeute»  und  die  philonische 
Schrift,  dans  le  Jahrb.  fur  class.  philol.,  1896,  p.  695- 
772,  cle.  On  remarque  surtout  l'analogie  que  présente 
ce  traité  avec  les  autres  écrits  de  Philon  au  point  de 
vue  de  la  langue  et  des  idées,  de  sorte  que  la  thèse  de 
l'authenticité  paraîl  en  somme  mieux  établie  que  la 
thèse  contraire. 

v.  œuvres  apocryphes.  —  Sont  considérés  comme 
inauthentiques  les  ouvrages  suivants,  ordinairement 
attribués  à  Philon  :  1.  De  l'incorruptibilité  du  monde, 
t.  il,  p.  487-516,  qui  soutient  la  thèse  de  l'éternité  du 
monde.  —  2.  lin  monde,  i.  n.  p.  601-624,  compilation 
tirée  des  autres  écrits  de  Philon.  —  3.  Sur  Samson  et 
sur  Jonas,  seulemenl  en  arménien  et  en  latin.  —  i.  In- 
terprétation des  noms  hébreux,  œuvre  probablement 
anonyme  attribuée  à  Philon  parOrigène,  au  témoignage 
de  saint  Jérôme,  Lib.  de  nomin.  hebraic,  t.  xxm, 
col.  771,  qui  juge  à  propos  de  la  refondre  totalement  et 
de  la  compléter.  —  5.  Livre  des  antiquités  bibliques, 
qui  raconte  l'histoire  biblique  d'Adam  à  Saûl.  Le  texte 
latin  suppose  un  texte  grec,  qui  lui-même  suppose  un 
original  hébreu.  Cf.  Massebieau,  Le  classement  des 
œuvres  de  Philon,  dans  la  Bibliothèque  des  liâmes 
études,  Scienc.  relig.,  t.  i,  1889.  p.  1-91.  —  6.  Abrégé 
des  temps,  postérieure  Philon.  —  En  outre, sont  perdus 
vingt  e1  un  livres  mentionnés  par  Philon  lui-même  ou 
eilés  par  des  auteurs  postérieurs.  —  La  meilleure  édi- 
tion c plète  des  humus  de  Philon  était  celle  de  Man- 

gey,  Londres,  17i2,  2  in-f°;  elle  sera  désormais  rem- 
placée par  l'édition  critique,  en  cours  de  publication, 
de  Colin  el  Wendland,  Berlin,  1896-1906,  t.  l-v.  La 
traduction  latine  a  été  faite  par  Sigismond  (lelenius, 
Bâle,  I55i  .  une  tradui  lion  française  a  été  publiée  par 
Bellier,  Paris,  1588,  el  revue  par  Morel,  Paris.  1612. 
Cf.  Sehûrer,  Geschichte  des  jiïdischen  Volkesim  Zeit. 
./.  '.'..  Leipzig,  I.  III,  1898.  p.  i,s7-512.  qui  donne  toute 
la  bibliographie  concernant  Philon.  On  voit  que  l'écri- 
vain juil  ■  occupe  surtout  du  Pentatenque.  On  peut  dire 
que  les  trois  quarts  de  son  o  uvre  s'y  rapportent,  11  ne 
i  ite  d'ailli  urs  que  fort  peu  les  autres  Livres  sari  es.  — 
Dans  la  plupart  de  ses  écrits,  Philon  est  assez  médiocre 
écrivain.  Sa  composition  est  lâche,  avec  des  longueurs 
et  des  répétitions;  les  idées  sont  souvent  confuses,  for- 
mulé, s  sans  clarté  ou  imparfaitement  exposées;  l'abus 
des  métaphores  contribue  à  rendre  la  pensée  plus  indé- 
cise. Philon  n'est  pas  un  écrivain  châtié;  c'esl  un  pen- 
seur assez  superficiel  qui  se  contente  d'écrire  comme 
il  parle. 

IIP  Si  v  doctrines.—  /.  leur  SOURCE.  —  La  forma- 
tion intellectuelle  de  Philon  se  montre  à  la  fois  juive  et 
grecque;  mais  c'est  surtout  le  philosophisme  ;:rec  qui 


dirige  sa  pensée.  Il  connaît  et  cite  les  grands  poètes, 
Homère,  Euripide  et  les  autres.  Platon  est  pour  lui  le 
maître  «  sacré  »  par  excellence,  ispû-a-oç,  cf.  Quod 
oninis  probus  liber,  t.  n,  p.  447,  et  saint  Jérôme.  De 
vir.  ill.,  11,  t.  xxm,  col.  629,  transcrit  le  dicton  qui 
courait  à  ce  propos  parmi  les  Grecs  :  c<  C'est  ou  Platon 
qui  philonise  ou  Philon  qui  platonise.  »  Il  appelle 
Philon  un  «  Platon  juif  »,  Èpisl.  LXX,  3.  t.  xxii, 
col.  666.  Cf.  £pist.  xxii,  35,  col.  421.  Aux  yeux  de  Phi- 
lon, Parménicle.  Empédocle,  Zenon,  Cléanthe  sont  des 
hommes  divins.  Cf.  De  Provid.,  Il,  48.  Il  est  également 
pythagoricien,  cf.  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  I,  15. 
72:  ii,  19,  100,  t.  vin,  col.  7117,  1039;  Eusèbe,  //.  F.,  n. 
4,  3,  t.  xx,  col.  148.  Les  récentes  études  sur  la  philo- 
sophie stoïcienne  démontrent  que  Philon  a  emprunté 
à  Zenon  et  à  son  école  la  théorie  de  la  nature  à  la  fois 
providence,  juge,  cité  universelle,  dont  Moïse  et  le 
grand-prêtre  sont  les  citoyens  par  excellence.  De  sep- 
temar.,  t.  n,  p.  279;  De  monarch.,  t.  n.  p.  227.  Cf.  Hans 
von  Arnim,  Quellenstudien  :u  Philo  von  Alexandria, 
Berlin,  1880,  p.  101-140;  Massebieau,  Le  classement, 
p.  11-12.  «  Philon  doit  à  sa  foi  juive  les  croyances 
religieuses  qui  orientent  sa  pensée  :  la  transcendance 
divine,  la  nécessité  d'un  intermédiaire  par  qui  Dieu 
agit  et  se  manifeste;  il  a  reçu  de  Platon  les  spécula- 
tions brillantes  qui  la  dominent;  la  théorie  des  idées, 
l'exemplarisme,  mais  c'est  aux  stoïciens  qu'il  emprunte 
loute  la  charpente  qui  la  soutient,  c'est-à-dire  toute  sa 
théorie  sur  le  monde,  sur  sa  constitution  intrinsèque 
sur  le  rôle  qu'y  jouent  la  raison  et  la  loi.  »  .1.  Lebreton 
Les  théories  du  Logos  au  début  de  l'ère  chrétienne, 
Paris,  1906,  p.  70.  Cependant,  au-dessus  de  tous  les 
philosophes,  il  place  Moïse,  auquel  tous,  d'après  lui, 
ont  emprunté  ce  qu'ils  ont  de  vrai.  Cette  idée  avait  été 
formulée,  avant  Philon.  par  Aristobule,  170-150  avant 
J.-C,  cf.  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  V,  14,  97,  t.  ix. 
col.  145,  voir  Aristobule,  t.  i,  col.  964,  el  même  par 
Hermippe  Callimaque,  246-204  av.  J.-C,  cf.  Origène, 
Cont.  Cels.,  i,  15.  t.  xi,  col.  682.  Philon  la  reproduit, 
Vit.  Mosis,  t.  Il,  p.  163,  et  Josèphe,  Cont.  Apion.,  i.  22 
init.,  la  reprend  à  son  tour.  Pour  Philon,  la  Loi  de 
Moïse  est  l'expression  parfaite  de  la  sagesse  divine;  elle 
est  la  seule  source  de  toute  philosophie,  c'est  à  cette 
source  qu'ont  puisé  tous  les  grands  penseurs  grecs.  Pour 
justifier  ce  système,  Philon  voit  surtout  dans  l'Écriture 
des  allégories,  ce  qui  lui  permet  d'y  retrouver  les  doc- 
trines les  plus  variées  de  la  philosophie  grecque.  En 
réalité,  il  prête  à  l'Ecriture  les  idées  que  sa  culture 
grecque  lui  suggère.  C'est  le  triomphe  de  L'hellénisme, 
dont  il  croit  faire  une  doctrine  essentiellement  mosaïque. 
Juif  el  Grec  à  la  fois,  Philon  s'imagine  réaliser  ainsi 
l'unité  de  deux  civilisations  et  de  deux  peuples.  Pour 
lui,  comme  bientôt  après  pour  saint  Paul,  I  il  n'y  a  pas 
de  différence  en!  -  le  Juif  et  h  Grec.  >  Rom.,  x.  12. 
Seulement  l'Apôtre  parle  ainsi  parée  que  le  même  Christ 

,  si  devenu  le  Soi-neur  de  tous,  tandis  que  Philon.  qui 
n. ire  totalement  renseignement  et  l'action  du  Christ, 
pourtant  son  contemporain,  n'a  réalisé  qu'une  vaine  el 
superficielle  tentative.  Les  éléments  si  divers  qu'il 
combine  ensemble  n'arrivent  à  former  qu'une  unité 
factice.  Voici  quelles  sont  ses  idées  principales: 

n.  dieu.  —  Dieu  est  l'absolu  par  essence;  il  est  éter- 
nel, immuable,  simple,  libre,  se  suffisant  à  lui-même. 
Il  est  le  souverain  bien,  la  souveraine  beauté',  la  souve- 
raine unité.  Il  est  ôntoioc,  sans  propriété  particulière, 
-ans  noiÔTTjc,  c'est-à-dire  sans  qualité  positive  qui  le 
détermine  ou  le  limite.  On  peut  dire  qu'il  est,  mais 
non  ce  qu'il  est.  11  n  est  cependant  pas  une  abstraction; 
il  jouit  d'une  personnalité  absolue,  qui  réunit  en  elle 
toule  perfeclion. 

/;;.  LBS  Êtres  INTERMÉDIAIRES.  —  Dieu,  étant  l'être 
absolu  et  immuable,  ne  peul  entrer  en  rapport  avec  le 
monde  changeant  et  imparfait.   Il  y  a  donc  des  êtres 


305 


PHILON 


306 


intermédiaires  qui  agissent  sur  ce  monde  tons  que 
Dieu  ail  à  se  commettre  avec  lui.  Philon  prend  ces 
êtres  intermédiaires  là  où  il  les  trouve;  il  emprunte 
1rs  i  idées  »  à  Platon,  les  «  énergies  »  aux  stoïciens, 
les  g  anges  »  à  la  théologie  juive  et  les  «  dénions  ou  gé- 
nies »  à  la  mythologie  grecque.  Ces  forces  spirituelles, 
identiques  malgré  la  diversité  des  noms,  sont  les  agents 
de  Dieu  en  ce  monde;  c'est  par  elles  qu'il  le  gouverne. 
Les  intermédiaires  ainsi  supposés  sont  en  nombre  illi- 
mité; quelquefois  Philon  les  réduit  à  trois,  quatre  ou 
cinq,  ou  même  à  deux,  l'énergie  créatrice  appelée  Dieu, 
et  l'énergie  royale  appelée  Seigneur.  Philon  leur  accorde 
la  personnalité,  mais  parfois  la  leur  refuse.  Il  les  place 
si  avant  dans  l'essence  divine  qu'on  a  peine  à  les  en 
distinguer;  et  cependant,  il  faut  bien  qu'ils  en  soient 
distincts,  pour  éviter  à  Dieu  ce  contact  avec  le  monde 
que  l'écrivain  déclare  impossible.  Cf.  Zeller,  Die  Phi- 
losophie cler  Griechen,  Leipzig,  1881,  t.  ni,  2,  p.  365. 

IV.  le  Loaos.  —  Pour  Philon,  le  Logos  est  à  la  tête 
de  tous  ces  êtres.  Il  est  l'agent  par  excellence  de  la 
puissance  divine.  Il  n'est  ni  incréé,  comme  Dieu,  ni 
créé  comme  les  autres  êtres.  Il  est  parole  créatrice,  et 
non-seulement  l'organe  de  Dieu  vis-à-vis  du  monde, 
mais  encore  le  médiateur  entre  le  monde  et  Dieu.  On 
ne  peut  savoir  cependant  si,  dans  la  pensée  de  Philon, 
il  se  confond  avec  Dieu  ou  s'il  constitue  une  personne 
distincte  de  lui.  Il  est  certain  que  les  idées  juives  ne 
permettaient  pas  d'admettre  une  seconde  personnalité 
divine  qui  eût  paru  inconciliable  avec  le  dogme  de 
L'unité  absolue  de  Dieu.  Voir  Logos,  t.  iv,  col.  325-327, 
Le  Logos  exerce  surtout  son  activité  dans  le  monde 
moral;  il  est  l'inspirateur  de  tout  bien,  l'initiateur  de 
toute  vie  supérieure,  le  guide  du  salut,  le  législateur, 
le  grand-prêtre,  l'intercesseur,  l'introducteur  dans  la 
vie  éternelle.  Philon  a  certainement  connu  le  livre  de 
la  Sagesse,  composé  au  moins  un  demi-siècle  avant 
lui,  dans  le  milieu  helléniste  et  alexandrin  où  il  vécut 
lui-même.  Cf.  Sap.,  xm,  8,  9,  et  De  profug.,  38,  t.  i. 
p.  577.  Dans  sa  description  du  Logos,  il  s'en  est  inspiré 
d'autant  plus  volontiers  que  l'auteur  du  livre  sacré 
s'inspirait  lui-même  de  Platon.  Voir  Sagesse  (Livre  oe 
lai.  o  11  est  incontestable  qu'il  y  a  entre  les  doctrines 
platoniciennes  et  philoniennes  d'une  part,  et  les  en- 
droits du  livre  de  la  Sagesse  de  l'autre  part,  un  accord 
frappant,  affectant  non  seulement  le  fond  des  pensées, 
mais  encore  l'expression.  Il  n'est  pas  possible  que  pa- 
reille concordance  soit  l'effet  du  hasard.  Nous  avouons 
donc  volontiers  que,  dans  sa  description  de  la  Sagesse, 
l'auteur  sacré  a  fait  des  emprunts  au  platonisme  et 
qu'il  a,  en  suivant  Platon,  marché  dans  une  voie  à  peu 
près  parallèle  à  celle  où  entra  plus  tard  l'alexandrin 
Philon.  »  .1.  Corluy,  La  Sagesse  dans  l'A.  T.,  dans  le 
Congrès  scient,  internat,  des  catliol.,  1889,  t.  i,  p.  81. 
Aujourd'hui,  on  admet  assez  généralement  le  caractère 
stoïcien  du  Logos  de  Philon.  Cf.  Zeller,  Die  Philoso- 
phie der  Griechen,  p.  385;  Schiirer,  Geschichte,  t.  m, 
p.  .Vu  ;  Bousset,  Die  Religion  des  Judentums  in  neu- 
test.  Zeilalter,  Berlin,  1903,  p.  346.  Pour  Philon,  le 
Logos  est  encore  l'âme  du  monde,  idée  qu'il  emprunte 
à  Platon.  «  Ce  que  l'àme  est  dans  l'homme,  le  ciel,  je 
pense,  l'est  clans  le  monde...  Il  y  a  donc  deux  natures 
indivisibles,  la  raison  qui  est  en  nous,  et  cette  autre 
raison  divine,  b  Quis  rer.  divin,  hier.,  48,  t.  i,  p.  506. 
1  Le  Logos  très  ancien  de  Celui  qui  est,  est  entouré  du 
monde  comme  d'un  vêtement...  Comme  il  est  le  lien  de 
toutes  choses,  il  tient  ensemble  et  resserre  toutes  les 
parties,  ne  les  laissant  ni  se  dissoudre  ni  se  disperser.  » 

Me  profug.,  20,  t.  i.  p.  562;  cf.  De  migr.  Abrah.,  1, 
t.  i,  p.  436.  Cf.  J.  Lebreton,  Les  théories  du  Logos  au 
début  de  l'ère  chrétienne,  p.  63-90;  Hackspill.  Élude 
le  milieu  religieux  et  intellectuel  du  Nouveau 
Testament,  dans  la  Revue  biblique,  1901,  p.  379-383. 
v.  LE  MONDE.  —  Dans  bon  nombre  de  passages,  Phi- 


lon affirme  nettement  l'idée  de  création.  Dieu  a  tout 
tiré  du  néant,  Leg.  alleg.,  m,  3,  t.  I,  p.  89;  il  a  appelé 
du  néant  à  l'être.  De  juslit.,  9,  t.  Il,  p.  367,  etc.  Philon 
reproche  aux  philosophes  d'avoir  ignoré  la  création. 
De  opif.  mund.,  1,  61,  t.  i,  p.  2,  41.  D'autres  fois,  par 
une  singulière  inconséquence,  il  la  nie.  De  plaidât.,  1, 
t.  i,  p.  329;  De  profug.,  2,  t.  i,  p.  547.  Ailleurs,  De 
somn.,  il,  6,  t.  i,  p.  665,  il  suppose  comme  préexis- 
tante une  matière  informe,  indéterminée,  sans  qualité, 
à  laquelle  Dieu  donne  la  forme,  la  détermination,  la 
qualité  et  une  âme.  Cf.  De  opif.  mund.,  5,  t.  i,  p.  5. 
En  tous  cas,  Dieu  n'agit  sur  la  matière  que  par  son 
Logos  et  les  êtres  intermédiaires.  Ceux-ci  continuent 
l'œuvre  première  en  veillant  à  la  conservation  et  au 
gouvernement  du  monde.  Les  astres  sont  des  êtres 
intelligents,  composés  d'une  âme  et  d'un  corps,  mais 
dont  la  volonté  toujours  droite  ne  pèche  jamais.  De  opif. 
mund.,  24,  t.  i,  p.  17. 

17.  l'homme.  —  Toutes  les  âmes  préexistent  à  l'union 
avec  le  corps.  Elles  habitent  les  régions  aériennes.  Il 
en  est  qui  s'approchent  de  la  terre  et  finissent  par 
s'unir  à  -des  corps  mortels.  Si  elles  le  font  pour  se 
livrer  à  la  philosophie,  elles  retournent  ensuite  à  la 
demeure  céleste;  mais  elles  sont  perdues  si  elles  se 
laissent  absorber  par  le  corps.  De  gigant.,  3,  t.  i, 
p.  263,  264.  «  L'homme  est  mortel  selon  le  corps,  et 
immortel  selon  l'àme.  »  De  opif.  mund.,  16.  t.  i,  p.  32. 
Mais  Philon  ne  sait  affirmer  l'immortalité  que  pour  les 
justes.  Il  parle  des  Juifs  persécutés,  qui  «  se  précipitent 
volontiers  vers  la  mort,  comme  vers  l'immortalité.  » 
Leg.  alleg.,  16,  t.  n,  p.  562.  Il  ne  dit  rien  de  la  sanction 
réservée  aux  méchants,  ni  rien  de  la  résurrection, 
malgré  ce  qu'il  pouvait  lire  à  ce  sujet  dans  les  livres 
de  Daniel,  des  Machabées  et  de  la  Sagesse. 

Vil.  LA  RELIGION.  —  Elle  consiste  à  connaître  et  à 
honorer  le  Dieu  unique.  Le  vrai  prêtre  est  aussi  un 
prophète,  illuminé  de  Dieu.  De  justit.,  8,  t.  u,  p.  367, 
368.  Le  Juif  doit  exercer  le  prosélytisme,  De  victim., 
12,  t.  ti,  p.  260,  261,  mais  avec  douceur,  parce  que  les 
idolâtres  sont  victimes  de  leur  éducation  et  de  leur 
ignorance.  De  monarch.,  i,  7,  t.  Il,  p.  220.  Quant 
aux  apostats,  ils  sont  dignes  de  toutes  les  poursuites 
et  de  tous  les  châtiments.  Aux  Juifs  qui  seraient  tentés 
d'innover,  en  matière  de  religion,  il  rappelle  qu'  «  il 
n'est  pas  avantageux  d'ébranler  les  coutumes  des  an- 
cêtres.  »  Adv.  Flacc,  6,  t.  Il,  p.  523. 

VIH.  LA  morale.  —  Le  grand  principe  delà  morale 
philonienne  est  le  dégagement  de  la  matière,  source  de 
tout  mal.  Comme  les  stoïciens,  Philon  impose  l'obli- 
gation de  combattre  et  de  contenir  les  passions,  les 
besoins  et  les  affections  sensuelles.  Il  se  distingue 
d'eux,  cependant,  en  ce  qu'ils  estimaient  cette  lutte  à  la 
portée  des  forces  humaines,  tandis  que,  pour  lui,  on 
ne  peut  la  mener  à  bien  qu'avec  le  secours  de  Dieu. 
Seul,  Dieu  peut  faire  croître  la  vertu  dans  l'âme,  et 
cette  vertu  consiste  à  tout  faire  en  vue  de  Dieu.  Il  suit 
de  là  que  la  foi  en  Dieu  est  le  premier  des  devoirs, 
tandis  que  l'incrédulité  est  le  pire  des  crimes.  La  ré- 
compense de  la  vertu  sera  la  vue  même  de  Dieu  dans 
l'autre  monde.  Mais,  d°s  ici-bas,  on  peut  s'élever 
jusqu'à  cette  vue  de  Dieu  par  l'extase.  En  état  d'extase, 
l'âme  s'élève  au-dessus  de  tous  les  êtres,  même  du  Lo- 
gos, et  plonge  dans  l'essence  divine  elle-même.  On 
arrive  à  l'extase  en  se  dépouillant  de  soi-même  pour 
s'abandonner  passivement  à  l'action  de  Dieu.  On  est 
alors  animé,  comme  les  cordes  d'un  instrument,  par  le 
souffle  d'en  haut  et,  de  fils  du  Logos,  on  devienl  fils  de 
Dieu  et  presque  l'égal  du  Logos.  Philon  prétend  avoir 
atteint  plusieurs  fois  cet  état  extatique.  Cf.  Quis  rerum 
divin,  hseres,  t.  i,  p.  482,  508,  511.  Le  règne  messia- 
nique, tel  qu'il  le  conçoit,  n'est  guère  que  l'extension 
de  cet  état  d'extase  à  toute  la  nation  juive.  Les  Juifs 
pratiqueront  alors  de  si  sublimes  vertus  que  les  na- 


307 


PHILON 


308 


lions,  frappées  d'admiration,  les  renverront  tous  dans 
leur  pays,  où  le  sol  se  couvrira  de  moissons  spontanées, 
pour  que  les  saints  ne  soient  pas  détournés  de  leur 
contemplation.  Une  nombreuse  postérité  et  une  longue 
vie  leur  seront  alors  accordées.  On  reconnut  ici  les 
idées  millénaristes  familières  aux  coreligionnaires  de 
Philon.  Cf.  Dollinger,  Paganisme  et  judaïsme,  trad. 
J.  de  P.,  Bruxelles,  1858,  t.  iv,  p.  249-262;  Drummond, 
Philo  fudssus  or  the  Jewish-Alexandrian  Philosophtj, 
Londres,  1S88;  Schûrer,  Geschichte,  t.  m,  p.  542-562, 
et  les  auteurs  qu'il  cite;  Ed.  Herriot,  Philon  le  Juif, 
Paris,  1898;  .1.  Martin,  Philon,  Paris,  1907. 

On  voit  comment  Philon,  qui  se  pique  de  philoso- 
phie et  de  littérature,  utilise  les  philosophes  grecs  avec 
un  parfait  éclectisme.  «  11  emprunta,  sans  choix,  à 
chaque  philosophe,  les  théories  purement  physiques... 
Mais  comme  Philon  vénérait  les  philosophes  et  que  son 
orthodoxie  n'était  pas  toujours  assez  avisée,  il  n'arri- 
vait pas  à  bien  discerner  chez  les  philosophes  leur 
réelle  doctrine.  Il  lisait  le  Timée,  et  c'était  avec  une 
admiration  et  un  respect  presque  aussi  absolu  que  s'il 
s'était  agi  de  la  Genèse.  Donc,  dans  ses  ouvrages,  il 
mêle  au  hasard  l'enseignement  de  la  Bible  avec  celui 
des  philosophes;  il  garde  avec  une  parfaite  quiétude 
toute  son  orthodoxie;  et  lorsque,  à  propos  de  Dieu,  de 
la  création  et  de  la  providence,  l'enseignement  des 
philosophes  ruinerait  celui  de  la  Bible,  Philon  n'aper- 
çoit pas  la  contradiction;  il  n'a  jamais  conscience  que 
le  Timée  ne  s'accorde  pas  avec  la  Genèse;  il  n'a  jamais 
songé  à  se  demander  si  l'accord  existe.  11  a  passé  sa 
vie  à  lire  les  philosophes,  et  on  peut  bien  affirmerqu'il 
ne  les  a  jamais  compris,  et  que  jamais  non  plus  le 
souci  de  choisir  dans  leurs  œuvres  les  vérités  qui  s'y 
trouvent,  et  de  faire  servir  toutes  ces  vérités  à  l'éclair- 
cissement du  dogme,  n'a  guidé  son  étude.  »  J.  Martin, 
Philon,  p.  42,  43.  «  La  philosophie  de  Philon  est  si 
fuyante  et  si  incertaine,  que  l'on  hésite  toujours  à  en 
trop  presser  les  maximes.  »  Lebreton,  Les  théories  du 
Logi  s,  p.  88.  A  l'égard  des  doctrines  bibliques,  il  prend 
des  libertés  bien  autrement  répréhensibles.  Ses  théo- 
ries sur  les  rires  intermédiaires  et  sur  le  Logos,  sur 
l'existence  de  la  matière  indépendamment  de  Dieu,  sur 
l'impossibilité  où  est  Dieu  d'agir  directement  sur  elle, 
sur  sa  nature  essentiellement  mauvaise,  sur  l'origine 
des  âmes  el  la  formation  de  l'homme,  sur  l'extase  et 
l'obtention  sur  lerre  de  la  vue  de  Dieu,  sont  en  contra- 
diction formelle  avec  la  doctrine  des  Livres  Saints. 
«  Philon  ne  voit  pas  comment  la  doctrine  enseignée  dans 
la  Bible  montre,  dans  des  faits  concrets,  très  différents 
de  vaines  allégories,  la  toute-puissance  absolue  d'un 
Dieu  maître  et  père  de  l'homme.  11  ne  voit  pas  que  l'in- 
tervention de  Dieu  au  début  de  l'histoire  présage  une 
autre  intervention  encore  :  il  ne  voit  pas  le  dogme  de 
la  chute  et  la  promesse  du  Rédempteur.  Le  messianisme 
esl  l'aboutissement  du  judaïsme;  le  messianisme  ne 
tient  aucune  place  dans  la  pensée  de  Philon.  Si  son 
âme  est  restée  religieuse,  l'idée  grecque  a  dissous  en 
lui  la  foi  juive.  »  A.  Dufourcq,  L'avenir  du  christia- 
nisme, Paris,  1904,  p.  87.  Il  est  à  croire  que  la  plupart 
de  écrits  de  Philon  étaient  composés  quand  Jésus- 
Christ  prêcha  son  Évangile.  On  ne  peut  donc  dire  si  le 
silence  qu'il  garde  à  son  sujet  provient  d'un  parti-pris 
ou  d'une  inattention  assez  explicable  de  sa  part.  On 
sait  que  .losèphc,  écrivant  un  demi-siècle  après  lui,  a 
probablement  gardé  le  même  silence.  Voir  t.  m, 
col.  1516. 

IV.  Son  exégèse.  —  1°  .Son  texte  biblique.  —  Phi- 
lon interprète  ta  Bible  exclusivement  d'après  la  traduc- 
tion des  Septante.  Il  avail  certainement  la  connaissance 
de  l'hébreu,  comme  le  montrent  ses  étymologies  des 
noms;  celles-ci  sont  souvent  fort  arbitraires,  mais  Philon 
ne  dépasse  pas  sur  ce  point  ce  que  se  permettaient  les 
docteurs  palestiniens.  Pour  lui,  l'Écriture  est  inspirée  . 


les  oracles  que  contient  le  Pentateuque  ont  pour  au- 
teur, les  uns  Dieu  lui-même  immédiatement,  les  autres 
le  prophète  qui  est  l'instrument  de  Dieu.  Dieu  d'ail- 
leurs ne  parlait  pas  lui-même;  il  se  contentait  de 
former  dans  l'air  les  syllabes.  Philon  considère  la  ver- 
sion des  Septante  comme  reproduisant  l'hébreu  avec 
une  exactitude  rigoureuse,  au  point  qu'on  peut  regarder 
les  traducteurs  comme  de  vrais  prophètes.  C'est  lui 
qui  prétend  que  les  traducteurs,  comme  s'ils  eussent 
été  inspirés,  rendirent  tous  l'hébreu  par  des  expres- 
sions identiques,  bien  qu'ils  travaillassent  séparément. 
Il  ajoute  qu'en  mémoire  de  ce  fait,  on  célébrait  chaque 
année,  dans  l'île  de  Pharos,  une  fête  qui  attirait  à  la 
fois  les  Juifs  et  les  Grecs,  Cf.  Vit.  Mosis,  n,  5-7,  t.  II, 
p.  139-140.  Cependant,  il  n'indique  pas  le  nombre  l 
traducteurs,  et  laisse  entendre  que  ces  derniers  n'ont 
travaillé  que  sur  le  Pentateuque.  On  comprend  que, 
dans  ces  conditions,  il  ne  fasse  pas  de  dillérence,  au 
point  de  vue  de  l'inspiration,  entre  le  texte  de  la  ver- 
sion grecque  et  le  texte  hébreu.  Il  y  a  lieu  toutefois  de 
se  demander  comment  il  a  pu,  s'il  savait  l'hébreu, 
affirmer  une  exactitude  de  traduction  qui  n'existe  pas. 
Sur  le  texte  des  Septante  dont  se  sert  Philon.  cf.  Schû- 
rer, Geschichte,  t.  m,  p.  489.  —  2»  Son  allégorïsme. 
—  Philon  avait  eu  des  devanciers  dans  l'emploi  de  la 
méthode  allégorique.  Plus  de  quatre  siècles  avant  lui, 
les  philosophes  grecs  avaient  commencé  à  réduire  leurs 
mythes  religieux  à  de  simples  allégories,  afin  d'en 
pouvoir  fournir  une  explication  plus  rationnelle  et 
d'empêcher  le  peuple  de  se  prévaloir  des  exemples 
scandaleux  des  dieux.  Théogène  de  Bhegium,  Heraclite, 
Métrodore  de  Lampsaque  s'appliquèrent  à  donner  aux 
légendes  de  la  mythologie  grecque  des  interprétations 
physico-allégoriques.  Cf.  Tatien,  Oral.,  27,  t.  vi, 
col.  864.  Les  stoïciens  Zenon,  Cléanthe,  Chrysippe, 
adoptèrent  les  mêmes  procédés  d'interprétation,  cf. 
Cicéron,  De  nat.  deor.,  m, 24,  malgré  les  protestations 
de  Platon  et  d'isocrale.  Cf.  Dollinger,  Paganisme  et 
judaïsme,  t.  n.  p.  18-50,  141,  )  1-2  ;  Decharmi  < 
ti</ue  des  traditions  religieuses  chez  les  Grecs,  Paris, 
1904,  p.  270-355.  \  Alexandrie  même,  la  mythologie 
égvptienne  avail  été  l'objet  de  semblables  interpréta- 
tions de  la  part  des  philosophes  grecs.  On  voit,  au  dé- 
but du  traité  de  Plutarque  sur  Isis  el  Osiris.  comment 
chaque  école  prétendait  retrouver  dans  les  légendes 
égyptiennes  ses  principes  el  sa  doctrine.  Les  Juifs  eux- 
mêmes  y  voyaient  quelque  chose  de  leurs  croyances  et 
de  leur  histoire.  Cf.  De  Is.  el  Us,,:.  31.  L'idée  d'imiter 
ce  procédé  d'interprétation  devait  venir  naturellement 
aux  Juifs  hellénistes,  désireux  de  faire  accepter  par  le 
monde  grec  les  récils  merveilleux  de  la  Bible.  Sans 
nier  la  valeur  historique  de  ces  récits,  qu'on  ne  pou- 
vail  assimiler  aux  mythes  grecs,  ils  s'efforcèrent  de 
les  interpréter  r.i  .ne'  des  allégories  scientifiques  ou 
morales.  Ainsi  Aristobule  allégorisa,  à  l'usage  de 
Ptolémée  VI,  les  anthropomorphismes  du  Penta- 
teuque, el  Arisiée  faisait  ri  monter  à  Moïse  lui- 
même  les  principes  de  l'allégorisme.  Cf.  Eu 
Prtepar.  evang.,  un,  9,  t.  xxi,  col.  636.  Voir  Aristo- 
bule, 1,  t.  i,  col.  964;  Alexandrie  (École  exégétique 
u'),  t.  i,  col.  360.  Les  thérapeutes  étaient  des  allégo- 
ristes.  «  Ils  interprètent  la  loi  mosaïque  allégorique- 
ment,  persuadés  que  les  mots  de  cette  loi  ne  sont  que 
les  signes  et  les  symboles  de  vérités  cachées.  De  plus, 
ils  possèdent  des  écrits  d'anciens  sages,  fondateurs  de 
leur  secte,  qui  leur  ont  laissé  beaucoup  de  monuments 
de  la  sagesse  allégorique  dont  ils  font  leurs  modèles... 
La  loi  entière  leur  apparaît  comme  un  cire  organique, 
qui  aurait  pour  corps  le  sens  littéral,  et  pour  àme  le 
sens  caché  ».  Philon,  De  vit.  contempl.,  3,  t.  il,  p.  W5, 
17ti.  cf.  Karppe,  Étude  sur  les  origines  et  la  nature  de 
Zohar,  Paris,  1901.  p.  15-17.  Les  Juifs  palestiniens  culti- 
vait ut  eux-mêmes  le  genre  allégorique  dans  leurs  Mi- 


309 


PHILON 


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draschim.  Voir  MlDRASCH,  1.  iv,  col.  1079,  1080.  Philon, 
avec  son  estime  pour  les  philosophes  grecs  et  son  désir 
de  faire  accepter  les  écrits  bibliques  comme  les  trésors 
de  la  parfaite  sagesse,  ne  pouvait  manquer  de  faire  ap- 
pel à  toutes  les  ressources  de  l'allégorisme  et  de  trans- 
porter ainsi  dans  le  domaine  de  l'hellénisme  une  mé- 
thode déjà  en  faveur  auprès  des  rédacteurs  de  la  Ilagada 
palestinienne.  Cf.  Frankel,  Ueber  den  Eiii/luss  der  pa- 

ischen  Exégèse  auf  die  alexandrinische  Herme- 
neutik,  1851,  p.  190-200.  Il  n'était  donc  pas  le  premier 
à  se  servir  de  l'allégorisme  pour  expliquer  les  Livres 
Saints:  mais  il  faut  reconnaître  qu'avant  lui  personne, 
dans  le  inonde  juif,  n'avait  encore  employé  celte  mé- 
thode d'une  manière  aussi  étendue  et  aussi  systéma- 
tique. Cf.  R.  Simon,  Hist.  crit.  du  Vieux  Testament, 
Rotterdam,  1685,  p.  92,  97,  98,  371,  373.  -  Toutefois, 
Philon  ne  néglige  pas  le  sens  littéral  du  texte  sacré; 
mais  il  le  traite  comme  secondaire  et  uniquement  des- 
tiné à  ceux  qui  ne  sont  pas  capables  de  s'élever  à  une 
sagesse  supérieure.  C'est  un  corps  dont  le  sens  allégo- 
rique est  l'âme,  et  l'intérêt  de  l'âme  demande  qu'on 
prenne  soin  du  corps.  11  dit,  en  s'inspirant  des  idées 
qu'il  a  prêtées  aux  thérapeutes  :  «  Quelques-uns,  bien 
assurés  que  le  texte  des  lois  symbolise  des  réalités  in- 
telligibles, s'appliquent  avec  grand  soin  à  ces  réalités 
et  ne  font  plus  aucun  cas  de  la  lettre.  Je  blâme  leur 
parti-pris;  il  fallait,  en  effet,  avoir  souci  de  l'un  et  de 
l'autre,  rechercher  avec  grand  zèle  ,les  choses  invisi- 
bles, et  conserver  comme  un  précieux  trésor  l'élément 
visible...  Il  faut  assimiler  la  lettre  au  corps,  et  le  sens 
mystique  à  l'âme.  De  même  donc  que  l'on  doit  veiller 
sur  le  corps,  parce  qu'il  est  la  demeure  de  l'âme, ainsi 
l'on  doit  tenir  compte  de  la  lettre.  »  De  migr.  Abrah., 
16,  t.  i,  p.  450-451.  «  La  lettre  des  Saintes  Écritures 
ressemble  à  l'ombre  des  corps,  les  sens  mystérieux  dé- 
gagés des  Écritures  sont  la  vraie  réalité.  »  De  confus. 

38,  t.  î.  p.  134.  Cf.  Col.,  n,  17;  Heb.,  x,  1.  Phi- 
lon tient  surtout  à  écarter  du  texte  sacré  les  concep- 
tions anthropomorpbiques.  11  dit  à  leur  sujet  :  «  Pour 
ce  qui  est  de  la  propre  interprétation,  l'esprit  le  plus 
lent  ne  manquera  pas  de  concevoir  qu'ici,  il  faut  saisir, 
en  dehors  de  la  lettre,  une  autre  chose.  >>  De  somn.. 
16,  t.  i,  p.  635,  036.  La  lettre  ainsi  reléguée  à  l'arrière- 
plan,  Philon  allégorise  en  toute  liberté.  Il  se  refuse  à 
entendre  littéralement  les  six  jours  de  la  création,  Leg. 
alleg.,  i,  2,  t.  i,  p.  44;  le  récit  de  la  formation  d'Eve, 
Leg.  alleg.,  n,  7,  t.  i,  p.  70;  le  paradis  terrestre,  De 
tnund.   opif.,  54,   t.   i,  p.   37;  la  tentation   d'Eve,  De 

l.  opif.,  56,  t.  i,  p.  38,  etc.  Abraham  reçoit  l'ordre 
de  sortir  de  son  pays,  de  sa  parenté,  de  la  maison  de 
son  père.  Gen.,  xii,  1-3.  Dieu  indique  par  là  ce  qu'il  faut 
faire  pour  purifier  l'âme  :  l'éloigner  du  corps,  de  la 
sensibilité  et  de  la  conversation.  De  migr.  Abrah.,  1. 
t.  i,  p.  436.  Le  traité  De  congressu  explique  le  texte 
où  il  est  dit  que  Sara  envoya  Abraham  à  sa  servante 
pour  en  avoir  des  enfants.  Gen.,  xvi,  1-6.  Sur  ce  thème, 
Philon  explique  que,  désirant  épouser  la  philosophie,  il 
commença  par  entrer  successivement  en  rapport  avec 
trois  servantes  de  celle-ci,  la  grammaire,  la  géométrie 
et  la  musique,  et  qu'il  en  apporta  les  fruits  à  l'épouse 
légiti  ne.  De  congress.,  14,  t.  i,  p.  530.  Certaines  lois 
ne  peuvent  se  prendre  dans  le  sens  littéral,  par 
exemple,  celle  qui  exempte  les  fiancés  du  service  mili- 
taire. Deut.,  xx,  5.  Cette  loi  signifie  simplement  que 
ceux  qui  n'ont  pas  fait  grand  progrès  dans  la  vertu  ne 
doivent  pas  s'exposer  à  la  tentation.  De  agricult.,  t.  i, 
p.  322.  Ces  exemples  montrent  comment  Philon  traite 
'.      récits  bibliques.  Les  personnages  ont  aussi  leur  si- 

ation  allégorique.  Adam  est  l'homme  inférieur, 
Caïn  l'égoïsme,  Noé  la  justice,  Sara  la  vertu  féminine, 
Rébecca  la  sagesse,  Abraham  la  vertu  acquise  par  la 
science,  Isaac  la  vertu  produite  par  la  nature,  Jacob  la 
vertu  qui  résulte  delà  pratique  et  delà  méditation,  etc. 


L'Egypte  symbolise  le  corps,  Cbanaan  la  piété,  la 
tourterelle  la  sagesse  divine,  la  colombe  la  sagesse  hu- 
maine, etc.  En  un  mot,  tout  dans  la  Bible,  hommes, 
choses,  événements,  devient  sujet  d'allégorie  et  même 
n'est  mentionné  que  dans  ce  but.  Sans  doute,  il  y  a 
des  allégories  dans  la  Sainte  Écriture.  Voir  Allégorie, 
t.  i,  col.  368.  -Mais  encore  faut-il  qu'il  existe  un  rap- 
port naturel  et  justifiable  entre  le  sens  littéral  et  le 
sens  allégorique  ou  mystique.  Voir  MYSTIQUE  (Si  n-  . 
t.  IV,  col.  1371-1371.  Philon  ne  doutait  pas  de  la  valeur 
objective  de  ses  interprétations;  il  s'imaginait  que, 
dans  l'extase,  c'était  Dieu  même  qui  l'inspirait.  «  J'ai 
appris  plus  d'une  fois  une  merveilleuse  doctrine; 
c'était  mon  âme  qui  me  l'enseignait.  Il  lui  arriva  en 
effet  d'être  soulevée  par  Dieu  et  de  prophétiser  cela 
même  qu'elle  ne  savait  pas.  »  De  c/terub.,9,t.  i,p.!43. 
Cf.  De  migr.  Abrah.,  7,  t.  i,  p.  441.  Son  système  n'en 
est  pas  moins,  dans  son  application,  subjectif  et  arbi- 
traire. Il  a  porté  au  delà  des  limites  permises  l'exagéra- 
tion d'un  principe  vrai.  Aussi,  bien  qu'elle  soit  presque 
complètement  exégétique,  son  œuvre  n'apporte-t-elle 
qu'une  contribution  insignifiante  à  l'intelligence  des 
Livres  Saints.  Cf.  Cornely,  Tntrod.  in  U.  T.  libros  sa- 
cros,  Paris,  t.  i,  1885,  p.  598-599. 

V.  Son  influence.  —  1°  Nouveau  Testament.  —  On  a 
signalé  un  certain  nombre  de  resemblances  de  pensée 
ou  d'expression  entre  Matth.,  m,  10;  vu,  18,  19,  et  De 
agricult.,  2,3,  t.  i,  p.  301;  Matth.,  vu,  13,  14,  et  Leg. 
alleg.,  Il,  24,  t.  i,  p.  84;  Matth.,  xxm,  23-2S,  et  De 
cherub.,  27,  28,  t.  I,  p.  155,  156;  Joa.,  v,  3,  et  De  vi- 
ctim..  S,  t.  n,  p.  257;  Rom.,  i,  25,  et  De  sacrif.  Abel, 
20,  t.  I,  p.  177;  I  Cor.,  xv,  47-49,  et  Leg.  allegor.,  i,  29, 
t.  i,  p.  02;  II  Cor.,  v,  6,  et  De  agricult.,  29,  t.  i,  p.  310, 
etc.  Dans  l'Épitre  aux  Colossiens,  les  rapprochements 
possibles  seraient  au  nombre  de  plus  de  vingt-cinq. 
Ces  analogies  prouvent  seulement  que  la  terminologie 
et  les  idées  de  l'école  d'Alexandrie  étaient  assez  répan- 
dues au  temps  des  Apôtres  pour  que  ceux-ci  pussent 
y  faire  des  allusions  plus  ou  moins  formelles.  Dans 
i'Épitre  aux  Hébreux,  les  ressemblances  sont  d'un 
autre  ordre.  Elles  portent  sur  les  points  suivants  : 
1.  Caractère  et  mission  du  grand-prêtre,  Heb.,  v,  1,  2, 
et  De  monarch.,  u,  12,  t.  u,  p.  230;  De  prœm.,  9,  t.  il, 
p.  il7.  —  2.  Le  vrai  grand-prêtre  est  le  Logos,  Heb.,  v, 
5-10;  vu.  25,  elDeprofug.,  20,  t.l,  p.  562;  De  leg.  spec, 
m,  24,  t.  il,  p.  322;  De  somn.,  i,  37,  t.  i,  p.  653;  Vit. 
Mos.,  m,  14.  —  3.  Le  Temple  et  la  liturgie,  Heb.,  îx,  x, 
et  De  somn.,  i,  37,  t.  i,  p.  653;  Vit.  Mos.,  m,  1-18; 
Légat,  ad  Caj.,  39,  t.  n,  591.  —  4.  Difficulté  du  pardon, 
Heb.,  vi,  4-6,  et  De  prœm.,  I,  t.  Il,  p.  409.  —  5.  Le 
serinent  de  Dieu,  Heb.,  VI,  13,  et  Leg.  alleg.,  ni,  72, 
t.  i,  p.  127;  De  sacrif.  Abel,  28,  t.  i,  p.  181.  —  6.  Le 
pontife  Melchisédech,  Heb.,  vu,  1,  et  Leg.  alleg.,  m, 
25,  t.  i,  p.  102,  103,  etc.  D'autres  ressemblances  sont 
purement  verbales,  Heb.,  iv,  12,  et  Quis  rer.  divin. 
hseres,  48, 1. 1,  p.  506;  Heb.,  m,  5,  et  Leg.  alleg.,  m,  81, 1. 1, 
p.  132;  Heb.,  v,  8,  et  De  agricult.,  23,  t.  i,  p.  315,  etc. 
Rien  n'autorise  à  supposer  un  document  antérieur 
auquel  les  deux  auteurs  auraient  puisé  chacun  de  leur 
coté.  Plusieurs  savants  en  concluent  que  le  rédacteur 
de  ï'Épître  aux  Hébreux  connaissait  plusieurs  traités 
de  Philon.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  ne  dépend  de  lui  en  au- 
cune manière  pour  le  fond  même  des  idées.  Pour  éviter 
toute  confusion  entre  sa  doctrine  et  celle  de  Philon,  il 
s'abstient  même  d'employer  le  nom  de  Logos  et  fait  du 
Christ  le  Fils  même  de"  Dieu.  Voir  Hébmxx  (Epitre 
aux),  t.  m.  col.  543,  544.  Cf.  Petau,  De  incarn.  Verbi, 
XII,  xi,  1,  2;  Siegfried,  Philo  von  Alexandria  als  Aus- 
leger  des  Allen  Testaments,  Iéna,  1875,  p.  321-330.  Il 
faut  de  plus  observer  que  la  plupart  des  ressemblances 
entre  les  écrits  de  Philon  et  des  Épitres  de  saint  Paul 
s'expliquent  par  le  livre  de  la  Sagesse  et  parce  que  ces 
idées  étaient  devenues  courantes  dans  les  milieux  juifs. 


311 


PHILON    —    PHILOSOPHIE 


312 


2  Exégètes  postérieurs.—  Le  système  allégorie, 
Philon  inspira  ceux  qui  après  lui  étudièrent  ou  ensei- 
gnèrent dans  l'école  d'Alexandrie.  11  est  presque  exact 
de  dire  qti  il  avaitabsorbé,  comme  un  immense  réser- 
voir, tous  les  petits  ruisseaux  de  l'exégèse  biblique  à 
Alexandrie,  pour  déverser  ensuite  ses  eaux  dans  les  ri- 
vières et  les  canaux  à  mille  bras  de  l'interprétation 
juive  et  chrétienne  des  Saintes  Ecritures.  ■  Siegfried, 
Philo  von  Alexandria,  p.  27.  Il  eut  à  Alexandrie  même 
d'illustres  imitateurs,  Clément  d'Alexandrie,  qui  admet- 
tait la  création  instantanée  et  tendait  à  introduire 
l'allégorie  dans  l'explication  du  paradis  terrestre, 
Strom.,  v,  11;  vi,  16,  t.  ES,  col.  109,  370,  376;  voir 
Ci.t.Mi.M  d'Alexandrie,  t.   n,  col.  803;  Origène  qui, 

comme  Philon,  distinguait  dans  l'Ecriture  un  corps  et 
une  âme,  Periarchon,  iv,  11,  t.  xi,  col.  365;  In  Levit., 
boniil.  v,  5,  t.  xn,  col.  456.  excluait  l'anthropomorphisme 
et  appliquait  avec  grande  hardiesse  le  système  de  l'in- 
terprétation allégorique;  voir  Origène,  t.  iv.  col.  1874- 
1878;  saint  Athanase,  Oral,  il  cont.  Arian.,  49,  60, 
t.  xxvi,  col.  249,276,  el  saint  Cyrille,  Glaphyr.  in  Gen., 
1,  t.  i.xix.  col.  13.  16,  qui.  en  beaucoup  de  points, 
suivent  la  tradition  alexandrine.  Voir  Athanase  i Saint), 
t.  i,  col.  1209;  Cyrille  d'Alexandrie  (Saint),  t.  n, 
col.  1185.  A  la  même  tradition  se  rattache,  au  vif  siècle, 
Anastase  le  Sinaïlique,  In  Hexaemer.,  7,  t.  LXXXIX, 
col.  961,968,  qui  blâme  cependant  l'abus  du  sens  allé- 
gorique chez  Origène,  et  dit  que  Philon,  Papias.  [re- 
née, .lustin,  Pantène,  Clément  et  les  deux  Grégoire  de 
Cappadoce  entendaient  dans  un  sens  mystique  les  six 
jours  et  le  paradis  terrestre.  Voir  Alexandrie  i  ÉCOLE 
EXÉGÉTiMi  e  D'),  t.  i,  col.  358.  La  réaction  contre  l'allégo- 
gisrae  se  produisit  à  Antioche  de  Syrie.  Voir  Antiocue 
(École  i:\D.i.Tinn:  n'i,  t.  i,  col.  683.  Cf.  Yigouroux.  La 
cosmogonie  mosaïque,  Paris,  1882,  p.  20-57.  —  L'idée 
de  Philon  sur  la  dépendance  des  philosophes  grecs  par 
rapport  à  Moïse  est  adoptée  par  saint  Justin,  Apoh,  i, 
59;  Dial.  mm  Tryph.,  7.  t.  VI,  col.  116,  491,  par  Tatien, 
Oral ..  3(i-il,  i  v.  col.  880-888,  Clément  d'Alexandrie, 
Strom.,  i,  21,  t.  wh,  col.  819;  v,  3,  t.  ix,  col.  31,  Théc- 
doret,  Grœc.  Affect.,  n.  t.  î.xxx,  col.  840,  et  presque 
tous  les  Pères  des  cinq  premiers  siècles.  Cependant 
Origène,  Cont.Cels.,  i,  16;  vu.  27,  t.  xi.  col.  687,  1459; 
et  saint  Augustin,  De  civ.  Dei,  xvm,  27.  t.  xi.i.  col.  583. 
sont  moins  affirmatifs.  —  Eusèbe  et  saint  Jérôme  con- 
sidèrent Philon  comme  un  écrivain  important  et  lui 
consacrent  une  notice,  lieux  autres  Pères  lui  emprun- 
tent fréquemment  ses  pensées,  Clément  d'Alexandrie, 
cf.  la  préface  de  Potter,  Oxford,  1715,  reproduite  dans 
Migne,  t.  vin,  el  saint  Ambroise,  dans  ceux  de  ses 
livres  où  il  Iraite  les  mêmes  sujets  que  Philon,  In 
Hexaemer.,  De  paradis.,  De  Cain  elAbel,  De  Nœ  el 
De  Abrali.,  De  fug.  sœc,  De  Jacob.  Cf.  Siegfried, 
Philo  von  Alexandria,  p.  371-391.  —  En  appliquant  à 
leurs  explications  des  textes  sacrés  l'allégorisme  philo- 
nien,  1rs  Pères  alexandrins,  même  Origène,  n'avaient 
pas  dépassé  certaines  limites,  imposées  parla  nécessité 
de  sauvegarder  le  sens  littéral  de  la  Sainte  Écriture. 
L'opposition  que  rencontra  de  bonne  heure  l'en 

irique  empêcha  d'ailleurs  leur  méthode  de  faire  loi 
dans  l'Église.  11  n'en  fut  pas  de  même  pour  l'exégèse 
juive,  Obligée  de  se  dérobei  à  l'explication  littérale 
à  on  bon  Dombn  de  passages  bibliques,  elle  recourut 
de  plus  en  plus  à  l'allégorisme  pour  se  tirer  d'embarras. 
A  l'allégorie  des  choses,  elle  ajouta  celle  des  mots,  des 
chiffres,  des  lettres  elles-mêmes,  pour  aboutira  la  kab- 
bale. Philon,  sans  doute,  n'y  fut  pour  rien;  le  Talmud 
ibsolument.  Néanmoins  i  il  existe  entre 
la  kabbale  el  le  nouveau  platonisme  d'Alexandrie  de 
telles  ressemblances,  qu'il  esl  impossible  de  les  expli- 
quer autrement  que  par  une  origine  commune,  i 
A.  1  ranck,   L><  la  phiîot 

des  Juifs,  Paris,  1889,  p.  213.  Partis  des  mêmes  prin- 


cipes, obéissant  aux  mêmes  besoins,  Philon  et  les  kab- 
balistes  aboutirent  aux  mêmes  résultats,  et  rien  ne 
ressemble  mieux  à  l'œuvre  du  premier  que  le  Zoliar. 
qui  renchérit  encore  sur  l'allégorisme  de  l'écrivain 
d'Alexandrie.  Cf.  Sepher  ha-Zoliar.  édit.  Lafuma-Giraud, 
Paris,  1906. 

VI.  Bibliographie.  —  Fabricius,  Dissertatio  de  l'Ia- 
tonisnio    Philoms,    in-4°,    Leipzig.   1693;   Stahl,  dans 
VAltgemeine    Bibliothek    der     Biblischen    Lileratur 
d'Eichhorn,  t.  îv.  fasc.  v.  p.  770-890;  Plank,  Coi;-. 
tatio  de  principiis  et  causis    interpretationis  Pliilo- 
nianx  allégories?,  1807;  Grossmann,  Qusesliones  i>lii- 
lunianœ,  part.    I,   De    theologiec   Philonis   fontibus  et 
auctoritate,  1829;  Gfrôrer,  J'hilo  und  die 
nische  Theosophie,  2  in-8»,  Stuttgart,  I831-1S35;  Dâhne, 
Geschichtliche    Darslellung   der   jùdisch-al 
schen    Religionsphilosophie,   2  in-8'.    1834;    Creuzer, 
Kritik    der    Schriften    des    Judeu   Pliilo,    dans    les 
Theologische  Studien  und  Kritiken,  1832;  Kirchbaum, 
Der  jûdische  Alexi  mus,  Leipzig,  1841;  Bûcher, 

Philonische  Studien.  1848;  M.  Wolf,  Die  Philonische 
Philosophie,  Leipzig.  1849;  2'  édit..  Gothenbourg,  1858; 
J.  liiet,  Essai  historique  et  critique  sur  l'école  juive 
d'Alexandrie,  in-8",  .Paris,  1851;  F.  Delaunay,  l'hilon 
d'Alexandrie,  in-8»,  Paris,  1867;  C.  Siegfried.  Philo 
von  Alexandria  als  Ausleger  des  Allen  Testaments, 
in-8°,  Iéna,  1875;  Ed.  Ryle.  Philo  ami  Iii'ly  Scrip- 
ture,  in-16.  Londres,  1895;  Ed.  Ilerriot.  Philon  le  Juif, 
in-8,  Paris.  1898;  .1.  Martin.  l'hilon,  Paris,  1907. 

H.  Lesètre. 

PHILOSOPHIE  (grec:  piXoaoçfa;  Vulgate:  jddloso- 
jdiiu).  ensemble  d'idées  fondamentales  et  rationnelles 
sur  Dieu,  l'homme,  le  inonde  et  leurs  relations. 

1.  PHILOSOPHIE  HÉBRAÏQUE  —  l"  Les  Hébreux  avaient 
reçu  de  leurs  ancêtres  chaldéens  un  certain  nombre  de 
notions  théoriques  et  pratiques  sur  les  êtres  qui  font 
l'objet  des  connaissances  fondamentales  de  l'esprit  hu- 
main. Ces  notions,  conservées  et  approfondies  par  le 
bon  sens  des  générations  successives,  avaient  cependant 
subi  l'influence  des  croyances  religieuses,  issues  elles- 
mêmes  des  traditions  primitives,  mais  défigurées  et 
matérialisées  par  le  long  travail  de  l'erreur  et  des  pas- 
sions. Les  révélations  faites  à  Abraham  el  aux  patri- 
arches et  surtout  la  législation  donnée  par  Dieu  à 
Moïse  remirent  toutes  choses  au  point  pour  les  lb  lieux. 
Dès  lors  furent  fixés  pour  eux  les  grands  principes 
méconnus  ou  à  peine  soupçonnés  par  les  peu 
privés  des  lumières  de  la  révélation  :  existence,  unité, 
spiritualité,  puissance  créatrice  et  providence  de  Dieu, 
contingence  et  infériorité  du  monde  et  de  tous  les 
êtres  qui  le  composent,  double  nature  corporelle  et 
spirituelle  de  l'homme,  sa  liberté  et  sa  responsabilité. 
C  est  donc  de  la  révélation  que  procédait  la  philosophie 
hébraïque,  c'esl  lur  elle  qu'elle  s'appuyait,  c'est  par 
elle  qu'elle  corrigeai!  ses  écarts,  quand  les  tendances 
naturelles  des  Israélites  les  poussaient  au  polythéisme  ou 
au  matérialisme.  A  cet  égard,  il  était  juste  de  dire  : 
i  La  crainte  de  Jéhoi  dit     la  i   ligion    est 

le  commence I  de  la  sagesse.      Prov.,  i.  7.  Celui-là 

était  sage  et  savant,  il  s'élevail  mê à  un  niveau  très 

supérieur  à  celui  des  philosophes  de  l'antiquité,  parce 
qu'il  connaissait  Dieu,  l'homme  et  le  inonde  par  les 
inspirations  de  sa  foi.  Pour  les  sa.es  hébreux,  i  la  divi- 
nité n  esl  pas  le  résultat  d'une  suite  de  syllogismes;  il 
n'existe  dans  leurs  livres  aucune  trace  de  ces  spécula- 
tions métaphysiques  que  nous  trouvons  chei  les  Hindous 
et  chez  les  Grecs  il  n'j  a  chez  eux  ni  théologie  savante, 
ni  philosophie  dans  le  sens  que  nous  attachons  à  ce 
mot,  et.  pour  faire  connaître  Dieu,  ils  s'adressent  m 
cœur  de  l'homme,  è  son  sentiment  moral,  à  son 
gination.  L'Hébreu  croyait  au  Dieu  créateur  qui  s'était 
révélé  a  -es  pères  et  dont  l'existence  esl  au-dessus  du 
raisonnement  des  hommes.  La  morale  des  Hébreux  est 


313 


PHILOSOPHIE 


314 


celle  de  la  conviction,  du  sentiment  intime  d'un  Dieu 
juste   el   bon;  les   maximes  de  leurs  sages  et  de  leurs 
prophètes  ont  jailli   d'une  source  divine,  elles  se  sont 
manifestées  tout  à  coup  par  un  sublime  élan  et  ne  sont 
pas  les  résultats  d'une  froide  réllexion  et  d'un  orgueil- 
leux stoïcisme.   «  Munk,  Palestine,  Paris,  1881,  p.  418. 
Il  n'existe  donc  pas,  à  proprement  parler,  de  philoso- 
phie hébraïque;  les  Hébreux  reçoivent  de  la  révélation 
leurs  idées  toutes  faites;  tout  au  plus  en   tirent-ils  les 
conséquences  immédiates;  l'observation  leur  est  fami- 
lière, comme  à  tous  les  Orientaux,  mais  la  spéculation 
leur  demeure  à  peu  près  étrangère.  Leur  sagesse  a  un 
caractère  positif  et  traditionnel;  ils  reçoivent  la  vérité 
de  leurs  prophètes  et  de  leurs  sages;  ils  l'admettent  ou 
la  repoussent  pratiquement,  suivant  les  dispositions  du 
moment;  ils  ne  songent  guère  à  justifier  par  le  raison- 
nement déductif  leurs  conclusions  vraies  ou  fausses. 
—  2°  Dien  que  renseignés  aulhentiquement  par  la  révé- 
lation sur  les  thèses  capitales  de  la  vraie  philosophie, 
les  Hébreux  ne  laissent  pas  de  garder,  sur  les  points 
secondaires,  les  théories  qui  sont  celles  de  leur  temps 
et  de  leur  milieu,  ou  qui  même  leur  sont  particulières. 
La  révélation  respecte  chez  eux  ces  manières  impar- 
faites de  penser,   pour  autant  qu'elles  ne  sont  pas  en 
contradiction  avec  les  données  essentielles  de  leur  foi. 
Ainsi  la  nature  spirituelle  et  transcendante  de  Dieu  est 
affirmée  avec  la  plus  parfaite  netteté.  Néanmoins,  les 
Hi  breux    tiennent    à    concevoir   Dieu   d'une   certaine 
manière:  de   là   les  anthropomorphismes   si   fréquents 
dans  la  liible,  surtout  dans  les  anciens  livres.  Voir  AN- 
THROPOMORPHISMES, t.  i,  col.  662.  Dieu  a  interdit  toute 
représentation    de  la   divinité   et    personne   ne   l'a  vu, 
même  parmi  les  plus  privilégiés.  Exod.,m,  6;  xxiv.  10, 
11;  xxxili,  18-23;  Joa.,  i,  18.  Néanmoins  les  Israélites 
s'imaginent  qu'un   veau  d'or  peut  être  une  image  de 
Jéhovah,  Exod.,    \.\xn,    1,   4;  III  Reg..  xn,  28,  et  les 
prophètes  sont  obligés  de  leur  rappeler  que  Dieu  ne  se 
nourrit  pas  de  la  chair  de  leurs  sacrifices.  Ps.  i.  (xlix), 
12.  13,  Ces  tendances  grossières  ne  se  corrigent  com- 
plètement qu'après  le  retour  de  la  captivité,  et  les  con- 
quérants   romains    conduits   par   Pompée    sont  singu- 
lièrement étonnés,  avec   leurs   idées   polythéistes,    de 
constater  dans  le  temple  de  Jérusalem,  nulla     intus 
deâm  effigie,  vacuam  sedem  et  inania  areana,  «  aucune 
image  de  divinités  à  l'intérieur,  un  sanctuaire  vide  et  de 
vains  mystères.  •>  Tacite,  Hist.,  v,  9.  Voir  Eloiiim,  t.  il, 
col.    1701;  Jéhovah,  t.  m,   col.   1235.  Cf.    de  Broglie, 
L'idée  de  Dieu  dans  l'Ancien   Testament,   Paris,  1892, 
p    15-194.  —  3°  Les  notions  nécessaires  sur  la  nature, 
la  destinée  et  les  devoirs  de  l'homme   sont  également 
fournies  aux  Hébreux  par  la  révélation.   Voir  Adam, 
t.  i,  col.  171;  Ame,  col.  453;  Morale,  t.  iv,   col.  1260. 
liais   comme    celle-ci    n'a    pas    à  intervenir   dans   la 
manière  dont  on  conçoit  le  fonctionnement  de  l'être 
intelligent,  la  psychologie   des  Hébreux  est  purement 
humaine  et  spécialement  sémitique.  Ils  comprennent 
les  opérations  de  l'âme  et  ses  rapports  avec  le  corps 
comme  on  pouvait  le  faire  de  leur  temps  et  dans  leur 
milieu,  prêtant  au  souffle,  au  sang,  au  cœur,  aux  reins, 
aux   entrailles,    aux    os,    une    action    dans    la    vie   de 
l'âme,  dans  ses  pensées,  ses  volontés  et  ses  sentiments. 
Cf.  l'r.  Delitzsch,  System  der  biblischen  Psychologie, 
Leipzig,   1861,   p.  119-285.  Les  termes  qu'ils  emploient 
rellètent  ces  conceptions.   La  substance  spirituelle  et 
pensante   prend  chez  eux  le  nom  de  ruâh,  «  souffle  », 
KvEÛiut,  spiritus.  Le  corps  est  appelé  bdsàr,  «  chair  ». 
■yii-,  caro,  le   mot  •ràiu.x,   corpus,  étant   plus  habituel- 
.  ment  réservé  pour  désigner  le  cadavre,  Mat  th.,  xiv, 
12;  xix,   5;  xxvii.  58;   Marc,  x,  8;  xv,  43;  Luc.  xvn, 
.\iii.  52,  .V,;  Joa.,  xix,  31,  38,  10;  Act.,  ix,  40,  etc. 
Le  néfei    hébreu,  ■l-^yr,,  anima,  est  le  nom  du  com- 
posé humain  et  par  conséquent  de  la  vie.  Matth.,  Il, 
20;  vi,  25;  x.  39:  Marc,  m,  l;  x,  45;  Luc,  vi.  9;  xn, 


20,  23;  Joa.,  x,  11;  xn,  25;  Act.,  xx,  21;  Rom.,  xvi, 
4,  etc.  Il  remplace  même  le  pronom  personnel  pour 
désigner  la  personne  elle-même.  Matth.,  vi,  25:  xxvi, 
38;  Luc,  i,  46,  47;  Act.,  n,  43,  etc.  La  sensibilité  y  a 
parfois  son  siège.  Matth.,  xi,  29;  XXVI,  38;  Marc,  xiv, 
31;  Luc,  n,  35;  xn,  19,  20;  Apoc,  xvm,  II,  etc.  Les 
termes  abstraits  pour  désigner  la  sensibilité  et  les  sens 
n'existent  pas.  Des  verbes  servent  à  indiquer  les  opé- 
rations de  ces  derniers,  sans  qu'on  se  soucie  toujours 
d'établir  un  rapport  logique  entre  l'idée  et  l'expression. 
Ainsi  on  «  voit  s  la  chaleur,  Is.,  xliv,  16,  le  bruit, 
Marc,v,  38,  la  vie,  Joa.,  m,  36,  la  corruption,  Luc,  il, 
26;  Joa.,  VIII,  51;  Act.,  Il,  27,  au  lieu  de  les  «  sentir  »; 
on  «  goûte  »  la  mort,  Matth.,  xxvi,  28  ;  Joa.,  vm,  52,  etc., 
au  lieu  de  la  «  souffrir  ».  Rien  ne  marque  explicitement 
la  distinction  entre  la  sensation  et  le  sentiment.  Les 
nuances  manquent  pour  l'expression  des  sentiments 
intermédiaires;  pour  dire  «  aimer  moins  »,  on  est 
obligé  d'avoir  recours  au  verbe  «  haïr  ».  Luc,  xiv,  26-, 
Les  passions  ne  sont  pas  distinguées  des  désirs.  I.  in- 
telligence est  habituellement  nommée  lêb,  «  cœur  », 
xapSfot,  cor.  Voir  Cœur,  t.  Il,  col.  823.  La  raison,  la 
conscience  n'ont  pas  de  nom  spécial;  la  loi  esl  écrite 
dans  le  cœur,  Rom.,  Il,  15,  et  non  dans  la  conscience. 
L'imagination  n'est  pas  mentionnée;  l'intention  ne  se 
distingue  pas  du  cœur  où  elle  se  forme.  Le  nom  abs- 
trait de  la  vertu  se  rencontre  à  peine.  Cf.  Vigouroux, 
Le  Nouveau  Testament  et  les  découv.  archçol.  mod., 
Paris,  1S96,  p.  61-76.  Cette  psychologie  était  donc  assez 
rudimentaire  et  ne  comportait  pas  une  analyse  très 
profonde  des  facultés  de  l'âme  et  de  leur  exercice.  — 
Pareillement,  les  Hébreux  ne  se  font  qu'une  idée 
imparfaite  de  la  nature  de  l'âme,  de  sa  distinction 
d'avec  le  corps  et  des  conditions  de  sa  vie  séparée.  De 
là  peut-être  leur  embarras  pour  concevoir  clairement  sa 
survivance  après  la  mort,  quand  le  corps  lui-même 
n'étail  plus  là  pour  la  servir  et  tombait  en  dissolution. 
Voir  Schéol.  Ainsi  s'explique  en  partie  leur  lenteur  à 
dégager  complètement  la  notion  de  son  immortalité, 
comme  aussi  à  trouver  la  solution  du  problème  de 
l'épreuve  des  bons  et  de  la  prospérité  des  méchants  sur 
la  terre.  Voir  Mal,  t.  tv,  col.  601-604.  Les  révélations 
et  les  bienfaits  divins  dont  ils  ont  été  l'objet,  les  pré- 
cautions qui  ont  été  prises  pour  les  isoler  des  autres 
peuples,  les  persécutions  et  la  haine  dont  ils  finissent 
par  devenir  les  victimes,  enfin  les  prophéties  qu'ils 
entendent  dans  un  sens  temporel  et  exclusivement 
favorable  à  leur  nation,  deviennent  pour  les  Israélites 
le  prétexte  à  une  appréciation  très  exagérée  de  leur  su- 
périorité par  rapport  aux  autres  hommes.  Ils  oublient 
que,  s'ils  ont  été  les  premiers  bénéficiaires  de  la  révéla- 
tion, c'est  afin  de  la  conserver  et  de  la  transmettre  au 
reste  de  l'humanité,  et  non  de  la  monopoliser  comme 
un  bien  qui  leur  est  dû.  Il  y  a  là  une  méconnaissance 
de  l'égalité  originelle  des  hommes  et  de  l'indépendance 
de  Dieu  dans  la  répartition  de  ses  dons,  que  saint  Paul 
est  obligé  de  redresser.  Rom.,  n,  1-m,  20.  —  4°  La  révé- 
lation ne  faisait  connaître  aux  Hébreux  que  deux  idées 
fondamentales  au  sujet  du  monde  :  la  création  de  toutes 
choses  par  Dieu  et  l'action  de  sa  providence  sur  tous 
les  êtres  créés.  A  elles  seules,  ces  deux  idées  font 
de  la  cosmogonie  mosaïque  une  œuvre  philosophique 
qui  n'a  été  dépassée  par  aucun  système.  Voir  Cosmo- 
gonie mosaïque,  t.  il,  col.  1034.  Quant  aux  explications 
de  détail,  les  Hébreux  sont  restés  tributaires  de  la 
science  de  leur  époque,  science  des  apparences  au- 
dessus  de  laquelle  ils  n'ont  eu  ni  le  désir  ni  le  moyen 
de  s'élever.  Seulement  leurs  idées  religieuses,  se  com- 
binant avec  leur  connaissance  fort  restreinte  des  lois 
de  la  nature,  les  ont  portés  à  supposer  très  fréquem- 
ment une  action  directe  de  Dieu  là  où  nous  ne  voyons 
que  le  jeu  normal  des  forces  créées  et  réglées  par  lui. 
II.  La  philosophie  des  auteurs  sacrés.  —  1°  Moïse 


315 


PHILOSOPHIE 


316 


et  les  prophètes  sont  des  philosophes  en  ce  sens  que 
leurs  écrits  enseignent  la  vraie  sagesse,  beaucoup  moins 
par  le  cote  théorique  que  par  le  cùté  pratique.  Ils  règlent 
les  rapports  de  l'homme  avec  Dieu  et  avec  ses  sem- 
blables :  vis-à-vis  de  Dieu,  respect,  obéissance,  amour, 
culte  conforme  à  la  loi,  mais  sincère  et  exempt  de  for- 
malisme; vis-à-vis  du  prochain,  justice  sous  toutes  ses 
formes  et  bienveillance.  Il  n'y  a  pas  de  meilleure  phi- 
losophie que  celle  qui  conduit  à  de  pareilles  conclu- 
sions et  aide  à  en  faire  des  règles  pratiques  et  obéies. 
—  2°  D'autres  écrivains  sacrés  ont  traité  plus  directe- 
ment et  plus  exclusivement  les  questions  philosophiques, 
telles  que  les  concevaient  lès  Hébreux.  Ce  sont  d'abord 
certains  Psalmistes,  qui  se  sont  occupés  des  questions 
de  morale.  Ps.  (Vulgate)  1,  xx.wi,  lxxii,  cxi.  cxxxviii. 
cxi.iv,  etc.  Le  livre  de  Job  est  le  type  d'une  large  dis- 
cussion philosophique.  Le  problème  posé  est  celui  de 
la  relation  de  cause  à  effet  qu'il  faut  supposer  entre  le 
mal  moral  et  le  mal  physique.  Plusieurs  interlocuteurs 
défendent  des  solutions  diverses  en  faisant  appel  tantôt 
au  raisonnement,  tantùt  et  beaucoup  plus  fréquemment, 
à  l'expérience.  La  discussion  n'est  pas  menée  avec  une 
logique  serrée,  comparable  à  celle  des  dialogues  de 
Platon.  Elle  se  poursuit  cependant  majestueuse,  vivante, 
incisive,  avec  une  allure  tout  orientale,  pour  aboutir  à 
une  double  solution  :  une  solution  de  principe,  la  sou- 
mission à  la  toute-puissante  et  insondable  volonté  de 
Dieu,  et  une  solution  de  fait,  le  retour  du  juste  à  la 
prospérité  après  son  épreuve  momentanée.  Voir  Job 
(Livre  de),  t.  m,  col.  1570-1576.  L'Ecclésiaste  est  une 
sorte  de  traité  de  la  béatitude,  consistant  sur  la  terre  à 
servir  Dieu  tout  en  jouissant  avec  modération  des  biens 
qu'il  accorde  à  l'homme.  Le  raisonnement  y  tient  peu 
de  place;  l'auteur  procède  surtout  par  aphorismes  qui 
s'inspirent  du  bon  sens  et  par  des  appels  à  sa  propre 
expérience  et  à  celle  des  autres.  Voir  Eccli;:si,\ste  (Le 
LIVRE  de  l'),  t.  il,  col.  1534.  Le  livre  des  Proverbes  est 
par  excellence  le  livre  de  la  sagesse  hébraïque.  Il  con- 
tienl  I  ■  loge  de  la  sagesse,  dont  il  cherche  l'origine  en 
Dieu  même,  et  traite  des  devoirs  de  la  vie  morale,  de 
la  vie  domestique  et  de  la  vie  civile.  C'est  un  De  offtciis, 
mais  composé  suivant  la  méthode  orientale.  On  n'y  voit 
ni  déductions  logiques,  ni  développements  suivis,  mais 
seulement  de  brèves  sentences,  des  observation-,  di  s 
conseils,  des  tableaux  de  mœurs,  le  tout  tendant  à 
rendre  la  vie  vertueuse  et  en  même  temps  aussi  suppor- 
table que  possible,  pour  soi  et  pour  les  autres.  Les 
plus  hautes  leçons  de  morale  s'y  mêlent  aux  préceptes 
les  plus  élémentaires  de  la  prudence  et  de  la  civilité.  Le 
même  genre  de  philosophie  pratique  se  retrouve  dans 
le  livre  de  l'Ecclésiastique.  Seulement  le  groupement 
logique  des  pensées  y  est  beaucoup  plus  sensible.  D'après 
le  fils  de  Sirach,  la  vraie  sagesse  vient  toujours  de  Dieu 
et  se  manifeste  surtout  par  l'accomplissement  des  devoirs 
envers  lui.  Mais  elle  préside  également  à  tous  les  actes 
et  à  toutes  les  relations  des  hommes,  afin  de  rendre  la 

vie  bonne  et  heureuse  ici-bas.  Voir  Ecclésiasi L] 

m\i:i  DEL'),  t.  il.  col.  1551-1553.  La  morale  de  ces  livres 
est  inférieure  à  celle  de  l'Évangile;  mais,  en  général. 
elle  s'élève  fort  au  dessus  de  la  morale  des  sa.-'  -  du 
paganisme.  —  L'un  des  traités  de  la  Mischna,  Pirke 
Abolit,  o  sentence  des  pères,  »  contient,  en  cinq  cha- 
pitres, une  collection  analogue  de  conseils  pratiques, 
parmi  lesquels  plusieurs  insistent  sur  la  nécessité  d'étu- 
dier la  lui.  Ce  recueil  est  d'une  date  postérieure  à  1ère 
chrétienne  70-170),  mais  se  réfère  parfois  à  des  autori- 
tés plus  anciennes.  Sa  philosophie  ne  dépasse  pas  celle 
îles  livres  précédents,  si  tani  esl  qu'elle  l'égale. 

III.  Influence  de  la  philosophii  grecque.  —  1°  Elle 
se  fait  sentir  dans  un  drs  livres  dé  l'Ancien  Testament, 
la  Sagesse,  œuvre  dont  l'auteur  appartenait  à  la  com- 
munauté judéo-hellénique  d'Alexandrie.  Il  est  naturel 
que  ce  livre  inspiré  reflète  les  manières  de  penser  des 


Juifs  hellénistes,  tout  en  restant  conforme  à  la  doctrine 
révélée.  On  sait  que  les  Juifs  de  la  Palestine  voyaient 
de  fort  mauvais  œil  cette  sorte  de  décentralisation  de  la 
pensée  hébraïque  et  celte  intrusion  de  la  culture  grecque, 
justement  suspecte  à  bien  des  égards.  Josèphe,  A>il. 
j  "  '..  XX,  xi,  2.  se  fait  l'interprète  de  cette  antipathie  : 
«  On  n'estime  pas  chez  nous,  dit-il,  ceux  qui  apprennent 
à  parler  la  langue  de  beaucoup  de  nations  et  qui 
recherchent  dans  leurs  discours  l'élégance  et  les  orne- 
ments du  langage,  parce  qu'on  regarde  cette  recherche 
comme  à  la  portée  des  esclaves  aussi  bien  que  des 
hommes  libres.  On  ne  tient  pour  sages  que  ceux  qui 
ont  acquis  la  science  des  lois  et  savent  interpréter  a\ec 
compétence  la  valeur  des  choses  et  des  paroles  dans  les 
saintes  Lettres.  »  Le  livre  de  la  Sagesse,  par  sa  manière 
de  présenter  les  idées  hébraïques  et  de  les  exprimer, 
-oit  évidemment  du  cadre  traditionnel  et  se  rapproche 
de  l'hellénisme. La  sagesse  n'y  apparaît  plus  seulement 
sous  la  forme  poétique  usitée  dans  les  livres  précé- 
dents; elle  y  prend  une  allure  plus  philosophique.  Elle 
est  un  i<  souflle  de  Dieu  »,  une  «  émanation  de  sa 
gloire  »,  un  «  éclat  de  la  lumière  éternelle  »,  vu,  25, 
26;  elle  «  cohabite  avec  Dieu  »,elle  «  initie  à  la  science 
de  Dieu  »,  elle  n  choisit  parmi  ses  œuvres  ■>  celles  qu'il 
doit  réaliser,  vin,  3,  4;  elle  est  «  assise  près  du  trône 
de  Dieu  ,  ix.  i.  et  s'identifie  avec  le  Logos  tout-puis- 
sant qui  a  son  trône  royal  dans  le  ciel,  xvill,  15.  C'est 
déjà  un  acheminement  vers  le  Logos  de  saint  Jean. 
Voir  Logos,  t.  iv,  col.  323.  L'auteur  sacré  ne  s'écarte 
pourtant  point  des  données  antérieures  sur  la  sa. 
il  veut  surtout  montrer  en  elle  un  attribut  divin  à  la 
communication  duquel  sont  appelés  les  hommes  de 
bien.  Cette  sagesse  se  meut  et  pénètre  l'univers,  vil, 
•21;  vin,  1.  comme  ce  que  les  stoïciens  appelaient  l'àiue 
du  inonde.  Elle  est  la  source  de  la  tempérance,  de  la 
prudence,  de  la  justice  et  de  la  force,  vm,  7.  Ce  sont 
là  les  quatre  vertus  cardinales  de  Platon.  L'auteur 
s'inspire  aussi  de  la  psychologie  platonicienne  dans  sa 
conception  île  l'âme,  vm,  20.  dont  le  corps  n'est  que 
la  i  tente  terrestre  > .  ix,  15.  Il  ne  procède  plus  par 
courtes  sentences,  comme  les  écrivains  palestiniens  ; 
sa  pensée  se  déroule  en  assez  longs  développements, 
dans  lesquels  h-  raisonnement  prédomine.  L'idée  elle- 
même  perd  sa  forme  concrète  et  imagée  d'autrefois 
'  pour  prendre  un  tour  abstrait  et  philosophique.  Là  où 
l'auteur  dit  :  «  Qui  lient  des  discours  impies  ne  saurait 
rester  caché...  Facilement  on  la  trouve  lia  sagesse) 
quand  on  la  cherche,  i  Sap.,  i.  S;  VI,  13.  ses  prédéces- 
seurs avaient  écrit  :  <■  L'oreille  qui  entend  et  l'œil  qui 
voit,  c'est  le  Seigneur  qui  a  fait  l'un  et  l'autre...  La 
crie  dans  les  rues,  elle  élève  sa  voix  sur  les 
places.  »  Prov.,  xx,  12;  i.  20.  l'n  sorile  en  règle  esl 
même  employé  pour  prouver  que  le  désir  de  la  sagesse 
conduit  à  la  royauté  éterni  Ile.  Sap.,  VI,  17-20.  Les  ili\ 
derniers  chapitres  sont  une  philosophie  de  l'histoire 
des  Égyptiens,  au  moment  de  l'exode  des  Hébreux, 
tendant  à  montrer  l'infériorité  de  l'idolâtrie  par  rap- 
port au  culte  du  vrai  Dieu.  D'ailleurs  les  grandes 
erreurs  des  philosophes  grecs  sont  présentes  à  l'esprit 
de  l'écrivain  sacré'.  Par  sa  théodicée  si  claire  et  si 
ferme,  il  prémunit  à  la  fois  contre  le  panthéisme  des 
stoïciens,  l'abstraction  rationaliste  îles  péripatéticiens 
et  le  nihilisme  des  sceptiques.  —  2"  Platon  a  exercé 
une  large  influence  sur  les  idées  du  juif  l'hilon: 
cette  influence  est  demeurée  étrangi  re  aux  écrivains 
sacrés,  puisque  le  Logos  de  saint  Jean  n'emprunte 
rien  à  celui  du  disciple  de  Platon.  Voir  LOGOS,  t.  iv. 
col.  323.  —  3"  Par  contre,  quelques  écrivains  juifs  ont 
iiu  que  les  philosophes  grecs,  Pythagore,  Socrate, 
Platon,  avaient  puisé  dans  les  livres  de  Moïse.  Cette 
idée  a  été  mise  en  avant  par  axistobule,  vers  170-150 
avant  Jésus-Christ.  Pbilon  l'a  également  soutenue.  Cf. 
Schûrer,  Geschichte  ''es  jûdischen    Volkes  nu  Zeit. 


317 


PHILOSOPHIE 


PHILOXENE 


318 


J.  C,  Leipzig,  t.  m,  1S9S,  p.  386,  547.  Josèphe,  Cont. 
Apion.,  Il,  10,  prétend  que  les  philosophes  grecs  ont 
eu  Moïse  pour  maître  et  pour  guide  dans  tout  ce  qu'ils 
ont  dit  de  juste  sur  Dieu.  Les  livres  de  .Moïse  n'ont  pu 
exercer   d'influence    directe   sur   les    penseurs  grecs 
avant  leur  traduction  par  les  Septante,  sous  Ptolémée 
Philadelphe,  284-246  avant  Jésus-Christ.  Il  se  peut  que 
dans    leurs   voyages,  surtout   en  Egypte,   Pythagore  et 
Platon  aient  eu  quelque  connaissance  des  enseigne- 
ments mosaïques.  Mais  on   ne  saurait  dire  en  quelle 
mesure  et  rien  n'est  prouvé  à  cet  égard.  Dans  les  re- 
proches qu'il  adresse  aux  philosophes  du  paganisme, 
saint  Paul  ne  fait  aucune  allusion  à  une  transmission 
il'  ta  doctrine  mosaïque  sur  Dieu.  Il  suppose  au  con- 
tai ire  que  ces  philosophes  ont  parfaitement  pu  connaître 
Dieu  par  ses  oeuvres,  et  que  la  raison    suffisait  à  les 
instruire  de  son  existence    et  de  sa    nature.  Rom.,  I, 
18-20.   Si  l'enseignement  de  la  révélation  était   arrivé 
jusqu'à  eux,  ils  auraient  été  beaucoup  plus  coupables. 
IV.  La  philosophie  nu  Nouveau  Testament.—  4°  Les 
écrivains  du  Nouveau  Testament  se  rattachent  à  leurs 
ancêtres  hébraïques  quand  ils  touchent  aux  questions 
qui  peuvent  se  rapporter  à  la  philosophie.  Les  ensei- 
gnements évangéliques.  avec  leur  impeccable  rectitude, 
apportent   la  solution  définitive   aux  principaux  pro- 
blèmes qui    tourmentent  la  raison  humaine,  dans  la 
mesure  où  cette   solution  intéresse  la   vie  chrétienne. 
Pour  le  reste.  Notre-Seigneur  ne  dit  rien  dont  puissent 
profiter  soit  la  philosophie  spéculative,  soit  les  sciences 
profanes,  abandonnées  à  la  libre  activité  des  hommes. 
Ce  sont  surtout  des  idées  de  bon  sens  que  le  Sauveur 
met  en  relief  :  «  La  vie  est  plus  que  la  nourriture  et 
le  corps  plus  que  le   vêtement.   »  Mat  th.,  vi,  25.   «   Le 
sabbat  est  fait  pour  l'homme,    non   l'homme    pour  le 
sabbat.  »  Marc,  il,  27.  «  Celui  à  qui  on  remet  moins, 
aime  moins.  »   Luc,  vil,  47.   «  Ce  qui  souille  l'homme 
n'est  pas  ce  qui  entre  dans  sa  bouche,  mais  ce  qui  en 
sort.   »  Matth.,  xv,  11,   etc.  D'autres  fois,  ce   sont  des 
traits    de   vive  lumière  projetés  sur  les  questions  de 
tbéodicée  ou  de  morale  :  «  Mon  Père  est  sans  cesse  en 
action.   »  ,Ioa.,  v,  17.  «  Dieu  est  esprit  et  ceux  qui 
l'adorent    doivent    le    faire  en    esprit   et  en  vérité.  » 
.loa.,  iv,  24.  o   Qui  fait  le  mal  hait  la   lumière,  qui  pra- 
tique la  vérité  vient  à  la  lumière.  »  .loa.,  m,  20,  21,  etc. 
La  seule   doctrine    philosophique  que  Notre-Seigneur 
ait  rencontrée  sur  son  chemin  est  celle  des  sadducéens, 
qui   niaient  la  résurrection  des  corps  et  l'immortalité 
de  l'âme,  Matth.,  xxii,  23;  Marc.xn,  18;  Luc,  xx,  27; 
Act.,  iv,  1,  2,  et  aussi  l'existence  des  anges.  Act.,  xxm, 
8.    Il  y  avait   là   une  sorte  de   matérialisme,   qui  allait 
ni'  jusqu'à  révoquer  en  doute  l'action  de  Dieu  sur  ses 
créatures.  Le  Sauveur  les  réfuta  en  leur  rappelant  que, 
d'après  l'Écriture,  Dieu  est  le  Dieu  des  patriarches  et  le 
Dieu  des  vivants,  c'est-à-dire  celui  pour  qui  tous  sont 
vivants,  Luc,  xx,  38,  d'où  il  suit  que  les  patriarches  son 
encore  vivants  par  leuràme.  —  2°  A  Athènes,  saint  Paul 
eut  à  conférer  avec  des  philosophes  épicuriens  et  stoï- 
ciens. Act.,  xvii,  18.  Voir  EPICURIENS,  t.  n.   col.  1894; 
Stoïciens.  A  l'Aréopage,  l'Apôtre  traite  la  question  des 
attributs  de  Dieu  et  de  ses  rapports  avec  l'homme  dans 
les  termes  les  plus  philosophiques.  Mais  l'affirmation 
de  li  insurrection  des  morts  lui  aliène  son  auditoire. 
Act.,  xvn,  23-32.  Dans  ses  tpitres,  il  fait  allusion  à  cette 
sagesse  qu'estiment  tant  les  Grecs,  I  Cor.,  I,  22-25;  il  est 
obligé  de  recommander  aux  Colossiens,  n,  8,  de  se  tenir 
in  r  inle   contre  une  certaine  philosophie  qui  est  con- 
traire aux  enseignements  de  l'Évangile.  Col.,  Il,  16-23. 
ut    il  rencontra  dans  ses  missions  des  docteurs 
dont   les   rêveries   empruntaient   une  certaine    forme 
philosophique  pour  s'opposer  avec  plus  de  succès  aux 
doctrines  évangéliques.  Act.,   xx.   30;  I  Tim.,  IV,  1-7; 
vi,  20;  II  Tim.,  n,  16-18;  m,  13,  etc.  S'inspirant  sur- 
tout de  fables  judaïques,  ceux-ci  préconisaient  un  culte 


particulier  des  anges,  avec  des  généalogies  intermi- 
nables, des  mythes,  des  questions  subtiles  et  ridicules, 
le  tout  pour  aboutir  à  des  pratiques  immorales  et 
condamnables,  à  une  science  de  mauvais  aloi,  I  Tim., 
vi,  20,  que  les  systèmes  gnostiques  devaient  plus  tard 
développer  et  répandre.  Saint  Paul  combat  ces  doctrines 
avec  énergie,  sans  cependant  leur  opposer  d'arguments 
précis  :  il  n'y  a  pas  d'argumentation  philosophique 
contre  le  vague  et  l'insaisissable.  Cf.  Duchesne, 
Histoire  ancienne  de  l'Église,  Paris,  1906,  t.  i,  p.  66-75. 
L'Apôtre  a  sa  dialectique  particulière  pour  établir  les 
thèses  dont  il  a  besoin.  Cette  dialectique  n'est  pas 
toujours  conforme  aux  règles  de  la  logique  classique  ■ 
mais  elle  constitue  une  argumentation  ad  hominem 
contre  laquelle  ses  adversaires  demeuraient  impuissants. 
Ainsi,  d'après  saint  Paul,  Abraham  fut  justifié  par  sa 
foi  avant  d'être  circoncis;  donc  la  justification  ne  peut 
venir  de  la  circoncision.  Rom.,  iv,  9-22.  Abraham  eut 
deux  fils,  l'un  de  la  servante,  l'autre  de  la  femme  libre. 
Or  la  servante  venait  du  Sinaï,  et  c'est  au  Sinaï  que  les 
Israélites  ont  reçu  la  loi.  Donc  cette  loi  était  une  loi  de 
servitude  et  en  conséquence  les  Juifs  ne  sont  pas  les 
fils  de  la  femme  libre.  Gai.,  iv,  22-28.  L'Épitre  aux 
Hébreux  présente  des  arguments  de  même  nature. 
Melchisédech  a  béni  Abraham,  donc  il  lui  est  supé- 
rieur, donc  le  sacerdoce  de  Melchisédech  est  supérieur 
lui-même  au  sacerdoce  des  descendants  d'Abraham, 
par  conséquent  au  sacerdoce  aaronique.  Heb..  vu,  1-10. 
En  réalité,  saint  Paul  s'en  tient  aux  procédés  de  rai- 
sonnement qu'il  a  appris  des  docteurs  juifs.  Quand  il 
s'adresse  à  des  chrétiens  venus  du  paganisme,  il  fait 
même  profession  de  répudier  la  sagesse  humaine,  avec 
sa  dialectique  subtile  et  son  beau  langage,  afin  délaisser 
à  la  puissance  de  la  croix  de  Jésus-  Christ  toute  la  gloire 
de  la  prédication  évangélique.  1  Cor.,  n,  1-5.  Comme 
la  philosophie  humaine  n'a  pas  su  arriver  à  la  con- 
naissance de  Dieu,  l'Apôtre  veut  faire  accepter  par  les 
Grecs  la  croix  du  Sauveur,  mais  sans  se  servir  «  des 
paroles  qu'enseigne  la  sagesse  humaine  ».  I  Cor.,  i,  21  ; 
n,  13.  C'est  là  l'esprit  même  de  l'Évangile.  La  doctrine 
du  Sauveur  domine  de  haut  toutes  les  philosophies,  elle 
éclaire  beaucoup  de  leurs  obscurités  et  rectifie  beaucoup 
de  leurs  erreurs.  Mais  elle  ne  les  met  pas  directement 
à  contribution,  parce  que  les  systèmes  philosophiques 
ne  durent  pas  toujours  et  n'atteignent  qu'un  petit  nom- 
bre d'esprits,  tandis  que  l'Évangile  est  destiné  à  tous 
les  hommes  et  à  tous  les  temps,  et  ne  fait  appel  qu'au 
bon  sens  pour  gagner  la  raison  et  à  la  grâce  pour  pro- 
duire la  foi.  —  Voir  Philon,  col.  300;  II.  L.  Mansel, 
l'hilosophy,  dans  Kitto,  Cyclopxdia  of  Biblical  Lite- 
rature,  3«  édit.,  t.  m,  1866,  p.  517-531;  B.  F.  Westcott, 
dans  Smith,  Dictionary  of  Ihe  Bible,  t.  H,  1863,  p.  849- 
858;  l'rz.  Delitzsch,  System  der  biblischen  Psycholo- 
gie, 2e  édit.,  Leipzig,  1861;  Buch,  Weisheitlehre  der 
Hebràer,  Strasbourg,  1851;  M.  Nicolas,  Les  doctrines 
religieuses  des  Juifs,  Paris,  1860.        H.  Lesétre. 

PHILOXENE,  évèque  de  Mabboug,  un  des  écri- 
vains syriens  jacobites  les  plus  féconds.  Il  naquit  à 
Tahal  dans  le  Beit-Garmaï,  contrée  sise  entre  le  Tigre 
et  les  montagnes  du  Kurdistan  au  sud  du  petit  Zab.  Il 
étudia  à  Édesse  sous  Ibas  (435  à  457),  et  fut  chassé 
d'Antioche  par  le  patriarche  Calendion  (482  à  485) 
parce  qu'il  corrompait  la  doctrine  de  l'Église.  Il  se 
consacra  dès  lors  à  la  défense  de  la  doctrine  condam- 
née au  concile  de  Chalcédoine,  fut  nommé  évêque  de 
Mabboug  (Hiéropolis),  par  Pierre  le  Foulon,  en  485,  et 
changea  alors  son  nom,  qui  était  Aksénaya,  contre  ce- 
lui de  Philoxéne.  Il  alla  plusieurs  fois  à  Constantinople 
et  décida  enfin  l'empereur  Anastase  à  réunir  à  Sidon 
un  concile  qui  déposa  Flavien  d'Antioche  et  le  rem- 
plaça par  Sévère.  Mais  Justin  Ier  suivit  une  politique 
religieuse    opposée    à   celle  d'Anastase,  il  rétablit,  le 


319 


PHILOXÈXE 


PHINON 


320 


2't  mars519,  la  communion  avec  Rome,  exila  les  évo- 
ques jaeobites  et  déporta  Philoxène  à  Philippopolis  en 
Thrace,  puis  à  Gangres  en  Paphlagonie  où  il  mourut 
vers  523. 

Parmi  ses  nombreux  ouvrages,  dont  une  petite  partie 
seulement  est  publiée,  nous  citerons  son  commentaire 
sur  les  Évangiles  conservé  en  partie  dans  deux  manus- 
crits du  British  Muséum,  à  Londres.  L'un  de  ces  ma- 
nuscrits est  daté  de  l'an  511  et  renferme  des  fragments 
du  commentaire  sur  saint  Matthieu  et  saint  Luc.  Quelques 
années  plus  tôt,  en  505  ou  508.  Philoxène  avait  chargé 
le  chorévêque  Polycarpe  de  faire  sur  le  grec  une  ver- 
sion littérale  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament. 
Cette  version,  nommée  «  Philoxénienne  »,  jouit  d'un 
certain  crédit  durant  le  VIe  siècle,  mais  ne  tarda  pas  à 
être  supplantée  par  d'autres  et  il  n'en  reste  que  des 
fragments  dans  quelques  manuscrits.  Cf.  Wright,  Sy- 
riac  Lileralure,  London,  1894,  p.  13-14;  Rubens  Duval, 
La  littérature  syriaque,  Paris,  3«  édit.,  1907,  p.  50,  64. 

F.  Nau. 

PHINÉE,  PHINÉES  (hébreu  :  Pineljds,  «  bouche 
d'airain  éclatante;  »  Septante  :  <lnvl-ç),  nom  de  trois 
Israélites.  D'après  certains  commentateurs,  le  nom  est 
d'origine  égyptienne  et  peut  signifier  en  cette  langue 
«  le  nègre  ».  Voir  E.  Nestlé,  Die  israelitischen  Eigen- 
namen,  in-8°,  Haarlem,  1870,  112.  Cf.  Zeitsclirift  i)er 
deutschen  morgenl.  Geseltscltaft,  t.  xxv,  p.  139. 

1.  PHINÉES,  Bis  d'Éléazar  et  petit-fils  d'Aaron.  Sa 
mère  était  une  fille  de  Phutiel,  que  le  Targuni  du 
pseudo-Jonathan,  Exod.,  VI,  25,  identifie  avec  Jéthro 
le  Madianite,  mais  qui  est  en  réalité  un  inconnu  dont 
on  ne  sait  que  le  nom.  Phinées  fut  le  troisième  grand- 
prêtre  d'Israël.  Encore  jeune,  il  se  rendit  célèbre  par 
suii  zèle  à  châtier  les  Juifs  infidèles  qui  participèrent 
à  Settim  au  culte  licencieux  de  Béelphégor  et  commi- 
rent le  mal  avec  les  filles  de  Moab.  Moïse,  au  nom  de 
Dieu,  commanda  à  son  peuple  de  mettre  à  mort  les  cou- 
pables. Il  s'agissait  de  préserver  la  religion  judaïque 
dans  sa  pureté  et  de  combattre  Haal  qui  devait  pendant 
plusieurs  siècles  lutter  contre  Jéhovah.  Phinées  se  dis- 
tingua entre  tous  les  vrais  Israélites.  Il  pénétra  dans  la 
tente  de  Co/.bi,  fille  d'un  prince  madianite  appelé  Sur, 
où  Zambri,  fils  de  Salu,  chef  delà  tribu  de  Siméon,  au 
grand  scandale  des  Israélites,  était  entré  publiquement, 
et  il  frappa  à  mort  les  deux  complices  de  sa  lance  dans 
le  ventre.  En  récompense  de  cette  action  d'éclat,  Dieu 
lui  promit  pour  lui  et  sa  race  le  souverain  sacerdoce. 
Niiiu.,  xxv.  Son  zèle  futfécond  :  il  fut  glorifié  d'âge  en 
âge,  Ps.  cv  (evi),  30-31  ;  Eccli.,  xlv,  23-25,  et,  lorsque 
Matathias,  le  père  des  Machabées,  commença  la  guerre 
sainte  contre  le  persécuteur  Antiochus  Épiphane,  ce 
fut  l'exemple  de  Phinées,   qui  enflamma  son  ardeur. 

I  Mach.,  h,  26,  54. 

Afin  d'imprimer  l'horreur  la  plus  vive  dans  le  cœur 
des  Israélites  pour  le  culte  abominable  de  Beelphégor, 
Dieu  voulut  que  Moïse  châtiât  les  Madianites  qui  avaient 
fait  prévariquer  tant  de  coupables.  Douze  mille  hommes 
furent  envoyés  contre  eux  et  Phinées  fut  chargé  de  les 
accompagner  en  emportant  avec  lui  les  instruments 
sacrés  dont  la  nature  n'est  pas  précisée  et  les  trom- 
pettes (/«■ï.jôsc/'ii/  Imt-terû  àh.  Xuin.,  xxxi,  6;  cf.  x,  8-9; 

II  Par.,  xiii,  12.  La  défaite  des  Madianites  fut  com- 
plète el  Balaam,  qui  avait  donné  le  conseil  perfide  de 
séduire  les  Israélites,  en  les  initiant  au  culte  de  Beel- 
phégor, fut  au  nombre  îles  tués. 

Phinées  l'ut,  sans  dente  pendant  la  vie  d'Eléazar,  son 
père,  chef  des  Corites  chargés  de  la  garde  des  portes 
du  Tabernacle  el  de  l'entrée  du  camp  d'Israël.  I  Par., 
îx,  10-20.  Quand  les  tribus  transjordaniennes  construi- 
sirent un  autel  sur  les  bords  du  Jourdain,  Phinées 
reçut  à  Silo,  de  la  part  des  tribus  cisjordaniennes,  la 
mission  d'aller  à  la  tète  de  .dix  princes,  leur  faire  des 


remontrances;  ils  lui  répondirent  de  manière  à  le  satis- 
faire ainsi  que  tout  Israël.  Jos.,  xxn,  13-14,  30-33. 

Phinées  succéda  comme  grand-prêtre  à  son  père 
Éléazar.  Il  remplissait  ses  fonctions  lorsque  les  onze 
tribus  déclarèrent  la  guerre  à  celle  de  Benjamin  pour 
venger  le  crime  commis  à  Gabaon  contre  la  femme  du 
Lévite  delà  montagne  d'Éphraïm.  Jud.,  xx,  28.  D'après 
le  texte  hébreu,  l'arche  d'alliance  semble  avoir  été  à  ce 
moment  à  Béthel,  f.  26-27,  et  non  à  Silo,  comme  avant 
et  après  cette  époque.  Dans  le  partage  de  la  Terre  Pro- 
mise, Phinées  avait  reçu  pour  héritage  dans  la  mon- 
tagne d'Éphraïm,  la  ville  de  Gabaa,  ou,  comme  l'appelle 
la  Vulgate,  Gabaalh,  qui  fut  surnommé  »  de  Phinées  », 
pour  la  distinguer  des  autres  localités  du  même  nom. 
Voir  Gabaath  de  Phinées,  t.  m,  col.  14.  C'est  là  qu'avait 
été  enseveli  le  grand-prêtre  Éléazar,  Jos..  xxiv,  32,  et 
c'est  là,  d'après  une  addition  des  Septante,  que  fut  aussi 
enseveli  Phinées.  «  Phinées,  dit  le  texte  grec,  remplit 
les  fonctions  de  grand-prêtre  jusqu'à  sa  mort,  à  la  place 
d'Éléazar,  son  père,  et  il  fut  enterré  dans  la  ville  de 
Gabaath.  »  Le  lieu  traditionnel  de  son  tombeau  (tig.  73) 
est  très  fréquenté  par  les  pèlerins  juifs  et  samaritains. 


73.  —  Tombeau  traditionnel  de  Phinées. 
D'après  Conder,  Tcntwork  m  Palestine,  t.  i.  p.  77. 

Le  souverain  pontificat  se  conserva  dans  la  descen- 
dance de  Phinées,  comme  Dieu  le  lui  avait  promis,  en 
récompense  de  son  zèle,  contre  les  Israélites  idolâtres, 
Nom.,  xxv.  13,  sauf  une  interruption,  dont  la  cause 
est  inconnue.  Im  temps  du  grand-prêtre  llïli,  il  était 
pas-..- dans  la  branche  d'Ithamar,  quatrième  fils  d'Aaron, 

I  Reg.,II,23,  mais  il  rentra  dans  la  famille  d'Éléazar, en 
la  personne  de  Sadoc,  à  l'époque  de  Salomon,  III  Beg., 
il,  35,  et  il  se  perpétua  clans  la  même  ligne  jusqu'à 
Nolir-Seigneur.  Voir  Ghand-PRÈTRE,  I.  III,  Col.  304.  Le 
grand-prêtre  des  Samaritains  se  vante  de  descendre  des 
Phinées  par  Ménélas,  lils  de  Johanan  et  frère  do  Jeddoa, 

II  Esd.,  xn,  22,  ou  Jadclus.  Voir  la  Lettre  des  Samari- 
tains à  Scaliger,  dans  .1.  G.  Eichhorn,  Reperlorium 
fur  biblische  Literalur,  t.  xn,  p.  262. 

2.  PHINÉES,  second  lils  du  grand-prêtre  llïli.  I  Be 

I,  3;  il.  31.  Il  commit  les  mêmes,  fautes  que  son  frère 
Ophni  et  périt  avec  lui  dans  la  défaite  que  les  Philis- 
tins infligèrent  aux  Israélites.  I  Reg.,  IV,  i,  II,  17.  Voir 
Ophni  I,  t.  iv,  col.  1833.  Sa  femme,  a  la  nouvelle  de  sa 
mort,  mourut  elle-même  en  donnant  prématurément 
naissance  à  un  lils  qu'elle  appela  Ichabod.  Elle  avait  un 
fils  aiué  appelé  Achitob,  lequel  eut  a  son  tour  deux  Ris, 
Achias  cl  Achimélech,  qui  l'urenl  grands-prêtres  à  Silo 
et  à  Nobé  sous  le  renne  de  Sanl.  I  Reg.,  IV.  10;  XIV.  3; 
XXII,  9. 

3.  phinées,  lévite,  père  d'Éléazar.  Cet   Éléazar   fut 

un  de  ceux  qui  furent  chargés  par  Esd  ras  de  vérifier  la 

poids  des  vases  sacrés  rapportés  de   Babylc I  Esd., 

vin,  ;;:;. 

PHINON  (hébreu  :  Pinùit  ;  Septante  :  d'îtvwv),  un 
des  \tlliîf  d'Édom,  ainsi  appelé  du  nom  de  la  ville  oii  il 


321 


PHINON    —    PHITIIOM 


322 


résidait.  Gen.,  xxxvi.  41  ;  I  Par.,  i,  52.  Eusèbe  et  saint 
Jérôme,  Qnoniastic,  édit.  Larsow  et  Parlhey,  1862, 
p.  360-363,  mentionnent  une  ville  de  Phinon  entre  Pétra 
et  Zoar:  ils  disent  que  c'est  là,   N'um.,  xxxm,  42  (Vul- 

gate  :  Planton  I.  que  fut  établi  un  des  campements  d'Israël 
pendant  l'exode  et  qu'il  y  avait  en  cet  endroit  des  mines 
(de  cuivre)  exploitées  par  les  Romains.  Voir  Phunon. 

PHISON  (hébreu  :  Pisùn;  Septante  :  $t<;ûv),  un  des 
quatre  tleuves  du  Paradis  terrestre.  Il  entourait  le  pays 
d'Hévilath.  Gen..  n.  11-12.  Sur  son  identification,  voir 
Paradis  terrestre,  t.  iv,  col.  212.  L'auteur  de  l'Ecclésias- 
tique, xxiv,  35.  compare  la  loi  de  Moïse  qui  fait  débor- 
der la  sagesse  avec  le  Pbison  qui  fait  déborder  ses  eaux. 

PHITHOM  (hébreu  :  Pitôm  ;  Septante  :  nsiSw, 
riid'ùa),  ville  d'Egypte. 

I.  Conjectures  sur  le  site  de  1766  \  1883.  —  Sous 
le  pharaon  oppresseur,  les  Hébreux,  surveillés  par 
d'impitoyables  maitres  des  travaux,  bâtirent  deux  villes 
fortes  contenant  des  magasins,  l'bitbom  et  Ramessès. 
Exod.,  i.  10-11.  Longtemps  on  s'est  demandé  dans 
quelle  partie  du  Delta  oriental  se  trouvaient  ces  deux 
villes.  On  se  le  demande  encore  pour  Ramessès,  bien 
que  le  cercle  ou  il  faut  la  cbercher  se  soit  singulière- 
ment resserré.  Quand  les  premiers  cbrétiensse  préoc- 
cupèrent de  la  géographie  de  l'Exode,  la  plupart  des 
stations  bibliques  d'Egypte  étaient  disparues  ou  se 
cachaient  sous  des  noms  nouveaux.  On  les  localisa  au 
hasard.  Des  modernes  seulement  datent  les  recherches 
précises.  Pour  Pbitbom.  d'Ânville  avait  déjà  remarqué, 
Mémoires  sur  VKgypte  ancienne  et  moderne,  1766. 
p.  122-124,  qu'elle  devait  être  identique  à  l'Héroopolis 
de  l'Itinéraire  d'Antonin,  édition  Wesseling,  p.  170,  el 
qu'il  fallait  la  placer,  non  vers  le  fond  du  golfe  de 
Suez,  mais  sur  le  canal  de  Néchao,  devenu  plus  tard 
le  Ira/anus  amnis,  à  l'endroit  même  de  la  n&Tupoc 
d'Hérodote,  n,  158,  à  l'aboutissement  de  la  route  de 
Palestine  en  Egypte.  C'est  en  ell'et  dans  la  terre  de 
u.  Gen.,  xlvi,  28,  et  à  ce  point  même  de  la  terre  de 
n  dans  la  terre  de  Ramessès  que  Joseph  rencontra 
Jacob  venant  de  Chanaan  et  de  Bersabée.  Josèphe, 
A, il.  j)id.,  II,  vu,  15.  D'autre  part,  les  Septante,  qui 
i  aient  connaître  la  géographie  du  Delta,  ont  rendu 
par  Wy'n.y,  IIoXiv  le  Pbitbom  du  texte  hébreu;  et  la 
version  copte,  faite  d'après  le  texte  grec,  a  substitué 
Pbitbom,  ne&ioAi,  à  Héroopolis.  Sur  ces  témoignages  il 
n  élail  donc  pas  téméraire  de  tirer  l'équation  Pbitbom 
=  Patumos  =  Héroopolis.  Mais  quelle  était  au  juste 
la  situation  de  Pbitbom-Héroopolis?  Par  son  Mé- 
sur  le  canal  des  deux  mers,  dans  la  Description 
Je  l'Egypte,  t.  si,  2-  édit.,  182-2,  p.  291-298,  poussant 
plus  loin  les  observations  de  d'Anville,  Le  Père  situait 
Héroopolis  à  Abou-Keycheyd  où  l'on  voyait  un  vaste 
amas  de  décombres.  Dubois-Aymé,  Sur  les  anciennes 
limites  de  la  mer  Ronge,  loc.  cit.,  p.  377-379,  corro- 
borait la  même  opinion,  suivi  en  cela  par  Quatremère, 
Mémoires  géographiques  et  historiques  sur  l'Egypte, 
t.  n.  p.  166  sq.,  et  Champollion.  L'Egypte  sous  les 
i  n,  p.  89.  Or,  Abou-Keycheyd  n'est  pas 
autre  chose  que  l'ancien  nom  de  Tell-el-Maskbouta,  «  le 
montici  le  de  la  statue  ».  Ce  dernier  nom,  qui  nous  est 
innu,  était  du  à  un  monolithe  en  granit  rouge  re- 
'i  sentant  un  roi  assis  entre  deux  dieux  et  dominant  les 
ruines.  Précisons  la  place.  Au  sortir  de  Zagazig, 
quand  on  prend  la  direction  d'Ismaïliab,  le  chemin  de 
fer  ne  tarde  pas  d'atteindre  Tell  el-Kébir.  On  est  alors 
in  nue Ii  Toumilat  jusqu'à  Ismailiah,  sur  une 
longueur  de  cinquante  kilomètres.  L'Ouadi  relie  à 
-  le  désert  arabique  le  Delta  aux  lacs  Amers.  Le 
ii  de  fer  et  le  canal  d'eau  douce  qui  va  alimenter 
Suez,  y  ont  pris  la  place  de  deux  canaux  plus  anciens 
dont  les  traces  sont  encore  reconnaissables,  l'un  qu'on 

D1CT.   DE  LA  BIBLE. 


appelle  «  le  canal  de  l'Ouadi  »,  l'autre,  «  le  canal  des 
pharaons  »,  qui  depuis  Néchao  et  Darius  joignit  le  Nil 
à  la  mer  Rouge.  Le  canal  de  l'Ouadi  était  probablement 
un  canal  plus  moderne  destiné  à  l'arrosage  de  la  région. 
Déjà  Ramsès  II  dut  conduire  l'eau  jusqu'à  Phithom 
et  dans  toute  la  région  de  Socoth,  qui  n'auraient  pu 
subsister  sans  eau,  et  c'est  peut-être  ce  qui  lui  a  valu 
la  réputation  d'avoir  tenté  de  faire  communiquer  le  Nil 
avec  la  mer  Rouge,  suivant  la  tradition  mentionnée 
par  Strabon,  i,  2,  31.  C'est  du  canal  des  pharaons 
qu'Hérodote  a  dit  :  «  Son  eau  procède  un  petit  au-des- 
sus de  la  ville  Iïubastis,  et  passant  par  Patume.  ville 
d'Arabie,  va  rencontrer  la  mer  Rouge.  »  II,  158, 
trad.  Saliat,  édit.  Talbot,  p.  189.  Si  l'on  est  dans 
l'Ouadi  Toumilat,  on  est  aussi  en  terre  de  Gessen, 
voir  Gessen,  t.  m,  col.  218-220,  et  dans  la  partie  la 
plus  orientale  de  la  terre  de  Ramessès,  qui  parait  avoir 
compris  non  seulement  la  terre  de  Gessen,  mais  encore 
toute  la  partie  du  Delta  située  à  l'est  de  la  branche 
tanitique.  Ed.  Naville,  tios/ien  and  Shrine  of  Safl  el- 
Henneh,  1887,  p.  1S  (Mémoire  iv  de  VEgijpt  Explora- 
tion Fund).  Sur  cette  partie  ainsi  délimitée  de  la  terre 
de  Gessen  dans  la  terre  de  Ramessès,  Tell  el-Maskhouta 
occupe  le  point  central,  à  égale  distance  de  Tell  el- 
Kébir  et  d'Ismaïliab..  L'égyptologie,  à  qui  était  réservi 
le  dernier  mot  sur  son  identification,  s'égara  d'abord  et 
même  se  dispersa.  —  Mû  par  la  lecture  du  nom  de 
Ramsès  sur  le  monolithe  qui  avait  donné  son  nom  à  la 
butte,  Lepsius  proposa  d'y  voir  la  ville  de  Ramessès, 
Chronologie  der  Aegypler,  1849,  p.  318,  tandis  qu'il 
plaçait  Phithom  quatre  ou  cinq  kilomètres  plus  à  l'est, 
à  Magfar.  loc.  cit.,  p.  345.  Pendant  les  derniers  tra- 
vaux nécessités  par  le  percement  de  l'Isthme,  en  1876, 
les  ingénieurs  français  entamèrent  les  ruines  de  Tell  el- 
Maskhouta.  Entre  autres  monuments,  un  monolithe 
semblable  à  celui  qui  était  visible,  deux  sphinx,  un 
naos  et  une  grande  stèle  parurent  au  jour.  Ils  ornent 
aujourd'hui  le  jardin  public  d'Ismaïliah.  Maspero  les 
étudia,  Sur  deux  non veaux  monuments  de  Ramsès  II. 
dans  Revue  archéologique,  nouvelle  série,  t.  sxxiv, 
1877,  p.  320-332.  Les  inscriptions  ne  contenaient  au- 
cune indication  géographique,  mais  on  y  lisait  les  car- 
touches de  Ramsès  II  et  les  hommages  de  ce  roi  au 
dieu  Tum.  Maspero  ne  conclut  pas  autrement  que 
Lepsius  et  l'on  parut  s'en  contenter.  La  station  du 
chemin  de  fer  qui  s'arrêtait  alors  en  cet  endroit  porta 
même  le  nom  de  Ramessès.  —  Brugsch  avait  d'abord 
admis  l'identité  de  Phithom  et  d'Iiéroopolis,  mais  en 
1874  il  fit  sienne  une  théorie  de  Schleiden.  Celui-ci, 
dès  1858,  dans  son  livre  Die  Landenge  von  Sues  :ur 
Beurtheilung  des  Canalsprojects  uni!  des  Auszugs  der 
Israeliten  ans  Aegypten,  p.  120  sq.,  fut  le  promoteur 
d'un  Exode  à  travers  les  fondrières  du  lacSirhonet  par 
les  bords  de  la  Méditerranée,  iîrugsch  reprit  l'idée  de 
Schleiden  et,  pour  le  besoin  de  sa  cause,  plaça  Ramessès 
à  Tanis  et  Pbitbom  près  du  lac  Menzaleh,  à  mi-chemin 
entre  Tanis  et  Péluse.  La  sortie  des  Hébreux  d'Egypte 
el  les  monuments  égyptiens,  Alexandrie,  1874.  Après 
les  fouilles  de  Naville,  il  renonça  loyalement  à  l'idée 
de  Schleiden.  Naville,  Slore-City  of  Pitliom  and  Route 
o\  Exodus,  4«édit.  1903,  p.  9,  n.  8.  —  Chabas,  lui  aussi, 
en  1864,  avait  d'abord  supposé  qu'un  jour  on  retrouve- 
rait la  biblique   Pbitbom   en    égyptien   sous   la    forme 

EjJ  ^d=d  %k     |  f,,    «  la  demeure  du  dieu  Tum  »,  et  que 

Tell  el-Maskhouta  pouvait  bien  en  recouvrir  les  ruines. 
Mélanges  égyptologiques,  i'  série,  p.  162.  Mais  en  1*7:;, 
Recherches  pour  servi,-  o  /'/usinier  de  la  XIX  dynas- 
tie et  spécialement  à  celle  du  temps  de  l' Exode,  p.  109, 
oubliant  sa  conjecture,  il  inclina  à  chercher  Phithom 
aux  environs  de  l'ancienne  Thmuis.  —  La  question  de 
Phithom  depuis  d'Anville  et  les  savants  de  l'expédition 
française  s'était  donc  compliquée  au  lieu  de  s'éclaircir 


323 


PHITHOM 


3'24 


II.  M.  Naville  a  Tell  el-Maskhouta,  1883.  —  l'Egypt 
Exploration  Fund  venait  de  s'organiser.  Elle  confia  à 
M.  Ed.  Naville  le  soin  d'explorer  les  ruines  de  Tell  el-Mas- 
khouta.  Celui-ci  commença  par  étudier  les  monuments 
transportés  à  Ismaïliah.  Il  se  convainquit  que  le  dieu 
d'Héliopolis  sous  sa  double  forme  de  Tum,  le  soleil 
couchant,  et  d'Horemkhou  (Harmachis),  le  soleil  levant. 
avait  été  le  dieu  de  la  cité  à  identifier,  et  il  en  augura 
que  ce  n'était  pas  Ramessès  mais  Phithom,  la  ville  ou 
la  demeure  de  Tum,  qu'il  découvrirait  à  Tell  el-Mas- 
khouta. Store-City  of  Pithom,  p.  3-4.  Reprenant  les 
touilles  au  point  où  avaient  eu  lieu  celles  de  1876, 
M.  N'avilie  trouva  d'abord  qu'il  était  à  l'angle  sud-ouest 
d'une  énorme  enceinte  rectangulaire,  encore  visible 
par  places,  faite  de  briques  crues  et  enfermant  toute  la 
butte,  soit  une  surface  de  quatre  hectares  environ. 
Immédiatement  devant  lui  il  reconnut  un  temple.  Les 
monolithes  et  les  sphinx  enlevés  par  ses  devanciers  en 
marquaient  l'entrée,  Le  naos  trouvé  plus  loin  corres- 
pondait au  sanctuaire.  Ce  temple  une  fois  délimité, 
Naville  poussa  ses  recherches  vers  l'angle  nord-est  de 
la  grande  enceinte.  Il  rencontra  sous  le  sable  de  sin- 
gulières  constructions  rectangulaires,  nombreuses,  aux 
dimensions  inégales,  sans  communication  entre  elles, 
solidement  Inities  en  murs  de  briques,  d'au  moins  deux 
mètres  d'épaisseur.  C'était  évidemment  une  série  de 
grenier  enfermés  avec  le  temple  dans  la  grande  en- 
ceinte, comme  dans  une  forteresse.  On  remplissait  ces 
greniers  par  le  haut,  puis  on  les  fermait.  Pour  y  puiser, 
une  porte  était  réservée  à  mi-hauteur  ou  vers  le  bas. 
Le  signe  hiéroglyphique  *iA.  shenut,  «  grenier  8,  re- 
présente deux  de  ces  chambres  isolées  l'une  de  l'autre 
,i  n.piisanl  sur  une  large  assise  de  terre  battue.  Au 
cours  de  ces  découvertes,  déjà  si  précieuses,  quelques 
monuments  et  des  inscriptions  sortirent  des  décom- 
bres :  une  vieille  cité  livrait  quelques  feuillets  de  son 
histoire,  et  non  les  moins  intéressants. 

III.  Le  FONDATEUR  de  LA  VILLE.  —  Le  nom  de 
Ramsès  II  se  lisait  déjà,  avons-nous  dit,  sur  tous  les 
monuments  transportés  à  Ismaïliah.  Naville  le  ren- 
contra encore  sur  un  faucon  de  granit  noir,  emblème 
d'Ilorus.  et  sur  un  fragment  retrouvé  du  naos.  Il  n'est 
sorti  des  fouilles  aucun  monument  antérieur  à  ce 
prince,  ni  aucun  de  .Ménephtah.  A  supposer  même  que 
Tum  ail  reçu  là  un  culte  plus  ancien,  il  n'en  demeure 
pas  moins  certain  que  Itamsès  II est  l'unique  construc- 
teur de  l.i  grande  enceinte  et  des  édilices  qu'elle  con- 
tenait. Il  doit  être  regardé  comme  le  véritable  fonda- 
teur de  la  ville.  D'où  il  suit  que  si  cette  ville  est  Phi- 
thom, Itamsès  11  est  à  n'en  pas  douter  le  pharaon  de 
l'oppression,  et  ce  furent  bien  les  Hébreux,  au  milieu 
des  plus  cruelles  vexations,  qui  la  bâtirent  avec  son 
temple,  ses  greniers  et  son  enceinte,  en  même  temps 
qu'ils  bâtissaient  Ramessès.  Ce  qu'ils  eurent  à  souffrir, 
L'Exode,  v.  7-19,  nous  l'apprend  el  nous  pouvons  en 
juger  par  l'énorme  quantité  de  briques  amoncelées  à 

l'hillioiii.  pendant  qu'à  Ramessès  et  ailleurs  se  pour- 
suivait la  même  besogne,  dans  les  mêmes  conditions. 
Voir  BRIQ1  E,  t.  1.  COl.  1931-1934.  Naville  a  observé  que 
les  murs  des  greniers  étaient  remarquablement  bien 
bâtis,  avec  du  mortier  entre  les  couches  de  briques 
crues.  Celles-ci  ont  quarante-quatre  centimètres  de 
lang,  sur  vingt-quatre  de   large,  et  douze   d'épaisseur. 

i,,iii  j  indiquait  une  œuvre  de  la  bonne  époque,  laite 
pour  durer.  Store-City  of  Pithom,  p.  II.  Villiers 
Sluart  qui  vint  le  visiter  pendant  les  fouilles  a  écrit 
(citation  de  M.  Naville)  :  e  .l'examinai  avec  le  plus  grand 
soin  les  murs  des  chambres,  et  je  remarquai  que  cer- 
taines parties  étaient  faites  de  briques  sans  aucun  mé- 
lange de  paille  |ou  de  roseaux],  .le  ne  me  souviens 
pas  d'avoir  VU  en  Egypte  des  briques  de  celle  sorte. 
huis  un  climat  sec  comme  celui  d'Egypte,  il  n'est  pas 
nécessaire  de  cuire  les  briques  :  on  les  fabrique  née 


le  limon  du  Nil  et  on  les  fait  sécher  au  soleil.  Pour 
leur  donner  de  la  cohésion,  on  y  mélange  de  la  paille.  » 
Egypt  after  the  War,  p.  81.  Ceci  parait  nous  indiquer 
deux  choses  :  à  un   moment  la  paille  fut  supprimée 
aux   Hébreux   sans   que  leur  tâche   en   fut  diminuée, 
comme  le  rapporte   l'Exode,  v,  11;  et,  bien  qu'ils  se 
répandissent  dans  toute  l'Egypte  pour  y  ramasser  des 
roseaux  au  lieu  de  paille,  V,  12,  il  leur  arriva  parfois 
de  ne  pouvoir  en  réunir  en  quantité  suffisante  pour 
toutes  les  briques  à    fournir.   S'il  en  était  besoin,  le 
récit  de  Moïse  trouverait  là  une  confirmation.  Ramessès 
et  Phithom  étaient  des  forteresses  autant  que  des  ma- 
gasins,  comme    cela    convenait  à    un   pays    frontière, 
toujours  menacé  parles  nomades  que  les  riches  plaines 
de  l'Egypte  sollicitaient  aux  razzias;  comme  cela  con- 
venait surtout  au  débouché  des  routes  vers  la  Syrie,  à 
l'entrée  du  désert  où  se  réunissaient  les  armées  et  les 
caravanes,   où  des  soldats  devaient  se   tenir   toujours 
prêts   à    marcher   pour    sauvegarder  la    Palestine,    la 
seule  contrée  qui  restât  aux  Égyptiens  des  anciennes 
conquêtes  de  Thoulmès  III.  Les  Septante  ont  donc  pu 
rendre  l'hébreu  misknùt,  «   magasins  ».  par  r.r/t.v.;  6//j- 
j;:,  villes  fortifiées,  cf.  II  Par.,  vm,  i:  xvn.    12;  ail- 
leurs  encore  simplement  par  itoz.si:   où    le    contexte 
indique  des  citadelles.  II  Par.,  xvi,  4.  La  Vulgate  traduit 
le  même  hébraïsme  par  urbes  munitissimas,  II  Par., 
vm,  1;  urbes  murât  as,  xvi.  i  ;  xvn,12,  et  ici  par  urbes 
tabemaculorum,  villes  où   l'on   dresse  pavillon,  cam- 
pement. Toutes  ces  expressions  sont  également  vraies. 
IV.  Les  noms  DE  la  ville.  —Tell  el-Maskhouta  repn  - 
senterait  vraiment  le  site  de  Phithom.  suivant  M.  N'avilie. 
Cela  résulte  des  monuments  trouvés  par  lui.  Les  plus 
intéressants  sont  :  —  1°  L'n  fragment  de  grès  rouge  ap- 
partenant au  naos  d'Ismaïliah  :  il  porte  le  litre  divin  de 
■  maître  de  la  région  de  rhuku  «  ou  «  Thukut  ».  Store- 
City  of  Pithom,  pi.  m  B. — 2°  Une  statue  en  granit  rouge, 
figurant  un  homme  assis,  Ankhrenp-nefer,  o  lieutenant 
d'Osorkon  II,  le  bon  commémorateur  de  la  demeure 

ile^um.  ^p  J,  maître  de  An  (Héliopolis).  »  Frontis- 
pice et  pi.  IV.  —  3°  Un  fragment  de  statue  du  prophète 
Parnès-lsis,  «  chef  des  greniers,  scribe  du  temple  de 
Tum:  i  il  supplie  la  dame  de  An.  llathor.  que  la  statue 
qui  porte  son  nom  soit  à  jamais  fixée  dans  «  la  de- 
meure de   Tum,  le   grand  dieu  vivant  de  la  ville  de 


Thukut 


, .  PI.  vu  a.  —  4°  L'ne  statue  en  granit 


_©' 

noir.  un  homme  assis,  Aak,  «  chef  des  prophètes  de 
Tum,   premier  prophète   de  la    ville  de  Thukut.  »   Il 
s'adresse  aux  prêtres  :  «  Vous  tous,  prêtres,  qui  entre/ 
dans  celle  demeure  sacrée  de  'Tum,  le  grand  dieu  de 
la  ville  de  Thukut.  dites  :  Le  roi  donne  l'offrande,  etc.  ■> 
PI.  v.  —  5'  l'ne  grande  stèle  de  Ptolémée  Philadelphe, 
pièce  capitale.   Elle   fut  trouvée  non   loin  de  l'endroit 
ou    était  le  naos.  Philadelphe  j   est  représenté  trois 
fois   en    adoration,   dont    deux    fois  devant   Tum,   c    le 
grand  dieu  de  la  ville  de  Thukut.  »  PI.  vm.   Dans  le 
corps  de  l'inscription,  »   il  aime  Tum,  le  grand  dieu 
vivant  de  In  région  de  Thukut,  »  pi.  ix.  lig.  I,  x.  lig.  28, 
de  la  •■,!!.■  de  Thukut.    «  PI.  ix  lig.  2.  i   En  l'an  VI. 
quand  on  lui  eut  appris  qu'était  achevée  la  restauration 
du  sanctuaire  de  s. m  père  Tum,  le  grand  dieu  d 
ville  de  Thukut,  Sa  Majesté  vint  à  Thukut.  le  trône  de 
son  père  Tum.  •   PI.  ix.  lig.  7,  etc.  —  Les  cinq  monu- 
ments énumérés  sont  ou  dédiés  à  l'um  ou  appartiennent 
à  un  prêtre  attaché  au  culte  de  ce  dieu.   Le   nom  géo- 
graphique de  Thukut  se  présente  sur  quatre  d'entre  eux. 
Sous  Ramsès  1 1  il  porte  le  signe  d'une  terre  frontière  ; 
plus  tard  il   est   donné   connue  le  nom  de  la  capitale 
d'une  région  du  même  nom.  Ce  nom  est  généralen  enl 
associé  à  celui  du  dieu  Tum.      le  grand  dieu  de  Thukut, 
qui  ré.-hle  dans    Thukut,  le  grand  dieu  vivant  de  Thu- 
kut. »   La  seule   stèle  de   Philadelphe  le  contient   au 


325 


PHITHOM 


326 


moins    douze    fois    tantôt    avec    le    déterminatif   des 
villes  ©,   tantôt    avec   celui   d'une   région   de   quelque 


étendue 


•:- 


.  Il  s'agit  donc  bien  de  Tlmkut,  soit  comme 


ville  soit  comme  région,  et  du  culte  de  Tum  dieu  de  la 
ville  et  de  la  région  de  Thukut.  De  plus  le  nom  de  Pi- 
tum  se  lit  trois  fois  sur  la  statue  de  Ankh-renp-mTer, 
deux  fois  dans  la  grande  stèle  ptolémaïque  avec  le  déter- 
minatif des  villes  ©,  pi.  ix  lig.  10,  13,  où  il  est  parlé  des 
revenus  affectés  au  temple,  des  statues  et  des  prêtres  pla- 
cés devant  «  les  dieux  de  Pi-tum-Tlmkut  ».  Pi-tum  y  a  la 

variante  H  J Ha-tum,o  la  divine  demeure  de 

Tum,  le  grand  dieu  qui  réside  dans  Thukut.  »  PI.  v  A, 
vu  A,  lig.  2,  3.  II  s'agit  donc  bien  aussi  de  Phithom. 
Tout  ce  qu'on  peut  dire  c'est  que  Pi-tum  désignait  plus 
spécialement  l'enceinte  avec  son  temple  et  ses  greniers, 
tandis  que  Tlmkut,  désignait,  en  outre,  la  ville  grou- 
pée autour  de  l'enceinte  sacrée.  En  résumé,  les  textes 
de  Tell  el-Maskhouta  nous  apprennent  que  la  ville  située 
en  cet  endroit  s'appelait  Pi-tum,  qu'elle  était  dans  la 
la  région  de  Thukut  dont  elle  prit  aussi  le  nom  dans 
la  suite.  Si  nous  joignons  ces  données  à  ce  que  nous 
apprennent  les  Papyrus  de  la  XIXe  dynastie,  nous 
voyons  qu'à  cette  époque  il  n'est  pas  question  de  la 
ville  de  Thukut,  mais  uniquement  de  la  région  de 
Thukut,  le  plus  souvent  écrite  ^^   V    1.  Anastasi,v, 

pi.  xix,  lig.  2,  3,  8;  xxv,  lig.  2.  Une  lettre  de  l'an  VIII 
de  Ménephtah  parle  de  nomades  voisins  de  cette  région 
qui  furent  autorisés  à  passer  la  frontière  «  à  la  forte- 
resse de  .Ménephtah  dans  la  terre  de  Thukut,  vers  les 
lacs  de  Pi-tum  de  .Ménephtah  dans  la  terre  de  Thukut, 
pour  y  vivre  en  faisant  paitre  leurs  troupeaux  dans  le 
grand  état  ou  domaine  de  Pharaon.  »  Anastasi,  IV,  I. 
Cf.  Brugsch.  Dictionnaire  géographique  de  l'ancienne 
Egypte,  1889,  p.  612;  Chabas,  Recherches  pour  servir 
à  I  histoire  de  la  XIX'  dynastie,  p.  107.  A  rencontre 
des  papyrus  de  la  XIXe  dynastie,  les  textes  géogra- 
phiques de  Denderah,  Edfou  et  Philae,  tous  d'époque 
ptolémaïque,  nous  montrent  Thukut  comme  étant,  sans 
perdre  son  nom  de  région,  le  nom  vulgaire  ou  civil  de 
la  capitale  du  VIIIe  nome  de  la  Basse-tgypte.  Diiinichen, 
iraphische  Inschriften,  t.  i,  pi.  lxii.  lxiv.  Le  nom 
sacré  de  cette  même  ville  était  Ha-turn,  loc.  cit.,  t.  m, 
pi.  cxlvi.  etc..  i  la  demeure  de  Tum  »,  le  dieu  principal 
du  nome;  il  était  aussi  Pi-tum,  loc.  cit.,  t.  il,  pi.  lxxxviii; 
t.  m.  pi.  xxix,  «  qui  est  à  la  porte  orientale  ».  Il  y  a 
donc  pleine  correspondance  entre  les  textes  de  Naville 
et  les  textes  déjà  connus  par  les  papyrus  et  les  temples. 
De  ce  que  Pi-tum  nous  parait  n'avoir  emprunté  que 
plus  tard  le  nom  de  la  région  qui  dépendait  d'elle, 
nous  devons  conclure  qu'au  temps  de  l'Exode  la  Socoth 
de  la  Bible,  Exod.,  xn,  37;  xm,  20;  Num.,  xxxm,  5,  6, 
est  prise  dans  le  sens  de  région.  On  ne  peut  supposer 
d'ailleurs  qu'une  aussi  grande  multitude  que  celle  des 
Israélites  en  route  pour  la  Palestine  ait  pu  s'arrêter, 
dans  la  ville  même,  ville  fortifiée  dont  les  portes  ne  se 
seraient  pas  ouvertes  pour  elle,  et,  se  fussent-elles 
ouvertes,  qui  n'aurait  pu  la  contenir.  Que  r-", 
Sucoth  ou  Socoth,  soit  le  mot  égyptien  Thukut,  cela 
est  clair.  Le  s=  égyptien  se  prononçait  th  et  on  le 
transcr.t  souvent  en  grec  par  a  et  en  hébreu  par  c. 
Brugsch,  Zeitschrift  fur  âgyptiscke  Spracke,  t.  xm, 
1875,  p.  7.  Pour  n'en  citer  qu'un  exemple,  pris  entre 
beaucoup  d'autres,  la  "]  s=  J  ©,  Thebneter  ou  Theb- 
nuter  des  Égyptiens,  est  devenue  la  EsêevvuTo;,  Seben- 
nytus,  des  Grecs.  Store-Cily  of  Pithom  p.  7.  -  Il  reste 
à  no  is  demander  pourquoi  Hérodote  appelle  Pi-tum 
i  ville  d'Arabie»  :  IIït-j^;  fj'Apa6fï|.  Les  Septante 
nomment  aussi  la  terre  de  Gessen  F^éu.  'Apa6fo«. 
Gen  .  xxxvi,  31.  Arabie,  Arabique  signifient  ici  Orient, 
oriental,   et  c'est  la  traduction  de  l'expression  égyp- 


tienne    .     T  ,  Rti-ab,  i<  porte  orientale  »,  que  les 

textes  de  Denderah  accolent  au  nom  de  Pi-tum, 
Dûmichen,  loc.  cit.,  t.  i,  pi.  xcvm,  lig.  12;  t.  n.  pi.  xxix, 
lig.  3,  et  que  nous  retrouvons  dans  la  grande  stèle  de 
Philadelphe,  pi.  vin,  3e  tableau  où,  derrière  Tum,  se 
tient  Osiris  «  le  maître  de  la  porte  orientale  »,  comme 
ayant  son  sanctuaire  ou  sérapéum  à  l'extrémité  de  la 
région  de  Thukut.  Pour  l'Egypte,  l'Orient  c'élait  l'Arabie, 
les  Grecsdonnérent  ce  nom  aux  contrées  qui  touchaient 
directement  au  désert  de  l'est.  Outre  Gessen  d'Arabie, 
il  y  eut  le  nome  d'Arabie,  le  XXe.  situé  entre  la  branche 
pélusiaque  et  le  désert,  tout  de  même  qu'à  l'autre 
extrémité  du  Delta  il  y  avait  le  nome  libyque.  —  Nous 
avons  vu  plus  haut  la  correspondance  entre  les  textes  de 
Naville  et  ceux  des  papyrus  et  des  temples  au  sujet  de 
Thukut  région  et  Thukut-Pi-tum.  Cette  correspondance 
va  plus  loin  qu'il  n'était  nécessaire  de  l'établir  pour 
notre  sujet.  Elle  s'étend  d'abord  aux  noms  des  principales 
divisions  du  nome,  son  territoire,  son  canal,  ses  ter- 
rains inondés.  Elle  s'étend  encore  au  nom  du  nome 
lui-même  et  à  celui  d'une  de  ses  localités,  As-kéhëret 
ou  Pi-keheret  (Pi-hahiroth  ?),  le  sanctuaire 'osirien  du 
nome.  En  effet,  tous  ces  noms  que  les  temples  donnaient 
déjà  se  sont  retrouvés  à  Tell  el-Maskhouta.  Store-City 
of  Pithom,  p.  5-8.  Mais  ce  que  les  temples  ne  disaient 
pas,  c'était  la  situation  précise  du  VIIIe  nome  de  la 
Basse-Égvpte  dont  Pi-tum-Thukut  était  le  chef-lieu. 
Désormais  «  tout  change  grâce  aux  fouilles  de  Naville. 
Le  huitième  nome  ne  peut  plus  côtoyer  le  lac  Menza- 
leh,  comme  le  croyait  Brugsch,  et  une  grande  découpure 
de  la  topographie  encore  llottante  du  Delta  se  fixe  et  se 
précise  immédiatement,  sur  la  carte,  autour  de  Tell 
el-Maskouta.  o  E.  Lefébure,  Les  fouilles  de  il.  Naville  à 
Pithom,  dans  la  Revue  des  religions,  t.  xi,  1885,  p.  310. 
Cf.  J.  de  Rougé,  Géographie  ancienne  de  la  Basse- 
Egypte,  1891,  p.  15-55.  —  Si  Tell  el-Maskouta  était 
Phithom,  elle  était  aussi  HéroopoUs.  Quand  Naville 
découvrit  les  greniers  de  Phithom,  il  s'aperçut  qu'à  là 
basse  époque  on  avait  nivelé  le  sol  au-dessus  et  rempli 
toutes  les  chambres  avec  des  briques,  du  sable,  de  la 
terre,  des  débris  de  calcaire,  au  grand  détriment  du 
temple  de  Tum.  Le  but  avait  été  d'y  asseoir  un  camp,  et 
deux  inscriptions  révélèrent  que  ce  camp  était  l'œuvre 
des  Romains.  La  première  inscription  fragmentaire, 
qui  avait  dû  faire  partie  d'une  porte,  finit  après  cinq 
signes  peu  lisibles  par 

POLIS 

ERO 

CASTRA 

mots  tout  à  fait  distincts  et  pour  lesquels  le  doute 
n'est  pas  possible.  L'autre  inscription  est  datée  (30ii  ou 
307),  car  elle  contient  les  noms  des  empereurs  Maxi- 
mien  et  Sévère,  des  césars  Maximin  et  Constantin. 
Elle  donne  une  distance  de  neuf  milles  entre  Éro  et 
Clysma  : 

ABEROINCLUSMA 
M     Vllll     O 

PL  xi.  Le  nombre  des  milles  est  en  latin  et  en  grec. 
C'est  un  cas  fréquent  dans  les  pays  où  le  grec  était 
parlé.  Cf.  Corpus  inscr.  latin.,  m.  1.  n.  205,  309, 
312-315,  317.  461.  Phithom  sous  les  Grecs  avait  donc 
échangé  son  nom  contre  Uéroopolis,  IIPOT,  comme 
l'a  lu  Naville  sur  un  petit  fragment  trouvé  en  place. 
'Hpw,  dit  Etienne  de  Byzance,  De  urbibus  et  populis, 
Amsterdam,  1678,  p.  298-299,  est  une  ville  égyptienne 
que  Strabon  appelle  "Hpwcov  -o"/.tv.  Nous  l'avons  vu,  les 
Septante  avaient  déjà  rendu  Phithom  par  Uéroopolis,  et 
Josèphe,  marquant  à  cet  endroit  la  rencontre  de  Jacob 
et  de  Joseph,  lui  donna  le  nom  même  que  Phithom  por- 
tait de  son  temps.  Les  Romains  en  firent  r.ro.  A  la  fin  du 
IVe  siècle  de  notre  ère  (vers  385),  sainte  Silvie  suivit  la 


327 


PHITHOM 


I'HŒBE 


328 


route  de  l'Exode,  le  texte  des  Septante  en  mains,  de  la 
mer  Boni:.-  a  Ramessès.  Sur  tous  les  noms  bibliques  elle 
questionne  les  moines  et  les  clercs  qui  l'accompagnent. 
Ci  ux-ci  localisent  sans  le  moindre  embarras  les  villes 
mortes   et   nous    rappellent    les    drogmans    du    temps 
d'Hérodote  et  du  nôtre. Il  en  résulte  que  les  Israélites, 
pour  une  part  égale,  avançaient  et  reculaient,   allaient 
à  droite,  puis  à  gauche  :  nam  mihi  credat  voloaffectio 
vêtira,  quantum  tamenpervidere  polui,  filios  Israhel 
,    ambulasse,  ut  quantum  irait  dexlra,  tantum  re- 
verterentur  sinistra,    quantum   denuo  inante   ibanl, 
tantum  denuo  rétro  revertebantur.  Cependant  elle  ne 
put  être  induite  en  erreur  sur  le  site  d'Ero,  car  cette 
ville  subsistait   encore.    11    n'est  pas   certain  toutefois 
qu'elle  n'en  fasse  pas  une  ville  distincte  de  Phithom. 
Mais    l'important   pour  ce  qui    nous  touche    ici,  c'est 
qu'elle  en  donne  le  nom  romain  :  Heroum  autem  civi- 
tas...  nunc  esl   corne  ,/...',  ;j  v.   sed  grandis,  quod  nus 
dicimus  viens...    Ipse    oicut   nunc    appellatur   Bero. 
limera  hierosolymitana  sseeuh  ir-vm,  p.  17-48,  dans 
Corpus      scriptorum      ecclesiasticorum     lalinorum , 
t.   xxxvill,    Vienne,   1898.    -    D'où    vient    ce   nom    de 
'Hpw?  M.  Naville  avait  d'abord  pensé  qu'il  venait  de 
"~. J  Cl  •  àr,  pluriel  âru,  o   magasins  »,  ce  qui  aurait 
très   bien    convenu    aux    are    misknôt    de    Phithom. 
Exod.,  i,  11;  Store-Cily  of  Pilhom,  p.  10.  Mais  il  esl 
revenu  sur  cette  interprétation  et  l'a  corrigée  dans  une 
note,  loc.  rit.,  et  dans  le  Sphinx  d'Upsala,  t.  v.p.  197. 
n  Puisque  le  sphinx  est  un  lion,  il  doit  porter  les  dif- 
f,  rents  noms  qui  sont  donnés  à   cet  animal.  -Vous  en 
lissons   plusieurs,  en  particulier  un  qui  est  peut- 
êtred  origine  sémitique,  ^  -»s,  àr.  La  transcription 
pecque  en  serait  IIP  et  de  là  vient  le  nom  de  'II-.-. 
qui  esl  donné'  à  Tum.dans  la  traduction  de  l'obélisque 
d'Hermapion.   Ammien   Marcellin,   \vn.   4.    Ero  c'est 
Tin.i  représenté    par   un   lion,   un    sphinx;    Eropolis, 
Ero  castra,  c'esl  la  ville,  le  camp  du  sphinx,  de  l'uni   - 
Quoi  qu'il  en  soit,  la  pénétration  de  d'Anville 
„a     ,  ,,.  ,.,,  défaut,  ni  celle  des  savants  français,  depuis 
I.,.  père,  en  passant  par  Dubois-Aymé  et   Quatremèn 
jusqu'à  Champollion.  Le  premier  avait   vu    lléroopolis 
dans  phithom  et  délimité  l'espace  où  il  fallait  la  cher- 
cher, les  autres  en  devinèrent  l'emplacement.  Elle  ne 
devait   pas   être   confondue,  comme   le  voulut   d'abord 
Lepsius,  Chronologie,  p.  337,  avec  le  Thohu,  Thou  ou 
Thoum   de   l'Itinéraire   d'Antonin,   toc.  cit.,  dont   la 
situation    à    quarante-deux     milles    d'Héliopolis  et  à 
vingt-quatre   milles  avant    d'atteindre    lléroopolis    ne 
s'accorde  pas  avec  notre  Phithom. 

Y.  COKCLUSIOH-  —  Les  fouilles  de  Phithom  on!  donné 
|ieu  à  di  conclusions  secondaires,  donl  les  unes 
atteignenl  la  plus  grande  vraisemblance,  comme  l'iden- 
tification du  pharaon  de  l'oppression  et,  par  suite,  du 
pharaon  de  l'Exodi  ,  i  Ramsès  11  construisant  Pithom 
correspond  bien  au  puissant  roi  de  l'oppression,  tandis 
nue  Ménephtah  1"  négligeant  Pilhom  rappelle  bi<  n  le 
pharaon  malheureux  de  la  Fuite.  »  E.  Lefébure,  loc. 
cit.  il  320.  Les  autres  conclusions  sont  moins  certaim  -, 
impossibles  même,  i  omme  celle  qui  veut  que  le  golfe 
,,,  [a  mer  Rouge,  même  au  temps  des  Romains,  se  soil 
étendu  jusqu'à  neuf  milles  d'Héroopolis,  c'est-à-dire 
,  |U  a  Clysma  qui  aurait  été  situéeà  l'extrémité  du  lac 
limsah.  On  en  devine  les  conséquences  pourdi  terminer 
|f,  p0ini  -,u  les  Hébreux  passèrent  la  mer  Rouge.Slore- 
City  0/  Pilhom,  p.  24-27.  Mais  ce  sujet  a  été  traité. 
\,,j',.  PhihahirOTH.  Le  point  capilal  ici  était  de  voil  que 
la  piua  imporl  mte  ville  de  l'Exode  esl  à  peu  près  sûre 
ment  identifiée;  que  tout  le  début  de  ce  mèmi 
s'explique,  bien  qu'on  ne  sache  encore  avec  certitude 
ou  prendre  Ramessès;  que  Socoth,  la  seconde  station 
Hébreux,  esl  au  voisinage  de  Phithom.  toutefois 
quelque  vive  que  soil  la   lumière  que  les  fouilles  de 


Tell  el-Maskhouta  ont  projeté  sur  l'authentique  récit 
de  Moïse,  nous  n'oserions  pas  affirmer  de  façon  absolue 
que  tous  les  doutes  prudents  sont  levés.  11  faut  encore 
compter  avec  les  surprises  possibles  des  recherches 
entre  Ismaïliah  et  Sue/,  sur  la  rive  occidentale  du  canal. 

C.  Lagier. 
PHITHON  (hébreu:  Piton;  Septante  :  *i8iiv),   le 
premier  nommé  des  fils  de  Micha,  petit-lils  deJonathas 
et  arrière-petit-fils  du  roi  Saiil.  I  Par.,  vin,  35;  ix.  il. 

PHLÉGON  (grec  :  *Xsy<ov,  «  ardent,  brûlant  >  ). 
chrétien  de  Rome,  salué  par  saint  Paul.  Rom..  XVI,  I  '■• 
Le  Pseudo-Dorothée,  Patr.  gr.,  t.  xm.  col.  1060,  el  I 
lo-Hippolyte,  Patr.  gr.,  t.  x.  col.  160,  le  compt  ni 
parmi  les  soixante-douze  disciples  de  Notre-Seigneur 
et  disent  qu'il  devint  évêquede  Marathon  dans  l'Altiq 
le-  i  .i.i-  cl  les  Latins  l'honorent  comme  martyr  le 
8  avril.  Acta  sanctorum,  édit.  Palmé,  aprilis  1. 1.  p 

PHOCHÉRETH   (hébreu  :   Pôkérét,  t   prenant  au 
lit.  I    I  |,  chef  ou   ancêtre  d'une    famille  de  Nathinéens, 
i    (ils  des  serviteurs  de  Salomon    »,  qui  retourna  de 
captivité  en  Palestine  avec  Zorobabel.  Le  texte  hébreu 
porte  :  Benê  Pokérél  lias  febaim,  dans  les  deux  pas- 
sages où   il   esl   nommé,  1   Esd.,   il,  57;   II   Esd.,   vil, 
59,  et  à  en   juger   par  les  listes  des  Nathinéens,  que 
donnent   les  deux    livres   et    dans    lesquelles   le 
,    gis    »  est    suivi  exclusivement  du    nom  seul  du    pue 
ou  chef,  sans  autre  indication,  on  doit   conclun 
Pokérél   has-sebaïm    ne   forme  qu'un   nom   propre,  à 
moins  qu'on  ne  suppose  que  le  mot  benê,  «   (ils 
lom!  è  devant  hai-Sebatm.  Les  deux  opinions  oui  leurs 

,  r,j  an  ,    Li  -   uns    pensent    in  il   faut    lire   en  i  (Tel  : 

.,    les   fils  de    Pokéré(-Has  sel .  nom  ou  su 

q„i  signifie   i   celui  qui  prend  au  piège  d 
chasseur  de  '....■'■II'"   ».   D'autres   lisent  :  i    les  fils   di 
Ph,  chéreth;    lei     fils  d'Asi  baïm.       1  es   Si  ptanti 
Iraduil  :  uloi  *axepàB,  uiot  'AcreÊ      ;  -  1  Esd.,  Il,  5 
■axapie,  uto'.  Sasaqx,  Il  Esd.,  vit,  59.   La  Vu 

,  prj     ,  .  •   .   m    pour  un  nom  de  lieu  :   fil      I 

„.,/,,  qui  erant  de  Asebaim;  1  Esd.,   n.  57;  filii 

,.  ,,,  ortus  •■.,  Sebaim,  mais  ci  Ite  inter- 
prétation n'est  pa-.  facile  à  justifier.  Voir  Asebaïm,  t-  i. 
col.  1075. 

PHŒBÉ   lurec  :  'l'o-.nr,.   "    radieuse    »    ou   »    lui 
diaconesse  de  t'.oiichrées.  recommandée  par  sain 
aux   chrétiens  de   Rome  et  placée  en  tête  des  ri 
mandations.  Rom.,  xw.    1-2,  On  admet    général* 
que  ce  fut  Phœbé  qui  porta  aux  fidèles  de  Rome  l'Epttre 
écrite  à  leur  adresse  par  saint  Paul.  L'Apôtre  l'ait  d'elle 
un  grandi  loge.  11  lappelle-  notre  sœur,  qui  sert  (Siâxo- 

.,     n  giise  qui  esl  à  Ci  nchri  es     les  deux  ports  de 

Corinthe.  Ci  titi  de  Siaxd  o;  ■  '  IxxXïista;  semble  in- 
diquer une  fonction  spéciale  el  déterminée,  quoiqu  il 
i  ,,as  possible  de  préciser  en  quoi  elle  con 
„  Chrysostome,  Hom.,  x\x.  -2.  in  Rom.,  t.  i  x. 
col.  663.  Voir  Diaconessk,  3»,  t.  n,  col.  1401.  i 
seul  passage  du  Nom  eau  Testament  où  il  soil  question 
d'une  femme  v.v/o-<,:,  mais  .m  peul  >  voir  comme 
l'origine  des  diaconesses,  de   ces  ministre  que    I 

le  Je Episl.,    X.    xevi,  s.   dit    avoir  existé 

I  Église  chrétienne.  Cf.  UiACONKSSE,  t.  n,  col.  1400.  Saint 
Paul  ajoute  qu'elle  a   été  npooràviç,   «   aide   »,  c'esl  a- 

dire  qu'elle  a  rendu  de  grands  services  i  à  lu imeel 

,  bi  iu p  d'autres,   i    Elle  devait  être  riche  el 

ini  Cenchrées,  le  porl  où  débarquaient  les 
qui  venaient  d'Éphèse  en  Grèce,  elle  avait  eu  souvent 
0I  |Sion  il  être  utile  aux  nouveaux  chrétiens  qui  pas- 
.,.„,  par  là.  L'insistance  avec  laquelle  l'Apé.tre  appuie 
sa  recommandation  montre  quelle  impoi 
atlachail  et  combien  il  tenait  à  ce  qu'on  fit  bon  accui  il 
à  la  messagère  de  son  Épitre.  Nous  ignorons  quelles 


329 


PFIŒIîE    —    PHOGOR 


330 


affaires  particulières  Phœfié  pouvait  avoir  à  Rome. 
Saint  Paul,  sans  s'expliquer  autrement,  dem le  seule- 
ment aux  chrétiens  de  la  capitale  de  l'empire  de  lui 
prêter  leur  concours  en  tout  ce  dont  elle  aura  besoin. 
On  croit  communément  que  Phœbé  était  une  veuve,  et 
non  une  vierge.  Voir  Acla  sanctorum,  t.  i  septem- 
bres, édit.  Palmé,  p.  605,  n.  18.  L'Église  célèbre  sa 
fête  le  3  septembre.  Les  martyrologes  ne  savent  de  sa 
vie  que  ce  que  nous  eu  apprend  saint  Paul. 

PHŒNICE  (grec  :  J'ovi:),  port  de  mer  mentionné 

Act.,  xxvit,    12,   à  l'occasion  du    voyage  mariti de 

saint  Paul,  comme  un  excellent  hivernage,  situé  sur 
la  côte  méridionale  de  l'île  de  Crète,  à  l'est  de  fions- 
Ports  et  de  Laséa.  Cf.  Act.,  xxvn,  il.  Son  nom  lui 
venait  sans  doute  des  palmiers  (en  grec,  poivilj)  qui, 
comme  nous  l'apprend  Théophraste,  11ht.  planta.):, 
n,  8,  croissaient  en  nombre  dans  ces  parages.  Mis 
en  danger  par  le  mauvais  temps,  le  vaisseau  qui  con- 
duisait saint  Paul  à  Rome  se  dirigeait  vers  ce  port, 
pour  \  passer  l'hiver,  lorsqu'une  terrible  tempête  le 
rejeta  en  pleine  mer.  Plolémée,  III,  xvn,  3.  et  Strabon, 
X.iv,  3.  parlent  l'un  et  l'autre  d'un  portcrétois  du  nom 
de  Phoinix  ».  Strabon  en  fait  un  village  florissant, 
xaTosxia,  et  le  place  sur  •■  l'isthme  »  de  Crète,  c'est-à- 
dire  dans  la  partie  la  plus  étroite  de  l'île,  entre  le  muni 
I.I.,  et  les  montagnes  de  l'extrémité  occidentale,  sur  le 
territoire  de  Lampa  ou  Lappa,  ville  d'une  certaine  im- 
portance. Voir  Crète,  carte,  lig.  104,  t.  u,  col.  1113.  Le 
passage  de  Ptolémée  est  plus  obscur,  et  semble  dési- 
gner tout  à  la  fois  un  port  nommé  g  Phoinikoi  »,  et  une 
ville  appelée  a  Phoinix  .  également  situés  sur  la  cote 
méridionale. 

D'après  -MM.  .lames  Smith  el  le  commandant  Spratt, 
qui  ont  tout  particulièrement  étudié  les  détails  relatifs 
au  voyage  et  au  naufrage  de  saint  Paul  dans  la  Médi- 
terranée, il  n'y  a  pas  de  doute  que  Pbœnice  ne  corres- 
ponde au  port  actuel  de  Loulro.  qui  est  «  la  seule  baie 
île  la  côte  sud  dans  laquelle  un  bâtiment  puisse  mouil- 
ler en  toute  sécurité  durant  l'hiver,  parce  que  les 
vents  du  sud.  repoussés  par  les  hautes  montagnes  qui 
la  dominent,  ne  viennent  jamais  à  terre,  el  parce  que 
l.i  mer  qu'ils  soulèvent  arrive  presque  morte  à  la  cote, 
de  sorte  que  les  bâtiments  roulent,  mais  les  amarres 
ne  fatiguent  pas.  »  Spratt,  Instructions  sur  l'ile  de 
Crète,  trad.  franc.,  Paris,  1861,  p.  H.  Cf.  .1.  Smith,  The 
Voyage  and  Shipwrech  of  St.  Paul,  l"  édit.,  in-S», 
Londri  s.  1888,  p.  261 .  Loutro,  située  à  l'esl  du  cap  Plaka. 
qui  correspond  au  cap  llerniaa  des  anciens,  est  pré- 
cisément sur  le  territoire  de  l'antique  cité  de  Lappa. 
Il  est  vrai  que,  d'après  le  texte  des  Actes,  «  Phœnice 
est  un  port  de  Crète  qui  regarde  du  cùté  du  Libs,  > 
ou  vent  du  sud-ouest,  vent  africain,  «  et  du  coté  du  Kho- 
rus  ou  vent  du  nord-ouest,  tandis  que  la  baie  de  Loulro 
est  au  contraire  ouverte  dans  la  direction  du  sud-est  et  du 
nord-est.  La  difficulté  est  très  réelle.  On  a  essayé  de  la 
résoudre  de  plusieurs  manières  :  1»  Il  est  possible  que 
l'ancien  port  de  Phœnice  ait  consisté  en  un  double 
bassin,  dont  l'un  aurait  été  abrité  contre  les  vents  du 
sud,  et  l'autre  contre  les  venls  du  nord.  Voir  Ramsay, 
dans  II  istings,  Diction.  of  tlie  Bible,  in-i",  t.  m.  p,  863 . 
I  Belser,  Die  Apostelgeschichte  ûberselzt  und  erklsert, 
in-8",  Vienne,  1905,  p.  317.  —  2°  Comme  l'ont  lui  re- 
marquer de  nombreux  commentateurs,  à  la  suite  de 
M.  J.  Smith,  les  m  its  a  qui  regarde  du  cùté  du  Libs...  » 
ne  sauraient  signifier  que  le  port  était  ouvert  aux  venls  du 
sud-ouest  et  du  nord-ouest,  c'est-à-dire  aux  vents  occi- 
■  I- ■  ii  iux,  si  dangereux  dans  ces  régions,  mais  plutôt,  que 
les  cotes  qui  entouraient  la  baie  se  dressaient  dans  cette 
double  direction,  et,  par  suite,  la  garantissaient  contre 
eux.  Presque  tous  les  exégètes  récents  adoptent  ce  senti- 
ment: entre  autres  MM.  Viguuroux,  Fouard.  Felten, 
Cook  dans  la  Speaker's  Bible,  Wendt  dans  la  8e  édit.  du 


commentaire  de  W.  Meyer.  etc.  Cela  revient  à  dire  que 
le  port  de  Phœnice  était  ouvert,  non  pas  du  coté  d'où 
venait  le  vent,  mais  dans  la  direction  opposée,  du  coté 
où  le  vent  soufllait.  Si  le  port  avait  été  exposé  au  Libs 
et  au  Khorus,  il  n'aurait  nullement  répondu  aux  con- 
ditions requises  pour  un  hivernage.  —  3°  Comme  il  a 
été  dit  plus  haut,  aucun  autre  port  de  la  cote  méridio- 
dionale  de  l'île  de  Crète  ne  parait  avoir  convenu  à 
la  situation  décrite.  C'est  bien  à  tort  qu'on  a  parfois 
accusé  saint  Luc  de  n'avoir  pas  exactement  rendu  le 
langage  des  marins  qui  l'auraient  renseigné  sur  Phœ- 
nice. Les  habitants  affirment  que  l'ancien  nom  de  la 
ville  était  Phœniki.  —  Voir  Hœck,  Kreta,  Gœltingue, 
1823-1S24,  t.  i.  p  387-388;  C.  Bursian,  Géographie  von 
Crieclienland,  t.   n,  Leipzig,    1S70.   in  S0,   p,   545-546.; 


Plaine 
fiabos 


!  7    Fàraffà 


à  Anapolis  .     4^|É 

&  .  8 

'•^Anapolis 

,„        ■t'.tirvina 


74.  —  dite  sud  de  l'ile  de  Crète. 

Spratt,  Travels  and  Rescarches  in  Creta,  t.  n.  p.  247; 
Convbeare  and  Howson,  The  Life  and  Epistles  of 
St.  Paul,  in-12,  Londres.  1875,  p.  041-642;  A.  Breu- 
sin^.  Die  Xaulik  der  Allen,  in-8",  Brème,  1886,  p.  186; 
A.  Trêve,  l'ne  traversée  de  Césarée..  à  Putéoles,  in-8", 
Lyon,  1887.  p.  25-26;  II.  Balmer,  Die  Romfahrt  des 
Apostels  Paid  und  die  Seefahrtskunde  im  rômisehen 
Kaiserzeitalter,  Leipzig,  1906,  3e  partie,  cliap.  i. 

L.  r'ii.uoN. 
1.  PHOGOR  ihébreu  :  hap-Pe'or;  Septante  :  $ii>y<*p)i 
montagne  de  Moab,  mentionnée  seulement  dans  Xuni., 
XXIII,  "28.  Dalac,  roi  de  Moab,  conduisit  llalaam  sur  son 
sommet  afin  qu'il  pût  voir  de  là  le  camp  des  Israélites 
el  le  maudire.  Cette  montagne  était  située  en  face  de 
Jesimon,  c'est-à-dire  du  désert  au  nord  est  de  la  mer 
.Morte,  dans  le  voisinage  de  l'embouchure  du  Jourdain. 
Son  emplacement  n'est  pas  rigoureusement  déterminé; 
elle  devait  se  trouver  près  de  Rethphogor.  Voir  Beth- 
PHOGOR,  t.  i.  col.  1710.  C'est  là  qu'on  rendait  un  culte 
impur  à  Béelphégor.  Voir  BéelphéGOK,  t.  i,  col.  1543. 
—  l'hogor,  Num.,  \xv,  18  (Vulgate  :  idolum  Pliogor), 
est  pour  Béelphégor. 

2.  PHOGOR  (Septante  :  $aya>p),  une  des  onze  villes 
de  la  tribu  de  Juda  ajoutées  par  les  traducteurs  grecs 
au  texte  hébreu.  Elle  était  située  entre  Bethléhem  el 
Klhaui.  Jos.,  xv,  60.  Lusèbe  et  saint  Jérôme  en  l'ont 
mention.  «  Il  y  a  un  autre  village  de  Fogor,  dil  saint 
Jérôme,  qu'on  voit  non  loin  de  Bethléhem;  il  s'appelle 
maintenant  Phaora.  o  Onomaslic,  édit.  Larsovv  et  Par- 
thev,  1862,  p.  363.  On  identifie  généralement  aujourd'hui 
ce  Pliogor  avec  le  Khirbel  Beil-Foghour,  qui  a  con- 
servé le  nom  antique,  à  huit  kilomètres  au  sud-ouest 
de  Bethléhem.  C'est  un  amas  de  ruines  situées  sur  une 


331 


PHOGOR    —    PHRYGIE 


332 


colline.  M.  V.  Guérin,  Judée,  t.  m,  p.  314,  y  a  trouvé 
encore  une  vingtaine  de  maisons,  d'apparence  arabe, 
en  partie  debout,  mais  abandonnées,  ainsi  que  les 
jardins  qui  les  avoisinent.  Dans  les  environs  est  la 
source  appelée  Aïn  Faghour,  qui  coule  dans  un  ancien 
canal  dégradé;  sur  les  lianes  de  la  colline,  qui  limite 
au  sud  la  vallée  arrosée  par  l'Ain  Faghour,  sont  d'an- 
ciennes chambres  sépulcrales  creusées  dans  le  roc; 
quelques-unes  d'entre  elles  servent  de  refuge  à  des 
bergers.  Béelphégor  avait-il  été  honoré  autrefois  en  ce 
lieu?  C'est  ce  que  plusieurs  supposent,  mais  on  ne  peut 
donner  là  d'autre  indice  de  son  culte  que  le  nom. 

PHOLLATHI  (hébreu  :  Pe  ulfaï; Septante  :  $oUa6s), 

le  huitième  et  dernier  nommé  des  .fils  d'Obédédom 
qui  avait  gardé  l'arche  d'alliance  dans  sa  maison.  Phol- 
lalhi  était  un  descendant  d'Asaph,  de  la  tribu  de  Lé\i 
et  un  des  portiers  du  Tabernacle  du  temps  de  David. 
I  Par.,  xxvi,  5. 

PHORATHI  (hébreu  :  Parafa";  Septante  :  <I>apaôiOa: 
Alexandrinus  :  Bap8i8a;  Sinaiticus  :  $apaâ8a),  le 
quatrième      des 

di\  lils  d'Ainon 
qui  fut  mis  à 
mort  par  les 
Juifs.  Esth.,  ix. 
S.  Le  nom  doit 
être  perse  et  si 
l'on  adopte  la  le- 
çon grecque?  Aos- 
radatha,  peut  si- 
gnilier  «  donné 
parla  destinée  ». 


bornes  de  la  Phrygie.  Aux  temps  les  plus  anciens,  les 
Phrygiens  paraissent  avoir  occupe''  une  partie  considé- 
rable de  la  péninsule  asiatique.  Leur  domaine  allait 
jusqu'à  la  mer  Egée  et  à  l'Hellespont.  Cf.  Diodore.  vu. 
11,  d'après  lequel,  pendant  vingt-cinq  ans,  au  début  du 
IXe  siècle  avant  J.-C,  ils  furent  maîtres  de  la  mer.  Troie 
est  souvent  appelée  phrygienne  par  les  vieux  classiques, 
ainsi  que  la  Lydie  méridionale.  Néanmoins,  lorsqu'on 
parle  de  la  Phrygie  proprement  dite,  ou  de  la  Grande 


Phrygie, 


i-iXr,  &pv(la,  par  opposition  à  la  Petite 


PHOSECH 

(hébreu  :  l'risak; 
Septante  :  $o- 
oix),  le  premier 
nommé  des  trois 
Bis  de  Jéphlat, 
de  l.i  tribu  d'A- 
si  r.  I  Par.,  vu. 33. 


PHOTINE, 

nom  donné  à  la 

femme  samaritaine  convertie  par  Notre-Seigneur,  Joa., 
'v,  6-32,  sans  doule  parce  qu'elle  avait  reçu  la  lumière 
d'en  haut,  IçwTEivrj,  de  yw;,  o  lumière  ».  Voir  S.  Nil, 
Epis  t.,  il,  31,  t.  i.xxix,  col.  '2P2;  Elymolog.  magnum, 
édit.  Craisford,  in-f,  Oxford.  1818,  p.  276,  53.  Le  mar- 
tyrologe marque  sa  fête  comme  martyre  au  20  mars. 
Voir  Acta  sanclorum,  martii  t.  in,  p.  80. 

PHRYGIE  (grec  :  'I'p-jy:Vi,  province  d'Asie  Mineure, 
mentionnée  une  l'ois  dans  l'Ancien  Testament,  II  Mach., 
v.  22,  et  trois  fois  dans  le  Nouveau,  Act.,  Il,  10;  XVI,  6; 
xvm,  23.  Son  nom  lui  venait  de  ses  anciens  habitants, 
les  'l'vjye;  —  on  trouve  aussi  les  variantes  Hp-jy;;, 
Bpe'jys;  et  Bpiys;  —  c'est-à-dire  les  «  hommes  libres  , 
suivant  l'interprétation  donnée  à  ce  mot  par  Ilésychius, 
au  mot  lipiye;.  Lexicon,  édit.  M.  Schmidt,  5  in-i ".  h  lia. 
1858,  t.  i.  p.  398. 

I.  Limites  du  territoire  phrygien.  —  Elles  demeu- 
rèrent toujours  assez  vagues,  et  peut-être  n'existe-t-il 
p.is.  en  Asie  Mineure,  d'expression  géographique  dont 
il  soit  plus  difficile  de  déterminer  le  sens  d'une  manière 
précise.  En  effet,  l'étendue  de  la  Phrygie  varia  beaucoup 
aux  différentes  époques  de  son  histoire,  ainsi  qu'il  sera 
dit  plus  bas.  Pour  savoir  au  juste  ce  que  signifie  ce 
nom,  lorsqu'on  le  rencontre  dans  un  ancien  auteur,  on 
doit  donc  se  demander  tout  d'abord  de  quelle  période 
il  s'a-it  et  quelles  étaient  alors,  au  moins  en  gros,  les 


Phrygie.  nommée  aussi  Phrygie  hellespontide,  Slrabon, 
X,  ni,  6,  on  désigne  surtout  l'extrémité  occidentale  du 
grand  plateau  qui  occupe  le  centre  de  l'Anatolie  actuelle, 
avec  les  montagnes  avoisinantes,  jusque  vers  le  fleuve 
llalys.  aujourd'hui  Kizil-Irmak,  à  l'est.  Au  nord,  elle 
confinait  à  la  Bithynie;  au  sud,  à  la  Pisidie.  On  peut 
dire  aussi,  d'une  manière  plus  spéciale,  qu'au  premier 
siècle  de  noire  ère,  la  Phrygie  était  limitée  au  nord  par 
la  Bithynie;  au  sud  par  la  Lycie,  la  Pisidie  et  l'Isaurie; 
à  l'est  par  la  Galatie  et  la  Lycaonie;  à  l'ouest  parla 
Carie,  la  Lydie  et  la  Mysie  (fig.  76 1. 

II.  GÉOGRAPHIE  physique.  —  Sous  ce  rapport,  la  Phry- 
gie présentait 
beaucoup  de  va- 
riété, selon  les 
régions  dont  elle 
était  composée. 
Dans  son  ensem- 
ble, la  Phrygia 
magna  consis- 
tait en  un  iraste 
plateau,  dont  l'al- 
titude moyenne 
est  de '.uni  i  1000 
nielles.  Ce  pla- 
teau est  coupé  en 
divers  endroits 
par  des  vallées 
profondes,  en- 
tre antres  celles 

du    Méandre     et 

de    l'Hertnos    fi 

l'< st. du  Thym- 
brios  au  nord- 
est. du  Sangarios 
au  nord,  du  Ly- 
cus,  etc.  Çà  et  là  se  dressi  ut  des  groupes  isolés  de  mon- 
tagnes, parmi  lesquelles  on  peut  citer  le  Dindymos. 
aujourd'hui  Mmtrad-Dag/i.  Les  cours  d'eau  sont  plus 
rares  au  nord  et  au  sud,  plus  fréquents  au  centre  et  au 
sud-ouest.  Les  parties  de  la  contrée  qu'arrosent  des  ri- 
vières étaient  fertiles,  et  produisaient  en  abondance  du 
blé,  des  fruits  et  du  vin.  Cf.  Homère.  //.,  m,  862;  III, 
184;  vu.  719.  Lei  autres  districts  étaient  arides  et  peu 
productifs,  notamment  la  région  méridionale  qui  avoi- 
sine  la  Pisidie;  du  moins,  très  riches  en  sel  —  ils  con- 
tiennent plusieurs  lacs  salés  —  ils  convenaient  fort  bien 
à  l'élevage  des  moutons  :  aussi  la  race  des  brebis  phry- 
giennes à  laine  noire  était-elle  renommée  au  loin.  La 
Phrygie  était  aussi  un  pays  de  commerce,  grâce  aux  deux 
roules  qui  la  traversaient  et  qui  la  mettaient  en  com- 
munication soit  avec  11  k'eulenl.  suit  ,i\  ee  li  trient.  L'une 
a  liait  de  Byzanceen  Arménie,  par  Ancyre  et  Tavia  :  l'uni 
partait  de  la  côte,  à  l'ouest,  et  se  dirigeait  vers  le>  p 
du  Tauriis,  par  Sardes.  Synnade  et  Icône,  saint  Paul 
ilul  les  Utiliser  l'une  et  l'autre,  la  seconde  surtout,  du- 
rant ses  courses  apostoliques.  —  Les  carrières  de 
marbre  n'étaient  pas  rares  en  Phrygie,  non  plus  que 
les  mines  d'or,  comme  le  témoigne  la  légende  de  on 
ancien  roi.  Midas.  L'ait  phrygien  fui  llorissanl  au 
iv  et  au  vnr  siècle  avant  J.-C;  il  consistait  surtout  en 
broderies,  en  tapis,  dans  la  fabrication  des  voitures,  etc. 
—  Les  villes  du  pays  étaient  bâties  pour  la  plupart  dans 


75.  —  La  Phrygie  personnifiée. 
te'laurée  de  Caracalb.  à  droite,  épaule  drapée,  poitrine  cuirassée,  û.  En  liant 
En  exergue:  vaOaikeOM  NEQXOPnN.  A  gauche  :*PVriA;  i  droite  KAPIA.  Au 
milieu,  ta  déesse  urbaine  a  Laodicée  »,  assise  sur  un  trône,  tourrelée,  tenant  de  sa  inain 
droite  étendue  une  statuette  de  Zeus  Laodicien  et  de  la  gauche  une  corne  d'abondance; 
devant  elle,  la  Phrygie  debout  portant  sur  la  tète  le  kalathos;  dans  sa  main  droite 
sont  deux  épie,  et  dans  la  gauche  un  sceptre  appuyé  sur  son  épaule.  Derrière  te  trône 
est  la     i  larie  >  portant  le  kalathos  et  tenant  un  rameau  et  une  corne  d'abondance. 


333 


PIIRYGIE 


334 


les  vallées  creusées  par  les  fleuves;  Homère  vantait 
déjà  leur  beauté.  Les  principales  étaient  :  au  nord, 
Doryheon  et  Kotyseon;  à  l'est,  Amorion,  Synnade  et 
Ipsos;  dans  la  vallée  du  -Méandre,  Kéléœ  ou  Apamée 
Kibotos,  ancienne  résidence  des  rois  phrygiens;  puis 
Laodicée,  t.  m.  col.  82;  lliérapolis,  t.  m,  col.  702; 
Colosses,  t.  h,  col.  860,  célèbres  dans  l'histoire  des  ori- 
gines chrétiennes. 

III.  Les  habitants.  —  1°  Les  Phrygiens  étaient  un 
peuple  très  ancien.  D'après  la  tradition  grecque,  ils 
appartenaient  à  diverses  tribus  originaires  de  Macé- 
doine et  de  Tbrace,  qui  avaient  émigré  en  Asie  Mineure. 
Cf.  Hérodote,  vu.  73;  Strabon,  X,  in.  16;  Pline,  H.  N., 
v.  il.  Mais  Hérodote,  vu,  73,  signale  aussi  leur  parenté 
avec  les  Arméniens,  et  il  est  fort  possible,  comme 
l'admettent  de  nombreux  auteurs,  qu'ils  aient  formé 
dans  la  péninsule  asiatique  une  race  un  peu  mélangée. 
C'était  un  peuple  doux  et  pacifique,  efféminé  même  et 
passif,  qui  demeura  sans  vigueur  pour  résister  aux 
influences   étrangères;  aussi  fut-il  débordé  de  toutes 


«1/    y>JL 


fe§*p 


Cliodirep  ,'_-■■' 

l']    '  y  pi  si  pu 


.LYCIE 


76.  —  Carte  de  la  Phrygie. 

paris,  aux  différentes  époques  de  son  histoire,  et  jamais 
il  n'exerça  un  rôle  important,  sous  le  rapport  poli- 
tique, parmi  les  peuples  anciens. 

2°  Les  rochers  abondent  sur  le  territoire  phrygien  : 
aussi  les  habitants  en  prolitèrent-ils  de  bonne  heure, 
pour  y  creuser  des  habitations,  des  sanctuaires,  des 
tombeaux,  dont  on  a  retrouvé  de  nombreux  restes, 
spécialement  dans  le  district  montagneux  du  Sanga- 
rios  supérieur.  Il  y  a  là  des  échantillons  très  intéres- 
sants de  l'architecture  et  de  la  sculpture  phrygiennes. 
Voir  W.  M.  Ramsay,  The  Rock  Necropolis  of  Phrygia, 
dans  le  Journal  of  Hellenic  Studies,t.  ni,  p.  1-68,156- 
•263;  t.  v,  p.  241-262. 

3"  La  langue  des  Phrygiens,  autant  qu'on  peut  en 
juger  par  les  rares  spécimens  qui  sont  parvenus  jusqu'à 
nous,  appartenait  à  la  famille  indo-germanique.  Voir 
de  Lagarde,  Gesammelte  Abhandlungen,  Leipzig, 
p.  276-280;  Lassen,  dans  la  Zeitschrift  der 
li.  morgenlàndischen  Gesellscha/t,  t.  x,  p.  369- 
375.  Elle  passait  pour  remonter  jusqu'à  l'époque  des 
premiers  humains.  Hérodote,  II,  2;  Pausanias,  I,  XIV, 
12. 

4°  Les  Phrygiens  avaient  aussi,  à  l'origine,  leur  reli- 
gion à  part,  dont  maint  détail  passa  dans  celle  des  Hel- 
lènes Leurs  divinités  principales  étaient  Men  ou  Manès, 
le  et  Attis.  Au  culte  qu'ils  leur  rendaient  se  mê- 
laient les  plus  honteuses  orgies.  La  légende  religieuse 
tarissait  en  Phrygie,  et  elle  a  fourni  des  traits  abon- 
dai. ls  à  la  mythologie  grecque,  entre  autres  l'histoire 
de  Philémon  et  Baucis. 

IV.  Histoire   de   la  Phrygie.  —   Sous   le   rapport 


historique  et  politique,  cette  province  a  passé  par  des 
vicissitudes  multiples,  dont  nous  n'avons  à  relever  ici 
que  les  points  les  plus  saillants.  Suivant  les  anciens 
auteurs,  cf.  Hérodote,  II,  2;  Pausanias,  I,  xiv  12;  Clau- 
dien,  In  Eutrap.,  n,  251,  etc.,  il  exista  d'assez,  bonne 
heure,  dans  la  vallée  du  Sangarios,  un  royaume  auto- 
nome. Toutefois,  la  Phrygie  ne  forma  que  pendant  une 
période  assez  restreinte  un  État  indépendant.  On  en- 
tend dans  Homère,  Iliad.,  n,  862  et  ni,  187,  des  échos 
de  son  ancienne  grandeur.  Parmi  ses  premiers  rois, 
on  cite  Gordios.  et  surtout  Midas,  dont  on  a  retrouvé 
naguère  le  tombeau,  avec  l'inscription  «  Midas,  le  roi  ». 
Mais,  entre  les  années  680  et  670  avant  J.-C,  à  partir 
de  l'invasion  formidable  des  Cimmériens,  l'histoire  de 
la  Phrygie  devint  «  une  histoire  d'esclavage,  de  dégra- 
dation et  de  décomposition  ».  Eneycl.  Britannica, 
9°  édit.,  t.  xvni,  p.  851.  Lorsque  ces  terribles  envahis- 
seurs eurent  été  expulsés  d'Asie  Mineure,  vers  la  fin 
du  vi'î  siècle  ou  au  commencement  du  v«,  la  Phrygie 
tomba  au  pouvoir  de  Crésus,  roi  des  Lydiens.  Un  peu 
plus  tard,  vers  516,  les  Perses  s'en  emparèrent  à  leur 
tour;  elle  fut  ensuite  conquise  par  Alexandre  le  Grand, 
qui  la  légua  à  ses  successeurs.  Les  Galates  l'envahi- 
rent aussi  en  278  ;  mais,  refoulés  par  Attale  h1  de 
Pergame,  ils  ne  réussirent  à  garder  définitivement  que 
la  partie  nord-est  du  territoire. 

Lorsque  les  Romains  furent  devenus  maîtres  de  la 
région  qui  avait  formé  la  Grande  Phrygie,  ils  en  ratta- 
chèrent les  districts  occidentaux  à  la  province  d'Asie 
proconsulaire,  sous  le  nom  de  Phrygia  asiana  (49 
avant  J.-C).  tandis  que  les  districts  orientaux  et  méri- 
dionaux étaient  joints  à  la  province  de  Galatie,  sous  le 
titre  de  Phrygia  galatica  (36  avant  J.-C).  Elle  cessa 
par  là-même  d'avoir  une  existence  politique  séparée. 
Son  nom  ne  reparut  officiellement,  comme  désigna- 
tion d'une  province,  que  vers  la  fin  du  ni''  siècle  après 
J.-C,  lors  de  la  nouvelle  division  de  l'empire  ro- 
main. Voir  .1.  Marquardt,  Organisation  de  l'empire 
romain,  trad.  franc.,  t.  n,  Paris,  1892,  p.  237-239,  313- 
314. 

V.  La  Phrygie  et  les  Juifs.  —  Favorisés  par  les 
successeurs  d'Alexandre  le  Grand,  qui  leur  accordèrent 
en  Asie  Mineure  des  droits  égaux  à  ceux  des  Grecs  et 
des  Macédoniens,  de  nombreux  Israélites  ne  tardèrent 
pas  à  s'établir  dans  les  régions  phrygiennes.  Josèphe, 
A  ni.  jud.,  XII,  ni,  4,  raconte  expressément  qu'An- 
tiochus  le  Grand,  roi  de  Syrie  (224-187  avant  J.-C), 
transporta  2000  familles  juives,  de  Mésopotamie  et  de 
Babylonie,  en  Phrygie  et  en  Lydie.  Le  Talmud  range  ces 
Juifs  de  Phrygie  parmi  les  descendants  des  dix  tribus 
qui  avaient  formé  le  royaume  schismatique  du  nord, 
sans  doute  parce  qu'ils  venaient  de  la  Babylonie.  Il  les 
juge  assez  sévèrement,  car  il  va  jusqu'à  dire  que  «  les 
bains  et  le  vin  phrygiens  les  avaient  séparés  de  leurs 
frères.  »  Ce  langage  figuré  signifie  qu'ils  étaient  devenus 
très  relâchés  sous  le  rapport  religieux,  et  qu'ils  avaient 
adopté  sur  plusieurs  points  les  mœurs  des  païens.  Voir 
Neubauer,  La  géographie  du  Talmud,  in-8°,  Paris, 
1868,  p.  315;  Talmud  Babli,  Sabbalh,  147  6.  Cf.  Act., 
xvi,  1.  D'autre  part,  ils  exercèrent  eux-mêmes  une 
influence  salutaire  sur  les  Gentils  parmi  lesquels  ils 
vivaient,  et  ils  les  préparèrent  ainsi  à  recevoir  la  foi 
chrétienne.  Saint  Luc  nous  apprend  que,  de  leur  coté, 
ils  se  convertirent  en  grand  nombre  à  la  religion  de 
Jésus  dans  ces  parages.  Cf.  Act.,  xm,  14,  43,  49-50; 
xiv,  19,  etc. 

VI.  La  Phrygie  dans  l'Ancien  et  le  Nouveau 
Testament.  —  1°  Nous  ne  nous  arrêterons  pas  au  pas- 
sage II  Mach..  v,  22,  où  il  est  simplement  affirmé  que 
Philippe,  qui  avait  été  nommé  gouverneur  de  Jéru- 
salem par  Antiochus  Epiphane,  vers  l'an  170  avant 
J.-C,  appartenait  à  la  race  phrygienne,  xo  (xèv  ylvoç 
<l>p-jya. 


335 


PHRYGIE 


PII  L'A 


336 


"2°  Au  premier  des  Irois  endroits  où  elle  est  mention- 
née dans  le  Nouveau  Testament,  Act..  n,  10,  la  Phrygie 
est  prise  aussi  dans  un  sens  assez  généra).  Elle  y  apparaît 
comme  une  des  nombreuses  contrées  de  la  Diaspora 
d'où  il  était  venu  des  pèlerins  juifs  a  Jérusalem,  pour 
assister  à  la  fête  de  la  Pentecôte  :  "...  Ceux  qui  habitent 
la  Mésopotamie,  la  Judée,  la  Cappadoce,  le  Pont,  l'Asie, 
la  Phrygie,  la  Pamphilie,  l'Egypte...  »  Dans  cette  énu- 
mération  extraordinaire,  dont  on  a  vainement  cherché 
le  principe  directeur,  le  mot  «  Phrygie  »  doit  repré- 
senter tout  te  territoire  de  cette  contrée,  tel  qu'il  exis- 
tail  ,i  l'époque  de  saint  Paul,  c'est-à-dire,  aussi  bien  la 
Phrygia  galatica  que  la  Phrygia  asiana.  —  Les  deux 
autres  passages  ilu  livre  des  Actes  où  il  est  question  de 
la  Phrygie  se  rapportent,  l'un  au  second  voyage  aposto- 
lique de  Paul  et  l'autre  à  son  troisième  voyage.  Ils  mé- 
ritent d'être  étudiés  simultanément.  Act.,  xvi.  6  :  «  Ils 
(Paul  et  Timothée)  traversèrent  la  Phrygieet  le  pa\s  de 
Galatie,  »  rïjv  ^pu-ricr»  v.ai  [t»)v]  IV/atiy.r.v  ytipav.  Act, 
Xvni,  23  :  o  (Paul)  ayant  traversé  successivement  le 
pays  de  Galatie  et  la  Phrygie,  »  tt,v  reeXaTixïiv  jrûpav 
xai  $puyfav.  Dans  les  deux  textes,  le  narrateur  emploie 
les  mêmes  termes  géographiques,  mais  avec  une 
inversion  occasionnée  par  la  direction  différente  que 
suivait  l'Apôtre.  Dans  le]  premier  cas,  Act..  xvi.  6, 
saint  Paul  venait  de  Lycaonie,  et,  empêché  par  l'Esprit- 
Sainl  d'annoncer  l'Évangile  dans  l'Asie  proconsulaire, 
il  se  dirigea  vers  la  Bithynie,  après  avoir  traversé  un- 
partie  de  la  Phrygie  et  de  la  Galatie.  Dans  le  second 
cas,  Act.,  xvill,  23,  l'Apôtre  se  proposait  expressément 
de  |ui.  uiirir  la  Galatie  et  la  Phrygie,  pour  se  rendre  de 
là  à  phèse.  Si  nous  nous  reportons  à  ce  qui  a  été  dit 
plus  haut  de  l'iiisiuiiv  île  la  Phrygie,  il  n'est  pas  éton- 
nant qu'à  deux  reprises  cette  province  soitainsi  associée 
à  la  Galatie.  En  effet,  nous  avons  vu  qu'avant  l'époque 
de  saint  Paul,  la  Phrygie  avait  été  démembrée  par  les 
Romains  el  rattachée  aux  provinces  de  Galatie  et  d'Asie. 
Dans  nos  deux  textes,  le  mot  Phrygie  désigne  donc 
plus  particulièrement  la  Phrygia  asiana.  —  Selon 
d'autres,  l'expression  tîjv  *puyiav  y.ii  [tîjv]  ra)oTtxr,v 
ywpav,  ou  vice  versa,  désignerait  un  seul  et  même 
district,  qui  était  tout  à  la  fois  phrygien  el  galate  : 
phrygien  Wus  le  rapport  ethnologique,  el  galate  sous 
le  rapport  politique,  depuis  son  annexion  à  la  Galatie. 
—  Les  interprètes  discutent  aussi  sur  la  nature  du  mot 

I  .  stv  dans  les  ileu\  passages  en  question.  Suivant 
les  uns.  il  serait  île  pari  el  d'antre  un  adjectif,  de  sorte 
qu'on  devrait  traduire,  Act.,  xvi,  6  :  «  lis  traversèrent 
la  région  phrygienne  et  galate;  »  Aet.,  xvin.  13,  «Ayant 
traversé  la  région  galateel  phrygienne,  i  Selon  d'autres, 

II  iav  serait  au  contraire  un  substantif,  Act.,  xvi,  6 

o  Ils  traversèrent  la  Phrygie  et  la  région  galate;  i 
Act.,  XVIII,  23  :  a  Ayant  traversé  la  région  galate  et  la 
Phrygie.  »  D'après  une  troisième  opinion,  «PpuYtav 
serait  pris  adjectivement  dans  le  premier  passage, 
Act.,  xvi,  li,  et  substantivement  dans  le  second.  Act., 
xvill,  23.  L'emploi  d'un  seul  article,  du  moins  d'après 
la  leçon  la  plus  accréditée,  semble  favoriser  le  premier 
sentiment.  11  est  aussi  question  implicitement  de  la 
Phrygie  au  passage  Act.,  xix,  I.  peragratis  superiori- 
bus  partibus.  En  effet,  d'après  le  contexte,  les  o  parties 
supérieures  .  ainsi  nommées  à  cause  de  leur  altitude 
élevée,  ne  sont  autres  que  les  régions  centrales  de 
l'Asie  Mineure,  c'est-à-dire  la  Galatie  el  la  Phrygie, 
que  saint  Paul  venail  de  parcourir. 

Ainsi  donc,  la  Phrygie  i  ni  te  grand  honneur  de  re- 
cevoir {au  moins  à  deux  reprises  la  visite  de  l'apôtre 
des  Gentils,  qui  \  jeta  les  premières  semences  de  la  foi 

chrétienne.  On  ignore  cependant  si  c'est  par  lui  direc- 
tement,  ou  par  ses  disciples,  que  furent  fondées  les 
Eglises,  si  brillantes  peu  de  temps  après,  de  Colosses, 
de  Laodicée  el  de  Hiérapolis,  situées  dans  la  vallée  du 
Lycus.  En  ce  qui  concerne  celle  de  Colosses,  il  parait 


plus 'vraisemblable,  d'après  l'épitre  qui  lui  fut  adres- 
sée par  saint  Paul,  que  l'Apôtre  n'eut  pas  une  part 
immédiate  à  sa  fondation.  Voir  L.-Cl.  Fillion,  La 
Sainte  Bible  commentée,  t.  vin,  Paris,  1905,  p.  395. 
Selon  d'anciennes  traditions,  suint  Jean  l'évangé- 
liste  aurait  exercé  plus  tard  un  ministère  person- 
nel dans  la  même  vallée  du  L\cus.  —  La  Phrygie  a 
joué  un  rôle  important  dans  l'histoire  de  l'Église  pri- 
mitive, et  on  y  voit  encore  les  restes  nombreux  de 
monuments  chrétiens,  antérieurs  à  l'époque  de  Cons- 
tantin. 
VII.  Bibliographie.  —  Bergmann,  De  Asia  Romar 
n  provincia,  in-8",  Berlin,  Isiti;  l'article  Phry- 
gien, ilans  la  Realencyklopxdic  der  classischen  Al- 
terthumswissenschaft,  t.  v.  p.  1569-1580;  Becker-Mar- 
qnartll,  Handbuch  der  rômischen  Allerlhûmer, Leipzig, 
1843-1867,  t.  m.  p.  136-139.  155-162;  K.  Hitler.  Ver- 
gleichende  Erdkunde  des  Halbinsellandes  Klein-Asien, 
Berlin,  1859-1SG0,  t.  i.  p.  520-680;  Ch.  Texier,  Descrip- 
tion de  l'Asie  Mineure,  in-8°,  Paris,  1863,  p.  153-175; 
W.  M.  Hamsay,  Ciliés  ami  bishopnes  oj  Phrygia, 
2  m  8 ".  Londres,  1895-1897;  Id.,  Historical  get 
phy  of  Asia  Minor,  in-8".  Londres.  1890;  Id., 
Church  in  the  roman  empire,  in-8°,  Londres.  1893; 
Perrot  et  Chipiez.  Histoire  de  l'art  dans  Vantiquitêj 
in-î  .  Paris,  1890;  t.  v,  La  Phrygie,  p.  1-235,  A.  Torp, 
/,'  il, 'n  phrygischen  Inschriften  aus  rôniist  lier  Zeit, 
in -i".  Christiania,  1894;  Id.,  Zum  Phrygischen,  Chris- 
tiania, in-4»,  1896;  G.  Radet,  En  Phrygie  :  Rapport 
sur  une  mission  scientifique  en  Asie  Mineure,  in-8  . 
Paris,  1895  (extrait  des  Nouvelles  archive 
figues,  t.  vi);  li.  Ouvré.  In  •/uns  en  Phrygie,  in-18, 
Paris,  1896;  Reber.  Die  fihrygischen  Felsem 
mater,  in-8»,  .Munich,  ÎS'.IT  ;  V.  11.  Barclay,  Cata- 
logue of  the  greek  eoins  of  l'iirijgia,  in-8».  Londres, 
1906.  L.  Fillion. 

PHRYGIEN    (grec  .   *pûE),  originaire  de  Phi 
Il    Maeh..    v,  "22.   l'n   officier   d'Antiochus    Épipl 
appel.'    Philippe,  étail  Phrygien  d'origine.   Voir  Phi- 
lippe 3.  col.  266. 

PHUA,  nom  dans  la  Vulgate  d'une  Égyptienne  el  de 
deux  Israélites  qui  portent  tous  des  noms  différents  eu 
hébreu. 

1.  phua  (hébreu  :  Pùvrdh;  Septante  :  ■Pouà),  le 
second  des  quatre  lils  d'Issachar.  Gen.,  XI. VI.  Li; 
.N'uni.,  xxvi,  33;  I  Par.,  vu.  I.  Ses  descendants  furent 
nommés  les  Phuaïtes.  Num.,  xxvi,  -'■'•. 

2.  PHUA  (hébreu  :  Pû'âh  :  Septante  :  «l'o-ja).  une  des 

deux  sages-femmes  égyptiennes  <|ue  le  pharaon  char- 
gea de  faire  péri  tous  les  enfants  mâles  qui  naîtraient 
aux  Hébreux.  Exod.,  i.  15.  Elle  n'exécuta  pas  ainsi  que 
l'autre  sage-femme  Sèphora,  les  ordres  du  roi  et  lui  ré- 
pondit, pour  lui  expliquer  comment  les  nouveau-m 
Hébreux  n'avaient  point  péri,  que  les  femmes  des  Hé- 
breux n'avaienl  pas  besoin  de  leur  ministère.  Les  uns 
pensent  que  Sèphora  et  l'hua  étaient  Égyptiennes, 
d'autres  qu'elles  étaient  israélites.  Josèphe,  Ant.jud.,  II, 
i\.  2,  est  de  la  première  opinion;  la  plupart  des  com- 
mentateurs juifs,  saint  Augustin,  Conl.  menti.,  xv, 
t.  XL,  col.  539,  el  beaucoup  d'autres  sont  de  la  seconde. 
Les  premiers  allèguent  que  le  roi  d'Egypte  ne  pi 

c pu ir  que  Bur  des  Égyptiennes  | ■  en  obtenir  ce 

qu'il  voulait  d'elles  ;  li  -  seconds  disent  que  les  femmes 
israélites  n'auraient  pasaccepté  les  services  des  femmes 
égyptiennes,  el  que  celles-ci  n'auraienl  pas  cons 
servir  c. ■Iles-là.   L'origine  égyptienne  de  Sèphora  e   de 
l'hua  paraît  plus  vraisemblable.  —  Le  nom  de  Phua, 

V"  V  "V    J.  Poua,  se  lit  sur  une  stèle  du  musée 


337 


PHUA    —   PIIURIM    (FÊTE    DES 


338 


du  Caire.  Voir  Mariette,  Catalogue  général  des  monu- 
ments d'Abydos,  882.  C'était  le  nom  d'une  femme 
égyptienne  qui  vivait  sous  la  XIII1'  ou  la  XIV"  dynastie. 
Voir  Lieblein,  Dictionnaire  des  noms  hiéroglyphiques, 
supplém.,  in-N".  Leipzig,  1892,  p.  70i,  n.  1798.  Quoique 
deux  sages-femmes  seulement  soient  nommées,  il 
devait  ;  en  avoir  un  plus  grand  nombre,  mais  comme 
l'observe  Aben-Esra,  elles  étaient  les  deux  principales. 
—  Dieu,  pour  les  récompenser  de  leur  conduite, 
i  leur  lit  des  maisons.  »  Exod.,  i,  21,  c'est-à-dire  lit 
prospérer  leur  famille. 

3.  PHUA  (hébreu  :  Pïi'âh;  Septante  :  *o-ji),  de  la 
tribu  d'Issachar,  père  du  juge  d'Israël  Thola.  Jud.,x.l. 
l'hua  est,  d'après  le  lexte  hébreu,  bén-DodÔ,  ce  que  la 
Vulgate  traduit  «  l'hua,  uncle  d'Abimélech  »,  et  les 
Septante  :  «  l'hua,  lils  de  son  oncle.  »  Le  plus  probable 
est  que  Dôdô  est  un  nom  propre.  Voir  Dodo  1,  t.  n, 
col.  1459. 

PHUAITES  (hébreu  :  hap-Puni;  Septante  :  St|(j.oî  o 
*o-j»i ;  Vulgate  :  Phuaitœ),  descendants  de  Phua,  lils 
d'Issachar.  Num.,  XXVI,  23. 

PHUD  (Septante  :  #o-JS),  la  Pisidie,  dans  le  texte  grec 
de  Judith,  n,  23  (13).  D'après  les  Septante,  Holopherne 
ravagea  Phud  (la  Pisidie)  et  Lud  (la  Lydie),  etc.  Voir 
Pisidie. 

1.  PHUL  (hébreu  :  Pûl;  Septante  :  "ÊoûX,  'I'cjv, 
'l'x'nny.  'I>ï>t.',;;  assyrien  :  Pulu),  roi  d'Assyrie,  le  même 
que  Théglathphalasar.  IV  Reg.,  xv,  19;  1  Par.,  v,  '2(3; 
Voir  Théglathphalasar. 

2.  PHUL,  Pi'il,  dans  h  texte  hébreu  d'Isaïe,  lxvi,  29. 
Voir  Afrique,  t.  i,  col.  256. 

PHUNON  (hébreu  Pûnôn;  Septante  :  *iv(i),  campe- 
ment des  Israélites  dans  le  désert,  entre  celui  de  Sal- 
mona  et  celui  d'Gboth.  Num.,  xxm,  42-43.  Eusèbe  et 
saint  Jérôme,  Onomaslic,  édit.  Larsow  et  Parthey, 
p.  360-363,  disent  que  $tvc£v,  <I>aivwv,  Fenon,  était  situé 
entre  Pétra  et  Zoar  et  qu'on  y  exploitait  des  mines  de 
cuivre.  Saint  Épiphane,  Hœ»\,  i.xvm.  3,  t.  xi.ii,  col.  188, 
parle  îles  <PaivTJ<ji2  •>.{-. -jCiri.  de  même  que  Thèodoret 
de  Cyr,  //.  E.,  [V.  19,  1.  i.xxxii,  col.  1177,  qui  les  ap- 
pelle ^EW^o-iot  [léraXXa,  /.a:x  'Mvvov  (et  non  :  xorraçév- 
vr,;),  et  ils  nous  apprennent  l'un  et  l'autre  que  beaucoup 
de  chrétiens  avaient  été  condamnés  à  y  travailler.  Cf.  Ni- 
céphore,  //.  E.,  xi,  '28,  t.  cxlvi,  col.  665.  Eusèbe,  H.  E., 
vin,  13,  t.  xx,  col.  775,  nomme  quelques-uns  de  ces 
martyrs.  Cf.  aussi  Eusèbe.  Hist.  de  martyr.  Palsest.,  7, 
t.  xx,  col.  1484.  Saint  Athanase,  Hist.  Arian.  ad  mon., 
60,  t.  xxv,  col.  765,  parle  aussi  de  ces  mines  et  dit 
qu'on  y  trouve  promptement  la  mort. 

Le  site  dePhunon  était  donc  bien  connu  des  anciens, 
mais  le  souvenir  s'en  était  complètement  perdu.  Il  a 
été  retrouvé  en  1897  par  le  P.  Lagrange.  Pliunon  con- 
serve  encore  aujourd'hui  son  nom  sous  la  forme  à 
peine  modifiée  de  Fendu.  Le  Kliirbel  Fendn  est  au 
nord-ouest  de  Pétra,  dans  l'ouadi  el-Arabah,  à  l'est, 
voir  la  carte  de  l'Idumée,  t.  m,  col.  830.  «  Voici,  dit  le 
P.  Lagrange,  dans  la  Revue  biblique,  1898,  p.  114, 
deux  croupes  massives  qui  ont  l'aspect  des  mines  de 
cuivre  de  Maghâra,  sur  la  roule  de  Suez  au  Sinaï. C'est 
bien  le  même  grès  d'un  noir  verdàtre.  Au  bas  de  la 
montagne,  une  ruine  immense  (fig.  77),  dominée  par 
use  colline  tout  entière  couverte  de  constructions. 
C'était  comme  l'acropole.  Sur  ses  lianes,  à  l'ouest, 
deux  églises  orientées,  partout  des  tas  de  scories, 
toutes  les  traces  d'une  puissante  installation  indus- 
trielle. Cet  endroit  n'est  pas  dépourvu  d'un  certain 
charme.  Avec   un   peu  de  soin,  on  pouvait  avoir  là  le 


conlluenl  de  deux  ruisseaux  perpétuels,  l'ouadiThana... 
et  l'ouadi  l'enan  qui  remonte  vers  Chaubak.  L'eau  étail 
donc  abondante;  un  aqueduc  à  peine  rompu  la  condui- 
sait dans  un  grand  réservoir,  et  la  situation,  un  peu 
au-dessus  de  l'Araba,  était  meilleure  que  celle  de  Jéri- 
cho et  de  Ségor...  Aujourd'hui  trois  bergers  gardent 
(ces  mines),  en  répétant  sans  le  comprendre,  le  nom 
de  la  vieille  tribu  édomite  :  Kharbet  Fenàn.  Voir  l'ui- 
NON,  col.  320.  L'homophonie  des  noms  est  parfaite, 
elle  a  résisté  aux  transformations  des  hellénistes,  le 
site  est  caractérisé  par  la  présence  des  mines;  nul 
doute  que  nous  ne  soyons  à  Phunon.  »  Cette  identifi- 
cation est  d'une  extrême  importance  pour  la  détermi- 
nation de  la  roule  suivie  par  les  Israélites  dans  cette 
partie  de  leur  exode.  Moïse  put  tirer  des  mines  de 
Phunon  le  cuivre  nécessaire  pour  la  fabrication  du  ser- 
pent d'airain.  Num.,  xxi,  8-9.  Cet  épisode  miraculeux 
eut  lieu  dans  celte  région,  et  c'est  là  que  le  place  la 
carte  mosaïque  de  Madaba.  —  Phunon  devint  un  siège 
épiscopal   pendant    les     premiers   siècles  du  christia- 


itièsealcé-es  '"■'■         Urnes cà]aif?  'Hms  WÎ']':'Mbç>iiïpfc 
Puina  '  '   Khirèet  Haled 


ËchellB        773 


i.     ^  ---^ 


% 


77.  —  Ruines  de  Fenàn. 
D'après  un  croquis  de  la  Revue  biblique,  1900,  p.  285. 

nisme.  On  trouve  la  suscription  de  quelques-uns  de  ses 
évêques  dans  les  conciles  orientaux,  B.  Gains,  Séries 
episcoporum,  Ratisbonne,  1873,  p.  454,  et  le  P.  La- 
grange a  découverl  dans  les  ruines  de  Fenàn,  sur  un 
bloc  de  grès,  Revue  biblique,  1898,  p.  449,  le  nom  d'un 
évèque  Théodore.  K.  VlGOUROUX. 

PHUR,  singulier  de  Phurim.    Esth.,  vin,  7;  tx,  24 
26.  Voir  Phdrim. 

PHURIM  (FÊTE  DES)  (hébreu  ;  yîmê  hap-pûrîm, 

pûrîm;  Septante  : -qy.ipa.-i  tûv  "Ppo'jfa:,  'ï'poupa;';  Vul- 
gate :  (Vies  phurim,  phurim),  fête  instituée  en  mémoire 
de  la  délivrance  des  Juifs  du  temps  d'Esther. 

1"  Sun  origine.  —  1.  Lorsque  Aman,  ministre 
d'Assuérus,  voulut  se  venger  de  Mardochée  en  faisant 
exterminer  tous  les  Juifs  du  royaume,  il  obtint  du  roi 
un  édit  conforme  à  ses  désirs.  Mais  il  restait  à  déter- 
miner le  jour  de  l'extermination.  Les  Perses  aimaient 
à  s'en  remettre  au  sort  quand  ils  avaient  une  décision 
à  prendre.  Cf.  Hérodote,  m,  128.  Au  premier  mois  de 
l'année,  qui  est  celui  de  nisan,  on  jeta  donc  le  pur, 
c'est-à-dire  le  sort,  gôrâl,  Esth.,  m,  7,  «  pour  chaque 
jour  et  pour  chaque  mois,  jusqu'au  douzième  mois,  qui 
est  celui  d'Adar.  »  Le  sort  désigna  le  treizième  jour  du 
douzième  mois,  ce  qui  laissait  aux  Juifs  un  répit  d'une 
année  presque  entière.  Les  Perses  ne  revenaient  jamais 
sur  une  décision  du  sort,  si  peu  conforme  qu'elle  fût 
à  leurs  désirs.  Le  13  nisan,  les  secrétaires  du  roi  expé- 
dièrent des  lettres  à  toutes  les  autorités  du  royaume, 
pour  qu'il  fût  procédé,  le  13  adar,  au  massacre  de 
tous  les  Juifs.  Esth.,  m,  7,  13.  -  2.  o  Pour,  d'où  pour- 
rim....  est  une  des  racines  les  mieux  connues  et  les 
plus  fixes  des  langues  aryennes.  Par  en  sanscrit,  por 


339 


PHURIM    (FÊTE   DES) 


340 


en  persan;  plere  en  latin,  plein  en  français,  répondent 
à  la  même  idée  et  communiquent  le  même  sens  à  leurs 
dérivés...  Il  s'agii  d'un  instrument  fatidique,  nommé 
pour  en  langue  perse,  qu'on  jetait  devant  toute  personne 
désireuse  de  prendre  l'avis  du  destin.  Le  pour  rendait 
sans  doute  ses  oracles  par  oui  et  par  non...  Il  devait 
répondre  à  une  question  bien  déterminée,  posée  d'une 
façon  dichotomique  :  g   Les  Juifs  seront-ils  massacrés 

!•  premier jourdu  mois'.'"  Nous  savons  que, consulté 
jour  par  jour,  mois  par  mois,  le  pour  donna  d'abord 
un  avis  négatif,  puis,  quand  on  appela  le  treizième 
jour  et  le  douzième  mois,  il  répondit  :  oui,  c'est-à-dire  : 
tuez.  »  On  a  découvert  à  Suse  un  prisme  quadrangu- 
laire  sur  les  faces  duquel  sont  gravés  des  points,  comme 
sur  nos  dés.  Voir  t.  n,  fig.  484,  col.  1325.  «  Les  Perses 
aimaient  les  jeux  de  basard  autant  que  le  vin;  le  petit 
monument  susien  ne  serait-il  pas  un  de  leurs  dés;  et 
leurs  dés,  sous  le  nom  de  pour,  n'auraient-ils  pas 
servi  à  consulter  le  soit  et  à  tenter  la  fortune'.'  Pour, 
pas  plus  que  cartes,  urne  ou  dés,  n'a  le  sens  propre  de 
sort,  mais  tous  ces  mots  entrent  dans  des  pbrases  sem- 
blables :  jeter  le  ;>otir,  tirer  les  cartes,  mettre  la  main 
dans  l'urne,  agiter  les  dés,  qui  éveillent  toutes  quatre  la 
même  idée  :  consulter  le  sort.  L'expression  perse 
pour,  littéralement  <•  plein,  solide  ».  répond  même 
dans  une  certaine  mesure  à  la  forme  du  déachéménide  .» 
Dieulafoy,  L'acropole  de  Suse,  Paris,  189-2.  p.  362-363. 
Cf.  Vigouroux,  Lu  Bible  el  les  découvertes  modernes. 
6'  édit..  t.  iv.  p.  64(3-652.  —  3.  A  la  prière  d'Estber, 
Aman  fut  condamné-,  et  des  courriers  furent  expédiés 
dans  les  provinces  pour  permettre  aux  Juifs  de  se 
défendre  le  13  adar.  A  Suse.  dans  toutes  les  villes  et 
dans  toutes  les  provinces,  le  nouvel  édit  royal  produi- 
sit un  revirement  total  de  l'opinion  en  faveur  du 
peuple  voué  à  la  mort;  e  il  y  eut  parmi  les  Juifs  de  la 
joie  et  de  l'allégresse,  des  festins  et  des  fêtes,  et  beau- 
coup de  gens  d'entre  les  peuples  du  pays  se  firent 
Juifs,  parce  que  la  crainte  des  Juifs  les  avait  saisis.  » 
Estb..  vm,  'J-17.  Le  13  adar,  les  Juifs  prirent  les  armes 
contie  leurs  ennemis  el  en  lirent  périr  un  grand 
nombre.  Esther  obtint  même  qu'à  Suse  le  massacre  se 
renouvelât  le  M.  A  trois  reprises,  le  texte  sacré 
rque  que  1rs  Juifs  a  ne  mirent  pas  la  main  au 
.'  .  Esth.,  i.\.  1-16.  —  4.  Après  cette  exécution 
le- Juifs  s,'  reposi-ivnl  le  11  adar.  à  Suse  le  15  seule- 
ment, et  ils  en  firent  un  jour  de  joie  et  de  festin.  Mardo- 
chée  écrivit  le  récit  de  ce  qui  s'était  passé  et  ordonna 
que,  cbaque  année,  le  I  i  el  le  15  adar  fussent  célébrés 
par  des  festins,  des  échanges  gracieux  et  des  distribu- 
tions aux  indigents.  I  sther  el  Mardochée  écrivirent  par 
deui  fois,  alin  d'établir  cette  fêle  à  perpétuité,  en  la 
faisant  précéder  déjeunes  el  de  lamentations, à  l'exemple 
qu'Esther  avait  elle-même  pratiqué.  Estb.,  iv, 
16;  ix.  17-32.  La  part  prise  par  Mardochée  à  tous  ces 
événements  el  à  l'institution  de  la  fête  fit  donner  à 
cliacun  de  ces  deux  jours  le  nom  de  MsepSoy.aïxï-,  r,\i.ïpx, 
Mardochœi  aies,  «  jour  de  Mardochée  ».  II  Mach., 
xv,  37. 

■1  Sa  célébration.  —  I.  La  fête  se  célébrait  pendant 
deux  jours,  le  11  et  le  15  adar,  en  mémoire  des  deux 
jours  accordi  s  aux  Juifs  de  Suse  pour  se  défendre. 
Dans  K-s  années  auxquelles  on  ajoutait  un  mois  inter- 
calaire, le  vcadar  (voir  t.  Il,  col.  66).  on  célébrait  deux 
fois  la  fi  i  des  Phurim,  qu'on  appelait  petit  Phurim  en 
adar,  el  grand  Phurim  en  veadar.  La  veille  de  la  fête, 
13  adar,  était  un  jour  de  jeûne  appelé  »  jeune  d'Estber  . 
Mais  si  le  li  adar  tombait  un  jour  de  sabbat,  le  jeûné 
du  13  était  avancé  d'un  jour.  Les  règles  du  jeune  che2 

-  Juifs  eussent  été  trop  difficiles  à  observer  la  veille 

d'un  jour  où  était  défendue  même  la  préparation  desali- 

ments.  Voir  JEÛNE,  t.  ni,  col.  1531.  Il  va  de  soi  que  le 

gaiement  avancé  quand  le   13  adar  était 

un  jour  de  sabbat.   Du  reste,  on  évitait  que    la   fête 


tombât  le  second,  le  quatrième  ou  le  septième  jour  de 
la  semaine.  —  2.  La  fêle  des  Phurim  ne  s'introduisit 
pas  sans  quelque  difficulté  en  Palestine,  si  l'on  en  croit  la 
Gern.  lerus,  Megilla,  70,  4.  C'était  une  nouveauté  contre 
laquelle  un  bon  nombre  protestaient.  Elle  finit  cependant 
par  être  acceptée,  et  la  mention  qu'en  fait  le  second 
livre  des  Machabées,  xv,  37.  prouve  qu'en  162  avant 
Jésus-Christ,  on  la  célébrait  à  Jérusalem.  Elle  ne  com- 
portait pas  de  service  liturgique.  Aucun  sacrifice 
n'était  donc  prescrit  à  cette  occasion,  ce  qui  s'explique 
par  ce  fait  que  la  fête  avait  eu  son  origine  en  pays 
étranger.  Le  livre  d'Estber  ne  prévoit  d'ailleurs  aucun 
exercice  religieux,  pas  même  des  actions  de  grâces  au 
Seigneur.  A  une  époque  qu'on  ne  peut  déterminer,  on 
institua  des  réunions  dans  les  synagogues.  Dans  la 
réunion  de  la  veille,  on  lisait  deux  passages  de  la  Gei 
xxxn-xxxiv.  Ce  même  jour,  on  envoyait  de  l'argent  ou 
des  dons  en  nature  aux  pauvres,  alin  qu'ils  pussent  se 
réjouir  le  lendemain.  —  3.  L'acte  le  plus  important  du 
14  était  la  lecture  de  la  megillâh.  Ce  nom,  qui  signifie 
o  rouleau,  volume  »,  était  commun  à  cinq  livres  sai 
Voir  Ml  '.il  i  mu.  I.  iv,  col.  932.  Mais  on  le  donnait  par 
excellence  et  sans  autre  désignation  au  livre  d'Esther, 
à  cause  de  l'importance  que  lui  faisait  attribuer  la  fête 
des  Phurim.  Les  Juifs  disaient  proverbialement  que  le 
Temple  et  les  prophètes  pourraient  disparaître,  mais 
jamais  les  Phurim  ni  la  Megillâh,  et  ils  croyaient  que 
le  Messie  n'abrogerait  ni  la  loi  de  Moïse  ni  le  livre 
d'Estber.  La  lecture  solennelle  de  la  Megillâh  se  faisait 
dans  les  synagogues,  à  la  lueur  des  flambeaux,  le  soir 
ou  la  nuit,  mais  à  des  jours  différents  suivant  les  lieux, 
le  15  adar  dans  les  kârakim,  ou  villes  enceintes  de 
murailles  au  temps  de  Josue,  le  14  dans  les  autres 
villes  ou  ârim,  et  enfin,  dans  les  bourgs  ou  /.'<'/• 
le  second  ou  le  cinquième  jour  de  la  semaine  le  plus 
voisin  de  la  fête.  Si  celle-ci  tombait  le  jour  du  sabbat. 
la  lecture  se  faisait  l'avant-veille.  Lis  années  on  l'on 
célébrait  la  fête  des  Phurim  en  adar  et  en  veadar,  la 
lecture  n'avait  lieu  que  la  première  fois.  Cf.  Megilla.  i.  1. 
Le  matin  de  la  fête,  on  lisait  le  passage  de  l'Exode, 
xvii,  8-16,  qui  raconte  la  victoire  sur  les  Amali 
parce  qu'on  supposait  qu'Aman  avait  eu  pour  an 
le  roi  amalécite  Agag,  Cf.  I  Reg.,  xv.  S;  Estb..  m,  I. 
—  I.  Le  traité  Megilla  de  la  Miscbna  a  pour  objet 
la  manière  de  lire  le  livre  d'Estber  à  la  fête  des  Phu- 
rim.  Cette  lecture  donnait  lieu  à  des  manifestations 
bruyantes,  qui  étaient  probablement  la  cause  de  son 
interdiction  le  jour  du  sabbat,  autant  que  l'absence  du 
nom  de  Dieu  dans  le  livre.  Voir  ESTHER  (Lrvftl 
t.  n,  col.  1980.  Ces  manifestation*,  introduites  a  une 
époque  où  la  fête  prit  un  caractère  de  plus  en  plus 
profane,  furent  probablement  la  raison  pour  laqi 
or.  lit  une  rédaction  abrégée  du  livre  d'Esther,  dans 
laquelle  n'apparaissait  plus  le  nom  de  Jéhovah. 
Cf.  Cornely,  Introduct.  specia  hitt.  V.  T.libr., 
Paris,  1887,  i.  n,  p.  136;  Zschokke,  Bistoria  » 
Vienne.  1888,  p.  343.  Quand  le  nom  .1  Aman  se  pré- 
sentait au  cours  de  la  lecture,  on  s'écriait  :  innua/j 
temô,  que  son  nom  soit  détruit  !  ou  iêm  reSâ'im 
irqdb,  que  le  nom  il  -  méchants  pourrisse^!  i  Les 
enfants  battaient  des  mains,  frappaient  les  bancs  ou 
heurtaient  à  grand  bruit  l'un  contie  l'autre  des  mor- 
ceaux de  bois  ou  de  pierre  sur  lesquels  ils  avaient 
écrit  le  nom  d'Aman.  A  la  lin  de  la  lecture,  toute  l'as- 
semblée poussait  des  acclamations  :  j  Maudit  Aman 
Béni  Mardochée!  Maudite  Zarès  femme  d'Aman)!  Dénie 
Esther!  Maudits  idolâtres!  Denis  tous  les  Israélites! 
Béni  Eiarbona  qui  a  pendu  Aman!  »  Esth.,  vu.  '.' 
leurs  imprécations,  les  Juifs  visèrent  par  la  suit 
ceu\  qu'ils  regardaient  comme  leurs  ennemis.  Pai 
sans  limite,  il  leur  arrivait  de  faire  des  aumc -  même 

aux  chrétiens  pauvres,  à  l'occasion  de  la  fête  des  Phu- 
rim. Mais  d'autre  fois,  ils  brûlaient  l'effigie  d'Aman 


341 


PHURIM    (FETE    DES)    -  ■   PHUTH 


342 


et  en  même  temps  une  croix,  en  haine  de  la  foi  chré- 
tienne. Théodose  fut  ohligé  de  leur  défendre  ce  sacri- 
lège. Cod.  Theod.,  XVI,  vm.  18.  —  5.  Les  festins  qui 
accompagnaient  la  fête  des  Phurim  étaient  joyeux  et 
copieux.  D'après  la  Geni.  Megilla,  vu.  2.  chacun  de- 
vait boire,  à  la  fête  des  Phurim,  de  manière  à  ne  plus 
pouvoir  distinguer  entre  «  maudit  Aman  «  et  <•  béni 
Mardochée  «.  —  6.  Un  certain  nombre  d'auteurs  ont 
pensé  que  la  fête  mentionnée  par  saint  Jean,  v,  1. 
[opr-rj,  «  une  fête,  »  ou  d'après  plusieurs  manuscrits 
r,  èopr/j,  c  la  fête,  »  n'était  autre  que  celle  des  Phurim. 
.Mais  cette  fêle  n'obligeait  pas  à  se  rendre  à  Jérusalem 
et  il  serait  étonnant  que  saint  Jean  se  fut  arrêté  à  signa- 
ler une  solennité  d'un  caractère  si  profane.  Il  parle 
manifestement  d'une  fêle  qui  attirait  à  Jérusalem  un 
grand  concours  de  peuple.  A  la  suite  de  saint  Irénée, 
Adv.  User.,  n,  22,  3,  t.  vu.  col.  783,  et  conformément 
aux  conclusions  d'Eusèbe,  Chronic,  et  Demonslr. 
evang.,  t.  xix.  col.  Ô36;  t.  xxn,  col.  625,  on  croit  assez 
généralement  que  cette  fête  était  la  Pàque.  Cf.  Fillion, 
Evang.  selon  S.  Jean,  Paris,  1887,  p.  92,  93;  Knaben- 
bauer,  Evang.  sec.  Joan..  Paris,  1898,  p.  187.  —  7.  Enfin, 
on  a  cherché  à  rattacher  la  fête  juive  des  Phurim  à  cer- 
tains usages  en  honneur  chez  les  Perses.  La  fête  ne  se- 
i.i  1 1  qu'une  adaptation,  par  les  Juifs  de  Suse,  d'une  fête 
de  printemps  que  les  Perses  célébraient  annuellement. 
Selon  d'autres,  elle  devrait  son  origine  aux  festins  que 
les  Perses  faisaient  en  l'honneur  des  morts  pendant 
dix  jours,  les  cinq  derniers  jours  du  douzième  mois 
d'abàn  et  les  cinq  jours  intercalaires  qui  suivaient.  Ces 
solennités  gastronomiques  s'appelaient  Fôrdigàn  ou 
Pôrdigdn,  termes  que  reproduiraient  approximative- 
ment les  mots  des  textes  grecs  $povipai  et  «Êpoupaïa,  et 
les  festins  du  14  et  du  15  adar  n'en  seraient  que  l'imi- 
tation, On  a  prétendu  aussi  que  celte  fête  n'était  qu'un 
prélude  de  la  fête  de  la  Pàque,  qui  tombe  juste  un 
m  i-  plus  lard.  Cf.  Riehm,  Handwôrterbuch  des 
biblisch.  Allerlums,  Leipzig,  1894,  t.  n,  p.  1264. 
Toutes  ces  allégations  se  heurtent  au  récit  du  livre 
d'Esther  qui  ne  fait  pas  la  moindre  allusion,  à  propos 
de  la  fête  des  Phurim,  ni  à  une  solennité  printanière, 
ni  au  souvenir  des  morts,  ni  à  une  préparation  anti- 
cipée à  la  Pàque.  Les  festins  sont  de  tous  les  temps  et 
de  tous  les  pays  et  il  était  naturel  d'y  recourir  pour 
célébrer  une  délivrance.  Ils  étaient  déjà  prescrits  aux 
Israélites  dans  leurs  autres  fêtes.  Deut..  xvi,  11.  14.  En 
somme,  l'historique  de  la  fàte  des  Phurim  est  aussi 
incontestable  que  celle  des  autres  fêtes  instituées  après 
la  captivité,  celle  de  la  Dédicace,  II  Mach.,  x,  1-8,  et 
celle  du  13  adar  en  souvenir  de  la  mort  de  Nicanor. 
Il  Mach.,  xv,  36-37.  —  Cf.  Reland.  Antiquitates  sacrse, 
Utrecht,  1741,  p.  268-269;  Iken,  Antiquitates  hebraicse, 
Brème,  1741.  p.  141-142,  336-338;  W.  Schickard, 
Purim  sire  Bacchanalia  .fudxorum,  dans  les  Critici 
t.  m,  col.  1184;  B.  L.  Eskuche,  De  festo  Judseo- 
rum  Purim,  Marbourg,  1734.  II.  Lesètre. 

PHUTH  (hébreu  :  Pù«;Septante  :  *oû8,  AîëuEç;  Vul- 
gate  :  Pltuth,  Phut,  Libyes,  Libya,  Africa), pays. 

I.  Les  textes.  —Isaïe,  lxvi,  19,  sous  le  règne  et 
\ei  s  i  lin  de  la  vie  d'Ézéchias,  vers  698 avant  J.-C,  parle 
du  royaume  messianique  et  des  Juifs  incrédules.  Tou- 
tefois, parmi  ces  derniers,  quelques-uns  resteront 
fidèles  et  Dieu  les  enverra  prêcher  sa  gloire  aux  Gentils, 
aux  i  Pûl  »  entre  autres  et  aux  a  Lùd  qui  tirent  de 
ce  que  la  Vulgate  rend  par  in  Africain  et  Ly- 
diam  tendentes  sagittam.  Pûl  est  un  mot  qui  ne  se 
■ntre  nulle  part  ailleurs  et  qui  semble  une  cor- 
ruption pour  Put.  Ainsi  l'ont  compris  les  Septante  qui 
le  traduisent  par  <I>cCc.  Leur  lecture  a  été  généralement 
acceptée,  à  commencer  par  saint  Jérôme,  comme 
l'insinue  le  mot  Africa.  —  Nahum,  III,  9,  nous 
montre  Pût  et    Lûbim    parmi  les   auxiliaires   de  l'ar- 


mée égyptienne,  tandis  que  Kùs  et  Misraim  sont  la 
force  de  Thèbes  :  /Ethiopia  fortitudo  e/us  et  .Egyp- 
tus...:  Africa  (Put)  et  Libyes  [Lûbim)  fuerunt  in 
au.rilio  tuo.  Rien  n'est  plus  exact,  puisque,  avant  le  sac 
de  Thèbes  (664)  par  Assurhanipal,  l'Ethiopie  dominait 
l'Egypte  et  ne  faisait  qu'un  avec  elle.  Les  Éthiopiens  ne 
pouvaient  donc  alors  être  considérés  comme  les  auxi- 
liaires de  l'Egypte.  Cf.  No-Amon,  t.  IV,  col.  1647.  — 
Jérémie,  xlvi,  9,  nous  apprend  que  dans  l'armée  que 
Néchao  II  conduit  au  désastre  de  Carchamis,  606  avant 
J.-C,  se  trouvent  des  Éthiopiens  [Kûê)  et  des  Libyens 
[Pût)  armés  du  bouclier,  et  des  Lydiens  [Lûdîm)  sai- 
sissant et  lançant  des  llèches.Ici  les  Éthiopiens  ne  sont 
plus  que  les  auxiliaires  de  l'Egypte  et  sur  le  même  pied 
que  Pût  et  Lûdim.  En  effet  les  Éthiopiens,  à  cetle  date, 
se  sont  retirés  à  Napata,  et  l'Egypte  possède  un  gouver- 
nement indépendant.  —  Ézéchiel,  xxvn,  10,  place,  avec 
les  Perses  Lùd  et  Pût,  des  Lydiens  et  des  Libyens, 
parmi  les  auxiliaires  de  Tyr  qui  doit  tomber,  ou  du 
moins  se  soumettre,  après  treize  ans  de  siège,  àNabu- 
chodonosor,  574  avant  J.-C.  Cf.  Maspero,  Histoire  de 
l'Orient  classique,  t.  tu,  1899,  p.  549.  Chez  le  même 
prophète,  xxx,  5,  Kùs,  Pût  et  Lùd,  l'Ethiopie,  la 
Libye  et  les  Lydiens,  servent  dans  l'armée  de  Pharaon 
que  Nabuchodonosor  heurtera  en  568,  dans  sa  deuxième 
campagne  contre  l'Egypte.  Cf.  No-Amon.  t.  iv,  col.  1652. 
3°.  —  Enlin,  chez  Ézéchiel,  xxxvm,  5.  nous  trouvons 
dans  l'armée  de  Gog,  roi  de  Magog,  avec  d'autres  peu- 
ples Kùs  et  Put,  les  Éthiopiens  et  les  Libyens.  —  Dans 
un  passage  de  Judith,  Septante,  n,  23,  Holopherne 
vient  d'arriver  au  nord  de  la  Cilicie;  il  s'engage  alors 
dans  les  montagnes  et  ravage  Put  et  Lùd. 

IL  Phtth,  peuple  africain.  —  1°  Pour  Nahum.  m, 
9,  il  n'y  a  pas  de  doute,  Phuth  est  en  Afrique.  A  Thè- 
bes, dont  l'Ethiopie  et  l'Egypte  sont  la  force,  puisqu'à 
ce  moment  l'éthiopien  Tanoutamen  a  succédé  à  son 
père,  l'éthiopien  Tharaca,  dans  le  gouvernement  de 
l'empire  éthiopico-égyptien,  Phuth  fournit  des  auxi- 
liaires au  même  titre  que  la  Libye.  Les  gens  de  Phuth 
sont  donc  comme  les  Lùdim  des  voisins  de  l'empire 
éthiopico-égyptien.  —  2°  Isaïe,  LXVI,  19,  unit  les  Pût 
aux  Lùd,  si  vraiment,  après  les  Septante,  nous  devons 
lire  Put  au  lieu  de  Pùl.  Mais  comme  Lùd  représente 
ici,  nous  dit-on,  les  Lydiens  de  l'Asie  Mineure,  il  en 
résulte  que  Put  parait  être  aussi  un  peuple  delà  même 
région.  «  Isaïe...  comprend  dans  une  énumération 
Tarsis,  Phoul  (Phut),  Loud,  Thubal,  Javan,  leur  ap- 
pliquant la  désignation  commune  d'iles,  sous  la- 
quelle l'usage  biblique  entend  l'Asie  Mineure,  les 
iles  de  la  Méditerranée,  la  Grèce  et  les  îles  plus 
éloignées  à  l'ouest.  Le  texte  d'Isaïe  nous  ramène  donc 
à  l'Asie  Mineure  pour  Loud  en  particulier  et  probable- 
ment aussi  pour  Phout.  »  A.  Delaltre,  Le  peuple  et 
l'empire  des  Médes,  Bruxelles,  1883,  p.  159,  note  1.  A 
cela  on  peut  répondre  :  le  texte  en  question,  le  mot 
iles  en  particulier,  ont-ils  bien  ce  sens  restreint? 
«  Et  je  ferai  un  prodige  au  milieu  d'eux,  dit  le  texte 
hébreu,  et  j'enverrai  de  leurs  réqhappés  vers  les  na- 
tions, à  Tharsis  (Tartessus,  port  phénicien  d'Espagne), 
à  Pùl  (Put)  et  à  Lùd  qui  tirent  de  l'arc,  à  Thubal  iTi- 
baréniens  du  Pont-Euxin)  et  à  Iavan  (Ioniens,  Grecs) 
vers  les  iles  lointaines,  qui  n'ont  jamais  entendu  par- 
ler de  moi,  et  ils  publieront  ma  gloire  parmi  les  na- 
tions. »  De  ceux  qui  auront  échappé  au  jugement  de 
Dieu,  il  en  est  donc  qui  iront  annoncer  la  bonne  nou- 
velle jusque  chez  les  peuples  reculés  et  peu  connus, 
chez  toutes  les  nations,  dont  quelques-unes  sont  nom- 
mées. Aucune  limite  ne  leursera  assignée  que  les  limites 
des  iles  «  les  plus  lointaines  »,  c'est-à-dire  de  l'uni- 
vers. L'énumération  d'Isaïe  est  si  peu  restrictive  qu'elle 
a  pour  but  principal  de  montrer  que  le  royaume  de 
Dieu  sera  prêché  à  tous.  D'où  il  ne  suit  pas  néces- 
sairement que  les  peuples  réunis   par  l'énumération 


343 


I'HUTH 


344 


soient  aussi  réunis  par  la  race  ou  par  la  géographie  et 
qu'il  faille  placer  l'ùi  à  cédé  de  Lùd.  Cf.  Knabenbauer, 
1,,  haiam,  t.  n.  p.  515,  517.  En  accordant  même  que 
ers  deux  peuples  aient  été  voisins,  rien  ne  nous  garan- 
tit que  Lùd  ail  eu  son  habitai  en  Lydie.  Sans  vouloir 
avec  Ebers,  Aegyplen  und  die  Bûcher  Mose's,  1868, 
p.  91,   en   faire   des   I  gypliens,  Lulu,   ce  qui  est   très 

douteux  comme  lecture  puisque  le  mot  s=>  M*  se  lit 

aujourd'hui  plutôt  romilou;  ce  qui  est  exclu  par  le  l'ait 
même  que  Lùd  et  Lûdim  comptent  ailleurs,  .1er.,  xi.vi, 
9;  Ezech.,  xxx,  5,  parmi  les  auxiliaires  des  Égyptiens; 
sans  donc  aller  jusque-là,  il  est  à  propos  de  noter  que 
si  dans  la  Genèse,  x,  22,  Lùd  esl  le  quatrième  (ils 
ou  la  quatrième  famille  issue  de  Sera,  Lûdim,  X,  13, 
est  la  première  famille  issue  de  Misraîm.  Il  y  eut  donc 
à  l'origine  deux  peuples  de  ce  nom,  l'un  asiatique,  les 
Lùd,  l'autre  africain,  les  Lùdim.  Malheureusement,  la 
distinction  de  ces  deux  peuples  ne  s.'  conserve  pas 
chez  les  prophètes  qui  emploient  indifféremment  et 
l'un  pour  l'autre  Lùd  et  Lùdim.  Cf.  les  passages  paral- 
lèles, Jer.,  xi.vi.  9,  et  Ezech.,  XXX,  5.  On  ne  peut  donc 
rien  conclure  contre  l'origine  africaine  des  Lùd  tris 
qu'ils  apparaissent  dans  le  texte  de  J.  rende,  a  plus 
forte  raison  des  l'ùl  que  rien  n'autorise  à  dédoubler  et 
à  sortir  de  l'Afrique  où  les  met  clairement  Nahum.  On 
pourrait  objecter  le  texte  des  Septante  dans  Judith,  II, 
23.  .Mais  nous  ne  possédons  pas  le  texte  original  de  ce 
livre.  Les  noms  propres  surtout,  dans  les  manuscrits 
des  différentes  versions,  sont  profondément  altérés  el 
divers.  Cf.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  t.  n,  12'  édit., 
1906,  p.  186-188.  Si  bien,  qu'étant  donnée  la  marche 
d  Holopherne,  qui  ravage  la  Cappadoce,  puis  entre 
dans  t.,  région  des  montagnes,  c'est-à-dire  la  Pisidie, 
le  plus  probable  esl  de  déduire  avec  Robiou,  Deux 
questions  de  chronologie  et  d'histoire  éclaircies  par 
les  Annales  d'Assurbanipal,  1875,  p.  16,  que  ••  Phut  » 
esl  ici  pour  ■  Phusl  »,  par  suite  de  la  chute  de  la 
sifflante.  «  En  effet,  en  suivant  celte  direction,  les 
massifs  de  la  Pisidie  s,,  présentaient  devanl  eux  îles 
Assyriens'.  L'omission  de  la  sifflante  par  les  copistes 

sufiit    pour   transformer  en    Phul    le   n de   celte 

contrée,  »  —  3"  Jërémie,  xi.vi,  9,  et  Êzéchiel,  XXX,  5, 
nous  retiennent  en  Afrique  avec  Kûs  et  Pût  qui  ma- 
nient le  bouclier,  quoi  qu'il  en  soit  de  Lùdim  et  Lùd. 
Ces  derniers  pourraient  bien  être  des  Lydiens  à 
l'époque  de  Néchao  el  d'Amasis.  Les  Grecs  el  leurs 
voisins  de  l'Asie  Mineure  sont  nombreux  alors  dans 
l'armée  égyptienne,  et,  peu  après  la  seconde  campagne 
de  Nabuchodonosor,  Amasis  resserra  ses  liens  avec  eux 
en  s'alliant  à  Polycrate  de  Samos  et  à  Crésus  de  Lydie. 
Hérodote,  m,  3'J,  i,  77.  —  4"  Ezéchiel,  xxvu,  10,  ne 
nous  parle  plus  de  l'armée  égyptienne,  mais  de  l'armée 
qui  défend  Tyr,  et  celle  aine'.'  comprend  des  Perses. 
des  Lùd  el  des  pat.  A  première  vue,  un  tel  groupemenl 
dans  un  tel  endroit  peul  surprendre,  e!  on  a  voulu  y  voir 
une  »  simple  paranomase  ».  Cf.  Frd.  Delitzsch,  Wo 
lag  das  Parodies,  1881,  p.  252.  Mais  si  nous  nous  rappe- 
lons qu'à  ce  moment  la  mer  Rouge  esl  reliée  au  Nil  el 
a  la  Méditerranée,  que  les  colonies  phéniciennes  s-. ni 
disséminées  en  Syrie,  en  Mésopotamie,  au  golfe  IVr- 
sique,  en  Egypte,  sur  1rs  différents  rivages  de  I'  Mrique, 
dans  la  plupart  .les  Iles  de  la  Méditerranée,  sur  la  mer 
Noire  et  en  Espagne,  cf.  Movers,  Die  Phônizier,  1841- 
1856,  i.  n,  "2,  nous  ne  serons  pas  étonnés  de  voir  Tyr 
recruter  ses  mercenaires  jusque  chez  les  nations  les 
plus  éloignées,  ir.oll.ur-.  a  le  bien  regarder,  le  texte 
sien''  ne  nous  forée  nullement  à  l'aire  coudoyer  dans 
Tyr  même  les  gens  de  l'ùl  par  1rs  Perses  el  les  Lydiens. 
t  zéchiel  ne  borne  pas  sa  vue  à  la  ville  de  Tyr,  mais  il 
embrasse  Tyr  el  tout  l'ensemble  de  ses  colonies  el,  pour 
ainsi  dire,  son  rayonnement  entier  :  «  Les  Perses  el 
les  Lydiens  et  Put  combattaient  dans   ton   armée;  ils 


suspendaient  chez  toi  le  casque  et  le  bouclier  et  le 
donnaient  de  la  splendeur,  o  II  peut  très  bien  n'être 
question  que  de  mercenaires  soudoyés  sur  place  pour 
la  défense  dfs  colonies  phéniciennes  où  Tyr,  métropole 
des  nations,  était  encore  chez  elle,  et  alors  rien  de 
plus  naturel  que  les  gens  de  Pût  lui  aient  servi  de  mi- 
lice dans  ses  postes  africains  de  la  mer  Rouge,  pendant 

que  les  Perses  et  les  Lydiens  jouaient  ailleurs  le  mê 

rôle,  tous  contribuant  à  la  gloire  et  à  la  force  de  Tyr. 
Cf.  Knabenbauer.  7»  Ezechielem,  p.  270-271.  —  5°  Ezé- 
chiel, xxxviii.  ô  :  Que  Gog,  roi  de  Magog,  soit  un  per- 
sonnage historique  ou  non.  il  est  ici  une  figure.  Il 
incarne  la  lutte  générale,  et  peut-être  la  grande  el 
suprême  lutte  contre  le  royame  de  Dieu.  Tel  sera  son 
prestige  qu'il  recrutera  ses  partisans  dans  le  monde 
entier.  Afin  de  rendre  -,i  description  plus  saisissante, 
le  prophète  ne  se  contente  pas  de  parler  en  général,  il 
s'accommode  à  l'esprit  de  ses  contemporains  el  il  leur 
cite  des  peuples  aux  noms  et  aux  caractères  connus. 
pour  leur  montrer  que  ces  adversaires  seront  impla- 
cables autant  qu'innombrables.  Il  nous  faut  donc  gar- 
der le  symbole,  mais  en  en  distinguant  la  chose  signi- 
fiée, el  nous  comprendrons  sans  peine  pourquoi  l  - 
nations  africaines  de  luis  el  de  Put  sont  contenues  dans 
cette  énumération  des  contingents  de  l'armée  de  Gog. 
géographie  vivante  au  moment  où  l'auteur  parle,  bien 
qu'elle  ne  doive  plus  l'être  probablement  quand  se 
produiront  les  événements.  Cf.  Knabenbauer,  loc.  cit., 
p.  388-391.  —  En  résume,  de  l'examen  de  nos  textes,  il 
ressort  qu'il  n'j  a  qu'un  peuple  de  Pût  et  qu'il  est 
africain.  Cest  ainsi  d'ailleurs  que  l'avaient  compris  les 

Septante  et  la  Vulgale  puisqu'ils  rendent  toujours  ce 
nom  chez  les  Prophètes  par  Libyens, 

III.  Pût  et  Punt.  —  Où  les  Septante  se  sonl  Iroinpés, 
et,  après  eux,  la  Vulgale,  c'est  en  identifiant  Pùl  avei 
les  Libyens.  Ils  ne  faisaient,  du  reste,  que  suivre  une 
tradition.  Cf.  Josèphe,  1///.  jud.  I.  vi,  2.  Cf.  Pline, 
//.  N.,  v,  13  el  Ptolémée,  IV.  i.  3.  Jusqu'à  notre 
époque  les  interprèles  de  1  Écriture  s'i  n  -eut  lenus  à 
la  tradition  mentionnée  dans  Josèphe  el  plusieurs  s'j 
tiennent  encore.  Cf.  Riehm,  Handivôrterbûch  des  bibl, 
Altertums,  2"  édit.,  t.  n.  p.  1268.  Mais  elle  ne  mérite 
aucune  attention,  car  lés  anciens  Égyptiens  ne  connu- 
rent jamais  la  Mauritanie  marocaine.  I>e  plus.  .Ile  ne 
tient  aucun  compte  de  ce  fait  que  l'Écriture  distingue 
à  plusieurs  reprises  bs  Pùl  des  Libyens  :  Lehabini  el 

Lubini.  Ceii.,  x,  13;  N'ai m.  il;  Ezech.,  xxx,  5.  — 

Pour  justifier  la  traduction  de  Pût  par  Libyes,  quelques 
commentateurs,  cf.  Dillmann,  Genesis,  Ie  édit.,  1882, 
p.  169,  oui  fait  appel  au  mot  sb*.iô.T,  désignant  la  Li- 
bye el  surtout  la  partie  occidentale  du  Delta.  Mais  on 
ne  connaît  pas  encore  en  égyptien  le  correspondant  de 
ce   mot   el  l'on   ne   voil  pas  d'après  quelles  règles  de 

linguistique  il  sérail  représentatif  d'un  teri égyptien 

équivalent  à  l'ùl  el  qui  aurait  inlluencé  les  traducteurs. 
D'autre  pari,  .les  égyplologues  ont  comparé  l'ùl  à  .^ 
qu'ils  lisent  jiflt.  pâte,  «   guerriers  étrangers,  m 
naires  ».  Cette  expression  vient  de  _,  .  padit,  p 
g  arc  ...  en  copie  nrre  au  masculin,  >\>n  au  féminin; 


écrite 


III 

-  uni 


elle  désigne  les  <•  neuf  arcs  i  que  les 
statues  royales  t',.uient  aux  pieds  el  qui  représentent 

les  ennemis  de  l'Egypte.  Liant  donnée  la  lecture  peti, 
pale,  elle  ne  serait  pas  sans  analogie  avec  l'ùl  que  la 
Bible  accule  de  l'épithète  »   maniant   l'arc   ...   Par  suite. 

Put  désignerai!  en  général  tous  les  contingents  étran- 
gers, tant  africains  qu'asiatiques,  à  la  solde  de  l'Egypti 
el  même  d'aulres  nations.  Nous  les  trouvons,  en  effet, 
dans  les  forteresses  du  Delta  oriental.  Papyrus 
/.-m.  m,  6,  lig.  i  ;  7.  lig.  6;  gardant  les  puits  de  la  Pa- 
lestine orientale,  jo.,  v.  11,  lie.  7:  à  Héliopolis,  ib.,l, 
10.  lig.  I  ;  en  Ethiopie,  Papyrus  judiciaire  de  J 


34." 


PHUTH 


:î46 


pi.  v,  lig.  3;  dans  l'armée  fédérale  des  Chélas  se  bat- 
tant contre  Ramsès  II.  Lepsius.  Denkmâler,  Abth.  m, 
163  Cf.  Delatlre,  Lettres  de  Tell  el-Amarna,  7,:  série, 
dans  Proceedings  of  llie  Society  of  Biblical  Archse- 

ology,  t.  xv,  1892-1893,  p.  347-348,  note  de  Wiedmann. 
Allant  plus  loin  comme  au  temps  des  Prophètes  les 
mercenaires  de  l'armée  égyptienne  étaient  surtout  des 
Libyens,  on  pourrait  avancer  qu'il  n'était  pas  dérai- 
sonnable de  rendre  Pût  par  Aî6ueç.  A  cela  il  n'y  a 
qu'une  difficulté,  mais  elle  est  capitale,  c'est  que  la 
lecture  peti,  pale  est  fautive,  comme  le  prouvent  les 
transcriptions  assyriennes  des  Lettres  de  Tell  el- 
Amarna  :  bitati.  a.  72  de  Berlin,  lig.  -27.  pidali,  n.  102, 
verso  lig.  59,  bi-it-ta-ti,  n.  37  du  Brilisli  Muséum, 
lig.  57.  Cf.  Delattre,  loc.  cit.  Or  pidali  et  variantes 
nous  donnent  en  égyptien  pédale,  pedati  qui,  comme 
formation,  ne  concorde  pas  avec  Put.  Cf.  W.  M.  Millier, 
art.  Put,  dans  Cheyne-Black,  Encyclopedia  biblica, 
t.  iv.  col.  177.  Il  est  donc  nécessaire  de  nous  tourner 
ailleurs.  —  Le  premier,  E.  de  Rougé  attira  l'attention 
sur  un  peuple  que  nous  rencontrons  datas  les  docu- 
ments égyptiens  de  toutes  les  époques  :    |  S?±  .T.. 

Puni.  Recherches  sur  les  monuments  qu'on  peut 
attribuer  aux  si.c  premières  dynasties,  1S66,  p.  4-5. 
Il  déduisait  qu'on  pouvait  reconnaître  Phuth  dans  le 
nom  de  Punt.  Cf.  Ebers,  Aegypten  und  die  Bûcher 
Mnse's,  1868,  p.  64;  Brugsch,  Die  allaegyptische  Voel- 
kertafel,  p.  3S,  45,  51,  59,  66,  dans  Ve  Congrès  inter- 
national des  Orientalistes,  Berlin,  1882,  iic  partie, 
l,r  fasc,  section  africaine;   Weisbach-Beng,  Die  Alt- 

ischen  Keilinsehriften,  1893,  p.  36-37;  AV.  M. 
Muller.  Asien  und  Enropa  nach  altâgyptischen  Denk- 

>■»,  1893,  p.  115.  Ce  dernier  auteur,  art.  Put,  loc. 
•  it.,  ajoute  :  «  Les  Égyptiens  prononçaient  le  t.  après», 
avec  un  son  que  les  Grecs  rendirent  par  8  (cf.  <I>oùo 
rendu  constamment,  non  d'après  l'hébreu,  mais  d'après 
li  prononciation  égyptienne),  les  Sémites  par  teth. 
Ainsi  Pût  est  pour  Pu\n)t,  et  cela  très  régulièrement,  n 
L'opinion  d'E.  de  Rongé  est  de  plus  en  plus  générale- 
ment admise  aujourd'hui. 

IV.  Race  de  Punt.  —  Le  portrait  des  indigènes  de 
Punt  nous  a  été  conservé,  entre  autres,  par  le  temple 
«le  lieir  el-Bahari,  Mariette,  Deir  el  Baliari,  1877, 
pi.  5.  13-16;  Naville,  Deir  el-Bahari,  t.  m,  1898, 
pi,  iaix.  lxxiv,  lxxvi  (XVIe  Mémoire  de  VEgypt  Explo- 
ration lund);  par  le  Tombeau  de  Rekhmara,  publié 
par  Pli.  Virey,  dans  Mémoires  de  la  mission  arcliéolo- 
gique  française  au  Caire, t. y,  fasc.  1,1889,  pi.  iv;  par 

constructions  d'Horemheb  à  Karnak  (muraille  est 
de  la  Cour  qui  précède  le  dixième  pylône,  section  com- 
prisi  entre  le  temple  d'Aménopbis  II  et  le  pjlone  lui- 
même;.  Cf.  Xo-Amon,  t.  iv,  col.  1643-  16U.  lig.  445  a.  De 
celte  dernière  représentation  nous  lisons,  Lettre  de 
il.  Boudant  à  M.  Max  Mûller,  dans  Becueil  tles  tro- 
ua relatifs  à  la  philologie  et  à  l'archéologie  égyp- 
tii  fines  et  assyriennes,  t.  xvii,  1895,  p.  41-13  :  e  Le 
mur  iseclion  de  mur  en  question)  se  divise  en  deux 
parties,  séparées  par  une  porte  donnant  à  l'extérieur 
Cour.  La  partie   la   plus  méridionale,  celle,  par 

iquent,  qui  est  soudée  directement  au  pylône, 
portait  an  grand  tableau  représentant  le  roi  amenant 
a  la  triade  thébaine  un  certain  nombre  de  captif-.. . 
Sur  la  partie  du  mur  située  au  delà  de  la  porte,  un  seul 
peuple  est  représenté,  mais  traité  en  ami;  il  n'est  ni 
ùné  ni  même  relié  au  roi  par  la  corde  tradition- 
nelle. C'est  celui  de  Punt,  dont  les  chefs  apportent  l'or, 
la  gomme  et  les  plumes  d'autruche.  Le  type  de  ces 
individus  se  rapproche  assez  du  type  égyptien  pour 
faire  croire  à  une  commune  origine;  dans  tous  les  cas 

hairs  sont  rouges,  on  peut  encore  le  constater,  et 
■ment   n'est  pas  autre  chose  que  celui  des  Égyp- 
tiens. Détail   curieux  à  signaler  :  les  chefs  ne    portent 


pas  l'épitbète  de  **"-  -y/_  [khesi,  «  vils  o)  dont  on  est  si 

prodigue  envers  les  autres.  »  Sur  la  représentation  du 
tombeau  de  Rekhmara,  il  faut  faire  les  mêmes  re- 
marques :  les  gens  de  Punt  viennent  en  amis,  leurs 
traits  sont  ceux  des  Égyptiens,  leurs  produits,  or, 
gommes  résineuses,  œufs  et  plumes  d'autruche,  ivoire, 
arbre  à  encens,  la  bosweïlia  Carteri,  singes  et  guépard, 
«  presque  tout  ce  que  l'on  y  voit  rappelle  l'Afrique 
bien  plus  que  l'Arabie;  et  si  quelques  traits  peuvent 
s'appliquer  à  celte  dernière  contrée,  ils  lui  sont  com- 
muns avec  les  terres  extrêmes  du  continent  africain.  » 
Ilamy,  Etude  sur  les  peintures  ethniques  d'un  tombeau 
lliébain  de  la  XY11P  dynastie,  p.  21,  tirage  à  part  du 
Bulletin  de  la  Société  anthropologique  de  Paris,  t.  x. 
La  représentation  de  Deir  el-Bahari  est  de  toutes  la  plus 
caractéristique,  malgré  ses  mutilations.  Il  s'agit  d'une 
expédition  pacifique  envoyée  à  Punt  par  la  reine  Hat- 
chepsou.  Cf.  Naville,  loc.  cit.,  p.  11-21.  En  substance, 
Naville  observe  que  la  llottille  égyptienne  débarque  sur 
une  terre  africaine.  Les  huttes  des  indigènes,  arrondies 
et  surmontées  d'un  toit  conique,  sont  bâties  sur  pilotis, 
crainte  des  fauves  et  peut-être  de  l'inondation.  Une 
échelle  y  donne  accès.  Elles  ne  diffèrent  point  des 
huttes  qu'on  retrouve  aujourd'hui  dans  l'Afrique  cen- 
trale. La  faune  du  pays  ne  comporte  que  des  espèces 
africaines  :  bœufs  à  cornes  courtes,  bœufs  à  cornes 
longues  et  recourbées,  que  de  nos  jours  encore  on 
exporte  du  Soudan  en  Egypte;  girafes,  chiens  blancs  aux 
longues  oreilles  pendantes,  cynocéphales,  singes  vert-, 
peaux  de  panthère,  hippopotames.  Bien  africains  aussi 
sont  les  arbres  à  encens  ou  à  myrrhe,  les  ébéniers, 
l'or  et  l'antimoine.  Les  habitants  sont  plus  significatifs 
encore.  On  remarque  parmi  eux  trois  types  :  deux 
sortes  de  nègres  et  les  gens  de  Punt  proprement  dits. 
Des  nègres,  les  uns  ont  la  peau  noire,  et  sont  probable- 
ment venus  de  l'intérieur  pour  leur  commerce;  les 
autres  ont  la  peau  bronzée  ou  rougeàtre,  différents  des 
premiers  par  leur  visage  ovale,  leur  nez  lin  et  droit  ou 
d'une  courbe  légère,  leurs  attaches  délicates,  leurs  che- 
veux frisés,  tenant  le  milieu  entre  les  boucles  des 
Arabes  et  la  laine  crépue  des  Noirs,  tous  traits  que 
Deniker,  The  races  of  Mon,  p.  138,  regarde  comme  le 
lot  de  la  race  éthiopienne,  dont  les  Gallas,  avec  leurs 
épaules  larges  et  leur  tronc  en  forme  de  cône  ren- 
versé surdes  hanches  peu  développées, sont  le  meilleur 
spécimen.  Quant  aux  gens  de  Punt,  ils  ont  la  peau 
carminée,  la  taille  élancée  et  bien  prise,  le  nez  aquilin. 
la  barbe  longue  et  terminée  en  pointe,  la  chevelure 
blonde  qui  s'étage  en  petites  mèches  ou  se  divise  en 
nattes  soignées.  Leur  costume  esl  fait  d'un  simple 
pagne.  Si  la  femme  du  chef  est  difforme,  si  la  fille  est 
en  voie  de  le  devenir,  c'est  un  genre  de  beauté  toujours 
apprécié  dans  les  régions  du  Haut-Nil.  Cf.  Speke,  Les 
sources  du  Nil, édition  française,  1865,  p.  183;  Schwein- 
furlli,  Au  cœur  de  l'Afrique,  édition  française,  1875, 
t.  i,  p.  282.  En  tout,  les  gens  de  Punt  apparaissent 
cuiiime  des  Chamites,  appartenant  à  la  race  rouge  dont 
les  Egyptiens  sont  une  autre  branche.  C'est  donc  à  tort 
que  Lepsius,  Kubische  Grammatik,  Einleitung, p. xevi, 
et,  après  lui,  Glaser,  Punt  und  die  sudarabische  Race, 
p.  66,  ont  voulu  en  faire  des  Phéniciens  qui  fondèrent 
plus  tard  la  colonie  de  Carlhage.  On  rapproche  ainsi 
les  noms  :  Puna,  Phuna,  Phoenix  (  t'oiv.;  .  l'uni, Puni. 
.Mais  Puna,  pour  Punt,  est  une  lecture  incorrecte.  En 
outre,  l'adjectif  latin  punicus  est  dérivé  du  nom 
Pœnus,  qui  est  l'équivalent  exact  de  i'oïviÇ.  Or,  entre 
'l'oïviÇ  et  Punt,  il  n'y  a  ni  ressemblance  ni  rapport 
d'aucune  sorte.  La  vocalisation  gréco-romaine  $o£vtxe;- 
Pœni  repousse  toute  équivalence  entre  Vu  ou  plutôt 
le  i«  de  Punt  et  I'm  de  Puni.  Cf.  Ed.  Meyer,  Geschichte 
des  Alterthums,  1884-1902.  t.  i.  p.  210;  Bissing,  Ge- 
schichte Aegyptens  in  Vmriss,  1904,  p.  45. 


347 


P1IUTH 


348 


V.  Le  pays  de  Punt.  —  Il  est  avant  tout  «  les  Échelles 
de  l'encens  ».  khetiou  mm  antiou,  O-**  V    ^k  i    * 

^^  iii'  Naville>  loc-  cit->  P1-  Lxrxrv,  lig.  13,  la 
terre  des  parfums  par  excellence,  ceux  que  les  dieux 
préfèrent  et  qu'à  respirer  les  hommes  éprouvent  une 
joie  céleste.  «  Je  t'ai  donné,  dit  Amon  à  Hatchepsou, 
tout  le  pays  de  Punt,  y  compris  les  terres  des  dieux  de 
la  Terre  divine...  Les  Échelles  de  l'encens,  c'est  en 
vérité  le  lieu  de  mes  délices.  Je  l'ai  créé  pour  (y  trou- 
i ■]■  le  bien  de  mon  cœur,  dans  la  compagnie  de  Moût, 
d'IIathor,  d'Ourrit,  darne  de  Punt.  »  Naville,  loc.  cit., 
lig.  10-13.  Nous  voyons  par  ce  texte  que  Puni  s'appelait 

aussi  la  Terre  divine    |  /y*.  ■  ta  neter.  Punt  et  Taneter 

sont  d'ordinaire  synonymes.  Toutefois  le  second  sem- 
ble  avoir  un  sens  plus  vague  et  plus  étendu  que  le  pre- 
mier et  l'on  comprend  dos  lors  que  parfois  on  le  place 
au  nord  relativement  à  Punt.  Cf.  Maspero,  De  quelques 
navigations  des  Egyptiens,  1878,  p.  6.  Par  delà  Puni 
et  la  Terre  divine  s'étendaient  les  régions  fabuleuses, 
1  lie  des  Doubles,  la  Terre  des  Esprits.  —  De  ce  qui  a 
été  dit,  il  ressort  déjà  que  le  Punt  connu  des  Égyptiens 
était  en  Afrique  et  l'on  a  pu  soupçonner  qu'il  se  trouvait 
à  l'est  du  Nil.  Les  documents  hiéroglyphiques  vont 
nous  permettre  de  préciser  davantage.  «  Je  suis  venu, 
dit  Amon  à  Thoutmès  III,  et  je  t'accorde  d'écraser  la 
terre  d'Orient,  de  fouler  aux  pieds  les  habitants  des 
contrées  divines.  Mariette,  Karnak,  1875,  pi.  xi.  lig.  15. 
De  même  à  Ramsès  III  :  «  Je  tourne  ma  face  vers 
l'Orient...  :  je  le  l'assujettis  en  son  entier...;  je  réunis 
pour  loi  les  produits  de  Punt,  gommes  odorantes,  en- 
cens, cinnamome...,  l'odeur  agréable  en  esl  devant  toi.  » 
Champollion,  Monuments  de  l'Egypte  et  de  la  Nubie, 
Notices  descriptives,  t.  i,  p.  7"27.  Tous  les  malins  le 
soleil  arrivait  de  Punt  chez  les  Mazaiou,  c'est-à-dire 
d'Orient  en  Occident.  Mariette,  Papyrus  de  Boulaq, 
t.  il.  pi.  xi,  p.  2,  lig.  4;  cf.  p.  1,  lig.  4-5.  C'est  donc  bien  à 
l'I  trient  de  l'Egypte  que  se  trouvait  le  pays  de  Puni.  On 
pouvait  s'y  rendre  par  les  routes  de  terre  et  de  mer. 
C'est  par  les  roules  de  terre  que  Hirkhouf,  prince 
d'Éléphanline,  y  parvint  sous  la  VIe  dynastie  et  en  ramena 
un  pygmée,  comme  avait  l'ait  quatre-vingts  ans  plus 
lût  un  autre  fonctionnaire  de  la  Ve  dynastie.  Maspero, 
Histoire  de  l'Orient  classique,  t.  i,  1895,  p.  390-397. 
432-433,  pense  que  c'est  par  les  vallées  qui  s'ouvrent 
vers  la  mer  Rouge  un  peu  avant  la  seconde  cataracte 
que  Hirkhouf  toucha  au  pays  de  Punt.  E.  Schiaparelli, 
Una  tomba  egiziana  inedita  délia  VI»  dinastia,  dans 
Atti  délia  /.'.  Ace.  dei  Lincei,  séria  l»,  t.  x.  1893, 
part.  I',  tfemorie,  p.  22,  estime  que  ce  fut  plus  au 
miiI  encore  que  remonta  Hirkhouf  pour  aller  prendre 
contact  avec  la  Terre  divine,  p.  18-53.  Dans  la  suite,  on 
|,i  h  i-a  la  nulle  île  Coptos  par  l'Ouadi  llammamat,  jus- 
qu'à Qoçéyr  sur  la  mer  Rouge.  De  là,  des  chalands  ayant 
été  construits  sur  place,  on  filait  en  course  le  lon.u  des 
Cotes  vers  le  sud.  un  percevait  les  tributs  des  terres  divi- 
nes, surtout  1  encens  dont  on  avait  besoin  pour  le  culte 
des  dieux.  Ainsi  lit  Ibiunou,  l'ami  unique  de  Sankhara 
Mentouhotep,  le  dernier  roi  de  la  XIe  dynastie.  Lepsius, 
Denkmâler,  Abth.  Il,  pi.  I50a;  Maspero,  loc.  cit.,  p,  194- 
195.  Ainsi  m  un  certain Khentkhétouer,  en  l'an XXVIII 
d'Aménemhal  11  et,  il  consigna  son  heureuse  croisière 
sur  une  stèle  de  l'Ouadi  Gasous.  Erman,  Striai  ans 
i  ddi  Gasûs  bei  Qosêr,  dans  Zeitschrift  fur  àgyplische 
Sprache,  t.  x\;  1882,  p.  203-205.  Ainsi  feront  tous  les 
mis  aux  époqin-s  prospères.  Un  n'oubliera  plus  le 
chemin  de  l'uni  que  plus  lard  rendra  plus  abordable  le 
canal  du  Nil  à  la  mer  Rouge.  Cf.  Maspero,  De  quelques 
talions,  p.  27-32;  .Naville,  The  Store-City  of  l'i- 
thom,  l-  édii.,  1903,  p.  21,  33.  -  Jusqu'à  la  Xli-  dynas- 
tie, il  semble  que  les  Égyptiens  n'aient  connu  de  ce 
pays  que  la  partie  située  a  la  hauteur  de  Souakim  el 


de  Massaouah,  et  pour  cette  époque  seulement  valent 
les  conclusions  documentées  de  Krall,  Studien  zar 
Geschichte  des  allen  Aegxjptens,  IV,  Das  Land  Punt, 
dans  les  Sitzungsberichte  de  l'Académie  impériale  de 
Vienne,  t.  cxxi.  1890.  p.  1-87;  voir  en  particulier, 
p.  21-22.  En  effet,  Maspero.  Notes  sur  linéiques  pointa 
!  degrammaire  et  d'histoire,  dans  Recueil  des  travaux, 
t.  xvii,  1895.  p.  76-78.  a  montré  qu'à  la  XIIe  dynastie 
l'on  croyait  que  le  Nil  débouchait  par  là  dans  la  mer 
Rouge,  vers  l'île  du  roi  des  Serpents,  qui  répondrait  à 
l'île  des  Topazes  des  Anciens,  dans  la  région  moyenne 
du  golfe  Arabique.  Mais  sous  la  XVIII-  dynastie,  la  llot- 
tille  de  la  reine  Hatchepsou  parait  avoir  dépassé  ces 
limites.  Ce  n'est  pas  sur  la  côte  même,  mais  dans  l'es- 
tuaire d'un  fleuve  que  les  Égyptiens  débarquent,  comme 
cela  résulte  de  l'examen  des  représentations  de  Deir  el- 
Bahari.  Parlant  de  ce  fait.  Maspero,  Dr  quelques  navi- 
gations, p.  20-22,  a  cherché  le  point  d'arrivée  de  la 
lloltille  dans  l'une  des  rades  accessibles,  que  signale  le 
Périple  de  la  mer  Erythrée,  S  8-11.  dans  Millier. 
graphi  Grxci  minores,  t.  i,  édit.  Didot.  p.  265-2 
il  a  songea  la  rivière  de  l'Eléphant  dont  l'Ouadi,»  situé 
entre  le  Ras  el-Fil  (cap  Elephas)  et  le  cap  Guardafui, 
parait  avoir  été  assez  considérable  pour  que  des  navires 
d'un  faible  tirant  d'eau  pussent  y  pénétrer  et  même  v 
évoluer  à  leur  aise.  C'était  là,  et  là  seulement,  qu'à 
l'époque  romaine  on  recueillait  la  meilleure  qualité 
d'encens;  c'est  là  probablement  que  les  Égyptiens  d'IIat- 
chopsitou  atterrirent.  Ils  remontèrent  le  fleuve  jusqu'à 
l'endroit  où  le  ilux  et  le  reflux  ne  se  faisaient  plus  sen- 
tir, et  ils  mouillèrent  en  face  d'un  village  épars  sur  la 
rive,  au  milieu  des  sycomores  et  des  palmiers.  His- 
toire de  V Orient  classique,  t.  n.  1897.  p.  245-248  et 
notes.  Ils  auraient  donc  été  en  pleine  cùte  des  Somalis, 
dans  la  région  des  Aromates  des  Anciens.  Cf.  Geograpli. 
Grseci  minores.  Tabulée,  pars  prima,  lab.  mi.  N'avilie 
ne  pense  pas  autrement  que  .Maspero.  Cf.  The  tomb 
of  Hatchopsitû,  Londres.  1900.  p.  26,  27.  30,  31.  Le 
même  auteur,  p.  25,  fait  une  remarque  qui  vaut  d'être 
notée  :  «  .l'estime  une  erreur,  dit-il,  de  considérer  le 
nom  de  Punt  comme  s'appliquant  à  un  territoire  aux 

limites  définies,   s, ni  à  un  État  ou  rovai soit    a   un 

groupe  d'États.  C'était  une  vague  appellali.  n  géogi 
phique  embrassant  un  pays  d'une  vaste  étendue,  le  res- 
sort de  plusieurs  nations  de  races  diverses,  sans  aucun 
lien  entre  elles.  »  11  juge  même,  loc.  cit.,  p.  26,  que 
l'appellation  s'étendait  à  la  cùte  Arabique  de  la  mer 
Rouge.  Aux  gens  de  Punt  vivaient  plus  ou  moins  mê- 
lées les  tribus  chamiliques  du  désert,  celles  princi- 
palement qu'on  appela  plus  tard  1rs  Troglodytes  et 
les  Ichtyophages  (les  Ababdéhs  et  les  Bicharis  de  nos 
jours),  les  Bedjas  qu'un  dil  les  descendants  des  Ble- 

ir.ves.    les    Sahos   et    les  Afars  de  la    Côte  Abyssin 
Somalis    et    les    G   Mas.    plus    avancés    dans    les  tel 

touchant  même  au  Nil  et  occupant  les  vallées  de  l'esl 
à  la  hauteur  de  la  deuxième  cataracte,  disséminés  vrai- 
semblablement jusqu'à  l'Atbara,  étaient  contigus  au  pays 
de  Punt  les  Mazaiou  qui  fournirent  d<-  tout  temps  à 
l'Egypte  de  solides  el  nombreux  contingents  el  dont  le 
nom  finit  par  devenir  synonyme  de  soldais.  Cf.  le  copie 
Ai*aoi.  Le  nom  de  Punt  couvrit  vaguement  touti  - 
régions.  C'est  pourquoi,  sous  le  nom  de  Pnt-1'unl.  les 
Prophètes  purent  désigner  les  mercenaires  que  plu- 
sieursde  ces  contrées  envoyaient  à  l'Egypte.  —  D'autre 
part,  les  Égyptiens  ne  connaissaient  de  Punt  que  quel- 
ques points,  surtout  les  stations  côtières  qui  étaient  des 
entrepots  pour  les  produits  de  l'intérieur.  Sur  cet  inté- 
rieur, ils  n'avaient  que  de  vagues  idées,  et  l'on  s. -\- 
plique  que  d'après  leurs  données  obscures  les  savants 
aient  d'abord  divergé  beaucoup  dans  la  manière  <! 
tuer  la  Terre  divine,  qu'ils  l'ai, -ni  même  étendue  à  la  côte 
asiatique  de  la  mer  Rouge,  à  l'Vémen  el  a  l'Hadramaut 
Pour  la  bibliographie  des  opinions  diverses  ou  succès- 


349 


PHUTH    —    PHYLACTERES 


350 


sives  sur  ce  sujet,  voir  Maspero,  loc.  cit.,  p.  2i7.  note  3. 
Nous  devons  retenir  une  chose  surtout,  c'est  que  les  gens 
de  l'unt  étaient  de  purs  Africains,  qu'entre  eux  et  les 
Égyptiens  il  n'y  eut  jamais  que  des  rapports  amicaux. 
C'est  en  volontaires  qu'ils  livrent  leurs  tributs  aux 
envoyés  de  Pharaon  ou  qu'ils  les  apportent  en  Egypte. 
Les  Egyptiens,  de  leur  côté,  les  traitent  en  frères  plus 
qu'en  alliés  et  écrivent  d'ordinaire  le  nom  de  Punt 
sans  le  déterminatif  des  peuples  étrangers.  Pour  eux, 
Bès,  Hathor,  et  d'autres  dieux  de  la  vallée  du  Nil  étaient 
originaires  de  Punt.  Tout  sembledonc  indiquer  qu'entre 
les  Égyptiens  et  les  gens  de  Punt  il  y  avait  des  affini- 
tés de  sang  et  comme  le  souvenir  d'un  habitat  com- 
mun :  c'était  apparemment  les  deux  branches  d'un 
même  tronc.  F.t  l'on  est  en  droit  de  penser  que  les 
habitants  de  Punt  ne  sont  qu'une  portion  des  conqué- 
rants venus  primitivement  de  l'Orient  vers  l'Egypte. 
Cette  portion  s'arrêta  en  route,  se  lixa  sur  la  côte  afri- 
caine de  la  mer  Rouge,  la  dépassa  même  et  s'enfonça 
plus  ou  moins  dans  l'intérieur,  pendant  que  la  grande 
masse  des  immigrants,  suivant  l'Ouadi  Hammamat, abor- 
dait par  infiltrations  successives  à  Coptos  où  Pétrie  a  mis 
au  jour  les  statues  du  dieu  Min  qu'il  regarde  comme 
les  plus  anciens  monuments  dynastiques,  Coptos,  1896, 
p.  7.  9,  et  s'établissait  dans  les  environs  d'Abydos  où  se 
trouvent  les  tombes  des  premiers  rois.  Cf.  J.  Capart,  Les 
débuts  de  l'art  en  Egypte,  1904,  p.  '278-280.  Naville,  La 
religion  dee  anciens  Egyptiens,  1906,  p.  9-12,  pense  que 
les  immigrants  suivirent  une  route  plus  méridionale. 

Pour  récapituler,  les  textes  de  l'Écriture  pris  dans 
leur  ensemble  nous  obligent  à  situer  en  Afrique  le 
peuple  de  Phuth-Pùt.  Or,  précisément,  les  textes  hié- 
roglyphiques nous  donnent  le  nom  d'un  peuple  et  d'un 
l'unt,  qui  est  l'équivalent  exact  de  Put.  Ce  peuple 
de  l'unt,  d'après  les  produits  de  son  sol  et  ses  caractères 
ethnographiques  est  purement  africain,  mais  africain 
étroitement  apparenté  aux  Égyptiens  avec  lesquels  il. est 
en  rapports  d'amitié  constants.  Il  couvre  de  son  nom 
tout  un  groupe  de  tribus,  chamitiques  comme  lui, 
qui  lui  sont  mêlées  ou  contiguës,  s'étendent  dans  la 
partie  orientale  du  Nil.  au-dessus  de  la  première  ca 
i  tracte  jusque  vers  l'Atbara.  pépinière  de  soldats  pour 
l'Egypte.  Quant  à  lui,  il  habite  principalement  les 
côtes  de  l'Etbaye,  de  l'Abyssinie,  des  Somalis,  pénètre 
même  les  Gallas,  faisant  le  commerce  de  ses  produits 
et  servant  d'intermédiaire  pour  les  produits  de  l'inté- 
rieur. Il  marque  probablement,  à  l'origine,  la  dernière 
station  des  futurs  conquérants  de  la  vallée  du  Nil  dont 
il  se  détacha  pour  se  ttxer  aux  Echelles  de  l'encens. 

C.  Lagier. 

PHUT1EL  (hébreu  :  Pùlicl;  Septante  :  $outit|X), 
père  de  la  femme  du  grand-prêtre  Éléazar,  (ils  d'Aaron 
et  grand-père  de  Phinées.  Exod.,  vi,  25.  Voir  Puînées  1, 
col.  319. 

PHYGELLE  (grec  :  *ÛYeUoç,  «  fugitif  [?]  •>),  chré- 
tien d'Asie  qui.  se  trouvant  à  Rome  pendant  que  saint 
Paul  y  était  prisonnier,  l'abandonna,  de  même  qu'Her- 
mogène.  11  Tim.,  i,  1">.  Nous  ne  savons  pas  en  quoi 
consista  l'abandon  de  Phygelle,  s'il  refusa  simplement 
de  \  nir  en  aide  à  saint  Paul  ou  s'il  aila  jusqu'à  l'apos- 
tasie. Voir  Heruooène,  t.  m,  col.  633.  Ce  qu'ont  dit  les 
anciens  a  son  sujet,  et  en  particulier  l'Ambrosiaster,  In 
Tim.,  i,  15,  t.  xvn,  col.  487,  est  purement  conjectural. 

PHYLACTÈRES  (grec  :  çw.ax-r.pta;  Vulgate  : 
phyUwteria),  inscriptions  que  les  Juifs  portaient  à 
leur  front,  au  bras  ou  à  la  main. 

i.  Lti  R  origine.  —  1°  Dans  quatre  passages  du  Pen- 
tateuque,  Exod.,  xm,  9, 16;  Deut.,  VI, 8;  xi,  18,  le  légis- 
I c.'eur,  pour  inculquer  aux  Israélites  la  nécessité  de 
l'obéissance  aux  préceptes  divins,  dit  que  ces  préceptes 
doivent  être  pour  eux    ù(,  uïjiieïov,  signum,  un  signe 


dans  la  main,  un  zikkarùn,  «  mémorial.  ■■  ou  des  tôtdfôt 
devant  les  yeux.  Le  sens  du  mot  tôtdfôt  n'est  pas  bien  dé- 
terminé; on  ignore  de  quel  radical  il  provient.  Cf.  Buhl, 
(îesenius'  Handwôrterb.,p.  295.  Les  Septante  le  tradui- 
sent par  àsâXsuTOv,  «  quelque  chose  de  tixe,  •>  la  Vulgate 
par  appensum  cjuid,  «  quelque  chose  de  suspendu,  »  et 
par  les  verbes  movebuntur,  «  seront  agités,  »  coltocate, 
«  placez.  »  La  signification  de  tôtdfôt  est  vraisemblable- 
ment analogue  à  celle  de  vt.  Il  s'agit  de  part  et  d'autre 
d'un  signe,  d'un  mémorial,  d'un  zikkdrôn,  u,vï|[i.d(Tuvov, 
monumenlum,  objet  destiné  à  rappeler  une  idée,  comme 
il  est  dit  dans  le  premier  de  ces  textes.  Exod.,  xm,  9.  — 
2°  Les  Juifs  de  l'époque  évangélique  pensaient  que  les 
recommandations  du  législateur  devaient  se  prendre 
dans  le  sens  le  plus  littéral.  En  conséquence,  ils  écri- 
vaient les  passages  indiqués  par  le  législateur  et  se  les 
mettaient  sur  le  front  et  dans  la  main,  au  moins  pen- 
dant la  prière.  Il  est  à  croire  que  cette  pratique,  basée 
sur  l'interprétation  servile  du  texte  sacré,  n'entra  en 
vigueur  qu'après  la  captivité,  quand  le  formalisme  pha- 
risien commença  à  exercer  son  influence  et  à  substi- 
tuer peu  à  peu  la  lettre  de  la  loi  à  son  esprit,  les  tra- 
ditions humaines  aux  prescriptions  divines.  On  a  un 
exemple  analogue  d'interprétation  dans  la  inezuza.  Voir 
Me/.uza,  t.  iv,  col.  1057.  Du  temps  de  Notre-Seigneur, 
les  tôtdfôt  étaient  en  honneur  sous  le  nom  de  «  phv- 
lactères  ».  Le  divin  Maître  en  parle  sans  en  réprouver 
l'usage,  mais  seulement  pour  en  blâmer  l'abus.  Josèphe, 
An  t.  jud.,  IV,  vin,  13,  les  mentionne  sans  leur  donner 
de  nom;  il  dit  seulement  que  les  Israélites  écrivent  et 
portent  sur  leur  front  et  leur  bras  ce  qui  rappelle  la 
puissance  de  Dieu  et  sa  bonté  envers  eux.  Saint  Justin, 
Dial.  cum  Tnjpli.,  46,  t.  vi,  col.  576,  reconnaît  dans 
cet  usage  une  prescription  de  la  Loi.  Un  certain  nom- 
bre d'auteurs,  anciens  ou  modernes,  sont  du  même 
avis;  la  Loi,  selon  eux,  prescrivait  réellement  de  porter 
par  écrit,  sur  le  front  et  à  la  main,  plusieurs  de  ses 
préceptes.  Roseninùller,  In  Exod.,  Leipzig,  1795,  p.  471, 
dit  que  Dieu  commanda  cette  pratique  aux  Israélites 
alin  de  faire  tourner  au  profit  de  la  Loi  le  penchant 
qu'ils  avaient  pour  les  amulettes,  à  l'exemple  de  tous 
les  peuples  anciens.  Il  est  probable  que  l'interpréta- 
tion littérale  des  recommandations  sur  les  tôtdfôt  s'ins- 
pira de  la  loi  très  positive  qui  concerne  le  sisit.  Voir 
Frange,  t.  n,  col.  2394.  On  crut  que  les  'ôf  et  les  tôtd- 
fôt devaient  être  des  objets  matériels,  comme  les  fran- 
ges. —  3°  Il  n'est  pas  possible  cependant  de  faire  re- 
monter l'usage  des  phylactères  au  delà  des  siècles  qui 
précèdent  immédiatement  l'ère  chrétienne.  Cf.  Frz.  De- 
litzsch,  dans  le  Handwôrterb.  des  bibl.  Attert.  de 
Riehm,  t.  i,  p.  310.  Parmi  les  Juifs  eux-mêmes,  les 
Caraïtes  ne  les  admettaient  pas,  convaincus  que  les 
textes  allégués  devaient  s'entendre  dans  le  sens  figuré. 
Saint  Jérôme,  Ep.  m,  13,  t.  xxn,  col.  537;  In  Matth., 
iv,  23,  t.  xxvi,  col.  168,  tout  en  affirmant  par  erreur  que 
c'était  le  Décalogue  que  l'on  écrivait  sur  les  phylactères, 
dit  que  les  pharisiens  interprétaient  mal  la  Loi  et  qu'il 
s'agissait  de  la  porter  dans  le  cœur  et  non  extérieure- 
ment. De  fait,  dans  les  temps  antérieurs  à  la  captivité, 
on  ne  trouve  aucune  trace  de  l'usage  des  phylactères. 
Saint  Matthieu  est  le  premier  à  en  faire  mention,  sans 
cependant  les  supposer  récents.  Il  est  certain  que  si 
l'auteur  sacré  avait  voulu  que  ses  paroles  fussent  en- 
tendues dans  un  sens  matériel,  il  s'en  serait  expliqué 
plus  nettement,  comme  il  le  fait  quand  il  s'agit  de 
prescriptions  de  ce  genre,  à  propos  des  franges,  par 
exemple.  Pour  dire  qu'il  ne  faudra  jamais  oublier  les 
commandements  divins,  le  législateur  ajoute  :  «  Tu  les 
inculqueras  à  tes  enfants,  tu  en  parleras  quand  tu  seras 
dans  ta  maison,  quand  tu  iras  en  voyage,  quand  tu  te 
coucheras  et  quand  tu  te  lèveras.  •>  Deut..  VI,  7.  Ces 
recommandations  n'ont  pas  été  prises,  et  avec  raison, 
selon  la  rigueur  de  la  lettre.  Pourquoi  celles  qui  sui- 


351 


PHYLACTERES 


35'2 


vent,  el  qui  se  rapportent  aux  tôtâfôt,  auraient-elles  dû 
l'être?  Bon  nombre  d'expressions  équivalentes  se  ren- 
contrent d'ailleurs  dans  les  Livres  sacrés,  «ans  qu'on 
ait  songé  à  leur  donner  une  interprétation  matérielle. 
Il  esl  dit.  par  exemple,  qu'il  faut  o  attacher  à  son  cou  » 
la  miséricorde  cl  la  \érité,  l'rov.,  ni,  3,  ainsi  que  l'en- 
seignement du  père  et  de  la  mère,  «  lier  sur  ses  doigls 
et  écrire  sur  la  table  de  son  cœur  »  les  leçons  du  sage, 
l'rov..  vu,  3,  etc.:  cf.  Cant.,  VIII,  6.  Ces  expressions 
figurées  ont  toujours  été  comprises  dans  le  sens  d'une 
grande  attention,  d'un  soin  vigilant,  pour  ne  rien  ou- 
ïe r  de  ce  qu'il  faut  retenir  et  pratiquer.  Les  anciens 
Hébreux  entendaient  de  même  les  recommandations 
relatives  à  la  Loi. 

II.  La  pratique  juive.  —  1°  Les  tôtâfôt  prennent, 
dans  l'Evangile,  le  nom  de  fjXaxTTipia.  Matth.,  xxni. 
6.  Le  mot  pu^axT^piov  vient  de  çuXâcseiv,  «  garder.  » 
et  signifie  «  moyen  de  garder,  préservatif,  amulette  ». 
Lien    que   le   verbe   sulâo-aeiv  ait  quelquefois    le   sens 


78.  —  Phylactère  pour  la  tète.  D'après  L.  Cl.  Fillion,  Atlas 
archéologique  de  ta  Bible,2'  édit.,pl.  crx. 

observer  une  loi  »,  cf.  Bailly,  D'ut.  gr.  franc., 
p.  -ilui.  ce  sens  n'a  poinl  passé  au  substantif  el  il 
n'est  pas  probable  que  l'évangéliste  ou  son  traducteur 
le  lui  .lie ut  prêté,  contrairement  à  l'usage  de  la  langue 
recque.  D'ailleurs,  le  Targum  sur  Cant.,  vin,  3,  voii 
dans  les  phylactères  des  amulettes  contre  les  démons. 
Voir  Ami  l.i.rn;,  t.  I,  col.  531.  Il  est  donc  à  croire  qu'a 
l'époque  évangélique  le  mol  tôtâfôt  avait  pris  ce  sens. 
On  ne  peul  être  étonné  que  tes  pharisiens  aient  re- 
gardé le  l'oit  des  phylactères  comme  l'expression  par- 
faite de  l'accomplissement  de  la  Loi  et  comme  un 
préservatif  assuré  contre  les  malédictions  qui  mena- 
çaient ses  transgresseurs.  Les  rabbins  ont  substitué 
au  terme  hébreu  celui  de  te/illin.  qui  vient  de  tt'filhih, 

prière,  i  pane  que  les  phylactères  se  portaient  pen- 
dant la  prière  el  qu'ils  constituaient  eux-mêmes  une 
orte  de  prière. 

•2°  Les  Juifs  attachaient  la  plus  grande  importance 
aux  phylactères.  Il  en  esl  que-non  dan-  quinze  des 
traités  de  la  Mischna,  cf.  Berachoth,  m.  I.  '■'<:  Sckab- 
bath,  VI,  '2;  vin,  3;  xvi.  I.  etc..  et  dans  plusieurs 
l  argums.  1 H  petit  traité  talmudique  intitulé  Massecheth 
Tephillin  ou    simplement   Tephillin,  résume  tout  ce 


que  les  docteurs  ont  décidé  sur  le  sujet.  Maimonide 
s'en  occupe  dans  Hilchoth  Tephillin.  On  avait  réglé 
jusque  dans  les  détails  les  plus  minutieux  ce  qui  con- 
cerne les  Tephillin.  On  en  distinguait  de  deux  sortes, 
la  te/illali  srl  r'oi,  ou  phylactère  pour  la  tête  (fig.  78 
et  la  tefillàh  Sel  xjàd,  phylactère  pour  la  main,  cf.  Me- 
nacholh,  iv.  1,  ou  Sel  zerôd,  pour  le  bras  (lig.  79 
el  80),  cf.  Mihvaolh,  \.  3.  La  tefillàh  du  front  se 
composait  d'une  petite  cassette  de  basane,  divisée  en 
quatre  compartiments,  dans  chacun  desquels  on  enfer- 
mait l'un  des  quatre  passages  prescrits,  soigneusement 
écrits  sur  parchemin.   La   cassette,    appliquée  sur   le 


T'a.  -  -  Phylactère  pour  le  bras.  D'après  K        i  sedia 

ofSiblical  Literature,  1866,  t.  ni.  Dg.  183. 

front,  1  était  retenue  par  deux  courroies  qui  se  nouaient 
derrière  la  tête  et  venaient  retomber  sur  la  poitrine 
par-dessus  les  épaules.  La  tefillàh  de  la  main  ou  du 
bras  «e  composait  également  d'une  cas-'  Ile  île  basane. 
mais  a  un  seul  compartiment  dans  lequel  un  même 
parchemin    portait    écrits    les   quatre    passages    sa,  i 

La  cassette  devait,  selon  les  pharisiens,  s'attacher  au 
Lias  gauche  par  des  courroies  qui  s'enroulaient  ensuite 
autour  de  l'avant-bras,  de  la  main  el  des  trois  doigts 
du  milieu.  Les  sadducéens  se  contentaient  de  l'attacher 
à  la  main  gauche,  interprétant  ainsi  le  texte  plus  litté- 
ralement. Les  quatre  passage-  à  écrire  sur  les  parche 


hc~~ 


i> 


sa.       liras  avec  |  hj  lai  t(  re.  D'apn  s  Kit 

mins  étaient  les  suivants  :  Exod.,   XIII,    1-10,  sur  la  fêle 
ils  Azymes;  Exod.,  khi.  Il  Lé  sur  la  consécratioi 
premiers-nés  à  Jéhovah;  Deut.,  m.  1-9,  suc  les  com- 
mandements et   principalement  L-  premier;  Deut.,  m. 

13-21,    sur  les  promesses  cl    les    ou  II  na  s  ,|,.    Dieu  au    SU- 

jel  de  l'observation  ou  de  la  transgression  de  la  Loi. 
Com n  le  voit,  les  deux  derniers  passages  conte-1 

liaient  seuls  îles  prescriptions  d'un  usage  quotidien,  et 
I  .m  csi  en  di'oil  de  Iroincr  quelque  peu  singulière  une 

interprétation  en  vertu  de  laquelle  on  étail  censé  avoir 
devant  les  yeux  el  dans  la  main  des  préceptes  donl  le 
texte,  écrit  sur  parchemin,  étail  soigueusemenl  en- 
fermé dans  fies  cassettes,  du  avait  autant  de  \én,  , 
pour  les  Tephillin  que  pour  la  Sainte  Écriture,  cf.  Ya- 
dayim,  m.  lî.  et  l'on  était  autorisé  a  les  arracher  à  un 


353 


PHYLACTÈRES    —    PIED 


354 


incendie,   le  jour  du   sabbat,   an   même  litre   que  les 
écrits  sacrés.  Cf.  Schabbatb,  XVI,  1. 

o"  On  prenait  les  phylactères  pour  la  prière  quoti- 
dienne,  composée  des  trois  passages  bibliques.  Dent., 
VI,  1-9;  xi,  13-21,  et  Xiim.,  xv,  37-41.  Les  hommes 
seuls  y  étaient  obligés;  il  n'est  pas  prouvé  cependant 
qui'  cille  obligation  ait  été  regardée  comme  stricte. 
Rien  ne  donne  à  penser  que  Xotre-Seigneur  se  soit 
jamais  servi  des  phylactères,  qu'il  mettait  sans  nul 
doute  au  rang  des  institutions  humaines,  et  cependant 
les  pharisiens,  qui  lui  reprochèrent  tant  de  choses,  ne 
paraissent  pas  l'avoir  blâmé  de  celte  abstention.  Sans 
3  être  tenues,  les  femmes  pouvaient  les  porter.  (In  ne 
les  prenait  pas  les  jours  de  sabbat  ou  de  fêle,  parce  que 
ces  jours  rappelaient  suffisamment  par  eux-mêmes  le 
souvenir  de  la  loi  du  Seigneur.  Cf.  Midr.  Mechilta,iT, 
2.  <  > i •  s'en  abstenait  aussi  le  premier  jour  d'un  deuil. 
Un  homme  qui  portait  des  léphillim  ne  devait  pas 
s'approcher  à  plus  de  quatre  coudées  d'une  sépulture. 
11  fallait  se  servir  des  deux  mains,  autant  que  possible 
pour  écrire  les  textes  qu'ils  contenaient.  Ces  textes 
devaient  toujours,  même  à  l'étranger,  être  écrits  en 
hébreu.  Cf.  Megilla,  i,  8. 

4°  Malgré  le  soin  avec  lequel  les  docteurs  avaient 
réglé  tout  ce  qui  se  rapportait  aux  phylactères,  rien 
n'était  déterminé,  quant  à  la  dimension"  des  cassettes 
et  des  courroies.  Aussi  les  pharisiens,  toujours  portés 
à  exagérer  les  marques  extérieures  de  religion,  élargis- 
saient-ils .i  plaisir  les  cassettes  et  les  courroies  de  leurs 
tépbillim,  comme  pour  faire  entendre  que  la  Loi  tenait 
une  aussi  large  place  dans  leur  pensée  et  dans  leur 
conduite  que  ses  signes  extérieurs  en  tenaient  sur  leur 
front  et  dans  leurs  mains.  En  réalité,  ils  agissaienl 
ainsi  ii  pour  être  vus  des  hommes  »,  et.  en  dépil  de 
cette  ostentation  de  piété,  c  ils  négligeaient  les  points 
les  plus  graves  de  la  Loi,  la  justice,  la  miséricorde  et 
la  bonne  foi  »,  c'est-à-dire  précisément  les  grands 
devoirs  rappelés  dans  les  inscriptions  des  phylactères. 
C'est  ce  que  Notre-Seigneur  leur  reproche  sévèrement. 
Matth.,  xxin,  5,  23.  Il  ne  dit  rien  pourtant  de  l'usage 
même  des  phylactères,  le  jugeant  sans  doute  inoffensif, 
quand  on  évitait  d'en  faire  parade  ou  d'y  attacher  une 
valeur  superstitieuse. 

.".'  Saint  Jérôme,  In  Matth.,  iv,  23,  t.  xxvi.  col.  168, 
atteste  que,  de  son  temps,  les  Juifs  des  Indes,  de  Perse 
il  de  Babylonie  se  servaient  encore  de  phylactères 
pour  se  donn  i  aux  yeux  du  peuple  un  air  de  piété,  de 
ii  ême  qu'ils  fixaient  des  épines  à  leurs  franges,  pour 
faire  croire  qu'en  les  piquant,  ces  épines  leur  rappe- 
laient la  Loi.  11  donne  aux  inscriptions  des  phylactères 
le  nom  de  pictatiola  ou  pitlatiola,  de  -i-icr/.iov, 
«  feuille  de  tablette  »,  et  il  reproche  à  des  femmes  su- 
perstitieuses d'imiter  les  pharisiens,  en  portant  sur 
elles  de  petits  évangiles  en  guise  d'amulettes.  Sur  ce 
genre  de  phylactères,  voir  AMULETTES,  dans  le  Dict 
d'arch.  chrct.,  I.  /,  col.  1788.  Ils  furent  prohibés  par 
le  synode  de  Laodicée,  can.  30.  Cf.  Hefele,  Hist.  des 
conciles,  trad.  nouvelle.  Paris.  1907,  I.  i,  p.  lofs 

Sur  les  phylactères juife,  voir  Ugolini,  Oe  phylaeteriis 
Hebrœorum,  dans  le  Thésaurus,  t.  xxi;  Spencer  De 
gm.  Phylacteriorum,  dans  le  De  leg  Ue- 
brxot:  ritual.,  Tubingue,  1432,  p.  1201-1232;  Reland 
Intiquiiates  hebraicse,  Brème,  1741,  p.  5W-..V7;  sèl.ii- 
rer.  Geschichte  des  jUd.  Volkes  ini  Zeit.  J.  C  Leinzie 
t.  11,1898,  p.  48^486.  H.  Lesêtbe  P   S' 

PIANCJAN!  Jean-Baptiste,  savant  jésuite  italien,  né 
a  Spoleteje  27  octobre  1784,  morl  le  23  mars  1862  II 
I"""  mde  réputation  les  sciences  physiques 

et    mathématiques  au  Collège  romain.   Son  ouvrage  lu 
"""   creationis  mosaicam  commentai™,  paru  à 
«apli       en     1851,    in-8»,    a    été    réimprimé,    d'abord    à 
Louvain,  en  L853,  puis  à  Paris,  1861.    P.  Bliard, 

du  r.   DE   U   BIBLE. 


PIED  (hébreu  :  régél;  Septante  :  jroûç;  Vulgate  : 
pes),  organe  s'articulant  à  l'extrémité  de  la  jambe  de 
l'homme  et  posant  à  terre  pour  supporter  le  corps  à 
l'état  de  station  ou  de  marche. 

I.  .4«  sens  propre.  —  1»  Se  tenir  sur  ses  pieds,  c'est 
être  valide  et  vivant,  IV  Reg.,  xill,  21;  Ezech.,  xxxvn, 
10;  Zach.,  xiv,  12;  I  Mach.,  x,  72;  Act.,  xiv,  9;  xxvi, 
lfi:  Apoc,  xi,  11.  —  Les  pieds  peuvent  êtreatteints  de 
différents  maux,  la  fracture,  qui  rendait  inhabile  au 
sacerdoce,  Lev.,  xxi,  19;  la  difformité,  II  Reg.,  îv,  4; 
IX,  3,  13;  la  claudication,  Act..  xiv.  7,  etc.  Chez  les 
anciens,  un  pied  votif  placé  dans  un  sanctuaire  indi- 
quait que  l'on  avait  été'  guéri.  Un  pied  votif  en  marbre 
blanc,  mais  mutilé,  a  été  trouvé  à  Jérusalem,  dans  la 
fontaine  Probalique.  Il  est  aujourd'hui  au  musée  ju- 
daïque du  Louvre.  Voir  t.  i,  lig.  526,  col.  1731.  —  Les 
pieds  du  Messie  durent   être    percés.   Ps.   xxn    (xxi), 


81.  —  Fellah  conduisant  avec  le  pied  l'eau  d'arrosage  d'un 
jardin  dans  la  Haute  Egypte.  —  D'après  une  photographie 
prise  à  M Ii  et  envoyée  par  le  R.  P.  Jullien,  S.  J. 

17;  Luc,  xxiv,  39,  40.  —  A  la  guerre,  on  coupait  les 
pieds  et  les  mains  des  ennemis  vaincus.  II  Reg., 
iv,  12;  II  Mach.,  vu,  4.  —  On  liait  les  pieds  et  les 
mains  de  ceux  qu'on  voulait  réduire  à  l'impuissance. 
Dan.,  m,  20;  Matth.,  xxn,  13;  Joa.,  xi,  44.  —  Le 
vainqueur  niellait  le  pied  sur  le  cou  du  vaincu,  pour 
marquer  sa  domination  et  comme  pour  l'écraser.  ,Ios., 
x,  24;  Lam,,  m,  34;  Rom.,  xvi,  20  (voir  t.  i,  fig.  35, 
col.  227 1.  Les  êtres  inférieurs  servent  d'escabeau  aux 
pieds  du  supérieur,  particulièrement  de  Pieu.  Voir 
Escabeau,  t.  n,  col.  1912.  Cf.  Apoc.  xn,  I.  -  2°  On 
embrassait  les  pieds  de  quelqu'un  en  manière  de  sup- 
plication ou   de  vénération.    IV   Reg.,   iv,  27;   Matth., 

XXVIII,  9;  Luc,  vu,  38.  —  On  faisait  des  onctions  sur 
les  pieds  du  grand-prèlre,  pour   les   consacrer.  Exod., 

XXIX,  20;  Lev.,  vin,  23,  et  sur  ceux  du  lépreux,  pour 
lui  rendre  le  droit  à  la  Me  s, iei.de.  Lev.,  xiv,  14.  Voir 
Onction,  I.  iv.  col.  1806.  -  3'  II  est  souvent  question 
de  laver  les  pieds.  Exod.,  XXX,  19,  etc.  Voir  LAVEMENT 
DES  Pinns,  I.  iv.  col.  132.  Il  fallait  avoir  les  pieds  chaus- 
sés pour  manger  la  Pàque,  Exod.,  xn,  11,  et  les  pieds 
nus  dans  un  endroit  consacré' par  la  présence  de  Dieu. 
Lxod.,  m,  5;  ,Ios.,  v,  16,  etc.  Les  prêtres  servaient 
pieds  nus  dans  le  Temple.  Cf.  Middoth,  i.  G;  Schab- 
bath,  i,  11.  Voir  t.  iv.  co!.  910.  -  V.n  cerlaines  circon- 

V.   -     12 


355 


PIED    —    PIERRE    (SAINT) 


356 


stnnces,  on  secouait  la  poussière  de  ses  pieds.  Matlh., 
x,  14;  Luc,  x,  11,  etc.  Voir  PoDSSiÉBE.  En  Egypte,  on 
dirige  aujourd'hui  avec  une  binette  l'eau  dans  les 
rigoles,  mais  autrefois  on  se  servait  aussi  des  pieds. 
Deut.,  xi.  lu  dig.  81).  Voir  Irrigation,  t.  m,  col.  927- 
929.  —  Au  désert,  par  suite  de  la  protection  divine,  les 
pieds  des  Israélites  ne  s'enflèrent  pas.  malgré  la  durée 
du  voyage.  Deut.,  VIII,  4.  —  Sur  Exod.,  iv,  25,  voir 
t.  iv,  col!  I  195. 

II.  Au  sens  figuré.  —  1°  Être  assis  aux  pieds  de 
quelqu'un,  c'est  être  placé  sous  sa  dépendance  ou  sa 
protection.  Deut.,  xxxm,  3;  Rutli,  m,  8.  —  Se  jeter 
aux  pieds  d'un  autre,  c'est  s'adresser  à  lui  en  humble 
esclave  ou  en  suppliant.  I  Reg.,  xxv,  21;  IV  Reg  .  i\. 
37;  Judith,  xm,  20;  Esth.,  vin,  3;  Marc,  v,  22;  vil, 
25;  Luc,  vin,  41,  47;  xvn,  16;  Joa.,  xi,  32;  Act.,  XVI. 
29,  etc.  Voir  t.  i,  (ig.  37,  col.  236;  t.  n,  iig.  541, 
col.  1637.  —  Raiser  les  traces  des  pieds  de  quelqu'un, 
Is.,  lx,  14;  Esth.,  xm,  13,  ou  lécher  la  poussière  de 
ses  pieds,  Is.,  xlix,  23,  c'est  lui  témoigner  soumission 
et  respect.  —  Mettre  sous  les  pieds  de  quelqu'un,  c'est 
placer  sous  sa  domination.  III  Reg.,  v,  3;  Ps.  vm,  8; 
cx(cix),  I  :  Eph.,  i.  22;  Hehr.,  n,8.  —  2»  Tremper  ses  pieds 
dans  l'huile,  Deut.,  xxxm,  21,  ou  dans  le  beurre, 
Job,  xxix,  6,  c'est  posséder  en  abondance  les  biens  de 
la  terre.  Les  tremper  dans  le  sang,  Ps.  lxviii 
(i.xvn),  24,  c'est  triompher  de  ses  ennemis.  —  Job, 
\\i\.  15,  dit  qu'il  a  été  le  pied  du  boiteux,  pour 
indiquer  qu'il  a  exercé  la  charité  envers  les  malheu- 
reux, quelle  que  fût  leur  infirmité.  —  3°  Les  pieds  qui 
trébuchent,  Deut.,  xxxn,  35,  qui  errent,  IV  Reg.,  xxi. 
S;  Il  Par.,  xxxm,  8,  signifient  l'épreuve  ot  le  malheur; 
les  pieds  menacés  ou  saisis  par  les  lacets  supposent  la 
persécution.  Ps.  îx,  16;  xxv  (xxiv),  15;  i.vii  (lui,  7; 
CV  (civ),  18;  Jer.,  xvm,  22;  Lam.,  i,  13,  etc.  Les  pieds 
au  large,  Ps.  xxxi  jxxxi,  9,  ou  sur  le  roc  Ps.  xi.  (xxxix), 
3,  indiquent  la  prospérité  et  la  stabilité.  —  4°  Les  pieds, 
avec  lesquels  on  marche,  sont  souvent  pris  comme  le 
-- \  i ..?.<.  1 . ■  de  la  conduite,  c'est-à-dire  de  la  manière  dont 
on  marche  dans  le  chemin  du  devoir.  Job,  xm,  -~ , 
xxiii,  11;  l's.  xiv  (xm),  3;  xxxvi  (x.xxv),  12;  CXIX 
(cxvin),  59,  lui;  Prov.,  i,  15;  iv,  27;  Eccle.,  îv,  17; 
Hehr.,  \n,  13,  etc.  Les  pieds  du  méchant  courent  vers 
le  mal.  Ps.  xiv  (xm).  3;  Prov.,  i,  16;  vi,  18;  Is.,  i.t.x, 
7;  Rom.,  m.  15,  etc. 

III.  Locutions  diverses.  —  Ne  «  lever  la  main  ri  le 
pied  .i  qu'avec  la  permission  de  quelqu'un,  c'esl  dé- 
pendre totalement  de  lui.  tien.,  xi.i,  il.  —  «  Poser  la 
plante  des  pieds  »  sur  un  territoire,  c'est  l'occuper  ou 
le  posséder.  Deut.,  m.  5;  xi,  24;  .los.,  i,  3;  xiv,  il.  Le 
(  lieu  des  pieds  »  de  Jéhovah  est  le  Temple.  Is..  i.x,  13; 
I  zech.,  m. m,  7.  —  o  De  la  piaule  drs  pieds  au  sommet 
de  la  tête  »  désigne  le  corps  tout  entier,  11  Reg.,  xiv, 
25;  Job,  n.  7;  N..  i,  6.  Comme  on  comptait  souvent 
m  frappant  du  pied,  le  pluriel  regdlim  esl  pris  avec  le 
sens  de  «  fuis  .  après  un  nombre.  Exod..  xxm,  li  ; 
Hdloè  regdlim,  t  irois  (coups  de)  pieds  »,  c'est-à-dire 

huis  fois  l'an  lu  nie  fêleras   ».  Cf.  Num..   XXII,  28.   — 

La  i  voix  des  pieds     esl  le  bruit  que  fuit  les  pieds  en 

marcl t.  III  Reg.,  xiv,  6;  IV  Reg.,  vi,  32.  —  «  Être  sur 

les  pieds  »  de  quelqu'un,  c'est  le  suivre.  Exod.,  xi,  8; 
Deut.,  xi,  6;  etc.  —  Isaïe,  vu,  20;  xxxvi.  12,  emploie  le 
mol  "  pieds  »  pour  éviter  un  ter grossier.  L'expres- 
sion <>  d'entre  les  pieds  »  signifie  de  la  descend v  de 

quelqu'un.  Gen.,  XLIX,  10;  lient.,  xxvm.  .77.  «  Couvrir 
ses  pieds  »,  Jud.,  III,  24;  I  Reg.,  xxiv,  V.  veut  dire 
satisfaire  aux  besoins  de  la  nature.  Voir  LATRINES,  I-  IV, 

col.  125.  11.  Lesètre. 

PIÈGE,   engin  disposé    pour  prendre   des   animaux. 
On  utilise  dans  ce  but   drs  lacets,  des  filets,  des  h. 
des  trappes,  etc.  Voir  »'.>i\sse,  t.  n,  col.  621  ;  CROCODILE, 
t.  n,  col.  1123;  Filet,  t.  ni,  col.  2245;  Fosse,  t.  m, 


col.  2329;  Lacet,  t.  rv,  col.  II;  Lion.  t.  iv,  col.  269; 
Oiseaux,  t.  iv,  col.  1765;  Oiseleur,  t.  iv,  col.  1774; 
Pêche,  col.  4;  Poissons.  —  Le  plus  souvent,  les  écri- 
vains mentionnent  les  pièges  dans  le  sens  figuré,  à 
propos  des  embûches  de  toutes  sortes  que  les  méchants 
dressent  contre  les  serviteurs  de  Dieu.  Ps.  xxxvm 
(xxxvn),  13;  cxi.  (cxxxix),  6;  Is.,  xxix,  21.  Les  prêtres 
d'Israël,  en  sacrifiant  aux  idoles,  ont  été  pour  le  peuple 
comme  un  piège  et  un  filet  tendu.  Ose.,  v,  1.  Voir 
Scandale.  Le  malheur  et  le  châtiment  sont  comme  des 
pièges  dans  lesquels  les  hommes  sont  inévitablement 
pris.  Eccle.,  ix,  12;  Is.,  xxiv,  18;  Jer.,  xivm.  il. 
i.,  24,  etc.  Il  arrive  que  le  méchant  est  comme  pris  au 
piège  par  ses  propres  iniquités.  Prov.,  v,  22. 

II.  Lesêtri  . 
PICQUIGNY  (BERNARDIN  DE>.  Voir  Bernardin 

DE  PICQUIGNY,   t.  I,  Col.   1620. 

PIERRE  (SAINT)  (grec  LléTpo;),  apôtre  et  chef  du 
collège  apostolique  (Iig.  82  . 

I.  Pierre  dans  les  récits  évanci'i  iqi  i  s.  —  C'esl  la 
période  de  préparation  ou  de  formation  de  l'apôtre. 
Elle  s'étend  depuis  sa  vocation  jusqu'à  l'Ascension  du 
Sauveur. 

;.  PIERRE  .1  v.i.vr  L'APPEL  DE  JÉSUS.  —  I»  Son  nom.  — 
Il  reçut  à  la  circoncision  celui  de  Simon,  qui,  dans  les 
manuscrits  grecs  du  Nouveau  Testament,  apparaît  sous 
la  forme  de  £u[iewv,  cf.  Act.,  xv,  II;  11  Pet.,  I,  1,  etc.,  ou 
de  2i|jui)v.  Cf.  Mat  th.,  x,  2  ;  Marc,  i,  16;  Luc.  v,  3  ;  Joa  . 
i,  M,  52,  etc.  La  première  est  employée  par  les  Seplanle 
comme  l'équivalent   du   nom    hébreu   •••;■:—   (Si 

qui  se  présente  pour  la  première  fois  Gen.,  xxix,  33, 
pour  désigner  le  second  fils  de  Jacob.  La  seconde,  qui 
se  rapproche  davantage  de  l'usage  gin-,  est  employée 
Eccli.,  l,  1  ;  I  Mach.,  il,  I  ;  Luc,  il,  25,  el  souvent 
ailleurs.  Voir  aussi  Josèphe,  Bell.  n'il.,  IV,  m,  9.  Dans 
l'idiome  araméen,    elle   esl   devenue    ]-c';     [Simon). 

Voir  Dalman,  Die  Worte  Jesu,  in-8»,  1898,  p.  il,  n.  1; 
Rlass,  GiammatiU  des   neutestam.   Giiechisch,   in-80, 

1896,  p.  30.  La  Vulgale  dit  toujours  Sinmn.  Le  nom  de 
Simon  était  très  commun  chez  les  Juifs  an  temps  de 
Jésus-Christ.  Cf.  Matth.,  x,  i;  xm,  55;  XXVI,  t>;  xxvn, 
32;  Luc,  xxvn,  40;  Act.,  x,  6.  —  Plus  lard.  Matlh.,  \\i. 
18;  cf.  Joa.,  i.  42.  Simon  reçut  de  Jésus  la  dénomi- 
nation   symbolique    de    net.    Kêfd',    moi    araméen, 

dont  on  a  fait  en  grec  Ktjçï;,  et  qui,  connue  l'hébreu 
-:,  kêf,  .lob,  xxx,  6;  Jer.,  iv,  29,  a  la  signification  de 

B  pierre,  rocher  ii  ;  en  grec,  lier?'.:,  qui,  transcrit  I n 
latin,  est  devenu  Petrus  (masculin  de  petra),  Pierre  en 
français.   Rien   ne  prouve  que  les  substantifs  Kê/'l 

llivrpo:  aient  jamais  été  emploies  comme >s  propres 

avant  d'être  appli  pus  ;i  s.iini  Pierre.  Néanmoins,  d 
Edersheim,  The  Life  and  Times  of  Jésus  the  V. 
t.  i.  p.  175,  note,  d'autres  Juifs  auraient  été  pareille- 
ment appelés  Pétros.  —  On  a  fait  les  remarques  sui- 
vantes au  sujet  de  l'emploi  de  ces  deux  nom-  il, m,  1rs 
écrits  du  Nouveau  Testament  :  1°  Dans  le  quatrième 
évangile,  la  double  appellation,  Simon  Pierre,  esl  la 
plus  fréquente;  on  l'y  rencontre  jusqu'à  dix-sepl  fois; 
2°  dans  les  autres  Évangiles,  les  deux  noms  n'appa- 
raissent combinés  ensemble  qu'a  deux  reprises,  ni  dis 
circonstances  très  importantes  pour  l'apôtre,  Matth.,  ivi, 
16;  Luc,  v,  8;  3e  après  la  résurrection  el  l'ascensien, 
le  litre  d'honneur,  (Yphas  ou  Pierre,  remplaça  peu  à 
peu  le  nom  primitif  Simon,  comme  le  montre  son 
emploi  très  fréquent  (dix-neuf  fois  dans  -:i  i  ii  i  Matth., 
dix  huit  dans  saint  Maie,  seize  dans  s;iint  Lue.  quinze 
dans  saint  Jean  el  1res  souvent  au  livre  des  Actes) 

Sauveur    lui-nié revient   à    l'ancien    nom,    lorsqu'il 

adresse  à  l'apôtre  un  reproche,  cf.  .Mur.,  xiv.  37,  ou 
un  avertissement,  Luc,  XXII,  31  ;  5°  sainl  Paul  emploie 


357 


PIERRE    (SAINT) 


358 


volontiers  le  nom  araniéen  Céphas.  Cf.  I  Cor.,  i,  1-2; 
in,22:  Gai.,    i,  10;  il,  9,11,  11. 

2°  Sa  patrie.  —  Simon  était  originaire  de  «.  Bethsaïde, 
la  ville  d'André  et  de  Pierre  »,  comme  aussi  de  l'apotre 
Philippe.  Joa.,  i,  44.  Elle  était  située  en  Galilée,  non 
loin  de  Capharnaùm,  sur  la  rive  droite  du  lac  de  Tibé- 
riade.  Plus  tard,  cependant,  Pierre  abandonna  Beth- 
saïde, pour  s'établir  à  Capharnaùm,  car  plusieurs  textes 
évangéliques,  cf.  Matth.,  vin,  5,  li;  Marc,  i,  21,  29; 
Luc,  iv,  31,  38,  parlent  de  la  maison  qu'il  possédait,  ou 
du  moins  qu'il  habitait  dans  cette  dernière  ville. 

3"  Sa  famille.  —  Les  Évangiles  nous  fournissent 
aussi  quelques  renseignements  intéressants  sur  la  fa- 


82.  —  Statue  de  saint  Pierre,  iv*  siècle,  dans  les  cryptes 
vaticanes.  D'après  une  photographie.  Voir  D.  Dufresne, 
Les  cryptes  vaticanes,  1902,  p.  14. 

mille  de  saint  Pierre.  —  1.  Son  père  s'appelait  'Iiovâç, 
d'après  Matth.,  xvi,  17;  Joa.,  i,  42;  xxi,  15,  16, 17  (textus 

receptus).  Voir  Jona;  t.  m,  col.  1603.  —  2.  L'Évangile 
nous  apprend  aussi  que  Simon  avait  un  frère  nommé 
André,  lequel  eut  également  l'honneur  de  compter 
parmi  les  amis  privilégiés  de  Notre-Seigneur.  Il  n'est 
pas  possible  de  dire  avec  certitude  lequel  des  deux 
frères  était  l'aîné;  ce  serait  Simon,  d'après  la  plupart 
des  auteurs  qui  se  sont  occupés  de  cette  question.  — 
3.  Simon  s'était  marié  avant  de  recevoir  l'appel  de 
Jésus.  Il  est  parlé  expressément  de  sa  belle-mère. 
Matth.,  vin,  li;  Marc,  i,  30;  Luc,  iv,  38.  Saint  Paul 
mentionne  sa  femme.  I  Cor.,  ix,  5. 

i°  Son  éducation  intellectuelle  et  morale.  —  Nous 
sommes  réduits  sur  ces  deux  points  à  de  simples  con- 
jectures. —  l.  La  vie  de  Simon-Pierre  montre  qu'il  pos- 
sédait une  intelligence  peu  commune.  D'autre  part,  les 
membres  du  sanhédrin  portèrent  sur  lui  et  sur  son  ami 
saint  Jean  un  jugement  sévère  sous  le  rapport  de  l'ins- 


truction, les  regardant  tous  deux  comme  «  des  hommes 
illettrés  et  des  gens  du  peuple  ».  Act.,  IV,  13  : 
avOpwTtoi  àypâjxu.aToi...  xoù  ESiûtou,  homines  sine  lit- 
teris  et  idiotae.  Cf.  S.  Jean  Chrysostome,  Hom.  xxxn, 
3,  In  Matth.,  t.  lvii,  col.  3S1.  Mais  il  faut  prendre  ces 
expressions  dans  le  sens  que  leur  donnaient  alors  les 
Juifs;  ainsi  comprises,  elles  signilient  seulement  que 
les  deux  apôtres  n'avaient  pas  étudié  dans  les  écoles 
rabbiniques  et  qu'ils  n'étaient  que  des  hommes  ordi- 
naires, sans  influence,  par  contraste  avec  les  docteurs 
de  la  loi,  les  prêtres,  etc.  Néanmoins,  Simon  n'était  pas 
dénué  de  toute  instruction.  Depuis  longtemps,  en  effet, 
des  écoles  avaient  été  établies  dans  les  communautés 
juives  de  toute  la  Palestine,  et  les  pharisiens  veillaient 
à  ce  que  l'enseignement  des  maîtres  fût  sérieux  et 
solide.  Voir  J.  Simon,  L'éducation  et  l'instruction  des 
a, fu nis  chez  les  anciens  Juifs,  d'après  la  Bible  et  le 
Talmud,  in-8»,  Leipzig,  3»  édit.,  1879.  L;idiome  en  usage 
dans  la  contrée  était  l'araméen  occidental,  dont  les 
Évangélistes  nous  ont  conservé  quelques  échantillons. 
Cf.  Matth.,  xxvn,  46;  Marc,  v,  il;  Joa.,  xx,  16,  etc. 
Nous  apprenons,  Matth.,  xxvi,  13,  que  c'était  la  langue 
maternelle  de  saint  Pierre  ;  mais  de  très  bonne  heure 
il  dut  comprendre  et  parler  plus  ou  moins  parfaite- 
ment le  grec  dit  hellénistique  (voir  plus  bas,  col.  392,1. 
qui,  dans  la  région  du  lac,  était  connu  de  la  plupart 
des  habitants,  comme  l'affirment  les  anciens  auteurs. 
D^  nombreux  païens  s'étant  fixés  dans  ces  parages, 
ce  grec  vulgaire  servait  de  moyen  de  communication 
entre  eux  et  les  Juifs.  —  2.  La  formation  religieuse  de  . 
Simon  avait  eu  lieu  d'abord  sous  l'intluence  de  la  fa- 
mille, puis  sous  celle  de  la  synagogue.  Ses  relations 
intimes  avec  Jean-Baptiste,  cf.  Joa.,  I,  35,  attestent  sa 
grande  piété  et  la  foi  très  vive  avec  laquelle  il  atten- 
dait le  Messie.  Ses  discours  et  ses  Épitres  prouvent 
qu'il  connaissait  la  Bible,  si  chère  à  tous  ses  coreli- 
gionnaires; il  la  cite  assez  fréquemment,  et  son  lan- 
gage en  est  tout  coloré,  comme  il  sera  démontré  plus 
loin  (col.  393). 

5°  Sa  profession.  —  Avant  d'être  appelé  par  Notre- 
Seigneur,  Simon  exerçait  sur  la  mer  de  Galilée  le  mé- 
tier de  pécheur.  Matth..  iv,  18;  Marc,  i,  16;  Luc,  V,  2; 
Joa.,  xxi,  3.  Le  bateau  dont  il  se  servait  était  sa  pro- 
priété personnelle.  Luc,  v,  3.  Les  pêcheurs  du  lac  de 
Tibériade  formaient  alors  une  classe  nombreuse,  car 
les  poissons  abondaient  dans  ses  eaux  (c'est  encore  le 
cas  aujourd'hui),  et  il  s'en  faisait  un  commerce  consi- 
dérable dans  la  Palestine  entière.  C'était  une  profession 
assez  rémunératrice;  aussi  rien  ne  donne  à  penser  que 
Pierre  ait  été  pauvre  avant  de  s'attacher  au  Sauveur; 
bien  plus,  nous  l'entendrons  lui-même  affirmer  plus 
tard  qu'il  avait  conscience  d'avoir  abandonné,  pour 
suivre  Jésus,  des  biens  qui  n'étaient  pas  sans  valeur. 
Cf.  Marc,  x,  28.  Si  les  beaux  horizons  du  lac  durent 
exercer  une  impression  durable  sur  l'âme  sensible  et 
ardente  de  Pierre,  il  est  très  juste  aussi  de  dire  que 
son  rude  métier,  accompagné  de  tant  de  privations,  de 
fatigues  et  de  périls,  ne  contribua  pas  peu  à  développer 
son  énergie,  sa  persévérance,  son  activité  et  son  habi- 
leté pratique. 

//.     LES     APPELS    SUCCESSIFS    DE    SIMON    PIERRE.    — 

Nous  devons  en  distinguer  trois,  d'après  les  récits  très 
nets  et  très  formels  des  Évangélistes.  Le  premier,  seu- 
lement préliminaire,  établit  entre  Jésus  et  Simon  de 
simples  relations  d'amitié.  Le  second  fut  décisif  :  il  lit 
du  pêcheur  de  Galilée  un  disciple  du  Sauveur  dans  le 
sens  strict.  Le  troisième  fut  d'un  ordre  encore  plus 
relevé,  puisqu'il  transforma  Pierre  en  apôtre  du 
Christ. 

1»  Première  rencontre  de  Jésus  et  de  Simon,  et  pre- 
mier appel  de  ce  dernier.  —  C'était  sur  la  rive  orien- 
tale du  Jourdain,  à  Béthanie  ou  Bethabara.  Joa.,  i,  28. 
André  et  celui  qui  fut  plus  tard  le  disciple  bien-aimé 


359 


PIERRE     SAINT 


360 


par  conséquent,  le  narrateur  lui-mëmei  s'étaient  mis 
à  la  suite  de  Jésus,  que  le  précurseur,  dont  ils  étaient 
les  fervents  disciples,  leur  avait  désigné  comme 
l'Agneau  de  Dieu.  En  revenant,  tout  ému.  d'auprès  de 
celui  en  qui  i!  avait  reconnu  le  Messie.  André  trouva 
son  frère,  qu'il  se  limita  de  conduire  au  Sauveur.  Re- 
gard pénétrant  du  Christ  sur  Simon  vj'/jvLx:  ■  accom- 
pagné de  cette  parole,  qui  révélait  tout  l'avenir  du  futur 
clief  de  l'Église  Tu  es  Simon,  le  fils  de  .lean;  tu 
seras  appelé  Pierre.  -  C'est-à-dire  :  jusqu'à  ce  jour  tu 
n'as  été  qu'un  liomme  ordinaire:  bientôt  tu  seras  trans- 
formé, et  tu  dewendras  un  rocher  inébranlable,  sur 
lequel  je  bâtirai  un  glorieux  édifice.  Toutefois,  ici.  le 
nom  de  Céphas  ou  de  Pierre  est  seulement  promis  a 
Simon;  il  ne  le  recevra  d'une  manière  proprement  dite 
qu'après  sa  noble  confession.  Cf.  Matth..  xvi.  18.  Il  est 
probable  que  Simon  avait  alors  un  peu  plus  de  trente 
ans.  car  on  suppose  qu'il  était  un  peu  plus  âgé  que 
Notre-Seigneur.  Après  cet  appel,  il  demeura  pendant 
quelque  temps  auprès  de  son  nouveau  .Maître,  qu'il 
accompagna,  avec  son  frère  André,  ses  amis  Jacques 
et  Jean.  Philippe  et  Nathanaël,  d'abord  en  Galilée,  où 
il  fut  témoin  du  changement  de  l'eau  en  vin  à  Cana, 
puis  à  Jérusalem  pour  la  fête  de  Pàque.  et  de  nouveau 
en  Galilée,  après  avoir  traversé  la  Samarie.  Le  petit 
groupe  se  dispersa  alors  pour  un  temps.  Cf. 
Joa.,  ii-iv. 

-_     Si        d  appel.  —  Il  fit  de  Simon  le  disciple  pro- 
prement dit  du  Sauveur,  et  eut  lieu  après  la  première 
Pàque  de  la   vie  publique  de  Jésus.  Il  est  raconté  par 
les  trois  synoptiques.  Cf.  Matth..  tv.   18-22;  Marc.  i. 
Luc,  v.   1-11.  Les  ide  saint  Matthieu  et  de 

saint  Marc  sont  presque  identiques:  celui  de  saint  Luc 
en  diffère  notablement  pour  les  détails,  à  tel  point  que 
divers  commentateurs  ont  supposé  qu'il  y  est  question 
d'un  épisode  distinct.  Mais  la  ressemblance  générale  est 
trop  grande  entre  les  trois  narrations,  pour  qu'elles  se 
rapportent  à  des  faits  différents.  Tout  s'explique,  si 
Ion  admet  que  saint  Luc  raconte  plus  explicitement 
.  .distances  de  l'appel,  et  met  en  un  plus  s.iisis- 
sant  relief  la  personnalité  de  Pierre.  D'ailleurs,  de 
part  et  d'autre  nous  apprenons  que  Simon  fut  appelé 
par  X>       -S     -    eur  tandis  qu'il  ses  fonctions 

de    pécheur,   el  que    ces    mêmes   fonctions   lui  furent 
comme    un    symbole   de   son  rôle   futur  : 

Ne  crains  point:  désormais,  ce  sont  des  hommes 
que  tu  prendras  vivants.  Une  pêche  miraculeuse  fut 
associ  .'.ion.  André.  Jacques  et  Jean  devinrent 

en  même  temps  que  lui  les  disciples  de  Jésus,  et. 
comme  lui.  ils  quittèrent  tout  sans  hésiter,  pour  s'atta- 
cher définitivement  à  Notre-Seigneur.  Depuis  ce  mo- 
ment. Simon  vécut  auprès  du  divin  Mailre.  recevant  de 
lui  chaque  jour,  avec  les  autres  disciples,  la  formation 
-  ùre  pour  la  haute  destinée  qui  lui  était  rés 

_  listes  ne  mentionnent,  à  cette  époque,  que 
rares  incidents  auxquels  il  fut  personnellement 
mêlé.  11  eut  l'honneur  de  donner  l'hospitalité  au 
Sauveur  dans  sa  maison  de  Capharnaiim.  durant  1 
midi  d'un  juiir  de  sabbat,  et  Jésus  l'en  récompensi  en 
-i,,,  ie.  malade  de  la  Gèvre.  Cf.  Matth., 
▼ni.  Ii-I."i:  Marc.  i.  29-31;  Luc.  iv.  38-39.  Le  lende- 
main, comme  le  Sauveur  était  sorti  de  grand  malin  pour 
pri.  i .  I.i  foule,  que  ses  nombreux  miracles  avaient  jetée 
dans  l'enthousiasme,  le  cherchait  avec  an  lié  té;  Pierre 
et  ceux  qui  étaient  avec  lui  i  Marc.  i.  36  :  formule 
remarquable,  dans  laquelle  les  exégètes  reconn 
a  bon  droit  la  primauté  par  anticipation  allèrent 
dans  toutes  les  directions  pour  le  retrouver.  Il  leur  lit 
alors  évangéliser  une  partie  de  la  Galilée.  Marc.  i.  39: 
Luc  , 

:■    L'appel  é<   l'apostolat  et  les  divers  incidents  qui 
ni.  —  Cet  appel,  le  plus  solennel 

.ne  nommée 


Koi'io'n-Hattin.  qui  se  dresse  à  peu  près  en  face  de 
Tibériade.  à  environ  trois  heures  du  lac  de  Génésareth. 
Dans  la  région,  c  est  vraiment  «  la  montagne  »  par 
excellence  fri  c,ç.o:.  avec  l'article  .  Voir  Stanley,  Sinai 
and  Palestine,  p.  368.  Les  trois  synoptiques  racontent 
aussi  cet  événement,  qui  fut  d'une  gravité  exception- 
nelle dans  la  vie  de  Jésus.  Cf.  Matth..  x.  1-i:  Marc,  m, 
1319:  Luc.  vi.  12-16.  Saint  Marc  et  saint  Luc  en  font 
ressortir  l'importance  par  les  formules  solennelles  qui 
introduisent  leurs  narrations.  Un  trait  spécial  est  à 
noter  en  ce  qui  concerne  saint  Pierre  :  dans  les  trois 

du  corps  apostolique  citées  à  cette  occasion, 
connue  aussi  dans  la  quatrième,  que  nous  fournit  le 
des  Aet.s.  i.  13,  il  est  toujours  mentionné  le  pre- 
mier, quoique  la  plupart  des  autres  Apôtres  n'obtiennent 
pas  constamment  la  rnéme  place.  Saint  Matthieu  appuie 
sur  cette  circonstance  d'une  façon  particulière,  car, 
après  avoir  ouvert  sa  liste  en  ces  termes  :  Voici  les 
noms  des  douze  apôtres  :  le  premier  Simon,  qui  est 
appelé  Pierre.  »  il  cesse  tout  à  coup  de  signaler  d'autres 
numéros  d'ordre,  et  continue  en  disant  :  Et  André, 
son  frère:  Jacques...  et  Jean...  »  Les  Pères,  les  doc- 
teurs et  les  commentateurs  catholiques,  et  même  d 
nombreux  protestants,  voient  avec  raison  dans  ce  trait 
la  preuve  de  la  primauté  très  réelle  que  saint  Pierre 
exerçait  sur  ses  collègues  lorsque  l'Évangéliste  com- 
posa son  récit.  D'ailleurs,  cette  primauté  sera  bientôt 
confiée  à  Simon  par  Notre-Seigneur  en  un  lang  g 
encore  plus  saisissant.  Et  puis.  ce  n'est  pas  seule- 
ment en  cet  endroit  que  Pierre  occupe  le  premier  rang 
dans  le  collège  apostolique;  l'histoire  -        ue  lui 

fait  jouer  presque  à  chaque  page  un  rôle  prééminent. 
Tantôt  il  parle  au  nom  de  tous  le*  autre*  disciples, 
Matth..  xix.  27;  Luc.  XII,  il  :  tantôt  il  répond  1. 
les  Apôtres  sont  interpellés  en  commun  par  leur  Maître. 
Matth..  xvi.  16.  etc.;  quelquefois  Jésus  s'adresse  à  lui 
comme  au  personnage  principal,  même  parmi  li  - 
ciples  privilégiés.  Matth..  xxvi,  10;  Luc.  SSII,  31.  Ces 
détails,  sans  parler  d'autres  traits  plus  frappants  encore, 
auxquels  nous  arriverons  bientôt,  forment  le  meilleur 
commentaire  des  mots  Prinius  Peints.  ■  L.-CI.  Fillion. 
Saint  Pierre,  in-12,  Paris,  1906,  p.  -2'.. 

i  Entre  l'appel  de  saint  Pierre  à  l'apostolat  et  la  con- 
fession glorieuse  qui  lui  méritera  d  à  une 
dignité  encore  plus  haute,  nous   ne  connaissons  qu'un 

lit  nombre  d'incidents  auxquels  il  ait  pris  une 
part  directe.  —  1.  Saint  Luc.  vin.  45.  cite  une  réflexion 
familière  qu'il  lit  à  Jésus  au  moment  de  la  guérison  de 
l'hémorrhoîsse  :  Maître,  les  foules  vous  pressent  et 
vous  accablent,  et  vous  dites  :  Qui  m'a  touché  '.'  ■  Comme 
précédemment,  saint  Marc  se  sert  à  cette  occasion  de 
la  formule  remarquable  »  Pierre  et  ceux  qui  étaient 
avec  lui  ■.  Quelques  instant-  -    Simon  était  choisi, 

avec  les  lils  .  a  l'exclusion  des  auti 

pour  être  témoin  de  la  i  surit  lion  de  la  fille  de  Jaïre. 
Marc.  v.  37;  Luc.  vin.  51.  C'est  grâce  à  lui  sans  doute 
que  sainl  Marc  son  lils  spirituel  el  son     interpn 

la  parole  principale  du  Sauveur  sous 
sa  forme  primitive  :  Talilha  coumi,  Marc.  v.  41.  — 
•2.  Un  peu  plus  tard  eut  lieu  le  prodige  que  saint 
Matthieu,  xiv.  28-32,  raconte  immédiatement  api 
première  multiplication  des  pains,  Pierre  nous  appa- 
raît dans  cl  épisode  avec  tous  les  traits  distinclifs  de 
son  caraclère  :  il  est  tout  d'abord  ardent,  plein  d'entrain 
et  de  courage,  puis  il  se  laisse  tout  à  coup  abattre 
par  la  difficulté  :  Maître,  si  c'est  vous,  ordonnez  que 
j'aille  à  vous  sur  les  eaux.  Jésus  lui  dit  :  Viens.  Et 
Pierre,  descendant  de  la  barque,  marchait  sur  l'eau 
pour  aller  à  Jésus.  Mais  voyant  la  violence  du  vent,  il 
eut  peur;  et  comme  il  commençait  à  enfoncer,  il  s',  cria  : 
sauvez-moi.  Et  aussitôl  Jésus,  étendait  1» 
main,  le  saisit  et  lui  dil  :  liomme  de  peu  .1 
pourquoi  as-tu  douté?  »  —  Quelques  heures  se  pas 


361 


PIERRE   (SAINT) 


302 


et  ces!  une  foi  très  vive,  comme  aussi  un  amour  géné- 
reux, que  Simon-Pierre  manifeste  pour  son  Maître. 
Jésus  venait  de  prononcer  dans  la  synagogue  de  Caphar- 
naûm,  le  discours  où  il  promet  la  sainte  Eucharistie. 
Joa.,  vi,  2:2-59.  D'assez  nombreux  disciples  turent 
choqués  de  ses  paroles,  qu'ils  interprétaient  d'une 
manière  toute  charnelle.  Resté  seul  avec  les  Douze,  le 
Sauveur  leur  demanda  :  «  Et  vous,  est-ce  que  vous 
voulez  aussi  me  quitter'.'  »  Aussitôt,  Pierre  répondit  au 
nom  de  tous,  avec  toute  la  vigueur  de  sa  conviction  : 
■  Seigneur,  à  qui  irions-nous?  Vous  avez  les  paroles 
de  la  vie  éternelle.  Et  nous,  nous  avons  cru  et  nous 
avons  connu  que  vous  êtes  le  Christ,  le  Fils  de  Dieu  » 
(ou,  d'après  une  variante  qui  pourrait  bien  avoir  été 
la  leçon  primitive  :  le  Christ,  le  Saint  de  Dieu,  c'est-à- 
dire,  celui  que  Dieu  a  consacré,  misa  part,  pour  accom- 
plir le  rè)le  qui  lui  a  été  destiné).  Cf.  Joa.,  vi.  60-72. 
L'apôtre  regardait  donc  alors  Jésus  comme  le  vrai  Messie, 
—  3.  Vers  celle  époque,  les  scribes  et  les  pharisiens  re- 
prochèrent aux  disciples  de  se  dispenser  des  ablutions 
traditionnelles  qui  précédaient  les  repas.  Jésus  prit 
énergiquement  la  défense  des  siens,  et  prononça  à  cette 
occasion  la  parole  célèbre  :  «  Ce  n'est  pas  ce  qui  entre 
il:i ns  la  bouche  qui  souille  l'homme.  »  Pierre,  qui  ne 
le  comprit  point,  en  demanda  l'explication  :  «  Inter- 
prétez-nous cette  parabole,  o  Matth.,  xv,  1-20. 

;/;.  la  profession  ni;  foi  m:  simon  pieube  et  sa 
nÉCOitPEXSE.  —  1°  L'occasion.  Cf.  Matth.,  xvi,  13-15  ; 
.Marc,  VIII,  27-29;  Luc,  IX,  18-19.  —  Jésus  a  commencé 
de  rassembler  les  brebis  dispersées  d'Israël,  et  il  a 
institué  des  pasteurs  pour  les  nourrir  et  les  diriger; 
mais  il  faut  aussi,  pour  tenir  sa  place  lorsqu'il  aura 
quitté  cette  terre,  un  pasteur  suprême  des  âmes,  et  il 
\a  maintenant  l'établir.  Ce  fait  mémorable  eut  lieu 
dans  la  Galilée  du  nord,  au  pied  de  l'Hermon,  non 
loin  de  Césarée  de  Philippe.  Jésus  approchait  de  la 
ville;  tout  à  coup,  au  sortir  d'une  prière  solitaire,  il 
posa  aux  Douze,  dont  il  était  entouré,  cette  question, 
destinée  à  préparer  les  révélations  qui  suivent  :  «  Que 
disent  les  hommes  qu'est  le  Eils  de  l'homme?  »  C'est- 
à-dire  :  Quel  jugement  porte-t-onà  mon  sujet?  La  réponse 
des  Apôtres  fournit  un  compte  rendu  très  exact  des  dif- 
férentes opinions  qui  avaient  cours  en  Israèl  au  sujet 
de  leur  Maître  :  «  Les  uns,  qu'il  est  Jean-Baptiste  ;  les 
autres,  Elie;  les  autres,  Jérémie  ou  quelqu'un  des 
prophètes.  »  La  niasse  du  peuple  considérait  donc 
Jésus,  à  cette  époque  de  sa  vie  publique,  comme  un 
personnage  extraordinaire;  mais  beaucoup  avaient  cessé 
de  le  regarder  comme  le  Messie,  parce  qu'il  s'était 
refusé'  à  flatter  leurs  préjugés  grossiers.  Jésus  reprit  : 
i  Et  vous  (vous,  mes  disciples  privilégiés,  qui  me  con- 
naissez mieux  que  personne),  qui  dites-vous  que  je 
suis?  »  La  crise  terrible  de  sa  passion  approche,  et  il 
veut  savoir  s'il  pourra  compter,  pour  continuer  son 
ouvre,  sur  ceux  qu'il  avait  le  plus  aimés. 

2»  Confession  de  Pierre.  —  Il  répondit  au  nom  de 
tous.  Saint  Marc,  vin,  29,  et  saint  Luc,  îx,  20,  ne  donnent 
qu'un  résumé  de  sa  profession  de  foi;  mais  saint 
Matthieu,  XVI,  16,  l'a  conservée  plus  complètement  :  2ù 
il  ô  Xp:cTÔ;,  ô  v.o;  toO  ("hoO  roO  Ç&vtoç.  La  définition 
que  Pierre  donne  du  Sauveur  est  aussi  exacte  qu'éner- 
gique (notez  l'emploi  de  l'article  devant  tous  les  mots 
capables  de  le  recevoir);  la  nature  et  le  rôle  uniques  de 
Jésus  y  sont  nettement  marqués.  Simon  reconnaissait 
en  lui  non  seulement  le  Messie  promis  aux  Juifs,  mais 
le  Fils  de  Dieu  dans  un  sens  strict  et  absolu.  Il  n'est 
pas  douteux  que  telle  est  ici  la  signification  des  mots 
Filius  I)ei  viventis,  comme  l'ont  toujours  affirmé,  à  la 
suite  des  Pères,  les  exégètes  et  les  théologiens  catho- 
liques, et  même  de  nombreux  écrivains  protestants.  Si, 
dans  la  pensée  de  Pierre,  ce  second  titre  était  un  simple 
synonyme  du  premier,  comme  le  prétendent  les  com- 
mentateurs rationalistes,  Jésus  n'aurait  pas  pu  le  félici- 


ter  et  lui  dire  qu'il  avait  parlé'  en  vertu  d'une  révéla- 
tion spéciale;  en  effet,  les  Apôtres  savaient  depuis 
longtemps  que  leur  Maître  était  le  Christ.  Le  second 
titre  explique  donc  et  développe  le  premier  :  le  Messie, 
tel  que  Pierre  se  le  représentait,  était  réellement  le 
Fils  de  Dieu. 

3"  Récompense  de  Pierre.  —  Ce  passage  est  propre 
à  saint  Matthieu,  xvi,  17-19.  Jésus  répondit  à  l'apôtre  : 
.<  Et  je  te  dis  que  tu  es  Pierre,  et  sur  cette  pierre  je  bâ- 
tirai mon  Eglise,  et  les  portes  de  l'enfer  ne  prévaudront 
point  contre  elle;  et  je  te  donnerai  les  clefs  du  royaume 
des  cieux,  et  tout  ce  que  tu  lieras  sur  la  terre  sera  lié 
aussi  dans  les  cieux,  et  tout  ce  que  tu  délieras  sur  la 
terre  sera  aussi  délié  dans  les  cieux.  »  Dès  sa  première 
rencontre  avec  le  lils  de  Jonas,  Jésus  lui   avait  prédit 
qu'il  serait  appelé  Kêfa'.  Cf.  Joa.,  i,  43.  Voir  plus  haut, 
col.  356.  Il  lui  donne  maintenant  ce  nom  symbolique; 
et  part  de  là  pour  l'instituer  chef  de  son  Église,  com- 
parée à  un  édifice  spirituel.  «  Sur  cette  pierre  »,  c'est- 
à-dire,  comme   il  ressort  évidemment    du   texte,  sur 
Simon  lui-même,   en   tant    qu'il    était    Kêfa',    rocher 
mystique.  C'est  à   tort  qu'on  a   interprété   parfois  ces 
mots  comme  il  suit  :  sur  Jésus  en  personne;  ou  bien, 
sur  celte  confession  de  Pierre;  ou  encore  :  sur  le  collège 
apostolique  uni  à  Pierre.  Bâtie  sur  ce  roc  d'une  soli- 
dité à   toute  épreuve,  l'Église  de  Jésus  sera  elle-même 
à  jamais  inébranlable;  les  portes  (la  partie   pour   le 
tout)   de  l'enfer,    ou   plus   exactement,    du   séjour    des 
morts  (7rj).at  ïôo-j)  envisagé  comme  une  citadelle  dont 
les  portes  ont  une  solidité'  extraordinaire,  seront  im- 
puissantes contre  elle.  Ce  sombre  séjour,  à  la  puissance 
duquel  personne  ne  peut  se  soustraire,  ne  triomphera 
donc  pas  de  l'Église  du  Christ.  —  Les  images  suivantes 
expliquent  la  première.  Celle  des  clefs  se  rattache  liés 
naturellement  à  celle  de  la  construction  mystique  qui 
est  l'Église.  Elle  fait  de  Pierre  l'intendant  suprême,  le 
chef  visible  de  ce  bel  édifice,  puisque  celui  qui  possède 
les  clefs  d'une  maison,  et  qui  a  le  droit  de  s'en  servir 
pour  ouvrir  ou  fermer  les  portes  comme  bon  lui  semble, 
jouit  par  là  même  d'une  autorité  sans  limite  sur  la  mai- 
son. Cf.  Is.,  xxii,  22;  Apuc,  i,  1S  et  m,  7.  La  figure  : 
«  Tout  ce  que  tu  lieras...  »  est  encore  plus  expressive 
pour  marquer  une  puissance  absolue;  en  effet,  le  Sau- 
veur affirme  ainsi  que  toutes  les  décisions  de  Pierre  se- 
ront  ratifiées  par  Dieu  lui-même.  Les  rabbins  emploient 
souvent  les   verbes   lier  el  délier  dans  le  sens  d'inter- 
dire et  de  permettre.  Voir  Edersheim,  Life  a>i<l  rimes 
of  Jésus  Ihe  Messiah,  t.  il,  p.  84;  Dalman,  Worte  Jesu, 
p.   171-178.  Ils  signifient  plutôt  dans  ce  passage  :  con- 
damner et  acquitter.  —  Sans  doute,  Jésus  devait  dire 
plus  tard  à  tous  les  Apôtres,  presque  dans  les  mêmes 
termes  :  «  Tout  ce  que  vous  lierez  sur  la  terre  sera  lié 
aussi  dans  le  ciel,  et  tout  ce  que  vous  délierez  sur  la 
terre  sera  délié  aussi  dans  le  ciel.  »  Cf.  Matth.,  xvin,  18. 
Mais,  comme  le  remarque  très  bien  Bossuet,  Diseurs 
sur  l'unité  de  l'Église,   1"  point,  «  cette  parole  :  Tout 
ce  que  tu  lieras,...  dite  à  un  seul,  a  déjà  rangé  sous  sa 
puissance  chacun  de  ceux  à  qui  on  dira  :  Tout  ce  que 
vous  remettrez...  Il  y  a  donc  dans  la  chaire  de  Pierre 
la  plénitude  de  la  puissance.  »  La  primauté  de  Pierre 
et  l'indéfectibilité  de  l'Église,  telles  sont  donc  les  pro- 
messes faites  ici  par  Jésus. 

IV.  DEPUIS  LA  PROMESSE  DE  IA  PRIMAUTÉ  JUSQU'A 
i.  i  /•  [SSION  DO  SAl  r/77,'.  —  1°  Le  /ils  de  Jouas  se  fait 
le  tentateur  de  Jésus.  Matth.,  XVI,  21-23;  Marc,  VIII, 
31-33.  —  Cet  épisode,  qui  eut  lieu  aussitôt  après  la 
confession  de  Simon-Pierre,  ne  nous  présente  pas 
l'apôtre  sous  un  jour  aussi  favorable.  «  La  chair  et  le 
sang  »  avaient  encore  quelque  prise  sur  lui.  Comme 
Jésus,  pour  préparer  de  plus  en  plus  ses  amis  les  plus 
intimes  à  l'épreuve  redoutable  qui  les  attendait,  venait 
de  leur  annoncer  pour  la  première  fois,  en  termes 
très  clairs,  la  proximité  de  sa  passion,  le  cœur  aimant 


363 


PIERRE    (SAINT) 


364 


de  Pierre  en  fui  terrifié;  il  ne  pouvait  comprendre  en- 
core que  le  Christ  dut  subir  une  telle  humiliation.  Le 
prenant  donc  à  part,  il  s'écria  :  i  A  Dieu  ne  plaise, 
Seigneur!  cela  ne  vous  arrivera  pas.  »  Se  détournant 
de  Simon,  pour  mieux  marquer  sa  peine,  Jésus  lui  dit  : 
«  Va-t-en  derrière  moi,  Satan;  tu  m'es  un  objet  de 
scandale,  car  lu  n'as  pas  le  goût  des  choses  de  Dieu, 
mais  des  choses  des  hommes.  »  C'est  parle  même  lan- 
gage que  le  Christ  avait  autrefois  chassé  loin  de  lui  le 
démon  en  personne,  à  la  suite  de  sa  tentation  dans 
le  désert.  Matth..  iv,  10.  En  effet,  Pierre,  guidé  en  ce 
moment  par  des  pensées  et  des  sentiments  tout  humains, 
ne  tendait  à  rien  moins  qu'à  empêcher  .'.'sus  d'accom- 
plir la  volonté  de  Dieu. 

2"  Pierre  sur  la  montagne  de  la  Transfiguration. 
Matth.,  xvii,  1-8:  Marc,  ix,  1-7;  Luc,  ix,  -28-30.  -  Ce 
grand  miracle,  qui  tient  une  place  si  importante  dans 
la  vie  du  Sauveur,  fut  accompli  quelques  jours  seule- 
ment après  les  faits  qui  précèdent.  Simon-Pierre  eut 
le  grand  honneur  d'être  choisi  par  son  Maître  pour  en 
être  témoin,  avec  les  deux  fils  de  Zébédée.  Ici  encore, 
il  joua  un  rôle  spécial,  très  conforme  à  son  tempéra- 
ment ardent  et  à  sa  tendre  affection  pour  Xotre- 
Seigneur.  An  moment  le  plus  solennel  du  mystère, 
lorsqu'il  vit  que  Moïse  et  Èlie  étaient  sur  le  point  de  se 
retirer,  il  s'écria  :  Seigneur,  il  est  bon  pour  nous 
d'être  ici;  si  vous  le  voulez,  faisons-y  trois  tentes,  une 
pour  vous,  une  pour  .Moïse  et  une  pour  Élie.  »  Il  ne 
respirait  que  bonheur  et  suavité  sur  la  sainte  mon- 
tagne,  et  il  aurait  voulu  que  ces  instants  délicieux 
fussent  à  jamais  prolongés.  «  Il  ne  savait  ce  qu'il 
disait,  .)  fait  remarquer  saint  Marc,  ix,  6.  Dans  son 
extase,  il  oubliait  que  de  telles  joies  ne  sauraient  durer 
indéfiniment  ici-bas.  Un  passage  de  sa  IIe  Épltre,  î,  10- 
18,  composée  environ  trente-cinq  ans  plus  tard,  décrit, 
en  quelques  traits  pleins  de  vie,  le  m; stère  de  la 
Transfiguration,  le  citant  comme  une  preuve  incontes- 
table  de  la  certitude  parfaite  des  vérités  prèchées  par 
les  apôtres. 

'■'<  Le  m  irai  le  du  didrachtne.  —  Il  est  placé  un  peu 
plus  tard  dans  le  récit  de  saint  Matthieu,  xvn,  23-20. 
lu  jour  que  Jésus  el  ses  apôtres  revenaient  à  Caphar- 
naiim,  les  collecteurs  de  l'impôt  du  Temple,  n'osant 
peut-être  pas  s'adi — er  directement  à  Notre-Seigneur, 
demandèrent  à  Pierre,  qui  était  connu  dans  la  ville  : 
i  Votre  Maître  ne  paie-t-il  pas  le  didrachme?  »  c'est-à- 
dire  la  double  drachme  ou  le  demi-sicle.  Simon  ré- 
pondit affirmativement;  mais  il  s'était  trop  avancé,  en 
uit  son  Maître  sans  le  consulter.  Celui-ci  lui 
démontra  donc  qu'en  tant  que  Messie  il  n'était  pas  tenu 
i  payer  ce  genre  d  imposition.  Toutefois,  pour  ne  pas 
être  une  occasion  de  scandale,  il  consentit  à  acquitter 
le  tribut;  mais,  voulant  en  même  temps  attest 
droits,  il  se  procura  par  un  prodige  la  somme  qu'exi- 

eail  la  loi. 
1  la  suite  du  récil  évangélique  mentionne  encore, 
vers  cette  époque,  trois  questions  du  prince  des 
apôtres.  Elles  manifestent  s. m  esprit  pratique,  et  aussi 
l'attention  intelligente  avec  laquelle  il  ('contait  les  le- 
çons  du  Sauveur.  —  La  première  concerne  le  pardon  des 
injures,  vertu  toute  chrétienne  que  Jésus  venait  de  re- 
commander instamment  :  «  Seigneur,  combien  de  fois 
pardonnerai-je  à  mon  frère,  lorsqu'il  aura  péché  contre 
moi?   Jusqu'à   sept  fois?  »   Non,  ce  n'était   pas   assez  : 

Jusqu'à  soixante-dix-sept  fois,  »  sans  lin.  Cf.  Matth.. 
\vm,  21-22.  Dans  une  antre  circonstance,  Luc,  SXH, 
11-43,  Jésus  venait  d'exhorter  ses  auditeurs  à  une 
vigilance  de  tous  les  instants,  pour  qu'ils  fussent  bien 
préparés   à   son    second  avènement.    Pierre   demanda  : 

Seigneur,  est-ce  à  nous  (à  nous,  vos  Apôtre 
vous  dites  celte  parabole,  ou  est-ce  aussi  à  tous  (  a  tous 
fis  chrétiens i'.'  *  —  Pierre  adressa  sa  troisième  ques- 
tion à  Notre-Seigneur  après  le  départ  du  jeune  homme 


riche,  qui  avait  refusé  de  vendre  ses  biens  pour  suivre 
Jésus.  Le  g  bon  Maître  »  s'était  écrié  avec  tristesse  : 
a  En  vérité,  je  vous  le  dis,  un  riche  entrera  difficile- 
ment dans  le  royaume  des  cieux.  »  Pierre  lui  demanda; 
■  Nous,  voici  que  nous  avons  tout  quitté  et  que  nous 
vous  avons  suivi;  qu'y  aura-t-il  donc  pour  nous?  i  II 
reçut  pour  lui-même  et  ses  collègues  dans  l'apostolat 
une  promesse  magnifique.  Cf.  Matth..  xix,  27-30;  Marc, 
x,  28-31;  Luc.  xvm,  28-30. 

V.  SAINT  PIERRE  DOSANT  LA  SEMAINE  DE  LA  PASSION. 

—  Ici  encore,  il  a  sa  place  à  part  et  joue  un  rôle  pré? 
pondérant  parmi  les  membres  du  collège  apostolique. 

1  Saint  Marc  nous  a  conservé  deux  paroles  pronon- 
cées par  Simon-Pierre  dans  la  journée  du  mardi.  La 
première  fut  proférée  dans  la  matinée,  lorsque  les 
Apôtres  constatèrent  l'effet  produit  sur  le  figuier  stérile 
par  la  malédiction  de  Jésus.  Pierre,  «  se  ressouvenant, 
dit  à  Jésus  :  Rabbi,  voici  que  le  figuier  que  vous  avez 
maudit  s'est  desséché.  »  .Marc,  xi,  20-21.  —  11  prononça 
la  seconde  dans  l'après-midi.  Comme  Jésus  venait  de 
prophétiser  la  ruine  du  Temple,  Pierre,  Jacques,  Jean 
et  André  lui  demandèrent  en  particulier  :  «  Dites-nous 
quand  ces  choses  arriveront,  et  quel  signe  il  y  aura  de 
votre  avènement  et  de  la  consommation  du  siècle.  » 
Marc,  xiii,  I;  Matth.,  xxiv,  3;  Luc.  xxi,  7.  C'est  pro- 
bablement saint  Pierre  qui  fut  le  porte-parole,  selon 
sa  coutume. 

2°  Le  jour  du  jeudi-saint,  il  fut  chargé  par  Jésus. 
avec  saint  Jean,  de  préparer  tout  ce  qui  était  requis 
pour  le  festin  pascal  et  de  découvrir,  au  moyen  d'un 
signe  particulier,  le  cénacle  où  le  Maître  devait  l.ii 
la  Pâque  avec  ses  disciples.  Cf.  Luc,  xxn,  8.  Le  soir, 
lorsque  Jésus  et  les  Apôtres,  se  trouvèrent  réunis, 
Notre-Seigneur,  Joa..  xm.  1-10,  voulut  lavei  les  pieds 
des  Douze,  pour  marquer  symboliquement  les  disposi- 
tions avec  lesquelles  ils  devaient  recevoir  la  sainte  Eu- 
charistie. Dans  le  dialogue  qui  s'engagea  alors  entre  Jésus 
et  Pierre,  l'apôtre  se  peint  tout  entier  avec  sa  foi.  son 
enthousiasme,  son  amour,  l'eu  d'instants  après,  lorsque 
le  Sauveur  eut  prédit  qu'un  de  ses  Apôtres  le  trahirait. 
Pierre  sut  obtenir,  par  l'intermédiaire  de  son  ami 
saint  Jean,  la  désignation  du  trailre.  Joa.,  xm.  22-20. 

—  La  prédiction  de  la  chute  prochaine  de  Pierre  est 
mentionnée  par  les  quatre  Évangélistes,  Matth..  xxvi, 
30  S  Marc,  xiv,  26-31;  Lue.,  xxn.  31-34;  Joa.,  xm. 
33-38;  mais  ils  ne  la  combinent  pas  de  la  même  ma- 
nière avec  les  incidents  voisins;  du  moins,  ils  la  placent 
tous  à  la  suite  de  la  cène.  11  ne  parail  guère  vraisem- 
blable que  Jésus  l'ait  réitérée  à  plusieurs  reprises, 
comme  l'ont  supposé'  quelques  interprètes.  Saint  Luc 
l'associe  a  une  prophétie  consolante,  qu'il  est  seul  â 
signaler,  xxn.  31-32,  el  qui  rappelle  la  magnifique 
promesse  faite  autrefois  près  de  Césaréi   de  Philippe  : 

Simon,  Simon,  voici  que  Satan  vous  a  réclamé,  pour 
vous  cribler  comme  le  froment;  mais  j'ai  prié  pour  toi. 
afin  que  ta  foi  ne  dé-faille  pas,  el  lorsque  tu  seras  con- 
verti, affermis  tes  frères.  » 

:;  A  Gelhsémani,  Pierre  fut  de  nouveau  i 
Jacques  et  Jean,  pour  assister  à  l'une  des  scènes  les 
plus  douloureuses  de  la  vie  de  son  Maître.  Matth.,  XXVI, 
37;  .Marc,  xrv,  33.  D'après  saint  Marc  xiv.  37.  c'est  à 
lui  que  Notre-Seigneur  adressa  doucement  ce  reproche, 
après  la  première  phase  de  son  agonie  :  •  Simon,  tu 
n'as  pas  pu  veiller  une  heure!  >■  Mais,  un  peu  plus 
tard,  Pierre  essaya,  au  péril  de  sa  propre  vie,  de  di  - 
fendre  le  Sauveur,  lorsque  les  émissaires  du  sanhédrin 
sepn  '■senti  Ten  l  pour  l'arrélrr.  A  vaut  de  quitter  le  cénacle, 
il  s'était  muni  d'un  glaive,  dont  il  voulut  asséner  un 
coup  sur  la  tête  de  Malchus;  mais  il  ne  l'atteignit  |U  à 
l'oreille.  Matth.,  XXVI,  51;  Marc,  xiv.  17;  Lue.,  xxil, 
50;  Joa..  xvm,  10-11.  Jésus  blâma  cet  acte  de  violence. 
1'  Au  moment  de  l'arrestation  du  Christ,  Pierre  prit 
la  fuite  avec  les  dix  autres  Apôtres;  mais  bientôt,  devenu 


365 


PIERRE    (SAINT; 


366 


plus  calme,  et  oubliant  son  propre  péril  pour  ne  songer 
qu'à  la  triste  situation  de  son  Maître,  «  il  suivit  Jésus 
de  loin,  jusque  dans  la  cour  du  grand  prêtre.  »  Mat  th., 
xxvi.  58;  Marc,  xiv,  5i;  Luc,  xxii,  51;  Joa..  xvm,  15. 
Le  quatrième  Évangile  nous  apprend  formellement  que 
c'est  grâce  à  son  ami,  le  disciple  bien-aimé,  que  Pierre 
réussit  à  pénétrer  dans  la  cour  du  palais  ponlilical. 
Désireux  de  »  voir  la  lin  »,  Mattb.,  xxvi,  58.  c'est-à- 
dire,  l'issue  du  procès  de  Notre-Seigneur,  il  s'assit  au 
milieu  des  serviteurs  du  grand  prêtre,  auprès  du  feu 
de  braise  qu'ils  avaient  allumé  dans  la  cour,  à  cause  du 
froid.  , 

5»  Là,  un  autre  danger,  auquel  il  ne  pensait  pas, 
l'atteignit  et  le  renversa  tristement.  Les  quatre  Évangé- 
listes  racontent  le  douloureux  épisode  de  son  triple 
reniement.  Cf.  Matth.,  xxvi,  69-75;  Marc,  xiv,  66- 
72;  Luc,  xxn,  55-62;  Joa.,  xvm,  16-18,  25-27.  Chacune 
des  narrations  présente  un  certain  nombre  de  diver- 
gences, qui  ne  \ont  jamais  jusqu'à  la  contradiction, 
quoi  qu'on  ait  prétendu  en  sens  contraire.  La  meil- 
leure explication  qu'on  puisse  donner  de  ces  variantes 
consiste  à  dire  qu'il  y  eut.  dans  ce  petit  drame,  trois 
actes  principaux,  dont  chacun  se  composa  de  plusieurs 
scènes  convergentes  :  les  narrateurs  ont  fait  leur  choix 
parmi  ces  scènes  particulières,  l'essentiel  consistant 
pour  eux  dans  les  trois  actes,  à  cause  de  la  prophétie 
récente  de  Jésus.  Voir  Kouard,  Vie  de  Notre-Seigneur 
Jésus-Christ.  in-8»,  -1'  édit.,  Paris,  1882,  t.  n,  p.  350-352; 
L.-Cl.  Fillion,  L'Evangile  selon  saint  Jean,  in-S",  Paris, 
1887,  p.  331-335.  Le  chant  du  coq  rappela  le  malheu- 
reux apôtre  à  la  réalité.  Sortant  aussitôt  du  palais,  il  se 
mit  à  pleurer  en  sanglotant  (sxXocuoev).  Sa  faute  avait 
été  grande,  assurément;  mais  c'était  seulement  une 
faute  de  surprise,  de  faiblesse,  qui  n'atteignit  ni  sa  foi, 
ni  son  dévouement.  Il  la  répara  du  reste,  par  un  pro- 
fond et  perpétuel  repentir. 

VI.  APRES  LA  RÉSURRECTION  DE  JÉSUS.  —  Pierre 
continua  de  recevoir  alors  des  marques  de  la  prédilec- 
tion du  divin  Maître,  soit  à  Jérusalem,  soit  un  peu  plus 
tard  en  Galilée.  —  Lorsque  les  saintes  femmes,  averties 
par  un  ange  que  Jésus  était  ressuscité,  eurent  annoncé 
à  leur  tour  «  aux  disciples  et  à  Pierre  »,  Marc,  xvi. 
7,  les  faits  dont  elles  avaient  été  témoins,  Pierre  et  le 
disciple  bien-aimé  lirent  ensemble  au  sépulcre  la  visite 
que  saint  Luc  se  contente  de  mentionner  brièvement, 
XXIV,  12,  mais  que  saint  Jean  raconte  d'une  manière 
dramatique.  XX,  2-10.  D'après  le  troisième  Évangile, 
Pierre  s'en  alla.  «  admirant  en  lui-même  ce  qui  était 
arrivé.  »  Bientôt  son  admiration  se  changea  en  une 
complète  certitude,  car  Jésus  daigna  lui  apparaître 
en  ce  même  jour.  Luc,  xxiv,  34;  cf.  I  Cor.,  XV,  5.  — 
Saint  Jean,  xxi,  1-22,  expose  tout  au  long  les  détails 
d'une  autre  apparition  que  le  Sauveur  ressuscité  fit, 
quelque  temps  après,  à  sept  apôtres  réunis  sur  les 
bords  du  lac  de  Tibériade,  et  dont  saint  Pierre  eut, 
pour  ainsi  dire,  tous  les  honneurs.  A  la  suite  d'une 
pèche  miraculeuse,  analogue  à  celle  qui  avait  accom- 
pagné son  appel  au  rôle  de  disciple,  cf.  Luc,  v,  1-11, 
Jésus  exigea  de  lui  une  triple  protestation  d'amour,  en 
réparation  de  son  triple  reniement;  puis  il  lui  confirma 
solennellement  son  titre  de  chef  du  corps  apostolique 
et  de  l'Église  entière,  en  lui  disant  :  «  Pais  mes  agneaux, 
pais  mes  brebis.  »  Voir  L.-Cl.  Fillion,  L'Évangile  selon 
saint  Jean,  IS.S7,  p.  381.  Il  lui  prédit  ensuite  une  mort 
tragique,  par  ce  langage  figuré  :  «  Lorsque  lu  auras 
vieilli,  un  autre  te  ceindra  et  te  conduira  où  tu  ne 
voudras  pas.  » 

II.  Saint  Pierre  dans  les  Actes  des  Apôtres.  — 
C'est  le  début  de  la  période  d'action  pour  notre  héros, 
après  la  période  de  préparation  dont  les  Évangiles  con- 
tiennent le  très  riche  exposé.  Le  livre  des  Actes  renferme 
dans  sa  première  partie,  chap.  i-xi,  des  détails  si  nom- 
breux sur  le  ministère  du  prince  des  Apôtres,  qu'on  a 


souvent  donné  à  cette  section  le  nom  d'Actes  de  Pierre. 
Il  est  encore  question  de  Simon  au  chap.  xv.  Partout 
l'historien  sacré  nous  le  montre,  selon  le  mot  de  Bossuet, 
«  à  la  tête  de  tout,  menant  pour  ainsi  dire  ses  frères 
les  Apôtres  au  combat,  »  occupant  le  premier  rang  et 
exerçant  une  supériorité  très  réelle,  que  personne  ne 
songe  à  contester. 

1"  Part  très  grande  qu'il  prend  à  la  fondation  de 
l'Eglise  de  Jérusalem.  —  1.  Au  cénacle,  immédiatement 
après  l'ascension  de  Xotre-Seigneur,  il  se  mit,  même 
en  présence  de  Marie,  Act.,  i,  11,  à  la  tète  des  «  frères  ». 
et  il  présida  au  remplacement  de  Judas.  Act.,  i,  12-26.  Il 
prononça,  à  cette  occasion,  le  premier  des  huit  discours 
que  saint  Luc  nous  a  conservés  de  lui.  Cf.  Act.,  i,  15-22. 

2.  Le  jour  de  la  Pentecôte,  lorsqu'une  foule  énorme, 
composée  d'Israélites  qui  habitaient  toutes  les  régions 
de  l'empire  romain,  eut  entouré  le  cénacle,  attirée  par 
le  bruit  violent  qui  avait  accompagné  la  descente  de 
l'Esprit-Saint,  Pierre  prit  de  nouveau  la  parole,  pour 
expliquer  la  nature  de  ce  mystère  qu'avait  prédit  le 
prophète  Joël,  et  pour  prêcher  hautement-Jésus-Christ. 
Act.,  n,  1-41.  Une  transformation  admirable  s'était 
produite  en  lui,  naguère  si  timide.  Trois  mille  con- 
versions furent  le  résultat  de  ce  qu'on  a  très  jus- 
tement appelé  «le  premier  coup  de  filet  du  pécheur 
d'hommes.  » 

3.  Quelque  temps  après,  il  guérit  miraculeusement  un 
paralytique,  qui  mendiait  depuis  de  longues  années  à 
la  Belle-Porte  du  temple.  L'n  grand  concours  de  peu- 
ple s'étant  formé  autour  de  lui  et  de  saint  Jean,  qui 
l'accompagnait,  il  prononça  sa  troisième  allocution, 
dans  laquelle  il  attribue  nettement  la  guérison  à  son 
véritable  auteur,  Jésus-Christ,  dont  elle  attestait  le  ca- 
ractère messianique.  Cinq  mille  conversions  nouvelles 
eurent  lieu  en  cet  instant.  Act.,  m,  1-26.  Mais  ce  fut 
l'occasion  d'un  premier  conflit  des  autorités  juives  avec 
l'Église  naissante.  Irrités  de  voir  que  les  deux  apôtres 
proclamaient  publiquement  la  résurrection  de  Jésus  et 
sa  toute-puissance,  quelques  prêtres  et  sadducéens  les 
lirent  emprisonner.  Le  lendemain,  Pierre  et  Jean  com- 
parurent devant  le  sanhédrin  tout  entier,  pour  donner 
des  explications  sur  leur  conduite.  Dans  son  quatrième 
discours,  Pierre  rendit  un  éclatant  témoignage  à  Jésus- 
Christ  en  face  du  tribunal  suprême  des  Juifs.  Comme 
le  miracle  avait  eu  de  nombreux  témoins,  on  n'osa  pas 
condamner  les  accusés;  maison  les  relâcha,  après  leur 
avoir  interdit  sévèrement  de  prêcher  au  nom  de  Jésu  - 
Christ.  C'est  alors  que  Pierre  prononça  son  célèbre 
Non  possumus.  Act.,  iv,  1-22. 

■1.  Malgré  la  sainteté  de  vie  des  premiers  chrétiens. 
signalée  à  deux  reprises  par  l'auteur  des  Actes,  H, 
12-47;  iv,  32-35,  un  douloureux  épisode  ne  tarda  pas 
à  prouver  que  l'imperfection  et  le  mal  se  glissent  promp- 
tement  au  sein  des  sociétés  les  meilleures  :  Ananie  et 
Saphire  «  mentirent  à  l'Esprit-Saint  et  fraudèrent  sur 
le  prix  de  leur  champ  »,  pour  se  donner  l'apparence 
d'une  libéralité  généreuse.  Pierre,  en  sa  qualité  de  chef 
de  l'Église,  eut  à  châtier  cet  orgueil  doublement  cri- 
minel. Act.,  V,  1-11.  Son  autorité  suprême,  mise  en  un 
très  vif  relief  par  cet  événement,  fut  encore  rehaussée 
par  les  éclatants  prodiges  que  Dieu  lui  donna  d'accom- 
plir :  son  ombre  même  guérissait  les  malades  sur  les- 
quels elle  passait.  Act.,  v,  12-16.  Comme  ses  collègues 
dans  l'apostolat  accomplissaient  aussi  des  miracles  nom- 
breux, il  se  produisit  des  conversions  multiples.  Alors  la 
colère  du  grand-prêtre  et  du  sanhédrin  ne  connut  pas 
de  bornes  :  les  Douze,  arrêtés  tous  ensemble,  furent 
conduits  devant  le  tribunal,  et  Pierre,  dans  sa  cinquième 
allocution,  protesta  avec  un  courage  inébranlable  et 
rendit  témoignage  à  la  résurrection  de  son  Maître. 
Leurs  juges  iniques  les  auraient  infailliblement  con- 
damnés à  mort,  sans  l'intervention  du  sage  Gamaliel, 
qui  les   sauva.    Ils  furent  donc   remis   en   liberté,  non 


367 


PIERRE    l 'SAINT 


36* 


sans  de  nouvelles  menaces,  dont  ils  continuèrent  de 
ne  tenir  aucun  compte.  Act.,  v,  17 -42. 

2°  Avec  le  concours  de  Pierre,  l'Eglise  se  développe 
en  Samarie  et  en  Judée.  Act.,  VM,8-25.  —  1.  En  Sa- 
marie. —  Le  livre  des  Acles  ne  fait  aucune  mention 
directe  de  Pierre  pendant  la  persécution  violente  qui 
éclata  bientôt  contre  l'Eglise;  nous  y  apprenons  seu- 
lement que  les  apôtres  demeurèrent  alors  à  Jérusalem, 
où  leur  présence  était  nécessaire  pour  confirmer  les 
chrétiens  dans  la  foi.  Act..  VIII,  1.  Lorsqu'il  est  de 
nouveau  question  de  lui,  nous  le  trouvons,  d'après  le 
texte  grec,  à  Sébaste,  en  Samarie,  où  le  saint  et  vail- 
lant diacre  Philippe  avait  opéré  de  nombreuses  conver- 
sions, entre  autres  celle  de  Simon  le  magicien.  Sur  le 
désir  des  Apôtres,  Pierre,  en  compagnie  de  saint  Jean, 
se  rendit  en  Samarie.  pour  affermir  les  fidèles  dans 
leurs  bonnes  dispositions.  C'est  alors  que  le  magicien 
osa  lui  offrir'  de  l'argent  pour  obtenir  le  pouvoir  de 
faire  descendre,  comme  lui,  l'Esprit-Saint  par  la  simple 
imposition  des  mains.  L'apôtre  rejeta  cette  offre  avec 
indignation,  et  revint  à  Jérusalem,  en  annonçant  avec 
succès  la  bonne  nouvelle  dans  les  bourgades  samari- 
taines situées  sur  son  chemin. 

2.  En  Judée.  —  Lorsque  la  paix  eut  été  complètement 
rendue  à  l'Église,  le  prince  des  apôtres  en  profita  pour 
visiter  officiellement  les  chrétientés  qui  s'étaient  for- 
mées, pendant  la  persécution,  sur  divers  points  de  la 
Judée,  grâce  au  zèle  des  lidèles  de  Jérusalem,  obligés 
de  se  disperser.  Saint  Luc  raconte  deux  grands  prodiges 
accomplis  par  saint  Pierre  durant  cette  première  de 
toutes  les  visites  pastorales  :  la  guérison  d'un  paraly- 
tique à  Lydda,  Act.,  ix,  32-35,  et  la  résurrection  de 
Tabitha  à  Joppé.  Act.,  ix,  30 -43.  Voir  Paralytique,  t.  iv. 
col.  2153,  el  Taiii  i  ma. 

3°  Saint  Pierre,  sur  l'ordre  de  Dieu,  ouvre  aussi  les 
portes  de  l'Église  aux  païens.  —  1.  Conversion  du 
centurion  Corneille.  —  Avant  de  remonter  au  ciel, 
Jésus  avait  dit  à  ses  Apôtres  :  g  Vous  me  servirez  de 
témoins  à  Jérusalem,  el  dans  toute  la  Judée  el  la  Samarie, 
ci  jusqu'aux  extrémités  de  la  terre,  ij  Act.,  i.  8.  Pierre  a 
déjà  réalisé  les  deux  premières  parties  de  cet  ordre;  voici 
qu'il  va  maintenant  rendre  témoignage  à  Jésus  devant 
les  païens,  el  les  introduire  a  leur  loin- dans  le  dix  in 
bercail.  Quoiqu'il  fut  réservé  à  saint  Paul  d'être  l'apôtre 
des  Gentils  par  excellence,  il  convenait  que  le  vicaire 
du  Sauveur  fût  choisi  île  préférence  à  tous  les  autres 
Apôtres  pour  recevoir  d'une  manière  officielle  dans 
l'Église  les  premiers  convertis  du  paganisme.  Cet  épi- 
sode est  raconte  longuement  par  saint  Lue,  Act..  X,  1- 
48,  à  cause  de  son  importance  extraordinaire.  L'écri- 
vain sacre  expose  lour  à  tour  les  deux  visions  par  les- 
quelles  Corneille  et    Pierre  furent   divinement  avertis, 

chacun  de  son  côté;  le  voyage  de  Simon-Pierre  à  Cé- 

sarée  de    Palestine,  ville   où    le  centurion  était  abus  en 

garnison;  l'entrevue  des  deux  héros  de  la  narration, 
qu'entouraient  plusieurs  amis  de  pari  el  d'autre;  l'élo- 
quent discours  prononcé  è  cette  occasion  par  l'apôtre 

lie     Sixième    du     livre     des     Acles);    enlin    la    ileSOen  te   de 

I  Esprit-Saint  sur  les  nouveaux  convertis  et  leur  bap- 
tême. Voir  Corneille,  t.  n,  col.  1012, 

2.  Lorsqu'il  revini  à  Jérusalem,  Pierre  eut  à  justifier 
sa  conduite  devant  les  chrétiens  assemblés.  (In  lui  re- 
prochait d'  «  être  entré  chez  des  païens  et  d'avoir  mangé 
avec  eux  »,  et  beaucoup  plus  encore,  quoiqu'on  ne  mît 
pas  cette  raison  en  avant,  d'avoir  participé  à  leur  con- 
version. En  v i  il ti  d'antiques  préjugés,  la  plupart  des 
fidèles  d'origine  Israélite  étaient  demeurés  hostiles  aux 
convertis  du  paganisme,  el,  malgré  les  oracles  si  clairs 
des     prophète!,    ils    avaient    de    la    peine   à    croire  que 

!  Eglise  de  Jésus  dût  être  ouverte  à  tous  les  hommes 
sans  exception.   Pierre   expliqua  sa  conduite  dans  son 

seplié discours,  el  elle  fut  approuvée  de  tons.  Act.. 

xi,  lis. 


4°  Saint  Pierre  est  emprisonne  par  Be'rode  el  dé- 
livré miraculeusement.  Act.,  xn,  1-17.  —  Ce  double 
incident  eut  lieu  vers  l'an  43  de  notre  ère,  quelque 
temps  avant  la  mort  du  roi  llérode  Agrippa  Ier,  petit- 
fils  d'Hérode  le  Grand.  Ce  prince,  après  avoir  fait  dé- 
capiter saint  Jacques  le  Majeur  par  haine  du  chris- 
tianisme, donna  l'ordre,  pour  plaire  davantage  encore 
aux  Juifs,  que  cet  acte  cruel  avait  comblés  de  joie, 
d'incarcérer  saint  Pierre,  en  attendant  qu'on  le  condui- 
sit à  son  tour  au  supplice.  Mais,  la  nuit  même  qui 
précéda  le  jour  où  il  devait  être  exécuté,  un  ange  le 
délivra  en  des  circonstances  merveilleuses.  Sorti  de  sa 
prison,  Pierre  alla  directement  dans  la  maison  de  Marie. 
mère  de  Jean-Marc,  le  futur  évangéliste,  chez  laquelle 
il  trouva  de  nombreux  chrétiens  assemblés.  Après  leur 
avoir  raconté  l'histoire  de  sa  délivrance,  o  il  s'en  alla 
dans  un  autre  lieu,  »  que  nous  essaierons  de  fixer 
ultérieurement,  d'après  les  données  de  la  tradition.  Voir 
col.  37::  374. 

5»  Pierre  au  concile  de  Jérusalem.  Act..  xv.  1-27.  — 
Quelques  années  se  passent.  Lorsque  Pierre  est  de 
nouveau  mentionné  au  livre  des  Actes,  il  est  à  Jérusa- 
lem (vers  l'an  50,  51  ou  52)  et  préside  l'assemblée  des 
Apôtres  et  des  Anciens,  qui  allait  trancher  définitive- 
ment la  controverse  soulevée  avec  tant  de  violence  par 
les  judaïsanls,  sur  divers  points  de  la  chrétienté.  Paul 
et  Barnabe  étaient  venus  tout  expies  d'Antioche,  pour 
consulter  l'autorité  suprême  sur  celle  question.  Les 
débats   furent   1res    vifs,    car    les    partisans    de    l'erreur 

exigeaient   avec    nn    acharnement    extraordinaire   le 

maintien  de  la  circoncision  el  des  autres  princij  IUJ 
rites  du  judaïsme.  Lorsque  les  deux  partis  eurent  ex- 
posé leurs  arguments,  Pierre  prit  la  parole  a»ec  toute 
l'autorité  que  lui  conférait  sa  charge.  Le  petit  discours 
qu'il  prononça  (le  huitième  et  dernier  de  «eux  que 
nous  lisons  dans  les  Actes)  proclame  hautement  la 
liberté  pleine  et  entière  des  chrétiens  issus  du  paga- 
nisme, par  rapport  aux  observances  judaïques.  Le 
prince  des  Apôtres  disparait  du  récit  des  Acles,  après 
cette  conduite  si  digne  de  lui. 

111.  Saim  Pierre  dans  I'Épître  de  saint  Pai  i  ai  \ 
Galates.  —  I"  Paul,  dans  les  chap.  I  el  il  decelte  lettre, 
signale  coup  sur  coup  deux  fails  nouveaux  relatifs  a 
Céphas,  c'est-à-dire  à  saint  Pierre.  Esquissant  d'abord 
en  quelques  lignes  les  incidents  qui  suivirent  de  très 
près  sa  propre  conversion,  il  raconte  en  ces  termes  sa 
première  entrevue  avec  le  prince  des  Apôtres  ;  «  Je 
vins  à  Jérusalem  pour  voir  Pierre.  »  Gai.,  i,  18-20,  Le 
verbe  ieiQOTJaeti  signifie  toujours  que  la  personne  ou  la 
chose  contemplée  est  digne  d'un  intérêt  particulier; 
en  l'employant,  saint  Paul  met  en  un  vif  relief  l'auguste 
dignité  ipi  il  reconnaissait  et  qu'il  venait  honore]  dan 
Céphas. 

2°  Quelques  lignas  plus  bas.  Gai.,  u,  11-21,  Paul  si 
gnale  un  l'ait  plus  surprenant  encore,  dont  les  protes- 
tants ont  souvent  exagéré  la  portée,  pour  amoindrir 
l'autorité  de  saint  Pierre.  Il  s'agil  dé  ce  qu'on  nomme 
habituellement  <•  le  conllil  il'Anlioche  ».  Celait,  ce 
semble,  peu  de  temps  après  l'assemblée  de  Jérusalem, 
et  Pierre  se  trouvait  avec  l'apôtre  des  Gentils  dans  la 
métropole  de  la  Syrie.  Voici  les  laits,  tels  que  les  ex- 
pose sainl  Paul  :  •■  Lorsque  Céphas  vinl  à  Anlioche.  je 
lui  résistai  en  face,  parce  qu'il  était  blâmable  (xote-jvo»- 
n\i.i-/'i:).  lai  effet,  avant  l'arrivée  de  quelques  personni 
envoyées  ide  Jérusalem)  par  Jacques,  il  mangeait  avec 
les  païens  ic  est  à-dire,  les  chrétiens  d'origine  païenne  ; 
mais, quand  elles  furent  venues,  il  se  retira  el  se  mil  i 
l'écart,  craignant  ceux  de  la  circoncision  (les  Juifs  con- 
voi lis).  El  les  autres  Juifs  usèrent  de  la  même  dissimu- 
lation que  lui,  de  sorte  que  Barnabe  aussi  tiii  entraîné 
dans  celle  dissimulation.  Mais,  quand  je  vis  qu'ils  ne 
marchaient  pas  droit  selon  la  vérité  de  l'Évangile,  je 
dis  à  Céphas,  en  présence  de  tous  :  Si  toi,  qui  es  luif, 


369 


PIERRE    (SAINT) 


370 


lu  vis  à  la  manière  des  païens,  et  non  comme  les  Juifs, 
pourquoi  forces-tu  les  païens  de  judaïser?...  » 

Souvent,  dans  les  temps  anciens,  on  a  essayé  d'échap- 
per, par  des  hypothèses  assez  étranges,  aux  consé- 
quences fâcheuses  que  l'on  croyait  devoir  découler  de 
cet  épisode  pour  la  dignité  de  saint  Pierre.  —  1.  On  a 
prétendu  qu'il  s'agit  d'un  autre  Céphas  que  Simon 
Pierre,  Voir  Clément  d'Alexandrie,  dans  Eusèbe,  H.  E., 
i,  12,  t.  xx.  col.  117.  Mais  cela  est  inadmissible,  puisque, 
d'une  part,  quelques  lignes  plus  haut,  Gai.,  i,  18,  Paul 
a  déjà  mentionné  le  prince  des  Apôtres  sous  le  nom  de 
Céphas,  et  que,  d'autre  part,  tout  son  récit  suppose 
que  celui  avec  lequel  il  entra  en  discussion  était  un 
personnage  jouissant  d'une  autorité  supérieure.  Aussi, 
presque  tous  les  Pères  et  les  anciens  auteurs  ecclésias- 
tiques, comme  la  plupart  des  commentateurs  modernes 
et  contemporains,  ont-ils  identifié  ce  Céphas  et  saint 
Pierre.  Voir  Céphas.  t.  n,  col.  429.  —  2.  On  a  supposé 
(Origène.  d'après  S.  Jérôme, A'/iisl.  exil,  ad  August., 
4,  t.  xxn.  col.  918;  S.  Jean  Chrysostome,  Boni,  in 
illud  :  In  facieni  ei  rcslili,  15.  t.  i.i.  col.  384;  S.  Jé- 
rôme lui-même.  In  EpisL  ad  Gai.,  n,  11,  t.  xxvi, 
col.  341)  que,  si  saint  Pierre  et  saint  Paul  ont  agi  comme 
le  raconte  ce  dernier,  c'était  en  vertu  d'une  entente 
préalable,  afin  de  donner  une  leçon  très  forte  aux  ju- 
daîsants  dans  la  personne  du  prince  des  Apôtres.  Cette 
conjecture  s'appuie  sur  une  fausse  interprétation  du 
mot  ûnoxptijt;,  «  dissimulation,  «  En  effet,  en  employant 
ce  terme,  saint  Paul  a  seulement  voulu  dire  que  Cé- 
phas, Barnabe  et  leurs  imitateurs  avaient  changé  de 
conduite  par  de  simples  motifs  de  circonstance,  par 
timidité  et  faiblesse,  et  non  par  suite  d'une  convicti  on 
intime.  Voir  à  ce  sujet  S.  Augustin,  Epist.  xxvill  et 
LXXXlï,  ad  Hieronym.,  t.  xxm,  col.  112,  276.  Pour  in- 
terpréter les  faits,  il  faut  les  envisager  de  la  façon  la 
plus  simple  et  la  plus  naturelle.  Pierre,  en  arrivant  à 
Antioche.  partagea  sans  la  moindre  hésitation  la  vie  et 
les  repas  des  chrétiens  d'origine  païenne,  ainsi  qu'il 
avait  déjà  fait  autrefois  chez  le  centurion  Corneille, 
Act.,  xt,  3;  mais,  plusieurs  chrétiens  issus  du  judaïsme 
étant  venus  à  leur  tour  dans  cette  même  ville,  connue 
il  les  savait  très  attachés  aux  observances  légales,  il  se 
trouva  dans  une  situation  fort  délicate  :  s'il  continuait 
de  vivre  avec  les  Gentils,  il  froissait  les  chrétiens  de 
Jérusalem;  s'il  se  séparait  des  fidèles  d'origine  païenne, 
il  les  ollènsait  eux-mêmes.  Il  lui  parut  cependant  qu'il 
valait  mieux,  dans  l'intérêt  de  son  ministère,  exercé  sur- 
tout auprès  des  judéo-chrétiens,  de  se  décider  en  faveur 
de  la  seconde  alternative.  Il  en  avait  certainement  le 
droit,  puisque  les  Juifs  convertis  étaient  libres  encore 
d'observer  la  loi.  Mais  son  exemple  suscitait  deux  grands 
périls  :  d'un  côté,  quelques  esprits  exagérés  pouvaient 
en  conclure  que  les  pratiques  légales  continuaient  d'être 
strictement  obligatoires  pour  les  chrétiens  issus  du 
judaïsme,  et  pas  seulement  facultatives;  d'autre  part,  les 
païens  convertis  eux-mêmes  pouvaient  craindre  qu'on 
ne  les  assujettit  à  ces  pratiques.  Paul  réclama  au  nom 
de  ces  derniers.  Il  ne  dit  pas  en  termes  exprès  ce  que  fit 
saint  Pierre;  mais  il  n'est  pas  douteux  quecelui-ci  ne  se 
soit  humblement  soumis  aux  observations  très  justes  de 
son  «  bien-airné  frère  Paul  ».  II  Pelr.,  m,  lô.  Sur  cette 
question,  voir  Pesch,  Ueberdie  Persan  des  Kephas, dans 
la  Zeitschrift  fur  kalhol.  Théologie,  t.  vu,  1883.  p. 456- 
490;  F.  Vigouroux,  Les  Livres  Saints  et  ta  critique  ra- 
tionaliste, 5e  édit..  t.  v,  p.  456-476  ijls  donnent  la  liste 
des  principaux  auteurs  qui  ont  cru.  dans  le  cours  des 
temps,  que  le  Céphas  d'Antioche  est  distinct  du  prince 
des  Apôtres). 

1\ .  Saint  Pierre  d'après  la  tradition.  —  Ici,  une 
distinction  est  nécessaire,  car  les  documents  sont  loin 
de  posséder  tous  la  même  valeur  historique.  Il  en  est 
que  nous  pouvons  suivre  en  toute  sécurité;  tels  sont  en 
général   les  renseignements    fournis  par  les   Pères  de 


l'Église,  surtout  par  Eusèbe  de  Césarée  et  saint  Jérôme. 
D'autres  sont  plus  ou  moins  associés  à  des  détails  mer- 
veilleux, légendaires,  dont  il  est  nécessaire  de  se  défier; 
dans  cette  catégorie  se  placent  les  Actes  apocryphes  de 
saint  Pierre,  les  écrits  connus  sous  le  nom  de  littérature 
clémentine,  etc.  .Néanmoins,  ces  sources  de  second 
ordre  contiennent  elles-mêmes  quelques  faits  histori- 
ques, qui  se  dégagent  assez  facilement,  grâce  à  la  tra- 
dition sérieuse  et  à  la  critique,  des  fables  dont  ils  sont 
entourés.  Il  faut  noter  encore  que  la  tradition  propre- 
ment dite  nous  fournit  des  données  assez  restreintes 
sur  la  vie  et  le  ministère  apostolique  de  saint  Pierre.  Du 
moins,  elle  nous  renseigne  très  clairement  sur  les  points 
essentiels 

/.    LA  PREMIERE  PÉRIODE  UE   LA  VIE  DE  >'.4/.V2  PIERRE. 

—  A  ce  sujet,  la  tradition  se  borne  à  quelques  points 
d'importance  très  secondaire.  La  mère  de  Simon  se 
serait  nommée  Johanna.  Cf.  Cotelier,  Constit.  apost.,  n, 
63,  t.  I,  col.  755.  Sa  femme  aurait  porté  le  nom  de  Per- 
pétue ou  celui  de  Concordia  qui  ne  conviennent  pas  ;i 
une  Juive,  l'atr.  gr.,  t.  i,  col.  1365,  note  43.  D'après 
saint  Jérôme,  Adv.  Jovinian.,  i,  26,  t.  xxm,  col.  245, 
elle  serait  morte  d'assez  bonne  heure,  avant  que  Pierre 
ne  devint  le  disciple  de  Jésus.  Au  contraire,  au  dire  de 
Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  vu,  11,  t.ix,  col.  488,  elle 
aurait  subi  le  martyre  à  Rome,  peu  de  temps  avant  lui. 
Il  l'aurait  accompagnée  au  lieu  du  supplice,  en  l'encou- 
rageant par  ces  paroles  :  8  0  toi,  souviens-toi  du  Sei- 
gneur. »  Plusieurs  adoptent  ce  dernier  sentiment  en 
concluant  de  1  Cor.,  ix,  5,  que  saint  Pierre,  comme 
d'autres  apôtres,  se  faisait  accompagner,  durant  ses 
courses  apostoliques,  par  sa  femme,  traitée  comme  une 
sieur.  Saint  Jérôme,  loc.  cit.,  mentionne  une  tradition 
d'après  laquelle  Pierre  aurait  eu  plusieurs  enfants. 
Cf.  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  m,  6,  t.  vu,  col.  1 156. 
On  lui  a  longtemps  attribué  une  fille  du  nom  de  Pélro- 
nille,  que  mentionnent  les  Acla  A'erei  et  Achillet,  15. 
et  les  Acta  Philippi.  Tisçhendorf,  Apocal.  apocr.,  p.  149, 
155.  Mais  on  reconnaît  généralement  aujourd'hui  que 
cette  attribution  provient  simplement  d'une  fausse  éty- 
mologie.  En  effet,  le  nom  «  Petronilla  o  ne  dérive  pas  de 
«  Petrus  »,  mais  de  «  Petronius  ».  Par  son  père,  sainte 
Pétronilie  appartenait  à  la  célèbre  «  gens  Flavia  »,  c'est 
pour  ce  motif  qu'elle  fut  enterrée  dans  la  catacombe  de 
Domitilla.  Voir  Lightfoot,  St.  Clément  of  Borne,  1. 1,  p.  37; 
F.  X.  Kraus,  Real-Encijclopxdia  der  christl.  Alterthû- 
mer,  t.  n,  p.  607;  Acta  sanetorum,  maii  I.  vu,  p.  420. 
//.    QUELQUES    VOIACES  DU    PRIME    DES    APOTRES.   — 

1°  Nous  venons  de  le  voir,  saint  Paul  fait  une  allusion 
très  claire  aux  courses  apostoliques  de  saint  Pierre. 
Notre  héros  serait-il  allé  à  Corinthe?  Saint  Denys, 
évèque  de  cette  ville  vers  le  milieu  du  mesiècle,  l'affirme 
comme  une  chose  très  connue.  Voir  Eusèbe.  //.  E.,  II, 
25,  t.  xx,  col.  209.  S'adressant  aux  Romains,  il  leur  dit: 
«  (Pierre  et  Paul,)  étant  entrés  dans  notre  Corinthr. 
nous  ont  instruits;  puis,  partis  ensemble  pour  l'Italie, 
après  nous  avoir  enseignés,  ils  ont  subi  le  martyre  en 
même  temps.  »  Saint  Clément  pape,  I  Cor.,  xlvii.  t.  i, 
col.  308,  semble  admettre  aussi  ce  séjour  de  saint  Pierre 
à  Corinthe.  Néanmoins,  la  plupart  des  critiques  con- 
temporains le  mettent  au  rang  des  hypothèses. 

2°  On  regarde  aussi,  d'une  manière  assez  générale, 
comme  peu  fondé  le  sentiment,  d'ailleurs  très  ancien, 
d'après  lequel  saint  Pierre  aurait  évangélisé  les  cinq 
provinces  d'Asie  Mineure  auxquelles  est  adressée  sa 
première  Épilre  ;  le  Pont,  la  Galatie,  la  Cappadoce, 
l'Asie  proconsulaire  et  la  Bithynie.  I  Pet.,  I,  1.  Ori- 
gène, qui  est  le  premier  à  mentionner  cette  opinion,  lu 
Gen.,  m,  t.  xii,  col.  92;  cf.  Eusèbe.  H.  E.,  m,  1,  t.  XX, 
col.  216,  en  parle  comme  d'une  simple  conjecture,  basée 
seulement  sur  ce  que  saint  Pierre  a  écrit  aux  chrétiens 
de  ces  provinces  ;  «  Pierre  parait  (îoixev)  avoir  prêché 
dans  le  l'ont,  la  Galatie...  »  Eusèbe  fait  de  même, II. E.r 


371 


PIERRE    (SAINT) 


372 


m.  4,  t.  xx,  col. '2-20:  g  Que  Pierreait  prêché  le  Christ... 
dans  ces  provinces,  cela  ressort  ouvertement  de  l'Épi- 
tre.  »  Saint  Épipbane,  User.,  xxvn.  6,  t.  xu.  col.  374, 
saint  Jérôme,  De  Vir  M.,  1,  t.  xxm.  col.  138,  et  saint 
Léon,  In  Nat.  apost.  Pétri  et  Pauli  serin.,  i.xxmi,  5, 
t.  i.iv,  col.  iJô.  présentent  le  fait  en  termes  positifs; 
mais  ils  ne  paraissent  pas  avoir  eux-mêmes  appuyé  leur 
sentiment  sur  d'autre  preuve  que  la  mention  des  cinq 
provinces  dans  l'Épitre.  Du  reste,  cette  lettre  ne  contient 
aucun  détail  duquel  on  puisse  conclure  que  l'auteur 
connaissait  personnellement  les  destinataires;  elle  sup- 
pose plutôt,  I  Pet.,i.  12,  25;  v,  12;  cf.  11  Pet.,  m.  2,  que 
ceux-ci  avaient  été  évangélisés  par  d'autres  prédicateurs 
que  saint  Pierre.  Aussi  est-il  mieux  de  dire  que,  si  un 
séjour  du  prince  des  Apôtres  en  Asie  Mineure  n'est  pas 
impossible  en  soi.  il  ne  parait  pas  avoir  été  démontré 
historiquement.  Voir  Cornely,  Introd.,  t.  h,  3e  part., 
p.  619;  Lipsius,  Apokr.  Aposlelgesch.,  t.  n,  Ie  part., 
|i.  i  (i.  M.  Hundhausen,  Das  ersie  Ponti/icalschreiben 
des...  l'elrus,  1873,  p.  96,  croit  à  la  prédication  de  saint 
Pierre  en  Asie  Mineure,  tout  en  admettant  que  l'apôtre 
ne  lit  que  traverser  rapidement  les  provinces  en 
question. 

3  On  a  prétendu  aussi,  mais  seulement  à  partir  du 
XVIe  siècle,  que  saint  Pierre  serait  allé  et  aurait  séjourné 
à  Babylone,  vers  la  lin  de  sa  vie.  Le  motif  allègue  c'est 
que  la  7»  Pétri,  v,  13,  transmet  aux  chrétientés  d'Asie 
Mineure  les  salutations  de  l'Église  de  Babylone  (ï)  èv 
BxS'j).ûvi  auvexXextirç) ;  d'où  il  suit,  disent  les  partisans 
de  cette  opinion,  que  l'apôtre  résidait  à  Babylone  lors- 
qu'il composa  son  écrit.  C'est  Érasme,  lu  I  Pet.,  xv, 
13,  qui  inventa  le  premier  cette  explication.  De  no  n- 
breux  protestants  l'adoptèrent  aussitôt,  pour  enlever  à 
la  théorie  de  la  venue  et  du  séjour  de  saint  Pierre  à 
Home  un  de  ses  principaux  arguments.  Mais  il  n'est 
pas  douteux  que  le  nom  de  Babylone  ne  soit  pris  ici 
dans  un  sens  métaphorique.  En  effet,  —  1.  telle  a  .  té 
l'opinion  unanime  des  écrivains  ecclésiastiques  des 
pr<  miers  siècles  rentre  autres,  de  Papiasetde  Clément 
d'Alexandrie,  dans  Eusèbe,  //.  A'.,  il.  lô.  t.  XX,  col.  73, 
d'Eusèbe  lui-même,  ibid.,  de  saint  Jérôme,  De  vir.  ill.,  8, 

1.  xxm,  col.  654,  du  Vén.  Bède,  In  Petr.,  v,  13,  t.  xcin, 
col.  07.  d'Œcuménius  et  de  Théophylacte,  et  les  com- 
mentateurs catholiques  les  ont  suivis,  à  part  de  très  rares 
exceptions.  On  est  surpris  de  compter  panai  ces  excep- 
tions les  savants  et  judicieux  écrivains  Hum,.  Einleitung 
in  die  Schriflen  des  S.  T.,  .'!'  édit.,  t.  n.  p.  550,  et 
A.  Maier,  Einleit.  in  die  Schrifl.des  A'.  T.,  p.  il::.  — 

2.  Ce ji  symbolique  convenait  fort  bien  pour  désiguer 

Rome,  qui  n'avait  que  trop  parfaitement  remplacé  l'an- 
tique Babylone  sous  le  rapport  du  paganisme,  de  l'am- 
bition et  de  l'immoralité.  —  3.  Lis  Juifs  l'employaient 
couramment  dans  ce  sens.  Voir  Schoeltgen,  Hor.  hebr.  et 
tnl, mol..  |i.  1050  et  U25;  les  Oracles  sibyllins,  v,  143, 
158,  etc.  —  1.  S  uni  Jean  l'ail  de  même  dans  sou  Apoca- 
lypse, xiv,  8,  et  xvm,  2,10,  el  personne  n'a  jamais  songé 
à   prendre  a  la    lettre,  dans  cet   écrit,  le  nom  de  Baby- 

1 ■  —  5.  il  n'existe  aucune  tradition  proprement  dite 

au  sujet  d'un  voyage  de  saint  Pierre  à  Babylone,  et  ce 
silence  est  difficile  a  expliquer,  si  l'apôtre  avait  réelle- 
ment entrepris  ce  \.n ave.  Voir  P.  Martin,  Saint  Pierre, 
sa  venue  et  son  martyre  à  II, mie,  dans  la  Revue  des 
Questions  historiques,  t.  un,  1873  (article  très  docu- 
nté  -'i  rempli  de  témoignages  empruntés  à  des  écri- 
vains orientaux).  Lipsius,  il  esi  vrai.  loc.  cit.,  t.  it, 
-'  part.,  p.  145-116,  I7ô,  mentionne,  d'après  Assemani, 
Bibliolheca  orienlalis,  t.  m.  2a  part.,  p.  \i.  des  écri- 
vains  nestoriens,  qui  affirment  que  saint  Pierre  visita 
Babylone;  mais  ces  auteurs  sont  relativement  récents, 

i  I    leur  assertion    n'a    pas   d'autre  base  que   le    passage 

I   Pet.,  v,   13,  interprété  à  la  lettre.  Voir  Farrar,  77ie 

Days  of  Christianity,  1884,  p,  595-596;  Cornely, 

Introd.,  t.  u,3'  part., p. 621-623;  Hundhausen,  Joe.  rit.. 


p.  82-90;  Th.  Xahn,  Einleitung  in  das  N.  T.,  I.  n, 
p.  17;  Belser,  Einleitung  in  das  N.  T.,  p.  697-698.  — 
Mais  laissons  de  côté  le  faux  et  le  douteux,  pour  nous 
occuper  de  fails  réels  et  certains.  Or,  il  en  est  deux 
qu'une  tradition  très  nette  et  très  ancienne,  dont  nous 
avons  des  témoignages  multiples,  a  rendus  indubitables. 
C'est  l'installation  successive  de  la  chaire  de  saint  Pierre 
à  Antiocbe  et  à  Rome  :  deux  événements  d'une  impor- 
tance capitale. 

///.   LA   ri]  MUE    HE  SAINT  PIERRE  A    AXTIOCBB    DE    SF- 

iiii:.  —  1  "  Ce  fait  est  parfaitement  garanti  par  Eusèbe 
et  par  saint  Jérôme.  «  Pierre  fonda  la  première  Église 
d'Antioche,  »  lisons-nous  dans  le  Chronicon  d'Eusèbe, 
t.  xix,  col.  Ô39.  Il  s'agit  sans  aucun  doute,  de  la  chré- 
tienté mentionnée  Ael..  xi.  19,  et  composée  uniquement 
de  Juifs  convertis,  par  contraste  avec  la  deuxième  Église 
de  la  même  ville,  en  grande  partie  formée  de  chrétiens 
issus  du  paganisme,  et  développée  grâce  au  zèle  de 
Paul  et  de  Barnabe.  AeL.xi.  20-26.  Dans  sa  traduction 
du  Chronicon,  saint  Jérôme  n'a  pas  donné  le  sens  exact 
de  ce  passage,  car  il  dit  :  «  Petrus,  cum  prinunn  An- 
tiochenam  ecclesiam  fundasset,  »  tandis  que  le  texte 
porte,  avec  la  nuance  que  nous  venons  d'expliquer  : 
tv,"  èv  'AvtioxeMX7cpiiTii)v...4xxXï)(j!av.  Ailleurs,  U.K..  III, 
xxwi,  2,  t.  xx,  col.  288,  Eusèbe  suppose  aussi  la  trans- 
lation de  la  chaire  de  saint  Pierre  à  Antiocbe,  car  il 
affirme  qu'Evodius  succéda  en  42  au  prince  des  Apô- 
tres comme  évéque  de  cette  ville.  Saint  Jérôme,  de  son 
coté,  est  très  formel  sur  ce  même  point:  Simon  Pe- 
trus..., prinreps  Apostolorum...,  posi  episcopatùm 
[ntiochensis  ecclesiœ...  Romam  pergit.  De  vir.  ilt., 
i,  t.  XXIII,  col.  008.  Nous pouvous  citer  encore  le  témoi- 
gnage de  saint  Léon  le  Grand,  In  .Xat.  apost.  Pétri  el 
Pauli  Serni.,  i.xxxii.  5,  l.  i.i\.  col.  125  :  Jani  Anlio- 
i  henam  ecclesiam,  ubi  primum  christiani  nominis  dû- 
gnitas est  orla,  fundaveras.  Cf.  Epis(.,cvietcxiX,  l.i.iv, 
col.  1007,  I042;0rigène,flom.  v'iinZ/wc.t.xin.col.  1815; 
S.  Jean  Chrysostome,  Humilia,  in  Ignatium  martyr., 
t.  L,  col.  ô'.ll  ;  Théodoni.  Dial  [mmut.,  t.  i.xwiii. 
p.  81;  leChronic.  Pasch.,  t.  xcn,  col.  .">.">7;  les  Constit. 
ajiosl.,  vu,  i(i.  t.  i.  col.  1049;  le  Liber  pont  if.,  édit.  Du- 
chesne,  p.  ôl-ôô,  118;  la  littérature  dite  clémentine, 
dont  les  sources  remontent  au  moins  au  commence- 
i u t-ii l  du  tir  siècle,  notamment  Recognit.,  x,  08.  i.  i. 
roi.  168;  Hom.,  xx,  23,  t.  n.  col.  1452. 

2°  L'époque  et  la  durée  du  séjour  de  sainl  Pierre 
Antioche  ne  sauraient  être  déterminées  avec  certitude. 
11  est  possible,  nous  venons  de  le  voir  d'après  Eusèbe, 
[in  Pierre  ait  pris  en  mains  legouvernement  de  I  Église 
d'Antioche  des  l'année  36  de  notre  ère.  Évodius  lui 
avant  succédé'  en  12,  l'épiscopat  du  prince  des  Apôtres 
dans  I -tropole  de  la   Svric  aurait    par  là-mémo  duré' 

sept  ans.  comme  Eusèbe  l'affirme  en  propres  termes  Cf. 
s.  Grégoire  le  Grand,  EpUt.,\n,  (0,  t.  i.xxvn,  col.  899. 
Une  autre  tradition,  qui  p.uait  moins  digne  de  foi,  lui 
attribue  une  durée  de  dix  ans.  Voir  Duchesne,  I 
ponlif.,  p.  50.  ijiioi  qu'il  en  soit,  il  est  certain  que  saint 
Pierre,  même  après  s'èlre  fixé  à  Antioche,  ne  lit  pas  de 
eetle  ville  sa  résidence  exclusive,  rien  m  s'oppnsaii  ;'i 
ce  que,  de  ce  centre,  il  allât  visiter  les  chrétientés 
auxquelles  sa  présence  était  utile  ou  nécessaire.  Divers 
auteurs  ont  supposé'  que  Pierre  ne  transporta  sa  chaire 
à  Antioche  qu'après  avoir  été'  miraculeusement  délivré 
de  la  prison  où  llérode  Agrippa  l'avait  enfermé.  Act., 
xu,  1-11,  par  conséquent,  apris  l'année  43.  Mais, 
sans  compter  qu'Eusèbe  signale  une  date  de  beaucoup 
antérieure,  ce  sentiment  a  contre  lui  le  récit  des  Actes, 
qui  suppose  que,  vers  l'an  43  ou  il.  sainl  Paul  et  saint 
Barnabe  avaient  la  direction  de  l'Église  d'Antioche.!  ur 
les  relations  de  sainl  Pierre  avec  la  capitale  de  la  Syrie, 
voir  H.  Kellner,  Ihr  Fesle  Cathedra  Pétri  und  deran- 
lioclienische  Episkopat  Pétri,  dans  la  Zeitschrift  fur 
kathol.  Théologie,  Inspruck,  1889,  p.  566-575;  W.  Esser, 


373 


PIERRE    (SAINT) 


374 


Der  antiochenische  Episkopat  Pétri  und  die  Feste 
Cathedra  Pétri,  dans  le  Katholik,  1890,  t.  i.  p.  321-335, 
419-459. 

iv.  LA  iuaire  DE  SAINT  PIERRE  A  ROME.  —  1°  Pierre 
lui-même,  nous  l'avons  vu,  col.  371,  date  de  Rome,  la 
Babylone  mystique,  sa  première  Épitre.  I  Pet.,  v,  13' 
Plusieurs  Pères  apostoliques  supposent  ou  affirment, 
dans  un  langage  très  formel,  sa  \enue  et  son  apostolat 
à  Rome  :  saint  Clément,  l'un  de  ses  premiers  succes- 
seurs (vers  96),  1  ad  Cor.,  5,  t.  i,  col.  217;  saint  Ignace 
(vers  115),  ad  Rom.,  iv,  3,  t.  v,  col.  808;  Papias  (vers 
130),  dans  Eusèbe,  H.  E.,  Il,  15,  t.  xx,  col.  172.  Plus 
tard,  nous  avons,  dans  le  même  sens,  les  témoignages 
de  saint  Denys  de  Corinthe  (vers  170),  ibid.,  n,  25,  7-8, 
col.  209;  de  saint  Irénée,  venu  à  Rome  en  177,  Cont. 
hier.,  III,  i,  1  et  2,  t.  vu,  col.  845;  des  P/iilosophou- 
mena,  v,  20,  t.  xvi,  col.  3226,  part.  3;  de  Clément 
d'Alexandrie  (vers  l'an  200),  dans  Eusèbe,  II.  E.,  II,  XV, 
2,  et  VI,  xtv,  5,  t.  xx,  col.  172,  552;  du  prêtre  romain 
Caïus  (même  date),  ibid.,  n,  25,  7-8;  deTertullien  (même 
date),  De  Prsescript.,  xxxvi,  t.  Il,  col.  49;  Scoripac, 
15,  t.  n,  col.  15;  Adv.  Marc.,  IV,  5,  t.  Il,  col.  366;  plus 
tard  encore,  d'Origène  (vers  250),  Expos,  in  Gen.,  t.  ni, 
dans  Eusèbe,  H.  E.,  m,  1,  t.  xx,  col. 216;  de  saint  Cy- 
prien,  Episl.  lix  ad  Cornet.,  t.  m,  col.  806;  au  IVe 
siècle,  d'Eusèbe,  H.  E.,  II,  xiv,  6,  t.  xx,  col.  172;  De- 
monstr.  evang.,  III,  v,  65,  t.  xxn,  col.  209;  de  Lactance, 
Institut,  div.,  iv,  21,  t.  vi,  col.  516;  de  saint  Jérôme,  De 
vir.  ill.,  I,  8,  t.  xxni,  col.  651,  et  In  Gai.  Il,  11-13,  t.  wvi, 
col.  341,  etc.  Voir  sur  cette  question  Baronius,  Annal., 
ad  ann.  44  et  suiv.  ;  Tillemont,  Mémoires  pour  servir  à 
l'histoire  ecclésiastique,  édit.  de  1701,  t.  i,  p.  162; 
Nat.  Alexander,  Hist.  ecclesiaslica,  t.  m,  dissert.  XIII, 
p.  168;Dbllinger,  Clirislenthum  und  A'irc/ie,  Ratisbonne, 
1860,  p.  95-105;  Windischmann,  Vindicise  Petrinœ, 
Ratisbonne,  1836;  Ginzel,  Neue  Vnlersusch.  ùber.  den 
Episkopat  und  Marlijrtod  des  heil.  Pelrus  in  Rom,  dans 
la  (Eslerreich.  Yierteljahrschrift  fûrkalliol.  Théologie, 
1877,  p.  469;  C.  Fouard,  Saint  Pierre  et  les  premières 
années  du  christianisme,  p.  535-545;  Hundbausen,  Das 
erste  Ponliftcalschreiben  des  Pelrus,  p.  35-60;  Lecler, 
De  Romano  sancti  Pétri  episcopalu,  Louvain,  1888 
(p.  9  l'auteur  donne  une  liste  complète  des  écrivains 
catholiques  qui  ont  défendu  la  même  thèse);  Schmid, 
Pelrus  in  Rom,  oder  Nova*  vindicise  Petrinse,  Lu- 
cerne,  1892;  Eellen,  die  Apostelgeschichte,  Fribourg- 
en-I!risgau,  1892,  p.  240-241;  T.  Livius,  Ht.  Peter, 
Bishop  of  Rome,  or  the  Roman  Episcopale  of  Ihe 
Prince  of  the  Apostles,  Londres,  s.  d.  ;  Me  Giffert,  A 
Hislory  of  Chrislianily  in  the  apostolical  Age,  1897, 
p.  591-597. 

2»  La  date  du  premier  voyage  de  saint  Pierre  à  Rome 
demeurera  probablement  toujours  incertaine.  Nous 
avons  cependant,  pour  essayer  de  la  fixer,  les  docu- 
ments suivants.  —  1.  Suivant  Eusèbe,  H.  E.,  II,  xiv,  6, 
t.  xx,  col.  172,  saint  Pierre  serait  allé  à  Rome  sous  le 
règne,  de  Claude  (41-54).  Orose,  Hist.,  vu,  6,  t.  xxxi, 
col.  1078,  est  un  peu  plus  précis  :  Exordio  regni  Clau- 
dii.  D'après  la  traduction  du  Chronicon  d'Eusèbe  par 
saint  Jérôme,  H,  153,  t.  xxvn,  col.  577,  ce  voyage  aurait 
eu  lieu  la  seconde  année  du  même  règne  (42-43).  Saint 
Jérôme,  De  vir.  ill.,  1,  t.  xxm,  col.  608,  adopte  la  même 
date  pour  son  propre  compte.  La  traduction  armé- 
nienne du  Chronicon,  n,  t.  xix,  col.  539,  déclare  aussi 
qu'Evodius  succéda  en  cette  même  année  à  saint  Pierre 
sur  le  siège  épiscopal  d'Antioche.  Il  est  vrai  qu'un  peu 
plus  haut,  n,  150,  la  même  traduction  arménienne  as- 
signe à  l'an  39  l'arrivée  de  saint  Pierre  à  Rome;  mais 
il  y  a  en  cela  une  erreur  évidente.  La  date  très  nette- 
ment lixée  par  saint  Jérôme  est  selon  toute  probabilité 
la  véritable.  —  2.  Si  nous  parcourons  la  première  partie 
du  livre  des  Actes,  I,  1  ;  XII,  25,  nous  voyons  qu'il  n'y  a 
pas    de  place   pour  un  voyage   et  un  séjour  de  saint 


Pierre  à  Rome  avant  sa  délivrance  miraculeuse  de  pri- 
son, xii,  1  sq.  Or,  ce  dernier  fait  ne  saurait  s'être  passé 
antérieurement  à  la  Pàque  de  l'année  42,  puisque  Hé- 
rode  Agrippa  Ier  fut  institué  roi  de  Judée  par  l'empe- 
reur Claude,  lequel  monta  sur  le  trône  le  25 janvier  il. 
Le  même  fait  n'est  certainement  pas  postérieur  à  l'an 
44,  durant  lequel  mourut  Agrippa.  Il  est  donc  très  pos- 
sible que  le  trait  du  récit  des  Actes,  xn,  17,  «  Il  s'en 
alla  dans  un  autre  lieu,  »  se  rapporte  au  départ  de 
saint  Pierre  pour  Rome.  Voir  P.  Allard,  Histoire  des 
persécutions  pendant  les  deux  premiers  siècles,  Paris, 
1885,  p.  15;  Hundbausen,  Das  erste  Ponli/Ualschreiben 
...Petrus,  p.  16;  Felten,  Die  Apostelgeschichte  iXber- 
setzt  und  erklàrt,  1892,  p.  240,  etc.  —  3.  Alors 
même  que  cette  date  n'a  pas  le  caractère  d'une  entière 
certitude,  et  qu'elle  n'est  pas  mathématiquement  dé- 
montrable, elle  nous  parait  du  moins  très  vraisem- 
blable. Des  historiens  catholiques  assez  nombreux  l'ont 
adoptée  de  nos  jours.  Voir,  entre  autres,  Funk,  article 
Petrus  dans  le  Kirchenlexikon  de  Wetzer  et  Welte> 
2e  édition,  t.  ix,col.  1861.  Elle  coïncide  d'ailleurs  assez 
bien  avec  l'assertion  d'Apollonius  (vers  200;  dans  Eu- 
sèbe, H.  E.,  V,  xvm,  14,  t.  xx,  col.  480)  et  de  Clément 
d'Alexandrie,  Slrom.,  vi,  15,  t.  ix,  col.  264,  d'après  la- 
quelle Notre-Seigneur  aurait  enjoint  à  ses  disciples  de 
demeurer  à  Jérusalem  pendant  les  deux  premières 
années  qui  suivraient  son  ascension.  Si  Lactance,  De 
morte  persecut.,  2,  t.  vu,  col.  195,  fixe  une  date  beau- 
coup plus  tardive  (après  l'année  61),  c'est  sans  doute 
parce  qu'il  fait  allusion  au  dernier  voyage  de  saint 
Pierre  à  Rome. 

3°  La  durée  du  séjour  de  Pierre  dans  la  capitale  du 
monde  romain  ne  saurait  être  non  plus  déterminée 
avec  certitude;  les  bases  chronologiques  ne  sont  pas 
assez  sures  pour  cela.  Voici  les  faits  principaux.  Dans 
la  version  arménienne  du  Chronicon  d'Eusèbe,  t.  xix, 
col.  539,  on  doit  lire  :  «  Le  chef  de  l'Eglise  demeura  là 
(à  Home)  pendant  vingt-cinq  ans.  »  C'est  ce  que  porte  la 
version  latine  de  saint  Jérôme,  t.  xxvn,  col.  571  :  Vigintî 
quinque  annis  ejusdem  urbis  episcopus  persévérât.  Le 
saint  docteur  nous  fait  connaître  en  ces  termes  son 
sentiment  personnel,  De  vir.  ill.,  1,  t.  xxm,  col.  607  : 
Romani  pergit,  ibique  viginli  quinque  annis  cathe- 
dram  sacerdotalem  tenuit,  usque  ad  ullimum  aunniii 
Neronis,  id  est,  quartum  decimum  (l'an  67  de  notre 
ère).  Cette  durée  de  vingt-cinq  ans  pour  le  pontificat 
romain  de  Pierre  est  aussi  mentionnée  dans  les  diffé- 
rentes éditions  du  Liber  pontificalis.  Voir  celle  de 
M9r  Duchesne,  p.  xx,  2,  50,  118.  Toutefois,  les  détails 
par  lesquels  le  fait  est  développé  dans  cet  écrit  célèbre 
varient  au  point  d'être  contradictoires.  Il  n'en  demeure 
pas  moins  frappant  de  constater  que,  de  très  bonne 
heure  (dès  le  IIe  siècle,  d'après  Funk,  l.  c,  col.  1864), 
on  mentionne  cette  durée  de  vingt-cinq  ans.  Nous  pou- 
vons donc  fort  bien  admettre,  en  nous  conformant 
aux  données  d'Eusèbe  et  de  saint  Jérôme,  qui  parais- 
sent résumer  les  anciens  témoignages  sur  ce  point,  que 
saint  Pierre  fut  évêque  de  Rome  entre  les  années  42 
et  67. 

4°  De  son  activité  apostolique  dans  la  capitale  des  Cé- 
sars, il  ne  nous  est  parvenu  que  trois  détails.  D'abord, 
comme  il  fallait  s'y  attendre,  les  épreuves  ne  lui  man- 
quèrent pas,  ainsi  que  l'affirme  saint  Clément,  /  ad  Cor., 
v,  4,  t.  i,  col.  217.  En  second  lieu,  sa  prédication 
obtint  un  merveilleux  succès.  Comme  nous  l'apprend 
Eusèbe,  H.  E.,  Il,  15,  t.  xx,  col.  172,  en  s'appuyant  sur 
les  témoignages  de  Papias  et  de  Clément  d'Alexandrie 
(voir,  de  ce  dernier,  Hypotypos.,  VI,  dans  Eusèbe, 
H.  E.',  VI,  xiv,  t.  xx,  col.  552),  les  fidèles  de  Rome  de- 
meurèrent toujours  avides  de  l'entendre,  et  ils  for- 
cèrent  instamment  son  disciple  saint  Marc  de  la  mettre 
par  écrit,  pour  qu'ils  n'en  perdissent  jamais  le  souve- 
nir. C'est  ce  qui  occasionna  la  composition  du  second 


3î 


PIERRE    (SAINT) 


376 


Évangile.  En  troisième  lieu,  il  eut  probablement,  tout 
à  fait  à  la  lin  de  sa  vie.  une  nouvelle  rencontre  avec 
Simon  le  magicien.  Bien  que  les  détails  qui  entourent 
cet  épisode  dans  la  littérature  clémentine  et  dans  les 
autres  i  crits  apocryphes  soient  légendaires  en  grande 
partie,  le  fait  même  est  atteste  et  regardé  comme  his- 
torique par  des  écrivains  ecclésiastiques  aussi  anciens 
que  judicieux,  tels  que  saint  Irénée,  Tertullien,  saint 
Hippohte,  Eusèbe,  etc.;  c'est  pourquoi  divers  critiques 
contemporains  en  parlent  connue  d'un  événement  cer- 
tain, tout  en  le  dégageant  des  fables  dont  il  est  envi- 
ronné ;  d'autres,  il  est  vrai,  le  rejettent  totalement. 
Voir  C.  Fouard,  Saint  Pierre;  p.  551,  L.  Duchesne, 
Les  Origines  chrétiennes,  p.  87-113,  etc.  En  tout  cas, 
il  est  bien  évident  que  le  prince  des  Apôtres,  même 
après  s'être  installé  à  Rome,  n'y  séjournait  pas  per- 
pétuellement ;  il  s'en  allait  parfois,  lorsque  les  besoins 
de  l'Eglise  réclamaient  ailleurs  sa  présence.  C'est 
ainsi  que  nous  le  trouvons  a  .lérusalem,  pour  l'assem- 
blée qui  s'j  tint  vers  l'an  50,  Act.,  i.  15  et  à  Antiocbe 
un  peu  plus  lard.  Gai.,  Il,  11. 

v.  LES  DBBX1BRS  IXCIDBSTS  ni-  S  I  VIE  ;  SON  MAKJIIil 
i:  i  SOA  VO  il  DE  AU.  —  1'  Hien  n'est  complètement  cer- 
tain non  plus  sur  les  faits  qm  précédèrent  immédiate- 
ment la  mort  de  saint  Pierre.  Arrêté  par  l'ordre  de 
.Néron,  il  lut.  d'après  une  tradition  longtemps  en  hon- 
neur, mais  aujourd'hui  battue  en  brèche  (voir  Kraus, 
Real-Encyklopâdie  der  chrisll.  Alterthûmer,  t.  n, 
p.  611),  jeté  dans  le  cachot  nommé-  Tullianiim,  dans 
I  obscur  caveau  de  la  prison  Mamertine,  au  pied  du 
•  -qiitole.  Voir  II.  Grisar,  Histoire  de  Hume,  trad.  Ledos, 

i9oe,  1. 1.  p.  207-210. 

-'  I.e  théâtre  de  sa  mort  l'ut  Rome  :  il  n'y  pas  le 
moindre  doute  sur  ce  point.  Nous  en  avons  pour  ga- 
rants saint  Clément  pape,  /  ad  Cor.,  v  et  vi.  l.  i.  cul  217. 
220;  Caïus  dans  I  usèbe,  //.  E..  II,  xxv.  t.  xx,  col.  209; 
S.  Denys  .le  Corinlbe,  ibid.,  II.  xxv.  8;  Origène,  ibid., 
M,  i.  I.  col.  210;  Tertullien,  Adv.  Marc.  iv.  5.  t.  n. 
col.  375;Eusèbe,  Demonstr.  evang.,  III.  v,  65.  t.  \\n. 
col.  209;  saint  Jérôme,  h-  .  -, .  il/.,  I.  t.  xxiii,  col.  608; 
île  même  les  Acta  Pelri  ci  Pauli  (Tischendorf,  Acla 
Al-ostolorum  apocrypha,  Leipzig,  1851,  p.  35),  la  lit- 
térature clémentine.  Voir  Clemenlinœ,  édit,  de  Lagai  de, 
Leipzig,  1865,  p.  0.  Le  témoignage  des  Clémentines 
esl  remarquable;  en  effet,  les  hérétiques  qui  les  ont 
composa  e-  aiiraieni  (liflicilement  songé  d'eux-mêmes  a 
faire  mourir  saint  Pierre  à  Rome,  si  le  l'ait  n'avait  pas 
été  réel.  Il  est  Ira  ppa  ni  aussi  île  voir  que  «si  plusieurs 
r-glisi  -  revendiquent  l'honneur  d'avoir  été  fondées  par 
Pierre,  aucune,  sauf  Rome,  n'a  revendiqué  la  gloire 
île  son  martyre,  i  A.  Brun,  L'Apôtre  Pierre,  p.  OU.  note  I . 
L'endroit  spécial  de  Home  ou  le  vicaire  du  Christ  subit 
le  martyre  ne  lui  probablement  pas  l'emplacement 
actuel  de  l'Eglise  San  Pietro  inMontorio,  sur  lejanicule, 
mais  celui  de  la  basilique  de  saint  Pierre,  sur  la  col- 
line vaticane.  Voir  Marucchi,  Élément!  d'archéologie 
chrétienne,  t.  t.  p.  11. 

•">  Pierre  subil  le  martyre  pourson  Maitre,  comme  ce- 
lui-ci le  lui  avait  prédit    Joa.,  \xi.  -2-1.  Voir  Denys  de 
Corinthe  el  Caïus,  /.  c-.;  Tertullien,  Adv.  Marc,  tv,  5. 
t.  II.  cul.  .175.  Son  genre  de  mort  fut  le  crucifiement, 
ainsi    que    nous    l'apprennent    Origène,    dans    Eusèbe, 
H.E.,  III,  i,  2,  t.  sx,  col.  216;  Tertullien,  l><  prsescript., 
MO.  t.  i.  col.   ioi.  ei  Scorpiae.,  15.  l.  u,  cul.  151;  saint 
Jérôme,  Devir.  ilt.,  15,  t.  xxiii,  col.  631  ;  Eusèbe,  Dem. 
evang.,  III.  v.  05.  l.  xxii,  col.  209.  etc.  Origène  el  saint 
te  ajoutent   que,  sur  sa   demande,   le  prince  des 
s  lui  crucifié  la  tête  en  bas,  pour  n'être  pas  égalé 
Maître.  Sénèque,  Consul.  ail  Marc,  20,  mentionne 
en  termes  formels  cetle  aggravation  du  crucifiement, 

ni  usitée  de  son  temps.  D'après  l'explication 
la  plus  naturelle,  c'est  bien  le  supplice  de  la  croix  qui 
est  désigné  dans  la  prophétie  du  Sauveur,  Joa.,  XXI,  22  : 


«  Tu  étendras  les  bras...  «  C'est  ce  que  reconnaissait 
déjà  Tertullien.  Scorpiae,  15,  t.  i.  col.  151  :  Tune 
Peints  ah  at/cm  cingitur,  cum  cruci  adstringitur. 

4°   La  date  de   s;,   mort.   —    Suivant  Mfl'    Duchesne, 
Histoire  ancienne  de  l'Église,  Paris,   1906.  t.  i.  p.   01. 
«  c'est...  en  64  qu'il  convient  de  placer  son  martyre.  •■ 
Le  savant  historien  ajoute  dans  une  note  :  i  Eusèbe  le 
met  en  67  ou  68:   cependant,   comme    il   indique   en 
même  temps  la  persécution  de  Néron,  son  attribution 
n'est  pas  sans  ambiguité.  La  persécution   de  Néron... 
commença   à  l'été  de  04.    »   .Nous   préférons  nous  en 
tenir  à  la  date  d'Eusèbe,  et  tout  spécialement  à  l'année 
67,  la  quatorzième  du  règne  de  .Néron,  qui  est  adoptée 
par  saint  Jérôme  et  par  la   plupart  des  historiens  mo- 
dernes   et  contemporains.   Voir   Gains,   Das  Jaltr  des 
Martyrlodes  der  Apostel  Parus   e,,,/  Paulus,   Halis- 
bonne,  1867;  A.  Bartolini.  Sopra   Vanne  ti~    dcll    era 
volgare,  se  fosse  quel  del  martirio  dé  gloiiosi  apostoli, 
Rome,    1868.   D'après  saint  Épiphane,   User.,   xxvn.  6, 
t.   xli,   col.  373.    c'est    dès    la    douzième    année    de 
Néron  (en  00 1,  qu'aurait  eu  lieu  le  martyre  de  saint  Pierre. 
Déjà  le  catalogue  libérien  cite  le  29  juin  comme  le  jour 
de  cette  glorieuse  mort.  Les  Acta  Pétri  el  Pauli  font 
de  même.  Cf.  Tischendorf,  Acla  Apostol.  apocr.,p.  39. 
On  ne  saurait   faire   rigoureusement  la  preuve;    mais 
d'assez   nombreux   critiques    acceptent   cette    ancienne 
donnée  comme  véritable.   Voir   Erbes,  Die  Todestage 
der  Apostel  Paulus   und  Petrus,  dans  les  Texte  und 
Vntersuchungen,  nouvelle  série,  t.  iv,  h    partie.  1899. 
•">   Saint  Pierre  subit-il   le  martyre  eu  même  temps 
que  saint    Paul'.'  Plusieurs   anciens   auteurs   le   d 
formellement;  entre  autres,   Denys   de  Corinthe.  dans 
Eusèbe.  //.  E.,  II,  xxv,  t.  xx,  cul.  209  .      Us  ont  rendu 
témoignage  à  la   même  époque,  i    xerrâ  -.'ri  kÙtov  y.a.o-y,. 
Cf.  Eusèbe,  Cl,, -a nie.,  traduction  armén.,  I.  xix. col.  524, 
et    traduct.  de  saint   Jérôme,    t.    xxvn.  col.  589.   Saint 
Jérôme,    De  vir.    ill..    5.    t.    xxiit.   cul.   017.   dit,    en 
parlant  de  Paul  :   Eodem  die  .//u.  Petrus  Rom  i 
Christo  capite  truncatur.  Les  traditions  romaines  s'ex- 
priment  dans   le  même  sens.   D'autres   anciens  écri- 
vains, s.iiis  affirmer  directement  ce  l'ait,  le  supposent  : 
tels  saint  Clément  pape.  Caïus,  Origène, Tertullien,  l. c. 
iJe  nombreux  historiens  contemporains  se  rangent  a  celle 
opinion.  Voir  Funck,  dans  le  Kirchenlexikon  de  Wet- 
zer  et  Welte,  édit.  Kaulen,  l.  ix.  col.   1863.  Le   pueie 
Prudence,  Perisleph.,  12.  t.  t.x.  col.  556-557,  560,  l'ait 
mourir  saint  Paul  un  an  après  saint  Pierre.  Cf.  aussi 
saint  Augustin,  Scmi.,  ccxcv,  7,  et  Serai.,  ccclxxxj, 
I.  xxwin-xxxix.  col.  1352,  1683,  qui  ajoute  cependant 
que  le  jour  du  martyre  l'ut  le  même, 

6°  Le  prince  des  Apùlres  fut  enseveli  tout  près  du 
lieu  de  son  supplice,  sur  la  colline  Vaticane.  comme  le 
disait  déjà  le  prêtre  romain  Caïus,  dans  Eusèbe, 
//.  E..  il.  25.  t.  xx.  col.  2H7  :  I  Si  tu  veux  aller  sur 
le  Vatican  ou  sur  la  route  d'Ostie,  tu  trouvera 
trophées  (ri  cp6irai>)  de  ceux  qui  ont  fondé  cette  Égli- 
se.  -  c'est-à-dire  les  tombeaux  glorieux  de  -uni  Pi 
enterré  au  Vatican,  el  de  saint  Paul,  enseveli  pies  de  la 

via  Ostiensis  t.  Saint  Jérôme  signale  le  même  fait. 
lie  vir.  ill.,  1,  t.  xxiii,  col.  607.  Une  tradition  identique 
a  élé  conservée  parle  I.ilu  r  ponti/icalis,  édit.  Duchesne. 
p.  52-53,  158-159,  el  les  Acta  Pétri  n  Pauli,  si.  édit. 
Lipsius.  p.  216.  C'est  la  que  le  pape  Anaclet  construisit 
la  Mcinoria  beali  Pelri  [Lib.  ponlif.,  édit.  Duché 
p.  55  et  125)  ;  là  que  Constantin  bâtit  uni'  basilique,  sur 
l'emplacement  de  laquelle  s'élève  aujourd'hui  l'œuvre 
admirable  du  Bramante  ei  de  Michel-Ange. 

V.  Portrait  moral  et  physiqi  i    di    -,\i\i  Pierre; 

sun  ENSEIGNEMENT  D'APRÈS  LES  DISCOURS    l'I     IIV1;I    DES 

Actes.  —  ;.  «  m  li  rÊRB  m   prini  :  ss.  —  Il 

n'a  pas  toujours  été  décrit  exactement,  ('.est  ainsi  que 
divers  écrivains,  soit  catholiques,  suit  protestants, 
attribuent  à  l'apolre  trop  de  défauts  naturels  :  les  uns, 


377 


PIERRE    (SAINT) 


378 


pour  relover  la  puissance  de  la  grâce;  les  autres,  pour 
amoindrir  sa  valeur  personnelle.  Son  portrait  moral 
est  cependant  aisé  à  reproduire,  car  ses  grandes  lignes 
sont  esquissées  aussi  clairement  que  possible  dans  les 
récits  évangéliques  et  au  livre  des  Actes.  La  fougue, 
l'ardeur  impétueuse  en  étaient  le  trait  le  plus  saillant  :  ses 
paroles  ne  le  démontrent  pas  moins  bien  que  ses  actes. 
Voir  .Matlli.,  xvi,  22;  xvn,  4;  Marc,  xiv,  29;  Luc.,  v, 
8;  Joa.,  vi,  69;  xm,  9,  37,  etc.  A  cet  entrain  véhément, 
qui  lui  fit  si  souvent  prendre  la  parole  au  nom  des 
autres  Apôtres,  cf.  Matth.,  xv,  15;  xvi,  16;  xvm,  21; 
Marc,  i,  36;  xi,  21;  Luc,  vin,  45;  Joa.,  VI,  69-70, 
etc.,  se  joignaient  la  mobilité  et  l'impressionnabilité, 
cf.  Matth.,  xiv,  30;  Luc,  v,  8,  l'enthousiasme, 
Matth.,  xiv,  28-29,  la  candeur,  Matth.,  xvi,  22;  xvn,  4, 
la  franchise  et  la  loyauté,  Matth.,  xix,  27;  Luc,  v,  5, 
la  générosité  et  la  vaillance,  Matth.,  IV,  18-20  ; 
Joa.,'  xvm.  lit;  Act.,  n,  14;  m,  12-26,  iv,  8;  v,  29, 
etc.,  parfois  la  présomption  et  l'obstination,  Matth.,  XXVI, 
33,  la  timidité.  Gai.,  n.  11-12,  et  même  la  faiblesse. 
Matth.,  xxvi,  40,  69.  A  ces  divers  points  de  vue,  la  na- 
ture de  Pierre  reflétait  celle  des  Galiléens,  ses  compa- 
triotes, telle  que  l'historien  Josèphe  nous  l'a  décrite. 
Voir  A  ut.  juij.,  xvi.  17;  Bell.  jvd..  III,  m,  2.  Il  était 
avant  tout  un  homme  d'action,  comme  il  sut  le  montrer 
de  la  façon  la  plus  admirable  après  la  mort  de  Jésus- 
Christ.  Son  cœur  était  chaud,  généreux,  dévoué,  ainsi 
qu'on  le  voit  par  de  nombreux  passages  du  Nouveau 
Testament.  Voir  L.-CI.  Fillion,  Saint  Pierre,  p.  182-185. 

n.  SA  REPRÉSENTATION  -~rz<  I.i:s  J/il.ïl  MBNTS  FIGURÉS. 

—  Le  portrait  physique  de  saint  Pierre  est  très  souvent 
reproduit  sur  les  anciens  monuments  (sarcophages, 
mosaïques,  fonds  de  verres,  fresques  des  Catacombes). 
Voir  Smith,  Dictionary  of  Christian  Bibliography ,  t.  n, 
p.  1621;  Lipsius,  Die  apokryph.  Apostelgeschichte  tind 
Apostellegenden,  t.  n.  1"  partie,  p.  213;  F.  X.  Kraus, 
Realencyklopâdie  der  christl.  Alterthûmer,  t.  n,  p.  67 ; 
0.  Marucchi,  S.  Pietro  e  S.  Paolo  in  Rotna,  1900, 
p.  161-169. 

«  Saint  Jérôme  In  Gai.,  i,  18,  t.  xxvi,  col.  329, 
rapporte,  d'après  un  ancien  livre  apocryphe,  que 
saint  Pierre  aurait  été  chauve;  et  parfois  il  est  ligure 
comme  tel.  Mais,  sur  les  monuments  les  plus  anciens, 
il  porte  la  barbe,  dps  cheveux  courts  et  frisés;  son 
visage  est  rond;  ses  traits  sont  ordinaires,  comme 
ceux  de  la  plupart  des  gens  du  peuple;  toutefois,  quoi- 
qu'il ne  soit  nulle  part  idéalisé,  sa  physionomie  respire 
toujours  l'intelligence  et  la  bonté.  Plus  tard,  on  le  re- 
présente avec  une  tonsure  :  c'est  le  fruit  d'une  légende 
signalée  par  plusieurs  écrivains  du  VI"  ou  du  vif  siècle, 
et  suivant  laquelle  saint  Pierre  aurait  été  ignominieuse- 
ment tondu  par  les  ennemis  de  l'Évangile.  »  L.-CI. 
Fillion.  Sa,i,t  Pierre,  p.  188-189.  Voir  t.  iv,  col.  2188, 
li-.  579,  la  ligure  à  droite. 

lit.  ENSEIGNEMENT  DOCTRINAL  DES  DISCOURS  DE 
SAINT  pierre.  —  Plus  loin,  nous  aurons  à  spécifier  la 
doctrine  que  le  prince  des  Apôtres  enseigne  dans  cha- 
cune de  ses  Epitres.  Il  est  bon  d'indiquer  ici  celle  qui 
se  dégage  de  ses  huit  discours  du  livre  des  Actes.  No- 
tons cependant  qu'on  aurait  tort  de  vouloir  déterminer 
rigoureusement  par  ces  discours,  comme  on  l'a  fait 
parfois,  quel  était  l'enseignement  caractéristique  soit 
de  saint  Pierre,  soit  des  autres  Apôtres,  au  début  de 
l'histoire  de  l'Église.  On  ne  doit  pas  oublier  que  ces 
allocutions  furent  des  improvisations  rapides,  dictées 
par  les  circonstances,  qu'elles  furent  nécessairement 
brèves,  et  que  Simon-Pierre  ne  se  proposa  nullement 
d'y  développer  le  symbole  chrétien,  soit  en  général, 
soit  même  sur  tel  ou  lel  point  particulier.  Il  serait  donc 
inutile  d'y  chercher,  et  de  prétendre  y  trouver,  un  sys- 
l  n  dogmatique,  parce  que  c'est  avant  tout  une  pré- 
dication  apostolique,  dont  nous  n'avons  d'ailleurs  qu'un 
écho  nécessairement  affaibli,  quelque  fidèle  qu'il  soit. 


Cette  réserve  faite,  il  est  très  intéressant  de  les  par- 
courir, pour  les  envisager  sous  le  rapport  doctrinal. 
Voir  *B.  VVeiss,  Lehrbuch  der  bibl.  Théologie  des  N. 
T.,  4«  édit.,  Berlin,  1884,  p.  114-116,  123-144;  *Lechlei\ 
Vas  apostolische  und  nachapostolische  Zeitalter,  3e éd., 
Leipzig,  1885.  p.  225-241;  *Mc  Gifiért,  A  History  <•) 
Christianity  in  the  apostolical  Age,  1897,  p.  48-63, 
482-486;  *Bovon,  Théologie  du  Noitv.  Test.,  2e  éd., 
1905,  t.  il,  p.  51-7(1. 

Les  discours  les  plus  importants  au  point  de  vue  que 
nous  étudions  sont  :  1°  celui  que  saint  Pierre  adressa 
au  peuple  le  jour  de  la  Pentecôte,  Act.,  n,  14-40; 
2"  celui  qu'il  prononça  dans  la  cour  du  Temple,  après 
la  guérison  du  paralytique,  Act.,  m,  12-26;  3°  celui 
qu'il  adressa  au  centurion  Corneille  et  à  ses  amis. 
Act.,  x,  34-43.  En  effet,  ces  trois  allocutions  avaient  pour 
but  direct  de  gagner  les  auditeurs  à  la  foi  chrétienne. 
Néanmoins,  les  cinq  autres  discours  de  Pierre,  Act..  i, 
16-22;  iv.  8-12;  v,  29-32;  xi,  4-17;  xv,  7-11,  et  la  prière 
des  fidèles,  iv,  24-30,  sont  aussi  très  instructifs  sous  ce 
rapport.  Des  idées  dogmatiques,  morales,  apologétiques 
et  polémiques  très  variées  y  sont  exprimées.  On  a  dit  très 
justement  (B.  Weiss.  I.  e.,  p.  116)  qu'on  n'a  pas  suffi- 
samment apprécié  ces  discours  au  point  de  vue  théolo- 
gique. Ce  sont  les  documents  les  plus  anciens  que 
nous  ayons  pour  nous  renseigner  sur  la  prédication 
apostolique  au  début  de  l'histoire  de  l'Église.  Sur  leur 
authenticité,  voir  Actes  des  Apôtres,  t.  i,  col.  152. 
On  peut  les  résumer  tous  en  un  mot  très  exact  :  ils 
sont  un  témoignage  rendu  à  N.-S.  Jésus-Christ.  La 
doctrine  en  est  très  simple,  comme  le  demandaient  les 
circonstances;  elle  est  cependant  très  riche  aussi. 

1°  Rapports  de  la  religion  nouvelle  avec  celle  de 
V Ancien  Testament.  —  Ces  rapports  sont  très  intimes; 
les  deux  religions  sont  étroitement  alliées.  La  seconde 
se  rattache  à  la  première  comme  à  sa  racine,  à  sa  pré- 
paration. Saint  Pierre  est  très  formel  sur  ce  point,  et 
il  y  revient  fréquemment.  Dans  ses  discours,  comme 
plus  tard  dans  ses  écrits,  il  répète  sans  se  lasser  que 
le  christianisme  s'appuie  de  toutes  manières  sur  les 
oracles  prophétiques,  qui  l'ont  annoncé'  d'avance,  et 
dont  il  est  la  réalisation  parfaite.  Cf.  Act.,  n,  14-21, 
24-36;  iv,  11;  x,  43.  Il  cite  en  ce  sens  Moïse,  Act.,  m, 
22-23,  les  Psaumes,  Act.,  il,  25-36;  iv,  II,  les  grands 
et  les  petits  prophètes,  en  particulier  Joël,  Act.,  n,  17- 
21  ;  Jérémie,  xxxi,  34,  tous  les  oracles  de  l'Ancien 
Testament  in  globo.  Act.,  m,  24.  Ce  fait  ne  pouvait 
qu'intéresser  et  frapper  vivement  les  auditeurs  juifs  de 
l'apôtre. 

2»  La  cliristologie.  —  C'est  le  point  de  départ,  le 
point  central  et  aussi  le  terme  de  la  prédication  de 
saint  Pierre,  Jésus  est  le  Messie  prédit  par  Dieu  à  son 
peuple,  impatiemment  attendu  et  désiré  par  les  Juifs 
aux  différentes  époques  de  leur  histoire.  Act.,  m,  22. 
Dieu  l'a  en  quelque  sorte  légitimé,  accrédité  par  des 
miracles  et  des  signes  nombreux,  Act.,  n,  22,  36;  x, 
38;  il  a  fait  descendre  sur  lui  son  Esprit.  Act.,  x,  38; 
cf.  Marc,  i.  10.  Jésus  est  le  prophète  annoncé  par 
Moïse,  le  serviteur  de  Jéhovah  prédit  par  lsaïe.  Act.,  m, 
13,  26;  IV,  27,  30.  Sa  mort  ignominieuse  entrait  elle- 
même  dans  le  plan  divin.  Act.,  Il,  23;  m,  18;  IV,  11, 
25-28;  v,  30;  x,  39.  La  preuve  la  plus  frappante  de  son 
caractère  messianique  consiste  dans  sa  résurrection, 
dans  son  ascension  et  dans  sa  glorification  sublime 
auprès  de  son  père.  Act.,  H,  3335;  v,  31,  etc.  Saint 
Pierre  ne  manque  jamais  d'opposer  ces  faits  glorieux 
à  la  mort  humiliante  du  Sauveur.  Cf.  Act.,  Il,  36; 
m,  15;  iv,  10;  v,  30;  x,  40.  En  effet,  humainement 
parlant,  la  croix  de  Jésus  était  la  négation  de  son  carac- 
tère messianique,  tandis  que  sa  résurrection  en  est  la 
preuve  la  plus  convaincante;  aussi  l'apôtre  fait-il  de 
ce  dernier  mystère  le  centre  de  toute  sa  prédication. 
Cf.  Act.,  i,  8,  22;  il,  2-32,  36;  m,  15;  iv,   10;  v,  30;   x, 


379 


PIERRE  (PREMIÈRE   ÉPITRE   DE   SAINT) 


380 


42.  etc.  Vivant  et  triomphant  dans  le  ciel,  il  demeure 
toujours  uni  à  son  Église  et  lui  envoie  sans  cesse  de 
précieux  secours.  Act..  H,  33;  m,  16;  IV,  10.  Il  reviendra 
un  jour,  poissant  et  glorieux,  pour  juger  tous  les 
hommes,  Act.,  m,  26:  x.  42,  et  alors  commencera  une 
ère  de  consommation  pour  son  Église.  Il  est  la  pierre 
angulaire  sur  laquelle  repose  tout  l'édifice  chrétien. 
Act..  iv.  11.  —  Les  discours  de  Pierre  n'affirment  pas 
explicitement  et  directement  la  divinité  de  Jésus-Christ, 
mais  ils  la  supposent  constamment.  Le  point  essentiel 
consistait  à  démontrer  d'abord  aux  Juifs  que  Jésus 
était  le  Messie  depuis  longtemps  promis.  Il  est  le  Saint 
de  Dieu  par  excellence,  6  ôi'.i;  <ro'j,  Act.,  n,  27,  le 
saint  et  le  juste.  Ael.,  m,  14,  le  prince  de  la  vie,  Act.,  m. 
15,  le  Seigneur  de  toutes  choses.  Act.,  x,  36.  Il  est  le 
Seigneur  par  antonomase  (o  xdptoc),  comme  Dieu  lui- 
même,  Act.,  i,  24;  n,  20,  21,  36;  III,  20;  vu,  59-61; 
xi,  23,  24,  etc.,  ou  le  Seigneur  Jésus.  Act.,  i,  31;  îv,  33; 
xv,  11.  etc.  Dieu  était  avec  lui  d'une  manière  toute 
île,  Act.,  x.  38;  en  lui  seul  est  placé  le  salut  du 
monde.  Act..  IV,  12:  v,  31.  Assis  sur  le  trône  de  Dieu. 
il  est  évidi  mmenl  -on  égal,  De  grands  miracles  s'accom- 
plissent en  son  nom.  Act.,  m,  6,  16;  iv.  30,  etc.  A  tous 
ces  points  de  vue,  il  est  un  être  unique,  d'une  dignité 
et  d'une  puissance  extraordinaires.  Mais  il  est  homme 
aussi  :  c'est  Jésus  de  Nazareth,  «  homme  approuvé  de 
Dieu.  »  Act..  il.  22,  et,  à  ce  titre,  descendant  royil  de 
David.  Act..  il,  30. 

3^  La  sotériolugie.  —  Avec  Jésus-Christ  a  commencé 
l'ère  de  rédemption  annoncée  par  les  prophètes.  Act..  u. 
7;  m,  24;  x,  43.  Les  moyens  de  s'approprier  le  salut 
apporté  par  lui  consistent  :  —  1.  Sous  le  rapport  négatif, 
à  faire  pénitence  et  à  rompre  avec  le  péché,  Act..  II, 
38;  m,  26;  —  2.  Sous  le  rapport  positif,  à  accepter  sans 
hésitation  la  prédication  apostolique,  qui  est  la  parole 

u  lui-même.  Act..  iv.  29;  v.  32;  \.  11-12.  etc.,  à 

croire  en  Jésus-Christ  comme  au  Sauveur  depuis 
longtemps  prédit,  Act,  n,  36;  x,  13,  et  à  recevoir  le 
baptême  en  son  nom,  de  manière  à  faire  partie  de  la 
société  des  élus.  Act.,  Il,  38.  En  échange  de  cette  foi  en 
sn  personne  et  pour  rendre  plus  certaine  l'acceptation 
individuelle  du  salut.  Jésus  remet  les  péchés  des  croyants 
sincères,  Act.,  Il,  38;  m,  19;  x,  43;  il  leur  commu- 
nique son  Esprit,  selon  les  antiques  promesses,  Act..  II, 
Me  etc.;  il  leur  accorde  le  salut  éternel.  Act..  ni. 
15;  iv,  11-12;  v,  31,  etc.  Israël,  en  tant  que  peuple  de 
l'alliance,  avait  un  droit  spécial  à  la  rédemption  mes- 
sianique, cf.  Act.,  n,  39;  m,  26;  v,  31;  x,  36,  42,  etc.; 
mais  tous  les  peuples  du  monde,  sans  exception, 
devaient  \    participer   aussi.    Act.,  Il,  17.39;  III,  25;  \. 

i  35;  xv.  7.  —On  le  voit  parce  simple  sommaire,  rien 
n'est  plus  précis  que  l'enseignement  doctrinal  du  prince 
des  Apôtres,  malgré'  son  caractère  élémentaire.  Les 
Épi  Ires  nous  le  présentent  sous  une  forme  plus  large 
et  plus  complète. 

\  [,  llii'.i i:ai-ii u..  —  Voir  C.  Fouard,  Saint  Pu 

du  chrittianisnie,  Paris,   1886; 

Mb'  l.e  Camus,  L'œuvre  ''es  Apôtres,  t.  i,  Fondation  de 

l'Église  chrétienne,  Paris,    1891  :  Xavier.  Bistoria  S. 

,  1639;  P.  Scheuren,  Petrus  der  Apostelfùrst  u. 

Statthaller  Christi,  nach  der  h.Schrift,  d 

dargestellt,  Aix-la-Chapelle,  1846;  Janvier,  H ist.de saint 

Pierre,  Tours.  1*7.".;  '.I.S.  llo«son,  Studios  in  the  Life 

o/  st.  Peter,  Londres,  1883;* A.  Birks,  Studios  in  Ihe 

Life  a  acier   of   St.     Peter.    Londres.    1887; 

fer  Apostel  des  llerm,  1889; 

llenriot.  Saint  Pierre,  son  apostolat,  son  ponti/ieat,  son 

copat;  histoire,  traditions  et  légendes,  Lille.  1891; 

•  II.  G.   Tl is.    The   ApOStle  Peter,   oulline  Stmlies 

in  his  Life,  er  and  Writings,  Londres.  1904; 

L.-CI.  Fillion,  S,i,„i  Pierre.  Paris,  1906;  *A.  Brnn,  Essai 
sur  l'apôtre  Pierre,  Montauban,  1905. 

L.  Fillion. 


2.  PIERRE  (PREMIÈRE  ÉPITRE  DE  SAINT).  —  I.  La 
QUESTION  ri'AtTiiFNTiciTÉ.  —  Nous  étudierons  successi- 
vement les  preuves  extrinsèques  et  les  arguments 
intrinsèques;  puis,  nous  réfuterons  les  principales 
objections  des  néo-critiques. 

/.  PREUVE  BXTMNSÈQDB.  —  Les  témoignages  ren- 
dus à  notre  Épitre  par  les  écrivains  ecclésiastiques 
abondent  depuis  les  temps  les  plus  reculés.  Aucun  de 
ces  anciens  auteurs  «  n'a  douté  de  son  authenticité, 
ni  m. me  entendu  parler  de  doute  la  concernant  » 
(Olshausen).  Si  l'on  se  place  au  ive  siècle  et  que  l'on 
remonte  en  arrière,  on  est  tout  d'abord  frappé  de  ce 
l'ail  que,  dans  toutes  les  listes  qui  énumèrent  les  livres 
canoniques  du  .Nouveau  Testament,  à  part  une  seule, 
la  lettre  est  citée  et  attribuée  à  saint  Pierre.  C'est  le 
canon  de  Muralori  qui  l'ait  exception  :  ce  qu'il  dit 
des  i  erits  de  saint  Pierre  est  d'ailleurs  très  obscur;  il 
porte  en  cet  endroit  des  traces  visibles  de  corruption, 
et  il  est  possible  que  la  ia  Pétri  ait  été  menti 
dans  le  texte  primitif,  comme  le  pensent  des  critiques 
de  premier  ordre.  VoirTh.Zahn,  Gesch.  des  neutestam. 
Kanons,  t.  n.  I«  part.,  p.  llu.  Eusèbe,  //.  E.,  m.  25, 
t.  xx.  col.  268,  mentionne  expressément  l'Épitre  parmi 
les  livres  admis  d'une  manière  incontestable,  et  il  affirme, 
m.  3,  t.  xx,  col.  217,  que  «  les  anciens  prêtres  l'ont 
citée  dans  leurs  écrits  comme  étanl  très  authentique. 

Au  commencement  du  111e  siècle  et  dès  la  lin  du  n*, 
nous  pouvons  constater  l'étal  de  choses  suivant.  Pour 
I  Église  d'Alexandrie,  nous  avons,  d'une  part,  le  témoi- 
gnage du  docte  Clément,  qui,  non  seulement  cite  la 
lettre  et  l'attribue  à  Pierre,  Strom.,  ni.  18,  t.  vin, 
col.  1213;  Pxdagog.,  i,  6,  t.  vm,  col.  301  cf.  1  Pet,  i. 
6-9;  n.  2-3i,  mais  en  a  donné  une  brève  explii 
dans  ses  Bypotyposeis  (cf.  Eusèbe,  //.  E.,  n,  11  I, 
t.  xx.  col.  549;.  et,  d'autre  part,  l'attestation  non 
moins  claire  d'Origène,  dans  Eusèbe.  //.  E.,  VI,  25, 
s.  t.  xx,  col.  481;  —  pour  les  Eglises  d'Afrique,  le 
soil  deTertullien,  qui,  s'il  omet  de  la  men- 
tionner dans  son  énumération  des  Instrumenta  apos- 
tolica,  c'est-à-dire  des  écrits  composés  par  les  a] 
lui  emprunte,  plusieurs  passages  (cf.  De  oral.,  20,  t.  i. 
col.  1182,  et  I  Pet,  m,  3;  Scorpiace,  xiv,  t.  u,  col.  150, 
et  I  Pet,  H,  17;  voir  Rônscb,  das  Neue  Testament  Ter- 
>.  p.  556-563),  et  la  donne  expressément  comme 
l'œuvre  du  prince  des  Apôtres,  soit  de  saint  Cyprien 
(cf.  De  bono  patientiœ,  9,  t.  IV,  p.  628;  Conte,  jud.,  m, 
36,  t.  IV,  col.  756);  —  pour  les  Églises  de  Syrie,  celui  de 
la  Peschito,  dont  notre  lettre  a  toujours  fait  partie;  — 
pour  les  Églises  des  Gaules,  celui  <le  saint  Irénée,  qui 
lui  emprunte  plusieurs  citations,  en  déclaranl  qu'elle 
composée  par  sainl  Pierre  (cf.  Adv.  hier.,  IV, 
i\.  2.  t.  vu.  col.  998,  et  I  Pet,  i,  8;  ibid.,  x\i.  5, 
col.  1019,  et  I  Pet,  iv.  16);  —  pour  l'Eglise  de  Home, 
le  témoignage  de  l'Itala,  qui  a  toujours  contenu  la 
/'  Pétri,  comme  le  prouvent  les  citations  de  Tertul- 
lien  et  de  saint  Cyprien,  et  celui  de  sainl  Hippolyte 
i  i  Fragm.  in  Don.,  xn,  7,  édit.  La'garde.  185,  20,  et 
1  Pet,  l,  12). 

La  première  Épttre  de  saint  Pierre  esl  aussi  très 
fri  [uemmenl   citée  dans   le  cours  du  ir  siècle,  el  i 

I  .  ] .. ., | u .-  îles  Pores  apostoliques.  Voir  la  lettre  .1rs 
Églises  de  Lyon  el  de  Vienne,  en  177.  dans  Eu 
II.  E.,  v,  I  el  2.  t.  xx.  col.  136;  comp,  1  Pet,  v.  6 
el  8;  s.  .lusiin,  Dial.  e.  Tryph.,  103,  t.  vi,  col.  717 
(cf.  I  Pet,  v.  8);  s.  [renée,  Adv.  hier.,  i,  18,  3,  t.  vu, 
col.  645,  cf.  I  Pet,  m.  20;  Clément  d'Alexandrie, 
Strom.,  IV.  mi.  83,  et  1  Pet,  i.  12;  t.  vm.  col.  1108; 
llermas.  Vis.,  IV,  3,  1.  el  Pet,  I,  7;  Sini..  IX.  21.  3. 
xxviii.  4-7,  el  Pet.,  iv,  14-16;  Sim.,  îx.  16,  el  i 
m.  19-20;  Papias,  dans  Eusèbe,  //.  /'.'..  III.  XX\I\.  I. 
t  \\.  col.  500;  Polvcarpe.  Philipp.,  i,  2,  et  1  Pet,  i,  8; 
n.  i.  el  1  Petr.,  i,  13,  21;  n.  2,  et  I  Pet.,  m,  9;  vm,  1. 
et  1  Pet.,  n.  22,  24.  Cf.   Eusèbe,  H.  E.,   iv.   14,  t.  xx, 


381 


PIERRE    (PREMIÈRE    ÉPITRE    DE   SAINT) 


382 


col.  350;  S.  Clément  de  Rome,  1  ad  Cor.,  16,  17  et 
33,  t.  i,  col.  210,  244,  273,  et  I  Pet.,  n,  21;  xxu,  2, 
et  I  Pet.,  in,  10;  xlix.  5,  et  I  Pet.,  iv,  8.  Les  témoi- 
gnages de  Papias  et  de  saint  Polycarpe  ont  d'autant 
plus"  de  force,  que  les  Églises  gouvernées  par  eux 
(Hiérapolis  et  Smyrne)  faisaient  partie  de  la  région  à 
laquelle  est  adressée  l'Épitre.  Celui  de  saint  Clément 
a  aussi  une  grande  autorité,  la  lettre  ayant  été  composée 
à  Rome  même,  comme  il  sera  dit  plus  loin.  —  Le  témoi- 
gnage le  plus  ancien  de  tous,  et  par  suite  l'un  des  plus 
importants,  est  celui  de  la  II'  Pétri,  laquelle  se  pré- 
sente, m,  1,  comme  étant  la  seconde  lettre  de  l'apôtre 
Pierre.  Il  est  vrai  qu'il  a  existé  autrefois  des  doutes  au 
sujet  de  son  authenticité,  et  qu'un  grand  nombre  de 
critiques  hétérodoxes  la  rejettent  comme  apocryphe  (voir 
ci-dessous,  col.  402-410);  mais  elle  est  très  ancienne 
aux  yeux  de  ces  critiques  eux-mêmes,  car  ils  placent 
généralement  sa  composition  entre  les  années  88  et  90. 
Son  témoignage  demeure  donc  ferme  en  toute  hypothèse. 
Telle  est  la  preuve  extrinsèque,  qui  démontre  l'authen- 
ticité de  l'Épitre  de  saint  Pierre.  Ces  deux  faits  s'en 
dégagent  :  1"  l'Épitre  a  été  connue  de  très  bonne  heure 
dans  toute  l'Église  ;  dès  que  celle-ci  a  possédé  un  re- 
cueil de  littérature  qui  lui  fut  propre,  la  /a  Pétri  y  est 
citée  comme  un  écrit  qui  exerce  une  inlluence  consi- 
dérable; 2°  à  partir  de  saint  Irénée,  c'est  directement 
et  nommément  à  saint  Pierre  que  tous  les  auteurs  ec- 
clésiastiques attribuent  l'Épitre. 

Pour  éluder  un  si  puissant  argument,  les  adversaires 
de  l'authenticité  éprouvent,  on  le  conçoit,  un  très  grand 
embarras, et  il  ne  peuvent  lui  opposerquede  très  pauvres 
raisons.  Voir  Jûlicher,  Einleitung  in  das  N.  T.,  1894, 
p.  131.  1°  L'objection  qu'ils  tirent  du  silence  du  canon 
de  Muraturi  a  été  brièvement  réfutée  plus  haut.  2°  Ils 
s'appuient  aussi  sur  une  double  allégation  de  Pierre  de 
Sicile  (vers  870),  Historia  Manichseor.,  c  xvn.  D'après 
cet  auteur,  d'une  part,  les  «  pauliniens  »,  qui  vou- 
laient établir  un  christianisme  purement  basé  sur  la 
doctrine  de  saint  Paul,  ne  recevaient  pas  la  2a  Pétri; 
d'autre  part,  Théodore  de  Mopsueste,  suivant  une 
donnée  fournie  par  Léonce  de  Byzance  dans  son 
écrit  Contra  Keslor.  et  Eutych.,  1.  IV  (entre  5G0  et 
600).  t.  lxxxvi,  col.  1650.  aurait  abrégé  et  rejeté  les 
Épitres  catholiques.  Mais  tout  cela  ne  prouve  «  rien  du 
tout  »,  comme  l'a  fort  bien  dit  Credner,  Einleit.,  t.  il, 
p.  648;  car  les  faits  en  question  sont  d'une  date  très 
tardive.  D'ailleurs,  le  second  de  ces  faits  n'est  pas 
même  certain,  puisque  aujourd'hui  encore  les  Nes- 
toriens,  qui  ont  conservé  le  canon  biblique  de  Théo- 
dore de  Mopsueste,  regardent  la  Ire  Epitre  de  saint 
Pierre  comme  canonique.  Voir  Kihn,  Theodor  von 
Mops.,  in-8»,  Fribourg-en-Brisgau.  1880,  p.  64. 3°  En  troi- 
sième lieu,  les  néo-critiques  s'appliquent  à  affaiblir  la 
force  des  citations  faites  par  les  anciens  auteurs.  Ainsi, 
d'après  Harnack,  Chronologie,  p.  463,  saint  Polycarpe 
n'aurait  pas  regardé  notre  Épitre  comme  l'œuvre  de 
saint  Pierre,  puisqu'il  ne  la  lui  attribue  pas  nom- 
mément, tandis  qu'il  mentionne  expressément  saint 
Paul  en  lui  empruntant  des  citations.  Mais  la  con- 
clusion est  illégitime;  en  effet,  saint  Polycarpe  ne 
cite  pas  davantage  les  noms  de  saint  Jean,  des  synop- 
tiques, de  saint  Clément  pape  et  des  auteurs  de 
l'Ancien  Testament,  lorsqu'il  leur  fait  quelque  em- 
prunt. Si  lYvèque  de  Smyrne  fait  une  exception  en 
faveur  de  l'apôtre  des  Gentils,  c'est  simplement  parce 
qu'il  s'adressait  à  une  Église  fondée  par  lui. 

II.  ARGUMENTS  INTMNSBQDES.  —  Us  confirment  la 
preuve  fournie  par  la  tradition.  La  lettre  se  donne  elle- 
i.  i'iue,  i,  1,  comme  ayant  été  composée  par  o  Pierre, 
apôtre  de  Jésus-Christ  ».  Or,  de  nombreux  détails 
qu'elle  renferme  sont  en  parfait  accord  avec  ce  ren- 
seignement. Entre  autres  :  —  a)  la  mention  de  Silvain,  v, 
12,   personnage    important  qui  avait  eu  des   relations 


étroites  avec  l'Église  de  Jérusalem  et  avec  le  prince  des 
Apôtres,  Act.,  xv,  22;  —  6)  la  mention  de  saint  Marc, 
v,  13,  dont  saint  Pierre  connaissait  depuis  longtemps 
la  mère,  Act.,  xn,  12,  et  qu'il  avait  alors  auprès  de  lui 
comme  un  Mis  spirituel  et  un  compagnon  dévoué, 
voir  Eusèbe,  H.  E.,  m,  36,  t.  xx,  col.  300;  -  c)  la 
mention  de  Babylone,  v,  13,  c'est-à-dire  de  Rome, 
où  le  prince  des  Apôtres  se  trouvait  à  la  (in  de  sa 
vie.  —  (?)  v,  1  sq.,  l'auteur  désigne  certainement  par 
le  mot  TtpcaSÛTspoi  les  prêtres-évèques  préposés  aux 
chrétientés  d'Asie  Mineure  auxquelles  la  lettre  est 
adressée.  Il  se  présente  lui-même  comme  leur  (ruvitpsij- 
ë'JTEpoç.  Or,  tout  le  ton  de  la  lettre  montre  qu'il  est 
de  beaucoup  leur  supérieur  à  tous;  ce  qui  est  bien 
évident,  puisqu'il  est  le  chef  de  l'Eglise  entière.  Un 
faussaire,  bien  loin  de  parler  avec  une  telle  humilité, 
aurait  fait  valoir  hautement  le  titre  du  prince  des  apô- 
tres. —  e)  Nous  avons  à  signaler  aussi  des  allusions 
assez  fréquentes  aux  paroles  de  Jésus-Christ.  Cf.  i,  10, 
et  Luc,  x,  24-25;  i,  13,  et  Luc,  xn, 35;  1,17,  et  Matth.,  vi,  9; 
ii,17,  et  Marc, xn,  17;  m,14,etiv,  14,  avecMallh.,  v, 10-11  ; 
iv,  13,  et  Matth.,  v,  12;  v,  3,  et  Marc,  x,  42-43;  v,  6,  et 
Matth..  xxiii,  12.  Comp.  aussi  n,  6-8,  avec  Matth.,  xxi,  42, 
et  Luc,  xx,  17.  Cf.  Act.,  îv,  11.  Ce  dernier  rapproche- 
ment est  particulièrement  frappant,  car  la  combinaison 
de  la  pierre  angulaire  avec  la  pierre  de  scandale  ne  se 
trouve  qu'en  ces  quatre  passages,  dont  deux  citent  les 
paroles  de  Jésus  et  les  deux  autres  les  paroles  de  saint 
Pierre.  —  f)  Plusieurs  fois  aussi,  cf.  Pet.,  i,  19-21  ; 
il.  21-25;  m,  18-19;  iv,  1,  etc.,  l'auteur  fait  allusion  à 
divers  événements  de  la  vie  du  Sauveur,  et  même,  ce 
qui  est  encore  plus  significatif,  aux  relations  person- 
nelles qu'il  avait  eues  avec  lui.  Le  texte  I  Pet.,  i,  8  : 
«  (Jésus-Christ)  que  vous  aimez  quoique  vous  ne  l'ayez 
pas  vu,  »  semble  établir  sous  ce  rapport  une  distinction 
spéciale  entre  l'auteur  de  la  lettre  et  les  lecteurs  : 
ceux-ci  ne  connaissaient  le  Christ  que  par  ouï  dire; 
lui,  il  l'a  vu  de  ses  propres  yeux.  C'est  bien  à  tort,  on 
le  voit,  qu'on  a  accusé  la  1"  Pétri  de  «  manquer  de 
souvenirs  directs  du  ministère  et  de  l'enseignement  de 
Jésus.  »  J.  Monnier,  La  1"  Épitre  de  l'apotre  Pierre, 
Màcon.  1900,  p.  515.  Celui  qui  l'a  composée  a  été  réel- 
lement témoin  de  la  vie  publique,  de  la  passion  et  de 
la  résurrection  de  Notre-Seigneur.  S'il  parle  plus  sou- 
vent de  la  passion,  c'est  à  cause  de  l'importance  spé- 
ciale qu'avait  ce  mystère  pour  les  lecteurs,  plongés 
alors  dans  l'épreuve.  Voir  Westcott,  An  introduction 
to  the  Study  of  the  Gospels,  5e  édit.,  Londres,  1875, 
p.  174-175.  —  g)  Une  preuve  intrinsèque  qui  mérite 
toute  notre  attention,  c'est  la  ressemblance  qui  existe, 
soit  pour  le  fond,  soit  pour  la  forme,  entre  l'Epitre  et 
les  discours  de  saint  Pierre  contenus  dans  le  livre  des 
Actes.  Des  deux  côtés,  peu  de  pensées  abstraites  et 
spéculatives,  mais  les  faits  principaux  de  la  vie  du 
Sauveur,  présentés  d'une  manière  concrète  comme  la 
base  de  notre  salut.  Cf:  en  particulier  I  Pet.,  i,  10-12, 
et  Act.,  m,  18-25  et  x,  43;  I  Pet.,  i,  20,  et  Act.,  Il,  23,  et 
m,  20;  I  Pet.,  n,  4,  et  Act.,  x,  11  ;  1  Pet.,  n,  24,  et  Act., 
v,  :iO,  et  x,  39  ;  I  Pet.,  m ,  22,  et  Act.,  n,  33-34,  et  v,  31 ,  etc. 
De  part  et  d'autre  aussi,  l'auteur  aime  à  rattacher  sa 
doctrine  aux  oracles  de  l'Ancien  Testament.  Ce  trait 
est  vraiment  caractéristique.  De  nombreuses  pensées 
de  l'Épitre,  comme  celles  des  discours,  ont  un  vête- 
ment biblique.  «  On  sent  que  l'auteur  se  meut  dans  un 
domaine  familier,  et  que  sa  piété  plonge  ses  racines 
dans  la  terre  nourricière  de  l'ancienne  Alliance.  Il  en 
[Mile  la  langue,  il  en  rellète  la  pensée.  »  A.  Brun,  Essai 
sor  l'apôtre  Pierre,  p.  79.  Cf.  Lechler,  A/iost.  und 
nacltapost.  Zeilalter,  3«  éd.,  p.  140-443;  lv.  Burger, 
dans  le  Kurzgelasster  Komment.  de  Strack  et  Zoe.kler, 
A.  Test.,  4»  Abth.,  p.  153  de  la  2»  édit.  Voir  en  par- 
ticulier les  passages,  i,  16,  17,  24-25;  n,  4,  6,  7,  9, 
10,   22,  24;    m,    6,  9,    10,  11,  20;  iv,   8,    18,    etc.    - 


383 


PIERRE    (PREMIÈRE    ÉPITRE    DE    SAINT) 


3S4 


h)  L'Epitre  rellète  véritablement  le  caractère  de  saint 
Pierre,  tel  que  nous  le  révèlent  les  récits  des  Evangiles 
et  des  Actes  des  Apôtres.  Sa  personnalité  y  apparaît 
tout  entière,  comme  fait  celle  de  saint  Paul  dans  ses 
propres  lettres.  Nous  y  contemplons  l'homme  pratique, 
l'homme  d'action,  l'homme  au  tempérament  ardent  et 
généreux,  l'homme  qui  exhorte  avec  bonté,  en  em- 
ployant des  expressions  et  des  images  pittoresques. 
C'est  donc  d'une  manière  très  injuste  que  divers  cri- 
tiques regardent  notre  Epilre  comme  un  produit  litté- 
raire dénué  d'originalité.  Voiren  sens  contraire  Scharfe, 
Die  Petrinische  Strônaing  (1er  neutestam.  Lilteratvr, 
189',>.  Les  images  concrètes  et  frappantes  y  abondent; 
cf.  i.  7.  (3,  's.  28;  24;  ii.  -2,  4,  5,  etc.  L'auteur  dran  - 
lise  sou  exposition  au  moyen  d'épithètes  vigoureuses, 
i,  i.  7,  S.  19;  v.  10,  etc.  ;  il  emploie  des  verbes  compo- 
sés et  varie  les  prépositions  pour  mieux  exprimer  les 
nuances  de  sa  pensée,  i.  -,  :!.  ."■.  12,  13,  etc.;  il  a  recours 
aux  contrastes  pour  mieux  insister  sur  l'idée,  i.  6,  s. 
H:  il.  1-  7.  etc.  Tout  cela  manifeste  un  esprit  original, 
puissant,  ardent,  comme  l'était  celui  de  Simon-Pierre. 
Voir  Belser,  Einleit.,  p.  701. 

;;/.  OBJECTIONS  DES  CRITIQUES  CONTRE  L'AUTBBN- 
TICITÉ.  —  I"  Histoire  de  leurs  attaques.  —  Sans 
doute,  ces  différentes  preuves  intrinsèques  n'ont  pas 
I  ,  même  valeur  que  les  témoignages  cités  plus  haut; 
mais  elles  les  corroborent  singulièrement.  .Néanmoins. 
quoique  si  bien  accréditée  de  toutes  manières,  la 
/a  Pétri  ne  pouvait  pas  plus  échapper  que  les  autres 
parties  du  N.  T.  aux  procédés  dissolvants  de  la  critique 
rationaliste.  Déjà  Semler.  en  1781.  avait  émis  des  doutes 
sérieux  sur  l'authenticité,  que  Cludius,  un  peu  plus  la  ni. 
a  été  le  premier  à  nier  franchement,  dans  son  livre 
Uransich  tendes  Christenthums,  Alloua,  1808,  p.  296-300, 
Eichhorn,  en  1818,  a  marché  sur  ses  traces,  r.  Baur, 
Theol.  Jahrbïtcher,  1856,  t.n,p.  193-198, el  sesdisciples 
(notammenl  Schwegler,  Uas  nachapostol.  Zeilalter, 
Tubingue,  1846,  l.  n.  p.  2-16;  II.  Holtzmann,  i'.n,- 
SchenkeJ,  Itibel-Lexikon,  t.  n.  p.  195-498.;  Hilgenfi  Id 
/  ,  ,  ,,.  m  das  .Y.  T.,  p.  625-630  se  sont  particulière- 
ment distingués  parla  violence  de  leurs  attaques,  mais 
sans  pouvoir  se  mettre  d'accord  entre  eux  pour  les 
détails  de  leurs  théories,  ni  pour  la  date  de  l'Epitre,  etc. 
Celle-ci  sérail,  comme  lanl  d'autres  parties  du  .Nouveau 
Testament,  un  écrit  de  conciliation,  Unionsschrift, 
destiné  à  célébrer  l'harmonie  finalement  établie  entre 
les  deux  grands  partis  hostiles,  le  Pétrinisme  et  le 
l'aulinisme.  Elle  démontrerait,  en  même  temps,  com- 
ment i'  s  idées  pauliniennes  peuvent  être  mis<  s  a  profit 
dans  l'intérêl  du  parti  judéo-chrétien.  Baur,  loc.  cit., 
p.  219-222.  De  là  ces  réminiscences  perpètre  11 
épltres  de  sainl  Paul  qu'on  prétend  découvrir  dans  la 
/■  Pétri  (voir  plus  bas,  col.  385)  el  qui  donneraient, 
t-on,  l'impression  que  la  Lettre  provient  d'un 
disciple  de  Paul.  »  Mais,  comme  on  l'admet  univers  1 
lemenl  aujourd'hui,  a  cette  théorie    de  l'école  de  Tu- 

bing qui  esl  profondément  ébranlée  d'une  manière 

générale,  esl  réful i  particulier  dans  l'application 

qui  en  a  été  laite  à  I  l'et.  9  Harnack,  Chronologie, 
I.  i,  p.  156.  D'après  Jûlicher,  Einleit.,  p.  134-136,  de  la 
i     édit.,  la  lettre,  à  cause  de  ses  relations  avec  l'Epitre 

aux   I; ains.  aurai!  été  comptée  par  un  chrétien   qui 

résidai!  alors  a  Rome,  mais  .pri  était  originaire  d'Asie 
Mineui''.    Selon    l'on     Soden,    Hand-Comment.    r»/u 

N.  T.,  t.  m,  2e  part.,  p.  117,  la  lettre  aurait  Silvain  p ■ 

auteur.  Cf.  v,  12.  Me  Giffert,  Historyol  Chrislianily  in 
the  apo  tolical  Age,  p.  598,  l'attribue  à  sainl  Barnabe. 
D'autres  critiques  s'en  sonl  tenus  à  l'opinion  tradi- 
tionnelle, mais  en  admettant  que  l'upitreest  dans  un 
état  d'infériorité  et  de  dépendance  par  rapport  aux 
de  sainl  Paul;  ce  qu'on  explique  en  disant  que 
Pierre,  pratique  avant  tout,  n'avail  pas  une  grande 
lité  littéraire  (Bleek,  etc.),  que  c  était  un  thi  olo 


gien  médiocre  (Renan),  ou  du  moins  une  nature  «  ré- 
ceptive, impressionnable  a  (Salmon).  Suivant  Harnack, 
Lehre  der  zwôlf  Apostel,  t.  n,  p.  106-109,  et  Chrono- 
logie, t.  I,  p.  155-465,  les  premières  et  les  dernières 
lignes  de  l'Epitre,  I,  1-2;  v,  12-14,  n'appartiendraient 
pas  au  texte  primitif;  elles  auraient  été  ajoutées  à  la 
lettre,  lorsque  celle-ci  fut  officiellement  déclarée  cano- 
nique. Le  document  primitif,  i,  3-v,  11,  que  ce  fût  une 
lettre  ou  non  (ce  que  M.  Harnack  avoue  ne  pouvoir  dé- 
terminer), serait  l'œuvre  de  a  quelque  docteur  ou  pro- 
fesseur distingué  »,  qui  l'aurait  peut-être  composé  à 
Rome,  entre  les  années  83-93,  ou  même  \ingt  ans  plus 
tôt.  Toutefois,  d'une  part,  l'adresse  de  la  lettre,  qui  est 
si  concrète  et  caractéristique,  et,  d'antre  part,  la  con- 
[usion,  dont  les  détails  conviennent  si  bien  à  saint 
Pierre,  protestent  contre  cette  hypothèse  :  et  puis, 
qu'aurait  été  ce  document  original,  comme  nous  l'avons 
vu.  el  attribué  au  prince  des  apôtres  des  la  plus  haute 
antiquité?  Le  Dr  Harnack  sent  si  bien  la  faiblesse  de 
sa  conjecture,  qu'il  se  déclare  prêt,  au  cas  où  on  la 
trouverait  inexacte,  à  i  regarder  l'improbable  (c'est-à- 
dire,  ce  qui  est  improbable  à  ses  propres  yeux  i  comme 
possible,  et  a  revendiquer  l'épitre  pour  Pierre  lui- 
même,  plutôt  que  de  supposer  qu'elle  a  été-  écrite  par 
un  pseudo-Petrus.      Chronolog.,  t.  I,  p.  4(ii. 

2°  Première  objection.  —  L'argument  tiré  des  aflinit.'s 
de  la  l'  J'rt/i  avec  les  l'pilres  pauliniennes  et  l'Épitre 
de  saint  Jacques,  esl  mis  fréquemment  en  avant  par  les 
critiques  contemporains.  D'après  eux,  celte  affinité  serait 
telle,  que  la  lettre  ne  pourrait  pas  avoir  été  composée 
par  saint  Pierre,  mais  seulement  par  un  disciple  de  saint 
Paul.  Voir  McGilTert.  /.  c,  p.  593-595;  Jûlicher,  Einleit., 
p.  132-133;  11.  Holtzmann.  Einleit.,  p.  313-316.  Celte  as- 
sertion remonte  aux  dernières  années  du  xvnr  siècle; 
mais  elle  a  été  surtout  développée  au  débul  du  xix* siècle, 
par  Scbolz,  Der  schriflstell.  Werth  und  Charakter 
des  Johannes,  1811,  p.  12,  par  Eichhorn,  Einleit.  in 
das  -Y.  T.,  ISI  i.  t.  m.  §284-286.  Ce  dernier  rattache  pres- 
que toutes  les  pensées  el  les  expressions  de  la  /»  Pétri 
aux  Epilres  de  saint  Paul.  Le  savant  catholique  Hug, 
Si  lu  ift.  .'es  A".  T..  'e  édit.,  t.  n.  g  166, 
les  protestants  Scholt,  hagoge,  1830,  s  96,  de  Wette, 
Lehrbuch  der  Einleit.,  ■".  édit.,  1848,  >  172.  ri  il. 
reconnurent  aussi,  mais  avec  plus  de  mesure,  qu'il 
existe  un  certain  nombre  de  ressemblances  prémi 
entre  notre  Epitre  el  celles  de  sainl  Paul  :  sainl  Piem 
aurait  l'ail  ces  emprunts  à  dessein,  parce  qu'il  écrivait 
a  des  chrétientés  fondées  par  saint  Paul  (Hug);  ou  bien, 
il  aurait  voulu  manifester  sa  conformité  de  pei 
avec  l'àpôtré  des  Gentils,  soit  contre  les  hérétiques 
(Schott),  soit  sur  l'ensemble  de  la  doctrine  chrétienne 
(de  Wette).  Voir  aussi  la  Zeilschrift  for  wissenschaftl. 
Théologie,  1874,  p.  360-375;  1881,  p.  178-186,  332-342 
D'assez  bonne  heure  on  protesta  contre  cette  affirma- 
lion,  spécialement  ontre  -a  forme  la  plu-  exagérée,  et 
on  essaya  de  <i  Imontrer,  tantôl  dans  les  articles  de  Rc- 
Rausch,  dans  le  Krit.  Journal  de  VViner  ri  l.n- 
gelhardt,  t.  vm.  1828,  p.  396;  Lûcke,  dans  les  Theol. 
Sludii  itik.,  1833,  p.   528,    —   tantôt  dans  les 

ouvrages  propremenl  dits  MayerholT,  Hist.  krit.  Etn- 
Irit.  m  die  pétrin.  Schriften,  ls:;:,,  y.  lui;  I;.  Brûck- 
dition  remaniée  du  commentaire  de  L.  de 
Wette,  1853,  Introd.,  s,  iv;  II.  Weiss,  Der  pétrin.  Lehr- 
begriff,  p.  381,  que  -.nul  Pierre  n'a  utilisé  nulle 
pai'l  les  lettres  de  sainl  Paul,  ou  du  un. m-  que  h'  l'ait 
esl  très  douteux  el  nesaurail  être  prouvé  avec  certitude, 
(,u  enfin  m1"'  l< ,s  prétendus  emprunts  se  bornenl 

réminiscences  et  ■•  des  échos  plus  ou  i -  conscients! 

L'ouvrage  du  D'B.Weissesl  particulièrement  remar- 
quable sur  ce  point.  San-  nier  que  saint  Pierre  at 
connu  les  écrits  de  saint  Paul  et  qu'il  ait  pu  s'en  appro- 
iii  Iques  pensées ixpressiôns,  lorsqu  elles  ca- 
draient avec  le    lia  me   qu  il    avait  a    traiter,   l'auteur 


385 


PIERRE    (PREMIÈRE    ÉPITRE    DE   SAINT) 


386 


relève  en  détail  les  exagérations  dans  lesquelles  on  est 
tombé;  puis  il  restreint  le  débat  à  l'Épitre  aux  Éphé- 
siens  et  à  celle  aux  Romains  (chap.  xii-xm),  avec  les- 
quelles, dit-il,  la  /a  Pétri  présente  des  ressemblances 
très  réelles.  Ce  sentiment  est  admis  de  nos  jours  par 
un  assez  grand  nombre  de  critiques,  dont  quelques-uns 
ajoutent  l'Épitre  de  saint  Jacques  à  celles  de  saint  Paul 
aux  Romains  et  aux  Épbésiens.  Voir  Th.  Zahn,  Einleit. 
in  das  N.  T.,  t.  II,  p.  30;  Cornely,  Introd.,  t.  III,  p.  626- 
627:  Belser,  Einleit.,  p.  694. 

a)  Relations  de  la  Ia  Pétri  avec  l'Epitre  aux  Ro- 
mains. —  M.  R.  Weiss  reconnaît  qu'il  existe  des  points 
de  contact  évidents  entre  divers  passages  de  I  Pet.,  et 
les  chap.  xil-xm  de  la  lettre  aux  Romains.  De  même 
Kiibl,  Die  Briefe  Pétri,  p.  40.  Hofmann,  dans  son  com- 
mentaire de  notre  Épitre,  Die  heilig.  Schrif tendes  N. 
T.,  1875,  t.  vi,  p.  208,  mentionne  comme  des  réminis- 
cences de  l'un  ou  de  l'autre  des  deux  écrivains,  1°  le 
verbe  ffiuTxi)u.aTc'(e<r6ai  (il  n'est  pas  employé  ailleurs 
dans  le  N.  T.),  associé  dans  I  Pet.,  i,  14,  à  tïîç  npoTepov 
êni8u[uai{,  et  dans  Rom.,  xn,  2,  à™  aîiôvt  tovjtw;  2°  l'ad- 
jectif Ào-.-exô;,  employé  dans  I  Pet.,  Il,  2,  à  propos  du 
lait  de  la  divine  parole,  et  Rom.,  xn,  2,  à  propos  du 
service  de  Dieu  ;  3"  la  locution  xax'ov  àvr\  xaxoO  àitofii- 
Wi-.i;,  qu'on  trouve  identiquement  dans  I  Pet.,  m,  9.  et 
Rom.,  xn,  17.  Les  critiques  établissent  encore  les  rap- 
prochements suivants  :  I  Pet.,  n,  5,  et  Rom.,  xn,  1  ; 
I  Pet.,  n,  13-14,  et  Rom.,  xm,  1-6;  I  Pet.,  m,  8-9,  et 
Rom.,  xn,  9-10;  I  Pet.,  iv,  7,  et  Rom.,  xm,  12;  I  Pet., 
iv,  10-11,  et  Rom.,  xn,  6-S.  Ils  allèguent  encore  I  Pet., 
n,24,  et  Rom.,  vi,  2,  6,  18;  I  Pet.,  n,  6-7,  et  Rom.,  ix, 
33;  I  Pet.,  iv,  1.  et  Rom.,  vi,  6.  Il  règne  certainement 
quelque  ressemblance  entre  ces  divers  passages;  mais, 
des  deux  côtés  aussi,  il  y  a  une  indépendance  très 
réelle.  Comme  le  dit  fort  bien  le  Dr  Kùhl,  /.  c,  p.  18, 
les  ressemblances  signalées  permettent  seulement  de 
supposer  que  saint  Pierre,  qui  a  écrit  en  dernier  lieu, 
avait  lu  l'épître  aux  Romains,  et  qu'il  s'en  est  appro- 
prié, tout  en  demeurant  très  original,  des  pensées  et 
des  expressions  qui  s'harmonisaient  avec  le  but  de  sa 
lettre. 

b)  La  la  Pétri  et  l'Épitre  aux  Ephésiens.  —  «  On  a 
souvent  attiré  l'attention  sur  une  certaine  ressemblance 
de  notre  lettre  avec  l'Épitre  de  saint  Paul  aux  Éphé- 
siens.  Si  l'on  n'entend  pas  cela  d'un  emprunt  propre- 
ment dit  des  pensées,  mais  d'un  certain  accord  dans  les 
expressions,  les  concepts  et  les  constructions,  nous 
l'admettons  aussi.  »  Belser,  Einleit.,  p.  694.  De  même 
le  Dr  Zahn,  Einleit.,  t.  n,  p.  30  et  36,  qui  tire  simple- 
ment de  ce  fait  la  conclusion  que  saint  Pierre  connais- 
sait l'épitre  aux  Éphésiens,  et  que  la  I*  Pétri  est  au- 
thentique, attendu  qu'un  faussaire  de  la  première 
partie  du  second  siècle  n'aurait  eu  aucune  raison  de 
faire  des  emprunts  proprement  dits  à  saint  Paul.  On  a 
rapproché  les  uns  des  autres  les  passages  suivants  : 
I  Pet.,  i,  3,  et  Eph.,  i,  3  (début  identique,  mais  qu'on 
retrouve  dans  la  IIe  aux  Cor.;  d'ailleurs,  la  suite  diffère 
totalement  des  deux  parts;  I  Pet.,  i,  14-18,  et  Eph.,  iv, 
17-18  (exhortation  à  mener  une  vie  toute  chrétienne1  ; 
I  Pet.,  i,  20,  10-12,  et  Eph.,  i,  1;  m,  6-11  ;  1  Pet.,  n,  4- 
7,  et  Eph.,  n.  20-22;  I  Pet.,  m,  4  (xpu^To;  t?,ç  xapàitx; 
SvBpomoc),  et  Eph.,  m,  16  (='sw  av6pw7toi;);  I  Pet.,  m,  18 
(îvo  ',\)-'J.;  -fr^x-iyri  iS  8ew),  et  Eph.,  II,  18  (Si'  cojtoû 
ï/ouîv  rr|V  icpoaayiayrii  itpô;  tôv  na^ipa);  I  Pet.,  m,  22, 
et  Eph.,  i,  20-22,  etc.  Quelques  néo-critiques,  entre 
autres  Sieffert,  Hilgenfeld's  Zeitschnft,  1881,  p.  179, 
trouvent  les  ressemblances  si  nombreuses  entre  les 
ili'u\  écrits,  qu'ils  leur  attribuent  le  même  auteur,  le- 
quel ne  serait  ni  saint  Pierre  ni  saint  Paul.  Voir  aussi 
Gunkel,  Die  Schriften  des  y.  T.  neu  ùbersetzt,  1907. 
t.  n,  3e  partie,  p.  27.  Mais  cela  est  tout  à  fait  inadmis- 
sible. Voir  T.  Zahn,  Einleit.,  t.  n,  p.  36;  Knhl,  I.  c; 
Keil.  Comment,  ûber  die  Briefe  des  Peints,  p.  12-14; 

DICT.    DE  LA   BIBLE. 


B.  Weiss,  loc.  cit.,  p.  13.  Le  Dr  von  Soden,  loc.  cit.,  va 
même  jusqu'à  regarder  comme  douteux  le  point  de 
contact  de  la  ia  Pétri  avec  l'Épitre  aux  Éphésiens.  Le 
même  auteur,  Hand-Commenlar  :um  N.  T.,  t.  m, 
2e  partie,  p.  97-98,  remarque  que  l'auteur  de  la  ia  Pétri, 
tout  en  utilisant  les  œuvres  de  saint  Paul,  a  complète- 
ment laissé  de  coté  la  terminologie  de  l'apôtre  des  Gen- 
tils, et  qu'il  ne  mentionne  pas  même  les  idées  spécifi- 
quement pauliniennes.  En  résumé,  on  compte  dans  la 
7"  Pétri  environ  soixante  expressions  qu'on  ne  ren- 
contre ni  dans  saint  Paul,  ni  dans  les  autres  livres  du 
Nouveau  Testament.  Parmi  les  ressemblances  alléguées, 
plusieurs  proviennent  d'un  fonds  commun  de  pensées 
et  d'expressions  qu'aucun  auteur  chrétien  ne  pouvait 
éviter  (tels  les  mots  tiistiç,  i>7t:;,  ;Mvî,  yocpiana,  etc.). 
Dans  sa  IIe  Épitre,  m,  15,  saint  Pierre  affirme  avoir 
lu  les  Épitres  de  son  «  frère  bien-aimé  »  Paul  ;  il  est 
donc  difficile  de  ne  pas  admettre  l'existence,  dans  son 
écrit,  de  quelques  réminiscences  très  réelles;  mais 
il  demeure  toujours  indépendant,  original,  et  n'imite 
ni  de  près  ni  de  loin  d'une  manière  proprement 
dite. 

c)  La  Ia  Pétri  et  l'Epitre  de  saint  Jacques.  —  Ici 
encore,  on  signale  un  certain  nombre  de  ressemblances. 
Les  deux  Epitres  sont  adressées  aux  fidèles  de  la  6ia- 
oitopi,  I  Pet.,  i,  1,  et . lac,  i,  1;  mais  avec  de  grandes 
différences  pour  le  sens.  Le  passage  1  Pet.,  i,  6-7,  a 
beaucoup  d'analogie  avec  Jac,  i,  2-3  (noter  en  particu- 
lier l'expression  va  îoxi'u.tov  ûu-ùv  rr,;  7u'<7rsw;,  qu'on  ne 
trouve  pas  ailleurs  dans  le  N.  T.).  Cf.  aussi  I  Pet.,  n.  1, 
et  Jac,  i,21  ;  I  Pet.,  îv,  8,  et  Jac,  v,  20;  I  Pet.,  v,  5-9, 
et  Jac,  IV,  6,  10.  Mais,  dans  ces  divers  passages,  les  di- 
vergences sont  plus  grandes  que  les  ressemblances.  Il 
en  est  de  même  par  rapport  à  la  régénération  chré- 
tienne, I  Pet.,  i,  23,  et  Jac,  i,  18,  et  aux  désirs  de  la 
chair,  I  Pet.,  Il,  11,  et  Jac,  iv,  1.  La  citation  de  trois 
passages  identiques  de  l'Ancien  Testament  dans  les 
deux  écrits,  cf.  I  Pet.,  v,  5,  9,  et  Jac,  iv,  7;  I  Pet., 
iv,  8,  et  Jac,  v,  20;  I  Pet.,  i,  24-25,  et  Jac,  iv,  10-11,  ne 
prouve  pas  davantage  qu'il  existe  une  dépendance  pro- 
prement dite  entre  leurs  auteurs. 

3°  Seconde  objection.  —  Les  adversaires  de  l'authen- 
ticité font  une  autre  objection,  à  laquelle  ils  attachent 
aussi  une  grande  importance.  La  lettre  suppose,  disent- 
ils,  qu'à  l'époque  même  où  elle  fut  publiée,  les  chré- 
tiens étaient  sous  le  coup  d'une  persécution  générale 
et  officielle  dans  l'empire;  ce  qui  ne  saurait  convenir 
qu'au  règne  de  Trajan,  puisque  la  persécution  de  Xéron 
ne  dépassa  guère  les  limites  de  Rome.  Il  suit  de  là  que 
saint  Pierre,  mort  au  plus  tard  en  67,  ne  peut  pas  être 
l'auteur  de  la  lettre.  Voir  H.  Holtzmann,  Einleit-, 
3Ȏdit.,  p.  494;  Julicher,  Einleit.,  p.  135;  McGiffert, 
HUlory  of  the  apostol.  Age,  p.  596-597.  Mais  celte  ob- 
jection a  pour  base  une  fausse  interprétation  de  I  Pet., 
iv,  15-16,  et  des  passages  analogues,  i,  6;  n,  12;  ni,  9, 
15-16;  iv.  i,  12-14.  Aucun  de  ces  textes  n'exige  l'exis- 
tence d'une  persécution  sanglante  et  officiellement  or- 
ganisée par  l'empereur,  ou  par  ses  représentants  dans 
les  provinces,  soit  sous  Trajan,  soit  même  antérieure- 
ment sous  Néron.  Il  n'y  est  question  ni  de  juges  et  de 
tribunaux,  ni  de  prison,  de  supplices  ou  de  confisca- 
tions. Ce  n'est  point  de  la  part  des  autorités  constituées 
que  les  fidèles  avaient  alors  à  souffrir,  mais  de  leurs 
anciens  coreligionnaires,  qui  leur  faisaient  sentir  leur 
mécontentement  et  leur  haine  de  mille  manières,  dans  " 
les  relations  quotidiennes  de  la  vie.  Cf.  I  et  II  Thess., 
où  saint  Paul  mentionne  quelque  chose  de  semblable 
pour  les  Thessaloniciens.  Voir  aussi  Rom.,  xn,  11-16; 
Eph.,  iv,  27;  v,  15-16;  Heb.,  x,  32-3i;  Jac,  n,  13-17. 
L'auteur,  dans  ce  passage,  en  parlant  des  autorités  ci- 
viles, n'a  pas  de  reproche  spécial  à  leur  adresser;  il 
les  caractérise  même  comme  punissant  les  méchants 
et  réconfortant  les  bons.  11  aurait  difficilement  agi  de 

V.  -  13 


387 


PIERRE    (PREMIÈRE    ÉPITRE    DE    SAINT) 


388 


la  sorte,  si  elles  avaient  persécuté  ouvertement  les 
chrétiens.  —  Les  arguments  par  lesquels  les  néo-cri- 
tiques s'efforcent  de  démontrer  que  la  Ja  Pétri  n'est 
pas  l'œuvre  du  prince  des  Apôtres  n  ont  donc  rien  de 
solide. 

II.  Occasion  et  Bit  de  l'Entre.  —  Ils  ressortent  assez 
clairement  du  fond  même  de  l'écrit,  qui  les  rattache 
aux  circonstances  parmi  lesquelles  se  trouvaient  les  des- 
tinataires. —  1°  Les  Églises  d'Asie  Mineure  auxquelles 
il  est   adressé,  sans  être,  comme  il  a   été   démontré 
plus  haut  (col.   386).  sous   le  coup  d'une  persécution 
violente    et    officiellement    organisée,    avaient    néan- 
moins beaucoup   à    souffrir.    Les   païens   et  les  Juifs 
au    milieu    desquels    ils     vivaient    leur    infligeaient 
toutes  sortes    de  vexations  pénibles.    Ce  fait  n'a   rien 
d'étonnant,  quand  on  se  place  dans  la  situation  des 
membres  de  la  primitive  Kglise  :  les  nouveaux  conver- 
tis   abandonnaient    non    seulement  leurs  idoles,  leur 
culte,   leurs   superstitions,   cf.  I   Pet.,  i,    18,   mais  en 
grande  partie  aussi  leur  manière  antérieure  de  penser 
et  leur  genre  de  vie;  et  leurs  anciens  coreligionnaires 
ne  leur  pardonnaient  pas  ce  qu'ils  regardaient  comme 
une  apostasie   tout  à  la  fois   religieuse,    nationale  et 
sociale.  Voir  Tacite.  Ann.,  ii:  Suétone.   Nero,  10.  On 
leur  reprochait  aussi  leur  vie  simple,  qui  était  comme 
un  reproche  perpétuel  pour  leurs  compatriotes  païens, 
I  Pet.,  iv,  i.  et  l'on  ne  comprenait  pas  qu'ils  ne  retom- 
bassent point  dans  leurs  excès  d'autrefois.  On  les  con- 
tristait,   i,  6-7,    on  les  calomniait,  on   les  accusait  de 
crimes  divers,  n,  12,  et  m,  16  :  tout  cela,  soit  par  suite 
de  l'ignorance  et  des  préjugés,  soit  par  mauvais  vou- 
loir et  méchanceté  proprement  dite.  D'après  iv.  12,  un 
mouvement  particulier   de  haine  et  d'hostilité   venait 
d'éclater  contre  les  chrétientés  d'Asie.  Ces  vexations 
.[aient  récentes,   et  les   fidèles   n'y  étaient   pas  encore 
habitués;  de  là,  pour  eux.  le  trouble  et  le  danger  du 
découragement,  et,  par  suite,  de  l'apostasie,  car  le  dé- 
mon ne  manquerait  pas  de  mettre  à  profit  cette  situation 
pour  les  tenter,  cf.  1  Pet.,  V,  8.  Le  prince  des  Apôtres 
leur  écrivit  donc  pour  les  consoler  au  milieu  de  leurs 
épreuves  et  pour  les  affermir  dans  la  foi.  Pour  cela,  il 
leur  montre   que  la  souffrance  est  comme  la  vocation 
du  chrétien,   et   qu'elle   leur  procurera   plus   tard  une 
grande  gloire,   de  même  qu'elle   est  dès  ici-bas  pour 
eux  une  grande  grâce.  Il  les  engage  en  même  temps  à 
bien     remplir,    malgré  tout,   leurs  devoirs  envers   la 
société,  envers  eux-mêmes  et  envers  l'Église. 

2»  Comme  on  le  voit,  le  but  de  l'Kpitre  est  tout  pra- 
tique, nullement  dogmatique  ou  polémique.  L'auteur 
l'expose  lui-même  à  la  fin  de  la  lettre,  v.  12  :  »  .le 
vous  ai  brièvement  écrit,  pour  vous  exhorter  et  pour 
vous  attester  que  cette  grâce  de  Dieu  à  laquelle  vous 
êtes  attachés  est  la  véritable  (c'est-à-dire,  que  votre  reli- 
gion est  la  seule  vraie;.  Obsecrans  et  contestons 
-xyx/.x/i:>/  v.ï:  SjtijiapTuptôv)  :  ces  deux  participes 
résument  tout  le  contenu  de  1  Épitre,  où  l'exhortation 
alterne  avec  l'enseignement  proprement  dit.  Comme 
exemples  de  ces  g  attestations  »  ou  témoignages,  qui 
donnent  plus  de  poids  à  l'exhortation,  voir  i,  3-12,  18- 
21,  23,  25;  n,  3-10,  19-20;  m.  14-16:  iv,  12-11;  v,  7,  10, 
12.  L'apôtre  exhorte  ses  lecteurs,  en  pensant  à  la  situa- 
tion douloureuse  où  ils  se  trouvaient;  il  atteste  et  il 
témoigne  qu'en  dépit  des  adversités  qu'elle  occasionne, 
la  religion  chrétienue  est  la  grâce  des  grâces  pour  ses 
adeples  sincères  et  généreux,  et  qu'il  fauty  persévérer 
avec  courage.  C'est  l'exhortation  qui  domine;  elle  va 
d'un  bout  à  l'autre  de  l'Kpitre,  sous  des  formes  variées. 
Elle  porte  sur  la  sainteté,  l'obéissance,  la  charité  fra- 
ternelle et  le  support  du  prochain,  les  devoirs  envers 
la  société  et  la  famille,  la  vigilance,  et  surtout  la  pa- 
tience dans  l'épreuve.  Le  témoignage  a  pour  objet,  tan- 
tôt direct,  tantôt  indirect,  les  bienfaits  paternels  de 
Dieu   la  splendeur  de  l'héritage  réservé  aux  fidèles,  la 


force  que  procure  l'union  à  Jésus-Christ,  et  spécialement 
les  exemples  du  divin  Crucifié.  L'auteur  jette  souvent 
sur  Jésus  en  croix  un  regard  plein  d'amour.  —  l'ne 
occasion  plus  spéciale  fut  le  départ  de  Silvanus  pour 
l'Asie  Mineure.  Ce  disciple  avait  eu,  comme  compagnon 
de  saint  Paul,  des  relations  intimes  avec  quelques-unes 
des  chrétientés  de  cette  région.  Cf.  Act..  xvi,  19;  xvn, 
4,  15;  xvm,  5;  II  Cor.,  I,  19;  IV,  7-H:  1  Thess.,  i,  1, 
etc.  C'est  lui,  d'après  v,  13.  qui  fut  chargé  de  porter 
la  lettre. 

III.  Sujet.  —  L'auteur  a  précisé  lui-même  le  sujet  en 
indi juant  son  but,  v,  12.  Voir  aussi  i,  13;  v,  9-10. 
Aucune  pensée  dogmatique  ou  polémique  ne  domine 
la  lettre  et  ne  lui  communique  une  forme  spéciale, 
comme  cela  a  lieu  pour  la  plupart  des  Epitres  de 
saint  Paul.  L'opinion  contraire,  soutenue  par  l'école 
de  Tubingue.  est  aujourd'hui  complètement  abandonnée. 
Si  quelques  concepts  ont  plus  d'importance  que  les 
autres,  c'est,  d'une  part,  celui  de  la  sainteté  que 
doivent  pratiquer  les  chrétiens,  par  suite  de  leur  voca- 
tion même;  d'autre  part,  celui  de  la  souffrance  bien 
supportée,  à  l'exemple  de  Jésus-Christ  («  le  vrai  chré- 
tien dans  la  soulfrance,  d  dit  Jùlicher,  Einleit.,  I'  édit., 
p.  132V;  enfin,  celui  de  l'espérance,  car  les  amis  du 
Christ  seront  récompensés  éternellement  comme  lui. 
après  avoir  mené  une  vie  sainte,  et  supporté  comme 
lui  patiemment  les  peines  de  la  vie.  L'auteur  ne 
tache  nullement  à  exposer  les  principes;  ses  intentions 
sont  avant  tout  pratiques,  en  conformité  avec  le  but 
qui  vient  d'être  marqué.  Avant  toutes  choses,  il  se 
propose  d'exhorter  ses  lecteurs  à  demeurer  I 
dans  la  foi,  malgré  les  souffrances  qu'ils  endurent 
pour  elle.  S'il  signale  de  nombreux  points  de  doctrine 
(voir  plus  bas,  col.  394),  s'il  s  témoigne  »,  comme  il  dit. 
c'est  une  manière  transitoire  et.  secondaire,  en  tant  que 
son  témoignage  pouvait  servir  de  base  à  ses  exhorta- 
tions. Saint  Paul  sépare  d'ordinaire  1res  nettement  l.< 
partie  pratique  de  ses  Kpitres  de  la  partie  dogmatique; 
il  n'en  est  pas  de  même  de  saint  Pierre  dans  cette 
lettre,  où  l'exhortation  et  l'instruction  se  tiennent  per- 
pétuellement et  s'appuient  l'une  sur  l'autre.  Le  manque 
de  caractère  dogmatique  n'empêche  pas  cet  écrit  de 
former  un  tout  bien  compact,  et  jamais  encore  on  n'a 
songé  à  attaquer  son  unité. 

IV.  Division  et  analyse  de  l'Épître.  —  Il  n'y  a  pas 
de  plan  précis,  fant  la  pensée  est  spontanée  et  pour 
ainsi  dire  sans  préméditation.  Le  ton  est  presque 
toujours  celui  de  l'exhortation  paternelle;  ce  qui  exclut 
une  marche  systématique  des  pensées.  L'auteur  passe 
d'une  recommandation  générale  à  des  recommanda- 
tions particulières,  et  vice  versa,  sans  s'occuper  de 
mettre  un  ordre  très  logique  dans  ses  idées.  Elles  ne 
sont  pas  cependant  dépourvues  de  tout  enchaînement. 
Les  groupes  plus  ou  moins  considérables  de  vei 
qui  développent  une  même  pensée  se  rattachent  les 
uns  aux  autres,  de  manière  à  former  trois  séries  d'ex- 
hortations, encadrées  entre  un  court -préambule,  t,  1-2, 
et  une  conclusion  très  brève  aussi,  v,  12-11.  La  saluta- 
tion initiale,  I,  1-2.  se  compose  des  trois  éléments  ac- 
coutumés :  le  nom  de  l'auteur,  la  désignation  des 
destinataires,  un  souhait  pieux  et  affectueux. 

I'  La  première  des  trois  sections,  1,3-11,  10,  peut  s'inti- 
tuler :  Privilèges  accordés  par  Dieu  aux  chrétiens  et 
sainteté  qu'ils  exigent.  Elle  s'ouvre  par  une  action  de 
grâces  à  Dieu,  pour  les  dons  entièrement  gratuits  de  la 
i  gi  m  ration  spirituelle  et  du  céleste  héritage,  que 
Jésus-Christ  a  mérités  pour  les  chrétiens,  I,  3-.">;  dons 
tellement  précieux,  qu'ils  doivent  être  une  cause  pi 
tuelle  d'allégresse,  même  parmi  les  épreuves  de  la  vie, 
i.  0-9.  Les  prophètes  avaient  annoncé  depuis longu  tops 
ce  salut  apporté  aux  hommes  par  le  Christ,  et  les 
anges  sont  désireux  de  le  connaître  à  fond,  I,  10-12. 
Après   ce  beau  début,  l'apôtre  exhorte  ses  lecteurs  à 


389 


PIERRE    (PREMIÈRE    ÉPITRE    DE   SAINT) 


390 


mener  une  vie  digne  de  l'immense  bienfait  qu'ils  ont 
reçu  de  Dieu,  il  signale  tour  à  tour  la  nécessité  géné- 
rale d'une  vie  sainte,  quelques-uns  des  devoirs  spé- 
ciaux qui  en  découlent  et  le  grand  modèle  de  perfec- 
tion que  nous  devons  suivre.  Appelés  au  salut,  les  chré- 
tiens doivent  être  pleins  d'espérance  en  Dieu,  qui 
leur  a  accordé  cette  grande  faveur,  et  lui  devenir 
semblables,  en  pratiquant  la  sainteté,  i,  13-16.  L'exhor- 
tation à  la  sainteté  est  motivée  aussi  par  la  justice  di- 
vine et  par  notre  rédemption,  qui  a  coûté  la  vie  à 
Jésus-Christ,  i,  17-21;  puis  la  charité  mutuelle  des 
chrétiens  est  envisagée  comme  un  élément  de  leur 
perfection,  i,  22-25.  La  sainteté  chrétienne  étant  la 
conséquence  de  la  régénération,  il  faut  travailler  à 
l'accroitre  sans  cesse,  il,  1-3,  et  c'est  en  s'approchant 
du  Christ,  vraie  source  de  la  perfection  spirituelle,  et 
en  adhérant  intimement  à  lui,  qu'on  peut  réaliser  cet 
idéal,  il,  4-10. 

2"  La  seconde  série  d'exhortations,  H,  11-iv,  6,  envi- 
sage les  chrétiens  au  milieu  du  monde,  et  leur  rappelle 
quelques-uns  de  leurs  devoirs  généraux  et  particuliers. 
C'est  un  petit  traité  de  morale  pratique,  dont  voici  les 
principaux  détails.  Dans  une  courte  introduction,  II, 
11-12,  l'auteur  formule  une  pensée  importante  :  il  faut 
que  les  fidèles  aient  une  conduite  très  sainte,  capable 
d'édifier  même  les  païens.  De  cette  recommandation 
générale,  il  passe  à  plusieurs  domaines  spéciaux,  sur 
lesquels  les  vrais  disciples  de  Jésus  sont  tenus  de  ma- 
nifester leur  perfection.  Il  traite  successivement  des 
obligations  des  chrétiens  envers  le  pouvoir  civil,  II,  13- 
17,  des  devoirs  des  esclaves,  auxquels  il  présente  comme 
modèle  Jésus-Christ  humilié  et  outragé.  II,  18-23;  les 
relations  réciproques  des  époux,  m,  1-7.  Saint  Pierre 
revient  ensuite  à  l'exhortation  générale,  qu'il  fait  por- 
ter sur  les  points  suivants  :  sommaire  des  devoirs  du 
chrétien  à  l'égard  du  prochain,  m,  8-12;  la  fidélité  à 
Dieu  malgré  les  épreuves,  qui,  bien  supportées,  sont 
par  elles-mêmes  une  récompense  pour  le  chrétien,  m, 
13-17;  encore  l'exemple  du  Christ,  qui  a  souffert  pour 
nous,  tout  innocent  qu'il  fût,  et  qui  a  prêché  l'Évan- 
gile, non  seulement  aux  vivants,  mais  aussi  aux  âmes 
détenues  dans  les  limbes,  m,  18-22;  idéal  du  chrétien, 
qui  consiste  à  mener  une  vie  tout  exempte  de  péché, 
iv,  1-6. 

3°  La  troisième  série  d'exhortations,  iv,  7-v,  11,  ren- 
ferme des  recommandations  qui  concernent  la  vie  in- 
time des  chrétientés  particulières.  Introduite  par  cette 
transition.  «  Le  jugement  de  Dieu  approche  et  réclame 
des  dispositions  parfaites,  »  elle  entre  en  d'assez  nom- 
breux détails  pratiques,  que  l'on  peut  grouper  sous  ces 
divers  chefs  :  vertus  à  pratiquer  en  vue  de  la  proximité 
du  jugement  divin,  IV,  7-11;  confiance  en  Dieu  parmi 
les  épreuves,  car,  si  l'on  participe  aux  soulfrances  du 
Christ,  on  aura  également  part  à  sa  gloire,  iv,  12-15; 
obligations  mutuelles  des  pasteurs  et  de  leurs  ouailles, 
v,  l-5a  ;  autres  vertus  que  tous  les  chrétiens  sont  tenus  de 
pratiquer,  v,  ô''-l  1 .  —  La  lettre  se  termine  par  un  épilogue 
assez  court,  v,  12-14,  composé  d'une  petite  réflexion  de 
l'auteur  à  propos  de  son  écrit,  et  de  quelques  salu- 
tations. 

V.  Destinataikes  de  l'Épître.  —  Ils  sont  désignés 
de  la  façon  la  plus  nette  dans  le  premier  verset,  i, 
1  :  o  Aux  élus  étrangers  et  dispersés  dans  le  Pont,  la 
Galatie,  la  Cappadoce,  l'Asie  et  la  Bithynie.  »  Les  cinq 
provinces  mentionnées  faisaient  partie  de  l'Asie  Mineure, 
dont  elles  occupaient  le  nord  (le  Pont  et  la  Bithynie), 
l'ouest  (l'Asie  proconsulaire),  la  partie  centrale  et  orien- 
tal" ila  Galatie  et  la  Cappadoce).  Comme  la  province 
du  font  est  nommée  la  première,  notre  Épitre  a  porté 
aussi,  aux  temps  anciens,  dans  l'Eglise  latine,  le  nom 
de  Ei>isIola  ad  Ponlicos.  Cf.  Tertullien,  Scorpiac, 
12,  t.  il,  col.  146  ;  S.  Cyprien,  Testim.,  m,  36-37, 
t.  îv,  col.  756.  L'Evangile,  d'après  certains  commenta- 


teurs, avait  été  annoncé  dans  ces  différentes  régions 
par  saint  Paul,  et  par  ses  collaborateurs  Barnabe,  Épa- 
phras,  Silvain,  etc.,  soit  directement,  comme  en  Gala- 
tie, Act.,  xv,  40;  xvi,  6;  Gai.,  iv,  13;  en  Asie,  Act., 
xix,  1,  soit  indirectement  (des  chrétiens  de  l'Asie  pro- 
consulaire avaient  pu  porter  la  bonne  nouvelle  en 
Bithynie  et  en  Cappadoce,  comme  cela  avait  eu  lieu 
pour  la  Phrygie,  d'après  Col.,  il,  1).  Nous  avons  vu 
plus  haut  (col.  371)  .que  saint  Pierre  lui-même  a  pu 
exercer  son  ministère  apostolique  dans  l'une  ou  l'autre 
de  ces  provinces,  mais  que  le  fait  est  loin  d'ùtre  cer- 
tain, et  que  l'hypothèse  contraire  est  même  de  beau- 
coup la  plus  vraisemblable. 

Les  membres  des  Eglises  ainsi  fondées  avaient  ap- 
partenu en  grande  partie  au  paganisme.  Voir  S.  Jé- 
rôme, Adv.  Jovin.,  I,  39,  et  H,  3,  t.  xxm,  col.  275,  300, 
quoique  ailleurs  il  soit  d'un  autre  avis,  et  S.  Augus- 
tin, Cont.  Faust.,  XXII,  896,  t.  xt.ll.  col.  'i00.  Plusieurs 
passages  de  l'Épitre  rendent  cette  opinion  tout  à  fait 
certaine.  D'après  i,  14.  les  lecteurs  avaient  vécu  autre- 
fois dans  une  complète  ignorance  religieuse;  d'après  i, 
18,  leurs  ancêtres  avaient  vécu  dans  l'idolâtrie; 
d'après  H,  9-10,  Dieu  les  avait  appelés  à  sa  merveil- 
leuse lumière  et  avait  fait  d'eux  son  peuple  privilégié, 
eux  qui  n'étaient  rien  auparavant;  d'après  ni,  6,  leurs 
femmes  étaient  devenues  des  filles  de  Sara,  ce  qui 
prouve  qu'elles  ne  l'étaient  point  par  la  naissance; 
d'après  IV,  2-4,  avant  leur  conversion,  ils  s'étaient  livrés 
au  culte  des  faux  dieux  et  à  toutes  les  immoralités  du 
paganisme.  Ces  détails  ne  sauraient  convenir  à  des 
judéo-chrétiens,  mais  seulement  à  des  païens  d'origine, 
comme  l'ont  admis  et  l'admettent  encore  de  nos  jours 
la  plupart  des  interprètes  et  des  critiques.  Voir  Hund- 
hausen, 'Das  erste  Pontificalschreiben  des  Peints,  p.  45, 
note  n.  Il  n'est  donc  pas  étonnant  que  Cassiodore, 
Instit.  div.,  14,  t.  lxx,  col.  1 125  ;  Junilius  Africanus,  De 
part,  leg.,  i,  6,  t.  lxviii,  col.  16,  et  le  Codex  Fuhlensis 
aient  intitulé  notre  Épitre  :  «  ad  Gentes  ».  Cependant 
Origène,  dans  Eusèbe,  H.  E,.  m,  1,  t.  xx,  col.  216, 
Didyme  d'Alexandrie.  ïbid.,  ni,  4;  t.  xx,  col.  220;  le 
pseudo-Athanase,  Synops.,  53,  t.  xxxvin,  col.  40, 
saint  Jérôme,  De  vit:  M.,  1,  t.  xxm,  col.  638,  etc., 
croyaient  au  contraire  que  l'Épitre  avait  été  principa- 
lement composée  pour  des  chrétiens  issus  du  judaïsme. 
Leur  raison  principale  consistait  dans  une  interpréta- 
lion  inexacte  du  mot  SiaaitopSç  (dispersionis),  qu'on 
lit  à  la  première  ligne.  Comme  ce  mot  désignait  d'ordi- 
naire les  Juifs  «  dispersés  »  plus  ou  moins  loin  de  la 
Palestine,  à  travers  l'empire  romain,  cf.  II  Mach.,  1,27; 
Joa.,  vil,  35;  Jac,  i,  1,  on  a  supposé  qu'il  doit  rece- 
voir ici  sa  signification  habituelle.  Mais  saint  Pierre  l'a 
déterminé  et  précisé  par  les  expressions  èx/wcol 
TCapsTuS^iJiot,  electi  advenx,"  dont  la  première  était 
alors  une  appellation  spécifique  des  chrétiens,  choisis 
et  mis  à  part  en  vue  du  salut  futur,  I  Pet.,  n,  9; 
Rom.,  vm,  33;  Col.,  m,  12;  II  Tim.,  il,  10;  Tit.,  i,  1, 
etc.,  tandis  que  la  seconde,  d'après  l'usage  biblique,  a 
pour  but  de  rappeler  aux  destinataires  de  l'Epitre 
qu'ils  devaient  se  regarder,  à  la  manière  d'Abraham, 
Gen.,  xxm,  3,  de  Jacob,  Gen.,  lvii,  3,  comme  des 
étrangers  sur  cette  terre  d'exil,  et  avoir  constamment 
à  la  pensée  le  souvenir  de  la  céleste  patrie.  Cf.  i,  17; 
n,  11;  Heb.,  xi,  9.  Le  mot  SiacrTiopi  est  donc  pris 
ici,  non  pas  dans  le  sens  technique  qu'il  avait  autre- 
fois, mais  dans  un  sens  métaphorique,  pour  désigner 
le  nouveau  peuple  de  Dieu. 

Le  livre  des  Actes  montre  qu'il  y  avait  des  éléments 
juifs  considérables  dans  plusieurs  des  contrées  énumé- 
rées  ci-dessus.  Cf.  Act.,  xvm,  2i-28;  xix,  8-10,  etc.  Il 
est  donc  vraisemblable  qu'un  certain  nombre  des  des- 
tinataires de  la  Ja  Pétri  étaient  Israélites  de  naissance; 
mais  ils  formaient  certainement  une  minorité.  Aussi 
est-il  surprenant  que  divers  critiques  contemporains, 


391 


PIERRE   (PREMIÈRE    ÉPITRE   DE    SAINT) 


392 


B.  Weiss,  Krit.  Vntersuch.  ;u  den  kathol.  Briefen, 
1892,  et  Der  Pétrin.  Lehrbegriff,  1855,  p.  99;  Kuhl, 
Die  Briefe  Pétri,  p.  22;  Nôsgen,  Geschichte  der  neu- 
testam.  Offenbarung,  t.  II,  p.  37,  aient  repris  à  leur 
compte  le  sentiment  d'Origène,  de  Didyme,  etc.,  qui 
méritait  d'être  à  tout  jamais  abandonné.  Voir  Keil, 
Comment.  îtber  die  Briefe  des  Peints,  p.  20-24.  Voici 
leurs  principales  raisons  :  1°  Ils  s'appuient  sur  la  res- 
semblance qui  existe  entre  l'adresse  de  la  7a  Pétri  et 
celle  de  l'Épitre  de  saint  Jacques,  I.  1.  Il  est  vrai  que, 
dans  cette  dernière,  il  est  aussi  question  de  la  îia>7-oç.à  : 
mais  ce  mot  y  est  déterminé  par  l'addition  «  les  douze 
tribus  »,  qui  en  restreint  le  sens  aux  seuls  Juifs  con- 
vertis. —  2°  Ils  allèguent  que  les  pensées  et  le  six  le  de 
notre  Épitre  sont  vraiment  des  échos  de  l'Ancien  Tes- 
tament; ce  qui  conviendrait  fort  peu  à  des  lecteurs 
d'origine  païenne,  mais  seulement  à  des  destinataires 
judéo-chrétiens,  familiarisés  avec  la  loi,  les  prophètes 
et  les  Psaumes.  Nous  répondons  que  saint  Paul  cite 
assez  souvent  aussi  les  livres  de  l'Ancien  Testament  dans 
plusieurs  de  ses  lettres  adressées  à  des  païens  convertis, 
tout  spécialement  dans  I  Cor.,  II  Cor.  et  Gai.  Nous 
dirons  encore,  sur  ce  même  point,  que  les  citations  ou 
allusions  de  saint  Pierre  expriment  des  pensées  claires 
par  elles-mêmes;  il  n'était  donc  pas  nécessaire  que  les 
lecteurs  comprissent  qu'elles  étaient  empruntées  à  la 
Bible  juive.  D'ailleurs,  l'Ancien  Testament  n'était-il  pas 
lu  en  grec  dans  les  assemblées  religieuses  des  premiers 
chrétiens?  —  3°  Nos  adversaires  essaient,  mais  sans 
succès,  de  démontrer  que  les  passages  énuinérés  plus 
haut,  i,  H,  18;  n,  9-10;  m,  6;  lv,  3,  ne  conviennent 
qu'en  apparence  aux  païens  et  s'appliquent  en  réalité  à 
des  Juifs  convertis.  Mais  il  faut  faire  violence  à  ces  di- 
vers textes,  pour  obtenir  d'eux  un  tel  résultat.  Voir 
Belser,  Einleit.  in  dus  X.  T.,  p.  695-696.  —  Dans  leur 
ensemble,  les  lecteurs  avaient  été  convertis  depuis  assez 
longtemps,  puisqu'ils  avaient  leurs  prêtres  et  leur  orga- 
nisation ecclésiastique  régulière.  Cf.  V,  1-5.  Les  mots 
siei  '  modo  genili  infantes...,  h,  2.  ne  prouvent  pas 
qu'ils  venaient  de  passer  tout  récemment  au  christia- 
nisme, car  c'est  là  une  ligure  qui  peut  s'appliquera  la 
vii'  entière  de  la  plupart  des  chrétiens.  Us  formaient 
un  corps  parfaitement  constitué  parmi  leurs  voisins  de- 
meurés païens. 

VI.  Le  lieu  de  l\  composition.  —  Nous  lisons  à  la  fin 
de  l'Épitre,  V,  13  :  «  L'église  qui  est  à  Babylone  vous 
salue.  »  D'où  il  suit  que  la  lettre  a  été  écrite  de  la  ville 
qui  est  appelée  ici  Babylone.  Mais  nous  avons  démontré 
plus  haut  (col.  371),  que  ce  nom  doit  être  interprété 
d'une  manière  symbolique.  Il  ne  saurait  en  aucune 
façon  désigner  l'antique  capitale  des  Babyloniens,  à  la- 
quelle la  tradition  n'a  jamais  rattaché  un  séjour  île 
saint  Pierre.  Il  ne  saurait  non  plus  se  rapporter, 
comme  on  l'a  parfois  supposé,  a  la  cité  égyptienne  de 
Babylone,  située  près  du  Caire.  Cette  opinion  est  dénuée 
de  tout  fondemenl ,  Ce  n'esl  point  au  prince  des  Apôtres, 
mais  à  son  disciple  saint  Marc,  que  les  Églises  d  Egypte, 
et  en  particulier  celle  d'Alexandrie,  ont  toujours  attribué 
leur  origine.  La  Babylone  mystique  mentionnée  par 
l'auteur  de  l'épltre  n'est  autre  que  Rome  même,  roui  me 
le  dit  saint  Jérôme,  De  vir.  m.,  8,  t.  nuit,  col.  621. 
C'est  très  exactement  que,  malgré  les  mois  lv  BaguXûvc, 
de  nombreux  manuscrits  grecs  ont  celte  suscription 
finale  :  ëypafo  inb  'P<i>(iîjç.  Voir  Tischendorf,  A'.  Test., 
édit.  vm,  t.  ii,  p.  :«kj.  c-t  aussi  II.  Ewald,  Sieben  Setid- 
schreiben,  1890,  p.  2;  F.  Baur,  Dos  Christenthum  und 
die  christl.  Kirche,  p.  130;  Schw  egler,  Nachapostolich.es 
Zeitalter,  i.  n,  p.  16;  E.  lien. m.  L'Antéchrist,  p.  122; 
Hilgenfeld,  Einleit.,  p,  632;  II.  .1.  Holtzmann,  Einleit., 
2°  édit.,  p.  521;  Jûlicher,  Einleit.,  1811.  p.  132;  von 
Soden,  Band-Commentar  zum  N.  T..  t.  m  2  part;, 
3«  édit,,  p.  115;  Me  Giffert,  History  of  Ihe  apostolical 
Age,  p.  598. 


VII.  Date  de  l'Épitre.  —  1°  D'après  les  critiques  qui 
ne  croient  pas  à  l'authenticité,  la  lettre  aurait  été  com- 
posée :  a)  sous  Doinitien,  81-96  après  J.-C.  (von  Soden, 
entre  92  et  96;  Harnack,  entre  83  et  93,  mais  peut-être 
dès  73.  ou  même  dès  63);  6)  sous  Trajan,  96-117  (Baur, 
Keim,  Lipsius,  Plleiderer,  Jûlicher);  cl  sous  Adrien. 
1 17-138  (Zeller)  ;  </■  enlre  les  années  140  et  1 17  (  Volkmar). 
Ces  divers  sentiments  ont  été  réfutés  d'avance  par  ce 
qui  a  été  dit  au  sujet  de  l'authenticité  (col.  380).  — 
2°  Parmi  les  auteurs  qui  regardent  l'Epitre  comme 
l'oeuvre  de  saint  Pierre,  il  en  est  qui  fixent  une  date 
trop  avancée  :  entre  autres,  le  Vén.  Bède,  In  Pelr.,  v, 
13,  t.  xni,  col.  68,  sous  le  règne  de  Claude,  41-54;  Ba- 
ronius,  Annal.,  ad.  ann.  45,  16,  en  45;  Foggini,  De  Bo- 
mano  D.  Pétri  itinere,  17'i2,  p.  196-198,  entre  42  et  49: 
B.  Weiss.  Pétrin.  Lehrbegriff,  p.  365-367;  Einleit., 
3'  édit.,  p.  427  430,  et  Kûhl,  Die  Briefe  Pétri,  p.  50. 
à  une  époque  antérieure  aux  Épilres  de  saint  Paul. 
—  D'après  l'opinion  la  plus  vraisemblable,  qui  a  tou- 
jours eu  des  adhérents  très  nombreux,  la  /*  Pétri 
fut  composée  vers  la  fin  de  l'année  63.  ou  au  commen- 
cement de  61.  On  arrive  à  celle  conclusion  grâce  aux 
données  suivantes:  -  ni  b  lettre  suppose  que  le  chris- 
tianisme avait  fait  de  grands  progrès  dans  l'Asie  Mi- 
neure; or,  un  tel  développement  n'a  eu  lieu  qu'à  la 
suite  du  séjour  de  trois  ans  que  Paul  lit  à  Éphèse  du- 
rant son  troisième  voyage  apostolique,  entre  51  et  57. 
Cf.  Act.,  XVIII,  23;  xix,  1,  10.  L'Épitre  n'a  donc  pas  été 
écrite  avant  cette  dernière  année.  —  b)  L'Apôtre  des 
Gentils  avait  été  délivré'  de  sa  prison  en  63,  et  était  parti 
pour  l'Espagne  ou  pour  l'Orient;  de  là  probablement 
le  silence  de  la  lettre  à  son  sujet.  —  c)  La  persécution 
île  Xéron  n'avait  pas  encore  éclaté  lorsque  l'Épitre  fut 
composée  (elle  ne  commença  que  vers  la  lin  de  61); 
mais  on  en  voyail  déjà  les  signes  précurseurs.  — 
d)  Saint  Marc,  mentionné'  à  la  lin  de  la  lettre,  V,  13, 
était  encore  à  Rome,  où  saint  Paul  l'avait  appelé  na- 
guère, dînant  sa  première  incarcération,  Col..  IV,  10 
(l'Épitre  aux  Colossiens  date  de  63).  —  e)  Si  saint  Pierre 
a  réellement  connu  l'Épitre  aux  Éphésiens  (voir  la 
col.  385),  il  n'a  pu  composer  sa  lettre  qu'après  l'époque 
où  saint  Paul  écrivit  lui-même  à  l'Église  d'Éphèse, 
c'est-à-dire  en  63.  —  Sur  toute  cette  question  voir  en- 
core H.  Holtzmann,  Einleitung,  3"  édit.,  p.  318-320; 
E.  Scberfe.  Die  petrinische  Strômung  der  neutestani. 
Literatur,  1893,  p.  633;  Ramsay,  Tlie  Church  in  Ihe 
Roman  Empire,  1893,  p.  279-295. 

VIII.  Idiome  et  style  de  l'Épître.  —  1'  La  /■>  Pétri 

a  été   conquis n   grec;  il    ne  saurait    existe;'   aucun 

doute  à  ce  sujet.  Seul,  saint  Jérôme  a  supposé,  Epitt. 
i\x.  ad  Hedib.,  11.  t.  xxn,  col.  1002,  que  la  langue 
primitive  aurait  été  l'araméen.  Ainsi  qu'il  a  été  dit  plus 
haut  (col.  338),  Simon-Pierre,  originaire  des  bords  du 
lac  de  libii'iiile  avail  pu  apprendre  de  bonne  heure  à 
parler  le  grec,  qui  était  d'un  usage  fréquent  dans  ces 
parages;  il  se  développa  dans  la  connaissance  de  celte 
langue,  durant  ses  courses  apostolique-;  à  travers  des 
contrées  habitées  par  des  i  .n-.--  helléniques.  Saint  Jean, 
saint  Jacques  le  Mineur  et  saint  Jude  étaient,  comme 
lui,  Juifs  d'origine,  et  pourlanl  il  est  certain  qu'ils  ont 
écrit  en  grec.  Si  saint  Marc  esl  appelé,  depuis  les 
temps  les  plus  anciens.  l' g  interprète  (ipu,r,vgvrn{)  de 
Pierre,  cela  vient,  soit  de  ce  qu'au  début  de  ses  voyages 
(vers43)  Pierre,  ne  se  croyant  pas  suffisamment  exercé 
pour  parler  a  îles  I  lices  proprement  dils.  se  taisait  aider 
par  son  disciple  de  prédilection,  sc.il  plutôt  de  ce  que 
Jean-Marc  a  rédigé  son  Évangile  d'après  les  prédica- 
tions de  saint  Pierre  ».  Voir  t.  tv,  col.  717. 

2°  La  lettre  est  écrite  en  un  grec  correct,  assez  bon 
un  nie.  mais  qui  n'a  pas  )  élégance  de  celui  de  saint 
Jacques.  L'agencement  des  phrases  présente  parfois 
quelque  rudesse:  par  exemple,  lorsqu'elles  sont  pro- 
longées an  moyen  de  participes  ou  de  pronoms  relatifs 


393 


PIERRE   (PREMIÈRE   É  PITRE    DE   SAINT, 


394 


accumulés.  L'emploi  des  synonymes,  le  maniement  assez 
habile  des  verbes  (surtout  des  verbes  composés),  des 
temps  et  des  prépositions,  la  structure  rythmique  des 
phrases  dénotent  aussi  une  connaissance  su  disante  de 
la  langue  grecque.  Les  hébraïsmes  ne  sont  ni  fréquents 
ni  choquants.  On  peut  citer,  parmi  les  principaux  : 
Siacnropri,  t,  1:  fils  d'obéissance,  i,  14;  l'acception  des 
personnes,  i.  17;  la  parole  du  Seigneur,  i,  25-  un  peuple 
d'acquisition,  il,  9;  le  mot  «  vase  »  pour  désigner  le 
corps  humain,  m,  7.  Le  style  est  généralement  simple. 
comme  la  pensée;  par  moments,  il  est  plein  de  gran- 
deur. Cf.  i.  3-9,  17-21;  n.  21-25;  v,  6-10,  etc.  L'auteur 
aime  à  exprimer  la  même  pensée  en  termes  tour  à  tour 
négatifs  et  positifs,  cf.  i,  H,  18,  23;  II,  16;  m,  3,  9,  21; 
iv,  2;  v,  2-3;  il  fait  çà  et  là  un  usage  intelligent  des 
épithétes,  cf.  i.  3.  18.  22;  n,  2,  etc.;  il  oppose  d'une 
manière  caractéristique  le  pluriel  au  singulier,  par 
exemple,  iv,  2  :  àv6pw^tov  |jtt8uu.éat«  et  OeX^iia-i  SeoO,  etc. 
Il  a  recours  à  des  images  vivantes,  dramatiques,  qu'il 
emprunte  à  la  vie  de  famille,  i.  3.  14.  17,  22-23;  n,  2; 
à  la  vie  des  champs,  i,  4;  v,  2,  8;  à  la  vie  militaire,  i, 
5:  n.  11  ;  iv,  1  :  à  la  vie  nomade,  i,  1,  17;  n,  1 1  ;  au  culte 
sacré,  n,  ô;  ni,  15;  à  la  métallurgie,  i,  7:  iv.  12,  etc.  Le 
vocabulaire  do  l'Épitre  renferme  un  nombre  assez  con- 
sidérable de  termes  qui  ne  sont  employés  dans  aucun 
autre  livre  du  Nouveau  Testament.  On  en  a  compté 
jusqu'à  soixante-deux,  dont  beaucoup  se  rencontrent 
dans  la  traduction  des  Septante.  Parmi  ces  expressions, 
il  en  est  de  très  classiques;  àva-jxaarùiç,  ivâ-xu(nç,  »vti- 
XoifiopEïv,  xita-fEvéadat,  àitoOeatç,  [jeoOv,  épTr'/oy.r,,  ÊTCLxâ- 
/,a;ja.  otvoçuyta,  ôu/j-çr-tv.  âitXiÇstv,  TCflfcpoTrapâSoTOÇ,  etc. 
D'autres,  plus  remarquables  encore,  ne  paraissent  pas 
avoir  été  employées  avant  saint  Pierre;  néanmoins,  leur 
formation  est  très  régulière  et  leur  signification  est  géné- 
ralement très  nette  là  part  celle  du  premier  terme)  : 
iXXoTpioeiti'mumo;,  iu.âpavTivoç,  àvaycvvïv,  ivExXdcXr,- 
Toç,  à— pOTa)7:o).^|J.Ta);,  ÈYXOtAoo'JG-ôac,  TCEpiÔETi:,  izpv- 
|iapTÛpEs6ai,  aOevoov,  crjv7rpE<7<5ÛTEpo;,  etc.  D'autres 
locutions,  comme  /ipiajia,  piXaSsXçîa,  faisaient  par- 
tie du  langage  chrétien.  La  dépendance  des  Septante 
est  très  frappante,  sous  le  rapport  soit  des  réminis- 
cences, soit  du  vocabulaire,  soit  de  la  syntaxe  :  ce 
qui  n'a  rien  de  trop  surprenant,  car  il  était  aisé 
à  Pierre  d'avoir  cette  traduction  avec  lui  durant  ses 
voyages. 

3°  Le  texte  grec  de  l'Épitre  ne  présente  au  critique 
aucun  problème  sérieux.  Les  principaux  manuscrits 
qui  nous  l'ont  transmis  sont  les  suivants  :  n.  A,  B,  G, 
k-,  L-,  P-.  puis  13,  'i0.  ii,  137.  Comme  il  a  été  dit  ci- 
dessus  (col.  380),  l'Épitre  est  contenue  dans  la  Pes- 
chilto.  On  possède  des  fragments  de  l'ancienne  version 
latine  dans  plusieurs  manuscrits  anciens  :  I  Pet.,  iv, 
17-v.  14,  dans  le  palimpseste  Fleury  (Ii):  i,  8-19;  n, 
20-ni,  7;  iv.  10-v,  14,  dans  le  ms.  de  Munich  (7);  1,  1- 
12;  n,4-10,  dans  le  Codex  Bobbiensis  (s).  Voir  OM  Latin 
Biblical  Texls,  n.  IV,  p.  xx-xxi,  46.  Le  D'  B.  Weiss 
a  soigneusement  revisé  ,1e  texte  grec,  Die  kalltol. 
Briefe,  Texlkrit.  Untersucltungen  und  Textherstel- 
lung,  1892. 

IX.  Caractère  générai,  de  l'Épitre.  —  L'espérance 
est  une  de  ses  notes  dominantes.  Cf.  1,  3,  21;  m,  15; 
iv,  13;  v,  1.  4.  Elle  atteste  dans  son  auteur  une  nature 
très  personnelle  et  indépendante,  mais  aussi  un  tempé- 
rament tout  pratique,  qui  n'a  pas  l'intérêt  spéculatif. 
ni  la  profondenr  mystique  de  saint  Paul  et  de  saint 
Jean.  Voir  von  Soden,  loc.  cit.,  p.  121.  Elle  renferme 
quelques  belles  pensées  originales.  On  peut  mentionner, 
entre  beaucoup  d'autres  :  la  désignation  des  chrétiens 
comme  des  advenu!  et  perigrini  sur  cette  te.rre,  11,  11; 
le  rapprochement  établi  entre  le  baptême  et  le  déluge, 
m,  21  ;  le  titre  d'ip-/_ntoqiY)v  donné  à  Notre-Seigneur,  v, 
'4;  la  passior  1  J  -us  souvent  représentée  comme  un 
modèle  pour  les  chrétiens  éprouvés.  11,  12;  III,  16,  etc. 


—  Un  point  particulièrement  frappant,  c'est  l'emploi 
que  saint  Pierre  fait  sans  cesse  de  l'Ancien  Testament. 
Tantôt  il  montre  que  le  salut  apporté  par  le  Christ  est 
la  réalisation  intégrale  des  promesses  que  Dieu  avait 
faites  aux  anciens  prophètes,  1,  10-12;  tantôt  il  s'appro- 
prie dans  le  détail,  comme  il  a  été  marqué  plus  haut, 
col.  900,  les  pensées  et  les  expressions  même  de  l'an- 
cienne Alliance.  Fait  remarquable  :  ce  petit  écrit,  qui 
ne  contient  que  deux  citations  proprement  dites  de 
l'Ancien  Testament,  1,  16,  et  n,  6,  renferme  un  nombre 
considérable  de  réminiscences  ou  d'échos  bibliques. 
Cf.  1,  14,  15;  11.  3.  4.  7,  9,  10,  22-24;  m,  10-12,  13,  14; 
iv,  8,  17.  18;  v.  5,  7,  etc. 

X.  L'enseignement  doctrinal  de  l'Épître.  —  On  doit 
se  souvenir,  lorsqu'on  cherche  à  déterminer  l'enseigne- 
ment d'un  écrit  avant  tout  pratique,  comme  l'est 
celui-ci,  qu'on  tomberait  dans  une  exagération  singu- 
lière, si  l'on  concluait  que  tel  ou  tel  point  doctrinal  qui 
y  est  omis  était  inconnu  de  l'auteur,  ou  n'avait  pour 
lui  qu'une  importance  secondaire.  On  a  donc  eu  tort 
de  chercher  et  de  vouloir  trouver  ici,  soit  un  type  de  la 
doctrine  chrétienne  durant  la  période  apostolique,  soit 
(c'est  le  cas  pour  M.  B.  Weiss)  un  christianisme  juif  anté- 
rieur à  saint  Paul,  soit  une  théologie  de  saint  Pierre 
en  opposition  avec  celle  de  saint  Paul,  ou,  selon  d'autres 
itant  les  opinions  sont  subjectives  et  arbitraires  sur  ce 
point)  ayant  pour  but  de  la  confirmer.  Nous  l'avons 
déjà  dit,  le  dogme  'n'apparaît  dans  cette  lettre  que  par 
accident  et  d'une  manière  secondaire,  pour  appuyer 
les  exhortations  pratiques.  Saint  Pierre  n'a  nullement 
songé  à  insérer  ici  son  Credo,  ou  un  système  doc- 
trinal complet;  il  nous  fait  seulement  connaître  un 
coté  spécial  de  sa  prédication.  Et  pourtant,  en  grou- 
pant sous  divers  chefs  les  principaux  enseignements 
positifs  qui  sont  épars  dans  la  7a  Pétri,  on  trouve  un 
sommaire  assez  riche  du  dogme  chrétien.  —  On  est 
frappé  d'abord  de  la  grande  ressemblance  qui  existe 
entre  cet  enseignement  et  celui  des  discours  de  saint 
Pierre,  tels  que  les  Actes  des  Apôtres  nous  les  ont 
transmis.  Voir  plus  haut,  col.  382.  Comme  point  fon- 
damental nous  avons,  de  part  et  d'autre,  cette  grande 
idée  :  le  christianisme  a  l'Ancien  Testament  pour  base; 
il  a  réalisé,  grâce  à  la  mort  et  à  la  résurrection  de 
Jésus-Christ,  les  oracles  prophétiques  de  l'ancienne 
Alliance  relatifs  au  salut  promis  à  l'humanité  coupable. 
Toutefois  les  discours  de  saint  Pierre  ne  nous  révè- 
lent qu'une  face  de  son  enseignement,  tel  qu'il  était 
tout  à  l'origine  de  l'Église,  tandis  que  sa  première 
Epitre  est  adressée  à  des  chrétientés  qui  existaient 
déjà  depuis  assez  longtemps,  et  auxquelles,  par  con- 
séquent, l'apôtre  présente  des  conseils  plus  variés  et 
plus  développés  qu'aux  premiers  chrétiens,  d'origine 
juive  ou  païenne.  Il  est  remarquable  qu'il  ne  men- 
tionne nulle  part  ici  la  loi  judaïque,  ni  la  justification 
par  la  foi. 

Voici  les  principaux  points  de  l'enseignement  doctri- 
nal de  la  I'Petvt.  —  i"Sur Dieu.  —  Naturellement,  une 
place  souveraine  lui  est  accordée,  et  son  nom  revient  à 
tout  instant.  Dès  le  début  de  la  lettre,  1,  2,  nous  ren- 
controns la  formule  trinitaire.  Non  content  de  nommer 
en  passant  les  trois  personnes  divines,  l'auteur  signale 
le  rôle  spécial  de  chacune  d'elles  dans  le  mystère  de 
la  rédemption.  A  plusieurs  reprises,  il  est  parlé  de 
Dieu,  du  Père,  qui  est  le  «  Créateur  fidèle  »,  iv,  19, 
le  Dieu  vivant,  1,  23,  l'auteur  de  notre  salut  par  l'in- 
termédiaire du  Christ,  1,  3,  23;  de  Jésus,  son  divin 
Fils,  I,  13,  etc.;  de  l'Esprit-Saint,  qui  est  tout  à  la  fois 
l'Esprit  de  Dieu,  IV,  14,  et  celui  de  Notre-Seigneur,  1, 
11.  L'Esprit-Saint  vient  de  Dieu;  il  a  reçu  de  lui  une 
mission  temporelle  à  remplir,  1.  12.  Il  assiste  les  prédi- 
cateurs de  l'Évangile,  I,  12;  il  opère  la  sanctification 
des  âmes,  1,  2,  22;  il  atteste  la  réalité  de  l'héritage 
futur,  tv,  li. 


395 


PIERRE    (PREMIERE    EPITRE    DE   SAINT; 


396 


2°  La  christologie.  —  a)  La  personne  du  Christ.  Jésus 
est  Dieu,  Fils  de  Dieu,  i,  3.  L'apôtre  le  nomme  à  côté 
du  Père  et  du  Saint-Esprit,  comme  leur  égal,  i,  2;  il 
l'élève  au  niveau  de  Dieu  et  nous  le  montre  assis  à  la 
droite  du  l'ère,  m,  22.  Jésus -Christ  s'est  incarné  pour 
nous  sauver  et  a  pris  toute  notre  nature,  composée 
d'une  âme  et  d'un  corps,  m,  18.  Il  possède  une  par- 
faite sainletr,  i,  lit;  n,  22-23;  m,  18.  Il  est  le  Messie 
prédestiné  île  toute  éternité,  i,  20.  promis  par  les  pro- 
phètes, qui  avaient  annoncé  longtemps  d'avance  ses 
souffrances  et  sa  gloire,  i,  10-12;  n,  4-6.  Aussi  Pierre 
lui  altribue-t-il   les  titres  de  Christ,  i,  11,  19;  n,  21  ; 

III,  16,  18;  iv,  1,  13,  etc.,  de  Jésus-Christ,  I.  1,2,  3,  7, 
13;  il.  5,  etc,  de  Notre-Seigneur  Jésus-Christ,  i,  3.  — 
6)  L'œuvre  rédemptrice  du  Christ  a  pour  point  de  départ 
la  mort  et  la  passion  du  Sauveur,  m,  18;  IV,  1.  Celte 
mort  douloureuse  et  ignominieuse  a  eu  le  caractère  d'un 
sacrifice  proprement  dit,  par  lequel  Jésus  a  expié  les 
péchés  des  hommes,  comme  Isaïe  l'avait  prophétisé,  II, 
21-24;  m.  18;  son  sang  divin  nous  a  servi  de  rançon  et 
de  purification,  i,  2,  18-19.  Non  content  de  dire  que  les 
souffrances  du  Christ  ont  une  valeur  infinie  pour  nous 
racheter,  saint  Pierre  envisage  aussi  leur  valeur  morale 
et  les  présente  comme  un  exemple  pour  les  chrétiens, 
n,  21  ;  m,  17-18;  iv,  I,  13.  La  conséquence  du  sacrifice 
expiatoire  de  Jésus-Christ,  c'est  le  pardon  des  péchés, 
i,  2,  la  régénération  chrétienne,  i,  3,  la  liberté  chré- 
tienne, n,  l(i.  l'héritage  impérissable  qui  nous  attend 
dans  le  ciel,  i,  4.  —  c)  Lntre  sa  mort  et  sa  résurrection, 
Jésus  est  descendu  dans  les  limbes,  où  il  a  annoncé  la 
bonne  nouvelle  aux  âmes  des  justes,  m,  19-iv,  6.  Ce 
dogme  est  tout  spécialement  intéressant  à  noter  ici,  car, 
parmi  les  écrivains  inspirés,  saint  Pierre  est  seul  à  le 
mentionner  en  termes  explicites.  Il  est  vrai  que  Jésus 
lui-même  avait  dit  au  bon  larron  :  «  Aujourd'hui,  tu 
seras  avec  moi  dans  le  paradis.  »  Luc,  xxm,  43.  Or, 
cette  parole  ne  saurait  s'appliquer  au  ciel,  où  l'âme  de 
Jésus-Christ  ne  monta  pas  ce  jour-là,  non  plus  que 
celle  du  bon  larron;  elle  désigne  donc  le  «  limbus  jus- 
toi  uni  »,  auquel  il  est  peut-être  encore  fait  une  triple 
allusion  par  saint  Paul,  Rom.,  x,  7:  xiv,  19;  Eph., 
iv,  9,  Le  passage  I  Pet.,  m,  19-22,  ne  manque  pas 
d'obscurité;  mais  l'opinion  commune  a  toujours  été, 
depuis  les  temps  les  plus  anciens,  qu'il  décrit  le  des- 
census  ad  inferos  de  Notre-Seigneur  Jésus-Christ. 
Telle  était  déjà  l'interprétation  de  saint  Justin,  Dial.  c. 
Tryph.,  82,  t.  vi.  col.  6G9,  de  saint  [renée,  Adv.  hier., 

IV,  xxvh,2;  v,  1,  t.  vu.  col.  1058,  de  Tertullien,  De  ani- 
ma, vu,  55,  t.  n,  col.  (iô7,  etc.  Voici  la  partie  principale 
de  ce  passage,  in.  18-20:  «  Le  Christ  aussi  est  mort  une 
fois  pour  nos  péchés,  lui  juste  pour  des  injustes,  afin 
de  nous  offrir  a  Dieu,  ayant  été  mis  à  mort  quanl  à  la 
chair,  mais  rendu  à  la  vie  quanl  à  l'esprit;  par  lequel 

aussi  il  esl  allé  prêcher  aux  esprits  qui  étaient  en  prison, 
qui  autrefois  avaient  été  incrédules,  lorsque,  au  temps 
de  Noé,  ils  s'attendaient  à  la  patience  de  Dieu,  pendant 
qu'était  préparée  l'arche,  dans  laquelle  peu  de  personne-, 
à  savoir  huit  seulement,  furent  sauvées  à  travers  l'eau,  o 
Les   âmes  emprisonnées  -oui  évidemment  celles  des 

jusles.  et  n.. m  relies  des  damnés,  qui  ne  pouvaient 
tirer  aucun  fruit  de  la  bonne  nouvelle  apportée  par  le 
Christ,  Parmi  les  auditeurs  de  Jésus  dans  les  limbes, 
il  se  trouvail  des  contemporains  de  Noé,  qui,  d'abord 
incrédules,  s'étaient  convertis  avanl  de  périr  dans  les 

eaux  du  déluge;  ils  sont  eilés  comme  type  de    tou 

pécheurs  venus  à  résipiscence  antérieurement  à  l'ap- 
parition du  Messie.  On  retromo  rel  enseignement  dans 
I  Evangile  (apocryphe)  de  Pierre,  il-i-J,  et  dans  VÉvan 
gile  de  Nicodème,  n,  10.  D'après  l'enseignement  de 
saint  Pierre,  c'est  entre  la  mon  de  Jésus  et  sa  résur- 
rection qu'à  eu  lieu  sa  descente  mysti  rieuse  dans  les 
1""l"'s-  En  effet,  le  Christ  meurt*  quant  à  sa  chair, 
mail    il  .si  vivifié  quant  à  son  esprit;  c'est  donc  dans 


cet  état  spirituel  qu'il  est  descendu  aux  enfers.  Ensuite 
il  est  ressuscité  et  monté  au  ciel.  La  prédication 
(xripûrreiv)  qu'il  a  portée  dans  les  limbes  n'a  pas  con- 
sisté, comme  on  l'a  parfois  affirmé,  dans  une  sentence  de 
condamnation  lancée  par  lui  contre  les  pécheurs.  Son 
message  est  tout  d'amour,  ainsi  qu'il  est  dit  iv,  6  : 
«  L'Évangile  a  été  annoncé  aux  morts.  »  Or,  l'Évangile 
est  la  bonne  nouvelle  par  excellence;  d'où  il  suit  (pie 
Notre-Seigneur  a  dû  annoncer  aux  âmes  des  justes 
retenues  dans  les  limbes  sa  mort  rédemptrice,  sa  ré- 
surrection et  son  ascension  prochaines,  et  leur  propre 
délivrance.  —  Qu'il  suffise  de  signaler  deux  interpréta- 
tions inexactes  données  à  la  prédication  de  Jésus  :  d'après 
saint  Augustin,  c'est  par  la  bouche  de  Noé  que  le 
Christ  aurait  prêché  l'Évangile  aux  pécheurs  qui  vi- 
vaient à  l'époque  du  déluge;  selon  d'autres,  Jésus 
aurait  apporté  la  bonne  nouvelle  aux  morts,  c'est-à-dire 
aux  pécheurs,  par  l'entremise  des  Apôtres.  Sur  cette 
question  importante,  voir  Dietelmaier,  tlitl,  dogma- 
lica  de  descensu  Christi  ad  inferos,  17il  et  1762; 
Gùder,  Die  Lettre  von  der  Erscheinung  Christi  noter 
den  Todten,  1853;  Zezschwitz,  De  Christi  ad  inferos 
descensu,  1857;  Schweitzer,  Hinabgefahren  zur  Hôlle, 
1886;  Spittà,  CAristi  Predigt  an'die  Geisler,  1893; 
Bruston,  La  descente  tlu  Christ  au.r  enfers,  1897; 
Stevens,  Theology  of  ihe  New  Test.,  1899,"  p.  304; 
C.  Clemen,  Niedergefahren  iu  den  Toten,  ein  Beitrag 
zur  Wûrdigung  des  Apostolikums,  Giessen,  1900; 
Tunnel,  article  dans  les  Annales  de  philosophie  chré- 
tienne, n"  de  février  1703,  p.  508-533;  ld.,  La 
descente  du  Christ  aux  enfers,  Paris,  1901;  2'  édit., 
1905.  —  rf)  Jésus  est  ressuscité  d'entre  les  morts,  con- 
formément aux  anciens  oracles;  la  foi  et  l'espérance 
des  chrétiens  s'appuient  sur  ce  fait  capital.  Cf.  î,  3-.r>, 
18-21,  elc.  C'ist  Dieu  lui-même  qui  a  ressuscité  et  glo- 
rifié  son  Fils,  i.  21;  ni,  21-22.  Le  Christ  est  monté  au 
ciel,  où  il  est  élevé'  au-dessus  de  toutes  les  créatures, 
I,  21;  m,  18,  22.  Dans  cet  état,  il  est  encore  actif  pour 
glorifier  son  l'ère,  iv,  11;  car  tout  ce  qui  se  fait  de  bon 
dans  l'Église  est  opéré  par  lui.  —  c)  Il  reviendra  à  la 
lin  du  monde,  i.  4,  5,  7,  8,  13,  21  ;  IV,  13;  v.  4,  10.  S, m 
second  avènement  est  désigné   par   le  mot    iitoxaÀûiJKÇ, 

révélation  »,  i,  7,  13;  IV,  13.  Ce  retour  sera  terrible 
pour  les  méchants,  iv,  17,  mais  il  apportera  aux  bons 
le  salut  définitif,  le  ciel,  qui  est  l'objet  suprême  de  notre 
espérance  i,  4,  etc. 

3°  L'eschatologie.  —  L'auteur  mentionne  la  fin  du 
inonde  iv.  li.  et  le  second  avènement  de  Jésus-Chrisl 
i.  13;  iv.  13.  Pour  mieux  encourager  les  chrétiens 
d'Asie  Mineure  à  supporter  avec  patience  les  épreuves 
auxquelles  ils  étaient  en  butte,  il  leur  propose  plusieurs 
fois  la  pensée  du  glorieux  el  éternel  héritage  qui  les 
attend  dans  le  ciel  cf.  i.  4-9;  tv,  18;  v,  lu. n.  rie.  Mais 
le  Dr  li.  Weiss  '  lagère,  lorsqu'il  prétend,  Lehrbuch  der 
bibl.  Théologie,  S  li,  p.  172,  que  ette  idée  était,  pour 
saint  Pierre,  l'idée  centrale  de  la  vie  chrétienne.  —  Le 
prime  des  Apôtres  croyait-il  que  le  retour  de  Jésus- 
Christ  sérail  prochain?  On  l'a  souvent  répété  parmi  les 
protestants,  en  se  basanl  sur  le  texte:  s  La  lin  de  toutes 
choses  approche,  »  iv,  7,  et  aussi  sur  v.  I,  autre'passage 
dans  lequel  on  a  prétendu  trouver  la  persuasion  ou 
était  siiniiii  Pierre  qu'il  serait  bientôt  témoin  de 
l'avènement  de  Jésus-Christ.  Mais  comment  l'apôtre, 
après  avoir  entendu  son  Maître  affirmer,  Mat  th.,  xxiv, 
36,  que    l'époque    de    la    lin    du    inonde  est    un    secret 

réservé  nu  Père  céleste,  se  serait-il  hasardé  à  faire  uns 
prédiction  i  m'  ce  point?  Le  second  texte  allégué  revient 

simplement  à  dire   :  J'espère    qu'un  jour  je  serai  avec 
vousdans  le  ciel.  Quanl  au  premier,  il  doit  s'inli 
ter  d'une  manière  générale,  car  il    ne    signifie    i 
menl  que   Pierre   regardait  le  retour  de  Jésus  comme 
imminent.  Comme  saint  Paul,  cf.    I    Thess.,  iv,  12-17; 
H  Thess,  n,  2-11  ;  1  Cor.,  xv,  5-58,  etc.,  saint  Jacques, 


397 


PIERRE    (DEUXIÈME    ËPITRE    DE    SAINT) 


:ï!)8 


Jac,  v.  7-9.  et  saint  Jean.  cf.  I  .loa.,  n,  18,  il  savait  que 
ce  grand  jour  pouvait  arriver  d'un  moment  à  l'autre, 
puisque  désormais  le  mystère  de  la  rédemption  était  ac- 
compli. Mais  à  quelle  date  précise  JPsus  reviendrait-il 
juger  les  vivants  et  les  morts?  Il  l'ignorait.  Cf.  II  Pet., 
m.  8-9,  où  il  dit  qu'il  peut  s'écouler  encore  mille  ans 
et  plus  avant  la  fin  du  monde.  Voir  Estius,  Cornélius  a 
Lapide.  Hundliausen,  etc..  In  1  Pet.,  IV,  7.  De  nombreux 
commentateurs  protestants  n'interprètent  pas  autrement 
ce  passage.  —  Les  chrétiens  doivent  souvent  penser  au 
jugement  de  Dieu  et  le  redouter,  i,  17;  ni.  9-10;  iv,  7. 
17-19.  Cette  crainte  est  pour  eux  le  commencement  de 
la  sagesse. 

4°  L'Église.  —  Formée  de  tous  ceux  qui  ont  été  rache- 
tés par  Jésus-Christ,  elle  est  une  société  très  auguste,  que 
l'auteur  désigne  par  plusieurs  titres  magnifiques,  em- 
pruntés à  l'Ancien  Testament.  Cf.  Il,  9-10.  Ses  membres 
sont  comme  des  prêtres,  qui  offrent  perpétuellement 
à  Dieu  des  victimes  spirituelles,  II,  5,  9.  Elle  est  un  édi- 
fice pareillement  mystique,  dont  chaque  fidèle  est  une 
pierre  vivante,  et  dont  Jésus-Christ  et  la  pierre  angu- 
laire, n,  8.  Elle  est  un  troupeau  symbolique  dont 
Notre-Seignenr  est  le  pasteur  suprême,  iv,  10-11;  v.  1- 
4.  Quant  à  son  organisation,  rien  de  plus  simple  :  à 
la  tète  de  chaque  Église  particulière  étaient  les  anciens 
(npEaëifcepot),  les  prêtres,  chargés  de  nourrir  et  de  diri- 
ger leurs  ouailles;  celles-ci  devaient  l'obéissance. 

5"  Les  devoirs  des  chrétiens.  —  a)  D'abord  il  faut 
croire,  ou,  comme  dit  notre  auteur,  i,  2.  21-22,  il  faut 
obéir  à  la  vérité,  à  l'Evangile.  Les  chrétiens  sont,  en  ce 
sens,  «  des  fils  d'obéissance  »,  i,  14,  tandis  que  les 
incrédules  sont  des  rebelles,  il,  S;  m.  1,  etc.  La  prédi- 
dication  de  l'Évangile  est  la  source  de  la  foi.  i,  12.  La 
foi  même  est  un  sentiment  de  confiance  inébranlable. 
I,  S;  en  nous  attachant  à  Jésus-Christ,  elle  est  pour 
nous  le  principe  d'une  force  irrésistible,  v,  9.  Elle  com- 
munique la  vraie  connaissance,  I,  14.  la  connaissance 
de  Dieu  et  de  Jésus-Christ,  i,  2,  8;  m,  18.  Elle  est  la 
condition  indispensable  du  salut,  i,  9.  L'épreuve  bien 
supportée  l'épure  et  la  fortifie,  i,  7;  v,  9.  —  b)  Il  faut 
aussi  recevoir  le  baptême  au  nom  de  Jésus-Christ,  m,  21 . 
Si  la  foi  et  le  baptême  sont  nécessaires  au  salut,  rien 
ne  se  fait  sans  la  grâce,  qui  est  un  don  gratuit  du 
.  Dieu  de  toute  grâce  »,  v,  10.  La  grâce  suprême  est 
celle  du  salut  éternel,  m,  7.  —  c)  Il  faut  mener  une 
vie  très  sainte,  puisque  Dieu  lui-même  est  la  sainteté 
parfaite,  i,  15.  De  là,  la  nécessité  de  se  purifier  sans 
cesse,  i,  22,  d'avoir  une  n  bonne  conscience  »,  comme 
l'apôtre  aime  à  le  répéter,  cf.  m,  16,  21,  de  lutter  contre 
la  chair,  H,  11,  que  saint  Pierre  oppose  à  l'esprit,  comme 
saint  Paul,  ni,  18;  iv,  6,  de  remplacer  l'homme  exté- 
rieur par  l'homme  intérieur,  m,  3-4.  Comme  moyen  de 
parvenir  à  cette  sainteté,  l'auteurallègue  l'union  intime 
et  vitale  avec  Jésus-Christ,  qui  en  est  à  la  fois  la  source 
et  le  modèle.  II,  4-5.  —  d)  Parmi  les  vertus  spéciales 
que  le  chrétien  doit  pratiquer,  saint  Pierre  cite  :  1»  la 
charité  fraternelle,  sur  laquelle  il  insiste  spécialement, 
d'une  manière  soit  positive  soit  négative,  i,  32;  n,  I. 
15.  17:  m,  8-11,  15;  iv,  8-10;  2"  les  devoirs  d'état,  en 
particulier  ceux  des  chrétiens  en  tant  que  citoyens,  il, 
13-17,  ceux  des  esclaves,  n,  18-25,  ceux  des  époux,  m,  1-7. 
Sur  ces  trois  points,  il  existe  une  grande  ressemblance 
entre  les  règles  tracées  par  saint  Pierre  et  les  recom- 
mandations antérieures  de  saint  Paul,  Rom.,  xm.  1-7: 
Eph.,  v,  22- vi,  9;  Col.,  m,  22-25.  etc.  3"  L'apôtre  recom- 
mande encore  la  sobriété,  la  vigilance,  iv,  7;  v,  8, 
la  pratique  des  bonnes  œuvres,  n,  12;  m,  11,  et,  avec 
une  insistance  particulière,  la  patience,  la  résignation 
et  même  la  joie  dans  les  souffrances,  il,  19-25;  m.  9; 
iv.  12-14. 

Sur  l'enseignement  doctrinal  de  la  I*  Pétri,  voir 
Poelmann,  Theologia  Pelrina,  1850;  C.  F^Schmid, 
Bibl.  Théologie  des  N.  T.,  herausgegeben  von  Weiz- 


.ïcker,  Stuttgart,  1853;  4"édit.  par  A.  Keller,  Gotha,  1868; 
11.  Weiss,  Der  Petrinische  Lehrbegriff.  Berlin.  1855; 
du  même,  Leltrbuch  der  Théologie  des  N.  T..  3e  éd., 
p.  144  sq.;  Lechler,  Das  aposlol.  und  das  nacha- 
poslol.  Zeitaller,  2e  édit.,  p.  421-439:  A.  Krawutzky 
(catholique),  Petrinische  Studien,  2  in-S-.  Dresde,  1872- 
1873;  Bovon,  Théologie  du  Nouv.  Test.,  1893,  t.  Il, 
p.  430445;  Briggs,  The  Messiah  of  the  Apostles,  1895, 
p.  21-35;  McGiffert,  Histoni  of  the  apostolical  Age, 
p.  482-487;  Stevens,  Theology  of  the  N.  T.,  1899,  p.  293- 

311.  L.    FlLLION. 

3.      PIERRE     (DEUXIÈME     ÉPITRE     DE     SAINT).    - 

I.  Destinataires.  —  Dès  ses  premières  lignes,  i.  1. 
l'auteur  les  désigne  lui-même,  en  s'exprimant  ainsi  : 
«  A  ceux  qui  ont  obtenu  avec  nous  une  foi  du  même 
prix,  par  la  justice  de  notre  Dieu  et  Sauveur  Jésus- 
Christ.  »  Avec  nous  :  cela  signifie,  d'après  le  contexte, 
avec  les  apôtres;  d'où  il  suit  que  la  lettre  s'adresse 
aux  coreligionnaires  de  ces  derniers,  aux  chrétiens. 
L'expression  ayant,  à  première  vue,  un  caractère  géné- 
ral, on  en  a  conclu  parfois  que  l'Épitre  a  été  composée 
pour  toute  la  chrétienté.  Mais  le  passage  m,  1.  où  l'au- 
teur dit  expressément  à  ses  lecteurs  que  cette  lettre  est 
la  seconde  qu'il  leur  envoie,  est  directement  contraire  à 
ce  sentiment;  en  effet,  il  en  résulte  de  la  manière  la 
plus  claire  que  les  destinataires  sont  les  mêmes  que 
ceux  de  la  première  Épitre.  Il  s'agit  donc  de  nouveau 
des  chrétiens  qui  vivaient  alors  dans  les  cinq  provin- 
ces d'Asie  Mineure  énumérées  I  Pet.,  i,  l  (voir  la 
col.  389).  —  On  ne  trouve  dans  le  cours  de  l'écrit  aucun 
détail  dont  on  puisse  conclure  que  les  lecteurs  primi- 
tifs diffèrent  de  ceux  de  la  I*  Pétri.  Au  contraire,  le 
texte  m,  15,  où  il  est  parlé  d'une  lettre  qui  leur  avait 
été  adressée  par  saint  Paul,  désigne  selon  toute  vrai- 
semblance l'Épitre  aux  Éphésiens;  or,  Éphèse  était  la 
capitale  de  l'Asie  proconsulaire,  l'une  des  cinq  provinces 
en  question,  et  il  est  possible  que  cette  Épitre  aux 
Éphésiens  ait  été  une  lettre  circulaire  adressée  par 
l'Apôtre  des  Gentils  à  d'autres  chrétientés  d'Asie  Mi- 
neure. 

II.  Temps  et  lieu  de  la  composition.  —  Aucun  de 
ces  deux  points  n'est  déterminé  en  termes  directs  dans 
l'Épitre.  On  peut  cependant  les  préciser  avec  une  cer- 
titude morale,  au  moyen  de  la  réllexion  faite  par  l'au- 
teur, i,  14,  au  sujet  de  la  révélation  qu'il  avait  reçue 
naguère  de  Jésus-Christ  relativement  à  sa  mort  pro- 
chaine. Selon  toute  probabilité,  cette  révélation  ne  doit 
pas  être  confondue  avec  l'oracle  mentionné  Joa.,  xxi. 
18-19.  Eu  effet,  celui-ci  ne  désigne  que  d'une  façon  très 
générale  l'époque  de  la  mort  de  Pierre,  cum  senueris; 
ce  qu'il  annonce,  c'est  le  genre  même  de  cette  mort,  le 
crucifiement.  Il  s'agit  donc  plutôt  d'une  révélation  ré- 
cente. Voir  Spitta,  Der  zweite  Brief  Peints,  1885,  p.88- 
89;  Hundhausen,  Das  zweite Pontificalschreiben  des  Pe- 
trus,  p.  207-209;  Belser,  Einleit.,  p.  716,  etc.  —  Simon- 
Pierre  sent  donc  que  sa  fin  est  imminente.  Or,  connue 
il  est  démontré  qu'il  subit  le  martyre  à  Rome,  en  67 
d'après.l'opinion  la  plus  probable  (voir  col.  376),  nous 
pouvons  conclure  de  là  qu'il  a  composé  cette  seconde 
Épitre  dans  la  capitale  de  l'empire,  durant  la  première 
partie  de  l'année  67,  ou  à  la  fin  de  66.  Telle  est  l'opi- 
nion de  presque  tous  les  critiques  qui  croient  à  l'au- 
thenticité de  la  lettre.  Il  semble  résulter  de  II  Pet.,  m, 
1,  qu'il  ne  s'écoula  pas  un  temps  très  considérable  en- 
tre les  deux  lettres  du  prince  des  Apôtres.  Si  l'auteur  de 
la  II1  Pétri,  comme  nous  le  pensons  (voir  col.  410,  et 
t.  m,  col.  1811),  a  eu  sous  les  yeux  l'Épitre  de  saint 
Jude  et  lui  a  fait  des  emprunts,  son  œuvre  est  natu- 
rellement d'une  date  plus  récente  que  cette  dernière 
composition,  que  l'on  suppose  avoir  été  écrite  elle- 
même  vers  l'année  65.  Les  exégètes  qui,  tout  en  admet- 
tant l'authenticité  de  notre  Épitre,  placent  la  mort  de 


399 


PIERRE  '(DEUXIÈME    ÉPITRE    DE   SAINT) 


400 


saint  Pierre  en  64,  adoptent  cette  même  date  pour  sa 
seconde  lettre.  Quant  à  ceux  qui  rejettent  l'authenticité, 
ils  lui  assignent  les  dates  les  plus  variées,  et  cette  di- 
versité de  sentiments  manifeste  à  elle  seule  la  faiblesse 
de  leurs  preuves.  Credner  et  Bleek,  à  la  fin  du  1er  siè- 
cle; Schwegler  et  Volkmar,  à  la  lin  du  n«  siècle;  Jùli- 
cher,  en  Egypte,  entre  158  et  175  (d'après  cet  auteur, 
Einleit.,  p.  152,  ••  la  II»  Pétri  est  certainement  la 
partie  la  plus  récente  du  .Nouveau  Testament,  et  aussi 
celle  qui  méritait  le  moins  d'entrer  dans  le  canon  »); 
Chase(dans  Hastings,  Dicl.  o(  tlie  Bible,  t.  m,  col.  817), 
pas  plus  tard  que  175,  probablement  vers  150, en  Egypte, 
peut-être  à  Alexandrie. 

III.  Occasion  ni  bit  de  l'Épître.  —  1°  a)  Dans  l'in- 
tervalle qui  s'était  écoulé  depuis  l'envoi  de  la  Ire  Épitre, 
un  fait  très  grave  s'était  produit  dans  les  chrétientés 
il  Asie  Mineure.  Des  hérétiques,  dont  la  doctrine  et  la 
conduite  étaient  également  perverses,  s'y  étaient  intro- 
duits, et  menaçaient  de  les  corrompre  tout  à  fait.  Ce  sont 
eux  qui  furent  vraiment  l'occasion  de  l'Épître.  Ils  sont 
déjà  mentionnés  au  chap  tre  i",  16,  19-21  ;  le  chapitre  il 
s'occupe  d'eux  uniquement;  on  les  retrouve  au  cha- 
pitre m.  3-7,  16-17. Ces  hommes,  qui  avaient  été  d'abord 
païens  et  qui  s'étaient  convertis  à  la  religion  du  Christ, 
avaient  repris  les  mœurs  du  paganisme  et  se  livraient 
sans  pudeur  aux  vices  les  plus  honteux.  Cf.  n,  2-3,  10, 
13-1 1.  18-20.  Non  contents  de  s'abandonner  eux-mêmes 
à  la  licence,  ils  exerçaient  autour  d'eux  un  ardent  pro- 
sélytisme,  s'efforçant  de  séduire,  par  leurs  discours  et 
leurs  exemples,  les  chrétiens  parmi  lesquels  ils  vivaient. 
Cf.  n,  1-3,  14,  18-19.  Us  faisaient  aussi  de  l'antino- 
misme,  vantant  la  liberté  apportée  par  .lésus-Christ, 
comme  si  elle  avait  autorisé  toutes  sortes  d'excès.  Cf. 
i,  18-19,  A  l'immoralité  de  leur  vie  sejoignaientde  graves 
erreurs  doctrinales.  Ils  se  permettaient  de  traiter  cer- 
tains faits  de  l'histoire  sacrée  comme  «  des  fables  sage- 
ment inventée*  ».  i,  16.  Ils  avaient  cessé  de  croire  que 
le  monde  est  dirigé  par  une  intelligence  supérieure,  et 
qu'il  y  aura  un  second  avènement  du  Christ,  suivi  du 
nent  éternel  des  impies.  Cf.  m,  9.  Ils  donnaient  à 
l.i  sainte  Écriture  de  fausses  interprétations,  afin  de 
pouvoir  mieux  appuyer  sur  elles  leurs  doctrines  perni- 
cieuses, ni,  16.  Il  est  même  possible  qu'ils  allassent 
jusqu'à  nier  la  divinité  de  Notre- Seigneur.  Cf.  II,  1,  et 
linl.i  .  4.  Comme  beaucoup  d'autres  hérétiques,  ils  ai- 
maient l'argent,  et  s'en  faisaient  donner  en  échange  de 
la  communication  de  leurs  erreurs,  n,  3,  13.  L'auteur 
nous  les  présente  comme  des  apostats  véritables,  II, 
20-22.  Le  tableau  qu'il  en  trace  au  chapitre  n  est  d'une 
r_n.ur  remarquable. 

b)  Quels  étaient  les  hérétiques  que  sainl  Pierre  stig- 
matise avec  tant  d'énergie?  Certains  critiques  con- 
mporains,  entre  autres  Harnack,  Chronologie,  t.  i, 
;  166-470;  Jûlicher,  Einleit.,  p.  151-152;  von  Soden. 
Hand-Commentar  zun\  N.  T.,  t.  m.  part.  2,  p.  171.  ont 
prétendu  qu'ils  étaient  identiques  aux  gnostiques  du 
cle;  puis  ils  se  sont  servis  de  ce  fait  comme  d'un 
argument  pour  attaquer  l'authenticité  de  l'Épître.  11  est 
vrai  que,  dés  le  début  de  la  lettre,  II  l'et.,  I,  2,  saint 
Pierre  mentionne  la  i  vraie  connaissance  (ète-yvcdsi;) 
de  Dieu  et  de  Notre-Seigneur  .lésus-Christ  »  comme 
une  bénédiction  spéciale  qu'il  souhaite  à  ses  lecteurs, 
par  opposition  à  la  fausse  science  (yvûvic)  des  docteurs 
hérétiques,  et  qu'il  n\  ienl  plusieurs  fois  sur  cette  pen- 
•  Cf.  i,  3.  18;  n,  20;  ni,  18.  Mais  saint  Paul  le  fait 
pareillement. Col.,  1,6,9,  10,  etc.  U.est  certain  de  même, 
que  «  les  germes  de  la  Gnose  apparurent  dès  le  com- 
mencement de  l'ère  chrétienne,  et  qu'il  n'exista,  dans 
les  premiers  temps  de  l'Église,  aucun  hérétique  qui 
n'ait  eu  plus  ou  moins  de  traits  communs  avec  les 
gnostiques  des  temps  plus  rapprochés.  »  Kaulen,  I-a>i- 
p.  515.  11  est  également  vrai  que  saint  Innée 
accuse  les  gnostiques  de  son  temps  de  pervertir  le  sens 


des  Écritures.  Cf.  User.,  m,  i;  t.  vu.  col.  882.  Néan- 
moins, maigre  tout  cela,  ce  ne  sont  pas  les  gnostiques 
proprement  dits  qui  sont  décrits  dans  celte  lettre, 
mais  seulement  Teurs  premiers  précur  seurs;  car  le 
portrait  que  notre  Épitre  trace  des  faux  docteurs  ne 
coïncide  qu'à  la  surface  avec  le  système  gnostique, 
tel  qu'il  se  développa  plus  tard.  Quoi  que  prétendent 
nos  adversaires,  les  expressions  aip.tfîi;  oncc-Otciat, 
II  Pet..  11.  2,  tù:i<..o.ç  >.ôyoiç>  II,  3,  et  iTtcpoyxa  u,a- 
TacÔTuiTo;,  n.  18.  sont  trop  vagues  pour  représenter  le 
système  en  question.  La  première  ne  désigne  point 
un  corps  de  doctrine,  mais  un  choix,  une  hérésie;  les 
deux  autres  font  allusion  à  ce  qu'il  y  avait  de  nul  et  de 
vaia  dans  les  discours  des  docteurs  hérétiques.  Quant 
aux  éons,  que  M.  von  Soden  a  cru  découvrir  dans  le 
passage  II,  10-11,  ce  sont  tout  simplement  les  bons  ou 
les  mauvais  anges,  d'après  le  sentiment  commun.  Voir 
B.  W'eiss.  Einleit.  in  dos  N.  T.,  3*  édit.,  1897,  p.  451; 
Kaulen,  Einleit  ,  p.  565;  Hundhausen,  Der  zu'eite  Pon- 
tificalbrief,  p.  1-10;  K.  Henkel,  Der  iweile  Brief  des 
Apostelfûrsten,p. 21-37,  etc.  S'il  ya  ici  quelque  chose  de 
la  gnose,  c'est  la  gnose  a  ses  premiers  débuts,  telle  qu'elle 
commença  à  se, manifester  environ  vingt  ans  après  l'as- 
cension du  Sauveur,  comme  on  le  voit  par  les  Épitres 
de  saint  Paul  aux  Philippiens,  aux  Éphésiens.  aux 
Colossiens,  par  la  première  à  Timothée,  par  les  Épitres 
de  saint  Jacques  et  de  saint  Jude.  Ainsi  donc,  «  pour 
éclaircir  par  d'autres  données  historiques  le  portrait 
des  faux  docteurs  que  nous  présentent  l'Épitre  de  Jude 
et  la  17»  Pétri,  il  n'est  pas  nécessaire  de  descendre 
dans  le  second  siècle.  Nous  en  trouvons  déjà  les  traits 
essentiels  dans  la  chrétienté  primitive  >.  Th.  Zahn, 
Fini,  in  das  N.  T.,  t.  n,  p.  101;  voir  aussi  le  t.  i. 
p.  197-202,  210.  Entre  ces  premiers  adversaires  du 
christianisme,  tels  que  les  décrivent  ces  diflérentes 
Épitres,  on  reconnaît  une  grande  ressemblance  :  ils 
ont  des  tendances  antinomisles  et  refusent  de  se  plier 
entièrement  sous  la  loi  chrétienne. ils  se  livrent  à  toutes 
sortes  d'excès,  ils  en  viennent  jusqu'à  mépriser  la  per- 
sonne du  Christ  et  à  l'abaisser  pour  devenir  plus 
libres  par  là-même. 

c)  A  quel  groupe  spécial  des  premiers  hérétiques 
devons-nous  rattacher  les  faux  docteurs  contre  lesquels 
s'élève  la  11*  Pétri?  On  les  a  identifiés  lantùt  aux  Xi- 
colaïtes  de  l'Apocalypse  dans  les  temps  anciens,  Œcu- 
ménius,  In  II  Pet.,  Il,  I,  t.  cxix,  col.  592;  dans  les 
temps  modernes,  Baronius,  Annal.,  ad  ann.  8,  n.  8; 
de  nos  jours,  llug.  Einleit.,  '.',  édit..  t.  II,  p.  572;  W'in- 
dischmann.  Vindicte  Petrinse, p.  :ii:  Reithmayr,  Kin- 
leit.,  p.  743;  Cornely,  Tntrod.,  t.  ni.  p.  636;  T.  Zahn, 
Enleit.  in  dasN.  T.,  t.  Il,  p.  loi  i,  tantôt  avec  les  disci- 
ples et  successeurs  de  Simon  le  magicien,  etc.  11  est 
difficile  de  se  prononcer  la-dessus  avec  certitude.  Toutes 
ces  hypothèses  on'  du  Mai.  car  '  s  hérétiques  décrits 
dans  la  H'  Pétri  présentent  certaines  ressemblances 
avec  ces  autres  docteurs  de  mensonge;  mais  elles  pa- 
raissent toutes  plus  ou  moins  exagérées, attendu  qu  au- 
cune d'elles  ne  correspond  absolument  au  portrait  tracé 
par  saint  Pierre.  11  esl  probable  que  le  prince  des 
Apôtres  généralise,  el  qu'il  stigmatise  en  même  temps 
toutes  ces  sectes  diverses.  Cf.  Henkel,  lor.  cit.,  p.  32- 
37.  —  Un  a  eu  tort  parfois.  Fronmûller,  In  11  Pet.,  ni, 
3,  p.  96;  P.  W'eiss,  Der  Pétrin.  Lehrbegriff,  p.  283; 
lluther,  Die  Briefe  Pétri,  p.  2X6;  Uisping,  Erktàrung 
der  kathol.  Briefe,  p.  257.  etc..  d'établir  une  distinc- 
tion entre  les  •iî.S.caôï'jy.aVot,  magistri  mendaces, 
que  décrit  le  cinq).  11,  JT.  2-3,  et  les  èu..:a.y.-at.  illu- 
sores,  du  chap.  in.  v.  3-4,  comme  s'ils  avaient  formé 
deux  classes  distinctes  d'héivtiqucs.  Il  s'agil  en  i  i- 
lité  d'une  seule  et  même  catégorie  de  faux  docteurs, 
qui  prêchaient  simultanément  la  licence  morale  et  des 
doctrines  erronées  sur  la  nature  et  sur  le  retour  de 
Jésus-Christ.  Après  les  avoir   décrits  en  ternies  gêné- 


401 


PIERRE    (DEUXIÈME    ÉPITRE   DE   SAINT 


402 


raux  dans  le  chap.n,  l'auteur  revient,  dans  le  chap.ui, 
sur  un  trait  spécial  de  leurdoctrine  perverse,  la  néga- 
tion du  second  avènement  de  Jésus-Clirist. Cf.  H, 10  et  III, 
3,  où  le  même  trait  caractéristique,  qui  post  carnem 
in  concupiscentia  immunditiœ  ambulant,  etjuxta  pro- 
prias concupisceidix  ambulantes,  appliqué  de  part  et 
d'autre,  montre  qu'il  est  vraiment  question  des  mêmes 
personnes.  Le  texte  m,  17,  ne  insipientium  (à8É<ru,<i>v, 
«  des  hommes  sans  loi  »)  errore  traducti  excidatis..., 
prouve  aussi  que  les  i^-Kxîy.-ca:  étaient  antinomistes 
comme  les  iiE-j6riSiS<iiTxa).ot.  Rejetant  toute  loi,  ils  se 
livraient  à  la  débauche,  et  niaient  le  retour  gênant  du 
Christ.  Comme  l'auteur  emploie  plusieurs  fois  le  futur 
à  propos  de  ces  faux  docteurs,  o,  1,  «  erunt  magistri 
mendaces;  »  m,  3,  «  ventent  in  novissimis  diebus  illu- 
sores,  »  quelques  interprètes  ont  supposé  que  sa  des- 
cription concerne  l'avenir  et  non  le  temps  présent.  Ce 
sentiment  est  inexact,  car  il  est  évident,  d'après  le  sens 
de  l'Épitre,  que  saint  Pierre  écrit  pour  prémunir  ses 
lecteurs  contre  un  péril  actuel.  D'ailleurs,  dans  les  ver- 
sets 10-15  du  chap.  il  (cf.  ii,20,  y£yovEv;n,22,  avy.6iêi\x&v), 
il  parle  des  hérétiques  comme  existant  déjà  réellement. 
Cf.  II  Tim.,  m.  1-8,  où  saint  Paul  s'exprime  d'une  fa- 
çon identique.  Cette  manière  de  faire  devait  montrer 
que  le  danger,  déjà  présent,  deviendrait  plus  grand 
encore,  parce  que  le  mal  irait  en  se  développant. 

2°  Le  but  que  se  proposait  l'auteur  est  indiqué  parles 
détails  qui  précèdent.  Il  est  même  énoncé  tout  au  long 
dans  les  dernières  lignes  de  l'Épitre,  m,  17-18, en  termes 
tour  à  tour  négatifs  et  positifs  :  «  Vous  donc,  frères, 
avertis  d'avance,  soyez  sur  vos  gardes,  de  peur  qu'en- 
traînés par  l'erreur  de  ces  insensés,  vous  ne  veniez  à 
déchoir  de  votre  fermeté;  mais  croissez  dans  la  grâce 
et  dans  la  connaissance  de  Notre-Seigneur  et  Sauveur 
Jésus-Christ.  »  Saint  Pierre  voulait  donc  prémunir  ses 
lecteurs  contre  le  nouveau  danger  qui  les  menaçait; 
danger  beaucoup  plus  grave  que  celui  qui  avait  servi 
d'occasion  et  de  but  à  sa  première  Epitre.  Voir  col.  387. 
Nous  ignorons  de  quelle  manière  il  avait  été  averti  du 
fait  désolant  qui  a  été  signalé  plus  haut.  Les  relations 
entre  Rome  et  l'Asie  Mineure  étaient  d'ailleurs  faciles 
et  fréquentes  à  cette  époque.  Certain  qu'il  ne  tarderait 
pas  à  mourir,  cf.  i,  14,  Pierre  se  hâta  d'écrire  cette 
seconde  lettre, qui  est  avant  tout, comme  la  précédente, 
une  exhortation  essentiellement  pratique. 

IV.  Analyse.  —  La  II'  Pétri  se  fait  remarquer, 
comme  la  première  Epitre,  par  son  unité,  et  par  une 
marche  simple  et  claire.  Voir  Keil,  Comment,  ûber  die 
Briefe  des  Petrus,  p.  179-182. 

1°  Voici  d'abord,  en  général,  le  sujet  traité  par 
l'apôtre.  Dans  les  circonstances  qui  ont  été  décrites,  il 
importait  de  rappeler  dès  le  début  aux  chrétiens  d'Asie 
Mineure  la  stricte  obligation  où  ils  étaient  de  mener 
une  vie  très  sainte,  et  aussi  la  certitude  parfaite  de 
l'objet  de  leur  foi.  Il  fallait  ensuite  les  mettre  directe- 
ment et  nettement  en  garde  contre  les  séductions  qui 
les  menaçaient  de  la  part  des  docteurs  hérétiques. 
C'est  ce  thème  qui  est  traité  ici  par  saint  Pierre.  Il 
presse  ses  lecteurs  d'organiser  leur  vie  d'une  manière 
conforme  à  la  foi  chrétienne,  de  se  préserver  des  doc- 
trines malsaines  et  des  mauvais  exemples  de  l'hérésie, 
enfin  de  se  tenir  prêts  en  vue  du  second  avènement  de 
Jésus-Christ.  Il  insiste  aussi,  dès  la  première  ligne,  sur 
la  divinité  de  Jésus-Christ,  cf.  i,  1,  dont  il  ne  cite 
ensuite  jamais  le  nom  sans  y  ajouter  le  titre  «  Notre- 
Seigneur  ».  Cf.  i,  2.  S,  11,  14,  16;  m,  18. 

2»  Il  y  a  trois  parties  dans  la  lettre  :  a)  Nécessité  et 
motifs  de  croître  dans  la  pratique  de  la  vertu,  i,  1-21; 
6)  Description  des  mœurs  et  des  maximes  des  faux 
docteurs,  il,  1-22;  c)  Réalité  du  second  avènement  de 
■k-sus-Christ  et  instruction  relative  à  la  fin  du  monde, 
m.  1-18.  La  première  partie  est  morale;  la  seconde  polé- 
mique; la  troisième,  tout  ensemble  pratique  et  doctrinale. 


a)  Après  avoir  brièvement  salué  ses  lecteurs,  i,  1-2, 
l'auteur  les  invile  à  grandir  sans  cesse  dans  les  vertus 
chrétiennes  :  les  bienfaits  dont  Dieu  les  a  gratuitement 
comblés  et  les  magnifiques  promesses  qu'il  leur  a 
faites  sont  pour  eux  de  pressants  motifs  de  vivre  sain- 
tement. En  agissant  ainsi,  ils  réaliseront  de  la  façon  la 
plus  sûre  le  but  de  leur  vocation,  qui  consiste,  d'une 
part,  à  connaître  de  plus  en  plus  Xotre-Seigneur  Jésus- 
Christ,  et,  de  l'autre,  à  conquérir  la  place  qui  leur  est 
préparée  dans  le  ciel,  i.  3-11.  Pierre  se  sent  pressé  de 
leur  adresser  cette  recommandation,  car  Jésus  lui  a  ré- 
vélé que  sa  fin  est  proche;  c'est  donc  pour  ainsi  dire 
son  testament  qu'il  fait  en  leur  écrivant,  i,  12-15. 
Comme  raison  spéciale  de  vivre  très  saintement,  il  leur 
signale  la  certitude  de  l'enseignement  qui  leur  a  été 
prêché,  et  il  démontre  successivement  cette  certitude 
par  la  prédication  des  apôtres  et  par  les  oracles  des 
anciens  prophètes. 

b)  Dans  la  seconde  partie,  dirigée  ouvertement  contre 
les  docteurs  hérétiques,  l'auteur  commence  par  affirmer 
avec  énergie  le  châtiment  futur  de  ces  hommes  per- 
vers :  Dieu,  qui  est  fidèle  à  délivrer  les  justes,  sera 
fidèle  aussi  à  punir  ces  misérables,  de  même  qu'il 
avait  autrefois  châtié  les  anges  déchus,  les  contempo- 
rains impies  de  Noé,  les  infâmes  habitants  de  Sodonie 
et  de  Gomorrhe,  H,  1-9.  Saint  Pierre  trace  ensuite  une 
peinture  vivante,  hardie,  de  leur  conduite  ignoble; 
surtout  de  leur  orgueil,  de  leur  esprit  de  révolte,  de 
leurs  débauches.  Il  les  montre  comme  les  prédicateurs 
d'une  fausse  liberté,  qui  produit  forcément  l'esclavage, 
et  il  assure  qu'il  aurait  été  meilleur  pour  eux  de  ne 
pas  connaître  Jésus-Christ,  n.  10-22. 

c)  Dans  la  troisième  partie,  l'auteur  réfute  deux 
erreurs  dogmatiques  de  ces  docteurs  de  mensonge. 
Ils  tournaient  en  ridicule  la  croyance  au  second  avè- 
nement du  Christ  et  à  la  fin  du  monde.  L'apôtre  ré- 
pond avec  vigueur  que  ces  deux  événements  se 
passeront  à  l'heure  voulue  par  Dieu,  et  que,  s'ils  sont 
retardés,  c'est  par  un  effet  de  la  bonté  du  Seigneur, 
qui  veut  donner  pleinement  aux  pécheurs  le  temps  de 
se  repentir.  Mais  le  jour  du  Seigneur  viendra  infailli- 
blement; les  cieux  et  la  terre  actuels  seront  dissous 
par  le  feu,  non  toutefois  pour  disparaître,  mais  pour 
faire  place  à  de  nouveaux  cieux  et  à  une  nouvelle 
terre  où  habitera  la  justice,  m,  1-10.  Pierre  conclut  en 
engageant  ses  lecteurs  à  se  tenir  toujours  prêts,  en  vue 
du  jugement  divin,  qui  éclatera  à  l'improviste;  il  en 
appelle  sur  ce  point  au  témoignage  de  son  bien-aimé  frère 
Paul,  m,  11-16.  Enfin,  il  exhorte  les  fidèles  à  se  tenir 
en  garde  contre  les  faux  docteurs,  et  à  croître  dans  la 
connaissance  et  dans  la  grâce  du  Sauveur  Jésus,  m,  17-18. 

V.  Authenticité.  —  /.  preuves  extrinsèques  (voir 
Hundhausen,  Das  zweite  Pontificalschreiben...,p.  19- 
100;  Keil,  Comment,  ûber  die  Briefe  des  Petrus,  p.  184, 
Th.  Zahn,  Einleit.,  t.  n,  p.  89  sq.;  Cornely.  Introd.; 
Henkel,  Der  zweite  Brief  des  Apostelfinslen  Petrus 
geprûft  auf  seine  Echlheit,  p.  47-89).  —  a)  Si  nous 
interrogeons  la  tradition  sur  ce  point  important,  nous 
n'aurons  pas  à  signaler  la  même  unanimité  de  témoi- 
gnages que  pour  la  I10  Epitre;  nous  trouverons  cepen- 
dant des  preuves  satisfaisantes.  De  nombreux  faits  his- 
toriques, regardés  très  justement  comme  indiscutables, 
sont  beaucoup  moins  accrédités.  Remarquons  d'ailleurs 
que  la  7ia  Pétri  est,  dans  son  ensemble,  moins  pratique 
que  la  première  lettre,  qu'elle  traite  de  sujets  moins 
généraux,  et  qu'elle  est  née  de  circonstances  plus  spé- 
ciales. Il  n'est  donc  pas  étonnant  qu'elle  ne  soit  pas 
mentionnée  et  citée  aussi  fréquemment  dans  les  temps 
anciens. 

b)  Néanmoins,  elle  était  connue  de  très  bonne  heure 
dans  l'Église  comme  un  écrit  inspiré  et  canonique.  Au 
premier  siècle,  le  pape  saint  Clément  y  fait  plusieurs 
allusions  très  probables.  Cf.  surtout  1  ad  Cor.,  vu,  5; 


403 


PIERRE    (DEUXIÈME    EPITRE    DE    SAINT) 


404 


ix.  1.  et  II  Pet.,  il,  5-7  :  de  part  et  d'autre,  les 
exemples  de  Xoé  et  de  Lot  sont  cités  conjointement,  et, 
dans  les  deux  écrits,  à  propos  de  Lot,  il  est  dit  que 
Dieu  n'abandonne  pas  les  siens,  mais  qu'il  châtie  leurs 
ennemis;  ce  double  rapprochement  est  frappant. 
Cf.  aussi  I  ad  Cor.,  vu.  9,  et  II  Pet.,  i,  12-13;  /  ad 
Cor.,  ix,  2,  et  II  Pet.,  i.  17;  /  ad  Cor.,  xi,  1,  et 
II  Pet.,   Il,  6-8;  1    ad  Cm-..    XXHI,   2,  et  II  Pet.,  i.    1; 

I  ad  Cor.,  xxv,  5,  et  II  Pet.,  n.  2.  Au  second  siècle, 
on  entend  très  vraisemblablement  aussi  des  échos  de 
notre  Épitre  dans  le  Pasteur  d'Hermas  (cf.  Simil.,  6, 
et  II  Pet.,  n,  1-3;  plusieurs  critiques  sérieux  croient 
qu'ici  l'emprunt  est  indéniable),  dans  la  Didaclié,  cf.  m, 
6-8;  iv,  1,  et  II  Pet.,  II,  lu  il  régne  une  grande  ana- 
logie de  pensées  et  d'expressions  entre  les  deux  au- 
teurs); dans  l'Épitre  de  Barnabe,  cf.  n,  t.  n,  col.  729,  et 

II  Pet.,  i,  5-6;  xv,  4.  et  II  Pet.,  m.  8;  dans  l'Épitre  de 
saint  Polycarpe  Ad  Philipp.,  7.  t.  v.  col.  1012,  cf.  II  Pet., 
m,  3;  dans    l'écrit  de  saint  Théophile  d'Antioche  Ad 
Aulol.,  n.  9,  t.  vi,  col.  1064  (il  existe  une  grande  res- 
semblance entre  le  passage  n,9,  et  II  Pet..  1,21  ;  cf.  aussi 
II,  3.  et  II   Pet.,   i,  19);  dans  le   Dial.  c.   Tryph.,  de 
saint  Justin,  cf.  t.  vi,  col.  669,  et  II  Pet.,  i,  21;  t.  m, 
8;   dans  saint  Irénée,  Adv.  hier.,  cf.  îv,  36,  3,  t.  vu. 
col.  1224,  et  II  Pet.,  n,   i-7:  v,  23,  2;  28,  3,  col.  L185, 
1200,  et  II  Pet.,  m,  8.  Au  troisième  siècle.  Firmilius  de 
Césarée  en  Cappadoce  parle.  Ep.  ad  Cypr.,  75,  t.   m. 
col.  1159,  d'avertissements  donnés  aux  fidèles  par  saint 
Pierre  et  par  saint  Paul,  afin  de  les  mettre  en  garde 
contre  les  docteurs  hérétiques:  or,  cette  réflexion  ne 
saurait  s'appliquer  qu'à  la  II'  Pétri,  car  il  n'est  nulle- 
ment question  des  faux  docteurs  dans  la  première  lettre 
du  prince  des  Apôtres.  L'auteur  des  Philosophoumena, 
ix.  7,  t.  xvi,  col.   3371,  fait  allusion  à  II  Pet.,  n.  22. 
Au  dire  d'Eusèbe,  //.  E.,  vi,   11.   t.  xx,  col.  549,  Clé- 
ment d'Alexandrie  avait   commente'    l'Épitre   de  saint 
Jude  et  «  les  autres  Epitres  catholiques  »;  or,   Eusèbe 
range  la  II*  Pétri  dans  cette  catégorie  d'écrits.  Cf.  //. 
E.    îi   23.  t.  xx,  col.  205.  Ce  commentaire  de  Clément 
d'Alexandrie  suppose  que  notre  Kpitre  était  alors  très 
estimée  et  répandue.  Origène  est  le  premier  à  la  citer 
nommément   comme   l'œuvre    de    saint    Pierre.    Voir 
surtout  Hom.   iv  in  Le».,   I.    n.  col.   437,   où   il   cite 
Il  Pet.,  i,  4;  Hom.  xiii  in  Num.,  t.  n,  col.  676,  où  il 
cile  II  Pet.,   n,  16;  Hom.   vu  in  Jox.,  t.  n,  col.  857, 
où  il  dit  :  Petrus  duabus  Epistolorum  suatttm  Per- 
sonal tubis;  Connu,   in   ilatlh.,    15,  t.   m,  col.  692,  el 
Comm.    in    Rom.,    i,    8,   t.   iv,  col.    1178,    où   il    cite 
II   Pet.,    i,    2.    Didyuie    d'Alexandrie,    mort    en     384. 
attribue  plusieurs  fois  notre  lettre  à  saint  Pierre,  dans 
son   traité  De  Trinit.,  i,   15.    28,    29.   etc.,   t.    xxxix. 
col.  304,  409,  416.  Saint  Athanase,  Ex  Epist.  (estai.. 
39,  t.  xxvi,  col.  1176,1a  range,  avec  les  autres  livres  du 
Nouveau  Testament,   parmi   «   les  sources  du  salut  ». 
Saint  Cyrille  de  Jérusalem.  Catecli.,  iv,  36,  t.  xxxin. 
col.  500,  énumère  les  sept  Épitres  catholiques  telles  que 
nous  les  connaissons.  L'historien  Eusèbe  accepte  per- 
sonnellement la  //•  Pétri  comme  authentique  et  cano- 
nique. H.  E.,u.  23,  l.xx.  col.  205.  Ailleurs,  II.  E..  m,  3. 
col.  217.  il  établit  une  distinction  essentielle  entre  elle 
et  trois  écrits  (les  Actes,  la  Prédication  et  l'Apocalypse 
de  Pierre),  qui  circulaient  sous  le  nom  du  prince  îles 
Apôtres;  ces  derniers  n'ont  pas  été  transmis  parmi  les 
livres  généralement    reçus  par  l'Église,  tandis  que  la 
Seuïépa  imaxaXr,  est  lue  officiellement  comme  les  autres 
écrits  inspirés.  Saint  Jérôme  est,  en  ce  qui  le  concerne 
personnellement,  un  partisan  très  décidé  de  l'authenti- 
cité :  Scripsit  (Petrus    duat  Epistolas,  quœ  catholicœ 
nominanhir.  De  vir.  ill..  I,   t.  mu,  col.  607.  Il  dit 

irs  Bpi*t,  >\\.  ad  Uedib.,  II.  t.  xxn,  col.  1002; 
Cf.  Ep.  ad  Paulin.,  LUI,  8,  t.  xv.il,  col.  5i8.  qu'il  >  a 
sept  Épitres  catholiques,  composées  par  Jacques,  Pierre, 
Jean  et  Jude. 


c)  Il  est  vrai  que  plusieurs  de  ces  anciens  écrivains 
signalent  des  doutes  qui  existaient  çà  et  là.  de  leur 
temps,  touchant  l'authenticité  et  la  canonicité  de  la 
11"  Pétri.  C'est  ainsi  qu'Origène  a  dit  (dans  Eusèbe. 
H.  E.,  vi,  25,  t.  xx.  coi.  585)  :  «  Pierre  n'a  laissé 
qu'une  Épitre  universellement  reconnue,  peut-être 
aussi  une  seconde,  mais  on  n'est  pas  d'accord  sur  ce 
point.  »  Didyme  d'Alexandrie  l'accepte  et  l'a  commen- 
tée, comme  il  a  été  indiqué  ci-dessus,  col.  403;  mais 
un  fragment  latin  de  son  interprétation  contient  ce 
trait  :  Non  igitur  ignoraxdum  pnrsentem  Epistolam 
esse  falsalam,  quœ  licet  publiée tur,  non  tanien  in  ca- 
none  est.  Mais  il  est  assez  communément  admis,  même 
par  des  adversaires  de  l'authenticité,  que  ces  mots  ne 
sont  pas  de  Didyme  lui-même,  ou  bien  que  esse  falsa- 
tam  est  une  traduction  fautive  du  verbe  vo8ï-J;ts<:,  qui 
signifie  :  o  Elle  est  déclarée  non  authentique.  »  Eusèbe. 
dont  nous  avons  vu  plus  haut  le  sentiment  personnel, 
très  favorable  à  notre  Épitre,  la  range  ailleurs  parmi 
les  livres  qui  n'étaient  pas  universellement  admis 
comme  canoniques,  ri  iv-riXe- ;6u.v.x.  bien  qu'elle  fût 
connue  de  la  plupart  des  chrétiens  (toî;  7to).Xoîç)  et 
qu'elle  fût  étudiée  par  un  grand  nombre  (tkAXoiç)  avec 
les  autres  écritures,  parce  qu'elle  leur  paraissait  utile. 
H.  E.,  vi,  25,  t.  xx.  col.  584;  voir  aussi  m,  26.  3; 
m,  3,  1.  Saint  Jérôme  fait  une  observation  semblable  : 
Secundam  (epistolam)  a  plerisque  ejus  (Pétri)  esse 
negari  propter  styli  cum  priore  dissonantiam.  De 
tir.  ill.,  I,  t.  xxiîi,  col.  6:38.  Cf.  Epist.  ad  H- 
cxx,  t.  xxn,  col.  1002.  Nous  ferons  remarquer,  à  la 
suite  du  P.  Cornely,  Inlrod.,  t.  ni.  2'  part.,  p.  64 
d'autres  auteurs,  en  particulier  A.  Scha'fer.  Eitlleit. 
in  das  N.  T.,  p.  333,  n.  3,  que  l'expression  a  ple- 
risque dépasse  la  mesure,  car;  à  l'époque  du  saint 
docteur  (lin  du  IV  siècle),  il  est  certain  que  notre 
Épitre  était  communément  regardée  [comme  un  livre 
inspiré. 

d)  Les  doutes  en  question  sont  très  probablement  la 
cause  du  silence  gardé  au  sujet  de  cette  Epitre  par  le 
Canon  de  Muratori  ivers  175),  par  Tertullien  el  par 
saint  Cyprien.  qui  cependant  connaissent  et  citent  la 
précédente  lettre.  L'omission  de  la  II'  Pétri  par  la 
version  syriaque  primitive  est  pareillement  surpre- 
nante; mais  elle  est  compensée  par  la  présence  de  cet 
écrit  dans  lTtala,  au  second  siècle.  Nous  savons  d'ail- 
leurs par  saint  Ephrem,  Opéra  syriaca,  t.  il,  p.  342, 
que  les  Syriens  admettaient  la  canonicité  de  l'cpitre 
au  IVe  siècle.  Les  doutes  en  question  portèrent  surtout 
sur  la  différence  de  style  avec  la  I'  Pétri  voir  plus 
bas,  col.  407),  ou  bien,  comme  c'est  le  cas  pour  le  moine 
Cosinas  Indicopleuste  (au  si'  siècle),  ils  durent  leur 
origine  à  la  prophétie  relative  à  la  destruction'du  monde 
par  le  feu.  Cf.  II  Pet.,  m,  7.  10-13.  Peu  à  peu  ces  doutes 
disparurent,  de  ne  me  que  pour  les  autres  parties  deu- 

noniques  du  Nouveau  Testament;  aussi,  à  partir 
de  la  fin  du  iv«  siècle,  on  n'en  voit  plus  de  trace 
sérieuse.  Les  onze  ou  douze  listes  authentiques  des 
écrits  inspirés  que  nous  a  léguées  le  même  siécl 
tiennent  l'Épitre  (voir  Gaussen,  Canon  des  Ecrii 
t.  i.  p.  505),  et  les  conciles  de  Laodicée  en  364,  île 
Rome  en  375,  d'Hippone  en  393,  île  Cartilage  en  397, 
comptent  officiellement  notre  lettre  parmi  les  livres 
inspirés;  ce  qui  signifie,  en  même  temps,  qu'on  en  attri- 
buait alors  généralement  la  composition  à  saint  Pierre, 
Voilà,  certes,  de-,  témoignages  plus  que  suffisants  pour 
croire  à  son  authenticité.  —  Il  n'y  a  pas  eu  la  moindre 
hésitation  durant  le  moyen  âge  jusqu'à  Érasme  (voir  la 
lin  de  son  commentaire  sur  II  Pet.),  Calvin  i/« 
Il  Pet.,  Prolog.),  et  plus  tard  Grotius  [Adnotat.  in 
Il  Pet.,  i.  I),  etc..  qui  liront  revivre  les  anciens  dûmes. 
Les  protestants  eux-mêmes  refusèrent  d'abord  d 
suivre:  mais,  à  partir  du  xix*  siècle,  ils  se  sont  mis  i 
regarder  assez  généralement  l'Épitre  comme  l'œuvre 


405 


PIERRE    (DEUXIÈME    ÉPITRE    DE    SAINT) 


406 


d'un  faussaire.  On  compte,  aujourd'hui,  ceux  qui  l'attri- 
buent encore  au  prince  des  apôtres.  Voir  leur  énu- 
mération  dans  Hundhausen,  Das  ziveite  Pontifical- 
schreiben  des  Peints,  p.  19;  ajouter  Spitta,  Der 
zweite  Brief  Petrus,  p.  175. 

//.  preuves  INTRINSÈQUES.  —  Olshausen,  l'un  de  ces 
exégètes  protestants  qui,  assurent-ils,  n'ont  pas  réussi 
à  se  former  une  opinion  certaine  au  moyen  des  seuls 
témoignages  de  l'antiquité,  ajoute  :  Rationibus...  sub- 
jectivis  fultus  authentiam  Epistolœ  persuasum  habeo. 
Dans  Salmon,  Introd.  lo  the  Study  of  the  Books  of 
the  N.  T.,  7«  édit.,  p.  498.  Interrogeons  donc  maintenant 
l'Épitre  elle-même,  et  voyons  ce  qu'elle  nous  dit  au 
sujet  de  son  authenticité. 

Elle  se  donne  dès  le  début,  i,  1,  comme  l'œuvre  de 
«  Simon  Pierre,  serviteur  et  apôtre  de  Jésus-Christ  ». 
Plusieurs  passages  de  la  lettre  confirment  cette  asser- 
tion. L'auteur  se  range,  i,  16-18,  parmi  les  témoins  ocu- 
laires de  la  transfiguration  de  Notre-Seigneur,  et  le 
récit  qu'il  fait  de  ce  prodige  montre  qu'il  était  vraiment 
sur  la  «  sainte  montagne  ».  Cf.  Matth.,  xvn,  l-4;Marc,  ix, 
1-5;  Luc.  ix,  28-33.  Or,  ce  prodige  éclatant  n'eut  que 
trois  témoins,  Pierre,  Jacques  et  Jean,  et  personne  n'a 
jamais  songé  à  attribuer  la  lettre  aux  deux  fils  de  Zé- 
bédée.  Plus  loin,  in,  15,  l'auteur  nomme  saint  Paul  son 
«  frère  bien-aimé  »,  c'est-à-dire  son  collègue  dans  l'apos- 
tolat. Ces  deux  témoignages  sont  très  explicites.  11  faut 
en  rapprocher  aussi  la  déclaration  II  Pet.,  m,  1,  qui 
identifie  clairement  l'auteur  de  la  première  Épitre  et 
celui  de  la  seconde,  et  le  passage  m,  2,  où  celui  qui  a 
écrit  la  lettre  affirme  de  nouveau  qu'il  faisait  partie  du 
collège  apostolique.  En  rapprochant  n,  20,  de  Matth.,  xn, 
45,  et  n,  14,  de  Matth.,  v,  27,  on  voit  qu'il  connaissait 
fort  bien  les  paroles  du  Sauveur.  Ce  n'est  pas  qu'il 
«  fasse  des  efforts  surprenants  pour  jouer  le  rôle  d'apô- 
tre »,  comme  le  prétendent  E.  Reuss,  Die  Geschichte 
der  heil.  Schriften  des  N.  T.,  p.  256  de  la  3"  édit.,  1860, 
et  H.  Holtzmann,  Einl.  in  das  N.  T.,  3e  édit.,  p.  321,  dans 
le  but  d'enlever  toute  force  à  l'argument  qui  précède. 
Il  ne  joue  jamais  un  rôle,  mais  il  se  présente  simple- 
ment tel  qu'il  était  en  réalité.  On  a  aussi  affirmé  que, 
m.  2.  il  sort  de  ce  même  rôle  par  mégarde,  et  qu'il 
s'exclut  lui-même  du  corps  apostolique;  mais,  pour  ob- 
tenir ce  résultat  on  suit  la  leçon  àiroor<S),<«v  fiurâv,  «  de 
nos  apôtres  »,  tandis  que  le  texte  le  mieux  garanti 
porte  û)iùv,  vestrorum. 

Autre  preuve  très  forte.  Non  seulement  cette  seconde 
Épitre  ne  renferme  absolument  rien  que  saint  Pierre 
n'ait  pu  écrire;  elle  contient  en  outre  des  pensées  iden- 
tiques à  celles  de  la  première.  Voir  Hundhausen,  Das 
ziceite  Pontificalschreiben,  p.  02-90;  Kaulen,  Einleit-, 
p.  567;  Belser,  Einleit.,  p.  718  sq.;  Krawutzcky,  Pe- 
trinische  Studien,  Breslau,  1877,  t.  n,  p.  64-72.  — 
a)  Les  deux  écrits  mettent  singulièrement  en  relief  la 
personne  de  Notre-Seigneur,  qui  est  leur  centre  per- 
pétuel, et  auquel  tout  se  rapporte  en  vérité.  Relevons 
en  particulier  l'importance  attachée  à  son  second  avè- 
nement et  à  l'obligation  qu'ont  les  fidèles  de  se  préparer 
à  cet  acte  suprême  par  une  vie  très  simple.  Cf.  I  Pet., 
i,  7-8,  13-14;  iv,  7-8,  13-14;  v,  1-3;  II  Pet.,  i,  16, 
19.  m,  10-12.  —  6)  De  part  et  d'autre,  l'auteur  insiste 
sur  la  pensée  que  Jésus-Christ  nous  a  rachetés  au  prix 
de  son  sang  divin,  et  qu'il  nous  a  ainsi  purifiés  de  nos 
péchés.  Cf.  1  Pet.,  i,  2,  18-19;  m,  21;  II  Pet.,  i,  9;  II, 
20-22.  —  c)  Dans  les  deux  lettres,  la  religion  chrétienne 
est  présentée  comme  la  réalisation  des  anciennes  pro- 
phéties, de  sorte  que  le  ministère  des  prophètes  et  ce- 
lui des  Apôtres  sont  mis  en  relations  intimes.  Cf. 
I  Pet.,  i,  10-12;  II  Pet.,  i,  16-19;  m,  2.  -  d)  La 
seconde  Épitre  suppose,  comme  la  première,  une  con- 
naissance très  grande  de  l'Ancien  Testament.  Il  est  vrai 
qu'il  n'y  est  cité  qu'une  fois;  explicitement,  II  Pet.,  n, 
28;  cf.  Prov.,  xxvi,  11;  mais  les  allusions,  les  réminis- 


cences, les  citations  indirectes  y  abondent  partout.  Cf. 
i,  19-21;  n,  1,  4-8,  15-16;  m,  2,  5-8,  10,  13,  16,  etc.  - 
e)  Voici  encore  quelques  traits  communs  aux  deux  Épi- 
tres  :  l'idée  que  les  chrétiens  ont  été  régénérés  et  qu'ils 
participent  à  la  nature  divine,  I  Pet.,  i,  23;  II  Pet.,  i, 
4;  l'existence  d'une  vraie  et  d'une  fausse  liberté,  I  Pet., 
i,  22;  II  Pet.,  II,  19;  la  mention  du  déluge,  I  Pet.,  m. 
20;  II  Pet.,  m,  6;  le  fait  que  sept  personnes  seulement 
échappèrent  à  cette  catastrophe,  I  Pet.,  m,  20;  II  Pet., 
H,  5;  plusieurs  ressemblances  frappantes  sous  le  rap- 
port eschatologique.    I   Pet.,   i,   4,   et  II  Pet.,    i,    11: 

I  Pet.,  i,  7,  et  II  Pet.,  i,  16;  I  Pet.,  I,  20,  et  II  Pet.,  m, 
3.  —  /)  Notons  aussi  les  analogies  qui  existent  entre 
le  commencement  et  la  lin  des  deux  lettres.  Elles  men- 
tionnent l'une  et  l'autre,  dès  leurs  premières  lignes, 
l'espérance  du  ciel  comme  un  puissant  encouragement 
pour  les  chrétiens.  Cf.  I  Pet.,  i,  4-6;  II  Pet.,  i,  11. 
Elles  s'ouvrent  par  le  même  souhait,  qui  n'apparaît 
nulle  part  ailleurs  dans  le  Nouveau  Testament.  L'une 
et  l'autre  elles  s'achèvent  par  l'indication  très  précise 
du  but  que  se  proposait  leur  auteur,  I  Pet.,  v,  12; 

II  Pet.,  m,  17-18.  —  g)  La  seconde  Épitre  rappelle 
partout  le  caractère  ardent,  l'autorité  et  le  zèle  aposto- 
lique, la  vigueur  et  l'originalité  du  prince  des  Apôtres, 
de  sorte  qu'elle  respire  constamment,  comme  la  pre- 
mière, «  l'esprit  de  Pierre  ». 

///.  objections  des  CRITIQUES.  —  Dans  ces  conditions, 
on  conçoit  que  les  adversaires  de  l'authenticité  «n'aient 
pas  essayé  de  proposer,  avec  quelque  vraisemblance, 
un  auteur  différent  »  de  saint  Pierre.  Burger,  dans  Strack 
et  Zôcklet, Kurzgefasster  Komment.,N.  Test.,  4»  fascic, 
p.  181.  Néanmoins,  malgré  tant  de  preuves  extrinsè- 
ques et  intrinsèques,  ils  ont  combattu  notre  Épilre  avec 
un  acharnement  extraordinaire.  Voir  E.  Renan,  L'Anté- 
christ, p.  vi  ;  E.  Reuss,  Gesch.  der  heilig.  Schriften  des 
N.  Test.,  3e  édit.,  p.  256;  .lûlicher,  Einleit.,  p.  152. 
B.Weiss  lui-même,  qui  admettait  autrefois  l'authenticité, 
pense  maintenant  qu'on  ne  peut  rien  décider  à  ce  sujet. 
Cf.  Einleit.,  3=  édit.,  p.  450.  Le  D'  Kûhl,  Die  Briefe 
Pétri,  édit.  de  1897,  p.  370,  affirme  très  justement  qu'on 
a  abusé  des  arguments  intrinsèques  contre  l'Épitre,  et 
que  plusieurs  détails  qui,  dans  l'hypothèse  de  l'authen- 
ticité, paraissent  tout  à  fait  inoffensifs,  ont  été  bien  à 
tort  regardés  comme  des  motifs  de  soupçon  et  de  doute. 
Parmi  les  exégètes  protestants  qui  l'admettent,  nous 
pouvons  citer  Nietzsche,  Epislola  Pétri  posterior,  au- 
ctori  suo...  vindicata,  I7S5;  C.  Flatt,  Genuina  secunda 
Pétri  epistolœ  origo...  defendilur,  1806;  W.  Dahl,  De 
Authentia  epistolse  Pétri  posterioris  alque  Judw,  1807, 
Bertholdt,  Olshausen  (il  a  aussi  composé  un  ouvrage  spé- 
cial sur  la  question,  De  integrilate  et  authentia  poste- 
rioris Pétri  epistolse,  1823),  Guericke,  Thiersch,  Stier, 
Dietlein,  Hofmann,  Schulze,  F.  Keil,  Briickner,  Spitta, 
A.  Bruce,  etc.,  qui  appartiennent  aux  écoles  exégéti- 
ques  les  plus  diverses.  Voir  .1.  H.  Holtzmann,  Einleit  , 
p.  325;  Grosch,  Die  Echtheit  des  zweiten  Briefes  Pé- 
tri, 1889,  et  surtout  l'excellent  ouvrage  du  D'  Henkel 
(catholique),  Der  zweite  Brief  des  Apostelfûrsten 
Petrus  geprûft  auf  seine  Echtheit,  Fribourg-en-Bris- 
gau,  1904. 

Les  objections  alléguées  sont  de  deux  sortes  :  il  y  a 
celles  qui  concernent  les  pensées  et  celles  qui  regar- 
dent la  forme.  —  1°  Objections  concernant  les  pensées. 
—  On  a  prétendu  que  le  fond  des  deux  écrits  est  trop 
différent  pour  qu'ils  puissent  provenir  d'un  seul  et 
même  auteur.  H.  Holtzmann,  Einleit.,  p.  321-322.  Mais 
nous  avons  déjà  démontré  indirectement,  col.  405,  que 
cette  allégation  porte  entièrement  à  faux;  aussi  Reuss 
lui-même,  Geschichte  der  heil.  Schriften  des  N.  T., 
p.  70,  ne  lui  attache-t-il  «  aucune  force  décisive  ».  Comp. 
Hofmann,  Heil.  Schriften  des  N.  T.,  t.  il,  p.  128;  t.  ix, 
p.  208.  Nos  adversaires  insistent  en  particulier  sur  le  fait 
suivant  :  la  II'  Pelri  parle  de  la  destruction  ou  plutôt 


407 


PIERRE    (DEUXIÈME    ÉPITRE    DE   SAINT) 


408 


de  la  rénovation  du  inonde  actuel  par  le  feu.  m,  7,10, 
12,  tandis  que  cette  doctrine  est  tout  à  fait  étrangère  à 
la  première  Épilre.  Nous  répondons  que  cet  enseigne- 
ment n'est  pas  nouveau,  mais  très  conforme  à  celui 
des  prophètes  de  l'Ancien  Testament  et  de  Jésus- 
Christ  lui-même.  Cf.  Is..  rxv.  17  :  lxvi.  22;  Matth.,  xxiv, 
29.  etc.  Et  pourquoi  saint  Pierre,  qui  a  mentionné 
dans  la  I"  Épitre  la  descente  de  Jésus-Christ  aux  en- 
fers, dogme  qui  n'est  qu'insinué  rapidement  ailleurs 
dans  les  écrits  du  Nouveau  Testament,  ne  parlerait-il 
pas,  dans  la  IIe,  d'un  fait  qu'il  laisse  de  coté  dans  la 
lettre  précédente'/  Les  autres  divergences  s'expliquent 
suffisamment  par  la  différence  du  thème  traité  de  part 
et  d'autre.  Par  exemple,  dans  la  Ire  Épitre,  l'auteur 
insiste  sur  l'espérance,  voir  la  col.  396,  afin  de  mieux 
consoler  et  encourager,  par  la  promesse  de  l'héritage 
céleste,  les  chrétiens  d'Asie  Mineure,  qui  enduraient  la 
persécution  pour  la  justice;  dans  la  IIe,  il  appuie  da- 
vantage sur  la  connaissance  ii-i-ytw.z.)  de  Jésus-Christ, 
qu'il  oppose  à  la  fausse  science  (tvôo'.ç)  des  docteurs 
hérétiques.  Mais  la  première  Épitre,  tout  en  insistant 
davantage  sur  l'espérance,  ne  manque  pas  de  mention- 
ner aussi  la  vraie  yvûxji;,  cf.  I  Pet.,  m.  7.  et  la  II', 
hien  qu'elle  ne  contienne  pas  expressément  le  mot 
:/- :.-  ;espérance|,  exprime  à  plusieurs  reprises  l'idée 
de  l'espérance  chrétienne.  Cf.  II  Pet.,  i.  11,  19;  m,  9, 
12-15.  Dans  la  première  lettre,  le  retour  de  Jésus- 
Christ  à  la  fin  des  temps  est  appelé  i-ozj/vi:;.  i  révé- 
lation ■ .  et  icapou<7(a,  s  présence  »,  dans  la  seconde. 
Mais  est-ce  là  une  différence?  Voir  la  réfutation  de 
cette  ohjection  générale  dans  B.  Weiss.  Die  Petrinische 
Etage,  p.  293;  F.  Keil,  Comment,  ûber  die  Briefe 
des  Petrus,  p.  194. 

2°  Objections  tirées  ('»  style.  —  On  a  ohjecté  très 
souvent  aussi  la  différence  de  style  entre  la  première 
et  la  seconde  Épitre,  comme  une  preuve  manifeste  que 
les  deux  écrits  ne  peuvent  pas  avoir  été  composés  par 

même  auteur.  Voir  Holtzmann,  Einleit.,  p.  321-322. 
La  différence  alléguée  est  très  réelle.  Cf.  von  Soden, 
Eand-Comment.  mm  .Y.  Test.,  t.  m.  2  partie,  p.  211: 
Henkel,  De*  zweile  Brief  des  Âpostelfûrsten  Petrus, 
p.  56.  Mais  elle  n'est  nullement  de  nature  à  permettre  de 
nier  l'authenticité;  sans  compter  que  nous  possédons 
trop  peu  de  produits  littéraires  de  saint  Pierre,  pour 
porter  un  jugement  convenable  sur  son  style.  Déjà  saint 
Jérôme  signalai!  cette  difficulté.  Epist.  cxx,  ad  Hedib., 
11,  t.  xxii,  col.  1002;  cf.  De  vir.  ill.,  1,  t.  xxm.  col.  609. 
Il  essayait  en  même  temps  d'en  marquer  la  cause  :  Ex 
quo  intelligimus  pro  diversitate  rerum  diversis  eum 
esse  interpretibus.  Ibid.  Plusieurs  exégètes  con- 
trains pensent  que  telle  est,  en  effet,  la  meilleure 
solution;  entre  autres,  Cornely,  Introd.,  t.  n,  3°  part., 
p.  848;  A.  Schaefer,  Einleit.  in  das  A*.  T.,  p.  3.S5:  Kûhl, 
Die  Briefe  Pétri,  p.  367,  S:i int  Marc  ou  Silvain  auraient 
aidé  saint  Pierre  pour  la  composition  de  la  première 
Épitre,  et  un  autre  disciple,  pour  la  seconde.  Le  fait 
n'a  rien  d'invraisemblable  en  lui-même;  toutefois,  il 
est  loin  d'être  certain,  et  il  n'est  pas  nécessaire  de 
recourir  à  lui  pour  expliquer  le  petit  problème  lin- 
guistique que  nous  étudions.  D'ailleurs,  on  peut  dire 
que  saint  Jérôme  exagère  à  propos  de  la  dillérence  de 
style  et  que  beaucoup  de  critiques  contemporains  font 
comme  lui.  Cf.  Henkel,  lue.  cit.,  p.  58-59. 

Il  est  bon  de  noter  ici,  avant  toute  autre  ré- 
ponse, que,  en  ce  qui  concerne  le  style  et  la  diction 
_  aérai,  i  la  divergence  des  opinions  est  la  règle 
parmi  les  savants,  comme  le  dit  fort  hien  M.  Helser, 
Einleit.,  p.  705.  Et  pour  justifier  cette  réllexion.  le 
savant  auteur  cite  les  jugements  contradictoires  de 
deux  exégètes  protestants  sur  lechap.  n  de  la  II'  Pétri  : 
Bofmann,  Die  Briefe  Pétri,  Judœ,  etc., 
p.  137-138,  le  juge  admirable  et  le  regarde  comme 
unique    en   son   genre  parmi  les  écrits  du    Nouveau 


Testament,  Mayerhoff,  Hisl.  krit.  Einleit.  in  die  Pétrin. 
Schriften,  p.  161-162,  le  trouve  faible,  pauvre  et  plat. 
Il  est  aussi  très  important,  pour  apprécier  équitahle- 
ment  la  divergence  indiquée,  de  se  rappeler  la  diffé- 
rence considérable  des  sujets  traités  et  du  but  que  se 
proposait  l'auteur.  En  outre,  l'emploi  que  saint  Pierre 
a  fait,  selon  toute  prohabilité,  de  la  lettre  de  saint 
Jude,  col.  410,  n'a  pas  manqué  d'exercer  une  certaine 
inlluence  sur  son  propre  style. 

Examinons  maintenant  quelques-unes  des  objections 
de  détail  proposées  sur  ce  point  par  les  néo-critiques. 
—  a)  On  a  noté  en  particulier,  J.  H.  Holtzmann.  Einleit., 
p.  322,  une  certaine  monotonie  que  présente  la  II' Pétri 
dans  l'usage  des  prépositions,  tandis  que  l'auteur  de  la 
I"  Epitre  sait  mieux  varier  sous  ce  rapport.  Ainsi,  dans 
le  passage  II  Pet.,  i,  3-5,  lia  revient  quatre  fois;  h 
jusqu'à  sept  fois  dans  les  lignes  qui  suivent,  i,  5-7.  Il  est 
vrai  que.  dans  la  première  lettre,  les  prépositions  sont 
plus  variées;  ce  qui  n'empêche  pas  si.-,  Èv  et  r.ix  d'y 
dominer  aussi.  Quant  aux  deux  passages  de  II  Pet.. 
qui  viennent  d'être  cités,  les  répétitions  ont  eu  lieu 
évidemment  à  dessein,  et  elles  donnent  beaucoup  de 
force  à  la  pensée.  —  6)  Il  y  a  dans  II  Pet.  ce  qu'on  a 
appelé  à  tort  des  ••  répétitions  traînantes  »,  des  mêmes 
termes,  à  des  intervalles  très  rapprochés.  Holtzmann, 
loc.  cit.,  p.  322.  Par  exemple  :  I,  2-3.  BESupiguivo;  et 
SeêcôprjTat ;  I.  1-10,  trois  fois  -ra-jr*;  II,  1.  deux  fois 
àiruXeia.  Voir  aussi  i,  17.  etc.  Mais  comment  n  a-t-on 
pas  remarqué  que  ces  répétitions  sont  voulues,  et 
qu'elles  ont  pour  but  évident  de  fortifier  la  pensée'.' 
Du  reste,  il  en  existe  de  semblables  dans  la  Ire  Épilre. 
Cf,  I  Pet.,  i,  5-10,  où  les  mots  «  foi,  croire.  - 
sont  employés  coup  sur  coup:  i.  5-18  et  m.  1-2.  à  pro- 
pos des  expressions  àveurrpofij  et  xya<rrpéçE<r6at.  —  c  On 
met  en  avant  un  nombre  assez  considérable  de  tel  mes 
(environ  cinquante-  qu'on  ne  trouve  pas  ailleurs  dans 
le  Nouveau  Testament  (entre  autres  i'JE-ju.o:.  i/aTxnaj- 
n-',;.  àjj.ii'iu.r.To;.  otù-/(iT)po;,  'j'hth.  (îopéopo;,  i:iv, 
5uavtfr)toc,  ÉYxaToixeïv,  ÈÇaxo^ouSetv,  ËitfXuai;,  W/jt.v 
).<x6eïv,  prlacua,  6a:/>r,.  rcapEtaxyetv,  icXamdç,  'ï-^v 
-xy.iô;.  reçpoOv,  pwofdpo;),  et  dont  plusieurs  semblent 
avoir  été  inventés  par  l'auteur  lui-même  (notamment 
taprapoûv,  n.  i;  Kotpaçpovta,  II, 16;  Êgépa|jLa  et xuXia|iâ<)> 
Mais,  selon  la  remarque  très  juste  de  Reuss,  Epi  très  ca- 
tholiq., p. 223, qui  rejettepourtant  l'authenticité.  «  qu'est- 
ce  que  cela  prouve'.'  Est-il  juste  que  chaque  auteur 
écrive  toujours  de  la  même  manière?  i  Les  Apôtres 
étaient  souvent  obligés  de  créer  un  langage  nouveau 
pour  exprimer  les  idées  chrétiennes;  saint  Pierre  l'a 
fait,  comme  saint  Paul,  comme  saint  Jean.  Ainsi  donc, 
0  on  ne  saurait  déduire  de  ces  particularités  de  lan- 
gage une  nécessité  absolue  d'affirmer  que  l'auteur  de 
].,  !;  Épitre  diffère  de  celui  de  la  II'.  »  Burger,  Knrz- 
gefasst.  Comment.,  p.  182,  N.  T..  4«  fasc. 

Nous,  de  notre  côté,  nous  pouvons  signaler  des  points 
de  contact  très  nombreux  entre  les  deui  tpîtri 
le  rapport  de  la  diction.  Nous  n'indiquerons  que  les 
plus  caractéristiques.  Voir  des  listes  plus  compli  i  - 
dans  Lumby.  dans  le  Speakers  Commentary,  t.  iv 
du  N.  T..  p.  228;  Davidson.  Introd.  t«  the  New  Test., 
t.  il,  p.  462;  llundhausen,  Das  zweite  Ponti/icalschrei- 
ben,  p.  86-88;  Keil,  'loc.  cit.,  p.  199-202;  Kûhl,  Die 
Pétri,  p.  336;  Henkel.  Der  zweite  Brief  des 
Apostelfûrsten,  p.  47.  —  a)  Les  deux  .lettres  ren- 
ferment  un  certain  nombre  d'expressions  qui  leur  sont 
communes  et  qui  ne  sont  pas  employées  dans  les  autres 
livres  du  Nouveau  Testament  :  a;jLr.>j ^ -  et  uvr.ù.iz.  1  Pet., 
i.  19;  cf.  Il  Pet.,  m,  14;  eimkteùeiv,  I  Pet.,  il,  19  et 
m.  2:  cf.  11  Pet.,  i.  Hi:  E-Jit46e<»i;,  I  Pet.,  m,  J!. 
cf.  Il  Pet.,  i.  11;  iténavrai  â|ixpT(ac,  I  Pet.,  iv.  '. 
cf.  II  Pet.,  il.  1  i.  —  b)  Des  deux  côtés,  on  rencontre 
des  expressions  et  des  tournures  identiques,  rares  ou 
relativement    rares.    Par    exemple  :   1   Pet..   Il,   9.  -.iz 


409 


PIERRE   (DEUXIÈME   ÉPITRE    DE   SAINT) 


410 


àperct;  to-j...  xaXéoavToç  ;  II  Pet.,  I,  3,  toù  xaXéaavioç 
Tjtxâs  Si'  àp£Tf|{  (il  est  à  remarquer  que  le  mot  àpsxr,, 
«  vertu  »,  indépendamment  de  ces  deux  passages,  n'est 
employé  dans  le  Nouveau  Testament  que  par  saint 
Paul,  Phil.,  îv,  8,  où  il  est  appliqué  aux  hommes  ;  saint 
Pierre  seul  l'applique  à  Dieu);  à6£p.iToç,  I  Pet.,  IV,  3, 
et  à6s<j[io?,  II  Pet.,  il,  7;  Sr)).o'jv,  pour  marquer  la  ré- 
vélation divine,  I  Pet.,  i,  II,  et  II  Pet.,  i,  14;  àva- 
oipo^  (le  «  mot  favori  »  de  saint  Pierre),  1  Pet.,  i,  15, 
18;  il,  23;  m,  1,  2,  16,  et  II  Pet.,  n,  7;  m,  11; 
èmOu[K'a  aapxixa,  I  Pet.,  il,  11.  et  II  Pet.,  II.  10; 
(TOipfÇstv,  I  Pet.,  v,  10,  et  II  Pet.,  i,  12,  etc.;  .0  x- 
Stkipta,  I  Pet.,  i,22.  et  II  Pet.,  i,  7;  -/op^v,  I  Pet., 
iv,  11,  et  II  Pet.,  i,  5,  11,  etc.,  —  c)  On  signale  encore 
l'usage  très  spécial  du  participe  é'xovteç  (I  Pet.,  II,  12, 
ayant  une  bonne  manière  d'agir;  ni,  16,  ayant  une 
bonne  conscience  ;  iv,  8,  ayant  une  charité  conti- 
nuelle; II  Pet.,  n.  II,  ayant  les  yeux  pleins  d'adul- 
tère), la  construction  avec  le  datif,  I  Pet.,  i,  12;  II,  7; 
m,  15;  iv,2.  12;  v,  9;  II  Pet.,  i,  1,  17;  n,  1,  3,  5,  8, 
17,  19,  20;  m,  7;  l'emploi  fréquent  du  participe  passif. 
Cf.  I  Pet.,  i,  4,  8,  20,  22,  23;  il,  1  ;  iv,  3;  II  Pet.,  i,  3, 
12,  16;  n,  12,  14;  m,2,  7.  —  d)  Notons  aussi  des  mots 
ordinaires,  mais  qui  reviennent  souvent  dans  les  deux 
lettres  ;  i}-ujc>j,  I  Pet.,  i,  9,  22;  n,  II,  25;  m,  21;  IV, 
19;  II  Pet.,  n,  8,  14;  siSÛ;,  I  Pet.,  i,  8,  18;  II,  9; 
II  Pet  ,  I,  12,  li;  ri;,  cinq  fois  dans  I  Pet.,  quatre 
fois  dans  II  Pet.  —  e)  On  trouve  dans  les  deuxÉpitres 
l'emploi  des  substantifs  abstraits,  au  pluriel  :  I  Pet., 
i,  II,  les  gloires;  voir  aussi  n,  19,  et  iv,  3;  II  Pet.,  n, 
2,  13,  18;  ni,  11.  Et  rien,  dans  toutes  ces  coïncidences, 
n'indique  qu'elles  aient  été  voulues  et  recherchées 
par  un  faussaire  qui  se  serait  proposé  d'imiter  le 
style  du  prince  des  Apôtres  :  elles  n'ont  rien  de  trop 
saillant,  qui  puisse  exciler  la  méfiance;  elles  ne  sont 
pas  la  répétition  de  pensées  formulées  dans  la  lie  Épitre. 
En  somme,  la  comparaison  du  style  des  deux  lettres 
aboutit  plutôt  à  une  très  forte  présomption  en  fa- 
veur de  l'authenticité  de  la  IIe.  —  /')  On  peut  citer 
pareillement  des  coïncidences  assez  frappantes,  tou- 
jours au  point  de  vue  du  style,  entre  notre  Épitre  et 
les  discours  de  saint  Pierre  dans  le  livre  des  Actes. 
Voir  Lumby,  loc.  cit.,  p.  226;  Salmon,  Introd.  lu  tlie 
N.  T.,  p.  495;  Henkel,  loc.  cil.,  p.  75-76.  Voici  quelques- 
unes  des  principales  :  àpvsou.ai,  Act.,  m,  13-14,  et 
II  Pet.,  n,  1;  YvûptÇsiv,  Act.,'  n,  28,  et  II  Pet.,  I,  16; 
eiSùç  8xi,  Act.,  n,  30,  et  II  Pet.,  I,  14;  r,u.épa  xupiW, 
Act.,  Il,  20,  et  II  Pet.,  m,  10;  xaTaixv"i«'-,  Act.,  Il, 
26,  et  dxYy/wtioc,  Il  Pet.,  i,  13,  14;  z-jnèStax,  Act.,  m, 
12,  et  II  Pet.,  i,  7;  czanôvr,^  Act.,  iv,  21,  et  II  Pet.,  n, 
1;  çépoueu,  Act.,  n,  2,  et  II  Pet.,  i,  7,  17. 

3"  Objection  tirée  de  la  prétendue  ressemblance  qui 
existe  entre  la  IIa  Pétri  et  les  écrits  de  l'historien  Jo- 
sèphe. —  M.  Edwin  Abbott  a  développé  dans  The  Ex- 
positor,  IIe  série,  t.  ni,  1882,  p.  49-60,  un  nouvel  argu- 
ment contre  l'authenticité  de  l'Épître,  en  prétendant 
que  l'auteur  aurait  fait  de  nombreux  emprunts  à  l'his- 
torien juif  Josèphe  et  imité  son  langage.  Si  le  fait  était 
exact,  comme  les  écrits  de  Josèphe  datent  de  la  fin  du 
Ier  siècle,  la  H"  Pétri  ne  saurait  être  l'œuvre  de  saint 
Pierre.  Le  Dr  Farrar  admet  comme  un  fait  certain  que 
l'un  des  deux  écrivains  a  fait  des  emprunts  à  l'autre. 
Cf.  The  Exposilor,  ibid.,  p.  403.  Voir  aussi  von  So- 
den,  Hand-Comtnentar  zum  N.  T.,  t.  m,  2e  part., 
p.  210.  —  Remarquons  d'abord  que  les  ressemblances 
alléguées  ne  portent  que  sur  les  expressions,  jamais 
sur  les  pensées  :  Josèphe  et  le  chrétien  qui  a  composé 
Il  Pet.  expriment  des  idées  tout  à  fait  différentes, 
bien  qu'ils  aient  parfois  recours  à  des  expressions 
identiques.  De  plus,  les  expressions  de  ce  genre 
sont  espacées  les  unes  des  autres  dans  les  écrits  de 
l'historien  juif;  elles  n'ont  pas  été  empruntées  à  des 
passages  qui  se  suivent:  ce  qui  diminue  singulièrement 


la  force  de  l'objection.  Ajoutons  qu'un  grand  nombre 
d'entre  elles  (notamment  j'ÇoSo;  dans  le  sens  de  mort, 
cf.  Luc,  ix,  31;  Oeîoç,  adjectif  plusieurs  fois  employé 
par  les  Septante;  u£y<xXsi6ti]ç,  cf.  Luc,  ix,  43,  etc.; 
|iC'9o;,  qu'on  trouve  quatre  fois  dans  les  Épitres  pasto- 
rales, etc.)  existent  dans  le  vocabulaire  des  Septante  ou 
du  Nouveau  Testament  ;  par  conséquent,  dans  le  grec 
avec  lequel  saint  Pierre  était  familier.  Enfin,  les  termes 
tn  question  n'ont  rien  de  rare  ou  d'extraordinaire. 
Ainsi  on  signale,  comme  une  coïncidence  remarquable, 
l'usage  fait  de  part  et  d'autre  du  verbe  xva.zëk).u>,  pour 
désigner  le  lever  d'un  astre;  l'emploi  du  substantif 
Bûvctu.[;,  pour  exprimer  la  puissance  divine,  et  de  locu- 
tions aussi  ordinaires  que  EÙt7S«eta,xaTaTpov£w,  Tiapwv, 
yivwuxetv  Sti,  Sixaiov  ^ysîtrfla:,  etc.  Or,  dans  une  argu- 
mentation de  ce  genre,  la  plus  grande  partie  de  la 
preuve  consiste  dans  la  rareté  des  mots  employés.  Le 
raisonnement  porte  donc  absolument  à  faux  :  l'auteur 
de  II  Pet.  n'a  fait  aucun  emprunta  Josèphe.  auquel  il 
n'a  rien  prêté  lui-même;  ils  ont  écrit  l'un  et  l'autre  en 
grec,  et  c'est  tout.  Voir  la  réfutation  détaillée  dans 
Salmon,  Introd.  totheN.  T.,  p.  498-501,  et  dans  l'ou- 
vrage spécial  de  B.  Warfield,  D'  E.  A.  Abbott  on  the 
genuineness  of  II  Pet.,  1883. 

VI.  Intégrité  de  l'ÉpItre.  —  Divers  critiques  protes- 
tants ont  nié  l'unité  et  l'intégrité  de  la  II"  Pétri.  Voir 
F.  Keil,  Comment,  ûber  die  Briefe  des  Petrus,  p.  170. 
Le  plus  récent  est  le  Dr  Kûhl.  D'après  ce  savant,  Die 
Briefe  Pétri  und  Judas,  1897,  p.  346-356,  le  chap.  n 
tout  entier  serait  une  interpolation.  De  plus,  les  versets 
1  et  2  du  chap.  m,  auraient  été  remaniés,  de  manière 
à  s'adapter  à  ce  qui  précède.  A  l'origine,  immédiate- 
ment après  i,  21.  on  lisait,  selon  M.  Kûhl,  l'exhortation 
suivante  :  «  Pour  vous,  bien-aimés,  souvenez-vous  des 
paroles  prédites  par  les  saints  prophètes,  sachant 
d'abord  cela...  »  etc.  Cf.  ni,  1-3.  Cette  théorie,  qui  ne 
s'appuie  sur  aucune  preuve,  n'a  trouvé  aucun  succès.  Il 
règne  une  parfaite  unité  dans  notre  Épitre:  le  passage 
que  l'on  prétend  avoir  été  interpolé  se  rattache  de  la 
façon  la  plus  naturelle,  d'une  part,  à  i,  21,  de  l'autre  à 
m,  2.  Il  n'y  a,  du  reste,  aucune  différence  sous  le 
rapport  du  style  entre  ce  passage  et  ceux  qui  l'en- 
tourent. 

VII.  Relations  de  la  II"  Pétri  avec  l'Épître  de 
saint  Jude.  —  Sur  ce  point  important,  voir  le  t.  m, 
col.  1811-1812.  Aux  ouvrages  mentionnés,  on  peut 
ajouter  :  'Keil,  Comment,  ûber  die  Briefe  des  Petrus, 
p.  202-208;* Kûhl,  die  Briefe  Pétri,  p. 336-346;  Cornely, 
Introd.,  t.  n,  3e  part.,  p.  645-647;  'II.  Holtzmann,  Ein- 
Ieit.,3*  édit.,  p.  322-324;  Belser,  Einleit.,  p.  707-709, 
719-721;  M.  Bovon,  Théologie  du  Nouv.  Test.,  t.  n, 
2=  édit.,  p.  416-448;  "A.  Brun,  L'Apôtre  Pierre,  1905, 
p.  126-136. 

VIII.  Le  texte  primitif  et  sa  transmission.—  Nous 
possédons  le  texte  grec  de  la  II"  Pétri  dans  les  ma- 
nuscrits onciaux  liiBCK'L'  P'.  Les  Pères  grecs 
fournissent  ça  et  là  des  indication^  précieuses  pour  le 
critique.  Voir  le  texte  grec  amélioré  par  B.  Weiss,  Das 
Neue  Testament,  Textkritische  Untersuchungen  und 
Text fiers tellung ,  t.  III,  et  aussi  les  éditions  critiques 
de  Tischendorf,  Gebhardt,  Westcott  et  Hort,  Nestlé,  etc. 
Le  texte  syriaque  que  nous  avons  est  beaucoup  moins 
ancien  que  la  Peschito,  qui  ne  contenait  pas  notre 
Épitre,  comme  il  a  été  dit  plus  haut.  On  possède  quel- 
ques fragments  assez  rares  des  versions  latines  anté- 
rieures à  saint  Jérôme,  dans  les  manuscrits  h,  g,  etc. 

IX.  Enseignement  doctrinal  he  l'Épître  (voir  les 
ouvrages  mentionnés  à  propos  de  la  I"  Pétri;  en  par- 
ticulier, B.  Weiss,  Der  Pelrinische  Lclirbegriff,  Ber- 
lin, 1855,  et  Lefirbuch  der  bibl.  Théologie  des  N.  T., 
4e  édit.,  Berlin,  1881,  p.  536-546).  —  1»  Sur  Dieu.  Dieu 
est  le  Père  de  Notre-Seigneur  Jésus-Christ,  i,  17.  Il  est 
éternel,  m,  8;  c'est  lui  qui  a  tout  créé  et  qui  gouverne 


411 


PIERRE    (DEUXIÈME   ÉPITRE    DE    SAINT) 


412 


le  monde  actuel,  ni,  5-7.  Il  est  infiniment  miséricor- 
dieux, et  il  désire  le  salut  de  tous  les  hommes,  m.  5, 
15.  C'est  de  lui  que  vient  la  vocation  au  salut,  1,3.  — 
2» Les  idées  christologiques  sonl  moins  abondantes  que 
dans  la  I"  Épitre.  La  lettre  est  d'ailleurs  plus  brève  : 
en  outre,  la  description  et  la  réfutation  des  hérétiques 
y  tiennent  une  large  place.  Mais,  ici  encore,  Jésus- 
Chrisl,  i,  1,  ou  Notre-Seigneur  Jésus-Christ,  i,  '2.8.  10, 
ou  le  Seigneur  et  Sauveur,  i.  11;  [II,  '2,  18,  ou  Notre- 
Seigneur  et  Sauveur  Jésus-Christ,  i,  14;  n,  '20,  m,  2, 
ainsi  qu'il  est  appelé,  occupe  la  place  principale.  Il  y 
est  aussi  désigné,  à  propos  du  récit  de  la  transfigura- 
tion, par  le  nom  de  «  Fils  bien-aimé  »  de  Dieu,  i,  17. 
Dans  la  doxologie  finale,  III,  18.  l'apôtre  lui  souhaite, 
comme  il  le  ferait  pour  Dieu  lui-même,  la  gloire  dans 
les  siècles  des  siècles.  Le  but  auquel  doit  tendre  tout 
chrétien,  c'est  de  le  connaître  toujours  davantage,  1,2, 
8;  III,  18.  SaintPierre  n'a  pas,  comme  dans  sa  I"  Épitre, 
l'occasion  d'insister  sur  la  passion  et  sur  la  mort  ré- 
demptrice du  Christ.  Il  signale  du  moins,  en  passant, 
ce  fait  capital  :  Jésus  est  le  Maître  qui  nous  a  rachetés, 
II,  1  ;  cf.  I,  9.  Il  mentionne  aussi  deux  de  ses  mystères 
glorieux  :  d'un  côté,  au  centre  de  sa  vie  publique,  la 
transfiguration,  I,  16;  de  l'autre,  son  retour  à  la  fois 
glorieux,  consolante!  terrible,  au  jour  du  Seigneur  ou 
au  jour  de  Dieu,  m,  10,  12.  Ce  second  avènement  est 
appelé  jtapoj<7ia,  «  la  présence  »,  m,  4,  12.  Quelques 
hérétiques  osaient  en  nier  la  réalité  :  l'apôtre  réfute 
leur  objection  principale,  à  laquelle  ils  affectaient  de 
donner  une  forme  scientifique,  ni.  '2-10.  Au  retour  du 
Christ  est  rattachée  la  transformation  du  monde  par  le 
feu,  en  vue  de  créer  »  de  nouveaux  cieux  et  une  nou- 
velle terre,  où  la  justice  habitera  »,  m,  13.  Déjà  saint 
Pierre  avait  annoncé  ce  fait  dans  un  de  ses  discours 
des  Actes,  m,  19-21.  Cette  grande  catastrophe  amènera 
la  consommation  du  royaume  de  Dieu,  selon  ce  que 
Jésus-Christ  lui-même  avait  prédit.  Cf.  Mat  th.,  xxiv, 
29-42;  Marc,  XIII,  24-35;  Luc,  xxi.  '25-35. Le  prince  des 
Apôtres  men lionne  aussi,  mais  seulement  d'une  ma- 
nière rapide,  le  royaume  de  Jésus-Christ,  c'est-à-dire  le 
ciel  et  son  bonheur  éternel,  I,  11.  —  3° L'Espril-Saint. 
Dans  la  II'  Épitre,  comme  dan-  la  I  .  il  est  question  de 
l'Esprit-Saint.  C'est  lui  qui  a  inspiré  les  prophètes,  I, 
21,  dont  les  oracles  sont  une  lumière  très  précieuse, 
indispensable  même,  pour  arriver  à  la  connaissance 
du  Sauveur,  î.  19.  —  4°  La  sotériologie.  Le  salut  est 
offert  à  tous;  mais,  pour  l'obtenir,  il  faut  croire  en 
Jésus-Christ,  il,  1,17.  Ceux  qui  ne  croient  pas  sont  des 
«  enfants  de  malédiction  »,  n,  li.  La  foi  est  aussi  la 
base  de  toute  la  vie  morale  et  spirituelle,  i,  5,  6.  Le 
christianisme  est  la  voie  de  la  vérité, II,  2;  cf.  i,  12.  La 
grâce  nous  aide  puissamment  à  nous  sauver;  mais  il 
est  nécessaire  d'y  faire  des  progrès  perpétuels,  de 
marcher  constamment  vers  la  perfection,  M,  18.  C'est 
seulement  à  la  fin  du  monde,  an  dernier  jour,  que  l<- 
salut  sera  proclamé  d'une  manière  générale  et  défini- 
tive, III,  15.  Comme  adversaires  du  salut,  il  va  au-dedans 
de  nous  la  chair  et  ses  convoitises  coupables,  II,  18,  et, 
en  dehors  de  nous,  le  monde  avec  sa  corruption  dan- 
gereuse,  i,  1;  n,  20.  Par  les  mérites  de  Jésus-Christ, 
les  chrétiens  deviennent  «  participants  de  la  nature  di- 
vine »,  i,  4.  La  connaissance  de  Notre-Seigneur  ne  doit 
pas  demeurer  oisive  en  nous;  mais  il  faut  qu'elle  pro- 
duise des  fruits  pour  la  vie  éternelle.  A  ce  point  de  vue 
pratique,  saint  Pierre  nomme  la  religion  chrétienne 
«  la  voie  de  la  justice  ».  n,  21.  L'arbre  mystique  de  la 
foi  doit  de  même  faire  mûrir  en  nous  sept  fruits  déli- 
cieux, i,  5-7.  Une  des  sources  de  la  foi  consiste  dans 
les  Saintes  Écritures,  dont  Dieu  est  l'auteur  el  dont  il 
fournit  l'interprétation  authentique,  i,  20-21.  Instam- 
.  l'apôtre  recommande  «  les  bonnes  œuvres,  les 
oeuvres  de  piété  »,  i,  3;  m,  1 1.  Les  hérétiques  sont  des 
ennemis  dangereux;  il  faut  les  fuir,  si  l'on  ne  veut  pas 


se  laisser  entraîner  par  eux,  car  le  châtiment  éternel 
de  l'enfer  leur  est  réservé,  n.  1-20. 

X.  Bibliographie.  —  Pour  la  Ia  et  la  IIa  Pétri.  — 
I  L.  Mayerhoff,  H/st.-krit.  Einleitung  in  die  petri- 
nischen  Schriften,  Hambourg,  1835;  Harnack,  Die 
Chronologie,  1897,  t.  i,  p.  450. 

2°  Commentaires  sur  les  deux  Épîtres,  —  a)  Catho- 
liques. Didyme  d'Alexandrie  (on  n'en  possède  que  des 
fragments  latins  ou  grecs,  t.  xxxix,  col.  1750-18l8i, 
Œcuménius,  t.  cix,  col.  451-722,  Théophylacte,  t.  cxxv, 
col.  1131-1.  i:\xvi.  col.  104;  Bède,  Expositio  super  ca- 
tliol.  Epistolas,  t.  xcin,  col.  9-130.  Cramer,  Catena  in 
Epistolas  catholicas,  Oxford,  1840;  Lorin,  lu  cathol. 
Joannis  el  Pétri  epistolas,  Lyon,  1609;  Bisping,  Er- 
klârung  (1er  katholischen  Briefe,  Munster,  1871  ;  Drach, 
Les  Épîtres  catholiques, "Paris,  1873;  llundhausen,  Die 
beiden  Pontificalschreiben  des  Apostelfùrsten  Petrus, 
Mayence,  1873-1878:  Van  Sleenkisle,  Epistolas  catltolicœ 
breviter  explicatœ,  Bruges,  1876;  Maunoury,  Commen- 
taires sur  les  Épîtres  catholiques,  Bar-le-Duc.  1888; 
L.-Cl.  Fillion,  Lu  Sainte  Bible  commenter,  t.  vin, 
p.  058-715,  Paris,  1904.  —  b)  Commentateurs  protes- 
tants ou  rationalistes  :  De  Wette,  Kurze  Erklârung  dei 
Briefe  des  Petrus,  Judas  und  Jakobus,  1847,  2"  édit., 
en  1853,  revue  par  B.  Bruckner,3<  édit.  en  1805;  Hu- 
ther,  Krit.  exeget.  Handbuch  ûber  den  ersten  Brie/ 
des  Petrus,  den  Brief  des  Judas  und  den  ziceiten 
Brief  des  Petrus,  l"  édit..  1852;  .">  .'dit..  1887.  revue 
par  Kiihl;  6e  édit..  1897;  YViesinger,  Der  ersle  Brief 
des  Apostels  Petrus  (continuation  du  commentaire 
de  Olshausen  sur  le  X.  T.),  Kœnigsberg,  1856,  el  Der 
tuieite  Brief  Pétri  desApost.  Petrus  und  der  Brief  des 
Judas,  1862;  Scholt,  Der  ente  Brief  Pétri  erklârt, 
Erlangeri,  1861,  etDerzweite  Brief  Pet  ri  und  der  Brief 
Judâ,  1802;  Fronmûller,  Die  Briefe  Pétri,  dans  le 
Bibelwerk  de  J.  P.  Lange,  1862,4e  édit.,  par  Fûller,  en 
1890;  Ewald.  Die  sieben  Sendschreiben  des 
11, n, des.  Gcettingue,  1870;  Wordsworth.  77ie  New  Tes- 
tament, iftlh  introduction  and  notes,  t.  iv,  2e-  édit., 
1872;  l'Iumptre.  dans  la  Cambridge  Bible  for  schools 
and  collèges,  Cambridge,  1880  ;  K.  Hofmann,  Die  Briefe 
l'etri,  Judx  und  Jacobi,  Nôrdlingen,  1875;  F.  Keil, 
Rommentar  ûber  die  Briefe  des  Petrus  und  Judas, 
Leipzig,  1883  ;  von  Soden,  dans  le  Band-Commentar 
:um  A".  T.,  3"  édit.,  1S99;  Burger,  Die  Briefe  des  Ja- 
kobus, Petrus  und  Judas,  dans  le  Eurzgefasst.  Kom- 
menl.  de  Strack  el  /...ckler,  2e  édit.,  1895;  S.  Gœbel, 
Die  Briefe  des  Petrus  mit  kurzer  Erklârung,  1893; 
F.  \V.  Bugge,  Commentaire  (en  langue  danoise)  sur  les 
deux  Épîtres  de  saint  Pierre  et  i Épitre  de  saint  Jude, 
1892;  J.  T.  Beck,  Erklârung  der  Briefe  Pétri,  1895; 
J.  H.Jowett,  Epistles  of  St.  Peler,  Londres,  1905. 

3»  Sur  la  1"  Épitre  seulement  ;  Usteri,  Wissenschafll, 
und  praktischer  Commentar  ûber  den  ersten  Petrus 
brief,  Zurich,  iss7:  Rob.  Johnston,  The  first  Epistle 
of  Prier,  Edimbourg,  1888;  A.  J.  Mason.dans  le  Com- 
meiititry  for  Englisli  Readers  de  Ellicott,  Londres, 
1889;  L-  Monnier,  La  1"  Épitre  de  l'apôtre  Pierre, 
Paris,  I9i)'2;  Abbé  L.  Gontard,  Essai  critique  et  liislo- 
rique  sur  la  1"  Epitre  de  sainl  Pierre,  in-8°,  L\on. 
1905;  D.  Voiler.  Der  ersle  Petersbrief,  seine  Entstehung 
und  Stelhmg  m  der  Geschichte  îles  l'rchristentums, 
Strasbourg,  1906;  H.  Gunkel,  dans  Die  Schriften  îles 
X.  Test,  uberseizl  ;  und  fur  die  Gegenwart  erklârt, 
Gcettingue,  t.  n,  1906,  p.  25;  H.  Weiss,  Der  ciste 
Petrusbrief  und  die  neuere  Kritik,  in-8°,  Berlin. 
1906. 

i  Sur  la  ID  Épitre  :  \V.  O.  Dietlein,  Der  zweite 
Brief  Petrus,  1851  ;  F.  Steinfass,  Der  :»■,>,/,■  Brief  les 
heil.  Petrus,  1863;  Plummer,  dans  le  Commentary 
for  English  Beaders  de  Ellicott,  Londres,  1883  ;  Spitta, 
Der  zweite  Brief  des  Petrus  und  der  Brief  des  Judas, 
Halle,  1885;  G.  llollmann.  dans  l'ouvrage  Die  Schrif- 


413 


PIERRE    (ÉCRITS    APOCRYPHES    DE    SAINT; 


414 


ton  des  N.  Test.,  neu  ûbersetzt  und  fur  die  Gegenwarl 
erklsert,  t.  n.  1906,  p.  61;  J.  B.  Mayor,  Epistle  of 
St.  .Inde  and  the  second  Epistle  of  St.  Peter,  in-8°, 
Londivs,  1907.  L.  Fillion. 

4.  PIERRE    (ÉCRITS    APOCRYPHES    DE    SAINT).  — 

On  en  distingue  quatre  principaux  :  les  Actes  de  Pierre, 
voir  t.  i,  col.  161-163;  l'Apocalypse  de  Pierre,  t.  i, 
col.  765;  l'Évangile  de  Pierre  et  la  Prédication  de 
Pierre.  Nous  n'avons  à  parler  ici  que  des  deux  der- 
nières compositions. 

.1)  L'Évangile  de  Pierre.  —  1»  Origène  le  mentionne 
In  Matth.,  tom.  x,  17,  t.  xm,  col.  876.  Eusèbe  le  signale 
aussi,  //.  E.,  m,  3,  t.  xx,  col.  '217,  en  même  temps 
que  les  Actes,  la  Prédication  et  l'Apocalypse;  puis  il 
ajoute  :  «  Nous  ne  les  reconnaissons  pas  comme  trans- 
mis jusqu'à  nous  parmi  les  écrits  catholiques  ;  car  aucun 
écrivain  ecclésiastique,  soit  dans  les  anciens  temps, 
soit  de  nos  jours,  n'a  jamais  fait  usage  des  témoignages 
qu'ils  fournissent.  ï  Voir  aussi,  m,  25,  et  S.  Jérôme, 
De  ut)',  ill.,  1.  t.  xxiii,  col.  609,  qui  le  classe  égale- 
ment parmi  les  apocryphes,  comme  fait  encore  leDecre- 
(»»i  Gelasianum.  Dans  un  autre  endroit  de  son  II.  E., 
vi,  12,  t.  xx,  col.  5i5,  Eusèbe  a  conservé  une  lettre  écrite 
par  Sérapiùn,  évêque  d'Antioche  à  la  fin  du  IIe  siècle, 
et  relative  à  cet  Evangile.  Le  saint  évêque  nous  apprend 
qu'il  avait  trouvé  l'Évangile  en  question  à  Rhésus,  loca- 
lité située  sur  la  baie  d'Issus,  en  Asie  Mineure,  et  qu'il 
l'avait  d'abord  approuvé  ;  mais,  qu'après  l'avoir  étudié  de 
plus  près,  il  le  condamna,  parce  qu'il  était  l'œuvre  des 
Docètes,  et  qu'il  ajoutait  différentes  choses  «  à  la  véri- 
table doctrine  par  rapport  au  Sauveur  ».  Cette  œuvre 
apocryphe  ne  devait  pas  jouir  d'une  circulation  consi- 
dérable, car  il  est  rarement  parlé  d'elle  dans  l'antiquité. 

2°  Un  Français,  M.  U.  Bouriant,  découvrit  à  Akmim 
(Haute  Egypte),  dans  un  tombeau  durant  l'hiver  1886- 
1887,  et  publia  en  1892  un  fragment  en  langue  grecque, 
que  les  critiques  sont  d'accord  pour  regarder  comme 
un  reste  de  l'Évangile  de  Pierre.  Voir  les  Mémoires  pu- 
bliés par  les  membres  de  la  Mission  archéologique  ait 
Caire,  t,  ix,  Paris,  1892,  p.  137-142.  L'auteur  parle  à  la 
première  personne  (comp.  chap.  vu  et  xn),  et  s'iden- 
tifie avec  le  prince  des  Apôtres  :  «  Moi,  Simon  Pierre, 
et  André  mon  frère  »  (c.  xiv).  Le  fragment  se  rap- 
porte au  jugement  de  Notre-Seigneur  devant  Pilate  et 
Hérode  (il  s'ouvre  au  moment  où  Pilate  se  lave  les 
mains),  aux  outrages  dont  il  fut  l'objet,  à  son  crucifie- 
ment, à  sa  sépulture,  à  sa  résurrection.  On  l'a  divisé  en 
quatorze  petits  chapitres  et  en  soixante  versets.  On  en 
a  donné  plusieurs  éditions  :  J.  A.  Robinson,  The  Gos- 
pel according  lu  Peter  and  the  Révélation  of  Peter, 
Londres,  1892;  Lods,  L'Evangile  et  l'Apocalypse  de 
Pierre,  1893;  Th.  Zahn,  Brucltsl'ùcke  des  Evangel.  und 
der  Apokalypse  Petrus,  1893;  A.  Harnack,  Evatigelium 
des  Petrus,  Leipzig,  1893;  Swete,'  The  Akmim  frag- 
ments of  the  apocrijphal  Gospel  of  Peter,  1732;  0.  von 
Gebhardt,  Das  Evangelium  and  die  Apokalypse  des 
Petrus,  Leipzig,  1893;  Klosterinann,  Reste  des  Petrus- 
evangelium,  der  Pelrusapokalypse  und  des  Kerygma 
Pétri,  Bonn,  1891. 

3°  Jésus-Christ  y  est  toujours  appelé  «  le  Seigneur  »  ; 
le  dimanche  y  est  nommé  r,  xupizx^  le  (j°ur)  domini- 
cal. L'auteur  fait  successivement  des  emprunts  aux 
quatre  Évangiles  canoniques  :  c'est  ainsi  qu'il  prend  le 
lavement  des  mains  de  Pilate  dans  le  récit  de  saint 
Matthieu,  l'histoire  du  bon  larron  dans  celui  de  saint 
Luc,  la  trans/ixio  lateris  dans  celui  de  saint  Jean,  et 
qu'il  raconte  la  visite  des  saintes  femmes  au  sépulcre 
ii  ns  les  mêmes  termes  que  saint  Marc.  On  voit,  d'un 
bout  à  l'autre,  qu'il  les  connaît  à  fond;  mais  il  les  trans- 
forme et  les  enjolive  à  sa  façon,  en  multipliant  les  détails 
légendaires,  en  grossissant  les  miracles,  etc.  Il  rend 
témoins  de  la  résurrection  de  Jésus  les  soldats  romains 


et  de  nombreux  Juifs,  prêtres  et  laïques.  Il  manifeste 
une  grande  sévérité  à  l'égard  des  Juifs,  dont  il  fait  les 
bourreaux  immédiats  du  Sauveur;  il  innocente  au  con- 
traire le  plus  possible  Pilate  et  les  Romains.  Son  docé- 
tisme  apparaît  en  plusieurs  endroits  de  la  passion;  par 
exemple,  dans  la  suppression  de  l'angoisse  de  Jésus  sur 
la  croix.  En  somme,  son  écrit  n'enrichit  en  rien  notre 
connaissance  de  la  vie  de  Jésus, 

4"  Les  critiques  sont  loin  d'être  d'accord  sur  la  date 
de  la  composition  de  cet  écrit.  Ce  serait  le  commence- 
ment du  IIe  siècle,  d'après  Harnack,  qui  croit  que  saint 
Justin  a  commenté  l'Évangile  de  Pierre  (fait  d'ailleurs 
très  contestable  et  probablement  inexact  ;  voir  V.  II. 
Stanton,  The  Gospels  as  h  istorical  Documents,  I™part., 
Cambridge,  1903,  p.  93  sq.);  l'année  130  d'après  lé 
Dr  Zahn;  l'an  150,  selon  Swete,  etc.  En  tout  cas,  l'écrit 
existait  un  certain  temps  avant  la  fin  du  IIe  siècle,  puis- 
qu'il était  connu  de  Sérapion  et  d'Origène. 

5°  Auteurs  à  consulter.  Outre  ceux  qui  ont  été  indi- 
qués plus  haut,  voir  H.  von  Schubert,  Die  Composition 
des  pseudopetrin.  Evangelien fragmentes,  Berlin,  1893- 
D.  Vôlter,  Petrusevangelium  oder  Aegypterevange- 
liumf  Tubingue,  1893;  A.  Sabatier,  L'Évangile  de 
saint  Pierre  et  les  Evangiles  canoniques,  Paris,  1893; 
Salmon,  Introduction  lo  the  Study  of  the  Books  of 
the  New  Testam.,  S'  édit.,  1897,  p.  581-591  ;  O.  Bar- 
denhewer,  Geschichte  der  altchristlichen  Litteratur, 
t.  I,  Fribourg-en  Brisgau,  1892,  p.  392-397;  L.  Hennecke, 
Neutestam.  Apokryphen,  in  deutscher  Ûbersetzung 
iniil  mit  Erlàuterungen,  Tubingue,  1904,  p.  27-32;  et 
aussi  les  articles  suivants,  insérés  en  diverses  revues  : 
Funk,  Fragmente  des  Evangeliums  und  der  Apoka- 
lypse des  Petrus,  dans  la  Theolog.  Quartalschrift, 
t.  lxxv  (1893),  p.  255-288  ;  H.  von  Soden,  Das  Petrus- 
evangelium und  die  kanonischen  Evangelien,  dans  la 
Zeilschrift  fïir  Théologie  u.  Kirche,  t.  m,  1893,  p.  52- 
92;  A.  Hilgenfeld,  Das  Petrusevangelium  iiber  Leiden 
und  Aufcrslehung  Jesti,  dans  la  Zeilschrift  fur  wis- 
senschalfl.  Théologie,  année  1893,  t.  i,  p.  439-454;  J.-B. 
Semeria,  L'Evangile  île  Pierre,  dans  la  Revue  biblique, 
t.  m  (1894),  p.  522-560;  A.-C.  McGiffert,  The  Gospel 
of  Peter,  dans  les  Papers  of  the  American  Society  of 
Church  Hislory,  t.  vi,  1894,  p.  99-130;  E.  Koch,  Das 
Petrusevangelium  und  unsere  kanonischen  Evange- 
lien, dans  la  Kircldiche  Monatsschrift,  t.  xv  (1896), 
p.  311-338;  V.  II.  Stanton,  The  Gospel  of  Peter,  ils 
early  history  and  character  considered  in  relation  lo 
the  history  of  the  récognition  in  the  Church  of  the 
canonical  Gospels,  dans  le  Journal  of  Theological  Stu- 
dies,  t.  u,  1901,  p.  1-25. 

b)  La.  Prédication  de  Pierre  (xvipuY|*a  Ilé-rpou),  qu'il 
ne  faut  pas  probablement  confondre  avec  la  «  Doctrine 
de  Pierre  »  (ôtSauxaXa  Ilérpou),  mentionnée  par  des 
écrivains  moins  anciens,  a  exercé  une  influence  assez 
grande  dans  l'antiquité  chrétienne.  1»  Elle  semble  avoir 
été  connue  dès  la  fin  du  second  siècle  par  Apollo- 
nius 'd'Asie  Mineure  (cf.  Eusèbe,  //.  E.,  v,  18,  t.  xx, 
col.  480),  par  le  gnostique  Héracléon,  par  l'auteur  de 
l'Epitre  à  Diognète,  les  apologistes  saint  Justin  et  Aris- 
tide. Voir  Robinson.  Tecls  and  Studies,  t.  i,  Ie  partie, 
p.  86-90.  Clément  d'Alexandrie  s'en  est  servi  certaine- 
ment, et  c'est  à  lui  que  nous  sommes  redevables  de  plu- 
sieurs des  fragments  qui  sont  parvenus  jusqu'à  nous. 
Voir  Strom.,  i,  29;  II,  15;  vi,  5,  etc.,  t.  vin,  col.  929, 
1008;  t.  ix,  col.  264.  Elle  remonte  donc  évidemment 
plus  haut  que  tous  ces  écrivains  :  aux  années  110- 
130  d'après  Harnack,  Chronologie,  t.  i,  p.  472-474; 
aux  années  90-100  d'après  Th.  Zahn,  Gesch.  des  neu- 
testam Kanons,  t.  u,  IIe  partie,  p.  820-832;  vers 
l'an  110  d'après  le  D1  von  Dobschùtz,  Texte  und  Unter- 
suchungen  zur  Geschichte  der  altchristl.  Litteratur, 
xi,  1.  Ce  dernier  auteur  et  M.  Harnack  regardent 
l'Egypte  comme  le  pays  d'origine  de  ce  document,  sur- 


415      PIERRE  (ÉCRITS  APOCRYPHES  DE  SAINT)  —  PIERRE  LOMBARD      41G 


tout  à  cause  des  allusions  qu'on  y  trouve  au  culte  des 
animaux  par  les  Égyptiens.  C'est  très  probablement  le 
v./^yvy.a  qui  est  cité  par  Origène,  De  princ.  (Prol.),  i> 
8.  t.  XI,  col.  119,  sous  le  titre  de  Pétri  doctrina. 

2°  Les  fragments  que  nous  en  possédons  ont  été  réu- 
nis par  A.  Hilgenfeld,  Nov.  Text.  extra  canonem  recep- 
tuiti,  2e  édit.,  188i,  fasc.  iv,  p.  51-65,  par  von  Dobschûtz, 
Das  Kerygma  Pétri  kritisch  untersucht,  1893,  dans  les 
Texte  und  Unlersuch.,  XI,  1.  et  Preuschen,  Antilego- 
mena,  die  Reste  der  ausserkanon.  Evangelien  und 
urchristl.  Uberlieferungen,  Giessen,  1901,  p. 53-54,  143- 
145.  Voir  aussi  E.  Hennecke,  Neutestamenllichen  Apo- 
crqphen  in  deutscher  Uberselzung,...  mit Einleitungen, 
Tubingue,  1904,  p.  1G8-171.  L'écrit,  autant  qu'on  peut  en 
juger  par  ces  fragments,  se  composait  de  discours  pro- 
noncés par  un  personnage  qui  parle  toujours  à  la  pre- 
mière personne  du  pluriel,  au  nom  des  douze  apôtres. 
Clément  d'Alexandrie  dans  Origène,  In  Evang.  Joa., 
tom.  xnt,  17,  t.  xiv,  col.  424,  suppose  que  ce  personnage 
n'est  autre  que  saint  Pierre;  bien  plus,  que  le  livre  lui- 
même  l'identifiait  avec  Pierre.  Strotn.,  VI,  7  :  6  IléTpoi; 
ypiçEt,  t.  ix,  col.  280.  Origène,  (.  c,  doute  à  bon 
droit  de  l'authenticité,  el  Eusèbe,  H.  E.,  in,  3.  t.  xx, 
col.  217,  range  explicitement  l'écrit  parmi  les  apo- 
cryphes. 

3»  Quant  au  sujet  traité,  c'est  le  pur  monothéisme 
que  doivent  pratiquer  les  chrétiens,  par  opposition  aux 
erreurs  du  judaïsme  et  du  polythéisme.  Les  fidèles  sont 
précisément  nommés  un  tpcrôv  yév'oç  entre  les  Juifs  et 
les  païens.  Le  livre  renferme  aussi  des  ordres  de  Notre- 
Seigneur  en  vue  de  la  prédication  de  l'Évangile  chez 
les  païens.  En  somme,  l'écrit  renferme  une  sorte  d'apo- 
logie du  christianisme,  ou  un  programme  pour  les 
missionnaires  chrétiens. 

L.  Fillion. 

5.  PIERRE  dans  les  noms  de  lieux.  Le  mot  pierre. 
'ébén,  ou  rocher  entre  dans  un  certain  nombre  de 
noms  géographiques  : 

1"  Pierre,  ville  principale  d'Idumée,  connue  sous  son 
nom  latin  de  Pétra.  Voir  Pétra,  col.  166. 

2"  Pierre  de  Boen.  .los..  xv,  6;  xviii,  17.  Voir  A.BEN- 
Bohen,  t.  I,  col.  34. 

3"  Pierre  de  division  (Vulgate  :  Pelra  dividens). 
I  Reg.,  xxill, 28.  Rocher  du  déserl  de  Maon  où  se  retira 
David  pendant  la  persécution  de  Saûl.  Son  ennemi  ne 
put  l'y  poursuivre,  ayant  été  obligé  de  marcher  contre 
les  Philistins.  En  souvenir  de  cet  événement,  le  rocher 
fut  appelé  Séla'  ham  mahleqôt,  «  Rocher  de  la  déli- 
vrance. »  Il  n'est  pas  identifié.  Voir  Hachila,  t.  ni,  2°, 
col.  391. 

4"  Pierre  du  désert  (Vulgate  :  l'clra  deserti).  ls.,  xvi, 
1.  C'est  la  ville  de  Pétra,  col.  166. 

5»  Pierre  d'Étam  (Vulgate  :  Pelra  Elam).  Jud.,  xv. 
8.  Voir  Étam  3,  t.  il,  col.  1996. 

6°  Pierre  d'Ézel  (Vulgate  :  Lapis  cui  notnen  est 
Ezel).  Rocher  auprès  duquel  David  devait  attendreson 
ami  Jonathas  au  commencement  de  la  persécution  de 
Saûl.  I  Reg.,  xx.  !'.).  Voir  Ézel,  t.  ri,  col.  1062. 

7  Pierre  d'Horeb  (Vulgate  :  l'clra  Horeb),  rocher 
d'où  Moïse  lit  jaillir  miraculeusement  de  Iran. 
Exod.,  xvn,  6.  Voir  M  \ss.\n.  t.  iv,  col.  853-854. 

8"  Pierre  d'Oreb  (Vulgate  :  Petra  Oreb).  Jud.,  vu, 
25.  Voir  Oreb  2,  t.  iv,  col.  1857. 

9»  Pierre  du  secours  (Vulgate  Lapis  adjutorii). 
I  lteg.,  iv,  1  ;  v,  L  ;  vu,  12.  Voir  Èben-Ézer,  t.  H, col.  1526. 

10  Pierre  de  Zohéleth  (Vulgate  :  Lapis  Zohelelh), 
111   Reg.,  I.  9.   Voir  /.mil  i  I.T1I. 

G.  PIERRE  ANGULAIRE.  Voir  ANGULAIRE  (PIERRE), 
t.  I,  col.  601. 

7.  pierre  de  jacob.  Gen.,  XXVIII,  18,  22j  XXXI,  15. 
Voir  Bétvle,  t.  i,  col.  1766. 


8.  PIERRE  COMESTOR,  théologien  catholique  fran- 
çais du  xnc  siècle,  né  à  Troyes,  mort  à  Paris,  le  21  oc- 
tobre 1179  (d'après  certains  auteurs,  en  1198i.  Il  fut 
surnommé  Comestor  ou  le  Mangeur,  à  cause,  croit-on, 
de  la  grande  quantité  de  livres  qu'il  dévora.  D'abord 
chanoine  et  doyen  de  Sainte-Marie  de  Troyes  (1147),  il 
devint,  en  1464.  chancelier  de  l'Église  de  Paris  et  \  occupa 
jusqu'en  1169  la  chaire  de  théologie.  Il  se  démit  de  ses 
dignités  dans  les  dernières  années  de  sa  vie  et  se  retira 
à  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Paris  où  il  mourut.  Il 
laissa  des  sermons  qui  furent  publiés  d'abord  sous  le 
nom  de  Pierre  de  Blois,  Pair,  lat.,  t.  cxcviu, 
col.  1721-lSii.  mais  il  fut  surtout  célèbre  à  cause  de  sa 
Schola&tica  Hisloria  super  Novum  Testameutum,  cum 
additionibus  atque  inciilenliis,  qui  fut  considérée  pen- 
dant plus  de  trois  siècles  comme  l'ouvrage  de  ce  genre  le 
plus  parfait.  Son  Histoire  s'étend  depuis  le  commence- 
ment du  monde  jusqu'au  martyre  de  saint  Pierre  et  de 
saint  I'aul  à  Rome.  L'auteur  résume  ou  bien  développe 
et  explique  les  livres  historiques  de  l'Ancien  et  du  .Nou- 
veau Testament,  dont  il  cite  souvent  les  propres  ex- 
pressions. Son  commentaire  ou  sa  paraphrase  est  tantôt 
littérale  et  tantôt  allégorique,  entremêlée  de  considé- 
rations théologiques  et  philosophiques  et  de  citations 
d'auteurs  profanes.  Le  livre  de  Pierre  Comestor  eut 
dans  les  écoles  un  succès  semblable  à  celui  du  Maître 
des  Sentences,  et  c'est  son  autorité  qui  parait  être  ordi- 
nairement alléguée  par  les  auteurs  du  moyen  âge  quand 
ils  emploient  la  formule  :  dicit  magister  in  historiis. 
C'est  a  cause  de  l'usage  qu'on  en  lit  dans  les  écoles 
qu'elle  reçut  le  nom  de  Historia  scholastica.  »  Il  n'y 
avait  en  ce  temps-là.  dit  Richard  Simon,  Histoire  cri- 
tique du  Nouveau  Testament,  t,  II,  p,  320,  de  plus 
grand  et  de  plus  estimé  pour  l'Ecriture  Sainte  que  le 
Pierre  Comestor...  On  ne  lisait  la  Bible  que  de  la 
manière  qu'elle  était  dans  ce  compilateur,  et  avec  ses 
gloses.  Cet  usage  a  duré  longtemps  en  France,  g 
V Hisloria  scholastica  fut  imprimée,  in-f",  Reutling, 
1471;  Utrecht,  1473;  Augsbourg.  1473;  Strasbi 
1483  et  1502;  Bâle,  i486;  in-4°,  Paris,  1513;  in-f, 
Haguenau,  1519;  in-4",  Lyon,  1526;  in-8»,  Lyon,  1543; 
Venise,  1728;  in-i  ,  .Madrid,  1699.  Cette  dernière  édi- 
tion a  été  reproduite  par  Migne,  dans  la  Patrologie 
latine,  t.  cxcvm,  col.  1053-1722.  La  Bible  historiale, 
de  Guyart-Desmoulins  (voir  t.  m,  col.  369),  esl  une  tra- 
duction libre  de  V Historia  scholastica.  Voir  aussi  t.  il, 
col.  2:455.  —  Voir  les  notices  d'Oudin,  de  Fabricius, 
etc.,  dans  Pat):  lat.,  t.  cxcvm,  col.  1045-1054;  dom 
Ceillier,  Histoire  générale  des  auteurs  sacres,  Paris, 
1868,  t.  xiv,  p.  744;  Ilrial,  dans  Histoire  littéraire  de 
ia  France,  t.  xiv,  Paris,  1817,  p.  12;  V.  Chevalier,  Ré- 
pertoire  des  sources  historiques  du  moyen  âge.  Bio- 
bibliographie, el  Supplément,  col.   1813,  277s. 

!).     PIERRE    LOMBARD,     surnommé    le     Maître     des 

Sentences,  né  probablement  à  l.umellogno,  petite  ville 
de  Lombardie,  Mrs  la  lin  du  m  siècle,  morl  à  Paris, 
le  20  juillet  1164.  Après  avoir  étudié  la  théologie  à 
Pologne,  .i  lîeiins  et  ;ï  Paris,  ou  il  fui  auditeur  d'Abé- 
lard,  il  devint  lui-même  professeur  île  théologie  dans 
celte  dernière  ville  et  fut  élu  en  1159  évêque  de  Paris; 
il  renonça  à  cette  dignité'  des  l'année  suivante  el 
Maurice  de  Sully  lui  succéda  en  1160.  Il  s'est  rendu 
surioul  célèbre  par  --es  Sentenliaruni  libri  quatuor, 
qu'il    rédige;,    entre    1145-1150    (Denille,    dans    II 

fur  Lileratur  und  Kirchengeschichle,  1. 1,  1885,  p.  611); 
mais  on  a  aussi  de  lui  des  commentaires  de  l'Écriture 
qui  montrent  avec  quel  soin  il  avail  étudié  les  Livres 
Saints  :  Commentarius  in  Psalnws  davidicos,  l'air,  lat., 
i.  i  m  i.  col.  55-1296;  Collectanea  in  omnes  L>.  Pa 
Epistolas,  col.  1297-1696;  t.  CXCII,  col.  9-520.  Le  Com- 
mentaire sur  les  Psaumes  emploie  ei  développe  la 
I, lassa  ordinaria  (t.  III,   col.  246);  il   reçut  le  nom  dl 


417 


PIERRE    LoMP.ARD 


PIERRE 


418 


Magna  tilossalura.  Le  Commentaire  sur  saint  Paul 
est  tiré  principalement  des  Pères.  «  Cet  ouvrage,  dit 
dom  Rivet,  dans  l'Histoire  littéraire  de  lo  France, 
est  clair,  méthodique,  et  renferme,  outre  les  pensées 
des  Pères,  de  fort  bonnes  vues  propres  à  l'auteur.  » 
La  Glossa  in  Jobum  et  la  Concordia  evangelica, 
qu'on  a  attribuées  à  Pierre  Lombard  ne  sont  pas  pro- 
bablement authentiques.  —  Voir  Histoire  littéraire  de 
[a  France,  t.  xn,  1763.  p.  585-609;  A.  Stôchl,  Geschichte 
der  Philosophie  des  Mittelallers,  Mayence,  1864,  t.  i. 
■  1 1 1  ;  .J .  Bach.  Dogmengeschichte  des  Mittelal- 
lers,  Vienne.  1875,  Th.  n.  p.  191-307.  727-739;  F.  Protois, 
Pierre  Lombard,  son  époque,  sa  rie,  ses  écrits,  son 
influence,  Paris,  1881;  U.  Chevalier,  Répertoire  des 
sources  historiques  du  moyen  âge.  Bio-bibliographie, 
2   édit.,  1905-1907,  p.  3722. 

PIERRE  (hébreu  :  ëbén,  serôr,  «le  petit  caillou  »; 
Septante  ;  Xt'6oç;  Vulgate  :  lapis,  petra,  calculus, 
.  substance  minérale  qui  compose  la  plus 
grande  partie  des  couches  géologiques  du  sol.  —  Quand 
la  pierre  forme  de  grandes  niasses  continues,  enfouies 
dans  le  sol  ou  en  émergeant,  on  l'appelle  rocher.  Voir 
Rocher.  De  ces  masses,  on  extrait  des  matériaux  de 
divers  volumes  pour  les  constructions.  Voir  Carrii  i;i  . 
t.  n.  col.  318.  On  réserve  le  nom  de  pierres  aux  parties 
rocheuses  qui  sont  meubles,  par  nature  ou  par  suite 
du  travail  de  l'homme.  Ces  pierres  peuvent  être  de 
toutes  tailles,  depuis  le  grain  de  sable  ou  de  gravier  jus- 
qu'aux blocs  qu'on  employait  aux  grandes  construc- 
tions. Voir  t.  n,  col.  320;  Maçon,  t.  îv,  col.  513.  Les 
pierres  de  médiocre  volume,  amassées  ensemble, 
forment  un  monceau,  margèmâh,  acervus,  Prov., 
xxvi,  8,  à  moins  que  le  mot  hébreu  ne  désigne  la 
fronde,  comme  le  pensent  les  Septante.  —  Le  sol  de  la 
Palestine  renferme  des  pierres  de  beaucoup  d'espi  c<  s. 
surtout  des  calcaires  et  des  grès.  Les  roches  éruptives 
y  fournissent  aussi,  en  quelques  endroits,  le  basalte,  le 
granit  et  le  porphyre.  Voir  Palestine,  t.  iy,  col.  2005. 
Quand  les  pierres  sont  calcaires,  il  est  relativemenl 
facile  de  les  tailler.  Plus  elles  sont  siliceuses,  plus 
elles  sont  dures.  Les  silex  fournissent  la  pierre  que 
les  chocs  peuvent  transformer  en  couteaux  assez  aigus 
pour  opérer  la  circoncision.  Exod..  iv,  25;  voir  t.  n, 
col.  775. 

1«  Pierres  à  l'état  naturel.  —  La  pierre  est  lourde, 
Prov..  xxvii,  3.  et  résistante,  .lob,  VI,  12.  Le*  eaux 
creusent  la  pierre,  grâce  aux  matières  solides  qu'elles 
entraînent  avec  elles.  Job,  xiv,  19.  Les  racines  des 
plantes  s'enfoncent  entre  les  pierres.  Job,  vu,  17.  Il 
est  dit  des  pierres  du  pays  de  Chanaan  qu'elles  sont 
comme  du  fer.  Deut.,  vm,  9;  cf.  1s.,  lx.  17.  Voir  Fer, 
t.  Il,  col.  2207.  Les  pierres  d'une  maison  pouvaient 
subir  un  effritement  que  l'on  considérait  comme  une 
sorte  de  lèpre.  Lev.,  xiv,20.  Voir  Lèpre,  t.  îv,  col.  186. 
—  Certaines  pierres,  plus  remarquables  par  leur  cou- 
leur et  leur  éclat,  étaient  aptes  à  servir  d'ornements. 
Voir  Pierres  précieuses. 

2°  Pierres  utilisées  à  l'état  brut.  —  1.  Usages  do- 
mestiques. —  On  se  sert  d'une  pierre  comme  de  siège. 
Lxod.,  xvii,  12.  Pour  dormir,  on  met  une  pierre  sous 
sa  tête.  Gen.,  xxvni,  11;  Luc,  ix,  ôS.  «  Les  Arabes  du 
commun  n'ont  pour  tout  meuble  dans  leurs  maisons 
que  des  nattes,  sur  lesquelles  ils  couchent,  quelques 
couvertures  et  rarement  des  coussins;  ils  se  servent 
d'une  pierre  pour  chevet,  qu'ils  mettent  par-dessus  la 
natte.  •>  De  la  Roque,  Voyage  dans  la  Palestine,  Ams- 
terdam, 1718,  p.  176.  Cette  pierre  n'était  guère  plus 
que  le  chevet  de  bois  dont  se  servaient  les  Egyp- 
tiens. Voir  t.  îv,  tig.  93,  col.  826.  On  pesait  à  l'aide  de 
pierres.  Prov.,  xvi,  II.  Voir  Poids.  On  cachait  son 
argent  sous  une  pierre.  Eccli.,  xxix,  13.  On  faisait  cer- 
tains exercices  physiques  à  l'aide  de  pierres.  Eccli.,  VI, 

UICT.    DE  LA   BIBLE. 


22;  Zach.,  xn,  3.  Voir  Fabdeau,  t.  n,  col.  2178.  Un  jet 
de  pierre  constituait  une  sorte  de  mesure  pour  les 
distances.  Luc,  xxn,  il.  —  2.  Manipulation.  —  Il  y 
avait  temps  pour  ramasser  les  pierres  et  temps  pour 
les  disperser.  Eccle..  m,  5.  On  enlevait  les  pierres  des 
ii-ii'-.'.  pour  qu'elles  ne  gênassent  pas  la  culture,  Is., 
v.  2;  on  les  répandait  au  contraire  sur  un  champ, 
quand  on  voulait  le  rendre  stérile,  IV  Reg.,  m,  19,  25. 
On  enlevait  les  pierres  d'une  route  pour  qu'elle  devînt 
plus  praticable,  .1er.,  i,  26;  mais  ce  sens,  adopté  par  la 
Vulgate,  est  tout  autre  en  hébreu.  On  pouvait  être 
blessé  par  une  pierre  quand  elle  retombait  pendant 
qu'on  la  roulait,  Prov.,  xxvi,  27,  quand  on  la  détachait 
à  la  carrière.  Ecole.,  x,  9,  ou  quand  elle  redescendait 
sur  le  tète  de  celui  qui  l'avait  jetée.  Eccli..  XXVII,  28. 
—  3.  Usages  religieux.  —  L'autel  devait  être  fait  de 
pierres  non  taillées.  Exod.,  xx,  25.  Étie  bâtit  ainsi  un 
autel  avec  douze  pierres  sur  le  Carmel.  III  Reg.,  xvm 
31.  Sa ii I  lit  rouler  une  grande  pierre,  afin  qu'on  égor- 
geât sur  elle  les  victimes  destinées  au  sacrifice.  I  Reg., 
xiv,  33.  Cf.  Jud.,  î.x,  5,  18.  La  Loi  ordonnait  aux 
Hébreux  de  dresser  de  grandes  pierres  dans  le  pays  de 
Chanaan,  de  les  enduire  de  chaux,  et  d'y  écrire  les 
commandements  divins.  L'ordre  fut  exécuté  sur  le 
mont  Hébal,  et  un  aulel  de  pierres  brutes  y  fut  dressé,  . 
Deut.,  xxvii,  2-5.  —  4.  Monuments  de  souvenir.  —  Les 
habitants  de  la  Palestine  antérieurs  aux  Hébreux 
avaient,  comme  tous  les  anciens  peuples,  dressé  ou 
utilisé  d'énormes  pierres  afin  de  perpétuer  certains 
souvenirs.  La  Palestine  transjordane  compte  par  cen- 
taines les  monuments  mégalithiques,  dolmens,  voir  1. 1, 
lig.  120,  col.  491,  menhirs  et  cromlechs,  connus  depuis 
longtemps.  Plus  récemment,  on  en  a  découvert  «n 
certain  nombre  d'autres  dans  la  Palestine  occidentale, 
tels  un  dolmen  aux  environs  du  Nébo,  encore  à  l'est 
du  Jourdain,  le  double  dolmen  d'el-Hosn,  au  nord- 
ouest  de  la  Syrie,  etc.  Cf.  H.  Vincent,  Mo-nun;ents  en 
pierres  brutes  dans  la  Palestine  occidentale,  dans  la 
Revue  biblique,  1901,  p.  278-298;  Canaan,  Paris,  1907, 
p.  414-423.  Jacob  dresse  ainsi  une  pierre  comme  mo- 
nument de  son  entente  avec  Laban,  et  il  l'ait  amasser 
des  pierres  en  monceau  en  signe  d'alliance.  Gen., 
xxxi,  45-52.  En  mémoire  du  passage  du  Jourdain, 
Josué  ordonne  de  prendre  douze  pierres  dans  le  lit  dn 
fleuve  et  ensuite  de  les  dresser  à  Galgala.  Jos.,  iv, 
'A.  20-24.  Pour  marquer  la  tombe  d'Absalom.  dans  la 
forêt  d'Éphraïm,  on  élève  au-dessus  d'elle  un  monceau 
de  pierres.  II  Reg.,  xvm,  17.  Les  pierres  sont  bien 
indiquées  pour  servir  ainsi  de  mémorial.  Elles  ont 
pour  elles  la  durée,  et  la  disposition  particulière  qu'on 
leur  impose  indique  assez  qu'on  a  eu  une  intention  eu 
les  plaçant  ainsi.  A  ce  même  litre,  elles  fournissent 
aussi  des  bornes  pour  les  champs.  Voir  Bornes,  t.  i, 
col.  1S54.  —  5.  Hostilités.  —  Les  pierres  peuvent  servir 
d'armes  offensives.  On  mettait  à  mort  certains  cou- 
pables à  l'aide  de  pierres.  Exod.,  vm,  26.  Voir  Lapi- 
dation, t.  IV,  col.  90.  On  jetait  des  pierres  à  quelqu'un 
pour  le  blesser,  II  Reg..  xvi,  6,  13;  Eccli.,  XXII,  25,  ou 
l'on  saisissait  la  pierre  en  main  pour  le  frapper, 
Exod.,  xxi,  18,  ou  se  frapper  soi-même.  Marc.  v.  5.  On 
donnait  plus  de  portée  à  la  pierre  en  la  projetant  au 
moyen  d'une  fronde.  Jud..  xx,  16,  etc.  Voir  Fbonde, 
t.  il,  col.  2408.  l'ans  la  suite,  on  eut  des  machines 
pour  lancer  de  grosses  pierres  contre  les  ennemis. 
I  Mach.,  n.  36;  vi.  51.  Voir  Baliste,  t.  i.  col.  lîli; 
Catapulte,  i.  ii.  col.  346.  Les  pierres  contribuaient  à 
l'attaque  on  à  la  défense  en  obstruant  des  portes.  Jos., 
x,  18;  I  Mach..  v.  47.  La  pierre  devenait  dangereuse 
par  elle-même  quand  elle  était  placée  sur  le  chemin 
pour  faire  tomber  le  passant.  Ps.  xci  (xc),  12;  Eccli., 
xxvii.  29;  xxxii.  25;  ls.,  vm,  14;  Matin.,  iv,  G;  Luc, 
iv,  11.  —  Sur  li  pierre  de  scandale,  Rom.,  ix,  23; 
I  Pet.,  il,  8,  voir  Scandale.  —  6.  Autres  usages.  —  Les 

V.  -  14 


419 


PIERRE    —    PIERRE    PRECIEUSE 


4120 


pierre;  servaient  à  fermer  des  puits  ou  des  excava- 
tions diverses.  Gen..  xxix,  2.  3,  8,  10;  Dan.,  vi,  17. 
Jetée  dans  l'eau,  la  pierre  va  au  fond,  à  cause  de  son 
poids,  et  entraine  avec  elle  ceux  qui  y  sont  attachés. 
Exod.,  xv,  5;  .1er.,  Ll,  63;  II  Esd.,  ix.  11;  Apocxvm, 
21.  Voir  Meule,  t.  iv.  col.  1054.  —  La  pierre  à  feu  est 
mentionnée  II  Mach.,  x.  3.  —  Certaines  pierres  re- 
marquables, soi!  par  leur  grandeur  naturelle,  soit  par 
le  souvenir  qu'on  y  attachait,  ont  donné  leur  nom  à 
plusieurs  localités.  Voir  Pierre  5,  col.  415 :  Ében, 
Êben-Ézer,  t.  ii.  col.  1525,  1526. 

3»  Pierres  travaillées.  —  Dans  les  plus  anciens 
temps,  les  habitants  de  la  Palestine  ont  commencé  à 
tailler  la  pierre.  Des  dolmens  subissent  déjà  un  travail 
reconnaissable,  comme  celui  de  Tell  el-Mataba,  qui  est 
régulièrement  troué.  On  taille  ensuite  des  pierres  pour 
les  consacrer  à  des  usages  religieux,  voir  Betyi.e,  t.  i, 
col.  1765,  funéraires  ou  profanes.  Voir  Stèle.  AuSinaî, 
la  Loi  est  donnée  sur  des  tables  de  pierre,  Exod.,  xxiv, 
12,  que  Moïse  brise,  Exod..  xxxn.  19,  et  remplace  en- 
suite. Exod.,  xxxiv,  1;  II  Cor.,  m,  7.  Souvent,  le  nom 
de  «  pierre  o  sert  à  désigner  1rs  idoles,  à  c;iusr  de  la 
matière  dont  elles  sont  faites.  Deut.,  IV,  28;  xxvm,  36; 
S;i|i.,  xm,  10;  Jer.,  Il,  27  ;  Act.,  XVII.  29,  etc.  On  fabrique 
en  pierre  divers  objets  i  liles,  meules,  voir  Meule, 
t.  iv,  col.  1052,  portes,  voir  Porte,  surtout  pour  les 
tombeaux,  Matth.,  xxvii,  66:  Marc,  xv,  16;  .loa..  XI,  38, 
voir  t.  ii,  col.  1178,  pressoirs,  voir  Pressoir,  etc.  On 
utilise  la  pierre  à  la  construction  des  murs,  des  maisons, 
des  palais,  du  Temple,  ainsi  qu'au  dallage  de  certains 
espaces.  Voir  Pavé,  t.  IV,  col.  2237.  Les  Gibliens  étaient 
renommés  pour  leur  habileté  à  mettre  la  pierre  en 
œuvre,  voir  Ci  ru,,  I.  m.  col.  139,  et  on  les  employa 
pour  les  grandes  constructions  salomoniennes.  On  tail- 
lait la  pierre,  IV  Reg.,  xil,  12;  Ain.,  v,  11;  I  Mach., 
XI,  10;  on  la  polissait,  quand  il  était  besoin,  I  Mach., 
xui.  27  ;  on  l'appareillait  pour  que  toutes  ses  faces  fussent 
à  angle  droit  les  unes  des  autres.  111  Reg.,  v.  17  ;  1s..  ix. 
10;  Lam.,  m,  9;  Ezech.,  XL,  12;  Am.,  v.  11.  On  pla<  ail 
d'énormes  pierres  pour  servir  de  fondements  à  l'édi- 
fi  v  III  Reg.,  v,  17;  .1er.,  xliii,  9,  10,  ou  de  pierres 
angulaires  à  l'intersection  des  murs.  Voir  ANGULAIRE 
(Pierre),  1. 1,  col.  601.  Les  belles  pierres  de  leur  Temple 
ont  toujours  émerveillé  les  Hébreux,  qui  prenaient 
grand  soin  de  les  réparer  à  l'occasion.  111  Reg.,  VI,  7- 
vii,  12;  IV  Reg.,  xn,  12;  xxn,  6.  Ils  aimaient  les  pierres 
de  leur  Temple.  Ps.  en  ici),  15.  Les  Apôtres  se  firent 
un  jour  l'écho  de  celte  admiration  et  de  cet  amour, 
auprès  de  Noire-Seigneur.  Marc,  xm,  1;  Luc,  \xi.  5. 
—  Mais  les  plus  solides  amas  de  pierres  n'étaient  pas 
à  l'abri  de  la  destruction.  Lue  ville  pouvait  être  si  bien 
ruinée  qu'il  n'en  restât  pas  un  caillou,  c'est-à-diiv  pa! 
la  plus  petite  pierre  informe.  Il  Reg..  XVII,  12.  Des 
monceaux  de  pierres  représentent  seuls  les  cités  rui- 
nées. Is..  xvii.  I  ;  .loi'..  \x\i,  18  :  Mich.,  i,  6;  m,  12.  Du 
Temple  d'Hérode,  qui  semblait  si  solidement  a^sis  sur 
ses  fondations,  le  Sauveur  prédit  qu'il  ne  resterait  pas 
pierre  sur  pierre.  Matlh.,  xxiv,  2.  —  La  pierre,  soit 
isolée,  soii  enclavée  dans  des  constructions,   pouvait 

reee\oir  des  inscriptions,  voir  Si  I  il  .  ou  une  décoration 
sculpturale.  Voir  SCULPTURE. 

v  Autres  mentions  de  la  pierre.  —  [.Comparai- 
sons. —  L'eau  gelée  devienl  comme  de  la  pierre,  Job, 
xxxviii,  30.  Être  comme  une  pierre  signifie  qu'on  est 
sous  le  coup  de  la  stupéfaction.  1  Reg.,  xxv,  .'(7.  t'n 
cœur  de  pierre  est  un  cour  dur,  insensible  et  inintelli- 
gent. Ezech.,  xi,  19;  xxxvi.  26.  Certaines  pierres  ont 
quelque  ressemblance  avec  le  pain;  le  démon  en  prend 

occasion  de  proposer  à  Xotre-Seigneur  le  changement 
des  pierres  en  pain.  Matth.,  tv,  3;  Luc.  i\,  3,  et  le 
Sauveur  lui-même,  faisant  allusion  à  la  même  ressem- 
blance, dit  qu'un  pore  ne  donnerait  pas  une  pierre  à 
son  enfant  qui  réclame  du  pain.  Matth.,  vu,  9;  Luc, 


xi,  11.  Dans  les  déserts  rocheux,  les  pierres  plus  ou 
moins  hautes  se  dressent  à  perte  de  vue  et  ont  l'air 
d'êtres  immobiles  :  Dieu,  par  sa  puissance,  pourrait 
changer  ces  pierres  en  fils  d'Abraham.  Matth.,  m.  19: 
Luc,  m,  8.  Le  paresseux  est  comparé  à  une  pierre 
souillée  d'ordure  et  qu'an  ne  peut  toucher.  Eccli.,  xxn. 
1.  Voir  t.  ii,  col.  2136.  Rien  de  plus  commun  que  les 
pierres;  l'argent  était  aussi  commun  à  Jérusalem  sous 
Saloinon.  III  Reg..  x.  27.  —  2.  Métaphores.  —  Avoir 
une  alliance  avec  les  pierres  des  champs,  c'est  vivre  en 
paix  sur  le  sol  où  l'on  a  sa  tente.  Job,  v,  23.  Quand  on 
bâtit  sa  maison  avec  des  gains  iniques,  la  pierre  cric 
delà  muraille,  c'est-à-dire  les  êtres  inanimés  protestent 
eux-mêmes  contre  l'injustice.  Hab.,  Il,  11.  A  défaut 
des  enfants  acclamant  le  Sauveur,  les  pierres  elles- 
mêmes  auraient  crié  pour  saluer  en  lui  le  Messie.  Luc. 
xi\.  40.  —  3.  Symboles.  —  Dans  un  songe,  Nabucho- 
donosor  vit  une  haute  statue  qu'une  pierre  vint  briser 
et  dont  elle  ne  laissa  pas  trace:  la  pierre  devint  ensuite 
une  grande  montagne.  Cette  pierre  représentait  le 
Messie  et  son  royaume,  devant  lequel  devaient  dispa- 
raître toutes  les  autres  puissances  de  la  terre.  H. m.. 
il.  34-45.  —  Le  Sauveur  traite  saint  Pierre  comme  la 
pierre  sur  laquelle  il  doit  asseoir  inébranlablemenl 
l'édifice  de  son  Église.  Matth.,  xtv.  18.  Les  fidèles  sont 
eux  aussi  des  pierres  vivantes  et  spirituelles  appelées  i 
entrer  dans  la  construction.  Eph.,  Il,  20-22;  I  Pet.,  il. 
4-8.  —  Au  vainqueur,  Dieu  donnera  une  pierre  blanchi 
portant  un  nom  écrit,  que  connait  seul  celui  qui  la 
reçoit.  Apoc,  H,  17.  Le  caillou  blanc  marquait,  chez  les 
anciens,  les  jours  heureux  et  les  votes  favorables, 
Cf.  Martial,  ix,  53;  l'erse,  ll,  I:  Ovide,  Metam.,  XV, 
H.  Pour  saint  Jean,  il  désigne  le  sort  heureux  attribué 
dans  le  ciel  à  celui  qui  a  bien  combattu  sur  la  lei 

II.     I.l   S|.| |;| 

PIERRE  PRÉCIEUSE,  pierre  remarquable  par  sa 
couleur,  -on  éclat  on  sa  rareté.  Les  pion-os  précieuses 
étaient  recherchées  des  i  irientaux  qui  les  faisaienl  entrer 

dans  la  composition  de  leurs  bijoux,  anneaux,  brao  I.  Is, 
colliers,  pendants  d'oreille,  dans  l'ornementation  des 
vêtements,  couronnes  de  roi-,  voiles,  etc.  II  Reg.,  XII, 
30;  I  Par.,  x\.  2;  Judith,  x.  19.  xv,  11:  Cuit.,  x.  Il,  rie. 
Voir  Bi.ioi  x.  t.  i.  col.  1794. 

I.  .Nom  oi  m  ral.  —  Un  les  appelle  habituellement  on 
hébreu  ébén  yeqàrâh,  ■  pierre  Je  pris  >>  {cf.  l'assyrien 
ubnu  aqartu,  pierres  précieuses,  l'rd.  Delitzsch,  Assy- 
risches  H-andwôrterbuch,  in-8»,  Leipzig,  1896,  p.  s 
II  Reg.,  XII,  30;  III  Ile-..  \.  2:1  Par.,  \\'.  2;  Il  ParT,  is. 
1,  9,  Î0;xxxn.27;  Ezech.,  xxvn,  22:  xxvm.  13;  Dan.,  XI, 
38.  Quelquefois  'ébén  yeqàrâh  esl  employé  non  pour  des 
pierres  précieuses  proprement  dites,  mais  pour  des  pier- 
res de  construction,  coin  me  le  marbre,  etc.  L'expression 
ébén  yeqàrâh,  pierre  précieuse,  esl  parfois  remplacée 
par  une  locution  équivalente,  comme  ébén  hëféf,  Is.,I.IV, 
12.  mot  à  mot  o  pierre  de  désir  »,  pierre  qui  excite  le  do- 
sir,  la  convoitise 'par  sa  beauté;  ou  comme  'ëbnê  hên, 
Prov.  xvn,  8,  «  pierres  de  grâce,  de  beauté,  »  c  esl  à- 
diro  belles  pierres.  On  rencontre  aussi  le  mol  Y/en 
accompagné  du  nom  d'une  espèce  particulière  do  pierres 
précieuses,  par  exemple  ébén  ïôham,  pierre  de  Sohani, 

ou  on\x  .  ébén  sappir,  pierre  do  saphir,  'ébén  éqdah, 
pierre  d'éclat,  Is.,  i.iv,  12,  escarboucle  ou  rubis.  Le 
mot  ébén  0  pierre  I  sans  addition  ne  se  trouve  dans 
I.'  sens  de  pierre  précieuse,  que  lorsque  le  conb  tte, 
comme  une  énumération  de  pierres  précieuses,  \iciil 
préciser  la  signification  et  ('■carter  toute  amphibologie 
Les  Septante  traduisent  ces  diverses  expressions  pat 
'/■Mo;  T!|uo;  ou  XÏGo;  XP1î<rroî'  ''■'>"•  èx).exToç,  Xî8o;  JtoAu- 
-Or,;:  el  la  Vulgate  par  lapis  pretiosus  on  gemma. 

II.  Provenance.  —  L'Egypte,  l'Arabie,  l'Inde  fourni- 
rent aux  Hébreux  les  17  ou  18  pierres  précieuses  n  en- 
tionnées  dans  les  textes  bibliques.  Elles  leur  arrivaient 
par   les  caravanes    de  marchands  qui  de    l'Inde   ou  de 


421 


PIERRE   PRÉCIEUSE 


l'Arabie  venaient  en  Phénicie  apporter  leurs  richesses, 
ou  par  leurs   relations  avec    l'Egypte  et   la    Phénicie. 
A  certaines  époques  même  ils   aîièrenl  eux-mêmes  en 
chercher  jusque  dans  l'Inde.  »  On  ne  saurait  parcourir 
une   galerie  égyptienne  sans  être   surpris  du   nombre 
prodigieux  de  menues  figures  en  pierre  fine  qui  sont 
parvenues  jusqu'à   nous.  On   n'y    voit   pas  encore    le 
diamant,   le  rubis  ni  le  saphir;  mais  à  cela  près,    le 
domaine  du  lapidaire  était  aussi  étendu  qu'il  l'est  aujour- 
d'hui et  comprenait  l'améthyste,  l'émeraude,  le  grenat, 
l'aigue-marine,  le  cristal  de  roche,  le  prase,  les"  mille 
variétés  de  l'agate  et  du  jaspe,  le  lapis-lazufi,  le  felds- 
path, l'obsidienne...  Le  plus  grand  nombre  de  ces  sub- 
stances étaient  taillées  en  perles  rondes,  carrées,  ovales, 
allongées  en  fuseau,  en  poire,  en  losange.  Enfilées  et 
disposées  sur  plusieurs   rangs,   on -en   fabriquait    des 
colliers,  et  c'est  par  myriades  qu'on  les  ramasse  dans  le 
sable  des  nécropoles...  La  perfection  avec  laquelle  beau- 
coup d'entre  elles  sont  calibrées,  la  nettelé  de  la  perce, 
la  beauté  du  poli  font  honneur  aux  ouvriers,  a  G.  Mas- 
pero,  L'archéologie égyptienne,m-8»,  Paris,  -1887,  p.  234. 
<  tes  pierres  précieuses,  les  Égyptiens  les  trouvaient  ou 
chez   eux,  ou   en    Ethiopie  et  jusque    dans  la    terre  de 
Pount,  dans  la   presqu'île  du  Sinaï  et  en  Arabie    Les 
documents  de  la  XVIII'  dynastie  les  signalent  parmi  les 
présents  que  les  rois  de  Babylone,  les  princes  de  Mitani 
ou   des  Heihéens  envoyaient  au  Pharaon.  G.  Maspero 
Hisl.  ancienne  des  peuples  de  l'Orient  classique   in-8»' 
Pans.  1897,  t.  il,  p.  284.  L'Egypte  pouvait  donc  fournir 
aux  Hébreux,  des  le  temps  de  l'Exode,  toutes  les  pierres 
nécessaires  à  la  confection  du  pectoral  du  grand-prêtre 
Plus  tard,  fixés  en  Palestine,   ils  voyaient  passer  par 
leur  pays  les  marchands  qui,  de  Babylonieou  de  Perse 
allaient  en  Egypte.  Ils  pouvaient  aussi  entrer  en  relation 
avec  les  marchands  de  Saba  et  de  fiééma   qui  appor- 
taient   à    Tyr   toutes    espèces    de    pierres   précieuses, 
Ezech.,  xxvil,  22.  Sur  les  marchés  de  cette  grande  ville 
commerçante,  il  leur  était  facile  d'acquérir  les  pierres 
précieuses  apportées  par  les  Syriens.  Ezech.,  xxvil,  16. 
Nous  voyons  aussi  à  l'époque  de  Salomon  la  reine   de 
Saba  apporter  au   monarque  une   grande   quantité  de 
pierres  précieuses.  III Reg.,  x,  2,  10.  Salomon  lui-même 
équipait  des  Hottes  pour  le  pays  d'Ophir.  quiavecd'au- 
Ires  produits  de  l'Inde  revenaient  chargées  de  pierres 
précieuses.  III  Reg.,  x,  11,  t.   iv,  col.    1832.  Et  on  sait 
combien  les  anciens  ont  vanté  la  beauté  et  l'abondance 
des  pierres  précieuses  de  ce  dernier  pays.   S.  Jérôme 
Epist.  cxxxv,3,  t.  xxii,  col.  1073-1071;  Lassen,  lndische 
AUerlhumskunde,  in-8»,  1866, 1. 1,  p.  364  ;  Vigouroux,  La 
Bible  et  les  découvertes  modernes.  6-  édit.,  Paris,  1896, 
t.  m,  p.  390.  Il  y  avait  en  Israël  des  artisans  habiles  à' 
travailler  ces  pierres,  à  les  tailler,  à  les  enchâsser,  à  les 
graver.  Ainsi    Béséléel  à  l'époque  de  l'Exode  était  re- 
nommé en  cet  art,  Exod.,  xxxv,  33;  et  son  travail  était 
reste  célèbre.  Eccli.,  xlv,  13. 

IN.  Détermination  des  espèces  de  pierres  pré- 
cieuses. —Pour  classer  et  dénommer  ces  pierres  pré- 
cieuses, les  Hébreux  ne  pouvaient,  comme  aujourd'hui, 
s  arrêter  a  l'analyse  de  leur  composition  chimique  et  à 
leurs  formes  cristallines.  Pour  eux,  comme  pour  les 
anciens,  on  tenait  compte  de  la  couleur  surtout  des 
autres  qualités  extérieures,  de  l'usage,  etc.,  et  ainsi  sou- 
vent on  comprenait  sous  un  même  nom  des  pierres  de 
couleur  identique  ou  approchante,  mais  de  composition 
très  différente.  De  plus,  avec  le  temps  les  dénominations 
ont  change;  ainsi  par  exemple  on  admet  généralement 
que  ce  que  les  anciens  appelaient  chrysolithe  est  notre 
»Pa;  ,  et  que  le  saphir  n'était  qu'un  lapis-Iazuli,  etc. 
De  la  la  difficulté  de  déterminer  exactement  l'espèce 
de  pierre  comprise  sous  les  noms  qu'ils  employaient.  On 
peut  aboutir  cependant  à  des  déterminations  certaines 
ou  du  moins  probables,  en  tenant  compte  des  divers  élé- 
ments de  solution  suivants  :  l'étymologie  des  noms  hé- 


4-22 

breux  et  la  comparaison  de  ces  noms  avec  les  termes  des 
différentes  langues  sémitiques,  ou  avec  la  languedupavs 

d  origine  de  ces  gemmes;  les  différentes  versions  an- 
ciennes comme  les  Septante,  l'Itala  et  la  Vnlgate  la  ver- 
sion syriaque  et  les  Targums,  et  les  interprétations  de 
•losephe  ou  des  Rabbins;  les  qualités  ou  les  usages  que 
les  textes  sacrés  attribuent  à  ces  pierres  et  leur  groupe- 
ment en  séries  disposées  avec  art,  permettant  de  mieux 
préciser  les  couleurs  elles  nuances;  enfin  les  descrip- 
tions des  mêmes  pierres  dans  les  auteurs  anciens,  comme 
Strabon,  Diodore  de  Sicile,  Théophraste,  Pline  l'ancien 
et  aussi  dans  les  lapidaires,  bien  que  ceux-ci  s'occupent 
davantage  du  sens  mystique  et  des  propriétés  occultes 
des  pierres  précieuses. 

Ces  ressources  ont  été  utilisées  dans  les  articles  con- 
sacres a  chacune  de  ces  pierres.  Il  reste  ici  à  donner  les 
principaux  groupements  que  l'on  rencontre  dans  la 
Sainte  Ecriture,  et  dont  l'observation  peut  être  utile  à 
la  détermination  de  chacune  des  pierres  ainsi  artiste- 
ment  rangées. 

Trois  groupements  principaux  méritent  de  fixer  l'at- 
tention :  les  pierres  du  rational,  Exod.,  xxvm,  17-20,  et 
xxxix,  10-13;  les  pierreries  du  roi  de  Tyr,  Ezeclî.,  xxvîii 
13;  et  les  pierres  des  fondements  de  la  Jérusalem  céleste! 
Apoc,  xxi,  18.  Et  il  est  à  remarquer  que  les  deux  der- 
niers groupements  dépendent  étroitement  du  premier. 
1»  Pierres  du  rational.  -  Les  12  pierres  du  pectoral 
ou  rational  sont  disposées  3  par  3  sur  4  rangées,  et 
placées  selon  le  texte  massorétique  de  la  façon  sui- 
vante. Les  rangées  commencent  de  haut  en  bas,  et  les 
pierres  dans  chaque  rangée  vont  suivant  la  coutume 
hébraïque  de  droite  à  gauche.  Nous  les  disposons  dans 
le  même  ordre  pour  la  comparaison  qui  sera  faite  plus 
bas  avec  le  texte  de  l'Apocalypse. 
l'-Tang  :     3.  Bâréqét         2.  Pitdâh  1.  'Ôdëm 

2«  rang  :     6.   Yahâlôm        5.  Sappir  4.  Nofék 

3e  rang  :     9.  'Ahlâmâh      h.  Sebo  7.  LéSén, 

i'  rang  :   12.   YaSféh  11.  Sôham        10.   Tarsis 

Les  Septante  dans  Exod.,  xxvm,  17-20  et  xxxix,  10-13 
les  traduisent  et  les  rangent  ainsi  : 

3.  (rfiipaySos         2.  touxÇiov  1.  rràpctcri 

(12)6.  ïauTti;  5.  a-âucpsipo;       4.   ïvBpaÇ 

9.   à(ié?y<rros  8.   i/,y.ir,;  7.   z.iyuoiov 

(11)12.  ôvOy.iov        (6)11.  ^pûXXiov  10.  Zjju<t(5Xi6oç 

On  peut  remarquer  que  dans  le  manuscrit  hébreu 
qu'ils  traduisaient,  les  Septante  ne  trouvaient  pas  le 
jaspe  à  la  12=  place,  mais  à  la  sixième,  t.  m,  col.  1143. 
Plusieurs  anciens  copistes  pouvaient  avoir  transcrit 
l'un  pour  l'autre  deux  noms  qui  ont  une  certaine  res- 
semblance dans  le  texte  hébreu  nsro»  et  abnt,  les  deux 
mots  commençant  par  un  >,  yod,  et  l'ensemble  des 
lettres  ayant,  surtout  dans  l'ancienne  écriture,  grande 
analogie,  *™\(,S%,  yahâlom,   et  ^?V\,,  yaifeh. 

De  même  les  copistes  des  Septante  ont  dû  intervenir 
l'ordre  des  deux  dernières  pierres,  le  Sôham  à  la 
11e  place  de  l'hébreu  étant  l'onyx,  qui  se  trouve  dans 
la  leçon  actuelle  des  Septante  rejeté  en  12»  lieu,  t.  iv, 
col.  1824.  Nous  avons  indiqué  la  correspondance  avec 
le  texte  hébreu  massorétique  par  des  chiffres  entre 
parenthèses.  La  Vulgate  suit  la  traduction  des  Seplante, 
et,  comme  elle,  place  le  jaspe  eu  6e  lieu  au  lieu  du  12». 
Mais  cette  version  latine  n'intervertit  pas  la  11«  et  la 
12"  pierre. 

3.  Sniaragdui       2.  Topazius  1.  Sardius 

(12)6.  Jaspis  5.  Sapphirus  4.  Carbtinculus 

9.  Ametliystus       8.  Achates  7.  Ligurius 

(6)12.  Beryllus  [11.  Onychinus  10.  Chrysçlithus 

Nous  trouvons  dans  Josèphe    en    deux    passages  de 
ses  ouvrages,  Bell,  jud.,  V,  v,  7,  et  Ant.  jud.,  III,Jvii, 


423 


PIERRE    PRECIEUSE 


424 


."),  rémunération  des  pierres  du  ralional.  On  voit  qu'il 
suit  les  Septante  :  il  conserve  les  mots  employés  pal- 
cette  version  pour  rendre  les  termes  hébreux,  et  l'ordre 
îles  rangées;  mais  il  intervertit  plusieurs  fois  la  place 
des  pierres  dans  les  rangées,  sans  doute  parce  qu'il 
cite  de  mémoire.  Et  dans  les  deux  passages  indiqués, 
sur  ce  dernier  point,  il  ne  s'arrête  pas  à  la  même  dis- 
position. Nous  mettrons  entre  parenthèses  le  numéro 
de  la  place  des  mêmes  pierres  dans  le  texte  hébreu  ac- 
tuel. 

Dans  Bell,  jud.,  V,  v,  7. 

3.  TU-ipaySor                 2.  •zàr.-j.l/i;  1.  o-âpoiov 

(5)  6.  OTX7t:peipo?  (12)  5.  ïacntlç  4.  avûpa5, 

(7)9.  Xryûpiov                (9)8.    àuéÇéjffio;  (8)7.   à/iTï]ç 

(10)12.  zpuai/.tôo;  (6)11.   8,r,puXXoç  (11)10.  6vu? 


dans  la  traduction  grecque   de  la  description   du  ra- 
tional. 


Dans  Ant.  jud.,  III.  VII,  .">. 


3.  ap.apayôo; 

(5)6.  ijiiiyEtpGi 
(8)  9.   i/âTV]Ç 
6  (12).   pT,pj>.>.o; 


t2.    TOTTOCÇOÇ 

(12)5.    ■X';-:; 
(9)  8.   Ôche'O-jst; 
11.    Hr'j'i 


1.  <rap5(5vu5 

4.  avôpal; 

7.  Xt'yupo; 

10.  }^pua<iXt6a« 


2°  Pierres  précieuses  du  roi  de  Tyr  dans  Ézéchiel, 
xxvin,  13. 

1.  'Ôdém,  2.  Pilddh,  3.  Yahàlùm,  4.  TarHS,  5.  So- 
Aa«î,  6.  yâsfêh,  7.  sappir,  8.  nôfék,  9.  bâréqèf.  Cette 
énumération  de  9  pierres  se  termine  par  vezâhâb,  «  et 
de  l'or.  » 

Les  Septante  ou  bien  lisaient  un  texte  plus  complet 
et  différent  en  plusieurs  points;  ou  bien  plus  proba- 
blement, leurs  copistes  ont  ajouté  trois  pierres  et 
modifié  l'ordre  afin  de  se  rapprocher  de  rémunération 
du  rational.  On  lit  en  effet  : 

i.    aipoioç,     2.     T07iàÇioi;,    3.    <i;j.ip«Y5o;,     4.     avOpct;, 

5.     TOTlÇElpOÇ,   6.    ÏXITUÇ. 

Après  ces  six  premières  pierres  le  texte  ajoute  ici 
ipyvpioc  -/.ai  -/pusioç,  «  l'argent  et  l'or,  »  et  il  reprend  : 

;7.  Xtfûptoç,  8.  à/car,;,  9.  àu.£6uo~-ro:,  10.  xpucdXcOoç, 
lï.  f3r,p'jXXto;,  12-   ov'jy.o,-. 

C'est,  on  le  voit,  absolument  la  disposition  des 
Septante  pour  les  12  pierres  du  ralional,  tandis  que 
dans  le  texte  hébreu  d'Ézéchiel  il  n'y  a  que  9  pierres 
et  elles  sont  disposées  dans  un  ordre  différent  des 
pierres  du  rational,  soit  selon  l'hébreu,  soit  selon  la 
version  grecque.  Les  pierres  du  texte  hébreu  d'Ézé- 
chiel répondent,  dans  tla  traduction  des  Septante  de 
la  description  du  rational,  aux  numéros  1,  2,11,10, 
12,  6,  5,  i,  3.  Sainl  Jérôme  sur  ce  passage  d'Ézéchiel 
avait  remarqué  la  différence  de  l'hébreu  et  des  Sep- 
tante, et  il  ajoutait  qu'Aquila,  Symmaque  et  Théodotion 
en  cet  endroit  différaient  totalement  entre  eux,  et 
avec  les  Septante,  pour  l'ordre,  le    nombre  et  même 

les  noms.  La  Vulgate  comme  l'hébreu   n'é nère  que 

9  pierres  et  suit  le  même  ordre,  sauf  qu'il  >  a  interver- 
sion entre  le  jaspe  et  le  berjl.  Le  syriaque  et  le  chal- 
déen  n'ont  que  huit  pierres. 

3°  Les  pierres  de  la  Jérusalem  céleste.  —  Nous  trou- 
vons déjà  dans  ïobie,  xui,  10-17  (texte  grec),  un  essai 
de  description  de  la  Jérusalem  céleste,  où  entrent  les 
pierres  précieuses,  mais  moins  développé  que  dans 
l'Apocalypse.  «  Les  murs  de  Jérusalem  sont  de  saphir  et 
d'émeraude  et  de  diverses  pierres  précieuses;  les  rues 
sont  pavées  de  heryl  et  d'escarbonrlr.  d  Dans  l'Apoca- 
lypse, xxi,  18-20,  les  pierres  sont  au  nombre  de  12  que 
saint  Jean  ne  range  pas  par  séries,  mais  que  nous 
disposons  en  4  rangées  pour  les  comparer  plus  facile- 
ment avec  les  pierres  du  rational.  Nous  faisons  pré- 
céder chaque  pierre  d'un  chiffre  indiquant  le  numéro 
d'ordre  dans  le  texte  de  l'Apocalypse.  Le  chiffre  placé 
entre    parenthèses    indique    la    place    correspondante 


(6)  1.  ïit-i; 

(3)  4.  apÂpaySo; 

(10)7.  xP<xroXc9o; 

(8)  10.  -/pufroTTpaac; 


(5)  2.  ai-nçsipo;  (4)  3.   /aX/EÎwv 

(12)5.  a-xpôdyuÇ  (1)6.   ffàpôiov 

(11)8.  fiâpuXXo;  (2)9.  TOJtdcÇiov 

(7)11.  uiy.evôo;  (9)12-  à|i.éO'juTo; 


On  peut  remarquer  que  des  manuscrits  portent 
yap/^oiov  au  lieu  de  -/xXxeowv  ou  ^aXxyjStuv  ;  ce  qui 
donnerait,  au  lieu  de  la  calcédoine,  l'escarboucle  et 
répondrait  alors  exactement  au  nôfék  du  rational, traduit 
SvSpaÇ  par  les  Septante,  t.  il,  col.  56.  La  chrysoprase 
de  saint  Jean  n'est  peut-être  pas  la  chrysoprase  mo- 
derne et  ne  serait  qu'une  des  variétés  de  l'agate,  le  iebo 
du  rational.  t.  n.  col.  7'i2.  L'hyacinthe  ne  serait  autre 
chose  que  le  ligure.  léseni  du  rational,  t.  m,  col.  789 
et  t.  iv,  col.  254. 

A  l'exception  du  <japB<SvuÇ et  du  towâÇtov,  qui  devraient 
échanger  leur  place,  les  pierres  de  l'Apocalypse  con- 
servent la  disposition  générale  des  4  rangées  du  ra- 
tional, tout  en  variant  l'ordre  des  rangées  et  la  dispo- 
sition des  pierres  dans  chaque  rangée.  Ainsi  les 
'A  premières  pierres  de  saint  Jean  sont  les  pierres  de 
la  i'  rangée  du  ralional  selon  le  texte  lu  par  les  Sep- 
tante, mais  énumérées  à  rebours.  Avec  la  transposition, 
indiquée  tout  à  l'heure,  la  2e  et  la  3e  rangée  de  saint 
Jean  répondraient  à  la  1™  et  à  la  4e  du  rational.  Les 
trois  dernières  pierres  de  saint  Jean  sont  les  pierres  de 
la  3e  rangée,  dans  un  ordre  ni  semblable,  ni  inverse, 
mais  différent.  En  somme  donc  l'énumération  de  l'Apo- 
calypse est  visiblement  inspirée  du  rational,  sans  en 
être  cependant  la  copie.  Les  12  pierres  du  rational 
représentaient  pour  les  Hébreux  tout  ce  qu'il  y  avait  de 
plus  beau  en  pierreries.  Aussi  Ézéchiel  s'en  inspire 
pour  joindre  la  richesse  du  roi  de  Tyr.  Et  saint  Jean 
qui  ne  pouvait  manquer  de  voir  et  d'indiquer  le  carac- 
tère typique  de  la  loi  ancienne  à  l'égard  delà  nouvelle 
et  d'Israël  avec  le  peuple  chrétien,  signale  ainsi  le 
rapport  entre  les  12  patriarches  et  les  12  tribus  avec 
les  12  Apôtres  et  le  peuple  nouveau.  Apoc,  xxi,  12.  11. 
Les  noms  des  12  enfants  de  Jacob  étaient,  comme  on 
sait,  gravés  par  ordre  sur  chacune  des  12  pierres.  On 
croit  généralement  que  cet  ordre  est  celui  de  la  nais- 
sance. 1.  Ruben,  2.  Siméon,  3.  Lévi,  4.  Juda.  5.  Dan, 
6.  Nephlhali,  7.  Cad,  8.  Aser,  9.  Issachar,  10.  Zabulon, 
11.  Joseph,  12.  Benjamin.  —  Joseph  qui  donna  nais- 
sance aux  deux  tribus  d'Éphraim  et  de  Manassé,  occu- 
perait la  onzième  place,  où  se  trouve  l'onyx  ou  sarde- 
nyx  aux  deux  couleurs. 

Avec  les  divers  moyens  d'information  indiqués  plus 
haut  et  la  comparaison  des  pierres  dans  les  différents 
groupements  qui  tous  dépendent  du  rational,  on  peut 
établir  le  tableau  suivant  (tig.  83  A)  : 

S.  Êmeraude         2.  Topaze  des  anciens  1.  Saule  ou  Cornaline 
(Vert  i>"    •  {Vert  jaune)         (/ion;)'-"""1  clair) 

i     Béryl  ou  5.  Saphir  des  anciens         4.  Kscarboucle 

aigue-marine  L&piB-LazuU  ou  Grenat 

(Vert  bleuâtre)  (Bleu  ciel)  igeliedevin) 

9.  Améthyste  8.  Agate  ou         7.  Ligure  ou  hyacinthe 

(Violet  pur)  Chrysoprase  (.Rouge  orangé 

'  rrisâtre  clair)  foncé) 

[12.  Jaspe.  Il   nnyx  ou  variété     10.  Chrysolythe  des 

(Vert  foncé)  de  Sardoine         anciens  (notre  topaze) 

(Blanc  et  rouge)  (Jaune  d 

L'arrangement  harmonieux  des  couleurs  demande 
que  le  béryl  soit  à  la  sixième  place  et  non  à  la  douzième. 
Le  jaspe  fait  moins  bien,  placé  sous  l'émeraude,  qu'à  la 
douzième  place.  La  disposition  donnée  dans  le  texte 
hébreu  est  donc  plus  heureuse  que  celle  des  Septante. 

IV.  Liste  alphabétique  dis  pierres  précieuses  m 
LA  Bible.'—  En  dehors  des  pierres  du  rational  qui  for- 
ment comme  l'écrin  des  plus  belles  pierres  connues 
des  Hébreux,  auxtemps  anciens,  il  y  a  quelques  géminés 


DICT.    DE   LA   BIBLE 


LETOUZEY   &   ANE   EDIT. 


I.    PIERRES    DU     RATIONAL 


TOPAZE   I 


SARDE  =  CORXALINE 


BERYL -AIGUE-MARINE 


1.  IPIS-LAZULI=SAPHIR 


AMETHYSTE 


.. ,    ..  , 


LIGURE =HYACINTHE 


jasi'E  0NYX=SARIX)1NE  CHRYSOLITH1 

II.    AUTRES    PIERRES  PRÉCIEUSES    DE    LA    BIBLE 


^J 


PERLE 


DIAMANT -CORINDON  LIMPIDE 


anciens) 


i  HRYSOPRASE 


TURi.H  OIS1 


PIERRES   PRECIEUSES    BIBLIQUES 

Reproduction  d'après  nature,  suivant  la.  indications  J<-  M.  MELLERI(>  dit  MELLER. 


425 


PIERRE   PRECIEUSE 


426 


mentionnées  isolément,' comme  le  diamant  et  peut-être 
le  rubis,  du  moins  les  pierres  entendues  autrefois  sous 
ces  noms.  On  peut  ranger  aussi  parmi  les  pierres  pré- 
cieuses, bien  que  leur  origine  soit  différente,  le  corail 
et  la  perle  (tig.  83  B). 

Voici  rémunération  alphabétique  des  unes  et  des 
autres  : 

1.  Agate  (sebô,  Septante  :  àxà-r,;,  Vulgate  :  achates), 
la  seconde  pierre  de  la  troisième  série  des  pierres  pré- 
cieuses du  rational,  Exod.,  xxviii,  19;  xxxix,  12;  Voir 
t.  i,  col.  264.  C'est  la  chrysoprase  de  Saint  Jean. 
Apoc,xxi,  20,  t.  »,  col.  742.  Omise  dans  le  texte  hébreu 
d'Ezéchiel,  xxvm,  13;  mais  mentionnée  dans  la  traduc- 
tion des  Septante. 

2.  Améthyste  (hébreu  :  'ahldmâh,  Septante  :  ànsSuc- 
toç;  Vulgate  :  amethystus),  la  3me  pierre  du  3me  rang 
dans  le  rational,  Exod.,  xxvm,  19;  xxxix,  12;  et  la 
12°  pierre  fondamentale  de  la  nouvelle  Jérusalem. 
Apoc,  xxi,  20.  Omise  dans  le  texte  hébreu,  mais  rétablie 
par  la  version  des  Septante  dans  Ezech.,  xxvm,  13- 
Voir  t.  i,  col.  478. 

3.  Béryl  (hébreu  :  yahâlôm;  Septante  :  Bïip'j>Xo?; 
Vulgate  :  beryllus),  la  3e  pierre  du  second  rang  dans  le 
rational  d'après  le  texte  hébreu,  Exod.,  xxvm,  19; 
xxxix,  12,  la  2«  du  4e  rang  d'après  le  texte  reçu  des 
Septante;  et  la  3e  du  4e  rang  dans  la  Vulgate.  C'est  la 
3e  pierre  dans  Ézéchiel,  xxvm,  13.  Elle  figure  dans  le 
texte  grec  de  Tobie,  xm,  17,  mais  manque  dans  la  Vul- 
gate. Dans  l'Apocalypse,  xxi,  20,  c'est  la  8e  pierre  fon- 
damentale. Voir  t.  i,col.  1637. 

4.  Calcédoine  (grec  :  xa)/e8<av  et  yx'i/rfi'jyi  et  d'après 
quelques  mss.  xxpyr,8<ôv;  Vulgate  :  chalcedoiiius).  La 
calcédoine  est  une  variété  d'agate;  mais  toute  l'anti- 
quité a  souvent  confondu  le  chalcedonius  avec  le  char- 
chedonias,  l'escarboucle.  Elle  occupe  la  3e  place  parmi 
les  pierres  de  la  Jérusalem  céleste,  Apoc,  xxi,  19,  et 
ne  serait  autre  que  le  nôfék  ou  Mpai  du  rational. 
Exod.,  xxvm,  17.  Voir  t.  H,  col.  55. 

5.  Chrysolythe  (hébreu  :  tarsis' ;  Septante:  ypuaô- 
XiOo;;  Vulgate  :  chrysolythus),  la  dixième  pierre  du 
rational,  Exod.,  xxvm,  20;  xxxix,  13;  la  4e  dans  l'énu- 
mération  d'Ezéchiel.  xxvm,  13;  la  7e  des  pierres  de  la 
Jérusalem  céleste.  Apoc,  xxi,  20.  Dans  Ezech.,  16, 
Cant.,  v,  4;  Dan.,  x,  6,  les  traducteurs  grecs  gardent  le 
mot  sans  le  traduire  :  Oxpaiç,  Oapacc;.  La  chrysolithe 
des  anciens  serait  notre  topaze  actuelle.  Voir  t.  il, 
col.  740. 

6.  Chrysoprase  (grec:  yp-jdÔTtpaToç  ;  Vulgate  :  chry- 
soprasus),  la  dixième  pierre  de  la  Jérusalem  céleste. 
Apoc,  xxi,  20.  Ce  ne  serait  probablement  pas  la  chry- 
soprase moderne,  mais  une  sorte  'd'agate  et  elle  cor- 
respondrait à  la  Se  pierre  du  rational.  Voir  t.  H,  col.  '*-■ 

7.  Corail  (hébreu  :  ra'mof;  Septante  :  jiETswpa,  pap.08; 
Vulgate  :  excelsa,  seHcum),  matière  calcaire  sécrétée  par 
certains  polypes,  le  corail  rouge.  tJob,  xxvm,  18; 
Prov.,  xxiv,  7;  Ezech.,  xxvn,  16.  Voir  t.  Il,  col.  955. 

8.  Cornaline  (hébreu  :  ôdem;  Septante  :  odtpStov; 
Vulgate  :  sardius),  pierre  qui  varie' du  rouge  sang  foncé 
au  rouge  chair,  nuancé  de  jaunâtre,  était  confondue 
avec  la  sardoine.  C'est  la  lrc  pierre  du  rational; 
Exod.,  xxvm,  17;  xxxix,  10;  la  première  des  pierres  du 
roi  de  Tyr,  Ezech.,  xxvm,  13;  la  sixième  pierre  de  la 
cité  céleste,  Apoc,  xxi,  19.  Voir.  t.  il,  col.  1007. 

9.  Cristal  (hébreu  :  gdbis.  Job,  xxxm,  18,  et  qérah, 
Ezech.,  i,  22,  mots  qui  ont  d'abord  le  sens  de  glace, 
mais  qui  s'entendent  aussi  du  cristal  de  roche,  comme 
le  mot  grec  xpôerraXXoç).  Voir  t.  n,  col.  Il  19. 

10.  Diamant  (hébreu  :  Sâtnîr  ;  Septante:  àSoqjiavTÎvoç; 
Vulgate  :  adamas,  adamantmus).  Ezech.,  m,  9; 
Zach.,  vu,  12;  Jér.,  xvn,  1.  Ce  ne  serait  pas  le  vrai 
diamant  que  les  anciens  ne  savaient  pas  tailler  et 
polir;  mais  le  yaqout  blanc  des  arabes,  appelé  au.:o::_, 
la  pierre  asmir  des  Egyptiens,  c'est-à-dire  une  pierre 


dure   et   brillante,    le    corindon    limpide.   Voir   t.   Il, 
col.  1403. 

11.  Émeraude  (hébreu  :  bdréqét;  Septante:  o(jl«- 
pocySoç;  Vulgate  :  smaragdus),  la  3e  pierre  du  rational, 
Exod.,  xxvm,  17  ;  xxxix,  10,  la  9"pierre  d'Ezéchiel,  xxvm, 
13;  la  4e  pierre  de  la  Jérusalem  céleste.  Apoc,  xxi,  19. 
Elle  figure  parmi  les  pierres  de  la  Jérusalem  nouvelle  de 
Tobie.,  xm,  16  (Vulg.  21).  Elle  ornait  le  pavillon  d'Holo- 
pherne.  Judith,  x,  21  (Vulgate,  19).  Le  texte  grec  de  l'Ec- 
clésiastique, xxxn,  8,  mentionne  un  cachet  d'émeraude 
enchâssé  dans  l'or;  mais  le  texte  hébreu  récemment 
découvert  n'a  pas  le  mot  émeraude  ni  l'indication  d'une 
pierre  particulière  pour  le  cachet.  Voir.  t.  n,  col.   1729. 

12.  Escarboucle  (hébreu  :  nôfék;  Septante:  ïv8p«Ç; 
Vulgate  :  carbitnculus),  la  lre  pierre  du  second  rang 
dans  le  rational;  Exod.,  xxvm,  18;  xxx,  11;  la  8e  pierre 
du  roi  de  Tyr,  Ezech.,  xxvm,  13;  une  pierre  qu'on 
apportait  à  Tyr,  Ezech.,  xxvu,  16  ;  peut-être  la 
3e  pierre  fondamentale  de  la  cité  céleste.  Apoc,  xxi,  19. 
L'Ecclésiastique,  xxxn,  7.  parle  de  joyau  fait  d'une 
escarboucle  enchâssée  dans  l'or;  et  dans  le  texte  hébreu 
retrouvé  on  constate  en  effet  le  mot  nôfék  (xxxil,  5). 
Voir  t.  il,  col.  1907. 

13.  Hyacinthe  (Apocalypse  :  uixivôoç;  Vulgate  :  Hya- 
cinthus),  la  onzième  pierre  de  la  cité  céleste.  Apoc,  xxi, 
20.  Elle  parait  n'être  autre  chose  que  le  ligure,  lésem, 
la  7e  pierre  du  rational.  Voir  t.  m,  col.  787. 

14.  Jaspe  (hébreu  :  y  ai  f eh;  ïxutxic,;  Vulgate  :  jaspis), 
la  12e  pierre  du  rational  selon  le  texte  massorétique,  la 
6e  selon  la  version  grecque  et  la  Vulgate,  Exod.,  xxvm, 
20;  xxxix,  13;  la  6e  pierre  d'Ezéchiel,  xxvm,  13;  la 
l'«  pierre  de  la  Jérusalem  céleste.  Apoc,  xxi,  19.  Voir 
t.  m,  col.  1142. 

15.  Ligure  (hébreu  :  lésém  ;  Septante  :  Xi-pptov; 
Vulgate  :  ligurius).  la  lre  pierre  du  3e  rang  dans  le 
rational.  Exod.,  xxvm,  19;  xxxix,  12.  Ce  serait  la 
pierre  hyacinthe  de  l'Apocalypse,  xxi,  20,  d'après  saint 
Épiphane  et  de  nombreux  exégètes.  Elle  manque  dans 
l'énumération  d'Ezéchiel,  xxvm,  13,  d'après  le  texte 
hébreu,  mais  figure  dans  la  traduction  grecque.  Voir 
t.  iv,  col.  254. 

16.  Onyx  (hébreu  :  sôiiam;  Septante  :  ôvj/iov  ; 
Vulgate  :  onychinus)  la  11e  pierre  du  rational,  Exod., 
xxvm,  20;  xxxix,  13,  mise  au  12e  rang  par  les  Sep- 
tante. C'est  la  5e  pierre  de  l'énumération  d'Ezéchiel, 
xxvm.  13,  d'après  l'hébreu,  rejetée  la  12»  dans  la  tra- 
duction grecque.  C'est  le  sardonyx  de  l'Apoc,  xxj,  19. 
Voir  t.  iv,  col.  1823. 

17.  Perle  (grec  :  tiap-focpiTYi;  Vulgate  :  margarita), 
substance  brillante  qui  se  forme  dans  l'intérieur  de 
certaines  coquilles  marines.  Voir  t.  v,  col.  144.  —  Sur 
les  peninim  que  les  uns  regardent  comme  du  corail, 
d'autres  comme  des  perles,  voir  l.  il,  col.  957. 

18.  Rubis.  Quelques  auteurs  voient  dans  le  kadkod 
d'Is.,  liv,  12,  et  d'Ezéchiel,  xxvu,  16,  une  pierre  rouge 
éclatante  qu'ils  identifient  avec  le  rubis.  Pour  d'autres 
c'est  le  'éc/ddl},  pierre  étincelante,  Is.,  liv,  12,  qui  serait 
le  rubis.  Voir  Rubis. 

19.  Saphir  (hébreu  :  sappir;  Septante  :  (jdcjrysipov; 
Vulgate  :  sapphlrus),  la  5e  pierre  du  rational,  Exod., 
xxxm,  19;  xxxix,  13;  la  7«  pierre  d'Ezéchiel,  xxvm, 
14,  selon  l'hébreu;  placée  la  5e  dans  le  grec.  La  2e  pierre 
fondamentale  de  la  cité  céleste.  Apoc,  xxi,  19.  On  sait 
que  le  saphir  des  anciens  est  plutôt  le  lapis-lazidi. 
Quelques  auteurs  croient  que  la  turquoise  serait  dési- 
gnée par  ce  nom. 

20.  Sardoine  (hébreu:  'ôdêm;  Septante  :  râpSiov; 
Vulgate  :  sardius),  la  première  pierre  du  rational, 
Exod.,  xxvm,  19;  xxxix,  12;  la  première  des  pierres 
précieuses  du  roi  de  Tyr,  Ézech.,  xxvm,  13;  la  sixième 
pierre  fondamentale  de  la  cité  céleste.  Apoc,  xxi,   19. 

21.  Topaze  (hébreu  :  pitddli  ;  Septante  :  TOTtiÇcov, 
Vulgate  :  topazius),  la  seconde  pierre  du  rational,  Exod., 


427 


PIERRE   PRÉCIEUSE  —   PIÉTON 


428 


xxyiii,  17;  xxxix,  19;  la  seconde  aussi  de  rémunération 
d'Ézéchiel,  xxvm,  13;  la  9B  pierre  fondamentale  de  la 
nouvelle  Jérusalem.  Apoc,  xxi,  20.  Ce  n'est  pas  la 
belle  pierre  jaune  d'or  que  nous  nommons  aujour- 
d'hui topaze  et  que  les  anciens  appelaient  chrysolithe. 
C'est  une  pierre  d'Ethiopie,  lob.  XXVIII,  19,  qui  pourrait 
n'être  qu'un  péridot,  ou  une  pierre  vert  olive,  ou  vert 
jaune.  Voir  Topaze. 

V.  Comparaisons.  —  Les  pierres  précieuses  en  géné- 
ral, ou  telle  pierre  déterminée,  servent  de  terme  de 
comparaison  pour  marquer  une  chose  de  grand  prix. 
Ainsi  l'attente  de  celui  qui  espère  est  une  pierre  pré- 
cieuse. Prov.,  xvii,  8.  Les  lèvres  savantes  ont  plus  de 
valeur  que  les  pierres  précieuses.  Prov.,  xxn.  5.  La 
sagesse  est  supérieure  à  la  topaze  d'Ethiopie.  Job.,  xxvm, 
19.  —  Dans  Ps.  cxix,  127,  où  le  Psalrniste  aime  la  loi  de 
Dieu  plus  que  l'or  fin.  pàz,  les  Septante  et  la  Yulgate 
ont  vu  à  tort  une  pierre  précieuse,  la  topaze. 

VI.  Bibliographie.  —  Théophraste,  De  îapidibus; 
Pline,  H.  N.,  xxxvn;  S.  Kpiphane,  De  duodecim  gem- 
mis  it.  xliii,  col.  294-304,1  et  son  ancienne  version 
latine  iloc.  cit.,  col.  322-366  :  S.  Isidore,  Etymo'og., 
xvi. 6- 15,  De  Iapidibus,  t.Lxxxn,  col.  570-580;  J.Braunius, 

Vestitui  Sacerdotuni  Itebrœorum,  in-8»,  Leyde,  1680, 
1.  II.  c.  vm-xtx,  p.  627-715;  E.  Fr.  R.  Rosenmûller, 
llandbucli  der  biblischen  Alterthumskunde,  in-8°,  Leip- 
zig,  l.  iv,  \"  partie;  G.  B.  YViner,  Biblisches  Realwôr- 
,  in-s  .  Leipzig,  1817,  t.  i,  p.  281-284,  Edelsteine; 
Ch.  William  King,  Antique  Gems,  in-8»,  Londres,  1860: 
2*  édit.,  2  in-8°,  1872;  The  natural  history  of  geins  or 
décorative  slones,  in-12,  Londres,  1867:  2e  édit.,  1870; 
de  Saulcy,  dans  la  Revue  archéologique,  août  1869, 
p.  91;  Ch.  de  Linas,  Les  origines  de  l'orfèvrerie  cloison- 
née, 3  in-8»,  Paris,  1877,  1878,  1887;  Clément  Mullet, 
Essai  sur  la  minéralogie  arabe,  extrait  du  Journal 
asiatique,  1868;  E.  Jannetaz  et  E.  Fontenay,  Diamant 
et  pierres  pi  écieuses,  in-8",  Paris.  1881;  Ch.  Barbot  et 
Baye,  Guide  pratique  du  joaillier,  in-8,  Paris,  s.  d.; 
dans  Daremberget  Saglio,  Dictionnaire  des  antiquités 
grecques  et  romaines,  t.  Il,  2'  partie,  in-i",  1896,  article 
Gemmœ  par  E.  Babelon,  p.  1160-1488:  dans  Hastings, 
Dictionary  of  the  Bible,  t.  iv.  in-i',  1902.  p.  619-621, 
article  Precious  Stones  de  \V.  M.  Flinders-Petrie.  — 
On  peut  consulter  aussi  les  divers  lapidaires  et  les  au- 
tres ouvrages  cités  aux  articles  spéciaux  sur  chaque 
espèce  de  pierres  précieuses.  E.  Levesque. 

PIERRERIES,  pierres  précieuses.  Voir  Pierres  PRé- 
CIEOSES. 

PIÉTÉ  (grec  :  rJTïfei;  Vulgate  :  pietas),  applica- 
tion de  toute  sa  volonté  et  de  tout  son  cœur  au  service 
de  Dieu.  —  1.  Dans  l'Ancien  Testament,  l'idée  de  piété 
est  représentée  par  1rs  mois  h<:s<:<ly  «  zèle,  dévoue- 
ment »  envers  Dieu,  Eccli..  xi.ix.  1,  d'où  les  noms  de 
■  .  ■  htéséd,  i  hommes  de  piété  »,  et  hâsidim,  donnés 
aux  hommes  pieux,  Is..  lvii,  I  ;  ird'hr  «  crainte  », 
voir  Crainte  de  Dieu,  t.  n,  col.  1099;  sédëq,  «  justice  ». 
Voir  Justice,  t.  m,  col.  1875.  Dans  Isaïe,  xi,  2.  3.  il 
est  dit  que  sur  le  rameau  de  Jessé  reposera 

L'esprit  de  science  et  de  crainte  de  Jéhovab, 
Et  il  respirera  dans  la  crainte  de  Jéhovab. 

Dans  les  deux  vers,  le  même  mot  îr'dh  est  employé; 
il  -  agit  donc,  de  part  et  d'autre,  delà  même  crainte  de 
Dieu,  c'est-à-dire  de  la  religion  envers  lui.  Les  versions, 
pour  ne  pas  répéter  deux  fois  le  même  mot,  l'ont  tra- 
duit une  première  fois  par  vjaéfjf.a,  pietas,  et  la  se- 
conde par  soSo;,  limur,  i  crainte  ».  Les  deux  mots 
ont  ici  exactement  le  même  sens,  comme  le  montre  la 
double  traduction  grecque  d'un  mime  verset  des  Pro- 
verbes, i,  7,  par  les  Septante  qui  y  rendent  successive- 
ment ira;  Yehovàh  par  yoëo;  Kupfou   et  par  sû<ri6sia 


e!;  Osdv.  La  piété  et  la  crainte  de  Dieu  ne  sont  donc, 
dans  le  passage  d'Isaïe,  qu'une  seule  et  même  chose. 
Cf.  Touzard,  lsaie,  xr,  2-3,  et  les  sept  dons  du  Saint- 
Esprit,  dans  la  Revue  biblique,  1899.  p.  219-252. 
Après  la  restauration  messianique.  Jérusalem  sera  ap- 
pelée «  Splendeur  de  la  piété  ».  Bar.,  v,  4.  Les  auteurs 
sacrés  célèbrent  la  piété  de  Josias,  Eccli..  xlix.  4. 
et  celle  d'Onias  III.  II  Mach.,  m,  1.  Les  premiers  an- 
cêtres d'Israël  n'ont  pas  laissé  faiblir  tiqôfam,  «  leurs 
obéissances    •>  ou   «  leurs    espérances    »,   Bixaiotr-jvat, 

leurs  justices  »,  pielates,  «  leurs  témoignages  de 
piété  ».  Eccli.,  xliv,  10.  Une  récompense  est  réservée 
à  ceux  qui  s'endorment  dans  la  piété,  c'est-à-dire  dans 
la  fidélité  au  service  de  Dieu.  II  Mach.,  xn.  15. 

2°  Dans  le  Nouveau  Testament,  la  piété  ne  se  con- 
fond plus  simplement  avec  la  crainte  de  Dieu  ou  la 
religion  en  général;  elle  suppose  quelque  chose  de  plus 
généreux  et  de  plus  affectueux  dans  le  service  de  Dieu, 
en  réponse  à  la  bonté  et  à  l'amour  du  Sauveur  pour 
les  hommes,  Tit. .  m,  4,  et  comme  effet  de  la  grâce 
plus  puissante  de  la  Loi  nouvelle.  Car  l'incarnation  est 
«  un  grand  mystère  de  piété  ,  c'est-à-dire  de  l'amour 
de  Dieu  envers  l'homme,  provoquant  l'amour  de 
l'homme  envers  Dieu.  I  Tim.,  ni,  16.  Une  e  doctrine 
conforme  à  la  piété  »  est  celle  qui  s'inspire  des  grands 
mystères  de  la  foi.  I  Tim.,  vi,  3.  Les  chrétiens  doivent 
vivre  »  en  toute  piété  et  honnêteté  »,  par  conséquent 
fidèles  à  tous  les  devoirs  de  la  vie  surnaturelle  et  à  ceux 
de  la  vie  naturelle.  I  Tim.,  Il,  2.  Les  femmes  chré- 
tiennes font  profession  de  piété,  ôeoTi^::»,  pietas,  au 
moyen  des  bonnes  œuvres.  I  Tim.,  n,  10.  Saint  Paul 
recommande  vivement  à  son  disciple  de  s'exercer  à 
la  piété,  comme  à  quelque  chose  qui  peut  et  doit 
toujours  grandir.  I  Tim..  IV,  7.  Il  veut  qu'il  recli 
«  la  justice,  la  piété,  la  foi,  la  charité,  la  patience,  la 
douceur.  »  I  Tim,,  VI,  11.  La  piété  est  donc  d'un 
supérieur  à  la  justice.  «  Elle  est  utile  à  tout  : 
des  promesses  pour  la  vie  présente  et  pour  la  \ 
venir,  n  par  conséquent  est  profitable  même  à  la  vie 
du  temps,  loin  de  lui  nuire.  1  Tim.,  IV,  8.  «  C'est  une 
grande  richesse  que  la  piété  contente  du  nécessaire  » 
et  ne  s'embarrassant  pas  des  biens  inutiles  de  ce 
monde.  I  Tim.,  VI,  6.  Il  y  a  des  hommes  vicieux, 
i  ayant  les  dehors  de  la  piété  sans  en  avoir  ia  réalité,  » 
II  Tim..  m,  5.  i  Ils  ne  voient  dans  la  piété  qu'un 
moyen  de  lucre,  »  parce  qu'eux-mêmes  sont  privés  da 
la  vérité,  I  Tim.,  vi.  5,  et  que  c'est  «  la  vérité  qui 
conduit  à  la  piété  ».  Tit..  i.  I.  La  vraie  foi  est  donc 
seule  la  source  de  la  piété  sincère.  La  grâce  eus 
à  renoncer  à  l'impiété  et  aux  convoitises  mondaines, 
pour  vivre  dans  le  siècle  présent  avec  tempérance, 
justice  et  piété.  Tit..  n,  12.  Mais  le  monde  ne  s'accom- 
mode pas  de  la  piété,  et  "  tous  ceux  qui  veulent  vivre 
avec  piété  dans  le  Christ  Jésus,  auront  à  souffrir  persé- 
cution. »  II  Tim..  m,  12.  —  Saint  Pierre  veut  aussi 
qu'à  leur  foi  les  chrétiens  ajoutent  la  vertu,  le  discer- 
nement, la  tempérance,  la  patience,  la  piété,  l'amour 
fraternel,  la  charité',  autant  d.'  dons  qui  viennen 
Dieu.  Il  Pet.,  i.  3,6,  7.  Ils  doivent  veillera  la  sainteté 
de  leur  conduite  et  à  leur  piété,  en  attendant  le  jour 
du  Seigneur,  II  Pet.,  m,  II,  qui  a  sait  délivrer  de 
l'épreuve  les  hommes  pieux  ...  II  Pet.,  il,  9. 

II.  Les  être. 

PIÉTON  (hébreu  :  ragli;  Septante  :  -  =  ;<i:;  Vulgate: 
.  homme  de  pied.  Ce  terme  ne  s'emploie  que 
dans  les  dénombrements  de  troupes.  Exod.,  xn.  .'(7: 
Num.,  xi,  21:  .Iml..  xx,  2:  I  Reg.,  iv,  10;  ,xv.  1. 
II  Reg.,  x.ti:  111  I!eg.,  xx.  29,  et  l'on  oppose  le  piéton 
au  cavalier  ou  au  soldat  monté  sur  un  char.  IV  Heg., 
Mil,  7;  I  Par..  XVIII,  i;  SIX,  18.  On  lit  dans  Jél 
xn.  5  :  Si  lu  cours  avec  des  piétons  et  qu'ils  te 
fatiguent,  pourras-tu  lutter  avec  des  cavaliers'.'  »  Le 
prophète  s'applique  à  lui-même  cette  remarque  :  il  est 


429 


PIETON    —    PILATE    (PONCE; 


430 


haï  et  persécute  par  ses  propres  concitoyens;  comment 
pourra-t-il  tenir  devant  des  ennemis  plus  forts,  les 
étrangers'.'  II.   LESÈTRE. 

PIGEON  (Vulgate  :  columba).  Voir  Colombe,  t.  n, 
col.  846. 

PILA,  «  mortier  ».  La  Vulgate,  Sopli.,  i.  11.  a 
traduit  par  Pila  le  nom  propre  hébreu  MaktéS,  loca- 
lité des  environs  de  Jérusalem  ou  quartier  de  celle  ville. 
Voir  Macthesch,  t.  îv.  col.  531. 

1.  PILATE  (PONCE)  (grec  :  IIo'vuo;  I'Kàjcto;),  pro- 
curateur romain  de  la  Judée  au  temps  de  Jésus-Christ. 
Indépendamment  des  récits  évangéliques  relatifs  à  la 
passion  de  Xotre-Seigneur,  Matth.,  xxvn,  .Marc,  xv, 
Luc,  xxiii,  Joa.,  xviii-xix,  il  est  nommé  plusieurs  fois 
dans  le  Nouveau  Testament  :  Luc,  m,  1,  pour  fixer 
l'époque  à  laquelle  saint  Jean-Baptiste  inaugura  son 
ministère;  Luc.  xiii,  1,  à  propos  d'un  acte  particulière- 
ment cruel  de  son  gouvernement,  Act.,  m,  13;  iv,  27; 
xiii,  28,  et  I  Tim.,  vi.  13,  comme  responsable  de 
la  mort  du  Sauveur.  Parmi  les  auteurs  classiques. 
Tacite  est  seul  à  le  mentionner.  Ann.,  xv,  44.  Philon 
et  Josèphe  parlent  souvent  de  lui,  le  premier  dans  sa 
Legatio  ad  Caium,  xxxvm,  le  second  dans  ses  Anti- 
quités et  dans  le  Bellum  judaicum.  Voir  plus  bas, 
col.  430  et  431. 

1"  Son  nom  l'/  son  origine.  —  Son  nom  complet, 
qui  n'apparaît  qu'une  seule  fois  dans  le  Nouveau  Tes- 
tament, Luc,  m,  1,  est  Pontius  Pilatus.  Il  est  possible 
qu'il  ait  appartenu,  soit  par  son  ascendance  propre- 
ment dite,  soit  par  adoption,  à  la  gens  Pontia,  d'origine 
samnite  et  célèbre  dés  le  début  de  l'histoire  romaine. 
Voir  le  P.  Ollivier,  Ponce  Pilate  et  les  Ponlii,  dans  la 
Revue  biblique  internationale,  t.  v,  Paris,  1896,  p.  247. 
254,  594-600.  Pilatus  n'était  qu'un  surnom,  un  cogno- 
men,  dont  il  est  difficile  d'expliquer  la  provenance. 
C'est  à  tort  qu'on  l'a  rattaché  parfois  à  pileus,  bonnet 
de  laine  dont  on  coiffait  les  esclaves  lorsqu'on  les 
affranchissait;  en  effet,  dans  ce  cas,  on  eût  dit  pilealus. 
La  véritable  étymologie  semble  être  plutôt  pilum  ou 
pila,  «  javelot,  »  de  sorte  que  pilatus  signifierait  : 
«  armé  du  javelot.  »  Cf.  Virgile,  .En.,  XII,  121-122. 
D'après  sa  fonction,  Pilate  devait  appartenir  à  l'ordre 
des  chevaliers  romains. 

2°  Son  titre  et  la  durée  de  son  administration.  — 
Pilate  porte,  dans  le  texte  grec  de  saint  Matth.,  wvii. 
2,  11,  14,  etc.,  et  de  saint  Luc,  xx,  20,  comme  aussi 
dans  Josèphe,  Anl.,  XVIII,  m,  1,  le  titre  moins  exact  de 
f,ycu.civ.  Cf.  Act.,  xxiii,  24,  26,  33;  xxiv,  1,  10;  xxvi,  30. 
En  latin,  son  titre  officiel  était,  non  pas  prseses,  comme 
nous  lisons  habituellement  dans  la  Vulgate  aux  pas- 
sages qui  s'occupent  de  lui  et  d'autres  gouverneurs  de 
la  Judée,  mais  procurator,  dont  l'équivalent  grec  était 
i-'Tfj-o;.  Voir  Tacite,  Ann.,  xv,  44;  Philon,  Légat,  ad 
C(^ium.  xxxvm;  Josèphe,  Bell,  jud.,  II,  ix,  2.  Avant  lui 
à  partir  de  la  déposition  d'Archélaiis,  par  Auguste,  l'an  6 
de  notre  ère,  quatre  procurateurs  s'étaient  succédé  en 
Judée  et  en  Samarie,  —  car  leur  juridiction  s'étendait 
aussi  à  cette  seconde  province.  C'étaient  :  Coponius 
(6-9  après  J.-C.),  Jlarcus  Ambivius  (9-12),  Annius  Rufus 
(12-15),  Valerius  Gratus  (15-26).  Il  fut  donc  le  cinquième, 
et  il  exerça  ses  fonctions  entre  les  années  26  et  36  de 
l'ère  chrétienne  ;  par  conséquent  pendant  dix  ans, 
comme  le  dit  Josèphe  en  termes  exprès,  Anl.  jud., 
XVIII,  iv,  2.  Il  entra  en  fonction  la  douzième  année  de 
Tibère.  Eusèbe,  H.  E.,  i,  9,  t.  xx,  col.  107,  laquelle 
correspond,  non  pas  à  l'an  27  après  J.-C,  comme  on  l'a 
dit  parfois,  mais  à  l'an  26.  Cf.  Euald,  Geschichte  Christi 
und  seiner  Zeit,  in-8",  2"  édit.,  Gœttingue,  1S57,  p.  36; 
T.  Keim,  Geschichte  Jesu  von  Nazara,  in-8",  1. 1,  Zurich, 
1867  ;  E.  Schùrer,  Geschichte  des  jùdischen  Yolkes,  in-8°, 


4  édit.,  Leipzig,  1904.  p.  487;  pour  l'an  27,  J.  Celser 
Geschichte  des  Leideus  und  Slerbens  des  Herrn,  in-8", 
Eribourg-en-Brisgau,  1903,  p.  332.  Le  gouvernement  de 
Pilate  eut  donc,  comme  celui  de  Valerius  Gratus,  une 
assez  longue  durée,  et  c'est  uniquement  sous  le  rècne 
de  Tibère  qu'il  fut  exercé.  Or,  Tacite,  Ann.,  I,  80;  iv, 
6,  et  Josèphe,  Ant.  jud.,  XVIII,  VI,  5,  font  remarquer 
que,  par  principe,  ce  monarque  laissait  longtemps  ses 
magistrats  en  fonction  dans  les  provinces. 

3"  Caractère  général  et  quelques  épisodes  de  son 
administration.  —  Ce  qu'en  racontent  les  auteurs  sa- 
crés et  profanes  montre,  d'un  coté,  à  quel  point  était 
pénible  et  difficile,  à  cette  époque,  la  tâche  d'un  gou- 
verneur de  Judée,  et,  d'un  autre  coté,  combien  Pilate 
fit  peu  d'ellorts  pour  rendre  son  administration  conci- 
liante à  l'égard  des  Juifs.  La  lettre  d' Agrippa  à  Caligula, 
citée  par  Philon  dans  sa  Legatio  ad  Caium,  xxxvm. 
trace  de  lui  un  portrait  peu  flatteur,  dans  lequel  il  y  a 
certainement  quelque  exagération,  puisqu'il  provient 
d'un  ennemi  juré,  mais  dont  l'histoire  ne  constate  que 
trop  bien  l'exactilude  générale.  Cette  lettre  dit  de  lui 
qu'il  était  «  intlexible  de  caractère  et  dur  avec  arro- 
gance ».  Elle  lui  reproche  :<  la  corruption,  les  vio- 
lences, la  rapine,  les  mauvais  traitements,  les  vexations, 
de  perpétuelles  exécutions  sans  jugement  préalable,  des 
cruautés  sans  nombre  et  insupportables  ».  Détestant 
les  Juifs  et  ne  comprenant  rien  à  leur  tempérament  ni 
à  leurs  sentiments  religieux,  il  prétendit  les  gouverner 
d'après  sa  propre  volonté,  et  les  faire  fléchir  en  tout  et 
malgré  tout.  .Mais,  aussi  faible  et  irrésolu  par  moments 
qu'il  était  d'ordinaire  intraitable,  il  contribuait  lui- 
même  à  amoindrir  son  autorité;  aussi  fut-il  vaincu  à 
plusieurs  reprises  par  ceux  dont  il  croyait  pouvoir  aisé- 
ment triompher,  et  il  finit  même  par  être  tout  à  fait 
brisé  par  eux.  Son  opiniâtreté  et  sa  maladresse  occa- 
sionnèrent plus  d'une  fois  des  mouvements  de  rébel- 
lion, qu'il  dut  ensuite  étouffer  dans  le  sang. 

Dés  les  premiers  mois  qui  suivirent  son  installation, 
il  froissa  jusqu'au  vif  les  habitants  de  Jérusalem,  et 
tous  les  Juifs  de  Judée  par  là  même.  Ses  prédécesseurs, 
fidèles  à  la  politique  d'après  laquelle  Rome  accordait 
habituellement  une  grande  liberté  aux  provinces  con- 
quises, lorsqu'il  ne  s'agissait  que  de  leurs  affaires  in- 
térieures, s'étaient  montrés  fort  accommodants  sur 
certains  points  qui  touchaient  aux  idées  religieuses  des 
Juifs.  C'est  ainsi  qu'ils  avaient  fait  enlever,  sur  les  éten- 
dards du  détachement  militaire  qui  tenait  garnison  à 
Jérusalem,  toutes  les  images  et  effigies  qui  présen- 
taient un  caractère  idolàtrique.  Pilate,  au  contraire, 
\oulut  que  les  soldats  envoyés  par  lui  dans  la  ville 
sainte  y  entrassent  avec  leurs  enseignes  munies  de 
tous  leurs  emblèmes.  Il  ne  prit  d'autre  précaution  que 
de  faire  pénétrer  hommes  et  drapeaux  pendant  la  nuit. 
La  colère  des  Juifs  fut  grande,  lorsqu'ils  s'aperçurent, 
le  lendemain  matin,  de  l'outrage  qui  leur  avait  été  fait. 
En  nombre  considérable  ils  se  rendirent  à  Césarée,  où 
le  procurateur  avait  sa  résidence  ordinaire,  et,  pendant 
cinq  jours,  ils  protestèrent  avec  une  telle  énergie,  que 
Pilate,  qui  avait  d'abord  pris  le  paiti  de  les  faire  mas- 
sacrer, dut  céder,  en  voyant  qu'ils  étaient  prêts  à 
mourir  tous,  plutôt  que  de  supporter  cet  affront.  Cf. 
Josèphe,  Ant.  jud.,  XVIII.  m,  1-2;  Bell,  jud.,  II,  ix, 
2-4.  —  Plus  tard,  malgré  cette  leçon  humiliante,  il 
commit  une  faute  toute  semblable,  en  faisant  suspendre 
dans  le  palais  qui  lui  servait  d'habitation  lorsqu'il  sé- 
journait à  Jérusalem,  des  boucliers  d'or  dédiés  à  Tibère 
et  munis  aussi  d'inscriptions  ou  de  symboles  idolà- 
triques.  Une  insurrection  faillit  éclater.  Averti  par  les 
Juifs,  l'empereur  ordonna  lui-même  d'enlever  au  plus 
tôt  la  cause  du  désordre.  Voir  Philon,  Légat,  ad 
Caium,  xxxvm,  édit.  Mangey,  t.  n,  p.  590;  Eusèbe 
H.  E.,  n,  6,  t.  xx,  col.  154.  —  Plus  tard  encore,  Pilate 
se  permit  de  puiser  dans  le  trésor  sacré  du  temple  de 


431 


P1LATE   (PONCE 


432 


Jérusalem,  sous  prétexte  de  se  procurer  ainsi  les  fonds 
nécessaires  pour  construire  un  aqueduc  grandiose,  qui 
amènerait  dans  la  capitale  l'eau  des  réservoirs  de  Sa- 
lomon,  situés  à  environ  15  kilomètres  au  sud-ouest  de 
Bethléhem.  Des  troubles  violents  s'ensuivirent  et  le 
sang  coula  encore  abondamment.  Cf.  Joséplie,  Anl. 
jud.,  XVIII.  m.  i:  Bell.jud.,  II.  ix.  i:  Eusèbe,  H.  E., 
II.  vi,  6-7.  t.  xx.  col.  114;  E.  Schûrer,  Geschichte  îles 
iûd.  VoUtes,  i   édit.,  t.  i.  p.  490491. 

Saint  Luc,  xin,  1,  signale  brièvement  un  épisode 
également  tragique  de  l'administration  de  Pilate  :  Il 
y  avait  là  (près  de  Jésus,  à  certain  jour  de  sa  vie  pu- 
blique) quelques  hommes  qui  lui  annoncèrent  ce  qui 
était  arrivé  aux  Galïléens,  dont  Pilate  avait  mêlé  le  sang 
avec  celui  de  leurs  sacrifices,  s  Nous  ne  connaissons 
cet  incident  que  par  le  récit  du  troisième  Évangile:  mais 
il  est  en  parfaite  harmonie  avec  la  conduite  habituelle 
de  Pilate,  comme  aussi  avec  le  caractère  belliqueux 
des  Galiléens,  qu'on  était  sùr  de  trouver  parmi  les 
Zélotes  les  plus  exaltés,  les  plus  remuants.  CF.  Jos 
Anl.  jud.,  XVIII.  ix.  3.  etc.  Il  s'agit  sans  doute  d'une 
tentative  de  révolte,  qui  fut  aussitôt  réprimée  par  le 
gouverneur  avec  une  implacable  sévérité.  Les  rebelles 
furent  assaillis  par  les  soldats  de  Pilate  et  égorgés  dans 
les  parvis  mêmes  du  temple,  au  moment  où  les  prêtres 
immolaient  les  animaux  que  ces  malheureux  offraient 
en  sacrifice,  de  sorte  que  leur  propre  sang  se  mêla  à 
celui  de  leurs  victimes. 

4»  Son  rôle  dans  la  passion  du  Sam  sur  est  fort  bien 
résumé  dans  ces  mots  de  Tacite,  .4/t».,  xv,  44  :  '.'/'■ 
Tiberio  imperitanle,  per  procuratorem  Pontium  /,- 
lalum  tupplicio  adfectus  fixerai.  Malgré  la  parole  si 
miséricordieuse  et  si  délicate  de  la  divine  victime  : 
«  Celui  qui  m'a  livré  à  toi  commet  un  plus  grand 
péché,  >  .loa..  xix.  11.  Pilate  demeure  à  tout  jamais 
couvert  d'infamie  par  l'attitude  lâche,  égoïste,  inique 
qu'il  prit  à  l'égard  île  Jésus-Christ,  en  n'osant  pas  ré- 
sister jusqu'au  bout  au  fanatisme  cruel  des  Juifs.  Tou- 
tefois,  dans  le  Credo,  les  mots  Passus  sub  l'ontio 
Pilato  ont  été  insérés,  moins  pour  mettre  en  relief 
l'odieuse  injustice  du  procurateur,  que  pour  fixer  la  date 
officielle  Je  la  mort  de  .bsus-Christ,  et  pour  montrer, 
par  là-même,  que  le  christianisme  repose  sur  une  base 
historique  certaine.  Cf.  s.  Augustin.  De  foie  et  sym- 
bolo,  c.  v.  t.  xl,  col.  187. 

Les  membres  du  Sanhédrin,  privés  par  Rome  du  jus 
gladii,et  n'ayant  pas  le  droit  d'exécuter  la  sentence  île 
mort  qu'ils  avaient  portée  contre  Jésus,  conduisirent 
Notre-Seigneur  au  prétoire,  pour  obtenir  du  procura- 
teur la  ral.'i  nent.  C'est  donc  devant 
le  tribunal  de  Pilate  que  se  passa  la  seconde  partie  du 
procès  du  Sauveur,  celle  qu'on  nomme  le  procès  civil, 
par  opposition  au  procès  ecclésiastique,  qui  avait  eu 
lieu  chez  Caïphe.  Pilate  se  trouvait  alors  à  I  Srusalem,  à 
l'occasion  de  la  fête  de  la  Pàque,  selon  la  coutume  des 
gouverneurs  romains,  pour  prévenir  par  sa  présence, 
et  au  besoin  pour  châtier  aussitôt  le  moindre  mouve- 
ment insurrectionnel.  Sa  conduite  en  cette  circonstance 
s  ilennelle,  assez  brièvement  esquissée  par  saint  Mat- 
thieu, xxvii,  1-25,  el  par  saint  Marc,  xv,  1-15,  <■<!  dé- 
crite d'une  manière  plus  complète,  au  point  de  vue 
psychologique,  soit  par  saint  Lue.  XXIII,  I-i">.  soit  sur- 
tout par  saint  Jean.  xvm.  28-xix,  16,  dont  l'admirable 
analyse  jette  de  vives  clartés  sur  les  narrations  des 
synoptiques.  Voir  .1.  Belser,  Geschichte  des  l 
des  Berrn,  p.  337-338:  L.-C.l.   l'illion.    Évangilt 

Luc,  introd.  critique  et  corn,:,'  ntaires,  Paris, 
1882,  p.  381-388;  Écant/ilc  selon  saint  Jean,  introd. 
critiq.  et  commentaires.  Paris.  1887,  p.  335-349.  I..' 
quatrième  Évangile  nous  rend  vraiment  témoins  de  ce 
drame  auguste  et  douloureux,  partageant  le  mil  en 
petites  scènes  très  vivantes,  qui  nous  fonl  eonti  tnpler 
Pilate,   tantôt   faisant   l'interrogatoire   de   Jésus   dans 


l'intérieur  du  prétoire,  tantôt  discutant  avec  les  Juifs, 
qui  étaient  demeurés  en  dehors.  Les  réflexions  de  l'évan- 
géliste  et  celles  du  gouverneur  nous  permettent  de  lire 
jusqu'au  fond  de  l'âme  de  ce  dernier. 

Le  procurateur  ne  pouvait  guère  ne  pas  connaître, 
au  moins  de  nom  et  depuis  quelque  temps.  Jésus-Christ, 
qui  avait  excité  une  si  vive  émotion  dans  Jérusalem 
durant  les  derniers  jours.  Quoi  qu'il  en  soit,  les  évan- 
gélistes  sont  unanimes  à  affirmer  que.  malgré  la  gravité 
des  crimes  reprochés  à  l'accusé  par  les  princes  des 
prêtres,  Pilate  fut  promptement  convaincu  de  sa  par- 
faite innocence.  Dis  le  premier  instant,  il  avait  percé 
à  jour  la  futilité  de  leurs  accusations,  et  reconnu  qu'ils 
le  lui  avaient  livré  ■  par  jalousie  •>,  par  haine.  Cf. 
Matth.,  xxvii.  IS;  .Marc.  xv.  10.  Aussi  refusa-t-il  long- 
temps  d'acquiescer  à  leur  demande,  dont  l'injustice 
•'•tait  flagrante.  Cf.  Matth.,  xxvn.  23-24;  Luc.  xxm.  S. 
II.  -J-2;  .loa..  xvm.  38;  xix,  4,  6.  Le  récil  sacré  nous  le 
présente  même  comme  prenant  un  grand  intéi 
Jésus,  d'abord  à  cause  de  son  majestueux  silence, 
Matth.,  xxvn.  Il;  .Marc.  xv.  4-5,  puis  à  cause  de  ses 
graves  et  sublimes  réponses.  Lue.,  xxm,  3;  Joa..  xvm. 
33-38;  xxix.  9-11.  De  là  ses  efforts  multipliés  pour  le 
sauver  :  il  proclame  plusieurs  fois  et  hautement  son 
innocence  (voir  ci-dessus);  il  le  renvoie  à  llérode.  qui. 
lui  non  plus,  ne  le  trouve  pas  coupable,  Luc.  xxm. 
6-15:  il  propose  de  le  faire  flageller,  pour  apitoyer  le 
peuple.  Luc.  xxm.  lli;  il  essaie  d'user  du  droit  de 
grâce  en  sa  faveur.  Matth.,  xxvn.  15-23;  Marc,  xv.0-15; 
Luc,  xxm.  17--25;  Joa.,  xvm,  39-40;  il  le  montre  i  la 
foule,  couronné  d'épines  il  tout  ensanglanté,  loa..  xix, 
i  ■  :  enfin,  il  dégage  sa  responsabilité  par  un  acti 
bolique.  Matth..  xxvn.  -21. 
Les  Évangélistes    mettent  ainsi  i    nu  sa  conscience 

ssionnée,  qu'ébranlait,  mais  trop  superficielle- 
ment, le  désir  d'arracher  a  la  mort  ce  juste,  qui  ne 
ressemblait  a  au. -un  des  accusés  conduits  jusque-là 
devant  son  tribunal.  -  uperstitieuse,  quoique 

incrédule,  fui    toul  particulièremenl  frappée,  lorsqu'il 
entendit  les  Juifs  reprocher  à  Je  tre  fait  Fils 

de  Dieu.  Joa..  xix.  7.  Il  craignait  que  Ni  ■urne 

fût  quelque  dieu  ou   demi-dieu  de  la  mythologie,  aux 
i    pi  i- ailles    duquel    il    redoutait  de    s'exposer.   Aussi 
s'empressa-t-il  de  le  questionner  sur  son  origine 
es  tu?  La   réponse   de  Jésus  le  rassura.  Cf.    Joa..   xix. 
9-12. 

Finalement  il  céda,  «  pour  donner  satisfaction  au 
peuple,  d  Marc,  xv.  l5;o  il  livra  Jésus)  à  leur  volonté,  i 
Luc.  xxm.  24,  surtout  lorsque  les  Juifs  l'eurent  me- 
nacé très  ouverlt.Mii  -ut  de  la  disgrâce  de  César.  Joa.. 
xix.  12.  Il  monta  donc  sur  son  tribunal  et  proclama  la 
sentence  du  Sauveur.  Joa., xrx.  15.  11  avait  mis  à  profit 
1"^  rudes  lei  onB  que  lui  avaient  donn  -  Juifs.  Pour 

ce  magistral  égoïsl  .  sans  principes  moraux,  guidé 
seulement  par  les  considérations  mondaines  et  poli- 
tiques, qu'étaient  les  droits  les  plus  sacrés  d'un  inno- 
cent, dès  lors  que  son  intérèl  personnel  était  en 
La  conservation  de  son  emploi  si  lucratif  et  <i  hono- 
rable l'emportait  sur  tout  le  reste.  C'est  ainsi  que.  mal- 

a  vaine  protestation,  il  prit  une  très  grande  pari 
an  crime  le  plus  affreux  qu'aient  jamais  enregistré  les 
annales  de  l'histoire.  Les  Constitutions  apostoliques,  v. 

14,  t.  t,  col.  877,  lui  iv] Iinil   ,i  bon  droit  sa  ! 

(ivavSpia).  Quant  à  la  question  célèbre  qu'il  adres 

;i.  Qu'est-ce  que  la  vérité'.'  Joa..  xvm.  38, 
c'était  simplement  la  parole  d'un  dilettante,  d'un  scep- 
tique, qui  regardait  la  vérité  comme  une  chose  indill'é- 
i  comme  un  mot  sans  portée.  Aussi  n'attendit-il 
pas  la  réponse  de  Jésus.  —  Semblable  à  lui-même 
jusqu'au  boni,  après  avoir  été  battu,  celle  fois  encore, 
par  les  Juifs,  il  les  traita  avec  dédain,  en  refusant  opi- 
niâtrémenl  de  modifier  l'inscription  qu'il  avait  fait 
placer  au-dessus    de    la  [croix.   Joa..   xix.    19-22,   et    en 


433 


PILATE    (PONCE)    —    PILATE    (FEMME   DE) 


434 


permettant  à  Joseph  d'Arimathie  de  donner  au  corps 
sacré  de  Notre-Seigneur  une  sépulture  honorable.  Cf. 
Luc,  xxiii,  50-52;  Joa.,  xix,  38. 

5"  Sa  révocation  et  sa  mort.  —  Un  dernier  acte  de 
cruauté,  dont  Josèphe,  Ant.  jud.,  XVIII,  iv,  1-2,  nous 
a  conservé  les  détails,  ne  tarda  pas  à  renverser  les 
calculs  de  cet  homme  politique  et  à  amener  sa  chute. 
Un  certain  nombre  de  Samaritains,  séduits  par  un  im- 
posteur, s'étant  mis  à  faire  des  fouilles  sur  le  mont 
Garizim,  prés  de  Sichem,  dans  l'espoir  d'y  trouver  des 
vases  sacrés  que  Moïse  y  aurait  cachés  avant  sa  mort, 
le  gouverneur  les  fit  massacrersans  pitié.  Leurs  parents 
et  amis,  exaspérés,  allèrent  se  plaindre  à  Vitellius,  qui 
était  alors  légat  de  Syrie.  Celui-ci.  voyant  que  Pilate 
était  devenu  insupportable  à  ses  administrés,  l'envoya 
à  Rome  pour  qu'il  essayât  de  se  justifier  devant  l'empe- 
reur; mais  il  n'arriva  qu'après  la  mort  de  Tibère. 

Les  derniers  faits  de  sa  vie  sont  enveloppés  d'ombre 
et  de  mystère  ;  du  reste,  ils  furent  de  bonne  heure 
défigurés  par  la  légende.  On  ignore  même  en  quel  lieu 
et  de  quelle  manière  il  mourut.  Suivant  Eusèbe,  II.  E., 
II,  vu,  t.  x.v,  col.  155,  et  Chronicon,  Ve  année  de  Caïus, 
t.  xix,  col.  538,  il  aurait  été  banni  à  Vienne  dans  les 
Gaules.  Oï'i.  accablé  par  l'infortune,  il  aurait  péri  de  sa 
propre  main.  Voir  aussi  le  Chronicon  paschale,  t.  xcn, 
col.  557-559,  et  Orose,  Hist.,  vu,  5,  t.  xxxi.  col.  1071. 
On  voit  encore  dans  cette  ville  un  monument  de  forme 
singulière,  une  pyramide  sur  une  base  carrée,  qu'on 
nomme  le  «  tombeau  de  Pilate  »,  mais  qui  n'a  rien 
pour  justifier  ce  titre.  Le  nom  de  Pilate,  que  porte  une 
montagne  voisine  de  la  ville  de  Saint-Étienne,  se  rat- 
tache sans  doute  aussi  à  ce  souvenir.  D'après  l'histo- 
rien grec  Malalas,  Chronographia,  x,  t.  xcvn,  col.  390, 
Pilate  aurait  été  décapité  par  Néron.  Comp.  Jean  J'An- 
tioche,  dans  Mûller,  Fragmenta  hisloricorum  grœco- 
j-uni,  t.  iv,  p.  574,  édit.  Didot,  et  Suidas,  au  mot  Nijuv. 
Il  semble  du  moins  probable  qu'en  toute  hypothèse  il 
mourut  de  mort  violente.  Voir  E.  Sehûrer,  Geschichte 
des  jud.  Volkes,  4e  édit.,  t.  i,  p.  493-494.  On  trouve  de 
curieux  détails  sur  ses  derniers  moments  dans  le  traité 
apocryphe  Mors  Pilati.  Cf.  Fabricius.  Apocryph.,  t.  m, 
p.  505;  Thilo,  Codex  apocryph.  Novi  Testam.,  1832, 
t.  I,  p.  796-798  :  Tischendorf,  Evangelia  apocrypha, 
1"  édit.,  1851,  p.  132-135;  2-  édit.,  1876,  p.  456-458. 
Plus  tard,  la  légende  continua  à  se  développer.  Jeté  à 
Rome  dans  le  Tibre,  le  cadavre  de  Pilate  y  aurait  occa- 
sionné des  tempêtes  et  des  inondations.  Dans  le  Rhône, 
où  on  l'emporta  ensuite,  les  mêmes  phénomènes  terri- 
bles se  reproduisirent.  Enfin,  on  le  précipita  dans  un 
petit  lac,  situé  près  de  Lucerne,  au  sommet  du  mont 
Pilate,  dont  le  nom  viendrait  précisément  de  cet  épi- 
sode. Ou  bien,  après  avoir  erré  au  loin,  poursuivi  par 
le  remords,  l'ancien  procurateur  serait  allé  de  lui-même 
cacher  son  infortune  sur  cette  cime  gigantesque,  et 
aurait  fini  par  se  noyer  de  désespoir  dans  le  lac  qu'on 
y  voit  encore.  Cf.  A.  Liitolf,  Sagen,  Braûche  und  Le- 
genden  an  den  fûnf  Orten,  Lucerne,  1865;  Creizenach. 
Pilatus-Legenden,  1894;  James,  Apocrypha  anecdota, 
dans  les  Texls  and  Studies,  édités  par  Robinson.  t.  v, 
fasc.  i,  1897,  p.   xlv-l,  65-81. 

Fait  surprenant  :  cette  triste  figure  a  excité  de  bonne 
heure  une  certaine  sympathie.  Il  est  vrai  que  c'était  à 
une  époque  où  l'on  aimait  a  disculper  Pilate  et  les  Ro- 
mains, pour  aggraver  le  crime  des  Juifs  déicides.  Comp. 
l'Evangel.  Pétri,  dans  E.  Preuschen,  Antilcgomena, 
die  Reste  der  ausserkanonischen  Euangelien,  Giessen, 
1901,  in-12,  p.  13-18.  C'est  ainsi  que,  d'après  la  Para- 
dosis  Pilati,  le  gouverneur,  condamné  à  mort  par 
Tibère  et  sur  le  point  d'être  exécuté,  conjure  Notre- 
Seigneur  de  ne  pas  permettre  qu'il  soit  châtié  avec 
les  Juifs,  et  allègue  son  ignorance  pour  excuser  en 
partie  sa  conduite.  Une  voix  lui  répond  du  ciel,  et 
l'assure  que    toutes  les   générations    le  proclameront 


bienheureux,  et  qu'il  sera  un  témoin  du  Christ  lors  de 
son  second  avènement,  pour  juger  avec  lui  les  douze 
tribus  d'Israël.  Voir  Tischendorf,  Evang.  apocr.,  p. 426- 
431.  Les  Abyssins  vont  même  jusqu'à  l'honorer  comme 
un  martyr,  et  célèbrent  sa  fête  le  25  juin.  Cf.  Stanley, 
Lectures  on  the  History  of  the  Eastern  Church,  in-8", 
Londres,  1S65,  3e  édit.,  p.  13.  Le  mot  de  Tertullien  au 
sujet  de  Pilate,  jam  pro  sua  conscientia  christianus, 
Apolog.,  21,  t.  i,  col.  12,  provient  d'un  sentiment  ana- 
logue, qu'on  retrouve  dans  l'évangile  de  Nicodème,  i,  2, 
où  Pilate  est  désigné  comme  «  incirconcis  dans  la  chair, 
mais  circoncis  de  cœur  ...  Voir  Tischendorf,  Evang. 
apocr.,  p.  236;  Origène,  Hom.  in  Matth.,  xxxv,  t.  XIII, 
col.  1773.  On  savait  gré  au  gouverneur  de  la  Judée  des 
tentatives,  pourtant  si  molles,  qu'il  avait  faites  pour 
arracher  Jésus-Christ  à  la  mort. 

6°  Bibliographie.  —  Karl  Hase,  Leben  Jesu,  5e  édit., 
in-12,  Leipzig,  1865,  p.  248-219,  cite  une  littérature 
considérable  composée  sur  Pilate.  Voir  aussi  Ehrhard, 
Die  altchrislliche  Litieratur  und  ihre  Erforschung 
von  lSSj-1900,  Impartie,  p.  114-146.  Parmi  les  livres 
les  plus  récents,  voir  J.  Langen,  Die  letzten  Lebenstage 
Jesu,  in-S»,  Fribourg-en-Brisgau,  1864,  p.  261-291  ; 
Mommsen,  Rômische  Geschichte,  in-S»,  t.  v,  4"  édit., 
Berlin.  1891,  p.  508  sq.  ;  P.  Waltjer,  Pilatus,  eene 
Studie,  in-8«,  Amsterdam,  1888;  G.  A.  Mûller,  Pontius 
Pilatus,  der  fïinfle  Procurator  von  Jadda,  Stuttgart, 
1888;  Gr.itz,  historien  juif,  Geschichte  der  Juden,  t.  m, 
p.  253-271;  A.  E.  Innés,  The  Trial  oj  Jésus  Christ,  a 
légal  monograpli,  Edimbourg,  1899,  in-S°,  p.  61-123; 
E.  Sehûrer,  Gesch.  des  jûdischen  Volkes  iin  Zeitalter 
Christi,  in-S",  t.  i,  4e  édit.,  Leipzig,  1904,  p.  187-492; 
J.  Belser,  Die  Geschichte  des  Leidens  nnd  Sterbens, 
der  Auferstehung  und  Himnielfahrt  des  Herrn,  in-S", 
Fribourg-en-Brisgau,  1903,  p.  323-339,  346-372. 

L.    FlLLION. 

2.  pilate  (actes  de),  livre  apocryphe  Voir  Évan- 
giles APOCRYPHES,  t.  II,  COl.  2116. 

3.  PILATE  (FEMME  DE).  —  Elle  n'est  mentionnée 
dans  les  Évangiles  que  par  saint  Matthieu,  xxvn,  19  : 
,<  Pendant  qu'il  (Pilate)  était  sur  son  tribunal,. sa  femme 
lui  envoya  dire  :  Qu'il  n'y  ait  rien  entre  toi  et  ce  juste 
(Jésus-Christ),  car  j'ai  beaucoup  souffert  aujourd'hui  en 
songea  son  sujet.  »  A  part  ce  trait  touchant,  qui  inani 
feste  tout  ensemble  une  vive  et  respectueuse  sympathie 
pour  le  Sauveur,  et  la  crainte  que  son  mari  ne  s'em- 
barrassât dans  de  graves  difficultés,  s'il  ne  se  dégageait 
immédiatement  de  ce  procès,  nous  ne  savons  rien  de 
bien  certain  sur  elle.  —  Une  ancienne  tradition  l'appelle 
Procla,  IlpôxXs,  ou  Claudia  Procula,  et  fait  d'elle  une 
femme  pieuse,  bien  plus,  une  «  prosélyte  de  la  porte  ». 
Voir  Prosélyte.  Dans  l'Évangile  de  Nicodème,  chap.  H, 
Pilate  dit  d'elle  :  Ososepï).;  ii-i  y.où  [/.SXXov  îouSaftei. 
Cf.  Thilo,  Codex  apocryph.  Novi  Testam.,  in-8",  1832, 
t.  i,  p.  523;  Tischendorf,  Evangelia  apocrypha,  in-8°, 
Leipzig,  1851,  p.  332;  Nicéphore,  Historiée,  i,  30,  t.  cxlv, 
col.  720.  Or,  nous  savons  par  Josèphe.  Ant.,  XVIII,  m, 
5;  Bell,  jud.,  xx,  2,  et  par  Juvénal,  Sat.,  VI,  543,  que 
les  femmes  romaines,  même  celles  qui  appartenaient 
aux  classes  supérieures,  étaient  attirées  par  la  religion 
judaïque,  qui  parlait  beaucoup  plus  à  leur  àme  que  le 
paganisme  si  vide  d'alors.  Il  est  probable  que  la  femme 
du  procurateur  avait  entendu  parler  de  Notre-Seigneur. 
et  qu'elle  avait  conçu  une  grande  admiration  pour  sa 
conduite  et  son  enseignement. 

Les  interprètes  discutent  sur  la  nature  du  songe  au- 
quel fait  allusion  son  message  à  Pilate.  Plusieurs  au- 
teurs contemporains  le  regardent  comme  un  fait  pure- 
ment naturel,  provoqué  par  l'arrestation  et  le  procès 
ecclésiastique  de  Jésus,  dont  elle  aurait  été  informée 
avant  de  s'endormir.  Voir  Langen,  Die  letzten  Lebens- 
tage Jesu,  in-8»,  Fribourg-en-Brisgau,  1864,  p.  271-275- 


435 


PILATE    (FEMME   DE)    —   PIN 


436 


Mais  nous  croyons,  à  la  suite  des  Pères  et  de  la  grande 
majorité  des  commentateurs,  qu'il  est  difficile  de  ne 
pas  reconnaître  à  ce  songe  un  caractère  non  seulement 
providentiel,  mais  vraiment  surnaturel.  Toutefois,  les 
anciens  écrivains  ecclésiastiques  n'apprécient  pas  tous 
de  la  même  manière  cette  intervention  surnaturelle. 
Il  en  est  qui  l'attribuent  au  démon.  La  plupart  des 
exégètes  lui  donnent  une  origine  céleste.  Voir  Origène, 
lin, ii.  in  Matlli.,  xxxv,  t.  xin,  col.  1773;  S.  Jean  Chry- 
sostome,  Hom.  lxxxvi  in  ilatlh.,  1,  t.  lviii,  col.  764; 
Schanz,  Commenter  ûber  das  Evangel.  des  lieilig. 
Matthâus.  in-8f,  Fribourg-en-Brisgau,  1879,  p.  510; 
M«r  Le  Camus,  La  vie  de  N.-S.  Jésus-Christ,  2'  édil .. 
in-8°,  t.  m,  Paris,  1887.  p.  315. 

On  a  essayé,  il  est  vrai,  d'attaquer  la  valeur  histo- 
rique de  cet  épisode,  en  rappelant  la  loi  romaine  qui 
interdisait  aux  proconsuls,  et  aussi  aux  autres  magis- 
trats délégués  dans  les  provinces,  de  se  faire  accompa- 
guer  par  leurs  femmes;  mais  cette  loi.  observée  avec 
rigueur  sous  la  république,  tomba  en  désuétude  à 
l'époque  de  l'empire,  comme  nous  l'apprennent  for- 
mellement Tacite,  Ann.,  m,  33-3i,  et  Suétone,  .4»- 
gust.,  2i.  Voir  aussi  Joséphe,  Aut.,  XX.  x.  1;  L'Ipien, 
iv,  2. 

D'après  une  tradition  qui  remonte  au  moins  jusqu'au 
temps  d'Origènc.  a  femme  de  Pilate  aurait  été  récom- 
pensée de  son  dévouement  pour  Notre-Seigneur  en 
acceptant  la  foi  chrétienne.  Voir  Origène,  Hom.  in 
Matth.,  xxxv.  I.  xiii,  col.  1773.  et  les  lettres  apocryphes 
qu'auraient  échangées  Pilate  et  Hérode.  dans  M.  H.  .la- 
mes, Apocrypha  anecdota,  2e  série,  Cambridge,  1897, 
in-8°,  p.  66-75.  Le  inénologe  grec  va  même  jusqu'à  la 
ranger  parmi  les  saints  et  place  sa  fête  le  27  octobre. 
Cf.  Calmet,  Diction»,  de  la  Bible,  au  mot  Procla, 
éilit.  Migne,  t.  m,  col.  1268.  L.  Fillion. 

PILON  (hébreu  :  èli;  Vulgate  :  pilus),  masse  de 
bois,  de  métal  (fig.  84)  ou  de  pierre  (lig.  85)  destinée  à 


un  mortier,  comme  on  broie  le  grain,  avec  le  pilon,  sa 


85.  —  Pierres  de  quartz  pour  piler  le  grain,  trouvées  à  Tell- 
Yehudiyéh  (XYII1*  dynastie).  D'après  W.  M.  Flinders  Pétrie, 
Hyksos  and  Israélite  Cities,  in-4\  Londres,  1906,  pi.  xv  et 
p.  17. 

folie  ne  se  séparera  pas  de  lui,  »  comme  l'huile  se  sé- 
pare des  olives.  11.  LeSETRE. 

PIN  (hébreu  :  'orén;  Septante  :  -éru;;  Vulgate  : 
pinus),  arbre  vert  assez  abondant  en  Palestine. 

1.  Description.  —  Les  arbres  résineux  de  la  famille 
des  Conifères  doivent  ce  nom  à  leur  appareil  fructifère 
ou  cône  formé  d'écaillés  servant  à  protéger  les  graines. 
Mais  entre  tous  leurs  congénères  les  Pins  se  distinguent 
par  la  forme  de  ces  écailles  pourvues  sur  le  dos  d'une 
proéminence  ou  apophyse.  Leur  feuillage  n'est  pas 
moins  caractéristique,  car  les  aiguilles  foliaires,  sur 
l'arbre    adulte,    sont    réunies    par   petits    groupes,    de 


81. 


Égyptiens  pilant  dans  un  mortier.  Tbèbes,  L'Inscription  porte  :  k  •■  Dépèchcz-vus  tous  à  l'ouvrage  en  prenant  soin 

de  tout  ce  qui  vous  est  donné;  faites  le  pain,  d  (  «  On  pile  le  grain  dans  les  greniers  de 

D'après  Wilkinson,  Mannert  of  ancien!  Egygtians,  2*  édit.,  t.  u,  p.  204. 


concasser  et  à  écraser  les  objets  placés  dans  un  mortier. 
Voir  Mortier,  i.  iv,  col.  1311.  —  La  manne  est  com- 
parée à  g  quelque  chose  de  menu  comme  des  grains  >', 

et,  d'après  la  Vulgate,  à  i  quelque  chose  d'écrasé  au 
pilon  ».  Exod.,  XVI,  14.  Les  grains  peuvent  être  écrasés 
au  pilon;  mais,  si  la  manne  se  prétait  au  travail  de  la 
meule  ou  du  pilon,  elle  n'apparaissait  pas  à  l'état  concassé 
quand  elle  tombait.  Voir  Manne,  t.  iv.  col.  657.  —  Les 
enfants  d'Israël  doivent  apporter,  pour  le  luminaire  du 
sanctuaire,  de  l'huile  d'olives  concassées  »,  Septante  : 
xexou.pivov,  «  martelées  »,  et  équivalemment,  d'après 
la  Vul-ale.  martelées  an  pilon  ».  Exod.,  XXVII,  20.  — 
I-'  mol  pilon  »  ne  se  lit  en  hébreu  que  dans  ce  texte 
des   Proverbes,   xxvn,   22  :  «  Qu'on  pile  l'insensé  dans 


deux  ordinairement, protégés  chacun  par  un  involucre 
de  folioles  scarieuses.  La  lloraison  a  lieu  au  printemps, 
au  lieu  d'être  automnale  comme  chez  les  Cèdres;  les 
fleurs  mâles  émettent  alors  en  extrême  abondance  la 
poussière  pollinique  qui  emportée  par  le  vent  simule 
une  pluie  de  soufre.  Les  cènes  mettent  parfois  3  ans 
avant  d'atteindre  leur  maturité'.  Il  en  est  ainsi,  par 
exemple,  dans  le  Pin-Pignon  [Pinus  l'inea  L.),  bel 
arbre  de  la  région  méditerranéenne  que  la  disposition 
étalée  'le  ses  branches  au  sommet  de  la  tige  a  fait  nom- 
mer aussi  Pin-Parasol.  Son  cène  esl  ovoïde  obtus  ne, 
îles  écailles  luisantes;  ses  g  rai  lies  de  viennent  des  a  mandes 
comestibles  el  volumineuses  revêtues  d'une  coque  noi- 
i  ilie,  très  dure,  à  aile  presque  nulle.  Le  Pin  d'Alep 


137 


PIN   —   PINACLE    DU   TEMPLE 


438 


P.  Halepensis  Miller  (fig.  86),  est  l'espèce  la  plus 
répandue  en  Svrie.  où  elle  remplace  le  Pin  maritime 
des  rivages  occidentaux:  ses  feuilles  sont  grêles  et 
tlexueuses  ;  ses  cônes,  plus  allongés  et  penchés  à 
l'extrémité  d'un  court  pédoncule,  mettent  2  ans  à  mûrir  : 


les  graines  petites,  couvertes  d'un  tégument  mou,  sont 
prolongées  en  aile  roussàtre.  Enfin  dans  la  région  éle- 
vée du  Liban  on  observe  un  Pin  très  voisin  du  précé- 
dent. P.  Brutia  Tenore,  distinct  toutefois  par  ses 
feuilles  plus  épaisses,  rigides,  ainsi  que  par  ses  cônes 
sessiles  non  pendants.  F.   llv. 

II.  Exégèse.  —  L'arbre  appelé  orén  n'est  mentionné 
qu'une  seule  fois  dans  la  Bible.  Is.,  xliv.  11.  dans  un 
;  ■  i_e  où  le  prophète  se  moque  de  l'idolâtre  qui  est  à 
la  recherche  de  bois  dont  il  prend  une  partie  pour  se 
tailler  des  idoles,  et  dont  il  brûle  le  reste. 

Un  homme  va  couper  des  cèdres, 

II  prend  des  rouvres  et  des  chênes. 

Il  fait  un  choix  parmi  les  arbres  de  la  foret 

Et  même  il  plante  le  'orén  que  la  pluie  fait  croître. 

Il  s'agit  d'un  arbre  dont  le  bois  est  bon  à  brûler  et 
peut  être  utilisé  pour  sculpter  des  idoles,  un  arbre 
qu'on  peut  mettre  en  parallèle  avec  le  cèdre  ou  le  chêne, 
qui  s'en  distingue  cependant  sous  certains  rapports. 
l.r  cèdre,  le  rouvre  et  le  chêne  sont  placés  ici  parmi 
les  arbres  des  forêts  qu'on  n'a  pas  besoin  de  planter  et 
qu'on  ne  cultive  pas.  Le  'orén  est  signalé  comme  un 
arbre  qu'on  plante,  mais  cependant  ce  n'est  pas  un  arbre 
qu'on  soigne  et  qu'on  arrose  selon  les  procédés  habi- 
tuels de  la  Palestine  pour  les  plantes  et  les  arbres  culti- 
vés. On  laisse  à  la  pluie  du  ciel  le  soin  de  l'arroser. 
Tous  ces  caractères  paraissent  bien  convenir  à  diverses 
espèces  de  pin  qu'on  rencontre  abondamment  en 
Palestine,  surtout  dans  les  terrains  sablonneux,  comme 
le  Pin  d'Alep,  l'inus  Halepensis,  le  Pin-Pignon  ou  Pa- 
lasol,  Pinus  Pinea,  et  le  Pinus  Brutia.  C'est  ainsi  du 
reste  que  l'entendent  les  Septante  et  la  Vulgate  qui 
traduisent  'orén  par  t.;.-.-j:.  et  pinus.  Bien  qu'il  y  ait 
grande  divergence  parmi  les  rabbins  sur  la  nature 
de  cet  arbre,  beaucoup  cependant  s'arrêtent  au  pin,  et 
l'identifient  avec  l'arbre  que  les  arabes  appellent  yiyï^o, 

snaubar,  et  qui  n'est  autre  que  le  pin;  ou  bien  ils  le 
rangent  dans  la  même  famille  que  les  arazim,  «  cèdres,  » 
et  les  beroSîm,  les  cyprès:  ce  qui  convient  bien  au  pin. 


Cependant  il  est  des  critiques  qui  croient  que  le  mot 
orén,  ]~s.  dont  le  nuit  final  n'est  pas  régulièrement 
formé  dans  les  anciens  manuscrits  et  pourrait  bien 
être  un  zaïn  mal  écrit,  n'est  autre  que  t-n.  'éréz,  le 
cèdre.  Ils  pensent  aussi  que  la  suite  logique  du  sens 
demande  qu'on  lise  à  rebours  les  stiques  de  ce  verset  : 
car  il  est  naturel  de  planter  le  cèdre  avant  de  le  couper. 
Ils  ont  ainsi  : 

On  a  planté  des  cèdres  et  la  pluie  les  fait  croitre, 
On  laisse  grandir  les  arbres  de  la  forêt, 
Puis  on  prend  le  rouvre  et  le  chêne, 
Et  l'on  coupe  les  cèdres. 

C'est  le  sens  auquel  s'arrête  A.  Condamin,  Le  livre 
d'haïe,  1905,  p.  269.  Cette  leçon  et  ces  transpositions  sont 
loin  toutefois  d'être  certaines,  et  pourraient  bien  n'être 
qu'une  interprétation  de  ce  passage,  inspirée  d'un  point 
de  vue  trop  subjectif.  Les  anciennes  versions  tiennent 
pour  un  mot  différent  de  'éréz,  c'est-à-dire  pour  'orén, 
«  pin.  »  Et  on  peut  trouver  une  suite  logique  à  la  pensée 
sans  rien  bouleverser.  L'idolâtre  cherche  d'abord  parmi 
les  arbres  des  forêts,  le  cèdre,  le  rouvre  et  le  chêne;  il 
en  vient  même  à  planter  des  pins  afin  d'avoir  du  bois 
à  sa  convenance  pour  se  tailler  des  idoles.  Rien  ne  pa- 
rait donc  exiger  de  transposition  ;  et  la  lecture  'orén  et 
sa  traduction  par  «  pin  »  sont  suffisamment  justifiées. 
Cette  traduction  d'ailleurs  trouve  une  certaine  confir- 
mation dans  un  texte  égyptien  du  Papyrus  Anaslasi, 
i,  19,  3.  Dans  une  description  d'un  site  de  Palestine, 

se  lit  le  nom  j  .  .  .     |     i    li,  anourna,  arrouna,  qui 

rappelle  l'hébreu  'orén,  pin.  Le  rapprochement  est 
d'autant  plus  vraisemblable  que  ce  mot  est  placé  entre 
deux  noms  de  conifères,  le  cyprès  et  le  cèdre,  et  que 
ces  trois  arbres  sont  dits  «  atteindre  jusqu'au  ciel  ». 
Tous  ces  caractères  semblent  bien  viser  le  pin-pinier. 
J.  Lauth,  dans  la  Zeilschrift  der  deutsch.  morgenlànd. 
Gesellsch.,  1871.  p.  620;  V.  Loret,  Études  de  botanique 
égyptienne,  dans  Becueil  de  travaux  relatifs  »  la 
philol.  et  archéol.  égijpt.,  in-i°,  1895,  p.  187. 

E.  Levesque. 
PINA  (Jean  de),  commentateur  espagnol,  né  à  Ma- 
drid en  1582,  mort  dans  la  même  ville  en  1657.  Entré 
au  noviciat  des  Jésuites  d'Alcala  en  1603,  il  remplit 
divers  offices  dans  son  Ordre.  Sou  volumineux  commen- 
taire sur  l'Ecclésiastique,  Commentariorum  m  Eccle- 
siasticum  tomi  quinque,  parut  à  Lyon  de  1638  à  1648, 
5  in-f».  On  y  rencontre  des  idées  élevées,  ingénieuses, 
des  aperçus  nouveaux,  mais  aussi  parfois  des  longueurs 
et  du  remplissage.  P.  Bliard. 

PINACLE  DU  TEMPLE,  partie  du  Temple  de 
Jérusalem  sur  laquelle  le  diable  transporta  Notre-Sei- 
gneur  pour  le  tenter.  Le  récit  de  la  tentation  est  le 
seul  endroit  du  Nouveau  Testament  où  nous  rencon- 
trons ce  terme  :  -h  tits^-j-j-iov  to-j  ispo-j,  pinnaeulum 
templi,  Mat  th.,  tv,  6;  pinna  templi,  Luc,  iv,  9.  IItbsûyiov 
est  le  diminutif  de  irrépyl,  «  aile  »,  comme  pinnacu- 
lum l'est  de  pinna,  qui  désigne  en  latin  une  grosse 
plume  d'oiseau,  ou  une  nageoire  de  poisson,  cf.  Lev., 
xi,  9,  10,  12;  Deut..  xiv.  9.  10,  ou  des  créneaux  de  mu- 
raille. Les  Septante  emploient  le  mot  Trtspuyov  —  1 .  pour 
traduire  l'hébreu  kânàf,  signifiant  la  partie  du  vête- 
ment, le  bord  qui  pend  comme  une  aile,  Num.,  xv,  38; 
Ruth.,  m,  9;  I  Sam.  (Reg.),  xv,  27;  xxiv,  5;  —  2.  l'hé- 
breu senappir,  désignant  l'aileron,  la  nageoire  des 
poissons,  Lev.,  xi.  9-12;  Deut.,  xiv,  9,  10;  —  3.  l'hébreu 
qàfâh,  qui  s'entend  de  o  l'extrémité  »  du  rational  ou 
pectoral.  —  Que  signifie  exactement  mépiiytoi  dans 
l'Évangile?  Tout  le  monde  reconnaît  qu'il  s'agit  d'un 
endroit  élevé,  ressemblant  en  quelque  manière  à  une 
aile  ou  à  une  pointe,  mais  on  ne  s'accorde  pas  sur  sa 
situation  précise.  Le  nom  étant  précédé  de  l'article  en 


439 


PINACLE   DU   TEMPLE    —   PINTO    RAMIREZ 


440 


grec,  il  en  résulte  que  la  partie  du  temple  désignée 
par  là  était  bien  connue  et  déterminée,  du  temps  de 
Jésus-Christ;  aujourd'hui  on  ne  peut  faire  que  des  con- 
jectures. Selon  les  uns,  le  pinacle  faisait  partie  de  la 
maison  de  Dieu,  ou  du  sanctuaire  proprement  dit; 
selon  les  autres,  il  était  dans  les  dépendances  du 
temple.  Les  partisans  de  cette  seconde  opinion  s'appuient 
sur  ce  que  le  sanctuaire  est  appelé  dans  le  .Nouveau 
Testament  6  vcedç  et  que  le  pinacle  est  appelé  pinacle  toû 
Upoû,  non  toû  vaoû.  Ceux  qui  soutiennent  la  première 
opinion  reconnaissent  que  le  mot  vad;  s'applique  ex- 
clusivement à  «  la  maison  de  Dieu  »,  mais  ils  allèguent 
que  le  mot  iepév,  quoiqu'il  puisse  s'entendre  quelquefois 
seulementdes  dépendancesdu  temple,  Matth.,  xxi,  12, 14; 
xxvi,  55:  Marc,  xiv,  49;  Luc,  xix,  17  ;  xxi.  37  :  xxu,  53; 
xxiv,  53,  etc.,  comprend  en  réalité  le  veto;  avec  ses  dépen- 
dances, Matth.,  XII,  6;  xxiv.  I  :  Marc,  xm,  3;  Luc, 
xxi,  5;  xxu,  52;  par  conséquent  le  pinacle  pourrait  avoir 
été  à  la  rigueur  une  partie  du  vad;.  Ce  n'est  donc  pas 
sur  le  mot  izsàv  seul  qu'on  peut  s'appuyer  pour  fixer 
la  position  du  pinacle. 

1°  Ceux  qui  le  placent  sur  le  sanctuaire  proprement 
dit  sont  loin  d'être  d'accord  entre  eux.  —  1.  Grotius 
entend  par  ïtxepÛYiov  le  parapet  qui  entourait  le  toit 
de  la  maison  de  Dieu,  conformément  à  l'usage  juif.  Voir 
Parapet,  t.  iv,  col.  2153.  Ce  parapet,  d'après  le  Talmud, 
Middolh,  iv,  6,  avait  trois  coudées  de  hauteur,  un  peu 
plus  d'un  mètre  et  demi.  —  2.  D'autres  commentateurs 
pensent  que  le  pinacle  est  le  faîte  du  toit,  ce  qui 
s'accorde  mal  avec  ce  que  nous  apprend  Josèphe, 
Bell,  jud.,  V,  V,  G,  à  savoir  que  le  faite  était  hérissé 
de  pointes  d'or  afin  que  les  oiseaux  ne  pussent  pas  s'y 
reposer.  —  3.  D'après  Ligthfoot,  Horm  hebraiese,  Malt/,., 
iv,  5.  Works,  1081,  t.  n.  p.  130.  le  pinacle  peut  être  le 
nom  donné  au  portique  de  [a  maison  de  Dieu.  dVin, 
'iilà)i),  parce  qu'il  débordait  comme  des  ailes  à  droite 
<  i  à  gauche  l'éililice  de  la  maison  de  Iheu.  On  peut  allé- 
guer contre  cette  opinion,  de  même  que  contre  les  deux 
précédentes,  que  les  termes  irrepiSyiov  roû  tepoû  s'enten- 
dent plus  naturellement  des  dépendances  du  temple  que 
de  la  maison  de  Dieu,  mais  surtout  que  Jésus-Christ, 
r.'élant  pas  delà  tribu  de Lévi,  se  trouvait  empêché  par 
la  Loi  de  pénétrer  dans  le  sanctuaire.  Le  roi  Hérode, 
même  pendant  qu'il  lil  reconstruire  la  maison  de  Dieu, 
ne  put  jamais  y  entrer.  Josèphe,  A)it.  jud.,  XV.   xi,  5. 

2°  Le  pinacle,  d'après  ceux  qui  le  placent  dans  les 
dépendances  du  Temple,  faisait  partie  du  grand  por- 
tique qui  fermait  l'aire  sacrée  à  l'est  et  au  sud.  Josèphe, 
Ant.  jud.,  XV,  xi.  .">,  décrit  ce  portique  en  ces  termes  : 
«  Au  sud  (de  la  cour  des  Gentils)  étail  le  portique  royal 
(t»|V  paffiXeiov  <rcoâv),  qui  était  triple  et  s'étendait  de  la 
vallée  orientale  jusqu'à  la  vallée  occidentale;  il  étail 
impossible  d'aller  au  delà.  C'est  le  plus  remar- 
quable des  travaux  qu'ait  éclairés  le  soleil.  La  vallée 
est  tellement  profonde,  que  les  yeux  de  celui  qui  re- 
garde en  bas  en  sont  troublés.  [Hérode]  y  éleva  un 
portique  [soutenu  par  un  mur  de  terrassement]  d'une 
immense  bailleur. Si  quelqu'un  voulait  du  haut  voir 
jusqu'au  fond,  il  s'exposerait  à  être  pris  de  vertige.  > 
La  muraille  surplombe  en  effet  la  vallée  du  Cédron 
qui  forme  au-dessous  un  affreux  précipice.  Josèphe, 
Anl.  jud.,  XX,  ix,  7.  Quand  on  cherche  sur  les  lieux 
mêmes  à  se  rendre  compte  de  la  scène  décrite  par 
l'Évangile,  on  esl  amené  naturellement  à  cette  conclu- 
sion :  c'esl  au-dessus  de  la  haute  muraille  qui  soutient 
la  terrasse  du  temple  du  coté  de  la  vallée,  que 
le  démon  a  dû  transporter  Notre-Seigneur,  car  en 
aucun  autre  endroit,  il  ne  pouvait  le  tenter  avec  autant 
de  force,  en  lui  disant  :  <•  Si  tu  es  le  l'ils  de  Dieu,  pré- 
cipite-toi en  bas.  g  Matth.,  iv.  (i.  —  Ajoutons  que. 
d'après  le  témoignage  d'Hégésippe  el  de  Clément 
:i  Alexandrie,  dans  Eusèbe,  //.  /.'.,  Il,  I,  23,  I.  xx,  col.  136, 
196,  200,  l'apôtre  saint  Jacques  le  Mineur,  le  premier 


évoque  de  Jérusalem,  fut  précipité  du  pinacle  du  Temple, 
rctépuYcov,  dit  Clément,  nxépuyiov  toû  UpoO,  dit  d'abord 
Hégésippe,  et  puis  nrlpyyiov  roû  vaoJ.  col.  200,  mais  le 
mot  va'ô;,  dans  son  sens  précis,  ne  peut  être  exact,  parce 
que  ni  saint  Jacques  ni  le  peuple  auquel  il  parlait  ne 
pouvaient  pénétrer  dans  le  vm:.  Ce  n'est  que  dans  le 
parvis  que  l'Apôtre  a  pu  adresser  un  discours  aux  Israé- 
lites et  ce  n'est  que  du  portique  extérieur  qu'il  a  pu  être 
jeté  en  bas.  Le  pinacle  était  donc  une  partie  du  por- 
tique. Lorsque  l'Apôtre  eut  été  achevé  par  le  bâton  d'un 
foulon,  il  fut  enseveli  à  l'endroit  même  où  il  avait  con- 
sommé son  martyre,  ajoute  Hégésippe,  ce  qui  ne  peut 
être  vrai  que  s'il  était  mort  en  dehors  de  l'enceinte  du 
Temple,  c'est-à-dire  dans  la  vallée  de  Cédron  où  l'on 
enterrait  en  effet  les  défunts,  tandis  qu'il  était  impos- 
sible d'enterrer  dans  le  Temple  même.  La  tradition  locale 
place  le  tombeau  de  saint  Jacques  à  l'angle  sud-esl  île 
l'esplanade  du  Temple,  voir  Jacques  2.  t.  ni.  col.  ioSS. 
dans  la  vallée  de  Josaphat.  Ces  divers  détails  s'accordent 
1res  bien  avec  l'opinion  qui  place  le  pinacle  au-dessus 
de  la  vallée  du  Cédron  et  la  confirment  par  là  même. 

F.   VlGODROUX. 
PINCETTES     (hébreu         mafodh,    mélqâho 
malqâhayim ;    Septante   :   '/»?:;;    Vulgate   :    fn,-- 
instrument  de  métal  composé  de  deux  liges  qu'on  peut 
rapprocher  pour   saisir  un    objet  (lig.  87).  —  11   n'es' 


87.  —  Pincettes  romaines  antiques. 
■    :  rés  Daremberg  el  Saglio.  Dictionnat, 
t.  n,  i:  !     1163,  |     1240. 

question  de  pincettes  que  dan-  la  description  du  mobi- 
lier du  sanctuaire  qie  Moïse  ni  exécuter.  Exod.,  xxv, 
38;  xxvii  3;  xxxvn,  23;  xxwm.  3.  Elles  servaii 
mettre  du  feu  dans  les  encensoirs,  N'um.,  xvi.  G. 
à  disposer  les  mèches  des  lampes.  Xiiiu..  IV,  9,  Salo- 
mon  lit  fabriquer  en  or  les  pincettes  du  Temple, 
III  Reg.,  vu,  49;  Il  Par.,  iv,  21.  Dans  une  de  ses  vi- 
sions, Isaïe,  vi,  G.  vit  un  ange  prendre  un  charbon  ar- 
dent sur  l'autel  avec  des  pincettes,  afin  de  lui  purifier 
les  lèvres.  11.  I.i  Si  l 

PINEDA   (Jean   de),   cou ntaleur  espagnol,    né  à 

Séville  en  1558,    mourut  dans  celle  ville   le   27  janvier 
Ili37.    Bceii   dans   la    Compagnie    de  Jésus  en    1572,    il 
s'appliqua  à  l'étude  de  l'Écriture  Sainte  qu'il  en 
ensuite  pendant  18  ans  à  Cordoue,  Séville  et  Madrid. 
Le  premier  ouvrage  d'exégèse  dû  à  la  plume  de  P.  l'i- 
neda  est  le  Commentariorum   in  Job  lilni  tredecini', 
il  parut  à  Madrid  en  1597-1601,  2  in-f».  Des  rééditions 
de  cette   œuvre  capitale   se  succédèrent   à  intervalles 
rapprochés  dans  diverses  villes  de  l'Europe,   Madrid, 
Cologne,  Séville,  Venise.  Paris.  -   Ses  travaux  sur  Sa- 
loinon,  Ad  suos  commentai  îus  Nommée   prssvii 
esl,    de    rébus    Salomonis    régis    libri    octo,   qui 
moins  considérables,   eurenl    également   beaucoup  de 
vogue    i   son  époque;   ce   travail   qui  parui   à   Lv> 
1600,  fut  réimprimée  Venise  en   1  « '•  1 1  el  à  M 
1613.  Il  donna  enfin  des  Commentarii  in  Ecclesiasten, 
in-i",  Séville,  1619,  Paris,   1620,  el   Prœlectio  soi 
Cantica  Canticorum,  in-i1.  Séville,  1602.  Ces  ouvi 
témoignent  d'une  science  aussi  vaste  que  sûre. 

P,  Bliard. 

PINTO  RAMIREZ  André,  < ntatenrporti 

né  à  Lisbonne  en  lô'.iô,  mourul  le  23  mai    1654. 
dans  la  Compagnie  de  Jésus  en  1617,  il  enseigna  li 
temps  la  rhétorique,  puis  l' Écriture  Sainte  à  Salamanqu   ; 
son  Canticum  Canticorum  Salomonis  dramatii 
nore,  litlerali  allegoria,  tropologicis  notis  explicatuni, 
in  S1.  Lyon,   1642,  es I  curieux  et  original  plutôt  que  sur. 


441 


PINTO    RAMIREZ 


PIS1DIE 


442 


Son  explication  de  VApocalypse  qui  contient  les  aver- 
tissements aux  sept  évêques  d'Asie,  offre  de  précieux 
enseignements  moraux.  Commentarius  in  Epistolas 
Chrisli  Domini  ad  septem  Episcopos  Asiec  <jux  in 
Apocalypsi  continentur.  Lyon,  1652,  in-fol. 

P.  Bli.vrd. 
PIOCHE  (hébreu  :  ma'edêr;  Vulgate  :  sarculum), 
instrument  destiné  à  défricher  le  sol.  Xolre  fer  de 
pioche  se  termine  d'un  côté  en  pic  et  de  l'autre  en 
houe.  Pline,  H.  A".,  xvm,  49,  '2,  dit  que  le  sarculum 
servait  surtout  à  la  petite  culture  dans  les  régions  mon- 
tagneuses. Le  ma'edêr  dont  parle  Isaïe,  vu.  25,  est 
précisément  employé  dans  les  mêmes  conditions.  Le 
même  mot  désignait  sans  doute  des  instruments  ana- 
logues, constituant  des  houes  plus  ou  moins  étroites. 
Voir  Houe,  t.  m,  col.  766.  11.  Lesêtre. 

PIRES  Jacques,  commentateur  flamand,  né  à  Anvers 
le  22  janvier  1680,  mort  à  Bruxelles  le  3  janvier  1750, 
entra  au  noviciat  de  la  Compagnie  de  Jésus  à  Malines 
en  septembre  1698  et  professa  la  théologie  et  l'Écriture 
sainte.  Dans  son  Commentarius  in  sancluni  Jesu 
Chris ti  evangelium  secundum  Matthseum,  necnon  se- 
cundum  Marcum,  Lucam  et  Joannem,  Louvain,  1747, 
in-S»,  Malines,  1823,  il  s'applique  plus  particulièrement  à 
montrer  l'accord  des  quatre  écrivains  sacrés  d'après 
saint  Augustin,  Maldonat  et  Cornélius  a  Lapide;  puisa 
fournir  des  armes  contre  les  hérétiques,  à  mettre  en 
relief  les  idées  mystiques  auxquelles  le  texte  peut  se 
prêter  sans  effort.  P.  Bliard. 

1.  PISCINE  (liébreu  :  berêkàh ;  Septante  :  xot|Vt;, 
y.oXu[j.6ï:|6pa;  Vulgate  :  piscina,  natatoria),  bassin  arti- 
ficiel à  ciel  ouvert,  construit  pour  garder  l'eau  des 
sources,  des  pluies  ou  des  aqueducs.  Il  diffère  de  la 
citerne,  ordinairement  couverte,  moins  vaste  et  alimentée 
seulement  par  l'eau  de  pluie.  Voir  Citerne,  t.  n, 
col.  787.  —  Différentes  piscines  sont  mentionnées  dans 
la  Bible,  la  piscine  de  Gabaon,  II  Reg.,  n,  13,  voir  t.  m, 
col.  19;  les  piscines  d'Hésébon,  Cant.,  vu,  5,  voir  t.  m, 
col.  659;  la  piscine  de  Samarie,  III  Reg.,  xxii,  38;  les 
piscines  attribuées  à  Salomon,  Eccle.,  il,  6,  voir  t.  i, 
col.  799,  et  les  piscines  de  Jérusalem  :  la  piscine  supé- 
rieure, sur  le  chemin  du  champ  du  Foulon,  IV  Reg., 
xvm,  17;  Is.,  vu.  3;  xxxvi,  '2;  la  piscine  inférieure, 
Is.,  xxn,  9,  11;  la  piscine  attribuée  à  Ézéchias,  IV  Reg., 
xx,  20;  II  Esd.,  m,  16;  la  piscine  du  roi,  II  Esd.,  il, 
14;  la  piscine  de  Siloé,  II  Esd.,  m,  15;  Joa.,  IX,  7,  11. 
et  la  piscine  probatique  ou  de  Bethesda.  Joa.,  v,  2,  4, 
7.  Sur  les  piscines  actuelles  de  la  ville,  voir  JÉRUSAJ  eh, 
t.  m,  fig.  245.  246,  col.  1347,  1350.  Cf.  C.  Mommert, 
Topograpliie  des  alten  Jerusalems,  3  in-8°,  Leipzig, 
1900-1905,  t.  m,  p.  76-102.  Pour  la  piscine  supérieure 
voir  Piscine  2.  Ézéchias  fit  déverser  par  un  aqueduc 
la  fontaine  de  Gihon  dans  la  piscine  de  Siloé  (voir 
Aji'educ,  t.  i,  col.  804),  appelée  pour  cette  raison  pis- 
cine inférieure.  L'attribution  de  piscines  à  l'initiative 
de  ce  roi  ne  vise  pas  autre  chose  que  ce  travail,  qui 
eut  pour  résultat  d'alimenter  la  fontaine  de  Siloé.  Voir 
Siloé.  Quant  à  la  piscine  du  roi,  c'était  sans  doute  celle 
que  Josèphe,  Bell.  /»</..  V,  iv,  2,  appelle  piscine  de 
Salomon  et  qu'il  place  à  l'est  de  Siloé.  Voir  son  empla- 
cement, t.  m.  fig.  249,  col.  1356.  Sur  la  piscine  Proba- 
tique, voir  Bethsaïeie,  t.  i,  col.  1723.  —  Xahum,  n,  8, 
compare  Ninive,  au  temps  de  sa  prospérité,  à  une  pis- 
cine d'eaux;  ni  les  habitants,  ni  les  ressources  ne  man- 
quaient alors  à  la  cité.  —  Les  piscines  servaient  à 
recueillir  l'eau  pour  différents  usages.  La  piscine  de 
Siloé  recevait  par  un  aqueduc  creusé  dans  le  roc  l'eau 
de  la  source  de  Gihon,  que  l'on  tenait  à  soustraire  aux 
atteintes  d'un  ennemi  assiégeant"  la  ville.  On  puisait 
aux  piscines  l'eau  à  boire,  Luc,  xxn,  10;  on  y  lavait 
des  objets  divers  et  l'on  s'y  baignait,  comme  à  la  pis- 


cine de  Samarie,  III  Reg..  xxn,  38.  à  la  piscine  de  Beth- 
esda, Joa.,  v,  4,  et  très  probablement  dans  les  autres. 
Voir  Bain,  t.  i.col.  13S7.  C'est  encore  ce  qui  se  pratique 
aujourd'hui  aux  piscines  de  Siloé  et  de  la  Vierge. 
Cf.  Le  Camus,  Xotre  voyage  aux  pays  bibliques,  Paris» 
1894,  t.  i,  p.  376-379.  '    11.  Lesètre. 

2.  piscine  SUPÉRIEURE  (hébreu  :  berêkàh  hd-'élyô- 
nàh,  Septante:  i\  xoX'j|i6iqGpa  r,  «vu  .  piscine  située  près  de 
Jérusalem,  où  conduisait  une  route  appelée  chemin  du 
champ  du  Foulon.  Elle  est  mentionnée  en  deux  occa- 
sions :  1»  C'est  en  cet  endroit  que  fut  faite  la  prophétie 
d'Emmanuel,  Is.,  vu,  3;  2»  C'est  là  que  le  Rabsacès  et 
les  envoyés  de  Sennachérib  s'adressèrent  au  peuple 
qui  était  sur  les  murs  de  la  ville  pour  le  presser  de  se 
soumettre.au  roi  d  Assyrie.  IV  Reg.,  xvm,  17;  Is., 
xxxvi,  22.  Il  résulte  des  détails  de  cette  dernière  scène 
que  la  piscine  était  en  dehors  de  la  ville.  Pendant 
longtemps  on  a  cru  que  la  piscine  supérieure  se  trou- 
vait à  l'ouest  de  Jérusalem  à  l'emplacement  du  Birket 
Mamillah  actuel.  Voir  Jérusalem,  t.  m,  col.  1349; 
Champ  du  Foulon,  t.  n,  col.  529.  Cf.  C.  Mommert, 
Topographie  des  allen  Jérusalem,  m  Th.,  Leipzig 
1 1905),  p.  76-79,  132.  Plusieurs  savants  contestent 
aujourd'hui  cette  identification  et  identifient  la  piscine 
supérieure  avec  une  des  piscines  de  Siloé.  Voir  J.  Ben- 
ziger,  Hebriiische  Archiiologie,  1894,  p.  52. 

PISIDIE  (grec  :  IIi<n8io),  contrée  située  dans  la 
partie  sud-ouest  de  l'Asie  .Mineure,  et  mentionnée  deux 


'  P-"    I'       S       1  "VD       I       Ê\A   '  V 


88.—  Carte  de  la  Pisidie.- 

fois  dans  le  Nouveau  Testament  :  Act.,  xm,  li.  et 
xiv,  24. 

1°  Limites.  —  Elle  était  enclavée  entre  le  haut  pla- 
teau phrygien  et  la  vaste  plaine  de  Pamphylie.  Ses 
limites  précises  ne  peuvent  pas  plus  être  déterminées 
que  celles  d'autres  nombreuses  provinces  de  la  pénin- 
sule asiatique,  car  elles  varièrent  aux  différentes 
époques  de  l'histoire.  On  peut  dire  du  moins  avec  assez 
d'exactitude,  qu'à  l'époque  qui  nous  intéresse,  la  Pisidie 
était  bornée  au  nord  par  la  Phrygie;  au  sud,  parla 
Pamphylie,  qui  la  séparait  de  la  Méditerranée;  à  l'est, 
par  le  territoire  isaurien  et  la  Lycaoniejà  l'ouest  et  au 
sud-ouest,  par  la  Carie  et  la  Lycie  (fig.  88). 

2°  Géographie  physique.  —  La  Pisidie  était  un  dis- 
trict rocheux,  montagneux,  formé  par  la  chaîne  du 
Taurus  occidental,  qui  a,  dans  ces  parages,  quelques- 
uns  de  ses  pics  les  plus  élevés.  C'est  une  des  contrées 
les  plus  sauvages,  les  plus  accidentées  et  les  plus  pitto- 
resques de  l'Asie  .Mineure.  Çà  et  là  s'ouvrent  de  larges 
vallées,  où  coulent  des  cours  d'eau  dont  plusieurs,  tels 
que  le  Kestros,  l'Eurymédon  et  le  Mêlas,  sont  considé- 
rables et  vont  se  jeter  dans  le  golfe  de  Pamphylie.  Dans 
la  partie  septentrionale  du  pays  se  trouvent  plusieurs 
lacs  salés,  et  aussi  le  grand  lac  d'eau  douce  qui  porte 


443 


PISiniE 


PISTACHE 


44  4 


le  nom  A'Egherdîn  Gœl.  Au  sud.  les  montagnes  des- 
cendent d'une  manière  assez  abrupte  dans  la  plaine 
pamphylienne  et,  sur  la  partie  inférieure  de  leurs  pentes 
fort  bien  exposées,  croissent  l'olivier,  le  styrax  et  plu- 
sieurs autres  plantes  aromatiques. 

3»  Population  et  histoire  de  la  Pisidie.  —  Les 
Pisidiens  formaient  une  race  montagnarde  âpre  et 
belliqueuse,  passionnée  pour  la  liberté  et  ardemment 
hostile  à  tout  ce  qui  pouvait  gêner  son  indépendance. 
Strabon,  XII,  VI,  7;  Pline,  H.  N.,  v,  24.  On  ignore 
quelles  étaient  leurs  origines  ethnologiques.  Ils  furent 
d'abord  gouvernés  par  des  chefs  héréditaires;  puis 
Amyntas,  le  dernier  roi  des  Galates,  réunit  tout  le  pays 
sous  sa  domination,  en  36  avant  J.-C.  C'est  Xénophon, 
dans  son  Anabasis',  1,  I,  11;  II,  I,  4,  etc.,  qui  fait  la 
première  mention  historique  des  Pisidiens.  Ne  re- 
doutant rien,  ils  troublaient  fréquemment  le  repos  des 
contrées  voisines,  par  des  invasions  soudaines  et  ter- 
ribles, dont  ils  revenaient  chargés  de  butin.  Cf.  Stra- 
bon, /.  c.  ;  Tite  Live,  xxxv,  13.  Un  comprend  donc 
qu'ainsi  exercés  à  la  guerre  el  au  brigandage,  ils  aient 
fait,  à  l'occasion,  d'excellents  soldats.  Voir'  Josèphe, 
A, il.  iu,l..  XIII,  xin,  5;  Bell.jud.,  xi.ui,  3.  Aussi,  ni 
les  Perses,  ni  Alexandre  le  Grand,  ni  les  Séleucides, 
ni  même  les  Romains  ne  réussirent-ils  à  les  subjuguer 
complètement.  Si  le  général  romain  Quirinius  parvint 
à  s'emparer  de  la  citadelle  de  Cremna,  après  de  longs 
efforts,  el  à  y  installer  une  colonie  de  vétérans,  et  si 
d'autres  colonies  furent  également  établies  à  Antioebe 
el  en  d'autres  localités,  Pline,  H.  X.,  v,  24,  le  cœur  de 
la  contrée  ne  fut  jamais  dompté.  Après  celle  conquête 
imparfaite  de  Home,  la  Pisidie  l'ut  rattachée  à  la  pro- 
vince de  Galatie  (25  avant  J.-C.)  et  puis  de  Pamphylie, 
Cf.  Ptolémée,  v,  4  et  5;  .1.  Marquardt,  Organisation  de 
l'empire  romain,  t.  Il,  trad.  franc.,  Paris,  1802,  p.  238, 
278,  313.  Ce  n'esl  qu'en  297  de  notre  ère,  durant  le 
règne  de  Iiioclélien,  qu'elle  devint  une  province  à  part, 
gouvernée  par  un  presses.  —  On  conçoit  aisément, 
d'après  les  détails  qui  précèdent,  que  les  Pisidiens 
soient  demeurés  à  peu  près  totalement  rebelles  à  la 
civilisation  hellénique.  Cependant,  le  langage  et  l'art 
grecs  pénétrèrent  à  la  longue  dans  la  contrée,  comme 
le  montrent,  d'une  part,  les  inscriptions  récemment 
découvertes,  et,  de  l'autre,  les  restes  assez  bien  conser- 
vés des  anciens  monuments.  On  ne  possède  que  de 
rares  fragments  de  la  langue  propre  aux  Pisidiens. 
Voir  W.  M.  liamsay,  Inscriptions  en  langue  pisi- 
dienne,  dans  la  Revue  des  Universités  du  Midi,  1895, 
p.  353-360.  —  Les  villes  principales  de  la  Pisidie,  vraies 
forteresses  au  milieu  des  montagnes,  étaient  Sagalassos, 
Selgé,  Cremna,  Termessos,  Pednalissos.  Les  ruines  de 
plusieurs  d'entre  elles  ont  élé  retrouvées  de  nos  jours. 
4"  La  Pisidie  et  le  Nouveau  Testament.  —  La  Pisidie 
rei  ni  plusieurs  l'ois  la  visite  de  saint  Paul.  Durant  son 
premier  voyage  apostolique,  il  la  traversa  du  sud  au 
nord,  avec  Barnabe,  en  venant  de  Chypre  et  de  Pam- 
phylie. Act.,  xm,  13-14.  Puis  il  la  parcourut  de  oo'u 
veau  en  sens  inverse,  du  nord  au  sud,  lorsqu'il  revint 
de  Lystres  et  d'Icône  à  Antioche  (de  Pisidie),  et  re- 
descendit en  Pamphylie.  Act.,  xiv,  20-23.  Il  est  pro- 
bable qu'il  visita  aussi  la  partie  septentrionale  de  la 
province  au  début  de  son  second  voyage  apostolique, 
en  compagnie  de  Silas  et  de  Timothée.  Act.,  XVI,  6; 
mais  cela  n'est  pas  dit  explicitement.  Saint  Luc  décrit 
tout  au  long,  Act.,  XIII,  14-52,  le  ministère  et  le  beau 
succès  de  l'Apôtre  à  Antioche.  Notons,  à  ce  sujet,  une 
double  leçon  du  texte  sacré,  au  passage  Act.,  xm,  11. 
Pour  distinguer  celle  ville  importante  de  plusieurs 
autres  cités  homonymes,  spécialement  d'Antioche  de 
Syrie,  le  narrateur  emploie,  d'après  le  «  textus  recep- 
tus  o,  l'expression  'Avrtdjceicev  rr,;  IlnrtSix:,  «  Antioche 
de  Pisidie  o;  mais  il  est  vraisemblable,  d'après  les  ma- 
nuscrits n,  A,  U,  C,  etc.,  que  la  leçon  primitive  était 


'Avrio^eiav  rîjv  IliaiSisiv.  «  Antioche  la  Pisidienne.  » 
Dans  rémunération  des  nombreux  périls  auxquels  il 
fut  exposé  durant  son  long  ministère,  saint  Paul 
signale  en  particulier,  II  Cor.,  xi,  26,  ceux  qu'il  courut 
en  passant  les  Meuves  et  de  la  part  des  brigands.  Il  lit 
sans  doute  très  spécialement  l'expérience  de  ces  deux 
sortes  de  dangers  en  voyageant  sur  les  routes  pisi- 
die n  n  o  s .  D'une  part,  en  effet,  il  eut  à  franchir  plus 
d'un  torrent  de  montagne,  aux  eaux  gonllées  par  les 
pluies.  D'autre  part,  ce  que  nous  avons  dit  plus  haut 
du  caractère  des  habitants  de  la  Pisidie  montre  que  les 
o  périls  des  brigands  »  n'étaient  pas  rares  dans 
celle  région.  D'ailleurs,  les  inscriptions  anciennes 
qu'on  y  a  trouvées  mentionnent  en  propres  termes  cetti 
espèce  de  péril.  Plusieurs  d'entre  elles  signalent  l'exis- 
tence d'un  corps  de  gardiens,  qui  avaient  pour  fonction 
principale  de  protéger  les  voyageurs  et  les  propriétés 
contre  les  bandits  :  ôpoçûXaxsç,  TtapaspuXaxvat.  Une 
autre  est  dédiée  par  des  parents  éplorés  o  à  Sousou, 
leur  fils,  gardien  des  montagnes,  égorge  par  des 
brigands.  »  Voir  W.  M.  Ramsay,  Hislorical  Geography 
of  Asia  Minor,  p.  174;  Id.,  The  Church  in  the  Roman 
Empire,  p.  23  25, 

Il  semble  qu'il  existe  encore  un  vestige  du  passage 
de  saint  Paul  en  Pisidie,  dans  le  nom  de  Kara  Bavlc 
(c'est-à-dire  n«SXo)  que  portent  les  ruines  de  l'ancienne 
ville  d'Adada.  située1  autrefois  sur-  la  route  qui  condui- 
sait directement  de  la  cote  de  Pamphylie  à  Antioche 
de  Pisidie.  Cf.  Ramsay,  The  Church  in  the  Roman 
Empire,  p.  20-23. 

Voir  Strabon,  XII,  VI,  7  et  8;  Pline,  H.  .Y.,  v,  21; 
luepert,  Aile  Géographie,  in-8°,  p.  127;  Conybean 
et  llouson,  The  Life  and  EpistU  s    /  .S/.  Paul.  Londres, 

IS7.V  in-12,  p.  129-13't;  C.  , 'euard.  Saint  Paul,  ses 
missions,  in-8°,  Paris,  1872,  p.  28-32;  le  comte  Lan- 
ckoronski.  Stâdte  Pamphyliens  ont  Pisidiens,  iu-8  . 
t.  n.  Vienne,  1892.  L.  FiLLIO 

PISTACHE  (hébreu  :  botnîm  :  Septante  :  vepÉëivOo;  ; 
Vulgate  :  tercbintlms).  fruit  du  Pistachier. 

I.  Description.  —  Le  Pistacia  vera  (vulgairement 
Pistachier),  lig.  89  est  un  arbrisseau  de  la  famille  des 
Térébinthacées.  Les  feuilles  pennées  avec  1  ou  2  paires 
de  folioles,  rarement  réduites  à  la  foliole  leniiin.de, 
sont  d'abord  velues  sur  tonte  leur  surface,  puis  à  la  lin 
seulement  aux  bords,  très  amples,  coriaces,  obtuses 
ou  mucronulées,  luisantes  en  dessus,  avec  des  ner- 
vures saillantes.  Les  fleurs  dioïques  et  apétales,  en 
panicules  dressées,  ont  les  caractères  de  celles  du 
Lentisque.  Mais  le  fruit  devient  beaucoup  plus  gros, 
rouge,  oblong,  prolongé'  en  apicule  à  son  sommet. 
Originaire  des  montagnes  du  Liban,  il  s'est  répanda 
parla  culture  dans  toute  la  région  méditerranéenne  et 
orientale,  pour  son  fruit  dont  la  pulpe  esl  aigrelette 
i'l  comestible.  L'amande  e-t  oléagineuse,  et  le  lue- 
fournil  un  combustible  excellent.  Enfin  son  écorce 
astringente  peut  servirait  lannage.  el  secrète  la  résine 
connue  sous  le  nom  de  Térébenthine  de  Ghio.    1".  Hy. 

IL  EXÉGÈSE.  —  Les  botnîm  figurent  parmi  les  meil- 
leures productions  du  pays  de  Canaan,  que  les  enfants 
de  Jacob  doivent  porter  en  présent  au  premier  ministre 
du  pharaon  d'Egypte,  tien.,  xi.m,  II.  One  sont  ces 
botnîm?  A  s'en  tenir  aux  seules  versions  anciennes,  il 
serait  difficile  de  décider,  puisque  les  unes,  comme 
la  version  samaritaine,  la  version  arabe  (les  Samaritains 
et  celle  d'Erpenius  voient  dans  les  botnîm  les  noix  du 

pistachier,  et  les  autres  plus  anciennes  el  plus  nom- 
breuses traduisent  par  térébinthe,  comme  les  Sep- 
tante, TSf/iëevGoc,  la  Vulgale.  terebinthus,  le  syriaque, 
betmo,  le  chaldéen,  but  mu',  l'arabe,  butm.  Les  Arabes 
appellent  actuellement  le  térébinthe  butm,  tandis 
qu'ils  donnent  au  pistachier  le  nom  de  fistùq.  El  les 
noms  employés  par  le  syriaque  el  le  chaldéen,  betmo. 


445 


PISTACHE   —    PLACE    D'HONNEUR 


446 


bulmâ  désignent  également  dans  ces  langues  le  téré- 
binthe. Il  y  a  lieu  de  remarquer  cependant  que  le 
Pislacia  vera  et  le  Pistacia  terebinthus  sont  deux 
arbres  de  la  même  famille,  des  plantes  ayant  entre  elles 
de  grandes  analogies;  c'est  ce  qui  a  amené  les  Grecs 
â  les  confondre.  Théophraste,  Hist.  pi.,  IV,  5.  Il  est 
fort  possible  que  les  peuples  orientaux  aient  aussi 
compris  sous  la  même  dénomination  les  deux  espèces 
du  Pislacia  et  que  tout  en  traduisant  par  térébinthe, 
les  versions  sémitiques  aient  eu  en  vue  cependant  le 
Pislacia  vera.  Les  fruits  du  térébinthe  ne  sauraient 
guère  être  offerts  en  présent  comme  une  des  meilleures 
productions  de  la  Palestine,  tandis  que  la  noix  du 
pistacbier  était  et  est  encore  très  appréciée.  C'est  ce 
qu'ont  bien  vu  d'anciens  commentateurs  juifs  :  ainsi 
le  botnah  du  TV.  Schebi,  7,  est  regardé  par  la  glose  de 


—  Pistacia  vera. 


Barlenora  et  par  Maimonide  comme  une  espèce  de 
noix,  appelée  pBDNa,  p'istuq.  On  sait  du  reste  que  le 
pistachier  était  très  répandu  en  Palestine.  La  ville  de 
Betonim,  Job,  xm,  26,  au  pays  de  Gad,  parait  tirer  son 
nom  de  l'abondance  de  cet  arbre.  Pline,  H.  X.,  xm, 
10,  y  reconnaît  une  spécialité  de  la  Syrie,  qu'on  ne 
trouvait  pas  en  Egypte  :  ce  qui  est  conforme  au  texte 
de  la  Genèse,  xliii,  11.  Pour  ces  diverses  raisons  l'iden- 
tilication  des  botnïm  avec  les  pistaches  est  très  vraisem- 
blable :  c'est  le  sentiment  de  Bochart.  Geograph.,  t.  n. 
1.  I,  ch.  x;  de  Celsius,  Hierobotanic,  in-8°,  Amsterdam, 
t.  i,  p.  24;  de  Michaelis,  Supplementa  ad  lexica  he- 
braica,  in-8.  Gœttingue,  1792,  t.  i,  p.  171.  Cf.  I.  Lôw. 
Aramaische  Pflanzennamen,  in-8»,  p.  420. 

E.  Levesque. 
PLACE  D'HONNEUR,  place  attribuée  à  un  per- 
sonnage considérable.  —  1"  La  droite  est  ordinaire- 
ment attribuée,  dans  la  Sainte  Écriture,  à  celui  qu'on 
veut  particulièrement  honorer.  Dieu  fait  siéger  à  sa 
droite  le  Messie,  son  Fils  incarné.  Ps.  ex  (cix),  1; 
Matth.,  xxii,  44;  Marc,  xn,  36;  Luc,  xx,  42;  Act.,  n, 
34;  lleb.,  i,  13.  Devant  le  sanhédrin,  Notre- Seigneur 
annonce  qu'on  le  verra  un  jour  occuper  cette  place. 
Matth.,  xxvi,  64;  Marc,  xiv,  62;  Luc,  xxn,  69.  Il  en 
prend  possession  au  jour  de  son  ascension.  Marc,  xvi. 


19,  Saint  Etienne  le  voit  à  cette  place.  Act.,  vu,  55. 
Les  Apôtres  parlent  souvent  du  Christ  à  la  droite  de 
Dieu.  Rom.,  vin,  il;  Col.,  m,  1;  Heb.,  i,  3;  vm,  1;  x. 
12;  xn,  2;  I  Pet.,  m,  22.  Au  dernier  jour,  le  Fils  de 
l'homme  occupera  le  siège  de  sa  majesté  pour  exercer 
sa  fonction  déjuge  suprême.  Matth.,   xxv,  31. 

2"  Le  roi  Salomon  fait  asseoir  la  reine  Belhsabée  a 
sa  droite.  III  Reg.,  n,  19.  Dans  l'épithalame  du  Psaume 
xlv  ixi.ivi,  10,  la  reine  est  aussi  à  la  droite  du  roi.  Le 
peuple  d'Israël  est  appelé  «  l'homme  de  la  droite  »  de 
Jéhovah,  Ps.  lxxx  (lxxix),  18,  à  cause  de  la  place 
d'honneur  que  Dieu  lui  a  assignée  parmi  les  autres 
peuples.  Au  dernier  jugement,  les  brebis,  c'est-à-dire 
les  âmes  des  justes,  seront  placées  à  droite.  Matth., 
xxv,  33.  11  ne  faut  pas  mettre  son  ennemi  à  coté  de  soi. 
le  faire  asseoir  à  sa  droite,  si  l'on  ne  veut  pas  être 
supplanté  par  lui.  Eccli.,  xn,  12. 

3°  La  place  attribuée  à  quelqu'un  marque  sa  dignité 
et  l'autorité  qu'il  exerce.  Job,  xxix,  25,  dit  que  quand 
il  se  rendait  dans  l'assemblée  de  ses  concitoyens,  on 
lui  donnait  la  première  place  et  il  siégeait  comme  un 
roi.  La  mère  des  fils  de  Zébédée  demande  à  Notre- 
Seigneur  que.  dans  son  royaume,  ses  deux  fils  soient 
assis  l'un  à  sa  droite  et  l'autre  à  sa  gauche.  Matth..  xx, 
21.  C'était  réclamer  pour  eux  les  deux  premières  di- 
gnités dans  ce  royaume  temporel  dont  on  croyait  l'éta- 
blissement imminent.  La  seconde  place  est  attribuée 
au  premier  ministre  du  roi.  Joseph  occupe  le  second 
char  après  le  pharaon.  Gen.,  xli,  43.  Jonathas  sera  le 
second  après  David,  I  Reg.,  xxm,  27;  Elcana  est  le 
second  après  Achaz,  II  Par.,  xxvm,  7;  Aman  et  Mar- 
dochée  occupent  la  même  place  auprès  d'Assuérus. 
Esth.,  x,  3;  xm,  3,  6.  Daniel,  v,  7,  16,  29,  n'est  que  le 
troisième  dans  le  royaume,  parce  que  le  roi  Xabonide 
avait  associé  au  gouvernement  son  fils  Balthasar. 
A  Malte,  le  gouverneur  Publius  portait  le  titre  de 
npoiTo;,  «  premier  >;.  Act.,  xxvm,  7.  On  regardait 
comme  un  honneur  de  siéger  au  milieu  des  premiers. 

I  Reg.,  n,  8;  III  Reg.,  xxi,  9;  Prov.,  xxxi,  23.  Les  rois 
mettent  leur  plaisir  dans  les  trônes  et  les  sceptres, 
Sap.,  vi,  22;  la  sagesse  vaut  mieux  que  ces  choses. 
Sap.,  vu,  S.  Les  pharisiens  aimaient  à  occuper  les 
premières  places  dans  les  festins  et  dans  les  syna 
gogues.  Matth.,  xxm,  6;  Marc,  xn,  39;  Luc,  xx,  16 
Quand  un  riche  se  présentait  dans  certaines  réunions, 
on  lui  offrait  une  place  d'honneur  en  lui  disant  : 
aj  xaOo'j  (ôo£  xaXcôç,  «  à  toi  cette  belle  place  ». 
Jacob.,  n,  3,  —  Au  jour  du  jugement,  les  Apôtres 
siégeront  sur  douze  sièges  d'honneur,  pour  juger  avec 
le  Fils  de  l'homme.  .Matth.,  xix,  28.  Alors  celui  qui 
aura  vaincu  sera  assis  avec  le  Fils  de  Dieu  sur  son 
trône,  de  même  que  le  Fils  est  assis  sur  le  trône  du 
Père.  Apoc,  m,  21.  Mais  bien  des  rôles  seront  changés; 
beaucoup  de  ceux  qui  étaient  les  premiers  sur  la  terre 
seront  alors  les  derniers  et  réciproquement.  Matth.,  xix, 
30;  xx,  16;  Marc,  x,  31. 

4»  La  place  occupée  à  table  était  en  rapport  avec  la 
dignité  de  chaque  convive.  La  reine,  épouse  d'Artaxer- 
xès,    est    assise     auprès    du    roi    pendant    le     repas, 

II  Esd.,  n,  6,  sans  doute  dans  l'attitude  figurée  t.  iv, 
11g.  97,  col.  290.  A  l'époque  de  Notre-Seigneur,  on 
recherchait  avec  avidité  les  premières  places  à  table. 
Matth.,  xxm,  6;  Marc,  xn,  39;  Luc,  xx,  46.  Un  jour, 
le  divin  Maître  fut  témoin  de  cet  empressement.  Il  en 
prit  occasion  pour  donner  aux  convives  une  leçon  de 
savoir-vivre,  dont  il  fit  en  même  temps  une  leçon  d'hu- 
milité. Luc,  xiv,  7-11.  L'hôte  en  effet  ne  respectait  pas 
toujours  le  choix  de  chaque  convive;  il  faisait  monter 
l'un  et  descendre  l'autre,  ce  qui  était  une  source  d'hu- 
miliations pénibles,  bien  que  méritées.  Les  Apôtres  ne 
profitèrent  pas  de  la  leçon.  Avant  la  dernière  Cène,  au 
moment  sans  doute  où  il  s'agissait  de  prendre  place  à 
table,    on    les     voit    se     disputer     sur    la     préséance. 


PLACE    D'HONNEUR    —    PLAIDEUR 


44S 


Luc.  XXII.  24-30.  En  leur  lavant  les  pieds  lui-même, 
Xotre-Seigneur  leur  montra  en  quoi  consisteraient  les 
dignités  dans  son  royaume.  .Toa..  xm.  4,  5.  13-17.  — 
Sur  la  place  occupée  par  les  convives  à  l'époque  évan- 
gélique,  voir  Lit.  t.  iv.  col.  -290- 291. 

H.  Lesètre. 

PLACE  PUBLIQUE  (hébreu  :  hùs,  «  le  dehors  », 
relwb,  «  ce  qui  est  large  »,  Syq,  •  là  où  l'on  court  i  : 
Septante  :  izXarzia,  -/iîo:.  iropâj  Vulgate  :  plalea, 
i,  espace  découvert,  à  proximité  des  habitations. 
—  Dans  les  villes  d'Orient,  il  n'y  avait  pas  de  places 
proprement  dites  comme  dans  les  nôtres.  Les  maisons 
étaient  resserrées  les  unes  près  des  autres,  les  rues 
étroites,  souvent  tortueuses  et  encombrées.  On  se  gar- 
dait d'y  ménager  des  emplacements  vides,  où  l'on  n'au- 
rait pu  s'abriter  contre  le  soleil  et  qui.  dans  les  villes 
entourées  de  murs,  auraient  rendu  l'enceinte  plus  éten- 
due et  plus  difficile  à  défendre.  Les  places  n'étaient 
ordinairement  que  l'espace  maintenu  libre  à  l'entrée 
des  villes  ou  des  villages.  De  là  les  noms  qui  leur  sont 
donnés;  ce  sont  des  endroits  en  dehors  de  l'agglomé- 
ration, ils  sont  larges,  on  peut  y  courir,  ce  qui  n'était 
pas  possible  dans  les  rues.  Les  places  étaient  les  lieux 
naturellement  indiqués  pour  servir  à  toutes  les  mani- 
festations de  la  vie  publique.  La  Sainte  Écriture  y  l'ail 
assez  souvent  allusion. 

I  Quand  des  étrangers  arrivaient,  ils  se  tenaient  sur 
la  place,  jusqu'à  ce  que  quelqu'un  leur  offrit  l'hospita- 
lité. Jud.,  xix.  16,  17.  20.  Parfois,  ils  préféraient  s'y  éta- 
blir pour  passer  la  nuit.  Gen.,  xix,  2.  Comme  la  place 
était  le  lieu  de  passage  de  tous  les  arrivants  et  de  tous 
les  sortants,  on  y  cherchait  ceux  qu'on  voulait  rencon- 
trer, Cant..  ni.  2:  on  y  faisait  les  proclamations  publiques, 
l'rov..  i,  20;  Luc.  x.  10,  les  vieillards  venaient  y  devi- 
ser  ■<  l'aise,  quand  la  chaleur  était  tombée.  I  Mach., 
XIV,  9;  on  >  trouvait  les  ouvriers  à  louer.  Matth..  xx.  3. 
et  les  convives  à  inviter.  Luc.  xiv.  21.  Les  gens  d'im- 
portance aimaient  à  s'y  rendre  pour  être  salués.  Matth., 
xxin.  7;  Marc.  xn.  38;  Luc.  xi.  13;  xx.  Hi:  mais, 
comme  on  y  rencontrait  toutes  sortes  de  personnes  et 
d'objels  plus  ou  moins  impurs,  les  pharisiens  ne  man- 
quaient pas  de  se  laver  en  revenant  de  la  place  publique. 
.Marc,  vu,  1.  Noire-Seigneur  voulut  bien  enseigner  son- 
vent  sur  les  places  publiques.  Luc.  xm.  26.  mais  sans 
j  faire  retentir  sa  voix  comme  ceux  qui  veulent  im- 
poser à  la  foule.  Matth..  xn.  19.  Dans  les  villes  et  les 
villages,  on  rassemblait  les  malades  sur  les  places  pu- 
bliques, pour  qu'il  les  guérit.  Marc,  vi,  36. 

2°  Les  places  étaient  le  théâtre  des  événements  qui 
inti  ressaient  toute  la  population.  En  cas  de  danger,  c'est 
là  que  retentissaient  les  cris  d'alarme.  Ps.  exuv  (cxliii). 
11.  Les  ennemis  les  occupaient  tout  d'abord.  Lam..  IV, 
ls.  Les  Hébreux  devaient  \  brûler  tout  le  butin  des 
villes  adonnées  à  l'idolâtrie.  Deut.,  xm,  16.  Les  Philis- 
tins avaient  suspendu  les  os  de  Saùl  et  de  Jonathas  sur 
la  place  de  Bethsan.  Il  Reg.,  SXI,  12  Aj.res  la  défaite, 
la  place  publique  devenait  le  siège  de  la  désolation 
populaire.  Is..  xv.  3;  Ara.,  v,  16.  Menacé  par  Senna- 
chérili.  Ézéchias  réunil  les  chefs  militaires  sur  une 
place,  hors  de  la  ville,  et  les  exhorta  au  courage  et  à  la 
conliance.  II  Par.,  xwii.  6.  Esdras  lut  la  lui  au  peuple 
assemblé  sur  la  place,  devant  la  porte  des  Eaux,  et  en- 
suite, sur  cette  place  el  sur  celle  d'r.phraim.  on  dressa 
•les  tentes  pour  célébrer  la  fête  des  Tabernacles.  Il  Esil.. 
ni.  S,  16.  Voir  Jérusalem,  lui.  col.  1364,  1365  Parfois 
aussi,  sur  les  places,  on  installa  les  cultes  idolàtriques, 
Ezech.,  \\i.  24,  31 .  assimilés  à  la  fornication.  Cf.  Prov.. 
vu.  12. 

'■'■  La  place  publique  était  le  rendez-vous  de  la  jeu- 
nesse, qui  y  prenait  ses  ébats.  Les  jeunes  garçons  et  les 
ieunes  filles  y  venaient  jouer.  Zacb.,  \m.  .")  :  Matth..  XI, 
16;  Luc,  mi.  32,  Dans  les  temps  de  calamités,  la  mort 
frappait  les  jeunes  gens  des  places  publiques,  .1er.,  ix. 


21  ;  xlix,  26:  l,  30;  les  enfants  et  les  nourrissons  y  tom- 
baient en  défaillance.  Lam.,  n,  11. 

4»  Sur  la  place  publique,  par  laquelle  tous  les  hommes 
passaient  pour  se  rendre  aux  champs  ou  en  revenir,  la 
justice  tenait  ses  séances.  Job.  xxix.  7;  cf.  Act..  xvi.  19. 
Mais  souvent  la  vérité  et  la  justice  trébuchaient  sur  la 
place  publique.  Is..  ux.  H.  l'oppression  et  l'astuce  s'y 
installaient  à  demeure.  Ps.  lv  (liv),  12.  Voir  Jugement, 
t.  ni,  col.  1843:  Porte.  Les  places  publiques  servaient 
aussi  pour  les  marchés.  Voir  Marché,  t.  iv.  col.  718.  — 
Daniel,  ix.  25,  prédit  la  restauration  de  Jérusalem,  avec 
ses  places  et  son  enceinte;  ïobie.  xm.  22.  souhaitait 
que  le  pavé  de  ces  places  fût  de  pierres  d'une  blancheur- 
sans  lâche. 

5"  Il  est  aussi  queslion  d'autres  places  :  la  place  orien- 
tale du  Temple,  c'est-à-dire  le  grand  parvis,  dans  lequel 
Ezéchias  réunit  les  prêtres  et  les  lévites.  II  Par.,  xxix, 
4;  Esdras  y  rassembla  aussi  tout  le  peuple,  I  Esd.,  x. 
9.  et  ludas  Machabée  y  détruisit  les  autels  idolàtriques 
que  les  étrangers  y  avaient  élevés,  II  Mach..  x.  2;  la 
place  du  palais  de  Suse.  à  travers  laquelle  Mardochée 
fut  promené  en  triomphe,  Esth.,  tv,  6:  vi,  9,  11,  et  les 
places  que  voit  saint  Jean  dans  la  Jérusalem  déicide. 
Apoc.  xxi.  2i  :  xxii.  2.  Voir  Agora,  t.  i,  col.  275; 
Forum,  t.  n.  col.  2328.  —  Souvent  les  versions  parlent 
Je  places  là  où  le  texte  hébreu  mentionne  un  emplace- 
ment quelconque,  une  contrée.  Job,  XVIII,  17.  et  sur- 
tout des  rues.  Il  Reg.,  xxn.  Ui:  III  Reg..  xx.  3t;  Tob., 
n,  3;  Esth.,  iv.  1  :  l's.  xvm  (xvn),  43;  Prov.,  vu.  S; 
xxn,  13;  Ecclc,  xn.  I,  5:  Eccli.,  ix.  7;  Is.,  v.  25;  x  6; 
xxiv.  11:  .Ter.,  v.  1  ;  vu.  17,  34;  xliv,  6.  17,  21:  Lam.. 
n.  12:  iv.  1.8.  li:  E/ech.,  XXVI,  11:  xxvni.  23:  Mich.. 
vu,  10;  Nah.,  n,  i:  Zach.,  vin,  i:  ix.  3:  I  Mach.,  1,58; 
il.  9:  II  Mach..  m.    19;   Matth..    m.  5.  Ait..  \.   15.    Voir 

Rue. 

6     In   dehors  des  villes,   certains    croisements    de 
routes  forment  des  sortes   de    places   ou   carrefours. 
Ainsi,   pour   tirer    ses   présages,    le  roi   de   Babylone 
s'arrête  à  'êm  had-dérêk,  «  la  mère  du  chemin 
tête  de  deux  chemin*.  L-:  ?r,v  àp^afav  ôSov,  •>  à  l'antique 
chemin    .  probablemenl  pour  ëieit^v  ipxv  68oQ, 
commencement  du  chemin  ».  in  bivio,  <■  au  carrefour  ". 
Ezech..  xxi.  21  (26).  —  La  Vulgate  appelle  bivium,  car- 
refour, ce  que  l'hébreu  et  les  Septante  nomment  <•  porte 
d'Énaîm   ».  Gen.,   xxxvm.    li.   21.   Voir   Enaim,   t.   H, 
col.  1766.  Elle  donne  encore  le  nom  de  bivium  a  1 
Sov,  «  la  rue  »,  de  Bethphagé.  Marc.  xi.  1.  Enfin,  elle 
appelle  triria.   <■    carrefours  des  trois  chemins  ■.  les 
places  des  villes  de  Moab.  Is..  xv.  3. 

11.  Lesètre. 

PLAGIAIRE  (grec  :  ivSpanoSKrrr,;;  Vulgate:  / 
riut  .  celui    qui    vend   ou  qui    achète    comme  esclave 
un   homme  libre,  dont  on  s'est  emparé  par  vol.   Saint 
Paul.  I  Tina.,  i.  ht.  énumère  les  plagiaires  avec  les  ho- 
micides et  les  autres  criminels  dignes  de  toute  lai. 
des  lois.  Le  plagiat   ainsi  entendu  était  puni  de  mort 
chez  les  Hébreux,   Exod..  xxi,  16:   lient..  XXIV,  7 
les  Gn  es,  Xénophon,  liemorab.,  I,  n.  62,  et  chez  les 
Romains.  Lea  Fabia,  Digesl.,  xlviii,  lit.  xv.  La  loi  mo- 
saïque condamnait    à   mort   non   seulement  celui    qui 
avait   vendu  comme  esclave  un  homme  ou  une  femme 
mais  aussi  celui  qui.  sans  les  vendre,  les  retenait 
entre  ses  mains.  Exod.,  xxi.  16. 

PLAIDEUR,  celui  qui.  devant  le  juge,  défend  ce 
qu'il  croit  être  son  droit.  —  Chez  les  Hébreux,  chacun 
plaidait  lui-même  sa  cause  devant  les  jugés.  A  défaut 
de  témoins  pour  appuyer  sa  revendication  ou  sa  dé- 
1  prêtai!  serment  alin  de  donner  plus  de  poids  à 
s.i  parole.  Exod.,  xxn.  Il:  Heb..  vi,  i6.  Voir  Jigemeni 
t.  ni,  col.  1841;  Procédure.  Booz  et  le  proche  ] 
de  lluth  font  valoir  chacun  leurs  raisons  devant  dix 
anciens  pour  épouser  ou  ne  pas  épouser  la  jeunejille. 


449 


PLAIDEUR    -   PLAIE 


Ruth,  iv.  1-6.  Deux  femmes  viennent  ainsi  plaider  de- 
vint Salomon.  au  sujet  de  l'enfant  que  chacune  prétend 
être  le  sien.  III  Reg.,  m,  16-28.  Déjà,  du  temps  de  David 
Absalom  cherchait  à  attirer  à   lui  les  plaideurs,  sous 
prétexte  que  justice  ne  leur  était  pas  rendue  au  tribunal 
royal,  II  Reg.,  xv,  2-4,  bien  que  lui-même  fût  rentré 
en  grâce  sur  l'intervention  d'une  femme  de  Thécué 
venue  pour  plaider  auprès  de  David  la  cause  d'un  fils 
soi-disant  menacé  de  mort  par  sa  parenté.  II  Reg.,  xiv 
4-20.  Les  plaideurs  usaient  parfois  de  movens  ind.'-i ici ts 
pour  capter  la  bienveillance  des  juges.  Prov.,  xvn   15 
23;  xviii,  5;  xxiv,  23;  xxvm,  21.  -  Notre-Seigneur  re- 
commande au  plaideur  de  s'accorder  avec  son  adversaire 
pendant  qu'ils  sont  tous  les  deux  ensemble  en  roule  pour 
le  tribunal;  car,  une  fois  entre  les  mains  de  la  justice 
lallaire  suivra  son  cours  et  le  plaideur  imprudent  ou 
opiniâtre  en  subira  les  dures  conséquences.  Matth    v  25 
En  parlant  ainsi,  le  divin   Maître  entend  donner'  un 
conseil  pratique  non  seulement  pour  la  vie  présente  mais 
encore  pour  l'autre  vie.  On  a  intérêt  à  donner  satisfac- 
tion en  ce  monde  à  tous  ceux  qu'on  a  lésés  de  quelque 
manière;  car,  si  l'affaire  vient  en  élat  au  tribunal  du 
souverain  Juge,  la  sentence  sera  redoutable,  et  le  cou- 
pable ne  sortira  de  prison  qu'après  avoir  payé  jusqu'à 
la  dernière  obole.  Voir  Purgatoire.  -  Saint  Paul  ne 
veut  pas  que  les  chrétiens  qui  ont  à  plaider  quelque 
allaire  1  un  contre  l'autre  en  appellent  aux  tribunaux 
des  païens.   «   Quand  vous  avez  des  jugements  à  faire 
rendre   sur  les  affaires  de  cette  vie,  dit-il,  établissez 
pour  les  juger    ceux   qui    sont   les    moins    considérés 
dans     Eglise.  »  I  Cor.,  vi,  4.  Les  plus  humbles  lidéles 
avec  leur  simple  bon  sens,   seront  aptes  à  juger  ces 
différends  à  l'amiable,  et  l'on  évitera  ainsi  de  porter  à 
la  connaissance  d'adversaires  des  discussions  qui  leur 
donneraient  occasion  de  se  moquer  d'hommes  faisant 
profession  de  vivre  en  paix  les  uns  avec  les  autres  et 
de  n  attacher  qu'une  médiocre  importance  aux  intérêts 
matériels.  D'autre  part,  le  conseil  de  l'Apôtre  montre 
que,    sur    certaines    questions    temporelles,    il    peut 
exister  des  dissentiments  légitimes,   même  entre   les 
chrétiens.  Mais  le  chrétien  ne  doit  pas  être  un  homme 
a  procès.    L'Apôtre    s'inspire    du    conseil   donné   par 
Notre-Seigneur  :    «  Si   l'on  t'appelle  en  justice  pour 
avoir  ta   tunique,  abandonne  encore   ton  manteau     » 
Matth.,  v,  40;  Luc,  vi,  20,  30.  Il  est  évident  qu'il  n'y  a 
pas  ici  de  précepte.  Ainsi  l'a  compris  saint  Paul  qui 
en  plusieurs  circonstances,   a   revendiqué  ses  droits' 
a  1  hihppes,  Act,  xvi,  37-38;  à  Jérusalem,  xxn,  25-26^ 
xxm,  1  ;  devant  les  procurateurs  Félix,  xxiv,  10,'  et  Fes- 
tus,  xxv,  8-12.  Si  le  chrétien  abandonnait  toujours  tous 
tes  siens,  les  adversaires  l'accuseraient  de  pusillanimité 
son  abnégation    encouragerait  tous   les  attentats  et  ii 
Unirait  lui-même  par  ne  plus  compter  dans  la  société 
des  hommes.   La  charité,  autant  que  la  justice,  com- 
mande de  se  défendre  légalement  en  certains  cas,  pour 
ne  pas  laisser  les  méchants  maîtres  absolus  de  tous  les 
biens  d  ordre  temporel.  Cf.  S.Augustin,  Epist.  13S   H 

?  .  s  V?'"'  C01'  528"532;  De  serm-  Dom-  '"»  m«fc! 
I,  18,  63,  t.  xxxiv,  col.  1261-1262.         H.  Lesètre 


450 


PLAIE,  résultat  d'un  coup,  d'une  blessure,  d'un  mal 
quelconque  qui  entame  partiellement  le  corps  et  par 
extension,  calamité  de  tout  ordre  qui  atteint  une' per- 
sonne ou  une  collectivité.  Ce  mot  représente  donc  plu- 
sieurs idées,  auxquelles  correspondent,  dans  l'hébreu  et 
dans  les  versions,  des  termes  tantôt  identiques  et  tantôt 
uitlérents. 

I»  Coups  (hébreu  :  makkàh,  de  nâkâh,  «  frapper  »  • 
bcptante  :  ^m:  Vulgate  :  plaga).  1.  Les  coups  sont 
âss.  /.  souvent  mentionnés  dans  la  Sainte  Kcriture  Fxod 
n.  11;  Prov.,  xvii.  10;  xix,  29;  xxm,  13,  14;  II  Mach"' 
m.  26;  v,,  30;  Matth.,  v,  39;  xx.v,  49;  .xxv.  51  68;  xxvn' 
■i0;  Act.,  xxm,  2,  etc.  Voir  Soufplet.  -  2.  La  loi  pré- 

DICT.    DE   LA  BIBLE. 


voyait  le  châtiment  ou  le  dédommagement  qu'entraî- 
nent les  coups  donnés.  Qui  frappait  son  père  ou  sa  mère 
ncoura,  la  mort.  Fxod.,  xxi.  18.  Frapper  son  esdave 
;<  coups  de  bâton  jusqu'à  lui  ôter  la  vie  méritait  châti- 
ment; si  1  esclave  survivait,  ne  fût-ce  qu'un  jour  ou  deux 

e  bl?LrnetT'a,î  inde"lne-  Kx°d-  XX*'  2a  Ceu*  1"    £ 
l?6'*?'  Une  fem»^  enceinte,  devaient  une 
amende  s.  I  accouchement  n'était  que  prématuré.  Au  cas 
iidt  é       '  0"  fPplK'uait  !a  Pei»e  du  talion,  qui  concer- 
nait également  les  cas  de  blessure,  de  mutilation  ou  de 

n  donner'  EX°a-'XXI'  22"-5-  V0ir  Ta"on'  Celui  qui 
en  donnant  un  coup  a  son  esclave,  lui  faisait  perdre  un 

Lxod.,  xxi,  26.  -  3.  La  loi  réglait  enfin  le  nombre  de 
coups  qul  po       ient  êtreinfli  f£  *e 

Ils  devaient  être  proportionnés  à  la  faute  et  ne  jamais 
dépasser  quarante.   Deut.,  xxv,  2,  3.  On  les  inLea 
anciennement  sous  forme  de  bastonnade.  Voir  Baston 

2;>1  '5r  ■  ApréS  'a  CaptîVité'  on  ï  subSla 
vf  9 * .    mT  Flageu-a™n,  t.  „,  col.  2281.  Cf.  Act., 
xvi,  iô,  ôà;  Il  Cor.,  vi,  5;  xi,  23 

2»  Blessure  (makkàh,  «ft,^.  plaga;  pesa,  de  pdsa\ 
«  blesser  »,  rpaU(ta,  vulnus;  dakke,  de  dàka,  «   être 
hroye  i,  nl^,  mfirmitas ;  maffias,  de  mâhas,  «   frap- 
peI.\  *Xr>W'  Plaaa;  bês,  «  blessure  de  flèche  »,  de  liés 
«  Hêcne  »,  3IXoç,  sagitta;  néga   de  ndga  ,  «  frapper  ,',' 
«91,  (i.a<m5,  Plaga,  lepra,  flagellum;  Sêbér,  deïabar- 
«  hnser»,  <™vWu«,  fractura).  1.  La  première  men- 
tion de  blessure  se  lit  dans  le  chant  de  Lamech.  Gen.   iv 
-o.  \  o.r  Lamech,  t.  iv,  col.  41.  On  trouve  ensuite  mention- 
nées les  blessures  de  Job,  xxxiv,  6;  d'Achab,  III  Ree 
xxii  35    de  Joram,  IV  Reg.,  ,x,  15;  II  Par.,  xxn,  *?& 
Notre-Seigneur   Joa.,  x.x.  18;  xx,  27;  cf.  Is.,  lui,  10; 
de  saint  Paul,  Act.,  xvi,  33,   etc.  Au  désert,  les  Hébreux 
son    blesses  par  les  morsures  des  serpents.  Num.,  xxr 
6.  Il  n  y  a  que  plaies  et  blessures,  par  conséquent  vio- 
lences de  toutes  sortes,  dans  Jérusalem,  au  temps  de 
Jeremie,  yi,  7.  Les  faux  prophètes  font  passer  les   inci- 
sions qu  ils  pratiquaient  sur  eux-mêmes  pour  des  bles- 
sures qu  ils  auraient  reeues  dans  des  rixes  avec  leurs 
amis.  Zach. ,  xin,  6.  Voir  Incision,  t.   m,  col.  868.  Le 
voyageur  de  la  parabole  du  bon  Samaritain  est  couvert 
de  blessures  par  les  voleurs.  Luc,  x,  30.  Les  ivro-nes 
encourent  souvent  des  blessures.  Prov.    xxm    ^9  'Les 
verges  causent  des  blessures  qui  contribuent  à  corriger 
le  vice.  Prov.,  xx,  30;  Eccli.,  xxvm,  21  ;  xxx     7    L'hu 
man.te  sera  sauvée  par  les  blessures  et  les  meurtrissu- 
res du  Rédempteur.  Is.,  un,  5,  10.  -2.  Au  sens  figuré, 
Jehovah  bandera  les  blessures  et  guérira  les  plaies  de 
son  peuple.  Is,  xxx,  26.  Les  blessures  que  fait  un  ami 
sont  inspirées  par  sa  fidélité.  Prov.,  xxvn    6    -  3    La 
législation  s'occupait  des  blessures.  Elle  réglait  que  celui 
qui  blesse  subit  la  loi  du  talion.   Exod.,  xxi    25-  Lev 
xxiv,  20  Quand  le  cas  était  difficile  à  décider,  on  allait 
trouver  les  prêtres  et  le  juge  en  fonction  à  ce  moment 
et  I  on  s  en  remettait  à  leur  sentence.  Deut    xvii   8-  xxi 
5.  Voir  Juge,  t.  m,  col.  1834.  >>•»-", 

3»  Maladie  (néga'  irf,  rf,-^,  ^.j  plaga)w  La  ièpre 
est  appelée  une  plaie;  elle  entame  en  effet  la  peau  et  les 
chairs.  Lev.,  xiii,  3-42;Deut.,  xx.v,  8.  Voir  Lèpre,  t.  iv, 
col.  175.  Apres  la  prise  de  l'Arche,  les  Philistins  sont 
frappes  de  plaies  consistant  en  tumeurs  malignes.  IRe° 
V:  °'  ?jrVi'  5-,Voir  0fa"M-  '■  'V,  col.  1757.  Le  roiAntio- 
chus  IV  Epiphane  fut  atteint  d'une  plaie  incurable,  qui 
avait  le  caractère  d'un  châtiment  divin,  tela  yAor^dwina 
plaga  II  Mach.,  ,x,  5,  11.  Notre-Seigneur  guérissait 
les  malheureux  qui  soutiraient  de  plaies.  Marc,  m  10 
v,  29.  31;  Luc,  vu,  21. 

4»  Épreuve  (yàd,  «  main  »,  ZEÎ?  fj^,  «  main 
lou.de  »,  manus  plagX;  ^^  plaga^  flageaum\  Job. 
x.x,  ,1  se  plaint  que  la  main  de  Dieu  l'a  frappé  comme 
d  une  plaie.  Cette  main  est  lourde.  Job,  xxm,  2.  Le  Juste 
éprouve  et  repentant  constate  que  ses  amis  s'éloignent 

V.  -  15 


451 


PLAIE 


PLAIES    DE    N.-S.   JESUS-CHRIST 


452 


de  lui  à  cause  de  su  plaie.  Ps.  xxxvm  (xxxvn),  4,  12.  Il 
demande  que  Dieu  détourne  de  lui  cette  plaie.  Ps.  xxxix 
(xxxvm),  11.  Celui  qui  a  conllance  en  Dieu  n'a  pas  à 
subir  de  plaie.  Ps.  xci  (xc),  10. 

.>  Châtiment  {yâd,  i/y-y.r,.  dolor;  maggêfâh,  de 
nâgaf,  «  frappei-  ».  -ir,-;i„  plaga;  néga',  oSûvri,  turpi- 
tvido-;  négéf,  tctûoi;,  plaga;  makkàh,  %ki\-fy,  plaga; 
pesa',  9pa-Jeiv.  plaga;  sébér,  de  Sdbar,  «  briser  »,  T.'>r,-;rr 
plaga).  1.  Tous  les  coups  du  malheur  fondent  sur  l'im- 
pie. Job.  xx,  '22.  L'impudique  ne  recueille  que  plaie  et 
honte.  Prov.,  VI,  33.  La  maison  du  parjure  est  pleine  de 
plaies.  Kccli.,  xxm,  12.  —2.  La  plaie  atteindra  ceux  qui 
n'acquitteront  pas  leur  rançon  au  moment  du  recense- 
ment dans  le  désert.  Exod.,  xxx,  12.  Les  lévites  servent 
le  Seigneur  dans  le  sanctuaire,  afin  que  les  Israélites  ne 
soient  frappés  d'aucune  plaie  quand  eux-mêmes  s'\  pré- 
senteront. N'uni.,  vin,  19.  Ceux-ci  cependant  s'attirent 
la  plaie  par  leurs  murmures.  Num., xvil,  13.  Dieu  frap- 
pera île  plaies  les  Israélites  rebelles  et  infidèles.  Lev., 
xxvi,  21,  28;  Deut.,  xxvm,  59,  61;  xxix,  21.  —  3.  Il  a 
frappé  de  la  sorte  les  envoyés  qui  sont  allés  visiter  le 
pays  de  Chanaan  et  ensuite  ont  découragé  le  peuple. 
Num.,  xiv,  37;  Coré,  Dathan  et  Abiron,  Num..  xvi,  46; 
les  Hébreux  qui  ont  murmuré  au  désert  pour  avoir  de 
la  viande,  Num.,  xi,  33;  ceux  qui  se  sont  laissé  séduire  a 
Béelphégor,  Num  ,  xxv,  8,  18;  xxxi,  16;  la  nation  cou- 
pable au  temps  de  Joram,  11  Par.,  xxi,  li,  et  de  Jéré- 
mie.  x,  19;  xiv,  17.  Par  moquerie,  on  siffle  sur  la  plaie 
qui  atteint  Jérusalem  coupable,  .1er.,  xix,  8;  l'Idumée, 
.1er.,  xux,  17,  Babylone,  .1er.,  i.,  13;  Ninive,  Nah.,  in. 
19,  et  les  peuples  conjurés  contre  Jérusalem.  Zach., 
xiv,  12. 

ti"  Fléau  public  {maggêfâh,  <ruvavTriu.a,  «  accident  », 
plaga;  n'i.r^r,;  Opi-t;:;,  interfectio ;  néga',  i-uiu.6;, 
«  recherche  »,  plaga;  négéf,  Tzlrtfr,,  plaga;  makkâh, 
t.i  r,-;fn  plaga).  I.  Le  pharaon  d'Egypte  etsa  maison  sont 
frappés  de  grandes  plaies  à  cause  de  Sara,  femme  d'Abra- 
ham, lien.,  xn,  17.  Les  fléaux  se  déchaînent  contre  les 
Égyptiens,  quand  le  pharaon  refuse  la  liberté  aux 
Hé!  in  ux.  Exod.,  ix,  II;  Judith,  v.  10,  11.  .Mais  ceux-ci 
en  sont  indemnes.  Exod.,  xn,  13.  La  plaie  sévit  sur  les 
Philistins,  qui  se  sont  emparés  de  l'Arche,  I  Reg.,  v,  12; 
vi,  .">,  9;  sur  les  gens  de  Bethsamès,  qui  ont  regardé 
l'Arche  irrespectueusement,  1  lieg.,  vi.  19;  sur  toul  le 
peuple  Israélite,  à  l'époque  de  David,  sous  forme  de 
peste.  II  Reg.,  xxiv,  21;  1  l'ai.,  xxi,  22.  -  2.  Dieu  châ- 
tiera son  peuple  »  avec  une  verge  d'homme  et  des  plaies 
de  lils  des  hommes  »,  c'est-à-dire  par  des  fléaux  pro- 
portionnés à  la  t'ois  à  la  faiblesse  et  à  la  malice  des 
coupables.  II  Reg.,  vu,  14.  On  priera  dans  le  Temple 
pour  obtenir  la  délivrance  de  ces  fléaux,  III  Reg.,  VIII, 
37,38;  Il  Par.,  vi,  28,  29. 

7°  Les  plaies  d'Egypte  (maggàfôf,  ffuvavt^inaTct, 
plagx,  Kxod.,  ix,  14).  Elles  sont  au  nombre  de  dix  : 
I.  L'eau  changée  en  sang.  Exod;,  vu,  17.  21.  Voir  Eau, 
t.  h,  col.  1520;  Sang.  Les  magiciens  imitèrent  ce  fléau. 
Exod.,  vu,  22.  —  2.  Les  grenouilles.  Exod.,  vin,  3-0. 
Voir  Grenouilles,  t.  m,  col.  317.  Les  magiciens  imi- 
tèrent de  nouveau  ce  lléau.  Exod.,  vin,  7.  '.).  Les 
moustiques.  Exod.,viu,  16-19.  Voir  Cm  mn.  t.  n,  col.  1093. 
Les  magiciens  furent  impuissants  à  imiter  cette  plaie 

ainsi  que  les  suivantes,  el   ils  dirent  au  pharaon  :  o  C'est 

le  doigl  d'un  dieu'  i  Exod.,  vin,  18,  19.  -    i.  Les  mou- 
ches. IaiiiI..  vin.  21-21.  Voir  Moi  on.  I.  iv,  col.  1321. 
.">.  La  peste  du  bétail.  Exod.,  i\.2-7.  Voir  PESTE,  col.  164. 

li.  Les  pustules.  Exod.,  ix,  9,  10.  Voir  Pi  stules. 
7.  La  grêle.  Exod.,  i\.  18,26.  Voir  Grêle,  i.  mi.  col.336. 
—  8.  Les  sauterelles.  Exod.,  x,  i-l.">.  Voir  SAUTERELLE. 
—9.  Les  ténèbres.  Exod., x, 21-23.  Voir  <>i  km. an.  t.  iv, 
col.  1930.  —  10.  La  mort  des  premiers-nés.  Exod..  xn, 
29-30.  Voir  PAQI  i.,  I.  iv,  col.  2091:  Pri  MIER-NÉ.  —  Ces 
plaies  ont  un  côté  naturel,  en  ce  sens  que  les  phéno- 
mènes qui  les  constituent  se  produisent  naturellement 


en  certaines  circonstances.  Mais  ce  qui  leur  donne  «  un 
caractère  miraculeux,  évident  et  incontestable,  c'est 
qu'elles  arrivent  à  point  nommé,  comme  sanction  de  la 
parole  de  Dieu,  dans  des  circonstances  annoncées  à 
l'avance,  précises,  et  avec  une  intensité  qui  révèle  mani- 
festement une  intervention  surnaturelle  :  elles  se  pro- 
duisent par  l'ordre  de  Moïse,  au  moment  qu'il  a  prédit, 
de  la  manière  qu'il  a  déclarée;  elles  cessent  quand  il 
l'ordonne  et,  plusieurs  fois,  au  moment  qui  lui  a  été 
fixé  par  le  pharaon;  le  pays  de  Gessen  est  toujours 
exempt;  les  Égyptiens  n'en  contestent  jamais  le  carac- 
tère extraordinaire;  ils  en  sont  au  contraire  consternés 
et  ils  acceptent  ces  signes  comme  une  preuve  de  la 
mission  di.ine  de  Moïse.  »  Vigouroux,  La  Bible  el  les 
découvertes  modernes,  6e  édit.,  t.  n.  p.  312.  Sur  les  dix 
plaies,  voir  lbid.,  p.  315-319.  La  dixième  plaie,  en  par- 
ticulier, en  faisant  périr  dans  une  même  nuit  tous  les 
premiers-nés,  tant  des  hommes  que  des  animaux,  fit 
éclater  de  la  manière  la  plus  convaincante  et  la  plus 
douloureuse  le  dessein  que  Dieu  avait  d'arracher  son 
peuple  aux  mains  de  ses  persécuteurs.  Cette  dernière 
plaie,  plus  terrible  que  toutes  les  autres,  ne  pouvait  ces- 
ser comme  les  précédentes  et  était  sans  remède.  Dieu 
exerça  cette  sévérité  contre  toute  une  nation  pour  abais- 
ser l'orgueil  et  vaincre  l'obstination  du  pharaon,  pour, 
châtier  les  Egyptiens  de  la  part  qu'ils  avaient  prise  à 
l'oppression  des  Hébreux  et  pour  graver  profondément, 
dans  le  cœur  de  ces  derniers,  l'idée  de  sa  puissance,  de 
sa  domination  absolue  sur  toute  la  nature,  de  sa  supé- 
riorité sur  tous  les  dieux  qu'adoraient  les  nations  et  de  la 
bonté  qu'il  entendait  témoigner  au  peuple  qu'il  s'atta- 
chait particulièrement.  Voir  Moisi:,  t.  iv,  col.  1196-1198. 
8°  Défaite  (rnakkâh,  (rûvtpi^iç,  r.~/r,-;r,,  plaga).  La 
défaite  d'une  armée  esl  habituellement  désignée  -eus  le 

nom  de  »  grande  plaie   ».  Jos.,  X>10,  20;   ,lud.,    SI,    :\'.l 
xv,  8:  1  Reg..  iv,  10:  xi\,  14,  30:  xxm.  .'.;   11   Reg.,  XVII, 
9:  xvill,  7;  III  Reg  .  w.  21  :  II  Par..  XIII,  17:   XXVIII,  '>: 
Toi,.,  i.  21:  Esth.,  ix.  5;  I  Mach.,  i,  22:  v.3.  31:  vu, 22; 

VIII,  'i.  etc. 

9"  Etat  moral  (makkàh,  tta/vt,.  plaga).  La  misère  mo- 
rale d'un  individu  ou  d'un  peuple  est  représentée  sous 
la  ligure  d'une  plaie.  »  Toute  transgression  est  connue 
uni'  épée  à  deux  tranchants,  la  plaie  qu'elle  l'ail  esl 
incurable.  »  Eccli..  xxi,  i.  Les  infidélités  continuelles  du 
peuple  de  Dieu  constituent  pour  lui  un  état  ma  lad  if  dans 
lequel  on  ne  constate  que  blessures,  meurtrissures, 
plaies  purulentes,  qui  ni'  sont  ni  nettoyées,  ni  bandées, 
ni  soignées  d'aucune  manière.  Is..  i,  5,  6.  La  plaie  de  la 
nation  est  inguérissable  et  mortelle.  .1er.,  xv,  18:  xxx. 
12,  li.Mich..  i.  9.  Cependant  Dieu  pansera  les  plaies  de 
Sion,  .1er.,  xxx.  17,  et  un  jour  le  Rédempteur  se  char- 
gera des  plaies  de  l'humanité.  Is..  Lin,  i. 

10"  Plaies  symboliques  {->.r-;r,.  plaga).  Ce  sont  les 
lliaux  que  saint  Jean  énumere  dans  l'Apocalypse  :  le  feu, 
l.i  fumée  et  le  soufre,  IX,  18:  les  plaies  dont  les  deux 
témoins  de  Dieu  peuvent  frapper  la  terre.  XI,  0;  la  plaie 
mortelle  dont  guérit  la  première  bête,  xm,3,  12.  W  ;  les 
sept  plaies  déchaînées  par  les  anges,  xv.  i.  6.  8:  xvi,  9, 
21:  la  plaie  qui  frappe  la  grande  Rabylone,  xvm,  1,8; 
les  plaies  dont  sont  menacés  ceux  qui  ajouteront  ou 
retrancheront  aux  paroles  de  l'Apocalypse    xxn,  18. 

II.  Lesêtre. 

PLAIES  DE  NOTRE-SEIGNEUR  JÉSUS- 
CHRIST,  blessures  qui  lui  onl  été  faites  pendant  sa 
passion.  I"  Les  prophéties  faisaient  clairement  entendre 
que  des  plaies  seraient  inlligées  au   Messie  souffrant. 

Ils  ont  percé  mes  mains  cl  mes  pieds, 

Je  pourrais  compter  (Vulgate  :  ils  nui  compté)  tous  mes  os, 

fait  dire   au   Messie  soutirant  le  Psaume  x.xu  (XXI),  17- 
18.  Sur  ce  texte,  voir  Lion.  t.  iv.  col.  277-279. 

il   i  été  transpercé  à  cause  de  nus  pécl 

Et  c'est  par  ses  meurtrissures  que  nous  avons  été  guéris. 


45:î 


PLAIES    DE    N.-S.   JESUS-CHRIST    —    PLAINE 


454 


Is..  lui,  ô.  Les  mots  employés  par  le  prophète. 
meholdl,  «  il  a  été  transpercé,  ouvert  ».  irpautiatiôBj], 
vulneratus  est,  «  il  a  été  blessé  »,  et  bakâburâtô, 
«  par  sa  meurtrissure  »,  cf.  Gen.,  iv,  23.  (jlw).(ùtu, 
livore,  la  trace  que  laissent  les  coups  reçus,  supposent 
des  blessures  et  des  coups  attaquant  la  chair  même. 

Je  répandrai  sur  la  maison  de  David 

Et  sur  les  habitants  de  Jérusalem 

l'n  esprit  de  grâce  et  de  supplication. 

Et  ils  regarderont  vers  moi  qu'ils  ont  percé. 

Zacli.,  xii,  10.  Le  mot  ddqdrù  signifie  «  ils  ont 
percé  »,  confixcefunt.  Par  une  transposition  de  lettres, 
les  Septante  ont  lu  rdqddû,  xaTiop^iran-o,  «  ils  ont 
insullr  '.  Saint  Jean,  xix.  37,  qui  cite  ce  texte,  lit  con- 
formément à  l'hébreu  ïH/.yi-.r,i-j.-i,  t  ils  ont  transpercé  », 
transfixerunt.  Ce  texte  ne  s'applique  pas  directement 
à  Judas  Machabée,  tué  par  les  ennemis,  comme  le 
pense  saint  Éphrem.  qui  le  rapporte  du  reste  aussi 
dans  le  «  sens  mystique  et  très  vrai  »  à  Noire- 
Seigneur.  Cf.  Bévue  biblique,  1898,  p.  91.  Ce  dernier 
sens  est  seul  possible;  il  est  reconnu  et  consacré  par 
saint  Jean,  xix,  37.  Les  regrets  dont  parle  ensuite  le 
prophète  de  la  part  de  ceux  qui  ont  commis  le  crime. 
Zach.,  xii,  10,  se  sont  produits  effectivement  après  la 
mort  du  Sauveur.  Luc,  xxni.  48;  Act.,  Il,  37.  —  Un 
autre  texte  de  Zacharie,  xm,  6  :  «  Qu'est-ce  que  ces 
blessures  à  tes  mains?  —  J'ai  reçu  ces  coups  dans 
la  maison  de  mes  amis,  »  ne  peut  être  appliqué  à 
Xotre-Seigneur  que  par  accommodation.  Il  s'agit  en 
effet  d'un  faux  prophète  qui  a  pratiqué  sur  lui-même 
des  incisions  idolàtriques  et  qui.  pour  se  disculper, 
feint  d'avoir  été  blessé  par  ses  amis. 

2»  Quand  Notre-Seigneur  annonce  sa  mort,  il  dit 
qu'il  sera  crucifié.  Matth.,  xx.  19;  xxvi,  2.  La  cruci- 
fixion était  un  supplice  romain,  et  saint  Jean,  xvm,  32, 
remarque  que  quand  les  Juifs  avouèrent  qu'ils  ne  pou- 
vaient eux-mêmes  mettre  Jésus  à  mort,  ils  procuraient 
l'accomplissement  de  la  prédiction  qu'il  avait  faite. 
Joa.,  XII,  33.  Les  Juifs  l'auraient  lapidé,  les  Romains 
devaient  le  crucilier.  Les  Kvangélistes  se  contentent  de 
dire  qu'on  le  crucifia,  sans  donner  aucun  détail.  Matth., 
xxvn,  31,35;  Marc,  xv.  21,  25;  Luc,  xxm,  33;  Joa., 
xix.  18.  Quelquefois,  les  criminels  étaient  attachés  à  la 
croix  avec  des  cordes.  Cf.  Rich,  Dict.  des  antiq. 
grecques  et  romaines,  trad.  Chéruel,  Paris,  1873,  p.  206. 
Le  plus  souvent,  on  les  fixait  avec  des  clous.  Cf.  Plaute, 
Mostellaria,  n,  1,  13.  Tertullien,  Adv.  jud.,  10,  t.  n, 
col.  629.  fréquemment  témoin  de  ce  spectacle,  dit  que 
la  perforation  des  mains  et  des  pieds  était  «  l'atrocité 
propre  de  la  croix  ».  En  certains  cas,  on  liait  le  sup- 
plicié avec  des  cordes  avant  de  le  clouer.  Cf.  Pline. 
H.  X.,  xxviil,  11;  S.  Hilaire,  De  Trinit.,  x,  13,  t.  x, 
col.  352.  Les  Pères  sont  unanimes  à  expliquer  les  ver- 
sets 17-18  du  Psaume  xxi,  en  supposant  que  le  Sau- 
veur a  eu  les  mains  et  les  pieds  percés  par  les  clous. 
On  lit  aussi  dans  YEpitrede  Barnabe,  12,  dont  l'auteur 
se  réfère  à  IV  Esd.,  XIV,  33;  v,  5  :  «  Quand  ces  choses 
s'accompliront  elles'.'  Lorsque  le  bois,  dit  le  Seigneur, 
aura  été  étendu  par  terre  puis  redressé,  et  que  du  bois 
le  sang  tombera  goutte  à  goutte,  paroles  qui  se  rappor- 
tent à  la  croix  et  à  celui  qui  devait  y  être  crucifié.  » 
Cf.  Hemmer-Lejay,  Textes  et  documents,  les  Pères 
apust.,  Paris,  1907.  t.  i,  p.  cxn,  74-75.  Pour  que  le 
sang  tomliàt  du  bois  goutte  à  goutte,  il  fallait  que  le 
supplicié  y  fût  blessé,  qu'il  eut  par  conséquent  les 
mains  et  les  pieds  percés.  Voir  Clou,  t.  Il,  col.  810. 
Cl".  Friedlieb,  Archéologie  de  la  Passion,  trad.  Martin, 
Paris,  1897,  p.  181-184;  ollivier.  La  Passion,  Paris, 
1891,  p.  334-338.  Le  Sauveur  avait  reçu  d'autres  bles- 
sures à  la  flagellation,  au  couronnement  d'épines,  et 
probablement  même,  d'après  certaines  traditions,  pen- 
dant le  portement  de  la  croix  et  par  suite  de  diverses 


chutes.  Cf.  Thurslon.  Etude  historique  sur  le  chemin 
de  la  Croi.v,  trad.  Roudinhon,  Paris,  1907,  p.  87-109. 
Mais  ces  blessures  n'étaient  qu'accessoires  à  côté  des 
quatre  plaies  qui  lui  furent  faites  pendant  le  crucifie- 
ment. Une  cinquième  fut  ajoutée  après  la  mort.  Au  lieu 
de  briser  les  jambes  du  crucifié,  comme  c'était  la  règle, 
un  soldat  lui  transperça  le  coté  de  sa  lance,  et  il  en 
sortit  du  sang  et  de  l'eau.  Joa.,  xix,  32-34.  L'apôtre  voit 
dans  cette  plaie  l'accomplissement  de  la  prophétie  de 
Zacharie,  xn,  10. 

3°  Après  sa  résurrection.  Jésus  apparaît  dans  le 
cénacle  aux  onze  et  à  leurs  compagnons,  et,  en  preuve 
de  sa  résurrection  et  de  la  réalité  de  sa  présence,  il 
leur  montre  ses  mains  et  ses  pieds.  Luc.  xxiv,  39,  40; 
Joa.,  xx.  20.  Pourquoi?  Parce  que  cette  vue  devait 
constituer  pour  eux  un  témoignage  irrécusable,  ce  qui 
suppose  nécessairement  que  ses  extrémités  n'avaient 
pas  seulement  été  attachées  à  la  croix,  mais  qu'elles 
avaient  été  transpercées  et  qu'elles  gardaient  encore  la 
trace  de  ses  blessures.  Le  Sauveur  explique  ensuite 
qu'il  fallait  que  s'accomplit  en  lui  tout  ce  qui  avait  été 
préditpar  Moïse,  les  prophètesetles  Psaumes,  Luc.  xxiv, 
il.  ce  qui,  entre  autres  prophéties,  vise  les  passages  se 
rapportant  aux  plaies  du  Messie  soutirant.  Thomas, 
absent  au  moment  de  cette  première  apparition,  déclara 
que,  pour  croire,  il  voulait  mettre  son  doigt  dans  le 
trou  des  clous  et  sa  main  dans  le  coté  du  Sauveur. 
Xotre-Seigneur  accéda  au  désir  de  l'apôtre  incrédule; 
huit  jours  après,  il  lui  montra  les  plaies  de  ses  mains 
et  de  son  côté  et  l'invita  à  en  constater  la  réalité.  Tho- 
mas se  rendit  alors.  Joa..  xx.  24-29.  Ce  récit  rend  indu- 
Intable  la  perforation  des  mains  et  des  pieds,  que  les 
Kvangélistes  permettaient  de  supposer,  mais  n'affir- 
maient pas  positivement.  —  Saint  Jean,  parlant  du 
dernier  avènement  du  Christ,  dit  qu'alors  «  tout  œil  le 
verra,  même  ceux  qui  l'ont  percé  »,  lî£X£VTïi<rav,  pupn- 
aerunt.  Apoc.  i,  7.  Saint  Jérôme.  Epist.  XIV,  11, 
t.  xxii.  col.  35i,  en  faisant  allusion  à  cette  apparition 
du  Christ  souverain  Juge,  s'exprime  ainsi  :  «  Regarde, 
Juif,  les  mains  que  tu  as  clouées;  regarde,  Romain, 
le  côlé  que  tu  as  percé.  »  Saint  Jean  représente  dans 
le  ciel.  «  au  milieu  du  trône.  l'Agneau  debout,  et  parais- 
sant avoir  été  immolé.  »  Apoc.  v,  6.  L'Agneau  est 
vivant,  puisqu'il  est  debout,  et  pour  paraître  c  avoir  été 
immolé  ».  il  faut  qu'il  porte  encore  les  traces  des 
blessures  mortelles  qu'il  a  reçues.  L'Église  a  consacré 
cette  pensée,  dans  l'hymne  qui  se  récite  aux  premières 
vêpres  de  la  fête  de  la  Lance  et  des  Clous  de  N.-S.  J.-C.  : 

Te,  Jesu,  superi  laudibus  efferant, 
Qui  clavonim  aditu  signaque  lanceae 
In  caslo  rétines,  vivus  ubi  imperas. 

Dans  la  séquence  Soler.mis  hsec  festivilas,  pour  le 
jour  de  l'Ascension,  on  lisait  aussi  : 

Patri  monstrat  assidue 
Qua?  dura  tulit  vulnera, 
Et  sic  pacis  perpetuae 
Nobis  exorat  fœdeia. 

Ces  idées  s'inspirent  de  ce  qui  est  dit  Heb..  ix.  11,  12, 
21;  x.  11-14,  et  Apoc.  i,  7  ;  v,  6.  H.  Lesétre. 

PLAINE,  étendue  de  pays  plat.  —  Les  Hébreux  ont 
plusieurs  expressions  pour  rendre  ce  mot  : 

1°  Biq'âh,  de  la  racine  bàqa  ,  qui  veut  dire  :  «  fendre,  » 
et  par  là  même  :  «  ouvrir.  »  Le  substantif  indique  donc 
comme  une  «  fissure  »  ou  une  «  ouverture  »  entre  les 
montagnes  ou  les  collines;  voilà  pourquoi  il  rend  aussi 
bien  le  sens  de  vallée.  Cependant  il  ne  s'applique  qu'à 
une  large  étendue  de  terrain,  à  la  différence  de  ge,  qui 
désigne  plutôt  des  ravins  ou  des  gorges  étroites.  C'est 
ainsi  que  la  grande  plaine  de  Cœlésyrie,  qui  s'étend 
entre  le  Liban  et  l'Antiliban,  porte  encore  en  arabe  le 
nom  d'El  Beqàa.  Les  Septante  traduisent  généralement 


455 


PLAINE    —    PLAISIR 


456 


ce  mot  par  rceSiov.  Gen.,  xi,  2:  .Tos.,  xi,  8,  17;  xu.  7; 
Ezecli..  m,  22,  23,  etc.  La  Vulgate  le  rend  par  campus, 
Gen.,  xi,  2;  Jos..  xu,  7:  II  Par.,  xxxv,  22;  Is.,  xi.i.  18; 
lxiii,  14,  etc.;  campestris  \ierra}.  Deut..  xi,  11;  pla- 
nities,  Jos.,  xi,  17;  vis  planée,  Is..  XL,  4.  Il  est  employé 
dans  un  sens  indéterminé  Gen.,  xi,  2;  Ps.  cm  (hébreu, 
civ),  8;  Is.,  xl.  4:  XU,  18:  i.xm,  14;  Ezech.,  m,  22,  23, 
vm,  4;  xxxvil,  1.  2.  Ajouté  à  des  noms  propres,  il  dé- 
signe les  plaines  suivantes  : 

1.  La  plaine  de  Jéricho  (hébreu  :  biq'af  Ierëhô), 
partie  de  la  vallée  du  Jourdain  qui  s'étend  aux  envi- 
rons de  Jéricho.  Deut.,  xxxiv,  3. 

2.  La  plaine  de  Masphé  (hébreu  :  biq'af  Mispéh), 
Jos.,  xi,  8,  territoire  appelé  «  terre  de  Maspba  »  au 
f.  3  du  même  chapitre,  ou  région  située  au  pied  de 
l'Hermon.  Voir  Maspha  2,  col.  834. 

3.  La  plaine  du  Liban  (hébreu  :  biq'af  hal-Lebdnôn), 
Jos.,  xi,  17;  xu,  7,  est,  non  pas  la  Cœlésyrie,  mais 
plutôt  la  plaine  qui  se  trouve  au  sud  et  au  sud-ouest 
de  Banias,  «  sous  l'Hermon.  »  Voir  BiALGAD,  t.  1, 
col.  1336. 

4.  La  plaine  de  Mageddo  (hébreu  :  biq'af  Megiddô, 
II  Par.,  xxxv,  22;  biq'af  Megiddôn,  Zach.,  xu,  lll 
n'est  autre  que  la  plaine  d'Esdrelon  ou  de  Jezraël, 
entre  les  monts  de  Samarie  au  sud  et  ceux  de  Galilée 
au  nord.  Voir  Mageddo  3,  col.  560. 

5.  La  plaine  d'Ono  (hébreu  :  biq  al  'Onô),  II  Esd., 
vi,  2.  dans  laquelle  était  situé  le  village  d'Ono,  aujour; 
d'hui  Kefr  'Àna,  au  sud-est  de  Jaffa.  Voir  ONO  2, 
col.  1821. 

6.  La  plaine  d'Aven  (hébreu  :  biq  ai  'Avèn;  Sep- 
tante :  Tteôîov  TLiv;  Vulgate  :  campus  idoli,  «  la  plaine 
de  l'idole  »),  Ain.,  I,  5,  serait,  d'après  un  certain  nombre 
d'auteurs,  la  plaine  de  Cœlésyrie,  ce  qui  n'a  rien  de 
sûr.  Voir  Aven,  t.  i,  col.  1286. 

7.  La  plaine  de  Dura  (hébreu  :  biq'af  Dura'), 
Dan.,  III,  1,  aux  environs  de  Babylone.  Voir  Dira,  t.  n, 
col.  1517. 

2"  Kikkar.  Ce  mot,  qui  signifie  «  rond,  cercle.  »  el 
par  extension,  «  district,  »  est  plusieurs  fois  appliqué 
à  la  plaine  du  Jourdain.  Il  désigne,  en  particulier, 
l'oasis  fertile  qui  existait  autrefois  près  de  la  partie 
inférieure  du  lleuve  et  où  Mûrissaient  les  villes  de  la 
plaine.  On  trouve  ainsi  les  expressions  :  kikkar  hay- 
Yardên;  Septante  :  f,  neff/topo?  -où  'IopSâvou;  Vulgate  : 
regio  Jordanis,  Gen.,  xm,  10,  11,  etc.,  ou  simplement 
liak-kikkar,  Gen.,   xix.    17.  25.  28,   29.  Cf.   Matth.,  III, 

5.  Voir  Jourdain,  t.  m,  col.  1712. 

3°  'Ârûbtih,  avec  l'article  défini,  hd'Ardbdh,  dont 
l'idée  générale  est  celle  de  «  région  déserte,  stérile  ». 
C'est  une  des  expressions  caractéristiques  que  l'Ecri- 
ture emploie  pour  désigner  dans  son  ensemble  la 
plaine  ou  dépression  remarquable  qui  s'étend  des 
pentes  méridionales  de  l'Hermon  au  golfe  d'Akabali. 
Voir  Aiuiiaii.  t.  i,  col.  820.  Le  pluriel  'Arbôf,  souvent 
uni  à  Mô'db,  Nuin.,  xxti,  I;  xxvi,  3,  63;  XXXI,  12,  etc., 
et  à  Yeriltà,  «  Jéricho  ».  .lus.,  îv.  13;  v,  10;  IV  lteg., 
xxv,  5.  etc.,  il  indique  la  partie  de  la  plaine  du  Jour- 
dain qui,  au  nord  de  la  mer  Morte,  se  développe  sur 
les  deux  rives  du  lleuve,  à  l'ouest  aux  environs  de 
Jéricho,  à  l'est  dans  le  Ghôr  es-Çeisbdn,  jusqu'aux 
premières  hauteurs  de  Moab.  Voir  MOAB,  l,a  plaine 
inférieure,  col.  11  is. 

1"  Misnr,  plus  souvenl  avec  l'article.  ham-Miiôl'.  Ce 
mot,  de  la  racine  ijdSar,  «  élre  droit  »,  est  appliqué 
au  plateau  de  Moab.  lient  .  lit.  10;  iv,  43;  Jos..  \in.  9, 
etc.,  par  contraste  avec  les  inégalités  de  la  partie  occi- 
di  iii, île  de  la  même  contrée  et  les  montagnes  de  Galaad 
m  nord.  Voir  MisOB  1,  col.  1132. 
5°  Sefêlâh,  haS-aefêHh.  Cette  expression,  qui  signifie 

le  pavs  bas  ».  désigne  la  partie  de  la  plaine  CÔtière 
qui  s'étend  entre  les  montagnes  de  Juda  et  la  Méditer- 
ranée, el  dont  les  Philistins  formèrent  leur  territoire. 


Les  Septante  la  rendent  ordinairement  par  raStov, 
Deut.,  i,  7;  Jos..  XI,  2,  xu,  8;  r,  rceSevrj  [-;•?,],  Jos..  x.  40: 
xi,  16,  etc.  la  Vulgate.  par  campestris,  campestria, 
Jos.,  x,  40;  xv,  33:  Jud..  i,  9,  etc.;  planifies,  Jos.,  xi. 
16.  etc..  Voir  SéPHÉlah.  La  partie  supérieure  de  cette 
plaine,  celle  qui  va  de  Jaffa  au  Carrnel,  porte  le  nom 
de  baron.  Voir  Saron. 

6°  On  trouve  dans  saint  Luc.  VI,  17.  à  propos  du  lieu  où 
Notre-Seigneur  prononça  le  discours  sur  les  Béatitudes. 
l'expression  TQito;  Ttsôrvdç,  «  plateau  »:  Vulgate  :  locus 
campestris.  Voir  Béatitudes  (Mont  des),  t.  i,  col.  1528. 

On  voit  que  chacun  des  mots  hébreux  dont  nous 
venons  de  parler  a,  par  lui-même,  une  signification 
distincte.  C'est  ainsi  que  les  environs  de  Jéricho,  sui- 
vant les  divers  points  de  vue  sous  lesquels  on  les  con- 
temple, sont  dits  faire  partie  du  kikkar,  de  la  biq'àh 
ou  des  'arabôf.  Mais  le  misùr  ne  saurait  être  appelé 
une  blq'dh,  ni  la  biq'dli  une  ârdbdh.  De  même  encore 
le  mïiôr  nioabite  était  tout  à  fait  distinct  des  'arbôf 
Mô'db.  Ce  mot  mièôr  est  en  définitive,  étymologique- 
ment.  celui  qui  correspond  le  mieux  à  celui  de 
«  plaine  ».  —  Voir  VALLÉES.  Sur  le  sens  et  la  distinction 
des  différents  mots  employés  pour  »  plaines  »  et 
.<  vallées  »,  cf.  Stanley,  Sinai  and  Palestine,  Londres. 
1866,  Appendix,  p.  481-489.  A.  Legendre. 

PLAISIR  (hébreu  :    édndh,    êdén,   onég.  iimhdh. 

taàni'iq;  Septante  :  f/>>'/f1,:nv.fflij.j.  E*j?p09VV7],  Tvj;r,  : 
Vulgate  :  volnptas,  deliciœ,  luxuria),  satisfaction  plus 
ou  moins  vive  que  l'on  ('prouve  à  jouir  des  biens  de  ce 
monde. 

1"  Plaisirs  permis.   —  Dieu    a   attaché   le    plai-i 

I  accomplissement  de  certains  devoirs,  comme  ceux  île 
la  vie  conjugale,  lien.,  xviit.  12;  Gant.,  vu,  7,  du  travail, 
Eccle.,  ii.  10,  de  l'observation  du  sabbat,  Is..  î.vni,  13, 
de  la  fidélité  à  son  service,  Ps.  xxxvi  xxxv),  9,  de  la 
célébration  des  fêtes.  Il  Par.,  \\\.  23;  II  Esd.,  vni,  12; 
xu.  27,  etc.  La  jouissance  des  biens  de  la  vie  cause  un 
plaisir  légitime.  II  Esd.,  IX,  25.  I.'Ecclésiasto.  Il,  I.  8, 
24,  25;  v,  18.  a  usé  île  tous  les  plaisirs  en  pensant  qu'ils 
lui  venaient  de  Dieu.  Certains  plaisirs  se  trouvent  sur- 
tout auprès  des  rois.  Il  lîeg.,  i,  21:  Luc,  vu.  25,  et, 
d'après  les  versions.  II  l'.ir..  x.  10.  Ces  plaisirs  présen- 
tée cependant  des  inconvénients.  \  les  aimer  trop,  on 
tombe  dans  l'indigence.  Prov.,  xxi.  17.  Il  ne  sied  pas  à 
l'insensé  de  s'y  livrer,  Prov.,  xix,  10.  sans  doute  parce 
qu'il  ne  saura  pas  se  modérer.  Un  moment  d'aflliction 
les  fait  vite  oublier.  Eccli..  xi,  29.  L'avare,  qui  s'est 
privé,  laisse  ses  biens  à  d'autres,  qui  vivront  dans  les 
délices.  Eccli..  xiv.  4.  —  La  veuve  chrétienne  qui  vit 
dans  les  plaisirs,  esl  morte,  bien  quelle  paraisse 
vivante.  I  'fini.,  v,  6,  l'usage  immodéré  du  plaisir, 
même  légitime,  ne  convenant  pas  à  son  état,  VoirJOIE, 
t.  m.  col.   1597. 

2°  Plaisirs  coupables.  —  Les  impies  cherchent  par- 
tout le  plaisir  et  s'y  livrent  s. m-  retenue.  Sap.,  11,6-9; 
Luc,  xv,  13;  I  Cor..  xv,32;  I  Pet.,  iv,  3,  4.  A  Babylone, 
Châtiée  par  Dieu,  les  chiens  sauvages  devaient  hurler 
dans  les  «  maisons  de  plaisir  .  Is..  xm,  22.  Pendant 
la  persécution  d'Antiochus  Épiphane,  le  Temple  était 
devenu  un  lieu  de  plaisirs  infinies.  Il  Mach.,  VI,  4.  Les 
riches  vivent  sur  la  terre  dans  les  déliées  et  les  festins. 
comme  la  victime  qui  se  repail  le  jour  où  l'on  doit 
rger.  Jacob..  V,  5.  Saint  Pierre  accuse  les  faux 
docteurs  de  passer  toutes  les  Journées   dans    les   délices 

et,  par  leurs  il 'ies  pompeuses  et  vides,  d'attirer  les 

nouveaux  convertis  dans  les  convoitises   de    la   chair. 

II  Pet.,  il    13,   18.  Saint  Paul  signala  également  ces 

mêmes  faux  docteurs,  i  amis  des  voluptés  plus  que  de 
Dieu.  »  Il  Tim..in.  i.  Les  fidèles  de  Jésus-Christ,  autre- 
fois «  esclaves  de  toutes  sortes  de  convoitises  et  de 
jouissances  »,  ont  su  \  renoncer  pour  devenir  héritiers 
de  la  vie  éternelle.  TU.,  m,  3,  7.  Car  Notre- Seigneur  8 


457 


PLAISIR 


PLANÈTE 


458 


déclaré  que  o  les  plaisirs  de  la  vie  »,  soit  ceux  qui  sont 
coupables,  soit  même  ceux  qui  sont  légitimes,  mais 
dont  on  abuse,  sont  les  épines  qui  empêchent  la  bonne 
semence  de  croître  dans  les  âmes.  Luc,  vm,  14.  Saint 
Jean  rapporte  la  sentence  portée  contre  la  grande  Baby- 
lone  et  contre  tous  ceux  qui  ont  partagé  son  genre  de 
vie  :  «  Autant  elle  s'est  gloriliée  et  plongée  dans  le  luxe, 
autant  donnez-lui  de  tourmentetde  deuil.  »  Apoc,  xviii, 
T.  Voir  Gourmandise,  t.  m,  col. 281;  Ivresse,  col.  1048: 
Li.xe,  t.  iv.  col.  135;  Luxire,  ibicl.,  col.  136. 

H.  Lesètre. 
PLANCK  Heinrich  Ludvvig,  théologien  protestant, 
né  à  Gœttingue  le  19  juillet  1785.  mort  dans  cette  ville 
le  23  septembre  1831.  En  1806,  il  devint  répétiteur  à 
l'université  de  Gœttingue,  en  même  temps  que  Gese- 
nius,  et  y  enseigna  l'exégèse  et  l'hébreu.  Il  s'occupa 
principalement  de  la  critique  et  de  la  langue  originale 
du  Nouveau  Testament.  On  a  de  lui  :  Bemerkungen 
iiber  ilen  ersten  Paulinitchen  Brief  an  Timotheus, 
Gœttingue,  1808  (défense  de  l'authenticité  de  celte  Épître 


planètes,  qui  sont,  dans  l'ordre  de  leur  distance  du 
soleil.  Mercure,  Vénus,  la  Terre,  Mars,  Jupiter,  Saturne, 
(Jranus,  Neptune.  Ces  deux  dernières  ont  été  décou- 
vertes l'une  en  1781 ,  l'autre  en  1816.  On  a  de  plus  observé 
une  multitude  de  petites  planètes,  dont  le  nombre  at- 
teint plusieurs  centaines  et  s'accroît  avec  les  années.  — 
Les  anciens  ont  très  bien  reconnu  les  planètes  à  leurs 
signes  distinctifs.  Dans  le  système  cosmogonique 
babylonien,  Mardouk  avait  tracé  la  route  des  planètes 
dans  le  ciel,  et  avait  confié  à  des  dieux  la  garde  de 
quatre  d'entre  elles,  se  réservant  lui-même  de  veiller 
sur  celle  que  nous  appelons  Jupiter.  Cf.  Jensen,  Die 
Kosmalogie  der  Bahylonier,  Strasbourg,  1890,  p.  288- 
291.  Les  Babyloniens  ne  connaissaient  naturellement 
que  cinq  planètes,  confiées,  Jupiter  à  Mardouk,  Vénus 
à  Istar,  Saturne  à  Ninib,  Mars  à  Nergal,  Mercure  à  Nébo. 
Ces  attributions  ne  sont  pas  absolument  certaines. 
Cf.  Jensen,  Die  Kosmalogie,  p.  95-133;  Oppert,  Un 
annuaire  astronomique  babylonien,  dans  le  Journal 
asiatique,  1891  ;  Maspero,  Histoire  ancienne,  1. 1,  p.  669. 


90.  —  Les  planètes,  d'après  les  Babyloniens,  représentées  sur  une  borne,  sous  le  règne  de  Nabuchodonosor  1 
roi  de  Babylone,  vers  1300  avant  J.-C.  —  D'après  Jeremias,  Das  alte  Testament,  1C04,  flg.  5,  p.  11. 


contre  Schleiermacher);  Entwurf  einer  neuen  si/nop- 
tischen  Zusammenstellung  der drei  ersten  Evangelien, 
in-8»,  Gœttingue,  1809;  De  vera  natura  atque  indole 
orationis  grœrœ  Novi  Testamenti  commentatio,  in-4°, 
Gœttingue,  1810;  cet  essai,  qu'il  publia  comme  pro- 
gramme de  son  cours,  quand  il  fut  nommé  professeur 
extraordinaire  de  théologie  en  1810.  lui  acquit  une 
grande  réputation.  Il  travailla  les  dernières  années  de 
sa  vie  à  un  Lexique  du  Nouveau  Testament,  mais  la  mort 
l'empêcha  de  l'achever.  —  Voir  Fr.  Lucke,  Fr.  G.  J. 
Planck,  ein  biograpliischer  Versuch,  Gœttingue,  1835. 
Dans  cette  biographie  du  père  d'Henri  Louis,  in-8°; 
Lucke  a  réimprimé,  p.  135  sq.,  ce  qu'il  avait  écrit  du 
fils  en  1831  au  moment  de  sa  mort,  Zum  Andenken  an 
D.K.  L.  Planck.  eine  biographische  Miltheilung.  Voir 
Allgemeine  deutsclte  Biographie,  t.  xxvi,  1888,  p.  227. 

PLANÈTE,  corps  céleste  dont  la  révolution  est 
commandée  par  le  soleil  et  dont  l'orbite  décrit  une 
ellipse  autour  de  cet  astre.  Les  planètes  se  distinguent 
des  étoiles  fixes  par  leur  absence  de  scintillation  et  par 
leur  déplacement  au  milieu  des  étoiles.  C'est  par  suite 
d'une  simple  illusion  d'optique  que  les  planètes  parais- 
sent se  mouvoir  à  travers  les  étoiles,  car  elles  sont  à 
une  distance  effroyable  de  la  plus  rapprochée  de  ces 
dernières.  Les  planètes  n'ont  pas  de  lumière  propre; 
elles  réfléchissent  celle  qu'elles  reçoivent  du  soleil  et, 
en  conséquence,  présentent  des  phases  régulières, 
comme  la  lune.  On  distingue  aujourd'hui  huit  grandes 


Si  à  ces  planètes  on  ajoute  le  soleil  ou  Samas  et  la 
lune  ou  Sin,  on  a  les  sept  planètes  des  anciens  (fig.  90). 
On  a  retranche  depuis  de  ce  nombre  le  soleil,  qui  n'est 
pas  une  planète,  et  la  lune,  qui  est  un  satellite  de  la 
terre,  et  l'on  y  a  ajouté  la  terre  elle-même,  qui  est  une 
planète.  —  Les  Égyptiens  connaissaient  aussi  les  cinq 
planètes,  Ouapshetalooui  ou  Jupiter,  Kahiri  ou  Saturne, 
Sobkou  ou  Mercure,  Doshiri,  «  le  rouge  »,  ou  Mars,  et 
Bonou,  «  l'oiseau  »,  ou  Vénus,  ayant  double  figure, 
Ouàiti,  ou  étoile  du  soir,  et  Tiou-noutiri,  ou  étoile  du 
matin.  Cf.  E.  de  Rougé,  Note  sur  les  noms  égyptiens 
des  planètes,  dans  le  Bulletin  archéologique  de  l'Athe- 
nœum  français,  t.  il,  p.  18-21,  25-28.  Sur  un  plafond 
du  tombeau  de  Séti  Ier,  sont  représentées  trois  planètes 
debout  sur  leurs  barques  et  cheminant  lentement  sous 
la  conduite  de  Sàhou  ou  Orion  et  de  Sothis  ou  Sirius 
(lig.  91).  —  Les  écrivains  sacrés  ne  mentionnent  qu'in- 
cidemment quelques  planètes  :  liëlèl,  Vénus, voir  LUCI- 
FER, t.  IV,  col.  407;  hag-Gad,  probablement  Jupiter, 
voir  Gad,  t.  m,  col.  24;  kîyyûn,  correspondant  à  l'as- 
syrien kaivanû,  Saturne,  cf.  Jensen,  Kosmologie, 
p.  111-116;  Oppert,  Tablettes  assyriennes  dans  le 
Journal  asiatique,  6e  sér.,  t.  XVIII,  1861,  p.  445; 
voir  Rempham.  Saint  Jude,  13.  assimile  les  docteurs  de 
mensonge  à  des  7t>ivr,-î;  ia-ioz;,  «  astres  errants  ».  Il 
est  probable  que  l'apôtre  songe  plutôt  aux  comètes. 
Voir  Comète,  t.  n,  col.  877.  Les  Chaldéens  cependant 
comparaient  les  planètes  à  des  moutons  capricieux. 
libbou,  échappés  au    troupeau   des    étoiles  pour  s'en 


459 


PLANETE 


PLAT 


460 


aller  paître  à  leur  guise.  Cf.  .lensen,  Die  Kosmologie, 
p.  95-99;  Jeremias,  Dus  aile  Testament,  in-8».  Leipzig, 
1904.  p.  9-16.  H.  Lesétre. 

PLANTAVIT  DE  LA  PAUSE  Jean,  évêque  fran- 
çais, né  en  1576  au  château  de  Marcassargues,  dans  le 
Gévaudan  (aujourd'hui  le  département  de  la  Lozère  . 
mort  au  château  de  Margon,  près  de  Béziers,  en  1651. 
Élevé  dans  le  calvinisme,  que  professaient  ses  parents, 
il  y  resta  jusqu'à  l'âge  de  i\\  ans.  Il  remplissait  même 
les  fonctions  de  ministre  à  Béziers,  lorsqu'il  se  conver- 
tit au  catholicisme  et  lit  son  abjuration  dans  cette 
ville  (1605).  Par  la  suite  il  devint  prêtre,  et  après  avoir 
été,  successivement,  grand  vicaire  du  cardinal  de 
La  Rochefoucauld,  aumônier  d'Elisabeth  de  France, 
reine  d'Espagne,  il  fut  promu,  en    1625,  par  l'interven- 


liebraico-latini  loco,  sacrœ  linguse  studiosis  inservire 
posait,  in-f°,  Lodève,  1644.  Son  second  ouvrage  est  inti- 
tulé :  Florilegium  rabbinicutn,  ordine  alphabetico 
digestion,  complectens  hebraicas  et  chaldaicas  vete- 
rum  rabbinorum  sententias  duplici  charactere  rabbi- 
nico  et  quadrato  exaratas,  versione  latina,  brevibut- 
giie,  ubi  opns  est,  scholiis  in  grattant  studiosorum 
linguw  sanctx  illust ratas,  in-f  ".  Lodève,  1644.  A  la  lin 
une  table  donne  les  noms  de  tous  les  rabbins  dont  les 
maximes  sont  citées.  Dans  cet  ouvrage  l'auteur  fait  de 
nombreux  rapprochements  avec  les  maximes  de  1  An- 
cien et  du  Nouveau  Testament. 

Cet  ouvrage  appelait  comme  complément  le  suivant  : 
Florilegium  biblicum,  complectens  ontnes  utriusque 
Testament!  sententias  hebraice  et  grsece  cum  versione 
latina  et  brevi  juxta  literalem   sensu»)  commentariu 


91.   —   Planètes  et  constellations  représentées  en   Egypte  sur  le  tombeau  de   >■      I 
D'apn  -  E,  Lefébure,  Les  hypogées  royaux  de  Thèses,  V  part.,  pi,  xxxvi. 


tion  de  celte  princesse,  à  l'évdché  de  Lodève.  Ses 
infirmités  l'obligèrent  à  résigner  ce  siège,  en  Hi4S. 
pour  se  retirer,  dans  le  diocèse  de  Béziers,  au  château 
de  Margon.  Il  avait  étudié  l'hébreu  avec  le  plus  grand 
soin,  et  l'on  a  de  lui  sous  un  titre  qui  rappelle  le  nom 
de  l'auteur  :  |::n  7::,  néla  haggéfén,  Planta  viti 
Thésaurus  synonijmicus-bebraico-clialdaico-rabbini- 
cus,  in  i/ua  omnes  totius  hebraicas  linguee  voces  una 
cum  plerisque  rabbinicis,  talntudicis,  chaldaicis,  ea 
runtque  significationes,  elymon,  synonymia,  usas, 
elegantise,  paraphrases,  idiolismi,  ex  hebraicorunt 
Bibliorum  contexlu,  horuni  chaldaicis  paraphrasibus, 
ex  immensa  codicum  Babylonici  el  Bierosolymilani 
Talmudica  farragine,  ex  Rabbinorum  ru,, nu,  ntalori- 
btts,  grammaticis  expositoribus,  cabbalistis,  pliiloso- 
pliis  et  thenlogis,  aliisque  reconduis  Hebrseorum 
monuntentis,  nova  et  exacta  methodo,  per  hexapla 
-i?i>> /;><.>;  demonstrantur,  ac  una  cum  auctorit, 
e  sacrarum  litterarum  corpore  depromptis  energiam 
et  emphasim  vocum  perhibentibus  ample  ac  dilucide 
explieantur  :  nonnulîorum  quoque  vocabulorum  grec- 
corum,  latinorum,  gallicorum,  italicorum,  hispani- 
corum,  germante,,/  uni,  anglicorum,  belgicorum,  po- 
lonicorum,  ex  elymologia  ab  hebrœo  seu  che 
idwmate  petita  passim  ubique  indicatur;  Quibus  ac- 
cessit duplex   lu, 1er   locupletissimus  qui  jusli  lexici 


illustrât  as.  L'ouvrage  est  divisé  en  deux  parties.  La 
l"  contient  les  maximes  tirées  des  livres  de  l'Ancien 
testament  écrits  en  hébreu,  La  seconde  renferme  les 
maximes  du  Nouveau  Testament  et  des  livres  écrits  en 
grec  de  l'Ancien  Testament.  Les  maximes  sont  dispo- 
sées  par  ordre  alphabétique  du  l"  mot  de  la  sentence 
biblique  en  hébreu  ou  en  grec.  In-f°,  Lodève,  1645.  A 
la  lin  an  index  donne  toutes  les  sentences  d'après  la 
Vulgate  selon  l'ordre  alphabétique.  Une  table  des  prin- 
cipales matières  termine  le  volu I  n  exemplaire  de 

ces  trois  volumes  se  trouve  à  la  Bibliothèque  nationale 
.t  2718,  -,'',  lu  n  2720.  —  Sur  le  mouvement  d'études 
bibliques  auquel  se  rattache  la  composition  du  premier 
de  ces  ouvrages,  voir  t.  Il,  col.  1415,  1416:  pour  la  bio- 
graphie, cf.  Poitevin-Peltavi  .  Notice  sur  Jean  Planla- 
vit  de  la  Pause,  in-8",  Béziers,  1SI7.  0.  Rey. 

PLANTES  DE  PALESTINE.  Voir  Botaniqi  i    SA- 
CRÉE, t.i.col.  1867-1869;  Palestine,  t.  iv,  col.  2035  2041 . 
arbres,  1. 1,  col. 888-894;  Herbes  el  Herbacéi  s{pla 
t. m,  col. 599 et  596-599;  Fleur,  t.  n,  col.  2287;  i.i 
t.  n.  col.  160,  et  l'article  consacré  à  chaque  plante. 

PLAT  (hébreu  :  satinant,  sel6h.it;  grec:  -:.,x-.,  rpu- 
.,/:',..  rr,oi::;  Vulgate  :  ras,  catinus,  paropsis  .  usten- 
sile  servant  à  contenir  certains  aliments.  Cet  ustensile 


461 


PLAT 


PLATANE 


462 


a  le  fond  plat  et  est  muni  do  bords  plus  ou  moins  élevés. 
Il  ne  sert  pas  ordinairement  à  la  cuisson;  celle-ci  se  fait 
au  four  ou  dans  des  marmites.  Voir  Chaudière,  t.  n, 
col.  628.  —  1°  Alin  d'assainir  des  eaux,  Elisée  y  jeta  du 
sel  qu'on  lui  avait  apporté  dans  un  plat  neuf,  J6pi'Txr„ 
■<  vase  à  eau  »,  vas.  IV  Reg.,  n.  20.  —  Pour  donnerune 
idée  des  malheurs  que  l'impiété  de  Manassé  attirera  sur 
Jérusalem,  le  Seigneur  dit  qu'il  nettoiera  la  ville  comme 
le  plat  qu'on  nettoie  et  qu'on  retourn"  onsuite,  c'est-à- 
dire  qu'il  y  fera  place  nette  et  bouleversera  tout  de 
fond  en  comble.  IV  Reg.,  xxi,  13.  Les  versions  appellent 
ici  le  plat  àù.6.?jzrs-poz,  «  vase  d'albâtre  »,  tabulas,  «  tablet- 
tes», plateaux.  —  Sous.losias,  on  lit  cuire  les  victimes  de 
la  Pàque  dans  des  chaudrons  et  des  plats,  ollee.  II  Par., 
x\xv.  13.  —  Il  est  dit  du  paresseux  qu'il  plonge  la  main 
dans  le  plat  et  ensuite  a  de  la  peine  à  la  ramener  jus- 
qu'à sa  bouche.  Prov.,  xix,  24;  xxvi,  15.  Les  versions, 
qui  n'ont  compris  nulle  part  le  sens  du  mot  sallahat, 
le  traduisent  ici  par  «  sein  »  et  «aisselle  ».  —  2°  Notre- 
Seigneur  reproche  aux  scribes  et  aux  pharisiens  de 
nettoyer  le  dehors  de  la  coupe  et  du  plat  en  laissant  à 
l'intérieur  la  rapine  et  l'intempérance.  Matth.,  XXIII, 
25,  26;  Luc,  xi,  39.  Le  TtîvaE,  dont  parle  ici  saint  Luc, 
était  originairement  une  planche;  le  nom  est  passé  suc- 
cessivement au  plateau  de  bois,  puis  au  plat  de  terre  ou 
de  métal.  —  Judas  met  la  main  au  plat  en  même  temps 
que  le  Sauveur,  c'est-à-dire,  comme  l'indique  le  con- 
texte, prend  part  au  même  repas  que  lui.  Matth.,  XXVI, 
23:  Marc,  xiv,  20.  Le  catinus  de  la  Vulgate  était   un 


92.  —  Le  sacro  catino. 
D'après  Rich,  Dictionnaire  des  antiquités,  p.  128. 

plat  assez  profond  dans  lequel  on  servait  des  légumes, 
de  la  volaille  et  du  poisson.  Cf.  Horace,  Sat.,  I,  vi,  115; 
II,  il,  39;  iv.  77.  On  conserve  à  Gènes,  dans  le  trésor 
de  la  cathédrale,  le  sacro  catino  (lig.  92),  vase  précieux 
apporté  de  Césarée  de  Palestine  en  1 101,  qu'on  dit  avoir 
servi  à  Xotre-Seigneur  pendant  la  dernière  Cène  et  à 
Josèphe  d'Arimatiiie  pour  recueillir  le  sang  des  bles- 
sures du  Sauveur.  Tombé  au  pouvoir  des  Génois,  après 
la  première  croisade,  il  fut  prodigieusement  célèbre 
au  moyen  âge  sous  le  nom  de  Saint-Graal.  On  le  croyait 
en  émeraude;  mais  il  fut  brisé  quand  Napoléon  Ier  le 
fit  transporter  à  Paris,  et  l'on  reconnut  qu'il  n'était 
qu'en  pâte  de  verre  orientale  ancienne.  Ses  faibles  di- 
mensions ne  permettent  pas  de  croire  qu'il  ait  jamais 
pu  servir  de  plat  dans  un  festin  pascal.  Cf.  A.  de  La- 
borde,  Notice  des  émaux,  bijoux,  etc.,  conservés  au 
Louvre,  Paris,  1853,  p.  333.  H.  Lesétre. 

PLATANE  (hébreu  :  armt'm;  Septante  :  TïXiravo:, 
Gen.,xxx,37,  etl/irr,,  Ezech.,  xxi,  8;  Vulgate  :  plata- 
nus). un  des  grands  arbres  de  Palestine. 

I.  Description.  —  Les  arbres  de  cette  famille  se 
rapportent  à  un  genre  unique  et  même,  selon  Spacb, 
à  une  seule  espèce,  ce  qui  est  incontestable  au  moins 
pour  l'ancien  inonde.  Par  ailleurs  leur  structure  est  si 
spéciale  qu'ils  ne  peuvent  être  confondus  avec  aucun 
autre  type  végétal,  et  que  leurs  affinités  même  restent 
douteuses.  Les  Heurs  petites  et  unisexuées  sont  grou- 
pées en  capitules  monoïques,  globuleux  et  espacés  sur 
de  longs  pédoncules  terminaux  et  pendants.  Les  étami- 
nes,  comme  les  pistils,  y  sont  entremêlés  de  poils  écail- 
leux  considérés  comme  des  bractées, des  périanthes  ru- 
dimentaires  et  des  organes  sexuels  avortés.  Chaque  fruit 
isolé  est  un  achaine  claviforme,  avec  style  terminal 
persistant,  et  entouré  à  sa  base  de  poils  raides  articulés. 


Le  Platanus  orientalis,  de  Linné  ilig.  93),  d'origine 
méditerranéenne  et  surtout  asiatique,  a  été  répandu 
par  la  culture  dans  toutes  les  régions  tempérées, 
parce  qu'il  supporte  des  froids  très  rigoureux,  et 
prospère  également  sous  les  climats  chauds,  surtout 
au  voisinage  des  eaux.  Il  devient  alors  un  arbre  de 
première  grandeur,  à  cime  large  et  régulière,  donnant 
un  ombrage  très  épais  et  ainsi  très  propre  à  orner  les 
places  publiques.  Ses  larges  feuilles  alternes  et  palma- 
tilobées  sont  munies  de  stipules  concrescentes  en 
forme  de  manchette,  et  la  base  de  leur  pétiole  se  di- 
late en  une  poche  qui  protège  le  bourgeon  axillaire. 
Il  se  distingue  surtout  de  tous  les  autres  arbres  d'ave- 
nue par  l'exfoliation  de  ses  couches  corticales  externes, 
qui  tombent  par  grandes  loques,  laissant  le  tronc  lisse 
et  nu.  Boissier   dit  bien   que   le   vrai    platane   d'Orient 


93.  —  Platanus  orientalis. 

aurait  son  écorce  persistante  et  rugueuse  (Flora  orien- 
talis, t.  îv,  p.  1162),  mais  c'est  sans  doute  une  manière 
un  peu  exagérée  d'exprimer  la  différence  entre  les 
écailles  petites,  alignées  longitudinalement  et  plus 
longtemps  persistantes  du  type  Platanus  orientalis,  et 
les  larges  plaques  irrégulières,  promptement  caduques, 
de  sa  variété  acerifolia,  de  beaucoup  la  plus  répandue, 
et  qui  se  distingue  en  outre  par  ses  feuilles  à  lobes 
moins  profonds.  Cette  même  variété  acerifolia  a  plus 
souvent  encore  été  confondue  avec  le  type  américain 
des  platanes,  Platanus  occidentalis  L.,  qui  a  le  limbe 
foliaire  superficiellement  lobé,  plus  large  que  long,  avec 
un  duvet  persistant  plus  longtemps  sur  les  nervures  de 
la  page  inférieure,  et  un  seul  capitule  fructifère  pen- 
dant à  l'extrémité  de  chaque  pédoncule.        F.  Ilv. 

II.  Exégèse.  —  L"armôn  est  mentionné  deux  fois 
dans  le  texte  hébreu  de  l'Ancien  Testament.  Dans 
Gen.,  xxx,  37,  nous  voyons  Jacob  prendre  des  baguettes 
de  peuplier,  d'amandier  et  d"armôn,  y  peler  des 
bandes  blanches  et  les  placer  ainsi  en  face  des  brebis 
qui  venaient  s'abreuver.  Dans  Ézéchiel,  xxxi,  8,  Assur 
est  comparé  à  un  cèdre  du  Liban  dont  les  rameaux 
sont  si  puissants  qu'ils  égalent  des  cyprès  et  des 
'armôri.  L'étyinologie  (arman,  «  dépouiller  »,  'armôn, 
l'arbre  qui  se  dépouille  de  son  écorce),  la  place   que 


463 


PL AT AN K    —    PLÉIADES 


464 


les  deux  textes  lui  donnent  au  milieu  des  grands 
arbres,  la  traduction  généralement  adoptée  par  les  an- 
ciennes versions,  ne  laissent  guère  place  au  doute  dans 
l'identification  de  'armôn  considéré  comme  le  platane. 
—  Dans  l'éloge  delà  Sagesse.  Eccli.,  xxiv,  19,  le  platane 
est  également  présenté  comme  un  bel  et  grand  arbre. 
Aussi  les  exégètes  sont-ils  presque  tous  d'accord  pour 
rejeter  le  châtaignier  (que  les  rabbins  voient  habituel- 
lement dans  'armôn,  bien  que  cet  arbre  ne  croisse  pas 
en  Palestine)  et  pour  rejeter  aussi  l'érable,  reconnais- 
sant dans  'armôn,  le  Platanus  orientalis.  —  Le  platane 
est  répandu  dans  toute  la  Palestine  et  s'y  montre  comme 
un  très  grand  arbre,  aux  larges  rameaux  et  épais  om- 
brages. Et  ce  qui  est  conforme  à  nos  deux  textes  hé- 
breux qui  nous  transportent  en  Syrie,  en  Assyrie  et  en 
Mésopotamie,  les  platanes  de  ces  dernières  régions  dé- 
passent en  général  la  hauteur  et  les  proportions  que 
cet  arbre  atteint  en  Palestine,  lîelon,  Observations  de 
plusieurs  singularités,  in-8°,  1588,  1.  I,  c.  cv:  Jean 
de  la  Roque,  Voyage  de  Syrie  et  du  mont  Liban,  Paris, 
1722,  p.  197,  199.  L'ne  constatation  de  ce  dernier  ou- 
vrage, p.  68,  semble  être  le  commentaire  du  passage 
d'Ézéchiel,  xxxi,  8.  Parlant  des  cèdres  groupés  au 
sommet  du  Liban  et  qui  forment  comme  une  petite 
forêt,  cet  auteur  ajoute  :  «  Elle  est  composée  de  vingt 
cèdres  d'une  grosseur  prodigieuse,  et  telle  qu'il  n'y  a 
aucune  comparaison  à  faire  avec  les  plus  beaux  pla- 
tanes, sycomores,  et  autres  gros  arbres  que  nous  avons 
vus  jusqu'alors.  »  Voir  0.  Celsius,  Hierobotanicon, 
in-8°,  Amsterdam,  17'iS,  t.  i,  p.  512;  I.  Low,  Aramâische 
Pflanzennamen,  in-8",  Leipzig,  1881,  p.  107. 

E.  Levesque. 

PLATRE,  produit  de  la  calcination  du  gypse.  Le 
gypse  est  un  sulfate  de  chaux  hydraté,  qui  perd  son 
eau  quand  on  le  calcine  au  four.  Le  produit  de  cette 
opération,  réduit  en  poudre,  est  le  plâtre.  Délayé  avec 
de  l'eau,  le  plâtre  devient  une  pâte  molle  qui  prend 
toutes  les  formes  que  l'on  désire  et  les  garde  en  dur- 
cissant peu  â  peu.  —  Le  plâtre  n'est  pas  directement 
mentionné  dans  la  Bible.  Mais  le  gypse  ne  manquait  pas 
en  Palestine;  les  couches  gypseuses  du  cénomanien 
affleuraient  en  particulier  au  bord  de  la  nier  Morte. 
Voir  Palestine,  t.  rv,  col.  2010,2014,  2022.  Il  n'était  pas 
plus  difficile  â  utiliser  pour  faire  du  plâtre,  que  le  cal- 
caire pour  faire  de  la  chaux.  Voir  Chaux,  t.  Il,  col.  642. 
Les  Hébreux  n'ont  guère  dû  s'en  servir  dans  leurs  con- 
structions ;  les  pierres  y  étaient  simplement  superposées 
ou  le  mortier  \  agglutinait  les  matériaux  sans  consis- 
tance. Voir  Mortier,  t.  iv.  col.  1312.  Le  plâtre  ne  pou- 
vait être  utilisé  que  pour  faire  des  enduits  dans  des 
endroits  â  l'abri  de  l'humidité.  Voir  ENDUIT,  t.  Il, 
col.  1783.  Les  Hébreux  durent  apprendre  des  Phéniciens 
â  fabriquer  et  â  utiliser  le  plâtre,  â  supposer  que  les 
Chananéens  ne  l'aient  pas  connu  avant  leur  arrivée. 
on  a  trouvé  en  Espagne  la  trace  du  passage  des  Phé- 
niciens dans  les  objets  que  renfermaient  d'anciennes 
sépultures.  Ce  sont  des  débris  de  vases  phéniciens  en 
plâtre,  des  fonds  de  pots  troués  et  bouchés  avec  du 
plâtre,  des  cols  de  plâtre  ajoutés  â  des  vases  de  terre 
cuite  et  peints  en  rougi',  des  crépissages  de  mu- 
raille, etc.  Cf.  L.  Siret,  Orientaux  et  Occidentaux  en 
Espagne  aux  temps  préhistoriques,  dans  la  Revue  des 
questions  scientifiques  de  Bruxelles,  oct.  1906,  p  558, 
559.  Les  Phéniciens  ne  faisaient  ainsi  qu'importer  au 
loin  une  industrie  bien  connue  dans  leur  pays  d'origine. 

11.  I.I.SI.THE. 

PLECTRE.  Le  plectre  (irMjxTpov,  de  tA^tteiv,  <•  pin- 
cer, frapper  »  les  cordes,  en  latin  plecto;  on  disait 
aussi  xpoûetv.  Le  terme  technique  était  xpfxeiv)  était 
un  bâtonnet,  pointe  ou  crochet,  de  bois,  d'ivoire  ou 
de  métal,  droit  on  recourbé,  dont  on  se  servait  pour 
faire  vibrer  les  cordes  des  instruments,  au  lieu  de  les 
toucher    directement  avec    les    doigts.    On   employait 


aussi  pour  le  même  usage  un  crochet  de  corne  ou  un 
bec  de  plume.  Les  Orientaux  modernes  fixent  souvent 
le  plectre  â  un  anneau  tenu  au  doigt  et  peuvent  ainsi 
en  employer  plusieurs  simultanément.  L'usage  du 
plectre,  moins  ancien  que  le  procédé  de  percussion 
manuelle,  est  peut-être  d'origine  grecque.  La  Bible  ne 
le  mentionne  pas,  non  plus  qu'Homère.  Il  est  repré- 
senté' cependant  en  Egypte  entre  les  mains  de  musiciens 
bédouins  ou  Amou  du  temps  de  la  XIIe  dynastie, 
voir  t.  ii,  lig.  304,  col.  1068,  et  l'espèce  de  harpe  dont 
ces  musiciens  se  servaient  a  dû  être  connue  des 
Hébreux.  On  rapporte  à  Sapho  l'invention  du  plectre, 
mais  Athénée  remarque  qu'Épigone  d'Amhracie.  au 
VU"  siècle,  dédaignait  de  s'en  servir  :  no-jaixioTaro;  S'ûv 
xari  xE'Pa  î'X"  tWprcpou  ïlix'tïvi-  Deipnos.,  îv.  25, 
p.  183.  C'était  une  exception.  Il  est  évident  que  les 
Grecs  apprécièrent  un  procédé  d'exécution  qui  augmen- 
tait l'émission  du  son  et  sa  résonnance  et  multipliait 
l'effet  musical  en  diminuant  la  fatigue  du  joueur.  Ils 
l'appliquèrent  â  la  cithare,  à  la  lyre,  au  psaltérion, 
même  aux  instruments  â  manche,  mais  non  exclusive- 
ment; les  deux  procédés  de  percussion  étaient  employés 
concurremment.  Les  monuments  représentent  en  effet 
des  musiciens  jouant  avec  le  plectre  de  la  main  droite 
pendant  que  la  main  gauche  nue  pince  les  cordes. 
C'était,  à  peu  près  comme  dans  le  jeu  actuel  de  la 
Zitber,  le  moyen  de  faire  ressortir  le  chant;  et  l'on 
disait,  sans  doute  d'après  la  manière  dont  le  musicien 
tenait  son  instrument,  foris  canere,  pour  «  jouer  (de  la 
main  droite)  avec  le  plectre  »,  et  intus  canere,  «  toucher 
les  cordes  avec  les  doigts  (de  la  main  gauche)  ».  Cicéron, 
1  err.,  i,  20,  53,  qui  nous  rapporte  ces  expressions  mu- 
sicales, mentionne  le  cithariste  Aspendius,  qui  pouvait 
exécuter  à  la  fois  l'accompagnement  et  le  chant  de  la 
main  gauche  seule.  Ibid.  Chez  les  Grecs  même,  les 
instruments  asiatiques  proprement  dits  se  jouaient  s.m- 
plectre,  mais  cet  accessoire  fut  importé  de  Grèce  chez 
les  Asiatiques  avec  les  instruments  nouveaux,  ainsi  que 
l'attestent  les  monuments  ass\  riens,  et  les  Hébreux 
durent  s'en  servir  pareillement,  après  la  captivité.  Du 
moins  Josèphe  l'exprime-t-il  indirectement  en  mention- 
nant e  nable  antique  qui  se  jouait  sans  plectre. 
Ant.jud.,  Vil,  xii,  3.  Mais  les  rares  indications  musi- 
cales de  cette  période  ne  nous  fournissent  aucun  texte 
qui  démontre  l'usage  du  plectre  dans  la  musique  du 
second  temple  ou  dans  l'usage  privé.      J.  Pahisot. 

PLÉIADES  (hébreu  :  kimdh;  Septante  :  ID.ciiSe;; 
Vulgate  :  Pléiades),  constellation  de  l'hémisphère  boréal, 
voisine  de  la   tète  du   Taureau  (lig.  94).    Voie  HYADES, 


f>/eu 


^*v        *    Coe/eno 
4tcj/pn? Ï^TXomqut  ou  C 
Alias  .  Electre 

Merope 


t/"j-f. 


?<**-  ----_ 


J|3~~, 


94.  —  Les  Pléiades. 

t.  ni,  col.  789.  Elle  compte  plus  de  2500  étoiles,  dont 
tii  principales,  parmi  lesquelles  cependant  sept  ou  huit 
seulement  sont  visibles  â  l'œil  nu.  D'après  quelques 
auteurs  modernes,  kimdh  désignerait  Sirius  ou  le 
Scorpion.  Mais  un  passage  de  .lob,  XXXVIII,  31,  «  Est-ce 
toi  qui  serres  les  liens  de  kintdh  '     -appose  clairement 


465 


PLÉIADES   —   PLEUREUSES 


466 


qu'il  s'agit  d'un  groupe  d'étoile?,  et,  d'après  les  an- 
ciennes versions,  ce  groupe  n'est  autre  que  celui  des 
Pléiades.  L'Iliade,  xvm,  486,  signale  également  ce 
groupe  parmi  les  constellations  les  plus  remarquables. 
Deux  autres  passages  bibliques  mentionnent  kimâh 
parmi  les  œuvres  importantes  du  Créateur.  Dans  le 
premier,  Job,  ix,  9,  les  Septante  traduisent  par  Pléiades 
et  la  Vulgate  par  Hyades;  dans  le  second,  Amos,  v, 
8.  les  Septante  rendent  le  mot  par  raivTa,  «  toutes 
choses  ».  et  la  Vulgate  par  Arcturus.  Voir  Arcturus, 
t.  i.  col.  937.  H.  Lesêtre. 

PLEURANTS  < LIEU  DES),  Locus  Flentium,  dans 
la  Vulgate,  ,Iud..  u,  1,5.  Voir  Bokiji,  t.  i,  col.  1843. 

PLEUREUSES  (hébreu   :  meqônenôf,  de   gin,  au 
pilel  qénên,  o  chanter  des  chants  lugubres  »;  Septante: 


95.  —  Pleureuses  égyptiennes  dans  le  cortège  funèbre. 
D'après  Wilkinson,  Vannera  and  Custons,  t.  in,  pi.  LXVI. 

8pt]vo-j<rai;  Vulgate  :  lamentatrices),  femmes  qui  pous- 
saient des  cris  lugubres  dans  les  funérailles.   —    Chez 


l'extrême  du  désespoir,  mais  les  parents  et  les  amis  ne 
craignaient  pas  de  se  donner  en  spectacle,  ni  de  trou- 
bler l'indifférence  des  passants  par  l'intempérance  de 
leur  deuil.  »  Maspero.  Histoire  ancienne,  t.  Il,  1S97, 
p.  511  Cf.  Lectures  historiques,  Paris,  •1890,  p.  1 VI- 
152.  Les  pleureuses  accompagnaient  le  convoi  funèbre 
(fig.  95),  en  poussant  des  exclamations  pour  répondre 
à  celles  de  la  parenté  :  «  A  l'occident,  demeure  d'Osiris, 
à  l'occident,  toi,  le  meilleur  des  hommes  !  »  Sur  le  Nil, 
elles  montaient  dans  une  barque  et  y  continuaient  leurs 
gestes  éplorés  et  leurs  cris  de  douleur  (fig.  96).  Enfin, 
à  la  tombe  même,  elles  faisaient  au  mort  les  adieux 
suprêmes  :  »  Plaintes!  plaintes!  Faites,  faites  des 
lamentations  sans  cesse,  aussi  haut  que  vous  le  pouvez! 
0  voyageur  excellent,  qui  chemines  vers  la  terre  d'éter- 
nité, tu  nous  as  été  arraché!  0  toi  qui  avais  tant  de 
monde  autour  de  toi,  te  voici  dans  la  terre  qui  impose 
l'isolement!  »  Cf.  .Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  m, 
p.  516.  518.  Voir  t.  Il,  fig.  705,  col.  2417;  t.  iv,  fig.  459, 
col.  17V9;  Funérailles,  t.  u,  col.  -2416-2420.  —  La  mode 
de  ces  bruyantes  démonstrations  ne  s'est  point  perdue. 
Chez  les  Arabes,  quand  quelqu'un  est  mort,  «  les  fem- 
mes crient  de  toutes  leurs  forces,  s'égratignant  les  bras, 
les  mains  et  le  visage,  arrachant  leurs  cheveux  et  se 
prosternant  de  temps  en  temps,  comme  si  elles  étaient 
pâmées  de  douleur.  »  De  la  Roque,  Voyage  dans  la 
Palestine,  Amsterdam,  1718,  p.  260.  En  Palestine,  aux 
enterrements  des  musulmans  actuels,  on  voit  en  tête  du 
cortège  «  une  troupe  de  gamins  affublés  ou  plutôt  dé- 
guenillés à  l'orientale,  guidés  par  un  gamin  chef  qui 
n'arrive  jamais  à  les  faire  mettre  en  rang,  ni  à  leur 
faire  comprendre  la  mesure  de  la  cantilène  criarde 
qu'ils  ont  mission  de  chanter...  La  marche  est  fermée 
par  une  troupe  de  femmes  enveloppées  de  longues  robes 
et  drapées  de  manteaux  de  toile  indigo;  elles  poussent, 
en  signe  de  douleur,  de  petits  cris  stridents;  chacune 
tient  à  la  main  un  mouchoir  de  couleur  sombre  qu'elle 
tortille  avec  toute  espèce  de  contorsions  et  agite  dans 


[»iïlil?nwnra 


ïfiîtPWJM  .UUIMI 


«eiiiui!, 


96-  —  Pleureuses  égyptiennes  sur  la  barque  funéraire.  D'après  Wilkinson,  Ibid-,  pi.  lxvii. 


les  Orientaux,  la  douleur  a  toujours  été  fort  démonstra- 
tive. En  Egypte,  par  exemple,  «  les  enterrements 
n'étaient  pas.  comme  chez  nous,  de  ces  processions 
muettes  où  la  douleur  se  trahit  à  peine  par  quelques 
larmes  furtives;  il  leur  fallait  du  bruit,  des  sanglots, 
des  gestes  désordonnés.  Xon  seulement  on  louait  des 
pleureuses  à  gages  qui  s'arrachaient  les  cheveux, 
chantaient    des    complaintes  et  simulaient   par  métier 


la  direction  du  corps,  comme  si  elle  voulait  l'asperger 
des  larmes  que  le  tissu  est  censé  avoir  essuyées.  Ce 
sont  des  pleureuses  de  profession,  louées  pour  la  cir- 
constance ».  Chauvet-Isamhert,  Syrie,  Palestine,  Paris, 
1890,  p.  165-166.  —  Les  pleureuses  n'étaient  pas  incon- 
nues chez  les  anciens  Israélites.  On  s'y  lamentait  sur 
les  morts.  III  Reg.,  xm,  30.  Voir  Deiil,  t.  Il,  col.  1397. 
Les  chanteurs  et  les  chanteuses  firent  entendre  leurs 


467 


PLEUREUSES 


PLOMB 


468 


lamentations  sur  Josias.  II  Par.,  xxxv,  25.  Dans  sa  pro- 
phétie sur  la  ruine  de  Jérusalem,. Urémie,  ix,  17-20,  écrit  : 

Pensez  à  commander  les  pleureuses,  qu'elles  viennent! 

Envoyez  chez  les  plus  habiles,  qu'elles  viennent  ! 

Qu'elles  se  hâtent,  qu'elles  entonnent  sur  nous  des  lamenta- 

Que  les  larmes  coulent  de  nos  yeux....  [tions, 

Ensei^n'/  .i  \   s  tilles  une  lamentation, 

Que  chacune  apprenne  à  sa  compagne  un  chant  de  deuil. 

Car  la  mort  est  montée  par  nos  fenêtres... 


TTo'/Xï,  /lentes  et  e jutantes  multum,  des  pleureuses  qui 
se  lamentaient  beaucoup.  Malth.,  ix,  i'.l;  Marc,  v,  !iS; 
Luc,  vin,  52.  Quand  Noire-Seigneur  dit  que  la  jeune 
fille  dormait  et  n'était  pas  morte,  toutes  ces  personnes 
à  gages,  musiciens  et  pleureuses,  se  moquèrent  de  lui, 
en  comptant  bien  que  le  salaire  attendu  ne  leur  ferait 
pas  défaut.  Ces  manifestations  bruyantes  de  la  douleur 
frappaient  les  enfants,  qui  les  imitaient  dans  leurs  jeux 
et   disaient   à   leurs   camarades  :  «  Nous  avons  chanté 


TX}3bt- 


ifnmi-r 


ittiw:i 


Pleureuses  égyptiennes  dans  une  scène  de  sépulture.  D'après  Wilkinson,  op.  cit.,  t.  m,  pi.  69. 


Cf.  Eccle.,  xm,  5;  Eccli.,  xxxvm,   16;  Jer.,  xxn,    18; 
xxxi,  15;  xxxiv,  5;  Am.,  v,  16.  Sur  les  complaintes  des 


98.  —  Pleureuses  gagnes.  Sarcophage  représentant  les  funérailles 
de  Méléagre.  D'après  Iticii,  Dict.  ttts  antiq,,  p.  507. 

pleureuses,  voir  t.  n,  col.  1397.  Sur  la  ruine  de  l'Egî  pte, 
les    filles   des    nations   chauleront    une    lamentation. 


une  lamentation  et  vous  ne  vous  êtes  pas  frappé  la  poi- 
trine, vous  n'avez  pas  pleuré!  »  Mattli.,  xi,  17;  Luc, 
vil,  32.  Cf.  Ketubotli,  iv,  6:  Baba  Metsia,  vi,  1  ;  Josèphe, 
Bell,  jttil.,  III,  ix.  5.  —  Il  ne  convenait  pas  aux  chré- 
tiens de  donner  à  leur  deuil  une  expression  aussi 
exagérée;  saint  Paul  leur  recommande  de  ne  pas 
s'affliger  comme  les  autres  hommes  qui  n'ont  pas 
d'espérance.  1  Tlies..iv,  13.  L'Église  a  toujours  réprouvé 
les  excès  du  deuil  funèbre.  Les  Romains  avaient  adopté 
l'usage  des  pleureuses  gagées  (tig.  98),  appelées  prm- 
(icœ,  parce  qu'elles  étaient  placées  en  tête  des  cortèges 
funéraires.  Cf.  Aulu-Gelle.  XVIII,  7.  3.  Les  chrétiens 
occidentaux  répudièrent  toujours  le  service  de  ces 
pleureuses,  comme  entaché  d  idolâtrie.  Les  Orientaux 
le  conservèreut  dans  une  certaine  mesure;  mais  les 
Pères  ne  manquaient  pas  de  combattre  cet  usage. 
Cf.  Martigny,  Dict.  des  antiq.  chrét.,  Paris.  IS77. 
p.  241,  280.  Une  curieuse  inscription  chrétienne, 
(lig.  09)  réprouve  les  cris  poussés  sur  la  tombe  des 
morts.  L'inscription  grecque  est  ainsi  conçue  :  «  Spe- 
rantius,  aie  bon  courage,  doux,  excellent;  »  à  gauche 
de  la  seconde  ligne,  on  voit  un  canard  portant  le  mot 
ANATEC,  qui  joue  sur  le  latin  anates,  e  canards  '»;  à 
droite  est  un  bœuf  avec  le  mot  BOYAEIN.  En  réunissant 
les  deux  mots,  on  a  en  grec  :  ïvatte;  poâeiv,  «  cesse  de 
beugler  »,  de  crier,  Cf.  Martigny,  Dict.  des  antiq.  chrét., 
p.  241.  C'est  la  condamnation  des  pleureuses  el  de  ceux 
qui  seraient  tentés  de  les  imiter.  H.  Lesictue. 


CJ1HPANTI€Y+1XI 
r\Ykïc  xpHcre 

99.  —   Inscription  de  la  custode  des  reliques  de  saint  Apollinaire. 
i  l'aprèE  Perret,  Catacombes  de  Rome,  In-f ,  Paris,  t,  vi,  1851,  pi.  i.xiu,  n.  33. 


.  XXXII,  16.  —  Lorsque  le  Sauveur  arriva  chez 
Jaïre,  dont  la  fille  venait  de  mourir,  il  y  trouva  grand 
tumulte  de  gens  accourus  pour  les  funérailles,  entre 
autres  des  joueurs  de  flûte  el  via/ovrn:  »j:  èAttkâTovmc 


PLEURS.  Voir  Larmi  s,  t.  iv,  col.  92. 


PLOMB   (hébreu 
Se  tante    :    uOiêoc, 


oférét,    en    assyrien     abdru  : 
;>//:. .2-,:;    Vulgate    :  plnnil>> 


469 


PLOMB 


PLUIE 


470 


métal  d'un  blanc   bleuâtre   qui    se    ternit    facilement, 
assez  malléable,    si   mou   qu'on    peut    le   rayer    avec 
l'ongle,  fusible  à  la  température  peu  élevée  de  330"  et 
onze  fois  et  demie  lourd  comme  l'eau.  —  1°  Le  plomb 
est  très  commun  dans  la   nature;   mais   il  ne   se   pré- 
sente pas  à  l'état  natif.   Le  minerai  qui   le  contient   en 
plus  grande  quantité  est  la  galène,  ou  sulfure  de  plomb 
naturel.  On  en  dégage  le  métal  par  divers  procédés  de 
calcination.  La  presqu'île  Sinaïtique  renferme  de  nom- 
breux gisements  de  minerai  de  plomb;  on   en  trouvait 
aussi  en  Egypte.  On  s'explique  ainsi  que,  dès  le  séjour 
au  désert,  les  Hébreux  possédaient  différents  objets  ou 
ustensiles  de  plomb.  Num.,  xxxi,  22.  Les  Pbéniciens 
en  recueillaient  en  Espagne,  où  abondent  les  fdons  de 
plomb  argentifère.  Voir  Argent,  t.  i.  col.  945.  Cf.  Pline, 
H.  N.,  m,   7;   L.  Siret,   Orientaux  el   Occidentaux  en 
Espagne   aux  tenijis   préhistoriques,   dans   la   Renie 
îles  questions    scientifiques,  Bruxelles,   octobre    1906, 
p.  544-545.  Ézécbiel.  xxvn,  12,  dit  que  Tharsis  échan- 
geait le  plomb  avec  Tyr.  Le  plomb  n'avait  pas  grande 
valeur,    mais    était    assez    usuel    en    Palestine    pour 
qu'on    pût   dire    que    Salomon    amassait    de    l'argent 
comme  du  plomb,  Eccli.,  xlvii,  20.  Jérémie,  vi,  '29,  30, 
pour  indiquer  que   la   méchanceté   est   inséparable  de 
ses  compatriotes,  fait  allusion  à  l'opération  du  fondeur 
de  métaux   :  «  Le  soufflet   est  devenu  la   proie  du   feu 
(ou  :  a  souftlé  violemment),  le  plomb  est  épuisé,  on 
épure,   on  épure,   les  méchants  ne  se  détachent  pas. 
Argent  de  rebut!   dira-t-on.    »    Le   prophète  décrit  ici 
l'opération  au   moyen   de  laquelle   on  sépare  l'argent 
des  métaux  inférieurs  auxquels  il  est  mélangé.  On  fait 
fondre  du  plomb  dans  le  creuset  et,  quand  il  est  fondu, 
on  y  ajoute  le  minerai  d'argent.    Sous  l'influence  de  la 
chaleur,  au  contact  de  l'air,  le  plomb  se  transforme 
en  litharge,  qui  s'absorbe  peu  à  peu,  tandis  que  l'argent 
se  sépare  de  toute  autre  substance  et  se  rassemble  au 
fond  du  creuset.  Voir  Creuset,  t.  n,  col.  1110.  Jérémie 
suppose  que,  contrairement  à  l'ordinaire,  le  plomb  a 
été  complètement    transformé    et  absorbé,    sans   que 
l'argent  soit  sorti  de  la  gangue.  Ézéchiel,  xxn,  18,  20. 
compare  les  Israélites  infidèles   à  des  scories  et  à  des 
métaux  communs,   fer,    cuivre,   étain    et    plomb,    que 
Dieu  fera  fondre  dans  le  fourneau  allumé  par  sa  colère. 
Ces  passages  montrent  que  les  Israélites  possédaient  la 
science  pratique  des  procédés  nécessaires  pour  le  trai- 
tement des  métaux  usuels.  Zacharie,  v,  7,  8,  parle  d'un 
disque  de  plomb,  servant  de  couvercle  à  un  épha  assez 
large  pour  contenir  une  femme.  On  a  trouvé  en  Pales- 
tine des  poupées  de  plomb  qui  servaient  aux  pratiques 
magiques.  Voir  t.   iv.  fig.  173,  col.  568.   —  2»  La  pesan- 
teur de  ce   métal   fait   dire  que   les  Égyptiens  se  sont 
enfoncés  dans  les  eaux  de   la  mer  Rouge  comme  le 
plomb.   Exod..   xv.    10.    Les  anciens  ne  connaissaient 
pas  de  métal  plus  lourd.  Eccli.,  xxn,  17.  —  3"  Job,  xix, 
24,  parlant  de  ses  paroles  d'espérance,  fait  ce  souhait  : 

Je  voudrais  qu'avec  un  burin  de  fer  et  du  plomb 
Elles  fussent  pour  toujours  gravées  dans  le  roc! 

L'auteur  sacré  fait  probablement  allusion  à  une  inscrip- 
tion creusée  dans  le  roc  avec  le  burin  de  fer  et  dans  les 
lettres  de  laquelle  on  a  ensuite  coulé  du  plomb.  Grâce 
à  ce  procédé,  l'inscription  était  plus  visible  et  les  lettres 
sculptées  se  conservaient  mieux.  Cf.  Renan,  Le  livre 
de  Job,  Paris,  1859,  p.  81  ;  Frz.  Delitzsch,  Das  Buch  Job, 
Leipzig,  1876,  p.  246.  Il  ne  peut  évidemment  être  ques- 
tion d'un  burin  de  plomb,  ce  métal  étant  beaucoup 
trop  mou  pour  servir  à  cet  usage.  La  Vulgate  suppose 
l'inscription  gravée  «  avec  un  stylet  de  fer  et  une  lame 
de  plomb,  ou  sculptée  au  burin  sur  le  roc.  »  Les  an- 
ciens écrivaient  parfois  sur  des  lames  de  plomb,  même 
des  inscriptions  assez  longues.  Cf.  Pausanias,  ix,  3!,  4; 
Pline,  H.  X.,  un,  21;  Tacite,  Annal.,  n,  69,  etc.  Voir 
t.  n,  lig.  191,  col.  1366.  Mais  le  texte  hébreu  et  les  Sep- 


tante parlent  de  plomb,  efëre't,  uo/.iëio,  et  non  de  lames 
de  plomb,  et  la  contexture  même  de  la  phrase  exige 
que  le  plomb  soit  ici,  non  la  matière  sur  laquelle  on 
écrit,  mais  celle  au  moyen  de  laquelle  on  constitue 
l'inscription,  barzél  ve'oférèt,  avec  «  le  fer  et  le  plomb  ». 
Cf.  Frz.  Delitzsch,  Das  Buch  lob,  p.  246.  On  n'a  pas 
retrouvé  d'inscription  ancienne  ayant  du  plomb  coulé 
dans  le  creux  des  lettres.  Mais  le  procédé  n'était  pas 
d  invention  si  difficile  qu'il  ne  pût  être  employé  en  cer- 
tains cas.  —  5»  Le  plomb  est  encore  désigné  en  hébreu 
par  le  mot  'ânâk,  l'assyrien  anaku.  Mais  ce  mot  n'est 
utilisé  qu'une  fois.  Ain.,  vu.  7,  8,  pour  désigner  le  fil  à 
plomb.  Voir  Fil  a  plomb,  t.  n,  col.  2244. 

H;  Lesètre. 
PLONGEURS,  oiseaux  de  l'ordre  des  palmipèdes, 
surtout  remarquables  par  leur  facilité  à  plonger 
pour  chercher  leur  proie  dans  l'eau.  Imparfaitement 
organisés  pour  le  vol  ou  la  marche,  ils  mènent  une  vie 
presque  exclusivement  aquatique.  Les  plongeurs  pro- 
prement dits  ne  se  rencontrent  guère  que  dans  les  mers 
des  climats  froids.  Aussi  n'en  est-il  pas  fait  mention 
dans  la  Sainte  Écriture.  —  Mais  on  trouve  en  Pales- 
tine d'autres  oiseaux  qui  se  nourrissent  de  poissons  et 
plongent  adroitement  pour  saisir  leur  proie.  Tels  sont 
les  martins-pècheurs,  passereaux  de  l'espèce  ceryle 
rudis,  qui  pèchent  de  petits  poissons  dans  les  lagunes 
d'eau  douce,  ou  de  l'espèce  alcyon  smyrnensis,  qui 
plongent  dans  le  Jourdain  avec  un  agilité  surprenante. 
Cf.  Lortet.  La  Syrie  d'aujourd'hui,  Paris,  1884,  p.  429, 
448,  463.  A  la  mer  Morte  et  surtout  au  lac  de  Tibériade 
vivent  par  myriades  des  échassiers  macrodaetxles 
appelés  grèbes  huppés,  podiceps  cris  talus.  Ces  oiseaux, 
longs  d'environ  0"'50,  portent  au  sommet  de  la  tête 
une  double  huppe  qui  leur  donne  un  aspect  très  gra- 
cieux, avec  leur  cou  long  et  mince.  Ils  nagent  presque 
complètement  plongés  dans  l'eau  et  ne  peuvent  être 
atteints  qu'à  la  tète.  Extrêmement  sauvages,  ils  s'enfon- 
cent à  la  moindre  alerte.  De  leur  long  bec,  ils  aiment  à 
enlever  les  yeux  des  poissons,  surtout  des  chromis, 
dont  beaucoup  errent  ensuite  aveugles  à  travers  les 
eaux  du  lac.  Cf.  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui,  p.  ÏM, 
510.  Ces  oiseaux  ont  été  sûrement  connus  des  anciens 
Hébreux;  mais  ils  étaient  beaucoup  trop  inaccessibles 
pour  que  le  législateur  songeât  à  parler  d'eux  au  point 
de  vue  de  l'alimentation.  Peut-être  les  assimilait-on  au 
porphyrion.  Voir  Porphyrion,  H.  Lesètre. 

PLUIE,  eau  qui  se  déverse  des  nuages  sur  la  terre 
en  globules  plus  ou  moins  volumineux.  La  pluie  tombe 
quand  les  gouttelettes  liquides  qui  composent  un  nuage 
deviennent  trop  lourdes  pour  rester  en  suspension 
dans  l'atmosphère.  C'est  ce  qui  arrive  quand,  par  suite 
du  refroidissement  de  l'air  ou  du  transport  du  nuage 
dans  des  régions  à  plus  basse  température,  de  nouvelles 
quantités  de  vapeur  viennent  se  condenser  à  la  surface 
des  gouttelettes  déjà  formées.  D'autres  fois,  un  fort 
ébranlement  de  l'air,  comme  celui  qui  résulte  des  dé- 
charges de  la  foudre,  suffit  pour  déterminer  la  résolu- 
tion d'un  nuage  en  pluie.  Voir  Nuage,  t.  iv,  col.  1710. 

I.  Les  noms  de  la  pluie.  —  La  pluie  est  désignée  en 
hébreu  par  treize  noms  différents,  ce  qui  indique  l'impor- 
tance qu'on  attachait  en  Palestine  à  ce  phénomène  mété- 
orologique. Ces  noms  sont  les  suivants  :  mdtàr,  Oetôî, 
pluvia;  —  gésém,  veto:,  pluvia,  «  averse  »;  —  gosém, 
Ceto;,  compluta  est;  —  metar-géSém,  •jetô;  -/etufpivôç, 
«  pluie  d'hiver  ».  pluvia  imbris,  «  grosse  pluie  »;  — 
gèsém-Diitrôt,  -/eiftùv  ùeto;,  hieinis  phivia,  «  pluie  d'hi- 
ver »;  —  zérém,  -jeto;,  pluvia;  —  sagrir,  axayôvzç, 
«  gouttes  «.perslillantia;  —  zarzif,  u-caytivEç,  stillicidia; 
—  sdfîah,  -jSaïa  'j^tia,  «  eaux  inférieures  »,  alluvio;  — 
rebibîm,  vi?eti>;,  o  pluie  ».  stillx;  —  séirim,  ou.opo;, 
iniber;  —  yôréh,  ie-côc  npoôcpio;,  pluvia  temporanea, 
«    première  pluie  »;   —  môréh,  -jetô;  îrpciïu.0;,  pluvia 


471 


PLUIE 


472 


matutina,  <<  première  pluie  »;  —  malqôs,  -jetoc  0'iiu.o:, 
pluvia  serotina,  «  arrière-pluie  »  ;  —  setdv,  «  temps  de 
pluie  »,  uetôç,  iniber.  Dans  le  Nouveau  Testament,  les 
mots  qui  désignent  la  pluie  sont  -je-oç,  pluvia,  et  6poy.r„ 
seulement  dansMatth.,  vu,  25,  27. 

II.  La  pli  m:  en  général.  —  1"  La  pluie  est  beaucoup 
plus  appréciée  dans  les  climats  très  cliauds  que  dans 
les  nôtres;  elle  l'est  encore  davantage  dans  les  régions 
où  font  défaut  les  rivières  et  les  moyens  naturels  ou 
artificiels  d'irrigation.  Aussi  les  auteurs  sacrés  parlent- 
ils  de  la  pluie  comme  d'un  grand  bienfait  de  Dieu, 

Qui  a  ouvert  des  canaux  aux  ondées... 

Afin  que  la  pluie  tombe  sur  une  terre  inhabitée, 

Sur  le  désert  où  il  n'y  a  point  d'hommes, 

Pour  qu'elle  arrose  la  plaine  vaste  et  vide. 

Et  y  fasse  germer  l'herbe  verte  ! 

La  pluie  a-t-elle  un  père? 

Job,  XXXVIII,  25-28.  C'est  Dieu  qui  verse  la  pluie  sur  la 
terre.  Job,  v,  10,  par  le  moyen  des  nuées  qui  se 
vident,  Eccle.,  xi,  3.  C'est  lui  qui  commande  aux 
ondées  et  aux  averses,  Job,  xxxvu,  6;  1er.,  x,  13;  Li, 
16,  qui  fait  les  éclairs  et  la  pluie,  Ps.  cxxxv  (cxxxiv), 
7,  qui  donne  des  lois  à  la  pluie,  Job,  xxvm,  26,  de 
manière  qu'elle  vienne  en  temps  propice.  Act.,  xiv,  16. 

IPattirc  lus  gouttes  d'eau 

Qui  se  répandent  en  pluie  par  leur  propre  poids; 

Les  nuées  la  laissent  couler, 

Et  en  versent  les  ondées  sur  les  hommes. 

Job,  xxxvi,  27,  2S.  Kt  qui  peut  compter  les  gouttes  de 
pluie'?  Eccli.,  i,  2.  Dieu  accorde  la  pluie  à  tous  sans 
distinction,  bons  et  mauvais.  Mattb.,  v,  45.  Mais  les 
idoles  seraient  bien  incapables  d'en  donner.  Jer.,  xiv. 
22;  Bar.,  VI,  52.  Aussi  la  pluie  est-elle  invitée,  comme 
toutes  les  autres  créatures,  à  bénir  le  Seigneur. 
Dan.,  vi,  64.  —  2»  La  pluie  est  un  élément  de  fécon- 
dité pour  le  sol.  .<  La  pluie  et  la  neige  descendent  du 
ciel  et  n'y  retournent  pas,  qu'elles  n'aient  abreuvé  <l 
fécondé  la  terre  et  ne  l'aient  couverte  de  verdure, 
qu  elles  n'aient  donné  la  semence  au  semeur  et  le  pain 
à  celui  qui  mange.  »  ls.,  LV,  10;  cf.  XXX,  23.  Après  la 
pluie,  le  soleil  vient  et  l'herbe  sort  de  terre.  Gen.j  il, 
5;  II  Reg.,  xxm,  4.  Cf.  Ps.  cxi.vii  (cxlvi),  8.  La  pluie 
fait  aussi  croître  les  arbres,  ls.,  xi.iv,  li.  «  Lorsqu'une 
terre,  abreuvée  par  la  pluie  qui  tombe  souvent  sur  elle, 
produit  une  herbe  utile  à  ceux  pour  qui  on  la  cultive, 
elle  a  part  à  la. bénédiction  de  Dieu.  »  Heb.,  vi,  7.  — 
3°  Quelquefois  la  pluie  a  des  effets  désagréables  ou 
nuisibles.  A  travers  la  couverture  mal  close,  elle  forme 
drs  gouttières  qui  coulent  dans  la  maison.  Prov.,  xxvn, 
15.  Au  dehors,  il  faut  une  tente  pour  s'abriter  contre 
elle.  Is.,  iv,  6.  Il  y  a  des  malheureux  qui  passent  la 
nuit  sans  vêlement;  la  pluie  des  montagnes  les  pé- 
nètre, alors  même  qu'ils  cherchent  a  se  blottir  contre 
un  rocher,  .loi.,  \xiv,  S.  La  pluie  Lui  écrouler  les  murs 
mal  bâtis.  Ezech.,  xm,  II.  13;  Malth.,  vu.  25,  27.  Elle 
peut  tomber  eu  torrents  dévastateurs.  E/cch.,  xxxvm, 
■J'J.  C'est  ce  qui  arriva  en  particulier  au  déluge.  Gen., 
vu,  12  ;  vin,  2. 

III.    LE  RÉGIME    PLUVIAL  EN    PALESTINE.    —  1°  Le  pays 

que  Dieu  donna  aux  Israélites  'tait  un  «  pays  de  mon- 
tagnes et  de  vallées,  qui  est  arrosé  par  la  pluie  du 
ciel  ».  lient.,  xi,  11.  En  cela,  il  différait  totalement  de 
l'Egypte.  La  Palestine,  en  effet,  n'a  pas  à  compter  sur  les 
rivières  pour  arroser  le  sol.  Les  torrents  qui  descen- 
dent des  collines  vers  le  Jourdain  ou  vers  la  Méditer 
ranée  sont  eux-mêmes  taris  pendant  la  saison  sèche 
C'est  donc  de  la  pluie  seule  qu'il  faut  attendre  l'irriga- 
tion des  terris.  Elle  tombe  d'ailleurs  on  Palestine  avec 
une  régularité  remarquable.  Elle  commence  à  appa- 
raître I  0  octobre  et  cesse  tout  à  fait  avec  le  mois  de 
mai.  A  Jérusalem,  les  jours  de  pluie  sont  en  moyenne 
de  1  '     en  octobre,  5  '  2  en  novembre,  9  en  décembre, 


10  en  janvier,  10  l/2  en  février,  8  '/■>  en  mars,  5  '/s  en 
avril,  1  '  -i  en  mai.  Cf.  Socin,  Palâstina  und  Syrien, 
Leipzig,  1891,  p.  35;  Palestine  Exploration  Fund, 
Quarterly  Statement,  1883,  p.  8-40;  1892,  p.  50-71; 
Zeitschri.fi  des  deutxchen  Palâslina-Vereins,  t.  xiv. 
1891,  p.  93-112.  Il  ne  se  produit  que  des  variations 
légères  dans  la  distribution  de  ces  jours  pluvieux.  La 
même  règle  s'applique  à  peu  près  à  tout  l'ensemble  du 
pays.  Il  tombe  moins  de  pluie  cependant  du  côté  de 
Gaza,  et  surtout  dans  la  vallée  encaissée  du  Jourdain. 
La  hauteur  de  pluie  qui  tombe  dans  l'année  et  de  1*10 i 
2m12,  en  moyenne  de  l'"60,  alors  que  la  moyenne  est 
de  lm50  à  la  surface  du  globe.  Cette  pluie  alimente  les 
sources  et  servait  autrefois  à  remplir  les  citernes.  Il 
est  probable  que.  quand  la  Palestine  était  plus  boisée 
et  plus  cultivée  qu'aujourd'hui,  les  pluies  étaient 
encore  plus  abondantes.  La  fraîcheur  entretenue  par 
la  végétation  déterminait  la  précipitation  de  nuages  qui 
passent  maintenant  sans  rien  donner  ou  dont  la  pluie 
s'évapore  dans  une  atmosphère  desséchée,  avant  d'avoir 
touché  le  sol.  La  dénudation  du  pays  a  un  autre  incon- 
vénient. Au  lieu  d'être,  arrêtée  par  les  cultures  et  de 
pouvoir  pénétrer  à  l'intérieur  d'un  sol  ameubli,  la  pluie 
ruisselle  à  la  surface  et  les  trois  quarts  en  sont  perdus, 
ne  produisant  d'autres  effets  que  des  ravinements 
dévastateurs.  Ce  sont  les  vents  d'ouest  et  de  sud-ouest 
qui  amènent  la  pluie  en  Palestine.  III  Reg.,  xvm,  44; 
Luc.  xii.  54.  Le  vent  du  nord  souflle  assez  rarement: 
il  se  sature  d'humidité  sur  les  sommets  du  Liban  et  de 
l'Anti-Liban  et  amène  aussi  de  la  pluie.  Prov.,  xxv,  23. 
2°  Les  Israélites  distinguaient  deux  pluies,  la  pre- 
mière pluie,  yôréh  ou  môréh,  pluvia  teniporanea,  et 
l'arrière  ou  dernière  pluie,  malqôi,  pluvia  sev"lin<t. 
Deut.,  xi,  14;  Jer.,  m,  3;  v.  24;  Joël..  11,  23;  Jacob.,  v. 
7.  Cf.  Schebiith,  ix.  7;  Nedaritn,  vin,  5,  etc.  La  pre- 
mière pluie  commençait  à  tomber  en  octobre  et  deve- 
nait plus  fréquente  en  novembre.  C'est  elle  qui  ameu- 
blissait le  sol  et  permettait  le  travail  préparatoire  aux 
semailles.  A  son  défaut,  «  à  cause  du  sol  crevassé, 
parce  qu'il  n'y  a  pas  eu  de  pluie  sur  la  terre,  les  labou- 
reurs sont  confondus.  »  .1er.,  xiv.  i.  Cette  première 
pluie  manquait  rarement;  il  fallait  des  sécheresses  ex- 
ceptionnelles pour  qu'on  en  fût  totalement  privé. 
III  Reg.,  xvii,  1.  Dans  les  derniers  temps  avant  l'ère 
chrétienne,  le  sanhédrin  ordonnait  des  jeûnes  répètes, 
quand  cette  pluie  tardait  encore  en  novembre  et  sur- 
tout en  décembre.  Voir  Jeûne,  t.  m,  col.  1531.  —  La 
période  qui  va  du  commencement  de  décembre  a  la  lin 
de  lévrier  est  la  saison  des  pluies.  Elle  compte  une 
trentaine  de  jours  pluvieux,  sur  les  cinquante-deux 
jours  de  pluie  habituels  à  la  Palestine.  Le  neuvième 
mois,  correspondant  à  décembre,  est   signale  pour  son 

caractère  pluvieux.  I   Esd.,  x,  9.    13.   Pendant  ce  is. 

a  la  fête  île  la  lin:  care.  .Nulre-Si  ignoiir  était  obligé  de 
s'abriter  dans  le  Temple  sous  le  portique  de  Salouion, 
à  cause  des  intempéries.  Joa.,  x.  22,  23.  Celle  saison 
n'avait  pas  d'importance  spéciale  au  point  de  vue  agri- 
cole. Cependant  des  pluies  trop  continues  empêchaient 
la  maturation  de  l'orge  on  niellaient  les  chemins  hors 
de  service.  Cf.  Malth..  \\i\.  :i(l;  Josèphe,  Anl.  jud., 
XIV.  xv,  12.  lai  pareil  cas,  on  retardait  la  Pàque  d'un 
mois,  en  ajoutant  au  douzième  mois  de  l'année  le  mois 
intercalaire  de  veadar.  Voir  PAQUE,  I.  IV,  col.  2098.  —  La 
seconde  pluie  venail  en  mars  et  en  avril.  C'est  elle 
qui  arrosait  les  céréales  déjà  en  herbe  et  facilitait  leur 
croissance.  De  son  abondance  dépendaient  la  quantité 
et  la  qualité  'le  la  moisson.  Aussi  était-elle  attendue 
avec  anxiété,  lob.  xxi\.  23;  Prov.,  xvi,  15;  .1er.,  m.  :i; 
Ezech.,  xxxiv,  26;  Ose.,  vi,  3;  Zach.,X,  I..M.  Vigourou 
dans  la  Revue  biblique,  1894,  |>   lin.  raconte  comment 

il  lui.  en  Palestine.  «  témoin  des  souhaits  que  tout  le 
inonde  répétait  sans  cesse,  pour  obtenir  celte  i  pluie 
0  tardive   >.  qui  avait   l'ail  jusque-là   défaut.   El,  en  effet, 


473 


PLUIE    —    PLUME 


474 


les  recolles  commençaient  à  sécher  dans  les  champs, 
les  citernes  tarissaient  et  les  accapareurs  cachaient  le 
blé.  Aussi,  quand  la  pluie  est  tombée  en  abondance, 
la  joie  a  été  universelle  ;  ceux-là  même  dont  les  projets 
de  voyage  étaient  ainsi  renversés,  ou  qui  rentraient 
chez  eux  trempés  jusqu'aux  os,  bénissaient  ce  don  de 
Dieu,  qui  apportait  avec  la  fertilité  la  seule  eau  qu'on 
ait  pour  boire  dans  la  plus  grande  partie  du  pays.  » 
Cette  pluie  n'était  pas  toujours  régulière.  «  .le  vous  ai 
retenu  la  pluie  alors  qu'il  y  avait  encore  trois  mois 
avant  la  moisson...  ;  une  terre  était  arrosée  par  la  pluie, 
et  une  autre,  sur  laquelle  il  ne  pleuvait  pas,  se  dessé- 
chait. ■  Ami.,  iv.  7.  Il  ne  fallait  pas  pourtant  que  cette 
pluie  fut  trop  violente:  car  alors  elle  renversait  les 
épis  et  causait  la  disette.  Prov.,  xxvm.  3.  —  En  mai, 
la  pluie  cessait  complètement.  Gant..  II,  11.  Elle  était 
aussi  insolite  pendant  la  moisson,  c'est-à-dire  à  partir 
de  la  seconde  quinzaine  de  niai,  que  la  neige  en  été. 
Prov.,  xxvi.  1.  C'est  pourquoi  Samuel  donne  comme 
une  marque  certaine  de  l'intervention  divine  la  pluie 
qu'il  obtient  à  l'époque  de  la  moisson.  I  Beg.,  XII,  I". 
18.  —  Cf.  Tristram,  The  natural  History  of  Ihe  Bible, 
Londres,  1889.  p.  31-33.  —  Du  milieu  de  mai  au  mi- 
lieu d'octobre,  la  pluie  ne  tombe  plus  en  Palestine.  Ed. 
Robinson,  Biblïcal  Researches  in  Palestine,  2e  édit., 
1856,  t.  i.  p.  128-431. 

IV.  Caractère  providentiel  de  la  pluie  pour  les 
HÉBREUX.  —  1°  »  Si  vous  gardez  mes  commandements 
et  les  mettez  en  pratique,  j'enverrai  vos  pluies  en  leur 
saison;  la  terre  donnera  ses  produits  et  les  arbres  des 
champs  donneront  leurs  fruits.  »  Lev.,  XXVT,  3.  4. 
Telle  est  la  convention  établie  dès  l'origine  entre  Dieu 
et  son  peuple.  Elle  est  rappelée  dans  le  Deutéronoine, 
xi.  li.  17  :  Que  les  Israélites  soient  fidèles,  la  première 
et  la  seconde  pluie  viendront  à  leur  heure,  et,  en  con- 
séquence, le  blé,  le  vin,  l'huile  et  le  fourrage  abonde- 
ront. Qu'ils  soient  infidèles,  Dieu  «  fermera  le  ciel  et 
il  n'y  aura  plus  de  pluie  »,  par  conséquent,  plus  de 
récoltes.  Dieu  leur  enverra  de  la  poussière  au  heu  de 
pluie.  Dent.,  xxvm,  24.  II  n'est  point  dit  que  Dieu  ait 
toujours  appliqué  à  la  rigueur  les  termes  de  la  con- 
vention et  proportionné  le  bienfait  de  la  pluie  au  degré 
de  fidélité  des  Israélites.  Dans  leur  histoire,  en  effet, 
il  est  beaucoup  plus'souvent  question  de  transgressions 
et  d'apostasies  que  de  sécheresse  et  de  disettes.  Néan- 
moins, en  plusieurs  circonstances,  le  châtiment  annoncé 
suivit  les  fautes.  —  2°  A  la  consécration  du  Temple, 
Salomon  demanda  au  Seigneur  d'oublier  les  péchés 
de  son  peuple  et  de  lui  accorder  la  pluie.  III  Reg., 
VIII,  36,  quand  ce  peuple  se  repentirait  sincèrement  et 
viendrait  dans  le  Temple  implorer  son  Dieu.  II  Par.,  vi. 
26, 27.  Le  Seigneur  daigna  répondre  qu'il  en  serait  ainsi. 

II  Par., vu,  13;  li.  —  3°  Le  prophète  Élie  fut  chargé  d'aller 
dire  à  l'impie  Achab.  roi  d'Israël  :  «  Il  n'y  aura  ces 
années-ci  ni    rosée  ni  pluie,  sinon    à  ma    parole.    » 

III  Reg.,  xvii,  1.  La  prophétie  s'accomplit,  et  la  famine 
fut  la  conséquence  de  la  sécheresse.  Nulle  part  même 
on  ne  trouvait  d'herbe  pour  la  nourriture  des  animaux, 
qu'on  était  obligé  d'abattre.  III  Reg..  xvni.  5.  Sur 
l'ordre  du  Seigneur,  Élie  se  présenta  de  nouveau 
devant  Achab,  et,  après  avoir  confondu  et  fait  périr 
les  prophètes  de  Baal,  il  annonça  la  pluie,  qui  en  effet 
fut  amenée  par  des  nuages  venus  du  cùté  de  la  mer 
et  tomba  abondamment.  III  Reg.,  xvm,  41-45;  Jacob., 
v.  18.  —  4°  Isaïe,  V,  6,  comparant  Israël  à  une  vigne 
stérile,  dit  que  le  Seigneur  commandera  aux  nuées  de 
ne  plus  laisser  tomber  la  pluie  sur  elle.  David  avait 
déjà  appelé  la  même  malédiction  sur  les  monts  de 
Gelboé.  témoins  de  la  mort  de  Saûl.  II  Reg.,  i,  21. 
Jérémle,  v.  '21.  25,  s'adresse  en  ces  termes  à  ses  com- 
patriotes impies  :  «  Ils  ne  disent  pas  dans  leur  coeur  : 
Craignons  Jéhovah  notre  Dieu,  lui  qui  donne  la  pluie, 
celle  de  la  première  saison  et  celle  de  l'arrière-saison, 


et  qui  nous  garde  les  semaines  destinées  à  la  moisson. 
Ce  sont  vos  iniquités  qui  ont  dérangé  cet  ordre,  ce 
sont  vos  péchés  qui  vous  privent  de  ces  biens.  » 
Amos,  iv,  7,  8,  fait  une  remarque  analogue.  Zacharie, 
xiv,  17.  18.  annonce  que  la  pluie  fera  défaut  en  Pales- 
tine et  en  Egypte,  si  les  familles  de  ces  pays  ne  sont 
pas  représentées  à  Jérusalem  pour  la  fête  des  Tabernacles. 
Cette  fête  se  célébrait  les  derniers  jours  de  septembre 
et  les  premiers  jours  d'octobre,  par  conséquent  à  la 
veille  de  la  première  pluie.  La  pluie  est  tout  à  fait 
exceptionnelle  en  Egypte.  Deut.,  xi.  10.  11.  Cf.  Héro- 
dote, m,  10.  Mais  les  pluies  abondantes  des  régions 
qui  alimentent  le  Nil  peuvent  faire  plus  ou  moins  défaut, 
et  l'inondation  du  Meuve  n'être  plus  suffisante  pour 
arroser  et  féconder  le  pays.  Voir  IRRIGATION,  t.  m, 
col.  926.  Les  Septante  ont  supprime'  dans  ce  passage 
la  mention  de  la  pluie  et  ne  parlent  que  d'un  lléau. 
-Tfoat;.  —  5°  Les  deux  témoins  que  Dieu  envoie  sur  la 
terre  pour  parler  et  agir  en  son  nom  «  ont  la  puissance 
de  fermer  le  ciel  pour  empêcher  la  pluie  de  tomber 
durant  les  jours  de  leur  prédication  >..  Apoc,  xi,  6. 

VI.  Comparaisons.  —  1°  A  cause  de  son  rôle  si  bien- 
faisant en  Palestine,  les  écrivains  sacrés  comparent  à 
la  pluie  l'enseignement  de  la  loi  et  de  la  sagesse. 
Deut.,  xxxn,  2;  Job,  xxix,  23;  la  miséricorde  divine, 
Eccli.,  xxxv,  26  (19),  et  la  faveur  du  roi.  Prov.,  xvi, 
15.  —  2°  La  venue  du  Messie  sera  pour  le  monde 
comme  une  pluie  bienfaisante  et  féconde. 

Qu'il  descende  comme  la  pluie  sur  le  gazon, 
Comme  l'ondée  qui  arrose  la  ten 
Qu'en  ses  jours  le  juste  fleurisse, 
Avec  l'abondance  de  la  paix! 

Ps.  lxxii  (lxxi),  6.  Isaïe,  xlv,  8,  dit  aussi  : 

deux,  répandez  d'en  haut  votre  rosée. 
Et  que  les  nuées  fassent  pleuvoir  la  justice  ! 
Que  la  terre  s'ouvre  et  produise  le  salut, 
Qu'elle  fasse  germer  la  justice  en  même  temps  ! 

Israël  espère  que  Dieu  viendra  à  lui,  «  comme  la  pluie 
tardive  qui  arrose  la  terre.  »  Os.,  vi,  3.  —  3°  Par  assi- 
milation, on  dit  que  Dieu  fait  pleuvoir  la  grêle,  Exod.,  IX, 
18,  23;  le  feu  du  ciel,  Gen.,  xix,  21;  Ezech..  xxxvm. 
22;  Luc,  xvn,  29;  sa  colère.  Job,  xx,  23;  les  pièges 
sur  les  pécheurs,  Ps.  xi  (x),  7;  la  manne  et  les  cailles 
du  désert.  Exod..  xvi.  4;  Ps.  lxxv  (lxxivi,  24.  27. 

H.  Lesètre. 
1.  PLUME  hébreu:  nôsâh,  yty;  Septante  :  titïsov; 
Vulgate  :  plumât,  produit  épidermique.  de  nature  plus 
compliquée  que  le  poil  des  mammifères,  et  qui  sert  à 
recouvrir  le  corps  des  oiseaux.  —  Quand  le  prêtre  offrait 
un  sacrifice  d'oiseaux,  il  devait  jeter  de  côté  le  jabot  et 
nosatâh.  Lev.,  î,  16.  On  fait  ordinairement  venir  nosdh 
de  i/iisci',  «  sortir  >■.  et  on  lui  donne  le  sens  d'  «  impu- 
reté, excrément  ».  Mais  en  s'en  tenant  à  la  leçon  du 
Samaritain,  et  à  la  traduction  des  Septante,  de  Sym- 
maque,  de  Théodotion  et  de  la  Vulgate,  on  doit  traduire 
par  «  plume  ».  Nôsdh  a  le  sens  de  plume,  Job,  xxxix, 
13;  Ezech.,  xvn.  3,  7.  Il  est  certain  d'ailleurs  qu'avant 
de  porter  un  oiseau  sur  l'autel,  on  le  déplumait. 
Cf.  Sebachim,  vi,  2;  Siphra,  f.  67,  1.  —  Jérémie,  xlviii, 
9,  dit  à  propos  de  Moab  : 

Donnez  la  plume  à  Moab,  car  en  s'envolant  il  fuira. 
Ses  villes  seront  dévastées  et  dépeuplées. 

Ici,  le  mot  qui  désigne  la  plume,  prise  pour  les  ailes, 
est  fis.  Or,  ce  mot  a  plusieurs  significations.  C'est  d'abord 
le  nom  de  la  lame  d'or  du  grand-prêtre,  ce  qui  fait  que 
les  Septante  le  traduisent  par  tr,u.i:.x.  «  signes  •>,  et  le 
Chaldéen  par  «  couronne  »,  la  lame  d'or  étant  comme 
la  couronne  du  grand-prêtre  et  le  signe  de  sa  dignité. 
Exod.,  xxvm,  36-38.  Le  mot  yif  veut  aussi  dire  «  Heur  », 
Job,  xiv,  2,  traduction  admise  par  Aquila  et  la  \  ulgate, 
tandis  que  Symmaque  le   rend  par  «   germe  ».   Pour 


47.") 


PLUME    —    POÊLE 


476 


continuer  la  métaphore,  la  Vulgate  fait  venir  le  verbe 
suivant  ndso'  de  nùs,  «  lleurir  »,  et  traduit  :  «  Donnez 
une  Ileur  à  Moab,  car  il  sortira  florissant,  »  ce  qui  con- 
corde peu  avec  le  vers  suivant.  En  réalité,  nâso'  vient 
de  nàsa  ,  «  voler  »,  et  y  if  a  ici  le  sens  déplume.  Jérémie 
semble  s'inspirer  d'un  passage  d'Isaïe,  xvi,  2,  également 
contre  Moab  : 

Comme  des  oiseaux  fugitifs, 

Gomme  une  nichée  que  l'on  disperse. 

Telles  seront  les  filles  de  Moab. 

Voir  Aile,  t.  i,  col.  311.  —  Ézéchiel,  xvn,  3,  7,  repré- 
sente le  roi  de  Babylone  comme  un  grand  aigle,  o  cou- 
vert d'un  plumage,  nosdh,  aux  couleurs  variées,  »  et  le 
roi  d'Egypte  comme  un  aigle  aux  ■  nombreuses  plumes  ». 
Dans  ces  deux  passages,  les  Septante  traduisent  par 
à'vuye;,  «  serres  ».  Ici  le  sens  du  mot  n<ï?ah,  correspon- 
dant à  l'assyrien  nâsu,  n'est  point  douteux.  Dans  Job, 
xxxix,  13,  il  est  dit  que  l'aile  de  l'autruche  n'est  ni 
(celle  de)  la  cigogne,  ni  nosdh,  «  la  plume  »  qui  vole. 
Les  Septante  reproduisent  le  mot  sans  le  traduire  : 
vso-aa.  La  Vulgate  traduit  par  «  épervier  »,  en  faisant 
probablement  venir  nosdh  du  miphal  nissdh,  «  se 
disputer  »,  d'où  oiseau  de  proie.  H.  Lesètre. 

2.  PLUME  A  ÉCRIRE.  Voir  Calame,  t.  il,  col.  50. 

PLUVIER  (Septante  :  xaP«8piô«;  Vulgate  :  chara- 
drion,  charadrius),  oiseau  de  l'ordre  des  échassiers,  à 
bec  long  et  renllé  à  l'extrémité,  habitant  le  voisinage 
des  eaux  et  se  nourrissant  d'insectes  aquatiques  et  d'an- 
nélides.  Les  pluviers  vivent  en  troupes  et  voyagent 
ensemble  quand  ils  émigrent  d'Afrique  usque  dans  le 
nord  de  l'Europe  (lîg.  100).  Ils  sont  nombreux  dans  la 


100.  —  Le  pluvier. 

Basse  Egypte.  —  Les  Septante  et  la  Vulgate,  Lei .,  XI,  19; 
Deut..  xiv,  18.  traduisent  par  o  pluvier  »  le  mol  'ùnâfdh, 
qui  désigne  beaucoup  plus  probablement  le  héron. 
Voir  HÉRON,  I.  III,  col.  654.  Les  pluviers  ne  sont  pas 
nommés  parmi  les  échassiers  qui  fréquentent  les  bords 
des  lacs  palestiniens.  Cf.  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui, 
Paris,  1884,  p.  526,  543.  Le  législateur  hébreu  n'a  donc 
pas  eu  à  s'occuper  d'eux.  11.  L-ESÊTRE. 

POCOCKE  Edward,  théologien  anglican,  l'un  des 
plus  célèbres  orientalistes  de  la  Grande  Bretagne,  né 
le  8  novembre  1604  à  Oxford,  mort  dans  cette  ville  le 
lu  septembre  1691.  Après  avoir  fait  ses  études  dans  sa 
ville  natale,  on  il  étudia  surtout  les  langues  orientales 
el  recul  les  ordres  anglicans,  il  fut  nommé,  en  1630, 
i  hapi  lain  de  la  factorerie  anglaise  à  Alep  et  \  séjoui  na 


six  ans.  En  1636,  Land,  archevêque  de  Cantorbéry, 
fonda  en  sa  faveur  une  chaire  d'arabe  à  l'université 
d'Oxford.  Il  ne  put  professer  qu'en  1647,  après  de  nom- 
breuses difficultés.  Pocock  se  servit  de  ses  études 
orientales  principalement  pour  l'intelligence  des  Écri- 
tures. Il  fut  un  des  principaux  collaborateurs  de  la 
Polyglotte  de  Walton.  En  1655.  il  publia,  in -4°.  à  Oxford, 
sa  Porta  Mosis,  contenant  six  discours  arabes,  impri- 
més en  caractères  hébreux,  des  commentaires  de  Moïse 
Maimonide  sur  laMischna,  avec  une  traduction  anglaise 
et  des  notes.  Ce  fut  le  premier  ouvrage  publié  par  la 
presse  hébraïque  d'Oxford.  Outre  plusieurs  autres  pu- 
blications orientales,  on  lui  doit  Commentary  on  the 
Prophéties  of  ilicah  and  Malachi,  1077;  Borea,  1685; 
Joël,  1691.  Ces  divers  ouvrages  ont  élé  réunis  dans  ses 
Theological  Works,  2  in-8°,  Londres,  1710,  en  tête 
desquelles  on  trouve  une  biographie  de  l'auteur.  Voir 
W.  i  irme.  Bibliotheca  biblica,  4824,  p.  352  ;  S.  Lee,  Dic- 
tionary  of  national  Biography,  t.  xi.vi.  1896,  p.  7-12. 

PODAGRE,  maladie  de  Iakoutie,  affectant  spéciale- 
ment les  pieds.  —  La  goutte  est  une  maladie  qui  en- 
vahit l'organisme  entier  et  se  présente  à  l'état  tantôt 
aigu  et  tantôt  chronique.  Elle  se  déclare  d'ordinaire 
entre  25  et  55  ans  et  atteint  plus  souvent  1rs  hommi  s 
que  les  femmes.  Ses  causes  les  plus  fréquentes  sont  les 
excès  de  table,  la  vie  molle  et  sédentaire,  le  défaut 
d'exercice,  quelquefois  l'impression  d'un  froid  humide, 
la  suppression  de  la  transpiration,  etc.  La  goutte  se 
manifeste  par  une  douleur  subite  et  très  vive  au  gros 
orteil,  ou  plus  rarement  au  cou  de  pied,  au  genou,  à 
la  main.  La  douleur  augmente  et  linit  par  devenir 
intolérable.  L'accès  dure  plusieurs  jours  et  se  renou- 
velle à  intervalles  irréguliers;  puis,  les  périodes  de 
souffrance  se  multiplient  et  se  prolongent;  des  nodosi- 
tés et  des  concrétions  d'urates  et  de  phosphates  cal- 
caires se  forment  dans  les  articulations  el  en  rendent 
les  mouvements  difficiles  ou  même  impossibles.  On 
appelle  podagre  la  goutte  qui  s'attaque  aux  pieds, 
chiragre  celle  qui  atteint  les  mains,  etc.  La  goutte  se 
traite  surtout  par  des  soins  hygiéniques,  exercice, 
sobriété,  régularité  de  vie.  frictions,  séjour  dans  les 
climats  chauds  et  Secs,  etc.  —  Il  est  raconté  du  roi  Asa 
que  hdldlt  'éf-raglàv,  ètiôve»  tous  -oôi;  teJroO,  dotait 
pedes,  III  Reg.,  xv,  23;  yèhélè  beragldv,  Éu.aXaxca8i) 
loùç  -oSa;,  œgrotavit  dnlorc  peduni.  II  Par.,  xvi,  12. 
Il  fut  malade  des  pieds,  et,  suivant  ce  qu'ajoute  ce 
dernier  texte,  il  en  arriva  à  éprouver  de  grandes  souf- 
frances. Le  mal  se  déclara  la  trente-neuvième  année  du 
règne  d'Asa  ;  il  dura  par  conséquent  de  deux  à  trois 
ans,  puisque  le  roi  mourut  la  quarante  et  unième 
année.  II  Par.,  xvi,  12.  13.  Le  texte  sacré  ajoute  qu'an 
lieu  de  chercher  Jéhovah,  sans  doute  pour  en  obtenir 
sa  guérison,  il  s'adressa  aux  médecins.  Ceux-ci  n'arri- 
vèrent nia  le  guérir  ni  à  le  soulager  beaucoup.  On 
s'accorde  généralement  .i  reconnaître  la  goutte  dans  la 
maladie  si  succinctement  décrite;  --a  localisation,  les 
souffrances  qu'elle  occasionna,  son  prolongement  sont 
di  -  caractères  propres  à  la  goutte.  11  esl  probable  qu'à 
un  moment  elle  remonta  jusqu'à  un  organe  essentiel, 
le  coeur  ou  le  cerveau,  el  entraîna  ainsi  la  mort.  L'an- 
cienne médecine  ne  possédait  pas  de  spécifiques 
sérieux  contre  ce  mal.  Lucien.  Tragopodagra,  173. 
indique  comme  remède  contre  la  podagre  un  exorcisme 
fait  par  un  Juif.  —  Il  y  a  peut-être,  dans  plusieurs  autres 
(.-vies,  quelque  allusion  à  la  goutte  qui  paralyse  (es 
genoux,  Joh,  IV,  i.  et  à  celle  qui  atteint  à  la  fois  les 
genoux  et  les  mains.  Eecli.,  xxv,  32;  I*..  xxxv,  3; 
Heb.,  xii,  12.  —  Cf.  W.  Ebstein,  Die  Medizin  un 
Alten  Testament,  Stuttgart,  1901,  p.  lis. 

II.  Lesètre, 

POÊLE  (hébreu    :    mahàbaf,   niairêf ;  Septante 
ti^Yavov  ;  Vulgate  :  sarlago),  instrument  qui  sert  à  faire 


477 


POÊLE    —    POESIE    HÉBRAÏQUE 


478 


frire  sur  le  feu  des  gâteaux  ou  des  mets  analogues. 
La  poêle  était  en  métal  et  ne  consistait  guère  que 
dan-,  une  simple  plaque  avec  ou  sans  rebords  (lig.  LOI  :. 
—  On  faisait  frire  sur  la  poêle  des  gâteaux  de  fleur 
de  farine  destinés  aux  oblations.  Lev.,  n,  5;  vi,  21; 
vu,  9.  Ces  gâteaux  étaient  ordinairement  mélangés 
d'huile,  ce  qui  leur  permettait  de  se  détacher  facile- 
ment du  métal.  Dans  le  Temple,  il  y  avait  des  lévites 
chargés  de  veiller  sur  les  gâteaux  cuils  à  la  poêle, 
1  Par..  i\,  31;  xxm,  29.  —  Chez  son  frère  Amnon- 
Thamar  fit  cuire  des  gâteaux,  puis  prit  la  poêle  et 
les  versa.  II  Reg.,  xiii,  9.  Le  mot  mairêf  n'ap- 
parait  que  dans  ce  passage.  Le  mot  mahâbat  n'est 
pourtant  pas  réservé  pour  les  poêles  du  Temple.  — 
Ezéchiel,  iv,  1-3,  reçut  l'ordre  de  tracer  sur  une  brique 
un  plan  de  Jérusalem  et  de  construire  autour  l'appareil 
d'un  siège,  puis  de  prendre  une  poêle  de  fer  et  de  la 
placer  comme  un  mur  de  fer  entre  lui  et  la  ville,  dont 
il  figurait  l'assiégeant.  Cette  poêle  de  fer,  ainsi  inter- 
posée, signifiait  que  Dieu,  le  véritable  assiégeant,  ne 
voulait   plus  ni   voir   ni   entendre    Jérusale  in,  dont  le 


101.  —  Poêle  à  frire,  trouvée  à  Pompéi. 
D'après  Ricli,  Dictionnaire  des  antiquités,  p.  556. 

sort  était  irrévocablement  fixé  et  la  ruine  décidée.  Dans 
la  réalité,  la  poêle  de  fer  représentait  ici  les  péchés 
d'un  peuple  incorrigible,  appelant  un  vengeur  inflexible. 
Isaïe,  i.ix,  2,  avait  en  effet  déjà  dit  :  «  Ce  sont  vos  ini- 
quités qui  ont  mis  une  séparation  entre  vous  et  voire 
Dieu,  ce  sont  vos  péchés  qui  vous  ont  caché  sa  face 
pour  qu'il  ne  vous  entendit  pas.  »  Cf.  Lam.,  ni,  il.  — 
Pendant  la  persécution  d'Antioelius  Épiphane,  le  pre- 
inii".'  des  sept  frères,  d'abord  affreusement  mutilé,  fut 
placé  sur  une  poêle  pour  y  être  rôti,  et  la  vapeur  de 
la  poêle  se  répandit  au  loin.  II  Mach.,  vu.  3-5. 

H.  Lksètre. 

POÉSIE  HÉBRAÏQUE.  Sur  le  caractère  général 
de  la  poésie  hébraïque  et  sur  les  caractères  particuliers 
qui  la  distinguent,  parallélisme,  vers,  strophe,  voir  HÉ- 
BRAÏQUE (Langue),  t.  m,  col.  487-492 

1°  Origine  babylonienne  de  la  poésie  hébraïque.  — 
Le  parallélisme  n'est  pas  une  invention  des  Hébreux, 
on  le  trouve  dans  de  très  anciens  poèmes  babyloniens 
et  même  égyptiens,  quoique  inoins  régulier  dans  ces 
derniers.  Eh.  Schrader.  Setiiitismus  und Babylonismus, 
dans  les  Jahrbûcher  fur  proteslantische  Théologie, 
1. 1.  1875,  p.  121  ;  H.  Zimmern,  dans  la  Zeitschrift  fur  As- 
syriologie,  t.  vin,  p.  121  :  t.  x.  p.  1  ;  W.  Max  Millier,  Die 
Liebespoesie  de?  alten  Aegypler,  1899.  p.  10.  La  littéra- 
ture assyrienne  offre  même  des  exemples  de  poèmes 
alphabétiques.  Proceedings  of  the  Society  of  Biblical 
Archseology,  t.  vu,  1895,  p.  135-151.  C'est  donc  de  leur 
pairie  primitive  que  les  Hébreux  avaient  emporté,  pour 
ainsi  dire,  leur  moule  poétique.  Leurs  ancêtres  avaient 
connu,  là  aussi,  leur  principal  genre  poétique,  la  poésie 
lyrique,  et  l'on  a  pu  donner  le  nom  de  psaumes  à  des 
poèmes  babyloniens  qui  par  leur  ton,  leur  tour  et 
leur  sentiment  religieux,  ressemblent  en  effet  aux 
chants  du  Psautier,  dont  ils  dillérentpeu  pour  la  forme, 
quoiqu'ils  en  diffèrent  totalement  par  la  doctrine  théolo- 
gique.  —  Ni  les  Assyriens  ni  les  Hébreux  n'eurent  l'idée 
du  drame  proprement  dit.  —  L'antique  Babylonie  eut  des 
poèmes  épiques,  tels  que  le   poème  de  Gilgamès.  mais 


les  Israélites  n'ont  jamais  utilisé  cette  forme  de  poésie. 
L'Écriture  contient  snrtout  des  poèmes  lyriques.  Pour 
les  différents  noms  qu'on  leur  donnait,  voir  Psaumes. 
—  Avec  la  poésie  lyrique,  la  poésie  gnomique  ou  didac- 
tique, mdsal,  fut  la  plus  cultivée  chez  les  Hébreux.  Voir 
Proverbes. 

2°  Usage  de  la  poésie  chez  les  Hébreux.  —  Comme 
chez  tous  les  peuples,  dès  la  plus  haute  antiquité,  les 
Hébreux  eurent  recours  à  la  poésie  pour  exprimer  leurs 
joies  et  leurs  peines,  les  événements  heureux  et  les 
deuils  de  la  vie  privée  ou  de  la  vie  publique.  Le  plus 
ancien  morceau  poétique  que  renferme  la  Bible  est  re- 
latif à  l'histoire  de  Lamech.  Gen..  iv,  23-21.  Moïse  chante 
le  passage  de  la  mer  Rouge.  Exod.,  xv,  1-21;  Débora.  la 
victoire  de  Barac  et  la  défaite  de  Sisara,  ,Tud.,  v,  etc. 
Cf.  I  Reg.,  xvin,  7;  .lud..  xv,  16;  Kuni,  xxi,  27-30; 
Jos..  x,  12.  Noé,  Gen.,  ix,  25-27:  Jacob,  Gen..  xlix; 
Moïse,  Deut.,  xxxm,  bénissent  leurs  enfants  ou  leur 
peuple  en  un  testament  poétique.  David  déplore  dans 
une  élégie  d'un  lyrisme  achevé  la  mort  de  Saûl  et  de 
Jonalhas,  II  Reg.,  i,  18-27;  Jérémie,  dans  ses  touchantes 
Lamentations,  les  malheurs  de  son  peuple  emmené  en 
captivité.  Cf.  Il  Reg.,  m,  33;  .lud.,  xi,  40.  La  poésie 
cumme  la  musique  égayait  les  festins.  Is.,v.  12;  xxiv. 
9;  Amos,  vi,  5;  Jml.,  xiv,  14,  18,  etc.  La  découverte 
d'une  source  fournissait  matière  à  un  chant.  Num.,  XXI, 
17-18.  On  célébrait  aussi  par  des  chants  poétiques  la 
moisson  et  les  vendanges.  Jud.,  ix,  27.  Voir  Chanson, 
t.  n,  col.  551.  Mais  les  Hébreux  composaient  surtout  des 
chants  religieux  et  leur  poésie  est  avant  tout  religieuse. 
Le  Psautier  en  est  la  preuve;  aucun  autre  recueil  poé- 
tique ne  peut  lui  être  comparé  pour  l'élévation  des  sen- 
timents, la  profondeur  de  la  piété,  l'éclat  du  lyrisme, 
l'union  intime  du  poète  avec  Dieu.  Les  livres  des  pro- 
phètes nous  offrent  une  plus  grande  variété  de  formes 
poétiques  que  les  Psaumes,  mais  c'est  le  même  senti- 
ment religieux  qui  s'y  manifeste. 

Les  chants  sacrés,  avec  accompagnement  de  musique, 
furent  un  des  éléments  principaux  du  culte  rendu  à 
Dieu  par  les  Israélites.  Voir  Chant  sache,  t.  u,  col.  553; 
Chantres  du  temple,  col.  556;  Musique,  ni,  t.  iv, 
col.  1349.  C'est  aux  Hébreux  que  l'Eglise  chrétienne  a 
emprunté  avec  les  Psaumes,  l'usage  de  la  psalmodie  et 
du  chant  liturgique. 

3°  Technique  de  la  poésie  hébraïque.  —  1.  La  poésie 
hébraïque,  comme  toutes  les  poésies,  se  distingue  de 
la  prose  par  l'assujettissement  à  des  règles  spéciales 
qui  consistent  surtout  dans  le  rythme  et  dans  la  me- 
sure. Un  poème  doit  briller  par  le  choix  des  pensées, 
la  beauté  des  figures,  le  mouvement,  la  couleur  et 
l'éclat  du  style,  mais  toutes  ces  qualités  peuvent  exister 
dans  la  prose;  ce  qui  constitue  proprement  le  poème 
en  tant  qu'oeuvre  d'art,  c'est  en  général,  la  métrique; 
en  hébreu,  c'est  en  particulier  le  parallélisme,  qui 
par  lui-même  n'exige  pas  une  mesure  rigoureuse  et 
peut  se  rencontrer  à  la  vérité  dans  des  morceaux  qui 
ne  sont  pas  en  vers,  mais  qui  doit  toujours  coexister 
avec  le  vers,  lequel  caractérise  par  excellence  les  mor- 
ceaux poétiques.  Les  règles  de  la  versification  hébraïque 
ne  nous  sont  pas  bien  connues,  mais  l'existence  du 
vers  hébreu  n'en  est  pas  moins  certaine.  Les  poèmes 
hébreux  sont  aussi  souvent  divisés  en  strophes. 

2.  Outre  ces  caractères  généraux,  on  peut  signaler 
dans  la  poésie  hébraïque,  a)  l'emploi  de  mots,  de 
formes  grammaticales  et  de  tournures  qui  lui  sont 
propres,  comme  dans  toutes  les  langues;  —  b)  les 
poèmes  acrostiches,  dans  lequel  chaque  vers  ou  chaque 
série  parallèle  commence  par  une  lettre  de  l'alphabet, 
selon  son  ordre  alphabétique.  Voir  Alphabétique 
(Poème),  t.  i,  col.  416;  —  c)  la  rime  ou  répétition  du 
même  son  à  une  place  déterminée  du  vers.  L'emploi 
de  la  rime  dans  la  poésie  rabbinique  est  fréquent, 
mais  son  usage  régulier  ne   parait  pas   antérieur  au 


479 


POÉSIE    HÉBRAÏQUE    —    POÉTIQUES      LIVRES)    DE    LA    BIBLE 


480 


\ue  siècle  de  notre  ère.  On  ne  la  rencontre  donc  qu'acci- 
dentellement dans  l'ancienne  poésie  hébraïque.  La 
langue  des  Hébreux,  par  la  sonorité  des  finales  de  ses 
mots  et  de  ses  flexions,  fournit  à  la  rime  des  ressources 
abondantes  et  le  poète  est  amené  tout  naturellement  à 
s'en  servir  et  à  répéter,  sans  les  chercher,  les  mêmes  ter- 
minaisons qu'il  emploie  nécessairement  pour  exprimer 
sa  pensée.  Il  y  a  donc  dans  ce  qu'il  écrit  des  rimes  in- 
conscientes, mais  elles  sont  aussi  quelquefois  un  effet 
de  l'art  comme  on  n'en  saurait  douter  lorsqu'elles  ré- 
viennent d'une  manière  régulière  et  suivie  et  par  con- 
séquent voulue.  Ainsi,  par  exemple,  dans  les  vers  sui- 
vants de  Job,  x,  9-1S. 

Zekor-nd  ki  kahômèr  âèîtàni 
Ve'él   dfâr  teiîbêni. 

Halo  kékàlâb  (afikêni 
Vekagbinàh  (aqpi  êni. 
i  ij    ûbâsâr  falbisêni 
Ûba'âsâmôf  vegîdim  (eéôkkênî. 

Hayim  vdhéséd  àiitâ'  itnmâdi 
Ufquddatkâ  Sdntrdh  rûhi. 

Ve'élléh  sâfan(à  bilbdbéka 
Yâdaefi  ki  zôf    immdk. 

Im  hâtati  uicmartdni 
Umê  'tr.ni  Vô  (enaqqêni. 

Im  rdia'eli   alelai  U 
Vesddui/li  h':  'esta'  r'ôSi 
$eba   qâlôn  iiru'rh  'onyi. 

Ve-ig'éh  kassahal  (esûdêni 
Veiasob  (ilpalld   M. 

Tehaddêi  êdéka  negdi 
Veféréb  ka'askd  itnmâdi 
IJnlifôi  vesdbd'  'imtnî. 

Veldmmdli  mëréhém  hôs'ê(âni 
'Egeva  ve'ain  l'ô-(ir'êni. 

Voir  aussi  le  l's.  VI,  dont  un.'  grande  partie  des  vers 
sont  rimes. 

i/  L'assonance,  c'est-à-dire  la  reproduction  fréquente 
du  même  son,  est  recherchée  par  les  poètes  hébreux. 
Elle  se  distingue  de  la  rime  en  ce  qu'elle  n'est  pas  placée 
régulièrement  à  la  fin  du  vers  mais  arbitrairement  à 
des  endroits  différents.  Dans  les  iV  vers  que  contient 
le  chap.  v  dis  Lamentations,  la  syllabe  nû  est  répétée 
trente-cinq  fois;  elle  l'est  douze  fois  dans  les  seize  vers 
de  Ps.  cxxiv.  Elle  est  autant  un  artifice  de  rhétorique 
qu'un  procédé  poétique,  «le  même  que  l'allitération  et 
les  jeux  de  mots,  mais  tous  ces  moyens  qui  piquent 
l'attention  et  aident  la  mémoire  du  lecteur  ou  de  l'au- 
diteur sont  familiers  aux  poètes  d'Israël. 

e)  L'allitération  esl  la  répétition  des  mêmes  lettres 
ou  des  mêmes  syllabes.  Les  exemples  en  sont  nom- 
breux :  <<•,;/(  umeis'âh,  solitude  <■!  désert  »,  qui  se  lit 
deux  fois  dan?,  .lob,  xxx.  3,el  wxvm.  27.  etc.  -  L'an- 
nomination  est  la  répétition  des  mêmes  mots  sous  des 
formes  différentes;  Isale  l'affectionne  particulièrement. 

Hinnêh  Yahvéh  metallélqà. 
Taltêldli  gober  ve  ôtkâ  atôh 
Çanàf  isnofkd  çenêfàh.  Is..  xxn,  17-18. 

Quant  aux  paronomases  et  aux  jeux  de  mots,  les  poètes 
hébreux  s'\  complaisent.  Ire'û  rabbîm  veirâ'û.  l's.  xi., 
i.  Veire  û  saddiqim  veird  «.  Ps.  in.  S.  Vehdyefah 
.:>h.  is..  x\ix.  2.  etc.  Voir  Jeu  di  mots, 
(.  m.  col.  loi").  Cf.  aussi  i;.  \V.  llopf,  Allitération, 
Assonanz,  Retm  in  der  Bibel,  in-8  .  Erlangen,  1883; 
.1.  M.  Casanowicz,  Paronomasia  in  tbeold  Testament, 
in-8»,  Boston.  1894. 

Sur  la  poésie  hébraïque  i  n  _  aérai,  voir  l'historique 

et  l'exposé  dis   systèmes  anciens  et   modernes  sur   la 

métrique  hébraïque  dan-  .1.   huiler.  Rythmus,  Metrik 

■  Irophik  in  ker  biblisch-hebrâischen  PoesU  .  in-8  . 

Paderborn,  -189!);  Ed.  Kbnig,  Stilistik,  Rhetorik,  Poe- 


tik  im  Bezug  auf  die  biblische  Literatur,  in-8",  Leip- 
zig. 1900,  p.  346  sq.  Sur  les  strophes  en  particulier, 
voir  D.  H.  Huiler,  Die Proplieten  in  ihrer  ursprùngli- 
chen  Form,  2  in-S°.  Vienne,  1896:  F.  Perles,  Zur 
hebraîschen  Stropbik,  Vienne.  1896;. 1.  K.  Zenner,  S.J.. 
Die  Chorgesânge  ini  Huche  der  Psahnen.  2  in-i".  Fri- 
bourg-en-Brisgau.  1896;  D.  H.  Mullér,  Strnpltenbau 
und  Responsion,  in-8°,  Vienne.  1898.  Voir  aussi 
H.  Grimme,  Psahnenprobleme,  Vntersuchungen  ïtber 
Metrik,  Strophen  und  Pasekdes  Psahnenbuches,  in-i  . 
Fribourg  (Suisse),  1902.  F.  Vigouroux. 

POÈTE  (grec  :  -o •./•,:-/,;).  Ce  mot,  désignant  un  écri- 
vain qui  a  composé  des  vers,  ne  se  lit  qu'une  fois  dans 
l'Écriture.  Saint  Paul,  dans  son  discours  de  l'Aréopage, 
cite  littéralement  à  ses  auditeurs  un  vers  d'Aratns  qui 
était  comme  lui  originaire  de  Cilicie.  Voir  ARATUS, 1. 1, 
col.  882.  Il  ne  le  lui  attribue  pas  d'ailleurs  nommé- 
ment, mais  il  s'exprime  ainsi  :  «comme  l'ont  dit  quel- 
ques-uns de  vos  poètes.  A,  !..  \\n.  28.  Cette  manière 
de  parler  pourrait  ne  pas  être  prise  à  la  rigueur  de  la 
lettre  et  s'entendre  d'un  seul  poète,  niais  il  est  vrai 
que  deux  autres  poètes  grecs  sont  connus  comme  ayant 
écrit  un  vers  semblable  :  'Ex  oo3  yop  tv'o;  écuiv,  dit 
Cléanthe,  Hymn.  in  Ju>\,  15.  "Ev  xvSpcôv,  Ëv  8ewv  ysvo;, 
dit  Pindare.  Nem.,  6.  Voir  Wetstein,  In  Ad.,  xvn,  28, 
Novum  Testam.  gi\,  t.  n.  1752.  p.  570. 

Saint  Paul  cite  aussi  un  poète  Cretois,  Tit.,  i.  ^.éga- 
lement sans  le  nommer;  il  l'appelle  »  un  prophète  ■ 
des  Cretois.  Voir  Epiménide,  t.  u,  col.  1891.  Dans 
I  Cor.,  xv,  33,  il  reproduit  un  vers  de  la  Thaïs  de  Mé- 
nandre,  mais  sans  aucune  indication.  Voir  Ménandre. 
t.  îv,  col.  960.  Ce  sont  là  les  seuls  poètes  profanes  cités 
dans  le  Nouveau  Testament.  —  llans  l'Ancien  Testa- 
ment, on  ne  trouve  qu'un  mot  qui,  en  hébreu,  dé- 
signe les  poètes  en  général,  et  encore  ne  s'applique-t-il 
directement  qu'à  i  eux  qui  composent  îles  mâsdl, poèmes 
gnomiques,  didactiques  et  satiriques.  Les  Nombres, 
xxi.  27.  rapportent  les  vers  contre  Moah.  v.  27-30,  en 
les  attribuant  aux  môilitn  un  portes.  La  Vulgate  n'a 
pas  traduit  ce  mot:  les  Septante  l'ont  rendu  par  ol 
otîviY|ucTi<rcaî.  —  Il  est  possible  que  le  mot  nâbi  .  •  pro- 
phète »,  eut  accessoirement  le  sens  de  poète,  parce 
que  les  prophètes  écrivaient  souvent  ou  s'exprimaient 
en  vers,  mais  ce  n'était  certainement, en  tout  cas,  qu'une 
signification  secondaire  et  dérivée.  lien  Sirach  fait 
l'éloge  des  poètes  sacrés  •  ■---  •*•;■-:).  KcclL,  xi  iv,  5. 

F.    VlGODROt  X. 

POÉTIQUES    (LIVRES)    DE     LA     BIBLE.    - 

1°  L'Fcriture  contient  un  certain  nombre  de  livres  écrits 
en  vers  et  des  morceaux  poétiques  se  trouvent  ;,us-i 
dans  plusieurs  des  livres  écrits  en  prose.  Voir  t.  III, 
col.  487.  Les  grammairiens  hébreux  n  ont  noté  que 
trois  livres  avec  les  accents  poétiques,  Job,  les  Psaumes 
ei  n-  Proverbes,  mais  on  range  aussi  aujourd'hui  parmi 
lis  livres  poétiques  le  Cantique  de-  Cantiques  et  les  La- 
mentations.  Plusieurs  >  ajoutenl  l'Eccli  siaste  el  1 
siastique  dont  une  partie  a  été  retrouvée  dans  le  texte 

original.  —  lieux   recueils  de  | sies  qui  contenaient 

des  morceaux  profanes  avec  de-  morceaux  religieux, 
le  Livre  île.  Guerres  du  Seigneur.  Nu  m..  XXI,  14,  el  le 
Livre  des  Justes  ou  du  ï'dè  ly  Ins..  ix,  13,  etc.  Voir 
Justes  Livri  des),  t.  m,  col.  1873.  Cf.  Livres  ph 
1°,  2°,  t.  iv,  col.  317).  ne  nous  sont  plus  connus  que  par 
des  citations.  U  parait  avoir  existé  ni-si  un  recueil 
d'élégies  ou  lamentions  funèbres.  <iinùt.  II  Par..  \\\\. 
23. 

tin  pourrait  considérer  également  comme  livres  poé- 
tiques  les  écrits    de  plusieurs  prophètes,  qui  se  con- 

I lent   en   général   aux  règles  de  la  poésie  hébraïque. 

tels   que    Isaïe,    Osée,    Joël,    Amos,   Abdias,   Mi 
Nahum,   Habacuc,  Sophonie,  etc.  Cependant  ils  s'as- 
treignent d'ordinaire   moins  rigoureusement  aux  exi- 


481 


POÉTIQUES   (LIVRES)    DE   LA    BIBLE   —   POIDS 


482 


gences  de  la  poétique  hébraïque,  de  sorte  qu'il  n'est 
pas  toujours  facile  de  distinguer  ce  qui  est  vers  de  ce 
qui  n'est  que  style  oratoire,  et  de  tracer  une  ligne 
exacte  de  démarcation  entre  les  deux.  Si  nombre  de 
morceaux  renferment  des  chants,  des  psaumes  ou  des 
cantiques  en  vers  réguliers,  Is.,  xn,  1-6,  etc.,  qu'on  re- 
connaît sans  peine,  il  en  est  autrement  ailleurs.  Néan- 
moins même  quand  ils  ne  s'expriment  pas  en  vers  pro- 
prement dits,  les  prophètes,  souvent,  ne  parlent  pas  en 
prose  simple;  ils  se  servent  d'un  langage  mesuré,  plus 
soigné,  plus  artificiel  et  plus  rare,  afin  qu'il  soit  plus 
digne  des  oracles  divins  qu'il  transmet  aux  hommes  et 
afin  qu'il  frappe  davantage  l'imagination  et  l'esprit  des 
auditeurs  et  des  lecteurs.  Il  est,  du  reste,  malaisé  d'en 
fixer  les  règles  précises.  Tandis  que,  parfois,  ils  s'ex- 
priment de  la  manière  la  plus  ordinaire,  sans  aucun 
effort  et  sans  aucun  artifice,  ls.,  vu,  1-3;  .1er.,  xxi,  1-10, 
d'autres  fois,  prose  et  poésie  sont  entremêlées,  Is.,  vi  ; 
Jer.,  i,  etc.,  et  ailleurs,  entre  l'une  et  l'autre,  apparaît 
un  langage  rythmé,  qui  n'est  ni  la  simple  prose  ni  le 
vers  de  Job  ou  des  Psaumes,  et  qui  est  caractérisé  sur- 
tout par  le  parallélisme,  mais  avec  des  nuances  et  des 
variations  infinies.  F.  VlGOURoux. 

POIDS,  morceaux  de  pierre  ou  de  métal  d'une  pesan- 
teur déterminée,  qu'on  a  employés,  dès  les  temps  les 
plus  reculés,  pour  peser  les  objets  de  toute  nature. 
Comme  l'or  et  l'argent  ne  furent  monnayés  qu'à  une 
époque  relativement  tardive  et  qu'il  fallait  les  peser 
pour  connaître  leur  valeur,  chez  les  Hébreux,  comme 
chez  les  Babyloniens  et  les  Assyriens,  les  mêmes  noms, 
talent,  mine,  sicle,  etc.,  servent  à  désigner  soit  des 
poids,  soit  des  monnaies.  Voir  Monnaie,  t.  iv,  col.  1235. 

I.  Les  poids  a  l'origine.  —  I»  Poid*  primitifs.  — 
De  même  que  les  membres  du  corps  humain  fourni- 
rent les  premières  mesures  de  longueur,  par  exemple, 
la  coudée,  le  pied,  l'empan,  le  palme,  le  doigt,  voir 
Mesures,  t.  iv,  col.  1041-1042,  de  même  la  nature  pro- 
cura aux  hommes,  sous  la  forme  des  graines  de  cer- 
taines plantes  communes,  telles  que  le  blé,  l'orge,  les 
haricots,  etc.,  les  premiers  poids  dont  ils  firent  usage. 
Voir  Ridgeway,  Origin  of  metallic  Currency  and 
standard  Weigtks,  in-8°,  Cambridge,  IS92,  p.  387. 
Divers  passages  du  Talmud  mentionnent  encore  ces 
poids  primitifs.  Voir  le  traité  Scheqâlim.  Maimonide 
dit  aussi,  Vonstitut.  de  Siclis,  Leyde,  1718,  p.  1-2,  que. 
sous  les  rois  hébreux,  le  sicle  pesait  320  grains  d'orge. 
Néanmoins,  il  exista  de  très  bonne  heure,  en  Egypte  et 
spécialement  chez  les  Babyloniens,  un  système  com- 
plet, fort  bien  agencé,  en  ce  qui  concerne  cette  partie 
de  la  métrologie. 

2»  Noms.  —  Le  mot  «  poids  »  se  dit  en  hébreu  : 
miSqâl,     "jptfn,    ou  séqél,    bp*,    de  la   racine    sâqal, 

«  peser  ».  Cf.  Gen.,  xlhi,  21;  Ex.,  xxx.  14:  Lev..  v. 

15;   xxix,   35,    etc.    Les   poids  des   anciens   Israélites 

furent  tout  d'abord  de  simples  pierres,  et  c'est  pour 

ce   motif  qu'on    les    nommait    habituellement  z-;:*. 

.  T_. 

'âbdnîm,«  pierres  ».  Cf.  Lev.,  xix,  36;  Deut.,  xxv,  13; 
II  Reg.,  xiv,  26;  Prov.,  xi,  1;  xvi,  11;  xx.  10,  23,  etc. 
En  fait,  on  a  retrouvé,  à  Jérusalem  et  en  d'autres 
endroits  de  la  Palestine,  plusieurs  poids  en  pierre 
ordinaire,  en  hématite,  etc.  Voir  Talent.  Plus  tard,  ils 
paraissent  avoir  été  aussi  quelquefois  en  plomb,  cf.  Zach . , 
v,  7,  et  sans  doute  aussi  en  d'autres  métaux. 

3°  Formes.  —  Les  Égyptiens,  les  Assyriens  et  les 
Babyloniens  donnaient  à  leurs  poids  des  formes  d'ani- 
maux ;  notamment  celle  d'un  lion  accroupi,  muni 
d'une  anse  qui  le  rendait  plus  maniable  (fig.  102),  celle 
d'un  canard  (fig.  103),  celle  d'une  gazelle  ou  d'autres 
animaux.  Voir  Balance,  t.  i,  fig.  420,  col.  1403.  C'est 
peut-être  pour  ce  motif  que  le  mot  hébreu  rroiDp, 
qesîtdh,  Gen.,'xxxni,  19,  cf.  Jos.,  xxiv,  32,  et  Job.  xli'i, 

DICT.    DE   LA    BIBLE. 


11,  est  traduit  par  «  agneau  »  dans  les  Septante  et  dans 
la  plupart  des  autres  versions  anciennes.  Voir  Gese- 
nius,  Thésaurus,  t.  III,  p.  1241.  Mais  on  ne  peut  rien 
dire  de  certain  à  ce  sujet.  Les  poids  hébreux,  assy- 
riens et  babyloniens  portaient  d'ordinaire  une  ou  deux 
inscriptions,  qui  marquaient  leur  valeur  et  le  nom 
du  roi  qui  les  avait  fait  fabriquer.  C'est  ainsi  que,  sur 
un  poids  assyrien  en  forme  de  lion,  on  lit  ces  mots 
gravés  en  araméen  :  «  deux  mines  du  pays  »,  et  cette 


102.  —  Poids  assyrien  en  forme  de  lion.  British  Muséum. 

autre  inscription  en  caractères  cunéiformes  :  «  Palais 
de  Sennachérib;  deux  mines  du  roi.  »  Sur  un  poids 
babylonien  en  basalte  vert,  en  forme  de  canard,  on  lit 
en  caractères  cunéiformes  :  «  Trente  mines  de  poids 
justifié.  Palais  d'Irba-Mérodach,  roi  de  Babylone.  » 

4°  Poids  hébreux.  —  On  ne  pouvait  pas  manquer  de 
retrouver  quelques  anciens  poids  hébreux  en  Pales- 
tine; mais  ils  ne  forment  encore  qu'une  série  très 
incomplète.  Toutefois,  il  ne  faut  pas  oublier  que  les 
sicles  juifs  qui  sont  parvenus  jusqu'à  nous  sous  forme 
de  monnaie  comptent  aussi  sous  ce  rapport,  puisque,  à 


103.  —  Poids  assyrien  en  forme  de  canard. 

la  façon  de  nos  monnaies  courantes,  ils  correspon- 
daient à  des  poids  fixes.  —  1°  M.  Clermont-Ganneau  a 
étudié  dans  son  Recueil  d'archéologie  orientale,  t.  iv. 
1900,  p.  24-35,  quelques-uns  de  ces  poids.  Un  tout  petit 
poids  de  2ar54  seulement,  a  été  découvert  en  Samarie; 
il  porte  deux  inscriptions  en  hébreu  :  réba'  nésef, 
=135731,  «  quart  d'une  moitié  »  (?),  et  réba'  Sel,  1,-"'.'-~ . 
«  quart  d'un  sicle  »  (?)  (fig.  104).  Trois  autres  poids  sont 
l'un  en  pierre  rougeàtre,  l'autre  rouge  clair  et  le  troi- 
sième en  calcaire  blanc;  .ils  ont  été  trouvés  à  Tell- 
Zachariya;  ils  pèsent  10a1 21,  9ar05  et  9  grammes  (fig.  105). 
Sur  chacun  d'eux  on  a  cru  lire  le  mot  hébreu  né?i 
=132,  qu'on  a  traduit  ordinairement  par  «  moitié  ».  Un 
autre  poids,  également  de  petites  dimensions,  a  la 
forme  d'un  grain  de  chapelet  percé  et  est  en  pierre 
d'un  jaune  rougeàtre;  il  provient  d'Anàtà,  l'ancienne 
Anathoth,  près  de  Jérusalem,  et  correspond  à  8'Jr61. 
Les  hébraïsants  ont  beaucoup  discuté  au  sujet  de  ces 
inscriptions,  sans  pouvoir  se  mettre  entièrement 
d'accord.  Quelques-uns  d'entre  eux  ont  lu  nêség,  1S3, 

ou   késéf,  =]DD,  «  argent   ■>,  au  lieu  de  néséf.  En  tout 

V.  —  16 


483 


POIDS 


484 


cas,  le  mot  reba  désigne  certainement  un  quart.  Voir 
Ed.  Kœnig,  Einleitung  in  das  aile  Testât».,  in-S\  Bonn. 
•1893,  p.  485.  q,  I  ;  Driver,  lntrod.  to  the  Literature 
of  the  Old  Test.,  in-8",  6'  édit.,  p.  419,  note;  Pales- 
tine Explor.  Fund,  Quarterly  Slalement,  in-8°,  1890, 
p.  267-268;  1891,  p.  69;  1893,  p.  22;  1S94,  p.  220,  286- 
287;  1895.  p.  187-190.  —  2°  Dans  la  jnême  revue,  1892, 


104.  —  Poids  en  hématite,  en  forme  de  navette,  découvert  à 
Samarie.  D'après  Palestine  Expl.  Fund,  Quart.  Stat., 
1890,  p.  207;  lb94,  p.  287. 

p.  114,  M.  FI.  Pétrie   analyse  d'autres  poids  qu'on  a 
aussi  découverts  en  Palestine.  Mais  rien  de  tout  cela 
ne  conduit  à  des  résultats  définitifs. 
II.  Anciens  systèmes    métrologiques   de    l'Orient. 

BIBLIQUE  EN  CE  QUI  CONCERNE  LES  POIDS.  —  l.  OB- 
SERVATIONS GÉKÊRALES.  —  Les  Hébreux  paraissent 
avoir  eu  assez  tôt  un  système  de  poids  bien  complet. 
Ce  système  était  le  même,  dans  son  ensemble,  que 
celui  de  la  plupart  des  peuples  de  l'Asie  antérieure,  en 
particulier  des  Pbéniciens,  des  Syriens,  de  plusieurs 
provinces  d'Asie  Mineure,  et  tout  spécialement  le  même 
que  celui  des  Babyloniens.  —  On  avait  d'abord  simple- 


105.  —  Quatre  poids  Israélites  à  inscriptions. 
D'après  Clermont-Ganneau,  Recueil  d'archéologie  orientale, 

t.  iv.  1"  et  2-  livr.,  1900,  p.  'J5,  20,  18. 

ment  conjecturé,  puis  on  a  démontré  de  la  manière 
l;i  plus  certaine  qu'en  ce  qui  regarde  les  poids,  comme 
les  mesures  de  longueur  el  de  capacité,  tous  1rs  svs- 
teni'-s  métrologiques  de  l'antiquité,  y  compris  ceux  de 
l'Egypte,  de  la  Grèce,  de  la  Sicile,  de  l'Italie,  etc.,  ont 
entreeux  une  ressemblance  frappante,  el  que  Babylone 
en  esi  le  centre,  ou  plutôt  le  lieu  d'origine.  Voir  Bôckh, 
Metrologische  Vfitersuchungen  ûber  Gewichte,  Mûnz- 

fiisse  und  Muasse  tirs  Mlerl/iutns  in  i/trem  Zusani- 
menhange,  in-8°.  Berlin,  1838.  liertlieau,  Z ur  Geschichte 
(1er  Israeliten,  in-8»,  Gœttingue,  1842,  a  développé 
cette  idée  et  cette  démonstration  par  rapport  aux  an- 
ciens Hébreux  ;  M.  Brandis  la  reprise  plus  en  grand, 
dans  son  ouvrage  intitulé  Uas  Mini:-  ,  Mass-  und  Ge- 
wiclttsiresen  in  Vorderasien  bis  auf  Alexander  den 
Grossen,   in-8»,    Berlin,    1866.    La  preuve  est  devenue 


péremptoire  à  la  suite  des  savants  travaux  de  M.  C.  P. 
Lehmann.  Voir  surtout  Das  altbabijlomsclie  Mass-  und 
Gewichtssystem  als  Grundlage  der  antiken  Gewicht-, 
Minrz-  und  Maassijsteme,  dans  les  A ctes  du  vin*  Congrès 
international  des  Orientalistes,  Section  sémitique  B, 
in-8»,  Leyde,  1893,  p.  166-246.  Cf.  V.  Duruy,  Histoire 
des  Grecs,  t.  i,  Paris,  1887,  p.  608.  Naturellement,  le 
système  babylonien  a  subi  des  modifications  et  des 
transformations  multiples  chez  les  divers  peuples  qui 
l'ont  emprunté,  tout  en  demeurant  au  fond  le  même. 
On  peut  regarder  comme  un  point  incontestable  que, 
dès  le  xvi1'  siècle  avant  J.-C,  la  partie  du  système 
métrologique  des  Babyloniens  qui  se  rapporte  aux  poids 
avait  pénétré  dans  les  régions  syriennes.  Cela  ressort 
de  la  façon  la  plus  évidente  du  fait  suivant  :  dans  les 
inscriptions  de  Tell-el-Amarna,  les  tributs  payés  au  roi 
d'Egypte  Thothmès  III  par  ses  vassaux  de  Syrie  sont 
énumérés  en  poids  assyriens,  c'est-à-dire,  en  talents 
et  en  mines,  et  non  pas  en  poids  égyptiens.  Voir  Leh- 
mann, dans  la Zeilschrift  fur  Assyriologie,  t.  m,  1888, 
p.  392.  11  est  vrai  que,  sur  l'inscription  du  temple  de 
Karnak,  les  mêmes  tributs  sont  énoncés  d'après  le 
système  métrologique  égyptien.  Mais  il  est  visible,  par 
la  seule  inspection  des  chiffres  marqués,  que  ces  chif- 
fres ont  été  obtenus  au  moyen  de  calculs,  et  traduits 
pour  ainsi  dire  en  langue  égyptienne;  car  ils  sont  sou- 
vent impairs,  et  même  accompagnés  de  fractions,  tandis 
que  d'ordinaire  les  tributs  étaient  comptés  par  centaines 
et  par  milliers  de  talents,  de  mines,  de  sicles,  etc.  Cf. 
Nowack,  Handbuch  (1er  hebr.  Archâologie,  t.  i,  p.  206; 
Benzinger,  Hebr.  Archâologie,  p.  186.  Suivant  Héro- 
dote, m,  91,  l'Egypte  elle-même  payait  le  tribut  aux 
Perses  d'après  les  poids  babyloniens. 

/(.  LES  nui»  babyloniens.  —  Quelques  indications 
à  ce  sujet  sont  ici  à  leur  place,  puisque  c'est  au  sys- 
tème babylonien  que  les  Hébreux  ont  emprunté  leurs 
propres  poids.  Cette  branche  a  été  en  quelque  sorte 
révolutionnée  de  nos  jours,  non  seulement  par  l'étude 
des  textes  assyriens  et  babyloniens,  mais  surtout  par 
la  découverte  d'un  nombre  assez  considérable  de  poids 
de  Babylone  Jet  de  Ninive,  —  Le  principe  sur  lequel 
s'appuie  tout  ce  système  métrologique  est  le  principe 
sexagésimal,  ainsi  nommé  parce  que  le  chiffre  60 
joue  chez  les  Babyloniens  le  même  rôle  que  le  chiffre 
10  chez  nous.  Leur  unité  de  poids  était  la  mine. 
MA-NA  des  inscriptions,  qui  correspond  à  mâneh  des 
Hébreux,  au  grec  u.vî  et  au  latin  jiina  ou  mina.  Au 
dessus  de  la  mine  était  le  talent,  appelé  gaggarou  dans 
les  lettres  de  Tell-el-Amarna.  kikkareo  hébreu,  tàXavrov, 
c'est-à-dire  «  poids  »,  en  grec,  lalentum  en  laiin:  il 
valait  60  mines.  Au  dessous  de  la  mine  était  le  sicle,  en 
assyrien  Siklu,  sèqél  en  hébreu,  trixXo;  en  grec,  ou 
tf7arr,p.  siclus  en  latin  ;  elle  formait  la  soixantième  partie 
de  la  mine.  Il  fallait  donc,  en  Chaldee  et  en  Ass\rie. 
60  sicles  pour  faire  une  mine,  60  mines  pour  faire  un 
talent. (Les  monuments  découverts  à  Tell-Lob.  dans  la 
Babylonie  méridionale,  montrent  que  ies  Chaldéens  se 
servaient  aussi  d'un  poids  inférieur,  nommé  clié,  qui 
correspondait  à  180  grains  de  blé  (60x3). 

On  a  remarqué'  qu'à  Babylone  et  à  Ninive  il  existait 
un  double  système  de  poids,  et.  dans  chaque  s\slriih 
une   double  série,   la  série    lourde  et  la  série   lé 
Voir  C.  P.  Lehmann.  Sitzungsberichte  der  archàolog. 
Gesellschaft  zu  Berlin,  1888,  p.  27-42;  Das  altba 
nischeMaas-  und  Gewichtssystem,  1893.  p.  6-20.  La  série 
lourde  pesai!  exactement  le  double  de  la  série  légère.  Le 
premier  système  a  été  surnommé  royal,  parce  que  les 
poids  qui  le  représentent  ont  été  trouvés  dans  les  palais 
royaux   et  qu'il  portent  tous  cette  inscription  :  <  Tant 
et  tant  de  mines  du  roi.   »  La  mine  royale  lourde  a  été 
évaluée,  d'après  ces  modèles,  à  1010  gr.  (c'est  le  poids 
de  la  Bg.  102),  el   la  mine  légère  à  505  gr.  (poids  de  la 
fig.  103),  D'après  cela,  le  talent  royal  de  la  série    lourd 


485 


POIDS 


486 


correspondait  a  1010  gr.  x  60,  c'est-à-dire  à  60  600  gr., 
et  le  talent  royal  de  la  série  faible,  à  505  gr.  x  60, 
c'est-à-dire  30  300  gr.  Le  sicle  royal  lourd,  qui  était  la 
60  partie  de  la  mine,  valait  16s'83,  et  le  sicle  royal 
léger  pesait  S'ri  1 .  Voir  Lehmann,  dans  Zeitsi  lirift  fur 
Ethnologie,  1889.  p.  372-373.  A  côté  de  ce  système  de 
poids  royaux,  les  Babyloniens  en  avaient  un  autre,  dit 
commun  ou  usuel,  dont  on  a  également  retrouvé  des 
échantillons,  marques  g  une  1  "2  mine,  un  1,3  de  mine. 
1  6  de  mine  ».  Ces  poids  étaient  un  peu  plus  faibles 
que  les  poids  royaux.  D'après  les  évaluations  de  M.  Leh- 
mann. la  mine  lourde  y  valait  en  moyenne  989r24;  la 
mine  légère.  49l3r2. 

//;.  srsrÈME  DES  POIDS  BÉBRBUX.  —  II  était  en  réa- 
lité, ainsi  qu'il  a  été  dit  plus  haut,  la  reproduction  de 
celui  des  Babyloniens.  A  Jérusalem  comme  à  Babylone. 
les  poids  principaux  étaient  le  sicle,  la  mine  et  le 
talent.  Le  talent  valait  60  mines,  et  tel  était  aussi  le  cas 
en  Asie  Mineure,  en  Grèce,  en  Syrie,  en  Perse.  .Mais 
le  sicle  avait  cessé  d'être  la  60'  partie  de  la  mine;  par 
un  compromis  entre  le  système  sexagésimal  et  le  sys- 
tème décimal,  elle  en  était  devenue  la  50e  partie.  Nous 
ignorons  à  quelle  époque  précise  et  en  quel  endroit  se 
fit  tout  d'abord  cette  transformation.  Chez  les  Israélites, 
elle  nous  apparaît  dès  l'Exode,  xxxvm.  24-25.  où  nous 
voyons  que  leurs  talents  d'argent  n'équivalaient  pas  à 
3600 sicles, comme  à  Babylone,  mais  seulement  à  3000. 

Les  principaux  poids  des  Hébreux  sont  mentionnés 
très  souvent  dans  la  Bible,  mais  toujours  d'une  manière 
indirecte,  par  conséquent  sommaire  et  incomplète,  car 
les  écrivains  sacrés  supposaient  à  bon  droit  que  ce  sujet 
était  familier  à  leurs  lecteurs.  Ça  et  là  cependant,  les 
rapports  réciproques  de  plusieurs  poids  ou  mesures 
sont  indiqués  en  termes  explicites.  Cf.  Exod.,  XV,  36: 
Ezech.,  xlv,  12. 

1"  Le  sicle.  —  L'unité  de  poids  des  Israélites  était  le 
sicle,  Séqcl,  qui  valait,  à  l'époque  des  Machabées,  et 
probablement  aussi  dès  celle  de  Moïse,  14'Jr200.  Les 
subdivisions  du  sicle  envisagé  comme  poids,  étaient  : 
—  1.  le  1  2sicleou  béqa ,  7p3.  de  la  racine  bdqâ  ,  «  divi- 
ser ».  Cf.  Gen..  xxiv,  22;  Ex.,  xxx,  13  et  xxxvm,  26, 
dans  le  texte  hébreu.  Voir  Béka,  t.  i,  col.  1555;  —2.  Le 
gérâh.  ".:,  «  grain    »,   qui  était  la  dixième  partie  du 

béqa ,  la  vingtième  partie  du  sicle.  Cf.  Exod.,  xxx.  13; 
Lev.,  xxvil,  25;  Num.,  m,  47;  xvm,  16;  Ez.,  xi.v,  12. 
Voir  Obole,  t.  m,  col.  197.  C'était  le  plus  petit  de  tous 
les  poids  hébreux.  —  3.  L'Ancien  Testament  signale  aussi 
le  1  3  de  sicle,  Neh.,  x,  32.  et  le  1  4  de  sicle,  appelé 
relia  .  «  quart  »,  Gen..  xxiv,  22;  I  Reg.,  IX,  8.  Plus 
tard,  les  Juifs  donnèrent  au  réba'  le  nom  de  zouz,  "•. 
Voir  Réba  . 

2°  La  mine.  —  Au-dessus  du  sicle,  il  y  avait  la  mine, 
en  hébreu,  mdneh,  -:-.  Cf.  III  Reg.,  ix,  17;  I  Esd.,  Il, 
9;  M  Esd..  vu.  71-72.  Son  poids  était  de  50  sicles. 
comme  il  a  été  dit  plus  haut.  Il  est  vrai  que,  d'après 
Ezéchiel.  xlv,  12.  elle  parait  avoir  correspondu  à 
60  sicles,  car  on  lit  dans  le  texte  hébreu  de  ce  passage, 
et  aussi  dans  la  Vulgate  :  «  Le  sicle  a  20  gérali  ;  la 
mine  doit  avoir  20  sicles,  25  sicles,  15  sicles.  »  Or.  20 
+  25  +  15  =  60.  Mais,  généralement,  on  préfère  à 
cette  leçon  celle  de  la  traduction  grecque  des  Septante 
d'après  le  Codex  Alexandrinus  et  le  Codex  Valicanus  : 
«  Cinq  (sicles)  doivent  être  cinq  (sicles),  et  dix  sicles, 
dix,  et  (de)  cinquante  sicles  sera  votre  mine.  »  Manière 
de  dire  que  les  poids  doivent  avoir  leur  valeur  rigou- 
reusement exacte,  ni  plus  ni  moins.  Il  est  très  possible, 
en  effet,  que  le  texte  primitif  ait  été  altéré  en  cet  en- 
droit. Voir  F.  Keil.  Bibl.  Commentai-  ïtber  den  Pro- 
phelen  Ezéchiel,  in-8",  Leipzig,  1868,  p.  460-461.  Les 
mines  mentionnées  au  1"  livre  des  Machabées.  xiv,  24 
et  xv,  18.  sont  des  mines  attiques,  qui  avaient  un  poids 
distinct.  Voir  Mine.  t.  iv,  col.  1102-1105. 


3»  Le  talent.  —  Le  poids  le  plus  élevé,  chez  les 
Hébreux  comme  chez  les  Babyloniens,  les  Perses,  etc., 
était  le  talent.  Son  nom  hébreu,  kikkar,  -ï2,  a  le  sens 

de  t  rond,  objet  rond  ».  sans  doute  parce  que  telle  était 
sa  forme  primitive.  VoirTALENT.il  équivalait  à  60  mines, 
à  3000  sicles.  Cela  ressort  très  évidemment  du  passage 
Exod.,  xxxvm,  24-25.  où  nous  voyons  que  603550  demi- 
sicles  correspondaient  en  poids  à  100  talents  1775  sicles. 
Comp.  aussi  Exod.,  xxv,  39;  II  Reg.,  xn.30;  III  Reg.. 
ix,  H;  x,  10.  14;  II  Par.,  xxv,  9,  etc. 

4°  Poids  dans  le  Nouveau  Testament. —  Le  Nouveau 
Testament  ne  mentionne  qu'une  nouvelle  espèce  de 
poids,  la  'i.i-ûx,  Vulgate,  libra,  la  livre.  Joa..  XII,  3; 
xix.  139  :  poids  romain  qu'on  évalue  à  326or327.  et 
qui  se  subdivisait  en  12  onces.  —  Dans  l'Apocalypse,  xvi, 
21,  nous  trouvons  aussi  la  mention  du  talent  en  tant 
que  poids  :  des  grêlons  pesant  un  talent.  Cf.  Josèphe, 
Bell,  jud.,  V,  vi,  3.  —  On  a  trouvé  à  Jérusalem,  en 
1891,  une  grosse  pierre  ayant  servi  de  poids  et  pesant 
41' ''900  grammes.  Voir  Palestine  Exploration  Fund, 
Quarterly  Statement,  1892,  p.  289-290;  F.  Vigouroux, 
Manuel  biblique,  12e  edit.,  t.  I,  p.  310. 

5"  Les  balances.  —  Pour  peser,  on  se  servait  de  ba- 
lances. Cf.  Gen.,  xxiii,  16;  x.xiv,  22;  Deut..  xxv,  13; 
Prov.,  xi,  1;  xx,  10;  Is.,  xxiv,  6:  Am..  vin.  5,  etc.  Voir 
Balance,  t.  i.  col.  1400-1  tOJ.  Les  marchands  les  por- 
taient avec  eux,  en  même  temps  que  les  poids  les  plus 
usuels,  placés  dans  une  pochette.  Cf.  Deut.,  xxm,  3; 
Prov.,  xvi,  4;Mich..  VI,  11.  Cela  était  d'autant  plus  né- 
cessaire que,  pendant  longtemps,  l'argent  et  l'or  n'étaient 
pas  monnayés,  et  qu'il  fallait  les  peser  chaque  fois  qu'ils 
étaient  donnés  en  paiement.  Cf.  Jer.,  xxxn,  10.  Voir 
Monnaie,  t.  iv.  col.  1235. 

III.  Rapport  des  poids  hébreux  avec  notre  système 
décimal.  —  II  est  très  difficile,  pour  ne  pas  dire  impos- 
sible, de  déterminer  cette  relation  avec  certitude, 
comme  on  le  voit  par  les  divergences  qui  existent  entre 
les  évaluations  des  savants  qui  se  sont  le  plus  occupés 
de  ce  problème.  Les  modèles  qu'on  a  récemment  décou- 
verts nous  sont  parvenus  en  trop  petite  quantité  et  dans 
un  état  de  préservation  trop  incomplète,  pour  nous 
fournir  autre  chose  que  d'assez  vagues  indications.  Du 
moins,  nous  pourrons  établir  l'équivalence  d'une  façon 
approximative.  Pour  fixer  le  rapport  qui  existe  entre 
notre  système  décimal  et  les  poids  des  anciens  Israélites, 
les  savants  ont  pris  pour  base  le  sicle  d'argent  de 
l'époque  des  Machabées,  qu'ils  ont  supposé  être  de  même 
pesanteur  que  celui  des  anciens  Hébreux.  Les  deux  ta- 
bleaux qui  suivent  indiquent  les  résultats  ainsi  obtenus. 

Ii  <[  v  Ri'. 

1  Talent  —-  60  mines    3000  sicles    6000    60  000=  42533.100 

1  Mine     = 30—          100      1000=  708,850 

1  Sicle     = 2          20  =  14.200 

1  Béqa'   - 10  =  7.100 

1  Gérait  = =  .0.708 


Ou  bien  : 


sicle 


gr. 

0.708 

7.100 

14.200 

708,850 

42  533,100 


Gérah  bcqa' 

1   = 

10  —  1  = 

20  =  2  =  1  = 

1000  =     100  =       50  =    1  mine 

60000  =  6000  —  3000  =  60     —     =  1  Talent 

IV.  Le  poids  de  sanctuaire  et  le  poids  de  roi.  — 
1»  On  rencontre  fréquemment  dans  le  Pentateuque 
l'expression  séqel  haq-qôdéS,  tf-jpn  u--\  »  poids  du 
sanctuaire  »,  au  sujet  de  laquelle  on  a  fait  des  conjec- 
tures plus  ou  moins  heureuses.  Cf.  Ex..  xxx.  13,  24; 
xxxvm,  24,  26;  Lev.,  v.  15:  xxvn,  3,  25;  Num..  m, 
17,  50;  vu,  13-11;  xvm,  16.  Les  rabbins  l'expliquaient 
en  ce  sens  qu'à  coté  du  poids  du  sanctuaire,  ou  poids 
sacré,  les  Hébreux  en  auraient  eu  d'ordinaires,  en 
quelque  sorte  civils,  dont  la  valeur  aurait  été  moindre 


487 


POIDS 


POIL 


488 


de  moitié.  Voir  Maimonide,  Constilut.  de  siclis,  éd.  de 
Leyde,  1718,  p.  19;  Bertheau,  Zuv  Gesch.  der  Israeliten, 
Gœttingue,  18i2,  p.  26-27.  Cette  hypothèse  rappellerait 
aussi  le  système  babylonien;  mais  elle  est  sans  fonde- 
ment, car  il  n'est  parlé  nulle  part  d'un  tel  arrangement 
chez  les  Hébreux.  D'autres  ont  supposé  que  le  système 
de  poids  ainsi  Sommé  dépassait  au  contraire  les  poids 
ordinaires.  Voir  Nowack,  Handbuch  der  Itebr.  Archâo- 
logie, 1. 1,  p.  209.  —  11  est  plus  simple  et  beaucoup  plus 
naturel  de  dire,  avec  la  plupart  des  interprètes,  que  la 
locution  «  poids  du  sanctuaire  »  indiquait  des  poids 
légaux,  d'une  exactitude  rigoureuse,  conformes  aux  éta- 
lons qui  avaient  été  déposés,  d'abord  dans  le  tabernacle, 
puis  dans  le  temple,  pour  servir  de  norme  régulière. 
Le  Taluiud,  Kélim,  17,  9,  constate  que  c'est  près  de  la 
porte  orientale  du  lernple  que  se  trouvait  ce  dépôt. 
Cette  hypothèse  explique  aussi  pourquoi,  d'après  1  Par. . 
xxm,  29,  les  lils  d'Aaron  paraissent  avoir  été  préposés 
aux  poids  et  mesures.  Voir  Keil  et  Delitzsch,  Bibl.  Com- 
mentai' liber  die  nachexilischen  Geschichtsbûcher,  in- 
8»,  Leipzig,  1870,  p.  194;  Josèphe,  Ant.  jud.,  VIII.  m, 
8;  Michaelis,  Mosaisehes  Redit,  Francfort-sur-le-Main, 
1775-1780,  t.  îv.  ij  227.  Les  Romains  conservaient  ainsi 
au  Capitule,  et  les  Athéniens  dans  les  bâtiments  de  la 
monnaie,  les  étalons  de  leurs  divers  poids.  Cf.  V.  Dnruy, 
Histoire  des  Grecs,  t.  t,  Paris,  1887,  p.  390-391  ;  Histoire 
des  Romains,  t.  v,  Paris,  1883,  p.  504. 

2°  Nous  lisons  aussi  dans  l'Ancien  Testament,  mais 
une  seule  fois,  II  Reg.,  xiv,  26,  l'expression  «  poids  du 
roi  »,  'ébén  ham-mèlék,  littéralement  «  pierre  du  roi  », 
Septante,  ™  <*U\u>  tû  fjijc'uxw;  Vulga te, pondère  publico. 
Il  est  dit,  dans  ce  passage,  que  la  chevelure  d'Absalom, 
lorsqu'il  la  coupait  une  fois  par  an,  pesait  200  sicles 
d'après  le  poids  du  roi.  Les  avis  des  commentateurs 
sont  également  très  divisés  sur  ce  point,  d'autant 
plus  qu'une  chevelure  d'homme  pesant  2kll8i0  gr. 
(14ar200  x  200)  parait  chose  impossible.  Peut-être  y 
aura-t-il  eu  ici  une  corruption  du  texte  en  ce  qui  regarde 
les  chiffres.  Du  moins,  d'après  la  plupart  des  auteurs, 
le  poids  du  roi  aurait  été  exactement  le  même  que  le 
poids  du  sanctuaire.  Voir  Bœckh,  Melrologische  Ûnter. 
suchungen  ûber  GeivielUe...,  p.  61;  Bertheau,  l.  c. 
p.  28.  D'autres  ont  pensé,  à  la  suite  de  Josèphe,  Ant., 
VII,  vm,  5,  que  le  poids  du  roi  aurait  dépassé  en  pesan- 
teur le  poids  commun,  de  sorte  qu'il  n'aurait  fallu 
que  40  sicles  royaux  au  lieu  de  50,  pour  valoir  une  mine. 
D'autres,  au  contraire,  ont  regardé  le  poids  royal  comme 
inférieur  de  moitié  au  poids  ordinaire.  On  est  dans  l'in- 
certitude sur  ce  point.  Le  plus  vraisemblable  est  que  le 
poids  royal  signifie  poids  juste  et  exact. 

V.  Les  poids  envisagés  dans  la  Bible  m1  point  de 
vue  MORAL.  —  La  scrupuleuse  fidélité  par  le  manie- 
ment des  poids  est  fréquemment  exigée  dans  les  livrés 
les  plus  divers  de  l'Ancien  Testament.  Les  auteurs 
inspirés  insistent  à  ce  sujet,  soit  à  cause  du  caractère 
sacré  de  la  propriété  individuelle,  soit  en  vue  de  la 
loyauté  et  de  la  paix  des  relations  commerciales  ou 
sociales.  Lev.,xix,  35-36  :  «  Vous  ne  commettrez  d'ini- 
quité ni  dans  les  jugements,  ...ni  dans  les  poids...  Vous 
aurez  des  balances  justes,  des  poids  justes,  »  'abné 
sédeq.  Deut.,  xxv,  13-16  :  «  Tu  n'auras  pas  dans  ton 
sac  (dans  ta  pochette)  un  poids  et  un  poids,  un  gros 
et  un  petit...;  tu  auras  un  poids  exact  et  juste  (à  la 
lettre,  une  pierre  de  perfection  et  de  justice),  afin  que 
tes  jours  se  prolongent  dans  le  pays  (pie  le  Seigneur 
ton  Dieu  le  donne.  »  Prov.,  xi,  I  :  <•  La  balance  fausse 
est  en  abomination  au  Seigneur:  mais  le  poids  juste 
lui  est  agréable.  »  Prov.,  xx,  10  :  «  Deux  sortes  de  poids 
sont  une  abomination  au  Seigneur.  »  Eccli.,  xm,  14. 
le  lils  de  Sirach  recommande  instamment  »  la  justesse 
de  la  balance  et  des  poids  »,  c'est-à-dire  l'honnêteté  dans 
tous  les  rapports  commerciaux.  Mich.,  vi,  Il  :  «  Est-on 
puravec  des  balances  fausseset  avec  de  faux  poids  dans 


le  sac?  ■>  C'est  en  conformité  avec  ces  conseils  que  les 
rabbins  exigeaient,  Baba  bathra,  v,  10  f,  qu'on  nettoyât 
soigneusement  les  poids  et  les  balances,  de  crainte  que 
les  matières  étrangères,  en  y  adhérant,  n'en  dimi- 
nuassent la  parfaite  justesse,  aux  dépens  de  l'acheteur. 
VI.  Bibliographie.  —  Liber  de  mensuris  et  ponderi- 
bus,  Migne,  t.  xliii,  col.  271-271;  Eisenschmidt,  De 
ponderibus  et  mensuris  ueterum  Romanorum,  Grseco- 
runt  et  Hebrseorum,  Strasbourg,  1737;  Paucton, 
Métrologie  ou  traité  des  Mesures,  Poids  et  Monnaies 
des  anciens  peuples  et  des  modernes,  in-4",  Paris,  1780; 
X.  Bock  h,  Melrologische  Untersuchungen  uber  Ge- 
wichte,  Mûnzfùsse  und  Muasse  des  Aller thums,  in-8», 
Berlin,  1838;  V.  Vasquez  Oueipo,  Essai  sur  les  système» 
métriques  et  monétaires  des  anciens  peuples,  ,'i  vol. 
in-8°,  Paris,  1859;  L.  Herzfeld.  Melrologische  Vurunter- 
suchungen  zu  einer  Geschichte  des  ibrâischen  resp. 
altjûdischen  Bandels,  Leipzig,  1863-1865;  de  Yvette, 
Lehrbuch  der  hebrâisch-jùdischen  Archâologie,  in-8". 
i<  (dit.,  Leipzig,  1864,  S  182-184;  .1.  Brandis,  lias 
Miin:-,  Muss-und  Gewichtswesen in  Vorderasien,  in-.1», 
Berlin,  1866,  p.  43-45,  95, 102-103,  158;  F.  Hultsch,  Métro- 
logicorum    scriplorura    reliqw.se,    2    in-4°,    1864-1866; 

B.  Zuckermann,  Das  jûdische  Maassystem  in  seinen 
Beziehungen  zum  griechischen  und  rômischen,  in-8*, 
Breslau,  1867;  J.  Oppert,  L'étalon  des  mesures  assy- 
riennes, in-8",  Paris,  1875;  F.  Hultsch,  Griechische 
und  rômische  Métrologie,  in-8«,  2e  édit.,  Berlin.  1882: 
M.  C.   Soutzo,    Etalons   pondéraux    primitifs.    1884; 

C.  F.  Lehmann,  Altbabylonisches  Maas  und  Gewicht, 
dans  les  Verhandlungen  der  Berliner  Gesellschaft  fur 

anthropologie,  Berlin,  1889;  W.  Ridgeway,  The  Origin 
"/  Metallir  Currencij  and  Weigth  Standards,  in-8", 
Cambridge,  1892;  C.  F.  Lehmann,  Das  Allbabylon. 
Maas-  umt  Gewichtssystem  (VIIIe  Congres  des  orienta- 
listes, 1889),  Leyde,  1893;  \V.  Nowack,  Lehrbuch  der 
hebrâischen  Archâologie,  in-8°,  Leipzig,  1891,  p.  208- 
209;  .1.  Benzinger,  Uebrâische  Archâologie,  in-8".  Fri- 
bourg-en-Br.,  1894,  p.  182-189;  H.  Klimpert,  Lexikon 
der  Mùnzen,  Maasse,  Geivù  h  te  soivie  der  Zâhlarlen  und 
Zeitgrôssen  aller  Litnder  der  Erde,  in-12,  Berlin,  1896; 
F.  Hultsch,  Die  Gewichte  des  AUertums  nach  ihrem 
Zusammenlinng  dargestellt,  dans  les  Abliandlungen 
der  pltilolog.- histor.  Classe  der  kônigl.  sâchsischen 
Gesellschaft  derWissensi  haften,in-i0, t. iv. Leipzig,  1899. 

L.    Fll.LION. 

POIL  (hébreu  :  ie'âr;  Septante  :  8pi§;  Vulgate  : 
pilus),  production  épidermique,  composée  d'une  racine 
bulbeuse  enfermée  dans  la  peau,  et  d'une  tige  extérieure 
qui  s'élève  plus  ou  moins  au  dessus  de  la  surface  cuta- 
née. Cette  tige  est  creuse  et  imbibée  d'un  liquide  colo- 
rant qui  détermine  la  nuance  du  poil.  —  Le  système 
pileux  de  l'homme  comprend  les  cheveux  (voir  t.  n, 
col.  681),  les  sourcils,  les  cils,  la  barbe  i  voir  t.  i,  col.  1 150; 
t.  IV,  col.  13301.  les  poils  et  les  poils  follets.  Chez  les 
animaux,  le  Système  pileux  couvre  à  peu  près  tout  le 
corps.  Voir  Laine,  t.  tv,  col.  34,  et',  pour  les  poils  de 
chèvre,  ou  'izzini,  Exod.,  xxvi,  7;  xxxvi.  14;  I  Reg., 
xix,  13,  et  de  chameau.  ClLlCE,  t    n,  col.  759. 

I»  Esau  était  velu.  Sa  il;  Ixi-J:,  pilosus,  b  comme  un 
manteau  de  poil.  >>  Gen.,  xxv.  26;  XXVII,  11.  La  môme 
particularité  se  remarquait  chez  le  prophète  Elie. 
IV  Reg.,  i,  8.  —  Le  poil  de  l'homme  a  la  propriété  de  se 
hérisser  sous  l'empire  de  la  frayeur  :  les  cheveux  se 
dressent  sur  la  télé  de  celui  qui  a  grand'  peur.  Job,  v, 
15,  dit  <  pi 'a  u  passage  d'un  esprit,  tous  les  poils  de  sa  chair 
se  hérissèrent.  —  2»  Pour  leur  purification,  les  léviti 
eurent  à  passer  le  rasoir  sur  tout  leur  corps,  à  cause 
des  impuretés  dont  le  système  pileux  peut  être  le  m. 
Num.,  vin.  7.  Cette  prescription  ne  s'étendait  pas  a  ix 
prêtres,  l.ev..  XXI,  5.  On  pense,  du  reste,  qu'elle  ne  lui 
en  vigueur  qu'au  désert.  Cf.  Negaim,  xiv,  i.  Chez  les 
Égyptiens,  pour  raison  de  pureté,  les  prêtres  se  rasaient 


489 


POIL    —    POIREAU 


490 


le  corps  entier  tous  les  trois  jours.  Hérodote,  n,  37.  — 
3"  Des  indications  minutieuses  sur  l'examen  des  poils 
sont  consignées  dans  la  loi  sur  les  lépreux.  Le  poil 
devenu  tout  blanc  est  un  signe  de  contagion.  Lev.,  xm, 
3,  10.  20.  25.  Le  poil  devenu  .jaunâtre  indique  une 
autre  espèce  de  mal.  Lev.,  xm,  30.  Les  poils  noirs  cons- 
tituent au  contraire  un  signe  favorable.  Lev.,  xm,  37. 
On  comprend  que  le  liquide  qui  remplit  le  canal  pileux 
et  le  colore  soit  lui-même  altéré'  et  décoloré  dans  le 
cas  où  la  contagion  a  atteint  le  tissu  épidermique.  Le 
lépreux  que  l'on  jugeait  guéri  devait  raser  tout  son  poil 
le  premier  et  le  septièmejour  de  sa  purification  légale. 
Lev.,  xiv,  8,  9.  —  i°  Pour  faire  périr  le  dragon  vénéré 
des  Babyloniens,  Daniel  lui  fit  avaler  des  boules  com- 
posées de  poix,  de  graisse  et  de  poils.  L'animal  dut 
étouffer  à  la  suite  d'une  absorption  si  indigeste. 
Dan.,  xtv,  26.  —  Sur  Is.,  vit,  20.  voir  Pied,  col.  355. 

H.  Lesètre. 
POING  (hébreu  :  'egrôf  ;  Septante  :  rcuY|un  ;  Vulgate  : 
pugmis).  main  dont  les  doigts  sont  repliés  en  dedans, 
de  manière  à  former  une  sorte  de  masse  offensive  ou 
défensive.  —  Celui  qui  frappait  un  autre  avec  le 
poing  et  le  rendait  malade,  avait  la  charge  de  le  faire 
soigner  et  de  l'indemniser  de  son  chômage.  Exod..  xxi, 
18.  Isaïe.  lvih.  i.  observe  qu'un  jeune  accompagné  de 
querelles  et  de  coups  de  poings  ne  saurait  plaire  à  Dieu. 
—  Sur  la  coutume  de  se  laver  les  mains  7ruY|«j,  a  avec 
le  poing  »,  voir  Laver  (se)  les  mains,  t.  iv,  col.   137. 

H.  Lesètre. 
POINTS-VOYELLES,  nom  donné  aux  signes  mas- 
sorétiques  marquant  les  voyelles  dans  les  Bibles  hé- 
braïques qu'on  appelle  pour  cette  raison  ponctuées.  Leur 
nom  provient  de  ce  que  ces  signes  sont  des  points  ou 
des  petits  traits.  Voir  Hébraïque  (Langue),  t.  m,  col.  467, 
pour  leur  forme  et  leur  valeur;  col.  50i,  pour  leur  ori- 
gine. Voir  aussi  PONCTUATION. 

POIREAU  (hébreu  :  hâçir;  Septante  :  -picot;  Vul- 
gate :  porri),  un  des  légumes  appréciés  des  Israélites. 

I,  Description.  —  Diverses  espèces  d'Allium  sont 
cultivées  comme  condiment  à  cause  de  leur  saveur  acre, 
mais  agréable  ;  d'autres  chez  qui  l'arôme  est  moins  péné- 
trant comptent  parmi  les  herbes  potagères,  ainsi  l'Oi- 
gnon. Voir  t.  iv.  col.  1762.  C'est  aussi  le  cas  du  Poireau. 
A.  Porrum,  L.  ilig.  106).  Dans  la  nombreuse  série  des 
aulx,  cette  espèce  se  distingue  par  son  bulbe  simple  et 
allongé  et  surtout  par  ses  feuilles  planes,  jamais  creuses, 
garnissant  dans  sa  moitié  inférieure  la  tige  épaisse  et 
cylindrique,  qui  peut  atteindre  la  taille  d'un  mètre  au 
moment  de  la  floraison.  L'inllorescence  globuleuse  très 
ample  nait  d'une  spathe  herbacée  terminée  par  une 
pointe  4  fois  plus  longue  qu'elle.  Les  pièces  du  périanthe, 
de  couleur  blanchâtre  ou  carnée,  sont  rapprochées  en 
cloche  d'où  font  saillie  les  étamines  au  nombre  de  6; 
les  3  filets  inférieurs  portent  de  chaque  côté  une  longue 
pointe  stipulaire  dépassant  au  début  les  anthères  rou- 
geàtres.  Le  style  reste  inclus  ;  la  capsule  trigone-arrondie 
s'ouvre  en  3  valves  à  la  maturité,  pour  laisser  échapper 
les. nombreuses  graines  noires  aplaties,  ridées. 

On  ne  connaît  pas  la  plante  à  l'état  sauvage,  mais 
Vilmorin  regarde  comme  très  probable  son  origine  déri- 
vée de  YAllium  Ampeloprasum,  vulgairement  appelé 
Ail  d'Orient,  qui  croit  spontanément  dans  la  région 
méditerranéenne,  et  n'en  diffère  guère  que  par  la 
production  de  caïeux  abondants,  la  brièveté  et  la  cadu- 
cité de  la  spathe,  enfin  par  la  substitution  fréquente 
de  bulbilles  aux  graines.  F.  Hv. 

II.  EXÉGÈSE.  —A  s'en  tenir  à  la  signification  ordinaire 
de  hâfir  on  n'entendrait  par  ce  mot  que  l'herbe,  le 
gazon.  Mais  dans  N'uni.,  xi,  5,  ce  terme  semble  bien 
désigner  une  planle  particulière,  une  herbe  potagère, 
comme  les  oignons  et  les  aulx  près  desquels  elle  figure. 

11  nous  souvient,    disent  les  Israélites  au  désert,  des 


poissons  que  nous  mangions  pour  rien  en  Egypte,  des 
concombres,  des  melons,  hëhaçir,  des  oignons  et  des 
aulx.  »  Ici  toutes  les  versions,  les  Septante,  la  Vulgate, 
le  syriaque,  le  chaldéen,  l'arabe,  le  samaritain,  toutes 
ont  traduit  hasir  par  poireau.  Comme  les  hébreux  dési- 
gnaient par  le  terme  très  général  yéréq,  verdure,  les 
légumes  verts,  ils  pouvaient  également  appeler  du  nom 
d'herbe  verte,  hafir,  le  poireau,  sa  couleur  verte  lui 
méritant  bien  cette  dénomination.  Cependant  en  lisant 
ce  verset  du  livre  des  Nombres  on  peut  être  étonné  de 
voir  après  haqqisSuim,  les  concombres,  et  ôbattihim 
les  melons,  et  avant  besalim  les  oignons  et  SOmim  les 
aulx,  le  mot  hdsir  mis  au  singulier.  Sans  doute  ce  pour- 
rait être  un  collectif.  Mais  ne  pourrait-on  avancer  une 


106.  —  AUium  porrum. 

conjecture?  i>xn,  hâçir,  ne  serait-il  pas  une  faute  de 
copiste  pour  n>sn,  hrsim"?  (Dans  l'ancienne  écriture 
surtout  le  »!  et  le  r,  rapidement  écrits,  peuvent  avoir 
une  grande  ressemblance.)  Hèfnn  serait  le  pluriel  de 
Ir's,  nom  emprunté  aux  Égyptiens  pour  désigner  le 
poireau,  qui  se  dit  en  effet  htsi,  hedji,  en  copte  et  qui 

rappelle  l'hiéroglyphe  |  ^  T.  hedj,  hets.  Le  nom  des 
oignons  bëfél,  besdlim,  n'est-il  pas  déjà  un  mot  égyp- 
tien, badjar,  avec  la  même  lettre  hébraïque  s,  j,  pour 
rendre  le  dj  égvptien?  T.  iv,  col.  1765.  'Abattihim,  les 
melons  ou  pastèques,  dans  le  même  texte  est  aussi  un 
nom  d'origine  égyptienne.  T.  iv,  col.  951.  La  faute  d'un 
copiste,  introduisant  au  lieu  de  hasim,  nom  d'origine 
égyptienne,  un  nom  hébreu  hasir  bien  connu,  aurai 
été  l'origine  de  la  leçon  actuelle  du  texte  hébreu. 

Le  poireau  était  très  apprécié,  et  il  l'est  encore  en 
Egypte  et  en  Palestine.  On  connaît  la  satire  de  Juvé- 
nal,  xv,  9,  sur  les  Égyptiens  : 

Porrum  et  cèpe  nefas  violare,  ac  franç;ere  morsu. 
O  sanctas  gentes,  quibus  hœc  nascuntur  in  hortis 
Xumina! 


491 


POIREAU 


POIS 


492 


Les  Égyptiens  n'ont  jamais  adoré  les  poireaux.  Tout  ce 
qu'il  y  a  de  vrai  dans  ce  texte  c'est  que  le  poireau  était 
cultivé  dans  les  jardins.  Il  entrait  fréquemment  dans 
l'alimentation.  E.  LEVESQUE. 

POIRIER.  C'est  par  ce  mot  que  les  Septante  tradui- 
sent beka'ini  dans  1  Par.,  xiv,  14,  ôtntov,  et  que  la  Vul- 
gate  rend  le  même  terme  hébreu,  dans  I  Par.,  xiv.  H. 
et  dans  l'endroit  parallèle,  II  Reg.,  V,  23,  pyrus.  Dien 
que  le  poirier,  dont  deux  espèces  sont  indigènes,  ait 
été  connu  et  cultivé  en  Palestine,  aucune  raison  ne  per- 
met cette  identification.  Les  bekaini  sont  plutôt  des 
mûriers.  Voir  t.  iv,  col.  1344. 

POIS,  légume  cultivé  en  Palestine1. 

I.  Description.  —  Le  nom  de  pois  a  été  attribué  à 
plusieurs  plantes  annuelles  de  la  famille  des  Légumi- 
neuses, tribu  des  Viciées,  fournissant  des  graines  ali- 
mentaires riches  en  fécule,  sucre  et  gluten.  Le  genre 
Cicer  se  distingue  aisément  à  ses  gousses  courtes  et 
gonflées,    renfermant   chacune  2  graines    bossuées  et 


.^ 


107.  —  Cicer  Arietinum. 

ridées,  et  surtout  à  ses  feuilles  formées  de  6  à  8  paires 
de  folioles,  terminées  par  une  foliole  impaire,  sans  vrille. 
L'espèce  principale  est  le  C.  Arietinum  L.  (fig,  107  . 
vulgairement  pois-chiche.  Les  vrais  Pisum  ont  de  très 
larges  stipules  foliaires,  plus  développées  même  que 
les  folioles,  dont  le  nombre  est  réduit  de  1  à  3  paires  avec 
une  vrille  terminale  et  ramifiée.  Les  gousses  longues 
et  comprimées  renferment  des  graines  muni. reuses. 
L'espèce  cultivée  communément  dans  les  jardins  sous 
le  nom  de  petit  pois  est  le  /'.  satirum  L.  ilig.  1(18  a 
fleurs  blanches  ou  bleuâtres,  et  à  graines  rondes.  Elle 
n'est,  sans  doute,  pas  distincte  spécifiquement  du 
/'.  arvense  à  corolle  plus  teintée,  surtout  sur  les  ailes 
qui  sont  d'un  pourpre  noir,  el  à  graines  .meuleuses  par 

compression   réciproque.    Celle   dernière   for ,  plus 

robuste  et  aussi  plus  résistante  aux  froids,  se  cultive  en 
pleins  champs  comme  plante  fourragère.  A  l'heure 
actuelle  on  ne  connaît  à  l'état  spontané  ni  l'une  ni 
l'autre,  mais  seulement  échappées  des  cultures.  Aussi 
pense-t-on  communément  qu'elles  sont  dérivées  de 
certains  Pisum  croissant  dans  les  bois  de  la  région 
méditerranéenne  el  de  l'Asie  centrale,  el  ayant  pour 
type  le  1'.  elutiusi\,<  liieherslein.  Les  différences  tirées 
de  la  dimension  du  pédoncule  el  des  gousses  paraissent 
insignifiantes.  Celles  même  de  la  graine  légèrement 
granuleuse  chez  la  plante  des  broussailles,  tandis  qu'elle 
est  lisse  dans  les  races  cultivées,  ne  dépassent  pas  non 
plus  la  limite  des  variations  provoquées  artificielle- 
ment. Or  c'est  de  temps  immémorial  que  les  pois    sont 


introduits   dans   la    culture    pour    la    nourriture     de 
l'homme  ou  des  animaux  domestiques.         F.  Hv. 

IL  ExÉfiÈSE.  —  Le  poisse  rencontre  dans  la  Vulgate 
pour  traduire  le  mot  hébreu  >Sp,  qdli,  qui  est  répété 
une  seconde  fois  dans  II  Reg.,  xvn,  28.  Lorsque  David 
arriva  à  Mahanaîm,  on  vint  lui  offrir  du  froment,  de 
l'orge,  de  la  farine,  et  qdli  (Septante  :  a/.rrov;  Vulgate  : 
polenlam),  o  du  grain  grillé  d;  puis  des  fèves,  des  len- 
tilles, et  qâli  (omis  dans  Septante;  Vulgate  :  frixum 
cicer),  «  des  pois  grillés  ».  Dans  le  premier  cas,  qdli 
est  regardé  généralement  comme  étant  du  grain  grillé. 
On  vient  apporter  à  David  du  froment  et  de  l'orge, 
c'est-à-dire  des  grains  de  ces  deux  céréales  en  nature, 
et  aussi  en  farine  et  en  grains  grillés.  Les  grains  grillés 
sont  une  nourriture  très  usitée  dans  les  pays  orientaux. 
W.  Thomson,  The  Land  and  Ihe  /.'....A-,  in-8»,  Londres, 
1885,  p.  648.  Mais  quand  le  mot  qdli  revient  pour  la 
seconde  fois  dans  le  même  verset,  certains  auteurs  pen- 
sent que  c'est  le  fait  d'une  dislr action  de  copiste  qui 


Pisum  sativum. 


l'aurait  répété  à  tort  :  aussi  les  Septante  n'eut  rien  en 
cet  endroit.  D'autres  au  contraire  croient  que  cette 
répétition  est  justifiée.  Après  avoir  offert  à  David  des 
céréales  en  nature  el  préparées,  on  lui  présente  an^si 
des  graines  légumineuses  en  nature  et  grillées  :  «  des 
fèves,  des  lentilles  et  des  pois  grillés.  ■>  Rabbi  Isaïe 
cil.''  pai'  O.  Celsius.  Ilierobotanicon,  in-8",  Amsterdam, 
1748,  t.  ii.  p. 233  l  aussi  Rabbi  Salomon,  Aboda Zarah, 
f.  38,  2.  admettent  deux  espèces  de  qâli,  ou  grain  grillé, 

l'une  faite  de  blé  ou  d'orge,  l'autre  de  graines  légumi- 
neuses. On  aurait  ainsi  une  explication  suffisante  de 
qâli  dans  le  même  verset.  Pour  .1.  Kitlo.  Cyclopœdia, 
in-8",  Edimbourg,  ISGi.  t.  il,  p.  607,  qdli  à  la  seconde 
fois,  serait  un  mot  différent  du  premier,  mais  par 
une  ponctuation  fautive,  ramené  à  la  mène  forme, el 
serait  à  rapprocher  du  sanscrit  kalhc,  kullss,  qui  signi- 
fie graines  de  légumineuses,  el  spécialement  pois,  soit 
pois-chiche,  soit  pois  gris  et  petit  pois.  Le  pois  qui 
était  certainement  cultivé  en  Palestine,  serait  ainsi 
mentionné  à  coté-  de  la  fève  et  de  la  lentille,  el  se  serait 
il. . 1 1 1 1 1 1 •  -  peut-être  i/alli.  La  conjecture  est  bien  hasardée, 
(i.  Celsius,  Bierobotanicon,  I.  il,  p.  231-234.  —  Les  pois 
étaient  vraisemblablement  compris  dans  les  espèces 
diverses  de  zêr'ônim,  o  graines  légumineuses  doi  i  -e 
nourrissaient  Daniel  et  ses  trois  compagnons  a  la  cour 
.le  Xaluichodonosor.  —  Quelques  auteurs,  comme  Rey- 
nier,    Ecoiwntie    des   Arabes    et    des    Juifs,    p.     130. 


im 


POIS 


POISSON 


494 


cherchent  à  identifier  de  qéçah  d'Isaïe,  xxvui.  24-27, 
avec  le  pais-chiche;  mais  ce  nom  désigne  la  nielle 
i  Nigella  saliva)  ou  cumin  noir.  Voir  Gith,  t.  m,  col.  244. 
A.  de  Candolle,  Origine  des  plantes  cultivées,  in-8°, 
Paris.  1886.  p.  259.  E.  Levesqoe. 

POISON  (hébreu  :  hêmàh,  «  ce  qui  brûle;  »  r'ôS,  ce 

qui  vient  de  la  plante  vénéneuse;  merorâh;  Septante  : 
!o::  Vulgate  :  venenum),  substance  d'origine  animale  ou 
végétale,  qui  est  nuisible  ou  mortelle  pour  l'organisme 
humain.  —  II  n'est  guère  parlé  de  poison  qu'une  seule 
fois  dans  le  sens  propre  :  Ptolémée  Macron  se  donna  la 
mort  par  le  poison,  ïapaixs'jua;,  veneno.  II  Mach.,  x, 
13.  Le  mot  yap|*axeia,  employé  dans  le  grec  biblique, 
Ezod.,  vu,  11;  vin,  7.  18,  etc.;  Gai.,  v,  10;  Apoc,  ix, 
21,  et  traduit  par  vene/icium,  ne  suppose  pas  l'usage 
des  poisons,  mais  seulement  les  sortilèges  et  les  pra- 
tiques magiques,  tandis  que  le  verbe  çapu.avt£'jw  des 
Machabées  y  signifie  «  empoisonner  ».—  Xotre-Seigneur, 
en  envoyant  ses  Apôtres,  leur  promet  que  s'ils  prennent 
quelque  breuvage  mortel,  daviaiuo;,  ils  n'en  éprouve- 
ront aucun  mal.  Marc,  xvi,  18.  —  Au  figuré,  le  venin 
des  reptiles,  hèmâli,  Dupée,  furor,  fera  périr  les  enne- 
mis de  Dieu.  Deut.,  xxxu,  24.  Une  peste  venimeuse, 
meriri,  les  frappera.  Deut.,  xxxu,  24.  Leur  raisin  de- 
viendra vénéneux  et  leur  vin  se  changera  en  venin, 
vôS.  6'jad.-,  ■/_'à'rl.  venenum,  fel.  Deut.,  xxxu,  32,  33. 
Pour  r'ôs,  dans  le  sens  de  venin,  voir  Pavot,  t.  iv, 
col.  2239.  Le  pain  du  méchant  se  change  en  venin, 
merorâh,  yo/.r,,  fel,  Job,  xx,  14,  car  lui-même  a  sucé 
le  venin  de  l'aspic,  Septante  :  «  la  langue  du  serpent  le 
lera  périr  »,  Vulgate  :  caput,  «  tète,  »  sens  ordinaire  de 
r'oS,  qui  ne  convient  pas  ici.  Job,  xx,  16.  Le  vin  mord 
comme  un  serpent,  Prov.,  xxm.32;  d'après  les  versions, 
il  répandra  le  venin,  iô;,  venena.  Dieu  fait  boire  à  son 
peuple  infidèle  et  aux  faux  prophètes  l'eau  de  poison, 
/•V.-,  y/j'i.r,,  fel.ier.,  vin,  14;  ix,  14;  xxm,  15.  Les  riches 
d'Israël  ont  changé  le  droit  en  poison,  c'est-à-dire  qu'ils 
en  font  un  moyen  de  nuire  au  peuple.  Am.,  VI,  13.  Le 
venin  des  impies,  hêrndh,  f)-j;j.6;,  furor,  est  semblable  à 
celui  des  serpents,  Ps.  lviii  (lvii),  5;  ils  ont  sous  les 
lèvres  le  venin  de  l'aspic.  Ps.  cxl  (cxxxix),  4;  Rom.,  m, 
13.  La  langue,  si  l'on  n'y  prend  garde,  répand  un  poison 
mortel.  Jacob.,  m,  8.  L'apôtre  compare  ainsi  à  la  langue 
du  serpent  venimeux  celle  de  l'homme  aux  paroles 
impies  et  méchantes.  H.  Lesétre. 

1.  POISSON  i hébreu  :  ddg,  ddg,  ddgdlt,  tannin, 
«  le  monstre  marin  »;  Septante  ;  iyb-Js,  v.r,-o:;  Vulgate: 
piscis,  celé,  cetus),  animal  vertébré,  vivant  dans  l'eau 
et  y  respirant  au  moyen  de  branchies,  organes  qui  em- 
pruntent à  l'eau  même  l'oxygène  nécessaire  à  la  vie. 
Sur  les  mammifères  qui  vivent  aussi  au  sein  des  eaux 
et  sont  généralement  désignés  par  les  mots  tannin, 
xtj-coç,  cete.  Voir  Cétacés,  t.  n,  col.  405.  Les  poissons 
forment  de  très  nombreuses  espèces,  que  les  natura- 
listes divisent  plus  communément  en  cinq  ordres.  Us 
ont  l'intelligence  nulle,  la  vue  très  courte,  mais  l'odo- 
rat très  développé.  Leur  conformation  et  leur  système 
musculaire  leur  permettent  de  se  mouvoir  très  rapide- 
ment dans  l'eau.  Leur  appétit  est  très  vorace;  ils  se 
dévorent  les  uns  les  autres  et  sont  doués  d'une  prodi- 
gieuse fécondité  qui  aide  chaque  espèce  à  survivre  à 
toutes  les  exterminations. 

I.  Remarques  générales.  —  l»  La  Sainte  Écriture 
n'entre  dans  aucun  détail  caractéristique  sur  les  pois- 
sons. Elle  se  contente  de  les  mentionner  d'une  manière 
générale.  Après  avoir  créé  tout  ce  qui  se  meut  dans  les 
eaux,  selon  son  espèce,  Gen.,  i,  21,  Dieu  soumit  les 
poissons  à  la  domination  de  l'homme,  Gen.,  i,  26.  28; 
IX,  2;  Ps.  vin,  9,  domination  qui  se  borne  pratiquement 
pour  l'homme  à  s'emparer  des  poissons,  quand  il  le 
peut,  pour    en   faire  sa  nourriture.  Œuvre    de    Dieu, 


comme  tous  les  autres  êtres,  les  poissons  de  la  mer 
rendent  témoignage  à  la  puissance  du  Créateur.  Job,  xu, 

8.  Ils  tremblent  devant  lui,  c'est-à-dire  ne  sont  que  de 
pauvres  créatures  en  face  de  sa  majesté.  Ezech..xxxvm, 
20.  Leurabondance  marque  la  bénédiction,  Ezech.,XLvn, 

9,  10,  et  leur  destruction,  la  colère  de  Dieu.  Is.,  L,  2; 
Os.,  iv,  3;  Soph.,  i,  3.  —  2"  Il  était  permis  aux  Israé- 
lites de  manger  des  poissons,  mais  seulement  ceux  qui 
sont  pourvus  de  nageoires  et  d'écaillés.  Les  poissons 
sans  nageoires  ou  sans  écailles  devaient  leur  être  en 
abomination.  Lev..  xi,  9-12.  La  restriction  n'était  pas 
considérable.  Elle  comprenait  les  silures,  par  consé- 
quent le  silurus  auritus  du  Nil,  et  d'autres  de  la  même 
espèce  qui  sont  très  communs  dans  les  eaux  douces  en 
Orient;  les  raies,  qui  habitent  exclusivement  la  mer; 
les  lamproies,  qui  au  printemps  remontent  les  fleuves 
et  les  rivières  pour  frayer;  les  squales,  poissons  marins 
très  voraces  qui  forment  plusieurs  espèces.  Les  doc- 
teurs y  joignirent  par  la  suite  les  murénidés  ou  an- 
guilles, dont  les  écailles  sont  petites  et  peu  visibles. 
La  plupart  de  ces  poissons  ont  une  chair  agréable, 
mais  parfois  un  peu  indigeste.  La  principale  raison  de 
leur  prohibition  provenait  donc  uniquement  de  la  vo- 
lonté divine,  qui  s'affirmait  en  imposant  aux  Israélites 


109.—  Poison  en  bronze  trouvé  dans  une  nécropole  punique. 

D'après  un  des-in   de  M.  .1-  d'Anselme  (Delattre,  La  nécropole 

punique  de  Douïmès,  fouilles  île  1S93-1894,  fig.  3,  p.  !)• 

une  privation  d'ailleurs  assez  légère.  Saint  Paul  signale 
la  différence  qu'il  y  a  entre  la  chair  du  poisson  et  celle 
des  autres  animaux.  I  Cor.,  xv,  39.  —  3»  Il  est  dit  de  Salo- 
mon  qu'il  disserta  sur  les  poissons.  III  Reg.,  IV,  33.  Il 
est  à  croire  que  le  roi  avait  des  connaissances  assez 
étendues  sur  le  grand  nombre  des  espèces  qui  peuplent 
les  eaux  palestiniennes.  Toutefois,  il  est  remarquable, 
observe  Tristram,  The   natural  History  of  the  Bible, 
Londres,  1889,  p.  284,  qu'on  ne  trouve  en  hébreu  au- 
cun nom  particulier  de  poisson,  alors  que  la  langue 
grecque  en  possède  plus  de  quatre  cents.  —  4°  La  Loi 
défendait  formellement  «  toute  image  de  poisson  qui 
vit  dans  les  eaux  au-dessous  de  la  terre  ».  Deut.,  iv, 
18.  La  prohibition  n'était  pas  restreinte  aux  seuls  pois- 
sons.  Elle  avait  pour  but   de   détourner  les  Israélites 
d'une  forme  d'idolâtrie  commune  aux  peuples  qui  les 
entouraient.  Les  Philistins  avaient  leur  dieu-poisson, 
Dagon,  ddgôn,  dont  le  nom  vient  de  dâg.  Voir  Dagon, 
t.  n,  col.  1204.  Les  Phéniciens  et  les  Carthaginois  vé- 
néraient les  poissons;  ils  en  portaient  les  images  sur 
eux  comme  amulettes  et  se  faisaient  enterrer  avec  elles 
après  leur  mort.  Le  P.  Delattre,  dans  ses  fouilles  des 
nécropoles  puniques,  en  a  trouvé  un  grand  nombre  en 
bronze  (fig.  109),  en  os,  en  ivoire,  en  lapis-lazuli  (fig.  110). 
D'après   Hérodote,    II,    72,    les    Égyptiens  regardaient 
comme  sacrés  un  gros  poisson  du  Nil,  appelé  lépidote, 
et  l'anguille.  Les  Chaldéens  honoraient  aussi  un  dieu- 
poisson,  Oannès  (t.  I,  fig.  316,  col.  1154),  qui  passait 
pour  avoir  instruit  les  premiers  hommes.  Cf.  Fr.  Lenor- 
mant,  Les  origines  de  l'histoire,  Paris,  1880,  t.  i,  p.  585. 
Il  n'était  donc  pas  inutile  de  prémunir  sévèrement  les 
Israélites  contre  tout  danger  d'imitation  de  ces  cultes 
Tossiers.  Aujourd'hui  encore,  dans  la  Syrie  occidentale, 
l'ancien  culte  rendu  à  Dagon  se  perpétue  sous  forme 
de  vénération  envers  certains  poissons  qu'il  est  défendu 
dépêcher.  Tel  est  le capoetafratercula (fig. Hl), nourri 
avec  sollicitude  dans   des  bassins  spéciaux  à  Tripoli. 


495 


POISSON 


496 


Cf.  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui,  Paris,  1884,  p.  58; 
Élien,  Hist.  n»ima/.,x,  46;  xu.2;  Xénophon,  Anabas., 
i.  i.  S»;  Strabon,  xvn.  S12;  Diodore  de  Sicile,»,  4. 
II.  Li:s  POISSONS  D'ÉGÏPTE.  —  1°  En  bénissant  lesfils 
de  Joseph,  Jacob  dit  :  i  Qu'ils  multiplient  (idgû,  qu'ils 
poissonnent)  en  abondance  au  milieu  du  pays  ». 
Gen.,  XLVIII,  16.  Il  y  a  là  une  allusion  à  la  grande  fé- 
condité des  poissons  et  à  leur  abondance  particulière 
dans  le  Nil  et  ses  canaux.  Au  désert,  les  Israélites  se 
souvenaient  des  poissons  qu'ils  mangeaient  pour  rien 


110.  —  Poissons  en  os,  ivoire  et  lapis-lazuli,  trouvés  dans  les 
nécropoles  de  Oarthage.  Celui  qui  est  figuré  au  milieu  en  noir 
est  gravé  sur  une  pastille  de  verre.  D'après  le  P.  Delattre. 

en  Egypte,  Niim.,  xi,  5,  tant  ils  étaient  abondants  et 
faciles  à  prendre.  Ce  sont  ces  poissons  qui,  pendant  la 
première  plaie,  moururent  à  cause  de  l'infection  du 
lleuve.  Exod.,  vu,  18,  21;  Ps.  cv  (civ),  29.  Quand  les 
Israélites  se  plaignirent  de  leur  nourriture  près  du 
Sinaï,  Moïse  lit  celle  réflexion  :  o  Leur  ramassera-t-on 
tous  les  poissons  de  la  mer,  pour  qu'ils  en  aient  assez?» 
Nuin  .  xi,  22.  —  2°  Les  poissons  marins  des  cotes 
d'Egypte  el  de  la  Palestine  sont  ceux  qu'on  trouve 
dans  toute  la  Méditerranée.  Quelques  espèces,  les  mu- 
lets par  exemple,  y  abondent  particulièrement.  Certains 


,111.  —  Capoeta  fratercula.  D'après  Lortet,  La  Syrie,  p.  58. 


cétacés,  marsouins  el  dauphins,  y  sont  aussi  très  com- 
muns, mais  ne  pouvaient  servir  à  la  nourriture  des 
Israélites.  —  3°  De  nombreuses  espèces  peuplent  le  Nil 
et  les  divers  canaux  qui  en  dérivent.  «  Beaucoup  de  pois- 
sons de  mer  montent  frayer  en  eau  douce,  les  clupées, 
les  mugils.  les  perches,  le  labre,  et  poussent  leurs  ex- 
cursions très  haut  dans  le  Saïd.  Les  espèces  qui  ne 
sortent  pas  de  la  Méditerranée  sont  arrivées  du  fond  de 
l'Ethiopie,  et  en  arrivent  encore  chaque  année  avec  la 
crue,  le  raschal.  le  raï,  la  tortue  molle,  le  doemac,  les 
mormyres.  Plusieurs  atteignent  une  taille  gigantesque, 
le  bavad  et  la  tortue  pies  de  I  mètre,  le  lalus  jusqu'à 
3  mètres;  d'autres  se  distinguent  par  leurs  propriétés 
électriques,  comme  le  silure  tremhleur.  Le  fahaka 
ilig.  112  e»t  un  poisson  allongé',  qui  liait  au  delà  des 
cataractes.   Le    Nil  l'entraîne   d'autant   plus  aisément 


qu'il  a  la  faculté  de  s'emplir  d'air  et  de  se  gonfler  à 
volonté:  quand  il  est  tendu  outre  mesure,  il  bascule  et 
file  à  la  dérive,  le  ventre  au  vent  et  tout  semé  d'épines 
qui  lui  prêtent  l'apparence  d'un  hérisson.  Pendant 
l'inondation,  il  roule  de  canal  en  canal  au  gré  du  cou- 
rant ;  les  eaux  en  se  retirant  l'abandonnent  dans  les 
champs  limoneux,  où  il  devient  la  proie  des  oiseaux 
ou  chacals,  et  sert  de  jouet  aux  enfants.  »  Maspero, 
Histoire  ancienne  des  peuples  de  l'Orient,  Paris,  1895, 
t.  i,  p.  35,  36.  Cf.  J.  Geoffroy  Saint-Hilaire,  histoire 
naturelle  des  poissons  du  Nil,  dans  la  Description  de 
l'Egypte,  t.  xxiv.  p.  176-217.  Tous  ces  poissons  sont  en 
quantité  prodigieuse.  Si,  même  avant  la  promulgation 
de  la  loi  sur  les  animaux  impurs,  les  Israélites  s'abste- 
naient de  plusieurs  d'entre  eux  par  raison  d'hygiène, 


112.  —  Fahaka  du  Nil. 
D'après  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  36. 

particulièrement  des  silures,  ils  en  avaient  à  leur  dis- 
position beaucoup  d'autres  appartenant  aux  genres 
brème,  spare,  perche,  labre,  carpe,  chromis,  etc.  Voir 
t.  il.  6g.  622,  col.  2044,  un  eunuque  apportant  à  une 
Égyptienne  di  s  poissons  dans  un  panier.  —  4°  Dans  sa 
prophétie  contre  l'Egypte,  Isaïe,  XIX,  8,  prédit  le  des- 
sèchement du  lleuve  et  des  canaux,  l'infection  des  eaux 
et  la  perte  des  poissons,  au  grand  désespoir  des  pécheurs. 
Ezéchiel,  xxix.  4,  5,  annonce  également  la  destruction 
des  poissons,  en  punition  de  l'orgueil  égyptien. 

111.    Ll>  POISSONS  DE  PALESTINK.   —    I"  Au  lac  de    l'i- 

Les  poissons  sont  prodigieusement  abondants 

dans  ce  lac.  Comme  ceux  du  Jourdain  el  de  ses  affluents, 
ils  présentent  une  grande  ressemblance  avec  les  pois- 
sons  du  Nil,  au  point   qu'autrefois   on  croyait  à   une 


118.  —  Chromis  Simonis.  D'après  Lortet,  La  Syrie,  p.  507. 

communication  souterraine  entre  le  fleuve  égyptien  et 
les  eaux  palestiniennes.  Cf.  Josèphe,  Bell,  jud.,  in.  \, 
8.  Ces  poissons  forment  parfois  des  bancs  étendus  et 
épais,  qui  agitent  l'eau  à  la  surface  comme  le  ferai! 
mu'  violente  averse.  Ils  appartiennent  aux  genres  chro- 
mis, clarias,  capoeta,  barbus,  blennius,  discognathus 
et  nemachilus.  Les  chromis  sont  représentés  par  de 
nombreuses  espèces.  Ces  poissons,  longs  d'une  ving- 
l.iine  de  centimètres  à  peine,  ont  la  spécialité  de  garder 
leurs  alevins  dans  leur  gueule  durant  plusieurs  se- 
maines, jusqu'à  ce  que  ceux-ci  soient  de  taille  à  se 
suffire  à  eux-mêmes,  o  l'ne  de  ces  espèces,  le  chn  ois 
Simonis  (6g.  113),  a  une  gueule  énorme,  compilée 
aux  dimensions  du  corps;  au  printemps,  les  joues  du 
mâle  sont  toujours  gonllées  par  les  o^ufs,  ou  le  fretin, 
qu'il  transporte  ainsi  partout  avec  lui...  J'ai  vu  maintes 


497 


POISSON 


498 


fois  la  femelle  en  pondre  une  quantité  considérable, 
deux  cents  environ,  au  milieu  des  joncs  et  des  roseaux, 
dans  une  petite  excavation  qu'elle  creuse  en  se  frottant 
dans  la  vase...  Quelques  minutes  plus  tard,  le  mâle 
prend  avec  ses  lèvres  les  œufs,  les  uns  après  les  autres, 
et  les  fait  glisser  dans  l'intérieur  de  sa  gueule,  contre 
ses  joues  qui  se  gonflent  alors  d'une  manière  étrange... 
Au  sein  de  cette  cavité  incubatrice  d'un  nouveau  genre, 
les  œufs  subissent  en  quelques  jours  toutes  leurs  méta- 
morphoses. Les  petits,  qui  prennent  rapidement  un 
volume  considérable,  paraissent  bien  gênés  dans  leur 
étroite  prison...  et  ne  quittent  cette  demeure  que 
lorsqu'ils  sont  longs  de  dix  millimètres,  et  alors  assez 
forts  et  agiles  pour  écbapper  facilement  à  leurs  nom- 
breux ennemis.  »  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui, 
p.  506.  h'hemichromis  sacra  se  rencontre,  au  mois  de 
juin,  avec  la  gueule  pleine  d'œufs  et  d'alevins,  atteignant 
parfois  le  nombre  de  deux  cent  cinquante.  Les  chromis 
Tiberiadis,  niloticus  et  microstoimts,  de  plus  grande 
taille  que  les  précédents,  sont  préférés  par  les  pê- 
cbeurs.  Les  alevins  que  contient  ainsi  la  gueule  des 
cbroniis  ont  une  couleur  argentée  et  tombent  sur  le 
sable  comme  des  gouttelettes  de  mercure.  Ce  fut  très 
probablement  dans  la  gueule  d'un  chromis  que,  sur 
l'ordre  du  Seigneur,  saint  Pierre  trouva  un  jour,  non 
plus  des  alevins,   mais   le  statère   destiné  à  payer  le 


114.  —  Clarias  macracanthus  des  rives  vaseuses  et  herbeuses 
du  lac  de  Tibériade.  D'après  Lortet,  La  Syrie,  p.  509. 

tribut.  Matth.,  xvn,  26.  Le  poisson,  malgré  la  présence 
du  statère  dans  sa  bouche,  n'eut  pas  plus  de  difficulté 
à  saisir  l'hameçon,  que  n'en  avaient  ses  semblables 
pour  saisir  la  proie  destinée  à  les  nourrir,  dans  le 
temps  que  leur  bouche  était  encombrée  par  leurs  ale- 
vins. Un  des  poissons  les  plus  curieux  du  lac  est  un 
siluridé,  le  clarias  macracanthus  (fig.  114),  analogue 
au  clarias  anguillaris  d'Egypte,  le  coracinus  de  Josè- 
phe,  Bell,  jud.,  III,  x,  8.  Il  atteint  plus  d'un  mètre  de 
longueur,  peut  vivre  plusieurs  jours  hors  de  l'eau,  et 
fait  entendre,  quand  on  le  prend  ou  qu'on  le  frappe, 
des  espèces  de  miaulements  comme  ceux  d'un  chat.  Il 
a  une  vessie  natatoire  qu'il  peut  remplir  d'air,  qui  lui 
permet  de  respirer  hors  de  l'eau  comme  les  dipneustes, 
et  qui,  en  se  contractant,  imite  le  bruit  d'un  miaule- 
ment. Ce  poisson,  dépourvu  d'écaillés,  ne  pouvait  être 
mangé  par  les  Israélites.  Les  poissons  du  lac  servent 
de  proie  aux  pélicans  et  aux  grèbes  huppés,  échassiers 
qui  fréquentent  la  Palestine  en  très  grand  nombre.  Ces 
derniers  s'attaquent  aux  chromis  pour  les  dévorer; 
mais,  quand  ils  les  trouvent  trop  gros,  ils  se  conten- 
tent de  leur  enlever  les  yeux  avec  leur  long  bec.  Aussi 
prend-on  souvent  des  poissons  aveugles  dans  le  lac. 
Cf.  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui,  p.  508-510. 

2°  Dans  le  Jourdain  et  ses  affluents.  —  Le  Jourdain 
nourrit  une  grande  quantité  de  poissons  que  chassent 
les  martins-pècheurs,  mais  qui  se  multiplient  d'autant 
plus  aisément  que,  par  suite  d'un  préjugé,  les  Arabes 
n'y  touchent  jamais.  Les  espèces  ne  diffèrent  pas  de 
celles  qui  peuplent  le  lac  de  Tibériade.  On  pêche  le 
plus  fréquemment  les  capoeta  Syriaca,  socialis  et  Da- 


mascina,  poissons  argentés  comme  les  truites  de  mon- 
tagne ;  les  barbus  canis  et  longiceps,  d'assez  grande 
taille  et  pourvus  de  tentacules  de  chaque  côté  du  mu- 
seau; le  cyprinodon  cypris,  petit  poisson  de  cinq  cen- 
timètres de  long,  et  quelquefois  le  clarias  macracan- 
tlms.  Les  torrents  qui  se  jettent  dans  le  Jourdain  ont 
les  mêmes  espèces  que  le  fleuve.  Les  petits  ruisseaux 
du  Kelt,  aux  environs  de  Jéricho,  nourrissent  le  ca- 
poeta Damascina,  le  Discognatlms  lamta  et  le  cypri- 
nodon cypris.  Le  barbus  longiceps  abonde  surtout  dans 
le  Jaboc.  Le  lac  Houléh  a  les  mêmes  habitants  que  le 
lac  de  Tibériade.  Mais  tous  les  poissons  qu'entraîne  le 
violent  courant  du  Jourdain  périssent  dès  qu'ils  attei- 
gnent les  eaux  de  la  mer  Morte.  Cf.  Ezécli.,  xlvii,  9, 
10.  Voir  Jourdain,  t.  m,  col.  1739;  Morte  (Mer),  t.  iv, 
col.  1300.  On  trouve  aussi  en  grande  abondance  dans 
des  sources  même  salées  ou  chaudes,  de  petits  pois- 
sons argentés,  le  cyprinodon  Sophiie,  le  'cyprinodon 
dispar,  et  d'autres  analogues.  Le  cyprinodon  dispar 
(fig.  115),  long  de  cinq  centimètres  à  peine,  est  d'un 
gris  argenté  et  verdâtre  sur  le  dos.  Des  points  pigmen- 
taires  d'un  noir  intense  sont  semés  sur  les  flancs,  le 
ventre  et  les  nageoires.  Ce  poisson  vit  dans  les  sources 
chaudes,  fortement  salées  et  parfois  quelque  peu  sulfu- 
reuses. Mais,  comme  tous  les  autres,  il  périt  sitôt  qu'on 
le  plonge  dans  l'eau  de  la  mer  Morte.  La  source  Ain 
Sghaïr,  salée,  sulfureuse  et  d'une  température  de  20», 
renferme  des  myriades  de  cyprinodon  Sophiœ.  longs 


115.  —  Cyprinodon  dispar  de  Palestine. 
D'après  Lortet,  La  Syrie,  p.  439. 

de  trois  ou  quatre  centimètres  à  peine.  Ces  poissons 
sont  d'un  brun  verdâtre,  avec  des  raies  argentées  ver- 
ticales sur  les  tlancs.  Ils  se  meuvent  avec  grande  agi- 
lité et  se  nourrissent  surtout  de  larves  de  moustiques. 
Près  du  lac  Houléh,  la  source  Ain  Mellàhâh  nourrit  des 
cyprinodon  dis}iar  et  des  capoeta  fratercula.  Cf.  Lor- 
tet, La  Syrie  d'aujourd'liui,  p.  438,  439,  44i,  540.  Il 
arrivait  parfois  que  les  torrents  aboutissant  au  Jourdain 
se  tarissaient.  Alors  se  réalisait  ce  que  dit  Isaïe,  L,  2  : 
«  Je  changerai  les  fleuves  en  désert,  leurs  poissons 
pourriront  faute  d'eau  et  ils  périront  de  soif.  » 

IV.  Le  poisson  de  Jonas.  —  Le  texte  sacré  dit  que 
«  Jéhovah  fit  venir  un  grand  poisson,  ddg  gâdôl,  pour 
engloutir  Jonas,  et  Jonas  fut  dans  le  ventre  du  poisson 
trois  jours  et  trois  nuits.  »  Jon.,  h,  1.  Dans  saint  Mat- 
thieu, xn,  40,  le  poisson  est  appelé  un  monstre  marin, 
xtitoç,  cetus.  Tout  d'abord,  il  n'est  nullement  néces- 
saire de  supposer  que  Dieu  ait  créé  un  poisson  spécial 
pour  engloutir  le  prophète.  Il  .<  fit  venir  »,  c'est-à-dire 
prit  soin  que  le  monstre  se  trouvât  là  au  moment 
voulu.  Notre-Seigneur  lui-même  fait  allusion  à  l'évé- 
nement et  le  présente  comme  un  signe,  c'est-à-dire 
comme  un  fait  miraculeux  destiné  à  prouver  ou  à  fi- 
gurer quelque  chose.  Matth.,  xil,  39;  Luc,  xi,  29.  Les 
mots  dàg  gâdôl,  «  grand  poisson  »,  xî|To;,  employés  par 
les  Septante  et  par  saint  Matthieu,  piscis  grandis  de  la 
Vulgate,  ne  préjugent  absolument  rien  quant  à  la  na- 
ture de  l'animal  en  question.  Il  ne  saurait  être  la 
baleine  dont  le  pharynx  est  beaucoup  trop  étroit  pour 
avaler  une  proie  considérable.  Voir  Baleine,  t.  i, 
col.  1413.  Mais  dans  la  Méditerranée  se  trouvent 
d'autres  monstres  capables  d'engloutir  un  homme  tout 
entier.  Tels  sont  par  exemple  le  pristis  ou  scie,  dont  la 


499 


POISSON 


000 


taille  peut  atteindre  de  trois  à  cinq  mètres;  le  squale, 
poisson  de  grande  taille  dont  la  voracité  est  prodi- 
gieuse; la  lamie,  de  dimension  extraordinaire  et  dont 
le  poids  peut  atteindre  15000  kilogrammes,  et  surtout 
le  requin  ou  carcharias,  d'une  force  et  d'une  voracité 
étonnantes  et  dont  la  taille  peut  aller  jusqu'à  neuf  et 
dix  mètres.  Tous  ces  poissons  appartiennent  à  la 
famille  des  sélaciens  ou  plagiostomes,  dont  la  bouche 
est  placée  transversalement  au-dessous  du  museau. 
Dans  leur  mythe  d'Hercule  englouti  par  un  monstre 
marin  qu'avait  envoyé  Xeptune,  puis  rejeté  sain  et  sauf, 
les  Grecs  faisaient  intervenir  un  carcharias,  xip-/_apo; 
xûuv,  canis  carcharias  ou  requin.  Cf.  L;cophron,  Cas- 
sandr.,  34.  On  cite  plusieurs  cas  d'hommes  engloutis 
tout  entiers  par  des  requins,  entre  autres  celui  d'un 
matelot  qui,  en  1759,  tomba  à  la  mer  dans  la  gueule 
d'un  requin  qui  suivait  le  navire.  Le  monstre,  blessé  à 
coups  de  fusil,  rendit  aussitôt  le  matelot  un  peu  contu- 
sionné. Cf.  S.  Muller,  Des  Ritt.  i>on  Linné  volst.  Natur- 
system.,  Nuremberg,  1774,  p.  268,  269.  Le  cas  d'un 
homme  englouti  par  un  poisson,  comme  le  fut  Jonas, 
est  donc  naturellement  possible.  Il  est  dit  que  le  pro- 
phète resta  trois  jours  et  trois  nuits  dans  le  ventre 
du  monstre.  .Ion.,  Il,  2.  Cette  expression  doit  s'entendre, 
à  la  manière  hébraïque,  non  de  72  heures,  mais  de 
beaucoup  moins,  peut-être  de  30  ou  40.  Ce  séjour  de 
Jonas  au  sein  du  poisson,  sa  survivance  dans  un  pareil 
milieu  et  ensuite  sa  délivrance  sur  le  rivage  ne  sont 
pas  présentés  par  le  texte  sacré  comme  des  faits  natu- 
rels. On  ne  peut  donc  leur  opposer  d'autres  objections 
que  celles  qu'on  fait  contre  tous  les  miracles.  Voir  Jo- 
nas 2,  t.  III,  col.  1608-1609.  Cf.  F.  Baringius,  De  ceto 
Jonœ,  dans  le  Thésaurus  de  Hase  et  Iken,  Leyde,  1732, 
t.  il,  p.  217-219;  Rosenmùller,  Prophète*  minores. 
Leipzig,  p.  354-356,  374;  T.  J.  Lamy,  J<mas,  dans  le 
Diction,  apologétique  de  Jaugey,  p.  1705-1714.  Sur  les 
représentations  de  Jonas  et  du  poisson  dans  l'iconogra- 
phie chrétienne  primitive,  voir  Martigny,  Diction,  des 
antiquités  chrétiennes,  Paris,  1877,  p.  398. 

V.  Le  poisson  de  Tobie.  —  Le  jeune  Tobie  descendait 
sur  la  rive  du  Tigre  pour  se  laver  les  pieds,  quand  un 
poisson  énorme,  i/6-Jî  \ls*(«.ç,  piscis  immanis,  sortit  pour 
le  dévorer,  ou,  d'après  le  StnaïLicus,  chercha  à  lui 
happer  le  pied.  Tobie  fut  épouvanté,  mais,  sur  l'ordre 
de  l'ange,  il  tira  le  poisson  par  les  ouïes  jusque  sur  la 
rive.  Tob.,  VI,  2-4.  Le  texte  sacré  ne  dit  rien  sur  la  na- 
ture de  ce  poisson.  L'Euphrate  et  le  Tigre  sont  très 
poissonneux.  Les  riverains  n'ont  longtemps  vécu  que 
de  poisson,  qu'ils  mangeaient  frais,  salé  ou  fumé.  Ils  le 
séchaient  au  soleil,  le  pilaient  dans  un  mortier,  tami- 
saient la  poudre  et  en  faisaient  des  sortes  de  pains  ou 
de  gâteaux.  Hérodote,  i,  200.  Le  barbeau,  la  carpe,  l'an- 
guille, la  murène,  le  silure  prospèrent  et  prennent  de 
fortes  dimensions  dans  ces  eaux  Unies.  On  y  trouve 
aussi  une  curieuse  espèce  de  grondin,  g  II  séjourne  dans 
l'eau  à  l'ordinaire,  mais  l'air  libre  ne  l'effraie  point  : 
il  saule  sur  les  berges,  grimpe  aux  arbres  sans  trop  de 
peine,  s'oublie  volontiers  sur  les  bancs  de  boue  que  la 
marée  découvre  el  s'y  vautre  au  soleil,  sauf  à  s'enlizer 
en  un  clin  d'œil  m  quelque  oiseau  l'avise  de  trop  près.  » 
Maspero,  Histoire  ancienne  des  peuples  de  l'Orient. 
t.  i,  p.  556.  On  a  conjecturé  que  le  poisson  de  Tobie 
était  un  silure,  mais  on  a  contesté  qu'il  ait  pu  s'élancer 
pour  attaquer  l'homme,  cf.  Tristram,  The  natural  His- 
tory  o{  the  Bible,  p.  293.  Le  Sinailicus  et  la  Vulgate 
parlent  d'un  grand  poisson.  Le  texte  grec  de  la  Sixtine 
dit  seulement  qu'  «  un  poisson  s'élança  du  neuve  ».  il 
ne  sérail  pas  impossible  que  ce  poisson  non  qualifié, 
qui  sauta  du  fleuve,  ne  f"t  autre  que  le  grondin.  Il 
devait,  en  tous  cas,  être  à  la  fois  de  taille  assez  faible 
pour  que  le  jeune  homme  put  le  tirer  à  lui,  et  pourtant 
assez  volumineux  pour  fournir  les  provisions  qui  suf- 
Rrenl  aux   deux  voyageurs  jusqu'à  liages.  Tob..  vi,  6. 


L'ne  fresque  du  cimetière  de  Thrason  représente  Tobie 
offrant  à  l'ange  le  poisson  qu'il  vient  de  prendre 
(lîg.  116).  Cf.  Marucchi,  Éléments  'l'archéologie  chré- 
tienne, Paris,  t.  i,  1899,  p.  303.  Sur  l'emploi  du  fiel  de 
poisson  pour  la  guérison  des  yeux,  voir  Fiel,  t.  n, 
col.  2234.  Voir  aussi  Tobie. 

VI.  Le  marché  aix  poissons.  —  Dans  l'ancienne  Jé- 
rusalem, il  y  avait  une  porte  des  Poissons,  ainsi  nommée 
parce  que  les  provisions  de  poisson  arrivaient  par  là, 
de  la  mer  et  du  lac  de  Tibériade.  II  Par.,  x.xxiii,  14; 
II  Esd.,  m,  3;  xn,  38;  Soph.,  i,  10.  Des  ^marchands 
tyriens  vendaient  le  poisson  dans  la  ville;  Néhémie  fut 
même  obligé  de  prendre  des  mesures  rigoureuses  pour 
les  empêcher  d'exercer  leur  commerce  le  jour  du  sab- 
bat. II  Esd.,  xin,  16.  Le  poisson  qu'ils  vendaient  n  était 
pas  frais,  à  cause  de  la  distance  à  parcourir,  mais  salé 
ou  séché  au  soleil.  Voir  le  marchand  de  poisson  d'un  an- 
cien bazar  égyptien,  t.  il,  fig.  512,  col.  1555.  Le  poisson 
de  mer  frais  ne  pouvait  guère  venir  à  Jérusalem  que  de 
Joppé.  Les  Phéniciens  avaient  de  grandes  pêcheries 
maritimes  et  exportaient  en  Palestine  une  partie  de  leur 


116.  —  Tobie  offrant  à  fange  le  poisson. 
Peinture  de  la  catacombe  des  Salnts-Thrason-et-Saturnin. 

D'après  Martigny,  Dictionnaire,  p.  760. 

poisson.  Les  habitants  de  plusieurs  bourgs  de  la  cote  ne 
vivaient  que  de  leur  pèche.  Le  lac  de  Tibériade  four- 
nissait les  poissons  d'eau  douce.  Un  grand  nombre  de 
bateaux  y  péchaient  au  temps  de  Notre-Seigneur.  Cf. 
Josèphe,  Bell,  jud.,  III,  \.  9.  Ues  poissons  salés  arri- 
vaient aussi  d'Egypte.  I.e  rifr/o;  ou  salaison  s'y  prépa- 
rait en  un  grand  nombre  d'endroits,  d'où  la  fréquence 
du  nom  de  lieu  Tapr/iïi.  Machschirin,  vi,  3.  Cf.  Héro- 
dote, il.  149.  Le  thon  salé  ou  kolias  provenait  d'Espa- 
gne, dont  les  salaisons  étaient  renommées.  Schabbath, 
xxii,  2;  Machschirin,  vi,  3.  Cf.  Pline,  H.  -V..  xxxn. 
140;  Schùrer,  Geschichte  des  jiulischen  T'offres,  Leipzig, 
I.  il,  1898,  p.  57.  58,  Sauf  au  bord  de  la  nier  et  du  lac 
tous  les  poissons  n'étaient  transportés  et  utilisés 
qu'après  avoir  été  salés  ou  séchés  au  soleil.  Le  peuple 
se  contentait  de  cette  nourriture. 

VIL  Lis  POISSONS  DANS  l.'Ev  \M.ll.E.  —  Les  ,'\. nihi- 
listes mentionnent  les  poissons  à  propos  des  pèches 
ordinaires,  Matth.,  XIII,  47,  ou  miraculeuses.  Luc.,  v, 
6;  Joa.,  xxi,  6-13.  Voir  Pèche,  col.  6.  Ils  en  parlent 
surtout  au  point  de  vue  de  la  nourriture.  Notre-Seigneur 
dit  qu'un  père  ne  donnerait  pas  un  serpent  à  son  en- 
fant qui  lui  demande  un  poisson.  Matth.,  vu.  10;  Luc, 
xi,  11.  Le  poisson  et  le  serpent  ont  une  certaine  res- 
semblance; mais  l'un  est  comestible  il  l'autre  nuisible. 
A  la  première  multiplication  des  pains,  un  enfant  a  il.  nx 
poissons,  assez  petits,  sans  doute,  puisqu'il  peut  'es 
porter  en  chemin  avec  cinq  pains.  Matth.,  xiv,  17; 
Marc.  vi.  38,  il  ;  Luc,  IX,  13;  Joa.,  VI,  9.  A  la  seconde 
multiplication,  on  trouve  parmi  les  assistants  quelques 


501 


POISSON 


POLICE 


502 


petits  poissons.  Matin.,  xv.  'Si.  Ces  poissons,  salés  ou 
séchés,  faisaient  partielles  provisions  de  route  dont  se 
munissait  ordinairement  l'Israélite.  —  Après  la  résur- 
rection, au  cénacle,  les  Apôtres  offrent  à  Notre-Seigneur 
un  morceau  de  poisson  rôti.  Luc.  xxiv,  42.  A  son  tour, 
sur  les  bords  du  lac  de  Tibériade.  le  Sauveur  a  disposé 


117.  —  Poisson,  personnifiant  Notre-Seigneur. 

portant  une  corbeille  de  pains. 

D'après  Martigny,  Dictionnaire,  p.  '291. 

pour  eux  du  poisson  qui  rôtit  sur  des  charbons  ardents. 
Joa.,  xxi,  9.  —  Les  miracles  de  la  multiplication  des 
pains  suggérèrent  aux  premiers  chrétiens  l'idée  d'un 
symbole  eucharistique  qu'on  trouve  représenté  dans  les 
catacombes.  C'est  un  poisson  portant  une  corbeille  de 
pains  (fig.  117).  Voir  Martigny,  Dictionnaire  des  anti- 
quités chrétiennes,  3e  édit.,  p.  291.  Cf.  Marucchi.  Élé- 
ments d'archéologie  chrétienne,  Varis,  1900,  t.  h.  p.  170. 


118.  —  Poisson  de  bronze,  figure  de  Notre-Seigneur. 
D'après  Martigny,  Dictionnaire,  p.  655. 

A  cause  de  son  nom  grec,  le  poisson  devint  lui-même  le 
symbole  du  Christ.  On  observa  de  bonne  heure  que  les 
cinq  lettres  du  mot  i^flyç  fournissaient  les  initiales  des 
cinq  mots  'Irt<rous  Xpurcoç  Oso-j  utoç  (rwrrçp,  «  Jésus- 
Christ,  de  Dieu  Fils,  Sauveur.  »  Des  poissons  de  verre 
ou  de  métal  étaient  portés  comme  objets  de  piété,  au 
moyen  desquels  les  chrétiens  se  reconnaissaient  entre 
eux.   On   gravait    des   poissons   surj  des    anneaux,    sur 


119. 


Ancre  debout,  figurant  une  croix,  d'où  descend  une  ligue 
à  laquelle  est  pris  un  poisson,  image  du  chrétien. 
D'après  Martigny,  Dictionnaire,  p.  657. 


l'ivoire,  les  pierres  précieuses,  etc.  Parfois  des  inscrip- 
tions étaient  tracées  sur  le  poisson  lui-même,  pour 
accuser  davantage  sa  signification.  On  lit  sur  un  pois- 
son de  bronze  ilig.  118)  le  mot  CC0CAIC,  «  sauve  »,  ce 
qui  fait  que  l'ensemble  constitue  celte  invocation  : 
«  Jesus-Cbrist.  Fils  de  Dieu,  Sauveur,  sauve-nous.  »  Le 
poisson  pris  à  l'hameçon  (fig.  119)  ligure  le  chrétien 
converti  par  la  prédication  évangélique.  Cf.  Martigny, 
Dictionnaire  des  antiquités  chrétiennes,  p.  653-659. 

H.  Lksètbe. 
2.  POISSONS  (PORTE  DES)  à  Jérusalem.  Voir  JÉ- 
i.i  sali  m.  2»,  t.  nr,  col.  1364. 

POITRINE  (hébreu  :  fyazéh;  chaldéen  :  hidin:  Sep- 
tante :  srrfloç,  artflivw,  Vulgale  :pectus,  pectusculum), 


partie  antérieure  du  corps,  située  entre  le  ventre  et  le 
cou.  —  1»  Le  mot  hazéli  n'est  employé  que  pour  dé- 
signer la  poitrine  des  victimes  offertes  dans  les  sacri- 
fices pacifiques.  Cette  poitrine  était  détachée,  balancée 
devant  le  Seigneur  et  ensuite  appartenait  ordinaire- 
ment aux  prêtres.  Exod.,  x.xix.  '26,  27  ;  Lev.,  vu,  30,  31  ; 
ix,  20.  21  ;  x,  1.  —  2"  Dans  plusieurs  passages,  les 
versions  prennent  la  poitrine  pour  désigner  le  ventre, 
•  ■en.,  m,  14,  et  surtout  les  organes  du  sentiment,  tels 
que  les  concevaient  les  auteurs  sacrés,  le  cœur,  Ju- 
dith, m,  11,  les  reins,  les  entrailles,  le  sein,  etc.  La 
statue  vue  en  songe  par  Xabuchodonosor  avait  la  poi- 
trine et  les  bras  d'argent.  Dan.,  n,  32.  Au  moment  de 
l'attentat  d'Héliodore,  les  femmes  de  Jérusalem  se 
couvrirent  la  poitrine  d'un  cilice,  en  signe  de  deuil. 
II  Mach.,  m,  19.  Les  sept  anges  de  l'Apocalypse,  xv,  6, 
portaient  des  ceintures  d'or  autour  de  la  poitrine.  — 
3°  Dans  le  deuil  ou  le  repentir,  on  se  frappe  la  poitrine. 
Nah.,  n,  7;  Luc,  xvm,  13;  xxm,  48.  Ce  geste  est  na- 
turel; c'est  la  révélation  publique  de  ce  qui  est  caché  au 
fond  du  cœur,  douleur  ou  regret.  Cf.  S.  Augustin, 
Serm.,  67,  t.  xxxvm,  col.  433.  —  A  la  dernière  Cène, 
saint  Jean  reposa  sa  tête  sur  la  poitrine  de  Jésus, 
Joa.,  xiii,  25;  xxi,  20,  ce  qui  marquait  l'amour  du 
Sauveur  pour  le  disciple,  et  celui  du  disciple  pour  son 
divin  Mailre.  II.  Lesètre. 

POIVRETTE  COMMUNE,  non,  vulgaire  de  la  ni- 
gelle  ou  nielle  cultivée,  dont  la  graine  servait  de  condi- 
ment dans  l'Orient  et  qui  était  appelée  gith  en  latin. 
Voir  Gith,  t.  m,  col.  244. 

POIX  (hébreu  :  zcfét;  Septante  :  niatsa.;  Vulgate  : 
pi.r),  substance  résineuse  ou  bitumineuse,  extraite  des 
pins  et  des  sapins.  Celte  substance  est  de  la  térében- 
thine qui  se  fond  à  chaud  dans  l'eau;  d'aspect  jaunâtre, 
elle  est  grasse  au  toucher,  tient  aux  mains  et  est  im- 
perméable à  l'eau;  elle  se  ramollit  seulement  à  la 
chaleur.  —  La  corbeille  de  jonc  dans  laquelle  .Moïse 
fut  exposé  sur  le  Nil  était  enduite  de  bitume  et  de  poix, 
pour  que  l'eau  n'y  pénétrât  pas.  Exod.,  Il,  3.  —  Dans 
sa  prophétie  contre  Édom,  Isaïe,  xxxiv,  9,  dit  que  les 
torrents  de  son  territoire  seront  changés  en  poix  et 
que  la  terre  elle-même  deviendra  de  la  poix  brûlante. 
Le  prophète  fait  allusion  à  la  configuration  du  pays  qui, 
situé  au  sud-ouest  de  la  mer  Morte,  a  vu  les  éruptions 
de  matières  bitumineuses  dans  lesquelles  ont  péri 
Sodome  et  les  villes  coupables.  Voir  t.  m,  col.  830. 
Les  phénomènes  qu'il  prédit  ne  sont  que  des  images  du 
châtiment  qui  menace  l'Idumée.  —  Celui  qui  touche  de 
la  poix  souille  sa  main,  à  cause  de  la  nature  adhésive 
de  cette  substance;  de  même,  celui  qui  fréquente  l'or- 
gueilleux devient  vicieux  à  son  contact.  Eccli.,  xm,  1. 
—  Pour  augmenter  la  combustion  de  la  fournaise  baby- 
lonienne, on  y  jetait  de  la  poix,  matière  résineuse  qui 
activait  le  feu.  Dan.,  m,  46.  Pour  tuer  le  dragon 
qu'adoraient  les  Babyloniens,  Daniel  lui  fit  avaler  des 
boulettes  composées  de  poix,  de  graisse  et  de  poils. 
Dan.,  xiv,  26.  La  graisse  devait  allécher  l'animal,  la 
poix,  retenue  par  les  poils,  s'arrêter  dans  sa  gorge  et 
l'étouffer.  C'est  ce  qui  se  produisit. 

H.  Lesètre. 

POLE  Matthieu.  Voir  Poole. 

POLICE,  institution  chargée  de  maintenir  l'ordre 
public.  —  1"  Police  civile.  —  On  a  fort  peu  de  rensei- 
gnements sur  ce  sujet.  Les  choses  de\  aient  d'ailleurs 
se  passer  très  simplement  chez  les  Hébreux.  La  police 
rentrait  naturellement  dans  les  attributions  des  anciens, 
placés  à  la  tête. de  chaque  agglomération.  Voir  Anciens, 
t.  i,  col.  555-556.  Dans  les  affaires  criminelles,  les  pa- 
rents, le  lésé  lui-même  ou  les  témoins  amenaient  le 
coupable  devant  les  juges.  Voir  Jugement,  t.  m,  col.  1814. 


503 


POLICE 


504 


Les  rois  exerçaient  le  droit  de  police  sur  tout  le  pays 
soumis  à  leur  juridiction.  III  Reg.,  xvm,  10:  IV  Reg., 
1,9,  11,  13;  .1er.,  xxxvil,  12-14;  Matth.,  xiv,  3;  Act., 
XII,  1-3.  Dans  certains  cas  de  flagrant  délit,  on  voit  les 
juges  prendre  l'initiative  des  poursuites  et  citer  ou 
saisir  eux-mêmes  le  coupable.  Dan.,  xm,  27,  29;  loi.. 
vm,  3. 

2°  Police  religieuse.  —  Le  blasphème  et  les  crimes 
contre  la  religion  appelaient  la  surveillance  des  juges 
locaux,  III  Reg.,  xxi,  10-13,  et  surtout  des  prêtres  de 
Jérusalem.  Jer.,  xxvi,  8,  9.  Le  grand  sanhédrin  exerça 
plus  tard  cette  surveillance  sur  tout  le  pays  juif  et 
même  sur  les  communautés  juives  vivant  hors  de  la 
Palestine.  Les  hommes  qu'il  employait  pour  sa  police 
sont  appelés  VTn\phai,  ministri,  *  serviteurs  ».  Il  en  '"=1 
question  dans  le  Nouveau  Testament.  Matth..  XXVI,  58; 
.Marc,  xiv,  54;  Joa.,  vu,  32,  45;  xvm,  3,  12,  22;  xix.  fi; 
Act.,  v,  22,  26.  La  police  du  sanhédrin  fut  mise  en  mou- 
vement pour  suivre  partout  Notre-Seigneur  pendant  sa 
vie  publique  et  espionner  ses  paroles  et  ses  démarches. 
Le  soin  de  cet  espionnage  ne  fut  pas  confié  aux  simples 
serviteurs;  des  scribes  et  des  pharisiens  envoyés  de  Jé- 
rusalem s'y  employèrent.  Matth.,  xv,  1-6;  xvi,  1  ;  Luc, 
v,  17:  xi,  53,  54.  A  Jérusalem,  le  sanhédrin  chercha  à 
faire  arrêter  Jésus  par  les  serviteurs.  Joa.,  vu,  30,  32, 
44.  Ceux-ci  n'osèrent  pas  une  première  fois  et  furent 
réprimandés  par  leurs  maîtres.  Joa.,  vu,  45-47.  Peu 
avant  la  dernière  Pàque,  le  sanhédrin  donna  ordre  à 
quiconque  le  savait  de  dénoncer  le  séjour  de  Jésus, 
afin  qu'on  pût  l'arrêter.  Joa.,  xi,  56.  Pour  plus  de  sû- 
reté, il  voulait  agir  par  ruse.  Matth..  \\vi.  i.  Mais- 
grâce  à  la  trahison  de  Judas,  on  put  trouver  une  occa- 
sion favorable  pour  s'emparer  de  la  victime.  Matth., 
xxvi,  16.  La  troupe  qui  fut  envoyée  a  Gethsémani  com- 
prenait une  cohorte,  mais  aussi  des  agents  dépendant 
du  sanhédrin.  Matth..  xxvi.  47:  Marc,  xiv,  13;  Joa., 
XVIII,  3.  Ces  derniers  appartenaient  à  la  police  des 
grands-prêtres.  L'un  d'eux  se  permit  de  souffleter  le 
Sauveur  en  plein  tribunal.  Joa.,  xvm.  22.  Cf.  A.  Lémann, 
La  police  autour  de  la  personne  de  Jésus-Christ,  Paris. 
1895.  Les  mêmes  agents  se  saisirent  plus  tard  des  apô- 
tres, les  mirent  en  prison,  mais  se  gardèrent  ensuite 
de  les  maltraiter,  quand  ils  constatèrent  leur  délivrance 
miraculeuse.  Act.,  vu,  18,  22,  26.  Lorsque  Saul  s'en 
allait  à  Damas,  pour  ramener  à  Jérusalem  les  chrétiens 
enchaînés,  il  disposait  évidemment  d'une  force  de 
police  à  la  solde  du  sanhédrin.  Act.,  ix,  2. 

3°  Police  du  Temple.  —  Dans  le  premier  Temple,  la 
police  ('•lait  confiée  à  des  lévites.  Voir  Portier;  I  Par., 
îx,  17,  24-27;  xxvi,  12-18.  Dans  le  second,  les  lévites 
occupaient  la  nuit  vingt  et  un  postes,  à  savoir  :  les  cinq 
portes  de  la  montagne  du  Temple,  les  quatre  angles 
intérieurs,  les  cinq  portes  du  parvis  intérieur,  les  qua- 
tre angles  extérieurs  du  ce  parvis,  la  chambre  de  l'obla- 
tion,  celle  du  voile,  la  partie  postérieure  du  Saint  des 
Saints,  la  porte Nitzotz  au  nord,  la  chambre  Aftines  au- 
dessus  de  la  porte  des  Eaux  et  l'endroit  appelé  Beth  mo- 
ked,  dans  lequel  donnaient  les  prêtres.  Dix  lévites 
veillaient  à  chaque  poste,  et  avec  eux  dix  prêtres , lans 
chacun  des  trois  derniers.  Cf.  Num..  xvm,  i  :  Ps.  .  wi\ 
(cxxui),  I.  2.  Tamid,  i,  1;  Middoth,  i,  1.  Un  préfet  du 
Temple,  nommé  'ÎS  liai-  hah-bnil,  j  homme  de  la  mon- 
tagne  de  la  maison  »,  faisait  des  rondes  pendant  la 
iniil  pour  s'assurer  que  chacun  veillait  à  son  poste. 
S'il  trouvait  quelque  gardien  à  dormir,  il  pouvait  le 
frapper  de  verges  el  même  mettre  le  feu  a  ses  .éléments. 
Cf.  Middoth,  i,  2.  L'Apocalypse,  xvi,  lô,  fait  peut-être 
allusion  à  cet  usage.  On  renforça  celle  garde  de  nuit. 

après  l'attentai  Ci ois,  sous  le  procurateur  Coponius, 

par  des  Samaritains,  qui  profitèrent  de  l'ouverture  du 
Temple  après  minuit  durant  lus  fêtes  de  la  Pâque  pour 
semer  dus  osse nis  de  moi  i-  dans  le  lieu  saint.  Cf.  Jo- 
sèphe. Ant.  jud.,  XVIII.  M.2.  Pendant  le  jour,  la  police 


du  Temple  veillait  également  pour  interdire  l'entrée  du 
péribole  à  ceux  qui  n'avaient  pas  le  droit  de  le  franchir. 
Voir  Péribole,  col.  142;  Philon,  De  prœm.  sacerdot., 
6,  édit.  Mangey,  t.  n,  p.  236.  Le  préfet  du  Temple  avait 
la  police  des  parvis  extérieurs;  un  autre  fonctionnaire, 
appelé  'U  hab-birâh,  <>  homme  de  l'édifice  »,  surveillait  le 
Temple  lui-même.  Cf.  Orla,  II,  12.  Le  mot  birdh  désigne 
certainement  ici  le  Temple,  comme  I  Par.,  xxix,  1,  19; 
Pesac/tim,  m,  8;  vu,  8,  etc.  Cf.  Schùrer,  Geschichte 
des  jîidischen  Volkes  ïm  Zeil.  J.-C,  Leipzig,  t.  n,  1898, 
p.  273,  274.  Dans  le  Nouveau  Testament,  le  préfet  du 
Temple  porte  le  nom  de  s-rpatriYÔç,  magistratus.  Judas 
s'aboucha  avec  les  princes  des  prêtres  et  les  magistrats, 
vraisemblablement  les  deux  préfets  mentionnés  plus 
haut  et  commandant  la  police  du  Temple.  Luc,  XXII,  i. 
Les  forces  policières  qui  procédèrent  à  l'arrestation  du 
Sauveur  à  Gethsémani  étaient  d'ailleurs  accompagnées 
de  princes  des  prêtres,  d'anciens  et  des  préfets  du 
Temple,  <TTpav7]YO!  to-j  ispo-j,  magistratus  templi.  Luc, 
xxil,  52.  L'un  des  deux  préfets  intervint  à  plusieurs 
reprises  au  sujet  des  Apéitres.  Act.,  iv.  1;  v,  21,  26. 
C'est  plutôt  le  préfet  des  parvis  dont  il  est  question 
dans  ces  derniers  passages. 

4"  Police   romaine.    —    Les    procurateurs    romains 
exerçaient  en  Judée  le  droit  de  haute  police.  De  l'an  6 
à  l'an  41  après  J.-C,  ils  surveillèrent  même  les  finances 
du  Temple.  Ce  droit  passa  ensuite,  jusqu'en  66,  aux 
princes  juifs,  Hérode  de  Chalcis  et  Agrippa  II,  qui  d'ail- 
leurs nommaient  le  grand-prêtre.   Cf.   Josèphe,  Ant. 
jud.,  XX,  i,  3;  ix,  7.  Jusqu'à  l'an  36,  le  procurateur 
garda,  dans   la   citadelle    Amonia,  les   ornements   du 
gr.md-prêtre,  ne  les  remettant  au  titulaire  qu'aux  trois 
grandes  fêtes  et  au  jour  de  l'Expiation.  Vitellius  en  ren- 
dit alors  aux  Juifs  le  libre  usage,  que  le  procurateur 
Cuspius  Fadus  chercha  en  vain  à  restreindre  de  nou- 
veau en  44.  Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XVIII,  i\.  3:  XX. 
i,  1,  2.  Les  Romains  s'en  emparèrent  définitivement  à 
la  prise  de  Jérusalem.  Cf.  Josèphe,  Bell.  jud..  VI,  vm, 
3.  A  l'époque  des  grandes  fêtes,  qui  attiraient  à  Jérusa- 
lem une  population  nombreuse  et  très  remuante,  le 
procurateur  quittait  sa  résidence  ordinaire  de  Césarée 
pour  venir  dans  la  capitale  juive,  afin  de   parer  a  tout 
événement  imprévu.  Il  habitait  alors  soit  la  citadelle 
Antonia,    soit   l'ancien   palais    d'Hérode.    Cf.    Josèphe, 
Bell,  jud.,  II,  xiv,  8;  xv,  5.  La  garnison  de  Jérusalem 
se  composait  habituellement  d'une  cohorte.   Voir  t.  il. 
col.   S-J7.   Celle-ci   était   commandée   par  un  y/i.i<xpyoz, 
tribunus.  Act.,  xxi,  31;  xxn.  24;  xxm,  10,  15;  xxiv,  7, 
22.  Josèphe,  Bell,  jud.,  V,  v,  8.  parle   d'un  Tïyna  de 
Romains  en  garnison  à  l' Antonia;  mais  pour  lui,  cf.  Ant. 
jud.,  XX,   vi,   1;   Bell,  jud.,  II,  xii,  5,  le  rctypia  est  la 
oTtet'p»),  la  cohorte,  cf.  Act..  xxi.  31,  et  non  la  légion. 
La   cohorte  romaine  prétait  main   forte  aux  autorités 
juives  dans  certains  cas.    Elle  fournit  les  soldats  qui 
prirent  part  a  l'arrestation  du  Sauveur,  Joa..  xvm.  3, 
et  à  son  crucifiement,  Joa.,  xix,  23,  21.  sous  la  conduite 
d'un  ï/.x-.'yi-.x-, /',:.  centurio.  Matth.',  xxvii,  51  ;  Marc. 
sv,  39;  Luc,  xxm.  i7.  La  garde,  xouormSîa,  rustodia, 
a  pus  lée  au  sépulcre,  Matth  ,  xxvii,  65,  se  composai!  aussi 
de  soldats  romains,  comme  le  prouve  ce  qui  se  passa 
après  la  résurrection.  Matth.,  xxvm,  li.  De  l'Antonia, 
deui  escaliers  donnaient  accus  d.-ms  le  Temple  et  per- 
mettaienl  d'j  l'aire  pénétrer  îles  soldais  en  cas  de  trou- 
bles. Aux  jours  de  fête,   dus   postes  étaient  établis  sous 
les   portiques   qui    entouraient   le    parvis   des    gentils. 
i:r.  Josèphe  Ant.  jud.,  XX.  v,  3;  vm,  il;  /;,//.  jud.,  II, 
xii,  1  :  Y.  v,  8.  Le  tribun  de  la  cohorte  intervenait  pour 
maintenir  l'ordre.  Act.,  xxi.  31-40;  xxm,  10,  et  il  expé- 
diait des  détachements  composés  de  piétons  et  de  ca- 
valiers, pour  conduire  des  prisonniers  jusqu'à  Ces 
Act.,  xxm,  23,  24.  Le  centurion  qui  conduisait  des  pri- 
sonniers  'lue   par   mer,   en    était    responsable.   Act., 

xxvii,  42-43,  H.  Lesêtre. 


505 


POLITARQUE 


POLITESSE 


506 


POLITARQUE  (grec  :  noViTap-//,;;  Vulgate  .  princeps 
civitatis),  nom  local  des  chefs  de  la  ville  de  Thessalo- 
nique.  Act.,  XVII,  6,  8.  On  a  retrouvé  un  certain  nombre 
de  leurs  inscriptions.  Voir  Vigouroux,  Le  Nouveau 
Testament  et  les  découvertes  archéologiques  modernes, 
2e  édit.,  p.  237-256.  Leur  nombre  parait  avoir  varié 
selon  les  époques.  Une  inscription  en  mentionne  deux, 
une  autre  six,  une  autre  sept,  etc.  On  trouve  des  poli- 
tarques  dans  d'autres  villes  de  la  Macédoine.  Quand 
saint  Paul  prêcha  l'Évangile  à  Thessalonique,  les  Juifs 
irrité-;  voulurent  s'emparer  de  sa  personne  et,  ne  l'ayant 
pas  trouvé,  ils  traînèrent  Jason  chez  qui  il  logeait 
devant  les  politarques;  ceux-ci  ne  laissèrent  en  liberté 
Jason  et  les  frères  qu'on  avait  arrêtés  avec  lui  que 
contre  caution.  Act.,  xvn.  1-9. 

POLITESSE,  ensemble  d'usages  qui  président  aux 
bonnes  relations  des  hommes  entre  eux.  —  Ces  usages 
varient  suivant  les  pays  et  suivant  les  temps;  mais  la 
dignité  extérieure  a  toujours  été  en  grande  estime  chez 
les  Orientaux,  ce  qui  fait  que  parmi  eux,  même 
l'homme  du  peuple,  le  pauvre,  le  nomade,  ne  sont 
jamais  vulgaires.  Les  Israélites  avaient  des  règles  de 
politesse  auxquelles  la  Sainte  Écriture  fait  assez  sou- 
vent allusion. 

Ie  En  se  rencontrant,  on  échangeait  des  salutations 
très  expressives  et  parfois  très  cérémonieuses.  Voir 
Salutation.  En  certaines  circonstances,  on  donnait  un 
baiser.  Voir  Baiser,  t.  i,  col.  1388.  On  voit  Joab  saisir 
de  la  main  droite  la  barbe  d'Amasa  pour  le  baiser. 
II  Reg.,  xx,  9.  Pour  inarquer  un  plus  grand  respect, 
on  se  prosternait,  voir  Adoration,  t.  i,  col.  233,  et 
Prosternemknt.  A  la  rencontre  d'un  supérieur,  celui 
qui  était  sur  sa  monture  en  descendait  et  se  proster- 
nait. I  Reg.,  xxv,  23. 

2»  L'inférieur  donnait  à  son  supérieur  le  nom  de 
seigneur  et  lui-même  se  déclarait  son  esclave,  Gen., 
xviii,  3;  xix,  2;  xxxm,  14;  Jud.,  xix,  19;  I  Reg.,  xxvi, 
18,  etc.  ;  il  parlait  de  lui  à  la  troisième  personne.  Gen., 
xliv,  18.  19,  etc.  Une  femme  prenait  aussi  le  nom 
d'esclave  devant  son  supérieur.  I  Reg.,  i,  Iti;  xxv.  24; 
IV  Reg.,  iv,  2,  16,  etc.,  cependant  même  un  serviteur 
pouvait  parler  à  sa  maîtresse  sans  qu'aucun  terme  spé- 
cial de  respect  fût  mentionné.  I  Reg  ,  xxv.  li,  17. 

3°  On  avait  des  égards  particuliers  pour  les  vieillards. 
La  loi  faisait  une  obligation  de  se  lever  devant  eux. 
Lev.,  xix,  32.  Le  jeune  homme  devait  garder  une  atti- 
tude modeste  et  réservée  : 

Parle,  jeune  homme,  s'il  y  a  utilité  pour  toi, 

A  peine  deux  fois,  si  l'on  t'interroge. 

Abrège  ton  discours,  dis  beaucoup  en  peu  de  mots. 

Sois  comme  quelqu'un  qui  a  la  science  et  sail  se  taire. 

Au  milieu  des  grands,  ne  te  fais  pas  leur  égal. 

Et,  où  il  y  a  des  vieillards,  sois  sobre  de  paroles... 

L'heure  venue,  lève-toi  sans  tarder. 

Eccli.,  xxxii.  7-10. 

4°  Quand  on  allait  chez  quelqu'un,  on  commençait 
par  se  tenir  hors  de  la  maison,  et,  si  l'on  arrivait  chez 
un  grand  personnage,  on  se  faisait  annoncer.  III  Reg., 
1,  23.  Il  eût  été  impoli  d'entrer  rapidement  dans  la 
maison,  de  se  courber  à  l'entrée  pour  voir  à  l'intérieur 
et  d'écouter  à  la  porte.  Eccli.,  xxi,  25-27.  Voir  Visite. 
Les  visites  comportaient  différentes  attentions  mu- 
tuelles. Le  nouvel  arrivant  pouvait  apporter  des  pré- 
sents, voir  Présent;  son  hôte  lui  donnait  le  baiser, 
lui  lavait  les  pieds,  voir  Lavement  des  pieds,  t.  iv, 
eol.  132,  et  le  parfumait.  Voir  Onction,  t.  iv,  col.  1810; 
Parfum,  col.  2163.  S'il  y  avait  quelque  festin  ou  quelques 
autres  réjouissances,  il  fallait  éviter  de  s'attribuer  la 
première  place,  voir  Première  place,  et  ensuite  prendre 
soin  de  se  comporter  convenablement.  Voir  Festin, 
t.  III,  col.  2212;  Repas.   Quand   le  visiteur  venait  de 


loin,  le  devoir  de  l'hospitalité   s'imposait  envers  lui. 
Voir  Hospitalité,  t.  m,  col  760. 

50  La  conversation  était  fort  dans  le  goût  des  Israé- 
lites, comme  de  tous  les  Orientaux.  Job,  xxix,  9-11,  etc. 
Hais  elle  devait  respecter  la  convenance  des  assistants. 
Aussi  était-il  dit  à  l'adresse  du  vieillard  qui  assistait  à 
un  repas,  Eccli.,  xxxn,  3-4  : 

Parle,  vieillard,  avec  justesse  et  doctrine,  c'est  ton  rôle, 
M. lis  sans  faire  obstacle  à  la  musique. 
Lorsqu'on  (l')écoute,  ne  te  répands  pas  en  paroles, 
Et  n'étale  pas  ta  sagesse  à  contre-temps. 

Il  y  a  en  effet  «  un  temps  pour  se  taire  et  un  temps 
pour  parler.  »  Eccle.,  m,  7.  Fleury.  Mœurs  des  Israé- 
lites,  I,  xn,  fait  les  remarques  suivantes  au  sujet  du 
langage  des  Hébreux  :  «  Ils  usaient  volontiers,  dans  leurs 
discours,  d'allégories  et  d'énigmes  ingénieuses.  Leur 
langage  était  modeste  et  conforme  à  la  pudeur,  mais 
d'une  manière  différente  de  la  nôtre  :  ils  disaient  l'eau 
des  pieds  pour  dire  l'urine;  couvrir  les  pieds,  pour  sa- 
tisfaire aux  autres  besoins,  parce  qu'en  cette  action,  ils 
se  couvraient  de  leurs  manteaux,  après  avoir  creusé  la 
terre,  Deut.,  xxm,  14;  ils  nommaient  la  cuisse  pour  les 
parties  voisines   que    la  pudeur  défend    de  nommer. 
D'ailleurs,  ils  ont  des  expressions  qui  nous  paraissent 
fort  dures,  quand  ils  parlent  de  la  conception  et  de  la 
naissance  des  enfants,  de  la  fécondité  et  de  la  stérilité 
des  femmes;  et  ils  nomment  sans  façon  certaines  infir- 
mités secrètes  de  l'un  et  l'autre  sexe,  que  nous  enve- 
loppons par  des  circonlocutions  éloignées.  Toutes  ces 
différences  ne  viennent  que  de  la  distance  des  temps  et 
des  lieux.  La  plupart  des  mots  qui  sont  déshonnétes, 
suivant  l'usage  présent  de  notre  langue,  étaient  hon- 
nêtes autrefois,  parce  qu'ils  donnaient  d'autres  idées... 
Les  livres  de  l'Écriture  parlent  plus  librement  que  nous 
ne  ferions  de  ce  qui  regarde   le   matériel  du  mariage, 
parce  qu'il  n'y  avait  personne  parmi  les  Israélites  qui 
y  renonçât,    et  que   ceux   qui   écrivaient   étaient   des 
hommes  graves  et  des  vieillards  pour  l'ordinaire.  »  Les 
récits  que   font  parfois  les  historiens  sacrés  et  le  lan- 
gage que  tiennent  certains  prophètes  ne  doivent  donc 
pas  étonner.  Ils  n'accusent  nullement  un   manque   de 
savoir-vivre  et  de  délicatesse;  ils  portent  seulement  la 
marque  d'un  temps  et  d'un  pays  où  les  choses  ne  s'ap- 
préciaient pas  comme  dans  les  nôtres,  où  la  grâce  de 
l'Évangile  n'avait  pas  encore  fait  sentir  son  intluence  et 
où  la  politesse  ignorait  ceu-tains  raffinements  dont  des 
civilisations  plus   avancées  couvrent   leurs    vices.    La 
simplicité  des  mœurs  autorisait  d'ailleurs  celle  du  lan- 
gage en  bien  des  circonslances.  —   Il  était  considéré 
comme  malséant  de  rire  bruyamment.  Eccli.,  xxi,  23. 
6°  Dans  l'Évangile,  on  rencontre  un  bon  nombre  de 
formules  de  politesse  très  simples,  mais  d'autant  plus 
expressives  que  souvent  les  interlocuteurs  s'adressent 
l'un  à  l'autre  sans  se  donner  aucune  appellation  spé- 
ciale. Ceux  qui  parlent   au   Sauveur  lui  disent  ordi- 
nairement «  Seigneur  »,  Matth.,  vin,  6,8,  25;  ix,  28; 
xv,  22;  Luc,  v,  8,  12;  Joa.,  iv,  49;  v,  7;xi,  21,  27,  etc., 
ou  ■•  Maître,  Rabbi,  Rabboni  ».  Matth.,  xxn,  16;  xxvi, 
49;  Marc,  iv,  38;  ix,  16:  x.  51;  Luc,  vu,  40;  vm,  24; 
x,  25;  xvn,  13;  xvm,  18;  xix,  39;  Joa.,  vin,  4;   ix.  2; 
xi,  8,  etc.  Lui-même,  suivant  les  personnes  auxquelles 
il  s'adresse,  dit  «  mon  fils  »,  Matth.,  ix,  2;   Marc,  II, 
5;  «  homme  »,  Luc,  v,  20;    «  jeune  homme    »,  Luc, 
vu,  14;  «  femme  »,  Matth.,  xv,  28;  Luc,  xni,  12;  Joa., 
vm,  10,  même  quand  il  parle  à   sa  mère,  Joa.,  n,  4; 
xix,  26;  »  ma  fille.   »  .Marc,  v,  3i;  Luc,  vm,  48.    Par- 
fois, il  interpelle  directement  quelqu'un  par  son  nom. 
Matth.,  xvn,  24;  Luc,   vu,  10;  x,  11;  xix,  5;  Joa.,  xiv, 
9;  xxi,  15,   17.    Dans  les  paraboles,    le  fils  dit  «   mon 
père  »,  Matth.,  xxi,  28;   Luc,  xv,  12,  21;  le  père  dit 
«  mon  fils  »,  Luc,  xv,  31;  le  serviteur  dit  à  son  maître 
«  seigneur  ».  Matth.,   xxv,  20;  Luc,   xm,  8;   xiv,  22; 


507 


POLITESSE 


POLYGAMIE 


508 


xix,  16,  25.  etc.  On  dit  «  ami  »  même  à  des  hommes 
répréhensibles  ou  méchants.  Matth.,  xx,  13;  xxn,  12; 
xxvi,  50;  Luc,  xiv,  10.  Abraham  dit  même  «  mon  fils  » 
au  mauvais  riche  de  l'enfer.  Luc,  xvi,  25.  La  femme 
qui  pousse  une  acclamation  au  milieu  d'un  discours  de 
Notre-Seigneur,  Luc,  xi,  27,  fait  preuve  à  son  égard 
d'une  courtoisie  très  délicate.  Le  Sauveur  veut  que  ses 
disciples,  en  entrant  dans  une  maison,  y  souhaitent  la 
paix,  Matth..  x.  12;  Luc,  x,  5,  et,  quand  on  a  à  répri- 
mander quoiqu'un,  il  recommande  de  le  faire  tout 
d'abord  seul  à  seul.  Matth.,  xvm,  15.  Le  convive  malap- 
pris auquel  le  maître  dit  sèchement  :  «  Cède  la  place 
à  cet  autre,  »  Luc,  xiv,  9.  a  bien  mérité  cette  leçon  de 
politesse.  —  Après  sa  résurrection,  Notre-Seigneur 
salue  gracieusement  ceux  auxquels  il  se  montre,  Matth.. 
xxvm"  9;  Luc.  xxiv,  36;  Joa.,  xx,  21,  26,  et  il  appelle 
ses  Apôtres  «  enfants  ».  Joa.,  xxi,  5. 

7°  Saint  Paul  réprouve  la  vaine  politesse;  il  prescrit 
aux  chrétiens  d'avoir  «  une  charité  sans  hypocrisie  o, 
par  conséquent,  une  politesse  extérieure  qui  s'inspire 
des  sentiments  d'une  charité  sincère,  et  il  veut  qu'ils 
soient  remplis  d'affection  les  uns  pour  les  autres,  se 
«  prévenant  d'honneur  les  uns  les  autres  ».  Rom.,  Xil, 
9,  10.  Il  rappelle  à  Timothée  qu'il  doit  avoir  des  égards 
pour  tous  et  de  l'honneur  pour  les  vraies  veuves. 
I  Tini..  v.  1.3.  H.  Lesétre. 

POLONAISES  (VERSIONS)  DELA  BIBLE.  Voir 

Slave.--  (Versions)  de  la  Bible. 

POLYCARPE,  cborévèque  syrien  jacobite,  du  v«  au 
VIe  siècle.  Philoxène,  évèque  de  Mabboug,  le  chargea, 
en  l'an  508,  de  traduire  toute  la  Bible  du  grec  en  sy- 
riaque. Cette  version  est  appelée  philoxénienne  et  il 
n'en  reste  que  des  fragments.  La  version  philoxé- 
nienne du  Nouveau  Testament  lut  corrigée  par  Thomas 
d'Harkel  (ou  d'Héraclée)  et  constitua  ainsi  la  revision 
héracléenne  dont  nous  possédons  encore  de  nombreux 
manuscrits.  Il  n'est  pas  facile,  a  l'aide  de  la  revision 
héracléenne.  de  reconstituer  la  traduction  faite  par 
Polycarpe,  car  les  astérisques  et  les  obèles  qu'elle 
porte  peuvent  avoir  déjà  été  introduits  par  Polycarpe 
lui-même,  comme  l'a  montré  M.  D.  Gottlob  Christian 
Storr.  C'est  donc  à  tort  sans  doute  que  MM.  Wetstein 
et  White  croyaient  pouvoir  formuler  la  règle  suivante  : 
«  Lorsque  Thomas  a  trouvé  dans  ses  manuscrits  grecs 
des  choses  différentes  de  celles  qui  étaient  dans  la  ver- 
sion de  Polycarpe,  il  les  a  écrites  en  marge  ;  il  a  marqué 
d'un  obèle  les  mois  qui  manquaient  dans  ses  manus- 
crits, et  il  a  introduit  dans  le  texte,  en  les  marquant 
d'une  astérisque,  les  mots  qui  manquaient  dans  la  tra- 
duction philoxénienne  >■,  Repertorium  fur  Biblisclte 
und  Morgenlàndische  Litteratur,  Leipzig,  1780,  t.  vu, 
p.  48-74.  Cf.  Rubens-Duval,  La  littérature  syriaque, 
3°  édition,  p.  50.  F.  N\r. 

POLYCHRONIUS,  écrivain  ecclésiastique  du 
v  siècle.  Tout  ce  que  Ton  connaît  de  la  vie  de  cet 
exégète  lient  dans  le  maigre  renseignement  fourni  par 
Théodoret,  //.  E  .  v,  30.  t.  i.xxxii,  col.  1277.  L'histoire 
nous  apprend  que  Polychronius  était  le  frère  cadet  du 
fameux  Théodore  de  Mopsueste,  et  qu'en  428,  il  occu- 
pait le  siège  d'Apamée  en  Syrie,  qu'il  illustra  par  son 
éloquence  et  l'éclat  de  ses  vertus.  Il  ne  semble  pas 
qu'il  ait  survécu  longtemps  à  son  frère,  mort  Yn  428, 
car,  au  concile  d'Éphèse,  ce  n'est  plus  son  nom  qui 
ligure  comme  titulaire  d'Apamée.  Un  a  cru  pouvoir 
appliquer  m  l'évéque  d'Apamée  les  nombreux  détails 
que  Théodoret,  Religiosa  historia,  xxiv,  t.  i.xxxii, 
col.  1457-1464,  rapporte  d'un  saint  ermite  du  nom  de 
Polychronius.  Mais  il  n'y  a  nulle  identité  enliv  ces 
deux  personnages  qui  doivent  demeurer  distincts.  C'esl 
sur  l'exégèse  île  l'Ancien  Testament  que  s'est  portée 


toute  l'activité  littéraire  de  Polychronius,  et  lui  aussi 
est  un  des  principaux  compilateurs  de  Chaînes.  Voici 
l'indication  de  ses  œuvres  aujourd'hui  connues.  — 
1°  Scolies  sur  le  livre  de  Job.  Elles  furent  publiées 
d'abord  sous  le  nom  d'Olympiodore,  diacre  d'Alexan- 
drie, en  traduction  latine,  par  Paul  Coinitolus,  S.  J., 
a  Lyon,  en  1586;  l'année  suivante,  en  1587,  une  seconde 
édition  parut  à  Venise,  avec  deux  additions.  Le  texte 
grec  fut  édité  à  Londres  en  1637  par  Patrice  .lunius, 
et  c'est  cette  dernière  édition  que  Migne  a  reproduite. 
l'atr.  G>-.,  t.  xciii.  col.  13-470.  —  2°  On  trouve,  dans  la 
seconde  édition  des  Scolies  sur  Job.  celle  de  Venise,  1587, 
le  prologue  d'un  commentaire  sur  le  livre  de  Job.  En 
1738,  D.  0.  Wahrendorf  en  publie  le  texte  grec  origi- 
nal, dans  ses  Meditationes  de  resurrectione  pra 
tim  Jobi,  Grôttingen.  —  3"  La  même  édition  de  Venise 
dont  nous  avons  parlé,  donne  aussi  en  latin,  p.  38-38, 
un  petit  traité  sur  les  causes  de  l'obscurité  de  l'Écri- 
ture Ti  èttiv  r,  iii^=ia  -r,;  Ppavpij;.  Toutefois,  on  pos- 
sédait depuis  longtemps  le  texte  grec  de  ce  fragment 
dans  les  Questions  ù  Amphiloque  de  Pbotius,  Quiest., 
CLH,  t.  ci,  col.  815-816.  —  4»  Des  Scolies  sur  le  livre 
de  Daniel  ont  été  découvertes  et  publiées  par  le  cardinal 
Mai,  Scriptorutn  velerum  nora  colteclio,  t.  i,  part.  2, 
Rome,  1825,  p.  105-160.  Le  savant  éditeur  accompagne 
le  texte  grec  d'une  version  latine.  Toutefois,  celle-ci, 
ainsi  que  bon  nombre  de  notes,  a  été  supprimée  dans 
la  seconde  publication  que  le  cardinal  Mai  lit  de  ce 
travail  de  Polychronius  dans  Scriptorutn  veterum  nora 
collectio,  t.  i,  part.  3,  p.  1-27.  —  5°  F.nlin  des  Scolies  sur 
Ezéchiel  ont  été  également  trouvées  et  éditées  par  Mai 
danssaA'ova  Patrum  Bibliotheca,  t.  vu,  part.  2,  Borne, 
1854,  p.  92-1-27.  Au  tome  clxh  de  la  l'atrologie  grecque, 
Migne  a  repris  les  éditions  des  Scolies  'sur  Daniel  et 
Ezéchiel  faites  par  Mai.  En  1617,  .1.  Meuvsius  publia  à 
Leyde  son  Ettselni,  Polychronii,  l'st'lli  in  Canlicum 
Canticorum  expositiones  grsecœ.  Ces  commentaires 
sur  le  Cantique  des  Cantiques  ne  sont  pas  de  l'évéque 
d'Apamée,  comme  l'a  démontré  O.  Bardenhewer,  Po- 
lychronius, Bruder  Theodors  ion  Mopsuestia  und 
Bischof  von  Apamea.  Ein  Beilrag  zur  Geschichle  der 
Exégèse,  Fribourg-en-Brisgan,  1879.  M.  Bardenhewer, 
dans  le  même  travail,  défend  aussi  Polychronius, 
contre  toute  suspicion  de  nestorianisme.  qui  du  reste 
ne  repose  que  sur  le  fait  de  sa  parenté  avec  Théo- 
dore de  Mopsueste.  Alors  que  celui-ci,  par  exemple, 
mettait  en  doute  le  caractère  canonique  du  livre  de  Job, 
Polychronius,  au  contraire,  insiste  sur  la  canonicitéde 
celte  partie  de  l'Ecriture  Sainte.  Polychronius  se  révèle 
comme  un  des  plu?  grands  exégètes  de  la  célèbre  école 
d'Antioche,  dont  il  pratique  tous  les  principes.  11  s'at- 
tache surtout  à  épuiser  l'explication  du  texte  qu'il  a 
sous  les  yeux  et  à  l'occasion  il  s'élève  fortement  contre 
la  méthode  allégorique  d'Origène. 

.1.  Van  iikn  Gheyn, 

POLYGAMIE,  mariage  d'un  seul  homme  avec  plu- 
sieurs femmes  à  la  fois. 

I.  A  L'ÉPOQUE  patriarcale.  —  I  '  Du  récit  de  la  créa- 
lion  du  premier  homme  et  de  la  première  femme  ressort 
nettement  celte  idée  que,  dans  l'intention  du  Créateur, 
l'union  constitutive  de  la  famille  doit  exister  entre  un 
seul  homme  et  une  seule  femme.  Gen.,  II,  21-21.  La 
suite  du  récil  ne  suppose  toujours  qu'une  seule  femme 
.1  \d.im.  Gen.,  rv,  25.  Dans  la  postérité  de  Caïn,  le 
cinquième  patriarche.  Lantech,  est  noté  comme  avant 
pris  deux  femmes,  Ada  et  Sella.  Gen.,  IV,  19.  Le  fait 
est  enregistré-  comme  digne  de  remarque.  H  introduit 
en  effet  une  modification  notable  dans  la  constitution 
de  la  famille  humaine.  Rien  ne  laisse  supposer  que 
Lantech  ait  été  autorisé  a  agir  ainsi  ;  il  n'est  pas  blài  té, 
sans  doute,  mais  il  suffit  que  l'usage  s'introduise  par 
un  descendant  de  Caïn  pour  qu'il  soit  suspect.  Les 
autres  patriarches  vies  deux  lignées  de  Caïn  et  de  Seth 


509 


POLYGAMIE 


510 


paraissent  n'avoir  eu  qu'une  seule  femme.  La  chose 
n'est  pourtant  dite  assez  clairement  que  pour  Noé. 
lien.,  vin,  18.  —  Avec  Abraham,  la  polygamie  appa- 
raît comme  chose  normale.  Le  patriarche  a  une  pre- 
mière femme.  Sara.  Gen.,  xn,  5.  Comme  celle-ci  ne 
lui  donne  pas  d'enfant,  il  prend  une  seconde  femme, 
Agar.  Gen.,  xvi,  1.  Il  faut  remarquer  toutefois  que  cette 
dernière  n'a  pas  la  même  situation  que  Sara.  C'est 
une  épouse  de  rang  inférieur,  une  de  celles  que  l'on 
appelle  concubines  dans  un  sens  particulier  à  la 
Sainte  Écriture,  c'est-à-dire  des  femmes  légitimes, 
mais  de  second  rang,  et  quelquefois  des  esclaves  que 
le  mari  prend  ou  reçoit  quand  la  première  femme  est 
stérile.  Ce  fut  le  cas  pour  Abraham.  Le  patriarche 
épouse  Cétura.  après  la  mort  de  Sara.  Gen.,  xxv,  1,  et 
il  est  ensuite  fait  mention  de  concubines.  Gen.,  xxv,6. 
11  n'est  question  que  de  Rébecca  pour  Isaac.  Gen.,  xxiv, 
51.  En  principe,  semble-t-il,  Jacob  ne  pense  qu'à  Rachel. 
Lia  est  substituée  frauduleusement  à  la  première,  et, 
comme  Jacob  ne  veut  pas  renoncer  à  l'épouse  de  son 
choix,  il  se  trouve  en  avoir  deux.  Or  Rachel  est  d'abord 
stérile.  Elle  fait  agréer  par  le  patriarche  Râla,  son 
esclave;  puis  Lia,  de  son  côté,  agit  de  même  et  pré- 
sente à  Jacob  son  esclave  Zelpha.  Gen.,  xxix,  25,  29; 
xxx.  2,  9.  Ésati  a  trois  femmes.  Gen.,  xxxvi.  1.  2.  Il 
n'est  plus  parlé  de  plusieurs  femmes  à  l'occasion  des 
personnages  bibliques  jusqu'à  Moïse,  soit  qu'en  elïet 
ils  n'en  ai«nt  pris  qu'une,  soit  que  les  auteurs  sacrés 
n'aient  eu  ni  occasion  ni  motif  pour  mentionner  une 
circonstance,  qui  paraissait  toute  naturelle.  On  voit 
en  effet  que  Rachel  considère  Rata  comme  une  autre 
elle-même  auprès  de  Jacob.  «  Qu'elle  enfante  sur  mes 
genoux,  dit-elle,  et  par  elle  j'aurai,  moi  aussi,  une 
famille.  »  Quand  Bala  a  enfanté,  Rachel  s'en  félicite 
en  disant  :  «  Dieu  m'a  rendu  justice,  et  même  il  a 
entendu  ma  voix  et  m'a  donné  un  fils.  »  Elle  ajoute, 
après  la  naissance  du  second  enfant  de  Bala  :  «  J'ai 
lutté  auprès  de  Dieu  à  rencontre  de  ma  sœur  et  je  l'ai 
emporté.  »  Gen.,  xxx,  3-8.  Comme  Bala  appartient  à 
Rachel,  les  enfants  de  Bala  sont  regardés  comme  lui 
appartenant  aussi.  De  fait,  on  ne  voit  aucune  différence 
de  traitement  entre  les  douze  fils  de  Jacob:  enfants  des 
deux  femmes  libres,  enfants  des  deux  esclaves,  tous 
sont  au  même  titre  enfants  de  Jacob. 

2'  L'attribution  à  Lamech  du  premier  exemple  de 
polygamie  et  l'absence  totale  de  scrupule  qui  caracté- 
rise les  multiples  unions  d'Abraham,  indiquent  assez 
qu'à  l'époque  du  patriarche  la  tolérance  de  la  polyga- 
mie était  tout  à  fait  entrée  dans  les  mœurs.  De  fait,  le 
code  d  Hammourabi,  art.  14H46,  voir  t.  iv,  col.  336, 
prévoit,  à  coté  de  l'épouse  de  premier  rang,  l'exis- 
tence légale  d'une  concubine  ou  d'une  esclave  présentée 
au  mari  par  l'épouse.  Les  rois  babyloniens  avaient 
dans  leurs  harems  de  nombreuses  femmes  de  condi- 
tion variée.  Dans  la  classe  bourgeoise  et  dans  le  peu- 
ple, le  nombre  des  épouses  dépendait  des  ressources 
du  mari.  Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  741- 
742.  Il  en  était  de  même  en  Egypte.  Le  pharaon  possé- 
dait de  nombreuses  femmes,  filles  de  grands  seigneurs 
ou  de  hauts  fonctionnaires,  ou  étrangères,  filles  de  pe- 
tits princes  des  pays  soumis  à  l'Egypte,  venues  à  la 
cour  en  qualité  d'otages.  La  plupart  de  ces  femmes  de- 
meuraient simples  concubines,  quelques-unes  pre- 
naient rang  d'épouses  royales,  et  une  au  moins  recevait 
le  titre  de  grande  épouse  ou  de  reine.  Cf.  Maspero, 
Histoire  ancienne,  t.  i.  p.  270.  Les  seigneurs  possédaient 
aussi  leur  harem,  proportionné  à  leur  situation  de 
fortune;  les  hommes  de  moindre  condition  constituaient 
i.  ur  famille  selon  leurs  moyens.  Ce  que  l'on  sait  des 
Babyloniens,  des  Égyptiens,  et  plus  tard  des  Perses, 
cf.  Hérodote,  i,  135,  donne  l'idée  de  ce  qu'était  la 
polygamie  des  anciens  temps.  Le  nombre  des  femmes 
était  le  signe  d'un  luxe  proportionnel   aux  ressources 


des  riches  et  des  puissants.  Comme  d'autre  part  on 
estimait  à  très  haut  prix  l'avantage  d'une  descendance 
multiple  et  assurée,  on  faisait  normalement  appel  à 
une  seconde  femme  quand  la  première  n'avait  pas 
donné  d'enfants.  Abraham  et  Jacob  ne  firent  donc  que 
se  conformer  aux  usages  de  leur  temps  et  de  leur  pays, 
Jacob  avec  moins  de  réserve  que  son  grand-père,  il  est 
vrai,  mais  sous  la  pression  de  circonstances  indépen- 
dantes de  sa  volonté. 

II.  Chez  les  Israélites.  —  1»  La  législation  mo- 
saïque. —  1.  Les  traditions  reçues  des  ancêtres  chaldéens 
sur  l'usage  de  la  polygamie  et  le  spectacle  de  ce  que  les 
Hébreux  eurent  devant  les  yeux,  sous  ce  rapport,  en 
Egypte,  ne  permettaient  pas  à  Moïse  de  passer  la  ques- 
tion sous  silence.  La  loi  mosaïque  n'approuve  ni  ne 
blâme  la  polygamie;  elle  tend  seulement  à  la  ramener 
à  la  bigamie,  telle  que  la  prévoyait  le  code  babylonien. 
Elle  examine  le  cas  où  un  homme  a  donné  à  son  fils  une 
esclave  israélite  pour  épouse;  si  le  lils  prend  une  autre 
épouse,  il  doit  cependant  garder  la  première  et  ne  rien 
lui  ôter  de  ce  qui  lui  est  du  pour  la  nourriture,  le  vê- 
tement et  l'habitation.  Exod.,  xxi,  9,  10.  Des  entraves 
considérables  sont  ensuite  apportées  à  la  pratique  de 
la  polygamie.  Les  rapports  sexuels  entraînent  une 
impureté  légale  qui  nécessite  des  ablutions  et  met,  pour 
ainsi  dire,  hors  de  la  société  jusqu'au  soir.  Lev.,  xv,  18. 
On  ne  peut  prendre  pour  seconde  épouse  la  sœur  de 
sa  femme.  Lev.,  xvm,  18.  Les  eunuques  ne  sont  pas 
admis  dans  la  société  israélite,  Deut.,  xxm.  1,  et  sans 
eux  la  tenue  d'un  harem  est  pratiquement  impossible. 
La  loi  prévoit  qu'un  homme  puisse  avoir  deux  femmes. 
Deut.,  xxi,  15.  Elle  n'indique  pas  dans  quelles  condi- 
tions. Le  code  babylonien  est  plus  précis  et  plus  res- 
trictif. Il  règle  que  celui  auquel  son  épouse  n'a  pas 
donné  d'enfants  peut  prendre  une  concubine;  mais  celui- 
ci  n'en  peut  prendre  une  seconde,  s'il  a  déjà  reçu  de  sa 
femme  une  esclave  dont  il  a  eu  des  enfants.  Art.  144, 
145,  t.  iv,  col.  336.. Le  cas  d'Abraham  est,  dans  le  prin- 
cipe, conforme  à  cette  législation;  il  ne  prend  Agar 
qu'à  cause  de  la  stérilité  de  Sara.  Le  cas  de  Jacob 
n'est  pas  conforme  à  la  littéralité  du  code  babylonien; 
car  le  patriarche  a  déjà  des  enfants  de  Lia,  quand  il 
s'unit  à  l'esclave  Zelpha,  sans  parler  de  ses  deux  autres 
unions.  Les  rois  s'autorisaient  de  leur  situation  pour 
s'accorder  de  nombreuses  épouses.  Le  législateur 
hébreu  songe  à  ce  qui  pourra  un  jour  se  passer  en 
Israël,  et  il  recommande  expressément  au  roi  futur 
de  ne  pas  prendre  un  grand  nombre  de  femmes, 
de  peur  que  son  cœur  ne  se  détourne  de  Dieu. 
Deut.,  xvn,  17.  —  2.  Les  concessions  faites  par  la  loi 
mosaïque  furent  considérées  plus  tard  comme  un  pis- 
aller.  Dans  plusieurs  passages,  Prov.,  v,  18,  19;  xn, 
4;  xix,  14;  xxxi,  10-31;  Ps.  ç.xxvin  (cxxvn),  3; 
Eccli.,  xxvi,  1-4,  les  auteurs  sacrés  semblent  supposer 
la  présence  d'une  seule  femme  au  foyer  domestique. 
Cependant  on  ne  peut  tirer  de  leurs  paroles  une  con- 
clusion rigoureuse,  à  cause  de  l'étroite  subordination 
dans  laquelle  vivaient  l'esclave  ou  la  concubine  et  leurs 
enfants  vis-à-vis  de  l'épouse  principale.  Les  prophètes 
envisagent  aussi  sous  la  figure  d'une  union  conjugale 
les  rapports  de  Dieu  avec  son  peuple  choisi.  Voir  Ma- 
riage, t.  îv,  col.  769.  Ce  symbolisme  n'avait  de  sens 
qu'autant  que  la  monogamie  était  la  règle  du  mariage. 
Mais  il  n'y  a  là  encore  qu'une  improbation  lointaine  de 
la  polygamie.  Ce  sont  les  mœurs  qui  peu  à  peu  réagirent 
contre  l'usage  toléré  par  la  loi. 

2°  La  coutume  israélite.  —  1.  On  ne  peut  pas  in- 
terpréter de  la  polygamie  ce  qui  est  dit  des  lils  d'Issa- 
char.  I  Par.,  vu,  4.  Mais  Saharaïm,  de  la  tribu  de 
Benjamin,  eut  d'abord  deux  femmes  moabites  qu'il 
renvoya,  puisune  troisième. I  Par.,vm,7,  8.  A  l'époque 
des  Juges,  la  polygamie  est  pratiquée  sans  mesure  par 
certains   personnages  que  les  événements  mettent  en 


511 


POLYGAMIE 


Ô12 


lumière,  mais  qui  devaient  vivre  comme  ceux  de  leur 
condition.  Gédéon  a  70  lils  et  beaucoup  de  femmes  et 
de  concubines.  Jud.,  vin,  30,  31.  Jaïr  a  30  fils.  ,Iud.,  x, 
4.  Abesan  a  30  fils  et  30  filles.  Jud.,  xn,  9.  Abdon  a 
40  fils.  Jud.,  xn,  14.  Elcana,  père  de  Samuel,  a  deux 
femmes  qui  paraissent  de  même  condition,  Anne  et 
Phénenna.  La  seconde  prenait  plaisir  à  aflliger  sa  rivale 
à  cause  de  sa  stérilité.  I  Reg.,  i,  2,  6.  La  situation  de 
la  famille  d'Elcana  représente  ce  qu'étaient  les  familles 
moyennes  en  Israël.  La  bigamie  y  régnait.  Peut-être 
même  Elcana  n'avait-il  pris  Pbénenna  qu'à  raison  de 
la  stérilité  d'Anne,  qu'il  préférait  à  l'autre  et  traitait  en 
conséquence.  I  Reg.,  i,  5.  De  là  des  dissentiments,  des 
jalousies  et  des  propos  amers,  conséquences  inévitables 
de  la  polygamie  déjà  constatées  dans  les  familles 
d'Abraham  et  de  Jacob.  —  2.  Sous  les  rois,  les  recom- 
mandations du  Deutéronome,  xvn,  17,  sont  interprétées 
avec  une  largeur  excessive.  A  Saiil  ne  sont  attribuées 
qu'une  femme  et  une  concubine.  II  Reg.,  m,  7.  Mais 
déjà   David    prend  Michol,    I  Reg.,  xvm,  27,  Abigaïl, 

I  Reg.,  xxv,  42,  Rethsabée,  II  Reg.,  xi,  5,  et  un  certain 
nombre  de  femmes  et  de  concubines,  II  Reg.,  xn,  8, 
en  possession  desquelles  se  met  publiquement  Absalom, 
le  jour  où  il  veut  s'emparer  de  la  royauté  paternelle. 

II  Reg.,  xvi,  21,  22.  Salomon  dépasse  toutes  les  bornes 
avec  son  innombrable  harem.  III  Reg.,  xi,  3.  Cf.  Cant., 
vi,  8-9,  Roboam  a  18  femmes  et  60  concubines;  il 
établit  ses  fils  dans  les  différentes  places  du  royaume 
et  leur  donne  beaucoup  de  femmes.  II  Par.,  xi,  21, 
23.  Abia  a  14  femmes.  II  Par.,  xm,  21.  Joram  en  a  un 
nombre  qui  n'est  pas  indiqué.  II  Par.,  xxi,  17.  Quand 
le  grand-prêtre  Joïada  veut  établir  le  jeune  roi  Joas,  il 
lui  fait  prendre  deux  femmes.  Il  Par.,  xxiv,  3.  Les 
renseignements  font  défaut  au  sujet  des  autres  rois  de 
Juda;  mais  c'est  probablement  parce  qu'ils  ont  plu- 
sieurs épouses  que  l'historien  sacré  prend  soin  de 
nommer  la  mère  de  chaque  nouveau  roi.  III  Reg.,  xxn, 
42;  IV  Reg.,  mi,  1;  xiv,  2;  xv,  2,  33;  xvm,  2;  xxi,  1, 
19;  xxn,  I  ;  xxm,  31,  36;  xxiv,  8.  Par  ce  que  l'on  sait 
des  rois  de  Juda,  on  peut  juger  de  ce  que  dut  être  la  po- 
lygamie parmi  les  rois  d'Israël.  —  3.  Après  la  captivité, 
on  ne  trouve  plus  mention  de  polygamie  chez  les  écri- 
vains sacrés.  Il  est  seulement  question  de  l'admission 
d'Esther  dans  le  harem  d'Assuérus.  Esth.,  n,  8.  A  cette 
occasion,  l'historien  fournit  de  curieux  détails  sur  le 
recrutement  et  le  fonctionnement  du  harem  royal  de 
Suse.  On  commence  par  chercher  dans  tout  l'empire 
des  jeunes  filles,  «  vierges  et  belles  de  figure  »,  qu'on 
rassemble  à  Suse.  L'eunuque  Egée  a  pour  fonction  de 
faire  un  choix,  d'enfermer  les  élues  dans  la  maison 
des  femmes,  sous  une  surveillance  rigoureuse,  et  de 
leur  assurer  des  soins  appropriés  pendant  de  longs 
mois.  Au  bout  d'un  an,  chacune  était  présentée  au  roi, 
passait  une  nuit  dans  son  palais,  puis  était  reléguée 
dans  une  seconde  maison  des  femmes,  où  elle  restait 
désormais  confinée  sous  la  garde  d'un  autre  eunuque, 
à  moins  que  le  roi  ne  la  fit  rappeler.  Esth.,  n,  2-1  i. 
Esther  eut  la  faveur  de  plaire  à  Assuérus  plus  que 
toutes  les  autres,  et  elle  fut  élevée  à  la  dignité  de 
reine,  ce  qui  lui  permettait  d'avoir  ses  entrées  auprès 
du  roi,  et  d'habiter  dans  un   palais  particulier  où  elle 

I vail   donner   des    festins   même    au    roi   et    à   son 

ministre.  Esth.,  u,  16,  17;  v,  1-8.  La  polygamie  étail 
en  vigueur  chez  les  Perses,  cf.  stral.on,  w.  7:;.;. 
Hérodote,  i,  135,  chez  les  Mèdes  et  chez  les  Indiens. 
Cf.  Strabon,  xi,  526;  xv,  714.  —  4.  On  a  pu  remar- 
quer que,  pour  la  période  royale,  la  Sainte  Écriture 
parle  de  polygamie  à  propos  des  rois,  mais  se  tait  en 
ce  qui  concerne  les  particuliers.  Môme  silence  pour 
l.i  période  qui  s'étend  de  la  captivité  à  .lésus-Christ. 
Faut-il  en  conclure  que  la  coutume  était  totalement 
tombée  en  désuétude,  en  dehors  des  cours?  On 
ne  doit  pas  se  lutter  de  tirer  cette  conclusion.  Le  roi 


llérode  eut  en  tout  dix  femmes,  dont  plusieurs  à  la  fois. 
A  ce  propos,  Josèphe,  Bell,  jud.,  I,  xxiv,  2,  observe  que 
cette  pluralité  était  permise  aux  Juifs  en  vertu  de  leurs 
usages  particuliers,  et  que  d'ailleurs  le  roi  aimait  avoir 
plusieurs  femmes.  En  un  autre  endroit,  Anl.  jud.,  XVII, 
i,  2,  il  dit:  «  C'est  pour  nous  une  coutume  nationale 
d'avoir  en  même  temps  plusieurs  femmes.  »  Il  adresse 
cette  remarque  à  ses  lecteurs  grecs  et  romains,  chez 
lesquels  la  polygamie  était  mal  vue.  D'après  la  Mischna, 
■Sanhédrin,  II,  I,  un  roi  pouvait  se  permettre  dix-huit 
femmes.  Quant  aux  particuliers,  ils  avaient  droit  d'aller 
jusqu'à  quatre,  cf.  Yebamoth,  iv,  11;  Kethuboth,  x, 
1-6,  ou  cinq.  Cf.  KeHthoth,  m,  7;  Kiddutchin,  n.  7: 
Bechorolh,  vin,  4.  Saint  Justin,  Dial.  cum.  Tryphon., 
134,  t.  vi,  col.  785,  confirme  ces  indications  de  la  Mi- 
schna, quand  il  déclare  que  les  docteurs  juifs  «  en  sont 
encore  à  permettre  à  chacun  d'avoir  quatre  ou  cinq 
femmes.  »  La  polygamie  s'est,  parait-il,  perpétuée  chez 
les  Juifs  allemands  jusqu'au  moyen  âge.  Cf.  Schùrer, 
Geschichle  des  jiidischen  Volkes  im  Zeit.  J.-C,  Leip- 
zig, t.  i,  1901,  p.  407. 

III.  Dans  le  Nouveau  Testament.  —  Les  écrivains 
du  Nouveau  Testament  ne  font  nulle  part  mention 
expresse  de  la  polygamie.  Par  deux  fois,  saint  Paul 
exige  bien  que  l'évèque  soil  |iiâç  yuvaix'o;  ccvr)p,  «  mari 
d'une  seule  femme  ».  I  Tim.,  ni,  2;  Tit.,  i.  6.  Mais  ce 
qu'il  exclut  ici,  ce  n'est  pas  la  polygamie  simultanée, 
étrangère  aux  mœurs  des  Grecs  et  des  Romains,  c'est 
la  polygamie  successive.  Il  veut  de  même  que  la  veu\e 
admise  au  service  de  l'Église  soit  ï-t'u;  àvSpbç  yv/v,. 
«  femme  d'un  seul  homme  »,  c'est-à-dire  évidemment 
«  n'ayant  eu  qu'un  seul  mari  ».  Le  silence  des  écrivains 
du  Nouveau  Testament  démontre  qu'à  leur  époque 
malgré  les  concessions  des  docteurs  juifs,  la  polygamie 
élait  assez  exceptionnelle  et  assez  décriée  pour  qu'il  lut 
inutile  de  la  réprouver.  C'était  donc  un  abus  qui  tom- 
bait totalement  en  désuétude,  surtout  au  contact  du 
monde  gréco-romain,  qui  avait  bien  d'autres  vices, 
mais  ignorait  celui-là.  S'il  en  eût  été  autrement.  Notre- 
Seigneur  en  aurait  parlé,  comme  il  a  fait  pour  le 
divorce.  —  2.  D'ailleurs  la  condamnation  île  la  polyga- 
mie est  nécessairement  renfermée  dans  celle  <lu  divorce. 
Notre-Seigneur  déclare  que  «  quitter  sa  femme  pour 
en  prendre  une  autre,  c'est  commettre  l'adultère.  » 
Matlh..  XIX,  9;  Mare.,  x,  Il  ;  Luc,  xvi,  18.  Le  mal  ne 
consiste  pas  nécessairement  à  se  séparer  de  sa  femme, 
puisque  dans  certains  cas  la  séparation  est  permise, 
mais  à  prendre  une  seconde  femme  du  vivant  de  la 
première.  An  regard  de  la  loi  évangélique,  la  bigamie  a 
donc  le  caractère  de  l'adultère;  à  plus  forte  raison  en 
est-il  ainsi  de  la  polygamie.  Le  divin  Maître  attribue  à 
la  dureté  de  cœur  des  Hébreux,  c'est-à-dire  à  leur 
manque  d'intelligence, de  délicatesse  et  de  sens  moral, 
l'autorisation  du  divorce  que  Moïse  a  dû  leur  accorder. 
Mat  th.,  xix,  S.  La  même  cause  a  certainement  inspiré 
le  législateur  quand  il  a  tolère''  tacitement  la  polygamie. 
Les  Hébreux  d'autrefois  n'auraient  pu  se  passer  de  cetti 
tolérance,  au  milieu  de  peuples  qui  en  jouissaient  à 
leur  aise.  Une  défense  portée  par  la  loi  n'eûtservi  qu'à 

multiplier    les  transgressions.    Rom.,    vu.    7-11.  La    loi 

ancienne  a  donc  toléré  un  abus  qui  ne  se  heurtait  à 
aucun  article  essentiel  de  la  loi  naturelle  et  qui  respec- 
tait suffisamment  les  fins  principales  du  mariage,  l'union 
mutuelle  de  l'homme  et  delà  femme  et  la  propagation 
de  la  race.  Mais  la  loi  nouvelle,  plus  parfaite  et  d'ail- 
leurs universelle,  ne  pouvait  laisser  se  perpétuer  cette 
tolérance.  «  Au  commencement,  il  n'en  fut  pas  ainsi.  » 
Matlh.,  xix,  8.  Xotre-Seigneur  le  disait  du  divorce; 
c'était  également  vrai  de  la  polygamie.  Adam  n'avait 
reçu  de  Dieu  qu'une  seule  femme  et  n'en  avait  qu  i  ne, 
ainsi  que  ses  descendants  pendant  plusieurs  générations. 
—  3.  Quels  qu'aient  pu  être  les  avantages  résultant  de 
la  tolérance  de  la  polygamie  pour  les  anciens  Hébreux, 


513 


POLYGAMIE 


POLYGLOTTES 


514 


il  est  incontestable  que  ces  avantages  étaient  secon- 
daires, locaux  et  prêtant  à  de  nombreux  et  graves  abus, 
tels  que  la  mésentente  entre  les  femmes  dans  les  familles 
d'Abraham,  de  Jacob  etd'Elcana.  la  discorde  entre  les 
enfants  dans  la  famille  de  David,  la  multiplication 
scandaleuse  des  épouses  et  des  concubines  autour  de 
Salomon  et  de  plusieurs  rois.  La  loi  évangélique  réta- 
blissait les  cboses  à  l'état  primitif,  qui  était  conforme 
au  plan  providentiel.  L'expérience  a  d'ailleurs  prouvé 
que  la  polygamie  n'était  favorable  ni  à  l'union  des 
époux,  ni  à  la  dignité  de  la  femme,  ni  au  bonheur  des 
enfants,  ni  à  la  multiplication  de  la  population.  Cf. 
Bergier,  Œuvres  complètes,  Paris,  1859.  t.  iv,  p.  1529- 
On  a  la  démonstration  de  cette  vérité  chez  les 
peuples  qui  ont  conservé  la  polygamie,  spécialement 
chez  les  Musulmans.  Avant  Mahomet,  les  Arabes  avaient 
huit  ou  dix  femmes.  Mahomet  crut  devoir  restreindre 
ce  nombre  :  i  N'eu  épousez  que  deux,  trois  ou  quatre. 
Choisissez  celles  qui  vous  auront  plu.  Si  vous  ne  pou- 
:s  maintenir  avec  équité,  n'en  prenez  qu'une, 
ou  bornez-vous  a  vos  esclaves.  Cette  conduite  sage 
vous  facilitera  les  moyens  d'être  justes  et  de  doter  vos 
femmes,  o  Koran,  iv,  3.  La  restriction  de  la  polygamie 
n'est  ici  qu'une  question  de  ressources;  l'intérêt  social 
et  la  cause  de  la  morale  n'ont  rien  à  gagner  à  la  règle 
ainsi  formulée.  On  sait  comment  quelques  protestants 
du  XVIe  siècle  crurent  pouvoir  autoriser  ou  pratiquer  la 
polygamie.  En  1540.  Luther.  Mélancblon  et  lïucer  accor- 
dèrent même  au  landgrave  Philippe  de  Hesse  la  per- 
mission d'adjoindre  une  seconde  épouse  à  celle  qu'il 
avait  déjà.  Cf.  Bossuet.  Histoire  des  variations,  vi. 
Œuvres,  Bar-le-Duc,  1870,  t.  m,  p.  239-24-2.  La  loi 
évangélique  n'en  subsiste  pas  moins  dans  sa  rigueur 
salutaire.  H.  Lesètre. 

POLYGLOTTES.  —  I-  Définition.  —  Sous  le  nom 
de  «  Polyglottes  >  ou  sous  la  dénomination  plus 
complète  de  «  Bibles  pohglottes  ".  on  désigne,  con- 
formément à  la  signification  étymologique  :  koXûç, 
•<  plusieurs  »,  v'/iotti.  langue  »,  des  recueils  conte- 
nant, en  tout  ou  en  partie,  le  texte  original  de  la  Bible 
accompagné  de  deux  versions,  au  moins,  en  langues 
différentes.  Ces  textes  doivent  être  reproduits  dans  le 
même  volume  et  sur  des  colonnes  parallèles  ou  super- 
posées. Faute  d'avoir  dans  l'esprit  cette  notion  suffi- 
samment précise,  des  bibliographes  mal  avisés  ont  ap- 
pelé Polyglottes  des  éditions  de  la  Bible,  contenant 
auprès  de  l'original  une  seule  traduction  soit  en  latin 
soit  dans  une  langue  vulgaire.  Généralement  toutefois 
on  exige  pour  une  Polyglotte  trois  textes  bibliques  au 
minimum  :  l'original  et  deux  versions,  sans  compter 
les  traductions  littérales  qui  les  accompagnent.  Cette 
notion  écarte  donc  de  la  catégorie  des  Polyglottes  les 
manuscrits  bilingues  du  Nouveau  Testament,  grecs  et 
latins,  D'.D-,  Wc,  A  (Évangiles),  E.G1'  (Actes  et  Épitres  ca- 
tholiques i,  grecs  et  coptes.  T\  T-,  T\  T1,  T\  ï:,  T».  T°, 
T",  T>,  T'.  T  .  T".  grec  et  arabe.  B\  les  Psautiers  bi- 
lingues, trilingues  ou  quadruples,  manuscrits  qui  re- 
produisaient plusieurs  versions  latines  des  Psaumes  et 
parfois  le  texte  grec,  aussi  bien  que  le  Quintuplex 
Psalterium,  que  Le  Fèvre  d'ttaples  lit  imprimer  en 
1509,  les  éditions  du  Nouveau  Testament  avec  une 
version  interlinéaire  ou  avec  une  traduction  latine. 
récente  ou  ancienne,  les  éditions  de  plusieurs  versions 
sans  le  texte  original,  telles  que  celle  du  Cantique  et 
des  Epitres  catholiques  en  éthiopien,  en  arabe  et  en 
latin,  faite  en  1654  et  1655  par  Xi-sel  et  Petrâus,  et  la 
Biblia  pentaplc  de  Wansbeck,  1711.  comprenant 
"uatre  versions  allemandes  et  une  néerlandaise,  enfin 
les  éditions  reproduisant  le  texte  original,  une  ancienne 
version  et  la  traduction  de  celle-ci  en  langue  étrangère, 
telle  que  le  Nouveau  Testament  de  Le  Fèvre  de  la  Bode- 
rie,  publié'  à  Paris  en  1584  et  contenant  le  grec,  la  Pe- 

DICT.   DE  LA   BIBLE 


schito  et  une  traduction  latine  de  cette  version  syriaque. 

Ainsi  limitée,  la  notion  de  Polyglotte  exclut  toute 
édition  de  la  Bible  en  plusieurs  langues  faite  dans  un 
but  pratique  d'édification.  La  Polyglotte,  en  effet,  est 
un  ouvrage  destiné  à  favoriser  l'étude  et  les  travaux 
scientifiques  sur  la  Bible.  Son  but  principal  est  de 
faciliter  la  comparaison  du  texte  original  des  Livres 
Saints  avec  les  anciennes  versions,  en  présentant  ces 
textes,  non  pas  en  très  volumes  différents,  mais  dans 
un  seul,  et  sur  la  même  page  en  des  colonnes  parallèles 
ou  superposées.  Les  Polyglottes  sont  donc  un  instru- 
ment d'étude  presque  nécessaire  aux  mains  de  ceux 
qui  veulent  se  livrer  à  la  critique  textuelle,  à  la  re- 
constitution et  à  l'interprétation  du  texte  et  de  la  pensée 
des  écrivains  sacrés.  Aussi,  dans  l'encyclique  Providen- 
tissimus  Deus,  Léon  XIII  a-t-il  déclaré  les  Polyglottes 
d'Anvers  et  de  Paris  sincerx  invesligandae  sententise 
peraptas.  Voir  t.  i.  p.  XVI.  Les  Polyglottes  présentent 
encore  un  autre  avantage  :  elles  facilitent  aux  étudiants 
l'étude  des  langues  sacrées,  si  vivement  recommandée 
parle  même  pape.  Voir  ibid.,  p.  xxvn.  La  juxtaposi- 
tion des  textes  permet  les  comparaisons  et  rend  le 
même  service  qu'une  version  interlinéaire,  et  le  manie- 
ment fréquent  des  textes  parallèles  ainsi  groupés  est 
une  condition  de  progrès  à  réaliser  dans  la  connaissance 
de  ces  langues. 

II.  Les  quatre  grandes  Polyglottes.  —  Dans  l'an- 
tiquité chrétienne,  les  Hexaples  d'Origène  (voir  t.  ni. 
col.  689-701)  sont  le  seul  travail  qui  soit  une  véritable 
Polyglotte.  Ce  n'est  qu'au  xvie  siècle  que  la  renaissance 
des  études  bibliques  provoqua  la  publication  de  recueils 
des  textes  originaux  et  des  anciennes  versions  de  la 
Bible.  Les  quatre  Polyglottes  d'Alcala,  d'Anvers,  de 
Paris  et  de  Londres  méritent  par  leur  ampleur  et  leur 
importance  d'être  signalées  les  premières. 

1°  La  Polyglotte  d'Alcala.  —  1.  Histoire.  — Onladoit 
à  l'initiative  et  à  la  magnificence  du  grand  cardinal 
François  Ximénès  de  Cisneros,  archevêque  de  Tolède 
et  ministre  du  roi  de  Castille.  C'est  pendant  l'été 
de  1502.  durant  son  séjour  à' Tolède,  qu'il  conçut 
le  projet  d'une  Polyglotte  pour  raviver  l'étude 
scientifique  de  la  Bible  et  permettre  aux  théolo- 
giens, par  la  comparaison  des  textes,  de  remonter 
aux  originaux.  Il  confia  le  travail  à  des  philologues,  qui 
étaient  professeurs  à  son  université  d'Alcala  :  Antoine 
de  Lebrija  (voir  t.  i,  col.  709).  Démétrius  Ducas,  Lopez 
de  Zuniga,  Nunez  de  Guzman,  à  qui  il  associa  trois  sa- 
vants juifs  convertis  :  Alphonse  d'Alcala,  Paul  Coronell 
et  Alphonse  de  Zamora.  Le  cardinal  acheta  des  manus- 
crits hébreux  et  rassembla  de  divers  côtés  des  manus- 
crits grecs  et  latins.  Nous  indiquerons  ceux  qu'on  a  pu 
identifier.  Quoique  le  cardinal  pressât  les  travailleurs. 
ce  ne  fut  qu'au  mois  de  janvier  1514  qu'un  premier 
volume,  contenant  le  Nouveau  Testament,  sortit  des 
presses  d'Arnold  Guillaume  de  Brocario.  C'est  le  tome  v 
dans  le  plan  général  de  l'ouvrage.  Quelques  mois  plus 
tard, à  la  fin  demai  1514,  fut  achevé  un  second  volume, 
le  t.  vi;  il  contient  deux  dictionnaires,  hébreu  et  chal- 
daïque,  et  une  grammaire  hébraïque,  œuvres  d'Alphonse 
de  Zamora  et  devant  servir  d'introduction  à  l'Ancien 
Testament.  Les  quatre  autres  volumes,  t.  I-IV,  sont 
consacrés  à  l'Ancien  Testament;  le  dernier  sortit  des 
presses  le  10  juillet  1517.  Le  cardinal  mourut  quatre 
mois  plus  tard,  le  S  novembre  1517.  Toutefois,  son 
grand  ouvrage  ne  fui  mis  en  vente  qu'en  1520.  après 
que  Léon  X,  à  qui  il  avait  été  dédié,  l'eût  approuvé  par 
bref  en  date  du  22  mars  1520.  Il  n'en  avait  été  tiré  que 
600  exemplaires,  et  quoique  la  dépense  totale  s'élevàl 
à  plus  de  50  000  ducats,  le  prix  de  chaque  exemplaire 
fut  tixé  à  six  ducats  et  demi  seulement.  La  Polyglotte 
d'Alcala  ne  fut  guère  connue  qu'en  1521.  Elle  est  d'une 
extrême  rareté;  aussi  le  prix  des  exemplaires,  qui 
reparaissent  sur  le  marché,  est  très  élevé. 

V.  -    17 


515 


POLYGLOTTES 


516 


2.  Description.  —  Le  titre  général  de  l'ouvrage,  qui 
forme  6  in-f»,  est  :  Iliblia  nacra  Pohjglotta,  etc.  Celui 
de  l'Ancien  Testament  est  :  Vêtus  Testamentum  multi- 
plia   lingua  mine   primo   impressum.  Dans  le  t.   I, 
consacré  tout  entier  au  Pentateuque,  à  la  suite  des  pro- 
logues et  de  divers   traités,  viennent  les  textes  repro- 
duits .  hébreu,  latin,  grec,  disposés  sur  trois  colonnes 
dans  la  partie  supérieure  de  chaque  page,  sans  que  les    l 
lignes  correspondent,  en  raison   de  la  dill'érence  des   i 
caractères.  Le  texte  hébreu  est  ponctué  et  le  texte  grec 
est  accentué.  Dans  la  colonne,  toujours  la  plus  rappro- 
chée de  la  marge  intérieure,  le  grec  des  Septante  est 
surmonté  d'une  version  latine,  littérale  et  interlinéaire, 
faite  par  les  éditeurs;  les  mots  latins  sont  exactement 
au-dessus  des  mots  grecs  correspondants.  De  petits  ca- 
ractères latins  indiquent  le  rapportde  laVulgate  avec  le 
texte  hébreu.  La  partie  inférieure  delà  page  est  divisée 
en  deux  colonnes  inégales,  dont  la  plus  large  contient 
le  texte  chaldéen  ponctué  du  targum  d'Onkelos,  et  la 
moins  large  une  version  latine  de  ce  texte.  A  la  marge 
extérieure,  sont  indiquées  les  racines   des  mots  et  des 
formes  hébraïques  et  chaldaïques,  imprimées  dans   la 
colonne   voisine.  Le  t.  il  comprend  les  livres  de  Josué. 
jusqu'aux    Paralipomènes  inclusivement.    Comme    les 
targums,  bien  que  traduits  en  latin  par  ordre  de  Ximé- 
nès,  n'y  sont  pas  reproduits, la  page  entière  est  divisée 
en  trois  colonnes,  dans  lesquelles  les  lexles  sont  dispo- 
sés comme  dans  le  volume  précédent.    La  prière  de 
Manassé,  à  la  fin  du   t.  n,  n'est  éditée  qu'en  latin.  Le 
t.  in  renferme  les  deux  livres  d'Esdras,  Tobie,  Judith, 
Esther,   Job,  le  Psautier,  les  Proverbes,  l'Ecclésiaste, 
le  Cantique,  la  Sagesse  et  l'Ecclésiastique.  La  disposi- 
tion générale  est  la  même  que  dans  les  volumes  précé- 
dents, sauf  quelques  particularités.  Dans  le  Psautier, 
la  version  latine  ordinaire  ouïe  Psalterium  gallicanum 
sert  de  version  interlinéaire  au  texte  grec,  et  le  Psalte- 
rium hebraicum  de  saint  Jérôme  occupe  la  colonne  du 
milieu.    Pour  les  livres  deutérocanoniques,    bien   que 
le  texte  hébreu  fasse  défaut,  on  a  maintenu  la  division 
en  tn,is  colonnes  :   la  version  interlinéaire  du  grec  des 
Septante  est  imprimée  a  paît  dans  la  colonne  réservée 
ailleurs  à  l'hébreu.  Le  t.  iv  contient  tous  les  prophètes 
et  1rs  trois  livres  des  Machabées.   Pour  le  troisième  de 
ces  livres,  il  n'y  a  que  deux  colonnes,  contenant  sépa- 
rément b'  texte  grec  et  une  version  latine.  Dans  le  t.  V, 
consacré  au  Nouveau  Testament,  après  diverses  pièces 
qui   servent  d'introduction,    les   quatre   Évangiles  sont 
imprimés  sur  deux  colonnes,  dont  la  plus  large  contient 
le  texte  grec  et  la  moins  large  la  Vulgate.  Les  passages 
parallèles    et    les    citations    bibliques    sont    notés    en 
marge.  Chaque  Évangile  est  suivi  d'un  prologue.   Deux 
dissertations  grecques,  dont  la  seconde  est  d'Eutbalius. 
in-, -cèdent    les   Ëpltres   de  saint    Paul,  reproduites  sur 
deux  colonnes.  Chaque  Épitre  esl  précédée  d'un  prologue 
et  d'un   sommaire.   Deux  prologues  précèdent  aussi  les 
Actes,  qui  sont  suivis  des  Épltres  catholiques  et  de  l'Apo- 
calypse.  Cinq   pièces  de  poésie,   deux  en   grec  et  trois 
en  latin,  à   la    louange  de  Kiménès  et  de  son  œuvre, 
terminent  le  volume,  avec  une  liste  des  noms  propres, 
une  petite  grammaire  grecque  et  un  court  lexique  grec- 
latin.  Le    texte   grec    n  est  pas  aeeeiilué,  parce  que   les 
autographes    ne  l'étaient    pas.  afin    de    se  rapprocher 
ainsi  le  plus  possible  de  l'original.  Le  rapport  du   texte 
grec  avec  la  Vulgate  est  indiqué  par  de  petites  lettres 
latines,  inscrites  au-dessus   îles  mots  correspondants. 
Cf.  Van  l'raet.  Catalogue  «/es  livres  imprimés  sur  vélin 
qui  se  traînent  dans  des  bibliothèques  tant  publiques 
que  particulières,  Paris,   18-21,  t.  I.  p.   1-4. 

;t.  Valeur  ri  influence.  —  «\  Taie  hébreu.  —  Bien 
que  n'appartenant  pas  aux    incunables  hébreux,  son 

édition  a  l'ait  époque  et  elle  est  la  première  édition 
catholique  de  ce  texte.  Elle  a  été  considérée  comme 
une  œuvre  scientifique,  Ses  inexactitudes  et  ses  nom- 


breuses fautes  d'impression  ne  diminuent  pas  la  valeur 
critique  du  texte.  D'après  les  travaux  de  Iiaer,  ses 
variantes  sont  meilleures  que  les  leçons  traditionnelles 
massorétiques.  Ximénès  avait  fait  acheter  sept  manus- 
crits hébreux,  qui  lui  avaient  coûté  à  eux  seuls  4000  du- 
cats. Ils  provenaient  des  synagogues  de  Tolède  et  de 
Maquéda.  Ils  sont  conservés  à  la  bibliothèque  de  l'uni- 
versité de  Madrid.  Cinq  ne  sonl  que  des  Pentateuques 
avec  des  commentaires  ordinairement  défectueux  et  cor- 
rigés par  Zamora.  Deux  sur  parchemin  contiennent  la 
Bible  hébraïque  en  entier.  Ils  ont  appartenu  au  collège 
de  Saint-Ildefonse  d'Alcala.  L'un  est  du  .\ille  siècle  et  a 
été  acheté  à  Tolède  en  1280  par  deux  médecins  juifs, 
l'autre  a  été  transcrit  l'an  6242  depuis  la  création  à 
Tarazona  en  Aragon.  Les  collations  que  Franz  Delitzsch, 
Complutensische  Varianlen  :u  dem  allteslamentlichen 
Text,  in-i",  Leipzig,  1878,  p.  6-38,  a  faites  de  quelques 
passages  avec  d'autres  documents,  lui  ont  permis  de 
conclure  que  les  éditeurs  avaient  utilise''  au  moins  un 
manuscrit  hébreu,  différent  des  deux  Bibles  hébraïques 
conservées,  que  le  texte  édité,  malgré  ses  fautes,  a  une 
haute  valeur  critique  et  surpasse  souvent  les  autres 
éditions  du  texte  hébreu.  Cette  édition  a  été'  reproduite 
dans  la  Polyglotte  d'Heidelberg  et  utilisée  dans  celle 
d'Anvers. 

b)  Texte  des  Septante.  —  Les  éditeurs  de  la  Polyglotte 
pour  cette  édit  on  princeps  des  Septante,  eurent  a  L'in- 
disposition deux  manuscrits  de  la  bibliothèque  vaticine: 
346  (Holmes  248)  contenant  les  livres  sapientiaux.  Esdras. 
Tobie,  Judith,  Esther,  et 330  (Holmes  108)  contenant  les 
livres  historiques  depuis  1  ■■  Pentateuque  jusqu'à  Esther 
avec  un  fragment  de  Tobie.  Voir  I.  [V,  col. 682.  Ces  manus- 
crits, qui  paraissent  être  du  \nr  siècle,  furent  envoyés 
à  Alcala  par  Léon  X  la  première  année  de  son  pontifical; 
prêtés  pour  un  an.  il-  ne  furent  rendus  que  le  9  juil- 
let 1519.  Les  éditeurs  eurent  aussi  la  copie  faite  avec  grand 
soin,  envoyée  par  le  sénat  de  Venise  et  conservée  à  la 
bibliothèque  de  Madrid  corn provenant  du  collège 

Saint-Ildefonse  d'Alcala,  d'une  partie  d'un  manuscrit 
grec  très  correct  copié  par  le  crétois  Jean  Hhosos  pour 
le  cardinal  Bessarion  et  conservé  à  la  bibliothèque 
Saint-Marc  de  Venise  (Marc  V,  Holmes  68).  La  copie 
comprend  les  .luges,  Ituth.  les  quatre  livres  des  Bois, 
tesdeuxlivres  de,  Paralipomènes,  les  Proverbes,  lie,!' 
siaste.  le  Cantique,  le  I"  livre  d'Esdras  (apocryphe  . 
Esdras  et  N'éliémie.  Esther.  la  Sagesse.  Judith.  Tobie, 
les  trois  livres  des  Machabées.  Les  collations  de  ces 
manuscrits  avec  le  texte  des  Septante  de  la  Polyglotte, 
que  Franz  Delitzsch  a  faites,  Fortgesetzle  Studien  fur 
Entstehungsgeschichte  der  Complulensischen  Poly- 
glotte, in-'r.  Leipzig,  1886,  p.  1-28,  ont  permis  de  déter- 
miner l'usage  que  les  éditeurs  ont  fait  des  manuscrits 

mis  à  leur  disposition.  Ils  n'ont  pas  reproduit  textuelle- 
ment les  manuscrits  :i:so  et  li'iti.  Les  nombreuses  diffé- 
rences de  leur  I    -le  avec  relui    illl   preln  ier  mail  i  l'e-  len  I 

des  corrections  arbitraires,  faites  d'après  l'hébreu  qu'ils 
préféraient,  non  pas.  comme  dit  Richard  Simon.  •  en 
une  infinité  d'endroits,  o  Catalogue  des  principales 
éditions  de  lu  Bible,  dans  Histoire  ci-itique  du  Vieux 
'testament.  Amsterdam,  ItiSô,  p.  516,  ou  u  en  un  assez 
grand   nombre  d'endroils    ■•■    Bibliothèque    critique, 

Amsterdam.    1708.  I.    lit.  p.    185,   mais    seule nt   pour 

une  petite  part,  ou  plus  souvent  des  emprunts  à  la 
copie  du   manuscrit  de  Bessarion  ou  au   Vatican  346, 

donl    ils   corrigeaient   les  fautes  de  transcription,    r ' 

le  Psautier,  qui  n'est  pas  dans  les  trois  manuscrits 
précédents,  ils  ont  utilisé'  un  manuscrit  spécial  en  cur- 
sive.  du  xur  ou  xiv  siècle,  qui  esl  a  la  bibliothèque  de 
Madrid.  Un  ignore  de  quels  manuscrits  il-  disposaient 

pour  les  livre-,  propliel  iqlles.  A  défaul  de  ronsoiglii     .lents 

précis,  on  a  recherché  à  quelle  recension  appartenait 
le  texte  de  leur  édition  et  on  a  constaté  qu'il  ressemblait 

:,    celui    des   manuscrits    I.    V    el    VI    de   Sainl  Marc   .le 


517 


POLYGLOTTES 


518 


Venise  (Holmes  23,  68,   122),  < i n i   ont  servi  à   l'édition 

Aldine  de  1518.  Ibid.,  p.  53-57.  Le  texte  des  Septante 
de  la  Polyglotte  de  Complute  a  été  reproduit  dans  les 
Polyglottes  d'Anvers  et  de  Paris,  dans  la  Bible  de  Vala- 
ble 00  de  Bertram,  Genève,  15S6-1587.  1599.  ICI*;,  el 
dans  celle  de  D.  Wolder,  Hambourg,  1596.  Cf.  Swete, 
An  introduction  to  the  OUI  Testament  in  Grèek,  Cam- 
bridge, 1900,  p.  171-173. 

c)  Texte  grec  du  Nouveau  Testament.  —  L  édition 
de  Complute  est  aussi  l'édition  princeps  du  texte  ori- 
ginal du  Nouveau  Testament.  On  ignore  sur  quels  ma- 
nuscrits elle  a  été  faite.  Lopez  de  Zuniga  (Stunica), 
qui,  sans  avoir  eu  la  part  principale  à  cette  édition, 
comme  on  le  pensait,  a  travaillé  au  moins  au  texte  des 
Actes  et  des  Kpitres,  parle  de  manuscrits  grecs  corrigés, 
mais  il  n'en  nomme  qu'un,  le  Rhodiensùt,  vraisem- 
blablement envoyé  de  Rhodes  au  cardinal  Ximénès  et 
contenant  les  tpitres.  On  ne  l'a  pas  encore  retrouvé. 
On  ne  sait  si,  pour  le  Nouveau  Testament,  des  manus- 
crits grecs  du  Vatican  furent  envoyés  à  Alcala.  La  com- 
paraison du  texte  édité  avec  les  manuscrits  du  Vatican, 
1158  (Ev.  140  et  366,  Act.  7-2.  Paul  79,  Apoc.  37),  les 
seuls  dont  il  puisse  être  question,  ne  permet  pas  de 
conclure  à  leur  emploi.  Franz  Delitzsch  estime  que  le 
texte  des  Actes  el  des  Kpitres  est  apparenté  à  celui  du 
Bafniensis  1  (Ev.  234.  Act.  57,  Paul  72),  qui  est  à 
Copenhague,  mais  qui  était  encore  à  Venise  en  1699, 
el  qui  a  été  copié  par  Théodore  d'Hagios  Petros.  et  à 
celui  du  Lawlianus  2  (Ev.  51,  Act.  32.  Paul  38),  qui 
est  à  la  Bodléienne  à  Oxford  et  qui  est  une  copie  du 
lent.  lorlgeselzte  Studien,  p.  30-51.  Wettstein 
et  Semler  avaient  prétendu  que  les  éditeurs  de  la  Poly- 
glotte d'AIcala  avaient  altéré  le  texte  grec,  en  y  insé- 
rant des  leçons  de  la  Vulgate.  Gœze,  Vertheidigung 
(1er  Complut.  Bibel,  Hambourg.  17ii5;  Ausfùhrlichere 
Vertheidigung  des  Compl.  -V.  T.,  ibid..  1766;  Fort- 
setzung  der  ausfûhrl,  Vertheidigung  des  Compl. 
N.  T.,  Halle,  1769,  a  surabondamment  prouvé  la  faus- 
seté de  ce  sentiment.  Seul,  le  verset,  I  Joa.,  v,  7,  a  été 
certainement  emprunté  à  la  Vulgate;  les  passages,  Rom., 
xvi,  5;  II  Cor.,  v,  10;  VI,  15;  Gai.,  m,  19,  en  proviennent 
peut-être.  En  résumé,  bien  que  les  manuscrits  consultés 
aient  été  probablement  récents,  le  texte  édité  comprend 
beaucoup  de  bonnes  leçons  que  les  critiques  postérieurs 
ont  admises,  surtout  pour  l'Apocalypse,  moins  pour 
les  Évangiles  et  très  rarement  dans  les  autres  livres. 
Il  diffère  beaucoup  de  celui  qu'Érasme  éditait  à  la 
même  époque;  il  est  moins  incorrect,  malgré  ses 
fautes  évidentes.  Kranz  Delitzsch,  Studien  :ur  Enste- 
hungsgeschickle  der  Polygloltenbibel  des  Cardinals 
Ximenes,  Leipzig,  1871;  Ed.  Reuss,  Bibliotheca  -V.  T. 
grseci,  Brunswick,  1872,  p.  15-26;  S  Berger,  La  Bible 
au  seizième  siècle,  Paris,  1879,  p.  49-51;  Gregory, 
Texlkrilik  des  Xeuen  Testaments.  Leipzig,  1902,  t.  n, 
p.  924-928;  A.  Bludau,  dans  Der  Katholik,  1902,  t.  n, 
p.  27  sq. 

Le  texte  grec  du  Nouveau  Testament  d'AIcala  n'a 
pas  eu  au  xvt«  siècle  l'inlluence  qu'Hefele  lui  a  attri- 
\ucuni-  édition  ne  l'a  reproduit  exactement.  Les 
éditeurs  des  Polyglottes  u'Anvers  et  de  Paris  et  ceux 
qui  dépendent  de  ces  Bibles  lui  ont  emprunté  un  plus 
n  n  uns  grand  nombre  de  leçons.  Ed.  Reuss,  op.  cit., 
p.  74-83.  Au  xixe  siècle,  il  a  été  lidèlement  réédité  par 
Gratz  dans  son  édition  du  Nouveau  Testament,  2  in-8", 
Tubingue,  1821;  Majeure,  1827,  1851.  Van  Ess.  dans 
son  édition,  in-8  '.  Tubingue,  1827.  a  mêlé  les  leçons  de 
Complute  avec  celles  d'Érasme.  Ed.  Reuss,  op.  cit., 
p.  45. 

'  Texte  latin  de  la  Vulgate.  —  L'édition  d'AIcala  a 
précédé  la  Bible  clémentine.  Son  origine  est  peu  con- 
nu-, Ximénès  dit  bien  qu'il  a  rassemblé  des  manuscrits 
latins,  mais  sans  plus  d'explication.  La  bibliothèque  de 
l'université  de  Madrid  a   trois  Bibles   latines  qui  vien- 


nent d'AIcala  et  qui  contiennent  le  verse!  des  trois 
témoins  célestes.  Elles  ont  dû  servir  aux  éditeurs  de  la 
Vulgate.  Franz  Delitzsch,  Fortgesetzte  Studien,  p.  51- 
52.  De  l'examen  du  texte  édité,  on  a  conclu  que  ces 
éditeurs  ont  corrigé  des  exemplaires  courants  de  leur 
époque  d'après  hs  manuscrits  plus  anciens  et  plus  cor- 
rects, dont  ils  rapportaient  quelques-uns,  écrits  en  lettres 
gothiques,  au  vne  ou  au  vm«  siècle,  mais  parfois  aussi 
sur  l'hébreu  et  le  grec,  en  particulier  pour  supprimer 
Ce  qui  n'avait  pas  de  termes  correspondants  dans  les 
originaux.  R.  Simon,  Histoire  critique  du  Vieux  Tes- 
tament, Amsterdam,  1685,  p.  313,  516.  —  Sur  la  Poly- 
glotte de  Complute,  voir  encore  Hefele,  Der  Cardinal 
Ximenes,  2'  édit.,  Tubingue,  1851.  p.  113-147;  trad. 
franc.,  Tournai,  1856.  p.  141-177;  Vercellone,  Disserta- 
zioni  academiche  di  vario  argumenta,  Rome,  1864, 
p.  407;  Hurler,  Nomenclator  literarius,  3e  édit..  Ins- 
pruck,  1906,  t.  n,  col.  1132-1134. 

2°  La  Polyglotte  d'Anvers.  —  1.  Histoire.  —  Dés 
1566,  l'imprimeur  Christophe  Plantin,  établi  à  Anvers, 
avait  formé  le  projet  de  publier  une  Polyglotte.  Par 
l'intermédiaire  du  cardinal  de  Granvelle,  son  protec- 
teur, il  s'assura  l'intervention  de  Philippe  II,  roi  d'Es- 
pagne. Ce  prince  donna  un  subside  de  12000  llorins  à 
rembourser  en  exemplaires  de  la  nouvelle  Bible  et 
envoya  Arias  Montanus  pour  surveiller  le  travail  et 
corriger  les  épreuves.  Ce  savant  espagnol  arriva  à 
Anvers  le  15  mai  1568.  Il  apportait  d'AIcala  la  version 
latine  des  targums  sur  les  prophètes,  et  un  très  ancien 
manuscrit  hébreu  qui  lui  appartenait.  Pendant  que 
Plantin  faisait  fondre  les  caractères  nécessaires,  gravés 
par  Robert  Granjon  et  Guillaume  Le  Bée  (on  se  servit 
pour  l'hébreu  des  caractères  employés  pour  la  Bible  de 
Bomberg),  Arias  Montanus  préparait  les  matériaux.  11 
fut  aidé  par  André  Maes,  François  Luc  de  Bruges, 
Guy  Le  Fèvre  de  la  Boderie  et  son  frère  Nicolas, 
François  Ravlenghien,  plus  tard  gendre  de  Plantin,  et 
son  frère  Nicolas-Guy,  le  jésuite  Jean  Willem  (Harle- 
mius),  etc.  Voir  t.  i.  col.  954-955.  Les  caractères  ,■!  le 
papier  étaient  plus  beaux  que  ceux  de  la  Polyglotte 
d'AIcala.  L'impression  commença  au  mois  de  juillet 
1568  et  fut  terminée  le  31  mai  1572.  Le  t.  tv  est  daté  de 
1570,  le  t.  v  de  1571  et  les  Apparatus  de  1572.  Un  tira 
960  exemplaires  ordinaires,  200  meilleurs,  30  lins, 
10  extra-fins  et  13  sur  parchemin.  Arias  Montanus  avait 
demandé  à  Pie  V  son  approbation.  Le  pape  hésita  à 
cause  de  la  version  latine  de  Pagnino  et  de  quelques 
traités  de  l' Apparatus  qui  paraissaient  suspects.  Le 
Talmud  et  Sébastien  Munster  y  étaient  trop  souvent 
cités.  On  consulta  des  théologiens  belges  et  espagnols. 
Montanus  alla  à  Rome  s'expliquer  et  présenta  un  mé- 
moire. Pie  V  était  mort  le  1er  mai.  Grégoire  XIII,  élu 
le  12  du  même  mois,  se  montra  plus  favorable  et  adressa 
à  Philippe  II,  le  20  octobre  1572,  un  bref,  dans  lequel 
il  appelle  la  Polyglotte  d'Anvers  opus  vere  regium. 
D'ailleurs,  V Apparatus  fut  réimprimé  du  2  août  1572 
au  1  i  août  1573  avec  des  modifications,  faisant  droit 
aux  critiques  précédentes.  Max  Rooses,  Christophe 
Plantin,  imprimeur  Anrersois,  1882,  p.  123.  Cepen- 
dant Léon  de  Castro,  professeur  de  langues  orientales 
à  Salainanque,  dénonça  Arias  Montanus  à  l'Inquisition 
espagnole.  Il  lui  reprochait  d'avoir  présenté  la  traduc- 
tion de  Pagnino  comme  la  version  la  plus  exacte  des 
textes  hébreu  et  grec  et  d'avoir  recommandé  de  recourir 
aux  sources  originales,  contrairement,  prétendait-il, 
au  décret  du  concile  de  Trente  sur  la  Vulgate.  Arias 
Montanus  se  défendit  en  1576.  Mariana,  comme  inqui- 
siteur, signala  des  fautes  très  réelles,  mais  déclara 
qu'elles  n'étaient  pas  suffisante?  pour  faire  condamner 
la  Polyglotte  du  roi  d'Espagne.  L'affaire  ne  fut  terminée 
qu'en  1580.  H.  Reusch,  Der  Indec  der  verbolenen 
Bûcher,  Bonn,  1883,  t.  i,  p.  575  576.  La  Polyglotte 
«  royale  d  reçut  bon  accueil  du  public  et  elle  fut  ap- 


519 


POLYGLOTTES 


520 


prouvée  par  plusieurs  universités,  notamment  par 
celle  de  Paris.  L'empereur  et  le  roi  de  France  autori- 
sèrent sa  vente  dans  leurs  États.  Les  exemplaires  furent 
vite  distribués  et  devinrent  rares  et  recherchés.  On  les 
a  vendus  chez  les  antiquaires  120,  150  et  180  marks. 

2.  Description.  —  La  Polyglotte  de  Plantin  est  inti- 
tulée :   Biblia  hebraice,  chaldaice,    grsece  et   latine, 
et  elle  comprend  8  in-folio.  Les  quatre  premiers  volumes 
contiennent  l'Ancien  Testament.  Pour  les  livres  pro- 
tocanoniques,  chaque  page  a  deux  colonnes,  reprodui- 
sant, au  verso,  le  texte  hébreu  sans  version  interlinéaire 
et  la  Vulgate,  et  au  recto,  le  texte  grec  des  Septante  à 
droite  avec  sa  traduction  latine  à  gauche.  Au  bas  des  pages, 
on  trouve,  pour  tous  les  livres  qui  en  ont,  les  targums 
ou    paraphrases   chaldaïques   et   leur   version   latine. 
Celle-ci  était  celle  que  le   cardinal  Ximénès  avait  fait 
faire  et  qu'Arias  Montanus  avait  apportée  d'Espagne. 
Le  texte  chaldaïque  avait  été  emprunté  à  des  manuscrits 
espagnols  et  vénitiens.  On  en  avait  retranché  les  fables 
les  plus  grossières.  Les  livres  deutérocanoniques  n'ont 
que  trois  colonnes,   sur  une  seule  page,    reproduisant 
de  gauche  à  droite  la    version  latine  du  texte  grec,  ce 
texte  lui-même  et  la  Vulgate.  Dans  le  t.  m,  on  a  imprimé, 
sans  pagination,  le  seul  texte  latin  des  IIIe  et  IV  livres 
d'Esdras.  Le  t.   v  contient  le  Nouveau  Testament.    Les 
textes  y  sont  disposés  dans  cet  ordre.  La  page  de  gauche 
présente  dans  une  première  colonne  la  Peschito,  qui 
n'a    que    les    livres   protocaaoniques,    en     caractères 
syriaques,  et  dans  une  seconde  colonne,  sa  version  latine, 
œuvre   de   Guy  Le   Fèvre  de   la   Boderie.   La  page  de 
droite  reproduit  d'abord  la  Vulgate  latine,  puis  le  texte 
grec.  Sous  ces  quatre  colonnes,  et  par  conséquent  sur 
les  deux  pages,  le  texte  syriaque  est  transcrit  en  carac- 
tères  hébraïques  avec  points-voyelles  pour  les  lecteurs 
qui  ne  sauraient  pas  lire  le  syriaque.  Les  trois  derniers 
volumes  ont  le  titre  d'Apparatus.  Le  t.  vi  contient  une 
grammaire  hébraïque  et  un  abrégé  du   Thésaurus  de 
l'agnino  par   François    Ravlenghien,   une  grammaire 
chaldaïque  et  un  dictionnaire  syro-chaldaïqiie  par  Guy 
Le  Fèvre  de  la  Boderie,  une  grammaire  syriaque  et  un 
vocabulaire  intitulé  :    Peculium   Syrorum   par  Macs. 
une  grammaire  et  un  dictionnaire  grecs,  dont  l'auteur 
est  inconnu.  Le  t.   VU  renferme  plusieurs  dissertations 
d'archéologie  biblique  par  Arias   Montanus,  et  des  re- 
cueils de  variantes  ou  de  notes  philologiques  et  critiques 
de  divers  ailleurs.  Ces  dissertations  et  recueils  forment 
un  total  de  18  traités  distincts.  Le  t.  vm  comprend  la 
version  latine  des  livres  de  la  Bible  hébraïque,  faite 
par  Pagnino  el  revisée  par  Arias  Montanus;  elle  a  été 
examinée  par  les  censeurs  de  Louvain.  Il  contient  en- 
suite le    texte  -J'ec    du  Nouveau   Testament,    la  version 
latine  interlinéaire,  correspondant  aux  mots  grecs;   les 
différences  du  grec  et  du  latin  suiit  imprimées  en  marge 
avec  des  caractères  spéciaux.  Enûn,  viennent  les  Com- 
munes   et    familiares    hebraicœ     lingu.se    idiolisnii 
d'Arias  Montanus.  Mais  l'ordre  de  ces  volumes  et  des 
matières    qu'ils    contiennent    est    divergent    selon    les 
exemplaires  qui  sont  d'éditions  différentes.  Van  Praet, 
Catalogue  des  livres  imprima  sur  relui  de  la  biblio- 
thèque du  Roi,  Paris,  1821,  t.  i.  p.  1-5;  C.  Ruelens  et 
A.  de    Backer,   Annales   plantiniennes,    Paris,    1866, 
p,  128-135,  La  version  interlinéaire  a  été  souvent  réim- 
primée à  pari.  Voir  t.  i,  col.  954-955.  Richard  Simon  l'a 
jugée  très   sévèrement.   Histoire  critique   >iit    Vieux 
Testament,  1.   II,  c.   xx,  Amsterdam,  1685,  p.  3 16-318 ; 
Critique  de  la  Bibliothèque  îles  auteurs  eccli  siastiques, 
Paris,  1730,  t.  h,  p.  213-216. 

3.  Valeur  ei  influence.  Les  textes,  hébreu  et  grec, 
ont  été  empruntés  à  la  Polyglotte  de  Complulc  et 
celui  des  Septante  sans  modifications;  mais  l'hébreu  a 
été  collationné  avec  la  Bible  de  Bomberg.  Quant  à 
l'édition  grecque  du  Nouveau  Testament,  elle  diffère 

de  celle  de  Complute  par  un  certain  nonilire  de  leçons 


qui  se  trouvent  dans  l'édition  de  Robert  Estienne  de 
1550.  Sur  les  mille  passages  que  Reuss  a  étudiés,  elle 
est  709  fois  d'accord  avec  les  deux  éditions  précédentes. 
Dans  les  291  autres,  39  sont  d'accord  avec  R.  Estienne, 
3  avec  Érasme,  1  est  tout  spécial  et  les  249  dernières 
sont  exclusivement  conformes  à  la  Bible  de  Complute. 
Le  texte  grec  du  t.  vm  diffère  de  celui  du  t.  v  en  14 
passages  dans  lesquels  la  leçon  de  Complute  est  aban- 
donnée pour  celle  d'Estienne,  sauf  Apoc,  i,  6,  dont  le 
texte  est  nouveau,  en  trois  autres  dans  lesquels  la  leçon 
d'Estienne  est  remplacée  par  celle  de  Complute,  enfin, 
I  Pet.,  il,  3,  la  leçon  Erasmienne  est  remplacée  par  le 
texte  ordinaire.  L'édition  d'Arias  Montanus  suit  donc 
une  voie  spéciale  et  elle  a  plus  de  valeur  que  les  cri- 
tiques le  disaient.  Elle  a  été  souvent  reproduite  exac- 
tement ou  avec  quelques  corrections,  dans  ses  deux 
états.  On  trouvera  le  détail  de  ces  rééditions  dans 
Reuss,  Bibliolheca  N.  T.  grseci,  p.  74-83.  Cf.  Gregory, 
Textkritik  des  N.  T.,  t.  n,  p.  936.  La  Vulgate  latine  est 
de  même  nature  que  celle  de  la  Polyglotte  d'Alcala. 
Finalement,  les  travaux  préparatoires  de  la  Bible 
d'Anvers  ont  laissé  beaucoup  à  désirer.  Les  éditions  ne 
sont  pas  en  progrés  notables  sur  celles  de  Complute. 
et  les  recueils  de  variantes,  dans  l'Apparat  us,  sont 
parfois  peu  considérables. 

3»  La  Pub/glotte  de  Paris.  —  1.  Histoire.  —  Le  car- 
dinal du  Perron  et  Jacques  de  Thou,  bibliothécaire  du 
roi,  avaient  conçu  le  projet  de  rééditer  la  Polyglotte 
d'Anvers  avec  l'aide  de  deux  maronites,  Gabriel  Sionite 
et  Jean  Hesronite,  ramenés  d'Orient  par  Savary  de 
Brèves.  Ils  avaient  obtenu  le  privilège  royal  en  1615. 
Mais  la  mort  du  premier  en  1617  et  du  second  en  101S 
arrêta  l'entreprise,  qui  pourtant  fut  louée,  en  1619,  par 
l'Assemblée  du  clergé  réunie  à  Blois.  Guy-Michel  Le  Jay, 
avocat  au  parlement,  reprit  le  projet.  Le  cardinal  de 
Bertille  lui  conseilla,  en  1626.  d'y  ajouter  le  Pentateu- 
que  samaritain  et  la  version  samaritaine.  L'édition  il'' 
ces  textes  fut  confiée  à  l'oratorien  Jean  Morin.  Philippe 
d'Aquin  fut  chargé  de  l'hébreu,  Gabriel  Sionite  et  Jean 
Hesronite  des  versions  syriaques  et  arabes,  Abraham 
Echellensis  et  d'autres  érudits  collaborèrent  à  l'entre- 
prise. L'impression  fut  remise  à  Antoine  Vitré,  qui  fit 
graver  des  caractères  hébreux,  chaldéens,  grecs  et 
latins  par  le  fils  de  Le  lice.  Jacques  de  Sanlecque 
grava  les  caractères  samaritains  et  syriaques,  dont 
Sionite  avait  fourni  le  modèle.  Il  prépara  aussi  des 
matrices  nouvelles  d'arabe  sur  les  poinçons  de 
M.  de  Brèves.  On  fit  fabriquer  un  papier  spécial,  si 
beau  qu'on  l'a  appelé'  caria  imperialis.  A.  Bernard. 
Antoine  Vitré  ci  les  caractères  orientaux  île  la  Bible 
polyglotte  de  Paris,  in-S",  Paris,  1857;  Id..  Histoire 
de  l'imprimerie  royale  du  I. mirée,  in-8".  Paris,  1867, 

p.   55-64.  L'impression    fut  ci nencée  au    mois   de 

mars  1628.  Les  quatre  premiers  volumes  étaient  ache- 
vés en  1629,  et  le  I.  vt  en  1632;  la  première  partie  du 
t.  v  est  datée  de  1630,  ci  ia  seconde  de  1633.  Le  t.  vm 
fut  terminé'  vers  la  fin  de  1635.  L'impression  du  t.  \n, 
qui  était  commencée  à  cette  date,  fut  interrompue  par 
suite  du  relu-  .1.'  Sionite  de  remettre  la  copie  néces- 
saire. 11  ne  voulait  pas  non  plus  se  dessaisir  des  ma- 
nuscrits orientaux,  ayant  appartenu  à  Savary  de  Brèves 
Au  mois  de  janvier  1640  il  fut  enfermé  au  château  de 
Vincennes  par  ordre  du  roi,  et  les  manuscrits  remis  à 
Vitré.  Libéré  le  12  juillet,  Sionite  reprit  sa  traduction 

latine  de  la  version  syriaque,  et  le  t.  VII  fut  achevé  en 
1642.  Sou  travail  traîna  en  longueur,  elle  t.  IX  sortit 
des  presses  au  mois  de  mai  1655  seulement,  La  Poly- 
glotte entière  parut  enfin,  avec  une  préface,  datée  du 
1"  octobre  1645,  en  lolc  du  premier  volume.  L'Assemblée 
du  clergé'  l'avait  approuvée,  le  24  janvier  1636.  I  e  Jay 
avait  emprunté'  ÎUOIKK»  «Vus  que  Richelieu  s'oltrit  de 
payer,  L'éditeur  refusa  cette  olîre  aussi  bien  que  la 
proposition    des     éditeurs     anglais    de     lui    racheter 


521 


POLYGLOTTES 


522 


600  exemplaires.  La  Polyglotte  de  Walton  empêcha  la 
vente  de  celle  de  Paris,  dont  le  prix  était  de  200  francs. 
Beaucoup  d'exemplaires  furent  veudus  au  poids  du 
papier,  et  Le  Jay,  entièrement  ruiné,  ne  put  payer 
ses  dettes.  La  Polyglotte  fut  présentée  au  public,  en 
1666,  par  trois  libraires  hollandais  sous  un  nouveau 
titre  :  Biblia  alexandrina  heplaglotta,  comme  étant 
publiée  sous  les  auspices  d'Alexandre  VII,  mais  leur  ruse 
fut  déjouée.  Mabillon,  Musssum  italicum,  Paris,  1687, 
1. 1,  p.  95-96.  Elle  est  magnifique  par  la  beauté  du  papier 
et  l'exécution  typographique;  mais  la  grandeur  du 
format  rend  son  emploi  fort  difficile.  Elle  présente 
enfin  le  désavantage  de  n'avoir  pas  publié  dans  le 
même  volume  tous  les  textes,  puisqu'il  faut  recourir  à 
deux  volumes  pour  les  avoir  ensemble  sous  les  yeux. 

2.  Description.  —  Elle  comprend  9  tomes  en  15  vo- 
lumes grand  in-folio  et  est  intitulée  :  Biblia.  1.  hebraiea. 
2.  samaritana.  3.  clialdaica.  4.  grœca.  6.  latina.  7.  ara- 
bica, quibus  textus  originales  totius  Script  tiras  Sacrée, 
quorum  pars  in  editione  Coniplutensi,  deinde  i» 
Antuerpiensi  regiis  sumplibus  e.rtat,  nunc  integris  ex 
manuscriptis  tolo  fere  orbe  qusesitis  exemplaribus 
exhibentur.  En  raison  de  son  contenu,  elle  comprend 
deux  parties  bien  distinctes.  Les  cinq  premiers  volumes, 
sauf  une  préface  non  paginée  de  Le  Jay  :  Institua 
operis  ratio,  et  une  autre  préface  de  .T.  Morin  sur  le 
Pentateuque  samaritain  et  sa  version  samaritaine,  en 
tète  du  premier  volume,  ne  sont  guère  que  la  reproduc- 
tion intégrale  des  cinq  premiers  volumes  de  la  Polyglotte 
d'Anvers.  La  disposition  typographique  est  la  même, 
ainsi  que  les  textes.  Les  seules  différences  notables 
consistent  en  ce  que  le  t.  v,  au  lieu  du  syriaque  en  lettres 
hébraïques,  contient  une  version  arabe  du  Nouveau 
Testament  et  sa  traduction  latine,  et  aussi  le  texte 
syriaque  des  quatre  Épitres  catholiques  et  de  l'Apocalypse 
qui  manquaient  dans  la  Peschito.  La  seconde  partie,  for- 
mant les  quatre  derniers  tomes,  est  seule  nouvelle.  Le 
t.  vi  contient  le  Pentateuque  syriaque  et  arabe  avec 
leurs  traductions  latines,  puis  le  Pentateuque  samari- 
tain et  sa  version  samaritaine,  qui  n'ont  qu'une  seule 
traduction  latine.  Ces  deux  textes  étaient  imprimés 
pour  la  première  fois.  Les  t.  vn-ix  ont  les  versions 
syriaque  et  arabe,  avec  leurs  traductions  latines,  de 
tout  le  reste  de  l'Ancien  Testament,  sauf  que  pour  Job 
il  n'y  a  qu'une  seule  traduction  latine  des  deux  textes. 

3.  Valeur.  —  Quant  à  la  première  partie,  qui  n'est 
presque  que  la  reproduction  de  la  Polyglotte  d'Anvers, 
la  Polyglotte  de  Paris  n'a  pas  réalisé  les  progrès  que 
pourtant  il  eût  été  facile  d'accomplir.  Le  texte  hébreu 
est  mal  reproduit  et  fort  incorrect;  il  aurait  pu  aisément 
être  constitué  d'après  les  bons  manuscrits  massorétiques 
qui  se  trouvaient  à  Paris  à  la  bibliothèque  du  roi. 
Pour  les  targums,  le  texte  d'Anvers  est  mêlé  à  celui  de 
la  Bible  de  Boniberg.  Il  eut  été  à  propos  d'imprimer, 
pour  les  Septante,  l'édition  romaine  faite  d'après  le 
Vaticanus,  et  pour  la  Vulgate,  la  Bible  clémentine. 
Pour  le  texte  grec  du  Nouveau  Testament,  Reuss,  Bi- 
bli"theca  N.  T.  grseci,  p.  75,  n'a  remarqué  que  neuf 
différences  d'avec  le  prototype.  Cf.  Gregory,  Textkritik 
des  X.  T.,  t.  n,  p.  940-941.  Relativement  aux  textes 
non  eaux,  l'absence  de  préfaces  et  d'Apparat  us  critique 
prive  de  renseignements  sur  leur  origine,  si  l'on  excepte 
le  Pentateuque  samaritain  et  sa  version  samaritaine. 
Ils  provenaient  des  manuscrits  achetés  à  Damas  par  le 
voyageur  Pietro  délia  Valle  pour  le  compte  de  M.  de 
Sancy,  ambassadeur  de  France  a  Constantinople,  et 
donnés  par  ce  dernier,  qui  était  devenu  oratorien,  à  la 
bibliothèque  de  l'Oratoire  (n.  1  et  2  du  fonds  samari- 
tain de  la  Bibliothèque  nationale).  Le  manuscrit  de 
Peiresc,  demandé  dés  1630  par  Vitré,  avec  des  manus- 
crits arabes,  ne  futapporté  à  Paris  qu'en  1632  par  Denis 
Guillemin  et  ne  put  être  utilisé.  L.  Dorez,  Notes  et 
documents  sur  la  Bible  polyglotte  de  Paris,  dans  le 


Bulletin  de  la  Société  d'Histoire  de  Paris  et  de  l'Ile- 
de-France,  17e  année,  1890,  p.  84-94.  La  version  arabe 
des  Evangiles  a  été  éditée  d'après  le  texte  arabe,  publié 
à  Rome  en  1591,  et  la  traduction  latine  est  celle  de 
J.-B.  Baymond,  revue  par  Gabriel  Sionite.  Pour  le  reste 
du  Nouveau  Testament,  on  avait  quelques  manuscrits 
arabes,  venus  d'Alep,  entre  autres  un  seul  sur  l'Apoca- 
lypse, provenant  deS.de  Brèves.  On  a  reproché  à  Gabriel 
Sionite  d'en  avoir  modifié  le  texte.  Les  versions,  syriaque 
et  arabe,  de  l'Ancien  Testament,  furent  éditées  à  l'aide 
d'éditions  antérieures  (le  Pentateuque  arabe,  publié  à 
Constantinople,  en  1546;  un  Psautier  syriaque  et  arabe 
édité  au  Mont-Liban,  en  1610;  un  Psautier  syriaque, 
Paris,  1625;  un  Psautier  arabe.  Genève,  1516;  Rome, 
1613), et  de  six  ou  sept  manuscrits  seulement.  En  1640, 
Sionite  avait  rapporté  de  Rome  un  manuscrit  syriaque, 
légué  par  Risius.  La  Polyglotte  de  Paris,  supérieure  à 
celle  d'Anvers  par  les  nouveaux  textes  qu'elle  contenait, 
n'eut  guère  d'iniluence,  supplantée  qu'elle  fut  bientôt 
par  la  Polyglotte  de  Londres. 

4°  Polyglotte  de  Londres.  —  1.  Histoire.  —  Comme 
la  Bible  de  Le  Jay  était  incommode  à  manier  et  très 
chère,  les  Anglais  décidèrent  de  publier  une  Polyglotte 
plus  commode  et  moins  coûteuse.  Brian  Walton,  qui 
fut  plus  tard  évèque  anglican  de  Chester,  s'en  chargea 
avec  desavants  collaborateurs.  Edmond  Castle  surveilla 
l'édition  des  textes  samaritains,  syriaques,  arabes  et 
éthiopiens;  il  fit  la  traduction  latine  de  la  version  éthio- 
pienne du  Cantique  et  composa  le  Lexicon  lieptaglotton, 
annexé  à  la  Polyglotte.  Samuel  Clarke  s'occupa  du 
texte  hébreu  et  des  targums.  et  traduisit  en  latin  la 
version  persane  des  Évangiles.  Thomas  Hyde  transcri- 
vit le  Pentateuque  persan  et  en  fit  la  traduction  latine. 
Alexandre  Huish  surveilla  l'impression  des  textes  grecs 
et  latins,  et  recueillit  les  variantes  du  Codex  Alexan- 
drinus.  La  nouvelle  Polyglotte  fut  publiée  par  souscrip- 
tion sous  le  patronage  de  Cromwell,  qui  lui  accorda 
l'exemption  des  droits  sur  le  papier.  Le  premier  volume 
parut  en  septembre  1654;  il  sortait,  comme  les  suivants, 
des  presses  de  Thomas  Roycroft,  à  Londres.  Il  contient 
une  dédicace  au  Protecteur.  Après  la  restauration  des 
Stuarts,  on  remplaça  cette  dédicace-  par  une  autre  à 
Charles  II.  On  distingue  par  suite  les  exemplaires 
royaux  et  les  exemplaires  républicains;  ceux-ci,  qui 
sont  les  plus  rares,  sont  les  plus  recherchés.  Le  t.  n 
est  daté  de  1655.  Le  t.  \i  et  dernier  parut  en  1657.  En 
1669,  on  y  joignit  le  Lexicon  lieptaglotton  de  Castle  en 
deux  in-folio.  La  Polyglotte  de  Londres,  qui  avait  été 
mise  à  l'Index  par  décret  du  29  novembre  1663,  à 
cause  de  ses  prolégomènes  (voir  H.  Reusch,  Der  In- 
dex der  verbotenen  Bâcher,  Bonn,  1885,  t.  n,  p.  124- 
125),  ne  figure  plus  dans  l'édition  officielle  du  cata- 
logue des  livres  prohibés,  publiée  en  1900. 

2.  Description.  —  Cette  Bible,  qui  forme  6  in-f»,  est 
intitulée  :  S  6'.  Biblia  poh/glotta  compleclens  textus 
originales  hebraicos  cum  Pentateucho  Samaritano, 
chaldaicos,  grsecos  versionumque  antiquarum  sama- 
ritaine, chaldaicse,  latinse  Vulgatse,  sethiopicx,  grœcœ 
Sept.,  syriacse,  arabicse,  persicse,  quicquid  comparari 
poterat  ex  mss.  antiqnis  undique  conquisitis  opti- 
misque  exemplaribus  impressis  summa  foie  collatis. 
Les  quatre  premiers  tomes  sont  remplis  par  l'Ancien 
Testament.  Le  I",  à  la  suite  de  la  préface  et  de  prolé- 
gomènes, dans  lesquels  Walton  parle  des  langues 
sacrées,  des  éditions  et  des  versions  de  la  Bible,  et  qui 
constituent  une  véritable  introduction  critique,  repro- 
duit le  Pentateuque  en  huit  langues.  Les  textes  sont 
disposés  sur  deux  pages  en  cet  ordre  :  au  verso,  en 
haut  de  la  page  sur  quatre  colonnes  parallèles,  le  texte 
hébreu  avec  la  version  interlinéaire  de  Santé  Pagnino 
revue  par  Arias  Montanus,  la  Vulgate  latine  de  la  Bible 
clémentine,  le  grec  des  Septante  d'après  l'édition  ro- 
maine du    Vaticanus  avec  les  variantes   de  VAlexan- 


523 


POLYGLOTTES 


524 


drinus,  placées  au-dessous,  la  version  laline  de  ce 
texte  grec,  empruntée  à  l'édition  de  Flaminius  Nobi- 
lius;  la  version  syriaque,  accompagnée  de  sa  traduction 
latine  est  dans  le  bas  de  cette  page;  au  recto,  le  haut 
de  la  page  contient  parallèlement  le  targum  d'Onkelos 
selon  l'édition  de  Bâle.  sa  version  latine,  le  texte 
hébreu  samaritain  et  sa  version  latine;  la  version  arabe 
et  sa  traduction  latine  occupent  le  bas  de  la  page.  Le 
t.  il  contient  les  livres  historiques,  de  Josué  à  Esther. 
La  disposition  est  à  peu  près  la  même  que  dans  le  t.  i, 
sauf  qu'au  recto,  il  n'y  a  que  le  targum  du  pseudo- 
Jonathan pour  les  livres  qui  en  sont  dotés,  avec  sa 
traduction  latine,  et  la  version  arabe  i qui  manque  pour 
Esther).  Le  t.  m  renferme  Job,  les  Psaumes,  les  Pro- 
verbes, PEeclésiaste,  le  Cantique,  les  grands  et  les 
petits  prophètes.  La  disposition  typographique  varie 
suivant  les  livres.  Sans  entrer  dans  plus  de  détails, 
signalons  seulement  un  texte  nouveau  :  la  version 
éthiopienne  des  Psaumes  et  du  Cantique.  Le  t.  iv  débute 
par  la  Prière  de  Manassé.  en  grec  et  en  latin,  le 
IIIe  livre  d'Esdras  (latin,  grec,  syriaque,  avec  traduc- 
tion latine  du  grec  et  du  syi'iaque),  le  IVe  livre  d'Esdras, 
en  latin  seulement.  On  trouve  ensuite  Tobie  (le  texte 
hébreu  selon  les  deux  éditions  de  Fage  et  de  Sébastien 
Munster  avec  leurs  traductions  latines  correspondantes, 
la  Vulgate,  le  grec  et  la  version  syriaque).  Pour  Judith, 
les  parties  deutérocanoniques  de  Jérémie  et  de  Daniel 
et  les  deux  livres  canoniques  des  Machabées.  il  n'y  a 
que  trois  grands  textes  (latin,  grec  et  syriaque);  une 
version  arabe  est  en  plus  pour  la  Sagesse,  l'Ecclésias- 
tique, Baruch.  Les  passages  deutérocanoniques  d'Esther 
ne  sont  qu'en  grec  et  en  latin.  Après  les  textes  grec  et 
syriaque  de  III  Mac  h.,  on  trouve  la  version  arabe  de 
II  .Macli.  La  seconde  partie  de  ce  t.  IV  contient  les  deux 
targums  du  Pentateuque,  dits  du  pseudo-Jonathan  et 
de  Jérusalem,  intercalés  l'un  dans  l'autre  et  accom- 
pugnés  de  leurs  traductions  latines,  la  version  persane 
des  mêmes  livres  avec  traduction  laline.  Le  t.  V  est 
consacré  au  Nouveau  Testament.  Il  contient  superposés, 
au  verso,  le  texte  grec  (édition  Robert  Estienne)  avec 
la  version  laline  interlinéaire  d'Arias  Montanus,  les 
versions  syriaque  et  éthiopienne  avec  leurs  traductions 
latines,  au  recto,  la  Vulgate  et  les  versions  arabe  et 
perse  (celle-ci  pour  les  Évangiles  seulement),  avec 
leurs  traductions  latines.  Le  t.  vi  sert  d'Appendice  et 
renferme  des  notes  de  divers  auteurs  et  des  recueils  de 
variantes,  avec  l'Indea  de  l'ouvrage  entier.  Le  il 
heptaglolton  de  Castl'e,  2  in-f»,  Londres,  1669,  est  sou- 
vent  ajout.'  à  la  Polyglotte  de  Walton. 

li.  Valeur.  —  La  Polyglotte  de  Londres  est  la  plus 
complète  et  la  meilleure  qui  ait  été  publiée.  Elle  est 
loin  cependant  d'être  parfaite.  Les  Prolégomènes  de 
Wallon,  qui  ont  été  réédités  à  part,  in-f°,  Zurich,  H>7:», 
et  par  Dathe,  Leipzig,  1777,  ont  été  critiqués  en 
plusieurs  points  par  Richard  Simon,  Histoire 
tique  du  Vieux  Testament,  Rotterdam,  1685.  p.  isi- 
510.  Cf.  Réponse  de  Pierre  Ambrun,  ministre  du 
saint  Évangile,  »  l'Histoire  critique  du  Vieua  Tes- 
tament, ibid.,  p.  16  18;  Lettres  choisies,  Paris.  1730, 
t.  n,  p.  275;  t.  m.  p.  122.  Les  éditeurs  ont  emprunté 
aux  Polyglottes  d'Anvers  et  de  Paris  la  version  inter- 
linéaire de  l'hébreu,  le  Pentateuque  samaritain  et  sa 
version  samaritaine,   la  version  syriaque  de  l'Ancien 

testament  et  la  version  arabe  du  Nouveau.  Au  lieu  de 
rééditer  ces  versions,  prisés  a  la  Polyglotte  de  Paris 
par  un  larcin  public  t,  connue  dit  li.  Simon,  on  aurait 
pu  reproduire  de  meilleurs  textes  ou,  au  moins,  revoir 
les  traductions  latines  correspondantes,  qui  sont  mal 
Elle  a,  en  progrès  sur  les  précédeutes,  reproduit 
l'édition  romaine  des  Septante,  l'édition  de  l'Italique 
par  Flarninius  Nobilius  el  la  Vulgate  clémentine.  Elle 
a    produit    aussi    des    textes    nouveaux    :    un    Psautier 

pien,    déjà    imprimé  à  Cologne  et    à  Rome,  la 


version  éthiopienne  du  Cantique  et  du  Nouveau  Tes- 
tament, publiée  pour  la  première  fois,  et  la  version 
persane  des  Évangiles,  tirée  d'un  manuscrit  de  Poco 
Les  trois  targums  du  Pentateuque  étaient  empruntés 
à  l'édition  de  Buxtorf.  et  la  version  persane  de  ce  livre 
à  l'édition  de  Conslantinople.  Le  texte  grec  du  Nouveau 
Testament  provenait  de  l'édition  d'Estienne  de  1550, 
dont  le  texte  n'est  modifié  qu'en  trois  passages. 
Ed.  lleuss.  Bibliolheca  N.  T.  grseci,  p.  56.  A  la  marge, 
on  lit  les  variantes  du  codex  Alexandrinus,  recueillies 
par  Huish.  Les  notes  et  les  variantes,  éditées  dans  l'ap- 
pendice ont  généralement  peu  de  valeur.  Gregory, 
Textkritik  des  N.  T.,  t.  n.  p.  9il-9i2.  Nonobstant  ces 
défauts,  la  Polyglotte  d'Angleterre  reste  un  instrument 
très  utile  pour  l'étude  critique  de  la  Bible, 

III.  Polyglottes  partielles  ou  moins  importantes 

FAITES  AUX   XVIe,   XVIIe  ET  XVIII'   SIÈCLES.  —  \"  Le  f'sn 

de  Justiniani.  —  Bien  qu'imprimé  après  le  Nouveau 
Testament  d'Alcala,  il  a  été  publié  en  1516,  avant  la 
Polyglotte  de  Xiinénès.  Son  éditeur,  Augustin  Justiniani. 
religieux  dominicain  et  évéque  de  Nebbio.  avait  projeté' 
la  publication  d'une  polyglotte  qu'il  ne  put  exécuter.  Il 
n'a  donné  que  le  psautier  en  cinq  langues:  Psalteri  ion 
hebrseum,  grsecum,  arabicum  el  chaldaicum  cum 
tribus  latinis  interpretationibus  et  glossis,  in-i'  . 
Gênes,  1516-  Chaque  page  comprend  quatre  colonnes, 
qui  contiennent,  au  verso,  l'hébreu,  sa  traduction 
latine,  la  Vulgate  et  le  texte  grec,  au  recto,  la  version 
arabe,  le  targum,  la  version  latine  du  targum  el  des 
scolies  et  remarques. 

2°  Le  Psautier  de  Polken.  —  .ban  Polken,  prévôl 
de  la  collégiale  Saint-Georges  de  Cologne,  a  fait  impri- 
mer, en  1518,  un  Psautier  eu  quatre  langues  :  hébreu, 
grec,  latin  et  éthiopien  (qu'il  appelle  chaldéen).  Cette 
version  éthiopienne  a  été  reproduite  dans  la  Polyf 
de  Londres. 

3°  Les  deux  Pentateuques  polyglottes  des  Juij 
Constanlinople.  —  En  1546,  les  Juifs  de  Constantinople 
firent  imprimer  le  Pentateuque  en   plusieurs  lau 
Au  milieu  de  la  page  se  trouve  le  texte  hébreu  en  gros 
caractères,    il   est  accompagné  d'un  côté  du   targum 
d'Onkelos  en  caractères  médiocres  et  de  l'autre 

paraphrase  persane.  En  dehors  de  ces  trois  colonnes,  il  \ 
a  en  haut  de  la  page  la  version  arabe  de  Saa.lias  (iaon. 
et  au  bas  le  commentaire  de  Babbi  Isaac  Iarcbi.  Les 
lextes  arabe  et  persan  sont  imprimés  en  caractères 
hébreux.  L'année  suivante.  1517,  parut  dans  la  même 
ville  un  autre  Pentateuque  polyglotte  avec  la  meioe 
disposition  des  textes.  Le  texte  hébreu,  qui  est  aussi  au 

milieu,  est  accompagné  d'une  traduction  en  grec  vul- 
gaire et  d'une  version  espagnole;  ces  deuxtraduc 
sont  imprimées  en  caractères   hébreux   avec  points- 
voyelles.  Au  haut  de  la  page,  court  te  targum  d'Onkelos 
et  au  bas,  le  commentaire  de  .Iarcbi. 

)     Essais  de   Draconitès.  —  Jean  Draconitès  (1491 
1566)  avait  entrepris  uni'  Biblia  pentapla.  Il  n'en  a  pu- 
blié que  de  courts  fragments  ou  spécimens  :  les  six 
premiers  chapitres   de    la   Genèse,   in-f",   Wittemberg, 
loti!!;  les  deux  premiers  Psaumes,   ibid.,   1563;  les   sepl 

premiers  chapitres  d'Isaïe,  Leipzig,  loti:;;  les  Provi 
Wittenberg,  1564;  Malaehie,  Leipzig,  1561;  Joël.  Wit- 
temberg, 1565;  Zacharie,  ibid.,  lôtiô;  Michée,  ihid..  1565, 
Ces  textes  étaient  imprimés  en  cinq  langues  :  hébreu, 
chaldéen, grec,  latin,  version  allemande  de  Luther. Par 
une  disposition  bizarre,  ces  cinq  lextes  sont  superposi  B 
ligne  par  ligne.  Les  Septante,  la  Vu  h  He  et  la  traduction 
allemande  sonl  corrigés  d'après  lie  bien.  Les  passages 
messianiques  sont  en  encre  rouge.  Un  commentaire  esl 
encore  au-dessous  de  ces  cinq  lignes  du  texte, 
suite  est  de  la  sorte  maladroitement  interrompue. 

5"  /.«  Polyglotte  de  Bertram,  ou  de  Heidelberg.  —  Un 
calviniste  d'origine  française,  Corneille-Bonaventure 
Bertram.  professeur  d'hébreu  à  t'.enève  (1566-1581).  puis 


525 


POLYGLOTTES 


526 


prédicateur  à  Frankenthal,   morl  en  1591,  publia  une 

Biblia  sacra,  hebraice.  grsece  et  latine-,  i  in-f".  Heidel- 
berg,  1587.  Elle  ne  contenait  que  l'Ancien  Testament  en 
hébreu,  en  grec,  avec  la  Vulgate  et  la  version  de  Pa. 
gnino.  Dieu  que  le  titre  ajoute  :  Omnia  cum  éditions 
Complutensi  diligenter  collala,  l'édition  n'est  qu'une 
reproduction  de  la  Polyglotte  d'Anvers;  elle  lui  a  em- 
prunté aussi  les  deutérocanoniques  de  l'Ancien  Testa- 
ment. Une  deuxième  édition  parut  en  4599.  Latroisiè 

faite  chez  Commelin,  en  1616.  comprend  en  outre  le 
Nouveau  Testament  avec  la  version  latine  d'Arias  Mon- 
lanus,  le  tout  emprunté  encore  à  la  Polyglotte  d'Anvers. 
Voir  Ed.  Reuss,  Bibliotheca  A".  T.  gi'seci,  p.  78-79.  Ce 
n'est  donc  pas  une  Polyglotte  pour  le  Nouveau  Testa- 
ment. Comme  cette  Cible  contenait  des  notes  de  Valable. 
on  l'appelle  parfois  la  Bible  de  Valable. 

6°  La  Polyglotte  d'Hambourg..  —  On  la  rencontre 
rarement  complète.  Elle  comprend  :  1.  le  texte  hébreu 
de  la  Bible  hébraïque  d'Elie  llutter.  in-f",  15S7,  dont 
la  date  est  remplacée  par  celle  de  1596,  et  dans  laquelle 
les  lettres  de  la  racine  sont  typographiquement  distin- 
guées des  autres  caractères;  2.  l'édition  de  David 
Wolder  qui  contient  en  6  in-f"  et  sur  quatre  colonnes 
le  texte  grec  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament,  la 
Vulgate.  la  traduction  latine  de  l'Ancien  Testament  par 
Pagnino  et  celle  du  Nouveau  par  Théodore  de  Bèze, 
enfin  la  version  allemande  de  Luther.  Les  deux  ouvrages 
sortent  des  presses  de  Jacques Lucius,  à  Hambourg,  1596. 
Le  texte  grec  du  Nouveau  Testament  est  emprunté,  sauf 
de  rares  modifications,  à  l'édition  de  Samuel  Sellisch, 
in-8°.  Wittenberg,  Io83.  Cf.  Ed.  Reuss,  Bibliotheca  N.  T. 
graeci,  p.  63-64.  Cette  Polyglotte,  qui  est  très  imparfaite, 
ruina  son  éditeur,  bien  que  le  gouvernement  danois 
ait  obligé  toutes  les  églises  du  Schleswig  à  l'acheter. 

7°  Les  Bibles  de  llutter.  —  Êlie  Hutler.  ancien  pro- 
fesseur d'hébreu  de  l'électeur  de  Saxe  et  imprimeur  à 
Nuremberg,  avait  la  passion  des  Polyglottes.  Il  en  pu- 
blia plusieurs  qui  sont  toutes  imparfaites.  —  1  -  Il  avait 
commencé  un  Ancien  Testament  en  six  langues  et  en 
quatre  éditions  différentes.  Le  seul  volume  paru,  in-f", 
Nuremberg,  1599,  comprend  six  textes  en  six  colonnes. 
Sur  la  page  de  gauche,  on  trouve  l'hébreu  entre  le  tar- 
gum  et  le  grec,  le  tout  d'après  la  Polyglotte  d'Anvers; 
sur  la  page  de  droite,  il  y  a  la  version  allemande  de 
Luther  entre  la  Vulgate  et  une  autre  version  récente, 
qui  diffère  selon  les  exemplaires,  destinés  à  des  nations 
différentes.  La  sixième  colonne,  en  effet,  reproduit,  ou 
bien  la  version  slavonne  de  l'édition  de  Wittemberg, 
ou  bien  la  traduction  française  de  Genève,  ou  bien  la 
version  italienne  de  Genève,  ou  bien  la  version  saxonne 
faite  sur  la  traduction  allemande  de  Luther.  Ce  volume 
ne  dépasse  pas  le  livre  de  Ruth.  —  -2.  Un  Psautier  hé- 
breu, grec,  latin  et  allemand,  in-8",  Nuremberg,  1602. 
—  3.  Un  Nouveau  Testament  en  douze  langues,  2  in-f", 
Nuremberg.  1599.  Les  douze  textes  sont  disposés  sur  six 
colonnes  de  la  manière  suivante  :  Au  verso,  dans  la 
1"  colonne,  la  version  syriaque  de  l'édition  de  Trémé- 
lius.  1569  (l'auteur  a  suppléé  les  passages  manquants  : 
le  récit  de  la  femme  adultère,  le  verset  des  témoins  cè- 
les quatre  Epitres  catholiques  et  l'Apocalypse, 
qu  il  a  traduits  en  syriaque  d'après  le  grec),  avec  la 
ver  ion  italienne,  de  Bruccioli,  1526,  l'une  sous  l'autre, 
verset  par  verset;  dans  la  2e  colonne,  un  texte  hébreu 
que  l'éditeur  avait  fabriqué,  imprimé  en  caractères  de 
deux  sortes,  et  la  traduction  espagnole  de  Cassiodore 
Reina.  1569;  d  ins  la  3e,  le  grec  et  la  version  française 
de  Genève,  de  1588.  Au  recto,  la  1"  colonne  contient 
la  Vulgate  et  la  version  anglaise  de  1562,  la  2«,  la  ver- 
sion de  Luther  et  la  traduction  danoise  de  1589,  et  la 
3e,  la  version  bohémienne  de  1693  et  la  version  polo- 
naise de  1596.  I  lutte  i-  reproduisit  l'Epi  Ire  aux  Laodicéens 
qu'il  avait  lui-même  traduite  en  grec  sur  le  texte  latin. 
Cette  œuvre  n'a  aucun  caractère  scientifique,  et  rien 


n'égale  l'audace  et  l'arbitraire  avec  lesquels  l'éditeur 
constitue  ses  texles.  Pour  le  grec  du  Nouveau  Testa- 
ment, il  n'a  pas  tenu  compte  des  règles  critiques,  mè- 
l.mi  les  leçons  anciennes  à  sa  guise  et  en  fabriquant 
impudemment  en  conformité  avec  les  doctrines  luthé- 
riennes. Ed.  Reuss,  Bibliotheca  N.  T.  grœci,  p.  105- 
106.  —  i.  Un  autre  Nouveau  Testament  en  quatre  lan- 
gues :  hébreu,  grec,  latin  et  allemand,  emprunté  au 
précédent  sans  grandes  modifications,  in-l°,  Nurem- 
berg, 1602.  On  en  fit  un  nouveau  titre  en  1615,  pour 
représenter  une  soi-disant  édition  d'Amsterdam,  chez 
.1.  Walschaert.  Ed.  Reuss,  op.  cit.,  p.  106.  —  5.  Hutter 
a  édité  aussi  quelques  prophéties  et  les  quatre  Evan- 
giles en  douze  langues. 

8°  La  Polyglotte  de  Reineccius  ou  de  Leipzig.  — 
Chr.  Reineccius.  curé  de  Weissenfels,  prépara  une 
nouvelle  Polyglotte  en  quatre  langues,  qui  parut  à 
deux  époques  assez  éloignées  l'une  de  l'autre.  Le  Nou- 
veau Testament  fut  édité,  in-f".  à  Leipzig,  en  1713. 
sous  ce  titre  :  Biblia  sacra  quadrilinguia  N.  T.  A  la 
suite  d'une  préface  de  Reineccius  et  de  prolégomènes 
en  allemand,  tirés  de  Luther,  les  textes  sont  imprimés 
sur  cinq  colonnes  parallèles.  Sur  la  page  de  gauche, 
se  trouve  le  texte  grec  entre  la  version  syriaque  et  une 
traduction  en  néo-grec;  sur  la  page  de  droite,  on  lit  la 
version  latine  de  Sébastien  Schmid  et  la  version  alle- 
mande de  Luther.  Les  passages  parallèles  sont  indiqués 
à  la  marge  extérieure;  des  variantes  grecques  et  alle- 
mandes, celles-ci  prises  à  la  première  édition  de  Lu- 
ther avec  îles  notes  marginales  de  Luther  et  des  anno- 
tations de  Reineccius,  sont  au  bas  de  la  page.  En 
appendice,  se  trouvent  des  additions  critiques  et  exé- 
gétiques  de  diverse  nature.  Le  texte  grec,  qui  ressemble 
souvent  à  celui  de  Pritius,  mêle  les  leçons  de  Robert 
Estienne  et  des  Elzévier.  Il  a  été  souvent  réédité  à  part. 
Ed.  Reuss,  op.  cit.,  p.  157-159.  L'impression  de  l'An- 
cien Testament  était  déjà  commencée  en  1713,  mais 
elle  subit  de  longs  retards.  Quand  elle  fut  fort  avancée, 
en  17'i-7,  l'imprimeur  fit  un  nouveau  titre  au  Nouveau 
Testament,  et  enfin,  trois  et  quatre  ans  plus  tard,  en 
1750  et  1751,  parut  l'Ancien  Testament  en  2  in-f».  Ces 
volumes  contiennent  le  texte  hébreu,  le  texte  grec  des 
Septante,  la  version  latine  de  Schmid  et  la  version 
allemande  de  Luther. 

IV.  Projet  d'une  nouvelle  Polyglotte  par  Richard 
Simon.  —  En  1678,  dans  son  Histoire  critiquedu  Vieux 
Testament,  édit.  de  Rotterdam,  1685,  p.  521-522,  Ri- 
chard  Simon  avait  esquissé  le  projet  d'une  nouvelle 
Polyglotte,  qui  ne  serait  qu'un  abrégé  de  la  Polyglotte 
de  Londres.  Au  lieu  d'imprimer,  dans  des  volumes 
lourds,  difficiles  à  manier  et  chers,  toutes  les  anciennes 
versions,  il  ne  reproduirait  que  les  variantes  de  celles 
qui  sont  dérivées.  Par  conséquent,  la  nouvelle  Po- 
lv glotte  ne  devait  être  composée  que  de  trois  textes 
complets  :  le  texte  hébreu,  la  version  des  Septante  et 
la  Vulgate  latine.  Le  P.  Simon  avait  d'abord  pensé  y 
joindre  Vllala  d'après  l'édition  de  Flaminius  Nobi- 
lins.  Il  ne  voulait  éditer  ni  le  Penlaleuque  samaritain, 
ni  la  version  samaritaine,  ni  les  targums;  leurs  va- 
riantes auraient  seulement  été  indiquées  a  la  marge  en 
face  de  l'hébreu.  Les  autres  targums,  qui  sont  plutôt 
des  commentaires  que  des  versions,  pourraient  être 
négligés,  sauf  à  noter  à  la  marge  leurs  leçons  propres. 
Quant  aux  autres  versions,  leurs  variantes  seraient 
signalées  en  face  de  l'hébreu  pour  celles  qui  dérivent 
.le  ce  texte,  ou  en  face  îles  Septante  pour  celles  qui  en 
suivent  le  texte.  De  celles  qui  sont  mixtes,  comme  la 
version  syriaque  remaniée  d'après  les  Septante,  on  ne 
noterait  que  les  leçons  vraiment  spéciales.  Les  variantes 
latines  accompagneraient  aussi  la  Bible  clémentine. 
Retiré'  à  Dieppe,  des  1681,  Simon  avait  préparé  l'An- 
cien Testament  conformément  à  ce  plan.  Il  avait  pris 
un  exemplaire  de  la  Polyglotte  de  Wallon,  et  au  moyen 


527 


POLYGLOTTES 


528 


de  bandes  de  papier  collées,  il  avait  couvert  ce  qu'il 
voulait  omettre,   et   écrit   ce   qu'il   désirait   ajouter   ou 
substituer.   En   16S'r,   sous   forme  de   lettre  adressée   à 
Ambroise  par  Origène,  il  développait  son  projet  :  No- 
vnrum     Bibliorum     polyglotlorum     synopsis,     in-S", 
L'treclit,  datée  du  20  août  1081.  Il  aurait  mis  aussi  au 
bas    des    pages   les    passages  conservés   des    versions 
d'Aquila  et  de    Symmaque  et  différents  des  Septante. 
Dans  une  réponse  d'Ambroise  à  Origène  :  Ambrosii  ad 
Origenem  epistola  de  m, ris  Bibliis  polygloltis,  datée 
du  1"  décembre  I68i,  in-8",  Utrecht,  1685,  il  annonce 
que  sa   Polyglotte  serait  heureusement  complétée  par 
un  dictionnaire  et  une  grammaire  hébraïque,  dont  il 
dressait  le  plan.  Cf.  Bayle,  Nouvelles  de  la  République 
des  lettres,  octobre  1684,  art.  13,  t.  i,  p.  153-155;  jan- 
vier 1685,  art.  9,  t.  i,  p.  209-211;  Journal  des  Sçavans, 
30  juillet  1685.  Voir  aussi  H.  Simon.  Réponse  de  Pierre 
Ambrun,  ministre  du  sainl  Evangile,  à  l'Histoire  cri- 
tique   ilu    Vieux   Testament,   Rotterdam,  1685,    p.  48. 
Ce  projet  fut  loué  par  Le  Clerc  et  blâmé  par  Jurieu. 
Au  premier,   qui  sous  le  pseudonyme  de  Cristobulus 
Hierapolitanus,    écrivit    à    Origène   une    longue   lettre 
latine,  datée  du   4  novembre  1684,  publiée  partielle- 
ment par  R.  Simon,  Réponse  au  livre  intitulé  :  Sen- 
timent de  quelques  théologiens  de  Hollande  sur  l'His- 
toire critique  du    Vieux  Testament,  Rotterdam,  1686, 
p.  2-5,  et  intégralement  par  Le  Clerc,  Défense  des  Sen- 
timent,   etc.,   1686,   p.    421   sq.,   Simon    demanda   des 
conseils  et  des  renseignements  dans  un  billet  en  fla- 
mand, traduiten  français  dans  la  Réponse  au  livre,  etc., 
p.  5-6.  Jurieu,  de  son  coté,  avait  attaqué  le  projet  de 
Simon  dans  son  livre  sur  V Accomplissement  des  pro- 
phéties.  Simon   répliqua    violemment.  Réponse    à    la 
Défense  <les  Sentiment,  etc.,  Rotterdam,  1687,  p.  194- 
198.  Il  continua  la  préparation  de  cette  Polyglotte,  qui 
devait  être  complète  en  un  seul  volume.  Si  elle  n'a  pas 
été  imprimée,  ce  ne  fut  pas,  comme  l'a  dit  le  Père  Le- 
long,  parce  qu'aucun  imprimeur  n'a  voulu  en  faire  la 
dépense;  ce  fut  seulement  parce   qu'il   ne   s'en  trouva 
aucun  assez  habile  pour  imprimer  un  ouvrage  qui  exi- 
geait, sur  la  même  page,  tant  de  caractères  différents. 
La  première  feuille  fut  imprimée;  elle  fourmillait  de 
tant  de  fautes  qu'il  fut  impossible  de  les  corriger,  It. 
Simon,  Critique  de  la  Bibliothèque  des  auteurs  ecclé- 
siastiques, Paris,  1730,  t.  Il,  p.  449-450.  Quand  11.  Si- 
mon écrivait  ce  dernier  ouvrage,  la  meilleure  partie  de 
la  copie  de  sa  polyglotte   était  prèle.  Son  travail  passa, 
après  sa  mort,  à  la  bibliothèque  du  chapitre  cathédral 
de  Rouen,  à  qui  il  avait  légué  ses  manuscrits.  L.  Bat- 
terel,  Mémoires  domestiques  pour  servir  à  l'histoire 
de  l'Oratoire,  édit.  Ingold  et  Bonnardet,  Paris,   1905, 
t.  iv,  p.  273-275;  Saas,  Notice  des  manuscrits  de  la  bi- 
bliothèque de  l'Église  métropolitaine  de  Rouen,  in- 12, 
Rouen,    17i(i,  p.  41    sq.;  A.  Bernus,  Richard  Simon 
et  son  Histoire  critique  du  Vieux  Testa/ment,  Lausanne, 
1869,  p.  29,  107.  Le  manuscrit  dont  des  parties   man- 
quaient déjà  en  1746,  ne  se  trouve  pas  à  la  bibliothèque 
municipale  de   Rouen,  qui  a   hérité  des  autres  manus- 
crits de  Richard  Simon. 

V.  Polyglottes  manuelles  pi  bliées  ai-  xix*  et  ai' 
xxe  siècle.  —  1°  La  Polyglotte  de  Bagster.  —  L'édi- 
teur anglais  Bagster  a  donné  au  publie  :  lliblia  sacra 
Polyglotta  lextus  archetypos  versionesque  prsecipuas 
ah  Ecclesia  anliquilus  reeeptas  neemm  rersiones  re- 
centiores,  2  in-f°,  Londres,  1831.  Après  îles  prolégo 
mènes  dus  à  S.  Lee.  cette  Polyglotte  reproduit  en  petits 
caractères  l'hébreu  de  Van  (1er  iluoght,  le  Pentateuque 
samaritain  de  Kennicott,  les  Septante,  la  Vulgate,  la 
Peschito,  le  texte  grec  du  Nouveau  Testament  (édition 
de  Mill),  les  traductions,  allemande  de  Luther,  italienne 
de  Diodati,  française  d'tiMcrwnld,  espagnole  de  Scio  et 
la  version  anglaise  dite  autorisée.  Elle  a  été  rééditée 
sous  ce  titre  :  Bagster' s   Polyglot  Bible  in  eigltt   lau- 


gtiages,  2  in-f".  Londres,  1874.  Elle  ne  comprend  que 
les   livres    protocanoniques.    Ragster  a   aussi   publié 
Hexapla  Psalter,  in-4".    I8i3,  contenant  les  Psaumes 
en  hébreu, en  grec,  en  latin,  Psalterium  hebraicumet 
gallicanum,  de  saint  Jérôme  et  deux  divisions  anglaises. 

2"  l.a  Polyglotte  de  Stier  el  de  Theile.  —  Stier  et 
Theile  ont  publié  une  Polyglotte  manuelle  :  Polyglot- 
ten-Bibel  zuin  praktischen  Handgebrauch,  4  in-8"  en 
6  parties,  Bielefeld,  1846-1855.  Elle  contient,  pourl'An- 
cien  Testament,  l'hébreu,  les  Septante,  la  Vulgate  et  la 
version  allemande  de  Luther,  et  pour  le  Nouveau,  le 
grec,  avec  linéiques  variantes,  le  latin  et  l'allemand. 
Elle  a  eu  plusieurs  éditions  dont  la  dernière  date  de 
1890.  Dans  les  trois  premières  qui  ontété  stéréotypées, 
la  quatrième  colonne,  pour  le  Nouveau  Testament,  est 
remplie  île  variantes  de  diverses  traductions  allemandes. 
Dans  la  quatrième  (1855)  et  la  cinquième  1858),  cette 
colonne  est  occupée  par  une  version  anglaise.  Dans 
l'édition  de  1875,  on  a  ajouté  en  appendice  les  princi- 
pales variantes  du  Sinaiticus.  Sur  la  constitution  du 
texte  grec  du  Nouveau  Testament,  voir  Éd.  Reuss.  Bi- 
liliolheca  N.  T.  grseci,  p.  265.  Ce  lexte  diffère  peu  du 
texte  reçu.  L'hébreu,  revu  par  Bôckel  et  Landschrei- 
ber,  n'est  pas  1res  bon.  Les  deutérocanoniques  manquent. 

3°  Biblia  tetraglotta  de  Bunsen.  1859.  sous  la  direc- 
tion de  Lagarde,  est  demeurée  à  l'état  de  projet . 

1  Ed.  de  Levante  a  publié  une  llexaglotte  et  une 
Triglotle  ;  Hexagloll  Bible,  comprUing  the  holy  Scri- 
plures  of  the  Oldand  Neiv  Testament,^ in-4", Londres, 
1876,  qui  contient  l'hébreu,  les  Septante,  la  version  sy- 
riaque du  Nouveau  Testament,  la  Vulgate,  la  vei 
anglaise  autorisée,  une  version  allemande  et  une  ver- 
sion française;  Biblia  Triglotta  continent  Script 
sacras  Veteris  el  Novi  Testamenti,  -  in-i".  Londres. 
1890,  qui  est  un  extrait  de  l'Hexaglotte  et  qui  contient, 
pour  l'Ancien  Testament,  l'hébreu,  les  Septante  et  la 
Vulgate,  pour  le  Nouveau,  le  grec,  la  Peschito  et  la 
Vulgate.  Les  livres  deutérocanoniques  en  sont  absents. 

5°  M.  Vigouroux  a  entrepris  la  publication  d'une  Po- 
lyglotte  catholique  el  française  ;  La  sainte  Bible  Poly- 
glotte contenant  le  laie  hébreu  original,  le  texte  grec 
des  Septante,  le  texte  latin  de  la  Vulgate  et  la  tra* 
duction  française  de  M.  l'abbé  Glaire,  avec  les  diffé- 
rences de  l'hébreu,  des  Septante  et  de  la  Vulgate. 
îles  introductions,  des  miles,  des  cartes  et  des  illustra- 
titms.  Elle  formera  8  in-8»  dont  six,  contenant  toul 
l'Ancien  Testament,  et  le  septième  comprenant  lesEvan- 
giles  et  les  Actes,  ont  déjà  paru.  Paris,  1898-1908,  Les 
textes  sont  disposés  sur  quatre  colonnes,  avec  notes  et 
variantes  au   bas   des  pages.  Le  texte  hébreu  a   éle     n 

prunté  a  l'édition  stéréotypée  de  Stier  et  de  Theile  (texte 
de  Van  der  Hooghi,  revu  par  Ilahn  et  Theile).  Le  texte 

des  Septante  est  celui  de  l'édition  romaine  de   I5S7.  avec 

quelques  additions  tirées  de  la  Polyglotte  d'Alcala.  Des 

Signes,  introduits  dans  le  texte,  indiquent  les  lacunes, 
les  additions  et  les  divergences  les  plus  notables  rela- 
tivement à  l'hébreu.  Au  bas  de  la  colonne  sont  les  prin- 
cipales variantes  de  ['Alexandrinus,  du  Sinaiticus,  de 
1  ' IÇ/ilicn  initiais,  etc.  La  Vulgate  clémentine  est  conforme 
à  la  réimpression  officielle,  faite  à  Turin  en  1881.  La 
traduction  française  de  Glaire  esl  accompagnée  de  notes. 
A  partir  du  t.  n,  les  variantes  grecques  sont  plus  nom- 
breuses, on  trouve  en  plus  celles  de  l'Ambrosiamu  et 
du  l'urisinus,  n.  8,  du  liuislmiiiuiis  \  111  pour  Tobie, 
du  Marc/ialianus  pour  les  prophètes;  un  double  texte 
grec  pour  certains  passages  de  Tobie  et  de  Judith,  avec 
les  variantes  pour  le  reste  de  Tobie  el  pour  Esther;  les 
parties,  récemment  retrouvées,  du  texte  hébreu  de  l'Ec- 
clésiastique. Les  Epitres  et  l'Apocalypse  seront  B  te 
nues  dans  le  t.  VIII. 

6"  Indiquons  enfin  quelques  Polyglottes  partielles  ; 
Tischendorf,  Novum  Testanicniuni  triglottuni,  in-8°, 
Leipzig,  185!  ;  2«  édit.,  ibid.,  1805,   a    publié   le   texte 


529 


POLYGLOTTES 


POMMIER 


530 


grec  avec  des  variantes,  la  revision  de  saint  Jérôme 
d'après  les  manuscrits  avec  les  leçons  différentes  delà 
Vulgate  clémentine  et  la'version  allemande  de  Luther, 
revue  sur  les  premières  éditions;  He.ragjoll  Bible  de 
Cohn.  1856-1S59,  jusqu'aux  Nombres;  1868,  tout  le  Pen- 
tateuque;  Hexaglot  Pentateuch  de  Robert  Young, 
Edimbourg,  1851  :  textes  samaritain,  chaldéen, syriaque 
et  arabe  des  cinq  premiers  chapitres  de  la  Genèse  ; 
Parabola  de  seminatore  ex  Erangelio  Matthsei,  in 
LXXJI  Europeas  linguas  ac  dialectes  versa,  ac  Roma- 
nis characteribus  expressa,  Londres.  1857  (édition  pri- 
vée du  prince  L.-C.  Bonaparte 

Sur  les  Polyglottes,  voir  Richard  Simon,  Histoire 
critique  du  Vieux  Testament,  in-S".  Rotterdam.  1685. 
p.  514-522;  P.  Lelong,  Discours  historique  sur  les 
principales  éditions  des  Bibles  polyglottes,  ïn-12,  Pa- 
ris, 1713:  ld.,  Bibliotheca  sacra,  in-fol.,  Paris,  17-2,!. 
t.  i.  p.  1-47;  dom  Cathelinot,  Bibliothèque  sacrée, 
part.  III,  a.  1.  dans  le  Dictionnaire  de  la  Bible  de  dom 
Calmet,  Paris,  1730.  t.  iv,  p.  '297-302;  G.  Outhuys, 
Geschiedkundig  verslag  der  voornaamsle  uitgaven  van 
het  Biblia  Polyglolta,  in-8»,  Franeker,  1822;  Brunet, 
Manuel  du  libraire,  Paris,  1860,  t.  i,  col.  8i9-8ôi;  En- 
cyclopédie des  sciences  religieuses  de  F.  Lichtenberger, 
t.  x,  p.  676  sq.  (art.  Polyglottes  de  S.  Berger);  F.  Vi- 
goureux. Manuel  biblique,  12e  édit . ,  Paris,  1906,  t.  i, 
p.  260-261;  Ch.  Trochon,  Introduction  générale,  Paris, 
1886,  t.  i,p.  449-455;  R.  Cornely,  Introductio  generalis, 
2  <  dit.,  Paris,  1894.  p.  527-532:  Realencyclopâdie  fur 
protestanlische  Théologie  und  Kirehe,  t.  xv.  p.  528-535. 

E.  Mangenot. 

POLYPE,  zoophyte  à  longs  filaments  mobiles.  Voir 
Corail,  t.  n,  col.  955. 

POMARIUS.  Voir  Baujjgarten  2,  t.  i,  col.  1518. 

1.  POMME.  Voir  Pommier. 

2.  POMME     DE     SODOME.    Voir     JÉRICHO,    t.    m, 

col.  1291  et  fig.  226,  col.  1290. 

POMMIER  (hébreu  :  tappûah;  Septante  :  [»jXov; 
Vulgate  :  malum),  arbre  fruitier  de  Palestine. 

I.  Description.  —  Cet  arbre  a  donné  son  nom  à  une 
tribu  de  Rosacées  dont  il  est  le  type,  les  Pomacées,  à 


120.  —  Malus  communis. 

fruit  comprenant,  outre  les  carpelles  soudés  à  son 
centre,  une  enveloppe  charnue  formée  en  partie  par  le 
réceptacle  ou  le  tube  du  calice.  Son  sommet  porte  une 
dépression  ou  œil  limité  par  les  sépales  ou  par  la  trace 
de  leurs  cicatrices.  Dans  les  vrais  Malus  chacune  des 
5  loges  de  l'ovaire  renferme  seulement  deux  ovules, 
alors  qu'ils  sont  nombreux  dans  les  Cognassiers.  Au- 


tour de  la  graine  ou  pépin  l'endocarpe  est  cartilagi- 
neux au  lieu  d'être  osseux  comme  dans  les  Xétliers, 
ou  totalement  charnus  comme  dans  les  Poiriers.  Enfin 
le  pédoncule  s'insère  dans  une  cavité  basilaire  de  ce 
fruit  qui  est  ainsi  ombiliqué,  avec  une  forme  généra- 
lement déprimée. 

Les  Pommiers  sont  originaires  de  toute  la  région 
silvatique  de  l'Ancien  Monde.  Mais  l'espèce  la  plus  ré- 
pandue en  Europe  à  l'état  spontané,  le  Malus  acerba, 
semble  manquer  dans  la  région  orientale,  où  l'on  ne 
trouve  que  le  M.  Communis  (fig.  120)  (.1/.  mitis  de 
Wallroth)  caractérisé  par  ses  feuilles  cotonneuses 
en  dessous,  ainsi  que  les  sépales.  Ces  deux  types  croi- 
sés entre  eux  et  améliorés  par  la  culture  ont  donné 
naissance  à  toutes  les  nombreuses  races  de  nos 
vergers.  F.  H  Y. 

II.  Exégèse.  —  Le  tappûah  se  présente  plusieurs  fois 
dans  la  Bible,  trois  fois  comme  arbre,  Cant.,  n,  3; 
vin,  5;  Joël,  1,12,  et  trois  fois  comme  fruit  de  cet  arbre, 
Cant.,  n.  5;  vu,  9  (Vulgate,  8);  Prov.,  xxv,  11.  Ce  mot  se 
rencontre  aussi  comme  nom  de  ville,  Tappûah,  Jos.,  xn, 
17;  xv,  34;  xvi,  8;  xvn,  8,  ou  sous  la  forme  Bet  Tap- 
pûah, Jos.,  xv,  53.  Dans  les  textes  cités,  le  tappûah  est 
un  arbre  à  l'ombre  duquel  on  peut  se  reposer,  Cant.  Il, 
3  ;  vm,  5;  un  arbre  rangé  à  côté  du  figuier,  du  grena- 
dier, du  palmier,  de  ces  arbres  cultivés  qui  se  des- 
sèchent au  jour  des  calamités.  Joël.,  i.  12.  Son  fruit  est 
doux  à  la  bouche.  Cant..  Il,  3;  et  répand  une  suave 
odeur  (d'où  lui  vient  son  nom,  racine  nafah).  Cant.,  vu, 
9.  Ce  fruit  réconforte  et  rafraîchit.  Cant..  n,  5.  Ces 
différents  caractères  conviennent  bien  au  pommier, 
qu'on  rencontre  en  Palestine  dans  les  vergers,  près  des 
habitations,  et  dont  le  fruit  est  toujours  très  apprécié 
pour  son  goût  et  son  odeur.  D'autre  part  les  Septante 
et  la  Vulgate  ont  toujours  traduit  par  jj.?,).ov  oumalum. 

L'arabe  -AjL),  tiffah,  qui  évidemment  rappelle  étroite- 
ment le  tappûah  hébreu,  signifie  toujours  la  pomme, 
et  rien  que  la  pomme.  Pour  désigner  un  autre  fruit, 
il  faut  ajouter  une  épithète,  par  exemple,  tiffah  ar- 
niiny,  pomme  d'Arménie,  l'abricot;  lifjah  parsy,  pomme 
de  Perse,  la  pèche;  tiffah  main,  pomme  de  Mali,  le 
citron.  Du  reste  les  abricotiers  et  les  pêchers  ne  furent 
implantés  qu'assez  tard  en  Palestine,  sous  la  domina- 
tion grecque.  Or  certainement,  d'après  Joël,  i,  12,  et 
les  noms  de  lieux  chananéensoù  entre  le  tappûah,  cet 
arbre  était  connu  en  Palestine  beaucoup  plus  ancien- 
nement. Le  pommier  avait  été  importé  en  Egypte  à 
une  époque  reculée,  et  probablement  du  pays  de  Cha- 
naan.  Rarnsès  II  fit  planter  des  pommiers  dans  ses 
jardins  du  Delta.  V.  Loret,  Recherches  sur  plusieurs 
plantes  connues  des  anciens  Égyptiens,  V.  le  Pom- 
mier, dans  Recueil  de  travaux  relatifs  à  la  philo- 
logie et  archéologie  égyptiennes,  t.  vu,  p.  113.  Rarn- 
sès III,  pour  les  offrandes  journalières  des  prêtres  de 
Thèbes,  leur  fit  présent  de  848  paniers  de  pommes. 
La  culture  de  cet  arbre  était  alors  très  répandue  en 
Egypte  et  encore  maintenant  on  le  rencontre  aux  envi- 
rons de  Miniéh.  V.  Loret.  La  flore  pharaonique,^  édit., 
p.  83.  Le  nom  égyptien  d'aillleurs  a  probablement  été 
emprunté  aux  peuples  de  Syrie  en  même  temps  que 
l'arbre  et   il   rappelle   le  tappûah  hébreu  et  le  tiffah. 

arabe  :   ■    8  t.  Dapih,  pommier,  et    II  , ,  Dapih, 

pomme,    nom    qui     est   devenu    •s.eriHg  ou  xHixeg, 

Djepeli  en  copte;  et  dans  les  anciens  lexiques  coptico- 
arabes,  ce  mot  est  rendu  par  tiffah,  u,î$ov.  La  traduc- 
tion tappûah,  «  pomme,  pommier,  »  parait  donc  bien 
établie;  et  il  n'y  a  pas  de  raison  de  chercher  une  au- 
tre identification,  lorsque  toutes  sont  sujettes  à  plus 
de  difficultés.  Aussi  la  tappûah  n'est  pas  l'abricot 
comme  le  veut  H.  Tristram,  The  nalural  Hislory  of 
the  Bible,  8«  édit.,    in-8<>,    Londres,  1889,  p.  335  ;  ce 


531 


POMMIER 


PONCTUATION    HEBRAÏQUE 


532 


fruit  est  du  reste  d'importation  plus  récente,  et  ne 
répond  pas  parfaitement  aux  caractères  du  tappûah. 
Cf.  t.  i,  col.  91.  Ce  n'est  pas  davantage  le  coing,  comme 
le  voudraient  0.  Celsius,  Hierobolanicon,  in-12,  Ams- 
terdam. 1818.  p.  254,  267  et  E.  F.  K.  Rosenmûller,  Hand- 
but'h  Oer  biblischen  Alterthutnskunde,  t.  îv,  p.  308- 
312.  cf.  t.  il.  col.  826  :  ce  fruit  acerbe  et  acide  au  goût 
ne  répond  pas  parfaitement  à  la  description  du  tappûah 
dans  les  textes  bibliques.  C'est  encore  moins  l'orange, 
qui  ne  fut  connue  dans  la  région  méditerranéenne  que 
postérieurement  à  1ère  chrétienne.  Bien  que  plu-  an- 
ciennement connus  en  Palestine,  le  cédratier  et  le  ci- 
tronnier ne  paraissent  avoir  été  importés  qu'à  l'époque 
de  la  captivité  de  Sabylone;  du  reste  leurs  qualités  ne 
permettent  guère  de  les  identifier  avec  le  tappûah 
biblique.  Cf.  t.  Il,  col.  371.  793.  Reste  donc  le  pom- 
mier, comme  l'arbre  le  plus  anciennement  connu 
(même  avant  l'introduction  des  Hébreux  en  Palestine) 
de  tous  ceux  qu'on  veut  identifier  au  tappûah  et  son 
fruit  a  bien  les  caractères  marqués  dans  les  textes. 

On  peut  cependant  mettre  à  part  le  tappûah  des 
Proverbes,  xxv,    11. 

Comme  des  pommes  d'or  sur  des  ciselures  d'argi 
Ainsi  une  par->le  d;te  â  propos. 

L'épithète  d'or  pourrait  changer  la  signification  et 
marquer  qu'il  ne  s'agit  pas  d'un  simple  tappûah.  mais 
d'un  fruit  qui  lui  ressemble,  aux  couleurs  plus  dorées, 
par  exemple  le  citron,  le  cédrat,  l'orange.  11  n'est  pas 
nécessaire  alors  que  les  caractères  du  tappûah  ordi- 
naire lui  conviennent.  Mais  reste  la  difficulté  de  l'époque 
tardive  pour  l'introduction  de  ces  plantes  en  Palestine 
surtout  relativement  à  l'oranger.  Il  est  vrai  qu'il  n'esl 
pas  nécessaire  alors  d'admettre  que  les  arbres  eux- 
mêmes  y  aient  été  transplantés,  il  peut  s'agir  de  la 
simple  importation  du  fruit.  11  faut  dire  aussi  que 
dans  ce  tappûah  d'or  on   peut  encore  voir  la   pomme. 

E.  Leyesque. 

PONCE  grec  :  lltfvTco;;  Vulgate  :  Ponlius),  nom  de 
famil  de  Pilate,  qui  le  rattache  par  origine  ou  par 
adoption  à  la  gens  Pontia,  très  connue  dans  l'histoire 
romaine.  Matth.,  XXVII,  2;  Lue.,  m,  1;  Act..  IV,  27; 
I  Tim..  vi.  13.  Voir  Pli  mi  .  col.  129. 

PONCTUATION   HÉBRAÏQUE.  -  1.  Sa  nature 

El  SES  différentes  ESPÈCES.  —  On  traitera,  sous  ce 
nom,  de  l'ensemble  des  points  ou  signes  que  les  anciens 
rabbins  ont  inventés  pour  transmettre  d'une  manière 
plus  certaine  la  prononciation  du  texte  hébreu  de  la 
Bible,  et  aussi  pour  aider  à  mieux  comprendre  le  sens 
des  Saints  Livres,  en  indiquant  les  relations  des  mots 
entre  eux.  Avant  celte  invention,  les  consonnes  étaient 
seules  tracées  sur  les  manuscrits;  il  fallait  donc  possé- 
der une  connaissant'  parfaite  de    la   langui    In  l  raique 

pour  lire  aisément  le  texte  sacré  el  pour  suppléer  exac- 
tement les  voyelles.  Lorsque  l'hébreu  fut  devenu  une 
langue  morte,  on  sentit  peu  à  peu  le  besoin  de  faciliter 
aussi  de  fixer  la  signification  d'un 
.i  ind  nombre  de  mots,  en  joignant  aux  consonn 
signes  qui  représenteraient  soit  les  voyelles,  soit  la 
ponctuation.  Ceux  qui  ont  créé  ce  système  très  com- 
plexe, composé  de  signes  multiples,  n'ont  pas  touché 
au  texte  même  de  la  lîible,  tel  qu'il  s'était  transmis 
avant  eux  de  génération  en  génération.  Ils  n'ont  rien 
Changé  aux  consonnes,  qui,  jusqu'alors,  avaient  été 
seules  reproduites  par  l'écriture  :  tous  les  signes  nou- 
veaux ont  été  insérés  soit  dans  l'intérieur  des  lettres 
primitives,  soit  au-dessus  d'elles,  soit  au-dessous,  soità 
Côté,  parfois  aussi  dans  la  ligne  même,  entre  les  mots. 
Ces  signes  sont  de  plusieurs  sortes.  On  distingue  : 
1" Ceux  qui  sont  destinés  à  marquer  les  voyelles,  les 
punir-  comme    on     disait     autrefois,    ainsi 

nommés  parce  que    beaucoup  d'entre    eux   —   c'était 


même  le  cas  pour  la  plupart,  à  l'origine  —consistent 
en  un  ou  plusieurs  points  groupés  de  différentes  ma- 
nières :  par  exemple,  tséré,  ou  e  long,  ~  .  Les  anciens 
grammairiens  juifs  les  appelaient  pource  motif  niqqûd, 
de  la  racine  niqgêd,  ponctuer;  par  conséquent,  ponc- 
tuation. De  là  vint  aussi,  pour  leurs  inventeurs,  le  nom 
de  punclatores,  ponctuateurs.  —  2°  H  existe  une  autre 
série  de  signes,  qui  servent  à  des  tins  diverses,  et  qu'on 
désigne  parfois  en  général  par  le  nom  de  points  dia- 
critiques. Ce  sont  :  —  a)  le  daguesch,  point  dans  l'inté- 
rieur de  la  leltre.  pour  montrer  que  celle-ci  doit  être 
redoublée  ou  fortifiée  dans  la  prononciation;  —  b)  le 
point  qui  sert  à  différencier  lejtn,  »,  d'avec  le  s«n,w, 
suivant  qu'il  esl  placé  à  droiteou  à  gauche  de  la  lettre; 
—  c)  le  ràphêh,  trait  horizontal  qu'on  met  an-dessous 
d'une  consonne,  pour  marquer  qu'elle  n'a  pas  le  son 
fort;—  d  le  mappîq,  semblable  au  daguesch,  mais  qui 
ne  se  place  guère  que  dans  le  hé  final,  ".  pour  indi- 
quer que  cette  lettre  doit  alors  se  prononcer  comme 
un  li  aspiré;  —  e)  les  signes  £.  ou  *,  puncla 
itaria  qu'on  rencontre  fréquemment  à  travers  le 
texte  biblique  original  el  qui  correspondent  à  des  notes 
placées  soit  au  bas  de  la  page,  soit  en  marge,  les- 
quelles marquent  le  qeri  et  le  ketib.  —  3°  11  y  a  enfin 
les  signes  qui  représentent  la  ponctuation  proprement 
dite.  Comme  il  a  été  déjà  traite,  t.  ni.  col.  467-469, 
504-507,  des  signes  relatifs  à  la  vocalisation,  c'est-à-dire 
de  ceux  qui  ont  été  mentionnés  au  I»  et  au  2°,  il  ne 
sera  question  ici  que  de  la  ponctuation  dans  1> 
strict  de  l'expression. 

II.  La  ponctuation  hébbaïqi  e  PROPREMENT  DITI  i  I 
ses  divers  i:i  ts.  —  Ici  encore,  il  esl  nécessaire  d'éta- 
blir une  distinction,  car  les  signes  ou  accents  spéciaux 
dont  nous  allons  parler  servent  tout  à  la  fois  à 

tins  différentes.   —  a)   Pour  la   lecture  ordinail 
marquent  l'accent  tonique,  c'est-à-dire  la   syllabe  qui 
doit  être  mise  en   relief  dans   la   prononciation 
toujours  la  dernière  ou    l'avant-dernière,   le   plu- 
vent  la  dernière.  Voir  t.  ni,  col.  -472.  —  b\  Pour  la  lec- 
ture modulée  de   la    Bible,  cantillalio,  telle  qu'elle  a 
lieudans  les  synagogues,  ces  accents  indiquent  I 
rations  el  les  chutes  de  la  voix,  chacun  d'eux  équiva- 
lant à  une  sorte  de  neume,  qui  se  compose  de  plusieurs 

note,  de  musique  toujours   les  mêmes.  —   c)  Ils  ■- 

quenl  enfin  la  ponctuation  des  phrases,  sujet  que  nous 
avons  seul  à  traiter  ici.  En  hébreu,  les  accents,  en  t.mt 
qu'ils  servent  à  cette  fin.  portent  le  nom  expressif  de 
ta  a,,i,  ■  goût.  i  au  pluriel  te  âtllit»,  paire  qu'ils  donnent 
pour  ainsi  dire  du  goûl  .i  la  phrase. 

III.  (  H;  loi  M    DES    ACCENTS  DESTINÉS    V  i  \   POKI  TIATiON 

in  hébreu.  —  Ce  système  de  signes,  avec  les  règles 
multiples  qui  le  dirigent,  suppose,  comme  celui  de  la 
vocalisation  auquel  il  se  rattache  de  très  près,  un  travail 
de  longue  haleine.  De  nombreux  savants  Israélites  > 
prirent  part,  car  il  se  prolongea  pendant  plusieurs 
siècles.  —  Au  moyen  âge,  les  Juifs  croyaient  g<  nérale 

nt   que    l'accentuation    et   la   vocalisation    du   texte 

hébreu  de  la  Bible  remontaient  jusqu'à  Ksdras  el  à  ce 
qu'on  appelait  la  o  Grande  Synagogue  t.  Cetle  opinion 
avait  encore  des  adhérents  au  xvii  sieele.  parmi  les 
hébraîsants  chrétiens,  comme  on  le  voit  parla  discus- 
sion très  \  ive  qui  eut  lieu  sur  ce  point  entre  Louis  Cap- 
pel,  cpii  li  rejetait,  et  les  deux  Buxtorf,  qui  t'acceptaient. 

Voir   t.    I,   col.   1982.  t.  11.   col.  219;  .1.  Sel.iiedenn.inn. 

ontroverse  ''es  Ludovicus  Cappellus  mit  den 
Buxtorfen  ùber  die  hebr.  Punclation,  in-8  .  Leipzig, 
1879.  Quelques  rabbins  allaient  même  jusqu  à  affirmer 
que  le  lienl  été  introduits  par  les  propl 

de  l'exil,  el  qu'ils  portaient  ainsi  le  sceau  de  l'inspira- 
tion divine.  Bien  plus,  plusieurs  d'entre  eus,  entre 
autres  Judas  Hadassi,  l'un  des  chefs  de  l'école  caraïte, 

supposaient  que  les  tables  il,-  la  Loi.  lorsque  Moïse  les 
recul    au    sommet  de    Sinaï,    auraient   été'   munies   de- 


533 


PONCTUATION    HÉBRAÏQUE 


534 


points-voyelles  et  d'accents.  Voir  H.  Gràtz,  Geschichte 
der  Juden  von  den  atteste»  Zetlen  bis  auf  die  Gégen- 
uiart,  t.  v,  p.  503.  Au  xvie  siècle,  le  savant  juif  Elias 
Levita  protesta  de  toutes  ses  forces  contre  ces  théories; 
Louis  Cappel  lit  de  même  cent  ans  après. 

On  ne  saurait  dire  avec  certitude  si  la  vocalisation 
et  l'accentuation  du  texte  sacré,  c'est-à-dire  l'invention 
des  points-voyelles  et  celle  des  accents  destinés  à 
marquer  la  ponctuation,  furent  contemporaines.  Celle- 
ci  est  peut-être  un  peu  moins  ancienne  que  celle-là. 
Le  grammairien  juif  Ben-Ascher,  dans  son  traité  Dikduké 
ha-Teamim,  réédité  en  1879  par  Baer  et  Strack,  f.  9,  fait 
en  prose  rimée  l'éloge  de  la  ponctuation  biblique  et  men- 
tionne les  «  points  sans  nombre  »  dont  elle  se  composait, 
mais  sans  dire  à  quelle  époque  il  en  fixait  l'origine. 
Il  est  certain  du  moins,  et  communément  admis  de  nos 
jours,  que  la  ponctuation  hébraïque  proprement  dite 
est  plus  récente  que  saint  Jérôme  (\  420),  et  que  le 
Talmud,  achevé  vers  l'an  500  après  Jésus-Christ.  En 
effet,  ni  l'un  ni  l'autre  ne  la  connaissent  encore,  ainsi 
qu'on  l'a  démontré  par  des  arguments  irréfutables. 
Voir  la  dissertation  de  II.  Hupfeld,  dans  les  Theolo- 
gische  Studien  und  Kritiken,  1830,  p.  549-590,  785-810. 
Le  traité  Soferim,  m,  7,  où  il  est  parlé  pour  la  premier'' 
fois  de  points  destinés  à  marquer  la  séparation  des 
versets,  est  postérieur  au  Talmud. 

C'est  probablement  au  vi"  siècle  de  notre  ère  qu'il 
faut  placer  les  débuts  du  système  de  la  vocalisation  et 
de  la  ponctuation  hébraïques.  Il  se  développa  lente- 
ment, car  il  ne  semble  avoir  été  complet  qu'au  milieu 
du  vnle  siècle.  Voir  The  Jewish  Encyclopédie/.,  in-40, 
New-York,  t.  x,  1905,  p.  269.  Les  plus  anciens  manus- 
crits, qui  datent  du  IXe  et  du  X'  siècle,  sont  pourvus 
d'accents;  il  en  est  de  même,  jusqu'à  un  certain  point, 
des  fragments  hébreux  de  l'Ecclésiastique,  récemment 
découverts  en  Egypte.  Cf.  la  Revue  des  Éludes  juives, 
Paris,  t.  XL,  n.  79,  année  1900,  p.  1-36;  A.  E.  Cowley  et 
A.  Neubauer,  The  original  Hébreu'  of  a  Portion  of  Ec- 
clesiaslicus,  in-f",  Oxford,  1897. 

D'après  une  hypothèse  ingénieuse,  mais  peu  vrai- 
semblable, de  M.  Joseph  Derenbourg,  dans  la  Revue 
critique,  nouvelle  série,  t.  vu.  1879,  p.  453-461,  le  sys- 
tème de  la  ponctuation  hébraïque  se  serait  élaboré  tout 
entier  dans  les  écoles  primaires  juives,  à  l'époque  in- 
diquée plus  haut,  et  serait  l'œuvre  des  maitres  d'école, 
qui  auraient  inventé  ces  divers  signes  pour  faciliter 
aux  enfants  la  lecture  du  texte  hébreu  de  la  Bible.  Ce 
système  a  une  origine  plus  scientifique.  Les  hébraï- 
sants  s'accordent  de  plus  en  plus  pour  le  rattacher  à 
celui  des  Syriens,  inventé  dès  la  fin  du  ve  siècle,  avec 
lequel  il  présente  de  grandes  analogies,  et  dont  il  pro- 
vient au  moins  en  partie.  Voir  P.  Martin,  Histoire  '<e 
la  ponctuation  et  de  la  Massora  chez  les  Syriens,  in-8", 
Paris,  1875,  dans  le  Journal  asiatique,  7e  série,  t.  v, 
p.  81-208;  A.  Wright,  A  short  History  of  Syriac  Lite- 
rature,  in-8,J,  Londres,  1894,  p.  115-116.  Les  Syriens 
avaient  eux-mêmes  emprunté  leurs  accents  aux  Grecs. 
D'après  une  autre  théorie,  dont  H.  Praetorius  s'est  fait 
l'ardent  et  savant  défenseur,  dans  son  livre  Die  Her- 
kunftder  hebrâischen  Accente,  in-8", Berlin,  1901,  la  plu- 
part des  accents  hébreux  auraient  pour  modèles  directs 
la  ponctuation  et  la  neumation  des  Évangéliaires  grecs. 

En  toute  hypothèse,  le  système  emprunté,  soit  grec, 
soit  syrien,  ne  fut  pas  adopté  tel  quel,  mais  remanié 
et  considérablement  développé  par  les  écoles  juives  de 
Babylonie  et  de  Palestine,  qui  prirent  en  main,  de  très 
bonne  heure,  la  vocalisation  et  la  ponctuation  du  texte 
biblique.  Il  existait  des  divergences  assez  grandes  entre 
les  signes  adoptés  par  les  écoles  orientales  et  les  écoles 
occidentales  (celles  de  Palestine).  Voir  Babyloniens 
(Petropolitanus  Codex)  et  le  fac-similé,  fig.  409,  t.  i, 
col.  1359.  Nos  éditions  imprimées  contiennent  l'accen- 
tuation palestinienne.  —  Les  massorètes  veillèrent  sur 


les  signes  des  voyelles  et  des  accents,  avec  le  même  soin 
religieux  et  méticuleux  que  sur  les  consonnes,  comme 
on  le  voit  par  les  notes  nombreuses  des  éditions  cri- 
tiques de  la  Bible  hébraïque  publiées  par  S.  Baer  etFrz. 
Delitzsch,  in-8",  Leipzig,  1869-1896,  et  par  B.  Kittel, 
in-8»,  Leipzig,  1905-1906. 

IV.  IlirORTANCE  DU  VERSET  DANS  LA  PONCTUATION 
hébraïque.  —  Cette  ponctuation  a  pour  but  principal,  en 
effet,  de  déterminer  les  rapports  réciproques  des  mots 
et  des  propositions,  non  pas  précisément  dans  une  même 
phrase,  comme  c'est  le  cas  pour  nos  langues  euro- 
péennes, mais  dans  un  même  verset.  D'où  il  suit  que  le 
verset  joue  un  rôle  essentiel  dans  cette  sorte  d'accen- 
tuation, car  c'est  par  rapport  à  lui  qu'elle  est  invaria- 
blement déterminée.  Les  punctatores  ont  donc  commencé 
par  séparer  les  versets  tant  bien  que  mal,  d'après  le 
sens,  s'efforçant  d'en  faire  un  tout  à  peu  près  complet. 
Ils  l'ont  ensuite  divisé  en  deux  parties,  qui  ne  sont  pas 
nécessairement  égales.  Chacune  de  ces  parties  a  été  à 
son  tour  subdivisée  en  deux  sections  plus  petites,  et  ainsi 
de  suite,  jusqu'à  ce  qu'on  eût  atteint  des  groupes 
minuscules  et  inséparables  de  mots.  Ainsi  donc,  sous 
le  rapport  de  la  ponctuation,  chaque  verset  biblique  — 
et  notons  de  nouveau  qu'il  ne  forme  pas  toujours  ni 
obligatoirement  une  phrase  complète  —  est  considéré, 
d'après  le  langage  imagé  des  anciens  grammairiens, 
comme  un  territoire,  ditio,  qui  est  dominé  par  le  double 
point  final  (voir  plus  bas),  et  que  d'autres  accents,  de  ■ 
valeur  décroissante,  coupent  de  façon  à  former  d'autres 
petits  domaines  secondaires,  selon  qu'il  est  plus  ou 
moins  long. 

Nous  aussi,  nous  avons  des  signes  disjonctifs,  qui 
partagent  la  phrase  en  ses  différents  membres;  mais, 
tandis  qu'il  nous  suffit  d'en  posséder  quatre,  le  point, 
les  deux  points,  le  point  et  virgule,  la  simple  virgule 
—  nous  laissons  de  côté  le  point  d'interrogation,  le 
point  d'exclamation  et  la  parenthèse,  qui  manquent  tota- 
lement en  hébreu  —  on  en  rencontre  près  de  treille 
dans  l'ensemble  de  la  Bible  hébraïque,  sans  parler  du 
système  de  ponctuation  qui  est  propre  à  quelques  livres 
poétiques.  Voir  col.  535.  Et  non  contents  de  séparer 
ainsi  parle  menu  les  propositions  et  les  mots,  au  moyen 
de  signes  divers,  les  ponctuateurs  en  ont  inventé  une 
seconde  classe,  qui,  à  une  exception  prés,  le  trait 
d'union,  fait  complètement  défaut  dans  les  langues  indo- 
germaniques :  il  s'agit  des  accents  conjonctifs,  assez 
nombreux  aussi,  qui  sont  destinés  à  unir  entre  eux 
certains  mots  d'une  manière  plus  étroite.  En  somme, 
il  n'est  pas  un  seul  mot  hébreu  qui  ne  soit  muni  d'un 
accent  quelconque,  lequel  le  sépare  du  mot  précédent 
ou  l'y  rattache.  —  Parmi  les  accents  qui  servent  à  la 
ponctuation,  les  uns  sont  placés  sur  la  première  con- 
sonne du  mot,  les  autres  sur  la  dernière;  pour  ce  mo- 
tif, on  donne  aux  premiers  le  surnom  de  prépositifs,  et 
aux  seconds  celui  de  postpositifs. 

V.  Désignation  des  signes  de  la  ponctuation  hé- 
braïque. —  On  distingue,  ainsi  qu'il  vient  d'être  dit, 
deux  grandes  catégories  d'accents,  servant  à  la  ponc- 
tuation dans  la  Bible  hébraïque  :  les  distinctivi  ou 
disjonctifs, appelés  aussi  doniini, «  maîtres  »,  c'est-à-dire 
principaux,  à  cause  de  leur  importance  considérable; 
les  conjunctiri  ou  conjonctifs,  qu'on  appelait  encore 
servi,  «  serviteurs  »,  subalternes,  à  cause  de  leur 
moindre  utilité.  D'après  la  savante  grammaire  de  Kônig, 
Lehrgebânde  der  hebrâischen  Sprache,  1881,  t.  I, 
p.  75-81,  que  nous  avons  prise  pour  guide  principal 
dans  l'énumération  qui  suit,  on  en  compte  jusqu'à  27. 
Leurs  noms  hébreux  ou  araméens  se  rapportent  tantôt 
à  leur  forme,  tantôt  aux  fonctions  qu'ils  remplissent 
soit  pour  rendre  plus  aisée  l'intelligence  de  la  phrase, 
soit  en  vue  de  la  cantillatio  des  synagogues.  Nous  n'en 
avons  donné  la  traduction  que  lorsqu'elle  est  morale- 
ment certaine,  ou  de  quelque  utilité. 


535 


PONCTUATION    HÉBRAÏQUE 


536 


Il  y  a  d'abord  les  accents  ordinaires,  ou  prosaïques, 
qui  sont  employés  dans  la  plupart  des  livres  de  la  Bible, 
écrits  habituellement  en  simple  prose;  puis  les  accents 
poétiques,  qui  forment  un  système  particulier,  réservé 
pour  les  trois  livres  de. lob,  des  Psaumes  et  des  Proverbes, 
écrits  en  vers.  Il  parait  singulier,  à  première  vue,  que 
ce  système  n'ait  pas  été  adopté  aussi  pour  le  Cantique 
des  cantiques;  mais  les  rabbins  ont  rangé  de  bonne 
heure  ce  petit  livre  dans  une  catégorie  spéciale.  De 
pari  et  d'autre,  nous  trouverons  la  double  classe  des 
accents  disjonctifs  et  des  accents  conjonctifs. 

A)  Accents  ordinaires  ou  prosaïques.  —  1°  Dans  ce 
groupe,  les  signes  disjonctifs  de  la  ponctuation  sont 
rangés  sous  quatre  chefs  distincts,  dont  les  noms  sym- 
boliques, relativement  récents,  marquent  la  valeur  tou- 
jours décroissante.  On  distingue  :  —  a)  les  [MPERA- 
tores,  au  nombre  de  deux  seulement  :  Ie  le  sôf  pâsûk, 
«  lin  du  verset  »,  :  ,  toujours  précédé  du  silli'iq,  «  ces- 
sation »,  T,  qui  l'annonce,  placé  qu'il  estsous  la  syllabe 
du  dernier  mot  du  verset;  2°  V'atnah,  «  respiration, 
pause  »,  7,  situé  habituellement  vers  le  milieu  du  ver- 
set; —  b)  les  reces,  au  nombre  de  cinq  :  1"  le  zâqêf 
qâtôn  ou  petit  zâqi-f.  1".  dont  le  nom  signifie  i  éléva- 
tion »  ;  2»  le  zâqêf  gddôl  ou  grand  zâqêf,  —  :  3°  le  rebid , 
«  qui  repose  »,  _^  ;  4°  le  segoltd,  «  grappe  »,  i  ;  5»  le  sal- 
sélet,  «  chaîne  ».  i_  ;  —  c)  les  m  ces,  au  nombre  de  cinq  : 
1°  le  paild,   «  inclinatio  »  ±;  2»  le  yetib,  «  sessio  », 

'  ~;3°  le  tifhâ  ,  i  largeurde  la  main  »,  T  ;  4°  le  tebif ,  t  ; 
5°  lezarqâ',  -;  —  d)  les  comités  au  nombre  de  six  :  1»  le 
géreS,  L;  2"  le  gerSaïm  ou  gcrê's  double.  ±  ;  le  legarmëh, 
t;  4°  le  pdzêr,  '  J  5"  le  qarnépàrdh,  •■  cornes  de  vache», 
îf  ;  6»  le  telisâ  gedôlâh  ou  grand  telisd  X,  qui  n'est 
employé  que  seize  fois  dans  la  Bible. 

Cela  fait  donc  en  tout,  dans  le  système  prosaïque, 
dix-huit  accents  disjonctifs.  Les  «  empereurs  »  mar- 
quent toujours  la  fin  et  habituellement  le  milieu  du 
verset;  les  «  rois  »  servent  à  diviser  les  deux  sections 
ainsi  obtenues,  lorsqu'elles  ont  une  certaine  étendue. 
Cf.  Gen.,  i,  22,  on  la  première  moitié  du  verset, qui  est 
forl  courte,  n'a  aucun  accent  de  cette  espèce,  tandis 
que  la  seconde  en  contient,  parce  qu'elle  est  plus 
longue;  le  contraire  a  lieu  au  verset  24.  Les  «  ducs  » 
séparent  les  divers  groupes  de  la  phrase;  par 
exemple,  le  sujet  de  ses  attributs,  le  complément  et  les 
mots  qui  en  dépendent.  Les  «  comtes  o  ont  encore  un 
rôle  plus  spécial,  puisqu'ils  séparent  simplement  'es 
petits  groupes  de  mots. 

2»  On  compte  d'ordinaire  neuf  accents  prosaïques 
conjonctifs.  Ce  sont  :  1°  le  merkd',  o  prolongement  », 
—  ;  2°  le  merkd  kefûlâ  ou  double  merkd',  7  ;3"  le  nnï- 
nah,  —.  semblable  au  legarmëh;  1  le  dargd',  t  ■  5  le 
mâhpdk,  ~;60  le  qadmd',  appelé  aussi  'azld',  i;  7°  le 
(eliêd  qetanndh  ou  petit  tctisiï,  ±;  8°  le  gérait,  nommé 
aussi  galgal,  7.  qui  précède  toujours  le  ptizer  g  à,  lui 
et  qui,  comme  cet  accent  disjonctif,  n'est  employé  que 
seize  fois  dans  la  Bible;  9°  le  ma'yelà',  ~-  Seuls,  les 
mots  étroitement  unis  par  le  sens,  comme  le  nominatif 
et  le  génitif  qui  en  dépend,  le  substantif  et  l'adjectif 
qui  lui  sert  d'épi  thète,  sont  relies  l'un  à  l'autre  par 
un  acecent  conjonclif. 

B)  Les  accrut*  dits  poétiques  sont  en  partie  1rs 
mêmes  que  les  accents  ordinaires,  dont  on  vient  de 
parcourir  la  liste,  et  ils  en  diffèrent  en  partie.  La  dis- 
semblance entre  les  deux  systèmes  d  accentuation  se 
rattache  moins  à  la  ponctuation  proprement  dite 
qu'aux  modulations  différentes  de  la  voix,  lorsque  les 
livres  de  .lob,  des  Psaumes  et  des  Proverbes  sont  lus 
comme  partie  intégrante  du  culte  dans  les  sjnagogues 
On  en  compte  20,  qui  se  divisent  aussi  en  deux  classes 
principales.  —  1.  Les  accents  disjonctifs  sont  :  1°  le 
st/iV'</  avec  le  se/'  pâsùq,  :  et  T  :  '-"   le    oleh  veyâred, 

niant  et  descendanl    »,    que   l'on   nomme   aussi 
merkd'  mdhpàh,  parce  que  les  deux  signes  dont  il  se 


compose  sont  ceux  qui  représentent  ces  deux  accents, 
r  :  3°  V'atndli,  —  ,  qui  a  une  valeur  moindre  que  dans  le 
système  ordinaire;  i"  le  rebia'  giidôl  ou  grand  rebid, 
_^;5°  le  rebid  qdtùn  ou  petit  rebia,  -,  semblable  au 
précédent,  niais  formé  d'un  point  plus  petit;  6°  le 
rebia'  mngrâs,  c'est-à-dire  le  rebid  précédé  du  gérei, 
;  ±  :  7»  le  salsrlet  gedôlâh  ou  grand  saliélet,  —  ;  8°  le 
larqà  ou  èinnôr,  -:  9°  le  dehi,  auquel  on  donne  encore 
le  nom  de  tifhâ'  initial  ou  prépositif,  j;  10»  le  pâzêr, 
Z:  I  \  \<),ia  h  i^îk  legarmëh, l—;li°le'azld' legarmëh, \  y. 
—  2.  Les  accents  conjonctifs  sont  :  1°  le  mêrkd',  ~  '■  2°  le 
mûnâft,  t;  3»  le  'illûy  ou  mûnah  supérieur,  j.  :  4"  le 
(ai  /<<;,  identique  au  dehi  non  prépositif.  7;  5°  le  géràh 
ou  galgal,  7  ;  6"  le  mahpâk,  -;'"  le  azld,  i;  8»  le 
SalSdlet  qetanndh  ou  petit  iaùélef,  ±. 

C)  Le  maqqêf  et  le  méteg.  —  A  ces  divers  signes  de 
la  ponctuation  hébraïque,  il  faut  joindre  le  maqqêf  el 
le  méfeg,  qui  s'y  rattachent  de  très  près.  Le  maqqêf, 

lien  0,  consiste  en  un  gros  trait  horizontal.  — ,  placé 
en  haut  de  la  ligne,  entre  deux  ou  plusieurs  mots 
qu'il  associe  très  étroitement,  de  sorte  qu'ils  sont  cen- 
sés ne  plus  former  qu'une  seule  expression.  Par  ex.  : 
--iN-'-i.  kôl-'dddm,  «  tout  homme  »;  tV- -rs-'-i-rs, 
ep-kôt-'âSer-lô,  ■  tout  ce  qui  est  à  lui  ».  Certaines  par- 
ticules, entreautres  rs,  signe  de  l'accusatif,  -s. 

-7.  1   sur  »,  en  sont  presque  toujours  accompagnées. 

Le  maqqêf,  faisant  refluer  l'accent  tonique.vers  la  lin 
du  mot  qu'il  sert  à  créer,  modifie  par  là-même,  en  les 
abrégeant,  les  voyelles  des  premières  syllabes  de  ce 
mot  nouveau.  —  Le  méteg,  0  frein  »,  a  la  forme  d'un 
petit  trait  vertical,  placé  en  bas  de  la  ligne.  7.  et  à  la 
gauche  d'une  voyelle.  Comme  son  nom  l'indique,  il 
l'attention  du  lecteur,  qu'il  averti!  de  ne  pas 
glisser  trop  rapidement  sur  la  syllabe  ainsi  notée  11 
marque  aussi  un  accent  tonique  secondaire.  I!  a  par- 
fois une  importance  spéciale  pour  la  prononciation  de 
certaines  voyelles;  par  exemple,  pour  distinguer  e 
1  long  de  i  bref,  etc. 

VI.  Quelques  remarques  sub  ces  divers  accents.  — 
1.  Ce  double  système  de  ponctuation  est.  on  le  voit, 
assez  compliqué,  non  seulement  à  cause  du  grand 
nombre  des  signes  employés,  mais  encore  parce  que 
plusieurs  de  ces  signes  sont  identiques,  ou  presque 
identiques  enlre  eux,  et  aussi  parce  que,  insérés  à 
travers  les  voyelles,  ils  rendent  tout  d'abord  la  lec- 
ture plus  difficile.  Heureusement,  il  n'est  pas  néces- 
saire d'en  avoir  une  connaissance  approfondie  pour 
bien  comprendre  le  texte  original  de  l'Ancien  Testa- 
inent.  Pour  l'hébraïsant  ordinaire,  il  suffit  d'être 
familiarisé  avec  les  accents  principaux.  Leur  multipli- 
cité même  montre,  à  elle  seule,  que  plusieurs  d'entre 
eux  ne  peuvent  avoir  qu'une  infime  valeur;  souvent 
ils  n  équivalent  pas  même  au  quart  d'une  de  nos  vir- 
gules. 

2.  Lorsqu'on  étudie  la  ponctuation  hébraïque  dans  le 
détail,  on  est  forcé  d'admettre  qu'elle  est  réellement 
ingénieuse,  tout  en  demeurant  subtile  et  complexe. 
Le  choix  des  accents,  soit  disjonctifs,  soit  conjonctifs. 
a  été  déterminé'  d'avance  par  les  ponctuateurs  el  les 
grammairiens  ;  tel  accent  conjonctif  ne  peut  s'employer 
qu'avec  tel  accent  disjonctif,  à  l'exclusion  de  tout  autre, 
el  réciproquement. 

:;.  si  quelques-uns  de  ces  signes  ont  la  même  forme 
ou  ressemblent  à  une  voyelle  —  c'est  le  cas  pour  le 
rebia,  qui  est  identique  au  cholem,  c'est-à-dire  à  Vo 
—  leurs  inventeurs  ont  pris  soin  qu'on  ne  put  pas 
aisément  les  confondre.  C'est  ainsi  que.  dans  le  sys- 
tème ordinaire  ou  prosaïque,  le  pastd,  i,est  placé'  »u- 
dessus  de  la  consonne  qui  termine  le  mot,  tandis  que 
le  qadmd',  qui  lui  est  identique,  est  mis  sur  la  pre- 
mière' consonne  de  la  syllabe  accentuée.  De  même,  le 
yetib,  —,  est  placé'  à  droite  et  au-dessus  de  la  première 


537 


PONCTUATION    HEBRAÏQUE   —   PONT 


538 


consonne,  tandis  que  le  mahpdk,  qui  lui  est  entière- 
ment semblable,  est  mis  à  gaucbe  de  la  syllabe  qui 
porte  l'accent  tonique,  etc. 

4.  Les  principaux  signes  de  ponctuation  entraînent 
souvent  des  changements  dans  les  voyelles  auprès 
desquelles  ils  sont  placés.  Tantôt  ils  les  allongent, 
tantôt  ils  les  abrègent,  suivant  les  circonstances.  Les 
grammaires  un  peu  complètes  donnent  les  règles  de 
ces  changements.  —  Il  arrive  çà  et  là  que  le  même 
accent  est  employé  plusieurs  fois  de  suite  dans  un 
membre  de  phrase.  Cf.  Gen.,  i,  20,  dans  la  première 
moitié  du  verset.  Il  perd  alors  graduellement  de  sa 
force,  au  fur  et  à  mesure  qu'on  avance  dans  la  phrase. 

VII.  Utilité  de  ce  système  de  ponctuation.  —  Elle 
est  indéniable,  car  cet  ensemble  de  signes  a  d'abord 
contribué  à  fixer  de  bonne  heure  le  sens  traditionnel 
du  texte  original  de  l'Ancien  Testament,  enjoignant  et 
en  séparant  les  mots  d'une  manière  logique;  puis, 
grâce  à  la  vigilance  minutieuse  des  massorètes,  qui 
n'ont  pas  inoins  surveillé  la  ponctuation  que  les  con- 
sonnes et  les  voyelles,  elle  a  servi  aussi  à  maintenir  ce 
texte  dans  une  assez  grande  pureté.  Le  travail  des  ponc- 
tuateurs  se  conforme  bien,  d'ordinaire,  à  la  significa- 
tion naturelle  de  la  parole  divine.  11  représente  l'inter- 
prétation courante  de  la  Bible  hébraïque  parles  anciens 
.fuifs,  à  l'époque  où  il  fut  accompli. 

La  ponctuation  hébraïque  parut,  pendant  longtemps, 
si  excellente  aux  commentateurs  israélites,  qu'Abraham 
Aben  Esra,  au  xn'siècle,  alla  jusqu'à  édictercette  règle  : 
i  Aucune  interprétation  d'un  passage  biblique  ne  de- 
vrait être  acceptée,  si  elle  n'est  pas  conforme  à  l'accen- 
tuation. »  Néanmoins,  dans  la  pratique,  presque 
aucun  exégète  juif  ne  s'est  conformé  rigoureusement  à 
ce  principe,  pas  même  Aben  Esra;  et  ils  ont  eu  raison, 
car  le  système  a  des  imperfections  manifestes,  et  il  est 
évident  que  ses  créateurs  n'ont  eu  ni  le  désir,  ni  le 
droit  d'imposer  des  liens  perpétuels  à  ceux  qui  de- 
vaient interpréter  après  eux  les  saintes  Écritures.  Un 
autre  savant  juif  très  illustre,  Kimchi,  a  donc  pu  dire 
en  toute  justesse,  In  Ose.,  xir  17  :  «  En  interprétant 
l'Écriture,  nous  ne  sommes  pas  liés  par  les  accents.  » 
I!  y  a  quelques  endroits,  cependant,  où  la  ponctuation 
rabbinique  est  préférable  à  celle  des  Septante  et  de  la 
Vulgate;  par  exemple,  au  passage  célèbre  Is.,  XL,  3, 
où  on  lit,  d'après  l'accentuation  de  l'hébreu  :  «  Une 
voix  crie  :  Dans  le  désert  préparez  le  chemin  du  Sei- 
gneur; »  d'après  les  Septante  et  notre  version  latine 
officielle,  comme  aussi  d'après  les  passages  du  Nouveau 
Testament  qui  reproduisent  ce  texte.  Matth.,  m,  3; 
Marc,  i,  3;  Luc,  m,  4;  Joa.,  i.  23  :  «  Une  voix  crie 
dans  le  désert  :  Préparez...  » 

VIII.  Bibliographie.  —  1°  Dans  les  temps  plus  éloi- 
gnés de  nous.  Le  plus  ancien  traité  que  nous  ayons 
sur  la  ponctuation  hébraïque  est  celui  du  grammairien 
juif  Ben  Ascher,  qui  vivait  dans  la  première  moitié  du 
x«  siècle;  il  a  été  réédité  sous  ce  titre  :  Diqduqé  ha- 
Teamim  des  Ben-Ascher  von  Tiberias,  herausgegeben 
von  S.  Baer  und  H.  L.  Strack,  in-8»,  Leipzig,  1879.  On 
a  aussi,  dans  le  même  sens,  i.  Derenbourg,  Manuel 
du  Lecteur,  traduction  d'un  traité  arabe  sur  les  ac- 
cents et  la  Massera,  in-8»,  Paris,  1871  ;  voir  aussi  Jour- 
nal asiatique,  juillet-décembre,  1870,  VIe  série,  t.  xvi, 
p.  309-550.  —  2°  Ouvrages  spéciaux,  contemporains  : 
A.  R.  Davidson,  Outlines  of  hebr.  Accentuation,  in-8», 
Londres,  18lil  ;  A.  Geiger,  Zur  Nakdanim  (=  Punkta- 
toren)  Literatur,  dans  la  Jùdische  Zeitschrift  fur  Wis- 
senschaft  und  Leben,  1872,  t.  x,  p.  10-35;  L.  Segond, 
Traité  élémentaire  des  accents  hébreux, in-8l>,  Genève, 
2»  édit.,  1874  ;  E.  Kônig,  Gedanke,  Laul  und  Accent  als 
die  drei  Faktoren  der  Sprachbildung,  in-8°,  Weimar, 
1874;  H.  Strack,  Beitrag  zur  Geschichte  des  liebrài- 
schen  Bibeltextes,  dans  les  Theolog.  Studien  und  Kriti- 
ken,  1875,  p.  736-747;  M.  Schwab,  Des  points-voyelles 


dans  les  langues  sémitiques,  dans  les  Actes  de  la  So- 
ciété philologique,  t.  vu,  in-8",  Paris,  1875;  Frz.  De- 
litzsch,  Elemenla  accentuationis  metriese,  dans  l'ou- 
vrage Liber  Psalmorum,  lextum  massoreticum  accu- 
ratissime  expressif...  S.  Baer,  in-8»,  Leipzig,  1880, 
p.  viii-xii;  J.  Wejnkoop,  Leges  de  accent,  hebr.  linguse 
ascensione,  in-8»,  Leyde,  1881;  H.  Gràtz,  Étude  sur  la 
ponctuation  hébraïque,  dans  la  Monalschrift  fur  Ge- 
schichte und  Wissenschafl  des  Judenthums,  1882, 
p.  389-409;  \Y.  Wickes,  A  treatise  on  hebr.  Accentua- 
tion, in-8»,  Oxford,  1S81-1887,  ouvrage  très  solide;  Her- 
n  ki  n  h.  Zur  Geschichte  des  Streites  iïberdie  Entstehung 
der  hebràischen  Punktation,  in-8»,  Ruhrort,  1885: 
A.  Buchler,  Untersuchungen  sur  Entstehung  und 
Entwickelung  der  hebr.  Accente,  in-8»,  Vienne,  1891  ; 
A.  Ackermann,  Das  hermeneutische  Elément  in  der 
biblischen  Accentuation,  in-S»,  Berlin,  1893;  Nathan, 
Die  Tonzeichen  in  der  Bibel,  in-8»,  Hambourg,  1893; 
J.  Bachrach,  Das  Aller  der  hebr.  Vocalisation  und  Ac- 
centuation, in-8»,  Varsovie,  1895;  H.  Grimme,  Grund- 
zïige  der  hebràischen  Akzente  und  Vokallelire,  in-8», 
Fribourg  (Suisse).  1896;  J.  M.  Japhet,  Die  Accente  der 
heiligen  Schriften,  in-8»,  Francfort-sur-!e-Mein,  1896; 
F.  Praetorius,  Ueber  dem  zurûckweichenden  Accent  int 
Hebràischen,  in-8»,  Halle,  1S97;  Id.,  Die  Herkunft  der 
hebr.  Accente,  in-8»,  Berlin,  1901;  P.  Kahle,  Zur  Ge- 
schichte der  hebràischen  Accente,  dans  la  Zeitschrift 
der  morgenlândischen  Gesellschaft,  1901,  t.  lv,  p.  167- 
194;  The  Jewish  Encyclopedia,  New-York,  1900-1905, 
t.  i,  au  mot  ■<  Accents  »,  p.  149-158,  et  t.  x,  au  mot 
«  Ponctuation  »,  p.  268-273.  Voiraussi  E. Kônig, His(oWsc/i- 
kritischer  Lehrgebàude  der  hebràischen  Sprache,  t.  i, 
Leipzig,  1881,  p.  52-90;  t.  n,  1">  partie,  Leipzig,  1895, 
p.  349-362.  L.  Fillion. 

1.  PONT  (grec  :  flôvroç),  nom  qui  a  désigné,  à  diffé- 
rentes époques  de  l'histoire,  un  territoire  du  nord-est 
de  l'Asie  Mineure,  dont  les  limites  ont  beaucoup  varié. 
Directement  il  représente  la  rner,  tiovto;,  et  en  parti- 
culier la  mer  Noire,  le  Pont  Euxin  des  anciens,  Llriv- 
toç  eû'Eeivoç,  «  mer  hospitalière.  »  Puis  on  l'employa 
comme  une  dénomination  appliquée  aux  côtes  sud-est 
de  cette  mer.  Xénophon,  Anabasis,  V,  vi,  15,  est  le 
plus  ancien  auteur  qui  en  ait  usé  en  ce  sens.  Ailleurs, 
nous  apprenons  que  c'est  une  abréviation  pour  Karata- 
ôoxt'ac  /)  itepi  to  Eù'letvov,  «  la  Cappadoce  qui  est  près 
de  l'Euxin,  »  Polybe,  v,  43,  ou  K.  r,  r.yiz  t»  itov-w,  «  la 
Cappadoce  qui  est  près  de  la  nier.  »  Strabon,  XII,  i.  i. 

1.  Situation  géographique.  —  A  l'origine,  le  pays 
qui  portait  ce  nom  n'était  donc  qu'une  bande  de  terri- 
toire qui  s'étendait  le  long  de  la  côte  de  l'Euxin,  entre 
la  Colchide,  à  l'est,  et  le  ileuve  Halys,  à  l'ouest.  Il  faisait 
partie  du  vaste  domaine  de  la  Cappadoce,  qui  allait  de 
la  Cilicie  au  Pont  Euxin.  Sous  la  domination  persane, 
il  fut  divisé  en  deux  satrapies  ou  gouvernements,  dont 
le  plus  septentrional,  borné  au  nord  par  la  mer  et  au 
sud  par  le  mont  Paryadrès,  fut  appelé,  comme  nous 
venons  de  le  voir,  Cappadoce  sur  le  Pont,  puis  simple- 
ment le  Pont.  Du  côté  de  l'ouest,  son  territoire  s'avan- 
çait davantage  dans  les  terres.  Les  contrées  limitrophes 
étaient  :  au  sud-ouest,  la  Galatie;  au  sud  la  Cappadoce 
proprement  dite  et  la  Petite  Arménie;  à  l'est,  la  Colchide 
et  l'Arménie;  à  l'ouest,  la  Paphlagonie.  Voir  fig.  121. 
Néanmoins,  comme  nous  l'apprendra  le  résumé  de 
l'histoire  du  Pont,  ces  limites  ne  furent  pas  les  mêmes 
à  toutes  les  époques. 

Sous  le  rapport  de  la  géographie  physique,  la  région 
qui  forma  toujours  le  noyau  principal  du  Pont  est  acci- 
dentée à  l'extrême,  comme  le  sont  peu  de  contrées 
de  notre  globe.  C'est  essentiellement  un  pays  de  mon- 
tagnes. Les  monts  principaux  sont,  à  l'est,  le  Paryadrès 
et  le  Scydisès,  qui  se  dressent  comme  des  remparts 
gigantesques  ;  le  premier,  tout  le  long  du  littoral,  en 


539 


PONT 


540 


face  du  Caucase,  tandis  que  l'autre  s'avance  à  l'inté- 
rieur, comme  un  prolongement  de  l'Antitaurus.  Quel- 
ques-uns de  leurs  sommets  atteignent  plus  de  3000  mè- 
tres. Les  montagnes  du  sud  donnent  naissance  à  de 
nombreuses  rivières,  qui  sillonnent  tout  le  pays;  on 
en  a  compté  jusqu'à  vingt-huit.  Les  principales  sont  le 
Halys,  aujourd'hui  Kisil-lrmach,  l'Iris  et  le  Lycos.  Les 
vallées  étaient  très  fertiles,  surtout  celle  qui  borde  le 
l'ont  Euxin;  elles  produisaient,  spécialement  dans  la 
partie  occidentale,  toutes  sortes  de  céréales  et  d'arbres 
fruitiers.  Cf.  Strabon,  XII,  i,  15;  Pline,  H.  N.,  xiv,  19; 
Théophraste,  Hisl.  planta):,  iv,  5;  vu t,  i;  ix,  16.  Les 
abeilles  y  abondaient;  aussi  faisait-on  un  commerce 
considérable  de  miel  et  de  cire.  Voir  Xénophon,  Aunb., 
IV,  vin,  10,  '20;  Pline,  H.  N.,  xxi,  45.  Les  eaux  des 
rivières  étaient  très  poissonneuses,  et  l'on  trouvait  des 
minerais  variés  dans  les  montagnes.  On  rencontrait 
partout,  suivant  les  zones  et  les  altitudes,  des  pâturages, 
des  champs  cultivés,  des  vignobles,  des  vergers,  des 
forêts.  La  situation  commerciale  était  excellente  aussi, 


121.       Carte  du  Pont. 

gré aux  ports  de  l'Euxin  et  aux  vallées  fluviales.  Le 

climat  est  généralement  tempéré,  doux  et  agréable, 
comme  celui  de  la  région  méditerranéenne.  Cf.  Strabon, 
II,  i,  15;  XII,  n,  10. 

Les  habitants  appartenaient  parleur  origine,  les  uns 
à  la  Colchide,  les  autres  à  la  Grèce,  d'autres  à  de  nom- 
breuses tribus  dont  la  parenté  ethnologique  est  très 
obscure;  parmi  elles,  on  mentionne  les  Tibareiii.  les 
Macrones,  les  Mocynœci,  les  Chalybei,  etc.  (Juel- 
ques-u  nés  appartenaient  à  la  race  sémitique,  notamment 
les  Leucosyri,  ou  Syriens  blancs,  qui  semblent  être 
descendus  des  Assyriens.  A  eux  tous,  ils  formaient  une 
vraie    mosaïque    de-    nations,   et    parlaient,  au  dire    des 

anciens  auteurs, 22  ou  25  langues  distinctes.  Voir  Valère- 
Maxime,  VIII,  vu,  10;  Quintilien,  1.  11,50;  Pline,  H.  A'., 
xxv,  2;  Aulu-Gelle,  xvn.  17.  Le  long  de  la  côte,  tirs 
colonies  grecques,  venins  en  partie  de  Sinope,  en  par- 
tie de  Milet,  s'étaienl  établies  depuis  le  xvir  siècle 
avanl  J.-C  et  étaient  parvenues  à  une  grande  prospé- 
rité. Les  peuplades  de  l'intérieur,  surtout  à  l'est,  étaient 
très  sauvages, à  demi  barbares.  Voir  Strabon,  loc.  cit.: 
li.  Hansen.  De  genlibus  m  Ponto  orienlali  liabilanti- 
bus,  Kiel,  IS70. 

Plus  de  cent  villes,  dont  plusieurs  riches  el  peuplées, 

liaient  un  signe  de  la  prospérité  du  pays  :  quelques-unes 
d'entre  elles  sont  encore  pleines  de  vie.  Les  plus 
célèbres  liaient  I"  sur  le  rivage  de  l'Euxin  :  Sinope, 
actuellement  Siimiih,  Aniistis  ou  Sumsoûn,  Trape/us  ou 

Trébizonde,    Pharnacéia,    Side;    2°  dans  l'intérieur  : 

Auiaséia,  qui  devint,  l'an  7  avant  J.-C,  la  capital"  de  la 

province  romaine  du   Pool;  Comana  Pontica,  Lycopolis, 

lia  OU  Siuds.-Cabira, appelée  plus  lard  Xéucésaive. 

II.  Histii Pont.        Elle  est  assez  difficile  à 

résumer,  tant  elle  a  eu  de  vicissitudes. Tel  est  d'ailleurs 


le  cas  pour  la  plupart  des  provinces  d'Asie  Mineure. 
Après  l'époque  de  Cyrus,  le  Pont  demeura  sous  la 
domination  au  moins  nominale  de  la  Perse,  et  fut 
gouverné  par  des  satrapes.  Cf.  Hérodote,  m,  94;  vu.  77, 
etc.  Ses  annales  proprement  dites  ne  s'ouvrent  qu'avec 
la  famille  des  Mithridate.  qui  lui  procura  tant  de 
gloire  et  aussi  tant  de  revers.  Cn  premier  Mithridate, 
qu'on  dit  avoir  appartenu  à  la  noblesse  perse,  fut  le 
fondateur  de  cette  dynastie.  Ariobazane.  son  Mis.  :»li:è 
337  avant  J.-C.  subjugua  quelques  tribus  du  Pool,  qui 
avaient  été  jusqu'alors  plus  ou  moins  indépendantes, el 
jeta  ainsi  les  bases  d'un  territoire  à  part.  Voir  Diodore 
de  Sicile,  \v,  90.  Son  (ils  et  successeur.  Mithridate  II. 
poursuivit  son  ouivre.  Mais  c'est  surtout  Mithridate  III, 
301-200,  qui  fonda  vraiment  le  royaume  du  l'ont,  en 
profitant,  pour  s'établir  solidement,  des  guerres  intes- 
tines  que  se  livraient  alors  les  Diadoques  ou  succes- 
seurs d'Alexandre  le  Grand.  On  le  désigna  plus  lard 
par  le  surnom  de  ktistès,  »  fondateur  ».  Il  prit  le  litre 
de  roi  en  290.  Son  domaine,  qui  s'étendait  d'abord  sur 
les  districts  papblagonien  et  cappadocien  situés  près  du 
cours  inférieur  du  lleuve  Halys.  ne  tarda  pas  à  embras- 
ser aussi  les  régions  pontiques  proprement  dites. 
Durant  deux  siècles  ce  royaume  continua  de  grandir, 
presque  en  silence,  éclipsé  par  les  deux  dynasties 
des   Séleucides  et  des  Ptolémées,  et  même  aussi  par 

les  deux  petits  royaumes  de  Bithynie  et  de  l'erg; ■. 

nés  en  même  temps  que  lui. 

C'est  sous  son  dernier  roi.  Mithridate  VI  Kupalor, 
dit  le  Grand  (120-63),  qu'il  s'élc\a  tout  à  coup  a  une 
grandeur  prodigieuse.  Ce  prince  fui  presque  perpétuelle- 
ment en  guerre,  en  premier  le \ec  ses  voisins  du  nord- 

esl  de  l'Asie,  auxquels  il  enleva  lour  à  tour  la  Chersonèse 
taurique,  la  Colchide,  la  Petite  Arménie  et  une  grande 
partie  de  l'Asie  Mineure,  puis  avec  les  Romains  dont  il 
avait  d'abord  recherché  l'amitié.  Salutteavec  Romi 
prolongea,  à  part  quelques  intervalles  de  trêve,  durant  de 
longues  années, 92-65  avant.l.-C.  La  grande  république 
n'eut  guère  d'adversaires  plus  terribles.  Cicéron  disait 
de  lui,  PrO  Muni.,  x\.  32,  que  c'était  »  le  plus  grand 
des  rois  auxquels  le  peuple  romain  eut  jamais  fait  la 
guerre.  »  Sylla  lui-même,  envoyé  contre  lui,  n'arriva 
pas  à  remporter  des  avantages  décisifs.  Finalement. 
Mithridate  fut  défait  par  Pompée  en  05,  et  son  territoire 
fut  divisé  en  plusieurs  morceaux.  La  région  septen- 
trionale, voisine  de  la  mer  Noire,  et  la  région  occi- 
dentale furent  incorporées  à  la  province  de  Bithynie, 
établie  depuis  l'an  74,  et  la  nouvelle  province  ainsi  for- 
mée reçut  le  nom  de  Bithynia  et  Pontus.  Les  districts 
méridionaux  furent  partagés  entre  un  certain  nombre 
de  petits  dynastes  du  pa\s.  Cf.  Dion  Cassius,  xi.n, 
15;  Strabon,  XII,  1,4.  C'est  ainsi  que  Polémon  recul 
d  Antoine,  l'an  36  avant  J.-C,  le  territoire  situ,'  tues  ,  lu 
Lycos,  qui  fut  nommé  Pontus  poletnoniacus.  lie  son 
côté,  Déjotare,  roi  de  Galatie,  recevait  la  partie  située 
entre  les  rivières  Iris  et  Halys,  cpii  l'urina  le  Pontus 
galatievs.  Enfin,  la  partie  orientale  échut  an  roi  de 
Cappadoce,  et  devint  le  Pontus  cappadocicus.  On 
trouve  ces  trois  contrées  ainsi  désignées,  non  seulement 
par  les  historiens,  mais  aussi  sur  d'anciennes  inscrip- 
tions. A  Polémon  I"  succéda  Polémon  II,  qui,  en  03 
après  J.-C,  se  désista  en  faveur  de  Néron.  Suétone,  Netro, 
8.  Il  avait  épousé  en  secondes  noces  Bérénice,  Mlle 
d'Ilérode  Agrippa  1"  et  sieur  d'Hérode  Agrippa  IL. Fosè- 

phe,  Ant.,  XX,  vu,  3.  Voir  Bérénice  2,  t.  i,  col.  I0J2. 
III.  Le  Pont  ei   n  Noi  vi  u  Testament.  —  Le  Ponl 
esl  mentionné  à  trois  reprises  dans  les  écrits  «In  Nou- 
veau Testament  :  deui  fois  au  livre  des  Actes,  n.  9.  et 

xvni.  2,  et  une  fois  au  début  de  la  1"  Kpitre  de  saint 
Pierre,  I  Pet.,  i,  1.  Dans  le  premier  de  ces  passages 
Act.,  n,  9,  le  l'ont  est  cité  avec  plusieurs  autres  pro- 
vinces d'Asie  Mineure,  la  Cappadoce.  l'Asie  procon- 
sulaire, la  Phrygie  et  la  Pamphilie,  dans  la  longue  liste 


541 


POXT    —    POOLE 


542 


des  contrées  d'où  un  certain  nombre  de  Juifs  étaient 
venus  à  Jérusalem,  pour  célébrer  la  première  Pentecôte 
qui  suivit  la  mort  de  Notre-Seigneur  et  qui  fut  témoin 
de  la  descente  du  Saint-Esprit  sur  l'Église  naissante. 
Dans  le  second  texte.  Act.,  xvin,  2,  nous  apprenons 
qu'Aquila,  le  célèbre  ami  et  collaborateur  de  saint  Paul, 
était  originaire  de  cette  contrée.  Enfin,  la  première 
Épitre  de  saint  Pierre  est  adressée  simultanément  aux 
chrétiens  «  du  Pont,  de  la  Galatie,  de  la  Cappadoce,  de 
l'Asie  et  de  la  Bitbynie  ».  D'après  le  sentiment  général 
des  critiques,  le  livre  des  Actes  et  la  jfa  Pétri  furent 
composés  vers  l'an  63  de  notre  ère  ;  mais  le  premier 
des  trois  textes  signalés  se  rapporte  à  peu  prés  à  l'an 30. 
et  le  second,  relatif  au  décret  par  lequel  Claude  exila 
les  Juifs  de  Rome  vers  50,  nous  ramènent  quelques  an- 
nées plus  haut.  Or,  le  résumé  historique  qui  précède  a 
montré  qu'au  1" siècle  de  notre  ère  le  mot  Pont  pouvait 
recevoir  deux  significations  distinctes,  selon  qu'on  l'ap- 
pliquait au  royaume  de  Polémon   II,  ou   à  la   province 


■  I  après  le  Nouveau  Testament,  il  y    fut  introduit  beau- 
coup plus  tôt. 

Voir Maf quardt. Rômische  Staalsverwallung,  2  in-8", 
Leipzig,  1873,  p.  192-216;  E.  Meyer,  Gesckickte  des 
Kônigreichs  Pontus,  in-8»,  Leipzig,  1879;  E.  Reclus, 
Nouvelle  géographie  universelle,  t.  IX,  L'Asie  anté- 
rieure, in-i".  Paris,  1S84,  p.  555-562;  Rollin  et  Feuardent, 
Trois  royaumes  de  l'Asie  Mineure  :  Cappadoce,  Bithii- 
uie.  Pont,  in-8».  Paris,  1888;  Th.  Reinach,  Mithridate 
Eupator,  roi  du  Pont,  in-8",  Paris,  1890;  W.  Ramsay, 
Historical  geography  of  Asia  Minor,  in-8».  Londres, 
1890;  Id.,  The  Churcli  in  Un'  Roman  Empire,  in-8", 
Londres,  1893.  L.  Filliox. 

2.  PONT  (grec  :  yeçupoûv  ;  Vulgate  :  pons).  construc- 
tion jetée  au-dessus  d'un  cours  d'eau,  pour  permettre 
de  le  traverser  (lig.  122).  Il  n'en  est  question  que  dans  un 
seul  passage.  II  Mach.,  xn,  13,  et  encore  ne  s'y  agit-il  pas 
de  pont  proprement  dit.  Voir  Casphin,  t.  n,  col.  331. 


122.  --  Construction  d'un  pont  par  les  Assyriens  pour  passer  une  rivière.  D'après  Gates  of  Balaient,  pi.  74. 


romaine  Bithynia  et  Pontus.  Mais  la  plupart  des  com- 
mentateurs supposent  à  bon  droit  que,  dans  nos  trois 
passages,  le  nom  du  Pont  semble  avoir  été  employé 
d'une  manière  toute  générale,  sans  allusion  aux  diverses 
péripéties  de  l'histoire  du  pays  et  aux  vicissitudes  de 
son  territoire. 

Nous  manquons  de  détails  sur  lévangélisation  du 
Pont.  Elle  eut  lieu  sans  doute  sous  l'influence  de  saint 
Paul  et  de  ses  disciples.  Le  pays  n'était  pas  directement 
sur  la  route  des  premiers  prédicateurs.  Le  fait  que  saint 
Pierre  compte  le  Pont  parmi  les  destinataires  de  sa 
I,e  Epitre  suppose  qu'il  y  avait  alors  dans  cette  contrée 
des  Églises  ferventes,  entièrement  constituées.  Voir 
surtout  I  Pet.,  v.  1-7.  D'après  quelques  ailleurs,  le 
prince  des  Apôtres  les  aurait  connues  personnellement  ; 
mais,  selon  l'opinion  générale,  il  parait  peu  probable 
qu  I  soit  allé  jusque-là.  Voir  PiERitE  (Saint),  t.  îv, 
col.  370.  Dans  sa  lettre  si  célèbre  à  Trajan,  qui  date  de 
l'année  112,  Pline  le  jeune  atteste,  Epist.,  96,  qu'il  y 
avait  alors  un  nombre  considérable  de  chrétiens  dans  la 
province  Bythinia  et  l'onlus,  dont  il  était  le  gouver- 
neur  :  à  tel  point,  dit-il,  que  les  temples  païens  étaient 
déserts  et  les  sacrifices  interrompus  en  divers  lieux. 
Quelques  apostats  prétendaient  même  avoir  abandonné- 
la  religion  chrétienne  25  ans  auparavant.  Ce  dernier 
trait  suppose  que  le  christianisme  avait  pénétré  dans  la 
région  au  moins  vers  l'an  87;  mais  nous  avons  vu  que, 


PONTIFE,  grand-prètre  des  Juifs.  La  Yulgate  appelle 
souvent  le  grand-prêtre  pontifex  dans  les  livres  histo- 
riques de  l'Ancien  Testament  et  dans  l'Évangile  de 
saint  Jean.  Voir  Grand-Phétre,  t.  ni,  col.  295.  Dans 
l'Épitre  aux  Hébreux,  v,  5,  etc.,  Jésus-Christ  est  appelé 
le  pontife,  «p^iepEÛç,  de  la  loi  nouvelle. 

POOLE  ou  POLE  ien  latin  Polus)  Matthew,  né  à 
York  en  1621,  mort  à  Amsterdam  le  12  octobre  1679.  Il 
se  rattachait  par  son  père  aux  Pôles  ou  Pools  de 
Spinkhill  en  Derbyshire.  Après  avoir  pris  ses  degrés 
universitaires  à  Cambridge,  il  exerça  le  ministère  pas- 
toral dans  la  paroisse  presbytérienne  de  S.  Michael-le- 
Querne.  mais  il  démissionna  en  1662  aussitôt  après  le 
vote  de  VUniformity  Act.  Ce  fut  alors  que,  plus  libre 
de  son  temps,  et  à  l'instigation  de  William  Lloyd  qui 
devait  être  plus  tard  évèque  anglican  de  Worcester,  il 
écrivit  la  Synopsis  Criticorum  aliorumque  Sacras 
Scripturse  Interprétant,  le  travail  le  plus  important 
d'une  active  carrière.  Il  puisa  largement  aux  sources 
rabbiniques  et  catholiques,  affirment  ses  biographies; 
il  emprunta  peu  de  chose  à  Calvin  et  rien  à  Luther. 
Le  premier  volume  parut,  in-f»,  en  1669,  le  2e  en  1671, 
le  3e  en  1673,  le  4e  en  1674,  le  5=  en  1676.  —  A  l'époque 
de  ce  que  les  protestants  appellent  le  Popish  Plot, 
comme  son  nom  fut  mêlé  incidemment  aux  déclara- 
tions  ultra-fantaisistes  de  Titus  Oates,  Poole  crut  devoir 


543 


POOLE 


PORC 


544 


se  réfugier  i  Amsterdam  où  il  mourut.  —  Une  2e  édi- 
tion de  la  Synopsis,  5  in-f",  fut  publiée  à  Francfort  en 
1679;  une  3*  édition  à  Ulrecht  en  1684;  une  4"  à  Franc- 
fort en  1694  (toujours  en  5  in-f»),  augmentée  d'une  vie 
de  l'auteur,  une  â'  à  Francfort  en  1709,  6  in-f»,  grossie 
d'un  commentaire  sur  les  Apocryphes  (deutérocanoni- 
ques).  L'ouvrage  fut  mis  à  Ylndex  le  21  avril  1693.  — 
Poole  mourut  avant  d'avoir  pu  terminer  ses  Annota- 
tions on  the  Holy  Bible  qu'il  n'eut  le  temps  cle  pousser 
que  jusqu'au  chapitre  l.vin  d'Isaïe.  Le  travail  fut  achevé 
par  d'autres  presbytériens  et  publié  en  2  in-f\  1683.  Il 
a  été  souvent  réimprimé.  La  dernière  édition,  3  in-8°, 
a  paru  en  1840.  —  Voir  S.  Lee,  Diclionary  of  national 
Biography,  t.  xi.vi.  1S96,  p.  99.        .1.  Montai. m  . 

PORC  (hébreu  :  hâzir,  le  fcunifiru  assyrien;  Sep- 
tante :  yoïpo:.  5;;  Vulgate  :  porcus,  sus),  mammifère  de 
l'ordre  des  bisulques,  à  pied  fourchu  et  à  doigts  pairs; 
c'est  le  type  des  porcins  (fig.  123  .  —  Le  porc  est  surtout 
remarquable  par  sa  voracité,  qu'on  exploite  pour  l'en- 
graisser. Il  se  nourrit  de  glands  et  de  fruits  sauvages. 
Guidé  par  son  odorat  très  tin.  il  fouille  la  terre  de  son 


123.  —  Le  porc. 

boutoir  pour  y  chercher  les  larves  d'insectes, les  ra- 
cines el  les  tubercules.  Tous  les  détritus  lui  sont  bons, 
et,  pour  les  trouver,  il  se  vautre  dans  toutes  les  fanges. 
Il  lui  arrive  de  dévorer  ses  petits  et  même  parfois  de 
jeunes  enfants.  Il  \il  jusqu'à  20  ans,  et.  chaque  année, 
la  truie  a  deux  portées  de  12  à  15  petits  chacune.  La 
chair  du  porc  fournit  un  aliment  substantiel,  mais  de 
digestion  un  peu  difficile.  Dans  les  pays  chauds,  elle 
devient  aisément  malsaine. 

1"  L'usage  de  la  viande  de  porc  était  interdit  aux 
Israélites.  Lev.,  xi.  7;  Peut.,  xn.  8.  Cf.  Tacite,  Hist.,  v. 
'i:  Juvénal,  Sut.,  xiv,98;  Macrobe,  n,  4.  Cette  prohibi- 
tion ne  leur  était  pas  spéciale.  En  Egypte,  le  simple 
contact  du  pourceau  rendait  impur.  Cependant,  à  la 
pleine  lune,  il  était  permis  d'immoler  des  porcs  à 
Osiris  et  i  la  Lune,  el  ensuite  d'en  manger,  mais  seule- 
ment ce  jour-là.  Hérodote,  il,  i7.  Les  Egyptiens  ne  lais- 
saient pas  d'élever  des  porcs  en  grand  nombre  fig.  124); 
quand  les  eaux  du  Nil  se  retiraient,  ils  lâchaient  les 
porcs  dans  les  champs  avant  de  les  ensemencer;  le  pié- 
tinement de  ces  animaux  suffisail  à  tenir  lieu  de  labour. 
Hérodote,  n.  14.  Cf.  Elien,  Hist.  animal.,  x,  16;  Plu- 
tarque,  De  Isid.,  8;  Josèphe,  Cont.  Apion.,  n,  13. 
L'abstention  du  porc  était  encore  en  vigueur  chez  les 
Indiens,  Élien,  Hist.  animal.,  xvi,  37;  cf.  I.  I,  col.  615; 
chez  les  Arabes.  Pline,  //.  .Y.,  vin,  78.  dont  la  coutume 
a  été  consacrée  par  le  Coran,  u,  168;  v,  4;  vi.  lie,- 
xvi,  116;  chez  les  Ethiopiens,  Porphyre,  De  abstin.,  i, 
14;  chez  les  Phéniciens,  Hérodien,  v,  6,  21  ;  voir  ce- 
pendanl  Lampride,  Vit.  Héliogabal.,  31,  qui  est  d'un 
avis  contraire.  Les  Cretois  s'en  abstenaient  également, 
mais  parce  qu'ils  considéraient  le  porc  comme  sacré. 
Athénée,  tx.  :;7ô.  Les  troglodytes  ou  les  Chananéens  qui 
précédèrent   les  Hébreux   en    Palestine  mangeaienl  le 


porc  ou  l'offraient  en  sacrifice.  On  a  retrouvé  dans  les 
cavernes  de  l'époque  néolithique,  à  Gazer,  les  ossements 
de  ces  animaux.  Cf.  Revue  biblique,  1904,  p.  428.  Les 
ossements  de  porcs  qui  abondent  dans  le  haut-lieu  néo- 
lithique de  Gazer,  donnent  même  à  penser  que  le  porc 
était  une  victime  préférée  dans  l'ancien  culte  chana- 
iieen.  ce  qui  expliquerai!  encore  la  prohibition  absolue 
de  l'usage  du  porc  par  la  loi  mosaïque.  Cf.  Vincent, 
Canaan,  Paris,  1907,  p.  188,  202.  Tacite.  Hist.,  v,  i.  se 
fait  l'écho  d'une  fable,  quand  il  prétend  que  les  Israé- 
lites s'abstenaient  du  porc  à  cause  d'une  lèpre  dont  ils 
auraient  été  atteints  et  à  laquelle  le  porc  est  sujet.  Por- 
phyre, De  abstin.,  i,  14,  prend  l'ellèt  pour  la  C 
quand  il  dit  que  les  Phéniciens  et  les  Juifs  ne  man- 
geaient pas  de  porc  parce  qu'il  ne  s'en  trouvait  pas 
dans  leurs  pays.  Les  raisons  qui  avaient  détermine  le 
législateur  des  Hébreux  étaient  à  la  fois  d'oïdre  mural 
et  d'ordre  hygiénique.  Voir  t.  i.  col.  617.  620.  Cf.  S.  Jé- 
rôme, Ailv.  Jovin.,  II.  6.  t.  xxui,  col.  291.  L'abstention 
de  la  chair  de  porc  demeura  l'une  des  caractéristiques 
du  peuple  juif.  Cf.  Philon,  De  concupiscent..  4-9.  édit. 
Mangey,  t.  n.  p.  352-355;  Juvénal,  Sal..  vi,   160;   xi\. 


124.  —  Porcher  et  troupeau  de  porcs  en  Èg 
D'après  Wilkinson,  Manners,  t   u  .  p.  100. 

98;  Cassel,  De  Judseorum  odio  et  abstinentia  a 
cina  ejusque  causis,  Magdebourg,  1740. 

2°  Les  prescriptions  de  la  loi  ne  furent  pas  toujours 
suivies  par  les  Israélites,  [sale,  i.xv,  1,  parle  de  ceux 
qui,  de  son  temps,  mangeaient  de  la  chair  de  porc  et 
des  mets  impurs,  dans  des  cachettes  où  ils  se  retiraient 
la  nuit.  Il  décrit  ce  que  se  passait  dans  les  jardins  i . I , . - 
l.ïtriques,  où,  à  l'exemple  de  celui  qui  présidait  rassem- 
blée, chacun  mangeait  de  la  chair  de  porc  el  d'autres 
choses  abominables.  Is.,  i.xvi,  17.  —  A  l'époque  n 
liéenne,  les  persécuteurs  des  Juifs  entreprirent  de  leur 
imposer  la  transgression  de  la  loi  mosaïque  au  sujet 
du  porc.  Pour  profaner  le  sanctuaire,  le  nu  intiochus 
Epiphane  ordonna,  sous  peine  de  mort,  d'y  offrir  eu 
sacrifice  des  pour  aux  el  d'autres  animaux  impurs. 
Beaucoup  de  Juifs  sesoumirenl  i  cet  ordre.  I  Mach..  i, 
50,55.  Il  voulut  aussi  obliger  les  Juifs  fidèles  à  man- 
ger la  viande  de  porc,  et  il  la  laisait  introduire  de  fore 
dans  la  bouche  de  ceux  qui  résistaient.  Il  Mach.,  VI,  18. 
Le  docteur  Eléazar  donna  à  cette  occasion  un  admirable 

exemple    de   droiture    de   conscience   et  de   fer té. 

il  Mach.,  vi.   18-31;  voir  Eléaza.r,  t.  n,  col.  1652.  Sepl 

frères  el  leur  nière  subirent  ensuite  courageusement  le 
martyre,  plutôt  que  de  manger  de  la  chair  de  porc. 
Il  Mach.,  vu,  1-41.  Sous  Caligula,  le  préfet  d'Egypte 

Flaccus,  obligeait    les  fem s  juives    à    manger  de  la 

chair  de  pore  en  plein  théâtre.  Philon,  In  Flacc.  11. 
t.  n,  p.  529-531.  Par  la  suite,  les  Juifs  ne  furent  pas 
toujours  aussi  intransigeants  dans  leur  répulsion  pour 
la    chair  de   porc.   Cf.     Drach,    De    l'harmonie 

e   el  la  synagogue,  Paris,   1844,  I.   I.  p,  265     -' 
3°  L'horreur  dont  le  porc  était  l'objet  parmi  les  Israé- 
lites se  manifeste   en   plusieurs  passages  de  la   Sainte 


545 


PORC   —   PORC-ÉPIC 


546 


Ecriture.  Pour  marquer  le  mépris  de  Dieu  à  l'égard  du 
culle  purement  extérieur,  Isaïe,  lxvi,  3,  dit  :  «  Celui 
qui  présente  une  oblation  offre  du  sang  de  porc,  »  c'est- 
à-dire  celui  qui  présente  à  Dieu  une  oblation  sans 
l'accompagner  de  sentiments  intérieurs  lui  est  aussi 
odieux  que  s'il  offrait  du  sang  de  porc.  La  femme  qui 
a  le  don  de  la  beauté,  mais  est  dépourvue  de  sens,  est 
comparée  à  un  anneau  d'or  au  nez  d'un  pourceau.  Prov., 
xi,  22.  Anneau  et  beauté  sont  également  mal  placés. 
Notre-Seigneur  dit  :  «  Ne  jetez  pas  vos  perles  devant  les 
pourceaux,  de  peur  qu'ils  ne  les  foulent  aux  pieds.  » 
Matth.,  vu,  6.  Les  pourceaux  désignent  ici  les  hommes 
grossiers,  uniquement  préoccupés  de  plaisirs  immondes 
et  de  pensées  terrestres.  Ils  n'apprécieraient  pas,  ils 
mépriseraient,  ils  profaneraient  la  doctrine  évangé- 
lique  et  les  biens  spirituels,  représentés  par  les  perles. 
Inutile  donc  de  les  leur  offrir.  Pour  indiquer  le  degré 
d'abaissement  où  est  tombé  le  lils  prodigue,  Notre- 
Seigneur  dit  qu'on  l'envoya  garder  les  pourceaux.  Luc, 
xv,  15.  Les  docteurs  interdisaient  aux  Juifs  d'être  gar- 
diens de  pourceaux.  Balia  Uama.  vu,  7;  Jerus.  Scheka- 


125.  —  Tuile  de  la  Legio  X'  avec  l'emblème  du  sanglier. 

Uni,  f.  47,  3.  Mais  le  lils  prodigue  n'est  plus  dans  son 
pays;  il  est  tombé  si  bas  qu'il  est  devenu  étranger  à  sa 
famille  et  à  sa  nation.  Enfin,  saint  Pierre,  parlant  des 
faux  docteurs  qui,  après  avoir  connu  la  vérité,  enseignent 
le  mensonge,  leur  applique  le  proverbe  :  o  La  truie  vau- 
trée s'est  lavée  dans  le  bourbier,  o  II  Pet.,  Il,  22. 
Horace,  Ep.,  I,  n,  213,  dit  de  même,  en  unissantensemble, 
comme  l'Apôtre,  le  chien  et  la  truie  : 

Viœisset  canis  immundus,  vel  arnica  luto  sus. 

Sur  le  hûzir  de  Ps.  lxxx(lxxxix),  14.  voir  Sanglier. 

4"  Lorsque  le  Sauveur  vint  aux  pays  des  Géraséniens 
(voir  t.  m,  col.  204),  et  qu'il  eut  guéri  un  possédé  dont 
le  démon  disait  s'appeler  «  légion  »  (voir  t.  m,  col.  159). 
pour  indiquer  que  les  esprits  mauvais  se  trouvaient  là 
en  grand  nombre,  ces  esprits  demandèrent  à  être  envoyés 
dans  un  troupeau  de  deux  mille  pourceaux  qu'on  fai- 
sait paitre  dans  le  voisinage.  Le  Sauveur  le  leur  permit. 
Aussitôt  les  pourceaux,  sous  l'influence  des  démons,  se 
précipitèrent  du  haut  de  la  colline  à  pic  dans  le  lac  de 
Tibériade  et  y  périrent  tous.  Matth.,  vin,  30-34  ;  Marc, 
v,  9-20;  Luc,  vin,  30-39.  Les  évangélistes  ne  disent  pas 
à  qui  appartenait  ce  nombreux  troupeau.  Que,  contrai- 
rement à  l'esprit  de  la  Loi,  il  ait  appartenu  à  un 
Juif,  qu'il  ait  été  gardé  par  des  porchers  juifs,  ou  bien 
qu'il  ait  eu  pour  propriétaire  et  pour  gardien  des  étran- 

DICT.    DE   LA   BIBLE. 


gers,  Notre-Seigneur,  qui  commandait  aux  démons, 
n'en  était  pas  moins  le  maître  d'agir  comme  il  le  fit. 
Le  troupeau,  il  est  vrai,  n'était  pas  en  terre  juive.  Son 
voisinage  n'en  constituait  pas  moins  une  tentation  ou 
une  sorte  de  défi  à  l'égard  des,  Israélites  de  l'autre  rive 
du  lac.  Du  reste,  la  perte  était  compensée  par  la  sécu- 
rité rendue  à  la  localité  ;  car  auparavant  la  fureur  des 
possédés  rendait  le  chemin  impraticable.  Matth.,  vm, 
28.  —  On  a  retrouvé  à  Jérusalem  des  tuiles  portant 
l'estampille  de  la  Legio  X'  Fretensis,  qui,  sous  l'empe- 
reur Hadrien,  campa  à  Gadara,  non  loin  du  pays  des 
Géraséniens.  Plusieurs  de  ces  tuiles  portent  comme 
emblème  un  porc  ou  plutôt  un  sanglier  (fig.  125).  Cette 
représentation  ne  constitue  pas,  comme  on  l'a  cru  un 
moment,  cf.  Revue  archéologique,  1869,  t.  xx,  p.  259, 
une  insulte  à  la  nation  juive;  car  l'emblème  du  san- 
glier appartenait  à  plusieurs  légions.  Encore  moins 
faut-il  songer  à  chercher  une  relation  quelconque  entre 
la  «  légion  »  des  démons  se  précipitant  dans  les  porcs, 
et  la  Legio  Fretensis  ayant  le  porc  ou  le  sanglier  pour 
emblème.  A  l'époque  évangélique,  la  Xe  légion  campait 
en  Espagne  ;  elle  ne  vint  en  Judée  que  pour  la  cam- 
pagne de  Vespasien.  Tacite,  Hisl.,  v,  1.  Cf.  Revue 
biblique,  1900.  p.  101-105.  H.  Lesêtre. 

PORC-EPIC,  mammifère  de  l'ordre  des  rongeurs, 
qui,  en  dépit  de  son  nom,  n'a  rien  de  commun  avec  le 


126.  —  Le  porc-épic. 

porc,  et  se  rapproche  plutôt  des  lapins  par  sa  taille  et 
ses  habitudes  (lig.  126).  Il  est  très  inoffensif,  malgré  les 
piquants  raides  et  aigus  dont  son  corps  est  couvert.  Ces 
piquants  sont  creux  comme  les  tuyaux  d'une  plume, 
clairsemés  et  assez  peu  adhérents  à  la  peau  pour  tomber 
souvent  quand  l'animal  fait  des  mouvements  brusques. 
Le  porc-épic  vit  dans  des  terriers  profonds.  Il  en  sort 
la  nuit  pour  chercher  les  graines,  les  racines,  et  même 
parfois  les  œufs  et  les  petits  oiseaux  dont  il  se  nourrit. 
—  Le  porc-épic  n'est  pas  nommé  dans  la  Sainte  Écri- 
ture, bien  que  certains  auteurs  le  croient  désigné  par 
le  mot  qippôd,  comme  le  hérisson,  avec  lequel  ses 
piquants  lui  donnent  quelque  ressemblance.  Voir 
Hérisson,  t.  m,  col.  609.  Pourtant  l'espèce  hystria 
cristata  est  fort  commune  en  Palestine,  dans  les  régions 
rocheuses  et  dans  les  gorges  des  montagnes.  Elle 
abonde  dans  le  voisinage  de  la  mer  Morte,  dans  la 
vallée  du  Jourdain  et  dans  tous  les  endroits  où  les 
fentes  des  rochers  peuvent  lui  ménager  un  abri.  Le 
porc-épic  n'a  pas  besoin  d'eau;  il  peut  vivre  par  con- 
séquent là  où  presque  aucun  autre  mammifère  serait 
incapable  de  résider.  Il  reste  à  dormir  pendant  l'hiver, 
et,  le  reste  du  temps,  ne  sort  que  la  nuit.  Aussi  ne  le 
renconlre-t-on  pas  vivant,  excepté  quand  les  Arabes 
réussissent  à  s'emparer  de  lui  dans  sa  retraite.  Celle-ci 
se  reconnaît  aux  empreintes    de  pattes    et   au  grand 

V.  -  18 


547 


PORC-EPIC 


PORTE 


548 


nombre  de  piquants  qui  jonchent  le  sol  ;  mais  elle  est 
bien  trop  enfoncée  dans  les  fissures  du  rocher  et  bien 
trop  étroite  pour  être  accessible.  Les  Arabes  n'ont  pas 
trouvé  le  moyen  de  faire  sortir  le  porc-épic  de  sa  for- 
teresse. Sa  chair  est  très  estimée  pour  sa  délicatesse,  et 
ses  piquants  sont  un  objet  de  commerce  à  Jérusalem. 
Pour  s'en  emparer,  on  chasse  l'animal  pendant  la  nuit. 
au  moment  où  il  regagne  son  gîte  avant  le  lever  du 
soleil  et  on  le  met  dans  l'impuissance  de  s'échapper 
en  le  frappant  à  coups  de  bâton.  D'autres  fois,  on  dis- 
pose à  l'entrée  de  son  refuge  des  nasses  de  fil  de  fer. 
Pour  se  défendre,  le  porc-épic  se  roule  en  boule  et 
darde  ses  piquants  contre  les  assaillants  qui  ne  peuvent 
l'atteindre  sans  se  blessercruellement.  CI.Tristram,  1  lie 
natural  Hislonj  of  llie  Bible,  Londres,  1889,  p.  125. 

H.  Lesktre. 
PORFIRIANUS ou  PORPHYRIANUS (CODEX). 
Ce  manuscrit,  ainsi  appelé  du  nom  île  son  ancien 
possesseur,  fut  d'abord  étudié  et  put/lié  par  Tischendorf 
dans  ses  Monumenta  sacra  ineilila,  t.  v  et  vi,  Leipzig, 
ISIm  c-i  isijil.  Il  .,•  trouve  maintenant  à  la  Bibliothèque 
impériale  de  Saint-Pétersbourg  sous  le  numéro  225. 
C'est  un  palimpseste  en  écriture  onciale  du  IXe  siècle; 
il  contient  des  fragments  notables  des  Actes,  des  Kpitres 
de  saint  Paul  et  de  l'Apocalypse,  mais  une  assez  grande 
partie  est  à  peu  près  illisible.  L'écriture  supérieure, 
datant  de  l'année  1301,  comprend  les  Actes  des  Apôtres 
(315  act)  et  les  Épilres  pauliniennes  (474  paul\;  von 
Soden  lui  attribue  le  symbole  a  463.  —  A  cause  de  son 
état  fragmentaire  et  de  sa  lecture  difficile,  le  Por/iria- 
nus  n'a  été  que  peu  ulilisé  par  les  critiques;  son  texte 
est  d'ailleurs,  au  jugement  de  Ilort,  d'un  type  relative- 
ment récent.  Le  Por/irianus  est  désigné  en  crili  [ue 
par  la  lettre  P,  par  le  sigle  a  3  dans  la  notation  nou- 
velle de  von  Soden.  —  Voir  Scrivener,  Introduction, 
i  édit.,  Londres,  1891,  t.  i,  p.  172-173;  Gregory, 
Te.rlkiilik  des  neiien  Testaments,  Leipzig,  t.  i,  1900, 
p.  102-103;  v<m  Soden.  Die  Schriften  des  neuen  Tes- 
taments, Berlin,  t.  i,  1902,  p.  216.  F.  Pbat. 

PORPHYRION,  oiseau  de   l'ordre  des    écbassiers 
macrodactyles,  appelé'  aussi  poule  sultane,  l'eu  différenl 


..  •    ;  ï^m 


127.  —  Le  porphyi  ii  a, 


plumage,  sur  lequel  se  détachent  un  bec  rouge  et  des 
pattes  rougeàtres  (fig.  127).  —  Les  Septante  ont  traduit 
une  fois  par  Ttopçvpiwv  le  mot  (inSémél,  qui  désigne 
tantôt  le  caméléon,  voir  t.  il,  col.  90,  tantôt  un  oiseau 
impur,  le  pborpbyrion.  d'après  les  Septante,  le  cygne, 
d'après  la  Vulgate,  Lev.,  xi,  18,  l'ibis,  d'après  les  deux 
versions.  Deut..  xiv.  16.  Voir  Inis,  t.  m,  col.  801.  Il  est 
impossible  de  déterminer  quelle  est  l'espèce  visée  par 
le  législateur.  Le  porpbyrion  est  commun  sur  le  Nil 
et  prés  des  marais  de  la  Palestine.  Il  se  nourrit  de 
toutes  sortes  de  proies  et,  à  ce  titre,  mérilait  de  prendre 
place  parmi  les  oiseaux  impurs.  Cf.  Tristrain,  'i 'lie  na- 
tural hUlory  of  the  Bible,  Londres.  1889.  p.  250. 

H.  Lesètre. 
PORREAU.  Voir  Poireau,  col.  189. 

PORTE  (hébreu  :  dâlâh,  délé(,mùsiî,pétah,  U 
Sa'ar;  cbaldéen  :  fera  :  Septante  :  6ypa,  -w.r,,  iruXc&v, 


delà  poule  d'eau,  le  porpbyrion  est  originaire  d'Afrique 
et  se  fait  remarquer  par  la  belle  couleur  bleue  de  son 


128.  —  Perle  antique.  Plolémaïde.  Musée  judaïque  du   L  livre. 

;;'»-;;  Vulgate  ;    janua,  porta,   valva,  ostium,  fores), 

ouverture  ménagée   | •  pénétrer   dans  une   enceinte. 

Celte  ouverture  se  compose  d'une  partie  fixe,  compre- 
nant le  seuil,  les  montants  et  le  linteau,  et  d'une  partie 
mobile  pivotant  sur  des  gonds.  Voir  GoNUS,  t.  III, 
col.  275.  La  partie  mobile  peut  être  d'une  seule  pii  i  . 
s'articulant  sur  l'un  des  montants  de  la  porte  (lig.  I28i, 
ou  de  deux  pièces  dont  chacune  s'articule  sur  un 
montant  el  dont  la  réunion  clôt  l'ouverture.  Dans  ce 
second  cas,  la  porte  est  désignée  par  un  mot  au  duel, 
delâfayini, ou  au  pluriel,  delàtôf,  fores,  à  cause  deses 
deux  battants  (fig.  131).  Le  nom  de  porte  convient  d'ail- 
leurs soit  à  la  partie  lise  de  l'ouverture,  soit  à  la  partie 
mobile,  soit  à  l'ensemble. 

1.  Dans  le  sens  propre.    —  1"   Différentes  esj 
de  portes.  —  Les  écrivains  sacrés   font    mention 
portes:  1.  du  Tabernacle,  Exod.,xxxv,  17;  xi.,  12,  etc.; 
-2.  du  Temple,  111    Reg.,   vi,  31;  IV   Reg.,    su,  9; 
II  Par..  SXVIII,  24;  L'zech.,  vin,  5;  x.  19;  xi.i,  24;xLIIl, 


549 


PORTE 


550 


11;  Mal.,  i.  10;  Ps.  xxiv  (xxm),  7;  cxvm  (cxvn),  19, 
20;  HMach.,  vin,  33;  Act.,  xxi,  30;  etc.;  voir  Temple, 
—  3.  des  chambres  du  Temple,  Ezech.,  XL.  38;  xi.n, 
11  ;  I  Mach.,  iv,  57;  —  4.  des  temples  païens,  Bar.,  vi, 
17;  Dan.,  xiv,  10;  —  5.  du  camp  Israélite,  Exod., 
xxxn,  26,  27;  —  0.  des  villes,  Peut.,  ni.  5;  Jos.,  il,  5, 


129.  —  Porte  avec  gonds  et  fermeture  d'un  modèle  de  maison 
égyptienne.  British  Muséum.  D'après  Wilkinson,  Manners  and 
cusloms  of  the  anc.  Egyptians,  t.  i,  fïg.  117,  n.  2,  p.  351. 

7;  vi,  26;  Jud.,  xvi,  3;  I  Reg.,  xxm,  7;  III  Reg.,  xxn, 
10;  IV  Reg.,  vu,  1;  Judith,  x,  6;  Jer.,  xlix,31  ;  Ezech., 
XLVIH,  30;  I  Mach.,  xn,  38;'xm,  33;  Act.,  xiv,  12,  etc.; 

—  7.  de  Jérusalem,  Ezech.,  xxvi,  2;  II  Esd.,  xm,  19,  etc.  ; 
voir  Jéri-salem,  t.  m,   iig.  240-242,  col.  1364-1365;  — 

—  8.  des  maisons,  Jud.,  xi,  21;  Prov.,  v,  8;  Marc,  n, 
2;  Luc,  xvi,  20;  Act.,  x,  17,  etc.;  —  9.  des  chambres, 
Jud.,  m,  23-25;  —  10.  des  palais  de  Joseph  en  Egypte, 
Gen.,  xljii,  19,  de  David  à  Jérusalem,  II  Reg.,  xi,  9; 
xv,  2;  du  roi  de  Bahylone,  Dan.,  n,  49;  du  roi  des 
Perses  à  Suse,  Esth.,  Il,  19;  21;  iv,  2;  v,  9,  13;  vi,  10; 
de  Caïphe,  Mattli.,  xxvi,  71;  —  11.  des  tours,  Jud.,  ix. 


130.  —  Porte  égyptienne. 
D'après  Wilkinson,  Manners,  t.  i,  fig.  123,  p.  355. 

51;  II  Mach.,  xiv,  il;  —  12.  des  prisons,  Bar.,  vi,  17; 
Act.,  v,  19,  23;  xvi, 26,  27;  —  13.  des  tombeaux,  Matth., 
xxvn,  60;  Marc,  xv,  16;  —  14.  du  jardin,  Dan.,  xm, 
17;  —  15.  de  la  bergerie,  Joa.,  x,  1;  —  16.  de  la  four- 
naise, Dan.,  m,  93.  —  17.  de  la  ferme,  Marc,  XI,  4. 

2°  Agencement  des  portes.  —  1.  Les  portes  des  villes 
étaient  de  bois  et  formées  de  deux  battants  assujettis 
à  l'intérieur  par  des  barres.  Voir  t.  i,  fig.  453,  col.  1468. 
La  porte  de  Gaza,  que  Samson  enleva  pendant  la  nuit, 
avait  chaque  battant  fixé  à  un  poteau.  Jud.,  xvi,  3.  Les 


villes  qui  possédaient  des  portes  et  des  barres  pouvaient 
se  défendre  et  garder  des  prisonniers.  I  Reg.,  xxm,  7. 
Celles  qui  n'avaient  ni  portes  ni  barres  étaient  à  la 
merci  des  assaillants.  Jer.,  xi.ix,  31.  Quand  la  ville 
était  entourée  de  murailles  assez  épaisses,  on  pouvait 
ménager  au-dessus  de  la  porte  une  chambre  de  garde. 


131.  —  Portes  égyptiennes  fermées.  Celle    de  gauche  est  close 

avec  des  verrous. 

D'après  Wilkinson,  Manners,  t.  i,  fig.  121,  p.  353. 

II  Reg.,  xvin,  24,  33.  Dans  les  sièges,  on  attaquait  les 
portes  parla  cognée  et  par  le  feu  et  ensuite  on  renver- 
sait les  montants  qui  les  soutenaient.  Lam.,  i,  4.  —  2. 
Les  portes  du  Temple  de  Salomon  étaient  fixées  à  des 
poteaux  en  bois  d'olivier  sauvage  engagés  dans  la  mu- 
raille; les  battants  se   composaient  de  deux  panneaux 


132.  —  Porte  égyptienne  avec  ornements  et  inscriptions. 
D'après  Wilkinson,  Manners.  t.  I,  fig.  124,  p.  356. 

en  bois  de  cyprès,  qui  pouvaient  se  replier  l'un  sur 
l'autre.  III  Reg.,  vi,  34;  Ezech.,  XLI,  24.  Les  Chaldéens 
brûlèrent  ces  portes.  IV  Reg.,  xxv,  9.  Cf.  Ps.  lxmv 
(i.xxm),  3-7.  Les  portes  du  second  Temple  eurent  le 
même  sort.  II  Mach.,  vin,  33.  —  3.  Les  portes  des  mai- 
sons et   des  chambres  étaient  aussi  de  bois,  quelque- 


551 


TORTE 


552 


foia  de  bois  de  cèdre.  Cant.,  vm,  9.  Les  monuments 
égyptiens  nous  ont  conservé  la  représentation  d'un 
«rand  nombre  de  portes.  Le  British  Muséum  possède 
îe  modèle  d'une  petite  maison  avec  sa  porte  roulant 
sur  des  gonds  (fig.  129).  Voir  Wilkinson,  Manners, 
•>■  édit.,  1. 1,  fig.  117,  p.  351.  Les  portes  avaient  naturelle- 
ment différentes  formes  (fig.  130),  ibkl.,  fig.  123,  p.  355, 
et  fermaient  de  diverses  manières  (fig.  131).  lbid.,ùg.  121. 
p.  353.  Quelques-unes  étaient  très  ornées  (fig.  132). 
lbid.,  fig.  124,  p.  356.  Quelquefois  elles  portaient  un 
nom '(fig.  133),  ibid.,  fig.  115,  n»  1,  p.  3'iï)  ou  une  ins- 
cription (fig.  134).  Ibid.,  fig.  134,  p.  362.  Cf.  Deut.,  xx, 
5.  Les  portes  des  maisons  de  Pompéi  avaient  générale- 
ment plusieurs  battants,  deux,  trois  et  même  quatre. 
Elles  étaient  divisées  en  panneaux  et  ornées  de  clous 
à  grosse  tète.  Cf.  H.  Tbédenat,  Pompéi,  Paris.  L906, 
t.  1,  p.  58.  —  4.  Les  portes  des  tombeaux  étaient  souvent 
de   pierre  plus  ou   moins    ornée.  Voir  t.   m,    fig.  41, 


133.  —  Porte  égyptienne,  avec  le  nom  de  Remenkopiou 

(Thotmès  lit). 

D'après  Wilkinson,  Manners,  t.  I,  fig.  115,  p.  346. 

col.  205;  fig. 56,  col.  275.  Cf.  t.  iv,  fig.  392,  393,  col.  1 14Ô, 
1450,  D'autres  fois,  une  simple  dalle  fermait  la  porte. 
Voil  i.  m.  liy-  '-I*.  col.  1478.  —  5.  Les  portes  de  ber- 
gerie  m'  consistaient  guère  que  dans  une  sorte  de 
clayonnage  suffisant  pour  arrêter  les  bêtes  fauves.  Voir 
t.  ii,  fig.  6H,  col.  1987.  —  6.  Les  portes  de  métal 
étaient  plus  rares.  Il  est  probable  qu'on  s'en  servait 
puni  fermer  les  fournaises.  Dan.,  m,  93.  Dans  les  pri- 
sons,  où  il  fallait  des  fermetures  particulièrement  so- 
lides, on  mettait  des  portes  très  épaisses.  A  Jérusalem, 
la  poil''  extérieure  était  de  fer.  Act.,  xn,  10.  —  7.  La 
partie  fixe  des  portes  de  temple,  de  palais  ou  de  ville 
recevait  une  ornementation  particulière  en  rapport 
avec  sa  destination.  Voir  t.  i,  fig.  68,  col.  312  (égyp- 
tienne); t.  n,  lie.  246,  col.  668  (assyrienne);  fig.  587, 
col.  1845  (grecque),  etc. 
3»  Usage  des  portes.  -  I.  La  porte  tourne  sur  ses 
onds,  l'rov.,xxvi,li.  un  l'ouvre, Jud.,  xix,27;IVReg., 
.  : ,  Ail.,  mi.  li  ;  Apoc,  m,  20,  ou  on  la  ferme.  Gen., 
mx,  10;  Il  Reg.,  xiii.  17,  18,  IV  Reg.,  iv,  4,  5,  21,  33; 
Matth-,  xxv,  10,  etc.  Pour  la  fermer,  on  la  fixe  avec  des 
barres,  voir  Barre,  i.  i,  col.  1468,  ou  avec  une  clef  qui 
|H.,,i  être  manœuvrée  du  dehors.  Voir  Clef,  t.  n, 
, ,1 .  silo,  i  in. mi  mi  >.<  nt  l'ire  seul,  ,i  I  abri  des  dangers 
extérieurs,  ls..   xxvi,  20,  pour  prier,   Matth.,  vi,  6,  ou 

e  reposer,  Luc,  xi,  7;  xm,  25,  on  fer la  porte 

sur  soi;  car  d'ordinaire,  elle  restait  ouverte,  parce  que 

il   seulement  par    la  porte  qu'entrait  la    lumière 


dans  les  maisons  les  plus  communes.  Pour  se  faire 
ouvrir  du  dedans,  on  frappe  à  la  porte.  Jud.,  xix,  22; 
Act.,  xn,  13;  Apoc,  m,  20.  —  2.  Chez  le  roi  Achis,  à 
Geth,  David,  contrefaisant  le  fou,  se  heurtait  contre  les 
battants  des  portes,  d'après  la  Vulgate  (hébreu)  :  i  il 
faisait  des  marques.  »  I  Reg.,  xxi,  13.  La  porte  était 
souvent  assez  légère  ;  écouter  à  la  poi-te  ce  qui  se  disait 
à  l'intérieur  était  une  grossièreté.  Eccli.,  xxi,  17. 
L'homme  bien  élevé  s'arrêtait  à  la  porte,  même  quand 
elle  était  ouverte;  l'insensé  entrait  rapidement  et  se 
courbait  dès  la  porte  pour  voir  à  l'intérieur.  Eccli., 
xxi.  15.  16.  —  3.  La  Loi  ordonnait  de  placer  sur  la 
porte  de  la  maison  certains  textes  sacrés.  Deut.,  vi,  9; 
xi,  20.  Voir  Mezuza.  t.  iv,  col.  1057.  Isaïe.  lvh,  8,  re- 
proche à  celle  qui  veut  se  conduire  mal  de  reléguer 
derrière  la  porte  et  les  poteaux  son  zikkarôn,  «  mé- 
morial «.  c'est-à-dire  probablement  sa  mézuza,  qui  lui 
rappelle  la  loi  de  Dieu,  ou,  selon  d'autres,  ses  amu- 
lettes idolàtriques,  qu'elle  veut  dérober  aux  regards.  — 
4.  Quand  un  esclave   voulait  rester    pour  toujours  au 


3 


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134,  _  Porte  égyptienne  avec  l'inscription   :  Pinofir, 

t  Belle  maison.  i> 

D'après  Wilkinson.  Manners,  i.  i,  lig.  134,  p.  362. 

service  de  son  maître,  celui-ci  devait  lui  percer  l'oreille 
contre  la  porte  de  la  maison.  Deut..  XV,  17.  Voir 
OREILLE,  t.  iv,  col.  1857.  C'est  devant  la  maison  de  son 
père  qu'on  lapidait  la  jeune  femme  que  son  époux 
n'avait  pas  trouvée  vierge.  Deul.,  xxn,  21.  L'exécution 
ainsi  faite  entraînait  une  sorle  d'infamie  pour  le  père 
qui  n'avait  pas  su  garder  sa  fille  et  l'avait  accordée  en 
mariage  sans  savoir  son  état  ou  sans  vouloir  en  tenir 
compte.  —  5.  A  l'époque  des  Machabées,  on  brûlait  de 
l'encens  aux  portes  des  maisons,  en  signe  d'adhésion 
au  culte  idolàtrique.  I  Mach.,  i,  58. 

3-  Les  portes  do  la  ville  (fig.  135).  -  1.  Elles  étaient 
le  lieu  le  plus  passager  à  cause  des  entrants  et  des  sor- 
tants. De  pi"-,  il  étail  rare  que  les  villes  anciennes 
eussent  des  places  spacieuses.  Dans  les  villes  entourées 
de  murs,  on  utilisait  pour  les  constructions  tout 
pace  disponible,  afin  de  réduire  au  minimum  la  lon- 
gueur de  l'enceinle  à  défendre.  Le  lieu  de  réunion  !•• 
plus  commode  el  le  plus  fréquenté  était  donc  I;.  p 
de  la  ville.  Là  se  tenaient  les  oisifs  et  les  curieux,  qui 
voulaient  se  distraire  ou  s'informer.  Lot  était  assis  à  la 
porte  de  la  ville  de  Sodome  quand  les  deux  anges  y  arri- 
vèrent. Gen..  xix.  I.  C'est  là  qu'on  devisait  sur  le  compti 
,1,..  uns  et  .1rs  autres.  Ps.  i.xix  (lxviii),  13.  Jérémie, 
xvii  19.  reçoit  l'ordre  d'aller  faire  entendre  ses  oracles 
à  la'poi'lc  de  !..  ville,  pour   qu'ils  soient  entendus  des 

rois  et  des    fils  du     peuple.  On    y   tenait  des  mi In-, 

IV  ReL..,\.  1.  et,  dans  les  temps  d'idolâtrie,  des  h  ats- 
lieux,  c'est-à-dire  du  petits  sanctuaires  d'idoles,  sur- 
montaient les  portes,  pour  rappeler    à  tous    le  cuil.   un 

honneur.  IV  Reg.,  xxm,  S.  La  sagesse  est  représi 


553 


PORTE 


554 


comme  instruisant  et  invitant  les  hommes  à  la  porte 
de  la  ville.  Prov.,  i,  il  ;  vm,  3;  ix.  14,  tandis  que  l'in- 
sensé était  incapable  de  s'y  faire  entendre.  Prov..  xxiv, 
7.  On  amenait  les  malades  à  Notre-Seigneur  à  la  porte 
des  villes.  Marc.  i.  33.  —  '2.  La  porte  de  la  ville  cor- 
respondant en  Orient  à  l'àfofi  grecque  et  au  forum 
romain,  on  y  passait  les  contrats.  Gen.,  xxm,  18.  et  là 
se  réunissaient  les  anciens  auxquels  on  soumettait  les 
affaires  litigieuses.  Deut.,  xxn.  15.  On  y  faisait  la  re- 
nonciation publique  au  droit  du  lévirat.  Deut.,  xxv,  7; 
Ruth,  tv,  11.  Voir  Lévirat,  t.  îv,  col.  214.  Dans  le  pays 
de  Job,  on  écrasait  à  la  porte,  sans  que  personne  les 
défendit,  les  fils  de  l'insensé,  c'est-à-dire  qu'on  laissait 
à  l'abandon  et  que  l'on  vouait  au  mépris  la  race  de 
l'impie.  Job,  v,  4.  Job  lui-même  venait  siéger  à  la  porte 
de  la  ville,  sur  la  place  publique,  et  se  faisait  vénérer 
de  tous,  parce  qu'il  prenait  en  main  la  cause  de  tous 
les  infortunés,  n'avait  d'autre  régie  que  celle  de  la  jus- 
tice et  réduisait  l'injuste  au  silence  et  à  l'impuissance. 
Job,  xxix,  7-17.  il  n'eût  jamais  profité  de  la  faveur  d'un 
juge  pour  accabler  le  faible.  Job,  xxxi,  21.  Il  est  re- 
commandé de  ne  pas  opprimer  le  malheureux  à  la 
porte,  c'est-à-dire   au    tribunal,  Prov.,    xxn.  22.  là  où 


royale,  parce  que  la  porte  donne  accès  au  siège  de  cette 
puissance.  Chez  les  Perses,  x\  9Jpoci,  «  les  portes,  dési- 
gnaient la  cour,  Xénophon,  Cyroped.,  I,  m,  2,  et  dans 
l'inscription  de  Behistoun,  col.  M,  13,  Darius  emploie 
le  terme  duvarayàmai,  «  dans  ma  porte  ».  L'usage  du 
mot  «  porte  »,  pour  parler  de  la  puissance  souveraine, 
s'est  conservé  en  Turquie,  «  la  Porte  »,  comme  ailleurs 
l'usage  des  mots  «  cour,  chambre,  cabinet  »,  etc.,  qui 
indiquent  une  autorité  par  le  nom  de  l'endroit  où  elle 
s'exerçait  jadis.  En  ce  sens  doivent  s'entendre  les  pa- 
roles de  Notre-Seigneur,  déclarant  que  «  les  portes  de 
l'enfer  ne  prévaudront  pas  contre  son  Église  ».  Matth., 
xvi,  18.  Ces  portes  de  l'enfer  ne  sont  autre  chose  que 
la  puissance  satanique  qui  sans  cesse  attaquera  l'Eglise 
sans  jamais  pouvoir  triompher  d'elle. 

II.  Dans  le  sens  figuhé.  —  1°  Les  écrivains  sacrés 
assimilent  à  une  porte  tout  ce  qui  peut  permettre  ou 
empêcher  un  accès.  Les  portes  du  pays  sont  les  endroits 
par  lesquels  les  ennemis  peuvent  l'envahir.  .1er.,  xv,  7; 
Nah.,  m,  13.  Le  Seigneur  ouvre  devant  Cyrus  toutes  les 
portes  des  nations,  afin  qu'il  s'en  rende  maître.  Is.,  xi.v, 
1.  —  Le  rivage  est  comme  une  porte  qui  enferme  la 
mer.  Job.  xxxvm,  8,   10.   Le  ciel  s'ouvre  comme  une 


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135.  —  Portes  assyriennes. 
D'après  Smith,  Dict.  of  the  Bible,  t.  I,  au  mot  Gâte,  et  Layard,  The  Monuments  of  Nlneveh,  part.  I,  p.  66. 


l'époux  de  la  femme  forte  siège  avec  honneur  parmi 
les  anciens  du  pays.  Prov.,  xxxi.  23.  Isaie.  xxix.  21. 
s'élève  contre  ceux  qui  tendent  des  pièges  à  l'homme 
juste  qui  les  confond  a  la  porte  et  le  perdent  par  leurs 
mensonges.  Amos,  v,  10.  12,  15,  constate  la  haine  dont 
les  oppresseurs  du  peuple  poursuivent  les  hommes  in- 
tègres à  la  porte,  et  le  tort  qu'ils  y  font  aux  justes  et 
aux  pauvres;  il  veut  que  le  droit  y  règne.  Après  la 
prise  de  Jérusalem,  les  vieillards  ne  purent  continuer 
de  se  réunir  à  la  porte.  Lam.,  v,  14.  — 3.  Quand  les 
jugements  étaient  rendus,  c'est  encore  à  la  porte  de 
la  ville  qu'on  exécutait  les  sentences.  On  y  lapidait. 
Deut.,  XVII,  5;  xxn,  24.  Le  Sauveur  fut  mis  en  croix  à 
la  porte  de  Jérusalem.  Heb.,  xm,  12.  A  Suse  même, 
Aman  fut  pendu  à  la  porte  de  la  ville.  Es  th.,  xvi.  18. 
—  4.  Par  extension,  les  portes  sont  prises  pour  les 
villes  elles-mêmes.  L'expression  «  dans  tes  portes  •>, 
qui  revient  si  souvent,  surtout  dans  le  Pentateuque, 
signifie  «  dans  tes  villes  ».  Deut.,  XII,  12;  xiv.  27  ;  xvn, 
2," etc.:  III  Reg.,  vm,  37;  II  Par.,  vi,  28.  Dieu  affermit 
les  verrous  des  portes  de  Jérusalem,  c'est-à-dire  for- 
tifie et  protège  la  ville.  Ps.  cxlvii,  13.  Les  portes  de 
Sion  gémiront,  c'est-à-dire  la  ville  sera  plongée  dans  le 
deuil.  Is.,  m,  26.  Rendre  la  justice  dans  ses  portes, 
c'est  la  rendre  dans  ses  villes.  Zach.,  vm,  16.  Il  est 
promis  à  Abraham  que  sa  postérité  possédera  «  la 
porte  de  ses  ennemis  ».  Gen.,  xxn,  17.  La  porte  repré- 
sente ici  la  puissance  des  ennemis,  de  même  qu'elle 
représente  la  fore  ■  d'une  ville,  l'autorité  qui  s'exerce 
à  la  porte  et  la  ville  elle-même.  La  «  porte  du  roi  », 
dans  Daniel,  II,  49,  tara'  malka,  et  dans  Esther,  m,  2, 
-3:  îv,  2;  v,  9,  Ha'ar  ham-mâlék,  désigne  la  puissance 


porte  pour  laisser  tomber  la  pluie.  Ps.  lxxviii  (lxxvii), 

23.  Jérusalem  est  la  porte  des  peuples,  Ezech.,  xxvi,  2, 
toujours  ouverte  afin  qu'on  puisse  par  là  arriver  au  sa- 
lut promis.  Is.,  lx,  11.  18.  Les  portes  du  Liban  sont 
l'endroit  par  où  l'incendie  viendra  dévorer  les  cèdres. 
Zach.,  xi,  1.  On  appelle  »  porte  du  ciel  »  un  lieu  sanc- 
tifié par  une  communication  divine,  Gen.,  xxvm,  17. 
et  l'accès  même  du  ciel  aperçu  en  vision,  Apoc,  iv,  1,  et 
«  porte  de  la  mort  »  ou  «  du  scbéol  »  toutes  les  causes 
qui  acheminent  vers  le  tombeau.  Job,  xxxvm.  17; 
Ps.  IX,  15;  cvn  (cvn.  16,  18;  Is..  xxxvm,  10;  Sap.,  xvi, 
3.  —  Par  une  figure  plus  hardie,  on  parle  de  la  porte 
du  sein  maternel,  Job,  m,  10,  de  la  porte  que  forme  la 
gueule  du  crocodile,  Job,  xli,  6,  et  de  la  porte  des  lè- 
vres, à  laquelle  il  faut  mettre  une  garde  sévère.  Ps.  cxli 
(cxl),  3;  Eccli.,  xxvm,  28.  Dans  le  Cantique,  vm,  9, 
l'Épouse  est  comparée  à  une  porte  qu'on  fermera  avec 
des  panneaux  de  cèdre,  c'est-à-dire  qu'on  défendra 
contre  toute  tentative. 

2°  Différentes  locutions  proverbiales  empruntent  l'idée 
de  porte.  Être  à  la  porte  de  quelqu'un,  c'est  être  tout 
près  de  lui  pour  le  menacer  ou  l'assister.  Gen.,  iv,  7; 
Matth.,  xxiv,  33;  Marc,  xm,  29;  Apoc.  m,  20.  Veiller 
ou  écouter  à  la  porte  de  la  sagesse,  c'est  se  montrer 
attentif  à  ses  enseignements.  Prov.,  vm,  34;  Eccli..  xiv 

24.  User  le  seuil  de  la  porte  d'un  homme  sage,  c'est 
aimer  à  le  fréquenter  pour  profiter  de  ses  leçons  et  de 
ses  exemples.  Eccli.,  vi,  36.  Devant  une  pareille  porte, 
les  impies  eux-mêmes  s'inclinent,  c'est-à-dire  sont  forcés 
de  rendre  quelque  hommage  à  la  vertu.  Prov.,  xiv,  19. 
Par  contre,  faire  le  guet  à  la  porte  du  prochain  indique 
parfois  des  projets  criminels.  Job,  xxxi,  9. 


Ô.").") 


PORTE 


PORTIER 


556 


3°  La  ■•  porte  de  la  foi  »  est  la  facilité  que  Dieu  mé- 
nage auï  hommes  pour  qu'ils  se  convertissent  à  l'Évan- 
gile. Act.,  xiv,  20.  Saint  Paul  aime  à  appeler  i  porte 
ouverte  »  toute  occasion  favorable  qui  se  présente  à  lui 
d'annoncer  Jésus-Christ.  I  Cor.,  \vi,  9;  Il  Cor..n.  12; 
Col.,  iv,  3;  cf.  Apoc,  m,  8.  La  «  porte  du  salut  »,  celle 
qui  mène  à  la  vie  éternelle,  est  une  porte  étroite  par  la- 
quelle on  ne  passe  pas  sans  de  sérieux  efforts.  Mallh.,  vu, 
13;  Luc,  xiii,  24.  —  Xotre-Seigneur  déclare  qu'il  est 
lui-même  la  porte  qui  donne  accès  dans  la  bergerie;  si 
on  entre  par  cette  porte,  on  est  sauvé.  Joa.,  x,  9.  Le 
divin  Maître,  en  effet,  aide  les  âmes  par  sa  grâce  à 
entrer  dans  l'Église  et  par  l'Église  dans  le  ciel.  —  4°  La 
Jérusalem  régénérée,  image  de  la  Jérusalem  céleste,  a 
aussi  des  portes.  Isaïe,  liv,  12,  dit  qu'elles  sont  d'escar- 
boucles.  Voir  t.  il,  col.  1907.  Tobie,  xm,  21,  les  voit 
bâties  de  saphirs  et  d'émeraudes  ».  Saint  Jean  les  dé- 
crit avec  détail.  La  Jérusalem  céleste  a  douze  portes, 
portant  chacune  le  nom  d'une  des  douze  tribus.  Cha- 
que porte  est  formée  par  une  seule  perle,  enchâssée 
dans  les  pierres  précieuses  qui  forment  la  muraille. 
Comme  il  n'y  a  point  de  nuit,  il  n'est  pas  nécessaire  de 
fermer  ces  portes.  Apoc,  xxi,  12.  21,  25.  Sous  ces 
figures  de  pierres  précieuses  et  de  perles,  les  auteurs 
sacrés  veulent  décrire  les  merveilles  que  Dieu  opérera 
(lins  son  Église  par  la  grâce  et  dans  le  ciel  par  la 
gloire  dont  il  environnera  les  saints. 

H.  Lesètre. 

2.   PORTES   DE  JÉRUSALEM.   Voir  JÉRUSALEM,  t.  III, 

col.  1364. 

PORTIER  (hébreu  :  SÔ'êr;  chaldéen  :  tard  ;  Sep- 
tante :  KuXwpdc,  Supwpôç;  Vulgate  :  janitoi;  ostiarius, 
portarius),  préposé  à  la  surveillance  d'une  porte. 

1.  Portiers  do  Temple.  -  l«Des  prêtres  et  des  lévites 
avaient  été  chargés  autrefois  de  tout  ce  qui  concernait 
le  service  du  Tabernacle.  Num.,  xvm,  i.  Il  y  en  avait 
donc  naturellement  parmi  eux  qui  devaient  veiller  sur 
la  porte.  Ce  service,  d'après  l'institution  de  Samuel  et 
de  David,  comprenait  212  lévites.  Ceux-ci  se  tenaient 
aux  quatre  côtés  du  Tabernacle  et  avaient  à  l'ouvrir 
chaque  matin.  La  surveillance  des  chambres  et  des  tré- 
sors de  la  maison  de  Dieu  rentrait  dans  leurs  attribu- 
tions. Quatre  chefs  les  commandaient.  Les  portiers  ré- 
sidaient dans  les  villages  environnants;  mais  un  roule- 
ment était  établi  entre  eux  pour  faire  à  tour  de  rôle  un 
service  hebdomadaire.  Les  portiers  de  semaine  logeaient 
auprès  du  Tabernacle.  I  Par.,  ix,  17-27.  —  Quand  l'Arche 
l'Ut  été  transférée  à  Jérusalem,  David  adjoignit  à  Bara- 
chias  et  Elcana,  qui  étaient  portiers  de  l'Arche,  deux 
autres  portiers,  Obedédom  et  Jéhias.  A  ces  fonction- 
naires incombait  la  surveillance  de  l'entrée  de  la  tente 
qui  abritait  l'Arche.  I  Par.,  xv,  23,  24.  Obedédom  et 
llosa  furent  ensuite  chargésdece  service  avec  68  lévites. 
I  Par.,  xvi.  38.  En  vue  du  service  du  Temple  projeté, 
David  régla  que,  sur  les  24  000  lévites  chargés  de  rem- 
plir les  différents  offices,  Î0OO  seraient  portiers.  I  Par., 
XXIII,  5.  Ils  étaient  partagés  en  différentes  classes,  sous 
les  ordres  de  chefs  appartenant  à  la  descendance  de 
Coré  et  de  Mérari.  Le  sort  désigna  les  portes  qu'ils 
aillaient  a  surveiller.  A  Obedédom  échut  le  côté  du 
midi,  et  à  ses  fils  la  maison  des  magasins;  à  Sépbiin  el 
à  llosa  le  côté  de  l'occident;  à  Sélémias,  le  cété  de 
l'orient  el  a  Zacharie  le  cété  du  nord.  (Juatre  portiers 
devaient  être  de  garde  chaque  jour  au  midi,  à  l'occident 
el  au  nord,  six  â  l'orient,  quatre  aux  magasins  el  deux 
aux  dépendances  à  l'occident,  soit  en  tout  vingt-quatre 
pour  chaque  joui  nie.  |  Par.,  xxvi,  1-19.  Les  i  000  lé- 
vites chargés  des  portes  se  relayaient  pour  ce  service. 
Ils  passaient  la  nuit  a  leur  poste  el  pendant  le  jour, 
surveillaient  les  entrées  el  les  sorties.  Chacun  des 
quatre  postes  occupait  naturellement  plusieurs 
gardiens  dans  le  cours  d'une  même  journée,  el  il  est 


probable,  quoique  les  textes  ne  le  disent  pas,  que 
chaque  semaine  l'effectif  des  portiers  était  changé. 
Quand  le  Temple  fût  bâti,  Salomon,  se  conformant  aux 
dispositions  prises  par  son  père,  «  distribua  les  por- 
tiers à  chaque  porte  d'après  leurs  classes.  •  c'est-à- 
dire  d'après  l'attribution  que  le  sort  avait  assignée  à 
chaque  famille.  II  Par.,  vm,  14. 

2°  Sous  Joas,  le  grand-prètre  Joïada  eut  à  réorganiser 
le  service  du  Temple,  en  partie  supprimé  sous  les 
règnes  précédents.  Il  rétablit  des  portiers  aux  entrées 
du  Temple,  avec  ordre  de  ne  laisser  entrer  personne 
qui  eût  quelque  souillure.  II  Par.,  xxm.  19.  —  Sous 
Ézéchias,  le'  lévite  Coré,  gardien  de  la  porte  orientale, 
était  en  même  temps  préposé  aux  dons  volontaires  et 
chargé  de  distribuer  aux  prêtres,  même  en  dehors  de 
Jérusalem,  ce  qui  était  otlèrt  au  Seigneur.  II  Par.,  xxxi. 
14.  Les  chefs  des  portiers  étaient  donc  des  personnages 
considérables,  ayant  la  responsabilité  de  services  assez 
délicats.  —  Sous  Josias,  les  portiers  recueillaient  l'ar- 
gent qu'on  apportait  pour  la  restauration  du  Temple 
et  le  remettaient  aux  intendants.  II  Par.,  xxxiv,  9.  13; 
IV  Reg..  xxii.  i.  Ils  furent  chargés  aussi  de  rejeter 
hors  du  Temple  tout  le  mobilier  idolâtrique  dont  on 
l'avait  souillé.  IV  Reg.,  xxm,  4.  A  la  Pàque  solennelle 
que  Josias  fit  célébrer,  il  fut  enjoint  aux  portiers  de  ne 
pas  quitter  leur  poste  et  des  lévites  furent  chargés  de 
préparer  pour  eux  la  Pàque.  Il  Par.,  xxxv,  15.  —  A  la 
prise  de  Jérusalem  par  les  Chaldéens.  le  général  vain- 
queur prit  un  certain  nombre  de  notables  de  la  \ille, 
entre  autres  trois  portiers,  que  Jérémie,  xxxv.  i  ;  ui, 
24,  appelle  «  gardes  du  seuil  »  ;  il  les  conduisit  à  N'abu- 
chodonosor,  qui  les  fit  mourir  à  Réblatha.  IV  Reg., 
xxxv.  18. 

3'  Après  la  captivité,  139  lévites  portiers  revinrent 
avec  Zorobabel.  I  Esd.,  n.  12.  70;  II  Esd.,  vu.  ir. 
D'autres   accompagnèrent    l.'sdras    un    peu    plus    tard. 

I  Esd.,  VII,  7,  21.  Trois  d'entre  eux  avaient  pris  des 
femmes  étrangères  et  durent  s'en  séparer.  I  Esd..  x, 
24;  II  Esd..  x.  28.  Quand  il  fallut  repeupler  Jérusalem, 
on  compta  172  portiers  qui  s'v  établirent.  Il  Esd..  xi, 
19.  A  cette  époque,  les  chefs  des  portiers  du  Temple 
étaient  au  nombre  de  six.  II  Esd.,  XII,  25.  Les  portiers 
avaient  part  aux  distributions  des  dîmes  qui  étaient 
versées  par  les  Israélites,  et  remplissaient  leurs  fonc- 
tions   conformément   au    règlement   établi    par    David. 

II  Esd.,  XII,  li.  16;  xm,  5.  —  Ézéchiel.  xi.iv.  11.  prévoit 
aussi,  dans  son  Temple  idéal,  des  lévites  chargés  des 
portes. 

4°  Dans  le  second  Temple,  il  n'y  avait  plus  que  vingt 
et  un  postes  de  gardiens,  au  lieu  de  vingt-quatre.  Mais. 
à  chaque  poste,  dix  lévites  étaient  de  garde,  et,  chaque 
nuit,  210  lévites  et  30  prêtres  veillaient  sur  le  Temple. 
Cf.  Ps.  cxxxin  (cxxxrv);   Tamid,  i,    I;  Middoth,  t,   1; 
Reland,  Antiquita  is  sacrée,  Utrecht,   17H.  p.  118.  Un 
fonctionnaire  supérieur  faisait  des  rondes  nocturnes  dans 
le  Temple,  sous  la  surveillance  d'un  intendant  spécial. 
Cf.  Schekalim,  v,  1.  D'après  Josèphe,  Cont.  Apion.,  n. 
9,\  ingl  hommes  étaient  employés  à  la  fermeture,  et  il  fal- 
lait les  efforts  de  ces  vingt  hommes  réunis  pour  ouvrir  la 
porte  orientale  du  sanctuaire,  qui  était  toute  de  bronze 
et  d'un  poids  énorme.  Cf.  lirll.  jud.,  VI,  v,  3.  Les  Juifs 
prétendaient  que  la  porte  principale  du   Temple  grin- 
çait si  fort  quand  on  l'ouvrait,  que  le  bruil  s'en  enten- 
dait jusqu'à  Jéricho.  Cf.  Tamid,  ni,  8.  On  ouvrait  les 
portes    à    la    pointe   du  jour  et  on   les  fermait    le  soir  à 
-un   déclin.    Pendant  les  fêtes  de   la  Pàque,  on  les  ou- 
vrait  dès   le  milieu  de  la  nuit,  cf.  Josèphe,  An!,  jud., 
XVIII,  II,   2.   et  à   la   Pentecôte  les    prêtres  venaient  la 
nuit  pour  remplir  leurs  fonctions.  Cf.  Bell.  jud..  VI, 
v,  ;;  ;    Yoiuii,  i,  8.  —   Les  portiers  surveillaient  aussi 
ceux  qui  pénétraient  dans  le  Temple  et  dans  ses  par- 
vis.  IN  laissaient  pénétrer  dans   le  premier  parvis  tous 
ceux  qui  se  présentaient,  même  les  étrangers,  mais  non 


557 


PORTIER    —    PORTIQUE 


558 


les  femmes  en  état  d'impureté  légale.  Le  parvis  des 
femmes  n'était  ouvert  qu'aux  Israélites  et  le  parvis 
d'Israël  qu'aux  hommes  seuls,  à  l'exclusion  de  ceux  et 
celles  qui  n'étaient  pas  légalement  purifiés.  Cf.  Josèphe, 
CoiU.  Apion.,  il,  8.  Les  portiers  ne  remplissaient  pas 
toujours  leur  office  avec  le  soin  requis  et  beaucoup  d'Is- 
raélites trouvaient  plus  commode  de  traverser  le  grand 
parvis  que  de  contourner  l'enceinte  du  Temple  pour  al- 
ler du  nord  au  sud  de  la  ville.  Notre-Seigneur  intervint 
pour  défendre  de  transporter  différents  objets  à  travers 
le  Temple.  Marc,  xi,  10. 

5°  L'importance  des  portiers  dans  l'ancien  Temple  et 
la  nécessité  de  leur  fonction  ont  déterminé  l'Église  à 
instituer  aussi  des  portiers  parmi  ses  ministres.  L'ordre 
d'ostiarius  est  le  moins  élevé  des  ordres  mineurs.  Les 
portiers  avaient  à  veiller  sur  ceux  qui  entraient  pour 
assister  aux  réunions  liturgiques  et  à  prendre  soin  de 
l'ordre  dans  l'église,  de  la  garde  de  différents  objets,  etc. 


137.  —  Soldats  égyptiens  gardant  la  porte  d'un  campement. 
D'après  Lepsius,  Denkmâler,  Ablh.  III,  Blatt.  154. 

Cf.  Martignv,  Dut.  des  antiquités  chrétiennes,  Paris, 
1877.  p.  659. 

II.  Autres  portiers.  —  I»  Il  est  plusieurs  fois  question 
de  portiers  veillant  sur  les  portes  d'une  ville.  Mais  ces 
portiers  étaient  plutôt  des  gardes  postés  en  cet  endroit 
en  cas  d'alerte  ou  de  guerre  (fig.  137).  Tels  étaient  les 
gardesdesportesdeSamarie  assiégée,  IV  Reg.,  vu,  10,  11, 
et  ceux  de  Jérusalem,  à  l'approche  des  Chaldéens.  Jer., 
xxxvii,  12,  —  Pour  assurer  le  respect  de  la  Loi,  Néhémie 
posta  des  gardes  aux  portes  de  Jérusalem,  avec  ordre  de 
les  tenir  fermées  le  jour  du  sabbat,  pour  empêcher  les 
marchands  tyriens  d'entrer  et  de  vendre.  II  Esd.,  xm,  19. 
—  2°  Des  portiers  gardaient  la  porte  des  palais.  Mardo- 
chée  surprit  le  complot  que  tramaient  deux  gardiens  de 
la  porte  du  palais  de  Suse.  Esth.,  il,  21  ;  xn,  1.  A  l'en- 
trée de  la  cour  du  palais  de  Caïphe,  il  y  avait  une  por- 
tière qui,  par  ses  propos,  contribua  à  la  chute  de  saint 
Pierre.  Joa.,  xvm,  16,  17.  —  3°  Les  maisons  de  quel- 
que importance  avaient  des  portiers.  En  quittant  sa 
maison,  le  maître  commande  au  portier  de  veiller.  Marc, 
xm,  35.  A  la  maison  de  Marie,  mère  de  Jean  Marc,  une 
servante,  du  nom  de  Rhodé,  entendit  saint  Pierre  frap- 
per à  la  porte  du  vestibule  et  ne  songea  pas  à  lui  ouvrir. 
Act.,  xn,  13,  14.  —  4»  Le  portier  de  la  bergerie  est  le 
gardien  qui  veille  sur  le  troupeau  pendant  la  nuit  et 
ouvre  au  vrai  pasteur,  quand  celui-ci  se  présente.  Joa., 
x,  2,  3-50.  On  lit  dans  Job,  xxxvii,  17  : 

Les  portes  de  la  mort  ont-elles  été  ouvertes  devant  toi  ? 
As-tu  vu  les  portes  des  ténèbres? 

Il  est  question  de  portes  dans  les  deux  vers.  Dans  le 


second,  les  Septante  lisent  7rj)t.>po!,  ce  qui  donne  au 
parallélisme  une  forme  bien  préférable  : 

Les  portiers  de  l'Hadès  ont-ils  eu  peur  à  ta  vue? 

Cf.  Dhorme,  Le  séjour  des  morts  chez  tes  Babyloniens 
et  les  Hébreux,  dans  la  Revue  biblique,  1907,  p.  68. 
Dans  le  poème  babylonien  de  la  Descente  d'istar  aux 
enfers,  il  y  a  aussi  un  portier,  pêtû,  préposé  à  la  garde 
des  différentes  portes.  Sur  la  menace  que  fait  Istar 
d'enfoncer  la  première  porte  si  on  ne  la  lui  ouvre, 
le  portier  va  avertir  la  déesse  infernale  et  ensuite 
ouvre  à  Istar  les  sept  portes  successives  de  l'enfer. 
Cf.  Dhorme,  Choix  de  textes  religieux,  Paris,  1907, 
p.  327-333.  —  Sur  les  portiers  de  prison,  voir  Geôlier, 
t.  m,  col.  193.  H.  Lesétre. 

PORTIQUE  (hébreu  :  'ùldm,  ou  'ulâm,  mûsdk, 
parhdr:  Septante  :  al\i\j.,  vaôç,  oroà;  Vulgate  :  porli- 
cus,  vestibulum),  construction  ordinairement  composée 
de  colonnes  et  d'un  toit  servant  d'abri,  destinée  à  orner 
l'entrée  d'un  édifice,  le  pourtour  d'une  cour  où  il  sert 
contre  la  pluie  et  le  soleil,  etc.  —  1°  La  première 
mention  d'une  sorte  de  portique  se  trouve  dans  les 
Juges,  m,  23.  Il  y  est  dit  qu'Aod,  après  avoir  tué  Églon, 
roi  de  Moab,  sortit  par  le  misderôn.  On  fait  venir  le 
mot  de  sdddr,  «  série  »  ;  il  désigne  probablement  une 
série  de  colonnes  formant  vestibule  à  la  maison.  Les 
Septante  traduisent  par  xpoa-ràç,  «  vestibule  »  ;  la  Vul- 
gate ne  rend  pas  le  mot  hébreu.  Le  portique  de  la  mai- 
son d'Églon  était  sans  nul  doute  fort  simple.  —  2°  Le 
Temple  de  Salomon  avait  des  portiques  dont  David 
avait  laissé  le  plan.  I  Par.,  xxvm,  11.  Sur  les  mots  par- 
bdr  et  parvdrim,  pliarurïm,  que  plusieurs  expliquent 
comme   signifiant   portiques,  voir  Pharurim,  col.  220. 

—  3°  Le  portique  du  Temple  porte  ordinairement  le 
nom  de  'ùldm,  que  les  Septante  reproduisent  à  peu 
près  sans  le  traduire  :  sùXip..  Le  portique  avait  20  cou- 
dées de  largeur,  10  de  profondeur  et  120  de  haut. 
III  Reg.,  vi,  3;  II  Par.,  m,  4.  Ce  dernier  chiffre  est 
manifestement  fautif,  car  le  Temple  lui  même  n'avait 
que  30  coudées  de  haut.  III  Reg.,  VI,  2.  D'après  la  des- 
cription qui  en  est  fournie,  ce  portique  occupait  la  façade 
même  de  l'édilice  sacré.  L'autel  s'élevait  en  face  de  ce 
portique.  II  Par.,  vin,  12;  xv,  8.  Les  rois  impies  le  fer- 
mèrent; Ézéchias  le  purifia  et  le  rendit  à  sa  destination 
primitive.  II  Par.,  xxix,  7.  Les  prêtres  se  tenaient  entre 
le  portique  et  l'autel  pour  prier  et  demander  pardon 
au  nom  du  peuple.  Joël,  H,  17.  Ézéchiel,  XL,  7-17,  pré- 
voit également  des  portiques  dans  son  Temple  idéal.  — 
Sur  l'espèce  de  portique  construit  par  Achaz  et  appelé 
mûsak,  IV  Reg.,  xvi,  18,  voir  MuSACH,  t.  iv,   col.   1345. 

—  4°  Salomon  orna  aussi  son  palais  de  portiques  :  por- 
tique à  colonnes,  long  de  50  coudées  et  large  de  30, 
ayant  en  avant  un  autre  portique  avec  des  degrés,  por- 
tique du  trône,  portique  du  jugement,  portique  de  sa 
maison  d'habitation  et  portique  de  la  maison  de  la 
reine.  III  Reg.,  vu,  6-8.  Voir  Maison  du  Rois-Liran, 
t.  iv,  col.  597.  —  5"  Dans  le  Temple  d'Hérode,  des  por- 
tiques occupaient  les  côtés  du  grand  parvis  des  gentils, 
et  en  faisaient  le  tour,  à  l'exception  de  la  partie  occu- 
pée par  la  forteresse  Antonia.  Ces  portiques  formaient 
deux  allées  parallèles,  au  moyen  de  trois  rangées  de 
colonnes,  dont  la  troisième  était  engagée  dans  la  mu- 
raille même  de  l'enceinte.  Le  portique  du  midi,  ou  por- 
tique royal,  avait  une  rangée  de  colonnes  de  plus  et 
formait  par  conséquent  trois  allées.  Les  colonnes  étaient 
de  marbre  blanc  et  avaient  25  coudées  de  haut.  Des  lam- 
bris de  cèdre  recouvraient  les  portiques.  L'espace  ainsi 
protégé  contre  la  pluie  et  le  soleil  était  de  30  coudées  de 
large.  Dans  le  portique  royal,  les  deux  allées  latérales 
avaient  30  pieds  de  large  et  50  de  haut,  celle  du  milieu 
45  pieds  de  large  et  100  de  hauteur.  Cf.  Josèphe,  Anl. 
jud.,  XV,  xi,  5  ;  Bell,  jud.,  V,  v,  2.  Ces  portiques  furent 


559 


PORTIQUE   —    PORTUGAISES    (VERSIONS)    DE    LA    BIBLE 


560 


incendiés  à  l'époque  d'Archélaûs,  pendant  une  sédition 
des  Juifs  contre  les  Romains.  Cf.  .Tosèphe,  Ant.  jud., 
XVII,  x,  2.  On  les  reconstruisit  ensuite.  Le  portique  situé 
à  l'esl  et  faisant  face  au  Temple  proprement  dit  s'appe- 
laitportique  de  Salomon.On  se  réunissaitsous  ces  por- 
tiques pour  converser,  les  docteurs  y  entretenaient 
leurs  disi  iples.  Un  jour  d'hiver,  Jésus  se  promenait 
sous  le  portique  de  Salomon  et  les  Juifs  se  rassemblèrent 
autour  de  lui.  Joa.,  x,  23.  Sous  ce  même  portique,  le 
peuple  se  réunissait  plus  tard  autour  de  Pierre  et  de 
Jean,  pour  écouler  leur  prédication,  Act.,  ni,  11.  et  les 
premiers  fidèles  se  tenaient  ensemble  pour  prier  et 
entendre  les  Apôtres.  Act.,  v,  12.  —  Sur  la  piscine  Pro- 
batique  et  ses  cinq  portiques,  Joa.,  v.  2,  voir  BETHSAÎDE, 
t.  i,  col.   1723.  H.  Lesètre. 

PORTIUS  (grec  :  n&pxioc;  Vulgate  :  Portius),  no- 
men  gentilitium  de  Festus,  procurateur  de  Judée. 
Act.,  xxxiv,  27.  Voir  Festus,  t.  h,  col.  2116. 

PORTUGAISES  (VERSIONS)   DE   LA  BIBLE. 

La  nationalité,  portugaise  commença  à  se  constituer 
à  la  fin  du  XIe  siècle  et,  quoique  le  peuple  eût  déjà 
depuis  longtemps  son  idiome  particulier,  formé  des 
langues  parlées  par  ceux  dont  il  tirait  son  origine,  les 
recherches  les  plus  anciennes  attestent  que,  même 
parmi  les  Portugais,  jusqu'au  commencement  du 
xive  siècle,  les  versions  connues  ou  usitées  des 
Saintes  Ecritures  étaient  en  espagnol  ou  en  une  autre 
langue  étrangère. 

I.  Premières  versions  portugaises.  —  On  doit  au 
savant  archevêque  d'Évora  (Portugal),  D.  I'r.  Forlunalo 
de  S.  Boaventura  (f  1844),  deux  importantes  publica- 
tions qui  nous  fournissent  des  renseignements  et  des 
documents  sur  les  origines  des  versions  portugaises 
des  Écritures,  Le  premier  de  ces  travaux  a  pour  titre: 
Memoria  sobre  o  começo,  progresso  e  decadencia  da 
litteratura  hebraica  entre  os  portugueses  catholicos 
romanosel  a  paru  dans  le  t.  ix  des  Mémoires  de  l'Aca- 
démie royale  des  sciences  de  Lisbonne.  Un  écrivain 
du  xvie  siècle,  Jacob  Flavio  d'Evora,  suivi  au  xvme  siècle 
par  Diogo  Barbosa  Machado,  dans  sa  Bibïiotheca  Lusi- 
lana,  et  par  d'autres  savants,  avait  raconté'  qu'un  évèque, 
supposé  ou  douteux,  d'Evora,  appelé  Gaston  de  Fox, 
avait  traduit  la  liible  en  langue  arabe  et  que  le  roi 
h.  Diniz  l'avait  fait  traduire  de  l'arabe  en  portugais. 
Fortuné  de  Saint-Bonaventure  a  démontré  par  des 
raisons  si  solides  la  fausseté  de  ce  récit  que  le 
célèbre  bibliographe  du  siècle  dernier,  Innocencio 
Francisco  da  Silva,  dont  l'autorité  est  universellement 
reconnue,' déclare  dans  son  Diccionario  bibliographico, 
articles  /'■'  Francisco  Becreio  et  Canton  de  Fox,  que 
l'existence  de  cette  prétendue  version  est  inadmissible 
au  tribunal  de  la  critique. 

La  seconde  publication  de  Fortuné  de  Saint-Bona- 
venture est  une  Coliecçào  île  Inédites  Portuguezes  dos 
secidos  XIV  et  xv,  3  iu-S  .  Coimbre,  1829,  imprimerie 
de  l'Université.  Cette  collection  est  la  reproduction 
fidèle  de  Manuscriplos  do  Mosteiro  de  Alcobaça.  Dans 
le  tome  i"  (de  317  p.)  on  trouve  entre  autres,  une 
Traducçâo  do  liiro  <ios  Actos  dos  Apostolos;  dans  le 
t.  II  (de  xv-299  p.),  Hislorias  d'abreriado  TestamentO 
Velho,  segundo  o  Ueestre  das  Historias  scolasticas,  e 
segundo  oittros  que  as  abreviarom,  e  com  dizeres 
d'alguds  doctores  e  sabedores  (depuis  le  commence- 
ment de  la  Genèse  jusqu'à  la  fin  du  second  livre  des 
Rois);  dans  le  t.  ni  (de  232  p.),  sous  le  même  titre, 
l'histoire  se  continue  depuis  le  troisième  livre  des  Rois 
jusqu'au  second  livre  des  Machabées,  avec  des  additions 
tirées  de  l'historien  Josèphe.  Le  manuscrit  îles  Histo- 
rias est  de  l'an  1320  et  du  règne  du  roi  de  Portugal 
D.  Diniz.  Fortuné  de  Saint-Bonaventure,  dans  son 
Historia  chronologica  e'jeritica  da  Real  Abbadia  de 


Alcobaça,  a  fait  ressortir  le  mérite  et  l'utilité  de  celte 
œuvre,  et  Innocent  da  Silva.  dans  son  Diccionario, 
notice  sur  la  Coliecçào,  les  avantages  qu'on  peut  en 
tirer  pour  l'étude  archéologique  et  philologique  de  la 
langue.  Comme  on  ne  peut  constater  l'existence  d'au- 
cune version  portugaise  d'un  livre  biblique  antérieure 
au  règne  de  11.  Diniz.  comme  on  n'a  non  plus  aucune 
preuve  que  ce  roi  ait  fait  faire  aucune  autre  traduction, 
même  abrégée,  c'est  aux  moines  d'Alcobaça,  auteurs 
de  la  version  des  Actes  des  Apôtres  et  de  l'histoire 
abrégée  de  l'Ancien  Testament,  que  revient  l'honneur 
d'avoir  été  chronologiquement  les  premiers  traducteurs 
de  la  Bible  en  langue  portugaise. 

Fernào  Lopes,  surnommé  le  patriarche  des  histo- 
riens portugais,  rapporte  dans  le  prologue  de  la  se- 
conde partie  de  sa  Chronica  d'el  Rei  I).  -loào  P,  qui 
régna  de  1385  à  H33,  que  ce  monarque  «  fit  traduire 
par  de  grands  lettres,  en  langue  (portugaise!,  les  Evan- 
giles, les  Actes  des  Apôtres  et  les  Epitres  de  saint  Paul, 
ainsi  que  d'autres  livres  spirituels  des  saints  ».  Quels 
furent  les  «  lettrés  »  qui  exécutèrent  ce  travail,  de 
quelle  manière  ils  accomplirent  leur  tâche,  où  se 
trouvent  ces  versions,  Fernand  Lopes  ne  le  dit  pas  et 
ceux  qui  sur  son  témoignage  ont  reproduit  cetlenotice 
ne  le  disent  pas  davantage.  11.  Fr.  Manuel  do  Cenaculo 
Villas-Boas,  dans  son  livre  Cuidados  litterarios  do 
Prelado  de  Beja  em  graça  de  seu  bisjiado.  p.  64,  dé- 
clare seulement  qu'il  a  eu  en  sa  possession  une  tra- 
ducçâo historiada  do  Antigo  Tcslamenlo  manuscrite, 
faite  au  xve  siècle  en  portugais  de  l'époque  par  un 
théologien  savant  et  versé  dans  la  connaissance  de  la 
langue  hébraïque,  et  il  ajoute  qu'à  la  date  à  laquelle 
il  écrit  (son  livre  fut  imprimé  en  1788)  il  ne  sait  pas 
autre  chose  sur  cette  traduction.  ■ 

Il  convient  de  mentionner  ici  la  version  faite  par  le 
jurisconsulte  Gonçalo  Garcia  de  Santa  Maria.  Diogo 
Barbosa,  dans  le  t.  n  de  la  Bibïiotheca  Lvsitana,  dit 
qu'elle  a  pour  titre  Epistolas  e  Ecangelhos  que  se  cou- 
lant no  decurso  do  anno,  el  qu'elle  fut  imprimée 
in-folio,  en  lettres  gothiques,  en  1479,  sans  indication 
de  lieu.  Antonio  Ribeiro  dos  Santos.  qui  vivait  de  1743  à 
1818, en  parle  aussi  dans  Memoria  de  algumas  traduc- 
çôes  biblicas  menos  vulgares  em  lingua  portugueza, 
qui  a  paru  dans  le  t.  vu  des  Memorias  de  Litteratura 
Portugueza,  publié  par  l'Académie  royale  des  sciences 
de  Lisbonne.  Il  est  vrai  que  le  bénéficier  Francisco 
Leitào  Ferreira  (1667-1735),  dans  ses  Noticias  Chrono- 
logicas  da  Universidade  de  Coimbra,  dit  que  Gonçalo 
Garcia  était  originaire  de  Saragosse  (Espagne)  et  qu'on 
ne  connait  de  lui  qu'une  version  en  castillan  de  138 
pages,  imprimée  en  caractères  gothiques.  Barbosa  et 
Ribeiro  dos  Santos, s'en  rapportant  à  cette  information, 
mil  rétracté  Ce  qu'ils  avaient  écrit  avant  de  la  connaî- 
tre. Toutefois  leui  rétractation  b  été  trop  prompte 
el  elle  n'est  pas  fondée  sur  des  raisons  suffisantes.  Les 
tangues  parlées  dans  les  deux  pays  ont  une  source  com- 
mune et  elles  ont  entre  elles  grande  affinité  el  ressem- 
blance ;  Portugais  et  Espagnols  des  classes  instruites 
cultivaient  l'une  et  l'autre,  la  leur  el  celle  de  la  nation 
voisine,  de  sorte  qu'il  y  avait  des  Portugais  qui 
écrivaient  en  espagnol,  comme  le  rabbin  Duarte  Pinhel, 
qui,  de  concert  avec  le  castillan  Jacques  de  Vargas  et 
d'autres,  composa  en  celte  langue  une  version  de  la 
Bible  (Ancien  Testament)  éditée  par  Abraham  l'sqne 
et  connue  sous  le  nom  de  Bible  de  Ferrare,  parce 
qu'elle  fut  imprimée  dans  celte  ville  en  1553.  Il  y  eut 
aussi  des  Espagnols  qui  écrivirent  en  portugais  el  de 
ce  nombre  fut  Goni  alo  I  rarcia  de  Santa-Maria.  Innoc  ent 
da  Silva.  dans  son  Diccionario,  article  Gonçalo  Harcia, 
rapporte  que  le  21  gaai  1866  le  libraire  Bertrand  lui 
montra  un  livre  in-folio,  en  caractères  gothiques,  où 
manquaient  le  frontispice  et  le  dernier  ou  les  der- 
niers feuillets,  mais  on.  au  liant  du  premier  feuillet,  le 


561 


PORTUGAISES   (VERSIONS)    DE   LA   RIBLE 


562 


titre  constatait  que  c'étaient  les  Epislolas  e  Evangelhos 
em  portuguez  par  Gonçalo  Garcia  de  Sauta  Maria, 
Da  Siha  n'affirme  point  que  c'était  l'édition  de  1479, 
citée  dans  le  tome  H  de  la  Bibliotheca  Lusitana, 
puisque  le  livre  ne  contenait  ni  frontispice  ni  suscrip- 
tion  finale  avec  la  date  de  l'impression,  mais  il  dit  qu'il 
n'a  pas  de  doute  que,  s'il  n'était  du  xv  siècle,  il  doit 
être  au  moins  du  commencement  du  xvie.  Pour  se  rendre 
compte  que  c'était  un  livre  différent  de  celui  dont 
parle  Ferreira  Leitào,  il  suffit  à  Da  Silva  de  constater 
que  celui  que  mentionne  Leitào  avait  138  pages,  tan- 
dis que  celui  que  vendit  le  libraire  Bertrand  en  avait 
plus  de  400,  sans  compter  celles  qui  étaient  perdues  à 
la  fin. 

A  peu  prés  contemporaine  de  la  version  de  Goncalo 
Garcia  fut  celle  de  D.  Philippa  de  Lancastre,  fille  de 
l'infant  D.  Pedro  et  petite-fille  de  D.  Joào  I".  Elle  vécut 
de  1435  à  1497  et  acheva  ses  jours  dans  le  couvent  des 
religieuses  cisterciennes  d'Odivellas.  Le  premier  qui 
mentionne  cette  traduction  est  .lorge  Cardoso  (1606- 
1669)  dans  VAgiologio  Lusitano,  au  11  février,  la  lettre 
A.  Elle  a  été  citée  depuis  par  le  théatin  D.  Antonio 
Caetano  de  Sousa  (1674-1759)  dans  le  t.  u  de  VHistoria 
Genealogica  da  Casa  Real,  et  par  Diogo  Barbosa  dans 
le  t.  u  de  la  Bibliotheca  Lusitana.  D'après  ces  auteurs 
cette  version,  faite  sur  une  traduction  française,  ren- 
ferme les  Erangel/wx  e  Humilias  de  todo  o  anno.  Les 
deux  premiers  et  Antonio  de  Figueiredo,  dans  la  Pré- 
face générale  de  sa  traduction  de  la  Bible,  nous 
apprennent  que,  de  leur  temps,  cette  œuvre  se  conser- 
vait encore  dans  le  monastère  des  Cisterciennes  d'Odi- 
vellas. Augusto  Soares  d'Azevedo  Barbosa  de  Pinlio 
Leal,  parle  aussi  de  ce  travail,  en  1875,  dans  le  t.  VI  de 
son  Portugal  Anligo  e  Moderno,  au  mot  Odivcllas. 
«  D.  Philippa,  dit-il.  écrivit  un  manuscrit  et  l'orna  de 
belles  miniatures;  c'est  un  ouvrage  de  grand  mérite, 
qu'elle  donna  au  monastère;  il  existe  encore.  »  Sur  le 
degré  d'instruction  de  la  princesse,  le  même  auteur 
ajoute  :  g  Dirigée  par  son  père  dans  son  éducation,  elle 
connaissait  à  fond  le  latin  et  le  français  et  elle  a  laissé 
des  œuvres  écrites  de  sa  main.  » 

Dans  la  Resposta  a  Consulta  que  o  Deputado  (da 
Real  Mesa  censoria)  Antonio  Pereira  de  Figueiredo 
fez  aô  Sr.  Bispo  de  Beja  sobre  versôes  partidas  da 
Biblia  em  vulgar,  em  Fevereiro  de  1794  (manuscrit 
qui,  selon  l'auteur  de  la  Préface  à  la  seconde  édition 
de  la  Bible  traduite  par  Figueiredo,  appartient  au- 
jourd'hui à  l'Académie  des  sciences  de  Lisbonne),  D. 
Fr.  Manuel  do  Cenaculo  rapporte  que  la  reine  D. 
Leonor,  femme  de  D.  Joào  II,  fit  imprimer  la  traduc- 
tion des  Actos  dos  Apostolos,  as  duas  Epistolas  de  S. 
Pedro,  as  très  de  S.  Joào  e  a  de  S.  Judas,  mais  il  ne 
dit  pas  par  qui  elle  avait  été  faite  et  s'il  en  existe  des 
exemplaires. 

Si  ce  n'est  pas  la  même  version,  c'est  au  inoins  une 
version  de  la  même  époque,  celle  des  Actos  dos 
Apostolos,  dont  nous  avons  parlé  plus  haut,  qui  a 
été  publiée  dans  le  t.  i  de  la  Collecçâo  de  Ineditos 
l'orluguezes,  éditée  par  D.  Fr.  Fortunato.  D'après  ce 
prélat,  cette  version  fut  faite,  peut-être  d'après  une 
autre  version  plus  ancienne,  par  Fr.  Bernardo  de  Alco- 
baça,  qui  vivait  sous  le  règne  de  D.  Joào  II.  C'est  à  ce 
Fr.  Bernardo  de  Alcobaça  qu'on  attribue  généralement 
et  avec  raison  la  traduction  portugaise  de  la  Grande 
vida  de  Jésus  Christo,  écrite  en  latin  par  Ludolphe  le 
Chartreux.  Cette  traduction  fut  imprimée  à  Lisbonne 
en  1495,  par  ordre  du  roi  D.  Joào  II  et  de  sa  femme 
D.  Leonor. 

Il  est  inutile  d'énumérer  ici  en  détail  diverses  ver- 
sions de  moindre  importance,  qui  sont  de  la  même 
époque  ou  peu  postérieures,  des  traductions  d'un  cer- 
tain nombre  de  Psaumes  ou  de  chapitres  d'autres 
•livres  de  la  Bible,  intercalés  occasionnellement  dans 


des  biographies  ou  dans  des  livres  d'histoire  ou  de  lit- 
térature profane. 

II.  Versions  portugaises  depuis  le  xvi»  siècle 
jusqu'au  milieu  du  xviii«  siècle.  —  Dans  le  cours  du 
xvie  siècle,  avec  l'apparition  du  protestantisme  et  la 
propagation  de  sa  fausse  doctrine  du  libre  examen  et 
de  l'interprétation  privée  des  Ecritures,  la  lecture  de  la 
Bible  devint,  dans  une  certaine  mesure,  un  danger 
pour  ceux  qui  n'étaient  pas  familiers  avec  les  règles 
de  l'herméneutique  sacrée  et  qui  ne  connaissaient  pas 
la  véritable  interprétation  donnée  aux  Livres  Saints 
par  l'Eglise  qui  en  a  le  dépôt.  Pour  ce  motif,  Pie  IV, 
le  24  mars  1564,  en  publiant  par  la  Bulle  Dominici 
Gregis  l'Index  des  livres  défendus,  établit  dans  la 
règle  4,  que  l'usage  des  versions  de  la  Sainte  Écriture 
n'est  pas  permis  à  tous  sans  discernement,  mais  que 
la  permission  de  les  lire  n'est  accordée  qu'à  ceux 
qui,  au  jugement  de  l'évêqueou  de  l'inquisiteur,  peuvent 
le  faire  sans  péril  et  au  profit  de  leur  foi  et  de  leur 
piété.  En  Portugal,  la  religion  des  rois  très  fidèles  et 
le  zèle  des  évêques  avaient  déjà  prévenu  ce  décret  du 
Saint-Siège  en  adoptant  à  l'avance  des  mesures  analo- 
gues. Les  exemplaires  de  tout  livre  de  la  Bible  traduit 
en  langue  vulgaire  devaient  porter  à  la  première  page 
la  permission  accordée  à  celui  qui  pouvait  s'en  servir, 
et  les  versions,  quelquefois  même  dans  les  manuscrits 
originaux,  portaient  le  nom  de  celui  à  qui  elles 
étaient  destinées.  On  possède  des  documents  histo- 
riques qui  en  témoignent.  Ribeiro  dos  Sanctos,  dans 
sa  Membria  da  Litteratura  Sagrada,  publiée  dans  le 
t.  u  des  ilemorias  de  Litteratura  Portugueza,  de 
l'Académie  des  sciences  de  Lisbonne,  cite  un  exem- 
plaire de  la  Bible  où  était  incorporée  à  la  première 
page  la  permission  donnée  par  Fr.  Francisco  Foreiro 
pour  autoriser  Francisco  de  Sa  de  Miranda  (-J-  1558)  à 
en  faire  usage.  Barbosa  dans  la  Bibliotheca  Lusitana  et 
Figueiredo  dans  la  Préface  de  sa  traduction  de  la  Bible, 
parlent  d'une  version  manuscrite  des  Psaumes  de  la 
pénitence,  faite  par  D.  Fr.  Antonio  de  Sousa  (f  1597), 
évêque  de  Viseu,  pour  l'usage  de  sa  sœur  la  comtesse 
de  Monsanto. 

Ces  défenses  restrictives  furent  cause  que  les  ver- 
sions devinrent  de  plus  en  plus  rares  et  que  les  savants 
s'appliquèrent  surtout  dès  lors  à  commenter  en  latin 
le  texte  latin  de  la  Vulgate,  chaque  écrivain  choisis- 
sant le  livre  de  l'Écriture  pour  lequel  il  se  sentait  le 
plus  d'attrait.  L'auteur  de  la  Préface  générale  de  la 
version  de  la  Bible  par  Figueiredo.  éditée  à  Lisbonne 
en  185i,  énumère  un  grand  nombre  de  ces  commen- 
tateurs, parmi  lesquels  figurent  des  noms  de  grande 
autorité  dans  les  lettres  portugaises,  comme  ceux  de 
Bartholomeu  dos  Martyres,  Bernardo  de  Brito.  Fran- 
cisco Foreiro,  Heitor  Pinto,  Joào  de  Lucena,  Manuel 
de  Sa,  Antonio  Vieira,  Francisco  de  Mendonça,  etc. 

De  leur  côté,  les  protestants,  interprétant  maligne- 
ment la  défense  faite  par  Pie  IV,  accusèrent  l'Église 
d'interdire  aux  fidèles  la  lecture  des  Livres  Saints  afin 
qu'ils  ne  pussent  pas  connaître  ce  qui  la  condamnait 
dans  les  écrits  sacrés,  et  ils  se  mirent  avec  une  grande 
activité  à  composer  et  à  publier  des  versions  de  la 
Bible,  en  supprimant  une  partie  des  livres  du  canon, 
en  altérant  parfois  les  textes  comme  il  leur  convenait 
et  en  proclamant  surtout  qu'il  était  libre  à  chacun  de 
les  interpréter  à  son  gré.  Ils  trouvèrent  un  collabora- 
teur pour  la  langue  portugaise  dans  la  personne  d'un 
prêtre  apostat  du  XVIIe  siècle  qui  était  devenu  mi- 
nistre calviniste  en  Hollande;  il  publia  :  Novo  Tesla- 
inento,  isto  é,  todos  os  sacrosantos  livros  de  escriptos 
evangelicos  e  apostolicos,  do  novo  concerto  de  nosso 
fiel  senhor, Salvador  e  redemptor  Jesu  Christo,  agora 
traduziilos  em  portuguez  pelo  Padre  Joào  Ferreira 
A.  de  Almeida,  ministro  prégador  do  Sancto  Evan- 
gelho.  Com  todasas  licenças  necessaria  .  Em  Amster- 


563 


PORTUGAISES    (VERSIONS)    DE    LA    RIDLE 


564 


dam.  Por  a  l'iuva  de  J.  V.  Someren.  Anno  1681. 
Em  4°.  La  Bibliothèque  nationale  de  Lisbonne  en 
possède  un  exemplaire.  Comme  le  fait  remarquer  le 
bibliographe  da  Silva.  Diccionario,  article  Joào  Fer- 
reira A.  de  Almeida,  cette  traduction  est  remplie 
d'erreurs  et  de  fautes  typographiques  provenant  de  ce 
que  le  correcteur  était  peu  versé  dans  la  langue  portu- 
gaise, ainsi  que  le  fait  remarquer  l'auteur  lui-même 
dans  un  avertissement  publié  à  Batavia  le  1"  janvier 
1683  et  où  sont  énumérées  plus  de  mille  erreurs  à  cor- 
riger, avec  cette  observation  qu'il  a  été  impossible  de 
les  relever  toutes. 

l'ne  seconde  édition  fut  faite  par  les  Hollandais  éta- 
blis en  Asie  pour  l'usage  des  protestants  portugais  de 
Batavia,  sous  ce  titre  modifié  :  O  Novo  Testamento, 
istu  ê,  todos  os  livros  do  nova  concerto  do  nosso  fiel 
senhor  e  redemptor  Jesu  Christo,  traduzido  na  lingua 
portugueza  pelv  reverendo  padre  Joào  Ferreira  A.  de 
Almeida,  ministro  prégadordoSanctoEvangelhon'esla 
cidade  de  Batavia  em  lava  Maior.  Em  Batavia,  par 
Joào  de  Vites,impressor  da  Illustre  Companhia,e  desla 
nobre  cidade.  Anno  1693.  Sur  le  verso  de  la  feuille  où 
se  lit  le  titre  se  trouve  la  déclaration  que  l'ouvrage  a 
été  imprimé  por  ordem  do  Supremo  Governo  da 
illustre  Companlna  dus   l'un/as  Provincias  na  India 

Oriental,   revis  ta,  com    approvaçâo  da  congrega 

ecclesiastica  da  cidade  de  Batavia,  pelos  ministros 
prrgadores  do  Sancto  Evangelho  naJgreja  da  mesma 
cidade  Theodorus  /.as,  Jacobus  Opden  Akker.  Cette 
édition  est  sur  papier  de  Hollande,  grand  in-4»,  et  a 
vin-597  pages.  Elle  a  de  plus  que  la  première  la  con- 
cordance des  textes  de  l'Écriture.  I.  da  Silva  observe 
qu'on  y  a  corrigé  peu  ou  point  des  fautes  de  la  pre- 
mière édition,  mais  qu'on  y  a  fait  des  changements 
considérables,  plaçant,  par  exemple,  la  plupart  des 
verbes  à  la  fin  des  propositions,  «  ce  qui  rend  parfois 
le  sens  obscur,  fait  violence  à  la  phrase  et  affecte  la 
construction  des  périodes,  o  Da  Silva  possédait  un 
exemplaire  de  cette  édition.  l.-Ch.  Brunet.  dans  le  Ma- 
nuel du  libraire  cl  de  l' Amateur  de  livres,  en  signale 
une  autre  qualifiée  de  «  rarissime  t  dans  le  catalogue 
de  Meerman. 

En  1712  parut  une  troisième  édition  in-8".  à  Ams- 
terdam, chez  Joào  Creliluz,  par  ordre  de  la  même 
compagnie  des  Provinces-Unies,  pour  l'instruction 
des  Indiens.  Elle  est  encore  plus  fautive  que  les 
précédentes,  l'ne  quatrième  édition  fut  publiée  en 
1760  en  deux  grands  m  8°,  à  Tramgambar,  par  l'of- 
fice de  la  mission  royale  du  Danemark  et  au  béné- 
fice de  cette  mission,  ans  frais  de  la  Société  (angli- 
cane) de  la  Propagation  de  la  foi  de  Londres.  Une 
cinquième  édition  fut  donnée  à  Batavia  par  Egberl 
llumen,  in-8",  1773.  Da  Silva  dit  qu'elle  fut  comparée 
de  nouveau  avec  le  texte  original  et  avec  d'autres  ver- 
sions et  ainsi  améliorée,  les  verbes  furent  remis  à 
leur  place  naturelle  et  beaucoup  de  mots  et  de  fautes 
corrigés. 

La  traduction  de  Ferreira  de  Almeida,  dil  Ribeiro  dos 
Santos,  dans  sa  Memuria  sobre  versôes  Biblicas,  fut 
faite  sur  le  texte  grec  qu'elle  suit  dans  lis  points  où  il 
diffère  de  la  Vulgate,  En  sa  qualité  de  calviniste,  l'au- 
teur n'en  a  pas  exclu  les  livres  deutérocanoniques  que 
rejette  le  luthéranisme.  D'après  Antonio  Pereira  de 
figueiredo,  dans  sa  préface  au  Nouveau  Testament, 
t.  i,  2e  édit.,  on  n'y  trouve  rien  qui  sente  le  calviniste, 
et  il  la  regarde  comme  très  servile.  Mais  d'autres  écri- 
vains sont  d'un  avis  tout  à  fait  contraire  et  la  préface 
que  nous  venons  de  citer  ne  fut  pas  reproduite  dans 
les  éditions  de  Figueiredo  qui  furent  publiées  en  1701 
et  après,  son-  la  surveillance  de  l'autorité  ecclésias- 
tique qui  \  fit  supprimer  aussi  des  notes.  Quant  a  sa 
servilité,  la  traduction,  par  exemple,  de  Luc,  i,  28, 
prouve  le  contraire;  au  lieu  de   traduire  par  vheia  de 


graça,  elle  traduit  par  em  graça  accrila  dans  quelques 
éditions  et  par  agraviada  dans  d'autres. 

Le  même  traducteur  publia  en  1738,  in-4",  a  Tran- 
gambar,  Lirros  Hisloricos  do  Velho  Testamento,  et 
en  17 iO,  in-8°  dans  la  même  ville  et,  comme  le  précé- 
dent, par  l'office  de  la  mission  royale  de  Danemark 
Livra  dos  Psalmos.  Eu  1748  parut  à  Batavia,  in-81", 
imprimé  à  l'office  des  séminaires  par  M.  Mulder,  Do 
Yellio  Testamento  o  primeiro  tomo  que  content  os 
SS.  Livros  de  Moysés,  Josué,  Juizes  e  Ruth,  Samuel, 
Reys,  Chronicas,  Fsra.  Nehemias  e  Esther.  Tradu- 
zidos  etil  portuguez  por  Joào  Ferreira  A.  de  Almeida, 
Ministre  prégador,  etc.  En  1753,  G.  II.  Heusler  impri- 
ma au  même  office  du  séminaire  à  Batavia.  in-8°.  Do 
Vellio  Testamento  o  segundo  tomo  que  contem  os 
SS.  Livros  de  Job,  os  Psalmos,  vs  Proverbios,  o  Pré- 
gador, os  Canlares,  com  os  Prophetas  Mayores  < 
nores.  Traduzidos  em  portuguez  por  Joàu  Ferreira 
A.  de  Almeida,  e  Jacob  Opden  Akker,  Ministros  pré- 
gadores  do  Santo  Evangelho,  etc.  Entre  la  publication 
du  t.  i  et  du  t.  il  de  cette  version  parut  en  1749  une 
nouvelle  édition  du  Livro  dos  Psalmos,  in-8",  à  la 
même  imprimerie,  qui  donna  aussi  plus  tard,  en  IT.'iT. 
dans  une  édition  séparée, Os  Livros  de  Moysés. 

La  traduction  de  l'Ancien  Testament  fut  faite  aux 
frais  de  la  Compagnie  hollandaise  des  Indes  Orientales. 
Elle  ne  contient  pas  les  livres  deutérocanoniques.  Au 
témoignage  de  da  Silva.  Almeida  fit  sa  version  sur  l'ori- 
ginal hébreu,  en  se  servant  de  la  version  hollandaise 
imprimée  en  1618  et  de  la  version  castillane  de  Cypria- 
no  Valera.  édition  de  1602;  il  la  poursuivit  jusqu'aux 
derniers  chapitres  d'Ézéchiel  ;  elle  fut  achevée  par 
Jacob  Opden  Akker,  un  de  ceux  qui  avaient  été  chargés 
de  revoir  la  traduction  du  Nouveau  Testament  éditée 
par  Almeida  en  1693. 

Depuis  sa  publication,  la  version  d'Almeida  a  été'  si 
souvent  réimprimée  soit  totalement,  soit  partiellement, 
pour  les  sociétés  bibliques  d'Angleterre  et  d'Amérique, 
qu'  o  il  est  difficile,  dit  da  Silva,  de  donner  une  .nu- 
mération exacte  »  de  toutes  ses  éditions.  Ce  bibliographe 
mentionne  deux  éditions  complètes  dont  il  possède 
des  exemplaires,  l'un  grand  in-S".  imprimé  par  B.  et 
A.  Taylor.  à  Londres,  1811t.  l'autre  grand  in-8°,  impri- 
mé' à  New-York  en  1850.  Xous  avons  entre  les  mains 
ileux  éditions  complètes  plus  récentes,  l'une  in-8°, 
publiée  à  New  York  en  1883,  par  la  Société,  biblique 
Américaine,  et  où  il  est  dit  que  le  Nouveau  Testament 
est  uni1  Reimpresso  daediçâode  1093,  revista  e  emen- 
dada;  l'autre.  in-4°.  imprimée  à  Lisbonne,  en  1897, 
revista  •■  correcla,  com  refereneias  e  na  margem 
algumas  palabras  segundo  o  hebraico  e  o  grego.  Se 
vend  au  Deposito  dus  Escripturas  Sagradas.  —  En 
1862,  l'archevêque  de  Bahia,  I).  Manuel  Joaquim  da 
Silveira,  publia  une  I  ittre  pastorale  pour  prémunir  ses 
diocésains  contra  adulteraçôes  emu  tilaçôes  da  ISildia 
traduzida  em  portuguez  pelo  Padre  .1.1.  A  .  de  A  Imeida. 
Il  y  examine  l'édition  de  New   York  que  les  protestants 

répandaient  dans  le  Brésil  et  après  l'avoir  confrontée 
avec  le  texte  reconnu  authentique  dés  les  premiers 
siècles,  il  montre  qu'elle  contient  des  altérations, 
changements,  mutilations,  additions,  par  exemple, 
Luc.  i.  28;  Act.,  xiv,  23;  Eph.,  V,  32;  Il  Tim.,  iv.  ô; 
Il  .Ion.,  V,  6.  10,  13,  là.  17-20.  Ces  ait. -rations  se  trou- 
vent .dans  les  éditions  de  New  York.  1882,  et  de  Lis- 
bonne. 1807. 

Ribeiro  dos  Santos,  dans  sa  Memoria  de  algumas 
IraduCfÔes  biblicas  noir  col.  560),  appréciai'.!  la  valeur 

philologique  et  littéraire  du  travail  de  Ferreira  de 
Almeida,  dil  que  sa  langue  est  assez  riche  et  renferme 
un  trésor  de  mois  pour  le  vocabulaire  portugais,  mais 
que  sa  grammaire  est  défectueuse,  parce  qu'il  emploie 

îles  phrases  el  des  constructions  qui  n'ont  pas  la  saveur 
du  langage   national    et  parce  qu'il  serre  de  trop  près 


565 


PORTUGAISES    (VERSIONS)    DE    LA    BIBLE 


566 


le  texte  original  ou   l'ail    usage  de   locutions  et   d'idio- 
tisrnes  propres  au  pays  où  il  vivait. 

III.  Versions  portugaises  pepuis  le  milieu  du 
xviii'  siècle  jusqu'à  nos  jours.  —  Au  milieu  du 
xvme  siècle,  à  peu  prés  au  moment  où  apparaissait  la 
version  complète  faite  par  Almeida  et  son  auxiliaire 
(1748-1753),  s'ouvre  une  période  nouvelle  pour  la  mul- 
tiplication des  traductions  de  la  Bible.  L'Église  qui 
avait  interdit  la  lecture  de  l'Écriture  en  langue  vulgaire 
au  commencement  du  ^protestantisme  pour  entraver 
les  progrès  de  l'hérésie  naissante  parmi  le  peuple, 
permit,  dans  la  seconde  moitié  du  x.vii°  siècle,  pour 
détourner  les  fidèles  de  la  lecture  des  versions  pro- 
testantes, de  publier  des  traductions  en  langue  vul- 
gaire à  la  condition  qu'elles  fussent  accompagnées  de 
notes  et  d'éclaircissements  tirés  des  saints  Pères  et  des 
savants  catholiques,  et  approuvées  par  le  Siège  aposto- 
lique. Benoit  XIV  modifia  en  ce  sens  en  1757  la  qua- 
trième règle  de  l'Index  formulée  par  Pie  IV  en  1564.  Le 
résultat  fut  la  publication  de  versions  nouvelles  parmi 
les  catholiques  :  au  Portugal,  il  parut  presque  simul- 
tanément deux  traductions  complètes  de  l'Ecriture. 

1°  Version  de  Figueiredo.  —  La  première  fut  celle 
de  P.  Antonio  Pereira  de  Figueiredo  (né  en  1725.  morl 
en  1797).  11  commença  par  le  Nouveau  Testament, 
lequel  était  prêt  dès  1772,  comme  on  le  voit  dans  l'Épitre 
dédicatoire  au  cardinal  D.  Joào  da  Cunha  (y  177:;  . 
mais  le  premier  volume  ne  fut  imprimé  qu'en  177S. 
nào  por  culpa  do  auctor,  dit  le  Prologue,  daté  du  8  jan- 
vier 1778,  mas  por  infelicidade.  La  version  de  l'Ancien 
Testament  commença  par  les  Psaumes  imprimés  en 
"2  volumes  en  178'2,  elle  se  continua  par  la  Genèse  et 
les  autres  livres,  imprimés  par  l'imprimerie  royale  à 
Lisbonne  de  1783  à  1790.  La  traduction  complète  forme 
23  in-8".  Dès  1781,  on  réimprima  les  deux  premiers 
volumes  du  Nouveau  Testament,  corrigés  pour  le  texte 
et  augmentés  pour  les  notes. 

Peu  de  temps  après  parut  la  seconde  édition  de  la 
Bible  entière  :  Biblia  Sagrada,  traduzida  em  porlu- 
guez  segundo  a  Vulgata  latina,  illustrada  com  pré- 
facées, notas eliçôes  variantes.  Segunda  ediçâo  revista 
e  retocada  pelo  auctor.  Les  17  volumes  in-8",  que  com- 
prend l'Ancien  Testament,  furent  imprimés  par  l'impri- 
merie royale  de  Lisbonne  de  1791  à  1803  et  les  6  du 
Nouveau  Testament  par Simào Thaddeo  Ferreira  de  1803 
à  1S05. 

En  1794.  commença  à  paraître  une  troisième  édition  , 
en  deux  colonnes,  contenant  l'une  le  texte  latin  et 
l'autre  la  traduction  portugaise,  texte  et  notes  retou- 
chés par  l'auteur.  Elle  est  dédiée  au  prince  du  Brésil 
B.  Joào,  dont  elle  reproduit  en  tète  le  portrait.  Le  tome 
premier  contient  une  Prefacio gérai  à  toda  a  Sagrada 
Biblia,  de  xcv  pages,  dans  laquelle  il  est  dit  que  cette  édi- 
tion «  est  incomparablement  plus  correcte  et  augmen- 
tée, de  telle  sorte  qu'on  peut  dire  avec  raison  que  c'est 
une  version  nouvelle  ».  Outre  cette  Préface  générale, 
chaque  livre  est  précédé  d'une  Préface  spéciale  plus 
ou  moins  courte  dans  laquelle  Figueiredo  indique  les 
traductions  en  langues  diverses  dont  il  s'est  servi  pour 
la  version  de  ce  livre.  Cette  édition,  imprimée  à  Lis- 
bonne, par  S.  Th.  Ferreira  et  terminée  en  1819,  com- 
prend sept  tomes  in-folio. 

Une  réédition  de  la  traduction  de  Figueiredo,  avec  le 
texte  latin,  en  2  in-f\  fut  publiée  en  1852-1853,  par  la 
Bibliotheca  Economica,  sous  la  direction  d'Eduardo  de 
l'aria,  auteur  d'un  Dictionnaire  portugais,  avec  ce  titre  : 
A  Biblia  Sagrada  conlendoo  Vellio  e  Novo  Testamento. 
Traducçâo  do  Padre  Antonio  Pereira  de  Figueiredo. 
Enriquecida  com  varias  notas  pelo  mesmo  traductor 
leoccepto  aquellas  que  foram  condemnadas  enx  Borna) 
e  por  D.  Felippe  Scio  de  S.  Miguel,  Bispo  de  Segovia, 
Bossuet,  etc.  Ornado  com  gravuras.  Lisboa.  Typogra- 
phia  de  José  Carlos  de  Aguiar  Vianna,  1852.  Appro- 


vada  pelo  Cardeal  Patriarcha  de  Lisboa  em  9  de  Ja- 
neiro de  i852.  Cette  Bible  fut  critiquée  lors  de  son 
apparition  à  cause  des  fautes  typographiques  nom- 
breuses, de  la  suppression  des  indications  chronolo- 
giques et  d'une  partie  des  préfaces  et  aussi  de  l'insuf- 
fisance des  notes. 

Une  nouvelle  édition  parut  en  1854,  avec  le  texte 
latin  à  la  librairie  populaire  et  historique  de  Lisbonne, 
sous  les  auspices  du  cardinal  patriarche.  Le  Patriarche 
en  autorisa  la  publication  le  4  juin  1852,  à  condition 
qu'elle  reproduirait  la  seconde  édition,  in-4",  faite  à 
Lisbonne  en  1794.  par  Simào  Thaddeo  Ferreira,  avec 
ses  préfaces  et  ses  notes,  lesquelles  avaient  été  expur- 
gées, et  qu'elle  serait  revue  et  corrigée  par  un  savant 
ecclésiastique,  aidé  au  besoin  de  deux  autres  réviseurs. 
Une  préface  nouvelle  à  l'Ancien  Testament  et  une  autre 
au  Nouveau  sont  l'œuvre  de  l'un  des  censeurs,  P.  Fran- 
cisco Recreio.  Elle  comprend  trois  volumes  in-folio. 
Le  troisième  contenant  le  Novo  Testamento.  Vida  de 
Nosso  Senhor  Jésus  Christo,  parut  en  IS57.  La  vie  de 
Xotre-Seigneur  forme  un  supplément  publié  en  1858, 
avec  ce  titre  spécial  :  Vida  de  Xosso  Senhor  Jésus 
C/iristo,  redigida  pelo  Beverendo  Abbade  Brispot,  e 
rertida  em  vulgar  por  Luis  Filippe  Leite,  Direclor 
da  Escola  Normal  Primaria  de  Lisboa. 

La  traduction  de  Figueiredo,  sans  le  texte  latin,  fut 
éditée  au  Brésil,  en  1864,  en  2  in-4",  à  Rio  de  Janeiro, 
par  la  librairie  0.  B.  L.  Garnier.  Elle  contient  peu  de 
notes  de  Figueiredo  et  seulement  dans  les  livres  du 
Pentateuque,  Josué,  Esther,  Daniel  et  Amos.  Plusieurs 
livres  n'ont  aucune  note.  Celles  qui  sont  relatives  aux 
prophètes  et  au  Nouveau  Testament,  œuvre  du  chanoine 
Delaunay,  curé  de  Saint-Étienne-du-Mont  à  Paris,  sont 
placées  à  la  fin  de  la  Bible,  sans  aucun  renvoi  dans  le 
texte  sacré.  Celte  édition,  avec  les  notes  explicatives  de 
Delaunay.  est  approuvée  par  un  mandement  de  l'arche- 
vêque de  Bahia,  alors  métropolitain  du  Brésil,  daté  de 
1863.  —  La  Société  biblique  de  Londres  a  publié  di- 
verses éditions  de  la  version  de  Figueiredo,  sans  pré- 
faces et  sans  notes.  1821.  1866,  etc.  La  lecture  en  fut 
permise  aux  catholiques  du  Portugal  par  un  acte  du 
ministère  du  royaume,  du  17  octobre  1842,  reproduit 
dans  la  Revista  universal  Lisbonense,  1™  série,  t.  il, 
p.  521.  Francisco  Recreio,  un  des  censeurs  de  l'édition 
de  la  Librairie  populaire  de  1854,  déclare  à  la  fin  de  la 
préface  que  c'est  «  pour  le  bien  de  l'Église  qu'est  pu- 
bliée avec  le  plus  grand  soin  cette  traduction,  parce 
que  la  propagande  protestante  l'a  fâcheusement  intro- 
duite dans  le  Portugal  et  les  pays  de  sa  domination,  en 
la  faisant  imprimer  à  sa  manière  par  ses  presses  im- 
pures et  falsificatrices  ». 

Au  point  de  vue  philologique  et  littéraire,  la  traduc- 
tion de  la  Bible  par  Figueiredo  a  justement  la  réputa- 
tion d'une  œuvre  de  valeur.  Il  avait  toutes  les  qualités 
requises  pour  ce  travail,  fait  sur  la  Vulgate  latine,  étant 
lui-même  un  excellent  latiniste,  «  connu  comme  tel 
même  à  l'étranger,  »  dit  Innocencio  da  Silva,  auteur 
d'études  historiques  et  théologiques  en  latin,  ainsi  que 
d'ouvrages  classiques  pour  l'enseignement  élémentaire, 
moyen  et  supérieur  de  celte  langue,  adoptés  universelle- 
ment pendant  près  d'un  siècle  au  Portugal  et  au  Brésil  ; 
sa  compétence  l'avait  fait  nommer  rédacteur  pour 
les  lettres  latines  de  la  secrétairerie  d'Étal.  Quant  à 
sa  composition  en  langue  portugaise,  voici  ce  qu'en 
dit  Fr.  Recreio,  dans  la  première  préface  de  l'édi- 
tion de  la  Librairie  populaire  :  «  Dans  le  catalogue 
des  livres  à  consulter  pour  la  continuation  du  Diction- 
naire de  la  langue  portugaise,  publié  par  ordre  de  l'Aca- 
démie royale  des  sciences  de  Lisbonne,  figure  la  traduc- 
tion de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament,  édition  in-S", 
d'Antonio  Pereira  de  Figueiredo.  Cette  mention  est  la 
preuve  authentique  de  son  caractère  classique.  »  On  ne 
peut  donner  de  semblables  éloges  aux  notes  que  Figuei- 


567 


PORTI'OAISES    (VERSIONS)   DE    LA    BIBLE 


568 


redo  a  jointes  lui-même  à  sa  version.  «  On  ne  saurait 
nier,  dit  Recreio,  dans  la  préface  déjà  citée,  l'utilité  et 
l'étendue  de  l'érudition  qui  fait  le  mérite  (des  notes  de 
Figueiredo)  sous  le  rapport  critique,  dogmatique  et 
moral.  A  ceux  qui  ne  sont  pas  d'accord  avec  quelques- 
unes  de  ses  opinions  particulières,  nous  répondrons 
par  les  paroles  de  l'Apôtre,  prises  dans  leur  sens  vul- 
gaire :  Unusquisque  in  suo  sensu  abundet.  »  Sans 
contester  ce  jugement,  nous  devons  observer  que 
Figueiredo.  tout  en  possédant  une  instruction  variée  et 
étant  très  versé  dans  les  sciences  ecclésiastiques  et  pro- 
fanes, soull'rit  néanmoins  de  l'inlluence  des  doctrines 
régalistes  auxquelles  ne  surent  pas  alors  résister  même 
des  membres  notables  de  l'épiscopat  ;  il  les  défendit 
dans  les  livres  qu'il  publia,  tels  que  la  Tentativa  theo- 
logica  et  l'Analyse  da  Pro/isào  de  Fê  do  santo  Pa  Ire 
Pio  1  V,  laquelle  fut  mise  à  l'index  par  décret  du  26  jan- 
vier 1705,  et  il  s'y  montra  tellement  attaclié  qu'il  refusa 
de  se  rétracter  même  à  ses  derniers  moments,  ainsi  que 
l'affirme  un  de  ses  neveux,  dans  une  lettre  adressée  à  la 
presse,  et  qu'il  est  rapporté  par  VEncyclopedùi  Portu- 
gueza  illustrada  (publication  qui  a  commencé  au 
xx»  siècle,  sous  la  direction  de  Maximiano  Lemos), 
article  sur  Antonio  Pereira  de  Figueiredo.  Si  l'on 
tient  compte  de  ces  circonstances,  on  comprend  que 
ses  notes  aient  été  condamnées,  quoiqu'un  grand 
nombre  d'entre  elles  témoignent  de  ses  connaissances 
linguistiques,  historiques  et  littéraires;  il  n'y  a  pas 
d'injustice  à  affirmer  qu'on  n'y  voit  prédominer  ni  l'es- 
prit sacerdotal,  ni  la  piété  chrétienne  qui  animent  les 
commentaires  d'autres  versions  portugaises. 

De  1902  à  1904,  la  traduction  de  Figueiredo  a  été  réé- 
ditée en  Portugal  sous  ce  titre  :  Biblia  Sagrada  con- 
tendo  o  Velho  e  Novo  Testamento.  Versào  du  Padre 
Antonio  Pereira  de  Figueiredo.  —  Commentarios  e 
annotaçôes  segundo  os  modernos  irabalhos  de  Glaire, 
Knabenbauer,  Lesêtre,  Lestrade,  Poels,  Vigouroux,etc. 
—  Pelo  Hev.  Sanlos  Farinha.  —  Ediçào  popular  e 
illustrada,  approvada  pelo  Emmo-Cardeal  Patriar- 
cha,  3  in-8°,  Lisbonne,  1902-1904.  Les  préfaces  de  Fi- 
gueiredo sont  remplacées  par  des  préfaces  nouvelles, 
les  archaïsmes  et  les  inexactitudes  sont  corrigés.  Les 
corrections  ne  sont  pas  toujours  heureuses.  Le  com- 
mentaire est  presque  certainement  nouveau.  Cette  édi- 
tion n'est  pas  accompagnée  du  texte  latin. 

2°  Version  de  Sarmento.  —  Une  autre  traduction  por- 
tugaise de  la  Bible  fut  faite  en  même  temps  que  celle 
de  figueiredo  par  Francisco  de  Jésus  Maria  Sarmento 
qui  vécut  de  1713  à  1790.  Le  Nouveau  Testament  pa- 
rut d'abord  sous  le  titre  de  Historia  Evangelica,8  in-8°, 
Lisbonne,  1777-177S.  Avant  le  texte  sacré  on  trouve  une 
Concordia  Evangelica,  à  imitaçâo  dadeJoâo  Buisson, 
imi>ressa  em  Savreux  no  anno  de  1554.  L'ancien  Tes- 
tament parut  à  Lisbonne  de  I77S  à  1785  en  44  in-'r, 
sous  le  titre  de  Historia  biblica.  Le  traducteur  ne  s'est 
pas  astreint  à  une  traduction  rigoureuse,  comme  il  le 
déclare  dans  le  prologue  du  premier  livre,  et  il  ajoute 
souvent  des  explications  au  texte. 

La  traduction  de  Sarmento  lut  rééditée  sans  le  texte 
latin  à  Porto.  L'Ancien  Testament  parut  sous  ce  titre  : 
Historia  Biblica  e  Dov.tri.na  Mural  da  Religiâo  Catho- 
lica,  extrahida  dos  Livros  Santos  do  Antigo  Testa- 
mento com  fréquentes  Paraphrases  et  Varias  Notas 
Litterarias  e  Beflexoes  Moraes,  para  sua  maior  e 
mais  proveitosa  intelligencia  :  27  in-8",  Porto,  1864- 
18117.  Le  Nouw.'iu  Testament  dans  un  premier  volume 
la  Concordia  Evangelica,  et  les  suivants  :  ['Historia 
Evangelica,  apostolicae  doutrinal,  deduzida  dos  Livros 
Santos  do  Novo  Testamento,  com  fréquentes  para- 
phrases introduzidas  no  Texto,  sobre  algumas  Notas 
Litteraes  em  certos  lugares  maisdifficeis,  tudo  extra- 
hido  dos  Antigos  Padres  e  Modernos  Expositores, 
para  melhor  e  mais  faeil  intelligencia  da  Sagrada 


Escriptura,  11  in-8»,  Porto,  1867-1869.  Le  troisième  et  le 
quatrième  livre  d'Esdras,  également  traduit  par  Sar- 
mento, avec  la  prière  de  Manassé,  etc.,  sont  contenus 
dans  un  12e  volume  paru  en  1868. 

Le  bibliographe  Innocencio  mentionne  deux  ver- 
sions partielles  du  Nouveau  Testament,  composées  au 
xvme  siècle  et  restées  manuscrites  :  Versào  das  Epis- 
tolas  e  Evangelhos,  que  se  recitam  em  todo  o  anno. 
acompanhada  de  illustraçôes,  par  Joaquim  José  da 
Costa  Sa  -;-  1803),  et  0  Evangelho  de  Jésus  Christo 
segundo  S.  Matheus  et  S.  Marcos,  traduzido  e  illus- 
trado  em  largos  commentarios,  3  in-i".  par  Antonio 
Ribeiro  dos  Santos  (f  1818),  donnés  par  l'auteur  à  la 
Bibliothèque  de  Lisbonne. 

3°  Versions  du  w.v  et  du  xx<  siècles.  —  l).  Fr.  Joa- 
quim de  Nossa  Senhora  de  Nazareth,  qui '[fut  d'abord 
évêque  de  Maranhào  et  puis  de  Coimbra  et  acheva  sa 
vie  à  Maranhào  (Brésil),  en  1851,  publia  :  O  Novo  Tes- 
tamento de  Nosso  Senhor  Jésus  Christo,  conforme  a 
Vulgata  Latina.  traduzido  em  portuguez,  e  annotado 
segundo  o  sentido  dos  Santos  Padres  e  Expositores 
Catholicos,  pelo  quai  se  esclarece  a  verdadeira  dou- 
trina  do  texto  sagrado,  e  se  réfutant  os  erros  subver- 
sivos  dos  novadores  antigos  e  modernos,  3  in-f",  Ma- 
ranhào, 1845-1847.  Version  estimée  et  accompagnée  du 
texte  latin.  Une  nouvelle  édition  fut  imprimée,  sans  le 
texte  latin,  in-)  2,  à  Lisbonne,  1875,  em  conformidade 
da  Versào  Franceza  annotada  por.l.-B.  Glaire. 

En  1879.  fut  publié  au  Brésil  une  autre  version  : 
O  Novo  Testamenta  de  Xosso  Senhor  e  Bedemptor 
Jésus  Christo.  traduzido  do  original  grego.  Primeira 
ediçào  brazileira,  in-8°,  Rio  de  Janeiro.  Elle  parait 
être  une  reloue  lie  de  la  version  de  Ferreira  de  Almeida 
et  ne  contient  aucune  note. 

En  1895,  a  paru  à  Porto  une  Biblia  popular  illustrada 
pelo  abbade  Drioux.  Traducçâo  de  Paiva  Pona.  l'u- 
blicada  com  permissâo  do  Cardeal  Bispo  do  Porto. 
Velho  e  Novo  Testamento,  in-4",  avec  gravures.  Ce 
n'est  pas  proprement  une  version,  mais  un  récit  dans 
lequel  le  commentaire  est  mêlé  au  lexte. 

Le  premier  congrès  catholique  brésilien,  réuni  a 
Bahia  en  1900,  résolut  le  9  juin  la  publication  d'une 
nouvelle  édition  de  la  Bible,  pour  combattre  la  propa- 
gande protestante.  Le  travail  fut  confié  aux  Francis- 
cains. Ils  ont  publié  à  Bahia,  en  février  1902:  O  Santa 
Evangelho  de  Jésus  Christo  segundo  S.  Matheus,  tra- 
duzido em  Portuguez  segundo  a  Vulgata  latina.  Com 
annotât  ces  extrahidas  dos  SS.  Padres  et  de  theologos 
emiuentes,  antigos  e  modernos.  Editado pelos Beligio- 
sas  Franciscanos.  —  En  avril  de  la  même  année  :  0 
Santo  Evangelho  de  Jésus  Christo  segundo  S.  Marcos. 
Une  nouvelle  édition  de  ces  deux  Évangiles  parut  en 
juin  1902. 

En  août  1903  :  t>  Soi  in  Erangellio  segundo  S.  Lions  ; 
en  décembre  1903  :  0  Santo  Evangelho  segundo 
S.  Joào  :  en  mai  1904  :  Os  Actos  dos  Apostolos;  de 
mai  1905  à  janvier  1906  ont  été  publiées  :  Epistola  de 
S.  Paulo  ans  Romanos ;  l*  et  2"  Epistola  a<is  Corin- 
thios.  La  version  des  Evangiles  et  des  Actes,  avec  les 
notes,  destinées  surtout  à  combattre  les  erreurs  des 
protestants,  pour  une  nouvelle  édition,  qui  est  sous 
presse,  ont  été  revues  par  le  P.  I.  Knabenbauer,  S.  .1. 

En  1903,  le  chanoine  Duarte  Leopoldo  e  Silva.  de- 
venu successivement  depuis  évêque  de  Corytiba  el  au- 
jourd'hui de  S.  Paulo,  publia  une  Concordancia  dos 
Santos  Evangelhos  reunidos  em  um  sa,  in-8",  avec  com- 
mentaire. Le  texte  des  quatre  Evangiles  est  fondu  en- 
semble de  manière  à  former  un  seul  récit  suivi. 

Le  Brésil  a  vu  paraître  en  1905  une  traduction  por- 
tugaise :  Os  Sautas  Evangelhos  deN.  S.  Jésus  Christo 
e  os  Actos  dos  Apostolos,  Au  titre  général  des  Évan- 
giles, on  lit  en  plus  :  Traducçâo portugueza  segundo  a 
Vulgata  latina.  Par  um  Padre  da  Missào.  Com  mitas 


569 


PORTUGAISES    (VERSIONS)    DE   LA   RIBLE   —   POTERIE 


570 


da  ediçâo  franceza  dos  PP.  da  Assumpçdo,  in-4».  Rio 
de  Janeiro.  Le  traducteur  est  le  P.  Pedro  Maria  Booz, 
sa  version  est  approuvée  par  l'archevêque  de  cette  ville, 
Mtr  Arcoverde.  aujourd'hui  cardinal. 

4"  L'histoire  des  versions  portugaises  embrasse,  comme 
on  le  voit,  six  siècles,  et  peut  se  partager  en  trois  périodes, 
la  première  d'essais,  la  seconde  de  suspension,  la  troi- 
sième d'activité.  La  première  va  du  commencement  du 
xiv«  siècle  au  milieu  du  xvi«;  elle  ne  voit  paraître  que 
des  traductions  partielles  dont  les  unes  ont  été  impri- 
mées et  les  autres  sont  restées  manuscrites.  La  seconde 
période  s'étend  jusqu'au  milieu  du  xvnie  siècle  et  corres- 
pond au  temps  où  les  erreurs  protestantes  qui  regardent 
l'Écriture  comme  l'unique  règle  de  foi  et  qui  enseignent 
que  chacun  peut  l'interpréter  comme  il  l'entend,  obligent 
les  souverains  Pontifes  à  interdire  la  lecture  des  ver- 
sions en  langue  vulgaire  à  ceux  qui  ne  sont  pas  autori- 
sés à  le  faire  par  leurs  supérieurs  ecclésiastiques.  Cette 
époque  n'a  guère  vu  paraître  que  la  traduction  protes- 


138.  —  Jarre  archaïque,  de  Tell  es-Safy. 
D'après  Vincent,  Canaan,  p.  307. 

tante  de  J.  Ferreira  de  Almeida,  accommodée  aux 
erreurs  dont  il  faisait  profession.  La  période  finale 
s'ouvre  avec  le  décret  de  Benoit  X1Y,  autorisant  la  lec- 
ture des  versions  en  langue  vulgaire  approuvées  par 
le  Saint-Siège  et  annotées  d'après  les  saints  Pères  et 
les  savants  catholiques.  Les  traductions  se  sont  alors 
multipliées  et  les  éditions  augmentent  continuelle- 
ment. J.  Pereira. 

POSIOONIUS  (grec  :  iWeiôwvio;),  un  des  trois 
envoyés  du  général  syrien  Nicanor,  chargés  de  porter  à 
Judas  Macchabée  des  propositions  d'alliance  qui  furent 
acceptées.  II  Mach.,  xiv,  19. 

POSSÉDÉS  DU  DÉMON.  POSSESSION.  Voir 

DÉMONIAQUES,  t.   II.   col.  1374. 

POTEAU.  Voir  Mat,  t.  iv,  col.  861-862;  Pal,  ibid., 
col.  1961  ;  Potence. 

POTENCE  (hébreu  :  é.j;  Septante  :  ÇùXov;  Vulgate: 
lignum,  patibulum,  cntx),  pièce  de  bois  servant  pour  la 
pendaison  des  criminels.  Voir  Pendaison,  t.  iv,  col.  3ï. 
En  général,  l'hébreu  emploie,  pour  désigner  cet  instru- 
ment, le  mot  es,  «  bois  »,  qui  ne  préjuge  rien  quant  à 
sa  forme,  et  peut  convenir  au  pal,  voir  Pal,  t.  iv,  col.  1961. 
à  la  croix,  voir  Croix,  t.  Il,  col.  11-29,  au  simple  poteau 


ou  à  un  agencement  de  plusieurs  pièces  de  bois.  Gen., 
xl.  22:  Num..  xxv,  4;  Deut.,  xxi,  '22;  Jos.,  vin,  29;  x, 
27:  Esth.,  n.  23;  vi.  i;  vu,  10;  ix,  13.  En  hébreu,  atta- 
cher à  la  potence  se  dit  tâlâh  al  liâ'ès,  «  suspendre  au 
bois  »,  Septante  :  È/.pî(iauc,  o  il  suspendit  »,  Deut.,  xxi, 
22;  ou  simplement  hôqîya',  •  pendre  »,  Septante  : 
itapaSEiYpâttiTov,  «   on  fit  un  exemple   >\  on  exposa  en 


139.  —  Lampe-canard,  de  Gazer. 
D'après  Vincent,    Canaan,  p.  315. 

exemple,  Num.,  xxv,  4,  et  i'i^'/.'.iix-i,  a  on  exposa  au  so- 
leil ».  II  fieg.,  xxi,  6,  9.  Une  autre  fois,  les  Septante 
supposent  une  potence  en  forme  de  croix:  ia-xvpioaQcii, 
«  être  mis  en  croix  »,  en  parlant  de  la  potence  d'Aman. 
Esth.,  xvi,  18.  Cette  potence  avait  cinquante  coudées, 
près  de  vingt-cinq  mètres  de  haut.  C'était  donc  comme 
un  grand  mût  au  sommet  duquel  fut  hissé  le  corps  du 
condamné.  H.  Lesltrl. 


140.  —  Oiseau  peint,  à  Lachis. 
D'après  Bliss,  A  mound  of  many  cities,  Londres,  1894.  fig.  106. 

POTERIE,  fabrication  d'ustensiles  et  d'objets  divers 
en  terre  cuite.  —  1°  Poterie  chananéenne.  L'argile  se 
rencontrait  assez  communément  en  Palestine.  Voir 
Argile,  t.  i,  col.  949;  Palestine,  t.  iv,  col.  2013.  Les 
plus  anciens  habitants  du  pays  surent  l'utiliser. 
Jusqu'en  ces  dernières  années,  les  débris  de  poterie 
retrouvés  dans  le  sol  palestinien  étaient  assez  rares. 
Depuis  les  fouilles  de  MM.  Bliss  et  Macalister,  Excava- 


571 


POTERIE 


572 


lions  in  Palestine during  the  years  1898-1000,  Londres, 
1902,  part,  u,  The  pottery,  p.  74-141,  les  documents 
céramiques   sont   devenus   beaucoup    plus   nombreux. 


141.  —  Jarre  chananéenne. 
D'après  Vincent,  Canaan,  pi.  x,  8. 

Les  plus  anciens  spécimens  chananéens  sont  grossiers 
et  simplement  durcis  au  soleil.  Puis,  les  potiers 
apprennent  à  cuire  et  perfectionnent  leur  art.  Les  vases 


d'animaux,  comme  la  lampe-canard  trouvée   à   Gcezer 
(fig.  139).   Ensuite  on  décore  les  objets   en   noir  sur 


143.  —  Cruche  chananéenne  décorée. 
D'après  Rlisset  Macalister,  Excavations,  pi.  S4. 

fond    jaune,   en    y    représentant  divers  ornements  et 
surtout  des  animaux  (lig.  140). 

A  partir  du  XVIe  siècle  avant  J.-C.,  l'emploi  du   tour 


142.  —  Marmites  chananéennes.  t  l'après  Vincent,  Canaan,  pi.  x,  l.  15,  16. 


■-ont  modelés  à  la  main  avec  une  assez  grande  habileté 

et  a  l'aide   de  silex   pour  aplanir   le^  sur  laces;    mais  le 
tour  n'est  pas  encore  utilisé.   Iles  stries  et  des  hachures 


se  généralise,  la  technique  devient  plus  habile  et  les 
pièces  beaucoup  mieux  réussies.  Les  jarres  sont  pour- 
vues d'anses  (fig.  141), les  marmites  prennent  une  l'orme 


lit.  —  Lampe  chananéenne.  D'après  Bliss  et  Macalister,  Excavations,  pi.  47. 


commencent  à  décorer  les  pièces.  On  ne  se  contente 
pas  de  fabriquer  des  vases  à  forme  régulière  (fig.  138), 
on  s'essaie  à  faire  des   récipients  affectant  des  formés 


élégante  (lig.  142),  les  cruches  reçoivent  une  déco- 
ration pittoresque  (lig.  143),  les  lampes  reproduisent 
plus  artistiquement  les  types  d'animaux   (fig.  lii  .   la 


573 


POTERIE 


574 


peinture  rouge  foncé  sur  fond  jaune  ou  gris  et  même 
une  sorte  de  vernis  émaillé  donnent  aux  pièces  une 
physionomie  plus  agréable.  On  a  retrouvé  à  Gazer  des 
jarres  à  fond  pointu  qui  servaient  à  la  sépulture  des 
enfants.  Parfois  ces  jarres  se  rencontrent  sous  un  mur. 
sous  un  seuil  de  porte,  sous  une  maison;  les  cadavres 
qu'elles  contiennent  sont  ceux  des  enfants  qui  ont  été 


145.  —  Ancienne  cruelle  à  huile  phénicienne.  Xécropole  de  Tyr. 
D"après  Lortet,  La  Syrie,  p.  143. 

immolés  selon  le  rite  chananéen.  Voir  Sacrifice.  — 
On  a  été  tenté  de  reconnaître  l'influence  phénicienne 
dans  la  céramique  chananéenne.  Mais  les  Phéniciens 
n'ont  jamais  eu  de  céramique  originale  (lîg.  145).  La  po- 
terie mise  au  jour  à  Tyr,  à  Tell-el-Rachédiéh,  en  1903, 
est  d'imitation  cypriote.  Cf.  Revue  biblique,  1904,  p.  564- 
5(56.  Les  Phéniciens  cherchaient  avant  tout  à  débiter 
les  articles  les  plus  capables  d'exciter  l'envie  de  leur 
clientèle  ;  les  légendes  gravées  ou  peinles  par  eux  sur  les 
objets  n'impliquaient   nullement  une  origine  tyrienne. 


146.  —  Cruche  décorée,  de  style  cypriote. 
D'après  Sellin,  Tell  Ta'annek,  Vienne,  1904,  fig.  44. 

Cf.   Babelon,    Manuel  d'archéologie  orientale,   Paris, 
18S8,  p.  292-299;  Maspero,  L'archéologie  égyptienne 

Paris,  1887,  p.  242-247. 

2»  Poterie  isra^lite.  —  Après  leur  installation  en  Pa- 
lestine les  Hébreux  imitèrent  naturellement  les  procédés 
de  la  céranique  chananéenne.  Mais  ils  donnèrent  des 
formes  quelque  peu  originales  à  leurs  produits,  cruches 
décorées  à  la  manière  cypriote  (fig.  146  ,  ou  à  panse 
étroite,  comme  des  gourdes  (lîg.    147).   A  partir  de  la 


monarchie,  l'autonomie  des  potiers  israéli tes  s'accentue, 
tout  en  subissant  l'inlluence  phénicienne,  à  laquelle  la 
construclion  et  l'ornementation  du  Temple  avaient 
donné  grand  crédit.  Les  produits  de  la  Grèce  arrivaient 
aussi  sur  les  marchés  palestiniens  et  contribuaient  à 
affiner  le  goût  des  artistes  israélites.  Néanmoins,  leurs 
produits  ne  parviennent  pas  à  rivaliser  avec  ceux  de  la 


147.  —  Cruche  en  forme  de  gourde 
D'après  Sellin,  ibid.,  pi.  v.  a. 

dernière  période  chananéenne.  Presque  toute  la  vaisselle 
est  fabriquée  au  tour;  mais  bien  des  vases  domestiques 
sont  grossièrement  modelés  à  la  main  et  à  peine 
dégrossis  au  polissoir.  Ils  font  des  jarres  larges  et  mas- 
sives (lîg.  148).  11  n'y  a  pas  de  types  absolument  origi- 
naux; les  ouvriers  imitent  l'ancienne  poterie  indigène 
ou  s'inspirent  des  modèles  mvcéniens  ou  cypriotes 
(fig.    149).  Voir.  t.  n,  lîg.  416,  col.  1135.  La  décoration 


148.  —  Jarre  juive.  D'après  Vincent,  Catuian,  p.  356. 

est  purement  linéaire  ou  empruntée  au  règne  végétal. 
Le  ton  jaune  ou  noirâtre  de  la  terre  cuite  reçoit  des 
traits  en  noir  ou  en  rouge.  Les  figurines  de  l'époque  se 
rattachent  aux  productions  grecques  (lîg.  150i.  quelque- 
fois avec  des  types  sémitiques  (fig.  151 1.  L'n  certain 
nombre  de  pièces  portent  des  estampilles.  Parfois, 
c'est  un  nom  de  potier.  Souvent,  ce  sont  des  estampilles 
royales,  caractérisées  par  le  mot  -]'"-'"  et  par  le  nom 
d'une  localité  (fig.  152).  Quatre  localités  palestiniennes 


o/o 


POTERIE 


POTHIER 


576 


sont  nommées,  Hébron,  Zipli,  Soccoth  et  Marésa.  Il 
faudrait  donc  lire  :  «  Au  roi,  Hébron;  au  roi,  Zipli,  » 
etc.  Les  ateliers  royaux  auraient  ainsi  fabriqué  certaines 
catégories  de  vases;  ces  ateliers  se  trouvent  précisément 
dans  des  régions  où  abonde  l'argile  apte  au  moulage. 
Les  potiers  d'IIébron  et  de  Beit-Djebrin,  au  voisinage 


noms  de  la  plante  çémç,  le  Poterittm  épineux.  Mais  le 
nàâsus  est  le  jujubier  ou  Zizyphus  Spina-Christi, 
Voir  t.  m,  col.  1861. 

POTHIER  Rémi,  théologien  français,  né  à  Reims  en 
1727,  mort  dans  cette  ville  le  23  juin  1812.   Il  fut  suc- 


Poterie  Km.  élite.  D'après  Vincent,  Canaan,  pi.  XI. 


de  l'antique  Marésa,  approvisionnent  encore  aujourd'hui 

les  marchés  de  Jérusalem,  (if.  11.  Vincent,  Canaan. 
Paris,  1907,  p.  297-360.  Les  potiers  israélites  fabriquaient 
des    récipients   de    toute    nature,    des    lampes,     voir 


cessivement  curé  de  Béthenville  et  chanoine  [de  Laon 
avant  la  Révolution.  Esprit  singulier,  il  croyait  que  per- 
sonne avant  lui  n'avait  parfaitement  compris  le  sens- 
de  l'Écriture.  11  publia  en  1773  le  plan  d'une  Explica- 


150. 


nés  de  stvle  cypriote.  D'après  vinrent,  Canaan,  p.  356. 


Lampe,  t.  iv,  lig.  li,  col.  54,  des  ustensiles  que 
la  rareté  du  bois  obligeait  à  faire  en  terre  cuite,  comme 
des  mangeoires  d'animaux,  \oir  Cri  <:ue,  t.  tt,  col.  1 108, 
"  is  d'idoles.  Cf,  Sap.,  xv,  8,  etc. 
II.  Lesètre. 


des  téraphim,  des  statuettes 

II.    LESI  I  RI  . 

POTERIUM    ÉPINEUX.    Les    Septante  traduisent 
le    mol    hébreu  nu  axa?.  Is..   I.v.   13,  par  «toiê/,,   un    des 


ratian  de  l'Apocalypse,  qui  fut  brûlé  par  le  bourreau 
par  ordre  du  Parlement  de  Paris,  sur  la  réquisition  de 
l'avocat  général  Seguier.  Polluer  n'en  lit  pas  moin 
raltre  s. m  Explication,  imprimée  clandestinement  I 
Douai,  2  in-8u,  1773,  et  il  en  donna  plus  tard  une  tra- 
duction latine,  2  in-12,  Augsbourg,  1797  et  1798.  Il  lit 
paraître  à    part  un  extrait  intitulé   Les  Irais  dernières 


577 


P0TU1ER    —   POTIER 


578 


plaies,  in-12,  Augsbourg,  1798,  dans  lequel  il  appelle 
Bonaparte  précurseur  de  l'Antéchrist.  En  1802,  il  publia, 
in-8°,  à  Augsbourg,  une  explication  des  Psaumes  en 
latin.  Voir  Hoefer,  Nouvelle  biographie  générale,  t.  XL, 


151.  —  Figurines  à  profils  de  Sémites. 
D'après  Vincent,  Canaan,  p.  357. 

1862,  col.  895;  Michaud,  Biographie  universelle,  nom. 
édit.,  t.  xxxiv,  p,  190. 


de   yàsar,  «  façonner  a  ; 
y.£pïu.:-j;  ;  Vulgate  :  figu- 


POTIER  (hébreu  :  i/és-V 
chaldéen  :  péhâr;  Septante  . 

lus),  artisan  qui  fait  des  vases  et  des  ustensiles  de  terre 
cuite.  —  1°  A  une  époque  reculée,  il  y  eut  des  potiers 
à  Nétaïm  et  à  Gédéra,  qui  travaillaient  pour  le  compte 
du  roi.  1  Par.,  iv,  23.  D'autres  sont  signalés  auprès  de 


2»  Pour  exécuter  son  travail,  le  potier  commençait 
par  pétrir  la  terre  avec  les  pieds.  Is.,  xli,  25.  Puis,  s  il 
s'agissait  d'un  vase,  il  se  servait  de  la  roue  (lig.  153) 
pour  le  façonner.  La  forme  de  l'instrument  n'a  guère 


15  '■.  —  Le  dieu  Plitah  façonnant  l'œuf  du  monde  (peint  en  jaune) 
sur  un  tour  à  potier,  dont  it  met  la  roue  en  mouvement  avec 
les  pieds.  British  Muséum.  Cf.  E.  A.  W.  Budge,  The  Gods  of, 
Ihe  Egyptians,  2  in-4%  Londres,  I9u4,  t.  I,  p.  500. 

varié  depuis  les  anciens  tpmps.  Il  se  compose  essentielle- 
ment de  deux  roues  pleines,  fixées  horizontalement  aux 
extrémités  d'un  axe  vertical.  L'appareil  est  agencé  sur 
un  pivot,  de  telle  manière  que  la  roue  inférieure  puisse 
être  mise  en  mouvement  par  les  pieds  d'un  ouvrier 
assis.  La  roue  inférieure,  ainsi  conduite  par  les  pieds, 


152.  —  Estampilles  royales.  D'après  Vincent,  Canaan,  p.  358. 


Jérusalem,  dans  la  vallée  de  Ben-Hinnorn,  oùJérémie. 
xtx,  2,  mentionne  une  porte  des  Tessons  ou  du  Potier. 
saar  ha-karsùf,  — -j>.r,  t?;;  gapers/8,  porta  fietilis,  qu'il 
faut  peut-être  identifier  avec  la  porte  Sterquiline  ou  du 
Fumier.  Voir  Jérusalem,  t.  in,  col.  1365.  De  ce  même 
côté  se  trouvait  le  champ  du  potier  que  les  Juifs  ache- 
tèrent avec  les  deniers  de  Judas  pour  y  inhumer  les 
étrangers.Matth., xxvn, 8. Voir  HA.CELDAMA,t.lii,col.386. 

DICT.  DE  LA  BIBLE. 


entraine  dans  son  mouvement  la  roue  supérieure,  qui 
fait  partie  d'un  même  système.  Les  objets  posés  sur 
cette  roue  seront  donc  entraînés  dans  son  mouvement 
giratoire,  et,  comme  dans  un  tour  à  façonner  le  bois, 
auront  leurs  surfaces  usées  par  les  objets  résistants 
qu'on  tiendra  à  frottement  auprès  d'eux.  Pourvu  d'un 
appareil  de  cette  nature,  le  potier  s'assied,  prend  dans 
ses  mains  de  l'argile  suffisamment  humide,  lui  donne 

y.  -  19 


579 


POTIER 


580 


une  première  forme  générale,  accusant  le  relief  exté- 
rieur et  ménageant  une  cavité  à  l'intérieur  de  la  masse. 
Puis  il  la  pose  sur  la  roue  supérieure,  maintient  le  vase 
avec  une  de  ses  mains  placée  à  l'intérieur,  met  la  roue 


154.  —  Tambourin  en  terre  cuite. 
D'après  Lortet,  La  Syrie,  p.  336. 

en  mouvement,  et  de  l'autre  main,  avec  une  pièce 
plate  à  échancrures  appropriées,  comprime  doucement 
la  masse  d'argile,  jusqu'à  ce  qu'elle  ait  été  réduite  à 


les  tours  sont  mis  en  mouvement.  Cf.  1. 1,  fig.  22,  col.  -179. 
Il  fallait  au  potier  une  certaine  habileté  pour  réussir 
dans  sa  tâche.  Parfois,  pour  une  raison  ou  pour  une 
autre,  le  vase  se  brisait  avant  d'être  terminé.  «  Je  des- 
cendis à  la  maison  du  potier,  raconte  Jérémie,  xxiii,  3, 
4;  or,  il  faisait  son  ouvrage  sur  des  roues.  Le  vase  qu'il 
faisait  manqua,  comme  il  arrive  à  l'argile  dans  la  main 
du  potier,  et  il  refit  un  autre  vase,  comme  il  plut  au  po- 
tier de  le  faire,  »  L'Ecclésiastique,  xxxviu,  32,  33. 
décrit  avec  plus  de  détails  le  travail  du  potier  : 

Le  potier  assis  à  son  ouvrage 

Kî  tournant  la  roue  avec  ses  pieds, 

Constamment  est  en  souci  de  son  travail, 

Et  fait  effort  pour  fournir  la  quantité. 

Avec  son  bras  il  façonne  L'argile, 

Et  devant  ses  pieds  il  fait  tourner  la  masse. 

11  met  tout  son  cœur  à  parfaire  le  vernis. 

l'a  soin  vigilant  à  nettoyer  son  four. 

En  effet,  le  vase  une  fois  séché  à  l'air,  est  mis  au 
four  pour  y  cuire.  Le  four  doit  être  bien  propre,  pour 
que  la  pâte  encore  molle  ne  se  déforme  pas  au  contact 
d'objets  étra-ngers.  Le  vernis,  %piap.a,  linilio,  est  un 
composé  de  divers  oxydes,  colorés  ou  non,  qui  se  vitri- 
fie par  la  fusion  et  constitue  une  sorte  d'émail  à  la 
surface  du  vase.  C'est  dans  le  four  que  les  vases  du 
potier  prennent  leur  forme  définitive  ;  ils  en  sortent 
réussis  ou  manques.  Eccli..  xxvn.  6.  Le  potier  peut 
faire  ainsi  des  ouvrages  de  toutes  sortes,  à  son  choix. 
Sap.,  xv,  7. 

3°  Comme,  pour  créer  l'homme,  Dieu  prit  de  la 
poussière  de  la  terre  et  en  forma,  yâfar,  son  corps, 
Gen.,  il,  7-8,  les  auteurs   sacrés    aiment   à    assimiler 


m  n  , 


5  6  r      <j  7  £ut>»  9 

155.  —  Potiers  égyptiens.  D'après  Wilkinson,  Marinera  and  Customs,  2'  édit..  t.  n,  lig.  397,  p.  192. 
a,  e,  l,  p,  roues  sur  lesquelles   est  placée  l'argile;  t.  Ouvrier  façonnant   l'intérieur  d'une  coupe  qui   tourne  sur  la  roue  a. 
b,  c,  (l,  n,  h,  m,  n,  représentent  des  vases  déjà  faits.  —  2.  Autre  ouvrier  façonnant  l'extérieur  d'une  coupe  cl  se  préparant  à  la 
séparer  du  bloc  d'argile.  —  3  vient  de  séparer  la  coupe  k  ilu  bl"<'  d'argilo  l.  —  4  met  sur  la  roue  p  l'argile  qu'il  va  travailler, 
—  5  façonne  avec  les  deux  mains  nu  disque  d'argile.  —  6  entretient  le  tour  q  d'où  l'on  voit  sortir  les  flammes  s.  —  7  fail  pa 
à  8  les  vases  que  celui-ci  fait  cuire  au  haut  du  four.  —  '.'  emporte  les  vases  déjà  cuits.  Beni-Hàssan  iMoyen  Empire). 


l'épaisseur  voulue  et  ait  pris  une  forme  circulaire  bien 
régulière.  (In  obtient  ainsi  toutes  sortes  de  formes 
(fig.  154).  S'il  faut  ajouter  des  anses  au  vase,  élargir 
ou  rétrécir  quelque  partie  de  ses  bords,  on  le  fait  pen- 
dant que  l'argile  est  encore  fraîche.  Des  peintures 
égyptiennes  représentent  ce  travail  des  potiers  fabri- 
quant au  tour  des  vases  d'argile  (fig.  155),  sans  qu'on 
puisse  cependant  se  rendre  compte  de  la  manière  dont 


son  œuvre  à  celle  du  potier.  Cf.  t.  i.  lig.  22,  col,  179, 
le  dieu  égyptien  Khnoum  façonnant  l'homme.  L'homme 
est  donc  par  rapport  à  Dieu,  ce  que  l'argile  est  par 
rapport  au  potier. 

Ciiinmi'  l'argile  est  dans  la  main  du  poiier, 

Et  qu'il  en  dispose  selon  son  bon  plaisir, 

Ainsi  les  hommes  sont  dans  la  main  de  celui  qui  les  a  faits. 

Et  il  leur  donne  selon  son  jugement.  Eccli..  XXXIII,  18-14. 


581 


POTIER   —    POULE 


582 


En  conséquence,  l'homme  n'a  pas  plus  droit  de  se 
révolter  contre  Dieu  que  l'argile  contre  le  potier. 

Folie!  Le  potier  sera-t-il  pris  pour  de  l'argile, 

De  sorte  que  l'œuvre  dise  à  l'ouvrier  :  Il  ne  m'a  point  faite! 

Et  le  vase  au  potier  :  Il  n'y  entend  rien  !  Is.,  xxix,  16. 

Malheur  à  qui  conteste  avec  celui  qui  l'a  formé, 

Vase  parmi  des  vases  de  terre, 

L'argile  dira-t-elle  à  celui  qui  la  façonne  :  Que  fais-tu? 

Ton  œuvre  dira-t-elle  :  Il  n'a  pas  de  mains!... 

Oserez-vous  m'interroger  sur  l'avenir, 

Me  commander  au  sujet  de  mes  enfants 

Et  de  l'ouvrage  de  mes  mains  ! 

C'est  moi  qui  ai  fait  la  lerre. 

Et  qui  ai  créé  l'homme  qui  est  sur  elle.   Is.,  xlv,  9,  11,  12- 

Après  avoir  montré  le  potier  mettant  sur  la  roue  un 
vase  qui  ne  se  moule  pas  bien,  et  le  remplaçant  par  un 
autre.  Jérémie,  xvm,  3-0,  ajoute  de  la  part  de  Dieu  : 

Est-ce  que  je  ne  puis  pas  vous  faire 
Comme  a  fait  ce  potier,  maison  d'Israël? 
Ce  que  l'argile  est  dans  la  main  du  potier, 
Vous  l'êtes  dans  ma  main,  maison  d'Israël. 

Saint  Paul  reprend  la  même  comparaison  et  assimile 
Dieu  au  potier  qui  prend  son  argile  et  en  fait  ce  qu'il 
veut,  tirant  de  la  même  masse  un  vase  d'honneur  et 
un  vase  commun.  Rom.,  ix,  20,  21.  Cf.  Sap.,  xv,  7. 

i  Quand  l'ouvrage  du  potier  a  passé  au  four,  on  le 
brise  aisément,  mais  on  ne  peut  pas  le  réparer.  Les 
auteurs  sacrés  tirent  de  là  d'autres  comparaisons.  Dieu 
mettra  en  pièces  les  nations  rebelles  comme  le  vase  du 
potier.  Ps.  il,  9;  Apoc,  II,  27.  Isaïe,  xxx,  14,  compare 
l'alliance  égyptienne  à  un  ouvrage  qui  tombe  subite- 
ment en  morceaux,  comme  un  vase  de  potier.  Jérémie 
reçoit  l'ordre  d'acheter  une  cruche  de  potier,  de  la 
briser  hors  de  Jérusalem  sous  les  yeux  des  anciens  et 
de  leur  dire  : 

Ainsi  parle  Jëhovah  des  armées  : 

Je  briserai  ce  peuple  et  cette  ville, 

Comme  on  brise  le  vase  du  potier 

Qui  ne  peut  plus  être  réparé.    Jer.,  xix,  1,  11. 

Après  la  prise  de  la  ville,  les  nobles  filles  de  Sion, 
jadis  estimées  au  poids  de  l'or,  se  plaignent  d'être 
traitées  comme  de  simples  vases  de  terre,  œuvre  du 
potier.  Lam.,  IV,  2.  La  statue  du  songe  de  Nabuchodo- 
nosor  avait  une  partie  des  pieds  en  argile  de  potier,  ce 
qui  indiquait  la  fragilité  de  l'œuvre.  Dan.,  n,  41. 

H.  Lesétre. 

POU,  insecte  aptère,  vivant  sur  le  corps  de  l'homme 
et  des  animaux.  Le  pou  est  pourvu  d'un  suçoir  qui  lui 


156.  —  Pou  et  ses  œufs.  Grossis  de  20  diamètres. 

permet  de  pomper  le  sang,  après  qu'à  l'aide  d'un  ai- 
guillon corné  il  a  percé  la  peau  (fig.  156).  Ses  pattes 
sont  terminées  par  des  crochets  au  moyen  desquels  il 
adhère  fortement  aux  poils  ou  aux  cheveux.  —  Josèphe, 


Ant.  jitd.,\\,  xiv,  3,  suivi  par  beaucoup  de  commenta- 
teurs juifs,  prétend  que  les  kinnîm  de  la  troisième  plaie 
d'Egypte  étaient  des  poux  :  «  Une  innombrable  quantité 
de  poux  fourmillait  des  corps  des  Egyptiens,  et  il  n'y 
avait  ni  lavages  ni  application  de  remèdes  qui  put  les 
détruire.  »  Les  Égyptiens  prenaient  d'ordinaire  de 
grandes  précautions  pour  éviter  ces  insectes.  Hérodote, 
il,  37.  Mais  ici  Josèphe  paraphrase  le  texte  biblique. 
Les  kinnîm  ne  sont  pas  des  poux,  cpDeipî';,  pediculi, 
mais  des  cousins  ou  moustiques.  Voir  Cousin,  t.  n, 
col.  1093.  Les  poux  n'en  sont  pas  moins  une  vermine 
qui  laisse  assez  indifférents  les  Bédouins,  les  Arabes, 
les  Fellahs  et  la  plupart  des  Orientaux.  Cf.  E.  Pierotti, 
La  Palestine  actuelle,  in-8",  Paris,  1865,  p.  122,  169. 
Les  anciens  Juifs  la  connaissaient.  Les  Talmudisles 
disent  qu'il  y  a  autant  de  péché  à  tuer  un  pou  le  jour 
du  sabbat  qu'à  tuer  un  chameau.  Jerus.  Schabbatli, 
f.  107.  —  La  multiplication  des  poux  peut  engendrer 
une  maladie  qui,  dans  quelques  cas,  devient  mortelle, 
la  phtiriase  ou  maladie  pédiculaire.  Antiochus  Épi- 
pliane  et  Hérodote  Agrippa  moururent  d'une  maladie 
analogue.  Voir  Helminthiase,  t.  m,  col.  585.  Quelques 
auteurs  ont  pensé  que  la  maladie  dont  mourut  Hérode 
le  Grand,  et  que  mentionne  Josèphe,  Ant.jad.,  XVII, 
vu;  Bell.jud.,  I,  xxxm,  5,  n'était  autre  que  la  maladie 
pédiculaire.  H.  Lesétre. 

POUCE  (hébreu  :  bohén;  Septante  :  -r/.pov;  Vulgate  : 
pollex),  doigt  de  la  main  ou  du  pied,  occupant  l'extré- 
mité intérieure  du  membre,  et,  dans  la  main,  opposa- 
ble aux  autres  doigts.  — Des  lustrations  de  sang  doivent 
être  faites  aux  pouces  des  mains  et  des  pieds  dans  la 
consécration  du  grand-prêtre,  Exod.,  xxix,20;  Lev.,  vm, 
23,  et  dans  la  purification  du  lépreux,  pour  lequel  des 
lustrations  d'huile  sontajoutées  aux  premières.  Lev.,  xvi, 
14,  17,  25,  28.  Sur  la  signification  de  ces  rites,  voir 
Lustration,  t.  iv,  col.  427,  428.  —  Le  roi  chananéen 
Adonibésec,  qui  avait  fait  couper  les  pouces  des  mains 
et  des  pieds  à  soixante-dix  rois,  subit  à  son  tour  la 
même  mutilation,  après  sa  défaite  par  les  hommes  de 
la  tribu  de  Juda.  Jud.,  i,  6,  7.  H.  Lesétre. 

POULE  (Grec  :  ô'pvt;;  Vulgate  :  gallina),  oiseau  de 
l'ordre  des  gallinacés  (fig.  157)  et  femelle  du  coq,  donl 
elle  diffère  par  une  taille  plus  petite,  une  queue  plus 
courte  et  un  plumage  moins  éclatant.  Voir  Coq,  t.  n, 
col.  951.  Les  poules  pondent  d'ordinaire  un  œuf  par 
jour,  sauf  à  l'époque  de  la  mue.  Quand  elles  en  ont 
pondu  une  vingtaine,  elles  manifestent  le  besoin  de 
couver.  Les  petits  sortent  de  leur  coquille  au  bout  de 
vingt  et  un  jours  d'incubation.  La  poule  remplit  avec 
grande  sollicitude  et  grand  dévouement  ses  devoirs 
maternels.  Elle  suit  ses  poussins,  les  rappelle  quand 
ils  s'écartent,  veille  à  leur  nourriture  avant  de  penser 
à  la  sienne,  les  réunit  sous  ses  ailes  pour  les  réchauffer 
et  les  protéger,  et  les  défend  résolument  même  contre 
les  oiseaux  de  proie.  —  Les  poules  ne  paraissent  pas 
avoir  été  connues  des  anciens  Israélites.  Il  n'en  est 
jamais  question  expressément  dans  l'Ancien  Testament, 
et  les  volailles  engraissées  qu'on  servait  à  la  table  de 
Salomon,  III  Reg.,  iv,  23,  pouvaient  comprendre 
toute  espèce  d'autres  oiseaux.  Voir  Barburim,  t.  i, 
col.  1458.  On  ne  sait  pas  à  quelle  époque  les  poules 
furent  introduites  en  Syrie.  Elles  ne  sont  jamais  repré- 
sentées sur  les  monuments  égyptiens.  Dans  l'Inde,  on 
les  trouve  à  l'état  domestique  dés  les  plus  anciens 
temps.  De  là  elles  ont  passé,  par  l'intermédiaire  de  la 
Perse,  en  Palestine,  puis  en  Grèce.  11  est  peu  probable 
que  leur  introduction  soit  due  à  Salomon  ;  car  les  paons 
et  les  singes  sont  seuls  mentionnés  parmi  les  animaux 
que  ses  navigateurs  lui  rapportèrent  d'Ophir.  III  Reg., 
x,  22.  Cette  introduction  doit  cependant  être  voisine  du 
retour  de  la  captivité,  car  déjà  Pindare  (520-450  avant 


583 


POULE   —    POURPRE 


584 


J  -C  ),  Ohjmp.,  xii.  20,  fait  mention  du  coq.  -  Quoi 
qu'on  ait  dit  sur  la  défense  qui  aurait  été  faite  aux 
Juifs  d'élever  des  coqs  ou  des  poules  (voir  t.  n,  col.  SfâiJ), 
ils  ne  font  pas  difficulté  d'en  nourrir  en  grande  quan- 
tité même  dans  leurs  maisons  de  Jérusalem,  ou  il  es 
laissent  percher  pendant  la  nuit.  Les  poulets  et  les 
œufs  entrent  pour  beaucoup  dans  leur  alimentation, 
surtout  pour  les  personnes  que  les  infirmités  ou  l'âge 
ont  rendues  plus  délicates.  Cf.  Tristram,  The  nalural 
Eistory  of  the  Bible,  Londres,  1889,  p,  221-223.  -  Il 
en  était  à  peu  près  ainsi  déjà  à  l'époque  de  Xotre-Sei- 
gneur.  De  là  cette  comparaison  que  le  divin  Maître 
emprunte  à  la  poule  qui  rassemble  ses  poussins  sous 
ses  ailes.  Matth..  xxm,  37.  lia  voulu  faire  de  même 
pour  les  fils  de  Jérusalem,  mais  ceux-ci  n'y  ont  pas 
consenti.  La  Vulgate  traduit  avec  raison   par  gallina, 


157.  —  La  poule. 

«  poule,  i  le  mot  grec  o'pviç,  qui  veut  habituellement 
dire  «  oiseau  »,  en  général,  mais  qui  désigne  aussi  la 
poule  en  particulier.  Cf.  Eschyle,  Eumen.,  866; 
Xénophon,  Anab.,  iv.  5,25;  Théocrite,  x.xiv,  63,  etc. 

H.  Lesêtre. 
POUPE  (grec  :  icpùnvr,;  Vulgate  :  puppis),  arrière 
d'un  navire.  Voir  Navire,  t.  iv.  col.  1513.  Au  moment 
où  une  tempête  s'éleva  sur  le  lac  de  Til.ériade.  Xotre- 
Seigneur  dormait,  appuyé  sur  un  coussin,  à  la  poupe 
d'une  barque.  Marc,  IV,  38.  C'est  à  la  poupe  qu'on  fai- 
sait asseoir  les  passagers  dune  embarcation;  ils  y 
étaient  plus  à  l'aise  et  j  gênaient  moins  ht  manœuvre 
des  rames  ou  des  voiles.  Voir  I i  . 

II.  LesÈTRE. 
POURCEAU.  Voir  Pori  ,  col.  543. 

POURPIER  DE  MER,  nom  vulgaire  de  l'arroehe 
halime,  plante  vivace  que  nombre  d'auteurs  identilient 
au  mail  lath  de  lob,  \\s.  i.  Voir  Arroche  halime,  t.  i, 

col.  1032. 

POURPRE  (hébreu  :  argdmàn;  assyrien  :  arga- 
mannuychaldéen  :  ârigvân  :  Septante  :  nopfûpa;  Vul- 
gate purpura), matière  colorante  extraite  d'un  mol- 
!eel  étoffe  teinte  avec  cette  couleur.  L'étymologie 
du  mol  ârgdman  n'est  point  certaine.  11  est  assez 
m  cependant  qu'elle  doit  être  tirée  du  sanscrit, 
dans  lequel  on  trouve  les  mots  râga,  «  couleur  rouge,  ■ 
rdgamane\  rdgavan,  ■  coloré  en  rouge.  »  Cf.  Gesenius, 
Thésaurus,  Addenda,  p.  III. 

I.  l.<i  pourpre  dans  l'antiquité.  -  1°  La  pourpre  esl 
une  matière  colorante    que    les  anciens  extrayaient  de 


plusieurs  mollusques,  connus  sous  le  nom  de  murex 
ou  «  rocher  >.  Ces  mollusques  sont  gastéropodes  et 
pectinibranches,  à  coquille  ovale  ou  oblongue,  pourvue 
antérieurement  d'un  canal  respiratoire,  et  dont  chaque 
spire  présente  des  bourrelets  saillants  en  rangées  lon- 
gitudinales et  irrégulières.  Ces  bourrelets  sont  les  restes 
des  anciennes  bouches  de  l'animal.  Le  murex  truncu- 
lus  ou  rocher  fascié  (lig.  158)  fournissait  la  pourpre 
améthyste  ou  violette,  dite  de  Tarente.  Du  murex  bran- 
dons ou  rocher  droite-épine  (fig.  159),  on  tirait  la 
pourpre  rouge  foncé,  dite  pourpre  de  Tyr.  On  imitait 
cette  dernière  à  l'aide  de  certaines  coquilles  univalves 


158.  —  Murex  trunculus. 

ou  buccins,  le  purpura  hœmasloma  (fig.  160),  le  pur- 
pura lapillus,  le  janthina,  etc.  La  matière  colorante 
du  murex  se  trouve  dans  une  poche  située  à  la  partie 
supérieure  du  corps,  entre  la  tête  et  le  foie.  Incolore 
dans  l'animal,  elle  passe  par  diverses  nuances,  quand 
elle  est  exposée  à  l'air  et  à  la  lumière,  et  part  du 
vert  pour  se  fixer  à  la  couleur  pourpre.  Le  produit 
.lu  murex  trunculus  se  compose  de  deux  radicaux, 
une  substance  azurée  analogue  au  bleu  d'indigo,  l'oxyde 
cyanique,  et  une  substance  d'un  rouge  ardent,  l'oxyde 
purpurique.  Le  murex  brandaris  ne  contient  qu'un 
seul  radical,  l'oxyde  tyrien.  Cf.  Grimaudde  Caux.  Sur 
la  pourpre  des  anciens;  dans  la  .Revue  de  zoologie, 
1856,  p.  31,  et  Lacaze-Dulhiers,  Mémoire  sur  la  pour- 
pre, dans  les  Annales  des  sciences  naturelles,  1859, 
t.  xii,  p.  1-92.  —  2»  Les  coquilles  à  pourpre  se  trouvent 


l.v.i,  —  Hurex  brandaris. 

en  grande  quantité  sur  les  bords  de  la  Méditerranée-. 
Les  anciens  les  recueillaient  sur  les  cotes  de  Phénicle, 
Sirabuii.  xvi,  757;  surcelles  du  Péloponèse,  Pausanias, 
m,  21,  6;  sur  celles  du  nord  de  l'Afrique.  Strabon, 
xv'ii,  834,  etc.  Vitruve,  De  architect.,  vu,  12,  rem 
que  la  pourpre  recueillie  au  nord  de  la  Méditerranée 
étall  plus  sombre,  qu'elle  passail  au  violei  dans  les 
régions  moyennes,  pour  arriver  au  rouge  sur  les 
méridionales.  La  nature  du  mollusque  employé  était 
aussi  pour  beaucoup  dansées  colorations.  Pour  e\tr.ure 
la  matière  colorante,  on  ouvrail  la  coquille  sur  les 
premiers  tours  de  spire,  soit  d'un  coup  de  hachette, 
soil  à  l'aide  d'une  meule  qui  l'usait  par  le  frottement. 
Les  Phéniciens  se  livraient  en  grand  à  l'exploitation  de 


585 


POURPRE 


586 


la  pourpre.  Au  dessus  du  port  de  Sidon,  on  rencontre 
des  amoncellements  de  murex  ouverts  artificiellement. 
sur  plusieurs  mètres  d'épaisseur  et  quelques  centaines 
de  mètres  de  largeur.  Le  long  de  l'isthme  de  Tyr,  on 
constate  des  dépôts  analogues  (fig.  161 1.  A  Pompéi,  on 
a  trouvé  de  semblables  amas,  indiquant  l'existence 
d'anciens  ateliers  de  teinture.  Pour  préparer  la  teinture, 
après  avoir  ouvert  le  sommet  de  la  coquille,  «  on  re- 
cueillait avec  soin  le  suc  un  peu  jaunâtre  qui  suintait 
de  la  blessure,  on  le  laissait  macérer  trois  jours  avec 
du  sel.  on  faisait  bouillir  dans  des  vases  de  plomb  et 
l'on  réduisait  à  feu  doux;  on  filtrait  la  liqueur  au 
tamis,  pour  la  débarrasser  des  résidus  de  chair  qui  y 
baignaient,  et  l'on  trempait  l'étoile.  La  nuance  la  plus 
fréquente  était  un  sang  frais  poussant  au  noir  par  ré- 
Hexion;  mais  des  manipulations  graduées  permettaient 
d'obtenir  des  tons  rouges,  violet  sombre,  améthyste.  » 
Maspero.  Histoire  ancienne  des  peuples  de  l'Orient, 
Paris,  t.  H,  1897.  p.  203.  -201.  Cf.  Aristote,  Hist.  anim.. 
v.  13;  Pline,  H.  .Y.,  ix,  36,  37.  Aujourd'hui,  ,<  les  ga- 
mins de  Tyr  savent  encore  parfaitement  bien  teindre 
des  chiffons  de  laine  en  fixant  la  couleur  sécrétée  par 
le  mollusque  avec  un  peu  de  carbonate  de  soude  et  du 
jus  de  citron  employés  comme  mordants.  Ces  guenilles 
colorées  en  rouge  violacé  leur  servent  de  drapeaux 
lorsqu'ils  jouent  au  soldat  comme  les  enfants  de  nos 


•160. 


Murex  hœmastama. 


pays.  >■  Lortet.  La  Syrie  d'aujourd'hui,  Paris,  1884, 
p.  127.  —  3°  «  La  pourpre  était  considérée  comme  la 
plus  précieuse  des  teintures,  à  cause  de  son  éclat  et  de 
sa  durée.  L"n  des  plus  grands  avantages  de  cette  cou- 
leur est.  en  effet,  de  résister  indéfiniment  à  l'influence 
de  la  lumière,  qui,  au  lieu  de  détruire  ou  affaiblir  les 
principes  colorants,  en  augmente  au  contraire  l'éclat. 
Elle  présente  de  plus  à  un  très  haut  degré  ces  reflets 
chatoyants  et  changeants  si  appréciés  des  anciens,  s 
Lortet,  ibid..  p.  202.  Le  prix  de  revient  de  la  pourpre 
était  fort  élevé,  à  raison  de  la  faible  quantité  de  matière 
colorante  que  contient  chaque  murex,  du  grand  nombre 
de  mollusques  qu'il  fallait  recueillir  et  de  la  manipula- 
tion qu'il  fallait  faire  subir  au  produit.  D'après  les 
estimations  de  Pline,  H.  N.,  ix,  36,  61,  le  poids  des 
mollusques  employés  représentait  plus  de  six  fois  celui 
de  la  laine  à  teindre.  A  Rome,  la  laine  teinte  en  pourpre 
se  vendait  au  poids  de  l'argent,  et  la  laine  deux  fois 
teinte,  en  écarlate  puis  en  pourpre,  ou  dibapha,  Pline, 
H.  y.,  n,  39,  63:  xxi,  8,  22,  valait  dix  fois  plus,  soit 
2300  francs  le  kilogramme.  Cf.  Guignet,  Les  couleurs, 
Paris,  1889,  p.  139.  —  4"  Le  haut  prix  de  la  pourpre 
n'en  r3ndait  l'acquisition  possible  qu'à  des  personnages 
très  riches.  Cf.  Hérodote,  ix,  22.  Elle  était  l'emblème 
de  la  royauté  et  plus  tard  de  la  puissance  impériale. 
Cf.  Odyss.,  xix.  223 ;  Lucain,  Pharsal.,  vu,  228;  Eu- 
trope,  Breviar.,  ix.  8;  Ainmien  Marcellin,  xxi,  9;  Cod. 
Theod.,  VI.  xxiv,  3.  Cod.  Justin.,  n,  8;  vi,  12,  etc.  A 
Byzance.  on  appelait  iropo-jpofévvTycoç,  «  né  dans  la 
pourpre  »,  le  fils  du  prince.  Des  ordonnances  impériales 
restreignirent  l'usage  de  la  pourpre  à  certains  digni- 
taires. Cf.  Suétone,  Cses.,  43;  Ner.,  32;  Philostrate, 
Heroic.,  xix,  15;  Cod.  tlieod.,  IV,  xl.  Les  Phéniciens 
restèrent  toujours  les  principaux  fabricants  et  les  four- 
nisseurs des  teintures  de  pourpre.  Cf.  Virgile,  Georg., 
m,  307;  Tibulle,  II,  3,  58;  4,  28;  Ovide,  Ars  atnat.,  m, 


170.  Cependant  les  Lydiens  parvinrent  à  leur  faire  une 
concurrence  appréciée.  Cf.  Elien,  A'a(.  animal.,  iv,  46; 
Valer.  Flaccus,  Argonaut.,  îv,  369,  elc.  On  cherchait 
naturellement  à  imiter  la  pourpre.  Ctésias,  Indic,  21, 
dit  que  dans  l'Inde  ou  se  servait  d'une  Heur  couleur 
de  pourpre  pour  obtenir  un  produit  de  même  qualité 
que  ceux  de  Grèce  et  encore  plus  brillant.  La  fabrica- 
tion de  la  pourpre  au  moyen  du  murex  est  délaissée 
depuis  longtemps.  Grâce  aux  progrès  de  la  chimie,  on 
obtient  beaucoup  mieux  et  surtout  à  meilleur  marché. 
Cf.  A.  Schmidt,  Veber  die  Purpurfurberei  und  den 
Purpurhandel  ini  Altertum,  Berlin,  1812;  Von  Mar- 
tens,  Purpur  und  Perlen,  Berlin,  1874. 

II.  La  pourpre  dans  la  Sainte  Écriture.  —  I»  Moïse 
reçut  l'ordre  de  recevoir  des  Israélites,  au  désert,  la 
pourpre  nécessaire  à  la  confection  des  objets  du  culte. 
Exod.,  xxv.  4.  On  lui  en  apporta  en  effet,  Exod.,  xxxv, 
6,  23,  25,  35,  ce  qui  suppose  que  le  fil  de  pourpre  était 


161.  —  Conglomérat  de  débris  de  murex  truneulus  trouvés  à 
Tyr.  —  D'après  W.  R.  Wilde.  Narrative  of  a  voyage  to  Ma- 
deira,  Tenerifte,  along  the  shores  of  the  Méditerranéen, 
2  in-8\  Dublin,  1840,  t.  il,  p.  482. 

assez  commun  en  Egypte  et  que  les  Israélites  en  avaient 
emporté  en  quittant  ce  pays.  Les  fils  de  pourpre  furent 
employés  à  confectionner  les  tentures  du  Tabernacle, 
le  voile  du  Saint  des  Saints,  Exod.,  xxvi,  1,  31,  36,  les 
tentures  de  la  porte  du  parvis.  Exod..  xxvn,  16,  l'éphod, 
la  ceinture,  le  pectoral,  les  grenades  de  la  robe  du 
grand-prètre.  Exod..  xxvm,  5,  6,  8,  15,  33;  xxxvi,  8, 
35,  37;  xxxvm,  18,  23;  xxxix.  1.  2.  8.  22,  28.  Dans  la 
confection  de  ces  travaux  entrent  trois  éléments  :  le  te- 
kêlél,  hyacinthe  ou  pourpre  bleue-violette,  lirée,  d'après 
le  Talnuid,  du  hilzôn,  mollusque  à  pourpre  ,  voir  Cou- 
leurs, t.  il,  col.  1066;  Y'argdmdn,  ou  pourpre  rouge, 
et  le  tôla  ou  cramoisi.  Voir  Cochenille,  t.  Il,  col.  818; 
Eccli.,  xlv,  12.  —  Quand  Salomon  voulut  bâtir  le  Temple, 
il  demanda  à  Hiram  un  ouvrier  habile  à  teindre  en 
pourpre.  II  Par.,  n,  7.  li.  Pour  fabriquer  le  voile  du 
Temple,  on  employa  le  byssus,  le  bleu,  le  pourpre  et  le 
cramoisi,  II  Par.,  ni,  14,  c'est-à-dire  qu'à  l'étoffe  de 
bit?,  voir  Lin,  t.  iv,  col.  264.  furent  joints  des  tils  de 
laine  bleue,  pourpre  et  cramoisie.  —  Dans  toute  l'anti- 
quité, l'étoffe  de  pourpre  fut  considérée  comme  la  plus 
riche  et  la  plus  magnifique  de  toutes.  Aussi  on  en 
revêtait  les  statues  des  dieux.  Jer.,  x,  9;  Bar.,  vi,  71. 
On  disait  que  l'Héraclès  phénicien  avait  offert  à  Astarté 
la  première  tunique  teinte  avec  la  pourpre  tyrienne. 
Cf.  Lortet,  La  Syrie  d'aujourd'hui,  p.  127.  La  statue 
de  Jupiter  Capitolin,  à  Rome,  celle  des  Dioscures,  à 
Sparte  et  à  Messine,  portaient  des  manteaux  de  pourpre 


587 


POURPRE 


POUSSIÈRE 


588 


précieuse.  Le  vêtement  de  pourpre  éveillant  ainsi  la 
double  idée  de  royauté  et  de  divinité,  il  convenait  que 
la  pourpre  fût  employée  dans  le  culte  de  Jéhovah,  pour 
inarquer  sa  divinité  unique  et  sa  suprême  royauté. 
Cf.  Bàhr,  Symbolikdes  mosaischen Cullus,  Heidelberg, 
1837,  t.  i,  p.  330-332. 

2°  La  pourpre  est  signalée  dans  les  dépouilles  du  roi 
de  Madian,  dont  s'empara  Gédéon,  .1 1 1 cl . ,  vin,  26;  dans 
le  siège  de  la  litière  de  Salomon,  Cant.,  m,  10;  dans  le 
conopée  d'Holoplierne,  Judith.,  x,  19;  dans  les  vête- 
ments de  la  femme  forte,  qui  ordonne  si  bien  sa  riche 
maison,  Prov.,  xxxi,  20;  dans  la  parure  de  Daniel, 
après  qu'il  a  expliqué  le  songe  de  Baltassar,  Dan.,  v,  7, 
16,  29  ;  dans  celle  dont  est  revêtu  Mardochée  pour  son 
triomphe,  Esth.,  vm,  15;  dans  les  vêtements  du  mauvais 
riche  à  Jérusalem.  Luc,  xvi,  19.  A  l'époque  des  Macha- 
bées,  les  royautés  orientales  attachaient  grande  impor- 
tance au  port  de  la  pourpre.  Quand  Judas  pilla  le  camp 
des  Syriens,  il  y  trouva  beaucoup  de  pourpre.  I  Mach., 
iv,  23.  Par  contre,  l'auteur  sacré  remarque  qu'à  Home, 
à  cette  époque,  personne  ne  prenait  la  pourpre  pour 
se  faire  roi.  I  Mach.,  vin,  14.  Antiochus  Epiphane  ôta 
le  droit  de  pourpre  à  Andronique,  le  meurtrier  du 
grand-prétre  Onias.  II  .Mach.,  iv,  38.  Alexandre  Bala 
l'accorda  à  Jonathas,  et  le  revêtit  lui-même  à  Ptolémaïde, 
I  Mach.,  x,  20,  62,  61;  Antiochus  VI  lui  conllrma  ce 
droit.  1  Mach..  XI,  58.  Après  lui,  le  grand-prêtre  Simon 
eut  seul,  parmi  les  Juifs,  le  droit  de  se  revêtir  de 
pourpre.  I  Mach.,  xiv,  43,  44. 

3°  Ézéchiel,  xxvn,  7,  16,  dit  que  les  Tyriens  faisaient 
venir  la  pourpre  des  iles  d'Élisa,  c'est-à-dire  de  Laconie 
dans  le  Péloponèse,  voir  Élisa,  t.  Il,  col.  1686-1688;  il 
ajoute  qu'ils  en  échangeaient  contre  les  marchandise? 
des  Syriens.  —  A  l'époque  de  saint  Paul,  une  fervente  et 
généreuse  chrétienne, Lydie, était  marchande  de  pourpre, 
TCopîpvfonio'/i;,  purpuraria,  à  Thyatire.  Act..  xvi.  14. 

4°  D'après  saint  Marc,  XV,  17,  Notre-Seigneur  fut 
revêtu  de  pourpre  par  les  soldats  du  prétoire.  Saint 
Matthieu,  xxvil,  28,  dit  que  ce  fut  d'un  manteau  cra- 
moisi. />>:;.•;  xoxx:'vïj.  Il  y  avait  donc  équivalence  entre 
les  1 1 . ■  1 1 \  couleurs,  et,  quand  on  parlait  de  pourpre  sans 
autre  explication,  il  s'agissait  de  pourpre  rouge. 

5»  Les  cheveux  de  l'Épouse  sont  comparés  à  la  pourpre. 
Cant.,  vu,  .">.  La  comparaison  porte  moins  sur  la  couleur 
que  sur  le  brillant,  la  splendeur  et  les  tons  chatoyants 
de  la  pourpre.  Les  poètes  appellent  «  cheveux  de 
pourpre  »  ceux  qui  sont  d'un  brillant  brun-noirâtre. 
Cf.  Virgile,  Georg..  i,  405;  Tibulle,  I,  iv,  ti:!. 

6»  Enfin  saint  Jean  représente  Babylone  comme  une 
reine  velue  de  pourpre  et  faisant  le  commerce  de  la 
pourpre.  Apoc,  xvn,  4;  xvm,  12,  lii. 

II.  Les  être. 

POURRITURE  (hébreu  :  «107,  râqàb,  sah&nâh, 
ià/iat,  tam'dh;  Septante  :  BiaçOopot,  ;''''?■'•  trewrpi'a; 
Vulgate  :  pulredo,  corruptio),  résultat  de  la  décompo- 
sition des  corps  organiques.  —  I»  Job.  XVII,  II,  en 
proie  à  sa  terrible  maladie,  en  vient  à  dire  à  la  pour- 
riture :  «  Tu  es  mon  père  ».  Isaïe,  m,  21,  annonce  aux 
filles  de  Sion  que  la  pourriture  remplacera  pour  elles 
l'odeur  des  parfums.  Joël,  II,  20,  prédit  que  l'infection 
de  la  pourriture  s'élèvera  dans  le  camp  des  Assyriens. 
Dieu  l'a  fait  déjà  monter  dans  le  camp  des  Israélites. 
Am.,  iv,  lo.  —  2°  La  pourriture  est  surtout  la  caracté- 
ristique du  tombeau.  Dieu  ne  permettra  pas  que  son 
bien-aimé,  son  Messie,  voie  la  corruption.  Ps.  xvi  (xv), 
10;  Act.,  n.  27;  xin.  35.  Par  la  mort,  le  corps  de 
l'homme  tombe  en  pourriture,  mais  pour  ressusciter 
ensuite  :  0  Semé  dans  la  corruption,  le  corps  ressus- 
cite incorruptible;  semé  dans  l'ignominie,  il  ressuscite 
glorieux.  »  I  Cor.,  xv,  42,  43.  Il  est  connue  une  se- 
mence qui  d'abord  pourrit  en  terre  avant  de  revivre. 
—  3°  La  pourriture  ou  carie  des  os  représente,  dans  les 
comparaisons,  la  femme  acariâtre,  Prov..  XII,  4;  l'en- 


vie, Prov..  xiv,  30;  la  crainte  des  ennemis.  Ilab.,  m, 
16.  Le  pécheur  repentant,  en  proie  au  remords,  dit 
que  l'infection  et  la  purulence  ont  envahi  ses  meur- 
trissures, marquant  ainsi  combien  est  malheureux  et 
répugnant  l'état  de  son  àme,  Ps.  xxxvm  (xxxvn),  6. 
La  racine  des  méchants  est  semblable  à  la  pourriture. 
Is.,  v,  24,  elle  ne  peut  rien  produire  de  bon.  Leur  nom 
aussi  tombe  en  pourriture.  Prov.,  x,  7.  Les  riches 
impies  succomberont  un  jour  à  la  pourriture  d'une 
cruelle  destruction,  Mich.,  11.  10;  leurs  richesses  sont 
pourries.  Jacob.,  v,  2.  Celui  qui  sème  dans  la  chair  en 
moissonnera  la  corruption,  Gai.,  vi,  8,  c'est-à-dire  que 
celui  qui  vit  au  gré  des  convoitises  mauvaises  de  sa 
nature  n'en  recueillera  que  péché  et  misère.  Dieu  est 
comme  la  pourriture  pour  la  maison  de  Juda.  Ose.,  v, 
12.  il  l'attaque  et  la  consume  lentement  dans  sa  justice, 
afin  de  lui  ménager  le  temps  de  la  pénitence. 

H.  Lesétre. 

POUSSIÈRE  (hébreu  :  àfâr,  et  une  ou  deux  fois  seu- 
lement :  'âbâq,  'âbâqâh,  daliktï ,  daq,  sahaq.  nei.o't; 
Septante  :  Su.u.or,  y-?,,  xovcopTo;,  j(oûç;  Vulgate  .pulvit), 
éléments  solides  réduits  en  particules  très  ténues. 

I.  Au  sens  PROPRE.  —  1"  Dans  son  corps,  l'homme  a 
été  tiré  de  la  poussière  et  il  retournera  en  poussière. 
Gen.,111,  19;  Job,  x,  9:  Ps.  xc  n.xxxixi,  3;  cm  (cil),  14; 
Eccle.,  XII,  7.  Il  en  est  de  même  des  animaux,  l's.  eiv 
11:111 1.  29.  —  2"  La  poussière  du  sol  s'élève  sous  les  pieds 
des  chevaux,  E/.ech..  XXVI,  10;  elle  couvre  les  statues 
des  faux  dieux.  Bar.,  vi,  12,  16.  Dans  la  poussière,  un 
arbre  meurt.  Job,  xiv,  8;  mais  la  pluie  fait  de  la  pous- 
sière une  masse  consistante.  Job.  xxxvm,  38.  La  pous- 
sière joue  un  grand  rôle  dans  les  plaies  d'Egypte.  D'elle 
sortent  les  moustiques  de  la  troisième  plaie,  Exod., 
vin.  Iti,  17,  et  les  pustules  de  la  sixième.  Exod..  ix,  9. 
Mise  en  mouvement  par  le  khamsin  de  la  neuvième 
plaie,  elle  empêche  la  lumière  d'éclairer  le  pays  pen- 
dant trois  jours.  Exod.,  \.  21-23.  Voir  Ouragan,  t.  iv, 
col.  1931.  —  3"  La  loi  sur  l'épreuve  de  la  femme  accusée 
d'infidélité  l'obligeait  à  boire  une  eau  dans  laquelle  le 
prêtre  avait  mis  de  la  poussière  prise  sur  le  sol  du  sanc- 
tuaire.Num.,  v,  17.  24.  C'étail  une  manière  de  marquer 
que  le  sanctuaire  lui-même  détail  prendre  parti  contre 
la  femme,  si  elle  élail  vraiment  coupable.  Les  Assyriens 
avaient  un  rite  analogue.  Ils  versaient  dans  de  l'eau  du 
lleuve  de  la  poussière  du  sanctuaire  du  dieu  et  d'autres 
poussières  ramassées  à  différentes  portes,  et  ils  se  ser- 
vaient de  ce  mélange,  non  pour  le  faire  boire,  mais 
pour  arroser  la  porte  de  la  maison  que  l'on  voulait 
sans  doute  préserver.  Cf.  l'r.  Martin,  Textes  religieux el 
babyloniens,  \"  série,  Paris,  1903,  p.  243-245.  —  V  l.a 
poussière  résulte  de  l'écrasement  ou  de  la  décomposition 
de  certains  solides.  Ainsi  le  veau  d'or  est  réduit  en  pous- 
sière. Exod..  xxxii. 2ll;  lient..  i\.  21.  Voir  On.  col.  1810, 
Quand  les  murs  sont  atteints  de  lèpre,  on  les  racle  et 
l'on  jette  la  poussh  ie  au  loin.  Lev.,  XIV,  41.  Voir  l.i  11:1  , 
t.  iv,  col.  186.  Josias  lit  enlever  du  Temple  tous  les 
objets  idolâtriques  et  réduire  eu  poussière  les  idoles; 
puis  il  ordonna  de  porter  cette  poussière  à  Béthel,  cen- 
tre idolâtrique,  et  sur  les  tombes  du  peuple.  IV  l;  _  . 
xxni,  1,  6,  15.  —  5»  En  signe  de  deuil,  on  se  jetait  de  la 
poussière  sur  la  tête.  Jos.,  vu.  (i;  I  Reg.,  IV,  12;  Job,  11, 
12;  Ezech.,  xxvn,30; Am.,  u,7;  Apoc,  wni,  19.  Le  pro- 
phète Hichée,  I,  10,  annonçant  le  châtiment  de  Juda. 
joue  sur  le  nom  de  la  ville  de  Beth-Aphra,  «  maison 
de  poussière  »,  et  dit  d'elle  :  «  A  Beth-Aphra,  je  me 
roule  dans  la  poussière,  »  c'est-à-dire  je  suis  au  comble 
de  la  désolation.  Voir  Aphra,  t.  1.  col.  735.  Cf.  Jer.,  xxv, 
lii.  tu  Egypte,  une  des  marques  les  plus  fréquentes  de 
douleur  consistait  à  se  barbouiller  le  visage  de  pous- 
sière 1 1  de  boue  (lig.  162).  Cf.  Wilkinson,  Manners  m  ' 
Gustoms,  -■  édit.,  t.  III,  pi.  I.xvn:  Maspero,  Les  contes 
populaires  de  l'Egypte  ancienne,  3'  édit.,  p.  lu.  Les 
Hébreux  employaient  dans  l'expression  de  leur  deuil  la 


:>89 


POUSSIERE 


590 


cendre  et  la  poussière.  Voir  Cendre,  t.  n.  col.  407.  La 
poussière  implique  l'idée  de  fragilité  et  surtout  celle  de 
mort.  Elle  convenait  donc  bien  à  l'expression  d'un  cha- 
grin qui  entamait  la  vie.  Aux  funérailles,  chez  les  Ara- 
bes, s  les  femmes  crient  de  toutes  leurs  forces,  s'égra- 
tignent  les  bras,  les  mains  et  le  visage,  arrachant  leurs 
cheveux,  et  se  prosternant  de  temps  en  temps,  comme 
si  elles  étaient  pâmées  de  douleur;  elles  prennent  des 
poignées  de  terre  ou  de  sable,  et  le  jettent  sur  leur 
tète  et  sur  leur  visage.  »  De  la  Roque,  Voyage  dans  la 
Palestine,  Amsterdam,  1718,  p.  260.  —  5°  Pour  marquer 
la  colère  et  l'indignation,  on  lançait  de  la  poussière  en 
l'air.  C'est  ce  que  fait  Séméï,  en  accompagnant  David  de 
ses  imprécations.  II  Reg.,  xvi,  13.  A  Jérusalem,  les  Juifs, 
en  fureur  contre  Paul,  lançaient  de  la  poussière  en 
l'air.  Act.,  xxn,  '23.  Cette  expression  de  l'indignation 
parait  être  instinctive  en  Orient.  Un  fellah  ayant  été 
battu  sur  l'ordre  d'un  elfendi,  jusqu'à  ce  qu'il  eût  perdu 
connaissance,  «  il  y  eut  une  grande  lamentation.  Le 
malheureux   fut  apporté   lout  près  de  ma  maison,  au 


iv.  10;  Job,  xvr.  18;  Is..  xxvi,  21.  —  3°  Secouer  la  pous- 
sière de  ses  pieds  sur  quelqu'un  ou  sur  un  pays,  c'est  mar- 
quer qu'on  regarde  comme  maudite  la  poussière  de  ce 
pays,  qu'on  ne  veut  rien  emporter  d'un  pareil  endroit,  et 
qu'on  cesse  tout  rapport  avec  des  hommes  qui  n'ont  su 
ni  comprendre  ni  remplir  leur  devoir.  Cette  expression 
ne  se  lit  que  dans  le  Nouveau  Testament.  Matth..  x,  14; 
Marc.  vi.  11  ;  Luc.  ix,  5;  x,  11  ;  Act.,  xm,  51.  »  Aujour- 
d'hui, il  n'est  pas  rare  de  voir  un  Égyptien,  un  Syrien, 
à  la  suite  d'une  discussion,  ou  au  sortir  d'une  maison 
où  il  a  été  mal  reçu,  quitter  ses  babouches  et  les  battre 
deux  ou  trois  fois,  semelle  contre  semelle,  en  face  de 
son  adversaire.  Cela  veut  dire  :  Je  ne  veux  plus  avoir 
affaire  avec  toi.  •>  Jullien,  L'Egypte,  Lille,  1891,  p.  L257. 
—  4°  A  raison  de  la  sentence  originelle,  Gen.,  m.  19,  la 
poussière  éveille  naturellement  l'idée  du  tombeau.  Aussi 
est-elle  prise  parfois  pour  la  mort  elle-même.  Job,  vu, 
11;  xx.  11;  xxi.  26;  xl,  8  (13);  Ps.  vu,  6;  Is.,  xxvi, 
19;  Dan.,  xn,  2.  La  poussière  du  tombeau,  c'est-à-dire 
la    mort  ne  chante  pas  la  louange   de   Dieu.  Ps.   xxx 


162.  —  Egyptiennes  répandant  de  la  poussière  sur  leur  tête  en  signe  de  deuil. 
D'après  Wilkinson,  Manners  and  customs  of  the  ancient  Egyptians,  t  édit.,  t.  i,  p.   167. 


milieu  d'une  foule  de  femmes  qui  hurlaient  comme  des 
possédées;  la  sienne  surtout  criait  et  se  frappait  la  tèle 
et  jetait  de  la  poussière  en  l'air,  more  majorum,  comme 
vous  pouvez  le  voir  dans  les  tombes.  »  Lady  Gordon, 
Lettres  d'Egypte,  trad.  Ross,  Paris,  1869,  p.  273. 

II.  Ai"  sens  figuré.  —  1°  La  poussière  du  sol  est 
l'image  de  ce  qui  est  petit,  faible,  méprisable.  Abraham 
parle  au  Seigneur,  bien  qu'étant  poussière  et  cendre. 
Gen.,  xvni,  27.  Dieu  tire  le  pauvre  de  la  poussière,  c'est- 
à-dire  de  l'abaissement.  I  Reg.,  n,  8;  III  Reg.,  xvi.  2. 
Les  nations  ne  sont  devant  lui  que  poussière.  Is.,  XL,  15. 
Il  réduit  en  poussière  ou  renverse  dans  la  poussière, 
c'est-à-dire  humilie, abaisse  et  ruine,  Moab,  Is.,xxv,  12; 
wvi,  5;  Bahylone,  ls.,  xlvii,  1;  Tyr,  Ezech.,  xxvi,  i.  12; 
les  ennemis.  Is.,  xxix,  5.  Il  l'ait  voler  en  poussière  l'épée 
des  puissants.  Is.,  xli.  2.  Dans  l'épreuve,  on  est  affaissé 
jusqu'à  la  poussière.  Ps.  xliv  (xlihi,  25.  Jérusalem  régé- 
nérée secoue  sa  poussière.  Is.,  lu,  2.  Après  la  captivité, 
les  Juifs  sauront  tirer  de  leur  poussière  les  pierres 
de  leurs  murs.  II  Esd.,  IV,  2.  —  2»  Mettre  sa  bouche 
dans  la  poussière,  c'est  se  prosterner  très  humblement. 
Lam..  m,  29.  Voir  t.  i,  col.  541.  Lécher  la  poussière  des 
pieds  de  quelqu'un,  c'est  lui  marquer  sa  complète  sou- 
mission. Ps.  i.xxi  ii.xxii),  9;  Is.,  xlix,23.  Ezéchiel,  xxiv,  7, 
accusant  Jérusalem  de  ses  crimes,  dit  qu'elle  a  versé  le 
sang  sur  la  roche  nue,  et  non  sur  la  terre  pour  le  re- 
couvrir de  poussière.  Le  prophète  veut  signifier  que  les 
crimes  de  Jérusalem  ont  été  commis  impudemment,  au 
grand  jour,  et  que  les  traces  en  sont  visibles.  Cf.  Gen., 


(xxixi,  10.  Le  supplicié  attaché  à  la  croix  est  réduit  à  la 
poussière  de  mort,  c'est-à-dire  dévoré,  après  la  perte 
de  son  sang,  par  une  fièvre  brûlante  qui  le  dessèche 
comme  une  poussière  et  le  conduit  à  la  mort.  Ps.  xxn 
xxi  .  16.  —  5°  Les  nuages  sont  comme  la  poussière  des 
pieds  de  Dieu.  Nah.,  i,  3.  A  Israël  infidèle,  la  poussière, 
c'est-à-dire  la  sécheresse,  sera  envoyée  au  lieu  de  pluie. 
Deut.,  xxviii,  24. 

III.  Comparaisons  tirées  de  la  poussière.  —  1°  La 
poussière  se  compose  d'une  multitude  innombrable  de 
particules.  La  race  d'Abraham  deviendra  aussi  nom- 
breuse que  la  poussière.  Gen...  xm,  16;  xxvm,14;  Nuin., 
.xxui,  10;  II  Par.,  i,  9.  A  la  voix  de  Dieu,  les  cailles 
tombèrent  comme  la  poussière  dans  le  camp  des  Israé- 
lites. Ps.  lxxviii  (lxxvh),  27.  Dans  un  sens  analogue, 
Benadad,  pour  donner  l'idée  du  grand  nombre  de  ses 
soldats,  prétend  que  la  poussière  de  Samarie  ne  suf- 
firait pas  à  remplir  le  creux  de  toutes  leurs  mains. 
III  Reg.,  xx,  10.  —  2"  La  poussière  est  le  résultat  d'un 
broiement  d'éléments  solides.  Les  ennemis  sont  broyés 
comme  la  poussière.  II  Reg.,  xxn,  43.  —  3»  La  pous- 
sière légère  est  emportée  par  le  vent.  Les  nations  enne- 
mies, Is.,  xvn,  13,  les  armées  vaincues,  IV  Reg.,  xm,  17, 
la  fleur  des  méchants,  c'est-à-dire  leur  prospérité,  les 
méchants  eux-rnèmes  sont  emportés  par  le  vent  comme 
la  poussière.  Ps.  xvm  (xvn),  43;  xxxv  (xxxiv),  5;  Is., 
xxix.  5.  —  4°  Le  serpent  rampe  à  terre  et  semble  lécher 
et  manger  la  poussière.  Gen.,  m,  14;  Is.,  lxv.  25.  En 
face  d'Israël  régénéré,  les  nations  lécheront  la  poussière 


591 


POUSSIÈRE   —   l'OUZZOLES 


592 


comme  le  serpent,  c'est-à-dire  se  feront  humbles  et 
soumises.  Micb.,  vu.  17.  —  Sur  la  poussière  aromati- 
que, I  xod.,  xxx,  30;  Cant.,  m,  G.  voir  Parfum,  t.  îv, 
col.  2163.  11.  Lf.siïtre. 

POUSSINES  Pierre,  érudit  français  né  le  28  oc- 
tobre 1609,  à  Laurar  Autlei.  novice  de  la  Compagnie  de 
Jésus  le  "juillet  1624,  fut,  19  ans  durant,  chargé  du 
cours  d'Écriture  Sainte  et  d'hébreu  au  Collège  romain. 
Revenu  a  Toulouse  en  1682,  il  j  mourut  4  ans  plus 
tard,  le  2  février  '1686.  Sa  vaste  et  sure  érudition  ne  se 
porta  pas  seulement  sur  les  Pères  grecs,  elle  s'exerça 
sur  l'Écriture  Sainte  et  nous  a  valu  notamment  deux 
ouvrages  fort  importants.  C'est  d'abord  Catena  Grseco- 
rum  Patrum  in  "Evangelium  secundum  Marcum, 
in-f»,  Rome,  1673.  Cette  œuvre  est  suivie  île  commen- 
taires sur  des  passages  spéciaux  des  quatre  Lvan- 
giles;  de  collations  du  texte  grec  de  tous  les  livres  du 
Nouveau  Testament  avec  22  manuscrits;  d'observations 


montants,  colonnes,  poteaux,  etc.  —  Barucb,  vi,  13, 
54,  dit  que  les  idoles  sont  dans  leurs  temples  comme 
des  poutres  et  qu'elles  y  brûleront  comme  ces  der- 
nières. —  Notre-Seigneur  compare  à  une  poutre  dans 
l'oeil  les  défauts  de  celui  qui,  oublieux  ou  inconscient 
de  ses  torts  graves,  ne  songe  qu'à  remarquer  les  tra- 
vers beaucoup  moindres  du  prochain.  Matth.,  vu,  3-5; 
Luc,  vi,  41.  42.  La  poutre  dans  l'œil  est  une  hyper- 
bole orientale  de  même  ordre  que  le  chameau  dans  le 
trou  d'une  aiguille.  Matth.,  xix,  24,  le  chameau  avalé. 
Matth..  xxiii.  2i.  etc.  La  comparaison  se  retrouve  dans 
la  Miscbna.  Arachin,  16  6,  à  propos  des  réprimandes 
qu'on  refuse  d'accepter  ;  g  A  qui  dirait  à  son  prochain  : 
Ole  la  paille  qui  est  dans  ton  œil,  on  ne  manquerait 
pas  de  répondre  ;  Ote  la  poutre  qui  est  d;ins  le  tien.  » 

H.   LESÊTRE, 
POUZZOLES  (grec  :  norfoXoi;  Vulgate  :  Puteoli), 
aujourd'hui  Pozzuoli,  port  autrefois  célèbre,  situé  vers 
l'extrémité  septentrionale  du  golfe    de  Xaples,  ou   du 


1G3.  —  Purt  de  Poum-les,  ruines  de  1  ancien  môle. 


sur  divers  endroits  du  Nouveau  Testament.  Son  second 
ouvrage,  plus  remarquable,  est  Apocalypsis  etiarra- 
tiones,  in-4»,  Toulouse,  1685.  On  doit  signaler  encore  deui 
Dissertations  sur  l'Assuérus  d'Esther,  le  Darius  de  Daniel 
et  le  Zacharie  de  Barachie,  deux  autres  Dissertations 
sur  les  prophéties  concernant  Notre-Seigneur,  enfin 
une  étude  De  adventu  Christi  nonnisi  posl  prsevisum 
Adami  lapsum  decreto.  P.  Bliard. 

POUTRE  (hébreu  :  krufôp,  mehabbrôf,  sêl'ôf, 
lequfïm,  qôrâh;  Septante  :  Soxd;;  Vulgate  :  trabes), 
pièce  de  bois,  longue  et  forte,  employée  dans  les  cons- 
tructions. —  Il  est  question  de  poutres  à  propos  de  la 
construction  des  parvis  du  Temple,  III  Reg..  vi,  36; 
vu,  12,  du  Temple  lui-même,  sous  Salomon,  II  Par., 
m,  7,  et  sous  Josias,  Il  Par.,  xxxiv.  11.  des  palais  et 
autres  édifices  de  Salomon,  III  Reg,,  vi,  15,  16;  vu.  ::, 
4,  et  de  maisons  riches,  Cant..  i,  lli,  on  communes. 
IV  Reg.,  VI,  2,  5.  Les  termes  hébreux,  presque  tous  au 
pluriel,  indiquent  probablement  des  variétés  de  pou- 
tres, différentes  quant  à  la  forme  ou  quant  à  l'usage, 
poutres  proprement  dites,  poutrelles,  fermes,  solives, 


Sinus  Puteolanus,  comme  on  disait  alors,  à  l'ouest  et 
à  lu  Kilomètres  de  l'ancienne  g  Néapolis  »,  entre  le  cap 
du  Pausilippe  el  le  ap  Misène,  L'origine  de  son  nom 
est  douteuse.  On  l'a  rattaché  tantôt  aux  exhalaisons 
putrides  des  sources  sulfureuses  de  la  région,  ptl- 
tere;  tantôt  directement  à  ces  puits  sulfureux,  putei, 
Saint  Paul  y  arriva  de  Malte  en  peu  de  jours,  poussé 
par  un  vent  favorable.  Act.,  xxvm.  13.  Puteoli  était  le 
grand  port  commercial  de  l'Italie.  Pline.  H.  .Y.,  xxwi, 
14,  rapporte  que  les  marchands  de  soixante-dix  nations 
diverses  s'y  rencontraient,  occupés  à  y  entreposer  pour 
Rome  les  produits  de  tout  l'univers,  .spécialement  le 
blé  d'Egypte.  Voir  aussi  Suétone,  August.,  98,  et  Titus, 
'>;  Silius  Italicus.  Silv..  m,  2.  Cicéron,  comme  saint 
Paul,  y  aborda  en  venant  de  Sicile.  Cf.  Pro  Plane. ,26. 
L'historien  juif  .losèphe  y  vint  également  à  la  suite 
d'un  naufrage,  Vita,  3.  On  nommait  Pouzzoles  g  la 
petite  Délos  »,  parce  que  cette  il.-  de  la  mer  Egée  avait 
été  elle-même  te  grand  marché  de  l'univers.  Il  existe 
encore  des  restes  de  l'ancien  môle  sur  lequel  saint  Paul 
dut  débarquer  ilig.  163).  Fondée  par  les  Ioniens,  Puii/- 
zoles  portait  primitivement,  lorsque  toute  la   rive  cam- 


593 


POUZZOLES   —    PREDESTINATION 


594 


panienne  était  beaucoup  plus  grecque  que  latine,  le 
nom  de  Dikéai  k/iia,  que  lui  donne  encore  Josèphe, 
Ant.jud.,  XVII,  xii,  1.  C'est  pendant  la  seconde  guerre 
punique  qu'elle  fut  occupée  par  les  Romains. 

En  sa  qualité  de  port  marchand  fréquenté  du  monde 
entier.  Pouzzoles  ne  pouvait  manquer  de  posséder  une 
colonie  de  juifs,  cf.  Josèphe.  I.  c,  et  aussi  d'entendre 
de  très  bonne  heure  la  prédication  chrétienne.  Voir 
Ramsay.  i't.  Paul  the  Traveller,  5e  édit..  in-8°,  Londres. 
1900,  p.  346.  C'est  probablement  parmi  ces  habitants 
israélites  que  germèrent  les  premières  semences  de  la 
foi  en  Jésus-Christ.  Paul,  en  y  débarquant,  y  trouva 
des  «  frères  »,  Act.,  xxvm,  14,  qui  le  prièrent  de  de- 
meurer quelques  jours  auprès  d'eux.  Le  centurion  Ju- 
lius,  sous  la  garde  duquel  était  l'Apôtre,  lui  accorda 
cette  faveur,  comme  précédemment  à  Césarée,  Act., 
xxvii,  3,  de  sorte  que  saint  Paul  put  passer  une  semaine 
entière  à  Pouzzoles.  Une  variante  du  texte  grec,  dans 
Act.,  xxvm,  13,  mérite  d'être  signalée  :  au  lieu  de 
~xpïy.).r,6iî|j.£v  Tiap'a-J-oT;  £Tr:|j.£Ïvai,  qui  est  la  leçon  la 
plus  autorisée  et  celle  qu'a  suivie  la  Vulgate,  le  cod.D 
et  d'autres  manuscrits  portent  :  Ttotpsx)..  iic'amoT(  ip.ii.zi- 
vavTs;,  «  Nous  fûmes  consolés,  étant  demeurés  auprès 
d'eux  ».  L.  Fillion. 

PRADO  (Joronime  de),  exégète  espagnol,  né  à 
Baeza  en  1547.  mort  à  Rome  le  13  janvier  1595.  Il 
entra  en  1572  au  noviciat  de  la  Compagnie  de  Jésus  et 
devint  ensuite  professeur  à  Cordoue  où  il  enseigna 
d'abord  les  humanités,  puis,  pendant  16  ans,  l'Écriture 
Sainte.  Il  est  surtout  connu  à  cause  de  son  grand  ou- 
vrage sur  Ézéchiel.  Étant  allé  à  Rome  pour  y  chercher 
des  artistes  capables  de  faire  les  illustrations  qu'il 
voulait  joindre  à  son  Commentaire,  il  y  mourut,  lais- 
sant inachevée  son  œuvre  qui  fut  terminée  par  son  con- 
frère Villalpaud  :  Hieronymi  Pradi  etJoannis  Baptistœ 
Villalpandi  e  Societale  Jesu  in  Ezecldelem  Explora- 
tiones  et  Apparatus  Urbis  ac  Templi  Hierosolymi- 
tani  Commentariis  et  Imaginibus  illustratus.  Opus 
tribus  toinis  dhtinctum,  3  in-f«,  Rome,  1596-1604.  Le 
tome  i.part.  I,  renferme  le  commentaire  des  26  premiers 
chapitres,  le  tome  n  est  consacré  au  Temple  et  le  tome  m 
à  la  ville  de  Jérusalem.  La  première  partie  seule  du  tome  i 
est  l'œuvre  de  Prado  ;  la  seconde  partie  du  tome  i 
lÉzech.,  xxvii-xxviii)  et  les  tomes  n  et  m  sont  l'œuvre 
de  Villalpand. 

PRÉCURSEUR  (grec  :  itpoïps/iov,  itptiSpou.o;;  Vul- 
gate :  prsecursor),  celui  qui  court  devant  un  person- 
nage pour  préparer  son  passage.  —  Les  précurseurs 
étaient  employés  chez  les  Égyptiens.  Ils  sont  représen- 
tés courant  à  pied  devant  le  char  du  pharaon.  Voir  t.  n, 
fig.  193,  col.  566.  L'un  d'eux  précédait  le  char  de  Jo- 
seph en  criant  'abrek!  Gen.,  xli,  43.  Voir  Abrek,  t.  i, 
col.  90;  Main,  t.  iv.  col.  584.  Samuel  prévit  que  les 
rois  israélites  voudraient  aussi  avoir  des  hommes  pour 
courir  «  devant  la  face  de  leur  char  »,  à  la  mode  égyp- 
tienne. I  Reg.,  vm,  11.  L'usage  du  précurseur  existe 
encore  en  Egypte.  «  Il  court  devant  notre  landau,  écar- 
tant de  ses  cris  et  menaçant  de  sa  baguette  les  pares- 
seux ou  les  affairés  qui  sont  sur  la  route.  Les  sais  des 
grands  seigneurs,  mieux  costumés  que  lui,  portent  des 
vestes  brodées  d'argent  et  d'or.  Leurs  manches  larges 
et  leur  jupe  volumineuse  flottent  au  vent,  tandis  qu'ils 
crient,  qu'ils  volent,  qu'ils  frappent.  »  Le  Camus,A'o(»-e 
voyage  aux  pays  bibliques,  Paris,  1894,  t.  i,  p.  97. 
Cf.  Landrieux,  Aux  pays  du  Christ,  Paris,  1897,  p.  65. 
—  Le  Seigneur  promit  à  Moïse  d'envoyer  devant  lui 
un  ange  pour  précéder  le  peuple  dans  le  pays  de  Cha- 
naan  et  ainsi  lui  frayer  la  voie.  Exod.,  xxxm,  2.  Plus 
tard,  Dieu  fit  annoncer  par  Malachie,  m,  1,  qu'il  enver- 
rait son  messager  pour  préparer  le  chemin  devant  lui. 
Saint  Jean-Baptiste    remplit    cet  office   à    l'égard    de 


Notre-Seigneur,  Marc,  i,  2,  4.  ce  qui  lui  a  fait  donner 
le  nom  de  précurseur.  —  Jésus-Christ  est  entré  dans 
le  sanctuaire  du  ciel  en  qualité  de  précurseur.  Heb., 
vi,  20.  Il  nous  y  précède  et,  par  sa  rédemption,  nous 
mérite  la  grâce  de  le  suivre.  H.  Lesêtre. 

PRÉDESTINATION,  acte  de  volonté  divine  déter- 
minant à  l'avance  la  lin  surnaturelle  que  doit  atteindre 
une  âme. 

1°  Il  y  a  une.  prédestination  à  la  grâce  pour  la  vie 
présente.  Des  témoins  choisis  d'avance  ont  eu  la  faveur 
de  voir  Jésus  ressuscité,  et  sont  ainsi  devenus  capables 
de  transmettre  à  d'autres  la  foi  en  cette  résurrection. 
Act.,  x,  41.  Saint  Paul  a  été  prédestiné  â  connaître  la 
volonté  de  Dieu,  à  voir  le  Juste  et  â  entendre  les  paroles 
de  sa  bouchej.  Act.,  xxn,  14.  Les  chrétiens  sont  prédes- 
tinés à  être  les  fils  adoptifs  de  Dieu  par  Jésus-Christ, 
selon  sa  libre  volonté,  en  faisant  ainsi  éclater  en  eux  la 
gloire  de  sa  grâce,  Eph.,  i,  5,  prédestination  qui  est 
toute  gratuite  et  ne  suppose  aucun  mérite  préalable  de 
la  part  de  l'homme,  puisqu'elle  ne  dépend  que  de  «  la 
résolution  de  celui  qui  opère  toutes  choses  d'après  le 
conseil  de  sa  volonté.  »  Eph.,  i,  11.  Les  chrétiens  par- 
viennent à  cette  adoption  divine  par  la  grâce  de  Jésus- 
Christ,  qui  veut  que  nous  accomplissions  n  les  bonnes 
œuvres  que  Dieu  a  préparées  d'avance  afin  que  nous 
les  pratiquions.  »  Eph.,  il,  10.  Tout,  dans  la  vie  chré- 
tienne, est  donc  prévu  et  voulu  à  l'avance  par  Dieu, 
dont  la  volonté  toute-puissante  respecte  cependant  la 
liberté  de  l'homme.  Rom.,  ix,  18. 

2°  Il  y  a  surtout  une  prédestination  au  salut  et  à  la 
gloire  éternelle.  Saint  Luc  dit  qu'à  la  prédication  de 
Paul  et  de  Barnabe,  à  Antioche  de  Pisidie,  <  tous  ceux- 
là  crurent  qui  étaient  prédestinés  à  la  vie  éternelle.  » 
Act.,  xm,  48.  Saint  Paul  formule  en  ces  termes  la  doc- 
trine complète  de  la  prédestination  :  «  Toutes  choses 
concourent  au  bien  de  ceux  qui  aiment  Dieu,  de  ceux 
qui  sont  appelés  selon  son  dessein.  Car  ceux   qu'il   a 
connus  d'avance,  il  les  a  aussi  prédestinés  à  être  con- 
formes à  l'image  de  son  Fils,  afin  que  son  Fils  soit  le 
premier-né  d'un  grand  nombre  de  frères.  Et  ceux  qu'il 
a  prédestinés,   il    les  a   aussi  appelés;   et  ceux  qu'il  a 
appelés,  il  les  a  justifiés;  et  ceux  qu'il  a  justifiés,  il  les 
a    glorifiés.   »    Rom.,  vm,    28-30.    Voilà    donc    quatre 
termes  qui  marquent  l'action   de  la  volonté  divine  sur 
une  âme  :  prédestination  ou  détermination  antécédente 
de  Dieu;  vocation  ou  appel  adressé  à  l'âme;  justifica- 
tion ou  effet  de   la  grâce   sur  l'âme;    glorification   ou 
entrée  de  l'âme  dans  la  vie  éternelle.  L'Apôtre  compare 
ensuite  les  âmes  à  l'argile  dont  le  potier  est  le  maître 
absolu,  et  dont  il  peut  tirer,  à  son  choix,  un  vase  pré- 
cieux  ou  un  vase  commun.  Ainsi  fait  Dieu,  qui  sup- 
porte avec  patience  «  des  vases  de  colère,  formés  pour 
la  perdition   »,   et  qui  exerce  sa  libre  munificence  «  à 
l'égard  des  vases  de  miséricorde  qu'il  a  d'avance  pré- 
parés pour  la  gloire.  »  Rom.,  ix,  21-23.  L'Évangile  que 
prêche  l'Apôtre  est  une  sagesse  «  que  Dieu,  avant  les 
siècles,  avait  destinée  pour  notre  glorification.  »I  Cor., 
n,  7.  Cette  sagesse  a  été  révélée  «  selon  le  dessein  éter- 
nel qu'il  a  réalisé  par  Jésus-Christ.  «  Eph.,  ni,  11.  Voir 
F.  Prat,  La  théologie  de  saint  Paid,  1. 1,  1908,  p.  342-352. 
3»  La  prédestination  ne  peut  en  aucune  manière  être 
assimilée  au  destin,  àvocyx-o,    fatum,  des  anciens,  qui 
déterminait  aveuglément  à  l'avance  le  sort  de  chacun. 
Elle   ne    préjudicie   en    rien    à    la   libre    activité    de 
l'homme.    Au  dernier  jugement,   le   sort   de   chacun 
est  décidé,  non  d'après  une  détermination  antécédente 
et  nécessitante  de  Dieu,  mais  selon  les  œuvres  bonnes 
ou  mauvaises  que  l'homme  a  accomplies.  Matth.,  xxv, 
34,  35.41,  42.  D'après  les  paraboles  du  Sauveur,  l'homme 
est   lui-même    l'artisan    de    son   bonheur    ou  de  son 
malheur  éternels.  Matth.,   xx,   10;    xxn,  12,    13;  xxv, 
3-12,  21,  23,  30,  etc.   «  Si  tu  veux  entrer  dans  la  vie, 


595 


PRÉDESTINATION   —   PREDICATION 


596 


garde  les  commandements  »,  dit  formellement  le  Sau- 
veur. Mat  th.,  xix,  17.  Cf.  Luc.,  xm.  23.  D'après  saint 
Paul,  il  faut  courir  et  se  donner  de  la  peine  pour 
atteindre  le  but  final,  I  Cor.,  ix,24;  la  récompense  est 
une  couronne  due  en  justice  à  celui  qui  a  bien  tra- 
vaillé pour  Dieu  sur  la  terre,  II  Tim.,  iv,  7.  et  cette  ré- 
compense est  en  rapport  avec  le  labeur  de  chacun. 
Rom.,  il,  5;  I  Cor.,  m,  8.  Saint  l'ierre  déclare  que  les 
bonnes  mœurs  sont  nécessaires  pour  fixer  chacun  dans 
sa  vocation  et  son  élection.  II  Pet.,  i,  10.  La  récom- 
pense promise  demeure  toujours  incertaine  tant  qu'on 
ne  la  tient  pas,  car  on  peut  la  perdre  par  sa  négligence 
ou  son  infidélité.  Rom.,  xi,  22;  I  Cor.,x,  12;  Phil.,  Il, 
12;  Apoc,  m,  11,  etc.  Voir  JUSTIFICATION,  t.  III, 
col.  1878;  Œuvres,  t.  iv,  col.  1756.  De  tous  ces  textes 
résulte  cette  conclusion,  que  par  la  prédestination  Dieu 
prévoit  le  sort  éternel  de  chaque  âme,  mais  en  tenant 
compte  de  la  manière  dont  cette  âme  utilisera  libre- 
ment ses  grâces.  Autrement  l'obéissance  aux  comman- 
dements et  les  efforts  pour  la  pratique  de  la  vertu  ne 
seraient  pas  de  précepte  pour  le  salut.  Si,  avant  de 
venir  au  monde,  on  était  prédestiné  au  bonheur  ou  au 
malheur  par  une  volonté  inéluctable  de  Dieu,  indépen- 
damment de  tout  acte  d'obéissance  ou  de  désobéissance 
personnelle,  il  serait  dès  lors  impossible,  quoi  qu'on 
fit,  de  manquer  ce  bonheur  ou  de  se  dérober  à  ce 
malheur.  Pareille  théorie  est  contraire  à  toutes  les  as- 
surances et  à  tous  les  conseils  de  l'Évangile.  Dieu  «veut 
que  tous  les  hommes  soient  sauvés  »,  I  Tim.,  Il,  4,  et 
il  a  envoyé  son  Fils  dans  le  monde  «  pour  que  le 
monde  soit  sauvé  par  lui  ».  Joa.,  111,17.  Telle  est  la  pré- 
destination universelle  ante  mérita;  c'est  seulement  la 
prédestination  post  mérita  prsevisa  qui  assigne  aux 
uns  le  bonheur  et  aux  autres  le  malheur.  Sur  la 
théorie  thomiste  et  sur  les  discussions  auxquelles  a 
donné  lieu  la  doctrine  de  la  prédestination,  voirTurmel, 
Histoire  de  la  théologie  positive,  Taris,  1904,  p.  270- 
282,  401-409. 

4°  Il  y  a  une  prédestination  spéciale  pour  Notre-Sei- 
gneiir,  dont  saint  Paul  dit,  d'après  la  Vulgate,  qu'il  «  a 
été  prédestiné  Fils  de  Dieu  miraculeusement,  selon 
l'Esprit  de  sainteté,  par  une  résurrection  d'entre  les 
morts  ».  Rom.,  i,  3.  La  prédestination  ne  peut  porter 
sur  le  Fils  de  Dieu  dans  sa  nature  divine,  mais  seule- 
ment sur  ce  qu'il  est  devenu  dans  le  temps  par  son  in- 
carnation, et  sur  la  gloire  dont  sa  nature  humaine  a 
ensuite  été  comblée  dans  le  ciel  après  son  ascension. 
Dans  le  texte  grec,  au  lieu  de  prœdestinatus,  on  lit 
(5pio8évTo«,  qui  veut  dire  «  défini,  t\\r,  établi  ».  La 
pensée  de  l'Apôtre  est  donc  que  Jésus-Christ  a  été 
défini,  déclaré,  manifesté  Fils  de  Dieu  par  sa  résurrec- 
tion, h.  Lesêtre. 

PRÉDICATION  (hébreu  :  qeryâh  ;  Septante  : 
xiip'jyna;  Vulgate  :  prœdicalio),  exposition  et  propa- 
gation par  la  parole  d'un  enseignement  dogmatique 
ou  moral. 

I.  Dans  I'Ancien  TESTAMENT.  —  En  plusieurs  circon- 

sh s,  Moise  adressa  au  peuple  qu'il  avait  à  former 

des  exhortations  publiques  à  la  fidélité  envers  Jéhovah. 
Elles  sont  consignées  dans  le  Deutéronome,  x,  xi,  xxix. 
Après  lui,  ce  ne  furent  pas  les  prêtres,  dont  les  fonc- 
tions étaient  presque  exclusivement  liturgiques,  mais 
les  prophètes  qui  eurent  à  rappeler  au  peuple  les 
prescriptions  de  la  loi  divine.  Ainsi  firent  Samuel, 
I  lie,  Elisée,  et  ceux  qui  les  suivirent.  Josaphat  envoya 
de  ses  chefs  et  des  lévites  dans  les  villes  dcluda,  avec 
le  livre  de  la  loi,  pour  enseigner  le  peuple.  II  Par.,  XVII, 
7-9.  Plus  tard,  le  roi  iv/.échias  envoya  de  même  à 
travers  le  pays  d'Israël  des  messagers  remplissant  les 
fonctions  de  missionnaires,  pour  prêcher  aux  tribus 
séparées  le  retour  au  service  de  Jéhovah,  sans  grand 
succès  d'ailleurs.  II  Par.,   xxx,   0-11.    Sous   Josias,  la 


découverte  du  livre  de  la  Loi  fut  l'occasion  d'une  sorte 
de  prédication  solennelle.  II  Par.,  xxxiv,  29-33.  L'obéis- 
sance à  la  Loi  fut  de  nouveau  prêchée  au  temps  d'Esdras. 
I  Esd.,  ix,  0-x,  14;  II  Esd.,  vin.  1-ix,  38.  Les  oracles 
des  prophètes  sont  souvent  des  prédications  mises  par 
écrit.  Jer.,  vu,  2;  xix,  2,  etc.  C'est  par  eux  surtout 
que  la  sagesse  prêchait  sur  les  places  publiques. 
Prov.,  i,  20.  Jonas,  i,  2;  m,  2,  fut  envoyé  à  Ninive 
pour  y  prêcher  la  pénitence.  Luc,  xi,  32.  Isaïe,  LU, 
7,  salue  à  l'avance  celui  qui  doit  venir  prêcher  à  Israël 
la  bonne  nouvelle,  la  paix,  le  bonheur  et  le  salut.  Il 
annonce  que  le  Messie  prêchera  la  bonne  nouvelle,  le 
retour  à  la  lumière  et  l'année  de  grâce.  1s.,  i.xi.  1; 
Luc,  iv,  19.  Quand  les  synagogues  furent  instituées. 
le  service  religieux  y  comprit  une  explication  des 
textes  sacrés  et  une  exhortation  morale.  Voir  Lecteur 
t.  iv,  col.  147;  Synagogue.  Saint  Jacques  atteste  que 
depuis  bien  des  générations,  Moïse  avait  dans  chaque 
ville  des  hommes  qui  le  prêchaient.  Act.,  XV,  21. 
Néanmoins,  sous  l'ancienne  loi.  la  prédication  n'avait 
qu'un  rôle  secondaire,  parce  que  le  Livre  sacré  était 
la  base  de  la  religion  et  renfermait  tout  ce  qui  s'impo- 
sait à  la  croyance  et  à  la  pratique  de  l'Israélite. 

II.  Dans  le  Nouveau  Testaient.  —  1»  Par  sa  pré- 
dication sur  les  bords  du  Jourdain,  saint  Jean-Baptiste 
prépare  les  foules  à  l'apparition  du  Messie.  Il  exhorte 
à  la  pénitence  et  à  l'accomplissement  des  devoirs  d'état; 
il  interpelle  sévèrement  les  pécheurs  orgueilleux  pour 
les  obliger  à  rentrer  en  eux-mêmes.  Mais  sa  mission 
se  borne  à  annoncer  le  Messie,  à  disposer  les  âmes  à 
le  recevoir,  et  enfin  à  le  montrer.  Matth.,  ni,  1;  Marc,  i. 
4,  6;  Luc,  m,  3;  Act.,  xui.  24.  Celle  prédication  fit 
grand  effet.  Le  précurseur  eut  beaucoup  de  disciples 
qui  s'attachèrent  à  lui.  Matth.,  ix.  1  ;  Marc,  n,  18; 
Luc,  v,  33;  VII,  18,  19;  XI,  1  ;  Jôa.,  III,  25;  IV,  I.  Plus 
tard,  il  s'en  trouva  même  un,  Apollos.  à  Ephèse,  qui 
prêchait  la  doctrine  de  Jésus  tout  en  ne  connaissant 
que  le  baptême  de  Jean.  Act.,  xvm,  25.  —  2°  Le  Sau- 
veur prêcha  lui-même  sa  doctrine  pendant  tout  le  cours 
de  sa  vie  publique.  Cette  doctrine  constituait  la  «  lionne 
nouvelle  »  ou  l'Evangile,  d'où  l'emploi  du  mot  eC*--.  •:- 
XtVadOai  ou  t\>a.fyt.\i&afl(xi,evangelizare,  i  évangéliser,  >> 
pour  désigner  celte  prédication.  Le  Sauveur  prêchait 
donc  le  royaume  de  Dieu,  Luc,  iv,  fâ;  vin,  1  ;  il  l'an- 
nonçait aux  pauvres,  Matth.,  vu,  22;  xi,  5;  Luc,  îv, 
18,  alors  que  les  docteurs  juifs  se  bornaient  à  enseigner 
leurs  disciples.  Il  prêchait  partout,  Matth.,  iv,  17,  23; 
ix,  35;  XI,  1;  Marc,  I,  14,45;  Luc,  VIII,  1;  Marc,  i, 
14,  45;  Luc,  VIII,  1;  dans  les  bourgs,  Marc,  i,  38;  en 
pleine  campagne,  Matth.,  v,  I,  2;  dans  la  Décapole, 
Marc,  v,  20;  dans  les  synagogues,  Marc,  l,  39; 
Luc,  iv,  44;  sur  les  bords  du  lac,  Matth.,  xm,  2,  3; 
dans  le  Temple,  Joa.,  v,  18;  VII,  14,  etc.  Sur  la  pré- 
dication du  Sauveur,  voir. h  si  s-CHRIST,  t.  III,  col.  1  iSO- 
1497.  —  3"  Notn  Seigneur  chargea  ses  disciples  et 
particulièrement  ses  apôtres  de  prêcher  son  Évangile. 
Matth.,  x,  7;  Marc,  ni,  li;  vi,  12;  xvt,  15,  20;  Luc,  IX, 
2;  xxiv,  47;  Act.,  x.  42;  I  Pet.,  i,  12;  etc.  Il  leur 
recommanda  de  le  prêcher  sur  les  toits,  Matth.,  x,  27; 
Luc,  xn,  3,  c'est-à-dire  de  manière  à  être  vus  et  enten- 
dus pas  tous.  —  4"  L'ordre  du  Sauveur  fut  exécuté  avec 
zèle.  Dés  le  jour  de  la  Pentecôte,  saint  Pierre  se  nul 
a  prêcher.  Act.,  Il,  11;  il  a  pour  imitateurs  le  diacre 
Etienne  à  Jérusalem,  Act.,  VI,  14;  vu,  1-53,  le  diacre 
Philippe  en  Samarie,  Act.,  vin,  5,  12,  40,  tous  les 
autres  Apôtres  à  travers  le  monde.  Act.,  v.  42;  VIII,  i, 
25;  xiv,  G,  20;  xv,  35,  etc.  —  5°  Mais  le  prédicateur  de 
l'Évangile  par  excellence  est  saint  Paul,  que  le  Sauveur 
lui-même  a  choisi  pour  porter  son  nom  devant  les  na- 
tions, devant  les  rois  et  devant  les  enfants  d'Israi  I. 
Act..  ix,  15.  Il  s'en  va  prêcher  partout  dans  le  inonde 
romain,  en  commençant  par  les  synagogues  des  Juifs, 
Act.,  ix,  20;  xm,  5,  etc.,  et  en  s'adressant  ensuite  aux 


597 


PREDICATION    —    PREMICES 


598 


gentils  partout  où  il  les  rencontre.  Act..  w.  36;  xvn, 
13;  six.  13:  xx.  25;  xxvm,  31;  I  Cor.,  n.  i;  xv.  1.  -2, 
11.  14;  Il  Cor.,  i,  19;  XI,  i;  Col.,  i.  '23;  I  Thés.,  n,  9; 

I  Tim..  ii.T,  II  Tim  .1.  11;  iv.  L7;Tit.,l,  3,  etc.  Cepen- 
dant il  se  sait  particulièrement  chargé  de  la  prédication 
aux  gentils.  Gai.,  i.  10:  n,  2;  Eph.,  m.  8;  mais  il  s'ap- 
plique à  prêcher  l'Évangile  là  où  il  n'a  pas  encore  été 
annoncé.  Rom.,  xv,  20;  II  Cor.,  x,  16.  Son  rôle  spécial 
n'est  pas  de  baptiser,  mais  de  prêcher,  I  Cor.,  i,  17,  et 
malheur  à  lui  s'il  ne  prêche  pas.  I  Cor.,  i.\.  16.  — 
6»  Les  Èpitres  de  saint  Paul  énoncent  un  certain  nombre 
de  réllexions  qui  montrent  quelle  idée  l'Apôtre  se  faisait 
de  la  prédication.  Tout  d'abord,  dans  la  religion  de 
Jésus-Christ,  la  prédication  est  indispensable.  «Comment 
invoquer  celui  en  qui  on  ne  croit  pas  ?  Comment  croire 
en  celui  dont  on  n'a  pas  entendu  parler?  Comment  en 
entendre  parler  sans  prédication?  Et  comment  y  aura- 
t-il  des  prédicateurs  s'ils  ne  sont  envoyés?  »  Rom.,  x, 
14-15.  La  prédication  est  donc  nécessaire,  puisque 
Notre-Seigneur  a  donné  pour  base  à  sa  religion  non 
plus  un  livre,  comme  dans  la  loi  ancienne,  mais  la 
parole  de  ses  envoyés.  Matth.,  xxvm,  19.  Pourtant  n'est 
pas  prédicateur  qui  veut  :  il  faut  avoir  reçu  mission  de 
Jésus-Christ,  ou  de  ceux  qui  le  représentent.  Saint  Paul 
ne  se  prêche  pas  lui-même,  c'est-à-dire  qu'il  ne  met 
en  avant  ni  sa  personne  ni  ses  idées.  II  Cor.,  iv,  5.  Il 
prêche  Jésus-Christ,  et  Jésus-Christ  crucifié,  c'est-à- 
dire  le  Sauveur  dans  ses  humiliations  aussi  bien  que 
dans  ses  gloires.  I  Cor.,  i,  23.  Il  ne  le  prêche 
pas  en  faisant  appel  aux  ressources  de  la  sagesse 
et  de  l'éloquence  humaines,  I  Cor.,  i.  17-25,  mais 
simplement  et  en  dépit  de  ses  infirmités  person- 
nelles, Gai.,  iv,  13.  afin  qu'il  soit  bien  constant  que 
cette  prédication  agit  par  sa  propre  vertu,  indépen- 
damment de  la  valeur  du  prédicateur.  I  Cor.,  i.  17.  Il 
y  en  a  qui  se  font  prédicateurs  de  l'Évangile  par  envie 
et  par  esprit  d'opposition.  Phil.,  i,  15.  Saint  Paul  prêche 
avec  un  parfait  désintéressement.  I  Cor.,  ix,  18; 
II  Cor.,  XI.  7.  et  il  s'applique  à  pratiquer  la  doctrine 
qu'il  prêche,  afin  de  n'être  pas  réprouvé.  I  Cor.,  ix,  27. 

II  veut  que  son  disciple  Timothée  «  prêche  la  parole, 
insiste  à  temps  et  à  contre-temps,  reprenne,  menace, 
exhorte,  avec  une  entière  patience  et  toujours  en  ins- 
truisant. »  II  Tim..  iv.  2.  Tels  sont  en  effet  les  devoirs 
qui  s'imposent  au  prédicateur  de  l'Évangile. 

H.  Lesëtre. 


PRÉFETS  DE    SALOMON.    III 

Voir  Gouverneur,  12°,  t.  m,  col.  285. 


Res 


IV. 


-19. 


PRÉFIXES,  terme  grammatical  par  lequel  on  dé- 
signe dans  la  langue  hébraïque  les  particules  qui  sont 
placées  au  commencement  de  certains  mots.  Voir  Hé- 
braïque (Langue),  t.  m,  col.  473. 

1 .  PRÉMICES,  prélèvements  opérés  sur  les  premiers 
fruits  produits  par  la  terre,  destinés  à  être  offerts  au  Sei- 
gneur, comme  les  premiers-nés  de  l'homme  et  des 
animaux.  Ces  prélèvements  étaient  de  deux  sortes,  les 
prémices  des  fruits  naturels  et  les  prémices  des 
fruits  préparés. 

I.  Prémices  ijes  fruits  naturels.  —  1°  Ces  prémices 
portent  le  nom  de  bikkurim,  npb>Toyevv^|i.aTa,  yevvTijiaTa, 
fruges,  et  sont  ordinairement  désignées  par  l'expres- 
sion r'êlif  bikkùrê  hd-'âdâmàh,  à7iap-/x:  tcôv  -pwrovcv- 
■ir,i)-j-i.ri  :r;  '/.-'■  primitive  frugum  terrse,  «  les  pré- 
mices des  fruits  de  la  terre  •>,  Exod.,  xxm,  19,  ou 
t'eut  péri  ha-'âddmdh,  x-uy/ri  rûv  YEWT][iâTb>v  îTj;yîjç, 
primitisB  frugum  terrœ.  Deut.,  xxvi,  10.  —  2°  La  Loi 
ordonnait  d'apporter  les  prémices  des  fruits  de  la 
terre  dans  la  maison  du  Seigneur.  Exod.,  xxm,  19; 
xxxiv,  26.  Elle  indiquait  ensuite  avec  plus  de  détail  la 
manière  dont  on  devait  procéder.  Une  fois  dans  la 
Terre  Promise,  l'Israélite  prendra  les  prémices  de  tous 


ses  fruits,  les  mettra  dans  une  corbeille,  s'en  ira  au 
lieu  choisi  par  le  Seigneur  pour  y  être  honoré  et  se 
présentera  au  prêtre  en  fonction  en  lui  disant  :  «  Je 
déclare  aujourd'hui  à  Jéhovah,  ton  Dieu,  que  je  suis 
entré  dans  le  pays  que  Jéhovah  a  juré  à  nos  pères  de 
nous  donner.  »  Le  prêtre  prendra  la  corbeille  et  la 
déposera  devant  l'autel.  L'Israélite  prononcera  une 
formule  rappelant  tout  ce  que  Dieu  a  fait  pour  ses 
pères  et  conclura  en  ces  termes  :  «  Et  maintenant, 
voici  que  j'apporte  les  prémices  des  produits  du  sol 
que  vous  m'avez  donné,  ô  Jéhovah  !  »  Ensuite  il  se 
livrera  à  des  réjouissances  avec  le  lévite  et  l'étranger 
qui  réside  auprès  de  lui.  Deut.,  xxvi,  1-11.  —  3°  Le 
traité  Bikkurim  de  la  Mischna  a  pour  objet  l'offrande 
des  prémices.  —  Quelques  docteurs  ont  prétendu  que 
la  loi  sur  les  prémices  ne  fut  obligatoire  que  quand  le 
Temple  exista,  parce  que  le  texte  sacré  dit  de  les 
apporter  dans  la  «  maison  »  du  Seigneur.  Deut.,  xxvi, 
2.  Cf.  Schekalim,  vm,  8.  Mais  cette  assertion  est  inad- 
missible, puisque  le  Tabernacle  lui-même  est  souvent 
appelé  «  maison  ».  Exod.,  xxm,  19;  Jos.,  vi,  24;  I  Reg., 
I,  7,  24,  etc.  —  3°  Rien  que  la  Loi  parlât  de  tous  les 
fruits  de  la  terre,  on  restreignait  l'obligation  des  pré- 
mices aux  sept  fruits  qui  sont  indiqués.  Deut.,  vin,  8, 
comme  caractéristiques  de  la  Palestine,  le  froment, 
l'orge,  la  vigne,  le  figuier,  le  grenadier,  l'olivier  et  le 
miel.  Cf.  Bikkurim,  i,  2;  Gem.  Bekorolh,  35,  1.  — 
4°  La  Loi  ne  portait  que  sur  les  produits  de  la  terre 
d'Israël,  à  laquelle  on  ajoutait  les  anciens  territoires 
de  Séhon,  Deut.,  n,  32-37,  d'Og,  Deut.,  m,  8-10,  et 
plus  lard  la  partie  de  la  Syrie  conquise  par  David. 
D'après  Josèphe,  Ant.  jud.,  XVI,  vi,  7,  on  apportait 
aussi  les  prémices  d'Asie  Mineure.  —  5"  Les  fruits 
offerts  en  prémices  devaient  être  de  premier  choix  et 
tout  frais,  sauf  les  raisins  et  les  figues  qui  pouvaient 
être  secs  quand  on  les  apportait  de  loin.  —  La  quan- 
tité de  fruits  à  offrir  en  prémices  n'était  pas  déter- 
minée. On  pouvait  même  offrir  à  ce  titre  ceux  d'un 
champ  tout  entier.  Cf.  Bikhurim  n,  4;  Siphra,  f.  25, 
I.  Les  prémices  faisaient  partie  des  six  ou  dix  choses 
dont  la  Loi  ne  réglait  pas  la  mesure.  Cf.  Pea.i.  1  ;  Gem. 
Jerus.,  Pea,  16.  1.  Mais  les  docteurs  avaient  décidé  que 
l'offrande  devait  être  au  moins  d'un  soixantième.  Le 
mot  téné',  «  corbeille  »,  dont  les  trois  lettres  -.:.  :.  n, 
représentent  les  chiffres  9,  50  et  1,  au  total  60,  servait 
à  rappeler  cette  règle  à  la  mémoire.  Cf.  Gem.  Jerus. 
Bikkurim,  65,  3;  Siphra,  f.  202,  2.  —  6°  La  sépara- 
tion des  fruits  constituant  les  prémices  pouvait  se 
faire  soit  sur  l'arbre,  avant  maturité,  au  moyen  d'un 
signe,  soit  après  la  récolte,  à  condition  toutefois  que 
les  bikkurim,  fussent  mis  àpartavant  toutes  les  autres 
redevances.  Cf.  Terumoth,  m,  7.  On  était  obligé  de 
remplacer  ce  qui  s'était  pourri  ou  avait  été  volé.  — 
7°  Quand  le  Temple  eut  été  construit  l'offrande  de 
ces  prémices  se  faisait  à  Jérusalem,  mais  pas  avant  la 
Pentecùte,  Exod.,  xxm,  16;  Lev.,  xxm.  17,  ni  après  la 
Dédicace,  le  25  casleu,  les  fruits  plus  tardifs  n'ayant 
pas  grande  valeur.  Cf.  Bikkurim,  i,  6;  Challa,  iv,  10. 
—  8°  Par  la  suite  des  temps,  l'offrande  des  prémices 
fut  réglée  dans  tous  les  détails.  Les  fruits  se  plaçaient 
dans  des  corbeilles  dorées,  argentées  ou  en  bois  de 
saule.  Si  tous  les  fruits  devaient  être  contenus  dans 
la  même  corbeille,  on  mettait  au  fond  l'orge,  puis  le 
blé,  ensuite  les  olives,  au-dessus  le  miel,  les  grenades, 
les  figues  et  enfin  les  raisins.  Ordinairement  on  atta- 
chait à  la  corbeille  des  tourterelles  ou  des  colombes 
destinées  à  être  offertes  en  holocauste.  —  La  corbeille 
ainsi  disposée  était  portée  à  Jérusalem  par  celui  qui 
faisait  l'offrande  ou  par  son  réprésentant.  Le  voyage 
était  entrepris  en  grande  pompe.  De  plusieurs  loca- 
lités, on  se  réunissait  à  un  rendez-vous  commun.  Le 
chef  de  la  bande  criait  les  paroles  de  Jérémie,  xxxt,  6; 
cf.  Mich.,  iv,  2  :  «  Levez-vous  et  montons  à  Sion,  vers 


599 


PREMICES 


600 


Jéhovah  noire  Dieu!  »  et  l'on  se  niellait  en  route, 
avec  un  bœuf  à  cornes  dorées  et  couronné  d'olivier,  et 
un  joueur  de  flûte.  Chemin  faisant,  on  répétait  les 
paroles  du  Psaume  r.xxn  (cxxi),  1  :  •  J'ai  été  dans  la 
joie  quand  on  m'a  dit  :  Allons  à  la  maison  de  Jéhovah!  g 

—  Aux  approches  de  Jérusalem,  de  hauts  fonction- 
naires du  Temple  allaient  au  devant  des  arrivants  et 
leur  faisaient  accueil.  A  l'entrée  du  Temple,  chacun, 
même  le  roi,  devait  prendre  sa  corbeille  sur  ses 
épaules,  et  la  porter  à  l'intérieur  en  chantant  le 
Psaume  CL,  auquel  les  lévites  répondaient  par  le 
Psaume  xxx  ,xxix).  Au  parvis  des  prêtres,  il  la  déchar- 
geait et  l'agitait,  avec  l'aide  d'un  prêtre,  en  proférant 
les  paroles  prescrites.  Deut..  xxvi.  3-10.  Cette  formule 
n'obligeait  ni  les  femmes,  ni  les  tuteurs,  ni  les  esclaves, 
ni  ceux  qui  présentaient  des  prémices  après  la  fêle 
des  Tabernacles.  Cf.  BikkuHm,  i,  5,  6.  La  corbeille 
était  portée  près  de  l'autel,  sans  qu'on  put  mettre  sur 
l'autel  même  ce  qui  contenait  du  levain  ou  du  miel, 
Lev.,  il,  11,  12.  et  le  sacrifice  était  offert.  Si  la  corbeille 
était  de  métal,  on  la  rendait  à  l'Israélite  porteur  des 
prémices:  1rs  prêtres  gardaient  pour  eux  les  corbeilles 
de  saule  ou  de  jonc.  —  Après  l'offrande  des  prémices. 
l'Israélite  était  obligé  de  passer  la  nuit  à  Jérusalem;  il 
ne  pouvait  repartir  avant  le  lendemain  matin.  Cf.  Bik- 
kurim,  II,  2.  3.  4.  —  Les  prémices  appartenaient  aux 
piètres,  ce  qui  explique  l'empressement  avec  lequel 
ils  accueillaient  ceux  qui  les  apportaient.  Les  prêtres 
de  service  pendant  la  semaine  se  les  partageaient  et  les 
mangeaient  a  Jérusalem  même,  eux.  leurs  femmes, 
leurs  esclaves  et  leurs  bêtes,  pendant  le  séjour  en 
ville  de  celui  qui  avait  présenté  ces  différents  fruits. 
Num.,  xvmi.  13;  Il  Esd.,  x,  37.  —  Cf.  Josèphe.  Aul. 
jud.,  IV.  vin,  22.  Philon  a  écrit  au  sujet  de  la  pré- 
sentation des  prémices  un  petit  traité  De  festo  co- 
phini,  publié  par  Mai  et  par  Tischendorf,  Phii 
1868,  p.  (39-71. 

II.  Prémices  des  i  ruits  prépari  s.  —  l°Ces  prémices 
portenl  le  nom  il''  (erùmâh,  içacpefia,  inj/r.  prinii- 
tise.  Elles  font  l'objet  du  traité  Terumolh  de  la  Mischna. 

—  Outre  les  prémices  des  fruits  à  l'état  naturel,  la  Loi 
ordonnait  encore  de  donner  aux  prêtres  les  prémices 
des  produits  tirés  des  fruils,  Exod.,  xxn,  29,  nommé- 
ment delà  farine.  Num.,  xv.  lit.  -21.  du  vin  nouveau, 
de  l'huile,  même  de  la  toison  des  brebis.  Deut.,  xvm, 
4,  et  en  général  de  tous  les  produits  de  la  terre  ou  des 
arbres,  il,  Terumoth,  n.  5,  6.  Cette  redevance  devait 
être  acquittée  chaque  année  envers  les  prêtres  par  les 
Israélites  non  seulement  de  Palestine,  mais  aussi,  après 
la  captivité,  de  Babylone,  d'Egypte,  du  pays  d'Ammon 
et  de  Moab,  el  de  Syrie.  Toutefois  les  prémices  de  ces 
pays  étrangers  ne  devaient  pas  êtres  introduites  en  Terre 
Sainte.  Cf.  Te-umoth,  i.  1.  Les  prémices  des  toisons 
étaient  fidèlement  offertes  par  Tobie,  i,  l>.  qui.  du 
royaume  d'Israël,  avant  d'être  emmené  en  captivité,  se 
rendait  régulièrement  au  Temple  de  Jérusalem  et  j  pré- 
sentait <■  les  prémices  i  et  ses  «  premières  tontes  », 
rcpuvoxoupfcc.  Les  prémices  de  la  farine  et  des  aliments 
dont  elle  formait  la  base  étaient  l'objet  de  prescriptions 
spéciales  contenues  dans  le  traité  Challaie  la  Mischna. 
Saint  Paul  y  fait  allusion  quand  il  dit  que  t  si  les  pré- 
mices,  ù-xy/.r.  seul  sainles,  la  masse  de  la  pâte,  pûpot- 

ij.ï.  l'est  aussi.  ■  Rom.,  xi,  l(i.  Était  soumis  à  l'obliga- 
tion des  prémices  tout  ce  qui  provenait  du  froment,  de 
l'orge,  de  l'épeautre,  de  l'avoine  et  du  seigle.  Cf.  Clialta. 
i.  1.  Ces  prémices  ne  s'acquittaient  pas  en  farine,  mais 
en  pâte  et  en  pain  tout  préparé.  Cf.  Challa,  il.  5.  —  La 
quantité  de  prémices  à  fournir  n'était  pas  déterminée. 
Ezéchiel.  xlv,  13,  14,  suppose  une  proportion  d'un 
soixantième  pour  le  froment  et  l'orge,  et  d'un  centième 
pour  l'huile.  On  estimait  généralement  qu'il  était  dû  un 
cinquantième;  les  disciples  d'Hillel  opinaient  pour  un 
quarantième,  ceux  de  Scbammai  pour  un  trentième;  les 


moins  généreux  se  contentaient  d'un  soixantième.  Sur 
les  pains,  les  particuliers  donnaient  1/24  et  les  boulan- 
gers 1  48.  Cf.  Challa,  m.  7;  Eduyoth,  i,  2.  Saint  Jérôme, 
ht  Ezech.,  xiv.  45.  t.  xxv.  col.  451,  dit  que,  selon  la 
tradition  juive,  on  pouvait  s'en  tenir  à  une  quantité  in- 
termédiaire quelconque  entre  le  quarantième  et  le 
soixantième.   Cf.  Philon,  De  primitiis  r    '.uni,  1, 

édit.  Mangey.  t.  Il,  p.  233. 

2°  L'usage  de  ces  prémices  n'était  pas  réglé.  Chacun 
les  attribuait  au  prêtre  qu'il  voulait.  Ces  prémices 
n'avaient  donc  pas  un  caractère  sacré,  comme  les  pré- 
cédentes qu'il  fallait  aller  présenter  au  Temple.  C'étaient 
de  simples  redevances  au  bénéfice  de  l'ordre  sacerdotal. 
La  liberté  que  chacun  avait  de  les  distribuer  à  son  gré 
ne  laissait  pas  que  d'aider  les  prêtres  à  se  rendre  ai- 
mables et  serviables  à  tous.  Sous  Ézéchias,  des  prémices 
abondantes  de  vin  nouveau  et  d'huile  furent  ainsi  pré- 
sentées, avec  les  autres  prémices,  par  les  habitants  de 
Jérusalem  aux  prêtres  et  aux  lévites,  g  afin  qu'il  s'atta- 
chassent fortement  à  la  loi  de  Jéhovah.  «  c'est-à-dire 
au  service  du  Temple.  II  Par.,  x.xxi.  4-10.  Apres  la  cap- 
tivité,  les  Israélites  s'engagèrent  à  porter  au  Temple 
leurs  prémices  de  farine,  de  vin  et  d'huile;  mais  ce  fut 
clans  le  but  d'attirer  et  de  fixer  les  prêtres,  alors  peu 
nombreux,  dans  la  maison  de  Dieu.  II  Esd..  x,  35-39; 
xii,  43;  xiii,  5.  Pour  l'ordinaire,  la  redevance  était 
acquittée  partout  où  vivaient  des  prêtres.  —  Les  pré- 
mices devaient  être  consommées  en  Terre  Sainte  par  les 
prêtres  en  état  de  pureté  et  tous  ceux  de  leur  maison 
qui  satisfaisaient  à  la  même  condition,  Num.,  xvm.  11. 
leurs  femmes,  leurs  enfants  et  leurs  esclaves.  Leurs 
animaux  même  pouvaient  manger  des  prémices.  Cf. 
Terumoth,  i.x,  3:  xi.  'J.  La  Bile  d'un  piètre  mariée  à  un 
simple  Israélite  n'avait  pas  le  droit  d'en  manger,  pas 
plus  que  ceux  de  sa  maison.  Lev..  xxn,  11-13.  Cf.  le- 
hamotli,  vu,  2;  ix.  6.  Une  simple  Bile  Israélite  mariée 
à  un  prêtre  en  mangeait,  ainsi  que  ceux  de  sa  maison, 
cf.  Yebatnoth,  vu,  2;  ix,  5,  mais  seulement  du  vivant 
de  son  mari.  Cf.  Gittin,  m.  i.  —  Cf.  Reland.  Antii/iii- 
tates  sacrée,  l'Irecht,  1741.  p.  2im-2<>5:  Iken,  Antif/ui- 
tales  h,  Brème,  1741.  p.  210-218;  Schûrer,  Ge- 

schichte  des  judischen  Yolkes  im  Zeit.  J,  (.'.,  Leipzig. 
t.  n.  1898,  p.  249-250 

III.  Remarques  diverses  sur  les  prémices.  —  I  /.« 
pratique.  —  A  toutes  les  époques  de  l'histoire  d'Israël, 
il  est  question  des  prémices.  Pour  maudire  les  monts 
de  Gelboé,  David  souhaite  qu'ils  n'aient  aucun  champ 
de  prémices,  c'est-à-dire  qu'ils  soient  frappés  de  stéri- 
lité. 11  Reg.,  i.  21.  Un  homme  de  Baalsalisa  apporte  à 
Elisée  vingt  pains  d'orpe  de  prémices  et  du  froment 
nouveau.  IV  Reg.,  iv,  12.  Pareille  offrande  ne  pouvait 
se  faire  qu'aux  prêtres;  mais  il  n'y  en  avait  plus  de  lé- 
gitimes dans  le  royaume  d'Israël,  III  Reg-.  XIII,  3:f.  et 
le  présent  fait  à  Elisée  ne  procédait  que  de  la  généro- 
sité du  donateur.  Ézéchias  remit  en  honneur  l'offrande 
de  prémices  abondantes.  II  Par..  XXXI,  H0.  Il  est  re- 
commandé de  faire  honneur  à  Dieu  des  prémices  de 
tout  son  revenu,  l'rov..  m,  9.  Cf.  Eccli..  xxxv.  10 
chiel,  xx,  40;  xi.iv.  30;  xi.vm,  14,  rappelle  que  les  pré- 
mices appartiennent  au  Seigneur  et  que  celles  des  pre- 
miers produits  de  toutes  sortes  sont  pour  les  prêtres, 
Les  captifs  de  Babylone  se  plaignent  qu'il  n'y  a  plus 
d'endroit  pour  présenter  les  prémices  au  Seigneur. 
I>an..  m,  38.  Après  la  captivité,  cette  institution  fut 
restaurée.  II  Esd..  x.  35-39;  xn,  13;  un,  5.  Elle  était 
en  pleine  vigueur  à  l'époque  évangélique,  comme  le 
donne  à  supposer  la  composition  des  traités  Bikkurim 
et  Terumoth.  —  Deux  offrandes  de  prémices  étaient 
particulièrement  solennelles,  celle  des  prémices  de 
l'orge, à  la  Pique,  Lev.,xxm,  10,  11,  voir  Pàque,  t.  i*, 
col.  2091.  et  celle  des  prémices  du  froment  et  des  deux 
pains,  à  la  Pentecôte.  Exod.,  xxxiv.  22;  Lev.,  xxm,  17. 
Voir  Pentecôte,  col.  119. 


601 


PRÉMICES    —    PREMIER-NÉ 


m-2 


2°  Signification  des  prémices.  —  L'offrande  des  pré- 
mices, prescrite  par  le  Seigneur,  constituait  à  son  égard 
un  acte  de  reconnaissance,  de  soumission  et  de  suppli- 
cation. En  s'acquittent  de  ce  devoir,  l'Israélite  faisait 
profession  de  reconnaître  en  Jéhovah  le  créateur  de 
toutes  choses,  le  maitre  de  la  nature  et  le  dispensateur 
libéral  de  tous  les  biens.  Il  lui  obéissait  en  sacrifiant 
une  partie,  la  première  et  la  meilleure,  de  ce  qu'il  avait 
reçu  de  sa  munificence.  En  même  temps,  il  se  le  ren- 
dait propice  et  s'assurait  les  mêmes  bienfaits  pour  l'ave- 
nir. Ces  idées  étaient  si  naturelles  qu'on  trouve  chez  un 
bon  nombre  de  peuples  l'usage  d'offrir  à  la  divinité  les 
prémices  des  fruits  de  la  terre.  Cf.  lliad.,  ix,  529;  Cal- 
limaque,  In  Cercr.,  19 ;  Théocrite,  vu,  31  ;  Aristophane, 
Ran.,  1272;  Pausanias,  i,  43;  Porphyre,  De  abstin. ,11, 
5,  6,  27,  32;  Épictète,  38;  Ovide,  Metam.,  vin,  273;  x, 
431;  Fast.,  Il,  519;  Tibulle,  i,  1,  13;  Pline,  //.  -V.,  IV, 
26,  etc.  En  Egypte,  les  donations  analogues  de  pains,  de 
liqueurs,  de  quartiers  de  victimes,  même  de  terres  avec 
tout  ce  qu'elles  contenaient,  étaient  faites  aux  dieux, 
pour  se  les  rendre  favorables,  et  laissées  à  la  jouissance 
des  prêtres.  Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne  des  peu- 
ples île  l'Orient,  1895,  t.  i,  p.  303.  Les  mêmes  usages 
régnaient  en  Chaldée.  Ibid.,  p.  676,  677. 

3°  Leur  destination.  —  Les  prémices  constituaient 
une  partie  de  la  dotation  des  prêtres  et  des  lévites.  Il 
était  juste  que  ceux  qui,  au  nom  de  la  nation,  consa- 
craient leur  vie  au  service  du  Seigneur,  reçussent  du 
peuple  les  choses  nécessaires  à  la  vie.  On  comprenait 
également  le  droit  supérieur  de  Dieu  qui,  en  donnant 
aux  Hébreux  la  terre  fertile  de  Chanaan,  avait  établi 
une  réserve  en  faveur  de  ceux  qu'il  prenait  à  son  ser- 
vice. Cf.  Eccli.,  xj.v,  25.  Aux  prémices  s'ajoutaient,  poul- 
ies prêtres  et  les  lévites,  les  dîmes,  voir  DÎME,  t.  il, 
col.  1431;  une  part  d'un  centième  sur  le  butin  de 
guerre  pour  le  grand-prêtre,  et  d'un  cinquantième  pour 
les  lévites,  Num.,  xxxi,  28-30;  une  part  plus  ou  moins 
considérable  des  victimes  offertes  pour  les  sacrifices 
autres  que  l'holocauste,  voir  Sacrifice;  différentes 
sommes  d'argent  ou  divers  biens  en  nature  provenant 
de  vœux,  de  restitutions,  d'amendes,  de  rachats,  etc.; 
l'épaule  droite,  l'estomac  et  la  mâchoire  de  tous  les 
animaux  tués  pour  l'usage  des  particuliers,  redevance 
qui  était  comme  une  extension  des  prémices.  Cf.  Iken, 
Antiquitates  hebraiese,  p.  217;  Munk,  Palestine,  Paris, 
1881,  p.  177.  La  vie  des  prêtres  et  des  lévites  était  ainsi 
assurée  dans  des  conditions  suffisamment  larges,  mais 
qui  ne  permettaient  pas  l'accumulation  de  grandes 
richesses,  comme  il  arrivait  pour  les  castes  sacer- 
dotales des  autres  pays  de  l'antiquité.  Cf.  Hérodote, 
il,  37;  Diodore  de  Sicile,  i,  73;  Munk,  Palestine, 
p.  178-179. 

4»  Les  prémices  au  sens  figuré.  —  Pour  marquer  que 
le  peuple  d'Israël  appartenait  spécialement  au  Seigneur 
et  que  le  Seigneur  le  protégeait  en  conséquence,  Jéré- 
mie,  il,  3,  dit  ;  «  Israël  était  consacré  à  Jéhovah,  comme 
les  prémices  de  son  revenu;  quiconque  en  mangeait  se 
rendait  coupable,  le  malheur  fondait  sur  lui.  »  —  Saint 
Paul  salue  en  Jésus-Christ  les  prémices  de  la  résurrec- 
tion et  de  la  vie,  c'est-à-dire  celui  qui  le  premier  est 
ressuscité  glorieusement  pour  ne  plus  mourir  et  com- 
muniquer la  vie  aux  âmes.  I  Cor.,  XV,  20,  23.  —  Les 
chrétiens  ont  ici-bas  «  les  prémices  de  l'Esprit  s,  c'est- 
à-dire  le  commencement  d'une  vie  qui  se  développera 
un  jour  dans  la  gloire.  Rom.,  vin,  23.  Cf.  S.  Irénée, 
Adv.  hseres.,  \,  8.  1,  t.  vil,  col.  1142.  —  La  famille  de 
Stéphanas  représente  les  prémices  de  l'Achaïe,  c'est-à- 
dire  qu'elle  est  la  première  qui  se  soit  convertie  dans 
celte  province.  I  Cor.,  xvi,  15.  Les  âmes  vierges  sont 
des  prémices  pour  Dieu  et  l'Agneau,  c'est-à-dire  qu'elles 
occupent  une  place  privilégiée  dans  l'Église  et  dans  le 
ciel.  Apoc,  xiv.  i. 

II.  Lesétre. 


2.  PRÉMICES  (FÊTE  DES),  un  des  noms  de  la  fête  de 
la  Pentecôte.  Exod..  xxm,  16.  Voir  Pentecôte,  col.  119. 

PREMIER  (grec  :  irptôto;;  Vulgate  :  princeps),  titre 
que  portait  le  magistrat  qui  gouvernait  1  île  de  -Malle, 
Act.,  xxvm,  7.  Il  s'appelait  Publius,  lorsque  saint  Paul 
y  aborda  après  son  naufrage.  Voir  Publr'S.  L'île  de 
Malte,  pendant  la  seconde  guerre  punique,  était  passée 
en  342  avant  J.-C.  de  la  domination  carthaginoise  sous 
celle  de  Rome.  Les  Romains  laissèrent  aux  Maltais  une 
grande  liberté,  ils  tirent  de  Malte  un  municipe  et  per- 
mirent aux  habitants  de  se  gouverner  d'après  leurs 
propres  lois.  Malte  dépendait  du  préteur  de  Sicile, 
ma is  celui-ci  étaitreprésenté  dans  l'île  par  un  propréteur, 
àqui  l'on  donnait  le  titre  de  irpw-o;  MeXeTaîwv,  Primus 
Melite/isium,  comme  l'atteste  l'inscription  suivante 
qui  confirme  l'exactitude  de  saint  Luc  :  Aoc.xeoç  K-jp. 
IIpo-J07)v;  Î7C7ISÙ;  'Ptou.[a:cov]  7cptoToç  Me).tra:'wv  xcti 
7iaTpûv.  Kaibel,  Inscript,  grœc.  Italiœ  et  Sicilise,  Ber- 
lin, 1890,  p.  142,  n.  601.  Cf.  Boeck,  Corpus  inscriptio- 
num  grxcarum,  n.  5754,  t.  m,  p.  682;  Une  inscription 
latine  porte  :  Mel.  Primus.  Smith,  Voyage  and  ship- 
wreck  of  St.  Paul,  3'  édit.,  Londres,  1866,  p.  150-151. 
Voir  Schœlfer,  Dissertatio  de  Publio,  koùzw  Meliten- 
sium,  in-4",  Iéna,  1755. 

PREMIER-NÉ  (hébreu  :  bek&r,  de  bdkar,  «  être  le 
premier  »;  Septante  ;  irpuTOToy-oj;  Vulgate  :  primogeni- 
tus),  le  premier  qui  vient  au  monde  dans  une  famille. 
Il  est  aussi  désigné  par  l'expression  pétér  réhém,  «ou- 
verture du  sein  »,  ou  simplement  peter,  Biccvoïyov  u.y-t- 
potv,  quod  aperil  vulvam.  Exod.,  xm,  2,  12,  13,  15; 
xxxiv,  20.  Ces  désignations  s'appliquent  à  la  fois  au 
premier-né  de  l'homme  et  à  celui  des  animaux. 

I.  Les  premiers-nés  des  hommes.  —  I»  Dans  les  an- 
ciennes familles  israélites,  les  premiers-nés  jouissaient 
de  certains  droits.  Voir  Aînesse  (Droit  d'),  1. 1,  col.  317- 
322.  —  2°  Le  premier-né  était  naturellement  l'objet 
d'une  affection  plus  grande  et  d'attentions  plus  marquées 
de  la  part  de  son  père  dont  il  devait  continuer  la  des- 
cendance. Si  ce  père  mourait  sans  premier-né,  on  lui 
en  procurait  un  en  vertu  de  l'institution  du  lévirat. 
Voir  Lévirat,  t.  iv,  col.  213.  On  pleurait  plus  amèrement 
que  celle  des  autres  la  mort  du  premier-né.  Zach., 
xii,  10.  Cette  mort  était  le  plus  grand  malheur  qui 
put  arrivera  une  famille,  Jos.,  vi,  26,  et  le  plus  grand 
sacrifice  qu'un  père  pût  s'imposer.  Gen.,  xxn.  2,  12,  16  ; 
IV  Reg.,  m,  27  ;  Mich.,  VI,  7.  —  3°  Dans  un  sens  méta- 
phorique, Dieu  appelle  le  peuple  d'Israël  son  premier- 
né,  c'est-à-dire  son  peuple  de  prédilection,  celui  auquel 
il  accorde  plus  de  bénédictions  qu'aux  autres  et  qu'il  a 
chargé  de  garder  son  nom  sur  la  terre,  comme  le  pre- 
mier-né perpétue  celui  de  son  père.  Exod.,  iv,  22,  23; 
Eccli.,  xxxvi,  14.  Si  Jérémie,  xxxi,  9,  appelle  Ephraïm 
le  premier-né  de  Dieu,  c'est  pou»  marquer  qu'après  la 
captivité  le  royaume  d'Israël  représenté  par  Ephraïm, 
retrouvera,  aussi  bien  que  Juda,  le  titre  et  les  préro- 
gatives de  premier-né  de  Jéhovah.  Le  titre  de  premier- 
né,  donné  par  Dieu  à  Israël,  est  devenu  comme  l'idée 
maîtresse  qui  commande,  historiquement  et  légalement, 
tout  ce  qui  se  rapporte  aux  premiers-nés.  —  4»  Moïse 
reçoit  l'ordre  de  dire  au  pharaon  d'Egypte  que  s'il  re- 
fuse de  laisser  aller  le  premier-né  de  Jéhovah.  Israël, 
Jéhovah  fera  périr  son  fils  premier-né,  par  conséquent 
l'atteindra  dans  son  affection  la  plus  chère.  Exod..  iv, 
23.  Le  pharaon  s'obstine  à  refuser  et  la  sentence  divine 
s'exécute.  Le  premier-né  du  pharaon  et  les  premiers- 
nés  des  Égyptiens  périssent  en  une  nuit,  et  même  les 
premiers-nés  du  bétail  ne  sont  pas  épargnés.  Exod.,  xi, 
5;  xn,  29,  30;  xm,  15;  Ps.  lxxviii  (lxxvii),  51  ;  cv  (civ), 
36;  cxxxv  (cxxxiv),  8;  cxxxvi  (cxxxv),  10;  Sap.,  xvm, 
13.  Par  contre,  tous  les  Hébreux  demeurent  indemnes, 
y-  compris  leurs  premiers-nés.  Exod.  3,  27.  — 


603 


PREMIER-NE 


604 


.V  En  conséquence  de  celle  préservation.  Dieu  veut  que 
tous  les  premiers-nés  lui  soient  consacrés,  comme  lui 
appartenant.  Exod.,  xiii,  2,  12;  xxn,  29.  Il  indique  lui- 
même  la  raison  de  cette  consécration.  Le  père  doit  en 
effet  dire  à  son  li!s  :  •  Comme  le  pharaon  s'obstinait  à 
ne  point  nous  laisser  aller,  Jéhovah  fit  mourir  tous  les 
premiers-nés  dans   le  pays  d'Egypte,  depuis   les  pre- 
miers-nés des  hommes  jusqu'aux  premiers-nés  des  ani- 
maux. Voilà  pourquoi  j'offre  en  sacrifice  à  Jéhovah  tout 
mâle  premier-né  et  je  rachète  tout  premier-né  de  mes 
(ils.  »  Exod.,  xiii,  15-16.  Le  texte  sacré  ajoute  que  l'Is- 
raélite ne  devra  jamais  perdre  de  vue  le  sens  de  cette 
consécration  et  que  ce  souvenir  sera  pour  lui  comme 
un  signe  sur  la  main  et   un  bandeau  entre  les  yeux.  — 
6°  En  principe,  les  premiers-nés  étaient  ainsi  réservés 
pour  le  service  de  Dieu.  C'était  en  effet,  dans  les  an- 
ciens temps,  la  prérogative  du  chef  de  famille  et,  après 
lui,  de  son  premier-né,  d'exercer  le  sacerdoce.  Voir  t.  i, 
col.  31S.  Mais  il  plut  à  Dieu  d'organiser  le  culte  autre- 
ment  chez    le  peuple  qu'il   se  choisissait.  Il    formula 
ainsi  sa    volonté   :    «  J'ai  pris  les  lévites  du  milieu  des 
enfants  d'Israël,   à  la  place  de  chaque  premier-né  qui 
ouvre  le  sein  de  sa  mère  parmi  les  enfants  d'Israël,  et 
les  lévites  sont  à  moi  ;  le  jour  où  j'ai  frappé  tous  les 
premiers-nés  dans  le  pays  d'Egypte,  je  me  suis  consa- 
cré tout  premier-né  en  Israël.  >  Xum.,  m.  12,  13,  40-50; 
VIII,  16.  Les  lévites  sont  donc  désignés  par  Dieu  pour 
remplir  auprès  de  lui  les  fondions  cultuelles  précédem- 
ment  dévolues   au    père  et   à   l'aîné    de   la    famille.   — 
7°  Comme   les  premiers-nés  appartiennent   à  Dieu  et 
que  cependant  Dieu   n'a   pas  le  dessein  de  les  utiliser 
pour  son  service  particulier,  la  liberté  leur  sera  laissée 
moyennant  rachat.  Tout  premier-né  doit  donc  être  ra- 
cheté, et  l'Israélite  qui  le  reprend  au  Seigneur  ne  doit 
pas  se  présenter  les  mains  vides.  Exod.,  xxxiv.  20.  l'n 
mois  après  sa  naissance,  le  premier-né  tombe  sous  la 
loi  du  rachat  li\é  à  cinq  sicles  d'argent.  Xum.,  m,  47; 
xviii,  15-16.  —  8"  l'our  qu'un  premier-né  fut  soumis  à 
la  loi,  il  devait  être  à   la  fois  un  garçon  et  le  premier 
enfant  de  sa  mère,  l'n  gareoii  né  après  une  ou  plusieurs 
sœurs  n'était   pas  péter  réjfém,     ouvrant  le  sein  «de 
la  mère.  Exod.,  xiii.  2.  Cette  expression  du  texte  sacré 
montre  qu'il  s'agit  bien  du  premier  fils  de  la  mère,  et 
non  du  premier  fils  du  père.   Ce  premier-né  pouvait 
n'avoir  pas  le  droit  d'ainesse,  si   le   père  avait  eu   déjà 
d'autres  enfants  d'une  autre  épouse.  Réciproquement, 
un  père  pouvait  avoir  plusieurs  premiers-nés  il  'épouses 
différentes.  Voir  t.  I,  col.  317.  11  n'y  avait  pourtant  pas 
de  premier-né  dans  toutes  les  familles.  Dans  le  recen- 
sement que  Moïse  fit  au  désert,  on  trouva  22273  pre- 
miers-nés d'un  mois  et  au-dessus,  sur  603550  Israélites 
de  vingt-ans  et  au-dessus,  Num.,  i,  15  :  m,   13,  soit  un 
premier-né'  sur  27  hommes,  et  encore    parmi  ces  der- 
niers ne  sont  pas  comptés  ceux    qui   onl   d'un   mois  à 
vingt  ans.  Il  s'agissait  alors  de  substituer  les  lev  ites  aux 
premiers-nés.  Comme  il  n'v  avait  que  20000  lévites,  les 
273    premiers-nés  qui    ne   pouvaient     être    remplacés 
furent  rachetés  chacun  au  prix  de  cinq  sicles  Num.,  m, 
40-50.  Le  rachat  fut  ensuite  imposé  a  tous  les  premiers- 
nés,  sans  qu'il  fui  tenu  compte  de  leur  remplacement 
par  les  lévites.  Num.,  xvm,   15.   Les  prêtres  et  les  lé- 
viles  n'étaienl   pas  assujettis  à  cette  loi,  puisque  tous 
ils  devaient  consacrer  leur  vie  au  service  du  Seigneur. 
—  9"   Le  prix  du  rachat  était  uniformément   de  cinq 
sicles,   pour    les    riches    comme     pour     les    pauvres. 
Cf.  Philon.  De  priemiis  sacerdolum,    1,  édit.  Mangey, 
t.  il,  p.  233.  Ce  prix  appartenait  au  prêtre,  Num.,  xvm. 
15.  sans  doute  en  tant  que  remplaçant  du  premier-né, 
La  loi  n'obligeait  nullemenl  à  présenter  le  premier-né 
au  Temple.  Cependant,  après  la  captivité,   on   paraît 
avoir  pris  l'habitude  de  celle  démarche.   II  Esd.,  x. 

36.    On    profilait   pour    cela    de   la    \isile    que   la    mère 
avait  à   \  faire  après  la  naissance  d'un  enfanl.   Lev., 


xii,  2-8;  mais  rien  de  particulier  n'était  prescrit  au  sujet 
de  ce  dernier.  La  Sainte  Vierge  se  conforma  à  l'usage 
des  pieux  Israélites  en  ce  qui  concernait  la  présenta- 
tion du  divin  Enfant.  Le  trentième  jour  après  la  nais- 
sance, elle  avait   remis  ou  fait  remettre  au  prêtre  les 
cinq  sicles   d'argent  (environ    17    fr.   50,  voir    t.    tv, 
col.   1254)  imposés  par  la  Loi.  Num.,  xvm,  16.  Quand 
elle  vint  au  Temple,  après  les  quarante  jours  de  réclu- 
sion   qui   lui    étaient  prescrits,  Lev.,    xn,  2-4,  elle   et 
Joseph  eurent  l'intention  de  présenter  l'Enfant  au  Sei- 
gneur. Luc,   H,  22.  Les   deux   oiseaux    offerts   à  celte 
occasion   étaient   destinés  au  sacrifice  de  purification 
pour  la  mère,  et   non    au   rachat  de   l'Enfant,  comme 
on  le  dit  quelquefois  à   tort.   Cf.  Bossuet,   Serm,  pour 
la  Purification,   1658,  2e  part.;  Elëv.  sur   les   myst., 
xvme  serm.,  iv,  Bar-le-Duc,  1870,  t.  v»,  p.  233;  t.  vin, 
p.  508.  Bossuet  peut  s'appuyer  sur  la  liturgie  de  la  fête 
de  la  Purification,  qui  répète  plusieurs  fois  :  obtulerunt 
pro  eo  par  turturum.  Cette  allégation   liturgique  est 
conforme  à  l'interprétation  du   texte  du  Lévitique,  xn, 
0,   par  saint   Augustin,  In   Heptat.,   m,  40,   t.   xxxiv, 
col.  695-696.   Mais  le  saint  Docteur  n'explique  ainsi  le 
texte  que  par  suite  d'une  ponctuation  défectueuse.  — 
10»  Les  juifs  restèrent  fidèles  à   l'accomplissement  de 
cette   loi,   même  après    la   destruction    du  Temple.  Le 
trente-et-unième  jour  après   la  naissance   du  premier- 
né,  ils  invitaient  le  prêtre  à  un  festin  et  lui  versaient 
les  cinq  sicles.  Ce  festin  se  célébrait  même  un  jour  de 
jeûne,  mais  se  remettait  au  lendemain  si  le  Irente-et- 
unièine  jour  coïncidait  avec  le  sabbat.  Si  le  père  mou- 
rait avant  cette  date,  la  mère  n'était  pas  obligée  de  ra- 
cheter l'enfant.    Elle   lui    mettait   au   cou   une    petite 
plaque  portant  les  mots  :  bekôr  Sélô'  nipdd/i,  «  premier- 
né   non    racheté'   »,  et  lui-même  se    rachetait    une   fois 
adulte.  Les  lilles  de  prêtres  et  de  lévites,  mariées  à  de 
simples  Israélites,  étaient,  comme  leurs  pères,  exemptes 
de  l'obligation  du  rachat.  Cf.  Iken,  Antiquitates hebraiese, 
Brème,  1741,  p.  516.  —  11°  Jésus  est  appelé  le  s  pre- 
mier-né'     de  Marie.  Matth.,  i.  25;  Luc,  M,  17;  Heb.,  I, 
6.  L'enfant  premier-né  était  en  effet  bekôr  tout  en  res- 
tant  fils  unique.   Zacharie,  xn,  10,  met  en   parallèle  le 
ydhid,  «  fils   unique  »,  et  le  bekôr.  —  La  Sagesse  est 
«  première-née  avant  toute  créature,  »  d'après  une  ad- 
dition de  la  Vulgate,  Eccli.,  xxiv,  5,  et  le  Verbe  incarné 
est  '  né  avant  toute  créature,  »  Col.,  I,  15,  le  premier- 
né'  d'un  grand   nombre  de  frères,   Rom..   VIII,  29,  en- 
fants  par  adoption  d'un  Père  dont  il  est  fils  par  nature, 
et.  par  sa  résurrection  glorieuse,  «  premier-né  d'entre 
les  morts.  »  Apoc,  I,  5. 

II.  Les  premiers-nés  des  animaux.  —  ]«Des  l'origine, 
les  premiers-nés  des  animaux  ont  été  considérés  comme 
ayant  une  valeur  plus  grande.  Deut.,  xxxm,  17.  Déjà 
A I .t-l  offrait  au  Seigneur  les  premiers-nés  de  son  trou- 
pe.,!], r.en.,  iv,  i.  —  2"  A  la  dixième  plaie  d'Egypte,  les 
premiers-nés  du  bétail  furent  frappés  comme  ceux  des 
hommes,  Exod.,  xi,  5;  xn,  29.  Aussi,  en  retour,  Dieu 
voulut-il  que  les  premiers-nés  des  animaux  lui  fussent 
réservés,  Exod,,  xiii.  2;  Xum.,  m.  13.  —  3°  Les  mâles 
premiers-nés  des  animaux  devaient  être  immolés,  connue 
appartenant  à  Jéhovah.  Le  premier-né'  de  l'âne  pouvait 
cependant  être  racheté  pour  un  agneau  et  à  défaut  de 
rachat,  on  devait  lui  briser  la  nuque.  Exod.,  xiii.  13; 
xxxiv,  20.  L'âne  était  l'objet  de  cetfe  exception  à  cause 
di  sa  -lande  utilité  pour  les  Israélites.  Voir  Ane,  t.  i, 
col.  566.  On  rachetai!  également  les  premiers-nés  des 
animaux  impurs  et  le  prix  en  revenait  aux  prêtres,  mais 
on  immolait  les  premiers  nés  du  bœuf,  de  la  brebis  et 
de  la  chèvre.  Num..  XVIII,  15-18.  Ces  derniers  devaient 
être  amenés  au  sanctuaire,  Dent..  XII,  6, el  c'est  là 
lemeiit  que  les  prêtres  et  les  lévites  pouvaient  mangi 
la  part  qui  leur  en  revenait.  Deut.,  XII,  17.  IS;\i 
Il  était  défendu  de  faire  travailler  le  premier-né'  du 
boni'  et  de  tondre  le  premier-né'  de  la  brebis.  Si  le  pre- 


005 


PREMIER-NÉ   —   PRÉMONTRÉS    (TRAVAUX    DES) 


006 


raier-né  était  aveugle,  boiteux,  atteint  d'un  défaut  ou 
d'une  difformité  quelconque,  on  ne  l'offrait  pas  en  sacri- 
lice  et  on  pouvait  le  manger  là  où  l'on  résidait,  sans 
aucune  condition.  Deut.,  xv,  19-23.  —  4°  La  tradition 
juive  a  interprété  ces  différentes  lois  dans  le  traité  Be- 
choroth  de  la  Misohna.  Les  prêtres  et  les  lévites  étaient 
tenus  à  l'offrande  des  premiers-nés,  mais  seulement  des 
animaux  purs.  Cf.  Beclioroth,  n,  1  ;  Midr.  Mechilta,  15, 
2.  Les  premiers-nés,  comme  les  prémices,  devaient  être 
amenés  de  toute  la  terre  d'Israël.  Cf.  Themura,  m,  •">. 
On  devait  également  offrir  ceux  qu'on  introduisait  dans 
le  pavs.  —  Si  l'on  n'avait  pas  d'agneau  pour  racheter  le 
premier-né  de  l'àne,  on  en  donnait  le  prix,  fixé  d'après 
.losèphe,  Ant.  jud.,  IV.  iv,  4,  à  un  sicle  et  demi.  A 
défaut  de  rachat,  on  frappait  l'animal  et  on  l'enterrait. 
D'après  Philon,  De  prsem.  sacerdot.,  1,  les  premiers- 
nés  des  animaux  impurs,  cheval,  àne,  chameau,  se  ra- 
chetaient à  prix  d'argent,  sur  l'estimation  du  prêtre, 
avec  majoration  d'un  cinquième.  —  Les  premiers-nés 
des  animaux  purs  devaient  être  amenés  aux  prêtres  de 
service  dans  le  Temple,  au  cours  de  leur  première 
année,  comptée  cependant  à  partir  du  huitième  jour 
après  la  naissance.  L'animal  était  égorgé  dans  le  par- 
vis, son  sang  versé  aux  pieds  de  l'autel,  les  parties  in- 
térieures brûlées  sur  l'autel  après  addition  de  sel,'et 
le  reste  cuit  au  gré  des  prêtres  et  mangé  par  eux  à 
l'intérieur  de  Jérusalem.  Cf.  Sebachim ,  v,  8.  —  Le 
premier-Hé  atteint  d'un  défaut  congénital,  ou  contracté 
ensuite,  ne  pouvait  servir  de  victime.  Mais  il  était  sacré 
à  raison  de  sa  naissance,  et  on  le  remettait  aux  prêtres 
qui  pouvaient  en  manger  partout,  ou  le  vendre  à  d'autres 
qui  le  mangeraient  à  condition  de  ne  pas  le  mettre  dans 
le  commerce.  Cf.  Maaser  caheni,  i,  2.  —  Les  défauts  du 
premier-né  pouvaient  être  manifestes  ou  douteux,  passa- 
gers ou  permanents.  Des  mandataires  du  sanhédrin 
étaient  chargés  de  faire  des  inspections  à  ce  sujet. 
Cf.  Reland,  Antiquilales  sacrse,  Utrecht,  1741,  p.  185- 
188;  Schùrer,  Geschichte  des  jùdischen  Volkes  imZeit. 
J.-C,  Leipzig,  t.  H,  1898,  p.  253-254.  -  5»  Dans  Job, 
xviii,  13,  le  «  premier-né  de  la  mort  »  est  la  maladie 
très  cruelle  qui  conduit  infailliblement  à  la  mort.  En 
arabe,  les  fièvres  mortelles  sont  aussi  appelées  «  tilles  de 
la  mort  ».  Cf.  Frz.  Belitzsch,  Das  Bucli  Job,  Leipzig,  1876, 
p.  231.  Un  Targum  traduit  l'expression  hébraïque  par 
mal'ak  môld',  «  ange  de  la  mort  »,  un  autre  par  ëêrùi/ 
môtâ',  «  prémices  de  la  mort  »,  les  Septante  par  ôSpaîa 
6ivaTo;,  «  le  temps  convenable  de  la  mort  »  et  la  Vul- 
gate  par  primogenita  mors,  «  mort  première-née  », 
sans  doute  dans  le  sens  de  «  mort  prématurée  ».  Dans 
Isaïe,  xiv,  30,  les  c<  premiers-nés  des  pauvres  »  sont  les 
plus  pauvres  de  tous.  II.  Lesêtue. 

PRÉMONTRÉS  (TRAVAUX  DES)  SUR  LES 
SAINTES  ÉCRITURES.  L'ordre  des  Prémontrés  a 
été  fondé  par  saint  Norbert  de  Gennep,  né  à  Xanten 
(duché  de  Clèves)  en  1080  (1085),  mort  le  6  juin  1131. 
11  fut  chanoine  régulier  de  Xanten  et  fonda  un  ordre 
de  chanoines  réguliers  à  Prémontré,  dans  le  diocèse  de 
Laon  (1120).  Il  devint  archevêque  de  Magdehourg  en 
1126.11  fut  canonisé  en  1582.  —  Xous  donnons  ici,  d'après 
l'ordre  chronologique,  les  principaux  ouvrages  des 
Pré  iiontrés  relatifs  aux  Saintes  Écritures. 

I.  Introductions  aux  saintes  Écritures.  —  l.Ulin,ou 
Ulinus  Guillaume  (date  ?),  De  studio  linguœ  sanclse, 
Ingolstadt.  1513.  —  2.  Mansuy  Nicolas  (1690),  Disser- 
tation sur  les  années  et  époques  de  l'Ancien  Testa- 
ment, pour  redresser  les  erreurs  de  certains  chro- 
nologistes,  Clef  du  Cabinet  de  Luxembourg,  novem- 
i  'e  1749.  —  3.  Nauwens  Corneille  (f  1774),  Antilogiœ 
alimque  diffieultates  sefipturisticas  amplificatse,  5  in-8" 
ms.  —  4.  Kips  Jean  Baptiste  (1716-1793),  Compendiosum 
Sacrse  Scripturœ  Diclionariuni  ail  scripturisticarum 
historiarum  nolitiam.  Ex  ipsa  Sacra  Scriptura,  Flavio 


Josepho,  aliisque  sac  ris  historicis  deduclum  et  concin- 
natum,  in-8",  Louvain,  1779;  Synopsis  Sacrse  Scripturœ, 
3  vol.  ms.  —  5.  Zasio  André  Maximilien  (1741-1816), 
Hermeneuticse  seu  ratio  inlerprelandi  Sacrant  Scrip- 
turam  Antiqui  FœUeris,  1796,  in-8»;  Hermeneuticse 
Xeteris  Testamenti  partes  duœ,  in-8°,  Pesth,  1796-1797; 
Hermeneutica,  seu  ratio  inlerprelandi  Sacram  Scrip- 
turam  Novi  Fœderis,  i-m  Tomi,  Pesth,  1796;  editio 
2'i»,  Vacii-VVaitzen,  1801-1802.  -  6.  Jahn  Martin  Jean 
1 1750-1806),  Einleilung  in  die  gôlllichcn  Schriflen  des 
allen  Ilundes,  in-8°,  Vienne,  1792.  Cette  première  édi- 
tion fut  suivie  d'une  nouvelle  :  Zweyteganz  umgearbei- 
tele  Au/lage,  4  in-8°,  Vienne,  1802;  Biblische  Archâo- 
logie,  trois  parties  en  5  in-8»,  Vienne,  1797-1804;  lntro- 
ductio  in  libros  saci'os  Veleris  Fœderis.  In  epitomen 
redacla  a  Johanne  Jahn.  Editio  secunda  emendata, 
in-8",  Vienne,  1814;  Archœologia  Biblica  in  compen- 
dium  redacta  a  Johanne  Jahn,  in-8",  Vienne,  1805; 
Editio  altéra  emendata,  in-8»,  Vienne,  1814;  3e  édi t.,  1826, 
par  Ackermann;  ¥  édit.,  2  in-8»,  Vilna,  1829-36;  Bibha 
Hebraica  digessitet  graviores  lectionum  varietales  ad- 
jecit  Jo/iannesJahn,  4  in-8».  Vienne,  1806;  Enchiridion 
Hermeneuticse  generalis  tabularum  Veleris  et  Novi 
Fœderis,  in-8»,  Vienne,  1812;  Appendix  Hermeneuticse- 
seu  exercitationes  exegeliese.  Vaticinia  de  Messia, 
Fasciculi  duo.  in-8",  Vienne,  1813  et  1815;  leremias, 
MS.  latin,  in-4°.  —  6.  Stoppani  Charles  Antoine  Jean-Bap- 
tiste (1778-1836),  Sâtze  aus  der  biblischen  Auslegungs- 
kunde,  den  biblischen  Allerthimiem  und  der  Einlei- 
tung  in  die gôltlichen  Bûcher,  in-8»,  Prague,  1805-1812  ; 
Dissertatiode  sludii  biblici  Veleris  Testamenti,  quan- 
tum ad  christianos  theologos  atlinet,  necessitate  ac 
prœslantia,  Prague,  1809;  Einige  ldeen  zur  Beurthei- 
lung  des  moralischen  Theiles  des  allen  Blindes,  dans 
Frints'  theol.  Zeitschrift,  2"  Jahrg.,2"  Band,  1"  Heft. 

—  8.  Koppmann  Adolphe  Jean  (1781-1835),  Hermeneu- 
tica biblica,  a  Cl.  Altmanno  Arigler  édita  (Viennae, 
1813),  fuit  ab  eximio  Dre  Adolpbo  Koppmann  scriptote- 
nus  emendata.  —  9.  Gûntner  Gabriel  Jean  Baptiste  (1804- 
1867),  Hermeneutica  biblica  generalis  juxta  principia 
catholica,  in-8",  Prague,  1848;  2"  édit.,  1851;  3"  édit., 
Prague,  1863;  Inlroduclio  in  sacros  Novi  Testamenti 
libros  historico-critica  et  apologetica,  in-8",  Prague, 
1863.  —  10.  Dallos,  Szekeres  et  Wentko  ont  publié  une 
revue,  qui  a  pour  titre  :  .4  Biblia  es  a  Tudomàny  (La 
Bible  et  la  Science),  depuis  1896,  in-4°,  à  Budapest. 

—  11.  Crets  Gommaire  Joseph  (né  en  1858),  De  divina 
Bibliorum  inspirations;  dissertatio...,  in-8°,  Louvain, 
1»86.  —  12.  Kortleitner  François-Xavier  Joseph  (né  en 
1863),  Archseologiœ  Biblica:  Summarium,  in-8»,  ins- 
pruck,  1906;  De  poh/theismo  universo...  apml  Hebrseos 
/initimasque  génies  usilalis,  in-8»,  Inspruck,  1908. 

II.  Traductions  des  saintes  Ecritures.  —  1.  Gebhard 
(f  1191),  Psalmen  Verdeutscliung,  1174.  —  2.  Carré  Ré- 
mi (1706-1773),  Psaumes  dans  l'ordre  historique, nouvel- 
lement traduits  sur  l'hébreu.  —  3.  Klimesch  Philippe 
Mathieu  (1S09-1886),  Codex  Te)>lensis,  enthallend  die 
Schrift  des  neuen  Gezeuges.  I  Theil  :  Die  vier  heili- 
gen  Evangelien.  II"  Theil  :  Die  Hriefe  S.  Pauli, 
III"  Theil  :  Die  Briefe  S.  Jacobi,  S.  Pétri,  S.  Johannis, 
S.  Judse,  das  Botenbuch,  und  S.  Joliannis  Oflenba- 
rung,  nebsl  drei  An/uingen,  in-4°,  Augsbourg-Municli, 
1881. 

III.  Commentaires  sur  les  saintes  Écritures.  —  1. 
S.Xorbert  (f  1134),  archevêque  de  Magdebourg.  On  lui 
attribue:  Commentarii  sive  Interpretaliones  in  aliquot 
libros  S.  Scripturœ.  —  2.  Luc  du  Mont-Cornillon 
(+1179),  In  Evangelium  Matlhaei  liber  unus;  InEvan- 
gelium  Joannis  liber  unus;  In  Apocalypsin.  —  3.  Phi- 
lippe de  llarvengt  (fll82)  Commentarius  mysticus  ei 
moralis  in  Canlica  canticorum  Satomonis,  in-f», 
mdcxxi.  —4. Gebhard  (f  1191),  CommenlariainS.  Pau- 
lum  (1160);  Interpretatio  Apocalypseos  (1156) ;  Expo- 


607       PRÉMONTRÉS    (TRAV.    DES)    SUR    LES   SS.    ÉCRIT.    —   PRÉSENT      608 


sitioin  Genesim,  Exodum,  Leviticum,  librum  Nume- 
rorum,  Deuteronomium  el  Josue  (1164);  Explanatio 
Psalmorum  (1170);  Vocabularium S .  Scripturx  (1189). 
—  5.  Zacharias  Chrysopolitanus  (xne  siéclei.  In  ttniun 
ex  quatuor  sive  de  concordia  Evanjelistarum,  libri 
quatuor,  l"  édit.,  in-f",  1473;  2e  édit.,  in-f",  1535; 
'.',•  édit.,  Cologne,  1618.  —  6.  Jean  d'Abbeville  (vers 
1210),  Glossa  in  Genesim;  Commentaria  in  libros  Exo- 
di  cl  Levillci  ;  Commentaria  in  Numéros,  Deuterono- 
mium .  tu  Cantica  canticorum,  et  in  Isaïam  ;  Commcn- 
taria  in  Danielem,  Tobiam,  Judith  et  Est  fier;  Glossa 
in  Psalterium,  3  in-f°;  Commentaria  in  Acta  Apostolo- 
rum.  —  7.  Lensius  ou  de  Lens  (Eustache)  (né  vers  1170, 
vivait  encore  en  1220),  Seminarium  verbi  Dei  (diction- 
naire biblique);  Detropis  et  schematibus  .S.  Scripturse  : 
De  mysteriis  S.  Scripturse  ;  Cosmographiae  Moysis  Li- 
bri III;  on  lui  attribue  encore  des  Commentaires 
sur  la  Genèse,  l'Exode,  le  Lévitique,  le  Deutéronome, 
et  sur  les  Paralipoménes.  —  8.  Jacques  d'Arras  (Jaco- 
bus  Atrebas,  1227),  In  ultimom  visionem  Ezechielis, 
liber  unus.  —  9.  (Servais  (-j-  1228),  Commentant  litté- 
rales in  Psalmos ;  Commentarii  littérales  in  minores 
Prophrtas  (ces  deux  ouvrages  n'existent  qu'en  manus- 
crit). —  10.  Jaricus  (f  1240),  Commentaria  in  Genesim 
et  Commentariain  Cantica  canticorum  (ms).  —  ll.Hay- 
tbo,  vel  Haythonus  (commencement  du  xive  siècle), 
Commentarius  in  Apocalypsin  (inédit).  —  12.  Pierre  de 
Lutra,  ou  de  Kayserslauter  (vivait  dans  la  l"  moitié 
du  xivsièele),  In  Evangelium  S.  Joannis,  liber  unus. 

—  13.  Pierre  de  Herenthals  (1322-1391),  Collectarius 
Evumjcliorum,  1364,  2  in-f";  Collectarius  super 
librum  Psalmorum,  in-f",  1480,1483,  1487,  1488,  1494, 
1498,  1504,  etc.;  In  septem  Psalmos  psenitentiales  Com- 
mentarius (ms.);  In  XV  Cantica  graduum  liber  1  (ms). 

—  14.  Thomas  de  Vicogne  (vers  1308);  on  lui  attribue: 
Commentarii  in  Cantica  canticorum,  liber  unus; 
In  librum  Job.  —  15.  Lheureux,  ou  Félix  Thomas 
éf  1420)   :    Annolaliones   in  Psalmos    Davidicos    (ms). 

—  16.  l'Un,  ou  Ulinus  Guillaume  (vers  le  milieu  du 
XVIe  siècle),  Commentationes  m  Epistolam  sancti  Pauli 
ad  homanos,  ms.  in-4».  Le  manuscrit  n>  (5333  de  la 
bibliothèque  royale  de  Munich  a  pour  titre  :  (S.  Qlini 
Commentationes  in  sancti  Pauli  Epistolas  cl  in  Vil 
Epistolas  canonicas,  in-8»,  1533.  —  17.  Motzhart  An- 
toine (-j- 1544),  A  nnotationes  in  Evangelium  sancti  Joan- 
nis. —  18.  De  Quixada  Thomas  (1588),  Sermones  exege- 
tici  in  Sacrum  Sa'ipturam.  — 19.  Manar  {ou  Mannaert) 
Jean  1 1583-1033).  .1  nnotationes  in  Novum  Teslamentum 
(ms).  —  20.  l'abri  Christophe  (f  1645).  On  lui  attribue 
les  ouvrages  suivants  :  Commentaires  stir  les  livres 
deMoyse;  Commentaires  sur  Tobie;  Commentaires 

sur    1rs    Psaumes  de  David.    —   21.  Ilempfer   G 'ges 

(■j-  1048),  Exegesis  Psalmorum.  —  22.  Balavenus  Augus- 
tin, ou  Balavoine  (vivait  vers  le  milieu  du  xvnc  siècle), 
Paraphrasis  mystica  in  Canticum  canticorum.  Il  tra- 
duisit ce  même  ouvrage  en  français.  (Rien  ne  fut  im- 
primé, pour    autant  que  nous  le   savons  du    moins.) 

—  23.  Tineo  de  Morales  Louis  (1660),  Bexameron  com- 
menta rm  litterali  ac  morali  illustration.  —  24.  .Noizct 
Henri  (t  1670),  Annotationes  in  Epistolas  B.  Pauli. 
Manuscrit  de  1578,  in-f",  biblioth.  d'Averbode.  —  25.  De 
Estrada Gijon Jean  (fvers  1070),/»  Exodum.  —  20.  Ma- 
clot  Edmont  (1639-1711),  Histoire  de  l'Ancien  Testament, 
Nancy.  1705,  in-8";  Histoire  du  Nouveau  Testament  nu 
du  sixième  âge  du  monde,  divisé  en  deux  parties.  Avec 
des  réflexions  théologiques,  murales,  critiques  et  chro- 
nologiques, in-8",  Paris.  1712.  —27.  (F.rtle  Eusèbel  1654- 
1721  i,  Commentarius  in  Psalterium  Davidis.  —  28,  Reif- 
fenberger  Norbert  (1694-1764),  Varuc  Qusestiones  in 
Historias    Genesis  et  Judicum,  cum  Resolutionibus, 

20.  liéraneck  lingues  |-j-  1771),  Calechesis  scripturi- 
stica  m  l'eninienelium.  —  30.  Caenen  Candide  Jean 
Joseph  Mathias  Antoine  (1749-1811),  Commentaria  in 


Actus  Aposlolorum,  ms.  in-f°;  Commentaria  in  Psal- 
mos, 3  in-4"  ms;  Brcriarium  historicum  Veteris  ac 
Novi  Testament},  1775.  ms.  in-4»  (Bibliothèque  d'Aver- 
bode).—31.  L'Ecuy  Jean-Baptiste  (1740-1834),  auteur  du 
8e  et  dernier  volume  de  l'ouvrage  de  Bassinet  :  His- 
toire sacrée  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament, 
Paris,  1804-1806.  Ce  dernier  volume  contient  les  Actes 
des  Apôtres  et  l'Apocalypse,  in-8»;  La  Bible  de  la 
jeunesse  (96  figures),  2  in-8»,  Paris,  1819;  2e  édit.; 
Abrégé  de  l'Histoire  de  la  Bible  (24  ligures),  in-12°, 
Paris,  1812.  —  A  cet  ouvrage  est  ajouté  un  Nouvet 
Altos  de  la  Bible,  pour  servir  à  l'intelligence  des 
livres  sacrés  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament, 
Paris,  1809,  grand  in-f";  La  Bible  de  la  jeunesse,  par 
l'Ecuy,  reçut  de  grands  éloges  lors  de  sa  publication. 

—  32.  Seerwart  Ilerman-Joseph  (1752-1828),  Thèses  sacrx 
ex  septem  Epistolis  catholicis,  et  Apocalypsi  S.  Joan- 
nis, in-4°,  Anvers,  1777;  Thèses  sacras  ex  prioribus 
capitibus  Evangeliisecundum  Joannem,  Louvain,  1778. 

—  33.  Gûntner  Gabriel  Jean-Baptiste  (1804-1867),  Com- 
mentarius in  Evangelium  S.  Malthœi  (cet  ouvrage, 
annoncé  dans  la  préface  des  2e  et  3'  éditions  de 
l'Hermeneutica  du  même  auteur,  est  peut-être  resté 
manuscrit).  —  34.  Wentko  Justin  François  (né  en  1848  . 
Exegesis  in  Libros  sacros  (Hongrie),  1881.  —  35.  Ma- 
gashazy  Antoine  Adalbert  (né  en  1861),  A  négu  evange- 
lium hasonliisétga  es Eûlônbôrôsège  (Die  Einheil  und 
Vcrschicdenheit  der  vier  Evangeliën),  in-8»,  Keszthcly, 
1890.  —  30.  Kortleilner  François  Xavier  Joseph  (né  en 
1863),  Canticum  canticorum  explicatum  el  prsecipue 
ad  historiam  Ecclesias  applicatum,  in-8»,  Inspruck, 
1802.  —  37.  Daniel  (dates  inconnues),  In  Apocalypsin 
B.  Joannis  Commentariorum  liber. 

IV.  Bibliographie.  —  Dupré  (Maur.),  Annales  brèves 
ordinis  Prxmonstratensis, 2e  édit.,  in-8",  Namur,  1880; 
Kohel  Sigismond.  Prxmonstratensis  ordinis  nonnul- 
lorum  patrum  vitx  ex  variis  aut/ioribus  collecta;, 
in-4»,  1608;  Le  Paige.  Bibliotheca  Prmmonstratensis 
ordinis, %  in-f",  Paris,  1633;  Lienhart  Georges,  Spiritus 
literarius  Norbertinus...  seu  sylloge  viros  ex  ordine 
l'ricmonslralensi,  scriptis  et  doctrina  célèbres  neenon 
eorumdem  vitas,  res  gestas,  opéra  et  scripta  tum  mé- 
dita perspicue  exhibais...,  in-4».  Augsbourg.  1771; 
Miraeus  (.4ub.),  Chronicon  ordinis  Prxmonstratensis, 
in-8".  Cologne.  1613;  Ulysse  Chevalier,  Répertoire  des 
sources  historiques  du  moyen  âge,  Topo-Bibliographie, 
in-8»,  Montbéliard,  1891-1903,  p.  2455;  Léon  Goovaerts, 
Ecrivains,  artistes  et  savants  de  l'ordre  des  Pré- 
montrés, Dictionnaire  bio-bibliographique,  2  in-4". 
Bruxelles,  1899-1908.  J.  .1.  Fim.n. 

PRÉPUCE.  Voir  Circoncision,  i.  ii,  col.  772. 

PRÉSENT   (hébreu    :    berdkdh,    o   bénédiction   »; 

maffân,  maftanâh,  mattat.  île  nàfan,  o  donner  »; 
Sohad,  île  idhad,  i  donner  »;  maéia  .  mai'êf,  de  misée 
•<  porter  s  ;  minhâh,  nedâbàh,  nêdéh,  (erûmdh,  (eSû- 
râh,  salmnnim;  chaldéen  :  matfon,  nebizbdh;  Sep- 
tante :  Sôiia,  Sûpov  ;  Vulgate  :  donum,  donarium,dona- 
tio,  munus,  munusculum),  chose  que  l'on  donne  à 
quelqu'un  sans  y  être  obligé  en  justice.  (In  peut  distin- 
guer les  présents  en  trois  sortes,  suivant  la  pensée  qui 
les  inspire. 

I"  Présents  gracieux.  —  Ce  sont  ceux  qui  sont  faits 
par  amitié,  par  reconnaissance,  par  charité  ou  par 
respect.  1.  Tels  sont  les  présents  d'Abraham  à  ses  con- 
cubines, Gen.,  xxv,  6;  d'Eliézer  à  Rebecca,  à  son  frère 
cl  a  sa  mère,  Gen..  xxiv.  53;  de  Jacob  à  Ësaù,  Gen.,  xwn. 
Ii,  19,  21; xxxiii,  Ujd'AbigaïlàDavid,  IReg.,  xxv,  "7. 
de  David  ans  anciens  de  Juda,  1  Reg.,  xxx,  26;  •  •■ 
Saloinon  à  la  reinede  Saba,  111  Reg.,  \.  13;  de  ses  sujets 
et  de  ses  voisins  à  Salomon,  111  Beg.,  i\,  21;  x.  25; 
II  Par.,  IX,  24;  de  tout  Juda  à  Josaphat,  Il  Par.,  xvn, 


609 


Présent  —  présentation  de  jésus  au  temple 


610 


5;  de  Josaphat  ù  ses  enfants,  II  Pat'.,  xxi,  3;  de  Méro- 
dach  Baladan  à  Ézéchias,  IV  Reg..  xx,  12;  Is.,  xxxix. 
t;  de  ses  sujets  à  Ézéchias,  II  Par.,  xxxn,  23;  du  chef 
chaldéen  à  Jérémie,  .1er.,  xl,  5;  de  Xabucliodonosor  à 
Daniel,  Dan.,  Il,  6.  48;  d'Assuérus  à  ses  invités, 
Esth.,  il.  18,  et  à  Mardochée,  Esth..  xn,  5;  de  Cyrus 
aux  captifs  israélites  qu'il  délivre.  Is.,  xi.v,  13; 
I  Esd.,  i,  4;  du  roi  de  Perse  aux  Juifs,  II  Mach.,1,35; 
des  .luifs  à  leurs  frères  indigents,  Esth.,  ix,  22;  des 
mages  à  Xotre-Seigneur,  Matth.,  n.  11;  voir  Mages, 
t.  iv.  col.  551;  des  rois  à  leur  médecin.  Eccli.,  xxxvm, 
2;  des  hommes  entre  eux  en  signe  d'allégresse,  Apoc, 
xi,  10,  etc.  Parmi  les  présents,  il  faut  ranger  les  dons 
qui  sont  faits  par  charité  aux  malheureux.  Voir  Ai- 
Mône,  t.  i,  col.  1244.  —  2.  Il  est  prédit  qu'un  jour,  à 
l'époque  du  Messie,  les  rois  et  les  nations  apporteront 
leurs  présents  à  Jérusalem.  Ps.  xi.v  (xliv),  13:  lxxii 
n.vxn.  20;  Tob.,  xm,  14.  I!  s'agit  ici  surtout  des  dons 
destinés  à  honorer  le  Seigneur.  Sur  ces  présents,  voir 
Oblatiok,  Offrande,  t.  iv,  col.  1725,  1758.  —  3.  Quel- 
quefois les  présents  gracieux  sont  refusés  par  ceux  qui 
devraient  les  faire,  I  Reg.,  x,  27,  ou  par  ceux  qui  pour- 
raient les  accepter.  Dan.,  v,  17.  —  4.  Les  présents  ont 
leurs  raisons  d'être  :  ils  font  plaisir  à  tous,  Prov..  xvii, 
8,  procurent  à  celui  qui  les  fait  des  amis,  Prov.,  xix, 
6,  et  même  des  bénédictions  temporelles,  Prov.,  xi.  25, 
et  sont  parfois  utiles  pour  calmer  la  colère.  Prov.,  xxi, 
14. 

2°  Présents  intéressés.  —  1.  On  les  fait  en  vue  d'un 
intérêt  légitime.  Hémor  offre  de  grands  présents  afin 
d'obtenir  que  Dina  soit  accordée  pour  épouse  à  son 
fils  Sichem.  Gen..  xxxiv.  12.  Sur  le  présent  ou  mohar 
que  l'époux  doit  offrir  aux  parents  de  l'épouse,  voir  Dot, 
t.  n.  col.  1496.  Jacob  envoie  des  présents  à  Joseph,  pour 
gagner  ses  bonnes  grâces.  Gen.,  xliii.  11,  25,  26.  Quand 
Saûl,  à  la  recherche  de  ses  finesses,  songe  à  consulter 
le  voyant,  il  se  prépare  à  lui  offrir  un  présent.  I  Reg., 
îx.  7.  Ainsi  procèdent,  vis-à-vis  d'hommes  de  Dieu. 
Jéroboam,  III  Reg.,  xm.  7;  Naaman,  IV  Reg.,  v,  15.  et 
Hazaël,  IV  Reg.,  vm.  8-9.  —  2.  Des  présents  sont  olferls 
à  des  rois  dont  on  veut  se  ménager  la  faveur.  Aod  est 
chargé  de  porter  des  présents  à  Eglon,  roi  de  Moab. 
Jud..  m.  15,  18.  De  cette  espèce  sont  les  tributs  plus 
ou  moins  volontaires,  mais  décorés  du  nom  de  pré- 
sents, qui  sont  payés  par  les  Moabites  à  David,  II  Reg., 
vm.  2,  6:  par  les  Philistins  à  Salomon,  III  Reg..  iv, 
21;  par  Asa  à  Benadad.  III  Reg.,  xv,  19;  par  Achaz  au 
roi  d'Assyrie.  IV  Reg.,  xvi,  8;  II  Par.,  xxvm,  21;  par 
les  Philistins  à  Josaphat,  II  Par.,  xvn,  11;  par  les 
Ammonites  à  Ozias,  II  Par.,  xxvi,  S;  par  Epliraim  aux 
nations  voisines,  Os.,  vm,  9;  par  Tryphon  à  .lonathas, 
I  Mach.,  xn.  43.  etc.  Le  roi  Osée  se  déroba  à  l'obliga- 
tion d'ollrir  des  présents  au  roi  d'Assyrie.  IV  Reg., 
xvn,  4.  —  3.  On  offre  des  présents  à  quelqu'un  pour  le 
gagner  ou  l'adoucir.  David,  pour  pallier  son  crime,  en- 
voie des  présents  a  Une.  II  Reg.,  xi,  8.  Antiochus  Épi- 
phane  en  otlre  à  Matathias  et  aux  Juifs  de  son  parti 
pour  qu'ils  se  soumettent.  I  Mach.J  il.  IS.  L'homme 
outragé  dans  son  honneur  de  famille  demeure  inflexible 
et  n'accepte  pas  les  présents.  Prov..  vi,  35.  —  Ces 
sur  s  de  présents  frayent  la  voie  à  un  homme  et  lui 
donnent  accis  auprès  des  grands.  Prov..  xvm,  16.  Mais 
ils  engendrent  facilement  des  abus.  Le  roi  qui  en  est 
avide  ruine  son  pays.  Prov..  xxix,  S.  Le  présent  injus- 
tement acquis  périra.  Eccli..  XL,  12.  Celui  qui  se  glo- 
rifie de  présents  trompeurs,  c'est-à-dire,  comme  traduit 
la  Vulgate.  qui  en  promet  mais  ne  les  donne  pas,  est 
un  nuage  ou  un  vent  sans  pluie.  Prov..  xxv,  14.  En 
somme,  celui  qui  hait  les  présents,  vivra.  Prov.,  xv.  27. 

3°  Présents  corrupteurs.  —  1.  Il  y  a  des  présents  in- 
fâmes, qui  sont  le  salaire  de  la  prostitution.  Ezeeh., 
xvi,  33.  —  2.  Bien  plus  fréquemment,  il  est  question 
dans  la  Sainte  Ecriture  de  la  corruption  introduite  par 

D1CT.   LE   LA   BIBLE. 


les  présents  dans  l'exercice  de  la  justice  publique.  La 
Loi  recommande  aux  juges  de  ne  pas  accepter  de  pré- 
sents. Exod.,  xvm,  8.  Il  est  dit  que  Jéhovah  ne  reçoit 
pas  de  présents  pour  rendre  justice,  Deut..  x,  17; 
II  Par.,  xix,  7:  que  les  juges  n'en  doivent  pas  rece- 
voir, parce  que  les  présents  aveuglent.  Deut..  xvi.  19.  et 
que  maudit  est  celui  qui,  pour  un  présent,  verse  le 
sang  innocent.  Deut.,  xxvn,  25.  Les  auteurs  sacrés 
rappellent  que  les  présents  corrompent  le  cœur,  Eccli., 
vu.  7:  qu'ils  aveuglent  les  sages  et  les  empêchent  de 
blâmer  ce  qui  est  mauvais,  Eccli.,  xx.  :il  :  qu'il  ne  faut 
pas  chercher  à  tromper  le  Seigneur  par  des  dons,  parce 
qu'il  juge  sans  tenir  compte  de  la  qualité  des  per- 
sonnes. Eccli.,  xxxv,  14.  —  3.  Le  juste  n'accepte  pas 
de  présents  au  préjudice  de  l'innocent.  Ps.  xv  ixivt, 
5.  Samuel  a  pu  se  rendre  ce  témoignage  qu'il  n'a  jamais 
reçu  de  présents  pour  fermer  les  yeux  à  la  justice. 
I  Reg.,  xii,  3.  En  général,  l'homme  juste  se  délie  des 
présents,  et  il  secoue  ses  mains  pour  n'en  pas  recevoir 
et  n'en  pas  garder.  Is.,  xxxiu,  15.  —  4.  Mais  le  méchant 
a  la  droite  pleine  de  présents,  soit  de  ceux  qu'il  a 
reçus  pour  mal  faire,  soit  de  ceux  qu'il  veut  donner 
pour  corrompre.  Ps.  xxvi  (xxv),  10.  Les  fils  de  Samuel 
recevaient  des  présents  au  détriment  de  la  justice. 
I  Reg.,  vm,  3.  D'autres  cachaient  des  présents  dans  le 
pli  de  leur  manteau  pour  gagner  les  juges.  Prov., 
xvn,  23.  Ceux-ci  se  laissaient  facilement  corrompre. 
Des  plaintes  sont  formulées  à  ce  sujet  par  Isaïe,  i,  23; 
v.  23;  l'.zéchiel,  xxii,  12:  Amos.  v.  12,  et  Michée, 
m.  11.  II.  Lesètre. 

1.  PRÉSENTATION  de  la  Sainte  Vierge  au  Temple 
de  Jérusalem.  Voir  Marie,  t.  iv,  col.  77S-780. 

2.  PRÉSENTATION     DE     JÉSUS    AU     TEWPLE.    — 

1»  Saint  Luc  raconte  que.  quand  les  jours  de  sa  (on  de 
leur)  purification  furent  accomplis,  «  Marie  et  Jo-eph 
portèrent  l'Enfant  à  Jérusalem  pour  le  présenter  au 
Seigneur,  suivant  ce  qui  est  écrit  dans  la  loi  du  Sei- 
gneur. «Luc,  u.22-24.  L'Evangéliste  vise  deux  lois,  celle 
qui  ordonnait  de  consacrer  au  Seigneur  tout  mâle  pre- 
mier-né, Niiin.,  vu.  17;  xvm,  16-17,  et  celle  qui  pres- 
crivait le  sacrifice  à  offrir  pour  la  purification  de  sa  mère 
quarante  jours  après  la  naissance  de  l'enfant.  Lev..  xn, 
2-4.  La  Sainte  Vierge  ayant  seule  à  ét»e  purifiée  légale- 
ment, on  comprend  que  la  Vulgate  parle  des  jours  de 
«  sa  purification  ».  Mais  la  plupart  des  manuscrits  grecs 
portent  ici  le  pluriel.  <•  leur  purification  ».  D'après  ce 
texte,  il  faut  comprendre  sous  le  nom  de  purification 
la  présentation  de  l'Enfant  et  le  sacrifice  de  la  mère,  et 
le  pronom  au  pluriel  concerne  Marie  et  Jésus,  présenté 
lui-même  à  son  Père.  Selon  la  loi,  Num.,  xvm.  16,  le 
premier-né  appartenait  au  Seigneur.  Mais,  comme  le 
service  direct  du  Seigneur  avait  été  réservé  à  la  tribu 
de  Lévi,  les  premiers-nés  qui  s'en  trouvaient  ainsi 
exemptés  devaient  être  rachetés,  au  prix  de  cinq  sicles 
d'argent,  à  l'âge  d'un  mois.  La  loi  ne  prescrit  pas  en 
termes  exprès  la  présentation  du  premier-né  au  Sei- 
gneur, mais  l'usage  avait  ainsi  interprété  la  loi  qui 
ordonnait  de  le  «  sanctifier  »  (consacrer  dans  le  texte 
hébreu)  à  Dieu.  Exod.,  xm.  2;  Num.,  vm.  17.  «  Quand 
les  jours  de  sa  (ou  de  leur)  purification  (les  quaranle- 
jours)  furent  accomplis,  dit  saint  Luc,  II,  22-23.  selon 
la  loi  de  Moïse.  Joseph  et  Marie  le  portèrent  à  Jérusa- 
lem pour  le  présenter  au  Seigneur,  comme  il  est  écrit 
dans  la  loi  du  Seigneur  :  Tout  mâle  premier-né  sera, 
consacré  au  Seigneur.  »  Plus  que  toute  autre  mère,  la 
Sainte  Vierge  devait  être  portée  à  offrir  au  Seigneur  son 
divin  Enfant.  Elle  savait  que  cet  Enfant,  destiné  au  seul 
véritable  et  efficace  sacrifice  pour  le  genre  humain, 
avait  hâte  de  faire  précéder  sa  future  immolation  d'une 
offrande  officielle  de  lui-même  dans  le  Temple.  D'autre- 
part,  elle   n'ignorait  pas  les  prophéties,  et,   sans   nul 

V.  -  20 


PRÉSENTATION    DE   JÉSUS   AU   TEMPLE   -   PRESSOIR 


611 

doute,  comprenait  que  Jésus  les  réalisait  par  sa  pré- 
sence :  «  .le  remplirai  de  gloire  cette  maison;...  grande 
sera  la  gloire  de  cette  maison,  la  dernière  plus  que  la 
première.  »  Agg.,  II,  7,  9.  «  Soudain  viendra  dans  son 
Temple  le  Seigneur  que  vous  cherchez,  l'ange  de 
l'alliance  que  vous  désirez.  Voici,  il  vient,  dit  Jéhovah 
des  armées.  »  Mal.,  m,  1.  Pendant  sa  vie  publique,  le 
Sauveur  devait  accomplir  ces  prophéties  dans  toute 
leur  plénitude.  Mais  il  ne  pouvait  attendre  jusqu'à  celte 
époque  pour  paraître  dans  la  maison  de  son  l'ère.  Car 
la  volonté  de  ce  Père  était  qu'il  y  fut  apporté  peu  après 
sa  naissance.  Le  saint  vieillard  Siraéon  avait  reçu  la 
promesse  «  qu'il  ne  mourrait  pas  avant  d'avoir  vu  le 
Christ  du  Seigneur  »,  et  il  fut  envoyé  dans  le  Temple 
pour  le  saluer,  pendant  que,  de  son  côté,  la  prophétesse 
Anne,  sur  le  déclin  de  sa  vie,  lui  rendait  hommage  et 
parlait  de  lui  «  à  tous  ceux  qui,  à  Jérusalem,  attendaient 
la  rédemption.  »  Luc,  II,  26-38.  Comme  cette  présen- 
tation n'était  pas  spécialement  réglée  par  la  loi,  les 
prêtres  n'eurent  pas  à  intervenir  pour  la  faire,  et  il  se 
trouva  que  Marie,  la  plus  pure  et  la  plus  sainte  des  créa- 
tures, eut  à  remplir  cet  oflice  extérieurement,  pendant 
qu'intérieurement  le  Verbe  incarné  renouvelait  l'of- 
frande qu'il  avait  faite  de  son  humanité  dès  le  premier 
instant  de  son  union  hypostatique.  Heb.,  x,  5. 

2°  La  présentation  du  Sauveur,  racontée  par  l'Evan- 
gile même,  fut  de  bonne  heure  l'objet  d'une  fête  chré- 
tienne. A  la  lin  du  iv«  siècle,  la  Peregrinalio  Silvise,  60, 
la  mentionne  comme  célébrée  à  Jérusalem  quadrage- 
sinise  de  epipliania,  «  le  quarantième  jour  de  l'épipha- 
nie  »,  c'est-à-dire  de  la  naissance  du  Sauveur,  selon  le 
langage  oriental.  Justinien  en  prescrivit  la  célébration 
dans  son  empire  en  542,  à  l'occasion  d'une  peste.  Les 
Grecs  appelaient  cette  fête  iîtaTtivvr,,  «  rencontre  »,  à 
cause  il.'  la  rencontre  au  Temple  de  Jésus  et  ses  parents 
avec  Siméon  et  Anne.  A  Rome,  elle  est  mentionnée  par 
lesacranienlaire  de  saint  Gélase,  II,  8,  t.  LXXIV,  col.  1 158, 
entre  492  et  l'Jli,  sous  le  nom  de  purificatio.  La  litur- 
gie latine  appelle  celte  fête  la  «  Purification  de  la 
I,.  \.  Marie  »;  mais  les  souvenirs  évangéliques  y 
liennent  nue  très  grande  place  et,  en  conséquence,  s'il 
y  est  question  de  la  très  sainte  Vierge,  il  y  est  encore 
plus  parlé  du  divin  Enfant,  des  prophéties  qui  annoncent 
son  apparition  et  des  circonstances  qui  accompagnèrent 
sa  présentation.  Cf.  Kellner,  Heortologie,  Fribourg-en- 
Brisgau,  1901,  p.  116-1 IK.  11.  Ij.siti.e. 

PRESLES    (Raoul  de),  traducteur   de   la    Bible  en 

français,  mort  en  1382.  Il  fut  avocat  général  au  parle- 
ment de  Paris  ei  puis  maître  des  requêtes  de  l'hôtel 
de  Charles  V,  roi  île  France.  Il  traduisit  et  composa 
plusieurs  ouvrages.  Nous  n'avons  à  mentionner  ici  que 
sa    traduction    française    des    Saintes    Ecritures.    Voir 

Françaises  (Versions)  de  la  Bible,  iv,  3,  t.  ni, 
col.  2960. 

PRESSENSÉ  (Edmond  de),  théologien  protestant, 
née  Paris  le  3  juin  1824,  mort  dans  celle  ville  le  8  avril 
1891.  Au  terme  de  ses  études  théologiques,  commencées 
à  Lausanne  (1842-1845)  sous  la  direction  de  Vitiet.  cl 
poursuivies  à  Halle  ci  a  Berlin  avecTholuck  et  Néander 
pour  maîtres,  Pressensé  l'ut  nommé  pasteur  de  l'église 
Taitbont  à  Paris  (1847).  En  187(1  il  résigna  ses  fonc- 
tions, pour  remplir  celles  d'aumônier  des  ambulances  à 
la  frontière.  De  retour  à  Paris  il  partagea  son  activité 
entre  la  politiqoe,  la  Revue  chrétienne,  fondée  par 
lui  en  1854  et  qu'il  dirigea  pendant  37  ans,  et  la  publi- 
cation de  nombreux  ouvrages.  Le  1 1  janvier  1890,  l'Aca- 
démie des  sciences  morales  et  politiques  lui  ouvrit  ses 
portes,  une  année  avant  sa  mort.  —  Sans  parler  des 
nombreux  articles  de  la  Revue  chrétienne,  relatifs  aux 
,  Indes  hililii|iics,  «m  a  de  lui  :  Histoire  des  trois  pre- 
mier» siècles  de  l'Église  chrétienne,  6  in-8»,  Paris, 


612 


1858-1877;  L'école  critique  et  Jésus-Christ,  in-8»,  Paris, 
1863;  Le  pays  de  l'Évangile,  in-12,  Paris,  1861;  Jésus- 
Christ,  son  temps,  sa  vie,  son  œuvre,  in-8"  et  in-12, 
Paris,  1866  (plusieurs  éditions);  Études  évangéliques, 
in-12,  Paris,  1867;  Saint  Paul  jugé  par  Renan, 
in-8»,  Paris,  1869.  —  Cf.  Théophile  Roussel,  Notice  sut- 
la  vie  et  les  intcres  de  M.  de  Pressensé,  in-8»,  Paris, 
1894.  0.  Rey. 

PRESSOIR  (hébreu : ga(,  ijéqéb,  pùrdh;  Septante: 
).ï)v6ç,  7cpoAÏ)viov,  iicoXriviov;  Vulgale  ;  torcular),  appa- 
reil servant  à  faire  sortir  le  jus  contenu  dans  les 
raisins,  les  olives,  etc. 

1»  Le  pressoir  se  compose  essentiellement  d'une 
cuve  dans  laquelle  on  fait  arriver  le  jus  des  fruits. 
Cette  cuve  s'appelle  gat,  Xyivo;.  Le  yéqéb  désigne  la 
même  cuve,  en  tant  que  placée  au-dessous  de  l'appareil 
à  pression,  -jnoATJvtov.  Le  7tpo).r,vio'/  est  la  cuve  platée 
non  plus  au-dessous,  mais  en  avant.  La  parait,  de 
pur,  «  broyer  »,  est  l'appareil  à  pression.  Le  torcular, 
de  torqueo,  «  tordre  »,  a  le  même  sens  que  pûrdh. 
Tous  ces  mots  d'ailleurs  désignent  l'ensemble  de 
l'appareil,  bien  qu'ils  n'en  nomment  qu'une  des  par- 
ties. Parmi  les  pressoirs  anciens,  il  y  en  a  qui  sont  à 
torsion.  Tel  est  un  pressoir  égyptien  se  composant  d 'un 


164.  _  Pressoir  égyptien  à  torsi.ni.  Béni  Hassan. 
D'après  Wilkinson,  Manners   and    cusfciffll    0/    the    ancien! 
Egyptians,  2'  édit.,  t.i,  fig.  160,  i 

sac  ohlong  et  perméable,  fixé  par  ses  extrémités  à  deux 
poteaux  (fig.  164).  Quand  le  raisin  est  enfermé  dans  le 
sac,  on  soumet  celui-ci  à  une  forte  torsion,  et  le  raisin 
comprimé  laisse  échapper  son  jus  dans  une  cuve,  qui 
est  un  CiitoÀT,v'<w  C'est  là  un  torcular  proprement  dit. 
D'autres  fois  le  raisin  est  foulé  aux  pieds  (lig.  165). 
Un  autre  pressoir  égygtien  (fig.  166)  consiste  en  un 
grand  récipient  dans  lequel  on  a  versé  le  raisin.  Sept 
hommes  le  foulent  aux  pieds,  en  se  tenant  par  les 
mains  à  des  cordes  qui  pendent  d'un  châssis  supéi  leur. 
Sur  deux  côtés  du  récipient,  des  cuves,  qui  sont  des 
Tupo^vio,  reçoivent  le  jus.  Beaucoup  de  monuments 
anciens  représentent  des  vendangeurs  qui  foulent  aux 
pieds  le  raisin  ou  d'autres  fruits  dans  des  cuves 
Cf  met.  cVarchét  .chrét.,  1. 1,  lig.  385,  col.  1616;  fig.387, 
col.  1617;  fig.  411,  col.  1643;  fig.  973,  col.  2871.  de 
|i;,ns  le  pressoir  à  levier  (lig.  167),  primitivement 
employé  en  Grèce  el  en  Italie,  une  lourde  pierre 
pesé  sur  les  raisins  ou  les  olives.  Ces  fruits  sont 
retenus  par  un  panier  ou  par  des  lattes.  Une  longue 
poutrelle,  articulée  à  l'une  de  -es  extrémités,  sert  a 
soulever  la  pierre  pour  placer  le  panier,  el  ensuite  a 
augmenter  ta  pression  par  la  pesée  que  des  hommes 
exercent  à  l'extrémité  libre.  Ce  pressoir  parvenait  à 
extraire  ce  qui  restait  de  .jus  dans  les  raisins  déjà  fou- 
lés ou  l'huile  dans  les  olives  déjà  écrasées.  D  autres 
pressoirs  moins  encombrants  furent  inventes  par  la 
suite  Cf  Hicli,  met.  des  antiquités  romaines  et 
grecques,  trad.  Chéruel,  Paris,  1873,  p.  655-659.  Les 
,'rcssoirs  a  huile  de  Palestine  ressemblaient  un  p.  a 
des  meules  à  blé.  Voir  t.  m,  lig.  157  col.  773.  Sur 
une  pierre  creusée  en  cm  elle,  une  meule  pouvait  tout 
ner    s,,it  à  la  ncin.  soit  à  laide  d'une  traverse  de  bois 


613 


PRESSOIR 


614 


passant  à  travers  la  meule  et  mise  en  mouvement  par 
des  hommes  ou  des  animaux.  —  «  Encore  aujourd'hui, 
en  Palestine  et  en  Syrie,  on  creuse  le  pressoir  dans  la 
vigne.   Le  raisin  est   entassé   sur  une  aire  de   fortes 


dans  la  Bible.  Le  pressoir  ou  la  cuve  sont  nommés 
pour  désigner  leurs  produits.  Num.,  xviii,  "27.  30; 
Deut.,  xv.'li;  xvi,  13;  IV  lteg.,  VI,  27.  Gédéon  battait 
son  froment  sur   son  pressoir,    c'est-à-dire  sur  l'aire 


163.  —  Pressoir  égyptien  dans  lequel  le  raisin  est  foulé  aux  pieds. 
'D'après  Wilkinson,  llanners  and  customs  of  anc.  Egyptians,  2'  édit.,  t.  n.  p.  192. 


dalles,  entourée  d'une  bordure  en  pierres  et  adossée  à 
une  muraille.  Là  il  est  foulé  aux  pieds,  puis  fortement 
pressé  à  l'aide  de  poutres  engagées  dans  le  mur.  Le 
moût  s'écoule  dans  des  fosses,  profondes  d'un  mètre. 


Xn  .-vuY^w.i  !  uiiiiiinii;nirm7~ 


166.  —  Grand  pressoir  égyptien.  Thèbes. 
D'après  Wilkinson.  Manners,  t.  i,  fig.  162,  p.  385. 

enduites  avec  soin.  Quand  il  y  a  déposé  ses  impuretés, 
on  le  porte  dans  une  chaudière  établie  tout  auprès,  où 
il  reçoit  une  légère  cuisson  avant  d'être  mis  en  barils 
pour  fermenter.  On  rencontre  quelquefois  des  pressoirs 


dallée  qui  servait  d'ordinaire  à  presser  le  raisin.  Jud., 
vi,  11.  Des  pressoirs  sont  signalés  près  du  Jourdain, 
Jud.,  vu,  25,  et  dans  le  voisinage  de  Sichem.  Jud.,  ix, 
27.  Job.  xxiv,  11,  parle  des  pauvres  gens  que  le  riche 
occupe  à  exprimer  l'huile  dans  ses  celliers  et  à  fouler  la 
vendange  au  pressoir.  Dans  une  vigne,  on  bâtissait 
d'ordinaire  une  tour  et  un  pressoir,  Is.,  v,  2;  Matth.,xxi, 
33;  Marc,,  xn,  1,  le  pressoir  pour  faire  le  vin  sur  place, 
la  tour  pour  y  poster  un  veilleur  chargé  d'écarter  les 
maraudeurs.  Voir  Tour.  Zacharie,  xiv,  10,  parle  de 
«  pressoirs  du  roi  »  attenant  à  l'enceinte  même  de  Jéru- 
salem, et  probablement  voisins  des  jardins  royaux,  au 
sud  de  la  ville.  Voir  t.  m,  col.  1132.  Gethsémani  marque 
l'emplacement  d'un  pressoir  à  huile.  Voir  t.  m,  col.  230. 
Les  villes  de  Geth,  «  pressoir  »,  Géthaïm,  «  les  deux 
pressoirs  »,  Gethhépher,  «le  pressoir  de  l'excavation  », 
ont  du  leur  origine  à  des  pressoirs.  Voir  t.  in,  col.  223, 
227.  228.  On  trouve  encore  en  Palestine  de  nombreux 
restes  d'anciens  pressoirs  (fig.  169).  plus  ou  moins  dé- 
formés et  enfouis  sous  la  terre  et  les  broussailles,  dans 
les  collines  du  sud  de  la  Judée,  entre  Hébron  et  Ber- 
sabée  ;  il  y  en  a  beaucoup  au  mont  Carmel  et  aux  en- 
virons de  Caïffa,  en  Galilée  et  spécialement  près  de 
Cédés.  Cf.  Tristram,  The  natural  History  of  tlw  Bible, 
Londres,  1889,  p.  409.  —  Néhémie  rappela  à  l'ordre 
des  hommes  qu'il  vit  fouler  au  pressoir  un  jour  de 
sabbat.  II  Esd.,  xm,  15.  A  l'Israélite  fidèle,  il  était 
promis  que  sa  cuve  déborderait  de  vin  nouveau.  Prov., 
m.   10.  Par  contre,  en  Moab,  châtié  par  le  Seigneur,  le 


167.  —  Pressoir  romain.  D'après  Rich,  Dict.  des  antiquités,  p.  656. 


de  ce  genre  tout  entiers  taillés  dans  le  roc.  »  Jullien. 
VÉgijpte,  Lille,  1891,  p.  261. 

2°  La   Palestine  était  un  pays  de  vignes.   Aussi  les 
pressoirs  sont-ils  l'objet  d'assez  nombreuses  mentions 


vendangeur  ne  foule  plus  le  vin  dans  les  cuves,  Is., 
xvi,  10,  et,  chez  les  Israélites  infidèles,  quand  on  venait 
au  pressoir  pour  y  puiser  cinquante  mesures,  il  n'y  en 
avait  que  vingt,  Agg.,  H,  17,  ou  bien  on  pressait  l'olive 


615 


PRESSOIR 


616 


et  le  raisin,  mais  on  n'en  jouissail  pas.  Mich.,  vi,  "15. 
Cf.  Ose.,  ix,  2.  —  On  chantait  et  on  poussait  des  cris 
de  joie  en  foulant  le  raisin  au  pressoir.  Le  Seigneur 
fait  dire  de  Moab,  Jer.,  xi.vin.  33  : 

J'ai  fait  tarir  le  vin  des  cuves; 

On  ne  le  foule  plus  au  bruit  îles  cris  de  joie  : 

Ce  sont  des  cris  de  guerre  et  non  des  cris  de  joie. 

3°  Le  pressoir  fournit  matière  à  des  comparaisons 
expressives.  L'auteur  de  l'Ecclésiastique,  xxxm,  16,17, 
après  avoir  consacré  ses  veilles  à  la  sagesse,  se  dit  sem- 


| 

Echelle 
o         ,        s        3        i   '     ^iMeens 


168.  —  Pressoir  à  vin,  antique,  taillé  dans  le  roc,  à  Ain  Karim. 
—  On  foule  le  raisin  en  a,  d'où  il  s'écoule  dans  le  bassin  b, 
qui  est  de  1  mètre  plus  profond  et  plus  large.  Dans  sa  partie 
méridionale,  qui  est  moins  profonde,  il  y  a  trois  niches,  dout 
les  deux  latérales  sont  percées  de  trous,  devant  lesquels  il  y 
avait  sans  doute  un  clou  qui  .devait  servir  a  lixer  des  le- 
viers pour  presser.  Voir  lig.  167.  Les  raisins  foulés  en  a  pas- 
saient donc,  comme  le  montre  la  section,  en  b,  n  les  près- 
davantage  au yen  de  pièces  de  bois  et  de  leviers. 

la*  liquide  s'écoulait  alors  par  les  Irous  on  ,  et  ,i  ,  <■  est  beau- 
coup plus  étroit  et  n'a  que  1"40  de  i  rofondeur,  tandis  que  d 
a  environ  'J  mètres  de  large  el  2"30  'le  profondeur.  De  c  &  d 
il  y  a  un  trou  rond  par  où  le  liquide  peut  passer  du  premier 
dans  le  second.  Ce  dernier  a  des  marches  au  nord  et  à  l'est. 
Sur  le  roc,  près  de  la  marche  i  !  est  et  au  coin  nord-est,  il  y  a 

un  creux  en  forme  de  cou| l'on  pool  poser  une  jarre  de 

terre  sons  qu'elle  soit  exposée  ô  se  renverser.  -  D'après  Schick, 
Palestine  Exploration  Fund,  Quarterly  Étalement,  1899, 
p.  41. 

blable  à  celui  qui  grapille  les  raisins  après  la  vendange 
el   <]iti    pourtant,    comme    le   vendangeur,   rempli)  le 

ir.  Au  temps  messianique,  les  cuves  regorge- 
ront de  vin  nouveau  e1  d'huile, Joël,  ti,  24,  symboles  de 
l'abondance  des  biens  spirituels.  —  Le  pressoir  est  la 
figure  de  l'épreuve  et  du  châtiment  qui  écrasent.  Les 
Chaldéens  ont  écrasé  les  jeunes  bommes  de  Juda  et  le 
Seigneur  a  foulé  au  pressoir  les  jeunes  lilles.  Lam.,  i, 


15.  A  la  même  idée  se  rapporte  la  pression,  OXt^-.ç, 
pressura,  de  la  femme  qui  enfante,  Joa.,  xvi,  21,  el 
celle  qu'endure  le  chrétien  de  la  part  des  persécuteurs. 
Joa.,  xvi.  33;  II  Cor.,  i,  4;  Phil.,  i,  17.  -  Dieu,  dans 
l'exercice  de  sa  puissance  ou  de  sa  justice,  est  comparé 
au  vendangeur  qui  travaille  au  pressoir.  Isaïe.  i.xiii,  2-6, 
représente  en  ces  ternies  le  jugement  exercé  contre 
Édom,  (igure  des  ennemis  des  serviteurs  de  Dieu  : 

Pourquoi  y  a-t-il  du  rouge  à  ton  vêtement. 

Et  tes  habits  sont-ils  comme  quand  on  foule  au  pressoir? 

J'ai  été  seul  à  fouler  au  pressoir. 

Et  parmi  les  peuples  personne  n'a  été  avec  moi; 

Je  les  ai  foulés  dans  ma  colère, 

Écrasés  sous  mes  pieds  dans  ma  fureur; 

Le  jus  a  jailli  sur  mes  habits 

Et  j'ai  souillé  tout  mon  vêtement... 

J'ai  écrasé  les  peuples  dans  ma  colère... 

Et  j'ai  fait  couler  leur  sang  à  terre. 


1C9.  —  Pressoir  à  huile,  trouvé  à  Taaoach. 
D'après  E.  Sellin,  Eine  A'acMese  aus  dem    Tell   Ta'annak, 
dans  les  Denkschrifteti  der  K.  Akademie  der  Wissenec) 
Ph.  hist.  Kl.,  Vienne,  1906,  flg.  W.  p.  27. 

On  voit  ici  le  vendangeur,  se  plaignant  d'être 
à  l'ouvrage  quand  d'ordinaire  plusieurs  foulent  sut  la 
même  aire.  Il  se  met  cependant  à  la  biche  avec  ardeur; 
le  jus  du  raisin  jaillit  sur  ses  habits  qu'il  rougit  Bl 
tombe  eu  bas  de  la  cuve,  .lérétnie,  xxv,  30,  montre  le' 
Seigneur  sur  le  point  deebâtier  Jérusalem  par  le  glaive 
des  Chaldéens  :  il  fait  entendre  à  tous  les  habitants  de 
la  terre  le  cri  des  vendangeurs  qui  foulent  le  raisin. 
Joël,  m,  13,  parlant  de  la  vengeance  qui  va  fondre  sur 
les  ennemis  du  peuple  de  Dieu,  s'écrie  : 

\  .nez,  foulez,  car  le  pressoir  est  plein, 

la-  cuves  regorgent,  tant  est  grande  leur  malice. 

Sainl  Jean  se  sert  des  mêmes  figures  pour  décrire 
le  jugement  du  monde.  «  L'ange  vendangea  la  vigne  de 
la  terre  et  il  en  jeta  les  grappes  dans  la  grand  cuve 
de  la  colère  de  Dieu.  La  cuve  fut  foulée  hors  de  la  ille, 
et  il  en  sortit  du  sang  jusqu'à  la  hauteur  du  mots  des 
chevaux,  »  Apoc.  xiv,  19,  20.  C'est  le  Roi  des  n 

le  Seigneur  des  seigneurs  e  qui  foulera  la  cuve  du  vin 


617 


PRESSOIR    —    PRÊT 


618 


de  l'ardente  colèredu  Dieu  tout-puissant.  »Apoc.,xix.  15. 

Plusieurs  Psaumes  ont  en  titre  dans  les  versions  : 
•j-£p  twv  Xt|V(Tiv,  pro  torcularibus,  «pour  les  pressoirs  ». 
Ps.  vin.  1;  lxxx.  1;  lxxxiii,  1.  Il  y  a  en  hébreu  'al 
hag-gittit,  «  sur  la  gittit  ».  Ce  mot  est  le  nom  d'un 
instrument.  Voir  Gittith,  t.  m.  col.  -215. 

E.  Lesètre. 

PRÊT,  mise  d'une  somme  d'argent  ou  d'un  objet  à 
la  disposition  de  quelqu'un  qui  doit  les  rendre.  En 
hébreu,  le  verbe  lâvâh  signilie  «  emprunter  o  au  kal, 
et  «  prêter  •>  à  l'hiphil  causatif  ;  Septante  :  Bavsfïeiv, 
xiypàvai;  Vulgate  :  commodare.  Le  verbe  nâSdh  a  le 
même  sens. 

I.  La  loi.  —  l1  La  loi  mosaïque  considérait  le  prêt 
comme  un  service  essentiellement  désintéressé  qu'il 
fallait  rendre  au  prochain  dans  le  besoin,  a  Si  lu 
prêtes  de  l'argent  à  quelqu'un  de  mon  peuple,  au 
pauvre  qui  est  avec  toi,  tu  ne  seras  pas  à  son  égard 
comme  un  créancier,  tu  n'exigeras  pas  de  lui  d'intérêt.  » 
Exod.,  xxii,  25.  La  prescription  est  répétée  dans  le 
Lévitique.  xxv,  35-37  :  »  Si  ton  frère  devient  pauvre  et 
que  sa  main  s'affaiblisse  près  de  toi,  tu  le  soutiendras, 
fùt-il  étranger,  afin  qu'il  vive  auprès  de  toi.  Ne  tire  de 
lui  ni  intérêt  ni  profit,  mais  crains  ton  Dieu  et  que 
ton  frère  vive  avec  toi.  Tu  ne  lui  prêteras  point  ton 
argent  à  intérêt,  et  tu  ne  lui  donneras  point  de  tes 
vivres  pour  en  tirer  profit.  »  L'étranger  est  ici  le  gê>; 
admis  à  vivre  au  milieu  des  Israélites  en  respectant 
leurs  lois  religieuses  et  sociales.  Voir  Prosélyte.  Le 
Deutéronome,  xxm,  19,  20,  revient  une  troisième  fois 
sur  le  même  objet  :  «  Tu  n'exigeras  de  ton  frère 
aucun  intérêt  ni  pour  argent,  ni  pour  vivres,  ni  pour 
aucune  chose  qui  se  prête  à  intérêt.  >  —  L'intérêt 
porte  en  hébreu  différents  noms.  On  l'appelle  d'abord 
nésék,  du  verbe  nâSak,  «  mordre  »,  parce  que  c'est 
mordre  et  dévorer  le  débiteur  pauvre  que  de  l'obliger 
à  rendre  quelque  chose  de  plus  que  ce  qu'on  lui  a 
prêté.  L'araméen  nekat,  «  mordre  »  donne  de  même 
nûktà",  o  intérêt  j;  l'arabe  gras  signifie  à  la  fois 
«  ronger  9  et  «  tirer  intérêt  »;  Aristophane,  Xub.,  i, 
12,  emploie  l'expression  8dtxvE<x8a:  Otto  twv  xperâv,  «  être 
mordu  par  les  dettes  »,  et  Lucain,  i,  181,  qualifie 
l'usure  de  vorax,  «  dévorante  ».  Cf.  Gesenius,  T/ic- 
s,  p.  922.  Les  versions  traduisent  nésék  par  to/.o; 
et  usitra.  Du  verbe  râbâh,  »  augmenter,  multiplier  », 
sont  tirés  deux  autres  noms  de  l'intérêt  :  niarbit  et 
farbît,  que  les  versions  rendent  par  jc)iEovao|iôç,  «  sur- 
plus »,  superabundantia.  L'intérêt  d'un  prêt  se  pré- 
sentait donc  aux  Hébreux  sous  un  double  aspect  :  celui 
d'une  dureté  à  l'égard  d'un  homme  déjà  pauvre,  et 
celui  d'un  profit  en  faveur  d'un  homme  déjà  riche.  On 
comprend  qu'à  ces  titres  il  ait  été  prohibé  par  une  loi 
qui  visait  à  resserrer  les  liens  de  fraternité  entre  tous 
les  membres  de  la  famille  israélite. 

'2  S'il  ne  pouvait  exiger  d'intérêt,  du  moins  le  prê- 
teur avait  le  droit  de  prendre  un  gage  sur  son  débi- 
teur. S'il  en  eut  été  autrement,  certains  débiteurs  au- 
raient abusé  de  la  situation  pour  se  faire  prêter  sans 
intention  de  rendre,  et  bien  des  riches  auraient  refusé 
de  prêter,  à  cause  des  risques  à  courir;  et,  en  défini- 
tive, c'eût  été  au  détriment  du  pauvre.  Mais  la  loi  im- 
posait certaines  conditions  à  celui  qui  se  nantissait 
d'un  gage  prélevé  sur  les  biens  de  son  débiteur.  Voir 
Dette,  t.  n,  col.  1394,  1395.  Plus  tard,  la  solvabilité  du 
débiteur  fut  garantie  par  des  cautions.  Voir  t.  n, 
■col.  1395.  —  L'institution  des  années  jubilaires  et  sab- 
batiques apportait  certaines  restrictions  aux  droits  na- 
turels du  préteur.  A  l'année  jubilaire,  chaque  famille 
devait  rentrer  dans  sa  propriété-  foncière.  Dès  lors,  le 
gage  pris  sur  cette  propriété  devenait  caduc.  Il  ne  s'en- 
suit nullement,  comme  le  prétend  Josèphe,  Ant.  jud., 
III,  xil,  3,  que  les  dettes  s'éteignaient  par  le  fait 
même.  Rien  dans    les   textes  sacrés  n'autorise  à  l'ad- 


mettre. Voir  Jubilaire  (Année),  t.  m,  col.  1752-1753. 
L'effet  de  l'année  sabbatique  était  purement  suspensif. 
Comme,  cette  année-là,  le  sol  n'était  pas  cultivé  et  ne 
rapportait  rien,  celui  qui  avait  fait  un  prêt  ne  pouvait 
en  exiger  la  restitution  d'un  Israélite.  L'approche  de 
l'année  sabbatique  ne  devait  même  pas  empêcher  de 
prêter  au  pauvre,  sous  prétexte  qu'on  ne  rentrerait  pas 
dans  ses  fonds  toute  la  durée  de  cette  année.  Le  Sei- 
gneur voulait  que  l'Israélite  lise  eût  le  cceur  mieux 
placé  et  n'hésitât  pas  à  proroger  d'une  année  entière 
l'échéance  de  la  dette.  Deut..  xv,  1-3,  7-11.  Ce  précepte 
n'était  pas  d'une  observation  très  onéreuse  dans  un 
pays  et  dans  un  temps  où  l'argent  n'avait  qu'une  valeur 
représentative  et  n'était  pas  considéré  comme  portant 
profit  par  lui-même. 

3°  Vis  à  vis  de  l'étranger,  nokri,  xûb-pio;,  de  celui 
qui  n'était  pas  agrégé  à  la  nation  comme  le  gêr,  les 
droits  de  l'Israélite  avaient  plus  d'extension.  On  pou- 
vait exiger  de  lui  le  paiement  de  la  dette  même  l'année 
sabbatique.  Deut.,  xv,  3.  De  plus,  il  était  permis  de 
lui  prêter  à  intérêt.  Deut.,  xxm,  20.  Cette  faculté  com- 
ptait parmi  les  faveurs  accordées  par  Jéhovah  à  son 
peuple  :  «  Tu  feras  des  prêts  à  beaucoup  de  nations  et 
toi  tu  n'emprunteras  pas.  »  Deut.,  xv,  6;  xxvm,  12. 
Or  ces  prêts  comportaient  intérêt;  autrement  les  Israé- 
lites ne  les  eussent  jamais  consentis  à  des  peuples  vis- 
à-vis  desquels  aucune  obligation  ne  les  liait,  ni  en  jus- 
tice, ni  en  charité.  Chez  les  Babyloniens,  on  prêtait  à 
intérêt.  Le  code  d'IIammourabi  prévoit  plusieurs  fois  le 
paiement  d'un  capital  et  des  intérêts,  kaspu  u  sibat-su. 
Scheil,  Textes  élamitiques-sémiliques,  Paris,  1902, 
p.  ï'.i;  art.  48-51,  p.  41-43.  Cf.  Buhl,  La  société  israé- 
lite d'après  l'A.  T.,  trad.  de  Cintré.  Paris,  1904, 
p.  155-160.  L'intérêt  était  de  20  et  parfois  même  de 
25  pour  100.  Cf.  Rawlinson,  Cun.  Tnsc.  W.  As.,  t.  n, 
pi.  12,  col.  1,  20,  21:  t.  m,  pi.  47,  9.  Les  prêtres  ba- 
byloniens faisaient  fructifier  les  immenses  ressources 
accumulées  dans  les  temples,  trafiquaient  sur  l'argent 
el  servaient  d'intermédiaires  entre  prêteurs  et  em- 
prunteurs, avec  intervention  de  scribe  public  et  usage 
du  gage,  de  la  caution,  de  l'amortissement  et  de  la 
saisie.  Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  (379,750. 
Les  Israélites  ne  faisaient  donc  que  suivre  un  usage 
commun  en  tirant  intérêt  de  ce  qu'ils  prêtaient  aux 
étrangers.  —  Par  contre,  si  l'Israélite  devenait  infidèle 
à  son  Dieu,  les  malédictions  devaient  tomber  sur  lui, 
celle-ci  entre  autres  :  «  L'étranger  qui  vit  au  milieu  de 
toi  s'élèvera  de  plus  en  plus  au-dessus  de  toi,  tandis 
que  toi,  tu  descendras  toujours  plus  bas;  il  te  prêtera, 
et  tu  ne  lui  prêteras  pas;  il  sera  en  tête,  et  tu  seras  à 
la  queue.  »  Deut..  xxvm,  43,  44.  L'étranger  en  ques- 
tion est  léger,  admis  à  vivre  au  milieu  d'Israël  et  astreint 
à  ses  lois.  Par  conséquent,  s'il  prétait  à  un  Israélite,  il 
ne  devait  pas  réclamer  d'intérêt,  et  c'était  déjà  une 
humiliation  pour  l'Israélite  que  d'en  être  réduit  à  em- 
prunter sans  avoir  le  moyen  de  prêter.  Mais,  pour  la 
suite,  on  ne  prêta  guère  sans  intérêt  dans  de  pareilles 
conditions. 

II.  La  pratique.  —  1°  Les  prescriptions  de  la  loi  sur 
les  prêts  n'ont  pas  toujours  été  strictement  observées. 
La  femme  dont  Elisée  multiplia  l'huile  pour  l'aider  à 
payer  sa  dette  avait  vu  ses  deux  enfants  réduits  en  escla- 
vage par  un  créancier  impitoyable.  IV  Reg.,  iv,  1.  Le 
texte  ne  dit  pas  si  ce  créancier  était  Israélite  ou  étran- 
ger. S'il  était  Israélite,  il  avait  outrepassé  ses  droits; 
car  la  loi  permettait  à  l'Israélite  pauvre  de  se  vendre 
comme  esclave  jusqu'à  l'année  jubilaire,  Exod.,  xxv. 
39  ;  elle  n'autorisait  pas  un  créancier  à  le  réduire  de 
force  en  esclavage.  Il  est  assez  probable  que  le  créancier 
était  étranger,  car  le  fait  se  passait  dans  le  royaume  du 
nord  ;  on  est  alors  en  droit  d'incriminer  les  compatriotes 
de  cette  veuve  «  d'entre  les  femmes  des  fils  des  pro- 
phètes »,qui  avaient  laissé  cette  violence  s'exercer  sans 


619 


PRÊT 


620 


venir  au  secours  de  la  malheureuse  famille.  —  Après 
la  captivité,  les  gens  du  peuple  se  virent  obligés,  pour 
se  nourrir  et  pour  paver  le  tribut,  d'emprunter  de 
l'argent  en  engageant  tous  leurs  biens  et  même  de 
mettre  leurs  enfants  en  esclavage.  II  Esd.,  v,  2-5.  Les 
créanciers  étaient  des  Juifs.  Néhémie  les  réprimanda 
sévèrement  en  leur  disant  :  »  Vous  prêtez  donc  à  inté- 
rêt à  vos  frères!  »  El,  préchant  lui-même  d'exemple,  il 
décida  les  riches  à  faire  abandon  des  biens  qu'on  leur 
avait  engagés  et  de  l'intérêt  qu'ils  avaient  exigé.  Cet 
intérêt  se  montait  à  un  centième  de  l'argent,  du  vin  et 
de  l'huile.  II  Esd.,  v,  7-12.  Bien  que  peu  élevé,  il  ne 
laissait  pas  cependant  d'être  contraire  à  la  loi  et  oné- 
reux pour  les  pauvres  gens.  —  Dans  une  des  para- 
boles de  Notre-Seigneur,  un  débiteur  est  condamné  à 
être  vendu,  avec  sa  femme,  ses  enfants  et  tous  ses 
biens,  afin  d'acquitter  la  dette.  Malth.,  xvm,  25.  Ici  le 
divin  Maître  se  réfère  sans  doute  à  la  législation  ro- 
maine, qui  était  très  dure  pour  les  débiteurs  insol- 
vables et  permettait  de  les  mettre  à  mort  ou  de  les 
vendre  hors  de  Rome.  Cf.  Aulu-Gelle,  xx,  1,  47. 

2°  Les  prophètes  ont  quelques  allusions  aux  prêts 
qui  se  faisaient  de  leur  temps.  Isaïe,  t.,  1,  suppose  des 
débiteurs  vendus  à  des  créanciers.  Jérémie,  xv,  10, 
dit  en  parlant  des  antipathies  dont  il  est  l'objet  :  «  Je 
n'ai  rien  prêté,  et  tous  me  maudissent.  »  Celui  qu  i 
prêtait  [était  donc  habituellement  maudit,  soit  à  cause 
de  sa  dureté,  soit  par  suite  de  l'ingratitude  de  son  dé- 
biteur. Le  même  prophète  constate  que  de  son  temps, 
et  même  bien  avant  son  époque,  on  n'obéissait  plus  à 
la  loi  qui  ordonnait  de  libérer,  à  l'année  sabbatique. 
les  esclaves  israélites  qui  avaient  dû  se  vendre  par 
pauvreté  ou  pour  acquitter  des  dettes.  .1er.,  xxxiv,  9-16, 
—  Amos,  il,  8,  accuse  les  riches  d'Israël  de  s'étendre 
près  de  chaque  auiel  sur  des  vêtements  reçus  en 
gage,  et  de  boire  dans  les  maisons  de  leur  Dieu  le  vin 
de  ceux  qu'ils  ont  condamné  à  l'amende.  Ce  passage 
fait  allusion  à  la  loi  qui  permettait  au  préteur  de 
prendre  en  gage  le  manteau  du  prochain,  à  condition 
de  le  lui  rendre  pour  la  nuit.  Exod.,  xxn,  26.  Les 
3  faisaient  ainsi  un  étalage  scandaleux  et  un  usage 
déshonorant  des  manteaux  qui  constituaient  la  preuve 
de  leurs  prêts.  Probablement,  ils  ne  songeaient  nul- 
lement à  les  rendre  au  temps  prescrit.  Le  vin  prove- 
nant des  amendes  arait  peut-être  aussi  été  prélevé  sur 
des  débiteurs.  —  Ézéchiel,  xvm,  8,  13,  dit  que  le  juste 
rend  au  débiteur  son  gage,  ne  prête  pas  à  usure  et  ne 
prend  pas  d'intérêt,  tandis  que  le  méchant  fait  tout  le 
contraire.  Mais  il  constate  qu'à  Jérusalem  le  prêt  à 
intérêt  s'était  généralisé  contrairement  à  la  loi.  Ezech., 
xxn,  12. 

3"  Les  autres  écrivains  de  l'Ancien  Testament  ont 
aussi  quelques  traits  relatifs  à  la  question  du  prêt. 
Dans  Job,  xxn,  6,  on  voit  le  méchant  prendre  sans 
motif  des  gages  à  ses  frères  et  enlever  les  vêtements  au 
misérable;  il  pousse  devant  lui  l'âne  de  l'orphelin  et 
retient  en  gage  le  bœuf  de  la  veuve,  tandis  que,  par  sa 
faute,  le  pauvre  est  sans  couverture  contre  le  froid  el 
passe  la  nuit  sans  vêtement.  Job,  xxiv.  3,  7.  —  Au 
maudit,  on  souhaite  que  le  créancier  s'empare  de  ce 
qui  est  a  lui.  Ps.  i:ix  (avili),  11.  Quant  au  juste,  on  lui 
fait  honneur,  comme  d'une  chose  qui  est  loin  de  se 
pratiquer  généralement,  d'être  compatissani  el  de  prê- 
ter sans  intérêt.  Ps.  xv  (xiv).  5;  xxxvii  ixxxvi),  26;  exil 
(CXI),  5.  —  Pour  l'auteur  des  Proverbes,  xxn.  7,  em- 
prunter, c'est  se  faire  l'esclave  de  celui  qui  prête.  Par 
contre,  avoir  pitié  du  pauvre,  c'est  prêtera  Jéhovah. 
Prov.,  xix,  17.  —  L'Ecclésiastique  renferme  des  remar- 
ques intéressantes  sur  le  prêt  el  ses  conséquences 
diverses  : 

Ne  prête  pas  à  plus  puissanl  que  toi, 
Et  si  tu  lui  as  prêté,  tiens-le  pour  perdu. 

Eccli.,  vin.  15  (12). 


Les  puissants  n'avaient  donc  guère  l'habitude  de 
rendre.  L'insensé  «  prête  aujourd'hui  et  redemandera 
demain  ».  Eccli.,  xx,  16  (14).  On  ne  peut  se  fier  à  lui. 
C'est  faire  acte  de  miséricorde  que  de  prêter  au  pro- 
chain qui  est  dans  le  besoin.  Eccli.,  xxix,  1,  2.  Mal- 
heureusement, l'emprunteur  n'est  pas  toujours  délicat. 

Beaucoup  regardent  comme  une  trouvaille  ce  qu'on  leur  a  prêté. 

Et  causent  de  l'ennui  à  ceux  qui  les  ont  aidés... 

Quand  vient  le  moment  de  rendre,  on  prend  des  délais, 

On  exprime  tout  son  chagrin,  on  accuse  la  dureté  des  temps. 

Peul-on  payer,  le  prêteur  recevra  la  moitié  à  peine 

Et  encore  croira  à  une  bonne  aubaine. 

Si  on  ne  le  peut,  on  le  frustre  de  son  argent, 

Et  celui-ci  se  fait  malgré  lui  de  son  obligé  un  ennemi 

Qui  le  paie  en  malédictions  et  en  injures. 

Et  qui,  au  lieu  d'honneur,  ne  lui  rend  qu'outrage. 

Eccli.,  xxix,  4-6. 

L'auteur  observe  que,  pour  ces  raisons,  beaucoup  se 
refusent  à  prêter;  il  les  exhorte  cependant  à  le  faire 
par  charité  pour  leurs  frères.  Eccli.,  xxix,  7-11.  —  De 
ces  différents  passages  résulte  cette  conclusion  que  chez 
les  Israélites,  surtout  aux  époques  d'affaissement  reli- 
gieux, l'amour  du  gain  se  manifestait  chez  ceux  qui 
empruntaient  et  surtout  chez  ceux  qui  prêtaient.  La 
loi  était  d'autant  plus  aisément  violée  qu'on  prétendait 
parla  se  mettre  d'accord  avec  la  pratique  des  étrangers. 

4»  A  l'époque  évangélique,  la  situation  n'est  plus  la 
même.  On  admet  que  l'argent  prêté  peut  produire  un 
intérêt.  Notre-Seigneur,  dans  une  parabole,  fait  allu- 
sion, sans  un  mot  de  blâme,  aux  opérations  de  banque 
qui  rendaient  l'argent  productif.  Mattb..  xxv,  27; 
Luc,  xix,  23.  Chez  les  Romains,  l'intérêt  légal  était  de 
12  pour  100  par  an,  et  il  s'accumulait  d'année  en  année. 
Cf.  Cicéron,  Attic,  vi,  3,  5.  A  son  disciple  cependant, 
le  Sauveur  recommande  de  ne  pas  chercher  à  éviter  celui 
qui  veut  lui  emprunter.  Matth.,  v,  42.  Il  ajoute  même  : 
«  Si  vous  ne  prêtez  qu'à  ceux  dont  vous  espérez  resti- 
tution, quel  mérite  avez-vous  ?  Car  les  pécheurs  prê- 
tent aux  pécheurs  afin  de  recevoir  l'équivalent,  ta  fca... 
Prêtez  sans  rien  espérer,  et  votre  récompense  sera 
grande.  ■  Luc.,  vi,34,35.  Ces  pécheurs  sont  sans  doute 
des  Juifs,  car  ils  se  contentent  de  recevoir  l'équivalent 
du  prêt,  conformément  à  la  loi  mosaïque.  Il  y  a  dans 
le  texte  grec  :  [»)5èv  àTteXiti'ÇovTe;,  ce  que  beaucoup 
d'anciens  manuscrits  latins  traduisent:  nihil  despe- 
ranles,  «  sans  désespérer  de  rien,  »  conformément  au 
sens  habituel  du  verbe  grec,  même  dans  les  Septante. 
Is.,  xxix,  19;  Judith,  ix,  11;  Eccli.,  xxn,  26;  xxvn,  24; 
II  Mach.,  ix,  18.  Notre-Seigneur  voudrait  donc  dire  qu'il 
faut  prêter  sans  désespérer  de  rien,  car,  à  défaut  du 
débiteur,  Dieu  sera  là  pour  récompenser  le  bienfaiteur. 
Mais  le  verbe  grec  peut  aussi  avoir,  comme  d'autres 
verbes  de  composition  semblable, le  sens  «  d'espérer  en 
retour  ».  Ce  sens  s'accorde  mieux  avec  l'ensemble  du 
passage,  dans  lequel  Notre-Seigneur  préconise  la  pra- 
tique d'une  charité  absolument  désintéressée;  aussi 
est-il  le  plus  généralement  admis.  Le  mot  iîteXitî'Covvss 
équivaudrait  à  ivTeXitfïovTe;,  »  espérant  en  retour.  » 
Cf.  Bulletin  critique,  15  juin  1894,  p.  238;  Knaben- 
bmet,Evang.  sec.  Luc,  Paris,  1896,  p.  239,  210.  Cette 
sentence  de  Notre-Seigneur  représente,  de  l'aveu  de 
tous,  non  pas  un  précepte,  mais  un  conseil  à  l'usage 
des  parfaits.  —  11  v  avait  à  Jérusalem  un  dépôt  public 
dans  lequel  se  conservaient  les  titres  des  créances.  Au 
débul  du  siège,  les  sicaires s'empressèrent  d'y  mettre  le 
feu,  afin  de  se  concilier  la  faveur  île  la  multitude  ainsi 
libérée  de  ses  délies.  Josèphe,  llcll.  jud.,  II.  xvn,  6.  — 
L'Évangile  ne  mentionne  qu'un  seul  prêt  effectif,  celui 
de  trois  pains.  Luc,  xi,  5. 

5°  La  loi  mosaïque  autorisait  les  spéculations  d'argent 
avec  les  étrangers,  mais  non  avec  les  compatriotes. 
Cette  disposition  ne  laissa  pas  que  de  devenir  gênante 
quand  les  Israélites  commencèrent  à  se  lancer  dans  les 


621 


PRET 


PRÉTOIRE 


622 


affaires  et  à  exercer  en  grand  le  commerce  de  l'argent. 
qui  ne  permettait  pas  de  différer  le  paiement  des 
dettes  à  la  septième  année.  Les  prêtres  eux-mêmes 
participaient  à  ces  opérations  financières.  Cf.  Josèphe, 
Ant.jud.,  XX.  IX,  2.  Pour  éluder  la  difficulté,  le  créan- 
cier acceptait  l'argent  de  son  débiteur  à  titre  de  cadeau, 
ou  bien  l'on  excluait  de  l'ordonnance  légale  les  dettes 
pour  lesquelles  le  créancier  avait  un  gage.  Hillel  ima- 
gina un  autre  moyen,  la  ->o<x?o"/.r,.  qui  consistait  à  lire 
à  haute  voix,  devant  le  juge,  une  formule  par  laquelle 
on  se  réservait  d'exiger  son  argent  en  tout  temps.  De  la 
sorte,  l'intérêt  du  commerce  était  sauf,  mais  non  le 
texte  de  la  loi.  Cette  déclaration  prend  le  nom  hébraïsé 
de  prôz-bôl  dans  la  Mischna.  Cf.  Schebiith,  x,  3-7; 
Gittin,  îv,  3;  Pea,  m,  6;  Moed  Kalan,  m,  3;  Kelhu- 
bolh,  ix,  9;  Okzin,  m,  10.  Les  titres  déposés  dans  les 
archives  publiques  de  Jérusalem  étaient  vraisemblable- 
ment accompagnés  de  cette  déclaration.  Cf.  Schùrer. 
Geschichte  des  jùdischen  Volkes  im  Zeit.  J.  C,  Leip- 
zig, t.  h.  1S98,  p.  45.  363;  F.  Buhl,  La  société  israélite 
d'après  VA.  T.,  trad.B.de  Cintré,Paris,  1904, p.  173,  174. 

H.  Lesêtre. 
PRÊTEUR  (hébreu  :  nôSéh,de  >uisdh,  «  prêter  »; 
Septante  :  Saveiircfc;  Vulgate  :  creditor,  fœnerator). 
celui  qui  prête.  —  Voir  Dette,  t.  u,  col.  1394.  Le  prê- 
teur met  de  l'argent  ou  un  objet  quelconque  à  la  dispo- 
sition de  quelqu'un  qui,  tant  qu'il  n'a  pas  rendu  ce  qui 
lui  a  été  prêté,  demeure  son  débiteur,  lôvéh,  'jx-niXopt- 
vo;  O-'i/piio;,  ■/ç,to>yzù.é-rl;,  debitor.  Il  y  a  des  prêteurs 
impitoyables,  IV  Reg.,  iv,  1,  d'autres  qui  sont  miséri- 
cordieux. Luc.  vu.  41.  Ils  sont  les  uns  et  les  autres 
sous  le  regard  de  Dieu.  Prov.,  xxix,  13.  On  vendait  au 
prêteur  des  esclaves  pour  acquitter  ses  dettes,  Is..  i..  1, 
ou  lui-même  prenait  tout  dans  la  maison  de  son  débi- 
teur. Ps.  cix  (cvm),  11.  Au  jour  du  grand  jugement  de 
Dieu,  tous  les  hommes  se  trouveront  dans  la  même  si- 
tuation, le  préteur  comme  l'emprunteur,  le  débiteur 
comme  le  créancier.  Is.,  xxiv,  2.  Voir  Emprunt,  t.  Il, 
col.  1764;  Prêt.  col.  617.  H.  Lesêtre. 

PRÉTOIRE  grec  :  -h  itpoutwpiov),  mot  dérivé  du 
latin  prxtorium ,  lequel  est  passé  en  grec.  Il  désignait 
primitivement,  chez  les  Romains,  dans  les  camps  de 
marche,  la  tente  du  général  en  chef  {prsetor).  Cf.  Tite- 
Live,  vu,  12-;  x,  33.  Il  s'appliqua  ensuite  au  conseil  de 
guerre  ou  réunion  des  officiers  supérieurs  qui  se 
tenait  dans  cette  tente,  Tite  Live,  xxvi,  15;  xxx.  5; 
xxxvii.  5,  et,  dans  les  camps  permanents,  au  quartier 
général  du  commandant  en  chef.  Lorsque  l'empereur 
devint  théoriquement  le  général  par  excellence,  l'fni- 
perator,  sa  résidence  prit  le  nom  de  prxtorium,  et, 
comme  d'habitude  il  demeurait  à  Rome,  il  y  eut,  à 
côté  de  prxtvria  changeant  avec  ses  déplacements,  un 
prxtorium  fixe  dans  la  capitale.  A  la  tête  de  ce  der- 
nier étaient  les  préfets  du  prétoire,  prxfecli  prxtorio, 
et  les  prxloriani  étaient  spécialement  chargés  de 
le  garder.  Tacite.  Ann.,  i.  '20;  n.  11,  -24;  iv,  46.  Mais, 
même  alors,  le  mot  continua  a  être  employé,  comme 
auparavant,  dans  le  sens  de  «  résidence  du  gouver- 
neur »  et  particulièrement  de  «  logement  réservé  au 
gouverneur  dans  ses  déplacements  .>.  Cicéron./re  Verr., 
II.  iv.  28;  v.  35.  Par  une  dernière  extension,  il  devint 
synonyme  de  maison  riche,  palais,  et  même  de  maison 
d'habitation  opposée  aux  constructions  agricoles. 
Cf.  R.  Cagnat,  Prsetorium,  dans  le  Dictionnaire  des 
antiquités  grecques  et  romaines  de  Daremberg  et 
Saglio,  Paris,  t.  vu,  p.  640.  —  Ce  nom  ne  se  trouve  que 
dans  le  Nouveau  Testament.  Dans  les  Évangiles.  Mat  th., 
xx. n.  27;  Marc,  xv,  16;  Joa.,  xvm,  28,  33;  xix,  9,  et 
dans  les  Actes  des  Apôtres,  xxm,  35,  il  désigne  la 
nce  du  gouverneur  romain.  Dans  l'Épitre  aux 
Philippiens,  i.  13,  il  a  un  sens  que  nous  aurons  à  dé- 
terminer. 


I.  Dans  les  Évangiles.  —  Le  prétoire,  dans  les 
Évangiles,  soulève  une  question  fort  débattue  de  nos 
jours,  à  savoir  l'emplacement  qu'il  occupait  à  Jéru- 
salem au  moment  de  la  Passion  du  Sauveur.  Commen- 
çons par  examiner  les  données  scripturaires. 

i"  Données  évangéliques.  —  C'est  de  chez  Caïphe 
que  les  Juifs  conduisirent  Jésus  au  prétoire,  chez 
Pilate.  Matlh..  xxvii.  2;  Marc.  xv.  1;  Luc.  xxm.  1: 
Joa.,  xvm,  28.  o  C'était  le  matin,  et  ils  n'entrèrent  pas 
eux-mêmes  dans  le  prétoire,  afin  de  ne  pas  se  souiller 
et  de  pouvoir  manger  la  Pàque.  Pilate  sortit  donc  au 
devant  d'eux.  è$î)>.8ev...  ëÇm;  Vulgate  :  exivit...  foras.  » 
Joa.,  xvm,  28-29.  Après  leur  avoir  demandé  quelle 
accusation  ils  portaient  contre  cet  homme  et  entendu 
leur  réponse,  il  «  rentra  dans  le  prétoire,  et  appela 
Jésus  »,  qu'il  interrogea  sur  sa  royauté.  Joa.,  xvm.  33- 
37.  «  Il  sortit  de  nouveau  au  devant  des  Juifs  »  et  leur 
proposa  de  relâcher  le  prisonnier  à  l'occasion  de  la 
fête  de  Pàque;  mais  ceux-ci  réclamèrent  Barabbas. 
Joa.,  xvm,  38-40.  «  Alors  donc  Pilate  ordonna  de  saisir 
Jésus  et  de  le  flageller.  Et  les  soldats  (le  conduisant 
dans  la  cour,  qui  est  le  prétoire,  ïaat  tîjç  av/f,;,  S  S<rriv 
npacTwpiov,  Marc,  xv,  16)  tressèrent  une  couronne 
d'épines  qu'ils  lui  mirent  sur  la  tète,  et  le  revêtirent 
d'un  manteau  de  pourpre;  puis  ils  s'avançaient  vers 
lui  en  disant  :  «  Salut,  roi  des  Juifs!  »  et  ils  lui  don- 
naient des  coups  de  verge.  Pilate  sortit  de  nouveau  et 
leur  dit  :  «  Voici,  je  vous  l'amène  pour  que  vous 
»  sachiez  que  je  ne  lui  trouve  aucun  crime.  »  Jésus 
sortit  donc,  portant  la  couronne  d'épines  et  le  manteau 
de  pourpre,  et  il  leur  dit  :  j  Voici  l'homme!  »  Joa., 
xix,  1-5.  Devant  les  cris  de  mort  poussés  par  les  Juifs, 
Pilate  «  rentra  de  nouveau  dans  le  prétoire  »  et  lit 
subir  un  nouvel  interrogatoire  à  Jésus.  Joa.,  XIX.  7-11. 
Accusé  de  n'être  pas  l'ami  de  l'empereur,  <•  Pilate  fit 
sortir  Jésus,  i-ya^s-'  ïîm,  et  s'assit  sur  le  tribunal.  i-\ 
;if,u.aTo:,  à  l'endroit  appelé  Lithostrotos,  en  hébreu 
Gabbatha.  »  Enfin  «  il  le  leur  livra  chargé  de  liens 
pour  être  crucifié.  »  Joa.,  xix,  12-16.  —  Voilà  tout  ce 
que  nous  apprend  l'Evangile:  le  prétoire  où  demeurait 
Pilate,  d'où  il  sortit,  et  où  il  rentra  plusieurs  fois  au 
cours  de  ces  différentes  scènes,  le  lieu  témoin  de  l'in- 
terrogatoire, de  la  flagellation,  du  couronnement  d'épi- 
nes et  de  la  condamnation  de  Jésus,  était  précédé  d'une 
place  où  la  foule  des  Juifs  put  se  rassembler  et  d'un 
lieu  «élevé  »  [Gabbatha)  et  «pavé  en  pierre  »  (Lithos- 
trotos) où  le  gouverneur  établit  son  tribunal.  Saint  Marc 
nous  parle  d'une  cour  intérieure  ou  atrium,  qui  était  le 
prétoire.  Mais  dans  quel  endroit  de  la  ville  se  trouvait-il? 
Le  texte  sacré  ne  nous  le  dit  pas.  Interrogeons  l'histoire. 

2°  L'histoire.  —  Le  prétoire,  chez  les  Romains, 
n'était  pas  un  édifice  spécial,  semblable  à  nos  palais  de 
justice,  affecté  aux  audiences  et  aux  jugements  du 
tribunal;  c'était,  nous  l'avons  dit,  la  résidence  du  gou- 
verneur de  province,  qui  y  jugeait  cependant  les  cas 
soumis  à  sa  juridiction  et  y  rendait  ses  sentences, 
puisqu'il  était  non  seulement  le  chef  de  l'armée,  mais 
encore  le  chef  du  gouvernement.  Les  procurateurs  de 
Judée  n'habitaient  pas  ordinairement  Jérusalem,  mais 
Césarée  maritime,  où  ils  occupaient  le  palais  d'Hérode, 
qui  est  appelé  itpatTÛptov  toû  'HpwSou,  Aet.,  xxm.  35, 
à  propos  de  la  comparution  de  saint  Paul  devant  Félix. 
Ils  venaient  dans  la  ville  sainte  à  l'époque  des  grandes 
fêtes  de  l'année,  lorsque  la  multitude  des  Juifs  rassem- 
blée à  ces  occasions  pouvait  amener  et  amenait  sou- 
vent des  émeutes.  Pilate  s'y  trouvait  donc  à  cause  de  la 
fête  de  Pàque.  Mais  où  habitait-il?  L'histoire  nous 
éclaire  un  peu  en  nous  apprenant  qu'il  devait,  comme 
à  Césarée,  occuper  un  des  palais  d'Hérode,  mais  elle 
ne  nous  dit  pas  lequel.  Nous  savons,  en  effet,  qu'Ilérode 
le  Grand  agrandit  et  embellit  la  citadelle  Antonia, 
située  à  l'angle  nord-ouest  de  l'enceinte  du  Temple.  Il 
en  fit  non  seulement  une  forteresse  remarquable,  mais 


623 


PRETOIRE 


6'24 


encore  un  palais,  renfermant  des  galeries  et  de  somp- 
tueux appartements.  Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XV.  xi, 
i;  XVIII,  iv,  3;  Bell,  jud.,  1.  xxt.  1;  V,  iv,  2;  v,  8. 
Voir  Antokia,  t.  I,  col.  712.  Elle  est  appelée  nafC|).ëo>./, 
Vulgate  :  castra  .  A,  t..  x.\i.  34,  37;  xxn,  24;  mu,  10, 
16,  32:  elle  servait,  en  effet,  de  caserne  à  la  garnison 
romain-',  mais  elle  offrait  en  même  temps  au  gouver- 
neur une  résidence  agréable.  Hérode  cependant  fit  con- 
struire un  autre  palais,  plus  splendide  encore,  à  l'angle 
nord-ouest  de  la  ville,  sur  remplacement  actuel  de  la 
citadelle.  Flanquée  de  trois  tours  énormes,  appelées 
Hippicus.  Phasaël  et  Mariamne,  cette  maison  royale 
était,  à  l'intérieur,  d'une  richesse  extraordinaire.  Cf.  Jo- 
sèphe, Bell,  jud.,  V,  îv,  i.  Voir  JÉRUSALEM,  t.  m, 
col.  1373.  Il  est  certain  qu'elle  offrait  plus  d'attraits 
encore  que  l'Antonia.  Le  procurateur  Gessius  Florus 
s'y  installa,  et  nous  le  voyons  un  jour  établir  devant 
le  palais  son  tribunal,  prés  duquel  se  rassemblent  les 
princes  des  prêtres  et  les  principaux  de  la  ville.  Jo- 
sèphe, Bell,  jud.,  II,  xiv.  8.  Le  contexte,  II,  xv,  5,  6, 
montre  bien  qu'il  s'agit  ici  d'une  demeure  royale  dis- 
tincte de  l'Antonia.  Cependant  on  peut  dire  que,  pen- 
dant les  fêtes  de  Pàque,  le  gouverneur  avait  tout 
intérêt  à  occuper  la  citadelle,  d'où  il  pouvait  mieux 
surveiller  les  agissements  des  Juifs  dans  le  Temple  et 
parer  plus  vite  à  toute  éventualité.  Cherchons  un  peu 
plus  de  lumière  dans  la  tradition. 

3'  La  tradition.  —  Le  premier  témoin  est  le  Pèlerin 
de  Bordeaux.  Dans  son  itinéraire  de  l'an  333.  après 
avoir  parlé  de  la  maison  de  Caïphe,  qu'il  visita  sur  le 
mont  Sion.  c'est-à-dire  sur  la  colline  occidentale,  et 
de  l'endroit  où  fut  le  «  palais  de  David  »,  il  ajoute  : 
«  De  là,  en  sortant  de  l'enceinte  de  Sion  et  en  se  ren- 
dant à  la  porte  napolitaine  (aujourd'hui  bâh  ri- A  mini. 
appelée  aussi  porte  de  Xaplouse  et  de  Damas),  on  a, 
ii  droite,  en  lias,  dans  la  vallée  les  murs  où  fut  la 
maison  ou  le  prétoire  de  l'once  Dilate.  Là,  le  Seigneur 
fut  entendu  avant  sa  passion.  A  gauche,  est  le  monti- 
cule du  Golgotha  où  le  Seigneur  fut  crucifié.  »  Cf.  lti- 
nera  Terres  Sanctœ,  edit.  T.  Tobler,  Genève  1877,  t.  i. 
p.  18.  Ce  texte,  comme  les  autres,  sera  discuté  plus 
loin.  —  Un  passage  dr  la  Vie  de  Pierre  l'Ibère  nous 
apprend  que,  au  v  siècle,  il  y  avait  une  église  de  Pi- 
late.  Quelle  que  soit  la  valeur  intrinsèque  de  la  vision 
qu'il  relate,  l'itinéraire  dont  il  est  question  est  claire- 
ment tracé  :  parti  du  Martyrium  de  saint  Etienne,  Pierre 
o  courut  au  saint  Golgotha  et  au  tombeau:  puis  il  des- 
rendit à  l'église  qui  est  dite  de  Dilate  et  de  là  à  celle 
du  paralytique  (Sainte-Anne) et  ensuite  à  Gethsémani.  > 
Cf.  J.-B.  Chabot,  Pierre  l'Ibérien,  dans  la  Bévue  de 
l'Orient  latin,  Paris,  t.  m,  1895,  p.  381-382.  —  A  cette 

église  succéda  un  peu  plus  tard  la  basilique  de  Sainte 
Sophie.  Xous  lisons  dans  le  Breviarivs  de  Hierosolyma 
(vers  530]  :  i  De  là.  vous  allez  à  la  maison  de  Caïphe, 
où  saint  Pierre  renia  [le  Sauveur]  et  où  une  grande  basi- 
lique esl  déd  iée  à  saint  Pierre.  Vous  vous  rendez  ensuite 
à  la  maison  de  Dilate,  où  celui-ci  livra  aux  Juifs  le 
Seigneur  flagellé,  et  où  il  y  a  une  grande  basilique, 
appelée  Sainte  Sophie,  avec  une  chambre  où  le  Sau- 
veur fut  dépouillé  de  ses  vêtements  el  flagellé,  « 
Cf.  Itinera  Terrée  Sani  tx,  p.  59.  —  Théodose,  De 
Terra  Sancla  (vers  530),  dit  de  son  côté  :  o  De  la 
maison  de  Caïphe  jusqu'au  prétoire  de  Pilate,  il  j  a 
cent  pas.  La  esl  I  i  glise  de  Sainte-Sophie;  tout  auprès. 
s;iint  Jérémie  fui  jeté  dans  une  citerne.  De  la  citerne  où 
fut  jeté  le  prophète  Jérémie  jusqu'à  la  piscine  de  Siloé, 
il  y  a  cent  pas.  De  la  maison  de  Dilate  jusqu'à  la  piscine 
probatique,  il  j  a  plus  ou  moins  cent  pas:  là  le  Sei- 
gneur guérit  le  paralytique,  o  Cf.  Itinera  Terra  San- 
i  tir.  p.  65.  —  lin  l'année  570  environ,  nous  avons  le 
témoignage  d'Antonin  le  Martyr,  De  l.oris  Sanctis  : 
Xous  avons  prié  dans  le  prétoire  où  le  Seigneur  fut 
entendu  et  ou   est  actuellement  la  basilique  de  Sainte- 


Sophie.  Devant  les  ruines  du  Temple  de  Salomon, 
l'eau  coule  vers  la  fontaine  de  Siloé,  près  du  portique 
de  Salomon.  Dans  la  même  basilique,  il  y  a  le  siège 
sur  lequel  s'assit  Pilate  quand  il  écouta  le  Seigneur, 
et  une  pierre  quadrangulaire  qui  se  trouvait  au  milieu 
du  prétoire.  C'est  sur  celle-ci  que  le  Seigneur  fut  élevé 
quand  il  fut  interrogé  par  Pilate.  afin  qu'il  fût  entendu 
et  vu  de  tout  le  peuple;  et  il  y  laissa  l'empreinte  de 
ses  pieds.  »  Cf.  Itinera  Terrée  Sanctœ,  p.  101.  L'église 
de  Sainte-Sophie  disparut  sous  le  tléau  de  l'invasion 
persane,  en  tili.  et  près  de  W0  chrétiens  arrosèrent 
de  leur  sang  le  sol  de  l'antique  prétoire,  s'il  faut  en 
croire  une  relation  arabe.  Cf.  Clermont-Ganneau,  Be- 
rneil  d'archéologie  orientale,  Paris,  t.  it,  1896,  p.  148. 
—  Il  faut  arriver  au  commencement  du  ix*  siècle  pour 
retrouver  mention  du  prétoire.  L'auteur  du  Comme- 
moratoriutn  de  casis  Dei,  vers  808,  dans  le  recense- 
ment qu'il  fait  des  prêtres  et  clercs  desservant  les 
sanctuaires  de  Jérusalem  en  compte  cinq  dans  le  Pré- 
toire. Cf.  Itinera  hierosolymitana,  édit.  Tobler  et  Mo- 
linier,  Genève,  1880,  t.  i.  p.  301.  On  pourrait  croire 
d'après  le  contexte  qu'il  place  ce  lieu  saint  sur  le 
mont  Sion.  avec  l'église  de  Saint-Pierre;  il  ne  faut  peut- 
être  pas  trop  presser  celte  conclusion. 

Xous  verrons  cependant  s'accréditer,  au  temps  des 
croisades,    la   tradition   qui    place  le   prétoire  sur   le 
mont  Sion.  Un  des  premiers  historiens  de  cette  époque, 
l'auteur  des  Gesta  Francorum  expugnantium  Jérusa- 
lem, déclare  que,  au  moment  où  les  croisés  entrèrent 
pour  la  première  fois  dans  la  ville  sainte,  il  était  dif- 
ficile de  reconnaître  certains   sanctuaires,  en  particu- 
lier ceux  qui  marquaient  le  théâtre  des  diverses  scènes 
du  procès  de  Noire-Seigneur.  Après  avoir  visite  i 
de    Sainte-Anne  et  la  piscine  Probatique,  il   ajoute  : 
«  La  llagellation  de  Jésus-Christ,    le  couronnement,  la 
dérision  et  d'autres  souffrances  qu'il  a  endurées  pour 
nous  :  mais  il  n'est  pas  facile  à  présent  de  reconnaître 
les  endroits  où  ces  faits  s'accomplirent,   surtout  parce 
que  la  ville  a    été  trop  souvent  depuis  bouleversée   el 
détruite.  ..  Cf.  •!•  Bongars,  Gesta  Dei  per  Franco»,  11a- 
nnu,     1611.    p.     573.     Cependant,    en     1112    ou     1113, 
l'higoumène  russe  Daniel  mentionne  le  prétoire  i  pi  a 
près   dans  la   même  direction    que  les   pèlerins  dont 
nous  avons  parlé.  Cf.  Itinéraires  russes  en  Orient,  trad. 
B.  de  Khitrowo,  Genève,  1881t.  p.  18-19.  Un  petit  traité 
des  Lieux  Saints  intitulé  :  De  situ  urbis  Jérusalem .  .  I 
qui  fut  écrit  entre  1 130  et  1 150,  dit  au  sujet  du  prétoire  : 
.  [Jésus],  étant  retourné  de  là  à  Gethsémani,  fut  livré 
par  Judas  aux  Juifs.  Celui-ci   le  présenta  lié  à  Anne  «t 
a  Caïphe  près  du  portique  de  Salomon,  ensuite  à  Sion, 
au  lieu  qui    est  appelé  Lithostrotos  et    qu'on  montre  a 
présent  devant  la  porte  de  l'église.     Cf.  M.  de  \> 
Les  églises  de   la    Terre    Sainte.    Paris.    1860,   p.    127. 
C'est   le    commencement    de   la    confusion.    Plusieurs 
écrivains  anonymes,  que  l'on   ne  croil   pas  antérieurs 
à   1145  ni  postérieurs  à   1170.  placent  le  prétoire  sur  le 
mont  Sion.  Ainsi,  pour  n'en  citer  qu'un.  l'Innomina- 
tns  \ttt  dit  :  i  Xous  vînmes  ensuite  au  mont  Sion.  où 
est  la  chapelle  du  Sauveur,  appelée  le  prétoire  de  Di- 
late. Là,  Notre-Seigneur  lut  couronné,  lié,  exposé'  aux 
dérisions  et  condamné  par  Dilate.   »  Cf.  Descript 
Terrée  Sanctœ  a   sœr.   vm-xv,  édit.  Tobler,   Leipzig, 
1874,  p.   194.  —  Vers  1165,  Jean  de   Wur/.bourg  s'ex- 
prime  de    même.  Cf.    Descriptiones  T.  S.,  p.  139.  — 
Théodoric    1172    mêle  les  deux  traditions.   D'un  côté, 
il  parle  de  la  maison  de  Pilate  pies  de  l'église  Sainte- 
Anne;  de  l'autre,  il  montre  le  tribunal  de  Dilate  sur  le 
mont  Sion.  Ci.  Theodorici  Libellus,  édit. Tobler,  Paris, 
1865,  p.  10,  62-63.  —  Il  est  à  remarquer  cependant  que, 
même  à  celle  époque,  la  tradition  maintient  le  li' 
la  condamnation  dejésus  du  cédé  de  l'église  de  Sainte- 
Anne  et  de  la  piscine  probatique.  C'est  ainsi  que,  sur 
une  carte  topographique  de  Jérusalem,  tracée  vers  l'an 


625 


PRÉTOIRE 


626 


1180,  on  lit,  à  gauche  du  chemin  qui  conduit  ad  por- 
tant vallis  Josapltat,  ces  mots  :  Hic  flagcllalus  est 
Jhesus.  Cf.  Rôhricht,  Karlen  und  Plane  zur  Palasli- 
nakunde  aus  dem  7  bis  16  Jahrhundert,  dans  la  Zeit- 
schrift  des  Deutschen  Palâstina-Vereins,  Leipzig,  t.  xv, 
1892,  p.  34-39,  pi.  i.  On  trouve  de  même  dans  Ernoul, 
L'estatdela  rite:  de  Iherusalem  (vers  1231)  :  «A  main 
destre  de  celle  rue  de  Josall'as,  avait  un  moustier  c'on 
apeloit  le  Repos.  Là  dist  on  que  .Ihesu  Cris  reposa, 
quant  on  le  mena  crucefiier;  et  là  estoit  li  prisons  u  il 
lu  mis  la  nuit  que  il  fu  pris  en  Gessemani.  Un  poi 
avant,  à  main  senestre  de  celle  rue,  estoit  li  Maisons 
Pilote.  Devant  celle  maison  avoit  une  porte  par  u  on 
aloit  al  Temple.  »  Cf.  Itinéraires  ù  Jérusalem  publiés 
par  H.  Michelanl  et  G.  Raynaud,  Genève,  1882,  p.  49. 
Parmi  les  ouvrages  du  XIIIe  siècle,  il  en  est  quelques- 
uns  qui  parlent  vaguement  du  prétoire  au  mont  Sion. 
Ainsi  nous  lisons  dans  Les  pelerinaiges  por  aler  en 
Iherusalem  (vers  1231)  :  «  Vers  midi  sur  la  cité  de 
Iherusalem  est  Monte  Syon  :  la  fu  la  grant  yglise  qui 
est  abatue,  où  Notre-Dame  trespassa,  et  d'ilueques 
l'emportèrent  li  apostre  à  Josaphas,  et  iluec  devant 
est  une  chapele  où  Xostre  Sire  fu  iugiés  et  batus  et 
Qacillez  et  d'espines  lormentés  et  coronés;  ce  fu  le 
Prétoire  Cayfas  et  sa  maison.  »  Cf.  Michelant  et  Ray- 
ii, nul,  Itinéraires  à  Jérusalem,  p.  96.  11  en  est  de 
même  dans  Les  sains  pèlerinages  que  l'en  doit  re- 
querreèn  la  Terre  Sainte,  et  Pèlerinages  et  pardouns 
de  Acre.  Cf.  Itinéraires  à  Jérusalem,  p.  104,  231. 
Ces  descriptions,  tout  en  ne  parlant  que  du  prétoire  de 
Caïphe,  placent  néanmoins  implicitement  le  tribunal 
de  Pilate  au  mont  Sion,  puisqu'elles  y  localisent  le 
couronnement  d'épines.  Cependant,  vers  la  fin  du  même 
siècle.  Riccoldo  da  .Monte  Croce  s'exprime  en  ces  termes 
au  suiel  du  prétoire  :  «  Et  nous  arrivâmes  à  l'église  de 
Sainte-Anne...  Tout  près  de  là,  nous  trouvâmes  la 
piscine  probatique.  En  montant,  nous  rencontrâmes  la 
maison  d'Hérode  et,  tout  près,  la  maison  de  Pilate,  où 
nous  vîmes  le  lilhostrotos  et  le  lieu  où  fut  jugé  le 
Seigneur,  ainsi  que  l'endroit  où  se  tint  le  peuple,  sur 
la  place,  devant  le  palais,  lorsque  Pilate  sortit  au- 
devant  des  Juifs.  »  Itinerarius,  édit.  Laurent,  Pere- 
grinatores  medii  sévi  quatuor,  Leipzig,  1S64,  p.  111- 
112.  —  Au  xiv  siècle,  Marino  Sanuto  (1310',  après 
avoir  mentionné  l'église  de  Sainte-Anne  et  la  piscine 
probatique,  l'une  en  face  de  l'autre,  la  première  à  droite, 
et  la  seconde  à  gauche  d'une  des  portes  de  la  ville, 
ajoute  que,  en  allant  directement  vers  la  porte  opposée 
ou  porte  Judiciaire,  on  trouve  «  la  maison  de  Pilate  », 
où  l'Agneau  de  Dieu  fut  flagellé,  couronné  d'épines  et 
enfin  condamné  à  mort.  Près  de  la  maison  de  Pilate,  il 
place  «  la  maison  d'Anne,  à  laquelle  le  Christ,  pris  par 
les  Juifs  à  Gethsémani,  fut  d'abord  conduit.  >>  Près  de 
la  maison  d'Anne,  il  signale  «  l'église  de  Sainte-Marie 
de  Pamason  {Pasmus  Virginia  sur  le  plan),  où  cette 
bienheureuse  vierge  tomba  en  syncope  de  douleur,  en 
voyant  son  fils  innocent  porter  sa  croix.  »  Cf.  Bongars, 
Gesla  Dei  per  Francos,  cap.  x,  p.  257.  C'est  ce  qui  est 
nettement  marqué  sur  un  plan  du  même  auteur,  tiré 
d'un  manuscrit  de  Londres.  Cf.  Rôhricht,  Marino  Sa- 
nn  in  scu.  uls  Kartograph  Palâstinas,  dans  la  Zeit- 
sih  ■{[!  des  Deutschen  Palâstina-Vereins,  t.  xxi,  1898, 
p.  84,  pi.  4.  A  remarquer  que  la  maison  de  Pilate  est 
placée  en  face  de  Notre-Dame  du  Spasme,  du  coté  op- 
posé de  la  rue,  à  l'angle  de  celle  qui  conduit  à  la  porte 
de  Saint-Etienne.  —  Au  XVIe  siècle,  un  pèlerin  manceau, 
Greflin  AH'agart  (1533-1534),  décrit  ainsi  le  Prétoire  : 
«  Plus  loing  un  peu  (au  delà  du  carrefour  où  il  place 
.-'.-li.  du  Spasme)  est  le  prétoire  de  l'illale  et  aussi  sa 
maison  en  laquelle  Jésus  fut  flagellé  et  couronné  d'es- 
pines. Mays  il  est  à  noler  que  la  rnayson  estoyt  telle- 
ment située  que  l'une  partie  estoyt  d'un  costé  de  la  rue 
■et  l'autre  part  de  l'autre,  en  faezon  qu'on  povoyt  aller 


de  l'une  à  l'autre  par  dessus  une  arche  de  pierre  qui 
traversoyt  la  rue,  faicte  en  manière  de  gallerye...  Après, 
l'on  va  à  la  maison  de  saincte  Anne.  »  Cf.  J.  Chavanon, 
Relation  de  Terre  Sainte  par  Greflin  Affagart,  Paris, 
1902,  p.  95.  Ici  il  n'y  a  plus  de  doute,  l'emplacement  du 
prétoire  est  bien  marqué  par  l'arc  de  l'Ecce  Homo.  — 
Au  xvne  siècle,  Quaresmius  (1616)  le  montre  au  nord- 
ouest  de  l'enceinte  du  Temple,  prés  de  la  tour  Antonia, 
et  décrit  longuement  l'état  des  lieux.  Cf.  Quaresmius, 
Elucidalio  Terras  Sanctse,  Anvers,  1639,  t.  u,  lib.  IV, 
cap.  u.  La  tradition  a  continué  sans  interruption  jus- 
qu'à nos  jours,  et  c'est  là  que  les  pèlerins  cherchent  le 
commencement  de  la  Voie  douloureuse. 

Si  nous  résumons,  en  dehors  de  toute  hypothèse,  les 
enseignements  de  la  tradition,  nous  arrivons  donc  aux 
résultats  suivants.  Le  prétoire,  que  saint  Cyrille  de  Jéru- 
salem, Catech.,  xm,  t.  xxxm,  col.  820,  déclare,  au  ive  siè- 
cle, «  réduit  en  solitude,  par  la  puissance  de  celui  qui 
fut  alors  attaché  à  la  Croix,  »  a,  dès  333,  son  emplace- 
ment marqué  ù  droite  de  la  voie  qui  'conduit  de  Sion 
à  la  porte  de  Naplouse,  c'est-à-dire  du  sud  au  nord,  et 
en  bas,  dans  la  vallée  (du  Tyropœon).  Plus  tard,  il  est 
indiqué  par  une  église  dite  de  Pilate,  à  laquelle  on 
descend  en  venant  du  saint  Sépulcre,  et  qui  se  trouve  sur 
une  ligne  allant  de  l'ouest  à  l'est,  vers  la  piscine  Proba- 
tique. A  cette  église  succède  la  basilique  de  Sainte- 
Sophie,  que  Théodose  (vers  530)  place  à  peu  près  à 
moitié  chemin  (quelle  que  soit  la  valeur  de  ses  pas) 
entre  la  maison  deCaïphe,  sur  le  mont  Sion.  et  la  pis- 
cine probatique,  et  qu'Antonin  le  Martyr  montre  devant 
les  ruines  du  Temple  de  Salomon,  à  un  endroit  où  l'eau 
coule  vers  la  fontaine  de  Siloé,  c'est-à-dire  le  long  de 
la  vallée  du  Tyropœon.  Après  la  destruction  de  la  basi- 
lique, enGli,  la  tradition  devient  plus  difficile  à  suivre; 
elle  s'égare  même  au  moment  des  croisades.  Dès 
le  début  de  la  guerre  sainte,  on  constate  la  difficulté 
de  retrouver  l'emplacement  du  prétoire.  Trompés  peut- 
être  par  une  fausse  lecture  du  texte  évangélique  :  Ad 
Caipham  principem  sacerdotnm  in  prsetorium,  au 
lieu  de  a  Caipha  in  prsetorium,  Joa.,  xvm,  28  (cf.  Tis- 
ehendorf,  Nuvum  Teslamenturn  grsece,  édit.  oct., 
Leipzig,  1869-1894,  t.  i,  p.  932),  et  par  certaines  reliques 
transportées  de  l'ancien  prétoire  sur  le  mont  Sion,  les 
pèlerins  des  XIIe  et  xme  siècles  ont  souvent  cherché  sur 
cette  dernière  colline  le  lieu  de  la  llagellation,  du 
couronnement  d'épines  et  de  la  condamnation  de  Jésus. 
Il  est  cependant  juste  de  remarquer  que,  même  au  mi- 
lieu de  ces  fluctuations,  les  anciens  jalons  ne  dispa- 
raissent pas  complètement.  Nous  le  voyons  d'après 
l'hégoumène  russe,  Daniel  (1112  ou  1113),  Théodoric 
(1172),  certaines  cartes  topographiques  de  Jérusalem 
(  1 1S0)  et  Ernoul  (vers  1231).  Au  xive  siècle,  Marino 
Sanulo  maintient  les  mêmes  lignes.  Enfin  la  tradition 
se  précise  et  se  fixe  à  l'ancienne  citadelle  Antonia.  Mais, 
il  faut  l'avouer,  ce  n'est  qu'en  des  temps  assez  éloignés 
des  origines  qu'elle  se  localise  d'une  façon  aussi  posi- 
tive ;  les  premiers  témoins  laissent  le  champ  libre  à 
des  recherches  qui  peuvent  se  poursuivre  le  long  de 
l'enceinte  occidentale  et  septentrionale  du  Temple.  Il 
nous  reste  donc  à  voir  si  l'archéologie  peut  nous  ap- 
porter quelque  lumière,  et  à  examiner  les  diverses  théo- 
ries émises  sur  la  question. 

4»  Les  hijpolhèses.  —  D'après  les  données  de  l'his- 
toire et  de  la  tradition  que  nous  venons  d'exposer, 
nous  sommes  en  face  de  deux  hypothèses  générales  : 
le  Prétoire  se  trouvait  ou  à  l'ouest,  sur  le  mont  Sion, 
ou  à  l'est,  sur  ou  vers  la  colline  du  Temple.  Cette 
dernière,  la  plus  importante,  se  subdivise  en  trois 
opinions,  que  nous  aurons  à  étudier  séparément. 

a)  LE  pnÉroiRE  au  MOKT  SION,  —  Cette  théorie,  long- 
temps abandonnée,  a  été  reprise  de  nos  jours  par 
Kreyenbùhl,  dans  la  Zeilscltrifl  fur  die  neulestament- 
liche  Wissenscliaft ,  Giessen,  t.  m,  1902,  p.  16  sq.  L'au- 


627 


PRETOIRE 


628 


leur  s'appuie  principalement  sur  l'histoire,  rappelant 
l'exemple  de  Sabinus,  gouverneur  de  Syrie,  qui,  pen- 
dant un  séjour  à  Jérusalem,  occupa  le  palais  d'Hérode, 
et  celui  de  Gessius  Florus,  dont  nous  avons  parlé  plus 
haut.  Cf.  Josèphe,  Bell.jud.,  II,  n.  2;  Anl.  jud.,  XVII, 
IX,  3 .  Bell,  jud.,  II,  xiv,  8.  Il  cherche  une  confirma- 
tion de  sa  thèse  dans  le  fait  suivant,  rapporté  par  l'his- 
torien juif,  Bell,  jud.,  Il,  IX,  4;  Anl.  jud.,  XVIII,  m. 
2.  Pilate,  ayant  employé  l'argent  du  trésor  sacré  à  la 
construction  d'un  aqueduc,  souleva  contre  lui  le  peuple, 
qui,  profitant  de  la  venue  du  procurateur  dans  la  ville 
sainte,  assiégea  son  tribunal,  -o  £lr,u.a,  en  poussant  de 
grands  cris.  Prévoyant  le  tumulte,  le  gouverneur  avait  eu 
soin  de  mêler  à  la  foule  des  soldats  armés,  mais  vêtus  à 
la  manière  du  peuple,  et  leur  avait  enjoint  de  frapper 
les  séditieux  non  avec  le  glaive,  mais  avec  des  bâtons. 
Sur  un  ordre  qu'il  donna  du  haut  de  son  tribunal,  la 
consigne  fut  exécutée,  et  un  grand  nombre  de  Juifs 
tombèrent  sous  les  coups,  .losèphe  ne  dit  pas  quel  palais 
habitait  Pilate  à  ce  moment-là,  mais  il  parait  clair  à 
notre  auteur  que  l'émeute  ne  put  avoir  lieu  à  l'Antonia, 
où  les  soldats  romains  n'eussent  pas  laissé  pénétrer  la 
misse  populaire;  on  ne  saurait  non  plus  placer  le 
pf,îj.ï  du  procurateur  sur  la  place  du  Temple,  au-dessous 
de  l'Antonia,  d'où  l'on  descendait  par  des  degrés.  Il  est 
vrai  que  la  sédition  soulevée  à  propos  de  saint  Paul, 
Acl.,  xxi-xxiiï,  éclata  en  cet  endroit,  et  que  le  tribun 
mit  l'Apôtre  en  sûreté  dans  la  citadelle.  Act.,  xxi,  34, 
37;  xxn,  24;  xxm,  10,  16,  32.  Mais  il  n'est  pas  ques- 
tion ici  du  procurateur,  qui  à  ce  moment  était  à  Césa- 
rée,  ■•!  le  théâtre  de  l'émeute  est  nettement  caractérisé 
par  la  mention  du  Temple,  du  «  camp  »,  ^ a f.;;j.ôo /.■>,, 
c'est-à-dire  de  la  partie  de  la  citadelle  qui  servait  de 
caserne  à  la  garnison  romaine,  et  des  degrés.  àvaSaO- 
|io!,  par  lesquels  on  y  montait.  Act.,  xxi,  35,  iO.  Dans 
le  récit  de  Josèphe,  au  contraire,  le  soulèvement  est 
dirigé  contre  le  gouverneur.  Il  va  sans  dire  que  le 
palais  d'Hérode  avait  sa  garnison  comme  l'Antonia,  el 
que  le  procurateur  y  avail  au  moins  sa  garde  du  corps. 
Lors  donc  que  saint  Marc,  xv.  10,  parle  de  la  cohorte 
convoquée  dans  la  cour  du  prétoire,  pour  prodiguer 
les  outrages  à  Jésus,  il  ne  saurait  être  question  de  la 
garnison  de  l'Antonia,  mais  de  celle  du  palais  d'Hérode 
ou  d'une  partie  de  celle-ci,  la  garde  du  procurateur. 
Aussi  les  Synoptiques,  dans  l'exécution  de  la  sentence 
capitale,  ne  mentionnent-ils  pas  un  yùiap/rj;  ou  tribun, 
comme  les  Actes,  xxi-xxiii,  mais  seulement  un  x;vt-j- 
pt'iov,  centurion.  Marc,  xv,  39.  La  présence  d'une  gar- 
nison dans  le  palais  royal  explique  peut-être  l'expres- 
sion de  saint  Marc,  xv,  10,  ■},  aj>/,,  ô  ïi-.'.i  irpamipiov; 
x-'j'rr,  seul  ne  pourrait  s'appliquer  à  l'Antonia,  qui  étail 
une  forteresse.  Sans  doute  celle-ci,  avec  ses  magni- 
ficences, pouvait  être  assimilée  à  un  château  royal. 
mais,  par  destination,  elle  était  surtout  une  forteresse, 
le  çpoûpiov  du  Temple,  comme  le  Temple  était  le  ypo-j- 
piov  de  la  ville,  suivant  le  mot  de  Josèphe.  llell.jiid., 
Y,  v,  8;  aussi  l'historien  juif  la  désigne -t-il  régulière- 
ment sous  les  noms  de  itupyoç,  nupYOEt$r,ç,  ppoiiptov, 
non  sous  celui  de  oc-J).irç.  Une  aùXr,,  c'est  le  palais  du 
grand-prétre,  Marc,  xiv,  ~>'t,  ou  de  l'empereur,  past- 
>'./.r  ocjVrj.  Eusèbe,  //.  h'.,  Y.  \x,  5.  Josèphe  lui-même, 
llell.  jud.,  Y,  iv.  i,  appelle  le  palais  d'Hérode  r,  ro-j 
\Jixiùii,i;  -j.i'i'1,.  Contre  cette  théorie  on  a  cherché  à  faire 
valoir  l'expression  àveiten<|/£v,  employée  par  saint  Luc, 
XXIII,  7,  à  propos  du  renvoi  de  Jésus  devant  Hérodi  . 
Comme  àvanéjjLTtu  signifie  «  envoyer  en  haut,  faire 
monter  .  on  enconclul  que  îe  palais  d'Hérode  Antipas 
étail  à  un  niveau  plus  élevé  que  la  demeure  actuelle 
de  Pilate.  Or,  Antipas,  pendant  son  séjour  à  Jérusalem, 
habitait  le  palais  des  Asmonéens.  situé  plus  bas  du 
côté  de  la  vallée  de  Tyropœon.  Donc  Pilate  ne  pouvait 
occuper  le  palais  .1  Hérode  le  Grand.  M.  luvyenbùh 
répond   que   le   verbe   «y x-Kéu.mi<i  n'indique  pas  seule- 


ment la  direction  vers  un  lieu  plus  élevé,  mais  encore 
vers  une  personne  supérieure  en  dignité  et  en  puis- 
sance. Cf.  Act.,  xxv,  21,  et  que,  Luc,  xxm,  11,  15,  il  a 
même  le  sens  de  «  renvoyer  ». 

Tels  sont  les  arguments  par  lesquels  on  cherche  à 
prouver  que  le  Prétoire  devait  se  trouver  sur  la  colline 
occidentale.  Cette  théorie  a  le  grand  inconvénient  d'être 
absolument  contraire  à  la  tradition.  Nous  avons  vu,  en 
effet,  que  les  témoignages  les  plus  anciens  et  les  plus 
authentiques,  jusqu'à  l'époque  des  croisades,  fixent  nos 
regards  du  côté  de  la  colline  orientale.  Le  silence  des 
premiers  siècles  jusqu'à  l'an  333  n'est  pas  un  obstacle, 
car,  malgré  les  bouleversements  subis  par  Jérusalem, 
les  chrétiens  n'avaient  pas  perdu  de  vue  les  principaux 
points  de  la  ville  sanctifiés  par  Xotre-Seigneur  et  de- 
venus l'objet  de  leur  vénération,  et  cette  tradition 
s'était  transmise  de  génération  en  génération.  Noos 
disons  les  principaux  points,  parmi  lesquels  il  faut 
bien  compter  le  Prétoire  de  Pilate,  sans  vouloir  approu- 
ver pour  cela  la  précision  rigoureuse  que  la  tradition 
a  donnée  plus  tard  et  donne  encore  aujourd'hui  à  cer- 
tains détails  des  scènes  évangéliques.  Si,  au  moment 
des  croisades,  les  recherches  se  sont  égarées  du  côté 
du  mont  Sion,  cette  fausse  piste  est  due  à  certaines 
méprises  et,  du  reste,  n'a  pas  fait  oublier  la  vraie. 
Quant  aux  arguments  historiques  qu'on  apporte,  ils  ne 
sont  pas  suffisants  pour  prouver  que  tous  les  procura- 
teurs, et  Pilate  en  particulier,  aient  habité  le  palais 
d'Hérode.  Pilate  aurait  sans  doute  pu  l'occuper,  et 
l'exemple  de  Gessius  Florus  rendrait  ce  séjour  vrai- 
semblable, s'il  n'y  avait  plus  de  vraisemblance  encore 
à  ce  que,  pendant  les  fêtes  de  la  Pàque,  en  prévision  des 
troubles,  il  n'eut  choisi  l'Antonia  pour  demeure.  Les 
soldats  romains  d'ailleurs  n'eussent  pas  plus  laissé  la 
foule  envahir  le  palais  de  Sion  que  la  citadelle,  el  la 
place  sur  laquelle  le  procurateur  établit  son  tribunal, 
sans  être  celle  du  Temple,  pouvait  être  au-dessous  de 
l'Antonia,  du  côté  de  la  ville.  D'autre  part,  s'il  n'est 
question  que  d'un  centurion.  Marc,  SV,  39,  il  n'est  pas 
nécessaire  de  ne  voir  dans  la  troupe  qu'il  commandait 
que  la  petite  garnison  du  palais  occidental,  ou  la  garde 
de  Pilate  ;  c'était  un  simple  détachement  de  l'effectif 
plus  nombreux  de  la  citadelle.  L'argument  tiré  de  x'j'ir, 
est  de  nature  à  frapper  davantage,  mais  le  mot  ne  veut 
pas  seulement  dire  «    palais   »,    il  signifie   également 

0  cour  ».  S'il  a  le  premier  sens  dans  certains  passages, 
comme  Matth.,  xxvi,  3,  58;  Marc,  xiv,  5i,  etc.,  il  a  le 
second  dans  d'autres,  comme  Matth..  xxvi.  Oit;  Marc, 
xiv,  66;  Luc.  xxn.  55.  L'expression  de  Marc,  xv,  16  : 
î|  KÙVrj,  3  Iffriv  Ttpatnopiov,  pourrait  donc  désigner  la 
cour  intérieure  qui  servait  de  prétoire.  Cependant, 
M.  van  Vebber,  Theologische  Quartalschrift,  1905, 
Hefl  II,  «  arrive,  à  la  suite  d'un  raisonnement  objectif 
et  très  serré,  à  ces  deux  équations  :  -x  Hpuiôou  Setaf- 
>.eia  =  oîxt'a  ttoy  ÈncTpd7E(dv  dans  Philon,  et  r,  a0>/(,  ô 
iotiv  itpaiTiâptoy  de  saint  Marc  =  r,  a-j> .r,  3a*0 " •■',  ou  sim- 
plement aO).r„  que  Josèphe  applique  uniquement  au 
palais  d'Hérode  élevé  dans  la  ville  liante,  tandis  que 
pour  lui  la  forteresse  du  Temple  n'est  que  l'Antonia, 
le  ppo-jpiov  ou  le  itûpyo;.  La  distinction  du  Prétoire  et 
de  l'Antonia  est  d'ailleurs  confirmée  par  d'autres  pas- 
sages de  Josèphe.  '  Cf.  Revue  biblique,  1905,  p.  650.  11 
y  aurait  donc  là  un  argument  sérieux  en  faveur  île 
cette  première  théorie,  si  elle  n'avait  toute  la  tradition 
contre  elle.  Quant  à  l'objection  tirée  de  xviireptl'sv,  nous 
sommes  d'avis  qu'il  ne  faut  pas  trop  presser  la  signi- 
fication étymologique  du  mot.  Cette  opinion  est  admise 
par   un    certain    nombre   d'auteurs,    entre    autres   par 

1  Schûrer,  Geschiehte  des  jiidischen  Volkes  im  Zeital 
/,,•  Jesu  Christi,  Leipzig,  1901,  t.  i,  p.  158,  et  dans 
rtfehm,  Handivôrterbttch  des  biblisclien  Alternons, 
Leipzig,  1884,  t.  n,  p.  1293.  Elle  est  regardée  comme 
probable  par  G.  T.  Purves,  dans  le  Dictionanj  of  the 


629 


PRETOIRE 


630 


Bible  de  J.  Hastings,  Edimbourg,  1902,  t.  iv,  p.  32,  qui 

cite  en  sa   faveur  Meyer,  Winer,  Alford,  Edersheim  et 
d'autres. 

/.')  I.E  PRÉTOIRE  ET  /..l  COLLISE  ORIENTALE.  —  La  tra- 
dition nous  conduit  plutôt  du  coté  de  la  colline  du 
Temple.  Mais  là,  les  opinions  se  partagent  actuellement 
et  cherchent  le  prétoire  en  trois  points  distincts. 

I.  L'Antonia.  —  C'est  là,  nous  l'avons  vu,  que,  depuis 
le  xm«  siècle,  les  pèlerins  ont  coutume  de  vénérer  le 
lieu  sanctifié  par  les  souffrances  du  Christ  chez  Pilate. 
On  ;i  même  localisé  en  des  points  précis  les  différentes 
scènes:  le  couronnement  d'épines,  la  flagellation,  X'Ecce 


qui  le  rendait  facilement  accessible  à  l'ennemi.  Il  fallut 
donc,  non  seulement  élever  une  tour  de  défense,  mais 
encore  séparer  les  deux  collines  par  une  tranchée.  Or, 
voici  ce  que  nous  révèle  l'exploration  du  terrain.  Voir 
fig.  170.  Au  nord  de  l'ancienne  enceinte,  existait  une 
vaste  tranchée,  taillée  dans  le  roc  (c),  au  fond  de  la- 
quelle avait  été  creusé  en  outre  un  fossé  large  d'envi- 
ron dix  mètres  (d),  destiné  sans  doute  à  défendre  les 
approches  d'un  rempart  élevé  au  nord  du  hiéron.  La 
communication  entre  le  mont  Bézétha  et  le  montMoriah 
n'étant  pas  jugée  suffisamment  interrompue  par  cette 
coupure,  on  en  pratiqua  une  nouvelle  vers  le  nord  (e), 


Echelle 


Les  chiffres  indiquent  les  hauteurs  en  mètres 
au-dessus  au  niveau  de  la  mer. 


Plateforme    du   Temple 


Rochersacré^ 


756 

-w-g*jr 


COUPE  en  A  B 

lr.e  Coupure   C 


7sz  Fosse  D 

'7~\     7te 


;"^9f.''.er.l8.B.anf  "  Z"1*  Coupure-  £ 

7J  .  '    <     ...  7tB, 


Configuration  du  terrain  au  nord-ouest  du  Temple  k  l'avènement  d'Hérode  : 
D'après  le  P.  Barnabe,  Le  Prétoire  de  Pilate,  p.  5. 


Homo,  la  condamnation  à  mort.  La  caserne  turque  ac- 
tuelle étant  regardée  comme  l'emplacement  du  Prétoire, 
c'est  de  là  que  part  la  Voie  douloureuse.  Cette  opinion, 
attaquée  de  nos  iours  par  plusieurs  savants  catholiques, 
a  été  défendue  en  particulier,  avec  ampleur  et  ardeur, 
par  le  P.  Barnabe  d'Alsace,  Le  Prétoire  de  Pilate  et  la 
forteresse  Antonia,  in-S»,  Paris,  1902.  Il  étudie  la 
question  au  point  de  vue  archéologique,  historique  et 
traditionnel;  cette  question  est  trop  importante  pour 
que  nous  ne  donnions  un  résumé  des  considérations 
de  1  auteur. 

Au  moyen  de  l'archéologie  et  de  l'histoire,  le  P.  Bar- 
nabe a  cberché  d'abord  à  reconstituer  le  Prétoire,  c'est 
à-dire  la  forteresse  Antonia,  telle  qu'elle  devait  être  au 
temps  de  Notre-Seigneur.  On  sait  que  cette  forteresse 
se  trouvait  à  l'angle  nord-ouest  de  l'esplanade  du  Temple 
tt  avait  succédé  à  l'antique  Baris.  Cf.  3osèphe,Ant,  jud., 
XV,  xi,  i;  XVIII,  iv,  3.  Elle  était  destinée  à  protéger  de 
ce  côté  l'enceinte  sacrée;  le  mont  Moriah,  en  effet,  en- 
touré partout  ailleurs  de  ravins  profonds,  se  rattachait 
au  nord  a  la  masse  rocheuse  appelée  mont  Bézétha, 


et  on  ne  laissa  subsister  que  le  massif  rocheux  qui  sup- 
portait la  tour  Baris.  Par  suite  de  ce  travail,  le  rocher 
sur  lequel  est  assise  la  caserne  turque  fut  taillé  à  pic 
sur  toutes  ses  faces.  Il  forme,  dans  son  ensemble,  un 
banc  trapézoïde,  long  de  110  mètres,  large  de  40  en 
moyenne,  et,  à  l'ouest,  une  équerre  dont  la  branche  qui 
va  du  nord  au  sud  n'a  que  9  mètres  de  largeur.  Du  côté 
sud.  l'escarpe  de  ce  bloc  immense  a  une  hauteur  maxima 
de  10  mètres,  tandis  que,  au  nord,  la  taille  perpendi- 
culaire n'a  guère  plus  de  5  mètres.  La  contrescarpe, 
c'est-à-dire  la  coupure  du  mont  Bézétha.  a  été  retrou- 
vée à  70  mètres  au  nord  du  rocher  Baris;  elle  se  dirige 
de  l'ouest  à  l'est,  mais,  à  l'ouest,  elle  fait  un  coude 
comme  pour  contourner  en  lignes  parallèles  le  massif 
de  la  citadelle,  et,  dans  l'église  de  l'Ecce  Homo,  on  voit 
le  rocher  taillé  verticalement  sur  une  hauteur  de 
4  mètres.  Cette  coupure  a  en  réalité  5  à  6  mètres  de 
hauteur  au-dessus  du  sol  rocheux  qui  s'étend  sous 
l'église,  tandis  que,  au  nord,  la  différence  de  niveau 
atteint  environ  9  mètres.  En  creusant  les  premiers  fon- 
dements du   monastère  des   Dames  de  Sion,  on  a  dé- 


631 


PRETOIRE 


153'_> 


couvert  également  une  ancienne  piscine,  taillée  dans 
le  roc,  divisée  en  deux  branches  parallèles,  qui  se 
dirigent  du  nord-ouest  au  sud-est;  elle  s'enfonce  légè- 
rement sous  le  rocher  Baris,  à  l'angle  nord-ouest. 

Tel  était  le  terrain  sur  lequel  Hérode  bâtit  l'Antonia. 
Mais  il  n'en  fit  pas  seulement  une  forteresse,  il  voulut 
aussi  s'\  ménager  un  palais,  avec  péristyles,  salles  de 
bains  et  vastes  cours.  Cf.  Tosèphe,  Bell,  jitd.,  V,  v,  8. 
Pour  cela,  il  dut  nécessairement  élargir  la  citadelle  de 
Baris,  trop  étroite  pour  porter  les  nouveaux  monu- 
ments. Ne  pouvant,  d'après  le  P.  Barnabe,  l'agrandir 
du  coté  du  sud.  il  l'étendit  des  autres  côtés,  et  prin- 
cipalement sur  le  plateau  artificiel  taillé  au  nord. 
L'Antonia  formait  ainsi  un  vaste  quadrilatère,  enfer- 
mant dans  son  enceinte  le  rocher  de  Baris,  qu'il  dépas- 
sait. Voir  fig.  171.  Quatre  grosses  tours,  reliées  par  des 


où  se  rendait  la  justice,  lorsque  le  procurateur  y  habi- 
tait, en  un  mot  le  prétoire,  r,  x-j'/.r,,  o  èît.v  itpartiipiov, 
suivant  l'expression  de  Marc,  xv,  16.  Le  Lithostrotos 
formait  la  cour  inférieure  et  extérieure.  Quoique  situé 
à  cinq  mètres  en  contre-bas  de  la  cour  intérieure,  il 
n'en  justifierait  pas  moins  son  autre  nom  de  Gabbaiha 
ou  «  élevé  »  par  sa  position  dominante;  car  il  est  placé 
au  sommet  d'une  crête  rocheuse,  à  laquelle  montent 
deux  chemins,  l'un  de  l'est,  l'autre  de  l'ouest.  La  lla- 
gellation,  d'après  le  P.  Barnabe,  p.  93.  aurait  eu  lieu 
en  dehors  du  Prétoire,  comme  aussi  en  dehors  du  Li- 
thostrotos, dans  le  lieu  spécialement  destiné  à  ce  genre 
de  supplice.  Ajoutons  enfin  que  deux  escaliers  des- 
cendaient, du  côté  du  sud.  sur  l'esplanade  du  Temple, 
pour  permettre  à  la  troupe  de  réprimer  les  premiers 
mouvements  séditieux.    D'autre    part,  le  P.   Barnabe, 


171.  —  La  citadelle  Antonia.  D'après  le  P.  Barnabe.  Le  Prétoire,  p.  29. 


portiques,  le  Danquaienl  aux  quatre  coin-;  un  fossé, 
dont  le  Birket  Israil  est  considéré  comme  le  terri 
le  séparait  du  mont  Bézétha.  Une  porte  monumentale 
à  trois  baies  s'ouvrait  vers  la  ville,  du  côté  de  l'ouest. 
Cette  porte  ne  serait  autre  que  l'arc  de  l'Ecce  Homo, 
qui,  comme  on  le  sait,  se  compose  d'un  grand  arc  en 
plein  cintre,  à  cheval  sur  la  rue.  et  d'une  arcade  plus 
petite,  qui  se  trouve  dans  l'église  des  haines  de  Sion, 
et  dont  le  pendant  ou  collatéral  sud  a  complètement 
disparu.  Voir  JÉR1  SALI  M,  t.  m,  col.  1342.  Le  P.  Barnabe 
le  compare  à  la  porte  monumentale  d'un  camp  préto- 
rien. En  avant  et  au  delà,  s'étendait  un  beau  pavement, 
qu'on  a  mis  à  découvert  à  un  OU  deui  mètres  au-dessous 
du  niveau  de  la  rue,  et  qui  se  continue  jusque  dans 
l'enclos  de  la  Flagellation.  Il  est  formé  de  grandes 
dalles  de  pierre  très  dure,  dont  l'épaisseur  varie  entre 
15  centimètres  :  devant  el  derrière  l'arc,  elles  sont 
striées  par  des  cannelures  transversales.  Ce  serait  le 
Lithostrotos.  Trois  escaliers  descendent  au  fond  de  la 
piscine.  La  résidence  royale,  par  là  même  le  palais  du 
procurateur  se  trouvait  sur  le  rocher  Paris,  dominant 
toute  l'enceinte  du  Temple;  on  y  accédait  du  Lithos- 
trotos par  un  escalier,  la  Scala  Santa  de  Borne.  C'est 
là,  au  milieu  des  bâtiments  qui  constituaient  le  palais, 
que  devait  être   l'atrium   intérieur,  la  cour  principale 


p.  56-77.  au  lieu  de  rattacher  la  seconde  enceinte  de 
Jérusalem  à  l'angle  nord-ouest  de  l'esplanade  du 
Temple,  la  l'ait  passer  au  nord  des  constructions  dont 
nous  venons  de  parler  et  la  ramène  à  l'angle  nord-est 
6g.  5,  p.  lfi'.  Apres  avoir  ainsi  reconstitué  l'Antonia, 
il  avoue,  p.  85,  que  l'histoire  ne  fournit  aucun  argu- 
ment péremptoire  pour  y  placer  le  Prétoire  de  Pilate; 
il  y  a  simplement  une  très  grande  probabilité  pour 
que,  pendant  les  fêtes  de  la  Pàque,  le  procurateur  ait 
préféré  la  citadelle  au  palais  du  mont  Sion.  Ce  dernier 
se  trouvait  éloigné-  du  Temple  et  de  la  caserne  princi- 
pale où  les  troupes  se  tenaient  concentrées,  ce  qui 
devait  paralyser  tout  commandement  prompt  et  rapide, 
qu'auraient  nécessité  les  circonstances  (p.  81  . 

Le  P.  Barnabe  cherche  à  faire  valoir  en  sa  faveur  les 
premiers  témoignages  traditionnels.  Ainsi,  en  ce  qui 
concerne  le  pèlerin  deBordeaux,  il  reconnaît  bien  (p.  111) 
que  les  mots  en  bas,  dans  la  vallée,  Désignent  évi- 
demment ce  qu'on  appelle  aujourd'hui  YEl-Wad,  la  rue 
(iu  Vallon,  rue  qui  suit  un  moment  la  Voie  doulou- 
reuse ».  .Mais  on  aurait  mauvaise  grâce  à  demander  aux 
anciens  pèlerins  une  précision  mathématique.  Et  puis, 
d'après  M.  de  Vogué,  il  ne  faut  pas  prendre  à  la  lettre 
les  expressions  ilcw»i»i  m  valle,  et  conclure  que,  pour 
le  pèlerin  de  Bordeaux,  le  Prétoire  était  dans  le  val  du 


633 


PRÉTOIRE 


634 


Tyropceon;  le  mont  Sion  domine  beaucoup  le  Sérail 
actuel,  qui,  vu  du  haut,  est  sur  un  plan  inférieur  et 
parait,  pour  ainsi  dire,  dans  une  vallée.  Au  iv°  siècle, 
du  reste,  le  fond  du  vallon  s'étendait  vers  la  forteresse 
Antonia  un  peu  plus  qu'aujourd'hui,  comme  l'indique 
la  mosaïque  trouvée  dans  l'église  de  Xotre-Dame  du 
Spasme,  et  qui  est  à  une  centaine  de  pas  seulement  de 
l'arc  Ecce  Homo,  à  six  ou  sept  mètres  au-dessous  du 
pied  de  l'arc.  L'expression  «  descendit  »,  qu'on  ren- 
contre dans  l'itinéraire  de  Pierre  l'Ibère,  est  parfaite- 
ment justifiée,  au  dire  de  M.  Clermont-Ganneau,  Recueil 
d'archéologie  orientale,  Paris,  1900,  t.  m,  p.  229,  la 
cote  d'altitude  du  parvis  de  l'église  du  Saint-Sépulcre 
étant  de  2479  pieds  anglais  (755  mètres)  et  celle  de  la 
Voie  douloureuse,  à  l'angle  nord-ouest  de  la  caserne, 
étant  de  2  448  (745  mètres).  Quant  aux  chiffres  de  Théo- 
dose, il  faut  absolument  s'en  passer,  tant  ils  sont  sujets 
à  caution.  Les  deux  points  suivants  seuls  sont  à  consi- 
dérer :  1»  Le  pèlerin  nous  conduit  au  Prétoire  en  se 
rendant  à  "ta  piscine  probatiquc  et  à  l'église  de  Sainte- 
Marie;  2°  près  du  Prétoire,  est  creusée  la  fosse  dans 
laquelle  fut  jeté  le  prophète  Jérémie;  or  la  tradition  a 
persisté  à  placer  cette  fosse  au  nord-est  du  Temple, 
dans  le  quartier  qui  renferme  l'église  de  Sainte-Marie 
ou  Sainte-Anne;  donc  le  Prétoire  était  non  loin  de  ce 
dernier  édifice.  Enfin  Antonin  de  Plaisance  rencontre 
le  Prétoire  près  du  portique  de  Salomon,  au-devant 
îles  reines  du  Temple.  «  Or,  comme  Ponce  Pilate  n'a 
absolument  pas  pu  établir  sa  résidence  et  celle  de  sa 
cohorte  païenne,  ni  sur  la  plate-forme  du  Temple,  ni 
au  pied  du  mur  de  l'enceinte  sacrée,  saint  Antonin  ne 
put  trouver  la  basilique  de  Sainte-Sophie  qu'à  l'autre 
extrémité  du  hiéron,  au  nord,  à  l'emplacement  de  la 
forteresse  Antonia.  »  Et  en  effet  «  les  ruines  du  temple 
de  Salomon  ne  furent  jamais  montrées  au  pied  du  mur 
d'enceinte,  qui  a  une  hauteur  énorme  sur  trois  de  ses 
cotés,  mais  bien  sur  la  plate-forme  elle-même,  et  ce 
n'est  qu'au  nord  que  le  rocher  de  Paris  se  dressait  en 
avant  des  ruines  du  temple.  Quant  au  portique  de  Salo- 
mon, nous  avons  déjà  vu  que  saint  Willibald  en  indique 
les  ruines  non  loin  de  la  piscine  probatique  ».  Barnabe, 
op.  cit..  p.  153,  454.  Inutile  d'aller  plus  loin;  tout  le 
monde  concède  que  dans  les  sept  derniers  siècles  la 
tradition  de  l'Antonia  l'emporte. 

Il  est  certain  que  l'opinion  qui  vient  d'être  exposée  a 
quelque  chose  de  séduisant;  elle  semble  reconstruire 
l'antique  Prétoire  d'une  manière  si  naturelle,  si  con- 
forme en  apparence  à  l'histoire  et  à  l'archéologie,  que 
les  scènes  évangéliques  y  revivent  d'elles-mêmes.  Elle 
donne  tant  de  satisfaction  à  la  piété  traditionnelle,  qui 
depuis  longtemps  cherche  à  l'Antonia  et  dans  les  envi- 
rons l'émotion  des  plus  douloureux  souvenirs,  qu'on  la 
voudrait  absolument  certaine.  Et  pourtant,  il  faut 
l'avouer,  elle  soutire  bien  des  difficultés.  Autant  le  Gol- 
gotha  et  le  Saint-Sépulcre,  malgré  quelques  attaques 
sans  importance,  sont  des  points  absolument  acquis 
dans  la  topographie  de  la  Passion,  autant  le  Prétoire 
reste  encore  soumis  à  des  incertitudes.  Le  P.  Barnabe 
lui-même,  p.  132,  ne  donne  à  sa  conclusion  qu'un  sens 
négatif,  lorsqu'il  dit  :  «  Par  l'étude  du  terrain,  nous 
croyons  avoir  bien  clairement  démontré  que  ni  l'Écri- 
ture Sainte,  ni  l'histoire,  ni  l'archéologie  ou  les  décou- 
vertes modernes  ne  s'opposent  d'aucune  façon  à  l'exis- 
tence du  prétoire  de  Pilate  dans  la  forteresse  Antonia  : 
bien  au  contraire.  »  Est-il  bien  vrai  même  que  la  vieille 
citadellea  pu  servir  de  Prétoire'?  Plusieurs  en  doutent. 

On  nous  dit  d'abord  qu'Hérode  ne  pouvait  étendre 
l'Antonia  du  côté  du  sud,  parce  qu'il  avait  déjà  prolongé 
le  hiéron  jusqu'au  rocher  de  Baris.  C'est  une  assertion 
que  n'admettent  pas  de  bonsarchéologues,  et  M.  deVogùé, 
en  particulier,  ne  l'a  pas  compris  ainsi.  Voir  Temple. 
Mais  le  plus  grave  est  de  porter  les  agrandissements 
jusque  dans  la  coupure  artificielle  qui  séparait  le  Bézétha 


du  Moriah.  Il  semble  de  prime  abord  qu'elle  était  des- 
tinée à  servir  de  fossé,  à  rendre  la  citadelle  plus  inac- 
cessible de  ce  côté.  Josèphe  lui-même  rapporte,  Bell, 
jud.,  Y,  v,  8,  que  l'Antonia  était  assise  sur  un  rocher 
«  escarpé  de  tous  côtés,  rccp'.xsrijivou  ôs  miaï);,  revêtu 
du  haut  en  bas  de  pierres  polies,  pour  l'embellissement 
de  l'édifice,  mais  aussi  pour  faire  glisser  quiconque 
aurait  voulu  monter  ou  descendre  >•.  Quelle  eût  été 
l'utilité  de  cette  muraille  septentrionale,  si  on  la  suppose 
précédée  d'autres  constructions  et  munie  d'un  escalier 
qui  eût  relié  les  appartements  supérieurs  aux  cours 
inférieures?  Cette  coupure  n'est-elle  pas  le  fossé  pro- 
fond dont  parle  Josèphe,  Bell,  jud.,  Y,  iv,  2,  «  creusé 
à  dessein  »  pour  que  les  fondements  de  l'Antonia  fussent 
moins  accessibles  et  plus  hauts9  Même  en  admettant  la 
reconstitution  proposée  par  l'auteur,  on  se  demande 
comment  la  concilier  avec  la  direction  de  la  seconde 
enceinte  de  Jérusalem.  Nous  reconnaissons  que  cette 
seconde  ligne  de  fortifications  est  hypothétique  en  plu- 
sieurs points,  mais  ses  deux  points  d'attache  sont  cer- 
tains, puisque  Josèphe,  Bell,  jud.,  Y,  iv,  2,  nous  dit 
qu'elle  partait  de  la  porte  Gennath  et  se  prolongeait 
o  jusqu'à  l'Antonia  ».  Voir  JÉRUSALEM,  t.  m,  col.  1360. 
Il  est  donc  tout  naturel  de  croire  que,  venant  de  l'ouest, 
elle  allait  buter  contre  'la  paroi  occidentale  de  la  forte- 
resse, c'est-à-dire  contre  son  angle  nord-ouest.  Ce  qui 
confirme  cette  supposition,  c'est  la  direction  même  de 
la  contrescarpe,  qui,  descendant  du  nord  au  sud,  fait, 
en  face  de  l'arc  de  l'Ecce  Homo,  un  détour  à  angle 
droit  et  s'en  va  du  côté  de  l'ouest,  le  long  de  la  Voie 
douloureuse.  Cette  dernière  ligne  semble  donc  bien 
indiquer  celle  que  suivait  le  fossé  et,  par  conséquent. 
le  mur  de  la  seconde  enceinte.  Mais,  s'il  en  est  ainsi, 
la  porte  monumentale  dont  on  décore  l'Antonia  se  trou- 
vait en  dehors  des  murs  et  donnait  sur  le  fossé,  ce  qui 
est  inadmissible.  Le  P.  Barnabe  (fig.  5.  p.  16)  remédie 
à  cet  inconvénient  en  conduisant  «  la  ligne  supposée 
de  la  deuxième  enceinte  »  par-dessus  le  mont  Bézétha 
et  la  faisant  aboutir  à  l'angle  nord-est  de  l'enceinte  du 
Temple.  C'est  se  mettre  en  opposition  absolue  avec 
Josèphe,  puis  à  quoi  aurait  servi  cette  muraille  bâtie 
en  plein  sur  le  mont  Bézétha?  Il  eût  donc  fallu  un 
second  fossé  pour  la  défendre.  D'antre  part,  le  même 
auteur  (p.  41)  avoue  que  des  archéologues  distingués, 
comme  MM.  de  Vogué  et  de  Saulcy,  après  avoir  cru 
reconnaître  dans  l'arc  Ecce  Homo  un  monument  héro- 
dien,  un  débris  du  palais  de  Pilate,  ont  fini  par  émettre 
des  doutes  et  lui  assigner  une  date  postérieure  à  la 
Passion  de  Xotre-Seigneur.  D'ailleurs,  si  ses  débris 
avaient  subsisté,  ils  eussent  été  des  indices  suffisants 
de  l'emplacement  de  l'antique  Prétoire.  Comment  se 
fait-il  alors  que  la  plus  ancienne  tradition  n'en  parle 
pas?  Il  va  sans  dire  que  le  pavement  de  pierres  ou 
Lithostrotos  doit  subir  les  incertitudes  qui  se  rattachent 
à.l'arc.  Il  y  aurait  encore  bien  des  objections  de  détail  ; 
celles  que  nous  venons  de  faire  montrent  assez  les 
défauts  de  la  reconstitution  archéologique.  Au  point  de 
vue  historique,  nous  avons  vu  qu'il  est  très  difficile, 
sinon  impossible,  d'avoir  des  données  certaines,  per- 
mettant d'affirmer  qu'un  des  procurateurs  ait  résidé  à 
l'Antonia. 

La  tradition  elle-même  fait  bien  entendre  quelques 
protestations  contre  l'usage  qu'on  en  fait.  Sans  exiger 
trop  de  précision  des  anciens  pèlerins,  et,  en  donnant 
à  ces  mots  :  deorsum  in  valle  toute  la  latitude  possible, 
il  est  difficile  de  les  appliquer  à  l'Antonia,  même  vue 
de  Sion,  puisqu'elle  se  trouvait  sur  la  partie  la  plus 
élevée  du  mont  Moriah.  Il  en  est  de  même  de  l'expres- 
sion «  descendit  »  de  Pierre  l'Ibère;  sans  rechercher 
l'endroit  précis  où  sont  prises  les  cotes,  il  est  peu 
naturel  de  dire,  en  parlant  du  Saint-Sépulcre,  qu'on 
«  descend  »  à  la  caserne  turque.  Quant  à  Théodose,  il 
est  sans  doute  inutile  de  discuter  la  valeur  de  ses  pas; 


635 


PRETOIRE 


636 


mais  ce  qui  ressort  de  son  témoignage,  c'est  que  le 
Prétoire  était  à  peu  près  à  égale  distance  de  Siloé  et 
de  la  piscine  probalique.  Or,  l'Antonia  est  de  beaucoup 
plus  prés  de  cette  dernière.  Anlonin  le  Martyr  place  le 
Prétoire  «  devant  les  ruines  du  Temple  de  Salomon  », 
à  l'endroit  où  «  l'eau  coule  vers  la  fontaine  de  Siloé, 
près  du  portique  de  Salomon.  »  Cette  eau  qui  coule 
dans  la  direction  de  Siloé  semble  bien  èlre  celle  qui 
suit  la  pente  naturelle  du  Tyropœon,  le  long  de  l'enceinte 
du  Temple.  Le  nom  de  «  portique  de  Salomon  »  n'est 
donc  pas  à  prendre  ici  dans  son  sens  historique,  comme 
indiquant  l'est  du  Temple,  mais  dans  un  sens  général 
que  le  pèlerin  donne  aux  restes  salomoniens  de  l'édifice 
sacré. 

2.  Le  Terrain  des  Arméniens  catholiques.  —  Une 
seconde  opinion,  qui  s'appuie  également  sur  les  données 
évangéliques,  traditionnelles  et  archéologiques,  se  rap- 
proche de   la  précédente    en  ce   sens  qu'elle  place  le 


172.  —  Plan  de  l'église  inférieure  de  Notre-Dame  du  Spasme. 

D'après  Macalister,  dans  le  Palestine  Exploration 

Fund,  Quarterlij  Statement,  1902,  p.  122. 

Prétoire  dans  une  certaine  dépendance  de  l'Antonia, 
mais  elle  s'en  écarte  en  le  mettant  à  l'ouest,  du  coté 
de  la  vallée  du  Tyropmon.  Le  terrain  de  cet  emplace- 
ment est  situé  entre  la  Voie  douloureuse  au  nord, 
la  rue  de  la  Vallée  à  l'ouest,  une  rue  qui  va  vers 
l'esplanade  du  Temple  au  sud,  et  le  couvent  des 
derviches  à  l'est;  il  appartient  aux  Arméniens  catho- 
liques. On  y  a  découvert  les  ruines  d'un  sanctuaire 
byzantin,  (fig.  L72)  dont  l'abside  méridionale  conserve 
une  curieuse  mosaïque,  représentant  doux  sandales 
(fig.  173). Cette  figure,  d'après  l'interprétation  courante, 
marque  l'endroit  où  se  tenait  la  Sainte  Vierge  lorsqu'elle 
rencontra  son  divin  Fils  marchant  au  supplice;  d'où 
Notre-Dame  du  Spasme,  signalée  par  d'anciens  pèle- 
rins. Une  autre  explication  y  voit  le  lieu  où  Jésus  se 
reposa  sur  le  chemin  du  Calvaire;  d'où  «  le  moustier 
c'on  apeloit  le  Hepos  0,  dont  parle  Krnoul.  Mais  les 
partisans  de  cette  seconde  bypollièse  veulent  y  re- 
li'ouver  la  place  qu'occupait  .N'ulre-Seigneur,  la  Sagesse 
incréée,  lorsqu'il  lui  condamné  par  Pilale.  Nous  aurions 

ainsi  l'emplacement  exacl  de  l'ancienne  église  de 
Sainte-Sophie,  et   par  conséquent   du    Prétoire.    Les 

raisons  mises  en  avant  sont  les  suivantes.  La  mosaïque 
est  très  ancienne,  comme  le  prouvent  les  monnaies 
byzantines,    les   seules    trouvées    dans    les   environs   au 

ment  des  fouilles  en   [883.   D'après  M.   Macalister, 


Palestine  Exploration  Fwnd,  Quart.  Si.  190-2,  p.  1-23, 
elle  est  plus  ancienne  que  l'église  elle-même.  Elle  n'a 
pas  été  faite  pour  servir  d'ornement  à  l'église,  mais 
pour  consacrer  un  culte  religieux,  car  elle"  était  ren- 
fermée dans  une  partie  de  l'édifice  où  elle  ne  pouvait 
être  profanée.  Elle  fixe  donc  un  souvenir  relatif  à  la 
Sainte  Vierge  ou  à  Notre-Seigneur.  Or,  il  n'est  pas  ques- 
tion d'un  sanctuaire  de  Notre-Dame  du  Spasme  avant  le 
XIIIe  siècle,  et  ceux  qui  en  parlent  ne  mentionnent  pas 
la  mosaïque  aux  deux  sandales.  L'endroit  d'ailleurs  est 
trop  éloigné  de  la  Voie  douloureuse  pour  avoir  pu  èlre 
le  point  de  rencontre  de  .lésus  avec  sa  .Mère.  Dès  l'an 
570,  au  contraire,  Anfonin  de  Plaisance  déclare  avoir 
vénéré  l'empreinte  des  pieds  du  Sauveur  dans  la  basi- 
lique de  Sainte  Sophie. 'C'est  donc  bien  la  même  basi- 
lique, tombée  dans  l'oubli  depuis  l'invasion  persane, 
qu'on  aurait  retrouvée  sur  le  terrain  arménien,  «  en 
bas,  dans  la  vallée,  »  selon  les  indications  du  Pèlerin 
de  Bordeaux  concernant  le  Prétoire,  «  devant  les  ruines 
du  Temple  de  Salomon  t,  à  l'endroit  où  e  l'eau  coule 
vers  la  fontaine  de  Siloé,  »  selon  Antonin  de  Plaisance. 


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173.  —  La  mosaïque  de  N.-D.  du  Spasme,  îWd.,  p.  124. 

Le  Prétoire  se  trouvait  ainsi  au  pied  de  l'Antonia,  du 
côté  de  l'ouest,  près  d'une  porte  conduisant  de  la  forte- 
resse à  la  ville.  Ces  données  semblent  confirmées  par 
le  plan  de  Jérusalem,  tel  qu'il  apparaît  sur  la  mosaïque 
de  Madaba.  En  suivant,  en  effet,  comme  le  Pèlerin  de 
Bordeaux,  la  grande  colonnade  qui  va  du  sud  au  nord 
et  aboutit  à  la  porte  napolitaine,  marquée  par  une 
belle  place,  avec  une  colonne,  on  rencontre  à  droite, 
presque  en  face  de  la  basilique  du  Saint-Sépulcre  à 
gauche,  un  peu  plus  loin  cependant  vers  !e  nord-est, 
une  église  placée  dans  la  direction  de  la  rue  qui  con- 
duit à  la  porte  de  l'est.  La  rue  qui  la  borde  à  l'est  n'a 
de  colonnes  que  d'un  cédé;  c'est  un  portique,  et  l'on 
peut  y  voir  le  portique  de  Salomon  dont  parle  Antonin 
et  le  long  duquel  les  eaux  descendent  à  Siloé.  Plus 
loin,  près  de  la  porte  de  l'est,  se  trouve  une  autre  église, 
qui  est  celle  du  paralytique  ou  de  Sainte-Marie, 
aujourd'hui  Sainte-Anne  Cf.  M.J.  I.agrange,  Jérusalem 
d'après  la  mosaïque  de  Madaba,  dans  la  Revue  inhii- 
(iue,  Paris,  IS',17.  p.  i.Vi-i.".7.  —Celte  seconde  opinion  a 
été  défendue  de  nos  jours  par  E.  Zaccaria,  dans  le  Nuovo 
bullettino  di  ar<  heoloijia  cristiana,  Rome,  mais  1900  et 
mars  1901;  et  C.Mommert,  DasPrâtorium  desPilatus, 

Leipzig,  IIHU.  Il  est  sur  qu'elle  répond  bien  à  la  tradi- 
tion des  plus  anciens  pèlerins,  à  la  situation  présumée 
de  l'antique  basilique  de  Sainte-Sophie.  Mais  on  peul  se 
demander  comment  elle  rattache  le  Prétoire  à  la  forte- 
resse Antonia,  commenl  elle  concilie  cet  emplacement 
avec  la  direction  de  la  seconde  enceinte  de  Jérusalem. 


637 


PRÉTOIRE 


638 


3.  Le  Mehkéméh.  —  Le  Mehkéméh,  qui  servait 
autrefois  de  Iribunal,  esl  une  grande  salle  que  l'on 
rencontre  près  d'une  des  portes  occidentales  du  llaram 
esch-Schérif,  appelée  Bdb  es-  Silsiléh  ou  «  Porto  de  la 
Chaîne  ».  Voir  le  plan  de  Jérusalem  moderne,  t.  ut, 
col.  13U.  Etabli  sur  de  vieilles  substructions,  cet  édi- 
fice n'est  pas  antérieur  au  xve  siècle.  C'est  là  qu'une 
troisième  opinion  cherche  le  Prétoire.  Au  temps  de 
Notre-Seigneur,  l'emplacement  était  occupé  par  la 
Curie  ou  salle  du  Conseil,  {JouXirç,  que  .losèphe, 
Bell,  jud.,  Y,  îv,  2.  nous  montre  contigué  au  mur  de 
la  première  enceinte,  qui,  descendant  du  palais  d'Hérode- 
venait  en  cet  endroit  rejoindre  l'esplanade  du  Temple. 
Voir  le  plan  de  Jérusalem  ancienne,  t.  [Il,  col.  1355. 
Au  sud.  se  trouvait  le  Xyste,  large  place  entourée  de 
portiques,  qui  était  reliée  au  Temple  par  un  pont  à 
arcades  superposées.  Un  palais  le  surplombait  à  l'ouest, 
celui  des  Asmonéens,  alors  la  propriété  des  Hérode. 
«  Les  données  de  l'Evangile,  disent  les  Professeurs  de 
Xolre-Dame  de  France,  La  Palestine,  Paris,  1904,  p.  103, 
s'adaptent  parfaitement  à  ce  cadre  :  La  place  du  Xyste 
était  le  lieu  des  rassemblements  publics,  une  sorte 
i'agora  ou  de  forum  comme  on  le  constate  particuliè- 
rement lors  de  la  révolte  juive  en  66.  Rien  de  plus 
vraisemblable  que  de  voir  Pilate  y  dresser  son  tribu- 
nal devant  la  foule  assemblée.  Il  faisait  ainsi  à  Césarée. 
Le  palais  où  eut  lieu  l'instruction  secrète  du  procès 
serai!  assez  naturellement  la  Curie.  Les  accusateurs  de 
Notre-Seigneur  n'y  entrent  pas  pour  ne  pas  se  souiller 
la  veille  de  la  Pàque.  et  Pilate  \ient  dehors  entendre 
leurs  dépositions.  Les  sanhédrites  répondent  du  milieu 
de  la  foule  qui  se  tenait  sur  la  place.  Cette  place  était 
sans  doute  dallée  et  peut-être  surélevée  à  l'endroit  où 
s'élevait  l'estrade  du  tribunal;  c'est  le  sens  des  deux 
mots  L'Uliostrotos  et  Gabatha  de  saint  Jean,  xix,  13. 
La  résidence  d'Hérode  Antipas,  ancien  palais  des 
Asmonéens,  était  toute  voisine,  et  explique  parfaitement 
le  rapide  envoi  de  Jésus  du  Prétoire  à  Hérode  en  cette 
lugubre  matinée.  Quant  au  chemin  suivi  pour  aller  au 
Calvaire,  on  dut,  en  partant  du  Xyste,  franchir  tout 
d'abord  la  première  enceinte  à  la  porte  dite  de  V Angle, 
voisine  de  la  Curie  ;  puis  entrer  dans  le  faubourg  neuf 
enclavé  entre  les  deux  murs,  et  enfin,  du  fond  de  la 
vallée,' gravir  la  pente  de  la  colline  occidentale  jusqu'à 
la  porte  qui  s'ouvrait  près  du  Golgotha,  dans  le  quar- 
tier où  s'élève  l'hospice  des  Nobles  russes.  La  Voie 
douloureuse,  ainsi  reconstituée,  monterait  donc  de  la 
vallée  parallèlement  au  tronçon  du  chemin  de  croix 
actuel  qui  va  de  la  V«  à  la  IXe  station.  Elle  se  tiendrait 
constamment  plus  au  sud.  Mais  ce  parcours  du  Prétoire 
au  Calvaire  ne  fut  pas  vénéré  parla  dévotion  du  chemin 
de  la  Croix  tant  que  dura  la  tradition  primitive;  da 
moins,  rien  ne  l'indique.  »  C'est  donc  sur  l'emplacement 
du  Mehkéméh  qu'aurait  été  l'antique  basilique  de 
Sainte-Sophie.  Aujourd'hui,  il  est  vrai,  rien  n'atteste 
matériellement  dans  l'endroit  présumé  l'existence  an- 
térieure de  cet  édifice.  On  y  a  cependant  découvert, 
il  y  a  quelques  années,  dans  le  mur  d'une  maison,  une 
pierre  sur  laquelle  on  a  pu  lire,  gravé  au-dessous  d'une 
croix  grecque,  le  mot  E]o<pîa;.  Celte  pierre,  bien  que 
déplacée,  parait  avoir  appartenu  à  l'église  dédiée  à  la 
div.ne  Sagesse.  Cf.  Germer-Durand,  Epigraphe  chré- 
(ifioie  de  Jérusalem,  dans  la  Revue  biblique,  1892, 
p.  584.  Cette  hypothèse,  ajoute-t-on,  est  confirmée  par 
la  tradition,  qui  est  avant  toutcelle  des  premiers  siècles. 
Elle  place,  en  effet,  le  palais  de  Pilate  «  en  bas,  dans  la 
vallée  i>  du  Tyropœon,  près  e  des  ruines  du  Temple  »;  au 
point  où  «  la  vallée  commence  à  s'abaisser  vers  Siloé  »  ; 
l  ins  le  «  voisinage  de  l'église  Sainte-Marie-la  Neuve  » 
i  la  Présentation)  et  des  «  hotelleriesT)àlies  au  centre  de  la 
ville  »;  enfin  à  «  égale  distance  de  Sainte-Anne  et  de  la 
piscine  de  Siloé,  »  distance  qui  est  «  double  pour  aller  du 
prétoire  à  Saint-Étienne.  »  Telle  est  l'opinion  adoptée 


par  les  Professeurs  de  Notre-Dame  de  France  dans  leur 
guide  de  La  Palestine,  p.  99-103,  et  par  le  P.  Zanecchia, 
La  Palestine  d'aujourd'hui,  trad.  Dorangeon,  Paris, 
1S99,  t.  i,  p.  349-359.  Il  est  certain  que  la  tradition  pri- 
mitive, dans  son  ensemble,  peut  s'appliquer  au  point 
en  question;  il  serait  cependant  permis  d'hésiter  sur 
le  texte  du  Pèlerin  de  Bordeaux,  pris  à  la  rigueur. 
D'autre  part,  on  avouera  que  la  pierre  portant  le  mot 
-o?ta;  est,  à  elle  seule,  un  faible  indice  archéologique 
puisqu'on  ne  sait  d'où  elle  provient;  il  en  serait  tout 
autrement  si  elle  avait  été  trouvée  in  situ  dans  quelque 
vieux  pan  de  muraille.  Au  point  de  vue  historique,  on 
se  demande  pourquoi  Pilate  choisit  la  Curie  pour  pré- 
toire. A  cause  du  Xyste,  lieu  des  rassemblements 
publics,  répond-on.  liais  ce  n'est  pas  Pilate  qui  suivit 
la  foule,  c'est  la  foule  qui  vint  le  trouver  à  sa  demeure 
I  officielle,  et  il  y  avait  devant  les  palais  qu'il  pouvait 
occuper  des  places  suffisantes  pour  contenir  la  populace 
juive  et  ses  meneurs  acharnés  contre  Jésus.  La  proxi- 
mité du  palais  des  Asmonéens  n'est  pas  non  plus  une 
raison  bien  déterminante.  Les  données  évangéliques 
peuvent  donc,  croyons-nous,  s'adapter  aussi  parfaite- 
ment à  un  autre  cadre.  M.  Léonide  Guyo,  Le  Prétoire 
dans  la  Revue augustinienne,  15  décembre  1903,  p.  501- 
;  513,  combat  bien  cette  théorie  du  Mehkéméh;  mais  il 
a  tort,  croyons-nous,  de  placer  le  Prétoire  au  palais  des 
Asmonéens,  ce  qu'il  est  difficile  d'accorder  avec  la 
tradition  primitive. 

5°  Conclusion.  —  Tels  sont  les  éléments  essentiels 
du  problème.  Complexe  et  difficile,  il  n'a  pas  encore, 
on  le  voit,  reçu  de  solution  définitive.  L'histoire  seule 
]  laisse  le  choix  entre  le  palais  d'Hérode  et  l'Antonia. 
L'archéologie  n'a  que  des  indices  insuffisants.  La  tradi- 
tion reste  donc  notre  guide  principal,  mais  un  guide 
dont  les  fils  conducteurs  ont  besoin  d'être  démêlés  et 
ramenés  à  certaine  unité  de  direction.  Or,  nous  avons 
à  distinguer  ici  entre  la  tradition  primitive  et  la  tradi- 
'  tion  récente.  Celte  dernière  dirige  incontestablement 
{  nos  pas  du  côté  de  l'Antonia.  Mais  quelle  est  son  ori- 
1  gine?  En  remontant  son  cours,  on  finit  par  perdre  ses 
traces.  On  aura  beau  accumuler  les  textes  et  les  auto- 
rités, on  ne  pourra  lui  donner  la  force  qui  s'attache  à 
un  témoignage  primordial,  authentique,  que  l'on  suit 
sans  interruption  à  travers  les  siècles.  La  tradition  pri- 
mitive, moins  riche,  est,  on  le  conçoit,  bien  autrement 
importante;  c'est  la  seule  qui  ait  une  valeur  historique. 
Mais  là  encore,  les  textes  ont  leur  latitude;  il  est  sou- 
vent facile  de  les  étendre  à  tel  ou  tel  point,  dans  une 
direction  déterminée,  et  c'est  ainsi,  nous  l'avons  vu, 
que  chacune  des  opinions  exposées  cherche  à  les  reven- 
diquer en  sa  faveur.  Chaque  texte  n'est  qu'une  voix  de 
la  tradition:  écouter  l'une  plutôt  que  l'autre  serait  s'ex- 
poser à  faire  fausse  route.  La  vraie  méthode  scientifique 
consiste  à  suivre,  autant  qu'on  le  peut,  la  résultante 
harmonique  de  ces  voix,  ou.  si  l'on  aime  mieux,  l'orien- 
tation générale  tracée  par  les  fils  conducteurs.  Or,  on 
peut  remarquer  chez  les  plus  anciens  témoins  une 
double  tendance  :  celle  de  placer  le  Prétoire  dans  un 
lieu  bas,  et  celle  de  le  mettre  en  relation  avec  la  Piscine 
probatique.  S'il  n'esl  pas  à  l'Antonia.  c'est  donc  au-des- 
sous, le  long  de  la  vallée  du  Tyropœon  qu'il  faudrait  le 
chercher.  Il  serait  sans  doute  plus  consolant  pour  notre 
piété  de  reconnaître  avec  certitude  dans  les  sanctuaires 
actuels,  depuis  longtemps  en  vénération  à  Jérusalem, 
les  lieux  témoins  des  souffrances  de  Notre-Seigneur  au 
début  de  la  Voie  douloureuse.  Mais  la  vérité  scientifique 
a  des  droits  que  la  piété  bien  entendue  ne  peut  mécon- 
naître. Le  débat  dont  il  s'agit  n'est  ni  une  affaire  de 
sentiment  ni  une  question  de  rivalité  entre  sanctuaires. 
Mettre  en  doute  l'authenticité  de  tel  ou  tel  d'entre  ceux- 
ci  n'est  point  faire  œuvre  de  démolition  sacrilège.  C'es,t, 
au  contraire,  rendre  service  à  la  foi  chrétienne  que  de 
chercher  en  toute  sincérité,  sans  parti  pris  ni  animo- 


039 


PRÉTOIRE 


PRÊTRE 


640 


site  contre  personne,  la  vérité  sur  nos  Lieux  Saints. 
Attendons  que  quelque  heureuse  trouvaille  historique, 
épigraphique  ou  archéologique,  la  fasse  éclater  à  nos 
jeux. 

G>  Bibliographie.  —  Sans  remonter  jusqu'à  T.  Tobler, 
Topographie  von  Jérusalem,  Berlin,  1853,  t.  t.  p.  220- 
230,  nous  nous  contentons  de  rappeler  ici  les  derniers 
travaux  sur  la  question  :  Barnabe  d'Alsace,  Le  Prétoire 
de  Pilote  et  la  forteresse  Antonio,  in-8»,  Paris,  1902; 
C.Mommert,  Dos  Pràtoriumdes  Pilatus,  in-8»,  Leipzig, 
1903;  G.  Marta,  La  t/uestione  del  Prelorio  ili  Pilota, 
in-8  .  Jérusalem,  1905;  D.  Zanecchia,  La  Palestine 
./'(-»;.. «iv/'/hh.  Paris,  1899,  t.  i,  p.  3-19-359;  Professeurs 
de  Notre-Dame  de  France,  La  Palestine,  Paris,  1904, 
p.  99-107.  Outre  les  articles  de  revues,  comme  ceux  de 
Kreyenbûhl  et  de  Zaccaria,  mentionnés  dans  notre  étude, 
nous  signalerons  :  .1.  Arb-Arétas,  Question  de  topo- 
graphie palestinienne  :  l'authenticité  du  Prétoire  et 
du  Chemin  delà  Croix,  dans  L'Université  catholique, 
Lyon,  15  septembre  1903.  p.  52-74;  Léonide  Guyo,  Le 
Prétoire,  dans  la  Revue  augustinienne,  Louvain  et  Pa- 
ris, 15  décembre  1903,  p.  501-513. 

IL  Dans  les  Actes  des  Apôtres.'  —  Les  Actes,  xm il. 
liS.  nous  apprennent  que  saint  Paul  fut  amené  de  Jéru- 
salem à  Césarée,  devant  le  gouverneur  Félix.  Celui-ci, 
en  attendant  l'arrivée  des  accusateurs  de  l'apôtre,  or- 
donna de  le  garder  dans  le  prétoire  d'Hérode,  *  ëv  r<3 
KpaiTcupïij)  toO  'HpûSou.  Il  s'agit  évidemment  ici  du  pa- 
lais bâti  par  Hérode  le  Grand  et  qui  servait  alors  de 
résidence  aux  procurateurs  romains.  Voir  Césarée  du 

RORD  DE  LA  MER,   t.    II,   Cûl.  456. 

III.  Dans  l'épItre  \rx  Philippiens.  —  Il  n'est  pas  si 
facile  de  préciser  le  sens  du  mot  «  prétoire  »  dans  ce 
passai'/  de  l'F.pitiv  aux  Philippiens.  i,  13,  où  saint  Paul 
dit  que  i  ses  ch,iine<  sont  devenues  manifestes  dans  le 
Christ  dans  tout  le  prétoire  »,  èv  S).u  -•■<  nfxttiasim, 
c'est-à-dire  que  là  on  le  regarde  non  comme  un  prison- 
nier vulgaire,  niais  comme  un  chrétien,  un  apôtre  in- 
carcéré pour  Jésus-Christ.  Quelques  commentateurs 
anciens  et  modernes  ont  voulu  voir  ici  le  palais  d>  Cê- 
sir.  à  Rome,  parce  que  plus  loin,  iv,  22,  il  est  question 
des  chrétiens  qui  sent  i  de  la  maison  de  César  ».  Mais 
il   n'y   a   pas  d'exemple   de  l'application   de  ce    terme 

prétoire  i  à  la  résidence  de  l'empereur  à  Rome.  Aussi, 
plus  communément,  on  l'entend  de  la  caserne  de-  pré- 
toriens, castra  prsetorianorum,  bâtie  par  Tibère.  Sous 
Auguste,  trois  cohortes  prétoriennes  seulement,  sur  les 
neuf  qui  furent  alors  créées,  étaient  logées  à  Home  dans 
différents  quartiers,  mais  sans  campement  fixe;  les 
autres  étaient  disséminées  en  Italie,  dans  les  diverses 
résidences  impériales.  Tibère  les  réunit  toutes  dans  un 
seul  camp,  au  nord-est  de  la  ville  Cf.  R.  Cagnal,  l'r.t- 
torise  cohortes,  dans  le  Dictionnaire  des  antiquités 
grecques  et  romaines  de  Daremberg  el  s  i - 1 i o .  t.  vu. 
p.  632.  Cependant  Conybeareet  Howson,  The  Life  and 
es  of  St.  Paul,  Londres,  1853,  t.  n.  p.  128.  pen- 
sent, à  la  suite  île  Wnseler.  qu'il  s'agit  plutôt  de  la  ca- 
serne de  cette  partie  île  la  garde  prétorienne  qui  était 
au  service  immédiat  de  l'empereur,  sur  le  Palatin. 
D'autre  part,  il  faut  remarquer  que  nparrupîov  di-i-nr 
ici  les  personnes,  c'est-à-dire  la  garde  prétorienne, 
plutôt  que  le  local  I  ni  -même.  C'est  ce  qui  ressort  du 
contexte  et  du   membre  de  phrase  suivant  :  v.x\  roî; 

l'i-.'r.;  --J.',.,.  i',:-;:.  dans  le  Nouveau  Testament,  lu 
s'appliquant  jamais  a  un  lieu.  C'est  donc  auprès  des 
prétoriens  el  de  beaucoup  d'autres  personnes  que  les 
chaînes  de  Paul  étaient  une  sorte  de  prédication  et  ren- 
daient célèbre  le  pi  isonnier  du  Christ.  Telle  est  l'inter- 
prétation pri  sentée  par  la  plupart  des  commentateurs, 
an  sujel  du  mol  prétoire  ».  depuis  la  fameuse  contro- 
verse a  laquelle  il  il. mua  lieu,  a  la  lin  o\u  XVII1  siècle, 
entre  lluber  et  Perizonius.  Mais,  de  nos  jours,  une 
nouvelle  explication  i  été  proposée  par  Mommsen,  SU- 


zungber.  de,-  kônig.  />;v;/.>s.  Aéad.  der  Wissensch.,  1893, 
p.  495  et  suiv.  Ce  savant  regarde  comme  peu  probable 
que  saint  Paul  ait  été  confié  à  la  gaule  prétorienne.  Il 
croit  plutôt  que  le  centurion  Jules,  qui  amena  l'apôtre 
à  Rome,  appartenait  au  corps  des  milites  frumenlarii 
ou  peregrini.  On  nommait  ainsi  les  soldats  chargés  d'as- 
surer l'alimentation  en  blé  des  troupes,  particulière- 
ment ceux  qui  composaient  ou  escortaient  les  convois. 
Mais  ce  terme  prit,  à  l'époque  impériale,  une  valeur 
toute  différente,  par  suite  du  changement  ou  plutôt  de 
l'extension  des  fonctions  réservées  aux  frumentarii. 
Le  service  des  vivres  légionnaires  était  le  moindre  de 
leurs  emplois.  De  tous  les  textes  que  l'on  possède,  il 
semble  bien  résulter  que  ces  soldats  étaient,  avant  tout, 
des  agents  de  police,  aussi  bien  à  Rome  qu'en  Italie  et 
dans  les  provinces.  On  voit,  en  effet,  que  le  préfet  du 
prétoire  s'adresse  à  eux  pour  opérer  des  arrestations 
et  l'empereur  pour  faire  surveiller  ceux  qu'il  juge  dan- 
gereux. Dans  les  légions,  outre  leurs  fonctions  de  fru- 
mentarii ou  approvisionneurs,  ils  devaient  avoir  un 
rôle  de  policiers,  analogue  à  celui  qui  est  réserve  a  la 
gendarmerie  dans  nos  corps  d'armée.  Le  nom  de  pere~ 
grini  leur  vint  de  ce  que,  appartenant  à  différentes  lé- 
gions provinciales,  ils  pouvaient  être  et  étaient  regardés 
comme  des  pérégrins,  non  point  à  cause  de  leur  état 
civil,  puisqu'ils  étaient  citoyens  romains,  mais  à  cause 
de  leurorigine  extra-italique,  tin  trouve  à  la  tête  de  ce 
corps,  et  sous  le  commandement  suprême  du  préfet  du 
prétoire,  un  princeps  peregrinorum  et  des  centurione» 
frumentarii  ou  frumentariorum.  Cl".  R.  Cagnat,  Fru- 
mentarius,  dans  le  Dict.  des  antiquités  grecques  et 
romaines,  t.  iv.  p.  1348.  Il  est  donc  probable  que  .Iules 
livra  son  prisonnier  au  princeps  peregrinorum,  dont 
la  caserne, castra  peregrinorum,  était  déjà  sans  doute, 
comme  elle  le  fut  plus  tard,  sur  le  mont  Cœlius.  Mais 
c'est  devant  le  préfet  du  prétoire  et  ses  assistants  que 
l'apôtre  comparut,  et  c'est  ce  tribunal  qu'il  mentionne 
dans  l'Epitre  aux  Philippiens.  A.  LeGENDRI  . 

PRÊTRE  ihébreu  :  kohên,  kômér,  Septante 

Vulgate  :  sacerdos),  celui  qui  est  spécialement  con 
à  l'exercice  du  culte  dhin.  Deut.,  x.8;  xvm,  7.  I. 
kômér  {kâmiru  dans  les  lettres  de  Tell-el-Amarn 
prend  dans  un  sens  méprisant  pour  désigner  les  prêtres 
des  idoles.  FY  Reg.,  xxm.5:  Ose.,  x.  5;  Soph.,  i,  4.  Le 
prêtre  est  appelé  mal'dk,     envoyé     .m      ange  i,  dans 
deux  passages.  Eccle..  v.  .">:  Mal.,  n.  7.  Le  nom  de 
est  celui  des  prêtres  de  Perse  el  de  Médie.  Voir  MAGI  . 
t.  tv,  col.  543. 

I.  Sacerdoce  patriarcal.  —  A  l'origine,   le  clef  de 
famille  remplit  lui-même  les  fonctions  sacerdotal 
au  nom  de  tous  ceux  qui  dépendent  de  lui,  offre  a  Dieu 
s. -s   hommages  et  ses  sacrifices.  Ainsi  agissent    Noé, 

Cen..    VIII.  211.  Abraham.   Gen.,    XII,  8;    XV,   8-17:  XVIII, 

s.\:  Isaac, Gen.,  xxvi, 25;  Jacob,  xxxui. 20, etc.  Au  temps 
d'Abraham,  Melchisédech,  roi  de  Salem,  est  prêtre  du 
Très-Haut.  Gen.,  xiv.  18,  Jéthro,  beau-père  de  .Moise, 
est  prêtre  de Madian  et  adore  levrai  Dieu.  Exod.,  n,  16; 

m.  1.  Voir  .lia mai.  t.  m,  col.  1522.  .lob  offre  lui-même 
ses  holocaustes  au  Seigneur  pour  la  purification 
lils.  Job,  i.  5.   Les   Hébreux,   pendant  leur  séjour  en 
l  gypte,  ne  connurent  que  ce  sacerdoce  patriarcal.  Eux- 
n  lén  ies  demain  le  ni  à  aller  offrir  leur*  sacrifices  au  désert, 
Kxod..  v.  1-3.  ce  qui  peut  faire  supposer  qu'ils  n'en  ont 
jui  ri  offerl  dans  la  terre  de  Gessen,  mais  et 
l'aide  de  ceux  qui  parmi  eux  remplissaient  l'oO 
prêtres,  o  Les  prêtres  qui  s'approchent  de  Jéhovah  »sont 
mentionnés  à  l'occasion  de  la  promulgation  de  la  loi;  il 
leur  est  commandé  de  se  sanctifier,   mais  défendu    ' 
franchir  les  limites  posées  autour  du  Sinai  :  ils  doive)  t 
rester  avec  le  peuple.  Exod-,  xix.  22-21   Plus  tard,  quand 
il  s'agit  de  conclure  l'alliance,    les  prêtres  ne   sont  pas 

-  d'offrir  les  sacrifices;  Moïse  envoie  des  jeunea 


641 


PRÊTRE 


64-2 


gens,  enfants  d'Israël,  pour  offrir  des  holocaustes  à 
ïéhovah  et  immoler  des  taureaux  en  actions  de  grâces. 
Exod.,  xxiv,  4-5.  Puis  les  anciens  d'Israël,  et  non  les 
prêtres,  sont  admis  à  monter  sur  la  montagne.  Exod., 
xxiv,  9.  On  a  pensé  que  ces  prêtres  n'étaient  autres  que 
les  premiers-nés,  cf.  S.  Jérôme,  Epist.  LXXIII,  6,  t.  xxn, 
col.  680,  que  Jéliovah  avait  commandé  de  lui  consacrer, 
Exod.,  xin,  2,  et  qui  furent  ensuite  remplacés  par  les 
lévites.  Mais  rien  ne  prouve  que  les  premiers-nés  aient 
élé  appelés  à  remplir  des  fonctions  sacerdotales  si  peu 
<le  temps  avant  l'institution  du  sacerdoce  aaronique,  et, 
d'autre  part,  les  Hébreux  devaient  avoir  depuis  long- 
temps des  hommes  marqués  pour  offrir  les  sacrilices. 
D'après  de  llummelauer.  In  E.eod.  et  Levit-,  Paris, 
•1897,  p.  6,  le  sacerdoce  aurait  été  exercé  en  première 
ligne  par  les  chefs  de  famille,  sans  préjudice  du  droit 
qui  appartenait  aux  Dis,  comme Caïn  et  Abel,  Jacob,  etc., 
d'offrir  des  sacrifices  en  certains  cas.  Jacob,  chef 
de  famille  et  prêtre,  aurait  transmis  ses  droits,  non  à 
son  aine,  Ruben,  mais  à  Joseph,  qu'il  appelle  «  prince 
de  ses  frères  ».  Gen.,  xlix,  '26.  Manassé,  l'aine  de  Joseph, 
aurait  hérité  de  la  charge  sacerdotale  de  son  père,  et 
après  lui  les  prêtres  des  Hébreux  auraient  été  choisis 
dans  sa  tribu.  Mais  ensuite  cette  tribu  serait  devenue 
indigne  de  son  mandat;  aussi  Moïse  tint-il  ses  prêtres 
à  l'écart  au  moment  de  la  promulgation  de  la  loi  et  fit- 
il  offrir  les  sacrifices  pardesjeunesgens  choisis  ailleurs. 
Les  prêtres  manasséens  auraient  été  les  instigateurs 
du  culte  rendu  au  veau  d'or,  et  trois  mille  d'entre  eux 
auraient  été  mis  à  mort  par  les  fils  de  Lévi.  Exod.,  xxxm, 
28.  Plus  tard,  afin  de  briser  davantage  l'orgueil  de  la 
tribu  et  couper  court  à  ses  prétentions.  Moïse  l'aurait 
divisée  en  deux,  pour  qu'une  partie  fût  établie  à  l'est 
du  Jourdain  et  l'autre  à  l'ouest.  Ces  conjectures  sont 
spécieuses;  mais  on  ne  peut  démontrer  historiquement 
ni  la  transmission  exclusive  du  droit  sacerdotal  de 
Jacob  à  Joseph,  ni  la  fixation  du  sacerdoce  dans  la  tribu 
de  Manassé.  Pendant  le  séjour  des  Hébreux  en  Egypte, 
le  sacerdoce  continua  à  être  exercé  parmi  eux  dans  des 
conditions  sur  lesquelles  les  renseignements  nous  font 
défaut.  Quand  Dieu  voulut  instituer  les  cérémonies  de 
son  culte,  il  était  naturel  qu'il  mit  de  coté  l'ancien 
sacerdoce,  quel  qu'il  fût,  pour  en  créer  un  nouveau. 

II.  Sacerdoces  idoi.atriques.  —  Les  coutumes  primi- 
tives étaient  passées  à  tous  les  peuples,  mais  elles 
s'étaient  transformées  suivant  les  conditions  particu- 
lières à  chacun  d  eux.  Quand  ceux-ci  se  créèrent  de  mul- 
tiples divinités,  ils  ne  manquèrent  pas  de  mettre  à  leur 
service  des  hommes  ou  même  des  femmes  ayant  les 
attributions  sacerdotales. 

1°  Chez  les  Egyptiens.  —  Le  pharaon  exerçait  la 
haule  maîtrise  sur  tous  les  cultes  de  son  empire;  il 
officiait  devant  tous  les  dieux,  sans  être  spécialement 
prêtre  d'aucun,  et  mettait  à  la  tète  des  temples  les  plus 
richement  dotés,  comme  ceux  de  Ptbah  Memphite  ou 
de  Rà  Héliopolitain,  les  princes  de  sa  famille  ou  ses 
serviteurs  les  plus  fidèles.  Le  seigneur  féodal  exerçait 
sa  juridiction  sur  les  temples  de  son  territoire  el  il  y 
exerçait  le  sacerdoce.  Toute  une  hiérarchie  de  prêtres 
remplissaient  les  autres  fonctions.  Ils  étaient  de  toute 
origine  et  il  n'y  avait  pas  de  règles  spéciales  pour  leur 
recrutement;  mais  ils  tendaient  à  rendre  leur  situation 
héréditaire  et  leurs  enfants  occupaient  presque  toujours 
leur  place,  de  sorte  que  les  prêtres  égyptiens  finirent 
par  constituer  une  sorte  de  caste  sacrée.  Les  temples 
les  logeaient,  les  nourrissaient  du  produit  des  sacrifices 
et  leur  assuraient  des  revenus  en  rapport  avec  leur 
rang;  de  plus,  ils  étaient  exempts  des  impôts  ordinai- 
i  du  service  militaire  et  des  corvées.  Les  nombreux 
serviteurs  et  scribes  qni  les  entouraient  partageaient  en 
fait  les  mêmes  privilèges.  Il  y  avait  là  tout  un  monde 
qui  échappait  aux  charges  communes.  Le  prêtre  égyp- 
tien avait  à  veiller  aux  mille  formalités  que  comportait 

DICT.    DE   LA   BIBLE. 


le  culte  de  la  divinité  à  laquelle  il  élait  voué.  Tous  les 
prêtres  étaient  assujettis  à  de  multiples  purifications 
et  devaient  avoir  la  a  voix  juste  »  pour  réciter  correcte- 
ment les  formules  de  prière.  Ils  formaient  une  hiérar- 
chie savamment  ordonnée.  Cf.  Brugsch,  Die  Aegyptolo- 
gie,  Lepzig,  1891,  p.  275-291.  A  chaque  culte  était  pré- 
posé un  souverain  pontife,  appelé  premier  prophète 
quand  il  servait  une  divinité  secondaire.  Au  temple  de 
Rà,  à  Héliopolis,  et  dans  ceux  du  même  rite,  il  se  nom- 
mait Oirou  maou,  «  maître  des  visions  »,parceque.seul, 
avec  le  pharaon  et  le  seigneur  du  nome,  il  avait  le  droit 
d'  «  entrer  au  ciel  et  d'y  contempler  le  dieu  »,  c'est-à- 
dire  de  pénétrer  dans  le  plus  intime  du  sanctuaire. 
Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  123-125,  303-305. 
Putiphar,  «  consacré  à  Rà  »,  dont  la  fille  Aseneth  fut 
donnée  en  mariage  à  Joseph,  était  prêtre  à  On  ou  Hélio- 
polis, là  même  où  Rà,  le  soleil,  avait  son  temple.  Gen., 
xli,  45.  La  fonction  de  Putiphar  devait  être  la  première 
du  temple  ou  l'une  des  principales.  Le  philosophe  stoï- 
cien Chœrémon,  qui  vivait  au  milieu  du  i "  siècle, 
écrivit  une  histoire  d'Egypte  dont  il  ne  reste  que  des 
fragments.  Cf.  Josèpbe,  Cont.  Apion.,  i,  32-33.  L'un 
d'eux,  conservé  par  Porphyre,  et  cité  par  saint  Jérôme, 
Adv.  Jovin.,  n.  13,  t.  xxm,  col.  302,  décrit'en  ces  termes 
la  vie  des  prêtres  égyptiens:  a  Ils  mettent  de  côté  toutes 
les  affaires  et  les  préoccupations  du  monde,  pour  être 
toujours  dans  le  temple.  Ils  observent  les  natures  des 
êtres,  les  causes  et  les  lois  des  astres.  Ils  ne  se  mêlent 
jamais  aux  femmes,  et  ne  voient  plus  leurs  parents, 
leurs  alliés  ni  même  leurs  enfants,  du  jour  où  ils  com- 
mencent à  se  consacrer  au  culte  divin.  Ils  s'abstiennent 
absolument  de  viande  et  de  vin,  à  cause  de  l'affaiblisse- 
ment des  sens  et  du  vertige  de  tète  qu'ils  éprouvent 
même  après  en  avoir  pris  très  peu,  et  surtout  à  cause 
des  appétits  désordonnés  qu'engendrent  cette  nourriture 
et  cette  boisson.  Ils  mangent  rarement  du  pain,  pour  ne 
pas  se  charger  l'estomac;  et  quand  ils  mangent,  ils 
prennent  avec  leurs  aliments  de  l'hysope  pilé,  pour 
que  sa  chaleur  fasse  digérer  une  nourriture  trop  lourde. 
...  Au  même  titre  que  la  viande,  ils  s'abstiennent  d'oeufs 
et  de  lait...  Leur  couche  est  faite  avec  des  branches  de 
palmiers;  un  escabeau  incliné  et  posé  à  terre  sert  de 
coussin  à  leur  tête;  ils  supportent  des  jeûnes  de  deux, 
trois  jours.  »  Cf.  Porphyre,  De  abstin.,  iv,  6-8.  Ce  por- 
trait ne  s'appliquait  qu'à  une  élite  des  prêtres  égyptiens, 
ceux  qu'on  appelait  prophètes,  iepocToXioraf,  «  chargés 
des  habits  sacrés  des  dieux  »,  scribes,  et  (IjpoXoyoi, 
«  ceux  qui  disent  l'heure  »,  et  encore  n'est-il  pascertain 
que  ces  coutumes  ascétiques  remontent  très  haut.  On 
voit  cependant  que  certaines  pratiques  sont  communes  . 
aux  prêtres  égyptiens  et  à  ceux  d'Israël. 

2°  Chez  les  Babyloniens.  —  En  Chaldée,  comme  en 
Egypte,  le  roi  était  le  prêtre  par  excellence;  il  pre- 
nait le  titre  de  palési  ou  «  vicaire  »  de  la  divinité. 
Les  fonctions  journalières  du  sacerdoce  étaient  remplies 
par  des  prêtres,  soit  héréditaires,  soit  recrutés,  for- 
mant une  hiérarchie  sous  la  conduite  du  grand-prêtre 
de  chaque  temple.  Les  grands-prêtres  des  divinités 
principales,  Bel-Mardouk,  Sin  et  Schamasch,  partici- 
paient à  la  suprématie  de  leur  dieu.  Parmi  les  prêtres, 
les  iSSakkii  présidaient  aux  libations,  les  Sangu  gouver- 
naient les  différentes  parties  du  domaine  de  la  divinité, 
les  kipu  et  les  Salammu  veillaient  à  ses  intérêts  finan- 
ciers, les  pasiUu  s'occupaient  des  détails  du  culte;  au- 
dessous  d'eux  venaient  les  sacrificateurs  et  leurs  aides, 
les  devins,  les  augures,  les  prophètes,  les  hiérodules 
de  toute  espèce.  Tous  vivaient  des  revenus  du  dieu 
et  des  offrandes  qui  lui  étaient  apportées.  Cf.  Maspero, 
Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  675-679.  Le  grand-prêtre  s'ap- 
pelait Sangamahhu;  sous  ses  ordres  agissaient  i'osipu 
et  le  bâru,  L'asipu  ou  •<  enchanteur  »  était  une  sorte 
d'exorciste  chargé  de  conjurer  les  mauvais  esprits,  causes 
des  maladies  et  de  tous  les  maux  qui  affligent  l'huma- 


V. 


21 


643 


PRKTRE 


644 


nité;  il  consacrait  les  idoles  destinées  aux  temples  et 
présidait  certaines  cérémonies  expiatoires.  Le  bdru  ou 
«  voyant  »,  dont  la  fonction  était  héréditaire,  interpré- 
tait la  volonté  des  dieux  et  rendait  des  oracles  en  leur 
nom  ;  il  exerçait  tous  les  genres  de  divination  et  pré- 
sidait aux  sacrifices  de  caractère  pacifique  et  eucharis- 
tique. Le  bdru  devait  réaliser  certaines  conditions  pour 
pouvoir  se  présenter  dans  le  sanctuaire  de  l'oracle, 
être  «  issu  d'un  prêtre,  d'un  père  pur  »,  et  être  «  lui- 
même  accompli  dans  sa  forme  et  dans  ses  propor- 
tions ».  Il  ne  pouvait  exercer  sa  charge  si  ces  conditions 
faisaient  défaut,  et  de  plus  s'il  était  «  aigu  quant  aux 
vpux  »,  c'est-à-dire  louche  ou  borgne  ou  avec  un  œil 
crevé,  c>  brisé  quant  aux  dents  »,  avec  une  ou  plusieurs 
dents  de  moins,  ayant  o  un  doigt  mutilé,  la  chair  noi- 
râtre, des  abcès,  de  la  lèpre,  un  ulcère  purulent  »,  ou 
d'autres  infirmités  analogues.  Il  devait  posséder  une 
doctrine  solide  et  savoir  à  fond  ce  qui  était  nécessaire 
dour  ne  pas  commettre  la  moindre  infraction  à  un 
rituel  compliqué.  Le  bdru  et  VaSipu  avaient  aussi  à 
revêtir  des  <■  vêtements  purs  »,  réservés  pour  leurs 
fonctions  liturgiques.  Cf.  Zimmern,  Beilrâge  zur 
Kennlniss  der  babylonischen  Religion,  Leipzig,  1901  ; 
Ir.  Martin,  Textes  religieux  assyriens  et  babyloniens, 
Paris,  1903,  p.  xiv-xvn,  235;  Lagrange,  Etudes  sur  les 
religions  sémitiques,  Paris,  1905,  p.  221-246;  Dliorme, 
Textes  religieux,  l'aris,  1907,  p.  141-147.  Daniel  déjoua 
la  fourberie  des  prêtres  de  Bel,  qui  venaient  enlever 
de  nuit  les  offrandes  du  temple  et  prétendaient  que 
leur  dieu  les  avait  mangées.  Dan.,  xiv,  1-27.  Cf.  Bar., 
VI,  9-51.  —  Sur  le  sacerdoce  des  Perses  et  des  Mèdes, 
voir  Mai.es,  t.  iv,  col.  543. 

3"  Chez  les  autres  peuples  sémites.  —  Chez  les 
Arabes  nomades,  la  fonction  de  sacrilicaleur  n'était 
pas  réservée  au  prêtre;  celui-ci  n'était  qu'un  sâdin, 
G  gardien  »  du  sanctuaire;  il  restait  à  son  poste  pen- 
dant que  la  tribu  se  déplaçait.  Il  rendait  des  oracles  au 
moyen  de  flèches  ou  de  bâtons,  selon  le  procédé  de  la 
rhabdomancie.  Cf.  Ezech.,  xxi,  21.  A  côté  de  lui  opé- 
rait  le  devin,  kihin,  véritable  sorcier,  dont  le  rôle 
n'est  nullement  le  prototype,  mais  la  déformation  de 
celui  du  kohên.  Chez  les  Arabes  civilisés  du  sud,  le 
sâdin  était  réellement  le  sacrificateur,  et  le  grand- 
prêtre,  kabir,  le  «  grand  »,  servait  d'éponyme  pour  le 
calcul  des  années.  —  Le  prêtre  araméen  se  nommait 
komér;  il  était  prêtre  de  tel  ou  tel  dieu.  Josias  chassa 
les  prêtres  de  cette  espèce  que  ses  prédécesseurs  avaient 
établis  en  Juda.  IV  Reg.,  xxm,  5.  Osée,  x,  5,  signale 
leur  présence  en  Samarie,  et  Sophonie,  i,  4,  annonce 
leur  extermination.  —  Le  temple  phénicien  avait  ses 
sacrificateurs,  ses  résidents  occupés  à  la  liturgie,  ses 
barbiers  pour  raser  les  chevelures  consacrées  à  la  divi- 
nité et  pratiquer  les  incisions  rituelles,  ses  scribes,  ses 
biérodules,  ses  portiers  et  ses  esclaves,  recevant  tous 
un  salaire.  Cf.  Lagrange,  Études,  p.  217-221,  478-481. 
A  Sidon,  le  roi  portait  le  titre  de  prêtre  d'Astarthé, 
comme  le  prouve  l'inscription  d'un  sarcophage  trouvé' 
en  1887  :  «  Tabnilh,  prêtre  d'Astarthé,  roi  de  Sidon, 
fils  d'Eschmunazar,  prêtre  d'Astarthé,  roi  de  Sidon.  » 
Cf.   Ile  vue  (ireliéiilugiiiue,  111"  série,  t.  x.  I8S7,  p.  2. 

4"  Cite:  les  Chananéens.  —  On  constate  chez  les 
Chananéens  la  pratique  des  libations,  l'érection  et  l'onc- 
tion des  bétyles,  celle  des  autels  et  des  lieux  sacrés, 
l'immolation  des  victimes  et  même  fréquemment  les 
sacrifices  humains.  Cf.  Vincent.  Canaan,  Paris,  1907, 
p.  201-203.  Toutes  ces  choses  supposent  un  sacerdoce, 
(in  n'a  point  de  renseignements  sur  sa  hiérarchie  el 
son  fonctionnement.  Mais  les  deux  grandes  divinités 
chananéennes.  Baal  et  Astarthé,  survécurent  à  la  prise 
de  possession  du  pays  par  les  Israélites.  Klles  avaient 
leurs  prêtres  qui  perpétuaient  leur  culte  et  réusirent 
souvent  à  le  faire  adopter  par  le  peuple  conquérant.  A 
ce  titre,  les  prêtres  chananéens  se  signalent  de  temps 


en  temps  dans  l'histoire  d'Israël.  Voir  Astarthé,  BaaLi 
t.  i,  col.  1180,  1315. 

5°  Chez  les  Gréco-Romains.  — Les  prêtres  des  cultes 
gréco-romains  apparaissent  dans  les  derniers  récits  de 
l'histoire  Israélite  et  dans  ceux  du  Nouveau  Testament. 
Voir  Bacchus,  t.  i,  col.  1374;  Dianf.,  t.  n,  col.  1405; 
Hercule,  Jupiter,  t.  ni,  col.  602,  1866;  Mercure, t.  iv, 
col.  991.  Cf.  Dôllinger,  Paganisme  et  judaïsme,  trad. 
J.  de  P.,  Bruxelles,  1858, 1. 1.  p.  280-287,  t.  m,  p.  93-109. 

III.  Sacerdoce  mosaïque.  —  /.  sox  institution.  — 
Au  Sinaï,  Dieu  donna  l'ordre  à  Moïse  de  prendre  son 
frère  Aaron  et  les  fils  de  celui-ci,  Nadab,  Abiu,  Éléazar 
et  Ithamar,  pour  qu'ils  devinssent  prêtres  à  son  service. 
Exod.,  xxvni,  I.  Il  prescrivit  ensuite  tout  ce  qui  con- 
cernait leurs  vêtements  et  leur  consécration.  Exod., 
XXVIII,  xxi.x.  Lorsque  tous  les  objets  nécessaires  au 
culte  furent  préparés  et  que  Jéhovah  eut  pris  possession 
du  Tabernacle,  Exod.,  XL,  34-38,  Moïse  procéda  à  la 
consécration  d'Aaron  et  de  ses  fils,  Lev.,  vm,  1-36.  et 
huit  jours  après,  leur  fit  inaugurer  leurs  fonctions  par 
l'offrande  de  sacrifices,  d'abord  pour  eux-mêmes,  et 
ensuite  pour  le  peuple.  Lev.,  ix,  1-24.  Mais  bientôt,  une 
sanction  sévère  fut  exercée  contre  deux  des  nouveaux 
prêtres.  Nadab  et  Abiu  apportèrent  devant  Jéhovah 
des  encensoirs  contenant  du  feu  profane,  qui  n'avait 
pas  été  pris  sur  l'autel.  Ils  furent  immédiatement  frap- 
pés de  mort.  Moïse  défendit  à  Aaron  et  à  ses  deux  fils 
survivants  de  prendre  le  deuil,  et  Jéhovah  leur  interdit 
l'usage  du  vin  et  des  boissons  enivrantes,  chaque  fois 
qu'ils  auraient  à  exercer  leur  ministère  dans  le  Taber- 
nacle. Lev.,  x.  1-11.  Le  châtiment  si  rigoureusement 
inlligé  aux  deux  coupables  devait  inculquera  tous  cette 
idée  qu'aucune  négligence  n'était  tolérable  dans  le 
culte  de  Jéhovah.  La  prescription  relative  aux  boissons 
enivrantes  autorise  à  penser  que,  si  Nadab  et  Abiu 
s'étaient  si  gravement  trompés,  leur  manque  d'atten- 
tion venait  de  quelque  abus  dans  l'usage  de  ces  bois- 
sons. Toute  la  tribu  de  Lévi,  à  laquelle  appartenaient 
Moïse  et  Aaron,  fut  substituée  aux  premiers-nés  pour 
être  à  Jéhovah  et  se  consacrer  à  son  service.  Num..  m, 
45.  Un  membre  de  cette  tribu.  Coré,  et  deux  de  la 
tribu  de  Ruben,  Dathan  et  Abiron,  jaloux  de  l'autorité 
qu'exerçaient  Moïse  et  Aaron,  se  concertèrent  avec 
deux  cent  cinquante  autres  Israélites,  prétendant  que 
dans  Israël  tous  étaient  saints  et  avaient  les  mêmes 
droits  à  l'exercice  de  l'autorité  et  du  sacerdoce.  Moïse 
en  appela  au  jugement  de  Jéhovah.  Il  convoqua  les  mé- 
contents et  leurs  deux  cent  cinquante  partisans,  chacun 
avec  un  encensoir,  devant  le  Tabernacle.  Tous  s'y  ren- 
dirent; mais  là,  à  la  vue  de  tout  le  peuple,  la  terre 
s'entr'ouvril  et  englorrtil  Coré,  Dathan.  Abiron  et  leurs 
familles,  et  un  feu  consuma  les  deux  cent  cinquante 
autres.  Le  peuple  ayant  murmuré  le  lendemain  contre 
Moïse  et  Aaron,  le  Seigneur  déchaîna  une  plaie  qui  fit 
mourir  quatorze  mille  sept  cents  personnes  el  ne  s'ar- 
rêta que  quand  Aaron  exerça  son  rôle  d'intercesseur, 
dont  la  légitimité  fut  ainsi  démontrée.  Num.,  XVI,  1-50. 
Dieu  voulut  encore  confirmer  son  choix  par  un  nouveau 
miracle.  11  lit  déposer  dans  le  Tabernacle  douze  verges, 
au  nom  des  douze  tribus  d'Israël;  le  lendemain,  la 
verge  d'Aaron,  représentant  Lévi,  fut  trouvée  lleurie,  et 
Dieu  ordonna  de  la  conserver  en  témoignage.  Num., 
XVII,  l-ll.  Il  décida  en  outre  que  les  lévites  feraient 
le  service  du  Tabernacle,  mais  que  seuls  Aaron  et  ses 
fils  rempliraient  les  fonctions  sacerdotales  à  l'autel  et 
au  dedans  du  voile.  Il  ajouta  :  o  Comme  un  service  en 
pur  don,  je  vous  confère  votre  sacerdoce.  L'étranger 
qui  approchera  sera  mis  à  mort.  »  Num.,  xvin.  1-7.  A 
la  mort  d'Aaron.  Eléazar  fut  investi  du  pontificat. 
Num.,   xx.   25-28.   A   Phinées,    fils  d'Eléazar,    qui   se 

montra   plein  de  zèle  contre    l'idolâtrie.   Dieu    pr il 

i  pour  lui,  et  pour  sa  postérité  après  lui,  l'alliance 
d'un  sacerdoce  perpétuel  ».  Num.,  xxv.  13. 


645 


PRÊTRE 


616 


II.  SA  DESCENDANCE  D'AARON.  —  La  volonté  du 
Seigneur  était  manifeste;  ne  pouvaient  être  prêlres  que 
les  descendants  d'Aaron.  «  Nul  ne  s'arroge  cette  dignité; 
il  faut  y  être  appelé  de  Dieu,  comme  Aaron.  »  Heb., 
v,  i.  Quand  Jéroboam  établit  son  culte  schismatique 
et  «  fit  des  prêtres  pris  dans  tous  les  rangs  du  peuple 
et  n'étant  pas  enfants  de  Lévi  »,  III  Reg.,  xii,  31,  ces 
derniers  n'eurent  donc  de  prêtres  que  le  nom;  leur 
sacerdoce  était  criminel  et  sans  valeur.  Au  retour  de 
la  captivité,  on  exclut  du  sacerdoce  ceux  qui  ne  purent 
produire  leur  généalogie  pour  justifier  de  leur  descen- 
dance aaronique.  I  Esd.,  n,  62,  63;  II  Esd.,  vm,  63-65. 
.losèpbe,  Cunt.  Apiun.,  I,  7,  dit  qu'on  prenait  le  plus 
grand  soin  de  maintenir  dans  toute  sa  pureté  la  des- 
cendance sacerdotale,  et  que  les  prêtres  qui  résidaient 
à  l'étranger,  à  Babylone  ou  en  Egypte,  avaient  pour 
règle  d'envoyer  à  Jérusalem  leur  généalogie,  avec  le 
nom  des  témoins.  Il  ajoute  qu'étant  lui-même  de  race 
sacerdotale,  il  a  trouvé  sa  généalogie  dans  les  archives 
publiques.  Vit.,  I.  Ces  généalogies  étaient  en  effet 
d'intérêt  général  ;  il  importait  donc  de  veiller  officiel- 
lement sur  elles.  —  Pour  maintenir  la  pureté  de  la 
race  sacerdotale,  le  prêtre  ne  pouvait  épouser  ni  une 
femme  prostituée  ou  déshonorée,  ni  une  femme  répu- 
diée. Lev.,  xxi,  7.  Il  n'était  pas  obligé  d'épouser  la  Bile 
d'un  prêtre,  mais  pouvait  choisir  une  vierge  ou  une 
veuve  quelconque,  pourvu  qu'elle  fût  Israélite.  Cf.  Jo- 
sépbe.  Vont.  Apion.,  i,  7;  Ant.  jud.,  III,  xn,  2.  Il  lui 
fut  aussi  interdit  d'épouser  celle  que  son  beau-frère 
refusait  en  mariage,  cf.  Sota,  iv,  1;  vin,  3;  Makkoth, 
in,  1.  celle  qui  avait  élé  prisonnière  de  guerre,  cf.  .lo- 
sèphe.  Ant.  jud.,  III.  xn,  2;  XIII.  x,5;  Cont.  Apion., 
i,  7,  une  prosélyte  ou  une  esclave  affranchie  ;  la  fille  de 
la  prosélyte  ou  celle  de  l'esclave  affranchie  ne  lui 
élaieut  permises  que  si  elles  avaient  une  mère  Israélite. 
Cf.  Yebamtlh,  vi,  5.  Aussi  le  prêtre  qui  voulait  se  ma- 
rier faisait  il  l'enquête  la  plus  sérieuse  sur  la  condition 
de  telle  qu'il  désirait  épouser.  Cf.  Kidduschin,  îv,  4,  5. 
Ézéchiel,  xliv,  22,  veut  que  le  prêtre  n'épouse  ni  une 
veuve,  sauf  celle  d'un  prêtre,  ni  une  répudiée,  mais 
seulement  une  vierge  de  la  maison  d'Israël.  Cette  res- 
triction n'est  pas  entrée  dans  la  pratique. 

;/;.  SBS  CONDITIONS  physiques.  —  Comme  le  bdru 
babylonien,  le  prêtre  israélite  devait  être  exempt  de 
toute  difformité  corporelle.  Il  ne  pouvait  remplir  les 
fonctions  sacerdotales  si,  malgré  sa  descendance  aaro- 
nique. il  était  aveugle  ou  boiteux,  avait  une  mutilation 
ou  une  excroissance,  une  fracture  au  pied  ou  à  la 
main,  une  bosse,  une  taille  de  nain,  une  tache  à  l'œil, 
la  gale,  une  dartre,  une  hernie.  La  Loi  insiste  pour 
exclure  de  l'approche  de  l'autel  ceux  qui  ont  quel- 
qu'une de  ces  difformités.  Lev.,  xxi,  17-23.  Ces  diffor- 
mités étaient  en  effet  de  nature  à  empêcher  les  prêtres 
d'accomplir  les  actes  liturgiques  ou  de  conserver  la 
pureté  légale  et  la  dignité  nécessaires  à  leur  ministère. 
Dans  la  suite,  les  docteurs  juifs  étudièrent  ces  cas 
d'exclusion  et.  en  spécialisant  chacun  d'eux  par  le  dé- 
tail, les  portèrent  à  142.  Cf.  Bechorot/i,  vu;  Selden.  De 
siœcessione in  ponlif.  Ebr.,  il,  5 ;  L'golini,  'fîtes.,  t.  xm, 
p.  897.  L'intégrité  du  corps  devait  être  le  symbole  du 
parfait  état  de  l'àme,  cf.  l'bilon,  De  monarch.,  n,  5; 
il  était  d'ailleurs  de  la  plus  haute  convenance,  pour 
l'honneur  de  Dieu  el  l'édification  du  peuple,  que  les 
minisires  du  culte  eussent  une  attitude  corporelle 
irréprochable.  Les  cultes  païens  avaient  souvent  les 
mêmes  exigences,  cf.  Aulu-Gelle,  i,  12;  la  difformité 
corporelle  élait  de  mauvais  augure,  et  l'on  écartait  le 
sacrificateur  qui  en  était  atteint.  Cf.  M.  Sénèque,  Con- 
liov.,  iv,  2;  Bâhr,  Symbolik  des  mnsaischen  Cullns, 
Heidelberg,  1839,  t.  n,  p.  42-61.  —  Il  était  interdit  aux 
prêtres  en  exercice  de  se  raser  complètement,  d'enlever 
les  côtés  de  leur  barbe,  de  se  faire  des  incisions,  Lev., 
xxi,  5,   de  laisser  flotter  leurs  cheveux  en  désordre, 


d'avoir. des  vêtements  déchirés.  Lev.,  x,  6.  Il  ne  leur 
était  pas  permis  de  couper  leurs  cheveux  ou  de  laver 
leurs  vêtements  la  semaine  où  ils  étaient  de  service, 
afin  que  tous  ces  soins  fussent  pris  à  l'avance.  Les  doc- 
teurs comptaient  dix-huit  cas  empêchant  le  prêtre 
d'exercer  son  ministère  :  l'idolâtrie,  la  naissance  d'une 
famille  étrangère  à  celle  d'Aaron,  la  difformité  corpo- 
relle, l'incirconcision,  l'impureté,  la  nécessité  d'attendre 
au  soir  pour  redevenir  pur,  l'obligation  de  se  soumettre 
à  l'expiation,  le  deuil,  l'ivresse,  le  manque  de  vête- 
ments, leur  trop  grand  nombre,  leur  déchirure,  le 
manque  de  coiffure,  les  pieds  ou  les  mains  non  lavés, 
s'asseoir  pour  remplir  le  ministère  sacré  ou  se  laver, 
ne  pas  toucher  directement  de  la  main  les  objets  sa- 
crés, ne  pas  tenir  les  pieds  immédiatement  sur  le  sol, 
faire  les  actions  sacrées  de  la  main  gauche.  Cf.  Seba- 
chim,  n.  1;  Reland,  Antiquitates  sacrée,  Utrecht,  1741, 
p.  96,  97. 

IV.  ENTRÉE  EN  FONCTION.  —  1°  Age.  —  La  loi  ne 
prescrivait  rien  quant  à  l'âge  requis  pour  commencer 
le  service  sacerdotal.  Pour  les  lévites,  on  ne  comprit 
dans  le  premier  dénombrement  que  ceux  qui  avaient 
trente  ans,  Num.,  iv,  3,  23,  47;  î  Par.,  xxm,  3;  un  peu 
plus  tard,  cet  âge  fut  abaissé  à  vingt-cinq,  Num.,  vin, 
23-26,  et  David  le  réduisit  à  vingt,  lorsque  les  lévites 
n'eurent  plus  à  porter  le  tabernacle.  I  Par.,  xxm,  24- 
27;  cf.  II  Par.,  xxxi,  17;  I  Esd.,  m,  8.  On  s'en  tint  dans 
la  suite  à  cette  règle  qu'on  pouvait  entrer  en  fonction 
dès  qu'apparaissaient  les  signes  de  la  virilité,  pratique- 
ment à  la  vingtième  année.  Cf.  Babyl.  Chullin,  24  b.  — 
Avant  d'être  admis  au  sacerdoce,  il  fallait,  dans  les  der- 
niers temps,  subir  un  examen  devant  le  sanhédrin  ou 
devant  d'autres  prêtres.  Cf.  Middoth,  v. 

2°  Consécration.  —  Le  jeune  prêtre  était  consacré  par 
un  bain  de  purification,  l'imposition  des  vêtements 
sacrés,  l'onction  et  une  série  de  sacrifices  accompagnés 
de  cérémonies  particulières,  destinées  à  lui  rappeler 
ses  droits  et  ses  devoirs  sacerdotaux.  Exod.,xxix,  4-37; 
xi.,  13-15;  Lev.,  vm.  2-36.  Les  textes  ne  disent  pas  si 
le  bain  de  purification  était  pour  tout  le  corps,  ou  seu- 
lement pour  les  pieds  et  les  mains,  comme  dans  le 
service  quotidien.  Exod.,  xxx,  19. 

3"  Vêtements.  —  Les  vêtements  sacrés,  imposés  au 
nouveau  prêtre,  élaientau  nombre  de  quatre  (fig.  172)  : 
le  caleçon  de  lin,  voir  Caleçon,  t.  Il,  col.  60;  la  tunique 
de  lin,  voir  Tunique;  la  ceinture  brodée,  voir  Abnét, 
t.  î,  col.  66;  Ceinture,  t.  n,  col.  389,  et  la  mitre  de  lin, 
voir  Mitre,  t.  iv,  col.  1135.  Les  prêtres  pouvaient  porter 
ci  s  vêtements  tant  qu'ils  étaient  dans  le  Temple, hormis 
la  ceinture  qu'ils  devaient  quitter  sitôt  leur  ministère 
accompli.  Cf.  Gem.  Tamicl,  61,  2;  Gem.  Yoma,  69, 
1.  L'usage  des  vêtements  sacrés  était  prohibé  hors  du 
Temple;  les  prêtres  les  y  déposaient  dans  une  chambre 
spéciale.  Quand  ils  étaient  usés,  ces  vêtements  servaient 
à  fabriquer  des  mèches  pour  les  lampes.  Cf.  Gem. 
Scliabbath,  21,  1;  79,  2. 

4»  Onction.  —  Des  onctions  furent  certainement  faites 
aux  fils  d'Aaron.  Exod.,  xxx,  30;  XL,  14;  Lev.,  x,  7. 
D'autres  textes  ne  semblent  parler  d'onction  qu'à  pro- 
pos d'Aaron.  Exod.,  xxiy,  5-8;  Lev.,  vin,  7-13, de  sorte 
que  le  grand-prêtre  est  appelé  par  excellence  le  «  prêtre 
oint  ».  Lev.,  xvi,  32;  xxi  12;  Num.,  xxxv,  25,  etc.  La 
contradiction  disparait  si  l'on  observe  que  le  grand- 
prêtre  recevait  sur  la  tête  une  onction  abondante,  cf. 
Ps.  cxxxn,  2,  tandis  que  les  simples  prêtres  étaient  seu- 
lement aspergés  d'huile.  Exod.,  xxix,  21;  Lev.,  vm,  30. 
Ils  étaient  oints  comme  le  pontife,  Exod.,  XL,  15,  mais 
d'une  manière  plus  sommaire.  Cf.  Fr.  de  Hummelauer, 
In  E.rod.  et  Lev.,  p.  290-291.  Voir  Onction,  t.  iv, 
col.  1S05,  1806.  —  On  emplissait  ensuite  les  mains  des 
prêtres,  ce  qui  signifie  qu'on  leur  conférait  les  pou- 
voirs nécessaires  à  leur  ministère,  et  l'on  o tirait  les 
sacrifices  prescrits,  le  veau  pour  le  péché,  Exod.,  xxix. 


647 


PRÊTRE 


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10-14,  le  bélier  en  holocauste,  Exod.,  xxix.  15-18,  et  le 
bélier  de  consécration.  Exod.,  xxix,  19-28.  Voir  Grand- 
prêtre,  t.  m.  col.  297.  Cf.  Bàhr, Symbolik,  t.  n.  p.  166- 
168.  Toutes  ces  cérémonies  duraient  sept  jours. 
Exod.,  xxix,  35;  Lev.,  vin,  33.  —  On  s'est  demandé  si 
les  cérémonies  de  la  consécration  sacerdotale  n'avaient 
pas  été  accomplies  une  fois  pour  toutes  dans  la  per- 
sonne des  fils  d'Aaron.  Philon,  Vit.  ilosis,  ni,  16-18, 
et  Josèphe,  Ant.  jud.,  III,  vin,  6,  se  contentent  de  re- 
produire les  passages  bibliques,  sans  rien  ajouter  à  ce 
sujet.  Plusieurs  auteurs  pensent  que  la  première  con- 
sécration a  suffi  pour  toute  la  suite  des  générations 
sacerdotales,  et  que  le  nouveau  prêtre  n'avait  qu'à  pré- 
senter l'offrande  indiquée.  Lev.,vi,  15.  Cf.  Iken,  Anti- 
guitates  hebraiae,  Brème,  17 H,  p.   112;  Munk,  l'ales- 


i~-.  —  Prêtre  hébreu  revêtu  de  ses  vêtements  sacerdotaux. 
D'après    Calmet,  Dictionnaire  de    la  Bible,   au  mot  Prêtre. 

Une,  Paris,  1881,  p.  174;  Zscbokke,  Historia  sacra, 
Vienne.  1888,  p.  114.  Mais,  d'après  Schûrer,  Geschichtc 
des  jihl.  Volkes,  t.  n,  p.  232,  cette  opinion  ne  s'appuie- 
rait que  sur  l'interprétation  défectueuse  des  textes  rab- 
biniques  qui  rappellent  au  nouveau  prêtre  l'obligation 
de  présenter  l'offrande  en  question  avant  toute  autre. 
Le  silence  des  auteurs  sacrés  postérieurs  ne  peut 
d'ailleurs  permettre  de  nier  la  consécration  particulière 
des  prêtres  dans  le  cours  des  âges. 

5°  Symbolisme.  —  Toutes  les  prescriptions  relatives 
à  la  consécration  des  prêtres  avaient  leur  sens  symbo- 
lique. Les  cérémonies  duraient  sept  jours  pour  leur 
faire  entendre  qu'ils  entraient  au  service  de  celui  qui 
avait  créé  le  monde  en  six  jours  suivis  d'un  septième 
jour  de  repos.  Cf.  Rosenmûller,  lnLevl.,  Leipzig,  1798, 
p.  51.  Parmi  les  difformités  qui  excluaient  du  sacerdoce 
figuraient  aussi  des  défauts  de  l'ordre  moral.  La  blan- 
cheur des  vêlements  sacerdotaux  rappelait  la  gloire 
et  la  sainteté  divines,  au  service  desquelles  les  prêtres 
étaient  appelés.  Le  caleçon  marquait  la  chasteté  du 
prêtre,  la  tunique  de  lin  sa  pureté  de  vie,  la  ceinture  sa 
discrétion,  la  mitre  sa  droiture  d'intention.  Cf.  S.  Tho- 
mas, Summ.  theol.,  I»  il*,  en,  5  ad  10.  Sur  le  symbo- 
ie  l'onction,  voir  t.  iv,  col.   1806. 


v.  CLASSBMBNT.  —  Quand  les  fils  d'Éléazar  et  d'Itha- 
mar  se  furent  multipliés,  il  ne  leur  fut  plus  possible 
d'être  tous  employés  en  même  temps  au  service  du 
culte.  A  l'époque  de  David,  il  se  trouvait  seize  chefs  de 
famille  parmi  les  descendants  d'Éléazar,  et  huit  seule- 
ment parmi  les  descendants  d'Ithamar.  On  tira  au  sort 
le  rang  que  devaient  occuper  ces  vingt-quatre  chefs, 
afin  qu'ils  prissent  à  tour  de  rùle  le  service  du  culte 
avec  les  prêtres  de  leur  famille.  I  Par.,  xxiv,  3-19; 
Il  Par.,  vin,  14.  Cette  organisation  fonctionna  jusqu'à 
la  captivité  de  liabylone.  Au  retour,  il  ne  se  trouvra  plus 
que  quatre  chefs  de  familles  sacerdotales,  Jadaïa,  avec 
973  prêtres,  Emmer,  avec  1052,  Pheshur,  avec  1247,  et 
Harim,  avec  1017.  I  Esd.,  Il,  36-38;  II  Esd.,  vu,  39- 
42.  Avec  Zorobabel,  il  y  eut  22  chefs  de  familles  sacer- 
dotales, II  Esd.,  x,  2-8;  xii,  1-7,  et  21  seulement  dans 
une  autre  liste.  II  Esd.,  xn,  12-21.  Tous  les  noms  ne 
sont  d'ailleurs  pas  identiques,  ce  qui  indique  des  chan- 
gements dans  l'organisation.  Plus  tard,  on  cite  encore 
comme  chefs  de  classes  sacerdotales  .loarib.  I  Mach.,  n, 
1;  xiv,  29,  et  Abia.  Luc.  i,  5.  Josèphe,  dans  un  passage 
dont  nous  n'avons  que  la  traduction  latine,  et  où  le 
nombre  20  manque,  d'après  plusieurs  critiques.  Cont. 
Apiun.,  II.  7,  ne  mentionne  que  quatre  classes  de  cinq 
mille  prêtres  chacune.  Mais  ailleurs,  .4»/.  jud.,  VU,  xiv, 
7:  Vit.,  l,il  parle  de  vingt-quatre  classes  qui  se  sont 
maintenues  jusqu'à  son  époque.  Ce  dernier  nombre  est 
celui  que  reproduit  toute  la  tradition  juive.  Cf.  Taa- 
nitlt.,\\,  %;Sukka,  v,  6-8;  ter.  Taanith.,  îv,  68a;  To- 
sephta  Taanith.,  n  ;  Ugolini,  Thésaurus,  t.  XIII, p.  876. 
—  Les  classes  sacerdotales  s'appelaient  mal, 
sçr]uEpfat,  divisiones,  I  Par.,  xxvm,  13,  21;  II  Par., 
vin,  14;  xxiii,  8;  xxxi,  2.  15.  16.  vices,  Luc,  1,8;  ln't 
abat,  oïxoi  luaTpicôv,  «  maisons  des  pères  ".  famil 
domus,  I  Par.,  xxiv,  4.  6.  ou  miSmârôf,  «  gardes  », 
'/e::o'jj-[s:ji,  observationes,  II  Par..  XXXI.  16,  l?7)|«p(at, 
ordines,  II  Esd.  xm,  30.  Pans  la  pratique,  on  réservait 
le  nom  de  miàmâr  pour  la  classe,  et  celui  de  bê(  db 
pour  ses  subdivisions.  Cf.  Taanith,  n,  8.  7.  Josèphe  ap- 
pelle la  classe  nxTpîa,  Ant.  jud.,  VII.  \iv,  7,  ou  Èçr.peB!;, 
Pït.,  1,  et  la  subdivision  -.Sic,.  Vit.,  1;  Bell,  jud.,  IV, 
III,  8.  Les  subdivisions  de  chaque  classe  variaient  de 
cinq  à  neuf.  Cf.  Jet:  Taanith,  iv,  68a.  A  la  tète  des 
classes  étaient  des  sdrim.  i  princes  »,  ïp^ovraç,  prin- 
cipes, I  Par.,  xxiv.  5:  Il  Par.,  xxxvi,  14;  î  Esd.,  vm, 
24,  29;  x,  5,  ou  des  râ'ëitn,  *  chefs  ».  I  Par.,  xxiv.  i. 
6;  II  Esd.,  xu,  12.  Par  la  suite,  ce  dernier  titre  désigna 
spécialement  les  chefs  des  subdivisions.  Le  nom  de 
zdqên,  «  ancien  »,  a  aussi  quelquefois  le  même  sens. 
Cf.  Yoma,  i.  5;  Tamid.  i.  1  ;  Middoth,  i,  S.  Au-dessus 
de  toutes  les  classes  s'exerçait  naturellement  l'autorité 
du  grand-prêtre. 

■  ;.  FONCTIONS  DANS  LE  TEMPLE.  —  I"  Service  hebdo- 
madaire. —  Chaque  classe  faisait  le  service  du  temple 
pendant  une  semaine.  C'est  ce  qu'on  appelait  aï  guipai 
-î,;  ).eiTOuy(«;,  dies  officii,  «  les  jours  de  service  ». 
Luc,  i,  23.  Le  service  se  prenait  le  jour  du  sabbat, 
IV  Reg.,  M.  6;  II  Par.,  xxni,  4;  la  classe  sortante 
offrait  encore  le  sacrifice  du  matin,  et  la  classe  sui- 
vante le  sacrifice  du  soir.  Cf.  Tosephla  Sukka,w,  24- 
25;  Josèphe.  Ant.  n"1--  VII,  XIV,  7;  Cont.  Anton.,  n, 
8.  Pendant  les  semaines  de  la  Pàque,  de  la  Pentecôte 
et  des  Tabernacles,  les  vingt-quatre  classes  étaient  de 
service  en  même  temps.  Cf.  Snkka,  v,  6-8.  On  n'a  au- 
cune donnée  certaine  sur  l'ordre  dans  lequel  les 
vingt-quatre  classés  se  succédaient  pour  le  service 
hebdomadaire.  C'est  donc  sans  aucun  résultat  qu'on  a 
cherché  à  déduire  l'année  de  la  naissance  de  Jésus- 
Christ  d'après  la  semaine  de  servie'  attribuée  a  la 
classe  d'Abia.  Luc.  i.  5.  du  lit  bien  dans  le  Babij  . 
Taanith,  29a,  que  la  classe  de  .loarib  était  de  service  au 
moment  de  la  destruction  du  Temple;  mais  cette  in- 
formation est  tardive  el  peu   sine,  et  encore,  pour  en 


649 


PRÊTRE 


650 


lirer  parti,  faudrait-il  savoir  exactement  quel  rang 
occupaient  les  deux  classes  et  à  quelle  époque  de  l'an- 
née eut  lieu  l'annonciation  de  Jean-Baptiste.  Quand 
une  classe  prenait  le  service,  chaque  jour  de  la  semaine 
était  attribué  à  une  ou  plusieurs  de  ses  subdivisions. 

2"  Interdictions.  —  Il  était  interdit  aux  prêtres  du 
service  hebdomadaire  de  se  raser,  sauf  le  sixième  jour 
à  cause  du  sabbat,  d'avoir  commerce  avec  leurs  femmes 
et  de  boire  du  vin  durant  le  jour;  ceux  qui  étaient  de 
service  un  jour  déterminé  ne  pouvaient  même  en  boire 
ni  ce  jour-là,  ni  la  nuit,  parce  que  c'était  de  nuit  qu'on 
brûlait  les  graisses  sur  l'autel.  Cf.  Taanith,  n,  7.  Ces 
prohibitions  s'inspiraient  de  la  défense  portée  par  le 
Seigneur,  Xum.,  x,  9,  et  aussi  de  la  nécessité,  pour  le 
prêtre,  d'être  totalement  et  exclusivement  à  la  fonction 
sainte  qui  lui  était  confiée,  Elles  lui  rappelaient  en 
même  temps  les  dispositions  morales  de  dévouement, 
de  pureté  et  de  pénitence  que  réclamait  de  lui  le  service 
du  Seigneur. 

3°  Tirage  au  sort.  —  Chaque  jour  on  faisait  désigner 
par  le  sort  les  prêtres  qui  devaient  remplir  les  différents 
offices.  Luc.  i,  9.  Ce  tirage  au  sort  se  répétait  quatre 
fois.  Le  premier  sort  désignait  celui  qui  devait  porter 
les  charbons  de  l'autel  extérieur  usque  dans  le  parvis 
intérieur.  Le  second  sort  pourvoyait  aux  treize  fonc- 
tions suivantes  :  I.  égorger  l'agneau;  2.  en  répandre  le 
sang'  3.  enlever  la  cendre  de  l'autel  intérieur;  4.  dis- 
poser les  lampes;  5.  porter  à  la  montée  de  l'autel  la 
tète  et  une  jambe  postérieure  de  l'agneau  ;  6.  les  deux 
épaules.  7.  la  croupe  avec  la  queue,  l'autre  jambe  et  les 
reins;  8.  la  poitrine  et  la  gorge ;9.  les  deux  côtés;  10.  les 
intestins  sur  un  plateau  et  les  pieds;  11.  l'offrande  de 
farine;  12.  le  gâteau  du  grand-prêtre;  13.  la  libation  de 
vin.  Le  troisième  sort  portait  sur  le  prêtre  qui  devait 
brûler  l'encens;  on  le  choisissait  parmi  ceux  qui 
n'avaient  pas  encore  exercé  cette  fonction,  à  laquelle  on 
ne  pouvait  être  appelé  qu'une  fois  dans  sa  vie.  Enfin  le 
quatrième  sort  désignait  celui  qui  devait  porter  les 
membres  de  la  victime  de  la  montée  de  l'autel  jusqu'à 
l'autel  même. 

4°  Cérémonies.  —  Le  détail  de  toutes  les  cérémonies 
quotidiennes  est  donné  par  le  traité  Tamid.  On  y  voit 
que  les  prêtres  de  service,  qui  couchaient  dans  une 
chambre  du  parvis  intérieur,  se  mettaient  à  l'œuvre 
avant  même  le  lever  du  jour.  Avant  de  procéder  à 
l'exercice  de  sa  fonction,  chacun  se  lavait  les  mains  et 
les  pieds  au  bassin  d'airain  qui  se  trouvait  entre  le 
Temple  et  l'autel.  Dés  que  le  jour  paraissait,  on  prenait 
un  agneau  dans  la  chambre  des  agneaux  et  les  93  usten- 
siles qui  servaient  chaque  jour  dans  la  chambre  des 
ustensiles.  Pendant  ce  temps,  les  deux  prêtres  chargés 
de  nettoyer  l'autel  des  parfums  et  les  lampes  arrivaient, 
l'un  avec  une  clef  d'or,  l'autre  avec  un  vase  d'or,  ou- 
vraient la  grande  porte  du  Temple  et  remplissaient  leur 
office,  en  disposant  d'abord  les  cinq  lampes  qui  étaient 
au  couchant,  puis  les  deux  autres,  à  moins  que  ces 
dernières  ne  fussent  éteintes,  car  alors  on  commençait 
par  elles.  C'est  seulement  à  l'ouverture  de  la  porte  qu'il 
était  permis  d'immoler  l'agneau.  Sur  les  cérémonies  du 
sacrifice  lui-même,  voir  Sacrifice,  Libation,  t.  iv, 
col.  234;  Oblation,  col.  1727;  Pari-tm,  col.  2164. 
Quand  tout  était  disposé  pour  le  sacrifice,  les  prêtres 
se  rendaient  dans  la  chambre  ha-gasith  pour  y  réciter 
le  schéma  du  matin.  Voir  Prière.  Cf.  Tamid,  iv,  1-3. 
Ensuite,  les  prêtres  que  le  sort  n'avait  désignés  pour 
aucune  fonction  quittaient  leurs  vêtements  sacrés.  On 
procédait  alors  à  l'offrande  de  l'encens  et  on  brûlait 
l'holocauste  sur  l'autel.  Enfin,  les  cinq  prêtres  qui 
avaient  été  employés  à  l'offrande  de  l'encens  se  ren- 
daient à  l'entrée  du  Temple  et  prononçaient  sur  le  peuple 
la  formule  de  bénédiction  prescrite,  Xum.,  vi,  24-26,  en 
élevant  les  mains  et  en  remplaçant  le  nom  de  Jéhovah 
par  Adonaï.  Cf.  Tamid,  vu,  2;  Sota,  vu,  6.  Les  mêmes 


cérémonies  se  répétaient  pour  le  sacrifice  du  soir,  qui 
avait  lieu  vers  trois  heures  de  l'après-midi.  Mais  on  ne 
tirait  au  sort  que  le  nom  de  celui  qui  devait  ollrir  l'en- 
cens. Cf.  Gem.  Yoma,  26,  1.  L'encens  était  offert 
avant  le  sacrifice,  et  les  prêtres  n'y  donnaient  pas  la 
bénédiction  au  peuple. 

5°  Fêtes.  —  Outre  les  sacrifices  quotidiens,  les 
prêtres  en  avaient  d'autres  à  offrir  à  l'occasion  des 
néoménies  et  des  fêtes,  à  la  Pàque,  à  la  Pentecôte,  à 
la  fête  des  Tabernacles,  à  la  nouvelle  année  et  au  jour 
de  l'Expiation.  Voir  ces  mots.  Ils  avaient  aussi  à  s'oc- 
cuper des  nombreux  sacrifices  de  toute  nature  que  fai- 
saient offrir  les  particuliers. 

6°  Garde  du  Temple.  —  Ils  avaient  également  à 
garder  le  Temple.  Les  portes  en  étaient  fermées  à  la 
tombée  de  la  nuit  et  ouvertes  au  point  du  jour.  Les 
prêtres  qui  couchaient  dans  le  parvis  antérieur  et  à  qui 
incombait  le  service  du  jour  suivant,  gardaient  les 
clefs  et  les  transmettaient  à  ceux  qui  devaient  servir 
après  eux.  Le  matin,  le  préfet  du  Temple  les  recevait 
pour  l'ouverture  des  portes.  Cf.  Middoth,  i,  8,  9; 
Tamid,  i,   1. 

7°  Trompettes.  —  Enfin,  les  prêtres  avaient  à  sonner 
de  la  trompette  dans  le  Temple.  Xum.,  x,  8-10;  II  Esd., 
xii,  41.  Chaque  jour  ils  sonnaient  vingt  et  une  fois, 
trois  fois  à  l'ouverture  des  portes,  neuf  fois  à  la  liba- 
tion du  matin  et  neuf  fois  à  celle  du  soir.  Cf.  Sukka, 
v,  5.  Voir  Trompette. 

8"  Dignitaires.  —  Un  certain  nombre  de  prêtres  rem- 
plissaient, sous  l'autorité  du  grand-prêtre,  les  charges 
qui  réclamaient  des  titulaires  permanents.  Les  gisbd- 
rîm,  -jaÇoçûXaxeç,  «  gardiens  du  trésor  »,  veillaient  sur 
tous  les  biens  du  Temple,  mobilier  et  apports.  Les 
fonctions  principales  de  ce  service  après  ta  captivité 
de  Babylone,  étaient  confiées  à  des  prêtres,  II  Esd., 
xin,  13,  les  autres  à  des  lévites.  I  Par.,  ix,  28,  29; 
xxvi,  20-28;  II  Par.,  xxxi,  11-19.  Il  fallait  surtout  des 
prêtres  préposés  au  bon  ordre  du  culte  quotidien, 
puisque  ceux  qui  s'acquittaient  des  fonctions  de  ce  culte 
n'avaient  en  général  à  s'en  occuper  que  deux  jours  par 
an,  ce  qui  ne  leur  permettait  guère  de  s'en  rappeler 
tous  les  détails.  Il  y  avait  donc,  au  moins  dans  les  der- 
niers temps,  quinze  prêtres  préposés  aux  services  sui- 
vants :  le  sceau,  les  libations,  les  'sorts,  l'argent  pour 
l'achat  des  victimes,  la  santé  des  prêtres  malades  des 
entrailles  (voir  t.  iv,  col.  910),  les  eaux,  les  temps,  les 
portes,  la  discipline,  les  cymbales,  la  direction  du  chant, 
les  pains  de  proposition,  le  parfum,  les  voiles,  les  vête- 
ments. Cf.  Sclwkalim,  v,  1.  Le  préposé  aux  sorts  prési- 
dait aux  tirages  au  sort  au  moyen  desquels  on  désignait 
chaque  jour  les  prêtres  chargés  d'un  office.  Le  préposé 
au  sceau  délivrait  des  cachets  pour  se  procurer  les  liba- 
tions auprès  du  préposé  aux  libations.  Le  préposé  à  l'ar- 
gent pour  l'achat  des  victimes  recueillait  l'argent  déposé 
dans  le  tronc  destiné  à  cet  usage  et  prenait  soin  de  four- 
nir en  échange  les  victimes  convenables.  Le  préposé  aux 
temps  était  le  héraut  chargé  le  matin  d'appeler  chacun 
à  son  poste.  Le  préposé  à  la  discipline  avait  à  réveiller 
et  même  à  corriger  les  lévites  trop  lents  à  se  mettre 
sur  pied.  Le  Talmud  parle  encore  d'autres  fonction- 
naires :  le  sagan,  voir  Sagan',  les  amarkelin,  cf.  Sche- 
kalim,  v,  2,  probablement  chargés  de  la  caisse  et  des 
comptes,  et  des  xaSoXixoi,  cf.  1er.  Schekalim,  v,  49  a, 
probablement  des  trésoriers  ou  des  subordonnés  du 
sagan. Cf.  Reland,  Antiquitales  sacrse, p. 88-91  ;  Schûrer, 
Geschichte  des  jûdiscken  Volkes  im  Zeitalter  Christi, 
t.  Il,  p.  269-299. 

r;;.  altres  FONCTIOKS.  —  1°  A  la  guerre.  —  Avant  le 
combat,  un  prêtre  était  chargé  de  parler  au  peuple 
pour  l'exhorter  au  courage  et  à  la  confiance  en  Dieu. 
Deut.,  xx,  2-4.  Cf.  Xum.,  xxxi,  6;  I  Reg.,  iv,  4;  II  Par., 
xin,  12.  On  appelait  ce  prêtre  I'  «  oint  du  combat  »,  et 
l'onction  qu'il  recevait  l'assimilait  au  grand-prêtre  sur 


651 


PRÊTRE 


6r>2 


plusieurs  poinls,  mais  ne  conférait  pas  l'hérédité  delà 
charge.  Cf.  Sota,  vin,  1;  Geni.  Yonia,  73,  1.  Judas 
Macliabée  parait  avoir  rempli  la  fonction  d'  «  oint  du 
combat  ».  I  Mach.,  m,  55,  56. 

2°  Lois  de  pureté.  —  Les  prêtres  étaient  chargés  de 
l'application  des  lois  concernant  la  pureté  légale.  Ils 
devaient  savoir  discerner  le  saint  du  profane,  le  pur  de 
l'impur.  Lev.,  x,  10;  XI,  47;  Ezech.,  xxu,  26;  xliv,  23. 
Agg.,  H,  11-14.  Ces  lois  étaient  devenues  très  compli- 
quées, grâce  aux  décisions  de  détail  portées  par  les 
docteurs.  Voir  Impureté  légale,  t.  m,  col.  857-860; 
cf.  Reland,  Antiquitates  sacrée,  p.  105-112.  Dans  les 
cas  ordinaires,  les  prêtres  constataient  l'impureté,  s'il 
était  nécessaire,  indiquaient  sa  durée  et  le  moyen  de  la 
faire  disparaître;  dans  les  cas  douteux,  ils  éclairaient 
celui  qui  les  consultait.  Ils  intervenaient  nécessaire- 
ment dans  le  cas  de  la  femme  soupçonnée  d'adultère, 
Num.,  v,  11-31,  voir  Eau  de  jalousie,  t.  n,  col.  1522; 
dans  l'examen  et  la  purification  du  lépreux,  Lev.,  xui, 
XIV,  voir  LÈPRE,  t.  iv,  col.  180-184;  dans  l'examen  delà 
lèpre  des  vêtements  et  des  maisons,  Lev.,  xm,  53-59; 
xiv,  34-53,  voir  t.  iv,  col.  186,  187,  et  dans  tous  les  cas 
analogues  d'impureté  légale.  Lev.,  xv,  1-33.  Le  juge- 
ment d'un  seul  prêtre  suffisait  pour  la  constatation 
de  la  lèpre.  Cf.  Gem.  Nidda,  50,  1;  Siphra,  100,  1. 

3"  Estima/ions.  —  Certains  rachats  s'opéraient 
moyennant  un  prix  laissé  à  l'estimation  du  prêtre, 
pour  les  personnes,  Lev.,  xxvn,3-8,  pour  les  animaux, 
Lev.,  xxvn,  12,  13,  27,  pour  les  maisons.  Lev.,  wvn, 
14,  15.  Voir  Rachat. 

4°  Jugements.  —  Quand  une  affaire  relative  à  un 
meurtre,  à  une  contestation,  à  une  blessure,  était  trop 
difficile  à  juger,  on  la  soumettait  à  la  décision  des 
prêtres.  Deut.,  xvn,  8-12.  Ils  intervenaient  spéciale- 
ment dans  le  cas  d'un  meurtre  dont  l'auteur  était 
inconnu.  Deut.,  xxi,  5.  Josaphat  mit  des  prêtres  au 
nombre  des  juges,  II  Par.,  xix,  8-10;  cf.  Ezech.,  xi.iv, 
2i,  bien  que  la  fonction  de  juge  fut  habituellement 
confiée  aux  anciens.  Voir  JuGE,  t.  ni,  col.  1835.  Quand 
commença  à  fonctionner  le  tribunal  suprême  appelé 
sanhédrin,  des  prêtres  en  firent  partie. 

5°  Enseignement.  —  La  Loi  ordonnait  aux  prêtres 
d'  «  enseigner  aux  enfants  d'Israël  toutes  les  lois  que 
Jéhovah  leur  a  données  par  Moïse  ».  Lev.,  x,  11; 
cf.  Deut.,  XXXIII,  10.  Us  s'acquittèrent  de  cette  tâche 
d'une  manière  qui  fut  loin  d'être  toujours  parfaite.  La 
foi  au  vrai  Dieu  disparaissait  quand  cessait  l'enseigne- 
ment du  prêtre.  II  Par.,  xv,  3.  Josaphat  envoya  dans 
Juda,  pour  y  prêcher  la  loi  île  Jéhovah,  cinq  de  ses 
chefs,  neuf  lévites  et  seulement  deux  prêtres.  II  Par., 
xvn,  7-9.  Ézéchiel,  XXU,  26,  se  plaint  que  les  prêtres 
n'enseignent  plus  à  distinguer  cuire  le  saint  et  le  pro- 
fane, le  pur  et  l'impur;  il  annonce  que,  chez  le  peuple 
régénéré,  ils  enseigneront  ces  choses.  Ezech.,  xuv.  23. 
Michée,  m,  11,  les  accuse  de  prendre  un  salaire  pour 
enseigner.  Aggée,  n,  12,  constate  que  les  piètres  de 
son  temps  ne  savent  pas  faire  la  distinction  dont  parle 
Ézéchiel.  Malachie,  n,  7.  8,  leur  adresse  1rs  mêmes 
reproches  :  «  Les  lèvres  du  prêtre  sont  les  gardiennes 
de  la  science,  et  c'est  de  sa  bouche  qu'on  demande 
l'enseignement,  parce  qu'il  est  l'ange  de  Jéhovah  des 
armées.  Mais  vous,  vous  vous  êtes  écartés  de  la  voie, 
vous  en  avez  fait  trébucher  plusieurs  contre  la  loi,  vous 
avez  perverli  l'alliance  de  Lévi.  n  II  est  probable  que 
le  texte  du  Lévitique  se  rapportait  beaucoup  plus  à  la 
lui  rituelle  qu'à  la  loi  morale.  I.a  connaissance  de 
celte  dernière  venait  de  la  conscience  même,  et, chaque 
année  sabbatique,   les   prêtres    devaient   donner   an 

peuple  lecture  du  livre  qui  la  rappelail.  Deut.,  XXXI, 
9-13.  En  fait,  l'enseignement  moral  el  religieux  donné 
par  les  prêtres  semble  avoir  été  assez  restreint.  Voir 
Ensi  igni  ment,  t.  n,  col.  1813.  Les  prophètes  s'en  char- 
ge mil  pendant  un   temps;    puis,  après  la  captivité,  les 


docteurs  ou  scribes,  avec  moins  d'autorité  et  de  sûreté 
dans  la  doctrine,  prirent  la  tâche  de  l'enseignement. 
Les  prêtres,  uniquement  occupés  de  leurs  fonctions 
rituelles,  s'en  désintéressèrent  à  peu  près  complète- 
ment, sauf  ceux  d'entre  eux  qui  devinrent  docteurs  de 
la  loi.  C'est  ce  qui  fait  que  les  prêtres  d'Israël  n'exer- 
cèrent qu'une  influence  médiocre  sur  le  développement 
et  la  garde  des  idées  morales  et  religieuses  dans  leur 
nation. 

Vin.  nÉSIDBKCE.  —  Quand  les  Israélites  occupèrent 
la  Palestine,  quarante-huit  villes  furent  assignées  aux 
membres  de  la  tribu  de  Lévi.  pour  servir  d'habitation 
aux  prêtres  et  aux  lévites.  Num.,  XXXV,  1-8.  Voir  LÉVI- 
tiques  (Villes),  t.  îv,  col.  216.  Parmi  ces  villes,  treize 
étaient  spécialement  destinées  aux  prêtres  dans  les 
tribus  de  Juda,  de  Siméon  et  de  Denjamin,  par  consé- 
quent dans  le  voisinage  de  Jérusalem.  Jos..  xxi,  i.  Voir 
l'énumération  de  ces  villes,  t.  iv,  col.  217.  Pourtant  les 
prêtres  n'étaient  pas  confinés  dans  ces  seules  villes. 
Partout  ailleurs,  ils  pouvaient  s'établir  à  leur  gré,  mais 
en  s'achetant  eux-mêmes  des  maisons  et  des  champs. 
Cf.  De  Hummelauer,  In  Num.,  Paris,  1899,  p.  373. 
C'est  pourquoi,  à  l'époque  du  schisme  de  Jéroboam, 
les  prêtres  et  les  lévites  «  qui  se  trouvaient  dans  tout 
Israël  »,  voyant  qu'on  les  empêchait  de  remplir  leurs 
fonctions  en  l'honneur  de  Jéhovah,  abandonnèrent  leurs 
champs  et  leurs  propriétés  pour  passer  en  Juda  et  à 
Jérusalem.  II  Par.,  XI,  13,  14,  Après  la  captivité',  les 
prêtres  et  les  lévites  s'établirent  dans  leurs  villes,  ce 
qui  s'entend  seulement  du  pays  mis  à  la  disposition 
des  nouveaux  arrivants,  c'est-à-dire  de  Jérusalem  et 
de.Iuda.  Il  Esd.,  vu,  6,  73.  A  Jérusalem  même  se  fixèrent 
1192  prêtres,  II  Esd.,  xi,  4,  10-14,  1760  d'après  II  Par., 
ix,  13.  Les  villes  et  bourgades  de  Juda  en  reçurent 
aussi.  I  Esd.,  n,  70;  II  Esd.,  vu,  73;  xi,  3,  20,  36. 
Le  voisinage  de  Jérusalem  élail  certainement  préféré. 
parce  qu'il  rendait  plus  faciles  les  voyages  au  Temple.  Le 
prêtre  Zacharie  demeurait  dans  la  montagne  de  Juda. 
Luc,  i,  39. 

II.  RESSOURCES.  —  Les  prêtres,  comme  tons  les 
lévites,  n'avaient  pasde  domaine  territorial:  ilsappar- 
tenaient  exclusivement  au  service  de  Dieu,  et  Dieu  de- 
vait être  lui-même  leur  part  et  leur  héritage  au  milieu 
d'Israël.  Num.,  xvm,  20;  Jos.,  XIII,  14.  Voici  par  quels 
moyens  Dieu  assurait  leur  subsistance  et  celle  de  leur 
famille.  Il  y  a  quelques  divergences  de  détail  à  ce 
sujet  entre  le  Lévitique  et  le  Deuléronome;  mais  elles 
se  concilient  assez  aisément,  ou  parfois  accusent  une 
modification  dans  la  législation. 

1»  Sacrifices.  —  Dans  le  sacrifice  pour  le  péché,  tout 
revenait  au  prèlre,  Num.,  xvm,  9,  10,  sauf  l'un  des 
deux  oiseaux  qu'offraient  les  pauvres,  Lev.,  v,  7,  et  fout 
ce  qui  était  offert  pour  le  péché  d'un  prêtre.  Lev.,  vi, 
23.  —  Dans  le  sacrifice  pour  le  délit,  tout  revenait  égale- 
ment au  prêtre.  Lev.,  vu, 7; Num.,  XVIII, 9, 10.  —  Dans  les 
dilations,  tout  était  pour  le  prêtre,  sauf  la  poignée  ,1e 
farine  prélevée  pour  l'autel.  Lev.,  Il,  3,  10:  vi,  9-11; 
vu,  9,  10,  14;  x.  12,  13;  Num.,  xvm,  9.  10;  Ezech., 
xuv,  29.  —  Les  préires  avaient  encore  pour  eux  les 
douze  pains  de  proposition.  Lev.,  XXIV,  5-9.  —  Dans  les 
sacrifices  pacifiques,  la  poitrine  et  la  cuisse  droite  de 
la  victime  étaient  pour  le  prêtre.  Lev.,  vu,  30-3 i  ;  x, 
I  i,  15.  —  Dans  les  holocaustes,  les  prêtres  n'avaient 
pour  eux  que  la  peau  de  la  victime;  mais  le  revenu  ne 
laissait  pasque  d'être  f<>rl  appréciable,  à  cause  du  grand 
nombre  des  victimes.  Cf.  Philon,  De  praeniiis  sacer- 
dot..  i.  édit.  Mangey,  I.  Il,  p.  235.  Le  rituel  babylo- 
nien assignait  aussi,  aux  prèlres  el  aux  serviteurs  dis 
temples,  la  pari  des  victimes  qui  devait  leur  reven 
après  les  sacrifices  de  bœufs  et  de  moutons,  ainsi  que 
les  poissons,  légumes,  vêlements,  etc.,  auxquels  ils 
avaient  droit.  Cf.  Dborme,  Textes  religieux,  Paris, 
1907,  p.  391-393. 


653 


PRÊTRE 


654 


2°  Prémices.  —  Elles  portaient  sur  le  froment,  l'orge, 
les  raisins,  les  ligues,  les  grenades,  les  olives  et  le 
miel.  Deut.,  vin,  8;  xxvi,  5-10;  Num.,  xvm,  13; 
II  Esd..  x,  36.  Voir  Prémices,  col.  598.  On  y  joignait 
ce  qu'on  appelait  la  terûmdh,  «  offrande  »,  prélevée 
sur  le  meilleur  des  champs  et  des  arbres  fruitiers,  et 
consistant  surtout  en  grains,  vin  et  huile.  On  donnait 
de  1  40  à  1/60  de  la  récolte,  suivant  la  générosité  de 
chacun.  Xum.,  xvm,  12;  II  Esd.,  x,  38.  Cf.  Terumoth, 
i,7;  îv,  3;  etc. 

3°  Dîme.  —  Elle  portait  sur  tout  ce  qui  croit  de  la 
terre  et  sert  à  la  nourriture.  Elle  servait  à  alimenter 
non  seulement  les  prêtres,  mais  aussi  les  lévites,  qui 
d'ailleurs  versaient  encore  aux  prêtres  la  dîme  de  la 
dime.  Num.,  xvm,  20-32;  II  Esd.,  x,  38-40.  Voir  Dîme, 
t.  n,  col.  1434. 

4°  Pain.  —  On  devait  aux  prêtres  une  partie  du 
pain  préparé,  Xum.,  xv,  17-21  ;  II  Esd.,  x,  28,  ce  que 
saint  Paul  appelle  ir.ïpyj,  t&C  ç-jpi[i.aTo;,  «  prémices 
de  la  masse  »,  Rom.,  xi,  16,  et  ce  qui  fait  l'objet  du 
traité  Challa  de  la  Mischna.    La  redevance  portail  sur 

I  24  pour  les  particuliers  et  sur  1/48  pour  les  boulan- 
gers. Challa,  n,  7. 

5" Premiers-nés.  —  Exod.,  xm,  11-16;  xxii,  29,  30; 
xxxiv.  19,  20;  Deut.,  xv,  19-23.  Le  premier-né  de  la 
femme  était  racheté  au  prix  de  cinq  sicles  d'argent, 
qui  appartenaient  aux    prêtres.  Xum.,   xvin,    15,  16; 

II  Esd.,  x,  37.  Le  premier-né  des  animaux  purs  leur 
était  aussi  destiné,  sauf  la  graisse  et  le  sang,  qui 
allaient  à  l'autel.  Xum.,  xvm,  17-18;  Peut.,  xv,  19,20; 
II  Esd..  x.  37.  S'il  avait  quelque  défaut,  sa  destination 
était  la  même,  mais  on  ne  l'offrait  pas  à.  l'autel.  Deut., 
xv.  19-23.  Le  premier-né  des  animaux  impurs  se  rache- 
tait a  prix  d'argent,  sauf  celui  de  l'àne,  qui  se  rache- 
tait pour  un  agneau,  toujours  au  profit  des  prêtres. 
Exod.,  xm,  13;  xxxiv,  20;  Xum.,  xvm,  15;  II  Esd.,  x, 
37.  Voir  Prehier-m:;,  col.  603;  Rachat. 

6°  Viande.  —  Pur  tout  animal  de  gros  ou  menu  bé- 
tail  que  l'on  abattait,  les  prêtres  avaient  droit  à  trois 
morceaux,  l'épaule,  les  mâchoires  et  l'estomac.  Deut., 
xvm,  3.  Cf.  Chullin,  x. 

7"  Toisons.  —  Deut.,  xvm,  4;  Tob.,  i,  6.  Cf.  Chullin, 
xi,  1,  2.  La  redevance  n'était  due  que  par  celui  qui 
avait  plusieurs  brebis,  deux  d'après  l'école  de  Scham- 
maï,  cinq  d'après  celle  de  Hillel. 

8°  Vœux.  —  Le  produit  des  vœux  de  toute  nature  de- 
vait être  versé  aux  prêtres,  soit  sous  forme  réelle,  soit 
sous  forme  de  rachat,  Lev.,  xxvn,  2-33;  Deut.,  xxm, 21- 
23;  Matth.,  xv,  5;  Marc,  vu,  11;  mais  il  était  probable- 
ment employé  aux  besoins  du  culte.  Cf.  Schekalim,  îv, 
6-8.  Voir  Rachat.  Vœu. 

9°  Ana thèmes.  —  Tout  ce  qui  était  voué  à  Jéhovah 
par  anathème,  sauf  les  personnes,  allait  aux  prêtres  sans 
pouvoir  être  racheté.  Lev.,  xxvn,  28;  Xum.,  xvm,  14; 
Ezech.,  xi.iv.  19. 

{0" Restitutions.  —  Quand  un  coupable  voulait  réparer 
le  préjudice  causé  au  prochain,  il  rendait  le  bien  mal 
acquis  avec  majoration  d'un  cinquième,  et  si  le  lésé 
n'était  plus  là  et  n'avait  plus  de  représentant,  la  resti- 
tution profitait  aux  prêtres.  Num.,  v,  6-10.  Cf.  Schûrer, 
Gest  hichte,  t.  Il,  p.  243-257;  F.  Duhl,  La  société  Israélite 
d'après  VA.  T.,  trad.  de  Cintré,  Paris,  1904,  p.  135-139. 

x.  USAGE  DBS  RESSOURCES.  —  1»  Centralisation.  —  Cer- 
taines ressources,  à  raison  de  leur  nature  même,  comme 
le  pain,  la  viande,  etc.,  ne  pouvaient  être  portées  au 
loin.  On  les  remettait  donc  au  prêtre  là  où  il  se  trou- 
vait. Cf.  Terumoth,  n,  4.  D'après  Challa,  iv,  8,  9,  on 
pouvait  remettre  à  tout  prêtre  le  pain,  le  produit  de 
l'anathéme,  les  animaux  premiers-nés,  l'argent  du  ra- 
chat du  fils  premier-né,  celui  du  premier-né  de  l'àne, 
orceaux  de  l'animal  abattu,  la  toison.  Tout  le  reste 
était  centralisé  à  Jérusalem.  II  Par.,  xxxi,  11,  12; 
Il  Esd..  xn,  i3:  xm,  5;  .Mal.,  m,  10. 


2°  Répartition.  —  Les  ressources  sacerdotales,  au 
moins  celles  qui  étaient  apportées  à  Jérusalem,  se  ré- 
partissaient  entre  tous  les  prêtres.  Sous  Ézéchias,  les 
distributions  se  faisaient  dans  les  villes  sacerdotales  par 
des  lévites  préposés  à  ce  service.  II  Par.,  xxxi,  15-19. 
Les  prêtres  qu'une  difformité  corporelle  écartait  du  ser- 
vice de  l'autel  avaient  part  aux  distributions  au  même 
titre  que  lesautres.  Lev.,  xxi,  22.  Cf.  Josèphe,  Ant.  jitd-, 
III,  xn,  2;  Bell,  jud.,  V,  v,  7;  Sebachim,  xn,  1. 

3°  Consommation.  —  Les  choses  très  saintes  ne  pou- 
vaient être  consommées  que  par  les  prêtres  seuls  dans 
le  Temple;  on  en  comptait  dix  :  les  quadrupèdes  du 
sacrifice  expiatoire,  les  oiseaux  du  même  sacrifice,  les 
victimes  pour  le  délit  certain,  celles  pour  le  délit  dou- 
teux, celles  des  sacrifices  pacifiques  publics,  le  log 
d'huile  du  lépreux,  les  deux  pains  de  la  Pentecôte,  les 
pains  de  proposition,  les  restes  des  oblations  et  la  gerbe 
pascale.  On  en  comptait  quatre  autres  qui  devaient  être 
utilisées  à  Jérusalem  même  ;  les  premiers-nés  des  ani- 
maux, les  prémices,  ce  qu'on  réservait  dans  le  sacrifice 
du  nazaréen  et  les  peaux  des  victimes  très  saintes.  En- 
fin, il  y  en  avait  dix  dont  on  pouvait  faire  usage  hors  de 
Jérusalem  :  la  terumah,  la  dîme  des  dîmes,  le  pain  de 
la  challa,  ce  qui  provenait  des  animaux  abattus,  le  prix 
du  rachat  du  fils  premier-né,  celui  du  premier-né  de 
l'àne,  le  champ  voué  à  Jéhovah,  le  champ  de  l'anathéme 
et  le  produit  de  la  restitution  dévolue  aux  prêtres. 
Cf.  Reland,  Antiquitates  sacrx,  p.  97,  98.  Tous  ces 
biens,  à  l'exception  des  dix  premiers  qualifiés  de  «  choses 
très  saintes  »,  pouvaient  être  utilisés  par  le  prêtre  et  sa 
famille,  femmes,  filles  et  esclaves;  mais  elles  étaient 
interdites  au  mercenaire  et  à  la  fille  mariée  à  un  homme 
qui  n'était  pas  prêtre.  Lev.,xxn,  1-16.  Dans  tous  les  cas, 
il  fallait  être  en  état  de  pureté  légale  pour  participer  à 
l'usage  de  ces  biens. 

4°  Condition  économique  des  prêtres.  —  La  législa- 
tion assurait  ainsi,  d'une  manière  assez  large,  la  subsi- 
stance des  prêtres.  Car,  ce  n'étaient  pas  seulement 
leurs  compatriotes  de  Palestine  qui  leur  versaient  de 
multiples  redevances;  ceux  de  la  dispersion  ne  man- 
quaient pas  de  remplir  leur  devoir  à  cet  égard.  Cf.  Clial- 
la,  iv,  7-11;  Chullin,  x,  1;  Philon,  De  monarch.,  n,  3; 
Leg.  ad  Caj.,  23,  40,  édit.  Mangey,  t.  H,  p.  224,  568, 
592;  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIV,  vu,  2;  XVI,  VI,  2-7;  Ci- 
céron,  Pro  Flacco,  28,  etc.  D'autre  part,  les  prêtres 
n'avaient  pas  à  s'occuper  des  besoins  du  culte;  puisque 
des  redevances  spéciales  y  pourvoyaient.  Rien  ne  les 
empêchait  d'acquérir  des  propriétés  en  dehors  de  leurs 
villes,  et,  à  ce  point  de  vue,  ils  étaient  assimilés  aux 
autres  Israélites.  III  Reg.,  Il,  26;  .1er.,  I,  1;  etc.  Mais, 
en  tant  que  prêtres,  ils  n'avaient  pas  d'autre  propriété 
territoriale  que  celle  qui  leur  était  assignée  par  la  Loi, 
et  comme  les  redevances  qui  leur  étaient  servies  étaient 
à  peu  près  toutes  de  nature  mobilière,  il  n'y  avait  pas 
à  craindre  que  la  propriété  foncière  s'accumulât  entre 
leurs  mains.  Au  retour  de  la  captivité,  Artaxerxès  ne 
voulut  pas  que  les  prêtres  et  les  autres  ministres  du 
Temple  fussent  soumis  aux  impôts  communs.  I  Esd..  vu, 
24.  Sans  doute,  le  nombre  des  prêtres  avait  augmenté 
avec  le  temps  ;  mais  les  autres  familles  israélites  s'ac- 
croissaient dans  la  même  proportion  que  celle  d'Aaron, 
et,  avec  la  population,  augmentaient  les  sacrifices,  les 
dîmes  et  les  autres  sources  de  revenus.  Dieu  avait  ainsi 
voulu  assurer  à  ses  prêtres  une  situation  honorable  aux 
yeux  d'un  peuple  qui  regardait  l'aisance  et  la  prospé- 
rité temporelle  comme  les  marques  habituelles  de  la 
faveur  divine.  Il  ne  fallait  pas  non  plus  que  les  prêtres 
de  Jéhovah  fissent  trop  mauvaise  figure  à  côté  de  ceux 
des  dieux  égyptiens  et  babyloniens,  et  des  prêtres  scliis- 
matiques  ou  idolàtriques  de  leur  voisinage  immédiat. 
Tous  auraient  donc  pu  vivre  à  l'aise  si  les  redevances 
recueillies  leur  avaient  toujours  été  équitablement  ré- 
parties. 


65r 


PRÈTRE 


6ô6 


xi.'lbs  prêtres  dans  Vbistoire.  —  1°  De  Moïse  aux 
rois.  —  Le  sacerdoce  aaronique  établi  par  Moïse  ne  fut 
pas  installé  sans  opposition,  comme  le  montre  la  ré- 
volte des  rubénites  Dathan  et  Abiron,  qu'appuya  le  lé- 
vite Coré  et  à  laquelle  prirent  part  deux  cent  cinquante 
Israélites,      princes  de  l'assemblée,  appelés  au  conseil 
et  hommes  de  renom.  »  Nuin.,   xvi,   1-2.   11  fallut  un 
châtiment  terrible  pour  faire  pré\a)oir  la  volonté  de 
Jéhovah,  et  encore  les  Israélites  ne  se  soumirent-ils  pas 
de  bon  gré  à  la  leçon  qui  leur  était  donnée,  de  sorte 
qu'il  fallut  que  le  châtiment    recommençât  pour  les 
mettre  à  la  raison.  Num.,  xvi,  41-19.  Une  loi  nouvelle 
rappela  ensuite  à  tous  le  respect  qu'ils  devaient  au  prêtre 
et  au  juge  :  «  Tu  les  consulteras,  et  ils  te  feront  con- 
naître ce  qui  est  conforme  au  droit...  Tu  agiras  selon 
la  loi  qu'ils  enseigneront  et  selon  la  sentence  qu'ils  au- 
ront prononcée,  sans  le  détourner  ni  à  droite  ni  à  gau- 
che de  ce  qu'ils  t'auront  fait  connaître.  Celui  qui,   se 
laissant  aller  à  l'orgueil,  n'écoutera  pas  le  prêtre  qui  se 
tient  là  pour  servir  Jéhovah,  ton  Dieu,  ou  qui  n'écou- 
tera pas  le  juge,  sera  puni  de  mort.  »  Deut.,  xvn,  9-12. 
Dès  lors,  on  ne  vit  plus  se  produire  de  protestation  sé- 
rieuse contre   le  sacerdoce  issu  d'Aaron.   Les  prêtres 
exercèrent  la  fonction  qui  leur  était  dévolue  dans  les 
marches  et  dans  les  combats,  Num.,  x,  5-10;  au  passage 
du  Jourdain,  Jos.,  m,  13-17.  et  à  la  prise  de  Jéricho. 
Jos.,  vi,  12-16.  —  Du  temps  des  Juges,  on  vit  un  simple 
lévite  entrer  comme  prêtre  au  service  d'un  Éphraïmite, 
du  nom  de  Michas,  moyennant  dix  sicles  d'argent  par 
an,    une    provision    de    vêtements    et    la    nourriture. 
Jud.,  xvii,  10.  Il  fut  ensuite  enlevé  par  les  Danites  qui 
le  prirentà  leur  service,  puis  installèrent  à  Lais,  comme 
prêtres,   des  descendants  de    Gersam,  fils   de    Moïse. 
Jud..  xvm,  19,  20,  30.   Ces  prêtres,  bien  que  lévites, 
étaient  aussi  illégitimes  que  le  culte  qu'ils  exerçaient. 
Leur  tentative  demeura  isolée.  —  La  faiblesse  du  grand- 
prêtre  Héli  fut  cause  que  ses  fils  deshonorèrent  le  sa- 
cerdoce par  leur  rapacité,  attirèrent  le  mépris  des  Israé- 
lites sur  les  sacrifices  et  provoquèrent  de  terribles  châ- 
timents, la  défaite  d'Israël  par  les  Philistins,   la   prise 
de  l'Arche,  la  mort  d'Héli  et  leur  propre  mort.  I  Reg-,  II, 
12-17;  iv.  1-li-S.  Samuel  fut  suscité  par  Dieu  pour  réta- 
blir l'honneur  du  sacerdoce  et  du  culte  divin.  Il  était 
de  la  tribu  de  Lévi,   mais  non  de  la  famille  d'Aaron, 
puisqu'il, descendait  de  Lévi  par  Coré.  I  Par.,  vi,  3i-H8. 
«  Moïse  et  Aaron  parmi  ses  prêtres,  et  Samuel  parmi 
ceux  qui  invoquent  son  nom,  »  dit  le  Ps.  xcix  (xcvill), 
6.  Un  homme  de  Dieu  dit  à   Héli,  de    la   part  du  Sei- 
gneur :  «  Je  me  susciterai  un  prêtre  fidèle,  qui  agira 
selon  mon  cceur  et  selon  mon  âme;  je  lui  bâtirai  une 
maison  stable  et  il  marchera  toujours  devant  mon  oint. 
Et  quiconque  restera  de  ta  maison  viendra  se  prosterner 
devant  lui  pour  avoir  une  pièce  d'argent  et  un  morceau 
île  pain,  et  il  dira  :  Mets-moi,  je  te  prie,  à  quelqu'une 
des  fonctions  du  sacerdoce,  afin  que  j'aie  un  morceau 
de  pain  à  manger.   a  1  Reg.,  n,  35,  30.  La  prophétie  se 
réalisa  quand  le  pontificat  fut  enlevé   à   Aliialhar,  qua- 
trième successeur  d'Héli,  de  la  descendance d'Élëazar, 
pour  être  conféré  à  Sadoc,  de  la  descendance  d'Ithamar, 
quatrième  fils  d'Aaron.   III  Reg.,  il.  20.  27.  35.  Les  petits- 
lils  el  descendants  d'Héli  en  furent  alors  réduits  à  exer- 
cer les  fonctions  de  simples  prêtres.   Il  est  bien  dit. 
dans   un   commentaire   faussement    attribué    à   saint 
.bruine,  In  /  ad  Cor.,  i,  2,  t.  xxx,  col.  717,  que  le     pré- 
Ire  fidèle      n'éiait  autre  que  Samuel.  Mais  saint  Jérôme 
lui-même,  Qusest,  hebr.  in  I  Reg.,  t.  xxx,  col.   1333. 
n'exprime  nullement  cet  avis,  et  enregistre  seulement 
l'opinion  de  ceux  qui  pensent  que  tout  le  passage  I  Reg., 
Il,  27-30,  se  rapporte  à  une  époque  antérieure  el  a    été 
inséré  ici  pour   l'honneur  de  Samuel.   Saint  Augustin, 
De  Cir.  Dei,  xvn,  5,  2,  dil  également  qu'il  ne  peut  pas 
s'agir  ici  de  Samuel,  qui  était  lévite,   mais  non  de  la 
famille    d'Aaron.  Cf.  Cont.  Faustum,  xn,  33,  t.  xlii, 


col.  271.  Les  fonctions  déjuge  et  de  prophète  n'exigeaient 
nullement  le  sacerdoce,  et  si  Samuel  conféra  l'onction 
royale  à  Saiil,  I  Reg.,  x,  1,  et  à  David,  I  Reg.,  xvi,  13, 
il  ne  parait  pas  qu'il  fallût  être  prêtre  pour  cet  office. 
IV  Reg.,  îx. 0.  Mais  Samuel  offrait  des  sacrifices,  I  Reg., 
vu, 9, 10;  ix,8;Eccli.,  xi.vi,  19(10)  :  «  Il  offrit  un  agneau 
encore  à  la  mamelle.  »  Aucun  reproche  n'est  adressé 
au  prophète  à  ce  sujet.  C'est  donc  qu'il  agissait  en  vertu 
d'une  inspiration  divine,  ou  qu'il  n'offrait  de  sacrifices 
que  par  le  ministère  habituel  des  prêtres.  Voir  Samuel. 
2»  Sous  les  rois.  —  Le  transport  définitif  de  l'Arche 
à  Jérusalem  fixa  dans  la  nouvelle  capitale  le  culte  de 
Jéhovah,  et  David  offrit  des  sacrifices  d'actions  de 
grâces  et  des  holocaustes.  II  Reg.,  VI,  17.  Il  le  fit, 
bien  entendu,  par  le  ministère  des  prêtres,  pour  ne 
pas  encourir  la  réprobation  qui  avait  frappé  Saiil. 
I  Reg.,  xm.  9-14.  En  Egypte,  les  pharaons  étaient  les 
souverains  sacrificateurs.  Dieu  ne  voulait  pas  qu'il  en 
fut  ainsi  en  Israël;  il  y  maintint  toujours  très  formel- 
lement la  prérogative  qu'il  avait  attribuée  à  la  descen- 
dance d'Aaron.  David  s'occupa  de  l'organisation  du 
culte  à  Jérusalem;  il  divisa  les  prêtres  en  vingt-quatre 
classes,  de  concert  avec  Sadoc  et  Achimélech,  afin 
d'assigner  à  chaque  classe  son  tour  de  service. 
I  Par.,  xxiv,  1-19.  Les  prêtres  figuraient  aussi  dans 
l'armée  et  y    exerçaient    même  des  commandements. 

I  Par.,  xn,  27,  28;  xxvn,  5,  6.  Avec  Salomon,  l'organi- 
sation préparée  par  David  commença  à  fonctionner 
dans  le  nouveau  Temple.  II  Par.,  vin,  14,  15.  Après  lui, 
les  choses  changèrent  de  face.  Les  prêtres  avaient  leurs 
villes  sacerdotales  ;  mais  un  bon  nombre  d'entre  eux 
s'étaient  établis  dans  tout  le  pays.  Ils  y  avaient  avan- 
tage, parce  que,  tout  en  restant  assurés  des  ressources 
générales  de  leur  ordre,  ils  pouvaient  profiter  en  plus 
des  redevances  locales  qu'il  était  impossible  ou  qu'il 
n'était  pas  nécessaire  de  centraliser  à  Jérusalem.  Le 
schisme  île  Jéroboam  les  obligea  à  se  replier  sur  le 
territoire  du  royaume  de  Juda  et  à  abandonner  ainsi 
la  plus  grande  partie  du  pays  précédemment  occupé. 

II  Par.,  xi,  13,  14.  Il  dut  en  résulter  une  certaine  i4eiie 
pendant  quelque  temps;  car  Je  nombre  des  prêtres  res- 
tait à  peu  près  tel  qu'à  l'époque  de  David  et  de  Salo- 
mon, alors  que  le  royaume  de  Juda  était  seul  désor- 
mais à  assurer  leur  subsistance,  et  rares  furent  ceux 
d'Israël  qui  continuèrent  à  s'acquitter  des  redevances 
légales.  Tob.,  i,  0-8.  La  situation  fut  souvent  aggravée 
par  l'idolâtrie  des  rois  et  celle  du  peuple,  ce  qui  com- 
mença dès  le  règne  de  Roboam.  II  Par.,  XII,  1.  Il  est 
évident  que  ceux  qui  se  détournaient  de  Jéhovah  pour 
passer  au  culte  des  idoles  ne  se  préoccupaient  guère 
d'acquitter  leurs  redevances  envers  le  sacerdoce  aaro- 
nique. Beaucoup  de  prêtres  durent  être  souvent  ré- 
duits, comme  les  descendants  d'Héli,  à  solliciter  une 
fonction  active  dans  le  service  du  culte,  afin  d'avoir  un 
morceau  de  pain  à  manger.  I  Reg.,  Il,  36.  —  Sous  les 
ordres  du  grand-prélre  .loiad.i.  les  prêtres  et  les  lévites 
furent  les  agents  actifs  de  la  révolution  qui  détrôna 
Athalie,  pour  mettre  à  sa  place  le  roi  légitimé.  Joas, 
IV  Reg..  xi,  4-10;  II  Par.,  xxiu,  L-15.  Quelques  années 
plus  tard,  Joas  blâma  la  négligence  des  prêtres  qui 
n'avaient  pas  dignement  entretenu  la  maison  du  Sei- 
gneur, et  prit  des  mesures  pour  faire  tout  remettre  en 
état.  IV  Reg.,  xn,  6-16;  II  Par.,  xxiv,  4-11.  Le  roi 
Ozias,  qui  eut  la  témérité  d'imiter  Saiil  et  de  s'ingérer 
dans  une  fonction  qui  n'appartenait  qu'aux  prêtres, 
fut  frappé  de  Dieu,  toujours  jaloux  de  faire  respecter 
les  prérogatives  de  son  sacerdoce.  IV  Reg.,  XV,  o; 
Il  Par.,  xxvi,  10,  21.  Ézéchias  rouvrit  les  portes  du 
Temple  fermées  par  Achaz,  y  rétablit  les  prêtres  da  is 
leurs  fonctions,  restaura  le  culte  de  Jéhovah,  fit  re- 
prendre par  le  peuple  l'habitude  de  s'acquitter  des 
redevances  sacrées  et  en  assura  l'équitable  répartition. 
II  Par.,  xxix,  3-XXXI,  21.  -   Pendant  son  long  règn& 


657 


PRÊTRE 


658 


de     cinquante-cinq    ans,    Manassé    installa     le    culte 
idolàtrique  dans  le  Temple  même,  sans  que  les  prêtres 
paraissent  avoir  fait  une  sérieuse  opposition  à  un  tel 
attentat.  II   Par.,  xxxm,  2-10;  IV  Reg.,  xxi,  2-9.  Les 
prophètes    seuls    protestèrent,    bien    qu'inutilement. 
IV  Reg.,  xxi,  10-15.  Une  dernière  restauration  du  culte 
eut  lieu  sous  Josias,  avec  le  concours  du  grand-prêtre 
Helcias.  IV  Reg.,   xxn,  3-xxm,  28;  II  Par.,  xxxiv.  8- 
xxxv,  19.  —  A  travers  toutes  ces  vicissitudes  de  la  re- 
ligion, selon  le  caprice  des  rois  infidèles,  on  ne  voit 
guère  les  prêtres  prendre  un   parti  décisif  en  faveur 
du  culte  de  Jéhovah.  Les  prophètes  nous  donnent  le  se- 
cret de  cette  apathie.   11  n'y  avait   évidemment  pas  à 
compter,  pour  maintenir  le  peuple  dans  la  fidélité,  sur 
les  prêtres  d'Israël,  qui  n'av3ient  qu'un  sacerdoce  fictif 
et  dont  Osée  décrit  l'ignorance,  la  scélératesse  et  le 
châtiment  prochain.  Ose.,  IV,  6-9:  v,   1-9;  VI,  6-10.  En 
Juda  même,  les  prêtres  se  laissaient  entraîner  au  mal. 
Déjà  Isaïe,  xxvm,  7,  8,  reproche  leurs  ignobles  ivresses 
aux  prêtres  qui  ont  à  rendre   la  justice.   Cf.   Is.,  lvi, 
10-12.  Sophonie,  m,  4,  accuse  les  prêtres  de  profaner 
les  choses  saintes  et  de  violer  la   loi.  Jérémie,  prêtre 
lui-même,  donne  des  détails  significatifs  sur  la  con- 
duite des  autres  prêtres.  Ils  ne  s'inquiètent    pas   de 
Jéhovah  et  n'ont  de  pensée  et  de  culte  que  pour  les 
idoles  et   pour  1'  o  armée  des  cieux  ».  .1er.,  Il,  8,  26; 
vm,  I,  2;  cf.  Ezech.,  xliv,  12.  Les  faux  prophètes  sont 
leurs  oracles,    Jer.,  v,    31,    le  mensonge  est  leur  loi. 
Jer.,  vi.  13;  vin,  10.  «  Prophètes  et  prêtres  sont  des 
profanes,    et  dans  ma  maison  même,  j'ai  trouvé  leur 
méchanceté,  dit  Jéhovah.  »  Jer.,  xxm,  11.  Comme  les 
rois,  les  chefs  et  le  peuple,   les  prêtres  ont  tourné  le 
dos  à  Dieu.  Jer.,  xxxn,  32.  II  n'est  donc  pas  étonnant 
que  le  châtiment  terrible  soit  tombé  sur  Jérusalem  et 
tout  le  pays-,  «  à   cause  des  péchés  de  ses  prophètes, 
des  iniquités  de  ses  prêtres  qui  répandaient  dans  son 
enceinte  le  sang  des  justes.   »  Lam.,  IV,   13.  Ézéchiel, 
prêtre   lui   aussi,    formule    les   mêmes   accusations   : 
«  Les  prêtres  ont  violé  ma  loi  et  profané  mon  sanc- 
tuaire; ils  ne  distinguent  pas  entre  le  saint  et  le  pro- 
fane, ils  n'enseignent  pas  la  différence  entre  celui  qui 
est  souillé   et  celui  qui   est  pur,    ils   détournent  les 
yeux  de  mes  sabbats  et  je  suis  profané  au  milieu  d'eux.  » 
Ezech.,  xxn,  26.  Les  chefs  des  prêtres  eux-mêmes  mul- 
tipliaient les  transgressions  et  profanaient  la  maison  de 
Jéhovah.  II  Par.,  xxxvi,   14.   Aussi   devinrent-ils  vic- 
times de  la  captivité,  avec  le  peuple  qu'ils  n'avaient  pas 
su  maintenir  dans  le  devoir.  Tous  les  prêtres  ne  furent 
pas  transportés,  sans  doute;  les  pauvres  furent  laissés 
en  Palestine.  Mais  au  milieu  d'une  population  amoin- 
drie et  ruinée,  sans  Temple  et  sans  culte,  ils  ne  pou- 
vaient que   végéter    misérablement.   Il  ne  resta  plus 
en  fonction  dans  le  pays  que  ces  prêtres  improvisés 
en    Samarie   après   la    première    déportation,   et    qui 
alliaient  sacrilègement  le  culte  de  Jéhovah  à  celui  des 
dieux  étrangers.  IV  Reg.,  xvii,  27-41. 

3°  Après  la  captivité.   —  Avec  Zorobabel  revinrent 
en  Palestine  quelques  milliers  de  prêtres,  4289  d'après 

I  Esd..  il,  36-39,  et  II  Esd.,  vu.  39-42.  On  dut  écarter, 
au  moins  provisoirement,  ceux  qui  ne  furent  pas  à 
mi  me  de  fournir  la  preuve  de  leur  descendance  aaro- 
nique.  II  Esd.,  n,  61-63.  Les  prêtres  reprirent  l'exer- 
cice de  leurs  fonctions,  selon  la  loi  de  Moïse,  I  Esd., 
m,  2;  vi,  18;  II  Esd.,  vm,  14;  x,  29,  34,  et  partici- 
pèrent à  tout  ce  qui  se  fit  pour  la  reconstruction  du 
Temple  et  des  murs  de  la  ville.  Les  prêtres  revenus  de 
l'exil  appartenaient  à  quatre  familles,  I  Esd.,  H,  36-38; 

II  Esd.,  vu,  39-42.  Ces  quatre  familles  comprenaient 
vingt-deux  chefs  au  temps  du  grand  -  prêtre  Josué, 
II  Esd.,  xn,  1-7,  et  du  grand-prêtre  Joakim,  II  Esd., 
xn,  12-21.  A  l'époque  d'Esdras,  des  Israélites,  et  même 
des  prêtres  et  des  lévites  prirent  pour  épouses  des 
étrangères,  contrairement  à  la  Loi.   I  Esd.,  ix,  1,  2. 


Dix-sept  prêtres,  dont  les  noms  sont  cités,  s'étaient 
rendus  coupables  de  cette  infraction;  ils  jurèrent  de 
renvoyer  leurs  femmes  et  d'expier  leur  faute.  I  Esd., 
x,  18-22.  Plus  tard,  Néhémie  chassa  le  fils  même  du 
grand-prêtre,  qui  s'était  allié  à  une  étrangère.  II  Esd., 
XIII,  28.  Il  s'en  faut  que  tout  fût  parfait  parmi  les 
prêtres  de  ce  temps.  Malachie,  i,  6-14,  leur  reproche 
sévèrement  d'offrir  à  l'autel  des  victimes  indignes  de 
Dieu.  Il  leur  annonce  le  châtiment  qui  les  frappera, 
Mal.,  n.  1-9;  m,  2-3,  et  prédit  à  cette  occasion  l'obla- 
tion  pure  qu'un  jour  Dieu  substituera  aux  anciennes 
victimes.  Mal.,  i,  10,  11.  On  comprend  que,  dans  ces 
conditions,  l'influence  religieuse  qu'auraient  pu  exercer 
les  prêtres  ait  passé  peu  à  peu  aux  mains  des  scribes. 
Voir  Scribes.  —  Les  devoirs  envers  le  prêtre  étaient 
néanmoins  rappelés  au  peuple.  Osée,  iv,  4,  avait  com- 
paré les  Israélites  impies  à  «  celui  qui  aurait  un  pro- 
cès avec  le  prêtre  »,  c'est-à-dire  qui  contesterait  ses 
droits  légitimes  au  vrai  prêtre  de  Jéhovah  et  mérite- 
rait ainsi  les  plus  graves  châtiments.  Deut.,  xvn,  12. 
Le  fils  de  Sirach  recommande  de  rendre  aux  ministres 
du  Seigneur  ce  qui  leur  est  dû  : 

Crains  le  Seigneur  de  toute  ton  âme, 
Et  tiens  ses  prêtres  en  grand  honneur. 
Aime  de  toutes  tes  forces  celui  qui  t'a  fait, 
Et  ne  délaisse  pas  ses  ministres. 
Crains  le  Seigneur  et  honore  le  prêtre, 
Donne-lui  sa  part,  comme  il  est  prescrit  : 
La  victime  pour  le  délit  avec  le  don  des  épaules, 
La  sainte  oblation  et  les  prémices  dues  aux  saints. 
Eccli.,    vil,  31-34. 

Il  fait  ensuite  l'éloge  du  grand-prêtre  Simon,  qui 
officiait  si  majestueusement  et  autour  duquel  les  autres 
prêtres  remplissaient  leurs  fonctions  saintes.  EcCli.,  L, 
1-21.  —  Sous  la  domination  des  rois  de  Syrie,  le  prêtre 
Matathias  et  ses  cinq  fils,  Jean,  Simon,  Judas,  Éléazar 
et  Jonathas,  prirent  l'initiative  d'un  soulèvement  na- 
tional pour  délivrer  le  pays  du  joug  étranger  et  réta- 
blir le  culte  de  Jéhovah  dans  sa  splendeur.  I  Mach., 
n,  1-5.  Ils  réussirent  dans  leur  double  entreprise.  Ils 
donnèrent  eux-mêmes  l'exemple  de  l'obéissance  à 
toutes  les  prescriptions  de  la  loi  mosaïque.  Ils  gouver- 
nèrent le  peuple  juif  avec  une  indépendance  complète 
à  partir  de  Simon,  en  l'an  142,  jusqu'à  la  prise  de 
Jérusalem  par  Pompée,  en  l'an  63.  Jonathas,  en  161. 
fut  même  investi  du  souverain  pontificat,  qui  resta 
dans  la  famille  machabéenne  jusqu'en  l'an  37  et  passa 
successivement  à  huit  grands-prêtres  après  Jonathas. 
Voir  Grand-prêtre,  t.  m,  col.  306;  Maciiabées,  t.  iv, 
col.  480-487.  Il  est  probable  qu'un  certain  nombre  de 
prêtres  se  laissèrent  entraîner  aux  pratiques  idolà- 
triques  mises  à  la  mode  par  les  rois  de  Syrie;  car  il 
est  noté  que,  pour  purifier  le  sanctuaire,  Judas  Macha- 
bée  «  choisit  des  prêtres  sans  défauts,  attachés  à  la 
loi  de  Dieu  ».  I  Mach.,  IV,  42.  Les  prêtres  prenaient 
part  aux  luttes  soutenues  par  leurs  chefs,  et  plusieurs 
périrent  dans  les  combats,  parfois  par  leur  propre 
imprudence.  I  Mach.,  v,  67.  Quand  Nicanor  menaça  les 
prêtres  de  détruira  le  Temple  s'ils  ne  lui  livraient 
Judas  Machabée,  ceux-ci  en  appelèrent  à  Dieu  pour  les 
secourir  et  ils  furent  exaucés;  II  Mach.,  xiv,  31-34.  — 
Vers  l'an  160,  Onias  IV,  fils  du  grand-prêtre  Onias  III, 
éleva  un  temple  à  Léontopolis,  en  Egypte,  et,  sous  sa 
direction,  des  prêtres  aaroniques  y  célébrèrent  le  culte 
suivant  les  règles  mosaïques,  tout  en  se  maintenant 
en  relations  avec  le  sacerdoce  de  Jérusalem.  Cette  en- 
treprise ne  fut  pas  bien  vue  des  Juifs  de  Palestine. 
Voir  Onias  IV,  t.  iv,  col.  1818-1819. 

4»  A  partir  de  Jésus-Christ.  —  Quand  Jean-Baptiste 
commença  sa  prédication,  on  envoya  de  Jérusalem  des 
prêtres  et  des  lévites  pharisiens  pour  lui  demander  ce 
qu'il  était.  Joa.,  i,  19,  24.  C'étaient  des  représentants 
du  sanhédrin,  exerçant  ainsi  le  droit  qu'il  avait  de  sur- 


659 


PRETRE 


660 


veiller  les  manifestations  religieuses  qui  se  produi- 
saient dans  le  pays.  —  Xotre-Seigneur  lui-même 
semble  avoir  eu  peu  de  rapports  avec  les  prêtres.  Il 
reconnaît  cependant  la  légitimité  de  leur  ministère 
dans  le  Temple,  Mat  th.,  xn,  4,  5,  et  renvoie  à  leur 
examen  le  lépreux  qu'il  a  guéri.  Matin.,  vin,  4;  Marc, 
I,  44;  Luc,  v,  li.  —  Depuis  que  le  pontificat  suprême 
était  tombe  sous  la  dépendance  absolue  du  pouvoir 
civil,  qui  se  réservait  la  nomination  du  grand-prêtre, 
c'est-à-dire  depuis  Hérode,  le  haut  sacerdoce  se  recru- 
tait dans  la  secte  des  sadducéens,  qui  ne  croyaient  pas 
à  la  vie  future  et  ne  songeaient  qu'aux  honneurs,  aux 
richesses  et  à  la  jouissance.  Parmi  les  descendants 
d'Aaron,  les  riches  seuls  étaient  admis  à  exercer  leurs 
fonctions  dans  le  Temple,  avec  la  faculté  de  les  exploi- 
ter conformément  à  leurs  intérêts.  Les  autres  prêtres 
vivaient  dans  l'abandon,  la  pauvreté  et  l'ignorance. 
Des  grands-prêtres  en  vinrent  à  faire  piller  par  leurs 
serviteurs  les  greniers  contenant  des  dîmes  destinées 
aux  prêtres,  si  bien  que  ceux-ci  mouraient  de  misère. 
Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XX,  VIII,  8;  ix.  2.  Ceux  qui 
jouissaient  de  la  faveur  des  grands  n'en  avaient  pas 
plus  d'inlluence  morale  pour  cela.  Ils  ne  se  préoccu- 
paient plus  que  de  la  forme  matérielle  du  culte,  surtout 
dans  ce  qu'il  avait  d'honorifique  et  de  lucratif.  Il  n'est 
pas  surprenant  que,  dans  ces  conditions,  leur  inlluence 
morale  fût  à  peu  près  nulle  sur  le  peuple.  Déjà  même 
les  meilleurs  prêtres  aaroniques  eussent  été  impuis- 
sants à  procurer  le  salut  de  leur  nation  et  à  travailler 
à  celui  de  l'humanité,  parce  que  la  religion  qu  ils  re- 
présentaient n'avait  pas  grâce  pour  assurer  ce  bien  et 
d'ailleurs  touchait  à  sa  fin.  Notre-Seigneur  le  donne  à 
comprendre  dans  sa  parabole  du  bon  Samaritain,  qui 
représente  le  prêtre  de  l'ancienne  loi  passant  auprès 
du  malheureux  blessé  et  ne  faisant  rien  pour  lui,  par 
impuissance  plus  encore  que  par  mauvais  vouloir, 
Luc,  x,  31.  Beaucoup  de  ces  pauvres  prêtres  s'en  ren- 
dirent compte;  la  grâce  aidant,  une  multitude  d'entre 
eux  obéirent  à  la  foi  chrétienne.  Act.,  VI,  7.  —  Bien 
que  les  prêtres  influents  au  point  de  vue  politique 
appartinssent  à  la  secte  sadducéenne.  Act.,  v,  17; 
cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XX,  ix,  1,  il  s'en  faut  cepen- 
dant qu'on  ait  le  droit  d'identifier  le  sacerdoce  avec  le 
sadducéisme.  Les  principaux  seuls  se  rattachaient  à  la 
secte:  beaucoup  d'autres  étaient  pharisiens,  et  les  pha- 
risiens défendaient  avec  zèle  les  droits  légitimes  du 
sacerdoce  et  lui  reconnaissaient  la  première  place  dans 
la  théocratie.  Cf.  Chagiga,  u,  7;  Horayoth,  m,  8; 
Gitlin,  v,  S.  Leur  opposition  ne  visait  que  les  prêtres 
inféodés  au  sadducéisme  et  au  pouvoir  civil,  étranger 
à  la  nation.  Au  temps  des  Machabées,  la  hiérarchie 
sociale  se  composait  de  quatre  éléments  :  le  grand- 
prêtre,  le  sénat  ou  le  conseil  des  anciens,  les  prêtres 
i  !  le  peuple.  I  Mach.,  xn,-6;  xiv.  20.  A  l'époque  évan- 
gélique,  les  prêtres  n'étaient  pas  déchus  de  ce  rang, 
l'n  certain  nombre  d'entre  eux  faisaient  même  partie 
du  sanhédrin,  soit  dans  la  classe  des  grands-prêtres, 
soit  dans  celle  des  anciens,  soit  dans  celle  des  scribes. 
Voir  S.\mii::drin.  Dans  les  synagogues,  les  prêtres 
avaient  la  préséance;  ils  étaient  appelés  les  premiers 
à  faire  la  lecture.  Cf.  Gitlin,  v,  8,  —  Le  sacerdoce 
judaïque,  aboli  en  droit  par  la  mort  de  Jésus-Christ, 
le  fut  en  fait  par  la  ruine  définitive  du  Temple.  On 
voulut  croire  d'abord  que  le  désastre  n'était  que  pro- 
visoire, comme  au  temps  des  Chaldéens.  Les  doc- 
teurs suspendirent  donc  le  paiement  des  redevances 
qui  avaient  pour  objet  l'entretien  du  Temple  et  l'exer- 
cice public  du  culte;  mais  les  autres  furent  maintenues 
et  on  les  acquitta,  en  général,  là  où  se  trouvaient  des 
i  rêtres.  Cf.  Schekalim,  vin,  s.  Mais  il  fallut  ensuite 
se  rendre  à  l'évidence.  Les  prêtres  axaient  perdu  leur 
raison  d'être,  puisqu'il  n'y  avait  plus  de  fonctions  ri- 
tuelles à  remplir.  Us  fuient  remplacés  par  les  docteurs 


ou  rabbins,  qui  n'avaient  pas  besoin  de  temple  pour 
une  religion  privée  de  sacrifice  et  réduite  au  service 
des  synagogues. 

IV.  Sacerdoce  chrétien.  —  1°  Sacerdoce  de  Jésus- 
Christ.  —  1.  Jésus-Christ  a  été  le  prêtre  par  excellence 
de  la  loi  nouvelle.  Il  a  été  appelé  à  cette  fonction  par 
Dieu  même,  qui  déjà  s'était  réservé  d'appeler,  en  la 
personne  d'Aaron,  les  prêtres  de  la  loi  ancienne,  Heb., 
v,  4,  5.  Cet  appel  a  eu  lieu  quand  Dieu  lui  a  dit  :  ■  Tu 
es  mon  Fils,  je  l'ai  engendré  aujourd'hui.  »  Ps.  Il,  7. 
et  encore  :  «  Tu  es  prêtre  pour  toujours  selon  l'ordre 
de  Melchisédech.  »  Ps.  ex  (cix),  4.  —  Xotre-Seigneur 
n'est  pas  de  la  tribu  de  Lévi,  mais  de  celle  de  Juda. 
Son  sacerdoce  ne  se  rattache  donc  pas  à  celui  d'Aaron. 
Il  est  prêtre  selon  l'ordre  de  Melchisédech.  c'est-à-dire 
à  la  manière  de  ce  «  roi  de  justice  »  et  «  roi  de  paix  >\ 
dont  l'Écriture  n'indique  pas  la  généalogie,  mais  auqui  1 
Abraham,  père  de  toute  la  race  lévitique,  rend  lui- 
même  hommage  et  donne  la  dime.  Le  sacerdoce  de 
Jésus-Christ  ne  dérive  donc  pas  de  celui  d'Aaron;  il  a 
sur  lui  une  supériorité  figurée  déjà  par  les  devoirs 
qu'Abraham  a  rendus  à  Melchisédech.  Heb..  vu,  1-7.  — 
Le  sacerdoce aaronique  a  été  établi  sans  serment,  Dieu 
ne  lui  ayant  jamais  promis  l'exercice  perpétuel  de  ses 
fonctions;  aussi  les  prêtres  se  succédaient-ils  les  uns 
aux  autres  parce  que  la  mort  les  arrêtait.  Le  sacerdoce 
de  Jésus-Christ  a  été  établi  avec  serment  :  <  Le  Sei- 
gneur l'a  juré,  il  ne  s'en  repentira  pas  :  Tu  es  prêtre 
pour  toujours.  »  De  plus,  il  demeure  éternellement  et 
ne  se  transmet  point,  parce  que  celui  qui  le  possède 
est  toujours  vivant.  Heb.,  vu,  20-25.  —  Les  prêtres  lévi- 
tiques  étaient  sujets  au  péché;  se  souvenant  de  leur 
faiblesse,  ils  étaient  capables  de  se  montrer  indulgents 
envers  les  autres,  mais  devaient  nécessairement  com- 
mencer par  offrir  des  sacrifices  pour  eux-mêmes.  Jésus- 
Christ  est  un  grand-prêtre  «  saint,  innocent,  suis 
tache,  séparé  des  pécheurs,  élevé  au-dessus  des  cieux  ». 
Il  n'a  donc  pas  besoin  d'offrir  de  victimes  pour  lui- 
même;  mais  il  s'est  olfert  pour  les  péchés  du  peuple 
et  a  été  exaucé  pour  sa  piété.  Heb.,  v,  1-9;  vu,  26-28. 
—  Les  prêtres  anciens  exerçaient  leur  ministère  dans 
des  sanctuaires  faits  de  main  d'homme,  le  Tabernacle 
et  le  Temple;  il  y  avait  là  un  Saint  des  saints  caché 
par  un  voile,  et  de  multiples  prescriptions  charnelles 
auxquelles  les  prêtres  étaient  assujettis.  Le  ministère 
sacerdotal  de  Jésus-Christ,  après  avoir  commencé  sur 
terre,  s'exerce  maintenant  g  à  la  droite  du  trône  de  la 
majesté,  dans  les  cieux  »,  où  est  assis  Jésus-Christ, 
«  comme  ministre  du  sanctuaire  et  du  vrai  tabernacle, 
qui  a  été  dressé  par  le  Seigneur,  et  non  par  un  homme,  » 
et  il  y  est  «  toujours  vivant  pour  intercéder  o  en  faveur 
des  hommes.  Heb.,  vu,  25;  vin,  1.  2;  ix,  1-11.  —  Les 
sacrifices  des  anciens  prêtres  se  multipliaient  indéfini- 
ment, parce  qu'ils  étaient  inefficaces  et  ne  pouvaient 
procurer  que  la  pureté  de  la  chair.  Le  sacrifice  de 
Jésus-Christ  est  unique,  parce  qu'il  purifie  les  âmes 
elles-mêmes,  aboli)  le  péché  une  fois  pour  toutes,  a  une 
vertu  toute  puissante  et  assure  le  salut  éternel  à  ceux 
qui  veulent  en  profiter.  Heb..  v.  Il;  vu,  25;  IX,  12-14. 
Jésus-Christ  a  donc  été  revêtu  d'un  véritable  sacer- 
doce, supérieur  au  sacerdoce  lévitique  par  son  origine, 
son  unité,  sa  sainteté  et  son  efficacité.  —  2.  «  Tout 
grand-prêtre,  pris  d'entre  les  hommes,  est  établi  poul- 
ies hommes  en  ce  qui  regarde  le  culte  de  Dieu,  afin 
d'offrir  des  oblations  et  des  sacrifices  pour  les  péchés.  ■ 
Heb.,  v,  I.  Jésus-Chri>t  n'a  offerl  qu'un  seul  sacrifice 
«  par  lequel  il  a  procuré-  la  perfection  pour  toujours  à 
ceux  qui  sont  sanctifiés.  »  Heb..  x,  14.  Ce  sacrifice  est 
celui  de  la  croix,  que  le  sacrifice  eucharistique  repré- 
sente et  continue.  Voir  Sacrifice.  Cf.  l'e  Condren, 
Idée  iln  sacerdoce  et  du  sacrifice  de  ./.-'.'.,  Paris,  1858, 
p.  lii-i").  —  '■'>.  Les  Pères  appliquent  à  Jésus-Christ  les 
paroles  du   Psaume  xlv  (xuv),  8  :  «   Le  Seigneur  t'a 


661 


PRETRE 


PRIAPE 


662 


oint  d'une  huile  d'allégresse.  »  Plusieurs  ont  pensé 
que  cette  onction  s'était  faite  au  jour  du  baptême;  il 
est  plus  exact  de  dire,  avec  d'autres,  que  cette  onction 
remonte  au  moment  même  de  l'incarnation  et  que 
Jésus-Christ  a  été  fait  prêtre  en  même  temps  que  fait 
homme.  Cf.  Pétau,  De  incarn.  Verbi,  XI,  ix,  3-14; 
XII,  xi.  1-11. 

2"  Les  prêtres  de  l'Église.  —    1.    Le  sacerdoce    de 
Jésus-Christ  étant  un  sacerdoce  éternel,  qui  ne  se  trans- 
met pas   parce  que  celui  qui  le  possède  est  toujours 
vivant,  il  suit  de  là  que  les  prêtres  de  la   loi  nouvelle 
ne  peuvent  être  que  les  organes  du  prêtre  éternel,  mais 
invisible.  Cf.  S.  Optât,  De  schismate  Donatist.,   v,  3, 
4.  t.  xi,  col.  1051  ;   S.  Augustin,  In  Joa.,  v,  17,  18,  20, 
t.   xxxv,  col.  1423,   etc.  Jésus-Christ   les  prend  où   il 
veut,  en  les  appelant  lui-même  par  une  vocation  inté- 
rieure,  contrôlée   extérieurement  par  le  jugement  de 
l'Eglise.    I    Tim.,    v,  22.  Comme    sa    religion    et  son 
Eglise    sont   établies   pour   tous  les   peuples    et   pour 
tous   les    temps,    il    ne   s'astreint    pas    à   prendre  ses 
prêtres  dans  une  race  spéciale;  il   les   choisit  partout. 
Le  prophète  l'avait  prédit  :  «  Le  temps  est  venu  de  ras- 
sembler  toutes    les    nations    et   toutes    les    langues... 
J'enverrai...  vers  les  îles  lointaines  qui  n'ont  jamais 
entendu  parler  de  moi  et  qui  n'ont  pas  vu  ma  gloire, 
et  ils  publieront  ma  gloire  parmi  les  nations...  Et  j'en 
prendrai  même  parmi  eux  pour  prêtres  et  pour  lévites, 
dit  Jéhovab.  »  Is.,  lxvi,    18-21.  Ainsi  devait  être  pro- 
curé l'accomplissement  de  la  prophétie  de  Malachie,  I, 
11,  annonçant  l'offrande  de  l'encens,  des  sacrifices  et 
de  l'oblation  pure,  en  tous  lieux  parmi  les  nations.  — 
2.  Jésus-Christ  lui-même  a  institué  le  sacerdoce  de  la 
loi   nouvelle.   Il  a   confié  à   ses   Apôtres  le  pouvoir  de 
gouverner  l'Église,  Matth.,  xvi,  19;  xvm,   18,  de  célé- 
brer le  sacrifice  eucharistique,  Luc,  xxn,   19  ;  I  Cor., 
xi,  25,  de  remettre  les  péchés,  Joa.,  xx,  23,  d'enseigner 
et  de  baptiser,  Matth.,  xxxvm,  19,20;  Marc,  xvt,  15; 
Luc,  xxiv,  47,  etc.  Les  Apôtres  ont  exercé  ces  pouvoirs 
et  les  ont  transmis  à  d'autres  par  l'imposition  des  mains. 
I  Tim.,  iv,    14;  il  Tim.,  i,  6.  Voir  Ordination,  t.  iv, 
col.  1853.  De  très  bonne  heure,  il  y  eut  comme  un  dé- 
doublement du    sacerdoce.    Les    Apôtres    eux-mêmes, 
qui  en  étaient  revêtus  dans  sa  plénitude,   instituèrent 
les  diacres,  Act.,   vi,   1-6,  chargés  de  certains   minis- 
tères qu'eux-mêmes  remplissaient  tout    d'abord.  Voir 
Diacre,  t.  h,  col.  1401.  Les  ministres  institués  par  les 
Apôtres  pour  leur  succéder  et  administrer  les  églises 
étaient  appelés  indifféremment  èjikjxôtcoi,    «  surveil- 
lants »,  Phil.,  i,   1,  et  itpsoSvTépoi,  «  anciens  ».  L'an- 
cien   nom    hébraïque,   kohèn,    était  donc    abandonné 
et  remplacé  par  des  noms  grecs  plus  intelligibles  poul- 
ies convertis  du  monde  gréco-romain.  On  laissait  égale- 
ment de  côté  le  nom   grec  iïpE'J;,   que  portaient    les 
prêtres  païens  et  que  gardaient  aussi  les  prêtres  juifs. 
Saint  Paul  disait  encore  de  son  temps  aux  «  prêtres  » 
d'Ephèse,  toÙç  TipEnêuTlpou;  (majores  natu  dans  la  Vul- 
gate),  que  Dieu  les  avait  constitués  «  évèques  »,  iinay.6- 
tiou;,  pour  régir  l'Église  de  Dieu.  Act.,  xx,  17,  28.  Ces 
ministres  gouvernaient   collectivement  les  églises  qui 
leur  avaient  été  confiées  par  les  fondateurs.  Act.,  xiv, 
22;   xx,   17;  Tït.,  i,  5;  I  Pet.,  v,   1-5;  Jacob.,  v,    14; 
Docl  r.    Apost.,    xv,    1.    Mais  cet    ordre  supérieur  ne 
tarda  pas  à  être  dédoublé  à  son  tour.  Dès  le  commen- 
cement du  second  siècle,  d'importantes  églises  sont  gou- 
vernées par  un  chef  unique,  qui  est  appelé  évêque.  Voir 
Évêque,  t.  il,  col.  2121-2126.  On  peut  affirmer  que  cet 
épiscopat  unitaire  a  fonctionné  dès  l'organisation  des 
églises  de  Jérusalem,  de   Rome,   probablement   d'An- 
tioche,  etc.  Cf.   Duchesne,  Hist.  ancienne  de  l'Eglise, 
Paris,  t.  i,  1906,  p.  84-95;  Pourrat,  La  théologie  sacra- 
mentaire,  Paris,  1907,  p.  283-286.  Le  sacerdoce  chrétien 
se  trouva  ainsi,  presque  à  l'origine,  partagé  entre  trois 
ordres,  l'épiscopat.  qui  en  avait  la   plénitude,  le    pres- 


bytérat,  qui  en  exerçait  presque  tous  les  pouvoirs,  mais 
sous  l'autorité  de  l'évèque,  et  le  diaconat,  qui  ne  jouissait 
que  de  pouvoirs  inférieurs  et  restreints.  Cf.  Cône.  Trid., 
Sess.  xxm,  can.  6,  7;  D.  A.  Gréa,  De  l'Église  et  de  sa 
divine    constitution,    Paris,     1885,     p.     271-306.     — 
3.  Saint  Paul  recommande  à  son  disciple  ïimothée  de 
n'imposer  trop  vite  les  mains  à  personne.  I  Tim.,  v,  22. 
Il  faut  en  effet  que  le  sujet  qui  désire  exercer  le  minis- 
tère sacré  et  ses  fonctions  excellentes  soit  examiné  et 
éprouvé  au  préalable,  parce  que  le   ministre  du  Sei- 
gneur doit  se   «  montrer,  dans    le  service   de    Dieu, 
comme  un  homme  éprouvé,  un  ouvrier  qui  n'ait  point 
à  rougir,  dispensant  avec  droiture  la  parole  de  vérité.  » 
II   Tim.,    il,    15.  L'Apôtre  indique  donc    les   qualités 
exigées  du  candidat  à  l'épiscopat  ou  au  sacerdoce.  Il 
faut  qu'il  soit  irréprochable,  qu'il  n'ait  été  marié  qu'une 
fois;  le  célibat  n'était    pas  encore  requis   pour  le  sa- 
cerdoce, que  cette  exigence  eût  alors  rendu  impossible 
à  recruter,  mais  les  secondes   noces  constituaient  un 
obstacle   au    ministère    sacré.     Il    doit     encore    être 
vïifâXto;,   sobrius,  sobre  ou   modéré  dans  ses  désirs, 
prudent,  v.6a\uot,ornalus,  bien  ordonné  (pudique ajoute 
la  Vulgate),  hospitalier,  capable  d'enseigner.  11  ne  doit 
pas  être  adonné  au  vin,  ni  violent,  mais  doux,  paci- 
fique (non  querelleur,    ajoute    la    Vulgate),     désinté- 
ressé, gouvernant  bien  sa   maison,  maintenant  ses  en- 
fants dans  la   soumission  en  toute  gravité,    <t£[j.v6t»];, 
caslihis.  Car  celui  qui  ne  sait  pas  gouverner  sa  maison 
serait  incapable  de  prendre  soin  de  l'Église  de  Dieu. 
Il  ne  faut  pas  non  plus  qu'il  soit  un  nouveau  converti, 
de  peur  que  la  dignité  si  vite  obtenue  ne  le  porte  à  un 
damnable  orgueil.  Il  est  enfin  nécessaire  qu'il  jouisse 
de  la  considération  de  ceux  du  dehors,  afin  de  ne  pas 
tomber   dans  l'opprobre  et  de  là  dans  les    pièges  du 
diable.  I  Tim.,    m,  1-7.  Saint  Paul  reproduit  un  pro- 
gramme analogue  à  l'usage  de  Tite.  Il  appelle  l'évèque 
ou  le   prêtre  ©eoû  oîxovA|ioç,    «  administrateur  de  la 
maison  de    Dieu  »,  Dei  dispensator.  Il  veut   surtout 
qu'il  soit  «  fermement  attaché  à  la  doctrine,  afin  d'être 
en  état  d'exhorter  selon  la  saine  doctrine  et  de  réfuter 
ceux  qui  la  contredisent   ».   Th.,   i,  0-9.  —   L'Apôtre 
supplie  Timothée  de   faire  l'œuvre  d'un  prédicateur  de 
l'Évangile  et  d'être  tout  entier  à  son  ministère,  gtaxo- 
via.    II   Tim..    iv,   5.    La   même    recommandation  est 
adressée  à  Archippe,  de  Colosses.  Col.,  IV,   17.  —  Le 
prêtre  de  la  loi  nouvelle,  comme  celui  de  l'ancienne,  a 
le  droit  de  vivre  de  son   ministère.   I  Cor.,   ix,  4-12; 
I  Tim.,  v,  17,  18.  —  Il  se  peut  qu'il  ne  soit  pas;toujours 
à  son  devoir.  On  ne  doit  accueillir  d'accusation  contre 
lui  que   sur  la  déposition  de  deux   ou  trois  témoins. 
S'il  est  coupable,  on  le  reprendra  publiquement,  afin 
d'inspirer  de  la  crainte  aux  autres,  mais  on  ne  devra 
agir  ni  par  prévention,  ni  par  faveur.  I  Tim.,  v,  19-21. 
—  Saint   Jean,  III  Joa.,  9,  signale  un  certain  Diotré- 
phès  qui  exerçait  dans  une  église  une  orgueilleuse  et 
intolérante  autorité.  Il  écrit  aussi  aux   «  anges   »  des 
sept  églises,  c'est-à-dire  à  leurs  chefs  spirituels,  pour 
leur  rappeler  leurs  devoirs,  les  féliciter  ou  les  blâmer, 
selon  qu'ils  le   méritent.  Apoc,  II,  i-m,  22. 

Sur  le  sacerdoce  attribué    par   certains   textes    aux 
simples  fidèles,  voir  Ordre,  t.  iv,  col.  1855. 

H.  Lesltre. 
PRIAPE,  dieu  de  la  fécondité  des  champs  dans  la 
mythologie  grecque  et  latine.  On  le  faisait  naître  de  Bac- 
chus  et  de  Vénus  et  l'on  plaçait  ses  statues  de  forme 
indécente  dans  les  jardins.  On  lui  sacrifiait  des  boucs 
et  des  ânes.  Ses  fêtes  s'appelaient  priapées.  On  l'hono- 
rait particulièrement  à  Lampsaque.  Il  n'est  pas  nommé 
dans  le  texte  original  des  Écritures,  mais  saint  Jérôme 
a  traduit  par  son  nom  le  mot  hébreu  >ni/lését, 
III  Reg.,  xv,  43;  II  Par.,  xv,  16,  voir  Idole,  m,  35", 
t.  m,  col.  825,  parce  que  tnifléséf  désigne,  d'après  le 
contexte,  un    objet  idolâtrique  obscène   en  l'honneur 


663 


PRIAPE   —    PRIÈRE 


664 


d'Astarthé  que  la  reine  Maacha  honorait  et  faisait  ho- 
norer par  un  culte  impur.  Saint  Jérôme  l'a  rendu  par 
l'riape  pour  donner  à  ses  lecteurs  latins  l'idée  de  ce 
qu'était  cette  sorte  d'idole.  Elle  était  en  bois  et  le  roi 
Asa,  fils  ou  plutôt  petit-fils  de  Maacha,  la  fit  brûler 
dans  le  torrent  de  Cédron.  Voir  Maacha.  t.  IV,  col.  465. 

PRICE  John,  en  latin  Pricœus,  savant  anglais,  né 
vers  1600,  mort  à  Rome  en  1676.  Il  était  né  de  parents 
protestants  et  fut  élevé  à  Oxford.  Après  avoir  achevé 
ses  études,  il  se  convertit  au  catholicisme  et  fut  obligé 
de  quitter  l'Angleterre  pendant  les  guerres  civiles. 
Après  avoir  vécu  quelque  temps  à  Paris,  il  alla  s'éta- 
blir à  Florence  et  devint  ensuite  professeur  de  grec  à 
Pise.  Il  se  retira  finalement  à  Rome  au  couvent  des 
Augustins  où  il  mourut.  11  avait  une  connaissance 
étendue  des  littératures  classiques  et  il  en  lit  un  usage 
utile  pour  l'explication  des  Saintes  Ecritures  par  des 
notes  courtes  mais  judicieuses.  On  a  de  lui  :  i\[attlixus 
ex  Sacra  Pagina,  sanclis  Palribus,  etc..  illustratus, 
in-8»,  Paris,  16i6;  Adnolaliones  in  Epistolam  Jacobi, 
in-8»,  1646;  Acta  Apostolorum  ex  Sacra  Pagina,  San- 
ctis  Patribus,  etc.,  illustrala,  in-8»,  Paris,  16i7;  Com- 
mentarii  in  varios  Novi  Testament!  libros;  liis  acces- 
serunt  Adnotationes  in  Psalnwrum  Uin-inn,  in-f". 
Londres,  1600,  et  dans  les  Crilici  sacri,  t.  v,  824, 
p.  362.  Voir  Orme,  Bibliotheca  biblica,  1824,  p.  362; 
S.  Lee,  Dictionary  of  national  Biograpliy,  t.  xlvi, 
1896,  p.  330. 

1.  PRIÈRE  (hébreu  :  teftllâh,  tehinini.lt;  cbaldéen  : 
bâ'v  ;  Septante  :  fjyj,,  c,ir,<jiz,  TipoTcir/jr,  ;  Vulgate  : 
oratio,  supplicalio,  preces),  acte  par  lequel  l'homme 
s'adresse  à  Dieu  pour  lui  rendre  hommage  ou  solliciter 
sa  bienveillance.  —  Pour  les  Hébreux,  prier  c'est  sur- 
tout »  invoquer  le  nom  de  Jéhovah  »,  qâra  beSêm 
yehovdh,  êirixa>6Ï<r8ai  t'o  ovo|ia  xupfou  to0  ÔeoO.  invocare 
nom  en  Domini.  Comme  habituellement  le  nom  de 
Dieu  se  prend  pour  Dieu  lui-même,  1  expression  hé- 
brai  [ue  revient  à  signifier  «  invoquer  Dieu  »,  l'appeler 
à  son  aide  ou  le  nommer  pour  le  louer.  Gen.,  îv,  26; 
xn,  8;  Deut.,  xxxn,  3;  Ps.  i.xxix  (i.xxvm),  6;  xcix 
(xcviu),  6;  cv  (Civ),  1;  Is.,  i.xiv,  7;  Jer..  x.  25;  Lam., 
m,  55;  Soph..  III,  9;  etc. 

I.  Nature  de  la  prière.  —  1°  Son  caractère  instinctif. 
Rien  ne  parait  plus  naturel  à  l'homme  que  de  tourner 
les  yeux  vers  une  puissance  supérieure  pour  l'appeler 
à  son  aide.  De  quelque  nom  qu'il  désigne  cette  puis- 
sance, il  l'invoque,  parce  que  d'elle  il  attend  des  biens 
ou  redoute  des  maux.  C'est  là  un  fait  qui  a  été  constaté 
chez  tous  les  peuples  de  tous  les  temps.  Cf.  A.  Bros, 
La  religion  des  peuples  non  civilisés,  Paris,  1907, 
p. 276-304.  Au  commencement  de  la  Bible, la  prière  n'est 
pas  mentionnée  dans  l'histoire  des  premiers  parents. 
Ce  silence  semble  indiquer  qu'elle  a  gravement  manqué, 
soit  immédiatement  avant  la  chute,  pour  appeler  le  se- 
cours de  Dieu  contre  le  tentateur,  soit  immédiatement 
après,  pour  exprimer  le  repentir.  .Mais  les  rapports  dans 
lesquels  Adam  et  Eve  ont  tout  d'abord  été  avec  Dieu  ne 
se  conçoivent  pas  sans  la  prière,  c'est-à-dire  sans  l'ex- 
pression de  pensées,  de  sentiments  et  de  désirs  ma- 
nifestés à  Dieu  dans  le  langage  de  l'homme.  Cette 
expression  est  même  sj  impérieusement  commandée  à 
l'homme  par  la  conscience  qu'il  a  de  sa  dépendance 
vis-à-vis  d'un  auteur  et  d'un  maître,  qu'elle  jaillit  ins- 
tinctivemi  nt  de  son  âme.  Des  lors,  la  prière  ne  résulte 
pas  d'une  institution  positive;  elle  est  d'ordre  naturel, 
et  la  Bible  n'avait  pas  à  en  enregistrer  le  précepte. 
A  la  seconde  génération  après  Adam,  Knos  commence  à 
invoquer  le  nom  de  Jéhovah.  Gen.,  iv,  26.  Quel  que 
soit  le  sens  véritable  de  ces  paroles,  elles  n'en 
marqiienl  pas  moins  une  accentuation  et  un  progrès 
dans  l'idée  et  dans  la  pratique  de   la   prière.  Celle-ci 


est  en  pleine  vigueur  sous  Noé,  puisque  ce  patriarche 
oflre  un  sacrifice  avec  un  rite  déjà  ancien,  et  que  le 
sacrifice  n'est  qu'une  prière  en  action.  Gen.,  vin,  20. 
Par  la  suite,  si  haut  qu'on  remonte  vers  les  origines 
des  anciens  peuples,  on  rencontre  toujours  des  dieux, 
un  culte,  des  sacrifices,  institutions  inséparables  de  la 
prière.  Cf.  Sap.,  XIII,  2,  10,  17-19.  La  prière  se  trompe 
souvent  dans  la  désignation  de  l'être  auquel  elle 
s'adresse,  mais  elle  répond  à  un  besoin  instinctif  que 
■  ressent  chaque  conscience  et  qui  se  constate  chez  tous 
les  hommes. 

2"  Sa  dépendance  de  l'idée  de  Dieu.  —  L'idée  que 
chaque  peuple  se  fait  de  Dieu  détermine  nécessaire- 
ment la  manière  dont  il  le  prie.  A  mesure  que  cette 
idée  se  déforme  chez  les  peuples  de  l'antiquité,  la 
prière  passe  de  plus  en  plus  au  pur  formalisme.  De 
même  que  les  dieux  sont  soumis  à  une  sorte  de  néces- 
sité inéluctable  qui  limite  leur  bon  plaisir,  ainsi  la 
prière  doit  s'accommoder  servilement  à  des  règles  exté- 
rieures dont  la  négligence  ruine  toute  possibilité  de 
crédit  auprès  de  divinités  plus  ou  moins  soumises  à  la 
volonté  aveugle  du  destin.  Il  en  est  ainsi  chez  les 
Egyptiens.  De  multiples  et  impérieuses  formalités 
s'imposaient,  comme  condition  indispensable,  à  celui 
qui  voulait  obtenir  la  faveur  du  dieu.  De  plus,  g  les 
formules  qui  accompagnaient  chacun  des  actes  du  sa- 
crificateur comprenaient  un  nombre  déterminé  de 
mots,  dont  les  séquences  et  les  harmonies  ne  pouvaient 
être  modifiées  en  quoi  que  ce  soit,  ni  par  le  dieu  lui- 
même,  sous  peine  de  perdre  leur  efficacité...  Une  note 
fausse,  un  désaccord  entre  la  succession  des  gestes  et 
l'émission  des  paroles  sacramentelles,  une  hésitation, 
une  gaucherie  dans  l'accomplissement  d'un  seul  rite 
et  le  sacrifice  était  nul.  o  Maspero,  Histoire  ancienne, 
t.  i,  p.  124.  En  Babylonie  se  faisait  sentir  le  même 
asservissement  aux  riti-s.  Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne, 
t.  i,  p.  704,  705;  Fr.  Martin,  Textes  religieuse  assyriens 
et  babyloniens,  Paris,  1903,  p.  xx-xxvii.  Le  formalisme 
n'est  pas  moins  outré  dans  la  religion  de  la  Grèce  et 
surtout  de  Rome.  «  11  ne  suffit  pas  de  connaître  les 
attributs  du  dieu  qu'on  veut  prier,  il  est  bon  de  lui 
donner  son  nom  véritable,  sans  quoi  il  serait  capable 
de  ne  pas  entendre...  Même  quand  on  invoque  le  plus 
grand  d'entre  eux,  on  lui  dit  :  Puissant  Jupiter  ou 
quel  que  soit  le  nom  que  tu  préfères.  Le  nom  du  dieu 
trouvé,  il  faut  savoir  les  termes  exacts  de  la  prière 
qu'il  convient  de  réciter...  Ces  prières  sont  souvent 
très  prolixes.  Le  Romain  qui  prie  a  toujours  peur  de 
mal  exprimer  sa  pensée;  il  a  sein  de  répéter  plusieurs 
fois  les  choses  pour  être  parfaitement  compris...  Quant 
aux  dispositions  de  l'âme  qu'il  faut  apporter  à  la 
prière,  la  religion  romaine  ne  s'en  occupe  pas;  elle 
s'arrête  aux  pratiques.  Pour  elle,  les  gens  les  plus  reli- 
gieux sont  ceux  qui  connaissent  le  mieux  les  rites.  » 
G.  Boissier,  La  religion  romaine,  1884,  t.  i,  p.  12-15; 
Dôllinger,  Paganisme  et  judaïsme,  trad.  J.  de  P., 
Bruxelles,  1858,  I.  i,  p.  306-311;  t.  m,  p.  112,  113; 
Fustel  de  Coulanges,  I.a  cité  antique,  Paris,  7e  édit., 
p.  194-197.  —  Il  y  a  un  abime  entre  cette  conception 
mécanique  de  la  prière  et  l'idée  que  nous  en  donne  la 
Bible.  Le  premier  exemple  de  prière  un  peu  étendue 
qu'elle  nous  fournit  est  le  dialogue  qu'Abraham  engage 
avec  Dieu  au  sujet  de  Sodome.  Gen.,  xvm,  16-32.  Le 
Dieu  d'Abraham  n'est  pas  une  entité  rigide,  inaccessible 
à  tout  sentiment  désintéresse  de  bonté  et  de  compas- 
sion et  liée  d'ailleurs  par  un  inéluctable  destin.  C'est 
un  père  du  genre  humain,  qui  traite  Abraham  en  ami, 
ne  lui  révèle  les  desseins  de  sa  justice  que  pour  pro- 
voquer son  intercession,  et  exauce  ses  prières  succes- 
sives avec  une  telle  condescendance  que  celui  qui  sup* 
plie  s'arrête  plus  tôt  que  celui  qui  exauce.  Les  autres 
prières  bibliques  procèdent  toutes  de  ce  même  esprit. 
L'Israélite  sait  qu'il  parle  à    un  Dieu  attentif,  bon,  mi- 


6G5 


PRIERE 


660 


séricordieux.  généreux,  patient,  indifférent  aux  for- 
mules et  aux  gestes,  mais  exigeant  sur  les  sentiments 
du  cteur.  Sans  doute,  un  jour,  les  pharisiens  étendront 
leur  formalisme  aux  règles  de  la  prière  elle-même  : 
mais  Xotre-Seigneur  viendra  bientôt  pour  détruire 
leur  œuvre  néfaste  et  rendre  à  la  prière  de  l'homme 
son  caractère  d'appel  simple,  naturel,  cordial  et  con- 
fiant de  la  créature  au  Créateur  bon  et  puissant,  de 
l'enfant  à  son  Père  des  eieux.  Aussi  n'est-il  pas  éton- 
nant que  les  prières  bibliques,  les  Psaumes  en  parti- 
culier, s'inspirant  de  sentiments  si  vrais  et  en  même 
temps  si  élevés,  aient  pu  traverser  les  âges  et  soient 
devenues,  même  après  le  passage  du  Sauveur,  les 
prières  de  l'humanité. 

3°  Ses  fitis.  —  Chez  les  anciens  peuples  polythéistes, 
la  prière,  à  peu  d'exceptions  près,  était  devenue  une 
formalité  destinée  à  procurer  les  biens  ou  à  écarter  les 
maux  d'ordre  temporel.  Cicéron.  Nal.  deor.,  m, 30, pou- 
vait dire  :  «  Jamais  personne  n'a  considéré  la  vertu 
comme  un  présent  de  la  divinité.  On  appelle  Jupiter  le 
dieu  le  meilleur  et  le  plus  grand,  non  parce  qu'il  nous 
rend  justes,  sobres  et  sages,  mais  parce  qu'il  nous 
donne  la  santé,  le  bonheur,  la  fortune  et  l'abondance.  » 
Sans  doute,  les  Israélites,  comme  tous  les  autres 
hommes,  ont  été  plus  sensibles  aux  biens  temporels 
qu'aux  avantages  spirituels,  et  les  premiers  ont  été 
fréquemment  appelés  par  leurs  prières.  Mais,  chez  eux, 
la  prière  intéressée  n'a  pas  été  exclusive  des  autres.  La 
Sainte  Ecriture  renferme  un  grand  nombre  de  prières 
qui  ont  des  fins  plus  relevées  :  1.  La  prière  latreutique 
ou  d'adoration.  Ce  genre  de  prière  se  reconnaît  dans 
les  Psaumes  vm.  xxiv  ixxiii),xcxni  (xcxin.  xcv  (xerv), 
XCVlt  (zevi),  xcix  (xcvm),  cxiii  (cxni.  etc.:  dans  le 
cantique  des  trois  jeunes  gens,  Dan.,  III,  52-90;  dans 
les  acclamations  d'Isaïe,  VI,  3,  et  de  saint  Jean,  Apoc, 
vu,  12;  xi.  17-18;  xv.  3-4;  xvi,  5-7.  etc.  —  2.  La 
prière  eucharistique  ou  d'actions  de  grâces.  Elle  est 
fréquente  dans  la  Bible.  A  ce  genre  appartiennent  le 
cantique  de  la  mer  Rouge,  Exod.,  xv,  1-18;  le  cantique 
d'Anne,  I  Reg..  Il,  1-10;  celui  de  David,  II  Reg.,  XXII, 
2-51  :  les  Psaumes  xxxiv  (xxxnn.  xi.  (xxxix),  lxx(lxix), 
cxxiv  jcxxiin,  etc.:  les  cantiques  de  Tobie,  xm,  1-23, 
et  de  Judith,  xvi,  2-21;  ceux  de  Marie,  Luc,  i,  46-55, 
et  de  Zacharie,  Luc,  i.  6S-79,  etc.  —  3.  La  prière 
impétratoire  ou  de  demande.  La  prière  pour  demander 
les  biens  d'ordre  temporel  se  rencontre  continuelle- 
ment, surtout  dans  l'Ancien  Testament.  L'Évangile  lui- 
même  enregistre  les  nombreuses  requêtes  de  malheu- 
reux qui  réclament  leur  guérison  ou  celle  de  leurs 
proches.  Ces  demandes  sont  conformes  à  l'ordre  de  la 
Providence,  et  la  meilleure  preuve  en  est  qu'elles  sont 
très  souvent  exaucées.  Mais  les  biens  spirituels  sont 
aussi  l'objet  de  la  prière.  Ainsi  Salomon  demande  la 
sagesse  et  l'intelligence,  II  Par.,  i,  10;  des  Psalmistes 
prient  pour  «  connaître  le  sentier  de  la  vie  »,  Ps.  xvi 
(xv),  11,  pour  revoir  bientôt  le  sanctuaire  du  Dieu 
qu'ils  aiment,  Ps.  xlii  (xli),  2,  3,  pour  obtenir  «  un 
cœur  pur  »  et  «  un  esprit  ferme  »,  Ps.  i.n  (i.n,  12. pour 
que  Dieu  donne  au  roi  l'esprit  de  justice  et  d'équité, 
Ps.  lxxii  ilxxd,  1,  2,  pour  qu'il  accorde  la  connais- 
sance et  l'amour  de  sa  loi,  Ps.  exix  (cxvm),  etc.;  on 
lieu  d'envoyer  du  ciel  sa  sagesse,  afin  que  l'on 
connaisse  ce  qui  lui  est  agréable.  Sap.,  ix,  4.  10.  Quand 
ils  conjurent  si  souvent  le  Seigneur  d'envoyer  le  Messie, 
les  prophètes  demandent  le  bien  spirituel  par  excel- 
lence, celui  qui  doit  être  pour  l'humanité  la  source  de 
tous  les  autres.  Le  Nouveau  Testament  abonde  en 
requêtes  spirituelles,  celles  du  don  de  Dieu.  Joa.,  iv. 
10  !".  du  pain  de  vie.  Joa.,  VI,  34,  de  l'accroissement 
de  la  foi,  Marc,  tx,23;  Luc,  xvn,  5,  de  la  vue  du  Père, 
Joa.,  xiv,  8,  et  toutes  colles  qui  sont  formulées  dans 
les  Actes  des  Apôtres  ou  dans  leurs  Épitres.  Ces  re- 
quêtes répondent    à   l'invitation  si   formelle  du  divin 


Maitre  qui  a  recommandé  de  «  chercher  d'abord  le 
royaume  de  Dieu  et  sa  justice  ».  Matth..  vi,  33.  — 
4.  La  prière  propitiatoire  ou  de  repentir.  Elle  est  re- 
présentée par  les  Psaumes  de  pénitence,  vi,  xxxu 
(xxxi),  xxxvm  (xxxvn).  u  (t.),  en  (ci),  cxxx  (cxxix), 
cxliii  (cxlii),  les  prières  de  saint  Pierre,  Luc,  v,  8,  et 
du  publicain,  Luc,  xvm,  13,  etc. 

1"  La  prière  type.  —  1.  Le  Sauveur  a  daigné  lui 
même  l'enseigner  à  ses  Apôtres.  C'est  le  Pater,  qui 
donne  une  si  haute  et  si  complète  idée  de  ce  que  doit 
être  la  prière.  Matth.,  vi,  9-13;  Luc,  x,  2-4.  Cette  prière 
iif  renferme  rien  dans  sa  formule  qui  soit  exclusivement 
caractéristique  de  la  religion  chrétienne  et  qui  ne  puisse 
convenir  qu'aux  enfants  de  l'Église  du  Christ.  Notre- 
Seigneur  a  voulu  qu'elle  fût  par  excellence  la  prière  de 
l'humanité.  Dieu  y  est  présenté  comme  Père,  par  consé- 
quent comme  celui  auquel  les  hommes  peuvent  s'adres- 
ser en  toute  confiance,  Père  qu'on  ne  doit  pas  s'étonner 
de  ne  pas  voir,  puisqu'il  est  dans  les  deux,  mais  dont 
la  puissance  et  la  bonté  s'exercent  de  là-haut  sur  les 
enfants  qu'il  a  sur  la  terre.  Les  trois  premières 
demandes  :  «  Que  votre  nom  soit  sanctifié,  que  votre 
règne  arrive,  que  votre  volonté  soit  faite  sur  la 
terre  comme  au  ciel  »,  se  rapportent  à  la  gloire  de 
Dieu,  que  l'homme  souhaite  et  qu'il  doit  travailler  à 
procurer  par  son  obéissance.  Ainsi  l'homme  satisfait 
au  double  devoir  de  l'adoration  et  de  l'action  de  grâces. 
Sa  prière  passe  ensuite  à  la  demande,  quand  elle 
détermine  les  biens  qui  sont  attendus  de  la  munifi- 
cence divine,  pour  le  corps,  le  pain  de  chaque  jour, 
pour  l'âme,  la  préservation  de  la  tentation,  pour  les 
deux  ensemble,  la  délivrance  du  mal.  Enfin  le  repen- 
tir a  son  expression  dans  les  paroles  :  «  Pardonnez- 
nous  nos  offenses  comme  nous  les  pardonnons  à  ceux 
qui  nous  ont  offensés,  »  paroles  qui  font  de  4la  charité 
fraternelle  la  preuve  du  repentir  sincère.  Ces  choses 
sont  exprimées  en  peu  de  mots,  pour  indiquer  que 
Dieu  tient  plus  aux  sentiments  du  cœur  qu'à  la  lon- 
gueur des  formules.  C'est  la  prière  par  excellence,  tant 
par  son  origine  que  par  sa  simplicité  et  la  perfection  de 
ses  demandes.  —  2.  Avec  la  leçon,  Xotre-Seigneur  a 
tenu  à  donner  l'exemple  de  la  prière.  Nul  doute  que  la 
prière  n'ait  consacré  le  temps  de  sa  vie  cachée.  Pen- 
dant sa  vie  publique,  aussitôt  après  son  baptême,  il  est 
en  prière  quand  le  Père  le  fait  connaître  comme  son 
Fils.  Luc,  m.  21.  Au  cours  de  ses  tournées  évangé- 
liques,  il  se  lève  de  grand  matin  et  va  prier  dans  la 
solitude.  Marc,  i.  35.  Après  la  guérison  du  lépreux, 
pour  échapper  à  l'empressement  indiscret  des  foules, 
il  se  retire  dans  le  désert  et  y  prie.  Luc.  v,  16.  Avant 
de  choisir  ses  Apôtres,  il  passe  la  nuit  en  prière  sur  la 
montagne.  Luc,  vi.  12.  Après  la  multiplication  des 
pains,  il  se  retire  seul  sur  la  montagne  pour  prier. 
Matth.,  xiv,  23;  Marc,  VI,  46.  Il  était  encore  seul  à 
prier,  avant  de  demander  à  ses  Apôtres  ce  qu'on  pensait 
de  lui.  Luc,  ix,  18.  Sur  la  montagne  de  la  transfigura- 
tion, il  prie,  et  c'est  pendant  sa  prière  que  son  visage 
se  met  à  resplendir.  Luc,  ix,  28,  29.  A  la  suite  d'une 
de  ses  prières,  les  Apôtres  lui  demandent  de  leur  ap- 
prendre à  prier.  Luc,  xi,  1.  Ces  quelques  indications 
des  Évangélistes  montrent  que  la  prière  tenait  la  plus 
grande  place  dans  la  vie  du  Sauveur.  II  profitait  de 
toutes  les  occasions  pour  s'isoler  et  prier,  sans  parler 
des  prières  qu'il  faisait  publiquement  avec  ses  Apôtres, 
sur  les  chemins,  dans  les  synagogues  ou  au  Temple. 
La  prière  sanctifie  surtout  la  dernière  journée  de 
Xotre-Seigneur, au  cénacle.  Matth..  xxvi,  30;  Marc,  xiv, 
26;  Joa.,  xvil,  1-26,  à  Gethsémani,  Matth,,  xxvi,  36; 
Marc,  xiv,  32;  Luc,  xxn,  41,  et  sur  la  croix.  Luc,  xxm, 
3i;  Matth..  x.xvu.  4b;  Marc,  xv,  34;  Luc,  XXII I,  46. 
L'Epitre  aux  Hébreux,  v,  7,'dit  que,  «  dans  les  jours  de 
sa  chair,  il  offrit  avec  de  grands  cris  et  avec  larmes 
des  prières  et  des  supplications  à  celui  qui  pouvait  le 


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PRIERE 


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sauver  de  la  mort,  et  fut  exaucé  pour  sa  piété.  »  Cet 
exemple  montre  déjà  quelle  importance  a  la  prière 
dans  la  religion  et,  en  général,  dans  les  relations  de 
l'homme  avec  Dieu. 

II.  Sa  nécessité.  —  Il  y  a,  surtout  dans  l'ordre  natu- 
rel, une  fuulede  biens  que  Dieu  accorde  même  a  ceux 
qui  ne  le  prient  pas.  «  Il  fait  lever  son  soleil  sur  les 
méchants  et  sur  les  bons,  et  descendre  sa  pluie  sur  les 
justes  et  sur  les  injustes,  i  Mat  th.,  v,  45.  Mais  beaucoup 
de  biens,  principalement  dans  l'ordre  spirituel,  ne 
peuvent  être  accordés  qu'à  ceux  qui  les  demandent  par 
la  prière.  «  Sachant  que  je  ne  pouvais  obtenir  la  sagesse 
si  Dieu  ne  me  la  donnait,  et  c'était  déjà  de  la  prudence 
que  savoir  de  qui  vient  ce  don,  je  m'adressai  au  Sei- 
gneur et  je  l'invoquai,  o  Sap.,  vin,  21.  Pour  faire  com- 
prendre cette  nécessité  de  la  prière,  Notre-Seigneur  se 
sert  de  deux  exemples.  Un  ami  déjà  couché'  ne  se  lève 
que  quand  son  voisin  vient  avec  insistance  le  solliciter 
pour  lui  emprunter  du  pain.  Autrement,  il  ne  se  lèverait 
pas  et  n'irait  pas  au-devant  de  ses  désirs.  En  consé- 
quence, «  demandez  et  l'on  vous  donnera,  cherchez  et 
vous  trouverez,  frappez  et  l'on  vous  ouvrira.  Qui  de- 
mande reçoit,  qui  cherche  trouve,  à  qui  frappe  on 
ouvre...  Si  vous,  qui  êtes  méchants,  vous  savez  donner 
ce  qui  est  bon  à  vos  enfants,  combien  plus  votre  Père 
du  haut  du  ciel  donnera-t-il  le  bon  esprit  à  ceux  qui  le 
lui  demandent!  »  Luc.  xi,  5-13.  Pour  montrer  «  qu'il 
faut  toujours  prier  sans  se  lasser  »,  le  Sauveur  met 
encore  en  scène  une  pauvre  veuve  qui  n'obtient  gain 
de  cause  auprès  d'un  juge  inique  qu'à  force  d'instances. 
Puis,  comparant  Dieu  à  ce  juge  inique,  il  conclut  qu'à 
plus  forte  raison  ceux  qui  s'adressent  à  lui  seront 
exaucés.  Luc,  xvm,  1-8.  Le  Sauveur  prescrit  à  ses 
Apôtres  de  veiller  et  de  prier,  afin  de  ne  pas  entrer  en 
tentation.  Mat  th.,  xxvi,  41.  Saint  Jacques,  iv,  2,  dit  aux 
chrétiens  que,  s'ils  n'obtiennent  pas,  c'est  qu'ils  ne 
demandent  pas.  —  De  là  les  exhortations  pressantes  à 
la  prière  fréquente,  Luc.  xvm,  1  ;  «  Priez  sans  cesse.  » 

I  Thés.,  v,  17;  Soyez  «•  assidus  à  la  prière,  »  Rom.,  xn; 
12;  persévérez  dans  la  prière,  »  Col.,  IV,  2;  «  soyez 
prudents  et  sobres,  pour  vaquer  à  la  prière.  »  I  Pet.,  IV, 
7.  Dans  les  circonstances  graves,  les  Apôtres  et  les 
chrétiens  avaient  recours  à  la  prière  continue.  Act.,  i, 
14;  xit,  5.  La  vraie  veuve  «  persévère  nuit  et  jour  dans 
les  supplications  et  les  prières.  »  I  Tim.,  x  ,  5.  Ces 
exhortations  et  ces  exemples  s'inspirent  de  la  recom- 
mandation du  Seigneur  :  «  Veillez  et  priez  sans  cesse, 
afin  que  vous  soyez  trouvés  dignes  d'échapper  à  tous 
ces  maux  qui  doivent  arriver,  et  de  paraître  debout 
devant.le  Fils  de  l'homme.  »  Luc,  xxi.  3(i. 

III.  Son  EFFICACITÉ.  —  Du  commencement  à  la  fin, 
la  Suinte  Écriture  témoigne  de  l'accueil  bienveillant 
que  Dieu  fait  à  la  prière.  Gen.,  xxx,  17;  Num.,  xxm , 
1;  Deut.,  ix,   19;  I    Reg.,    vu,  9;   III   Reg.,   xvn.   22; 

II  Esd.,  ix,  28;  Ps.  iv,  2;  xvm  xvn).  7;  xxxiv  ixxxm). 
5;  Is.,  xi.ix,  8;  Dan.,  xnt,  44;  II  Mach.,  i,  8;  Luc,  i, 
13,  etc.  Notre-Seigneur  exauce  presque  tous  ceux  qui 

l'implorent.  Il  donne  les  assurances  les  plus  for Iles 

sur  l'efficacité  de  la  prière.  Mattb.,  vu.  7-12;  Luc,  xi, 
1-13.  8  le  vous  le  dis  de  nouveau,  si  deux  d'entre  vous 
s'entendent  sur  la  terre,  quoi  qu'ils  demandent,  ce  leur 
sera  accordé  par  mon  Père  qui  est  dans  les  cieux.  » 
Mat  th.,  xvm,  19.  «  Tout  ce  que  vous  demanderez  avec 
fui  dans  la  prière,  vous  l'obtiendrez.  0  Mattli.,  xxi,  22  ; 
Marc,  xt,  2i.  «  Tout  ce  que  vous  demanderez  à  mon 
l'ère  en  mon  nom,  je  le  ferai,  pour  que  le  Père  soit 
glorifié  dans  le  Fils.  »Joa.,  xiv,  13-14.  «  Si  vous  de- 
meurez en  moi,  et  si  mes  paroles  demeurent  en  vous, 
vous  demanderez  tout  ce  que  vous  voudrez  et  cela  vous 
arrivera.  »  .loa.,  xv,  7,  Iti.  g  Ce  que  vous  demanderez  à 
mon   l'ère  en   mon   nom,  il  vous  le  donnera.  Jusqu'à 

présenl    vous    n'avez    rien   dem lé    en  n    nom  : 

dem les  el  vous   recevrez.    »  .loa..  xvi,  23,   26.  En 


mettant  au  cour  de  l'homme  l'instinct  naturel  de  la 
prière,  Dieu  s'était  engagé  à  lui  donner  satifaction,  et. 
par  conséquent,  à  accueillir  et  à  exaucer  les  prières 
qui  lui  seraient  adressées.  Notre-Seigneur  corrobore 
puissamment  la  confiance  de  l'homme,  en  multipliant 
lui-même  les  promesses.  «  Nous  avons  auprès  de  Dieu 
cette  pleine  confiance  que,  si  nous  demandons  quelque 
chose  selon  sa  volonté,  il  nous  écoute.  Et  si  nous 
savons  qu'il  nous  écoute,  quelque  chose  que  nous  lui 
demandions,  nous  savons  que  nous  obtenons  ce  que 
nous  avons  demandé.  >i  I  Joa.,  v,  14-15.  La  mort  volon- 
taire de  Jésus-Christ  nous  est  un  infaillible  garant  des 
promesses  de  Dieu.  «  Lui  qui  n'a  pas  épargné  son 
propre  Fils,  mais  qui  l'a  livré  à  la  mort  pour  nous  tous, 
comment  avec  lui  ne  nous  donnera-t-il  pas  toutes 
choses?  »  Rom.,  vin,  32.  —  Pour  figurer  l'efficacité  de 
la  prière,  les  auteurs  sacrés  se  servent  de  métaphores 
expressives.  La  prière  monte  jusqu'au  ciel,  à  la  sainte 
demeure  de  Jéhovab,  II  Par.,  xxx,  27,  devant  la  gloire 
du  Dieu  souverain,  Tob.,  m,  25,  en  sa  présence. 
Ps.  lxxxviii  (lxxxvii).  3.  Elle  s'élève  comme  l'encens. 
Ps.  cxli  (cxl),  2.  Elle  pénètre  les  nues.  Eccli.,  xxxv, 
21.  Quand  il  ne  veut  pas  exaucer.  Dieu  se  couvre  d'une 
nuée,  «  afin  que  la  prière  ne  passe  point.  »  Lam.,  m. 
44.  —  Ce  n'est  pas  à  dire  pourtant  que  la  prière  soit 
toujours  efficace,  au  moins  dans  les  termes  où  elle  a 
été  formulée.  Dieu  voit  plus  loin  que  celui  qui  le  prie 
et  sa  sagesse  règle  l'action  de  sa  bonté.  Aussi  saint 
Jean  dit-il  que  Dieu  nous  écoute,  si  ce  que  nous  lui 
demandons  est  «  selon  sa  volonté  ».  I  Joa.,  v.  11 
Autrement,  au  bien  demandé,  il  substitue  un  bien 
préférable.  Il  y  a  donc,  dans  la  Sainte  Écriture,  des 
prières  bonnes  en  elles-mêmes  qui,  pour  ce  motif,  ne 
sont  pas  exaucées.  Telles  sont  celle  du  possédé  guéri 
qui  demande  à  suivre  Jésus,  Marc,  v,  18,  19;  Luc,  VIII, 
38,  39,  celle  des  fils  de  Zébédée  et  de  leur  mère, 
Mattb.,  xx,  20-23;  Mare.,  x,  35-40,  et  surtout  celle  du 
Sauveur  à  Gethsémani.  Mattb. .  xxvi,  39-44;  Marc,  xiv, 
36-40;  Luc,  xxn.  12. 

IV.  Ses  CONDITIONS.  —  Saint  Jacques,  iv,  3,  écrit  : 
«  Vous  demandez  et  vous  ne  recevez  pas,  parce  que 
vous  demandez  mal,  avec  l'intention  de  satisfaire 
vos  passions.  »  Il  y  a  donc  des  conditions  à  remplir 
pour  être  exaucé.  La  Sainte  Écriture  indique  les  sui- 
vantes :  —  1"  Conditions  essentielles.  —  1.  La  foi  et  la 
confiance.  Comme  il  est  impossible  de  plaire  à  Dieu  sans 
la  foi,  il  est  de  toute  nécessité  de  croire  pour  s'approcher 
de  Dieu  utilement.  Heb.,  xi.  6.  Notre-Seigneur  exige 
absolument  cette  foi.  Mat  th.,  xxi,  22.  Il  la  réclame  or- 
dinairement de  ceux  qui  le  prient  et  les  traite  en  con- 
séquence de  leur  foi.  Matth.,  vin,  13;  ix,  28;  Mare.. 
v,  36;  ix,  22;  xi,  23;  Luc,  vin, 50;  etc.  C'est  la  prière 
avec  la  foi  qui  soulage  le  malade.  Jacob.,  v,  15.  —  2.  L'Im- 
militè.  Dieu  s'incline  à  la  prière  du  petit.  Ps.  eu  (ci), 
18.  C'esl  aux  humbles  qu'il  accorde  sa  grâce.  Jacob., 
IV,  6;  I  Pet.,  v.  5.  La  parabole  du  pharisien  et  du  pu- 
blicain  a  pour  but  de  faire  comprendre  la  nécessité  de 
l'humilité  quand  on  parle  à  Dieu.  Luc,  xvm,  9-14.  — 
3.  La  loyauté.  Dieu  veut  que  ceux  qui  lui  demandent 
de  faire  leur  volonté  commencent  par  faire  la  sienne. 
(  Jéhovah  est  près  de  tous  ceux  qui  l'invoquent  d'un 
COBUr  sincère.  1  IN.  cxi.v  (CXL1V),  18.  «  Il  écoute  la 
prière  des  justes.  »  Prow,  xv,  29.  Par  conséquent,  pour 
prier  devant  la  face  du  Seigneur,  il  faut  quitter  ses 
péchés,  diminuer  ses  offenses,  détester  le  mal.  Eccli., 
xvn,  24,  25.  La  prière  de  celui  qui  n'écoute  pas  la  loi 
est  une  abomination.  Prov.,  xxvm,  9.  Elle  est  même 
réputée  péché,  c'est-à-dire  qu'elle  est  offensante  pour 
Dieu.  Ps.  CIX  (CVlll),  7.  «  Quand  vous  multipliez  les 
prières,  dit  Jéhovah,  je  n'écoute  pas...  Lavez-vous,  puri- 
liez-vous,  otez  de  devant  mes  yeux  la  malice  de  vos 
actions.  »  1s.,  i.  15.  —  '».  La  charité  fraternelle.  Le 
Sauveur  en  insère  la  condition  dans  le  Pater  même,  el 


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PRIERE 


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il  n'admet  à  prier  devant  l'autel  que  celui  qui  n'a  aucun 
mauvais  sentiment  envers  son  frère.  Mat  th.,  v,  23,  24. 
Il  fait  de  l'union  fraternelle  un  moyen  d'être  plus  sûre- 
ment exaucé.  Matth.,  xviii,  19, 20.  —  5. L'union  à  Dieu. 
i  Sans  moi,  vous  ne  pouvez  rien  faire,  »  dit  le  Sauveur. 
Joa.,  xv,  5.  Cf.  I  Cor.,  xn,  3;  II  Cor.,  in,  5.  Ceci  s'ap- 
plique également  à  la  prière.  C'est  pourquoi  «  l'Esprit 
vient  en  aide  à  notre  faiblesse,  car  nous  ne  savons  pas 
ce  que.  nous  devons,  selon  nos  besoins,  demander  dans 
nos  prières.  Mais  l'Esprit  lui-même  prie  pour  nous  par 
des  gémissements  ineffables.  »  Rom.,  vin,  26. 

2"  Conditions  favorables.  —  Certaines  pratiques  ajou- 
tées à  la  prière  peuvent  la  rendre  plus  efficace,  comme 
le  jeûne.  Judith.  i\.  8.  12;  Bar.,  I,  5;  Il  Esd..  i.  i; 
Matth.,  xvii,  20;  Marc.  ix.  28;  Act.,  xiv,  22;  l'aumône- 
Tob.,  xn.  S;  Act..  x.  i,  et  les  larmes.  I  Reg.,  i,  10;  Is., 
xxxvm,  5;  Judith,  xin,  6;  Tob.,  m,  11;  vu,  13;  xn.  12. 
La  prière  est  d'ailleurs  elle-même  un  remède  à  la  tris- 
tesse. Jacob.,  v,  13. 

V.  La  prière  poi  r  les  mitres.  —  On  ne  prie  pas  seu- 
lement pour  soi  ;  l'intention  de  Dieu  est  que  les  hommes 
prient  les  uns  pour  les  autres.  Ainsi.  1"  Abraham  prie 
pour  Abimélech,  Gen.,  xx,  7,  17;  le  pharaon  d'Egypte 
demande  à  Moise  et  à  Aaron  de  prier  pour  sa  déli- 
vrance, Exod.,  vin.  8.  29.  30;  ix,  28;  x,  18;  sur  l'ordre 
de  Dieu,  Job  prie  pour  ses  amis,  Job,  xlii.  8,  10;  Judith 
prie  pour  ses  concitoyens,  Judith,  vin,  29;  Sédécias 
demande  à  Jérémie  de  prier  pour  le  peuple,  .1er.,  xxxvu, 
3,  et  le  peuple  renouvelle  cette  demande,  Jer.,  xlii,  2, 
20;  les  exilés  de  Babylone  sollicitent  les  prières  de  leurs 
frères  de  Jérusalem,  Bar.,  i,  13;  les  Juifs  de  Jérusale  m 
prient  pour  ceux  d'Egypte.  Il  Mach.,  i,  6.  Le  grand- 
prêtre  Onias  apparaît  priant  pour  toute  la  nation,  et 
disant  de  Jérémie  :  «  Celui-ci  est  l'ami  de  ses  frères, 
qui  prie  beaucoup  pour  le  peuple  et  pour  la  ville  sainte.  » 
II  Mach.,  xv.  12.  —  Dans  la  pensée  de  Notre-Seigneur, 
la  prière  doit  habituellement  avoir  un  caractère  collec- 
tif. Voilà  pourquoi  les  demandes  du  Pater  sont  formu- 
lées au  pluriel.  En  conséquence  de  cette  indication  et 
de  la  grande  loi  de  la  charité,  les  premiers  chrétiens 
prient  beaucoup  les  uns  pour  les  autres.  Saint  Jacques, 
v,  16,  le  recommande  à  ses  fidèles.  Saint  Paul  réclame 
les  'prières  de  ses  enfants  dans  la  foi,  Rom.,  xv.  30  ; 
II  Cor.,  i.  11  ;  Phil.,  i  19;  I  Thés.,  v.  25,  et  il  leur 
assure  les  siennes.  Eph..  i,  16;  Phil.,  i,  3;  I  Thés.,  i, 
2;  II  Tim.,  1.3;  Philem.,  4.  Épaphras  prie  pour  les 
Colossiens,  iv,  12.  —  L'obligation  de  prier  pour  les 
autres  s'impose  plus  spécialement  aux  pasteurs  spiri- 
tuels. I  Reg.,  vu,  5;  xn.  9,  23;  II  Mach.,  xv,  14;  Col., 
i.  3,  9;  II  Thés.,  i,  11,  etc.  Notre-Seigneur  prie  pour 
ses  disciples.  Joa.,  xvii,  9, 13,  20,  21.  —  2°  On  prie  poul- 
ies rois  et  les  princes,  même  idolâtres,  Bar.,  "i,  11; 
I  Esd..  vi,  10,  même  persécuteurs.  I  Tim..  H,  1-2.  — 
Jérémie,  xxix,  7.  prescrit  aux  Israélites  déportés  à 
Babylone  de  prier  Jéhovah  pour  cette  ville  dont  la  pros- 
périté leur  profilera.  —  3°  On  prie  pour  les  persécuteurs. 
C'est  une  des  lois  les  plus  formelles  de  l'Évangile. 
Matth..  \.  41;  Luc.  VI,  28;  Rom.,  XII,  14.  Elle  a  été 
consacrée  par  les  exemples  de  Xotre-Seigneur,  Luc. , 
xxm,34.  et  de  saint  Etienne.  Act.,  vu,  60.  —  4°  On  prie 
pous  les  morls.  II  Mach.,  xn,  44.  Saint  Paul  prie  pour 
Onésiphore,  qui  lui  a  rendu  service  à  Rome  et  qui  est 
mort  depuis.  II  Tim.,  i,  15-18.  Voir  Onésiphore.  t.  îv. 
col.  1813.  —  5"  Dans  le  ciel,  les  prières  des  saints  sont 
présentes  devant  le  trône  de  Dieu.  Ces  prières  sont 
celles  des  saintes  âmes  de  la  terre,  offertes  à  Dieu  par 
celles  qui  sont  déjà  au  ciel.  Apoc,  v,  8;  vm,  3,  4. 

VI.  Les  I'RIères  bibliques.  —  La  Sainte  Écriture 
renferme  une  foule  de  prières  plus  ou  moins  longues, 
par  lesquelles  les  hommes  s'adressent  au  Seigneur  avec 
des  intentions  diverses.  Les  plus  caractéristiques  sont 
les  suivantes  :  1°  Dans  l'Ancien  Testament  :  Abraham 
intercède  en  laveur  de  Sodome  et  poursuit  sa  requête. 


malgré  la  diminution  progressive  des  chances  de  par- 
don. Gen.,  xviii,  23-32.  —  Jacob  prie  pour  échapper  à 
la  colère  d'Ésaû.  Gen.,  xxxn,  9-12.  —  Moïse  s'adresse 
souvent  à  Jéhovah,  pour  lui  demander  de  l'eau  douce, 
Exod.,  xv.  25;  le  pardon  de  son  peuple,  Exod.,  xxxn, 
11-13;  la  cessation  d'un  fléau.  Num.,  xi,  2;  l'éloigne- 
ment  des  serpents,  Num.,  xxi,  8,  etc.  —  David  adresse 
ses  louanges  et  ses  actions  de  grâces  au  Seigneur. 
II  Reg.,  vu,  18-29,  et.  dans  les  Psaumes  dont  il  est 
l'auteur,  il  en  renouvelle  l'expression,  en  y  joignant 
d'humbles  demandes  et  des  sentiments  de  repentir.  — 
Salomon,  à  l'occasion  de  la  dédicace  du  Temple,  fait  à 
Dieu  une  prière  solennelle  pour  le  remercier  et  implo- 
rer son  assistance  en  faveur  de  ceux  qui  viendront 
l'implorer  dans  l'édifice  sacré.  III  Reg.,  vm,  15-53; 
II  Par.,  v,  4-42.  Il  avait  d'ailleurs  commencé  son  règne 
en  demandant  la  sagesse.  II  Par.,  i,  8-10.  —  Êzéchias 
prie  pour  que  Dieu  délivre  son  peuple  de  l'invasion 
assyrienne.  IV  Reg.,  xix,  15-19;  II  Par.,  xxxin,  20.  — 
Manassé  en  exil  implore  Jéhovah  avec  humilité  et 
repentir.  II  Par..  Xxxn,  12.  —  Dans  les  écrits  des  pro- 
phètes, on  trouve  un  bon  nombre  de  prières  :  ies  can- 
tiques des  rachetés,  Is.,  XII,  1-6;  xxvi,  1-19;  la  prière 
pour  les  captifs,  Is.,  lxiv,  7-lxv,  12;  les  prières  de 
Jérémie  pour  son  peuple  coupable,  .1er.,  xiv,  7-22;  ses 
plaintes  à  Jéhovah.  Jer.,  xx,  7-18;  Lam.,  m,  55-66;  sa 
prière  après  la  ruine  de  Jérusalem,  Lam.,  v,  1-22;  la 
prière  de  Baruch  en  faveur  des  exilés,  Bar.,  n,  11-ni, 
8;  la  prière  d'Azarias  dans  la  fournaise,  Dan.,  m,  26- 
45,  et  le  cantique  d'actions  de  grâces  qui  la  suivit, 
Dan.,  i  il,  52-90:  la  prière  de  Susanne,  Dan.,  xm.  12, 
43;  celle  de  Jonas,  n,  3-10;  le  cantique  de  louanges 
de  Michée,  vu.  18-20;  la  prière  d'IIabacuc,  ni,  2-19,  etc. 

—  La  plupart  des  Psaumes  sont  aussi  des  prières  expri- 
mant les  divers  sentiments  de  l'âme  bénie  de  Dieu, 
éprouvée  ou  repentante.  —  Job  interpelle  Dieu  fré- 
quemment et  linit  par  une  humble  protestation  de 
repentir.  Job.  xlii,  2-6.  —  Sara,  fille  de  Raguel,  de- 
mande la  protection  divine,  Tob..  m,  13-23,  etTobie  cé- 
1(  bre  la  louange  du  Seigneur  dans  un  cantique  d'actions 
de  grâces.  Tob.,  xm,  1-23.  —  Judith  implore  le  secours 
de  Dieu  en  faveur  de  son  peuple,  Judith,  îx,  2  19, 
et  ensuite  exprime  sa  reconnaissance  au  Seigneur. 
Judith,  xvi,  2-21.  —  Mardochée  et  Esther  prient  pour 
leur  peuple  menacé.  Esth.,  xm,  9-17;  xiv,  3-19.  — 
Néhémie  prie  pour  les  enfants  d'Israël,  II  Esdr.,  i,  5-1 1. 
et  tout  le  peuple  demande  pardon  et  protection  à  Jéhovah. 
II  Esdr.,  ix,  5-38.  —  L'auteur  de  la  Sagesse,  ix.  1-18. 
prèle  à  Salomon  une  prière  pour  demander  la  sagesse. 

—  Celui  de  l'Ecclésiastique,  xxm,  1-6,  prie  pour  être 
préservé  des  péchés  de  langue,  pour  la  délivrance 
d'Israël,  Eccli.,  xxxvi,  1-17,  et  pour  remercier  le  Sei- 
gneur de  l'avoir  tiré  du  péril.  Eccli.,  i.i,  1-12.  —  On 
prie  avant  de  livrer  bataille.  1  Mach.,  5,  33;  xi,  71  ; 
II  Mach.,  vin,  29:  xv,  26,  etc. 

2°  Dans  le  Nouveau  Testament.  —  Les  cantiques  de 
Marie,  Luc,  i,  46-55.  de  Zacharie,  Luc,  i,  6S-79,  et  de 
Siméon,  Luc,  n,  29-32,  sont  des  prières  d'actions  de 
grâces.  —  ^Un  grand  nombre  de  prières,  toutes  très 
courtes,  sont  adressées  à  Xotre-Seigneur  par  toutes 
sortes  de  personnes.  Lui-même  remercie  son  Père  de 
la  manière  dont  est  répartie  la  grâce  de  la  lumière, 
Matth..  xi,  25,  26;  il  le  prie  à  la  dernière  Cène,  Joa., 
xvii,  1-26;  au  jardin  des  Olives,  Matth.,  xxvi,  39-44; 
Marc,  xiv,  36-39;  Luc,  xxu.  42,  et  sur  la  croix.  Luc, 
xxm.  31.  46;  Matth.,  xxvn,  46;  Marc,  xv,  34.  —  Au 
livre  des  Actes,  des  prières  sont  mentionnées  en  diverses 
occasions  solennelles  :  pour  l'élection  de  saint  Mathias. 
i,  24,  25:  pour  demander  secours  après  la  comparution 
des  apôtres  Pierre  et  Jean  devant  le  sanhédrin,  iv,  24- 
30;  pour  la  délivrance  de  Pierre   emprisonné,  xn,  5. 

—  Saint  Jean  termine  son  Apocalypse,  xxu,  20,  par  un 
appel  au  Seigneur  Jésus. 


671 


PRIERE 


672 


3»  Prières  sacramentelles.  —  Les  Apôtres  se  consacrè- 
rent plus  particulièrement  à  la  prière  et  au  ministère 
de  la  parole.  Act.,  VI,  4.  La  prière  devait  accompagner 
nécessairement  les  actes  par  lesquels  ils  conféraient 
la  grâce  aux  fidèles.  Elle  était  inséparable  de  la  fraction 
du  pain,  Matth.,  xxvi,  26;  Act.,  11,  42,  de  l'imposition 
des  mains,  Act.,  vi,  6;  xm,  3;  xxvm,  8,  de  l'onction 
des  malades,  Jacob.,  v,  14,  etc. 

VII.  Usages  concernant  la  prière.  —  i° Les  formules. 

—  llans  l'Ancien  Testament,  aucune  formule  spéciale  de 
prière  n'est  indiquée  comme  devant  être  d'usage  habi- 
tuel. Mais  il  y  a  un  certain  nombre  de  prières  toutes 
préparées  dans  le  recueil  des  Psaumes;  elles  servaient 
surtout  dans  les  cérémonies  liturgiques.  Des  formules 
spéciales  étaient  imposées  pour  l'offrande  des  dimes  et 
des  prémices.  Deut.,  XXVI,  3-15.  Pour  l'ordinaire,  il  est 
probable  qu'on  s'inspirait  des  besoins  du  moment  dans 
les  prières  que  l'on  adressait  à  Dieu.  L'Oriental  a  d'ail- 
leurs une  particulière  facilité  pour  exprimer  ses  désirs 
et  ses  sentiments.  La  prière  n'était  pas  toujours  vocale. 
Anne  parle  à  Dieu  en  son  cœur  et  remue  seulement  les 
lèvres,  sans  que  sa  voix  se  fasse  entendre.  I  Reg.,  1,  13. 
Judith  prie  en  silence  et  se  contente  de  remuer  les  lèvres. 
Judith,  xm,  0.  Iiien  souvent,  sans  doute,  des  âmes 
pieuses  et  méditatives  priaient  intérieurement  et  don- 
naient un  libre  cours,  sous  le  regard  de  Dieu  seul,  à 
l'expression  de  leurs  pensées  et  de  leurs  sentiments. 

—  A  l'époque  évangélique,  la  prière  juive  avait  une  for- 
mule bien  déterminée,  comprenant  deux  thèmes  prin- 
cipaux, le  Schéma  et  le  Schemoné-Esré.  Le  Schéma  se 
composait  de  trois  passages  bibliques  :  Deut.,  vi,  4-9  ;  xi, 
13-21  ;  Num.,  xv,  37-41.  Le  premier  morceau  commence 
par  le  mot  Sema',  «  écoute,  »  d'où  le  nom  donné  à  l'en- 
semble de  la  formule.  Ces  trois  passages  contiennent 
seulement  des  préceptes  mosaïques  et  non  des  prières 
proprement  dites.  On  les  récitait  comme  nous  récitons 
nous-mêmes  soit  notre  symbole,  soit  les  commande- 
ments de  Dieu  et  de  l'Église.  On  les  accompagnait  de 
bénédictions  dites  avant  et  après  chacun  de  ces  mor- 
Ci  1  .  Le  Schéma  devait  être  récité  le  matin  et  le  soir, 
en  hébreu  ou  en  une  autre  langue,  par  tous  les  Israé- 
lites, mais  non  par  les  femmes,  les  esclaves  et  les  enfants. 
Beracholh,  1,  1-4;  111,  3;  Sota,  vu,  1.  Les  deux  passages 
du  Deutéronome,  VI,  4-9;  xi,  13-21,  étaient  écrits  sur 
la  mezuza,  voir  Mezuza,  t.  iv,  col.  1057,  et  sur  les  phy- 
lactères. Voir  Phylactères,  col  350.Le  Schemoné-Esré, 
Semânéh  'é&rêk,  0  dix-huit  »,  se  composait  de  formules 
de  bénédictions  et  de  louanges  en  l'honneur  de  Dieu, 
presqu'éntièrement  empruntées  aux  Psaumes  et  aux 
prophètes.  C'était  pour  les  Israélites  la  fefillâh  par  excel- 
lence. Ces  formules  sont  assez  développées,  mais,  à 
l'époque  évangélique,  la  rédaction  actuelle  n'était  pas 
encore  arrêtée.  Le  nombre  en  a  été  porté  à  dix-neuf. 
Tous  les  Israélites  sans  exception  avaient  à  les  réciter 
trois  fois  le  jour,  le  matin,  l'après-midi  et  le  soir.  Bera- 
choth,  m,  3;  IV,  1.  Elles  sont  reproduites  dans  Schûrer, 
Geschichte  des  /»■'■  Volkes  im  Zeit.  .1.  C,  t.  11,  p.  461, 
162,  el  dans  Stapfer,  La  Palestine  au  temps  deJ.-C, 
Paris,  1885,  p.  372-376.  Les  docteurs  examinèrent  une 
foule  de  cas  concernant  la  récitation  de  ces  formules. 

—  Les  plus  dévots  parmi  les  Juifs,  ou  du  moins  ceux 
qui  tenaientàle  paraître,  ne  manquèrent  pas  de  mul- 
tiplier et  d'allonger  les  formules  de  la  prière.  C'estdéjà 
sans  doute  pour  protester  contre  ces  longueurs  que 
Jean-Baptiste  enseigna  à  ses  disciples  à  prier.  Luc,  xi, 
1.  Notre  Seigneur  ne  veut  pas  qu'on  multiplie  les  pa- 
roles, comme  les  païens,  et  qu'on  s'imagine  qu'on  sera 
exaucé  à  force  de  parler.  Matth.,  VI,  7.  Il  reproche  aux 
pharisiens  hypocrites  d'aller  faire  d'interminables  priè- 
res chez  les  veuves,  afin  de  tout  dévorer  chez  elles. 
Matth.,  XXIII,  11;  Mari-.,  xm,  10,  Lue.,  xx,  47.  La  for- 
mule de  prière  qu'il  enseigne  à  sesdisciples  est  courte. 
Elle  représente  à  peine  en  longueur  la  vingtième  partie 


du  Schemoné-Esré.  Le  Sauveur  donne  la  raison  de 
cette  brièveté.  Le  Père  céleste  sait  parfaitement  ce  dont 
nous  avons  besoin.  Matth.,  vi,  32.  Nous  n'avons  pas  à 
le  renseigner,  mais  seulement  à  lui  témoigner  notre 
confiance,  notre  soumission  et  notre  amour.  «  \ous 
demanderez  en  mon  nom,  dit  Notre-Seigneur,  et  je  ne 
vous  dis  point  que  je  prierai  le  Père  pour  vous,  car  le 
Père  lui-même  vous  aime.  »  Joa.,  XVI,  26.  11  n'est  donc 
pas  nécessaire  de  lui  exposer  longuement  un  besoin. 
Ce  n'est  pas  en  répétant  :  «  Seigneur.  Seigneur!  » 
qu'on  est  exaucé,  c'est  avant  tout  en  faisant  la  volonté 
du  Père.  Matth.,  vu,  21.  —  En  dehors  du  Pater,  les 
premiers  chrétiens  n'avaient  guère  d'autres  formules 
de  prières  que  les  Psaumes  et  les  Cantiques  inspirés 
de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testament.  C'est  peu  à  peu 
que  d'autres  formules  entrèrent  en  usage  parmi  eux. 
Cf.  Duchesne,  Origines  du  culte  chrétien,  Paris,  1903, 
p.  46-55. 

2°  Les  temps.  —  Les  Israélites  avaient  l'habitude  de 
prier  trois  fois  le  jour,  le  soir,  le  matin  et  au  milieu 
du  jour.  Ps.  i.v  (i.iv),  18.  Trois  fois  par  jour,  Daniel  se 
mettait  à  genoux  et  louait  Dieu.   Dan.,  VI,   10.  La  pra- 


173.  —  Égyptiens  priant  les  mains  étendues. 
D'après  Wilkinson,  Manners,  t.  11,  p.  324. 

tique  du  Psahnisle  qui,  sept  fois  le  jour,  redisait  les 
louanges  du  Seigneur,  l's.  exix  (cxvhi),  161,  paratl 
avoir  été  exceptionnelle,  bien  qu'elle  ail  inspiré  plus 
tard  celle  des  sept  heures  canoniales  du  jour.  Cf.  Ila- 
cuez,  Du  Saint-Office,  Paris.  IS72.  p.  284.  Les  Israé- 
lites récitaient  le  Schemoné-Esrê  le  matin,  l'après- 
midi,  à  l'heure  de  l'ohlation,  c'est-à-dire  vers  trois 
heures  et  le  soir.  Ils  priaient  également  avant  et  après 
les  repas.  Voir  REPAS,  lies  prières  spéciales  étaient  en 
outre  prescrites  pour  le  sabbal  et  les  différentes  fêtes 
de  l'année.  La  prière  avant  le  jour  ou  dés  l'aurore  est 
plusieurs  fois  mentionnée.  Ps.  1  xxxvm  u.xxxvn,  li; 
Judith,  \m.  ">;  Sap.,  xvi,  28,  etc.  La  prière  de  la  neu- 
vième heure  ou  de  trois  heures  du  soir,  Act.,  m.  I. 
était  celle  qui  accompagnai!  le  sacrifice  de  l'après- 
midi.  Saint  Pierre  priait  également  vers  la  sixième 
heure.  Act.,  x.  9.  Ces  différentes  indications  bibliques 
ont  déterminé  le  choix  des  heures  auxquelles  l'Église 
a  Qxé  ses  prières  publiques,  prime,  au  lever  du  jour,  à 
l'heure  de  la  prière  du  malin,  tierce,  à  l'heure  on  se 
terminaient  les  sacrifices  du  malin,  sexte.  à  l'heure 
consacrée  par  saint  Pierre,  noue.  .1  l'heure  du  sacri- 
lice  du  soir,  vêpres,   à   l'heure   de    la    prière   du    soir, 

c'esl  à-dire  à  la  chute  du  jour. 
3°  Les  lieux.  —  L'ancien  sanctuaire,  rf.  1  Mach.,  m, 

16,  el  plus  lard  le  Temple  ont  été  les  rendez-vous  in- 
diqués de  la  prière.  Salomon  suppose  que  l'on  viendra 


<373 


PRIERE 


674 


fréquemment  prier  dans  le  Temple  qu'il  vient  de  con- 
sacrer. III  Reg.,  vin,  "28.  31,  33,  35.  etc.  Le  Temple 
était  par  excellence  la  «  mai- 
son de  la  prière  ».  Is.,  lvi. 
7;  I  Mach.,  vu,  37.  Là,  en 
effet,  Dieu  manifestait  plus 
qu'ailleurs  sa  présence  et 
s;i  grâce.  C'est  pourquoi 
Xotre-Seigneur  tint  à  inter- 
venir avec  autorité  pour 
faire  respecter  la  destina- 
tion de  cet  édifice.  Matth., 
xxi.  13:  .Marc,  xi,  17;Luc, 
xix,  46.  On  se  rendait  donc 
au  Temple  pour  prier.  I  Reg., 
i,  10-1-2;  Luc,  i,  10;  xvm. 
10;  Act.,  il,  46;  tu,  1,  etc. 
En  dehors  du  Temple,  on 
priait  en  commun  dans  les 
synagogues, voirSvNAGOGiE, 
et  dans  de  simples  oratoi- 
res. Voir  Oratoire,  t.  iv, 
col.  1850.  Les  particuliers 
priaient  ensemble  dans  leur 
maison,  ou  bien,  pour  être 
seuls,  ils  se  retiraient  dans 
unechambre haute.  IIIReg., 
xvm,  19-23;  IV  Reg.,  iv,  10,33;  Judith,  ix,  1;  Dan.,vi,lb; 
Act.,  x,  9,  etc.  Le  Sauveur  recommande  à  celui  qui 
veut  prier  d'entrer  dans  sa  chambre,  d'en   fermer   la 


174.  —  Carthaginois  offrant 
un  sacriti.ee,  la  main  droite 
levée  dans  l'attitude  de  la 
prière.  Chaton  de  bague 
sigillaire  en  or.  Musée  La- 
vigerie  à^Carthoge. 


175.  —  Personnage  tenant  la  main  droite  levée  dans 
l'attitude  de  l'adoration.  Rasoir  carthaginois  m"  siècle 
avant  J.-C.).  Musée  Lavigerie  à  Cartilage.  Voir  Delat- 
tre,  La  nécropole  de  Rais  anru  'le  fouilles, 
13g.  25,  p.  22. 

porte  et  là.  seul  à  seul,  de  s'adresser  au  Père  qui  est 
présent  dans  le  secret.  Il  blâme  les  hypocrites  qui 
aiment  à  prier  debout  dans  les  synagogues  et  au  coin 
des  rues  alin  d'être  vus  des  hommes.  .Matth.,  vi,  5- 
6.  Les  chrétiens  suivirent  la  recommandation  du  Sau- 

DICT.    DE   LA  BIBLE. 


veur.  I  Cor.,  vu,  5.  Les  pharisiens  avaient  été  amenés 
à  prier  dans  les  rues  par  une  conséquence  de  leur 
casuistique.  Les  docteurs  avaient  réglé  les  heures  aux- 
quelles devaient  se  réciter  le  Schéma  et  le  Schemonë- 
Esré.  Le  bon  pharisien  sacrifiait  le  recueillement  à  la 
ponctualité  servile.  Il  récitait  la  prière  là  où  l'heure 
fixée  le  surprenait.  Des  règles  spéciales  déterminaient 
les  cas  dans  lesquels  il  était  alors  permis  de  saluer  ou 
du  rendre  un  salut.  Beracliolh,  II,  1-2.  Sous  prétexte 
de  régularité,  les  pharisiens  faisaient  dégénérer  en 
ostentation  coupable  ces  prières  en  public,  qui  eussent 
été  bien  mieux  dites  dans  la  solitude  et  le  recueille- 
ment, fût-ce  avec  plus  ou  moins  de  retard  sur  une 
heure  arbitrairement  lixée.  Les  docteurs  permettaient 


Mfih        ^   -l  ■'"■-' 


•  176.  —  Stèle  funéraire.  Attitude  de  la  prière. 

Musée  Lavigerie  à  Carthage. 

aux  ouvriers  de  faire  la  prière  sur  un  arbre  ou  sur  un 
mur,  ce  qui  parfois  pouvait  avoir  quelque  raison  d'être. 
Berachoth,  n,  3,  4.  Le  principe  que  fait  prévaloir,  ici 
comme  partout,  Notre-Seigneur,  c'est  que  les  vaines 
réglementations  des  hommes  sont  à  mettre  de  côté, 
quand  elles  sont  un  obstacle  au  vrai  culte  en  esprit  el 
en  vérité. 

4°  Les  altitudes.  —  Or.  priait  ordinairement  debout. 
1  Reg.,  i,  26;  III  Reg.,  vin,  22;  Matth.,  VI,  5;  .Marc, 
xi,  25;  Luc,  xvm,  11;  Berachoth,  v,  1;  Taanith,  II,  2 
;lig.  173-175).  Quand  on  voulait  témoigner  d'une  plus 
grande  humilité  ou  prier  avec  plus  d'instance,  on  se 
mettait  à  genoux.  III  Reg.,  VIII,  54;  II  Par.,  vi,  13; 
xxix,  29;  I  Esd.j  ix,  10;  Dan.,  VI,  10;  Act.,  ix,  10;  xx, 
36;  xxi,  5,  etc.,  ou  même  on  se  prosternait.  Judith, 
îx,  1;  II  Esd.,  vin,  6;  Matth.,  xxvi,  39;  Marc,  xiv, 
35,  etc.  On  baissait  parfois  la  tête.  Ps.  xxxv  (xxxivi. 
13;  Luc,  xvm,  13.  On  étendait  les  mains,  Is.,  i.  15, 
selon  l'usage  commun  en  Orient  (lig.  176),  on  en  frap- 
pait sa  poitrine,  Luc,  xvm,  13,  et  surtout  on  les  le- 
vait vers  le  ciel.   III  Reg.,   vm,  22;   Lam.,   Il,    19;   m, 

V.  -  22 


675 


PRIER  F. 


PRIMAISE 


676 


il;  I  Esd.,  ix,  10;  Il  Mach.,  m,  20;  I  Tim.,  n,  8,  etc. 
(fig.  177).  Les  Juifs  tenaient  beaucoup  à  ce  qu'on  les 
law'it  avant  de  prier.  Judith,  xn.  7.  8.  Le  Zohar,  Dent., 
f.  101,  déclarai!  plus  lard  digne  de  mort  quiconque 
priait  les  mains  sales.  Saint  Paul  fait  allusion  à  cette 
exigence,  mais  il  lui  donne  un  sens  moral.  ITim.,  11,8. 
Cf.  Tertullien,  De  oratione,  13,  t.  i,  col.  1168.  Le  ca- 
non 241  d  Hippolyte  dit  cependant  encore:  «  Qu'en  tout 
temps  le  chrétien  lave  ses  mains  quand  il  prie.  ■  Die 
Canones  Hippolyti,  édit.  H.  Achelis,  Leipzig.  1891, 
p.  130.  Le  lavement  des  mains  subsiste  toujours  avant  et 
pendant  la  célébration  de  la  messe.  —  Pendant  la  prière, 
1rs  Juifs   se  voilaient  la  tête;  ils  ont  conservé  depuis 


177.  —  Figurine  carthaginoise  nv  siècle  avant  i.-r.  i. 
AUitniir  île  la  prière.  Musée  Lavigeric  .1  Carthage. 
Voir  Delattre,  La  nécropole  de  liabs,  3'  année  de 
fouilles,  lig.  loi,  p,  12, 

l'habitude  de  prier  la  tète  couverte.  Saint.  Paul  déclare 
qu'il  v  a  déshonneur  pour  un  homme  à  prier  la  tête 
couverte,  el  déshonneur  pour  une  femme  à  prier  sans 
voile.  I  Cor..  M.  i.  5.  Il  ne  vise  que  la  prière  publique. 

Les  esclaves  avaient  habituelle ni  la  tête  couverte; 

C'esl  pourquoi  l'Apôtre  veul  que  1rs  chrétiens  gardent  la 
lête  nue,  comme  des  hommes  libres.  La  modestie  com- 

mamlail   le  contraire    aux    femmes.    —    Dieu    avait    fait 

■  lu  sanctuaire  le  centrede  toute  la  vie  religieuse  de  son 
peuple.  Deut.,  xu,  5-7.  Quand  les  Israélites  lurent 
et  Palestine,  il  ne  leur  fui  possible  de  se  rendre 
au  sanctuaire  el  plus  lard  au  Temple  que  de  loin  en 
loin.  Ils  prirent  l'habitude  de  se  tourner  du  côté  du 
femple  pour  prier.  Salomon  suppose  cet  usage  en  vi- 
111  Ri  mm,  1S;  n  Par.,  vi,  34  ;  Daniel,  vi, 
11,  et  tous  les  Israélites  s']  conforment.  Cf,  Berachoth, 
v,  ."'.  6;  Sip/ice,  71  b;  s.  Jérôme,  'In  Ezech.,  ni.  9, 


t.  xxv,  col.  83.  Quand  des  prévaricateurs  veulent  se 
livrer  à  un  culte  idolà trique,  ils  tournent  le  dos  au 
Temple.  Ezech.,  vin,  16.  Toutefois,  on  a  remarqué  que 
la  plupart  des  synagogues  galiléennes  dont  il  reste 
des  ruines  sont  orientées  du  sud  au  nord.  Pour  prier 
selon  la  coutume,  il  aurait  donc  fallu  se  tourner  du 
côté  de  la  porte,  ce  qui  parait  assez  anormal,  cf.  Schû- 
rer,  Geschichte,  t.  II,  p.  146,  453,  à  moins  qu'on  eut 
disposé  les  constructions  tout  exprés  pour  que.  la  porte 
élant  ouverte,  la  prière  pût  se  diriger  vers  Jérusalem 
sans  se  heurter  à  une  muraille.  —  Les  chrétiens  adop- 
tèrent l'usage  de  prier  tantôt  debout,  tantôt  à  genoux, 
el  souvent  les  mains  étendues  (lig.  17Si.  Il  cessèrent 
naturellement  de  se  tourner  vers  l'ancien  Temple, 
pour  prier  de  préférence  vers  l'orient,  sans  pourtant  se 
faire  une  règle  invariable  de  tourner  leurs  églises  de 


178.  —  mante  chrétienne,  à  gauche. 
D'après  Bullettino  di  archeol.  cristiana,  isTâ,  pi.  1. 

ce  coté.  Cf.  Martigny,  Dict.  des  antiquités  chrétiennes, 
Paris.  1877.  p.  55i,  C66-G09.  Saint  Paul  veut  qu'on  prie 
en  lotit  lieu.  1  Tim.,  n,  8.  —  Cf.  Saubert,  /V  precibui 
Rebrseorum,  el  Polemann,  De  ritu  precandi  veterum 
Hebrseorum,  dans  Ugolini,  Thés.,  I.  xxi;  Voullième, 
Quomodo  veleres  adwraverint,  Halle.  1887. 

II.     I.l.sl  I  RE. 

2.  PRIÈRE  DE  JOSEPH,  écrit  apocryphe.    Voir    APO- 
CRYPHES (Livres),  7.  I.  i,  col.  771. 

3.  PRIÈRE   DE  MANASSÉ,  écrit  apocryphe.  Voir  .Va- 
\  \--i  s.  t.  iv.  col.  651. 

PRIMAISE,  cm  latin  Primasius,  écrivain  ecclésias 

tique,  il  vers  560.   La  date  de  sa  naissance  esl  i . i 

connue,  Il  fui  évêque  d'Adrumète,  dans  la  province  de- 
Byzacène  eu  Afrique.  Il  apparaît  pour  la  première  fois 
au  concile  provincial  lenu  en  511.  On  le  retrouve  en- 
suite, île  .Vitia  554,  a  Constanlinople  où  il  fut  mêlé  aui 
discussion-   théologiques  de    son   temps.   A  la  nier'  de 

i ce,  primai  de  Byzacène,   il  lui  succéda  dans  cette 

dignité  qui.  dans  celle  province,  n'étail  pas  attachée! 
un  siègefixe.  Il  nous  reste  de  lui   :  Commentarioruyi 


677 


PRIMAISE    —    PRISON 


678 


super  Apocalypsim  libri  quinque,  t.  i.xvm, col.  793-936, 
composés  vers  5i0.  Il  y  a  mis  à  contribution,  d'après 
son  témoignage,  saint  Augustin  et  Ticonius,  et 
s'attacha  surtout  à  expliquer  le  sens  mystique.  On  lui 
a  attribué  des  Commentaria  in  Epistolas  saticli  Pauli, 
col.  415-794,  tirés  en  grande  partie  de  saint  Jérôme, 
de  saint  Ambroise,  de  saint  Augustin,  etc.,  mais  ils  ne 
paraissent  pas  être  de  lui.  Le  commentaire  de  l'Épitre 
aux  Hébreux,  col.  6SÔ-794,  en  particulier,  doit  être 
l'œuvre  d'Haymon  de  Halberstadt. 

PRtMATICED   Grégoire,  en   latin    Primalicius  ou 

De  Primaticiis,  exégète  italien,  mort  en  1518.  Il  était 
docteur  de  Padoue  et  il  enseigna  dans  cette  ville  la 
philosophie  et  la  théologie.  L'archevêque  de  Sienne, 
François  Bondini,  l'emmena,  en  qualité  de  théologien, 
au  Concile  de  Trente.  On  a  de  lui  :  Expositio  litteralis 
omnium  Epistolarum  Divi  Pauli,  in-4",  Venise,  1561. 

PRINCE,  mot  fréquemment  employé  dans  la  Vul- 
gate  pour  désigner  un  chef  ou  un  personnage.  C'est  un 
terme  générique  qui  traduit  des  mots  divers  de  l'hé- 
breu et  du  grec  :  hôqêq,  môSël,  nddib,  ndgîd,  ndii, 
nesîb,  nissab,  pâqid,  rô's,  rôznîm,  èar,  sdrak,  ïp^wv, 
lOvipvr,;,  elc.  Voir  GouVERSEï  R,  t.  m.  col.  284-287. 

PRINTEMPS  (Septante  :  ïxo;  Vulgate  :  ver,  lempus 
vernum),  i.i  saison  de  l'année  qui  succède  à  l'hiver. 
—  En  Palestine,  les  saisons  n'ont  pas  la  même  grada- 
tion que  dans  nos  climats.  Aux  pluies  de  l'hiver  succède 
presque  sans  transition,  en  avril,  la  chaleur  de  l'été. 
Aussi  le  printemps  proprement  dit  est-il  très  court. 
On  en  lit,  dans  le  Cantique  n,  11-13,  la  description 
suivante  : 

Voici  que  l'hiver  est  fini, 

La  pluie  a  cessé,  elle  a  disparu. 

Les  Heurs  se  montrent  sur  la  terre, 

Le  temps  des  chants  est  arrivé; 

La  voix  de  la  tourterelle  s'entend  dans  nos  campagnes, 

Le  figuier  développe  ses  fruits  naissants, 

La  vigne  en  fleur  exhale  son  parfum. 

Les  impies  comparent  la  vie  à  un  printemps  dont  il 
faut  jouir  :  «  Que  la  fleur  de  la  saison,  /los  temporis, 
ne  nous  échappe  point.  »  Sap.,  Il,  7.  Dans  le  texte  grec, 
ïv'jo;  iq>o;,  o  la  Heur  de  l'air,  »  est  une  leçon  fautive 
pour  ïv8o;  ëapoç,  «  la  Heur  du  printemps,  »  que  porte 
l'Alexandrin.  L'Ecclésiastique,  L,  (S,  compare  le  grand- 
prêtre  Simon  à  «  la  Heur  des  roses  aux  jours  du  prin- 
temps o,  in  Jiebus  vernis,  Septante  :  èv  Tjuipaiç  vlwv, 
s  aux  jours  des  choses  nouvelles,  »  du  renouveau.  Dans 
l'original  hébreu,  on  peut  lire  :  kenês  be'anfc  beyemê 
mô'êd,  «  comme  la  fleur  sur  les  branches  aux  jours  de 
fête.  »  —  Au  Psaume  lxxiv  (lxxjii),  17,  il  est  dit  que 
Dieu  a  fait  l'été  et  le  printemps,  ïap,  ver.  Au  lieu  de 
ïolç,.  l'édition  de  Venise  lit  wpaïa,  «  les  temps  conve- 
nables. »  En  hébreu,  le  terme  employé  est  horéf, 
«  l'automne,  •>  opposé  à  qayîs,  «  l'été  ;  »  ainsi  sont 
désignées  les  deux  saisons  qui  se  partagent  l'année  en 
Palestine.  Cf.  Gen.,  vm,  22;  Zach.,  xiv.  8.  —  Dans  un 
passage  où  la  Vulgate  parle  de  printemps,  il  est  ra- 
Gen.,  xxxv,  10;  xi.vm,  7,  que  Jacob  et  Rachel 
avaient  encore  kibrat-hâ-'drés  pour  arriver  à  Éphrata. 
Le  mot  kibrat,  analogue  au  kibrdli  assyrien,  qui 
désigne  une  portion  du  monde  ou  de  la  terre,  indique 
en  hébreu  une  distance,  probablement  celle  de  l'hori- 
zon. Cf.  Buhl,  Gesenius'  Handwôrterbuch,  Leipzig, 
1899,  p,  358.  Le  sens  du  texte  est  donc  que  les  voya- 
geurs étaient  arrivés  à  un  kibrat  de  terre  d'Éphrata, 
autrement  dit  qu'Éphrata  était  à  l'horizon  ou  en  vue. 
De  fait,  l'endroit  où  se  trouvaient  alors  les  voyageurs 
et  auprès  duquel  Rachel  fut  inhumée  n'est  guère  à 
plus  d'un  kilomètre  de  Bethléhem.  Le  Syriaque  traduit 
par  i<  parasange   »,  mesure  de  longueur  quatre  fois  plus 


grande.  Les  Septante  ne  traduisent  pas  le  mot  hébreu 
et  disent  que  les  voyageurs  approchaient  de  Chabratha, 
ùi  Xaëpafji;  Gen.,  xi.viii,  7  ;  y.otTi  ràv  'i7t7rô<3pou.ov 
XaôpaOi,  «  vers  l'hippodrome  de  Chabratha,  »  le  mot 
hippodrome  doublant  ici  celui  de  Chabratha  pour 
exprimer  une  idée  de  distance;  IV  Reg.,  v,  19  :  si; 
AîopaOdi  ou  Xagpï6i.  Aux  deux  passages  de  la  Genèse, 
la  Vulgate  traduit  kibrat  par  vernum  lempus,  «  prin- 
temps. »  On  ne  saurait  dire  comment  saint  Jérôme  est 
arrivé  à  cette  traduction,  si,  au  livre  des  Rois,  il  n'avait 
rendu  le  même  mot  par  electum  tempus,  «  un  temps 
de  choix,  »  par  extension  «  le  printemps  ».  Il  est  pro- 
bable que  le  traducteur  a  rattaché  kibrat  à  bdrdli  ou 
bdrar,  «  choisir.  »  En  tous  cas,  dans  ces  trois  passages, 
il  n'est  pas  question  de  printemps,  mais  d'une  mesure 
itinéraire  dont  on  ne  peut  préciser  la  longueur.  — 
Dans  l'Exode,  xxxiv,  18,  il  est  noté  que  les  Hébreux 
sont  sortis  d'Egypte  Èv  u.Yiv'i  râv  vltov,  «  au  mois  du 
renouveau,  »  mense  verni  temporis,  «  au  mois  du 
printemps.  »  L'indication  est  exacte,  mais  donnée  par 
équivalence.  Dans  l'hébreu  il  y  a  ;  «  au  moisd"abib, 
c'est-à-dire  «  des  épis  ».  La  même  expression  et  les 
mêmes  traductions  se  retrouvent  Deut.,  xvi,  1. 

II.  Lesètre. 
PRISCILLE  (grec  :  IlpeïxiUa),  diminutif  de  Pris- 
ca,  femme  d'Aquila.    Rom.,    XVI,   !i;    II    Tim.,    i\.    11». 
Voir  Prisque,  col.  680,  et  Aquila,  t.  i,  col.  809. 

PRISON    (hébreu    :    bôr,  «    fosse    »,  bet    hab-bôr, 

8  maison  delà  fosse,  »  bêthâ'êsûr,  «  maison  du  lien,  » 
bëf  hd'sùrini,  «  maison  des  liés,  »  bel  hap-pequddôt, 
«  maison  des  surveillances,  »  kéle ,  kelû',  kêlV,  de 
kâld',  <,  enfermer,  »  mattârâh,  de  nâtar,  «  garder,  » 
masgér,  de  sdgar,  «  enfermer,  »  mismâr,  de  Sâmar, 
«  garder;  »  Septante  :  cju'/.axr,,  Xâxxoç,  oïxoç  toC  5euu.w- 
T»ipéou;  Vulgate  :  carrer,  cuslodia,  lacus),  lieu  dans 
lequel  on  enferme  les  hommes  qu'on  veut  châtier. 

1°  Prisons  égyptiennes.  —  Injustement  accusé  par 
la  femme  de  Putiphar,  Joseph  fut  jeté  dans  une  prison 
où  étaient  détenus  les  prisonniers  du  roi.  Gen.,  xxxix, 
20.  Cette  prison  est  appelée  bet  has-sohar,  «  maison  de 
la  tour,  »  rjyjpwu.x.  Elle  était  donc  située  dans  une  sorte 
de  forteresse,  probablement  dans  celle  qui  est  appelée 
"  Muraille  blanche  »  par  Thucydide,  i,  101,  et  Hérodote, 
ni,  13,  91,  et  qui  se  trouvait  dans  la  «  ville  de  la  Muraille 
blanche  »,  Pa-sebti-liet,  c'est-à-dire  Mempbis.  La  prison 
était  gouvernée  par  un  sar  bel  has-sohar,  «  chef  de  la 
maison  de  la  tour,  »  àp-/i8ea,u.ocp^Xaxo;,  princeps  car- 
ceris,  dont  Joseph  ne  tarda  par  à  gagner  les  bonnes 
grâces.  Cf.  Vigouroux,  La  Bible  et  les  découvertes  mo- 
dernes. 6"  édit.,  t.  n,  p.  67-69.  Deux  officiers  du  pharaon, 
le  grand  panetier  et  le  grand  éebanson  furent  aussi 
enfermés  dans  cette  prison.  Au  bout  d'un  certain  temps, 
ils  en  sortirent  tous  les  deux,  le  premier  pour  être 
pendu,  le  second  pour  être  rétabli  dans  ses  fonctions. 
Ce  dernier  avait  promis  à  Joseph  de  penser  à  lui 
auprès  du  pharaon,  mais  il  n'en  lit  rien  et  le  jeune 
Hébreu  resta  encore  deux  ans  en  prison.  Il  en  fui  tiré 
pour  expliquer  le  songe  du  prince.  Toutefois  avant  de 
paraître  à  la  cour,  il  dut  se  raser  et  changer  de  vête- 
ments. Gen.,  xli,  14,  15.  Cette  double  précaution 
n'implique  rien  quant  au  régime  intérieur  de  la  prison, 
dans  laquelle  Joseph  était  sans  doute  bien  traité; 
mais  on  comprend  qu'une  tenue  spéciale  fût  obliga- 
toire pour  ceux  qui  étaient  admis  à  l'audience  du  pha- 
raon. —  Pour  éprouver  ses  frères,  Joseph  à  son  tour 
les  fit  mettre  en  prison  pendant  trois  jours,  à  leur 
premier  voyage  en  Egypte.  Ensuite,  il  commanda  de 
tenir  Siméon  sous  bonne  garde  et  ne  lui  rendit  la 
liberté  que  quand  les  autres  revinrent  avec  Benjamin. 
Gen.,  xi.ii,  17,  24;  xliii,  23. 

2»   Prison    philistine.   —   Après    s'être  emparés  de 
Samson,  les   Philistins  le  menèrent  à   Gaza,  lui  cre- 


679 


PRISON    —   PROCÉDURE 


680 


vèrent  les  yeux,  le  lièrent  d'une  double  chaîne  d'airain 
el  le  mirent  dans  une  prison  où  il  avait  à  tourner  la 
meule.  C'était  une  dure  réclusion,  compliquée  des 
travaux  forcés.  Ils  l'en  tirèrent  au  jour  de  la  fête  de 
leur  dieu  Dagon  et  Samson  en  profita  pour  renverser 
le  temple  où  se  tenait  l'assemblée.  ,Iud..  xvi,  21,  25. 

3"  Prisons  assyriennes.  —  Pour  punir  la  révolte 
d'Osée,  roi  d'Israël,  Salmanasar,  roi  d'Assyrie,  le  fit 
saisir,  encbainer  et  jeter  dans  une  prison.  IV  Reg., 
xvn,  4.  Celte  mesure  suppose  la  relégation  d'Osée  en 
Assyrie,  où  le  peuple  d'Israël  allait  bientôt  rejoindre 
son  dernier  roi.  Voir  OSÉE,  t.  IV,  col.  1906.  —  L'avant- 
dernier  roi  de  Juda,  Joacbin  ou  Jécbonias,  subit  le 
même  sort.  Nabuchodonosor  le  tint  en  prison  en  Assyrie 
pendant  trente-six  ans.  IV  Reg.,  xxv,  9,  27.  Au  bout 
de  ce  temps,  le  nouveau  roi,  Évilmérodach,  dès  le 
début  de  son  règne,  le  tira  de  son  humiliation  et  le  traita 
avec  une  faveur  marquée.  IV  Reg.,  xxv,  27-30;  .1er.,  LU, 
31-33.  Voir  Jéciionias,  t.  m,  col.  1211.  -  Le  dernier 
roi  de  Juda,  Sédécias,  pris  et  conduit  à  Nabuchodono- 
sor, alors  à  Rébla,  eut  les  yeux  crevés,  fut  cbargé  de 
deux  cbaines  d'airain  et  jeté  dans  une  prison  de  Baby- 
lone,  où  il  demeura  jusqu'à  sa  mort.  IV  Reg.,  xxv.  6. 
7;  Jer.,  ut,  11.  Plus  tard,  Arsace,  roi  de  Perse,  lit 
mettre  en  prison  le  roi  de  Syrie,  Démétrius,  qui  avait 
violé  son  territoire.  I  Mach.,  XIV,  2,  3. 

i  Prisons  israéliles.  —  1.  Dans  les  premiers  temps, 
les  Israélites  n'avaient  pas  de  prisons.  On  se  conten- 
tait d'exercer  une  surveillance  étroite  sur  les  coupables 
qui  devaient  être  jugés  et  punis.  Lev.,  xxiv,  12;  Num., 
xv,  34.  La  première  mention  d'une  prison  serencontre 
dans  l'histoire  d'Acbab,  roi  d'Israël.  Un  prophète,  du 
nom  de  Michée,  ayant  prédit  l'insuccès  de  l'expédition 
qu'Àchab  et  Josaphat  allaient  entreprendre  ensemble 
contre  les  Syriens,  le  roi  d'Israël  le  lit  mettre  en 
prison,  avec  ordre  de  le  nourrir  du  pain  et  de  l'eau 
d'affliction.  III  Reg.,  XXII,  27.  Voir  MiCHÉE,  t.  iv, 
col.  1063.  —  Le  prophète  Jérémie  subit  plusieurs  rois 
la  prison.  Enfermé  d'abord  dans  la  cour  des  gardes, 
1er.,  xxxti,  2,  8,  12;  xxxm,  1,  il  fut  ensuite  accusé  de 
vouloir  passer  aux  Chaldéens,  saisi,  battu,  et  jeté  dans 
une  basse-fosse,  sous  les  voûtes,  dans  la  maison  du 
secrétaire  Jonathan,  dont  on  avait  fait  une  prison. 
Après  bien  des  jours,  le  roi  Sédécias  le  lit  tirer 
de  là  et  garder  dans  la  cour  de  la  prison,  avec 
ordre  de  lui  fournir  chaque  jour  une  miche  de  pain, 
dont  il  était  privé  précédemment.  .1er.,  xxxvn,  14- 
16,  20.  Ses  ennemis  ne  l'en  firent  pas  moins  descendre 
ensuite  dans  une  citerne  qui  ne  contenait  que  de  la 
boue.  Le  prophètey  enfonça.  On  l'en  tira  avec  des  cordes 
et  on  le  relégua  de  nouveau  dans  la  cour  des  gardes, 
où  il  demeura  jusqu'à  la  prise  de  la  ville.  1er.,  xxxvm, 
6,  13,  28;  xxxix,  14,  15.  —  2.  Apres  la  captivité,  le  roi 
Artaxerxès  donna  à  Esdras  des  instructions  en  vertu 
desquelles  les  transgressenrs  de  la  loi  juive  devaient 
être  punis  de  mort,  de  bannissement,  d'amende  ou  de 
prison.  I  Esd.,  vu,  26.  Il  y  eut  un  peu  plus  lard  une 
prison  à  Jérusalem.  II  Esd.,  III,  25;  XII,  38.  Au  temps 
des  Machabées,  le  général  syrien  Bacchidès  prit  en 
otages  les  lils  des  principaux  Juifs  et  les  retint 
prisonniers  dans  la  citadelle  de  Jérusalem.  I  Maeh.,  ix, 
53.  —  3.  A  l'époque  évangélique,  saint  Jean-Baptiste 
est  mis  en  prison  à  Machéronte  par  le  roi  Hérode 
Antipas  et  \  esl  décapité.  Matth.,  xiv,  3,  10;  Marc,  vi, 
17,  27;  Luc,  m,  20;  Joa.,  m,  24.  Dans  l'Évangile,  il 
esl  fail  mention  de  la  prison  dans  laquelle  le  juge  fait 
enfermer  les  accusés,  Matth.,  v,  25;  Luc,  xn.  58;  de 
celle  où  l'on  met  les  débiteurs  infidèles,  Matth.,  XVIII, 
,1,  i  Ile  où  était  détenu  Barabbas.  Luc,  XXIII,  19, 
25.  Saint  Pierre  proteste  qu'il  est  prêt  à  suivre  Jésus 
m  prison  el  à  la  mort.  Lue.,  xxn,  33.  On  pouvait  visiter 

les  prisonniers  el  l '  venir  en  aide.  Act..  xxv,  23. 

Nôtre-Seigneur  dit  qu'au  jour  du  jugement  il  considérera 


ce  bon  office  comme  rendu  à  lui-même  en  personne. 
Matth.,  xxv,  36.  —  4.  Les  deux  apôtres  Pierre  et  Jean 
sont  mis  en  prison  par  l'ordre  du  sanhédrin.  Act.,  iv, 
3.  Tous  les  autres  Apôtres  y  sont  enfermés  à  leur  tour, 
mais  un  ange  les  en  fait  sortir  pendant  la  nuit.  Act.,  v, 
18-25.  Saint  Paul,  avant  sa  conversion,  faisait  mettre 
en  prison  les  disciples  du  Sauveur.  Act.,  VIII,  3;  xxn, 
19;  xxvi,  10.  Lui-même  y  alla  à  son  tour.  II  Cor.,  VI, 
5;  XI,  23.  A  Philippes,  il  fut  enfermé  avec  Silas  dans 
un  des  cachots  intérieurs  de  la  prison,  et  aurait  pu 
s'échapper  s'il  avait  voulu.  Act.,  XVI,  23-3't.  Les  premiers 
chrétiens  étaient  souvent  jetés  en  prison  par  leurs 
persécuteurs.  Heb.,  XI,  36;  Apoc,  II,  10. 

5»  Au  sens  figuré.  —  La  plaie  des  ténèbres  enchaînait 
les  Égyptiens  comme  dans  une  prison.  Sap..  xvu,  15; 
XVIII,  4.  —  Satan  est  dans  son  enfer  comme  dans  une 
prison.  Apoc.  XX,  7.  —  Avant  la  rédemption,  les  rois 
et  les  peuples  étaient  comme  en  prison,  dans  les 
ténèbres  de  leur  ignorance  et  pour  l'expiation  de  leurs 
méfaits.  Is.,  xxtv,  22;  XLII,  22.  Le  Messie  devait  venir 
pour  faire  sortir  les  captifs  de  prison.  Is.,  XLII,  7.  — 
Le  sage,  même  pauvre  et  sortant  de  prison,  est  capable 
de  régner.  Eccle..  IV,  li.  II.  LesétRE. 

PRISONNIER.  Voir  Captif,  Lu,  col.  222;  Priso 
col.  678. 

PRISQUE  (grec  :  Ilpi'oxa;  Vulgale  :  Prisca,  o  an- 
cienne, «nom  de  la  femme  du  juif  converti  Aquila.  Act., 
xviii, 2,  18,  26;  I  Cor..  XVI,  lit.  On  l'appelait  aussi  l'ris- 
cilla,  diminutif  de  Prisca,  selon  l'usage  romain  qui  em- 
ployait souvent  les  deux  formes.  Suétone  appelle  t.'/an- 
clitia  et  Livilla  celles  que  Tacite  appelle  Claudia  et 
Livia,  Cf.  Drusa  et  Drusilla,  Quinla  et  Quinlilla, 
Secundo  el  Secundilla.  Voir  Avi  il*.,  t.  i,  col.  809. 

PROBATIQUE  (PISCINE)  à  Jérusalem,  loa., 
v,  2.  La  Vulgate  a  appelé  probatica  piscina,  la  piscine 
(y.orjiiS'/iiJi.  qui,  d'après  le  texte  grec,  est  située  htl  rij 
r.ooôi.-.:/J,  (sous  entendu  -j'ir,\.  c'est-à-dire  près  de  là 
porte  des  Brebis  ou  du  Troupeau,  cf.  Il  Esd.,  III,  I,  32; 
XII,  38.  où  la  Vulgale  appelle  cette  porte  porta  Gregis. 
Voir  Jérusalem,  t.  ni,  1°,  col.  1364.  On  donnait  en  hé- 
breu à  celle  piscine  le  nom  de  1!v,()s<tôï;  Vulgate  :  Beth- 
suida.  Voir  BETHSAÏÛE  3,  t.  I,  col.   1723. 

PROCÉDURE,  manière  dont  s'exerce  la  justice 
publique.  —  Chez  les  Hébreux,  comme  en  général  chez 
les  Orientaux,  la  procédure  était  assez  sommaire.  La 
justice  se  rendait  aux  portes  des  villes,  où  les  juges 
s'asseyaient.  Prov.,  xxxi.  23.  Voir  Porte,  i,  3",  col.  553. 
La  justice  'lui  rendue  par  les  anciens,  puis,  a  partir  de 
la  domination  grecque,  par  des  tribunaux  appelés  sanhé- 
drins, formant  trois  juridictii  us  graduées.  Voir  Ji  ai 
t.  m,  eol.  1833-1836.  Les  rois  jugeaient  naturellement 
dans  leur  palais,  111  Reg.,  vu,  7.  el  le  grand  sanhédrin 
dans  un  local  du  temple.  Voir  1.  III,  eol.  1843.  Sur  l.i 
comparution  devant  le  tribunal,  l'instruction  de  l'affaire, 
la  sentence  et  son  exécution,  voir  .li  ci  mi  m  iudiciairi  , 
t.  m.  eol.  1844,  1815.  Quand  la  cause  en  litige  ne  pou- 
vait être  élucidée  ni  par  la  déposition  des  témoins,  ni 
par  le  serment  de  l'accusé,  on  l'abandonnail  au  juge- 
ment de  Dieu.  La  cause  eiileinlue,  les  j  11140s  donnaient 
chacun  leur  suffrage,  soit  pour  absoudre,  soit  pour 
condamner,  soit  pour  déclarer  que  la  question  ne  leur 
paraissait  pas  claire,  La  sentence  était  rendue  d'après 
le  nombre  des  suffrages.  S'il  s'agissait  iVuur  affaire 
grave,  les  juges  ne  pouvaient  rendre  leur  sentence  que 
i,.  lendemain  des  débats.  Ne  prenant  que  peu  de  nour- 
riture et  s'abstenanl  de  vin,  ils  passaienl  la  nuit  à  con- 
i;.,.,.,  deux  1  deux  sur  la  cause.  Le  matin,  ils  rendaient 
leur  sentence  définitive,  et  ne  pouvaient  d'ailleurs 
changer  leur  avis  de   la  veille  que  dans   un  sens  favo- 


681 


PROCÉDURE    —   PROCÈS 


682 


rable,  Le  nombre  des  juges  étant  toujours  impair,  il 
pouvait  arriver  que  l'un  d'eux  déclarai  que  la  question 
ne  lui  paraissait  pas  élucidée,  et  que  les  autres  juges  se 
partageassent  à  voix  égales  pour  ou  contre.  En  pareil 
cas.  on  adjoignait  d'autres  juges  aux  premiers,  jusqu'à 
ce  que  la  sentence  put   être  portée  à  la  pluralité  dis 
voix.  S'il  y   avait   au   grand  sanhédrin   trente-six  voix 
pour  condamner  et  trente-cinq  pour  absoudre,  on  con- 
tinuait les  débats  jusqu'à  ce  qu'un  des  juges  qui  con- 
damnaient  se  ralliât  à  la  sentence  opposée.  Cf.  Iken, 
Antiquitates  hebraiese,  Brème,   1741,  p.  410,  411.  Ces 
complications  de  procédure  ne  furent  instituées  qu'assez 
tard   après  la  captivité.    Elles   montrent  le   souci  que 
l'on  avait  d'éviter  une  sentence  erronée  dans  les  affaires 
graves.  Ce  souci  était  d'autant  plus  justifié  qu'il  n'exis- 
l.nl  pas   de   tribunal   d'appel   et  que   la  sentence  était 
exécutée  immédiatement.  Cf.   Sanhédrin,  iv,   1  ;  v,  5. 
Sur  la  procédure  suivie  au  grand  sanhédrin  de  Jérusa- 
lem, voir  Sanhédrin.  —  Comme  il   était  interdit  aux 
Juifs  de  prendre  part  à  une  affaire  judiciaire  le  jour  du 
sabbat,  cf.  Beza    \  Yom   tob),  v,  '2,  l'empereur   Auguste 
exempta    les  Juifs  de  tout  l'empire  de  l'obligation  de 
témoigner  en  justice  ce  jour-là.  Cf.  Josèphe,  A)it.  jud., 
XVI,  vi,  2.  4.   Par  le  même  décret,   il  voulut  que  le 
vol   de    l'argent   ou    des    livres    sacrés    fût  considéré 
comme  sacrilège  et  puni  en  conséquence.  La  loi  mo- 
saïque  réglant  à  la   fois  les  affaires  religieuses  et  les 
affaires   civiles,  les  Juifs   avaient   obtenu  le   privilège 
d'être  jugés   selon   le  droit  mosaïque.  Ils   dirimaient 
d'après  ce  droit  les  contestations  qui   s'élevaient  dans 
leurs  communautés   de   la   dispersion.  C'est*  ainsi  que 
S.iiil  reçut  pleins  pouvoirs  du  sanhédrin  de  Jérusalem 
pour  ;dler  poursuivre  juridiquement  à  Damas  les  Juifs 
passés  à   la  foi   chrétienne.  Act.,  ix,  2;  xxn,  19;  xxvi, 
11,   12.   A  Corinthe,    les   Juifs   traduisirent  saint  Paul 
devant  le  tribunal  du  proconsul  Gallion,  sous  prétexte 
qu'il    prêchait   une  religion   contraire  à   leur   loi.  Les 
Juifs  attaquaient   ainsi    saint  Paul  en  qualité  de  Juif; 
mais   ne  se  sentant  pas  en  force  pour  porter  contre  lui 
une  sentence  exécutoire,  ils  en  appelaient  à  l'autorité 
romaine,  qui  d'ailleurs  se  récusa.  Act.,  xvin.  12-16.  Le 
sanhédrin  le  poursuivit   plus   tard   à   Jérusalem,  mais 
devant  le  procurateur,  à  cause  de  l'amoindrissement  de 
ses  pouvoirs  en  matière  criminelle.  Act.,  xxiv,  1  ;  xxv, 
7.  Il  l'accusait  surtout  d'actes  contraires  à  la  loi  reli- 
gieuse, et  les  procurateurs  de  Judée  étaient  obligés  d'en 
connaître,  sans  pouvoir  se   dérober   comme    Gallion, 
parce    que    les  attributions   du   sanhédrin   en   matière 
criminelle  étaient  passées  entre  leurs  mains.  Du  reste, 
il  en  avait  été  déjà  ainsi  au  temps  de  Xotre-Seigneur. 
C'est   bien   la    loi  mosaïque  que  l'on   invoqua  devant 
Pilate,  Joa.,   xix,  7;   les  Juifs  avaient  la  prétention  de 
la  faire  triompher  dans  le  sens  qu'ils  lui  prêtaient,  et 
ils  y  réussirent  au  moins  par  intimidation.  Saint  Paul 
fut  plus  d'une  fois  cité  devant  les  tribunaux  juifs  de  la 
dispersion;  il   atteste  que   cinq  fois  il  reçut  des  Juifs 
trente-neuf  coups  de  fouet,  châtiment  que  les  commu- 
nautés de  Palestine  et  de   la  dispersion  avaient  le  droit 
d'infliger  à  leurs  coreligionnaires.   II  Cor.,  xi,  24.  A 
Sardes,  avec   l'autorisation  du  pouvoir   de   Rome,   les 
Juifs  avaient  un  tribunal  dans  lequel  ils  jugeaient  les 
contestations  qui   s'élevaient  entre  eux.   Cf.   Josèphe, 
Anl.  jud.,    XIV.   x,  17.   Presque  toutes  leurs  commu- 
nautés exerçaient  ce  droit.  Cf.  Schurer,  Geschichte  des 
jùdischen    Volken  im  Zeit.  J.  (.'.,  Leipzig,  t.  m,  189S, 
p.  71,  72.  II.  Lesètre. 

PROCÈS  (hébreu  :  rib,  mâdôn;  Septante  :  /.pin:, 
■/.fia»,  ivxû.ayia;  Vulgate  :  judicium,  lis,  disceptatio), 
action  intentée  devant  les  juges.  L'objet  même  du  pro- 
cès s'appelle  ddbâr,  <•  parole,  affaire,  8  /.v.?-.;,  causa, 
Exod.,  XVIII,  16,  22;  XXII,  9,  et  celui  qui  a  un  procès 
est  un  ba'al  debdrim,  «  ayant  des  affaires,  »  xpi'creç,  quid 


nalitm  guseslionis.  Exod.,  xxiv,  14.  Sur  les  questions 
se  rapportant  aux  procès,  voir  Jugement  judiciaire, 
t.  ni,  col.  1843;  Plaideur,  col.  448;  Procédure,  col.  680. 
—  I"  La  loi  mosaïque  s'occupe  des  procès  que  rendent 
inévitables  les  différentes  manières  d'envisager  une 
même  question,  surtout  quand  il  s'agit  d'intérêts  ma- 
tériels. Dans  le  principe,  au  désert,  Moïse  lui-même 
prenait  la  peine  de  juger  tous  les  procès,  et  cette  occu- 
pation l'accaparait  du  matin  au  soir.  Sur  le  conseil  de 
Jéthro,  il  se  dessaisit  de  sa  fonction  déjuge  et  la  con- 
fia à  des  hommes  chargés  chacun  des  affaires  d'une 
partie  du  peuple.  Exod. r  xvm,  13-26.  Voir  Juges,  t.  m, 
col.  1834.  Dans  sa  législation,  il  détermina  la  juridiction 
devant  laquelle  devaient  être  portés  les  différents  pro- 
cès. Exod.,  xxn,  9,  14;  xxiv,  14;  Deut.,  xvii,  8;  xix,  17; 
xxv,  1.  Il  défendit  soit  de  se  ranger  dans  un  procès  à 
l'avis  du  grand  nombre  contre  la  justice,  soit  de  favori- 
ser le  pauvre  au  détriment  du  droit,  soit  de  l'accabler. 
Exod.,  xxiii,  ,  2,  3,  6.  Son  organisation  judiciaire  pour 
l'examen  des  procès  fut  plus  tard  renouvelée  par  Josa- 
phat.  II  Par.,  xvin,  9,  10.  —  Job,  xxix,  16,  dit  qu'il 
examinait  avec  grand  soin  la  cause  de  l'inconnu.  —  Les 
querelles  et  les  procès  sont  fréquemment  suscités  par 
l'homme  violent,  Prov.,  xv,  18,  ou  l'homme  faux. 
Prov.,  xvi,  28.  Il  est  permis  de  défendre  sa  cause  con- 
tre l'insulteur,  mais  en  veillant  à  ne  pas  compromettre 
des  tiers.  Prov.,  xxv,  9.  Commencer  un  procès  ou 
soulever  une  querelle,  c'est  ouvrir  une  digue.  Prov.,xvn, 
14, car  on  ne  sait  ni  quand  ni  comment  la  chose  finira. 
Il  est  conseillé  d'éviter  les  procès  avec  un  riche,  car 
celui-ci  peut  aisément  gagner  les  juges  à  sa  cause  avec 
son  argent.  Eçcli.,  vm,  2.  —  Notre-Seigneur  recom- 
mande d'éviter  les  procès  et  de  s'arranger  à  l'amiable, 
Matth.,  v,  25,  et  il  désire  que  son  disciple  souffre  le 
dommage  plutôt  que  d'en  exiger  la  réparation.  Matth.,  v, 
38-41.  Saint  Paul  blâme  les  chrétiens  qui  ont  des  pio- 
cès  les  uns  avec  les  autres;  il  préférerait  qu'on  sup- 
portât l'injustice.  I  Cor.,  vi,  7,  8.  Un  chrétien  et,  à 
plus-  forte  raison,  un  ministre  de  l'Église  doit  être 
àVcc/or,  «  non  combatif,  »  non  liligiosus,  ennemi  des 
querelles  et  des  procès.  I  Tim.,  m,  3;  II  Tiin.,  n,  24; 
Tit.,  m,  2.  —  Ponce  Pilate  proclama  plusieurs  fois 
qu'il  n'y  avait  pas  matière  à  procès  dans  ce  que  les 
Juifs  reprochaient  à  Notre-Seigneur.  Luc,  xxm,  ï,  14; 
Joa.,  xvm,  38;  xix,  4,  6.  Sur  les  irrégularités  dont  le 
sanhédrin  se  rendit  coupable  dans  la  conduite  de  ce 
procès,  voir  t.  m,  col.  1845;  Chauvin,  Le  Procès  île 
Jésus-Christ,  Paris,  1901. 

2°  Au  sens  figuré,  on  compare  à  un  procès  dont  Dieu 
est  le  juge  les  difficultés  qui  s'élèvent  entre  les  bons  et 
leurs  persécuteurs,  entre  le  juste  éprouvé  et  Dieu  lui- 
même.  Ainsi  Dieu  juge  entre  David  et  SaùI,I  Reg.,xxiv, 
16,  entre  David  et  Nabal.  I  Reg..  xxv,  39.  En  butte  à 
l'épreuve,  à  cause  de  laquelle  on  incrimine  sa  vertu, 
Job,  xxxi,  35-37,  s'écrie  ; 

Qui  me  fera  trouver  quelqu'un  qui  m'écoute! 
Voilà  mon  thav  .que  le  Tout-Puissant  me  réponde; 
Que  mon  adversaire  écrive  aussi  sa  cëdule  ! 
On  verra  si  je  ne  la  mets  pas  sur  mon  épaule, 
Si  je  n'en  ceins  pas  mon  front  comme  d'un  diadème  . 

Job  a  écrit  sa  cédule  d'accusation  ou  de  défense  et  il  l'a 
signée,  comme  on  faisait  d'habitude,  avec  le  thav,  la 
dernière  lettre  de  l'alphabet  hébraïque,  qui  avait  dans 
l'ancienne  écriture  la  forme  d'une  croix.  Il  veut  que  son 
adversaire,  l'ami  qui  l'accuse,  en  fasse  autant.  Il  est  si 
sur  de  son  innocence  et  de  la  sentence  du  Tout-Puis- 
sant, qu'il  traitera  les  pièces  du  procès  comme  si  elles 
étaient  pour  lui  un  titre  de  gloire  et  les  attachera  osten- 
siblement à  son  épaule  et  à  son  front.  —  Dieu  estjuge 
et  défenseur  dans  la  cause  de  l'orphelin  contre  l'oppres- 
seur. Prov.,  XXIII,  11.  Les  justes  éprouvés  lui  confient 
leur  cause.  Ps.  ix,  5;  xlhi  (xi.n),   1;  Is.,  u,  22.  —  Le 


683 


PROCÈS   —    PROCHAIN 


684 


Seigneur  lui-même,  en  procès  contre  sa  vigne,  c'est-à- 
dire  contre  son  peuple,  défère  le  jugement  aux  hale- 
tants de  Jérusalem  et  aux  hommes  de  Juda,  c'est-à-dire 
aux  coupables  eux-mêmes,  dont  l'inlidélité  est  si  évi- 
dente qu'ils  seront  bien  obligés  de  se  condamner. 
ls.,  v,  3.  H.  LesëTRE. 

PROCHAIN  (hébreu  :  'ah,  «  frère  »,  rê'a,  «  compa- 
gnon ;  »  Septante  :  •',  -n'/r^ivi  (sous-entendu  :  wv),  «  ce- 
lui qui  est  auprès;  »  Vulgate  :  proximus),  tout  homme 
vis-à-vis  d'un  autre  homme. 

I.  Devoirs  envers  le  prochain  dans  l'Ancien  Tes- 
tament. —  1°  La  loi  ancienne  prescrit  différents  devoirs 
à  l'égard  du  prochain.  Il  faut  respecter  sa  vie,  Exod., 
xx,  13,  sous  peine  de  mort,  Gen.,  i.\,  5;  Exod.,  XXI,  I  1: 
respecter  ses  biens,  Exod.,  xx,  15,  sous  peine  d'avoir  à 
restituer  le  double,  Exod.,  xxn,  9;  ne  convoiter  ni  sa 
femme,  ni  ses  biens,  Exod.,  xx.  17;  ne  pas  le  frapper, 
à  peine  d'avoir  à  réparer  le  tort  causé,  Exod.,  xxi,  18; 
le  traiter  humainement  quand  on  prend  un  gage  sur 
lui,  Exod.,  xxn.  20;  ne  pas  l'opprimer.  Lev.,  xix.  13; 
le  iuger  selon  la  justice,  Lev.,  xix,  15;  ne  pas  l'accuser 
méchamment,  Lev.,  xix.  16;  le  reprendre,  Lev.,  xix.  I"  : 
l'aider  dans  sa  pauvreté,  Lev.,  xxv,  35,   36;  respecter 
les  limites  de  son  champ.  Deut.,  xix,  14,  etc.  Tous  ces 
devoirs  se  résument  en  ces  deux  prescriptions  :  «  Tu 
ne  haïras  point  ton  frère  dans  ton   coeur,  tu  aimeras 
ton  prochain  comme  toi-même.  »  Lev.,  xix,  17,  18.  Des 
recommandations  spéciales  visent  certaines  catégories 
de   prochain,    les  esclaves,  voir  t.   Il,   col.    1925,    les 
étrangers,  voir   t.  n.  col.   2(.HO,  les  mercenaires,  voir 
t.  iv,  col.  990,  les  pauvres,   voir   t.    IV,  col.   2234,  les 
pères,  voir  col.  128,  et  mères,  voir  t.  iv,  col.  995,  etc. 
2°  Les  auteurs  sacrés  rappellent  les  différentes  pres- 
criptions   imposées  par  Dieu  à   l'égard  du    prochain. 
Eccli.,  xvn.  12.  On  doit  s'abstenir  de  faire  du  mal  au 
prochain  ni  croire  celui  que  l'on   dit  de  lui.  Ps.  XV 
(xiv),  3,    4.   Celui   qui   méprise  son  prochain  se  rend 
coupable,    l'rov..   XIV,   21.   11   ne    faut    pas    lui    garder 
ne  de  ses  injustices,  Eccli.,  x,  6,  ni  refuser  de 
lui  pardonner,  si  l'on   veut  être  pardonné  soi-même, 
Eccli.,  XXVIII,  2,  ni   forger  des  mensonges  contre  lui, 
Eccli.,  vu,   I!!.  On  lui   prêtera  s'il   est  dans   le   besoin. 
Eccli.,  xxix,  2.  On  ne  lui  ravira  pas  sa  subsistance,  ce 
qui  serait  lui  donner  la  mort.  Eccli.,  xxxiv,  26.  On  lui 
dira  la  vérité.  Zach.,  VIII,  16.  On  n'imitera  pas  les  faux 
témoins,    qui   sèment    la    discorde    entre    les   frères. 
Prov.,  vi,    19.    On   évitera    même   de    trop    fréquentes 
visites  dans  la  maison  du  prochain,  Prov.,  xxv.  17,  et 
les  salutations  intempestives.   Prov.,  xxvm,    14.  Si  on 
juge  des  désirs  du  prochain  d'après  les  siens  propres, 
Eccli.,  xxxi,  18,  on  saura  comment  régler  sa  conduite 
envers  lui,  et  alors  il  sera  bon  et  doux  pour  des  frères 
d'habiter  ensemble.  Ps.  cxxxm  (cxxxn),  1. 

II.  La  notion  DE  PROCHAIN  cm/  LES  .lins.  —  I  II 
faut  observer  que  dans  ces  textes  de  l'Ancien  Testa- 
ment, les  devoirs  prescrits  envers  relui  que  nous 
appelons  le  prochain  concernent  celui  qui,  pour  les 
Hébreux,  pouvait  porter  le  nom  de  ah.  •■  frère,  »  ou 
rê'a,  «  compagnon.  »  Or  ces  noms  ne  se  donnaient  en 
général  qu'aux   compatriotes.    La    loi    interdisait   toute 

amitié  avec  les  Amalécites,  Lxod..  xvn,  Hi;  Deut.,xxvj 
19;  les  Ammonites  et  les  Moabites.  lient.,  XXIII,  3-6; 
1rs  Mailiauiles,  Xiiiu  ,  xxv.    17,    18,  et   sept   peuples  du 

pays  de  Chanaan.   Deut.,  vu,  1,  2.  Le  Seigneur  avait 

promis  à  Israël,  s'il  était  lidèle,  d'être  l'ennemi  de  ses 
mi    et  l'adversaire  de  ses  adversaires.  Exod.,  xxm. 

22.  Seuls,  les  Iduméens  et  les  Egyptiens  étaient  misa 

part  et  ne  devaient  pas  être  dis  objets  d'abomination. 

l'eut.,  xxm,  7.  Ces  mesures  étaient  prises  pour  inter- 
toute   union    el    même    tout    contact    entre    les 

Hébreux    et  des  populations   immorales  Vi    idolâtres. 

Mais  en    Israël,  comme   généralement  chez  les  autres 


peuples  de  l'antiquité,  on  en  vint  aisément  à  confondre 
ensemble  l'étranger  et  l'ennemi.  Chez  les  Grecs, 
i-'ii'j--y.',i.  <■  autrui,  l'étranger,  »  était  devenu  le  nom 
de  l'ennemi.  Cf.  Mail.,  v,  214;  Udys.,  xvi,  102,  etc. 
Chez  les  Romains,  la  loi  des  xn  Tables  donnait  encore 
à  l'étranger  le  nom  d'hoslis,  qui  par  la  suite  fut  celui 
de  l'ennemi.  Cf.  Cicéron,  De  '■flic,  i,  12,  37.  De 
même,  chez  les  Hébreux,  on  s'habitua  à  regarder 
comme  ennemis,  par  conséquent  comme  exclus  des 
préceptes  de  l'amour  et  de  la  bienveillance,  tous  ceux 
qui  n'appartenaient  pas  à  la  nation  choisie.  On  est 
obligé  de  convenir  que  les  hostilités  dont  les  Israélites 
furent  fréquemment  l'objet  de  la  part  des  peuples 
voisins,  n'étaient  pas  faites  pour  les  incliner  à  une 
grande  amitié  pour  les  étrangers, 

2°  Avec  le  temps,  les  sentiments  d'antipathie  s'accen- 
tuèrent et  devinrent  une  véritable  haine  pour  tout  ce 
qui    n'était   pas   Juif.    Déjà  à    Suse,    d'après    Josèphe, 
Ant.jud.,  XI,  vi.  5,  Aman  accusait  le  peuple  juif  d'être, 
par  ses  mœurs  et  ses  lois,  i  ennemi  du  peuple  perse  et 
de   tous    les  hommes.  »  Plus    tard.   Apollonius   Molon 
représentait  les  Juifs  comme  g  athées  et  misanthropes  i, 
Josèphe,  Cont.  A  pion.,  n,    11;   il  leur  reprochait  de  ne 
pas  recevoir  ceux  qui  avaient  d'autres  idées  qu'eux  sur 
la  divinité  et  de  refuser  tout  commerce  avec  ceux   qui 
ne  partageaient  pas  leur  genre  de  vie.  Il  est  vrai  que 
Josèphe,  Cont.  Apion.,  Il,  36,  37,  lui  renvoie  le  reproche 
en  lui  faisant  observer  que  les  autres  peuples,  spéciale- 
ment les  Grecs,  Lacédémoniens,  Athéniens  et  autres, 
en    faisaient   tout  autant.    Lysimaque    prétendait   que 
Moïse  avait  ordonné  à  son  peuple  de  n'avoir  de  bien- 
veillance   pour   aucun   autre    homme   et  de    toujours 
conseiller  aux  autres   non    le    meilleur,    mais  le  pire, 
Josèphe,    Cont.  Apion.,  i,  3t.  et  l'un  des  conseilli  rs 
d'Antiochus   Subies   dissuadait  ce   prince  de  ne  rien 
accorder  aux  Juifs  à  cause  de  leur  àjiiÇt'a,  leur  habitude 
de   ne    pas    se    mêler   aux    autres   peuples.    Josèphi 
Anl.  jml.,  XIII,  VIII,  3.  Tacite,  But.,  V,5,  leur  attribue 
adversus  omnes  aliot  hostile   odium,  i    une   inimitié 
haineuse  a  l'égard   de  tous  les  autres,       et  Juvénal, 
Sat.,  xiv,  103.  loi,  les  accuse  de  ne  vouloir  montrer  le 
chemin  et  indiquer  les  fontaines  qu'à  leurs  coreligion- 
naires. Cf.  Justin,  xxxw,  2,  15.  Ces  accusations  étaient 
justifiées  eu  grande  partie.  Un  docteur  de  la  loi  en  est 
encore  à  demander  à  Notre-Seigneur  :  g   Oui  donc  est 
mon  prochain?»  Luc.  X,  29.  Du  reste,  les  écrivains  du 
Talmud  déclarent  formellement  qu'on  ne  doit  exercer 
envers  les  gentils  ni  bienveillance  ni  miséricorde,  que 
le  païen  n'est  pas  le  prochain,  que  les  gentils  sont  com- 
parables aux  chiens,  etc.  Cf.  Lightfoot,  Horœ  Itrbraicx 
et  talm.,  m  Malth,  v,  43,  et  in  Luc,  ix,  60.  Saint  Paul 
résume  tout,  d'un  mot   qui  confirme  ce  qu'on  dit  les 
autres  auteurs,  quand   il  dénonce  l'hostilité  des  Juifs, 
0êcS    \nt    ipeaxtfvTtûVj    xai    tcxtiv    àv6pft>itoic    âvav-faov, 
■   déplaisant  a    hieu   et  ennemis  de  tous  les  hommes.  » 

I    Thés..    11.    15. 

3"  Dans  le  discours  sur  la  montagne,  Notre-Seigneur 
dit  à  ses  disciples  :  g  Vous  avez  appris  qu'il  a  été  dit  : 
Tu  aimeras  ton  prochain  et  tu  haïras  Ion  ennemi.  « 
Matlli.,  v,  ii.  Le  Sauveur  n  entend  pas  ici  faire  allusion 
à  l'interprétation  des  Juifs,  mai-,  comme  dans  les 
autres  passages  du  discours.  Matth.,  v.  21,  27,  31,33, 
38,  il  se  réfère  aux  ternies  de  la  lui  ancienne.  I  Ir  nulle 
put  n  1!  -I  i  ii.  commande  la  haine  des  ennemis.  Aussi 
le  m, il  haïr  ■•  doit-il  s'entendre  ici  dans  un  sens 
relatif.  Il  signifie  seulement  «  aimer  moins  eu  ne 
pas  aimer  ».  comme  dans  le-  texte-  où  il  est  oppi 
i  aimer  t.  lien.,  xxix,  31;  lient.,  xxi,  15.  lfi  ;  Mal.,  i, 
2:  Matth..  vi,  24;  Luc,  xiv.  26;  xvi,  13;  Joa.,  xn,  25; 

R ix,   13,   La  pensée  du  divin  Maître  doit  donc    tic 

que  la  loi  ancienne  ne  prescrivait  pas  d'aimer  les 
ennemis  connue  on  aime  les  ami-,  le  prochain;  lui- 
même  va  corriger  cette  loi  ainsi  entendue.  Sans  doute. 


685 


PROCHAIN 


PROCOPE    DE    GAZA 


686 


la  législation  mosaïque  suggérait  parfois  la  haine  envers 
les  ennemis,  non  entant  qu'hommes,  mais  en  lanl  que 
peuples  pervers,  malfaisants  et  idolâtres,  dont  il  fallait 
se  délier  et  se  tenir  à  l'écart.  En  prescrivant  d'aimer 
le  rê'a  comme  soi-même,  Lev.,  xix,  1S,  elle  désignait 
tout  d'abord  l'Israélite,  il  est  vrai  ;  rien  ne  prouve  cepen- 
dant qu'elle  excluait  le  prochain  en  général  ;  le  contraire 
résulte  certainement  de  la  manière  [dont  les  auteurs 
sacrés  parlent  des  autres  hommes,  de  l'étranger  inoll'en- 
sif  et  même  des  ennemis  personnels.  Cf.  Job,  XXXI, 
29,  30;  Prov.,  xxiv.  17,  29;  xxv,  21;  Rom.,  xn,  '20. 
Aussi  faut-il  tenir  pour  fausse  et  contraire  à  la  loi 
l'interprétation  des  Juifs  qui,  opposant  le  ré  a  au  nokrî, 
le  compatriote  à  l'étranger,  se  croyaient  permis  d'avoir 
pour  l'un  l'amour  et  pour  l'autre  l'opposé  de  l'amour, 
la  haine.  * 

III.  Devoirs  envers  le  prochain  dans  le  Nouveau 
Testament.  —  1"  Notre-Seigneur  parle  beaucoup  plus 
explicitement  de  ces  devoirs  que  ne  l'avait  fait  la  loi 
ancienne.  Tout  d'abord,  il  donne  au  mot  «  prochain  n 
l'extension  qu'il  comporte.  Le  prochain,  ce  n'est  pas 
seulement  l'ami,  le  compatriote,  c'est  encore  l'étranger 
el  même  l'ennemi.  Notre-Seigneur  le  déclare  avec 
insistance  :  «  Et  moi  je  vous  dis  :  Aimez  vos  ennemis, 
sez  ceux  qui  vous  maudissent,  faites  du  bien  à 
ceux  qui  vous  haïssent,  et  priez  pour  ceux  qui  vous 
maltraitent  et  qui  vous  persécutent.  »  Matin.,  v,  44.  Il 
veut  qu'en  cela  on  imite  le  Père  céleste,  qui  fait  lever 
son  soleil  et  descendre  sa  pluie  sur  les  méchants  tout 
comme  sur  les  bons.  Matth.,  v,  -15.  Dans  la  parabole  du 
bon  Samaritain,  il  explique  quel  est  celui  qui  se  con- 
duit vraiment  en  prochain  vis-à-vis  d'un  autre  homme. 
Le  prochain  du  malheureux  Juif  blessé  n'a  été  ni  le 
prêtre,  ni  le  lévite,  ses  compatriotes,  mais  le  Samari- 
tain, abhorré  des  Juifs,  et  pourtant  miséricordieux 
envers  quelqu'un  qui  le  détestait.  Le  docteur  de  la  loi 
est  forcé  d'en  convenir.  Luc,  x,  30-37. 

2°  Le  Sauveur  aime  à  rappeler  le  précepte  de 
l'amour  envers  le  prochain.  A  un  autre  docteur,  il 
enseigne  que  le  plus  grand  commandement  de  la  loi 
concerne  l'amour  de  Dieu,  mais  que  «  le  second  lui 
est  semblable  »  et  concerne  l'amour  du  prochain.  Matth., 
xxil,  3(3-39.  Il  appelle  ce  commandement  un  «  com- 
mandement nouveau  o,Joa.,  xin,  34,  parce  que  la  loi  de 
I  amour  du  prochain  n'avait  jamais  été  formulée  avec 
tant  d'instance,  de  précision  et  d'extension.  Matth.,  v, 
14;  xix,  19;  xxvi,  39;  Marc,  xn,  31,33;  Luc,  x,  27  ; 
Rom.,  xin,  9;  Gai.,  v,  11;  Jacob.,  Il,  8. 

3°  En  conséquence  du  précepte,  il  ne  faut  pas  s'irriter 
contre  son  frère,  Matth.,  v,  22,  ni  juger  le  prochain, 
Rom.,  xiv,  10;  Jacob.,  iv,  13,  ni  chercher  la  paille 
■dans  son  œil,  Matth.,  vu,  3;  Luc,  vi,  41,  ni  le  scanda- 
liser. I  Cor.,  vin,  13.  On  doit  au  contraire  se  réconci- 
lier avec  lui,  Matth.,  v,  24,  le  reprendre  quand  il  fait 
mal,  Matth.,  xvm.  15,  lui  pardonner  ses  torts,  Matth.. 
xvm,  35,  prier  pour  lui  quand  il  pèche,  I  Joa.,  v,  l(i, 
l'aider  dans  son  indigence,  Jacob.,  H,  15,  chercher  à 
lui  plaire  pour  le  bien,  Rom.,  xv,  2,  faire  de  la  vérité 
la  règle  des  rapports  qu'on  a  avec  lui.  Eph.,  iv,  25.  Le 
véritable  amour  ne  fait  jamais  de  mal  au  prochain. 
Rom.,  xin,  10.  Aimer  le  prochain,  c'est  accomplir  la 
loi.  Rom.,  xm,  8,  et  vivre  dans  la  lumière.  I  Joa.,  n, 
10.  Ne  pas  l'aimer,  c'est  vivre  dans  les  ténèbres,  I  Joa., 
n.  9.  11,  n'être  pas  de  Dieu  et  se  faire  homicide. 
I  Joa.,  ni.  10,  15.  On  ne  peut  pas  vraiment  aimer  Dieu 
si  l'on  n'aime  pas  son  frère.  I  Joa.,  iv,  20. 

4°  Le  divin  Maître  indique  la  raison  fondamentale  des 
devoirs  envers  le  prochain  quand  il  ordonne  à  tous  de 
-,  adresser  à  Dieu  en  disant  :  «  Notre  l'ère  qui  êtes  aux 
cieux,  m  quand  il  fait  ajouter  ;  «  Pardonnez-nous  nos 
offenses  comme  nous  pardonnons  à  ceux  qui  nous  ont 
offensés,  •>  Matth.,  VI,  10,  12,  et  qu'il  dit  :  g  Vous  êtes 
tous  frères,.,  vous  n'avez  qu'un  seul  Père,  celui  qui  est 


dans  les  cieux.  »  Matth., XXIII,  8,  9.  SaintPaul  reprend 
la  même  idée  sous  cette  autre  forme  :  o  Nous  sommes 
membres  les  uns  des  autres.  »  Eph.,  iv.  25. 

II.  Lesétre. 
PROCHORE  (grec  :  IIpo/opo;),  un  des  sept  diacres 
institués  par  les  Apôtres  à  Jérusalem.  Il  est  nommé  le 
troisième  de  la  liste,  après  saint  Etienne  et  saint  Phi- 
lippe. Act.,  vi,  5.  Son  nom  ne  parait  nulle  autre  part 
dans  le  Nouveau  Testament.  D'après  une  tradition,  il 
fut  institué  par  saint  Pierre,  évèque  de  Nicomédie  en 
liithynie.  On  trouve  dans  la  Magna  Bibliotheca 
Patrum,  Cologne,  1618,  t.  i,  p.  49-69,  une  Ristoria 
Prochori  Christi  discipuli,devita  B.  Toannis  apostoli, 
livre  apocryphe,  rempli  de  fables  et  d'erreurs.  Le  mar- 
tyrologe romain  place  la  fête  de  saint  Prochore  au 
6  avril.  Voir  Acta  sanctorum ,  aprilis  t.  I,  p.  818. 

PROCONSUL  (grec  :  àve-JTcato;),  gouverneur  d'une 
province  sénatoriale.  Le  nom  grec  du  proconsul,  iv- 
8-jtoxto;  (ivW  «  à  la  place  de,  »  -jTtaTo;  «  celui  qui  est  au 
sommet,  le  consul  »)  se  trouve  dans  deux  endroits  du 
livre  des  Actes,  xm,  7,  8,  12,  et  xix,  38.  On  y  rencontre 
aussi  une  fois  le  verbe  àvOuTrate-ju,  xvm,  12,  «  être  pro- 
consul »,  faire  l'office  de  proconsul.  —  On  sait  que  les 
provinces  de  l'Empire  romain  étaient  divisées  en  séna- 
toriales et  en  impériales.  Les  provinces  sénatoriales 
étaient  celles  qui  étant  pacifiées  n'avaient  pas  besoin 
de  forces  militaires.  On  en  confiait  l'administration  à 
un  magistrat  qui  exerçait  les  fonctions  civiles  de  gou- 
verneur de  la  province  et  portait  !e  titre  de  proconsul. 
—  1°  L'ilede  Cypre,  après  la  bataille  d'Actium,  était  deve- 
nue province  impériale;  mais 'cinq  ans  après,  elle  [fut 
donnée  au  Sénat  et  administrée  par  un  proconsul.  Dion 
Cassius,  liv,  4;  Corpus  incript.  latin.,  t.  IX,  2845;  J.  Mar- 
quardt,  Organisation  de  l'empire  romain  [Manuel  des 
antiquités  romaines  de  Mommsen  et  Marquardt).  t.  H, 
p.  328.  Comme  ce  proconsul  était  de  rang  prétorien, 
Strabon,  xiv,  vi,  6,  quelques  exégètes  ont  cru,  bien  à 
tort,  que  saint  Luc,  xm,  7,  s'était  trompé  en  mettant 
un  proconsul  en  Cypre.  Mais  l'historien  des  Actes  des 
Apôtres  donne  à  Sergius  Paulus  son  vrai  titre.  Une  in- 
scription découverte  dans  cette  île  en  1677,  est  datée  de 
son  proconsulat  :  twv  ètù  HaûXou  àvô'j-ito'j.  Cf.  F.  Vi- 
gouroux,  Le  Nouveau  Testament  et  les  découvertes 
modernes,  2e  édit.,  p.  200-206.  Voir  aussi  la  monnaie 
proconsulaire  de  Cominius  Proclus,  Cypre,  t.  Il,  (îg.  443, 
col.  1166.  —  2»  L'Achaïe  d'abord  province  impériale,  Ta- 
cite,. Ann.,i,  76,  fut  rendue  au  Sénat  par  Claude.  Suétone, 
Claudius,  26.  Saint  Luc  a  donc  donné  au  gouverneur 
résidant  à  Corinthe  le  titre  précis  qui  lui  convenait. 
Ce  proconsul,  au  moment  ou  saint  Paul  vint  évangéliser 
celte  ville,  était  Gallion,  frère  de  Sénèque.  J.  Mar- 
quardt, Inc.  cit.,  p.  220.  Voir  Gallion,  t.  m,  col.  93.  — 
Au  moment  du  partage  des  provinces  l'Asie  fut  donnée 
au  Sénat  et  administrée  par  un  proconsul  a  12  faisceaux 
qui  résidait  à  Éphèse.  Voir  Éphèse,  t.  il,  fig.  582, 
col.  1831.  Dans  la  sédition  soulevée  contre  saint  Paul 
par  l'orfèvre  Démétrius,  le  secrétaire  de  la  ville  dit  au 
peuple,  Act.,  xix,  38  :  «  Si  Démétrius  et  ses  ouvriers 
ont  à  se  plaindre  de  quelqu'un,  il  y  a  des  jours  d'au- 
dience et  des  proconsuls.  »  En  mettant  le  nom  pro- 
consuls au  pluriel,  il  ne  veut  pas  indiquer  qu'il  y  avail 
plusieurs  proconsuls  à  la  tête  de  la  province  d'Asie; 
mais  il  se  sert  d'un  pluriel  de  catégorie,  marquant  qu'il 
y  a  toujours  des  proconsuls  auxquels  on  peut  recourir. 
Saulio  et  Daremberg,  THctiorihaire  ''es  ani>>itntr^ 
grecques  et  romaines,  t.  IV,  1,  p.  061,  719. 

E.  Levesque. 
PROCOPE  DE  GAZA  (IIpoiuSiHoç),  écrivain  ecclé- 
siastique qui  llorissait  sous  les  empereurs  Anastase  1  ' 
;  191-518)  eT.Justin  Ie'  (518-527).  —.L'école  palestinienne 
des  rhéteurs  de  la  ville  de  Gaza  a  compté,  parmi  ses 
représentants  les  plus  illustres,  Procope.  On  ignore  la 


687 


I'ROCOPE    DE    GAZA 


688 


date  précise  de  sa  naissance  et  de  sa  mort.  Son  disciple 
et  son  successeur,  le  sophiste  Choricius,  a  écrit  son 
éloge  dans  un  discours  intitulé  Xoptxfou  itoçiotoû 
IniTaçioc  Èntllpoxontid  ffoçifftij  IV-'r,;  à  >o -,  o:.  et  publié, 
avec  une  traduction  latine  de  Joseph  Chrétien  Wolff, 
par  Fabricius,  Bibliolkeca  grœca,  édit.  Harless,  V, 
xxxi,  t.  vin,  p.  8Î0-85I,  et  aussi  par  Boissonade,  Cho- 
ricii  Gazaei  orationes,  declamationes,  fragmenta, 
Paris,  1844,  p.  1-24.  Avec  les  lettres  de  l'rocope 
(voir  Pat.  Gr.,  t.  i.xxxvii,  col.  2717-92,  Fabricius-Har- 
less,  Bibliotheca  grseca,  t.  îx,  p.  296  et  R.  Hercher, 
Epislolographi  grseci,  Paris,  1873,  p.  533-598),  le 
panégyrique  de  Choricius  est  la  principale  source  pour 
la  biographie,  d'ailleurs  peu  fournie,  de  Procope.  Sauf 
quelques  courts  séjours  à  Alexandrie,  à  Césarée,  en 
Pamphylie,  et  peut-être  à  Constantinople.  sa  paisible 
carrière  s'est  toute  entière  écoulée  dans  sa  ville  natale. 
Étranger  aux  agitations  qui,  de  son  temps,  boulever- 
sèrent l'Église  et  l'État,  Procope  se  voua  complètement 
et  uniquement  à  des  travaux  littéraires  et  théologiques. 
Nous  n'avons  à  nous  occuper  ici  que  de  ces  derniers. 
La  majeure  partie  de  l'œuvre  de  Procope  est  con- 
sacrée à  l'Écriture  Sainte.  11  est,  parmi  les  commenta- 
teurs de  la  Ijible.  un  des  principaux  exégètes  de  ceux 
qui  ont  pratiqué  la  méthode  dite  de  la  Chaîne  (aeipâ, 
Calena).  Lui-même  caractérise  nettement  son  procédé, 
au  début  d'un  commentaire  sur  la  Genèse,  t.  i.xxxvii, 
col.  21.  «  Nous  avons  réuni  les  explications  sur  l'Octa- 
teuque  fournies  par  les  Pères  et  d'autres  écrivains,  les 
recherchant  dans  les  documents  et  divers  discours... 
lorsqu'une  explication  est  commune  à  tous,  nous  ne  la 
donnons  qu'une  fois.  S'il  y  a  quelque  divergence,  nous 
l'exposons  sommairement  pour  faire  de  toutes  les  opi- 
nions un  seul  corps,  qui  renfermera  pour  nous  les 
sentiments  de  tous.  »  Les  commentaires  de  Procope, 
qui  tous  portent  sur  l'Ancien  Testament,  sont  les  sui- 
vants. 1»  Celui  que  Photius,  [Bibl.,  ccvi,  t.  i:iii,  col.  076, 
intitule  npoxo7t[Vj  ffoçiirroû  i;r,"/,Tr/.a'i  a/oXai  z:;  ~i  -:<;i 
'OxvaTeu/0\  liïn  llx/aitov  rpa[Ajj.àxf,)v  y.t\  i\:  ràç  Ita^'.- 
/îta:  xa;  £r,  i'.c.  ii  Ilapa/e'.Tiousvx.  Il  fut  publié  pour  la 
première  fois  en  1553  à  Zurich  par  André  Gesner,  mais 
seulement  en  traduction  latine,  peu  correcte  de  Conrad 
Clauser,  qui  porte  aussi  le  nom  de  Claude  Thrasybule, 
Toutefois  Conrad  Clauser  ne  traduisit  que  le  commen- 
taire sur  la  Genèse,  l'Exode  et  le  Lévitique;  le  reste  de  la 
traduction,  soit  la  partie  concernant  leDeutéronome,  le 
livre  de.losué,  celui  des  Juges,  ceux  des  Rois  et  les  Pa- 
ralipomènes  furent  Pieuvre  dllartinan  Hamberger. 
Fn  1620,  .1.  Meursius  publia  à  Lyon,  une  traduction  de 
Louis  Lavater,  ou  plutôt  aussi,  prétend-on,  d'ilart- 
man Hamberger,  le  texte  grec  des  scolies  sur  les  livres 
des  Rois.  .1.  Meursius,  Opéra,  t.  vin,  p.  1  et  suiv.  Le 
cardinal  Auguste  Mai,  au  xix»  siècle,  retrouva  le  texte 
grec  de  la  partie  du  commentaire  qui  se  rapporte  à  la 
Genèse  el  l'édita  à  Rome  en  183i,  dans  ses  Classici 
auctores,  t.  vi,  p.  1-18.  Migne,  t.  i.xxxvii.  a  reproduit 
le  texte  grec  de  Mai  et  la  traduction  de  I  lesnert,  d'Ham- 
berger,  on  y  ajoutant,  pour  certaines  parties,  le  texte 
grec  de  la  Calena  Lipsiensis  éditée  à  Leipzig  en  1772, 
par  Nicéphore  Hiéromonachos,  et  que  l'on  a  tout  lieu  de 
croire  l'œuvre  de  Procope.  —  2°  Commentaire  sur  le  livre 
des  Proverbes;  signalé  par  Monlfaucon,  Palœographia 
grseca,  p.  278  et  suiv.,  et  Turrianus,  Defensio  epistola- 
non  Pantificum,  t.  iv.  p.  i,  (i,  17,  le  texte  grec  en  a  été 
publié  par  le  cardinal  Mai,  Classici  auctores,  t.  i\, 
p.  1-256,  el  il  a  été  reproduit  avec  une  traduction  la- 
tine  dans  Migne,  t.  i.xxxvii.  col.  1221-151  i.  Dans  un  ma- 
nuscrit de  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique,  n   3895- 

96  (cf.  .1.  Van  den  Gheyn,  Catalogne  (les  manuscrits  de 
bliotlièque  royale  de  Belgique,  t.  n,  p.  221-222), 
on  trouve  p,  1-217,  le  texte  grec  de  Dpoxoitîov  PaSat'ou 
£piffTtavo3  t'j^'.ttoO  t«iv  îi;  :à;  itapot}uaç  SaXofjLfôvToç 
i'.r-r-iy.tin  ixloyâv    iiEiTopir,,  accompagné  d'une  traduc- 


tion latine  faite  au  xvni'  siècle  par  Balthazar  Cordier, 
S.  .1.  Migne,  t.  lxxxvii.  col.  1779-1800,  en  donne  quel- 
ques extraits.  —  3°  Dans  les  Auctores  classici,  t.  ix. 
p.  257-130,  le  cardinal  Mai  et  Migne.  t.  i.xxxvii,  col.  1541- 
1754.  ontpublié  HpoxoTcîou  FaCaiou  -/piffTiavoû  troçtaroû 
li;  ~'x  àauara  rôv  Ba'fJl.crraw  i\rt-rr- :/.&'/  ExXoYCdV  È,T'.TOU.rt, 
Procopii  Gazœi  chrisliani  sophistes  in  Cantica  Can- 
ticorum  selectarum  expositionum  epitome.  Migne 
a  ajouté  à  son  édition  les  variantes  du  mss.  n"  3895-96 
de  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique.  En  outre.  Mai. 
Classici  auctores, t.  vi.p.318,  et  Migne,  t.  cité,  col.  1755- 
1779,  ont  publié  des  fragments  d'un  autre  commentaire 
de  Procope  sur  le  Cantique  des  Cantiques.— 4"  En  1579. 
Jean  Curlerius  publia  le  texte  grec  et  la  version  latine 
d'un  long  commentaire  de  Procope  sur  Isaïe,  reproduit 
dans^Migne,  t.  i.xxxvii,  col.  1801-2718.  Cave,  Bistoria 
litteraria,  1750,  p.  ;>27.  attribuée  Procope  un  commen- 
taire sur  les  douze  petits  prophètes,  mais  cette  opinion 
n'est  guère  appuyée.  Toutefois,  il  n'est  pas  impossible 
qu'un  examen  plus  approfondi  des  manuscrits  fasse 
retrouver  encore  un  certain  nombre  d'ouvrages  du 
sophiste  de  Gaza,  ou  du  moins  des  exemplaires  de 
traités  de  Procope  connus  seulement  par  un  texte  unique. 
Ainsi  M.  E.  Bratke,  Handschriftliclies  zu  Procopios 
von  Gaza,  dans  Zeilsclirift  fur  wissenschaftliche 
Tlieologie,  t.  xxxix.  1896,  p.  303-12,  croit  avoir  recon- 
nu une  Chaine  de  Procope  sur  le  Cantique  des  Cantiques 
dans  le  manuscrit  grec  n°  131  de  la  bibliothèque  de 
Munich  et  il  signale  également  de  nouveaux  exem- 
plaires du  commentaire  sur  le  livre  des  Proverbes. 

Les  travaux  scripturistiqnes  de  Procope  ont  de  tout 
t  imps,  chez  ceux  qui  les  ont  édités  ou  connus,  excité 
une  vive  admiration.  Ernesti  loue  sa  vaste  érudition  et  sa 
profonde  connaissance  des  ancien-,  exégètes.  l'ittc.  tir., 

t.  i.xxxvii,  col.  15.  Le  cardinal  Mai  relève  l'importance 
des  commentaires  et  qualifie  la  méthode  de  Procope 
«  d'herméneutique  solide  et  de  doctrine  authentique  », 
et  il  constate  que  l'on  retrouve  chez  lui  d'intéressantes 
variantes  des  Rexaples  d'Origène.  Pair.  Cr.,  t.  IX, 
col.  17.  Jacques  Gesner,  un  des  éditeurs  de  Procope, émet 
un  jugement  semblable.  Ibid.,  col.  11. On  s'est  récem- 
ment surtout  préoccupé',  en  ce  qui  concerne  Procope  de 
Gaza,  de  démarquer  le  fond  même  de  ses  commentaires 
sur  l'Écriture,  si  riches  en  extraits  d'auteurs  anciens, 
dont  quelques-uns  sont  en  partie  perdus  ou  incomplè- 
tement conservés.  En  d'autres  termes,  on  s'est  efforcé 
de  reconnaître  les  sources  auxquelles  Procope  a  puisé; 
s'il  nomme  parfois  les  écrivains  auxquels  il  emprunte, 
le  plus  souvent  il  fond  les  opinions  d'autrui  dans  son 
propre  texte.  M.  Rendel  Harris,  Fragmenta  of  Pliilu, 
Cambridge,  1886,  a  constaté  que  Procope  s'est  plus  d'une 
fois  inspiré  des  écrits  du  juif  Philon,  dans  son  commen- 
taire sur  l'Octateuque.  Des  constatations  analogues  ont 
i  te  faites  parMM.P.  Wiudland.  Xeuentileelite  lent/mente 
Philo's,  Berlin,  1891,  p.  19.  note  17.  et  L.  Colin.  Zur 
indirecten  Uberlieferung  Philo's  und  der  àlteren  Kir- 
clienschriftsteller,  dans  Jahrbuch  fur  protestantische 
Tlieologie,  1812,  p.  175-492.  Mais  ils  signalèrent  en 
même  temps  l'influence  d'Origène,  toutefois  en  bornant 
leurs  observations  aux  textes  parallèles  d'Origène  et  de 
Procope  pour   le  commentaire  sur  la  Genèse  el  sur 

l'Fxode  el  ne  renseignant  pas  les  homélies  d'Origène 
connue  avant  .le  utilisées  par  Procope.  Cette  dernière 
constatation  élail  réservéeà  M.  Fric  Klostermann,  quia 
nettement  indiqué  que  les  .homélies  d'Origène  ont  été' 
mises  a  contribution  par  Procope  dans  son  commen- 
taire sur  le  livre  de  Josué ;  niais  seulement  les  quatre 
premières  et  les  onze  dernières   des  vingt-six  homélies 

d'Origène  sur  Josué.  Griechische  Excerpte  aus  llomi- 
lien  des  Origenes,  dans   Texte  und  Untersuchungen 

zur  allchrisllichen  l.iteralur,  t.  XII.  Ilell  3,  189i, 
p.  1-12.  Toutes  les  recherches  sur  l'œuvre  de  l'rocope 
el  ses  sources  ont  été  complétées  de  façon  notable  par 


689 


PROCOPE    DE    GAZA 


PROCURATEURS   ROMAINS 


690 


l'étude  de  M.  Louis  Eisenhofer,  Procopius  von  Gaza. 
Elite  literarhistorisclie  Studie,  in-8°,  Fribourg-en-Bris- 
gau.  1897.  Par  l'examen  approfondi  du  commentaire 
sur  l'Octateuque,  comparé  avec  la  Catena  Lipsiensis, 
il  a  singulièrement  augmenté  la  liste  des  auteurs  con- 
sultés par  Procope  et  réussi  à  reconstituer  pour  une 
bonne  partie  ses  emprunts  et  ses  citations.  Ainsi,  il 
démontre  que  l'utilisation  des  homélies  d'Origéne 
va  au-delà  de  ce  qu'a  signalé  M.  Klostermann.  Pour  le 
commentaire  sur  la  Genèse,  M.  Eisenhofer  nomme 
Basile,  Théodoret,  Sévère  de  Cabales,  Grégoire  de 
Nysse,  Cyrille  d'Alexandrie,  Méthode,  etc.,  les  mêmes 
ont  été  mis  à  contribution  pour  le  commentaire  sur 
l'Exode  et  en  outre  Grégoire  de  Nazianze;  pour  le 
commentaire  sur  le  Lévitique,  outre  les  écrits  des 
Pères  ayant  servi  aux  deux  premiers  commentaires,  à 
citer  en  outre  Apollinaire  de  Laodicée;  comme  sources 
du  commentaire  sur  le  livre  des  Nombres,  il  y  a  Cyrille 
d'Alexandrie,  Apollinaire,  Grégoire  de  Nysse,  pour  celui 
sur  le  Deutéronome,  Josué  et  les  Juges,  Cyrille  d'Alexan- 
drie et  les  scolies  anonymes  de  la  Catena  Lipsiensis. 
Théodoret  a  servi  pour  le  commentaire  sur  les  livres 
des  Rois  et  les  Paralipomènes;  Cyrille  d'Alexandrie, 
Eusèbe  de  Césarée  et  Théodore  d'Héraclée  pour  celui 
sur  Isaïe.  Cf.  J.  Stiglmayr,  t.  i,  dans  Stimmen  aus 
Maria  Laach,  t.  lui  (1897),  p.  79-82,  et  Cari  Weyman, 
dans  Byzanlinische  Zeitschrift,  t.  vi,  1897,  p.  457-458. 

Procope  eut  avec  le  néoplatonicien  Proclus  une  polémi- 
que théologique,  dont  on  s'est  beaucoup  occupé  en  ces 
derniers  temps.  En  1831,  le  cardinal  Mai  en  publia  un 
fragment  'E-/.  t»v  si;  ti  [IpâxXou  6îo}.oyL'/.i  xsipiXaix 
àvTtppTJoEtov,  dans  ses  Classici  auctores,  t.  îv,  p.  274. 
Cf.  Migne,  Patr.  Gr.,  t.  lxxxvii,  col.  2792.  Démosthène 
Russos,  Tpelç  FaÇûtiot,  crj|j:oo).aL  si;  Tr,v  iaropi'av  Tyj; 
9t),off03i'a;  -Sri  FaÇaiwv,  Constantinople  et  Leipzig, 
1893,  constata  que  cet  écrit  polémique  de  Procope  ser- 
vit de  base  à  celui  de  Nicolas  de  Méthone  dirigé  aussi 
contre  Proclus.  .1.  Drâseke  dénie  toute  paternité  pour 
cette  œuvre  à  Nicolas  de  Méthone  et  cherche  à  établir 
que  c'est  Procope  qui  en  est  l'auteur.  Byzantinisclie 
Zeitschrift,  l.  vi,  1897,  p.  55-91.  Mais  ses  conclusions 
ont  été  fortement  battues  en  brèche  parle  P.  .1.  Stigl- 
mayr. S.  .1.  lbid.,  t.  vin,  1899,  p.  263-301.  Nous  n'avons 
rien  à  dire  ici  des  travaux  purement  littéraires  du  rhé- 
teur de  l'école  de  Gaza. 

Bibliographie.  —  Outre  les  ouvrages  cités  au  cours  de 
l'article,  voir  Sainjore  (R.  Simon),  Bibliotheca  critica, 
1710.  t.  iv,  p.  143-55;  Bardenhewer,  Patrologie,  1895, 
p.  303;  Legrand,  Bibliothèque  hellénique,  t.  Il,  1894, 
p.  230;  A.  Ehrard,  Procopius  von  Gaza,  dans  Kirclien- 
lexicon,  t.  x,  1897,  col.  453-55;  K.  Krumbacher,  Ges- 
chichle  der  byzantinischen  Lillcratur,  2e  éd.,  1897, 
p.  125-127;  Th.  Zahn,  Forschungen  zur  Geschichte  des 
neutestamentlichen  Kanons  und  der  allkircldichen  Lit- 
leratur,  t.  n,  Erlangen,  1883,  p.  239-253;  J.  Dràseke, 
dans  Tlieologisclie  Studien  und  Krilikcn,  1895,  fasc.  3, 
p.  371  sq.  ;  L.  Eisenhofer,  Procopius  von  Gaza,  Fri bourg 
(Bade),  1897;  lui.  Seitz,  Die  Schule  von  Gaza,  Heidel- 
berg,  1892,  p.  9-21;  C.  Ivirsten,  Quxstiones  Choricianse. 
Breslau,  1894,  p. 8-13;  ErnstLindl,  Die  Oktateiiclikaleue 
des  Prokop  von  Gaza  und  die  Septuagintaforschung, 
Munich,  1902.  J.  Van  den  Gheyn. 

PROCURATEURS  ROMAINS  (Nouveau  Testa- 
ment :  TrY£|i6veç),  gouverneurs  de  certaines  provinces 
impériales,  en  particulier  de  la  Judée  et  de  la  Palestine. 
Matth.,  xxvii,  2,  11,  14,  15,  21.  27;  Act.,  xxm,  24,  26. 
33,  etc. 

I.  Nom.  —  Le  mot  procurator,  comme  l'indique  sa 
formation,  s'applique  à  toute  personne  chargée  de  veil- 
ler, au  nom  d'une  autre,  sur  quelque  alTaire  :  manda- 
taire qui  surveille  les  biens  d'un  ami,  intendant  mis  à 
la  tète  d'une  propriété,  conseil  et  fondé  de  pouvoirs,  etc. 


C'est  ainsi  qu'il  vint  à  désigner  plusieurs  hauts  fonc- 
tionnaires de  l'Empire  romain  :  intendants  de  la  mai- 
son impériale,  chefs  de  la  chancellerie,  directeurs  de 
divers  services  à  Rome,  administrateurs  du  fisc  et 
agents  financiers  dans  les  provinces  impériales  ou  sé- 
natoriales, enfin  gouverneurs  des  provinces  dites  pro- 
curatoriennes  qui  avaient  le  jus  gladii.  Cf.  Mommsen 
et  Marquardt,  Manuel  des  antiquités  romaines,  trad. 
franc.,  t.  ix,  1892,  p.  581.  Son  véritable  correspondant 
en  grec  est  Itu'tpotio;.  Cependant  les  écrivains  du  Nou- 
veau Testament  n'emploient  régulièrement  que  le  mot 
riycutiv.  Cf.  Matth.,  xxvn,  2,  11,  14,  15,  21,  27;  xxvm, 
14;  Luc,  m,  1;  xx,  20;  Act.,  xxm,  24,  26,  33;  xxiv,  1, 
10;  xxvi,  30.  Ce  terme  ^veumv  n'est  pas  un  titre  spécial, 
mais  il  ne  appellation  générale  qui  s'applique  à  tout  per- 
sonnage investi  d'un  haut  commandement  :  prseses, 
«  président.  »  Aussi,  dans  la  langue  des  auteurs  sacrés, 
les  mots  ^yî'jivî-jw.  r,YEU.ovta,  7,ysu.wv,  sont-ils  unifor- 
mément employés,  qu'il  s'agisse  de  Tibère,  Luc,  ni, 
1,  du  légat  de  Syrie,  Cyrinus,  Luc,  n,  2,  ou  de 
Ponce  Pilate,  Luc,  m,  1;  Matth.,  xxvn.  2.  11.  14,  15. 
21,  27,  et  de  Félix.  Act.,  xxm,  24,  26.  Josèphe  lui-même 
varie  ses  expressions.  Il  appelle  généralement  le  gou- 
verneur de  Judée,  éiri-rpoKo,',  Art.  jttd.,  XX,  vi,  2;  Bell, 
jud.,  II,  vin,  1;  ix,  2;  xi,  6  (dans  le  passage  parallèle 
Ant.  jud.,  XIX,  IX,  2,  Ë7rapy_o;);  XII,  8;  ènt-rpoitiÙMv, 
A  nt.  jud.,  XX,  v,  1.  Mais  il  le  nomme  aussi  :  k'nîtpxo; 
=  prsefectus,  Ant.  jud.,  XVIII,  n,  2;  XIX,  ix,  2;  XX, 
ix,  1;  Bell,  jud.,  VI,  v,  3;  vi"';'"i>j.svoç,  Ant.  jud.,  XVIII, 
I,  1;  r,ysti<ôv,  Ant.  jud.,  XVIII,  MI.  1  :  IIiàStoç,  6  tf,ç 
TouSacec?  riysao)-/  (cf.  Matth.,  xxvn,  2  :  Tlù,i-:u>  râ 
:,\i]i'ji:);  êiri[i6).ïrriiç,  Ant.  jud.,  XVIII,  IV,  2.  Il  semble 
qu'Auguste  avait  plutôt  choisi  le  titre  de  prsefectus, 
eiiapxoç.  Mais  bien  vite,  au  moins  depuis  Claude,  et  à 
l'exception  de  l'Egypte,  le  titre  de  procurator,  i7ttTpo7to;, 
devint  prédominant.  Dans  une  lettre  aux  Juifs,  citée  par 
Josèphe,  Ant.  jud.,  XX,  i,  2,  l'empereur  Claude  dit  lui- 
même  :  «  J'en  ai  écrit  à  Cuspius  Fadus  mon  procura- 
teur, râ  Ijiw  £7u-pÔ7tw.  »  On  connaît  aussi  la  parole  de 
Tacite,  Annal.,  XV,  44  :  Christus  Tiberio  imperitante 
per  procuratorem  Pontium  Pilatum  supplicia  adfe- 
clus  erat.  Quant  à  la  qualification  de  presses,  7(yîu.<,Sv,  qui 
tire  son  origine  de  l'administration  de  la  justice,  où  l'on 
opposait  le  président  aux  assessores  ou  au  consilium, 
elle  fut  tardivement  réservée  aux  gouverneurs  de  pro- 
vinces. On  rencontre  parfois,  chez  les  auteurs  du  Ie'  et 
du  IIe  siècle,  dans  un  sens  général,  le  terme  prases 
provincise,  qui  devint  officiel  au  début  du  m»  siècle. 
Cf.  Tacite,  Annal.,  vi,  41  ;  xn,  45;  Plin.  juin.,  Paneg., 
70;  V.  Chapol,  art.  Prseses,  dans  le  Dictionnaire  des 
antiquités  grecques  et  romaines  de  Daremberg  et 
Saglio,  Paris,  t.  vu,  p.  627. 

II.  Attributions.  —  Les  procurateurs,  étant  en  même 
temps  chargés  d'un  commandement  militaire,  apparte- 
naient à  l'ordre  équestre,  et  ce  fut  une  innovation  ex- 
traordinaire lorsque,  sous  Claude,  le  gouvernement  de 
la  Judée  fut  confié  à  un  affranchi,  Félix.  Jusqu'à  quel 
point  étaient-ils  soumis  au  légat  de  Syrie?  Il  semble 
que  celui-ci  avait  le  droit  et  le  devoir  d'intervenir,  avec 
sa  haute  autorité,  dans  les  cas  de  nécessité.  Les  écrivains 
cependant  ne  s'expriment  pas  toujours  d'une  manière 
constante  sur  les  relations  de  la  Judée  avec  la  province 
de  Syrie  :  tantôt  ils  les  représentent  comme  deux 
provinces  distinctes,  et  par  là  même  indépendantes,  tan- 
tôt ils  donnent  la  première  comme  «  ajoutée  »  à  la  se- 
conde :  7cpo<7Br,xïi  r?,;  S\ip:ac,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XVIII, 
i,  1;  cf.  XVII,  xni,  5;  Bell,  jud.,  II,  vin,  1;  Judsei... 
provincise  Suriai  addili,  Tacite,  Annal.,  su,  23;  cf.  u, 
42.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  commandement  militaire  el  la 
juridiction  indépendante  que  possédait  le  procurateur 
de  Judée  lui  créaient,  en  temps  ordinaire,  une  situation 
analogue  à  celle  des  gouverneurs  des  autres  provinces. 
Mais  le  légat  de  Syrie  avait  à  juger  l'opportunité  de  son. 


69 1 


PROCURATEURS    ROMAINS 


692 


intervention,  lorsque  des  troubles  étaient  à  craindre  ou 
qu'il  surgissait  de  sérieuses  difficultés.  Il  agissait  alors 
en  Judée  avec  pleine  autorité,  comme  le  tirent  Petro- 
nius,  Ant.  jud.,  XVIII,  rai,  2-9;  Cassius  Longinus,  Ant. 
jud.,  XX,  i,  1;  Ceslius  G-allus,  Bell,  jud.,  II,  xiv.  3. 
Les  procurateurs  résidaient  habituellement  à  Césarée, 
sur  le  bord  de  la  mer;  ils  n'allaient  à  Jérusalem  qu'à 
l'époque  des  grandes  fêtes,  pour  surveiller  les  mouve- 
ments du  peuple.  Au  commandement  des  troupes  ils 
joignaient  l'administration  de  la  justice  et  des  finances. 
I»  Pouvoir  militaire.  —  Les  procurateurs  étaient 
commandants  de  corps  d'armée,  comme  les  légats  des 
provinces  impériales,  avec  cette  différence  toutefois  que 
les  troupes  rangées  sous  leurs  ordres  étaient  des  auxi- 
liaires et  non  des  légionnaires.  Voir  Auxiliaires,  t.  I, 
col.  1282;  Armée  romaine,  t.  i,  col.  994.  Alors  que,  sous 
Auguste,  il  y  avait  trois  légions  en  Syrie,  et  quatre 
depuis  Tibère,  la  Judée  ne  posséda,  jusqu'à  Vespasien, 
que  des  troupes  auxiliaires,  pour  la  plupart  levées  dans 
le  pays  même,  et  recrutées  dans  la  population  non 
juive,  ("est  ainsi  que  nous  trouvons  mentionnés  les 
'Seêatrcr^ol,  Sebasteni,  ou  soldats  pris  sur  le  territoire 
<le  Sébaste,  l'ancienne  Samarie,  aujourd'hui  Sebastiyëh. 
Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIX.  ix,  1-2;  XX,  vi.  I  ;  vin. 
7;  Bell.  jud..  Il,  in,  4;  IV,  2-3.  Ce  corps  est  sans  doute 
identique  à  celui  que  nous  montrent  plus  tard  les  ins- 
criptions. Cf.  Corpus  inscriptionutn  latinarum,  t.  vm, 
n.  9358.  9359.  Un  diplôme  militaire  de  l'armée  de  Judée 
nous  apprend  que,  en  l'an  139  après  J.-C,  les  corps 
auxiliaires  (trois  ailes  et  douze  cohortes),  placés  sous 
les  ordres  du  légat  P.  Calpurnius  Atilianus,  compre- 
naient entre  autres  une  Co/iors  i  Sebasstenorum  milia- 
ria.  Cf.  Héron  de  Villefosse,  Revue  biblique,  1897. 
p.  598-604.  Aux  HeSairnpioi  Josèphe  associe  plusieurs 
fois  les  IvaiTapsïr,  Ciesarenses.  Cf.  Ant.  jud.,,  XIX,  IX, 
1-2;  XX,  vin,  7.  Il  ne  faut  pas  confondre  avec  ces  vo- 
lontaires de  Sébaste  la  ry-v.^x  XîôaTtr,,  à  laquelle  appar- 
tenait le  centurion  Julius,  qui  fut  chargé  de  conduire 
saint  Paul  à  Rome.  Art.,  xxvti,  I.  Le  mot  2e6a<rr^,  Au- 
gusta,  n'est  qu'un  titre  honoritique  donné  à  cette  co- 
horte. Voir  Ai  GUSTA  Cohorte),  t.  i.  col.  1235.  Au  temps 
des  Apôtres,  il  y  avait  à  Césarée  une  cohorte  italique. 
r.T.v.'.-x  '\-.x'i\/.r,.  (huit  faisait  partie  le  centurion  Cor- 
neille, qui  fut  baptisé  par  saint   Pierre.  Acl..  x,  I.  Voir 

Italiqi  i;  (C RTE),  t.  in,  col.  1038.  D'autres  villes  et 

d'autres  postes  possédaient  également  de  petites  ^.nui- 
sons :  ainsi  Jéricho  et  Machéronte.  Bell,  jud.,  II,  xvm, 
0.  On  les  trouvait  éparses  dans  la  Samarie,  Bell,  jud., 
III,  vu,  32,  et  la  plaine  d'Ksdrelon  était  gardée  par  un 
décurion.  Josèpbe,  Vila,  21.  Jérusalem  avait  une  co- 
horte, commandée  par  un  -/ùJ.iy/'j;  (ou  tribun,  d'après 
la  Vulgate).  Art.,  nu, 31-37; xui,  24-29;  \\m.  10,  15-22; 
xxiv,  7, 22.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XV,  xi,  i;  X  VIII,  iv,  3, 
appelle  le  commandant  île  l'Antonia  ppoypapxo;.  La 
garnison  comprenait  aussi  des  cavaliers.  Ail.,  xxm,  23, 
32.  Apres  la  grande  guerre  de 66-73  après  .1.  C.  la  situa- 
tion militaire  changea  en  Palestine,  le  gouverneur 
n'étant  plus  un  procurateur  d'ordre  équestre,  mais  un 
légal  d'ordre  sénatorial  ;  une  légion,  la  legio  X  Freten- 
sis,  vint  s'établir  sur  les  ruines  de  Jérusalem. 

-  Pouvoir  judo-mire.  —  Comme  les  gouverneurs 
d'ordre  sénatorial,  les  procurateurs  avaient  également 
droit  de  haute  justice   dans   leur  province;  mais   ceux 

de  Judée  ne  l'exercèrent  que  dans  les  cas  extraordi- 
naires, La  justice  ordinaire,  en  effet,  aussi  bien  dans 
le,  causes  Criminelles  que  dans  les  causes  civiles, 
('•lait  restée  entre  les  mains  des  Juifs.  Le  pouvoir  du 
procurateur  comprenait  le  droit  de  vie  et  de  mort,  le 
i.  Josèphe,  Bell,  jud.,  II,  vin,  I,  nous  dit  (pie 

inius  avail  reçu  ai/v.  roû  xTEivEtv  Uouvfav,  la 
puissance  .le  condamner  même  à  la  peine  de  mort. 
Cependant  le  citoyen  romain,   sous  le  coup  d'une  ac- 

tion  capitale,   gardait,  au  commencement 


cours  du  procès,  le  droit  d'en  appeler  à  César.  Art., 
xxv,  10-12,  21  ;  XXVI,  32.  Le  pouvoir  coercitif  du  gou- 
verneur ne  s'étendait  donc  qu'aux  gens  de  la  province, 
qu'il  pouvait  néanmoins  renvoyer  à  Rome,  pour  un  ju- 
gement délinitif,  lorsqu'en  raison  de  la  difficulté  du 
cas  il  aimait  mieux  laisser  la  décision  à  l'empereur. 
Ainsi  fit  Félix  pour  Lléazar  et  un  grand  nombre  de 
ses  compagnons.  Anl.  jutl.,  XX.  vm.  5;  Bell,  jud.,  II, 
XIII,  2.  Bien  que  le  procurateur  fut  seul  juge,  il  pre- 
nait cependant  assez  souvent  l'avis  de  son  «  conseil  i . 
t7u|i6o-jXiov,  Act.,  xxv.  12,  composé  en  partie  des  hauts 
fonctionnaires  de  sa  suite,  en  partie  des  jeunes  gens 
qui  l'accompagnaient  pour  leur  propre  formation.  L'exé- 
cution de  la  sentence  capitale  revenait  régulièrement 
aux  soldats.  Voir  BOURREAU,  t.  i,  col.  1895. 

3"  Pouvoir  financier.  —  Les  procurateurs  avaient 
encore  pour  fonction  de  veiller  à  la  perception  des 
impôts;  c'est  même  de  là  que  leur  venait  leur  titre.  La 
Judée  étant  province  impériale,  son  tribut  allait  au 
trésor  de  l'empereur,  et  non  à  celui  du  sénat. 
Cf.  Matth.,  xxn,  17-21  ;  Marc,  vu.  14-17;  Luc.  xx.  22- 
25.  Pour  les  impôts  en  usage  dans  la  fiscalité  impé- 
riale et  la  manière  de  les  lever,  voir  Cens.  t.  n. 
col.  422:  Impôts,  t.  m,  col.  851;  Pi  blicaiks. 

III.  Liste.  —  On  compte  quatorze  procurateurs  ro- 
mains en  Palestine,  sept  de  l'an  G  à  l'an  41,  avant  le 
règne  d'Agrippa  1"  (il-4'n,  et  sept  après,  de  il  à  66. 
Nous  n'avons  que  peu  de  renseignements  sur  plusieurs 
d'entre  eux. 

1"  Coponius,  6-9  ap.  J.  C  II  vint  en  Judée  avec  Qui- 
rinius.  Ant.  jud.,  XVIII,  i,  1.  C'est  sous  son  administra- 
tion que   quelques   Samaritains,  entrés   furtivement  à 
Ji  rusalem,  vinrent,  une  nuit,  pendant  la  fêle  de  Pàque, 
jeter  des  ossements  humains   dans  le  temple,  pour  le 
souiller  et  ainsi  en  empêcher  l'accès  au  peuple.  Ant. 
jud.,  XVIII,  n.  2.  C'est  aus-i  dans  cette  période  que 
Judas  le  Gaulonite  fomenta  une  sédition,  en  proclamant 
qu'on  ne  devait  ni  payer  l'impôt  aux  Romains,  ni  re- 
connaître d'autre  maître  que  Dieu,  llrll.jud..  II,  vin,  1. 
-.'•  Mo, -rus  Ambivius  ou  Ambibulus;  on  lit  dans  Jo- 
sèphe,  Ant.  jud.,   XVIII,  II,    2  :    'ApSioûïO;,   dans  cer- 
tains manuscrits  :  'A|iëiSo-j-/.o;;  le  nom  d'Ambibulus 
se   retrouve  ailleurs,    par  exemple  celui   des    consuls 
mis  Ambibulus  et  Varius  Ambibulus.  Cf.  Corpus 
Inscript,   lot.,  t.    x.    n.  3861.  Ce   procurateur  fut   en 
Judée  de  l'an  9  à  l'an  12.  De  son   temps,  Salomé,  soeur 
du  roi  Ilérode.  légua  en  mourant  à  Livie,  épouse  d'Au- 
guste, différentes  villes,  comme  Jamnia,  Phasaélis  et 
Archélaïs.  Ant.  jud.,  XVIII,  n.  2;  Bell,  jud.,  11.  ix.  1. 
:p  Annius  Bufus,   12-15.  Ant.  jud..  XVIII.  11,2. 
i    Valerius  Gratus,  15-26.    Envoyé  par   Tibère,   il 
déposa   et  nomma    successivement    plusieurs    grands 
prêtres  :  Anne   (6-15);  Ismaël,   lils  de    l'babi;   Lléazar. 
61s  d'Anne;  Simon.  BlsdeCamith;  et  Caïphe.  A  ut.  jud., 
XVIII,  n.  2. 
.".    Pontius  Pilatus,  26-36.  Voir  Pilate,  col.  429. 
0*  Marcellus,  36-37,  ami  de  Vkellius;  légal  de  Syrie. 
et  envoyé  par  lui.  Ant.  jud.,  XVIII,  IV,  2. 

7  Marullus,  37-41.  Ant.  jud.,  XVIII.  vi.  10. 

8  Cuspius  Fadus,  il-".  Envoyé  par  Claude,  après  la 
mort  du  ci  Agrippa  1,  il  gouverna,  comme  ses  succes- 
seurs, non  plus  seulement  la  Judée,  mais  toute  la  Pa- 
lestine, A  ut.  jud.,  XIX.  ix.  2.  Il  eut  a  arrêter  un  conllit 
entre  les  Juifs  de  la  Pérée  et  les  habitants  de  Phila- 
delphie, délivra  la  Judée  des  brigandages  qui  s'y  com- 
mh  Plient;  mais  il  souleva  maladroitement  une  diffi- 
culté à  propos  des  vêtements  du  grand-prêtre,  qu'il 
voulait  faire  garder  dans  l'Antonia,  afin  qu'ils  fussent 
au  pouvoir  des  Romains.  Ant.  jud.,  XX,  i.  I.  2.  Il  mit 
également  a  morl  l'imposteur  rheudas  et  un  grand 
nombre  de  -es  partisans.  Ant.  jud.,  XX.  v.  I . 

'.)  Tiberius  Alexander,  jusqu'à  18.  Issu  d'une  des 
plus  grandes    familles  juives    d'Alexandrie,  neveu  de 


693 


PROCURATEURS    ROMAINS 


694 


Philon,  il  avait  abandonné  la  religion  de  ses  pères, 
pour  se  mettre  au  service  des  Romains.  De  son  temps, 
la  Palestine  fut  éprouvée  par  une  grande  famine.  Il  fit 
crucifier  les  lils  de  Judas  le  Galiléen,  Jacques  et  Simon. 
Ant.jud.,  XX,  v,  i. 

10'  Ventidius  Cumanus.  48-52,  Il  eut  d'abord  à  ré-. 
primer  un  soulèvement  du  peuple,  à  Jérusalem,  pen- 
dant les   fêtes  de  Pàque,  soulèvement  provoqué  par  la 
faute  d'un  des  soldats  romains  qui  gardaient  le  temple. 
La  foule,  effrayée  au  premier  aspect  de  la  troupe,  s'en- 
fuit, mais,  dans  la  précipitation   et  vu    l'étroitesse   des 
issues,  beaucoup  trouvèrent   la  mort.  Ce  deuil  à  peine 
terminé,  un   autre  conllit  s'éleva,  mais   dont  la  cause 
venait   cette   fois   du   côté  des  Juifs.  Un  serviteur  de 
l'empereur,  nommé  Etienne,  ayant  été,  à  quelque  dis- 
tance de   Jérusalem,  attaqué   et    dépouillé  sur   la  voie 
publique,  Cumanus  envoya  des  soldats  pour  tirer  ven- 
geance des  villages  voisins   du  théâtre  du  crime.  Mais 
un  de  ces  soldats  ayant  lui-même  gravement  offensé 
les   Juifs    dans    leurs    sentiments    religieux,    ceux-ci 
allèrent  à  Césarée  demander  satisfaction  au   procura- 
teur, qui,  dans  la  crainte  de  nouvelles  complications, 
et  sur  le  conseil  de  ses  amis,  se  décida  à  punir  le  cou- 
pable, et  apaisa  ainsi  un  tumulte  qu'il  aurait  pu  rallu- 
mer. Enfin  un  troisième  événement  valut  à  Cumanus 
la  déposition  et  l'exil.  Des  Galiléens  qui  passaient  par 
la   Samarie    pour  aller  à   Jérusalem  furent  assaillis  et 
mis  à  mort.  Les  principaux  personnages  de  la  région 
galiléenne   se   rendirent  près    du    procurateur    pour 
crier  vengeance.  Mais  celui-ci,  acheté  par  l'or  des  Sa- 
maritains, ne  voulut  rien  entendre.  Alors  les  Galiléens 
se   firent  justice  en   pillant   et   incendiant,   malgré  les 
supplications  de   leurs  chefs,  plusieurs  villages  sama- 
ritains. A  celte  nouvelle.  Cumanus  marcha  contre  eux, 
en  tua  un  grand  nombre  et  en  prit  d'autres  vivants. 
La  sédition  apaisée,  grâce  à  l'intervention  des  princi- 
paux Juifs  de  Jérusalem,  la   cause   fut  portée    devant 
Ummidius  Quadratus,    légat  de  Syrie,  alors  à  Tyr.  En 
présence  des  deux  partis,  qui   s'accusaient  mutuelle- 
ment, celui-ci   différa  le  jugement  et   finalement  les 
renvoya  devant  Claude.  Il  ordonna  en   même  temps  à 
Cumanus  de   les  suivre  en  Italie.  L'empereur,  recon- 
naissant dans    les   Samaritains   les  auteurs   de  tout  le 
mal,  lit  mettre  à  mort  ceux  qui  avaient  comparu  devant 
son  tribunal,   et    envoya    Cumanus  en  exil.  Cf.  Ant. 
jud...  XX.  v,  '2,  3,  4;  VI,  1-3;  Bell,  jud.,  II,   xn,  1-7. 
11°  Félix.  52-60.  Voir  Félix,  t.  n,  col.  2186. 
12°  Porcins  Festus,  60-62.  Voir  Festus,  t.  Il, col. 2216. 
13»  Albinus,  62-64.  Josèphe,   Bell,  jud.,  II,  xiv.   1, 
lui  rend  ce  témoignage  peu  llatteur  qu'il  n'omit  au- 
cune sorte  de  méchancetés.   Homme    d'argent   avant 
tout,  il  pillait  aussi  bien  le  trésor  public  que  les  biens 
particuliers;  tout   en  accablant  le  peuple  d'impôts,  il 
relâchait,  pour  certaines  sommes,  les  brigands  qu'on 
avait  jetés  en  prison.  Avec  de  pareilles  dispositions,  il 
se  laissait  gagner  par  les  ennemis  comme  par  les  amis 
de  Rome.  Cf.  Ant.jud.,  XX,  ix.  1-i. 

14"  Gessius  Florus,  61-66.  Son  gouvernement  fut 
tellement  odieux  qu'Albinus  auprès  de  lui  pouvait 
passer  pour  un  homme  très  juste,  selon  Josèphe,  Bell. 
jud.,  II,  xiv,  2.  Celui-ci,  en  effet,  cherchait  encore  à 
cacher  ses  méfaits,  tandis  que  Gessius  se  glorifiait  de 
ses  sévices  à  l'égard  des  Juifs.  C'était  le  pillage  par- 
tout, au  point  de  faire  déserter  les  habitants.  Il  se 
plut,  pour  ainsi  dire,  à  fomenter  la  sédition  parmi  les 
Juifs;  il  réussit  si  bien  qu'il  finit  par  allumer  la 
grande  guerre  qui  amena  la  ruine  de  Jérusalem  et  de 
la  nation  juive.  Cf.  Anl.  jud.,  XX,  xi,  1;  Bell,  jud., 
II,  xiv,  2-9  sq. 

IV.  La  Palestine  sous  les  Romains.  —  {«Au  point 
de  vue  politique.  —  Après  la  conquête  de  Jérusalem 
par  Pompée,  la  Palestine  perdit  son  indépendance  et 
devint  tributaire  des  Romains.  Ant.  jud.,  XIV,  iv,  4; 


Bell,  jud.,  I.  vu,  0.  Fut-elle  immédiatement  incorporée 
à  la  province  de  Syrie?  Ce  n'est   pas  sûr.  Les  villes 
conquises  par  les  Juifs  en  Codé-Syrie  leur  furent  enle- 
vées et  la  nation  se  vit  condamnée  à  vivre  désormais 
dans  les   limites  de  son  territoire.  Hyrcan  II  (63-40) 
resta  à  la   têle  du  gouvernement,  mais  sous  la  haute 
surveillance  du  légat  romain.  Plus  tard  Gabinius  (57-55) 
lui  retira  son  pouvoir  politique,  pour  ne  lui  laisser  que 
le  souverain  pontificat.  En  même  temps  il  divisa  le  pays 
en  cinq  districts,  uûvofiot,  <juvs5p;i,  dont  les  chefs-lieux 
furent  :  Jérusalem,  Gazara,   Amathus,  Jéricho  et  Sep- 
phoris.  Ant.  jud.,  XIV,  v,  4;  Bell,  jud.,  I,  vin,  5.  On 
ne  sait  au  juste  ce  qu'ils  représentent,  mais  on  peut  y 
voir  ou  des    circonscriptions  territoriales  établies  en 
vue  des  impôts,  ou  des  ressorts  judiciaires,  conventus 
juridici,  peut-être  les  deux  à  la  fois.  Ces  dispositions 
ne  furent  cependant  pasde  longue  durée.  César  rendit 
à  Hyrcan   le  pouvoir  que  lui  avait  enlevé  Gabinius  et 
le  nomma  ethnarque  des  Juifs.  Il  nomma  aussi  Anti- 
pater  procurateur,  È-iuTpo-no;,   de  Judée,  ou  plutôt  il  le 
confirma    dans    cette    charge,   car,    déjà     avant    cette 
époque,  Josèphe   le  présente  comme    ô  tô>v    'Iouoaîcov 
iTitjj.EÀr.T/,.-.  Ant.  jud.,  XIV,  vin,  1.  Il  est  possible  que 
Gabinius    lui-même  lui   eût  confié    une  certaine  part 
dans  l'administration  des  finances,  comme  l'indique  le 
titre   d'âm|jiE)a]Tï)ç.  Le    faible    Hyrcan   n'eut  guère  du 
gouverneur  que    le  nom.  En  réalité,  ce  fut  Antipater 
qui  exerça   l'autorité.  Il  eut  soin  de  donner  à  son  fils 
aîné   Phasaèl    le  gouvernement  de    Jérusalem  et  des 
environs,  et  à  son  second  fils  Hérode  celui  de  la  Ga- 
lilée. Ant.  jud.,  XIV,  ix,  2;  Bell,  jud., ,1,  x,  4.  Plus  tard, 
Antoine  leur  conféra  à  tous  deux  le  titre  de  tétrarque, 
et,  par  un  décret  en  forme,  remit  entre  leurs  mains 
l'administration  de   la  Judée.  Anl.  jud.,  XIV,  xm,  1  ; 
Bell,  jud.,  I,  XII,  5.  Cependant  la  race  des  Asmonéens 
reparut  sur  le  trône  avec  Antigone  (40-37),  qui  fut  ra- 
mené   par   les    Parthes.   Mais,   trois   ans  après,   avec 
l'appui  des  Romains,  Hérode  le  Grand  reparaissait  avec 
le  titre  de  roi.  Voir  Hérode  le  Grand,  t.  m,  col.  638. 
Après  sa  mort,  le  territoire  fut  partagé  entre  ses  fils  : 
Archélaiis  reçut  la  Judée,  la  Samarie  et  l'Idumée,  avec 
le  titre  d'élhnarque;   Antipas,  la  Galilée  et  la   Pérée; 
Philippe,  la  Gaulanitide,  la  Ratanée,  la  Trachonitide  et 
l'Auranitide,  tous  deux  avec  le  titre  de  tétrarque.  Cf. 
Luc,  m,  1.  Voir  ArchélaûS,  t.  i,  col.  927;   Hérode  An- 
Tii'As,  t.  m,  col.  647;  Hérode  Philippe  II,  t.  m,  col. 649. 
Après  la  déposition  d'Archélaùs,  ce  furent  les  procura- 
teurs romains  qui  gouvernèrent  son  territoire.  L'an  37 
après  J.-C,  Caligula  donna  la  tétrarchie  de  Philippe 
et  l'Abilène  à  Hérode  Agrippa  Ie',  avec  le  titre  de  roi. 
Ant.  jud.,  XVIII,  vi,  10;  Bell,  jud.,  II.  ix,  6.  En  39,  il 
y  ajouta  celle    d'Antipas,    et,    en   41.  Claude  réunit  au 
tout  la  Judée  et  la  Samarie.  Anl.  jud..  XVIII,  vu,  2; 
XIX,   v.    1:    Bell,  jud.,   II,  ix,   6;   xi,  5.  C'est   ainsi 
qu'Agrippa  I  posséda    tout  le  royaume  de  son  grand- 
père  et  que  la   Palestine  se  trouva  de  nouveau  sous  le 
même  sceptre.  Voir  Hérode  Agrippa  Ier,  t.  ni,  col.  650. 
Mais  bientôt  après,  en  4i,  le  roi  mourait  et  la  province 
retombait   sous   les  procurateurs  romains.   Cependant, 
en  53,  son  (ils,  Hérode  Agrippa  II,  recevait  de  Claude, 
en  échange  de  la    principauté  de  Chalcis,  et   avec  le 
titre  de   roi,    la    tétrarchie   de  Philippe  et  l'Abilène. 
Anl.  jud.,  XX,  vu,   1.  Voir  Agrippa   II,  t.  i,  col.  286. 
Après  la  ruine  de  Jérusalem,  la  Palestine  fut  confiée  à 
des  gouverneurs  de  rang  sénatorial. 

2°  Au  point  île  vue  géographique.  —  Telles  sont  les 
vicissitudes  par  lesquelles  passèrent,  dans  l'espace 
d'un  siècle,  les  différentes  provinces  de  ta  Palestine. 
Pour  les  limites,  divisions,  description  et  histoire  de 
chacune  d'elles,  voir  les  articles  qui  leur  sont  consa- 
crés. Nous  devons  nous  borner  ici  à  un  aperçu  géné- 
ral du  pays  et  à  ses  particularités  les  plus  remarquables 
pendant  la  période  romaine.  Voir  la  carte,  fig.  179. 


695 


PROCURATEURS    ROMAINS 


6r& 


Joscphe  décrit  sommairement,  Bell,  jud.,  III,  ni, 
1-.").  l'ensemble  de  la  Palestine  telle  qu'elle  était  de 
son  temps.  L'historien  juif  est  notre  première  source 
dans  cetle  étude.  .Mais  il  n'est  pas  la  seule.  Pour  avoir 
une  idée  plus  complète  de  la  région,  il  est  utile  de  dé- 
passer les  bornes  de  l'histoire  auxquelles  la  Bible  nous 
limite  strictement,  et  d'étendre  nos  recherches  géogra- 
phiques jusque  vers  le  iv  siècle  de  notre  ère.   Après 


-1  |Snr  la  côte  méditerranéenne,  nous  renconlrons, 
en  allant  du  nord  au  sud  :  'ExSt'mca.  Ptol.,  V,  15;  Ec- 
dippa,  Pline,  V.  17:  'Exgtnnwv,  'Exôi'tcouç,  .losèphe, 
Bell,  jud.,  I.  xiii.  I;  Kezîb  ou  (u-.îb,  Taira.;  'A-/Ç19, 
Achtif-Onom.,   p.  65,  22i:   aujourd'hui    Es-Zib.    Voir 

\l   IIA/II!    1,    t.    I,    COl.     136. 

IlTo>£|iaï:,  Acl.,  xxi,  7;  Bell,  jud.,  I,  xxi,  11:  Ptolo- 
maide,  Tab.  Peut.  :  Plolomais,  dans  Onom.,  95;  Ahkor 


10         20        30        *e 


179.  —  Carte  de  Palestine  sous  le  gouvernement  lies  procurateurs  romains. 


.losèphe,  les  sources  seront  donc  :  les  Talmuds  (nous 
renvoyons  à  Neubauer,  La  géographie  du  Talmud, 
Paiis.   isiis,  pour    les   détails),   VOnomaslicon    d'Eu- 

sèl tdeS.  Jérôn dit.de  Lagarde,  Gœttingue,  1870), 

la  carte  mosaïque  de  Mâdaba  (voir  fig.  180),  auxquels 
on  peut  joindre  :  Ptolémée,  la  Table  de  l'eutingcr,  la 
Notitiadignitalum,  etc.  Nous  retrouvons  ainsi  un  cer- 
tain  nombre  de  noms  connus  dans  l'Ancien  Testament. 
Mai  il  en  est  d'autres  qui  viennent  s')  ajouter;  plusieurs 
villes,  en  effet,  lurent  bâties  à  cette  époque;  d'autres 
lurent  rebâties  ou  prirent  une  plus  grande  impor- 
tance. Une  Bimple  esquisse  nous  suffira. 


Talm.;  aujourd'hui   Akka,  Voir  Accno,  t.  1,  col.  108. 

Ilrifii.  ns'n,  Talm.,  probablement  la  ville  de  l'aoi, 
que  Josèphe,  Bell,  jud.,  111,  m,  1,  place  près  du  Car- 
inel  :  anj.  llaifa  ou  Khaïfa,  Cf.  Neubauer,  p.  IH7.  Elle 
est   appelée     Epha,      11.  y.   clans  lOnoni.    p.    134,    267, 

qui  l'identifie  avec  la  suivante. 

Euxs|uv(ov,  Ptol.:  Siqmônahj  -:•---•,  Talm..  Neu- 
bauer, p.  197;  Suxâ|iivo;,  Sycaminum,  Onom.,  p.  133, 
•Jii7:  aujourd'hui  llaifa  el  a liqa  ou  Tell es-Semak. 

Castra,  s-.:-.  Talm..  Neubauer,  p.  196,  que 
It.  Schwarz,  Das  heilige  Land,  Francfort-sur-le-Main, 
1852,  p.  129,  identifie  avec  Athlit,  le  Castrum  peregri- 


,  lie  en  1896,  eBt  une-  mosaïque  datant  do  v  ou  du  vr  siècle  de  l'ère  chrél 
QB|I  |b  plue  grande  parité  du  pavement  d'une  église  située  au  nord-est  de  la  ville  deMadi 
, .  de  Vîoab:  Avec  ce  dernier  paye,  elle  comprenait  primitivement  tout  Le  territoire  de 

,,,  ert  du  Sfnaï,  la  Ba    i    i.  f\ ■■■   et  probablement  une  bande  de  t'Idumée,  de  l'Amn 
et  de  la  Syrie,  i-t  fragment  qui  Bubsista  aujourd'hui,  et  rjui  a  de  nombreuses  lacunes,   s'étend  depule 
bouches  da  Nil.  L'église  étanl  orientée  de  l'es)  &    [\  u    I     ...  carte  était  dessinée 
s  le  même  ens,  et  les  noms  étaient  écrits  de  manière  à  être  lus  &  mesure  qu'on    avai 

hœur.  ■s,':  lM'llls  seulement  figurent  en  loiil  'jii  en  |.;irtie  sur  ce  <|in   reste  :  Siméon,   Juda,    l'an,   Ben- 

:■  Ruben   Lei  montagnet  sontrepré  entées  pai   di  de  cou- 


leurs qui  les  disUnguenl  nettement  de  la  plaine  Les  fleuves  sont  striés  de  bandai  étroites  et  ilnuousoa 
des  poissons  bs  Jouent  sans  les  eaux  i  s  Met  Morte  a  sur  ses  Rots  deux  navires  qui  manquent  de  pro« 
portions,  mais  sont  d  ll[1  bDbI  pittoresque.  Au  désert,  les  palmiers  marquent  les  oasis  ;  la  gaielle  Cuit 
devant  le  Uon.  Dans  les  grandes  villes,  comme  tension,  Qaia,  Jérusalem,  on  distingue  les  colonnades, 
les  principaux  monu  tes.  Les  <  itéa  moins  Importantes  «ont  figurées  perdes  murs 
flanqués  de  tours  carrées.  Les.  plana  deé  villes  principales  sont  malheureusement  pins  ou  moins  enta- 
mes;  mais  celui  de  Jérusalem  est  presque  en  entier  et  présente  le  pins  haut  Intérêt,  t-es  loooiUéd 
sont  désignées,  s'il  \  o  lieu,  par  le  nom  uolen  el  le  nom  usité  è  L'époque  où  la  carte  o  été  cons- 
truite; souvent  des  renseignements  historiques  on  géographiques  -    tant  sj as.  Les  IndloaUons  sont 

en  grande  partietirees.fr  l'OnontotCfcofi  (TGusebe   La taïque  originale  asl  en  couleurs 


\PH1QUE  I»E   WaDADA    ! 


€97 


PROCURATEURS   ROMAINS 


698 


norum  du  moyen  âge.  Il  est  possible  que,  dés  l'époque 
■romaine,  cet  endroit  très  bien  situé  ait  été  une  localité 
fortifiée,  une  sorte  de  camp.  V.  Guérin,  Samarie,  t.  n, 
p.  290,  est  disposé  à  y  reconnaître,  avec  Ritter,  la  mu- 
talio  Cerla,  que  le  Pèlerin  de  Bordeaux  (333)  mentionne 
■entre  Sycaminos  et  Césarée  de  Palestine,  cf.  Itinera 
Terra:  Sanctae,  édit.  T.  Tobler,  Genève,  1877,  t.  i.  p.  15. 
C'est  probablement  aussi  la  Magdihel,  MaySir,).,  que 
l'Onomasticon,  p.  139,  280,  signale  entre  Dora  et  Pto- 
lémaïde. 

Âupot,  Ptol. ;  Thora,  Tabl.  de  Peut.;  aujourd'hui 
Tantûrah.  Voir  Dor,  t.  n,  col.  14S7. 

KaiaipEia  ÏTpïTiivor,  Ptol.  ;  primitivement  la  «  Tour 
de  Straton,  »  Plin.,  H.  N.,  v,  14,  qui  devint,  sous 
Hérode  le  Grand,  Césarée  maritime,  aujourd'hui  Qai- 
sariyéh.  Voir  Césarée  du  bord  de  la  mer,  t.  n. 
col.  456. 

Apollonia,  AnoXXbmot,  Ptol.  ;  Apolloniade,  Tab.  Peut. 

Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII,  xv,  4,   et  Pline,   v,   14,   la 

placent  entre  Césarée  et  Joppé.  C'est  aujourd'hui  Arsûf. 

Irj7ir„   Ptol.;   Joppe,    Tab.  Peut.;  aujourd'hui  Jaffa. 

Voir  Joppé,  t.  m.  col.  1631. 

'Ictiivet'ct,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII,  vi,  6  ;  Yabnéh, 
Talm.,  Xeubauer,  p.  73,  était  une  petite  ville,  jtoXr/viri, 
au  temps  d'Eusèbe  et  de  saint  Jérôme,  Onom.,  p.  132, 
276;  cependant,  la  carte  mosaïque  de  Mâdaha  repré- 
sente Ia6vi)X  i\  xai  Iaav.a  comme  une  ville  considéra- 
ble, mais  sans  colonnades;  aujourd'hui  Yebna.  Mais  le 
port  de  Jamnia.  IaftviTwv  Xqn/y/,  Ptol.,  correspond  à 
Minet  Rabin.  Voir  Jamnia,  t.  ni,  col.  1115. 

'  A't.iTor,  Ptol.;  Azoton,  Tab.  Peu  t.  ;  aujourd'hui  Esdûd. 
"A^ûjtq;  ■Kxpzj.'.rj;  ou  Azot  maritime  ■'  Miuet-el-Qal'a. 
La  mosaïque  de  Màdaba  distingue  bien  Aa5w[8]  de 
ACw-o;  n«paXo[;J,  et  montre  l'importance  de  la  cité 
maritime.  Voir  Azot  1.  t.  i,  col.  1307. 

'Ao-xi/Mv,  Ptol.  ;  Ascalone,  Tab.  Peut.;  'A<xxaXeo[v], 
carte  de  Màdaba,  sur  laquelle  on  remarque  une  im- 
mense place  rectangulaire  entourée  de  colonnes,  au 
milieu  de  laquelle  se  dressent  trois  obélisques;  aujour- 
d'hui Asqûlàn.  Voir  Ascalon,  t.  i,  col.  1060. 

'Av8j]8(iv,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII,  xm,  3;  Anthe- 
don,  Plin.,  v,  13,  68,  dont  le  nom  fut  changé  par 
Hérode  en  celui  A'Agrippias,  Josèphe,  toc.  cit.,  se 
trouvait  au  nord  de  Gaza.  On  l'identifie  aujourd'hui 
avec  les  ruines  â'el-Blachiyéh,  appelées  aussi  Teda,  à 
une  heure  au  nord-ouest  de  Gaza.  Cf.  G.  Gatt,  Bemer- 
kungen  ïiberGaza  und  seine  Umgebung,  dans  la  Zeit- 
scltrift  des  deutschen  Palâstina-Vereins,  Leipzig,  t.  vu, 
1884,  p.  5-7;  voir  ibid.,  p.  140-142,  les  remarques  de 
Noldeke  et  Gildemeister. 

râÇa,  Gaza,  aujourd'hui  Ghazzéh;  roÇacuv  Xc(ir(v,  le 
port  de  Gaza  =  el-Mînéh.  Voir  Gaza,  t.  m,  col.  1 18.  La 
mosaïque  de  Màdaba  fait  ressortir  la  grandeur  et  la 
beauté  de  la  ville  de  [T]  a^a  avec  ses  édifices,  sa  grande 
rue  à  colonnades  et  sa  superbe  basilique. 

Raphia,  'Paçia,  Strabon,  XVI,  p.  522;  Josèphe,  Ant. 
jud.,  XIII,  xv,  4;  Raphea,  Pline,  v,  14;  Talm.  :  rosn, 
Xeubauer,  p.  20;  aujourd'hui  Khirbel  bir  Refait,  au 
sud  de  Gaza.  C'était  la  première  ville  syrienne  que  l'on 
rencontrait  en  venant  d'Egypte. 

B)  En  Galilée  :  —  Giscala,  Ti<sy*k*,  Josèphe,  Bell. 
jud.,  II,  xx,  6;  IV,  II,  1;  Vita,  10;  GûS  Balab,  shn  wil, 
Talm.,  Xeubauer,  p.  230;  aujourd'hui  el-Djisch.  Voir 
Aiiai.ab,  t.  i,  col.  289. 

MnpûO,  Josèphe,  Bell,  jud.,  II,  xx,  6;  Vila,  37; 
Merôn,  '•--,  Talm.,  Xeubauer,  p.  22S;  aujourd'hui 
Meirûn,  au  sud  A'El-Djisch. 

Achabara,  'A-/ïêip-rl,  Josèphe,  Vita,  37;  'A^aëâpuv 
riÉTpa.,  «  rocher  d'Achabara,  »  Bell,  /ut/.,  II,  xx,  6; 
Akbarah,  ïrasr,  Talm.,  Xeubauer,  226;  aujourd'hui 
Akbara,  au  sud-est  de  Meirûn. 

Kefar  Hananiyah.  rtoan  iss, Talm.,  Xeubauer,  p. 226; 
aujourd'hui  Kefr'Andn.  Voir  Hanatiion,  t.  m,  col.  415. 


Séldmis,  SeXa(it'ç,  Josèphe,  Bell,  jud,,  II,  xx,  6; 
Vila,  37;  aujourd'hui  Khirbet  Sellaméh,  au  sud-ouest 
de  Kefr'Andn. 

Gabara,  l'àêcxpa,  Josèphe,  Vita,  25,  45;  une  des 
trois  grandes  villes  de  la  Galilée,  avec  Tibériade  et 
Sepphoris,  d'après  l'historien  juif,  loc.  cit.;  on  l'a 
identifiée  avec  Khirbet  Kabra,  au  nord-ouest  de 
À7i.  Sellaméh,  voir  cependant  W.  Oehler,  Die  Ort- 
schaften  und  Grenzen  Galilàas  nach  Josephus,  dans  la 
Zeilschrift  des  deutschen  Palâstina-Vereins,  t.  xxvm. 
1905,  p.  56. 

Sogane,  Sto-favTJ,  Josèphe,  Vita,  51  ;  Sîknîn  ou  S(- 
knî,  i>33'D  »K>D,  Talm.,  Xeubauer,  p.  204;  aujourd'hui 
Sakhnin,  au  sud  de  Kh.  Kabra. 

Chabolo,  XaëwXti,  Josèphe,  Vila,  43;  Kabùl.  b-cD, 
Talm.,  Xeubauer,  p.  205;  aujourd'hui  Kabùl,  à  l'ouest 
de  Sakhnin.  Voir  Chabui.  (Terre  de),  t.  n,  col.  473. 

Iotapata,  'Itazànarcn,  Josèphe,  Bell,  jud.,  II,  xx,  6; 
Vila,  37;  sans  doute  la  Yôdafat,  riSTV,  des  Talmuds, 
Xeubauer,  p.  203;  aujourd'hui  A7<.  Djéfàt,  au  sud-est 
de  Kabùl. 

Schefar'âm,  nyisw,  Talm.,  Xeubauer,  p.  198 ;  au- 
jourd'hui Schéfa  'Amr,  au  sud-ouest  de  Kh.  Djéfàt. 

Uscha,  x-iHN,  Talm.,  Xeubauer,  199;  aujourd'hui 
Kh,  Hûsehéh,  au  sud  de  Schéfa  Amr. 

'Poujjià,  Josèphe,  Bell,  jud.,  III,  vu,  21  ;  probablement 
la  Bùma',  ndti,  des  Talmuds,  Xeubauer,  p.  203;  au- 
jourd'hui A7i.  Rùméh,  au  sud  de  Kh.  Djéfàt. 

Sepphoris,  SÉTrycopc;,  Josèphe,  Vila,  65;  SaTtço'jpet, 
Ptol.;  Sippôri  ou  Sippôrin,  mss,  î'Tiss,  Talm.,  Xeu- 
bauer, p.  191  ;  aujourd'hui  Seffuriyéh,  au  sud  de 
Kh,  Rùméh. 

Tibériade,  TiSepii;,  Josèphe,  Rell.  jud.,  II,  XIII, 
2,  etc.;  Ptol.  ;  Onom.,  p.  88,  215;  Tyberias,  Tab.  Peut.; 
Tabaria,  «nais,  Talm.,  Xeubauer,  p.  208;  aujourd'hui 
Tabariyéh.  Voir  Tirériade. 

lirfii.xoJs;,  Jos.,  Vila,  12,  62;  Beth  Maon,  Ji7a  n>3, 
Talm.,  Xeubauer,  p.  218;  aujourd'hui  Tell  Ua'ûn,  à 
l'ouest  de  Tibériade. 

Sennabris,  EewaSp:';,  Josèphe,  Bell,  jud.,  III,  ix,  7; 
Senabrî,  >H33ï,  Talm.,  Xeubauer,  p.  215;  Sinn  en- 
Nabra,  au  sud  de  Tibériade.  Pour  les  difficultés  d'iden- 
tification, en  ce  qui  concerne  Josèphe,  cf.  .1.  B.  van  Kas- 
teren,  Am  See  Genezaret,  dans  la  Zeilschrift  des 
deutschen  Palâstina-Vereins,  t.  xi,  1888.  p.  242,  213; 
F.  Buhl,  Bemerkungen  lu  einigen  frûheren  Aufsât- 
zen  der  Palâstina-Zeitschrift,  dans  la  même  revue, 
t.  xm,  1890,  p.  38-39. 

Tapr/sac  ou  Tapt^loe,  Josèphe,  Bell,  jud.,  III,  X,  1. 
Vita,  32;  Tarichea,  Plin.,  H.  N.,  v,  15,  71;  probable- 
ment la  Betli  Yerah,  m>  n'a,  du  Talmud,  Xeubauer, 
p.  215.  On  la  place  généralement  à  Kh.  el-Kérak,  à  la 
pointe  sud  du  lac  de  Tibériade.  D'autres  cependant  la 
cherchent  au  nord  de  la  ville  de  Tibériade,  à  el-Medjdel. 
Pour  les  partisans  des  deux  opinions,  voir  E.  Schûrer, 
Geschichle  des  jûdischen  Volkes,  t.  i,  p.  614,  note  44. 
Kefar  Sobti,  >roiv  te:,  Talm.,  Xeubauer,  p.  218; 
aujourd'hui  Kefr  Sabt,  au  nord-ouest  de  Sinn  en- 
Nabra. 

Simonias,  Sip-w/iâ;,  Josèphe,  Vita,  24;  Simonia', 
N'jiO'D,  Talm.,  Neubauer,  p.  189;  aujourd'hui  Semû- 
niyéh,  à  l'ouest  de  Nazareth. 

Scylhopolis,  Sxu8Ô7coXcç,  sur  les  confins  de  la  Galilée, 
appartenait  à  la  Décapole,  au  temps  de  Josèphe,  Bell. 
jud.,  III,  îx,  7;  Scylopoli,  Tab.  Peut.,  Beth  Sc/ie'dn, 
Talm.,  Xeubauer,  p.  174.  C'est  la  Bethsan  de  l'Écriture, 
aujourd'hui  Béisân.  Voir  Bethsan,  t.  I,  col.  1738 

G)  En  Samarie  :  Ginxa,  IV/sta,  Josèphe,  Bell,  jud., 
III,  m,  4  ;  l'ancienne  Engannini,  aujourd'hui  Djénin,  à 
l'entrée  de  la  Samarie,  au  sud  de  la  grande  plaine 
d'Esdrelon.  Voir  EnganniM  2,  t.  n,  col.  1802. 

Caparcolia,  KauapxoTta  ou  KanapxÔTvEi,  Ptol.;  Ca- 
pnreotani,  Tab.  Peut.,   localité  que   Ptolémée  marque 


699 


PROCURATEURS    ROMAINS 


700 


comme  appartenant  à  l;i  Galilée  :  aujourd'hui  Kefr  Qûd, 
près  de  Djénin,  à  l'ouest. 

A£-=u)v,  Legio,  est  un  nom  qu'on  rencontre  plusieurs 
fois  d'ans  VOnomaslicon,  p.  88, 94, 107,214,  223,239,  etc., 
et  qui  sert  connue  de  point  central  pour  déterminer  la 
position  de  certaines  autres  localités.  Il  atleste  sans 
doute  que  les  Romains  avaient  établi  en  ce  point  stra- 
tégique important  un  camp  pour  une  légion.  Il  a  sub- 
sisté jusqu'à  nos  jours  sous  celui  de  Ledjdjûn,  au 
nord-ouest  de  Kefr  Qûd,  el  représente  l'ancienne  Ma- 
geddo.  Voir  Mageddo  1,  t.  iv,  col.  553. 

Sébaste,  Zeêaavf\,  Josèphe,  Bell,  jud.,  I,  xxi,  2,  nom 
donné'  à  l'ancienne  ville  de  Samarie  par  Hérode  le 
Grand,  qui  la  restaura  et  l'embellit.  Elle  porte  encore 
le  même  nom  de  Sébastiyéh.  Voir  Samarie. 

Néapolis,  NeâiroXiç,  Josèphe,  Bell,  jud.,  IV.  vin,  1  ; 
Ptol.;  Neapoli,  Tab.  Peut.;  appelée  par  les  indigènes 
MaêopOâ,  selon  Josèphe,  loc.  cit.;  Mamortha,  selon 
Pline,  //.  A'.,  v,  14.  C'est  l'ancienne  ville  de  Sichem, 
qui,  rebâtie  presque  complètement  à  l'époque  de  Ves- 
pasien,  reçut  alors  une  colonie  romaine,  avec  le  nou- 
veau nom  de  Flavia  Néapolis,  qui  subsiste  encore  en 
celui  de  Xablus  chez  les  Arabes,  Naplouse  pour  les 
Européens.  Voir  SlCBEH. 

D)  En  Judée.  —  Acrabbi,  'Axpaêfeiv,  Onom.,  p.  87, 
214,  localité  donnée  par  Eusèbe  et  saint  Jérôme  comme 
-  limite  de  la  Judée  vers  l'orient  »,  ['Axpjagqi,  Mad.; 
Aqrabah,  -z-py,  Talm.,  Neubauer,  p.  159.  C'est  l"Ax- 
paëaztâ  de  Josèphe,  Bell,  jud.,  111.  m,  5,  capitale  de  la 
toparchie  d'Acrabatène,  Bell.  nul..  Il,  XX,  1;  IV.  ix,  3, 
9,  aujourd'hui  Aqrabéh,  au  sud-est  de  Naplouse. 

Antipatris,  'Avrtitatpî;,  Josèphe,  Ant.  ?'ud., XIII,  xv, 
1:  Itell.  jud.,  1.  iv,  7;  A.I.,  xxm,  31';  Ptol.,  Onom., 
p.  127,  245;  r— jr--:s,  Talm.,  Neubauer,  p.  86,  aujour- 
d'hui Qala'at  Ràsel-'Aïn,  au  nord-est  de  Jaffa,  suivant 
les  uns;  Medjdel  Yaba,  au  sud-est  de  Qala'al  Rds  el- 
A'in,  selon  les  autres.  Josèphe  semble  l'identifier  avec 

la  localité'  suivante.  Voir  ANTIPATRIS,  t.  I,  col.  7lH>. 

Capharsaba,  Xa@ap(aS3,  Josèphe,  .1»/.  jud.,  XIII, 
xv.  1  :  Kaçapo-aSâ,  Ant.  iml.,  XVI.  v,  2;  Kefar  Saba , 
n;t  -rr,  Talm.,  Neubauer,  p.  87;  aujourd'hui  Kefr 
Sâbâ,  a >rd  do    Qala'at   Ràsel-'Aïn.   Les  Talmuds 

semblent   distinguer    cet   endroit  du    précédente   Cf.    V. 
Guérin,  Samarie,  t.  n,  p.  3.V7-367. 

Caplutrsalama,  Ka?ap<7aXau.â,  Josépbe,  Anl.  jud., 
XII,  x,  \  ;  Xaçap<xaXau.â,  I  Mach.,  vu,  31.  Le  Talmud 
connaît  aussi  un  village  appelé'  Kefar  Salem,  dSïj  is:, 
Neubauer,  p.  173.  Capharsalama  devait  se  trouver 
dans  le  voisinage  de  Jérusalem,  mais  l'identification 

exacte    n'est    pas    connue.     Voir    CAPHARSALAMA.,   t.    Il 

col.  210. 

Beil  Rimah,  non  r'z.  Talm.,  Neubauer,  p.  82;  au 
jourd'hui  Beil  Rima 

Tôrmasia,  NiDDiin,  Talm.,  Neubauer,  p.  279;  aujour- 
d'hui Turmus  Aya,  au  sud-ouest  d'Aqrabéh. 

Gophna,  Péyva,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIV,  xi,  2;  ville 
importante,  chef-lieu  d'une  toparchie,  Bell,  jud.,  III. 
m, 5;  Pouçvâ,  Ptol.;  Cofna,  Tab.  Peut.;  Gophna,  x::-;  ; 
très  populeuse,  selon  les  Talmuds,  Neubauer,  p.  Iô7; 
V'ifi-j..  Onom.,  p. 300;  Màdaba;  aujourd'hui  D/i/neVt, au 
nord  de  Jérusalem.  Voir  Opuni  2,  t.  iv,  col.  [833. 

Éphrem,  l  ....  losèphe,  Bell,  jud.,  IV.  ix,  9; 
'Açep  ip  -.  Anl.   jud.,    MU.    IV,-  9;    Efrem,   I 

'.  Onom.,  p.  94,  Ils.  257;  Eippuv  r\  Eçpaïa  tv8« 

o  /:.  b  Ephron  ou  Ephrata,  où  vint  le  Seigneur  i 

cl   Joa.,  \i,  54),   Màdaba;  aujourd'hui   Et-Tayibéh,  à 

i  ■  Djifnéh,  identification  justifiée  par  la  carte  dr 

Màdaba,  Voir  cphri  m  I,  t.  u,  col.  1885. 

Lydda,  VûSSa,  Josèphe,    \m.  jud.,  XX,  VI,  J.  clief- 

I  >p  tri  hie,    Bell,   jud.,   III.   m,    ô;    VuSSâ, 

l'Iol.;     Lllddis,     lab.     l'ont.;     I.n,l    ou    l.éil.    t'-,  Talm., 

uer,  p.  76;  Diospolis,  A.ioo-jr<5Xi«,   Onom.,  p.  107, 
128,  '219,   22b.  etc.;  Aw6   ijtoi  Auîea  r)    /.xi  Aïooitolt?, 


carte  de  Màdaba,  qui  représente  la  ville  avec  des  édi- 
fices imposants,  entre  autres  une  colonnade  circulaire 
autour  d'une  grande  place,  au  fond  de  laquelle  est  une 
grande  église.  C'est  aujourd'hui  Ludd,  au  sud-est  de 
Jaffa.  Voir  Lydda,  t.  iv,  col.  lii. 

Modin,  MwSisqi,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XII,  vi,  1; 
Mi'idi  vm  ou  Môdi  if,  B>yma,  rwnn,  Talm.,  Neubauer, 
p.  99;  Modeim,  MtjSeeîu,,  «  bourg  près  de  Diospolis 
d'où  étaient  les  Machabées,  »  Onom.,  p.  140,  281  ; 
Mwô^elij.  r,  vuv  MioScBa  ez  raut>)ç  ijrav  di  Mï'/./.xêi'.rj:, 
Màdaba  ;  aujourd'hui  El-Mediyéh,  à  l'est  de  Ludd.  Voir 
MnlUN.  t.  iv,  col.  1180. 

Belhoannaba,  BeToavvâg,  bourg  signalé  par  l'Oiioni.. 
p.  90,  218,  dans  le  voisinage  de  Diospolis,  connue 
représentant  l'ancien  Anob,  'Avw6;  \mu>6  r,  vuv  BïjToav- 
vioa,  Màdaba;  aujourd'hui  Annâbéh,  au  sud  de  Ludd: 
mais  nous  ne  croyons  pas  que  ce  soit  l'Anab  assiégé 
par  .losué.  xi,  21.  Voir  Anab,  t.  i,  col.  533. 

'Axxapûv,  Josèphe,  Ant.  jud.,  V,  II,  11,  etc.;  Acca- 
ron,  était  encore  un  très  gros  bourg  au  temps  d'Eusèbe 
et  de  saint  Jérôme,  Onom.,  p.  91,  218;  Axxap[a>v]  r,  vuv 
A/....,  Màdaba  :  aujourd'hui  'Agir,  au  sud-ouest  d'Aund- 
béh.   Voir  Accaron,  t.  i,  col.  105. 

Emmaûs,  'Eu.p.ao0;  ou  Ap.jj.ao0c,  Josèphe,  Ant.  jud., 
XII,  VII,  3;  Bell. jud..  II.  x.x,  1,  était  le  chef-lieu  d'une 
toparchie.  Bell,  jud.,  III,  m,  5;  Pline.  //.  A'.,  v,  14; 
Tvj.ij.aov;,  Ptol.,  Amarante,  Tab.  l'eut.,  c-s:s  ou  c-S--..- 
dans  les  Talmuds,  Neubauer,  p.  100;  appelée  aussi 
Nicopolis,  NixéitoXi;,  Onom.,  p.  121,  2Ô7  ;  Nixôtco).k, 
Màdaba,  où  la  ville  est  figurée  dans  une  petite  plaine 
déjà  dans  la  montagne,  mais  cependant  en  avant  du 
grand  massif  judéen;  beaucoup  plus  étendue  que  les 
simples  bourgs,  elle  n'a  pas  de  colonnade.  C'est  au- 
jourd'hui 'Amuâs,  à  l'est  i"Agir.  Voir  Emma!  s  1.  t.  n, 
col.  1735. 

Jérusalem,  appelée  par  Hadrien  ASlia  Capitolina ; \e 
nom  A'.Klut.  ViXfa,  est  habituellement  employé'  par 
Eusèbe  et  saint  Jérôme  dans  VOnomaslicon.  Elle  est 
indiquée  sur  la  carte  de  Màdaba  avec  l'inscription  : 
v)  ayia  itoXiç  Iepou<ra[X]r]U.]  et  y  occupe  une  place  très 
importante;  à  remarquer  :  les  principales  portes,  entre 
autres  celle  qui  est  précédée,  à  l'intérieur  de  la  ville, 
d'une  colonne  monumentale,  d'où  le  nom  de  bdb  el- 
Amûd,  «  porte  de  la  colonne,  »  qu'a  conservé  la  porte 
de  Damas;  les  doux  colonnades,  dont  l'une  traverse  la 
cité'  du  nord  au  sud,  et  qui  est  coupée  à  l'ouest  par  un 
grand  édifice,  dans  lequel  on  reconnaît  le  Saint-Sépulcre. 
Voir  Prétoire,  col.  621  ;  Sepi  lcre  (Saint-). 

Bethlehem.  BqSXéeu.,  marquée  sur  la  carte  de  Màdaba 
par  quelques  édifices,  dont   le   plus   important   est   une 

église,  celle  de  la  Nativité.  Voir  Bethlehem  1,  t.  i, 
col.  1688. 

Hérodium, 'HptaSia,  HpûSeiov,  Josèphe,  Ant.  /<"/.. 
XIV,  XIII,  9;   Bell,  jud  ,  1,  Xlll.  S,  ville  et  acropole  bâties 

par  Hérode  le  Grand  a  l'endroit  même  où  il  avail  vaincu 

les   Juifs    partisans    (l'Antienne   qui    le    poursuivaient; 

auj d'hui  djebel  Furéidis,  an  sud-est  de  Bcthli 

Kefar  Dikrin,  ]•-:-  -::,  Talm..  Neubauer,  p.  71; 
aujourd'hui  Dhikriu.  au  nord-ouest  de  Beil  Djibrin; 
pour  l'identification  de  ce  lien  avec  Geth,  voir  lii  in. 
t.  m,  col.  223. 

'EXsuOsponôXi;,  Eleutheropolis,  ville  souvent  citée 
dans  ['Onomastivon,  p.  92,  lu;;,  lob.  109,  etc  ,  comme 
point  central  ou  point  de  départ  auquel  il  rapporte  les 
distances  de  plusieurs  localités.  C'est  la  Bonvoyo6p£l  de 

Ptolémée,  la  Belogabri  do  la  Table  do  Peutinger,  la 
Beth  Gùbrin,  •■'-"-  ~'-.  des  Talmuds,  Neubauer, 
p.  122,  ot  lo  nom  subsi^io  encore  aujourd'hui  sous 
celui  d<-  Beit-Djibrin.  La  mosaïque  de  Màdaba  no  la 

nomme   pas,    il    est    facile    de    la    reconnaître    dans    la 

grande  cité,  avec  place  entourée  de  col les,  qui  se 

trouve  au  sud-ouesl  de  Mopooôi,  i  don  était  le  pro- 
plioto  Michée.  ■    VOnomaslicon,  p.  141,  282.  auquel  la 


701 


PROCURATEURS   ROMAINS 


702 


carte  emprunte  ces  paroles,  place  Morasthi  à  l'est 
d'Éleuthéropolis. 

Hébron,  Xegpûv,  Josèphe,  Bell,  jud.,  IV.  îx,  9.  dé- 
truite par  l'un  des  généraux  de  Vespasien,  quelque 
temps  avant  la  ruine  de  Jérusalem,  elle  ('lait,  au  temps 
d'Eusèbe,  Onom.,  p.  209,  un  gros  bourg,  nôpr,  vOv 
jiEyiirrr,  ;  aujourd'hui  El-Khalil.  Voir  Hébron  3,  t.  m, 
col.  55i. 

Bersabée,  Bi)p<royëa!,  Josèphe,  .4)^.  jud.,  I,  xn,  1; 
IUo^aiia,  Ptol.  Au  temps  d'Eusèbe  et  de  saint  Jérôme, 
Onom..  p.  103,  23i,  c'était  un  bourg  considérable,  où 
était  établie  une  garnison  romaine.  La  mosaïque  de 
Màdaba  la  mentionne  sous  le  titre  de  Brjpiraêee  r,  vuv 
B^ipoo-o-aSa,  et  la  représente,  en  effet,  comme  une  lo- 
calité importante.  C'est  aujourd'hui  Bir  es-Sébâ.  Voir 
Bersabée,  t.  i.  col.  1629. 

Malalha,  Ma).i6o,  Josèphe.  Anl.  juil.,  XVIII,  vi,  2; 
Maleaha  (var.  Maleathia),  dans  la  Notitia  dighitatum; 
MwXaôâ,  Onom.,! p.  279;  aujourd'hui  Kh.  el  Milh.,  à 
l'est  de  Bersabée.  Voir  Molada,  t.  îv,  col.  1222. 

E)  Le  long  de  la  mer  Morte  et  de  la  vallée  du  Jour- 
dain, en  remontant  du  sud  au  nord.  —  Mascula,  Ma- 
iiôa,  Josèphe,  Bell,  jud.,  VII,  vin,  2-3,  etc..  célèbre 
forteresse  que  les  Machabées  construisirent,  qu'Hérode 
le  Grand  rendit  imprenable;  aujourd'hui  Sebbëh. 

Engaddi,  'EyyaSî,  Josèphe,  Ant.  jud.,  IX,  i,  2; 
'EvyeSaiv,  Ant.  jud.,  VI,  XIII,  1;  'Eyya?8aî,  une  des 
toparchies.  Bell,  jud.',  III.  m,  5;  EvyaBSa,  Ptol.;  était 
encore  «  un  gros  bourg  des  Juifs  »,  au  temps  d'Eusèbe 
i'l  île  saint  Jérôme,  Onom.,  p.  119,  254;  aujourd'hui 
Aui  Djidi,  sur  les  bords  de  la  mer  Morte,  presque  à 
mi-chemin  entre  les  deux  extrémités  nord  et  sud.  Voir 
Engaddi,  t.  n,  col.  1796. 

Jéricho,  'LspixoOç,  une  des  toparchies,  Josèphe,  Bell, 
jud.,  III,  m.  5;  lepenouç,  Ptol. ;  Herichonte,  Tab.  Peut.  ; 
Jéricho,  'Iepc/fi,  Onom.,  p.  131,  265,  qui  compte  trois 
Jéricho  successives.  La  mosaïque  de  Màdaba  la  repré- 
sente comme  une  ville  importante,  flanquée  de  tours 
carrées  et  environnée  de  palmiers.  Elle  s'appelle  au- 
jourd'hui Er-Rikâ.  Voir  JÉRICHO,  t.  m.  col.  1282. 

Archélaïs,  'Ap-/3>.a;:.  Josèphe,  Anl.  jvd.,  XVII,  xm, 
1,  ville  fondée  par  Archélaiis,  fils  d'Hérode  le  Grand; 
'Af/sXac:,  Ptol.;  Arcelais,  Tab.  Peut.  Son  emplace- 
ment exact  n'est  pas  connu.  D'après  Josèphe,  Anl. 
jml '.,  XVIII,  II,  2,  elle  était  dans  la  plaine  du  Jourdain 
et  dans  le  voisinage  de  Pliasaélis,  mais  les  uns  la 
cherchent  au  nord,  les  autres  au  sud  de  cette  dernière 
ville.  La  carie  de  Màdaba  la  place  au  sud.  Cf.  V.  Gué- 
rin,  Samane,  t.  i,  p.  236-237;  E.  Schurer,  Geschichte 
des  jùdischen  Volkes,  t.  i,  p.  452.  note  12. 

Phasaélis,  'Pâinr,'/,:;,  Josèphe,  .4»;.  jud.,  XVI,  v,  2, 
ville  fondée  par  llérode  le  Grand,  en  l'honneur  de  son 
frère  Phasaèl.  au  nord  de  Jéricho;  ^ao-a/j'/iç,  Ptol.  Les 
dernières  lettres  seulement  du  nom,  [>ta<7ir,|/.'.ç,  sont 
conservées  sur  la  mosaïque  de  Màdaba.  Aujourd'hui 
Kh.  Fasdïl. 

Coreae,  Kopsaf,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIV.  m,  1;  Ko- 
peoy;,  Màdaba  ;  aujourd'hui  Kurdua,  à  l'embouchure, 
de  Vouadi  Fdri'a,  au  nord  de  Qarn  Sartabéh. 

F)  A  l'est  du  Jourdain,  du  nord  au  sud.  —  Césarée 
de  Philippe,  Kanrapsia  r,  $iX£mcou,  Matlh.,  xvi.  13; 
Marc,  vin,  27;  Josèphe,  Anl.  jud.,  XVIII,  n,  1,  etc.; 
Kataipetx  IJaviiç,  Ptol.;  Cœsarea  paneas,  Tab.  Peut.; 
aujourd'hui  Bdnias.  Voir  Césarée  de  Philippe,  t.  n, 
col.  450. 

Bethsaïda-Julias,  Josèphe,  .1///.  jud.,  XVIII,  n,  1, 
nous  dit  que  e  le  village  de  Bethsaïde,  situé  sur  le 
lac  de  Génésareth  »,  lui  agrandi  et  fortifié  par  le 
tétrarque  Philippe,  qui  lui  donna  alors  le  nom  de  la 
Elle  d'Auguste,  Julias,  C'est  la  louAia;  de  Ptolémée, 
longtemps  cherchée  à  Et-Tell,  au  nord  du  lac  de 
Tibériade,  plus  probablement  à  El-  Aradj,  ou  El-Mes'a- 
diyéh,  un  peu  plus  bas.  Voir  Bethsaïde  1.  i.  i,  col.  1713. 


Hippus,  "Ittooç,  Josèphe,  XIV,  iv,  4;  Ptol.;  Plin.,  v,  15: 
Onom.,  p,  116,  251.  C'est  la  Sûsitd,  sr':-:.  des  Tal- 
muds.  Xeubauer,  p.  238;  aujourd'hui  Sûsiyéh,  à  l'est 
du  lac  de  Tibériade. 

Gadara,  PaSapi,  une  des  places  les  plus  importantes 
de  la  Pérée,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XII,  ni,  3;  Faôàpa, 
Ptol.;  Cadara,  Tab.  Peut.;  Gadar,  "na,  Neubauer, 
p.  243;  aujourd'hui  l'niin  Qëis,  au  sud-est  de  la 
pointe  méridionale  du  lac  de  Tibériade.  Voir  Gérasé- 
niens  (Pays  des),  t.  ni,  col.  200.  Quelques  auteurs  dis- 
tinguent de  cette  Gadara  celle  que  mentionne  Josèphe, 
Bell,  jud.,  IV,  vu,  3,  et  la  TaSwpa  de  Ptolémée,  qu'ils 
cherchent  à  Es-Salt.  Cf.  F.  Iluhl,  Géographie  des  alleu 
Palâslina,  Leipzig,  1896,  p.  255,  263. 

Capitolias,  KaniTwXiaç,  Ptol.;  Capitoliade,  Tab. 
Peut.;  est  souvent  identifiée  avec  Beit  er-Bàs,  au  sudr 
est  d'Umm  QéiS,  mais  il  faudrait  plutôt  peut-être  la 
chercher  à  l'est  ou  au  nord-est  de  cette  localité. 
Cf.  Schûrer,  Geschichte  des  jùdischen  Volkes,  t.  i, 
p.  651,  noie  15. 

Pella,  IIîHv",,  Josèphe,  Bell,  jud.,  III,  ni,  3;  une  des 
toparchies,  Bell,  jml.,  III,  ni,  5;  IHXXa,  Ptol.;  Fahil, 
bnr,  Talm..  Xeubauer,  p.  274;  aujourd'hui  Kh.  Faliil, 
au  sud  d'Umm  Qéis. 

Dium,  Aïov,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII.  xv,  3;  Bell. 
jud.,  I,  VI,  4;  Ptol.;  Plin.,  v,  18;  aujourd'hui  Eidihi 
ou  El-IIosn,  à  l'est  de  Kh.  Fahil. 

Gérasa,  Vïç,-j.ni,  Josèphe,  Bell,  jud.,  I,  îv,  8;  Ptol.; 
Onom.,  p.  130,  263;  aujourd'hui  Djèrasch,  au  sud-est 
de  Kh.  Fahil,  avec  de  magnifiques  ruines.  Voir  Géra- 
séniens  (Pays  des),  t.  ni,  col.  200. 

Philadelphia,  "tiXaSéXçeia,  Josèphe,  Bell,  jud.,  I, 
xix,  5;  Philadelfia,  Tab.  Peut.;  est  l'ancienne  Rabbath 
Animun,  capitale  des  Ammonites,  Deut.,  ni,  11;  .lo^.. 
xm,  25;  Onom.,  p.  88,  215;  elle  reçut  ce  nom  de  Pto- 
lémée II  Philadelphe,  roi  d'Egypte,  qui  la  recon- 
struisit. C'est  aujourd'hui  'Amman,  au  sud  de  Djè- 
rasch, avec  des  ruines  importantes.  Voir  Rabbath 
Ammon. 

Tyrus,  T-Jpo:,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII,  iv,  II,  place 
forte  dont  Josèphe  attribue  la  fondation  à  un  prince 
nommé  Hyrcan;  auj.  Arà(j  el-Emir,  avec  des  ruines 
intéressantes,  à  l'ouest  d'Amman. 

Livias,  A.i6i'aç,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIV,  i,  'i  ;  Ptol.  ; 
Onom.,  p.  103,  234;  aujourd'hui  Tell  er-Raméh,  au 
sud-ouest d'Ardtj  el-Èniir.  Voir  Bétharan,  t.  i,col.  1664. 

Câllirrhoé,  KaXXtppdrj,  sources  d'eaux  thermales, 
situées  à  l'est  de  la  mer  Morte,  célèbres  dans  l'anti- 
quité, Josèphe,  Ant.  jud.,  XVII,  VI,  5;  Plin.,  v,  16; 
Ptol.  ;  6spp.a  KaXXipoïjç,  sur  la  carte  de  Màdaba,  qui 
représente  trois  fontaines  :  une  plus  petite  au  nord; 
une  autre  sur  le  cours  d'un  petit  torrent,  qui  prend 
naissance  au  pied  de  la  montagne;  entre  les  deux,  la 
fontaine  principale  avec  une  construction  en  forme 
d'abside.  D'après  ce  plan,  Câllirrhoé  répond  plutôt  à 
Sâra,  situé  au  sud-ouest  d'Hammàm  ez-Zerqa,  ce 
dernier  endroit  étant  le  [Bjaapo-j  de  la  mosaïque. 
Cf.  .1.  Manfredi,  Callirhoé  et  Baarou  dans  la  mo- 
saïque géographique  de  Màdaba,  dans  la  Revue  bi- 
blique, 1903,  p.  266-271.  Voir  Câllirrhoé,  I.  H,  col.  69. 

Machserus,  Mce-/aipo0ç,  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIV,  v,  2; 
Bell,  jud.,  VII,  VI,  1,  etc.;  Plin.,  H.  N.,  v,  16,  célèbre 
forteresse,  construite  par  Alexandre  Jannée,  recon- 
struite par  Hérode  le  Grand,  et  qui  servit  de  prison  à 
saint  Jean-Baptiste,  Ant.  jud.,  XVIII,  v,  2;  aujourd'hui 
M'kaur,  au  sud-est  de  Sâra. 

La  Batanée,  la  Trachonitide  et  l'Auranitide  renfer- 
maient aussi  de  nombreuses  villes,  dont  les  noms  nous 
sont  connus  ou  par  les  auteurs  anciens  ou  par  les  ins- 
criptions, et  qui  ont  laissé  des  ruines  encore  impo- 
santes. Citons  seulement  :  Bostra,  aujourd'hui  Bosra ; 
voir  Bosra  2,  t.  i,  col.  1860;  Dionysias,  Es-Suéidéh, 
qui  portait  probablement  un  nom  différent  pendant  la 


703 


PROCURATEURS    ROMAINS 


PROMESSE 


704 


période  romaine;  Alliila,  Alll:  Canatha,  Et-Qanaudl, 
voir  Canatii,  t.  ir.  col.  121;  Philippopolis,  Schoubba; 
Saccaea,  Schaqqa;  Phxna,  El-Musmiyéh ;  Aéra,  Es. 
Sanaméin;  Dorea,  Ecl-Dùr.  Voir  Argor  '2,  t.  i, 
col.  950;  A.URA.N,  t.  i,  col.  1253;  Basan,  t.  i,  col.  1486. 

Comme  on  le  constate  d'après  cette  énumération,  la 
Palestine,  à  l'époque  romaine,  vit  s'élever  plusieurs 
villes  nouvelles,  fondées  par  Hérodeet  ses  fils  :  Césarée 
maritime,  Césarée  de  Philippe.  Anlipalris,  Pharaélis, 
Archélaïs,  Julias,  Sepphoris,  Livias,  Tibériade.  D'autres 
furent  relevées  de  leurs  ruines  par  Gabinius  :  Raphia, 
Gaza,  Anthédon,  Azot,  .(amnia,  Apollonia,  Dora,  Sa- 
marie,  Scythopolis.  Cf.  .loséplie,  Ant.  jud.,  XIV,  v,  3; 
Bell,  jud.,  I,  vin,  'i.  Un  certain  nombre,  et  des  plus 
importantes,  furent  déclarées  libres  par  Pompée,  tout 
en  reconnaissant  la  suprématie  romaine.  Ant.  jud., 
XIV,  iv,  4;  Bell,  jud.,  I,  vu,  7.  Outre  celles  qui  sont 
citées  par  josèphe,  d'autres  sont  connues  comme  ayant 
gardé  l'ère  de  Pompée.  C'étaient  des  villes  hellénistes. 
Voir  Hellénisme,  t.  m,  col.  575.  Elles  se  trouvaient 
principalement  sur  la  cote  :  Raphia,  Gaza,  Anthédon, 
Ascalon,  Azot,  Jainnia,  Joppé,  Apollonia,  Césarée  mari- 
time, Dor,  Ptolémaïs,  et  à  l'est  du  Jourdain  :  Hippus, 
Gadara,  Abila,  Canatha,  Pella,  Dium,  Gérasa,  Philadel- 
phie. Dans  l'intérieur  étaient  :  Antipatris,  ISébaste, 
Sepphoris,  Julias,  Tibériade,  Scythopolis,  Phasaélis. 
Voir  DÉCAFOLÉ,  t.  m,  col.  1333.  Pour  l'histoire  de  ces 
\ i llis  à  l'époque  romaine,  cf.  E.  Schûrer,  Geschichte 
./es  jûdischen  Volkes,  t.  n,  p.  82-175.  Pour  les  villes 
juives,  voir  Villes. 

V.  Bibliographie.  —  E.  Schûrer,  Geschichte  des 
jûdischen  Volkes  >m  Zeitalter  Jesu  Christi,  Leipzig, 
•1901,  t.  i,  p.  454-507,  564-585;  t.  n,  p.  72-188;  G.  Bo  t- 
ger,  Lexicon  :<<  den  Schrifteti  des  Flavius  Josephus, 
Leipzig,  1879;  \V.  Oehler,  Die  Orlschaften  und  Gren- 
-_,,,  Galilâas  nach  Josephus,  dans  la  Zeitschrifl  '1rs 
deutschen  Palâstina-Vereins,  Leipzig,  t.  xxvm,  1905, 
p.  1-26,  49-74,  avec  carie,  is;  p.  Xhomsen,  Palâstina 
mi, -h  il, -, n  1 1,,  ,,in,i  si  Htm  des  Fus, ■huis,  dans  la  même 
revue,  t.  xxvi.  11103,  p.  97-141,  145-188,  avec  tarir, 
144;  ld..  Untersuchungen  zur  âlteren  Palàstina-Lite- 
ratur,  mêmerevue,  i.  xxix,  1906,  p.  101-132,  avec  carte, 
pl.  3;  M.-.l.  Lagrangr,  La  mosaïque  géographique  de 
\tddaba,  daus  la  Revue  biblique,  1897,  p.  165-184; 
A.  Jacob] ,  Dos  geographische  Mosaih  von  Mâdaba,  dans 
les  Studien  ûber  christliche  Denkmàler,  Leipzig,  1905. 

\.  Legendre. 

PRODIGUE,  celui  <pn  dépense  son  bien  à  tort  el  i 
travers.  —  Il  est  fait  allusion  au  prodigue  dans  quelques 
passages.  "  L'homme  aux  nombreux  amis  les  a  pour  sa 
perte,  i  Prov.,  xvm,  24.  «  Celui  qui  nourrit  1rs  débau- 
chés fait  honte  à  son  père,  o  Prov.,  wviii.  7.  De  pré- 
cieux trésors,  de  l'huile  sont  dans  la  maison  du  sage. 
mais  I  insensé  1rs  engloutit.  >  Prov.,  xxi,  20.  —  Dans 
une  de  ses  paraboles,  Notre-Seigneur  met  en  scène  un 
intendant  dissipateur,  Siseo-xopitijuv.  Luc,  xvi,  1.  Cet 
intendant  n'a  pas  fraudé  pour  si'  faire  une  fortune  à  lui- 
même,  puisque,  privé  de  son  intendance,  il  en  sera 
réduil  soit  à  travailler,  soit  à  mendier.  Mais  il  a  usé 
largement  des  biens  de  son  maître  comme  s'ils  étaient 
à  lui  ri  il  a  toul  dissipe'.  —  Dans  1 1  parabole  de  l'en- 
fant prodigue,  un  Dis  demande  à  son  père  la  part  d'hé- 
ritage qui  lui  revient,  et,  dans  un  pays  éloigné,  i  il 
dissipe  son  bien  en  vivant  dans  la  débauche.  »  Luc,  XV, 
13.  L'indigence  absolue  el  la  famine  sont  la  conséquen- 
ce de  sa  conduite  imprévoyante.  Il  expérimente  alors  la 
vérité  de  ce  qui  est  écrit  : 

i  e  pr<  cui  b  un  ■  i  and  noml  i  ■   à  amis, 

ner  l'ami  qu'il  possédait. 

Prov..  \ix,  4.  —  Dans  un  sens  tirs  différent,  Dieu  a  été 
prodi|  biens  envers  l'homme  dans  l'incarna- 


tion et  la  rédemption.  Joa.,  m.  10;  iv,  10;  Rom.,  vm, 
32:  II  Cor.,  ix,  15;  II  Pet.,  i,  i.  Cette  prodigalité  a 
paru  tenir  de  la  folie  aux  yeux  des  gentils.  I  Cor.,  i, 
18,  23.  II.  Lesêtoe. 

PROIE  (hébreu  :  téréf,  ad,  'okél;  Septante  :  Or,px, 
P'jpi,  âpirivjjiajYulgate  :  prœda,  esca),  ce  que  les  ani- 
maux carnassiers  chassent  et  prennent  pour  se  nourrir. 
Sur  les  captures  que  les  hommes  font  à  la  guerre,  voir 
Butin,  t.  i,  col.  1975.  —  Les  auteurs  sacrés  font  surtout 
allusion  à  la  proie  des  lions.  Le  lion  chasse  et  dévore 
sa  proie  en  rugissant.  Nurn.,  zxill,24;  1s.,  v.  29;  \x\i. 
'i  ;  Ezech.,  xxn,  25;  Am.,  m,  4;  Ps.  Ctv (cm),  21  ;  I  Pet., 
v,  8.  Il  remplit  de  proie  ses  cavernes,  Nah.,  Il,  12,  et 
apprend  aux  jeunes  lionceaux  à  saisir  et  à  déchirer  leur 
proie.  Ezech.,  xix,  3,  6.  Faute  de  proie,  il  périt.  Job,  tv, 
11;  aussi  Dieu  la  lui  procure.  Job,  xxxvm,  39.  —  Les 
loups  chassent  aussi  et  déchirent  leur  proie,  lien.,  xi.ix, 
27,  Ezech.,  xxn,  27.  —  L'aigle  voir  pour  atteindre  sa 
proie.  Job,  ix,  26.  Parfois,  les  cadavres  des  hommes 
sont  abandonnés  en  proie  aux  oiseaux,  ce  qui  est  con- 
sidéré comme  un  châtiment  redoutable.  Dent.,  XXVIII, 
26;  Ps.  i.xxix  (lxxviii),  2;  .1er.,  xvi,  i;  xix,  7;  xxxiv, 
20.  Voir  Oiseau,  t.  iv,  col.  1772.  H.  Lesltre 

PROMESSE  igrec  :  ir.x-;-;zï.ix;  Vulgate  :  pollici- 
lalio,  promissio,  promissunt,  repromis sio),  annonce 
d'un  bien  futur  que  l'on  s'engage  à  donner. 

I.  Promesses  humaines.  —  Les  hommes  promettent 
des  choses  plus  ou  moins  bonnes,  qu'ils  n'ont  pas  tou- 
jours le  pouvoir  ni  l'intention  de  donner.  Sur  les  pro- 
messes faites  à  Dieu,  voir  VŒU.  Sur  les  promesses 
laites  avec  serment,  voir  Jurement,  t.  m,  col.  1870. 
Ozias  promit  de  livrer  Belhulie  au  bout  de  cinq  jours. 
Judith,  vin,  9.  Tobie  lit  promettre  à  Raguel  de  lui 
donner  sa  lille  Sara  en  mariage,  lob.,  vu,  10.  \man 
promit  de  verser  une  somme  d'argent  au  trésor  du  roi 
en  retour  du  massacre  des  Juifs.  Esth.,  IV,  7.  Bon 
nombre  de  promesses  sont  faites  à  l'époque  des  Ma- 
chabées.  I  Mach.,  x,  15;  xi,  28;  II  Mach..  m,  35;  IV, 
8,9,  27.  i5;  vu,  26;  vin,  II.  30;  xi.  li;  xii.  II.  12. 
Hérode  promit  à  la  lille  d'Hérodiade  de  lui  accorder 
tout  ce  qu'elle  demanderait.  Malth.,  xiv,  7.  Les  princes 
«1rs  prêtres  promirent  de  l'argent  à  Judas.  Marc.  XIV, 
11.  Les  faux  docteurs  promettaient  la  liberté  à  ceux 
qui  les  écoutaient.  II  Pet.,  il,  19.  Les  Corinthiens 
avaient  promis  leurs  aumônes  pour  les  pauvres  de 
Jérusalem.  Il  Cor.,  ix.  5. 

II.  Promesses  divines.  —  1»  Temporelles.  —  1.  Dieu 
promit  aux  patriarches  de  leur  donner  le  pays  de  Cha- 
naan  et  une  nombreuse  postérité.  Gell..  XV,  5, 
0.  18;  xvii,  I(i;  xxvi,  3.  i;  Act.,  vu,  5.  etc 
promesses  sont  fréquemment  rappelées  à  Israël. 
Exod.,  xii,  25;  Nurn.,  x,  29,  xxxil,  II:  l'eut.,  vi,  3: 
xix.  8;  xxxi.  21,  2.1;  ileb..  VI,  15:  xi,  9.  11.  17.  rtc. 
et  l'accomplissemnit  m  est  demandé  on  signalé.  Jos., 
xxn,  4;  Judith,  Mil,  18;  Act.,  vu,  17;  Rom.,  ;x,  i; 
llrb..  vi.  15.  rtc  —  2.  Dieu  promit  encore  à  Israël  les 
biens  temporels.  Tout  d'abord,  une  promesse  de  longue 
vie  fut  attachée  au  commandement  qui  concerne  le 
respect  dû  aux  parents.  Eph.,  vi,  2.  Puis  les  prospé- 
ii  1rs  de  la  terre  furent  promises  aux  Israélites,  s'ils 
étaient  fidèles  à  Dieu.  Lev.,  xxvi,  3-13;  Deul.,  vm,  7- 
li;  xi,  13-17;  XXVIII,  9-14.  Les  Israélites  s'appliquèrent 
Irop  exclusivement  à  la  recherche  de  ces  bénédictions 
temporelles.  Longtemps  après  la  rédemption,  ils  di- 
saient encore  :  n  La  bénédiction  sur  la  terre  consiste 
dans  la  richesse.  »  Zohar,  i,  87  b;  édit.  Lafuma,  Paris, 
1906,  t.  i,  p.  507.  —  3.  Dieu  promit  à  David  que  qui  I- 
qu'un  de  sa  descendance  occuperait  toujours  so  I 
trône.  II  Par.,  i,  9;  vu.  18:  xxi,  7;  IV  Reg.,  vm,  19; 
Ps.  cwxn  i:\xxp, 11-13.  —  i.  Les  Israélites  comptèrent 
sur  l'efl'et  de  ces  promesses,  Judith,  XIII,  7:  Dan.,  III» 


705 


PROMESSE 


PROPHETE 


706 


36;  Sap.,  xn,  21;   II  Mach.,   xi,    18.    etc.,  à  cause  de 
la  fidélité  de  Dieu.  Hel...  x,  24. 

2°  Spirituelles.  —  1.  Notre-Seigneur  promet  que  la 
prière  adressée  à  son  Père  sera  toujours  exaucée. 
Voir  Prière,  col.  667.  —  2.  Les  anciennes  promesses 
temporelles  avaient  un  sens  spirituel  concernant  la  nou- 
velle alliance  et  excellemment  réalisé  par  Jésus-Christ. 
En  lui  s'accomplit  pleinement  ce  qui  a  été  promis  aux 
anciens  patriarches,  Act.,  xxvi,  6;  Rom.,  xv,  S;  Gai., 
m,  22;  II  Cor.,  i,  20;  Il  Pet.,  i,  4,  spécialement  par 
sa  naissance,  Act.,  xm,  23,  et  par  sa  résurrection. 
Act.,  xni,  32.  —  3.  Lui-même  a  promis  d'envoyer  le 
Saint-Ksprit.  Luc,  xxiv,  29;  Act.,  t.  4,  il  l'a  envoyé, 
Act.,  il,  33;  Eph.,  i,  13,  et  on  participe  à  cet  Esprit  par 
la  foi.  Gai.,  ix,  14.  —  4.  Les  promesses  de  l'ancienne 
alliance  ne  concernaient  que  les  Juifs;  aussi  ces  der- 
niers sont-ils  appelés  tout  d'abord  à  bénéficier  de 
l'effet  spirituel  compris  dans  les  promesses  anciennes. 
Rom.,  ix,  1  ;  Act.,  n,  39.  Les  justes  de  l'Ancien  Testa- 
ment n'ont  vu  que  de  loin  l'accomplissement  des  pro- 
messes faites  à  leurs  pères  et  ils  y  ont  cru.  assurant 
ainsi  leur  salut  par  la  foi.  Heb.,  xi.  13,  33,  39.  Les 
gentils,  étrangers  aux  promesses  de  l'ancienne  alliance, 
Eph.,  n,  10.  participent  par  Jésus-Christ  à  celles  de  la 
nouvelle.  Eph..  ni,  6.  En  promettant  d'ébranler  la 
terre,  Dieu  promettait  une  nouvelle  alliance,  Heb., 
xn,  26,  l'Évangile,  promis  par  les  prophètes.  Rom.,  i, 
2.  C'est  par  cette  alliance  nouvelle  et  par  la  grâce 
qu'elle  apporte  que  se  réalisent,  dans  un  sens  com- 
plet, définitif  et  spirituel,  les  promesses  faites  jadis  à 
Abraham.  Rom.,  IV,  13,  11,  16:  Gai.,  m,  16;  Heb.,  VI, 
13.  Les  vrais  enfants  de  la  promesse  ne  sont  donc  pas 
les  Juifs,  mais  les  descendants  spirituels  d'Abraham, 
Rom.,  ix,  8;  Gai.,  iv,  28;  Heb.,  vi,  17,  et  cette  descen- 
dance spirituelle,  qui  donne  droit  aux  bienfaits  de  la 
promesse,  ne  vient  pas  de  la  naissance  naturelle  ni  de 
la  loi  ancienne,  mais  uniquement  de  la  foi  en  Jésus- 
Christ.  Gai.,  m,  18;  iv,  23;  Heb.,  VI,  12,  13.  — 
5.  Jésus-Christ,  Pontife  de  la  loi  nouvelle,  établit  cette 
loi  sur  des  promesses  bien  supérieures  à  celles  de  la 
loi  ancienne.  Heb.,  vin,  6.  Il  promet  à  ses  disciples  le 
titre  de  fils  de  Dieu,  II  Cor.,  vu,  1,  la  vie  surnaturelle, 
IITim.,  i,  1,  les  biens  de  la  vie  présente  et  ceux  de  la 
vie  future,  I  Tim.,  iv,  8,  le  repos  de  Dieu,  Heb.,  iv,  1, 
la  récompense  et  la  couronne  célestes,  Heb.,  x,  36; 
Jacoby.,  i.  12;  n,  5,  la  vie  éternelle.  Tit.,  i,  2;  Heb.,  ix, 
15;  I  Joa.,  n,  25.  Les  incrédules  doutent  delà  venue  du 
royaume  promis.  II  Pet.,  m,  4.  Les  croyants  attendent 
de  nouveaux  cieux,  c'est-à-dire  la  vie  éternelle  à  l'avène- 
ment du  Fils  de  Dieu,  selon  sa  promesse.  II  Pet.,  m,  13. 

H.  Lesêtre. 

PROPHÈTE,  homme  inspiré  à  qui  Dieu  manifeste 
ses  volontés  pour  les  communiquer  aux  autres.  Les 
prophètes  ont  joué  un  rôle  important  dans  l'histoire 
d'Israël,  et  Dieu  s'est  servi  d'eux  pour  instruire  son 
peuple  choisi.  Il  n'a  pas  manqué  non  plus  de  prophètes 
dans  les  premiers  temps  du  christianisme  et  les  deux 
Testaments  parlent  fréquemment  des  prophètes  de  Dieu. 

I.  Notion.  —  Le  prophète,  tel  qu'il  apparait  dans  les 
Livres  Saints,  diffère  de  la  conception  vulgaire  qui  ne 
voit  en  lui  que  celui  qui  prédit  l'avenir.  La  Bible  lui 
donne  une  signification  plus  large  et  elle  le  reconnaît 
comme  un  homme  à  qui  Dieu  manifeste  spécialement 
ses  volontés,  quelles  qu'elles  soient,  présentes  ou  futures, 
pour  qu'il  les  fasse  connaître  aux  autres.  Comme  elle 
n'en  donne  nulle  part  une  définition  expresse  et  for- 
melle, il  faut  en  dégager  la  notion  des  nombreux  ren- 
seignements que  l'Ancien  Testament  fournit  sur  les 
prophètes  d'Israël.  Les  noms  différents  par  lesquels 
ceux-ci  sont  désignés  et  la  manière  dont  les  prophètes 
agissaient  de  la  part  de  Dieu  nous  serviront  à  préciser 
l'idée  que  la  Bible  nous  en  donne. 

/.    D'APRÈS    leurs  NOMS.  —  Trois   noms    hébreux, 

DICT.   DE   LA   BIBLE. 


-s-,  -Th.  s';:,  rô'éli,  hùzéli,  nabi',  indiquent  la  nature 

•T 

du  prophète  Israélite.  Comme,  d'après  une  note  que 
le  rédacteur  de  I  Sam.,  ix,  9,  a  insérée  dans  son  récit, 
-n-,  est  le  nom  le  plus  ancien   ou  au    moins  le    plus 

répandu  dans  l'antiquité,  nous  l'étudierons  le  premier 
nous  y  ajouterons  son  synonyme  ~'~,  avant  d'examiner 
les  noms  techniques,  N';:.  ndbi',  en  hébreu,  et  -poyv 
ty)Ç,  en  grec. 

1°  Le  rô'éhou  voyant.  — Étymologiquement,  ce  nom 
dérive   de   la  racine  îwi,  rd'âh,  qui  signifie  originaire- 

T  T 

ment  «  voir  »  des  yeux  du  corps  ou  de  l'esprit.  Ce  verbe 
a  servi  à  exprimer  les  visions  divines  des  prophètes. 
[s.,  xxix,  10;  xxx,  10.  Hii'éh  en  est  le  participe  actif.  De 
soi.  il  pourrait  désigner  un  voyant  quelconque;  mais 
l'usage  biblique  l'a  réservé  à  dénommer  une  catégorie 
spéciale  de  voyants,  d'hommes  qui  voient  des  yeux  de 
l'esprit  ce  que  les  autres  hommes  ne  voient  pas. 

Ce  nom  est  donné  à  Samuel,  pour  la  première  fois 
dans  la  Bible,  par  Saûl  et  son  serviteur,  I  Sam.,  ix, 
11,  18,  qui  l'avaient  d'abord  appelé  «  homme  de  Dieu  », 
6,  7,  8,  10.  La  glose  du  verset  9,  dans  les  deux  rédac- 
tions différentes  de  l'hébreu  et  du  grec,  indique  que  ce 
nom  était  usité  à  l'époque  de  l'événement  et  désignait 
ceux  qu'au  temps  du  rédacteur  on  appelait  tnibi.  Le 
voyant  était  donc  l'homme  qu'on  allait  interroger 
quand  on  voulait  consulter  Dieu.  Il  voyait  ce  qu'on 
voulait  apprendre  de  Dieu  et  ce  que  Dieu  répondait  à 
la  consultation  faite.  Sa  réponse  était  considérée  comme 
la  réponse  de  Dieu.  Si  l'objet  de  la  consultation,  rap- 
portée dans  cette  anecdote,  est  un  intérêt  temporel  et 
privé,  la  découverte  d'ànesses  perdues.  Dieu  toutefois 
manifestait  à  Samuel  des  desseins  plus  importants  et 
tout  secrets.  La  veille,  il  lui  avait  révélé  à  l'oreille  la 
venue  de  Saûl  et  ses  vues  sur  lui,  et  quand  Saûl  parut 
devant  lui,  Dieu  réitéra  ses  déclarations,  15-17.  Samuel 
promit  à  Saûl  de  lui  indiquer  le  lendemain  tout  ce 
qui  était  dans  son  cœur,  après  lui  avoir  annoncé  que  les 
ànesses  étaient  retrouvées,  19,  20.  Le  lendemain,  en 
effet,  il  lit  connaître  au  fils  de  Cis  la  parole  du  Sei- 
gneur, 27,  l'élection  divine  à  la  royanté,  x,  1,  et  il  lui 
donna  trois  signes  pour  confirmer  la  vérité  de  cette 
déclaration.  2-11.  Ce  n'était  pas,  d'ailleurs,  la  première 
révélation  faite  par  Dieu  à  Samuel.  Celui-ci,  encore 
enfant,  avait  entendu  à  Silo  la  voix  divine.  La  première 
fois  qu'elle  se  fit  entendre,  l'enfant  ne  savait  de  qui 
elle  provenait,  I  Sam.,  m,  7,  parce  que  la  parole  de 
Dieu  ne  lui  avait  pas  encore  été  manifestée.  Du  reste, 
elle  était  rare  à  cette  époque,  et  les  visions  n'avaient 
pas  lieu,  1.  Au  troisième  appel,  Héli  comprit  que  le 
Seigneur  parlait  à  Samuel,  2.  Au  quatrième,  l'enfant, 
obéissant  aux  recommandations  du  prêtre,  dit  : 
«  Parlez,  Seigneur,  votre  serviteur  écoute,  o  10,  et  le 
Seigneur  lui  annonça  le  sort  qu'il  réservait  à  la  famille 
d'Héli,  11-14.  Samuel  craignait  de  rapporter  au  prêtre 
la  vision,  riNTcn,    15.   Interrogé,   il   répéta   les  paroles 

T  :  -  - 

divines,  16-18.  Samuel  fut  dès  lors  connu  dans  tout 
Israël  comme  un  prophète,  20,  21.  Cf.  II  Par., 
xxxv.  18.  Il  porte  spécialement  dans  l'Écriture  le  nom 
de  voyant.  I  Par.,  ix.  22;  II  Par.,  xxvi,  28;  xxix,  29. 
.  Quelques  autres  personnages  cependant  sont  dits 
voyants.  David  appelle  ainsi  le  prêtre  Sadoc.  II  Sam., 
xv,  27.  Le  prophète  Hanani,  qui  vivait  sous  le  règne 
d'Asa,  porte  aussi  ce  nom.  II  Par.,  XVI,  7,  10.  Isaïe, 
xxx.  10:  xxxii,  3,  emploie  poétiquement  le  pluriel 
rô'im.  On  en  a  conclu  que  le  nom  de  voyant  a  cessé 
d'être  usité  après  le  règne  d'Asa.  Quoi  qu'il  en  soit, 
ces  simples  attributs  ou  ces  substantifs  absolus  ne  nous 
apprennent  rien  sur  la  signification  du  nom.  Toutefois, 
de  l'histoire  de  Samuel  il  ressort  que  le  voyant  recevait 
la  vision  el  entendait  la  parole  de  Dieu  pour  les  mani- 
fester aux  autres. 

Y.  -  23 


707 


PROPHETE 


708 


2°  Le  hôzéh  ou  voyant.  —  Étymologiquement,  ce  nom 
a  la  même  signification  que  ro'éh.  11  vient,  en  effet 
<le  la  racine  nin,  hâzdh,  i  voir  ».  Il  en  est  le  participe 
kaf,  pris  substantivement,  et  dans  l'usage,  il  désigne, 
comme  rà'éh,  le  prophète  voyant.  Il  est  plus  fréquem- 
ment employé  que  le  précédent,  surtout  à  partir  d'Amos. 
Il  désigne  cependant  des  prophètes  antérieurs.  Gad 
est  le  hôzéh  de  David,  II  Sam.,  xxiv.  11;  I  Par.,  xxi, 
9.  ainsi  que  Héinan,  I  Par.,  xxv,  5,  Asaph,  I  Par., 
xxix,  30,  et  Idithun.  II  Par.,  xxxv.  15.  Addo,  qui  a  écrit 
l'histoire  de  Salomonet  de  Rohoam,  est  dit  aussi  hôzéh 
II  Par.,  ix,  29;  xn.  lô.  Quelques  critiques  en  ont  conclu 
que  le  hôzéh  était  le  prophète  attaché  à  la  famille 
royale,  tandis  que  le  rà'éh  était  un  voyant  s'occupant 
des  affaires  des  simples  particuliers.  Mais  le  hôzéh 
.léhu.  fils  d'Hanani,  avait  fait  des  reproches  à  Josaphat. 
II  Par.,  xix,  2.  L'histoire  d  Amos  à  Béthel,  vu,  12-17, 
est  surtout  en  opposition  avec  cette  conclusion.  Amasias 
interdit  à  Amos,  qu'il  appelle  hôzéh,  de  prophétiser  à 
Béthel,  qui  est  le  sanctuaire  du  roi,  une  maison  royale. 
Si  le  hôzéh  avait  été  le  voyant  de  la  cour  royale,  Amos 
n'aurait  pas  reçu  ce  nom  de  la  bouche  d'Amasias.  Des 
hôzim  avaient  parlé  à  Manafesé  au  nom  du  Seigneur. 
II  Par.,  xxxiii,  18.  Il  y  avait  eu,  d'ailleurs,  en  Israël  et 
en  .luda  des  hôzim  qui  avaient  manifesté  les  ordres  du 
Seigneur.  II  (IV)  Reg.,  xvn,  13.  Ils  avaient  vu  les  visions 
de  Dieu,  hâzôn,  cl  reçu  ses  révélations  pour  les  com- 
muniquer aux  hommes.  Voir  Prophétie. 

Cependant,  le  pluriel,  hôzim,  a  spécialement  dési- 
gné les  faux  prophètes.  Michée,  m,  7,  les  nomme  avec 
les  devins  et  il  annonce  leur  confusion  :  ils  n'auront 
pas  de  i  réponse  de  Dieu  ».  La  nuit  leur  servira  de 
vision  et  les  ténèbres  de  divination,  6.  Le  prophète 
lui-même,  au  contraiiv.  est  rempli  de  la  force  de  l'es- 
prit iln  Seigneur,  9.  Isaïe,  xxix.  Kl,  parle  aussi  des 
faux  prophètes  de  luda,  qui  voient  des  visions,  mais 
que  Dieu  couvrira  de  sommeil  et  dont  il  fermera  les 
paupières,  de  sorte  que  la  vision  sera  pour  eux  comme 
un  livre  scellé,  dans  lequel  ils  ne  pourn.nl  lire,  11.  12. 
Les  '.lits  incrédules  refusaient  de  croire  les  vrais 
voyants  et  demandaient  aux  faux  prophètes  de  leur  an- 
noncer ce  qui  leur  plaisait  et  d'avoir  des  visions 
fausses  et  erronées.  Is.,  xxx,  10.  Cf.  Ezech.,  xm,  9. 
10;  xxu,  28. 

Bien  que  le  nom  de  hôzéh  ait  servi  en  dernier  lieu 
à  nommer  les  faux  prophètes,  primitivement  il  dési- 
gnait le  vrai  prophète  considéré  comme  un  homme 
dont  les  yeux  ne  sont  pas  fermés  aux  visions  divines, 
qui  les  voit,  qui  lit  la  réponse  de  Dieu  et  qui  la  com- 
munique aux  autres.  Il  était  donc  synonyme  de  rô'éh. 
La  seule  différence  entre  ces  deux  dénominations  est 
que  la  seconde  a  été  appliquée  aux  faux  prophètes  el 
la  première  pas. 

3  Le  ndbi'  ou  interprète  de  Dieu.  —  a)  Elgimilogie. 
—  L'origine  de  ce  nom  est  incertaine  et  sa  signification 
étymologique  douteuse.  On  l'a  recherchée  dans  l'hébreu 

lans  d'autres  langues  sémitiques.  Si  nàbi'  ne  peut 

venir  de  s;:,  nàbâ,  qu'il  est  impossible  de  décompo- 
ser en  une  racine  inconnue  s;,  h.i  ,  «  parler  »,  et  en  la 
préposition  a,  ayant  le  sens  de  /.%--%  nàbâ  signifierait 
alors  «  convaincre  par  la  parole  »,  et  le  ndbi'  serait  un 
homme  puissant  en  discours),  on  a  cherché  plus  ou 
moins  heureusement  .ï  le  rattachera  d'autres  racines; 
ou  bien  à  vz:.  r»a'6d  .  signifiant   i  bouillonner  i  et  par 

suite  »  répandre  abondamment  des  paroles  »,  et  dont 
s;:  nôinï.  esl  la  forme  adoucie  par  le  changement  de 

aïn  en  aleph;  ou  bien  i  z:.  nûb,  «  sortir,  pousser, 
germer  »,  ou  à  sa  racine  bilittère  ::.  nb,  exprimant 
un  mouvement  quelconque  du  dedans  au  dehors, 
quels  qu'en  soient  le  point  de  dépari  el  le  moteur, 
de  sorte  que  le  nAbï  sérail  l'homi [ui  émel  des  pa- 


roles, des  oracles,  et  qui  est  orateur.  Les  critiques  qui 
soutiennent  que  le  mot  ne  dérive  pas  d'une  racine 
hébraïque  ou  au  moins  n'a  pas  de  racine  dans  l'hébreu 
de  la  période  historique,  le  font  provenir  d'autres 
langues  sémitiques,  soit  de  l'arabe  nabaa,  «  annoncer  » 
une  nouvelle,  porter  un  ordre,  soit  de  l'assyrien  nabô, 
qui  signifie  «  crier,  publier,  annoncer  »  et  d'où  dérive 
le  nom  du  dieu  babylonien  Nabo,  dieu  de  la  sagesse 
et  de  la  science,  de  la  parole  et  de  l'écriture,  voir 
t.  iv,  col.  1434-1436,  de  sorte  que  nàbi'  signifierait 
celui  qui  parle  de  la  part  de  Dieu,  l'orateur  divinement 
inspiré. 

b)  Forme  grammaticale.  —  Les  hébraïsants  ont 
reconnu  au  mot  hébreu  nàbi  une  forme  passive  ou 
active  et  ont  précisé  en  conséquence  la  signification 
passive  ou  active  du  nom.  Si  on  considère  le  mot  ndbi' 
comme  un  participe  passif  qdtil,  le  ndbi'  est  un  homme 
à  qui  il  est  parlé,  qui  entend  une  voix  intérieure, 
mystérieuse  et  intelligible  pour  lui  seul  et  qui  ne  parle 
que  sous  l'action  d'un  révélateur,  un  homme  qui  est 
donc  inspiré.  C'est  pourquoi  les  actes  des  prophètes 
sont  toujours  exprimés  dans  la  Bible  par  des  verbes  au 
niphal  et  à  Vhithpahel,  qui  sont  deux  formes  passives. 
Mais  même  en  admettant  la  justesse  de  ces  observations, 
des  grammairiens  plus  récents  ont  remarqué  que  les 
participes  passifs,  devenus  substantifs,  ont  perdu  la 
signification   passive  et  ont  un  sens  actif;  ainsi  ">•—. 

•  T 

pdqid,  surveillant,  ->::-,  qaxir,  moissonneur,  :'":.  nâ- 
dib,  noble,   prince,  v:;,  ndgitl,  chef,  S':-,  rdkii,   ca- 

'T  '  T 

loinniateur.  etc.  D'ailleurs,  le  niphal  est  plutôt  la  forme 
réfléchie  du  qal  et  Vhithpahel  la  forme  réfléchie  du  phel. 

Par  suite  N2:  et  s::r~.  qui  sont  souvent  employés  l'un 

pour  l'autre,  ont  la  signification  réfléchie  et  veulent  dire  : 
«  se  montrer  prophète,  o  n-::.  a  donc  plutôt  une  forme 

•  T 

active  et  désigne  «  celui  qui  parle  »,  non  pas  sans  doute 
en  son  nom  propre,  mais  bien  au  nom  d'un  autre. 

e)  Signification  d'aprét  l'usage  biblique.  —Du  reste, 
l'usage  a  fixé  le  sens  du  mot.  et  l'usage  a,  pour  détermi- 
ner le  sens,  plus  de  valeur  que  l'étjniologie  et  la  forme 
grammaticale.  Or,  le  passage  classique  qui  détermine 
le  sens  usuel  du  mot,  est  le  récit  de  l'Exode,  vil,  1,  2. 
Moïse  avait  été  chargé  par  Dieu  de  transmettre  à  Pha- 
raon ses  volontés  au  sujet  des  Israélites  opprimés.  Il 
objecta  que  ses  lèvres  étaient  incirconcises,  Exod.,  iv, 
10;  vi,  10-12,  29-30,  et  qu'il  éprouvait  de  la  difficulté 
à  parler.  Or.  Dieu  lui  donna  Aaron  pour  ndbi  ;  il 
parlera  à  sa  place.  Moïse  dira  à  son  frère  tout  ce  que 
Dieu  lui  communiquera,  et  Aaron  le  transmettra  à 
Pharaon,  non  pas  comme  truchement,  mais  comme 
porte-parole.  De  même,  à  l'égard  des  Israélites,  Aaron 
sera  0  la  bouche  de  Moïse  ».  Exod.,  IV,  14-lfi.  Voir  t.  IV, 
col.  1194.  Le  nâbï  de  Dieu  était  pour  Dieu  ce  qu'Aaron 
était  pour  Moïse.  Dieu  mettait  dans  sa  bouche  les 
paroles  qu'il  voulait  lui  faire  dire;  lui-même,  il  ne 
disait  que  ce  que  Dieu  voulait  lui  taire  dire.  Il  était 
donc  le  porte-parole  de  Dieu,  non  pas  s.  ulement  un 
inspiré,  qui  reçoit  une  révélation,  mais  un  représentant 
officiel,  charge  de  parler  au  nom  et  à  la  place  de  Dieu, 
un  orateur,  un  prédicateur  qui  dit  aux  hommes  ce  que 
Dieu    veut  leur  faire  savoir. 

I tanière  dont  Jérémie  reçut  la  mission  prophétique 

continue  celle  interprétation.  Dieu  lui  révèle  qu'il 
l'avail  choisi  des  le  sein  de  sa  mère  pour  être  son  unh'i 
auprès  des  nations.  Jer.,  i.  i.  5.  Le  lilsd'Helcias  répond 
qu'il  ne  sait  ou  ne  peut  parler  avec  l'autorité  nécessaire, 
parce  qu'il  n'est  encore  qu'un  enfin!.  Dieu  l'encourage, 
confirme  sa  mission  prophétique,  lui  promet  sa  pi 
tion,  touche  ses  lèvres  sur  lesquelles  il  mettra  le 
paroles  que  le  prophète  aura  à  prononcer,  7-10.  Cf.  v, 
I  i.  Jérémie  dit  les  paroles  divines  qu'il  a  entendues,  i. 
11-13.  etc.   11  parle  donc  par  délégation  divine  et  il  est 


709 


PROPHÈTE 


710 


l'interprète  des  volontés  de  Dieu  auprès  des  hommes. 
Le  nom  de  ndbV,  ayant  cette  signification,  a  remplacé 
l'ancien  nom  de  r&éh.  et  est  devenu  d'un  emploi  uni- 
versel pour  désigner  les  représentants  de  Dieu  en 
Israël.  I  Sam.,  i.\,  9.  Il  a  toujours  caractérisé  un  homme 
qui  parle  au  nom  de  Dieu  et  qui  répand  des  oracles  di- 
vins. Tout  ce  qui  va  suivre  confirmera  cette  explication. 
4"  Le  irpoçrJTi);  des  Septante.  —  Ce  mot  grec  traduit 
régulièrement,  dans  la  version  grecque  dite  des  Septante, 
le  nom  nabi'  appliqué  aux  vrais  prophètes,  et  quelque- 
fois rô'êh,  IPar.,  xxvi, 28;  II  Par.,  xvi,  7,  10, et  hùzéh. 
II  Par.,  ix,  2;  xxix,  30;  xxxv,  15.  Il  faut  exposer  la 
véritable  signification  de  ce  nom,  duquel  viennent  le 
mot  latin  propheta  et  le  nom  français  prophète. 

a)  Étijmologie.  —  Les  Pères  et  les  théologiens  ont 
donné  diverses  explications  de  ce  nom.  Eusèbe  de  Césa- 
rée.  Demonst.  ev.,  1.  V.prolog.,  t.  xxn.  col.  345,  le  faisait 
dériver  de  npopocîvsw  et  lui  donnait  la  signification  de 
communication  par  le  Saint-Esprit  des  choses  futures  et 
■cachées.  Saint  Thomas  a  adopté  une  dérivation  analogue, 
puisqu'il  séparait  ~po,  procul,  et  potvo:,  apparitio,  et  il 
■en  a  conclu  que  la  prophétie  consistait  principalement 
dans  la  connaissance  surnaturelle  des  choses  inconnues. 
Sum.  theol.,  IL*  II»,  q.  clxxi,  a.  1.  Suarez,  De  fide, 
disp.  VIII,  sect.  m,  n.  I.  Opéra,  Paris,  1858,  t.  xn, 
p.  227,  l'a  rejetée  à  juste  titre  comme  n'ayant  aucun 
fondement  dans  la  langue  grecque.  Ce  théologien 
préférait  une  autre  étymologie,  communément  admise. 
qui  fait  venir  ce  mot  de  irpo  jivai,  «  dire  à  l'avance,  »  et 
qui  considère  la  prophétie  comme  une  prédiction  de 
J'avenir.  Celte  interprétation  était  déjà  acceptée  par 
saint  Irénée,  Cont.  hier.,  1.  IV.  c.  xx,  n.  4,  t.  vu, 
col.  1034;  par  saint  Ambroise,  De  benedictione  patri- 
archarum,  1.  II,  n.  7,  t.  xiv,  col.  670;  par  saint  Basile, 
In  Isa.,  proœm.,  n.  3;  1.  III,  t.  xxx,  col.  224, 
284;  par  saint Chrysostome,  In  Vidi  Dominum,  boni,  n, 
n.  2.  t.  i.vi,  col.  111;  et  par  saint  Grégoire  le  Grand, 
In  Ezech.,  1.  I.  boni,  i,  n.  1,  t.  i.xxvi,  col.  786.  Elle  a 
donné  naissance  à  l'opinion  vulgaire,  qui  ne  reconnait 
dans  les  prophètes  que  des  prédiseurs  de  l'avenir.  Mais 
tout  en  admettant  cette  dérivation,  on  peut  et  on  doit, 
semble-t-il,  lui  donner  une  meilleure  explication.  Dans 
jcpoç>T|T7)c,  la  préposition  icp<S  n'est  pas  une  particule  de 
temps.  Comme  dans  les  mots  composés  analogues, 
tzc,6ôot/.o:,  vice-pasteur,  KpoëouAoç,  qui  prend  conseil 
pour  un  autre,  itpôS-.xo;,  qui  traite  l'affaire  d'autrui, 
npoT)Yope:v,  parler  à  la  place  d'autres,  etc..  et  en  latin, 
proconsul,  procurator,  proprsetor,  propugnator,  etc., 
elle  signifie  «  à  la  place  de  ".  Le  -ooj/.t/-,;  est  donc 
celui  qui  pro  alio  loquitur,  et  il  exprime  ainsi  très  bien 
le  sens  de  nâbi'. 

6)  Signification.  —  Du  reste,  r.onzr-.r,i,  chez  les 
écrivains  grecs  profanes,  signifie  interprèle,  et  non 
prédiseur  de  l'avenir.  Denys  d'Halicarnasse  appelle  les 
prêtres  jcpoçïJTai  tûv  Bsi'iov,  c'est-à-dire  les  interprètes 
des  choses  divines.  Platon  dit  que  les  poètes  sont 
Houaûv  Kpo?r}T<xt.  Tbéiuistius,  Orat.,  xxni,  nomme 
RpoçYjTr,;,  celui  qui  explique  Aristote.  Philon  a  plusieurs 
fois  présenté  les  prophètes  d'Israël  comme  les  inter- 
prètes de  Dieu,  qui  ne  disent  que  ce  que  Dieu  leur  fait 
dire.  Les  Pères,  même  ceux  qui  admettaient  l'étymolo- 
gie  tirée  de  npotpâvat,  ont  donné  celte  signification. 
S.  Chrysostome,  In  Act.,  hom.  xix,  5.  t.  lx,  col.  156; 
In  1  do-.,  hom.  xxxvi.  i.  t.  i.xi,  col.  311;  S.  Âugus- 
tin,  Qusest.  in  Heptateucli..  II.  17,  t.  xxxiv,  col.  601  : 
Synopsis  Sac.  Script,  (attribuée  à  saint  Chrysostome), 
t.  i.vi.  col.  317.  Les  commentateurs  catholiques,  à  partir 
du  xvne  siècle,  ont  généralement  adopté  cette  interpré- 
tation, qui  n'est  pas,  comme  on  le  prétend  quelquefois, 
une  découverte  de  l'exégèse  moderne. 

//.  D'APRÈS  LELIl  MANIÈRE  iè agir.  —  Tout  ce  que 
disent  et  font  les  prophètes,  ils  le  disent  et  ils  le  font, 
non  pas  en  leur  nom  personnel,  mais  au  nom  de  Dieu. 


Beaucoup  de  leurs  oracles  oraux  ou  écrits  débutent  par 
ce*  mots  :  «  Ainsi  parle  le  Seigneur.  i>  I  Sam.,  x,  18; 
xv.  ■>;  1  ,111)  Heg..  xiu,  2;  xxn.  Il;  II  (IV]  Reg.,  vu,  1; 
Is.,  vu,  7;  .1er.,  n,  2;  xix.  1;  Ezech.,  V,  5,  8;  vi.  Il; 
vu,  5;  xi.  i.  7.  10:  Arnos,  i,  2,  3,  6,  II,  13;  H,  1,  4,  6; 
Abdias,  1;  Agg.,  i.  2.  .">,  7;  Zach..  i,  3,  etc.  Dieu  lui 
ordonne  de  parler  ainsi  :  «  Le  Seigneurdit  ceci,  a  .1er., 
ix.  24;  Ezech..  xi,  17;  xn,  23.  Le  prophète  a  entendu 
de  la  bouche  de  Dieu  les  paroles  qu'il  proclame.  Ezech., 
m,  17;  xxxiii.  7;  Hab.,  ni,  2.  Il  annonce  la  parole  de 
Dieu.  Is.,  r,  10;  xxvm,  14;  .1er.,  il,  4,  31;  vu,  2;  IX, 
20:  Ezech.,  vi.  3:  xm.  2;  xx,  47:  Ose.,  iv.  1;  Amos, 
vu,  16,  etc.  Dieu  lui  ordonne  de  proclamer  ce  qu'il  lui 
a  dit.  .1er.,  SIX,  2;  Ezech.,  m,  4.  C'est  Dieu  qui  parle 
par  sa  bouche.  Is.,  i.u.  6;  Ezech.,  xvn.  21.  La  parole  du 
Seigneur  lui  a  été  dite.  Ezech.,  vi.  1;  vu,  1;  xi.  li; 
xn,  1,  5,  17,  21,  26;  xm,  1,  etc.  Bref,  ce  que  le  prophète 
dit  n'est  pas  le  produit  de  son  esprit,  et  toutes  ses 
paroles  sont  des  paroles  divines.  Or,  rien  n'est  plus 
varié  que  leur  objet.  Elles  ne  concernent  pas  toutes 
l'avenir.  Elles  font  connaître  les  résolutions  que  Dieu 
a  prises,  ses  desseins.  Elles  sont  généralement  accom- 
pagnées d'avertissements  et  d'exhortations,  de  reproches, 
de  menaces,  de  consolations.  Elles  forment  parfois  un 
discours  entier.  Le  prophète  manifeste  donc  toutes  les 
volontés  de  Dieu,  présentes  et  futures.  Il  est  le  porte- 
parole  de  Dieu,  le  médiateur  de  la  révélation  divine, 
l'organe  de  Jéhovah,  l'interprète  humain  de  la  pensée 
divine,  un  orateur  divinement  inspiré.  Philon  en 
donnait  déjà  cette  définition,  et  saint  Pierre  l'a  déclaré  : 
«  Les  saints  hommes  de  Dieu  ont  parlé  sous  l'inspira- 
tion du  Saint-Esprit.  »  II  Pet.,  i,  21. 

II.  Vocation  et  inspiration  divine  des  prophètes. 
—  Les  prophètes  d'Israël  ne  se  sont  pas  introduits 
d'eux-mêmes  dans  le  ministère  qu'ils  remplissaient. 
Dieu  les  suscitait  parmi  son  peuple.  Deut.,  xvm,  18. 
Leur  vocation,  leur  mission,  leur  inspiration  sont  di- 
vines; tous  leurs  actes,  tous  leurs  oracles,  ils  les  rap- 
portaient à  Dieu. 

I1  Vocation  et  mission.  —  Ce  n'est  ni  deleurpropre 
choix  et  de  leur  initiative  privée  ni  par  une  éducation 
spéciale  que  les  prophètes  d'Israël  ont  commencé  et 
rempli  leur  ministère.  Amos  était  un  simple  berger  de 
Thécué,  i,  1  ;  Dieu  l'a  pris  derrière  son  troupeau  et  l'a 
envoyé  prophétiser  à  Israël,  vu,  14-15.  Il  est  donc 
devenu  prophète  par  vocation  expresse  et  personne  ne 
saurait  aller  à  rencontre  de  cet  appel  divin,  ni  les 
prêtres  de  Béthel  ni  les  rois  d'Israël.  Ce  n'est  pas  pour 
remplir  un  métier  et  gagner  son  pain  qu'il  prophétise 
comme  le  supposait  Amasias,  vu,  12;  c'est  pour  obéir 
à  l'ordre  de  Dieu.  L'appel  divin  a  été  pour  lui  d'une 
clarté  irrésistible;  il  a  quitté  son  métier  de  berger  et 
s'est  exposé  aux  dénonciations  et  aux  menaces  d'Ama- 
sias.  La  parole  divine  l'a  saisi  et  subjugué  :  «  Dieu 
parle;  qui  ne  prophétiserait  ?  »  ni,  8.  Dans  une  vision, 
Isaïe  a  entendu  Dieu  demander  qui  il  enverrait;  il  s'est 
offert  généreusement  et  il  a  reçu  l'ordre  d'annoncer  à 
Juda  les  volontés  divines,  vi,  8,  9.  Jérémie  a  été  choisi 
par  Dieu  comme  prophète  dès  le  sein  de  sa  mère. 
Comme  Moïse,  il  veut  repousser  la  mission  qui  lui  est 
confiée.  Dieu  le  fortifie,  touche  sa  bouche  pour  la 
rendre  éloquente  et  le  charge  d'une  mission  pénible,  i. 
4-10.  Plus  tard,  quand  l'accomplissement  de  sa  mission 
lui  attire  le  mépris  de  ses  contemporains,  il  se  plaint 
amèrement  que  Dieu  l'ait  fait  prophète  par  force.  Il 
avait  voulu  garder  le  silence;  mais  il  a  senti  brûler 
dans  ses  entrailles  et  dans  ses  os  un  feu  dévorant  et  il 
a  été  contraint  de  céder  et  de  parler,  xx,  7-9.  Cf.  iv. 
19-26;  xv,  10,  15.  Ézéchiel  a  reçu  de  Dieu,  lui  aussi,  la 
mission  de  parler  aux  Israélites  coupables  et  de  ne  pas 
craindre  leur  opposition,  n.  1-6.  Les  autres  prophètes, 
bien  qu'ils  ne  nous  aient  fait  connaître  ni  l'époque  ni 
le  mode  de  leur  vocation,  étaient  cependant  choisis  par 


711 


PROPHETE 


712 


Dieu  comme  ses  représentants  et  envoyés  vers  ceux  a 
qui  le  Seigneur  voulait  révéler  ses  volontés,  ordres  ou 
menaces.  Dieu  lui-même  l'affirme  par  la  bouche  de  Jé- 
rémie,  xi.iv.  i. 

2°  Inspiration.  —  Dieu  ne  se  borne  pas  à  envoyer 
ses  prophètes  et  à  les  charger  de  parler  en  son  nom;il 
met  sur  leurs  lèvres  ce  qu'ils  doivent  prêcher  et  annon- 
cer de  sa  part,  il  inspire  et  dirige  tous  leurs  actes  et 
toutes  kurs  démarches.  L'action  de  Dieu  sur  ses  en- 
voyés  est  exprimée  dans  les  Livres  Saints  en  des  for- 
mules nombreuses,  variées  et  très  expressives.  Les 
unes  la  décrivent  d'une  façon  générale,  d'autres  en 
précisent  la  nature,  tout  en  la  laissant  cependant  en- 
core dans  une  mystérieuse  obscurité  qu'il  est  impos- 
sible de  dissiper. 

La  main  du  Seigneur  est  sur  son  prophète.  Ezech-, 
i,  3;  III,  '22;  xxxm,  22,  avant  qu'il  ne  lui  parle;  elle 
tombe  sur  lui  et  il  a  une  vision,  Ezech.,  vm,  1  ;  elle  le 
conduit  dans  l'Esprit  de  Dieu.  Ezech.,  xxxvn,  1;  XL,  1. 
Elle  faisait  courir  Élie  devant  le  char  d'Achab.  1  (III) 
Heg.,  xviii,  'ili.  L'Esprit  du  Seigneur  est  sur  Isaïe, 
i.xi,  11.  Michée,  m,  8,  a  été  rempli  de  sa  force,  de  son 
jugement  et  de  sa  puissance.  Cet  Esprit  se  précipite 
sur  Ézéchiel  pour  lui  parler,  xi,  5;  il  l'enlève  et  l'em- 
porte au  lieu  où  il  doit  porter  son  message,  m,  12,  li; 
il  pénètre  en  lui,  le  fait  tenir  debout  et  lui  parle,  III, 
2i.  I  lieu  a  inspiré  par  son  Esprit  les  paroles  desanciens 
prophètes.  Zach.,  vu,  12.  Aussi  le  prophète  est-il 
l'homme  de  l'esprit,  nnn  tf>N,  qu'Israël  coupable  tient 

T 

pour  un  insensé,  Ose.,  ix,  7,  mais  qui  ne  peut  mentir. 
Mich.,  h,  11.  Cette  action  de  l'Esprit  divin  s'était  pro- 
duite aussi  sur  les  prophètes  d'action.  L'Esprit  de  Dieu 
s'était  précipité  sur  Halaam,  Num.,  xxiv.  2;  il  était 
venu  sur  Azarias,  fils  d'Oded,  II  Par.,  xv,  1,  sur  Jaha- 
ziel,  II  Par.,  xx,  14;  il  avait  revêtu  Zacharie,  fils  de 
Joïada.  II  Par.,  XXIV,  20.  L'annonce  .le  la  multiplicité 
des  prophètes  aux  temps  messianiques  est  faite  sous 
l'image  d'une  effusion  de  l'Esprit  divin  sur  toule  chair. 
Joël,  II,  28,  29.  Cet  esprit  qui  animait  les  prophètes 
d'Israël,  venait  donc  du  dehors;  il  était  étranger  à 
leurs  personnes  ;  il  dirigeait  leurs  actes  et  il  les  pous- 
sait eux-mêmes  à  parler. 

Son  action  est  précisée  ailleurs  et  présentée  comme 
une  révélation  divine.  Dieu  lui-même  met  ses  propres 
paroles  sur  les  lèvres  des  prophètes,  Dent.,  xvm,  1S, 
qu'il  a  purifiées.  Is.,  VI,  5-7;  .1er.,  i,  9.  11  parle  aux 
prophètes  pour  leur  révéler  ses  secrets.  Amos,  m,  7.  Il 
montre  l'objet  des  visions.  Amos,  vu,  1,4,  7:  vm,  1. 
Consulté  et  interrogé,  il  ne  répond  que  s'il  le  veut. 
Ezech.,  xiv,  3.  Le  prophète  doit  attendre  que  Dieu  lui 
réponde.  Hab.,  il,  1.  Quand  le  peuple  demande  une 
consultation,  il  prie  le  Seigneur  de  donner  une  ré- 
ponse qui  n'est  accorder  qu'au  bout  de  dix  jours.  Jer., 
xi.ii,  4,  7.  En  vain  le  prophète  voudrait-il  devancer 
l'heure  et  apprendre  de  force  la  parole  de  Dieu.  Il 
n'obtient  de  révélation  que  si  Dieu  veut  la  lui  accorder. 
Pour  punir  son  peuple.  Dieu  ne  donne  plus  de  visions 
à  ses  prophètes.  Lament.,  u,  9.  .Mais  quand  Dieu  a 
ouvert  la  bouche  de  son  prophète,  celui-ci  ne  peut 
plus  se  taire.  Ezech.,  xxxm,  22.  Les  prophètes  ne 
parlent  donc  pas  d'eux-mêmes  et  par  leur  propre  vo- 
lonté; c'est  l'Esprit  qui  les  inspire.  II  Pet.,  t,  21.  Leurs 
paroles  ne  sont  pas  le  fin  i  t  de  leurs  réflexions  person- 
nelles, ni  la  conséquence  de  leurs  raisonnements.  Elles 
leur  viennent  du  dehors,  sont  mises  par  Dieu  sur  leurs 
lèvres,  ou  au  moins  leurs  pensées  sont  produites  dans 
leur  esprit  par  une  force  supérieure,  I  Esprit  de  Dieu, 
qui  les  fait  agir  et  parler  et  qui  anime  toute  leur  con- 
duite. Sur  la  manière  dont  Dieu  agissait  sur  les  pro- 
phètes  ei  leur  communiquai!  ses  volontés,  voir  Pro- 
phétie. 

Les  prophètes  n'ont  pas  décrit  leur  étal  psycholo- 
gique, tandis  qu'ils  recevaient  les  communications  di- 


vines. Ils  avaient  le  sentiment  intime   de  posséder  la 
vérité  communiquée  par  Dieu.  Toutefois,  quelle  qu'ait 
été  la   façon  dont   l'Esprit  divin  agissait  sur  l'intelli- 
gence des  prophètes,  il  laissait  leur  personnalité  in- 
tacte; il   ne   leur  enlevait  pas  la   conscience  de    leurs 
actes  et  n'apportait  aucun  trouble  ni  aucune  modifica- 
tion dans  l'exercice  régulier  et  normal  de  leur  intelli- 
gence et  de  leur  liberté.  Quoique  inspiré,  le  prophète 
agissait,  pensait  et  parlait  comme  les  autres  hommes. 
Ses  pensées  et  ses  paroles  étaient  celles  de  Dieu;  il 
avait  compris  la  révélation  qui  lui  avait  été  faite,  et  il 
la  publiait  comme   il   eut  fait  pour  ses  propres  idées. 
En  parlant  et  en  agissant,  il  parlait  et  agissait  au  nom 
de  Dieu,  parfois  comme  s'il  était  revêtu  de  la  person- 
nalité   de   Dieu    qui    parlait  par   sa  bouche;   il  n'avait 
néanmoins   rien   perdu   de    son    activité  personnelle. 
Quand  les  prophètes  s'exprimaient  comme  s'ils  avaient 
été  Dieu  lui-même,  quand  ils  lui  attribuaient  leurs  dis- 
cours, ils  formulaient  la  pensée  divine  dans  leur   lan- 
gage propre,  avec  les  couleurs  de  leur  imagination   et 
la  chaleur  de  leurs  sentiments.  Ils  empruntaient  leurs 
images  à  leur  milieu  social,  et  ils  donnaient  parfois 
l'empreinte  de  leur  esprità  la  pensée  de  Dieu.  Ils  avaient 
reçu  de  Dieu  les  ordres  à  communiquer,   les  vérités  à 
manifester,  l'impulsion  pour  agir  et  parler;  mais  dans 
l'exercice  de  la  communication    des   pensées  divines 
aux  autres,  ils  gardaient  le  libre  usage  de  leurs  facultés. 
Ils  n'ont  pas  laissé  d'indice  que,  même  dans  la   vision, 
ils  aient  été  ravis  en  extase.  Ils  ne  disent  pas  que,  tandis 
que  leur  esprit  percevait  la  vérité  que  Dieu  leur  mani- 
festait, ils  avaient   perdu   conscience  des  choses   exté- 
rieures. Il  n'y  a   donc  pas  lieu,  d'ordinaire,  de  parler 
d'extase    prophétique,  au   moins    dans  le  sens  antique 
d'hommes  qui  parlent  étant  hors  d'eux-mêmes  et  sans 
l'usage  de  leurs  facultés  naturelles.  Leur  esprit  avait  du 
parfois,  peut-être,  se  fixer  si  attentivement  sur  la  vérité 
révélée  par   Dieu,  surtout  lorsqu'elle  était  présentée  à 
leur  imagination  sous  des  images,  qu'au  moment  de  sa 
manifestation  surnaturelle,  il  avait  perdu,  partiellement 
ou  totalement,  conscience  des  choses  extérieures.  Mu- 
cette  abstraction  d'esprit  ne  durait  que  pendant  la  per- 
ception de  l'objet  révélé;  elle  n'avait  pas  fait  cesser  la 
pleine   conscience   intérieure,  et   l'acte   de   perception 
accompli,  le  prophète  gardait  le  souvenir   distinct  de 
ce  qu'il  avait  vu  ou  de  ce  qu'il  avait  éprouvé,  et  il  le 
manifestait  avec  l'usage  plénier  de  sa  liberté  et  de  ses 
autres  facultés  naturelles.  L'extase  prophétique,  quand 
elle  s'est  produite,  différait  donc  de  la  [iolt.x  des  devins 
antiques  et  n'avait  rien  de  commun  avec  leur  délire  ou 
leur  démence.   Le    prophète    savait    toujours  ce    qu'il 
prophétisait,  quoiqu'il  put  cependant  ne  pas  saisir  tou- 
jours toute  la  portée  de  ses  oracles.  Sur  les  prophètes 
exaltés  et  hors  d'eux-mêmes,  voir  ProphÉtismE, 

Il  est  clair  enfin  que  les  prophètes  d'Israël  ne  sen- 
taient pas  constamment  en  eux  ni  toujours  au  même 
degré,  quand  elles  se  produisaient,  l'influence  el 
l'action  de  Dieu.  Leur  inspiration  n'était  pas  continue 
ni  habituelle.  Quoique  leur  mission  ait  été  ordinaire- 
ment perpétuelle,  tout  ce  qu'ils  faisaient  et  disaient 
d'y  avait  pas  un  rapport  nécessaire.  Quand  ils  remplis- 
saient leur  mission,  ils  étaient  poussés  par  l'Esprit  de 
Dieu,  et  alors  leurs  paroles  et  leurs  actes  étaient  ins- 
pirés, bien  que  Dieu  ne  leur  ait  pas  fait  de  nouvelles 
révélations.  L'inspiration  divine  avait  donc  lieu  pour 
eux  par  intermittence.  Le  prophète  Nathan  avait  de  lui- 
même  encouragé  le  roi  David  dans  son  projet  de  bâtir 
un  temple  au  Seigneur:  mais,  la  nuit  suivante,  Dieu 
lui  révéla  que  David  ne  réaliserait  pas  son  dessein  qui 
serait  accompli  par  son  lils.  II  Sam.,  vil,  3-13. 
ne  parlait  à  Élie  que  dans  des  cas  particuliers  et  à  .le 
longs   intervalles.  1   (III)   Reg.,  xvii,  2,  8;  xvm,  l.  Si 

Elisée    reçoil  une  double  part  de  l'esprit  d'Elie,  Il     IV) 
Reg.,  Il,  9,  10.  1"),  Dieu  lui  avait  caché  la  douleur  de  la 


713 


PROPHETE 


714 


Sunamite  privée  de  son  fils  unique,  Il  (IV)  Reg.,  iv,27  ; 
et  le  prophète  irrité  a  besoin  d'un  harpiste  pour  calmer 
sa  colère  et  le  prédisposer  à  recevoir  la  révélation 
divine.  Il  (IV)  Reg.,  m,  11-20.  Les  oracles  des  pro- 
phètes écrivains  n'étaient  pas  proférés  à  jet  continu. 
Chacun  a  eu  son  occasion  propre  et  le  prophète  ne  re- 
cevait les  révélations  divines  que  lorsque  Dieu  le  vou- 
lait et  dans  la  mesure  même  où  il  le  voulait. 

III.  Manière  dont  les  prophètes  manifestaient 
les  volontés  divines.  —  1°  De  vive  voix  et  par  la 
parole.  —  Les  prophètes,  étant  essentiellement  des  ora- 
teurs et  des  prédicateurs  qui  parlaient  au  nom  de  Dieu 
et  sous  son  inspiration,  ont  exercé  leur  mission  sur- 
tout par  la  parole.  Tous  les  anciens  prophètes,  qu'on 
appelle  prophètes  d'action  ou  non-écrivains,  n'ont  agi 
sur  leurs  contemporains  que  par  leurs  oracles  promul- 
gués de  vive  voix  et  par  leurs  discours.  Élie,  Elisée  et 
d'autres  n'ont  laissé  aucun  recueil  de  leurs  prophéties. 
Ce  n'est  que  vers  le  milieu  du  vme  siècle  que  commence 
la  prophétie  écrite  et  encore  les  prophètes  de  cette 
époque,  avant  de  faire  eux-mêmes  ou  de  laisser  faire 
la  collection  de  leurs  oracles,  les  avaient  prononcés  de 
vive  voix  en  public,  Amos,  le  plus  ancien  peut-être  des 
prophètes  écrivains,  lorsqu'il  parait  pour  la  première 
fois  à  Béthel,  parle  au  peuple  et  au  prêtre  Amasias.On 
peut  légitimement  supposer  qu'il  a  communiqué  les 
autres  messages  de  Dieu  par  la  parole  avant  de  les  ré- 
diger par  écrit.  .lérémie  a  prophétisé  pendant  23  ans 
sans  écrire,  et  ce  ne  fut  qu'après  ce  long  laps  de  temps 
que  Dieu  lui  ordonna  de  prendre  un  rouleau  et  d'y 
consigner  ses  précédents  oracles,  xxxvt,  1.  2.  Il  avait, 
du  reste,  prononcé  quelques-uns  d'entre  eux  dans  la 
cour  du  Temple  de  Jérusalem,  xxvi,  2.  Beaucoup  de 
prophéties  ont  la  forme  de  discours  qui  ont  sans  doute 
été  dits  avant  d'être  couchés  par  écrit.  La  parole  était 
certainement  à  cette  époque  le  moyen  le  plus  efficace 
<le  faire  connaître  et  de  propager  les  oracles  divins. 

On  peut  donc  penser  que  la  plupart  des  prophètes 
écrivains  ont  été  orateurs  avant  de  devenir  écrivains. 
Ce  n'est  qu'après  avoir  fait  entendre  aux  oreilles  de 
leurs  contemporains  les  volontés  divines  qu'ils  les  ont 
consignées  par  écrit.  Leurs  écrits  ne  sont  donc  qu'une 
reproduction  de  leur  prédication., Vraisemblablement, 
les  discours  des  prophètes  n'étaient  pas  reproduits  par 
eux  intégralement,  textuellement,  sténographiquement. 
A  moins  qu'il  ne  s'agisse  d'oracles  écrits  pour  être  lus, 
la  reproduction  n'est  pas  faite  in  extenso,  mais  seule- 
ment sous  forme  de  citations  partielles  ou  même  de 
simples  résumés,  .lérémie,  commençant  à  dicter  ses  pro- 
phéties après  23  ans  de  ministère,  ne  se  souvenait  plus 
textuellement  des  paroles  qu'il  avait  prononcées,  et  il 
n'a  pu  les  reproduire  littéralement.  Les  écrits  de 
beaucoup  de  prophètes  sont  donc  des  recueils  d'ex- 
traits ou  de  spécimens  de  leur  prédication,  ils  y  ont 
résumé  et  condensé  eux-mêmes  la  substance  de  leur 
enseignement,  les  thèmes  qu'ils  avaient  vraisemblable- 
ment traités  et  développés  à  diverses  reprises.  Parfois 
cependant,  le  texte  primitif  a  été  reproduit  intégrale- 
ment. On  peut  penser  qu'il  en  a  été  ainsi  de  ces  discours 
rédigés  sous  forme  poétique,  en  strophes  régulières  et 
avec  refrain  répété. 

2°  Par  écrit.  —  Toutefois,  certaines  parties  des 
livres  prophétiques  n'ont  probablement  pas  été  pronon- 
cées de  vive  voix,  mais  ont  été  publiées  seulement  par 
écrit.  Ainsi  les  prophéties  d'Osée  paraissent  être  moins 
des  discours  que  des  oracles  écrits  pour  être  répan- 
dus parmi  le  peuple  et  communiqués  par  la  lecture. 
Isaïe,  qui  avait  été  à  la  rencontre  d'Achaz  pour  lui  dire 
les  menaces  divines,  vu,  3-25,  voulut,  parce  que  sa  mis- 
sion était  mal  vue  du  peuple,  lire  la  révélation  et  fer- 
mer avec  un  sceau  la  doctrine  parmi  ses  disciples,  VIII, 
16;  ce  qui  signifie  qu'il  résolut  de  ne  plus  la  répandre 
en  public,  et  de  la  réserver  à  un  petit  groupe  de  fidèles. 


S'il  n'avait  pas  pensé  alors  à  la  laisser  par  écrit,  il 
reçut  plus  tard  de  Dieu  l'ordre  d'écrire  les  instructions 
du  Seigneur,  xxx,  S.  Il  est  possible  que  toute  la  seconde 
partie  de  son  livre,  xl-lxvi,  dont  la  composition  est  si 
régulière,  n'a  été  publiée  que  par  écrit.  Quand  Jérémie 
eut  dicté  à  Baruch  ses  oracles  antérieurs  et  les  eut 
réunis  en  un  volume,  il  en  fit  lire  publiquement  une 
partie  au  peuple,  xxxvi,  4-10,  et  aux  princes,  11-19.  On 
les  lut  aussi  au  roi,  qui  jeta  le  volume  au  feu,  20-25. 
Jérémie  dicta  à  son  secrétaire  un  volume  plus  complet 
que  le  précédent,  27-32.  Le  livre  de  Baruch  a  été  écrit 
tout  entier  pour  être  lu  aux  Juifs  exilés  à  Babylone, 
Bar.,  i.  l-i,  ainsi  que  la  lettre  que  Jérémie  adressa 
aux  mêmes  captifs.  Bar.,  vi.  L'ordre  et  la  disposition  du 
livre  d'Ezéchiel  font  penser  que  le  prophète  l'a  écrit 
d'un  seul  jet,  quoique  quelques  parties  soient  la  repro- 
duction de  discours  précédents,  m,  10-15;  xx,  2-44; 
xxiv,  18-27;  xl,  1.  On  estime  que  le  plan  de  restaura- 
tion religieuse,  dressé  par  lui,  xl-xlviii,  n'a  pas  été  des- 
tiné à  être  lu  en  public.  Toutefois,  Èzéchiel  n'a  pas  été 
seulement  un  prophète  de  cabinet,  comme  on  l'a  dit, 
il  a  été  aussi  bien  que  ses  devanciers  un  orateur  en  con- 
tact immédiat  avec  les  exilés  ;  mais  il  a  composé  lui- 
même  le  recueil  de  ses  prophéties.  On  a-  donc  eu  tort  de 
prétendre  que,  pour  lui,  la  vision  prophétique  n'était 
plus  une  expérience  réellement  éprouvée  et  qu'elle  était 
devenue  un  genre  littéraire,  une  simple  forme  dont  se 
revêtait  la  pensée  de  l'écrivain.  Le  livre  de  Daniel  a  été 
composé  pour  être  lu,  et  ses  oracles  ne  semblent  pas 
avoir  été  publiés  de  vive  voix,  avant  leur  publication 
littéraire. 

Les  recueils  d'oracles  prophétiques  ont  vraisembla- 
blement été  formés  pour  la  plupart  par  les  prophètes 
eux-mêmes  qui  réunissaient  ainsi,  groupaient  l'ensem- 
ble de  leurs  oracles,  dont  quelques-uns  peut-être  avaient 
primitivement  été  rédigés  sur  des  feuilles  volantes.  Il 
n'est  pas  certain  toutefois  que  tous  aient  fait  la  collection 
de  leurs  prophéties.  Quelques-uns  ont  pu  laisser  ce 
soin  à  leurs  disciples.  Les  oracles  d'Isaïe  et  de  Jérémie 
ne  semblent  pas  avoir  eu,  dès  le  début,  une  destina- 
tion publique.  Ces  prophètes  les  avaient  gardés  dans  le 
cercle  étroit  de  leurs  disciples.  Plus  tard,  les  livres 
prophétiques  furent  communiqués  au  peuple,  et  tous 
finirent  par  être  reconnus  officiellement  et  publique- 
ment comme  la  parole  de  Dieu.  La  prophétie  écrite  a 
ainsi  exercé  une  plus  grande  influence  que  la  prophétie 
simplement  orale.  Après  avoir  produit  son  effet  immé- 
diat dans  les  milieux  auxquels  elle  était  destinée,  elle  a 
transmis  aux  siècles  suivants  et  à  toutes  les  généra- 
tions juives  et  chrétiennes  la  révélation  divine. 

3°  Par  actions  symboliques.  —  Souvent,  les  volontés 
divines  étaient  manifestées  au  peuple  et  rendues  tan- 
gibles en  quelque  sorte  par  des  actions  symboliques, 
accomplies  par  les  prophètes  et  racontées  dans  les  Livres 
Saints.  Les  prophètes  d'action  en  ont  accompli  aussi 
bien  que  les  prophètes  écrivains.  En  coupant  son  man- 
teau en  douze  parts  et  en  en  donnant  dix  à  Jéroboam, 
le  prophète  Ahias  annonçait  symboliquement  le  schisme 
de  dix  tribus.  I  (III)  Reg.,  xi,  29-39.  Le  fils  du  prophète, 
qui  se  fait  battre  et  blesser  et  qui  se  présente  au  roi 
Achab  sur  le  chemin,  voulait  par  sa  conduite  attirer 
l'attention  du  roi  et  lui  faire  mieux  comprendre  le  tort 
qu'il  avait  eu  de  s'allier  avec  Bénadad.  1  (Ml  Reg.,  xx, 
35-43.  Les  mariages  d'Osée  avec  Gomer  et  avec  une 
femme  débauchée  ne  sont,  probablement,  ni  une 
fiction  allégorique,  ni  une  simple  parabole,  ni  des 
actes  accomplis  en  vision,  mais  des  histoires  vraies, 
symbolisant  la  conduite  d'Israël  à  l'égard  de  Dieu.  Voir 
t.  iv.  col.  1909-1912.  Isaïe,  1-4,  écrit  sur  une  grande  ta- 
blette en  grands  caractères  et  devant  témoins  le  nom 
prophétique  qu'il  donnera  au  fils  qui  lui  naîtra  bientôt. 
Ce  prophète,  nu  et  déchaussé,  parcourt  Jérusalem, comme 
s'il  était  un  prisonnier  de  guerre,  pour  figurer  les  captifs 


7ir 


PROPHETE 


716 


que  le  roi  d'Assyrie,  dans  la  campagne  commencée, 
emmènera  il  Egypte  et  d'Ethiopie,  xx,  1-6.  Jérémie  cache 
sa  ceinture  de  lin  nu  liord  d'un  cours  d'eau  el  va  la  re- 
prendre plus  lard,  toute  pourrie  et  impropre  à  aucun 
usage,  pour  annoncer  le  châtiment  que  Dieu  tirera  de 
Juda.  auquel  il  s'est  attaché  comme  la  ceinture  s'attache 
aux  reins  d  un  homme,  xui,  1-21.  L'n  potier,  sous  les 
yeux  du  prophète,  change  la  destination  du  vase  qu'il 
façonne  :  ce  qui  signifie  que  Dieu,  lui  aussi,  peut  mo- 
difier ses  plans,  win,  1-10.  Jérémie  brise  ensuite 
devant  témoins  un  vase  acheté  chez  ce  potier  pour  ligu- 
rer  la  destruction  prochaine  de  Jérusalem,  xix,  1-13. 
Il  met  un  joug  sur  ses  épaules  en  vue  de  représenter 
l'asservissement  d*1  Juda  par  Babylone  et  d'annoncer 
au  roi  que  Dieu  lui  commande  de  se  soumettre  à  ses 
vainqueurs.  XXVII,  2-13,  malgré  les  prédictions  trom- 
peuses des  faux  prophètes.  Hananias,  l'un  d'eux,  hrise 
le  joug  symbolique  porté  par  Jérémie.  et  ce  prophète 
contredit  son  adversaire  et  prédit  sa  mort  prochaine, 
XXVIII,  1-17.  Il  achète  un  champ  à  Anathoth.et  cet  achat, 
lut  sous  l'impulsion  divine,  est  l'emblème  et  le  gage 
des  bénédictions  que  Dieu  réserve  aux  captifs  après 
leur  retour,  xxxu,  li-ii.  Réfugié  en  Egypte,  il  cache  de 
grandes  pierres  pour  prédire  l'invasion  du  pays  par 
Xabuchodonosor.  xi  ni,  8-13.  Après  avoir  écrit  sa  pro- 
phétie annonçant  la  ruine  de  Babylone,  il  remet  le  rou- 
leau à  Sarias,  qu'il  envoie  à  Babylone  pour  le  lire, 
l'attacher  ensuite  à  une  pierre  et  le  jeter  au  milieu  de 
IT.uphrale.  afin  de  symboliser  la  submersion  de  la 
grande  ville,  i.i,  59-61.  Ézéchiel  mange  un  rouleau  d'écri- 
ture qui  lui  est  présenté-,  et  ce  symbole  ligurele  message 
dont  il  est  porteur,  il,  8-111,3.  Il  reçoit  l'ordre  dt  s'en- 
fermer dans  sa  maison  et  d'y  garder  un  silence  absolu 
pour  montrer  que  les  Israélites  exaspèrent  Dieu, qui  ne 
vent  plus  leur  parler,  III,  24-27.  Il  trace  sur  une  brique 

un  plan  de  Jérusalem  assiégée  et  représente  lui-mé 

les  assaillants,  îv,  1-3,  Couche  sur  le  côté  gauche  pen- 
dant 390  jours,  il  représente  la  durée  des  iniquités 
d'Israël  ;  couché  ensuite  sur  le  côté  droit  durant  10 jours, 
il  figure  celle  des  péchés  de  Juda,  un  jour  étant  pour 
une  année;  après  quoi,  il  prophétise  contre  Jérusalem 
assiégée,  IV,  i-S.  Sa  nourriture  répugnante,  malgré 
l'adoucissement  obtenu,  et  sa  boisson  seront  mesurées 
connue  le  signe  du  sort  misérable  auquel  seront  ré- 
duits les  assiégeants,  tv,  9-17.  Il  coupe  enfin  sa  cheve- 
lure, la  livre  au  feu,  au  rasoir  et  au  vent,  pour  signifier 
qu'un  petit  nombre  seulement  des  habitants  de  Jérusa- 
lem survivra,  v,  1-17.  En  présence  des  exilés,  il  simule 
un  départ  hâtif  pour  un  voyage,  el  il  explique  que  cette 
scène  représente  le  roi  Sédécias  et  les  habitants  de 
Jérusalem  qui  devront  riniyi'cr  au  milieu  des  nations, 
mi.  1-lli.  La  manière  dont  le  prophète  mange  son  pain 
et  boit  de  l'eau,  signifie  la  condition  misérable  à  la- 
seronl  réduits  les  habitants  de  Jérusalem,  xn, 
17-20.  Sa  femme  étanl  'te,  il  reçoit  de  Dieu  l'ordre 

de  ne  pas  en  porter  le  deuil,  afin  de  servir  de  signe  à 
ses  compatriotes,  en  prévision  de  la  ruine  prochaine  de 

Jérusalem.  XXIV,  15-24.  Le  livre  de  /.acharie  raconte 
une  seule  action    symbolique.  Trois  exilés,  revenus  de 

Babylone,  avaient  rapporté  de   l'or  et  de  l'argent;  le 

prophète  doit  en  faire  des  couronnes  qu'il  placera  sur 
la  lête  du  grand-prêtre  .losué  et  qui  seront  déposées 
dans  le  Temple  de  Jérusalem  comme  des  mémoriaux  de 
•  instruction  de  ce  Temple,  ainsi  prédite,  vi,  6-16. 
Bien  que  quelques-unes  de  ces  actions  symboliques 
présentent  des  difficultés  au  point  de  vue  de  leur 
réalité  historique,  ce  ne  sont  pas  de  simples  ligures  de 
rhétorique  comme  le  prétendait  Fteuss,  mais  plutôt  des 
faits  réels,  accomplis  sous  les  yeux  des  spectateurs  afin 
de  les  impressionner  plus  vin  nient  et  de  leur  donner 
une  saisissante  leçon  de  choses. 

IV.    l'i.l  l  m  s    m  i     i  i  -     pnOPIII  i  i       DONNAI!  VI    in     l  A 
VÉRITÉ    DE  LEUR     MISSION     M    ni     LEUR    INSPIRATION.— 


1°  Les  miracles.  —  Les  envoyés  de  Dieu  justifiaient  par- 
fois leur  mission  divine,  en  accomplissant  des  prodiges. 
Ainsi,  Dieu  accorda  à  Moïse  le  pouvoir  de  faire  des  pro- 
diges avec  la  verge  qu'il  tenait  à  la  main  ou  de  changer 
l'eau  en  sang  pour  l'accréditer  auprès  des  Hébreux, 
Exod.,  iv,  1-19.  29-21,  aussi  bien  qu'auprès  de  Pharaon. 
Exod.,  vu,  3-5,  etc.  L'autel  de  Béthel  fut  brisé  et  la 
main  de  Jéroboam  desséchée  pour  confirmer  la  pré- 
diction d'un  prophète  de  Juda,  réalisée  plus  tard  dans 
la  personne  du  roi  Josias.  I  (III)  Reg.,  XIII,  1-6.  La  ré- 
surrection de  son  lils  fut  pour  la  veuve  de  Sarephta 
une  preuve  certaine  qu'Élie  était  un  homme  de  Dieu 
et  que  la  parole  de  Dieu  était  vraiment  dans  sa  bouche. 

I  (III)  Reg..  xvn,  23,  24.  Le  même  prophète  confondit 
les  prophètes  de  Daal  qui  ne  purent  faire  dévorer  par 
le  feu  du  ciel  leurs  victimes,  et  quand  sa  prière  à  .lébo- 
vah  eut  été  exaucée,  le  peuple  entier  proclama  la  puis- 
sance de  son  Dieu.  Ibicl.,  xvm,  20-30.  Dieu  lui-même 
fait  proposer  à  Acbaz  par  Isaïe  un  signe  en  preuve  de 
la  vérité  d'un  oracle  précédent.  Is..  VIII,  7-12.  La  rétro- 
gradation de  l'ombre  sur  le  cadran  d'Ézéchias  devait 
être  pour  ce  roi  une  assurance  divine  de  la  vérité  des 
promesses  qui  venaient  de  lui  être  faites  de  la  part  du 
Seigneur.  Is.,  xxxvm,  5-8.  Toutefois,  les  prophètes 
d'Israël  ne  se  donnaient  pas  ordinairement  comme 
thaumaturges,  et  l'accomplissement  de  signes  el  de 
prodiges  semble  n'avoir  été  qu'accidentel  pour  autoriser, 
de  par  Dieu,  la  mission  de  ces  prophètes,  en  Israël. 

2°  La  réalisation  île  leurs  oracles.  —  La  véritable 
marque  distinctive  des  faux  et  des  vrais  prophètes  était 
la  réalisation  ou  la  non-réalisation  de  leurs  prédictions. 
Dieu  lui-même  avait  révélé  ce  critère  i  Moïse.  Deut.,XVIH, 
20-22.  Klie,  au  début  de  sa  mission,  prédit  une  séche- 
resse, qui  se  réalise  aussitôt  et  cesse  sur  sa  parole  au 
bout  de  trois  ans.  I  (llli  Reg.,    xvm,    1-45.   Dans  sa 

lutte  avec  les  faux  prophètes  d'Israël,  Miellée,  lils  de 
.lemla,  prédit  a  Sédécias  et  au  roi  le  sort  qui  les  attend 

en  conlir lit  m  de  la  vérité' de  sa  prédiction.  1(111    I 

XXII,  25.  28.  Elisée  annonce  aux  vieillards  qui  l'entou- 
rent que  le  roi  envoie  quelqu'un  pour  le  tuer,  et  à  peine 
avait-il  fini  de  parler  que  l'envoyé  arrivait.  II  (IV)  Reg.,. 
vi,  31-33.  L'Israélite  qui  avait  refusé  de  croire  à  l'abon- 
dance prédite  par  le  même  prophète,  vit  le  fait  réalise, 
mais  n'en  profita  pas,  ainsi  que  l'homme  de  Dieu  le  lui 
avait  déclare.  111  Reg.,  vu,  1,  2.  16-20.  L'événement  jus- 
tifia prompteinent  la  prédiction  d'Elisée  à  Ilazaël,  qui 
devint  roi  de  Syrie  après  le  meurtre  de  lienadad. 
III  Reg.,  VIII,  13-15.  Il  en  fut  de  même  pour  celle  que  ce- 
prophète  lit  à  Joas  qui  fut  trois  fois  victorieux  des 
Syriens,  III  Reg,,  xn,  14-19,25,  et  pour  celle  qu'Isaïe  fil 
à  E/échins  contre  Sennachérib.  III  Reg.,  xix,  20-35.  Les- 
incursions  des  Chaldéens,  des  Syriens,  des  Moabites  el 

de-  Ammonites  dans  le  royaume  de  Juda  sous  le  règne 

de  Joachim  réalisaient  les  paroles  que  Dieu  avait  l'ait 
prédire  parles  prophètes,  ses  serviteurs.  III  Reg.,  XXIV,  2. 
Amos,  vu,  17,  annonce  au  prêtre  Amasias  un  châtiment 
personnel,  qui  a  dû  avoir  une  prompte  réalisation. 
Dans  sa  discussion  avec  le  faux  prophète  Hananie, 
Jérémie  rappelait  à  son  adversaire  que  les  prophètes 
antérieurs  avaient  prédit  des  guerres,  des  dévastations. 
el  des  famines,  alors  que  lui  annonçait  la  paix.  Lé\é- 
ne ni  devait  vérifier  leurs  oracles.  Jer.,  xxvin.  8,  9- 

II  donna    tort  à    Hananie  qui,   lui-même,  mourut   dans 

l'année  en  punition  de  ses  prédictions  mensongères,  15- 

17.  La  réalisation  des  prophéties,  faites  ainsi  à  brève 
échéance,  confirmait  évidemment  la  mission  divine  de 

crus  qui  les  avaient  faites.  Mais    toutes    les  prédicl - 

ne  devaient  pas  se  réaliser  sous  les  yeux  des  auditeurs. 

Aussi  les  incrédules  reprochaient-ils  fréque ni  ave 

dérision  aux  prophètes  le  retard  de  leurs  prédiction 

A s.  v,   IS;   i\,   10;  Is..  v,    19;  Ezech.,   xn,  21-2S.  De 

même,  parce  que  les  prophètes  annonçaient  aux  Israé- 
lites prévaricateurs  des  châtiments,  ont-ils  été  persécu- 


717 


PROl'HKTE 


718 


tés.    Matth.,    v,    12;    Act.,    vu,   52;    Iteb.,    »,   3540. 

3°  Le  caractère  moral  de  leur  prédication.  —  Le 
plus  souvent,  surtout  quand  ils  luttent  contre  les  faux 
prophètes,  les  voyants  d'Israël,  pour  justifier  leur  mis- 
sion, en  appellent  à  leur  droiture,  à  la  conscience 
intime  et  profonde  qu'ils  ont  de  parler  au  nom  de  Dieu, 
au  caractère  moral  de  leur  prédication  dirigée  exclusi- 
vement, malgré  des  obstacles  sans  nombre,  à  maintenir 
ou  à  ramener  Israël  dans  la  vraie  religion,  dans  la 
bonne  voie  et  dans  la  pratique  du  bien.  Miellée  repro- 
che à  la  maison  de  Jacob  son  impiété.  S'il  n'était  un 
homme  inspiré,  il  dirait  des  paroles  mensongères,  il 
verserait  sur  ses  compatriotes  le  vin  qui  les  tromperait, 
II,  II.  Les  faux  voyants  de  Juda  se  complaisaient  dans 
des  visions  vaines  et  trompeuses.  Is.,  lvi,  10.  Du  temps 
de  Jérémie,  ils  trompaient  le  peuple,  VI,  13,  parce  qu'ils 
disaient  la  vision  de  leurs  cœurs  et  non  ce  qui  sortait 
de  la  bouche  du  Seigneur,  xxm,  16.  Ils  empêchaient 
la  conversion  de  Juda,  xxm,  22.  Au  temps  de  la  capti- 
vité, les  fausses  prophétesses  cousaient  des  coussins  et 
altéraient  la  vérité  pour  tromper  les  âmes.  Ezech.,  xm, 
'17-23.  Les  faux  prophètes  séduisaient  le  peuple  pour 
lui  plaire  et  par  amour  du  lucre.  Mich.,  m,5,  1 1  ;  Ezech., 
xm,  19,  21.  Du  reste,  ils  étaient  adonnés  au  vin.  Is., 
XXVIII,  7.  Leurs  pensées  étaient  exécrables  et  leur  con- 
duite mauvaise.  Jer.,  xxiu,  12,  11,  22;  xxix,23;  Soph., 
m,  4.  Celte  dépravation  morale  trahissait  la  fausseté 
de  leur  inspiration  feinte,  et  les  distinguait  des  vérita- 
bles prophètes,  prédicateurs  attitrés  et  officiels  du  culte 
moral  de  Jéhovah. 

V.  RÙLE  ET  INFLUENCE  DES  PROPHÈTES  EN  ISRAËL.  — 
Puisque  les  prophètes  étaient,  en  Israël,  les  représen- 
tants de  Dieu,  ses  envoyés  directs,  leur  intervention 
s'est  manifestée  dans  tous  les  domaines  dans  lesquels 
Dieu  voulait  exercer  ses  droits  sur  son  peuple  choisi. 
Elle  était  éminemment  religieuse  et  morale;  mais  comme 
le  gouvernement  d'Israél  était  théocratique,  elle  a  néces- 
sairement débordé  sur  la  politique.  Enlin,  comme  à 
partir  du  vni''  siècle  elle  s'est  exercée  par  des  écrits, 
elle  est  devenue  littéraire.  Nous  étudierons  donc  suc- 
cessivement le  rôle  religieux  et  moral,  politique  et 
littéraire  des  prophètes  israéliles. 

1°  Rôle  religieux  et  moral.  —  Les  prophètes  n'ont 
pas  été  les  créateurs  du  monothéisme,  mais  seulement 
ses  ardents  propagateurs.  Voir  t.  m,  col.  1235-1237. 
S'ils  luttaient  contre  les  rois,  c'est  que  ceux-ci  pour  la 
plupart,  depuis  Salomon,  portaient  le  peuple  par  leurs 
exemples  et  leurs  actes  de  gouvernement  à  l'idolâtrie 
et  que  le  peuple  se  laissait  facilement  séduire.  Les  pro- 
phètes étaient  les  adversaires  de  l'idolâtrie  et  des  cultes 
impurs  des  Philistins  et  des  Syriens.  Déjà,  sous  Samuel, 
les  disciples  des  prophètes,  à  l'époque  de  la  lutte  contre 
les  Philistins,  propageaient  par  leurs  réunions,  leurs 
chants  et  leurs  prières  en  commun  le  culte  de  Jéhovah  ; 
ils  allaient  par  bandes  errantes  à  travers  le  pays  pour 
entraîner  le  peuple  à  leur  suite.  Sous  Jéroboam  Ier,  les 
prophètes  luttèrent  contre  le  culte  du  veau  d'or,  établi 
à  Béthel.  Pendant  le  règne  d'Achab,  de  ce  roi  qui  avait 
introduit  en  Israël  les  idoles  tyriennes,  ils  voulaient 
avant  tout  sauver  la  foi  monothéiste.  L'extermination 
des  prophètes  de  Baal  par  Elie  s'explique  par  la  gran- 
deur du  danger  il  /tait  nécessaire  de  frapper  un  grand 
coup)  et  par  les  mœurs  du  temps.  (C'étaient  des  repré- 
sailles :  n'avait-on  pas  exterminé  les  prophètes  de 
Jéhovah?)  C'était  un  combat  de  vie  et  de  mort  entre  le 
culte  du  vrai  Dieu  et  celui  des  fausses  divinités.  Les 
prophètes  suivants  repoussent  tout  mélange  des  pra- 
tiques idolâtriques  avec  la  religion  nationale.  Voir 
t.  m,  col.  810-813. 

S'ils  n'ont  pas  créé  le  monothéisme,  ils  l'ont  cepen- 
dant épuré  et  développé  au  moins  dans  les  masses  popu- 
laires. Ils  travaillaient  à  répandre  une  connaissance,  non 
pas  spéculative  et  métaphysique,  mais  simple  et  pratique. 


de  Dieu.  Jéhovah,  le  Dieu  des  pères,  était  le  seul  Dieu 
du  ciel  et  de  la  terre,  supérieur  à  tous  les  êtres  qu'il  a 
créés,  gouvernant  le  monde  avec  sagesse  et  puissance, 
d'une  justice  inflexible  à  punir  les  coupables,  d'une 
bonté  sans  mesure  pour  ses  fidèles  adorateurs,  enfin 
d'une  sainteté  si  parfaite  qu'il  ne  supportait  aucune 
souillure.  Ce  Dieu  unique  et  universel,  souverainement 
bon  et  juste,  quoique  sévère  et  terrible,  imposait  un 
culte  moral  en  esprit  et  en  vérité  et  ne  se  contentait 
pas  des  sacrifices  et  des  pratiques  extérieures,  auxquelles 
ne  se  joignaient  pas  les  dispositions  intérieures  et  les 
œuvres  de  justice.  On  a  dil,  à  cause  de  cela,  que  la  pré- 
dication des  prophètes  était  antisacerdotale.  Ils  n'étaient 
pas  les  adversaires  du  culte  mosaïque;  ils  défendaient, 
au  contraire,  sa  spiritualité  comme  son  intégrité  contre 
les  prêtres  qui  favorisaient  avec  l'idolâtrie  la  dévotion 
purement  extérieure.  Ils  devenaient  donc  les  guides 
religieux  du  peuple,  et  ils  maintenaient  la  pureté  des 
mœurs  et  des  doctrines  par  leurs  avertissements,  leurs 
reproches  et  leurs  menaces  autant  que  par  leurs  exhor- 
tations et  leurs  encouragements.  Ils  rappelaient  sans 
cesse  à  la  nation  juive  son  idéal  religieux,  jugeaient  le 
passé  et  le  présent  d'après  cet  idéal  dont  ils  annonçaient 
et  préparaient  la  réalisation  dans  l'avenir.  Ils  se  disaient 
des  sentinelles,  Is.,  LU,  8;  Jer.,  VI,  17;  Ezech.,  m,  17; 
xxxiii,  IJ-7,  et  des  gardiens,  Is.,  xxi.  11,  12;  lxii,  6, 
parce  qu'ils  veillaient  à  la  sûreté  de  leur  peuple.  Cf.  Ose., 
v,  1;  lx,  8;  Mich.,  vu,  4. 

Les  prophètes  ont  aussi  fait  progresser  les  idées  mo- 
rales en  Israël.  Ils  ont  tous  été  les  protecteurs  des 
pauvres  et  des  opprimés  et  ils  ont  défendu  les  faibles 
contre  les  injustices  et  les  tyrannies  des  puissants.  Tout 
en  prêchant  la  rétribution  des  actes,  ils  ont  reconnu 
que  le  juste  peut  soull'rir  sans  être  coupable.  Pour  plus 
de  détails,  voir  t.  iv,  col.  1263-1266.  Cf.  .T.  Brucker, 
L'enseignement  des  prophètes,  dans  les  Eludes,  août 
1892,  p.  554-580;  Id.,  L'Église  et  la  critique  biblique, 
Paris  (1908),  p.  244-262. 

2»  Rôle  politique.  —  Il  a  été  souvent  mal  compris  et 
mal  jugé,  sinon  travesti  :  on  a  fait  des  prophètes 
d'Israël  des  ambitieux  voulant  tout  dominer,  le  trône 
et  l'autel;  on  les  a  représentés  comme  des  tribuns  et 
des  révoltés.  En  réalité,  ils  ont  simplement  tenu  la  place 
que  la  constitution  théocratique  de  leur  nation  leur 
assignait,  et  ils  ont  rempli  la  mission  que  Dieu  leur 
imposait.  Dans  la  constitution  mosaïque,  le  prophète 
était,  de  par  Dieu,  une  sorte  de  modérateur  suprême, 
semblable  à  Moïse,  un  surveillant  des  rois  comme  des 
prêtres.  Deut.,  xvm,  15-19.  C'est  le  voyant  Samuel  qui, 
par  révélation  divine,  oiqt  Saûl,  le  premier  roi,  I  Sam., 
ix,  15-17;  x.  1,  et  quand  Saùl  eut  été  infidèle  à  sa  mis- 
sion, le  même  prophète  fut  chargé  par  Dieu  d'oindre 
David,  le  chef  d'une  nouvelle  dynastie.  I  Sam.,  xvi, 
1-13.  Pendant  la  révolte  d'Adonias,  Nathan  avertit 
Bersabée  et  lui  conseille  de  faire  sacrer  Salomon. 
I  (III)  Reg.,  i,  11-14.  Il  intervient  lui-même  et  fait  agréer 
à  David  les  propositions  de  Bethsabée,  22-27;  il  concourt 
à  l'onction  de  Salomon,  32-38,  44,  45.  On  ne  doute  pas 
que  Nathan  ne  remplisse  en  cette  circonstance  son  rôle 
de  prophète.  Du  vivant  de  Salomon.  Ahias  se  présente 
à  Jéroboam  et  lui  annonce  qu'il  régnera  sur  dix  tri- 
bus, détachées  de  la  dynastie  salomonienne.  I  (III)  Reg., 
xi,  29-39.  Dès  que  Jéroboam  élève  un  autel  à  Béthel 
et  organise  le  culte  des  veaux  d'or  pour  empêcher  les 
Juifs  d'aller  adorer  Jéhovah  à  Jérusalem,  ibid.,  XII,  26- 
33,  un  homme  de  Dieu  vient  de  Juda  prophétiser  contre 
le  nouvel  autel.  Ibid.,  xm,  1-10.  Parce  que  ce  roi  a  été 
idolâtre,  Dieu,  par  la  bouche  d'Ahias,  lui  prédit  la  chute 
de  sa  dynastie.  Ibid.,  xiv,  7-16.  Cette  prophétie  fut 
réalisée  par  la  révolte  de  Baasa  et  l'extermination  de 
tous  les  descendants  de  Jéroboam.  Ibid.,  XV,  27-30. 
L'usurpateur,  ayant  suivi  les  voies  impies  de  son  pré- 
décesseur, apprit  du  prophète  Jéhu  sa  mort  prochaine 


ri9 


PROPHETE 


720 


et  la  ruine  de  sa  maison.  Ibid.,  xvi,  l-i,  7.  Après  deux 
ans  de  règne,  Éla,  fils  de  Baasa,  fut  détrôné  par  Zambri, 
8ri3.  Aiini  lui  ta  tête  d'une  nouvelle  dynastie,  qui  fut 
idolâtre.  Cependant,  c'est  en  punition  de  l'usurpation 
de  îa  vigne  de  Nabolh  par  Achab  qu'Élie  prédit  la  chute 
de  sa  maison.  Ibid.,  xxi,  17-24.  Seule,  la  pénitence 
d'Achab  lit  retarder  la  menace  de  ruine  à  la  génération 
suivante,  27-29.  Elisée  envoya  un  (ils  de  prophète  sacrer 
Jéhu,  Il  (IV)  Reg.,  îx,  1-10.  qui  extermina  la  maison 
d'Achab.  Tbid.,  \,  10,  17.  Parce  que  ce  nouveau  roi  fut 
idolâtre,  lui  aussi,  ses  fils  ne  régnèrent  que  jusqu'à  la 
quatrième  génération,  30.  Zacharie,  en  effet,  périt 
assassiné.  Ibid.,  xv,  12.  Les  prophètes  faisaient  donc  et 
défaisaient  les  rois  d'Israël.  Ils  n'étaient  pas  pour  cela 
des  adversaires  de  la  royauté  patprincipes  républicains. 
Aucun  d'eux  n'a  prêché  le  renversement  du  trône  au 
profit  d'une  constitution  nouvelle.  Par  ordre  de  Dieu, 
ils  substituaient  roi  à  roi.  maison  à  maison,  et  ils  pro- 
clamaient le  principe  de  la  légitimité  dynastique,  tant 
que  la  dynastie  était  elle-même  lidéle  à  sa  mission. 
S'ils  prenaient  fait  et  cause  pour  un  prétendant  et  favo- 
risaient les  usurpateurs,  ce  n'est  pas  par  républica- 
nisme, mais  simplement  par  application  rigoureuse  du 
régime  théocratique.  Dès  que  le  roi,  donné  par  Dieu  à 
Israël,  manquait  à  son  devoir  et  introduisait  ou  mainte- 
nait l'idolâtrie,  il  cessait  d'être  le  monarque  que  Dieu 
voulait  à  la  tête  de  -"U  peuple,  et  les  prophètes,  après 
avoir  protesté  contre  les  rois  coupables,  annonçaient 
leur  chute  sans  toutefois  les  renverser  directement  du 
trône. 

Pans  le  royaume  de  Juda,  comme  Pieu  avait  promis 
la  pérennité  à  la  dynastie  davidique,  Il  Sam.,  vu,  13, 
les  prophètes  n'interviennent  pas  au  sujet  de  la  succes- 
sion au  trône  et  ils  se  bornent  à  réclamer  contre  les 
infiltrations  idolàlriques,  favorisées  par  quelques  rois. 
Leur  action  politique  s'exerce  sur  un  autre  terrain. 
Après  la  scission  des  dix  tribus,  Séméias  empêche 
Itohoam  de  faire  la  guerre  aux  Israélites.  I  (III  Reg., 
xn.  22-21.  Azarias  félicile  Asa  de  sa  victoire  sur  le  roi 
'l  i  thiopie  el  s'appuie  sur  cette  protection  divine  pour 
l'excitera  veillera  la  pureté  du  culte.  Il  Par.,  xv,  1-7. 

Dans  les  deux  royaumes,  les  prophètes  s'opposent 
spécialement  aux  alliances  avec  les  p  :uples  voisins, 
lorsqu'elles  devaient  servira  la  lutte  fratricide  de  Juda 
et  d'Israël  et  lorsqu'elles  étaient  dangereuses  pour  la 
religion.  Ilanani  reproche  à  \sa  sa  conliancc  en  Henadad, 
roi  de  Syrie.  Il  Par.,  xvi,  7- In.  Quand  Achah  victorieux 
a  épargné  un  autre  Benadad,  roi  de  Suie,  et  a  fait 
alliance  avec  lui.  un  lils  de  prophète,  par  une  action 
symbolique,  lui  reproche  celte  conduite  et  le  menace 
du  châtiment  divin.  I  (III)  Reg.,  xv,  35-42.  Des  pro- 
phètes lui  avaient  promis  la  victoire.  Ibid.,  13.  14,  22, 
28.  Quand  Achab  et  Josaphal  se  sont  alliés  contre  les 
Syriens,  tandis  que  les  faux  prophètes  prédisent  le 
succès.  Michée,  fils  de  Jemla,  annonce  la  défaite,  Ibid., 
xxii.  5-28.  Et  Josaphal  fui  repris  par  Jéhu,  lils  d'Ilanani. 
pour1  avoir  donné  son  concours  a  Achah  en  cette  occur- 
rence. Il  Par..  XIX,  1-3.  Le  lévite  Jahaziel  est  suscité 
par  Pieu  pour  annoncer  à  ce  roi  la  victoire  dans  la 
guerre  contre  les  Ammonites  el  les  Moabites.  Ibid.,  xx, 
14-17.  Elisée  dévoile  à  Joram,  roi  d'Israël,  les  desseins 
du  roi  de  Syrie.  Il  (IV)  Reg.,  vi,  8-23.  Il  promet  à  Joas 
trois  victoires  sur  les  Syriens.  Ibid.,  xm,  14-21.  Quand 
les  rois  d'Israël  et  de  Juda  vpulurent  jouer  un  rôle 
dans  la  politique  générale  en  s'appuyanl  tantôt  sur 
l'empire  de  Ninive,  lantôl  sur  celui  d'Egypte,  les  pro- 
phètes blâmèrent  cette  politique  de  bascule  et  lurent 
constamment  les  adversaires  des  alliances  étrangi  res 
Osée,  vu,  8-16,  prédit  aus  Israélites  qu'ils  seront  vic- 
times de  leur  confiance  dan-  l'I  gypte  el  que  les  Assy- 
riens les  accableront,  lorsqu'ils  seront  en  guerre  avec 
les  Égyptiens.  Isaïe  qui  a  prédit  à  Achaz  la  défaite  des 
peuples  alliés  contre  Juda,  vu,   1-17,  est   violemment 


opposé  aux  .ludéens  qui  complent  sur  l'Egypte.  Le 
seul  espoir  de  Juda  en  face  des  menaces  des  Assyriens 
est  dans  le  Seigneur,  xxx,  1-7:  xxxi.  1-9.  Il  réconforte 
Ezéchias  et  l'empêche  d'accepter  les  propositions 
d'alliance  avec  les  Assjriens,  faites  par  iiabsacès,  x.xxvi, 
xxxvn.  Voir  t.  i,  col.  385-386.  Sous  Amasias  de  Juda, 
un  homme  de  Dieu  prédit  la  défaite  des  Iduméens. 
II  Par.,  xxv,  7-9. 

Les  prophètes  hébreux  ont  donc  fait  de  la  politique, 
mais  c'a  été  pour  réformer  l'esprit  de  gouvernement 
des  rois,  pour  faire  prévaloir  les  principes  du  droit,  de 
la  justice,  de  la  morale,  les  appareils  exagérés  de 
guerre  et  les  alliances  dangereuses.  Ils  reprochaient 
aux  rois  leurs  fautes,  à  David  son  adultère,  à  Achab 
l'usurpation  de  la  vigne  de  Naboth.  Ils  s'opposaient  à 
leurs  projets  de  guerre,  et  loin  de  s'appuyer  sur  le 
peuple,  même  fidèle,  pour  combattre  la  fausse  politique 
des  monarques,  ils  bravaient  parfois  l'opinion,  quand 
le  peuple  suivait  ses  princes  infidèles  à  la  théocratie; 
ils  annonçaient  l'insuccès,  la  défaite  et  ils  subissaient 
la  persécution.  Leur  politique  a  donc  toujours  été  une 
politique  religieuse,  théocratique,  imposée  et  sanc- 
tionnée par  Pieu. 

3°  Rûle  littéraire.  —  S'il  ne  nous  reste  rien  ou  à  peu 
près  des  discours  enflammés  des  anciens  prophètes 
d'Israël,  nous  avons  toute  une  littérature  prophétique. 
qui  va  du  ixf  siècle  jusque  après  le  retour  des  Juifs 
captifs  à  Dabylone.  Les  prophètes  ont  donc  créé',  sous 
l'inspiration  divine,  un  genre  spécial  de  productions 
littéraires,  dont  la  plupart  sont  des  chefs-d'œuvre  de 
la  littérature  hébraïque.  Les  premiers  prophètes  écri- 
vains ont  composé  et  publié  leurs  écrits  à  l'âge  d'or  de 
celte  littérature.  La  forme  oratoire  de  leurs  oracles 
parlés  avant  d'être  rédigés,  se  rapproche  à  des  é 
divers  du  lyrisme  des  poètes.  Us  sont  des  orateurs 
poètes,  et  leurs  œuvres,  qui  sont  les  classiques  hébreux, 
renferment  des  beautés  littéraires  de  premier  ordre. 
La  vivacité,  le  coloris  de  leurs  peintures,  la  véhémence 
deleurs  apostrophes,  l'originalité  et  le  nalurel  de  leurs 
comparaisons,  la  force,  la  franchise,  la  puissance  et 
l'audace  de  leurs  paroles  inspirées  donnent  à  leurs 
discours  un  cachet  inimitable.  Cependant,  tous  ne  se 
sont  pas  élevés  à  ces  hauteurs  et,  au  cours  des  siècles, 
le  genre  prophétique  a  évolué  au  point  de  vue  litté- 
raire. La  lyre  prophétique  perd  parfois  de  sa  fraîcheur. 
Après  la  fin  de  la  captivité,  la  forme  est  moins  parfaite, 
et  la  poésie  cède  la  place  à  la  prose.  La  langue  elle- 
même  esl  moins  pure;  elle  exprime  pourtant  encore 
de  bien  nobles  accenl s. 

VI.  Sun:  CHRONOLOGIQUE  DES  PROPHETES.  —  Les 
prophètes  d'action  ont  précédé  les  prophètes  écrivains. 
-  1»  Prophètes  d'action.   —  Sans  parler   d'Abraham 

qui  a  été  appelé  wibï ,  lien..  XX,  7.  au  sens  large  du 
mot,  parce  qu'il  avait  reçu  de  Pieu  des  révélations  et 
des  confidences,  Moïse  est  le  premier  et  le  plus  grand 
prophète  hébreu.  Au  Sinaï,  il  avait. parlé  avec  Pieu 
bouche  à  bouche,  et  il  avait  promulgué  la  loireligii  usi 
qui  devait  régir  le  peuple  choisi.  Peut.,  xxxiv.  10. 
Voir  t.  iv,  col.  1200-1202.  Il  était,  en  outre,  l'interprète 
autorisé  de  la  législation,  dont  il  avait  été  l'intermé- 
diaire, et  il  avait  en  Israël  la  fonction  d'oracle  attitré 
.le  Dieu  :  il  répondait  aux  consultations  du  peuple. 
Exod.,  xvill,  13-16.  Sur  le  conseil  de  Jéthro,  il  choisit 
des  chefs,  qui  le  suppléèrent  dans  celle  charge,  17-27, 
et  sur  lesquels  Pieu  répandit  une  part  de  l'Espril  qui 
était  mi  Moïse.  Ces  hommes  el  d'autres,  sur  lesquels 
l'Esprit  de  Dieu  s'était  reposé-,  prophétisèrent  et  par- 
lèrent au  nom  du  Seigneur.  Niim.,  XI,  2i-29.  Apres  le 
passage  de  la  mer  Rouge  et  le  cantique  de  Moïse,  Mari  . 
la  sieur  du  guide  des  Hébreux,  était  devenue  proph  - 
tesse  et.  sous  l'inspiration  divine,  avait  chaulé'  le  can- 
tique île  son  frère,  Exod.,  xv,  20;  cf.  Num.,  xn,  2.  Voir 
t.  iv.  col.  770.  Balaam,  un  devin  païen,  fut  obligé  de 


721 


PROPHETE 


722 


•répéter  les  paroles  que  Jéhovah  mit  clans  sa  bouche, 
Num.,  xxil, 25,  38;  xxiii,  3-12,  et  de  bénir  Israël, xxiii, 
16-26;  xxiv,  2  23.  Voir  t.  i,  col.  1392-1397.  Dieu,  qui 
voulait  exclure  à  jamais  d'Israël  les  devins  et  les  au- 
gures, promit  à  son  peuple,  par  la  bouche  de  Moïse, 
■une  série  de  prophètes,  semblables  à  Moïse,  qui  seraient 
les  intermédiaires  autorisés  entre  lui  et  les  siens  et  les 
organes  vivants  de  ses  révélations.  Deut.,  xvm,  15-19. 
Voir  PENTWEUQUE,  col.  1 16.  La  série,  en  ell'et,  fut  dès  lors 
à  peu  près  ininterrompue.  Josué  succéda  à  Moïse 
■comme  prophète.  Eccli.,  xlvi,  1. 

Sous  les  Juges,  Débora  est  dite  «  prophétesse  », 
.Jud.,  IV,  4;  elle  communiquait  à  Barac  les  ordres  de 
Dieu,  6.  Voir  t.  n,  col.  1331-1333.  Un  prophète  vint  de 
la  part  de  Dieu  annoncer  la  délivrance  aux  Hébreux 
■opprimés  par  les  Madianites.  Jud.,  vi,  8-10.  F.  de  llum- 
melauer,  Conimentarius  in  libros  Samuelis,  Paris, 
1886,  p.  53;  Commentarius  in  librum  Judicum  et 
But  h,  Paris,  1888,  p.  138.  L'homme  de  Dieu,  qui 
annonce  au  père  de  Samson  la  naissance  d'un  fils, 
Jud.,  xin,  6,  bien  qu'il  soit  un  ange  apparaissant  sous 
forme  humaine,  est  regardé  par  Manué  et  sa  femme 
comme  un  prophète.  Leur  erreur,  bientôt  corrigée, 
prouve  l'existence  de  prophètes  à  cette  époque.  F.  de 
Huminelauer,  Commentarius  in  librum  Judicum  et 
Buth,  p.  249,  253-254;  .1.  Lagrange,  Le  livre  des  Juges, 
Paris,  1903,  p.  227.  Un  homme  de  Dieu  vint  aussi 
adresser  à    lléli  des  reproches  au  nom  du  Seigneur. 

I  Sam.,  n,  27.  En  ces  jours,  la  parole  de  Dieu  était  rare, 
et  les  visions  n  étaient  pas  fréquentes.  I  Sain.,  m,  1. 
Samuel  entend  la  parole  de  Dieu,  qui  lui  révèle  le  sort 
d'Héli  et  de  sa  famille,  2-21.  C'est  un  «  voyant  »,  à  qui 
Dieu  manifeste  ses  desseins  sur  Saiïl.  I  Sam.,ix,6-x,  16. 
A  coté  de  lui  on  voit  des  troupes  de  prophètes  qui 
reconnaissent  son  autorité'  et  parmi  lesquels  Saùl  se 
mêle  pour  prophétiser,  I  Sam.,  x,  5,  6.  10-13;  xix,  20- 
24,  c'est-à-dire,  pour  chanter  les  louanges  de  Dieu. 
Voir  t.  n,  col.  1567-1568.  Samuel  en  mourant  ne  laissa 
aucun  successeur  de  son  autorité  spirituelle.  Il  y  avait 
cependant  d'autres  prophètes,  puisque  Saiil,  avant  de 
consulter  la  pythonisse  d'Endor,  avait  interrogé  les 
prèlres  et  les  prophètes.  I  Sam.,  xxvm,  6.  Sur  la  nature 
de  ces  anciens  prophètes  d'Israël,  voir  Prophétisme. 

Auprès  de  David  interviennent  les  prophètes  Gad  et 
Nathan.  Voir  t.  m,  col.  23-24,  t.  iv,  col.  1181-1182. 
Leurs  interventions,  à  la  fois  politiques,  religieuses  et 
morales,  sont  relativement  rares.  Ces  deux  voyants 
s'étaient  occupés  de  l'organisation  de  la  musique  sa- 
crée. II  Par.,  xxix,  25.  Ils  écrivirent  l'histoire  de  Da- 
vid,   I  Par.,  xxix,   29,   et  Nathan   celle  de   Salomon. 

II  Par.,  ix,  29.  On  n'a  signalé  l'intervention  direct0 
d'aucun  prophète  sous  le  long  règne  de  ce  prince.  Tou- 
tefois. Ahia  vint  prédire  à  Jéroboam  son  règne  sur 
dix  tribus  détachées  de  la  dynastie  davidique. 
I  (III)  Reg.,  xi,  29-39;  XII,  15;  xiv,  2.  Quand  Jéroboam 
fut  devenu  roi  d'Israël,  sa  femme  alla  consulter  Ahia  sur 
le  sortdeleur  enfant  malade.  Le  vieux  prophète  annonça 
la  mort  de  cet  enfant  et  prononça  de  terribles  menaces 
contre  la  maison  de  Jéroboam.  I  (III)  Reg.,  xiv,  1-18.  Voir 
t.  I,  col.  291-292.  Lors  de  l'organisation  schismatique 
du  culte  à  Béthel,  un  homme  de  Dieu  vint  de  Juda  pro- 
phétiser contre  l'autel  élevé  en  ce  lieu,  et  refusa  les 
présents  que  le  roi  lui  fit  offrir  pour  le  gagner  à  sa 
cause.  I  (III)  Reg.,  xn,  26-33;  xui,  1-10.  Un  vieux  pro- 
phète de  Béthel  réussit  à  tromper  l'homme  de  Dieu  et 
à  le  ramènera  sa  maison.  Il  lui  prédit  une  mort  vio- 
lente, qui  ne  tarda  pas  à  se  réaliser;  il  l'ensevelit  dans 
■on  propre  sépulcre  et  demanda  à  ses  fils  de  l'ensevelir 
lui-même  à  sa  mort  auprès  de  ce  prophète  dont  les 
menaces  contre  l'autel  de  Béthel  se  réaliseront. 
1  (III)  Reg.,  xin,  11-32.  Voir  t.  i,  col.  1629;  t.  m, 
col.  1302. 

Des  prophètes  exercent   leur  action   dans  les   deux 


royaumes  de  Juda  et  d'Israël.  Séméias  avait  empêché 
Roboam,  après  la  scission  des  dix  tribus,  de  faire  la 
guerre  aux  Israélites.  I  (III)  Reg.,  xn,  22-24.  Ce  pro- 
phète écrivit  l'histoire  de  Roboam,  ainsi  que  le  voyant 
Addo.  II  Par.,  XII,  15.  Jéhu  reproche  à  Baasa,  roi  d'is- 
raël,  ses  crimes  et  lui  annonce  les  châtiments  divins. 
I  (III)  Reg.,  xvi,  1-4,  7,  12.  Voir  t.  m,  col.  1244-1245. 
Son  père  Hanani,  ou  lui-même  désigné  sous  un  autre 
nom,  reproche  à  Asa  la  confiance  qu'il  avait  dans  le 
roi  de  Syrie.  II  Par.,  xvi,  7-10.  Voir  t.  m,  col.  414. 
Azarias  avait  harangué  ce  roi  victorieux  et  il  exerça 
sur  lui  une  heureuse  influence.  Il  Par.,  xv,  1-S.  Cepen- 
dant Asa,  dans  sa  dernière  maladie,  consulta  les  méde- 
cins plutôt  que  les  prophètes.  II  Par.,  xvi,  12.  Voir 
t.  I,  col.  1053-1054,  1300.  Sous  Achab,  apparaît  soudain 
Elie  le  Thesbite.  I  (IIll  Reg.,  xv#,  1-7.  Sur  sa  mission, 
voir  t.  n,  col.  1670-1676.  Pendant  la  persécution  de  ce 
roi  et  de  sa  femme  Jezabel  contre  les  prophètes, 
Abdias  avait  caché  cent  d'entre  eux.  I  (III)  Reg.,  xvm, 
4,  13.  Urn  prophète  annonça  la  première  victoire 
d'Achab  sur  Benadad,  roi  de  Syrie.  I  (III)  Reg.,  xx,  13, 
14.  Le  même  prédit  une  reprise  des  hostilités  pour 
l'année  suivante,  22.  Quand  elle  eut  lieu,  un  prophète, 
qui,  selon  les  rabbins,  serait  Michée,  fils  de  Jemla, 
prédit  la  victoire,  28.  Par  une  action  symbolique,  un 
fils  de  prophète  reproche  au  roi  d'Israël  d'avoir  laissé 
la  vie  sauve  au  roi  vaincu  de  Syrie,  35-40.  Trois  ans 
plus  tard,  avant  de  marcher  avec  Achab  contre  Ramoth- 
Galaad,  Josaphat,  roi  de  Juda,  voulut  consulter  Dieu. 
Achab  fit  venir  environ  100  faux  prophètes  qui  annon- 
çaient la  victoire.  Mais  Josaphat  désira  interroger  un 
véritable  prophète.  Il  restait  Michée,  fils  de  Jemla, 
prophète  de  malheur  pour  Achab.  On  l'appela.  Il  an- 
nonça la  défaite;  il  fut  souffleté  par  Sédécias,  le  chef 
des  prophètes  de  mensonge,  et  mourut  en  prison. 
I  (III)  Reg.,  xxn,  1-28.  Voir  t.  iv,  col.  1062-1063.  Josa- 
phat fut  repris  par  Jéhu  pour  avoir  donné  son  concours 
à  Achab.  II  Par.,  xix,  1-3.  Jéhu  écrivit  l'histoire  de 
Josaphat.  II  Par.,  xx,  3i.  Le  lévite  Jahaziel  avait  été 
suscité  par  Dieu  pour  prédire  à  ce  roi  la  victoire  sur 
les  peuples  voisins.  II  Par.,  xx,  14-17.  Voir  t.  m, 
col.  1106.  Élié/.er,  fils  de  Dodau,  avait  aussi  reproché  à 
ce  prince  son  alliance  avec  Ochozias,  roi  d'Israël,  37. 
Ochozias  reçut  les  reproches  d'Élie, parce  qu'il  consul- 
tait le  dieu  d'Accaron.  II  (IV)  Reg.,  i,  1-16.  Elisée  fut  le 
disciple  et  le  successeur  d'Élie.  Voir  t.  ir,  col.  1690- 
1696.  Il  intervient  auprès  de  Joram,  roi  d'Israël,  et  de 
Bénadad,  roi  de  Syrie,  et  fait  oindre  Jéhu  par  un  de 
ses  disciples.  Dans  sa  dernière  maladie,  il  annonce  à 
Joas  de  Juda  la  victoire  sur  les  Syriens.  Un  homme 
de  Dieu  prédit  à  Amasias  de  Juda  la  défaite  des  Idu- 
méens  et  reproche  au  roi  son  idolâtrie.  II  Par.,  xxv, 
7-16. 

Quand  parurent  les  prophètes  écrivains,  les  prophètes 
d'action  ne  disparurent  pas,  et  les  deux  classes  d'en- 
voyés divins  agirent  simultanément  par  des  moyens 
différents.  Ceux-ci  semblent  toutefois  avoir  été  moins 
nombreux  qu'auparavant,  ou,  du  moins,  un  plus  petit 
nombre  est  mentionné  dans  l'Ecriture.  Le  prophète 
Oded  fait  mettre  en  liberté  par  les  Israélites  les  habi- 
tants de  Juda,  qu'ils  avaient  fait  captifs.  II  Par.,  xxvm, 
9-11.  Des  prophètes  prédisent  les  châtiments  que  l'im- 
piété de  Manassé,  roi  de  Juda,  devait  attirer  sur  son 
peuple.  II  (IV)  Beg.,  xxi,  10-15.  Après  la  découverte  du 
livre  de  la  loi  au  Temple,  Josias  fit  consulter  la  pro- 
phétesse Holda  sur  la  conduite  à  tenir  en  cette  circon- 
stance. II  (IV)  Beg.,  xxn,  12-20;  II  Par.,  xxxiv,  21-28. 
Voir  t.  m,  col.  727.  Au  milieu  des  faux  prophètes  qui 
trompaient  Juda, L'ric,  fils  de  Séméi,  s'associa  aux  prédic- 
tions de  malheur  de  Jérémie,  et  fut  mis  à  mort  par 
ordre  deJoakim.  Jer.,  xxvi,  20-23.  Baruch  remplit  les 
fonctions  de  secrétaire  de  Jérémie,  Jer.,  xxxvi,  1-7, 
27-32;  xlv, avant  de  devenir  prophète  lui-même.  Parmi 


723 


PROI'HKTE 


724 


les  captifs,  emmenés  de  Jérusalem  en  Babylonie  par 
Xabuchodonosor,  se  trouvaient  des  prophètes,  à  qui 
Jérémie  adressait  son  livre.  .1er.,  x.xix,  dans  lequel  il 
les  mettait  en  garde  contre  les  faux  prophètes,  qui 
avaient  surgi  à  Babylone,  10-32. 

2»  Prophètes  en  nains.  —  1.  Leur  nombre,  leur  divi- 
sion et  leur  disposition  dans  la  Bible.  —  Les  Bibles 
grecques  et  latines  contiennent  les  écrits  de  seize  pro- 
phètes, quatre  grands,  Isaïe,  Jérémie,  Ézéchiel  et  Daniel. 
el  douze  petits,  Osée,  Joël,  Amos,Abdias,Jonas,Micbée, 
Nahum,  Habacuc,  Sophonie,  Aggée,  Zacharie  et  Mala- 
chie.  La  prophétie  de  Baruch  est  jointe  à  celle  de 
Jérémie,  dont  ce  prophète  avait  été  le  secrétaire.  Dans 
la  Bible  hébraïque,  il  n'\  a  que  trois  grands  prophètes; 
Daniel  est  rangé  parmi  les  hagiographes,  ainsi  que  les 
Lamentations  de  Jérémie.  Le  livre  de  Baruch  et  la 
lettre  de  Jén  nu.-  ne  son!  pas  au  canon  hébraïque.  Les 
douze  petits  prophètes  n'y  sont  considérés  que  comme 
un  seul  livre.  Ils  sont  déjà  mentionnés  ensemble  par 
l'auteur  de  l'Ecclésiastique,  xi.ix,  12  (10,  dans  le  texte 
grec),  et  cette  mention,  considérée  par  quelques  cri- 
tiques comme  une  interpolation,  est  dans  le  texte  hé- 
breu, récemment  retrouvé.  Josèphe  en  parle  dans  le 
même  sens,  Cont.  A-pion.,  i,  8,  et  les  rabbins  les  te- 
naient pour  un  seul  livre,  recueilli  par  les  hommes  de 
la  Grande  Synagogue, voir  t.  n,  col.  KO,  et  formé  ainsi, 
en  un  seul  recueil,  «  de  peur  que,  s'ils  étaient  demeurés 
séparés,  l'un  ou  l'autre  ne  se  perdit  à  cause  de  leurs 
petites  dimensions,  »  dit  kimehi,  Comment,  in  Ps., 
pra-f.,  d'après  la  tradition  rabbinique.  Les  Pères  de 
l'Kglise  en  parlaient  aussi  comme  d'un  seul  volume  : 
ScaSexot  Èv  |iovo8fë)iw,  dit  Méliton  de  Sardes, dans  Eusèbe, 
//.  E.,  IV,  26,  t.  xx.'col.  397.  Cf.  S.  Grégoire  de  Nazianze, 
t.  XXX VU,  col.  'i~'.\  :  S.  Athanase,  I.  xxvi,  col.  1177;  Kiilin, 
t.  xxt,  col.  374,  etc.  Saint  Épiphane  l'appelait  d'un 
mot:  tô  S(.)ÔE/.a-pojf,tov,  t.  xi.tti,  col.  2i4.  Ce  sont  les  La- 
tinsquiont  nommé  ces  prophètes  minores,  par  opposi- 
tion aux  ninjn /v;.',  non  en  raison  de  leur  importance  et 
de  leur  valeur,  mais  seulement  à  cause  de  la  moindre 
étendue  de  leurs  oracles.  Cf.  S.  Augustin,  De  civitate 
Dei,  XVIII,  wix.  I.  t.  xi.t,  col.  ôSô.  Si  l'ordre  du 
canon  hébraïque  el  chrétien  ne  varie  pas  pour  les  trois 
ou  quatre  grands  prophètes,  il  est  différent  pour  les 
petits.  Partout  uniformes  pour  les  six  derniers  :  Nahum, 
Habacuc,  Sophonie.  Aggée,  Zacharie  et  Malachie,  il 
varie  pour  les  six  premiers.  Dans  lesBibles hébraïques, 
latines  et  en  langues  modernes,  ceux-ci  sont  placés 
dans  cet  ordre  :  Osée,  Joël,  Amos,  Abdias,  .lonas,  Mi- 
chée;  mais  dans  la  Bible  grecque,  on  trouve  la  disposi- 
tion suivante  :  Usée,  Amos, Michée, Joël,  Abdias.  .lonas- 
On  pense  généralement  que  la  disposition  de  la  Bible 
hébraïque  a  été  déterminée  par  une  préoccupation 
d'ordre  chronologique,  et  saint  Jérôme  croyait  que  les 
écrits  des  petits  prophètes,  qui  ne  portent  pas  leur  date 
dans  le  titre,  sont  de  la  même  époque  que  les  précé- 
dents, dont  la  date  est  connue.  Prxfat.  in  prophetas, 
t.  xxviii,  col.  1016;  Comment,  in  Joelem,  i,  I,  t.  xxv, 
col.  950.  Quoi  qu'il  en  s, ai  de  cette  règle  qui  n'est  pas 
rigoureusement  exacte,  il  reste  vrai  que  les  prophètes 
du  viir  siècle,  Osée,  Amos  el  Michée,  sont  dans  la  pre- 
mière partie  de  la  liste,  que  les  prophètes  du  VII"  siècle, 
.Nahum.  Habacuc  el  Sophonie,  puis  ceux  d'après  la  lin 
de  la  captivité,  Aggée,  Zacharie  et  Malachie,  ont  été 
mis  dans  la  seconde  partie.  D'ailleurs,  la  date  de  quel- 
ans  de  ces  écrits  a  été  diversement  déterminée  par 
1rs  critiques. 

2  Leur  ordre  chronologique.  —  H  n'est  pasfacile  à 
hier,  parce  que  tous  ne  sont  pas  datés  et  que  les  rensei- 
gnements qu  ils  contiennent  ne  suffisent  pas  à  l'indi- 
quer avec  certitude.  Toutes  |rs  dates  proposées  ne  sont 
pas  certaines,  el  les  critiques  modernes  ont  émis  à  ce 
di  s  opinions  divergentes  de  celles  qui  axaient 
autrefois.  Ils  prétendent  même  que  plusieurs  des 


livres  prophétiques  ne  sont  pas  homogènes  et  renfer- 
ment des  éléments  de  provenance  d'époques  différentes. 
Ainsi  ils  partagent  couramment  le  livre  d'Isaïe  en  deux 
ou  trois  recueils  distincts,  et  celui  de  Zacharie  en  deux 
parties  d'origine  diverse.  Comme  la  date  de  chaque 
prophète  est  discutée  à  son  article,  le  tableau  suivant 
résumera  les  dates  proposées  dans  ce  Dictionnaire  et 
par  les  critiques  libéraux  et  rationalistes. 


NOMS 

DATES 

DATES 

des 

du 

des 

FRO  P  11  1    1  E  s. 

DICTIOHMAI  R  E. 

CRITIQUES   AVANCES. 

Abitias.  .   .   . 

Vers  865 

vi*  ou  v  siècle. 

s:  :7-80i 

V  ou  iv  siècle. 

Jonas  .... 

Sous  Jéroboam  II. 

v*  ou  iv*  siècle. 

Amos  .... 

804-770 

760-750 

Osée 

789-700 

Tâi  i-735 

755-7 1 2 

I",  740;  II-,  vers 
à  in;  III-,  v  siècle. 

Miellée.  .   .    . 

Contemporain  d'Isaïe. 

7'i0-701 

Nahum   .   .  . 

Mil.  du  vn- s.  (663-008). 

650,  624,  610. 

■  Sc>plionie    .    . 

Vers  665 

630,  027,  625. 

Habacuc.   .  . 

r.'i  5-630 

607,  Ooô-iWO. 

Jérémie  .   .  . 

639-586 

626486 

Baruch  .   .   . 

583 

Ép.  macbabéenne. 

Ezéchiel .    .    . 

592-570 

593-573 

Daniel.   .   .   . 

538 

168-167;  104-163 

Vggée.   .  .   . 

520-516 

52il 

Zacharie.   .  . 

520 

I",  520;  II-,  300 

Malachie.    .    ■ 

Après  la  32*  année  d'Ar- 
taxer.xès  Longuemarn. 

440 

Cf.  A.  Van  Iloonacker,  Les  douze  petits  proph  tes, 
Paris,   1908,  p.  Ml-x. 

La  série  des  prophètes  Israélites  se  termina  par  Ma- 
lachie. Au  temps  des  Machabées,  on  attendait  la  venue 
d'un  prophète,  pareil  aux  anciens,  pour  décider  ce 
qu'il  fallait  faire  des  pierres  de  l'autel  des  holocaustes 
profané.  I  Mach.,  IV,  16.  Cf.  I  Mach..  IX,  -27;  XIV,  il.  Ce 
ne  fut  qu'à  l'aurore  des  temps  messianiques  que  Jean- 
Baptiste  put  être  appelé'  prophèti  du  Très  Haut  en 
raison  de  sa  mission  de  précurseur.  Luc,  l,  76.  Il 
\inl  dans  la  puissance'  el  l'esprit  d'Klic.  Voir  t.  II. 
col.  107b\  Jésus  le  déclara  prophète  et  plus  que  pro- 
phète, parce  qu'il  avait  préparé  les  voies  au  Messie. 
Mallli..  xi.  9,10;  Luc,  vu,  26-28.  Voir  t.  m,  col.  1157. 

VIL  FAUX  PROPHÈTES.  —  Les  livres  de  l'Ancien 
Testament  signalent  deux  catégories  de  faux  prophètes  : 
ceux  qui  prophétisaient  au  nom  des  dieux  étrangers, 
et  ceux  qui  se  donnaient  mensongèrement  pour  des 
envoyés  du  vrai  Dieu  d'Israël.  —  1°  Prophétisant  au 
nom  des  dieux  étrangers.  —  En  dehors  de  llalaam, 
qui  l'ut  un  devin  plulot  qu'un  prophète,  voir  t.  i, 
col.  LiitX.  les  prophètes,  qui  étaient  prêtres  de  Baal, 
apparurent   dans  le  royaume  d'Israël   sous  le   i 

d'Achab.  Élie  en  provoqua  i50  sur  le  Carme],  et  après 
leur  échec,  il  les  lil  massacrer'  sur  les  bords  du  C.ison. 
I  (III  Heg.,  xviii,  19-40;  xix,  1.  Voir  t.  n,  col.  292-293, 
1671-1672.  Sur  les  incisions  qu'ils  se  faisaient,  voir 
t.  m.  col.  868-870.  Ils  prophétisaient  au  nom  de  Baal 
et  (rompaient  Israël.  .1er.,  xxin.  lit.  Le  Dieu  chananéen 
eut  aussi  des  prophètes  en  .liula  jusqu'à  la  captivité  de 
Babylone.  .1er.,  n,  S.  Voir  t.  I.  col.  1319-1320.  - 
2"  Prophétisant  mensongèrement  au  nom  deJéhovah. 
—  A  coté  des  vrais  prophètes,  inspirés  de  Dieu,  se 
levaient  des  personnages,  qui  se  comportaient  comme- 
s'ils  étaient  de  véritables  prophètes.  Dieu  les  avait 
annoncés  et  avait  indiqué  les  signes  auxquels  on  les 
reconnaîtrait,  et  le  sort  qu'ils  méritaient.  Dent.,  xin 
l-ô;  XVIII,  20-22.  Ils  sont  parfois  explicitement  dési- 
gnés comme  faux  prophètes.  Souvent  cependant  ils 
sont  dits  simplement  prophètes,  mais  le  contexte  per- 
met alors  de  les  distinguer  suffisamment  des  vrais 


725 


PROPHETE 


725 


prophètes.  Ils  apparurent  encore  en  Israël  sous  le 
règne  d'Achab,  au  nombre  de  400  environ.  Parce  que 
Josaphat.  roi  île  Juda,  veut  consulter  Dieu,  Achab  les 
interroge.  Par  une  action  symbolique,  leur  chef  Sédé- 
cias  prédit  la  victoire  sur  Ramotb-Galaad,  et  tous  les 
autres  confirment  cette  prédiction.  Alichée,  fils  de 
.lemla,  tenté  par  l'envoyé  du  roi,  refuse  de  s'associer 
à  ce  mensonge  et  annonce  la  mauvaise  issue  de  l'expé- 
dition. Il  a  vu  Jéhovah,  assis  sur  son  trône  et  envoyant 
un  esprit  menteur  pour  inspirer  les  faux  prophètes 
et  tromper  Achab.  Sédécias  se  prétend  véritablement 
inspiré  par  Jéhovah  et  il  frappe  Michée  qui  en  appelle 
à  la  prochaine  réalisation  de  son  oracle.  I  (III)  Reg.,  xxn, 
5-28.  Dans  le  royaume  de  .luda,  les  faux  prophètes 
furent  nombreux  au  temps  d'Isaïe  et  de  Jéréinie.  Isaïe 
leur  reproche  leurs  excès  et  leurs  erreurs,  causés  par 
l'ivrognerie,  xxvm,  7.  .Michée,  son  contemporain,  leur 
adresse  les  mêmes  reproches,  n,  11,  et  les  accuse  de 
prophétiser  pour  de  l'argent,  m.  5,  II.  Jérémie  les 
accuse  de  mensonge,  v,  13,  14;  vm,  10;  xiv,  13-18,  et 
il  les  maudit,  xxm,  9-40.  Il  entre  en  conllit  direct  avec 
eux.  Tandis  qu'il  prédit  la  ruine  prochaine  de  Jérusa- 
lem et  du  royaume  de  Juda,  les  faux  prophètes  s'unis- 
sent aux  prêtres  et  au  peuple  pour  le  contredire  et 
l'amener  en  jugement.  XXVI,  7-19.  Il  les  contredit  pu- 
bliquement et  exhorte  le  peuple  à  ne  pas  ajouter  foi  à 
leurs  oracles  trompeurs,  xxvn,  14-18.  Il  eut  un  conllit 
personnel  avec  Hanani.  prophète  de  Gabaon,  xxvm,  1- 
17.  Il  poursuivait  les  faux  prophètes  jusqu'au  lieu  de 
leur  exil.  Comme  ils  continuaient  à  tromper  les  pre- 
miers captifs,  il  les  confond,  et  il  prédit  des  châti- 
ments spéciaux  à  Achab,  à  Sédécias  et  à  Séméias,  xxix. 
1-32.  Le  prophète  de  l'exil.  Ézéchiel,  eut  à  lutter  aussi 
en  Chaldée  contre  les  faux  prophètes  d'Israël,  hommes 
et  femmes,  qui  trompaient  les  captifs,  xm,  1-23.  Après 
le  retour  à  Jérusalem,  Gossem  accusait  Xéhémie  d'avoir 
suscité  des  prophètes  pour  favoriser  ses  projets.  II  Esd., 
M.  7.  Loin  de  là,  Xéhémie  allant  consulter  Séméias  vit 
que  ce  soi-disant  prophète  n'était  pas  envoyé  par  Dieu, 
pas  plus  que  Xoadias  et  les  autres  prophètes  qui  vou- 
laient l'épouvanter  et  le  détourner  de  son  dessein. 
Ibid.,  10-11. 

Ces  prophètes  prétendaient  posséder,  eux  aussi,  la 
parole  de  Dieu  ;  mais  leur  parole  n'était  que  du  vent; 
elle  ne  contenait  pas  la  parole  de  Dieu,  ,1er.,  v,  13. 
Ils  parlaient  faussement  au  nom  de  Jéhovah,  et  ils 
mettaient  en  sa  bouche  leurs  propres  discours.  Dieu  ne 
les  avait  pas  envoyés,  ne  leur  avait  pas  ordonné  de 
parler.  Leur  vision  était  mensongère;  ils  trompaient 
et  séduisaient  le  peuple.  Jer..  xiv,  14,  15.  Ils  disaient 
la  vision  de  leur  cœur  et  non  celle  qui  vient  de  la 
bouche  de  Dieu.  .1er.,  xxm,  16.  Dieu  ne  les  envoyait 
pas,  et  ils  couraient  d'eux-mêmes;  il  ne  leur  parlait 
pas,  et  ils  prophétisaient  d'eux-mêmes,  21.  Ils  préten- 
daient avoir  eu  des  songes  prophétiques,  25;  mais  ils 
annonçaient  le  mensonge  et  les  séductions  de  leurs 
cœurs.  Ils  volaient  les  paroles  de  Dieu,  30,  et  ils  pre- 
naient leurs  langues  pour  dire  :  «  Le  Seigneur  a  dit.  » 
Ils  rêvaient  des  mensonges,  31,  32.  Ils  n'avaient  donc 
ni  mission  ni  révélation  divine.  Ils  prétendaient  avoir 
des  visions,  Jer.,  xiv,  li;  xxm,  16  :  visions  vaines, 
songes  creux.  Is.,lvi,  10;  Jlich.,  in.  6,  7;  Ezech.,  xiii, 
3,6-9;  xxii,  28.  C'étaient  des  trompeurs  et  des  séduc- 
teurs, .1er.,  xxix,  21,  23,  31  ;  des  chiens  muets  incapables 
d'aboyer.  Is.,  lvi,  10.  Loin  de  reprendre  le  peuple,  ils 
le  confirmaient  dans  le  mal  et  empêchaient  sa  con- 
version. .1er.,  xxm,  li,  15,  17,  22;  Ezech.,  xm,  5,  22. 
Ils  faisaient  avoir  confiance  dans  le  mensonge.  .1er., 
xxix.  31.  Ils  attendaient  vainement  la  confirmation  de 
leurs  oracles,  Ezech.,  xm,  6;  leurs  prédictions  ne 
s'accomplissaient  pas,  ce  qui  était  le  signe  de  leur 
fausseté'  conformément  à  la  prédiction  de  -Moïse.  Deut.. 
xvm,   22.  Ils    seront    couverts  de   confusion,   lorsque 


l'événement  aura  montré  la  fausseté  de  leurs  prophé- 
ties. Jer.,  xiv,  13-15;  xxvm,  9,  16-17.  Leur  caractère 
moral  était  peu  élevé,  Soph.,  m,  4;  ils  s'adonnaient  au 
vin,  Is.,  xxvm,  7  ;  .1er.,  xm,  13,  et  prophétisaient  pour 
de  l'argent  et  pour  gagner  la  faveur  des  hommes.  Mien., 
m,  5,  II;  Ezech.,  xm,  18,  19.  Ils  n'avaient  donc  rien 
de  commun  avec  les  véritables  prophètes,  et  leur 
inspiration  était  feinte.  Ils  avaient  cependant  de  l'in- 
fluence sur  les  prêtres,  sur  les  chefs  et  sur  le  peuple, 
et  ils  contrecarraient  souvent  la  mission  des  véritables 
prophètes. 

VIII.  Les  pnopiiiïTEs   du  Nouveau   Testament.   — 
1°  Jésus-Chrisl   prophète.  —   Si,   avec  la  plupart  des 
Pères,  on  pense  que  Moïse  prédisait,  sous  le  nom  de 
prophète  semblable  à  lui,  que  Dieu  devait  susciter  au. 
milieu  de  son  peuple,  Deut.,  xviii,  10.  le  Messie  seul  et 
sa  mission   prophétique,   voir    col.    116,   il    n'est  pas 
étonnant  que  Jésus,  le  véritable  Messie,  ait  été  pro- 
phète.   Luc.  xxiv,    19;  Joa.,  iv,   19;    vu,   40;  ix.    17: 
Act.,  m,  22:  vu,  37.  Sa  doctrine  dogmatique  et  morale, 
voir  t.  m,  col.  1480-1487,  complétait  et  surpassait  celle 
des  prophètes,  qu'il  n'était  pas  venu  renverser  ni  abo- 
lir. Matth.,  v.  17.  Comme  ses  devanciers,  il  a  connu  et 
prédit  l'avenir.  Ses  prédictions  ont  été  exposées,  t.  m, 
col.  1499-1501.  —  2"  Il  y  eut  aussi  des  prophètes  dans 
le    Xouveau   Testament.    D'abord,    des  prédiseurs    de- 
1  avenir.  Quand  l'Eglise  d'Antioche  eut  été  fondée,  il  y 
vint  de  Jérusalem  des   prophètes,  dont  l'un,   nommé 
Agabus,   prédit  une  famine  qui  se  produisit  sous   le 
règne  de  Claude.  Act.,  XI,  27-28.  Seize  ans  plus  tard,  à 
Césarée,  le  même    Agabus    annonça   par   une    action 
symbolique  la  prochaine  captivité  de  saint  Paul.  Act.,. 
xxi,  10-11.   Voir  t.  i,  col.  259.  Ce  fait  se  passa  dans  la 
maison  de  l'évangéliste  Philippe,  qui  avait  quatre  filles, 
vierges   et   prophétesses.   Act.,   xxi,  9.   Ces  prophèies- 
coexistaient  à  Antioche  avec  des  docteurs.  Act.,  xm,  1. 
Deux  prophètes  de  Jérusalem,  Judas,  surnommé  Barsa- 
bas,  et  Silas,  furent  envoyés  à  Antioche.   Act.,  xv,  32. 
Leur  ministère  prophétique  comprenait  sans  doute  la 
prédication  et  l'enseignement,   puisqu'ils   consolèrent 
les  frères  et  les  confirmèrent  dans  la  foi.  Voir  t.  ni, 
col.   1807.  Parmi  les  charismes,  qui  se  manifestèrent 
dans  l'Eglise  de  Corinthe,  saint  Paul  nomme  la  pro- 
phétie, I  Cor.,  xii,   10,  et  il  range  ceux  qui  en  étaient 
dotés  entre  les  Apôtres  et  les  docteurs,  28-29.  Le  don 
de  prophétie  était  supérieur  au  don  des  langues,  car  le 
prophète  parle  aux  autres  et  les  édifie,  les  exhorte  et 
les  console,  tandis  que  le  glossolale  n'édifie  pas  l'Église 
de  Dieu,  à  moins  que  ses  paroles  ne  soient  interpré- 
tées. I  Cor.,  xiv,  1-5.  Le  ministère  de  ces  prophètes  est 
utile  surtout  aux  fidèles,  22;  il  convertit  cependant  les 
infidèles  qui  pénètrent  dans  les    assemblées,   en    les 
convainquant  par  la  parole  et  en   manifestant  les  se- 
crets de  leurs  cœurs,  24-25.  Tous  ceux  que   l'Esprit 
animait  avaient  le   droit  de  prophétiser.  Cependant, 
pour  éviter  les  abus,  saint  Paul  règle  l'exercice  de  ce 
charisme.  Il  suffisait  qu'à  chaque  assemblée  deux  ou 
trois  seulement  prennent   la    parole  et  exhortent  les 
fidèles;  les  autres  devaient  être  juges  de  ces  manifes- 
tations de  l'Esprit.  Ils  devaient  parler  successivement, 
et  dès  qu'un  nouveau  prophète  prenait  la  parole,  le  pré- 
cédent devait  se  taire,  chacun  enseignant  et  exhortant 
l'assistance  à  son  tour,  car  les  prophètes  sont  soumis- 
les  uns  aux  autres.  Dieu  qui  les  inspire  est  le  Dieu  de 
la  paix   et   non    pas   de   la    discussion,  29-32.   Et  ces 
règles  l'Apôtre  les  enseignait  dans  toutes  les  Églises.  Il 
impose  donc  cette  loi  aux  prophètes  de  Corinthe,  comme 
un  ordre  du  Seigneur,  37,  non  pour  étouffer  l'esprit 
de  prophétie,  sinon  celui  des  faux  prophètes  qui  déso- 
béiraient, puisqu'il  tient  la  prophétie  pour  le  meilleur 
des  charismes  divins,  38.  Les  prophètes,  placés  entre 
les  Apôtres  et  les  évangélistes,  travaillent,  comme  eux,. 
au  service  des  saints  et  des  fidèles.  Eph.,   iv,   11.  Ils. 


727 


PROPHÈTE    —    PROPHÉTIE 


728 


sont  avec  les  Apôtres  les  fondements  de  l'Église.  Eph., 
H,  20.  Ils  sont  nommés  encore  après  les  Apôtres.  Eph., 
III,  5;  Apoc,  XVIII,  28.  Ils  n'ont  pas  disparu  avec  1  "âge 
apostolique.  La  Didaché,  x,  7;  xi,  7--12,  dans  Funk, 
Patres  apostolici,  2"  édit.,  Tubingue,  1901,  t.  i,  p.  24, 
28-30.  et  le  Pasteur  d'Hermas,  M  and.,  xi,  ibid., 
p.  502-510,  les  signalent  encore  et  les  distinguent  des 
faux  prophètes.  Ces  prophètes,  possédés,  dirigés  et 
conduits  par  le  Saint-Esprit,  étaient  des  prédicateurs 
inspirés,  qui  prêchaient  et  exhortaient  les  fidèles; 
c'étaient  parfois  des  missionnaires  qui,  poussés  par 
l'Esprit,  répandaient  comme  les  Apôtres  l'Evangile. 
Mais  leur  prophétie  était  un  charisme,  une  grâce 
d'exception,  qui  se  manifestait  quand  et  comme  vou- 
lait l'Esprit.  Cf.  Cornely,  Prior  Epistola  ad  Corinthios, 
Paris,  1890,  p.  414  sq.  —  3°  Jésus  avait  mis  ses  dis- 
ciples en  garde  contre  les  faux  prophètes.  Matth.,  vu, 
15.  lieux  faux  prophètes  sont  mentionnés  dans  le  Nou- 
veau Testament  :  Barjésu,  Act..  xm,  6-12,  voir  t.  î, 
col.  1461,  et  une  femme  de  Thyatire,  .lézahel.  Apoc, 
II,  20.  Voir  t.  m,  col.  1536. 

IX.  BIBLIOGRAPHIE.  —  Plusieurs  anciens  écrivains 
ecclésiastiques  ont  réuni  les  données  bibliques  à  beau- 
coup de  détails  légendaires  pour  composer  des  notices 
sur  tous  les  prophètes  de  l'Ancien  Testament.  On 
possède  en  grec  les  fragments  d'Eusèbe  de  Césarée, 
Dr  vitis  prophetarum,  t.  xxn,  col.  1201-1272;  deux  re- 
censions du  Liber  de  rilis  prophetarum,  attribué  à 
saint  Épipbane,  t.  xi.in,  col.  393-414,  415- i28  ;  un  livre 
analogue,  publié  sous  le  nom  de  Dorothée  de  Tyr, 
dans  le  Chronicon  pascale,  t.  xcii,  col.  300-307.  Sur 
ces  textes,  voir  Th.  Scbermann,  Propheten-  und  Apos- 
tellegenden,  dans  Texte  und  Vntersuchungen,  de 
Harnack  et  de  Schmidt,  Leip/i-.  1907,  t.  xxxi.  fasc.  3, 
p.  1-133,  qui  en  donne  une  édition  plus  complète  et 
plus  critique,  Pans  le  recueil  de  saint  Isidore  de  Se- 
ville  :  De  vitct  et  obitu  patrum  qui  in  Scriptura  lait- 
iithns  efferunlur,  édité  par Fabricius,  De  vila  et  morte 
Mosis  libri  très,  Hambourg,  1711.  p,  512  551,  et  par 
Aligne,  l'air.  Lai.,  t.  LXXXIII,  col.  131-156,  il  y  a  des 
notices  'sur  les  prophètes.  Les  légendes  syriaques  sur 
les  prophètes  ont  été  rassemblées  par  le  nestorien 
Théodore  bar  Kôni,  au  ixf  siècle,  dans  son  Livre  des 
scholies,  et  par  Michel  le  Syrien,  Chronique,  édit. 
Chabot,  Paris,  1899,  t.  i,  p.  63-101. 

Sur  les  prophètes,  on  pourra  consulter  tontes  les 
introductions  aux  livres  de  l'Ancien  Testament.  Citons 
seulement  F.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  12"  édit., 
Paris,  1906,  t.  ii,  p.  566-591  ;  Trochon,  Introduction 
générale  aux  prophètes,  Paris,  1883;  lt.  Cornely, 
Inlroductio  specialis  in  didacticos  ci  propheticos 
V.  T.  libros,  Paris,  1887,  p.  267-365;  card.  Meignan, 
Les  prophètes  d'Israël.  Quatre  siècles  de  lutte  contre 
l'idolâtrie,  Paris,  1892,  p.  1-iS;  td.,  Les  prophètes 
d'Israël  el  le  Messie  depuis  Salomon  jiisqu'à  Daniel, 
Paris,  1893,  p.  17;  .I.-li.  Pelt,  Histoire  de  l'Ancien 
Testament,  3'  édit.,  Paris.  1902,  t.  n,  p.  138  sq.; 
E.  Laur,  Die  Prophetennamen  des  alten  Testamentes, 
l-'ribniirg,  1903;  '  L.  Cautier,  Die  llerufungder  Prophe- 
ten, 1903.  E.  Mangenot. 

PROPHÉTESSE    (hébreu    :    nebî'dh;  Septante    : 

r.yj *>-.<.:;  Vulgate  ;  prophetis,  prophelissa),  nom  donné 
I  m  l'Ecriture  I1  à  des  femmes  douées  de  l'esprit  de 
Pieu  ;  2"  à  Marie,  sœur  de  Moïse,  considérée  comme  [mêle 
-ou  chantant  au  son  des  instruments  le  cantique  de  Moïse, 
après  le  passage  de  la  mer  Rouge,  Exod.,  w,  20  (sans  avoir 
aucun  don  de  prophétie,  cf.  Nom.,  xn,  6);  3°  à  la 
femme  du  prophète  Isaîe,  ainsi  appelée  parce  que  son 
mari  étail  prophète.  —  Les  femmes  â  qui  les  auteurs 
donnenl  l"  titre  de  prophétesses  dans  la  pre- 
mière acception  du  mot  sont  :  Débora,  qui  rendait  la 
justice  aux  tribus  d'Israël  avec  le  secours  divin.  Jud., 


iv,  4;  Holda,  contemporaine  du  roi  Josias,  IV  Fteg.,  xxn. 
14;  II  Par.,  xxxiv.  22;  Xoadias,  fausse  prophétesse, 
d'après  l'hébreu,  t.  iv,  col.  16135  (faux  prophète  d'après 
les  Septante  et  la  Vulgate),  II  Esd.,  vi,  14;  et,  dans 
le  Nouveau  Testament,  Anne,  fille  de  Phanuel.  Luc, 
n,  36.  Voir  ces  noms.  —  La  Vulgate,  dans  l'Ancien 
Testament,  n'a  employé  le  mot  prophelissa  que  pour 
Marie,  sœur  de  Moïse,  et  pour  la  femme  d'Isaïe  ; 
elle  a  donné  à  Débora  et  à  Ilolda  le  titre  de  prophe- 
tis. En  saint  Luc,  II.  36,  Anne  est  appelée  prophe- 
lissa. 

PROPHÉTIE.  —  I.  Notion.  —  La  notion  biblique 
de  la  prophétie  correspond  à  la  définition  du  prophète 
d'Israël,  donnée  précédemment,  col.  705.  La  prophétie 
dans  la  Bible  n'est  donc  pas  une  simple  prévision  de 
l'avenir,  quoique  l'historien  juif  .losèphe,  Ant.  jud., 
XIII,  x,  7,  l'ait  définie  ;  r,  tcdv  u£).}.ôvtwv  icptfyvutrcç,  et 
que  plusieurs  Pères  de  l'Église  aient  adopté  cette  défi- 
nition. Voir  col.  709.  Elle  a,  en  réalité,  une  significa- 
tion plus  large,  et  elle  désigne  toute  manifestation  de 
la  volonté  divine  à  un  prophète  et,  par  l'intermédiaire 
de  celui-ci,  aux  autres  hommes. 

Les  noms  qu'elle  porte  dans  la  Bible  correspondent 
aux  différents  noms  des  prophètes.  Si  le  prophète  est 
un  nsô,  i  voyant  »,  la  prophétie  est  une  «  vision  »,n>i"iBn, 

I  Sam.,  ix,  15,  et  une  vision  de  Dieu,  communiquée 
par  Dieu.  Ezech..  i,  1;  vm,  3;  XL,  2.  Ce  nom  ne 
désigne  pas  seulement  ce  que  Dieu  fait  voir  aux  yeux 
du  corps  ou  de  l'esprit,  mais  encore  ce  qu'il  fait 
entendre  aux  oreilles.  La  vision  est  donc  synonyme  de 
la  parole  de  Dieu.  1  Sam.,  III,  I.  15;  ix,  10-18.  Elle 
désigne  par  suite  toute  révélation  divine.  Ezech.,  i,  9: 
n.  2;   ni,  5;  v,  6;  vi,  i,  etc.  Le  verbe  -n-  est  souvent 

employé  dans  les  phrases  dans  lesquelles  les  prophètes 
rapportent  les  révélations  qu'ils  ont  reeues  de  Dieu. 
Is..  vi,  1;  XXI,  6;  1er.,  I.  11-13;  Ezech.,  I,  15;  III. 
23,  etc.;  Joël,  ni.  I;  Amos,  vu.  8;  VIII,  2;  llab.,  il,  I: 
Zach.,  i,  8;  n.  1,  elc.  Partout,  c'esl  Dieu  qui  fait  voir 
(le  verbe  esl  à  l'hiphil).  .1er.,  xxiv,  l;  Ezech.,  XL,  i, 
Amos,  vu,  I  sq.;  vin,  1  ;  Zach.,  il,  3;  m,  1.  Le  voyant 
ne  voit  que  ce  que  Dieu  lui  fait  voir.  La  vision  est 
donc  une  révélation  divine.  Cf.  S.  Isidore  de  Séville, 
Etym.,  1.  VII.  r.  vin,  t.  i.xxxn,  col.  283;  S.  Thomas, 
Suni.  theol.,  II«  II".  q.  clxxi,  a.  1.  —  Si  le  voyant  est 
dit   -Th,  sa  vision  se  nomme  alors   l'un.  Ce  nom  dé- 

T 

signe  la  parole  révélée  par  Dieu,  II  Sam.,  vu,  17; 
1  Par.,  xvn,  5,  ou  la  chose  elle-même.  Hab.,  n,  2,  3.  La 
révélation  est  dite  «  vision  »,  Ezech.,  vu,  13;  vin,  22; 
x,  1,  9:  xn,  13,  24,  27,  ou  «  parole  de  vision  s,  Ezech., 
xu,  23.  On  parle  une  vision,  Jer.,  xxill,   16  (faux  pro- 

phète),  coi s  un  voit  une  parole.  I  (IIP  lie-.,  xxn.  19. 

ls.,  i,  1  ;  n,  I  ;  xiii,  I  ;  Amos,  i,  1,  etc.;  Abdias,  i.  I  ;  Mich., 
i.  I;  Nahum,  i,  1;  liai..,  i,  I;  .1er.,  i.  11-13.  Jérémie  a 
eu  une  vision  de  la  bouche  de  Dieu.  .1er.,  xxm,  16.  La 
vision  ainsi  nommée  est  donc  encore  une  révélation 
divine,  une  manifestation  de  la  parole  de  Dieu.  —  3°  Le 
substantif  -s-;:,   rtebû'dh,  correspondant  a   *•:::,  dé- 

t      :  "T 

signe  un  oracle.  I  Esd.,  VI,  li;'ll  Esd.,  vi.  12;  11  Par., 
xv.  8,  eu  même  un  écril  prophétique.  11  Par.,  ix, 29. — 
Dans  les  Septante,  le  mol  grec  itpoçiiTsfa  répond  soit  a 
p-,  hàzôn,  Il  Par.,   xxxn,  32.  soit  à  -*-;:.  I  Esd..  vi, 

li;  il  Esd.,  vi,  12.  —  La  prophétie  consiste  donc  en 
une  action  extraordinaire  eu  surnaturelle,  par  laquelle 
Dieu  communique  à  son  prophète  certaines  lumières 
ou  connaissances  avec  mission  de  les  transmettre  aux 
autres  hommes. 

II.  Manières  hont  Diei  communiquait  m  x  pro- 
phètes si. s  volontés.  —  Pour  connaître  les  vérités 
qu'ils  devaient  manifester  de  la  part  de  Dieu,  les  pro- 
phètes   d'Israël     n'employaient    aucun    des    procédés 


729 


PROPHÉTIE 


730 


artificiels  ou  appris  de  la  divination,  voir  t.  il,  col.  1443- 
1448,  pas  plus  que  des  moyens  naturels  de  se  mettre 
en  rapport  avec  Dieu.  C'était  Dieu  lui-même  qui  leur 
révélait  ou  leur  inspirait  directement  ce  qu'ils  devaient 
dire.  Les  moyens  dont  il  se  servait  sont  désignés  dans 
l'Écriture  par  trois  expressions  différentes  :  la  parole, 
la  vision  et  le  songe.  Ces  deux  derniers  moyens  de 
communication  prophétique  devaient  être  les  plus 
ordinaires,  puisqu'ils  sont  distingués  de  la  parole 
articulée,  employée  régulièrement  par  Dieu  pour  ré- 
véler à  Moïse  ses  volontés.  Num.,  xn,  6-8. 

1°  La  parole.  —  Quand  Dieu,  pour  exclure  plus  sûre- 
ment de  son  peuple  les  devins,  Deut.,  xviu,  9-14,  pro- 
mit de  susciter  en  Israël  une  série  de  prophètes, 
semblables  à  Moïse,  il  déclara  qu'il  placerait  ses 
propres  paroles  dans  leur  bouche  et  qu'ils  diraient 
tout  ce  qu'il  leur  ordonnerait  de  dire.  Comme  Moïse  au 
Sinaï  servit  d'intermédiaire  entre  Jéhovah  et  son 
peuple,  sur  la  demande  de  ce  dernier  qui  craignait 
d'entendre  directement  la  voix  de  Dieu,  Exod.,  xx,  21, 
ainsi  les  prophètes  parleront  au  nom  du  Seigneur  au 
peuple,  qui  devra  écouter  leurs  paroles.  Deut.,  xyiii, 
15-19.  Les  prophètes  entendirent  donc  parfois  la  parole 
articulée  par  Dieu  lui-même,  comme  il  arriva  à  Moïse 
au  buisson  ardent,  Exod.,  m,  4-22,  et  au  Sinaï.  Samuel 
entendit  à  Silo  la  voix  divine  qui  l'appelait,  I  Sam., 
m,  4-14,  et  Dieu  parlait  à  son  oreille.  I  Sam.,  ix,  15- 
17.  Cf.  I(III)Reg.,  xvii,  2,8;  xvin,  1  ;  xxn,17;  Amos,  m, 
7;  Ose.,  i,  2,  4,  6;  m,  1;  Is.,  xvin,  i;  .1er.,  Il,  1;  xxm, 
28;  Dan.,  vin,  127;  x,  1,  5;  Agg.,  H,  1,  21;  Zach..  i, 
1,  7.  Il  s'établissait  parfois  un  véritable  dialogue  entre 
Dieu  et  le  voyant,  ainsi  avec  Élie,  I  (III)  Reg.,  xix,  9-18, 
et  avec  Jérémie.  .1er.,  xiv,  11-14.  Mais  le  plus  souvent, 
seinble-t-il,  les  prophètes  n'entendaient  qu'une  voix 
intérieure.  Job,  iv,  12,  16.  C'est  ainsi  qu'on  peut  expli- 
quer les  révélations  faites  aux  oreilles  des  prophètes. 
Is.,  xxi,  10;  xxti,  14;  xxvm,  22;  Abdias,  i,  1.  Ils  trans- 
mettaient de  vive  voix  ou  par  écrit  les  paroles  qu'ils 
avaient  entendues  au  fond  de  leurs  cœurs.  Aussi  leurs 
oracles  prenaient-ils  le  nom  de  paroles  de  Dieu,  Amos, 
m,  1,  et  plusieurs  recueils  ont  pour  titre  :  «  Paroles 
que  Dieu  a  dites  par  le  prophète.  »  Ose.,  1,1;  Joël.,  i, 
1;  Soph.,  i,  1;  Jer.,  i,  1,  2. 

2°  La  vision.  —  Les  mentions  de  visions  sont  nom- 
breuses dans  les  écrits  des  prophètes.  Amos  a  eu  cinq 
visions,  groupées  à  la  fin  de  son  livre,  vu,  1-ix,  15. 
Isaïe  reçoit  la  mission  prophétique  dans  une  vision, 
vi.  Il  voit  un  oracle,  xm,  1.  Jérémie,  peu  après  sa 
vocation,  a  deux  visions,  i,  11-19.  Zacharie  a  une  série 
de  visions,  i.  8,  18;  H,  1;  m,  1;  IV,  1;  v,  1,  5;  VI,  1. 
Ézéchiel  aussi  en  a  fréquemment,  I,  4;  II,  1;  VIII,  2; 
X,  1,  9,  etc.  Plusieurs  livres  prophétiques  sont  inti- 
tulés :  «  Vision  ».  Is.,  i;  Abdias,  i,  1;  Nahum,  i,  1. 
Quelques-unes  de  ces  visions  étaient  extérieures.  Dan., 
v,  25,  et  corporelles  et  formaient  de  véritables  appari- 
tions. Dan.,  vin,  16-27.  Mais  le  plus  souvent,  elles  se 
produisaient  dans  l'imagination  du  voyant.  Dieu 
avait  annoncé  à  Aaron  et  à  Marie  qu'elles  auraient  lieu 
per  senignwta  et  figuras.  Num.,  xn,  8.  On  a  remarqué 
qu'elles  se  présentaient  sous  des  traits  connus  du  pro- 
phète et  empruntés  au  milieu  où  il  vivait.  Les  images 
de  ces  visions  sont  ou  palestiniennes  ou  assyriennes 
ou  babyloniennes,  selon  que  le  voyant  habitait  la 
Palestine,  l'Assyrie  ou  la  Babylonie.  Elles  avaient 
lieu  à  l'état  de  veille  (autrement,  elles  auraient  été  des 
songes)  ou  le  jour  ou  la  nuit.  Dieu  parle  à  Samuel  de 
nuit.  I  Sam.,  m,  3,  10;  vu,  4;  xv,  11,  16;  Zach.,  i,  8; 
Job,  iv,  13.  Si  le  voyant  était  endormi.  Dieu  le  tirait  de 
son  sommeil,  ou  d'un  état  semblable  au  sommeil.  Jer., 
xxxi,  26;  Zach.,  iv,  1. 

3"  Le  songe.  —  Quand  Dieu  manifestait  sa  volonté 
aux  prophètes  endormis,  c'était  en  songe.  Ce  mode  de 
manifestation  divine,  annoncé  par  Dieu,  Num.,  xn,  6; 


Deut.,  xm,  1,  3,  5,  est  rarement  attesté  dans  l'Écriture. 
Il  est  mentionné  comme  un  moyen  que  Saûl  aurait 
tenté  inutilement  pour  consulter  Dieu.  I  Sain.,  xxvtll, 
6,  15.  Joël,  il,  2S,  annonce  que,  dans  l'avenir  messia- 
nique, les  vieillards  d'Israël  auront  des  songes.  Li» 
seul  exemple  cité  est  celui  de  Daniel,  vu,  1.  Les  faux 
prophètes  aimaient  les  songes.  Is.,  LVI,  10;  .1er.,  xxm, 
25,  28.  32;  xxvn,  9;  Zach.,  n,  2.  —  Sur  l'état  psycho- 
logique des  prophètes  pendant  les  visions,  voir  Pro- 
PHÈTE,  col.  712. 

III.  Réalité  des  prophéties.  —  Qu'il  y  ait  dans  la 
Bible  des  prophéties  véritables,  c'est-à-dire  des  mani- 
festations surnaturelles  de  ses  volontés,  faites  par  Dieu 
aux  hommes  par  l'intermédiaire   d'individus  inspirés, 
c'est  tout  à   la  fois  un  fait  constaté  et  un  dogme  de  la 
foi     catholique.     —     1°     Preuves     scripluraires.     — 
1.   L'affirmation  des  prophètes  eux-mêmes.   —   Tous 
les    prophètes    israélites   déclarent   qu'ils    parlent  au 
nom   de  Jéhovah,  que  Jéhovah  parle  par  leur  bouche 
et  qu'ils  annoncent  en  son  nom  ce  qu'il  faut  faire  et 
ne  pas  faire  et  ce  qui  arrivera.  Voir  Prophète,  col.  711. 
Us  croyaient  donc  être  et  ils  se  sont  donnés  comme 
les  organes  de   la  divinité,    parce  qu'ils  avaient  con- 
science de  leur  inspiration  divine.  Us  en  fournissaient 
des  preuves  à  leurs  contemporains,  qui  ont  cru  à  leur 
mission  et  à  leur  inspiration,  en  voyant  plusieurs  de 
leurs  prédictions  accomplies  à  brève  échéance  et  les 
miracles  qui    les   autorisaient.    On    peut   chercher  à 
expliquer  naturellement  ces  faits;  on  ne  peut  les  nier, 
et  le  témoignage  d'hommes  probes,  sincères,  désinté- 
ressés, en  faveur  de  leur  propre  inspiration  est  rece- 
vable.  En  racontant  leurs  visions,  ils  exprimaient  des 
expériences  réelles  qu'ils   avaient  éprouvées,  et  on  ne 
peut  prétendre  qu'ils  employaient  un  procédé  littéraire 
pour   exprimer   leurs    propres    pensées    et   les   faire 
passer  auprès  d'une  foule  crédule  pour  celles  de  Dieu. 
Leur  parole   n'a   pas  toujours  été  crue,  Amos,  II,  12; 
Is.,  xxxvm,  7;  Jer.,  vi,  17;  vu,  25-28;  xi,  8,  21,  etc., 
et  ils   ont   été    persécutés,   parce    que    leurs   oracles 
inspirés  étaient  la  plupart  du  temps  à  l'encontre  des 
idées  de  leurs  contemporains,  des  chefs  de  la  nation 
aussi   bien   que   du    peuple   tout  entier.  Mat  th.,  v,  12  ; 
xxm,  29-37;  Luc,  VI,  23;  xi,  47-50;  xm,  34;  Act.,  vu, 
52;  Rom.,  xi,  3;  I  Thés.,  n,  15;  Heb.,  xi,  3240;  .lac, 
v,  10.  Seul,  le  sentiment  intime  de  la  réalité  de  leur 
inspiration  divine  a  pu  leur  donner  à  tous  l'énergie  et 
le  courage  nécessaires  pour  supporter  les  persécutions 
dont  ils  étaient  l'objet,  et  remplir,  malgré  tout,  la  mis- 
sion que  Dieu  leur  avait  confiée.  —  2.  L'affirmation 
de  Jésus  et  de  ses  Apôtres.  —  Ils  en  ont  appelé  aux 
écrits  des  prophètes  comme   au  témoignage   de  Dieu 
même,  et  ils  ont  signalé  la  réalisation  des  prophéties 
messianiques.  Voir   t.   m,  col.    888-889.  L'inspiration 
des  prophètes  a  été  explicitement  affirmée  par  saint 
Paul,  Heb.,  i,  1,  et  deux  fois  par  saint  Pierre.  I  Pet.,, 
i,  10-12;  II  Pet.,  i,  16-21.  Voir  t.  m,  col.  889-890.  - 
2°  Preuves  traditionnelles.  —  Les  Pères,  appuyés  sur 
le  double  témoignage  de  l'Ancien  et  du  Nouveau  Testa- 
ment, ont  affirmé  et  enseigné  l'inspiration  divine  des 
prophètes  d'Israël.  Voir  t.  m,  col.  891-S97.  Cf.  Leitner, 
Die    prophetische    Inspiration,    Fribourg-en-Brisgau, 
1S96,  p.  98-190.  —  3J  Preuves  dogmatiques.  —  Après 
avoir  été  cru,  affirmé  et  prouvé,  le  dogme  de  l'inspira- 
tion  des    prophètes   a    été    explicitement   défini    par 
l'Église.    Voir    t.    m,   col.   S97-898;   Leitner,  op.  cit.,. 
p.  191-195.  Le  fait  de  l'inspiration  divine  des  prophètes 
est  donc  un  dogme  de  la  foi  catholique.  —  4°  Réponse 
aux  objections  îles  critiques.  —  La  plupart  des   cri- 
tiques rationalistes  ont  opposé   à  la  réalité  divine  des 
prophéties  une   fin   de  non-recevoir,   fondée   sur   des 
raisons  philosophiques  et  sur  l'impossibilité  d'une  in- 
tervention surnaturelle  de  Dieu  et  de  la  prédiction  de 
l'avenir.  Kuenen  a  discuté   à  fond   la  doctrine  tradi- 


731 


PROPHETIE 


732 


tionnelle  sur  les  prophéties;  il  a  prétendu  que  celle 
conception  était  contraire  à  l'histoire  et  à  la  critique 
loyale  des  textes  scripturaires.  Il  rejette  d'abord  le 
témoignage  des  prophètes  sur  leur  propre  inspiration 
divine.  Si  ce  témoignage  était  valable,  celui  des  faux 
prophètes  serait  recevahle  au  même  titre,  puisqu'ils 
avaient,  eux  aussi,  conscience  de  leur  inspiration  sur- 
naturelle et  qu'ils  l'affirmaient  expressément.  Tous 
tirent  leur  inspiration  d'eux-mêmes;  c'est  leur  convic- 
tion qui  les  inspire.  La  distinction  entre  les  vrais  et 
les  faux  prophètes  a  été  inventée  après  coup,  lui  fait, 
il  y  avail  seulement  des  prophètes  opposés  les  uns  aux 
autres,  et  tous  étaient  considérés  comme  inspirés  par 
Jéhovah.  Ils  étaient  en  conflit  et  dans  le  peuple  chacun 
prenait  parti  pour  ceux  dont  les  idées  lui  agréaient. 
Cependant  il  finit  par  s'établir  une  ligne  de  démarca- 
tion plus  nette  entre  les  prophètes.  Il  y  eut  ceux  dont 
la  pensée  religieuse  avait  fait  plus  de  progrès  et  qui 
avaient  sur  Dieu  des  idées  plus  précises,  ei  les  autres 
plus  retardataires  et  moins  avancés  au  point  de  vue 
religieux.  Les  premiers  ont  écrit  l'histoire  sainte  et 
traité   de   faux  prophètes   leurs  adversaires.  Toutefois 

l'ëlévatioi vile    des    uns,    leur    opposition    avec   les 

idées  des  grands  et  de  la  foule,  la  persistance  de  leur 
croyance  à  leur  inspiration  malgré  les  persécutions 
qu'elle  leur  attirait,  tout  cela,  que  Kuenen  reconnaît, 
prouve  la  sincérité  de  leur  prédication.  Les  faux  pro- 
phètes  flattaient  les  passions  des  rois  et  de  la  nation; 
ils  avaient  des  idées  moins  élevées;  leur  moralité  est 
discutée  par  leurs  adversaires;  tout  cela  constitue  un 
préjugé  contre  la  sincérité  de  leurs  affirmations  et  la 
vérité  de  leur  inspiration.  1  tailleurs,  pour  assurer  la 
permanence  de  la  mission  des  vrais  prophètes,  leur 
crédit  auprès  de  la  portion  saine  de  la  nation  et  leur 
triomphe  définitif,  il  a  bien  fallu  qu  ils  aient  fourni  des 
signes  de  leur  mission  divine.  On  les  exigeait  d'eux,  el 
ils  les  donnaient.  C'étaient  es  prédictions  claires  et  à 
courl  terme,  relatées  dans  les  livres  historiques,  l'an- 
nonce d'une  défaite  ou  d'une  victoire  immédiate,  du 
succès  ou  de  l'échec  d'une  invasion.  Voir  col.  710. 
Supposer  avec  Kuenen  que  ces  prédictions  ne  se  soient 
.jamais  réalisées  ou  n'aient  été  que  des  prévisions 
purement  naturelles,  c'est  se  mettre  dans  l'impossibi- 
lité d'expliquer  la  permanence  el  le  triomphe  de  pro- 
phètes, hais  du  peuple,  qui  auraient  été  traités  d'im- 
posteurs, s'ils  s'étaient  trompés,  aussi  bien  que  la  non- 
réalisation  des  soi-disant  oracles  des  taux  prophètes. 

qui  favorisaient  les  idées  du  peuple  et  étaient  en  oppo- 
sition directe  avec  les  prédictions  précises  des  vrais 
prophètes.  Il  a  bien  fallu  que  ces  prédictions  fussent 
vérifiées  pour  que  les  prophètes  pussent  continuer 
leur  mission  avec  quelque  chance  d'être  écoutés.  Le 
non-accomplissemenl  des  oracles  des  taux  prophètes 

devait  diminuer  leur  crédit  auprès  de  la  foule  qu'ils 
trompaient.  L'ieuvredes  prophètes  eut-elle  simplement 

consisté,  ci on  le  prétend,  dans  la  destruction  de 

l'idolâtrie  et  rétablisse ni  du  monothéisme  en  Israël. 

elle  n'a  pu  aboutir  que  s'ils  onl  eu  auprès  ,|  un  peuple 
grossier  et  idolâtre  une  réelle  autorité'  el  autorité 

divine. 

Kuenen  a  prétendu,  en  second  lieu,  que  si  les  pro- 
phètes d'Israël  étaient  véritablement  inspirés  par  Dieu, 
il  est  nécessaire  que  toutes  leurs  prédictions  se  soienl 
accomplies.  Si  elles  ne  se  sont  pas  accomplies,  c'esl 
que  les  prophètes  ne  parlaient  qu'en  leur  nom  el  pas 
au  nom  du  Dieu  de  vérité.  Cel  argument,  qu'il  avait 
indiqué  <\,<n-  son  Histoire  critique  des  livres  de  l'An- 
cien   lest "i,   ti.nl.  franc.,   Paris,  1879,   p.   15,    19- 

26,  a  i  un  ni  développé.    '/  lie   Prophels  and 

Prophecy  in  Israël,  trad,  anglaise,  Londres,  1877,  c.  v- 

vti,  p.  98-275.  Le  critique  hollandais  paie -t  la  série 

des  prédictions  contenues  dan-  les  livres  canoniques 
el   relatives  soit  aux  peuples  voisins  d'Israël  soil  aux 


destinées  du  peuple  élu  (les  prophéties  messianiques)  et 
il  prétend  démontrer  que  le  plus  grand  nombre  de  ces 
prophéties  n'a  jamais  été  accompli.  Au  c.  vin,  p.  -276. 
il  examine  un  petit  nombre  de  prophéties  qui  se 
sont  réalisées  ;  mais  il  soutient  ou  bien  qu'elles  ont  été 
vérifiées  par  l'événement  d'une  manière  vague  et  ine- 
xacte, ou  bien  qu'elles  ne  sont  pas  authentiques  et  ont 
pu  être  écrites  après  l'événement,  ou  enfin  qu'elles  ne 
dépassent  pas  les  limites  de  la  prévision  naturelle.  Cet 
argument  avait  été  énoncé  par  Munk,  La  Palestine, 
Paris,  1881,  p.  420-421;  À.  Réville,  dans  la  Revue  des 
deux  inondes,  juin  1807.  p.  836-840.  Il  a  été  repris  par 
Paul  Schwartzkopff,  Die  prophetische  O/fenbarunjj 
nach  Wesen,  Inhall  ttnd  Grenzen,  Giessen.  1896, 
p.  100-166.  Ce  n'est  pas  le  lieu  de  reprendre  une  à  une 
les  objections  de  Kuenen.  Voir,  pour  la  réfutation  de 
quelques-unes.  F.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  P2e  édit., 
l'iris,  1906,  t.  il,  p.  570-Ô72.  L'abbé  de  Broglie  a  observé 
que  la  plupart  avaient  été  présentées  auparavant  et  dis- 
cutées. La  force  de  l'argumentation  ne  pourrait  venir  que 
de  l'accumulation  des  objections.  Mais  cette  argumen- 
tation part  de  principes  faux,  connue  si  le  sens  d'un 
texte  prophétique  devait  être  exclusivement  déterminé 
d'après  les  idées  du  prophète  lui-même  et  de  ses  con- 
temporains, comme  si  la  réalisation  avait  dû  s'accom- 
plir d'une  façon  absolument  conforme  à  la  prévision  du 
prophète  ainsi  fixée,  comme  si  enfin  chaque  fragment 
d'une  prophétie  devait  être  la  prédiction  d'un  seul  et 
même  événement.  En  réalité,  la  prophétie  a  pu  ne  pas 
être  parfaitement  comprise  des  contemporains  el  du 
prophète  lui-même,  si  elle  avait  un  sens  énignialique 
que  l'événement  seul  pouvait  faire  découvrir  pleine- 
ment. N'étant  pas  claire  et  complète,  elle  ne  cadre  pas 
nécessairement  ave  l'événement  dune  façon  absolue, 
et  l'accord  ne  peut  pas  être  plus  clair  ni  plus  complet 
que  la  prévision  elle-même.  Enfin,  toutes  les  parties  d'un 
oracle  prophétique  ne  s'appliquenl  pas  â  an  même  événe- 
ment. La  vue  de  l'avenir  en  perspective  a  souvent  réuni 

sur  le   même  plan  des  e\  n  ■ nts  analogues,  dont  la 

réalisation  devait  avoir  lieu  à  des  époques  différentes.  Voir 
P.  de  Broglie,  Les  prophéties  el  les  prophètes  d'après 
les  travaux  <'«  /'■  Kuenen,  dans  Compte  rendu  du 
iw  Cmit/ers  setenU/iane  international  des  catholiques, 
Bruxelles,  1895,  II'  section.  Sciences  religieuses, p.  139- 
151;  ld..  Questions  bibliques,  édit.  Piat,  Paris,  p.  346- 
380;  .1.  llrucker.  Les  preil/elions  îles  prophètes,  dans 
les  Etudes,  août  1893,  p.  586-615;  F.  Vigouroux.  Manuel 
biblique,  t.  u.  p.  578-580. 
IV.  Cycle  des  prédictions  prophétiques.  —  Rien  de 

plus  varie  que  l'objet  des  prophéties  bibliques.  Cepen- 
dant, malgré'  leur  grande  variété,  les  oracles  des  pro- 
phètes écrivains  ont  des  thèmes  communs  plus  ou 
moins  développés  el  diversement  appliqués  selon  les 
temps  et    les    milieux,    el  se    déroulent  dans    le    même 

cercle  d'idées,  qu'il  est  bon  d'indiquer. 

I  Les  péchés  d'Israël  el  de  Juda.  —  Pour  ram  i 
leurs  contemporains  dans  la  voie  droite,  dont  la  plupart 
étaient  sortis,  les  prophètes  leur  reprochent  leurs  tantes 

et  font  des  tableaux  éloquents  de  la  perversité  morale, 
qui  attire  sur  eux  la  colère  divine  et  de  terribles  châti- 
ments. Amos  décrit  avec  véhémence  les  iniquités 
d'Israël,  i,  6-8;  in.  2,  9,  10;  iv,  1-5;  vi,  1-7.  Les  ai 
symboliques  d'Osée  cl  ses  mariages  figurent  l'infidélité 
et  l'idolâtrie  du  royaume  schismatique,  i,  2-in,  ô.  Ses 
discours  directs  exposent  en  détail  les  crimes  du  peu- 
ple el  île  ses  chefs,  iv.  1-v.  7;  VII.  1-7.  Isaïe,  des  le 
début  île  ses  oracles,    résume  les  fautes    de  Juda,  dont 

il  prédit  les  châtiments,  i,  2-31.  11  y  revient  sans  cesse, 
el  signale  celles  que  chacune  des  classes  de  la   nation 

i  i  ai ises,  u,  5-9;  m,  12,  16,  17  :  v.  8-23;  \.  I,  •>.  etc 

C'était  sa  mission  el  il  devait  la  remplir  avec  fore:  i 
constance,  i.vm,  I.  Michée décrit  les  crimes  de  Samarie 
et  de  Juda,  i,5;  u,  1,2;  tu,  2;  3, 5,  9  11;  vu,  1-4.  Juda 


733 


PROPHÉTIE   —    PROPHÉTIQUES    (LIVRES) 


734 


n'a  pas  tiré  profit  du  sort  d  Israël  :  il  imite  son  idolâtrie. 
Jer.,  m,  6-10;  xi,  9-10;  xvi,  11,  12.  La  corruption  est 
profonde  et  universelle  à  Jérusalem.  Jer.,  v,  1-9,  etc. 
Ézéchiel  voit  les  abominations  commises  dans  le  Temple 
de  Jérusalem,  VIII,  1-16.  11  dénonce  les  Taux  prophètes, 
qui  trompent  et  séduisent  les  exilés,  xm,  3-7,  18,  19.  Il 
retrace  les  crimes  des  habitants  de  Jérusalem,  xxn,  1- 
16,24-31.  Après  le  retour  en  Palestine,  Aggée  reprend 
les  rapatriés  qui  négligent  de  relever  le  Temple,  i,  2-6, 
et  plus  tard  Malachie  adresse  des  reproches  aux  prêtres, 
I,  6-8,  12,  13,  et  aux  Juifs  qui  épousent  des  femmes 
étrangères,  II,  11.  Les  prophètes  apparaissent  donc 
tous  comme  des  correcteurs  de  vices  et  des  redresseurs 
de  torts,  et  leurs  prophélies  sont  remplies  de  plaintes 
contre  les  prévaricateurs. 

2°  Le  châtiment  des  coupables.  —  Comme  les  cou- 
pables s'endurcissaient  et  refusaient  de  profiter  des 
reproches  et  de  changer  dévie,  Jer.,  xxxu,  33;  Ezech., 
m,  7,  si  même  ils  ne  se  moquaient  des  menaces  des 
prophètes.  Amos,  v,  18;  Is.,  v,  19,  la  punition  divine 
devait  les  frapper.  Toutes  les  descriptions  de  crimes, 
précédemment  rappelées,  sont  immédiatement  suivies 
de  l'annonce  de  châtiments.  Plus  souvent  encore,  la 
menace  est  directe,  qu'elle  soit  adressée  sous  forme 
de  plainte  ou  d'élégie,  Amos,  v,  1-14,  ou  d'exhortation 
ou  de  reproche.  Ose.,  vin,  ix;  Is.,  ix,8-x,  34.  Elle  tourne 
parfois  en  malédiction.  Is.,  xxvm,  I-xxxin,  12.  Elle 
vise  tous  les  coupables.  Tous  seront  punis,  et  la  puni- 
tion répondra  à  la  culpabilité.  Chacune  des  classes  de 
la  société  aura  son  châtiment  propre  et  proporlionné. 
Puisque  la  dépravation  est  générale  et  que  tout  espoir 
de  conversion  est  perdu,  la  nation  entière  périra.  Israël, 
qui  est  le  plus  coupable,  disparaîtra  le  premier.  Amos, 
I,  9-16;  Ose.,  xm,  1-xiv,  1;  Mich.,  i,  2-7.  Juda.  qui  n'a 
pas  compris  la  leçon,. 1er.,  ni,  6-10,  aura  le  même  sort. 
Jer.,  IV,  5-vi,  30;  Ezech.,  xxm.  Le  châtiment  sera  gra- 
dué, Jer.,  iv,  27;  v,  18,  et  la  ruine  définitive  ne  viendra 
pas  frapper  un  peuple,  capable  encore  d'amendement. 
Des  coups  isolés  avertiront  les  coupables  et  tenteront 
de  les  ramener  à  résipiscence.  La  patience  divin. ■  se 
lassera  enfin,  et  la  perte  des  deux  royaumes  sera  tour 
à  tour  décidée.  L'instrument  des  vengeances  divines 
est  ordinairement  l'épée  des  nations  voisines  d'Israël  et 
de  Juda.  La  ruine  du  royaume  du  nord  sera  l'œuvre  de 
l'empire  assyrien,  Ose.,  x,  6;  xi,  5;  Is., vu,  17-25;celle 
du  royaume  du  sud  sera  accomplie  par  les  Babylo- 
niens. Is.,  xxxix,  3-7;  Mich.,  iv,  10;  Hab.,  i,  6-11; 
.1er.,  ix,  10-16;  xxi,  3-14;  Ezech.,  xxiv,  etc. 

3°  Les  oracles  contre  les  nations.  —  Bien  que  les 
nations  païennes  soient  la  verge  dont  Dieu  frappe  Israël 
et  Juda,  elles  ne  seront  pas  toutefois  épargnées,  parce 
qu'elles  sont  coupables,  elles  aussi,  et  plusieurs  livres 
prophétiques  contiennent  des  recueils  spéciaux  d'ora- 
cles contre  elles.  Amos,  i,  3-II,  3;  Is.,  xiv.  28-xxi,  17; 
Soph.,ii,4-15;Zach.,ix,  1-7;  Jer.,  xi.vi,  I-xlix, 39;  Ezech., 
xxv,  1-xxxii,  32.  La  prophétie  d'Abdias  est  tout  entière 
contre  I'Idumée.  Mais  les  deux  grandes  puissances 
vengeresses  ont  leurs  menaces  particulières,  souvent 
répélées.  Elles  sont  idolâtres  ;  elles  ont  dépassé  la  mesure 
en  exécutant  les  jugements  de  Dieu  contre  Israël  et 
Juda;  elles  ont  tenté  d'exterminer  des  peuples,  que 
Dieu  ne  voulait  que  châtier;  elles  ont  commis  des  in- 
justices dans  la  répression  juste;  elles  seront  donc 
punies  à  leur  tour,  et  elles  seront  détruites  comme 
nations.  On  lit  des  oracles  contre  l'Assyrie  dans  Isaïe 
x,  5-26;  xxx,  27-33;  xxxvii.  21-38;  Nahum,  i,  2-m,  19; 
Sophonie,  n,  13-15,  et  contre  la  Chaldée  ou  Babylone 
dans  Isaïe,  xm,  1-xiv,  23;  xxi,  1-10;  xxxix,  3-7;  xi.m,  14- 
21,  xlvi,  1-xi.vn,  15;  Jérémie,  xxv.  12-14;  L,  1-li,  64; 
Habacuc,  n,  2-20.  Cf.  Rohart,  De  oneribus  biblieis  con- 
tra génies,  Lille,  1893. 

4°  La  conversion  d'Israël  et  de  Juda  ri  leur  restau- 
ration. —  Quels  qu'aient  été  les  crimes  de  son  peuple 


choisi,  quelque  durs  qu'aient  été  les  châtiments  infligés, 
Dieu  faisait  annoncer  par  ses  prophètes  la  conversion 
finale  d'Israël  et  de  Juda  sous  le  coup  de  l'adversité.  Il 
ne  se  bornait  pas  à  promettre  des  bienfaits,  si  les 
coupables  quittaient  les  voies  de  l'iniquité,  Ose.,  n,  14- 
24,  il  déclarait  que  les  Israélites,  emmenés  en  captivité 
en  Assyrie,  reviendraient  en  Palestine,  Ose.,  xi,  8-11. 
Alidias  prédit  le  salut,  17-21.  Israël  se  repentira  et  ob- 
tiendra miséricorde.  Mich.,  vu,  1-20.  Les  Israélites  dis- 
persés serontréunisdenouveau.  Is.,  xi,  10-16;  Jer.,  xxxi, 
1-14.  Juda  surtout  trouvera  grâce  aux  yeux  du  Seigneur. 
Is.,  i,  26-31.  Il  sera  restauré.  Is.,  xxvi,  1-xxvn,  13; 
xxxn,  1-20;  xxxiii,  13-21;  xxxv,  I-IO;  xl,  1-31;  XLI, 
8-20;  xliii,  1-13;  xi.ix,  14-26;  m,  1-12.  Jérémie  prétlil 
la  libération  des  exilés  après  70  ans  de  captivité,  xxix, 
8-14.  Il  décrit  la  conversion,  le  retour  et  la  restaura- 
tion, xxx,  2-24;  xxxn,  37-xxxin,  26.  Baruch  répète  aux 
exilés  la  même  promesse,  n,  30-m,  8;  v,  i-9.  Ézéchiel 
annonce  aussi  le  salut,  xxxvi,  8-xxxvn,  28.  Il  trace 
même  tout  un  plan  de  restauration,  xl-xlviu.  Voir  t.  n, 
col.  2156. 

5»  Le  royaume  messianique.  —  Le  rétablissement  de 
Juda  comme  royaume  temporel  de  Dieu  en  Palestine 
amène  les  prophètes  à  annoncer  la  rédemption  spiri- 
tuelle des  Israélites  et  de  tous  les  hommes  et  l'établis- 
sement d'un  royaume  nouveau,  idéal,  réunissant  tous 
les  peuples  sous  la  loi  du  vrai  Dieu,  et  gouverné  par  un 
rejeton  de  David,  roi  d'Israël  et  des  nations.  Michée  a 
décrit  ce  nouveau  royaume  comme  la  glorification  et 
l'exaltation  de  Sion,  iv,  1-13.  Isaïe  a  repris  le  même 
thème,  n,2-l.  Il  décrit  la  gloire  de  cette  nouvelle  Jéru- 
salem, liv,  1-lvi,  8;  lx,  1-22;  l.xvi,  1-24.  Jérémie  en 
parle  comme  d'une  alliance  conclue  entre  Dieu  et 
Juda  sous  de  nouvelles  conditions,  xx.xi,  31-40.  Bref, 
les  prophètes  prédisent  le  royaume  messianique  et  son 
roi,  le  Messie,  et  ils  en  décrivent  les  caractères.  Leurs 
oracles  messianiques  sont  exposés  dans  les  articles  de 
ce  Dictionnaire,  qui  concernent  chaque  prophète  en 
particulier.  Celles  qui  ont  trait  à  la  personne  du  Messie 
ont  été  résumées,  t.  tri,  col.  1431-1431,  et  leur  signifi- 
cation en  faveur  de  la  divinité  de  Jésus  indiquée  un 
peu  plus  loin,  col.  1197-1499.  Pour  la  bibliographie, 
voir  ibid.,  col.  1436. 

S  m  les  prédictions  des  prophètes  en  général,  voir 
J.-B.  Pelt,  Histoire  de  l'Ancien  Testament,  3e  édit., 
Paris,  1902,  t.  n,  p.  153-179;  '  Davidson,  OUI  Testament 
prophecy,  1903.  Sur  la  doctrine  des  prophètes,  on 
pourra  consulter  'Zschokke,  Théologie  der  Propheten 
desalten  Testaments,  Eribourg-en-Brisgau,  1877;  Tro- 
chon,  Introduction  générale  aux  prophètes,  Paris, 
1883,  p.  xlix-lix;  Selbst,  Die  Kirche  Jesu  Christi 
nach  dru  Weissagungen  der  Propheten,  Mayence, 
1883;  'Duhm,  Die  Théologie  der  Propheten,  Bonn, 
1875;  'Kirkpatrick,  Doctrine  of  the  Prophels,  1892.  On 
peut  consulter  aussi  les  théologies  de  l'Ancien  Testa- 
ment :  Scholz,  Handbuclt  der  Théologie  des  alten 
lion/les  im  Lichte  des  Neuen,  Ratisbonne,  1862;  'Franz 
Delitszch,  Die  Inblisch-prophetisclie  Théologie,  Leipzig, 
1845;  'Schullz,  A Ittestamentliche  Théologie,  2  in-8», 
Francfort,  1869;  5e  édit.,  1890;  'Œhler,  Théologie  des 
alten  Testaments,  Tubingue,  1873;  3»  édit.,  1801; 
trad.  anglaise,  2  in-8»,  Edimbourg,  1874;  trad.  franc., 
2  in-8°;  'Hitzig,  Biblische  Théologie  des  A.  T.,  1880; 
'Riehm,  Alltestanientliche  Théologie,  1889;  '  Dillmann, 
Eandbuch  der  alttestament.  Théologie,  1805. 

E.  Mam.e.not. 

PROPHÉTIQUES  (LIVRES).  Dans  l'usage  ecclé- 
siastique on  donne  spécialement  ce  nom  aux  livres  qui 
contiennent  les  oracles  des  quatre  grands  prophètes 
et  des  douze  petits  prophètes  dans  l'Ancien  Testament, 
et  à  l'Apocalypse  dans  le  Nouveau.  Dans  la  Bible  hé- 
braïque, outre  les  œuvres  des  prophètes  proprement 
dits  qui  sont  appelés  prophètes  postérieurs,  on  distingue 


735 


PROPHÉTIQUES    (LIVRES)    —    PROPHÉTISME 


73& 


celles  des  prophètes  antérieurs  ou  premiers,  c'est-à-dire 
des  auteurs  du  livre  deJosué,  des  Juges,  des  deux  livres 
de  Samuel  (nos  deux  premiers  livres  des  Rois)  et  des 
deux  livres  des  Rois  (le  troisième  et  le  quatrième  livre 
des  Rois  de  la  Vulgate). 

PROPHÉTISME.  On  désigne  sous  ce  nom,  dans  le 
langage  des  rationalistes,  l'explication  naturelle  de  l'in- 
tervention, dans  l'histoire  d'Israël,  des  prophètes,  hom- 
mes extraordinaires,  doués  d'une  très  grande  intelli- 
gence et  d'une  très  rare  perspicacité,  qui  ont  enseigné 
une  doctrine  religieuse  très  élevée  et  exercé  sur  leur 
peuple  une  très  forte  influence  au  point  de  vue  reli- 
gieux, moral,  social,  politique  et  littéraire.  Loin  d'être 
un  miracle  vivant,  une  série  presque  ininterrompue 
d'interventions  directes  de  Dieu  en  Israël,  comme  on 
l'a  cru  longtemps,  le  prophétisme  hébreu  est  un  phéno- 
mène purement  naturel,  unique  en  son  genre,  il  est 
vrai,  quoiqu'il  ne  soit  pas  absolument  distinct  d'autres 
actes  religieux  ni  sans  aucune  analogie  avec  des  faits 
de  même  nature  dans  les  autres  religions.  A  force  d'étu- 
des, la  critique  moderne  l'a  enfin  compris  et  l'a  ramené, 
sans  le  rabaisser,  aux  conditions  et  aux  lois  de  l'his- 
toire positive.  Avant  d'exposer  la  nouvelle  idée  qu'on 
s'est  faite  des  prophètes  d'Israël,  il  sera  bon  d'indiquer 
brièvement  les  principes  qui  ont  servi  de  point  de  dé- 
part et  la  méthode  suivie  pour  aboutir  à  de  tels  résultats. 

I.  Principes  et  méthode.— Pour  expliquer  l'origine, 
la  nature,  le  rôle  historique  du  prophétisme  hébraïque 
et  son  inlluence  sur  les  destinées  religieuses  et  politi- 
ques d'Israël,  les  critiques  rationalistes  ont  écarté  toute 
intervention  surnaturelle  de  Dieu;  ils  se  sont  placés 
uniquement  sur  le  terrain  rationnel  et  ils  n'ont  eu  re- 
cours qu'à  la  loi  historique  du  développement  de  l'huma- 
nité. Le  prophétisme  hébreu  leur  est  apparu  comme  un 
phénomène  religieux  et  se  présentant  avec  les  mêmes 
caractères  et  les  mêmes  traits  que  le  prophétisme  des 
autres  religions.  L'unique  différence  entre  le  prophète 
hébreu  et  les  prophètes  païens,  c'est  qu'il  a  atteint  une 
hauteur  à  laquelle  les  autres  ne  sont  pas  parvenus.  Les 
prophètes  d'Israël  excellent;  ils  sont  incontestablement 

et  de  beaucoup  les  premiers,  les  types  du  genre;  mais 
leur  supériorité  ne  les  élève  pasà  l'ordre  surnaturel  et 
divin;  ils  restent  dans  l'ordre  naturel  de  l'histoire  des 
anciennes  religions,  surtout  des  religions  sémitiques. 
En  effet,  le  prophétisme  n'est  pas  un  phénomène 
particulier  au  peuple  d'Israël.  Il  n'est  pas  de  société 
humaine  qui,  à  un  moment  donné  de  son  existence, 
n'ait  eu,  sous  un  nom  ou  sous  un  autre, ses  interprètes 
de  la  divinité,  ses  hommes  de  Dieu.  Chez  tous  les  peuples 
de  l'antiquité  et  aujourd'hui  encore  parmi  les  nations 
qui  n'ont  pas  dépassé  un  certain  degré  de  culture  et 
qui  sont  très  rapprochées  de  la  situation  sociale  des 
âges  primitifs,  il  s'est  rencontré  et  on  rencontre  des 
hommes  qui  se  sont  attribué  ou  s'attribuent,  avec  une 
entière  bonne  fui.  le  pouvoir  surnaturel  de  lire  dans 
l'avenir  et  de  communiquer  à  ceux  qui  les  entourent 
les  décisions  de  la  volonté  divine,  dont  ils  sont  ou  dont 
ils  croient  être  les  organes.  Tous  les  peuples  sémitiques, 
notamment  ceux  qui  touchent  de  plus  pies  à  Israël, 
ont  eu  leurs  prophètes.  Les  Arabes  n'ont  pas  cessé  d'en 
avoir.  Le  prophétisme  caractérise  en  quelque  sorte  la 
race  sémitique.  Toutefois,  il  s'est  produit  aussi  dans 
les  races  indo-européennes.  La  (irèce  eut  ses  u.avTei;,ses 
devins  possédés  de  la  u,avîa  ou  fureur  prophétique,  et 
cet  ordre  de  laits  donna  lieu  à  une  science  spéciale,  la 
mantique.  La  Gaule  et  la  Germanie  eurent  leurs  inspi- 
rées, leurs  prophétesses.  Dans  la  plupart  des  cas,  le 
prophétisme  ne  s'éleva  pas  très  haut  el  ne  dépassa  guère 
les  modes  ordinaires  de  la  divination,  si  chez  les  Hé- 
breux il  fut  supérieur  i  ce  qu'il  apparaît  ailleurs,  il  ne 
Paul  pas  cependant  changer  -a  supériorité  relative  en 

singularité  absolue. 


Il  présente,  en  effet,  dans  ses  manifestations  exté- 
rieures, des  ressemblances  avec  le  prophétisme  des- 
autres peuples.  Ce  que  la  Bible  rapporte  des  prophètes 
d'Israël,  de  leur  genre  de  vie,  de  leur  mode  d'action,, 
ressemble  étonnamment  à  ce  que  nous  savons  des 
devins  païens.  On  constate,  chez  les  uns  et  chez  les 
autres,  la  révélation  par  les  songes,  une  violente  exal- 
tation de  l'imagination  dans  l'exercice  même  de  la 
prophétie,  l'union  de  la  vaticination  avec  l'art  de  la 
médecine  et  la  poésie.  Leur  histoire  a  été  embellie  par 
la  légende,  et  leur  existence  n'est  signalée  qu'à  l'âge 
héroïque  des  peuples  anciens.  On  est  ainsi  ramené  à 
une  loi  historique  générale.  Le  prophétisme  est  com- 
mun à  tous  les  peuples,  et  il  est  une  manifestation 
propre  aux  temps  héroïques.  Le  peuple  d'Israël  n'est 
donc  pas,  sous  ce  rapport,  une  exception  dans  le  monde, 
et  son  prophétisme  rentre  dans  les  analogies  de  l'his- 
toire. D'ailleurs  les  récits  bibliques,  dépouillés  de  leur 
caractère  légendaire  et  de  leur  interprétation  surnatu- 
relle des  faits  prophétiques,  se  ramènent  très  facile- 
ment aux  conditions  ordinaires  du  développement  des 
idées  religieuses. 

Que  penser  de  ces  principes  et  de  celte  méthode?  Il 
n'est  pas  exact,  d'abord,  que  le  prophétisme  n'ait  existé 
qu'aux  âges  héroïques  de  l'histoire,  puisque  les  peuples, 
païens  ont  eu  leurs  devins  aux  époques  de  la  plus 
grande  civilisation  et  en  pleine  histoire.  Quant  à  la 
méthode  employée  pour  ramener  le  prophétisme  hé- 
breu aux  lois  et  aux  conditions  ordinaires,  elle  n'est 
qu'une  application  spéciale  de  l'étude  comparée  des 
religions,  comme  si  les  ressemblances  constatées  prou- 
vaient l'identité  de  nature  et  de  conditions.  Mais  ces 
ressemblances  sont  purement  extérieures,  partielles 
et  isolées,  et  elles  ne  constituent  souvent  que  de  simples- 
analogies.  On  ne  peut  donc  sans  paralogisme  conclure 
à  l'identité  de  cause',  d'autant  qu'à  côté  des  ressem- 
blances, si  multiples  qu'elles  soient,  il  y  a  de  très- 
grandes  différences,  et  la  supériorité  du  prophétisme 

hébreu  sur  les  autres  n'est  niée  par  aucun  critique. 
Ces  différences  et  cette  transcendance  exigent  donc 
une  autre  origine,  des  causes  différentes  et  supérieures 
aux  causes  naturelles,  par  suite  une  cause  surnaturelle 
qui  est  précisément  l'inspiration  divine,  attestée  dans 
la  Bible.  Voir  Prophète  et  Prophétie.  Les  ressem- 
blances purement  extérieures  s'expliquent  par  l'iden- 
tité de  quelques  moyens,  employés  par  Dieu  même 
pour  produire  parmi  son  peuple  de  choix,  les  mêmes 
elfets  que  la  divination  produisait  chez  les  peuples- 
païens,  pour  s'adapter  aux  mêmes  dispositions  du  cieur 
humain  et  donner  satisfaction  aux  mêmes  aspirations. 
Cf.  P.  de  Broglie,  Problèmes  et  conclusions  de  l'his- 
toire des  religions,  Paris,  1885,  p.  244-260,  321-326,  H2- 
•ili.  L'interprétation  naturaliste  des  récits  bibliques, 
faite  en  vue  de  leur  enlever  tout  caractère  surnaturel 
et  divin,  repose  sur  un  principe  «'  priori,  étranger  à 
la  science  véritable,  et  n'est  pas  capable  défaire  im- 
pression sur  un  esprit  exempt   du   préjugé  rationaliste. 

II.  DÉVELOPPEMENT  PRÉTENDU  DU  PROPHÉTISME  IIÉ- 
BREU.  —  Le  prophétisme  a  passé  en  Israël  par  trois 
périodes  distinctes  et  caractéristiques  :  1°  celle  des 
débuts  sous  Samuel;  2°  une  période  de  transition  jus- 
qu'à Élie  et  Elisée,  sous  Achab  ;  3°  celle  des  prophètes 
écrivains,  qui  va  du  vnr  siècle  au  IVe  avant  Jésus- 
Christ. 

/.  PÉRIODE  DES  DÉBUTS  SOUS  S  I  VUEL.  —  Tous  les  cri- 
tiques soi-disant  indépendants  sont  actuellement  d'ac- 
cord pour  placer  l'apparition  du  prophétisme  propre- 
ment dit  en  Israël  vers  la  lin  de  la  période  des  .luges, 
sous  Samuel,  qui  est  lui-même  un  des  premiers  pro- 
phètes, sinon  même  le  premier  des  prophètes  au  moins 
d'une  catégorie  particulière.  En  effet,  si  quelques  lus 
confondent  encore  tous  les  prophètes  de  cette  époque 
dans  une  seule  classe  d'hommes  divinement  inspires  et 


737 


PROPHETISME 


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exaltés,  groupés  autour  de  Samuel,  leur  chef,  la  plu- 
part distinguent,  à  l'origine,  deux  catégories  de  pro- 
phètes, de  nature  et  d'esprit  fort  différents,  celle  des 
voyants  et  celle  des  nebi  'im  enthousiastes  et  extatiques. 

1»  Les  voyants.  —  Dans  les  parties  anciennes  à'1  la 
légende  de  Samuel,  celui-ci  est  appelé  rô'éh,  voyant  . 
11  tient  du  devin  et  du  prêtre.  C'était  un  simple  sor- 
cier, que,  dit-on,  l'on  consultait  sur  des  ânesses  per- 
dues et  qu'on  n'abordait  qu'un  cadeau  à  la  main. 
I  Sam.,  ix.  6-9,  comme  liai. mm.  Num.,  xxh,  17,  18; 
xxiv,  11-13.  11  fondait  son  autorité  sur  des  signes,!  Sam.. 
x,  1-8.  et  il  jetait  les  sorts  pour  savoir  qui  serait  roi, 
20-22.  11  s'occupait  donc  déjà  de  politique.  Parfois  ce- 
pendant, sa  fonction  se  rehaussait,  et  il  annonçait  l'ave- 
nir. Tous  les  critiques  ne  sont  pas  d'accord  sur  la  nature 
des  voyants,  selon  qu'ils  tiennent  les  détails  de  la  vie  de 
Samuel  pour  historiques  ou  légendaires.  Kraetzschmar, 
Prophet  und  Seher  im  alleu  Israël,  Tubingue  et  Leip- 
zig, 1901,  p.  6- 12,  tient  le  voyant  pour  une  personne 
que  l'on  consulte  au  sujet  des  affaires  ordinaires  de  la 
vie  privée,  et  qui  ne  s'en  occupe  que  selon  sa  science 
et  sa  sagesse  naturelles.  Il  ne  se  considère  pas  comme 
un  représentant  de  la  divinité.  Il  ne  recourt  qu'à  des 
moyens  naturels  pour  découvrir  les  forces  secrètes  de 
la  nature.  Il  voit  ce  que  les  autres  ne  voient  pas,  mais 
sans  agitation  ni  extase,  et  il  dit  clairement  ce  qu'il 
voit  d'après  certains  indices  ou  même  une  illumination 
intérieure.  Il  n'a  aucun  rapport  avec  le  jahvéisme,  et 
il  est  peut-être  antérieur  au  jahvéisme.  D'autres  peuples 
avaient  des  voyants  de  même  nature:  ainsi  Balaam  en 
■Mésopotamie.  La  profession  de  voyant  n'a  aucune  rela- 
tion ni  avec  la  nationalité  ni  avec  la  religion,  et  les 
premiers  voyants  d  Israël  n'ont  i\::vcr  aucune  influence 
sur  la  religion  de  leur  peuple,  Pour  Siuend.  au  contraire, 
le  voyant  et  le  prêtre  étaient  primitivement  apparentés  ; 
tous  deux  rendaient  des  oracles  divins.  Chez  les  Sé- 
mite-, ils  avaienl  été  d'abord  identiques.  Le  mot  hé- 
breu kôhen,  «  prêtre  ».  signifie  i  voyant  »,  kâhin,  dans 
l'ancien  arabe.  Avant  d'être  voyant,  Samuel  avait  été' 
prêtre  à  Silo  avec  lleli  La  principale  dillérence  a  con- 
sisté en  ce  que  le  charisme  du  voyant  a  un  caractère 
plus  personnel  que  celui  du  prêtre,  qui  est  social.  Il 
se  rapproche  ainsi  du  ndbi'.  Lehrbuch  der  alllesta- 
ménlliclten  Religionsgeschichte,  2e  édit.,  l'ribourg- 
en-Bcisgau,  1899.  p.  9-2-93.  Cette  dernière  théorie  est 
démentie  par  les  faits,  et  au  lieu  que  le  prêtre  soit  ori- 
ginairement un  devin,  le  devin  n'est  chez  les  Sémites 
qu'un  prêtre  dégradé.  Cf.  J.  Lagrange,  Éludes  sur  les 
religions  sémitiques,  2e  édit..  Paris,'  1905,  p.  218.  Si  les 
anciens  rationalistes  regardaient  les  voyants  d'Israël 
comme  les  successeurs  de  Moïse  et  les  continuateurs 
de  son  œuvre  religieuse  et  morale,  la  plupart  des  ra- 
tionalistes récents  pensent  que  Samuel  a  inauguré  la 
série  et  que  le  peuple  d'Israël  n'avait  pas  eu  dévoyants, 
ni  au  désert,  ni  au  commencement  de  son  installation 
au  pays  deChanaan.  M.  Loisy  cependant  estime  que  les 
voyants  d'Israël,  Débora  et  Samuel,  ont  fait  suite  à 
Moïse  et  ont  rendu,  comme  lui,  des  oracles  au  nom  de 
Jéhovah,  tout  en  s'occupant  d'ordinaire  d'intérêts  pri- 
vés. La  religion  d'israi  l,  Paris,  1901,  p.  GO.  Organes  de 
Jéhovah,  les  voyants  ne  sont  pas  les  prédicateurs  de  leur 
Dieu,  parce  qu'ils  n'avaient  pas  besoin  de  le  prêcher. 

2°  Les  nebi'im.  —  A  la  même  époque  apparaissent 
des  prophètes  enthousiastes  et  possédés  de  la  divinité. 
Ils  sont  mentionnés  pour  la  première  fois  dans  la  lé- 
gende de  Samuel,  el  les  personnages  antérieurs,  Abra- 
ham. Moïse,  Marie.  Débora,  sont  nommés  prophètes  ou 
prophétesses  par  projection  des  notions  du  temps  de 
l'écrivain  dans  le  pissé  qu'il  raconte.  Les  premiers 
nebi  im,  contemporains  de  Samuel,  n'étaient  ni  des 
devins,  ni  des  prêtres.  Ils  ne  rendaient  pas  d'oracles 
et,  à  plus  forte  raison,  n'instruisaient  pas  le  peuple. 
C'étaient  des  exaltes,  des   cor\ hantes  extatiques,  réunis 

DICT.   DE   LA   BIBLE. 


en  groupes  et  formant  des  associations.  Ils  prophéti- 
saient par  leurs  cris  el  leurs  attitudes,  au  son  des  ins- 
truments de  musique.  Saiil  qui  les  rencontra  en  reve- 
nant de  chez  Samuel,  fut  sai>i  par  l'esprit  du  Seigneur 
et  prophétisa  avec  eux;  il  devint  un  autre  homme,  de 
telle  sorte  que  ceux  qui  l'apprirent  disaient  :  i  Saii! 
est-il  donc  du  nombre  des  prophètes?  «  1  Sam.,  x.  5, 
6,  10-12.  C'étaient  des  hommes  obscurs,  dont  personne 
ne  connaissait  l'origine,  ou  des  gens  mal  famés,  sans 
naissance,  ni  bonne  renommée.  Saiil,  seul  et  isolé',  eut 
dès  lors  des  accès  particuliers,  qu'on  attribuait  à  l'es- 
prit mam. ds  dé  Lieu.  Il  prophétisait, c'est-à-dire  faisait 
l'insensé  dans  sa  maison,  et  on  était  obligé  de  recourir 
a  un  harpiste  pour  le  calmer.  I  Sam.,  xvi,  11-16.23: 
xvill,  10:  xix,  9.  Les  soldats  envoyés  par  lui  pour 
prendre  David,  qui  s'était  réfugié  à  Ramatha,  rencon- 
trèrent une  troupe  de  ces  nebi  'im  qui  prophétisaient 
et,  saisis  par  la  contagion,  se  mirent  à  prophétiser  eux 
aussi.  D'autres  émissaires,  envoyés  après  eux,  furent 
encore  gagnés  par  l'exemple  et  le  même  fait  se  pro- 
duisit une  troisième  fois.  Saùl  enfin  se  mit  en  route  et, 
chemin  taisant,  il  fut  saisi  par  l'esprit  prophétique,  et 
se  dépouillant  de  ses  vêtements,  il  tomba  par  terre  et 
prophétisa  tout  nu  ce  jour-là  et  la  nuit  suivante,  de 
sorte  qu'il  passa  dès  lors  en  proverbe  dédire  :  «  Saiil 
est-il  donc  du  nombre  des  prophètes?  »  1  Sam.,  xix, 
20-21.  Ces  nebi  im,  auxquels  Saiil  se  mêla  à  deux  re- 
prises, étaient  donc  de  véritables  corybantes,  qui  se 
procuraient  une  ivresse  oi  giaslique.  et  dans  leur  enthou- 
siasme extatique  se  livraient  à  des  actes  de  folie  sacrée. 
Selon  M.  Loisy,  op.  cil.,  p.  60,  ces  inspirés  »  n'étaient 
censés  les  organes  de  Jabvéhqu'à  raison  des  phénomènes 
extraordinaires  qui  se  manifestaient  en  eux  ».  Toute- 
fois, selon  Smend,  op.  cit.,  p.  79,  ils  rendaient  des  ora- 
cles durant  leur  extase. 

Les  critiques  rapportent  généralement  leur  origine  à 
l'époque  de  leur  première  mention  dans  l'histoire  d'Is- 
raël. Le  nabisme  parait  alors  nouveau,  extraordinaire, 
mal  défini  encore.  Budde,  Die  Religion  'les  Volkes 
Israël  bis  zur  Verbannung,  (Jiessen,  1900,  p.  90.  11  est 
donc,  selon  ce  critique,  d'origine  palestinienne.  Cornill, 
Derisraelilische  Prop/ietisrjiws,4«édit.,Slrasbourg,'t903, 
p.  12,  qui  l'ait  dériver  le  mot  ndbi'  dune  racine  arabe, 
en  conclut  que  l'Arabie  a  été  la  patrie  du  prophétisme. 
Cf.  Cheyne,  Encyclopsedia  biblica,  Londres,  1902,  t.  in, 
col.  3857.  Mais  la  plupart  des  critiques  lui  reconnaissent 
une  origine  chananéenne.  «  Baal  avait  de  ces  confréries 
et  cette  forme  inférieure  du  prophétisme  aura  passé 
des  Chananéens  aux  Israélites,  i  A  Lois\.  op.  cit.,  p. 60. 
Kraetzschmar,  op.  cit.,  p.  10,  a  cherché  à  expliquer  leur 
apparition  en  la  rattachant  à  l'oppression  des  Israé- 
lites par  les  Philistins  à  la  fin  de  l'époque  des  .luges. 
Des  fanatiques  de  Jahvéh  se  levèrent  alors  pour  soule- 
nir  la  supériorité  de  leur  dieu  national  sur  l'idole 
Dagon  des  Philistins  et  pour  maintenir  en  Israël  le  culte 
de  Jahvéh.  Leur  enthousiasme  religieux  produisit  les 
accès  de  folie  religieuse,  qu'on  remarque  chez  eux.  qui 
frappèrent  l'attention  des  foules  et  les  rattachèrent  plus 
fermement  ou  même  les  ramenèrent  au  culte  de  leur 
dieu.  Ils  continuèrent  leurs  manifestations  religieuses 
sous  le  règne  de  Saiil,  qu'ils  avaient  entraîné  dans  leur 
parti.  Leur  exaltation  religieuse  se  compliquait  d'une 
exaltation  psychique,  maladive,  qui  les  poussait  à  l'ac- 
tion et  qui  développa  une  piété  plus  ardente  envers  le 
dieu  national. Budde,  op.  cit., p.  90-94.  Toutefois,  pense 
ce  critique,  lue.  cit.,  p.  90,  il  reste  toujours  possible 
que  le  nabisme  ait  existé  déjà  auparavant  en  Israël, au 
moins  dans  une  partie  du  peuple,  el  que.  après  un  long 
assoupissement,  il  ait  pris  sous  l'oppression  philistin- 
une  signification  et  une  ampleur,  jusque-là  inconnues. 

II.  PÉRIODE  ni:  TRANSITION  JUSQU'A  ÉLIS  ET  I  I  Kl  I 
SOI  -  ACBAB.  —  Durant  cette  période,  les  voyants  el  les 
prophètes  se  sont  rapprochés  au  point  de  se  confondre 

V.  -  24 


739 


PROPHÉTIS.ME 


740 


enfin  dans  l;i  personne  d'Elisée.  L'enthousiasme  des 
nebi'im  s'atténue  fortement;  les  prophètes  cessent  d'être 
hors  de  raison;  il-  deviennent  voyants  et  reçoivent  des 
communication-  de  Jéhovah.  D'autre  part,  les  voyants 
prennent  quelques  allures  extraordinaires  des  anciens 
prophètes  exaltés  el  l'ont  des  actes  plus  singuliers  que 
ceux  qui  sont  attribués  à  Samuel  dans  les  anciens  ré- 
cits. Élie  el  Elisée  inaugurent  un  ministère,  qui  est 
une  soi  te  d'ap  istolat  par  protestation  contre  l'introduc- 
tion de  Baal  et  des  dieux  étrangers  en  Israël.  Autour 
d'Elisée,  qui  était  un  voyant,  se  groupent  des  troupes 
d'inspirés;  ils  devinrent  ses  disciples,  et  ils  ont  des  ré- 
vélations. Les  voyants  prenaient  alors  le  nom  de  pro- 
phètes, et  les  inspirés  sont  appelés  Gis  de  prophètes. 

Suivant  la  remarque  de  Kraetzschmar,  op.  cit.,  p. 23, 
il  n'est  pas  toujours  facile  de  discerner  dans  l'histoire 
de  cette  période  de  transition,  à  quelle  catégorie  des 
voyants  ou  des  prophètes  il  faut  ranger  certains  per- 
sonnages, et  il  se  peut  que,  dans  les  anciens  récits,  le 
nom  d'un  groupe  ait  été  attribué  à  des  individus  de 
l'autre  groupe.  Par  suite,  les  critiques  ne  sont  pas  d'ac- 
cord sur  le  classement  pis  plus  que  sur  certains  dé- 
tails, dont  ils  admettent  ou  contestent  l'historicité. 

[]  relèvent  cependant,  même  chez  les  prophètes 
Élie  el  Elisée,  qui  paraissent  être  les  successeurs  des 
voyants,  des  traces  du  caractère  extatique  des  anciens 
neb  iim.  Ainsi  Klie  courut  au  gilop  devant  le  char 
d'Achab  durant  tout  le  trajet  du  Carmel  à  Jesraël. 
I  (III)  Reg.,  xvill,  1446.  Elisée  irrité  eut  besoin  d'ap- 
peler un  harpiste  pour  calmer  son  courroux  et  se 
procurera  l'aide  de  la  musique  l'inspiration  prophéti- 
que. II  (IV)  Reg.,  m.  !.">.  Quand  ce  prophète  envoya  un 
-  disciples  pour  oindre  .lélm,  ce  lils  de  prophète 
remplit  sa  mission,  seul.  snns  témoin,  dans  lâcha 
de  Jéhu,  et  des  qu'il  eut  fini,  il  ouvrit  aussitôt  la  porte 
et  s'enfuit.    Les  soldats   demandèrent   à   leur   chef 

Pourquoi  ce  fou  est-il  venu  te  trouver  ?  II  (IV)  Reg., ix, 
1-1 1.  Ce  terme  de  •;:--.  •  fou,  insensé  »,  servait  a  dési- 
gner les  prophètes.  Cf.  Ose..  IX.  T.  S:  .1er.,  XXIX,  -21''. 
La  conduite  du  lils  de  prophète,  qui  se  fail  frapper  par 
un  passant,  el  qui.  couvert  de  son  turban,  se  présente 
au  roi  Achab  et  lui  propose  un  cas  de  consciem  .  paraît 
bien  extravagante.  Aussi,  lorsqu'il  eut  enlevé  le  linge 
qui  couvrait  son  visage,  le  roi  le  reconnut  pour  un 
prophète,  pour  un  homme  exalté  el  singulier.  MU  Re 
\x.  33-41.  Kraetzschmar,  op.  cit.,  p.  9,  après  Stade,  a 
même  cm  reconnaître  dans  cel  épisode  une  preuve 
que  les  fils  de  prophètes  perlaient  sur  le  front  entre 
les  yeux  des  cicatrices  sacrées,  que  ce  critique  a  appe- 
lées des  «t  marques  de  Jahvéh  s,  tatouage  qui  distinguail 
ceux  qui  appartenaient  a  ce  dieu  el  qui  se  pi 
sous  sa  protection  spéciale.  In  nabi  ne  voulait-il  pas 
être  reconnu,  il  couvrait  son  front  d'un  linge  el  cachait 
ses  en 'Milices  caractéristiques.  Achab  reconnul  a  ce 
signe  le  fils  de  prophète,  qui  s'était  présenté  à  lui  ainsi 
voilé'.  Pour  les  mêmes  sknos  aux  mains,  on  renvoie  a 
Zach.,  xiil, 3-6.  CI".  A.  Van  Hoonacker,  /.es  i touze  petits 
prophètes,  Paris,  1908,  p.  686-687.  C'esl  parce  que  le 
nôbV  el  le  lils  de  nâbï  étaient  encore  mal  considérés 

et    passaient    pour  îles    insensés    qn  Aine-,    le   premier 
prophète  écrivain,  déclare  qu'il  n'es!   ni   nâbï   ni  lils 

de     inlhl    ,   Vil.     I  i. 

I  le. ,1,111-  la  légende  el  dans  t'histoii  ■  appareil  comme 
l.i  personnifia  i  idéale  du  prophète  puritain  de  Jého- 
vah.    Il    e-l    i-.'le.    Une    M'aie    p.n-.e    1'  Ic.lell-e    lamine. 

q [u'i  Ile  soil  empoisonnée  par  un  sombre  fanatisme. 

unjéhoviste  intégral,  c'est-à-dire  un  adorateur  de 
Jéhovah,  de  u   bon,  juste,  quoique  sévère,  exigeant   un 

culte    i 'al,   eu   esprit   el  en   vérité,   Sous    le    règne 

d'Achab,  qui    favorisait    h-  culte  de  Baal,    la  religion 
nationale  courait  de  grands  risques.  Le  prophète  se  lit 

Ire  de  son    l  lieu  :   mais  c'i  tait   un  apôtre  ardenl 
exalté,  qui  n<'  recula  ],as  devanl  l'emploi  de 


moyens  violents  pour  faire  triompher  ses  idées  reli- 
gieuses et  morales.  Il  esl  entré  en  lutte  ouverte  avec 
Achab  et  a  fait  égorger  les  prêtres  de  Baal.  Mais  la 
légende  l'a  peut-être  fait  plus  fanatique  qu'il  n'était  en 
réalité.  Son  disciple.  Elisée,  continuateur  de  son  esprit, 
est  entouré  de  lils  de  prophètes,  c'est-à-dire  de  nebi'im 
proprement  dits,  qui  étaient  de  la  même  catégorie  que 
les  nebi'im  exaltés  du  temps  de  Samuel.  C'étaient  des 
adorateurs  fervents  de  Jahvéh  qui  s'élevèrent,  à  cette 
époque  de  crise  nationale  et  religieuse,  pour  l'honneur 
d'Israël  et  de  son  Dieu.  Ils  protestaient  contre  l'intrusion 
du  culle  étranger  et  polythéiste  de  Baal.  Budde.  op.  rit., 
p.  9i.  Elisée  les  avait  organisés  en  corporations,  sur  la 
nature  et  le  but  desquelles  on  est  loin  d'être  d'accord. 
Généralement,  on  admet  qu'on  s'y  exerçait  à  l'art  pro- 
phétique et  qu'on  y  recourait  à  des  moyens  naturels. 
à  des  recettes,  à  des  procédés  pour  exciter  l'inspiration. 
«  La  plupart  d'entre  eux,  dit  M.  Maspero,  Histoire  des 
peuples  de  l'Orient  classique,  Paris,  1897,  t.  u,  p.  749, 
étaient  installés  auprès  des  temples,  et  ils  y  vivaient  en 
termes  excellents  avec  les  membres  du  sacerdoce 
régulier.  Ils  y  répétaient  au  son  des  instruments  les 
chants  où  les  poètes  d'autrefois  avaient  exalté'  les 
exploits  de  Jahvéh,  et  ils  en  extrayaient  la  matière  des 
histoires semi- religieuses  qu'ils  racontaient  sur  l'origine 
du  peuple,  ou  bien  ils  s'en  allaient  prêcher  à  l'aventure 
dès  que  l'esprit  les  saisissait,  isolés,  ou  le  maître  avec 
son  disciple,  ou  par  bandes  inégales.  Le  peuple  se  pres- 
sait autour  d'eux,  écoutant  leurs  hymnes  ou  leurs  his- 
toires de  l'âge  héroïque:  les  grands,  les  roi-  mêmes 
subissaient  leurs  visites  et  enduraient  leurs  reproches 
ou  leurs  exhortations  avec  un  respect  mêlé  de  terreur,  i 
Et  M.  Loisy.  op.  rit.,  p.  61,  conclut  :  i  L'institution 
semble  décliner  après  la  mort  d'Elisée,  et  elle  n'a  pa- 
dû,  en  tout  cas.  survivre  au  royaume  d'Israël.  Amos, 
Osée,  [saie  ne  sortent  pas  de  ce  milii  u 

;;/.  PÉRIODE  DBS  PROPBl  PES    ÉCRtVAlXS,    D(     Ml'  Al 

rv    siècle.       Ces  prophètes  sont  en   progrès  notable 

sur  les  précédents.  Il-  tiennent  encore  du  devin,  mais 
ils  n'ont  plus  rien  du  prêtre.  Ils  sont  les  héritiers  di 
Samuel  el  des  voyants  el  non  de-  caltés,  dont 

pourtant  ils  portent  le  nom,  mais  avec  une  autre  signi- 
fication. On  les  consultait  encore,  comme  on  avait 
consulté  Samuel,  sur  toutes  sorte-  île  sujets,  et  ils  ré- 
pondaient a  toutes  les  question-,  i  Les  rois  d'Israël  et 
de  .luda.  avant  de  partir  en  guerre,  interrogent  les  pro- 
phètes  -m  le  succès  de  leurs  expéditions.  Beaucoup 
d'individus  faisaient  métier  d'annoncer  l'avenir  el  de 
fournir  des  renseignements  sur  les  choses  cachées,  le 
tout  au  nom  de  Jahvéh,  mais  comme  ils  l'auraienl  l'ait 
au  nom  de  Camos  en  Moab  :  ce  sont  ceux  que  l'Écriture 
appelle  faux  prophètes,  et  qui  pratiquaient,  en  quelque 
façon,  la  divination  pour  elle-même.  Les  vrais  pro- 
phètes exercent  aussi  la  divination,  mais  en  Mie  à  une 
u  supérieure,  el  les  réponses  qu'ils  donnent  au  nom 
de  Jahvéh  sont  en  rapport  avec  le  caractère  moral  de 
lenrlhen.   Il.ius  le  temps  et  le  milieu  où  ils  vivaient,  un 

enseignement  dogmatique  n'aurait  eu  aucune  prise  sur 

le  commun  des  h mes.  un  eût  mieux  aimé  recourir 

aux  sorcier- que  de  se  passer  d'oracle-.  Les  vrais  pro- 
phètes en  ont  donc  rendu,  et  beaucoup,  selon  que 
I  l  sprit   les   leur  suggérait;    mais  nous  les  voyons   de 

bonne  I 'e  -ni. ordonner  leurs  réponses  a  un  principe 

n  i  ,i,  j  une  condition  religieuse  el  morale  qui  peut 
se  résumer  en  ce-  terni  is  :  Jahvéh  vous  protégera  -i 
vous  lui  el,-  fidèles;  il  vous  abandonnera  si  vous 
l'abandonnez.  El  comme  ils  en  viennent  de  plus  en 
plu-  a  s'occuper  des  intérêts  généraux  de  la  n 
leurs  prédiction-  -e  transformenl  progressivement  en 
véritables  prédications  sur  la  providence  de  Jahvéh,  ses 
desseins,  sa  justice,  les  moyens  de  prévenir  ses 

i    part  à   sa   miséricorde,    i   A.    I 
op.  cit.,  p.  61-62. 


741 


PROPHKTISME 


74i2 


Ces  propliètes  ne  se  bornaient  donc  pas  à  prédire 
l'avenir;  ils  enseignaient  une  doctrine  complète,  qu'ils 
prêchèrent  d'abor  I  et  qu'ils  écrivirent  ensuite  pour 
que  leurs  successeurs  et  la  postérité  en  tirent  profit. 
Sous  ce  rapport  même,  les  critiques  rationalistes 
exagèrent  et  faussent  l'inlluence  des  prophètes  du  vin» 
siècle,  quand  ils  en  font  les  créateurs  du  monothéisme 
el  les  fondateurs  de  la  théocratie.  A  l'époque  d'Élie  et 
d'Elisée,  la  religion  d'Israël  n'avait  pas  encore  rompu 
complètement  avec  l'idolâtrie.  Ces  prophètes,  qui  com- 
battent avec  la  dernière  énergie  le  culte  de  Iiaal,  ne 
disent  rien  contre  l'adoration  du  veau  d'or  à  Béthel. 
Leur  jéhovisme  cependant  est  déjà  monolàtre,  puisqu'il 
n'est  jamais  fait  mention  d'un  autre  dieu,  pas  même 
d'une  déesse  compagne  et  épouse.  Les  prophètes  du 
vme  siècle  sont  monothéistes.  Jëhovah,  pour  eux,  est  le 
vrai  liieu,  le  Dieu  universel,  maître  du  monde  entier, 
unique  par  nature,  invisible  et  spirituel,  saint,  juste  et 
miséricordieux.  Une  fois  en  possession  de  cette  idée 
monothéiste,  obtenue  par  la  comparaison  du  dieu  na- 
tional avec  les  dieux  des  peuples  voisins,  par  la  consta- 
tation de  sa  supériorité  et  finalement  par  la  conclusion 
de  son  unicité  et  de  sa  supériorité  universelle,  ils  s'en 
firent  les  apôtres  et  les  prédicateurs.  Ils  travaillèrent  à 
la  faire  accepter  par  les  rois,  les  prêtres  et  le  peuple 
lui-même.  La  lutte  fut  longue  et  le  triomphe  ne  fut  défi- 
nitif qu'après  le  retour  de  la  captivité  de  Babylone. 
Ils  furent  aussi  les  créateurs  du  culte  moral.  Aupara- 
vant, Jéhovah  n'était  honoré  que  par  des  actes  extérieurs 
et  par  des  sacrifices.  Les  prophètes  découvrent  que  le 
Dieu  unique  et  véritable  demande  le  culle  du  cœur,  la 
justice,  la  vertu,  l'obéissance  à  sa  loi,  supérieure  aux 
victimes  et  aux  sacrifices.  Ainsi  donc,  «  la  critique 
historique  ne  s'est  pas  bornée  à  détruire  les  croyances 
traditionnelles,  ainsi  qu'on  l'en  accuse  trop  souvent. 
Elle  a  reconstruit  après  avoir  démoli.  En  replaçant  les 
prophètes  d'Israël  dans  leur  véritable  milieu  historique, 
elle  a  fait  ressortir  leur  incomparable  originalité',  la 
haute  valeur  de  leurs  prédications  enflammées;  elle  a 
reconnu  en  eux  de  véritables  ancêtres  de  la  conscience 
moderne,  et  s'ils  ont  perdu  leur  caractère  miraculeux, 
ils  y  ont  infiniment  gagné  en  grandeur  morale.  » 
J.  Réville,  Le  prophétisme  hébreu,   Paris,   1906,  p.  2. 

Mais  enfin,  en  quoi  consistait  donc,  au  sentiment  de 
ces  critiques,  l'inspiration  des  prophètes,  hommes 
d'action  et  écrivains?  L'ancien  rationalisme,  celui  de 
Voltaire  et  des  encyclopédistes,  ne  voyait  dans  les  pro- 
phéties que  de  pures  conjectures  sur  l'avenir  religieux 
«t  politique,  capables  de  séduire  les  simples  et  d'en- 
llammer  les  fanatiques,  ou  bien  des  prédictions  post 
eventum,  c'est-à-dire  l'histoire  du  passé  écrite  sous 
forme  de  prophétie,  donc  un  procédé  littéraire  employé 
pour  attirer  l'attention,  frapper  l'imagination  et  aider 
la  mémoire.  Les  rationalistes  plus  récents  ont  rejeté 
cette  fausse  conception  et  réduit  les  oracles  post  even- 
tum à  un  minimum  de  prédictions  trop  claires-  Pour 
eux,  l'inspiration  des  prophètes  d'Israël,  sans 
être  surnaturelle  et  directement  divine,  est  cependant 
réelle  et  religieuse.  Ils  y  sont  allés  par  degrés.  Les 
prophètes  d'Israël  ont  d'abord  été  des  prédicateurs 
d'une  doctrine  élevée,  des  hommes  d'une  foi  profonde, 
des  orateurs  inspirés  par  de  grandes  pensées,  qui  attri- 
buaient à  Jahvéh  leur  propre  inspiration.  Mais  cette 
inspiration  provenait  de  leur  exaltation  religieuse;  ils 
la  puisaient  dans  leur  enthousiasme  pour  la  vraie  reli- 
gion. Ils  se  mettaient  constamment  en  rapport  avec 
Dieu,  et  ils  se  regardaient  comme  ses  serviteurs  et  ses 
messagers.  Dieu,  la  religion,  la  morale  étaient  l'objet 
de  leurs  principaux  discours.  Ils  rattachaient  toutes 
leurs  paroles  à  un  ordre  d'idées  purement  religieux; 
mais  ils  s'inspiraient  toutefois  réellement  de  leurs 
propres  convictions,  qu'ils  attribuaient  à  Dieu.  Des 
critiques  plus  récents  ont  reconnu  cependant  dans  ce 


sentiment  religieux  une  action  de  Dieu,  réellement 
exercée  dans  l'âme  des  prophètes.  La  prophétie  ne 
vient  pas  de  Dieu  en  ce  sens  seulement  qu'elle  est, 
comme  toutes  les  œuvres  humaines,  produite  par  les 
facultés  que  Dieu  a  données  à  l'humanité.  Il  y  a  plus. 
Le  prophète  a  conscience  que  la  pensée  qui  lui  vient, 
que  la  conviction  qui  s'empare  de  son  esprit,  n'est  pas 
de  lui,  qu'elle  ne  lui  est  pas  arrivée  par  la  voie  ordi- 
naire du  raisonnement,  et  il  l'attribue  à  Dieu.  Pour- 
quoi? Parce  qu'il  n'en  trouve  pas  la  source  en  lui.  Il 
se  sent  inspiré,  il  le  déclare,  et  nous  ne  pouvons  douter 
de  sa  parole.  Bien  que  les  idées  prophétiques  ne  lui 
aient  pas  été  communiquées  par  révélation  surnatu- 
relle, elles  sont  de  Dieu,  parce  que  la  disposition  qui 
les  a  produites  dans  l'esprit  du  prophète  est  l'œuvre  de 
Dieu  en  lui.  L'esprit  de  Jéhovah  est  entré  et  a  agi  dans 
l'esprit  de  l'homme.  Les  prophètes  expliquaient  ainsi 
l'obsession  intérieure  d'une  grande  pensée  qui  rem- 
plissait leur  âme  et  dont  l'origine  psychologique  échap- 
pait à  leur  conscience.  Ils  étaient  sincères,  et  leur 
inspiration  venait  de  Dieu  en  quelque  manière. 

Voir  '  Knobel,  Der  Prophetismus  der  Hebrâer,  1837; 
'M.  Nicolas,  Du  prophétisme  hébreu,  dans  Études  cri- 
tiques sur  la  Bible,  Ancien  Testament,  Paris,  1862, 
p.  301-442;  'A.  Béville,  dans  la  Revue  desdeux  mondes, 
juin  1867,  t.  i.xix,  p.  823;  'Dillmann,  Ueber  die 
Propheten  des  aile»  Bundes,  1868;  "Kuenen,  Histoire 
critique  des  livres  de  l'Ancien  Testament,  trad.  franc., 
Paris,  1879,  t.  il,  p.  1-52;  kl..  De  profelen  eu  de 
profetie  onder  Israël,  1875;  trad.  anglaise,  Londres, 
1877;  'Robertson  Smith,  The  prophète  of  Israël  ami 
their  place  in  history,  Edimbourg,  1882;  '  Darmesteler, 
Les  prophètes  d'Israël,  Paris,  1895;  "Cornill,  Der 
israelitische  Prophetismus,  1894  ;  \-  édit.,  Strasbourg, 
1906;  '  Giesebrecht,  Die  Berufsbegabung  der  alltesta- 
mentlichen  Propheten,  1897;  'S.  Michelet.  lsraels 
Propheten  als  Trâger  der  Offenbarung,  trad.  alle- 
mande, Eribourg-en-Brisgau,  1898;  "Smend,  Alttesla- 
mentliclie  Religionsgeschichte,  2e  édit.,  Friliourg-en- 
Brisgau,  1899,  p.  78-93,  187-2(111,  253-26',  ;  '  Kraelzschmar, 
Prophet  und  Seher  im  alten  Israël,  Tubingue  et 
Leipzig,  1901  ;  'A.  Sabatier,  Esquisse  d'une  philosophie 
de  la  religion,  1'  édit..  Paris.  1903,  p.  151-162: 
"B.  Stade,  Biblische  Théologie  des  Allen  Testaments , 
Tubingue,  1905,  t.  r,  p.  124-126,  131-132,  201-212  ; 
M.  Réville,  Le  prophétisme  hébreu.  Esquisse  de  son 
histoire  et  de  ses  destinées,  Paris,  1906. 

III.  Critique.  —  Les  preuves,  précédemment  données 
aux  trticles  Prophète,  col.  711,  et  Prophétie,  col.  730, 
de  l'inspiration  divine  des  prophètes  d'Israël  rendent 
inadmissible  le  prophétisme,  qui  n'est  qu'un  essai 
d'explication  naturelle  d'un  phénomène  surnaturel  et 
divin.  Par  conséquent,  nous  pourrions  nous  borner  à 
conclure  que  l'institution  prophétique  en  Israël  et  que 
son  développement  séculaire  ne  se  justifient  pas  par 
les  seuls  agents  de  l'histoire,  et  qu'ils  dépendent  d'une 
vertu  surnaturelle,  que  les  prophètes  eux-mêmes  ont 
nommé  l'Esprit  de  Dieu.  Cependant,  comme  cet  Esprit 
divin  a  pu  se  servir  des  causes  secondes  agir  et  se 
manifester  diversement  suivant  les  temps  et  les  milieux, 
il  se  pourrait  qu'il  y  ait  quelque  vérité  dans  ses  mani- 
festations extérieures,  telles  que  les  critiques  les  dé- 
crivent, en  ne  tenant  pas  suffisamment  compte  de  la 
puissance  surnaturelle  qui  agit.  Il  y  a  donc  lieu  de  se 
demander  si  les  conclusions  des  critiques  sur  le  déve- 
loppement de  la  prophétie  en  Israël  ne  sont  pas  cer- 
taines et  coneiliables  avec  l'action  divine  sur  les  pro- 
phètes. 

1"  La  distinction  entre  les  voyants  et  les  prophètes 
au  temps  de  Samuel,  si  elle  était  démontrée,  pou-rail 
se  concilier  avec  l'enseignement  catholique,  et  elle 
prouverait  seulement  la  diversité  des  dons  divins  et 
des   manifestations  prophétiques.    Mais   elle  est    loin 


743 


PROPHÉTISME 


744- 


d'être  certaine,  et  les  raisons  invoquées  pour  prouvera 

■  ratio»  complète  de  ces  deux  catégories  d  hommes 
inspirés  ont  paru  insuffisantes  à  M.  Jean  Reville  lui- 
même,  Le  prophélisme  hébreu,  p.  9.  On  recourt  a  des 
traditions  différentes,  qu'on  prétend  discerner  dans  les 
livres  dits  de  Samuel.  Mais  la  ré- 
teur,  I  Sa  iu.,  ix.  9,  montre  quil  ny 
avait  pas,   dans   les  documents  qu'il   connaissait,    de 

,,,..     i  i,  „    tranchée  entre   le   rô'éh  et  le  nabi  . 

„el,   que    Saûl   va   consulter,    n'ignore 

, lont  il  annonce  la  rencontre  an  futur 

,mme  signe  de  la  vérité  de  la  communication 
divine   el  de   la  vocation  à  la  royauté.  I  Sam.,  x.  5-7. 

:  David  s'esl  réfugié  auprès  de  Samuel  à  Ra- 
matha  le  voyanl  préside  les  scènes  prophétiques  des 
nebrhii.  I  Sam.,  mx.  18-20.  21.  Ainsi  donc,  dans  les 
deux  seules  circonstances  dans  lesquelles  il  est  ques- 
tion de  ces  nebi'im,  Samuel,  le  voyant,  est  en  rela- 
tions avec  eux.  C'est  un  indice  certain  que  la  distinc- 
tion des  deux  catégories  de  prophètes  n'est  pas  aussi 
évidente  qu'on  le  prétend,  el  pour  l'introduire  il  faut 
attribuer  au  rédacteur  du  livre  un  travail  de  concilia- 
tion de  deux  traditions  dont  la  diversité  n'est  pas  dé- 
montrée. M.   Van   Hoonacker  distingue   les  prophètes 

cation  personnelle,  tels  que  Amos,  etc.,  des  pro- 
phètes  par  état  et  consécration  volontaire.  Ceux-ci  ont 
été  groupés  à  l'époque  de  Samuel  et  de  Saûl,  puis, 
dans  le  royaume  du  nord,  autour  d'Élie  et  d'Elisée. 
lui  sein  de  ces  corporations  sortaient  parfois  de  véri- 
tables o  hommes  de  Dieu  »,  distingués  par  une  voca- 
tion pris. elle.  Mais  aussi  de  ces  prophètes  par  état 

provenaient  les  faux  prophètes,  qui  se  prétendaient 
investis  d'une  mission  d'en  haut.  Les  douze  petits  pro- 
phètes, Paris,  1908,  p.  269.  Cette  distinction  peut-être 
admise. 

Quant  à  la  nature  des  fonctions  du  voyant,  on  ne 
peut  les  réduire  à  celles  de  devin  et  de  sorcier  qu'en 
ne  prenant  dans  les  récits  actuels  que  ce  qui  va  à  la 
théorie.  Si  le  peuple  allait  consulter  le  voyant  pour  des 
intérêts  privés,  tels  qu'au  sujet  d'ànesses  égarées, 
I  Sam.,  i\,  8,  9,  Samuel  avait  reçu  la  veille  une  révé- 
lation divine  concernant  Saûl  et  sa  vocation  à  la 
royauté,  15,  10;  el  Dieu  lui  en  donne  confirmation, 
quand  Saûl  se  présente,  17.  11  n'a  pas  hesoin  d'être 
mi  au  courant  de  l'affaire,  et  avanl  d'avoir  été  inter- 
rogé, il  renseigne  sur  le  sort  des  finesses.  20,  et  il 
s'engage  à  révéler  le  lendemain  à  Saûl  ses  pensées  les 
plus  intimes,  19.  si  Saûl  se  préoccupe  du  cadeau  à 
offrir,  c'est  qu'il  ne  connaissait  pas  Samuel  et  que,  sur 
les  renseignements  de  son  serviteur,  il  le  prenait  pour 
,,,i  ,1  .in  ordinaire,  7.  En  l'ait,  on  ne  raconte  pas  qu'il 
lui  ait  offert  la  pièce  d'argent,  dont  parle  le  serviteur. 
8.  Les  événements  furenl  tout  autres  que  ceux  qu'il 
i1  udait,  el  le  lendemain,  Samuel  le  traita  royale- 
ment, 22-24.   Plus  lard,  devant  tout  le  peuple  réuni, 

Sai 1  déclara  qu'il  n'avait  jamais  reçu  de  présents 

dans  sa  judicature,  el  le  peuple  le  reconnut  hautement. 

I  Sam.,  \u,  3-5.  si  le  sort  est  jeté  pour  le  choix  du 
roi,  c'esl  devanl  la  face  de  Jéhovah,  c'est-à-dire  proba- 
blement auprès  de  l'arche.  1  Sam..  IX.  19.  On  n'en 
pi  ut  conclure  que  Samuel  était  un  vulgaire  sorcier.  En 
outre,  le  voyant  est  appel,'  i  homme  de  Dieu  -,  I  Sam., 
ix,  6,  7.  8,  i".   donné  à  d'autres  prophètes,  qui 

ni    ,, ,    de    devins.  I  (III)  lie-.,  xn.  22;  xvn.  18; 

II  (IV)  Reg.,  iv,  9.   La    prévision  des  signes  donnés  du 

h.    I    Sam.,   x.   o-7.   n'a    pu    avoir   lieu    qu'en 

vertu  du  don  prophétique,  l'eue,  le  récit  tout  entier,  le 

ni     m  i  quel  s'appuie  la  théorie  du  voyant,    orciei 

vin,  nous  montre  en  Samuel,  le  premier  voyant 

,,.  un  véritable  prophète.  Donc,  il  n'es!  pas  prouvé 

que  la  prophétie  hébi  tiré  son  oi  igine  de  la 

divination.   Et   s'il   j    a,   entre  quelques  formes  de  la 

prophétie  primitive  et  la  divination  superstiliei 


nalogies  extérieures,  elles  ne  peimelttnl  pas  de  con- 
clure à  l'identité  du  fond.  Elles  indiquent  seulement 
que  les  premières  manifestations  de  l'esprit  prophé- 
tique se  produisirent  sous  des  formes  imparfaites. 
adaptées  aux  usages  de  ces  temps  reculés  et  aux  idées 
encore  peu  élevées  du  peuple  juif.  Pour  le  détourner 
des  pratiques  superstitieuses  des  Chananéens,  Dieu 
daignait  condescendre  à  la  faiblesse  humaine  et  donner 
aux  Israélites  des  moyens  de  communiquer  avec  lui  et 
de  connaître  ses  volontés,  même  en  des  choses  de 
moindre  intérêt,  par  l'intermédiaire  de  ses  prophètes, 
comme  il  l'avait  promis.  Deut.,  XVIII,  0-22. 

Le  soi-disant  délire  prophétique  des  nebi'im  exaltés 
ne  repose  que  sur  quelques  textes  qu'on  interprète 
dans  un  sens  défavorable.  Saûl  devait  rencontrer  une 
troupe  de  prophètes,  qui  descendaient  du  haut-lieu, 
précédés  d'instruments  de  musique  et  «  prophétisant  i 
L'esprit  du  Seigneur  devait  se  saisir  de  lui;  lui-mêm 
devait  o  prophétiser  »  et  devenir  un  autre  homme.  Les 
faits  se  passèrent  comme  Samuel  l'avait  annoncé.  Saûl 
rencontra  les  prophètes:  l'esprit  divin  s'empara  de  lui, 
et  au  grand  éloiinemeiii  des  assistants,  Sanl  «  prophé- 
tisa »  avec  eux.  1  Sam.,  x.  5,  6,  10-13.  Hien  dans  ce 
récit  ne  décèle  des  extatiques,  el  il  n'est  rien  dit  de  la 
nature  de  l'acte  prophétique  accompli.  L'étonnemeii 
des  assistants  ne  porte  ni  sur  les  qualités  des  nebi'im 
ou  la  singularité  de  leurs  actes,  mais  seulement  sur  le 
fait  que  Saûl  se  mêle  à  eux  et  est  saisi  lui-même  par 
l'esprit  divin.  Sur  la  nature  des  actes  accomplis  par 
ces  prophètes,  voir  t.  Il,  col.  1569-1570.  Si,  dan-  sa 
maison,  Sanl  commet  plus  tard  des  actes  de  fureur  el 
de  folie,  c'est  qu'il  était  sous  l'inlluence  d'un  espril 
marnais,  qui  s'était  empan',  de  lui  et  qui  n'avait  rien  de 
commun  avec  les  actes  prophétiques  des  nebi'im.  Une 
seconde  fois,  I  Sam.,  xix.  18-24,  il  prit  part  aux  acte-  des 
nebi'im,  ainsi  que  les  trois  troupes  de  soldats  qu'il  avail 
envoyées  pour  prendre  David.  Ici  encore,  les  prophètes 
t  prophétisaient  ».  L'esprit  du  Seigneur  saisil  les  sol- 
dats, et  ils  prophétisent  à  leur  tour.  On  parle  de  con- 
tagion communiquant  le  délire  prophétique.  Rien  dans 
le  texte  ne  l'indique.  Il  y  a  seulement  une  action  de 
l'esprit  divin,  qui  fait  participer  les  soldats  aux  exer- 
cices   lies    prophètes,    quels    que    soient    d'ailleurs    e,  - 

exercices.  Le  cas  de  Sanl  est  plus  compliqué'.  En  che- 
min et  avanl  d'arriver  à  Itamatha,  il  est  déjà  SOUS 
l'action  de  l'esprit  et  il  se  met  à  »  prophétiser  ».  S'il 
v  a  eu  contagion,  ça  été  contagion  à  distance.  Arrivé,  à 
Ramatha,  il  se  dépouille  de  ses  vâtements  el  il  prophé- 
tise avec  les  autres.  ,  El  il  tomba  nu  ce  jour-là 
et  la  nuii  suivante,  i  On  voil  ici  la  chute  cataleptique 
de  l'extase,  en   se  référant  à  Balaam.  Num.,   xxn.   i. 

16.   Plusieurs  commentateurs  catholiques  l'ad ttenl 

quoique  \ on  C.all,  Zusa m  1,1  e n tset :u nij  und  Herkunfl 
der  Bileamperikope,  Giessen,  1900,  p.  33,  nie  la 
parité  avec  Balaan  el  jnstemenl  semble-t-il,  puisque 
ee  devin  a  des  visions,  que  n'ont  pas  les  nebi'in  di 
Saûl.  Ce  détail,  joint  à  la  nudité  el  à  la  longue  dure, 
de  l'extase,  rend  le  cas  de  Saiil  forl  singulier  el  extraor- 
dinaire. Ainsi  entendu,  il  ne  peut  être  généralisé  et 
appliqué-  à  tous  les  nebi'im.  11  semble  plutôt  que  c'est 

Un    cas    unique,   qui    s'explique,    dans    les    cil'Coll- 

spéciales,  par  les  mauvaises  dispositions  de  Saûl  contre 
David,  que  Hien  voulail  changer  par  une  action  plus 
énergique.  Quoi  qu'il  en  soit,  ce  sont  là  les  seuls  ren- 
ments  que  nous  ayons  sur  les  nebi'im  exaltés, 
nporains  de  Samuel.  Suffisent-ils  réellement  à- 
justifier  la   Ihéorie  qu'on  échafaude  sur   eux? 

n'es pas  fondé  à  traduire  mifnabbé'im  par.,  faisant 

les  fous,  les  insi  usés  o,  ou  hien     étanl  dans  le  délire 
prophétique   „.  On  n'a  pas  de  raison  non  plus  d'atlr  - 
buer  l'occasion  , le  leur  exaltation  religieuse  à  l'oppre* 
M,,n  des  Israélites  par  les  Philistins.  Quand  ils  apps 
al  dan-  les  recils   bibliques,  les  nebi'im  n'ont 


PROPHETISME 


746 


aucune  relation  avec  celle  situation  politique.  On  ne  la 
suppose  que  par  comparaison  avec  les  benë  han- 
nebi'ttll,  qui  entourent  Elisée  et  qui  luttent  avec  lui 
contre  Achab.  On  conjecture  qu'une  cause  analogue  a 
provoqué  l'élan  prophétique  du  temps  de  Samuel.  Tout 
cela  ne  sort  pas  du  champ  des  hypothèses,  et  l'existence 
des  prophètes  exaltés,  véritables  corybantes  de  Jahvé, 
n'est  pas  prouvée. 

D'autre  part,  nous  sommes  trop  peu  renseignés  sur 
les  actes  des  nehiim  de  cette  époque  pour  nous  faire 
une  idée  juste  de  leur  nature  et  de  leur  inlluence  re- 
ligieuse. En  particulier,  le  côte  extraordinaire  de  leurs 
manifestations  collectives  nous  échappe  complètement, 
et  c'est  abuser  de  quelques  ressemblances  générales 
que  de  les  assimiler  entièrement  aux  phénomènes  con- 
vulsifs  d'autres  mouvements  analogues  plus  récents.  On 
ne  peut,  en  tout  cas,  leur  enlever  tout  caractère  reli- 
gieux et  il  est  légitime  de  penser  que  ces  bandes  orga- 
nisées de  dévots  serviteurs  de  Jéhovah,  courant  le  pays 
au  son  des  instruments  de  musique,  priant  et  peut-être 
prêchant,  ont.  en  un  temps  de  marasme  religieux,  pro- 
duit une  grande  impression.  Ils  étaient  une  preuve 
manifeste  de  l'action  de  Jéhovah  en  Israël  et  ils  ont  pu 
aboutir  à  relever  le  niveau  religieux  et  moral  de  la 
foule.  L'Esprit  de  Dieu,  qui  agit  différemment  suivant 
les  époques  et  les  milieux,  a  suscité  un  mouvement 
extraordinaire,  capable  d'exciter  alors  dans  le  peuple 
la  piété,  l'espérance  en  Dieu  et  la  confiance  en  l'avenir. 

2»  Si,  comme  nous  le  pensons,  la  première  période 
•du  prophétisme  en  Israël  n'a  pas  présenté  les  caractères 
imaginés  par  les  critiques  rationalistes,  la  seconde  pé- 
riode, dite  de  transition,  perd  déjà  par  le  fait  même  sa 
caractéristique  générale,  car  il  ne  peut  y  avoir  transi- 
tion d'un  état  qui  n'a  pas  existé  à  un  état  futur.  Élie 
diffère  beaucoup  moins  de  Samuel  qu'on  ne  le  pré- 
tend, et  c'est  un  indice  assuré  que  la  série  des 
voyants  se  continue  sans  modification  essentielle,  et 
que,  s'il  y  a  progrès,  il  n'est  pas  aussi  sensible  qu'on 
le  dit.  Ce  qu'on  appelle  le  «  galop  »  d'Élie  devant  le 
char  d' Achab,  accompli  sous  l'action  divine.  I  (III) Reg., 
xvin,  16,  avait  sans  doute  pour  but  de  frapper  par  sa 
-singularité  l'esprit  du  roi,  au  début  de  l'activité  pro- 
phétique d'Elie.  Si  Elisée  demande  un  harpiste  avant 
de  répondre  à  la  consultation  de.losaphat,  II  (IV)  Reg.. 
m,  15,  ce  n'était  pas  pour  se  préparer  directement  à 
l'inspiration  prophétique  qui  ne  dépendait  pas  de 
moyens  extérieurs,  mais  de  la  seule  volonté  de  Dieu; 
•c'était pour  calmer  l'irritation  dont  il  s'était  animé  lui- 
même  en  parlant  au  roi  d'Israël.  Il  n'y  a  pas  à  s'étonner 
que  des  soldats,  ayant  remarqué  la  fuite  précipitée  du 
(ils  de  prophète  qui  était  venu  sacrer  Jébu,  l'aient 
traité  d'insensé.  II  (IV)  Reg.,  ix,  11.  Si  l'épithéte  a  le 
sens  injurieux  ou  méprisant  qu'on  lui  donne,  cela 
viendrait  du  peu  d'estime  que  ces  soldats  avaient  pour 
les  prophètes.  On  ne  doit  pas  faire  grand  fond  sur  une 
injure  ou  une  simple  moquerie  de  caserne.  Osée,  i\. 
dit  seulement  que  le  peuple  traite  d'insensé  le  pro-- 
phète  dont  les  avertissements  l'importunent  et  qu'à  ses 
•autres  crimes  il  ajoute  celui  de  persécuter  ceux  que 
Dieu  lui  envoie.  Dans  sa  lettre  au  prêtre  Sophonie,  le 
faux  prophète  Séméias  ne  parle,  selon  son  sentiment, 
que  des  faux  prophètes,  des  personnes  qui  feignent 
être  saisies  de  l'esprit  de  Dieu.  .1er.,  xxix,  26.  Si  l'ex- 
pression est  injurieuse,  elle  vient  d'un  adversaire  et 
elle  vise  Jérémie,  27.  Vraiment,  on  ne  peut  conclure 
de  ces  faits  que  7Vùa  ait  jamais  été  un  nom  ordinaire- 
ment  donné  aux  prophètes.  Cf.  Laur,  Die  Propheten- 
namendes  alten  Testamcntes,  Fribourg,  1903,  p.  38-40. 
L'acte  de  ce  fils  de  prophète  qui  se  présente  devant 
Achab,  la  face  voilée,  n'est  qu'une  de  ces  actions  sym- 
boliques que  les  prophètes  accomplissaient  pourannon- 
cer  la  volonté  divine  d'une  manière  plus  expressive  et 
-saisissante.  Il  se  fait  blesser  pour  paraître  revenir  du 


combat.  I  (III)  Reg.,  xx,  35-41.  Quant  aux  prétendus 
signes  de  Jéhovah  que  les  prophètes  auraient  portés  au 
front  et  aux  mains,  c'est  une  de  ces  hypothèses  singu- 
lières qui  ne  résistent  pas  à  un  examen  attentif. 
On  suppose  gratuitement  qu'il  voile  son  tatouage  qui, 
découvert,  le  fait  reconnaître  par  le  roi  pour  un  pro- 
phète. C'est  au  symbolisme  de  son  action  que  le  roi 
reconnaît  son  caractère  prophétique.  Zacharie  parle  de 
coups  reçus  par  le  faux  prophète  qu'il  met  en  scène, 
et  le  terme  qu'il  emploie  ne  peut  s'entendre  d'un  ta- 
touage antérieur  de  ses  mains.  Cf.  Laur,  op.  cit.,  p.  54- 
59.  Si  Amos,  vu,  li.  déclare  à  Amasias  qu'il  n'est  ni 
prophète  ni  fils  de  prophète,  c'est  qu'il  est  peut-être  au 
début  de  sa  vocation  et  qu'il  ne  fait  pas  partie  d'une 
communauté  de  fils  de  prophètes.  11  n'en  affirme  pas 
moins  sa  mission  divine  et  il  ne  rejette  pas  un  titre 
qu'il  regarderait  comme  injurieux,  ne  voulant  avoir 
rien  de  commun,  pas  même  le  nom,  avec  ces  insensés 
de  prophètes.  Il  répond  à  l'insinuation  malveillante 
d'Amasias  et  il  déclare  qu'il  ne  fait  pas  profession  de 
prophète  dans  un  but  de  lucre.  Cf.  Laur,  op.  cit.,  p.  39- 
41,50-51;  A.  Van  Hoonacker,  Les  douze  petits  pro- 
pliètes,  p.  269. 

Quant  aux  benë  han-nebî'îm,  on  a  pu  les  distinguer  du 
ndbi  de  Jéhovah.  Voir  Laur,  op.  cit.,  p.  59-63.  Les  pre- 
miers ne  seraient  pas  des  prophètes  proprement,  dits 
(quoique  leur  désignation  biblique  semble  équivaloir  à 
celle  de  nebi'im),  mais  des  hommes  menant,  sous  la 
direction  d'un  ndbi',  un  genre  de  vie  déterminé,  sans 
être  généralement  doués  de  l'esprit  prophétique.  Sur 
leurs  associations,  voir  Écoles  de  prophètes,  t.  n, 
col.  1567-1570.  Quoi  qu'il  en  soit,  ces  fils  de  prophètes, 
groupés  autour  d'Elisée,  ne  présentent  aucun  de  ces 
caractères  excentriques  et  violents  qu'on  a  voulu  attri- 
buer aux  prophètes  exaltés  du  temps  de  Samuel.  S'ils 
en  sont  les  successeurs,  ils  en  ont  continué,  avec  des 
différences  conformes  aux  temps,  les  fonctions  et  l'es- 
prit. Leur  organisation  parait  plus  régulière  et  leur 
action  non  moins  efficace.  Disciples  des  grands  pro- 
phètes, ils  faisaient  connaître  au  peuple  leur  doctrine 
et  ils  ont  contribué  à  arrêter  l'invasion  du  polythéisme 
en  Israël.  Ils  étaient,  dans  cette  œuvre,  personnelle- 
ment animés  de  l'Esprit  de  Dieu;  cet  Esprit  les  inspi- 
rait, les  dirigeait  et  favorisait  leur  succès  :  ce  qui  appa- 
raît tout  à  fait  digne  de  l'action  directe  de  Dieu  sur  son 
peuple  choisi. 

3»  Les  prophètes  de  la  troisième  période  ne  diffèrent 
donc  pas  essentiellement  de  ceux  des  périodes  antécé- 
dentes. Us  continuent  leur  univre  de  direction  et 
d'enseignement  par  des  moyens  nouveaux,  plus  parfaits 
en  eux-mêmes  peut-être  ou  selon  notre  mode  d'appré- 
ciation, mieux  adaptés  aux  besoins  de  leur  temps  et 
produisant,  par  l'écriture,  des  effets  plus  durables  de 
leur  ministère  prophétique.  Distinguer  des  formes  in- 
férieures et  des  formes  supérieures  de  l'inspiration 
divine,  c'est  mesurer  l'action  de  Dieu  aux  idées  hu- 
maines. Il  reste  cependant  conforme  aux  lois  de  la 
providence  que,  puisque  Israël  avançait  progressive- 
ment dans  la  civilisation,  qu'il  était  plus  directement 
en  rapport  avec  les  grands  empires  polythéistes  et  qu'il 
avait  besoin  de  mieux  comprendre  la  religion  et  le 
culte  spirituels,  Dieu  ait  choisi  de  nouveaux  moyens 
d'entrer  en  communication  avec  lui  était,  si  l'on  veut, 
recouru  à  des  formes  plus  parfaites  d'inspiration  pour 
éclairer  ses  prophètes.  Ce  développement  et  ce  progrès 
de  l'esprit  prophétique  se  comprennent  très  bien  et  se 
justifient  logiquement.  Ils  diffèrent,  il  est  vrai,  de  ceux 
que  les  critiques  ont  créés  d'après  leurs  vues  naturelles 
et  leurs  idées  rationalistes. 

La  seule  remarque  à  ajouter  est  que  les  prophètes 
du  vin»  siècle  ne  sont  pas  les  créateurs  du  monothéisme. 
La  foi  monothéiste  d'Israël  remontait  aux  origines  de 
ce  peuple,  constitué  précisément  pour  en  être  le  gar- 


7-47 


PROJMIETISME 


'ROPRIETE 


7  48 


dien  dans  l'humanité.  Voir  t.  m,  col.  1235-1237.  Les 
prophètes,  nous  l'avons  < I i t  ['lus  haut,  col.  717,  uni  été 
assurémenl  les  apôtres  el  les  propagateurs  du  mono- 
théisme; mais  ils  ne  l'ont  pas  fondé.  La  création  du 
monothéisme  par  1rs  prophètes  du  vm» siècle, non  seu- 
lement ,  pas  démontrée,  mais  encore  elle  se  heurte 
à  des  difficultés  insurmontables  qu'a  bien  fait  valoir 
l'abbd  di  Bi  iglie,  Questions  bibliques,  2«  édit.,  Paris, 
I90i,  p.  243-320.  Leur  rôle  historique  et  l'influence  des 
prophètes  d  Israël,  iris  que  nous  les  avons  exposés 
précédemment,  col.  717,  ne  sont  pas  pour  cela  amoin- 
dris. De  ce  'in'ils  les  ont  remplis  et  exercés  sons  l'in- 
spiration divine,  leur'  gloire  n'en  est  pas  diminuée.  C'est 
un  honneur  pour  un  homme  d'avoir  été  l'instrument 
intelligent,  libre  et  docile  de  l'Esprit  inspirateur.  L'in- 
spiration prophétique  n  esl  pas  une  action  mécanique 
qui  l'.ùi  mouvoir  des  agents  inconscii  nls.  Elle  a  sauve- 
gardé, nous  ['avons  dit,  avec  la  doctrine  catholique,  la 
conscience,  l'intelligence  et  la  liberté  des  prophètes. 
Tout  en  maintenant  leur  inspiration  surnaturelle, nous 
pouvons  les  saluer  comme  les  plus  grands  hommes 
d'Israël  et  les  plus  dignes  représentants  de  Dieu  dans 
l'histoire  du  peuple  choisi.  La  grandeur  de  l'œuvre 
i|u'ils  ont  accomplie  est  la  marque  la  plus  certaine  que 
Dieu  a  parlé  par  leur  bouche.  E.  Mangenot. 

PROPITIATOIRE  (hébreu  :  kapporét;  Septante  . 
IXaerc^piov,  Im'ÔEji.a,  ou  seulement  iXaaTvjpcov  ;  Vulgate  : 
propitiatorium),  plaque  d'or  qui  couvrait  l'Arche  d'al- 
liance et  portait  les  deux  chérubins.  Voir  Arche  d'al- 
liance, l.  i,  col.  913-919. 

1"  Description.  —  Le  propitiatoire  était  une  plaque 
d'or  pur,  longue  de  deux  coudées  el  demie  (ln>31)  et 
large  d'une  coudée  el  demie  (0m78).  Aux  deux  extré- 
mités étaient  placés  les  chérubins  d'or  battu,  qui  fai- 
saienl  corps  avec  le  propitiatoire.  Les  chérubins  se  fai- 
saient face,  et  leurs  ailes  déployées  vers  le  haut 
couvraient  le  propitiatoire,  en  laisant  vide  l'espace  du 
milii  i  .  l.i  propitiatoire  était  posé  au-dessus  de 
l'Arche.  Exod.,  xxv,  17-21;  xxvï,  li'i  :  xxx.ii,  xxxi.7: 
xxxv,  12;  xxxvii,  6-9;  w.xix.  :iô;  xl,  20. 

•1"  Destination.  —  1.  Le  propitiatoire  servait  lotit 
d'abord  à  couvrir  l'Arche.  Celle-ci,  étant  un  coffre  ou- 
vrant par  le  haut  et  contenant  différents  objets,  avait 

nalurellemciil  besoin  d'un  couvercle.  Exod.,  xxv,  21. 
-  2.  Le  propitiatoire  était  de  plus  l'endroit  où  le  Sei- 
gneur communiquai!  avec  Moïse'.  «  Là  je  me  rencon- 
trerai avec  toi  et  je  te  communiquerai,  de  dessus  le  propi- 
tiatoire,  du  milieu  des  deux  chérubins, tous  les  ordres  que 

|e  ledoi ai  poui  les  enfants  d'Israël.  »  Exod.,  xxv. 22. 

<  Lorsque  Moïse  euh  ail  dans  le  Tabernacle  de  l'alliance 
pour  parler  avec  Jéhovah,  il  entendail  la  voix  qui  lui 
parlait  de  dessus   le  propitiatoire  placé  sur  l'Arche  du 

|r ignagi  .  entre  les  deux  chérubins,  et  il  lui  parlait.  » 

Num.,   vu,    89.    C'était  là   comme    le    tre le  Dieu, 

l'endroit  où  il  manifestait   sa  présence  et   rendail  ses 
oracles .  I  esl  cette  pi  é  ence  ainsi  manifestée  que  plus 
tard  les  Juifs  ont  appelée  lekindh,  >■  habitation  ».  Voir 
Gloire  de  Dieu,  t.  m,  col.  252;  Oracle,  t.  iv,  col.  1846. 
On  comprend  dèi   loi     pourquoi  ce  dessus  du  propitia- 
toire restail   vide,  pour  servir  de    résidence   au  Dieu 
ible  il  dont  toute    représentation  était  interdite. 
Li  s  archi  -  égyptii  nue-,  au  contraire,  portaient  toujours 
m  Iconque  de  divinité.   Voir  t.  i,  fig.  24  I. 
ol  913,915,918       :;  Le  jour  de  la  fêle  de  l'Ex- 
til    dans   le  Saint  des 

ainl  pri  ua on  doigl  du  sang  du  taureau 

immolé,  il  aspet  oi  ientale  du  propitiatoire 

"t  sept  .mil  es  a  d     mm  le  propitiatoire, 

il  recommençai!  ensuite  le  même  rite  avec  le  sani   du 

1 mole    Lev.,   xvi,  1 1-15.  I 

pour  kul  de  prési  ntei    à 

1 1  ndi  i   prop 


3°  Signification.  —  1.  Le  mot  kapporét  vient,  d'après 
quelques  anciens  auteurs  juifs  et  quelques  modernes. 
de  kâfar,  o  couvrir  »  ;  il  désignerait  donc  le  propitia- 
toire  uniquement  comme  É:;iO=ij.a,  «  couvercle  »  de 
l'Arche.  Il  est  peu  probable  que  les  Hébreux  aient  at- 
taché un  sens  aussi  restreint  au  mot  kapporét,  qui 
n'est  d'ailleurs  employé  qu'à  propos  de  l'Arche.  L'idée 
de  «  couvrir  »  était  tout  à  fait  secondaire  dans  un 
objet  qui  portait  les  deux  chérubins  et  servait  de  trône 
à  la  majesté  divine.  Puis,  aurait-on  appelé  le  Saint  des 
saints  bt't  hak-kappôréf,  «  maison  du  couvercle  »? 
I  Par.,  XXVIII,  11.  —  2.  Les  anciennes  versions  ont  fait 
dériver  le  mol  du  piel  kippér,  qui  veut  dire  «  par- 
donner »  et  «  expier  o.  Cf.  Deut.,  xxi.  S;  l's.  lxv,  i; 
Jer.,  xviii.  23;  Exod.,  xxx,  15;  Le\.,  i.  i,  etc.  L'assy- 
rien kuppuru  ou  kapdru  a  aussi  le  sens  de  «  purifier, 
essuyer  ».  Les  takpirâli  sont  des  purifications  que 
Vâsipit  applique  à  des  personnes  ou  à  des  objets 
divers.  Cf.  I"r.  Martin,  Textes  religieux  assyriens  el 
babyloniens,  Paris,  1903,  p.  xxii-xxin;  Zimmern,  Die 
Keilinschr.  und  tins  A.  T..  Berlin,  1903,  p. 601.  L'arabe 
kaffdrah,  dans  le  Coran,  dé-signe  une  g  expiation  »  ou 
un  o  moyen  d'expiation  ».  Cf.  Hughes,  Dict.  of  Islam, 
Londres,  1896,  p.  259.  Le  sens  de  kapporê(  comporte 
donc  certainement  l'idée  d'expiation.  Les  Septante 
le  rendent  par  IXaaTrjpiov,  du  verbe  iXô(mou.ai,  «expier, 
rendre  propice.  »  Dans  l'Épttre  aux  Hébreux,  IX,  .">,  le 
même  mot  désigne  le  kappôréf.  La  Vulgate  l'appelle 
propitiatorium,  l'endroit  de  la  propitiation.  Le  sens 
du  mot  est  donc  surtout  emprunté  au  rite  de  la  l'été  de 
l'Expiation.  C'est  invisiblement  présent  sur  le  kap- 
porét que  Dieu  recevait  les  marques  authentiques  du 
repentir  d'Israël,  c'est  là  qu'il  accordait  au  peuple  SOD 
pardon.  Là  aussi  Dieu  communiquai!  ses  volontés  à 
Moïse.  .Mais  ces  communications  divines  se  firent  après 
Moïse  par  l'Urim  et  le  Thummin  et  le  texte  de  1  Re 
xiv,  18,  à  supposer  qu'il  n'ait  pas  été  altéré,  n'indiqua 
nullement  que  l'Arche  ail  servi  pour  faire  connaître 
au  grand-prêtre  Achias  la  volonté  divine.  Tous  les  ans, 
au  contraire,  le  grand-prêtre  pénétrait  dans  le  Saint 
des  saints  pour  y  implorer  le  pardon  divin.  Il  était 
donc  naturel  que  l'historien  sacré  parlai  de  la  »  maison 
de  la  propitiation  »,  bét  hak-kappôréf  ■  I  Par.,  xxvin, 
11.  Le  propitiatoire  d'or  était  en  réalité   le  siège  de  la 

royauté  de  Jéhovah  sur  Israël  .  c'estde  la  qu'il  co lan- 

dait,  c'est  là  qu'il  pardonnait.  Au  lieu  d'être  comme 
un  accessoire  destiné'  à  couvrir  l'Arche,  le  propitiatoire 
coiisliluail  .m  en  n  Ira  ire  la  pièce  principale,  dont  l'Arche 
était  comme  la  base.  Aussi  les  écrivains  sacrés  aiment- 
ils  à  appeler  Jéhovah  "  celui  qui  siège  entre  les  ché- 
rubins ».  I  lleg..  IV.  i;  Il  lleg..  VI,  2;  IV  lieg.,  XIX, 
lô;  I  l'a...  xiii.  Il:  l's.  i  xxx  (lxxix),  2;  XCIX  (xcxvm), 
1;  Is.,  xxxvii.  Iii.  Dan.,  ni,  55.  Cf.  liâhr,  Symbolih 
des  mosaischen  Cullus,  Heidelberg,  ls:i7,  t.  i,  p.  379- 
382,  387-395,  —  3.  Saint  Paul   dit  que  Jésus-Christ  a 

été  montré  «  c< e  iXjto^ptoy,  propitiatio,  dans  son 

sang  parla  foi.  t  Rom.,  ni,  25.  Le  mot  iXa<nr,piov  a  été 
retrouvé' dans  un  certain  nombre  d'inscriptions;  il  j 
désigne  nu  «  moyen  »  ou  un  objel  d'expiation  »  ou  de 
>  propitiation  ».  C'esl  bien  le  sens  de  l'hébreu  kappo- 
rét. Quanl  a  Noire-Seigneur,  il  esi  présenté  par 
sainl   Paul  comme  «  moyen     ou  «  instrument  d'expia- 

i il  expie  i    dans   son   sang    i    el   on  s'applique 

.■elle  expiation  i  par  la  foi.  »  Cf.  F.  Prat,  La  théologie 
de  sainl  foui.  Paris.  1908,  p.  282,  287  289. 

II.  Lesêtre. 

PROPOSITION  (PAINS  DE).  Von   Pains  di 
rosi  i  io\.  n.  2 ".  I.  iv.  col.   1957. 

PROPRIÉTÉ,  droit  eu  vertu  duquel  une  chose  ap- 
partient en  propre  a  quelqu'un. 

I.  A  i  i  poqi  i  patri  ua  ai  e.  -  1"  Dans  le  principe, 
Dieu  avait  placé  l'homme  sur  la  terre  en  lui  disant 


749 


PROPRIETE 


750 


lui  el  à  tous  ses  descendants  :  kibsu/ui,  xataxupteûtraTe 
ntÙTTjç,  subjicite  eam,  «  soyez-en  les  maîtres.  »  Gen.,  i, 
'28.   L'homme  était  ainsi  constitué  le  propriétaire  de  la 

terre,  c'est-à-dire  de  tout  ce  qu'il  pouvait  en  atteindre 
par  l'exercice  de  son  activité.  Les  animaux  furent 
également  mis  à  sa  disposition.  Gen.,  i,  28;  ix.  2,  3. 
Cette  propriété  devait-elle  rester  indivise  ou  se  partager? 
Dieu  ne  l'indiqua  point.  11  laissa  à  l'homme  la  liberté 
de  disposer  de  sa  propriété  comme  il  le  jugerait  bon. 
De  l'ait,  ceux  d'entre  les  hommes  qui  menèrent  la  vie 
nomade  exercèrent  leur  droit  de  propriété  sur  le  sol 
en  l'occupant  Iransitoirement  et  en  exploitant  ses  pro- 
duits spontanés  pour  leur  usage  et  celui  de  leurs  trou- 
peaux. Mais  déjà  les  pasteurs  nomades  possédaient  une 
propriété  personnelle,  celle  de  leur  troupeau.  Abe] 
offrait  à  Dieu  les  premiers-nés  de  «  son  troupeau  », 
c'est-à-dire  les  prémices  d'un  bien  qui  était  à  lui. 
Gen.,  iv,  'i.  D'autres  s'établirent  à  demeure  lixe  sur  une 
partie  du  sol.  Un  lils  de  Caïn,  Hénoch,  bâtit  une  ville. 
Gen..  îv,  17.  Le  terrain  occupé  et  les  demeures  élevées 
sur  son  emplacement  devenaient,  de  droit  naturel,  la 
propriété  des  bâtisseurs.  De  plus,  pour  subsister,  il 
leur  fallait  aussi  posséder  des  terres  environnantes, 
soit  pour  les  cultiver.  Gen..  îv.  12,  soit  pour  y  élever 
des  troupeaux.  La  propriété  se  trouva  ainsi  constituée 
naturellement  sous  diverses  formes,  engendrées  par 
des  manifestations  différentes  de  l'activité  humaine. 

2>'  En  arrivant  dans  le  pays  de  Chanaan,  Abraham 
amenait  avec  lui  les  biens  qu'il  possédait.  Ces  biens 
consistaient  surtout  en  troupeaux.  Les  Chananéens  et 
les  Phérézéens  étaient  alors  établis  dans  le  pays.  Gen., 
xiii.  7.  Abraham  et  Lot  n'en  faisaient  pas  moins  paitre 
leurs  troupeaux  ici  et  là  sans  être  inquiétés.  Ayant 
constaté  qu'ils  ne  pouvaient  rester  ensemble,  Lot  s'en 
alla  dans  la  plaine  du  Jourdain  tandis  qu'Abraham 
demeurait  en  Chanaan.  Il  existait  doncalors  des  espaces 
considérables,  sur  lesquels  les  habitants  du  pays  ne 
songeaient  à  revendiquer  aucun  droit  de  prepriëté,  ou 
dont,  tout  au  moins,  ils  laissaient  le  libre  usage  aux 
nomades.  Dieu  toutefois  se  réservait  le  droit  de  dispo- 
ser de  la  propriété  du  sol,  puisqu'il  dit  à  Abraham  : 
■  Tout  le  pays  que  tu  vois,  je  le  donnerai  à  toi  et  à  tes 
descendants  pour  toujours.  »  Gen.,  xui,  15.  Sur  ce  sol 
occupé  d'une  manière  générale  par  des  peuples  séden- 
taires, il  y  avait  des  propriétés  particulières.  A  Héhron, 
Éphron,  lils  de  Séor.  possédait  un  champ,  et,  au  bout 
de  ce  champ,  la  caverne  de  Macpélah.  Abraham  dési- 
rait cette  caverne  pour  y  inhumer  Sara  et  en  faire  un 
lieu  de  sépulture  à  lui.  Il  lit  marché  avec  Éphron  et, 
pour  quatre  cents  sicles  d'argent,  il  acquit  en  toute 
propriété  le  champ  et  la  caverne,  avec  les  arbres  qui 
se  trouvaient  dans  le  champ  et  tout  autour.  Gen.,  xxin, 
16-18.  Dans  les  pays  inoccupés,  les  nomades  creusaient 
des  puits  pour  les  besoins  de  leurs  troupeaux,  et,  bien 
que  disputés  par  les  populations  sédentaires  du  voisi- 
nage, ces  puits  demeuraient  leur  propriété.  Gen.,  XXVI, 
15,  18-22,  32.  A  Gérare,  en  pays  philistin,  lsaac  put 
même  faire  dis  semailles  et  récolter  abondamment. 
Gen.,  xxvi.  12.  Les  fils  de  Jacob  allaient  paitre  leurs 
troupeaux  jusqu'à  Sichem  el  Dothaïn,  pendant  que  leur 
père  résidait  à  Hébron,  où  Abraham  avait  acquis  une 
propriété-.  Gen.,  xxxvil,  1,  H,  17.  En  somme,  au  point 
de  vue  de  la  constitution  de  la  propriété,  le  pays  de 
Chanaan  apparaît  déjà  à  peu  près  tel  que  les  Hébreux 
le  trouveront  au  moment  de  la  conquête.  La  population 
forme  des  agglomérations  qui  possèdent  les  villes  et  les 
bourgs  épars  à  travers  le  pays.  Les  membres  de  ces 
agglomérations  comptent  parmi  eux  des  hommes  qui 
sont  propriétaires  de  champs  situés  dans  les  alentours. 
Puis,  entre  ces  agglomérations,  qui  ont  le  haut  domaine 
sur  les  habitations  et  la  campagne  environnante, 
s'étendent  des  espaces  plus  ou  moins  vastes,  stériles 
ou  inoccupés,  sur  lesquels  les  nomades  peuvent  s'éta- 


blir Iransitoirement,  mais  toujours  à  leurs  risques  et 
périls,  comme  le  montre  l'histoire  de  Lot,  Gen.,  xiv, 
12-16,  et  celle  d'Isaac.  Gen.,  xxvi,  10,  17,20. 

II.  Chez  les  Babyloniens.  —  1°  Le  roi  possédait  de 
vastes  domaines,  à  la  tète  desquels  il  plaçait  des 
administrateurs.  On  trouve  mentionnés  les  ministres 
du  blé,  les  chefs  des  vignes,  les  chefs  des  troupeaux 
de  bœufs,  etc.  Cf.  Rawlinson,  Cun.  Inser.  W.  As.,  t.  h, 
pi.  31,  cul.  il,  '2;  m.  22;  vi.  4.  Aux  temples  des  dieux 
étaient  attribués  des  territoires,  des  troupeaux,  des 
biens  de  toute  nature,  qui  allaient  sans  cesse  en  s'accu- 
mulant  et  que  se  chargeaient  d'amoindrir  de  temps  à 
autre  des  voisins  pillards  ou  des  rois  à  court  de  res- 
sources. En  principe,  la  terre  était  le  domaine  impres- 
criptible des  dieux:  il  convenait  donc  que  les  déten- 
teurs particuliers  tinssent  compte  de  ce  droit.  Cf.  Mas- 
pero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  676-678.  Le  roi  accor- 
dait à  ses  officiers  des  apanages  comprenant  maison, 
champ  et  jardin.  Ces  domaines  restaient  inaliénables 
et  la  vente  en  était  frappée  de  nullité.  Le  concession- 
naire ne  pouvait  les  transmettre  à  sa  femme  ni  à  sa 
tille,  qui  n'avaient  droit  qu'aux  biens  propres  de  l'époux 
el  du  père.  Celui-ci  devait  pourtant  pouvoir  transmettre 
à  son  lils  les  biens  reçus  du  roi,  à  moins  qu'ils  ne  fissent 
retour  au  donateur,  ce  sur  quoi  les  textes  ne  s'expliquent 
pas.  Cf.  Scheil,  Textes  élamites-sëmitiques,  Code  de 
Hammurabi,  art.  35-41,  p.  137.  Les  articles  suivants, 
12-65,  p.  138- 1 40,  se  rapportent  à  la  gestion  des  pro- 
priétés particulières.  Les  contrats  chaldéens  démontrent 
que,  dans  la  classe  moyenne,  chaque  famille  avait  sa 
propriété  qu'elle  s'efforçait  de  conserver.  La  maison 
était  léguée  à  la  veuve  ou  au  lils  aine,  à  moins  qu'elle 
restât  indivise.  Les  terres,  fermes,  jardins  el  autres 
biens  se  partageaient  entre  les  frères  ou  les  descendants 
naturels.  Au  temple,  à  la  porte  du  dieu,  un  arbitre 
présidait  à  la  répartition,  et  quand  celle-ci  était  acceptée, 
il  n'y  avait  plus  à  y  revenir.  Ces  partages  amoindrissaient 
graduellement  les  fortunes;  au  bout  de  quelques  géné- 
rations, l'avoir  des  héritiers  devenait  trop  médiocre 
pour  les  faire  vivre,  et  ceux-ci  servaient  de  proie  à  des 
usuriers,  s'ils  ne  parvenaient  à  relever  leur  situation. 
Cf.  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  748-749.  Les 
terres  étaient  limitées  par  des  bornes.  Voir  Borne,  t.  i, 
col.  1854. 

2"  En  Mésopotamie,  Bathuel,  père  de  Rébecca,  était 
riche  et  possédait  de  grands  troupeaux.  Gen.,  xxiv, 
25.  32.  Labi  n.  frère  de  Rébecca,  élevait  au  même 
endroit  de  nombreux  troupeaux,  dont  Jacob  prit  la  garde 
pendant  vingt  ans.  Gen..  xxxi,  38.  .Mais  Laban  ne  vivait 
pas  en  nomade;  il  avait  une  maison,  Gen.,  xxxix,  13, 
probablement  avec  des  terres  alentour,  ce  qui  n'empê- 
chait pas  de  conduire  les  troupeaux  jusqu'à  trois  jours 
de  marche,  Gen.,  xxx,  36.  dans  des  endroits  dont 
l'usage  restait  libre  à  tous. 

3°  Quelques  siècles  plus  tard,  les  Israélites  furent 
transportés  dans  ce  même  pays.  Pendant  que  leurs 
terres  de  Palestine  étaient  attribuées  a  des  colons 
étrangers,  eux-mêmes  occupèrent  celles  qu'on  leur 
assigna  en  pays  chaldéen.  II  Reg.,  xvn,  6,  24.  La 
propriété  ne  leur  fut  ni  interdite,  ni  inaccessible. 
Voir  Captivité,  t.  n,  col.  234,  235,  239.  Aussi  Jérémie, 
xxix,  4,  pouvait-il  dire  aux  exilés  :  <•  Bâtissez  des 
maisons  et  habitez-les,  plantez  des  jardins  et  rnangez-en 
les  fruits.   ( 

III.  Chez  les  Égyptiens.  —  1"  En  Egypte,  comme  en 
Babylonie,  une  grande  partie  du  territoire  était  la 
propriété- des  temples  liiudore  de  Sicile.  I,  21,  71!,  dit 
que  le  tiers  du  pays  appartenait  aux  prêtres.  Son  affir- 
mation a  été  reconnue  conforme  à  la  réalité.  Le  roi  et 
mneurs  se  chargeaient  d'arrêter  l'extension  de 
ces  biens  en  mettant  la  main  de  temps  en  temps  sur 
les  revenus  des  dieux.  Il  était  de  principe  que,  mise  à 
part  la  propriété  des  dieux,  le  sol  entier  appartenait 


751 


PROPRIETE 


752 


au  pharaon.  Mais  celui-ci  avait  à  faire  de  nombreuses 
largesses  à  ses  favoris  el  aux  seigneurs  héréditaires. 
Son  domaine  immédiat  ne  s'étendait  pratiquement  que 
-m  la  moitié  du  pays  :  ce  domaine  se  rétrécissait  quand 
les  concessions  devenaient  trop  nombreuses,  el  il  se 
reconsl il uait  quand  de  grands  liefs  lui  faisaient  retour  par 
ation  ou  par  quelque  autre  voie.  Le  pharaon  exploi- 
tait directement  une  petite  partie  de  ce  domaine  au 
nue.,  h  de  ses  esclaves  royaux  :  le  reste  était  confié  à  des 
fonctionnaires  qui  payaient  unereilevanceannuelle.  Les 
ni  droil  qu'à  l'usufruit  de  leurs  fiefs, 
dont  la  propriété  appartenait  au  pharaon.  Cela  ne  les 
■  liait  pas  de  s'y  comporter  en  maîtres  absolus 
el  de  les  administrer  pour  leur  compte  personnel, 
soit    directement,    soit    par    des    fermiers.     Quelques 


181.       Boi  ne  égyptienne. 
■  -  Mariette,  Monuments  divers,  pi.  17  n. 

cultivateurs  libres  réussissaient  è  acheter  des  domaines 
sur  les  territoires  concédés  par  le  pharaon,  et  dont,  par 
île,  celui-ci  restait  toujours  propriétaire.  Ces 
cultivateurs  pouvaient  d'ailleurs,  sans  nulle  opposition, 
h. m  seulement  l'aire  valoir  leur  domaine,  mais  encore 
le  léguer,  le  donner,  le  vendre  ou  en  acheter  de  nou- 
■  ni  i r  cela  une  taxe  personnelle  el 

rbnci    i  .    I.i       I  ilie.iii.ms  apportées  frequem- 

menl  à  la  configuration  du  terrain  par  les  inondations 

du  Nil  obligeaient  à  reviser  continuelle al  le  cadastre 

et  à  limiter  exactement  chaque  propriété  par  une  ligne 

181),  poi  tant  souvent  le  nom  du  proprié- 

I  avec  la  date  du  dernier  bi  i  nage    I  f    Mas- 

ne,  t.  i.  p.  283,  ±u'<.  303,  328    La 

constitution  de  la  propi  »  pie  tenait  à  la  nature 

ne' lu  sol  produ    leur,       [ci    toui   I  lent  il'i   Nil,  el   les 

'erre  , ions,  ) ■  nous  servir 

dune  expression  d'Hérodote,  n,  ô.  sont  un  véri 


présent  du  fleuve. Toutefois,  pour  répandre  ses  bienfaits 
sur  l'Egypte,  le  Nil  avait  besoin  d'une  main  puissante 
qui  lui  creusât  des  canaux  et  qui  pût  diriger  ses  eaux 
fécondantes;  la  distribution  des  eaux  du  Meuve  exigeait 
le  concours  de  la  puissance  publique  et  de  l'autorité 
souveraine;  il  fallait  que  le  pouvoir  des  gouvernements 
intervint,  et  la  nécessité  de  celte  intervention  dut 
changer  en  quelque  sorte  et  modifier  les  droits  de  la 
propriété  foncière.  oMichaud,  Correspondance  d'Orient, 
Taris,  t.  vin.   1835,  p.   64. 

•>  .losepli  connaissait  bien  la  situation,  quand  il 
prolita  de  la  famine  pour  reconstituer  le  domaine  royal. 
Il  commença  par  vendre  du  blé  aux   Égyptiens,  Gen., 

XLI,  56,  puis,  après   leur  argent,   il  recul  en  paie ni 

buis  troupeaux.  Gen.,  xi.vn.  13-17.  La  famine  se  pro- 
longeant, les  Égyptiens  eux-mêmes  offrirent  leurs 
terres  et  se  firent  serfs  du  pharaon,  afin  d'obtenir  du 
blé  pour  se  nourrir  et  ensemencer.  Tout  le  pays  devint 
ainsi  la  propriété  du  pharaon,  à  l'exception  des  terres 
des  prêtres,  c'est-à-dire  des  temples,  qui  étaient  inalié- 
nables. Les  Égyptiens  continuèrent  naturellement  à 
occuper  et  à  cultiver  leurs  champs,  quoique  passés 
dans  le  domaine  royal;  mais  Joseph  leur  imposa  une 
redevance  d'un  cinquième  sur  leurs  récolles.  Gen., 
xi. vu.  18-26.  Ordinairement,  l'impôt  montait  à  un 
dixième,  Cf.  Revue  des  deux  mondes,  lô  février  1875, 
p.  815;  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  t.  p.  A'M.  331, 
La  mesure  imposée  par  Joseph  équivalait  à  une  éléva- 
tion d'impôt,  justifiée  par  les  circonstances.  Cependant, 
grâce  à  lui,  le  pharaon  était  devenu  le  seulpropriél  lire 
du  pays,  mis  à  part  les  dieux  dont  les  propriétés  fon- 
cières durent  être  respectées.  I. 'auteur  de  la  Gem 
xi. vu.  '2u\  dit  que  la  loi  imposée  par  Joseph  était  encore 
en  vigueur  de  son  temps,  lié  roi  loti',  n.  108,  109,  attribue 
i  Sésostris  le  creusement  des  canaux  égyptiens  ,  |  le 
partage  des  terres  entre  tous  les  habitante,  moyennant 
le  paiement  d'un-'  certaine  redi  vance  sur  le  revenu. 
On  sait  que  le  nom  de  Sésostris,  Sésoustouri,  est  un 
sobriquet  désignant  Ramsès  II.  et  que  la  I 
attribuait  à  ce  prince  bien  des  travaux  et  des  exploits 
qui  remontaient  à  ses  prédécesseurs.  Toujours  est-il  que, 
pour  faire  le  partage  des  terres,  il  fallait  que  Ramsès  II 
ou  un  pharaon  plus  ancien  les  eut  en  sa  possession  i 
qui  confirme  le  récit  de  la  bible  sur  l'administration 
de  Joseph.  Ce  partage  n'empêcha  pas  Ramsès  III  de 
se  donner  comme  le  propriétaire  du  sol  de  l'Kg\pte. 
Cf.  Grand  Papyrus  Hari'is.  l 'lus  tard,  d'après  Diodore 
.le  Sicile,  i.  73,  le  lorritoiiv  était  ilhise  en  trois  pari-, 
celle  des  prêtres,  celle  du  pharaon  et  celle  des  .soldais. 

Cf,  Hérodote,  il.  168.  I  n  31  unie  .  dans  les  anciens  temps 

comme  aujourd'hui,  il  importail  peu  à  l'Égyptien  d'être 
propriétaire  OU  locataire  du  sol.  Toute  la  question  se 
résumait  pour  lui  à  pouvoir  le  cultiver,  a  sauvegard  i 
sa  récolte  contre  les  déprédations  et  à  en  abandonne! 

le   i s  possible  aux  collecteurs  d'impôts.  Cf.  Vigou- 

roux.  La  Bible  et  les  découvertes  modernes,  6  édit., 
t.  n.  p.  165-189. 

IV.  Chez  les  Israélites.  -  lia  législation  mosaïque 
commence  par  consacrer  le  principe  même  de  la  pro- 
priété, en  rappelant  le  droit  naturel  qui  défend  de  dé- 
rober, et  en  interdisant  mime  'le  convoiter  la  maison, 
les  animaux  du  prochain,  ni  rien  de  ce  qui  lui  appar- 
tient. Kxod..  xx.  lô.  17.  Cette  convoitise  est  prohibe,  en 
tant  qu'elle  prend  le  caractère  d'un  acheminement  a 
l'appropriation  illégitime  du  bien  du  prochain.  La  loi 
protège  la  propriété  dans  les  différentes  circonstances 
où  elle  peut  être  menacée.  \  oir  Borni  s,  i.  i.  col.  Is.Yi  ; 
Dette,  t.  il,  col.  1393;  Dommage,  t.  n.  col.  1182;  Ot 
rnoi  vi  -,  t.  iv.  coi.  ! T-j: ; ,  Vol. 

-J"  Le  Seigneur,  en  vertu  de  -ou  droil  souverain, 
Lev.,  wv.  i!.  donne  à  son  peiqde  le  pays  des  Chana- 
ii.  .n-.  pour  qu'il  en  occupe  les  villes  el  les  maisons, 
lient.,  xix,  1.  Il  en  prescrit  le  partage  suivant  certaines 


753 


PROPRIETE 


754 


règles.  A  chaque  tribu,  à  chaque  famille  est  attribué  un 
lot  inaliénable.  Ce  lot  devait  primitivement  se  tirer  au 
sort  et  être  proportionné  au  nombre  des  membres  de 
la  famille.  Num.,  xxxm,  54.  Des  précautions  étaient 
prises  pour  que  ce  lot  ne  sortit  ni  de  la  tribu,  ni  de  la 
famille,  voir  GoËL,  t.  III,  col.  260;  HÉRITAGE,  t.  m, 
col.  010,  cl  pour^|u'en  cas  d'aliénation  il  revint  à  la  fa- 
mille au  moins  à  l'année  jubilaire.  Voir  Jubilaire 
(Année),  t.  m,  col.  175'2.  Cette  disposition  s'appliquait 
même  au  champ  voué  à  .Téhovah  et  faisant  partie  d'un 
patrimoine.  Lev.,  xxvn,  22-25.  Aux  lévites  étaient  attri- 
buées des  villes  spéciales  et  des  pâturages  autour  de  ces 
villes.  Num.,  xxxv,  2-5.  Il  est  à  croire  qu'il  en  était  de 
même  dans  les  autres  villes,  autour  desquelles  la  cam- 
pagne, sur  une  étendue  variable,  était  réservée  aux 
habitants  soit  pour  le  labour,  soit  pour  le  pacage.  Ce 
terrain  était  probablement  morcelé  à  proximité  de  la 
ville  ou  du  village;  il  restait,  à  une  certaine  distance, 
propriété  indivise.  Le  sol  se  trouvait  ainsi  loti  à  peu 
prés  comme  du  temps  des  Chananéens  :  autour  des 
villes  et  des  villages,  des  terrains  attribués  à  chaque 
famille  comme  jardins  ou  champs  destinés  à  la  culture; 
au  delà,  un  territoire  plus  ou  inoins  étendu  servant  en 
commun  au  pâturage;  enlin,  entre  ces  territoires  appar- 
tenant aux  villes  ou  aux  villages,  des  espaces  libres, 
incultes  ou  improductifs,  que  personne  ne  revendiquait. 
L'existence  d'un  territoire  indivis  ou  communal  autour 
des  villages  parait  supposée  par  quelques  textes.  Mi- 
ellée, H.  5.  dit  au  faux  prophète  :  «Tu  n'auras  personne 
qui  étende  chez  toi  le  cordeau  sur  une  part  d'héritage 
dans  l'assemblée  de  Jéhovah.  »  Jérémie,  xxxvn,  11, 
sort  de  Jérusalem  pour  aller  au  pays  de  Benjamin,  afin 
de  retirer  sa  portion  au  milieu  du  peuple.  Peut-être 
s'agit-il  dans  les  deux  cas  d'un  terrain  communal,  qu'on 
divisait  en  portions  tirées  au  sort  chaque  année  parles 
familles  du  village.  A  cet  usage  se  rapporterait  l'allusion 
faite  par  le  Psalmiste  : 

Jéhovah  est  la  part  de  mon  héritage  et  de  ma  coupe; 
("est  toi  qui  m'assures  mon  lot. 

Le  cordeau  a  mesuré  pour  moi  une  portion  délicieuse, 
Oui,  un  splendide  héritage  m'est  échu. 

Ps.  xvi  (xv),  5-6.  Cf.  BuM,  La  société  israélite  d'après 
l'A.  T.,  trad.  de  Cintré.  Paris,  1904,  p.  94-95.  En  tous 
cas,  la  propriété  devenait  collective,  au  moins  quant  à 
l'usage,  durant  l'année  sabbatique.  Exod.,  xxm,  11; 
Lev.,  xxv,  0,  7.  A  la  même  idée  de  propriété  commune 
se  rattachaient  les  droits  de  glanage,  Lev.,  xix,9;  xxm. 
22,  Deut.,  xxtv,  19,  de  grapillage,  Lev.,  xix,  lit; 
Deut.,  xxiv,  21,  et  celui  d'entrer  dans  un  champ  ou 
dans  une  vigne  pour  y  manger  sur  place  des  raisins  ou 
des  épis.  Deut.,  xxm.  24-25. 

3»  La  propriété  privée  n'en  était  pas  moins  solidement 
constituée.  Elle  pouvait  comprendre  d'autres  possessions 
que  celles  qui  constituaient  le  domaine  patrimonial. 
Lev.,  xxvn,  16-21.  Ainsi  Caleb  se  fit  attribuer  la  pro- 
priété de  la  montagne  d'Hébron,  à  condition  d'en 
chasser  les  Énacim.  Jos.,  xiv.  11-1  i.  Après  avoir  donné 
à  sa  611e  Axa  un  domaine  peu  arrosé,  il  lui  en  accorda 
un  autre  qui  possédait  des  sources  d'eau.  Jud..  i.  Il,  15. 
Par  la  culture  de  leurs  terres,  l'élevage  de  leurs  trou- 
peaux et  l'extension  de  leurs  domaines  sur  des  terri- 
toires inoccupés,  certains  Israélites  de  vinrent  très  riches, 
tels  Nabal,  I  Reg.,xxv,  2;  Berzellaï,  IIReg.,  xix,32,  etc. 
Les  rois  eurent  naturellement  des  propriétés  fort  éten- 
dues. II  Reg.,  ix,  7.  David  possédait  des  champs,  des 
vignes,  des  vergers,  des  troupeaux  de  toutes  sortes  en 
différents  endroits  du  pays,  avec  des  préposés  chargés 
de  faire  valoir  tous  ces  biens.  I  Par.,  xxvn,  25-31.  Sa- 
lomon  faisait  administrer  les  siens  par  douze  intendants, 
assez  semblables  aux  fonctionnaires  du  pharaon.  Chacun 
d'eux  pourvoyait  pendant  un  mois  à  l'entretien  du  roi 
et  de  sa  maison.   III   Reg.,  IV,  7.  Josaphat  possédait  de 


grands  biens  dans  les  différentes  villes  de  Juda.  Il  Par., 
XVII,  13.  D'autres,  comme  Acbab,  ne  craignaient  pas 
de  recourir  au  crime  pour  agrandir  leur  domaine. 
III  Reg.,  xxi,  15,  16.  Les  gros  propriétaires  Israélites 
sont  désignés  sous  le  nom  de  gibbôrê  ha-hayll,  les 
«  grands  en  force  »,  nâv  5-jva7ov  \ayfii,  patentes  et  di- 
vites.  IV  Reg.,  xv,  20.  Pour  acquitter  les  mille  talents 
d'argent  (8500000  fr.)  versés  au  roi  d'Assyrie,  Manahem 
imposa  de  cinquante  sicles  d'argent  (141  fr.  50)  les 
propriétaires  du  royaume.  IV  Reg.,  19,  20.  Il  en  fallut 
donc  60000  pour  fournir  la  contribution.  Pour  qu'un 
si  grand  nombre  de  propriétaires  notables  existât  en 
Israël,  la  propriété  foncière  devait  être  assez  morcelée. 
En  Juda,  il  y  avait  une  tendance  abusive  à  étendre  les 
propriétés.  Isaïe,  v,  !>,  le  constate  en  ces  termes  : 

Malheur  à  ceux  qui  ajoutent  maison  à  maison, 

Qui  joignent  champ  à  champ, 

Jusqu'à  ce  qu'il  n'y  ait  plus  d'espace, 

Et  qu'ils  habitent  seuls  au  milieu  du  pays. 

Cf.  Mich.,  il,  2.  Cet  accaparement  ne  pouvait  guère  se 
produire  qu'au  mépris  de  la  loi  sur  l'inaliénabilité  des 
béritages  familiaux.  Il  avait  pour  effet  de  détruire  cette 
égalité  que  la  loi  avait  établie,  de  créer  de  grandes  pro- 
priétés foncières  et,  par  la  même,  de  réduire  à  l'indi- 
gence et  d'éliminer  peu  à  peu  les  petites  gens,  ceux  qui 
font  la  force  d'une  nation.  Aussi  le  prophète  ajoutait-il 
que  ces  grandes  et  nombreuses  maisons,  ainsi  passées 
aux  mains  de  quelques  propriétaires,  n'auraient  bientôt 
plus  d'habitants.  Is.,  v,  9. 

4°  L'Israélite  tenait  pourtant  avec  une  singulière 
énergie  à  son  domaine  familial.  Ou  aimait  à  habiter  en 
sécurité  «  sous  sa  vigne  et  sous  son  figuier  »,  III  Reg., 
iv,  25,  c'est-à-dire  dans  sa  propre  maison  et  sous  les 
ombrages  de  son  propre  jardin.  Micbée,  iv,  i,  promet- 
tait la  même  chose  pour  l'époque  île  la  restauration 
spirituelle.  Le  vieux  Berzellaï,  invité  par  David  à  le 
suivre  à  Jérusalem,  préférait  s'en  retourner  dans  sa 
ville  pour  y  mourir  près  du  sépulcre  de  son  père  et  de 
sa  mère.  II  Reg.,  xix,  37.  Quand  Acbab  offrit  à  Naboth 
d'acheter  sa  vigne  ou  de  lui  en  donner  une  meilleure, 
celui-ci  lui  répondit  sans  hésiter  ;  «  <Jue  Jéhovah  me 
garde  de  donner  l'héritage  de  mes  pères  !  »  III  Reg.  xxi, 
3.  Le  châtiment  annoncé  par  Elie  à  Acbab  et  à  Jézabel, 
après  le  meurtre  de  Naboth,  se  rapportait  à  deux  crimes  : 
«  N'as-tu  pas  tué  et  pris  un  héritage?  »  III  Reg.,  xxi, 
19.  Le  verbe  hébreu  yâras  signifie  «  prendre  un  bien 
héréditaire  ».  Septante:  lxÀï]povdu.ïi<jaç,  «  tu  as  hérité,  » 
tu  as  pris  un  bien  d'héritage.  Sous  les  patriarches, 
l'héritage  pouvait  passer  à  un  esclave,  quand  le  maître 
demeurait  sans  postérité.  Gen.,  xv,  2,  3.  Plus  tard, 
l'esclave  intelligent  arrivait  à  recevoir  une  part  dans 
l'héritage.  Prov.,  xvn,  2.  Mais  le  cas  ne  devait  pas  se 
produire  assez  fréquemment  pour  modifier  sensible- 
ment l'assiette  de  la  propriété.  L'Israélite  pouvait  pour- 
tant vouer  à  Jéhovah  sa  maison  ou  son  champ,  lesquels 
devenaient  propriétés  des  prêtres,  si  on  ne  les  rachetait 
pas.  Le\.,  xxvn,  14-21.  Sur  la  vente  des  maisons,  voir 
Maison,  t.  îv,  col.  590. 

.V  flans  sa  description  idéale  de  la  nouvelle  Terre 
Sainte,  Ézéchiel  fournit  de  curieux  renseignements,  en 
s'inspirant  de  l'état  de  choses  antérieur,  pour  le  consa- 
crer ou  pour  le  corriger.  Tout  d'abord,  le  pays  est  par- 
tagé et  tiré  au  sort.  Le  prophète  prévoit  troi?.  grandes 
parts.  La  première  part  est  pour  Jéhovah  :  son  sanctuaire 
y  est  élevé,  et  le  reste  du  territoire  est  occupé  par  les 
lévites.  Une  seconde  part  est  attribuée  à  la  maison 
d'Israël  et  une  troisième  au  prince.  Mais  ce  dernier 
devra  se  contenter  de  son  lot  et  ne  plus  empiélei  sur 

celui  du  peuple.      Ci        ra  son  do ine,  sa  possession 

en  Israël,  et  nies  princes  n'opprimeront  plus  mon 
peuple  et  ils  laisseront  le  pays  à  la  maison  d'Israël.  » 
Ezech.,    xlv,     1-8.    A    meilleur    droit    que    les    dieux 


/.  .< 


PROPRIKTi: 


756 


d'Egypte,  Jéhovah  était  considéré  comme  le  souverain 
propriétaire  du  sol.  Ps.  xxiv  (xxm),  1,2.  Israël  rendait 
nommage  à  son  droit  en  payant  les  red  inces  exigées, 
dîmes,  prémices  elc.  Le  prince  pouvait  faire  des  dons, 
à  condition  de  les  prendre  sur  son  propre  domaine, 
sans  expulser  personne  de  -.1  propriété,  el  avec  cette 
que  le  don  revenait  au  domaine  royal  à  l'année 
jubiliaire  si  d'autres  que  les  fils  du  roi  en  avaient 
1  zech.,XLVl,  16-18.  Nul  du  peuple  ne  coin  ail 
donc  le  péril  d'être  dépouillé  de  son  bien,  comme 
l'avait  été  Nabot  h.  Chaque  tribu  doit  avoir  une  part 
<l"  territoire,  et  ce  territoire  forme  une  bande 
allant  do  la  mer  à  la  vallée  du  Jourdain.  Dans  chaque 
tribu,  uni  portion  est  attribuée  non  seulement  à 
l'Israélite,  mais  aussi  au  gêr,  à  l'étranger  i|in  vil  au 
milieu  d'Israël  en  respectant  ses  lois.  Ezech.,  xi.vu.  13, 
li.  -21.  23.  La  capitale  est  comme  une  réduction  de 
tout  b'  pav-.  Il  y  a  là  encore  la  part  des  lévites,  la  part 
du  prince  et  celle  dos  habitants,  pris  d'ailleurs  dans 
toutes  les  tribus.  La  \ille  n'est  pas  isolée;  elle  a  une 
banlieue  composée  de  champs  et  de  pâturages.  Les 
artisan-  s'\  livrent  à  la  culture  et  pourvoient  ainsi  à  la 
subsistance  de  ceux  qui  remplissent  des  fonctions  dans 
la  ville.  Ezech.,  xi.vnt,  8-ii.  On  le  voit,  c'est  pour  le 
fond  l'organisation  antérieure,  mais  idéalisée  et  visant 
;i  me'  égalité  sociale  qui  n'a  pas  été  réalisée. 

i'>  Au  retour  de  la  captivité,  les  Israélites  trouvèrent 
les  anciennes  propriétés  occupées  ou  à  l'abandon. 
Asse2  peu  nombreux  eux-mêmes,  victimes  de  calamités 
•  1  de  vexations  multiples,  ils  eurent  peine  à  vivre  de 
leurs  bions  et  beaucoup  îles  moins  aisés  en  furent 
réduits  •  1  Qgager  leur  .noir  et  à  vendre  leurs  enfants 
comme  esclaves.  Il  Esd.,  v,  1-13.  Néhémie  parvint  à 
i  momentanément  la  situation.  La  prospérité 
matérielle  ne  parait  guère  avoir  repris  que  sous  la 
domination  des  Ptolémées. 

Y.  A  l 'i  poqi  k  évanci  liqi  e.  —  1"  Du  temps  de  Notre- 

Seigneur,  la  propriété  no  reposait  plus  sur  les  mê s 

qu'aux    époques   antérieures  a  la   captivité.  Les 

tribus  étaient  plus  c loins  confondues  e!  souks  les 

généalogies  >  a  gardaient  fidèlement  b-  souvenir.  De 
plu-,  beaucoup  d'étrangers  s'étaient  établis  en  Palestine 
el  possédaient.  Aussi,  quand  il  fait  quelque  allusion 
à  la  propriété,  le  Sauveur  ne  s'en  occupe-t-il  qu'au  point 
de  vue  moral  ou  ne  la  constate-t-il  quecommeun  fait. 
Il  parle  du  petit  propriétaire,  qui  -nue  dans  son 
champ,  Matth.,  xm,  i,  21.  31,  et  du  grand  propriétaire, 
qui  a  de  nombreux  esclaves,  Matth.,  xvin,  23;  Luc,  xn. 
37 ;  xvii.  7,  qui  possède  de  riches  exploitations  agri- 
Matth.,  xx.  I;  xxi  33;  Luc.  xvi.  1,  qui  amasse 
d'abondantes  récoltes,  Luc,  xn,  17.  il  l'ait  valoir  sa 
fortune.  Matth.,  xxv,  11;  Luc.  xix.   Li.   Il   menti le, 

in  ippi  cier  sa  conduite,  celui  qui  réalise  tout  son 
avoir  pour  acheter  un  champ  dans  lequel  il  sait  qu'un 
i'  ;soi  Matth.,  xm.  1  i.  Le  père  du  prodigue, 

Luc.  xv,  12,  ri  Joseph  d'Arimathie  suni  dos  riches, 
Matth.,  xxvii,  57.  Le  mauvais  riche  est  condamné,  mm 

pour  sa  richesse,   mais  pour  le  marnais   usage  qu'il  en 

.'  fait.  Luc.  xvi.  19,  Le  Sauveur  rappelle  le  commande- 
ment qui  protège  l.i  propriété  légitime  contre  b'  roi, 
Matth.,  xix.  18,  mais  il  se  mot  furt  au-dessus  de  toute 
question  d'intérêt  temporel.  Lui-même  n'a  pas  la  pro- 
pri  ité  don  gîte,  Matth.,  vin,  20;  Luc.  ix.  58;  ,l  refuse 
me  question  d'héritage,    Luc.  xn,   1  i, 

ente  les  i  i<  i  a le  un  obstable  à  l'i  nti  ée 

dans  le  royaume  di    Dieu.   Matth.,  xm.  -22;   xix,  23.  A 

ni  tout   le  royaume  de 
Dieu  et   sa  justice,  Matth.,   n,  23;   Luc.  xn,  31,  ri   i 

qui  veulent  d rparfai  ll<  de  renon- 

proprii  té,  Matth.,  xix,  21.  I  Notre- 

li     i  en   l'état   la  question  de  la  propriété. 
L    suppose   formellement  •  i  légitimité,   mais  il 
donne  i  I  ■  libei  té  humaine  le  soin  de  la  répartir  et  de 


l'utiliser.  Il  demande  seulement  aux  plus  aisés  de 
s'intéresser  à  leurs  frères  pauvres,  et  à  tous  ses  disci- 
ples de  faire  passer  en  première  ligne  les  biens  spiri- 
tuels. 

2»  Après  la  Pentecôte,  les  chrétiens  de  Jérusalem 
établirent  entre  eux  la  communauté  des  biens,  i  Tous 
ceux  qui  croyaient  vivaient  ensemble,  et  ils  avaient 
boit  ru  commun.  Ils  vendaient  leurs  terres  et  leurs 
biens,  et  ils  en  partageaient  le  prix  entre  Ions,  selon 
les  besoins  de  chacun.  »  Ad.,  Il,  44,  15  Trois  mille 
Juifs  environ  s'étaient  convertis  à  la  parole  de  saint 
Pierre,  àct.,  n.  il.  Parmi  eux  se  trouvaient  bon  nom- 
bre de  pauvres,  de  Juif-,  arrivés  de  l'étranger  etde  pro- 
sélytes sans  grandes  ressources.  D'autre  part,  ceux  qui 
demeuraient  attachés  au  judaïsme  se  montraient  fort 
peu  sympathiques  à  ceux  de  leur  famille  qui  embras- 
saient la  foi  nouvelle.  Il  était  donc  convenable  que, 
parmi  1rs  convertis,  les  plus  riches  vinssent  en  aide 
aux  moins  fortunés.  Leurs  revenus  ne  suffisant  pas  à 
cette  oeuvre,  ils  vendaient  leurs  terres  et  leurs  biens 
pour  en  utiliser  le  prix.  Rien  ne  s'opposait  à  la  vente 
et  à  l'achat  des  terrains.  Naguère  le  sanhédrin  avait 
acheté  auprès  de  Jérusalem  le  champ  d'un  potier,  avec 
les  trente  deniers  de  Judas.  Matth.,  XXVII,  7:  cf.  xm, 
li.  En  vendant  ainsi  leurs  biens  fonciers,  les  plus  riches 
faisaient  grand  acte  de  charité-;  en  mémo  temps,  ils  se 
dégageaient  de  toute  attache  terrestre  el  se  rendaient 
libres  pour  le  service  de  l'apostolat,  connue  il  arriva 
pour  Barnabe.  Act.,  iv,  37,  Quand  la  chrétienté  de 
Jérusalem  se  fut  encore  accrue,  elle  continua  sa  vie  de 
communauté  fraternelle,  a  Nul  n'appelait  sien  ce  qu'il 
possédait,  mais  tout  était  commun  entre  eux...  Il  n'y 
avait  parmi  eux  aucun  indigent;  tous  ceux  qui  possé- 
daient  dos  terres  el  des  maisons  1rs  vendaient  et  en 
apportaient  le  prix  aux  pieds  des  Apôtres;  on  le  dis- 
tribuail  ensuite  à  chacun, selon  ses  besoins.  »  Act.,  tv. 
32.  31.  3.",.  Les  choses  se  passaient  ainsi  sous  la  seule 
action  de  la  grâce  divine;  on  ne  voit  nulle  part  queles 

chefs  <\''  l'Église  naissante  aient  imposé   on  ren 

menl  si  désintéressé.  I.  Esprit  du  Seigneur  portait  1rs 
fidèles  à  mettre  en  pratique  ci-  que  le  Sauveur  avait 
présenté  comme  un  conseil  de  perfection,  Matth.,  xix. 
21.  el  nullement  connue  une  condition  nécessaire  à  la 
vie  chrétienne.  L'épisode d'Ananie  etSaphire  le  prouve 
surabondamment.  Ces  deux  chrétiens  avaient  vendu 
une  propriété  pour  en  apporter  le  prix  aux  Apôtres,  en 
se  réservant  cependant  une  partie  du  produit  de  la 
vente.  Sainl  Pierre  leur  reprocha  de  mentir  an  Saint- 
I.'sprit  en  retenant  quelque  chose  du  prix  de  leur 
champ  et  il  dit  à  Ananie  :      Ne  pouvais-tu  pas,  sans  le 

vendre,    en    rester  possesseur?    El  après  l'avoir  vendu. 

n'étais-tu  pas  maître  de  l'argent?  «  \rt..  v.  1.  Il  suit  de 

là  que  les  nouveaux  fidèles  n'élai.  il  obligés  ni  île  ven- 
dre leurs  propriétés,  ni  d'en  donner  le  prix  à  la  eom- 
munauté.  La  faute  d'Ananie  ei  de Saphire consista  donc 
surtout  dans  nue  dissimulation  accompagnée  d'orgueil 
ri  de  défiance  rnvers    la  Pro  i!-    voulurent   se 

procurer,  aux  vriix  de  I  I  glise,  la  gl  lire  de  tout  aban- 
donner au  bien  commun,  comme  le  faisaient  leurs 
frères;  mais  en  secret  ils  tinrent  à  garder  en  partie  le 
bénéfice  vie  leur  vente,  comme  si  Dieu  n'était  pas  là 
pour  leur  assurer  le  nécessaire.  Plusieurs  Pères,  SB 
référant  -ans  doute  à  Lev.,  xxvii,  16-21,  supposent  que 
l  offrande  totale  des  biens  résultait  d'une  promes 
d'un  vieu  qu'il  était  criminel  de  ne  pas  accomplir  inté- 
gralement. Cf.  S.  Jérôme,  Episl.  cxxx,  t.  xxn. 
col.  1118;  s.  Augustin,  Serai,  cxlviii,  2.  i.  xxxvm. 
col.  799;  s.  Grégoire,  Epist.  i.  .".i.  t.    i.xxvh,  col 

3°  A  cette  mène'  époque  vivaient  à  part,  sur  le  borf 
de  la  mer  Morte  etdans  l'oasis d'Engaddi,  les esséniens, 

ment  séparés  du  reste  de  la  société  juive  l  n 
leurs  lois  fondamentales  était  la  communauh  di  -  biensi 
Pour  faire  partie  de  leur   association,  il    fallait    mettre 


757 


PROPRIÉTÉ    —    PROSÉLYTE 


758 


son  patrimoine  à  la  disposition  de  tous,  ne  rien  con- 
server en  propre,  ne  rien  vendre  et  ne  rien  acheter  au 
sein  de  la  communauté,  vivre  dans  la  pauvreté  en  rece- 
vant d'une  caisse  commune  ce  qui  était  strictement 
nécessaire  pour  la  nourriture,  le  vêtement,  les  soins  en 
cas  de  maladie,  verser  à  cette  caisse  le  produit  de  son 
travail,  ne  rien  emporter  en  voyage,  etc.  Cf.  Josèphe, 
Bell,  jml.,  II,  vin,  3,  4,  8,  9;  Philon,  Qimd  omnis 
probits  liber.  12,  13,  édit.  Mangey,  t.  n,  p.  137,  45S, 
032,  633.  Les  écrivains  du  .Nouveau  Testament  ne 
l'ont  aucune  mention  des  esséniens  et  les  laissent  can- 
tonnés dans  leur  orgueilleux  et  stérile  particularisme. 
Les  pharisiens  les  avaient  en  horreur,  à  cause  de  leur 
prétention  à  être  des  Juifs  parfaits.  Ils  disaient  à  pro- 
pos de  leur  communisme  :  «  Celui  qui  dit  :  le  mien  est 
à  toi  et  le  tien  est  à  moi,  est  un  niais.  »  Pirké  abotli 
v,  li.  Les  doctrines  singulières  des  esséniens,  leur  fidé- 
lité servile  à  la  loi,  leur  éloignement  systématique  du 
Temple,  l'étrangeté  de  leur  manière  de  vivre  ne  per- 
mettlent  pas  de  dire  que  les  premiers  chrétiens  aient 
voulu  les  imiter.  Ceux-ci  avaient  pour  se  guider  les 
exemples  de  la  vie  menée  en  commun  par  les  Apôtres, 
les  exemples  et  les  conseils  du  Sauveur;  et  si  le  divin 
Maître  voulut  mener  une  vie  qui,  au  regard  des  hiens 
de  ce  monde,  avait  quelque  analogie  avec  celle  des  essé- 
niens, il  ne  lui  était  pas  nécessaire  de  recourir  à  eux 
pour  en  avoir  l'inspiration.  L'esprit  et  la  pratique  du 
détachement  et  de  la  charité  fraternelle  résultaient, 
comme  une  conséquence  toute  naturelle,  des  ensei- 
gnements qu'il  apportait  au  monde.  D'ailleurs  celte  vie 
d'obéissance  et  de  pauvreté  en  commun  n'était  pas 
totalement  étrangère  aux  anciens  Israélites;  elle  avait 
dû  être  la  vie  de  ces  «  lils  de  prophètes  »  qui  se  grou- 
paient autour  de  Samuel,  d'Élie,  d'Klisée  et  d'autres 
pieux  personnages.  I  Reg.,  x,  10;  III  Reg..  XX,  35; 
IV  Reg.,  n.  3;  iv,  38,   etc. 

4°  Le  système  inauguré  par  l'Église  de  Jérusalem  ne 
pouvait  être  que  transitoire.  Les  esséniens  excitaient 
l'admiration  du  peuple  par  leur  pauvreté  volontaire  et 
leur  charité.  Il  était  lion  de  montrer  que  la  doctrine 
nouvelle  avait  la  puissance  de  faire  pratiquer  ces 
grandes  vertus  par  tous  ses  adhérents.  .Mais  vint  le 
jour  où  toutes  les  propriétés  furent  vendues  et  où  il 
devint  fort  difficile  d'entretenir  une  société  nombreuse, 
incapable  de  se  suffire  par  son  seul  travail  et  n'ayant 
rien  à  espérer  de  ses  anciens  coreligionnaires.  Quand 
saint  Paul  vint  à  Jérusalem  après  ses  premières  mis- 
sions, les  trois  apôtres  qui  se  trouvaient  alors  dans  la 
capitale  durent  le  prier  de  se  souvenir  des  pauvres. 
Gai.,  il,  10.  Il  fut  lidèle  à  cette  recommandation.  Voir 
AUMÔNE,. t.  i.  col.  1251.  L'expérience  montrait  qu'au 
point  de  vue  de  la  propriété,  la  pratique  du  con- 
seil ne  pouvait  devenir  la  règle  générale  parmi  les 
chrétiens. 

ô°  Les  Apôtres,  dans  leurs  Ëpitres,  ne  disent  rien 
qui  ait  trait  directement  à  la  propriété.  Saint  Jacques, 
qui  avait  sous  les  yeux  le  contraste  existant  entre 
les  pauvres  de  son  église  chrétienne  et  les  riches  pro- 
priétaires du  judaïsme  sadducéen,  maudit  ces  derniers 
et  les  compare  à  la  victime  qui  se  repaît  encore  le  jour 
où  on  va  l'égorger.  Jacob.,  v,  1-6.  Saint  Paul  recom- 
mande de  ne  pas  attacher  son  cœur  à  ce  que  l'on  pos- 
sède. I  Cor.,  vu,  30.  Il  veut  que  les  ministres  de  Dieu, 
qui  possèdent  tout  dans  l'ordre  spirituel,  II  Cor..  VI, 
10,  se  contentent,  pour  toute  propriété,  de  ce  qui  est 
indispensable  à  la  nourriture  et  au  vêtement.  I  Tina.,  VI, 
8.  Dans  le  cours  de  ses  missions,  l'Apôtre  fut  mis  en 
rapport  avec  des  personnes  qui  disposaient  de  pro- 
priétés considérai. les,  Priscille  et  Aquila.  qui  entre- 
tenaient une  communauté  chrétienne  dans  leur  maison, 
à  Corintlic,  I  Cor.,  xvi.  19,  et  à  Ruine,  Hum..  XVI,  5,  Phi- 
lémon,  auquel  il  demande  l'hospitalité, Philem., 22, etc. 
Des  patriciens  de   Rome  ne  lardèrent  pas  à  suivre  les 


exemples  de  ces  premiers  chrétiens  et  à  mettre  à  la  dis- 
position de  leurs  frères  dans  la  foi  leurs  maisons,  pour 
y  célébrer  leur  culte,  leurs  domaines  ruraux,  pour  y 
creuser  leurs  sépultures.  11.  Lesètre. 

PROSÉLYTE  (Septante  :  7rpo<ri)Xyro5;  Vulgate  : 
proselytus),  étranger  qui  adhère  plus  ou  moins  com- 
plètement à  la  religion  juive. 

I.  Dans  l'Ancien  Testament.  —  Le  mot  7tpoor,XuToç 
est  particulier  au  grec  de  l'Ancien  Testament  et  ne  se 
trouve  pas  chez  les  classiques.  Dans  la  Genèse,  xi.vii, 
9,  Aquila  traduit  mâgûr,t  -■'■joui'  à  l'étranger  ».  r/ji^x: 
y.:  rcapotxû,  peregrinatio,  par  irpo<nr)X-jTeu(jiç.  Dans 
l'Exode,  xii.  lu.  ],.s  Septante  traduisent  gêr,<t  étranger  », 
par  itpooiôXuTo;,  colonus.  Dans  Ézéchiel,  xiv,  7,  les  mots 
hag-gêr  âSér  :i>igùr  beysrâ'êl,  »  l'étranger  qui  réside 
en  Israël  »,  sont  rendus  dans  les  Septante  par  jcpo<r»)).ilTOi 
ot  rcpo<n]Xu7£uovT£ç  iv  rw  'I^porr/,  et  dans  la  Vulgate  partie 
proselytis  quicumque  advena  fuerit  in  Israël,  «  qui- 
conque des  étrangers   se  sera   établi  en   Israël.    »  Le 

I    mot  prosélyte  est  encore  employé   pour  désigner  les 
j    étrangers,  gèrim,  qui   habitent    parmi   les    Israélites, 

I  Par.,  xxil,  2;  II  Par.,  il.  17;  XXX,  25;  Tob.,  I,  8   (7). 

En  somme,  dans  les  versions  de  l'Ancien  Testament, 

ce  mot  signifie  simplement  t  étranger  ». 

II.  A  l'époque  du  Nouveau  Testament.  —  1"  Signifi- 
cation du  mot.  —  Notre-Seigneur  accuse  les  scribes  et 
les  pharisiens  de  courir  les  mers  et  la  terre  pour  faire 
un  prosélyte  qu'ils  conduisent  ensuite  à  la  perdition. 
Matth.,  xxill,  15.  Le  mot  ne  signifie  plus  seulement 
«  étranger  »;  car  alors  la  remarque  du  Sauveur  ne  se 
comprendrait  pas.  Il  s'agit  d'un  étranger  conquis  à  la 
croyance  et  à  la  pratique  religieuse  des  Israélites.  A  la 
Pentecôte,  l'écrivain  sacré  signale  la  présence  à  Jéru- 
salem d'«  hommes  pieux  de  toutes  les  nations  »,  tant 
juifs  que  proséljtes.  Act.,  n,  5,  11.  Ici  encore  les  pro- 
sélytes sont  autre  chose  que  de  simples  étrangers. 
D'autres  noms  éclairent  la  signification  du  précédent. 
Des  étrangers  sont  appelés  ço6oûp.6vot  -a-i  Beôv,  timentes 
Deuni,  les  «  craignant  Dieu  ■>.  Act.,  x,  2,  22;  xm,  16, 
26;  ire6éu.svoi  tô*  Ôsov,  colentes  Deum,  les  «  servant 
Dieu  »,  Act.,  xvi.  14;  xvill.7,  ou  simplement  seôopieyo!, 
colentes,  Act..  xm.  50;  XVII,  1.  17. et  une  fois  <rE6ôp.£voi 
TcpoorjXuTO!,  colentes  advf.nse,<t  étrangers  servant  »  Dieu. 
Act.,  xm,  43.  Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIV.  vu,  2.  Ces 
noms  différents  désignent  les  gèrim  ou   «  étrangers  » 

»qui  ont  adhéré  de  quelque  façon  à  la  religion  juive. 
Dans  la  Mïschna,  le  mot  gêr,  traduit  par  jtpoarjXuToç, 
dans  les  versions,  prend  souvent  ce  sens  spécial  d'étran- 
ger converti.  Cf.  Bikkurim,  i,  4,  5;  Schekalim,  i,  3, 
6;  vu,  6,  etc.  De  gêr,  les  talmudistes  ont  même  tiré 
le  verbe  nitgayyêr,  «  se  convertir  ».  Cf.  Pea,  iv,6; 
Cltalla,  m,  6;  Pesachim,  vm,  8,  etc.  Comme  en 
araméen  gêr  devient  giyyorâ',  les  Septante  ont  créé  le 
mot  ystiipaç,  Lxod.,  XII,  19;  Is.,  xiv,  1,  pour  désigner 
les  réunions  d'étrangers  qui  se  joignent  aux  Israélites. 
Ainsi,  les  deux  mots  gêr  et  npooyiXuTo;  ont  perdu,  dans 
la  littérature  juive,  leur  sens  primitif  pour  en  prendre 
un  autre  plus  spécial.  Philon,  De  monarch.,  i,  7.  édit, 
.Mangey.  t.  n,  p.  219,  définit  les  jipooT,Xur<n)ç  onrô  toû 
7ipoffeXï)Xv8évat  xaivij  xa\  pO.oGio)  noXitet'a,  «  de  ce  qu  ils 
s'approchent  d'un  genre  de  vie  nouvelle  dans  laquelle 
on  aime  Dieu.  »  Dans  l'Évangile  de  Nicodème,  2,  il 
est  dit  :  «  Que  sont  les  prosélytes'.'  On  lui  dit  :  Ce  sont 
ceux  qui  sont  nés  enfants  des  Hellènes  et  maintenant 
sont  devenus  Juifs.  »  Les  Pères  parient  des  prosélytes 
dans  le  même  sen^;  ainsi  saint  Justin.  Dial.cum  Tryph., 
■ï.'i,  122,  t.  VI,  col.  525,  560,  qui  emploie  le  terne'  yr,o~ 
p»;  pour  désigner  la  réunion  des  prosélytes;  ~.iint  [ré- 
née,  Adv.  lueres.,  III,  XXI,  I,  t.  vu.  col.  946,  qui  appelle 
Théodotion  et  Aquila  des  i  Juifs  prosélytes  »;  Tertul- 
lieii,  Adv.  jud.,  1.  t.  n,  col.  597,  etc.  Philon  emploie 
parfois,    comme    synonymes    de    ;rpocrqX-jToc,    les    mots 


7. Y) 


PROSELYTK 


760 


£zr,)-jTo:.  qu'on  retrouve  dans  les  Septante.  Job,  xx,  26, 

È-/.AVT'/;;  et   ï~r~/-*:. 

2°  La  propagande  juive.  —  I.  Les  Juifs  ne  jouis- 
saient pas  d'une  grande  faveur  dans  l'ancien  inonde 
-romain.  Les  écrivains  classiques  les  traitent  sou- 
vent avec  mépris,  haine  et  injustice.  Cf.  Tacite.  Wst., 
v.  1,5,8;  Plutarque,  Sympos.,  iv,  5;  Juvénal,  Sot.,  vi, 
160;  xiv,  97,98,103-106;  Ainmien  Marcellin,  xxn,  .">.  etc. 
D'autre  part  les  Juifs,  par  leur  particularisme  outré, 
leur  antipathie  pour  les  étrangers,  le  caractère  de  leur 
■  loi:  nu'  el  de  leur  morale,  si  surprenants  pour  des  païens, 
-•■  ml  liaient  destinés  à  rester  confinés  dans  leur  isole- 
ment. Mais  l.i  Providence  avait  ici  très  manifestement 
des  vues  en  contradiction  avec  les  prévisions  humaines. 
Les  prosélytes  juifs  devaient  fournir  à  la  propagande 
chrétienne  des  âmes  toutes  préparées.  La  loi  mosaïque 
devenait  ainsi  le  vestibule  de  l'Evangile,  non  seulement 
par  son  action  préparatoire  à  la  rédemption  et  au  règne 
messianique,  mais  encore  par  une  inlluence  directe 
sur  les  âmes  des  Juifs  et  sur  celles  que  conquéraient 
les  Juifs.  C'en  fui  assez  pour  que  ce  peuple  longtemps 
jaloux  de  ses  prérogatives,  qu'il  tenait  pour  incommu- 
nicables, travaillât  à  y  associer  des  étrangers,  et  pour 
que  ces  derniers,  malgré  leurs  préjugés  contre  une 
religion  d'assez  mauvais  renom  parmi  eux.  se  missent 
à  l'étudier  et  à  l'embrasser  en  grand  nombre.  Il  y  a  là 
un  phénomème  dont  les  explications  naturelles  ne  suf- 
fisent pas  à  rendre  compte  d'une  manière  adéquate.  — 
2.  A  vrai  dire,  cette  adoptiondes  étrangers  dans  le  sein 
d'Israël,  inaugurée  à  la  sortie  d'Egypte,  Exod..  xit,  38, 
n'avait  ensuite  pris  quelque  développement  que  dans 
les  pays  de  l'exil,  où  le  contact  immédiat  des  Juifs  per- 
mettait de  mieux  apprécier  leur  religion.  Tob..  I,  7; 
Es  th.,  vin.  17.  Mais  la  propagande  ne  devint  vraiment 
active  et  systématique  que  dans  l'empire  romain.  Notre- 
Seigneur  constate  ce  zèle,  parfois  exclusif  el  funeste 
dans  ses  résultats.  Matth.,  xxni,  15.  Saint  Paul  l'attri- 
bue à  la  conviction  qu'avail  le  Juif  d'être  «  le  guide  des 
avi  i  les,  la  lumière  de  ceux  qui  sont  dans  les  ténèbres, 
le  docteur  des  ignorants,  le  maître  des  enfants,  ayant 
dans  la  Loi  la  règle  de  la   science  el  de  la  vériti 

il    lui    reproche   de    ne   pas    | sser   son   zèle  jusqu'à 

s'instruire  lui  même.  |;,,m  .  n.  19-21.  —  2.  La  propa- 
i  tnde  eul  tant  de  succès,  dans  le  monde  gréco  romain, 
que  seuls,  parmi  les  adeptes  des  cultes  orientaux,  ceux 
du  culte  d'Isis  el  de  Mithra  remportaient  sur  ceux  du 
judaïsme.  Josèphe,  Vont.  Apion.,  n,  10,  constate  que 
les  Juifs étaienl  plus  éloignés  des  Crées  par  la  distance 
que  par  les  idées,  el  que  beaucoup  d'entre  ces  derniers 
avaient  adhéré  au  judaïsme,  bien  que  Ions  n'y  eussent 
pas  persévéré.  Il  ajoute,  Cont.  Apion.,  il,  39:  o  Depuis 
ti  nips  beaucoup  désirent  s'associer  à  noire  ma- 
nière de  servir  Dieu.  Il  n'j  a  pas  de  ville  grecque  ou 
barbare,  pas  de  nation  chez  laquelle  ne  se  soit  intro- 
duite la  coutume  de  célébrer  le  septième  jour,  que 
nous  passons  dans  le  repos,  el  où  l'on  n'observe  les 
jeûnes,  les  allumages  de  lampes  el  les  abstinences  de 
mets  qui  nous  s,, ut  défendus.  On  s'efforce  d'imiter 
mutuelle  entente,  notre  libéralité,  notre  applica- 
tion auj  métiers,  notre  patience  dans  les  tourments  que 
nous  endurons  pour  nos  lois.  Des  témoignages  ana- 
logues sonl  fournis  par  Tertullien,  Ad.  nation.,  i,  13, 
t.  i,  col.  579;  Sénèque,  dans  s.  Augustin,  De  civ.  Dei, 
vi,  II.  t.  xi. i,  col,   192;  Dion  Cassius,  xxxvn,   17.  Les 

lytes  étaienl  en  nombre  à    \u :he,  cf.  Josèphe, 

Bell.jud.,  Vil,  m,  3;  à   Intioche  de   Pisidie,  Act.,  xill, 

"'■  26,  ilonique,  Act.,  xvn.  i  ;  i  \ 

Act.,  xvn,  17.  el  .i  Rome.  Cl.  Horace,  Sat.,  I.  >\.  68  72; 

pist.  xcv;  Perse,  v,  179-183;  Ovide,  De  art. 

Ile,  i,  3;  \.  18;  Juvénal,  Sat.,xrv, 

■   "■      i  taii  ni   plus  nombreuses  el 

P'USeï  ..,  .      ,  |  Jejudai-lne. 

Act.,  xiii.  50;  xvn,  i.  Certains  Juifs  faisaient  profession 


de  les  initier  à  la  connaissance  et  à  la  pratique  de  la 
loi  mosaïque.  Cf.  Josèphe,  Ant.jud.,  XVIII.  m,  5.  A 
Damas,  la  majorité  des  femmes  étaient  prosélytes.  Cf. 
Josèphe,  Bell,  jud.,  II,  XX.  2.  A  Rome,  des  femmes 
célèbres,  comme  Fulvie,  pratiquaient  le  judaïsme,  et 
d'autres,  comme  Poppée,  femme  de  Néron,  lui  étaient 
favorables.  Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XVIII,  m.  5:  XX, vm, 
II.  Non  contents  de  s'affilier  au  judaïsme,  de  nobles- 
étrangers  venaient  faire  acte  de  religion  à  Jérusalem 
même,  comme  le  ministre  de  la  reine  Candaee.  Act., vin, 
27,  et  la  reine  Hélène  d'Adiabène,  qui  se  lit  construire 
un  palais  dans  la  Ville  sainte  et  se  montra  si  généreuse 
envers  les  Juifs  dans  des  circonstances  difficiles.  Cf. 
Josèphe  i  Ant.jud.,  XX.  ii-iv. 

3°  Causes  du  succès  de  cette  propagande.  —  l.Dieu 
favorisait,  sans  nul  doute,  une  œuvre  dont  la  réalisation 
rentrait  dans  ses  plans;  mais  il  la  laissait  s'exécuter 
par  des  moyens  humains.  De  leur  cédé,  les  Juifs  avaient 
été  saisis  par  un  zèle  véritable  pour  la  propagation  de 
leurs  idées  religieuses.  Plus  leurs  adhérents  devenaient 
nombreux  dans  les  villes  étrangères,  plus  leurinlluence 
se  consolidait.  Les  hommes  vraiment  sincères  et  reli- 
gieux y  voyaient  un  gain  pour  la  cause  de  la  vérité  et 
aussi  pour  la  gloire  de  leur  nation,  Luc.  n,  32;  les 
autres  regardaient  cette  extension  comme  un  achemi- 
nement vers  cette  conquête  du  u le  et  celte  domina- 
tion universelle  sur  les  peuples,  que  les  prophéties 
semblaient  promellre  à  Israël.  Dans  ce  but,  on  employait 
dis  moyens  divers.  Pour  convertir  les  Iduméens  et  en- 
suite les  [turéens,  Jean  Hyrean  et  Aristobule  leur  don- 
nèrent à  choisir  entre  la  mort,  l'exil  ou  la  circoncision, 
Cf.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII,  ix.  3;  xi.  ::.  Parfois,  des 
fanatiques  imposaient  la  circoncision  par  violence.  Cf. 
Josèphe,  Vil.,  ■!'■).  D'autres  faisaient  de  la  propagande 
par   des  moyens  on  [mur  des  motifs  peu  avouai  les.  Cf. 

Josèphe.  Int.  jud.,  XVIII.  m,  5.  Les  procédés  employés 
étaienl  le  plus  souvent  de  loute  antre  nature-,  mais  les 
instances  ne  faisaient  jamais  défaut  pour  déterminer 
une  adhésion.  lie  là  le  mot  d'Horace,  Sat.,  I.  iv,  142  : 
Veluti  te  Judsei,  cogemus  in  hanc  cor  irbam, 

nous  te  forcerons,  comme  font  les  Juifs  à  prendre 
rang  dans  cette  foule.  »  —  2.  La  doctrine  israélite  exer- 
çait une  forte  attraction  sur  les  esprits  sérieux  qui, 
fatigués  des  hontes  du  paganisme  el  des  pauvretés  in- 
tellectuelles du  scepticisme,  cherchaient  une  base  solide 
à  la  croyance,  un  appui  à  l'espérance  d'un  avenir  meil- 
leur et  une  satisfaction  à  la  fois  digne  et  positive  au 
besoin  de  Dieu  qui  torture  le  cœur  humain.  Les 
.'unes  ainsi  disposées  apprenaienl  que  les  Juifs  possé- 
daient des  traditions  merveilleuses  el  des  données  in- 
comparables sur  les  questions  qui  intéressent  la  vie  de 
I  âme  :  qu'ils  avaient  en  main  des  livres  sacrés  du  plut 
haut  intérêt;  que  ces  livres  sacrés,  sur  le  désir 
d'un  Ptolémée  d'Egypte,  avaient  été  traduits  en 
pour  être  mis  à  la  portée  de  tous  les  penseurs  du  monde 
gréco-romain  ;  que  ces  livres  étaient  interprétés  par  des 
docteurs  compétents  el  que  plusieurs  d'entre  ces  der- 
niers, formés  dans  les  célèbres  écoles  d'Alexandrie, 
cherchaient  à  montrer  que  ce  qu'il  v  avail  de  meilleur 
et  de  plusélevé  chez  les  grands  philosophes  delà  Grèce 
ne  différai!  guère  de  l'enseignement  que  professaient 
les  livres  juifs.  En  fallait-il  davantage  pour  pousser 
beaucoup  d'âmes  à  une  élude  qui  promettait  de  leur 
donner  satisfaction?  L'expérience  leur  en  montrait 
d'ailleurs  l'à-propos.  —3.  Les  motifs  qui  déterminaient 

les  prosélytes  n'avaiénl  pas  toujours  la  iné noblesse. 

Ceux  du  temps  d'Esther,  vin.  17.  désiraient  surtout, 
sans  doute,  échapper  à  des  représailles  ou  partagei  la 
laveur  dont  jouissaient  alors  les  Juifs.  Les  élrang  rs 
transportés  en  Samarie  pendant  la  captivité  ne  devin- 
rent juifs  que  par  peur.  IV  lieg..  xvn,  26-29.  D'autn 
l  époque  romaine,  tendaient  surtout  à  partager  les  pri- 
es   accordés  aux   Juifs   par   l'autorité,  l'exemption 


761 


PROSELYTi: 


762 


du  service  militaire,  par  exemple.  Cf.  Josèphe.  Anl. 
jutl.,  XIV.  x,  13.  Ceu\  qui  voulaient  profiter  de  l'in- 
fluence, du  crédit,  de  l'assistance  des  Juifs  dans  une 
ville,  embrassaient  te  judaïsme.  On  en  faisait  autant  en 
vue  d'un  mariage,  cf.  Josèphe.  A  ut.  jud.,  XVI,  vu,  6, 
ou  d'intérêts  qui  n'avaient  rien  de  religieux.  Toutefois 
le  nombre  de  ceux  qui  devenaient  prosélytes  sans  vraie 
conviction  se  tenait  dans  des  limites  relativement  res- 
treintes, à  raison  des  sarcasmes  dont  les  Juifs  étaient 
l'objet  de  la  part  de  la  populace  païenne,  cf.  Horace. 
Sat.,  I,  iv,  142;  .Martial,  VI,  29,  31,  81;  xi.  95;  xn,  37, 
et  des  mesures  sévères  que  le  gouvernement  prenait 
contre  eux  de  temps  à  autre.  Cf.  Tacite,  Ann.,  Il,  85; 
Suétone,  Claud.,  25;  ûomit.,  12.  —  4.  Tout  en  tenant 
compte  des  abus  qui  se  produisirent  naturellement,  il 
est  juste  de  reconnaître  le  succès  de  la  propagande 
juive,  le  zèle  qui  portait  des  scribes  et  des  pharisiens 
à  traverser  les  mers  et  à  parcourir  la  terre  pour  y  tra- 
vailler. Mat  th.,  xxiii,  15,  et  aussi  le  réel  dévouement 
des  nouveaux  prosélytes  qui  adhéraient  à  une  doctrine 
élevée,  sans  doute,  mais  qui  en  même  temps  s'assujettis- 
saient à  des  pratiques  assez  onéreuses.  Il  est  à  regretter 
cependant  que  les  missionnaires  juifs  aient  trop  sou- 
vent communiqué  à  leurs  prosélytes  l'esprit  d'orgueil 
et  de  formalisme  qui  les  caractérisait  eux-mèrnes,  de 
manière  à  faire  de  leurs  nouveaux  disciples,  ainsi  que 
Notre-Seigneur  le  leur  reproche,  «  des  (ils  de  géhenne, 
deux  fois  plus  qu'eux-mêmes.  »  Même  convertis  au 
christianisme,  ces  prosélytes  seront  pour  l'Église  nais- 
sante une  cause  de  grandes  difficultés.  Voir  Jcdaïsants, 
t.  m,  col.  1778. 

4°  Les  prosélytes  juifs.  —  1.   Ainsi   qu'il   fallait   s'y 
attendre,  il  y  avait  parmi  ces  prosélytes  des  convertis 
inconstants,  comme  l'avoue  Josèphe,  Cont.  Api/m.,  n, 
10,  et  d'autres  qui  n'acceptaient  la  loi  juive  qu'en  par- 
tie. C'est  à  eux  que   saint  Paul   écrivait  :  «  Je  déclare 
encore  une  fois  à  tout  homme  qui  se  fait  circoncire, 
qu'il  est  tenu  d'accepter  la  loi  tout  entière.  »  Gai.,  v.  3. 
Cependant,  on  passait  outre  quelquefois.   Ainsi,  quand 
Izate,  fils  d'Hélène  et  roi  d'Adiabène,  voulut  se   faire 
circoncire  pour  devenir  juif  parfait,  sa  mère  s'y  opposa, 
pour  ne  pas  causer  de  troubles  dans  le  royaume:  mais 
un  marchand   juif,  du   nom  d'Ananias,  déclara  au  roi 
«  qu'on  pouvait  parfaitement  servir  la   divinité  sans  la 
circoncision,    pourvu    qu'on   fût  résolu  à  adopter  les 
antiques    coutumes    des    Juifs,   qui   importaient    bien 
davantage  que   la   circoncision   ».  Josèphe,  Ant.  jud., 
MX.  n.    't.   Un   autre  Juif,    nommé   Kléazar,   meilleur 
interprète  de   la  Loi,  donna  ensuite  une  décision  con- 
traire à   lzate,    qui   se   lit   circoncire.  Il  n'en  est  pas 
moins  à  penser  que  beaucoup  partageaient  les  idées 
d'Ananias.   Ils  croyaient  au  Dieu  unique,  dont  aucune 
représentation    n'était   permise;  ils  l'honoraient,  fré- 
quentaient  les  synagogues   et   observaient  la   loi    mo- 
saïque, mais  en  se  bornant  aux  points  principaux.  Ce 
sont  ces  hommes  que  l'on  désignait  sous  le  nom  de 
ueSÔuevoi  ou   foëo'JU,evo(  -bv  8cdv,  colenles  ou  timentes 
Deum,  «  ceux  qui  servent  »  ou   «   craignent  Dieu  ». 
Act.,  xiii.    13;   x,   2,   etc.  Les    anciennes  inscriptions 
latines  enregistrent  de  temps  en  temps  quelque  me- 
tuens  ou  observateur   des  coutumes  juives.  Cf.  Corp. 
insc.  lat.,  t.   v,  I,  88;  t.  vi.  29759,  29760,  29763;  t.  vin, 
4321,  etc.   —  2.  Or,  ces  hommes  vivant  à  la  juive  ne 
sont  pas  de  véritables  prosélytes.  On  les  appelle  ordi- 
nairement géré  lius-sa'ar,   «  prosélytes  de   la  porte  •>, 
tandis  que  fis  autres   sont  nommés  géré    has-çédéq, 
«    prosélytes    de  justice    ».   Mais    l'identification     des 
«  hommes   craignant  Dieu    »  et  des  «  prosélytes  de  la 

i    ' est  arbitraire;   la  Mischna   ne  la  connaît  pas. 

Celle-ci  dislingue  seulement  entre  le  gêr,  l'étranger 
proprement  dit,  et  le  gêr  lôsdb,  l'étranger  colon,  qui 
habite  au  milieu  du  peuple  d'Israël.  Le  gcr  has-Saar 
ne  serait  pas  autre  chose  que  ce  dernier,   l'étranger 


qui  habite  dans  les  portes  ou  le  pays  d'Israël,  la  porte 
étant  prise  souvent  pour  la  ville  elle-même.  Dent.,  xn  _ 
12;  xi\,27;  III  Reg.,  VIII,  37,  etc.  Voir  Porte,  col.  518. 
Cet  étranger  devait  se  soumettre  aux  lois  imposées  à 
tous  les  hommes  qui  n'étaient  pas  juifs,  c'est-à-dire  à 
ce  que  l'on  appelait  les  sept  commandements  des  lils 
de   Xoé  concernant  :  1°  l'obéissance  aux  juges;  2°  le 
blasphème;  3»  le  culte  des  idoles;  4»  l'impureté;  5°  le- 
meurtre;  6«le  vol  ;  7»  la  chair  avec  le  sani:.  Gen.,  i\,  i. 
Cf.  Sanliedrin,  56  li.  Il  va  de  soi  que,  depuis  la  con- 
quête romaine  surtout,  les   Grecs,  Romains  et  autres 
étrangers  établis  en  Palestine  se  mettaient  fort  peu  en 
peine  d'observer  ces  sept  lois  noachiques,  de  telle  fa- 
çon qu'aucune  différence  pratique   ne  subsistait    plus- 
entre  l'étranger  vivant  au  milieu  des  juifs  et  l'étranger 
résidant  hors  de  Palestine.  Les  noms  de  gêr,  de  gêr  (ôsâb 
et  de  gêr  Itas-sa'ar  ne    représentaient  donc   plus  des 
situations  différentes.  —  3.  Les  hommes  a   craignant   > 
ou  «   servant  Dieu   »  sont   ainsi   en   dehors   des  deux 
autres  classes.  Corneille,  par  exemple,   «   religieux  et 
craignant  Dieu,  ainsi  que  toute  sa  maison,  faisait  beau 
coup  d'aumônes  au  peuple  et  priait  Dieu  sans  cesse.  ,t 
Act.,    x,  2.   Mais   il  n'était  pas  circoncis;    saint   Pierre 
|    craignait  de  se  commettre  avec  quelqu'un  qui  n'appar- 
tenait pas  au  judaïsme,   Act.,  x,  10-16,  et  les  fidèles 
s'étonnèrent   beaucoup   que   le  Saint-Esprit   descendit 
sur  des  gentils.  Act.,  x,  45;  xi,  3.  Les  hommes  tels  que 
Corneille  n'étaient  pas  regardés  comme  juifs,  parce- 
qu'ils  n'avaient  pas  reçu  la  circoncision;  et  cependant, 
par  leurs  croyances  et  leurs  pratiques,  ils  étaient  aussi 
proches   des   Juifs   sincèrement   pieux  qu'éloignés  du 
commun   des    païens.    Les    convertis    de    cette    espèce 
s'étaient   multipliés  autour  des  juiveries  officielles,  et 
l'appoint   qu'ils   fournirent   au   christianisme   naissant 
dépassa  probablement  celui  qui  lui  vint  des  Juifs  propre- 
ment dits.  Ce  judaïsme  incomplet  ne  comptait  pas  .. u x 
yeux  des  Juifs  de  stricte  observance,  comme  le  montre 
l'appréciation  des  judéo-chrétiens  de  Jérusalem  au  su- 
jet du  baptême  de  Corneille.    Beaucoup   s'en  conten- 
taient cependant,  n'attachant  qu'une  importance  secon- 
daire au    rite   de    la    circoncision,    qui,    d'ailleurs,  les 
décelait  et  leur  attirait  des  sarcasmes  dans  les  thermes 
publics.  Voir  Circoncision,  t.  n,  col.  778.  Aussi  est-il 
probable  que,  parmi  les  Juifs  de  la  dispersion,   la  pro- 
pagande religieuse    n'obtenait  pas  toujours   tout   son 
effet;   beaucoup  se   décidaient  à  vivre  a  la  juive;  les 
vrais  prosélytes  allant  jusqu'à  recevoir  la  circoncision 
étaient  beaucoup  moins  nombreux.   On   le  conclut  des 
mentions  fréquentes  qui  sont  faites  dans  les  Actes  des 
hommes  «  craignant  Dieu  ».  Il  n'y  a  donc  pas  de  valeur 
à  attacher  à  la  division  des  prosélytes  adoptée  par  cer- 
tains  auteurs,  qui  distinguent  les  prosélytes  «    de   la 
porte  »   et  les  prosélytes  «  de  justice  ».  Les   luifs  ne 
reconnaissaient  d'autres  prosélytes   que  ces  derniers.. 
Depuis  la  conquête  grecque,  la   Palestine  ne  comptait 
plus  guère  de  prosélytes  «  de  la  porte  ».  ou  étrangers 
soumis    aux     lois      noachiques.    Quant    aux    hommes 
«  craignant  Dieu   »,  sans  aller  jusqu'à  l'adoption  com- 
plète de  la  loi  mosaïque,  ils  avaient  une  religion  bien 
supérieure   à    celle    des  prosélytes   «  de   la   porte   », 
anciens  ou  nouveaux. 

5°  Obligations  et  droits  des  prosélytes.  —  1.  Pour 
devenir  prosélyte  de  justice,  c'est-à-dire  prosélyte  com- 
plet et  véritable,  cf.  Matth.,  m,  15,  il  fallait  tout  d'abord 
se  soumettre  à  trois  conditions,  la  circoncision,  le 
baptême  ou  ablution  conférant  la  pureté  légale  et  un 
sacrifice.  Les  femmes  se  contentaient  des  deux  dernières 
conditions.  Cf.  Kerilliolli.  81  a;  Yebamoth,  46a;  Pe- 
sachim,  vm,  8;  Eduyoth,v,  2;  etc.  La  circoncision 
incorporait  le  gentil  au  peuple  juif,  l'ablution  le  puri- 
fiait selon  la  loi  lévitique  et  le  sacrifice  expiait  ses 
péchés,  après  la  destruction  du  Temple,  la  troisième 
condition  devint   naturellement  impossible  à  rempli]-. 


763 


PROSÉLYTE 


PROSTERNE. M  EXT 


764 


—  2.  Les  prosélytes  devaient  se  conformer  à  toute  la  loi 
mosaïque  et  acquitter  toutes  les  redevances  sacrées. 
Cf.  Gai.,  v,  .'!.  Bikkurim,  i.  i;  Schekalim,  i,  3,  0:  Pea, 
iv.  fi;  Clialla,  m.  6,  etc.  Cependant  il-  n'étaient  tenus 
à  ces  redevances  que  pour  les  biens  acquis  postérieure- 
ment à  leur  conversion.  t'A'.  Pea,  iv,  6;  Challa,  m,  6; 
Chullin,  x,  i.  Les  frères  nés  avant  la  conversion  de 
leur  mère  n'étaient  pas  obligés  au  lévirat.  Cf.  Yeba- 
moth,  xi,  2.  Aux  tilles  nées  avant  la  conversion  de 
leur  mère  ne  s'appliquait  pas  non  plus  la  loi  du  Deu- 
téronome,  xxu,  13-21.  Cf.  Kethuboth,  IV,  3.  Les  jeunes 
tilles  prosélytes  ne  pouvaient  épouser  un  prêtre;  les 
filles  de  prosélytes  ne  le  pouvaient  que  si  elles  descen- 
daient  d'un  côté  d'ancêtres  israélites,  à  la  dixième  gé- 
nération au  plus  Cf.  Yebdmoth,  VI,  5;  Kidduschin, 
iv.  7;  Bikkurim,  i.  5.  Les  jeunes  lilles  prosélytes  pou- 
vaient épouser  ceux  que  le  Deutéronome.  xxm,  1,  2, 
interdit  aux  juives  de  prendre  pour  époux.  Cf.  Yeba- 
molh,  vin,  2.  Klles  n'avaient  pas  le  bénéfice  de  la  loi 
de  l'Exode,  XXI,  22.  Cf.  Baba  kamma,  v.  i.  Elles 
étaient  cependant  obligées  par  celle  des  Nombres,  v,  II- 
28.  Cf.  Êduyoth,  v,  (i.  —3.  En  principe,  les  prosélytes 
étaient  assimilés  aux  Juifs  de  naissance;  en  réalité,  il 
subsistait  entre  les  uns  el  les  autres  une  distinction 
notable.  Au  prosélyte,  en  effet,  manquait  toujours  la 
descendance  d'ancêtres  juifs.  «  Quand  un  prosélyte 
apporte  ses  prémices,  il  ne  récite  pas  la  confession 
indiquée  lient.,  xxvi.  3,  parce  qu'il  ne  peut  pas  dire  : 
Que  tu  as  juré'  de  nous  donner.  Si  sa  mère  était  israé- 
lite,  il  peut  réciter  la  confession.  Si  le  prosélyte  prie 
à  part,  il  doit  dire  :  Dieu  des  pères  d'Israël.  S'il  prie 
dans  la  synagogue,  il  doil  dire  :  Dieu  de  vos  pères.  Si 
sa  mère  était  israélite,  il  doit  dire: Dieu  de  nos  pères.  » 
Bikkurim,  I,  i.  Il  y  avait  là  comme  une  ligne  de  il  - 
marcation  que  le  prosélyte  ne  pouvait  franchir  et  qui 
lui  rappelait  sans  cesse  son  origine.  D'ailleurs  le  rang 
qu'il  devait  occuper  dans  la  société  juive  lui  était  ainsi 
assigné  :  «  Le  prêtre  a  le  pas  sur  le  lévite,  le  lévite  sur 
l'Israélite,    l'Israélite    sur    le    bâtard,    le   bâtard    sur   le 

nalhinéen,  le  nathinéen  sur  le  prosélyte,  le  prosélyte 
sur  l'esclave  affranchi.  »  Horayoth,  m,  8. 
ir  Les   interdictions.  —  D'après  la  loi  du  Deutéro- 

■i xxm.    2.   3.    il    était    interdit    de    recevoir  dans 

assemblée  de  Jéhovah,  c'est-à-dire  dans  la  socii  !'■  des 
Israélites,  même  à  la  dixième  génération,  par  consé- 
quent à  jamais,  comme  l'explique  le  texte,  le  manizer, 
l'Ammonite  el  le  Moabite.  Voir  Mamzer,  col.  t>37.  un 
ne  pouvait  donc  recevoir  de  prosélytes  ayant  cette  ori- 
gine.     Mais,    avec    le     temps,    il    devint     impossible    de 

remonter  1res  haui  dans  la  généalogie  des  étrangers 
qui  demandaienl  a  faire  profession  de  judaïsme,  Aussi 
les  docteurs  se  montrèrent-ils  faciles  sur  ce  point, 
pour  la  raison  que  les  Ammonites  et  les  Moabites  visés 
par  la  Loi  n'existaient  plus  depuis  longtemps.  Cf.  Ya- 
dayim,  iv,  i.  Les  Iduméens  et  les  Egyptiens  pouvaient 
être  reçus  a  la  troisième  génération.  Deut.,  xxm,  7.  S. 
Vers  l'époque  évangélique,  celle  troisième  génération 
datait  île  fort  loin.  Il  ne  subsistait  donc  aucune 
difficulté    pour    recevoir  au    prosélytisme    ceux    de   ces 

nations  qui  le  sollicitaient,  Cf.  Josèphe,  .1»'.  /m/.. 
NUI.  ix,  I;  xi,  3;  xv,  i.  7,  '.i.  Pratiquement,  la  porte 
était  ouverti     i  tous;    les  conditions  imposées  étaient 

par    elle       lues    ;|,si7    oUé|VUSeS     pmil'    qu'un     U   6 

pas  de    celui    qui    les    acceptait    volontairement   des    ga- 

ranties  trop  difficiles  a  fournir.  Le  prosélytisme  juif 
put  .lune  ainsi  se  donner  libre  carrière,  et  préparer 
inconsciemment   a    l'Évangile  de  dévoués  disciples   et 

un  certain  ibi  •   <l  adversaires  acharnés, 

Voir  Slevogt,  De  proselytis  Judœorum,  léna,  1631, 
■■i  dans   i  golini,   riiesaurus,   i    \\n.  p.   841;   Millier, 

iselytis,  dans  le  mé volu l'Ugolini;  Wâhner, 

DeEbrteorum  proselytis,  Gœtlingue,  1743;  Dan/.  Cura 
Judœi  ,     ,  ,  ..  ,,,/  Mali  .  xxm, 


15,  dans  Nov.  Test,  ex  Talmude  illustratum  de  Meu- 
seben,  1736,  p.  649-676;  Lûbkert,  Die  Proselylen  der 
Juden,  dans  Stud.  und  Krit.,  1835,  p.  681-700;  Weill, 

Le  prosélytisme  chez  les  Juifs  selon  la  llible  el  le 
Tahmtd,  Strasbourg,  1880;  Friedlaender,  La  propa- 
gande  religieuse  des  Juifs  grecs  avant  l'ère  chré- 
tienne, dans  la  Bévue  des  études  juives,  t.  xxx.  1895, 
p.  161-181;  et  surtout  Sch tirer,  Geschichte  des  fi'tdis- 
chen  \'ulkes  im  Zeil.  J.-C,  Leipzig,  t.  in.  1898,  p.  102- 
135,  qui  donne  tous  les  textes  et  toutes  les  références 
sur  le  sujet.  II.  LesÊtbe. 

PROSTERNEMENT,  attitude  qu'on  prend  en  se 
mettant  à  genoux  devant  quelqu'un  et  en  inclinant  la 
tète  vers  le  sol.  —  En  prenant  cette  posture,  on  témoigne 
qu'on  se  fait  humble  et  petit  devant  celui  auquel  on 
veut  rendre  hommage,  qu'on  remercie  ou  dont  on 
attend  quelque  faveur.  Les  hommes  se  prosternent  en 
diverses  circonstances  :  —  !"  Devant  Dieu.  Ainsi  font 
Eliézer,  Gen.,  xxiv.  52:  Moïse,  pendant  quarante  jours 
et  quarante  nuits,  Deut.,  ix,  18;  Tobie  et  sa  famille, 
pendant  trois  heures, Tob.,  xn.  22;  Judith  et  les  Israélites 
ses  compatriotes,  Judith,  vu.  i;  ix,  1  ;  x,  1.  20;  les 
Machabées,  II  Mach.,  x,  i,  une  fois  pendant  trois  jours. 
II  Mach.,  xim,  12.  Le  Psalmiste  invite  son  peuple  à  se 
prosterner  devant  Jéhovah  pour  l'adorer.  Ps.  xcv  (xciv), 
6,  et  il  annonce  que  les  nations  se  prosterneront  devant 
lui.  Ps.  lxviii  (i.xvn),  31;  i.xxu  (i.xxi),  9.   Le  Sauveur 


182.  —  Serviteurs  je --i.  in.     devant  leur  maître. 

D'après  Champollion-Figeac,  VÉgyple  ancienne,  dans 
l'Univers  pittoresque,  de  Didot,  18:ï9,  pi.  38. 

se  prosterna  trois  fois  devant  son  Père  pendant  son 
agonie.  Matth.,  xxvi,  39;  Marc.,xiv,  35.  Les  vingt-quatre 
vieillards  sont  prosternés  devant  le  trône  de  Dieu  dans 
le  ciel.  Apoc,  in.  lu.  —  2  Devant  les  idoles.  La  Loi 
défendait  de  se  prosterner  devint  des. images  taillées. 
I.ev.,  xxvi,  l.  C'esi  ce  que  faisaient  les  idolâtres.  Is., 
\i  iv,  |9;  xlvi,  ii.  Voir  t.  i,  lig.  36,  col.  234.  Naaman 
était  obligé,  par  son  service  auprès  du  roi  de  Syrie, 
de  se  prosterner  devant  le  dieu  Remmon.  IV  Eleg., 
v,  18.  A  Babylone,  on  se  prosterne  pour  adorer  la 
statue  de  Nabuchodonosor.  Dan.,  m.  il.  lu.  15.  — 
:;  Devant  les  anges.  Loi  se  prosternait  le  visage  contre 
leice  pour  accueillir  les  anges  qui  le  visitent  à  Sodome. 
Gen.,  xix;  I.  —  1'  Devant  le  roi.  On  moi  se  prosterner 

devant  David  Abigaïl,  I  lie,..  \\\.  23,  Miphibuse lli. 
Il  Reg.,  ix,  8,  et  Seméi,  il  Reg.,  xix.  18.  Estber  se 
prosterna  devant  AssuéruS.  Es  th.,  Mil.  i!.  Les  subalternes 
n'approchaient  d'un  roi  qu'en  rampant  eu  en  se  proster- 
nant. Voir  t.  II,  flg.  541,  col.  1637.  Sur  l'obélisque  de  Sal- 
manasar  II.  on  voit  Jéhu  prosterné  devant  le  roi  assyrien. 
Voit-t.  i, fig.  37, col. 235.   -5°  Devant  un  grand.  Joseph 

\iilt     en     SOU.e      le-    gei'bes    de     ses    frères    se    prosterne  r 

devant  la  sienne,  le  soleil,  la  lune  et  onze  étoiles  se 
prosterner  devant  lui.  et  son  père  se  demande  si  les 
parents  et  les  frères  de  Joseph  auront  a  se  prosterni  ■ 
de  même.  Gen.,  xxxvn,  7.  9,  lu.  ('.est  pourtant  ce  qui 
arriva  plu-  tard.  Gen.,  xmi,  6.  En  Egypte,  on  se  pros- 
ternait ainsi  devant  un  dignitaire  (fig.  182).  Joseph   i 


765 


PROSTERNEMENT    —    PROSTITUTION 


766 


son  tour,  se  prosterne  devant  son  père.  Gen..  xlviii,  12. 
Achior  se  prosterne  devant  Judith,  xm,  30.  Plus  tard, 
le  centurion  Corneille  se  prosterne  devant  saint  Pierre, 
Act.,  x.  25,  et  le  geôlier  de  Philippes  devant  Paul  et 
Silas.  Act.,  xvi,  29.  —  6°  Devant  celui  qu'on  sollicite. 
11  faut  se  prosterner  devant  celui  pour  lequel  on  a 
répondu,  alin  d'être  délivré  delà  caution.  Prov.,  vi,  3. 
On  se  prosterne  devant  le  créancier  pour  obtenir  remise 
de  la  (iette.  Maltli.,  xvrn,  26,  29.  Abraham  se  prosterne 
devant  le  peuple  d'ilébron  alin  d'obtenir  qu'on  lui  vende 
la  caverne  de  Macpelah.  Gen.,  xxiii,  7.  —  Devant  Jésus- 
Christ.  Les  Mages  se  prosternent  pour  l'adorer.  Matlh., 
il,  11.  Saint  Jean-Baptiste  se  reconnaît  indigne  de  se 
prosterner  devant  lui  pour  détacher  les  cordons  de  ses 
sandales.  Marc,  i,  7.  Devant  lui  se  prosternent  ceux 
qui  demandent  une  faveur,  le  chef  de  la  synagogue, 
Marc,  v,22;  l'hémorrhoïsse,  Marc,  v,  33;  Luc,  vin,  17; 
la  Cbananéenne,  Marc,  vu,  25;  le  père  du  possédé, 
Matth.,  xvii,  14;  le  lépreux,  Luc,  v,  12;  le  démoniaque, 
Luc,  vin,  28,  et  ceux  qui  veulent  adorer  et  témoigner 
leur  reconnaissance,  Pierre,  après  la  pêche  miracu- 
leuse, Luc,  v,  8,  et  l'aveugle-né  après  sa  guérison. 
Joa..  ix,  38.  II.  Lesëtre. 

PROSTITUTION  [hébreu  :  zenût,zenûnîm, laznûl; 


Septante  :    icip 


Vulgate  :   fornicalio,  prostitutio), 


genre  dévie  dans  lequel  on  s'abandonne  et  on  provoque 
à  l'impudicilé. 

I.  En  Egypte  et  en  Chanaan.  —  1"  Le  climat  égyp- 
tien et  le  caractère  sensuel  du  culte  rendu  à  une  mul- 
titude dedieux  et  de  déesses  ne  pouvaient  que  favoriser 
l'immoralité  sur  les  bords  du  Nil.  La  Bible  cite  les 
exemples  du  pharaon  contemporain  d'Abraham,  Gen., 
XII,  15,  16,  et  de  la  femme  de  Puliph.ir,  Gen.,  xxxix, 
7-12.  dont  la  honteuse  entreprise  se  trouve  reproduite 
dans  le  conte  des  deux  frères.  Cf.  Maspero,  Les  Contes 
populaires  de  l'Egypte  ancienne,  Paris,  3e'  édit.,  p.  6. 
On  sait  quelles  coutumes  incestueuses  présidaient  aux 
mariages  égyptiens.  Voir  Inceste,  t.  m,  col.  865.  Hé- 
rodote, il.  18,  60,  64,  parle  de  l'immoralité'  qui  régnait 
en  Egypte;  mais  il  déclare  que  la  prostitution  ne  s'y 
pratiquait  pas  dans  les  lieux  sacrés,  comme  cela  se 
faisait  dans  la  plupart  des  autres  pays.  Cependant, 
dans  les  temples  des  dieux  mâles,  un  véritable  harem 
de  femmes  fournissait  à  la  divinité  des  épouses,  des 
concubines,  des  servantes,  des  musiciennes  et  des  dan- 
seuses. Dans  les  temples  des  déesses,  les  femmes  occu- 
paient les  premiers  postes.  Cf.  Erman,  Aegypten  und 
âgyptisches    Leben,    Tubingue,    1887,   p.    399-401. 

2°  Chez  les  Cbananéens,  le  culte  d'Astarthé  comportait 
partout  la  prostitution.  Voir  ASTAnniÉ,  t.  i,  col.  1187. 
Non  seulement  des  femmes,  mais  aussi  des  hommes 
exerçaient  ce  commerce  infâme.  Cf.  Eusébe,  Vit. 
Constant.,  m,  55,  t.  XX,  col.  1120.  Ce  sont  ces  derniers 
que  le  Deutéronome,  xxiu,  18,  désigne  sous  le  nom  de 
kelàbim,  «  chiens  ».  Les  pires  impudicités  se  com- 
mettaienten  l'honneur  de  la  déesse,  à  Byhlos.à  Aphéca, 
dans  le  Liban,  voir  t.  i,  col.  734,  etdans  toute  la  Syrie, 
d'où  son  culte  se  propagea  ensuite  dans  le  monde  grec. 
Cf.  Lucien,  De  dea  Si/ra;  Dœllinger,  Paganisme  et 
judaïsme,  trad.  .1.  de  P.,  Bruxelles.  1858,  I.  Il,  p.  241- 
244;  Vigouroux,  La  Bible  et  les  découvertes  modernes, 
6e  édit..  t.  ni,  p.  84-92.  On  trouve  dans  la  Genèse  les 
traces  de  l'influence  exercée  sur  les  mœurs  des  habi- 
tants par  les  exemples  qui  venaient  des  temples  chana- 
néens.  A  Sodome,  ce  sont  tous  les  hommes  de  la  ville, 
des  enfants  aux  vieillards,  qui  se  livrent  au  vice  infâme 
et  attirent  sur  eux  la  vengeance  divine.  Gen.,  xi.x,  4-9; 
Il  Pet., il, 7.  L'odieux  inceste  des  deux  filles  de  Lot  avec 
leur  père  indique  jusqu'à  quel  point  le  sens  inoral  était 
oblitéré',  même  chez  des  femmes  appartenant  à  la  fa- 
mille d'Abraham.  Gen.,  xix,  30-38.  Un  peu  plus  tard,  on 
voitThamar,  belle-fille  de  Juda,  jouer  le  rôle  de  prostituée 


auprès  de  son  beau -père.  Elle  s'assied  au  bord  du  che- 
min et  se  voile  le  visage.  A  ce  signe,  Juda  la  prend 
pour  ce  qu'elle  n'est  pas,  fait  marché  avec  elle  et  con- 
vient de  lui  payer  un  chevreau.  Celle-ci  demande  des 
gages  qui  lui  sont  accordés,  et  c'est  à  ces  marques  que 
Juda  reconnaît  ensuite  celle  à  qui  il  s'est  si  facilement 
abandonné.  L'acte  qu'il  s'est  permis  ne  semble  pas  lui 
causer  beaucoup  de  honte,  car  il  en  parle  à  un  ami 
qu'il  charge  de  porter  le  chevreau  convenu.  Il  n'en 
songe  pas  moins  à  faire  brûler  Thamar,  quand  on  lui 
dit  que  celle-ci  s'est  livrée  à  la  prostitution.  Gen., 
xxxviii,  14-25.  La  peine  portée  contre  Thamar  ne  visait 
pourtant  pas  la  prostitution  elle-même,  mais  la  préva- 
rication que  Juda,  en  tant  que  chef  de  famille,  avait  à 
reprocher  à  la  femme  veuve  d'un  de  ses  lils  et  promise 
à  un  autre.  La  courtisane  Rahab  avait  sa  maison  à  Jé- 
richo. Jos.,  h,  1.  Samson  alla  chez  une  autre  courti- 
sane dans  la  ville  philistine  de  Gaza.  Jud.,  XVI,  I. 

II.  La  LÉGISLATION  MOSAÏQUE.  —  1"  Moïse  devait  pré- 
munir les  Hébreux  contre  les  dangers  qu'ils  courraient 
dans  la  terre  de  Chanaan,  au  point  de  vue  des  mœurs. 
Aussi  commence-t-il  en  ces  termes  les  articles  de  sa 
législation  du  mariage  :  «  Vous  ne  ferez  pas  ce  qui  se 
fait  dans  le  pays  d'Egypte  où  vous  avez  habité,  et  vous 
ne  ferez  pas  ce  qui  se  fait  dans  le  pays  de  Chanaan  où 
je  vous  conduis.  »  Lev.,  xvill,  3.  Puis  il  défend  le  ma- 
riage entre  frère  et  soeur,  usité  en  Egypte,  Lev.,  xvm,  9, 
les  unions  incestueuses  et  les  actes  contre  nature  que 
se  permettaient  les  Chananéens,  et  parfois  aussi  les 
Égyptiens.  Lev.,  xvm,  22,  23;  xx,  16;  cf.  Hérodote,  il, 
46.  Ces  abominations  ont  souillé  le  pays,  ont  rendu  ses 
habitants  dignes  d'être  chassés,  et  attireraient  sur 
l'Israélite  la  peine  du  retranchement.  Lev.,  xvm, 24-30; 
xx,  23.  Il  dit  ensuite  formellement  :  «  Ne  profane  pas 
ta  lille  en  la  prostituant,  de  peur  que  le  pays  ne  se  livre 
à  la  prostitution  et  ne  se  remplisse  de  crimes.  »  Lev., 
xix,  29.  Aucune  pénalité  n'est  pourtant  assignée  contre 
les  coupables.  Quand  il  s'agit  de  la  fille  d'un  prêtre,  il 
en  est  autrement;  à  cause  du  déshonneur  qui  rejaillit 
sur  son  père,  la  coupable  est  livrée  au  feu.  Lev.,  xxi,  9. 
La  défense  de  la  prostitution  est  répétée  avec  plus  d'in- 
sistance et  de  détail  dans  le  Deutéronome,  xxm,  17,  18; 
«  Il  n'y  aura  pas  de  prostituée  [qedê'sâh,  Tiopvy;,  meee- 
trix)  parmi  les  filles  d'Israël,  et  il  n'y  aura  pas  de 
prostitué  (qddès,  itopvejwv,  scorlator)  parmi  les  fils 
d'Israël.  Tu  n'apporteras  pas  dans  la  maison  dejéhovah, 
ton  Dieu,  le  salaire  d'une  prostituée  [zônâh,  Trôpvïj, 
proslibulum),  ni  le  salaire  d'un  chien  (kéléb,  xûuv, 
canis)  pour  l'accomplissement  d'un  vœu;  car  l'un  et 
l'autre  sont  en  abomination  à  Jéhovah,  ton  Dieu.  9  Les 
prostitués  sont  désignés  par  les  mots  qâdês,  qedê'sâh, 
«  consacré,  saint  »,  qui  étaient  probablement  en  usage 
dans  la  langue  d'un  pays  où  la  prostitution  passaitpour 
une  fonction  sacrée.  Les  Grecs  donnaient  aux  mêmes 
individus  le  nom  de  IspôSoiAot,  «  serviteurs  sacrés  i>, 
hiérodules.  Le  mot  kéléb,  «  chien  »,  désigne  ici  le 
qâdêi.  Dans  l'Apocalypse,  xxii,  15,  les  chiens  sont  éga- 
lement des  impudiques.  Parmi  les  fonctionnaires  des 
temples  phéniciens,  l'inscription  de  Larnaca  signale  des 
kalabu,  qui  sont  vraisemblablement  les  prostitués, 
scorta  virilia,  comme  ont  traduit  les  éditeurs  du  Corp. 
inscr.  sentit.,  t.  i,  p.  92-99.  Cf.  Lagrange,  Études  sur 
les  religions  sémitiques,  Paris,  1905, p.  220.  Le  chevreau 
promis  par  Juda  à  Thamar,  Gen.,  XXXVIII,  17,  était  un 
de  ces  salaires  de  la  prostitution  qu'il  n'eût  pas  été  per- 
mis d'offrir  en  sacrifice. 

2»  Non  contente  d'interdire  directement  la  prostitu- 
tion, la  loi  la  poursuivait  encore  dans  ses  moyens  et 
dans  ses  effets.  Il  était  défendu  à  l'homme  et  à  la  femme 
de  prendre  les  habits  l'un  de  l'autre.  Dent.,  xxn,  5.  Ce 
changement  de  costume  favorisait  les  pires  désordres; 
souvent,  dans  les  temples  idolàtriques,  les  hommes  et 
surtout  les   prostitués  s'affublaient  de  costumes  fémi- 


767 


PROSTITUTION 


76S 


nins.  Cf.  Macrobe,  Saturnal.,  m.  8.  Un  prêtre  ne  \ ■ 

vait  épouser  une  zonâlt  xorluni)  ni  une  fyàld- 

lâh  i,^-;r,/wu.£v.  Lev.,  xm,  7,    li.  Ces 

deux  terme  i    la  courtisane.  \  oir  Courtisane, 

t.  u,  col.  1091.  D'après  Josèphe,  Anl.  jud.,  IV,  vin, 23, 
la  défense  d  ép  iusi  r  une  prostituée  s'étendait  à  tout 
Israélite  Enfin,  la  descendance  delà  prostitution  ne 
entrer  dans  la  société  Israélite.  Deut., 
XXHI,  2.  Cejtexte  qui  se  rapporte  au  mamzer,  voir 
Mamzer,  t.  iv,  col.  637,  comprend  aussi  très  vraisem- 
,i.  ni  le  fruil  de  la  prostitution. 

III.  La  prostitution  en  Israël.  —  La  Loi  la  con- 
damne sévèrement,  mais  ses  prescriptions  ne  furent 
pas  toujours  observées.  —  1°  Dès  le  désert,  les  filles 
de  Moab  entraînèrent  des  Israélites  à  la  débauche  et 
à  l'idolâtrie.  Vingt-quatre  mille  de  ces  derniers  furent 
punis  de  mort,  l'n  Hébreu  osa  amener  avec  lui  une 
Madianite  jusque  sous  les  jeux  de  ses  frères.  Phi- 
nées  les  perça  tous  fis  deux  de  la  lance  dans  la  qub- 
bâh,  x<x|uvoç,  lupanar.  Le  mot  hébreu  qui,  par 
l'arabe  a  donné  »  alcôve  •>,  a  dans  la  Mischna  le  sens 
que  lui  assigne  la  Vulgate.  C'est  un  rendez-vous  de 
prostitution.  Num.,  xxv.  1-9.  Sous  les  Juges,  .lephté  est 
le  fils  d'une  courtisane;  chassé  plus  lard  de  la  maison 
paternelle.,  comme  i  fils  d'une  autre  femme  »,  il  Jn'en 
devient  pas  moins  chef  du  peuple.  Jud.,  xi,  I,  2,  11. 
Samson  se  rend  chez  une  prostituée  de  Gaza.  Jud., 
xvi.  1.  A  Gabaa  de  Benjamin,  les  habitants  veulent  re- 
nouveler sur  un  lévite  le  crime  de  Sodome,  abusent 
de  sa  concubine  et  la  font  mourir.  Jud.,  xix,  22-26. 
Les  lils  du  grand-prêtre  Héli  commettent  le  mal  avec 
les  femmes  qui  servent  à  l'entrée  du  Tabernacle. 
1  Reg.,  ii,22,  25. 

■2  Des  prostituées  étaient  tolérées,  peut-être  à  Jéru- 
salem même,  du  temps  de  Salomon.  lieux  d'entre  elles, 
des  zônût,  stojivat,  meretricex,  furent  admises  au  tribu- 
ii. d  dece  roi  et  provoquèrent  son  fameux  jugement  au 
sujel  de  leur  enfant.  III  Reg.,  m,  16.  Sous  le  roi  lio- 
lioain,  des  prostituées  se  répandent  dans  le  pa\>  de 
Juda  il  les  anciennes  abominations  chananéennes  se 
rej  '  duisent.IU  Reg.,  xiv,2i.  Asa,  pelil-fils  deRoboam, 
fait  disparaître  les  prostituées  du  paj~s.HI  Reg.,  xv,12. 
.Mais  il  en  demeure  encore,  et  son  lils  Josapbat  achève 
de  les  supprimer,  III  Reg.,  xxn,  17.  Le  roi  Manassé 
installe  dans  le  Temple  même  l'idole  d'Astarthé, 
IV  Reg.,  xxi,  7,  et  avec  l'idole  s'introduisent  naturelle- 
ment les  hiérodules  qui  forment  le  cortège  obligé  de  la 
déesse.  Ces  femmes  habitaient  des  maisons  qu'on  leur 
avait  bâties  dans  l'enceinte  sacrée  et  elles  s'occupaient 
à  lisser  des  lentes  pour  la  déesse,  -lonas  chasse  les 
prostituées  et  démolit  leurs  maisons.  IV  Reg.,  xxin.7. 

Le  règne  de  Manassé  fut  la  seule  période  durant 
laquelle  la  prostitution  prit  un  caractère  officiel  et  pé- 
nétra dans  le  Temple  même  comme  élément  constitutif 
d  un  culte  Idolàtrique.  Il  est  doue  inexact  et  souverai- 
nement   injuste  d'affir v.  contrairement  à    tous   les 

textes,  qu'elle  servail  en   partie  à   payer  les  fiais  du 
culte  .i  Jérusalem.  Le  Deutéronome,  xxxm,  18,  interdit 
formellement  toute  offrande  souillée  par  une  pareille 
origine.  Cf.    Vigouroux,   La   Bible  et  les  découvertes 
nés,  t.  IV,  p.  506-516. 
:'."  Les  li\  res  historiques  ne  font  qu'une  allusion  à  ce 
passait  dans  le  royaume   d'Israël.  Quand  le  ca- 
davre du  i'"i   Achab  lui  ramené  à  Samarie,  on  lava  le 
char  ensanglanté  'i"i  l'avait  porté  dans  une  piscine  où 
baignèrent,    III   Reg.,   xxn,  ,"18.  La 
Vulgate  ne  parle  pas  de  prostituées,  zonôt,  et  les  Sep- 
tante  li     n  par  des  porcs,  J;:.  Il  est   présu- 

mable  que  dans   le    i i ni  la   prostitution 

axait  pris  beaucoup  plus  de  développement  que  dans 
celui  de  Juda  i  Ile  sui\ail  naturellement  le  progri  -  de 
l'idolâtrie.  De  plus  elle  hem. ni  des  exemples  et  des 
encouragements  en  Phénicie  ci  en  Syrie,  oii  le  culte 


des  Astarthés  avait  à  son  service  des  foules  d'hommes 
et  de  femmes  voués  à  tous  les  genres  d'impudicité. 
Cf.  Lucien,  De  dea  Syra,   19-27;  Movers,   Die  Phôni- 

zip.r,  Berlin.  1841,  t.  i,  p.  G77-GS1 .  Jébu  reproche  pu- 
bliquement à  Jézabel,  la  Sidonienne,  ses  prostitutions 
et  ses  sortilèges.  IV  Ré.".,  ix,  22. 

i"  Si  les  historiens  fournissent  peu  de  renseigne- 
ments sur  la  prostitution  parmi  les  Israélites,  les 
autres  écrivains  sacrés  reviennent  assez,  fréquemment 
sur  ce  sujet.  Dans  les  Proverbes,  v.  20;  VI,  24;  vu,  5, 
la  prostituée  est  appelée  «  étrangère  ».  nokriyâh, 
iXXoTpia,  aliéna,  extranea.  Le  parallélisme  ne  permet 
pas  de  s'y  tromper  : 

La  prostituée  (zônâh)  est  une  fosse  profonde, 

Et  l'étrangère  (nokriyâh)  un  puits  étroit.  Prov.,  XXI [I,  27. 

Il  en  faut  conclure  que,  très  souvent  du  moins, 
citaient  des  étrangères,  des  Syriennes,  des  Phéni- 
ciennes, qui  se  livraient  à  ce  vice  en  Palestine,  où  l'on 
avait  lort  de  tolérer  leur  présence.  Néanmoins  des  filles 
d'Israël  se  laissaient  aussi  pervertir,  comme  l'indiquent 
clairement  les  prophètes.  De  vives  exhortations  sont 
adressées  dans  le  livre  des  Proverbes  à  ceux  qui 
seraient  tentés  de  succomber  à  la  provocation  des  sé- 
ductrices. Prov.,  v,  3-6,  20;  vi,  it-iG;  vu,  5-23;  xxn, 
14;  xxni,  27-35,  etc.  L'auteur  de  l'Ecclésiastique,  ix, 
3-9;  xix,  2,  3;  xxvi,  8-P2.  etc.,  s'exprime  de  même, 
.lob,  xxxi,  I,  9,  a  fait  un  pacte  avec  ses  yeux  pour 
n'être  pas  séduit.  Amos,  n.  7,  dit  qu'en  Israël  le  pi  i 
et  le  lils  vont  vers  la  même  tille,  profanant  ainsi  le 
nom  de  Dieu  aux  yeux  des  étrangers.  Osée  revient  sans 
cesse  sur  les  allusions  à  la  prostitution,  à  laquelle  il 
compare  l'idolâtrie  d'Israël  comme  à  une  chose  fami- 
lière. 11  déclare  que  Dieu  ne  punira  pas  les  filles  et  le- 
femmes  de  leurs  adultères  et  de  leurs  prostitutions, car 
les  hommes  eux-mêmes  vont  à  l'écart  avec  les  pros- 
tituées et  sacrifient  .née  les  courtisanes.  Dès  qu'ils  ont 
fini  de  boire,  ils  se  livrent  a  la  prostitution.  »  Ose.,  IV, 
13,14,18.  [saie,  m,  9,  appelle  Jérusalem  une  Sodome; 
on  y  coniiiiel  le  mal  en  plein  jour,  suis  se  cacher,  .lé- 
rémie,  v,  7,  montre  les  hommes  de  Jérusalem  allant  par 
troupes  dans  la  maison  de  la  prostituée,  et  il  les  com- 
pare à  des  animaux.  Ezéchiel,  xi  ni,  7,  9,  rappelle  les 
prostitutions  dont  le  Temple  a  été  le  théâtre,  probable- 
ment à  l'époque  de  Manassé'.  De  ces  textes  il  faut  con- 
clure que  la  prostitution  exerçait  de  grands  ravages 
parmi  les  Israélites,  surtout  dans  le  royaume  du  nord, 
où  la  loi  religieuse  n'était  plus  capable  de  la  réfréner, 
et  dans  les  villes,  comme  Jérusalem,  où  se  donnaient 
rendez-vous  un  grand  nombre  d'étrangères  cl  où  l'im- 
piété des  rois  et  des  grands  favorisait  souvent  la 
propagation  du  mal.  U  ne  s'ensuit  nullement  toutefois 
que  la  masse  de  la  nation  ait  été  atteinte,  spécialement 
en  Juda.  La  loi  morale  et  les  prescriptions  mosaïques 
gardaient  encore   assez,   de  vigueur  pour  tenir  la  gêné 

ralité  des  Israélites  éloignée  des  excès  auxquels  se 
livraient  buis  voisins.  C'était  un  déshonneur,  pour  une 

fille  de  Juda,  de  devenir  une  prostituée.  Ain.,  Ml,   17. 

IV.  Descriptions  bibliques.  —  Pour  inspirer  plus 

grande  horreur  du  vice,  les  auteurs  sacrés  ne  reculent 
pas  'levant  des  descriptions  lies  réalistes.  L'histoire  de 
Thamar  et  de  Juda  en  est  un  premier  exemple.  Cen.. 
XXXVMI.  14-26.  L'auteur  des  proverbes.  VU,  10-23, 
montre  la  courtisane  aux  aguets,  hors  de  sa  maison, 
dans  la  rue.  sur  les  place-,  a  toiis  les  angles,  abordant 
sa  victime,   lui   vantant   les   chai  nies  de  sa  demeure,  la 

sécurité  de  la  rencontre. 

D'autres  fois,  la  provocatrice  s'assied  devant  chaque 
poteau.   Eccli.,   XXVI,    lô.   Elle  se  construit  un  gdb,  un 

lieu  élevé'  et  visible,  oïxi)|ia  Tiopvixov,  lupanar,  elle  .. 
lait  un  râniâh,  un  tertre,  ïy.Ijiu.x,  prostibulum ;  il  J  i   i 

a  un  à  chaque  Cl four,  et  là  se  multiplient  les  pros- 

iitiiiiniis.   Bzech.,  xvi,  24,  ib.  Non  contente  d'attendre 


"769 


PROSTITUTION 


770 


et  de  provoquer,  la  courtisane  chante  et  s'accompagne 
d'instruments  pour  attirer  l'attention.  Eccli..  i.\,  4. 
Isaïe,  xxiii,  16,  parle  de  la  chanson  de  la  courtisane. 
Elle  a  des  paroles  doucereuses,  comme  le  miel  et 
l'huile,  Prov.,  v,  3  ;  vi,  24,  la  démarche  agitée,  Prov.,  vu, 
11,   12,  un  visage  effronté,   Prov..  vu,   11,  13;  ,1er.,  ni, 

3,  une  mise  qui  la  fait  reconnaître.  Prov.,  vu,  10.  11 
lui  faut  son  salaire,  Ezech,,  xvi,  33,  son  pain  et  son 
eau,  sa  laine  et  son  lin,  son  huile  et  sa  boisson.  Ose., 
il,  5;  cf.  ix,  1  ;  Mich.,  i,  7.  Pour  elle,  on  se  réduit  à 
•un   morceau  de   pain,   Prov.,   vi,  26;   on   dissipe  son 

bien.  Prov.,  xxix,  3.  Cependant  ce  salaire  était  sou- 
vent mesquin.  Joël,  m,  3,  dit  que  les  ennemis  d'Israël 
donnaient  un  enfant  pour  le  salaire  d'une  courtisane, 
c'est-à-dire  le  vendaient  à  vil  prix.  L'auteur  de  Job, 
xxxvi,  14,  ajoute  un  Irait  au  tableau,  en  disant  que  les 
pécheurs  endurcis  meurent  dans  leur  jeunesse  et 
voient  leur  vie  se  ilétrir  comme  celle  des  qedêSim, 
effeminati,  les  hommes  qui  font  métier  d'impudicité. 
Les  Septante  traduisent  ici  à  tort  le  mot  hébreu  par 
«  anges  ». 

V.  En  Babvlonie.  —  1°  Toutes  les  monstruosités 
que  comportaient  le  culte  d'AsIarthé  en  Chanaan  se 
retrouvent  en  Babylonie  dans  le  culte  d'Istar.  Les 
temples  babyloniens  ont  leurs  courtisanes  sacrées, 
leurs  qadiStu  ou  hiérodules,  leurs  istaritu  ou  «  con- 
sacrées à  Istar  »,  leurs  harimtu  ou  prostituées.  Héro- 
dote, i,  199,  exagère  probablement  quand  il  prétend 
que  toute  femme  était  obligée  de  s'offrir  une  fois  dans 
sa  vie  au  temple  de  la  déesse.  Cf.  Strabon,  vin,  378; 
xii,  559;  Maspero,  Histoire  ancienne,  t.  i,  p.  639,  640, 
676.  liais  tous  les  temples  babyloniens  avaient  leurs 
bandes  d'hommes  et  de  femmes  qui  abusaient  et  lais- 
saient abuser  d'eux-mêmes.  Érech  était  comme  la  capi- 
tale de  la  prostitution  en  ce  pays.  Voir  Arach,  t.  i, 
col.  868.  Une  inscription  cunéiforme  caractérise  ainsi 
cette  ville  :  a  Érech,  la  demeure  d'Anou  et  d'Istar,  la 
ville  des  filles,  des  courtisanes  et  des  prostituées, 
auxquelles  Istar  vend  et  livre  l'homme;  ...eunuques... 
dont  Istar,  pour  effrayer  les  gens,  a  changé  la  virilité 
en  hermaphroditisme,  porteurs  d'épées,  de  rasoirs,  de 
stilets  et  de  silex...  »  Cf.  Jensen,  Mythe  d'Iura,  col.  il, 
I.  5-12,  dans  la  Keilinschriftliche  Bibliothek  de  Schra- 
der,  t.  vi,  p.  62.  Ces  instruments  servaient  aux  inci- 
sions et  aux  mutilations  que  s'imposaient  les  serviteurs 
•de  la  déesse.  Voir  Eunuque,  t.  n,  col.  2044;  Incisions, 

4.  m,  col.  S69.  La  prostitution  babylonienne,  partie 
intégrante  du  culte  des  idoles,  est  signalée  par  Jérémie 
dans  sa  lettre  aux  captifs  israélites.  Bar.,  vi,  42-44. 
Hérodote,  i,  199,  mentionne  la  couronne  que  portaient 
les  prostituées.  La  farine  qu'elles  brûlent  rappelle  le 
kavvàn,  gâteau  offert  aux  Astarthés,  Jer.,  vu,  18;  xliv, 
19,  et  sert  d'encens  à  la  déesse.  La  prostitution  ne  se 
confinait  pas  dans  les  enceintes  sacrées;  aucun  frein 
n'arrêtait  son  débordement.  Quand  les  Perses  occupèrent 
le  pays,  ils  ne  tentèrent  vraisemblablement  pas,  maigri' 
la  pureté  relative  de  leur  culte,  d'opposer  une  digue  à 
l'immoralité  de  la  race  conquise.  D'ailleurs  la  faveur 
avec  laquelle  ils  considéraient,  à  l'exemple  des  Égyp- 
tiens, les  unions  les  plus  incestueuses,  (cf.  Darmstetter, 
Le  Zend-Avesta,  Paris,  1892,  t.  i,  p.  126-134),  les  dispo- 
sait peu  à  corriger  l'immoralité  des  autres. 

2°  Ouand  Sargon  eut  déporté  en  Assyrie  les  habitants 
de  Samarie,  il  envoya  pour  les  remplacer  des  colons 
tirés  de  Babylone,  de  Cutha,  d'Avah,  d'Émath  et  de 
Bépharvaïm.  Ces  colons  établirent  leurs  divinités  par- 
ticulières dans  les  anciens  hauts-lieux  des  Samaritains. 
«  Les  gens  de  Babylone  firent  Sochoth-Benolh  [sukkôf 
bel  ôt),  ceux  de  Cutha  firent  Nergal,  ceux  d'Émath 
firent  Asima,  etc.  »  IV  Reg.,  xvn,  30.  Les  mots  sukkùt 
benôt,  à  s'en  tenir  à  la  transcription  massorétique, 
signifient  «  tentes  des  filles  ».  De  ces  simples  mots 
-ainsi  compris,  on  a  tiré  cette  conclusion  qu'il  existait 

DICT.   DE  LA   BIBLE. 


chez  les  Israélites  une  fête,  que  les  colons  de  Babylone 
auraient  adoptée,  et  dans  laquelle  les  filles  se  tenaient 
sous  des  lentes  pour  des  prostitutions  sacrées. 
Cf.  .1.  Soury,  Revue  des  deux  mondes,  avril  1876, 
p.  599-600.  liais  il  est  de  toute  évidence  que,  dans  le 
texte  des  Rois,  l'énumération  ne  comprend  que  des 
noms  de  divinités.  Il  faut  donc  que  Sukkùt  Benôt  ait 
un  sens  analogue  à  celui  des  autres  noms.  Déjà  Gese- 
nius,  Thésaurus,  p.  952,  se  rendant  compte  que  le  sens 
obvie  n'était  pas  le  véritable,  proposait  de  lire  sukkôt 
banôt,  •  tentes  sur  les  hauteurs  •>.  Mais  on  reconnaît 
aujourd'hui  qu'il  y  a  ici  un  nom  de  divinité  assyrienne. 
Cf.  Buhl,  Gesenius'  Handwôrterb . ,  p.  566.  Sukkôfbenol 
serait  une  transcription  hébraïque,  peut-être  altérée  à 
dessein,  du  nom  de  la  déesse  assyrienne  appelée  Zir- 
banit.  Zarpanit  ou  Sarpanit,  «  celle  qui  donne  la  pos- 
térité »,  la  même  qui  est  appelée  Mylitta  par  Héro- 
dote, I,  131,  199.  Cf.  Halévy,  dans  la  Revue  critique, 
19  déc.  1881,  p.  483,  note;  Vigoureux,  La  Bible  et  les 
découvertes  modernes,  t.  m,  p.  575-577;  t.  iv,  p.  509- 
511.  Toutefois  l'hébreu  m;c,  que  les  versions  tradui- 
sent ordinairement  par  «  tentes  »,  est  dans  Amos,  v, 
26,  le  nom  d'une  divinité  assyro-babylonienne,  Sakkut, 
qu'on  a  trouvé  joint  au  nom  d'une  autre  divinité,  Kaï- 
van,  dans  une  incantation.  Cf.  Revue  biblique,  1901, 
p.  358.  Ce  sont  deux  divinités  sidérales.  Il  est  fort  pro- 
bable que  le  Sakkut  nommé  dans  Amos  est  aussi  le 
dieu  qu'honoraient  les  Babyloniens  de  Samarie.  En 
toute  hypothèse,  il  ne  peut  être  question  de  «  tentes  de 
filles  »  érigées  en  vue  de  prostitutions  sacrées,  à 
l'exemple  de  ce  qui  se  serait  fait  dans  le  pays.  Les 
textes  ne  permettent  pas  cette  interprétation,  et  il  est 
incontestable  qu'en  Palestine  la  prostitution  ne  fut 
jamais  qu'au  service  des  cultes  idolàtriques. 

VI.  Prostitution  et  idolâtrie.  —  1°  La  Sagesse, 
xiv,  23-27,  déclare  que  •<  le  culte  des  viles  idoles  est 
le  principe,  la  cause  et  la  fin  de  tout  mal  »;  et  parmi 
les  manifestations  du  mal,  elle  signale  les  mystères 
clandestins,  les  débauches  effrénées  de  rites  étranges, 
l'impudeur  dans  la  vie  et  dans  les  mariages,  les  crimes 
contre  nature.  Saint  Paul  constate  aussi  que  les  pré- 
tendus sages  du  paganisme,  pour  avoir  substitué  l'ado- 
ration de  la  créature  à  celle  du  Créateur,  ontété  livrés 
à  l'impureté  et  en  sont  arrivés  à  <i  déshonorer  entre 
eux  leurs  propres  corps.  »  Rom.,  i,  24,  —  2°  Mais  la 
relation  de  cause  à  effet  entre  l'idolâtrie  et  la  prostitu- 
tion n'est  pas  la  seule  qui  existe.  Les  auteurs  sacrés  y 
ajoutent  une  relation  de  similitude.  Par  vocation,  en 
effet,  la  nation  israélite  appartient  à  .léhovah;  quand 
elle  se  détourne  de  lui  pour  se  livrer  aux  faux  dieux, 
elle  se  rend  donc  coupable  de  fornication,  voir  Forni- 
cation, t.  n,  col.  2316,  et  de  prostitution.  Ainsi  Moïse 
défend  aux  Israélites  d'entrer  en  contact  avec  les  Cha- 
nanéens,  de  peur  qu'ils  n'en  viennent  à  se  prostituer  à 
leurs  dieux.  Exod.,  xxxiv,  15,  16.  Dans  le  Pentateuque 
et  les  plus  anciens  livres,  le  culte  des  idoles  et  des  faux 
dieux  est  habituellement  appelé  une  prostitution. 
Lev.,  xvn,  7;  xx,  5,  6;  Deut.,  xxxi,  16;  ,Iud.,  n,  17. 
vin,  33,  etc.  Plus  tard,  toute  la  prophétie  d'Osée  roule 
sur  l'idée  de  l'idolâtrie  d'Israël  représentée  sous  la 
forme  d'une  prostitution.  «  Va,  prends  une  femme  de 
prostitution  et  des  enfants  de  prostitution,  carie  pays  ne 
fait  que  se  prostituer  en  abandonnant  léhovah.  »Ose.,l, 
2;  cf.  n,  2,  5;  iv,  12-14;  v,  3;  vi,  10;  ix,  1,  lu.  Jérémie 
emploie  la  même  image  pour  décrire  l'idolâtrie  de  Juda. 
et  celle  d'Israël.  Jer.,  m,  1-8.  Ézéchiel,  xvi,  17;  xxm, 
30,  se  sert  d'expressions  identiques.  —  3°  Les  auteurs 
sacrés  qualifient  aussi  de  prostitution  les  relations  du 
peuple  de  Dieu  avec  les  nations  idolâtres  dans  l'appui 
desquelles  il  met  sa  confiance.  Israël  s'est  prostitué'  aux 
nations.  Ose.,  vm,9.  Jérusalem  surtout  s'est  prostituée 
à  l'Egypte  et  à  l'Assyrie.  Ezech.,  xvi,  25-3i;  xxm,  8, 
27,  30.  —  4°  Enfin  la  conduite  même  de  certaines  na- 

V.  -  25 


771 


IT.OSTITUTION 


772 


lions  idolâtres  esl  assimilée  à  la  prostitution.  Ainsi 
l'yr  se  prostitue  à  toutes  les  nations  de  la  terre, 
[s.,  xxiil,  17.  Ninive  esl  châtiée  «à  cause  du  grand 
nombre  de  prostitutions,  de  la  prostituée  pleine  d'at- 
traits, de  l'habile  magicienne,  qui  vendait  les  nations 
par  ses  prostitutions  el  1rs  peuples  par  ses  enchante- 
ments.     Nah.,  m.  'i 

VII.  Dans  i.e  monde  gréco-romain.  —  De  la  Syrie  el 
il     I    Phénicie,  l'usage  de  la  prostitution  avait  aisément 

.  n  Asie-Mineure,  en  Grèce  el  en  Italie.  Dans  l'île 
deChypre  régnail  une  immoralité  analogue  à  celle  de  la 
Babylonie  Cf.  Hérodote,  i.  199.  En  Phrygie  el  en  Bi- 
thynie,  le  culte  de  Cybèle  comportait  l'orgieet  la  pros- 
titution. La  Cappadoce  et  le  Pont  honoraient  Ma,  con- 
fondue avec  Artémis  par  les  Grecs.  La  déesse  avait  à 

C ana    un   temple  qui  abritait  six  mille  hiérodules, 

hommes  el  femmes.  Anaïtis  en  comptait  autant  à 
Sinus,  et  /jus  trois  mille  à  Venasa.  Cf.  Dôllinger, 
Paganisme  et  Tudaïsme,  t.  n,  p.  169-173.  En  pays  grec, 
les  prostitutions  sacrées  n'étaient  point  en  usage,  si  ce 
n'est  peut-être  à  Corinthe  el  à  Éryx,  en  Sicile.  Cf.  Jus- 
tin, xvm,  5  ;  Strabon,  vi,  2;  Lagrange,  Études  sur  1rs 
religions  sémitiques,  p.  145.  Voir  Corinthe,  t.  II, 
col.  4175.  Mais  l'impudicité  trouvait  des  excitations  per- 
manente dans  les  exemples  des  dieux,  dans  les  fêles 

célébrées  en   leur  1 neur  et  dans  les  mille  facilités 

qu'une  vie  voluptueuse  pouvait  se  ménager  dans  le 
monde  antique  el  sous  des  climats  qui  la  favorisaient. 
Cf.  Dôllinger,  Paganisme  et  Judaïsme,  t.  ni,  p.  265- 
272;  de  Champagny,  Les  Césars,  Paris,  1870,  t.  m, 
p.  303-306.  A  Rome,  la  prostitution  avait  pris,  sous  les 
premiers  empereurs,  un  tel  développement,  que  les 
courtisanes  seules  étaient  considérées;  pour  attirer 
l'attention,  les  plus  nobles  matrones  en  venaient  à  se 
faire  courtisanes,  au  point  que  Tibère  même  se  crut 
obligé  de  réprimer  ce  honteux  désordre.  Cf.  Suétone., 
Vib.,  35;  Tacite,  Annal.,  n,  85;  xtv,  16;  xv,  37,  etc. 
Des  courtisanes  syriennes,  du  plus  bas  étage,  se  ren- 
daient dans  la  capitale,  où  on  les  connaissait  sous 
le  nom  A'ambubaiee, «joueuses  «le  flûte,  «parce qu'elles 
attiraient  l'attention  à  l'aide  de  cet  instrument.  Cf.  Ho- 
race, Sat.,  I,  2,  I  ;  Suétone,  Ner.,  27;  Pétrone, 
Sot.,  i.xxvi,  13.  —  La  Palestine  ne  fut  pas  à  l'abri 
de  la  contagion.  Le  progrès  de  la  prostitution  >  sui- 
\it  l'introduction  des  nneurs  grecques,  maison  pre- 
nant lesformes  de  la  corruption  asiatique.  Par  l'ordre 
d'Antiochus  Épiphane,  i  le  Temple  Tut  rempli  d'orgies 
et  de  débauches  par  des  (ientils  dissolus  et  des  cour 
tisanes,  des  hommes  ayant  commerce  avec  des  femmes 
dans  les  saints  parvis.  »  Il  Macli.,  VI, 4.  Dans  un  autre 
passage,  Il  Mach.,  iv,  12,  il  est  dit,  d'après  la  Vulgate, 
quejason  établi!  un  gymnase  et  exposa  les  jeunes  gens 
dans  les  lieux  infâmes,  in  lupanaribus.  Il  >  a  dans  le 
texte  6rec  :  J7ib  jréraerov  îjyev,  a  il  les  mena  sous  le 
chapeau  »,   c'est-à-dire  il  les  conduisit  aux  exercices 

de  la  palestre  ] r  lesquels  on   se  coiffait   du  niTauo;, 

chapeau  à  larges  bords.  Voir  t.  n, col.  829. 

VIII .  A    L'ÉPOQUl     ÉVANGÉLIQUE.  1"   1 1  est  plusieurs 

fois  question  de  prostituées  dans  l'Évangile.  C'est  avec 
elles  que  le  lils  prodigue  dissipa  son  bien.  Luc,  x\ ,  30. 
La  femme  qui  se  présenta  chez  Simon  le  pharisien, 
el  qui  était  Marie-Madeleine,  esl  qualifiée  de  <  péche- 
resse dans  la  ville  »,  atiaç-cMi,  peccalrix.  Luc,  vu, 
9  Ce  1er adoui  i  désigne  une  fem de  mœurs 

es.  Les  Juifs  talmudistes  ont  bâti  lont  un  roman 

'"'   '■"  •' pte,  pour  diffamer,  à  son  occasion,  la  mère 

du  Sauveur.  Voir  i.  tv,  col.  sus,  810.  Les  courtisanes, 
n<pvai,  meretrices,  ne  sont  pourtant  pas  exclues  du 
royaume  de  Dieu,  si  elles  font  pénitence.  Il  en  e:  l  qui 

i  n  à  la  prédication  de  Jean  Baptiste  el  onl  rail 
l"  ""'  «ce.  Elles  précèdent,  icpoûvouoi,  lesprêtresel  les 

as  dans  le  royaume  de  Dieu,  c'est-a  dire  qu'elles  j 
entrent  plus    rapidement    el    plus   sûrement  les 


orgueilleux  du  sanhédrin,  Matth.,  xxi,  31,  32.  Le  Sau- 
veur en  donne  l'assurance  à  Marie-Madeleine,  Luc,  vit, 
50,  qui  comptait  probablement  parmi  celles  qui  avaient 
entendu  les  exhortations  du  précurseur.  —  Mans  une 
discussion  avec  les  Juifs,  Notre-Seigneur  leur  reproche 
de  ne  pas  faire  les  œuvres  d'Abraham,  dont  ils  se  pré- 
tendent les  lils.  neiis  de  faire  les  œuvres  d'un  autre 
père,  c'est-à-dire  de  montrer  par  leur  conduite  qu'ils 
descendent  d'un  autre  père,  le  diable.  Ils  lui  répondent  : 
a  .Vous  ne  sommes  pas  nés  de  la  prostitution,  êx  iropr 
veîocc,  ex  fornicatione ;  nous  n'avons  qu'un  père,  qui 
est  Dieu.  »  Joa.,  vin,  il.  Ils  abandonnent  la  paternité 
d'Abraham  pour  remonter  plus  haut.  Mais  ils  ont 
compris  l'allusion  et  ont  été'  piqués  au  vif. 

2°  Au  cours  de  leurs  prédications  évan^éliqnes,  les 
Apôtres  eurent  à  réprimer  la  prostitution,  qu'ils  ren- 
contrèrent à  chaque  pas  sur  leur  chemin.  Par  leur 
décret  de  Jérusalem,  ils  proscrivent  rigoureusement  ce 
qu'ils  appellent  7topvïia,  fornicatio.  Act.,  xv,  20,  29; 
xxi,  25.  Le  mot  gœc  désigne  toute  liaison  en  dehors  du 
mariage,  non  seulement  quand  elle  est  passagère,  mais 
encore  et  surtout  quand  le  vice  devient  une  profession 
comme  dans  la  prostitution.  On  sait  que,  pour  les 
païens,  c'était  là  une  chose  qui  parfois  revêtait  un 
caractère  religieux  et  qui,  en  tous  cas.  demeurait  indif- 
férente el  licite.  Cf.  Térence,  Adelph.,  i.  2,  21;  Cicé- 
ron,  l'ro  Ctrlio,  20;  Horace.  .Sa(.,  i,  2,  31,  etc.  Quel- 
ques auteurs  pensent  que  le  mot  itopvefo  désigne  les 
unions  contractées  dans  des  conditions  de  consangui- 
nité ou  d'affinité  prohibées  par  le  Lévitique,  xvm.  7- 
18.  Ces  unions  sont  indiquées  par  l'expression  gallôf 
ërvdh,  •<  découvrir  la  nudité  »,  qui  se  retrouve  Sanhé- 
drin, 56  b,  pour  formuler  un  précepte  noaebile.  anté- 
rieur au  Lévitique.  11  est  difficile  d'admettre  que  les 
Vpôtres  n'aient  eu  en  vue  que  des  unions  prohibées 
par  une  législation  dont  les  Gentils  ne  pouvaient  avoir 
connaissance.  Ils  doivent  donc  viser  bien  plutôt  la  for- 
nication en  général,  telle  que  les  idolâtres  la  prati- 
quaient sans  grand  scrupule.  Cf.  [Cnabenbauer,  Aciui 
Apost.,  Paris,  1899,  p.  266-267;  Coppieters,  Le  décret 
des  Apôtres,  dans  la  Revue  biblique,  1907,  p.  4S.  Pour 
la  simple  prohibition  de  certains  mariages,  cf.  Cor- 
nely,  Prxor  Epist.  ad  Cor.,  Paris,  1890,  p.  119-121; 
l'rat,  La  théologie  de  saint  Paul,  Paris,  1908,  p.  70.  — 
Aux  Corinthiens,  qui  ont  sous  les  yeux  de  si  déplorables 
exemples,  saint  Paul  rappelle  que  les  membres  du 
chrétien   sont    les  membres  du  Christ,  que    son    Corps 

esl  le  temple  du  Saint-Esprit,  et  qu'il  y  aurait  crime 

et  honte  à  faire  de  ers  membres  ceux  d'une  prostituée. 
et  de  ce  corps  un  même  corps  avec  le  sien.  I  Cor.,  vi. 
15-19.  Seront  d'ailleurs  exclus  du  royaume  de  Dieu, 

entre  autres  criminels.  TTOpvoi,   fornicarii,  les  fornira- 
teurs;  yioiyol,  adulteri,  les  adultères;  u.a).axo(,  molles, 
1rs  n  n  m  s,  les  elléminés  qui  servent  à  la  débauche  d'il! 
triiiiiriils    passifs;    àpaevoxoërai,   masculorum    conat- 
bi tores,    ceux    qui    se   livrent  au   vice  contre  nature 

châtié  à  Sud. ;  ■îiuV.otâ'rpai,  idolis  servientes,  cens 

qui  rendent  un  culte  aux  idoles,  particulièrement  sous 
forme  de  prostitution  sacrée,  telle  qu'on  la  pratiquait 
dans  le  temple  d'Aphrodite  à  Corinthe.  I  Cor.,  vi,  9. 
lo.  Tous  les  excès  qu'entraîne  la  prostitution  sont 
ainsi  stigmatisés.  Mais  les  séductions  du  mal  étaient 
terribles  dans  cette  ville  de  Corinthe.  De  malheureux 
chrétiens  se  laissaient  entraîner.  En  leur  écrivant  une 
seconde  l'ois.  l'Apôtre  craint  d'avoir  à  pleurer  sur  ceux 
qui  n'ont  pas  fait  pénitence  après  avoir  succombé  ■< 
L'cUa6apo-(a,  ïmniunditia,  l'impureté  en  général,  la 
,.  fornicalio,ll\  prostitution,  el  YiveYyzia,  im/in- 
dicitia,  la  dissolution  des  nneurs  dans  ce  qu'elle  a  de 
plus  grossier.  Il  Cor.,  xii,  21.  Aux  Tbessalonicien  . 
dont  la  ville  était  un  bru  de  plaisir  el  de  dépravation, 

cf.   Lucien,  .4 sin.,   16,  saint   Paul  rappelle  l'oblij n 

de  fuir  la  prostitution  el  SCS  conséquences.  I  Thess.,  iv. 


773 


PROSTITUTION 


PROVENÇALES   (VERSIONS)    DE    LA   RIRLE        774 


3.  A  Timothée,  évéque  de  cette  ville  d'Éphèse  dans 
laquelle  le  culte  de  Diane  attirait  les  courtisanes  et  les 
débauchés,  il  ordonne  de  condamner,  au  nom  de 
l'Évangile,  les  -op-.o;  et  les  àptrevoxoiTat,  ceux  qui 
vivent  dans  la  prostitution  et  les  vices  contre  nature. 
ITim.,1,  10.  Aux  Éphésiens  eux-mêmes,  il  recommande 
de  ne  plus  se  conduire  comme  les  païens, qui.  <  ayant 
perdu  tout  sens,  se  sont  livrés  aux  désordres,  à  toute 
espèce  d'impureté,  avec  une  ardeur  insatiable.  »  Eph.,  iv, 
1749.  Cf.  1  Pet.,  iv.  3. 

3"  Enfin,  dans  l'Apocalypse,  n,  11.  20-21,  saint  Jean 
signale  la  prostitution  à  Pergame  et  à  Thyatire.  Il 
décrit  la  ruine  de  la  cité  du  mal,  de  Babylone,  ttj; 
-éfv.-ç  -rtc  u.i-;i'ir,;,  meretricis  magnas,  «  la  grande 
prostituée,  qui  a  abreuvé  les  nations  du  vin  de  sa 
furieuse  impudicité.  a  Apoc.  XIV,  8;  XVII,  1,  2,  4; 
xvm.  3,  9;  xix.  2.  Il  annopce  le  châtiment  qui  est  ré- 
servé aux  impudiques,  la  seconde  mort.  Apoc,  xxi,  8. 
Il  exclut  à  jamais  de  la  cité  bienheureuse  les  chiens  et 
les  débauchés,  en  compagnie  des  idolâtres,  par  consé- 
quent tous  ceux  qui  vivent  dans  ies  hontes  de  la  pros- 
titution et  des  vices  qu'abritent  les  temples  des  faux 
dieux.  Apoc,  xxii,  15.  11.  Lesètre. 

PROTÉVANGILE  (premier  évangile),  nom  donné 
1"  à  la  première  prophétie  messianique.  Gen.,  ni,  13, 
annonçant  que  le  Sauveur  futur,  de  la  race  de  la  femme 
écrasera  la  tête  du  serpent  tentateur  (voir  Marie  2, 
t.  iv.  col.  77S i ;  2°  à  un  Évangile  primitif  supposé 
par  divers  critiques  pour  rendre  compte  des  ressem- 
blances des  Évangiles  synoptiques  (voir  ÉVANGILES, 
t.  m,  col.  2091);  3°  à  un  Évangile  apocryphe  dit 
de  saint  Jacques.  Voir  ÉVANGILES  apocryphes,  t.  Il, 
col.  2115. 

PROTOCANONIQUES  (LIVRES),  livres  de  l'É- 
criture dont  l'autorité  n'a  été  l'objet  d'aucune  contesta- 
tion. Voir  Canon,  t.  n,  col.  137. 

PROUE  i-rec  :  icpûpa;  Vulgate  :  prora).  avant  d'un 
navire.  Voir  Navire,  t.  iv,  col.  1513.  Quand  le  navire 
qui  portait  saint  Paul  fut  poussé  par  la  tempête 
vers  l'île  de  Malle,  les  marins,  craignant  d'être  portés 
sur  les  récifs  au  milieu  de  la  nuit,  jetèrent  quatre  ancres 
de  la  poupe,  alin  d'arrêler  la  marche  du  navire.  Puis, 
pour  échapper  eux-mêmes  au  danger,  ils  mirent  une 
chaloupe  à  Ilot  du  coté  de  la  proue,  sous  prétexte  d'y 
jeter  une  autre  ancre.  C'est  de  ce  coté,  en  etfet,  qu'ils 
comptaient  trouver  un  rivage.  Quand  le  jour  fut  venu, 
on  coupa  les  amarres  des  ancres  et  on  échoua  le  navire 
sur  une  plage.  La  proue  s'enfonça  dans  le  sable  et 
y  resta  fixée,  tandis  que  la  poupe  se  disloquait 
sous  la  violence  des  vagues.  Act..  xxvii,  29,  30,  41. 
C'est  à  la  proue  qu'on  sculptait  les  ligures  symboliques 
qui  servaient  d'enseigne  au  navire.  Voir  Castors,  t.  n. 
col.  312.  H.  Lesètre. 

PROVENÇALES  (VERSIONS)  DE  LA  BIBLE. 

Leur  histoire  n'est  connue  exactement  que  depuis  peu 
de  temps  seulement.  Leurs  manuscrits  ont  été  long- 
temps confondus  avec  ceux  des  traductions  bibliques 
faites  dans  le  dialecte  des  vallées  vaudoises.  Cf.  Ri- 
chard .Simon.  Nouvelle*  observations  sur  le  tel'  et 
Ici  versions  du  Nouveau  Testament,  IIe  partie,  c  n, 
in-4»,  Paris,  1695,  p.  141-142  ;  J.  Le  Long,  Bibliotlieca 
sacra,  in-l".  Paris,  1723.  t.  I,  p.  308-369.  Ed.  Reuss 
a  distingué  le  premier  les  versions  albigeoises  ou  ca- 
thares en  provençal  des  traductions  vaudoises.  Frag- 
ments littéraires  et  critiques  relatifs  à  l'histoire  île  la 
Bible  française,  dans  la  Revue  de  théologie  de  Stras- 
bourg, 1852,  l.  v.  p.  321-349;  1853.  t.  vi.  p.  65-96. 
liepuis  lors,  on  a  découvert  et  étudié  des  manuscrits 
nouveaux,  on  a  confronté  les  textes,  et  de  cette  compa- 


raison Samuel  Berger  et  Paul  Meyer  ont  tiré  des 
conclusions  scientiliques,  que  nous  exposerons 
brièvement. 

1°  La  plus  ancienne  traduction  provençale  a  été  re- 
trouvée dans  un  manuscrit  unique  du  XIIe  siècle,  conser- 
vé' à  Londres  au  British  Muséum,  Harleian  2928, 
fol.  187  v».  Il  comprend  cinq  chapitres  de  l'Évangile  de 
saint  Jean.  xm.  1-xvn,  26,  dont  le  texte  provençal  est 
précédé  de  cette  rubrique  latine  :  Incipit  serino  Domi- 
iii  nostri  Jhesu  Chrisli  quem  fecit  in  cena  sua  quan- 
I  du  pedes  lavit  discipulis  suis.  Il  a  été  copié  à  Limoges, 
peut-être  à  l'abbaye  Saint-Martial.  Le  texte  est  un 
morceau  liturgique  et  on  n'a  pas  de  raison  de  penser 
qu'il  ait  fait  partie  d'une  version  plus  étendue.  11  est 
de  la  même  époque  que  le  manuscrit,  par  conséquent 
du  xne  siècle.  Il  a  été  publié  par  Fr.  Michel,  par 
C.  Hofmann,  Gelehrte  Anzeigen  der  kônigl.  b,< >,■,■>■ . 
Akademie  der  Wissenschaften,  juillet  1858,  par  Paul 
Meyer.  Recueil  d'anciens  textes  bas-latins,  provençaux 
el  français,  Paris,  1871,  t.  i,  p.  32-39,  et  par  K.  Bartsch, 
C  lires  tomathie  provençale,  i'  édit.,  Elberfeid,  1880, 
col.  9-18. 

2»  Environ   cent  ans  plus  tard,    au  xme  siècle,  on 
fit  une   version  provençale  de  tout  le  Nouveau  Testa- 
ment.  Elle  existe  dans  un  seul  manuscrit  d'une  écri- 
ture   méridionale   paraissant  de  la  fin  du  xme  siècle 
(1250-1280),    à   la    bibliothèque  du   Palais   des  arts  a 
Lyon,  n»36.  lia  été  apporté  de  Nimes  à  Lyon  en  1815, 
et  donné   à  la  ville  de  Lyon  par  J.-.l.   Trélis.  Le  texte 
présente  deux  lacunes  notables,  provenant  de  la  perte 
de  quelques  feuillets  :  les  passages,  Luc,  xxi,  38-xxm, 
13;  Rom.,  vu,  8  6-vm,  28,  manquent.  La  version  pro- 
vençale   est   suivie  d'un    rituel  qu'Edouard    Cunitz  a 
reconnu  le  premier  pour  le  rituel  cathare  ou  albigeois, 
contenant  la  liturgie  du  consolament  :  Ein  katharisches 
Ritual,  dans  les  Beitrùge  far  den  theol.  Wissenschaf- 
(en.Iéna,  IS52.  t.  iv.  p.  1-S8.  Il  a  été  réédité  par  M.  Léon 
Clédat  avec  le  Nouveau  Testament,  in-8°,  Paris.  1888 
(le  texte  en  a  été  transcrit   en  caractères  ordinaires  cl 
traduit  en  français  dans  l'Introduction,   p.  ix-xxvi),  et 
spécialement  :   Vieux    provençal.  I.  Rituel  provençal, 
manuscrit  36de  la  bibliothèque  municipale  du  palais 
Saint-Pierre,  à  Lyon,  in-8",  Lyon,  1890.  Les  citations 
du  Nouveau  Testament  de  ce  rituel  appartiennent  à  la 
version  provençale,  dont  le  texte  précède,  quoiqu'elles 
n'en  soient   pas  extraites    textuellement.    Éd.    Reuss, 
loc.  cit.,  avait  péremptoirement  démontré,  par  la  com- 
paraison   avec    les    textes    vaudois,   que  cette  version 
n'avait  rien  de  vaudois,  et  qu'elle  avait  été  la  traduction 
officielle  des  cathares  ou  albigeois.  Samuel  Berger.  Les 
Bibles  provençales  et  vaudoises,  dans  la  Romania,  Pa- 
ris, 1889,  t.  xvm,  p.  354  sq.,  a  constaté  que  la  version 
provençale  du  manuscrit  de  Lyon   avait  été   faite    sur 
un  texte  latin  de  la  Vulgate  tout  à   fait  caractéristique 
et  usité  dans  le  Languedoc  pendant  la  première  moitié 
du  xme  siècle.  Cf.  son  Histoire  de  la  Vulgate  pendant 
les  premiers  siècles  du  moyen  âge,  Paris,  1893,  p.  72- 
S2.    Elle   y  correspond    de   tous  points  pour  le  fond 
(aussi  bien  que  les  corrections  marginales)  et  lui  res- 
semble même  dans  ses  formes  extérieures,  et  en  par- 
ticulier   pour    la    division    en    chapitres.    Bien    plus, 
comme  un  certain  nombre  de  passages,  tant  du  début 
de   la  plupart  des  livres  que  de  quelques  endroits  du 
texte,  sont    restés  en   latin  sans  traduction,   il  faut  en 
conclure  que  le  copiste  transcrivait  la  version   proven- 
çale interlinéaire    d'un     manuscrit    latin    glosé.   Non 
seulement    il    a    copié'  parfois,   par  inadvertance  sans 
doute,   le  texte  latin,   mais   l'ordre  des  mots  vulgaires 
est   presque   exactement  celui  du  texte  original.    Cette 
copie  semble  avoir  été  prise  directement  sur  le  manus- 
crit lalin  glosé,   car,    si    elle    n'est  pas  un    manuscrit 
d'auteur,  elle  n'est  pas  très  éloignée  du    manuscrit  de 
l'auteur.   AI.    Paul   Meyer,   dans  la  Romania,  loc.  cri.. 


775 


PROVENÇALES    (VERSIONS)    DE    LA    BIBLE 


776 


p,  ij:!-12tj.  par  une  étude  comparée  de  la  langue  de 
version,  a  di  terminé  la  région  à  laquelle  appar- 
tenaient  l'auteur  el  le  copiste  du  manuscrit.  Toutes  les 
particularités  linguistiques  se  retrouvent  à  l'époque 
indiquée,  dans  les  documents  qui  proviennent  du  pays 

i  '  —pondant  au  département  actuel  de  l'Aude  et 
même,  (joui-  plus  «le  précision,  à  la  partie  orientale  de 
ce  département.  Des  fac-similés  du  manuscrit  oui  été 
reproduits  par  \V.  S.  Gilly,  The  romaunt  Version  of 
llie  Gospel  according  lo  St.  John,  Londres,  1848, 
p.  i.vii  :  par  Reuss,  loc.  cit.  ;  dans  le  Recueil  des  fac-si- 
à  l'usage  de  l'École  'les  chartes,  pi.  129.  W.  Foers- 
ter  a  édité  l'Évangile  selon  saint  Jean,  dans  la  Revue 
des  langues  romanes,  2"  série,  1878,  t.  v,  p.  105  sq. 
M.  Léon  Clédal  a  publié  une  reproduction  photolitho- 
graphique  du  manuscrit  entier  :  Le  Nouveau  Testa- 
ment ha/luit  au  xill'  siècle  eu  langue  •provençale, 
dans  la  Bibliothèque  de  la  faculté  'les  lettres  de  Lyon, 
Paris,  1888,  t.  iv.  Cette  version  provençale  a  exercé, 
nous  le  verrons,  nue  limmI.-  influence,  directement  ou 
par  ses  dérivés,  sur  les  versions  vaudoises,  catalanes  et 
italiennes  du  Nouveau  Testament. 

3°  Un  autre  état  de  cette  traduction  provençale  du 
Nouveau  Testament  a  été  conservé  dans  le  manuscrit 
français  2425  qui  provient  de  Peiresc.  Il  est  malheureu- 
sement mutilé  en  plusieurs  endroits,  et  l'Évangile  de 
saint  .Matthieu  est  perdu  tout  entier.  L'écriture  est  de- 
là première  moitié  du  xiv  siècle.  D'autre  part,  le  texte 
lui-même  est  abrégé.  Il  a  été  écourté  soit  pour  éviter 
des  répétitions,  soit  par  recherche  de  la  brièveté.  Au 
lieu  de  donner  la  traduction  complète  du  texte,  l'auteur 
n'en  fait  souvent  qu'un  résumé;  parfois  cependant,  il 
a  ajouté  quelques  mots  de  paraphrase.  La  version  est 
donc  plutôt  libre  que  littérale,  el  en  beaucoup  d'en- 
droits, elle  est  très  négligée.  D'ailleurs,  la  copie  est 
souvent  défectueuse.  Or,  elle  ressemble  en  bien  des 
points  à  celle  du  manuscrit  de  Lyon.  La  division  en 
chapitres  est  en  grande  partie  identique  à  celle  de  ce 
manuscrit.  Le  texte  lui-même  est  si  ressemblant  que 
vraisemblablement  on  ne  se  trouve  pas  en  présence  de 
deux  traductions  différentes  ;  les  contresens  sont  les 
m  mes.  Les  divergences  se  ramènent  à  peu  prés  à  une 
traduction  plus  littérale  de  quelques  mots;  la  diversité 
de  l'ordre  des  mots  et  de  la  disposition  des  phrases 
provient  de  ce  que  la  version  interlinéaire  du  manuscrit 
de  Lyon  suit  l'ordre  du  texte  latin,  tandis  que  celle  du 
manuscrit  de  Paris  a  remis  les  phrases  sur  ses  pieds. 
La  communauté  d'origine  admise,  le  manuscrit  «le  Lyon 
représenterait  la  première  édition;  celui  de  Paris  en 
sérail  le  redressement,  et  le  texte  provençal  primitif 
aurait  Simplement  été  transcrit  dans  un  langage  plus 
moderne  et,  au    jugement  du  transcripteur,    plus  con- 

for ni  latin.  Au  sentiment  de  M.  Paul  Meyer,  loc.  cit., 

cette  transcription  a  été  faite  dans  le  dialecte  de  la 
Provence,  et  plu--  probablement  du  sud  ou  c\u  sud-est 
de  cette  province.  Au  point  de  vue  doctrinal,  cette  ver. 
sion  est  neutre,  comme  la  précédente.  La  copie  semble 
avoir  été  faite  pour  l'usage  d'un  catholique,  qui  y 
liNail   les  évangiles  el   les  .pitres  des  dimanches  et  des 

fêtes.    Un    grand    nombre   d'index,    dus  à   plusieurs 
et   qui    paraissent  remonter  au  xv  siècle,  in- 
diquent en  quelles  mains  ce  manuscrit  a  passe.  Ils  at- 
tirent l'attention  sur  des  textes   de   morale  et  sur  des 
qui  ont  un  rapporl  direct  avec  l'enseignement 
p   cial  des   Vaudois,  et   ils  semblent  être  le    résumé  de 
la  prédication  d'un  g  barde  i   el    le   témoignage  de  sa 
carrière    errante    et    persécutée,    s.    Bel   ei      iotrf.. 
.-374. 
le  texte  de  l'Évangile  de  suint  Jean  a  été  publié  en 
entier  par  Gilly,  mnt  Version  of  the  Gospel 
ding  to  St.  John,  Londn  s,  1848,  el  par  .1.  Wollen- 
ainl  Jean  en  oieua  provençal 
' te  du  Collège  royal  français  de  Berlin),  1868. 


P.  Meyer  a  reproduit  Joa.,  XIII,  dans  Recueil  d'anciens 
le.cles  bas-latins,  pro  vent  aux  et  français,  Paris,  1874, 
t.  t.  p.  3-2-39.  J.  Wollenberg  avait  publié  déjà  l'Epitre 
aux  Ëphésiens,  dans  VArchiv  fur  dus  Sludium  der 
neueren  Sprachen,  18IÎ-2,  t.  xxxvm,  p.  75  sq.,  et  Karl 
Bartsch  en  a  extrait  Éph.,  i,  1-23,  pour  l'insérer  dans 
sa  Chreslomathie  provençale,  i"  édit.,  Elberfeld,  1888, 
col.  331-332. 

Ces  textes  provençaux  du  Nouveau  Testament  ont 
exercé  une  inlluence  notable  sur  les  versions  vau- 
doises, qui  ont  avec  eux  un  grand  nombre  de  points 
communs.  Les  divergences  ne  permettent  pas  d  ad 
mettre  la  communauté  d'origine;  mais  la  dépendance 
de  celles-ci  relativement  à  ceux-là  est  certaine.  S.  Ber- 
ger, loc.  cit.,  p.  399-408.  Ils  ont  indue  aussi,  comme  les 
versions  vaudoises  elles-mêmes,  sur  la  première  traduc- 
tion italienne  des  Épitres  de  saint  Paul,  îles  Épitres  catho- 
liques et  de  l'Apocalypse.  S.  Berger,  'La  Bible  italienne 
au  moyen  âge,  dans  la  Romania,  1891,  t.  xxiv,  p.  ïô. 
47,  50.  Voir  Italiennes  (Versions),  t.  m.  col.  1020- 102 1. 
Ils  ont  même  influé  sur  une  Bible  allemande,  repré- 
sentée par  les  manuscrits  de  Tepl  et  de  Freiberg 
(xive  siècle)  et  par  dix-huit  éditions  imprimées.  Son 
texte  se  rattache  surtout  au  manuscrit  de  Lyon;  mais 
certaines  de  ses  leçons  ne  se  retrouvent  que  dans  le 
manuscrit  de  Paris  ou  dans  les  versions  vaudoises.  Il 
faut  en  conclure  que  le  traducteur  allemand  a  eu  sous 
les  veux  un  original  intermédiaire  entre  les  différentes 
versions.  Voir  la  bibliographie  du  sujet,  citée  t.  i, 
col.  370,  et  les  articles  de  la  Revue  historique,  janvier 
1886,  t.  xxx,  p.  107;  septembre  1886,  t.  xxxn,  p.  184, 
el  1891,  t.  xlv,  p.  148  (les  deux  premiers  ont  été  repro- 
duits avec  additions  dans  le  Bulletin  de  la  Société 
d'histoire  vaudeise,  n°  3,  décembre  1887). 

4°  Une  version  toute  nouvelle  du  Nouveau  Testa- 
ment a  été  découverte  plus  récemment  encore  dans 

deux  manuscrits.    Le  premier,  qui  n'en  confient  qu'un 

fragment,  a  été  trouve'  par  M.  Mireur,  archiviste  du 
Var,  dans  les  archives  de  Puget,  où  il  servait  de  cou- 
verture à  un  registre  de  comptes.  C'est  un  débris 
de  deux  feuillets,  dont  l'écriture  est  du  milieu  du 
xive  siècle  environ.  Le  texte  reproduit  est  Mat  th., 
xwiii.  8-Marc,  i,  32.  Mais  plusieurs  lignes  du  feuillet 
précédent  se  sonf  imprimées  à  l'envers  sur  le  suivant 
et  ont  fourni  Matth.,  xxvi.  1-4,  17-21.  M.  P.  Meyer  a 
édité  ce  texte  et  l'a  étudié.  Fragment  cTune  version 
provençale  inconnue  du  Nouveau  Testament,  dans  la 
Romania,  t.  xvm,  p.  130-'i38.  Celle  version  est  bien 
plus  libre  d'allures  que  la  précédente;  elle  ne  suit  pas 
littéralement  le  lexte  latin,  et  elle  vise  à  être  claire  et 
intelligible  pour  tous,  parfois  même  en  forçant  un  peu 
le  sens.  Tous  les  mois  el  toutes  les  locutions  sont  de 
bonne  langue  populaire,  el  on  ne  trouve  pas  de  termi  s 
latins  passés  en  provençal,  La  traduction  ne  parait  pas 
notablement  plus  ancienne  que  le  manuscrit  :  elle  serait 
donc  de  la  première  moitié  du  xiv  siècle.  Les  n 
de  l'ancienne  déclinaison  sont  tombées  en  désuétude, 
el  elles  ne  semblent  pas  être  des  corrections  du  copiste. 
La  langue  appartient  à  la  partie  méridionale  de  la 
Provence,  en  sorte  que  la  version  est  du  même  pays 
que  le  manuscrit  qui  la  contient. 

Samuel  Berger  a  étudié  plus  tard  un  manuscrit  nou- 
veau, qui  reproduit  la  plus  grande  partie  des  Évangiles, 

à  la  suite  d'un  s  livre  de  (lenèse  »,  dont  il  sera  parlé 
plus  loin.  C'est  le  manuscrit  français  6261  de  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris.  Écrit  au  w  siècle,  il  a 
appartenu  à  Jean  de  Chastel,  évêque  de  Carcassonne 
;  1475),  et  au  célèbre  Tristan  l'Ermite.  Chaque  Évan- 
gile e>t  précédé  de  son  argument.  La  division  en  para- 
graphes, à  peu  près  semblable  à  celle  des  manuscrits 
de  la  version  précédente,  semble  indiquer  que  la  tra- 
duction est  antérieure,  sinon  au  milieu,  du  moins  a  la 
fin  du  XIIIe  siècle.    Le  lexte  latin,    sur  lequel    elle  a  été 


777 


PROVENÇALES    (VERSIONS; 


PROVERBES    (LIVRE    DES) 


778 


faite,  n'a  presque  rien  du  texle  languedocien;  c'est,  à 

peu  de  chose  prés,  celui  qui  a  été  en  usae,e  dans  toute 
la  France  depuis  le  IX"  siècle  jusqu'au  milieu  du  xiif. 
La  version  est  libre,  souvent  abrégée,  parfois  paraphra- 
sée ou  accompagnée  de  gloses.  Elle  est,  à  certains  en- 
droits, la  même  que  celle  du  fragment  du  l'uget. 
L'origine  commune,  au  moins  partielle, des  deux  textes 
est  évidente.  Le  fragment  est  plus  ancien  et  plus 
rapproché,  a  certains  égards,  de  l'original.  Celte  tra- 
duction a  certainement  été  en  partie  l'original  de  la 
plus  ancienne  des  versions  catalanes  des  Évangiles, 
qui  se  trouve  dans  le  manuscrit  de  Peiresc,  Bibliothèque 
nationale,  fonds  espagnol,  2-4,  du  XVe  siècle.  Voir  t.  u, 
col.  316.  Il  y  a  ressemblance  en  certains  passages,  et 
identité  en  beaucoup  d'autres.  Certains  indices  pour- 
raient faire  croire  que  cette  version  provençale  est 
d'origine  cathare.  Elle  parle  des  «  bons  hommes  »  et 
des  ce  parfaits  ».  Moins  littérale  que  la  précédente,  elle 
est  bien  supérieure  au  point  de  vue  du  goût,  et  elle  est 
faite  pour  le  peuple.  Certains  contresens,  dont  quel- 
ques-uns sont  peut-être  le  fait  des  copistes,  nous 
apprennent  comment  l'auteur  entendait  l'original.  Le 
texte  n'en  a  pas  encore  été  publié.  S.  Berger.  Nouvelles 
recherches  sur  les  Bibles  provençales  et  catalanes, 
dans  la  Bomania,  1890,  t.  xix.p.  535-548.  La  traduction 
toscane  des  Evangiles,  du  xmc  siècle,  a  été  faite,  à  cer- 
tains endroits,  sous  l'inlluence  d'un  texte  provençal, 
parent  de  celui  qui  avait  été  traduit  en  catalan,  mais 
plus  ancien  et  plus  rapproché  de  la  source  commune 
de  tous  les  textes  provençaux.  S.  Berger,  La  Bille  ita- 
lienne au  moyen  âge,  dans  la  Bomania,  1894,  t.  sxm, 
p.  3032. 

5"  Le  «  livre  de  Genèse  »,  que  contient  le  manus- 
crit 6261,  est  un  extrait  de  la  Bible  et  des  apocryphes, 
qui  complète  l'histoire  sainte  par  des  légendes  évangé- 
liques.  11  parait  être  du  xive  siècle.  Il  est  conservé 
aussi  dans  le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  de  Sainte- 
Geneviève  à  Paris.  Af  4,  fol.  79,  du  xive  siècle. 
M.  Bartsch  l'a  reproduit,  Chrestomathie  provençale, 
4-  édit.,  Elberfeld,  1880,  col.  393-398.  Ce  livre  a  été 
traduit  en  catalan.  La  version  catalane,  conservée  dans 
les  manuscrits:  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  esp.  46. 
du  xv«  siècle;  Barcelone,  daté  de  1451,  a  été  publiée 
par  M.  Y.  Amer,  Genesi  de  Scriptura,  Barcelone, 
1873.  Le  même  livre  a  été  traduit  en  béarnais.  V.  Les- 
pey  et  P.Ravmond,  Bécits  d'Itist.  sainte,  2  vol.,  Pau, 
1876,  1877. 

6»  Les  livres  historiques  de  l'Ancien  Testament  ont 
enlin  été  traduits  en  provençal  au  XVe  siècle.  L?  texte 
en  a  été  conservé  dans  un  seul  manuscrit  du  XVe siècle, 
à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  fonds  français  2426. 
Aux  feuillets  152  et  366,  il  y  a  une  signature  qui  pourrai' 
bien  être  celle  du  copiste  et  qu'on  peut  lire  «  Johannes 
Convel  »  ou  6  Conveli  ».  Quelques  parties  en  ont  été 
éditées  par  M.  .1.  Wollenberg,  dans  l'Archiv  fur  das 
Studium  iler  neueren  Sprat-lien,  à  savoir:  l'histoire  de 
Susanne,  1860,  t.  xxvm,  p.  85-88;  Esther,  1861,  t.  xxx, 
p.  159-169;  Tobie,  1862,  t.  xxxn,  p.  337-352.  Elle  a  été 
pour  une  partie  traduite  littéralement  sur  une  Bible 
historiale  française,  dont  il  existe  trois  manuscrits 
plus  ou  moins  complets  :  Bibliothèque  de  l'Arsenal  à 
Paris,  manuscrit  52 1 1,  du  milieu  du  xnr  siècle;  Biblio- 
thèque nationale,  nouvelles  acquisitions  françaises,  1 104, 
de  la  seconde  moitié  du  xin0  siècle;  fonds  français 
6447,  copié  entre  le  xme  et  le  xive  siècle.  Voir  t.  Il, 
col.  2353-2354.  Cette  version  a  les  caractères  de  son 
original  français,  qui  est  une  compilation  et  une  œuvre 
mêlée  due  à  plusieurs  traducteurs.  S.  Berger.  Nou- 
velles recherches,  etc.,  p.  518-557.  Elle  a  été  faite  peut- 
être  pour  servir  de  complément  au  Nouveau  Testament 
provençal. 

La  littérature  provençale  n'a  jamais  produit  une 
Bible  complète.  E.  Mangenut. 


PROVERBES  (LIVRE  DES),  un  des  livres  sa- 
pientiaux  de  l'Ancien  Testament. 

I.  TITRES  du  LIVRE.  —  Ce  livre  a  pour  titre  dans  la 
Bible  hébraïque  les  premiers  mots  du  texle  Mislê 
Selômôh.  Dans  le  Talmud  et  dans  certains  ouvrages 
juifs  plus  récents,  il  est  assez  souvent  désigné  par  le 
seul  mot  Afis7ê  ;  dans  le  Talmud  également  on  le  trouve 
aussi  mentionné  sous  le  titre  de  séfér  hokmdh,  «  livre 
de  la  sagesse  »,  Tosephot  in  Baba  balhra,  14.  —  Dans 
les  Septante  il  est  intitulé  Elapottifai  ou  Ilocpotijua; 
So(>w|j.ûvto;.  —  La  Vulgate,  au  titre  de  Liber  Prover- 
biorum,  ajoute  :  quem  Hebrsei  Misle  appellant.  — 
L'antiquité  chrétienne  indique  assez  souvent  les  cita- 
tions empruntées  à  ce  livre  par  ces  seuls  mots  :  Salo- 
mon  a  dit;  cependant  on  le  rencontre  encore  désigné, 
explicitement  ou  implicitement  par  le  terme  de  lo;;* 
ou  ~i.ij-J.-x  SaXoi[j.wvToç,  Sapienlia  Salonionis,  S.  Justin, 
Ailv.  Tryph.,  129,  t.  vi,  col.  771:  Méliton  de  Sardes, 
cité  dans  Eusèbe,  //.  E.,  îv,  26,  t.  xx,  col.  397;  Clé- 
ment d'Alexandrie,  L'œilag.,  II,  2,  t.  VIII,  col.  421;  Ori- 
gène.  In  Gen.,  hom.  xiv,  t.  xn,  col.  237;  S.  Cyprien. 
Testim.  adv.  Jud.,  m.  56.  t.  IV.  col.  761;  r,  tccivocpeto; 
ryj-j-x,  S.  Clément,  /  Cm-.,  i.vn,  3,  édit.  Gebhart  et  llar- 
nack,  1876,  p.  9i.  Eusèbe  nous  apprend  que  cette  épi- 
thète  était  en  usage  parmi  les  auteurs  ecclésiastiques  du 
IIe siècle,  H.  E.,  IV,  36,  t.  xx,  col.  397.  —  Dans  la  litur- 
gie, l'Eglise  le  désigne,  ainsi  que  les  autres  livres  sapien- 
tiaux,  sous  le  titre  général  de  «  Livre  de  la  Sagesse  ». 

II.  Place  du  livre  DANS  LA  BiEi.iî.  —  Le  livre  des 
Proverbes,  dans  la  Bible  hébraïque,  fait  partie  des 
Hagiographes,  et,  par  suite,  il  se  trouve  placé  après  la 
Loi  et  les  Prophètes,  le  plus  ordinairement  à  la  suite 
des  Psaumes  et  de  Job; dans  la  Vulgate  comme  dansles 
Septante,  il  est  placé  à  la  suite  de  Job  et  des  Psaumes. 

III.  CANONICITÉ  du  livre.  —  Le  livre  des  Proverbes 
fait  partie  des  protocanoniques;  il  a  toujours  été  con- 
sidéré comme  livre  canonique  par  les  Juifs  et  par 
l'Église  chrétienne.  Dans  les  écrits  du  Nouveau  Tes- 
tament, les  passages  de  ce  livre  qui  y  sont  cités 
sont  rapportés  avec  les  formules  ordinairement  em- 
ployées pour  les  citations  scripturaires.  Dans  l'Épitre 
aux  Romains,  XII,  19-20,  une  citation  des  Proverbes, 
xxv,  21-22,  est  jointe  à  une  autre  du  Deutéro- 
nome,  xxxn,  25,  et  toutes  les  deux  sont  introduites 
avec  la  formule  «  car  il  est  écrit  ».  Voir  aussi  II  Cor., 
v.m.  21,  et  Prov.,  m,  4;  lleb.,  XII,  5-6,  et  Prov.,  m,  11- 
12:  .lac,  iv,  6;  I  Pet.  V,  5,  et  Prov.,  m,  31:  I  Pet.,  IV, 
18.  et  Prov.,  xi,  21.  Cf.  II  Cor.,  ix,  7,  et  Prov.,  xxn, 
8  (Septante);  Héh.,  xn,  13,  et  Prov.,  iv,  26  (Septante). 
Quelques  anciens  rabbins  juifs  soulevèrent  des  diffi- 
cultés relativement  à  la  canonicité  des  Proverbes,  mais 
ils  visaient  l'usage  public  du  livre  et  non  pas  son  auto- 
rité religieuse.  Elles  consistèrent  principalement  dans 
les  contradictions  que  l'on  pensait  trouver  entre  ces 
deux  passages,  XXVI,  4,  et  XXVI,  5,  ainsi  que  dans  les 
descriptions  de  vu,  7-20,  jugées  inconvenantes  comme 
trop  réalistes  et  trop  suggestives;  celte  question  fut  en- 
core soulevée  au  synode  de  Jamnia  (vers  100  après 
J.-C).  Une  distinction  mit  fin  à  la  première  difficulté 
en  rapportant  XXVI,  i.  aux  choses  de  la  terre  et  XXVI,  5, 
aux  choses  religieuses.  Quant  aux  descriptions  du 
chap.  vu.  elles  furent  interprétées  d'une  manière  allé- 
gorique. Après  cette  date,  aucun  doute  n'est  plus  signalé' 
sur  ce  livre  dans  le  milieu  juif.  —  Parmi  les  chrétiens, 
le  second  concile  général  de  Constantinople  (553), 
Labbe,  Conc,  t.  v,  col.  451,  condamna  la  doctrine 
de  Théodore  de  Mopsueste  qui  reconnaissait,  il  est 
vrai,  que  Salomon  était  l'auteur  de  ce  livre,  fait  en 
vue  de  l'utilité  d'autrui,  mais  prétendait  qu'il  l'avait 
composé  de  lui-même,  parce  que  pour  ce  travail 
il  n'avait  pas  été  favorisé,  disait-il,  des  dons  de  pro- 
phétie. —  Dans  les  temps  modernes,  cette  attaque 
fut  reprise  par  le  juif  B.  Spinoza.  Traciatus  tlicologico- 


779 


PROVERBES    (LIVRE    DES' 


780 


polit.,  H,  et  par  .1.  le  Clore.  Sentiments  de  quelques 
théologiens  de  Hollande  sur  l'histoire  critiq 
V.  Testament.  Lettre  12,  Amsterdam,  1685,  qui  ne 
pouvaient  comprendre  que  «-le  Saint-Esprit  eût  inspiré 
des  choses  aussi  simples  que  celles  qu'on  rencontre 
en  plusieurs  passages  de  ce  livre  et  que  des  paysans 
sans  instruction  apprennent  et  connaissent  sans  le 
secours  d'aucune  révélation.  9  Raisonnement  absolu- 
ment taux,  parce  qu'il  confond  la  révélation  et  l'ins- 
piration et  donne  comme  critère  de  l'inspiration  d'un 
livre  son  contenu,  et  qui,  s'il  était  poussé'  logique- 
ment, aboutirait,  comme  le  remarquait  justement 
I;.  Simon,  Réponse  aux  sentiments  de  quelques  tlu:"- 
,  de  Hollande,  c.  xm,  Botterdam,  1686,  p.  138, 
à  la  négation  de  l'inspiration  d'un  lion  nombre  d'autres 
livres  île  la  Bible. 
IV.  Le  sens  du  mut  Proverbes.  —  Misai,  dont 
>.rbe  est    la    traduction,  vient   de  la  racine  -r-, 

-  T 

qui  répond  à  l'idée  de  comparaison,  de  similitude, 
d'où  parabole,  sentence.  Kautzsch,  dans  The  sacreil 
Books  of  the  Old  Testant.  :  Tlie  Book  of  Proverbs, 
l,  t\.  p.  '■■•!.  préfère,  pour  fixer  ce  sens,  recourir  à  un 
rapprochement    avec   l'assyrien    mislu,  qui   veut   dire 

«  moitié  »,  confirmé  par  l'arabe  SlX-o=.  dont  la  signi- 
fication revient  à  ceci  :  8  brisé  en  deux  »  ou  a  divise'' 
par  le  milieu  ».  Pour  lui,  l'idée  première  de  mâsâl  ne 
donc  point  celle  de  similitude,  au  moins  d'une 
façon  directe,  mais  impliquerait  immédiatement  l'idée 
de  stiques  poétiques,  c'est-à-dire  de  membres  paral- 
lèles. Dans  le  Lexique  de  Brown-Driver-Briggs,  le  mot 
'  est  traduit  ainsi  :  c  proverbe  parabole,  se  dit 
de  sentences  disposées  en  parallélisme.  »  On  peut  dire. 
en  général,  que  mâSâl  signifie  tout  d'abord  similitude, 
comparaison,  et  ensuite,  similitude  exprimée  sous  forme 
de  parallélisme,  avec  diverses  nuances  de  sens.  En 
dehors  du  livre  des  Proverbes  ou  il  esl  employé  6  fois 
i.  1,  6;  X,l;  xxv.  I  :  xxvi,  7,  9,  on  le  rencontre  33  fois 
dans  l'Ancien  Testament.  Il  signifie  :  dicton  populaire. 
I  Sam.,  xxiv,  14;  Ezech.,  xn,  22;  oracles  prophétiques 
Balaam),  Nuro.,  xxmetxxiv;  énigmes,  Ezech.,  xxi, 
V  XXIV,  3;  chant  où  domine  l'ironie,  Is.,  xiv.  'i  ; 
Mich..  Il,  l;  objet  de  risée,  Dent.,  xxvui,  37;  II  Par.,  vu, 
20,  mais  on  peut  retrouver  dans  ces  diverses  accep- 
tons une  signification  commune  :  celle  d'une  compo- 
sition littéraire  plus  ou  moins  longue,  en  langage  ligu- 
re el  suivant  le  rythme  poétique,  basée  sur  un  rappro- 
chement ou  nue  comparaison.  Mais  il  y  a  encore  une 
autre  acception  du  mot  mâsâl  qui  le  rapproche  du 
mut  •.""!•";  des  Crées,  celle  de  maximes,  de  sentences, 
(primées  sous  la  forme  poétique  et  avant  une  portée 
murale,  et  c'est  le  sens  qui  Convient  à  ce  mot  dans  le 
livre  îles  Proverbes. 
\.  Objet  du  livre  des  Proverbes.  —  Ce  recueil  est, 

avant  tout,  le  livre  île  la  Sagesse,  el  on  a  vu  Comment 
les  Pères  lui  ont  donné'  ce  litre.  Cette  désignation 
convient  excellemment  au  contenu  de  ce  livre,  car, 
dans  tout  son  ensemble,  c'est  la  Sagesse  qu'on  \  entend, 
soil  que.  personnifiée,  elle  instruise  directement  elle- 
même,    suit    qu'elle    communique   aux   hommes  ses 

ne ni-  par  s  les  sage-    .  ses  représentants. 

Mais  ce  livre  n'est  poinl  une  œuvre  abstraite,  un  re- 
cueil   de  considérations  Ihéologiques  sur  la  sagesse, 

un  livre  pratique  el  l'enseigne ut   qui   y  est 

donné,  les  préceptes  el  les  leçons  qu'un  \  trouve,  pré- 
igesse  ou  en  son  nom.  convergent  tous 
an  même   bul  el  donnent  ainsi   sa  véritable  unité 
teil  -le  -entences  :  rendre  meilleur  l'homme  qui 
suivra  i  le  rendant  participant  de  la  sa- 

L  objet  .lu  livre  di  -  Proverbes,  c  i  si  donc,  ainsi 
que  l'exprime  le  prologue  du  livre  I,  1-C>,  l'enseigne- 
ment ii.'im. ■  p.u  e  pour  rendre  l'homme  sage. 
Qu'est-ce  donc  que  la  sagesse?  qu'est  ce  qu'un 


Dans  la  Bible,  le  nom  de  sage  sert  à  désigner  diverses 
catégories  de  personnages,  mais  si  variées  que  puissent 
être  les  conditions  sociales  dans  lesquelles  ils  sont 
placés,  ou  la  nationalité  à  laquelle  ils  appartiennent.  un& 
idée  commune  se  retrouve  toujours  dans  cette  appella- 
tion; celle  d'une  science  plus  parfaite.  C'est  ainsi 
que  dans  l'Exode  Dieu  déclare  avoir  rempli  de  sagesse, 
d'intelligence  et  de  savoir  Béséléel  et  Ooliab  pour  qu'ils 
puissent  exécuter  ses  prescriptions  relativement  à  la 
construction  du  Tabernacle.  Exod.,  xxxi,3-6;  xwv.  31, 
31.  Iliram,  a  l'habilité  de  qui  Salomon  fait  appel  lors  de 
la  construction  du  Temple,  est  mentionné'  lui  aussi 
comme  «  rempli  de  sagesse,  d'  intelligence  e!  de  savoir 
pour  faire  toutes  sortes  d'ouvrages  d'airain,  g  I  Reg., 
vu,  11.  Au  témoignage  de  Jérémie,  xuv.  7,  et  d'Abdias, 
8,  les  Édomites  étaient  réputés  pour  leur  sagesse,  et. 
quand  il  s'agira  de  faire  ressortir  l'excellence  de  la  sa- 
gesse de  Salomon.  l'historien  sacré  dira  qu'il  .<  était 
plus  sage...  qu'K.tlian  l'Ezrahite,  qu'lléman.  Chalcol  et 
Dorda,  les  fils  deMàhol.  ><  I  Reg.,  iv,30-31.  Et  la  sagesse 
de  ce  prince  est  tout  aussi  bien  reconnue  et  proclamée 
dans  le  jugement  qu'il  rend  entre  les  deux  mères  qui 
viennent  le  consulter,  I  Reg.,  m,  28,  que  lorsqu'il  ré- 
pond aux  questions  de  la  reine  de  Saba  el  résout  ses 
difficultés,  1  Reg.,  x,  3,  6,  ou  qu'il  prononce  de  nom- 
breuses maximes.  I  Reg.,  tv,  32,  31. 

Si  l'on  examine  maintenant  les  diverses  acceptions 
du  mot  hnkmdlt,  ordinairement  traduit  par  Sagesse, 
on  verra  qu'une  large  part  y  est  faite  au  côté  intellec- 
tuel et  qu'il  implique  une  science  plus  parfaite  en 
celui  qui  possède  celte  sagesse.  Kl  celte  connaissance 
supérieure  n'est  point  restreinte  dans  son  objet,  elle 
est  toujours  susceptible  de  perfection,  elle  comprend 
tout  aussi  bien  les  choses  divines. que  les  choses  hu- 
maines et  elle  embrasse  les  vérilés  pratiques  et  mo- 
rales tout  autant  que  bs  vérités  spéculatives,  si  elle 
comprend  la  connaissance  de  la  nature  et  des  choses 
de  la  nature,  elle  comprend  également  la  science  de  la 
pratique  de  la  vie.  et  à  ce  litre  elle  est.  a-t-on  pu  dire,  le 
principe  du  savoir  vivre  comme  du  savoir  faire  dans 
l'homme  qui  la  possède.  Autant  qu'elle  se  trouve  en 
l'homme,  la  sagesse,  dans  son  acception  la  plus  vraie, 
consiste  donc  dans  la  science  de  Dieu,  de  l'univers 
et  de  la   vie. 

Mais  celle  sagesse  ou  celte  science  éminente  que 
l'on  peut  rencontrer  dans  l'homme  et  qui  le  rend 
supérieur  à  celui  qui  ne  la  possède  point,  ne  vient  pas 
de  lui.  il  la  reçoil  de  l'extérieur,  el.  en  dernière  ana- 
lyse de  Dieu  même  en  qui  elle  réside  essentiellement^ 
mais  qui  peut  en  communiquer  quelque  chose  aux 
nommes,  en  sorte  que  ceux  qui  la  posséderont  seront 
des  bénéficiaires  d'un  don  divin. 

Si  l'on  se  sert  de  ces  réflexions  pour  apprécier  les 
maximes  que  renferme  le  recueil  des  Proverbes,  en 
peut  reconnaître  que  ce  livre  constitue  un  manuel 
théorique  el  pratique  de  coniluile  morale,  il  a  pour  bot 
d'amener   celui    qui    en   suil    les  enseignements  a    une 

science  plus  parfaite  el   au   perfectionnement  de  s-, 

propre  vie.  ce  qui    constituera  sa  véritable  sagesse. 

Les  Pères  entendaient  ainsi  le  but  cl  l'objet  de  ce 
livre  quand,  avec  saint  Basile,  ils  définissaient  la  sa- 
gesse de  ee  recueil  «  une  science  île-  choses  divines  et 
humaines...,  non  pas  tant  spéculatives  que  pratiques. 
de  nature  à  conduire  l'homme  à  la  pratique  de  tontes 
les  vertus  et  par  là-même  te  mettre  en  mesure  d'attein- 
dre au  bonheur  parfait,  t  lu  princip.  Proverb., 
l vu.  3,   t.  sxxi,  col.  389. 

A  plusieurs  reprises,  surtout  dans  les  premiers  cha- 
pitres, ceux  à  qui  s'adresse  la  Sagesse  sont  désignés 
par  le  nom  de  n  lils  t,  mais  on  se  tromperait  sur  la 
portée  de  ce  terme  si  on  ne  voulait  y  voir  que  l'indica- 
tion d'un  âge  peu  avancé,  il  désigne,  avant  lout  Ceux 
qui  désirent  mener  une  vie  meilleure  et   ne  font  que 


781 


PROVERRES    (LIVRE    DESï 


782 


commencer.  La  sagesse  prend  à  leur  égard    l'attitude 
du  maître  qui  instruit  et  forme  un  disciple. 

VI.  Divisions  du  livre  des  Proverbes.  —  Il  renferme 
8  sections  :  —  1°,  I,  I-ix,  18.  Une  série  de  discours 
moraux  qui  paraissent  destinés  à  servir  d'introduction 
aux  Proverbes  proprement  dits  et  qui  ont  pour  titre  : 
Parabolx  Salomonis,  Proverbes  de  Salomon,  i,  1.  — 
2°  x,  1-xxn,  16.  L'ne  grande  collection  de  sentences 
portant  le  même  titre  que  les  maximes  de  la  section 
précédente  :  Paraboles  Salomonis,  x.  1.  Ce  titre  man- 
que dans  les  Septante.  —  3"  xxn,  17-xxiv.  22.  Un 
recueil  de  pensées  qui  sont  données  comme  «  paroles 
des  sages  »,  xxn,  17.  —  i"  xxiv,  23-34.  Quelques  pensées 
également  attribuées  à  des  sages,  xxiv,  23.  —  5°  xxv, 
1-xxix,  27.  Nouvelle  collection  de  proverbes  attribués  à 
Salomon.  mais  réunis  seulement  au  temps  d'Ézéchias, 
xxv,  1.  —  6°  XXX.  Recueil  de  maximes  intitulé  :  Pa- 
roles d'Agur,  xxxi,  1.  —  7 «xxxi,  1-9.  Quelques  réflexions 
de  la  mère  du  roi  Lamuel.  xxxi,  1.  —8"  xxxi,  10-31. 
Poème  alphabétique,  sans  titre,  contenant  le  portrait 
de  la  femme  forte. 

VII.  Origine  des  différentes  parties  du  livre.  — 
Sept  de  ces  sections  portent  donc  le  nom  de  person- 
nages déterminés  :  Trois  sont  attribuées  à  Salomon  : 
1.  2.  5;  deux  le  sont  à  des  auteurs  autres  que  Salomon 
et  dont  les  noms  sont  indiqués  :  6,  7;  deux  à  des  au- 
teurs désignés  seulement  par  le  titre  de  «  sares  ».  3,4. 
On  peut  donc  distinguer  deux  groupements  dansle  livre 
des  Proverbes  :  les  sections  attribuées  à  Salomon  et 
celles  qui  ne  portent  pas  son  nom.  Cette  distinction  est 
aujourd'hui  généralement  admise. 

/.  ORIGINE  SALOXONIENNE  DES  PRESIËIiE,  DEUXIÈME 
i:i  cinquième  sections.  —Il  s'agit  ici  de  l'origine  des 
trois  principales  sections  du  livre,  celles  qui  renferment 
le  nom  de  Salomon  dans  leurs  titres  respectifs  i,  1  :  x, 
1;  xxv,  1.  —  l"  Preuves.  —  Les  auteurs  anciens  et  la 
plupart  des  anteurs  modernes  catholiques  reconnaît 
dans  ces  sections  une  œuvre  vraiment  salomonienne. 
.M.  Vigouroux,  Manuel  biblique,  t.  Il,  12=  édit.,  1906, 
p.  482;  Cornely.  Introd.  specialis.  t.  n.  Paris,  1887. 
p.  143  sq.;  Card.  Meignan,  Salomon,  Paris,  1890, 
p.  328.  La  thèse  est  ainsi  exposée  :  Salomon  a  composé 
un  très  grand  nombre  de  maximes  gnomiques.  toutes 
ne  nous  sont  pas  parvenues,  mais  il  en  existe  au 
moins  deux  recueils  qui  furent  faits  à  deux  reprises 
différentes.  A  ces  sentences  ainsi  choisies  on  a  ajouté 
des  maximes  provenant  de  divers  auteurs,  et  de  l'en- 
semble est  résulté  le  livre  des  Proverbes  que  nous 
possédons. 

La  preuve  principale  de  l'origine  salomonienne  des 
trois  grandes  sections  du  livre  repose  sur  la  tradition 
qui  les  attribue  à  Salomon.  Les  Pères  et  les  auteurs 
ecclésiastiques,  héritiers  en  cela  des  docteurs  juifs,  sont 
unanimes  à  reconnaître  ce  livre  comme  une  œuvre 
vraiment  salomonienne.  Leur  témoignage  s'appuie  sur 
les  titres  de  ces  trois  sections,  titres  qui  sont  très  an- 
ciens et  antérieurs  aux  Septante.  II  est  vrai  que  la  ver- 
sion grecque  et  la  Peschitto  n'ont  point  de  titre,  au 
début  de  la  deuxième  section,  x,  I.rnais  quelle  que  soit 
l'explication  de  cette  omission,  on  peut  dire  que  le 
titre  i,  1.  devait,  sans  doute,  servir  à  désigner  tout  le 
contenu  i,  I-xxn,  16.  Et  même  le  titre  général,  i,  1-6, 
ne  peut  avoir  toute  sa  portée  que  s'il  désigne  les  sen- 
tences de  la  deuxième  section  tout  autant  que  les 
exhortations  morales  de  la  première.  —  Le  troisième 
livre  des  Rois,  iv,  29-32,  nous  apprend  expressément 
que  Salomon,  doué  par  Dieu  d'une  sagesse  particulière. 

prononça  trois  mille  maximes.  »  Le  terme  hébreu 
traduit  par  maximes  est  précisémenl  ce  mot  mdSdl 
que  l'on  retrouve  dans  les  titres  du  livre  des  Proverbes, 
i,  1;  x,  1  ;  xxv,  1. 

L'histoire  de  Salomon  nous  atteste  encore  que  le 
règne  de  ce  prince  fut,  dans  son  ensemble,  une  période 


de  tranquillité,  durant  laquelle  la  civilisation  pénétra 
de  plus  en  plus  dans  la  société  israélite,  entraînant 
avec  elle  l'abondance  des  richesses,  la  puissance,  le 
luxe  et  de  nombreux  abus.  Elle  nous  permet  de  suppo- 
ser à  cette  époque,  sinon  dans  toutes  les  villes.au  moins 
à  Jérusalem,  par  suite  des  exemples  de  Salomon  et  de 
sa  cour,  un  cadre  de  vie  sociale  analogue  à  celui  que 
supposent  certaines  descriptions  des  chap.  wx.  On  pour- 
rait même  signaler  quelques  rapprochements  assez 
significatifs:  c'est  ainsi,  par  exemple,  que  l'abondance 
de  parfums  et  d'aromates,  que  les  tapis  d'Egypte,  que 
les  lointains  voyages,  qui  sont  mentionnés,  vu,  16-19, 
s'accorderaient  bien  avec  ce  que  nous  savons  du  luxe 
et  du  commerce  d'Israël  à  l'époque  de  Salomon. 
III  Reg.,  ix,  20-28:  x,  2,  10,  14-15,  25. 

2°  Objections  contre  l'authenticité  îles  Proverbes.  — 
L'authenticité  salomonienne  des  sections  1,  2,  5,  nVst 
pas  admise  par  tous  les  auteurs  modernes.  Pour  beau- 
coup de  critiques,  le  livre  des  Proverbes  n'est  qu'une 
compilation  de  petites  collections  de  sentences  qui 
ont  existé  d'abord  indépendantes  les  unes  des  autres, 
car  elles  sont  et  d'époques  et  d'auteurs  différents. 
Plusieurs  des  sections  du  livre  actuel  renfermeraient 
mémo  des  sous-sections,  aux  caractères  particuliers 
assez  accentués  pour  qu'on  pût  considérer  les  sections 
actuelles  comme  étant  elles-mêmes  des  résultantes  de 
collections  moins  étendues:  notamment. x-xv  et  xvi-xxn, 
16,  dans  la  2e  section,  et  xxv-xxvn  et  xxvm-xxix,  dans 
la  5e  section.  Les  caractéristiques  de  ces  sous-sections 
se  reconnaîtraient  en  particulier  :  aux  répétitions  de 
proverbes  identiques,  à  l'emploi  presque  exclusif  de  tel 
genre  de  parallélismes,  à  la  préférence  pour  certaines 
idées  et  à  la  manière  de  les  apprécier.  Toy.  Pro- 
verbs,  dans  The  internat,  critical  Comment.,  1899, 
p.  xix  sq. 

Des  dates  sont  proposées  par  ces  auteurs,  soit  pour 
la  composition,  soit  pour  la  compilation  de  ces  sections 
et  l'on  peut  constater  une  progression  constante  depuis 
une  vingtaine  d'années  dans  l'abaissement  de  ces  dates 
par  rapport  à  l'histoire  d'Israël.  Les  critiques  les  plus 
récents  ne  recherchent  même  plus  s'il  y  a  des  maxi- 
mes qui  peuvent  être  de  Salomon,  mais  ils  voient 
uniquement  en  lui  l'initiateur  du  genre  gnomique 
en  Israël  comme  David  l'avait  été  de  la  poésie  lyrique. 
Frz.  Delitzsch,  Das  Salom.  Spruchbuch,  1873,  p.  25, 
n'hésitait  que  pour  les  chap.  1-ix  qu'il  plaçait  à  l'époque 
de  Josaphat;  Cheyne,  Job  and  Solomon,  1883,  p.  1S3, 
affirme  qu'on  ne  peut  reconnaître  l'authenticité  sa- 
lomonienne du  livre,  mais  qu'il  y  a  des  proverbes 
remontant  au  IXe  siècle.  Loisy,  Les  Proverbes  de  Salo- 
mon, 1889,  p.  32,  reconnaît  que  des  sentences  de  Salo- 
mon avaient  pu  être  conservées  par  la  tradition  orale, 
chez  les  sages;  et  que  la  partie  du  recueil  qui  paraissait 
la  plus  ancienne  et  qui  reproduisait  sans  doute  le  plus 
exactementle  fond  etla  forme  des  pensées  authentiques 
de  Salomon  était  la  collection  faite  à  l'époque  d'Ezé- 
chias; pour  Bickell,  Krit.  Bearbeitung  der  Proverbien, 
1891,  la  partie  la  plus  ancienne  du  livre  consiste  dans 
la  collection  faite  au  temps  d'Ézéchias;  laquelle  ne  de- 
vait comprendre  que  xxv.  11-xxvii.  22;  les  discours  sur 
la  sagesse,  I-IX,  pourraient  remonter  au  temps  de  Jé- 
rémie ;  Driver,  Introduction  (o  the  Lilerat.of  the  Old 
Test-,  7'  édit.,  1898,  p.  407,  considère  comme  histori- 
que l'a  donnée  de  Prov.,  xxv.  1,  et  y  voit  la  preuve  qu'au 
temps  d'Ézéchias  les  Proverbes  qui  suivent  ce  titre 
étaient  regardés  comme  anciens;  il  ne  conclut  pas 
cependant  à  l'authenticité  salomonienne  de  toute  la 
section,  mais  seulement  à  l'existence  certaine  d'un 
noyau  de  proverbes  salomoniens  dans  la  ô'  comme  dans 
la  3e  section,  sans  qu'on  puisse  en  déterminer  i  xacle- 
ment  l'étendue;  i-ix  serait  de  peu  antérieur  à  l'exil. 
Nowack,  Kurzgef.  exegetisches  Handbuch,  1883,  et 
Kuenen,  Histor.-crit.  onderzoek,  1865.  partagent  ;i  p  u 


783 


PROA  ERBES    (LIVRE    DES) 


78  i 


même  sentiment  cl  placent  la  composition  de  ce 
livre  avant  l'i  il.  â  partir  du  vm  siècle,  sauf  peut-être 
en  ce  qui  concerne  les  chap.  xxx-xxxt;  mais  pour 
.  Philos,  mot'  et  relig.  desHéb.,  1878,  p.  151  sq., 
,,n  ne  peut  sa  -oii  i  e  qu  il  y  a  de  Salomon  dans  le  livre 
des  Proverbes,  dont  la  partie  la  plus  ancienne  est  la 
collection  faite  au  vm«  siècle  au  temps  d'Ézéchias. 

Avec  les   auteurs  plus  récents,  les  conclusions  sont 

assez  différentes;  pour  Wildel r.  Die  Sprûche,  dans 

Kurzer  Hand-Commenlar  de  Marti,  1807,  adoptant 
les  conclusions  de  Cornill,  Einleitung,  i-  édit.,  tout 
le  livre  des  Proverbes  est  post-exilien  et  nullement 
antérieur  au  iv  siècle;  pour  ["rankenberg,  /'"'  >'/"  '"'  ''"'• 
dans  le  Hand-Commenlar  de  Nowaclt,  1898,  et  pour 
li>.  op.  cit.,  p.  xxx,  el  art.  Proverbs,  dans  VEncyc. 
Bibl.,t.m,  1902,  col.  3917,  les  deux  grandes  sections  x- 
xxu,  lti,  et xxv-xxix, proviennent  de  milieux  dillérents, 
mais  ne  sont  pas  antérieures  au  i\"  siècle,  la  lie  section 
I-IX,  appartient  au  milieu  du  IIIe  siècle.  I..  Gautier, 
Introduction  à  l'Ane.  Tes!.,  Lausanne,  1906.  t.  n. 
p,  89-90,  tout  en  admettant  la  possibilité  d'une  collection 
de  Proverbes  faite  au  temps  d'Ézéchias,  ne  voit  aucune 
preuve  permettant  d'affirmer  qu'ils  nous  auraient  été 
conservés;  e1  bien  que  le  style  ne  s'oppose  pas  à  une 
composition  du  vr  siècle,  il  place  au  iv«  la  composition 
de  notre  livre  des  Proverbes. 

Certains  auteurs  ont  même  modifié  leur  propre  sen- 
timent  sur  ce  sujet  :  ainsi  Xov.ack  dans  son  Commen- 
taire, 1883,  plaçait  les  Proverbes  avant  l'exil;  dans  l'art. 
Proverbs  du  Diction,  of  the  Bible,  t.  iv,  1902,  p.  142, 
tout  le  contenu  du  livre  lui  semble  post-exilien;  Cheyne 
dans  Job  and  Solomon,  1887,  p.  168,  reconnaissait  que 
non  seulement  les  grandes  sections  du  livre  étaient  pré- 
exiliennes  mais  encore  que  les  c.  i-ix  ne  pouvaient 
raisonnablement  pas  être  placés  après  l'exil,  et  dans 
Jewish  religions  Life  after  the  Exile,  1898,  p.  128,  il  dé- 
clare qu'une  littérature  de  la  sagesse  a  pu  exister  avant 
l'exil,    mais   qu'il    est   impossible  de    dire  dans  quelle 

sure  il  y  a  relation  entre  cette  ancienne  littérature 

plus  on  moins  hypothétique  el  les  œuvres  des  sages 
post-exiliens  conservées  dans  nos  livres  sapientiaux 
actuels;  Knenen,  dans  la    l1"  édit.,  18(i.">.  tic  sou  Ilislur.- 

crit.  Onderzoek, soutenait  la  composition  pré-exilienne 
du  livre  des  Proverbes;  dans  la  2e  édit,,    1893,  S  97, 

note  I"),  il  prétend  que  placer  à  l'époque  contempo- 
raine des  prophètes  l'ensemble  des  idées  morales 
religieuses  des  auteurs  des  proverbes  cela  constituerait 
un  véritable  anachronisme. 

Quant  à  l'usage  du  nom  de  Salomon  il  s'expliquerait 
par  ce  fait  que  de  bonne  heure  on  songea  à  utiliser  la 
réputation  de  sagesse  que  la  tradition  lui  avait  con- 
servée,  en  plaçant  sous  son  nom  et  en  couvrant  de  son 
patronage  des  recueils  de  sentences  provenant  d'au- 
teurs dont  le  nom  n'était  point  connu.  Les  meilleurs 
témoignages  de  la  haute  antiquité  de  cette  réputation 
de  Salomon  se  trouvent  et  dans  le  titre  de  XXV,  1,  qui 
repose  sur  une  base  historique  el  dans  la  mention  des 
l'rov.  comme  leuvro  île  Salomon  par  l'auteur  de  l'Lccli.. 

xi.vii,  16-18.  Mais  tout  en  reconnaissant  le  fait  de 
cette  réputation  traditionnelle,  ces  critiques  récusent, 
au  poinl  de  vue  historique,  la  valeur  des  titres  salo- 
moniens  i,  1  ;  x,  I  ;  xxv,  1,  pour  eux  ils  n'ont  pas  plus 
de  valeur  que  les  titres  des  Psaumes  pour  en  détermi- 
ner les  auteurs.  Le  témoignage  du  livre  des  Rois,  même 
considéré  comme  document  strictement  historique  el 
non  comme  l'expression  d'un  sentiment  traditionnel, 

n'autoriserait    pas  à    conclure    que    les    maximes    con- 

tenues  dans  le  livre  îles  Proverbes  sont  une  sélection 
■  lis  oiKtn  sentences  dont  il  fait  mention.  Bien  plus 
même  la  nature  des  sentences  telle  qu'elle  est  expliquée. 
m  Reg.,  v,  12-13  (Vulgate,  32-33),  indiquerait  plutôt 
que  leur  objet  n'était  pas  le  même  que  celui  des  sen- 
des  Proverbes. 


Les  principaux  arguments  présentés  par  ces  auteurs 
peuvent  se  résumer  ainsi.  Au  point  de  vue  religieux  — 
c'est,  à  rencontre  de  ce  qui  est  constaté  chez  tous  les 
auteurs  pré-exiliens,  l'absence  de  toute  polémique 
contre  le  polythéisme  :  le  monothéisme  est  supposé 
admis  par  tous  sans  aucune  difficulté;  —  c'est  l'absence 
de  celte  préoccupation  nationale  dans  l'emploi  des 
expressions  religieuses  telle  qu'on  la  constatait  avant 
l'exil  ;  sans  doute  Dieu  est  bien  encore  désigné  sous  le 
vocable  particulier  {'•-')  qui  le  caractérisait  durant  la 
période  pré-exilienne,  mais  on  ne  rencontre  jamais 
l'expression  si  fréquente  chez  les  prophètes,  de  «  Dieu 
d'Israël  »,  Toy.  Proverbs,  p.  xxi,  el  de  toute  allusion  à 
la  tendance  des  Israélites  à  se  porter  vers  leurs  sanc- 
tuaires les  plus  vénérés  comme  le  leur  reprochaient 
souvent  les  prophètes;  —  c  est  encore  l'élévation  de 
pensée  sur  la  divinité',  en  particulier  sur  la  sagesse 
divine  (vm)  qui  suppose,  dit-on,  un  milieu  religieux 
plus  cultivé  que  n'était  Israél  avant  la  captivité  (milieu 
grec)  Toy,  Proverfis,  p.  xxu;  Cheyne,  op.  eil.  ;  (milieu 
persan)  Knenen,  op.  cit.,  Baudissin,  Die  alll. 
Sprûch.,  1893;  enfin  ce  sont  des  réminiscences  du 
Deutéronome  qui  ne  permettent  pas  de  reporter  les- 
maximes  qui  les  renferment  à  une  date  antérieure 
à  la  réforme  de  Josias. 

Au  point  de  vue  social,  les  Proverbes  supposent  cons- 
tamment des  habitudes  et  un  état  de  choses  qui  n'exis- 
tèrent pas  en  Israël  avant  la  captivité  ou  même  avant 
le  début  de  la  période  grecque;  —  dans  la  famille,  la' 
monogamie  comme  règle  générale  et  la  place  impor- 
tante occupée  par  la  femme  ;  par  exemple  :  X.  1  ;  xv.  "20; 
xix,  14,  et  surtout  xxxi,  10-21;  —  dans  les  habitudes 
sociales,  les  fautes  et  les  vices  (violences  et  inconduite) 
spécialement  mentionnés  dans  i-ix.  Toy,  art,  Pro- 
verbs [Book),  dans  Encyc.  Bibl.,  t.  m,  col.  3itl.'t; 
Nowack,  dans  Hastings,  Dicl.  of  the  Bible,  art.  Pro- 
verbs,  t.  iv,  p.  1  i  I. 

Enfin,  au  point  de  vue  littéraire,  la  plupart  des 
auteurs  cités  pensent  que  ce  recueil  ne  saurait  appar- 
tenir aux  grandes  époques  de  la  littérature  hébraïque. 

Toutes  ces  raisons  sont  loin  d'être  décisives  et  ne 
constituent  pas  des  preuves  péremptoires  de  la  data 
relativement   récente    de   ce  livre,    surtout    de    sa    date 

post-exilienne. 

Il  est  à  remarquer  que  tous  ne  récusent  pas  indis- 
tinctement la  valeur  des  litres  saloinoniens,  notam- 
ment XXV,  1.  Si  Baudissin,  u/i.  cil.,  p.  Il,  déclare  que 
la  mention  de  o  roi  de  Juda  »  dans  ce  titre  est  une 
preme  qu'il  fut  écrit  alors  que  depuis  longtemps  il  n'y. 
avait  plus  de  roi  de  Juda,  par  contre  Driver,  "p.  cit., 
p.  107,  soutient  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  mettre  en  ques- 
tion   la    valeur  de    celte  donnée.   < J < -   même    Loisy,    qui, 

(op.  cit.,  p.  32 el  dans  le  compte  rendu  du  Commentaire 

de  Toy,   lier.  ,111, si.    et  de   LUI.    relui.,    1900,  p.    381 
déclare  «  qu'il  n'est  pas  démontré  que  la  mention  des 
hommes  s   d'Ézéchias  »,  Prov.,  xxv.   1.  comme  auteurs 
de  cette  seconde  collection,  n'ait  aucune  valeur  tradi- 
tionnelle ». 

Comparer  les  Proverbes  avec  les  écrits  prophétiques 
au  point  de  vue  religieux  et  s'appuyer  sur  l'absence  de 
polémique  contre  le  polythéisme  dans  les  Proverbes 
pour  en  fixer  la  date  tardive,  c'est  méconnaître  l'objet 
complètement  différent  de  ces  divers  écrits  el  la  diffé- 
rence d'action  el  de  ministère  pour  les  prophètes  et 
pour  les  sages. 

La  prédication  comme  les  écrits  des  prophètes 
devaient  prémunir  les  Israélites  contre  leur  tendance 
naturelle  à  matérialiser  les  données  de  l'enseignement 
religieux  el  prévenir  le  danger  d'aboutir  à  un  syn- 
crétisme religieux  sous  l'influence  des  civilisations 
étrangères;  les  Proverbes  s'adressaient  aux  Israélites 
fidèles  au  monothéisme,  el  leur  enseignaient  la  meil- 
leure manière  de  vivre  une  vie  moralement  bonne. 


785 


PROVERBES    (LIVRE    DES) 


78(r 


On  peut  cependant  établir  des  rapprochements 
entre  les  données  îles  écrits  prophétiques  et  les  Pro- 
verbes :  l'élévation  de  la  pensée  religieuse  de  ceux-ci, 
dit-on,  dépasse  de  beaucoup  le  milieu  religieux  ordi- 
naire antérieur  à  l'exil,  mais  n'y  a-t-il  pas  certains 
passages  hien  authentiques  d'Amos,  d'Osée.  d'Isaïe  qui 
dépassent,  et  notablement,  les  données  religieuses  de 
nombreux  passages  de  l'Ecclésiastique,  ou  de  certains 
psaumes  sûrement  post-exiliens?  Et  précisément  en  ce 
qui  concerne  la  doctrine  de  la  Sagesse,  le  rapproche- 
ment de  date  avec  l'Ecclésiastique  n'est  peut-être  pas 
aussi  favorable  qu'ils  le  veillent  bien  prétendre  aux 
conclusions  de  ceux  qui  le  soutiennent.  La  différence 
assez  sensible  qui  sépare  les  données  «  sapientiales  » 
des  Proverbes  de  celles  de  l'Ecclésiastique  réclame 
un  laps  de  temps  plus  long  qu'ils  ne  le  reconnaissent 
et  un  milieu  religieux  sensiblement  différent.  Dans  les 
Proverbes  la  Sagesse  conserve  son  caractère  universel 
et  on  ne  la  rencontre  pas  encore  s'identiliant  avec  l'en- 
seignement et  la  pratique  de  la  Loi,  ainsi  qu'on  le 
constate  dans  Eccli.,  xxiv.  Loisy,  Les  Proverbes  de 
Salomoit,  p.  '27. 

L'absence  de  toute  préoccupation  rituelle  dans  l'en- 
semble des  conseils  de  la  Sagesse  destiné  à  faire  l'édu- 
cation d'un  juste,  telle  qu'on  la  constate  dans  le  livre 
des  Proverbes,  semblerait  devoir  fournir  une  indication 
sérieuse  d'ancienneté  pour  ce  livre,  spécialement  pour 
des  auteurs  qui  soutiennent  que  les  prescriptions  cul- 
tuelles sont  particulièrement  indicatrices  de  1  époque 
post-exilienne  et  que  le  culte  du  second  Temple  a  eu 
nne  nécessaire  répercussion  sur  toute  la  littérature  bi- 
blique du  ve  et  du  iv*  siècle. 

Nowack,  dans  Dicl.  of  the  Bible,  art.  Proverbs, 
t.  iv.  p.  142,  signale  un  certain  nombre  d'exemples  pour 
montrer  dans  les  Proverbes  et  dans  les  écrits  prophé- 
tiques le  même  ton  dans  la  louange  de  l'humilité  et  les 
.avertissements  contre  l'orgueil  i  Prov.,  \i,2;xiv,29:xv,  1, 
4,  18,  etc.;  Is.,  H,  11  j  Ain.,  vi, 8;  Ose.,  vu,  11);  le  même 
cœur  pour  dénoncer  la  conduite  de  ceux  qui  oppriment 
le  pauvre  et  pour  insister  sur  la  sollicitude  à  laquelle 
celui-ci  a  droit,  Prov.,  xiv,  31  ;  xvn,  5;  xvm,  23,  et  Ain., 
iv,  1  ;  Ose.,  v,  10,  et  l'on  ne  voit  pas  qu'il  y  ait  cet  ana- 
chronisme dont  parlait  Kuenen.  op.  cil.,  $  'J7,  note  15. 

Plusieurs  descriptions  des  chap.  i-ix  semblent  bien 
supposer'dans  le  milieu  social  qu'elles  visent,  ces  raffi- 
nements de  luxe  dont  la  civilisation  grecque  a  fourni  de 
nombreux  exemples,  mais,  indépendamment  que  cette 
remarque  n'atteindrait  en  délinitive  que  les  neuf  pre- 
miers chapitres  du  livre,  on  peut  ajouter  encore  qu'elle 
ne  s'impose  pas  nécessairement,  car  on  peut  trouver 
des  situations  sociales  analogues,  en  Israël,  dans  la 
période  pré-exilienne  :  par  exemple,  dans  les  reproches 
que  les  prophètes  du  vme  siècle  adressaient  aux  femmes 
de  leur  temps;  les  prophètes  du  Xord  (Amos  et  Osée) 
à  celles  de  Sainarie;  Isaïe  à  celles  de  Jérusalem  ;  com- 
parer en  particulier  Is..  [Il,  16-23.  et  Prov.,  VII,  11  sq., 
et  ne  pourrait-on  pas  encore  alléguer  à  ces  auteurs 
Gen.,  xxvm? 

La  loi,  il  est  vrai,  permettait  l'usage  de  la  polygamie, 
mais  on  y  trouvait  surtout  une  grande  facilité  pour  la 
répudiation  de  l'épouse,  et  en  fait,  en  dehors  des  rois 
et  des  grands,  la  monogamie  était  pratiquée  parle  plus 
grand  nombre  des  familles  Israélites,  bien  des  siècles 
avant  la  lin  de  l'ère  juive.  Loisy,  Les  Proverbes  de 
Salomon,  p.  26. 

Les  réminiscences  du  Deutéronome  constatées  dans 
les  Proverbes,  ainsi  que  la  portée  sociale  de  quelques 
sentences,  comme  xxn,  28.  peuvent  tout  particulière- 
ment être  alléguées  contre  ceux  qui  veulent  placer 
après  l'exil  la  composition  de  tous  les  Proverbes. 

Quant  au  vocabulaire  du  livre,  il  est  assez  diflicile 
de  s'en  servir  comme  d'un  argument  bien  rigoureux 
pour  lixer  ia  date  de  sa  composition,  et  en  fait,  la  plu- 


part des  auteurs  le  reconnaissent  et  par  suite  ne  s'en 
servent  que  connue  d'un  argument  purement  négatif. 
Cela  est  particulièrement  vrai  des  deux  grandes  sec- 
tions 2  et  5. 

II.  PARTIES  DU  LIVRE  KOlf  ATTRIBUÉES  l  SALOMON. 
—  Troisième  section,  xxn.  17-xxiv,  22.  —  L'introduc- 
tion, xxn.  17-21,  commence  par  ces  mots  :  Prête 
l'oreille  et  écoute  les  paroles  des  sages,  que  la  Vulgate 
a  traduits  littéralement  de  l'hébreu.  Les  Septante  pré- 
sentent une  variante  :  Aôyoïç  aù?ù>-i  jrap<x6ceMiï  iôv 
où?  xoci  i/.ojE  È|iov  Xôfov.  Bickell,  Carmina  Vet.  Tes/., 
p.  140,  et  Kautzsch,  op.  cit.,  p.  55,  complètent  le  premier 
stique  hébreu  avec  i;),w  Xôyov  des  Septante  en  suppléant 
le  mot  idtïx't.  Que  cette  correction  soit  admise  ou  non, 
cette  section  doit  être  considérée  comme  distincte  de 
celle  qui  la  précède;  plusieurs  raisons  motivent  cette 
conclusion  :  le  style,  au  lieu  du  simple  distique  ce  sont 
habituellement  des  maximes  plus  développées,  4  vers  et 
même  plus;  —  l'autorité  dans  le  ton,  il  est  exhortatif 
et  prohibitif,  le  'al  hébreu  prohibitif  (correspondant  à 
la  particule  ne  des  Latins)  se  rencontre  17  fois  dans 
ce  petit  recueil  alors  qu'on  ne  le  trouve  que  2  fois  dans 
les  12  chapitres  précédents;  —  la  détermination  du  dis- 
ciple, l'auteur  s'y  occupe  de  l'éducation  d'un  disciple  en 
particulier,  de  là  la  fréquence  de  l'expression  «  mon 
61s  .  5  fois  (6  fois  dans  le  Targum)  dans  cette  section, 
et  une  fois  seulement  dans  la  précédente  fxt\.  27);  — 
la  nature  des  maximes,  très  pratiques  sur  quelques 
sujets  bien  déterminés.  —  Le  mot  «  sages  »  (xxn,  16) 
peut  donc  marquer  une  distinction  d'auteur  entre  la 
2e  et  la  3'  section,  ce  qui  est  confirmé  par  l'énoncé 
du  titre  de  la  4e  section  :  «  cela  aussi  vient  des  sages, 
car  cette  remarque  ne  peut  se  justifier  que  si  les 
auteurs  de  la  3e  comme  de  la  4e  section  sont  distincts 
de  celui  à  qui  la  2*  section  a  été  attribuée.  Il  faut  noter 
cependant  que  des  auteurs  comme  Cornely,  op.  cit., 
p.  147-148,  ne  trouvent  point  de  raisons  suffisantes 
pour  rejeter  l'origine  salomonienne  de  la  3e  section, 
comme  de  la  4e. 

Quatrième  secliou,  xxiv,  23,  34.  —  L'hébreu,  xxiv, 
23,  est  ordinairement  traduit  ainsi  :  «  cela  aussi  vient 
des  sages.  »  Le  '-,  I,  placé  devant  le  mot  hâkâmïm, 
«  sages,  »  étant  interprété  dans  ce  passage  comme  le  h 
auctoris,  fréquemment  employé  en  ce  sens  dans  les 
titres  des  Psaumes.  Les  anciennes  versions  n'ont  pas 
ainsi  compris  ce  passage  :  les  Septante  :  zx-j-x  8è  Xéyia 
ijxîv  to7.;  (J030Ï:;  la  Peschitlo  et  le  Targum  traduisent 
de  même;  la  Vulgate  seulement,  Hœc  quoque  sapien- 
tibus;  si  l'on  adoptait  ce  sens,  il  faudrait  conclure  que 
ce  passage  ne  renferme  aucune  indication  d'auteur, 
qu'il  désigne  seulement  un  enseignement  destiné  à 
ceux  qui  aspirent  à  la  sagessse.  Cf.  Cornely,  Introdu- 
ctio  specialis,t.  Il, 2=  part.,  p.  118.  Cette  interprétation 
n'est  pas  motivée  et  parait  peu  vraisemblable,  car  «  ce 
ne  sont  pas  les  sages  qui  ont  besoin  de  conseils  de  ce 
genre.  »  M.  Vigoureux,  Man.  bibl.,  t.  ri,  p.  490. 

Quels  furent  ces  sages  à  qui  le  contenu  de  la  troi- 
sième et  de  la  quatrième  section  est  attribué,  à  quelle 
époque  ont-ils  vécu  et  dans  quel  milieu  se  sont-ils 
trouvés?  Ce  sont  là  des  questions  auxquelles  on  ne  peut 
répondre  d'une  façon  satisfaisante. 

Pourexpliquer  le  fait  de  répétitions  assez  nombreuses 
entre  plusieurs  passages  de  ces  deux  petits  recueils  et 
les  deux  grandes  sections  1  et  2,  surtout  la  première, 
par  exemple,  xxn.  26,  et  VI,  etc.;  xxtv.  1,  et  III,  31, 
tout  particulièrement  la  description  du  paresseux,  xxiv, 
33-34,  et  vi,  10-11.  M.  Lesétiv,  Le  livre  îles  Proverbes,. 
1879.  préf.,  p.  21,  conclut  que  ces  auteurs  ont  du  s'ins- 
pirer de  Salomon  ou  puiser  à   une  source  comnn 

Sixième  secliou.  xxx.  —  Le  titre  hébreu  porte: 
«  Paroles  d'Agur,  lils  de  Yàqéh.  »ll  est  suivi  du  mot 
s1--;-,  ham^niaèsâ' ,  susceptible  de  diverses  interpréta- 
tions :  on  peut  le  traduire  par  ['oracle  ou  le  discours, 


787 


PROVERBES    (LIVRE    DES) 


788 


mais  il  peut  êlre  aussi  considéré  comme  un  nom  de 
lieu:  de  Massa  ou  le  Maièaïte.  C'est  le  sens  leplus 
ordinairement  adopté  par  les  auteurs  modernes. 
Frankenberg,  Die  Sprûche,  1898;  L.  Gautier,  op.  cil., 
p.  95;  Cornely,  op.  cit.,  p.  148.  La  Peschito  et  le  Targum 
ont  conserve''  exactement  les  noins  propres.  Les  Sep- 
tante ne  les  ont  pas  reconnus  et  ont  traduit  ce  passage  : 
a  Mon  fils,  crains  mes  paroles,  et  en  les  recevant,  lais 
pénitence.  Saint  Jérôme,  inlluencé  peut-être  par  les 
explications  de  quelques  rabbins,  y  a  trouvé  des  noms 
symboliques  de  David  et  de  Saloinon.  Agur  (celui  qui 
assemble)  serait  à  considérer  comme  un  qualificatif 
personnel  désignant  Salomon  rassemblant  le  peuple 
pour  l'instruire,  Yâqéh  (celui  qui  répand)  serait  une 
allusion  à  David  faisant  connaître  ou  répandant  la  \é- 
rité,  de  là  :  Verba  Congregantis,  filii  Vomentis.  Voir 
Agur,  t.  i,  col.  288-289.  Agur  et  Yâqéh  doivent  être 
pris  comme  noms  propres,  ce  sentiment  communément 
admis  par  les  auteurs  modernes,  était  déjà  soutenu 
par  11.  Calmet,  Préf.  des  Prov.,  Bossuet,  Proverbes, 
préf.,  Cornélius  a  Lapide,  Comm.  in  Inc.:  11.  Bayne, 
qui  s'exprimait  ainsi  :  Nam  quum  nomen  viri  et 
nomen  palris  ponantur,  scripluram  noins  hominem 
aliquem  insinuare  voluisse  credendum  est,  ut  ornitlam 
vehementer  durant  esse  metaphoram  vocari  Salomo- 
netn  filium  Vomentis.  Comm.,  Paris,  1555,  in  in,-. 
Si  à  l'époque  où  ce  chapitre  fut  ajouté  au  recueil  des 
Proverbes,  il  avait  été  considéré  comme  salomonien 
on  l'aurait  placé,  sans  titre,  à  la  suite  d'une  collection 
attribuée  explicitement  à  Salomon. 

Septième  section,  xxxi,  1-9.  —  Le  texte  hébreu, 
porte  :  «  Paroles  du  roi  Lamuel,  sentence  mi  oracle 
(ici  le  mol  maisa'  semble  plutôt  se  rattacher  à  ce  qui 
suit  et  a  un  sens  plus  précis  cl  plus  certain  que  dans 
xxx,  I),  ilnni  l'instruisit  sa  mère.  Ainsi  saint  Jérôme 
dans  la  Vulgate.  —  Les  Septante  (Oî  lux,'.  Xôyot etp»)VTat 
ii-',  ®cpv  :  ces  paroles  de  moi  uni  clé  dites  par  Dieu) 
n'ont  pas  vu  qu'il  s'agissait  d'un  nom  propre.  Un  cer- 
tain nombre  d'auteurs  modernes  voient  cependant  dans 
Maiàa'  un  nom  de  pays  comme  dans  \\x,  1.  Cornely, 
op.  cit.,  p.  1 19. 

Mu  ignore  ce  qu'étail  ce  roi  Lamuel.  l'n  certain 
nombre  d'interprètes  catholiques  ont  vu  dans  ce  nom 

un  pscudoin  nie.  .M.  Vigoui \.  np.  cit.,  p.  l'.li  ;  cl 'au  Ires, 

un  roi  d'Israël,  peut-être  Ézéchias  (Grotius),  Salomon 
(card.  Meignan,  op.  cit.);  Lamuel  (réservé à  Dieu,  consa- 
cré a  Dieu),  serait  ainsi  l'équivalenl  de  yedulâh  [Vul- 
gate :  Amabilis  Domino),  nom  donné  à  Salomon  par 
Nathan.  Il  Reg.,  xti,  25.  Aucune  des  identifications  pro- 
posées n'esl  justifiée  d'une  manière  satisfaisante, 

Huitième  section,  xxxi,  10-31,  la  seule  qui  ne  ren- 
ferme aucune  indication  comme  titre;  les  auteurs  an- 
ciens l'attribuaient  à  Salomon,  comme  le  reste  du  livre, 

1      la   place  qu'ell :cupe  à  la  lin  du  recueil,  à  la 

suite  de  deux  sections  donl  les  auteurs  sont  nommé- 

liienl   désignes  seinlilo   s'opposer    a   celle   attribution.    — 

L'origine  salomonienne  des  sections  3,  i,ti,  7,  8, 

est  admise  par  le  plus  grand  nombre  des  ailleurs  mo- 
dernes. 

///.   DAT1     m     LA     FORME     ICTUELLB    m      LIVRE   DES 

proverbes.  ■     La  date  de  coin posi i ion  des  différentes 

[ui  le  constituenl  ne  fixe  pas.  par  là  même,  la 

daie  du  livre  des  Proverbes  dans  l'étal  définitif  dans 
lequel  nous  le  possédons.  Pour  ions  les  auteurs,  en 
effet,  ce  livre  est  le  résultat  d'un  assemblage  —  sélec- 
tion ou  collection.  C'esl  un  recueil  qui  a  été'  formé  de 
sentences  qui  exislaienl  déjà  avant  d'être  groupées  en- 
semble. Mais  tous  ne  s  accordent  pas  sur  l'époque  el  les 
conditions  dans  lesquelles  ce  recueil  a  été  formé,  même 

'c  qui  admettent  l'origine  sale nienne  des   Pro- 

poui  les  uns.  le  recueil  actuel  ne  saurait  être 
i  ne    à    l'exil,  pour  d'autres   H    remonterait  au 
vin»  siècle. 


D.  Calmet  s'exprime  ainsi  :  «  De  tout  ce  détail  il 
parait  que  les  Proverbes,  tels  que  nous  les  avons,  seul 
une  compilation  des  sentences  ou  autres  ouvrages  de 
Salomon,  faites  en  divers  temps  et  par  différentes  per- 
sonnes, et  rassemblées  en  un  corps  par  Esdras  ou  par 
ceux  qui  revirent  les  Livres  sacrés  après  la  captivité  de 
Babylone  et  qui  les  mirent  en  l'état  où  nous  les  avons.  . 
lit  il  ajoute  qu'une  des  preuves  les  plu-  évidentes  que 
ce  livre  est  un  assemblage  fait  par  différentes  per- 
sonnes, se  trouve  dans  la  répétition  d'un  assez  grand 
nombre  de  versets,  «  ce  qui  ne  serait  pas  arrivé'  si  une 
seule  personne  eût  travaillé  à  cette  compilation.  » 

Cornely,  op.  cit.,  p.  I&1-152,  qui  admet  la  date  d'Ézé- 
chias  pour  la  formation  du  recueil,  i-xxix.  hésite  re- 
lativement à  l'addition  de  xxx-xxxi  qui  complète  le 
livre  actuel  des  Proverbes,  mais  en  tout  cas  il  ne  voit 
pas  de  raisons  sérieuses  pour  l'attribuer  à  une  date 
postérieure  au  temps  d'Esdras. 

Mais  le  plus  grand  nombre  parmi  ces  auteurs  font 
remonter  au  vin"  siècle  la  formation  définitive  de  ce 
recueil.  Les  «  hommes  d'Ezéchias  »,  xxv.  1,  auraient 
trouvé  déjà  réunis  les  chap.  î-xxiv.  résultat  d'une  col- 
lection faite  à  la  fin  du  règne  de  Salomon  ou  peu  de 
temps  après.  Cornely,  op.  lit.,  p.  151;  Vigoureux,  op. 
cit.,  p.  485,  etc.  «  Dans  sa  forme  présente,  le  livre  des 
Proverbes  est  du  temps  d'Ezéchias,  i  conclut  M.  Vigou- 
reux, faisant  sienne  l'affirmation  de  11.  Reusch,  Bible 
polyglotte,  t.  IV,  1903.  p.  .'ii't.  D'après  le  card.  Meignan, 
tSalomon,  p.  329,  le  recueil  officiel  n'aurait  d'abord  con- 
tenu que  ce  que  Salomon  avait  dicté  ou  écrit,  puis  au- 
tour de  ce  noyau  se  seraient  successivement  ajoutés 
d'autres  proverbes  salomoniens.  n  depuis  Salomon  jus- 
qu'au temps  d'Ezéchias  et  peut-être  au  delà.  " 

Pour  la  plupart  des  critiques  contemporains,  les  re- 
cherches relatives  à  la  fixation  de  la  date  du  recueil 
définitif  se  trouvent  circonscrites  à  un  laps  de  temps 
relativement  court  par  le  l'ail  de  la  claie  tardive  qu'ils 
adoptent  pour  la  composition  même  des  sentences,  l'n 
point  leur  pai. lit  définitivement  acquis,  c'est  que  la 
formation  du  livre  tel  que  nous  l'avons  ne  saurait  re- 
monter aune  période  antérieure  à  la  captivité,  ('criai us. 
tout  en  reconnaissant  que  plusieurs  des  collections 
particulières  qui  composent  le  livre  actuel  ont  pu  être 
formées  avant  l'exil,  ne  pensent  pas  pouvoir  admettre 
celle  même  date  pour  la  formation  définitive  du  recueil. 
Loisy,  Les  Proverbes,  p.  'M-',\'.\  ;  Bickell,  Wiener  Zeit- 
schrift  fur  die  Kunde  des  Morgenlandes,  1891;  Driver, 
op.  cit.,  p.  loti.  Kuenen.  op.  cit.,  2e  édit.,  §97,  p.  14-20. 
reconnaît  que  quelques  proverbes  peuvent  être  pré- 
exiliens,  mais  il  prétend  que  toutes  les  collections  sont 
post-exiliennes  et  que  la  rédaction  de  l'ensemble  dit 
livre  est  à  placer  entre  350-300.  La  question  ne  se  pose 
même  plus  pour  ceux  qui  ne  reconn  tissent  qu'une 
origine  post-exilienne  à  tous  l.s  proverbes  i  Wildeboer, 
Toy):  pour  ces  derniers,  le  ti  mps  écoulé  -ntre  la  com- 
position des  sentences  el  la  formation  du  recueil  esl 
ne  me  assez  court:  selon  Wildeboer  il  faudrait  placer 
au  iv  et  an  ni"  siècle  le  tra\  til  de  composition  et  de 
c pilation. 

Entre  ces  auteurs  les  divergences  Boni  particulière- 
ment accentuées  en  ce  qui  concerne  la  plus  cm  moins 
-ranilc  ancienneté  îles  diverses  collections  particulières 
dont  la  réunion  a  formé  le  livre  actuel  des  Proverbes. 
En  1862  Hooykas,  Geschiedenis  der  beoefening  van  de 
Wijsheid  onder  de  Bebreën,  prétendait  que  la  plus 
ancienne  de  ces  collections  correspo  m  lai  i  aux  chap.I-IXi 
par  contre,  les  critiques  contemporains  sont  à  peu 
près  unanimes  à  considérer  cette  même  section  comme 
la  dernière  en  date  pour  la  composition  motion  plus 
parfaite  de  la  sagesse  et  forme  littéraire  plus  développés 
que  dans  le  reste  du  livre)  el  pour  la  compilation  géné- 
rale du  recueil;  elle  aurait  été  ajoutée  aux  deux  grandes 
sections,  2  el  •">,  pour  leur  servir  d'introduction. 


789 


PROVERBES    (LIVRE    DES) 


790 


Laquelle  de  ces  deux  dernières  sections  serait  la  plus 
ancienne'.'  Les  uns  (Davidson,  Loisy,  Bickell),  utilisant 
la  donnée  chronologique  de  XXV,  considèrent  xxv-xxix 
comme  le  plus  ancien  recueil  de  proverbes;  d'autres 
(Delitzsch.  Ewald,  Driver,  Kautzsch),  considérant  plutôt 
la  place  respective  de  ces  sections  dans  le  recueil  défi- 
nitif, regardent  x-xxn,  16,  comme  la  plus  ancienne 
collection.  Quelques-uns  parmi  les  auteurs  les  plus  ré- 
cents (Franckenberg,  Nowack),  tout  en  estimant  qu'au 
point  de  vue  des  pensées,  xxv-xxix  (et  spécialement  xxv- 
xxvn),  renferment  les  plus  anciens  proverbes,  pensent 
néanmoins  que  comme  compilation  cette  section  serait 
postérieure  à  la  2e  ix-.xxii,  16). 

Les  proverbes  qui  constituent  ces  deux  sections,  pro- 
venant de  milieux  différents,  auraient  d'abord  été  réunis 
en  deux  groupements  absolument  distincts  et  auraient 
ainsi  existé  indépendamment  l'un  de  l'autre  vers  le 
milieu  du  IVe  siècle,  tous  les  deux  portant  le  même 
titre  Proverbes  de  Salomon.  Vers  cette  même  époque 
(Nowack),  ou  vers  la  lin  de  ce  même  siècle  (Toy),  ils 
auraient  été  réunis  ensemble,  mais  comme  dès  ce  mo- 
ment le  premier  groupement  (x-xxn,  16),  était  déjà 
pourvu  des  deux  petites  sections,  xxn-17.  xxiv,  22,  et 
xxiv,  23-34,  on  ne  toucha  point  à  ces  appendices  et  l'on 
ajouta  xxv-xxix  à  la  suite  de  xxiv,  31,  en  maintenant 
dans  xxv.  1,  le  nom  de  Salomon  comme  il  était  déjà 
dans  x,  1  ;  et  c'est  ainsi  que  fut  constituée  la  plus 
grande  partie  du  livre  x-x.xix. 

Le  recueil  fut  complété  par  les  chap.  i-ix,  qui  devaient 
servir  d'introduction  générale  à  tout  l'ensemble  formé 
par  les  précédentes  collections,  alors  même  qu'il  n'au- 
rait pas  été  composé  précisément  dans  ce  but.  La  date 
de  cette  addition  varie  selon  les  auteurs  car  elle  dépend 
de  1  époque  admise  pour  la  composilion  même  de  cette 
section;  en  effet,  ils  admettent  généralement  que  l'ad- 
dition suivit  de  près  la  composition,  si  même  elle  ne 
fut  pas  l'œuvre  du  même  auteur.  Davidson,  Cornill, 
Wildeboer.  La  fixation  de  cette  date  dépend  de  l'in- 
fluence principale  que  l'on  croit  reconnaître  dans  ces 
pages  :  influence  persane  (Cheyne,  Sentit,  studies,  1897); 
inlluence  grecque  (Franckenberg,  Wildeboer,  Stade); 
ou  seulement  trace  des  créations  baggadiques  de  la  lit- 
térature rabbinique  à  la  lin  de  l'ère  persane  (Baudissin). 
Sidon  Friedkender,  Griech.  Phil.  im  ait.  Test.,  1901, 
p.  20,  citant  Clément  d'Alexandrie,  Strom.,  I,  v, 
t.  vin,  col.  717,  la  femme  étrangère  (il,  16  sq.),  dont  le 
pieux  Israélite  doit  si  soigneusement  se  défier,  serait  la 
culture  grecque,  tt,v  "EXXevixïiv  useïoîtav.  Et  par  suite, 
si  le  recueil  est  complet  au  début  de  la  2e  moitié  du 
IV siècle  pour  Kautzsch,  Kuenen;  pour  d'autres,  Xovvack, 
Franckenberg,  Wildeboer,  Toy,  on  ne  trouvera  point  le 
recueil  i-xxix  avant  la  2e  moitié  du  IIIe  siècle.  Enfin, 
avec  certains  de  ces  auteurs,  Franckenberg,  Toy,  il  faut 
descendre  jusqu'au  ne  siècle  pour  trouver  le  livre  actuel 
absolument  complet  avec  l'addition  de  xxx-xxxi,  c'est-à- 
dire  à  l'époque  de  Ben-Sira  (200-180)  et  peu  de  temps 
avant  la  traduction  grecque  du  livre  des  Proverbes. 

Ces  assertions  contradictoires  et  arbitraires  ne  peu- 
vent modifier  le  sentiment  des  auteurs  catholiques  qui 
soutiennent  l'authenticité  des  sections  salomoniennes, 
en  s'appuyant  sur  les  titres,  Prov.,  i,  1;  x,  I.  x\\.  1, 
sur  certaines  descriptions  de  leur  contenu  et  sur  le 
témoignage  de  la  tradition. 

VIII.  Forme  littéraire  du  livre  des  Proverbes.  — 
/.  RYTHME.  —  Par  son  contenu  le  livre  des  Proverbes 
appartient  à  la  série  des  didactiques;  par  sa  forme,  aux 
livres  poétiques.  Les  règles  de  la  poésie  hébraïque  y 
sont  constamment  observées  et  se  manifestent  par  un 
parallélisme  très  régulier.  Les  vers  seraient  uniformé- 
ment de  sept  syllabes  d'après  Bickell,  Carminâ  Veteris 
Teslamenli  melrice,  p.  121  ;  ils  seraient  de  trois,  quatre 
et  très  rarement  de  cinq  accents,  d'après  le  système  de 
Grimme,  «  et  il  faut  s'attendre  à  voir  changer  le  mètre 


à  chaque  sentence  nouvelle.  »  Mètres  ri  Strophes, 
dans  la  Revue  biblique,  1900.  p.  405.  Toy,  Proverbs, 
p.  ix-x,  reconnaît  également  cette  même  mesure  ri 
désigne  les  stiques  des  Proverbes  par  l'appellation  de 
binaire,  ternaire  ou  quaternaire  selon  qu'ils  comptent 
2,  3  ou  4  accents.  Cf.  N.  Schlœgl,  Études  métriques  ri 
critiquessur  le  livre  des  Proverbes,  c.  i,  dans  la  Revue 
biblique,  1900,  p.  518-525. 

La  strophe,  sous  différentes  formes,  se  rencontre  dans 
toutes  les  sections  du  livre,  à  l'exception  de  la  2e,  car 
elle  n'est  pas  entièrement  absente  de  la  5e,  bien  que 
celle-ci  renferme  surtout  des  distiques.  Toy,  The  Book 
uf  Prov.,  p.  îx  ;  Bickell,  Kritische  Bearbeitung  der 
Proverbien,  dans  la  Wiener  Zeilschr.  fur  die  Kunde 
îles  Morgenlandes,  1891,  où  il  établit  l'existence  de 
strophes  de  quatre  vers  chacune  dans  tous  les  poèmes  de 
la  première  section. 

Toutes  les  pièces  qui  composent  ce  livre  n'ont  pi 
même  longueur,  on  trouve  dans  Frz.  Delitzsch,  Dus  S,i- 
lom.  Spruchb.,  p.  7-17,  le  relevé  des  différentes  formes 
de  sentences  constatées  dans  notre  livre.  La  plus  fré- 
quemment employée,  c'est  le  simple  distique,  soit  anti- 
thétique, x,  1,  20;  xi,  F;  xin,  24;  soit  synonymique. 
n,  3,  8,  11  ;  soit  synthétique,  n,  13;  xin,  14;  soit  para- 
bolique. Ce  dernier  renferme  une  comparaison,  expri- 
mée ou  spus-entendue  par  le  simple  rapprochement  de 
l'énoncé  de  deux  idées,  empruntées  à  la  connaissance 
de  quelque  phénomène  naturel,  x,  26;  xxv,  14,  ou  à  un 
incident  de  la  vie  quotidienne  domestique  ou  sociale, 
xxv,  17,  et  qui  sert  à  faire  mieux  ressortir  la  pensée 
morale  que  le  sage  veut  apprendre  à  son  disciple.  C'est 
sous  cette  forme  que  se  trouve  pleinement  réalisée  la 
première  notion  du  mâsàl.  D'autres  fois  une  mèn 
maxime  dépasse  les  limites  du  simple  distique  et  la  pen- 
sée qu'elle  renferme  s'y  trouve  développée  pendant  i, 
6,  8  vers  et  même  davantage,  III,  11-12;  x.xm,  19-21  ;  VI, 
12-15;  xxni,  29-35. 

A  côté  de  cette  catégorie  de  proverbes  ainsi  déve- 
loppés il  convient  de  signaler  soit  des  groupements  de 
distiques  ainsi  placés  parce  que  chacun  d'eux  renfer- 
mait une  même  expression  ou  avait  trait  à  un  même 
objet,  par  exemple  au  roi,  xvi,  12-15,  soit  des  séries 
de  vers  à  indication  numérique.  Dans  ces  derniers, 
l'auteur  indique  dès  le  premier  distique  la  somme 
totale  des  sujets  dont  il  va  parler,  mais  le  fait  de  telle 
sorte  que  le  nombre  répété  dans  le  2«  stique  renferme 
une  unité  de  plus  que   dans  le  1",  ainsi  xxx,  21-22  : 

Trois  choses  troublent  la  terre 

Eî  il  en  est  quatre  qu'elle  ne  peut  supporter. 

Enfin  on  y  rencontre  un  poème  alphabétique  très 
régulier. 

Toutes  ces  espèces  de  proverbes  ne  sont  pas  dispo- 
sées sur  un  plan  uniforme  et  ne  se  rencontrent  point 
également  dans  les  diverses  sections  du  livre  :  I™  sec- 
tion, i  ix.  Dans  l'ensemble,  ce  sont  des  discours  mo- 
raux formant  de  petits  poèmes  plus  ou  moins  développés, 
m,  1-10;  iv,  1-9;  vu,  6-23,  ordinairement  en  strophes 
de  4  vers  i  Bickell);  les  pensées  détachées  sont  rares, 
m,  29,  30.  On  y  trouve  un  proverbe  numérique  (vi,  16- 
19)  et  l'usage  du  parallélisme  synonymique  y  est  à  peu 
prés  exclusif.  -  IIe  section,  x-.xxn,  16:  uniquement 
des  distiques;  dans  x-xv  presque  exclusivement  anti- 
thétiques, sans  que  cependant  l'antithèse  soit  toujours 
aussi  uniformément  accentuée;  dans  xvi-xxn,  16,  sur- 
tout synonymique  el  synthétique;  peu  d'antithèses, 
xviii,  23.  —  IIP  section,  xxn,  17-xxiv,  22;  au  débul 
exhortation  morale  de  10  vers  analogue  à  celles  de  la 
1"  section;  quelques  distiques,  mais  surtout  des  tétras- 
tiques,  plusieurs  sentences  de  5,  6,  7  et  8  stiques  et 
même  un  petit  poème  de  16  stiques  d'après  Toy  et 
Kautzsch,  de  18  d'après  Bickell.  Le  texte  massorétique 
compte  17  stiques  :  Toy  et  Kautzsch  pensent  qu'il  y  a  un 


791 


l'IioVEUBES    (LIVHK    DES 


792 


stique  à  retrancher,  Bickell  eroil  plutôt  qu'il  faudrait  en 
jouter  un.  Ordinairement  parallélisme  synonymique 
entre  les  stiqnes,  parfois  même  entre  les  distiques  d'un 
quatrain.   —  IVe  section,  xxiv,  23-31,  la  plus  courte  et 

la  plus  variée  con rythme:  un  distique,  un  tristique, 

nu  tétrastique,  un  décastique;  sauf  2  exceptions,  paral- 
lélisme synonymique.  —  V''  section.  xxv-x\ix,  au  point 
de  ii'  lu  rythme  on  peut  la  diviser  en  deux  :  —  xxv- 
\xvii:  usage  prédominant  mais  non  pas  exclusif  du 
il  on  y  trouve  plusieurs  distiques  et  tétras- 
tiques,  un  pentastique,  un  hexastique  ainsi  que  2  petits 
poèmes,  l'un  de  8,  l'autre  de  10  stiques.  Parallélisme 
parabolique  et  synthétique;  les  antithèses  y  sont  très 
rares;  —  xxviii-xxix  :  emploi  exclusif  du  distique  et 
pre  que  dans  une  é^alo  proportion  parallélisme  anti- 
thétique et  parabolique.  —  VIe  section,  x\x;  quelques 
distiques  isolés,  mais  ordinairement  chaque  sentence 
renferme  plusieurs  distiques;  c'est  dans  cette  partie  du 
livre  que  s.-  rencontrent  (en  dehors  de  vi,  16-19)  les 
proverbes  numériques  dans  lesquels  on  ne  trouve  point 
de  parallélisme  au  point  île  vue  de  la  pensée.  En 
dehors  de  o  senti  uns.  parallélisme  synonymique.  — 
VII  section,  xxxi.  [-9.  Elle  renferme  3  sentences  de  4, 
8,  4  vers  :  parallélisme  synonymique.  —  VIIIe  section, 
XXXI,  lO-.'îl  :  poème  alphabétique  de  22  distiques,  paral- 
lélisme synonymique. 

ll.STYLBEi  Mi,  [dulairb.  —  i'Style.  —Le caractère 
particulier  du  genre  gnomique   rend  assez   difficile  la 

c pa raison  entre  le  style  des  Proverbes  et  celui  des 

autres  livres  de  l'Ancien  Testament,  la  plus  grande  par- 
tie de  Ce  recueil  se  composant  de  simples  maximes  dans 
lesquelles  une  pensée  déjà  bien  concise  est  exprimée 

sous  i forme  elliptique  dans  un  seul  distique.  Cepi  n- 

ilant,  la  variété  des  c paraisons,  le  choix  des  images, 

la  régularité  de  la  forme  rythmique,  l'allure  si  vive  de 

l'exprossi la   psychologie  m    pénétrante  de  certains 

tableaux,  revêlenl  d  un  cachet  spécial  les  pages  mêmes 
du  livre  OÙ  les  pensées  sont  le  moins  (tendues,  et  leur 
donnent  un  coloris  tout  particulier.  Dans  les  proverbes 
pi  développés,  tout  spécialement  dans  les  exhor- 
tations de  la  l"  section,  c atissi  dans  les  portraits 

esquissés  à  travers  les  autres  sections,  on  trouve  des 
passages  dignes  des  plus  beaux  jours  de  la  littérature 
hébraïque. 

2°  Vocabulaire.  —Il n'est  poinl  surprenant  que  ce  re- 
cueil renfer en  cuire  des  expressions  plus  spéciales 

aux  livres  sapientianx,  un  certain  nombre  de  mots  que 
l'on  ne  rencontre  pas  ailleurs  dans  la  Bible  hébraïque 
OU  du  moins  que  très  rarement.  La  raison  en  est  au  su- 
jet lui-même  el  à  celle  fori le  littérature  qui  demande 

une  plus   -rande    précision  dans  l'eu ;é  des  pensées. 

On  peut  signaler  quelques  locutions  qui   ne  se   ren- 
contrent que  dans  ce  livre  ou  liii'ii  s'y  trouvent  avec  un 
irticulier  qu'elles  n'ont  pas  ailleurs. 

Ne  se  trouvent  que  dans  les  Proverbes  :  nnb,  cou- 
ronne, i,  9,  tv,  9.  '-ns,  hélas!  ah!  (que  la  Vulgate  a 
traduil  :  Cujus  patri  uas?  xxm,  29;  —  le  verbe  nnb, 
employé  uniquement  au  lliihp.  o'DnbriD,  morceatta 
friands,  xvih,  8  (le  j^.  se  retrouve  identiquement  répété 

x.xvi,  '22.         ]isa  —--,  dans    le  sens   de  entrailles,  pris 
au  ligure,  xviu,  8;  w.  27.  30    xxvi.  22).  —  -•'-  -•,  assu- 
nt,  xi,  21;  xvi,  5.   -  am  »msn,  pommes  d'or,  xxv, 
11. 

Expressions  rues  rencontrées  plus  pariiculièreinent 
dans  les  Proverbes  :  Dt»n  yv.  arbre  de  vie,  1  fois  Gen., 
m,  24;  et  1  fois  Prov.,  m,  18;  xi,  30;  xm,  12;  xv,  i 
—  -T..  ville,  I  lois.  Job,  \\1\.  7;  i  fois  dans  Prov., 
vin,  3;  ix,  3,  14;  xi,  11  (Brown,  Driver).  -  =•-•::, 
avec  le  sens  de  choses  magnifiques,  ne  se  rencontre 
que  dans  Prov.  vm,  6.  musi, santé, ne  se  rencontre 
que  dans  Prov.  ni.  s  et  indique  une  forme  aramaïsan  te. 

-  -z,  fils,  xxxi,  2  ii i  araméen. 

Cependanl  les  aramaïsmes  i  i  le  livre  ne  ren- 


ferme point  d'expression  persane  ou  grecque.  ïoy, 
op.  cit.,  p.  xxxi.  Driver,  op.  cit.,  p.  403-404,  donne  une 
liste  des  principales  locutions  particulières  au  livre  des 
Proverbes,  au  moins  pour  la  2e  section. 

IX.  Texte  et  versions  du  livre  iu:s  Proverbes.  — 
.•li  Texte.  —  Le  texte  hébreu  de  ce  livre  a  subi  quelques 
altérations  par  suite  de  la  facilité  qu'il  y  avait  à  chan- 
ger la  suite  des  sentences  en  les  transcrivant,  à  modi- 
fier une  locution  dans  l'énoncé  d'une  maxime  difficile 
à  lire,  le  contexte  ne  pouvant  pas,  dans  ces  cas,  servir 
à  indiquer  sûrement  quelle  était  la  vraie  lecture  du 
passage;  le  l'ail  qu'il  n'était  point  du  nombre  des 
Kelubim  lus  dans  les  synagogues  eut  peut-être 
pour  résultai  de  le  faire  traiter  avec  moins  de  soin  que 
d'autres  livres.  Par  contre,  Toy,  Proverbs,  p.  xxxi-xxxn. 
prétend  que  ce  livre  dut  à  cette  situation  de  n'être 
point  l'objet  de  retouches  ou  de  modifications  sous 
l'influence  d'idées  théologiques. 

Les  altérations  de  ce  texte  peuvent  être  constatées  par 
le  contrôle  des  anciennes  versions,  par  les  moyens  de 
critique  que  fournissent  les  règles  poétiques  et  aussi, 
pour  les  plus  notables  transpositions,  parles  caractères 
particuliers  de  chaque  section.  C'est  ainsi  que  plusieurs 
critiques  voient  une  transposition  dans  la  description 
du  festin  de  la  Sagesse,  Prov.,ix,  1-12;  et  rapportent  les 
v.  7-ltl,  à  la  2e  section  x-xxn,  lti.  Bickell,  Carmina 
V.  T.  metrice,  p.  129;  ïoy,  op.  cit.,  p.  192. 

Le  texte  actuel  du  livre,  renferme  également  un  cer- 
tain nombre  de  sentences  répétées.  Elles  se  présentent 

sous   différenles     formes,    les    unes    smil    aliso] -i il 

identiques  dans  l'expression,  vi,  10-11.  et  xxiv.  33-34, 
d'autres  comportent  une  légère  modification  sur  un 
mot  ou  ileux  du  mdSâl  répété  xvi,  2,  et  xxi,  2,  d'autres 
enfin  sont  identiques  pour, la  pensée  el  nullement  dans 
its  qui  l'expriment,  xi,  15, et  xxu,  26.  Les  cas  les 
plus  difficiles  à  justifier  sont  ceux  où  il  y  a  identité 
absolue  dans  les  mois  ;  cl  les  critiques  modernes  se 
servent  assez  souvent  de  cette  constatation  pOUl 
(dure  à  la  pluralité  d'auteurs  et  à  une  formation  indé- 
pendante des    dillen  nie      sections  où    011  les   rencontre; 

ainsi  entre  autres  Nowack,  art.  Prowerb», dans  Dict.  of 
(/ie  Bible,  t.  tv,p.  140;  Cornill,  Einleitung,  p.  225;  Toy, 

op.  cit.,  p.  vu.  Il  importe  cependant  de  remarquer  qu'il 
y  a  des  répétitions  de  distiques  entièrement  identiques 
dans  une  même  section,  xiv,  12,  el  XVI,  25;  \.  I.  et  xv. 
20.  six,  5,  el  xix,  9. 

B)  Versions.  —  1"  La  plus  ancienne  des  versions  que 
nous  possédons  du  livre  (les  Proverbes  est  la  version 
grecque  des  Septante;  on  la  trouve  dans  les  princi- 
paux manuscrits  oncianx   B,  n.  A  (quelques  fragments 

dans  C)  cl  dans  de  ibreus  manuscrits   cursifs.    On 

admet  communément  que  ce  livre  faisait  partie  des 
Uagiograph.es  déjà  traduits  en  grec  el  que  l'auteur  du 
prologue  de  l'Ecclésiastique  désigne  par  les  mois  TJ 
'/o'.-a  rûv  fteô)  ■(.)■/;  celle  traduction  serait  donc  antérieurs 
à  1M2  d  aurait  probablement  été  faite  vers  le  milieu  du 
h  siècle  avant  J.-C.  Baumgartner,  Élude  critique  sur 
l'état  iin  texte  du  Livre  des  Proverbes,  p.  8.  Il  es 
auteurs  cependanl  qui  la  placent  vers  la  fin  du  II'  siècle, 
Toy,  Proverbs,  p.  xxxn;  art.  Proverbs,  dans  Encyc. 
col.  3907. 

Cette  traduction  est  plus  libre  que  littérale  et  c'est 
l'idée  du  texte  original  qui  a  été  exprimée  plutôt  que  le 
mot  n'a  été  exactement  rendu.  Frankenberg  pense  que 
le  traducteur  n'était  point  1res  familier  avec  la  langue 

héhraiq I  que  d'ailleurs  il  n'aurait  poinl  été  soucieux 

de  l'exactitude  lot. 'raie,  pana'  qu'il  n'entreprenait  pas 
tant  cet  le  Ira  duel  ion  pour  l'usage  de  ses  coreligionnaires 
que    pour    des   païens   instruits  à   qui  il  voulait  faire 

connaître  les  enseigi ents  moraux  de  la  littérature 

gnomique  d'Israël.  Celle  préoccupation  el  ce  but  expli- 
queraient la  pureté'  relative  du  grec  de  celte  version 
et  certaines  réminiscences classiqui  s  (également  constat- 


793 


PROVERBES    (LIVRE    DES) 


794 


tées  par  Baumgartner),  op.  cil.,  p.  9.  Indépendamment 

même  de  ces  circonstances,  il  était  à  peu  prés  impossible 
.au  traducteur  grée  de  rendre  littéralement  les  mots  d'un 
mâsàl  dont  l'expression  portait  si  fortement  accusée 
l'empreinte  du  cachet  sémitique;  et  alors,  tantét  un 
verbe,  tantôt  un  qualificatif,  tantôt  une  périphrase 
devaient  être  ajoutés  avant  que  la  formule  hébraïque 
devint  intelligible  à  (les  esprits  grecs. 

Les  dill'érences  entre  le  texte  massorétique  et  la  ver- 
sion grecque  des  Proverbes  ne  consistent  pas  unique- 
ment dans  des  manières  différentes  de  rendre  une  pen- 
sée. 11  y  a,  entre  les  deux,  d'autres  divergences  plus 
notables,  et  telles  que  la  plupart  des  auteurs  en  concluent 
que  cette  traduction  a  du  être  faite  sur  un  manuscrit 
hébreu  différent  du  texte  massorétique  qui  nous  est 
parvenu  (Vigouroux,  Baumgartner,  ïoy,  etc.).  Il  y  a  des 
■changements  dans  la  composition  même  de  distiques 
qui  de  synthétiques  sont  devenus  antithétiques;  il  y  a 
omission  de  plusieurs  passages  contenus  dans  le  texte 
hébreu  et  l'on  ne  voit  aucune  raison  pouvant  légitimer 
cette  disparition;  il  y  a  surtout  des  additions  de  pas- 
sages assez  nombreux,  provenant  plus  probablement 
d'un  texte  hébreu  plutôt  que  d'un  original  grec  i  Vigou- 
roux, Baumgartner,  Toyi;  on  y  constate  encore  des 
changements  relativement  à  la  distribution  des  chapitres 
à  partir  de  il.  Ainsi,  après  xxiv,22.  de  l'hébreu  le  grec 
intercale  xxx,  1-14,  puis  xxiv,  23-34,  ensuite  xxx,  1-9, 
après  xxv-xxix,  et  enfin  xxxi,  10-31. 

La  version  grecque  représentant  un  texte  hébreu  plus 
ancien  que  le  texte  massorétique  constituerait  un 
excellent  moyen  de  critique  littéraire  du  texte  hébreu 
reçu,  si  les  particularités  de  sa  composition  et  les  modi- 
fications qu'elle  a  subies  avant  et  après  les  recensions 
il u  ni"  siècle,  n'avaient  un  peu  diminué  sa  valeur  cri- 
tique, bien  qu'elle  soil  encore  assez  notable. 

•2»  La  version  sahidique,  éditée  par  Ciasca,  qui  com- 
prend une  grande  partie  des  Proverbes,  pourrait  être 
très  utile  pour  la  reconstitution  du  texte  ancien  des 
Septante,  en  tant  que  cette  version  a  été  faite  avant  les 
recensions  et  dans  la  suite  n'en  a  subi  qu'assez  peu 
l'influence, Hivernât,  Versions  coptes,  dans  la  Revue  bi- 
blique, 1896,  p.  427-433,  540-509  ;  1897,  p.  48-71.  -  Pen- 
dant longtemps,  la  Pescbitto  avait  été  considérée  comme 
dépendant  du  Targum  des  Proverbes  et  indépendante 
des  Septante,  ce  sentiment  est  maintenant  complètement 
abandonné.  R.  Duval,  Littérature  syriaque,  3e  édit., 
1907,  p.  32.  La  question  des  rapports  de  la  Peschito 
relativement  aux  Septante  a  été  particulièrement  étu- 
diée par  H.  Pinkuss,  Die  syriselie  Ûbersetzung  der 
Prov.  texlkritisch  untersucht,  dans  la  Zeitschr.  />"  die 
alltest.  nissenschaft,  t.  xiv,  1894,  p.  65-141,  161-222. 
3°  La  date  de  composition  de  la  Peschito,  en  ce  qui 
concerne  les  Proverbes,  est  assez  incertaine,  ce  livre 
n'étant  point  de  ceux  dont  la  traduction  s'imposât  en 
premier  lieu  :  les  uns  comme  Pi.  Duval,  op.  cit.,  p.  31, 
ne  font  terminer  l'ensemble  de  la  traduction  qu'au 
IVe  siècle,  tandis  que  d'autres,  avec  Baumgartner, 
op.  cit.,  p.  14,  ne  descendraient  pas  au  delà  du  milieu 
du  il"  siècle.  La  traduction  aurait  été'  faite  sur  un  ma- 
nuscrit hébreu  à  peu  près  identique  au  texte  massoré- 
tique. puis  plus  tard  revision  de  cette  traduction  d'après 
les  Septante,  R.  Duval,  op.  cit.,  p.  33;  au  vil"  siècle, 
au  moment  de  la  version  syro-hexaplaire  de  Paul  de 
Telia,  Baumgartner,  op.  cit.,  p.  14;  à  rencontre  de 
cette  opinion  celle  de  Frankenberg,  qui  prétend  que 
l'influence  du  grec  remonte  au  traducteur;  tout  en  sui- 
vant l'hébreu  pour  le  fond  il  se  serait  inspiré  en  même 
temps  de  l'œuvre  des  Septante.  Comme  par  ailleurs  la 
traduction  syriaque  a  une  allure  assez  libre,  qu'elle 
paraphrase  en  certains  passages,  ces  diverses  particu- 
larités diminuent  sa  valeur  critique. 

4°  Le  Targum  des    Proverbes  suit  de  très  près   la 
Peschito  et  en  dépend.  Dalhe,  De    ratione  consensus 


oersionis  chald.  et  syr.  Prov.  Salom.;  R.  Duval,  Lit- 
térature syriaque,  p.  32.  Les  passages  où  il  s'en  écarte 
proviennent  probablement  d'une  revision  faite  d'après 
le  texte  massorétique.  On  ignore  sa  date,  il  peut  être 
très  ancien;  la  défense  de  mettre  par  écrit  les  ex- 
plications targumiques,  si  longtemps  en  [vigueur,  ne 
s'appliquant  qu'aux  livres  bibliques  lus  dans  la  syna- 
gogue. 

V  l.a  traduction  des  Proverbes  dans  la  Vulgate  latine 
est  l'œuvre  de  saint  Jérôme;  elle  fut  faite  très  rapide- 
ment, en  même  temps  que  celle  de  l'Ecclésiaste  et  du 
Cantique.  Voir  Ecclésiaste,  t.  n,  col.  1543-1557,  et  Can- 
tique des  Cantiques,  t.  n.  col.  185-199.  D'une  façon 
générale  elle  suit  assez  fidèlement  le  texte  massorétique 
sur  lequel  elle  a  été  faite.  Elle  porte  cependant  îles 
traces  de  l'inlluence  des  Septanle,  probablement  par 
l'intermédiaire  de  l'ancienne  version  latine,  très  bien 
connue  de  saint  Jérôme,  Baumgartner,  op.  cit.,  p.  10; 
Toy,  Proverbs,  p.  xxxiv;  Frankenberg  pense  plutôt 
que  les  emprunts  aux  Septante  constatés  dans  la  Vul- 
gate seraient  postérieurs  à  saint  Jérôme  et  l'œuvre  de 
copistes  qui  ont  voulu  compléter  la  version  hiérony- 
mienne  avec  l'aide  de  l'ancienne  version  latine  faite 
sur  le  grec;  de  fait  la  comparaison  entre  la  Vulgate 
Clémentine  et  le  Codex  Amialinus, de  la  fin  du  vue  siècle, 
voir  Amiatinus  (Codex),  t.  i,  col.  480,  semble  favoriser 
cette  opinion.  La  Vulgate  renferme  donc  la  plus  grande 
partie  des  additions  des  Proverbes  qu'on  trouve  dans 
les  Septanle,  mais  elle  en  contient  aussi  un  certain 
nombre  qui  lui  sont  propres. 

X.  Comparaison  avec  les  autres  livres  saimentiai  x. 
—  Le  livre  des  Proverbes  est  ordinairement  rapproché 
des  autres  livres  sapientiaux  avec  lesquels  il  a  des  res- 
semblances pour  le  fond  comme  pour  la  forme.  — 1°  Au 
point  de  vue  du  vocabulaire,  on  y  trouve  certaines  ex- 
pressions dont  l'usage  est  assez  fréquent  dans  ces  livres 
comme  se  rapportant  plus  particulièrement  à  leur  objet 
spécial  :  les  mots  exprimant  le  commandement,  la  loi. 
l'instruction,  la  connaissance  de  la  vérité,  la  sagesse. 
Toy,  Proverbs,  p.  xxiv,  a  dressé  une  liste  comparative 
de  ces  expressions,  telles  qu'on  les  rencontre  dans  les 
Proverbes,  Job  et  l'Ecclésiastique. 

2»  La  composition  littéraire  de  ces  livres  se  signale 
par  une  constante  fidélité  à  garder  les  lois  du  parallé- 
lisme. Le  rapprochement  est  plus  particulièrement  re- 
marquable avec  l'Ecclésiastique  (voir  Ecclésiastique, 
t.  n,  plus  spécialement  col.  1543-1557)  et  dans  l'un  et 
l'autre  se  trouve  la  même  préoccupation  d'apporter  une 
grande  variété' dans  l'emploi  de  cette  règle  fondamentale 
de  la  poésie  hébraïque.  Le  simple  distique  est  cependant 
plus  fréquent  dans  les  Proverbes  que  dans  l'Ecclésias- 
tique, et  les  ebap.  i-ix,  malgré  une  certaine  unité  cons- 
tatée dans  les  discours  et  les  exhortations  de  la  Sagesse, 
ne  présentent  point  ce  caractère  d'unité  que  revêt 
1'  «  Éloge  des  anciens  »  dans  Eccli.,  xliv-xi.ix. 

3°  Quant  à  l'objet  du  livre,  les  Proverbes  se  rappro- 
chent également  beaucoup  plus  de  l'Ecclésiastique  que 
des  autres  livres  sapientiaux.  L'étude  de  la  Sagesse  four- 
nit la  note  caractéristique  de  ces  deux  ouvrages  comme 
elle  donne  une  certaine  unité  à  tout  l'ensemble  de  leur 
contenu  :  son  origine  divine  (Prov.,  vm;  Eccli.,  xxivl, 
et  surtout  ses  conseils  pratiques  pour  l'instruction  des 
hommes.  L'un  et  l'autre  livre  constituent  un  manuel 
pratique  pour  l'instruction  et  la  formation  de  ceux  qui 
veulent  se  constituer  les  disciples  de  la  Sagesse.  L'en- 
semble- des  vérités  religieuses  qu'ils  renferment  sur 
Dieu,  sur  la  rétribution,  sur  la  conduite  de  l'homme  et 
sa  dépendance  vis-à-vis  de  Dieu,  sont  envisagées  au  même 
point  de  vue;  à  noter  cependant  la  perspective  na- 
tionale constatée  dans  Eccli.,  xxiv,  (pion  ne  trouve  point 
dans  les  Proverbes.  Il  y  a  aussi  grande  analogie  dans  la 
description  de  la  vie  sociale  que  nous  révèlent  les  Pro- 
verbes et  l'Ecclésiastique. 


795 


PROVERBES    (LIVRE    DES 


796 


XI.    Analyse    du  livre     des    Proverbes.  —  Il    est 

impossible  de  donner  une  analyse  bien  serrée  du  con- 
tenu de  ce  livre  ou  d'indiquer  la  suite  de  toutes  les 
s  renfermées  dans  ce  recueil,  du  moins  dans 
toutes  les  parties  qui  le  composent. 

/  section,  i,  1-ix.  18.  —  i,  1-6.  Introduction  géné- 
rale indiquant  le  litre,  le  but  et  l'importance  de  l'ou- 
vrage. —  i,  7-ix.  18.  De  petits  discours  moraux  et 
quelques  distiques  isolés  dans  lesquels  la  Sagesse,  di- 

nt  ou  par  l'intermédiaire  du  Sage,  parle  à  son 

disciple  qu'elle  appelle  n  mon  fils  ».  Ils  forment  comme 
une  grande  introduction  préliminaire  au  recueil  de  ma- 
ximes proprement  dites  qui  commencera  avec  le  chap.  x. 
Tout  le  contenu  de  cette  section  se  ramène  à  un  même 
uliji't  :  l'excellence  de  la  Sagesse,  de  là,  des  exbortations 
sans  cesse  renouvelées  d'étudier  et  de  pratiquer  la  Sa- 
gesse. 

II'  section,  x.  1-xxii.  16.  —C'est  une  longue  série  des 
pensées  morales  présentées  dans  de  simples  distiques. 
Dans  cette  section,  on  rencontre  parfois  des  groupe- 
ments de  vers  présentant  une  certaine  affinité  de  pen- 
sées, "ii  simplement  contenant  chacun  un  même  mot 
important,  mais  un  classement  logique  n'a  point  présidé 
à  la  formation  de  ce  recueil.  On  a  pourtant  essayé  de 
trouver  un  classement  méthodique  pour  grouper  tous 
ces  proverbes  sans  obtenir  un  résultat  tout  à  t'ait  satis- 
faisant. Zôckler  a  proposé  un  tableau  de  ce  genre;  il  a 
été  utilisé  par  Lesètre,  Le  livre  des  Proverbes,  p.  29- 
31.  Toutes  les  sentences  de  cette  section  considèrent 
l'homme  dans  diverses  situations  de  la  vie  humaine  où 
il  peut  se  rencontrer,  avec  des  devoirs  sociaux,  moraux 
et  religieux.  —  On  pourrait  peut-être  reconnaître  que 
dans  x-xv,  où  le  parallélisme  est  antithétique  on  insiste 
plus  spécialement  sur  les  contrastes  qui  existent  entre 
les  heureux  effets  de  la  justice  pratiquée  et  les  châti- 
ments réservés  au  mal;  —  que  dans  xvi.  l-.xxn.  1(1. 
avec  le  parallélisme  synonymique  et  antithétique  on 
exhorte  plus  spécialement  à  la  pratique  du  bien  par  la 
perspective  du  bonheur  des  justes  et  du  malheureux  sort 
de  l'impie. 

111* section,  xxn,  17-xxiv,  22  :  Exhortations  morales 
du  même  genre  que  celles  de  la  I"  section  :  c'est  un 
corps  de  maximes  proposées  par  le  Sage  à  son  disciple 
connue  dans  i-x.  —  XXII,  17-21  :  Le  disciple  est  invile  à 
garder  soigneusement  l'enseignemenl  du  Sage.  —  xxn, 
22-xxm,  1S  :  Divers  conseils  entremêlés  de  formules 
dans  lesquelles  les  exhortations  sont  présentées  avec 
une  insistance  particulière;  elles  concernent  tout  spé- 
cialement la  conduite  à  tenir  a  l'égard  du  prochain  con- 
sidéré sons  divers  aspects  de  la  vie  sociale  :  pauvres, 
riches,  grands,  enfants,  orphelins,  etc.  —  19-35.  Caté- 
gories d'individus  â  éviter  plus  spécialement  :  ceux  qui 

ad ni    au    vin   et    les  femmes  de  mauvaise  vie.  — 

xxiv,  1-14:  Avantages  et  bienfaits  delà  Sagesse  pour  qui 
l.i   possède,    les   devoirs  qu'elle  crée  à   l'égard   d'autrui. 

15-22  :  Vivre  dans  la  paix  et  ne  causer  de  mal  à  per- 
sonne m  au  juste,  ni  même  à  ses  ennemis. 

IV'  section,  xxiv,  23-34.  —  Divers  conseils  du  Sage: 
rapports  avec  le  prochain,  -2  'i  - -J ; )  :  attitude  de  justii  i 

arité  qu'il  faut  prendre  à  son  égard.  —  30-34  :  Évi- 
ter la  paresse  en  constatant  ses  tristes  effets. 

V*  section,  xxv,  1-xxix,  27.  —  Ce  son i  îles  maximes 
d'ordre  général  concernant  des  devoirs  sociaux,  mais 
il  >  a  aussi  de  nombi ses  sentences  de  conduite  pra- 
tique dans  l'ordre  privé  el  domestique.  On  peut  >  dis- 
tinguer 2  parties  assez  nettement  distinctes  au  point  de 
vue  du  style  el  delà  nature  despensées  :  —  xxv-xxvu,qui 
minent  par  un  petil  poème  mu-  l'agriculture  :  les 
distiques  n'j  sonl  pas  exclusivement  usités  el  la  valeur 
psychologique  'les  maximes  qui  s'\  trouvent  est  parti- 
menl  remarquable  :      xxvm-xxix,  exclusivement 

istiques  :  sentences  i 'aies   avec  moins  de   vie 

dans  l'expression  que  dans  les  chap.  précédents 


VI'  section,  xxx,  forme  un  tout  distinct  du  reste  du 
livre, en  général  les  penséesy  ont  une  certaine  étendue. 

—  1.  Titre. 2-4.  Paroles d'Agur;  faiblesse  de  l'intelligence 
humaine  en  face  des  œuvres  de  Dieu,  qui  est  connu 
par  la  révélation  de  lui-même.  —5-6.  Exbortations  à  la 
confiance  en  Dieu.  —  7-9.  Une  prière  pour  demander  à 
Dieu  la  loyauté  de  caractère  et  une  situation  qui  ne 
l'expose  pas  à  être  tenté  par  les  extrêmes  de  la  fortune. 

—  10-33.  Diverses  maximes  :  descriptions  de  qualités  ou 
île  caractères,  sous  forme  de  proverbes  numériques, 
avec  prédominance  du  nombre  4. 

VIP  section,  xxxi.  1-9.  —  Maximes  de  la  mère  du  roi 
Lamuel.  genre  homilétique;  contre  la  fréquentation 
des  femmes  et  l'intempérance;  exhortation  à  la  justice 
et  au  secours  des  faibles. 

VIII' section, xxxi,  10-31.  —  Éloge  de  la  femme  forte 
ou  description  de  quelques-unes  des  qualités  que  doit 
posséder  l'épouse  parfaite, considérée  plus  spécialement 
dans  la  direction  et  le  soin  des  affaires  de  la  vie  do- 
mestique. 

XII.  Doctrine  du  livre  des  Proverbes.  — /.  géné- 
nALIl'ÉS.  — 1.11  ne  faut  point  chercher  dans  le  contenu  de 
ce  livre  un  exposé  systématique  ni  un  traité  théorique 
où  seraient  classées  et  étudiées  les  différentes  catégories 
de  devoirs  qui  incombent  à  tous  les  hommes,  même 
aux  Israélites  en  particulier,  mais  bien  plutôt  une  invi- 
tation à  la  pratique  de  la  morale  en  vue  de  rendre  la 
vie  morale  meilleure.  —  2.  La  vie  humaine  est  consi- 
dérée dans  ces  maximes  sous  son  aspect  extérieur, 
comme  une  collection  d'actes  moraux,  conformes  ou 
non  à  la  loi.  et  c'est  en  parlant  de  cette  conformité 
comme  norme  que  les  hommes  sont  divisés  en  deux 
catégories  dont  les.  caractères  paraissent  absolument 
fixés  :  b-s  bons  ei  les  méchants,  les  sages  et  les  in- 
sensés. —  3.  La  vie  humaine  y  est  envisagée  tout  par- 
ticulièrement comme  une  discipline  à  réaliser,  de  là 
l'importance  et  la  place  prépondérante  données  à  l'ins- 
truction.à  l'éducation  et  à  la  loi.  Par  loi.  dans  l'ensem- 
ble du  livre,  on  indique  tout  aussi  bien  les  préceptes 
de  la  bu  naturelle  que  ceux  de  la  loi  positive.  —  i.  Bien 
qu'à  plusieurs  reprises  on  \  parle  îles  devoirs  sociaux 
de  l'homme  el  que  toujours  l'homme  \  soit  considéré 
comme  faisant  partie  d'une  collectivité  sociale,  domes- 
tique OU  nationale,  néanmoins  c'est  avant  tout  à  l'indi- 
vidu qu'on  s'adresse  dans  cet  enseignement.  Le  bien 
général  résultera  île  la  mise  en  pratique  des  conseils  de 
la  sagesse  par  ceux  qui  voudront  bien  être  ses  disciples, 
mais  il  ne  sera  poinl  l'objet  immédiat  de  cette  instruc- 
tion. De  là  le  côté  si  forte nt  individualiste  que  pré- 
senteront un  grand  nombre  de  proverbes.  —  5.  L'exis- 
tence du   mal  physique  el  moral  j   est   parfaitement 

reconnue,  mais  on  n'y  rencontre  poinl  une  préoccupa- 
tion quelconque  d'indiquer  ou  de  solutionner  quel- 
ques-uns des  problèmes  que  cette  constatation  peut 
présenter  i  l 'esprit;  on  indique  seulement  la  possibi- 
lité et  le  devoir  d'éviter  la  violation  de  la  loi  (mal  moral) 
en  l'observant  fidèlement  el  la  possibilité  d'écarter  le 
mal  physique  en  méritanl  les  faveurs  de  Dieu. 

/;.  dibd.  —  1.  La  doctrine  monothéiste  est  absolue 
dans  toutes  les  parties  du  livre;  comme  dans  les  autres 
livres  de  la  Bible  affirmée  et  toujours  présupposés 
sans  aucune  préoccupation  de  démonstration  :  l'idolâ- 
trie n'est  pas  mentionnée,  Dieu  y  est  souvent  désigné 
sous  son  nom  de  .léhovah.  —  2.  Dieu  esl  éternel,  rien 
n'existait  encore  de  tout  l'univers  el  il  était  déjà  vin, 
22  26  :  indépendant  du  monde,  c'esl  lui  qui  esl  le  créa- 
teur de  tout  ce  qui  existe,  ni.  19-20;  libre  de  créer,  il 
esl  lui-même  la  cause  finale  de  son  .envie,  ivi,  i  iVul- 
gate).  —3.  Le  livre  ne  renferme  point  de  données  pn 
sur  la  nature  divine,  néanmoins  les  sections  de  \  n. 
22  sq..  sur  la  sagesse  personnifiée,  fournissent  un  ap- 
port tout  nouveau  et  important  sur  cel  objet.  I.  I. at- 
tention est  surtout  attirée  sur  les  attributs  de   Dieu  en 


7!  »7 


PROVERBES    (LIVRE    DES: 


798 


tant  qu'ils  se  manifestent  dans  ses  relations  avec  les 
hommes;  —  a)  Sa  science  parfaite  qui  lui  permet  de 
suivre  continuellement  les  actions  et  les  intentions  des 
hommes  :  cause  d'effroi  pour  le  pécheur,  source  de 
consolation  pour  le  juste,  v,  21:  xv.  3,  11.  xxiv,  12.  — 
fc)  Une  paissante  infinie  dans  l'exécution  de  tous  ses 
desseins,  irrésistible  dans  son  action  même  sur  les 
actes  de  l'homme  tout  en  respectant  sa  liberté  xvi,  4,  9; 
six,  21;  xx,  21;  xxi,  1.  —  c)  Sa  justice  absolue,  mise 
tout  particulièrement  en  relief,  soit  qu'on  le  considère 
comme  le  principe  de  toute  justice,  xvi,  11,  et  ne  pou- 
vant supporter  la  moindre  injustice,  xt,  1,  soit  qu'on 
envisage  son  activité  par  laquelle  il  se  révèle  toujours 
essentiellement  juste  :  en  appréciant  chaque  action 
selon  sa  valeur  morale,  111,32,35;  xn,  2;  en  se  consti- 
tuant le  protecteur  des  faibles  contre  ceux  qui  pou- 
vaient abuser  de  leur  force  à  leur  égard,  xxn,  23;  en 
poursuivant  le  pécheur  et  en  rétablissant  par  le  châti- 
ment l'équilibre  moral  ébranlé  par  sa  faute,  xv,  25; 
xvi,  5;  en  récompensant  le  juste  dont  il  est  le  défenseur, 
m,  5,  10.  —  d)  Sa  providence,  soit  au  sens  philosophi- 
que du  mot,  on  la  constate  s'exerçant  dans  le  monde 
par  une  action  incessante  à  l'égard  de  l'homme  comme 
par  rapport  aux  nations,  xvi,  4;  VIII,  15-16;  soit  au 
sens  de  protection  spéciale,  il  est  la  source  du  bonheur 
pour  quiconque  se  confie  en  lui,  spécialement  pour  le 
juste,  xvf,  20;  xvm,  lO.etpour  ceux  qui  sont  faibles  et 
abandonnés:  orphelins,  veuves,  etc.,  xv,  25;  xxm,  10- 
II.  —  e)  Sa  bonté  qui  se  manifeste  même  quand  il 
châtie  celui  qu'il  aime,  ni,  12. 

lu.  L'HOMME.  —  A)  Sa  constitution.  —  a)  Consti- 
tution p/ii/sique.  —  L'homme  se  compose  d'un  corps  et 
d'une  àme.  Lame  [néfêS]  est  le  principe  de  la  vie  phy- 
sique et  morale;  le  siège  de  la  pensée  et  des  passions, 
xxm,  7;  xi,  25.  Souvent  c'est  le  cœur  qui  est  donné 
comme  agent  de  la  connaissance,  xv,  14;  xvi,  1,  tandis 
que  la  vie  effective  de  l'âme  est  manifestée  par  le  tres- 
saillement des  entrailles,  xxm,  16.  —  b\  Constitution 
morale  :  il  est  un  être  libre  qui  a  des  commandements 
à  observer  et  qu'il  peut  ne  pas  garder  ;  tout  le  livre 
suppose  celle  liberté;  de  là  la  constatation  de  sa  res- 
ponsabilité et  la  note  caractéristique  de  l'insensé  :  il  a 
méconnu  les  conseils  de  la  sagesse,  i,  24.  —  c)  Dépen- 
dance de  Dieu,  dans  sa  vie  corporelle  :  membres,  con- 
servation de  la  vie.  etc.,  xx,  12;  dans  sa  vie  morale  : 
décisions,  conseils,  etc.,  xvi,  9;  xix,  21;  dans  son 
bonheur,  x,  22.  —  d)  Destinée.  Les  Proverbes  ensei- 
gnent que  tout  n'est  pas  fini  pour  l'homme  avec  la  vie 
présente,  ils  connaissent  et  affirment  la  doctrine  de  la 
survivance,  mais  ils  en  parlent  peu  et  leurs  expressions 
sont  assez  indéterminées.  Ce  qu'ils  nous  rappellent  à 
ce  sujet,  c'est  que  tous  les  morls  descendent  au  ùe'ol, 
rendez-vous  universel  de  tous  les  hommes  où  la  vie 
csl  transformée  en  une  sorte  de  léthargie,  goufi're  pro- 
fond situé  dans  les  parties  inférieures  de  la  terre,  i.  12; 
ii.  15,  séjour  immense  dont  la  science  parfaite  de  Dieu 
peut  seule  avoir  une  connaissance  complète,  xv.  11. 

Il\  L'homme  dans  sa  vie  morale.  —  1°  Morale  gé. 
nérale.  —  1.  C'est  Dieu  qui  est  le  principe  et  le  fon- 
dement  absolu  de  toute  la  morale,  xvi,  11;  xx,  24, 
connue  de  l'homme  par  la  parole  même  de  Dieu  ou 
par  des  intermédiaires  :  parents,  sages.  —  2.  L'idéal 
moral,  c'est  l'acquisition  de  la  Sagesse  qui  consiste 
dans  la  crainte  de  Dieu,  c'est-à-dire  la  haine  du  mal  et 
la  poursuite  de  la  sainteté,  i,  7;  vin.  13.  —  3.  L'obser- 
vation de  la  loi  morale  est  obligatoire  pour  l'homme, 
il  en  est  le  sujet  et  il  y  a  mal  moral  pour  lui  à  agir 
autrement,  xiv.  21;  xvi,  17,  et  il  n'aura  même  sa  véri- 
table valeur  d'homme  que  dans  la  mesure  où  il  s'y 
montrera  fidèle;  d'ailleurs  la  sagesse  est  accessible  à 
quiconque  la  recherche,  elle  s'offre  à  qui  veut  la 
trouver,  I,  20,  VIII,  1  sq.  ;  ix.  3  sq.  ;  —  4.  La 
méthode   morale  à  employer  (ou  les  dispositions  inté- 


rieures requises)  pour  l'acquisition  de  la  Sagesse  con- 
siste dans  une  recherche  sincère  accompagnée  de 
beaucoup  d'oubli  de  soi-même  et  de  détachement,  il. 
3  sq.,  iv.  7-8;  vu,  4;  d'humilité  et  de  défiance  de 
soi-même,  m,  517;  d'application  à  la  pratique  de  la 
justice  avec  tendance  constante  à  la  perfection,  xx,  9. 

—  5.  La  vie  morale  ne  consiste  pas  dans  des  obser- 
vances purement  extérieures,  même  excellentes  comme 
les  sacrifices,  xxi,  3,  mais  dans  la  crainte  de  Dieu,  la 
pratique  de  toutes  les  vertus  et  l'accomplissement  des 
diverses   prescriptions  concernant   Dieu,   le  prochain 

ou  soi-même.  C'est  une  vie  spéciale  qui  réclame  mê 

des  actions  plus  qu'ordinaires,  par  exemple,  les  préve- 
nances à  l'égard  des  ennemis,  xxiv.  17,  et  où  le  fond 
essentiel,  c'est  l'intention,  xvi,  30;  xxi,  27.  Elle  com- 
porte une  grande  maîtrise  de  soi.  manifestée  surtout 
au  moment  des  difficultés,  i\.  -23.  —  0.  La  sanction  de 
cette  vie  morale  se  manifeste  ordinairement  dans  la 
vie  présente  et  peut  être  envisagée  avec  ou  sans  une 
intervention  immédiate  de  Dieu.  Dans  le  premier  cas, 
comme  récompense,  c'est  en  particulier  l'amitié  de 
Dieu,  l'intimité  avec  lui  puisqu'il  «  communique  ses 
secrets  aux  cœurs  droits  »,  m,  32;  vin,  17,  35'';  xn,  2a, 
c'est  la  santé  et  l'abondance  des  biens,  ni,  8,  10;  c'est 
la  prolongation  des  jours  et  la  descente  au  se'ôl  re- 
tardée le  plus  longtemps  possible,  x,  27;  c'est  le  bon- 
heur et  la  stabilité  dans  le  bonheur  assurés  par  Dieu, 
m,  331' :  xix,  23;  —  le  châtiment  se  présente  dans  des 
conditions  analogues,  m.  33';  c'est  l'arrivée  subite  de 
la  ruine  pour  l'homme  méchant,  vi,  15,  c'est  le  nombre 
de  ses  années  abrégé,  c'est  à  la  (leur  de  l'âge  qu'il 
descend  ausëol,  x,  27;  si  une  affliction  transitoire  peut 
atteindre  le  juste,  il  s'en  relève,  il  n'en  est  pas  ainsi 
de  l'impie,  xxiv.  16.  Sans  mention  de  l'intervention 
immédiate  de  Dieu;  c'est  la  paix  et  le  bonheur  accom- 
pagnant ordinairement  la  vertu,  i.  33;  n,  7;  vm,  35», 
quant  au  péché,  il  se  punit  lui-même,  car  souvent 
l'homme  est  puni  par  où  il  a  péché,  i,  19,  32,  v,  22.  — 
Un  autre  genre  de  sanction  souvent  exprimée  est  celle 
qui  récompense  ou  châtie  l'homme  dans  sa  postérité, 
les  enfants  du  juste  participant  aux  bénédictions  dont 
il  avait  bénéficié,  tandis  que  le  pécheur  fait  partager  à 
ses  descendants  la  malédiction  qu'il  avait  attirée  sur 
lui,  xm.  22;  xx.  7.  —  Les  proverbes  mentionnent, 
bien  qu'un  peu  obscurément,  une  relation  entre  la  vie 
présente  et  les  conditions  de  la  vie  future  envisagée 
comme  sanclion,  xi,  4:  cf.  xu,  28. 

2"  Morale  spéciale.  —  a)  Devoirs  envers  Dieu.  Les 
principaux  sentiments  qui  doivent  animer  l'homme 
dans  ses  rapports  avec  Dieu  sont  :  la  crainte,  entendue 
spécialement  comme  exprimant  l'idée  de  religion,  i,  7, 
la  confiance,  m,  4,  la  délicatesse  de  conscience  qui  ne 
présume  pas  trop  facilement  de  sa  perfection,  xx,  9; 
xxviii,  14.  Ces  dispositions  se  manifestent  par  une 
fidèle  obéissance  à  toutes  les  prescriptions  de  Dieu, 
m,  9-10;  xix,  18,  qui  n'a  de  valeur  que  si  elle  est 
accompagnée  de  la  justice  intérieure,  xxi,  3.  27. 

b)  Devoirs  envers  le  prochain.  —  Ils  sont  prescrits  par 
Dieu  et  fondés  sur  la  nature  des  choses.  Les  prin- 
cipaux devoirs  sur  lesquels  on  insist.-  spécialement 
sont  tout  d'abord  :  la  justice  ion  y  revient  très  souvent 
dans  le  livre)  dans  les  transactions  commerciales,  XI,  1  ; 
xx,  10,  23,  dans  les  jugements,  xvn.  15.  23.  aussi  bien 
que  dans  le  respect  du  bien  d'autrui.  XXII,  28:  xxm. 
10;  —  la  charité  dans  ses  différentes  formes  :  aimer  et 
secourir  les  déshérités  de  la  fortune,  car  Dieu  a  fait 
le  pauvre  comme  le  riche  et  il  veut  qu'on  aime  les 
pauvres;  ainsi,  donner  aux  pauvres  c'est  prêtera  Dieu. 
xiv,  31;  six,  17;  xxn,  20;  —  s'intéresser  à  ceux  qui 
ignorent  la  Sagesse  en  les  instruisant,  xv.  7;  xv.  23; 

—  surtout  en  oubliant  et  en  pardonnant  les  injures 
xix.  11,  car  c'est  à  Dieu  seul  de  faire  justice,  xx,  23, 
ne  pas  même  se  contenter  de  ne  se  point  réjouir  du 


799 


PROVERBES    (LIVRE    DES) 


800 


malheur  d'autrui.  même  s  il  ost  notre  ennemi,  xxiv, 
17.  mais  encore  lui  faire  du  bien. 

Si  ton  ennemi  a  faim,  donne-lui  du  pain  à  manger, 
S'il  a  soif,  donne-lui  de  l'eau  à  boire,  xxv.  21. 

,      Devoii  s  en  me.  —  I  l'une  façon  générale, 

■c'est  d'un  côté,  des  efforts  incessants  vers  le  bien  et 
l'acquisition  de  la  Sagesse,  et  de  l'autre  une  applica- 
tion continuelle  à  fuir  le  mal.  Quelques  vertus  plus 
particulièrement  recommandées  dont  les  caractères  se 
ramènent  aisément  à  ces  deux  idées;  modération  et 
activité  :  l'humilité,  m,  5,  7;  xxvn,  2;  la  chasteté,  il, 
16;  vi.  24-29;  la  tempérance.  xx.  I  ;  xxm.  1-3;  le  déla- 
chement  des  richesses,  xxm,  4-5;  la  modération  et  la 
maîtrise  de  soi,  xvi,  32;  la  droiture  dans  les  actions, 
il.  15;  iv,  26;  l'amour  et  la  pratique  du  travail.  VI,  6- 
II;  x,  4-5.  —  Quelques  vices  et  défauts  plus  spéciale- 
ment signalés  ;  l'orgueil,  vi,  17;  l'impiété  manifestée 
dans  les  dispositions  défectueuses  de  celui  qui  offre 
un  sacrifice,  XV,  8,  ou  qui  fait  des  vœux  précipités,  xx. 
25;  le  faux  témoignage,  la  calomnie,  la  médisance,  xix. 
9,  28;  x.  18;  xvm.  S;  l'humeur  querelleuse  et  la  colère, 
xn,  16;  xvn,  19;  l'impureté  ion  y  insiste  spécialement 
dans  les  cliap.  v  et  vin;  le  mensonge  et  l'hypocrisie, 
XII,  19:  SIX,  22:  l'intempérance  et  la  paresse  signalées 
avec  une  insistance  particulière,  xxm.  29-35;  xxiv,  30- 
34:  xxvi,  13-16. 

d)  Dans  l'ensemble  de  ces  prescriptions,  il  en  est 
quelques-unes  qui  peuvent  provenir  de  l'expérience, 
personnelle  ou  acquise  des  anciens,  ce  sont  surtout 
celles  où  l'intérêt  immédiat  du  sujet  parait  en  cause, 

i m'  l'est  par   exemple  le  conseil   d'éviter  la  femme 

adultère  pour  ne  pas  s'exposer  à  la  vengeance  du  mari 
courroucé,  vi.  32-35;  mais  il  en  est  d'autres  qui  ne 
peuvent  provenir  de  la  même  origine,  car  ils  ne  con- 
sistent pas  uniquement  dans  le  tait  d'une  modification 
ayant  pour  but  d'en  faire  disparaître  les  principales 
imperfections,  mais  bien  dans  une  transformation  ra- 
dicale qui  ne  peut  avoir  que  l'Esprit  de  Dieu  comme 
principe,  ainsi  les  conseils  de  chasteté   par   rapport  à 

i  courtisane,  là  où  il  n'y  a  plus  les  inconvénients 
signalés  à  propos  de  l'adultère,  v,  20:  VI,  24;  ainsi  les 
conseils  concernant  l'attitude  à  garder  vis-à-vis  du 
pauvre,  quand  la  tendance  naturelle  porte  l'homme 
fortuné  i  abuser  de  sa  situation  par  rapport  aux  des- 
hérités  de  la  fortune  si  ses  intérêts  l'y  engagent,  sur- 
tout vis-à-vis  de  l'ennemi  quand  la  vengeance  parait 
si  naturelle  au  cœur  de  l'homme,  xix,  17;  xxv.  21. 

C'est  par  une  lidélité  ponctuelle  et  continuelle  que 
l'homme  deviendra  juste,  car  si  la  sagesse  est  la  con- 
naissance des  règles  de  l'activité  humaine  telle  que 
Dieu  veut  qu'elle  l'exerce,  la  justice  consiste  dans  la 
mise  en  pratique  des  règles  et  des  prescriptions  élabo- 
iiu  proposées  par  la  Sagesse.  Les  Proverbes  insis- 
tent beaucoup  pour  montrer  que  cette  sagesse  n'est 
pas  innée  en  nous  et  que  d'ailleurs  l'homme  se  fait 
très  aisément  illusion  sur  ses  intérêts  même  les  plus 
immédiats,  xvi,  25,  de  là,  l'impérieuse  nécessité  de 
l'éducation  pour  former  le  juste  qui  doit  se  constituer 
le  disciple  de  ceux  qui  sont  les  intermédiaires  de  Dieu 
pour  lui  faire  connaître  la  Sagesse. 

iv.  i..\  i  amii.i.i ■■:.  —  Plusieurs  points  sur  ce  sujet  sont 
l  ■  1 1 1  ^  particulièrement  intéressants  à  noter.  —  1.  Im- 
portance de  l'épouse  vertueuse  dans  l'intérêt  de  la 
maison,    Ml,   i;    xiv.    1».    aussi   l'homme    ne  saurait-il 

apporter  trop  de  si lan:  le  choix  de  celle  qui  devra 

être  -;i  compagne,  xvm,  22,  Le  portrait  de  la  femme 
forte,    xxxi,    10-31,    énumère   avec  complaisano 

services  que  le  mari  peut  attendre  d'uneépouse 

hoisie,   en   même   temps   qu'il    indique  quelles 

qualités  sérieuses  il  I.hiI  rechercher  pour  que  ce  choix 

âge  el  éclairé;  une  épouse  de  ce  genre  doit  être 

considérée  comme    un   don  de  Dieu,   Xix,    li;    —   par 


contraste,  le  Sage  ne  manque  pas  de  rappeler  fréquem- 
ment quels  maux  peut  attirer  sur  une  maison  l'épouse 
dépourvue  de  ces  qualités.  Il,  16-18:  xn,  i;  xiv.  !'•.  — 
2.  Le  premier  devoir  du  mari  c'est  la  fidélité  conjugale, 
aussi  lui  est-il  recommandé,  avec  une  insistance  signi- 
ficative, de  se  garder  avec  soin  de  toute  relation  cou- 
pable avec  la  femme  étrangère  et  corrompue,  en  même 
temps  qu'on  lui  rappelle  toute  la  gravité  de  l'adultère, 
v,  15-23;  vi,  25.  29,  32-33.  -  3.  Parmi  les  devoirs  des 
parents,  l'éducation  des  enfants  attire  tout  particuliè- 
rement l'attention  du  Sage,  il  reconnaît  l'autorité  du 
.  père  et  de  la  mère  en  cette  matière  et  indique  le  res- 
pect et  l'obéissance  que  les  enfants  doivent  également 
à  l'un  et  à  l'autre,  i,  8;  vi,  20;  il  signale  toute  l'impor- 
tance, xxii,  6.  15;  xxix.  17.  et  les  principaux  caractères 
de  cette  éducation,  insistant  spécialement  sur  la  fer- 
meté qu'on  doit  y  employer,  xm,  21;  xxiv.  13  non 
toutefois  sans  recommander  de  tenir  compte  des  ten- 
dances particulières  de  l'enfant,  xxn.  11:  c'est  d'ailleurs 
l'intérêt  des  parents,  car  la  conduite  de  leurs  enfants, 
résultat  de  l'éducation  reçue,  leur  sera  une  cause  de 
bonbeur  ou  de  malheur,  x,  I  ;  XVII,  25;  xxm,  24-25.  — 
i.  L'enfant  doit  montrer  une  lie-  grande  docilité  à 
l'égard  de  ses  parents;  il  leur  doit  un  égal  respect  qui 
ne  diminue  nullement  avec  l'âge.  VI,  20:  xxm.  22;  il 
trouvera  le  bonheur  dans  celle  attitude,  IV,  10,  tandis 
que  les  menaces  s'accumulent  contre  le  Mis  insensé  et 
indocile,  xix.  26;  xx.  20;  xxx.   17. 

i .  i.a  SAGESSE.  —  1»  D'une  façon  générale,  science  par- 
laite,  propre  à  Dieu  et  communiquée  par  lui  aux 
hommes;  elle  se  présente  sous  différents  aspects.  — 
a)  Une  conception  humaine  de  la  sagesse,  dont  les  traits 
caractéristiques  sont  :  une  certaine  habileté,  i.  5;  une 
grande  facilité  de  discernement,  i,  i.li;  une  prudence 
pratique  ou  n  expérience  »  qui  donne  la  science  de  la  vie, 
m,  2:  xiv.  8.  —  b)  Une  conception  religieuse,  considérée 

i une  distincte  de  l'habileté  naturelle  et  impliquant  la 

crainte  de  Dieu.  i.  7,  l'amour  de  Dieu,  l'accomplisse- 
ment du  culte  el  l'exécution  de  la  loi.  m.  9,  et  comme 
telle,  source  de  bénédictions  divines  et  principe  de 
l'acquisition  el  de  la  pratique  de  la  vertu  et  faisant  de 
celui  qui  la  possède  a  l'homme  juste  t,  vin,  13:  xxx,  3. 
—  L'acquisition  de  la  sagesse  par  l'homme  est  donnée 
comme  une  chose  ardue,  elle  lui  serait  presque  impos- 
sible, si  elle  ne  s'offrait  elle-même  à  qui  la  recherche,  vin. 
13;  ix,  3,  et  si  en  définitive  elle  n'était  communiquée 
par  Dieu  soit  indirectement  par  des  intermédiaires] 
soit  surtout  directement  comme  un  don  que  lui  seul 
peut  faire,  car  elle  est  plus  que  la  simple  totalité  de 
r  i  expérience  [personnelle  et  des  anciens);  s."  pos- 
session est  vraiment  un  duo  de  Dieu,  il,  li.  —  e)  Con- 
ception d'une  sagesse  absolue  et  universelle  ;  —  elle 
nous  est  montrée  comme  s'adressant  à  tous,  i.  20-33  ; 
vin,  2,3;  ix,  3;  elle  se  trouve  dans  l'ordre  général  d" 
monde  qui  la  manifeste,  m,  19-20;  on  lai  i    encore 

dans  le  gouvernement  politique  de  l'humanité,  vu. 
15-16.  —  (')  La  Sagesse  considérée  en  elle-même.— et)  Son 
origine;  elle  vient  de  Dieu  dès  l'éternité  et  avant 
toutes  choses.  VIII,  22-2:'..  —  v  Sa  nature;  I  °  attribut 
de  Dieu,  en  qui  elle  réside,  qui  la  possède  éternelle* 
ment  et  dont  elle  fait  les  délices,  m.  19;  vin,  22-31. — 
2-  hypostase  :  son  activité  coopératrice  dans  la  création, 
.ni-  2H;  son  amour  pour  les  hommes,  elle  leur  sert  de 
médiatrice  auprès  de  Dieu,  VIII,  31,  c'est-à-dire  qu'elle 
-e  présente  avec  les  trois  caractères  suivants  :  nature 
transcendante,  personnification  nettement  accentuéi  la 
tradition  catholique  y  voit  une  personnalité  réelle  et 
distincte!,  possibilité  et  désir  de  se  communiquer  aux 
hommes,  que  le  progrés  de  la  révélation  accentuera  île 
plus  en  plus  et  qui  trouveront  leur  exposition  compi  te 
dans  le  prologue  du  IV'  Évangile.  Voir  dans  .1.  Corluy, 
La  Sagesse  dans  l'Ane.  Test.  {Congr.  scient,  des  cath., 
1888,  t.  i,  p.  61-91),  un  tableau  comparatif  des  don 


SOI 


PROVERBES    (LIVRE    DES)    —    PROVIDENCE 


802 


de  saint  Jean,  i,  et  des  Proverbes,  vm,  ainsi  que  de  l'Ecclé- 
siastique, xxiv,  et  de  la  Sagesse,  vu-vin).  —  La  liturgie 
catholique  fait  une  application  particulière  de  vm, 
22-31,  à  la  très  sainte  Vierge. 

XIII.  Bibliographie  pf.s  Proverbes.  —  /.  texte  bt 
versions  ANClEli  ves.  —  '  R.  Grey,  The  Boni:  of  Proverbs 
divided  according  lo  the  mètre,  mith  Notes,  Londres, 
1738;  'J.  A.  Dathe, Prolusio  de  ralione  consensus  vers, 
chald,  el  syriacie  Prov.  Salom.,  Leipzig.  1764,  étude 
publiée  par  Rosenmûller,  dans  Opuscula  ad  crisin  el 
interpretationem  V.  T.  spectantia,  181  4;  'L.  Vogel. 
Observât,  crit.,  addition  à  Vers,  integ.  Prov.  Salom., 
de  A.  Schultens,  Halle,  1769;  '  J.  G.  .laeger,  Observatioues, 
in  Prov.  Salom.,  versionem  Alexand.,  Leipzig,  1788; 
'.1.  G.  Dahler,  Animadversiones  in  cap.  i-xxiv  vers. 
grascie  Prov.  Salom.,  Strasbourg.  17S6  ;  '  V.  de  Lagarde, 
Anmerkungen  zur  griecliisrheu  Uebersetzung  der  Pro- 
verbien.,  1863;  'S.  Baer,  Liber  l'roverbiorum  (texte 
massorétique),  avec  préface  de  Frz.  Delitzsch,  Leipzig, 
1880;  '  J.  Dyserinck,  Krilische  Scholiën  bij  de  vertaling 
ran  lie!  bock  der  Spreuken,  Leyde,  1883;  '11.  Grâtz, 
Exegetische  Sludien  :u  dcn  Salom.  Sprûchen,  dans 
Monatsschrif.t  fur  Gesch.  und  Wissenschaft,  des  Juden- 
thums,  1S81,  p.  -289,  337,  414.  433;  et  notes  critiques 
sur  les  chap.  i-xxn,  dans  Emendationes,  Breslau, 
1893,  p.  30;  '11.  Oort,  Spreuken  i-ix,  dans  Theol. 
tijdschrift,  Leyde,  1885,  p.  379;  'A.  J.  Baumgartner. 
Étude  critique  sur  l'état  du  le.rle  du  livre  des  Pro- 
verbes d'après  les  principales  traductions  anciennes, 
Leipzig,  1890;  '11.  P.Chajes;  Proverbia-Sludien  zu  der 
sogenannten  Salomonischen  Sammlung,  c.  x-xxm,  16, 
Berlin,  1899;  '  E.  Kautzsch,  The  Book  of  Proverbs,  dans 
Tlie  sacred  Books  of  the  Old  Test.,  édit.  par  P.  llaupt, 
Leipzig,  1901;  "G.  Wildeljoer,  De  Tijdbepaling  van  het 
Boek  der  Spreuken  dans  Verslagen  en  Mededeelingen 
der  konink.  Akad.  van  Wetenschappen,  Amsterdam, 
1899,  p.  233. 

;/.  COMMENTAIRES.  —  Outre  ceux  qui  ont  été  déjà 
nommés  dans  le  cours  de  l'article  :  '  H.  Deutsch,  Die 
Sprûche  Salomo's  nach  der  Au/jassung  im  Talmud 
und  Midrasch  dargestellt  und  krilisch  untersucht, 
1885;  S.  Ilippolyte,  In  Proverbia  (fragments),  t.  x, 
col.  615-628;  Origene,  E!ç  -rà;  ïtapo'|jua;  Xa'/.op.u>v'o; 
(fragments),  t.  xm,  col.  17-34;  S.  Basile,  llom.  xn,  In 
Principium  Proverb.,  t.  xxxr,  col.  385-424;  Bidyme 
d'Alexandrie,  fragments  d'un  comment,  sur  les  Pro- 
verbes, t.  xxxix,  col.  1621-1646;  Procope  de  Gaza,  'Ep|iv)- 
VEtot  si;  -x;  7t»poip.ca;,  t.  lxxxvii,  l™parl.,  col.  1221-1544; 
Supplément,  t.  lxxxvii,  2e  part.,  col.  1779-1800  ;  Salonius, 
évéque  de  Vienne.  In  Parabolas  Salomonis  expositio 
mystica,  t.  lui,  col.  967-994;  Bède,  Super  parabolas 
Salomonis  allegorica  expositio,  t.  xci,  col.  937-1010,  suivi 
du  De  muliere  forti  libellas,  col.  1040-1052,  également 
suivi  de  In  Prov.  Salom.  allegoricse  interprelationis 
fragmenta  fcliap.  vu,  xxx,  xxxi,  xxvn.  col.  1050-1060; 
R.  Maur,  Expositio  in  Prov.  Soi.,  t.  exi,  col.  679-792; 
U.  llolkotb,  Prselect.  in  lib.  Sap.,  1481;  in  Proverbia, 
Paris,  1515;  S.  Munster,  Prov.  Salom.  juxta  heb.  ve- 
ritalem  translata  et  adnotat.  illustrata,  Bàle,  1525; 
Cajetan,  Parabolx  Sal,  ad  verilatem  ebra'uam  casti- 
galx  et  enarratse,  Lyon,  1545;  .1.  Arboreus,  Comm.  in 
Prov.  Sal.,  Paris,  1549;  R.  Bayne,  Comm.  in  Prov. 
Sal.,  Paris,  1555;  Cornel.  Jansenius,  de  Gand,  l'ara- 
phrasis  et  adnolationes  in  Prov.  Sal.,  Louvain,  1569, 
•I.  Mercerus,  Comm.  in  Salomonis  Proverbia,  Genève, 
1573;  Th.  Cartvvrïght,  Comm.  succincti  et  dilucidi  in 
Prov.  Salom.,  Leyde,  1617;  Fr.  de  Salazar.  Expositio  in 
Prov.  Salom.,  tam  litteralis  quant  moralis  et  alle- 
go.ïca,  2  in-f»,  Paris,  1619-1621;  Bobl,  Elhica  sacra, 
sive  comment,  super  Prov.  Salom.,  publié  par  G.  Witz- 
leben,  Rostock,  1640;  J.Maldonat,  Scholia  in  Psalmos, 
Proverbia,  etc.,  Paris,  1643;  A.  Agellius,  Comment,  in 
Proverbia,  Paris,  1611;  Vérone,   1649;  Coin.  Jansenius 

D1CT.    DE   LA  BIBLE. 


d'Vpres,  Analecta  in  Prov.,  Louvain,  1644;  M.  Geier. 
Proverbia  regum  sapienlissimi  Salomonis  cum  cura 
enucleala,  Leipzig,  1653,  1688,  1725;  Bossuet,  Libri 
Salom.  Prov.,  Éccl.,  Paris,  1693;  '  C.  B.  Micbaelis, 
.Vote  Ùberiores  in  Prov.  Salom.,  dans  Annotât,  uber. 
in  Hàgiogr.  V.  Test,  libros,  Halle,  1720;  "A.  Schultens, 
Proverb.  Salomonis  versionem  intégrant  ad  Hebrœum 
fontem  expressit  atque  commenlarium  adjecit,Uége, 
1<  48;  '  L.  Nagel,  Die  Spniehwiirter  Salomon's  itm- 
schrieben,  Leipzig,  1767;  M.  F,  llirts,  Vollstàndigere 
Erklàrung  der  Sprûche  Salomons,  Iéna,  1768;  ,1.  D.  Mi- 
cbaelis, Uebersetzung  der  Sprûche  und  des  Predigers 
Salomons  mit  Anmerkungen  fur  Ungelehrte,  Gœtlin- 
gue,  1778;  'J.C.  Dœderlein,  Sprûche  Salomon's.  h'en 
ûberselzt  mit  kurten  erlâutemden  Anmerkungen, 
âltdorf,  1778,  1782,  1786;  '  B.  Hodgson,  The  Proverbs 
ofSal.  trauslaled  front  the  Hebrew  with  notes,  Oxford, 
1788;  'C.  L.  Zie^ler,  Neue  Uebersetzung  der  Denk- 
sprûche  Sal.  un  Geisl  der  Parallèle»,  mit  einer  volls- 
lândigen  Einleilung,  philologischen  Erlàuterungen 
und  praklischen  Anmerkungen,  Leipzig,  1791; 
"  C.  G.  llenslers,  Erlàuterungen  des  ersten  Bûches 
Samuels  und  der  Salom.  Denltsprûche,  Hambourg  et 
Kiel,1796;  'G.  Holdens,  Atlempt  towards  an  improved 
translation  of  the  Prov.  of  Salom.  from  the  original 
Hebreiu;  with  noies  critical  ami  explanalory,  and  a 
preliminary  dissert.,  Londres,  1819;  '  C.  Umbreit,  Phi- 
lolo g. -krilisch  und  philosoph.  Commentai-  uber  die 
Sprûche  Sal.,  Heidelberg,  1826;  '  Maurer,  Comment. 
gram.  crilic.  in  Proverbia,  1841;  '  R.  Noyés,  New 
translation  of  tlie  Prov..  1846;  '  E.  Bertheau,  Die. 
Sprûche  Salomo's,  Leipzig,  1847,  revu  par  W.  Nowaefc, 
Leipzig,  1883;  'M,  Stuart,  Comm.  on  the  Book  of 
Prov.,  1852;  '  F.  Hitzig,  Die  Sprûche  Salomo's  ûber- 
set:t  und  ausgelegl,  Zurich,  1858;  '  <».  Znekler,  Comm. 
:u  der  Sprûche  Salom.,  Leipzig,  1866:  '  H.  F.  Mùhlau, 
De  proverbiorum  qux  dicunlur  Aguri  el  Lemuelis 
origine  atque  indole,  Leipzig,  1869;  A.  Rohling,  Das 
Salom.  Spruchbucli  ùberselzl  und  erklârt,  Mayence, 
1879;  '  L.  Strack,  Die  Sprûche  Salomo's,  Xordlingue, 
1888,  2»  édit.,  1899;  G.  Frankenberg,  Die  Spritche, 
Gœttingue,  1898.  J.  Marie. 

2.    PROVERBES     (livre    DES),    apocryphe.    Voir 
Apocryphes  (Livres),  3,  t.  i,  col.  772. 

PROVIDENCE  (grec  :  npo-ioix;  Vulgate  :  provi-  . 
dentia),  action  par  laquelle  Dieu  veille  sur  ses  créatures. 
—  L'idée  de  Providence  est  une  idée  abstraite  et  phi- 
losophique, qui  était  familière  aux  Grecs.  Cf.  Hérodote. 
m,  108;  Sophocle,  Œd.  Col.,  1180;  Euripide,  Phen., 
640;  Xénophon,  Memor.,  i,  4,  6,  etc.  Elle  ne  passa 
que  tardivement  chez  les  Latins.  Cf.  Sénèque,  Quiest. 
nat.,  il,  45;  Quintilien,  I,  x,  7;  xn,  19,  etc.  Le  livre 
grec  de  la  Sagesse  est  le  seul  livre  inspiré  où  elle  soit 
exprimée.  L'auteur  dit,  en  parlant  du  vaisseau  qui  (lotte 
sur  les  eaux  :  «  O  Père,  c'est  votre  Providence  qui  le 
gouverne.  »  Sap.,  xiv,  3.  Il  représente  ailleurs  les 
Egyptiens,  pendant  la  plaie  des  ténèbres,  «  fuyant  eux- 
mêmes  votre  incessante  P.-ovidence.  »  Sap.,  xvn,  2.  — 
Les  Hébreux  avaient  à  un  haut  degré  l'idée  de  la  Pro- 
vidence, mais  ils  ne  possédaient  pas  dans  leur  langue 
de  mot  spécial  pour  l'exprimer.  Ils  ne  se  représentaient 
l'action  vigilante  de  Dieu  que  sous  une  forme  concrète. 
Jéhovah  est  le  Dieu  de  l'univers,  mais  en  même  temps 
leur  Dieu  particulier,  qui  prend  soin  d'eux,  les  bénit 
et  les  protège.  Exod..  xix,  5-6;  xxm,  20-33;  Deut., 
xxvil,  1-68,  etc.  Plusieurs  Psaumes  sont  de  véritables 
hymnes  à  la  Providence.  Ps.  IV,  VIII,  xxm  (xxil),  xxvn 

(XXVI),   XI. VI  (XL\).;  LXV  (LXIV),    CIV  (CIIl),    CVII  (CVl),    CXIII 

(exil),  cxxi  (cxx),  etc.  D'autres  célèbrent  l'action  de  la 
Providence  à  travers  l'histoire  d'Israël.  Ps.  lxxviii 
d.xxvii),  cv  (civ);  evi  (cv).  Ces  mêmes  idées  sont  expri- 

V.  -  26 


803 


PROVIDENCE 


PSALTERION 


804 


rnées  sous  Néhémie.  II  Esd..  îx,  6,  31.  Dans  le  Nouveau 
Testament,  la  Providence  est  présentée  comme  le 
Père  céleste,  qui  fait  luire  son  soleil  sur  les  bons  et 
«ur  les  méchants,  Matth.,  v,  45.  et  qui  prend  soin  île 
toutes  ses  créatures.  Matth..  VI,  25-3i.  —  La  Vulgate 
emploie  le  mot  providentiel  dans  plusieurs  passages  où 
il  est  question  seulement  de  prévision  divine,  Judith, 
ix,  5;  xi,  16;  de  prévoyance.  Toh..  ix,  2;  Sap.,  VI,  17; 
ix.  14;  de  connaissance,  Eccle..  v,  5,  ou  de  gouverne- 
ment. II  Mach.,  iv,  G;  Aet..  XXIV,  2. 

H.  Lesètre. 
PRUDENCE  (hébreu  :  (ebûnàh;  Septante  :  oilve<nç, 
ypov^aiç;  Vulgate  :  prudeiilia),  vertu  qui  aide  à  choisir 
ce  qu'il  y  a  de  meilleur  et  de  plus  sage,  pour  y  confor- 
mer sa  conduite.  —  Dans  la  Sainte  Ecriture,  la  pru- 
dence se  confond  fréquemment  avec  l'intelligence  et  la 
sagesse;  c'est  souvent  en  ce  sens  qu'il  faut  entendre  le 
mot  dans  les  versions.  Les  philosophes  platoniciens 
faisaient  de  la  prudence  l'une  des  quatre  vertus  cardi- 
nales; le  livre  de  la  Sagesse,  vin,  7,  se  réfère  à  cette 
classification.  —  La  prudence  vient  de  Dieu,  Prov..  n. 
6;  Bar.,  m.  H.  en  face  duquel  il  n'y  a  en  réalité  ni 
sagesse  ni  prudence,  Prov.,  xxi,  30,  les  qualités  hu- 
maines étant  insignifiantes  auprès  de  ses  perfections. 
Ceux  qui  ont  cherché  la  vraie  prudence  en  dehors  de 
Dieu  ne  l'ont  pas  trouv'c.  Bar.,  ni,  23.  Heureux  qui  a 
acquis  la  prudence,  Prov..  m,  13;  qui  vit  selon  la  pru- 
dence aura  le  bonheur.  Prov.,  xix,  S.  La  prudence  est 
aussi  le  fruit  des  années.  Job.  xii,  12.  Elle  apprend  à 
veiller  sur  ses  paroles,  Prov.,  x,  19,  et  à  ne  pas  attirer 
sottement  l'attention  sur  soi.  Eccli.,  xxi,  23  (20).  Elle 
aide  la  femme  à  trouver  un  mari.  Eccli.,  xxu,  4. 
L'homme  prudent  vaut  mieux  que  l'homme  robuste. 
Sap.,  vi,  I.  Il  plaît  aux  grands,  Eccli.,  xx,  29  (26),  est 
recherché  dans  les  assemblées.  Eccli.,  xxi,  20  (17),  et, 
même  esclave,  sait  s'imposer  aux  hommes  libres.  Eccli., 
x.  28  (24).  —  Notre-Seigneur  recommande  à  ses  dis- 
ciples d'être  prudents  comme  des  serpents.  Matth.,  n. 
16.  Voir  SERPENT.  Il  fait  l'éloge  du  serviteur  prudent, 
toujours  à  son  devoir,  Matth.,  xxiv.  15;  Luc.  xn,  i2.  et 
des  vierges  prudentes,  attentives  à  la  venue  de  l'époux. 
Matth.,  xxv,  2,  i,  9.  Il  remarque  que  les  Mis  du  siècle 
eut  beaucoup  plus  de  prudence,  dans  leurs  affaires 
temporelles,  que  les  fils  de  lumière  dans  leurs  intérêts 
spirituels.  Luc.,  xvi,  18.  Il  remercie  son  Père  de  n'avoir 
pas  réservé  sa  révélation  aux  sages  et  aux  prudents. 
Matth.,  XI,  25:  Luc.  x.  21.  Le  Sauveur  fut  lui-même, 
pendant  toute  sa  vie,  un  admirable  exemple  de  pru- 
dence. Il  la  fit  spécialement  remarquer  dans  sa  réserve 
à  manifester  sa  divinité.  Il  défendait  à  ceux  qui  en 
avaient  quelque  idée,  pendant  sa  vie  publique,  de  dire 
ce  qu'ils  savaient  ou  ce  qu'ils  avaient  vu,  afin  d'empê- 
cher des  manifestations  et  des  oppositions  qui  auraient 
mis  obstacle  à  son  ministère  évangélique.  Il  ne  s'expliqua 
publiquement  à  ce  sujet  que  dans  les  derniers  jours  de 
sa  vie.  alors  qui'  ses  déclarations  devaient  hâter  un  dé- 
nouement, dont  il  avait  lui-même  fixé  l'heure.  Cf.  Lepin. 
./e.wis  Messie  et  Fils  de  Dieu.  Paris,  1905,  p.  365-372. 
—  Saint  Pierre  demande  aux  fidèles  de  se  montrer 
prudents  et  sobres,  afin  de  vaquer  à  la  prière.  I   Pet.. 

iv.  7.  H.  Lesètre. 

PSALTERION,  PSALTÉRIUM  (chai. l'en  :  ,„■- 
sanferïn,  pesanlerïn;  Septante  :  pxXt^piov),  instrument 
île  musique,  composé  d'une  table  d'harmonie  plaie,  en 
forme  de  trapèze  allongé,  portant  un  jeu  de  cordes 
tendu  horizontalement.  Les  Septante  ont  traduit  nébc'l 
par  ixi-.r^wi  exceptionnellement;  la  Vulgate  presque 
toujours  par  psalterium.  Kinnûr  esl  rendu  <|/alT»jpiov 
dans  les  Septante,  Ps.  xi.vni.  5;  exux,  3;  Ezech.,  \xvi, 
13;  par  psalterium,  Vulgate,  Ps.  xivm.  5;  cxlix,  3. 

I.  Nom.  —  ij/aXtijptov,  d'après  -on  i  rymologie,  if/âXXw, 
t   tendre  les  cordes    ,  'I/a).(i6  .      percussion  'les  doigts 


sur  les  cordes  ».  Voir  Van  Lennep,  Etymologicum 
imguse  grsecx,  Utrecht,  1808,  p.  851.  Comparer  mizmôr 
de  zâmar,  voir  Musique,  t.  in,  col.  1137,  qui  désigne 
tout  instrumenta  cordes  joué  par  percussion  manuelle. 
Gevaert,  Histoire  et  théorie  de  la  musique  dans  l'an- 
tiquité, Gand,  1875-1881,  t.  n,  p.  213.  Ce  nom  com- 
prendrait par  conséquent  les  harpes,  lyres,  cithares, 
samhuques,  et  même  les  instruments  à  manches.  11  est 
à  remarquer  que  Varron  et  Athénée  appellent  le  nable 
un  psaltérion  droit,  orthopsalliunx,  •!/a)ïr,piov  opOiov, 
Deipnos.,  1.  IV,  p.  183,  par  opposition  sans  doule  aux 
instruments  de  forme  plaie,  comme  le  psaltérion  pro- 
prement dit.—  Cette  signification  générique  justifierait 
en  quelque  manière  les  auteurs  des  anciennes  ver-ions 
grecques  et  les  commentateurs  ecclésiastiques  latins  et 
grecs,  jusqu'aux  lexicographes  de  la  renaissance,  d'avoir 
traduit  par  iaXttjpiov,  psalterium,  l'hébreu  nébël  et 
même  le  nom  de  la  harpe,  kinnor.  Ezech.,  xxvi,  13. 
Cependant  il  est  préférable  d'admettre  que  par  celle 
interprétation,  ils  nous  ont  représenté,  au  lieu  de 
l'instrument  hébreu,  l'instrument  grec  en  usage  â 
Alexandrie  sous  la  domination  hellénique  et  qui  avail 
remplacé  à  cette  époque  les  anciens  types  d'instruments 
orientaux.  Telle  est  aussi  la  valeur  à  donner  aux  textes 
des  Pères,  qui  différenciaient  la  cithare  du  psaltérion 
par  cette  particularité,  que  la  première  a  sa  caisse 
sonore  à  la  base;  l'autre  au  contraire,  à  la  partie  supé- 
rieure. S.  Basile:  ibaXTqp'.oy  zr,-i  ^yo-Jvav  Byva[juv  It  roâ 
ïvwOev  systv.  In  Ps.  XXXII,  t.  xxix,  col.  328.  Le  Bre- 
viarium  in  Psalmos,  publié  dans  les  œuvres  de  sainl 
Jérôme,  In  Ps.  exux,  t.  xxvi,  col.  1266  :  Psalterium 
similitwlinnm  habel  citharx  sed  non  est  cilhara... 
Cilhara  deorsum  percutilur,  cselerum  psalterium  sur- 
sum  percutilur.  S.  Augustin  :  Psalterium  de  saperiori 
parte  habel  testudinem,  illud'scilicel  tympanum  esl 
concavum  lignum,  eut  chordse  innilentes  résonant. 
Enarral.  in  Ps.  XIII,  t.  xxxvi,  col.  499.  Voir  col.  280, 
671-672,  9110.  1961.  Cassio.lore  :  l'snllerium  esl.  ni 
Hieronymus  ait,  in  modum  A  literie  formait  ligni  su- 
nora  concavitas  obesum  vent  rem  in  superioribus 
habens.  Prsef.  in  Psalt.,c.  iv,  t.  i.xx,  col.  15;  S.  Isidore 
de  Séville,  Etymol.,  m,  22.  t.  i.xxxii.  col.  168;  Bède  le 
Vénérable,  Tnterpretalio  Psalterii,  t.  xcui,  col.  1099. 
L'assimilation  que  ces  auteurs  font  du  psaltérion  au 
nable  provient  de  la  version  des  Septante.  Les  dix  cordes 
du  psaltérion  sont  une  erreur  prise  des  textes  où  il 
esl  en  réalité  question  du  nable  à  dix  cordes.  Voir  NA- 
BLE, t.  iv,  col.  1432.  Le  rapprochement  entre  la  forme 
de  l'instrument  et  celle  du  délia  grec,  A,  loin  d'être 
exclusivement  propre  au  psaltérion,  figurerait  plus 
exactement  les  harpes  antiques,  et  lout  spécialement  le 
trigone.  Voir  Harpe,  t.  m,  col.  i:'i.  lu  somme,  ces 
textes,  où  les  auteurs  s'inspirent  d'un  instrument  de 
musique,  fort  éloigné'  de  l'antiquité  biblique  el  même 
de  la  tradition  hellénique,  ne  nous  fournissent  pas  .le 
renseignements  suffisants  pour  une  identification.  !..  si 
à  l'aide  des  monuments  anciens,  rapprochés  des  Ivp.s 
encore  en  usage  chez  les  Orientaux,  que  nous  polirions 
connaître  le  psaltérion  antique. 

il.  Description  du  psaltérion  antique.  —  Le  troi- 
sième musicien  du  bas-relief  de  Koyoundjik,  lig.  382, 
t.  IV,  col.  1353,  porte  un  instrument  (lig.  183)  dont  la 
forme  rappelle  le  i/am'in  ou  le  sanlir  des  modernes 
Orientaux.  Cette  représentation  montre  en  effet  une 
caisse  plaie,  pourvue  d'ouïes,  avec  un  jeu  de  coi. le- 
tendu  horizontalement.  La  caisse  esl  bombée  à  la  partie 
inférieure  et  se  porte  à  plat  devant  la  poitrine.  Les 
cordes  au  nombre  de  dix,  si  la  sculpture  esl  exacte,  dé- 
crivent une  courbe,  comme  si  elles  étaient  placées  sur 
un  rebord  arrondi  et  tendues  par  des  poids,  t'es  coi 
étaient  peut-être  de  métal,  voir  Botta,  Monument  de 
Ninive,  l.  i,  pi.  62.  et  doublées  pour  augmenter  la  réson- 
nance,  comme  dans  les  instruments  plus  modernes.  Les 


805 


PSALTÉRION 


806 


instruments  de  celte  forme  diffèrent  de  la  liarpe  en  ce 
que  les  cordes  ainsi  disposées  sont  accessibles  sur  une 
seule  face,  tandis  que  dans  la  liarpe  elles  peuvent  être 
touchées  sur  deux  cùtés  par  les  deux  mains.  Ils  diffèrent 
d'autre  part  des  instruments  à  manche  en  ce  que  les 
cordes,  bien  qu'elles  aient  la  même  disposition,  sont  en 
nombre  nécessairement  restreint  dans  ceux-ci,  par  suite 
du  manque  d'espace. 

Comme  les  autres  instruments  originaires  d'Orient, 
le  psallérion,  adopté  par  les  Hellènes  (lig.  184),  retourna 
en  Asie  à  la  suite  des  conquêtes  d'Alexandre;  mais  il  y 
revint  perfectionné  et  sous  un  nom  grec.  Nous  n'avons 
pas  le  nom  hébreu  de  l'ancien  type  asiatique  qui  devint 
le  !/x'/t/,v.'jv.  On  ne  le  trouve  en  effet  que  dans  l'énu- 


183.  —  Musiciens  de  Suse. 
D'îiprès  Place,  Ninive  et  l'Assyrie,  pi.  58. 

mération  des  instruments  babyloniens  de  Nabuchodo- 
nosor,  et  sous  la  transcription    jniMDs,    pesanterin, 

Dan.,  m,  7,  ou  jnnJDS,  pesanterin,  Dan.,  m,  5,  10,  15. 

où  le  changement  de  consonne,  (  pour  n.  n'est  qu'une 
particularité  dialectale  et  où  le  groupe  final  J>  repré- 
sente  la  terminaison  grecque   iov  plus  complètement 

exprimée  dans  la  transcription  syriaque,  a^  A  \  /v>  Q 

pesa^erôn. Toutefois  les  grammairiens  ont  traité  ï'tiûî, 
pesanterin,  comme  un  pluriel  et  consacré  la  forme  du 
singulier  ^r:cr,  pesant êr.  Du  même  mot  grec  les  Arabes 

ont  fait  postérieurement  le  mot  -*k-U*j,  santir,  autre- 
ment pisaniir,  santour.el  les  Syriens  modernes  samtur. 
Le  santir  arabe  et  son  dérivé  le  qanûn  affectent  une 
disposition  pareille  à  celle  de  l'instrument  babylonien, 
mais  sans  doute  moins  primitive.  Le  premier,  dont  le 
nom  rappelle  directement  le  psaltérion  grec,  se  com- 
pose d'une  table  d'harmonie  en  forme  de  trapèze  ou  de 
triangle  tronqué,  portant  trente-six  cordes  de  métal 
retenues  à  une  extrémité  par  des  attaches  et  à  l'autre 
par  des  chevilles  pour  régler  l'accord.  Ces  cordes,  mises 
à  l'unisson  deux  à  deux,  fournissent  dix-huit  notes. 

Le  qanûn,  ^y^i,  xaviôv,  «  règle,  type  ».  offrant  par 
ordre  les  toniques  de  chacun  des  modes  arabes,  est  le 
développement  plus  complet  du  psaltérion.  Il  a  de 
soixante-six  à  soixante-quinze  cordes,  accordées  trois 
par  trois,  et  vingt-deux,  vingt-trois  ou  vingt-cinq  notes. 


F.n  Algérie,  on  ne  lui  donne  parfois  que  soixante-trois 
cordes  et  vingt  et  une  notes.  La  table  de  l'instrument 
est  pourvue  de  sillets  en  os.  à  charnière,  pouvant  se 
lever  pour  régler  l'accord  et  distinguer  certaines  tona- 
lités. Les  cordes  sont  en  boyau,  la  caisse,  en  bois  de 
noyer,  a  3  mètres  de  long  sur  0,40  de  large  et  0,05  de 
haut.  Les  cordes  des  notes  élevées  sont  plus  mine.  -  i  I 
plus  courtes,  et  la  série  tout  entière  va  en  augmentant 
de  longueur  jusqu'aux  notes  graves.  On  accorde  à  partir 
de  la  corde  basse  (ré-2  substitué  à  l'ut  par  les  musiciens 
turcs1  et  par  succession  de  notes  (non  pas  par  quintes), 
la  deuxième  corde  sur  le  premier  sillet,  la  troisième 
sur  le  second  et  ainsi  de  suite.  Le  tvpe  ancien  du 
qanûn  est,  suivant  Al  Farabi,  le  djank  ou  sank.  Land, 


18i.  —  Psaltérion  grec,  d'après  quelques  archéologues. 

Bamneister,  Denkmâler  Oer  klassischen  Altertums,  t.  m, 

p.  1345,  fig.  1G09.  Peinture  du  jardin  Farnèse. 

Recherches  sur  l'histoire  de  la  gamme  arabe,  Levde. 
1884,  p.  52.  74. 

Le  joueur  ne  marche  pas  comme  le  musicien  baby- 
lonien ;  assis  à  terre  ou  sur  un  tabouret  bas,  et  les 
jambes  croisées  à  la  manière  orientale,  il  porte  l'instru- 
ment sur  ses  genoux  écartés  et  l'appuie  contre  sa  poi- 
trine pour  avoir  les  deux  mains  libres.  Il  touche  les 
cordes  au  moyen  de  deux  petits  plectres,  mizdrab,  de 
corne,  de  baleine  ou  de  becs  de  plume,  fixés  dans  des 
anneaux  portés  au  pouce  et  au  médius  de  chaque  main. 
Le  son  du  qanûn  est  fort,  vibrant,  avec  une  résonnance 
étouffée  dans  les  notes  graves,  ie  santir,  aux  cordes  de 
métal,  est  plus  aigu  et  rappelle  la  mandoline.  Le  joueur 
oriental  manie  son  instrument  avec  vivacité,  en  répé- 
tant rapidement  les  notes,  suivant  un  procédé  cher  de 
tout  temps  aux  exécutants  orientaux.  Voir  Fontanes, 
Les  Egypte»,  Paris.  1882,  p.  356-357.  Le  qanûn  a  sup- 
planté le  santir  dans  presque  tout  l'Orient.  Sauf  à  Mos- 
soul,  Bagdad,  Damas,  les  musiciens  des  villes  l'aban- 
donnent aux  exécutants  populaires.  Le  qanûn  de  Da- 
mas est  très  grand,  il  a  cent  sept  cordes  quadruples, 
sauf  la  dernièrequi  est  triple,  et  donne  vingt-septnotes. 
Enfin  les  Persans  ont  gardé  pour  la  musique  de  chambre 
le  santir,  qu'ils  appellent  ceintour.  Il  a  soixante-douze 
cordes  en  cuivre  jaune,  que  l'on  touche  avec  des 
baguettes  d'os  ou  de  métal  appelées  mezrabe.  Advielle, 
La  musique  dur.  les  Persans  eu  1885,  Paris,  1885, 
p.  12-13. 


807 


PSALTÉRION    —    PSAUMES    (LIVRE    DES) 


808 


De  l'Orient,  le  psaltérion,  qui  avait  passe  à  Rome 
SOUS  les  empereurs,  revint  en  Occident  après  les  croi- 
sades. On  l'appela  psaltère,  salière,  de  son  nom 
biblique.  Les  sculpteurs  le  mirent  parfois  aux  mains 
.du  roi  David.  L'instrument  oriental  resta  en  vogue  pen- 
dant tout  le  moyen  âge.  On  en  perfectionna  successi- 
vement la  qualité,  le  mécanisme,  on  en  augmenta  les 
dimensions. Le  Cymbel  hongrois  en  est  une  dérivation. 
Finalement  l'adjonction  de  marteaux  fixes  dépendant 
d'un  clavier  lit  de  l'ancien  instrument  le  piano  mo- 
derne. Mais  le  psaltérion  subsiste  de  nos  jours  sous  la 
forme  de  la  Zither  allemande.  J.  Parisot. 

1.  PSAUMES  (LIVRE  DES),  recueil  de  chants  sa- 
crés des  Hébreux.  Les  livres  historiques  et  prophétiques 
de  la  bible  en  renferment  un  certain  nombre;  mais  la 
plus  grande  partie  de  leurs  chants  religieux  forme  un 
recueil  spécial  désigné  en  hébreu  sous  le  nom  de  ISO 
z-'-~t ,  Sèfér  tehillim ,  V xi  ~.  >  y.'r, .  Psalteritmi,  en  grec  et 
en  latin.  La  désignation  hébraïque  est  transcrite  Dtpap 
0:/.'/.£:u,  (J£6Xoç  'Va/')">v  dans  le  Canon  origénien  en  tète 
du  Commentaire  d'Origène  sur  le  Ps.  i,  t.  xil,  col.  1084, 
et  «  Sephar  thallim,  quod  interpretatur  Voiimen 
IIv.mmiium  »  dans  S.  Jérôme  Prsef.  ad  Sophronium 
in  Ps.,  t.  xxviii,  col.  11-21.  Dans  le  Prologus  galeatus, 
t.  xxviii,  col.  553,  le  même  Père  l'appelle  du  nom  de 
linvitl,  et  ajoute  :  quem  quinque  incisionibus  et  uno 
Psalmorum  volumine  comprehendunt.  La  désignation 
du  même  livre  est  abrégée  dans  les  références  juives 
sous  les  formes  nop,  r?n,  (illim  et  (iili. 

I.  Place  des  Psaumes  dans  i.a  Bible.  —  Ce  livre  se 
trouve  communément  dans  la  Bible  hébraïque  masso- 
rétique  en  tête  des  Ketubim  ou  Hagiographes,  la  troi- 
sième  partie  du  recueil  ;  saint  Jérôme,  dans  son  Epist.  ad 
Paulinum,  t.  xxn.  col.  547,  le  place  de  même;  mais  il 
n'en  a  pas  toujours  été  ainsi  ;  dans  le  Prologus  galeatus, 
l.  XXVIII,  col.  555,  il  le  fait  précéder  de  Job;  la  liste  tal- 
mudique  du  traité  Baba  balltra  le  fait  précéder  de 
Idilh  :  les  manuscrits  hébraïques  espagnols,  des  Chroni- 
ques ou  Paralipoménes.  Quant  au  mot  mnémotechnique 
r.x,  désignant  par  abréviation  les  livres  poétiques  selon 
lesHébreux,  Job,  Proverbes,  Psaumes,  il  donne  préci- 
sément h'  renversement  de  l'ordre  des  manuscrits 
d'Allemagne,  suivi  par  l'édition  imprimée  actuelle.  Les 
Septante  placent  le  Psautier  dans  la  seconde  partie  de 
la  Bible,  en  tête  des  livres  sapientiaux,  mais  là  encore 
on  ne  trouve  pas  d'uniformité  :  VAlexandrinus,  par 
exemple,  le  rejette,  avec  les  autres  livres  sapientiaux, 
après  les  prophètes,  dans  la  troisième  partie.  La  vulgate 
Clémentine  le  place  au  contraire  dans  la  seconde  partie 
après  .lob.  L'habitude  des  auteurs  du  Nouveau  Testa- 
ment de  citer  la  Bible  sous  la  formule  in  Moysi,  pro- 
phétie et  psalmis,  Luc,  xxiv,  41.  permet  de  conclure 
que  de  leur  temps  ce  livre  était  placé  comme  dans  la 
Bible  massorétique,  en  tête  de  la  troisième  partie. 

II.  DIVISION  DES  l'-.vi  mes  EN  CINQ  livres.  —  Le  Psautier 
se  subdivise  en  cinq  livres,  terminés  chacun  par  une 
doxologie  indépendante  du  Psaume  final,  sauf  pour 
le  i  i  n  dernier  :  xi.,  li  ;  i.xxi.  18-20;  i.xxxvm,  53,  et 
dans  l'hébreu  par  une  indication  massorétique.  Saint 
Jérôme  dit  dans  son  Epist.  ad  Sophronium,  t.  xxviii, 
col.  1123  :  Nos  ttebrceorum  auctoritatem  secuti  et  ma- 
xime Apostolorum  gui  sou/ht  in  Novo  Testamento 
Psalmorum  librum  nominant,  union  volumen  asserL 

Mais  parlant  a\er  plus  de  précision  dans  son  Epist. 
xxvi  ad  Marcellam,  l.  xxn.  col.  431,  il  dit  :  lu 
quinque  volumina  Psalterium  apud  Hebreeos  divisum 
est;  également  Epist.  <  ri,  t.  xxn,  col.  1168,  et  dans  le 
Prolog,  galeat.,  t.  xxviii.  col.  553  :  quinque  inci- 
sionibus. La  plupart  des  Pères  anciens  mentionnent 
celle  division  du  Psautier. 

Le  recueil  total  se  subdivise  en  150  morceaux,  d'après 


l'hébreu  actuel,  le  grec  et  la  Vulgate  :  mais  les  anciens 
manuscrits  hébreux  n'étaient  pas  tous  d'accord,  certains 
n'en  comptant  que  149  ou  même  147.  La  séparation  des 
Psaumes  n'étant  pas  indiquée  dans  les  anciens  textes 
hébreux,  comme  en  témoigne  encore  Origène.  et  un 
bon  nombre  de  Psaumes  n'ayant  pas  de  titre,  les  cou- 
pures ont  étépraliquées  quelquefois  très  arbitrairement, 
de  sorte  que,  tout  en  arrivant  au  même  total,  l'hébreu 
d'une  part,  et  les  Septante  et  la  Vulgate  d'autre  part, 
donnent  des  numérotations  un  peu  différentes;  l'accord 
se  maintient  de  i  à  vin  ;  ix  de  l'hébreu  forme  ix  et  x  dans 
les  versions;  xi  a  cxm  de  l'hébreu  correspond  à  x-cxn 
des  versions;  cxivetcxvde  l'hébreu  à  cxm  des  versions  ; 
cxvi  de  l'hébreu  à  exiv  etcxvdes  versions;  cxvn  àCXLVl 
de  l'hébreu  à  cxvi-cxlv  des  versions;  cxi.vn  de  l'hébreu 
donne  CXLVI  et  c.xlvii  des  versions;  enfin  l'accord  est 
rétabli  de  cxlviii  à  cl.  Kn  général  donc  l'hébreu  l'em- 
porte d'une  unité  sur  les  versions.  La  critique  textuelle 
permet  de  constater  que  les  coupures  sont  fautives  en 
nombre  de  cas;  on  a  souvent,  dans  l'original  comme 
dans  les  versions,  joint  des  fragments  qu'il  fallait  séparer, 
par  exemple  cxliii,  1-11  et  1-2-15;  on  a  plus  rarement 
séparé  des  fragments  qui  auraient  dû  être  réunis,  par 
exemplexi.i  etxLit.  Lesauteurs  ecclésiastiques, appuyés 
sur  certains  manuscrits  et  sur  les  variantes  des  Actes, 
xm,  33,  ont  souvent  cité  le  Ps.  n  :  Quare  fremuerunt 
gentes,  avec  la  référence  êv  npiû-rto  4i/.u.m.  Origène, 
Fragm.  in  Psalm.,  t.  xn,  col.  1100;  S.  Hilaire,  In 
Psalm.,  t.  ix,  col.  2(52,  264. 

III.  Noms  des  divers  Psaumes.  —  Les  Psaumes 
portent  des  noms  différents,  qui  indiquent  différents 
genres  poétiques  :  celui  du  recueil  entier  est  ÏSéfér  te- 
liillini,  bien  rendu  parsaint  Jérôme,  Liber  hymnorum, 
exactement  «  Livre  des  louanges  (de  Dieu)  ?  :  le  Ps.  cxi.v 
(CXLivi  est  cependant  le  seul  qui  porte  un  pareil  titre. 
(ehillâh,  xhi'jizjaudatin  ;m\  titre  plus  ancien  nous  est 
donné  pour  une  portion  du  recueil  dans  LXXI,20,  {efillôj ' . 
orationes;  les  Septante  et  la  Vulgate  ont  dû  lire  trliil- 
lof,  car  ils  traduisent  laudes  [David  /ilii  Jesse);  exac- 
tement, «  prières  »';  le  nom  le  plus  courant  est  -r~-~, 

mizmôr,  ■bzl.tj.6;,  psalmus,  c'est-à-dire  :  chant  destiné  à 
être  accompagné  par  les  instruments,  ou  simple  poème 
lyrique  :  de  là  vient  le  tenue  tya).tffii<rt,  psalterium, 
détourné  de  sa  signification  première  t  d'instrument 
à  cordes  »,  pour  signifier  tout  le  recueil,  le  Psautier. 
Kn  hébreu  57  Psaumes  ont  le  titre  de  mizmôr,  mais  il 
y  en  a  davantage  dans  les  versions.  On  trouve  aussi  le 
titre  de  tv.-,  sir,  iu[ia,  û>8iî,   canticum,  hymnus,  qui 

veut  dire  citant,  xvil,  Xl.iv  et  XI  v,  souvent  préposé  (5  l'ois- 
on postposé  (8  fois)  au  terme  mi:môr,  et  traduit  alors 
canticum  psalmi  ou  psalmus  cantici,  mais  apparem- 
ment simple  doublet  provenant  des  variantes  île  diffé- 
rents manuscrits  ;  à  noter  en  outre  spécialement  la  série 
des  Sîrê  ham-ma'àUf,  canticum  graduum,  jiyx  tûv 
àva6a8u,fi>v  ou  ivaëiTswv,  «  cantique  graduel  ou  cantique 
des  montées  »  (du  pèlerinage  liturgique  à  Jérusalem),  de 
CXIX-CXXXIII.  Les  titres  désignent  en  outre  13  maskil, 
'-•"-,  terme  traduit  en  grec  par   les  Septante  trôveeic 

et  par  Aquila  iitKrrrJiiuv,  par  la   Vulgate   intellectus  et 

intelligentia,  parsaint. brome  crutlilin,  dans  le  sens  du 
verset psallite  sapienter,  psaumes  de  forme  artistique, 

beaucoup  ayant  des  strophes  et  des  refrains;  6  miktam, 
ZTZ-,  en   grec  avnXoypafia,  dans  la  Vulgate    tituli    in- 

T  :  * 

scriptio,  la  plupart  munis  d'une  indication  de  mélodie, 
de  l'air  sur  lequel  il  les  faut  exécuter;  enfin  I     w, 
p:ï,  le   Psaume  vu.    traduit   par   les  Septante  simple- 

T    ' 

ment  •ix'iit.o;,  par  Symmaque  et  Aquila  xyior.txx,  àyvo.'i. 
par  la  Vulgate  psalmus  et  par  saint  Jérôme  ignoralit  , 
sorte  d'ode  irrégulière  analogue  au  dithyrambe  avec  vifs 
changements  de  rythme  et  de  pensée.  Voir  tous  ces 
noms.  Il  est  à  remarquer  que  la  valeur  précise  de  ces 


809 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


810 


termes  techniques  s'est  vite  perdue,  on  ne  les  rencontre 
plus  guère  dans  le  cinquième  livre,  et  les  Septante  ne 
savent  plus  les  traduire;  les  Pères  de  l'Église  leur  don- 
nent des  sens  mystiques.  Au  point  de  vue  de  la  forme, 
et  abstraction  faite  des  appellations  anciennes,  il  faut 
distinguer  les  Psaumes  à  simple  parallélisme,  les 
Psaumes'avec  strophes,  ceux  avec  refrain,  et  les  Psaumes 
alphabétiques  avec  ou  sans  strophes. 

IV.  Origine  et  date  des  Psaumes.  —  1»  Collections 
successives  des  Psaumes.  —  L'origine  (auteur  et  date) 
des  Psaumes  est  assez  difficile  à  préciser  dès  qu'on  sort 
des  opinions  extrêmes,  attribuant  l'une  tous  les  Psaumes 
à  David,  l'autre  les  renvoyant  tous  à  l'époque  qui  suit 
le  retour  de  la  captivité.  Théodoret,   Preefat.  in  Ps., 
t.  lxxx,  col.  862,  se  décide  pour  l'attribution  générale  des 
Psaumes  à  David;  cette  opinion,  ajoute-t-il,  est  celle  de 
la  majorité  des  auteurs  ecclésiastiques  :  mais  Origène 
et  toute  son  école  sont  d'avis  différent;  et  c'est  leur  opi- 
nion  qu'exprime   saint   Jérôme,  Epist.   ad  Sophron., 
t.  xxviii,  col.  1123  :  Psalmos  omnes  eorum   testaniur 
auctorum  qui   penunlw    in    titulis,    David  scilicet, 
Asaph  et    Idithun,  filiorum   Cove,  Eman  Ezrahitse, 
Moisi  et  Salomonis  et  reliquorum  quorum  Ezras  uno 
volumine  comprehendit   (opéra).   —   D'autre  part  les 
additions  évidentes  datant  de  la  captivité,  telles  que  les 
deux   derniers  versets    du    Miserere  et  d'autres  ana- 
logues, montrent   bien  que  les  Psaumes  qui   les  ont 
reçues   étaient    d'origine    notablement    antérieure,   et 
s'opposent   à  la  composition   récente  du  Psautier.  La 
division  du   Psautier   en   cinq   livres  nous  donne  une 
chronologie  approximative  des  Psaumes,  pourvu  qu'on 
n'oublie  pas   d'aulre  part  que,   pour  des  raisons  di- 
verses,  les    Hébreux  ont   pu   insérer  dans   un    recueil 
ancien  un   Psaume  ou  un   fragment   plus   récent,  ou 
inversement  ajouter  à  une  collection  récente  un  poème 
plus  ancien.  —  I.   Le  premier  livre   et  une  portion  du 
second  semblent  avoir   formé  le  noyau  primitif  :  les 
Psaumes  y  sont,  par  leur  titre,  attribués  à  David,   ont 
généralement  un  caractère  élégiaque  ou  méditatif  per- 
sonnel et  non  pas  national,  et  trouvent  une  conclusion 
toute  naturelle  dans  Vexplicit  ou  note  finale  du  Ps.  lxxi, 
20  :   Defecerunt    laudes  David   filii  Jesse.  Ce    groupe 
n'est  cependant  pas  d'une  homogénéité  parfaite,  il  ren- 
ferme des   Psaumes   davidiques  en    deux    recensions, 
jéhoviste    et    élohiste,   tels   que   xm  et   lu,  xxxix  et 
lxx,  et  même  un  groupe  lévitique  xli-xi.ix  ;  les  Psau- 
mes î  et  ii  sans  nom  d'auteur  semblent  aussi  avoir  été 
mis  plus  tard  en  tète  du  Psautier  en  guise  de  préface. 
—  2.  Un  second  recueil  a  été  superposé   au  premier, 
d'origine   lévitique,    formant  le   livre   troisième    :   une 
tranche  lévitique  xli-xlix  a  même  pénétré  dans  le  livre 
deuxième,  probablement  par  interversion  des  manus- 
crits; ce   second  recueil  est  nettement  défini  par  les 
attributions  d'auteurs,  xi.i-xlviii  les  fils  de  Coré;  xlix  et 
1.XXU-LXXXII  Asaph;  lxxxiii-i.xxxviii  les  lils  de  Coré; 
par  le  choix  des  sujets  généralement  nationaux,  cultuels 
ou  dogmatiques,  et  par  le  st\  le  plus  soigné,  avec  plus 
de  recherches  d'ornemenls   poétiques,  strophes  et  re- 
frains, indications  techniques  et  musicales.  —  Dans  ces 
deux  recueils  composés  des  trois  premiers  livres,  tout 
ce  qui  a  trait  à  la  captivité  parait  sous  forme  d'antienne 
additionnelle,  la  royauté  davidique  avec  sa  perpétuité, 
l'inviolabilité   du  temple    et  de  la  cité   sainte  y  sont 
nettement  inculquées,  par  conséquent  la  composition  en 
est  antérieure  à  la   première  destruction  de  Jérusalem 
et  à  la  captivité  de  Nabuchodonosor.  —  3.  Au  contraire 
les  quatrième  et  cinquième  livres  donnent  l'impression 
d'une  composition  ou  d'une  compilation  plus  tardive  : 
les  allusions  à  la  captivité  paraissent  non  plus  sous  la 
forme  d'additions,   mais  comme    partie  intégrante  ou 
même  sujet  principal   des  Psaumes   :   le   style    en  est 
aussi   très   différent,   on   y  rencontre    de  ces  longues 
énumérations  ou  des  répétitions    multiples,    alignées 


souvent  en  groupe  ternaire  comme  dans  le  cantique  final 
de  l'Ecclésiastique  dans  le  texte  hébreu,  dans  la  Sagesse, 
dans  le  cantique  deutérocanonique  de  Daniel  ;  les  indica- 
tions techniques  et  musicales  y  font  très  communément 
défaut,  la  plupart  des  Psaumes  sont  anonymes,  et  lès 
emprunts  aux  plus  anciens  y  sont  fréquents;  la  langue 
est  plus  teintée  d'aramaïsme,  ki  pour  k,  pronom  suf- 
fixe de  la  2e  personne  du  féminin  singulier,  w  pour 
Tas,  pronom  relatif  :  beaucoup  ne  sont  que  des  com- 
positions doxologiquesà  l'usage  du  culte  public  et  privé, 
nourries  de  souvenirs  historiques  anciens,  mais  sans 
allusion  aux  événements  contemporains.  On  y  distingue 
même  plusieurs  petits  recueils  particuliers,  les  Hallel, 
le  recueil  des  cantiques  du  pèlerinage  ou  Psaumes  gra- 
duels, le  Ps.  cxviii,  recueil  de  strophes  à  la  louange  de 
la  loi  divine,  et  les  séries  d' Alléluia; l'ensemble  forrnan 
un  groupe  plus  considérable  que  les  autres  livres  a  été 
partagé  en  deux  par  une  doxologie  finale  apposée  à  la 
lin  du  Ps.  cv;  et  l'on  a  oblenu  ainsi  cinq  sections  du 
Psautier,  analogues  aux  cinq  sections  du  Pentateuque 
et  disposées  à  peu  près  dans  leur  ordre  chronologique. 
L'origine  du  recueil  remonte  donc  aux  plus  hautes 
époques  delà  monarchie  juive,  les  plus  beaux  morceaux 
lévitiques  étant  de  la  période  littéraire  d'Ezécbias,  l'exil 
et  le  retour  correspondant  au  quatrième  livre,  le  reste 
s'espaçant  durant  deux  ou  trois  siècles  postérieurs. 

2"  Psaumes  dits  Machabéens.  —  Certains  Psaumes 
descendent-ils  jusqu'à  l'époque  des  Macbabées?  La 
plupart  des  auteurs  modernes  l'admettent  volontiers; 
et  le  contexte  de  Psaumes  tels  que  xliii,  LXXII1, 
lxxviii,  lxxxii,  semble  leur  donner  raison.  Toutefois 
il  faut  se  garder  de  trop  presser  la  conséquence,  car 
en  somme  l'histoire  juive  dans  ses  détails  nous  est  peu 
connue;  les  livres  historiques  de  la  Bible  ne  procé- 
dant que  par  extraits  incomplets  ou  par  référence  à 
des  ouvrages  qui  ne  nous  sont  pas  parvenus,  il  nous 
est  impossible  de  dire  si  les  faits  narrés  par  les  Psal- 
mistes  sont  ceux  de  la  persécution  d'Antiocbus  Épi- 
phane,  ou  ne  datent  pas  d'une  autre  époque,  si  les 
invasions  égyptiennes,  assyriennes  et  babyloniennes 
n'ont  pas  amené  de  grands  massacres;  nos  renseigne- 
ments historiques  sur  la  période  pré-exilienne  tiennent 
en  quelques  pages,  ceux  de  la  période  post-exilienne 
sont  plus  défectueux  encore. 

En  outre,  Henan  a  fait  valoir  contre  les  Psaumes 
machabéens  des  raisons  qui  ne  manquent  pas  de  soli- 
dité et  que  Davidson  a  repris  dans  le  Dictionary  of  the 
Bible  de  Hastings,  t.  iv,  p.  152-153,  contre  les  exagéra- 
tions évidentes  de  llitzig,  Olshausen  et  Cheyne  :  «  (Des 
poèmes  machabéens)  subsistent-ils  dans  le  recueil  actuel 
des  Psaumes?  C'est  un  des  points  sur  lesquels  il  est  le 
plus  difficile  de  se  prononcer  :  l'âme  d'Israël  n'était  pas 
changée,  mais  sa  langue  était  changée,  et  nous  croyons 
que  des  prières  composées  au  temps  d'Antiocbus  ne 
seraient  pas  si  difficiles  à  discerner  des  prières  clas- 
siques plus  anciennes  ;  le  siècle  n'était  pas  littéraire,  la 
langue  était  plate  et  abaissée...  »  Il  ajoute  en  note  : 
«  Les  Ps.  xliv,  i.xxiv,  i.xxix,  lxxxiii  surtout  conviennent 
parfaitement  à  ce  temps  :  mais  après  tout  rien  ne 
s'oppose  à  ce  qu'ils  soient  plus  anciens,  les  'anavîm 
(fidèles)  s'étant  souvent  trouvés  dans  des  situations 
analogues.  Ces  Psaumes  sont  de  la  plus  belle  langue 
classique,  du  style  le  plus  relevé,  souvent  pleins  d'obs- 
curités et  de  fautes  de  copistes.  Or,  la  langue  à  l'époque 
des  Macbabées  était  extrêmement  abaissée,  et  le 
génie  poétique  perdu,  le  style  est  plat,  prolixe  à  la 
façon  araméenne,  n'offrant  jamais  aucune  difficulté 
quand  l'auteur  ne  fait  pas  exprès  de  contourner  sa 
pensée...  Le  Psautier  de  Salomon,  peu  postérieur  aux 
Machabéens,  a-t-il  jamais  pu  être  confondu  avec  les 
Psaumes  davidiques?...  Le  Psaume  qui  parait,  le  plus 
machabaïque,  le  Ps.  i.xxiv,  est  cité  dans  le  premier 
livre  des  Macbabées,  vu,  16-17,  comme  un  vieux  texte 


811 


PSAUMES    (LIVRE    DES] 


812 


prophétique.  »  Histoire  d'Israël,  t.  iv.  p.  316-317. 
Driver,  An  introduction  to  the  Littérature  of  the 
0.  T.,  Edimbourg,  1838,  p.  388,  bien  qu'un  peu  moins 
afiîrmatif,  fait  des  constatations  analogues.  On  peut 
ajouter  à  ces  raisons  littéraires  que  les  idées  des  rétri- 
butions ultra-terrestres  et  messianiques  sont  en  tels 
progrés  dans  les  Psaumes  de  Salomon  qu'on  ne  peut 
supposer  qu'ils  soient  de  la  même  époque  que  les 
Psaumes  canoniques.  Quant  à  l'acrostiche  Simon  (Ma- 
chabée)  obtenu  par  les  initiales  du  Psaume  cix,  1  b,  2, 
3,  4,  suivant  les  indications  de  G.  Bickell,  il  est  pour 
le  moins  fort  arbitraire  et  n'est  nullement  établi. 

Il  semble  donc  que  nous  n'avons  guère  de  Psaumes 
postérieurs  au  m  •  siècle  avant  J.-C.  La  traduction  des 
Septante,  dont  le  Psautier  est  absolument  homogène, 
est  déjà  utilisée  par  I  Mach.,  vil,  16;  l'original  hébreu 
est  déjà  employé  Ps.  ctv,  1-15;  xcv;  cv,  1,  47-48,  par 
!  rédacteur  des  l'aralipomènes  avec  la  doxologie  finale 
du  IVe  livre,  en  transportant  ce  verset  du  sens  original 
optatif,  à  une  application  à  un  passé  historique,  I  Par., 
xvi,  8-36;  or  les  Psaumes  présentés  comme  les  plus 
certainement  macbabéens  sont  antérieurs  à  cette  doxo- 
logie finale. 

V.  Auteurs  des  Psaumes.  —  La  plupart  des  Psaumes 
—  presque  invariablement  ceux  des  trois  premiers 
livres,  au  contraire  exceptionnellement  ceux  des  deux 
derniers  —  portent  en  tête  un  nom  d'auteur,  David 
(73),  Asaph  (12),  les  descendants  de  Coré  [(11),  Salo- 
mon (2),  Héman  (1),  Éthan-Idithun  (4),  Moïse  (1);  la 
formule  fréquente  dans  la  Vulgate.  ipsi  David,  doit 
être  considérée  comme  un  génitif,  et  n'est  que  la  tra- 
duction de  l'hébreu  le-David,  en  grec,  to-j  AaêiS,  ipsius 
David;  l'hébreu  laisse  50  Psaumes  orphelins,  c'est-à- 
dire  sans  nom  d'auteur;  les  versions  n'en  ont  qu'un 
nombre  moindre,  la  Vulgate  n'en  compte  que  3,">,  car 
elles  ont  mis  des  auteurs  à  de  simples  fragments  indû- 
ment séparés  de  leur  contexte,  cf.  xtu,  attribué  à  David, 
quoique  formant  la  troisième  strophe  du  Ps.  xi.i  des  (ils 
de  Coré.  —  Le  l'ait  qu'un  bon  nombre  sont  restés  ano- 
i  i  i  -.  montre  que  les  copistes  n'ont  pas  donné  des  noms 
d'une  façon  arbitraire;  une  seconde  observation,  le 
style  caractéristique  de  certains  auteurs  retrouvé  d'une 
manière  courante  dans  la  plupart  des  morceaux  qui 
leur  sont  attribués,  par  exemple  le  sl\le  élevé'-  et 
souvent  enllé  des  Psaumes  d'Asaph,  la  perfection  litté- 
raire et  poétique  de  ceux  des  fils  de  Coré,  montre  qu'il 
faut  tenir  compte  de  ces  indications.  Beaucoup  sont 
originales  ou  du  moins  ont  été  placées  très  ancienne- 
ment d'après  des  renseignements  traditionnels  ;  il  y 
avait  même  d.-s  traditions  divergentes,  que  l'on  a  re- 

CUI  illies  Simultanément  dans  certains  exemplaires; 
ainsi  s'expliquent  les  indications  contradictoires  trou- 
vées surtout  dans  les  versions  grecques  et  latines,  par 
exemple,  cxxxvi,  attribué  à  David  et  à  Jérémie.  Cer- 
tains de  ces  noms  doivent  aussi  être  considérés  plutôt 
comme  familiaux  que  comme  individuels,  ce  sonl  des 
noms  de  tribu  ou  d'école;  ainsi  Coré  et  Asaph  sont-ils 
appliqués  à  des  époques  1res  différentes,  au  temps  des 
luttes  de  Sennachérib  el  d'Ézéchias,  et  à  celui  de  la 
conquête  de  la  Palestine  par  Xahtichodonosor, 
Ps.  i. XXXII,  XI. m,  XXVIII,  d  une  part  el  d'autre  pari  xi.i. 
mu.  i.xxn.  i  xxix.  i, xxxiv.  Dans  les  cas  douteux,  le 
critique  peut  essayer,  par  les  indices  tirés  du  style,  les 
renseignements  historiques  contenus  dans  le  Psaume, 
les  analogies  de  doctrine  avec  telle  ou  telle  autre  partie 
de  la  Bible,  de  préciser  la  date  de  la  composition. 

I  David.  —  Le  roi  David  est  le  plus  célèbre  des 
I  salmistes  et  c'est  pourquoi  on  a  donné  souvent  son 
nom  à  la  collection  entière.  L'absence  de  préoccupa- 
tions politiques,  la  forme  plaintive  el  élégiaque,  le  ton 
de  pieuse  mysticité  don  grand  nombre  de  Psaumes 
attribués  à  David,  en  opposition  avec  le  caractère  de  ce 
prince  tel  qu  il  parali  se  dégager  des  livres  des  Rois  ou 


des  Paralipomènes,  sont  les  raisons  qu'on  allègue  à 
rencontre  de  la  composition  davidique;  mais  il  faut  se 
rappeler  que  l'énergie,  la  vaillance,  et  même  la  dureté 
à  la  guerre  des  Orientaux  n'empêchent  pas  chez  eux 
un  sentiment  de  soumission,  d'humilité,  de  confiance 
plus  ou  moins  mystique  vis-à-vis  de  la  divinité  :  vis-à-vis 
de  leurs  dieux,  les  prières  ou  psaumes  d'Assurbanipal 
et  d'Asarhaddon  ont  également  un  ton  plaintif  des 
plus  accentués  qui  forme  grand  contraste  avec  le  récit 
qu'ils  font  ailleurs  de  leurs  exploits.  Maspero,  Histoire 
ancienne  des  peuples  de  l'Orient,  les  Empires,  p.  405  ; 
Knudtzon,  Assyrische  Gebele  an  den  Sonnengolt  fi'tr 
Slaal,  p.  72-82;  Lb.  Schrader,  Keilinschriften  und 
Gesehichlsfo/scliung,  p.  519;  Records  of  the  Past, 
new  ser.,  p.  xi-xiii.  Il  faut  en  oulre  se  rappeler  que 
nous  n'avons  des  Psaumes  qu'une  rédaction  liturgique, 
par  conséquent  parfois  généralisée  ou  adaptée  à  des  cir- 
constances différentes,  et  nullement  l'édition  originale  : 
par  exemple  le  Psaume  ix  et  x  de  l'hébreu,  îx  des 
Septante  et  de  la  Vulgate,  en  strophes  alphabétiques 
dans  la  rédaction  primitive,  a  été  amalgamé  avec  un 
autre,  d'un  rythme  différent  et  non  alphabétique,  à  peu 
près  par  moitié  :  on  conçoit  que  le  caractère  primitif 
ait  dû  en  souffrir,  bien  qu'on  ait  retenu  le  titre  de 
Psaume  de  David.  Tout  le  monde  reconnaît  que  les 
deux  versets  ajoutés  au  Miserere  en  changent  notable- 
ment le  caractère  moral  et  historique,  la  finale  suppo- 
sant la  destruction  de  Jérusalem  et  le  grand  prix 
attaché  par  Dieu  aux  sacrifices  liturgiques,  tandis  que 
la  fin  primitive  donne  une  impression  différente.  Le 
Ps.  cxliii  Benediclus  attribué  par  le  titre  à  David, 
abrégé  du  Ps.  xvn,  peut  avoir  un  noyau  davidique, 
que  l'addition  des  V.  12-15  transporte  dans  des  condi- 
tions historiques  toutes  différentes.  Sous  des  réserves 
analogues,  si  les  deux  premiers  livres  du  Psautier 
n'avaient  pas  un  noyau  vraiment  davidique,  on  ne  com- 
prendrait pas  pourquoi,  à  une  date  très  ancienne,  on  y 
aurait  donné  la  finale  :  g  (Ici)  finissent  les  prières  de  David, 
fils  d'Isa']',  »  Ps.  i.xxi,  18-19;  que  du  recueil  ainsi  dé- 
limité ou  de  tout  autre  analogue  le  rédacteur  du  ch.  xxn 
de  II  Reg.  eut  extrait  le  Ps.  XVII comme  document  final, 
suivi  de  ses  novissima  verba,  ch.  XXIII,  de  slyle  sem- 
blable à  celui  de  beaucoup  de  Psaumes  davidiques.  et 
l'eût  nommé  lui-même  egregius  psaltes  Israël,  en  hé- 
breu :  «  aimable  par  les  chants  d'Israël.  »  Le  rédacteur 
du  régne  de  David  dans  les  Paralipomènes  I  Par.,  xvi, 
8-36,  lui  attribue' de  même  les  Ps.  civ,  xcv,  cv  :  tandis 
que  le  prophète  Amos,  vi,  5,  dit  des  habitants  de  Sa- 
marie  el  de  Jérusalem  :  sicut  David  pulaverwit  te 
liabere  vasa  canlivi,  ou  plus  exactement  d'après  l'hé- 
breu :  sicut  David  excogitanl  sihi  vasa  cantici;  1rs 
deux  élégies  conservées  de  lui  sur  la  mort  de  Saiil  el  de 
Jonathas  et  sur  celle  d'Aimer  ne  suffisent  pas  à  justifier 
toutes  ces  appréciations  :  la  réputation  littéraire  de 
Salomon  n'a  pas  suffi  à  lui  l'aire  attribuer  plus  de  deux 
Psaumes,  bien  que  les  rédacteurs  des  Rois  et  des  Para- 
lipomèines  aient  grandement  glorifié  son  œuvre  reli- 
gieuse. 

Ewald  concluait,  d'après  le  critérium  1res  subjectif 
du  goût,  de  l'originalité,  de  la  vivacité'  et  du  coloris, 
de  la  dignité'  et  de  la  noblesse  des  sentiments  exprimés, 
à  l'origine  davidique  des  Ps.  m,  iv,  vu,  XI,  xv  (xiv), 
xvin  (xvn),xix  (XVIII),  1" partie, xxiv  (xxin),xxix  ixxviii), 
xxxu  i xxxn,  ci  (c)  et  d'un  bon  nombre  de  fragments. 
Cette  liste  n'est  pas  définitive;  d'autant  moins  que  cer- 
tains de  es  Psaumes  ou  fragments  davidiques  sont  ré- 
pétés, ou  abrégés,  on  développés,  dans  d'autres  parties 

> 1 1 1  Psautier.  Renan    estime   ancienne  el  davidique  par 

exemple  la  strophe  i.x-i.ix,  8  (14),  répétée  dans  Ié 
Ps,  i  vin  icviii.  Nôldeke  tient  pour  authentique  I  ■ 
Ps.  xvin  xvn)  abrégé  dans  cxxxi  :  or,  la  longueur 
extrême  du  premier  Psaume,  la  description  du  secours 
de  Dieu  sous  l'allégorie  d'une  théophanie  accompagnée 


813 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


814 


de  tempête  et  de  tremblement  de  terre,  sembleraient 

plutôt  faire  incliner  à  un  jugement  contraire   :   is  il 

ajoute,  sans  qu'on  puisse  vraiment  le  contredire  : 
.  Connaissons-nous  donc  si  exaclement  le  style  de 
David?  Est-ce  qu'un  chant  de  fête,  composé  peut-être 
par  un  vieillard,  doit  reproduire  le  stjle  concis  et 
simple  d'une  œuvre  de  jeunesse  comme  l'élégie  sur 
Saù!  et  Jonathan?  >  Th.  Nôldeke,  Histoire  littéraire  de 
l'A.  T.,  trad.  II.  Derenbourg  et  .1.  Soury,  Paris,  1873, 
p.  185-186;  Driver,  op.  cit.,  p.  379.  385.  Enfin  il  est 
certain  que  le  culte  se  développa  en  même  temps  que 
la  royauté,  sous  David  et  Salomon,  et  aussi  sous  l'in- 
fluence extérieure  égyptienne  et  phénicienne,  peut-être 
aussi  dès  lors  assyrienne  ou  babylonienne;  il  dut  donc 
y  avoir  des  chants  religieux  analogues  à  ceux  de  l'Egypte 
et  de  l'Assyrie,  et  il  n'est  pas  vraisemblable  qu'on  les 
ait  laissés  de  coté  plus  tard. 

Il  faut  reconnaître  par  contre  que  ces  traditions  an- 
ciennes de  l'époque  davidique  ont  pu  occasionner  plus 
d'une  attribution  arbitraire,  et  même  évidemment 
erronée  :  par  exemple  les  manuscrits  utilisés  par  les 
Septante  ont  attribué,  comme  d'ailleurs  aussi  la  Vul- 
gate,  une  composition  davidique  au  Ps.  xlii,  Judica  me, 
qui  n'est  qu'une  strophe  détachée  du  Ps.  précédent  non 
davidique;  cf.  aussi  Ps.  cxxxvn,  Super  flumina Baby- 
lonis.  Inversement  le  Ps.  cxxiv,  Kisi  quia  Dominas  eral 
in  nobis,  porte  dans  l'hébreu  une  attribution  davidique, 
que  les  Septante  et  la  Vulgate  ont  justement  laissée  de 
côté,  apparemment  pour  nous  montrer  ce  qu'il  fallait 
faire  en  présence  du  caractère  si  évidemment  post- 
exilien  d'un  tel  morceau  ou  de  tout  autre  analogue. 

2°  Les  fils  de  Coré.  —  La  série  attribuée  aux  «  Fils  de 
Coré  o  comprend  11  Psaumes  en  deux  groupes  xi.i  ixi.m 
(avec  xlii  (xi.ni);  xnv  (xi.in)  jusqu'à  xlviii  (xux),  puis 
lxxxiii  (i.xxxiv)  jusqu'à  lxxxvii  (i.xxxvm)  à  l'exception 
de  L.xxxv  (i.xxxvi)  ;  ce  sont  les  plus  beaux  morceaux  du 
Psautier,  distingués  par  leur  simplicité,  leur  délica- 
tesse, leur  forme  à  la  fois  étudiée  et  parfaite  au  point 
de  vue  poétique,  d'une  strophique  liés  régulière  et 
avec  emploi  fréquent  et  heureux  du  refrain  :  au  point 
de  vue  des  sentiments  on  y  distingue  un  grand  amour 
du  Temple  et  de  la  cité  sainte.  La  tradition  rattachait 
l'origine  de  celle  famille  au  Coré  du  désert;  leur  acti- 
vité littéraire  fut  marquante  durant  la  période  d'Ézé- 
chias  et  jusqu'après  le  retour  de  la  captivité,  comme  le 
montrent  les  allusions  historiques  de  leurs  Psaumes  : 
leurs  idées  théologiques  ou  messianiques  sont  ana- 
logues à  celles  d'Isaïe  :  voir  par  exemple  Ps.  i.xxxvi 
(lxxxvii)  et  Isaïe,  xix,  19-25;  leurs  fonctions  dans  le 
Temple  sont  indiquées  dans  les  livres  historiques 
depuis  David  jusqu'à  la  restauration  d'Israël,  gardiens 
des  portes  du  temple,  I  Par.,  ix,  19;  xxvi,  1-19;  puis 
Chantres.  II  Par.,  xx,  19. 

3  Asaph.  —  Douze  Psaumes  portent  l'indication 
a  Asaph  »  et  sont  par  conséquent  aussi  de  l'école  lévi- 
tique  :  xi.ix  II.)  et  lxxii  (lxxiii)  jusqu'à  lxxxii  (LXXXIII). 
Sous  ce  nom  comme  sous  le  précédent  se  cache  une 
famille  de  lévite-  dont  l'activité  littéraire  s'espace  sur 
plusieurs  siècles  :  par  exemple  lxxxii  (lxxxiii) appartient 
à  l'époque  de  la  lutte  contre  l'Assjrie;  lxxiii  (lxxiv)  et 
lxxviii  (lxxix)  à  l'invasion  babylonienne;  ce  sont  tou- 
jours des  Psaumes  nationaux,  et  non  personnels  :  le 
style,  moins  parfait  que  ceux  des  Fils  de  Coré,  est 
communément  d'une  grande  autorité  et  d'une  grande 
véhémence,  qui  approche  souvent  du  sublime,  mais  qui 
aussi  le  dépasse  quelquefois;  ils  renferment  beaucoup 
d'allusions  à  l'histoire  et  aux  vieux  souvenirs  d'Israël, 
et  d'imitations  des  allégories  des  prophètes  :  voir  par 
exemple  la  belle  allégorie  de  la  vigne  i.xxix  d.xxx).  Leur 
langue  recherchée  a  été  souvent  mal  traduite  par  les 
Septante  et  la  Vulgate.  Voir  Asaph,  t.  I,  col.  1056. 

4»  Kllian.  —  Éthan,  auteur  du  Psaume  lxxxviii 
(i.xxxix),  est  peut-être  par  une  faute  de  transcription  ou 


de  lecture  de  Valepli  initial,  le  même  qu'Idithun  auteur 
de  xxxviii  (xxxix),  lxi  ii.xiii,  i.xxvi  (i.xxvii  .  Voir  ces 
noms.  Ces  Psaumes  sont  par  conséquent  aussi  d'origine 
lévitique,  et  très  beaux;  voir  par  exemple  LXXXVIII 
ii.xxxix)  élégie  messianique  sur  la  dynastie  de  David, 
en  en  séparant  les  v.  6-19,  qui  forment  un  Psaume  diffé- 
rent et  fort  beau,  également  inséré  dans  le  premier. 

5°  Salomon,  Moïse,  Psaumes  anonymes.  —  Salomon 
est  donné  comme  auteur  des  Psaumes  lxxi  (lxxii)  et 
cxxvi  (cxxvn)  :  celte  dernière  attribution  est  plus  que 
contestable.  Le  Psaume  de  la  vieillesse  lxxxix  (xc)  est 
attribué  à  Moïse,  mais  saint  Augustin,  In  Ps.  LXXXIX, 
t.  xxxvn,  col.  1141,  en  disait  déjà  ;  Non  enim  credendum 
est  ab  ipso  omnino  Moyse  islum  Psalmum  fuisse  con- 
scriptum,  et  il  en  donne  pour  raison  que  s'il  eut  eu  cette 
origine,  on  l'eût  joint  au  Pentateuque.  Saint  Jérôme, 
E/,ist.  i  xi.  ad  Cijprianum,  t.  xxn,  col.  1167,  admet 
l'origine  mosaïque  de  ce  Psaume  et  des  dix  suivants,  où 
il  est  cependant  parlé  de  choses  bien  postérieures  et 
même  de  Samuel.  Ps.  cxvin,  6.  Les  versions  ajoutent 
encore  des  noms  d'auteurs  à  quelques  Psaumes;  mais  ces 
additions  sont  généralement  fortarbitraires.il  reste  plu- 
sieurs Psaumes  anonymes,  comme  on  l'a  vu  plus  haut. 
Ouelques-uns  des  plus  beaux  du  Psautier  sont  compris 
dans  cette  catégorie,  tels  que  cm-civ,  tableau  de  la  créa- 
tion, et  cvi-cvn,  action  de  grâces  pour  le  retour  de  la 
captivité;  la  plupart  se  trouvent  dans  les  deux  derniers 
livres  du  recueil. 

VI.  Indications  historiques,  liturgiques  et  techni- 
ques des  titres.  —  1»  Indications  historiques.  —  Les 
litres  ajoutent  quelquefois  au  nom  de  l'auteur  des  indi- 
cations de  circonstances  historiques.  Elles  semblent 
n'être  plusieurs  fois  que  des  conjectures  du  recenseur; 
le  contenu  ne  les  justifie  pas  toujours;  un  mot  a  quel- 
quefois suffi  pour  qu'on  rattachât  tout  un  Psaume  ;>  la 
vie  de  David.  Par  exemple  Ps.  ni.  quand  David  fuyait 
devant  Absalom  son  fils;  vu,  à  l'occasion  des  paroles 
de  Chusi  le  Benjamite;  xxxnnxxxiv).  quand  David 
contrefit  l'insensé  en  présence  d'Abimélech;  li(lii), 
quand  Doëg  l'Iduméen  vint  dire  à  Saiil  que  David 
était  chez  Achiméleeh;  LUI  (nv)  quand  les  Ziphéens 
vinrent  dire  à  Saiil  :  «  David  est  caché  parmi  nous;  »  i.v 
1 1  \i  '.  quand  les  Philistins  le  saisirent  à  Geth  ;  lix(lx),  à 
l'occasion  de  la  guerre  contre  les  Syriens  de  Mésopota- 
mie et  de  Soba,  etc.  Dans  ce  dernier  cas,  par  exemple, 
il  est  question  des  Philistins,  des  lduméens  comme 
encore  à  vaincre,  et  nullement  des  Syriens;  dans  le 
Psaume  i.xn  (Lxiii).la  mention  repose  sur  le  f.  2,  in  terra 
déserta  et  invia  et  inaquosa,  qui  est  lui-même  vraisem- 
blablement pour  sicttt  terra...  inaquosa,  sic  in  sancto ap- 
parut tibi,  «  comme  o  étant  à  r<  sfiluer  au  lieu  de  t  dans  ». 
2°  Indications  liturgiques.  —  D'autres  additions  sont 
des  indications  liturgiques  remontant  à  l'emploi  des 
Psaumes  dans  le  Temple,  dans  le  culte  public  ou  dans 
le  culte  privé  :  xxixixxxi  pour  la  dédicace  du  Temple; 
xci(xcn)  pour  le  jour  du  sabbat;  de  cxix(cxx)  jusqu'à 
i:\xxiiii i:\xxiv)  cantique  des  montées  ou  du  pèlerinage 
à  Jérusalem,  canticum  graduum  ;  xxxvm(xxxviii)  et 
lxix(lxx)  pour  la  commémoraison  (des  bienfaits),  in 
rememoralionem  ;  cxixfc),  pour  (le  sacrifice  d')  action 
de  grâces, in  confessione.  Les  Septante  et  la  Vulgate  en 
ont  d'autres  encore  ;  xcv,  pour  li  reconstruction  du 
Temple  après  la  captivité,  quando  domus  sedi/icabatur 
post  captivitatem;  xcu,  quando  fundata  est  terra; 
xxxvn,  de  sabbato;xxiu  le  lendemain  du  sabbat,  prima 
die  sabbati;  xi.vn.  secundo  sabbati,  le  second  jour  de 
la  semaine;  XCU,  quarla  sabbati.  le  quatrième  jour; 
xen,  in  die  onle  sabbalum,  quando  fundata  est  terra, 
la  veille  du  sabbat,  le  jour  où  fut  achevée  (la  création) 
de  la  terre.  Les  Septante,  la  Vulgate  et  aussi  le  Sy- 
riaque contiennent  également  des  indications  de  cir- 
constances historiques  ou  une  seconde  série  de  noms 
d'auteurs  inconnus  à   l'hébreu  actuel,  et  généralement 


815 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


S16 


peu  soutenues  par  le  contexte  :  Septante,  {Psalnms 
David)  filiorum  Jonadab  et  priorum  captivorum  : 
cxxxvi,  de  David  et  de  Jérémie;  lxiv,  Jeremiœ  et  E:e- 
chielis populo  transmigralionis,  cum  inciperenl  exire: 
Cxi,  reversionis  Aggœi  et  tachante-,  en  tète  du  Beatus 
vir  qui  na  aucun  rapport  à  la  sortie  d'exil;  cxxv,  Can- 
licum  ad  Assyrios,  qui  semble  au  contraire  une  note 
marginale  bien  appropriée;  xxvi,  David  priusquam 
liniretur;  xxvm.  ■Ix'iu.'t;  -m  Ajoiô  ÈËoSt'o'j  anr;irfi,  in 
consummalione  tabernaculi,  etc. 

3°  Indications  techniques.  —  Ils  contiennent  encore 
des  indications  techniques,  poétiques  ou  musicales; 
par  exemple  l'espèce  particulière  de  chaque  Psaume  : 
mizmôr,  sir,  maskil,  miktam,  èiggâyôn,  {efillâltj 
sir  yedidôf.  Voir  col.  808. 

Quant  à  la    mélodie  ou    air   connu    indiqué,    nous 
trouvons  les  formules  suivantes  :    alnivt  labbén,  iyitip 
ïmv   xpuaptuv  to'j    l'io-j,   pro  occullis   Filii,  c'est-à-dire 
sur   l'air    alinût   labben   (peut-être    :    la   pâle   mort), 
Ps.  IX  ;  'al  'ayyélét  has-èahar,  ijtèp  iîj;  i;-0r,lîwç  tî,; 
É<i)6ivr,;,  pro  susceptione  matutina,  sur  l'air;  «  la  biche 
de  l'aurore  »;   Ps.  xxi(xxn),    al-yùnat  'êléni  rehôqîm, 
i-'i^  toO  Xao*j  to-j   ir.'t  rc5v  àyitav  [AE{jiaxpv(i{ilvou,   pro 
papule  qui  asanctis  longe  faclusest,  sur  l'air  :  "  colombe 
des  lointains    térébintlies    »;    Ps.    lv(lvi),     'al-tashrt, 
>j~r,  5ia?9EÎpi);  "<'  disperdas,  sur  l'air  :  g  ne  détruis  pas  », 
Ps.   i.vi(i.vii)  jusqu'à    lviii(lix);   'al-sûsan    'êdùf,   toï; 
à).Xotu6T)ao|iévoi;  ïxt,pro  iis  gui  immuiabuntur  [adhuc), 
sur  l'air  :  «  lis,  témoin  de...  »  Ps.  i.ix(i.x).  ou  encore  avec 
variante iôiannim  xi.iyixi.v),  i.xvnid.xixi.  lxxix(lxxx). 
Il  faut  y  ajouter  quelques  autres  indications  qui  ont  un 
sens    vraisemblablement    analogue,    'aL-'âldnwt,    ùirèp 
Tfi>v  xpvfiwv,  pro  areauis,  c'est-à-dire  super  puellarum 
(vocem  ou  modulum),  sur  (l'air)  :«  Jeunes  filles...»  ou 
■•  pour  voix  de  jeunes  filles,  de  soprani    ,  Ps.  xi.v  (xi .vu  : 
'al-gi[(i(,   -jtùç.  t<ôv  Yr-iôri,  pro  torcularibus,  «  sur  la 
Géthéenne  »,  sur  la  (lyre  ou  le  tonj  de  Geth,  ville  phi- 
listine  où  résida  David  durant  la  persécution  de  Saûl, 
ps.     i.xxx  iiw.vn   et    Lxxxm    uxxxivi;    'alrmahâlaf, 
ÛTtèp  Maeié6,  pro  maelelh,  sur  un  air  ou  un   instru- 
ment   de    musique    dont    on    ignore    la    nature,  peut- 
être  la  flûte  qui  guide  le  chœur,  ce  qui  s'accorde  assez 
bien  avec  la  traduction  d'Aquila,  Itiî  -/opst'-c,  et  de  saint 
Jérôme  (su)per  chorum  ;  Ps.  i.iiiuii  letl.xxxviu  i.xxxvinl, 
voir  Maeleth,  t.    iv,  col.  537;  be-negimit,  èv '|/a).u,oïç, 
sans  doule  pour  èv  •ia'/Tr,pioî;  :    Vulgale  :  in  carmini- 
6t<s;saint  Jérôme  :  inpsalmis,  sur  les  «  psaltérions»,sur 
les«  instruments  à  cordes  »,Ps.  îv;  'él  han-nehilôf,  Sep- 
tante -JTiJf  Tr,.-  x).ijpovo|j.o'jirî|{,  Vulgate  :  pro  ea  i/uœ  hue- 
reditatem  consequitw,  saint  Jérôme:  super  hsereditati- 
bus,  c'est-à-dire  «  sur  les  flûtes  »,  Ps.  v;  voir  ces  mots,  'al- 
hai-êeniinit/VTikQirft  oYOoirçç,  pro  oc  tara,  c'est-à-dire  pour 
•  la  lyre  à  huit  cordes  »  ion  peut-être  a  à  l'octave  »  si  l'on 
admet  pour  les  anciens  orientaux  une  échelle  musicale 
semblable  à  la  nôtre),  Ps.  vi,  Enfin  la  plupart  de  ces 
indications  ou  rubriques  sont  adressées  à  un  lévite  ou 
officiant  dont  le  nom  hébreu  est  menasseah,  terme  rendu 
par  les  Septante  :  \'.l:  -.'■,  «Xoç,  par  la  Vulgate,  In  fineni, 
parsaint  Jérôme  :  Victori,  et  qui  doit  être  traduit  par  «  Au 
maître  de  chœur  i  -  Voir  Cm  i  m  -  chantres,  t.  h,  col.  645. 
On  a  remarqué  que  tous  ces  termes  techniques  étaient 
déjà  devenus  inusités  lors  delà  rédaction  desdeux  der- 
nierslivresdu  Psautier;  il  furent  même  totalement  in- 
i pris  des  Septante,  qui  les  traduisirent  en  les  décom- 
posant OU  en  les  remplaçant  par  des  termes  de  pronon- 
ciation semblable  unis  de  sens  très  différent,  pris  dans 
le  Vocabulaire  qui   leur  était  familier;  de   sorte  que  les 
premiers   interprètes    des   Psaumes  et    les   Pères    de 
e,  ne  trouvant  dans  ces  titres  que  des  mots  in- 
compréhensibles, abandonnèrent  le  sens  littéral  pour 
chercher  îles  explications  allégoriques  plus  ou   moins 
3,  telles    que   l'explication   (le    saint     \mhroise  :    ' 

.,  v.  c.  il,  t.  xv,  col.   1649  :   Pro  oclava  enim   ( 


rnulti  inscribuntur  Psalnii...  spei  nostrm  oetara  per- 
feclio  est  :...  oclava  sumnia  virlulirmest. Tous  les  autres 
termesanaloguessont  expliqués  de  même,  en  y  cherchant 
des  sens  dogmatiques,  mystiques  ou  moraux.  Origène 
voyait  dans  les  titres  des  Psaumes  o  la  clef  pour  en  pé- 
nétrer le  sens.  »  mais  il  avouait  ensuite  que  «  les  clefs 
avaient  été  mélangées  et  qu'il  était  devenu  fort  difficile 
de  retrouver  celle  qui  donnait  entrée  dans  chacun  des 
Psaumes,  g  lu  Ps.  1,  n.  3,  t.  XII,  col.  1080.  D'après  l'ana- 
lyse que  nous  en  avons  donnée,  ce  sont  des  indications 
littéraires,  poétiques,  musicales  et  liturgiques,  de  date 
suffisamment  ancienne  mais  qui  méritent  vérification; 
on  peut  les  comparer  aux  rubriques  du  bréviaire  et 
du  missel.  Saint  Thomas  d'Aquin,  In  Psalm.  l  /.  Opéra 
omn.,  Parme,  1863,  t.  xiv.  p.  163,  reconnaît  qu'elles  ne 
remontent  pas  aux  auteurs  des  Psaumes  :  Sciendum 
est  quod  lituli  ab  Esdra  facti  tunt.  Par  conséquent  on 
ne  peut  les  considérer  comme  nécessairement  inspirées. 
L'Eglise  ne  les  a  jamais  regardées  comme  faisant  partie 
intégrante  des  Psaumes;  dom  Calmet,  Sur  les  litres  des 
Psaumes,  dans  le  Commentaire  littéral,  Psaumes,  L  i, 
p.xxxiv.  1713;  Noél  Alexandre,  Histoire  de  l'Ane,  'tes- 
tament, diss.  XXIV,  a.  I.  q.  I.  ont  nié  leur  inspiration. 
Certains  d'entre  ces  titres  ont  même  été  ajoutés  aux 
Septante  par  une  main  chrétienne,  pour  passer  de  là 
dans  la  Vulgate,  et  même  dans  l'Éthiopien,  comme 
Ps.  lxv,  'ia'/;j.'jç  iva<nid£i.>?,  Psalmus  Resurrectionis ; 
enfin  la  Pescbito  les  a  généralement  rejetés  et  remplacés 
par  des  indications  chrétiennes:  ainsi  en  tète  du  Ps.  cix, 
Dixil  Dominus.  nous  lisons  :  De  solio  Donnai  deque 
oirtute  ejus  gloriosa  :  et  proplielia  de  Cltristo  et  ri- 
ctoria  de  hoste. 
VII.  Caractère  des  Psaumes;  leur  si  périorité  par 

RAPPORT    AUX    CHANTS    RELIUIEI  X    DES    AUTRES    PEUPLES 

ORIENTAUX.  —  Le  Psautier  est  évidemment  un  recueil 

d'hymnes,  d.'  prières,  de  méditation-  et  même  île  com- 
positions didactiques,  histoire,  dogme,  prophétie,  mo- 
rale; il  appartient  à  la  poésie  lyrique,  et  les  Psaumes 
hébreux  peuvent  être  comparés,  quoique  infiniment  su- 
périeurs quant  au  fond  et  généralement  aussi  quant  à 
la  forme,  aux  psaune.-  assyriens  ou  babyloniens,  con- 
servés  dans  les  textes  cunéiformes:  aux  chants  religieux 
de  l'Egypte,  papyrus  ou  monuments;  aux  Gâthàs  de 
I  Avesla  el  aux  Védas  de  la  littérature  sanscrite.  Bien 
que  les  sections  ou  coupures  pratiquées  entre  les  Psau- 
mes ne  soient  pas  toutes  certaine-,  les  titres  maintenus 
dans  le  texte  nous  montrent  que  la  plupart  sont  des 
poèmes  de  peu  d'étendue  —  à  part  le  Ps.  cxvni ((  xix  qui 
est  plutôt  un  recueil  de  maximes  de  morale  religieuse, 
groupées  en  strophes  alphabétiques  —  les  uns  servant 
à  la  récitation  et  au  culte  publics,  les  autres  à  la  lec- 
ture ou  récitation  privée  :  les  uns  étaient  destinés  à  louer 
Dieu  dans  le  Temple,  dans  les  assemblées  religieuses, 
comme  le  Confitemiui  Domino,  les  autres  à  la  prière 
privée  tels  que  le  Miserere  mei;  d'autres  aux  cérémo- 
nies religieuses,  tels  que  l' K.i  urga I  Drus.  Ps.  i.xvin; 
d'autres  à  l'instruction  d'Israël,  comme  les  Conftlemini, 
civ  et  cv  lev  et  evi);  beaucoup  devaient  leur  origine  à 
un  événement  particulier  et  se  récitaient  dans  des  cir- 
constances analogues. 

D'autres  instruisaient  Israël  de  son  passé  et  de  l'ave- 
nir que  lui  prédisaient  les  prophètes  :  il  y  a  en  outre 
un  grand  nombre  de  Psaume-  de  caractère  individuel. 

relatifs  à  toute  sorte  d'épreuves,  maladie,  persécution, 
calomnies,  vieillesse,  etc.  C'est  une  exagération  évi- 
dente que  celle  de  le  us-  qui  voit  partout  des  Psaumes 
nationaux.  OÙ  Israël  esl  toujours  caché  sous  la  per- 
sonnification du  Psalmiste;  bien  qu'il  soit  suivi  par  la 
plupart   des  critiques   contemporains,    tels    que    liiibin. 

Cheyne,  Smend,   il  suffit   de    s'en    tenir  au   texte  de 

Psj s  tels  que  in.  iv,  VI,  el  même  xxi  xxtt    ou  autres 

semblables  pour  se  persuader  du  contraire,  l'auteur  > 
parlant    de   circonstances  personnelles    qu'on    ne   peut 


817 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


SIS 


évidemment  appliquer  à  Israël,  son  «  père»,  sa  «  mère  »,  sa 
«  naissance  »,  son  «  vêtement  »,  etc.  ;  il  v  a  cependant  cer- 
tains Psaumes  primitivement  individuels  qui  sont  deve- 
nus ensuite  des  Psaumes  nationaux,  soit  par  simple  ac- 
commodation, soit  même  grâce  à  des  changements  ou 
des  modifications  pratiquées  dans  le  texte  primitif  :  le 
Ps.  ix(x)enestun  exemple  caractéristique. 

VIII.  Forme  poétique  des  Psaumes.  —  Leur  carac- 
tère poétique,  non  seulement  quant  au  fond,  mais  en- 
core quant  à  la  forme,  est  absolument  évident,  et  si 
les    Psautiers    du    temps  d'Origène    ont    pratiqué    la 
scriptio  continua,  source  de  mauvaises  lectures  et  de 
fausses  coupures  fréquentes,  à  l'origine  et  pour  la  psal- 
modie primitive,  la  séparation  des  vers  et  des  strophes 
a  dû  être    conservée,  comme  elle  l'était  dans  la  poé- 
sie assyrienne  et  les  papyrus  égyptiens.  Les  déplace- 
ments du   selah,  Sii'JuXas,  qui  indique   la    strophique 
dans  beaucoup  de  Psaumes,  et  qui  a  été  parfois  copié 
un  vers  trop  haut  ou  un  vers  trop  bas,  ne  peut  avoir 
d'autre  origine  qu'un  texte  hébreu   où  les  vers  étaient 
séparés  ligne  par  ligne.  Beaucoup  de  manuscrits  grecs 
anciens  ont  tâché  de  reconstituer  la  disposition  primi- 
tive.  Le    parallélisme    qui   constitue    l'essence    de   la 
poésie  hébraïque  rendait  cette   reconstitution  relative- 
ment facile.   Voir   Poésie    hébraïque,  t.  m,  col.  4811. 
11  y  a  cependant  dans  les  Psaumes  des   endroits  dont 
la  tonne  poétique  est  très  peu  accentuée,  et  où  le  pa- 
rallélisme est  peu  régulier,  tels  que  le  Ps.  i;  d'autres 
où   le.s  copistes    lui    ont   fait  subir  des    altérations  en 
supprimant  ou  en  ajoutant  un  membre,  comnie  Ps.  VIII, 
•>  6.  c.  ;  enlin  certains  Psaumes  ont  été  composés  en 
rythme  ternaire,  et  l'habitude  de  mettre  deux  membres 
du  parallélisme  par    verset,    les  a    rendus   totalement 
méconnaissables,  comme  xcu  (xcin)  où  il  faut  rétablir 
ainsi  les  versets  ■ 

Etenini  Grmavît  orbem  terrœ... 

Parala  sedes  tua  ex  tune, 

A  sœculo  tu  es. 
Elevaverunt  flumina,  Domine, 

Elevaverunt  flumina  vocem  suam, 

Elevaverunt  flumina  fluctus  suos  ; 
A  vocibus  aquarum  multarum 

Mîrabiles  elationes  maris. 

Mirabilis  in  utlis  Dominus; 
Testimonia  tua  credibilia  facta  sunt  nimis, 

Domum  tiiam  decet  snnetitudo,  Domine, 

In  lungitudinem  dierum. 

Le  parallélisme  sous  ses  différentes  formes,  synony- 
mique,  antithétique,  synthétique,  produit  naturelle- 
ment en  hébreu  l'égalité  du  nombre  des  mots  et  par 
conséquent  un  rythme  facilement  perceptible.  Sur  le 
vers  hébreu,  voir  Hébraïque  (Langue),  t.  m,  col.  490. 
Mais  il  faut  noter  que  dans  les  Psaumes  la  régularité  du 
vers  est  loin  d'être  constante  et  absolue  :  parce  que  les 
règles  n'en  étaient  pas  peut-être  exactement  fixées,  bien 
connues  ou  bien  observées,  et  parce  que  les  copistes 
ne  nous  ont  pas  toujours  conservé  fidèlement  le  texte. 
Cf.  Ps.  xviii  (xvnl,  xvi  (xcv),  cv  (civ),  avec  II  Sam. 
Reg.,  xx,  2-51,  et  I  Par.,  .xvi,  8-36.  Bien  qu'entre  ces 
passages  il  y  ait  un  grand  nombre  de  divergences,  il  faut 
constater  néanmoins  qu'elles  n'ont  qu'une  influence  fort 
restreinte  au  point  de  vue  rythmique  et  de  la  poésie.  D'ail- 
leurs on  ne  peu  t  guère  supposer  dans  les  Psaumes  des  al- 
térations prosodiques  très  nombreuses  ni  très  graves  du- 
rant la  période  ou  le  Psautier  demeura  partie  intégrante 
de  la  liturgie  juive,  ou  élément  principal  des  chants 
d'Israël  :  par  conséquent  toute  théorie  sur  la  poésie 
hébraïque  qui  suppose  trop  d'altérations  et  exige  de 
trop  fréquents  remaniements  du  texte  doit  être  consi- 
dérée comme  suspecte. 

Le  caractère  lyrique  des  Psaumes,  l'usage  où  l'on 
était  de  les  chanter  couramment,  amène  à  supposer 
dans  un  grand  nombre  l'existence  de  strophes  :  il  en 


est  cependant  où  l'on  ne  découvre  aucune  strophique, 
tels  le  Psaume  moral  exil  (exi),  Bealns  vir,  les  Psaumes 
historiques  cxi(cx),  Confitebor,  i.xxvui  (lxxvii), Atten- 
due, papule  meus.  D'autres  ont  plutôt  des  divisions 
logiques  que  des  strophes  proprement  dites,  l'égalité 
des  fragments  n'étant  que  très  approximative;  mais 
dans  le  plus  grand  nombre  on  découvre  une  stro- 
phique très  intentionnelle,  reconnaissable  au  déve- 
loppement égal  attribué  à  chaque  pensée  du  Psaume, 
souvent  même  celte  strophique  est  accusée  par  do 
indications  spéciales,  Palphabétisme  en  tète  de  chaque 
strophe  ou  de  chaque  vers,  le  nom  de  .lébovah,  placé 
dans  chaque  premier  vers,  ou  au  contraire  le  terme 
technique  sélah,5ià'\,a\y.a  (voir  Sélah),  ou  la  présence 
d'un  refrain  à  fa  fin  de  chaque  strophe. 

La  division  la  plus  simple,  et  probablement  la  plus 
ancienne,  est  le  partage  du  Psaume  en  deux   parties, 
la  strophe   et  1' 'antistrophe,  sorte  de  parallélisme  qui 
oppose  non   pas  vers   à   vers  ou   membre   à   membre, 
mais  tableau   à  tableau    dans  un  même  poème  :  ainsi 
le  Ps.  i  donne  successivement  le  sort  du  juste  et  celui 
du  méchant;  le  Ps.  xvi  (xv)  le  choix  de  Jéhovah  comme 
Dieu  unique,  puis  les  heureuses  conséquences   de  ce 
choix;   le  Ps.  xix   (xvm)  la  lumière  physique,  puis  la 
lumière  morale;  le  Ps.  xxn  (xxi)  la  souffrance  du  Ser- 
viteur de  Jéhovah,  puis  l'action  de  grâce  pour  sa  déli- 
vrance,   etc.    Cette   habitude    de  joindre  la  strophe  et 
l'antistrophe   pousse    même    à  juxtaposer  et  à   réunir 
totalement    quelquefois  deux  Psaumes  primitivement 
distincts,  par  exemple  on  juxtapose  les  deux  Psaumes 
royaux  xx  ixixi   et  xxi  (xx),  Exaudial  le  Dominus  et 
Domine  in  virtute  tua;  on  réunit  dans    l'hébreu  i  xv 
(i:\ivi   Dilexi   quoniam  exaudiet   et   Credidi   propter 
quùd  locutus  sum.  Et  même  dans  les  Psaumes  d'un." 
strophique  plus  étudiée,  on  maintient  la  division  géné- 
rale en  deux  parties,  Ps.  xix  (xvtll),  C:eli  enarranl  glo- 
riamDei;  xi.v  (xliv),  Eruclarit  cor  meuni.  Avec  ou 
sans   celte  division    binaire   très  fréquente,  on  trouve 
souvent    des    strophes    moins   longues   et  plus  nom- 
breuses   de   différents   modèles,  quelquefois    avec   de 
légères  différences  de  longueur  dont  la  responsabilité 
incombe  à  l'auteur  primitif  ou  bien  au  copiste  ;  il  est 
évident  par  exemple  que  le  Ps.  n,  Quare  fremuerunt 
fjentes,  se   subdivise  en  quatre  strophes  d'une  égalité' 
approximative  :  révolte  des  nations,  réponse  de  Jéhovah, 
consécration  du  Messie,  conclusion   du   Palmiste;    au 
contraire  le  Ps.  m,  Domine,  quid  multiplicali  sunt, 
se  divise  naturellement  en  quatre  strophes  égales  mar- 
quées en  hébreu  et  en  grec  par  les  termes  sélah  et 
otï'!>a).y.a.   La  strophe  la  plus  ordinaire  se  compose  de 
quatre  membre  parallèles  deux  à  deux  :  Ps.  XXIv(xxm), 
A  et  B;  xxxm  (xxxii),  cxiv(cxiii)  In  exila  jusqu'à  Non 
nobis,  etc.  On  trouve  moins  fréquemment  la  strophe  de 
huit  membres  parallèles  :  Ps.  xvm  (xvil)    xxxn  ix.xxi), 
etc.  La  strophe  de  seize  membres  est  d'un  emploi  très 
rare  à  cause  de  sa  longueur  :  voirPs.  exix  (cxvm)  qui 
est  plutôt  un  recueil  de  maximes  sur  la  loi  de  Dieu  en- 
chaînées par  ordre  alphabétique  qu'un  Psaume  véri- 
table. —  Le    rythme  ternaire   a    donné   naissance  à   la 
petile  strophe  de  trois   membres   :    Ps.    xcm  (xcu),  et 
cxxxvi  (cxxxv)  à  la  strophe  de  six  membres;  Ps.  xxn 
(xxi);  xlvi  (xlv);  Ps.  cxv  b,  Kon  iwois;  Domine,  non 
nobis.  dans  Vin  a  du;  cxvm  (CXVIl),  etc.;   enfin  à  la 
strophe    de  douze   membres,   dont   le    modèle    le  plus 
achevé  est  le  Ps.  cxxxix  (cxxxvm),  Domine,  probasti 
me.  —  On   rencontre  aussi,    mais   fort  rarement,   une 
strophe  de  dixmembres  parallèles  :  Ps.  cxxxii  n:\x\r. 
Memenln  Domine  David. 

Un  bon  nombre  de  Psaumes,  ceux  surtout  destinés 
au  chant  public,  font  usage  du  refrain,  flans  'es  cas 
les  plus  simples  il  parait  seulement  au  commencement 
étala  lin  du  Psaume,  et  alors  c'est  plutôt  une  sorte  de 
cadre  donné  au  poème  qu'un  refrain  véritable,  Ps.  VIII; 


«10 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


820 


•  :i 1 1  iciij,  i  iv  (cm);  souvent  le  refrain  est  répété  régu- 
lièrement après  chaque  strophe  :  Ps.  xlii  (xli)  en  y 
joignant  le  suivant  qui  en  donne  la  dernière  strophe; 
xi.  vi  (xlv)  en  rétablissant  le  refrain  supprimé  après  le  v. 
4,  Dominus  virtulum  nobiscum;  susce/Hoi'  noster  Deus 
Jacob;  xi.ix  (XLVIIl)  liomo  cuni  in  honore  esset  non 
intellexit;  cvn  (evi)  refrain  modilié  après  chaque 
strophe  :  clamaverunt  ail  Dominuni...  Con/iteantur 
Domino  misericordiœ  ejns...;  cxvi  b  (Credidi),  rota 
mea  reddani...  etc.  Dans  le  seul  Psaume  cxxxvi 
(cxxxv)  le  refrain  quoniam  in  seternum  misericordise 
ejus  est  actuellement  répété  après  chaque  vers  : 
comparer  cxvm  (cxvn)  qui  se  chantait  peut-être  de 
même.  Le  même  verset  servait  de  répons  el  était  repris 
par  tout  le  chœur  dans  les  solennités  religieuses. 
I  Par.,  xvi,  il  ;  I  Esd.,  m,  II. 

Enfin  un  certain  nombre  de  Psaumes  rentrent  dans  la 
catégorie  des  poèmes  alphabétiques.  Voir  Alphabétiques 
I  Psaumes),  t.  i,  col.  410.  Dans  ce  cas  chaque  vers, 
chaque  strophe  ou  chaque  distique,  commence  successi- 
vement par  chacune  des  lettres  de  l'alphabet  :  ce  genre 
d'acrostiche,  que  la  poésie  dédaigne  chez  nous,  esl 
hautement  prisé  au  contraire  par  les  poètes  arabes 
ou  syriaques,  qui  recherchent  en  ce  genre  les  plus 
extraordinaires  complications.  Voir  R.  Duval,  An- 
cienne  littérature  syriaque,  p.  26-28,  On  serait  porté  à 
attribuer  aux  Psaumes  alphabétiques  une  date  récente  : 
mais  la  présence  de  ces  poèmes  dans  Nahum  et  les 
Lamentations  prouve  qu'ils  étaient  goûtés  même  des 
anciens  Hébreux.  On  pourrait  supposer  aussi  que  les 
Psalmistes  s'en  servent  pour  grouper  des  versets  qui 
n'ont  pas  entre  eux  d'enchaînement  logique  bien  étroit  : 
cette  ex  pli  ea  lion  esl  admissible  pour  le  Ileali  in  i  maculai' 
in  via,  CXIX  (cxvm)  el  d'autres  semblables;  mais  les 
Lamentations  el  le  début  de  Nahum  ne  manquent  pas 
d'unité  el  n'avaient  pas  besoin  de  ce  lien  factice  :  dans 
certains  cas  il  brise  même  la  suite  logique  ou  la  chro- 
nologie, comme  dans  le  Ps.  exi  (<:x)  où  il  bouleverse  la 
série  régulière  des  événements  de  la  sortie  d'Egypte 
et  du  s'ionr  au  désert.  Saint  Jérôme  l'avait  déjà  signalé, 
Epist.  \\\u,l  l'util, im,  t.  xxii,  col.  442;  suivant  le  goût 
île  son  temps  il  voit  à  chaque  lettre  une  raison  mys- 
tique ou  allégorique  qu'il  explique  dans  Epist.  a.v.v, 
t.  xxn,  col.  443.  Harre  s'en  est  servi  pour  les  études  de 
la  poésie  hébraïque,  comme  le  rapporte  Lowlh,  Dr  sucra 
poesi  ttebrœorum,  édit.  Rosenmûller,  1821,  p.  39,  365, 
629;  el  Koester  pour  l'étude  des  strophes  hébraïques 
Die  Slropken  und  der  Parallelismus  der  hebrâischen 
Poésie,  dans  Studien  und  Kritiken,  1831,  p.  10.  —  Dans 
le  Ps.  tx-x,  Vulgate,  ix  de  l'hébreu,  chaque  strophe  de 
deux  vers  ou  quatre  membres  commence  successive- 
ment par  une  des  lettres  de  l'alphabet  hébreu,  mais 
les  strophes  manquantes  onl  été  remplacées  par  d'autres 
non  alphabétiques  :  t,  n,  r,  0,5,0,7,  s,  St.  Les  Ps.  xxv 
(xxiv)  et  XXXIV  (xxxiiii  sont  semblables,  une  lettre  par 
vers,  avec  addition  au  poème  d'une  anlienne  non  alpha- 
bétique relative  aux  épreuves  d'Israël  ;  Ps.  XXXVII  (XXXVl) 
une  lettre  tons  les  deux  vers;  exi  (ex)  et  c.xn  (exi)  une 
lettre  pour  chaque  hémistiche;  exix  (cxvm),  chaque  lettre 
répétée  huit  loisen  tête  des  huit  vers  de  chaque  strophe: 
noter  en  outre  que  dans  chaque  strophe  la  loi  de  Dieu 
esl  désignée  par  huil  termes  synonymes,  que  chaque 

strophe  ri me  dans  un  ordre  différenl  ;  enfin  Ps.  cxlv 

(cxi.iv),  une  lettre  par  vers.  Les  irrégularités  qui  se 
remarquent  —  à  pari  l'interversion  de  v  et  r  qui  est 

m'  ie ■  el  se 'rencontre  déjà  dans  les  Lamentations  — 

sonl  de  date  postérieure,  et  proviennent  d'altérations, 
de  suppressions  el  d'additions  au  texte  :  à  noter  la  perte 

du  :  dans  le  ps.  i:\i.x   texte  hébreu,  alors  que  le  verset 

correspondant  esl  conserve  dans  les  Septante,  la  Vul- 
gate el  le  syriaque.  D'autres  Psaumes  ont  un  alphabé- 
lisme  incomplet,  le  premier  mot  y  commence  par  aleph 
et  le   dernier  Co lelice   ou    finit    par    thav,   peut-être 


pour  indiquer  que  le  poème  est  complet  et  qu'il  n'y  a 
rien  à  y  ajouter,  qu'il  comprend  depuis  la  première 
lettre  jusqu'à  la  dernière;  tels  sont  i,  v,  i.xx  (i.xixi, 
lxxix  (lxxviii);  cxii  (exi)  commence  aussi  par  asré  et 
finit  par  lobed  comme  le  Ps.  i. 

Il  faut  enfin  noter  comme  derniers  ornements  acces- 
soires la  rime,  assonance,  nwnorime:  lu,  rime  propre- 
ment dite;  cxxi  (cxx)  assonance  en  a,  cxxtv  icxxni)  as- 
sonance en  nu;  c:\xxn  (cxxxn:  cxi.ni  (CXXLII);  —  le 
rythme  graduel  ou  gradation  qui  prend  la  finale  d'un 
vers  pour  en  faire  le  commencement  du  vers  ou  de  l'hé- 
mistiche suivant,  dont  on  trouve  un  modèle  dans  [saïe, 
xxvt,  1-9.  et  une  imitation  dans  le  début  du  IV*  Evangile; 
Exemple  :  Ps.  cxv  {Xon  nobis  Domine). 

ncquando  dicant  gentes  : 
ubi  est  Deus  eorum? 
Deus  autem  noster  in  celo... 
Benedicti  vos  a  Domino 

Qui  fecit  cxlum  et  ter, 

Cxlum  cxli  Domino, 

Terram  autem  dédit  tiliis  hominum. 

Cette  construction  avait  pour  résultat  de  faciliter  la 
mémoire  :  aussi  la  retrouve-t-on  fréquemment  dans  les 
Psaumes  de  caractère'populaire,  spécialement  les  Can- 
tiques du  pèlerinage  i:xx-cxxxiv,  nommés  psaumes 
graduels,  ranlirum  graduum,  sir  liant-nia'alôl .  Les 
,,-n.r  de  mots,  formant  dans  la  poétique  orientale  [un 
ornement  très  recherché,  se  retrouvent  naturellement 
aussi  dans  les  Psaumes;  par  exemple  :  ire'ù  ve-iràû, 
ridebunt  (multi)  el  timebunt,  xi.  (xxxix),  lui  un,  S; 
r, ,1,1, uni  (junti)  et  timebunt,  xi.  (xxxix),  18;  'atii  'ani, 
miser  (sum)  ego,  i.xix  n.xvmi,  30;  i.xx  (lxix),  G,  etc. 
Voir  Jeux  de  mois,  t.  m,  col.  1523. 

IX.  CoNTENl  ET  IIUCTR1XE  liES  PSAUMES.  —  /.  - 
DES  PSAUMES.  —  Il  est  impossible  de  donner  une  clas- 
sification logique  des  Psaumes,  un  seul  touchant  sou- 
vent à  des  sujets  fort  divers,  ainsi  le  Ps.  i  nous  donne  le 
suri  du  juste  el  celui  de  l'impie;  xix  (xvm)  la  lumière 
matérielle  et  la  loi  de  Dieu  ;  xxiv  ixxiin  portrait  du  juste 
etcérémonie  religieuse  xxxiu  ixx.xui  invitation  à  louer 
Hi  mi,  sa  justice,  sa  puissance  créatrice,  châtiment  des 
nations,  triomphe  final  du  juste;  i.xxxix  (i.xxxvm) 
promesses  de  Dieu  à  David,  puissance  infinie  de  Dieu, 
sa  fidélité  à  son  peuple,  promesses  de  perpétuité  à  la 
race  davidique,  ses  abaissements,  prière  en  sa  faveur. 
Ouoi  qu'il  en  soit  Dieu,  son  infinité,  sa  puissance,  sa 
justice,  sa  miséricorde,  en  face  de  l'homme,  sa  dépen- 
dance, sa  faiblesse,  ses  fautes,  ses  épreuves,  son  besoin 
du  secours  divin,  les  dons  divins  qu'il  a  reçus  et  ceux 
qu'il  réclame,  tout  cela  forme  le  sujet  général  du  Psau- 
tier, soit  comme  contemplation,  soit  comme  louange, 
soil  dans  un  but  de  prière,  et  presque  toujours  sous  la 

for d'un  entretien  personnel  du  psalmiste  avec  Dieu 

ou  sous  la  forme  d'un  hymne  liturgique. TLn  ne  tenant 
compte  que  de  l'élément  principal  de  chaque  Psaume, 
on  peut  s'arrêter  à  la  classification  suivante  : 

1"  Psaumes  dogmatiques  ;  Dieu  créateur  :  vin.  créa- 
tion abrégée  ilicn.,  1);  tableau  développé,  civ  Jcill); 
xix  (xvm  A);  chaque  créature  doit  louer  Dieu  cxi.vm  ; 
beautédes  différentes  œuvres  de  Dieu,  xxvin(xxvn), orage 
(à  comparer  avec  xvm  ixvil),  8-17);  grandeur  du  créa 
leur,  XCII1  (XCIl);  omniscien.v  el  immensité  divines, 
i:.XXXIX  (CXXXVIH);  néant  des  idoles  OU  des  faux  dieux, 
I  vvvi  (LXXX),  cxv6  (CXIV);  CXXXV  (CXXXIV);  sa  bonté-  el 
sa  miséricorde,  il  (l),  CIII  ou):  CXXX  (r.xxix);  CXLV 
(CXI  IV  |. 

2°  Psaumes  moraux  :  la  loi  de  Dieu,  xix  ixvmM, 
CXIX  ic:xvm);  portrait  du  juste,  xv  (XIV);  XXIV  ixxun; 
i.xn  (i.xi);  CXll  (CXl);  l'impie,  xii  (XI),  M\  ixun:  xi.ix 
(xi.vm)  (mauvais  riche);  lviii  (LVll)  el  i.xxxii  ixxxii 
mauvais  juge);  LU  (1.1)  (calomniateur);  L  (xlix)  jhypo- 
crite);  sanctions  divines,  i.  xc:u  (xci),  sxxvil  (xxxvi), 
i.wiii  ii.xxiii;  xiv  (Xiin  =  i.iii  il. in.  i.xxxi  (LXXX). 


821 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


822 


3°  Psaumes  historiques  :  Lxvin  i  lxvii),  lxxvii  (lxxvj  . 
LXXVIII  (lxxvii),  cxv  (CXTV),  CXI  (ex),  cxxxv,  (cxxxiv), 
cxxxvi  (cxxxv)  (sortie  d'Egypte,  désert,  conquête  de 
Palestine);  période  des  Juges,  c:v  (civ),  evi  (cv);  davi- 
dique,  i.x   (uxi,  cvm  (cvm;  période  assyrienne,  xi.iv 

(XI.IIl),   LXXXIII  (l.XXXIl),    XLYI   (XI.V),    XLV1II   (XLVIl),    LXXVI 

i.uvi;  période  babylonienne,  i.xxiv  (lxxiih,  i.xxix 
(lxxviii),  i.xxx  (lxxix);  exil,  cxxxvu  (cxxxvi);  retour, 
i.xxxv  (lxxxiv),  cvii  (cvi).  cxxvi  (cxxv). 

4°  Psaumes  relatifs  à  .Jérusalem  au  Temple  :  xxvi 
(XXVl),     XI.II     (XLI),     XLtIl    (XLIl).    XLVIII      (XLVtl),    I.XXX1U 

(i.xxxini,  i. xxxvii  (lxxxvi),  cxxn  (cxxi),  cxxxn  (cxxxi)  ; 
cérémonies  religieuses  :  xxiv  (xxm  l>),  i.xvm  (lxvii), 
cxvm  (cxvn),  cxvi,  b  (cxv). 

5°  Psaumes  royaux  :  xx  (xix),  xxi  (xx),  ci  (c),  cxxxm 
(cxxxvu  b);  messianiques,  i.xxxix  (lxxxviii);  promesse: 
cxxxn  (cxxxi);  son  règne  universel,  II,  i.xxn  (lxxi), 
ex  icix);  sa  gloire  xlv  (xliv);  le  Serviteur  de  Jébovab 
souffrant,  lxxxviii  ilxxxvii),  xxm  ixxi)  ;  le  règne  de  Jébo- 
vab sur  les  nations,  xlvii  (xlvi),  lxvii  (lxvi),  xcxvi 
(xcxv),  CXLIX,  etc. 

6°  Psaumes  personnels  :  contre  ennemis  et  persécu- 
teurs m,  v.  vu.  xm  (xn),  xiv (xiii)  etc.;  pardon  du  pécbé, 
Ll  il,',  exxx  (cxxtx),  etc.;  la  souffrance  suite  du  pécbé, 
vi.  xxxvin  (xxxvii),  xli  (xl).  en  (ci)  ;  la  vieillesse,  xxxtx 
(xxxtiii),  xc  (lxxxix);  confiance  en  Dieu,  xvi  (xv),  xxin 
(XXII),  CXXI  (cxx),  xci  (xc),  CXII  (CXI). 

//.  doitmxe  lies  psaumes.  —  La  doctrine  générale 
des  Psaumes  est  l'abrégé  de  toute  la  Cible,  sous  la 
forme  la  plus  imagée  et  la  plus  brillante.  Les  Psal- 
rnistes  nous  donnent,  dans  leurs  chants,  une  image 
grandiose  du  monde  et  du  créateur,  naturellement 
sous  des  images  proportionnées  à  la  capacité  intellec- 
tuelle et  aux  formes  du  langage  des  Hébreux.  Le  monde 
est  comme  une  vaste  demeure  bâtie  par  Jéhovah,  créa- 
teur, ordonnateur  du  chaos  primitif,  sorte  d'océan  im- 
mense et  ténébreux.  Les  restes  de  cet  océan  entourent 
encore  le  monde  actuel,  c'est  le  grand  fleuve,  la  merdes 
confins  du  monde  jusqu'où  le  Messie  devra  étendre  son 
règne;  la  terre  s'élève  par  dessus,  et  ses  plus  hautes 
montagnes  soutiennent  le  firmament  qui  sépare  le  ciel 
du  monde  visible.  Au  ciel,  Dieu  trône  éternellement  sur 
sa  montagne  sainte,  entouré  de  la  milice  des  armées 
célestes,  et  de  là  il  gouverne  le  monde  matériel  et  le 
monde  humain.  Au  dessus  du  firmament  sont  accumu- 
lés, prêts  à  exécuter  ses  ordres,  les  trésors  des  eaux,  de 
la  neige,  de  la  grêle,  des  foudres  et  des  tempêtes.  Au 
firmament  se  balancent  ou  se  meuvent  les  astres,  les 
étoiles,  la  lune,  le  soleil  qui  forment  une  seconde  armée 
céleste  :  c'est  dans  ces  deux  sens  que  Jébovab  s'appelle 
le  Dieu  des  armées,  Dominas  Deus  Sabaoth,  Deus 
virlutum,  Deus  exercituum  ;  tous  ces  termes  ont  le 
même  sens.  —  Quand  Jébovab  vient  juger  les  hom- 
mes, c'est-à-dire  sanctionner 'ses  lois  par  des  récom- 
penses et  des  châtiments,  ou  soutenir  ses  fidèles  et 
anéantir  les  méchants,  il  est  représenté  descendant 
sur  son  char,  traîné  par  les  chérubins,  lançant  la  foudre 
autour  de  lui,  caché  derrière  un  voile  de  nuées,  faisant 
entendre  sa  voix  qui  est  le  tonnerre,  faisant  trembler 
la  terre  et  desséchant  les  abîmes.  Le  monde  aune  troi- 
sième partie,  la  terre  des  morts,  le  seôl,  sortede grand 
tombeau  souterrain  où  les  défunts  viennent  successive- 
menlprendre  place  :  c'est  l'abime  de  la  nuit,  du  silence, 
et  de  l'oubli  :  Jéhovah  n'y  est  pas  loué.  Les  Psaumes  les 
plus  anciens  ne  sont  guère  plus  explicites  sur  cette  exis- 
tence ultra-terrestre  et  n'y  distinguent  pas  le  sort  du 
juste  de  celui  de  l'impie.  Dans  ces  descriptions,  il  n'est 
pas  toujours  facile  de  discerner  le  sens  du  fond  d'avec 
ce  qui  est  simple  formule  poétique  et  pure  métaphore, 
ou  bien  allusion  aux  croyances  de  l'Orient  ancien  :  les 
Babyloniens,  les  Égyptiens  employaient  souvent  un 
langage  analogue;  la  science  du  temps  avait  groupé  sous 
cette  série  d'images  l'ensemble  des  phénomènes  observés 


par  elle  :  les  termes  mêmes  du  dictionnaire  hébreu  ren- 
fermaient des  mots  qui  faisaient  allusion  à  ces  opinions, 
le  tonnerre  ou  la  voix  de  Jébovab,  les  armées  célestes 
ou  les  étoiles,  etc.  Les  Psalmistes  hébreux  devaient 
parler  comme  leurs  contemporains. 

Mais  le  contraste  est  frappant  quand  de  la  forme,  on 
passe  au  fond  :  sans  langue  philosophique,  sans  raison- 
nements métaphysiques,  ils  nous  donnent  une  telle 
idée  de  Jéhovah  que  nulle  part  nous  ne  trouvons  une 
notion  de  Dieu  plus  élevée  ni  plus  exacte  :  tandis  que 
les  dieux  des  nations  sont  des  vanités,  des  abominations 
dépourvues  de  sentiment,  d'intelligence  et  de  vie,  Jého- 
vah est  le  créateur  et  le  maître  de  tous  les  êtres  célestes 
et  terrestres  :  tout  change  et  passe,  seul  Jéhovah  est 
immuable  :  sa  pensée  pénètre  l'avenir  comme  le  passé 
et  le  présent;  son  regard  voit  partout,  jusqu'au  fond  des 
abîmes  et  des  ténèbres  :  nul  ne  peut  fuir  sa  présence  : 
où  qu'on  soit,  sa  main  nous  soutient.  Sa  puissance  est 
telle  que  la  création  et  ses  merveilles  ne  lui  ont  coûté 
qu'un  mot  :  c'est  lui  qui  conserve  à  tout  la  vie  et  l'exis- 
tence, s'il  détourne  sa  face,  tout  rentre  dans  le  néant; 
sa  justice  est  incorruptible,  et  rien  n'y  échappe  :  la 
sainteté  est  sa  nature,  son  essence  :  seule  sa  miséricorde 
et  sa  bonté  la  surpassent,  le  pardon  habite  avec  lui, 
et  il  aime  les  enfants  des  hommes  ;  sans  doute  il  a  une 
allection  paternelle  pour  Israël,  mais  il  veut  aussi  le 
bien  de  tous  les  peuples  de  la  terre,  il  prend  soin  d'eux 
dès  maintenant,  et  il  les  amènera  tous  un  jour  à  recon- 
naître sa  royauté.  Il  aime  l'homme  et  il  prend  soin  de 
lui,  il  l'a  fait  à  son  image  et  comme  le  Dieu  visible 
de  la  terre. 

La  loi  qu'il  a  donnée  à  Israël  est  une  lumière  qui  ré- 
conforte l'âme,  par  ses  enseignements  et  par  ses  pré- 
ceptes :  les  sacrifices  qu'il  exige  ne  sont  pas  son  aliment 
à  lui,  il  n'a  besoin  de  rien,  rien  ne  lui  manque  ;  les 
pratiques  rituelles  doivent  surtout  être  accompagnées  de 
justice,  de  rectitude  morale,  de  confiance  en  Jébovab  : 
il  aime  mieux  le  cœur  repentant  que  les  holocaustes; 
les  sacrifices  lui  sont  insupportables  quand  ils  sont 
accompagnés  de  l'homicide,  de  l'oppression  des  faibles, 
du  déni  de  justice  aux  opprimés  :  quant  aux  sacrifices 
offerts  aux  idoles,  surtout  le  sacrifice  humain  des  cultes 
chananéens  et  phéniciens,  ils  souillent  la  terre,  Jébovab 
les  abhorre,  et  doit  les  punir. 

A  la  vérité  le  Psalmiste  rend  ces  idées  relevées  par 
toute  sorte  d'anthropomorphismes,  mais  cela  tient  aux 
nécessités  mêmes  de  la  langue  hébraïque  :  d'ailleurs,  ils 
sont  très  bien  choisis  pour  nous  donner  une  haute  idée 
de  Jéhovah  tout  en  nous  rapprochant  de  lui  ;  Jéhovah  est 
notre  salut,  notre  bouclier,  notre  citadelle,  notre  rocher, 
tous  termes  du  reste  adoucis  par  les  Septante  et  IaYul- 
gate;  il  trône  dans  les  cieux  et  la  terre  est  l'escabeau 
de  ses  pieds  :  ses  yeux  toujours  ouverts  sondent  les  cœurs 
des  hommes,  sa  main  les  soutient,  ses  ailes  les  cou- 
vrent de  leur  ombre  tutélaire,  son  bras  châtie  les  impies, 
ses  Mèches  les  transpercent,  sa  colère  les  anéantit. 

Plusieurs  points  de  la  doctrine  des  Psaumes  exigent 
cependant  des  éclaircissements  spéciaux  :  1°  Immor- 
talité de  l'âme.  —  La  Providence,  la  justice  de  Dieu, 
son  amour  du  bien  et  sa  haine  du  mal  soulèvent  dans  le 
Psautier  le  même  problème  que  dans  le  livre  de  Job  :  le 
pécheur  est  souvent  heureux,  et  le  juste  dans  l'épreuve  : 
l'auteur  l'explique  par  la  doctrine  des  rétributions  ter- 
restres": puis  il  suggère  des  moyens  de  justifier  la  provi- 
dence divine  :  tout  cela  est  passager,  et  le  juste  et  le  pé- 
cheur finissent  toujours  par  obtenir  le  traitement  auquel 
ils  ont  droit,  en  eux-mêmes  et  dans  leur  descendance  : 
telle  est  la  solution  commune.  A  d'autres  endroits,  le 
psalmiste  va  plus  loin  et  trouve  une  solution  plus 
haute  :  Dieu  seul  est  une  récompense  suffisante,  le 
juste  sera  toujours  avec  Dieu,  dont  la  main  le  conduira 
et  l'introduira  dans  la  gloire,  Dieu  sera  son  partage  à 
jamais,   lxxiii  (lxxh).    23-26;   xvi  (xvj,   10-11,  assure 


823 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


SU 


que  le  juste  ne  demeurera  pas  dans  le  ie'ôl,  qu'il  vivra 
devant  la  face  de  Jéhovah  y  trouvant  plénitude  de  joie 
et  des  délices  éternelles;  xvii  (xvi),  li-15.  exprime  le 
même  espoir  presque  dans  les  mêmes  termes;  le  juste 
se  trouve  plus  heureux  que  le  méchant,  rassasié  de  ri- 
chesses, comblé  d'enfants  et  de  petits-enfants:  xi  ix 
(xi.yimi.  lô.  représente  les  impies  conduits  au  seul  par 
la  mort  qui  sera  leur  berger  :  tandis  que  le  juste  sera  ra- 
cheté par  Jéhovah  de  l'étreinte  du  seul,  et  que  Jéhovah 
lt-  prendra  avec  lui.  C'est  l'acheminement  à  la  croyance 
à  l'immortalité  de  l'âme,  sinon  déjà  une  pleine  pro- 
fession de  cet  article  de  foi,  mis  par  l'Évangile  seul 
dans  toute  sa  lumière.  Les  Psaumes  VI,  xxx  (xxix), 
xxxix  (xxxviii),  i.xxwiii  ii.xxxvii).  sont  moins  précis  : 
ils  nous  représentent  le  se'ôl  comme  la  terre  de  l'oubli, 
de  l'éternel  silence  et  de  l'éternelle  nuit  que  la  pensée 
et  la  louange  de  Jéhovah  n'interrompent  jamais,  sorte 
d'état,  non  d'anéantissement  total,  mais  d'effacement  et 
de  semi-inconscience,  analogue  aux  croyances  baby- 
loniennes, mais  dont  les  mythes  babyloniens  eux-mêmes, 
tels  que  la  descente  d'Istar  aux  enfers,  nous  montrent 
qu'on  ne  doit  pas  prendre  toutes  les  expressions  au 
pied  de  la  lettre,  pas  plus  qu'il  ne  faudrait  le  faire  dans 
1rs  t.xirs  hébreux.  Quand  nous-mêmes  nous  disons 
d'un  mourant  qu'il  a  cessé  de  vivre,  qu'il  n'est  plus. 
nous  sommes  loin  de  faire  une  profession  de  foi  maté- 
rialiste; il  n'en  faut  pas  voir  davantage  dans  les  formules 
des  Psaumes  :  el  amplius  non  ero  :  «  (donne-moi  un 
peu  de  repos)  avant  que  je  cesse  d'être  (parmi  les  vi- 
vants). »  sans  préjudice  à  l'existence  subséquente,  dont 
les  seules  conditions  d'eux  connues,  n'avaient  à  leurs 
regards  et  avant  toute  révélation  plus  précise,  rien  de 
particulièrement  attrayant.  Présentement  bien  des 
croyants,  persuadés  cependant  de  la  vie  future,  parlent 
encore  il'-  la  sorte. 

2°  Psaumes  imprécatoires  :  xviii  (xvn),  38-40; 
xxxv  (xxxiv),  i.n  h  ii,  i.ix  (i.vm);  i.xix  (i.xviu),  3-29; 
i  w  .vin).  6-20;  cxxxyil  (cxxxvi),  7-9.  —  I.a  justice  de 
liieu.dont  le  principe  tient  si  fort  à  cœur  aux  Psalmis- 
te»,  s'i  xerce  sur  les  nations  comme  sur  les  individus  : 
par  conséquent,  les  nations  idolâtres  ne  peuvenl  pré- 
valoir définitivement  contre  Israël  croyant  el  fidèle  à 
Dieu  :  Effunde  iram  tuant  in  génies  qwe  tenon  nove 
runt  '  l's.  i  XXXVIII,  6;  bien  plus  les  ennemis  d'Israël  sont 
aussi  les  ennemis  de  Dieu  même,  puisqu'Israël  est  seul  à 
connaître  et  louer  le  vrai  Dieu  :  leur  ruine  ou  leur  châ- 
timent est  donc  certain  à  ses  yeux.  Ceci  n'est  pas 
seulement  une  certitude  de  foi,  c'est  aussi  un  objet  de 
désir  de  la  part  d'une  partie  des  Psalmistes,  désir 
d'autant  plus  grand  que  plus  grand  est  leur  amour 
pour  Jéhovah  et  son  règne.  C'est  ce  désir  qui  fait  le 
fond  des  l'-a  h  mes  dits  imprécatoires,  dont  la  plupart  sont 
non  des  Psaumes  individuels,  mais  des  Psaumes  natio- 
naux: Israël  est  sûr  que  Dieu  triomphera  de  ses  ennemis; 
ce  jour  de  Jéhovah,  le  Psalmiste  l'appelle  de  tous  ses 
vœux,  dans  lesquels  se  mêlent  à  la  fois  l'amour  de 
Jéhovah  et  le  sentiment  national.  Quant  aux  formules 
que  révèlent  ces  sentiments  et  à  ce  qu'elles  paraissent 
avoir  d'exagéré  el  de  cruel,  il  ne  faut  pas  oublier  que 
le  style  de  ces  morceaux  esl  poétique  OU  même  prophé- 
tique, e  i  si  l'hyperbole  qui  lui  donne  sa  couleur,  sa 
vivacité  et  sa  chaleur,  el  le  sens  réel  en  doit  être 
beaucoup  adouci.  Du  reste,  les  termes  sont  empruntés 
au  vocabulaire  couranl  de  l'époque,  et  aussi  aux  ter- 
ribles droits  de  la  guerre  d'alors   :   ceux-là  seuls  s'en 

étonnentqui  ignorent  com ni  les  vainqueurs  anciens 

traitaient    leurs   vaincus,    se    faisant     même    gloire    de' 

leur  cruauté,  c< le  on  peut  le  voir  dans  les  Annales 

des  fois  d'Assyrie,  en  particulier  d'Assurnasirpal  et 
d'Assurbanipal.  Dans  le  Super  flumina  Babylonis, 
le  Psalmiste,  sous  une  forme  optalive  dictée  par  sa 
conviction  du  triomphe  final  par  son  amour  pour  le  régne 
de  Dieu  el  par  son  attachement  à  sa  patrie,  la  Jérusalem 


terrestre,  ne  fait  que  dépeindre  d'une  manière  poétique 
comment  on  traitait  trop  souvent  les  villes  prises  d'as- 
saut; on  traitera  Eabylone  comme  celle-ci  a  traité  la 
ville  sainte  :  ami  comme  il  est  de  la  justice,  Jéhovah 
ne  doit  pas  vouloir  moins!  Les  mêmes  principes  d'ex- 
plication doivent  prévaloir  dans  les  Psaumes  certaine- 
ment individuels  :  le  véritable  Israélite  se  considère 
comme  le  représentant  du  vrai  Dieu,  de  la  justice  et  de 
la  religion  sur  la  terre  :  il  est  sur  de  son  triomphe  final, 
et  il  le  décrit  sous  une  forme  oplative  ou  prophétique  : 
ses  ennemis  lui  en  veulent  parce  qu'il  est  le  serviteur 
de  Jéhovah,  et  à  ce  titre  il  est  sûr  que  Dieu  prendra 
en  main  sa  défense,  qu'il  réduira  à  néant  les  projets 
de  ses  ennemis,  qu'il  châtiera  tous  leurs  crimes.  Ici. 
de  plus,  nous  devons  rappeler  que  les  sentiments  de 
charité  que  la  loi  chrétienne  nous  oblige  d'avoir  pour 
nos  ennemis,  rendant  le  bien  pour  le  mal,  et  priant 
pour  ceux  qui  nous  persécutent,  sont  d'origine  exclusi- 
vement évangélique  :  là  aussi,  comme  dans  la  question 
de  la  vie  future.  l'Évangile  a  mis  dans  noire  foi  et  notre 
conscience  des  données  nouvelles;  c'est  en  cela  que 
consiste  le  principal  progrès  de   la  révélation    morale. 

3"  Psaume*  messianiques.  —  Ils  tiennent  une  place 
particulièrement  importante  dans  la  collection  :  il  en 
faut  distinguer  deux  espèces,  les  uns  nationaux,  les 
autres  personnels.  Le  but  final  des  deux  espèces  est  le 
même,  c'est  d'annoncer  et  de  préparer  le  règne  de  Dieu, 
sur  les  nations  inlidèles  jusqu'aux  extrémités  du  monde  : 
les  Psalmistes  saluent  bien  souvent,  spécialement  de 
xc  (Lxxxrx)à  i.i  (ci),  cet  avenir  messianique.  «  Les  idoles 
seront  renversées  et  les  dieux  du  monde,  c'est-à-dire 
ses  princes,  avec  leurs  peuples,  se  joindront  au  dieu 
il  vbraham,  ils  deviendront  des  citoyens  de  Jérusalem  ;  » 
termes  et  idées  analogues  à  Isaie  xix  et  toute  la  se- 
conde partie  du  même  prophète;  outre  ce  groupe,  on 
les  rencontre  encore  dans  des  Psaumes  isnlés  tels  que 
xi. vu  (Xi. vu.  xevii  (xevi),  i.xvmi  (lxvh),  29-36,  etc. 

Mais  la  diversité  commence  ou  l'on  étudie  l'instru- 
ment de  cette  conversion  du  monde;  dans  certains 
Psaumes  on  ne  mentionne  qu'Israël  en  général,  c'esl 
Israël  qui  soumettra  les  nations,  enchaînera  leurs 
princes,  et  chantera  la  gloire  de  Jéhovah  il's.  CXUX); 
c'est  donc  une  formule  de  messianisme  ethnique,  un 
royaume  des  Saillis,  analogue  à  celui  des  Visions  de 
Pani.d,  vu.  17-18,  25-27.  D'autres  Psaumes  sont  plus 
précis.  Il  y  est  question  d'un  personnage  particulier. 
d'un  roi  qui  étendra  partout  le  culte  de  Jéhovah,  qui 
fera  cesser  l'injustice,  qui  donnera  au  momie  la  paix, 
dont  la  puissance  sera  partout  reconnue;  on  en  fait  dif- 
férents portraits,  les  un-  le  représentent  surtout  comme 
un  conquérant,  d'autres  accentuent  davantage  sa  mis- 
sion religieuse,  l'iniquité  et  la  violence  disparaîtront  à 
son  avènement,  il  sera  d'une  façon  particulière  Mis  de 
Dieu.  Ce   portrait    du    Messie    revient    souvent  dans  les 

Psaumes  comme  dans  les  prophètes;  l's.  u,  ex  (cix); 

[.XXII  II. XXI)  on  y  joinl  des  annonces  île  prospérité  tem- 
porelle qu'il  faut,  également  comme  dans  les  prophètes, 
[saîe,  xi.  6-9,  prendre  au  sens  allégorique  ;  lxxh  (lxxi), 
16-18;  cxxxn  (cxxxi),  14-16;  cxlh  (cxliii),  12-15.  lu 
trait  particulier  du  Messi<  qui  ressort  de  plusieurs  pas- 
sages, c'est  que  l'établissement  du  royaume  de  Dieu  sur 
la  terre  sera  le  résultat  de  ses  souffrances;  l'humilia- 
tion et  les  souffrances  du   Serviteur  de  Dieu,  suivies 

de  sa  glorification,  amèneront  le  m le  a  croire  à  cette 

puissance  de  Jéhovah;  en  certains  endroits,  commi 
dans  [saîe,  lui,  ei  dans  le  Psaume  xxii,  le  caractère 
individuel  de  la  victime,  de  ses  souffrances  el  de  cette 
délivrance  esl  précisé;  et  la  fidélité  de  la  peinture  du 
sacrifice  de  la  Croix  a  frappé  tous  les  lecteurs.au  point 
que  les  Évangélistes  n'ont  pas  manqué  de  la  souligner, 
que  le  Chris!  lui-même  sur  la  croix  a  voulu  montrer 
celte  prophétie  réalisée  dans  sa  personne.  Voir  l 
Christ,  prophéties,  t.  m.  col.  1433. 


825 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


826 


Pour  saisir  le  sens  de  ces  Psaumes  messianiques,  il 
faut  évidemment  les  préciser  par  les  textes  prophé- 
tiques parallèles  :  les  Psaumes  n'ont  pas  de  cadre  his- 
torique, et  trop  souvent  le  titre  ne  nous  fournit  presque 
aucune  lumière  :  c'est  alors  l'analogie  des  Écritures, 
et  l'ensemble  de  la  révélation  messianique  qui  doivent 
servir  de  guide  et  de  lumière  :  toutes  les  pensées 
d'Israël,  tous  les  battements  de  son  cceur  ont  leur  ré- 
percussion dans  le  Psautier,  de  même  que  ses  épreuves 
et  ses  triomphes,  en  un  mot  toute  son  histoire,  sa  re- 
ligion, sa  morale,  ses  croyances  de  tout  ordre  :  natu- 
rellement aussi  ses  espérances  et  les  grandes  annonces 
des  prophètes  doivent  y  trouver  leur  écho;  il  est  donc 
très  logique  d'éclaircir  les  uns  par  les  autres;  et 
quand  les  titres  des  Psaumes  ne  sont  pas  suffisamment 
clairs,  ou  indiscutablement  datés,  comme  c'est  souvent 
le  cas,  les  textes  correspondants  des  prophètes  nous 
donnent  un  commentaire  à  la  fois  littéraire,  chronolo- 
gique et  exégétique  sur  lequel  on  peut  s'appuyer  en 
toute  sécurité.  On  ne  peut  nier  le  caractère  messiani- 
que des  Psaumes  que  si  l'on  nie  également  l'existence 
de  toute  prophétie  messianique  dans  la  Ilible.  Cepen- 
dant il  faut  bien  se  garder  de  traiter  comme  vraiment 
messianiques  certains  passages  détachés  ordinairement 
de  leur  contexte  et  expliqués  indépendamment  du 
reste  du  Psaume  :  ce  sont  alors  des  accommodations 
plus  ou  moins  ingénieuses,  mais  qui  n'ont  pas  de  va- 
leur rigoureusement  exégétique  ou  théologique.  Quel- 
ques Pères  de  l'Église,  pour  l'instruction  des  fidèles, 
ont  appliqué  à  Noire-Seigneur  la  plupart  des  Psaumes, 
comme  on  le  voit  dans  le  commentaire  de  saint  Au- 
gustin; saint  Jean  Chrysostome,  bien  que  plus  attaché 
au  sens  littéral,  le  fait  aussi  quelquefois  et  cherche 
même  à  s'en  justifier  par  le  style  général  des  prophé- 
ties. In  l'salm.  i  a  r//,  t.  i.v,  col.  336. 

Les  Pères  ne  faisaient  en  cela  que  suivre  l'usage  des 
Juifs  qui  avaient  alors  coutume  d'appliquer  à  la  venue 
du  Messie  bien  des  textes  qui  n'ont  pas  d'application 
directe  à  Jésus-Christ,  mais  dont  on  pouvait  se  servir 
à  leur  égard  comme  d'arguments  ad  hom'tnein  ou 
connue  moyen  d'édifier  les  chrétiens. 

X.  Texte  des  Psaumes.  -  I»  Texte  hébreu.  —  Tel 
que  nous  le  connaissons  par  l'hébreu  actuel  et  les  ver- 
sions anciennes,  le  texte  des  Psaumes  n'est  pas  tou- 
jours correct  :  les  versions  ou  de  simples  conjectures 
permettent  de  le  corriger  en  certains  endroits,  mais  le 
plus  grand  nombre  des  altérations  échappe  à  toute  re- 
touche. Comme  plus  ancien  témoin  du  lexte,  nous  avons 
la  traduction  grecque  dite  des  Septante,  deux  siècles 
environ  avant  Jésus-Christ;  nous  avons  au  IIe  siècle  les 
versions  grecques  citées  dans  les  Héxaples  d'Origène, 
principalement  Aquila,  Théodotion  et  Syminaque,  mal- 
heureusement nous  n'en  possédons  que  quelques  frag- 
ments; enfin  vers  le  commencement  du  v  siècle, 
nous  trouvons  la  traduction  de  saint  Jérôme  adressée 
ad  Sophronium  ou  Psautier  secundum  veritatem  he- 
br.aicam.  Quant  au  texte  hébreu  actuel  dit  massorétique, 
il  se  présente  à  nous  avec  fort  peu  de  variantes,  mais  il 
bénéficie  d'une  unité  factice,  les  éditeurs  juifs  ayant 
supprimé  impitoyablement  toutes  les  divergences  des 
manuscrits.  On  peut  ajouter  à  cette  liste  les  citations  du 
psautier  dans  le  Nouveau  Testament  ;  seulement  la 
plupart  sont  faites  non  d'après  l'hébreu  mais  d'après 
les  Septante,  et  très  souvent  sans  l'exactitude  verbale 
absolue  que  réclamerait  la  critique;  enfin  la  version 
syriaque,  faite  sur  le  lexle  hébreu  mais  avec  des  leçons 
ou  des  retouches  dans  le  sens  des  Septante,  et  dont 
l'origine  est  incertaine;  les  Targum  et  le  Talmud  ont 
peu  aidé  la  critique  textuelle. 

On  peut  constater  que  le  texte  dont  saint  Jérôme  s'est 
servi  pour  sa  traduction  était  substantiellement  identi- 
que au  notre,  bien  qu'il  offrit  quelques  divergences 
accidentelles  :  par  exemple  Ps.  ex  (Cix),  3,  au  lieu  du 


tecum  principium  des  Septante  et  de  laVulgate,  il  traduit 
populi  tut  spontanei,  ce  qui  correspond  à  l'hébreu  actuel 
'ammekd neddbôt  dont  i\  a  lu  le  premier  mot  'ammêyka, 
le  pluriel  pour  le  singulier  :  au  lieu  de  liaderêy,  in  splen- 
doribus,  de  l'hébreu  et  des  versions,  il  a  lu  harerêy,  in 
montibus;  avant  ex  utero  il  intercale  ke,  quasi  (de 
vulva);  au  lieu  de  misl.iar,  aurora,  lucifer,'û  lit  izrah, 
orielw, -pour  le  reste  il  le  lit  comme  l'hébreu  actuel,  de 
sorte  qu'il  traduit  tout  le  verset  :  populi  lui  spontanei 
erunt  in  die  forlitudinis  tuœ  in  montibus  sanctis  :  quasi 
de  mira  orielur  libi  ros  adolescentise  tuas,  conformé- 
ment à  l'hébreu  actuel,  au  lieu  de  la  traduction  des 
Septante  et  de  la  Vulgate  :  Tecum  principium  in  die 
virtutis  tuse  in  splendoribus  sanctorum,  ex  utero  ante 
luciferum  genui  te;  Ps.  iv.  3,  au  lieu  de  usquequo  gravi 
corde,  utquid  (diligitis  vanitatem),  il  lit  à  peu  près 
comme  notre  texte  hébreu  :  Usquequo  inclyti  mei  igno- 
miniose,  avec  la  légère  différence  de  kebôdi  pour  kabe- 
dot;Ps.  xi  (x),  1,  il  lit  contre  l'hébreu  et  suivant  les 
Septante  et  la  Vulgate  :  (Transmigra  in)  montent  ùt 
[avis),  Itar  kemô  sippôr  pour  harkém  sippôr;  Ps.  xvi 
(xv),  10  :  (Non  dabis)  sanctum  luum  (videra  corrup- 
tionem),  ce  qui  parait  du  reste  la  leçon  primitive  de 
l'hébreu  que  les  massorètes  n'ont  pas  rejeté  totalement, 
au  lieu  de  sanetos  tuos,  hasidka  pour  Ijasidèka;  Ps. 
xix-xvm,  14,  il  lit  avec  l'hébreu,  mizzedim,  a  superbis 
au  lieu  de  ab  alienis,  mizzarim  des  Septante  et  de  la 
Vulgate;  Ps.  xxn  (xxi),  17,  il  lit  fixerunt  ou  vinxerunt 
.(pedes  meos  et  manus  meas)  au  lieu  de  fodienles  (pe- 
des  meos\,  kaani  pour  ka'arê  ou  ka'ari,  sicut  leo  ; 
xxix  (xxvm), 6,  il  lit  avec  l'hébreu  Sariun,  le  mont  Si- 
non, au  lieu  de  yeSûrûn,  dilectum  des  Septante  et  de 
la  Vulgate;  xlix  (xlviii),  13,  il  lit  avec  l'hébreu  lin, 
commorabitur,  contre  les  Septante  et  la  Vulgate  bin, 
intellexit,  etc.  De  même  pour  les  séparations  et  les  ti- 
tres des  Psaumes,  S.  Jérôme  confirme  l'hébreu  masso- 
rétique;  par  exemple  xliii  (xlii)  il  omet  avec  raison 
l'attribution  psalmus  David  puisque  c'est  une  strophe 
séparée  du  Psaume  précédent.des  Fils  de  Coré  :  dans  le 
Cod.  Amialinus  on  trouve  même  rétablie  la  suscription 
filiis  Cltore;  de  même  encore  contre  les  Septante  et  la 
Vulgate,  et  en  suivant  l'hébreu  il  supprime  au  cxxxvn 
(cxxxvi),  le  Super  flumina  Iiabylonis  le  titre  étrange 
Psalmus  David,  Jeremise.  On  doit  donc  conclure  que 
depuis  saint  Jérôme  le  texte  des  Psaumes  n'a  guère  subi 
d'altération. 

La  même  conclusion  s'impose  quand  on  compare 
l'hébreu  actuel  avec  les  traducteurs  grecs  du  n«  siècle 
cités  dans  les  Héxaples  d'Origène  :  par  exemple  iv,  3, 
ils  lisent  contre  les  Septante  et  la  Vulgate  et  avec  saint 
Jérôme  et  l'hébreu  massorétique,  oi  evSoÇoî  (aou  ou  t| 
2d$a  (iou;  iv,  8,  iitô  xatpo-j,  a  tempore,  pour  a  fruclu 
(frwmenti)  ;  xi-x,  1,  ilslisentcependantavec  les  Septante, 
la  Vulgate  et  saint  Jérôme  (transmigra  in  montent),  w; 
7CE-stvév,  ut  avis,  la  leçon  massorétique  étant  une  faute 
évidente;  xix  (xvm),  14,  à;ro  tùiv  uitepriçâvcov,  a  superbis 
avec  saint  Jérôme  et  le  texte  actuel;  xxix  (xxvm),  6. 
lepiwv  ou  Sapiwv,  le  mont  Sinon,  au  lieu  de  dilectum 
(quemadmodum  'filius  unicornium),  etc.  Voir  Field, 
Origenis  Hexapl.,  1875,  I.  H,  p.  90,  ill,  102,  115,  129  : 
CX(cix),3,  ex  utero  aurorse,  aoi  ôpôuo?  uaiôioT/j-cô;  ao\i 
ou  t|  vedtrjç  oou,  tibi  ros  juventutis  tuœ  au  lieu  de  npô 
iwoçôpo-j  lyè-nr^i  m,  ex  utero  ante  luciferum  genui 
le  des  Septante  et  de  la  Vulgate.  Ibid.,  p.  266.  En  som- 
me les  traductions  du  IIe  siècle  sont  presque  toujours 
favorables  au  texte  massorétique  :  du  reste  on  sait  que 
saint  Jérôme,  qui  lui  est  favorable  également,  n'a  guère 
fait  que  suivre  presque  partout  Aquila,  le  premier  de 
ces  traducteurs,  à  qui  il  ne  trouve  à  reprocher  que  sa 
littéralité  exagérée  et  son  manque  de  goût.  On  peut  dire 
d'une  façon  générale  que  le  Psautier  hébreu  était  au 
temps  de  Notre-Seigneur  sensiblement  ce  qu'il  est  au- 
jourd'hui. Quant  au  Nouveau  Testament,  la  plupart  de 


827 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


828 


ses  citations  du  Psautier  étant  prises  aux  S. 'plante,  il 
n'y  a  guère  de  conclusion  spéciale  ;'i  en  déduire. 

Le  Psautier  est  un  des  livres  de  l'Ancien  Testament  le 
plus  souvent  reproduit  dans  les  manuscrits  grecs:  mais 
c'est  aussi  un  de  ceux  dont  le  texte  a  reçu  le  plus  grand 
nombre  d'altérations  :  les  travaux  critiques  d'Origéne, 
loin  de  lui  conserver  sa  pureté  primitive,  ont  souvent 
même  contribué  à  augmenter  la  confusion,  car  on  a 
parfois  substitué  aux  Septante,  ou  même  on  leur  a  su- 
perposé les  différentes  traductions  grecques  des  Hexa- 
ples,  supprimant  les  signes  diacritiques,  astérisques  et 
obèles,  et  mélangeant  dans  une  même  plirase  des  ver- 
sions différentes  :  ainsi  au  début  de  xxn  (xxi)  nous  li- 
sons à  <9;b;,  6  Qîo;  \i.'i-j,  rcpoff/e;  (loi,  traduit  dans  la  Vul- 
gate  exactement  :  Deus  Deus  meus,respice  in  me  :orce 
sont  deux  traductions  juxtaposées  des  mêmes  mots  hé- 
breux :  'Êli  'Êli,  qu'on  peut  entendre  Deus  meus,  Deux 
meus,  ou  bien  in  tue,  in  me  (sous  entendu  respice). 
Dans  l'Évangile,  Notre-Seigneur  le  cite  selon  l'hébreu  et 
la  traduction  qui  y  est  jointe  omet  le  respice  in  me  des 
Septante.  Eusèbe,  In  Psalm.,  t.  xxm,  col.  204,  fait  aussi 
remarquer  que  rcpoaye;  ;joi  n'a  pas  d'équivalent  dans 
l'hébreu.  Saint  Jérôme  avait  soigneusement  indiqué  ces 
signes  critiques  dans  son  Psautier  exOrigenis  llexaplis 
ou  gallican  ;  mais  là  aussi  les  copistes  les  supprimèrent 
comme  il  s'en  plaint  souvent,  par  exemple  Episl.,  CVT 
55,  t.  xxn,  col.  857  :  Quse  signa  <lum  per  SCriplorum 
Hegligentiam  a  plerisque  quasi  super/lua  relinquun- 
tur,  magnus  in  legendo  error  exorilur.  Toute  cette 
lettre  de  saint  Jérôme  est  pleine  de  remarques  critiques 
analogues  qui  s'appliquent  aussi  bien  au  Psautier  grec 
qu'au  latin.  Au  Ps.  cxxxn  (cxxxi),  i,  on  lit  un  doublet 
d'origine  analogue  :  toïç  fD.ecpipoi;  y.o'j  vuirTayuàv  '•»'■ 
iviita'jffiv  toï;  ■/.paxi.tf'itç  \>.ov,  (si  dedero)  somnum  ocidis 
meis,  et  palpebris  meis  dormi tationeni,  la  seconde 
partie  étant  une  deuxième  traduction  des  mêmes  mots 
hébreux  empruntée  à  Théodotion.  Mans  le  même  Psaume 
nous  lisons,  v.  15,  tïjv  X'^pav  (aùif,;  eùXoytôv  ivkoyffitû) 
riilnam  (ejtts  benedicam  benedicam),  qui  est  une  alté- 
rai i.  n  subséquente  pour  tt|v  fir,pav  :  «  lin  enim  uns/ri 
legunl  viduam  ejtts  benedicens  benedicam. ..in  hebrœo 
habel  Seda  idesl  cibaria  ejus.  »  S.  Jérôme,  Qwest,  he- 
braic.  in  Gen.,  xi.v,  21,  I.  xxm,  col.  1000. 

Mais  les  altérations  les  plus  nombreuses  et  les  plus 
profondes  sont  antérieures  à  la  traduction  grecque  :  les 
scribes  d'alors  transcrivaient  les  textes  hébreux,  et  le 
Psautier  particulièrement,  avec  des  négligences  qui 
contrastent  vivement  avec  le  soin  dont  leurs  succes- 
seurs commencèrent  à  faire  preuve  après  1ère  chré- 
tienne. Dans  le  Ps.  ix-x  (ix  des  Septante  et  de  la  Vul- 
gate),  qui  est  alphabétique,  on  n'a  conservé  que  la  moitié 
ilrs  strophes  primitives,  les  autres  appartiennent  à  une 
composition  différente  et  sans  alphabétisme  :  lesautres 
Psaumes  alphabétiques  sont  copiés  plus  exactement, 
mais  il  y  a  aussi  des  lacunes,  et  souvent  addition  d'un 
verset  linalnon  alphabétique.  Le  début  du  Psaume  vin 

est  évidem ni  altéré  de  même  que  le  v.  3,  lema'au 

sorarêka  lehaibif  ôyeb  u-mitnaqêm,  propter  inimi- 
cos  ut  deslruas  inimicum  et  uliurem;  le  texte  du 
P  mine  xviii  (xvn)  est  fort  différent  de  la  reproduction 
qui  en  est  donnée  dans  II  Sain.  (Keg.,  xxil),  où  le  texte 
semble  meilleur;  le  Ps,  \xiv  (xxm)  a  une  linale  v.  7-10 
étrangère  au  sujet,  le  portraitdu juste;  la  linale  de  xxxix 
(xxxvin)  parait  écourtée:  xi.ii-xi.i et  xi.in-xui  sont  sépa 
rés  sans  raison;  xi. vi  (xi.v)  a  perdu  son  premii  r  refrain 
après  \.  1;  i  ii i  (lu)  et  xiv  (xiii)  identiques  offrent  des 
«triantes  multiples;  i.x  (lu)  et  cviii  (cvn)  dans  leur 
partie  identique  présentent  des  variantes  nombreuses; 
i.xxx  (LXXIX.)  a  perdu  son  troisième  refrain;  i.xxxvm 
i.xvwnj  a  perdu  sa  conclusion;  CVIII  (CVII)  offre  des 
variantes  inattendues  de  i.x  et  i.vm  qu'il  copie;  les  deux 
parties  de  i  \vi,  séparées  dans  les  Septante  et  la  Vul- 
gate.  sonl   réunies  à  tort  dans  l'hébreu,  etc.  Grœtz  a 


raison  de  dire  que  le  Psautier,  précisément  à  cause  de 
son  caractère  populaire,  est  l'un  des  livres  les  plus 
altérés  de  la  Bible,  Kritischer  Kommentar  r»  den 
Psalmen,  ISreslau,  1882,  t.  i,  p.  115;  mais  il  exagère 
outre  mesurequand  il  ajoute  que  o  1res  peu  de  Psaumes 
sont  demeurés  totalement  intacts,  tandis  que  beaucoup 
fourmillent  de  tant  de  fautes  qu'il  sont  devenus  tota- 
lement incompréhensibles,  o  Les  altérations  qu'a  su- 
ides le  texte  des  Psaumes  sont  d'ailleurs  sans  impor- 
tance grave  au  point  de  vue  doctrinal.  Elles  intéressent 
surtout  les  critiques  et  l'on  en  trouve  d'analogues 
dans  tous  les  livres  anciens  qui  ont  été  fréquemment 
transcrits. 

2°  Traduction  des  Septante.  —  Quant  à  la  version  grec- 
que dite  des  Septante,  elle  a  été  faîte  au  deuxième  siè- 
cle avant  Jésus-Christ,  en  un  temps  où  l'hébreu  était 
un  peu  moins  altéré  que  le  texte  massorétique,  maison 
il  avait  déjà  perdu  en  très  grande  partie  son  intégrité 
primitive.  En  outre,  les  interprètes  à  qui  l'on  doit  la 
version  des  Psaumes  sont  de  beaucoup  inférieurs  aux 
traducteurs  du  Penlateuque;  ils  connaissent  l'hébreu 
vulgaire  de  leur  temps,  fortement  aramaïsé,  mais  pa- 
raissent fort  peu  au  courant  de  la  langue  littéraire  clas- 
sique; ils  distinguent  rarement  entre  les  différentes 
significations  d'un  mot;  et  dans  les  passages  difficiles, 
fréquents  dans  les  Psaumes  à  cause  de  leur  caractère 
poétique,  ils  se  contentent  de  traduire  isolément  chaque 
tenue  hébreu  par  un  mot  grec,  sans  se  préoccuper  du 
sens,  ou  de  l'absence  de  sens,  qui  en  peut  résulter 
pour  l'ensemble.  Les  relations  des  mots  entre  eus, 
quand  elles  sont  exprimées  en  hébreu,  le  sont  souvenl 
par  des  particules  fort  différentes  îles  conjonctions  ou 
prépositions  grecques  par  lesquelles  ils  essaient  de  les 
traduire,  le  vav  conjonctif  hébreu  par  exemple,  aignifianl 
à  lui  seul  suivant  les  cas, et,  mais,  ou,  alors, au  contraire, 
parce  que,  quoique,  etc.  :  or,  ils  le  traduisent  presque 
toujours  parxa't,  qui  donne  un  sens  fort  différent;  enfin 
le  verbe  hébreu  exprime  la  modalité,  certaine  et  incer- 
taine, absolue  ou  conditionnée,  el  nullement  la  division 
du  temps,  présent,  passé  ou  futur;  or,  ilsonl  rendu  pres- 
que invariablement  la  modalité  certaine  par  le  passé, 
l'incertaine  par  le  futur.  Il  l'aul  ajouter  que  le  texte  hé- 
breu alors  n'était  pas  ponctué  de  voyelles,  que  les  mois 
n'y  étaient  pas  séparés,  non  plus  que  les  phrases  ni  les 
Psaumes  eux-mêmes.  S'ils  n'ont  pas  commis  plus 
d'erreurs,  il  faut  l'attribuer  à  une  certaine  connais- 
sance traditionnelle  qui  leur  restait  de  la  signification 
des  Psaumes  et  de  leur  emploi  dans  le  [culte  judaïque. 
l.'esl  à  eux  que  l'on  doil  faire  remonter  la  responsa- 
bilité des  nombreux  passages  étranges  que  renier la 

Vulgate. 

3°  Traduction  latine  des  Psaumes  ilans  la  Vulgate. 
—  la  version  latine  en  effet  esl  une  traduction  très 
littérale  des  Septante;  sa  forme  primitive  nous  est 
connue  par  les  citations  des  Pères  èl  quelques  rares 
manuscrits;  outre  les  particularités  de  la  lingua  cn- 
slica  qu'elle  partage  avec  tous  les  textes  bibliques  anté- 
rieurs aux  travaux  de  saint  Jérôme,  elle  a  les  qualités  i  ! 
les  défauts  de  la  version  grecque  du  Psautier  :  texte 
hébreu  plus  ancien  que  la  recension  massorétique,  ei 
multiples  imperfections  des  premiers  traducteurs,  aux- 
quelles vinrent  se  joindre  beaucoup  de  fautes  de  co- 
pistes et  de  multiples  interpolations.  Ce  texte  servit  de 
base  au  premier  travail  de  saint  Jérôme  pendanl  SOU 
séjour  à  Rome  sous  le  pape  saint  Damase;  il  fut  l'ait 
vraisemblable nt  sur  Yllala.  qu'il  revit,  non  sur  l'hé- 
breu, mais  sur  la  Kotvifj  OU  Vulgale  grecque  :  ce  fui  une 
revision  partielle  et  hâtive  :  l'sallcruou  Kom.v  dudum 
positusernendaram...  ;et  juxta  Septuaginta  interprt 
1rs  cursim,...  magna  ex  parle,  dit-il  lui-même;  il 
ajoute  que  le  texte  ainsi  expurgé'  fut  bientôt  altéré  de 
nouveau  :  Scriptorutn  vitio  déprava tum,  puisque  aidi- 
quum  crrnrem,  quam   nnram  cmendalionem    valere. 


8-29 


PSAUMES    (LIVRE    DES 


830 


Praef.  in  Psallerium  sec.  Septuaginla  edii.,  t.  xxix, 
col.  117-118.  Ce  premier  travail  forme  le  Psalle- 
rium romanum,  employé  autrefois  à  Rome  jusqu'à 
saint  Pie  V.  maintenu  dans  le  Missel  et  dans  une  partie 
du  Bréviaire,  ainsi  que  dans  l'office  capitulaire  de 
Saint-Pierre  de  Rome;  saint  Jérôme  en  décrit  le  prin- 
cipal caractère,  ubicumque  sensus  idem  est  (non  dans 
l'hébreu  mais  dans  le  grec),  velerum  interpretum  con 
suetudinem  mulare  noluimus,  nenimia  novitate  lec- 
toris  studium  terrerenius.  Epist.  evi,  t.  xxn,  col.  ^ii, 
et  plus  loin  :  nos antiquam  interpretdtioneni  sequentes, 
quod  non  nocebat,  mulare  noluimus.  Il  lit  ce  pre- 
mier travail  vers  384.  Voir  Jérôme,  t.  m,  col.  1307.  De 
retour  à  Béthléhem,  entre  386-391  selon  le  P.  Van  den 
Gheyn.  ibid.,  sa  première  édition  étant  déjà  fort  corrom- 
pue, il  en  entreprit  une  seconde,  où  il  prit  pour  texte 
l'édition  hexaplaire  des  Septante,  avec  astérisques  et 
obèles,  les  premiers  destinés  à  indiquer  ce  que  les 
Septante  omettaient  de  l'hébreu  el  dont  lui-même  em- 
prunta la  traduction  à  Théodotion.  les  autres  signalant 
au  contraire  ce  qu'ils  \  avaient  ajouté  :  saint  Jérôme 
dit  lui-même  qu'il  avait  fait  celte  seconde  traduction 
<  avec  beaucoup  de  soin,  »  Epist.  ad  Sophro>i.,  t.  XXVIII, 
col.  1126; il  l'appelle»  une  version  nouvelle  »  dansl' Epist. 
ad  Sunniam  et  Fretelam,  t.  xxn,  col.  838;  c'était  donc 
un  travail  critique  où  l'on  pouvait  voir  d'un  seul  coup 
d'œil  la  version  des  Septante  et  sa  comparaison  avec  le 
texte  hébreu  dans  les  passages  qu'elle  avait  en  plus  ou 
en  moins  :  il  n'y  manquait  que  la  retouche  des  en- 
droits où  les  Septante  avaient  traduit  d'une  façon  in- 
suffisante ou  inexacte.  Malheureusement  la  transcrip- 
tion de  tous  ces  signes  critiques  exigeait  trop  de  soins; 
et  malgré  les  prières  réitérées  du  saint  docteur,  on  les 
omit  dans  la  plupart  des  mauuscrits,  de  sorte  qu'on 
cessa  de  distinguer  ce  qui  venait  des  Septante,  ou  de 
Théodotion,  ou  qui  était  surajouté  au  texte  hébreu. 
Dans  cet  état,  et  avec  les  altérations  encore  subies  de- 
puis elle  constitua  le  Psallerium  gallicanum  qui  est 
celui  de  l'édition  officielle  de  la  Vulgate  et  du  Bréviaire, 
et  dont  le  nom  rappelle  sa  diffusion  rapide  dans  les 
églises  de  France  et  de  Germanie  :  dom  Martianay  re- 
niai' |ue  en  effet  que  la  plupart  des  manuscrits  du  Psau- 
tier avec  astérisques  et  obèles  proviennent  de  France, 
et  que  l'Italie  n'en  a  conservé  que  très  peu,  t.  xxvill, 
col.  66.  Saint  Jérôme  ne  dit  pas  qui  l'engagea  dans  sa 
première  retouche;  il  composa  la  seconde  à  la  prière 
de  sainte  Pauleet  d'Eustochinm  ;  enfin,  sur  les  instances 
de  Sophronius,  il  donna  une  troisième  traduction. 

4°  Traduction  nouvelle  de  saint  Jérôme.  —  Elle  fut 
faite  exclusivement  sur  le  texte  hébreu  vers  390-391,  en 
tout  cas  avant  la  lettre  à  Domnion.  t.  xxvm,  col.53-5i.  Il 
donne  les  raisons  de  celte  nouvelle  traduction  dans  sa 
lettre  à  Sophronius,  t.  xxvill,  col.  1  l"2i  :  la  nécessité  de 
donner  à  la  controverse  contre  les  Juifs  une  base  solide, 
ceux-ci  rejetant  les  prophéties  tirées  des  Septante  comme 
ne  rendant  pas  l'original  hébreu  :  ensuite  la  science 
des  Écritures  qui  n'est  véritable  que  si  elle  est  établie 
sur  les  originaux.  Autant  que  nous  en  pouvons  juger 
par  le  peu  de  fragments  qui  nous  en  restent,  Aquila  lui 
servit  surtout  de  guide  pour  le  sens  de  l'original; 
quant  à  la  forme,  il  s'éloigna  le  moins  possible  des  tra- 
ductions connues  jusqu'alors.  Dans  celte  dernière 
œuvre,  il  s'écarte  quelquefois  de  la  version  qu'il  avait 
cru  devoir  donner  de  l'hébreu  dans  d'autres  ouvrages; 
ainsi  Ps.  H,  il  traduit  adorate  pure  au  lieu  de  apprelien- 
dile  disciplinant  des  autres  versions  et  de  adorate  ji- 
lium  comme  lui-même  avait  traduit  précédemment;  il 
répond  même  aux  critiques  que  ce  changement  avait 
excitées,  dans  son  Apologie  contre  Rufin,  i,  19,  t.  xxm, 
col.  413;  en  cela  il  s'accommode  encore  à  la  traduction 
d'Aquila  qui  lisait  y.ï-x^Or^x-i  IvO.e-xtm;,  ou  à  Symmaque 
noo7/.v//:,aïTe  xa6apw;  ;  de  même  dans  le  titre  du  Psaume 
xxn,  il  traduit  d'après  la  plupart  des  manuscrits  :  pro 


cerva  malulina,  tandis  que  dans  le  commentaire  d'Osée, 
1.  II.  t.  xxv.  col.  867,  il  veut  qu'on  lise  pro  cervo  ma- 
tutino,  qu'il  applique  au  Christ.  Le  nom  du  maître  de 
chœur,  menasseah,  est  souvent  traduit  par  viclori,  tan- 
disque  dans  le  commentaire  sur  Daniel, Prsefat.,  t.  xxv, 
col.  492,  il  le  rend  par  pro  Victoria  ;  Ps.  xi,v.  il  rendeic 
domibus  eburneis,  ce  qu'il  traduit  de  templo  denlium 
dans  son  Epist.,  i  xv  ad  Principiam,  t.  xxn,  col.  633; 
Ps.  i.vi,  il  traduit  pone  lacrymam  meam  in  conspecln 
luo,  bien  qu'il   traduise  ailleurs  le  même  mot  no'd  par 
outre,  ce   qui  est  exact;  Ps.    i.xtll.  il  traduit   sitivit  te, 
bien  qu'il   prétende  qu'il  faille  traduire  titi dans  I'Épl- 
tre  xxxv.  ad  Sunniam  et  Fretelam,  t.   xxn,  col.  851); 
Ps.  xci,  1,  Saddai  est  traduit  in   umbraculo  Domini, 
tandis  que   le    même   mot  est  rendu  Deum  sublime»! 
dans  Ezéchiel  et  robuslum  el  sufficientem  ad  omuia 
dans   VEpisl.,  xxv,   ad  Marcellam,  t.  xxn,  col.    129; 
Ps.    Cil,     7,    il    traduit   quasi    bubo,    et   dans  VEpisl. 
ad  Sunniam  et  Fretelam,  t.  xxit,  col.  859,  quasi   no- 
cluo  ;  Ps.  civ,  il  traduit  pelra  refugium  hericiis,  et  dans 
la   même   lettre   refugium   cuniculi.    —    D'une  façon 
plus  générale   on  doit  lui  reprocher  d'admettre  trop 
facilement  et  trop  universellement  l'intégrité  absolue  du 
texte  hébreu,  de  V/iebraica  veritas, ainsi  qu'il  s'exprime 
après  Origène  et  Eusèbe  :  de  la  sorte  il  essaie  de  donner 
un  sens  à  des  passages  altérés  qui  en  sont  dépourvus, 
comme  Ps.  vin.  3;  exu,    5-7;  il  traduit   dans  les  titres 
canticum  psalmi  ou  psalmus  cantici,  les  deux  appel- 
lations cantique,  psaume,  juxtaposées  comme  variantes 
et    entre    lesquelles    il    faut    seulement    choisir:  il  se 
montre  trop  attaché  aux  traductions  de  ses  devanciers, 
surtout  du  juif  Aquila,  rendant   comme  lui  les  termes 
techniques  d'une    façon    étrange,    miktam,    ode,  par 
i  David)  humble  el  parfait,  sélah,  pause  après  les  stro- 
phes, par  toujours,  joint  à  la  phrase  précédente;  beau- 
coup de  noms  propres  sont  traités  comme  noms  com- 
muns, et  rendant  la  phrase  inintelligible  :  tels  dans  le 
Ps.  LXvin,  Saddai,  nom  divin,  Basan,  montagne,  deve- 
nus robuslissimus  et  pinguis;  il  faut  enfin  lui  reprocher 
trop  de   servilité  dans    la    traduction    des   modes    du 
verbe  hébreu,  qu'il  fait  trop  régulièrement  correspondre 
au  prétérit  ou  au  futur  latins,  et  trop  d'uniformité  dans 
celle  des  particules  :  ainsi  Ps.  ex,  il  traduit  -.percussit  in 
die  furoris  sui  reges,  judicabit   in  genlibus,  implecil 
valles,  perculiel  caput  in   terra  milita;  or  c'est  une 
description  dont    tous    les    verbes    devraient    être    au 
même   temps;  Ps.    cxvi   il    traduit    :    credidi  propice 
quod  locutus  sum,  au  lieu  de  confîdebam  etiain  quando 
diiebam,  etc.  Toutefois  ces  critiques  de  détail  ne  doi- 
vent pas  faire  méconnaître  la  valeur  de  cette  version 
du  Psautier  :  elle  est  au  contraire  ce  qu'il  v  a  de  plus 
parlait  comme  traduction  dans   l'œuvre    du   saint  doc- 
teur, et  même  les  commentateurs  protestants  comme 
Delitzsch  en  font  le  plus  juste  éloge  :  ils  en  ont  même 
donné  plusieurs  éditions  critiques,  telles  que  celle  de 
P.   de  Lagarde,  Leipzig,  1874,  et  celle   de  Tischendorf, 
Baer  et  Frz.  Delitzsch.  Leipzig,  1874.  On  la  trouve  au^si 
dans  les  éditions  des  œuvres  de  saint  Jérôme.  Voir  le 
tableau  col.  831-832. 

XI.  Casokicité.  —  Le  Psautier  est  l'un  des  livres 
bibliques  dont  la  canonicilé  est  la  plus  facile  à  établir  : 
ou  plus  exactement,  elle  n'a  jamais  été  contestée,  hor- 
mis par  les  sectes  qui  ont  nié  la  divinité-  de  l'Ancien 
Testament,  gnostiques  ou  manichéens.  Les  Psaumes 
sont  cités,  exactement  comme  lesautres  textes  bibliques, 
dans  I  Machabées.  iv,  24:  vu.  16;  dans  II  Machabées  ' 
on  rappelle  qu'ils  eurent  place  dans  la  bibliothèque 
sacrée  de  Néhémie,  II,  13.  Dans  le  prologue  de  l'Ecclé- 
siastique, ils  sont  évidemment  compris  dans  les  for- 
mules générales  qui  désignent  les  hagiographes  ou  troi- 
sième partie  de  la  Bible  hébraïque,  ti  Xoiità  tûv  pi8).s(ov, 
.t  sont  explicitement  désignés  dans  le  précis  historique 
qui  forme  la  seconde  partie  de  ce   livre,  xi.vn.  8-11.  Le 


831  PSAUMES    (LIVRE    DES)  832 

TABLEAU  COMPARÉ  DU  PS.  IV  DANS  LES  REVISIONS  ET  TRADUCTION  DE  SAINT  JÉRÔME 


PSALTERIUM  ROMANUM. 

1  .M  U    PSAI  MUS  DAVID  .    CAHTU  UM. 


i  .mu  invocaiem  te,  exaudisti  me,  Deus 
justifia:  meœ  : 

in  tribulatione  dilatasti  mihi. 
Mi  ierere  mibi,  Domine,  etexaudi  ora- 
Uonem  meam. 
Filii  bonainum, usquequo  gravi  corde? 
utquid  diligitis  vanitatem,  et  quae- 
ritis  mendacium? 

DIAPSALMA. 

Scitote  quoniam  magnificavit  Dorninus 
sanctum  suura  : 

Dorninus  exaudiet  me,  dum  clama- 
vero  ad  eum. 
Iraseimihi,  et  nolite  peccare  : 
qua    dicitîs  in   cordibus  vestris,  el 
in  cubUibus  vestris  corapungimini. 

Dl  M'SAl.MA. 

Sacriticate  sacrificium  justitîse, 

et  sperate  in  Domino. 
Multi  diennl:  quïs  oslendit  nobis  bona? 
signatum  est  super  nos  lumen  vultue 
lui,  Domine. 
i  ii  disti  Isetitiam  in  corde  meo  : 
a  tempore  frumenti,  vini  et  olei  sui 
multijilieati  sunt. 

In  pace  in  idipsum  obdormiam  et  rc- 
quiescam  : 

quoniam  tu  Domine  singulariter  in 
spe  constituisti  me. 


PSALTERIUM  GALLICANUM. 

IN    F.NBU,    IN   CARMINinuS,    FSALMUS    !>.« 


Cum    invocarem,    exaudivit   ine   Deus 
justitiaï  i  j  i  »  ■  :  *  •  : 

in  tribulatione  dilatasti  mihi. 
Miserere  mei  :  etexaudi  orationem  me 

[a  m 
Filii  hominum,  usquequo  gravi  corde? 
£r  ut  quid    X  diligitis  vanitatem,  ■==  et  J 
(]ii.:'i'itis  mendacium? 

Dl  IPSALMA. 

tH  Et  J  sci'.ote  quoniam  mirificavit  Do- 
minus  sanctum  suum  : 

Dorninus  exaudiet  -3  nie  %  cum    cla- 
mavero  ad  eum. 

Jrascimini  et  nolite  peccare  : 
\r    quœ    +    dicitîs  in  cordibus  vestris, 
in  cubilibus  vestris  compungimini. 

DIAPSALMA. 

s  icrih  ate  saci  ilivum  justiti  -•:. 
et  sperate  in  Domino  : 
multi  dicunt  :  quis  ostendit  nobis  bona  ? 
Signatum  est  super  nos  lumen  vultus  lui. 
Domine. 

dedisti  la-titiam  in  corde  meo. 
A  fructu  fruinenli  et  vini  -^-  et  olei  J  soi  : 
multiplicati  sont 

In  pace  in  idipsam,  dormiam  et  requies- 
cam  : 

Quoniam  tu.  Domine,  singulariter  in  spe 
constituisti  me. 


PSALTERIUM  Jl'XTA 
HEBRAIl  AM  VERITATEM. 
TORl    [X    PSALHIS,  CAKTICUJJ  DAVID. 


in\  ocantem  me  exaudi  me,  Deus  justitiœ 

niea-. 

in  tribulatione  dilatasti  mihi  : 
Miserere  mei:  et  exaudi  orationem  ineam. 

Filii  viri,  usquequo  inclyti  mei  îgnorni- 
niuse 

diligitis  vanitatem  quaerentes  menda- 


cium  7 


SEMPER 


Et  cugnoscite  quoniam  mirabilem  reddi- 
dit  Dorninus  sanctum  suum, 

Dorninus  exaudiet  cum  clamavero  ad 

OUI  II. 

Irasciinini  et  nolite  peecare, 
loquimini   in    cordibus  vestris  super 
cubilia  vestra  et  tacete. 

SEMPER. 

Sacriticate  sacriûcium  jusiiri;i- 

et  lidite  in  Domino. 
Multi  dicunt  :  quîsoslendil  nobis  bonum  ? 
leva  super  nos  lucem  vultui  tuï,  Do- 
mine. 

Dedisli  ketitiam  in  corde  meu 
a  tempore  Erumentum  et  vinum  eoi  mu 
multiplicata  "sunt, 
In  pace  simul  requiescam  el  dormiam, 

quia  tu.  Domine,  specialiler  securum 
habitare  fecisti  me. 


I 


La  première  colonne  comprend  le  Ps.  IV  d'après  la  première  recension  hier  on  3  mienne  ;  la  seconde  le  même  psaume  avec 
les  astérisques  et  obèles  :  les  astérisques  indiquent  les  passages  que  Théodotion  avait  déjà  ajoutés  aux  Septante,  et  qui  étaient 
dan-,  l'hébreu  sans  être  dans  leur  version;  saint  Jérôme  les  lui  emprunte  et  les  traduit  :  par  exemple  Et  scitote.  Les  obèles 
marquent  au  contraire  les  mots  qui  n'ont  pas  d'équivalent  dans  l'hébreu,  tels  que  utquid,  et  olei,  etc.,  el  qu'il  veut  faire 
con  idérer  comme  non  existants.  Son  texte  de  la  seconde  colonne  correspond  assez  généralement  au  texte  officiel  de 
Vulgate,  avec  cette  notable  différence  qu'on  en  a  éliminé  les  astérisques  et  les  obèles  dont  il  écrivait  :  Qua  diligenter  emen- 
davi,  cum  cura  et  diligentia  transcribantur.  Notet  sibi  unusqutsque  veljacentem  tineam  vel  signa  nui  mu  tia  :  idest  vel 
obelos,  vel  astericos.  Aussi  cette  suppression  des  signes  critiques  donne-t-elle  parfois  un  sens  tout  opposé  .1  celui  qu'avait  en 
vue  le  traducteur.  —  La  troisième  est  celle  du  Psalterium  ad  Sopkronium  ou  juxta  tiebraicam  veritatem,  où  il  faut 
remarquer  la  traduction  des  versets  :  Filii  viri,  loquimini  in  cordibus,  leva  super  nos,  a  tempore  [quo]  frumentum,  etc. 
qui  -"Ht  très  exactement  rendus.  Toutefois  les  termes  techniques  ne  sont  pas  exactement  traduits,  le  maître  de  chœur  par 
victori,  pause  par  semper.  Sain!  Jérôme  a  emprunté  ces  traductions  au  Juif  Aquila. 


Il  livre  des  Rois  (Samuel),  xx,  2-31,  avait  déjà  cité  comme 
davidique  le  Psaume  wui,  en  ajoutant,  xxi,  2,  que 
0  l'Esprit  de  Jéhovah  avait  parlé  par  (lui]  et  que  sa  parole 
étail  sur  [ses]  lèvres;  »  1  Par.,  xvi,  8-36,  fait  aussi  au 
Psautier  un  long  emprunt,  mais  sans  formuler  aucune 
appréciation  sur  sa  canonicité ;  il  témoigne  seule- 
ment qu'ils  servaient  aux  usages  lilurejqm -s,  il  l'ai,, 
vil,  <>,  \\i\,  :iO  :  voir  de  même  I  Ksil..  m,  10,  el  11  Esd., 
XII,  ï~*.  Les  Psaumes  ne  suscitèrent  jamais  chez  les 
Juifs  les  doutes  qui  parurent  au  sujet  du  Cantique,  de 
l'Kcclésiaste,  elc.  (Juant  au  Nouveau  Testament,  il  ne 
lui  que  continuer  la  tradition  juive  :  il  cite  souvent  le 
Psautier  comme  portion  de  l'Écriture  et  fait  même  du 
nom  des  Psaumes  une  désignation  pour  tous  les  hagio- 

graphes:  in  prophetis  et  psalmis,  Luc,  xxiv,  44;  outre 
les  références  générales  il  en  est  de  spéciales  pour.Notre- 
Seigneur,  Lue.,  w,  \-i  ;  les  Apôtres,  saint  Pierre,  Act.,  i, 

20;    \tii,    33;    saiul    Jean,    11,     17;    saint    Paul,     Rom., 

tu,  13-18;  llek,  1,  5 -11,  '.'  etc. ;  elles  forment  plus  de 
la  moitié  îles   citations  de  l'Ancien  Testament  par   le 

Nouveau. 

Aussi  figurent-ils  dans  tous  les  canons,  môme  les  plus 
exclusifs,  de  l'antiquité  :  Meliton  de  Sardes,  Origène, 
Athanase;  ils  se  trouvent  dans  lous  les  Pères,  cités  ou 


commentés;  ils  forment  le  livre  de  l'Aucun  Testament 
qu'on  rencontre  le  plus  fré  [uemment,  el  vie  beaucoup, 
dans  les  manuscrits  :  ils  se  trouvent  dans  toutes  les  listes 
conciliaires  et  versions  officielles  <Ie  l'Orient,  de  l'Église 
grecque  et  de  L'Église  latine. 

(juant  aux  attaque  dont  ils  ont  été  L'objet,  elles  ve- 
naient de  L'erreur  générale  des- gnostiques ou  des  mani- 
chéens qui  attribuaient  L'Ancien  Testament  en  entier  an 
mauvais  principe,  créateur  de  la  matière  :  c'est  pourquoi 
ce  livre  fut  rejeté  par  eux  el  les  nicolaites.  Philastre, 
H  aères.,  t.  xti,  col.  1199,  1259.  Théodore  de  Mopsueste 
l'ut  condamne,  non  parce  qu'il  les  rejetait,    mais   parce 

qu'il  avait  exagéré,  au  sujet  de  quelques  Psaumes,  le 
littéralisme  historique  tloni  il  faisait  profession  dans 
l'explication  de  l'Écriture,  spécialement  îles  Ps.  xxit 
(xxij  et  xly  1x1  vil  :  Codicem  in  prophetiam  Psalmorum 
conscripsil,  omnes  de  l>t>utn/,>  prsedicliones  abnegan- 
tem...  Judaicte  impietatis  viaticum.  Mansi,  Gollect. 
concil.,  17b\i,  t.  ix,  212-213.  Cf.  Patr,  gr.t  t.  i.xvi. 
col.  30,  32,  111-112,  (ili.î.  C'est  pourquoi  il  fut  con- 
damne par  le  I  Ve  Concile  de  Constanlinople. 
Quant  aux  Psaumes  que  Paul  de  Samosate  remplaça 

par   des    cantiques    à  sa    louante    personnelle,  Ce    pour 

quoi  il  fut  condamné  par  Le  concile  d'Antioche,  c'étaient 


833 


PSAUMES    (LIVRE    DES) 


83  i 


des  compositions  liturgiques  récentes,  et  non  le  Psau- 
tier biblique.  Eusèbe,  //.  i'.,  vil,  30,  I.  xx.  col.  71:!. 
Dans  les  deux  derniers  documents  conciliaires  où  l'on 
affirme  la  canonicité  de  ce  livre,  il  faut  noter  la  diffé- 
rence des  désignations  :  le  concile  de  Florence  l'avait 
désigné  sous  le  titre  de  Psalterium  Davidis;  le  Con- 
cile de  Trente,  reproduisant  le  même  décret,  changea 
ces  termes  en  Psalterium  davidicum  pour  éviter  de 
paraître  enseigner  l'origine  exclusivement  davidique  du 
Psautier,  tandis  qu'il  ne  voulait  qu'attester  sa  canoni- 
cité. Theiner,  Acla  conc.  Tridentini,  t.  i,  p.  "il  sq. 

XII.  Usage  des  Psaumes  dans  l'Église  chrétienne. 
—    Pour   les    chrétiens,    le    fait  indubitable   que   les 
Psaumes  ont  été  souvent  récités  par  le  Christ  donne  à 
ce  recueil  une  autorité  et  un  attrait  tout  particuliers  : 
dans  sa  passion  il  répète  le  Deus  Deus  meus,  quare  de- 
reliquisli  nie  ?  et  In  nianus  tuas  commendo  spiritum 
meum,  comme  des  textes  absolument  familiers,  et  pres- 
que les  seules  paroles  qu'il  ait  prononcées  alors.  Dans 
sa  vie  mortelle,  bien  que  l'Évangile  n'en  dise  rien,  il  dut 
souvent  réciter  les  Psaumes  à  la  synagogue,  au  temple, 
aux  fêtes  juives, aux  pèlerinages  à  Jérusalem  :  la  narration 
de  la  Cène  nous  atteste  qu'il  y  dit  YBallel  de  la  Pique. 
11  s'en  sert  également   dans   6a  prédication  :  le   Beali 
mites  quoniam  i}>si  possidebunt  terrant, est  l'abrégé  du 
Psaume  XXXVII  ixxxvi);  le  Dixit  Dominas  lui  sert  pour 
enseigner  sa  libation  divine;  le  Lapident  quem  reproba- 
verunt  xdificantes,  pour    expliquer  l'aveuglement  des 
Juifs;  le  Benedictus  qui  venit  in  noniine  Domini  est  ap- 
pliqué par  Jésus  au  retour  final  des  Juifs;  le  Ex  ore  in- 
fanlittttt  et  lactentium  perfecisti  laudem  estappliquéà 
son  entrée  triomphale  dans  le  Tempje.  Ce  livre,  outre 
l'inspiration  qui    lui  est  commune  avec  tous  les  livres 
de  l'Écriture,  a    donc  eu   le   privilège  d'être  la  prière    I 
même  du  Christ,  et  il  est  encore  pour  ainsi  dire  tout   [ 
imprégné  des  sentiments  mêmes  de  Jésus  :  il  n'y  a  que 
l'Oraison  dominicale   à  quoi  on  puisse  te  comparer. 
On  comprend  que  l'Eglise  ait  toujours  cherché  à  s'unir 
aux   pensées  et  aux  affections  du   Fils  de  Dieu,  en  re-    j 
prenant  le  Psautier  comme  sa  principale  prière.  Elle 
ne  faisait  du  reste  que  continuer  les  usages  de  la  Sy-   i 
nagogue.  Voir  Hali.el,  t.  ni,  col.   401.  Saint  Paul   l'y 
engage  instamment  dans  deux  textes  parallèles  ;  Loquen- 
tes   vobismelipsis   ia   psalmis  et  hymnis  et   canticis   \ 
spiritualibus,  caillantes  et   psallentes  m   cordibus  ve- 
stris  Domino,  Eph.,  v,  19;  Commonentes  vosmetipsos 
psalmis,   hymnis  et  canticis  spiritualibus,  in  gratta 
cantantes  in  cordibus  vestris  l>eo.   Col.,  m,    16.   Les   i 
psalmi  idiotici  ou   de  composition  nouvelle  et  chré- 
tienne, s'y  ajoutent  peu  à  peu  sans  les  supplanter,  ce 
sont    les    hymnis  et    canticis    spiritualibus    de    saint    | 
Paul,  et  il  semble  même  qu'on  en  retrouve  des  rest>  - 
dans  ses  propres  Épitres.  1  Tim.,  m,  16.  Terlullien,  De 
anima,  ix,  t.  n,  col.  660,  rapporte  qu'une  visionnaire  de 
son  temps  dont  la  mention  revient  plusieurs  fois  dans 
ses  écrits,  avait  des  extases  en  correspondance  avec  les 
différentes  parties  de  l'office  public,  selon  que  Scripturœ 
leguntur,  psalmi  cantintur,  allocutiones  proferunlur 
aut  petitiones  delegantur.  On  constate  que  le  peuple 
prit  peu  à  peu  une  place,  mais  généralement  modérée, 
à  cette  récitation,  comme  autrefois  chez  les  Juifs  où  il 
répondait  :  Quoniam  in  œtermtm  niisericordia  ejus; 
les  séries  de  Psaumes  étaient   interrompues  par  quel- 
que  oraison,  ou   par  quelque   antienne    ou   doxologie 
dite  en  chœur  par  l'assistance  :  dans  certaines  Églises 
comme  Alexandrie  et  Rome,  c'était  une  récitation  plutôt 
qu'un  chant;  ailleurs   c'était   un    chant    véritable.    De 
même  la   fréquence  des   versets  redits  en  chœur  était 
différente   :  soit  après  plusieurs  Psaumes,  soit  après 
chaque  Psaume,  soit    même  après    quelques  versets. 
Saint  Basile  emploie  le  terme  de  kvti<J/3XXsiv  i  >  >  r,  >  o  i  : . 
«  psalmodier  en  deux  chœurs,  o  Epist.,  ccvn,  t.  xxxn. 
col.  764.  Saint  Ambroise  institua  une  psalmodie  ana- 

DICT.   DE  LA    BIBLE. 


logue  à  Milan.  Notre  office  romain  a  conservé  la  trace 
de  ces  trois  récitations.  L'alternance  proprement  dite, 
par  deux  chœurs  qui   lisent  successivement  tous  les 
versets  du  Psaume,  introduite  d'abord  en  Syrie,  passa 
de  là  dans  les  églises  d'Egypte,  de  Palestine,  ;i  \ntioche. 
.'   Césarée,  puis  à  Constantinople  et  en  Occident,   en 
commençant  par  Milan,  au  temps  de   saint   Ambroise. 
Voir   Batiffol,   Histoire   du    Bréviaire   mutant,    1893, 
I'.  .\  23;  Bâumer,  Histoire  du  Lieertaire,  trad.   liiron. 
1905,  t.  i,  p.  1-2,  52,  170-178,  etc.;  (Bacuez,)  Du  saint- 
Paris.  1872,  p.  89-109. 
Outre  la  récitation  liturgique,  l'Église,  surtout  dans 
les  siècles  passés,  a  toujours  grandement  estimé,  con- 
seillé et   pratiqué    la   récitation    privée  des   Psaumes, 
divins   par  leur  origine,  sanctifiés  par  l'usage  qu  en 
ont  fait  les  saints  de  l'Ancien  et  .lu  Nouveau  Testament, 
et   surtout   Jésus-Christ.    Les   lettres  de  saint   Jérôme 
nous  montrent  l'usage  qu'on  en  faisait  de  son  temps  ; 
dans  son  Eloge  de  sainte  Paule,  t.  xxn,  col.  891-896.  on 
voit  combien  les  paroles  de  ce  livre  lui  étaient  fami- 
lières; elle   s'en  servait  contre  ses  ennemis,  ou   pour 
s'exciter  à  la  patience,  pour  se  consoler  dans  la  tristesse, 
pour  se  résigner  à  la  perte  des  siens,  pour  exciter  ses 
désirs  du  ciel;  «  elle  désira  même  d'apprendre  l'hébreu, 
ajoute-t-il;  et  elle  vint  tellement  à  bout  de  son  dessein 
qu'elle    chantait   les   Psaumes  en  hébreu,  et   le  parlait 
sans  y  rien  mêler  de  la  prononciation  latine  ;  ce  que  nous 
voyons  faire  à  sa  sainte  fille  Eustochium.  «  Dans  une 
lettre   de   sainte  Paule  à  Marcelle,  t.  xxn,  col.  191.  elle 
écrit  elle-même  qu'«  à  Bethléhemil  n'y  a  que  le  chant 
des  Psaumes   qui  rompe    le  silence,  le  laboureur  gui- 
dant sa  charrue  chante  Alléluia,  le  moissonneur  tempère 
le  poids  du  jour  et  la  chaleur  par  léchant  des  Psaumes; 
le  vigneron  en  taillant  la  vigne  a  toujours  à  la  bouche 
quelque  passage  de  David.  »  Saint  Jérôme,  écrivant  à 
La  'la,  Epist.,  evi,  t.  xxn,  col.  871,  876,  pour  l'éducation 
de  sa  fille,  lui  recommande  «  de  ne  lui  laisser  apprendre 
aucune  chanson  profane,  mais  seulement  à  chanter  les 
Psaumes;  »   il  veut  ensuite  que    ■   au  lieu  de  perles  et 
de  riches  habits,  elle  recherche  surtout  les  livres  sacrés, 
non  pas  les  mieux  enluminés,  mais  les  plus  corrects  et 
les  plus  capables  de  fortifier  la   foi;  qu'elle  commence 
par  apprendre  le   Psautier,  qu'elle   prenne  plaisir  à  le 
chanter.   »    Ecrivant  à    Gaudentius    sur  l'éducation    à 
donner  à  Pacatule,  il  conseille  de  même  :  -  Quand  elle 
sera  parvenue  à  sa  septième  année,  qu'elle  apprenne  le 
Psautier  par  cœur.     Epist.,  i.xxii.  t.  xxn,  col.  1098.  Saint 
Ambroise,  à    la    même   époque,  écrit   «   qu'un  homme 
sensé  aurait  honte  de  terminer  sa  journée  sans  la  réci- 
tation  de   quelque    Psaume;     ■>    qu'a    l'église,  «   alors 
qu'il  est  si  difficile  d'obtenir  le  silence  pendant  qu'on 
lit   les    leçons  ou   que   l'orateur  essaye    de  parler,  dès 
qu'on  lit  le  Psaume,  cela  suffit  à  faire  faire  le  silence  ; 
la  psalmodie  réunit  les  âmes  divisées,  réconcilie  dans  la 
discorde,   apaise   le    ressentiment   des   offenses...    On 
éprouve  autant  de  joie  à  le  chanter  qu'on  gagne  de 
science  à  l'apprendre.    »    S.  Ambroise,  In    Psalnt.   i, 
t.   XIV,  col.  9-25.   Ce  chant  des   Psaumes  à  Milan  avait 
produit  une   profonde   impression   sur  saint  Augustin 
qui  parait  même  se  reprocher  le  plaisir  qu'il  prenait  a 
entendre  les  mélodies  ambrosiennes.  Confess.,  IX,  VI- 
vn  ;  X,   xxxui,  t.  xxxn.  col.  769-770,  800.  Son  peuple 
d'Hippone   était  si  familier  avec  le  texte  sacré  qu'il  ne 
voulut   pas   corriger   les   fautes  de   latin   de  la  version 
africaine,  et  qu'il  laissait  chanter  dans  le  Psaume  cxxxn- 
cxxxi  ;  Super  ipsum  autem  floriet   (pour  efflorebit) 
sancti/icatiomea.  De  doctr.  cliristiana,  xiu,  t.  xxxiv, 
col.  45.  L'Église  orientale    les  avait  en   égale  estime  et 
en  faisait  le  même  usage  :  le  texte  cité  de  saint  Ambroise 
est  pris  presque  textuellement  à  saint  Basile,  liomil.  in 
Ps.  i,  t.  xxix,  col.  212,  qui  ajoute  :  «  Les  plus  indolents, 
c'est-à-dire  le  grand  nombre,  ne  retiennent  même  pas 
un  verset  des  prophètes  ou  des  Epitres;  mais  pour  les 

V.  -  27 


835 


PSAUMES    (LIVRE    DES 


836 


Psaumes,  ils  les  chantent  aussi  bien  chez  eux  qu'en  pu- 
blic... Et  quel  enseignement  n'y  puisons-nous  pas.'  l'éclat 
de  la  force,  la  perfection  de  la  justice,  la  gravité  de  la 
tempérance,  la  plénitude  de  la  prudence,  la  manière  de 
faire  pénitence,  la  juste  mesure  de  la  patience,  en  un 
mot  toute  sorte  de  biens!  Là  se  trouve  une  théologie 
parfaite,  là  les  prophéties  de  l'Incarnation,  la  menace 
du  jugement,  l'espérance  de  la  résurrection,  la  crainte 
du  supplice,  les  promesses  de  la  gloire,  la  révélation 
des  mystères;  tout  cela  se  trouve  dans  le  Psautier 
comme  dans  un  grand  et  riche  trésor.  »  Théodoret 
s'exprime  d'une  façon  presque  identique  dans  la  Pré- 
face de  son  Commentaire,  t.  lxxx,  col. 857. 

XIII.  Beauté  des  psaumes.  —  Sur  ce  fond  tout  divin 
fourni  par  l'inspiration,  les  auteurs  du  Psautier  ont  jeté 
leur  empreinte  personnelle,  en  le  colorant  des  pensées  et 
des  sentiments  les  plus  variés,  les  plus  grandioses,  les 
plus  vifs,  les  plus  profonds  et  les  plus  humains  vis-à- 
vis  de  Dieu,  de  son  temple,  de  sa  cité  sainte,  de  sa  loi. 
de  sa  création  tout  entière,  du  peuple  croyant,  des  na- 
tions infidèles,  des  destinées  du  monde  ou  des  néces- 
de  "l'existence  personnelle.  A  la  vérité  la  langui' 
hébraïque  manque  de  nuances  et  de  précision,  elle  n'a 
pas  la  souplesse  et  la  logique  de  nos  idiomes  :  mais  les 
Psaumes  n'y  perdent  guère,  ils  y  prennent  plutôt  un 
caractère  d'universalité  et  de  grandeur  hiératique  d'où 
esl  banni  tout  ce  qui  est  trop  personnel  et  trop  étroit, 
trop  étudié  ou  trop  mesquin  :  leur  rythme  poétique, 
grâce  au  parallélisme,  à  la  strophe  ou  au  refrain,  est 
facilement  traduisihle  en  nos  langues;  et  leur  grandeur 
un  peu  abstraite  permet  à  chacun  de  se  les  appliquer. 
Rien  n'estbeau,  dansaucune  poésie,  comme  les  Psaumes 
messianiques:  Quarefremuerunt  génies  ;Deusjudicium 
tuUm  régi  da;  Misericordias  Do  mini;  Dixit  Dominas; 
rien  n'est  grandiose,  recueilli,  coloré  et  varié'  comme 
tes  tableaux  delà  création  dans  Domine  Do  m  in  us  noster; 
l'.œli  enarrant;  Benedic  anima  mea  Domino;  comme 
li  peinture  de  la  tempête  dans  le  Diligam  te  el  Afferte 

Domino  :  rien  n'est  sublime  C( ne  la  description  des 

attributs  de  Dieu  dans  le  premier  Benedic  anima  mea]; 
1  i  Domine probasti  me. Aucun  sanctuaire  vénéré,  aucune 
des  cités  du  monde  antique  n'ont  été  aimés,  (liantes. 
glorifiés  et  pleures  connue  Jérusalem  et  son  temple  dans 
hs  Psaumes  religieux,  triomphants,  prophétiques  ou 
élégiaques  des  lils  de  Coré  et  d'Asaph.  Le  groupe  des 
cantiques  graduels  (Psaumes  du  pèlerinage  hiérosoly- 
mitain)  est  plein  de  vie,  de  fraîcheur,  de  naïveté,  d'en- 
thousiasme; il  donne  les  leçons  de  la  foi  la  plus  sublime 
et  de  la  morale  la  plus  pure  dans  une  langue  simple, 
aniline  et  populaire.  Aucune  littérature  n'a  rien  qui 
égale  l"  sentimenl  de  confusion,  de  repentir,  de  con- 
fiance aussi  dans  le  pardon  divin  des  Psaumes  de  la 
pénitence,  surtout  du  Miserere  et  du  De  profundis. 
Aucune  histoire  n'a  été  décrite  comme  celle  d'Israël 
dans  les  trois  Psaumes  Confitemini,  VExtirgat,  Vin 
exilti  Israël;  nulle  religion,  nulle  philosophie  n'a  été' 
exposée,  développée,  méditée  et  surtout  exaltée  el  aimée 

COI e   la    loi    de  Jéhovah    dans    les    Psaumes  moraux 

i,  cxix(cxvin).  Aussi  saint  Jérôme  pouvait-il  écrire  dans 
sa  Prmf.  m  Chronic,  Euseb.,  t.  xxvn,  col.  36  :  Quid 
Psallerio  canorius,  quod  in  morem  nostri  Flacci 
et  Grssci  Pindari  nunc  iambocurrit,  mine  alcaïco  per- 
sont ii  '  L'impression  de  beauté  el  de  perfection  ne 
fuit  que  s'accroître  si  l'on  met  en  face  des  Psaumes 
hébreux  les  chants  religieux  dos  autres  peuples.  Védas. 
;,  textes 'égyptiens,  psaumes  assyriens  et  babylo- 
niens :  ces  derniers  sont  ceux  qui  se  rapprochent  le 
plus  de  nu.  Psaumes;  mais  malgré'  des  coïncidences 
partielles,  ils  en  demeurent  encore  séparés  de  toute  la 
distance  de   l'humain  au  divin. 

XIV.  Lies  PSAUMES  ET  LA  RÉCITATION  DU  BRÉVIAIRE.  — 
La  récitation  du  Bréviaire  crée  pour  ceux  qui  y  sont 
obligés,  une  véritable  nécessité  de  faire  une  étude  spé- 


ciale du  Psautier,  non  seulement  abstraite  et  purement 
scientifique,  mais  encore  au  point  de  vue  spécial  de  la 
prière.  Il  est  incontestable  que  cette  étude  doit  être 
basée  sur  le  sens  littéral  des  Psaumes,  sur  celui  que 
le  Saint-Esprit,  leur  auteur,  avait  en  vue,  et  non  pas 
sur  les  accommodations  plus  ou  moins  arbitraires  par 
lesquelles  on  s'évite  la  peine  de  pénétrer  jusqu'au  sens 
véritable.  Le  reproche  de  saint  Jean  Chrysostome,  dans 
son  commentaire  sur  les  Psaumes,  serait  plus  grave, 
s'il  s'appliquait  aux  ecclésiastiques,  qu'il  ne  t'était 
adressé  aux  fidèles  qu'il  instruisait  :  Vosi/ni  ab  infanlia 
ad  extremam  usque  seneclutem  Psalmum  hune  médi- 
tantes, nihil  aliud  i/nain  verba  lenetis,  i/uid  aliud 
facitis  nisi  quod  thesauro  absconso  nssidelis,  el  obsi- 
gnalam  crumenam  circumfertist  In  Ps.  r.xi.,  t.  i.v, 
col.  127.  Ce  serait  négliger  une  portion  obligatoire  et 
principale  de  la  science  ecclésiastique,  se  priver  du 
vrai  moyen  de  dire  pieusement  le  saint  office  el  re- 
noncer à  une  véritable  jouissance  spirituelle  non 
moins  qu'intellectuelle.  Il  faut  donc,  principalement 
pour  le  nombre  relativement  restreint  des  Psaumes  de 
récitation  fréquente,  s'appliquer  à  en  saisir  le  sens 
général,  en  bien  préciser  le  sujet,  à  voir  surtout  l'en- 
chaînement des  idées,  souvent  indiqué  par  la  division 
slrophique,  sans  vouloir  néanmoins  que  dans  la  réci- 
tation l'esprit  s'attache  à  tous  les  détails,  ni  même 
exiger  que  dans  l'étude  préalable  il  en  approfondisse 
d'abord  toutes  les  obscurités.  Il  ne  faut  pas  quitter  ee 
sens  littéral  dans  la  récitation  des  Psaumes  théologiques, 
messianiques  ou  moraux  du  Bréviaire.  Les  premiers 
nous  dépeignent  Dieu,  ses  attributs,  la  création,  son 
gouvernement  du  monde,  sa  justice,  sa  miséricorde  et 
finalement  sa  royauté  établie  sur  toute  création;  les 
secondes  décrivent  les  gloires  du  Messie,  ses  souffrances, 
son  empire  sur  les  nations  et  nous  servent  à  nous  unir 
à  la  prière  qu'il  fait  lui-même  à  son  Pore  :  Postula  a 
me,  et  John  libi  génies  hxredilalem  luam.  Ps.  u,  8. 
('.'est  l'accomplissement  de  sa  loi  en  nous  et  dans  les 
autres  que  nous  devons  demander  dans  les  Psaumes 
moraux,  tels  que  i,  xvm  (xix),  el  surtout  cxwn  (CXIïJ, 
dont  chaque  verset  est  comme  la  répétition  des  de- 
mandes du  Pater , adveniat  regnum  tuum,  fiai  voluntas 
tua.  Les  Psaumes  relatifs  à  Jérusalem,  à  sa  beauté,  à 
ses  épreuves,  à  ses  triomphes,  aux  destinées  glorieuses 
que  Dieu  lui  réserve,  sont  des  chants  prophétiques  qui 
ont  bien  plus  en  vue  l'Église  et  la  Jérusalem  céleste  que 
celle  de  la  terre,  comme  on  le  voit  dans  i.xxxvi  (lxxxvii), 
i  \\i  iXXMi,  cxi.YII,  et  autres.  Les  Psaumes  historiques, 
outre  leur  sens  propre  déjà  suffisant  à  remplir  l'esprit 
des  pensées  de  la  puissance,  de  la  bonté-  et  de  la  justice 
de  Dieu  dans  la  conduite  d'Israël,  ont  en  outre  un  sens 
figuratif  ou  spirituel,  suivant  la  doctrine  de  saint  Paul 
el  de  toute  l'Écriture  :  Hier  omn'm  in  figura  conlinge- 

t'inil  Mis.   1  Cor..  X,  II.  C'est  ainsi  que    le  Psaume  CX 

(Ah  relatif  à  la  sortie  l'Egypte,  aux  prodiges  du  désert, 

à  la  pro Igation  de  la  loi.  à  la  prise  de  possession  de 

la  Palestine  est  appliqué  par  les  Pères  à  la  conversion 
des  nations,  à  leur  évangélisation,  aux  biens  ipirituels 
■  le  I  Église,  à   la    patrie  céleste;  ou    peut   (lire  i|ii 

est  l'interprétation  générale  dans  saint  Augustin,  Enar- 
rationes  in  Psalm.,  t.  x.xxvn,  col.  67-1966.  Enfin  les 

Psaumes  personnels  sont  rédiges  de  telle  sorte  que  leur 

texte,  loin  d'être  particulier  à  David,  à  Asaph  ou  aux 

autres  Psalmistes.  trouve  une  application  facile  a  la  vie 
intime  de  chacun  des  lecteurs,  comme  déjà  on  en  voit 
la  remarque  dans  saint  Athanase,  Epis  t.  ad  Mon  film.. 
t.  xxvn,  col.  lit  :  Hoc  sibi  proprium  el  admiran 
habet  quod  eliam  uniuscujutque  animi  moins  eorum- 
que  niutationes  et  catligaliones  m  se  descripta  et 
expressa  contineat...  singulis  in  rébus  quisque  repe- 
net  divina  cantica  ad  nos  noslrosque  motus  »no- 
mumque  temperationes  accommodala.  Les  Psaumes 
de  la  pénitence,  ceux  de  recours  à  Dieu  au  milieu  des 


837 


PSAUMES    (LIVRE    DES)    ■       PSAUMES    APOCRYPHES 


838 


adversités,  de  la  maladie,  de  la  vieillesse,  des  ennemis, 
des  calomniateurs,  conviennent  merveilleusement  à 
l'Église,  et  à  chaque  âme  chrétienne  au  milieu  de  ses 
épreuves  intérieures  et  extérieures,  péchés,  tentations, 
misères  de  toute  espèce.  On  trouvera  le  développement 
de  ces  indications  'générales  dans  Bacuez,  Du  Saint- 
Office,  1872,  p.  101-109;  Vigoureux,  Manuel  biblique, 
1895,  t.  Il,  p.  358-363;  Bossuet.  Explication  du  Psautier; 
dom  Martianay,  Les  Psaumes  de  David  et  les  Canti- 
ques de  l'Église,  1705  ;  Wolter,  Psallile  sapienler,  1883  ; 
Ad.  Schulle,  Die  Psalmen  des  Breviers,  1907. 

XV.  Bibliographie.  —  Une  bibliographie  des  com- 
mentaires du  Psautier  absolument  complète  serait  d'une 
longueur  démesurée  et  sans  utilité  :  nous  nous  borne- 
rons à  mentionner  les  principaux,  et  pour  l'époque  des 
Pères  d'après  l'ordre  de  la  patrologie  de  ïligne.  — 
I"  S.  llippolyte.  In  Psahnos  fragmenta,  t.  x,  col.  606- 
616,  71 1-724 ;  Origène,  Selecla  in  Psalmos,  t.  xn, 
col.  1013-1685;  Homiliœ  in  Ps.  xxxvi-xxxviua  Ru/ino 
translata:  et  excerpla  e  calenis,  t.  su,  col.  1319-1410; 
t.  xvil,  col.  105-149;  ce  sont  les  restes  de  ses  TÔgiot, 
ayjcù.ia  et  des  6u,iMat  sur  les  Psaumes;  y  joindre  pour 
le  texte  et  sa  critique  Field,  Origenis  fieœaplorum  quse 
supersunt,  t.  Il,  p.  83-305.  Eusèbe  et  Théodoret  chez 
les  Grecs,  saint  Hilaire  et  saint  Ambroise  chez  les  la- 
lius,  lui  ont  beaucoup  emprunté,  c'est  ce  qui  explique 
les  coïncidences  verbales  qu'on  remarque  entre  eux. 
Eusèbe  de  Césarée,  Commanlarii  in  Psalmos,  t.  xxui. 
col.  65-1396;  t.  xxiv,  col.  9-76;  commentaire  utile  et 
nullement  influencé  par  les  idées  un  peu  ariennes  de 
l'auteur;  S.  Athanase,  Epist.  ad  Marcellinitm,  t.  XXVII, 
col.  11-46;  Exégèses  in  Psalmos,  t.  xxvn,  col.  55-546; 
De  tilulis  Psalmorum  t.  xxvn,  col.  645-1344;  l'une 
et  l'autre  d'authenticité  douteuse;  Fragments,  t.  xxvn, 
col.  547-590;  S.  Basile.  Homiliœ  in  Psalmos,  t.  xxix, 
col.  209-494;  Pseudo-Basile,  t.  xxx,  col.  72-117;  Apolli- 
naire de  Laodicée.  Explication  métrique  des  Psaumes 
(fragments),  t.  xxxn,  col.  1313-1537;  S.  Didyme 
d'Alexandrie,  Explication  des  Psaumes  (fragments), 
t.  xxxix,  col.  1155-1615;  Astérius  d'Amasa,  Homélies 
sur  les  Psaumes  v-vil,  t.  xi.,  col.  389-4-77;  S.  Grégoire 
de  Xysse,  Sur  le  titre  des  Psaumes,  t.  xliv,  431-608; 
Explication  du  Psaume  VI  (fragment),  ibid.,  col.  608- 
615;  S.  Jean  Chrysostome,  Exposilio  Psalmorum  (in- 
complet), long,  moral,  mais  aussi  littéral  et  intéres- 
sant, t.  I.v,  col.  35-528;  fragments  douteux,  t.  I.v, 
col.  527-784;  Théodore  de  Mopsuesle.  Fragments,  t.  i.xm, 
col. 641-696;  (voir  aussi  Batiffol,  Lillér.  grecque,  1897, 
p.  297);  S.  Cyrille  d'Alexandrie,  Interpret.  Psalmo- 
rum (incomplet),  t.  i.xix,  col.  699-1274;  Théodoret, 
Interprétatif  Psalm.,  t.  lxxx,  col.  857-1998  (le  plus 
utile  parmi  les  Grecs,  avec  S.  Jean  Chrysostome)  ;  Euthy- 
mius  de  Zigabène,  Comment.,  t.  cxxvm,  col.  41-1326 
(formé  d'extraits).  —  Pères  latins  :  S.  Hilaire  de  Poi- 
tiers, Traclalus  su/ter  Psalmos  :  c'est  Origène  abrégé, 
traduit  et  expurgé,  t.  ix,  col.  231-908;  S.  Ambroise, 
Enarraliones  in  xil  Psalmos  (xxxv-xl,  mil,  xi.v.  xlvh, 
xi.vin,  lxi)  et  Exposilio  in  Psalmum  CXVIII,  t.  xiv. 
col.  921-1526;  oratoire  et  moral  plus  qu'exégétique; 
S.  Jérôme,  Liber  Psalmorum  juxta  hebraicam  verita- 
tem,  traduction  soignée  sur  l'héhreu,  t.  xxvm,  col.  1123- 
1210;  Excerpla  de  Psalterio  ou  Enchiridion  beaii  Hie- 
ronymi  in  Psalmos,  publié  par  D.  Morin  sous  le  titre  : 
Sancti  Hieroni/mi,  qui  deperdili  hactenus  pulabantur, 
commentarioli  in  Psalmos,  Maredsous,  1895;  Epistolse, 
t.  xxn,  col.  433,  441,  837;  Breviarium  in  Psalmos  (non 
authentique,  mais  formé  d'extraits  de  saint  Jérôme  et  au- 
tres);  t.  xxvi,  col.  821-1300,  trop  allégorique;  S.  Augus- 
tin, Enarraliones  in  'Psalmos,  t.  xxxvn,  col.  67-1966 
(commentaire  moral  et  pieux  ;  tout  y  est  appliqué  au 
Christ  et  à  lame  chrétienne  ;  il  est  abrégé  dans  S.  Pros- 
per  d'Aquitaine,  Exposilio  in  Psalmos  c-CL,  t.  u, 
col.  277-426);   Cassiodore.   Exposilio   in    Psalterium, 


t.  i.xx,  col.  9-1056;  et  un  inconnu  placé  parmi  les  œu- 
vres de  Rulin,  ///  i  \w  Davidis  Psalmos  commenta- 
ntes, t.  xxi,  col.  641-960. 

2"  Le  moyen  âge  ne  lit  que  compiler  les  Pères, 
quelques-uns  en  y  ajoutant  des  raisonnements  et  une 
forme  scolastique  :  on  peut  citer  Bède,  Richard  de 
saint  Victor,  Pierre  Lombard,  saint  Thomas  d'Aquin, 
saint  Bonaventure,  Denys  le  Chartreux  ;  Nicolas  de  Lyre 
et  Paul  de  Burgos  emploient  des  sources  rabbiniques, 
l'un  dans  ses  Pcstillœ,  l'autre  dans  ses  Additiones  édi- 
tées avec  la  Biblia Maxima  cum glossadu  moyen  âge;  on 
y  retrouve  assez  confusément  les  opinions  de  Raschi  de 
Troyes,  Aben-Ezra  et  David  Ivimchi.  Sur  les  commen- 
taires des  Juirs  médiévaux,  voir  Frz.  Belitzsch,  Kom 
mentar  itber  den  Psalter,  Einleitung,  1873,  t.  i.  p.  41, 
ou  la  traduction  anglaise,  1895,  t.  i,  p.  55-57. 

3»  Auteurs  modernes  :  M.  A.  Flaminius  :  In  librum 
Psalmorum  brevis  exposilio,  1515;  Jansenius  Ganda- 
vensis.  Paraphrasis  in  omîtes  Psalmos  Davidicos,  1614; 
Génébrard,  Commentarius  in  Psalmos,  15S2  (dans 
Migne,  Cursus  Complétas  S.  Sacrée,  t.  xiv-xv);  Agelli, 
Commentarius  in  Psalmos,  1611;  Bellarmin,  Expla- 
nalio  in  Psalmos,  1611  ;  Simon  de  Muis,  Commentarius 
in  omîtes  Psalmos  cum  versione  nova,  1630;  Bossuet, 
Liber  Psalmorum,  1690;  Notse  ni  Psalmos  cum  disser- 
latione  in  libr.  Psalmorum,  Lyon,  1691  :  Supplenda  in 
Psalmos,  Paris,  1693;  Bellenger,  Liber  Psalmorum 
cum  nolis,  1629;  Reinke,  Die  Messianischen  Psalmen, 
ls.57  1858;  Scheg,  Die  Psalmen,  1857;  Rohling  Die 
Psalmen,  1871  ;  Thalhofer,  Erklârung  der  Psalmen, 
Ratisbonne,  1880;  Wolter,  Psallile  Sapienler,  1883; 
Bickell,  Der  Psalter,  1884;  Van  Steenkiste,  Commenta- 
rius in  librum  Psalmorum,  1870;  Patrizi,  Cenlo  Salmi 
tradotli  e  commenlati,  1875;  Minocchi,  1  Salmi  tra- 
duit! dal  tesloebraicii,  1895,  1902;  H.  Laurens,  Job  et  les 
Psaumes,  1839;  de  la  Jugie,  Les  Psaumes  d'après  l'hé- 
breu, 1863;  Mabire,  Les  Psaumes  traduits  en  français 
sur  le  texte  hébreu  1868;  Le  Ilir.  Les  Psaumes  traduits 
de  l'hébreu  en  lalin  avec  la  Vulgate  en  regard,  Paris, 
1876;  Lesêlre,  Le  livre  des  Psaumes,  Paris,  1883;  Fil- 
lion,  Les  Psaumes  commentés  selon  la  Vulgate  et 
l'hébreu,  1893;  Crampon,  Le  livre  des  Psaumes,  tra- 
duction sur  la  Vulgate  avec  sommaire  cl  notes,  18S9; 
Flument,  Les  Psaumes  traduits  en  français  sur  le 
texte  hébreu,  1898;  Boulleret,  Les  Psaumes  selon  la 
Vulgate,  leur  véritable  sens  littéral,  Paris,  1902;  M.-B. 
d'Eyragues,  Les  Psaumes  traduits  de  l'hébreu,  Paris, 
1904;  E.  Pannier,  Les  Psaumes  d'après  l'hébreu  en 
double  traduction,  Lille,  1908.  —  Hétérodoxes  :  '  Ro- 
senmûller,  Scholia  in  Psalmos,  1821-1823;  'de  Wette, 
Commenlar  itber  die  Psalmen,  4e  édit.,  1836;  "Hitzig, 
die  Psalmen,  1863-1865;  '  Hengstenberg,  Commenlar 
itber  die  Psalmen,  2e  édit.,  1815-1852;  '  Ewald,  Poel. 
Bûcher  des  A.  B.,  t.  u,  2' édit.,  18S6;  "Hupfeld-Riehm, 
Die  Psalmen,  4»  édit.,  1867-71  :  '  Hupfeld-Nowack,  188S; 
'  Graetz,  Kritischer  Kommenlar  :u  den  Psalmen,  1882- 
1883;  'Frz.  Delitzsch,  Commentai'  itber  den  Psalter, 
1859-60;  5e  édit.,  1894  ;  Delitzsch-Bolton,  traduction  an- 
glaise revisée,  1895;  '  Duhm,  Die  Psalmen  erkl&rl,  1899, 
dans  le  Hantl-Commeitlardc  Marti;  'Perowne,  TheBook 
of  Psalms,  1878;  '  Cheyne,  The  Booh  of  Psalms,  1888. 

E.  Pannier. 

2.  PSAUMES  APOCRYPHES.  Indépendamment  des 
«  Psaumes  de  Salomon  »  (col.  840),  on  connaît  quel- 
ques Psaumes  apocryphes,  peu  importants.  —  Leur 
forme  extérieure  est  en  gros  celle  des  Psaumes  cano- 
niques. Les  pensées  sont  pour  la  plupart  littéralement 
extraites  des  écrits,  poéliques  et  autres,  de  l'Ancien 
Testament.  Le  plus  connu  de  ces  Psaumes  est  celui 
qu'on  trouve  dans  les  Septante,  à  la  lin  du  Psautier, 
sous  le  chiffre  eu.  D'après  son  titre,  il  aurait  été 
composé  par  David,  en  souvenir  de  son  combat  avec 
Goliath;   il    est    désigné     en   propres    termes,    dans 


839 


PSAUMES    APOCRYPHES    —    PSAUMES    DE    SALOMON 


S40 


ce  même  titre,  comme  étant  o  en  dehors  du  nombre  » 
canonique  de  [50.  C'est  une  composition  pseudépigra- 
phique,  qui  a  pour  base  les  récits  de  I  Reg.,  xvi,  1-13, 
et  xvn,  1-51.  Saint  Jérôme  l'a  traduit  en  latin,  comme 
les  autres  Psaumes-.  Voir  Pialterium  jvxta  Hebrseos 
Hieronymi,  édit.  de  Lagarde,  1874,  p.  151-152;  F.  Vi- 
gouroux.  \la)i,<el  biblique,  t.  n,  12«  édit.,  p.  476.  Le 
traduit  en  français,  d'après  la  version  syriaque 
publiée  par  M.  Wright;  elle  contient  quelques  variantes 
intéressantes. 

1.  J'étais  le  plus  jeune  parmi  mes  Frères 

Et  un  jeune  homme  dans  la  maison  de  mon  père. 

2.  Je  faisais  paître  le  troupeau  de  mon  père  ; 
Et  je  trouvais  un  lion  et  un  loup. 

Et  je  les  tuais  et  les  mellais  en  pièces. 

3.  Mes  mains  firent  une  flûte. 

Et  mes  doigts  fabriquèrent  une  liarpe. 

4.  Qui  me  montrera  mon  Seigneur'.' 

Lui,  mon  Seigneur,  est  devenu  mon  Dieu. 
h.  Il  m'a  envoyé  son  ange, 

El  ii  m'a  pris  derrière  le  troupeau  de  mon  père. 
Et  il  m'a  oint  avec  l'huile  d'onction. 

6.  Mes  frères,  eux,  beaux  et  grands, 

Le  Seigneur  ne  s'est  pas  complu  en  eux. 

7.  El  je  sortis  à  la  rencontre  du  Philistin, 
Et  il  me  maudit  par  ses  idoles. 

8.  Mais  je  tirai  son  ëpée  et  je  coupai  sa  tète, 
Et  j'enlevai  l'opprobre  des  fils  d'Israël. 

En  ISS".  M.  William  Wright,  a  publié  dans  les 
Proceedings  nf  the  Society  of  Biblicnl  Archeolcgy, 
l.  IX,  Londres,  p.  2Ô6-2G6,  en  syriaque  et  en  anglais, 
sans  noies  ni  commentaires,  cinq  Psaumes  apo- 
cryphe*, découverts  par  lui  dans  un  manuscrit  sy- 
riaque qui  appartient  actuellement  à  la  bibliothèque 
de  l'Université  île  Cambridge.  A  pari  le  premier,  qui 
reproduit  le  Ps.  eu,  ces  poèmes  étaient  inédits 
jusqu'ici.  Le  manuscrit  dont  ils  font  partie  contient 
un  traité  de  théologie  composé  par  un  évêque  nommé 
K lie.  qui  vivait  \ers  l'an  920  de  notre  ère.  Voir  Asse- 
mani,  Bibliolheca  orientalis,  l.  ni.  1™  part.,  p.  258- 
259.  Ce  manuscrit  ne  remonte  guère  au  delà  de  1700. 
(In  trouve  aussi  les  cinq  Psaumes  dans  un  autre  ma- 
nuscrit du  même  ouvrage,  daté  de  l'an  1703,  conservé 
à  la  bibliothèque  du  Vatican.  Les  titres  qui  les  précé- 
dent en  attribuent  trois  a  David,  y  compris  le  premier 
d'entre  eux,  qui  correspond  au  Ps.  CLi;  un  autre  est 
attribué  à  Èzéchias;  un  autre  est  sans  nom  d'auteur. 

Le  second  a  pour  titre  :  «  Prière  d'Ézéchias,  lorsque 
ses  ennemis  l'entouraient;  »  ce  qui  fait  évidemmenl 
allusion  à  la  situation  décrite  IV  Reg.,  xvm,  13-xi.x, 
37,  et  1s.,  xxxvi,  I xxxvn,  38.  —  Le  troisième  mor- 
ceau de  la  petite  collection  syriaque  publiée  par 
M.  Wright  mériterait  une  attention  spéciale.  Il  est 
intitulé  :  <i  Lorsque  le  peuple  reçut  de  Cyrus  la  per- 
mission de  renlrer  dans  la  patrie.  »  Quoique  l'auteur 
parle  à  la  première  personne  du  singulier,  c'esl  moins 

en  son  n personnel  qu'en  celui  de  loute  la  nation 

théocratique  qu'il  présente  a  Dieu  sa  prière  et  sa  re- 
connaissance  anticipée.  Voir  W.  Baethgen,  Die  l'sal- 
nien  ûbersetzt  und  erklârl,  Goettingue,  1892,  p.  iv  et 
xi..  C'est  le  plu*  long  de  tous;  il  a  vingt  versets.  —  Du 
quatrième,  il  est  dit  qu'il  fui  o  prononcé'  par  David, 
n  il  lut!. lit  avec  le  lion  el  le  loup  qui  ravissaient 
une  brebis  de  son  troupeau.  »  Il  n'est  pas  sans 
quelque  couleur  locale  : 

1.  (i  Dieu,  G  Dieu,  \  iens  i  mon  si urs. 

sauve-moi  : 

Délh  re  m  n     ■ e  l'égoi  jeur. 

'l.  Irai-je  dans  Le  -        i  des  ris  par  la  gueule  du  lion? 

i  mi  Le  I  uj ci  nvni'.i-i-ii  «le  confusion? 

3.  N  '  i      ilr  tendu  des  embûches  au 

i)  Dupeau  de  mon  i  ère, 

Et  mi-  'i      ■  .m  .i.-  mon  père? 

détruire  ma 


'i.  Vie  pitié,  Seigneur,  et  sauve  ton  saint  de  la  destruction 
Afin  qu'il  puisse  racontei  tes  louanges  dans  tous  les  temps 
Et  qu'il  puisse  louer  ton  grand  nom, 

5.  Lorsque  tu  l'auras  délivre  des  mains  (lu  lion  destructeur  et 

lilu  loup  furieux, 
Et  lorsque  tu  auras  délivré  ma  captivité  des  mains  des 

[bètes  fauves. 

G.  Vite,  ô  mon  Seigneur,  envoie  devant  moi  un  sauveur, 
Et  tire-moi  de  la  fosse  béante  qui  m'emprisonne  dans  9es 

[profondeurs. 

Le  cinquième  Psaume  fut  e  prononcé  par  David 
lorsqu'il  rendit  grâces  à  Dieu,  qui  l'avait  délivré  du  lion 
et  du  loup,  après  qu'il  les  eut  tués  l'un  et  l'autre.  "  Il 
a  également  six  versets,  g  Toutes  les  nations  sont  in- 
vitées à  louer  Dieu  de  celle  délivrance. 

Personne  ne  s'est  prononcé,  que  nous  sachions.  sur 
l'origine  de  ces  cinq  Psaumes.  Le  premier,  ou  cli*  des 
Seplante,  est  assez  ancien.  Les  quatre  autres  pour- 
raient bien  appartenir  à  la  même  époque.  .Mais  les  do 
cumenls  l'ont  défaut,  de  sorte  qu'on  ne  saurait  se  pro- 
noncer avec  certitude  à  ce  sujet. 

.1.  A.  l'ahricius  a  publié  depuis  longtemps  déjà,  en 
latin,  Codex  pseudepigraphus  Veteris  Testamenli, 
2  édit.,  Hambourg,  1822,  t.  I,  p.  21-2G.  deux  pré- 
tendus «  Psaumes  d'Adam  et  d'Eve,  i  Ces  deux  pièces 
ne  méritent  guère  d'attirer  l'attention.  Connue  le  dit 
Fabricius,  loc.  cit.,  p.  21,  c'est  un  franciscain  portugais, 
nommé  Amodéus,  né  en  1474,  qui  les  mit  par  écrit 
à  la  suite  d'une  révélation  qui  les  lui  aurait  fait  con- 
naître. Le  premier  aurait  élé  composé  par  Adam,  après 
la  création  d'Eve.  C'esl  un  développement  assez  peu 
poétique  de  Gen.,  n,  20h-24;  on  y  annonce  indirecte- 
ment la  naissance  du  Messie  :  l'ilius  ex  maire  sine 
I  (ihe  orielur.  —  Le  second  Psaume,  qui  est  censé  avoir 
été  composé  après  la  chule  de  nos  premiers  parents, 
contient  sept  strophes  assez  étendues,  qui  sont  allri- 
buées,  la  première  à  Adam,  la  seconde  à  Eve,  la  troi- 
sième, la  quatrième  el  la  cinquième  à  Adam,  la  sixième 
et  la  septième  a  K\e.  Il  exprime  les  gémissements,  les 
sentiments  de  contrition,  la  demande  de  pardon  d'Adam 

et  d'Eve  après  leur  péché.  Chaque  strophe   ci lenci 

par  les  mots  :  Adonai,  Domine  Ueus,  secundum  ma- 
gnant misericordiam  tuant  miserere  met. 

L.    FlLLION. 

3.    PSAUMES    Dï    SALOMON,  livre    apocryphe.    - 

[.Histoire  etnature  de  ce  recueil.  —  Ondésigne  par 
ce  litre  i'IV/W:  XoXou.£>vto;)  une  petite  collection 
pseudépigraphique,  qui  se  compose  de  dix-huil 
poèmes  rédigés  sous  la  forme  des  anciens  psaumes,  et 
qui  compte  parmi  les  meilleurs  el  les  plus  intéressants 
des  écrits  apocryphes  de  l'Ancien  Testament. 

I»  Transmission  et  éditions  principales.  —  L'anti- 
quité chrétienne  mentionne  1res  rarement  ce  psautier. 
Non*  ne  possédons  même  .i  son  sujet  aucune  citation 
patristique  bien  nette.  Lactance,  De  divin,  instil.,  iv, 
12.  t.  vi,  col.  'i 7 '. » .  signale  un  lexio  emprunté,  dit  il,  à 
la  «  10"  ode  île  Salomon,  ornais  qui  n'a  rien  de  commun 
avec  le  contenu  de  nos  dix-huit  psaumes,  quoiqu'il 
semble  supposer  leur  existence.  Pins  lard,  il  esl  ques- 
tion de  ce  recueil  d'une  manière  directe  dans  plusieurs 
lisles  du  canon  chrétien  de  l'Ancien  Testament.  On  le 
i.iiili'  tantôt  parmi  les  Anlilegomena,  avec  les  livres  ,i,  s 
Machabées,  la  Sagesse  de  Salomon,  l'Ecclésiastique, 
Judith,  Tobie,  etc.  —  c'est  le  cas  pour  la  Synopsis  |du 

pseililo-Alhanase,  I.  XXVIII,  col.  150,  el  pour  la  Slicho- 
mélrie  île  Xiri  phore,  cf.  Kicephori  opuscula,  éd.  de 
Béer,  Leipzig,  1888,  p.  13',,  et  T.  Zahn,  Gescliichte  de» 
neutestamenll.  Kanons,  t.  II,  p.  200  —  tantôt  parmi 
les  apocryphes  proprement  dits,  avec  le  livre  d'HénOCh, 
Le  Testament  des  douze  patriarches,  les  apocalypses  de 
Moïse  et  d'Esdras,  etc.  Il  est  encore  cité  par  deux 
ailleurs  byzantins  du  xn,?  siècle.  Zonaras  et  T.  Balsa- 
mon.  Voir  Beverngius,  Pandectse  canonum,  Oxford, 
1672,  t.    i.   p.    181,  'i'.  Zahn,  loc.  cil.,   I.   Il,  p.   288-289. 


8il 


PSAUMES    DE    SALOMON 


842 


Au  moyen  âge,  il  n'est  plus  question  des  Psaumes 
de  Salomon,  et  ils  avaient  depuis  longtemps  disparu. 
lorsqu'ils  furent  publiés  à  Lyon,  en  1626,  d'après  un 
manuscrit  de  la  bibliothèque  de  Vienne  (Autriche),  par 
le  jésuite  J.-L.  de  la  Cerda,  comme  appendice  à  son 
ouvrage  intitulé  Adversaria  sucra,  in-4».  Voir  0.  von 
Gebhardt,  dans  Texte  und  Untersuchungen,  t.  xiii, 
fasc.  2,  p.  1-8. 

il  ne  faut  pas  confondre  ces  psaumes  avec  les  cinq 
o  odes  de  Salomon  o  que  l'auteur  de  l'écrit  gnostique 
PislisSophia  a  incorporées  à  son  livre;  elles  en  diffèrent 
essentiellement,  Voir  Migne,  Dictionnaire  des  Apo- 
cry)>lws,  t.  i,  col.  955-108;  Munter,  Odœ  gnoslicse.  Salo- 
moni  tributm,  Havnia?,  1812;  A.  llarnack,  Texte  und 
Untersuchungen,  t.  vu,  fasc.  2,  1891,  p.  35-49;  Ryle  e1 
James,  Psalms  of  the Pharisees,p.  xxm-xxvn,  155-161. 

Pendant  très  longtemps,  on  se  contenta  de  l'édition 
princeps,  fort  imparfaite,  publiée  par  le  P.  de  la  Cerda. 
Celle  de  J.  A.  Fabricius,  imprimée  en  1713  dans  le 
Codex  pseudepigraphus  Veteris  Testamenli,  in-8<>,l.i, 
p.  914-999,  n'en  est  guère  que  la  reproduction  tant  soit 
peu  modifiée.  La  première  édition  scientifique  fut  celle 
de  A.  Ililgenfeld,  dans  la  Zeitschrift  fur  wissenschafl- 
liche  Théologie,  1S6S,  p.  13H68,  et  dans  le  Messias 
Judseorum,  in-8»,  Leipzig,  18(39.  p.  1-38;  niais  elle 
n'avait  pareillement  pour  base  que  le  manuscrit  de 
Vienne,  corrigé  d'après  des  conjectures  plus  ou  moins 
heureuses.  Il  en  estde  même  des  deux  suivantes,  pré' pa- 
rées l'uneparun  savant  catholique,  Ephrem  Geiger,  Der 
Psaller  Salomo's  herausgegeben  und  erklârt,  in-8", 
Augsbourg,  1871,  l'autre  parle  DrFrilzsche,  Libriapocry- 
pln  Veteris  Testamenti  grstee,  in-8".  Leipzig,  1871.  p. 569- 
589.  Une  sixième  édition,  par  M.  B.  Pick,  fut  insérée 
dans  la  Presbyterian  Revieio,  1883,  p.  775-812.  Celle 
de  MM.  11.  E.  Ryle  et  M.  R.  James.  H'imoi  2o).0[1(5vto;, 
Psalms  of  the  Pharisees,  commonly  called  tlie  Psalms 
of  Solomon,  in-8°,  Cambridge,  1891,  réalise  de  sérieux 
progrès,  car  ces  savants  purent  collationner  des 
manuscrits  nouvellement  découverts.  Vint  ensuite  celle 
du  D1  H.  B.  Swete,  dans  l'ouvrage  OUI  Testament  in 
Greek  according  to  the  Septuagint,  in- 12,  t.  m,  Cam- 
bridge, 1894;  2«  édit.,  IS99.  p.  765-787.  La  plus  récente 
et  la  meilleure  de  toutes  est  celle  d'O.  von  Gebhardt, 
qui  a  pu  consulter  des  rnanuscrils  plus  nombreux  en- 
core, découverts  au  mont  Albos  el  ailleurs;  elle  a  paru 
dans  les  Texte  und  Untersuchungen  zur  Geschichte 
der  altchristlichen  Lileralur,  t.  xm.  fasc.  2,  in-8°, 
Leipzig,  1895,  sous  ce  titre  :  Die  Psalmen  Salomo's  :um 
ersten  Maie  mit  der  Benulzung  der  Alhoshandschrif- 
ten  und  des  Codex  Casanatensis  herausgegeben. 

2°  Forme  extérieure.  —  La  forme  de  ces  poèmes  est 
celle  des  Psaumes  canoniques  qu'ils  imitent  très  osten- 
siblement sous  le  rapport  des  pensées,  du  style,  de  la 
marche  générale,  du  genre  poétique.  Ils  font  de  fréquents 
emprunts  à  l'Ancien  Testament,  dont  on  entend  sans 
cesse  l'écho  en  les  lisant.  Ils  sont  très  simples  pour  la 
plupart  et  dépourvus  d'originalité,  d'élévation  poétique, 
bien  qu'ils  renferment  quelques  beaux  passages.  Voir 
en  particulier  les  psaumes  n,  îv,  vm,  xi,  xvn  et  xvm. 
Chacun  d'eux  a  son  unité,  son  plan  bien  déterminé.  Le 
parallélisme  des  membres,  ce  trait  essentiel  de  la  poésie 
hébraïque,  y  apparaît  avec  toutes  ses  nuances;  mais  il 
manque  habituellement  d'art  et  de  distinction.  —  A  part 
le  1".  les  Psaumes  de  Salomon  sont  munis,  comme 
ceux  du  Psautier  canonique,  d'une  petite  inscription, 
qui  en  désigne  l'auteur  prétendu,  T<fi  Io),io|tùv;  le 
sujet.  «  sur  Jérusalem,  contre  la  langue  de  ceux  qui 
sont  opposés  à  la  loi,  »  etc.;  la  nature,  «  psaume  », 
«  parmi  les  hymnes  »,  «  dithyrambe  ».  On  trouve 
aussi,  xvu,  31,  et  xvm.  10,  l'expression  8(ai|/ot).u.a,  qui, 
dans  les  Septante,  représente  l'hébreu  sèlal*  et  qui 
parait  supposer  un  emploi  liturgique  des  Psaumes 
qu'elle  accompagne. 


II.  Sujet.  —  Le  sujet  traité  par  ces  poèmes  a  aussi 
une  grande  analogie,  dans  son  ensemble,  avec  celui 
des  psaumes  et  des  cantiques  de  l'Ancien  Testament. 
Il  suffit,  pour  s'en  convaincre,  de  lire  le  sommaire  de 
quelques-uns  d'entre  eux  :  i,  Les  péchés  et  le  châti- 
ment de  Jérusalem;  m.  Contraste  entre  les  justes  et 
les  pécheurs;  iv,  Description  et  dénonciation  de  ceux 
qui  cherchent  à  plaire  aux  hommes;  x,  Les  avantages 
de  l'affliction;  xi,  La  future  restauration  d'Israël.  Mais 
il  a  beaucoup  moins  d'ampleur,  puisque  les  psaumes 
de  Salomon  sont  si  peu  nombreux  et  qu'ils  furent 
composés,  on  le  dira  bientôt,  en  vue  d'une  situation 
très  particulière.  Ils  reviennent  souvent  sur  les  humi- 
liations inlligées  au  peuple  juif,  d'abord  par  un  parti 
national  puissant,  anti-théocratique,  puis  par  un  en- 
vahisseur étranger  qui  a  profané  la  capitale  et  le 
temple,  et  ils  présentent  ces  humiliations,  ces  souf- 
frances, comme  autant  de  châtiments  que  les  JuiTs 
avaient -mérités  par  leurs  fautes.  Sous  ce  rapport,  ce 
petit  psautier  rappelle  les  psaumes  canoniques  de 
l'époque  chaldéenne,  qui  décrivent  les  peines  analogues 
endurées  par  Israël.  A  ce  thème  douloureux  est  ratta- 
ché l'éloge  perpétuel  de  la  justice  divine,  et  aussi 
l'ardent  désir  de  voir  luire  des  jours  meilleurs,  et  sur- 
tout de  voir  apparaître  bientôt  le  libérateur  promis,  le 
Messie.  Voir  Wittichen,  Die  Idée  îles  Reiches  Golles, 
in-8",  1872,  p.  155-160. 

Le  portrait  que  les  psaumes  xvu  et  xvm  tracent  du 
rédempteur  si  impatiemment  attendu  a  pour  type  les 
oracles  messianiques  de  l'Ancien  Testament.  Il  est  re- 
marquable en  maint  endroit,  et  dépasse  tout  ce  que 
la  littérature  apocryphe  contient  en  ce  sens.  Cf.  A.  Bous- 
set,  Die  jùdisclie  Apokalyptik,  in-8",  Berlin,  1903, 
p.  12-13;  H.  Monnier,  La  Mission  historique  de  Jésus, 
in-8»,  Paris,  1906,  p.  20-21.  Le  Christ,  le  Xpitmi;  Kûptoç, 
comme  il  est  nommé  à  deux  reprises,  xvu,  36,  et  xvm. 
8,  cf.  Luc,  II,  11,  appartiendra  à  la  race  de  David;  il 
exercera  lui-même  la  royauté,  non-seulement  sur  les 
Juifs,  mais  aussi  sur  les  païens,  qu'il  soumettra  a  son 
sceptre  très  puissant.  11  viendra  à  l'époque  tixée  par 
Dieu,  xvu,  23,  à  la  suite  de  grandes  épreuves  subies 
parla  nation  choisie,  qu'il  délivrera  et  purifiera  de  ses 
péchés.  11  rétablira  les  douze  tribus  d'Israël  et  rendra  à 
Jérusalem  sa  gloire  antique,  matériellement  et  spiri- 
tuellement, xvu,  26-29.  Il  régnera  par  la  sainteté  et  la 
justice,  par  la  sagesse  et  par  la  puissance.  Néanmoins, 
dans  ces  psaumes  comme  au  livre  d'Hénoch.  le  Messie 
ne  semble  pas  être  autre  chose  qu'un  délégué  de  Dieu, 
bien  qu'il  porte  lui-même  le  titre  de  «  Seigneur  ».  Il  y 
a  donc  une  différence  étonnante  entre  ce  Christ  et  celui 
des  Évangiles,  qui,  d'ailleurs,  sauve  les  hommes  avant 
tout  par  ses  souffrances  et  par  sa  mort.  —  Relativement 
à  Dieu,  nos  psaumes  enseignent  le  plus  pur  mono- 
théisme. Par  rapport  à  la  vie  future,  leur  doctrine  ne 
s'écarte  pas  non  plus  de  l'Ancien  Testament  :  les  justes 
seront  à  jamais  récompensés  ;  les  méchants  subiront 
une  damnation  sans  fin. 

Il  existe  une  ressemblance  frappante,  assez  souvent 
littérale,  entre  le  Ps.  xi  de  Salomon  et  le  chap.  v  de 
la  prophétie  de  Baruch.  Plusieurs  critiques  protestants, 
entre  autres  MM.  Ryle  et  James,  The  Psaller  of  the 
Pharisees,  p.  lxxii-i.xxvii.  et  le  Dr  Sehiirer,  Gesch.  des 
jûdisch.  Volkes,  3«édit.,t.  m,  p.  15i,  en  ont  conclu  que 
celui  qu'ils  nomment  le  pseudo-Baruch  aurait  connu  et 
utilisé  notre  recueil.  C'est  le  contraire  qui  aurait  plu- 
tôt eu  lieu,  puisque  le  livre  de  Baruch  est  authen- 
tique et  contemporain  des  oracles  de  Jérémie.  Voir  Ba- 
ruch, t.  i,  col.  1475;  E.  Geiger,  Der  Psalter  Salomo's, 
p.  137.  D'ailleurs,  la  ressemblance  en  question  est  de 
telle  nature,  qu'elle  peut  s'expliquer  fort  bien  aussi  par 
une  source  commune,  c'est-à-dire  quelque  prière  litur- 
gique déjà  en  usage  à  l'époque  de  Baruch. 

III.  Date  de  la  composition.  —  Elle  était,  il  y  a  cin- 


843 


PSAUMES   DE   SALOMON 


844 


quante  ans,  l'objet  de  discussions  1res  \ives.  —  l^D'assez 
nombreuses  critiques,  à  la  suite  du  Dr  11.  Ewald, 
Geschichte  des  Volkes  Israël,  in-8°,  t.  iv,  3«  édit.j 
p.  392,  attribuaient  aui  psaumes  de  Salomon  une  date 
assez  reculée,  celle  du  règne  d'Àntioehus  Èpiphane 
(175-164  avant  J.-C),  et  plus  spécialement  celle  de  la 
prise  de  Jérusalem  par  ce  prince  (170  avant  J.-C.)- 
Naguère  encore,  le  lir  W.  Frankenberg  essayait  de  faire 
revivre  ce  sentiment  dans  l'ouvrage  Die  Dalierung 
der  Psalmen  Salomo's,  in-8»,  Giessen,  1896.  Comme 
preuves,  ces  savants  allèguent  en  particulier  les  pas- 
sages i,  8;  n,  3;  vin.  12-14,  où  il  est  parlé  de  la  profa- 
nation du  temple  et  de  l'autel.  Mais  c'est  à  plusieurs 
reprises  que  des  profanations  de  ce  genre  eurent  lieu, 
à  des  époques  très  diverses,  et  rien  n'indique  que  l'au- 
teur de  nos  psaumes  ait  eu  en  vue  celles  qui  se  ratta- 
chent à  la  persécution  d'Antioehus  Épipliane.  Tout  au 
contraire,  il  affirme  que  l'oppresseur  sacrilège  d'Israël 
était  venu  des  extrémités  de  l'Occident,  vu.  26,  taudis 
qu'Antioctius  venait  seulement  de  la  Syrie  pour  atta- 
quer les  Juifs. 

2»  D'autres,  notamment  Frz.  Delitzsch,  Commentai- 
ùber  den  Psalter,  in-8",  t.  n,  Leipzig.  1860.  p.  381,  et 
T.  ki-iin,  Geschichte  Jesu  von  Nazara,  t.  i.  p.  243,  retar- 
daient la  composition  de  ces  poèmes  jusqu'à  l'époque 
d'Hérode  I.-  Grand  (40  avant  J.-C.  -  1  après  J.-C),  éga- 
lement sans  raison  suffisante.  Suivant  eux,  ce  prince 
serait  «  l'homme  étranger  »  qui  s'éleva  contre  la  dynas- 
tie alors  régnante  en  Palestine.  Cf.  xvit,  9.  Mais  c'est 
là  une  erreur  manifeste  d'interprétation,  car  <■  l'homme 
étranger  ne  diffère  pas  en  réalité  de  l'envahisseur  en- 
nemi qui  s'empara  de  Jérusalem  el  emmena  captifs  des 
Juift  nombreux,  XVII,  14;  cequi  ne  fut  nullement  lecas 
pour  Hérode. 

3°  L'historien  juif  11.  Grà'tz,  Geschichte  der  Juden, 
2'  édit..  in-8",  Leipzig,  I.  [Il,  p.  439,  est  allé  encore 
plus  loin,  en  affirmant  que  le  psautier  de  Salomon 
aurait  eu  une  origine  chrétienne,  et  en  lui  assignanl 

comme  date  la  lin  du  premier  Siècle  de  notre  ère;  mais 
il  a  abandonné  son  opinion  dans  une  édition  subsé- 
quente. On  ne  trouve  pas,  dans  ce  recueil,  le  pins  léger 
détail  qui  trahisse  la  main  d'un  chrétien. 

1  (in  admet  très  généralement  aujourd'hui  que  Ces 
dix-huit  poèmes  furent  composés  \ers  l'époque  de  la 
conquête  de  Jérusalem  par  Pompée,  en  lil!  avant  J.-C; 
quelques-uns  peut-être  avant  celle  claie,  quelques 
autres  certainement  un  peu  plus  tard,  de  sorte  que  les 
années  so  in  avant  notre  ère  peuvent  servir  de  date 
une.  En  effet,  les  psaumes  de  Salomon,  surtout 
les  psaumes  11,  VIII,  XVII,  supposent  la  situation  sui- 
vante :  Les  Juifs  sont  gouvernés  par  des  rois  qui 
n'appartiennent  pas  a  la  race  de  David,  XVII,  5-8,  mais 
à  une  famille  d'usurpateurs  qui  se  sont  emparés  de  la 
couronne,  et  sous  l'administration  desquels  toute  la 
nation  est  tombée  dans  le  péché,  xvii,  7-8,  '21-J-J.  Le 
Seigneur  renversera  ces  mauvais  primes;  contre  eux 
s  est    levé    un    envahisseur    étranger,    qui,   conduit    par 

Dieu,  est  arrivé  des  extrémités  de  la  terre,  déclarant 
la  guerre  à  Jérusalem  et  à  la  Dation  entière,  xvn.  8-9. 

Les    Chefs  du    peuple    seilll   allés  ;iu  devant     de    lui    et     II], 

ont  ouvert  les  portes  de  la  ville,  de  sorte  qu'il  y  est 
entré-  ci ie  dans  sa  propre   maison,  vin,  15-20.  Après 

s'être  installé  dans  la  cité,  il  a  massacré  de  nombreux 
habitants,  choisis  parmi  les  plus  distingués,  el  il  a 
renversé  les  remparts  au  moyen  du  bélier.  Cf.  n.  I, 
20;  vin,  21  -Ji.  L'autel  du  Seigneur  n'a  pas  été  épargné, 
n,  2.  En  grand  nombre  aussi,  d'autres  citoyens  ont  été 
emmenés  captifs  dans  l'Occident,  el  les  princes  ont  su  In 
d'odieux  outrages.  Cf.  n.  6;  vin,  24;  xvn,  13-14.  .Mais 
finalement,  le  «  dragon  »  qui  avail   humilié  Jérusalem 

•"'  péri  lui-même, 'gé  pn    de    t itagnes  d  Egypte, 

on  cadavre  a  été  pi  ivé  d'une  sépulture 
honorable,  n,  29-31.  Or,  il  est  évidenl  que  ces  diffé- 


rentes circonstances  se  rapportent  à  la  conquête  de 
Jérusalem  par  Pompée,  puisa  sa  mort  (48  avant  J.-C). 
«  Les  princes  qui  s'étaient  arrogé  la  royauté  en  Israël 
et  s'étaient  emparés  du  trône  de  David  sont  les  llas- 
monéens,  qui.  depuis  Aristobule  Ier.  portaient  le  titre 
de  rois...  L'homme  étranger,  qui  frappe  avec  force, 
que  Dieu  a  amené  de  l'extrémité  de  la  terre,  c'esl 
Pompée.  Les  princes  qui  vont  au  devant  de  lui  sont 
Aristobule  II  et  Ilyrcan  II.  Les  partisans  de  ce  dernier 
ouvrirent  les  portes  de  la  ville  à  Pompée,  qui  s'empara 
ensuite  par  la  force  du  reste  de  la  ville,  où  le  parti 
d'Aristobule  s'était  retranché.  Tous  les  autres  détails, 
la  violation  du  temple  par  les  envahisseurs,  le  massacre 
des  citoyens  les  plus  distingués,  la  déportation  des 
prisonniers  en  Occident,  et  aussi  des  princes  pour 
qu'ils  servissent  au  triomphe  du  vainqueur,  tous  ces 
détails  correspondent  à  l'histoire,  i  telle  qu'elle  nous 
est  racontée  par  les  anciens  historiens.  Schûrer,  Ge- 
schichte des  Volkes  Israël,  3e  édit.,  t.  m,  p.  152,  Le 
transport  des  prisonniers  en  Occident,  xvn,  11.  est 
une  circonstance  décisive  en  cet  endroit,  car,  indé- 
pendamment de  la  conquête  de  Jérusalem  par  Titus, 
de  laquelle  il  ne  saurait  être  question  ici,  ce  trait  ne 
convient  à  aucune  autre  victoire  que  celle  de  Pompée. 
S'il  restait  encore  quelque  doute,  il  disparait  dés  qu'on 
lit  les  détails  relatifs  à  la  mort  du  conquérant,  tant  ils 
correspondent  à  la  lettre  avec  ce  que  les  anciens  au- 
teurs nous  racontent  de  la  lin  tragique  de  Pompée, 
Cf.  Plutarque,  Pompée,  i.xxx,  l-l2;  Tacite,  llisl..  v,  0; 
Slrahon.  XVI,  n,  40;  Dion  Cassius,  xxxvii),  13-16; 
xlh,  3-8.  Voir  aussi  Josèphe,  Bell,  jud.,  I,  vi-xix; 
Ant.   jud.,   XIV,    ni-iv;    Orose,    Hist.    Eccl.,   vi,   6, 

t.  XXXI,  col.  1004-1U06.  En  somme,  les  Psaumes  de 
Salomon  appartiennent  à  la  dernière  période  de  l'his- 
toire de  l'ancienne  théocratie. 

IV.  Esprit  religieux  m;  ces  psaumes.  —  Il  con- 
firme ce  que  nous  venons  de  dire  au  sujet  de  l'époque 
de  leur  composition.  Il  ne  diffère  pas  de  l'esprit  légal, 
de  l'esprit  pharisaïque,  tel  qu'il  esl  si  bien  décrit  dans 
nos  évangiles  ;  aussi,  plusieurs  des  savants  qui  s.  àonl 
occupés  de  ce  petit  psautier,  entre  autres  MM.  liyle 
el  .lames,  l'ont-ils  nommé  .1^17  justement  1  le  psautier 
des  pharisiens.  »  Voir  col.  841.  L'ne  très  grande  impor- 
tance y  est  attachée  aux  œuvres  légales;  c'est  d'elles 
que  nos  psaumes  font  dépendre  la  résurrection  pour 
la  vie  éternelle  ou  l'éternelle  condamnation.  La  Sixato- 
o-vvr,  TipoirayaiTo)/,  c'esl  -à-dire  l'accomplissement  inté- 
gral, non  pas  précisément  de  la  loi  divine,  mais  sur- 
tout des  prescriptions  pharisaïques,  \  apparaît  comme 
le  comble  de  la  vertu.  Cf.  m,  16;  IX,  9;  XIV,  I.  etc. 
Les  psaumes  de  Salomon  doivent  donc  avoir  été  com- 
posés dans  le  cercle  des  pharisiens,  qui  luttait  alors 
de  toutes  ses  forces  contre  le  part:  sadducéen.  Ces 
cantiques  insistent  fréquemment  sur  le  contraste  qui 
existe  entre  les  hommes  pieux  el  les  impies,  les  justes 
el  les  pécheurs.  .Mais  ces  dénominations  sonl  prises 
surtout  par  le  dehors  :  les  hommes  pieux  sonl  eux 
qui  pratiquent  les  observances  pharisaïques  ;  par  contre, 
les  impies  ne  diffèrent  pas  des  Sadducéens.  —  On  voil 

par  ces  détails  que  les  Psaumes  de  Salomon  sont  d'une 

grande  utilité-  pour  nous  faire  connaître  le  judaïs 

de  l'époque  à  laquelle  ils  appartiennent,  avec  ses  senti 
ments  religieux,  son  idéal  politique  et  historique. 

Y.  Auteur.  —  Le  P.  de  la  Cerda,  qui  admettait 
l'authenticité  du  titre  général,  0  Psaumes  de  Salomon  0, 
el  des  titres  spéciaux  placés  en  tête  de  la  plupart  de 
ces  dix-huit  cantiques,  u  de  Salomon  »,  etc.,  croyait 
que  Salomon  était  réellement  l'auteur  de  noire  collec- 
tion. Mais  cette  opinion,  condamnée,  nous  venons  de 
le  voir,  par  le  contenu  même  des  poème-,  fut  réfutée 
île  bonne  heure  et  ne  trouva  dès  lors  aucun  défenseur 
sérieux.  Cf.  Iluet,  Detnonstr.  evangel.,  iv;  Neumann, 
De  PsaUerio  Salomonis,  Wittemberg    Hi.s7.  Aucun  dé- 


845 


PSAUMES    DE    SALOMON 


PTOLEMEE 


846 


lail,  en  effet,  ne  contient  la  plus  petite  allusion  au  roi 
Salomon.  Peut-être  est-ce  le  passage  III  Reg.,  iv,  32. 
qui  a  suggéré  le  litre  «  Psaumes  de  Salomon  »,  ajouté, 
non  par  l'auteur  lui-même,  mais  plus  tard,  sans  qu'on 
puisse  dire  à  quelle  époque. 

On  ne  peut  désigner  l'auteur  que  d'une  manière 
générale  et  approximative.  Il  était  Juif,  et  appartenait 
au  parti  pharisaïque,  comme  le  montre  sa  vive  polé- 
mique contre  les  Sadducéens,  qui  sont  pour  lui  les 
«  pécheurs  »  et  les  «  transgresseurs  »  par  excellence, 
tandis  que  les  Pharisiens  sont  les  «  justes  »  et  les 
«  saints  ».  Ces  derniers  ont  actuellement  le  dessous; 
leurs  adversaires  sont  au  pouvoir,  riches  et  puissants. 
L'auteur  devait  habiter  la  Palestine,  comme  le  prou- 
vera ce  que  nous  dirons  de  la  langue  primitive  du 
livre;  peut-être  résidait-il  à  Jérusalem.  Son  œuvre 
donne  de  lui  une  idée  favorable;  c'était  un  homme 
pieux  et  humble.  —On  a  parlé  quelquefois  de  plusieurs 
auteurs  distincts  pour  le  recueil;  mais  cela  ne  parait 
pas  vraisemblable,  tant  il  y  a  d'unité  dans  le  style, 
l'esprit  et  les  pensées. 

VI.  La  langue  primitive.  —  On  ne  possède  aujour- 
d'hui les  Psaumes  de  Salomon  qu'en  grec.  Auraient-ils 
été  composés  dans  cet  idiome?  C'est  ce  qu'a  pensé 
l'évêque  d'Avranches,  Huet,  loc.  cil.  D'autres  encore 
l'ont  fait  à  sa  suite,  spécialement  le  Dr  Hilgenfeld,  qui 
leur  attribue  l'Egypte  comme  lieu  d'origine.  Mais  il  est, 
aujourd'hui,  à  peu  près  seul  de  son  avis,  car  c'est 
presque  à  l'unanimité  que  les  critiques  déclarent  qu'on 
doit  regarder  l'hébreu,  ou  tout  au  moins  l'araméen,  et 
non  pas  le  grec,  comme  la  langue  originale.  Le  grec 
actuel  n'est  donc  qu'une  traduction  faite  de  très  bonne 
heure,  ou  pour  les  Juifs  dispersés,  ou  pour  les  chré- 
tiens, qui  ne  tardèrent  pas  à  prendre  goût  à  ces 
psaumes.  A  l'appui  de  ce  fait,  on  allègue  plusieurs 
preuves,  «  avec  une  entière  certitude,  »  dit  le  Dr  Kit  tel, 
dans  Kautzsch,  Die  Apokryphen  und  Pseudepigraphen 
des  Allen  Testant.,  1 -ri bourg,  1899,  t.  Il,  p.  129.  La  pre- 
mière, qui  est  aussi  la  meilleure,  consiste  dans  un 
coloris  hébraïque  très  sensible.  Le  texte  grec  est  telle- 
ment «  maladroit  »,  Reuss, Gescli.  der  heiligen  Schrif- 
ten  tirs  A.  T.,  1881,  p.  052,  que  l'hébreu  apparaît  pour 
ainsi  dire  à  travers.  Les  temps  des  verbes,  en  parti- 
culier, ont  été  souvent  mal  rendus;  parfois,  dans  un 
seul  et  même  passage,  on  trouve  de  curieux  exemples 
de  crlte  confusion.  Cf.  ni,  8-10;  xvn,  8-12,  etc.  Il  faut 
recourir  à  l'hypothèse  d'un  texte  hébreu  primitif  pour 
expliquer  ces  difficultés.  Voir  Rjle  et  James,  loc.  cit., 
p.  i.xxvh-lxxxvh.  11  n'est  donc  pas  possible  de  dire 
que  nous  avons  ici  de  simples  hébraïsmes,  comme 
dans  la  traduction  des  Septante.  En  second  lieu,  nous 
avons  vu  que  ces  Psaumes  avaient  très  probablement 
une  destination  liturgique  ;  or,  ce  fait  suppose  aussi  que 
1  hébreu  était  la  langue  originale. 

VII.  BIBLIOGRAPHIE.  —  Indépendamment  des  ouvra- 
ges cités  ci-dessus,  voir  G.  .lanonski,  Disserlalio  de 
psalterio  Salomouis,  Wittemberg,  1687;  Migne,  Dic- 
tionnaire des  apocryphes,  t.  i,  Paris,  1856,  col.  939- 
956;  .1.  Langen,  Dos  Judenlhum  in  Palàstina  zur  Zeit 
Chrisli,  in-8°,  Fribourg-en-Brisgau,  1866,  p.  64-70; 
A.  Carrière,  De  Psalterio  Salomonis,  in-8",  Strasbourg. 
1870;  A.  Hilgenfeld,  Die  Psalmen  Salomo's  deutsclt 
ûbersetzt  und  au f s  neueuntersucht,  dans  la  Zeitschrift 
fur  wissenschaftliche  Théologie,  1871,  p.  343-418; 
M.  Vernes,  Histoire  des  Idées  messianiques,  in-8°,  Pa- 
ris, 1874,  p.  121-135;.!.  YVellhausen,  Die  Pharisâerund 
die  Sadducàer,  in-8»,  Greifsvvalden,  1871,  p.  112-164; 
J.  Girbal,  Essai  sur  les  Psaumes  de  Salomon,  in-8», 
Toulouse,  1887;  B.  Stade,  Geschichte  des  Yolkes  Israël, 
in-8",  Berlin,  1888,  t.  n,  p.  148-456;  0.  Zôekler,  Die  Apo- 
kryphen des  Alleu  Teslamcnls,  in-8',  Munich,  1891, 
p.  105-420  ;  AV.  J.  Deane.  Pseudepigrapha,  in-S»,  Londres, 
1891  ;  E.  Jacquier.  Les  Psaumes  de  Salomon,  dans  l'Uni- 


versité catholique,  Lyon,  1893,  p.  xu,  91-131,251-275; 
Frankenberg,  Die  Datierung  der  Psalmen  Salomo's, 
ein  Beilrag  zur  jûdischen  Geschichte,  in-8",  Giessen, 
1S96;  Lévi,  Les  dix-huit  Bénédictions  et  les  Psaumes 
de  Salomon,  dans  la  Revue  des  Éludes  juives,  t.  XXXII, 
Paris,  1S96,  p.  161-178;  W.  Baldensperger,  Die  mes- 
sianisch-apokalyptischen  Hoffnungen  des  Judentums. 
3e  édit.,  Strasbourg,  1903,  in-8»,  p.  33-36;  E.  Kautzsch, 
Die  Apokryphen  und  Pseudepigraphen  des  AltenTes- 
taments...  ûbersetzt  und  herausgeg eben,  gr.  in-8»,  Fri- 
bourg-en-Brisgau, 1900,  p.  127-118.       L.  Fillion. 

PTOLÉMAÏDE  (IIto^cu:),  ville  de  Palestine, 
nommée  primitivement  Aecho  et  plus  tard  Saint-Jean 
d'Acre.  Elle  reçut  le  nom  de  Ptolémaïde  quand  elle 
tomba  en  la  possession  de  Ptolémée  II  Philadelphe, 
roi  d'Egypte,  et  elle  figure  sous  ce  nom  dans  l'histoire 
des  Maciiabées,  I  Mach..  v,  15,  22,  55;  x,  1,  39,  56,  57, 
58,  60;  xi,  22,  2,  4;  xu,  45,  48;  xm,  12;  Il  Mach., 
xiii,  21,  25,  et  dans  l'histoire  de  saint  Paul.  Act..  xxi, 
7.  Voir  Accho,  t.  i,  col.  108. 

PTOLÉMAÏDtENS  igrec  ;  oi  T\icjUu.ynX;:  Vulgate  : 
Ptolemenses),  habitants  de  Ptolémaïde.  I  Mach.,  xu,  48; 
II  Mach.,  xm,  25.  Voir  Ptolémaïde. 

PTOLÉMÉE  (grec  :  n-oXeu,oaoç  ;  Vulgate  ;  Ptole- 
mseits),  nom  de  plusieurs  rois  d'Egypte  et  de  quatre  au- 
tres personnages  dans  l'Écriture.  Le  nom  grec  signifie 
«  belliqueux  ».  de  ir-ôXEjio;,  pour  7céXeu.oç,  «  guerre  ».  On 
le  trouve  déjà  dans  l'Iliade,  iv,  228.  Voir  W.  Pape, 
Worterbuch  der  gi  ieehischen  Eigennamen,  3L'  édit.. 
t.  n,  p.  1271.  Il  devint  surtout  célèbre  à  partir  d'Alexan- 
dre le  Grand,  lorsqu'un  de  ses  généraux,  Ptolémée,  lils 
de  Lagus,  eut  fondé  la  dynastie  à  laquelle  on  a  donné 
son  nom. 

1»  Dynastie.  —  Les  Ptolémées  ou  Lagides  ont  régné 
en  Egypte  depuis  la  mort  d'Alexandre  le  Grand  jusqu'à 
la  mort  de  Cléopàtre  VI  (323-30  avant  J.-C),  où  ce 
royaume  devint  province  impériale  romaine. 

TARLEAL'  CHRONOLOGIQUE   HE  LA   DYNASTIE  lus  LAGIDES 


Ptolémée  I"  Soter,  satrape 

Ptolémée  I"  Soter,  roi 

Ptolémée  II  Philadelphe. 

Ptolémée  III  Évergète  I" 

Ptolé e  IV  Philo]  .G.      .   - 

PI  i    née  V  Épiphane 

Ptolémée  VI  Philométor 

Ptolémée  VII  Évergète  II 

Ptolémée  VIII  Eupator -Mort  en 

Ptolémée  IX  Néos  Philopator  ....  Mort  en 

Ptolémée  X  Philométor  Soter  II  (Lathyros)    .   . 

Ptolémée  XI  Alexandre  I"  Philométor  .   .   .   . 

Ptolémée  X  Soter  II  restauré 

Ptolémée  XII  Alexandre  II 

Ptolémée  XIII  Philopator  H  Philadelphe  Néi  - 
Dionysos  (Aulètès) 

Bérénice  IV 

Ptolémée  XIII  restauré 

Cléopàtre  VI  Philopator 

Ptolémée  XIV  Philopator 

Ptolémée  XV  Philopator 

Ptolémée  XVI  (César  Philopator  Philomi  toi  i.  . 

L'Egypte  devient  province  impériale  sous  Au- 
guste   


Avant  J.-C. 

323-305 

305-285 

285-247 

247-222 

222-20 'i 

204-181 

1S1-14G 

170-117 

1  if. 

130 

116-108 

[08-88 

88-80 

80  f?) 

Sl-a8 
58-55 
55-51 
51-30 
51-47 
17-44 
44-30 

30 


2-  Bibliographie  des  Lagides.  —  J.  Vaillant,  Hisloria 
Ptolemseorum  JEgypti  regum  ad  /idem  numismalum 
accommodata,  Amsterdam,  1701;  I.  J.  Champollion- 
Figeac,  Annales  des  Lagides,  2  in-8",  Paris.  1819-1820; 
A.-.I.  Letronne,  Recherches  pour  servir  à  l'h  stoire  de 
l'Egypte  pendant  lu  domination  des  Grecs  et  des  Ro- 
mains, in-8°,  Paris,  1823;  s.  Sharpe,  History  ofEgypt 
underthe  Ptolemiesand  the  Romans,  25  édit.,  Londres, 


PTOLÉMÉE   Ie'   SOTER   —   PTOLÉMÉE   II   PHILADELPHE 


847 

1852;  H.  St.  Poole.  The  Ptolemies  Kings  of  Egypt 
[Catalogue  of  the  Greek  Coinsofthe  BHtish  Muséum), 
in-8»,  Londres,  1SS2;  Max  L.  Strack,  Die  Dynastie  der 
Ptolemâet;  in-8",  Berlin,  IS'.IT:  .1.  X.  Svoronos,  Ta 
Nvkvict  ro3  KpÔTOu;  tûv  riTO>.EU.ai«v,  3  parties  en 
1  in-f",  Athènes,  1904;  Paul  M.  Meyer,  Bas  Heerwesen 
der Plolemâer  vnd  Borner  in  Aegypten,in-8f>,  Leipzig, 
1900;  .1.  I'-  Mahaffy,  The  Empire  of  the  Ptolemies, 
in-16,  Londres,  1895;  Ed.,  .4  Bistory  of  Egi/pt  under 
the  Ptolemies  (t.  iv  de  l'Bislory  of  Egypt  de  Flinders 
,  in-16,  Londres.  1899;  E.  H.  Bevan,  The  Bouse 
,,f  Seleucus,  2  in-8",  Londres,  1902;  E.  W.  Budge, 
Bistory  of  Egypt  front  the  end  of  the  neolilhic  perlod 
h.  Un-  death  of  Cleopatra,  t.  vil  et  vm,in-16,  Londres, 
KIOI  ;  A.  Bouché  Leclèrq, Histoire  des  Lagides,^  in-8», 
Paris,  1903-1904;  L.  Niese,  Geschichte  der griechischen 
moi  makedonischen  Staaten  seit  der  Schlaclit  bei 
Chaeronea,  3  in-8»,  Gotha,  1893-1903. 

F.  Vicotnorx. 
1.  PTOLÉMÉE    l"    SOTER,  roi   d'Egypte,  n'est   pas 
nommé  par  son  nom  dans  l'Écriture,  mais  Daniel  pré- 
dit son  avènement  flig.  186).   Il   était   né   vers  367  et. 


848 


-  Monnaie  de  Plolémée  i  '  Soter. 
Trie  de  Ptolémée  Soter,  à  droite.  Devant  le  nez  une  contre-marque. 
ii.  nTOÀEMAIor  UAEIAEQï.  Aigle  debout  sur  un  foudre,  à 
gauche;  dans  le  champ,  à  gauche,  un  monogramme. 

quoiqu'il  passât  pour  fils  de  Lagus,  Macédonien  de  hunne 
naissance,  on  le  croyait  fils  de  Philippe,  roi  de  Macé- 
doine, et  d'Arsinoé.  Q.  Curce,  IV.  vm.  22;  Pausanias,  I 
vi.  2.  Il  jouit  d'une  grande  faveur  auprès  d'Alexandre  le 
(  ii  .nul  et  il  se  distingua  par  sa  bravoure  et  par  son  habi- 
leté militaire,  dans  la  campagne  de  l'Inde  en  particulier. 
Arrien,  Anab.,  [V,  Ji.  25,  29;  \.  13,  23,  24;  VI,  ô.  Il; 
Q.  Curce,  VIII.  x,  21  ;  xm,  13-27;  xiv,  15;  IX,  v, 21.  Après 
la  mort  d'Alexandre,  il  réussit  à  se  faire  donner  le  gou- 
vernement de  l'Egypte  et  chercha  aussitôt  à  a  établir 
solidement  son  pouvoir  (323). 

Il  gouverna  au  nom  de  Philippe  Arrhidée,  frère  idiot 
d  Alexandre  le  (ira ml,  el  d'Alexandre  IV,  fils  d'Alexandre 
le  Grand  ilig.  187),  de  323  a  310  avant  .I.-C,  et  au  nom 
d'Alexandre  IV seul  de  316  à 311;  il  fut  indépendant  de 31  I 
à  305,  mais  sans  prendre  le  titre  de  roi,  ce  qu'il  ne  fil 
qu'en 305.  Daniel  avait  prédit,  xi.  3  i.  qu'il  serait  un  de 
(aux  qui  recevraient  une  part  de  l'empire  d'Alexandre, 
quand  cet  empire  serait  divisé  aux  quatre  vents  du  ciel. 
«  Le  roi  du  sud  |  c'est  ainsi  qu'est  désigné  le  roi  d'Egypte) 
deviendra  fort,  mais  un  de  ses  princes  ,  Seleucus)  sera 
fort  aussi  et  celui-ci  (Seleucus;  deviendra  plus  fort 
que  lui  (Ptolémée  I"r)  et  il  aura  la  domination.  »  xi,  5. 
Ptolémée  avait  été  en  guerre  avec  Antigone,  dit  le 
«  .  un  îles  généraux  d'Alexandre,  au  sujet  de  la 
possession  de  la  Sx  rie  et  de  la  Phénicie  dont  il  s'était 
rendu  maille  en  320,  après  avoir  réussi  a  s'emparer  de 
la  plus  grande  partie  de  l'Asie.  Une  grande  bataille 
navale  avait  été  livrée  entre  les  troupes  des  deux 
rivaux  dans  les  eaux  de  Salamine  en  Cypre.  Les  Égyp- 
tiens avaient  été  complètement  battus  (306).  Antigone, 
lier  de  sa  victoire,  prit  à  cette  occasion  le  titre  dé  roi. 
Ptolémée,  malgré  sa  défaite,  se  sentait   encore  fort;  il 


l'imita  et  se  déclara  roi  à  son  loue  (305  .  Une  tentative 
d'invasion  de  l'Egypte  par  Antigone  échoua.  —  Quelques 
années  auparavant,  en  316.  un  autre  général  d'Alexandre, 
Seleucus,  satrape  de  Babylone,  traqué'  par  Antigone, 
s'était  réfugié  en  Égvpte  auprès  de  Ptolémée.  Profi- 
tant de  circonstances  favorables.  Seleucus  avait  repris, 
en  322,  sa  satrapie  de 
Babylone, et  son  retour, 
d'après  l'opinion  com- 
mune, marque  le  com- 
mencement de  l'ère  des 
Séleueides  (I"  octo- 
bre 312).  En  302.  Se- 
leucus se  ligua  avec 
Plolémée  et  quelques 
autres  contre  Antigone. 
Ce  dernier  lut  vaincu 
et  tué  à  la  bataille 
d'Ipsus  (301).  Ptolémée 
n'avait  pas  pris  part  à 
la  bataille.  Aussi  les 
coalisés  ne  lui  rendi- 
rent-ils ni  Cypre  ni  la 
Phénicie,  et  la  Coelésy- 
i  ie  fut  attribuée  a  Se- 
leucus, qui  fonda  aussi- 
tôt Antiocbe  (300)  et  en 
fit  sa  capitale.  Strabon, 
xvi.  i-5;  Appien,  Syr., 
57.  Seleucus  fut  alors 
«  plus  fort  »  que  Pto- 
I  'triée.  Celui-ci  réussit 
a  reprendre  Cypre  en 
295,  mais  la  Phénicie 
et  la  Cœlésyrie  avec  la 
Judée  restèrent  à  Seleu- 
cus. En  284,  Ptolémée 

abdiqua  en  faveur  de 
son  plus  jeune  fils,  Pto- 
lémée  II  Piladelphe,  et 
il  mourut  environ  deux 
ans  après  (283). 

Dans  une  de  ses  ex- 
péditions en  Syrie,  à 
unodateimvi'laine. niais 
probablement  vers  320, 
Ptolémée  avait  mis  à 
profit  le  repos  imposé 
aux  Juifs  le  jour  du 
sabbat    pour    s'emparer 

de  Jérusalem.  Josèphe, 
Cont.  Apion.,  i.  21  ; 
.■1»/.  jud.,  XII.  i.  1.  Il 
traita  d'ailleurs  avec  bienveillance  les  Juifs  qu'il  em- 
mena captifs  à  Alexandrie  el  leur  accorda  dans  sa 
capitale  des  privilèges  avantageux  qui  v  attirèrent 
volontairement  un  nombre  croissant  d'enfants  d'Israël. 

F.   VlGOUROI  x. 
2.    PTOLÉMÉE    II    PHILADELPHE    (284-247),    le     plus 

jeune  fils  de  Ptolémée  I  '  et  sou  siieeesseur  1,11g.  188), 
avait  été  proclamé'  roi  par  son  père  deux  ans  avant  sa 
mort, afin  de  lui  assurer  ainsi  sa  succession.  Sous  son 
règne,  la  lutte  recommença  entre  l'Egypte  el  la  Syrie, 
par  suite  des  intrigues  de  Magas,  demi-frère  de  Pto- 
léiiiée  II  par  sa  mère  Bérénice  et  roi  de  Cyrène,  avec 

Antiochus  l"  Soter.  son  beau  père.  Apres  plusieurs 
anii"es  de  guerre  entre  la  Syrie  el  l'Egypte,  une  partie 
des  possessions  d'Antioehus  II  Théos,  pelit-lils  de 
Seleucus  1"  Xiealor,  étaient  tombées  entre  les  mains 
de!  I  gyptiens,  et  le  roi  de  Svric  avait  été'  obligé  de 
faire  la  paix  avec  Ptolémée  II  et  d'épouser  sa  tille 
Bérénice,  en  répudiant  sa  femme  et  sieur  Laodice  et 
en  s'engageant  à  laisser  le  trône,  non  aux  enfants  qu'il 


187.  —  Statue  colossale  gréce- 
égyptieniie  d'Alexandre  IV  à 
Karnak,  D'après  Vkilialïy,  dans 
Pétrie,  Uistory  of  Egypt,  t.  iv. 


849 


PTOLÉMÉE    II    PIIILADELPHE    -  ■    PTOLÉMÉE   III    ÉVERGÈTE 


850 


avait  eus  de  Laodice,  mais  à  ceux  qui  naîtraient  de 
Bérénice.  «  Ptolémée  Philadelphie,  dit  saint  Jérôme, 
lu  Dan.,  xi.  6,  t.  xxv,  col.  560,  voulant  après  plusieurs 
années  mettre  lin  à  une  guerre  importune  donna  en 
mariage  sa  fille  Bérénice  à  Antiochus  II  iTliéos),  qui 
de  sa  première  femme  Laodice  avait  deux  fils,  Séleu- 
cus  qui  fut  surnommé  Callinicus,  et  un  autre  Antiochus. 
(Son  père)  la  conduisit  jusqu'à  Péluse  et  lui  donna 
pour  dot  une  grande  quantité  d'or  et  d'argent,  ce  qui 
le  fit  appeler  yspvopôpoç,  c'est  à  dire  dotalis,  «  qui  dote  9. 
Antiochus  déclara  qu'il  faisait  partager  son  royaume  a 
Bérénice,  et  que  Laodice  n'avait  plus  que  le  rang  de 
concubine,  mais  longtemps  après,  cédant  à  son  amour 
pour  Laodice,  il   la  ramena  dans  le  palais  royal  avec 


188.  —  Monnaie  de  Ptolémi  e  11  l'hilatlelphe. 

AAEA4QN.  Tètes  accolées  et  diadémées,  à  droite,  de  Ptolémée  II 

et  d'Axsinoé.   Derrière  la  tète  du  roi,  un   monogramme.  — 

r%  0E2N.  Tètes  accolées  et  diadémées,  à  droite,  de  Ptolémée  I" 

Soter  et  de  Bérénice.  Derrière  la  tète  du  roi,  un  fer  de  lance. 

ses  enfants.  Celle-ci,  redoutant  l'esprit  versatile  de 
son  mari  et  craignant  qu'il  ne  reprit  Bérénice,  le  lit 
empoisonner  par  ses  serviteurs;  Icadion  et  Gennée, 
princes  d'Antioche,  mirent  à  mort  par  ses  ordres 
Bérénice  et  le  lils  qu'elle  avait  eu  d'Antiochus,  et  elle 
établit  roi  son  lils  aine  Séleucus  Callinicus  à  la  place 
de  son  père.  Voir  ANTIOCHUS  II.  t.  I,  col.  G87.  A 
l'époque  du  meurtre  de  Bérénice,  son  père  était  mort. 
Ptolémée  II  avait  conservé  les  pays  que  lui  avait 
laissés  le  traité  de  paix,  la  Phénicie  et  la  Cœlésyrie. 
C'est  sous  son  règne  que  fut  commencée,  d'après  la 
tradition,  la  version  grecque  de  l'Ancien  Testament  par 
les  Septante.  Voir  Septante.  I".  Vigouroux. 

3.  PTOLÉMÉE  III  ÉVERGÈTE,  lils  aine  de  Ptolémée  II, 
lui    succéda   sur   le   trône     li^.    189).    Il    était  frère  de 


18J.  —  Monnaie  de  Ptolémée  III  Evergète. 
Buste  de  Ptolémée  III  Èvergète,  radié,  à  droite.  —  n.  nTOAE- 
MAIOr  BASIAEÇS.  Corne  d'abondance  radiée.  Au  bas  dans  le 
champ  AI. 

Bérénice,  la  victime  de  Laodice.  Il  voulut  venger  le 
meurtre  de  sa  sœur  et  envahit  la  Syrie  à  la  tète  d'une 
puissante  armée.  «  Il  sorlira  un  rejeton  (Ptolémée  III) 
de  ses  racines  (de  Ptolémée  II),  dit  Daniel,  xi,  7-9,  il 
ira  avec  une  grande  armée,  il  entrera  dans  les  places 
fortes  du  roi  du  nord  (Antiochus  II)  et  il  en  disposera 
à  son  gré  et  il  se  rendra  puissant.  Il  enlèvera  même  et 
transportera  en  Egypte  leurs  dieux  et  leurs  statues 
(nesikèliém),  leurs  objets  précieux  d'or  et  d'argent  et 
pendant  plusieurs  années  il  sera  plus  fort  que  le  roi 
du  nord.  Et  celui-ci  marchera  plus  tard  contre  le  roi 
du  midi  (en  Egypte),  mais  il  reviendra  dans  son  pays 
(en  Syrie).  » 


s  Apres  le  meurtre  de  Bérénice,  dit  saint  Jérôme, 
In  Dan.,  xi.  7-9,  t.  xxv,  col.  5G0,  son  père  Ptolémée 
Philadelphe  étant  mort  en  Égvpte,  son  frère  appelé  aussi 
Ptolémée  et  surnommé  Èvergète  lui  avait  succédé,  troi- 
sième, dans  son  royaume,  rejeton  de  sa  racine...  Il  s'en 
alla  avec  une  grande  armée  et  il  entra  dans  la  province 
du  roi  du  nord,  c'est-à-dire  de  Séleucus,  surnommé 
Callinicus,  qui  régnait  en  Syrie  avec  sa  mère  Laodice, 
et  il  les  maltraita  et  il  s'empara  de  force  de  la  Syrie,  de 
la  Cilicie  et  des  pays  situés  au  delà  du  haut  Euphrate 
et  de  l'Asie  presque  entière.  Mais  axant  appris  qu'une 
sédition  .venait  d'éclater  en  Egypte  (cf.  Justin,  xxvn, 
1,9),  il  ravagea  le  royaume  de  Séleucus  et  emporta 
quarante  mille  talents  d'argent,  des  vases  précieux, 
en  même  temps  que  les  statues  des  dieux,  au  nombre 


190.  —  Antiochus  111  le  Grand,  roi  de  Syrie.  Musée  du  Louvre. 

de  deux  mille  cinq  cents,  parmi  lesquels  se  trouvai!  le 
butin  que  Cambyse,  après  la  prise  de  l'Egypte,  avait 
emporté  chez  les  Perses.  » 

L'inscription  d'Adulis,  conservée  par  Cosmas  Indico- 
pleuste,  Pair,  gr.,  t.  i.xvm,  eol.  103-104;  Corpus  in- 
script, grssc,  n.  5127,  donne  des  détails  analogues  sur 
les  résultais  de  la  campagne  de  Ptolémée  III  en  Syrie  : 
«  Le  grand  roi  Ptolémée...  s'élant  rendu  maître  de 
tout  le  pays  en  deçà  de  l'Euphrate,  et  de  la  Cilicie,  et 
de  la  Pamphylie  et  de  l'Ionie  et  de  l'Ilellespont  et  de 
la  Tbrace...,  franchit  l'Luphrate,  et  avant  soumis  la 
Mésopotamie  et  la  Babylonie  et  la  Susiane  et  la  Perse 
et  la  Médie  et  tout  le  reste  jusqu'à  la  Bactriane,  et  avant 
recherché  tous  les  objets  sacrés  emportés  d'Egypte  par 
les  Perses  et  les  ayant  rapportés  en  Egypte  avec  tous 
les  autres  trésors  provenant  de  ces  lieux,  il  expédia 
des  troupes  parleslleuves  creusés  de  mainsd'homme...  1 
Bouché-Leclercq,  Histoire  des  Lagides,  t.  1.  p.  "26 1  - 
262.  C'est  en  reconnaissance  du  recouvrement  des 
objets  sacrés  qu'avait  emportés  Cambyse  que  les  Egyp- 
tiens donnèrent  à  Ptolémée  III  le  surnom  d'Evergète, 
0  le  Bienfaisant  ».  S.  Jérôme,  ibid.  Cf.  le  décret  de 
Canope,  dans  Bouché-Leclercq,  ibid.,  p.  267-272;  texle 


851 


PTOLÉMÉE  III  EVERGETE 


PTOLEMEE  V  EPIPHANE 


852 


erec  dans  Mahaffy,  The  Empire  of  ihe  Plolemies, 
1893,  p.  227-239. 

Après  le  retour  de  Ptolémée  en  Egypte,  Séleucus 
parvint  à  reprendre  une  partie  des  provinces  qu'il  avait 
perdues,  pendant  que  son  ennemi  restait  a  quel- 
ques années  loin  du  roi  du  nord  »  Dan.,  xi,  8  (texte 
hébreu).  Séleucus  s'enhardit  alors  à  tenter  de  repren- 
dre la  Cœlésyrie.  «  Le  roi  du  nord,  dit  Daniel,  XI,  9 
texte  hébreu),  marchera  contre  le  royaume  du  roi  du 
midi  (l'Egypte),  mais  (il  sera  défait  et)  retournera  dans 
son  royaume,  n  Séleucus  fut  complètement  battu  el 
obligé  de  se  retirer  à  Antioche.  Justin,  xxvn,  2,  5.  Son 
frère  Antioclms  Hiérax  se  lit  alors  proclamer  roi  en 
Asie  Mineure,  et  Ptolémée  III,  sans  poursuivre  son 
succès,  laissa  les  deux  frères  se  faire  la  guerre  entre 
eux,  se  contentant  pour  son  compte  de  travailler  à 
faire  lleurir  la  paix  dans  son  royaume.  Il  se  montra 
bienveillant  envers  les  Juifs  et  lit  offrir  des  sacrifices 
dans  le  temple  de  Jérusalem.  Josèpbe,  Cont.  Apion., 
il,  .">.  Cf.  Ant.  jud.,  XII,  iv.  Il  mourut  en  221  et  sa  mort 
offrit  à  AntiochusIII(lig.  190),  qui  venait  de  monter  sur 
li  trône  de  Syrie  une  occasion  favorable  pour  attaquer 
l'Egypte  dés  le  commencement  du  règne  de  Ptolémée  IV. 

C'est  peut-être  sous  le  règne  de  ce  roi  que  le  petit- 
fils  de  l'auteur  de  l'Ecclésiastique,  étant  allé  en  Egypte, 
comme  il  nous  l'apprend  lui-même  dans  le  Prologue 
de  ce  livre,  traduisit  en  grec  le  livre  de  son  grand- 
père  Ben  Sirach.  Comme  il  y  a  deux  rois  d'Egypte 
qui  ont  été  surnommes  Évergète,  Ptolémée  III  et  Pto- 
lémée VII.  ilil  aussi  Physcon,  frère  de  Ptolémée  Phi- 
lométor,  les  commentateurs  placent  le  voyage  du  tra- 
ducteur, les  uns  sous  Ptolémée  III,  les  autres  sous 
Ptolémée  VII.  F.  Vigouroux. 

4.  PTOLÉMÉE  IV  PHILOPATOR,  roi  d'Egypte,  lils 
aîné  et  successeur  de  Ptolémée  III  Évergète  (222-204), 
fut  un  priue.-  eCfém.iné  el  dégradé,  qui  déploya 'cepen- 
dant une  certaine  énergie  en  quelques  circonstances 
(fig.  191).  Les  principaux  événements  de  son  règne  el 


[91.  —  Monnaie  de  Ptolémée  IV  Philopator. 
de  Ptolémée  IV,  à  droite,  diadème.  —  iî.  nTOAEMAlOï 
■m  vodatpOï.  Aigle  debout  sur  un  foudre  ù  droite;  devant  lui, 
un  monogramme. 

ses  guerres  avec  la  Syrie  sont  décrits  dans  Daniel,  xi, 

10-12.  Voir  A  xi  nu.  m  s  III,  I.  i,  cul.  688-689.  Il  remporta 
sur  Anliuclius  à  Raphia  une  grande  victoire  qui  le 
remit  en  possession  de  la  Cœlésyrie.  Ce  fui  à  relie 
n>n  qu'il  put  aller  à  Jérusalem.  D'après  le  troi- 
sième livre  des  Machabées,  Ptolémée  IV  offrit  des  pré- 
sents au  vrai  Dieu,  mais  il  voulut  entrer,  malgré  le 
grand-prétre,  dans  le  Saint  des  Saints.  À  cette  nouvelle, 
toute  la  ville  se  souleva,  et  le  roi,  frappé  d'une  terreur 
miraculeuse,  fui  emporté  évanoui  par  ses  gardes,  lie 

retour    à    Alexandrie,  irrite    de    ce   qui    était   arrive'.,    il 

voulut  forcer  les  Juifs  de  la  ville  à  honorer  ses  dieux. 

SOUS  peine    dehe   eei'a^es    pa,'    les   éléphants   dans    l'Ilip- 

ime  de  la  ville.  Au  lieu  d'écraser  les  Juifs,   les 

tournèrent  contre  les   soldais  du  roi, 

qui  s'empressa  de  révoquer  ses  ordres.  III  Mach.,i-vii. 

e  parle  du  massacre  de  soixante  mille  Juifs  par 

ce    prince.    Le    revit   du    troisième   livre    des  Machabées 


ne  saurait  être  pris  à  la  lettre,  mais  il  doit  avoir  un 
certain  fond  de  vérité,  puisque  Josèpbe,  Cont.  Apion., 
n.  û.  atteste  que  les  Juifs  célébraient  une  fête  en  sou- 
venir de  ces  événements.  Voir  Machabées  (Livres apo- 
cryphes des),  t.  iv,  col.  499.  Ptolémée  IV  passa  les 
dernières  années  de  sa  vie  dans  l'oisiveté,  occupé'  seu- 
lement à  satisfaire  les  plus  basses  et  les  plus  honteuses 
passions.  Il  mourut  en  204.  Justin,  xxx,  2;  S.  Jérôme, 
In  Dan.,  xi,  13,  t.  xxv,  col.  562.      F.  VIGOUROUX. 

5.  PTOLÉMÉE  V  EPIPHANE.  roi  d'Egypte,  fils  unique 
de  Ptolémée  IV  (204-181 1  (fig.  192).  Il  n'avait  que  quatre 


192.  —  Monnaie  (le  Ptolémée  V  Épij.hane. 
Buste  de  Ptolémée  V,  adroite,  diadème  et  radié;  derrière  le  eue 
un  fer  de  lance.  —  fi).  QTOAEMAIOÏ  BALIAEQS.  Corne  d'abi  n" 
dance.  Dans  le  ebamp,  deux  astres  et  un  monogramme. 

ou  cinq  ans  quand  il  succéda  à  son  père.  Antioclms  III 
voulut  profiter  de  cette  circonstance  pour  se  venger  de 
l'échec  que  lui  avaient  inlligé  les  Égyptiens.  Il  fut  d'abord 
victorieux,  Dan.,  xi,  Lf-15,  mais  l'intervention  des  Ro- 


193.       Ptolémée  V  Êpiphane,  en  habits  sacerdotaux,  oflraot  de 

n  'us  aux  dieux.  D'après  K.  A.    \V.  lludge,  A   llislory  of 
Egypt,  t.  vin,  1902,  p.  19. 

mains  l'arrêta  au  milieu  de  ses  victoires.  Voir  Antio- 
i.iii  s.  m.  t.  i,  cul.  689-690.  Le  roi  de  Svrie  lit  la  paix 
avec  Ptolémée  V  et  lui  donna  en  mariage  sa  fille  Cléo- 
pàtre,  Dan..  XI,  17,  qui  reçut  en  dot  la  Palestine  el  les 
miles     provinces    conquises    sur    l'Egypte.     Josèplici 


853 


PTOLEMEE   V    EPIPHA.XE 


PTOLEMEE    VI    PIIILOM  ETOR 


s:,  i 


Anl.  jud.,  XII,  iv,  !;  Polybe,  xvm.  51.  Anlioclms 
avait  compté  sur  elle  pour  exercer  son  inlluence  sur  le 
roi  d'Egypte.  Ses  calculs  furent  déjoués.  Cléopàtre  prit 
le  parti  de  son  mari  contre  son  père  et  l'encouragi  a  à 
rester  fidèle  aux  Romains  dont  l'alliance  paralysait 
toutes  les  entreprises  de  la  Syrie  contre  lui.  Les  pro- 
vinces contestées  restèrent  néanmoins  sous  la  domina- 
tion d'Antiochus  III  jusqu'à  sa  mort  1 1 S>7  > -  l'Iolémée  V 
préparait  une  expédition  pour  les  reprendre  sur  le 
nouveau  roi  de  Syrie.  Séleucus  IV  Philopator,  lorsqu'il 
périt  par  le  poison,  d'après  plusieurs  historiens, 
cf.  S.  Jérôme,  In  Dan.,  xi.  -20,  t.  xxv,  col.  565,  laissant 
la  mémoire  d'un  prince  impopulaire,  indolent  et 
vicieux.  La  célèbre  inscription  trilingue  connue  sous 
le  nom  de  Pierre  de  Rosette,  découverte  en  1799  par  un 
officier  français  pendant  l'expédition  d'Egypte,  et  con- 
servée aujourd'hui  au  British  Muséum  à  Londres,  qui 
a  donné  à  Cliampollion  la  clef  de  l'écriture  hiérogly- 
phique, fut  gravée  en  l'honneur  de  Ptolémée  V  pour 
célébrer  la  fête  de  son  intronisation  à  Memphis  et 
ordonner  qu'une  statue  lui  serait  dressée  dans  tous  les 
temples  du  pays  (lig.  193).  F.   ViGOUROUX. 

6.    PTOLEMEE       VI       PHILOMÉTOR,       loi       d'Egypte 

(lig.  191i,  succéda  à  son  père,  étant  encore  en  bas  âge 


194.  —  Monnaie  île  Ptolémée  VI  Philométor. 

Tête diadémée  de  Ptolémée  Philométor,  adroite.  —  iî.  BASIAEQ^ 
rjTOAEMUOr  •l'iAOMHTOPOS  6E0V.  Aigle  debout,  à  gauche, 
sur  un  foudre  et  portant  un  épi.  !>ans  le  champ,  lettre  et  mo- 
nogramme. 


(181-146).  II  pouvait  avoir  environ  six  an-  Sa  mère 
Cléopàtre  gouverna  le  royaume  en  son  nom  et  vécut 
en  paix  jusqu'à  sa  mort  avec  la  S\rie  dont  elle  était 
originaire  (173).  Mais  à  peine  eut-elle  fermé  les  yeux 
que  l'eunuque  Eulaeus  et  l'affranchi  syrien  Lena?us 
qui  exercèrent  le  pouvoir  au  nom  du  jeune  Ptolé- 
mée VI.  cherchèrent  à  reconquérir  la  Cœlésyrie  et  la 
Judée.  Polybe,   xxvn.  19:   Diodore  de  Sicile,  xxx,  2; 


195.  —  Monnaie  de  Ptolémée  VU.Physcon  Évergète  II. 
Tête  de  Jupiter  Ammon,  à  droite.  —  h.iiaiiai  i.'l  il  rOAEMAIOV 
EVEPTETOï".  Aigle  debout  à  droite  sur  un  foudre  et  portant 
un  bâton.  Dans  le  champ  *. 

16.  Antiochus  IV  Epiphane  était  alors  devenu  roi  de 
Syrie.  Voir  Antiocius  IV,  t.  i.  col.  693.  Il  se  hâta 
d'attaquer  l'r.gypte  avant  que  les  Égyptiens  eussent 
achevé  leurs  préparatifs,  11  Mach..  IV,  il:  cf.  I  Mach., 
i,  17,  et  il  les  défit  entre  Péluse  et  le  mont  Casius  ,  171  ). 
Le  jeune  Ptolémée  tomba  entre  ses  mains.  Dan.,  xi, 


2'2;  S.  Jérôme,  1»  Dan.,  xi.  22,  t.  xxv.  col.  566;  Po- 
lybe, xxviii,  7.  16;  Diodore  de  Sicile,  XXX.  iv,  I  et  2, 
on  ne  sait  de  quelle  manier.'.  Antiochus  devenait  par 
là  même  maître  de  l'Egypte;  il  se  rendit  à  Memphis  et 
s'y  fit  proclamer  roi.  Mais  la  population  d'Alexandrie 
refusa  de  le  reconnaître  comme  tel;  elle  conféra  la 
dignité  royale  au  frère  cadet  de  Philométor  qui  prit  le 
litre  d'Évergète  et  est  connu  sous  le  nom  de  Ptolémée 
Physcon  Évergète  II  ilig.  195). 

Cet  événement  fournit  au  roi  de  Syrie  un  prétexte 
pour  marcher  contre  Alexandrie,  soi-disant  pour  réta- 
blir Philométor  sur  le  trône.  Il  assiégea  la  ville,  mais 
sans  succès,  et  il  se  détermina  quelque  temps  après  à 
retourner  en  Syrie,  en  laissant  une  forte  garnison  à 
Péluse.  Quand  il  se  fut  éloigné,  Philométor  s'entendit 
avec  son  frère  et  sa  sœur  Cléopàtre  (fig.  196)  qu'il  avait 


196.  —  Monnaie  de  Cléopàtre  II. 
Tète  de  Cléopàtre  II,  en  Isis,  avec  de  longues  tresses  attachées 
par  des  épis,  à  droite.  —  S.  nTOAEMAlor  BAEIAEQE.  Aigle 
aux  ailes  éployées,  sur  un  foudre,  à   gauche.  —  Elle  épousa 
successivement  ses  deux  frères. 

épousée  et  ils  convinrent  de  régner  conjointement 
lig.  197).  Polybe,  XXXIX.  vin.  i;  Tite  Live,  xlv,  11. 
tlet  accord  ramena  Antiochus  en  Egypte.  Au  commence- 
ment du  printemps  168,  il  se  mit  en  route,  et  envoya 
sa  Hotte  en  Cypre;  l'île  lui  fut  livrée  par  la  trahison  de 
Ptolémée  Macron.  II  Mach.,x.  13.  Lui-même  se  dirigea 
vers  la  vallée  du  Xil.  Philométor  envoya  des  ambassa- 


I.i7.  —  Ptolémée  VI,  son  frère  Ptolémée  Vil 

et  leur  sœur  Cléopàtre,  rois     I  '  deDeir-el-Medinéh- 

D'après  Mahaffy,  dans  Pétrie,  t.  IV,  p.  170. 

deurs  au-devant  de  lui  à  Rbinocolure.  Le  roi  syrien  for- 
mula de  nouvelles  demandes  :  la  possession  de  Cypre, 
celle  de  la  bouche  pélusiaque  du  Xil  avec  Péluse.  etc. 
Comme  les  rois  égyptiens  ne  lui  donnèrent  pas  de 
réponse  au  temps  qu'il  avait  fixé,  il  marcha  contre 
Alexandrie  par  Memphis.  Près  de  six  mois  s'étaient 
écoulés  depuis  son  départ  de  Syrie  quand  il  arriva 
près  de  la  capitale  des   Lagides.  Un   coup  de  théâtre 


85. 


PTOLÉMÉE    VI    PHILOMÉTOR   —    PTOLEMEE    (DE   SYRIE) 


856 


mit  fin  à  sa  marche  victorieuse.  L'envoyé  de  Rome, 
l'opilius  Lœnas,  l'arrêta  à  Kleusis  près  d'Alexandrie  et, 
renfermant  dans  un  cercle  qu'il  traça  autour  de  lui, 
l'obligea  à  promettre  de  retourner  immédiatement  en 
Syrie,  ce  qu'il  lit  (juin  168).  11  dut  aussi  retirer  sa 
llotte  de  Cypre.  Polybe,  xxix,  27;  Tite  Live,  XLV,  xi, 
8-xii,  8;  Diodore;  xwi.  2;  Velléius  Paterculus,  i,  10; 
Appien,  Syr., 66;  Justin,  XXX IV.  ni,  1-4;  Valère  Maxime, 
vi.  :î.  En  quittant  l'Egypte,  Antiochus  IV  s'arrêta  à  Jé- 
rusalem el  se  vengea  aux  dépens  des  Juifs  des  humilia- 
tions qu'il  venait  de  subir  de  la  part  des  Romains. 

Ptolémée  Philomitor,  au  contraire,  se  montra  bien- 
veillant pour  les  Juifs  de  ses  Etats  et  c'est  sous  son 
règne  qu'Onias  IV  éleva  dans  le  nome  d'Arabie,  à  Léon- 
topolis.   prés   d'Iléliopolis   (vers   154),  un   temple  rival 


■198.  —  Portrait  de  Ptolémée  VI,  .i  Kern- bo. 

D'après  MahalTy,  dans  Pétrie,  t.  iv,  p.  180. 

île  celui  de  Jérusali  m.  Josèphe,  Ant.  jud.,  XIII,  m,  I . 
Les  commentateurs  placent  communément  sous  le 
règne  île  rti.léinée  l'Iiilométor  le  voyage  de  Dosithée 
qui  apporta  en  Egypte  la  lettre  des  phurim,  c'est-à-dire 
probablement  la  traduction  du  livre  d'Esther  en  grec. 
Voir  ClÉOPÀTRE  2,  t.  II,  col.  805;  DOSITHÉE,  t.  II, 
col.  1494. 

Apres  la  morl  ignominieuse  d'Antiochus  Épiphane, 
Ptolémée  VI  eul  à  combattre  contre  son  propre  frère 
qui  était  devenu  roi.de  la  Cyrénaïque,  mais  voulait  s'em- 
parer en  plus  de  l'Ile  de  Cypre.  Il  arrêta  son  ambition 
et  songea  alors  à  la  Syrie.  Pendant  le  règne  du  jeune 
Antiochus  Eupator,  il  semble  avoir  pris  parti  pour  Phi- 
lippe le  Phrygien  (voir  col.  266)  contre  le  régent  du 
royaume  séleucide,  Lysias.  Cf.  il  Mach.,  ix,  29.  Lorsque 
Démétrius  I"1  eut  fait  périr  Eupator,  le  roi  d'Egypte  prit 
d'abord  parti  pour  Alexandre  Balas,  le  rival  de  liémé- 

trius.  en   haine  de  ci    dernier  qui  avait  essayé  de  s'ein- 

parer  de  Cypre.  Alexandre  Balas  battit  el  tua  Démé- 
trius  l".  Philométor  s  entendit  alors  avec  le  vainqueur 
et  lui  donna  sa  [fille  Cléopàlre  en  mariage  à  Ptotémaîde 


(150).  I  Mach.,  x,  51-58.  Mais  il  cherchait  par  là  à  faire 
valoir  ses  droits  sur  la  Syrie.  Cf.  I  Mach.,  XI,  1,  10.  Il 
eut  à  se  plaindre  d'Alexandre,  qui  attenta  à  sa  vie, 
cf.  I  Mach.,  xi,  10,  ce  qui  le  fit  tourner  en  faveur  de 
Démétrius  II,  le  compétiteur  d'Alexandre  Râlas;  il 
enleva  sa  fille  Cléopàtre  à  Alexandre  et  la  donna  à  son 
rival  (147).  La  Svrie  fut  soumise  en  peu  de  temps  par 
le  roi  d'Egypte  et  il  fut  couronné  roi  d'Asie  à  Antioche. 
I  Mach.,  xi,  13.  Mahaffy,  The  Empire  ofthe  l'iolemies, 
1895,  p.  300.  Alexandre  lit  de  vaines  tentatives  pour 
recouvrer  le  royaume;  il  fut  battu  par  les  armées  réu- 
nies de  Philopator  et  de  Nicator  el  périt  peu  après  en 
Arabie.  Voir  Démétrius  11  Nicator,  t.  n,  col.  1362. 
Ptolémée  VI  devait  le  suivre  de  près  dans  la  tombe  1 145). 
Ci  ieveinent  blessé  à  la  tète  dans  la  bataille,  les  méde- 
cins essayèrent  de  le  trépaner.  mais  il  mourut  pendant 
l'opération,  la  36'  année  de  son  règne.  Tile  Lue,  Eptsl., 
lu.  Cf.  Josèphe,  Aiil.jud.,  XIII,  iv,  8. 

Ptolémée  Philométor  (lig.  198)  est,  avec  son  frère  Pto- 
lémée VII  Physcon.  le  dernier  roi  d'Egypte  nommé 
dans  les  Saintes  Écritures.  F.  VlGOUROUX. 

7.  PTOLÉMÉE    VII     PHYSCON     ÉVERGÈTE      II,    roi 

d'Egypte  (  170-1 17).  Ptolémée  Physcon  (fig.  195  est  men- 
tionné I  Mach.,  xv,  16,  comme  le  destinataire  d'une 
lettre  qui  lui  fut  adressée  de  la  pari  des  Romains  par 
le  consul  Lucius  en  faveur  des  Juifs.  Voir  l.t  eus,  t.  IV, 
col.  i09.  C'est  peut-être  aussi  de  lui  qu'il  est  question 
dans  le  Prologue  de  l'Ecclésiastique.  Voir  plus  haut, 
col.  851.  Sur  son  règne,  voir  Ptolémée  VI. 

F.  Vient  r.otx. 

8.  ptolémée,  fils  de  Dorymine.  I  .Mach.,  ni,  38  (et 
dans  le  t  ex  le  grec  de  11  Mach.,  iv,  i5);  cl.  Polybe,  v.til. 
On  l'identifie  communément  avec  le  Ptolémée  qui  est 
surnommé  Maeron  [Macer,  dans  la  Vulgate),  Voir  t.  IV, 
col.  470.  Il  Mach.,  \,  12.  Celle  identification  n'est  pas 
sans  souffrir  quelques  difficultés.  D'après  Athénée,  vi. 
p.  246,  le  Ptolémée  qui  fut  gouverneur  de  Cypre  pendant 
la  minorité  de  Ptolémée  Philométor  el  qu'on  confond 
avec  le  Ptol'émée  de  1  Mach..  ni.  :!,s.  étail  fils  d'Agésarque 

et  non  de  Dorymine.  Si  Athén  le  il e  le  véritable  nom 

de  son  père  et  si  ce  nom  el  celui  de  Dorymine  ne  dési- 

éé,ii  pas  un  même  personnage,  Ptolémée  fils  d'Agé- 
sarque est  alors  le  Ptolémée  Maeron  de  II  Mach.,  X.  12. 
et  distinct  du  Ptolémée  de  1  Mach.,  m.  38,  mais  il  esl 
possible  que  Hors  mine  el  Agésarque  soie  ni  une  seule  et 
même  personne.  Cf.  I  Mach.,  ni,  38  et  11  Mach.,  x,  13. 
Ptolémée  surnommé  Maeron,  mégalopolitain  d'origine, 
fut  gouverneur  de  l'Ile  de  Cypre  au  nom  de  Ptolémée 
Philométor  encore  mineur,  et  il  remplit  d'abord  fidèle- 
ment ses  fonctions.  Polybe,  xxvn,  12.  Mais  la  lutte  étail 
vive  à  celle  époque  entre  les  Séleucides  el  les  Lagides, 
et  les  sujets  des  uns  et  des  antres  passe  n  ni  quelquefois 
du  camp  égyptien  lu  camp  syrien  et  réciproquement. 
Après  avoir  servi  le  roi  d'Egypte,  le  gouverneur  de  Cypre 
se  mit  au  service  d'Antiochus  IV  Épiphane  il  devint  son 
favori  el  en  recul  le  gouvernement  de  la  Phénicie  et 
de  la  Cœlésyrie.  II  Mach..  vin,  8;  n,  11-12.  Ptoli 
(fils  de  Dorymine)  profita  de  son  crédit  auprès  du  roi 
pour  protéger  le  grand-prêtre  juif  usurpateur  Menélas 
II.  IV,  col.  964),  qui  avait  acheté  son  concours  à  prix 
d'argent.  Il  Mach.,  iv,  15-50.  Il  fut  un  des  fauteurs  de 
la  persécution  syrienne  contre  les  Juifs.  II  Mach.,  vi,  8. 

(La  Vulgate   et  plusieurs  m; serils  grecs,  comme  le 

texte  de  l'édition  romaine  des  Septante,  portent  i  lea 
l'Iiiléiiiécs  g  au  pluriel,  mais  la  vraie  leçon  parait  bien 
être  «  Ptolémée  d  fils  de  Dorymine,  au  singulier. 
0.  Ir.  Fritzsche,  Kwzgefasstes  exegetisches  Handbueh 
tu  denApocryphen,  iv,  I.ief.,1857,  p.  1 1  II  12.)  Lorsque 
Judas  Machabée  eul  remporté  ses  premières  victoires 
contre  les  Syriens,  Lysias  choisit  pour  combattre 
les  Juifs  Ptolémée  fils  de  Dorymine,  avec  fx'icanor  et 
Gorgias.  1  Mach..  ni.  38.   Ils  furent  battus  par  les  Juifs 


857 


PTOLEMEE    —    PUBLICAINS 


858 


(108),  mais  nous  ne  savons  rien  de  particulier  sur  la 
conduite  de  Ptolémée  dans  cette  guerre.  Il  parait  seule- 
ment avoir  compris  l'inutilité  de  la  violence  contre 
Israël.  Nous  apprenons  par  II  Mach..  x,  13,  qu'à 
l'avènement  du  roi  mineur  Antiochus  Eupator  au  trône 
d'Anlioche,  Ptolémée  (Macron)  était  animé  de  senti- 
ments conciliants  à  l'égard  des  Juifs.  Ce  fut  la  cause  de 
sa  chute.  Ses  ennemis  en  prolifèrent  pour  le  perdre  :  on 
l'accusa  de  trahison  et  ne  pouvant  supporter  sa  disgrâce, 
il  s'empoisonna.  «  Ptolémée,  surnommé  Macron,  dit 
le  texte  grec,  avait  été  le  premier  à  ohserver  la  justice 
envers  les  Juifs  à  cause  des  violences  qu'ils  avaient 
subies  et  s'était  ell'orcé  de  gouverner  pacifiquement. 
Mais  pour  cela  même  il  fut  accusé  par  des  amis  (du  roi) 
auprès  d'Eupaloret  comme  il  s'entendait  partout  appeler 
traître,  parce  qu'il  avait  abandonné  Cypre  que  Philo- 
métor  lui  avait  confiée  et  qu'il  était  passé  (dans  le  parti) 
d'Antiochus  Épiphane,  n'ayant  plus  qu'un  pouvoir  sans 
honneur,  il  perdit  courage  et  prenant  du  poison,  il 
s'ôta  la  vie.  »  F.  ViGoi'rtoux. 

9.  PTOLÉMÉE,  fils  d'Ahobi,  gendre  de  Simon  Ma- 
chabée.  Il  était  fort  riche  et  avait  reçu  le  gouvernement 
de  Jéricho  et  de  son  territoire.  Il  conçut  le  projet  de 
devenir  maître  de  la  Judée  et  pour  le  réaliser,  ayant 
reçu  son  beau-père  dans  la  petite  forteresse  de  Doch 
(t.  il,  col.  1454),  il  le  mil  traîtreusement  à  mort  avec 
ses  deux  fils  Mathathias  et  Judas,  à  la  fin  d'un  grand 
festin.  Un  troisième  fils  de  Simon,  Jean,  surnommé 
Hyrcan  (t.  ni,  col.  1154),  n'avait  pas  accompagné  son 
père  à  Jéricho  et  se  trouvait  alors  à  Gazara  (Gazer, 
t.  m,  col.  126).  Son  beau-frère  expédia  des  émissaires 
dans  cette  ville  pour  le  mettre  à  mort,  mais  heureuse- 
ment prévenu  à  temps  de  la  mort  de  son  père  et  de  ses 
frères  et  du  danger  qui  le  menaçait,  Jean  fit  saisir  et 
exécuter  ses  assassins  à  leur  arrivée.  Pendant  ce  temps, 
Ptolémée  demandait  des  secours  au  roi  de  Syrie,  pour 
prendre  possession  de  la  Judée  et  essayait  de  se  rendre 
maître  de  Jérusalem.  1  Mach.,  xvi,  14-22.  L'auteur  de 
1  Mach.  ne  nous  apprend  plus  rien  sur  cet  ambi- 
tieux, mais  Josèpbe,  Ant.  /ml.,  XIII.  vil,  4;  vin,  1, 
ajoute  que  Jean  Hyrcan  alla  l'assiéger  dans  sa  forteresse 
de  Doch,  d'où  Ptolémée  s'échappa  finalement  pendant 
l'année  sabbatique,  et  ^.'  réfugia  auprès  de  Zenon  Coti- 
las,  prince  (rupavveûovToe)  de  Philadelphie.  Cf.  Bell,  jud., 
I,  il,  3-4.  Contrairement  au  récit  de  I  Mach.,  Josèphe 
suppose  que  Ptolémée  avait  conservé  ses  deux  beaux- 
frères  comme  otages,  ainsi  que  leur  mère,  et  qu'il  se 
servit  de  sa  belle-mère,  qu'il  exposait  aux  coups  des 
assaillants,  pour  ralentir  les  attaques  de  Jean  Hyrcan; 
il  explique  ainsi  les  longueurs  du  siège.  L'auteur  sacre 
ne  parle  point  de  la  mère  de  Jean  et  il  raconte  que 
ses  frères  avaient  été  tués  en  même  temps  que  leur 
père,  comme  on  l'a  vu  plus  haut,  et  non  après  que  le 
siège  eut  été  levé,  comme  le  dit  le  récit  de  Josèpbe, 
qui  ne  fait  d'ailleurs  jouer  aucun  rôle  dans  le  siège  à 
Mathathias  et  à  Judas,  ce  qui  confirme  indirectement  le 
récit  des  Machabées,  qui  est  seul  exactement  historique. 

F.  VlGOtlROUX. 

PUBERTÉ,  âge  auquel  le  jeune  homme  ou  la  jeune 
fille  deviennent  aptes  à  la  vie  conjugale.  —  Cet  âge 
vient  plus  tôt  dans  les  pays  chauds  que  dans  les  autres. 
Chez  les  Juifs,  il  était  fixé  à  treize  ans  et  un  jour 
pour  les  garçons,  à  douze  ans  et  un  jour  pour  les 
filles.  Si  alors  les  signes  de  la  puberté  étaient  constatés, 
on  déclarait  les  jeunes  gens  gedolim  et  gedolôt,  c'est-à- 
dire  «  grands,  majeurs  ».  S'il  en  était  autrement,  ils 
pouvaient  rester  mineurs  jusqu'à  dix-neuf  ans  et  onze 
mois;  mais  c'est  seulement  à  trente-cinq  ans  et  un  jour 
qu'on  les  déclarait,  s'il  y  avait  lieu,  impropres  au  ma- 
riage. Cf.  Iken,  Antiquilates  hebraicse,  Brème,  1741. 
p.  5111,  520.  On  se  mariait,  en  général,  à  un  âge  très 
jeune.    Le    jeune   homme    nubile   était   appelé     cléni. 


v£iv:'a;.  adolescent.  C'est  le  nom  qui  est  attribué  au 
j'eune  David,  1  Reg.,  xvn.  56,  et  au  jeune  page  de 
Jonathas.  I  Reg.,  xx,  22.  Sur  la  jeune  fille  nubile,  voir 
Ai.u.ui,  t.  i,  col.  391,  392.  -  Il  est  plusieurs  fois  parlé 
delà  «  femme  de  la  jeunesse  ».  èset  ne'ûrîm.  Prov.. 
Il,  1";  v,  18;  Ezech..  xxm,  3,  8,  21  ;  Jo.,  i,  18;  Mal.,  n. 
14,  etc.  Les  Septante  traduisent  par  yuvy)  vcôtriro;,  et  la 
Vulgate  ordinairement  par  u.cor  pubertalis,  «  femme 
de  la  puberté  »,  expression  exacte  quant  au  fond,  car 
il  ^agit  ici  de  la  première  union,  de  celle  qui  a  élé 
contractée  par  les  époux  à  un  âge  encore  tendre,  dès 
qu'ils  ont  élé  nubiles.  —  Dans  le  Lévitique,  xix,  20,  la 
Vulgate  appelle  simplement  nubilis,  «  en  âge  d'être 
mariée  »,  une  esclave  neliërefei  le'iS,  «  fiancée  à  un 
homme  »,  SiojtE<puXaYJi.évY]  àvépwirti),  «  réservée  à  un 
homme  ».  '     ||.  Lesèthe. 

PUBLiCAINS  (grec  :  zà.„r,xi;  Vulgate  :  publicani), 
nom  qui  sert  à  désigner,  soit  dans  la  littérature  classi- 
que, soit  dans  les  trois  premiers  évangiles,  avec  la  nuance 
importante  qui  sera  indiquée  plus  bas,  ceux  qui  levaient 
les  divers  genres  d'impôts  chez  les  Romains.  Le  nom 
grec  vient  de  téXoç,  «  impôt,  taxe  »;  le  nom  latin  dé- 
rive du  mot  publicum,  employé  comme  synonyme  de 
vectigal,  ou  dans  le  sens  de  trésor  public,  l'ite-Live, 
xx.xn,  7,  parce  que  les  sommes  perçues  par  les  agents 
en  question  étaient  versées  dans  le  trésor  de  l'État. 

1°  Les  publicains  en  général.  —  A  Rome,  sous  l'em- 
pire comme  au  temps  de  la  république,  la  perception 
dis  impôts  ne  se  faisait  pas  au  moyen  d'une  adminis- 
tration spéciale,  à  la  solde  et  sous  le  contrôle  direct  de 
l'Etat,  mais  au  moyen  d'une  mise  à  ferme,  qui  trou- 
vait de  nombreux  candidats,  car  l'opération  permettait 
presque  infailliblement  d'obtenir  de  gros  bénéfices. 
Voir  Impôts,  t.  ni,  col.  851-853.  Les  publicani  étaient 
donc  ceux  qui  affermaient  le  droit  de  lever,  dans  une 
région  déterminée,  la  totalité  des  impôts,  ou  du  moins 
telle  ou  telle  catégorie  spéciale  d'impositions,  par 
exemple,  la  taxe  de  pacage,  scriplura,  la  dime,  decuma, 
les  droits  de  douane,  porloria,  etc.  Publicani... 
ilicunlur  gui  publica  recligalia  liabenl  conducla. 
Digest.,  xxxix,  4.  La  somme  à  verser  dans  la  caisse 
publique  étant  considérable,  il  fallait  être  très  riche 
pour  prendre  les  impôts  à  bail;  aussi  les  publicani 
appartenaient-ils  généralement  à  l'ordre  des  chevaliers 
Le  fermage  avait  lieu  parla  voie  des  enchères  publiques, 
au  profit  de  celui  qui  oflrait  le  prix  le  plus  élevé. 
Souvent,  un  seul  capitaliste  était  incapable  de  verser 
la  somme  requise;  on  formait  alors  des  sociétés  vecti- 
galiennes,  societates  publicanorum,  Dige.it.,  xvn,  2; 
Cicéron,  Pro  Sextio,  iv,  32,  dont  les  membres,  au  mo- 
ment où  l'on  partageait  les  bénéfices,  recevaient  une 
quote-part  proportionnée  à  leur  cotisation.  Ces  sociétés 
étaient  présidées  à  Rome  par  un  magister;  en  province, 
par  un  pro  magister.  Cicéron,  Ad  Div.,  xm,  9;  Ad 
Allie,  v,  15;  Ïite-Live,  xxm,  48-59.  La  durée  du  fer- 
mage élail  de  cinq  ans  au  temps  de  l'empire,  et  l'exé- 
cution du  contrat  commençait  le  15  mars.  —  On  com- 
prend sans  peine  que  ce  système  de  perception  des  im- 
pôts était  très  vicieux  en  lui-même,  et  ouvert  aux  plus 
criants  abus.  Aussi  ne  manqua-t-il  pas  de  porter  ses 
fruits  :  la  vexation,  le  vol,  la  fraude,  les  brutalités  de 
tout  genre.  L'État  y  avait  un  grand  avantage,  puisqu'il 
évitait  ainsi  les  frais  de  perception  ;  mais,  par  contre, 
les  contribuables  étaient  livrés  à  l'arbitraire  d'une  levée 
d'impôts  non  réglée  par  la  loi,  et  organisée  unique- 
ment dans  l'intérêt  des  adjudicataires.  Cf.  Tile  Live, 
XLV,  xviii,  4.  Les  publicani  devaient  tout  naturel- 
lement songer  à  lever  sur  les  particuliers  des  sommes 
supérieures  à  celles  qu'ils  s'étaient  eux-mêmes  engagés 
à  payer,  car  ils  étaient  personnellement  responsables 
des  contributions  qui  ne  rentraient  pas,  et  tenus  de  les 
acquitter  à  leurs  propres  dépens. 


859 


PUBLICAINS 


860 


Ce  sont  ces  fermiers  généraux  qui  recevaient  à  pro- 
prement parler  le  titre  de  publicani.  Ils  avaient  sous 
leurs  ordres  un  nombre  considérable  d'agents  infé- 
rieurs, nommés  en  latin  portitores,  e.cactores,  qui 
exerçaient  à  peu  prés  les  fonctions  de  nos  douaniers. 
et  qui  étaient  attachés  à  des  stations  déterminées  :  sur 
les  ponts,  aux  carrefours  des  routes,  à  la  porte  des 
villes,  près  des  lieux  de  débarquement.  Cf.  Matth.,  ix, 
1,  9.  Ces  sous-agents,  qui  traitaient  directement  avec 
les  contribuables,  n'imitaient  que  trop  la  conduite 
odieuse  et  tout  spécialement  les  concussions  de  leurs 
cbefs.  d'autant  mieux  que  leur  recrutement  avait  lieu 
dans  de  mauvaises  conditions,  et  que,  ayant  souvent 
une  part  des  prolits  dans  les  perceptions,  ils  ne  crai- 
gnaient pas  de  surtaxer  les  objets  soumis  à  la  douane. 
Aussi  le  sentiment  populaire  leur  était-il  partout  dé- 
favorable; on  se  plaignait  d'eux  de  tous  côtés.  Cf.  Vi- 
gest.,  xxxix,  4.  D'après  Stobée,  Serrn.,  a,  34,  les 
portitores  étaient  comme  les  ours  et  les  loups  de  la 
société  humaine;  cf.  Tbéocrite,  Char..  7.  La  locution 
nâvTs;  tsàmvou  irivTs;  iprca.YE;,  «  Tous  les  publicains 
sont  des  voleurs  »,  était  devenue  de  bonne  heure  pro- 
verbiale. Cicéron,  dans  une  lettre  à  son  frère,  Ad 
Quint.,  I,  I,  11,  avoue  que  le  public  se  plaignait  moins 
encore  des  portoria,  quoique  si  lourds,  que  des  în- 
iurix  portitorum.  Il  dit  ailleurs,  De  Offic,  l,  42, 
que  la  profession  de  publicain  était  la  pire  de  toutes. 
Et  il  n'y  avait  pratiquement  aucun  recours  contre  leurs 
procédés  vexatoires,  car,  dans  les  provinces  surtout, 
les  autorités  romaines,  qui  auraient  dû  réprimer  les 
abus,  étaient  souvent  de  connivence  avec  les  publicains 
pour  dépouiller  le  publie,  sous  le  prétexte  de  perce- 
voir les  impôts.  Voir  Tacite,  Ann.,  xm,  50. 

■!■■  Les  publicains  dans  les  Évangiles.  —Remarquons 
d'abord  qu'à  l'époque  de  Notre-Seigneur  la  Palestine 
dépendait  de  trois  juridictions  différentes  au  point  de 
vue  politique,  et  par  conséquent  sous  le  rapport  des 
impôts.  La  Judée  et  ta  Samarie  étaient  sous  la  domi- 
nation directe  de  Itouie  et  étaient  gouvernées  par  le 
procurateur  romain;  la  Galilée  et  la  Pérée  apparte- 
naient à  Hérode  Antipas;  la  Trachonitide,  l'Abilène  et 
l'Iturée,  à  son  frère  Philippe.  Cf.  Luc,  m,  1.  En  Judée 
et  eu  Samarie,  les  impôts  étaient  donc  levés  pour  le 
compte  de  Rome;  dans  les  autres  districts,  pour  celui 
des  deux  tétrarques.  Sur  ces  divers  territoires,  il  \  avait 

de  r breux  collecteurs  d'impôts.  Des  deux  publicains 

qui  sont  mentionnés  nommément  dans  l'Évangile,  l'un, 
Lévi  ou  l'apôtre  saint  Matthieu,  dont  le  bureau  était  à 
Caphamaûm,  ptès  du  port.  Matth.,  îx,  1,  9,  levait  la 
taxe  au  nom  d'Ilérode  Antipas;  l'autre.  Zacbée,  à  Jé- 
richo, Lue.,  xix,  au  nom  du  gouverneur  romain. 

La  mention  fréquente  des  publicains  par  les  Evangé- 
I isit-.  indique  quelle  grande  place  cette  catégorie 
d'hommes  tenait  dans  la  vie  sociale  delà  Palestine. 
Dans  le  Nouveau  Testament,  les  synoptiques  sont  seuls 
à  les  mentionner,  encore  ne  parlent-ils  pas  des  publi- 
ent ti  proprement  dits,  e'osl-à  dire  des  entrepreneurs 
raux,  mais  des  simples  portitores,  auxquels  la 
V'nlgate  donne  improprement  le  nom  de  1  publicains 
le  grec  les  nomme  toujours  re).tôvai.  Il  existe  tout  au 
plus  une  exception  à  celte  règle  :  Luc,  XIX,  2,  Zachée 
immé  ip-/iTe).(ivr,î,  Vulgale,  pvinceps  publicano- 
ruiii,  et  il  est  fort  possible  qu'il  ail  été  lui-même  adju- 
dicataire des  impôts  pour  tout  le  district  de  Jéricho. 
Cette   ville,  en  effet,  était  une  station  importante  de 

dou s,  à  cause  du  grand  commerce  de  baume  dont 

elle  était  le  centre. 

Dans  les  Evangiles  aussi,  on  trouve  plusieurs  allu- 
sions   aux     extorsions    injustes    et     à     la    violence  des 

publicains.  Jean-Baptiste,  interrogé   par  quelques-uns 

d'enli iix  sur  li  manière  dont  ils  devaient  faire  péni- 

leur  répondit  :  o  Ne  faites  rien  de  plus  que  ce 
qui  \otis  a  été  prescrit,     Luc,  ni.  13,  c'est-à-dire  :  n'exi- 


gez rien  au  delà  de  la  taxe  légitime.  Zacbée,  prenant  en 
face  de  Jésus  de  généreuses  résolutions,  promet,  s'il  a 
fait  tort  à  quelqu'un,  de  restituer  au  quadruple. 
Luc.  xix.  S.  Dans  ce  second  texte,  l'équivalent  grec  de 
defraudavi  de  la  Vulgate  est  avxoçavTsïv,  extorquer  de 
l'argent  au  moyen  de  fausses  accusations.  Les  porti- 
tores recouraient  donc  au  chantage,  accusant  à  faux 
les  gens  d'avoir  fraudé,  pour  obtenir  d'eux  des  sommes 
plus  considérables.  Leur  conduite  est  surtout  stigma- 
tisée, dans  les  Évangiles  synoptiques,  par  la  manière 
perpétuelle  dont  le  peuple  les  associait  soit  aux  pé- 
cheurs en  général,  cf.  Matth.,  ix,  10,  II  ;  XI,  19  ;  Marc, 
il.  15-16;  Luc,  v.  30;  vu,  29-30;  xv.  I;  xvm,  11,  etc.. 
soit  en  particulier  aux  femmes  publiques,  Matth,,  xxi, 
31-32,  et  aux  païens,  Matth.,  xvm,  17,  c'est-à-dire  aux 
êtres  les  plus  odieux  d'après  les  principes  israélites. 

C'est  que,  dans  les  divers  districts  de  la  Palestine, 
les  collecteurs  subalternes  des  impôts  étaient  le  plus 
souvent  Juifs  eux-mêmes.  Cf.  Matth.,  ix,  9;  Luc,  ut, 
12  et  xix.  2;  .losèphe,  Anl  ,\l.  xiv,  4.  Or,  spécialement 
en  Judée,  ce  fait  les  rendait  doublement  méprisables 
aux  yeux  de  leurs  compatriotes,  parce  qu'ils  avaient, 
par  leurs  fonctions  mêmes,  indépendamment  de  leur 
rapacité,  le  tort  impardonnable  de  servir  d'instruments 
aux  Romains,  les  puissants  ennemis  de  la  cause  Ihéo- 
cratique.  On  les  regardait  donc,  non  seulement  connue 
des  hommes  avides,  qui  songeaient  avant  tout  à  leurs 
intérêts  personnels,  mais  aussi  comme  des  traîtres  et 
des  renégats  sous  le  rapport  politique  et  religieux.  En 
effet,  à  ce  dernier  point  de  vue,  plus  d'un  Israélite 
se  posait  au  fond  de  sa  conscience,  lorsqu'il  s'agissait 
de  se  mettre  en  règle  avec  les  publicains,  cette  ques- 
tion qui  fut  adressée  un  jour  à  X.-S.  Jésus-Christ, 
Matth.,  xxii,  17  :  «  Est-il  permis  de  payer  le  tribut 
à  César?  »  Le  payer,  n'était-ce  pas  substituer  une 
royauté  païenne  à  celle  du  Seigneur?  Les  publicains 
étaient  donc  particulièrement  abhorrés  en  Palestine, 
comme  on  le  voit  par  les  écrits  lalmudiques.  On  les 
bannissait  impitoyablement  de  la  société  .les  gens  hon- 
nêtes. Luc,  vu.  31;  on  regardait  comme  une  chose  in- 
convenante de  manger  et  de  boire  avec  eux.  Matth., 
ix.  11;  Marc,  II,  16;  Luc.  v,  30;  ils  n'avaient  pas  le 
droit  d'être  juges  ou  témoins  dans  les  procès.  Les 
rabbins  allaient  jusqu'à  affirmer  que  le  repentir,  et  par 
conséquent  le  salut  îles  publicains,  sont  impossibles, 
Baba  Kama,  9i  b;  ils  les  rangeaient  p:irmi  les  voleurs 
et  les  assassins.  Nedar.,  m,  'i,  I.  Les  publicains  étaient 
donc  excommuniés  de  l'ait.  Cf.  Lightfoot,  Opéra  omnia, 
l'trecbt,  1599,  t.  il,  p.  295  296,  31  i,  502-503,  555.  Leur 
famille  était  regardée  comme  déshonorée.  Il  était  in- 
terdit d'accepter  leurs  aumônes  et  même  de  changer 
de  la  monnaie  chez  eux.  leur  argent  étant  souvent  le 
produit  du  vol.  Baba  Kama,  10,  I.  Au  conlraire,  il 
était  permis  de  les  tromper  le  plus  possible;  par 
exemple,  en  déclarant  que  les  objets  soumis  à  la  douane 

étaient  destinés  au  Temple,  en  faisant  passer  un  es- 
clave pour  un  lils,  etc.  Le  Talmuil  ne  se  montre  indul- 
gent à  leur  égard  que  lorsqu'ils  diminuaient  les  taxes 
pour  leurs  compatriotes.  Sanhedr.,  25,  2.  Ainsi  traites 
en  parias,  les  publicains  n'axaient  d'autre  ressource 
que  de  s'associer  étroitement  entre  eux  ou  à  d'autres 
parias,  et  c'est  précisément  pour  ce  motif  qu'ils  sont  si 
fréquemment  rapprochés  des  pécheurs  dans  les  Évan- 
giles. On  ne  pouvait  les  fréquenter  sans  se  compro- 
mettre; aussi  les  Pharisiens  ne  pardonnaient-ils  pas  a 
Jésus-Christ    les   relations   qu'il   avait    avec    eux  et    les 

sentiments  de  bienveillance  qu'il  leur  témoignait. 
Cf.  Matth.,  îx,  10-11;  xi,  19;  Marc,  H,  15-10;  Luc.  v. 
29-30;  vu,  34;  w,  I  :  xix,  1-10.  Bien  plus,  Jésus  lui- 
même,  maigri'  sa  bonté  pour  les  pécheurs,  employait 
parfois  envers  les  publicains  le  langage  sévère  de  ses 
compatriotes.  Cf.  Matth..  xvm,  17;  xxi,  31-32,  etc.  La 
conversion  de  plusieurs  d'entre  eux.  comme  on  le  voit 


861 


PUBLICAIXS    —    PUDENS 


862 


par  celles  de  Lévi  et  de  Zachée,  fut  sincère  et  géné- 
reuse. Cf.  Malth.,  i\.  9-13;  Marc,  II,  14-17;  Luc.,  v. 
-7-3-J ;  xviii,  13-14;  xtx,  2-10.  Jésus  avait  une  grande 
influence  sur  beaucoup  d'entre  eux. 

3"  Bibliographie.  —  Struckmann,  De  porlitoribus  in 
Noeo  Testamento  obviis,  Lenigo,  1750;  C.  G.  Millier, 
De  reXûvaiç  et  ifiap-roXotç,  Géra,  1779;  Salkowski,  ijux- 
stiones  de  jure  socielatis  prsecipue  publicanorum, 
in-8  .  Regiomonti  Borussi,  1859;  G.  Friedlânder,  Dar- 
slellungen  aus  der  Sillengeschichle  Roms  in  der  Zeit 
von  August  bis  zum  Ausgang  der  Antonine,  in-8°. 
Leipzig,  1S65-1867,  t.  h,  p.  25-27,  G.  Humbert,  Les 
douanes  et  les  octrois  chez  les  Romains,  in-8»,  Tou- 
louse, 1867,  extrait  du  Recueil  de  l'Académie  de  lé- 
gislature: J.  Marquardt,  Rômische  Slaatsverwaltung, 
Berlin,  1876,  t.  n,  p.  261-209;  du  même  auteur. 
De  l'organisation  financière  chez  les  Romains, 
trad.  franc,  du  t.  x  de  T.  Mommsen  et  J.  Marquardt, 
Manuel  des  antiquités  romaines,  in-8",  Paris,  1888, 
p.  379-38 i  :  L.  Ilerzfeld,  Handelsgeschichle  der  Juden 
des  Alterlhums,  in-S»,  1865,  p.  160-165;  A.  G.  Dietricli, 
Reitrâge  zur  Kenntniss  des  rômiscli.  Steuerpâchter- 
systems,  in-8»,  Leipzig,  1877,  p.  5-10;  Id.,  Die  rechtliche 
Nalur  der  Societas  publicanorum,  in-8»,  Meissen,  1889  ; 
Edersheim,  Tlie  Life  and  Times  of  Jésus  the  Messiah, 
in-8»,  Londres,  1883,  t.  i,  p.  545-518;  Vigie.  Les  douanes 
dans  l'empire  romain,  in-8",  Montpellier,  1884,  p.  157- 
168;  F.  Thibault.  Les  douanes  chez  les  Romains,  in-S". 
Paris,  1888;  P.  Allard,  Les  publicains  et  l'organisa- 
tion dans  l'ancienne  Rome,  dans  la  Réforme  sociale, 
février  1889.  L.  Fillion. 

PUBLIUS  igrec  :  nô-Àioc,  forme  grécisée  du  latin 
Publias',  «  premier  »,  wpûTo;,  de  l'Ile  de  Malte  (voir 
PREMIER,  col.  602).  à  l'époque  où  saint  Paul  y  aborda 
après  son  naufrage.  Il  gouvernait  l'île  en  qualité  de 
légat  du  proconsul  de  Sicile.  Il  possédait  des  terres  à 
l'endroit  où  furent  jetés  les  naufragés:  il  fit  bon  accueil 
à  l'Apôtre  et  à  ses  compagnons  et  lui  donna  l'hospitalité 
pendant  trois  jours.  Saint  Paul  l'en  récompensa;  il  gué- 
rit son  père  qui  était  au  lit  malade  de  la  fièvre  et  de  la 
dysenterie,  en  priant  pour  lui  et  en  lui  imposant  les 
mains.  Act.,  xxvm,  6-8.  Dieu  lui  accorda  à  lui-même  une 
grâce  plus  grande  encore,  le  don  de  la  foi.  D'après  la 
tradition,  Publius  devint  évèque  d'Athènes  après  saint 
Denis  l'Aréopagite  et  reçut  la  couronne  du  martyre. 
S.  Jérôme,  De  vir.  M.,  19,  t.  xxm,  col.  037;  Acta 
sanctorum,  januariit.  n,  édit.  Palmé,  p.  792. 

PUCE  (hébreu  :  paroS,  le  pursu'u  assyrien;  Sep- 
tante :  iJrjXXoc;  Vulgate  ipulex),  insecte  diptère  et  suceur, 


-  Pulejc  irritans  (grossi  de  2<J  diamètres). 

composé  de  douze  segments  cornés,  dont  la  tète  est  ar- 
mée de  petites  scies  et  d'un  suçoir  aigu,  et  dont  les 
longues  pattes,  surtout  celles  de  derrière,  sont  confor- 
mées pour  permettre  à  l'animal  des  bonds  extraordi- 
naires pour  sa  taille  (fig.  199).  La  puce  femelle  pond  de 
huit  à  douze  œufs  qu'elle  dépose  dans  la  poussière, 
dans  les  fentes  des  boiseries  ou  des  meubles  ou  dans 


des  linges  malpropres.  De  ces  œufs  sortent  de  petites 
I  irves,  qui  se  changent  en  nymphes,  puis  en  puces  par- 
faites. Cette  transformation  demande  de  vingt  à  Irente 
jours.  La  chaleur  et  la  malpropreté  sont  des  conditions 
favorables  à  la  multiplication  de  l'insecte.  Le  pulex  wri- 
lans  s'attaque  à  l'homme;  il  y  a  d'autres  espèces  par- 
ticulières pour  les  chiens,  les  chats,  les  poules,  les 
pigeons,  etc.  —  Les  puces  trouvent  en  Orient  tout  ce 
qu'il  faut  pour  faire  prospérer  leur  race.  Tous  les 
voyageurs  se  plaignent  amèrement  du  supplice  qu'elles 
leur  font  endurer.  Cf.  de  Saulcy.  Voyage  autour  de  la 
mer  Morte,  Paris,  1853.  t.  H,  p.  463;  lady  Gordon. 
Lettres  d'Egypte,  trad.  Ross.  Paris,  1869.  p.  33;  Le 
Camus,  Voyage  aux  pays  bibliques,  t.  n.  p.  170. 
Aucun  n'échappe  à  leur  atteinte  et  les  habitants  de  la 
Palestine,  ordinairement  si  patients,  ne  peuvent  se 
défendre  de  manifester  leur  irritation  contre  cet  in- 
secte. Parfois  les  Bédouins  sont  obligés  de  capituler 
devant  les  puces  et  de  s'en  aller  camper  ailleurs;  mais 
malheur  au  voyageur  qui  s'arrête  à  leur  ancienne  place, 
même  s'ils  l'ont  quittée  depuis  un  mois!  Des  myriades 
de  puces  sortent  de  la  poussière  et  s'acharnent  après 
lui.  Cf.  Tristram,  The  natural  history  of  the  Bible. 
Londres.  1889,  p.  305;  Wood,  Bible  animais.  Loinlr  - 
1884,  p.  638.  —  Après  avoir  épargné  Saiil  qui  le  pour- 
suivait injustement,  David  lui  dit  :  «  Qui  poursuis-tu.' 
Un  chien  mort,  une  puce!  »  I  Beg.,  xxiv,  14.  Un  peu 
plus  tard,  dans  une  occasion  analogue,  il  dit  encore: 
«  Le  roi  d'Israël  s'est  mis  en  marche  pour  chercher 
une  puce!  »  I  Beg.,  xxvi.  20.  David  parlait  ainsi  par 
hyperbole;  il  se  comparait  à  un  insecte  insignifiant, 
indigne  d'occuper  l'attention  d'un  roi.  —  Un  certain 
nombre  d'Israélites  portèrent  le  nom  de  par'os,  puce 
I  Ksd.,    II,    3;   vm.  3;  x.  25:    Il    lïsd.,   m.  25:  vil.  S;   x, 


15.  Voir  Pharos,  col.  218 


II.  Lesètre 


PUDENS  (grec  :  IIo-JSyj;),  chrétien  de  Borne,  dont 
l'apôtre  saint  Paul  envoie  les  salutations  à Timothée avec 
les  salutations  d'Eubulus,  Linus,  Claudia  et  des  au- 
tres frères.  II  Tim.,  jv.  21. 

Le  nom  de  Pudens  est  un  cognomen  assez  fréquent 
chez  les  anciens  Romains;  et  il  fut  porté  par  deux 
consuls  du  IIe  siècle,  c'est-à-dire  «  Arvrius  Pudens  »  de 
l'an  105  et  «  Servilius  Pudens  »  de  l'an  166.  On  1 
trouve  aussi  chez  un  personnage  de  la  gens  Pomponi 
adopté  par  un  Flavien  (P.  Flavio  Pudenti  Pomponiano), 
Renier,  Inscriptions  de  l'Afrique,  n.  1521,  et  dans  la 
gensOctavia.  '.'.  Oclacio  FI.  Pudenti,  ibid.,  n.  381  c  ; .  || 
y  a  aussi  un  L.  Cassius  Pudens  militaire  et  un  G.  Vale- 
rius  Pudens  et  d'autres  encore  comme  on  peut  le  voir 
dans  les  recueils  épigraphiques.  Corp.  inscrip.  lai., 
t.  m,  n.  3543,  cf.  aussi  Willmans,  Exempta  Inscrip- 
tionum  lalinaru-m,  etc.  Le  nom  de  Pudens  fut  aussi 
un  nom  servile  qu'on  trouve  porté  par  des  affranchis. 
Ainsi  pour  en  citer  un  exemple  on  trouve  en  Espagne 
un  Pudens  affranchi  de  l'empereur  Nerva.  Corp.  insc. 
lat.,  t.  il,  n.  956. 

On  voit  par  là  que  le  Pudens  rappelé  par  saint  Paul 
dans  sa  lettre  envoyée  de  Rome  à  Timothée  a  pu  être 
à  la  rigueur,  soit  un  humble  esclave  chrétien,  soit  un 
affranchi,  soit  aussi  un  personnage  distingué  et  appar- 
tenant à  une  gens.  Le  plus  probable,  c'est  qu'il  a  été 
un  personnage  d'une  certaine  distinction  comme  pou- 
vait être  aussi  une  femme  distinguée,  Claudia,  rappelée 
dans  la  même  lettre  et  qui  porte  un  nom  de  la  plus 
haute  aristocratie  romaine.  On  peut  donc  identifier 
notre  personnage  avec  un  Pudens  qui.  d'après  un  an- 
cienne traditien.  aurait  reçu  chez  lui  l'apôtre  saint 
Pierre  à  Borne  pendant  sa  première  venue  dans  la 
capitale  de  l'empire  et  qui  aurait  été  baptisé  par  l'apô- 
tre  même.  On  dit  qu'il  était  fils  d'un  Punicus  et  d'une 
Priscille  et  qu'il  fut  le  père  des  deux  célèbres  vierges 
chrétiennes  l'tidentienne  et  Praxède. 


803 


TUDENS 


864 


On  parle  de  ce  Pudens  dans  les  Actes  des  saintes 
Pudentienne  et  Praxède,  mais  on  n'y  dit  rien  de  sa 
noblesse  ni  de  sa  dignité  sénatoriale.  Acta  sanctortim, 
maii  t.  IV,  p.  299;  Baronius,  Annales,  ad  ann.  159; 
Fiorenl,  Martyrol.,  p.  701  sq.?Le  récit  du  Liber  pon- 
tificalis  dans  la  biographie  du  pape  Pie  Ier.  à  ce  sujet 
est  une  interpolation  d'après  Mgr  Duchesne,  Liber  pon- 
tifical is,  t.  ij  p.  1331. Cependant  Adon,  dans  son  martyro- 
loge, appelle  sainte  Pudentienne  illushissinii  generis. 
Adon,  MartyroL.  19  mai. 

Dans  ces  documents,  quoique  apocryphes,  il  va  cer- 
tainement un  fond  de  vérité  historique,  comme  J.  B.  De 
Rossi  l'a  aussi  reconnu,  Bull,  d'arch.  crisliana,  1867, 
p.  3.  Mais  on  ne  peut  pas  accepter  tout  ce  qu'ont 
imaginé  à  ce  suj<'t,  d'abord  Bianchini  et  Fcbeo  et, 
depuis,  plusieurs  autres  qui  ont  fait  des  confusions  in- 
croyables. Bianchini  soupçonne  que  Pudens  était  de  la 
gens  Cornelia  et  de  famille  sénatoriale,  et  la  chose  est 
possible;  mais  on  est  arrivé  après  jusqu'à  dire  qu'il 
était  le  même  personnage  que  le  centurion  Corneille 
baptisé  par  saint  Pierre  en  Palestine  et  on  lui  a  attri- 
bué aussi  des  inscriptions  qui  sont  certainement  fausses. 
De  Rossi  ne  partagea  jamais  ces  opinionsqui  néanmoins 
lui  ont  été  attribuées.  Bull,  di  arch.crist.,  1880,  p.  53. 

Enfin  il  y  a  un  auteur  qui  a  cru  reconnaître  le  Pudens 
de  saint  Paul  dans  un  personnage  nommé  sur  une 
inscription  de  la  Grande-Bretagne  et  en  a  fait  un  fils 
de  Pomponia  Graecina  (!)  Mais,  ces  rêveries  ont  été 
justement  réfutées  par  Hùbner,  Corp.  iuscr.  lui.,  vil, 
p.  19.  et  dans  le  Blieinisches  Muséum,  t.  \iv,  1859, 
p.  358. 

Voici  ce  que  l'on  peut  établir  à  cet  égard.  Il  est  sur 
qu'il  y  a  eu  à  Rome  de  nobles  matrones  qui  ont  porté 
les  noms  de  Pudenliana  el  île  Pudentilla  réunis  aux 
noms  de  famille  des  Comelii  et  des  ASmilii.  l'e  Rossi, 
Borna  sotlerranea,  t.  i,  p.  312.  Il  est  certain  que,  au 
commencement  du  me  siècle,  demeurait  à  Rome  sur 
l'Aventin,  près  de  l'endroit  où  on  bâtit  après  l'église  de 
sainte  Prisque.  un  personnage  appelé  '.'.  Marins  Pu- 
dens Cornelianus,  qui  était  originairement  de  la  gens 
Cornelia,  adopté  après  dans  la  gens  Flavia,  et  qui 
devait  se  nommer  Cornélius  Pudens.  Un  de  ses  des- 
cendants fut  probablement  ce  AI.  Marias  Pudens, 
dont  le  nom  est  marqué'  sur  quelques  briques.  Ma- 
rini,  lscrizioni  doliari,  15-2,  (3.  Ce  Cornélius  Pudens 
demeurait  sur  l'Aventin  tout  près  de  l'endroit  où  l'on 
reconnaissait  au  moyen  âge  la  maison  d'Aquila  et  de 
Prisque  (église  de  Sainte-Prisque) ;  et  on  sait  que  ces 
deux  célèbres  personnages  nommés  par  saint  Paul 
dans  sa  lettre  aux  Romains,  eurent  leur  sépulture  dans 
le  cimetière  de  Priscille  sur  la  voie  Salaria,  cimetière 
qui  prit  le  nom  de  la  mère  il>-  Pudens,  le  maitre  de  la 
maison  sur  le  virus  patricius  (aujourd'hui  Sainte- 
Pudentienne)  el  qui  fut  enseveli  aussi  dans  le  même 
cimetière.  Cette  circonstance  ne  peut  pas  être  attri- 
buée  au  hasard;  mais  elle  nous  autorise  à  supposer 
qu'il  y  eut  des  relations  entre  les  deux  maisons  chré- 
tiennes de  l'Aventin  et  du  viens  patricius  et  que  le 
centre  où  ces  souvenirs  se  réunissaient,  était  le  cime- 
tière de  Priscille  sur  la  voie  Salaria.  ,1.-1).  lie  Rossi 
retrouva  dans  le  cimetière  île  Priscille  une  inscription 
d'un  PUDENS  FELIX  et  il  lit  remarquer  que  ce  co- 
gnomen  Félix  peut  bien  l'aire  penser  à  un  «  Cornélius  ». 
p,  scelle  délia  B.  V.  Maria,  p.  17.  On  peut  donc 
tirer  la  conclusion  que  très  probablement  le  Pudens 
nommé  par  saint  Paul  était  le  fondateur  du  cimetière 
de  Priscille  et  qu'il  pouvait  très  bien  être  un  Cornélius 
Pudens. 

Ce  rapprochement  nous  oblige  de  dire  un  mot  sur 
imetière  de  la  voie  Salaria  dent  l'histoire 
et  la  t  i  été  éclairée  d'une  lumière  inatten- 

due par  les  études  de  mon  maître  J.-B.  De  Rossi  et 
après  aussi  par  les  miennes. 


Il  est  maintenant  certain  que  ce  cimetière  est  le 
plus  ancien  de  tous  les  autres  cimetières  chrétiens  de 
Rome  et  que  ses  monuments  peuvent  remonter  jusqu'à 
l'âge  apostolique.  A  la  suite  des  nouvelles  fouilles, mon 
maitre  a  pu  démontrer  que  le  célèbre  cimetière  de  la 
voie  Salaria  avait  été  fondé  par  la  noble  famille  des 
Aeilii  Glabriones  dont  un  membre.  Manius  Aeilius 
Glabrio,  consul  de  l'an  91.  fut  mis  à  mort  par  ordre 
de  Domitien  à  cause  de  sa  profession  de  foi  chrétienne. 
Bull,  d'arch.  cris  t.,  1888-1889.  p.  3-4.  Il  y  retrouva 
des  inscriptions  qui  mettent  en  rapport  les  Aeilii  avec 
quelques  nobles  femmes  qui  portent  le  nom  de  l'ri- 
scilla  et  il  en  a  tiré  la  conclusion  que  le  Pudens  de  la 
légende  de  sainte  Pudentienne  élait  lié  de  parenté  avec 
la  famille  même  des  Aeilii  et  qu'il  fut  le  fondateur  de 
vénérable  cimetière,  le  plus  ancien  de  tous,  où  il 
fut  enseveli  et  où  furent  déposées  aussi  ses  Mlles  Puden- 
tienne et  Praxède. 

Priscille,  la  mère  de  Pudens,  pouvait  être  aussi 
de  la  gens  Acilia;  et  en  effet  on  trouve  dans  le  nom 
de  cette  famille  le  eognomen  «  Priscus  ».  Dans  le 
musée  du  Vatican  on  voit  l'inscription  d'un  Aeilius 
Priscus. 

Après  de  longues  recherches  sur  le  cimetière  de  la 
voie  Salaria,  je  suis  parvenu  à  démontrer  que  dans  le 
cimetière  de  Priscille  on  vénérait  le  grand  souvenir  de 
la  première  prédication  de  saint  Pierre  et  de  la  fonda- 
tion de  l'Église  romaine;  et  qu'on  y  doit  reconnaître 
le  célèbre  cimetière  Ostrien  où  l'Apôtre  aurait  admi- 
nistré le  baptême,  c'est-à-dire  le  cœmeterium  ail 
nymphas  appelé  aussi  cœmeterium  faillis  S.  Pelri. 
1  D  voir  les  preuves  développées  dans  plusieurs  articles 
publiés  par  moi  dans  le  Nuovo  Bulleltino  di  archeologia 
crisliana,  1901-1908.  La  célèbre  indication  du  cata- 
logue de  Monza  du  VIe  siècle,  sedes  ubi  prias  sertie 
sanclus  Pelrus,  doit  être  considérée  comme  une  indi- 
cation topographique  et  être  attribuée  au  cimetière  de 
Priscille.  Nuovo  Bulleltino,  1908,  n.  1-2. 

Or  cette  identification  a  une  grande  importance  pour 
la  question  du  Pudens  de  la  légende;  elle  nous  con- 
tinue que,  dans  cette  légende,  il  y  a  un  fond  de  vérité 
quand  on  met  saint  Pierre  et  sa  première  venue  à  Rome 
en  relation  avec  un  personnage  qui  avait  été  le  fonda- 
teur d'un  cimetière  creusé'  dans  un  endroit  de  la  ban- 
lieue romaine  où  l'apôtre  avait  inauguré  son  épiscopat 
dans  la  capitale  de  l'empire. 

Le  cimetière  de  Priscille  peut  être  appelé  aussi  le 
cimetière  de  Pudens  car  il  y  avait  là  son  tombeau  de 
famille.  D'après  les  dernières  fouilles  on  pourrait 
reconnaître  ce  monument  dans  la  région  du  cimetière 
qui  est  près  de  l'entrée  actuelle  et  dans  les  environs  de 
la  chambre  sépulcrale  que  l'on  appelle  la  n  chapelle 
grecque  ■•.  Mais  le  monument  le  plus  important  de  ce 
cimetière,  et  qui   t  ^fermait,  poui  ainsi  dire,  tous  ses 

grands  souvenirs,  était  labasiliq établie  à   la  surface 

du  sol  dans  la  maison  même  de  campagne  des  Aeilii 
Glabriones  qui  a  pu  être  1res  bien  la  maison  de  cam- 
pagne de  Pudens.  Celte  basilique  (ou  il  y  avait  les  tom- 
beaux de  sept  papes)  fut  retrouvée  et  rebâtie  par  mon 
initiative  aux  frais  de  la  commission  d'archéologie 
sacrée,  l'an  1907.  Voir  iVuovo  Bulleltino  di  arch.  cris  t., 
1908  n.  1-2.  Après  le  cimetière  de  la  voie  Salaria,  un 
autre  souvenir  de  Pudens  était  le  litulu»  Pudenlis, 
c'esl  à  dire  la  im.um.h  même  habitée  par  lui  à  l'intérieur 
di  la  ville  où  est  aujourd'hui  l'église  de  Sainte-Puden- 
tienne.  Les  documents  qui  nous  fournissent  des  indi- 
cations sur  l'origine  de  l'église  de  Sainle-Pudentienne 
sonl  les  récits  dits  de  Pasteur  et  de  Timothéi 
lettres  de  Pie  1"  à  Juste  de  Vienne,  et  le  Liber  ponli 
Les  deux  premières  classes  sent  apocryphes 
mais  neiis  avens  plusieurs  motifs  de  penser  qu'elles 

contiennent  un  fond  de   vérité,  coi i  j'ai  déjà  dit. 

D'après  ces  documents,  il  y  avait  la  primitivement  la 


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