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Full text of "Recherches géographiques sur l'intérieur de l'Afrique septentrionale : comprenant l'histoire des voyages entrepris ou exécutés jusqu'à ce jour pour pénétrer dans l'intérieur du Soudan ; l'exposition des systèmes géographiques qu'on a formés sur cette contrée ; l'analyse de divers itinéraires arabes pour déterminer la position de Timbouctou ; et l'examen des connaissances des anciens relativement à l'interieur de l'Afrique : suivies d'un appendice, contenant divers itinéraires"

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RECHERCHES  GEOGRAPHIQUES 

SUR  L'INTÉRIEUR 

DE    L'AFRIQUE 

SEPTENTRIONALE. 


iV.  B,  L'ouvrage  de  M.  Walckenaer,  que  nous  publions» 
et  qui  n'a  étë  imprimé  aux  frais  de  l'auteur  qu'à  un  très- 
petit  nombre  d'exemplaires,  fait  le  complément  de  V Histoire 
des  Foyctges  et  des  Découvertes  faits  en  Jfrique^  depuis  les 
siècles  les  plus  reculés  jusqu'à  nos  jou^s,  ^etc,  Paris,  i8ai. 

Cet  ouvrage  forme  4  volumes  in-8^,  et  un  atlas.  3o  fr. 

Voyez  le  prospectus  à  la  fin  de  ce  volume. 


DE  L'IMPRIMERIE  DE  FIRMIN  DIDOT, 

IMP&IXEUIL   DU   ROI,  DE   l'iNSTITUT   ET    DE   LA    MARINE, 


(XCJ 

RECHERCHES  GÉOGRAPHIQUES 

SUR   L'INTÉRIEUR 

DE   L'AFRIQUE 

SEPTENTRIONALE, 


COMPRENANT 

L'Histoire  des  Voyages  entrepris  ou  exécutés  jusqu'à  ce 
jour  pour  pénétrer  dans  l'intérieur  du  Soudan  ;  l'exposi- 
tion des  Systèmes  géographiques  qu'on  a  formés  sur  cette 
contrée;  l'analyse  de  divers  itinéraires  arabes  pour  déter- 
miner la  position  de  Timbouctou;  et  l'examen -des  connais^ 
sances  des  anciens  relativement  à  l'intérieur  de  l'Afrique: 

SUIVIES  d'un  appendice, 

Contenant  divers  Itinéraire^,  traduits  de  Tarabe  par  M.  le  baron 
Silvestre  de  Sacy  et  M.  de  La  Porte  ;  et  plasieurs  antres  Relations 
on  Itinéraires  également  traduits  de  Varabe ,  on  extraits  des  Toyages 
les  pins  récents. 

OUVRAGE     ACCOMPAGNE     0*UNE     CARTE. 

Par  C.-A.  WÀLCKENAER, 

MEMBRE     DE     l'iWSTITUT.        ..       ,     r  ,  .,     ^ 


A  PARIS^^Ti^:v^>\^ 


CHEZ   AR-rtlUS  BERTRAND,  LIBRAIRE, 

RUE    HAUTEFEUILLE,    N^    23. 


»%••—%•••%•»•%— 


1821. 


'...'.'.,: -.-.t 


AVIS 

AU  LECTEUR. 


Vjet  ouvrage  était  termine  dans  le  mois 
de  janvier  18120.  Un  jeune  et  célèbre  voya- 
geur anglais,  M.  Çowdicli,  en  entreprit  à 
cette  époque  sur  le  manuscrit  la  traduc- 
tion ^  qiù  fut*  annoncée  dans  les  papiers 
publics  d'Angleterre.  Diverses  circonstances 
m'empêchèrent  alors  de  le  publier.  Lorsqu'il 
m'a  été  possible  de  m'en  occuper  de  nou- 
veau, plusieurs  relations  sur  ce  sujet  avaient 
paru,  divers  documents  avaient  été  publiés; 
plusieurs  même  ont  vu  le  jour  pendant 
l'impression  de  mon  ouvrage.  Je  les  ai  tous 
analysés^  et  j'ai  tâché  de  renfermer  dans  ce 
volume  tout  ce  qui  peut  servir  à  éclaircir 


6  AVIS    AU    LECTEUR. 

la  géographie  des  contrées  les  moins  con- 
nues, de  l'ancien  monde,  et  cep^idânt  les 
plus  importantes  à  connaître ,  sous  le  rap- 
port de  rhistoire  physique  du  globe,  comme 
sous  celui  des  progrès  du  commerce  et  de 
la  civilisation. 


PRINCIPALES  DIVISIONS 

t  .         .     . 

DE  L'OUVRAGE. 


I 


NTRODUCTION.,  •  •  .  • ^ •    PAGE       1 


PrçmièAjs  pARTiBi  -^  Des  pçpgrès  des  découvertes 
géographiques  dans  Tintérieur  de  la  partie  occi- 
dentale de  ^Afrique  septentrionale  «  .44 9 

$  I.  Depuis  l'invasion  des  Maliométans  eh  Afrique, 
jusqu'à  la  chute  de  l'empire  des  Maures  en 
Espagne*  •  «  •  «  ^  •  • «••«•*»,•••»•*••«••  id. 

S  IL  Depuis  TeKpulsion  des  Maures  d'Espagne  ^ 
jusqu'au  CQmtiienceniént  du  seizième  siècle , 
lors  de  la  publication  de  l'euvràge  de  Léon. 
FAfricain  #  «  4 •  «  •  < « é    17 

f  HJ.  Depuis  le  commencement  du  seizième  siècle 
et  la  publication  de  Fouvra^e  de  Léon  l'Afri» 
cain ,  jusqu'à  la  formation  de  la  société  établie 
à  Londres  pour  les  découvertes.  ••#«•.•.«••  ^   35 

S  lY.  Depuis  l'établissement  de  la  société  fiour 
les  progrès  des  découvertes  en  Afrique  ^  jusqu'à 
nos  jours«  ..<•  ^  •••  a  «.•«•..««••«  » 64 

Deiixièmè  Partie.  —  Des  cartes  de  i' Afrique  Rela- 
tivement au  tracé  des  contrées  intérieures  de 
la  partie  septentrionale  de  ce  continent i85 


\ 


8  I^AINCII^ALES    DIVISIONS 

S  I.  Des  cartes  de  l'intérieur  de  l'Afrique  septen- 
trionale, depuis  Ia  publication  de  la  mappe- 
monde de  Ruysch  en  i5o8,itisqua  Orteliiiis 
en  1670 i i85 

S  II.  Depuis  la  publication  de  l'atlas  d'Ortélius 
en  iS^o,  jusqu'à  celle  de  la  mappemonde  de 
Guillaume  Delisle  en  1720 , 194 

S  III.  Depuis  la  publication  de  la  mappemonde 
de  Guillaume  Delisle,  jusqu'à  nos  jours 21;  4 

Troisième  Partie.  —  Analyse  géographique  des 
itinéraires  de  Tripoli  à^Timbouctou  et  de  Tri- 
poli à  Gachenah,  par  le  chejk  Hagg-Casaem 
et  par  Mohammed ,  fils  d'Ali «  •  «  ^  «  •   249 

S  I-  Considérations  préliminaires id. 

S  II.  Appréciation  de  la  journée  de  marche  des 
caravanes  dans  les  déserts  de  l'Afrique 262 

S  III-  Analyse  géographique  de  l'itinéraire  de 
Tripoli  de  Barbarie  à  Timbouctou,  par  le 
cheyk  Hagg-Cassem.  ...*••.«.«•. 269  ' 

§  IV.  Analyse  géographique  de  l'itinéraire  de 
Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  de  Foui. ........   3o2 

S  V.  Analyse  géographique  de  l'itinéraire  de  Tri- 
poli de  Barbarie  à  la  ville  de  Gachenah,  par  le 
cheyk  Hagg-Cassem 3o8 

§  V*".  Sur  un  itînérah*e  de  Gamba  à  Gachenah, 
à  Bornou  et  à  la  Mecque  • 325 

§  VI.  Sur  l'étendue  et  les  limites  des  connais- 
sances des  anciens  relativement  à  l'intérieur 
de  l'Afrique 346 

S  VII.  Résumé,  conjectures  et  conclusion.  • .  • .   892 


Dk    LOUTRAGS.  g      ' 

ÂPPSNDICX it •    4^6 

I.  Itinéraire  de  Tripoli  à  TimboDfctou ,  par  le 
cfaeyk  Hagg'Cassem • •  •  •  •  •  4^9 

II.  Itinéraire  par  Mohammed ,  fils  d'Ali 4^9 

m.  Itinéraire  de  Tripoli  à  Cachenal^. 44S 

IV.  Itinéraire  de  Gaudja   à   Haoussa    et   à   la 

Mecque /^ C 4^3 

y.  Itinéraire  d'Achmet  Ibn-Hasf^n,  de  Fez  à 

Tafilet » •   457 

VI-  Journal  d'une  expédition  contre  Soït;|in«  • .  •  465 

VII.  Extrait  d'Ibn-Haukal 4jS. 

VIII.  Itinéraire  d'Hadji-Boubeker ,  de  Seno-Palel 

à  la  Mecque • , 477 

IX.  Relation  de  Scott ; .  4S9 

X.  Relation  du  capitaine  Lyon,  •••••/••.••,.  494 


RECHERCHES 

GÉOGRAPHIQUES 

SUR  L'INTÉRIEUR 

DE   L'AFRIQUE 

SEPTENTRIONALE, 


INTRODUCTION. 

\^u4hfD  on  jette  les  yeux  sur  les  cartes  d'Afrique 
qui  ont  été  publiées,  on  voit  dans  l'intérieur  de 
la  partie  septentrionale  de  cette  portion  de  Tan- 
cien  monde,  des  montagnes,  des  rivières,  de 
grands  lacs  tracés  avec  des  détails  très -précis; 
un  grand  nombre  de  positions  dont  les  noms 
nous  font  connaître,  par  la  différence  des  ca- 
ractères avec  lesquels  ils  sont  écrits,  si  ce  sont 
des  villes  capitales,  des  boiirgs  ou  des  villages; 
beaucoup  d'états,  de  royaumes,  de  iia|ions,,de 
peuplades,  dont  les  situations  et  l'importance 


relatives  sont  indiquées  avec  une  clarté  parfaite. 
Enfin  les  limites  du  grand  désert  de  sable  sont 
marquéei  ftt^  uti4  tietteté.qui  semble  ne  rien 
laisser  à  désirer  ;  et  ces  vastes  solitudes,  que  tant 
de  relations  nous  peignent  comme  si  effrayantes, 
ont  en  .quelque  sbtté  tWspa^u  î  tâht  sont  nom* 
liseuses  les  oasis  qu'on  y  a  placées  i  tant  elles 
paMiisseAt  raji^îp^hées  Içs  un«s  des  autivs;  t^nt 
^e  trouvent  fixées  atec  précision  leur  étendile, 
leurs  limites ,  et  les  positions  des  lieux  qu'elles 
renfermenl:.  ,  . 

Un  état  si  prospère  de  la  géographie  de  ces 
contrées  semble  devoir  rendre  de  nouvelles  re- 
cherches superflues. 

Cependant ,  lorsqu^'on  ignorerait  tQut  à  cet 
égard ,  on  côhcevrait  des  l^otlpçbils  en  compa- 
rant nos  cartes  d'Afrique  les  plus  récentes  avec 
celles  que  Vùti  â  pcibliée^  dans  les  t6^  et  l'jf  siè*- 
clés;  car,  bten  loin  d*àvoir  acquit  de  iiotivelles 
nc$tio6i^,il  ^etftblèrait  qué  ùouè  éti  aurtom  b^u* 
coup  pêtdti.  Phisiëutis  de  v^es  ftncietii^s  carte» 
ntbus  donùient  sur  rinlériéûr  dé  l'Afrique  un 
plus  glt^nd  hdmbre  d^  détaib  qu«i  ilo»  cartes 
itiodefiies.  S\it  queli}ues-uii^ft  <^  H^ontinetit  pâ- 
l'ait  presque  aussi  peuple  que  l<5jfi  royaumet  les 
plus  Ûotissanti^  dt  YEiaùtop^  :  ôii  y  toit  iiomstu^ 
lement  lei  lituites  tks  états  ^  maiis  aussi  celles 
de   leurs   provipMS  M  de  leurs  disiriâts;  de 


IITTRODUCTIOîr.  3 

sorte  qu^on  embrasse  d'un  coup*d'œit  les  di^ 
visions  et  leâ  subdivisions  de  toute  cette  partie 
du  moiyde  avec  autant  de  facilité  que  celles  de  la 
France  sur  une  carte  divisée  par  départements 
et  par  arrondissements* 

Mius  quand  Toeil  de'  la  science  veut  scruter 
toutes  ces  richesses ^  elles  s'évanauii;f(ent  comme* 
des  Eantomeé^et  on  s^aperçoitavec  peine  qu'ell<$ 
ne  servent  qu'à  déguiser  la  plus  complète  pâu* 
vreté.  Lés  contrée^  qui  parail^sent  avoif  été  me* 
surées  sont  à  découvrir  ;  et  là  où  tout  paraissait 
fait,  tout  reste  à  faire. 

*  Ces  considérations  m'avaient  engagé  à  sou» 
mettre  à  un  examen  approfondi  les  notions  que 
nous  pouvons  avpir  sur  l'intérieur  de  l'Afrique 
septentrionale,  afin  de  connaître  quels[[moye)BS 
elles  nous  offrent  de  déterminer  sur  une  carte 
tout^ce  qui  concerne  la  géographie  positive, 
c'est-à-dire  le  tracé  des  rivières,  fles  lacs,  des 
chaînes  de  molitagnes;  les  positions  des  peuples, 
des  villes  et  des  bourgades;  l'étendue  de»  dé- 
serts, et  les  situations  respectives  des  oasis. 

Dans  le  cours  de  mo  études  géographiques.; 
j'avais  été  souvent  ramené  à  Ce  sujet  curieux.  Je 
regt^ttais  toujoui^s,  entraîné  par  d'autres  travaux^ 
de  ne  pouVèir  lui  aiecorder  qu^uae  attention  pas* 
sagère.  Une  occasion  s'est  enfin  présentée,  qui 
m'a  en  quelque  ëorté  feT^.d'vfihèver  la  tâche 


4  RËGI^£RGHES    SUR    l'aFRIQU£. 

devant  laquelle  j'avais  plus  d'une  fois  reculé. 
Dans  le  milieu  de  Tannée  1818,  on  envoya 
.   k  l'Académie  des  inscriptions  et  belles*  lettres 
de  l'Institut  de  France,  un  itinéraire  de  Tripoli 
k  Timbouetou^  écrit  par  un  çheyk  arabe,  qui 
avait  servi  de  guide  aux  caravanes,  et  qui  a 
'long -temps  fait  le  commerce  de  Timbouctou. 
Cet  itinéraire  avait  été  traduit  d'ai^ibe  en  fran- 
çais par  M.  de  La  Porte,  ci-devant  interprète  de 
la  chancellerie  de  France  à  Tripoli  en  Barbarie. 
L'Académie  me   chargea  de  prendre  connais- 
sance de  cet  itinéraire,  et  de  lui  faire  à  ce  sujet 
un  rapport  irerbal. 

Il  m'était  impossible  d'avoir  une  opinion  sur 
l'exactitude*  des  distances  données  dans  cet  iti- 
néraire, sans  examiner  sur  quels  renseignements 
ou  sur  quelles  combinaisons  reposait  la  position 
assignée  sur  nos  cartes  à  la  ville  de  Timbouùtou, 
qui  est  le  point  extrême  ou  principal  où  se  ter- 
mine la  série  des  positions  qu'il  indique.  Cet 
examen  m'a  entraîné  dans  celui  de  toute  la  géo- 
graphie positive  des  parties  occidentales  de  l'A- 
frique septentrionale,  auquel  il  se  trouvait  né- 
cessairement lié.  Ce  travail,  souvent  repris,  sou- 
vent int^Tompu,  fut  enfin  achevé;  mais  je  ne 
me  proposais  pas  de  le  soumettre  à  l'Académie , 
parce  que  les  développements  qu'il  nécessite 
excèdent  les  bornes  d'ua  sûaple  rapport  verbal^ 


INTRODUCTIOIf.  5 

et  que  d'ailleurs  <;e  qui  concerne  la  géographie 
moderne  semble  sortir  un  peu  de  ses  travaux 
habituels.  Je  n'avais  pas  non  plus  l'intention  de 
le  publier  ;  mais,  lorsque  j'eus  lu  dans  un  jour- 
nal qui  s'imprime  à  Marseille  une  notice  relative 
à  l'Afirique,  dans  laquelle  on  apprenait  au  public 
qu'un  itinéraire  écrit  en  arabe,  de  Tmpoli  à  Tùn- 
bouctouy  dont  M.  Ritchie,  jeune  voyageur  an- 
glais (i),  possédait  une  copie,  avait  été  présenté 
à  TAcadémie  des  inscriptions  et  belles-lettres,  je 
pensai  qu'il  était  convenable  de  prouver  qqe  la 
savante  compagnie  à  laquelle  j'ai  l'honneur  d'ap* 
partenir  avait  apporté  à  la  communication  qui 
lui  avait  été  faite  toute  l'attention  qu'elle  méri- 
tait. J'avais  donc,  dans  ce  but ,  extrait  de  mon 
travail  sur  l'intérieur  de  l'Afrique  tout  ce  qui 
peut  servir  à  éclaircirv  cet  itinéraire. 

Mais  bientôt  j'eus  occasion  de  voir  un  second 
itinéraire,  pareillement  écrit  en  arabe  et  beau- 
coup plus  détaillé.  M.  de  Sacy  eut  la  bonté  d'eit 
faire  à  ma  prière  une  traduction  qu'il  me  remit. 
Cet  itinéraire  commence,  comme  le  précédçut, 
à  Tripoli,  ti  se  termine. de  même  à  TimbouctoUé 
Mais  il  ne  ooildmt  à  c^te  ville  que  par  une 


(i)  Depuis  que  ceci  a  été  écrit ,  ce  jeime  et  intéressant 
▼oyagenr,  qae  nous  ayons  eu  occasion  de  connaître  à  Paris, 
a  succolnbë,  comme  tant  d'âut^s,  au  climat  d'AInque. 


8  KEGHERGHES    SUR    l'a'FRIQUE. 

du  voyage  qu'Ibn-Hassan  a  &U  en  1787,  de  Fez 
à  Tafilet^  qui  m'a  servi  à  déterminer  la  position 
de  cette  dernière  ville.  J'ajouterai  encore  quel- 
ques, autres  documents  oiîginaux  que  j'ai  eu 
occasion  de  citer  dans  le  cours  de  l'ouvrage. 


PREMIÈRE    PARTIE. 


PREMIÈRE    PARTIE. 

DES   PROGRÈS    DES    DÉCOUVERTES    GEOGRAPHIQUES 
DAKS   l'intérieur  DE  LA  PARTIE    OCCIDENTALE 

DE  l'afrique  septentrionale. 


§  I.  Depuis  l'invasion  des  Mahométans  en 
Afrique  j  jusquà  la  chute  de  V empire  des 
Maures  en  Espagne. 

X-iE  mahométisme,  qui  a  renversé  et  fondé  tant 
de  royaumes  et  d'empires,  produisit  dans  le 
centre  de  l'Afrique  la  plus  importsmte  des  révo- 
lutions. Quoique  les  parties  septentrionales  de  ce 
continent,  qui  bordent  la  Méditerranée,  eussent, 
depuis  des  temps  très-anaiens,été  habitées  par 
les  peuples  k&  plus  civilisé^  de  l'antiquité ,  et 
que  les  Égyptiens',  les  Phéniciens,  les  Carthagi^ 
nois,  les  Grecs  et  les  Romains,  y  eussent  feiit  fleii* 
rir  tour-à^tour  le  commerce  et  les  arts,  les  peu- 
plades de  l'intérieur,  séparées  de  ces  états  par 
de  vastes  espaces  stériles^  étaient  restées  bar- 
bares. La  nouvelle  religion ,  en  mettant  tout  le 


JO  IIEGHERGHB&    SUR    h^V%îqVJL. 

nord  de  l'Afrique  au  pouvoir  d'une  nation  ha- 
bituée à  traverser  de  vastes  déserts,  devint  pour 
les  régions  de  l'intérieur  une  puissante  cause  de 
civilisation.  Auparavant,  les  tribus  maures,  qui 
menaient  une  vi«  errante ,  sorties  originairement 
de  l'Arabie ,  et  répandues  dans  le  Safuira  ou  le 
Graind-Désert,  opposaient  des  obstacles  presque 
insurmontables  aux  nations  civilisées  qui  au- 
raient voulu  pénétrer  dans  les  régions  du  Sou- 
dan.  Opprimés  tour-à-tour  par  les  Carthaginois, 
les  Grecs,  les  Romains  et  les  Vandales,  qui  les 
réduisaient  en  esclavage  et  leur  faisaient  une 
guerre  opiniâtre,  les  Maures  accueillirent  les 
Arabes  conquérants,  qui  avaient  les  mêmes 
usages  qu'eux,  comme  des  défenseurs  de  leurs 
libertés,  et  non  comme  des  usurpateurs  (i). 

Les  Arabes  transportèrent  avec  eux  en  Afrique 
le  chameau^'  qui  leur  donnait  la  faculté  de  fran- 
chir ces  mers  de  sable  qui,  dans  leur  patrie 
aussi,  séparaient  entre  elles  les  contrées  fertiles 

^■■■'*      ■■"      11»"!*!!»'        ti      t  |.  ^_«>    »«>■■■  «,il.l*i  m    I     I         III.    I    II  ■   ..II»  il        ■       ..«        .■ w 

{%)  hss  Arabes  entrèrent  en  Egypte  vi^ê  V%n  37  de  Thé- 
gyre,  an  647  de  Fère  chre'tienne  (Voy.Cardonne,  Histoire 
de  V Afrique  sous  la  domination  des  Arabes  ^  t.  I,  p.  10); 
mais  ils  ne  se  rendirent  maîtres  de  la  partie  de  l'Afrique  qui 
s'étend  le  long  des  côtes  de  la  Méditerranée,  que  Tan  88  de 
rhégyre.  Voy.  Gibbon ,  vol.  IX, p.  44B. —  Cbénier, iîccAer- 
ches  historiques  sur  les  Maure»,  l.  I,  p.  s5i  ;  —  Browne's- 
Troi^els;  i'*  édit,,  in  4'',  p.  94- 


PREMIERE     PARTIE,  '      ^    II 

et  habitables.  Ils  purent  donc,  sans  aucun  ob- 
stacle, commercer  directement  avec  les  riches 
régions  situées  au-delà  du  Grand^Désert,  et  d'où 
depuis  long-temps ' on  apportait  de  lor.  Us  y 
envoyèrent  des  caravanes  régulières,  qui  parais- 
sent avoir  passé  par  le  Fezxan  et  par  ji godez  (  i  ) , 
parce  que  c'est  dans  cette  direction  que  le  désert 
se  trouve  interrompu  par  un  plus  grand  nombre 
d'oasis,  ou  de  terrains  fertiles,  isolés  au  milieu 
des  sables. 

Plus  tard ,  lorsque  l'empire  des  khalifes  se^fiit 
étendu  jusqu'à  l'extrémité  occidentale  de  l'Afri-r 
que,  et  même  en  Espagne,  d'autres  caravanes 
se  dirigèrent  aussi  -par  les  vallées  de  Suz,  de 
Darah  et  de  Tafilet^  qui  sont  au  sud  du  royaume 
de  Maroc  (a).  / 

Des  colonies  de  Maures  et  d'Arabes  s'établirent 
bientôt  dan&  des  contrées  dont  l'imagination 
orientale  exagérait  les^richesses.  Des  missionnaires 
zélés  y  pénétrèrent.  Un  comipencement  de  civi- 

(i)  Jgadez  est  V^ndagost  d'Ëdrisi,  et  YAoudagast  d*Ibn-« 
Haakal.  Yoy.  Hartxnanii's  Edrisi,  p.  40,  et  Ibn^Haukal, 
manoscrit  de  liejde,  p.  34, 

(a)  Geogrdiphia  Nuhiensis^  îÇ-4**»  ifiiQiP»  7-»'  -  *»*  Mi 
Hartmann'»  £drisi,  p.  26-49^  i33- 134*  —  Marinoi,  Im.  ii,, 
cbap.  XXXI,  1. 1,  p.  aBg.  Selon  cet  autenr,  Maroc  fut  bâtie 
vers  l*aa  1071. — Hartmann*»  £dmi,p«  67  et  61,  et  p..  ai6^ 
49,  i33. 


là    «      'REGHEBGHES    SUR    l' AFRIQUE. 

îisation  s'introduisît  avec  la  religion  de  Mahomet 
parmi  ces  peuplades  de  Nègres,  auparavant  livrées 
aux  plus  grossières  superstitions.  Les  sacrifices 
humains,  que  ces  superstitions  commandaient, 
et  qu'on  retrouve  malheurei^isement  encore  au- 
jourd'hui dans  des  contrées  situées  plus  au  sud 
et  voisines  de  la  côte  de  Guinée,  furent  abolis  (i  ). 
Enfin  les  révolutions  qui  eurent  lieu  dans 
l'empire  des  khalifes,  et  sur -tout  la  guerre  qui 
V  s'éleva  entre  les  khalifes  d'Espagne  et  ceux-d' Afri- 
que, de  la  dynastie  des  Zeïrites,  rendirent  les 
transmigrations  au-delà  du  Grand-Désert  plus 
nombreuses  et  plus  fi?équentes. 

On  ne  peut  fixer  les  époques  précises  de  ces 
événements;  mais  on  sait  que,  dans  les  dixième, 

(i)  «  Sous  le  règne  des  Almoravides ,  dit  Marmol,  liv.  ix, 
chap.  i,t.  m;",  p.  57  de  la  traduct.  fp.  (l'an  38oderhégyre, 
oa  96.5  de  J.-C),  plusieurs Morabites  et  plusieurs  docteurs 
mahométans  allèrent  planter  leur  religion  parmi  ces  bar^ 
bares  :  ensuite  le  filsd'Abdnlmalec  leur  en  apprit  les  dogmes 
et  les  cérémonies  ;  et  celui  d'Ali- Benbuçar  acheva  de  faire 
recevoir  cette  créance  à  tous  ceux  qui  demeurent  le  long  des 
Nègres,  ou  aux  environs,  qui  étaient  des  barbares  sans  loi, 
sans  roi  et  sans  aucune  poUce.  Quand  le  roi  Joseph- Lumptum 
conquit  ce  pays ,  il  le  partagea  en  cinq  provinces  :  les  Nègres, 
depuis  ce  temps ,  eurent  commerce  avec  les  Atabes,  appri- 
rent leurlangue ,  et  furent  vassaux  de  ce  prince  et  de  ses  des- 
cendants. «Voy.Lëon  VAfncàinyDeila  descrizione  delV Africa^ 
dans  Ramus^o,  édit.  i6i3,  t.  I,  p.  77  verso. 


PRSMlàniE    PARTIE.  l3 

onzième  et  douzième  siècles  de  l'ère  chrétienne, 
les  bords  du  grand  fleuve ,  6u  des  grands  fleuves  ^ 
qui  fertilisent  le  Soudan^  se  trouvaient  couverts 
d'états  et  de  royaumes,  dont  la  population  était, 
en  grande  partie,  composée  de  Mahométam  (i). 
Le  témoignage  Unanime  des  auteurs  arabes  nous 
représente  comme  un  prince  puissant  le  sou- 
verain de  GanahyCj^aï  ne  relevait  que  du  chef  des 
Abassides^  et  qui  tenait  sous  sa  domination  la 
contrée  de  Ouangara^  d'où  l'on  tirait  de  l'or  (a). 


(i)  Léon  rAfricain {Délia descnzione delV 4frica^y^9xX,  vii, 
dans  Ramnsio,  t.  I,  p.  77  )  dit  que  les  anciens  écrivains 
arabes  il  Bechri  et  il  Meschudi,  qui  l'ont  prëcëdë,  n'ont  pu 
donner  aucune  notion  sur  le  pays  des  Nègres,  parce  qu'il 
leur  était  inconnu ,  et  qu'on  ne  l'a  découvert  que  Tan  35o 
delliégyrCy  ou  971  de  Fère  chrétienne.  Cependant  Ibn- 
Haukal ,  qui  a  commencé  ses  voyages  en  94B  âe  Tère  chré- 
tienne, nous  doline  les  distances  de  Sidjilmessa  à  Aouda-- 
gast,  à  Ganah ,  à  KôuAoa,  à  Koagha,  et  enfin  a  Oulil^ 
où  étaient  les  mines  At  sel.  Donc  dès.- lors  le  Soudan  était 
connu  et  peuplé  par  les  arabes.  Voyiez  Ibn-Haukal,  Manu- 
scrit deLcyde,  p.  34-  Ceci  ne  se  trouve  pas  dans  l'extf^it 
donné  par  M.  Ouse\ey,  Oriental  Geography, 

(2)  Edrisi -«Hartmann,  p.  4^-4^;  Geogr.  NuLf.  11.  — 
Aboul-Fedae  Geographia  dans  Biisching's  Magazin^V  theil, 
p.  354.  —  {^-el-Ouardi  dans  les  Notices  des  Manu^rits^ 
t.  II,  p.  ^3-'37.  Cet  auteur  est  du  treizième  siècle;  et  de 
son  temps'  l'or  de  Ouankara  était  porté  dans  le  SidfjUmessa. 
'  Dans  li^armol  et  dans  Léon  l'Africain,  il  est  souvent  ques- 


t4  RECHEKCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

A  l'ouesl,  étaient  la  ville  et  Je  royaume  de  Tocrour; 
ati  nord-est,  ceux  de  KtiUgha^  de  Zaghara  ou 
Zanfara^  de  Kanem^  et  de  Kouâou. 

Des  révolutions,  dont  nous  ignorons  les  détails 
(ma»  dont  Thistoire  nous  instruira  peut-être, 
lorsque  nous  aurons  pénétré  dans  ces  contrées), 
bcniieversèrent  souvent  ces  nouveaux  états  de  Tin- 
lérieur  de  l'Afri(}ue.  La  ville  de  Timhouctou  fut 
fondée  par  Mensc(i')  Suleiman,  Fan  6iô  de  l'hé- 
gyre  (iai3  de  l'ère  chrétienne);  et  elle  devint 
bientôt  la  capitale  d'un  état  puissant  (2). 

On  doit  remarquer  que  c'est  dans  le  treizième 
siècle,  et  sous  le  règne  du  khalife  Almansor,  que 
l'empire  de  Maroc  acquit  son  plus  haut  degré  de 
puissance,  et  que  cette  époque  coïncide  avec 
oélle  de  la  fcmdalioifi  de  la  Ville  de  Titnbouc^ 
tou  (3). 

Les  souverains  de  Maroc  et  de  Fèz  étendi- 


tion  de  Tor  de  Tibof^  qu'on  apportait  de  Ouangara.^  Cette 
dénomination  vient  du  mot  arabe  Thihr^  qui  signifie  or  pur. 

(i)  Merise  signifie  roi  dans  le  langage  des  Mandingues. 

{i)  Léon  TAfricain ,  DescHiionc  deWA/rica ,  part,  vu , 
Ramusio»  p^  78.  ~ 

(3)  Marmol,  Uv.  xr,  ch.  ▼,  t.  lit,  p.  70.  -*^  Giovan 
Léon^  Descrizione  dell'JJrica,  part,  vu,  t.  I,  p.  77  verso. 
—  Cardonne,  Histoire  de  V Afrique  ei  de  V Espagne  sous  la 
dominaiioh  des  Arabes.  -*—  ChénTer,  Recherches  historiques 
sur  les  Maures  y  t,  III ,  p.'^lSg.   ' 


rent  leurs  tsoaquétep  rers  le  sud,  pa^im^nt  plu- 
sieurs fois  à  soumettre  les  peuplades  du  Grand* 
Désert^  et  pénétrèrent  niéme  avec  leurs  armées 
jusqu'à  Timbouctou^  qu'ils  assujettirent  à  un  tri- 
but. Dès-lorS)  les  couimunications  entre  cette  ville 
et  Tempire  de  Mmroc  devinrent  plus  faciles  et 
plus  sûres*  Les  histoires  et  les  relations  anciennes 
de  MuroCy  les  contes  même  que  les  vieillards 
répètent  à  leurs  enfants ,  parlent  de  l'or  que  les 
Abures  recevaient  de  TimiK>uciau  et  des  autres 
contrées  du  Soudan  (t). 

Jamais  le  commerce  de  rintérîeur  de  l'Afrique 
ne  fut  plus  florissant  qu'à  cette  époque,  et  lors« 
que  prospérait  la  domination  dés  khalifes  d'Es- 
pagne. Il  y  a  même  lieu  de  présumer  que  ce  sont 
les  Maures  d'Espagne  qui  ont  fondé  Jimbouc- 

(i)  QkémeVf  Recfierches  historiques  sur  les  Maures ^ 
t.  I,  p.  a46.  Du  temps  de  Marmol ,  Muley-Abdala ,  qui 
faisait  sa  r^sid^nce  à  Fez ,  atrait  ëtendu  tou  etupire  au  sud 
jusqu'à  Td^ffùxMft'y  Tegurarin^  et  Teqaia^  jnsqu^aux  confins 
de  la  Guinéu  (  liv.  ii,  t.  I,  p*  4^5).  Marniol  (  liv.  yii, 
ch.  VI,  t.  III ,  p.  7  )  nous  apprend  qu'il  était  de  Texpédi- 
tion  entreprise  par  le  chérif  Mohamet,  roi  de  Suz^  qui  s*é- 
tait  rendu  dans  Toasis  de  Guniaten  pour  attaquer  les  ^gres. 
Aassi  le  roi, de  Maroc  se  qualifiait>-il ,  dans  le  17^  siècle  , 
d'empereur  à^J/rique^de  Fez,  de  SuZyde  G€igo^de  seigneur 
de  Daraà  et  de  la  Guimea,  Voyez  D&p^eT ,  J)escryftian  de 
tj{/nque,  16^6,  iu-folio,  p.  129^ 


t6      RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

tou.  Léon  l'Africain  nous  apprend  que  ce  fut  un 
architecte  de  Grenade  qui  construisit  en  pierre 
le  palais  du  roi,  et  la  première  mosquée  de  cette 
ville  africaine  (i)* 

Timbouctou  étant  devenu  la  capitale  d'un  état 
puissant,  le  Ouangara  redevint  un  état  indé- 
pendant, et  ne  fut  plus  soumis  aux  souverains 
de  GanaJi.  Par  la  suite,  Tétat  de  Bornou^  au 
.  nord-est,  s'éleva  sur  les  ruines  de  ceux  de  Za/i- 
/àra,  de  Kanem  et  de  Koukou,  Mais,  si  Ton  en 
croit  Marmol ,  Bomou  ne  se  serait  converti,  au 
mahoroétisme  que  beaucoup  plus  tard,  et  vers 
le  milieu  du  seizième  siècle  {^)\  ce  qui  s'accorde 
avec  ce  que  dit  Browne  sur  le  Dar-Four.  Ce  cou- 
rageux et  infortuné  voyageur  nous  apprend 
qu'il  y  a  seuleiùent  cent- cinquante  ans  (3)  que 
les  habitants  de  cette  contrée  sont  devenus  ma- 
hométans.  Ainsi  l'introduction  de  la  religion  de 
Mahomet  dans  les  parties  orientales  du  centre 
de  l'Afrique,  et  la  formation  de  Tpmpire  de 
Bomou  et  des  autres  états  qui  en.  sont  voisins, 
paraissent  postérieures  à  l'époque  dont  nous 
nous  occupons. 


(i)  Léon  l'Africain,  dans  Ramusio,  part,  vu,  p.  78.    , 

(2)  Marmol ,  liv.  ix,  ch.  v,  t.  III,  p.  70. 

(3)  Browne's  Travels  in  Jfrica^  Egypt  an^  Syria^  ^799* 
in-4^. ,  ch.  xxxy  p.  a8o. 


PREMIÈRE    PARTIE.  '     I'^ 

§  IL  Depuis  V expulsion  des  Maures  d'Espagne 
jusquau  commencement  du  seizième  siècle^ 
lors  de  la  publication  de  T ouvrage  de  Léon 
VAfricain, 

Le  commerce  régulier  qui  avait  lifeu  entre  les 
contrées  septentrionales  et  centrales  de  l'Afrique 
par  le  moyen  des  caravanes,  attira  enfin  l'atten- 
tion des  nations  chrétiennes  de  l'Europe,  qui, 
après  avoir  expulsé  les  Maures  d'Espagne ,  étaient 
enflammées  par  l'ardeur  des  découvertes ,  et  se 
répandaient  dans  toutes  les  contrées  du  globe 
pour  .étendre  leur  puissance  et  accroître  leurs 
richesses. 

La  Géographie  d'Édrisi,  qu'avait  fait  con- 
naître Roger,  roi  de  Sicile,  vers  le  milieu  du 
douzième  siècle  (i),  avait  révélé  à  l'Europe 
chrétienne  l'existence  d'un  grand  nombre  de 
villes  et  de  rwaumes  dans  l'intérieur  de  l'Afrique. 
On  desirait  jîjr-tout  pénétrer  dans  la  contrée  de 
Ouangara^^&\xX on  tirait  beaucoup  d'or. 

Les  cosmographes  du  quatorzième  siècle,  qui 
paraissent  avoir  emprunté  aux  Arabes  toutes 
leurs  notions  sur  l'intérieur  de  l'Afrique,  indi- 


(i)  Voyez  l'article  JEdnsiàans  la  Biographie  tmiverselle, 
t.  XII,  p.  537^  et  Hartmann,  Edrisi  Africa^  in-S*^  1796* 
p.  55  et  65. 

2 


f8     RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

quaient  exactement  sur  leurs  cartes  Tendroit  du 
passage  de  la  montagne  par  où  les  caravanes  se 
rendaient  en  Ghinea  et  à  Timbouctou;  une  lé- 
gende particulière  et  détaillée  faisait  mention  du 
voyage  annuel  qui  avait  lieu  dans  ces  contrées. 
Mais,  faisant  disparaître  le  Grdnd-Désert  qui  sé- 
pare ces  mêmes  contrées  de  la  côte  septentrio- 
nale, les  cosmographes  terminaient  leurs  cartes 
un  peu  au  sud  de  TAtlas,  et  ils  plaçaient  le 
Soudan  ou  Ghinea  (t)  et  Timbouctou  tout  près 
de  Sidjilmessa,  C'est  dans  ces  imparfaites  ébau* 
ches  que  l'on  trouve  pour  la  première  fois  chez 
les  chrétiens  de  l'Europe  le  nom  de  Timbouc- 
iouj  et  leurs  premières  notions  sur  le  commerce 
de  cette  ville  (a). 


(i)  Ce  nom  est  Torigine  de  celui  de  Guinée^  sur  lequel 
on  a  tant  disserté,  et  dont  on  a  donné  tant  de  fausses éty- 
mologies.  Il  est  le  même  que  celui  de.  Bfènnê ^.ou  Genni^ 
ou  Gain ,  qui  est  encore  aujourd'hui  le  nom  d^une  ville  et 
d'un  état  autrefois  plus  étendu.  Il  nous  semble  que  Léon 
l'Africain  ne  laisse  aucun  dOute  à  cet  égard.  Voici  son  texte 
(ca^  on  sait  qu'il  a  lui-métte  traduit  son  ouvrage  de  l'arable 
en  italien)  :  «  Questo  seeondo  re^no  è  chiamato  da  nostri 
<c  ira^/ra/ir/Ghenoa,  dagU  ahitatori  Genni  e  da  alcun  aUro 
«  Europa  che  ne  ahhia  notion  è  detto  Ghinea.  »  (Ramusio, 
édit.   i6i3,  t.  I,p^  78. 

{%)  Sttr  randenne  carte  desainée  sur.b^is  qui  est  à  la 
Bibliothèque -dn> Roi ,  et  qui  a  été  construite  vers  le  milieu 


-       PREMIÈRE     PARTIE.  I9 

Les  voyages  de  Mohammed  -  Ibn  *  Batouta , 
écrits  en  arabe  dans  le  quatorzième  siècle,  pa- 
raissent avoir  été  connus  de  ces  anciens  cosmo- 

do  quatomème  mècle ,  od  a  tracé  au  sud  de  MarocAa  un 
pasaage  dans  la  montagne^  à  côté  duquel  on  a  écrit  ces  mots, 
qui  nous  prouvent  que  le  passage  était  par  le  val  Darah  : 
«  A  quest  loc  pasen  los  merchadores  ^  entren  en  la  terra 
«  des  Nègres  de  Gineva  le  quai  pases  appellat  val  de 
«  Darha.  »  Et  c'est  encore  aùjotifrd'hui  par  le  val  Darah 
que  passent  les  caravanes  de  Tafikt,  {yoye*i.  Shaabeny^s, 
Account  ofTimbouctou  andUouêay  m-8^,  Eondon^  iSno, 
p.  3.)  iDunédiatement  après,  ua  peu  à  Test  de  ce  pas-^» 
sage  et  au  sud  de  Sidjilmessa^  on  trouve  sur  la  carte 
dont  nous  parlons^  Tagazza ^  Sudan ^  Tenbuck  {^Tïmhonc-- 
tou) ,  Melty.  On  sait  que  ces  dernières  contrées  sont  situées 
bien  loin  de  là  et  au  sud  du  Grand-Désert.  Au  milieu  de 
tous  les  noms  que  nous  venons  de  transcrire  ,-  on  distingue 
celui  de  Guineuà,  qui  se  trouve  écrit  enplus  gro^  caractère. 
A  côté  de  ce  norti  de  Guineua  est  une  figure  de  nègre ,  et 
une  légetkâe  ainsi  conçue  :  «  A  quest  luggar  Nègre  es  appel- 
lot  mus^di^l^jif  §€nyor  de  los  Nègres  ^/tf  Guineva  a  quest  tèy 
es  lo  pu  ricit  et  pus  noble  sehyor  de  tota  estapattida  e  por 
Vabondantà  de  hr  la  quai  se  recuUen  ta  sua  terra.  »  Ainsi, 
selon  ce  cosmogràphé  ,  le  sultan  de  MeUy  était  alors  le  plus 
puissant  et  doiiftiiiisrit  dans  toirte  la  Guinée,  Marmo!  (  Kv.  i<, 
cap.  XXVI,  t.  I,  p.  73)  dit  que  ceux  de  Senega  oht  aér  midi 
le  Gueneova ,  où  sôUt  ïcs  royaumes  dé  Guatata  et  de  Tom- 
bût;  ce  qui  prouve  qu'on  donUait  alors  une  grande  exten- 
sion à  la  Gainée,  Cependant  Marmol  distingue  èîllétrrà  ces 
conti^ées,  loi*tqu*il  dif  (Kf.  I,  cb.  xxxtii)  que  dan»  Geloffè\ 
Geneova^  Tombutj  Melljr  et  Ganate^  on  parle  la  ttiême 

2  . 


20      RECHERGHXS'  SUR  LAFRIQUE. 

graphes.  Ibn-Batouta ,  natif  de  Tanger ^  voyagea 
pendant  vingt  ans,  et  parcourut  Y  Egypte ,  X  Ara- 
bie y  la  Syrie  ^  Y  Empire  grec,  la  Tartarie,  la 
Perse  y  Ylnde,  Ceylariy  Java  y  et  la  Chine.  Il 
avait  cinquante-trois  ans,  lorsqu'il  retourna  en 
Afrique ,  et  lorsqu'il  entreprit  un  nouveau 
voyage  dans  l'intérieur  de  ce  continent.  Il  visi- 
ta Timbouctou  et  Melly^  et  beaucoup  d'autres 
royaumes  africains.  Lorsqu'il  fut  de  retour  dans 
sa  patrie,  il  écrivit  ses  voyages,  dont  malheu- 
reusement on  ne  possède  qu'un  extrait  (i).  Nous 
ferons  l'analyse  de  la  partie  de  cet  extrait  qui 
concerne  l'Afrique. 

Ibn-Batouta  partit  de  Sidjilmessa^  et  se  rendit 


langue,  qui  est  le  zungay,  Tjéon  T Africain  (  dans  Ramu-< 
sio  ,  t.  I ,  p.  2  ^  )  nomme  les  royaumes  situés  sur  le  Niger 
dans  Tordre  suivant ,  en  allant  d*occident  en  orient  :  Gua-^ 
lata^  Ghinea,  Melli^  Tombutto^  Gago  ^  Guber^  J godez  ^ 
Cano ,  Casena ,  Zegzeg^  Zanfara^  Guangara ,  Burno^  Gao- 
ga^Nube,  Il  dit  que  le  zungay  se  parle  à  Gualata  en 
Ghinea^SL  MelU^et  à  Gago.  A  Tépoque  où  il  écrivait, le  roi 
de  Tombât  y  celui  de  Melly  et  celui  â!Jgadez  étaient  de  la 
nation  des  Zanagai, 

(i)  J.  G.  D.  Kosegarten,  De  Mohammede-Ibn-Batuta 
Arabe  Tingitano  ejusque  itineribus ^'xn-tC ^  Jenae,  1818.  Selon 
Burckhardt  {Trasfeht  in  Nubia^  p.  534), Ibn-Batouta  écrivit 
ses  voyages  Tan  755  de  Thégyre,  ou  x354  ^e  Tère  chré- 
tienne. 


PREMIÈRE     PARTIE.  21 

en  vingt  jours  à  Tegazza,  Il  parle  des  mines  de 
sel  qui  s'y  trouvent,  et  nous  apprend  que  cette 
oasis  (j)  est  habitée  par  les  esclaves  Aes  Mesou- 
fa ,  qui  tirent  le  sel  de  la  terre.  Ibn-Batouta  ne 
nous  apprend  point  quels  sont  les  Mesoufa; 
mais  nous  savons ,  par  Édrisi ,  que  les  Mesoufa 
sont  une  famille  de  Berbers  qui.  appartient  à  la 
grande  tribu  de  Lamta  (2). 

De  Tegazza  il  se  rendit  à  Tassahl^  après  dix 
jours  de  marche  dans  un  désert  sans  eau  (3).  Là 
les  marchands  résident. 

De  Tassahl  Ibn-Batouta  se  rendit  à  Eme- 
laten  (4).  Le  désert  que  Ton  traverse ,  est  de 
douze  jours  de  marche.  Eiwèlaten  est  le  pre- 
mier lieu  qui  se'ti^ouve  sous  la  domination  des 
Nègres.  Lorsque  les  marchands  entrent  sur  le 
territoire  d'£ï«^e/a^é*/ï,  ils  sont  obligés  de  déposer 
leurs  marchaindises  dans  une  place  particulière, 
et  de  les  confier  à  la  garde  des  Nègres.  Les 
Mesoufa^  qui  possèdent  une  grande  partie  diEï^ 


(i)  Selon  l'extrait  de  Burckhardt,  p.  536,  le  nom  de 
cette  oasis  est  Theghary^  et  Ibn-Batouta  mit  vingt  -  cinq 
jours  à  s'y  rendre.  Les  maisons  sont  bâties  de  pierres  de  sel, 
et  couvertes  de  peaux  de  chameau. 

(!2)  Hartmann  Edrisi,  p.  1128  et  i3i. 

(3)  Burckhardt,  p.  536.  —  Kosegarten,  p.  5o. 

(4)  Kosegarten ,  loc,  cit. 


aa      RECHERCHES  SUR  LAFRIQCE. 

(pelaten,  ont  des  mœurs  singulières.  Ils  ne  mon- 
trent aucune  jalousie  pour  leurs  femmes ,  qui 
sont  d'une  grande  beauté.  Celles  qui  sont  ma- 
riées ont  autant  d'amants  qu'il  leur  plait.  Dans 
ce  pays  on  prend  le  nom  de  son  oncle ,  et  non 
celui  de  son  père  ;  et  c'est  le  fils  de  la  sœur ,  ou 
le  neveu  du  côté  des  femmes,  qui  hérite,  et  non 
le  fils.  Ibn-Batouta  remarque  qu'il  a  trouvé 
cette  coutume  sur  la  côte  de  Malabar^  où  elle 
existe  encore  aujourd'hui  dans  la  caste  des 
Naïres,  Mais  Ibn-Batouta  ajoute  que  les  habi- 
tants diEiwelatenj  où  elle  est  en  vigueur,  sont 
zélés  mahométans,  tandis  que  ceux  de  la  côte 
de  Malabar  sont  idolâtres.  Nous  savons  que  le 
même  usage  existe  encore  aujourd'hui  parmi  les 
Nègres  de  Oualoy  qui  sont  à  l'embouchure  du 
Sénégal^  et  au  sud  de  ce  fleuve  (i).  Il  semble- 
rait, d'après  la  ressemblance  du  nom  et  la  con- 
formité des  usages,  que  Oualo  est  VEîwelaten 
d'Ibn-  Batouta ,  d'autant  plus  que  c'est  en  ^ffet 


(i)  Geoifeoy  de  VilIeHeuv«,  De  ^ Afrique^  in-i8,  t.  IIX, 
p.  ao  et  3a.  —  Cet  nsage  existe  parmi  plusieurs  autres 
peuplades  nègres.  M.  Bowdich  a  trouvé  des  coutumes  sem- 
blables chez  les  Jschantis.  Dans  ce  pays ,  c'est  le  frère  qui 
succède  au  trône;  au  déÊiut  dii  frère,  c'est  le  fils  de  la  sœur; 
au  défaut  du  neveu,  c'est  le  fils;  et  au  défaut  du  fils,  c'est  le 
principal  vassal  ou  esclave.  JRffif^ion  to  Ashantee^  p.  254. 


PREMIÈRE    PARTIE.  'ïi 

le  premier  lieu  que  l'on  rencontre  au-delà  du 
Grand-Désert.  Mais  la  direction  de  la  route  qu'a 
dû  parcourir  le  voyageur  arabe ,  répugne  à  cette 
conjecture.  D'ailleurs  Ibn-Batouta  ne  £ait  pas 
mention  du  grand  fleuve  du  Sénégal j  qu'il  au- 
rait traversé  s'il  s'était  rendu  à  Oualo.  Nous 
pensons  donc  qu  JÈÏwe/(a^^/2(ï)d'Ibn-Batouta  est 
le  fTalet  de  Muttgo-Park ,  sur  les  confins  du  dé- 
sert et  des  contrées  du  Soudan  qu'arrosent  et 
que  fertilisent  le  Nil  des  Nègres  et  les  fleuves 
qui  s'y  jettent. 

jyEîwelaien  Ibn-Batouta  se  dirigea  vers  la 
ville  de  Mali;  il  n'y  arriva  qu'après  vingt  quatre 
jours  de  marche  forcée.  Le  désert  qui  est  efttre 
ces  deux  lieux  abonde  en  arbres  très-gros  et  qui 
fournissent  beaucoup  d'ombrage  :  les  abeilles 
font  du  miel  dans  les  arbres  ;  les  voyageurs  s'en 
nourrissent.  Pour  ce  trajet,  on  n'a  pas  besoin 
de  faire  des  provisions  :  lorsque  vous  appro- 
chez de  la  ville ,  les  femmes  des  nègres  vous 
apportent  du  lait ,  des  poules ,  du  riz  et  de  la 
farine.  ,  . 

Après  être  parti  de  Mali^  Ibn-Bato^a  voya- 
gea pendant  dix  jours,  et  arriva  à  Sagher  (a), 


(i)  M.  Kosegarten ,  p.  5o ,  dit  que  dans  l'arabe  on  peut 

lire  aussi  Ejulat;  et  Burckhardt,  p.  536,  a  lu  Jbou-Laten, 

(a)  Dans  Burckhardt ,  p.  536 ,  ce  nom  est  écrit  Zagharj. 


q4         recherches  sur  l'afriqujk. 
grande  ville  où  Ton  trouve  aussi  des  habitants 
hidjites^  dont  les  uns  sont  de  la  secte  des  Ebad^ 
hidjites   et   des    Charedchitiques  ^  et   quelques 
autres  sont  Sunnites-Malékites  (i). 

De  Sagher  Ibn-Batouta  se  rendit  à  la  ville  de 
Karsekhou ,  qui  est  située  sur  le  rivage  du  Nil. 
Notre  voyageur  prend  de  là  occasion  de  décrire 
le  cours  de  ce  fleuve,  qui  de  Karsekhou  coule 
à  Kabarâ^  ensuite  à  Sagha^  dont  les  habitants 
dédaignent  la  religion  mahométane.  De  Sagha 
le  Nil  coule  à  Timhouctou ,  ensuite  à  Kok  (2)  ; 
et  enfin  il  passe  dans  la  ville  de  MouU^  qui  est 
le  dernier  lieu  appartenant  à  l'empire  de  Mali. 
Ensuite  ce  fleuve  arrose  Joi  (3),  le  plus  grand  de 
tous  les  royaumes  nègres,  et  celui  dont  le  sul- 
tan est  le  plus  puissant.  Les  blancs  ne  peuvent 
pas  pénétrer  dans  ce  royaume.  De  là  le  Nil 
coule  dans  cette  partie  de  la  Nubie  où  l'on  suit 
la  religion  chrétienne.  De  là  il  arrose  le  Dongola, 
dont  le  sultan  s'est  fait  mahométan;  ensuite  il 


(i)  Burckhardt,  p.  537  ,  dit  que  ces  blancs  sont  des  hé- 
rétiques de  la  croyance  de  Byadha, 

(a)  Ibn-Batouta  dit  ici  qu'il  parlera  ci-après  plus  ample- 
ment de  la  ville  de  Koh  ;  ce  qui  nous  prouve  qu'il  est  ques- 
tion ici  de  la  ville  de  Koukouy  dont  il  traite  plus  bas  et 
où  coule  le  Nil. 

(3)  Bowj  selon  Burckhardt^  P*  ^^7* 


PREMIERE    PARTIE.  sS 

passe  à  Dschenodel  ou  les  cataractes,  dernier 
lieu  de  la  terre  des  Nègres ,  et  le  premier  de  .la 
province  ^Assoûan^  qui  appartient  à  l'Egypte 
supérieure. 

Après  avoir  ainsi  décrit  le  cours  du  Nil ,  Ibn- 
Batouta  nous  dit  que  de  Karsekhou  (i)  il  s'est 
rendu  sur  les  bords  du  fleuve  Ssanssara,  On 
n'entre  point  dans  ce  pays  sans  permission. 

De  Ssanssara  Ibn-Batouta  s'est  rendu  à 
ilfâ://,'dont  les  habitants  ne  jurent  que  par  le 
nom  de  leur  sultan,  qui  est  Menassi  (2)  Solinlan. 
Ils  se  découvrent  en  sa  présence;  et,  lorsqu'ils 
lui  adressent  la  parole,  ils  se  prosternent,  et  se 
couvrent  la  tête  de  poussière.  Les  femmes  concilie 
les  hommes  vont  presque  nus,  et  n'ont  de  vête-, 
ment  que  sur  le  milieu  du  corps.  Du  reste ,  ils 
sotit  zélés  mahométans  ;  on  est  chez  eux  parfai- 
tement en  sûreté ,  et  il  règne  dans  toute  l'éten- 
due de  leurs  domaines  une  excellente  police.  A 
Mali^  Ibn-Batouta  apprit  qu'il  y  avait,  dans 
l'intérieur,  des  peuplades  païennes  qui  étaient 
anthropophages,  et  chez  lesquelles  on  transfpor- 
tait  les  criminels  et  les  exilés  de  Mali,     . 

(i)  Burckhardt  a  lu  Karendjou  ou  Karsendjer, 

(a)  Nous   avons   déjà  remarqué    que   celui   qui  fonda 

Timhouciou    se  nommait   Mense  Soliman,  ou  Suleiman. 

Menassi  est  le  même  mot  que  Mense  ^  et  signifie  Roi  en 

mandingue. 


^6  RECHERCHES     SUR    LAFRIQUE. 

Ibn-Batouta  retourna  sur  ses  pas,  et  quitta  le 
royaume  de  Mali  (i).  Il  vit  des  chevaux  marins 
paissant  sur  les  bords  du  fleuve.  Ils  étaient, dit-il , 
plus  grands  que  des  chevaux;  et  ils  portent, 
comme  eux,  une  queue  et  une  crinière,  mais 
ils  ont  des  pieds  d'éléphant  (2).  Iba*Batouta 
arriva  ensuite  à  Timbouctou,  ville  située,  dit-il, 
à  quatre  milles  du  NiL  Dans  lextrait  de  son 
voyage,  il  n'est  rien  dit  de  plus  sur  cette  ville. 

A  Timbouctou^  Ibn-Batouta  s'embarqua  sur 
le  Nil  dans  un  canot  fait  du  tronc  d'un  seul 
arbre.  Il  payait  les  frais  de  son  voyage  avec  du 
sel  et  des  aromates. 

ibn-Batouta  parvint  ainsi  à  la  ville  dé  Koukou^ 
qui  est  grande  et  située  sur  le  Nil.  C'est  la  plus 
belle  de  toutes  les  villes  qui  sont  en  la  puis- 
sance des  Nègres  (3). 

Selon  un  autre  extrait  du  même  voyage ,  Ibn- 


(1)  Kosegarten,  p.  48.  Selon  Burckhardt,  p.  537,  Ibn- 
Batouta  dit  que  Mali  n'est  qu'à  dix  milles  du  fleuve  Ssans- 
sara.  Les  femmes,  à  Mali,  ne  couvrent  leur  nudité  qu'après 
le  mariage. 

(a)  Dans  Riley  (^Loss  of  the  American  Jbrig  commerce, 
p.  378)  Sidi-Hamet  dit  qu'il  a  vu  aussi  des  chevaux  marins 
ou  des  hippopotames  sur  le  Niger,  Voyez  ci-après. 

(3)  Là,  comme  kMali,  les  coquilles  servent  de  monnaie. 
(  Burckhardt,  p.  537.  ) 


PREMlÈilE     PARTIE.  T^J 

Batouta  (i)  se  serait  rendu  de  Koukou  à  la  ville 
de  Berdamma ,  dont  les  habitants  protègent  les- 
caravanes,  et  ont  de  belles  femmes. 

De  là  notre  voyageur  arriva  à  Tekedda  (a), 
où  il  y  a  des  scorpions  dont  la  morsure  est 
mortelle.  La  ville  est  construite  en  pierre  rou- 
geâtre  ;  les  eaux  coulent  à  travers  des  veines 
de  cuivre,  qui  lui  donnent  un^  saveur  désa- 
gréable. Les  habitants  ne  s'occupent  que  de  corn- 
merce;  ils  vont  en  Egypte^  et  y  achètent  des 
étoffes  précieuses;  ils  ont  un  grand  nombre 
d'esclaves  et  d'affranchis.  Les  mines  de  cuivre 
sont  hors  de  la  ville  :  on  extrait  le  métal  de  la 
terre;  on  le  fond  en  masse,  et  on  le  met  eia 
barres,  que,  l'on  transporte  dans  le  pays  des 
Nègres.  Le  sultan  de  ce  pays  est  de  la  nation  des 
Berbers  (3). 

De  Tekedda  y  Ibn-Batouta  se  prépara  à  re- 
tourner à  Sidjibnessa^  et  il  se  dirigea  avec  une 
caravane  sur  Tewat  (Touat).  Il  y  a  soixante 
et  dix  stations  entre  Tekedda  et  Tewat.  Les 
voyageurs  doivent  apporter  avec  eux  leurs  pro- 
visions ;  car  on  ne  trouve  sur  cette  route  que 


(i)  Barckhardt,  p.  537. 

(a)  Burekhardt  a  lu  NeMa  et  Te^da. 

(3)  Burekhardt,  p.  537. 


aS  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

du  lait  et  du  beurre,  qu'on  se  procure  avec  des 
étoffes. 

De  T^cvat  on  arrive  à  Kahor,  qui  appartient 
au  sultan  de  Kerkeric^  et  qui  abonde  en  pâtu- 
rages; ensuite  on  voyage  pendant  trois  jours 
dans  un  désert,  sans  eau;  et  après  on  marche 
encore  quinze  jours  dans  un  désert ,  qui  .ne 
manque  pas  d'eau,  et  qui  cependant  ne  pré- 
sente point  d'habitations.  Enfin  l'on  arrive  dans 
un  endroit  où  la  route  se  divise  en  deux.  Une 
des  branches  de  cette  route  conduit  à  Tewat 
(Touat)  (i),  et  l'autre  en  Egypte.  C'est  à  Tewaty 
au  point  de  séparation  des  deux  routes,  que  l'on 
trouve  des  puits  dont  l'eau  est  ferrugineuse. 
Le  linge  qu'on  y  lave,  devient  noir. 

De  ce  lieu,  après  dix  jours  de  marche,  Ibn- 
Batouta  parvint  à  Dekha^  qui  est  habité  par 
une  tribu  de  Berbers. 

On  marche  sur  le  territoire  de  cette  tribu 
pendant  un  mois,  et  l'on  arrive  à  Bouda ^  qui  est 
la  plus  grande  ville  du  pays  de  Tewaù;  ce  qui 
prouve  que  le  pays  de  Tewat  ou  Touat  avait 
alors  une  grande  étendue. 

De  Bouda  Ibn-Batouta  arriva  à  Sidjiîmessa; 
et,  ce  qui  est  très-remarquable,  il  y  faisait  froid, 


(i)  Kosegarten,  p.  49*  ^eUe  branche  de  la  route  devait 
être  celle  que  notre  voyageur  venait  de  parcourir. 


PREMIÈRE    PARTIE.  29 

et  il  y  était  ^  tombé  beaucoup  de  neige.  Ceci 
prouve  que  les  montagnes  de  V^Jltlas  sont  très- 
hautes  dans  cette  partie,  et  que  le  Sidjilmessa 
est  sur  un  plateau  très-élevé. 

De  Sidjilmessa  Ibn-Batouta  parvint  facilement 
à  la  ville  royale  de  Fez,  «  où  nous  avons,  dit-il, 
«  jeté  fe  bâton  de  voyageur.  » 

Il  était  nécessaire  de  nous  étendre  un  peu 
sur  les  voyages  dlbn-Batoùta,  parce  qu'il  est 
le  premier  des  voyageurs  qui  ont  pénétré  dans 
le  centre  de  l'Afrique ,  parmi  ceux  dont  la  re- 
lation est  parvenue  jusqu'à  nous;  et  qu'il  forme 
la  liaison  entre  les  cosmographes  du  quator- 
zième siècle  et  Léon  l'Africain,  qui  n'a  écrit  que 
dans  le  seizième  siècle.  Ibn-Batouta  a  traversé 
l'Afrique  dans  deux  sens  différents,  du  nord  au 
sud,  et  de  l'est  au  nord-ouest.  Les  notions  qu'il 
nous  donne  s'accordent,  sur  presque  tous  les 
poiiits,avec  les  relations  les  plus  récentes  des 
voyageurs  modernes. 

Nous  voyons,  par  son  ouvrage,  qu'au  quator- 
zième siècle  le  commerce  était  plus  florissant 
dans  l'intérieur  de  l'Afrique,  qu'il  n'est  aujour- 
d'hui ;  et  la  religion  mahométane  même  paraît  y 
avoir  été  plus  répandue.  L'ouvrage  d'Ibn-Ba- 
touta  (i)  nous  prouve  aussi  que  Léon  l'Africain 

(i)  La  coïncidence  que  M.  Kosegarten  ,    p.  5i  ,  trouve 


3a      RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

eourqf  est  probablemeat  le  Tocrour  des  auteurs 
arabes;  et  ceci  prouverait  que  la  ville  et. l'état 
de  ce  nom  ne  doivent  pas  être  confondus  avec  la 
ville  et  le  royaume  de  Timbouctou^  comme  l'ont 
prétendu  quelques  géographes. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  Portugais ,  qui  avaient 
fini  par  poignarder  Bemoys ,  se  lièrent  avec  un 
roi  des  Mandingues^  nommé  Mandi;  avec  Te- 
mala  roi  des  Foulahs;  et  envoyèrent,  si  l'on  en 
croit  l'historien  Barros,  diverses  ambassades  à 
Timbouctouy  sur  lesquelles  il  ne  nous  a  été 
transmis  aucun  détail  (i).  Seulement  nous  sa- 
vons qu'alors  de  nombreuses  caravanes  de  mar- 
chands se  rendaient  du  Caire  (2),  de  Tunis,  de 


(i)  Barros ,  Asia  Decas  i,  liv.  m,  cap.  xii,  t.  I,  p.  267 . 
—  Marmol,  liv.  ix,  ch.  xx,  t.  III,  p.  81,  confirme  ce 
fait,  et  dit  que  le  roi  Jean  envoya  une  ambassade  aux 
rois  de  Toucourof  et  de  Tombout,  Ces  ambassadeurs  al- 
lèrent par  la  voie  de  Canior.  "Les  rois  de  Toucourof  et  de 
Tomhout  étaient  deux  rois  puissants,  qui  avaient  guerre 
contre  celui  de  Foulos  (FoulaH  ) ,  roi  si  puissant,  qu*il  leva 
une  armée  du  côté  du  sud  en  la  province  de  Fouta  qui 
borde  le  royaume  de  Manienga  (  Mandingue  )  du  côté  de 
l'orient.  Cette  province  de  Fouta  est  le  Fouta  -  Toro ,  entre 
le  Sénégal  et  la  Gambie. 

{%)  Barros,  Asia  Dec.  I,  liv.  m,  ch.  m,  t.  I,  p.  i70,in-8°, 
Lisbon,  1778.  —  Ibid.  t.  i,  dec.  I,  liv.  m,  cap.  viii,p.  aao  : 
E  asi  coHcorriam  a  outra  cidade ,  que  esta  na$  correntes 


PREMIÈRE    PARTIE.  33 

Tremezeriy  de  Maroc  ^  de  Fez^  et  de  tous  les 
royaumes  au  nor^  de  l'Afrique,  à  Timbouctou 
et  à  Genna  ou  Jenni:  ce  dernier  lieu  est  évi- 
demment le  Guenoa  et  le  Genoya  des  cosmo- 
graphes des  quatorzième  et  quinzième  siècles. 
Il  est ,  dit  Barros,  situé  plus  à  l'ouest ,  et  est  plus 
célèbre  que  Timbouctou. 

On  voit  par  l'ouvrage  de  Scbehab-Eddin-Ahmet, 
natif  de  Fez  y  dont  M.  Silvestre  de  Sacy  a  donné 
un  ample  extrait  (i),  qu'au  milieu  du  sei- 
zième siècle,  i55i,  les  Arabes  ne  connaissaient 
rien  au  delà  du  royaume  de  Jenné  ou  de  Guinée 
vers  l'occident,  parce  que  leurs  découvertes 
s'étaient  fiâtes  par  l'intérieur.  En  effet,  Schehab- 
Ëddin-Ahmet,  çn  décrivant  le  iVif,  s'exprime 
ainsi:  tt  La  branche  de  ce  fleuve,  qui  coule  dans 
le  pays  de  Djénawa^  ne  va  point  jusqu'à  l'Océan; 
elle  ne  coule  que  jusqu'à  la  contrée  qui  est  ha- 
bitée (2).  »  Djénawa  nou*  paraît  être  le  Jenné  de 

deste  rio  chamada  Genn4\  «  quai  em  outro  tempo  era  mais 
célèbre  que  Tungubutu  . . .  E  como  esta  mais  occidental 
que  TungUbutu^gerabnente  concorriam  a  ella  os  pàvoSy  che 
Ihe  suo'  mais  vizinhos. 

(i)  Notices  des  Manuscrits  ^  t.  II ,  p.  r56. 

(7.)  Dans  ce  même  passage  traduit  parD.  Leyden's  African 
discoveries  ^  t.  II,  p.  Sig,  il  est  dit  que  le  Ni]  coule  jusqu'à 
la  partie  habitée  de  la  terre  de  Ganak  :  alor^  ce  serait  tout 
différent  ;  mais  on  doit  accorder  plus  de  confiance  à  Torien- 

3 


34  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQU]£. 

Muiîgo-Park ,  qui  est,  comme  le  prouve  le  pas- 
sage de  Léon  rAfricain  que*  nous  avons  rap- 
porté, le  Ghinea  des  Portugais.  Ceux-ci,  qui 
s'étaient  avancés  dans  Fintérieur  de  F  Afrique, 
en  psurtant  du  rivage,  et  en  sens  contraire  des 
Arabes,  n'avaient  que  des  notions  confuses  sur 
les  contrées  situées  au-delà  de  Djenné.  Ainsi  le 
pays  de  Gmn^^' formait  la  limite  des  connais- 
sances géographiques  des  Portugais  vers  l'orient, 
et  celle  des  Arabes  vers  l'occident.  Et  comme  il 
arrive  toujours  pour  les  contrées  où  se  sont 
arrêtés  long-temps  les  progrès  des  découvertes, 
on  étendit  par  la  suite  ce  nom  à  tous  les  nou- 
veaux payj^  que  l'on  découvrit ,  soit  au  sud ,  soit 
à  Fouest,  soit  à  Fest;  et  une  grande  partie  de 
FAfrique  reçut,  le  nom  de  Guinée.  Barros  dit 
positivement,  dans  le  passage  que  nous  avons 
cit^^  que  les  Portugais  ne  se  rendaient  point  à 
Timbouctou^  mais  à  Gemna, 
De  Genna  ou  Jenné^  Xtit  que  Fon  recevait  en 


taliste  français.  D.  Leyden ,  qui  donnait  de  grandes  espé- 
rances,  est  mort  jeune  :  il  fait  vivre  Schehab-Eddin  en 
i4oo;  mais  M.  de  Sacy  prouve  très -bien,  selon  nous, 
qu*il  écrivait  vers  i/i*^o.  Au  reste  le  mot  Gana  n'est  que  ce- 
lui de  Genna  de  Barros ,  mal  lu  ;  et  ce  Grona  serait  Djenné 
ou  Guinée^  et  non  le  royaume  d'Afrique  connu  sous  le  nom 
de  Ganah^  plus  à  Test. 


PREMIÈRE     PARTIE.  35 

échange  des  marchandises  européehnes ,  était  i 
,  transporté  à  Mina^  forteresse  bâtie  par  les  Por- 
tugais sur  ]a  cote  d'Afrique,  qui  a  pris  de  là 
son  nom  de  Côte-d'or  (i).  De  toutes  les  cotes 
d'Afrique,  c'est  en  effet  la  plus  rapprochée  de 
ces  contrées,  et  celle  d'où  il  parait  le  plus  fa- 
cile d'y  arriver. 

Satisfaits  d'avoir  établi  c^  relations  commer- 
ciales, les  Portugais  ne  cherchèrent  point  à  faire 
de  nouveaux  voyages  à  Timbouctbu ,  ni  à  éta- 
blir avec  cette  ville  une  communication  directe. 
Ils  avaient  formé  de  grands  établissements  dans 
le  Congo;  et  c'est  e^  pénétrant  dans  l'intérieur 
de  cette  contrée,  que  leurs  missionnaires  con- 
tribuèrent efficacement  aux  progrès  de  la  géo- 
graphie en  Afrique. 

§  III.  Depuis  le  commencement  du  seizième 
siècle  et  la  publication  de  V ouvrage  de  Léon 
VÂjHcain ,  jusqu'à  In  formation  de  la  société 
établie  à  Londres  en  i^S8,  pour  les  progrès 
des  découvertes  dans  Vintérieur  de  V Afrique. 

La  Géographie  de  Jean  Léon,  surnommé  l'Afri- 
cain, fut  terminée  en  iSaô.  L'auteur  la  tradui- 
sit lui-même  en  italien  ;  son  manuscrit  fut  égaré, 

(i)  Voyez  Barres,  toc,  du- 


36      RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

ensuite  retrouvé,  et  enfin  publié  par  Bamusio 
en  i55o  (i).  Cet  ouvrage  jeta  un  jour  tout  nou- 
veau sur  l'intérieur  de  l'Afrique.  C'est  encore 
aujourd'hui  pour  ces  régions  la  principale  au- 
torité ,  la  source  d'instruction  la  plus  abondante 
et  la  plus  pure.  Ce  Maure,  natif  de  Grenade, 
avait  accompagné  à  Timhouctou  son  oncle,  qui 
y  avait  été  envoyé  en  ambassade  par  le  roi  de 
Pèz  {^y  Jean  Léon  ne  revint  qu'au  bout  de  quatre 


(i)  Voici  le  titre  exact  de- cette  première  édition  de  la 
collection  de  voyages  de  Ramusio  :  Itinerario  divarii  rino- 
mati  Fiaggiatori  nelle  parti  delVJfricay  Asia  edJmerica. 
C'est  un  vcdume  in-folio  de  4o5  feuillets,  ou  8io  pages, 
imprimé  à  Venise,  chez  les  Juntes, en  mai  i55o.  Ce  volume 
fut  réimprimé  en  i554  ;  et  Ramusio  en  ajouta  deux  autres 
à  celui-là,  et  mourut  en  i557.  On  a  réimprimé  plusieurs 
fois  sa  collection  sous  un  autre  titre. 

(a)  lbid.y  p.  gS  verso.  Lorsbach,  dans  la  préface  de  sa 
traduction  allemande  jde  Jean  Léon ,  a  démontré  combien 
la  traduction  latine  de  Floiiatius  ^t  inexacte.  Elle  parut 
en  i556..  Voyez  Lorsbach^  Johann  Léo' s  des  Afrikaners^ 
Beschreibung  von  Afiika^  Herborn,  în-S",  i8o5,  p.  xxij- 
xxix.  La  traduction  française  fut  aussi  imprimée,  en  i556, 
in-folio  et  in-8**;  elle  est  de  Jean  Temporal.  Beïïe-Forest, 
dans  sa  Cosmographie  in-folio,  i588,  tome  II,  p.  1917, 
déclare,  avec  beaucoup  de  force,  qu'il  n'a  d'autres  maté- 
riaux, pour  sa  description  de  l'Afrique,  que  Jean  Léon 
l'Africain,  Cadamosto  et  Barros.  De  nos  jours,  Hartmann, 
Brun,  et  tous  ceux  qui  ont  approfondi  la  géographie  de 
l'Afrique,  ont  rendu  hommage  au  savoir  de  Jean  Léon. 


PREMIÈRE     PARTIE.  37 

ans  :  pendant  ce  temps  il  voyagea  dans  l'inté- 
rieur de  rAfrique,et  parcourut  quinze  royaumes 
différents,  qu'il  a  décrits  (i).  Les  notions  les 
moins  douteuses  que  l'on  a  pu  acquérir  dans 
ces  derniers  temps,  coïncident  avec  celles  qu'il 
nous  a  données. 

Vers  la  fin  du  XV®  siècle,  le  commerce  de 
Timbouctou  éprouva  une  révolution  par  les  con- 
quêtes des  souverains  maures ,  qui  s'étaient  em- 
parés de  cette  ville.  Ils  avaient  étendu  leur  empire 
jusque  sur  le  Sénégal;  et,  trouvant  plus  avan- 
tageux de  rapprocher  de  ce  .  fleuve  l'entrepôt 
principal  du  commerce  de  ces  contrées ,  ils 
l'avaient  établi  à  Guineya  ou  DjeW^  (a).  Ce 
dernier  lieu  était  devenu  le  centre  des  cara- 
vanes ;  et  l'on  ne  doit  pas  s'étonner ,  ainsi  que 
nous,  l'avons  déjà  remarqué,  que  le  nom  de 
Guineva  ou  de  Guinée  se  soit,  étendu  jusqu'à 
l'embouchure  du  Sénégal  et  de  la  Gambie^  et 
même  jusqu'à  la  côte  qui  au  sud  faisait  face 
au  fleuve  du  Soudan^  ov^  au  Niger ^  et  qui  se 
trouvait  la  plus  rapprochée  de  la  contrée  de 
Guineva.    Par    un    déplacement   dans    les   dé- 


(i)  Jean  Léon  l'Africain,  dans  Ramusio,  Délie  Navigazioni 
e  Viaggi,  édit.   i6i3  ,  in-folio,  tome  I,  p.  78. 

(a)  Marmol,  trad.  franc.,  livre'  m,  ch.  i,  m  et  iv, 
Hamusio ,  t.  I ,  p.  78. 


38      RECHERCHES  SUR  L*AFRIQUE. 

noiQinations,  qui  est  commun  en  géographie, 
cette  côte  est  aujourd'hui  la  seule  qui  ait  con- 
servé le  nom  de  Guinée  (i). 

Mais  la  situation  politique  de  ces  régions  n'é- 
tait plus  la  même  lorsque  Jean  Léon  y  voyageait. 
En   i5oo,  Soniheli,  roi  de  Timbouciou  et  de 


(i)  Il  est  probable  qae  Timbouctou  avait  déjà  décline  à 
Tépoque  où  le  commerce  avait  été  transporté  à  Guinea^  et 
qae  cette  ville  était  plus  florissante  avant  le  temps  de  Léon 
l'Africain.  Si  on  ne  lisait  son  ouvrage  que  dans  la  traduction 
latine,  on  en  atiraît  une  preuve  positive  dans  ces  mots  de  la 
description  de  Timbouctou  :  Cujus  domus  omnes  in  iugurioia 
cretacea  straminiis  tectis  s  uni  mutata,  (J.  Leonis  Africanî 
totius  Africae  descriptio,  in-ia,  Antuerpiae,  iÔ56»  p.ttSo.) 
Mais  c'est  un  des  nombreux  contre-sens  du  traducteur  latin  ; 
le  texte  dit  :  Le  cuicase  sono  capanne  faite  dipali^  coperte 
di  creta  coi  coriividipagUa  (Ramusio,  édit.  i6i3, 1. 1 ,  p.  78). 
Jean  Temporal  Ta  traduit  exactement  :  Les  maisons  d'icelles 
sont  de  tortis  plâtré  y  et  couvertes  de  paille.  (Description 
de  l'Afrique,  in-folio,  i556  ,  t.  I ,  p.  824.  )  Loxdsbach 
(  Johami«  Leô's  des  Afrikaners  Beschrobung  von  Africa , 
i8o5 ,  in-80,  p,  483  )  a  aiusi  traduit  exactement.  Dapper 
(Description  de  l'Afrique,  Amsterdam,  in-folio,  1686,  p.  aai) 
dit ,  en  parlant  de  Timbouctou  :  «■  Les  maisons  étaient  au- 
trefois somptueuses  ;  mais  elles  ne  sont  maintenant  que  de 
bois ,  enduites  de  terre  grasse ,  et  couvertes  de  paille.  »  Mais 
comme  tout  ce  passage  est  traduit  sur  la  mauvaise  version 
latine  de  Léon  l'Africain  par  Florianus ,  il  ne  prouve  rien 
non  plus  sur  le  déclin  de  Timbouctou. 


Pll£MIÈIl£    PAKTIE.  Jy 

Gago,  mourut.  Un  nègre  qui  commandait  ses 
armées,  nommé  Aboubakre«-Is<^ia,  leva  l'élieQ- 
dard  de  la  révolte.  Dans  l'espace  de  quinze  ans, 
il  conquit  un  grand  nombt*e  de  porovinces,  et 
enleva  aux  Maures  l'empire  du  Soudan.  Il  éta- 
blit définitivement  à  Timbouotou  le  commerce 
qui  se  faisait  auparavant  à  Guene^^a  ou  Djenné{i\ 
C'est  cet  Aboubakre-Ischia  qui  régnait  lorsque 
Léon  l'Airicain  voyageait  dans  le  Soudan  (2).  Ce 
roi  s'était  emparé  du  royaume  de  Gualata  au 
nord  ;  il  avait  rendu  Agadez  et  le  royaume 
de  Melli  tributaires;  il  avait  conquis  et  réuni  à 
ses  domaines  les  royaumes  de  Cuber  et  de  Cano^ 
de  Cachenah^  de  Zegzeg  et  de  Zanfara.  Le  roi 
de  Oirangara  avait  conservé  son  indépendance; 
mais  il  se  trouvait  placé  alors  au  milieu  de  deux 


(i)  Léon  l'Africain,  dans  Ramusio,  1. 1,  p.  75-79.  — 
Marmol,  liv.  IX,  chap.  m  et  iv,  p.  60 -63. 

(2)  JKT.  Bowdich  nous  a  raconté  que ,  «  dans  le  pays  des 
Aschantis^  on  lui  demandait ,  ainsi  qu'à  M.  Hutchinson,  s'ils 
connaissaient  le  nom  dû  père  d'Aboubakre,  ils  répondirent 
que  non  :  alors  le  shérif  Brahima  leur  dit  que  Beaucoup  de 
Maures  n'en  savaient  pas  davantage ,  mais  qu'il  pouvait  leur 
assurer  que  son  nom  était  Kahabata.  »  Comme  notre  jeune 
voyageur  et  son  compagnon  ne  connaissaient  ni  Aboubakre 
ni  ses  exploits ,  ils  furent  fort  surpris  de  l'importance  que 
les  habitants  à*Aschantl  mettaient  à  cette  question  et  à  la 
réponse. 


4o      RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

puissants  ennemis ,  qui  étaient  Ischia  à  Tocci* 
dent,  et  le  roi  de  Bornou  à  l'orient  (i). 

Marmol  (qui,  comme  Léon  T Africain ,  était 
natif  de  Grenade)  écrivit  «n  espagnol  une  des* 
cription  de  l'Afrique,  qui  fut  publiée  dans  les 
dernières  années  du  seizième  siècle  (a).  Cet 
auteur  a ,  en  partie ,  puisé  tout  ce  qu'il  dit  de 
l'intérieur  de  l'Afrique ,  dans  Léon  l'Africain  et 
d'autres  auteurs  2trabes;mais  cependant  sa  des- 
cription renferme  aussi  quelques  notions  origi- 
nales, qu'il  avait  recueillies  en  Afrique  même, 
où  il  avait  fait  vingt  ans  la  guerre ,  et  où  il 
avait  été  retenu  comme  esclave  pendant  sept 
ans  et  huit  mois.  Il  fait  connaître  avec  beau- 
coup de  détail  l'état  florissant  du  commerce  qui 
avait  lieu  entre  le  nord  de  l'Afrique  et  Timbouc- 
tou  et  le  pays  des  Nègres;  il  indique  les  villes 
où  l'on  apportait  l'or  que  l'on  en  tirait  en  abon- 
dance (3). 

-    '  ■  '   »■         — >■    ' 

(i)  Jean  Léon,  dans  Ramusio,  t.  l,  p.  79. —  Marmol, 
t.  in  ,  p.  60 ,  nous  Apprend  que ,  de  don  temps ,  à  Test ,  les 
rois  de  Bornou  et  de  Gagoa  étaient  les  plus  puissants. 
"DeGualata  on  se  rendait  dans  le  Soudan,  et  de  ]à  au  Caire. 

(2)  La  première  partie  de  Marmol  parut  à  Grenade ,  en 
2  ToL  in-folio ,  en  i573;  la  seconde  en  1599.  ^  traduction 
française  fut  imprimée  à  Paris  en  1667  ;  la  traduction  hol- 
landaise en  1668 ,  à  Amsterdam  ;  et  la  traduction  allemande 
en  1670,  in-folio.  , 

(3)  Toyez  Marmol,  t.  III ,  p.  8 ,  sur  le  commerce  des 


PHEMIÈRB    PARTIE.  ^l 

La  grande  Géographie  de  rAfiâque ,  du  Vénii- 
tien  Livio  Sanuto,  parut  après  la  publication  de 
la  première  partie  de  celle  de  Marmol,  mais 
avant  que  la  dernière  partie  de  la  description  du 
géographe  espagnol  eût  été  mise  au  jour.  L'ou- 


villes  à^Oufaran  avec  Gualata  et  Tombât;  (t.  III,  p.  8  et  1 1), 
sur  le  trafic  delà  province  de  Darah  ;  (p.  la),  sur  les  Arabes 
à*Ukd  Calim  y  qui  sont  riches  et  puissants ,  parce  qu'ils  vont 
tous  les  ans  trafiquer  au  royaume  de  Tombut;  (  p.  17),  sur  Tor 
de  Tibar  y  que  Ton  v^  chercher  au  pays  des  Nègres  pour  le 
porter  à  Te/uf  dans  le  pays  de  Darah  ;  (p.  18),  sur  Tor  fin  de 
Tagazza  y  q^^on  envoyait  à  Quitoay  et  de  là  à  Maroc.  Nous 
apprenons  (p.  18)  que  les  habitants  les  plus  riches  de 
SidjUmessa  sont  ceux  qui  trafiquent  au  pays  des  Nègres,  et 
rapportent  de  Tor  et  des  esclaves  pour  des  marchandises  de 
Barbarie.  (P.  Sa) ,  il  est  dit  que  la  ville  de  Querquelen  est 
habitée  par  les  ZinagienSy  qui  sont  riches  à  cause  du  tr^c 
qu'ils  font  an  pays  des  Nigres.  (P.  39),  nous  apprenons  que 
les  habitants  deGadmès.»çmtj\çhes  en  dattes  et  en  arge'nt, 
parce  Qu'ils  trafiquent  avec  les  Nègres.  (  P.  4^  )  9  il  est 
dit  que  fib^-  plus  illustre  des  villes  sur  le  Nî^r  est 
Tombut  y  où  abondent  les  marchands  de  Barb^rii^  et  d'E- 
gypte, à  cause  de  l'iurde  Tibary  qui  y  vient  de  la  pro- 
vince dé  Mandinga.  Ce  commerce  était  autrefois  en  la'vîile 
deGenni  ou  Genoa  (Guisëe),  où  accouraient  tous  les  peuples 
voisins,  parce  quVUe  est  plus  proche  du  couchant  ;  ce  qui 
portait  quelque  or  au  château  à'Jrguirty  et  de  là  k  Lisbonne. 
Conférez  ces  passages  avec  ceux  de  Léon  l'Africain ,  dans 
Ramosio,  part,  vi  et  vu.,  t.  I,  p.  a,  75,  77,  8jp;  et  de 
Livio  Sànuto  ,  Geografia  delV  Africa ,  p.  70  -  75. 


4a  RECHERCHES    SUR    L'aFRIQUE. 

vrage  de  Livio  Sanuto ,  remarquable  pour  l'é- 
poque à  laq^uelle  il  fut  publié,  et  dont  toutes  les 
cartes  ont  été  dessinées  par  Fauteur,  est ,  pour 
ce  qui  concerne  Tintérieur  de  l'Afrique  principa- 
lement, composé,  comme  celui  de  Marmol,  d'a- 
près Léon  l'Africain,  qu'il  cite  fréquemment  (i); 
mais  il  présente  cependant  des  idées  neuves, 
dont  nous  aurons  à  nous  occuper  par  la  suite. 
Les  publications  successives  des  ouvrages  de 


(i)  Geografia  di Livio  Sanuto,  Venczia,  in-folio,  i588  , 
p.  76.  L'onvrage  porte  simplement  le  titre  de  Geografia, 
parce  que  Livio  Sanuto  s'était  propose  de  donner  ainsi  suc- 
cessivement les  autres  parties  du  monde  ;  il  aspirait  à  la 
gloire  d'être  le  Ptolëmée  de  son  temps  :  mais  il  mourut  à 
l'âge  de  56  ans,  après  avoir  achevé  ce  premier  volume,  qui 
ne  fut  publié  qu'après  sa  mort.  Ce  volume  commence  parles 
notions  de  géographie  générale ,  à  laquelle  il  consacre  deux 
livres.  Il  prélude  ensuite  à  la  éiiâcription  du  globe,  par 
TAufrique.  Les  auteurs  où  il  a  puisé  et  i|u'il  cite,  sont,  Léon 
l'Africain,  Cadamostd,  Barros,  Massondi,  et  Ptolémée.  Il 
décrifr  f^èo«c/oa ,  Iwe  VII ,  page  83  ,  et.  place  cette  ville 
dans  le  royaume  âes^Jalo/s.  Sarnilo- étend  le  royaume  de 
MeUi  sur  la  côte  aujoiird*l|ui  connue  par  le  nom  de  Guinée. 
Dans  le  pays  de  Gkinea,  4e  Bantito ,  sont  ces  vastes  régions 
comprises  dans  le«  bassins 'du  .9e72«^^(a/ et  de  la  Gambie,  que 
les  géographes  modernes  désignent  par  le  nom  de  Séné- 
gamhie.  Purehass  dit,  quelque  part,  que  Sanuto  est  un  des 
descripteurs  les  plus  exacts  de  l'Afrique:  One  ofthe  exactest 
dividers  ofJfrica.  (Purehass,  His pilgrimage^  in-folio,  i6a6) 


PREMIÈRE    P4RTIE.  4^ 

Léon  rAfricaîn,  de  Marmol  et  de  Sanuto,  ré- 
veillèrent chez  les  nations  d'Europe  l'ardeur  des 
'découvertes  pour  l'intérieur  de  l'Afrique,  ar- 
deur qui  s'était  ralentie,  ou  plutôt  qui  s'était 
dirigée  vers  d'autres  contrées. 

Les  Anglais,  les  premiers ,  renouvelèrent  les 
tentatives  qui  avaient  été  faites  pour  connaître 
les  régions  centrales  de  l'Afrique,  et  cherchè- 
rent à  parvenir  à  la  ville  qui  alors  était  consi- 
dérée comme  la  capitale  de  toutes  ces  contrées, 
à  Timbouctou. 

En  1 594 ,  un  nommé  Antoine  Dassel  envoya 
à  Maroc  pour  y  recueillir  de  son  correspondant , 
Laurent  Madoc,  des  informations  sur  Timbouc- 
tou  et  Gogo,  et  sur  la  conduite  des  Maures  qui 
avaient  fait  depuis  peu  la  conquête  de  ces  deux 
pays  sous  Âlkayd-Hamet.  Madoc  confirma  l'idée 
qu'on  avait  de  la  richesse  de  ces  contrées,  et 
rend^^poignaae  qxi'il  en  ^S^it  vu  arriver  trente 
"^^lijj^pi^^s.fflor  (i). 

Tout  «Éagéré  que  paraissait  être  ce  pfl|^ort, 
il  l'était  beaucoup  moins  qiie  les  récits  des  au- 
teurs arabes  et  que  né  le  furent  par  la  suite  ceux 
des  Européens.  Ibn  al  Ouardi,  auteur  du  trei- 

(i)  Hackluyt,  t.  III,  p.  a  (Loodon,  1810).  ^ —  Prévost, 
Histoire  générale  des  Voyages ,  t .  VIII ,  p.  1 3  7 ,  édit.  in- 1  a . 
—  J.  Leyden's ,  Rist.  accouni  of  discoveries  and  travels  in 
Africa^  t.  I,  p.  211. 


44  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

zième  ^siècle,  assure  qu'il  y,  a  dans  le  pays  de 
Ganah  un  morceau  d'or  qui  est  gros  comme 
un  rocher  (i).  Yakouti,  qui  écrivait  dans  le  corn- 
•  mencenient  du  quinzième  siècle,  dit,  en  décri- 
vant le  Belad  al  Tibr  ou  le  pays  de  Vor  pur^ 
que  dans  cette  contrée  on  voit  l'or  sortir  du 
sable  comme  ailleurs  les  plantes  sortent  de 
terre  (a).  Léon  l'Africain,  et  Dapper  d'après  lui, 
ilous  disent  que  l'empç reur  de  Timbouctou  pos- 
sédait des  lingots  d'or ,  dont  quelques-uns  pe- 
saient plus  de  treize  cents  livres  (3). 

Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  récits ,  il  est .  du 
moins  certain  que  tous  les  renseignements  s'ac- 
cordaient à  faire  considérer  le  commerce  de 
l'intérieur  de  l'Afrique  comme  une  source  de 
richesses. 

Alors  la  compagnie  de  marchands  qui  avait 
obtenu  de  la  reine  Elisabeth,  en  i588,  le  privi- 

(i)  Ibn  al  Ouardi,  Notices  des  Manuscrits  de  la  BibUo- 
thèque-du'Roi  ^  t.  II ,  p.  37. 

(a)  Yakouti ,  Notices  des  Manuscrits ,  etc. ,  tome  II , 
p.  393. 

(3)  Dans  Ramusîo,  édit.  i6i3 , 1. 1  ,*p.  78  au  verso,  et  Dap- 
per, Description  de  V Afrique,  p.  aai,  il  est  dit  :  {Reise  naar 
Guinea,' l'jg'j)  que  le  puissant  roi  des  Aschantis  a  un  mor- 
ceau d'or  que  quatre  hommes  ne  pourraient  porter.  Le  plus 
gros  morceau  d'or  que  M.  Bowdich  a  vu  dans  ce  pays ,  ne 
pesait  que  quatorze  onces. 


PREMIÈRE    PARTIE.  45 

lége  exclusif  du  commerce  du  Sénégal  et  de  la 
Gambie^  fit  partir,  en  1618,  un  nommé  George 
Thompson,  dans  le  but  de  pénétrer  jusqu'à  Tim- 
houctou.  George  Thompson  remonta  la  Gambie , 
et  paraît  s'être  avancé  jusqu'à  Tendu ,  ou  jus- 
qu'aux monts  qui  séparent  la  Gambie  du  Séné- 
gaL  11  apprit  que  ce  district  était  fréquenté  par 
des  caravanes  qui  s'y  rendaient  du  nord  de  l'A- 
frique; mais  il  ne  put  aller  plus  loin,  et  fat  assas- 
siné, soit  par  les  natifs,  soit  par  quelques-uns 
des  siens ,  dont  son  caractère  altier  avait  pro- 
voqué la  haine.  Tous  les  détails  relatifs  à  son 
expédition  furent  perdus  (i). 

La  compagnie  anglaise  ne  se  rebuta  point,  et 
envoya  une  seconde  expédition,  qui  fit  voile 
pour  la  Gambie  en  1620,  et  dont  Richard  Job- 
son  était  le  chef.  Richard  Jobson  ne  parait  pas 
s'être  avancé  beaucoup  plus  loin  que  son  pré- 
décesseur, c'est-à-Klire  qu'i!  n'a  pas  dépassé  les 
rivièri^ét  les  montagnes  de  Tenda:  mais  il  éta- 
bUt  des  relations  amicales  avec  les  habitants  du 
pays  :  il  apprit  par  eux  l'existence  d'une  ville 
située  à  quatre  journées  de  distance,  nommée 
TomboÂonda  (Tambsfkunda  de  Mungô-Park); 
il  entendit  parler  d,'une  autre  ville  nommée 
Jajre.  Dès-lors  il  ne  douta  point  que  Tomba- 

(i)  Leyden  ,  t.  I,  p.  ai 5. 


46  RECHERCHES    SUH    l'aFRIOUE. 

konda  ne  fut  Timbouciou^  et  qae  Jajre  ne  fut 
Gogo.  Satisfait  d'ayoir  réussi  à  se  rendre  dans  le 
pays  où  se  faisait  le  conunerce  de  Tor,  Jobson 
ne  chercha  même  pas  à  pénétrer  jusqu'aux 
deux  villes  qu'il  regardait  comme  les  capitales 
de  ces  contrées  :  il  retourna  sur  ses  pas,  et 
publia  ,  en  iGiiS,  une  relation  de  son  voyage, 
qui  renfermait  les  premiers  détails  intéressants 
que  l'on  eût  encore  mis  au  jour  sur  le  fertile 
territoire  qu'arrose  la  Gambie  {\\ 

Après  le  voyage  de  Jobson ,  les  Anglais  sus* 
pendirent  leurs  efforts  pour  parvenir  jusqu'à 
Timbouctou;  car  je  ne  parlerai  pas  du  voyage 
d'un  anonyme  qui  aurait  eu  lieu  en  1661 ,  et  dont 
la  relation  fiit  trouvée  dans  les  papiers  du  doc- 
teur. Hook.  Ce  voyage ,  qu'on  a  attribué  à  un 
certain  Yermuydeu ,  ne  renferme  que  des  détails 
vagues  et  insignifiants  (a). 

Les  Français,  qui  pour  ces  contrées  étaient 


(i)  CeUe  relation,  intittilée  Golden  irade,  etc.,  in- 4*,  a 
166  pages  sans  Tépître  dédicatoîie  à  la  compagnie  de  Guiney 
et  de  Binney.  Trois  ans  après ,  Porchass  publia  le  journal 
de  Jobson  dans  sa  collection. — Hist,  générait  des  Voyages^ 
t.  IX,  p.  75,  édit.  in^ia.  —  I^yden,  1. 1,  p,  «to  à  m3o, 
édit.  1817. 

(a)  Histoire  générale  des  Koyagts^  t.  IX,  p.  i36-i53. 
—  Leyden ,  t.  I ,  p.  a3i  -  a36. 


PREMIÈRE    PARTIE.  4? 

entrés  tard  dans  la  carrière  des  découvertes,  s'y 
engagèrent  avec  beaucoup  de  succès.  Une  com* 
pagaie  de  négociants  de  Rouen  et  de  Dieprpe  ^ 
qui  paraît  s'être  formée  vers  1626,  fraya  la 
route  à  la^  compagnie  des  Indes  occidentales, 
qui  fut  érigée  par  un  édit  du  roi  en  mars 
1664  (i).  D'autres  .compagnies  d'Afrique  lui  suc- 
cédèrent ;  on  bâtit  le  fort  Saint-Louis.  De  Brue, 
un  des  plus  habiles  agents  de  cette  compagnie , 
pénétra  en  1698  jusqu'au  royaume  de  Galam^ 
au-delà  du  confluent  de  la  Falémé  et  du  Séné- 
gai  (2).  Là  il  recueillit  des  renseignements  sur 
TimbouctoUj  qu'on  lui  dit  être  situé,  non  sur 
le  Niger,  mais  dans  l'intérieur  des  terres  (3),  à 
cinq  journées  d'une  ville  nommée  Timhi  (4). 
Mais,  d'après  le  détail  de  l'itinéraire  qu'il  nous  a 
donné,  il  nous  parait  évident  que,  n'ayant  pas 
connu  l'existence  de  Timhi  et  de  Timbou  des 


(1)  J.  B.  L&bat,  Nomelle  Relation  de P Afrique  occidentale, 
t.  I,  1^.  16. 

(î)  De  Brue  partit  du  içitl  Saint -Lo^ift ,  du  S^nëgal ,  le 
17  jaillet  1698.  —  Labat,  iSéuvelle  Relation  de  F  Afrique 
occidentale  y  t.  III,  p.  ftgS* 

(3)  Ibid,,  p.  36i. 

(4)  Labat ,  Nouvelle  Relation  de  l'Afrique  occidentale , 
tome  ni,  page  36a.  — Voici  Titin^raire  que  De  Brue  s'était 
procui^;  il  commence  à  Caignou,  dernier  lieu  où  le  Sénégal 
est  navigable^et  qui  se  trouve  è  l'est  du  Fort  Saint- Joseph  : 


48     RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Foulahs  de  la  côte  de  Guinée^  au  sud  de  la  Gam- 
bie^ 'A  a  confondu  cette  ville  de  Timbou  de 
Guinée  avec  la  ville  de  Timbouctou  du  5ow- 
dan ,  qui  en  est  éloignée  de  plus  de  680  milles. 
M.  d' An  ville  ,  qui  ignorait  également  l'exis- 
tence des  villes  de  Timbi  et  de  Timbou  de  la 
Guinée  (1),  en  faisant  une  fausse  application 


De 

Caignou  à  Jaga, . . . 

5  journées. 

De 

Jaga  à  Bajogné, . . . 

I       . 

De 

Bajognék  Congourou, 

I 

De 

Çongourou  à  Sabaa, 

I 

De  Sabaa  à  Boramaja,, 

2 

De 

Boramaju  à  Goury,. 

I 

De 

Goutj  à  Galama, . . . 

I 

De 

Galama  à  Timbi, . . . 

i5 

J}€^  Timbi  à  Tambouctou, 

5 

Total ...   32  journées. 

Durand,  dans  son  Voyage  au  Sénégal,  1807,  Paris,  în- 8% 
t.  II  y  p.  a86 ,  a  copié  cet  itinéraire  sans  citer  la  source  où  il 
Tavait  puisé ,  et  il  le  donne  comme  un  renseignement  qu'il 
aurait  lui-même  obtenu.  Cet  ancien  directeur  de  la  compagnie 
du  Sénégal,  publia  son  livre  dans  l'espoir  d'être  nommé 
gouverneur  de  nos  colonies  d'Afrique  ,  après  la  paix 
d'Aûiiens.  Il  a  le  plus  souvent  compilé  le  père  Labat.  Leyden, 
ou  son  continuateur  Murray,  s'est  aussi  mépris  sur  la  di> 
rection  de  cet  itinéraire  :  Historical  account  qf  discoverzes 
and  travels  in  Afri€a,,yio\.  I,  p.  174. 

(i)  L'existence  de  ces  villes  n'a  été  bien  connue  que  de- 
puis les  voyages  de  MM.  James  Watt  et  Winterbottom ,  et 


PREMIÈRE    PARTIE.  49 

de  cet  itinéraire,  a  placé  à  l'est  une  suite  de  po- 
sitions qu'il  fallait  mettre  au  sud  :  et  il  a  i;:empli 
ainsi  cette  partie  de  sa  carte  d'erreurs  graves  (i), 
qui  ont  trompé' tous  les  géographes  qui  l'ont 
suivi.  Dès  qu'il  est  reconnu  que  le  Tamhouctou 
de  l'itinéraire  de  de  Brue  est  Timhou  dans  la 
Guinée^  nous  ne  devons  pas  être  étonnés  que  le 
voyageur  qui  l'a  donné ,  ait  dit  que  cette  ville 
n'était  pas  sur  le  Niger j  mais  dans  l'intérieur 
des  terres;  car  Timbou  de  Guinée^  placée  près 
d'un  des  petits  ruisseaux  qui  contribuent  à  for- 
mer les  sources  du  Sénégal^  ne  se  trouve  voi- 
sine d'aucun  grand  fleuve  ni  d'aucune  rivière 

considérable  (2). 

'.      *•** 

par  la  relation  qui  en  fut  faite  dans  .l'ouvrage  intitulé  : 
An  account  of  the  colony  of  Sierra-Leone,  etc.  London, 
1795,  in-8',p.  i85,  197. 

(i)  Ainsi  la  position  de  Jaga  (qui  paraît  être  \eJoag  de  la 
carte  de  Mungo-Park)\  celks  de  Sabaa,  de  Boramaja,  de 
Galama^de  Timbi,  qui,  dans  la  carte  de  d'Anville,  ont  été 
placées  à  Test  du  Fort  Saint- Joseph  ,  et  vers  Timbouctou, 
doivent  être  mises  au  sud ,  et  sur  Tk  route  du  Sénégal  à  la 
Gambie ,  et  de  la  GamlÂe  vers  la  c6te  de  Sierra-Leone, 
Comme  le  major  tlennell  ignorait  l'origine  d^  la  position 
donnée  à  Timbi  sur  la  carte  de  d'Anville ,  il  a  forme  à  ce 
sujet  une  conjecture  qui.  ne  peut  se  soutenir.  Voyez  jPro- 
ceedmgs  ,  tome  I,  p..  392. 

(îfc)  Conférez  la  carte  de  Mungo-Park  dans  les  Proceedings 
of  the  Association  for  promoling  the  discos^ries  in  Afrika^ 


5o  RECHERCHES     SDR    l'aFRIQUE. 

De  Brue  se  procura  aussi  à  Tripoli  des  ren- 
seignements sur  les  caravanes  qui  du  nord  de 
Y  Afrique  se  rendaient  régulièrement  à  Timbouc- 
tou,  pour  y  faire  le  commerce.  Il  sut  qu^elles 
allaient  aussi  au  Fezzan  et  dans  le  pays  de  Zan- 
faraj  d'où ,  ainsi  que  de  Gago ,  on  apportait  beau- 
coup d'or  à  Timbouctou  (i).  De  Brue  compte 
45o  lieues  entre  cette  ville  et  Tripoli  (2). 

De  Brue  ignorait  que,  quelques  années  aupa- 
ravant, un  Français,  nommé  Paul  Imbert,  était 
parvenu  à  se  rendre  de  Tripoli  à  Timbouctou 
par  le  moyen  des  caravanes  :  et  ce  fait  remar- 
quable, renfermé  dans  une  relation  obscure, 
n'a  pas  été  connu  non  plus  de  ceux  qui  ont, 

London,  i8io,iii-8*,  1. 1,  p.  3^3,  avec  la  carte  des  Voyages 
dans  V  intérieur  de  F  Afrique  ^  par  J.  Mollien ,  Paris ,  1820, 
m-8%  1. 1,  p.  aga. 

(i)  Les  notions  que  deBme  avait  reçues  dans  cette  der- 
nière ville  se  rapportent  bien  à  la  ville  de  Timbouctou,  dans 
le  Soudan  ;  et  il  est  remarquable  que ,  dans  cet  endroit  de 
son  livre,  il  désigne  cette  ville  par  le  nom  de  Tombut ,  tandis 
que,  dans  la  page  précédente,  qui  renferme  l'itinéraire 
précité ,  il  a  appelé  Timbou  du  nom  de  Tambouctou.  Peut- 
être  est-ce  le  père  Labat  qui ,  ayant  écrit  d'après  les  notes 
de  de  Brue,  a  fait  un  échange  de  noms.  Labat,  Nouvelle 
rtlation  de  V Afrique  occidentale^  t.  III,  p.  363. 

(a)  Labat ,  Nouvelle  relation  de  l'Afrique  occidemale , 
t.  III,  p.  363.  — Prévost,  Hist.  f^nér.  des  Voyages,  lîv.  ti  , 
part,  i'*,  t.  Vin  ,  p.  ii6 ,  édit.  in- 12. 


PREMIERE     PARTIE.  5l 

en  ces  derniers  temps ,  tracé  les  progrès  de  là 
géographie  dans  ces  contrées.  Paul  Imbert,  na^ 
tif  des  Sables  d'OIonne ,  était  esclave  d'un  eu* 
nuque  blanc ,  Portugais  d'origine,  nommé  Ha'- 
mar ,  que  le  roi  de  Tafilet  avait  envoyé  deux 
fois  à  Timbouctou^  qu'on  disait  être  alors  la  ca- 
pitale du  royaume  de  Gngo.  Il  fit  plusieurs  fois 
la  relation  de  son  voyage  à  un  nommé  Charant, 
qui  en  a  publié  quelques  particularités  dans 
une  lettre  qu'il  fit  imprimer  en  1670  (i).  La 
diètance  de  Maroc  k  Timbouctou  (2)  est  de  quatre 
cents  lieues  selon  Paul  Imbert;  et  les  caravanes 
qu'on  y  envoyait  alors  régulièrement  pour  le 
commerce ,  mettaient  deux  mois  ^  se  rendre 
de  la  première  de  ces  villes  à  la  seconde.  Les 


(i)  Lettre  écrite  en  réponse  de  diverses  questions  curieuses 
sur  les  parties  de  T Afrique  oii  règne,  Muley-Arxid^  roi  de 
Tafilet^  par  M.  ***  (Charant),  qui  a  demeuré  a 5  ans  en 
MauritamejVms y  în-ia,  1670,  p.  87,  41 1  4^»  54,  55,  61. 
—On  la  trouve' ordinairement  jointe  à  un  volume  intitule: 
Bistoire  de  Muley-  Arxidg  roi  de  Tafilèt^  Fez,  Maroc  et 
Tarudent ,  in-ia,  Paris ,  1670.^  -^  Cette  petite  hialoirc 
est  traduite  de  l'anglais;  on  y  a  joint  la  Relation  d'un 
voyage  en  1666, etc.,  par  Roland Fréjus.  Ce  Roland  Fréjus 
était  un  négociant  de  Marseille ,  qui  se  fit  passer  pour  am- 
bassadeur de  Louis  XI¥.  Voyez  Histoire  des  conquêtes  de. 
Âfouley-Archjr ,  par  Mouette,  in*ia,  i683,  p,  93. 

(a)  L'auteur  de  la  relation  écrite  Tambouctou, 

4. 


5a  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

habitants  de  la  côte  de  Guinée  se  rendaient  aussi 
à  Timbouctou  pour  y  commercer ,  et  rappor- 
taient beaucoup^  d'or  de  cette  contrée.  Les  An- 
glais avaiei\t  cherché  à  y  pénétrer  en  remontant 
la  Gambie;  mais  ils  n'avaient  pas  réussi. 

Les  événements  qui  eurent  lieu  à  cette  époque 
contribuèrent  à  établir  des  communications  plus 
régulières  entre  Maroc  et  Timbouctou. 

En  1668  ou  en  1670  (i),  l'ambition  porta 
Muley  -  Archid ,  roi  de  Tafilet  et  de  Maroc  ^  à 
s'emparer  de  l'état  de  Suz^  où  régnait  Sidi-Ali 
Morabite ,  qui  fut  obligé  de  s'enfuir  au-delà  du 
Grand-Désert  pour  échapper  à  la  férocité  du 
vainqueur.  Muley-Archid  le  poursuivit,  et  arriva 
avec  une  partie  de  son  armée  sur  les  conîfins  du 
royaume  de  Bambarra ,  entre  Djermé  (  Guinée) 
et  Timbouctou.  Mais  le  roi  de  Bambarra  ne 
voulut  pas  violer  les  droits  de  l'hospitalité,  et 
refusa  de  livrer  Sidi-Ali  à  Muley-Archid.  Celui-ci 
fat  obligé  de  s'en  retourner  dans  ses  états.  Sidi- 
Ali  avait  fait  au  roi  de  Bambarra  présent  de  deux 
esclaves  blanches  dont  ce  prince  était  devenu 
éperdtjment  amoureux.  Sidi-Ali  acquit  par  ce 

(i)  J.  6rey  Jackson  [An  account  of  the  empire  of  Ma- 
roccoy  p.  a5o)  place  cet  ëvènement  vers  l'an  1670;  mais 
Mouette  (  Hist.  des  conquêtes  de  MouUy-Archyy  p.  70  )  le 
met  en  1668. 


PREMIÈRE    PA.RTIE.  53 

moyen  tant  '  d'influeDce  auprès  de.  lui,  qu'il 
obtint  le  commandement  de  Timhouctou^  où 
il  s'établit  avec  une  garnison  de  Maures.  Sidi^ 
Ali,  après  avoir  discipliné  une  arpiée  de  Nè- 
gres du  Bambarra ,  traversa  le  désert  pour 
faire  la  guerre  à  Muley-Archid.  Ce  roi' mourut 
lorsque  Sidi-Ali  parvint,  avec  son  armée,  aux 
confins  de  l'état  de  Suz.  Comme  Sidi-Ali  vou* 
lait  seulement  se  venger  et  non  pas  conquérir , 
Muley-Ismaèl,  qui  venait  d'être  proclamé  em- 
pereur de  Maroc,  lui  persuada  facilement  de 
faire  la  paix  et  de  congédier  ses  troupes  nègres , 
que  Muley-Ismaël  prit  à  .son  service,  et  qu'il 
reçut  dans  son  armée,  déjà  en  |^ande  partie 
composée  de  nègres  que  Muley-Archid  avait 
emmenés  avec  lui  An  Soudan  l'année  précédente. 
Muley-Ismaël  saisit  cette  occasion  d'étendre  sa 
puissance  dans  les  riches  contrées  du  Soudan, 
II  envoya*  des  troupes  maures  pour  renforcer 
la  garnison  qui  s'y  .trouvait ,  et  assujettit  Tim- 
boixctou  à  un  tribut  coii^dérable  ;  mais ,  comme 
d'un  autre  côté  il  gaioantit  cette  ville  des  incur- 
sions des  Arabes -du  désert,  auparavant  fré* 
quentes  et  désastreiises ,  il -rendit  son  commence 
beaucoup  plus  florissant.  Il  profita  aussi  de  son 
ascendant  sur  les  peuples  du  Soudan  pour  faire 
venir  de  ce  pays  uji  grand  nombre  de  nègres 
qu'il  incorpora  dans  ses  troupes,  et  qui.se  sont 


54  RECHERCHES    SUR  ^l'aFRIQUE. 

mêlés  avec  les  habitants  de  l'enipire  de  Aforoc^  et 
y  ont  formé  cette  sorte  de  population  mixte  que 
l'on  Remarque  encore  aujourd'hui  dans  ces  con- 
trées. Mul^-Ismaël  mourut  en  17117  (i),  telle- 
ment riche  en  or,  qu'on  prétend  que  même  tous 
ses  ustensiles  de  cuisine  étaient  composés  de  ce 
précieux  métal.  Ses  successeurs  ne  surent  pas 
conserver  la  même  autorité  sur  les  tribus  belli- 
queuses et  sur  les  autres  peuples  du  Soudan. 
Timhouctàu  cessa  d'envoyer  le  tribut  accou- 
tumé; et  le  commerce  de  cette  ville,  devenu 
moin^  sur  et  moins  régulier,  diminua  dès- lors 
considérablement  (a). 

Cependant  les  Anglais  continuèrent  leur  com- 
merce sur  la  Gambie^  mais  ne  réussirent  point 
à  pénétrer  dans  l'intérieur.  Les  voyages  de  Stibbs 
en  1723,  et  ceux  de  Moore  en  J731 ,  ainsi  que 
les  récits  du  nègre  Job-Ben-Salomon ,  donnèrent 


(i)  A  la  mort  d'Ismaël,  on  comptait  plus  de  cent  mille 
soldats  noirs  dans  l'empire  de  Maroc.  Voy.  Chénier,  t.  III, 
p.  l(%\,  —  Histoire  des  révolutions  de  f empire  de  Maroc ^ 
depuis  la  mort  du  dernier  empereur  Muley  Ismaël;  traduù 
dit  Journal  anglais  par  le  capitaine  Braithwaite  ^  Amster- 
dam, 1736 ,  in-ia ,  p.  6. 

(a)  Mouette,  iï&fto/re  des  conquêtes  de  Mouley-Archf,i^SL^, 
70-76.  —  Chénier,  Âee^erches  historiques. survies  Maures, 
tome  III,  p.  356.  —  J.  Grey  Jackson^,  Jn  account  of  the 
empire  of  Marooco ,  p.  i5o  à  aSa. 


PREMli:RE    PARTIE.  55 

des  connaissances  plus  précises  sur  cette  partie 
de  \ Afrique;  mais'  elles  ne  reculèrent  pas  les 
limites  des  découvertes.  Au  contraire  ^ob-Ben- 
Salomon,  en  assurant  que  Tombufp  était  situé 
vis-à-vis  Bunda  et  <ie  l'autre  côté  dil  Sénégal, 
confirma  l'erreur  qu'avait  accréditée  Jobson  en 
supposant  ain^,que  la  capitale  célèbre  du  Sou- 
dan était  peu  éloignée  des  établissements  envo- 
péens.  Ce  n'est  pas  que  Jobson  et  Job-Ben- 
Salomon  eussent  le  dessein  de  tromper;  mais 
ils  étaient  eux-mêmes  abusés  par  la  ressem- 
blance des  noms.  Les  cartes  d'Ortelius,  de  Mer- 
cator,  et  d'un  grand  nombre  de  géographes  des 
seizième  et  dix- septième  siècles,  entretenaient 
cette  erreur,  et  plaçaient  Timbouctou  sur  les 
bords  du  Sénégal^  et  à  peu  de  distance  de  son 
embouchure.  Il  n'y  a  guère  de  doute  qwe  le 
Bunda  de  Job  ne  soit  le  Bondou  de  Mungo- 
Park;  et  la  ville  de  Tomhuto  est  probablement 
le  lieu  nommé  Taipkquanni  ou  Tambouana, 
située  à  seize  lieues  de  Galant,  et  où  il  se  fait 
selon  Saugnier  un  commerce  considérable  d'es- 
claves (i). 


(i)  Lcyden's,  Hisu  account  of  discoveries  and  travels 
in  Àfiica^  éiiX.  i8i%  tome  I,  pa^t  a 46.—* Prévost,  Histoire 
générale  des  Voyages,  page  3  5o.  —Geoffroy  de  Villeneuve, 
L' Afrique ,  in-i8, 1814,  tomel,  page  90. 


56  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

Les  Français,  qui,  sur  le  Sénégid^  avaient  for- 
mé des  établissements  florissants  et  situés  dans 
l'intérieur  des  terres,  se  trouvaient  mieux  pla- 
cés que  le%  Anglais  pour  acquérir  des  notions 
sur  le  cefttre  de  l'Afrique  et  pour  s'avancer  dans 
ces  contrées.  Aussi,  dés  1 7 1 5 ,  un  voyageur  hardi , 
qui  depuis  devint  mautre  maçon  et  entrepreneur 
de  bâtiments  à  Paris  (  i  ) ,  parvint  dans  le  royaume 
de  Bamhouij  et  il  en  rapporta  de  l'or.  La  com- 
pagnie d'Afrique  française  ne  perdit  jamais  de 
vue  ce  pays,  entouré  et  fertilisé  par  la  Falémé 
et  le  Sénégal:  elle  y  envoya  ses  agents  à  di^é- 
rentes  époques  en' 1730,  en  1731,  1732,  1744 
et  même  en  1786  (2). 


(i)  Voy.  Labat ,  NouvMe  relation  de  l'Afrique  fKxideft- 
tale^  tome  IV,  pag.  3a.  —  Golberry,  Fragments  d'§tn  vqjrage 
en  Afrique  y  tome  I,  chapitre  xi,  pag.  433  à  5o». 

(a)  VaX'xvkà.e^Mémoire  sur V Afrique ^Y^^  ^^-  — Golbeny, 
Fragments  d'un  voyage  en  Afrique,  tome  I,  chapitre  xi , 
pag.  433  à  5oa.  Sons  le  titre  modeste  de  Fragments , 
M«  Golbeny  a  publié  im  des  meilleurs  livres  qui  aient  paru 
dans  ces  derniers  temps  sur  TAfnqne.  Nous  pensons  cepen- 
dant* que  ce  judicieux  auteur  se  trompe  lorsqu'il  avance  que 
tout  l'or  que  l'on  porte  à  TimbouctoUj  au  Caire,  à  Maroc, 
au  Sénégal^  ^ïxjfop  des  Paimes,  à  Alger,  etc. ,  vient  du  pays 
de  BambQui.^lifaçit^  toift  les  géognplips  arabes^  le  ps^s  de 
Tibry  ou  je  l'or  pur,  est  bien  certainement  à  l'est  de  Tûn- 
houcÊou  et  au  sud  du  royaume  de  Ouangara, 


PREMIERE    PARTIE.  B'J 

Cette  compagnie  ne  négligea  pas  non  plus  de 
prendre  des  informations  sur  Timbouctou.  Elle 
apprit  que  cette  ville  était  à  quarante  journées 
de  chemin ,  ou  deux  cent  quarantç  lieues  du 
Fort  St.- Joseph  ou  de  Galant^  et  au-delà  du 
royaume  àe  Bambarra;  que  l'on  y  recevait  de» 
caravanes  de  Médine^  et  que  ses  habitants  em- 
barquaient leurs  marchandises  sur  le  fleuve  pour 
les  envoyer  à  Djenné  (  Guinée  ),  ville  placée  à 
une  demi  -  lieue  de  la  séparation  de  deux  ri- 
vières; circonstance  remarquable,  sur  laquelle 
nous  reviendrons  plus  tard(i). 

Un  nommé,  de  Flandre  avait  résolu,  en  174^^, 
d'aller  à  Timbouctou^  et  mourut  avant  d'avoir 
entrepris  ce  voyage.  Le  savant  naturaliste  Adan- 
son ,  qui  se  trouvait  au  Sénégal^  de  1749  à  1753, 
fut  sur  le  point  d'entreprendre  avec  une  cara- 
vanfj^  la  traversée  du  désert,  pour  se  rendre  à 
Timbouctou  et  à  Agadez  (a).  Enfin,  la  compa- 
gnie du  Sénégal  et  le  g$iD9^emement  français  for- 

r- ' — ^ ; 

(i).Relatîon  de  Robert  Adams,  trad.  franc. ,  page  a5a. — 
Labat ,  Nouvelle  relation  de  V Afrique  occidentale ,  tome  III. 
—  Lalande  ,  Mémoire  sur  l'intérieur  de  V^Afriqué.  —  Gol- 
berry,  Fragments,  —  Durand,  Voyagé  au  Sénégal.    * 

fa)  Adanson ,  Voyage  au  Sénégal  y  .Paria^  i;7Ô7 ,  iu-4**« 
DaM  tmit  le  fiours  de?Ba relation,  Tanteuip  d^mo^U Sénégal 
le  nom  de  Niger,  —  Lalande ,  Mémoire  sur  l'intérieur  de 
VAlfrique^  page  aa. 


58  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

mèrent,  pour  arriver  jusqu'à  Tùnbouctcfu^  un 
projet  auquel  d'Anville  prit  part.  Ce  célèbre 
géographe,  en  nous  instruisant  de  cette  particu- 
larité, ne  nous  a  point  appris  f^  circonstances 
qui  en  eltopêchèrent  l'exécution  (i).  Mais,  comme 
il  ne  négligeait  aucun  moyen  pour  perfectionner 
ses* ouvrages,  il  recueillit  sur  l'intérieur  de  l'A- 
frique quelques  renseignements  du  père  Sicard, 
qui  avait  voyagé  dans  la  haute  Egypte  y  et  qui 
avait  appris  d'un  noir  de  la  capitale  du  JBor^ 
nouj  que  cette  ville  se  nommait  Kerné;  que  la 
rivière  qui  traversait  ce  royaume  de  Bomou^ 
se  nommait  Bahrel  Ghazelj  et  qu'elle  commu- 
niquait (  sur-tout  dans  la  saison  pluvieuse  )  avec 
le  IVil,  ou  Bahr  el  Jlbiad^  par  un  embranche- 
ment de  fleuve  nommé  Bahr  el  Azrek.  D'Anville 
tira  aussi  d'un  envoyé  de  Tripoli  quelques  lu- 
mières sur  la  marche  des  caravanes  qui  sâi|p^n- 
daieht  de  cette  ville  è  Timbouctou,  et  sur  les 
lieux  que  traversaient  ces  caravanes  pendant  ce 
voyage.   Ce  grand  géographe  a  fait  usage  de 


(i)  D'Anville,  Mémoire  concernant  les  rivières  de  V Afrique^ 
dans  le  Recueil  de  V Académie  des  inscripu,  t.  XXVI,  p.  73. 
— ^  Bru  zen  de  la  Martinière,  dans  son  Grand  Dictionnaire 
géqgraphiqfie^  tome  \IH,  page  56^^  indiquait  aussi  anx 
Français  ^s  moyens  bien  calculés  pour  parvenir  à  Tim-^ 
bouciou  en  partant  de  Galam, 


piiï:mière  partie.  Sg 

tous  ces  documents  dans  la  carte  d'Afrique  qu'il 
a  dressée  en  1749  (i). 

Les  Anglais  s'étant  emparés,  pendant  la  guerre 
de  Sept-Ans ,  des  établissements  des  Français  sur 
le  Sénégal^  les  tentatives  que  ceux^€î  avaient 
faites  pour  pénétrer  dans  l'intérieur  de  X Afrique 
furent  nécessairement  suspendues.  La  paix  de 
1763  laissa  les  Anglais  en  possession  de  ces  éta- 
Uisseraents.  En  1 779 ,  les  Français  les  enlevèrent 
aux  Anglais  ;  et  ils  restèrent  définitivement  à  la 
France  en  vertu  du  traité  de  1783. 

Bientôt  après,  les  relations  des  naufrages  de 
Follie,  de  Saugnier  et  de  Brissoi),  qui  tcHis  se 
perdirent  sur  la  côte  d'Afrique,  en  1784  et 
1785,  et  qui  furent  faits  prisonniers,  procurèrent 
quelques  notions  intéressantes  sur  cette  partie 
du  désert  voisine  de  la  côte,  qui  s'étend  entre 
la^pirièr^  de  iV£^/i  et  le  fleuve  du  Sénégal,  Ces 
relations  qui  furent  publiées  quelques  années 
après ,  firent  mieux  connaître  les  mœurs  féroces 
des  Maures  ;  mais  elles  ft'ajoutèrent  rien  à  ce  que 
l'on  savait  sur  l'intérieur  de  l'Afk'ique  et  sur  les 
régions  où  était  situé  Timbouctou{pL). 

En    1785,  M-   Von   Einsiedêl,  gentilhomme 


,  .  (i)  D^Anville ,  dans  le  Recueil  4e  T Académie  des  inscmp- 
tiens  ^  tome  XXVI ♦  pag^  67  et  7^.  •     > 

{p)  Histoire  du  naufrage  de  Brisson^  etc.,  Paris,  1789^  vorV^^ 


6o  KECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

saxon,  et  quatre  autres  voyageurs  allemands; 
encouragés  par  M.  de  Castries,  ministre  de  la 
marine  en  France,  se  rendirent  à  Tunis  sous 
la  protection  du  gouvernement  français ,  avec 
le  dessein  de  pénétrer  dans  l'intérieur  de  l'A- 
frique, et  de  se  rendre  au  Sénégal  en  traver- 
sant le  Grand-Désert.  Ils  furent  présentés  par 
M.  Venture,  envoyé  de  France  au  Bey ,  qui  leur 
promit  son  appui.  Ija  pteste,  qui  exerçait  ses  ra- 
vageSià  Tunis ^  les  força, de  suspendre  leur  pro- 
jet ,  et  bientôt  de  i'abandonner.  Cependant 
M.  Einsiedel  ne  revint  en  Saxe  qu'en  1787,  et 
publia  depuis,  les  informations .  qu'il  avait  re- 
cueillies des  naturels  de  l'Afrique,  sur  l'inté- 
rieur de  cette  partie  du  monde  (1).  ^ 

On  lui  a*  dit  que  la  distance  entre  le  Fezzan  et 
Bomou  était  de  dix  journées ,  dont  quatre  font 
un  degré.  De  tous  les  états  des  Nègp^s  01^  du 
Soudan^  c'est  \e  Koukou  qui  confine  ^caSenncuiry 
et  qui  est  le  plus  à  l'est.  Les  Nègres  de  Bomou 
disent  que  ceux  de  Koukou  sont  chrétiens.  Au 

—  Follie,  Voyages  dans  le  désert  de  Sahara^  Paris,  1792, 
in-S**.  — Saugnier,  Relations  de  plusieurs'^oya^s  à  la  côte 
d'Afrique,  au- Sénégal,  à  Corée,  à  Galam,  etc.,  in- 8*.  , 
Paris,  1791. 

(i)  Einsiedel >  dans  le  Samndung  .merkwûrdiger  Reisen- 
in  dos  inn^e  des  Afrika  von'Emst  Wilkem  (7iiA/2 ,  Leipsi^p» 
part. in ,  pag.  ^33  à  447*  ' 


PREMIÈRE    PARTIE.  6l 

nord-ouest  sont  Kachna^  Gnou  et  Zemzem  (i); 
à  l'ouest  et  au  %nd-onest  ^  Bornou^  El^Mabrouk 
et  Kounscha.  Au  nord -ouest  de  Bornou  est 
Agadez  où  Ogadez  ;  à  l'ouest,  Za/^ra  (c'est 
au  sud -ouest  sur  les  cartes  de  Reufiell};  au 
sud  -  ouest  et  au  sud ,  sont  Afnou ,  Kanem , 
Schickou^  Bitoû,  et  Engar  (%). 

En  allant  de  Afnou  à  l'ouest,  on  trouve  Sog- 
sog  et  Escar.  En  suivant  la  même  direction ,  l'on 
arrive  à  Cmsena,  Enzala^  Ekabli^  qui  au  sud 
confinent  avec  Jaouri  et  Nafi, 

A  l'ouest  A'Ekabli  sont  Jenni  (  c,  a.  d.  Djenné 
ou  Guinée  )  et  Avan ,  qui  à  l'ouest  sont  bornés 
par  Timbouciou^  et  au  midi  par  Mandra  et 
Mourki. 

Au  midi  de  Timbouctou  est  Bobou  ;  et  au 
saà'Onest.,  Bambarra  y  qui  n'est  pas  très-éloigné 
dej^^iitaJliK^ment  des  Français  au  Sénégal. 

M.  Ëûisîedel ,  d'après  les  rapports  qu'on  lui  a 
Êdts,  donne  sur  chacun  de  ces  états  des  détails 


(i)  Le  mbtZem  est  employé  quelque  part  dans  £'6/i--flbwif  a/, 
et  signifie  tribu.  En  persan Zim/z/ veut  dfre  mfidèles.  Cache- 
izaA  n'est  pas  aif  nord-ouest  à^Koukou;  mais  plusieurs  de^ 
aiRMs  indications  seinblent  également  fausl^es. 

(a)  On  trouvé  les  noms  de  vingt-huit  villes  sur  la  route 
de  Ouangara  à  Bornou ,  dans  les  itinéraires  donnés  par 
M.  Bowdich ,  Appendix  de  fa  Mission  to  AschanUes^  p.  483. 


6a  RECHERCHES     SUR    l'a^FRIQUE. 

intéressants  et  qui  semblent  porter  le  cachet  dé 
la  vérité.  Dans  ses  descriptions,  il  détermine 
encore  avec  plus  de  précision  les  positions  rela- 
tives de  chacun  d'eux.  Ainsi ,  nous  dit-il ,  on  ne 
trouve  pas  de  poudre  d'or  dans  le  Bornou  ; 
mais  on  la  va  chercher  dans  une  contrée  située 
loin  au  midi.  La  capitale  du  Bornou  s'appelle 
MokovfL  Koukou  est  immédiatement  à  l'est  de 
Bornou.  Zanfora  est  entre  Bornou  et  Agadez: 
ce  pays  est  déchiré  par  des  guerres  intestines. 
Au  nord  de  Bornou  sont  les  Zemzems^  peuple 
à  moitié  sauvage;  puis  Kochna  (i)  et  Gnou. 
Bobou ,  au  midi  de  Timhouctou ,  lui  fournit 
beaucoup  d'or.  Timbouctou  était  alors  tribu- 
taire de  l'empereur  de  Maroc. 

Les  royaumes  les  plus  étendus  et  les  plus  puis- 
sants sont  ceux  de  Bornou  ^  èiAfhou^  du  Sou- 
dan^ et  de  Timbouctou-^  et  ensuite  cei^L  ^Aga-- 
dez^^Enzala^  de  Schikou  et  de  Bitou.  L'arabe 
ne  suffit  pas  pour  se  faire  entendre  dans  l'inté- 
rieur de  l'Afrique;  il  faut  encore  connaître  les 
langues  de  Bornou  et  de  Timbouctou  ^  qui  sont 
les  plus  répandues.  Tels  sont  les  principaux  ren- 
seignements qui  furent  donnés  à  M.  Ëinsiedel. 

En.  1786,  le  directeur  de  la  compagnie  fran- 

(i)  lEjCLCOfe Kackna  au  nord  àt Bornou;  si  c'est  le  Cacher^ 
nah  que  nous  connaissons!  c*est  au  sud-est  qu'il  fiadlait  dm. 


PREMIÈRE    PARTIE.  &^ 

çaise  du  Sénégal  envoya  Rubault  (i)  par  terre 
]usqiïkGalam;  et, quelque  temps  après.  Picard, 
autre  employé  de  la  même  compagnie,  se  rendit 
k  Fouta"  Toro,  Ces  deux  voyages  procurèrent 
quelques  lumières  sur  les  contrées  arrosées  par 
le  Sénégal,  mais  n apprirent  rien  de  nouveau 
sur  celles  qvi  sont  l'objet  de  nos  recherches. 

En  1788,  le  gouvernement  français  résolut  de 
tenter  une  nouvelle  expédition  dans  l'intérieur , 
de  l'Afrique.   On  avait  questionné  à  Paris  des 
Maures  qui  disaient  avoir  fait  le  voyage  de  7Y/n- 

(i)On  trouve  la  relation  du  voyage  de  Rubault,  dans 
Dnrand  ,  Foyage  au  Sénégal,  tome  II,  chapitre  vu, 
page  125.  C'est  la  seule  partie  neuve  et  intéressante  de  cet 
ouvrage,  qui  n'est  d'ailleurs  qu'une  médiocre  compilation. 
— Labarthe  {Voyages  au  Sénégal ^  d'après  les  Mémoires  de 
LajaiïU^  180a,  in-8<>,  page  191)  avait  déjà  donné  très  en 
détailTitiné^aire  de  Rubault;  on  trouve  aussi  un  extrait  du 
voyage  de  Rubault  dans  l'ouvrage  intitulé  :  Tableau  des 
découvertes  et  établissements  des  Européens  dans  le  nord  et 
dans  T ouest  de  V Afrique ,  Jusqu'au  commencement  du 
dix-neuvième  siècle^ par  Cuny,  Paris,  Mongie,  1809,  in-S**, 
tome  II ,  page  35.  Cet  ouvrage ,  comme  on  le  voit  par  la 
pré&ce ,  n'est  qi>e  la  traduction  de  celui  de  Leydcn ,  tel 
qu'il  avait  été  publié  primitivement  à  Edimbourg  en  1 799. 
Il  y  a  été  mis  un  nouveau  t4tre.  Il  fut  d'abord  publié 
eu  1804,  chez  Fain  le  jeune  et  Debray.  L'extrait  du  Voyage 
de  Picard  s'y  trouve ,  tome  H,  pag.  41  à  48.  Je  n'ai  pu 
trouver  nulle  j)art  uno  autre  relation  de  ce  dernier  voyage, 
quoi^'elle  soit  citée. 


64  R£GHKRGH£S    SUR    l'aFRIQUE. 

bouctouj  et  qui  donnaient  même  les  détails  de 
la  route  qu'ils  avaient  parcourue.  Ce  fut  d'après 
ces  renseignements ,  que  M.  de  Boufflers ,  alors 
gouverneur  du  Sénégal  y  prit  des  engagements 
avec  un  chjef  arabe  nommé  Sidi- Mohammed, 
résidant,  au  Sénégal,  pour  la  sûreté  des  voya- 
geurs qu'il  se  proposait  d'envoyer  à  Timdouctou, 
et  qu'il  l'intéressa  au  succès  de  cette  entreprise 
par  la  promesse  d'une  forte  somme.  M.  Geoffroy 
de  Villeneuve,  auquel  nous  devons  un  petit 
ouvrage  intéressant  sur  l'Afrique,  devait  être  un 
des  principaux  chefs  de  cette  expédition,  qui 
n'eut  pas  lieu ,  parce  que  la  révolution  française 
survint  et  en  empêcha  l'exécution  (i). 

§  IV.  Depuis  rétablissement  de  la  Société  pour 
les  progrès  des  découvertes  en  Afrique^  jus^ 
qu'à  nos  jours. 

Nous  avons  tracé  l'exposé  succinct  des  voyages 
entrepris  dans  l'intérieur  de  l'Afrique,  et  des 
tentatives  faites  par  les  Européens  pour  lier 
avec  Timbouctou  un  commerce  réguHer,  jusqu'à 
l'époque  où  il  se  forma  à  Londres  une  société , 


(i)  Voyez  Lalande,  Mémoire  •sur  V Afrique  ^  pages  99, 
a5,  36/  —  Golberry,  Fragments  d'un  vayage  en  Afrique  ^ 
tome  I,  pages  288  et  336. 


PREMIERE    PARTIE.  65 

afin  de  seconder  les  progrès  de  la  géographie  en 
Afrique.  Cette  société  se  réunit  pour  la  première 
fois  le  9  juin  1788  (i).  Le  commerce,  ou  le  désir 
d'acquérir  des  richesses,  n'était  pas  le  but  direct 
des  hommes  respectables  qui  la  fbrmaient;  et, 
quelque  avantage  que  leur  patrie  sous  ce  rap- 
port dût  retirer  de  leur  générosité  et  de  leurs 
efForts,le$  membres  de  cette  association  n'étaient 
animés  que  par  leur  amour  pour  la  science ,  et  par 
leur  zèle  pour  les  progrès  des  découvertes  (2). 

(i)  Proceedings  of  tke  Association  for  promoting  the 
discovery  of  the  interior  parts  of  Africa^  în-4°j  London  , 
1790.  C'est  la  première  édition;  la  dernière  est  en  a  volumes 
in-d"*,  London,  18 10  :  mais  la  carte  d'Afrique ,  telle  que 
Bennell  Tavait  dressée  en  1790, a  été  corrigée;  de  sorte  que, 
pour  rhistoire  des  progrès  de  la  géographie,  cette  première 
édition  est  nécessaire  à  consulter. 

(2)  La  formation  de  cette  société  excita  l'émulation  du 
gouvernement  français.  M.  de  la  Luzerne ,  ministre  de  la 
marine ,  voulut  en  former  une  semblable  à  Paris.  On  re* 
cueillit  les  propositions  qui  furent  faites  à  ce  sujet.  M.  Gol- 
berry  a  publié  une  lettre  imprimée ,  rue  de  Chartres  ,  le 
4  janvier  17919  qui  a  fait  connaître  les  projets  que  l'on 
avait  formés  alors.  M.  Froment-de-Champ-la-Garde ,  vice- 
consul  de  France  à  Tripoli^  envoya  en  France,  pour  cet  objet, 
plusieurs  itinéraires  dans  l'intérieur  de  l'Afrique ,  qu'il  avait 
xecueillis  de  divers  marchands  nègres.  Dans  l'un  de  ces  iti- 
néraires, on  comptait  35  journées  de  Tripoli  au  Fezzan , 
70  du  Fezzan  à  Cachenah  ,  45  du  Fezzan  an  Bomou  :  les 

5 


66  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

Des  souscriptions  volontaires  furent  reçues  ;  un 
comité  fiit  choisi  pour  diriger  les  opérations  de 
la  société  :  tous  les  moyens  d'un  gouverneineat 
éclairé  qui  sait  si  bien  seconder  et  faire  tourner 
à  son  profit  les  entreprises  utiles  formées  par 
l'intérêt  ou  le  patriotisme  des  individus  ^  fiirent 
mis  à  la  disposition  de  ce  comité. 

Le  premier  missionnaire  géographique  doat, 


journées  étaient  de  six  lieues.  Dans  un  autre  itinéraire  ,  de 
Cackenahk  Marmara^  on  comptait  57  journées  par  Za/z/âr^Zy 
favouri  et  iVç/f  {Voyez  lÀXdiXiàe^  Mémcnre ^  page  33).  La 
révolution  mit  fin  à  ces  projets ,  et  même  au  gouvernement 
qui  les  avait  formés.  En  i8oa ,  on  imprima  à  Paris  les  rè- 
glements d'une  Société  de  V Afrique  intérieure  et  des  décou- 
vertes. La  société  et  son  comité  d'administration  devaient 
tenir  leurs  assemMées  à  Marseille  :  j'ignore  quels  ont  été 
les  actes  et  les  travaux  de  cette  société.  L'historien  de  la 
société  de  Londres  pour  les  Découvertes  en  Afrique  , 
tome  II,  page  327  ,  dit  que  la  société  africaine  française  fiit 
établie  d'après  la  proposition  et  l'exhortation  deM.Langlès; 
et  cependant  }e  nom  de  ce  savant  ne  se  trouve  pas  sur  la 
liste  des  membres  fondateurs  imprimée  à  la  suite  des  régl^ 
ments.  An  reste,  cette  société  ne  s'est,  je  crois,  jamais 
réunie  ;  et ,  si  elle  a  réellement  existé,  elle  n'a  été  utile  à 
rien.  Le  voyage  de  M.  Lamiral  du  Fort  St. -Louis  à  Galam  fat 
un  des  derniers  efforts  des  Frftnçais  ponr  pénétrer  dans  l'in- 
térieur de  l'Afrique.  — Voy.  h' Afrique  et  le  peuple  africain, 
in-8%  Paris,  1789.  — Bruns  rteue  Erdebeschreibungv(m  Afrikà, 
tome  V,  page  3a5.  —  Prooèedings  tfthe  African  as9ocimion. 


la  sociéité  ât  choix  ^  •devait,  doooer  ^ie  grandis 
espénaices;  c'étét  Ledyand^  que  la  nature  sem- 
blait avoir  iarmé  tout  expràs  f>oiiir  mener  une 
vie  dure  et  errante ,  let  qu'elle  avasit  doué  d  uo 
grand  talent  d'observation.  Il  avait  Êiit  le  tour 
du  «onde  airec  Cook,  comme  caporal  de  ouh 
rine;  il  avait  été  k  pôed  jusqu'au  Xamtschatia. 
H  se  proposait  4e  traverser  ^océan  Pacifique , 
Y  Amérique  et  ïocéeui  Atiantique^  lorsqu'il  iùlL 
pris  par  ks  Russes,  qui  le  soupçonnèrent  d'es* 
pionnage^  et  le  renvoyèrent  en  Prusse  (i).  Le 
comité  de  la  société  nouvellement  formée  lui 
proposa  de  repartir  pofttr  l'intérieur  de  \ Afrique: 
il  accepta  cette  proposition  avec  joie. 

Ledyard  paortit  de  Londres  le  3o  juin  1788;  â 
se  rendit  à  Alexandrie  ^  puis  au  Caire  ^  prenant 
Hiar-tout  des  informations  siu*  l'objet  de  sa  mis- 
sion. Il  se  disposait  à  se  rendre ,  en  traversant 
le^lé^ert,  dahs  le  Sennaar^  lorsqu'il  succomba, 
au  Caine,,  k  une  fièvre  bilieuse  (ti). 

M.  Lucas ,  tqui  avait  résidé  seize  am  à  Maroc ^ 


(i)  M.  Bnruey,  dans  l'ouvi^ge  intitulé,  A . Chronologie 
cal  history  of  Northreastern  Voyages  and  dbcovery,  in- 8®, 
London,  1819,  a  consigne  quelques  particularités  intërés- 
santés,  sur  Ledy^urd. 

{%\Proc€edings  t^the  dasociation,  etc.,  édit.  1810,  tome  I, 
pages  14  et  /|i. 

5. 


68     RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

ccxmine  vice-consul  et  chargé  d'affaires,  et  qui,  à 
son  retour  à  Londres,  avait  été  nommé  interprète 
des  langues  orientales  par  le  gouvernement  an- 
glais, s'offrit  au  comité  pour  entreprendre  le 
périlleux  voyage  de  Timbouctou,  Par  ses  con- 
naissances d^  langues  et  des  usages  d'Afrique , 
nul  ne  paraissait  plus  propre  à  réussir  dans  une 
telle  entreprise:  M.  Lucas ,  envoyé  fort  jeune 
à  Cadix  pour  y  recevoir  une  éducation  commer- 
ciale ,  avait  été  pris  à  son  retour  par  un  corsaire 
de  «So/e,  puis  emmené  à  la  cour  de  Maroc,  où 
il  était  resté  trois  ans  avant  d'obtenir  sa  liberté: 
'  il  était  devenu  ensuite  vice -consul  auprès  du 
même  monarque  qui  l'avait  retenu  comme  es- 
clave; et,  par  son  long  séjour  en  Afrique,  il  pou- 
vait être  considéré  comme  un  Africain. 

M.  Lucas  partit  de  Marseille  le  i8  octobri^ 
1788;  et,  le  a5  du  même  mois,  il  était  à  TripoU. 
Il  voulut  se  rendre  au  Fezzan  par  la  route  de 
Mesurata;  m^js  il  n'alla  pas  plus  loin  que  cette 
dernière  ville,  dont  le  gouverneur  ne  put  lui 
fournir  l'escorte  nécessaire  pour  continuer  sa 
route  (i).  M.  Lucas  recueillit  des  r^[iseignements 
întéf  essants  sur  le  Fezzan  et  sur  les  voyages  des 

(i)  Proceedings  of  the  AssodaoUmfor promating  the  dis- 
covery  of  the  intenor  parts  qf  Jfiica,  ëdit.  1810,  tome  I, 
pag.  47-8<K 


PREMIÈRE    PARTIE.  69 

Arabes  dans  l'intérieur  de  l'Afrique,  du  chérif 
Inhammed  qui,  en  sa  qualité  de  marchand  d'es- 
claves, avait  visité  ces  contrées.  M.  Lucas  re- 
tourna à  Londres.  Les  informations  qu'il  avait 
reçues  du  chérif  Inhammed  se  trouvaient  con- 
formes à  celles  que  la  société  s'était  procurées 
de  Ben-Ali,  natif  de  Maroc ^  qui,  vingt  ans  au- 
paravant, avait  aussi  voyagé  dans  l'intérieur  de 
l'Afrique  (i). 

léQS  difficultés  qu'on  éprouvait  pour  pénétrer 
par  le  nord  jusqu'à  Timbouctou  engagèrent  à  ten- 
ter une  expédition  en  partant  de  Sierra-Leon^j  où 
les  Anglais  avaient  établi  une  colonie.  MM.  Watt 
et  Winterbottom,  deux  employés  de  cette  colo- 
nie, s'avancèrent  en  1794  dans  l'intérieur  jus- 
qu'aux deux  villes  principales ,  nommées  Timbo 
et  Lahy  (Labbé),  dans  le  royaume  des  Foulahs  : 
mais  Ws  ne  passèrent  point  les  montagnes  qui 
paraissent  séparer  cette  contrée  des  sources  du 
Joliba  ou  du  Niger.  Ilsapprirent  seulement  à£a^, 
qu'il  y  avait  un  commerce  établi  entre  ce  lieu  et 
Timbouctou.,  quoique  la  distance  qui  sépare  ces 
deux  lieux' soit  de  quatre  mois  de  chemin;  peut- 
être  comptait-on  aussi  le  temps  du  (retour.  Les 
habitants  indiquèrent  six  royaumes  que  l'on  tra- 


(j)  Proceedings ,  tome  I,  pages  116—195^ 


•JO  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

versait  pour  arriver  à  Timbouctou^sxfovv  :  Belia, 
qui  se  trouvait  le  plus  proche  des  Foulahs  ;  le 
second  était  Èouria,  le  troisième  Manda  ^  le  qua- 
trième Sego,  le  cinquième  SousundoUj  le  sixième 
Oenah  (ou  Djenné)^  qui  se  trouvait  le  plus  rap- 
proché de  Timhouctou  (ï).  Un  coup-d'œil  jeté  sur 
la  carte  suffit  pour  démontrer  combien  la  der- 
nière partie  de  cet  itifnéraire  s'accorde  avec  la 
route  qu'a  depuis  parcourue  Mungo-Park;  Sou- 
mndou  est  sans  aucun  doute  Sansanding ^  où 
ce  hardi  voyageur  s'est  embarqué  à  son  second 
voyage,  et  qui  se  trouve  situé  un  peu  à  l'est  de 
Sego. 

Les  efforts  des  Anglais  pour  pénétrer  dans 
l'intérieur  de  l'Afrique,  éveillèrent  l'attention  de 
tous  les  savants  de  FEurope.  Niebhur,  un  des 


{})An  account  of  the  colony  of  fUerra- Leone ,  etc.jin-S**, 
1795,  pages  i85  et  igS.  Hous  n'avons  d'antres  relations  de 
cet  intéressant  voyage  que  par  le  court  extrait  qui  se  trouve 
dans  romrrage  que  nous  venons  de  citer;  et  dans  Leyden, 
toœel,  page  3i5,  édit.  181 7.  M.  Mcdlien  nous  apprend  qae 
MM.  Watt  et  Wintcrbottom ,  pour  pénétrer  dans  rinlérieiir, 
s'étaient  déguisés  en  chérifs  ;  mais  leur  stratagème  fut  dé- 
couvert, et,  après  avoir  été  détenus  comme  prisonniers 
pendant  quatorze  jours,  ils  furent  forcés  par  les  Poules  y  ou 
les  habitants  de  Timbou,  de  retourner  à  Sierra-Leone,  -— 
Voyez  le  Voyage  dans  t intérieur  de  V Afrique ,  tome  II , 
chapitre  VI,  page  T12. 


PREMIÈRE    PARTIE.  ^l 

voyageurs  les  plus  judicieux  et  les  plus  instruits, 
crut  alors  devoir  publier,  dans  un  recueil  pério- 
dique,  les  renseignements  que  lui  avait  donnés 
sur  l'intérieur  de  l'Afrique  un  envoyé  du  pacha 
de  TripoU^  nommé  Abd-Arrachman-Aga. 

Le  Niger  ou  le  grand  fleuve  qui  traverse  le 
pays  de  XAbyssinie^  si  l'on  en  croit  Abd-Arrach- 
man,  a  sa  source  dans  les  montagnes  ^Abyssi- 
nie  et  coule  kïoxx^^ls  AfnouçXBornouXi)  sont 
deux  grands  royaumes  situés  le  long  du  Niger  y 
et  peuplés  par  des  Nègres.  Les  rois  de  ces  deux 
contrées  sont  musulmans.  Berghermé  elAndamj 
deux  provinces  de  Bomou'^  sont,  dit-on,  peu- 
plées par  des  chrétiens.  Les  habitants  de  cette 
dernière  province  ont  les  dents  pointues.  Il  y  a 
parmi  eux  une  race,  nommé#  Jemjeniy  qui  a 
aussi  les  dents  pointues.  L'or  est  la  principale 
production  du  royaume  XAfhou,  Ce  royaume 
est  arrosé  par  un  grand  fleuve ,  que  l'on  nomme 
Goulbiy  dans  la  lUngue  du  pays;  et  c'est  le  même 
fleuve  qu'on  nomme  Nil  en  Barbarie  (a).  Zanfara 

(i)  L'auteor  écrit  Bemou  et  Sag^ra. 

(2)  Mai&  les  noms  de  Gouibi  et  de  Nil  servent  peut-être  . 
à  designer  toutes  les  grandes  rivières.  Gouibi  ou  Golbi  est 
le  même  mot  que  Joliba^ qui  signifie,  dit-on,  grande  eau. 
On  a  dît  à  M.  ^eetzen  que  Gouibi  signifie  Mer.  Ritchie  a 
entendu  dire,  au  Fezzan,  ^ue  le  fleuve  qui  coule  à  Cache- 
nah  se  nomme  Gouibi, 


7a  RECHERCHES    SUR  .  L  AF  RIQU  E. 

est  une  grande  ville  entourée  de  murs,  et  la 
résidence  du  roi  (i).  Abd-Arrachman  fait  men- 
tion ÔLjikades  (Agadez),  de  Kanna  (Gano),  de 
Segsker  (Zegzer),  de  Kardi  et  de  Flata.  Ghouari 
ou  Kouar  est  une  province  où  l'on  trouve  de 
For,  et  qui  dépiend  àiAfiiou*  Tocrour  est  la  ré- 
sidence d'un  sultan ,  qui  est  aussi  vassal  de  celui 
àiAfnou  ;  il  possède  les  villes  ^Andana  et  de 
Mara.  Agate  est  le  séjour  d'un  sultan,  à  qui  ap- 
partient Kika^  ville  considérable.  Kachne{%)  est 
une  grande  ville  sur  la  route  de  Zanfara  au  Fez- 
zan.  Dans  son  territoire  on  trouve  Kogho  (3), 
KankanUy  Kotour^  Kouschij  Kiana^  Saghcùii^ 
Tagamesy  et  Dcmdudjighi  :  tous  ces  lieux  sont 
désignés  par  la  dénomination  de  ^éfr/i/,  c'est-à-dire 
forteresses.  TouÈrik  est  une  ville  riche  et  com- 
merçante entre  Zanfara  et  le  FezzanJje  royaume 
de  Timbouctou  (4)  est  traversé  par  \e  Niger ,  et 
confine  avec  Maroc;  il  est  très-grand.  Le  second 
domestique  de  l'aga  y  était  né  f  mais  il  avait  été 
enlevé  jeune ,  et  ne   connaissait  de  son  pays 

(i)  Le  traducteur  d'où  j'extrais  ceci  a  mis  que  Sanfara  est 
À  trois  journées  de  Tripoli,  Il  est  évident  qu'il  a,  oublié  un 
mot.  Je  n'ai  pu  me  procurer  l'original  allemand  dans  aucune 
des  bibliothèques  de  Paris. 

(a)  Kaschné  est  probablement  Cachenah. 

(3)  Probablement  le  Gaoga  de  Xeon ,  le  Cauga  d'£drisi. 

(4)  L'auteur  écrit  Tombouctou. 


PREMlèjLE    PARTIE.  ^3 

d^autres  particularités,  sinon  qtie  les  habitants 
d'un    certain    canton,   qu'on    nommait   Flata^ 
étaient    blancs.   Timbouctou  fait    le  commerce 
^Afnou^  de  \ Egypte  et  de  la  Barbarie,  Godâ- 
mes ^^\  est  l'entrepôt  de  Timbouctou ^  de  Tunis 
et  de  Tripoli^  est  à  deux  journées  de  cette  der- 
nière ville.  Le  Fezzan  en  est  à  quarante  jour- 
nées. Les  marchands  et  les  pèlerins  de  Bomou^ 
qui  veulent  aller  en  Barbarie,  en  Egypte  ou  à  la 
Mecque,  se  réunissent  à  Zanfara  avec  ceux  ÔLuif- 
nouy  et  vont  ensemble,  par  Kaschné  et  Touarik, 
au  Fezzan,  Ceux  qui  se  rendent  en  Barbarie  vont 
à\y Fezzan  par  Sourkné  (i)  et  Sebati  à  Tripoli.  Et 
ceux  qui  ont  Y  Egypte  pour  but  de  leur  voyage, 
vont  par  Oedsjelé  au  C4xire  (a).  Bulma,  Kouar, 
Meddan^et  quelques  autres  petites  villes  sont  dans 
la  dépendance  du  Fezzan.  Dans  tout  le  Soudan 
ou  la  Nigritie  les  coquillages  ou  les  cancres  ser- 
vent de  monnaie.  On  compte  trois  mois  de  route 
de  Tripoli  à  Zanfara ,  résidence  du  roi  XAfnou^ 
en  y  comprenant  les  jours  de  repos  de  la  cara- 
vane, qui  ont  lieu  au  Fezzan,  ^^  Touarik,  et  à 
Kaschné. 


(i)  Le  Sohna  de  notre  carte  et  de  Titinëraire  de  Venture. 

(i)  Oedsjelé  est  probablement  \Audgila  des  écrivains 
grecs  et  romains  (iVo/a  de  Niebhur).  C'est  YAudjela  de 
Homemann  et  de  nos  cartes. 


^4  RECHERCHES    SU%    l'aFRIQUE. 

Tels  sont  les  principaux  renseignements  don- 
nés à  Niébhur  par  Abd-Arrachman-^Aga  (i). 

Il  paradt  que,  vers  1785^  il  vint  à  Tripoli  un 
prince  de  Bornou.  La  sœur  de  M*  TuUy ,  consul 
anglais,  le  vit  et  s'entretint  avec  lui.  Le  peu  qu'il 
a  dit  du  Bornou  donne  l'idée  d'un  royaume  fer- 
tile, puissant  et  civilisé  (a).  Vers  1794»  M.,  de 
Beaufois  reçut  des  rensdgnements  intéressants 
sixrTimboiiciou  eiHousa^d^un  musulman  nommé 
Schaabeny,  dont  nous  parlerons  plus  amplement 
ci-après. 

-La  société  formée  pour  les  découvertes  en 
Afrique,  à  Londres, 'n'avait  eu  aucune  part  au 
voyage  de  MM.  Watt  et  Winterbottom  ;  mais 
ce  voyage  contribua  peut-être  à  tourner  ses 
regards  vers  la  côte  occidentale  d'Afrique,  et 
à  lui  faire  penser  que  le  meilleur  moyen  pour 
arriver  à  TimèK>uctou  était  de  traverser  le  pays 
qu'arrose  la  Gambie.  Le  major  Houghton,  qui 
avait  été  ccmsul  anglais  à  Maroc,  et  major  du 
fort  de  Corée  ^  partit  de  Pisania  en  1791,  pé- 
nétra dans  le   royaume  de  Bambouk  y  et  ré- 


(i)  Deutsches  Muséum  Stuck  10,  ann.  1790,  p.  963  à  1004. 
Hartmann ,  dans  sa  préface  d'Edrisi ,  a  fait  mention  de  cette 
relation  {EdrisU  Afiica ,  p.  xxxix). 

(a)  Voyage  à  TripoHj  on  Relation  d'un  séjour  de  dix  ans 
en  Afrique,  a  vol.  in-8**,  tome  II,  page  48« 


PREMl&RE    PARTIE.  ^5 

monta  vers  le  nord  dans  celui  de  Ludamar  : 
c'est  dan»  cette  contrée  que,  trahi  et  dépouillé 
par  les  Maures,  auxquels  il  s'était  imprudemment 
confié 9  il  périt  dans  le  désert,  soit  par  la  main 
des  assassins,  soit  par  la  faim  et  la  soif.  On  ne 
put  se  procuter  aucune  des  observations  qu'il 
avait  écrites  pendant  son  voyage  ;  mais  -on  com- 
bina les  renseignements  contenus  dans  sa  der- 
nière lettre,  datée  du  i5  juilfet  1791 ,  avec  ceux 
qui  furent  transmis  vers  la  même  époque  par 
M-  Magra,  consul  de  S.  M.  britannique,  et  ceux 
que  Lemprière  avait  obtenus  dans  son  voyage  à 
Maroc  (i). 

Après  avoir  mûrement  délibéré,  ce  fut  encore 
par  les  contrées  qu'arrpse  la  Gambie  que  la  so- 
ciété poiur  les  découvertes  en  Afrique  chercha 
à  atteindre  le  but  qu'elle  s'était  proposé.  Mungo- 
Paric,  natif  de  Selkirk  en  Ecosse,  ayant  exercé 
la  profes^on  de  chirurgien ,  était  depuis  peu  de 
retour  des  Indes  orientales.  Possédé  du  désir  de 
parcourir  des  pays  inconnus,  il  s'offrit  au  comité 
de  la  société ,  et  fut  accepté.  Il  n'est  personne 
qui  soit  resté  tout-à-fait  étranger  aux  grands 
résultats  de  son  voyage.  Mungo-Park  partit  de 


(i)  Procêedings  of  the  Association^  etc.,  1. 1,  pag.  263- 
324-  —  Lemprière ,  A  tour  front  Gibraltar  to  Tangier , 
Sallec^  etc. ,  etc. ,  in-8%  London,  1798  ,  a*  édit,  p.  355, 


^6  RECHERCHES    SUR.    l'aFRIQUE. 

Pisania^  l'un  des  établissements  anglais  sur    la 
Gambie ^\^  a  décembre  1796,  c'est-à-dire  au 
commencement  de  la  saison  sèche.  Il  traversa 
les  forets  qui  séparent  la  Gambie  du.  Sénégul. 
Il   pénétra  dans  le  royaume  de  Bambouk^  vit 
dans  celui  de  Ludamar  la  place- même  où  avait 
péri  le  major  Hougthon,  et  atteignit  enfin,  à  Sego^ 
capitale  du  royaume  de  BambarrajleJoiiba  ou 
le  Niger.  Il  vit  avec  une  surprisé  et  un  plaisir 
inexprimables  ce  fleuve  majestueux ,  aussi  large 
que  la  Tamise  k  Londres  ,  rouler  d'occident  en 
orient  ses  flots  brillants  des  rayons  du  soleil 
matinal  :  il  courut  se  précipiter  sur  ses  bords, 
se  désaltérer  dans  ses  eaux  limpides,  et  remercia 
Dieu  d'avoir  permis  que  .ses  longs  et  pénibles 
travaux  fussent  enfin  couronnés  du  succès.  Cet 
enthousiasme  était  légitime.  Le  premier  des  Eu- 
ropéens ,  il  avait  franchi  les  hauteurs  qui  sépa- 
rent les  bassins  de  la  Gambie  et  du  Sénégal  de 
l'intérieur  de  l'Afiique,  et  qui  paraissent  le  plus 
grand  obstacle  aux  découvertes  :  il  semblait  avoir 
résolu  le  problème  géographique  qui  divisait  les 
géographes  depuis  tant  de  siècles;  savoir,  si  ce 
grand  fleuve  de  l'Afirique  centrale  coulait  d'orient 
en  occident,  ou  d'occident  en  orient  (i).  En  par- 
— . •    •  -      > 

(i)  On  verra  dans  notre  troisième  partie  que ,  sans  mettre 
en  doute  la  découverte  de  Mungo-Park ,  le  problême  n'est 


Tenant  jusqu'à. ses  rives , MungoPark  s'ouvrait 
une  route  vers  toutes  les  contrées  de  l'intérieur 
qu'on  desirait  connaître.  Mungo-Park  suivit  ce 
fleuve  jusqu'à  Silla.  Il  apprit  dans  ce  lieu  qu'il 
n'était  plus  qu'à  deux  journées  de  chemin  de  la 
grande  ville  de  Djenne  (Guinée),  et  à  quatre  d'un 
grand  lac  nommé  Dihbi^  que  traversait  le  Niger. 
Il  recueillit  les  renseignements  les  plus  circon- 
stanciés sur  l'espace  qui  restait  à  parcourir  pour 
arriver  à  Timbouctou.  Il  résolut  de  retourner  sur 
ses  pas  en  prenant  une  autre  route.  Il  se  trou- 
vait épuisé  par  la  maladie,  la  faim  et  la  fatigue, 
presque  nu  et  sans  aucun  moyen  de  se  pro- 
curer des  vêtements,  de  la  nourriture  et  des 
abris  :  enfin  les  pluies  des. tropiques  augmentaient 
à.  mesure  que  la  saison  avançait.  Bien  plus  dan- 
gereux encore  étaient  les  Maures,  dont  la  puis- 
sance se  fait  sentir  quand  on  est  parvenu  dans 
l'intérieur  de  l'Afiîque.  Leur .  fanatisme  intolé- 
rant et  cruel  devenait  de  jour  en  jour  plus 
menaçant ,  et  opposait  des  obstacles  de  plus  en 
plus  difiBciles  à  surmonter. 

De  retour  à  Londres,  Mungo-Park  publia  sa 
relation  qui,  de  toutes  celles  qui  ont  paru,  jette 

pas  résolu  par  cette  seule  découverte  ;  parce  que  ce  problème 
n'est  pas  aussi  simple  que  Muqgo^-Park  et  plusieurs  géo- 
graphes le  croyaient. 


78  RECHERCHES    SUR    JLAFRIQ^UE. 

le  plus  de  jour  sur  les  vastes  contrées  de  la  Se-- 
négambie,  et  a  fait  naître  le  plus  d'espérances 
fondées  de  voir  bientôt  se  dissiper  les  ténd^res 
qui  nous  dérobent  la  connaissance  des  parties 
centrales  de  l'Afrique  (i). 

Tandis  que^  sous  la  direction  de  la  société 
pour  les  découvertes  en  Afrique ,  Mungo-Park 
obtenait  de  si  brUlants  succès,  un  jeune  homme 
instruit,  né  avec  une  fortune  indépendante,  sans 
l'influence  ni  le  secours  d'^aucune  société  ni  d'au- 
cun gouvernement,  mu  par  le  seul  diestr  de  s'il- 
lustrer, £orma  le  bardi  pro^  de  p^étrer  aussi 
par  l'est  dans  l'intérieur  de  l'Afrkjue. 

Les  voyages  des  missionnaires  portugais  en 
Abymnie^  pendant  le  seizième  siècle,  ceux  de 
Bruce  dans  le  dix-huitième  sîède,  avaient  à  la 
vérité  procuré  de  grandes  lumières  sur  ceite 
contrée;  mais  ils  n'en  avaieiat  doniié  que  de 
très-faibles  et  de  très*incertaines  sur  les  riions 
centrales  de  l'Afrique,  qui  sont  à  l'cmesi.  VAbp^ 
sinie  est  réparée  de  ces  contrées  par  âes  mon- 
tagnes qui  probablement  sont  au  nombre  <le8 
plus  élevées  de  toute  l'Afrique,  et  peut-^re  du 

monde  efitier  (2).  Elles  mettent  de  ce  çôSié  *in 

V 

(x)  Proœedinffs,  etc.,  1. 1,  p.  Bli  -400.  \ 

(a)  Sait,  A  Voyage  ta  Ai^sinia^  p.  J20.  Les  8  et  9  avrlv 
M.  Sait  vit  distinctement  les  neiges  sar  \t%  sommets   dl 


\ 


PE£Mlà:]l£    PARTIE.  79 

obstacle  invincible  aux  découvertes  et  aux  com- 
munications commerciales,  qui  se  font  par  le 
Senfioar^  la  Nubie  et  Y  Egypte^  situés  au  nord  de 
YAbyssinie,  Avant  l'établissement  de  la  société 
anglaise  pour  les  découvertes  en  Afrique^  le  Kor^ 
dofsm^^Xxié  à  Touest  du«$6/ii2a<zr,et  contigu  à  ce 
rojraume,  était  la  contrée  la  plus  reculée  dans 
l'intérieur  de  \ Afrique  ^àonl  on  eût  une  con* 
nabsafice  certaine.  Bruce  avait  cependant  marqué 
sur  sa  carte  le  Dur-Four  comme  un  lieu  traversé 
par  les  caravanes  qui  se  rendaient  au  Caire  (i). 
Ledyard  entendit  aussi  parler  du  Dar-Four^  dans 
les  informations  qu'il  reçut  sur^  l'intérieur  de 
l'Afiique.  M.  Venlure  avait  appris  au  Gofi/vqu'on 
transportait  tous  les  ans  dans  cette  capitale  de 
l'Afrique  beaucoup  d'esckves  du  Dar-Foar  (a). 


Beyeda  et  à'Amhu-Haï  ^  qui  font  partie  de  la  chaîne  de 
Samen,  à  i3  degrés  seulement  au  nord  de  Téquateur. 
Alors,  dit  M.  Sait,  le  thermomètre  marquait  8B  degrés  à 
Fowlbre;  le  soieil était  vertical,  et  la  chaleur  était  insuppor- 
table. Si  M.  Bmce  nie  l'existence  des  neiges  en  Abyssinie^ 
c'est  ^'il  n'a  travjersé  f|ue  la  chaîne  du  Lainalmon ,  qui  est 
pen  élevée  \  ni«s  il  est  fait  mention  des  neiges  à'Aèyssif^e 
dafisTinse^ption  d'AduHs^et  dans  les  Voyages  des  mission- 
naires jésuites  les  plus  instruits.  M.  Sait  nous  apprend  aussi 
qu'en  lanfaf^  abyssin,  la  neige  s'exprime  par  le  mot  berrit. 
(i)  Bruce's  Travels  in  Abyssinm,  etc. 
*^^\,       (a)  laAaaide  f  Mémoire  sur  l'intérieur  de  V Afrique  y  p.  3o. 


8o      RECHKRCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Ces  notions  étaieiit  obscures  et  vagues,  mais  elles 
étaient  précieuses  ;  car  le  nom  même  de  Dar- 
Four^  au  royaume  de  Four^  parait  avoir  été  in- 
connu à  d'Anville.  Il  se  trouvait  cependant  placé 
sur  la  mappemonde  de  Fra-Mauro ,  terminée  en 
1459;  et  cette  contrée  paraît  avoir  été  le  terme 
des  connaissances  de  ce  cosmographe  vers  l'oc- 
cident (i). 

C'est  par  leZ?ar-jFottrque  le  courageux  Browne 
espéra  pénétrer  dans  l'intérieur  de  l'Afrique.  Il  se 
rendit  d'abord  à  Assiout  en  Egypte  :  là  il  acheta 
cinq  chameaux;  il  se  joignit  à  la  caravane  du 
Soudan,  et  partit  le  a5  mai  1793  (2).  Il  traversa 
la  Grande- Oasis  qui  n'est  qu'à  deux  journées  de 
marche  d' Assiout,  et  il  arriva  le  a 3  juillet  dans  le 
Dar-Four  (3).  Mais  tous  ses  efïorts  pour  pénétrer 
plus  avant  furent  rendus  vains  par  la  perfidie 
et  l'avidité  des  habitants  du  pays  et  des  nati£s 
qui  l'avaient  accompagné  :  il  fut  trop  heureux, 

(i)  Zurla^  Il  Mappamondo  di  Fra-Mauro^  in-folio, 
Venezia,  1806,  p.^  iSa.  —  Consultez  aussi  la  carte,  à  la  fin 
du  volume.  M*  Vincent  a  donné  séparément,  et  mieux , 
l'Afrique  de  cette  Mappemonde,  dans  son  ouvragé  intitulé  : 
The  Commerce  and  Navigation  of  ihe  Ancients  m  the  Indian 
Océan, 

(a)  Wv  G.  Browne's,  Travels  inAfrica,  E§jrpt  and  Syrict^ 
in-4°,  London,  1799,  1'*  édit.  p.  184. 

(3)Ibid.,p.  189. 


PREMIERE    PARTIE.  8l 

après  trois  ans  d'une  sorte  de  captivité ,  après 
avoir  éprouvé  une  maladie  qui  le  conduisit  aux 
portes  du  tombeau,  de  s'en  retourner  par  la 
même  route  que  celle  qu'il  avait  prise  pour  ve- 
nir. Il  arriva  dans  l'été  de  1796  à  JssiouL  Non- 
seulement  il  avait  fait  connaître ,  sous  les  rapports 
physiques,  moraux  et  gét)graphiques,  un  état 
dont  avant  lui  on  savait  à  peine  le  nom;  mais  il 
avait  recueilli  des  natifs  de  précieux  renseigne- 
ments sur  le  Kordofan  et  le  Stnnaar^  qui  sont  à 
l'orient  de  Dar-Four;  sur  les  royaumes  XJfnoUy 
de  Berghou^  de  Berghun^  de  BomoUj  qui  sont  à 
l'occident  de  cette  contrée;  et  enfin  sur  le  Dar- 
Kulla  et  le  Donga^  qui  sont  plus  au  sud,  et  vers  les 
sources  présumées  du  Bahr-el-Ahiad  ou  Rii^ière- 
BUmche,  qu'on  croit  être  le  véritable  Nil,  Ces 
sources,  selon  les  renseignements  donnés  à 
M.  Browne,  se  trouveraient  placées  à  sept  degrés 
eBfviron,  ou  /^^o  milles  géo^aphiques ,  au  sud 
de  Cobbé^  la  capitale  du  Dar-Four^  dans  le  Qebel- 
eUKumr  ou  Montagnes  de  la  Lune;  et  le  Dar- 
Kulla  ^  traversé  par  une  rivière  aussi  nompaée 
Kulla  ;l^(vx\  coide  vers  le.  sud  -  est ,  serait  à  10 
degrés  ov^  600  milles  au  sud-ouest  de  la  même 
ville  (i).  M*  Browné  s'était  même  procuré  des 


(i)  Browne's  Tra\fels,  in-4®,  1799,  P*  ^*^7  ^  ^t^  ^  et  la 
carte  qiii  fait  face  à  la  page  180.  >y 

I  6       '^ 


8à      K£CH£RGH£S  SUR  LAFRIQUK. 

itinéraires  de  quelques  «unes  des  contrées  qui 
environnent  le  Dar^Four^  suffisamment  dé- 
taillés pour  pouvoir  être  employés  par  les  géo* 
graphes  observateurs,  judicieux  et  exacts.  11  a, 
dans  ses  remarques  sur  \ Egypte  et  la  Sjrrie^ 
rectifié  les  erreurs  et  le»  inexactitudes  de  plu-* 
sieurs  voyageurs  célèbres  qui  l'avaient  précédé. 
Depuis,  cet  homme  à  jamais  regrettable,  tou- 
jours enflammé  par  son  zèle  pour  les  prc^ès 
de  la  science,  était  parti  avec  ^'excellents  îns^ 
truments  pour  Yjâsie'^Mineure  et  laPer^tf,d3ns 
le  but  de  rectifier  la  géographie  de  ces  contré^^ 
si  intéressantes  pour  l'histoire  ancienne  et  mo- 
derne. Il  a  été  assassiné  avec  toute  sa  suite  par 
des  brigands:  à  peine  sa  mort  fut-elle  remarquée 
de  l'Europe ,  occupée  de  ses  sanglants  débats. 
La  postérité  plus  équitable  inscrira  son  nom  avec 
honneur  dans  les  fastes  de  la  science  dont  il  fut 
un  généreux  martyr. 

Aux  renseignements  qu'il  nous  a  donnés  sur 
la  partie  orientale  du  centre  de  l'Afrique  septen- 
trionale, il  faut  joindre  ceux  que  l'on  s'est  pro- 
curés ea  É^jrpte  et  en  Jbyssinie^  par  le  moyen 
des  caravanes  qui  arrivent  du  Soudan  f  oxk  par 
les  Nègres  mahométans  qui  se  rendent  de  l'inté- 
rieur du  continent  africain  à  la  Mecque^  pour 
acquéi;^r  le  titre  révéré  d'hadgi  ou  de  pèlerins. 
Ainsi  M.  Haftiiiton  a  ohXmi\x,kJsiOuan  %nÉgxpt€^ 


PREMIÈRE     PARTIE.  83 

de  deux  pèlerins,  quelques  notions  sur  plusieurs 
états  qui  paraissent  situés  assez  loin  au  sud*" 
ouest  du  Dar^Four^  et  dont  les  noms  étaient 
inconnus  (i). 

M.  Denon  vit  à  Girgé  un  frère  du  roi  de  Dar-- 
Four^  qui  revenait  de  VMde.  Il  apprit  de  lui  que 
de  Dar-FourkSiouth  on  comptait  quarante  jours 
de  traversée  dans  le  désert.  Le  sultan  de  Dar-Four 
était  en  guerre  avec  Je  sultan  de  Senrumr^  et  en 
relation  d'amitié  et  de  parenté  avec  celui  de  Bar- 
nou.  I^a  ville  de  Timhouciou  est  au  sud-oue^  du 
Dar-Four^  sur  les  bords  d'un  fleuve  qui  coule  à 
l'occident  (2).  Je  prie  mes  lecteurs  de  remarquer 
cette  circonstance,  qui,  en  apparence,  se  trouve  en 
contradictîbn  avec  les  observations  de  Mungo^ 
Park,  mais  qui  est  confonpe  avec  Tassertion 
de  VEdrii  (3),  3e  Léon  l'Africain  (4),  de  Mar- 


(i)  Hamilton's  JEgypiiaca^  în-4%  London  ,  ch.  xn^iv. 
(a)  Denon ,  Foyage  en  Egypte ,  tome  I ,  p.  809 ,  édit.  ia-i  2. 

(3)  £dritfi,  Africa^  pag.  la-ai.  —  Geogmphia  J^ubiensis  y 
iII-4^  »6»9  »  Pî«««  9  -  '5, 

(4)  Dan»  R9ma#îo,  tome  I,  paf .  i  verso,  lIou  T Africain 
s'exprime  «inêi  :  ««  Aicani  dicono  ehe'l  dette  fipme  Niger  in~ 
comincia  4ucire  dldla .  j^te  d'çccidente  da  certi  monti , 
e  corrëlhdo  verao  prieiQ^  ai  çonverte  in  un  lago.  Il  che  non 
è  Tero  :  peroîo  che  noi  n^vigammo  dal  regno  di  Tomhutio 
dalla  parte  di  levsmte  scorr^ndo  per  Tacqua  fino  al  regno 
di  Gfiima  y  o  floo  al  re|[BO  di  HeUi;  i  quali  due  a  compa- 

6. 


84  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

mol  (i),  et  avec  celle  de  plusieurs  relations 
modernes  dont  nous  aurons  occasion  de  parler 
dans  la  suite.  M.  Lapanouse,  un  des  employés 
de  l'armée  française  enÉgjrptey  s'est  procuré,  de 
différents  chefs  des  caravanes,  un  itinéraire  qui 
nous  donne  des  détails  très-circonstanciés  sur  la 
route  de  Siouth  au  Dar-Four^  et, sur  le  commerce 
qui  a  lieu  entre  cet  état  nègre  et  \ Egypte  (a). 
Les  renseignements  que  M.  Seetzen  a  obtenus 
au  Caire,  du  jeune  Abd- Allah,  sont  plus  utiles , 
puisqu'ils  nous  donnent  un  itinéraire  qui  parait 
être  complet  et  exact  entre  Y  Egypte  et  le  Bor-- 
nou.  A  l'ouest  de  Bomou  sont  Kanem  et  Affano 
(Afnou);  au  nord,  Manderah;  à  Test,  Affadeh, 
Mpadé^  Baghermé  et  fFadey  ou  Mobbà;  au  sud , 
Leciwangj  Zélkba^  Kato  et  Sezikket  (3). 

Mais  M.  Seetzen  a  acquis,  sur  l'intérieur  même 
de  l'Afrique,  des  renseignements  plus  précieux 
encore ,  d'un  jeune  Arabe  fellata ,  natif  d'une 
ville  nommée  Ader^  située  dans  le  désert  à  cinq 

razîone  di  Ton^hutto  son  verso  Ponente.  »  La  traduction  fran- 
çaise 3e  Jean  Temporal  (iki-8^,  Anvers ,  1 5 56, 'page  3)  dit 
tout  le  contraire.  La  traduction  latine  est  conforme  à  Titalien. 

(i)  Marmol,  liv.  I,  ch.  xtii,  page  S66. 

(9k)  Lapanbnse,  Mémoires  surl'Égypie,  in-8^,  Paris^,  ^n  xi , 
tome  IV,  page  77.  D'après  cet  itinéraire,  le  voyage  de  1*-^- 
gXpie  au  Dar-Four  est  de  5o  jours.  L'auteur  érfrit  DétfurA. 

(3)  Seetzen,  Annules  des  Fayuges,  tome XIX,  page  17 S. 


'      PREMIÈRE    PARTIE.  85 

journées  au  sud  du  Fezzan.  Les  Arabes  Fellata 
habitent  les  régions  qui  sont  entre  les  Touariks 
et  Haoussa  (i).  Celui  que  M.  Seetzen  interrogea 
était  d'un  brun  noir  comme  les  Abyssins.  Ader^ 
où  il  était  né ,  appartient  à  un  sultan  qui  dé- 
pend de  celui  ôiAgadez.  JSAder  à  Zanfara  on 
compte  quatre  jours  de  marche,  et,  selon  une 
autre  manière  de  compter,  huit  jours.  Sur  la 
route,  on  trouve  des  Fellata  et  des. Nègres.  L'A- 
rabe fellata  connaissait  le  grand  fleuve  nommé 
Goulbi^  et  il  disait  que  ce  mot  signifiait  une 
mer  chez  les  Nègres ,  qui  nomment  aussi  le 
Nil  d'Egypte  Goulbi  (2).  L'Arabe  fellata  dé- 
clara qu'il  ne  connaissait  rien  sur  le  cours  du 
Goulbi  qui  arrose  le  Soudan  ;  mais  il  connais- 
sait Begirma^  Bomou^  et  Goubir  qui  n'est  qu'à 
six  journées  de  chemin  àiAder,  Goubir^  qui  est 
sepWnent  à  trois  journées  de  Kassena  (  Cache- 


Pi^  terre  des  Nègres,  est  évidemment  le  Guber 
'I"  — 

(i)  Selon  les  informations  données  à  Burckhardt(7>vip«/^, 
etc. ,  page  4 36 ,  et  le  Quarterly-Review ,  tome  XXIII^  p.  a34 , 
mai  iSao),  les  Fellata  sont  une  nation  puissante  dn«So«£?â;/i.* 
ceux  dans  les  envirocis  àt'Bomou  sont  mahométand^;  mais 
la  partie  de  ce  penple  plps  à  Tonest  est  idolâtre  :  c'est  ce  qui 
met  obstacle  aux  communications  entre  Timbouciou  et 
Cachenahy  et  fait' que  çetle.  partie  de  l'Afrique  est  si  peu 
comtne  des  Maires. 

(2)  Voyez  ci-dessus,  p.  71,  et  Ritchie,  dans  le  Quarterfy^ 
Reyiew^  vol.  XXIII ,  page  234  9  m^i  iBao. 


86     RECHERCHES  SUR  LAFRIQUK. 

de  Léon  rAfiicain,  de  d'Anville,  et  le  Goubour 
deDdisle.  Kcoîo  et  File  de  ii/ei/i\  placée  entre  les 
deux  bras  prtncipaciK  du  grand  fleuve,  étaîeni; 
beaucoup  plus  loin.  MeUi  est,  au  sud,  le  dernier 
royaume , connu  des  Nègres,  doù  l'on  se  rende 
en  pèlerinage  à  la  Mecque,  corome  on  le  fait  <le 
Bj^nné  et  de  Timbauctouy  et  dont  les  caravanes 
passent  par  Jder.  On  traverse ,  pour  s'y  rendre , 
Kassenû  (Cachenah),  f^ogobous,BaajiSy  Gurma, 
Jattwur,  Gonja ,  Kano^  Bargu ,  Jirma^ Kuara{i) : 


(i)  On  voit ,  diaprés  cet  itinéraire ,  que  la  caravane  se  di- 
rige par  le  Charje^  ou  la  grande  Oasis  en  Egypte  y  et  joint 
\e  Nil  à  Siouth  :  Bargu  est  lé  Dar-Bèrghou  de  nos  cartes  ; 
Knara  est  Kapmr^  nom  aiicien,  que  plusieurs  géograpkes 
français  ont  eu  tort  de  faire  disparaître  des  îcartes.  à 
Texemple  d*Arrowsmitfa ,  qu'ils  ont  copié.  M.  Purdy  n'a 
point  commis  cette  faute  dans  sa  carte  d'Afrique ,  publiée 
en  1814.  C'est  dans  le  Kawar  que  Durandi  (  Mémoires  de 
V Académie  de  Turin  ^  1809)  place  les  Garamantes,  M*  Saïfc 
{A  Voyage  tù  Jbyssiniay  in-4**,  London,  i8i/|,p.  437)^! 
Dixan  une  «aravane  qui  venait  et  Dar-Four^  et  qui  se  ren« 
dait  a  la  Mecque:  elle  voyageait  defHits  trcns  mois;  elle  était 
partie  de  R(l^  en  février;  elle  s  était  <l*al»ord  dirigée  trcrs  le 
sud ,  pour  éviter  le  peuple  an  Sennaar  avec  lequel  le  Dar-^ 
Four  était  «n  guerre.  La  caravane  avait  passé  par  Mitchécié 
qui  est  peut-être  le  Dar-Mitchegan^hAÏnié  par  lesSckar^a» 
ias.Les  deux  individus  de  cette  carava»e  avec  lesquels!^  Sait 
s'entretint,  étaient  de  purs  nègres;  ils  parl%i^t  aeal>e avec 
autant  ^le  facilité  que  X^faurian^  ou  langage  de  Dor-iPour. — . 


FRE;MlèRE     PARTIE.  87 

tons  ces  lieux  sont  eomprîs  sous  le  nom  général 
de  Haoussa,  Ce  jeune  Arabe  crojatC  que  les 
Touariks^  a^eç  les^^els  les  Fellatm  sont  en  paix, 
s'étendent  jusqu'à  trois  journées  de  ciiemtii 
de  VÉgypie.  Les  caravanes  du  Fezzan  vont  an 
Bomouj  et  aussi  dans  des  contrées  beaucoup 
pkis  au  sud.  Tels  sont  les  rensdgnements  im^ 
portants  donnés  k  M.  Seetzen  par  le  jeune 
Arabe  fellata  (i). 

Seetzen  se  disposait  à  pénétrer  lui-même  dans 
l'intérieur  de  l'Afrique,  lorsqu'il  fut  enlevé  aux 
sciences  et  à  la  géographiie  par  une  mort  pré- 
maturée. 

Dans  cet  abrégé  de  l'histoire  des  efforts  que  les 
Européens  ont  faits  pour  s'avancer  dans  l'intérieur 
deFAfrique,  je  me  vois  trop  souvent  forcé  d'attris- 
ter «mes  lecteurs  par  les  récits  de  la  fin  tragique 
îux  qui  ont  mis  le  plus  d'habileté  et  de  cou- 
fpour  réussir  dans  cette  entreprise.  Un  des 
\  jnstement  célèbres  est  Frédéric  Hornemann. 


Yoyez,  à  ce  stajet,  à  la  page  citëe  en  note ,  une  lettre  Se 
M.  Jrowne  à  M.  Sait.  Dans  cette  lettre,  le  mot  Tocrouri  est 
donné  comme  synonyme  de  Faquir,  Dans  Edrisi,  Léon 
VAfricain  et  Maxmol,  ^ocrour  est  un  royaume  célèbre  de 
Vintérieur  de  TAfrique. 

(1)  Adehing*s  Mrkridates ,  t,  IH,  to  in  Abyss.  pag.  146 
à  i4«.  • 


88  RECHERCHES    SUR    l'a£RIQUS. 

Fils  d'un  ecclésiastique ,  il  avait  fait  à  Gôttingue 
d'excellentes  études.  Il  avait  en  outre  acquis 
des  connaissances  théoriques  et  pratiques,  dans 
les  arts  mécaniques.  Patient  et  sobre ,  grand  et 
vigoureux,  d'une  constitution  brillante  de  jeu- 
nesse et  de  santé ,  à-la-fois  souple  et  forte,  pleine 
de  ressort  et  de  vivacité,  et  qui  n'avait  jamais 
été  atteinte  par  aucune  maladie  :  tçl  était  Horne- 
mann,  lorsque  dans  l'été  de  1796  il  pria  son  pro- 
fesseur d'histoire  naturelle,  M.  de  Blumenbach^ 
de  le  recommander  à  la  société  de  Londres  pour 
les  découvertes  en  Afrique.  Il  s'offrit  pour  être 
au  nombre  des  voyageurs  de  cette  société,  et  fut 
accepté.  Il  résida  encore  pendant  près  de  deux 
ans  à  l'université  de  Gôttingue.  Il  se  préparait , 
par  l'étude  dès  langues  orientales  et  de  l'astro- 
nomie ,  au  grand  voyage  qu'il  voulait  entrepren- 
dre. Il  partit  de  Londres  en  février  1 797  ;  puis , 
traversant  la  France,  il  s'embarqua  à  Marseille 
et  se  rendit  en  Egypte.  Pour  mieux  s'instruire 
dans  la  langue  et  les  habitudes  des  Arabes,  il 
54Journa  pendant  quelque  temps  au  Caire  ^  se  fît 
circoncire ,  et  passait  jpour  un  mahométan.  Il  se 
mit  en  route,  le  5  septembre  1798,  avec  une 
caravane  qui  se  rendait  au  Fezzan  par  le  désert  de 
Libye.  C'est  de  Mourzouk ,  la  capitale  du  Fezzan , 
qu'il  a  envoyé  la  relî^^tion  de  i^on  voyage,  et  tous 
les  renseignements  qu'il  avait  pu  recueillir  sur 


PftEMliR£    PARTIE.  89 

l'intérieur  de  TAfrique.  Le  6  avril  1800,  il  écri- 
vait de  cette  ville  qu'il  était  sur  le  point .  de 
partir  avec  la  caravane  qui  se  rendait  au  Bomou. 
Depuis  on  n'a  point  reçu  directement  de  ses  nou- 
velles. ,  Quelques  rapports  vagues  et  incertains 
firent  concevoir  un  instant  l'espoir  qu'il  était 
retenu  prisonnier  dans  le  Bornou  ;  mais  des 
détails  plus  récents  et  plus  précis  ne  semblent 
laisser  aucun  doUte  sur  sa  mort^  ni  sur  la  perte 
de  ses  papiers. 

La  relation  du  premier  voyage  deHornemann  (i) 
au  Fezzan  nous  a  mieux  fait  connaître  cette  con- 
trée et  les  oasis  de  Si<vah  et  A'jdudjelahj  ainsi 
que  la  partie  du  désert  qui  sépare  V Egypte  du 
Fezzan  ;  elle  justifie  les  espérances  que  l'on  avait 
conçues  de  ce  voyageur,  et  augmente  encore  les' 
regrets  que  sa  perte  a  fait  éprouver.  La  traduc- 
tsiCtR  française  dé' cet  ouvrage  a  donné  occasion 
àil:|Ktant  qui  l'a  revue  (2),  de  publiçr  un  itiné- 
raire de  Tripoli  ^n  Fezzan ,  rédigé  par  un  Tripo- 
litain ,  dont  les  géographes  qui  ont  dressé  dans 
ces  derniers  temps  des  cartes  d'Afriijue  oïit 
ignoré  l'existence  ou  méconnu  Futilité. 


(i)  The  Journal  of  Frederick  Hornemann*s  Travelsfrom 
Cairo  to  MourzoùJt,  in- 4^,  i8oa, 

(a)  L'auteur  avait  écrit  originairement  sa  relation  en 
allemand ,  et  elle  a  été  publiée  dans  cette  langue.  Le  tra- 


90  RECHERCHES    SUR    LAl^RIQUE. 

La  société  de  Londres ,  ayant  peu  d'espoir  de 
voir  s'effectuer  le  retour  si  désiré  de  M.  Home- 
mann,  écouta  les  propositions  de  M.  Nidiolis^ 
qui  croyait  pouvoir  pénétrer  dans  l'inUérieur  de 
l'Afrique,  en  partant  de  Caiabat  dans  le  gotfe 
de  Bénin.  M.  NichoUs  y  arriva  en  janvier  i8o5. 
On  avait  appris  que  les  habitants  du  Claiaéar{i) 
trafiquaient  dk«ecten)ent  avec  le  pays  de  Haoussa^ 
situé  à  l'est  de  Timboucêou. 

M.  NichoUs  commença  son  voyage,  en  ï8o5, 
en  remontant  la  rivière  de  Cakd^ar^  que  quel- 
ques géographes  croi^t  être  ie  Joliha  ou  Niger^ 
qui,  après  avoir  cotilé  pendant  quelque  temps 
vers  Test ,  se  reploie  ^à  l'ouest  et  se  jette  dans 
le  g<d&  de  Bénin  {%).  Lors  même  qu'on  n*aur 
'rait  pu  réussir  -à  s'avancer  dans  l'intériettr  de 
l'Afrique,  la  connaissance  du  cours  de  la  rivière 
de  la  Calabar  et  de  totfte  cette  contrée,  qu'on 
n'avait  point  encore  explorée ,  eût  été  une  ac- 


ductear  aoglais  a  fait  plusieurs  eontre-sens ,  ^q\  ont  été 
corrigés  dans  la  traduction  française  faite  sous  les  yeux  de 
M.  Langlès,  a  v.  in-B**,  Paris.  —  Nous  avons  fait  usage  de 
l'itinéraire  pour  notre  carte.  Toyez  ci-après. 

(i)  Proceedin^gs  of  the  Association  for  promoting  the  dis- 
coveries  in  the  intefior  ofAfrica^  tome  II,  page  38a. 

(a)  Voyez  M.  Bjeicfasird>  Annales  des  Voyage ,  tome  V, 
pag»  a  1^-244. 


PREAIIÈRE     PARTiE.  9I 

qutsition  préc^ase  pcmr  la  géographie.  Mais,  par 
une  fetalité  qui  semble  attachée  à  toutes  les  en* 
tpeprises  de  découvertes  en  Afrique,  M,  Nicholls 
mourul;  de  la  fièvre. 

Un  jeune  allemand  nonrnié  Roentgen,  recom* 
mandé  comme  Home^nann  par  le  professeur 
Blumenbadi  ii  sir  Joseph  Banks ,  fut  envoyé 
à  Mogador  au  commencement  de  1809,  dans 
le  dessein  de,  pénétrer  à  Timbouctou.  Il  cacha 
pendant  long-temps  son  nom  et  sa  mission. 
Il  s'était  soumis  à  la  'circoncision,  avait  appris 
l'arabe^  et  prétendait  se  faire  passer  pomr  mu- 
sulman. Il  partit  de  Mogador  avec  deux  guides 
pour  aller  joindre  la  caravane  du  Soudan.  Quel* 
ques  jours  après,  son  cadavre  fut  trouvé  à  pefb  ' 
de  distance  de  la  ville.  Il  est  probable  qu'il  a' 
été  assassiné  par  ses  guides  (i). 

Le  comité  de  l'association  cessa  p^idant  quel* 
que  temps  d'envoyer  des  voyageurs  en  Afrique; 
mais  il  continua  de  prendre  tous  les  renseigné- 

(i)  Annales  des  Voyages^  de  la  Géographie  et  de  l'Histoire^  * 
tome  XVH,pagc  ^gS.  — Leydcn's  Historical  account  x^  the 
discoverieit  and  Travels  in  Africa^  édît.  181 7,  tome  I, 
page  434  ;  et  Grey  Jackson ,  An  account  qf  Timhuctoo  and 
Haoussa,  i8tào,  in-8®,  p.  4^*5.—  Quarterly-Review  1S17, 
vol.  XVII,  p.  321.  Il  paraît,  d'après  ce-.^uç  dit  le  journa- 
liste, que  Roentgen  n'était  pas  employa  par  le  comité  de 
l'association,  mais  par  le  gouvernement  même.    ' 


9a  KECHERCHES    SUA    LA.F11IQUE. 

méats  qui  pouvaient  concourir  au  but  de  son 
institution.  Déjà  en  i8o4,  M.  Cahill  de  Rabat 
lui  avait  transmis  ceux  qu'il  avait  reçus  du  dié* 
rif  Hadji'Mohammed,  qui  résidait  au  Puits  d'^- 
roanj  à  deux  ou  trois  journées  de  Timboudou, 
Selon  ce  ehérif,  les  Nègres  de  Bambarra^  dont 
la  capitale  est  56go,  s'étaient  emparés  de  Timr 
boudoa  en  avril  1 8o3 ,  et  avaient  enlevé  le  gou- 
vernement de  cette  ville  aux  Maures,  qui  y 
résidairat  cependant  encore  et  y  faisaient  le 
commerce  sous  la  protection  de  ces  nouveaux 
dominateurs.  Le  Niger  ou  Joliba  coule  à  Test. 
Entre  Silla  et  Ghinnjr  ou  Guinée  le  voyage  n'est 
que  de  deux  journées.  On  met  dix  jours  à  se 
rendre  de  Ghinny  à  TimboucioUy  en  vcfyageant 
par  terre.  A  l'est  de  Kabra^  qui  est  le  port  de 
Timboudou  et  qui  en  est  éloigné  de  cinq  à  six 
heures  de  marche,  le  6euve  coule  à  Bouiou^i^ 
est  le  port  de  i7aoaj;sa  et  de  CocAeno^  De  iCa&fii, 
le  port  de  TimboucJlou ^k  Agadez  vo^  le  nord, 
qui  est  une  ville  nègre  composée  de  cabanes  de 
roseaux,  on  compte  huit  joius  de  mardie;  d'>/- 
godez  (i)  à  Humbriy  quinze  jours  de  marche; 
de  Hwnbri  à  Bauiau ,  le  port  de  Cachenah  et 
de  Huoiissaj  on  compte  vingt  on  vingt -cinq 

(i';  Oa  ne  doit  pas  confondre  cette  Tille  à'J^adn  avec  la 
eapîtade  û'Mét^i  ce  nf  ^at  être  la  m^e.  oo  il  y  a  enear. 


*    PREMIERE     PARTIB.  qS 

jours  de  marche.  Le  peuple  de  Boutou  se  rend 
par  eau  à  TimbouctoUy  pour  y  vendre  des  toiles 
teintés  en  bleu.  A  l'est  de  Boutou^  le  chérif 
Mohammed  ne  connaît  rien  sur  le  cours  du 
Niger.  Seulement  il  savait  que  la  navigation  en 
est  interrompue  par  des  chûtes  ou  des  cataractes; 
et  les  habitants  de  Hutérieur  de  l'Afrique  croient 
que,  le  Niger  est  le  Nil  ôl  Egypte^  ou  que  du 
moins  il  se  jette  dans  ce  fleuve.  Tels  sont  les 
renseignements  donnés  par  le  chérif  Moham- 
med (i). 

M.  Grey  Jackson ,  consul  anglais  à  Mogador^ 
donna  au  cpmité^en  i8o5^1es  notions  qu'il  avait 
obtenues  de  deux  savants  musulmans,  et  que 
depuis  il  a  développées  avec  plus  de  détails,  en 
1 809 ,  dans  sa  description  de  l'empire  de  Maroc  (a) 
et  dans  un  ouvrage  récent.  La  ville  appelée  Tim- 
bouctou  par  les  Arabes ,  et  Timoucatouh  par  les 
Téhilous  (3),  est  à  dix  milles  anglais,  selon 
ç ■  

(1)  Proceedings  oftheAfrican  cLssociation  y  tome  II,  pages 
3aa  -  324. 

(2)  Proceedings  of  the  Jfrican  association ,  tome  II, 
page  369.  —  Jackson's  Account  of  the  empiré  ofMarocco , 
London,  in- 4%  1809,  pages  287  -  262.  —  An  account  of 
Timbuctoo  and  Haoussa  hy  El  Hage  Salam  Schaabeny^  etc. , 
by  J.  Grey  Jackson,  1820^  in-8%  page^  443  et  446. 

(3)  Ce  sont*des  barbares  qut  occupent  la  partie  méridionale 
de  \ Atlas  j  et  qui  s'étendent  dans  les  plaiifés  dés  deux  pro- 


94  RECHERCHES    SUR     LAFRIQUE.  ^ 

M.  Jackson,  de  Kàbra,  qui  est  sur  les  rives  du 
Niger.  Timbouctou  est  sous  la  domination  du 
sultan  nègre  ait  Bambarra  y  qui  réside  à  Djenné 
ou  Guinée  :  Timbouctou  est  gouvernée  par  un 
canseil  ou  divan  de  douze  Alumna  ou  docteurs 
mahométans.  A  Djenné  et  à  JFimhonctoUy  le 
Niger  déborde  régulièrement.  On  voit  dans  ce 
fleuve  des  hippopotames  (i);  et  les  éléphants 
abondent  dans  les  contrées  adjacentes.  Entre 
Timbouctou  et  Càckenah,  que  Ton  appelle  Beè^ 
Haoussa  ou  entrée  de  Haoussa  (a) ,  est  une  race 
d'hommes  parttculi^s  que  les  Arabes,  pour  la 
blancheur,  comparent  aux  Anglais  (3).  A  quinze 
journées  à  l'est  de  Haoussa ,  est  un  lac  immense 
qu^on  nomme  Bahar-Soudan  ou  mer  duSoudan. 
Ses  bords  sont  très-peuplés,  et  on  y  copstruit 


vînces  à^Suz  et  d*^a^.— Voyez  le  Mémoire  de  M.  Dupuis^ 
à  la  suite  de  la  Relation  d*Adam,  page  276  de  la  trad.  f!r. 

.  (i)  Ainadi-Fatouma  et  Sidi-Hamet,  dans  Riley ,  attestent 
aussi-  Texistçnce  de  rhippopotame  dans  le  Soudan. 

(a)  M.  Purdy  a  adopté  cette  assertion,  et  loi  a  donné  place 
sur  sa  carte;  mais  je  crois  que  c'^st  à  tort:  le  Beb'H<wsjsa 
ou  la  lin^te  dupaysdelTaou^^a  est  limitrophe  de  Cnehenah; 
mais  il  y  a  des  Vnotifs  de  croire  que  ce  sont  des  contrées  dif- 
férqptes. 

(3)  UiT  girand  nombre  de  témoignages  concourent  à 
constater  l'existence  d'une  race  de  blancs  dans  riolérieur 
de  rÀ^frique.  Voyez  Bowdich,  p*  i87« 


PKSMIlkliE     FARTIC.  g5 

des  vaisseaux.  Les  Arabes  assurent  qu'il  existe 
une  communication  par  eau  entre  Timbouciou 
et  le  Caire.  Tous  croient  que  le  Nil  qui  coule 
à  Timbouciou  est  le  même  fleuve  que  le  Nil 
^Egypte.  Pour  se  rendre  de  Timbouciou  au 
Caire  9  on  préfère  aller  par  teire;  et  le  transp<»t 
des  marchandises,  par  le  moyen  des  caravanes, 
est  moins  coûteux  que  par  eau.  On  a  cependant 
di|tà  M.  Jackson  q^i'en  1780  dix-sept  nègres  de 
D/enné  (Guinée) ,  parlant  arabe  et  pouvant  lire 
le  Koran,  s'embarquèrent  dans  un  canot,  et  se 
rendirent  à  7V//2^02/c^ou  pour  commercer:  après 
avoir  échangé  leurs  marchandises,  ils  continuè- 
rent à  naviguer  vers  l'est,  et  arrivèrent  au  Caire. 
Ils  racontèrent  qu'entre  Timbouciou  et  le  Caire 
ils  avaient  vu  plus  de  douze  cents  \illes ,  bâties 
sur  les  bords  du  fleuve ,  et  garnies  de  mosquées 
et  de  tours*  Dans  trois  endroits  différents  le  Nil 
étsdt^  si  peu  profond  à  cause  des  canaux  de  dé- 
rivation qu'on  avait  pratiqués  pour  arroser  les 
campagnes  environnantes,  qu'ils  furent  obligés 
de  transporter  leur  canot  par  terre,  jusqu'à  ce 
qu'ils  trouvassent  assez  d'eau  dans  le  fleuve  pour 
naviguer.  Ils  furent  aussi  arrêtés  par  trois  ca- 
taractes considérables ,  dont  la  principale  est  à 
l'entrée  du  pays  de  Quangara  ;  c'est  là  un  des 
endroits  où  ils  furent  obligés  <^  transporter 
leur  canot  par  terre.  Quand  iKle  remirent  à  flot, 


96  RECHERCHES     SUR     l'aFRIQUE. 

ce  fut  dans  un  lac  immense  [Merdjà) ,  dont  on 
n'apercevait  pas  les  bords.  Us  virent ,  sur  les  rives 
du  Nilj  des  hippopotames  (i)  et  des  crocodiles, 
et,  dans  les  forets  environnantes ,  beaucoup  d'é- 
léphants. Au  Caire  ils  se  joignirent  à  la  grande 
caravane  de  Vouest  nommée  u^Mabah^el-Garbie y 
et  arrivèrent  à  Maroc.  Ils  repartirent  ensuite 
avec  la  caravane  èiAkka^  qui  les  conduisit  à 
Djenné  (  Guinée  ) ,  leur  patrie ,  dont  ils  avaient 
été  absents  pendant  trois  ans  et  deux  mois.  Tels 
sont  les  principaux  renseignements  qu'a  obtenus 
M.  Grey  Jackson  (q). 

Us  coïncident  presque  en  tout  avec  ceux  que 
M.  Badia ,  ou  Ali-Bey ,  a  reçus  vers  le  même  temps 
en  i8o5,'et  dans  le  même  pays,  de  Sidi*Math- 
Bouhlal,  frère  du.cheyk  nommé  par  l'empereur 
pour  gouverner  la  caravane  de  Xz  Mecque.  Bouh- 
lal avait  résidé  plusieurs  années  k' J'imbouctou 
et  dans  d'autres  pays  du  Soudan.  U  affirme  aussi 
que  le  Nil-Abid^  ou  le  Nil  des  Nègres^  coule  à 


(i)  Voyez  ci^ dessus,  p.  94. 

(2)  Proeeedings  of  the  Association  for  promoting  tke 
discovery  of  the  interior  parts  of  j^rica,Yo\,  II,  p.  366. 
—  J.  Gfey  Jackson,  An  account  of  the  empire  ofMaroccOy 
în-4%  1809,  chap,  ^iii,  p.  2^7  à  266,  et  p.  3i2  de  la  2* 
ou  3*  édit.  —  et  Schaahenj*5  account  of  Timhuctoo  and 
Housa,  etc.,  i8ao ,  in-8**,  p.  444. 


PREMIÈRE     PARTIE.  Q-y 

l'est ,  que  tous  les  ans  il  déborde  pendant  la 
saison  des  pluies,  inonde  le  pays  et  ressemble 
à  un  bras  de  mer;  que  Vers  l'intérieur  il  forme 
un  lac  immense  {Bahar)^  sur  les  bords  duquel 
les  barques  des  Nègres  naviguent  quarante-huit 
journées  de  marche,  mais  sans  apercevoir  la 
terre  opposée.  On  rapporte,  selon  Boublal,  que 
cette  mer  communique  avec  le  Nil  di  Egypte; 
niftis  il  n'y  a  rien  de  certain  sur  cela.  On  ajoute 
que  Haoussa  ^st  une  ville  extrêmement  grande 
et  bien  peuplée,  à  l'est  de  Timbouctou[i),  et 
qu  elle  est  très-civilisée  . 

Pendant  qu'on  recueillait  tous  ces  rapports 
incertains,  et  qu'on  faisait  des  tentatives  infruc- 
tueuses et  presque  toujours  funestes,  le  plus 
célèbre  des  voyagèiu'S  en  Afrique,  celui  dont 
les  efforts  avaient  obtenu  les  plus  grands  résul- 
tats, Mungo-Park  était  retiré  en  Ecosse  sa  patrie. 
Là  il  eut  occasion  de  s'entretenir  avec  M.  Max- 
well, qui  avait  souvent  navigué  pour  les  affaires 
de  son  commerce  dans  la  rivière  du  Congo.  Tous 
deux  pensèrent,  d'après  diverses  indicattions ,  que 
ce  fleuve  dont  on  ignorait  la  source  était  le  /o- 
liba  ou  Niger,  qui,  après  avoir  coulé  vers  Test, 
se  détourne  aji  sud-ouest.  Ils  exposèrent  leurs 

(i)  Forages  d'Aly-Bey  elÂhassi^  in-S-^,  1814 1 1. 1,  p.  388. 
Bouhlal  nomme  cette  ville  Tômhut^  et  non  Timbouctou. 

7 


98      RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

idées,  non  à  la  société  pour  les  découvertes  en 
Afrique^  mais  au  gouvernement  méine.  Leur 
projet  de  voyage  fut  approuvé  par  ceux  qui  ré- 
gissaient le  département  des  colonies.  On  donna 
des  ordres  au  gouverneur  de  Corée  pour  cette 
expédition,  et  Ton  y  consacra  une  somme  de 
cinq  mille  guinées  (120,000  fr.) 

Mungo-Park  partit  donc  de  OVjrij  petit  village 
près  de  P«a/im,le  27  avril  i8o5,  et  se  dirigea 
vers  le  Niger  par  une  route  plus  courte  et  plus 
directe  que  celle  qu'il  avait  suivie  dans  son  pre- 
mier voyage.  Ce  fut  le  19  août  que  du  haut 
d'une  colline,  près  de  Bambakou^  il  vit  pour  la 
seconde  fois  le  grand  fleuve  du  Soudan  couler 
dans  la  plaine,  vers  l'orient.  Mais  il  semble 
qu'avec  des  moyens  plus  abondants  et  une  es- 
corte plus  nombreuse ,  Mungo-Park  ait  dédaigné 
cette  fois  la  prudence  qui  l'avait  si  bien  servi 
dans  sa  première  expédition.  Il  s'était  mis  la 
seconde  fois  en  route  pendant  la  saison  des 
pluies.  Aussi,  lorsqu'il  arriva  à  Sansanding  (i)  ^ 
ville  siCùée  sur*  les  bords  du  JSiger  et  dont  la 
population  est  d'environ  onze  mille  âmes ,  il 


(i)  Ce  nom  de  Sansanding  doit  être  appellatif;  cap 
on  retrouve  un  lien  nommé  Sansanding,  sur  la  roule  de 
Mnn^-Park,  à  Test  de  la  Faieméj  dans  le  jroyannie  de 
Saiadou. 


PR£MlèRE     PA.RTIE.  99 

avait  perdu  par  les  maladies  la  plupart  de  ceux 
qui  raeoempagnaient.  Il  ne  lui  restait  plus  qae 
quatre  hommes.  Toutefois  il  s'embarqua  sur  le 
Niger,  à  Sansanding ,  le  17  novembre  i8o5, 
pour  s'enfoncer  dans  l'intérieur  du  Soudan; 
mais  il  eut  la  précaution  de  confier  son  joiirnfil 
et  ses  papiers  à  un  de  ses  nègres  nommé  Isaac, 
et  il  lui  ordonna  de  retourner  aux  établisse- 
ments anglais  à  l'embouchure  de  la  Gambée. 
En  1806,  des  bruits  sinistres  commencèrent  à 
se  répandre  sur  la  fin  malheureuse  de  Mungo- 
Park.  On  envoya  le  nègre  Isaac  à  sa  rencontre. 
Celui-ci  fiit  de  retour  en  septembre  1 8 1 1;  il  avait, 
à  ce  qu'il  disait,  trouvé  à  Sansanding  Amadi- 
Fatouma,  qui  s'était  engagé  à  servir  de  guide  à 
Mungo-Park.  Amadi-Fatouma  remit  à  Isaac  un 
journal  écrit  en  arabe,  qui  contient  le  récit  du 
voyage  de  Mu«go-Park  sur  le  Niger  jusqu'au- 
delà  de  TimbouctoU^  à  un  endroit  du  fleuve  res- 
serré entre  des  rochers,  où  il  fut  assassiné.  Qn  a 
*  suspecté  la  véradifcé  de  ce  journal;  mai»  la  calas- 
trophe  qu'il  aamooïtîe  ne  paraît  que  trop  .cer- 
taine, et  a  été  cc^firmée  par  d'autres  rapports 
qui  ne  iai&sent  plus  aucun  sujet  d'en  douter  (i). 


(i)  Mungo  Park's  Second  Jcfarney,  Londpn,  În-4**,'i8i5, 
p.  »t4.  —  Leyden's  Hin^càl  aceoum,  t.ll^  p.  4^8-467. 
—  JBodwich'»,  Mission  to  A$hantee^  dans  l'Appendice;  et 

7- 


lOO  RECHERCHES    SUR    I'aFRIQUE. 

Tout  ce  que  Mungo-Park  avait  écrit  sur  ce 
dernier  voyage  a  été  publié  tel  qu'il  l'avait  en- 
voyé, avec  une  louable  fidélité.  Sansanding^  le 
dernier  terme  de  ce  second  voyage,  étant  près 
de  Sego ,  n'est  pas  encore  aussi  avancé  vers  l'o- 
rient que  ^///a,  jusqu'où  Mungo-Park  était  pré- 
cédemment parvenu  ;  et ,  sous  ce  rapport ,  on 
peut  dire  que  son  second  voyage  ne  renferme 
aucune  découverte  nouvelle  :  mais  il  a  été  ce- 
pendant d'une  grande  utilité  pour  les  progrès 
de  la  géographie.  Outre  qu'il  a  confirmé  ce 
que  le  premier  avait  fait  connsutre  sur  l'exis- 
tence d'un  grand  fleuve  qui  coule  vers  l'orient , 
Mungo-Park ,  étant  pourvu  d'excellents  instru- 
ments ,  a  déterminé  par  des  observations  la 
latitude  de  vingt-trois  stations,  et  la  ïongitude 
de  quatre  ;  par  ce  moyen  nous  avons  pu  tracer 
avec  exactitude  la  route  qu'il  avait  parcourue, 
et  même  rectifier  la  géographie  de  son  précédent 
voyage.  Par  les  informations  qu'il  s'est  procurées 
d'un  vieil  Africain  qui  avait  fait  sept  fois  le 
voynge  de  Timhouctou  et  qui  y  retournait  pour 
la  huitième  fois,  Jtfungo-Park  ne  nous  a  plus 
laissé  de  doute  jsur  l'existence  du  hj^Dibbie^  et  il 
nous  a  donné  de  nouvelles  lumières  sur  les  ri- 

Jackson's  Shaaheny's  account  cf  Timbuctoo  and  Homsa  ^ 
i8ao,  iu-8%  p.  400  à  4x5.      ' 


PREMIÈRE    PARTIE.       ^  JOI 

vières  qui  s'y  jettent  et  sur  celles  qui  en  sortent. 
Selon  le  dessin  tracé  par  le  vieil  Africain,  il  pa- 
raît que  la  plus  grande  étendue  du  lac  Dibhie 
est  du  nord  au  sud;  qu'il  reçoit  de  l'ouest  le  /o- 
Uba^  et  le  Bd-Nimma  (i), lequel  se  grossit  du 
Miniana^  avant  de  se  jeter  dans  le  lac.  Les  ri- 
vières qui  coulent  à  l'est  du  lac,  forment  une  île 
nommée  Djinbala.  Tout  ceci  s'accorde  avec  ce 
que  Mungo-Park  avait  appris  dans  le  premier 
voyage.  Mais  le  vieillard  africain  plaçait  sur  son 
dessin  Djénni  ou  Guin  sur  le  Bâ-Nimma  :  aussi 
Mungo-Park  dit-il,  d'après  ce  renseignement, 
qu'il  ne  verra  pas  Jenni  en  allant  à  Timbouctou; 
ce  qui  semble  être  une  erreur,  puisque  Amadi- 
Fataouma,  lorsqu'il  s'embarqua  pour  servir  de 
guide  à  Mungo  -  Park ,  se  rendit  en  deux  jours 
de  Silla  sur  le  Niger  à  Djénni  (a).  Ce  der- 
nier renseignement  paraît  confirmer  ceux  qu'on 
a  obtenus  précédemment  sur  la  situation  de 
Djénni. 

Mungo-Park  termine  son  journal  par  les  iti- 
néraires qu'il  s'était  procurés  sur  les  routes  qui 
cpnduisent  de  Sego  dans  le  pays  de  Miniana  et 

■'■!■'        '  '  '    ■      '■    '      ■  "        ■  Il     H»»i  ■  ■■  ■ I  I         II    —— —     I  I  m  ' 

(i)  Mtingo-Park,  Bd  signiAe  fleuve  ou  mière,  en  lan-< 
gage  da  pays  ;  ainsi  JoU-Bd,  ou  DjaU-Bdy  signifie  la  rivière 
Joli  y  ou  DjaU. 

{il)  Journal  ofa  Misdon  to  éie  interioro/Afiica^  London  ^ 
1820,  in- 4^,  pages  i65  et  ao8. 


lOa  RECHERCHES     SUR     LAFRIQUE. 

de  BadoUj  et  qui  sont  au  sud  et  à  l'est  du 
Bambdha.  Malheureusement  ces  itinéraires  ne 
contenant  que  des  noms,  il  est  difficile  d'en  faire 
usage  pour  la  géographie.  Ils  nous  apprennent 
cependant  qu'il  y  a  sept  jours  de  marche ,  et 
sept  villes  ou  stations^de  Sego  à  Miniana;  que  les 
habitants  de  ces  contrées  sont  anthropophages , 
c'est-à-dire  qu'ils  mangent  leurs  ennemis  tués 
à  la  guerre  et  les  étrangers  morts  dans  le  pays. 
On  compte  trente  stations  entre  Sego  et  Badou; 
ce  qui  semble  indiquer  trente  journées  de  mar- 
che entre  ces  deyx  lieux  :  mais  ce  n'est  qu'après 
la  vingt-huitième  station  qu'on  sort  du  Bambarray 
'  et  qu'on  arrive  à  Totti^  et  ensuite  à  Badou, 
capitale  du  pays  de  ce  nom.  Avant  d'arriver 
dans  ce  dernier  lieu ,  on  passe  par  le  pays  des 
Jouli  qui  entendent  le  langage  des  Miniana , 
et  des  Badou  qui  sont  employés  comme  mar- 
chands et  comme  interprètes  pour  ces  contrées. 
Après  trente  jours  de  marche  au  sud  de  Badou, 
à  travers  le  royaume  de  Gotto^  on  arrive  au 
pays  des  Chrétiens ,  qui  ont  leurs  maisons  sur 
les  bords  du  Ba-si-fina.  Le  Ba^si^fina  présente, 
dit -on,  une  étendue  d'eau  incomparablement 
plus  grande  que  celle  du  lac  Dibbie,  Cette  eau 
coule,  tantôt  d'un  côté,  tantôt  de  l'autre  :  ceci 
.nous  indique  que  Badou  est  à  trefite  jours  de 
marche   des  établissements  européens   sur    la 


PREMIÈAE    PARTIE.  îo3 

Côte 'd'or  ou  de  Guinée^  où  l'Africain  qui  a 
donné  ces  renseignements  à  Mungo-Park  a  ob- 
servé pour  la  première  fois  exactement  le  phé- 
nomène du  flux  et  du  reflux,  Il  faut  se  garder 
de  confondre  le  Ba-si-fina  avec  le  lac  du  Sou-- 
dan^  ainsi  que  l'a  fait  M.  Jackson;  erreur  d'au- 
tant plus  singulière,  qu'indépendamment  de  ce 
que  la  position  du  Ba-si-fina  de  Mungo-Park, 
par  rapport  à  Badoû ,  s'oppose  à  ce  qu'on  puisse 
se  méprendre,  M.  Jackson  remarque  lui-même 
que  ces  mots  Ba-sifina  sont  la  corruption  des 
mots  arabes  Bahar-Sifina^  qui  signifient  mer 
des  vaisseaux  (i).  Mungo-Park  termine  en  di- 
sant qu'il  n'y  a  point  de  Schea  (chi)  ou  d'arbres 
à  beurre  dans  Kong  ou  Gotto;  ce  qui  semblerait 
indiquer  que  ces  deux  derniers  noms  s'appli- 
quent à  une  même  contrée. 

Isaac,  qui  fut  envoyé  à  la  recherche  de  Mungo- 
Park,  s'arrêta  à  Sansanding^  et  il  ne  fournit  dans 
son  journal  aucune  nouvelle  notion.  Le  récit 
d'Amadi-Fatouma ,  qui  vint  joindre  Isaac  à  San-' 
sanding  y  le  lo  octobre  1810,  contient  le  peu 
qu'on  a  pu  apprendre  de  la  fin  malheureuse  de 
l'expédition  de  Mungo-Park  ;  il  nous  conduit  de 
I  I        '■  ■  I i.i»       ,  I    I   II  I  II         I    II 

(1)  MungcKPark ,  The  Journal  of  a  Mission  to  the  inte- 
rior  of  Jfrica^  the  year^  i8o5,  p.  168.  —  Jackson's 
Shaaheny's  account  of  Timbuctooy  p.  45o,  4Sx  9  Ifi^^ 


I04    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Sansanding  à  Silla^  de  SUla  à  Guin  ou  L^'enni, 
ensuite  à  Dibbie,  qui  est  nonuné  Sibby;  de  là  à 
Timbouctou;  ensuite  à  Gouroumo^  puis  à  la  ré- 
sidence du  roi  Gotodji;  après  avoir  traversé  ses 
états,  on  trouva  un  hippopotame,  et  sur  l'autre 
rive  un  fort  parti  de  la, nation  des  Poules  (i)  : 
la  route  se  dirige  ensuite  de  Kaffo  à  Karmassi;  de 
là  yn  passe  à  Gourmon  et  à  Yaour^  et  Ton  arrive  à 
Boussaj  où  Mungo-Park  fut  tué.  Quoique  ce  récit 
soit  fort  obscur  et  incertain,  cependant  n'oublions 
pas  de  faire  observer  que,  sur  la  carte  de  d' An- 
ville,  comme  siu*  celle  de  Delisle,  on  remarque 
au  sud-est  de  Timbouctou  les  noms  de  Comui' 
chy^  de  YaouH  et  de  Bousa^  qui  indiquent  trois 
positions  contiguës  :  il  n'est  guère  possible  de 
douter  que  ce  ne  soient  les  villes  de  Karmassi  ^ 
de  Yaour  et  de  Boussa^  dont  il  est  £adt  mention 
dans  le  récit  d'Amadi-Fatouma. 

J'ignore  si  le  colonel  Boutin,qui  fit  en  1812 
un  voyage  de  découvertes,  se  proposait  de  pé- 
nétrer plus  avant ,  ou  s'il  s'est  procuré  des  ren- 
seignements sur  l'intérieur  de  l'Afirique.  Comme 


(i)  La  présence  de  Plûppopotame  dans  le  Soudan  s'ac- 

>  corde  avec  le  récit  fiiil  à  M.  Jackson  ;  et  celle  de  la  nation 

des  Poules  avec  les  renseignements  donnés  à  M.  Mollien 

(  Voyage  dans  Vintérieur  de  V Afrique ^  tome  I,  p.  219),  et 

aussi  avec  Ibn-Batouta.  —  Voyez  ci-dessas ,  page  26. 


PREMIÈRE    PARTIE.  Io5 

le  colonel  Boutin  a  été  assassiné  dans  les  mon- 
tagnes de  Syrie  y  tout  ce  que  nous  savons  de 
son  voyage  se  trouve  renfermé  dans  une  lettre 
fort  courte  de  M.  Barbie  du  Bocage  à  l'auteur 
du  Magasin  encyclopédique  (i).  Cette  lettre, 
qui  donne  des  détails  intéressants  sur  Swahy 
et  sur  la  partie  du  désert  comprise  entre  Siwah 
et  la  deuxième  oasis,  ne  contient  rien  de  relatif 
à  l'objet  qui  nous  occupe. 

Mais,  en  1810,  un  matelot  américain, xiommé 
Robert  Adams ,  fit  naufrage  sur  la  côte  occiden- 
tale d'Afirique ,  un  peu  au  nord  du  Cap-Blanc  ; 
il  fut  fait  esclave  par  les  Maures,  et  emmené 
dans  l'intérieur  de  l'Afrique.  Si  l'on  en  croit  ses 
récits ,  il  a  été  conduit  à  Timhouctou ,  et  y  a 
résidé  cinq  mois.  Cette  ville,  selon  lui,  est  située 
dans  une  plaine  très -unie,  à  deux  cents  pas 
environ  au  nord -ouest  d'une  rivière  nommée 
sur  les  lieux  la  Marzarah ,  qui  peut  avoir 
dans  cet  endroit  trois  quarts  de  mille  de  lar- 
geur, et  qui  coule  au  sud -ouest  (a).  Remar- 

( i)  Magasin  encyclopédique ,  anAléè  1 8 1 3 ,  tome I ,  p.  1 29. 
Le  colonel  Boutin  a  laissé  des  itinéraires  en  Orient ,  et  di- 
vers écrits  qui  sont  restés  manuscrits ,  et  qui  sont  conservés 
an  Dépôt  des  fortjfications. 

{*k)The  Narrative  of  Robert  Adams  m  Sailor,  London,  18 16, 
p.  a5,  €t  p.  53  de  la  traduction  Crançaise,  in-8°,  tljris,  181 7. 
—  Voyez  ci- dessus^  page  83. 


106  RECHERCHltS     SUR     l'aFRIQUE. 

quons  que,  d'après  les  premiers  renseignements 
obtenus  par  la  société  pour  les  découverte^  en 
Afrique ,  de  Sidi-Inhammed  et  Ben- Ali ,  il  était 
dit  que  le  Nil  ou  la  rivière  près  de  Tinibouctou 
coulait  vers  l'ouest,  et  se  nommait  Gnewa  ou 
Noire (i).Abd-Arrachman,  ainsi  que  nous  l'avons 
déjà  dit ,  assura  aussi  à  M.  Niebhur  que  la  rivière 
de  Timbouctou  coulait  à  l'ouest.  Léon  l'Africain , 
qui  a  navigué  de  Timbouctou  à  Djenni  ou  Gui-- 
née^  le  xlit  d'une  manière  plus  positive  encore. 
Nous  aurons  plus  d'une  occasion  de  faire  ob- 
server à  nos  lecteurs  les  contradictions  qui 
existent  sur  ce  point ,  le  plus  important  de  tous. 
Adams  s'accorde  aussi  avec  M.  Jackson  sur  le 
nom  de  WouUo  que  portait  le  souverain  nègre 
qui  régnait  alors  à  Timbouctou  et  dans  le  Bam- 
barra.  Adams  assure  que  Timbouctou  est  actuel- 
lemeiit  au  pouvoir  des  Nègres  idolâtres ,  et  que 
les  Maures  mahométans  qui  viennent  y  faire 
le  commerce  sont  désarmés  avant  d'entrei:  dans 
la  ville  :  à  cjrt  égvd  son  récit  concorde  avec 
celui  de  M.  Cahill,  que  nous  avons  rapporté 
précédemment,  ainsi  qu'avec  celui  qui  a  été 
fait  à  M.  Riley,  dont  nous  parlerons  bientôt  (ot). 

« 
(i)   James-Grey-Jac^son's   Account   of  the    empire   of 

MamccOj  p.  253. 

(7)  J.  Riley's  Loss  qf  the  American  Brig  of  commerce , 


PREMIÈRE    PARTIE.  IO7 

M.  Dupuis,  vice*  consul  anglais  k  Mogadorj 
qui,  le  premier,  interrogea  le  matelot  Adams, 
croit  cependant,  d'après  les  renseignements  qu'il 
a  recueillis  d'ailleurs,  que,  malgré  l'assertion  de 
ce  matelot ,  les  Nègres  de  Timbouctpu  sont  ma- 
hométans ,  et  qu'il  y  a  dans  cette  ville  plusieurs 
mosquées  :  Adams  déclare  n'en  avoir  vu  aucune , 
et  n'a  nulle  part  entendu  prononcer  le  nom 
de  Joliba^^n  général ,  Adams  montrait  d'ailleurs 
une  grande  ignorance ,  et  l'insouciance  qui  est 
commune  à  presque  tous  les  hommes  de  sa 
profession  :  ses  récits  sont  toujours  vagues  et 
souvent  contradictoires  ;  mais  du  moins  ils  sem- 
blent porter  tous  les  caractères  de  la  bonne 
foi ,  et  sous  ce  rapport  ils  méritent  attention. 
L^éditeur  de  sa  relation ,  M.  Cock ,  dans  l'ana- 
lyse qu'il  a  donnée  de  la  carte  qui  l'accompa- 
gne, dit  qu*il  a  appris- de  quelqu'un  qui  a.  fait 
une  longue  résidence  au  comptoir  de  Lagôs, 
et  dans  d'autres  établissements  anglais  sur  W 
Côte  de  Bénin  ^  que  les  marchaadi  de  Haoussa 
venaient  fréquemment  à  Z^lg^o.y,  avant  rabolition 
de  la  traite  des  Nègres,  et  qu'ils  s'y  rendent 
même  encore.  On  met  quatre  mois  pour  aller 
de  Haoussa  krUi  côte  du  Bénin:  ceux  qui  ont 


Jn-4**,  London,    i8i7,p.N^64.    —  i2ic\soa's   ^aabeny't 
account  of  Timbucto&,  1820,  in-80,  p.  44i«         * 


Jo8  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

dit  avoir  fait  ce  voyage  n'annoncent  point  avoir 
rencontré  sur  leur  route  aucune  chaîne  de  mon- 
tagnes ;  mais  seulement  ils  ont  été  obligés  de 
franchir  un  grand  nombre  de  rivières,  ainsi  que 
des  marais  et  des  lacs  considérables,  qui  retar- 
daient leur  marche,  parce  qu'on  les  traverse  sur 
des  radeaux,  et  que  les  propriétaires  de  ces  ra* 
deaux  ne  veulent  faire  le  trajet  que  lorsqu'il  y 
a  un  fret  suffisant.  Les  principales  nations  que 
l'on  trouve  sur  la  route  sont  les  Jous ,  et  plus 
près  de  la  côte  les  Jlnagous  et  les  Mahis  dans 
le  voisinage  de  Dahomey  (i). 

M.  Dupuis  déclare  aussi  dans  l'aj^endice  de 
ce  voyage,  qu'un  Nègre  de  Bambarra^  acheté  à 
Tiihbouciouy  lui  avait  parlé  d'une  nation  puis- 
sante de  l'intérieur,  nommée  Gallo  ou  Quallo^ 
où  on  l'avait  transporté  comme  esclave,  nation 
qu'il  lui  représenta  comme  plus  avancée  que 
les  autres  dans  les  arts  et  la  civilisation.  Ce  pays 
doit  être  au  sud-est  de  Bambarra,  A-peu-près 
à  trois  journées  en-deçà  de  la  ville  capitale  des 
Quallo  est  un  lac  considérable,  ou  plutôt  une 

(i)  The  Narrative  of  Robert  Jdams]  p.  xxxrij ,  et  p.  28  de 
la  trad.  franc.  Ce  rapport  est  contredit  par  M.  Bowdich , 
Mission  to  Aslmntees ^  p.  224-226,  et  il  nous  a  remis  une 
note  qui  semble  en  démontrer  la  fausseté  :  mais  nous  n'avons 
pas  dû  omettre  cette  portion  de  la  narration  d'Adams;  car 
notre  )mf,  dans  cette  partie  de  notre  ouvrage,  est  seule* 
ment  de  recueillir  les  témoignages.  * 


PREMIÈRE    PARTIE.  IO9   ^ 

rivière,  qui  communique  avec  le  Niger^  et  dont 
ce  nègre  profita  depuis  pour  effectuer  son  éva- 
sion; ce  qui  semble  confirmer  ^existence  du 
grand  fleuve  nommé  Quolla ,  dont  M.  Bowdich 
a  le  premier  donné  connaissance ,  et  dont  nous 
parlerons  plus  amplement  ci>après.  Tels  sont  les 
seuls  renseignements  dignes  d'attention  que  ren- 
ferme ,  sur  cet  objet ,  la  relation  d'Adams. 

Peu  de  temps  après  (en  1817)  parut  le  Voyage 
de  Riley,  subrécargue  d'un  vaisseau  américain, 
qui  a  aussi  fait  naufirage  sur  la  côte  d'Afrique, 
en  juin  i8i5;  tous  les  gens  de  l'équipage  furent 
pris,  et  emmenés  comme  esclaves  par  les  Maures 
dans  l'intérieur,  L'Arabe  auquel  M.  Riley  était 
tombé  en  partage  avait  fait  plusieurs  fois  le 
voyage  de  Timbouctou,  Il  a  donné  à  son  ancien 
esclave,  devenu  libre  par  le  paiement  d'une 
ferle  rançon,  les  détails  qu'il  pouvait  désirer, 
et  M.  Riley  les  mit  par  écrit. 

Sidi«-Hamet  a  dit  qu'il  avait  fait  d'abord  le  ^ 
voyage  de  l'intérieur  de  l'Afrique^  il  y  avait  en- 
viron dix  ans  (vers  i8o5).  Il  était  parti  de 
Oi/oA-iVoM/i,  dans  l'état  àeSuz^'àwecune  caravane 
chargée  de  toutes  sortes  de  marchandise^  de 
l'empire  de  Maroc  ^  et  composée  de  trois  mille 
chevaux  et  de  hmt  cents  hommes ,  commandés 
par  le  cheyk  Ben  -  Soleïman  de  fFald^jpn  ou 
ff^oled-^Ddeim.  Le  récit  de  Sidi-Hamet  e$t  moins 


/    IIO  RECHERCHES     SUR     LAFRIQUE. 

incohérent ,  mais  presque  aussi  vague  que  celui 
du  matelot  Adams.  La  caravane ,  commandée 
par  Soleïman,  s'arrêta  dix  jours  dans  le  désert; 
puis,  après  vingt-deux  jours  de  marche  (non 
compris  les  jours  de  repos),  elle  arriva  à  un 
lieu  nommé  Bihlah^  où  il  y  avait  de  l'eau.  La 
caravane  s'y  arrêta  sept  jours,  et  se  dirigea  au 
sud-ouest;  après  vingt  autres  jours  de  marche 
on  parvint  à«un  autre  lieu  nommé  Kibir  DJibl 
Dans  cet  endroit ,  nouveau  repos.  I^a  caravane 
ensuite  se  rapprocha  de  la  côte ,  et  arriva  enfin 
dans  le  Soudan^  chez  les  Arabes  Bessebes^  pro- 
'bablement  les  Libdessebas  des  cartes. 

Enfin  la  caravane  parvint  à  Timbouctou  :  elle 
n'entra  point  dans  cette  ville;  mais, après  qu'elle 
eut  déposé  ses-  armes ,  il  lui  fut  permis  de  cam- 
per près  de  ses  murs,  dans  une  vallée  profonde. 
'  On  trafiqua  ensuite  avec  les  Nègres ,  qui  don- 
nèrent de  la  poudre  d'or,  des  bagues  en  or,  de 
la  gomme,  des  dents  d'éléphant,  de  beaux  tur- 
bans ,  et  des  provisions  de  toute  espèce ,  c'est- 
àrdire  du  Wé,  du  riz  et  de  l'orge.  La  caravane 
donna  en  échange ,  du  fer,  du  sel ,  des  couteaux, 
du  drap  bleu  et  bknc,  de  l'ambre,  du  tabac ^ 
des  mouchoirs, de  soie,  des  épices  et  diverses 
autres  denrées,  et  aussi  des  vaches,  des  ânes  et 
des  moutons.  <  ^ 

.    La  petite  rivière ,  ou  plutôt  le  ruisseau ,  qui 


PREMIÈRE    PARTIE.  1 1  I^ 

coule  près  des  murs  de  Timbouctou  ^  éUit  à 
sec;  et  Ton  était  obligé  d'aller  chercher  de  Feau 
pour  les  chameaux  de  la  caravane  à  la  grande 
rivière  qui.  est  au  sud ,  et  qui  n'est  éloignée  de 
la  ville  que  d'une  heure  de  chemin  à  cheval« 
JL,a  caravane ,  après  être  restée  une  lune  et  de- 
mie, pour  nous  servir  des  expressions  mêmes 
de  Sidi-Hamet,  près  de  Timbouctou^  s'en  re- 
tourna par  le  nord-ouest  afin  de  s'approcher  de 
la  côte,  et  campa  sur  les  bords  d'une  rivière 
qui  n'est  qu'à  une  journée  de  marche  d'une 
grande  ville ,  nommée  Jathrow^  habitée  par  les 
Nègres.  La  caravane  s'en  retourna  ensuite  à 
Ouadi'Noun  (i). 

Dans  un  autre  Voyage,  dont  le  récit  est  en- 
core plus  confus,  Sidi-Hamet  dk  que  la  cara- 
vane dont  il  faisait  partie ,  s'étant  dirigée  droit 
vers  TimbouctoUy  au  lieu  de  marcher,  comme 
la  première  fois,  près  des  côtes,  fut  assaillie  par 
le  vent  du  désert ,  et  manqua  de  périr.  Enfin  elle 
arriva  dans  une  fameuse  vallée,  nommée  Ha^ 
hirahy  où  il  y  a  de  l'eau  (c'est  le  i?^rii>uflaA^r 
de  Léon  l'Africain ,  de  Marmol ,  et  de  tous  les 
géographes).  Un  grand  nombre  d'hommes  et 
de  chameaux  moururent  pencVint  la  traversée 

(i)  J.  Rtley's  Loss  ofthe  American  Brig  commerce ,  in-4*', 
Loudon,  1817 ,  ch.  XXV,  S  i»  P-  ^46-  345.. 


112  RECHERCHES    SUR    LÀFRIQUE. 

du  désert;  ce  qui  restait,  parvint  à  une  petite 
ville  nommée  Ouabilt  jhaLtie  sur  les  bords  d'une 
rivière  peu  considérable.  La  ville  de  Ouabik  est 
habitée  par  des  Nègres ,  qui  secoururent  la  ca- 
ravane, et  lui  donnèrent  les  provisions  qui  leur 
manquaient.  La  rivière  qui  coule  près  de  cette 
ville  a  environ  cinquante  verges  de  large  ;  elle 
est  nommée  El-Ouad'Tenijp2tr  ceux  qui  parlent 
arabe ,  et  Gozen-Zaïr  dans  la  langue  des  Nègres. 
A  une  certaine  distance  au  sud-ouest  de  ce  lieu, 
il  y  a  une  chaîne  de  montagnes  non  couvertes 
de  neige ,  mais  qui  paraissent  aussi  hautes  que 
\ Atlas  ^  vu  de  la  ville  de  Suz.  Après  quatorze 
jours  de  marche  à  partir  de  ce  lieu,  la  caravane 
arriva  sous  les  murs  de  Timhouctou ,  que  Sidi- 
Hamet;  dans  cet* endroit  de  son  récit,  dit  être  la 
capitale  du  Soudan.  Il  affirme  aussi  que  ce  nom 
de  Soudan^  pour  désigner  toute  la  contrée  au 
sud  du  Grand -Désert,  est  universellement  en 
usage  chez  les  Arabes  et  chez  les  Maures.  On 
pennti:  à  ceux  qui  composaient  la  caravane  d'en- 
trer dans  la  ville,  mais  seulement  après  qu'ils 
euœnt  remis  aux  officiers  du  roi  tous  leurs  fu- 
sils, avec  la  poudre  et  le  plomb  qu'ils  possé- 
daient (i).  La  ville  de  Timhouctou  (2),  dit  Sidi- 
"  - 

(1)  Riley,  p'.  36a. 

(a)  Biley  écrit  toujours  Tombooctoo. 


r 


PREMIÈRE    PARTIE.  1  l3 

Hamet,  est  cinq  fois  aussi  grande  que  Souirah 
(  Mogador  ).  Elle  est  bâtie  dans  une  plaine 
unie,  entourée  de  tous  côtés  par  des  collines, 
excepté  au  midi,  où  la  plaine  se  continue  jus- 
que sur  les  bords  de  cette  rivière  large  et  pro- 
fonde dont  il  a  été  question  précédemment. 
Sidi-Hamet  et  ceux  qui  l'accompagnaient  furent 
obligés  de  se  rendre  sur  ses  rives  pour  abreuver 
leurs  chameaux.  Il  assure  que  cette  rivière  coule 
vers  Test;  et  il  y  vit  un  grand  nombre  de  canots 
faits  de  troncs  d'arbres,  conduits  à  la  rame  par 
des  Nègres.  Les  murs  de  Timbouctou  sont  en 
pierres  et  en  terre.  La  plupart  des  maisons  sont 
construites  avec  de  gros  roseaux,  mais  il  y  en 
a  en  pierres;  et  on  voit  dans  certaines  rues  des 
boutiques  bien  garnies  de  diverses  marchandises. 
L.es  habitants  sont  noirs;  le  souverain  est  unNègre 
très  -  âgé  ,  à  tète  grise ,  qu'on  nomme  chigar 
(shegar),  c'est-à-dire  sultan  ou  roi.  Si  l'on  en 
croit  Sidi-Hamet,  ni  le  chigar  ni  ses  sujets  ne 
sont  mahométans.  Mais  il  y  a  une  partie  de  la 
ville  de  Timbouctou ,  séparée  du  reste  par  une 
forte  muraille,  qui  est  entièrement  peuplée  par 
des  Mahométans,  ainsi  que  la  ville  des  Juifs  ou 
le  Millah  de  Mogador,  Tous  les  Maures  ou  les 
Arabes  qui  résident ,  soit  passagèrement ,  soit 
pour  toujours,  à  Timbouctou^  ne  peuvent  passer 
la  nuit  que  dans  cette  partie  de  la  ville,  qui  leur 

8 


Il4  RECHERCHES    SUR  xl'aFRIQUE. 

est  réservée.  En  y  entrant ,  ils  sont  obligés  de 
remettre  leurs  cimeterres  ou  leurs  couteaux  à 
celui  qui  garde  la  porte  :  on  les  leur  rend  le 
matin  quand  ils  sortent.  La  ville  de  Timbouctou 
2L  quatre  portes, qui  sont  ouvertes  le  jour,  mais 
qui  sont  fermées  et  défendues  par  une  forte 
garde  pendant  la  nuit.  Cette  année  le  chigar 
attendit  en  vain  les  caravanes  qui  viennent  de 
Maroc  y  de  Tripoli  et  de  Tunis;  elles  avaient 
été  détruites  ou  dispersées  dans  le  désert.  Il  eu 
arrive  aussi  d^ Alger. 

Comme  Timbouctou  fait  un  commerce  con- 
sidérable avec  Ouassanah,  ville  qui  est  située 
loin  au  sud-est,  Sidi-Hamet  résolut  de  s'y  rendre. 
Au  sortir  de  Timbouctou^  il  se  dirigea  au  sud; 
et,  après  deux  heiu-es  de  marche,  il  se  trouva 
sur  les  bords  du  Zolibib  (Joliba),  qui,  dans  cet 
endroit,  a  environ  cent  cinquante  verges  an- 
glaises (45o  mètres)  de  large.  Là  est  un  petit 
village  d'environ  deux  cents  maisons ,  construites 
en  roseaux.  Sidi-Hamet  marcha  ensuite  pendant 
six  jours,  suivant  toujours  les  bords  du  fleuve 
qu'il  avait  à  sa  droite ,  et  qui  coulait  à  l'est.  Il 
arriva  à  une  ville  nommée  Bimbinah ,  dont  les 
maisons  sont  construites  en  bois  et  en  roseaux. 
Il  s'y  arrêta  deux  jours  ;  dans  ce  lieu  le  cours 
de  la  rivière  se  détourne  directement  au  sud- 
est,  à  cause  d'une  montagne  qui  est  en  face. 


PREMIÈRE     PARTIE.  Il5 

Sidi-Hamet  continua  son  voyage  en  suivant  tou- 
jours le  cours  du  fleuve.  Après  quinze  jours  de 
marche  (sans  compter  les  jours  de  repos),  il  eut 
à  traverser  une  chaîne  de  montagnes  couvertes 
d'épaisses  forets  ;  cette  traversée  employa  six 
jours.  Il  voyagea  ensuite  pendant  vingt  *sept 
jours,  tantôt  au  sud  et  tantôt  à  l'est,  voyant 
presque  tous  les  jours  la  rivière  à  sa  droite, 
et  traversant  beaucoup  de  petits  ruisseaux  et 
de  rivières  qui  s'y  jettent.  Il  arriva  enfin  à 
Ouassanah ,  dont  le  chigar  se  nomme  Olibou , 
et  est  allié  de  celui  de  Timbouctou.  D'après  ce 
récit,  Ouassanah  serait  à  cinquante-quatre  jours 
de  marche  de  Timbouctou;  la  route  ferait  un 
grand  circuit  vers  le  sud-est,  et  ce  serait  dans 
cette  direction  (jpe  Ouassanah  serait  placée  par 
rapport  à  Timbouctou.  On  permit  à  la  caravane 
de  camper  dans  une  enceinte  carrée,  qui  est 
prés  des  murs  de  la  ville. 

fTassanah  ou  Ouassanah  est  bâtie  à  une 
petite  distance  du  fleuve  qui  coule  au  sud  de 
cette  ville,  entre  de  hautes  montagnes,  et  qui 
est  tellement  large ,  en  cet  endroit ,  que  l'on 
peut  à  peine  discerner  un  homme  sur  l'autre 
rive.  Ce  fleuve,  que  les  habitants  de  Timbouc* 
tau  nomment  Zolibib ,  est  nommé  Zadi  par  les 
habitants  ^Ouassanah. 

Sidi-Hamet  donne  une  description  longue  et 

8. 


Il6  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

intéressante  de  la  ville  di  Ouassanah  ^  dont  les 
murs  sont  bâtis  en  pierres  de  taille,  et  dont  la  po- 
pulation est  au  moins  deux  fois  plus  nombreuse 
que  celle  de  Timbouciou.  Le  peuple  est  excel- 
lent, très-hospitalier, mais  il  est  idolâtre;  et  Sidi- 
Hamet  espère  qu'il  se  convertira  à  la  vraie  foi , 
ou  qu  il  sera  sous  peu  expulsé  de  ces  riches 
contrées.  Probablement  que  les  habitants  èiOuas- 
sanah  se  doutent  des  sentiments  des  Mahomé- 
tans  à  leur  égard;  car  ils  ne  permettaient  à  ceux 
d^  la  caravane  d'entrer  dans  la  ville  que  vingt 
à-la-fois.  Les  habitants  à'Ouassanah  ont  sur  la 
rivière  un  grand  nombre  de  canots,  faits  de 
troncs  d'arbres  creusés ,  qui  peuvent  contenir 
quinze  ou  vingt  hommes.  Le  frère  du  roi  dit  à 
un  des  compagnons  de  Sidi-Hamet  qui  compre- 
nait son  langage,  qu'il  se  disposait  à  s'embarquer 
dans  quelques  jours  avec  soixante  bateaux  pour 
transporter  des  esclaves  qu'il  voulait  vendre. 
Il  devait  d'abord  descendre  la  rivière  vers  le 
sud ,  et  tourner  ensuite  à  l'ouest  pour  se  rendre 
dans  la  grande  eau.  Là  il  espérait  vendre  ses 
esclaves  à  des  hommes  pâles ,  qui  se  rendaient 
en  ces  lieux  dans  de  grands  bateaux^  et  apr 
portaient  des  fusils,  de  la  poudre,  du  tabac 
et  du  drap  bleu.  Il  est  évident ,  si  c^  récit  est 
vrai ,  qu'il  ne  peut  être  question  ici  que  des 
Européens  qui   viennent    trafiquer   à   la   côte 


PREMIÈRE    PARTIE.  II7 

d- Afrique ,  et  que ,  d'après  la  direction  donnée 
au  fleuve  qui  passe  à  Ouassanah ,  il  doit  se 
décharger  sur  la  côte  occidentale  d'Afrique. 
Alors  il  pourrait  être  le  même  que  le  fleuve 
du  Bénin ,  ou  le  Congo  y  comme  le  présume 
M.  Riley,  olnse  joindre  à  l'un  ou  à  l'autre  de 
ces  fleuves. 

Le  nom  d' Ouassanah  ou  ff^assanak  di  été  jus- 
qûes  ici  inconnu  à  la  géographie  ;  mais  on  ne 
peut  douter  de  l'existence  de  cette  ville^puisque 
tout  récemment  un  des  esclaves  de  la  suite  d'un 
des  deux  fils  de  l'empereur  de  Maroc,  que  le 
capitaine  Dundas  avait  à  bord  à  son  retour  de 
la  Mecque ,  SLydLïït  été  interrogé  sur  le  lieu  de 
sa  naissance,  dit  qu'il  était  né  dans  une  grande 
ville  nommée  Ouassanah.  Cette  circonstance  doit 
nous  donner  quelque  confiance  dans  le  récit  de 
Sidi-Hamet  (i). 

Ce  chef  arabe  retourna  à  Timbouctou  ;  il  y 
trouva  les  caravanes  di  Alger yàe  Tunis ^ de  Tripoli 
et  de  Fez  y  qui  se  réunirent  pour  le  retour,  et 
ne  formèrent  plus  qu'une  seule  caravane,  emme- 
nant avec  elle  deux  mille  esclaves,  et  une  grande 


(x)  Journal  des  Voyages^  janvier  1819,  tome I,  p.  196. — 
Notice  sur  le  Voyage  entrepris  par  M,  Ritchie  dans  Vintérieur 
de  V Afrique ,  extraite  dé  la  Ruche  provençale^  journal  im- 
primé à  Marseille. 


Il8    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

quantité  de  poudre  d'or,  de  bagues  et  de  chaînes 
en  or,  d'ivoire,  de  turbans  et  de  gomme.  Cette 
caravane  était  conduite  par  quinze  cents  hommes 
et  avait  quatre  mille  chameaux.  En  quittant  Tint- 
bouctoUj  elle  se  dirigea  au  nord-est,  et  marcha 
pendant  vingt  jours  dans  une  contrée  lui  peu 
montagneuse  :  comme  il  avait  beaucoup  plu 
pendant  le  mois  précédent,  elle  eut  à  traverser 
un*  grand  nombre  de  petites  rivières  et  de  ruis- 
seaux, qyi  tous  coulaient  au  sud  et  à  Touest 
vers  le  grand  fleuve.  Cette  circonstance,  si  elle 
est  exacte ,  est  remarquable ,  et  nous  indique , 
d'une  manière  décisive ,  la  pente  générale  du 
terrain  dans  la  partie  du  désert  qui  est  au  nord 
de  Timbouctou. 

La  caravane  marcha  ensuite  dix -huit  jours 
directement  au  nord,  et  arriva  à  Oueydlahy  où 
il  y  a  un  lac  d'eau  salée.  On  se  reposa  six  jours' 
dans  cet  endroit;  et,  le  sixième  jour,  on  fut 
attaqué  par  un  parti  d'Arabes  du  désert,  que 
Sidi-Hamet  dit  avoir  été  au  nombre  de  quatre 
mille.  On  les  repoussa,  et  l'on  ne  perdit  que  cent 
hommes.  Cependant  la  caravane  se  mit  aussitôt 
en  route;  elle  se  dirigea  au  nord -est,  hors 
du  chemin  ordinaire,  afin  d'éviter  d'être  atta- 
quée une  seconde  fois.  Elle  marcha  sans  discon- 
tinuer pendant  vingt-sept  jours,  et  arriva  à  un 
endroit  abondant  en  Sources  excellentes,  qu'on 


PREMIÈRE    PARTIE.  J  I9 

nomme  les  Huit-Puits.  Elle  se  reposa  onze  jours 
dans  cet  endroit;  et  ensuite,  après  huit  jours  de 
marche,  elle  vint  à  Touat ^  lieu  oii  l'eau  est 
en  abondance  (i).  Dansi»les  trois  derniers  jours 
avant  d'y  arriver,  on  traversa  des  plaines  cou- 
vertes de  couches  très-profondes  de  sable,  sem- 
blables à  celles  qui  sont  près  de  Ouadi^Noun, 
On  se  reposa  deux  jours  à  Touat;  on  se  dirigea 
ensuite  directement  au  nord,  en  traversant  le* 
Pays  des  Dates ^  et  Von  parvint  à  Gudjilah,  ville 
petite,  mais  forte,  qui  appartient  à  Tunis.  La 
caravane ,  après  s'être  reposée  dans  ce  lieu ,  se 
divisa  en  deux  :  une  partie  alla  à  l'orient  pour 
se  rendre  à  Tnpolien  traversant  les  montagnes; 
une  autre  partie ,  dans  laquelle  se  trouvait  Sidi- 
Hamet, marcha  au  nord-est  pendant  douze  jours, 
et  arriva  à  Tuggurtah,  ville  grande  et  forte,  si- 
tuée près  d'une  montagne  et  sur  les  bords  d'une 
rivière  nommée  TVgy^A,  qui,  d'après  ce  qu'on 
a  dit  à  Sidi-Hamet,  se  décharge  dans  la  mer, 
près  de  Tunis;  circonstance  qui  est  contraire  à 
ce  que  nos  cartes  indiquent.  Après  avoir  séjourné 
vingt-cinq  jours  dans  cette  ville,  la  caravane  se 
mit  en  route,  marcha  au  nord -ouest  pendant 
dix  jours  dans  un  pays  abondant  et  fertile;  et, 
\ 

(i)  Rilcy's  Loss  of  the  American  Brig  commerce  y  p.  387. 


I20    RECHERCHES  SUR  LAFRIQUE. 

lorsqu'elle  fut  parvenue  sur  le  sommet  des  mon- 
tagnes, elle  se  divisa  encore  en  deux;  une  partie 
se  dirigea  sur  ^Iger;  l'autre,  qui  était  celle  où 
se  trouvait  Sidi-Hamet,  et  qui  n'était  plus  que 
de  deux  cents  chameaux  et  de  quatre-vingts 
hommes,  se  rendit  à  Fez  en  traversant  les  mon- 
tagnes. Ce  fut  là  le  terme  du  voyage.  Sidi  Hamet 
quitta  la  caravane ,  et  s'en  retourna  auprès  de  sa 
Camille ,  qui  résidait  dans  les  montagnes  voisines 
de  la  ville  de  Maroc.  Il  eut  le  bonheur  de  revoir 
tout  ce  qui  lui  était  cher,  en  bonne  santé,  après 
deux  années  d'absence.  Lorsqu'il  partit,  il  avait 
huit  chameaux  richement  chargés;  quand  il  re- 
vint,il  n'en  avait  plus  qu'un  seul,  portant  seule- 
ment avec  lui  un  petit  nombre  de  denrées.  Mais 
la  caravane  avec  laquelle  il  s'était  d'abord  mis 
en  route  avait  péri  presque  en  entier  ;  et  il  se 
trouva  fort  heureux  de  n'avoir  pas  été  la  vic- 
time des  dangers  auxquels  un  si  grand  nombre 
de  ses  compagnons  de  voyage  avaient  succombé. 
Tel  est  en  substance  le  récit  de  Sidi-Hamet, 
qui  méritait  que  nous  nous  y  arrêtassions  par- 
ticulièrement,  parce  qu'il  jette  du  jour  sur  la 
marche  des  caravanes  dans  le  Soudan^  sur  le 
genre  de  leur  commerce,  et  sur  les  périls  aux- 
quels elles  sont  exposées.  11  donne  enfin  des 
notions  dignes  de  remarque  sur  quelques  points 


PREMIÈRE     PARTIE.  lai 

importants  de  géographie  pour  l'intérieur  de 
T Afrique  (i). 

En  1816,  le  gouverneraent  anglais  crut  devoir 
faire  une  grande  tentative  pour  pénétrer  dans 
l'intérieur  de  l'Afrique.  Dans  la  persuasion  où 
l'on  était  que  le  Niger  était  le  Zaïre ,  ou  la  ri- 
vière du  Congo ,  on  dépensa  de  grandes  sommes 
pour  équiper  des  bâtiments  afin  de  remonter 
ce  fleuve.  Cette  entreprise  fut  la  plus  malheu- 
reuse de  toutes  celles  qu'on  avait  tentées  jusque 
alors.  Le  capitaine  Tuckey,  qui  la  commandait , 
son  lieutenant  Hawkey,  le  professeur  Smith,  et 
enfin  vingt  et  une  personnes  de  cette  expédi- 
tion ,  périrent  en  peu  de  temps  de  la  fièvre  (2). 
Des  pertes  si  douloureuses  n'aboutirent  qu'à 
explorer  l'embouchure  du  Zaïre  ^  à  corriger  le 
gisement  de  cette  côte,  qui  était  affecté  d'une 
erreur  considérable  ;  mais  on  n'obtint  aucun 
renseignement  sur  l'intérieur  de  l'Afrique. 

Cependant  on  tenta  encore  une  nouvelle  ex- 
pédition ,  qui  partit  des  établissements  situés 
sur  la  Gambie,  Nous  aurons  bientôt  occasion 


{x)  Riley's  Loss  of  ihe  American  Brig  commerce ^  etc. 
London ,  in-4**,  1B17,  S  ^  «*  V,  p.  370-390. 

[fy  Narrative  ofan  Expédition  to  explore  the  river  Zayre, 
ia-^^London,  if^i8,  p.  xliij  de  Tintrodnction. 


ia4  RECHERCHES    SUR    l'aPRIQUE. 

couvertes  en  Afrique,  publiée  dans  un  recueil 
périodique  qui  s'imprime  à  Marseille  y  à  la  ré- 
daction de  laquelle  il  a  eu  une  très-grande  part, 
M.  Ritchie,  à  son  départ  d'Europe,  a  manifesté 
l'intention  d'exécuter  le  plan  de  Hornemann  ; 
c'est-à-dire  qu'il  devait  se  rendre  à  Mourzouk 
dans  le  Fezzan ,  y  séjourner  quelque  temps , 
partir  avec  la  caravane  du  Bomou ,  se  diriger 
sur  Timbouctou  y  et  se  rendre  aux  établissements 
anglais  ou  français  de  la  Sénégambie  {i),  M.  Rit- 
chie  arriva  en  effet  à  Mourzouk  ^  le  3  mai  1819; 
mais  la  fièvre  le  saisit  au  moment  où  il  se  dis- 
posait à  partir  pour  le  Bergou ,  et  il  y  succomba 
le  ao  octobre  de  la  même  année  (2).  Le  peu  de 
renseignements  qu'il  avait  recueillis  sur  l'inté- 
rieur de  l'Afrique  sont ,  ainsi  que  ceux  de 
M.  MoUien,  au  nombre  des  derniers  que  Ton 
ait  publiés  ;  et  nous  ne  devons  les  faire  connaître 
qu'après  avoir  parlé  de  ceux  qi#on  a  antérieure- 
ment mis  au  jour. 

(i)  Voyez  la  Notice  sur  le  Voyage  entrepris  par  M.  Rùchie 
dans  V intérieur  de  V Afrique,  dans  la  Ruche  prd^nçale  im- 
primée à  Marseille,  et  dans  le  Journal  des  Voyages  par 
MM.  Vernenr  et  Friesvillc,  tome  I ,  p.  a8a.  —  Nous  avons 
de  fortes  raisons  ponr  penser  que  cette  notice  est  faite  d'après 
des  notes  de  M.  Ritchie  même;  et  on  peut  la  regarder  comme 
le  plan  de  voyage  qu'il  se  proposait  de  suivre  quand  il  est 
parti  d'Europe. 

(2)  Voyez  le  Quarterly^-Review ^  toI.  XXIII ,  page  aa8. 


.     PREMIÈRE    PARTIE.  îlkJ 

Pendant  que  Ton  s'occupait  des  espérances 
incertaines  et  lointaines  que  faisait  naître  l'en* 
treprise  de  M.  Ritchie ,  on  vit  tout- à -coup 
jaillir  une  lumière  vive  et  inespérée  d'un  des 
points  de  l'horizon ,  où  la  science  ne  songeait 
même  pas  à  diriger  ses  regards.  I^  fort  d'^/i- 
namaba^  qui  est  la  seconde  forteresse  ou  la 
vice -présidence  des  Anglais  sur  la  Côte -d  or  ^ 
avait  été  attaqué ,  en  1807,  par  les  Aschantis, 
C'était  la  première  armée  de  ce  peuple,  qu'on 
eût  encore  vue  sur  la  côte.  Après  une  défense 
vigoureuse,  une  trêve  fîit  conclue;  mais,  la  petite^ 
vérole  exerçant  ses  ravages  dans  l'armée  des  As* 
chantisy  le  roi  qui  la  commandait  se  retira  subi- 
tement avec  cette  armée,  et  les  Anglais  ne  purent, 
comme  ils  en  avaient  le  projet ,  profiter  de  la 
bonne  intelligence  que  la  trêve  avait  fait  naître 
entre  eux  et  les  Aschantis,  pour  conclure  une 
paix  solide.  Les  Aschantis,  en  181 1  et  en  1816, 
envahirent  le  territoire  des  Fantis^  sur  lequel 
les  forts  anglais  sont  construits  ;  ils  bloquèrent 
en  dernier  lieu  celui  où  se  trouve  leur  quartier- 
général  ,  le  fort  de  Cape-Coast.  Avant  de  se  re- 
tirer, ils  dévastèrent  tous  les  environs,  massa- 
crèrent les  habitants ,  et  causèrent  une  déplo- 
rable famine.  Les  Anglais,  pour  éviter  le  retour 
d'aussi  affreux  malheurs ,  résolurent  d'envoyer 
au  roi  des  Aschantis  une  ambassade  solennelle , 


ISÔ  RECHERCHES    SUR    l'aFRI^QUE. 

afin  d'apaiser  la  colère  du  conquérant  africain , 
de  se  lier  avec  lui  par  un  traité  de  commerce ,  et 
de  se  procurer  des  renseignements  sur  l'inté- 
rieur de  l'Afrique.  On  confia  la  conduite  de  cette 
ambassade  à  un  homme  qui,  par  sa  faiblesse  et 
son  impéritie,  mit  en  danger  le  succès  de  la 
négociation ,  sa  propre  vie ,  celle  de  fees  com- 
pagnons ,  et  par  suite  tous  les  établissements 
des  Anglais  sur  cette  côte.  Un  jeune  homme  en- 
voyé sous  ses  ordres  pour  faire  des  recherches 
scientifiques ,  par  sa  présence  d'esprit ,  son  in- 
trépidité ,  conjure  l'orage,  arrête  les  effets  de 
la  colère  du  roi  des  Aschantis^  se  concilie  son 
estime ,  sa  confiance ,  établit  entre  lui  et  les  An- 
glais une  paix  solide,  et  obtient  qu'un  consul 
anglais  résidera  pour  toujours  dans  la  capitale  de 
ce  roi ,  devenu ,  par  son  moyen ,  ami  et  aUié , 
d'ennemi  redoutable  qu'il  était  auparavant.  Ce 
jeune  homme  ,  joignant  beaucoup  d'instruction 
à  un  caractère  énergique ,  profite  de  la  considé- 
ration qu'il  s'est  acquise  parmi  les  naturels,  et  de 
cinq  mois  de  séjour,  pour  observer  les  mœurs, 
les  habitudes  et  les  institutions  d'un  des  peuples 
les  plus  curieux  de  l'Afrique.  Il  obtient  par  un 
grand  nombre  de  marchands  maures,  et  par  les 
habitants  de  la  rivière  Gaboun^  des  renseigne- 
ments sur  l'intérieur  de  cette  partie  du  monde, 
sur  les  noms  et  la  direction  des  grands  fleuves 


PREMIERE     PARTIE.  ll'J 

qui  arrosent  le  Soudan  y  et  sur  les  nations  qui 
peuplent  ces  vastes  régions.  De  retour  dans  sa 
patrie,  il  publie  (i)  une  relation  qui  est,  avec 
celles  de  Browne,  de  Hornemann  et  de  Mungo- 
Park,  ce  que  nous  avons  de  plus  neuf  et  de 
plus  intéressant  sur  l'Afrique  (a). 

M.  Bowdich  ,  que  les  lecteurs  instruits  'ont 
déjà  nommé ,  ne  s'est  cependant  avancé  que 
jusqu'à  Coumassie ,  la  capitale  du  royaume  des 
Aschantis ,  qui  n'est  qu'à  dix  journées  de  mar- 
che de  la  mer  Atlantique.  La  géographie  dé- 
taillée des  Aschantis  j  et  celle  de  Gaboun  ^  qui 
suffit  seule  pour  assurer  à  M.  Bowdich  une  place 
honorable  dans  les  fastes  de  la  science  (3),  ne 

(i)  Si  l'on  veut  connaître  quel  3#été  le  prix  des  services 
éminents  qn'a  rendus  ce  jeane  et  habile  voyageur,  il  faut  lire 
une  brocbure  intitulée  :  The  African  committee ,  London , 
in-8®,  1819.  C'est  d'ailleurs  un  supplément  utile  et  nécessaire 
à  la  relation  de  l'auteur ,  et  ce  n'en  est  pas  la  partie  la  moins 
curieuse.  * 

(a)  Dans  l'introduction,  M.  Bowdich  dit  qu'il  a  écrit  sa 
relation  en  Afrique  et  pendant  sa  traversée,  et  qu'il  n'y  a 
rien  changé. 

(3)Bowdich's  Mission  from  Cape-Coast  casile  to  Ashantee, 
in~4^,  London,  1819.  Cette  relation  est  pour  ces  contrées 
la  plus  originale  et  la  plus  complète.  Elle  a  été  précédée  par 
les  Voyage»  de  Bosman,  de  Barbot  de  Villault ,  de  des  Mar- 
chais ^et  par  la  Relation  du  Voyage  du  royaume  d'Issini  par 
Godefroy  Loyer,  in-S®,  Taris,  1704  ;  à  quoi  il  faut  ajouter 


ia8  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

doit  point  nous  Qccuper  ici.  Nous  ne  devons 
entretenir  nos  lecteurs  que  des  renseignements 
nouveaux  donnés  dans  cette  relation  sur  l'inté- 
rieur de  l'Afrique. 

Tous  ces  renseignements  concourent  à  nous 
faire  considérer  le  Niger  comme  un  grand  fleuve 
qui*traverse  \e Soudan;  qui,  déjà  très-large  dans 

l'ouvrage  d«  Roëmer  sur  les  peuples  de  la  côte  de  Guinée; 
V Histoire  des  Missions^  par  Oldendorp ,  le  Voyage  d'isert, 
Touvrage  de  Meredith  sur  la  Câte-d'or^  V Histoire  de  Da- 
homey, par  DalzeL  II  existe  du  Voyetge  d'isert  une  traduc- 
tion française  imprimée  à  Paris  (in-i)**)  i79'i,chez  Maradan), 
que  M.  Bowdich  paraît  n'avoir  pas  connue.  Voyez  Mis- 
sion to  J  s  hantée  ti^»  i65.  —  La  carte  que  M.  Bowdich  adres- 
sée  pour  son  voyage  est  suffisante  pour  bien  comprendre  les 
renseignements  qu'il  a^^btenus  sur  Tiatérieur  de  l'Afrique; 
ipais  elle  n'est  ni  assez  claire,  ni  sur  une  assez  grande  échelle, 
pour  ce  qui  concerne  les  Aschantis  :  une  carte  spéciale  où 
la  route  de  l'auteur  eût  été  tracée  en  détail  serait  nécessaire. 
Dans  l'analyse  et  la  discussion  de  cette  carte  spéciale,  il  se- 
rait utile  de  liomparer  la  géographie  établie  par  l'aHtenr 
relativement  aux  positions  relatives  des  peuples,  qui  ont  pu 
changer,  avec  celle  qui  nous  est  donnée  dans  la  carte  de 
d'Anville  intitulée  ;  Carte  particulière  de  la  partie  principale 
de  la  Guinée  située  entre  Issini  et  Jdra  (avril  1729).  — 
Depuis  que  cette  note  a  été  écrite ,  M.  Bovsrdich  ,  qui  en  a 
eu  connaissance  ,  a  de  nouveau  travaillé  avec  une  rare 
constance  à  la  géographie  de  l'intérieur  de  l'Afrique  et  à 
celle  de  la  Côte  de  Guinée;  et  il  en  est  résulté  des  caHes 
plus  claires  et  plus  détaillées. 


PREMIÈRE     PARTIE.  II9 

le  royaume  de  Barnbarra,  coule  vers  l'est,  tra- 
verse le  lac  Dihbir  ou  Dibbie^  se  sépare  ensuite 
en  deux  fleuves ,  qui  se  dirigent  presque  paral- 
lèlement de  l'ouest  à  Test,  en  formant  dans 
l'intérieur  du  Soudan,  une  région  Mésopota-- 
mique  ou  un  Douab.  Le  fleuve  le  plus  septen- 
trional ,  qui  porte  le  nom  de  Gambarou  y  va  se 
perdre  dans  un  grand  lac  intérieur  qu'on  nomme 
Caudij  vers  lo**  de  lat.  N.  et  19®  de  long,  orient, 
de  Paris:  mais,  un  peu  à  Test  de  TimbouctoUy 
le  Niger  émet  une  branche  formant  un  troi- 
sième fleuve,  nommé  Joliba  par  les  Maures,  et 
Zak'Mer  par  les  Nègres,  qui  se  divise  en  deux 
autres  branches,  dont  la  plus  petite  parcourt 
le  pays  de  Yahoudi  ^  où  naviguent  des  hom- 
mes blancs.  Cependant  un  marchand  maure  de 
Djenné  2l  dit  à  un  des  compagnons  de  M.  Bow- 
dich ,  que  le  Joliba  né  dérivait  pas  du  Gamba- 
rou (ï),  mais  que  c'était  au  contraire  le  Joliba 
qui  se  jetait  dans  le  Gambarou  :  alors  le  Joliba 
ne  coulerait  pas  du  sud -ouest  au  nord -est, 
mais  au   contraire  du  nord-est  au  sud -ouest  ^ 

(1)  Hutchinson's  Diary  dans  Bowdich's  Mission  toAshan^ 
tee^  p.  407.  M.  Bowdich,  p.  191 ,  dit,  dans  sa  note,  que 
M.  Hntcbinson  a  pu  mal  comprendre  ;  mais  ce  témoignage 
da  Maure  de  Djenniji*est  pas  isolé.  Depuis  que  M.  Bowdich 
a  la  cette  partie  de  notre  ouvrage ,  nous  croyons  qu'il  a 
changé  d'opinion  sur  la  direction  du  cours  du  Gambarou, 

9 


l36  RECHERCHES.  SUR    l'aFRIQUE. 

ce  qui  se  trouve  d'accord  avec  Tassertioii  de 
Léon  r Africain,  d'Édrisi,  de  Marmol,  du  chérif 
Inhammed^  d'Abd-Arrachman- Aga ,  du  matelot 
Adams,  et  du  cheyk  Hagg-Kassem, auteur  de  nos 
itinéraires.  Mais ,  selon  les  rapports  unaninies 
des  Maures,  ni  le  Joliba^  ni  le  Gambiirou,  ne 
peuvent  prétendre  à  être  considérés  comme  le 
fleuve  principal  du  Soudan,  ou  comme  le  Niger, 
objet  de  tant  de  recherches;  ce  titre  appartient 
à  Fimmense  cours  d'eau  qui,  ainsi  que  le  Gam- 
harouy  se  sépare  de  la  tige  commune  à  l'est  du  lac 
Z>/^ézè,et  qui,  coulant  vers  l'orient,  s'étend  au  sud 
du  Gambarou.  Ce  fleuve  est  le  véritable  Niger;  il  se 
nomme  Quolla^  et  vers  sa  source  Bietirilmilou  (i): 
kDjenné  et  à  Sansanding,  il  traverse  tout  \t  Sou- 
dan,  en  coulant  toujours  de  l'ouest  à  l'est,  et  il 
15e  joint  enfin  au  Nil;  ou  plutôt  le  Nil  d'Egypte 
n'est,  selon  ce  système ,  que  le  Quolla  ou  Niger 
qui  change  de  direction,  et  se  tourne  vers  le 
nord.  Un  embranchement  d^  Quolla  ou  Niger 
s'en  détache  vers  le  19®  degré,  coule  au  sud,et  se 
décharge  dans  l'océan  Atlantique,  près  du  Cap- 
Lopez  :  cet  embranchement  se  nomme  la  rivière 
Ogouaouai.  Cette  rivière  communique  avec  le 
Zaïre  ou  Barbela ,  ou  la  rivière  du  Congo ,  par 
une  autre  rivière  qui  coule  directement  au  sud , 

(i)  Bowdicli's  Mission  to  Jshanieey  p.'  192. 


PREMièltE    PARTIE.  l3l 

à  travers  le  pays  de  Tanjran ,  presque  parallèle- 
ment à  la  côte  ;  de  sorte  que  le  Zaïre  ou  Bar-- 
èe/a,  d'après  ces  renseignements,  communique-* 
rait  avec  le  Niger,  sans  être  cependant  le  même 
fleuve,  comme  on  l'avait  supposé.  Les  peuples 
et  les  contrées  qui  sont  placés  au  nord  du  Gam- 
baron ,  et  à  Test  de  Timbouctou  et  du  Joliba  y 
sont,  dans  la  direction  de  l'ouest  à  VesX^Mallowa^ 
Kallaghi^  Barrabadi^  Cûj^£>I42  (  Cachenah  ).  Ceux 
qui  sont  au  nord  du  Quolla  ou  Niger,  et  par- 
conséquent  entre  ce  fleuve  et  le  Gambarou, 
et  dans  la  Grande-  Mésopotamie  africaine  ou 
le  Douab  du  Soudan,  sont,  en  suivant  Tordre 
précédent,  Gauw  ,Gamhadi ,  Fillani ,  Goubirri, 
Jiamfarra ,  Yaoura  et  Noufi  :  à  ces  deux  der- 
niers états,  après  qu'on  a  traversé  le  Quolla, 
près  d'une  petite  île  nommée  Gandgi,  qui  est 
File  Gangou  de  Ben -Ali  et  dlnhammed,  con- 
finent au  sud  fF&Uiva  (Ouaoua),  Boussa  et 
Kaiama,  et  plus  au  sud  Yarriba,  qui  est  le  Yarba 
d'Inhammed.  Entre  le  Quolla  ou  le  Niger  et  les  v 
peuples  voisins  des  Aschantis  et  de  la  côte,  sont 
une  vingtaine  de  nations  ou  d'états,  dont  M.  Bow- 
dich  a  donné  les  noms  et  les  positions  d'après 
les  renseignements  et  les  dessins  que  lui  ont 
fournis  les  marchands  maures  (i).  Parmi  ces  états 

(i)  Bowdichti  Mission  io  Jshantee,  p.  ao^. 

9 


'  l3a         RECHERCHBS    SUR    l'àFRIQUE. 

on  distingue  surtout  celui  deDagwumba,  situé 
^u  hord-est  des  ^schantis,  II  est  peuplé  par  des 
Nègres  mahométans ,  et  par  conséquent  plus  ci- 
vilisé que  celui  ^Aschantis.  La  capitale  Yahndi 
est  le  centre  d'un  grand  commerce;  et  les  mar- 
chands maures  s'y  rendent  des  bords  du  Gamba" 
rou  et  du  Niger^  et  de  toutes  les  parties  du  nord 
et  de  l'intérieur  de  l'Afrique  (i). 
"■    '■        ■  ■   ■  I  ■•  )      .1  .11        II 

'  (l)  Bowdîch^s  Mission  f<>u^.f^^7/i/ee^  p.  453.M.Bowdich, 
depuis  qu'il  a  publié  cet  outrage ,  s'est  livré  à  des  travaux 
intéressants  pour  déterminer  avec  plus  de  précision  la 
géographie  de  l'intérieur  de  l'Afrique  entre  le  Niger  et 
la  Côte  de  Guinée.  Voici  l'itinéraire  et  les  distances  qui 
résultent  des  renseignements  qu'il  avait  obtenus  entre 
Dagwumba^  le  fleuve  QuoUa  et  Cachenah  {Mission*  io 
Ashanteê,  p.  an)  : 

De  Dagwumba  à 

Gamba 5  journées. 

Gourousie a 

Zeggo 4 

Barragou lû 

ToumbL ......     8 

Goudoubirri ...      3 

Kaiama, 3 

JVauwa 4 

Quolla^  fleuve,     3 

Gouberi lo 

Cachenah 8 

Ainsi  de  Dagç^umba  au  fleuve  QûoUm  on  compte  4^ 
journées  de  marche. 


.     PREMIERS    PARTIE.  l33 

Lorsqu'à  la  fin  de  cet. ouvrage  nous  compa- 
rerons entre,  eux  les  différents  renseignements 
qu  oïl  a  obtenus  sur  le  cours  des  rivières  dans 
l'intérieur  de  FAfiîque,  nous  examinerons  jus- 
qu'à quel  point  nous  devons  admettre  ceux  qui 
ont  été  donnés  à  M.  Bowdich ,  et  quelle  con- 
fiance, est  due  à  l'opinion  générale 'et  uniforme 
des  marchands  maures  qu'il  a  interrogés  à  Cou- 
massie  sur  le  cours  des  grands  fleuveS  du  Soudaf\. 

iN^ous  ne  devons  pas  cependant  différer  d'in- 
diquer aux  lecteurs,  la  coïncidence  remarquable 
qui  se  trouve  dans. le  nom  de  Gambarou,  que 
Delisle,  sur  sa  carte  d'Afrique  (i),  donne  au 
Niger  ou  au  grand  fleuve  An  Soudan  y  qui  coule 
près  de  Timbouctou,  et  que  les  marchands  mau- 
res, questionnés  par  M.  Bowdich,  donnent  aussi 
à  celui  des  deux  grands  fleuves  du  SoudûM 
quixoule  le  plus  près  de  Timbouctou.  Ce  nom 
de  GambaroUy  dans  l'intervalle  de  près  d'un 
siècle,  n'a  été  reproduit  par  aucun  ouvrage 
avant  celui  de  M.  Bowdich ,  et  ne  se  trouve  dans 
aucun. Uvre. ni  sur  aucune  carte  que  je  connaisse 
antérieurs  à  la  carte  d'Afrique  de  Delisle ,  publiée 
en  1 7^2,  M,  Bowdich  se  trompe  et  combat  contre 
lui-même ,  lorsqu'il  croit  trouver  dans  Marmol 
une  autorité  plus  ancienne  que  Delisle  ,  pour  le 

(i)  CarU  deJ*Jfrique,  par  Guillaume  Delisle,  17a». 


l34  AECHERCHSS    StlR    LAVRIQUE. 

nom  de  Gambarou.  Dans  le  passage  de  Mannol 
qu'il  cite ,  il  est  question  de  la  Gambie  y  que 
Cadamosto^  qui  en  a  parlé  le  premier ,  et  les 
géographes  de  ce  temps  nommaient  Gamin^a  ou 
Gamber.  Il  est  bien  vrai  que  dans  ce  même  pa»^ 
sage  Marmol  considère  la  Gambie  comme  un 
bras  du  Niger^  d'accord  en  cela  avec  tous  les  au- 
teurs de  cette  époque;  mais  c'est  à  ce^as  seul 
qu'il  appliquait  le  nom  Ae  Gamber,  et  nulle- 
ment au  fleuve  qui  traverse  l'intérieur  de  l'A- 
frique. Il  ne  donne  à  ce  dernier,  m  le  nom 
de  la  Gambie,  ni  celui  du  Sénégal,  qui,  dans 
son  système ,  était  aussi  une  branche  du  Niger, 
et  ^e  des  géographes  ont  appelé  le  Niger, 
quoiqu'ils  n'aient  jamais  donné  le  nom  de  Sé^ 
négal  au  Niger  (\).  Ainsi,  lors  même  qu'on  sup- 
poserait que  ,  selon  la  croyance  où  l'on  était 
de  l'identité  des  deux  fleuves,  la  Gambra  ou 
la  Gambie  a  donné  son  nom  au  Gambarou, 
ou  que  le  Gambarou  a  communiqué  le  sien  à 
la  Gambra,  et  que  l'un  de  ces  noms  n'est  que 
la  corruption  de  l'autre ,  il  est  toujours  certain 
que  Delisle  et  M.  Bowdich  sont  les  seuls  au- 
teurs qui  ont  appliqué  le  nom  de  Gambarou 


(i)  Voyez  le  Dictionnaire  géographique  de  Bruzen  de  la 
Martinière ,  aux  mots  Nigritie  et  Niger, 


PREMIÈRE    PARTIE.  l35 

i  un  grand  fleuve  de  rintérieur  de  TAfrique  (i).î 
Remarquons  aussi  que  Delisle  donne  au  iVi^^r 
le  nom  de  Camadaou  dans  le  BomoUt  et  que 
dans  la  relation  de  M.  Bowdich  il  est  dit  que 
M.  Hutchinson  avait  entendu  parler  d'une  ri- 
vière dans  le  Bomou  ,  nommée  Koumoudou-- 
Gaigidna  (a). 

On  observe  encore  d'autres  coïncidences 
entre  le  voyageur  anglais  et  le  géographe  franr 
çais,  relativement  à  plusieurs  peuples  qui  avoi- 
sinent  le  grand  fleuve  du  Soudan  ;  les  noms  de 
Ntmfi  et  de  Boussa  se  retrouvent  semblables 
dans  l'un  et  dans  l'autre.  Le  Yaouri  de  Delisle 
est  bien  évidemment  le  Yaoura  de  M.  Bow4|^; 
le  Goubour  du  premier  est  le  Goubirri  du  second. 

(i)  A  l'article  Delisle,  que  j'ai  inséré  dans  la  Biogra^ 
pkie  universelle^  je  crois  avoir  prouvé  que  le  mérite  de  ce 
grand  géographe  a  été  trop  méconnu  :  j'ai  démontré  qu'il 
était  le  véritable  créateur  du  système  de  géographie  des 
modernes,  et  que,  le  premier^  il  a  su  le  fonder  sur  les 
observationSfCta  tout  réformé  d'après  ces  bases.  J'ai  insisté 
•âr  l'utilité  dont  ses  cartes ,  pour  des  pays  peu  connus , 
pouvaientètre  encore  aujourd'hui,  parce  qu'il  a  eu  en  main 
des  mémoires  qui  n'ont  f  oint  été  publiés. 

(a)  M.  Burckhardt ,  p.  49a ,  dit  que  kamadogo  signifie 
rivière  dans  le  langage  du  Bomou  ;  mais  cette  remarque 
confirme  d'autant  mieux  la  coïncidence  et  l'originalité  des 
renseignements  obtenus  par  Delisle  et  par  M.  Bowdich. 
Voy.  Mission  to  Ashantet ,  p.  ai 3. 


l36    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Tout  ceci  nous  prouve  que  Delisle  a  en  partie 
dressé  les  portions  centrales  de  sa  carte  d'Afrique 
diaprés  des  mémoires  fournis  par  quelques-uns 
de  nos  établissements  sur  la  côte  de  Guinée. 

La  ressemblance  du  nom  et  la  position  géo- 
graphique ,  tout  semble  identifier  la  rivière  de 
Daf*'Kulla,  Aont^,  Browne  a  eu  connaissance  au 
Darfour ,  avec  le  Quolla  ou  le  Niger  de  M.  Bow- 
dich;  et  la  nation  dés  Quallo^  dont  M.  Dupuis 
a  entendu  parler ,  vient  encore  à  l'appui  de 
cette  opinion.  C'est  aussi  une  chose  fort  remar- 
quable que,  dans  les  renseignements  qui  ont 
été  donnés  à  M.  Lucas  à  Tripoli  ^  sur  les  con- 
trées au  sud  du  Niger  ^  par  le  chérif  Inham- 
med ,  il  nomme  sur-tout  Degorhbah ,  le  Dag- 
wumba  de  M.  Bowdich  (i).  Le  chérif  insiste 
principalement  sur  l'importance  de  cet  état, 
qu'il  dit  être  un  royaume  mahométan.  Ainsi 
se  trouve  confirmé ,  à  plus  de  cinq  cents  lieues 
de  distance ,  tout  ce  que  M.  Bowdich  a  appris 
dans  le  pays  même ,  sur  les  fréquentes  commu- 
nications qui  ont  lieu  entre  l'état  AeDagoi^umbc^ 
l'intérieur,  et  le  nord  de  l'Afrique. 

Mais  des  coïncidences  «icore  plus  fortes  se 
font  remarquer  entre  les  rapports  obtenus  par 

.  (i)  Proceedings  of  the  Association  for  promoting,  the 
discoveiy  in  Africa ,  Loadon ,  édit.  1810,  tome  I ,  paç.  175 

et  177- 


PREMIÈRE     PARTIE*  iS'J 

M.  Bowdich ,  et  ceux  que.  l'Arabe  fellata  a  faits 
à  M.  Seetzen  :  ces  deux  grands  bras  du  fleuve , 
entre  lesquels  l'île  de  Melli  se  trouve  placée ,  ne 
semblent -ils  pas  indiquer  le  Gambarou  et  le 
Quolla  de  M.  Bowdich?  Et  la  nation  des  Kuara 
de  l'Arabe  ne  rappelle-l*elle  pas  aussi  la  nation 
Quora  ou  Quolla  dont  M.  Bowdich  a  fait  men-^ 
tion,  et  qui  parait  être  aussi  le  Dar-Kulla  de 
Browne ,  le  Quallo  de  M.  Dupuis  ?  Ces  noms , 
différemfment  prononcés,  se  trouvent  communs 
à  une  nation  et  à  un  fleuve. 

Revenons  sur  la  nomenclature  des  noms  dont 
cet;  Arabe  fellata  a  fait  mention;  et  comparons- 
les,  dans  l'ordre  où  il  les  a  placés,  avec  ceax  de 
M.  Bowdich  et  des  autres  auteurs.  Nous  trou- 
vons d'abord  Kassena  ou  Cachenah,  connu  de 
tous  les  géographes.  fTogobourou  me  parait 
être  ensuite  le  même  lieu  que  le  Goubourou 
de  Delisle,  que  le  Goubirri-  de  M.  Bowdich, 
que  le  Guber  de  d'Anville,  de  Léon  l'Africain, 
et  des  autres  géographes  arabes,  mais  diffé- 
rent d'un  Guber  y  qui  est  du  côté  du  Bornou, 
et  dont  parle  aussi  cet  Arabe  fellata.  Baudtjii 
ou  Baoudtjii,  qui  suit  immédiatement  fTogo- 
horou ,  est  probablement  le  Baoussà  de  M.  Bow- 
dich ,  le  Boussa  de  Delisle.  Gourma ,  qui  vient 
ensuite ,  est  le  Gourouma  de  M.  Bowdich ,  au 
sud  du  Quolla  ou  Niger.  Jauwur  ou  Jaououour 


l38  REGHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

est  le  Yaoura  de  M.  Bowdich,  le  Yaouri  de 
Delisle  et  de  d'Anvillfe.  Le  Gonja  de  l'Arabe  fel- 
lata  nous  parait  être  le  Ganjij  ique  y  dans  la  re* 
lation  de  M.  Bowdich  (i),  un  Maure  deDjenni 
a  indiqué  à  M.  Hu^chinson ,  non  loin  de  Yctoura^ 
et  comme  une  ile  du  Quolla,  immédiatement 
au-dessous  de  Boussa.  Ce  lieu,  ainsi  que  le  re- 
marque M.  Bowdich,  pourrait  bien  être  le  m^ne 
que  le  Gongou  du  chériflnhammed,  représenté 
comme  étant  une  île  au  milieu  du  Niger.  KanOy 
que  l'Arabe  fellatà  mentionne  ensuite,  se  tronre 
dans  Delisle  et  chez  d' Anville ,  placé  d'après  Léon 
l'Africain  :  c'est  probablement  le  fameux  Ganah 
d'Édrisi.  Vient  ensuite ^ar^a,  qui  est  le  Bourgou 
de  Delisle.  Nous  avons  parlé  de  Kuara^  qui  ter- 
mine l'itinéraire.  Il  n'y  a  donc  qu'y/rma  que 
nous  ne  trouvons  pas  dans  ces  renseignements 
d'un  natif,  les  seuls  qui,  comme  ceux  qu'a  obte- 
nus M.  Bowdich,  «lonnent  l'idée  de  deux  grands 
fleuves  existants  dans  le  Soudan  ^  ou  de  deux 
grands  bras  d'un  même  fleuve. 

Un  auteur   danois  (a)  nous  apprend  qu'en 


(i)  Mission  to  Jshantee,  p.  aoa.  % 

(a)  P.  J.  Bhins ,  Neue  Systemaûsche  Erdbeschreibung  von 
Afrika^  IV  theîl,  p.  375.  —  Forster,  Mag,  V  Reisebeschr, 
347.  ^^^  Roëmer-Handl.  Ferschied,  Folk,  auj  d.  Kuste  von 
Guinea ,  p.  48. 


PREMIÈRE    PARTIE.  1)9 

1744  «n  roi  des  Assantès  (  Aschantis),  nom- 
mé Oppokou^  se  mit  à  la  tête  d'une  puis-» 
sastte  armée ,  pour  aller  faire  la  guerre  à  une 
nation  mahométane^  située  loin  au  nord* est. 
Oppokou  marcha  vingt  et  un  jours ,  à  travers 
un  pays  boisé  et  coupé  de  rivières  :  il  franchit 
pendant  quatorze  jours  un  désert  sablonneux  et 
sans  eau,  et  il  entca  dans  un  pays  riche,  peu* 
plé,  et  abondant  en  toutes  scM-tes  de  provisions; 
mais  la  nation  qu'il  était  venu  attaquer ,  l'envi* 
ronna  avec  une  immense  cavalerie  :  il  fut  obligé 
de  faire  sa  retraite  à  la  bâte  ;  il  emmena  ce- 
peiidant  avec  lui  des  esclaves  ,  et  il  rapporta 
beaucoup  de  manuscrits  ,  en  langue  arabe  , 
qui  tombèrent  ensuite  entre  les  mains  des  Da- 
nois, maîtres  ê^jàkra.  Le  savant  M.  Bruns  (i) 
conjecturait  que  cette  nation ,  attaquée  par  le 
roi  des  AschantiSj  pourrait  bien  ^tre  celle  de 
Degqmbah^  que  le  chérif  Inhiimmed  avait  fait 
connaître  à  M.  Lucas  ;  cette  conjecture  de 
M.  Bruns  se  trouve  démontrée  lorsque  nous 
lisons  dans  M.  Bowdich,  qu'un  roi  des  Aschau'- 
tis  j  nommé  Apokou  ,  qui  monta  -  sur  le  trône 
en  ijao ,  fit  la  guerre  au  roi  de  Dagwumbd , 
et  le  soumit  à  un  tribut  Seulement,  comme 

(i)  Bruns,  Erdbeschreibung  von  Afrika^  IV  theîl,  p.  875. 


l4o         RECHERCHES    SUA    l'aFRIQUS. 

M.  Bowdich  déclare  lui  -  même  que  pour  cette 
partie  de  son  histoire  il  n  a  eu  d'autres  docu- 
ments que  les  rapports  des  natifs  et  la  chrono- 
logie des  Maures ,  nous  croyons  qu'il  n'aura  au- 
cune répugnance  à  réformer  une  partie  de  son 
histoire,  en  ne  rendant  pas  Tissue  de  cette  guerre 
aussi  glorieuse  pour  les  Aschantis  qu'ils  le  pré- 
tendent eux-mêmes,  et  en  prolongeant  de  quel- 
ques années  le  règne  ^Apokou^  qu'il  termine 
en  1741- 

M.  Bowdich  a  entendu  le  nom  de  Tonomahy 
qu'on  lui  dit  être  au  nord- est  de  Yahndi  la 
capitale  de  Dagx^umba;  il  conjecture  que  Ta- 
nomah  est  une  ville  et  une  province  de  Dag- 
-wumba.  Nous  pensons  que  c'est  un  état  par* 
ticulier,  très -éloigné  de  Dagwumba^  et  dans 
l'intérieur  de  l'Afrique.  M.  Bowdich  remarque 
avec  raison,  que  Tonomah  doit  être  le  même 
pays  que  le  chéii^  Inhammed  a  désigné  à  M.  Lu- 
cas ,  sous  le  nom  de  Tqnouwahy  et  dont  la  ca- 
pitale se  nomme  Assenté  (i).  Il  nous  parait  donc 
évident  que  ce  peuplé  est  le  même  que  les  Kas- 
senti  des  missionnaires  danois,  qui  le  placent 
à  une  distance  de  deux  mois  de  marche  des 
^^cAa/i^flf,  quoiqu'ils  paraissent,  comme  Bruns 


(i)  Proceedings  of  the  Association ,  tome  1 9  pag.  174 
et  i75« 


PREMIERS    PARTIE.  l4l 

l'observe ,  s'être  trompés  sur  la  direction  de  là 
route,  en' indiquant  le  sud-est  au  lieu  du  nord- 
est  (i).  Le  peuple  èiAmina  nomme  cette  nation 
Kassenti,  probablement  d'après  le  nom  de  sa 
capitale ,  et  en  prononçant  avec  une  aspiration 
gutturale  la  première  syllabe  :  mais  le  véritable 
nom  de  ce  pays  ,  suivant  les  missionnaires,  est 
Tjemba  (2)  ;  ce  qui  a  donné  occasion  au  savant 
Bruns  de  faire  la  même  cçnjecture  que  celle  qu'a 
depuis  énoncée  M.  Bowdich^  c'est-à-dire  de 
supposer  que  le  pays  de  Kassenti  était  le  même 
que  celui  de  Dagwumba ,  ou  en  faisait  partie: 
et,  quoique  nous  ne  partagions  pas  cette  ppi"* 
nion,  cet  accord  de  renseignements  et  cesconr 
cordances  de  noms,  dont  nous  pourrions  mul- 
tiplier les  exemples,  nous  paraissent  remar- 
quables. 

Ces  rapprochements  entre  des  géographes  et 
des  voyageurs  dont  M.  Bowdièlft  n'a  connu  les 
travaux  que  depuis  qu'il  a  écrit  et. publié  sa 
relation,  démontrent  suffisamment  l'impoitailce 
des  notions  et  des  faits  qu'il  a  rassemblés. 

Peu  après  la  publicatiojavdë  son  livre ,  parut  à 

(  I  )   Brans  ,  Erdheschreihung  von    Jfrika  ,  IV  theil , 
p.  S71.  — Oldendorp,  p.  a8o.  ' 

(a)  Brans,  Afrika^  IV  theil ,  p.  872.  — Oldendorp ,  p.  2^9. 


l^'à  RECHERCHES    SUR    i/aFRIQUE. 

Londres  un  ouvrage  intitulé  Notes  sur  V Afrique^ 
par  M.  G.  Robertson  (i).  En  tête  de  cet  ouvrage  se 
trouve  une  carte  qui, selon  Tautetir,  est  dressée 
d'après  les  meilleures  autorités.  Elle  nous  fait  voir 
le  Niger  ayant  ses  sources  dans  les  montagnes 
de  Kong  y  à-peu-près  où  les  placent  les  cartes  de 
Rennell  :  mais  ce  fleuve,  au  lieu  de  diriger  son 
cours'  vers  le  nord-est ,  coule  directement  à  l'est, 
sans  s'éloigner  du  douzième  parallèle;  il  tra- 
verse un  petit  lac  alongé  nommé  Simbalaj  puis 
un  très -grand  lac  appelé  Bondou  :  de  ce  lac, 
qui  reçoit  encore  de  l'ouest  les  rivières  Ahwe- 
reim  et  Promproa^  sortent  trois  rivières  dif- 
férentes ;  ce  sont  celles  qui ,  sous  les  noms 
de  Formosa ,  de  Calabar,  et  de  Bani  ou  Cross  y 
se  jettent  dans  le  golfe  du  Bénin,  Soko  et  Èon- 
touko  se  trouvent  sur  les  bords  du  Niger,  à  l'ouest 
du  lac  Simbala  ;  et  Jinney  ou  Djermi  est  soi*  le 
bord  occidental. du  \^c  Bondou.  A  l'ouest  de  ce 
lac,  qui  reçoit  les  rivières  Akwreim  et  Prom^ 
proa ,  sont  Obong^  et  Ckamba  ou  Dunko ,  qui 
confine  par  le  sud  aux  Aschantis.  Au  nord  du 
Niger  se  trouvent  MamarUySourka  et  Ge/wc/i,  qui 
ont  à  l'est  la  ville  de  Timbouctou^  située  à  i4 


(i)  G.  A.  Robertson,  Notes  on  Africay  tlc.^w^iîk  an  appenr 
dix  containing  a  compendious  accoitnt  o/ the  Cape  4^  Qpod 
HopCy  in-S",  1819. 


PREMIÈRE    PARTIE.  l4H 

degrés  de  latitude  nord  et  environ  3o  minutes 
à  l'ouest  de  Paris.  Au  nç^rd  de  Timbouctou  sont 
les  pays  d'inta,  de  Fillani,  é'Endata^  èiOalla^ 
de  Alla^Boy  ou  Da-Bojr:  au  sud  du  lac  Bondou, 
on  voit  les  contrées  àiApama^  ^Ana^Oy  ^ui  ont 
au  sud -est  le  royaume  àiAdou  ou  ^lq  Bénin:  à 
Test  du  \à!^ Bondou^  est  le  pays d'^oi/i^^a  ou  de 
fibii5^a^  ayant  pour  capitale  Ze&e;  plus  loin  vers 
Test,  entre  ii®  et  i6°  de  latitude^  et  entre  12** 
et  ao^  de  longitude  orientale ,  est  un  vaste  pays 
nommé  Bouloumou,d3ins  lequel  coule  du  nordr  • 
ouest  au  sud-est  une  rivière  nommée  Zo/r>,  qui 
se  jette  dans  un  lac  nommé  Oinassey  :  sur  les 
bords  de  la  rivière  Loro  se  trouve  un  lieu  nommé 
(ktandera^  qui  avec  une  autre  rivière  forme  une 
petfte  île  nommée  Ouandamsera,  Entre  les  con- 
trées de  Bouloumou  et  d'Aouissa  où  de  Haussa, 
sont  les  pays  d'Obriichejr  et  de  Tibo^Ebo.  La 
rivière  qui  se  jette  près  du  ^ip^Lopez,  porte 
le  nom  diAyongOy  et  n'a  aucune  communication 
avéSc  le  fleuve  du  Congo. 

Rien  de  plus  étrange  que  cette  carte,  qui 
change  toutes  les  notions  connues  sur  Tintérieua' 
de  l'Afrique;  qui  nous  présente  plusieurs  noms 
jusqu'ici  ignorés  en  géographie ,  et  transport» 
ceux  qui  nous  sont  familiers  à  d'immenses  dis- 
tances 4^s  positions  qui  leur  sont  assignée^  ;  qui 
enfin  tend  à  nous  faire  considérer  les  voyages 


l44  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

de  MuBgo-Park  comme  une  fictioti»  et  les  asser- 
tions de  ce  célèbre  et  estimable  voyageur  comme 
une  suite  d'erreurs  grossières.  Par  toutes  ces 
raisons  mêmes,  rien  ne  serait  plus  digne  d'at- 
tention que  la  carte  qu'a  publiée  M.  Robert- 
son  ,  si  on  pouvait  croire  qu'elle  eût  été  dressée 
sur  des  renseignements  certains  et  des  informa- 
tions positives.  Mais  lorsqu'on  a  lu  l'ouvrage  de 
ce  voyageur,  et  qu'on  l'a  comparé  à  ceu?:  de 
Mungo  -  Park  et  de  M.  Bowdich ,  on  s'aper- 
çoit sur-le-champ  que  cette  carte  n'est  que 
le  produit  des  plus  grossières  méprises,  et  de 
l'ignorance  la  plus  présomptueuse. 

En  effet,  immédiatement  au  nord  des  Aschan- 
tis  proprement  dits,  et  entre  le  8®  et  le  9®  degré 
de  latitude ,  M.  Bowdich  nous  montre  une  ville 
de  Banda  ^  une  autre  de  Buntoukou  et  un  pays 
de  Soko;  ce  sont  ces  lieux  que  M.  Robertson 
transporte  dans  le  «So^^^ia/i  :  il  confond  le  Banda 
des  Aschantis  avec  le  Bondou  qui  se  trouve 
entre  la  Gambie  et  le  Sénégal;  il  confond  ctl- 
core  Soko  avec  le  Ségo  de  Mungo-Park  :  bien 
mieux,  il  réunit  ces  deux  lieux,  et  n'en  fait  plus 
qu'un  seul.  Le  royaume  ^Aouissij  qui,  sur  la 
«arte  de  M.  Bowdich,  est  à  l'est  de  Dahomey^y 
vers  huit  degrés  et  demi  de  latitude,  est,  sous  le 
nom.  àiAouissa ,  considéré  par  M.  Robertson 
comme  le  métne  que  Houssa  ou  Haoussa,  et 


PttEMIÈRE    PARTlJE.  l45 

transporté  entre  douzç  et  quatorze  degrés  de  la* 
titude  nord.  Boussa,  qui,  dansDelisle,  d'Anville 
et  M.  Bowdich,  est  un  royaume  situé  sur  les  bords 
du iVig^er, devient,  d'après  M.  Rohertson,  la  capi- 
tale àiAnago;  tandis  ^yjiAnago  forme,  sur  la  carte 
de  M,  Bowdich,  un  petit  royaume  peu  éloigné 
de  la  côte ,  à  l'est  du  fleuve  Folta,  M.  Robert- 
son  nous  dit  (i)  que  les  habitants  de  Timboucr 
tou  se  rendent  sur  leurs  Canots ,  en  trois  jours 
de  temps,  à  Lagos^  sur  la  côte  ;  et  il  ajoute  qu'il 
ne  doute  pas  de  cette  assertion  qui  se  trouve 
d'accord ,  selon  lui ,  avec  ce  qui  a  été  affirmé  par 
les  Aschantis, 

Nous  n'abuserons  pas  plus  long-temps  de  la 
patience  du  lecteur ,  en  relevant  les  autres  er- 
reurs grossières  et  les  traits  d'ignorance  que 
reirferme  le  livre  de  M.  Robertson.  11  paraît  que 
cet  auteur  a  cependant  voyagé  réellement  sur  la 
Côte- d'or j  en  qualité  d'agei\t  d'une  maison  de 
commerce  de  Liverpool;  et,  s'il  s'était  cohtenté 
de  donner  avec  franchise,  et  sans  y  rien  mêler  du 
sien,  les  renseignements  qu'il  a  pu  se  procurer, 
il  aurait  rendu  service  à  la  géographie  :  mais 
il  a  tellement  entremêlé  ces  notions  et  ces 
renseignements  avec  ses  erreurs  et  ses  sye? 
ternes ,  qu'ils  sont  devenus  peu  utiles  ppur  là 

{i)  Robertsoa  «  p.  aga. 

lO 


l46/        RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

science.  Si  Ton  en  croyait  M.  Robertson,  k  plu- 
part de  ces  renseignements  ont  été  obtenus  par 
les  Ascharttis.  Mais  M.  Bowdich  s'est  convaincu  à 
Coumassie  que  les  connaissances  des  Aschantis 
en  géographie  se  terminaient  au  nord  à  Kong^ 
et  à  Test  à  Gamba.  Les  seules  grandes  rivières 
qu'ils  connaissent ,  sont  les  deux  qui  se  réunis- 
sent pour  former  le  Foîta  et  le  Coumha  ou 
CoumboUy  à  dix-huit  journées  de  marche  au 
.nord-ouest.  Le  nom  de  Loro  leur  est  totalement 
inconnu  ;  ils  ne  parlent  non  plus  d'aucun  grand 
lac  dans  l'intérieur.  Enfin  ils  avouent  franche- 
ment leur  ignorance  pour  toutes  les  contrées 
situées  au  nord  de  Kong,  et  à  Test  de  Dag- 
wumba  et  de  Gamba. 

La  publication  des  voyages  de  Burckhardt,  qui 
a  suivi  de  près  celle  de  l'ouvrage  de  M.  Bowdidi, 
a  révélé  au  monde  savant  une  nouvelle  tentative 
pour  pénétrer  dans  l'intérieur  de  ces  cotatrées, 
qu'on  avait  tenue  secrète  pendant  quelques  an- 
nées. La  société  pour  les  découvertes  en  Afrique 
avak  perdu  l'espoir  de  se  procurer  aucune  nou- 
velle de  Hornemann.EUe  avait  appris  la  mort  de 
M.  Henri  NichoUs  ;  et  les  résultats  malheureux 
dés  essais  entrepris  pour  pénétrer  dans  l'intérieur 
du  continent  africain  par  le  nord  et  par  l'ouest, 
l'engagèrent  à  faire  un  effort  du  côté  de  l'est. 
C'est  dans  ce  but  qu'elle  accepta  les  offres  qui 


PREMIÈRE    PARTIE.  >  l47 

lui  furent  faites  par  Jean*Louis  Burckhardt.  Ce 
jeune  bomme ,  comme  Hornemann,  lui  fiit  aussi 
recommandé  par  le  professeur  Blumenbach. 

Burckhardt,  après  s'être  suffisamment  instruit 
dans  la  langue  arabe ,  après  avoir  laissé  croître 
sa  barbe  et  pris  le  costume  oriental,  partit  en 
mars  1809.  Il  résida  deux  ans  et  demi  à  jilep^ 
afin  de  s'initier  dans  le  langage  et  les  mœurs 
d'Orient,  et  de  pouvoir  passer  pour  musulman. 
Il  avait  pris  le  nom  d'Ibrahim-ibn-Abdallah  :  il 
se  rendit  au  Catre  en  septembre  181 2;  il  s'en- 
fonça ensuite  dans  V  Egypte  supérieure  et  dans 
la  Nubiey  et  employa  deux  ans  et  demi  à  ex^ 
plorer  ces  contrées  peu  connues.  Lorsqu'il  se 
préparait  à  pénétrer  dans  celles  qui  nous  sont 
tout-à-fait  inconnues ,  et  à  parcourir  de  l'est  à 
Touestles  vastes  régions  du  Soudan ,  il  succomba 
à  une  fièvre  dyssehtérique ,  le  i5  octobre  1817. 
La  fermeté  et  la  noblesse  de  son  caractère,  son 
courage,  sa  prudence,  son  mépris  des  richesses, 
son  ardeur  pour  les  découvertes,  ses  connais- 
sances dans  les  langues  et  les  mœurs  de  l'Orieht^ 
rendent  sa  perte  très -regrettable.  Le  premier 
volume  de  ses  voyages  qu'on  a  fait  paraître,  jette 
quelque  jour  sur  \ Egypte  supérieure  ei  la  Nubie 
et  les  pays  qui  en  sont  voisins;  mais  il  n'ajoute 
d'autre;^  renseignements  sur  les  contrées  qui  sont 
l'objet  de  nos  recherches,  que  ceux  qu'a  pu  ob- 

10. 


l48  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

tenir  son  auteur;  des  Arabes  eux-mêmes.  Quoi- 
que ces  notions  soient  nécessairement  vagues 
et  incertaines,  nous  ne  devons  pas  les  omettre. 
Burckhardt  a  confirmé  ce  que  Ton  savait  du 
Bahr-eUAbiadic^  fleuve  est  réellement  plus  grand 
que  le  Bahr^eUAzrek ,  et  c'est  le  véritable  NiL 
Shendfy  le  lieu  le  plus  méridional  de  la  Nubie 
où  M.  Burckhardt  a  pénétré,  est  le  principal 
entrepôt  des  marchands  d'esclaves  de  V Egypte^ 
du  Dar-FouTy  du  Kordofan  et  du  Sermuar.  Le 
roi  du  Shandy  est  tributaire  du  Sennaar.  La 
capitale  du  Bornou ,  c'est-à-dire  la  ville  où  le  roi 
réside,  se  nomme i5/r/iey  (i);  elle  est  sur  le  bord 
occidental  d'un  grand  lac  qu'où  appelle  Nou; 
de  là ,  dit-on ,  le  no  m  de  Bor-Nou.  Entre  le  Bornou 
et  la  Nubie  on  parle  l'arabe  pur;  mais  le  Bornou 
z,  un  langage  particulier.  Le  Kordofan  est  une 
oasis  ou  une  contrée  séparée  par  des  déserts  des 
pays  environnants,  et  qui  est  sous  la  domination 
du  Dar-Four.  Entre  le  Kordofan  et  Bornou  on 
traverse,  en  se  dirigeant  au  nord-ouest,  d'abord 
le  Dar-Four^  ensuite  le  Borgou  (Berghou),  qui 
porte  aussi  le  nom  de  Saley  au  Bornou  et  au 

/ 

(i)  Le  mot  de  himej  signifie  forteresse  y  selon  ce  qui  a 
été  dit  à  M.  Ëinsiedel.  Les  nègres  de  Mallo^a  ajoutent 
toujours  le  surnom  de  Berinnê,  ou  de  Brinné^  à  toutes  ^cs 
villes  fortifiées.  (Bowdicb's  Mission  Ib  Ashantee,  p.  197.) 


PREMIÈRE    PA.ATIE.  l49 

Fezzan^  et  que  les  Arabes  moggrebins  nomment 
JVady  ou  Ouady,  Au  midi  de  Borghou  est  la  ri- 
vière et  la  province  àe  Djyr^  non!  remarquable 
parce  qu'il  rappelle  celui  de  Gir  de  Ptolémée; 
plus  à  l'ouest  est  le  Bagherem^  qu'arrose  le  grand 
fleuve  Shary^  qui  reçoit  le  Bahr-Djad  et  le  Bahr- 
el'Feydh^  et  coule  du  nord  au  sud  entre  Katakou 
et  Bahr-el'GhazeL  M.  Bowdich  avait  eu  connais- 
sance de  la  rivière  Shary  (i) ,  et  l'avait  de  même 
placée  à  l'ouest  du  5agAere/7i;  selon  lui,elle  coule 
aussi  du  nocd  an  sud,  et  se  jette  dans  le  Quolla 
ou  Niger.  Il  y  a  quinze  jours  de  marche,  selon  les 
informations  données  à  M.  Burckhardt ,  depuis 
les  limites  du  Bomou  jusqu'au  Bahr^Shary.  On 
traverse  pour  y  arriver  le  Bahr-ehGhazel^  curieux 
vallon  qui  renferme- Xanem;  entre  Kanem  et 
Sfiory  est  le  Dar^Karka.  Du  Bagherem  à  Afnou 
il  y  a  vingt-cinq  jours  de  marche.  Le  pays  des 
Nègres,  ou  le  Soudan ^  est  à  dix  ou  quinze  jour- 
nées de  Borgou,  Les  Arabes  Fellata  sont  très- 
puissants  ;  leurs  tribus  résid^W  entre  le  Dar^ 
Four  et  le  Bomou;  ils  sont  souvent  en  guerre 
avec  le  sultan  de  ce  dernier  pays;  ils  étendent 
leur  influence  jusque  sur  les  limites  septentrio- 
nales du  Soudan,  Ils  ont  conquis  le  Cachenah , 
il  y  a  dix  ans,  et  ont  presque  détruit  la  ville: 

(i)  Bowdich's  Mission  to  Ashantee,  p.  204,  etc. 


l5o  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

leurs  principales  forces  consistent  en  cavale* 
rie,  et  leurs  chefs  sont  vêtus  de  robes  de  drap 
coloré  ou  de  soie;  ils  sont,  dit -on,  en  grand 
nombre  du  côté  de  Timbouctou.  On  a  assuré  à 
M.  Burckhardt  que  la  rivière  de  Timbouctou  cour 
lait  à  l'ouest  (i)  :  et  cependant  ceux  c|ui  parlai^it 
ainsi  la  considéraient  comme  la  même  rivière 
que  le  Nil.  M.  Burckhardt  ou  son  éditeur  a  tort 
de  penser  que  ces  deux  assertions  impliquent 
contradiction,  puisqu'une  rivière  peut  bien  d'a- 
bord couler  à  l'occident,  et  se  détourner  ensuite 
vers  l'orient. 

Le  voyage  de  M.  6.  Mollien  dans  rintérieur 
de  l'Afrique,  qui  a  paru  en  182O9  nous  a  procuré 
des  connaissances  plus  détaillées  et  plus  exactes 
sur  les  nations  qui  habitent  les  régions  situées 
entre  le  Sénégal^  lai. Gumine  et  le  Rio-Grande^ 
et  sur  l'aspect  général  de  ces  mêmes  régions  et 
la  nature  de  leur  sol  ;  mais,  tout  en  donnant  de 
justes  éloges  au  courage  çt  à  la  persévérance  du 
jeime  et  intéressant  voyageur,  nous  ne  pouvons 
dissimuler  que  le  défaut  d'instruments ,  le  dé* 
nuement  dans  lequel  il  s'est  trouvé,  les  dangers 
auxquels  il  a  été  exposé,  ne  lui  ont  pas  per- 
mis de  noter  avec   assez  d'exactitude  les  dis- 

(r)  J.  L.  Burckhardt,  Travels  in  Nubia,  in-4**,  I^pod^^, 
189  ,  p.  Ixxij  et  p.  477-493.  Voyez  ci-dessas,  p.  i3o. 


PKEMIÈRJE    PARTIE.  l5l 

tances  et  les  directions  de  la  route  qu'il  parcou- 
rait, ni  de  faire  les  observations  et  de  prendre 
les  renseignements  qui  auraient  pu  rendre  son 
voyage  d'une  grande  utilité  pour  la  géographie 
positive.  Toutefois  il  semble  avoir  reconnu  que 
le  Sénégç.lj  la  Gambie  et  le  Rio-Grande  prennent 
leur  source  danà  un  même  groupe  de  monta- 
ges, qui  s'étend  du  sud  au  nord,. entre  Labbé 
et  Timboy  dans  le  Fouta-Diallon  (i). 

La  Gambie  ou  Bâ^Diman^  et  le  Rio^Grande 
ou  Comrba^  sortant  d'un  même  enfoncement 
placé  au  milieu  des  hauteurs  de  ces  montagnes, 
et  qui  est  le  point  de  partage  des  eaux.  Le 
Bio-Grande- GOi^^  directement  à  l'ouest  vers  la 
mer;  la  Gambie  se  dirige  en  sens  oppoisé  et  vers 
le  nord.  De  l'autre  côté  de  ces  montagnes  et 
plus  au  sud  sont  les  sources  de  la  Falémé  ou 
Tené  (  Tenyah  de  Mungd-Park),  et  celles  du 


(i)  Selon  M.  Mollîen  (t.  I,  p.  265),  près  à&^  frontières 
du  Fouta  Taro ,  dans  le  Toisinage  d*an  lieu  nomme  Den- 
doudéJFiaUy  est  ttû  étang  (en  langae  poule,  Uali  signifie 
étang),  dcmt  les  eaux,  lorsqu'il  es$  gtossi  par  les  pluies, 
débordent,  d'un  côté,  dans  la  Gamhifiy  à  Kamhia,  et  de 
l'autre,  dans  le  Sénégal^  à  Kougnun,  dans  le  Bondou. 
Mais  lorsque  M.  Mollien  passa,  tout  ce  terraif^  était  à  sec; 
et  il  est  fâcheux  qu'il  n'ait  pu  s'assurer,  par  ses  propres 
obierva^ons ,  de  cette  communication  du  Sénégal  et  de  la 
Gambie  y  déjji  affirmée  par  le  P.  Labat,  et  rejetée  par  d'An« 
ville. 


/5a  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

Sénégal  on  Bâ-Fing  (i).  Les  montagnes  qui 
sont  au  sud  de  ces  sources  et  qui  ont  une  grande 
élévartion,  puisque  les  Nègres  disent  que  leurs 
plus  hauts  sommets  sont  toujours  couverts  de 
neige,  fournissent,  selon  ce  qui  a  été  dit  à  M.  Mol- 
lien,  les  sources  du2)/a///-5a(Djoli-Bâ  ou  Joliba) 
ou  du  Niger ^  qui  sont  à  huit  journées  au  sud  du 
Timbo  et  à  onze  journées  des  sources  du  Séné- 
gal, Il  résulte  de  tout  ceci  que  les  sources  du- 
Niger  devraient  être  placées  à  2  degrés  environ 
plus  à  l'ouQjJ:  que  sur\  la  carte  de  Mungo-Park. 
Vers  les  sources  du  Niger  ou  du  Djalli^Bà 
sont  le  Firia  et  le  Soliman.  Ge  dernier  pays  se 
trouvait  déjà  sur  la  carte  du  premier  voyage  de 
Mungo-Park,  mais  à  deux  degrés  plus  au  nord, 
et  aux  sources  de  la  Gambie ,  et  non  à  celles  du 
Niger.  Le  Firia  et  le  SoUman  sont  à  dix  jour- 
nées au  sud -est  de  Timbo,  et  forment  un  pays 
montagneux  habité  par  les DjallonÂis  :  c'est  dans 
les  bois  qui  séparent  le  Firia  du  Fouta-Diallon^ 
qu'existe,  dit-on,  la  source  de  la  Caba^  que  l'on 
suppose  être  la  rivière  de  SierrorLeone.  Le  San-- 


(i)  Enmandingae  Bâ-fingy  signifie,  dit-on,  Fleuve  noir; 
en  langage  poule ,  on  nomme  le  Sénégal,  Bâ-leo  ,'ce  qui  a 
ta  même  signification  qxxe  Bâ-fing  ;  on  l'appelle  anssi 
Fouta ,  ce  qui  signifie  simplement  ^ififc^.  Voyez  Ifollieil , 
t.  II,  p.  ia3. 


PREMi:ÈR£    PARTIE.  1 53 

garari^  le  Kankan^  et  le  Balia^  qui  sont  à  l'est 
du  Firia  et  du  Soliman^  sont  des  pays  plats. 
Le  premier  de  ces  deux  pays,  voisin  du  Firia^ 
est  habité  par  des  Poules  païens.  Ces  peuples , 
que  leur  couleur  rougeâtre  rend  faciles  à  dis» 
tinguer  des  autres  habitants  de  l'Afrique ,  sont 
les  mêmes  que  les  Foules  et  les  Foulahs  de  d'Aii- 
ville  et  d'un  grand  nombre  d'auteurs.  Le  Niger 
dsins  le  Sangarari  a  déjà  deux  portées  de  fusil  de 
large.  Balia,  qui  est  peuplé  par  les  D/allonÂis^est 
au  nord  du  Sangarari.  A  l'est  de  ces  deux  pays 
et  à  quinze  journées  de  Timho\  est  l'empire  du 
Kankan^  habité  par  àes  Mandingues  m^omé- ^ 
tans,  sur  les  frontières  duquel  est  un  village 
nommé  Bourré^  qui  possède,  dit-on,  plus  d'or 
que  tout  le  Bondou  et  le  Bamhouk  ensemble. 
Ce  pays  fait  un  grand  commerce  avec  Sego  et 
Timbouctou^  et  y  apporte  toutes  les  richesses 
que  l'on  y  voit.  A  quinze  jours  de  marche  vers 
l'est,  se  trouve  le  Maniana^  dont  les  habitants 
sont  anthropophages  ,  ainsi  ^  que  ^Ta  rapporté 
Mungo-Park  (i).  Au  nord -est  ée  Kankan  est 
un  pays  nommé  OuasseloUy  qui  fournit  aussi 
beaucoup  d'or,  mais  plus  pâle  et  moins  re- 
cherché que  celui  du  Kankan  :  au  reste  le  Kan^ 


(i)  Mnngo  -  Park ,  Journal  of  a  Mission  to  the  interior 
•f  Africa^  p.  i66. 


l54         RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

kan  et  le  Ouasselony  seraient,  selon  M.  Mollien, 
les  pays  de  l'intérieur  de  l'Afrique  les  plus  riches 
en  mines  d'or  et  en  esclaves;  et  Sego  et  Tim- 
bouctou  nç  seraient  que  les  entrepôts  du  com-^ 
merce  de  ces  peuples  avec  l'Afrique  septentrio- 
nale. Ces  notions  ne  s'accordent  nullement  avec 
Léon  l'Africain,  Marmol  et  les  auteurs  arabes, 
qui  placent  beaucoup  plus  à  l'est  et  dans  le 
Ouangara^  le  pays  à!EUTibr  ou  de  l'or  pur. 

Un  Marabout ,  ou  un  prêtre  mahométan 
nègre,  qui  avait  été  à  la  Mecque yàiX  à  M.  Mol- 
lien  qu'en -deçà  et  au-delà  de  Timbouctou  ^ 
on  •  rencontrait  des  états  entièrement  habités 
par  des  Fouies;  que  le  DjaUi^Bd  se  jetsdt  dans 
le  Nil^  et  que  ses  eaux,  après  s'être  mêlées  à 
celles  du  fleuve  de  V Egypte  j  se  rendaient  dans 
la  mer.  L'existence  des  Fouies  au-delà  de  Tïiw- 
bouctou  se  trouve  conforme  au  récit  d'Amadi- 
Fatouma  (i).  Quant  au  sy^me  ^ui  tend  à  faire 
considérer  1^  Niger  ou  le  ^nd  fleuve  du  Soudan 
comme  le  même  fleuve  que  le  Nii^  on  doit  dire 
que  cette  opinion  est  générale  chez  un  grand 
nombre  de  peuples  en  Afrique;  ce  qui  n'est  pas 
du  tout  une  preuve  décisive  qu'elle  soit  exacte. 

Tels  sont  tous  les  renseignements  que  nous 

*i  -.      - 

(i)  Mnngo-Park,  Journal  of  a  Mission  to  the  interior 
of  Jfritfu  in  the  year^  i8o5,  p.  209. 


PREMIÈRE    PARTIE.  l55 

fournit  là  relation  de  M.  MoUien  sur  l'intérieur 
dé  l'Afrique  (i). 

Les  notions  que  M.  Ritchie  avait  obtenues 
pendant  son  séjour  à  Tripoli  et  au  Fezzàn^ 
n'ont  été  mises  au  jour  que  très-récemment 
par  le  rédacteur  d'un  journal  anglais,  qui  pa- 
raît avoir  eu  entre  les  mains  les  papiers  de 
ce  jeune  et  infortuné  voyageur.  Pendant  son 
séjour  à  Mourzouk^  M.  Ritchie  s'était,  dit*on, 
minage  des  intelligences  avec  les  sultans  de 
Kanfim  et  de  Bornou;  il  devait  partir  pour  se 
rendre  dans  c^s  contrées  au  commencement 
de  novembre,  époque  de  l'année  à  laquelle 
commence  la  Aison  la  plus  convenable  pour 
traverser  le  désert.  Comme  Hornemann,  M.  Rit- 
chie se  proposait  ensuite  de  traverser  le  Soudan 
de  l'est  à  l'ouest ,  de  se  rendre  par  le  Dagivumba 
dans  le  royaume  des  Aschantis;  de  là  il  aurait 
ûicilement  attektl  rétablissement  anglais  de  Cape* 
Coast  sur  \di£ét€'d*or^  où  il  eût  pu  s'embar« 
quer  pour  rEurope*  La  mort,  ainsi  que  nous 
l'avons  dit,  a  empted^  raccompUsaeinent  de  ce 
projet;  et  il  n'en  est  resté  que  les  notions  que 
M.  Ritchie  avait  eu  soin  de  recueiHB"  à  Tripoli 

(i)  G.  Mollien,  Voyage  dans  V intérieur  de  l'Afrique, 
aux  sources  d^  Sénégal  et  de  la  Gambie,  t.  i,  p.  219, 
et  t.  II  y  p.  189  à  195. 


l56  RKCHERCHBS     SUR    l'aFRIQUE. 

et  à  Mourzouk,  Un  maître  d'école  de  Tripoli 
nommé  Mahomet,  né  à  Timbouctou  de  parents 
tripolitains ,  et  qui  s'était  deux  fois  rendu  dans 
sa  ville  natale  en  partant  de  Tripoli  et  en  pas- 
sant par  Ghadamès  et  Touat^  a,  dit-on,  donné 
à  M.  Ritchie  les  renseignements  suivants.  De 
Tripoli  k  Ghadamès  on  compte  treize  à  quatorze 
journées  de  marche;  de  Ghadamès  à  Ain^el-- 
Salah  {la  Fontaine  des  Saints)  sur  la  frontière^ 
du  pays  de  Touat^  il  y  ^^  vingt  jours  de  marche. 
A  deux  jours  de'  marche  de  Aîn-eU  Salah  ^  est 
Àgahly^  la  capitale  du  pays  de  Touat.  Touat 
est  une  oasis  au  milieu  du  désert ,  abondante  en 
sources  et  très-fertile;  les  maisons  y  sont  en 
pierres  comme  à  Tripoli.  Après  trente  jours 
de  marche  en  partant  de  Touàty  on  arrive  à 
Mabrouky  ville  plus  considérable  que  Tripoli 
et  bâtie  aussi  en  pierres  :  le  nom  donné  à  Ma- 
brouk  vient,  dit-on,  de  ce  que  les  conducteurs 
de  caravanes,  lorsqu'ils  s'y  rencontrent ,  se  féli- 
citent mùtuellenient  d'avoir  traversé  le  désert. 

Les  Touariks  habitent  ces  contrées  ;  c'est  une 
race  presque  noire",  qui  vit  dans  des  tentes,  et 
qui  possède  des  chameaux  d'uiie'  vitesse  ex- 
trême. Chez  les  Touariks^  les  hcunmes  s'enve- 
lopçent  le  visage  dans  une  sorte  de  vqile  ou  de 
capuchon ,  tandis  qu,e  les  femmes  laissent  le  leur 
à  découvert;  ce  qui  est  le  contraire  de  l'usage 


PR£Mlà:R£     PARTIE.  1 57 

qui  se  pratique  dans  tout  l'Orient.  Les  Touatiks 
sont  très-hospitaliers.  De  Mabrouk  à  Timbouctou 
on  compte  quinze  jours  de  marche;  mais  le  pays 
est  fertile,  et  abonde  en  provisions  et  en  sources 
dont  Teau  est  excellente. Jl  paraît,  d'après  ces 
renseignements ,  qui  s'acccyrdent  parfaitement 
avec  les  détails  donnés  dans  le  premier  de  no^ 
itinéraires,  que  le  Grand -Désert  se  termine  à 
Mabrouk  y  et  que  Timbouctou  n'est  pas  sur  la 
limite ,  mais  dans  l'intérieur  même  du  Soudan. 
Selon  Mahomet,  Timbouctou  est  une  ville 
murée;  quelques-unes  des  maisons  sont  bâties 
en  pierres,  d'autres  en  terre.  Le  palais  du  roi  res- 
semble au  château  A^  Tripoli;  sa  garde  est  armée 
de  fusils,  qu'on  se  procure  par  la  grande  mer. 
On  manufacture  à  Timbouctou  des  draps  de  coton 
et  des  tissus  en  or.  Les  environs  de  Timbouc-- 
tau  abondent  en  cocotiers:  cette  circonstance  est 
remarquable;  parce  que  le  matelot  Adams  avait 
affirmé  le  même  fait;  et,  comme  jusqu'ici  on  n'a 
rencontré  les  cocotiers  que  dans  le  voisinage  de 
la  mer ,  on  s'était  fait  un  argument  de  cette  par- 
ticularité du  récit  d'Adams  pa^r  prouver  qu'il 
était  messo&^r.  Le,  i)¥/,  selon  Mahomet,  est 
à  une  demi  ajournée  de  Timbouctou;  le  port 
de  la  ville  est  Kabra  :  quand  on  va  de  Tim- 
bouctou  à  Kabra^  la  rivière  vient  de  la  main 
droite,  et  coule  vers   la   gauche  (c'est-à-dire 


l58  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

^qu'elle  coule  d'occident  en  orient);  elle  est  si 
large  dans  cet  endroit ,  que  la  balle  du  fusil  ne 
peut  atteindre  la  rive  opposée  :  dans  la  langue 
du  pays,  cette  rivière  se  nomme  hsa.  On  y 
Yoit  un  grand  nombre  de  bateaux ,  qui  sont 
en  grande  partie  employés  au  commerce  de 
Djénni.  Mahomet  a  toujours  entendu  dire  que 
le  Nit  du  Soudan  et  le  Nil  d'Egypte  étaient  le 
même  fleuve.  De  Timbouctou  jusqu'à  Ouangara 
on  compte  vingt-cinq  journées  de  marche.  Les 
habitants  de  Ouangara  apportent  de  la  poudre 
d'or  à  Timbouctou,  Mahomet  n'avait  point  été 
à  Ouangara;  mais  il  avait  entendu  dire  que  cette 
contrée  est  au  sud.  Il  était  persuadé  que  des 
chrétiens  pourraient  résider  à  Timbouctou  sans 
y  éprouver  dé  vexations. 

M.Ritchie  obtint  encore  d'autres  informations 
d'un  nommé  Hadji-Hamet,  natif  de  Bornou, 
qui  avait  accompli  le  pèlerinage  de  la  Mecque 
cinq  ans  auparavant.  Il  était  né  dans  la  capi- 
tale de  Bomou ,  qui  porte  le  même  nom  que  le 
royaume,  et  qui  ne  s'appelle  pas  Bimey  comme 
l'avance  M-  Burckhardt.  Mais  celui-ci  nous  ap- 
prend ,  en  même  temps ,  que  ce  mot  de  Bimey 
signifie  ville  en  langage  du' pays  (i).  Hadji- 
Hamet  affirme  que  Bomou  e^phis  grand  que 
■  '■'■'■'■■■'     I  ■        "  *     II.  I  .  .  ..Il  '  ■  ■- 

(i)  Voyez  ci-dessus,  p.  72  et  148. 


PREMIÈRE    PARTIS.  ïSg 

la  ville  du  Caire  en  Egypte ^  et  qu'on  mettrait^ 
une  journée  entière  à  le  traverser.  Lorsqu'il  se 
rendit  à  la  Mecque ^  il  traversa  le  royaume  de 
jK^ane/7i,qui  est  à  sept  journées  à  l'est  de  Bomou. 
La  ville  de  Kanem  est  de  la  grandeur  de  celle 
de  Tunis.  Une  grande  rivière  arrose  le  royaume 
de  Kariem  ;  on  la  nomme  Tschadi  k  Cano  ou 
Gano ,  et.  Bimum  dans  le  pays  de  Kanem,  Elle 
coule  au  sud-est ,  n'est  jamais  à  sec;  et  pendant 
l'été  elle  inonde  les  contrées  environnantes.  Dans 
\e  Bomou  cette  rivière  se  nomme  Kama^kou,  Ce 
renseignement  est  confirmé,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit,  par  la  carte  d'Afi^ique  de  Delisle,  qui 
donne  au  Niger  dans  le  Bomou  le  nom  de  Kama- 
e/oou,  et  avec  ce  que  les  habitants  d* ^schantis  ont 
dit  à  M.  Hutchinson ,  qu'il  y  avait  à  Borno»  une 
rivière  nommée  Koumoudou-Gaiguina  (i).  Mais 
ces  mots  de  KamadooUy  de  Koumoudou^  de 
Kamadkou^  sont  certainement  les  mêmes  que 
Kamadago  diversement  prononcé,  qui,  dans  le 
langage  de  Bomou^  signifie  rivière  (2).  laeRamad- 
Âou^  on  la  rivière  de  Bomou  ^  selon  Hadji-jlamet, 
pas&e  aune  demi-journée  au  sud-est  de  la  capitale  ; 
et  sur  ses  bords  est  utie  ville  ou  un  port  nommé 
Gambarou.  Delisle  e^M.  Bowdicb,  ainsi  que.  nous 

" .  .  '^1.  — ■ 

(i)  Bowdich's  Mission  to  Askantee^  p.  ai 3. 
(a)  fiarckhardt ,  Travels  in  IVubia ,  p.  ^9^  9  et  ci-dessus 
p.  i35. 


l6o  RECHERCHES.    SUR    lVfRIQUE. 

gravons  déjà  remarqué,  donnent  ce  nom  de  Gant" 
barou  à  une  rivière.  A  Gambarou^  selon  Hadji- 
Hamet,  on  précipite  tous  les  ans  dans  le  fleuve,  à 
l'époque  de  l'inondation ,  une  jeune  fille  vierge  : 
on  croit  fel'mement  que  sans  ce  sacrifice  la  ville 
serait  submergée.  M.  Burckhardt  a  entendu  ra- 
conter la  même  chose  en  Egypte.  A  Gambarou, 
selon  HadjirHamet,  il  y  a  des  châteaux  et  des 
maisons  bâtis  par  des  chrétiens ,  qui ,  d'après  la 
tradition,  ont  habité  ces  contrées  il  y  a  plusieurs 
siècles.  Avant  que  la  rivière  qui  coule  devant 
Gambarou  atteigne  cette,  ville ,  e^le  traverse  le 
Soudan.  Hadji-Hamet  dit  s'être  rendu  à  Gano^ 
qui  est  à  douze  journées  à  l'ouest  de  Bornouy 
et  près  de  la  rivière  qu'on  appelle  Tchadi.  A.  cinq 
joujpées  à  l'ouest  de  Gano  est  C^chenah  y  où  la 
rivière  a  environ  un  tiers  de  mille  ;  on  la  nomme 
dans  cet  endroit  GoulbL  Hadji-Hamet  était  jeune 
lorsqu'il  se  rendit  à  Timbouctou;  mais  il  croit 
que  cette  ville  est  à  vingt-huit  journées  de  Ca- 
chenah-  et  à  quarante-cinq  journées  de  Bornou. 
Les  liei^  qu'il  traversa  pour  s'y  rendre,  sont 
GoubuTy  Zanfaruy  Nyffé^  Zeg-Zegy  Melli  et 
Fouta;  mais  il  ne  connaît  pas  les  distances  res^ 
pectives  qui  séparent  ces  li^uiles^uns  des  au- 
tres. A  JPfxffé  il  y  a  une  gt'ande  mer  intérieure 
dont  l'eau  est  douce  :  la  rivière  Tchadi  sort  de 
cette  mer,  et  dirige  ensuite  son  cours  en  Égypte^ 


PREMIÈRE    PiLRTIE.  t6l 

Ainsi  la  rivière  Tschad  serait  le  Nil^  où  s'y  joi^ 
drait  ;  mais  Hadji-Hamet  ne  sait  pas  si  la  rivière 
qui  coule  près  d^  Timbouctou  se  joint  ou  non 
à  celle-là.  Ouangara  est  au  sud  entre  la  mer 
intérieure  dont  nous  venons  de  parler  et  Tim^ 
bouctou,  Cachenah  et  toutes  les  contrées  envi- 
ronnanles  sont  actuellement  sous  la  domination 
de  Bello ,  chef  des  Fellata  et  fils  de  Hatman 
Panfodio  :  ce  chef  fit  une  irruption  dans  cette 
partie  de  l'Afrique ,  il  y  a  quelques  années ,  et 
&it  actuellement  sa  résidence  à  Cachenah  même. 
Tels  sont  tous  les  renseignements  que  Hadji- 
Hamet  a  pu  fournir. 

M.  Ritchie  en  obtint  quelquçs  autres  sur  les 
contrées  plus  voisines  de  X Egypte  et  de  I2L  Nubie j 
d'un  nommé  Sidi-Mousa ,  marchand  tripolitain , 
qui,  lorsque  ce  voyageur  le  vit,  revenait  de 
Wara ,  ou  Ouara  ^  capitale  du  Waday^  ou 
Ouadey ;  cette  contrée  est,  ainsi  que  nous 
l'avons  dit,  la  même  que  Bergou^  et  son  véri- 
table nom  est  Dar-Saley,  puisque  c'est  celui 
que  lui  donnent  les  natifs.  Selon  Sidi -«Mousa , 
la  distance  entre  Tripoli  et  Bergou  est  égale  à 
celle  de  Mourzouk  à  Bomou  ;  elle  est  de  qua- 
rante-cinq journées  de  caravane.  Pour  se  rendre 
de  Tripoli  à  fFaday^  on  passe  par  Begharmi  et 
Bomou.  On  emploie  vingt  jours  pour  se  rendre 
de  fFara  à  Bfigharmi^  et  six  de  Begharmi  à 


l62    HECHBKCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

%omou.  Cette  dernière  ville  est  beaucoup  plus 
grande  que  Tripoli.  Les  peuples  de  Bùmou  et 
de  fFdday  habitent  des  cabanes  construites  en 
terre  et  couvertes  de  gazon  ;  mais  ceux  de 
Beghanrd  ont  des  maisons  à  deux  étages.  Une 
rivière,  nommée  BaJtta^  arrose  une  partie  du 
royaume  de  H^aday;  et  Sidi-Mousa  croyait  que 
ce  pouvait  être  la  même  que  celle  qu'on  nomme 
Tschad^  et  qui  coule  à  Bonum.  Renaarquons 
que  Hornemann  a  aussi  entendu  dire  au  Fèz^ 
zàn  que  la  rivière  qui  passe  à  Timboudou 
coule  au  sud  de  H€U>ussa;  qu'elle  arrose  le 
Njffé  et  le  Cabi^  où  on  la  nomme  Gulbi  ;  et 
qu'elle  continue  à  couler  vers  Test  sur  le  terri- 
toire deBornou:  là,  dit-il,  elle  prend  le  nom  de 
2ad  ou  Tschad,  ce  qui  signifie  grande  euu. 
Dans  quelques  cantons  de  Haoussa^  on  la 
nomme  Gaora  (peut-être  Quorra  ou  Quùttd)^ 
mot  dont  le  sens  est  le  même  (i). 

Le  Nil  y  selon  Sidi-Mousa ,  arrose  le  Bomou  et 
le  Begharmi  des  Nègres  :  à  quatre  journées  de  dis- 
tance de  la  capitale  de  ce  dernier  pays,  ce  fléUve 
coule  à  Test;  là  il  a  près  d'un  miHe  de  largeur: 
il  se  dirige  ensuit*  au  sud -est.  Sidi-Mo^sà  ne 
put  donner  aucun  renseignement  isur  le  Nil  au- 
delà  du  pays  de  Begharmi;  mais  il  a  toujours 

(i)  Hornemann,  Voyage  y,  t.  I,  p.  1 64  de  la  traductien 
française^  et  p.  iiS  de  Tédition  anglaise,  in-4®. 


PREMIÈRE    PARTIE,  l63 

entendu  dire  que  ce  fleuve  est  le  même  que 
celui  qui  coule  en  Egypte.  Il  résulte  du  moins 
de  son  récit  que  le  Tschad  du  Bornou  n'est 
pas  le  fleuve  qui^  sous  le  nom  de  iVi7,  traverse 
le  Begharmi. 

Telles  sont  les  informations  que  M.  Ritchie  a 
reçues  de  trois  Africains  intelligents  et  instruits, 
et  elles  lui  ont  été  confirmées  par  d^autres  ;  mais 
il  n'a  trouvé  personne  qui  pût  lui  dire  si  la  ri- 
viàre  Issa^  coulant  près  de  Timbouctou,  est  la 
même  qui,  traversant  le  lac  d*eau  douce  deNj/fé^ 
coule  ensuite  à  Cachènah ,  où  on  la  nomme 
Culbiy  et  qui,  après  avoir  successivement  arrosé 
les  pays  de  Gano^  de  Bornou ,  de  Kanem ,  se  di- 
rige au  sud  à  travers  le  Begharmi^  pays  au-delà 
duquel  son  cours  est  ignoré.  «  Toutes  les  per- 
sonnes avec  lesquelles  j*ai  conversé,  dit  M.  Rit- 
<jiîe,  croient  que  c'est  la  même.  »  C'est  l'x>pinion 
de  M.  Ritchie,  qui  s'appuie  sur  les  informations 
données  à  cet  égard  par  Mungo-Park  et  par 
Homemann;  c'est  aussi  l'opinion  du  journaliste 
instruit  <pii  nous  a  donné  un  extrait  des  ma- 
nuscrits de  M.  Ritchie.  Mais  il  y  a  beaucoup 
d'objections  à  faire  contre  la  concordance  que 
l'on  prétend  exister  entre  les  divers  tépaoignages 
sur  les  différents  noms  que  pbrte  la  grande  ri- 
vière qiû  travel'se  \!t'Soudan.  Il  n'est  pas  clair  que 
ces  diverses  dénominatidïis  »e  servent  point  à  dé^ 

If. 


l64    REGHEUCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

signer  différentes  rivières.  Nous  venons^  de  ^ir 
que,  même  d'après  le  témoignage  d'un  des  Afri- 
cains interrogés  par  M.  Ritchie ,  le  Tscfiad  doit 
être  une  rivière  dififérente  du  Nil  qui  coule  dans 
le  BeghamU.  M.  Ritchie  pense  que  Borhou  est 
mal  placé  sur  les  cartes  ;  et  il  conjecture  qu'en 
mettant  le  centre  de  cette  contrée  à  i6  degrés 
de  latitude  nord,  et  à  f4  degrés  à  l'orient  du 
méridien  de  Paris,  on  ne  s'éloignera  pas  beau* 
coup  de  la  vérité.  La  ville  de  Kanem  lui  parait 
aussi  mal  placée;  et  il  en  indique  la  situation 
probable  à  i8  degrés  ii  minutes  de  latitude, 
et  à  i5  ou  ]6  degrés  à  l'orient  du  méridien  de 
Paris  (i). 

Nous  devons  remarquer  que  les  tentatives  dés 
Anglais  pour  pénétrer  dans  l'intérieur  de  TAfii- 
que  par  le  moyen  d'expéditions  militaires ,  ont 
été  pluii  infructueuses  que  celles  où  l'on  a  em- 
ployé des  voyageurs  accompagnés  d'une  suite 
peu  nombreuse.  Nous  avons  raconté  la  fin 
malheureuse  de  l'expédition  du  capitaine  Tue- 
key:  celle  qui  fut  envoyée  pour  remonter  le 
Rio-Nunezy.^&n  d'arriver  pàr-là  jusquW  Niger, 
a  coûté  la  vie  à  son  commandant  le  major 
Peddy^  au  lieutenant  M.  Kay,  et  au  chirur-^ 
gien  de  Texpédition.  JL.e  major  Peddy  est  mort 

(i)  Qmrterlx-Review^  i8ao,  t.  XXUIi  p.  «aaS  à  a4o. 


PREMIÈRE    PARTIE.  l65 

à  Kacondjr;  et  le  capitaine  Campbtell,  qui  prit 
le  commandement  de  l'expédition ,  fut  d'abord 
arrêté  à  Pandjicottoe ,  suc  la  route  de  Lahhé 
à  Timbou ,  à  environ  cent  cinquante  milles 
au-delà  de  Kcteondy.  Il  fut  obligé  de  séjour- 
ner trois  mois  entiers  à  Pandjicottoe ,  parce 
qu'un  chef  des  Foulahs ,  sous  le  prétexte  'Vrai 
'  ou  supposé  qu'il  était  en  guerre  avec  un  autre 
chef,  lui  refusa  le  passage.  Après  avoir,  pendant 
son  séjour,  perdu  ses  chameaux,  ses  chevaux, 
et  une  partie  de  ses  ânes,  le  major  Campbell 
fut  obligé  de  retourner  sur  ses  pas  ;  il  succomba 
au  chagrin  et  à  la  maladie,  et  mourut  aussi  à 
Kacondjr  (i). 

L'expédition  du  major  Gray  ne  parait  p^s 
promettre  de  plus  heureux  résultats.  Après 
s'être  avancé  dans  la  contrée  des  Foulado ,  où 
sa  trou]ib  fiit  insultée,  pillée,  et  en  partie  dé- 
truite, il  s'est  vu  forcé  de  retourner  à  Galam, 
sur  le  Sénéged,  au  mois  d'août  1819  (2). 

Le  chirurgien  de  l'expédition,  M.  Dorcherd, 
a  été  plus  heureux  ;  et ,  avec  une  suite  peu 
nombreuse,  il  est  parvenu  jusqu'à  Yamina^  sur 
le  Niger j  sans  aucune  difficulté  ;  mais,  après  avoir 
attendu  près  de  six  mois,  dans  ce  lieu ,  la  per- 

(1)  Quarterfy^Review,  1B17,  t.  XVII,  p.  3a6. 
(a)  Quanerfy'Âeview ^  iSao,  vol.  XXIII,  p.  .141. 


i66  RECHERCHES    SUR    L^FRIQUE. 

mission  du  roi  de  Sego  pour  pénétrer  plus  ayant, 
il  a  été  obligé  au  contraire  de  rétrograder  jusqu'à 
Burmnakou  ou  Bamhakou^  dans  le  Bambarra^ 
d'où  Ton  a  reçu  de  ses  nouvelles,  datées  de  Inaî 
1819.  Il  parait  qu'à  cette  époque  le  roi  de  Sego 
était  en  guerre  avec  les  peuples  voisins  vers  l'o- 
rient. M.  Dorcherd  a  été  traité  par  les  natifs  à 
Yamina  et  à  Bammakou  avec  beaucoup  de  bien- 
veillance. Il  croit  que,  s'il  peut  obtenir  la  per- 
mission de  s'embarquer  sur  le  Niger^  il  parvien- 
dra facilement  jusqu'à  son  emboudiure;  mais 
il  n'a  pas  expliqué  sur  quels  motifs  il  fonde 
sa  confiance  à  cet  égard.  Suivant  M.  Dorcherd, 
le  Niger  commence  à  être  navigable  à  Marra- 
bou^  où  il  présente  même  une  surface  d^eau 
assez  étendue ,  mais  pleine  de  bas-fonds.  Il  y  a 
des  marchés  établis  à  Sansanding  et  à  Yamina 
deux  fois  la  semaine;  on  y  débite  mfème  des 
étoffes  de  Manchester^  et  diverses  marchandises 
européennes,  qui  probablement  y  parviennent^ 
c6mme  au  temps  de  Léon  l'Africain,  par  la  voie 
de  Timbouctou  et  par  les  caravanes  du  nord. 

M.  Jackson  a  publié,  avec  d'autres  fragments 
sur  l'Afrique,  une  relatiopi  àeTimboiuÉou  et  de 
Haoussa ,  par  Shabeeny  (  i  ) ,  qui  n'est  autre 

(1)  J.  Grey  Jackson's  Jn  accouni  of  Timbactao  anâ 
Housa  by  El-Hage^Abd-Salam  Shabeeny,  liao,  int8% 


PREMIÈRE    PARTI];.  t&J 

chose  que  les  renseignements  qu'avait  recueillis 
M.Be9u(oy kTéioumn, d'un  marchand  arabe, lors 
des  premières  recherches  de  la  société,  pour  les 
découvertes  en  Afrique ,  et  dont  le  major  Rennell 
avait  déjà  fait  usage  (i);  particularité  dont  M.  Jack- 
son aurait  du  îiiistruire  le  public.Quoi  qu'il  en  soit, 
la  relation  de  Shabeeny  nous  apprend  que  Ton 
compte  vingt  jours  de  marche  de  Fez  à  Tafilet^ 
six  jours  de  Tafilet  à  Draha,  et  quarante-trois 
jours  de  Draha  à  Timbouctou.  On  cc»npte  égale- 
ment quarante-trois  journées  de  marche  ^Akka 
à  Timbouctou  (2).  Shabeeny  donne ,  sur  cette 
dernière  ville,  des  détails  fprt  intéressants,  s'ila 
sont  exacts.  Elle  coirtient,  selon  lui,  quarante 
mille  habitants,  sans  compter  les  esclaves  et 
les  étrangers.  Elle  est  entourée  d'un  mur  en 
terre  ou  en  pisé,  qui  a  douze  pieds  de  haut. 
Elle  a  trois  portes  :  Tune  au  nord ,  qui  ouvre  du 
coté  du  désert ,  qu'on  nomme  Porle-dn-Désert , 
Beb ^ Sahara  ;  l'autre,  qui  lui  est  opposée,  se 
nomme  Beè^el^Nil^  ou  Porte-du-Nil  ;  et  enfin 
une  troisième,  qu'on   nomme  Beb-el^Kiblay 
ou  Porte  -  de  -  la  -  Tombe  -  de  -  Afahomet,  qui 
*  "        .  '    '         '      ■       ' 

(i)  Heuiell  dte  Shabeeny,  d'après  les  manuscrits  de 
M.  Beaufoy  9  dans  Proceedings  of  the  Association  for  pro- 
moting  ihe  discoveries    of  the  irUerior  parts  of  Jfrica^ 
t.  ly  p.  287. 
(2)  Shabeeny*s  Account  of  Timbuctoo ,  p.  7. 


l68    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

conduit,  vçrs  l'est,  à  une  grande  forêt  voisine, 
remplie  d'éléphants  et  d'arbres  énonnea.  Les- 
habitants  ^ont  noirs,  et  ne  sont  pas  circoncis. 
C'est  le  centre  du  commerce  des  diverses  con- 
trées de  l'Afrique.  L'or  qu'on  y  vend  dans  de 
petits  sacs,  est  apporté  de  Housa,  Lorsque  Sha- 
beeny  se  trouvait  à  Timbouctou ,  c'est-à-dire  en 
1 787,  cette  ville  et  son  gouvernement  étaient  sous 
la  dépendance  du  sultan  de  Housa,  qui  même 
y  envoyait  de  l'argent  pour  payer  la  garnison. 

Selon  Shabeeny,  Housa  est  au  sud -est  de 
Timbouctou;  indication  qui  semble  contredire 
la  manière  dont  nous  avons  tracé  l'itinéraire 
de  Mohammed,  fils  de  ï*oul,  qui  nomme  ude 
ville  de  Haoussa  à  plus  de,  vingt  journées  à  l'est 
de  Timbouctou.  Les  contradictions  qui  résultent 
des  renseignements  donnés  sur  la  position  de 
Haoussa,  avaient,  il  y  a  long*temps,  déjà  em- 
barrassé le  major  Re;inell(i).  En  comparant  ces 
indications,  il  est  impossible  de  ne  pas  recon- 
naître deux  villes  ou  contrées  différentes  de 
Haoussa:  l'une  est  assez  rapprochée  de  7Y/w- 
bouctou ,  et  située  au  sud-est  ;  l'autre ,  au  con- 
traire, en  est  fort  éloignée  au  nord-est. 

C'est  dans  la  première  de  ces  villes  que  Sha- 


(1)  Kennell,  Proceedings ^  etc.,  t.  I,  p.  286  et  53o;  et 
Hômemann*s  Travelsy  p.  i8/|. 


I^BKMIÈRE    PARTIE.  169 

beeny  se  rendit  en  naviguant  sur  le  Niger.  Il  dit 
^eHousa  (i)  n'est  qu'à  cinq  journées  de  marche 
de  Timbouctou  (2).  Il  s'embarqua  à  Mouschgrilia^ 
et  il  fut  dix  jours  à  naviguer;  le  courant  est  très- 
lent,  et  on  amarrait  toutes  les  nuits  (a).  Shabeeny 
remarque  qu'il  y  a  une  communication  si  rapide 
entre  Timbouctou  et  Housa^  qu'il  a  vu,  entre 
ces  deux  villes,  plus  de  bateaux  sur  Je  fleuve 
qu'entre  Rosette  et  le  Caire  sur  le  Nil  A^Égjrpte. 
Enfin  Shabeeny  observe  que  le  pays  de  Housa 
confine  à  Bambarru,  à  Timbou^  à  Mouschi,  à 
Jinnie,  ou  Guin;  ce  qui  éloigne  tout-à-fait  cette 
contrée  de  la  ville  de  Haoussa^  qui  est  suf  la 
route  de  Ghadamès  à  Timbouctou.  Le  )>ays  de 
Housa  de  Shabeeny  nous  paraît  être  le  même 

(1)  Shabeeny  dit  Housa  ^  et  notre  itinéraire  Haoussa  ; 
mais  ce  ne  peuvent  être  deax  noms  différents ,  puisque 
M.  Bowdich  nous  apprend  que  Haoussa  est  la  pronon- 
ciation des  Maures ,  et  le  même  nom  que  les  Nègres  pro- 
noncent Houssa.  (Bowdich*s  Mission  to  Ashantee ,  p.  4 7 8.) 

(2)  Dans  Rennell,  Proceedings ^  t.  I,  p.  53o,  il  est  dit 
que  Shabeeny  retourna  à  Kahra^  en  remontant  la  rivière 
presque  anssi  vite  qu*en  descendant;  ce  que  le  gëograj>he 
anglais  trouve  fort  étrange.  Il  nous  semble  que  la  ma> 
nière  dont  nous  avons  dessiné,  d'après  nos  documents,  le 
cours  des  rivières,  explique  cela  en  partie.  Le  bras 
du  Qamharott  qui  communique  avec  le  Quolla  doit  être 
comme  une  espèce  de  canal  qui  n'a  presque  point  de 
cours.  Voyez  ci-après; 


170  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

que  celui  où  Mungo-Park  a  pénétré  loons  de  sort 
dernier*  voyage ,  et  qui ,  dans  le  récit  de  sa'tnort 
par  Amadi^Fatouma,  est  nommé  Ifaoussa  (i): 
dans  la  relation  de  ce  même  événement,  par  le 
chérif  Ibrahim,  il  est  nommé  Husa^iL).  Remar- 
quons ici  l'accord  de  ces  deux  récits  :  le  chérif 
Ibrahim  dit  que  c'est  après  avoir  traverse  le  ter- 
ritoire de  Husay  nommé  laourie^  ou  Yiouri, 
que  les  chrétiens  qui  étaient  sur  le  bateau 
s'avancèrent  dans  le  pays  de  Bousa^  plus  grand 
que  celui  de  laourie.  On  reconnaît  bien  ici  les 
mêmes  lieux  désignés  par  Amadi-Fatouma  ;  sa- 
voir, Yaour  et  Bou$sa  (3).  Selon  Shabeeny,  la 
•  -'        " 

(1)  Mungo-Park ,  Journal  of  a  Mission  in  the  interior 
of  Africa^  p.  21a. 

(a)  Jackson,  Shaheeny^s  account  of  Ti^nbuctoo^  p^  4^9; 
et  Bowdich's  Mission  ta  Ashantee ,  p.  478.  £n  note  ,  il  est 
dit  que  les  Nègres  prononcent  Housa^  et  les  Maures  Haoussa. 

(3)  Shabeeny,  Account  of  Timbuctoo  and  Ho  usa,  p.  4i- 

Dans  ritinéraire  d'un  Maure  de  fennie ,  publié  par 
M.  Bowdich  (Mission  to  Ashantee,  p.  489  ),  on  trouve  après 
Timbouctou ,  Gautv ,  Quoâlla ,  AsAea  >  Zabirma,  Cabi, 
Yaoura  et  Boussa;  mais,  à  cet  endroit ,  la  route  fait  un 
embranchement,  et*  ne  passe  pas  par  Haoussa.  Il  n'est 
pas  fait  mention  de  Haoussa  dans  lltinéraire  d*un  Maure  de 
J?o/720tt(p.  487 )>  qui,  après  Tiyibouctou ,  fait  suivra  les 
positions  dans  cet  ordre  :  Gauvt^,  Kolomanni,  Zinberme, 
Cabi,  Yaouriy  Noufi,  Boussa  ^  Rakka,  Bomou.  Enfin  il 
n'est  pas  fait  mention  de  j^aouf^a  dans  l'Itinéraire  du  Maure 


PRfMIl^RE    PARTIE»  I7I 

ville  de  Housa  est  beaucoup  plus  grande  que 
celle  de  Timbouctou;  et,  pour  Fespace  qu'elle 
occupe,  on  pourrait  presque  la  comparer  à  Lon- 
dres. L'empire  dont  Housa  est  la  capitale  s'é- 
tend loin  vers  le  nord,  au-delà  de  Timbouctou  y 
et  renferme  la  ville  ^Afnou^  près  de  laquelle  on 
remarque  celle  de  DafinL 

La  position  que  les  distances  indiquées  et  les 
détails  donnés  par  Shabeeny  assignent  à  Housa^ 
fournit  une  nouvelle  preuve  qu'il  s'agit  d'une 
contrée  différente  de  celle  que  l'itinéraire  de 
Mahomet,  fils  de  Foui,  place  à  vingt -huit  ou 
vingt-neuf  journées  au  nord -est  de  T imbouc» 
tou;  contrée  que  les  rapports  faits  à  Mungo-Park 
indiquent  aussi  à  trente  journées  par  terre,  et 
à  quarante-cinq  journées  par  eau  ;  qu'enfin  les 
renseignements  obtenus  par  M.  Bowdich ,  por- 
tent au  moins  à  vingt  journées  au  nord-est  de 
cette  ville  (i)  ;  et  qui ,  selon  Hornemann,  est 
limitrophe  de  Bomou,  à  l'ouest  (a). 

dt  ffao9issa ,  donné  9LUMi  par  M.  Bowdich  (p.  4^4)9  et  dont 
les  pofiitioBS,  à  Test  de  Timbouctou  jusqu'au  Dar-Four^  se 
saiTent  dans  cet  ordre  :  JoUiba^  Kabra,  Ussabir,  Gaw  y 
Kabi,  Yaoura^  Kaka  ^  Quarraraba^  Massigoudou,  Caudi  ^ 
Schary^  rivière ,  Four. 

(1)  Bowdich's  Mission  ta  Ashantee ,  p.  198. 

(a)  Homemann's  Travels  in  the  interior  part  of  4frica  y 
j8oa,  in-4%  p.  ii3;  et  t.  I,  p.  i58  de  1  edit.  franc. 


l'J%  RECHERCHES    SUR    ^AFRIQUE. 

Shabeeny^  selon  Rennell  (i),  a  dit  que  de 
Housa  il  descendit  le  fleuve  et  aborda  à  Ghinea, 
près  de  laquelle  se  trouve  un  lac  dans  lequel  le 
NiUel-JK.ibir  se  décharge.  Rennell  conclut  de  ce 
rapport,  et  de  plusieurs  autres  qu'il  a  précé- 
demment donnés,  qu'il  existe  une  contrée  de 
Jennie  ou  de  Guiriy  à  quarante  journées  de  marche 
à  l'est  de  Timbouctou.  Mais  ce  pays  de  Ghinea 
est,  suivant  nous,  celui  de  Ganahj  ou  de  Cana^ 
d'Edrisi  ^  que  ce  géographe  plaçait  sur  les  bords 
d'un  lac  d'eau  douce,  à  douze  journées  au  sud- 
est  dijindagost  ou  diAgadeZy  et  à  huit  journées 
à  l'ouest  de  Ouangara.  Selon  Shabeeny ,  le  com- 
merce de  Housa  est  le  même. que  celui  de 
Timbouctou;  mais  il  est  plus  considérable.  Il  s'y 
rend  des  marchands,  de  Timhou  ,  de  Bomou, 
de  Moschou ,  et  de  Y  Inde,  Le  Nil^-el-Kibir ,  ou 
le  Grand-Nil,  comme  le  Nil  d'Egypte  j  déborde 
au  mois  d'août,  et  inonde  le  pays.  L'inondation 
dure  dix  jours.  On  dit  que  ce  fleuve  se  décharge 
dans  la  Mer  salée,  qui  est  l'Océan.  Tels  sont 
les  renseignements  principaux  donnés  par  Sha- 
beeny, dont  la  relation,  souvent  citée  depuis 
trente  ans  par  un  célèbre  géographe ,  n'a  été 

(i)  Reoneirs  Proceedings. 

{i)  Hartman&'s  Edrisi,  p.  4 1  et  46. 


PREMlilRE    PARTIE.  1^3 

publiée  qu'au  moment  où  nous  allions  livrer 
notre  ouvrage  à  l'impression. 

Nous  avons  terminé  le  récit  des  tentatives 
infructueuses,  et  si  souvent  funestes,  que  les 
Européens  ont  faites  pour  pénétrer  dans  le 
centre  de  la  partie  occidentale  et  septentrionale 
de  l'Afrique.  On  a  pu  voir  que,  malgré  tant 
d'efforts ,  aucun  voyageur  instruit  n'a  encore  pu 
parvenir  à  se  rendre  à  Timbouctou  ni  à  Bornou, 
qui  paraissent  être  les  deux  centres  principaux 
de  la  partie. intérieure  de  l'Afrique  septentrio- 
nale. 

Du  coté  de  l'ouest,  les  découvertes  euro- 
péennes se  sont  arrêtées  à  Silla^  dans  l'état  de 
Massinaj  à  3  degrés  de  longitude  à  l'occident 
de  Pariç;  du  côté  de  l'est,  à  Cobbé^  dans  le 
Dar-Four^  à  a6  degrés  de  longitude  à  l'orient. 
Il  reste  donc  un  espace  de  ag  degrés  en  longi- 
tude, qui,  à  la  latitude  de  t5  degrés,  font  1680 
milles  géographiques ,  sur  lequel  les  Européens 
n'onf  d'autres  notions  que  celles  qui  leur  sont 
données  par  les  Africains. 

Du  nord  au  sud,  l'espace  inconnu  est  moins 
considérable  ;  cependant,  depuis  Mourzouk  ^  à 
^7  degrés  de  latitude  nord ,  contrée  la  plus  mé- 
ridionale qui  ait  été  reconnue  de  ce  côté  par  des 
Européens  instruits,  jusqu'à  SiUa  et  à  Cobbé^ 
on  compte  plus  de   12  degrés  ou  720  milles 


1^4    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

géographiques.  De  Mourzouk  à  Coumassie^  vers 
6  degrés  34  minutes  5o  secondes  de  latitude  (i) 
en  diagonale,  on  mesure  environ  a5  degrés ,  ou 
1 5oo  milles  géographiques. 

Mais,  si  la  position  des  peuples  et  des  villes, 
si  le  cours  des  fleuves,  les  directions  des  chaînes 
de  montagnes,  et  les  formes  particulières  du  sol 
de  ces  vastes  régions ,  ne  nous  sont  pas  encore 
bien  connus,  il  n'en  est  pas  de  même  des  traits 
principaux  que  la  nature  et  l'homme  présentent. 
A  cet  égard  les  récits  et  le$  descriptions  des 
géographes  et  des  voyageurs  de  tous  les  siècles 
sont  d'accord,  et  sont  continuellement  confir- 
més par  les  observations  que  les  Européens 
font  journellement,  et  par  les  témoignages  fré- 
quents  des  natife  qui  habitent  ces  régions  ou 
les  traversent  sans  cesse.  Ces  descriptions ,  ces 
récits,  concourent  tous  à  augmenter  le  désir  que 
nous  avons  de  les  connaître  plus  en  détail. 

Il  n'existe  en  effet  dans  aucune  autre  partie 
du  globe  un  contraste  aussi  pronbncé  qu'entre 
les  contrées  de  la  SénégamMe  et  du  Soudan ,  et 
le  Sahara  ou  le  vaste  désert  qui  se' trouve  au 


(i)  Bowdich's  Mission  îo  Ashantee^  p.  i6tà.  La  longitude 
de  Coumassie  est,  selon  M.  Bowdich,  de  a*^  ii  '  à  Tonest 
de  Greenwîch,  et,  pto  conséquent,  4®  %i  *k  Touest  de 
l'Obsenratoire  de  Pavîs. 


PREMIERE    PARTIE.  1^5 

nord.  Les  peuples  de  ces  deux  régions,  malgré 
les  alliances  qu'ils  ont  contractées,  malgré  les 
relations  que  le  commerce  et  la  religion  n'ont 
cessé  d'entretenir  parmi  eux,  sont  restés,  après 
le  laps  de  plusieurs  siècles,  aussi  différents  que 
les  teri*es  qu'ils  habitent. 

Le  désert  de  Sahara^  qui  a  1600  milles  géo- 
graphiques dans  sa  plus  grande  loD^eur  de 
l'est  à  l'ouest,  et  800  milles  du  nord  au  sud, 
renferme,  à  la  vérité,  à  de  certains  intervalles, 
quelques  oasis  ou  terrains  fertiles,  qui  surpren* 
nent  par  leur  aspect  riant  et  Tabondance  de 
leurs  produits  ;  mais  il  ne  présente,  dans  tout 
le  reste,  qu'un  sol  uni,  dur,  couvert  de  sables 
mobiles^  quelquefois  transp(»*tés  ça  et  là  par  les 
vents,  ou  soulevés  en  ondes  agitées  comme  les 
flots  delamer.Parfoisil  est  entrecoupé  de  collines 
rocailleuses ,  qui  renferment  d'énormes  cou<ches 
de  sel  gemme,  blanc  comme  la  neige;  ou  il  est 
noirci  par  des  amas  de  pitres  basaltiques  en* 
tassées  les  imes  sur  les  autres,  et  mêlées  de 
troncs  d'arbres  charbonnés,  pétrifiés,  témoins 
irrécusables  des  anciennes  révolutions  de  la  na- 
ture. Nul  animal,  si  ce  n'est  l'autruche  grisâtre 
et  le  léopard  tacheté,  n'interrompt  le  vaste  si- 
lence de  ces  déserts.  Désolantes  solitudes,  sans 
verdure ,  sans  eâu ,  sur  lesquelles  l'œil  se  tend 
et  le  reg^td  se  perd  sans  pouvoir  s'arrêter  sur 


1^6  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

un  s^ul  objet.  L'éclat  éblouissant  du  soleil,  que 
ces  plaines  réfléchissent  comme  un  miroir  ar- 
dent ,  ne  se  trouve  momentanément  obscurci 
que  par  ces  nuées  de  sable  que  Fouragan  roule 
dans  Tair  en  colonnes  énormes ,  qui ,  tantôt 
envahissant  tout  -  à  -  coup  l'atmosphère ,  ense- 
velissant, en  tombant,  des  caravanes  entières; 
ou  chassées  au-delà  même  du  continent,  jus- 
que sur  la  surface  de  l'Océan ,  apparaissent  aux 
navigateurs  comme  d'épais  brouillards,  qui  leur 
interdisent  l'approche  et  la  vue  des  côtes  à  plu- 
sieurs milles  de  distance.  Parfois  un  vent  léger, 
*  passager,  mais  rapide,  mais  brûlaqt  comme  la 
flamme,  s'élève,  et  suffoque  les  hommes  et  les 
animaux  qui  ne  sont  pas  assez  prompts- à  se 
tourner  ou  à  se  jeter  à  terre  pour  éviter  son 
souffle  destructeur. 

C'est  dans  ces  climats  embrasés  que  le  manque 
de  boisson  fait  éprouver  au  malheureux  dont  la 
provision  est  insuffisante  ou  épuisée ,  des  tour- 
ments inouis,  et  une  mort  que  rien  ne  peut  dif- 
férer«  Une  extrême  aridité  de  la  peau,  qui  se 
manifeste  par  tout  son  corps,  annonce  subite- 
ment l'attaque  de  la  soif;  ses  yeux  paraissent 
sanglants;  une  défaillance,  qui  s'accroît  à  chaque 
battement  du  pouls ,  semble  devoir  arrêter. tout- 
à-coup  le  mouvement  vital;  une  angoisse  vio- 
lente suspend  sa  respiration  haletante;  quelques 


PREMIÈRE    PARTIE.  I77 

-grosses  larmes  s'échappent  avec  effort  de  ses 
paupières  brûlantes;  et,  en  peu  d'instants,  s'il 
n'est  secouru^  il  a  perdu  connaissance  et  exhalé 
son  dernier  soupir.  Le  dessèchement  inattendu 
d'une  seule  source ,"  un  mécompte  dans  les 
distances,  une  erreur  dans  la  direction  de -la 
route,  un  accident  survenu  aux  outres  qui  re- 
cèlent la  provision  d'eau,  ont  souvent  fait  périr, 
dans  ces  solitudes,  par  cet  affreux  supplice,  plu- 
sieurs milliers  d'hommes  avec  tous  leurs  trou- 
peaux. 

Telle  est  cependant  la  patrie  qu'habitent  les 
Maures- Arabes ,  et  qu'ils  ne  voudraient  poijtit 
quitter,  parce  qu'en  effet,  dans  aucune  autre 
contrée  du  globe,  ils  ne  pourraient  satisfaire  les 
goûts  et  les  habitudes  qu'ils  ont  contractés  en 
naissant.  Fiers,  actifs,  belliqueux,  ils  chérissent 
la  liberté,  et  méprisent  les  autres  peuples,  sur- 
tout ceux  qui  s'emprisonnent  dans  des  villes  et 
qui  s'attachent  à  la  glèbe.  Ils  aiment  les  voyages , 
le  commerce,  et  les  combats.  Au  moyen  des 
guides  qu'ils  trouvent  dans  chaque  partie  du 
désert,  il^le  traversent  dans  toutes  les  directions 
avec  leurs  chameaux,  leurs  chevaux,  leurs  boeufs, 
leurs  brebis,  leurs  chèvres,  et  toutes  teurs  ri- 
ebes^s.  Ils  se  rendent  en  Egypte,  en  Abyssinie^ 
à  Tripoli  y  à  Maroc  ^  à  Tunis  ^  k  Alger,  kMourzouk^ 
à  Cacliep>ahy  au  Bomou,  à  Timbouêîou,  sur  le 

la 


1^8'   RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Sénégal^  sur  la  Gambie  y  à  la  Céte^-d'ôr,  et  jus- 
que sur  les  bords  du  Zaïre:  enfin,  pour  acqué- 
rir les  titres  vénérés  è!hadji  (i)  et  de  sidi  (2), 
ils  sortent  d'Afrique,  et  entreprennent  le  long 
pèlerinage  de  la  Mecque,  Ils  campent  sous  leurs 
tentes  noirâtres  et  impénétrables  à  la  pluie. 
Professant  une  religion  qui  leur  interdit  toute 
liqueur  enivrante,  l'eau  est  leur  unique  boisson. 
Ils  se  nourrissent  de  lait  de  jument  et  de  cha- 
meau ;  de  mil  sec ,  accommodé  en  une  pâte  qu'on 
nomme  couscou;  de  maïs ,  de  dattes ,  de  figues,  de 
gomme,  du  suc  mielleux  du  palmier.  Us  tissent 
eux-mêmes  leurs  étoffes;  ils  tannent  le  cuir,  le 
façonnent  à  toutes  sortes  d'usages,  et  en  font  de 
beau  maroquin.  Us  se  procurent  leurs  armes 
à  feu  des  Européens  ;  mais  ils  fabriquent  eux* 
mêmes  leurs  zagaies,  leurs  piques,  leurs  poi- 
gnards, leurs  harnais,  et  tout  ce  qui  leur  est 
nécessaire.  Ils  mettent  sur-tout  en  œuvre  For  et 
l'argent  avec  beaucoup  de  délicatesse  et  d'ha- 
bileté; mais  leur  principale  occupation  est  de 
soigner  leurs  troupeaux.  Leiirs  chevaux  leur 
obéissent  au  moindre  signe,  se  mettent  à  genoux 
devant  eux,  les  saluent  de  la  tête,  et  semblent 
répondre  à  toutes  les  caresses  de  leurs  maîtres. 
Toutefois,  lorsque  dans  des  occasions  périlleuse* 

'  I  I      ■  i  ■  I  ■  ■  ■  1 1 1.    ■  ■  ■» 

(i)  Péleriuv 

(a)  Saint. 


PREMIÈRE     PA.RTIE.  I-jg 

ils  lancent  au  galop,  avec  une  vitesse  extrême, 
ces  superbes  coursiers,  l'angle  aigu  de  l'étrier 
leur  déchire  les  flancs;  le  mors,  grossièrement 
fabriqué,  leur  écorche  la  bouche;  et  le  sang  rou- 
git l'écume  dont  ils  sont  bientôt  couverts. 

Les  Maures  sont  zélés  mahométans,  et  con- 
duisent avec  eux  leurs  prêtres,  connus  sous  le 
nom  de  Marabous  et  de  Talbes.  Ils  couchent, 
mangent  et  prient  en  commun,  sans  distinction 
d'âge  ni  de  sexe.  Ils  parlent  l'arabe  ancien,  qui 
est  extrêmement  doux  et  harmonieux  dans  leurs 
bouches.  Us  chantent  pour  tromper  l'ennui 
des  longs  voyages,  ou  pour  soulager  leurs  cha- 
meaux près  de  succomber  à  la  fatigue;  souvent 
aussi  pour  célébrer  les  grands  faits  d'armes  de 
leurs  guerriers.  Plusieurs  improvisent  des  vers 
avec  facilité.  L#soir,  après  le  repas  et  la  prière, 
ils  aiment  à  conter  des  histoires  jusqu'à  ce  que 
le  sommeil  vienne  fermer  leurs  yeux.  Parmi  eux 
les  jeunes  gens  discutent  avec  assurance,  devant 
des  vieillards,* les  intérêts  de  la  tribu;  mais  ce 
sont  toujours  les  femmes  des  chefs  qui  sont  char- 
gées des  négociations  de  la  paix.  Les  lances  et 
les  cimeterres  des  guerriers  les  plus  irrités  s'in 
dinent  devant  de  tels  me6sa|[ers,  et  le  respect 
qu'on  leur  porte  aplanit  les.obstacles.  Ces  Maures 
sont  cupideis,  envieux,  colères,  et  cependant  dis- 
simulés, adroits  et  trompeurs  avec^oeux^que  l'in- 

IQ« 


l8o  RECHIIRGHES    SVR     l'aFBIQUE. 

térêt  ou  la  politique  les  force  de  ménager.  Ils 
traitent  avec  la  plus  afFreuse  barbarie  les  blancs 
que  les  naufirages,  ou  tout  autre  événement,  ont 
fait  tomber  entre  leurs  mains.  Ils  les  considèrent 
comme  appartenant  à  une  espèce  dégradée ,  puis- 
qu'elle est  incapable  de  supporter  les  moindres 
fatigues  du  désert.  L'espoir  d'en  tirer  quelque 
argent  est  le  seul  motif  qui  les  empêche  de  les 
massacrer  dès  qu'ils  les  ont  dépouillés  ;  mais  ces 
mêmes  Maures  sont  pleins  de  justice,  d'humanité, 
de  douceur,  soit  pour  ceux  qui  se  sont  mis  sous 
leur  protection,  soit  à  l'égard  de  leurs  esclaves 
nègres.  Ils  exercent  une  généreuse  hospitalité 
envers  le  voyageur  isolé  qui  est  de  leur  religion. 
Leur  tente  est  un  asyle  sacré  où  leur  ennemi  le 
plus  détesté,  lorsqu'il  y  a  pris  refuge ,  peut  dor- 
mir en  sûreté.  Du  reste  ils  soflt  grands,  bien 
faits ,  de  couleur  cuiyrée ,  ne  connaissant  ni  les 
maladies,  ni  les  infirmités;  et,  par  leur  vie  la- 
borieuse ,  sobre   et  réglée ,  ils  acquièrent  une 
telle  vigueur  de  santé,  une  si  forte  et  si  durable 
constitution,  qu'ils  prolongent  leur  existence, 
dans  ces  climats  brûlants,  au-delà  du  terme 
connu  de  la  vie'humaine.  Tel  est  le  Désert;  tels 
sont  ceux  qui  l'hstbitent  (i). 

(i)  Riley,   ç.   337-416.  —  Ali-Bey,  t.-I,  p.   34i.  — 
Jackson  ,  p.  a44  -  339.  —  Geoffroy  de  Villeneuve,  D^ 


PREMIJCRi:     PARTIE.  l8l 

Dans  le  Soudan  et  dans  la  Sénégambie ,  au  ", 
contraire,  coulent  de  grands  fleuves,  s'étendent 
des  lacs  immenses,  ^'élèvent  de  majestueuses 
forets  ;  par-tout  des  eaux  limpides,  de  frais  om- 
brages ,  des  champs  cultivés  ;  là  croissent  ces 
arbres  éiiormes,  colosses  du  règne  végétal;  là 
se  meuvent  les  plus  gigantesques  animaux  du 
globe.  Dans  ces  contrées  fertiles,  perpétuelle-^ 
ment  échauffées  par  les  rayons  du  soleil,  Teau, 
l'air,  les  plantes,  l'intérieur  du  sol,  les  fentes  des 
rochers,  les  lits  des  fleuves  et  des  ruisseaux,  le 
fond  des  lacs  et  des  marais,  présentent  le 
spectacle  d'une  perpétuelle  agitation.  La  nature 
manifeste  sans  cesse  ses  facultés  génératrices  ; 
et  les  phénomènes  de  la  vie  s'offrent  à  chaque 
instant  aux  yeux,  sous  des  milliers  de  formes  et 
de  couleinrs  différentes. 

Les  Nègres  possèdent  ces  régions;  race  d'hom- 
mes essentiellement  distincte  de  toutes  les  autres. 
Ils  diffèrent  encore  plus,  par  leurs  moeurs,  leurs 
caractères ,  leurs  habitudes ,  leurs  inclinations , 
que  par  leur  conformation  physique,  des  Maures 
dont  ils  sont  voisins.  Doué  d'une  insouciance  que 
rien  n'égale,  d'une  extrême  légèreté,  le  Nègre  ne 
connaît  ni  le  chagrin  des  privations,  ni  les  soucis 

V Afrique  y  iù-i8  ,  1. 1,  p.  75  et  141. —  Voyez  aussi  Follie, 
Sangnier ,  Golberry,  etc. 


l8a    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

de  l'ambition  :  ses  besoins  sont  en  p^it  nombre  ; 
et ,  favorisé  par  la  beauté  de  son  climat  et  la  fer- 
tilité de  son  sol,  il  ne  lui  faut  pas,  pour  se  sa- 
tisfaire, entreprendre  de  longs  voyages,  ou  per- 
sévérer dans  de  pénibles  travaux.  A  ses  pieds 
l'indigo  et  le  coton  croissent  sans  culture.  Une 
demi-aune  de  toile  est  tout  son  habillement; 
quelques  pièces  d'arbres  à  peine  dégrossies,  des 
roseaux ,  de  la  paille  et  des  feuilles  lui  composent 
une  maison  ;  un  tronc  de  cejrba  creusé  forme  sa 
pirogue.  Vingt  jours  de  travail  par  an  suffisent 
à  la  culture  des  champs  qui  produisent  sa  nour- 
riture la  plus  essentielle.  A  l'âge  de  dix -huit 
ans ,  il  se  choisit  une  compagne  ;  et ,  sous  son 
ciel  brûlant,  il  ne  ressent  même  pas  l'ardeur 
dévorante  du  désir.  Tranquille  au  sein  de  sa 
famille,  oubliant  le  passé,  content  du  présent, 
sans  inquiétude  pour  l'avenir,  sa  vie  s'écoule 
dans  le  calme  d'une  voluptueuse  nonchalance , 
qui  est  son  suprême  bonheur.  Seulement,  pen- 
dant la  fraîcheur  des  nuits  et  à  la  clarté  de  la 
lune ,  il  manifestera  sa  joie  par  ses  mouvements 
cadencés  au  son  monotone  de  ses  grossiers 
instruments.  Tout,  pour  ces  peuples  heureux, 
est  un  ^ujet  de  fêtes  et  de  divertissements  ;  les 
cérémonies,  les  réceptions,  les  nsdssances,  Jes 
mariages,  les   devoirs  rendus  aux 'dieux  ^  les 


PREMIÈRE     PARTIE.  l83 

funérailles  même,  se  terminent  par  des  chants 
et.  des  danses  (i). 

Placés  sur  le  sol  le  plus  ^fécond,  les  Nègres  se 
sont  prodigieusement  multipliés,  et  ont  formé 
des  nations  nombreuses;  quelques-unes,  et  ce 
sont  les  plus  civilisées,  ont  été  converties  à  la 
religion  de  Mahomet,  dont  elles  défigurent  les 
dogmes  ;  d'autres  ont  conservé  leurs  anciennes 
et  grossières  superstitions  :  mais  du  moins 
l'exemple  d'une  religion  plus  douce  a  entière- 
ment aboli»  dans  la  Sénégambie  et  dans  le  Sou- 
dan^  ces  préjugés  féroces  et  ces  coutumes  san- 
guinaires dont  l'horreur  a  révolté  les  voyageurs 
qui  ont  pénétré  dans  l'intérieur  de  la  Guinée 
et  du  Congo, 

Sur  les  bords  des  grands  fleuves  et  des  grands 
lacs  qui  arrosent  la  Sénégambie  et  le  Soudan  y 
dans  les  vallées  formées  par  les  hautes  chaînes 
de  moiltagnes  qui  traversent  ces  régions,  au  mi- 
lieu des  vastes  forêts  qui  les  couvrent ,  les  na- 
tions nègres  ont  construit  un  nombre  considé- 
rable de  villages,  de  bourgades,  et  une  assez 
grande  quantité  de  villes. 

En  Europe ,  la  plus  célèbre  de  toutes  ces  villes 
est  Timbouctou  ;  et ,  quoique  plusieurs  relations 

(i)  Voyez  Golberry,  Labat,  Geoffroy  de  Villeneuve, 
Adanson,  FoUie,  Mun^o  -Park,  Mollien,  etc« ,  etc. 


l84         KEGHSRdHES    SUR    l'aFRIQUE. 

dignes  de  foi  doivent  nous  faire  croire  que  ce 
n'est  ni  la  plus  grande,  ni- la  plus  peuplée  de 
toutes  celles  du  Sou^n,  cependant  les  évalua- 
tions les  plus  modérées  lui  donnent  cent  mille 
hab^^tauts.  Mahomet,  fils  de  Foui,  dans  un  des 
itinéraires  que  nous  publions,  s'exprime,  en 
parlant  de  Timbouctou^  de  la  manière  suivante: 
«  C'est  la  plus  grande  ville  que  Dieu  ait  créée ,  où 
«c  les  étrangers  trouvent  toutes  sortes  de  biens, 
«  ville  remplie  de  commerçants.  » 

Nous  avons  exposé,  dans  cette  première  partie 
de  notre  ouvrage,  tous  les  efforts  que  les  Eu- 
ropéens ont  faits  pour  arriver  jusqu'à  cette  ville, 
et  pour  pénétrer  dans  le  Soudan,  Avant  de  pré- 
senter à  nos  lecteurs  l'analyse  géographique  de 
trois  itinéraires  qui  y  conduisent,  il  faut,  pour 
achever  de  remplir  le  plan  de  cet  ouvrage ,  et 
lui  assurer  le  degré  d'utilité  qui^est  notre  objet, 
que  nous  exposions  aussi  de  quelle  manière  les 
géographes  ont  tracé  les  résultats  des  informa- 
tions qu'on  a  pu  se  procurer  sur  ces  contrées, 
et  comment  ils  les  ont  successivement  figurés 
sur  leurs  cartes. 


DEUXIÈME    PARTIE.  l85 


DEUXIEME   PARTIE. 

DES  CARTCS  DÉ  l' AFRIQUE  RELATIVEMENT  AU  TRACÉ 
DES  CONTRÉES  irTTÉRIEURES  DE  LA  PARTIE  SEPTEIi- 
TRIONALE  DE  CE  COJVTIPTEirT. 


§  I.  Des  Cartes  de  Vintérieur  de  V Afrique  sep~ 
tentrionale ,  depuis  la  publication  de  la  map^ 
pèmonde  de  Ruysch  en  1 5o8 ,  jusqu'à  Ortélius 
en  1570. 

jLja  reconnaissance  des  côtes  du  grand  conti- 
nent d'Afrique  avait  été  entièrement  terminée 
avant  la. fin  du  quinzième  siècle,  en  14989  par 
Vasco  de  Gama,  la  même  année  que  Christophe 
Colomb  toucha  pour  la  première  fois  le  conti- 
nent du  Nouveau-Monde  :  l'imprimerie  était  dé- 
couverte depuis  plus  de  quarante  ans  ;  mais  ce 
n'était  que  depuis  vingt  ans  seulement  qu'on  gra- 
vait des  cartes  géographique^{i).  Ce  nouvel  art  fut 

(i)  Ceux  qai  désireraient  de  plas  amples  détails  sur  les 


I 


l86  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

employé  à  reproduire  des  espèces,  de  Fac  simili 
*  ou  de  copies  réduites  des  cartes  que  Ton  trouvait 
dans  les  manuscrits  de  Ptolémée  (i).  On  com- 
mença, dans  les  éditions  de  cet  ancien  publiées 
à  Ulm,  par  ajouter  quelques  cartes  modernes  des 
contrées  de  l'Europe  à  celles  du  géographe  grec; 
mais,  pour  toutes  les  autres  parties  du  globe, 
l'ouvrage  de  Ptolémée,  dont  on  multipliait  les 
éditions,  resta,  pendant  la  fin  du  quinzième 
siècle,  et  jusque  dans  les  premières  années  du 
seizième ,  le  seul  traité  de  Géographie  uni- 
verselle. 

Ce  fut  dans  une  édition  de  Ptolémée ,  donnée 
à  Rome ,  en  1 5o8  ,  par  Marcus  Beneventanus 
et  Jean  Cotta,  que  parut  la  première  mappe- 
monde moderne  gravée.  On  y  trouve  à-la-fois 
le  premier  tracé  des  terres  du  Nouveau-Monde, 
si    récemment    découvertes  ,    et    le    continent 


premières  cartes  géographiques  qu'on  a  gravées,  peaTcnt 
consulter  mon  article  Buchinck  {Arnold)^  d^ns  la  Biographie 
universelle,  t.  VI,  p,  7.0^, 

(i)  Les  éditions  d'Allemagne,  telles  4|ue  celles  d'Ulm, 
de  Strasbourg,  ont  pris  pour  modèles  les  cartes  qui  se 
trouvaient  dans  les  manuscrits  latins,  plus  grossièrement 
faites ,  et  dont  les  lettres  sont  en  caractères  presque 
gothiques.  Dans  les  éditions  de  Rome ,  on  a  copié  les 
cartes  des  manuscrits  grecs,  plus  délicatement  dessinées, 
et  dont  la  lettre  est  en  caractères  romains. 


DEUXIÈME    PARTIE.  187 

d'Afiîque  li^s  toute  son  étendue,  d'après  les 
navigations  des  Portugais. 

Jean  Ruysch  (dont  le  nom  mérite  de  sortir  de 
l'obscurité  où  il  est  plongé),  est  l'auteiir  de  cette 
carte  remarquable  intitulée  :  Universalior  cogniti 
orbis  Tabula  ex  recentibus  confecta  ohservationi- 
bus.  Les  premiers  géographes  du  quatorzième 
siècle,  qui  ne  connaissaient  que  la  petite  portion 
des  côtes  d'Afrique  qui  s'étend  à  l'ouest  jusqu'au 
cap  Bojador,  avaient  coutume  de  terminer  à 
cette  latitude  ce  grand  continent  (i)  par  une  ligne 
qui  formait  le  cadre  de  leur  carte ,  ainsi  qu'on 
peut  le  voir  par  la  carte  collée  sur  bois  qui  est 
à  la  Bibliothèque  du  Roi.  Mais^  comme  l'ou- 
vrage d'Edrisi  et  les  relations  des  Arabes  avaient 
donné  connaissance  à  ces  géographes,  de  Tint" 
bouctouy  de  Melli^  du  pays  de  Guinée^  de  plu- 
sieurs contrées  du  Soudan ,  et  du  grand  fleuve 
qui  le  traverse,  ils  entassaient  tous  ces  détails 
sur  leurs  cartes,  immédiatement  au-delà  de 
XAÛas  et  à  la  hauteur  du  cap  Bojador^  afin 
de  ne  pas  descendre  plus  bas  vers  le  sud  que  le 
point  connu* sur  la  côte,  et  de  se  renfermer 
dans  le  cadre  tracé  d'ayance. 


(1)  Fra  Mauro ,  qui  a  dressé  sa  carte  dans  le  xv*  siècle , 
montre  des  connaissances  plils  étendues,  et  alonge  da- 
vantage l'Afrique  vers  le  sud. 


l88  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

Dans  le  seizième  siècle,  lorsque  Ton  connut 
toutes  les  cotes  de  l'Afrique  ,  et  qu'on  sut 
jusqu'où  elles  s'étendaient  au  midi,  les  géo- 
graphes éprouvèrent  un  embarras  contraire ,  et 
tombèrent  dans  l'excès  opposé  à  ceux  des 
quatorzième  et  quinzième  siècles  ^  ils  ne  savaient 
plus  comment  remplir  le  vaste  espace  que  pré- 
sentait l'intérieur  de  l'Afrique,  qui  s'était  subite- 
ment agrandie  de  toute  la  longueur  comprise 
entre  les  latitudes  du  cap  Bojador  et  du  cap  de 
Bonne-Espérance  :  ces  géographes  se  trouvaient 
d'autant  plus  dépourvus  de  moyens  à  cet  égard, 
qu'uniquement  occupés  des  découvertes  mo- 
dernes qui  agrandissaient  de  jour  en  jour  et 
avec  une  prodigieuse  rapidité  4e  domaine  de  la 
science ,  ils  paraissent  avoir  ignoré  les  relations 
de»  Arabes  et  les  travaux  des  cosmographes  des 
quatorzième  et  quinzième  siècles;  ou  plutôt, 
peut-être,  ils. les  dédaignèrent,  parce  que  leurs 
cartes  ne  leur  offraient  aucune  graduation. 

Les  nouveaux  progrès  de  l'astronomie  et  de 
la  navigation  avaient  fait  prévaloir  sur  la  mé- 
thode vague  des  climats  et  des  itinéraires  ^  la 
seule  que  connussent  les  Arabes  de  ce  temps, 
la  méthode  scientifique  dePtoléipée,  d'assujettir 
les  positions»  de  tous  les  lieux  de  la  terre  à 
des  distances  à  Féquateur  et  à  un  premier  ïné- 
ridien:  par  cette  raison,  dans  les  temps  mêmes 


DEUXIÈME    PARTIE.  189 

OÙ  les  progrès  des  découvertes  auraient  du  faire 
disparaître  les  erreurs  de  Ptolémée,  l'autorité  de 
cet  ancien  dans  ces  matières  s'augmentait  dé  jour 
en  joyr,  et  son  ouvrage  était  considéré  comme  le 
traité  le  meilleur  et  le  plus  complet  su^  la  géo- 
graphie. On  cherchait  seulement  à  y  coordonner 
les  nouvelles  acquisitions  dont  la  science  s'en- 
richissait avec  une  étonnante  célérité. 

Le  géographe  grec  avait  tracé,  au-delà  de 
X Atlas j  dans  l'intérieur  3e  l'Afrique,  à  la  hau- 
teur des  îles  Fortunées^  deux  grands  fleuves , 
le  Niger  et  le  Gir;  il  avait  indiqué  un  certain 
nombre  d'états  et  de  villes  dans  les  pays  que  ces 
fleuves  arrosent.  Ruysch,  qui  ne  connaissait 
rien  dans  l'intérieur  de  l'Afrique ,  y  transporta 
le  Niger  et  le  Gir  de  Ptolémée,  tels  que  cet 
ancien  les  avait  tracés,  avec  tous  les  noms  des 
peuples  et  des  villes;  seulement  il  agrandit  ou 
dilata,  si  je  puis  m'exprimer  ainsi,  les  détails 
donnés  par  la  carte  du  géographe  grec,  de  ma- 
nière à  remplir  le  vide  de  la  sienne.  Ses  côtes , 
pour  le  continent  d'Afrique ,  se  trouvaient  ainsi 
tracées  seulenient  d'après  les  modernes  ;  et  l'in- 
térieur ,  uniquement  d'après  les  anciens. 

Jean  Scot ,  dans  son  édition  de  Ptolémée 
publiée  en  iSao  à  Strasbourg,  prit  un  parti 
tout  différent  de  celui  de  Rmysch ,  relative- 
ment à  l'Afrique  :  il  inséra  dans  cette  édition 


igo  RECHKIICHES    SUR    l'aFRIQUE. 

une  carte  de  ce  continent,  en  deux  grandes 
feuilles ,  pleine  de  détails  et  de  noms  de  lieux 
sur  les  côtes,  mais  entièrement  blanche  dans 
l'intérieur  ;  il  indiqua  seulement  le  Niger  et  le 
Gir  de  Ptoléi^aée  au  sud  de  \ Atlas  ^  mais  avec 
fort  peu  de  noms  et  de  positions.  Il  est  probable 
que  cette  carte  est  la  copie  ou  la  réduction  de 
quelque  excellent  Portulan  manuscrit.  Dans 
quelques  parties  même,  telles  que  la  côte  des 
CimhebaSy  au-dessus  du  cap  de  Bonne-Espé- 
rancey  où  les  navigateurs  n'abordent  plus ,  cette 
carte  pourrait  encore  servir  à  nos  géographes 
modernes.  J'ai  quelque  raison  de  croire  qu'elle 
a  été  inconnue  à  d'Anville, 

Cette  carte  fut  réduite,  avec  beaucoup  d'omis- 
sions et  d'erreurs,  dans  le  Ptolémée  de  Strasbourg 
donné  par  Laurent  Phrisius,  aux  dépens  de  Jean 
Gruninger,  en  iSaa.  Les  planches  de  ce  livre 
servirent  pour  l'édition  de  Ptolémée  imprimée 
à  Strasbourg  en  1 5^5,  et  pour  les  deux  éditions 
données  par  Servet  en  i535  et  en  i54i  (i). 
Mais  cependant  on  fit  dans  ces  dernières  quel- 

(i)  Je  me  soi»  assure  de  ces  faits  par  uoe  comparaison 
exacte  ;  ce  commerce  de  planches  était  commun.  C'est 
ainsi  que  les  belles  planches  gravées  par  Bentinck,  pour 
le  Ptolémée  de  147^»  ont  servi  a  deux  autres  éditions 
également  imprimées  à  Rome,  celle  de  i5o6  .et  celle 
de  x5o8.  •  .  • 


DEUXIÈHE    PARTIE.  I9I 

ques  changements  :  on  traçait  dans  ces  cartes 
quelques  détails,  pris  aux  géographes  arahes, 
qu'on  plaçait  vers  l'extrémité  méridionale  de 
l'Afrique,  dans  une  partie  où  les  Arabes  ne 
pénétrèrent  jamais,  et  dont,  peut-être,  ils 
n'avaient  pas  soupçonné  l'existence  (i). 

Dans  les  trente  années  qui  suivirent  la  publi- 
cation du  Ptoléméede  Servet,  toutes  les  éditions 
qui  furent  faites  du  géographe  d'Alexandrie 
sont  inférieures  à  celles  qui  les  avaient  précé- 
dées, et  d'un  format  beaucoup  plus  petit.  Les 
cartes  qui  s'y  trouvent,  ne  sont  plus  d'aucune 
utilité  pour  tracer  les  progrès  de  la  science, 
parce  que  dès  -  lors  on  commença  à  dresser  de 
grandes  cartes  séparées ,  d'abord  pour  l'Europe, 
et  ensuite  pour  d'autres  parties  du  monde. 
Les  publications  des  recueils  de  Gryneus  en 
i535,  et  de  Ramusio  en   i55o  (2),  où  étaient 

(i)  Il  est  remarquable  que  ces  cartes  indiquent,  vers  aa^ 
de  latitude  sud,  et  18^  à  Torient  de  l'Ile -de -Fer,  tine 
contrée  riche  en  or,  où  il  y  a  des  hippopotames,  et  où 
coale  un  grand  fleuve  qu'on  nomme  Gomormager;  ce 
nom  est  probablement  celui   de  Kouama,  défiguré. 

(a)  La  i'*  édition  de  Ramusio  est  de  i55o,  voyez  ci- 
dessns ,  pag.  36.  Il  n'y  a  dans  cette  édition  qu'une  seule 
petite  carie  d'une  partie  de  l'Afrique  qui  accompagne  la 
dissertation  sur  le  NU,  p.  a8o  verso.  Qp  y  voit  le  Bomou , 
ainfi  que  le  Niger ^  dont  le  cours  est  distinct  et  séparé  de 
celui  du  NiL 


iga  RECHERCHES     SUR    LAFRIQUE. 

réunis  tous  les  voyages  et  les  découvertes  des 
modernes  en  Afrique,  en  Asie  et  en  Amérique, 
et  les  cartes  modernes,  quoique  grossières,  que 
l'on  joignit  à  ces  recueils,  comfnencèrent  à  sé- 
parer la  science  géographique,  de  l'ouvrage  de 
Ptolémée ,  où  elle  était  restée  jusque-là  engagée. 
La  carte  qui,  dans  le  recueil  de  Ramusio,  fut 
mise  en  tête  de  la  description  de  l'Afrique  par 
Léon  l'Africain,  doit  d'abord  fixer  notre  atten- 
tion ,  parce  que  lès  erreurs  de  cette  carte  se  re- 
trouvent dans  presque  toutes  celles  qui  suivirent 
jusqu'à  Delisle  :  c'était  en  quelque  sorte  un  sys- 
tème arrêté,  auquel  chacun  se  contentait  de  faire 
quelques  modifications.  Ce  système  était  le  résul- 
tat de  trois  sources  de  notions  différentes ,  qui 
provenaient  des  Arabes,  de  Léon  l'Africain,  et 
des  découvertes  des  Portugais  sur  les  côtes  et  en 
Abyssinie.  Selon  le  système  d'Édrisi  et  des  Xrabes, 
le  Nil  avait  ses  sources  aux  Montaffies  de  la 
Lune;  ses  divers  affluents  se  réunissaient  dans  un 
lac;  là  le  Nil  se  partageait  en  deux  grands  fleuves: 
l'un  coulait  directement  vers  le  nord,  c'était  le 
Nil  proprement  dit;  l'autre  coulait  vers  l'ouest, 
c'était  le  Niger  ou  le  Nil  des  Nègres ,  qui  se  vi- 
sait dans  le  lac  Ulil,  et  se  jetait  dans  la  Mer 
ténébreuse  j  à  une  journée  de  navigation  du  lac 

(i)  Hartmann  y  Edrisi^  p.  X2. 


DEUXIÈME    PARTIE.  igi 

V/i'l.  Mais  (et  ceci  est  remarquable)  Édrisi  admet- 
tait encore  l'existence  d'un  autre  fleuve,  qui  se 
déchargeait  dans  le  Nil  des  Nègres  :  c'est  dans 
les  pays  qu'arrosent  ces  deux  fleuves,  ajoute 
Édrisi ,  que  les  Nègres  habitent. 

Léon  l'Africain  ne  parle  que  d'un  seul  fleuve 
dans  le  Soudan  ou  le  Pays  des  Nègres;  il  le  fait 
sortir  d'un  grand  lac,  situé  dans  la  partie  orien- 
tale de  l'Afrique,  au  milieu  d'un  désert  nommé 
Seu.  Ce  fleuve  coule  à  l'ouest ,  et  se  décharge 
dans  la  mer.  «  Mais ,  dit  Léon ,  les  géographes 
»  prétendent  que  ce  lac,  où  le  Niger  prend  sa 
»  source,  est  formé  par  le  Nil  d'Egypte^  qui, 
»  après  avoir  coulé  sous  terré,  ressort  en  cet 
»  endroit  ;'  par  conséquent ,  le  Niger  est  consi- 
»  déré  par  ces  géographes  comme  un  bras  du 
»  Nil  [ï).  », 

Ainsi  que  nous  l'avons  dit,  les  connaissances 
des  Arabes  et  celles  de  Léon,  beaucoup  plus 
étendues  que  les  nôtres  vers  l'intérieur,  étaient 
plus  restreintes  sur  les  côtes  ;  de  sorte  que  Léon 
connaissait  bien  le  cours  du  Niger  \nsc\ix\  Timr 
bouctou  et  même  jusqu'à  Djenni  {%) ,  et  il  savait 
ensuite  vaguement  que  ce  fleuve  continuait  son 
cours  jusqu'à  la  mer;  mais  il  ignorait, aussi-bien 
qu'Édrisi,  où  était  son  embouchure. 

•^— ^'— —         Il         ■  '    I  n    "■■■Il   I  ■■■  1^1  I         II         II  ';         >'■  ■ mmmmammmmm^ 

(i)  Leoni' Africain, dans Ramnsio, pi I  aurerso.  (a)  Id. 

l3 


194  IIECHSRCHES    SUR    L^AFRIQUE. 

Lorsque  les  Portugais  eurent  découvert  le  Sé- 
négal et  la  Gambie  ^ûs  ne  doutèrent  pas  que 
les  embouchures  de  ces  deux  fleuves  ne  fussent 
celles  du  Niger  décrites  par  Léon  ;  et  ces  fleuves 
furent  considérés  par  eux  cpmnie  les  deux  bras 
du  vaste  Delta  formé  par  le  Niger  ou  Nil  des 
Nègres  à  l'instar  du  Nil  d'Egypte. 

Mais,  comme  les  jésuites  portugais  avaieilt  pé- 
nétré dans  XAbyssinie  et  avaient  trouvé  le  Jaç 
Tzana  où  Dembea^  une  des  sources  éaBahr-el- 
Azrekj  Tun  des  affluents  du  Nil^  qui  est  cQnsi* 
déré  enÂbfssinie  ^^omme  le  véritable  iVi/,  qu  ne 
doqta  pas  non  plus  que  ce  lac  ne  fut  celui  dont 
^1  est  fait  mention  dansÉdrisi,  comme  donnant 
naissance  ou  Nil.  On  transporta  donc  loin  vers  le 
sud ,  f^ètrVtm  se  figurait  que  devaient  être  les 
sources  du  Nil,  le  lac  àiJbyssinie.  On  plaça,  alen- 
tour de  ce  lac ,  les  provinces  àiAbyssinie  dont 
on  avait  connaissance.  Ainsi ,  non-seulemept  ce 
lac,  mais  toute  XAbyssinie  se  trouva  transportée 
à' vingt  degrés  ou  1200  milles  géographiques  de 
sa  véritable  position.  Les  détails  relatii^  à  cette 
contrée,  agrandis  et  déplacés,  remplissaient  fa- 
cilement l'espace  encore  aujourd'hui  incomu 
qui  se  trouve  dans  l'intérieur  de  X  Afrique  au  sud 
de  Féquateur.  Le   grand  lac  ^Abyssiniej  ainsi 
placé  entre  les  cotes  occidentales  -  et  orientales 
de  cette  partie  méridionale  du  oontinént,  pou- 


DEITXljfelffE    PARTIE.  IQD 

vait  aussi  fournir  les  sources  des  grands  fleuves 
qu'on  y  avait  découverts ,  et  principalement 
celle  du  Zaïre  ou  rivière  A\jl  Congo  à  Touest ,  et 
celle  du  Zamf?ezé  ou  Coûama  à  l'est. 

Telles  sont  les  bases  principales  des  systèmes 
géographiques,  relatifs  à  l'Afrique,  que  l'on  re- 
marque dans  les  cartes  des  seizième  et  dix-sep* 
tième  siècles. 

Sur  l£(  carte  d'Afrique  qui  accompagne  dans 
Ramusio  l'ouvrage  de  Léon  l'Africain,  nous 
voyons  un  gi*and  lac  à  60  degrés  à  l'orient  du 
Cap'Fert  et  à  5  degrés  de  latitude  sud,  alen* 
tour  duquel  est  le  royaume  de  Gojam  et  de 
Caffa^  contrées  qui  sont  connues  pour  faire  au- 
jour^'l^ui  partie  de  XAbyssinie  :  de  ce  lac  coule 
au  nord  le  Nil;  à  l'est  se  trouve  le  Cuama;  à 
l'ouest,  le  Zaïre.  D'un  autre  lac  plus  petit,  et 
voisin  de  ce|ui-là,  sort  le  Niger  ^  qui  coule  d'a- 
bord au  nord-ouest,  ensuite  droit  à  l'ouest,  et 
qui  sç  décharge  dans  la  mer  par  plusieurs  em- 
bouchures en  formant  un  vaste  Delta ,  dont,  la 
Garnira  et  XeRio^Grande  sont  les  deux  bras  prin- 
cipaux. Il  est  grossi  dans  son  cours  par  diverses 
polîtes  rivières  qui  y  tombent  du  PQjpd  et  du  sud. 
To^U)!OUt  ou  Timbouctou  est  à  16  degrés  de  lati- 
tude nord,  ce  qui  semblerait  assez  exact,  ipais  à 
jo  degrés  seuletuept  à  l'orient  du  Cap^Fert^ 
c'est-à-dire  à  près  de  8  degrés  ou  480  n^illes 

i3- 


î()6  RECni-RCHES    SUR    LàFRIQUE. 

géographiques  plus  à  l'ouest  que  ne  le  placent 
nos  cartes  actuelles.  Aussi  cette  ville  se  trouve- 
t-elle  daiis  Ramusio^  sur   le  bras  supposé  du 
Niger ,  formé    par   le  Sénégal^  et   à    quelque 
distance  de  Kabra.  Ce  port  de  Timhouctou  est 
placé  à  la  jonction  présumée  ^\x  Sénégal^  à^  la 
Gambie  et  du  Niger ^  ou  à  la  pointe  du  préten- 
du Delta.  Le  royaume  dont  Timhouctou  est  la 
capitale,  s'étend  jusqu'à  cet  endroit.  Indépen- 
damment du  lac  qui  donne  naissance  au  Niger, 
on  en  distingue  deux  autres,  l'un  au  sud  et  à 
Forierit  de  Bornou^  l'autre  à  l'ouest  de  Cache- 
nah  et  entre  les  royaumes  de  Zegzeg  au  nord, 
et  de  Guber  au  sud.  Les  peuples  du  Soudan 
se  trouvent  tous  inscrits  le  long  des  rives  du 
fleuve  unique  du  Soudan,  En  allant  de  l'ouest 
à  l'est,  on  voit  au  nord  du  Niger,  Tombotu^ 
Gano ,  Zegzeg,  Cassena,  Ischar,  Guangara  et 
Bomo ,  qui  a  au  nord  -  est   Coran  et  Guoga  : 
au  sud,  dans  le  même  ordre,  sont,  Melli,  GagOy 
Guber,  Zanfara  et  Medra.  Tel  est  le  système 
exposé  dans  cette   carte  :  il  avait  cela  de  re- 
marquable, qu'il  résultait  entièrement  des  ob- 
servations modernes  et  de  celles  des  Arabfes, 
mal  expliquées  ;  qu'on  n'y  ajoutait  pas  les  noms 
anciens  et  les  positions  de  Ptolémée,  propres 
seulement  à  augmenter  la  confusion  et  à  rendre 
la  masse  des  erreurs  plus  forte.. 


DEUXIÈME     PARTIE.  I97 

La  carte  d'Afrique  de  Forlani,Véronais,  publiée 
à  Venise  en  mai  i56a,  a  été  cppiée  sur  celle  de 
Bamusio  relativement  à  la  direction  générale  des 
grands  fleuves,  et  à  la  désignation  des  peuples  dont 
nous  venons  de  parler;  Timbouctou  y  est  aussi 
placé  de  même  :  mais  le  cours  du  Niger ^  après 
être  sorti  du  grand  lac  qui  est  dans  le  royaume 
de  Medra ,  passe  sous  terre ,  ainsi  que  le  géo- 
graphe le  dit  sur  sa  carte,  et  reparait  à  soixante 
milles  dans  le  lac  du  Bomou.  Ce  changement 
semble  dû  à  la  fausse  interprétation  du  texte 
del^on  l'Africain,  que  nous  avons  rapporté  plus 
haut;  ce  texte  suppose  un  cours  souterrain  du 
iV//  au  sortir  du  lac  Zambezé,  source  commune 
du  Nilj  du  Zaïre  et  du  Cuama. . 

§  II.  Depuis  la  publication  de  la  première  édi- 
tion de  VAdas  d'Ortélius  en  1570  ,  jusquà 
celle  de  la  Mappemonde  de  Delisle  en  1720. 

Ortélius  réunit  toutes  les  cartes  particulières 
publiées  jusqu a  lui,  toutes  les  descriptions  con- 
nues des  contrées  de  la  terre,  et  il  recueillit 
dans  les  anciens  et  sur  les  inscriptions  antiques 
tout  ce  qui  était  relatif  à  la  géographie  :  il  ren- 
dit un  service  immense  à  cette  science,  en  pu- 
•  bliant  un  atlas  complet  pour  la  géographie  mo- 
derne sous  le  titre  de  Thésaurus  orbis  terrarum, 
«t  un  autre  de  géographie  ancienne  intitulé  Pa- 


igS  RECHERCHIîS    SUR    l'aPRIQUE. 

rergon^  séparant  ainsi  pour  la  première  fois  et 
avec  juste  raison  ces  deux  branches  delà  science, 
qu'on  avait  jusque-là  confondues  et  embrouil- 
lées l'utie  par  l'autre. 

Cependant  la  carte  d'Afrique  qu'Ortélius  a 
donnée  dans  son  Thésaurus^  en  iS'jo,  est  copiée 
sur  celle  de  Forlanî,  ou  ne  présente  que  de  bien 
légères  différences  ;  ce  qui  est  d'autant  plus  sur- 
prenant, qu'Ortélius^  ne  fait  pas  mention  de 
Forlani  dans  la  liste  des  auteurs  qui  ont  dressé 
des  cartes  et  qui  lui  ont  servi  pour  la  compo- 
^sition  de  son  atlas.  Peut-être  Oftélius  considé- 
rai t-il  Ramusio  comme  l'auteur  primitif;  mais  les 
changements  que  Forlani  a  faits  dans  la  carte  de 
Ramusio  se  retrouvent  dans  celle  d'Ortélius. 
Chez  celui-ci  seulement  la  latitude  de  Timbouctou 
est  baissée;  la  longitude  et  la  position  de  cette 
ville  sur  le  Sénégal  sont  restées  les  mêmes  ;  mais 
le  pays  de  Tonbuto  se  trouve  placé  à  six  degrés 
à  l'orient  de  Tombota^  à  trois  ou  quatre  de 
if  û^ra ,  et  immédiatement  au  nord  de  Gago;ce 
qui  prouve  qu'on  Soupçonnait  déjà  tm  TYm- 
bouctou  plus  éloigné  vers  l'est  que  celui  qui  était 
sur  les  cartes. 

Dans  toutes  les  éditions  de  l'atlas  d'Ortélius 
qui  suivirent ,  jusqu'à  cfelle  qui  fut  publiée  en 
français ,  en  1 698 ,  On  trouve  la  mêine  carte 
d'Afrique ,  reproduite  sans  aucun  changèhiènt 


]>EUXlàM£    PARTIE.  J99 

On  voit  que  cette  carte  d'Afrique  d'Ortélius, 
comme  celle  de  Forlani,  présentait  la  combi- 
naison des  systèmes  d'Edrisi  et  de  Léon  l'A- 
fricain. . 

Mais  Ortélius,  qui  mit  Une  louable  activité  à 
réunir  les  meilleurs  matériaux  qui  existaient  de 
son  temps  sur  la  géographie,  n'a  pu  s'occu- 
per à  les  discuter,  et  n'a  pas  même  cru  devoir 
chercher  à  faire  concorder  èhtre  elles  les  certes 
dont  se  compose  son  atlas;  de  sorte  que,  re- 
lativement à  l'Afrique,  sa  mappemonde  offre 
un  système  tout  différent  de  celui  de  sa  carte 
d'Afrique. 

D'abord ,  dans  cette  mappetnonde ,  les  sources 
du  Nil  sont  dérivées  dé  divers  lacs ,  à  dix  ou 
douze  degrés  de  latitiide  méridionale >  et  non 
plus  d'uù  seul  lac.  Ces  sources  sont  distinctes 
de  Celles  des  grahds  fleuves  du  Congo  et  du  Mo- 
nomotapa^  qui,  par  conséquent,  ne  communi- 
quent plus  avec  le  NiL  Le  Niger  y  relativement 
à  ses  sources  et  à  la  direction  de  son  cours,  n'a 
plus  rien  de  commun  avec  le  NU  ;  ce  fleuve 
prend  sa  source  dans  un  lac  du  pays  de  Ouan- 
gara  y  dans  le  voisinage  de  la  Nubie,  à  onze  de- 
grés de  latitude  nord;  il  coule  directement  à 
l'ouest,  et  se  décharge  dans  la  mer  par  plu- 
sieurs bras ,  dont  les  deux  principaux  oiit  leurs 
embouchures  près  du  Cap-Fert^  et  près  de  Sier- 


200  IlECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

'  ra-Leone^  c'est-à-dire  que  ces  deux  bras  sont 
le  Sénégal  et  le  Rio^Grande,  Si  on  fait  abstrac- 
tion de  la  communication  du  Niger  avec  la  Se- 
négambie ,  la  manière  dont  le  grand  fleuve  du 
Soudan  se  trouve  tracé  sur  la  mappemonde 
d'Ortélius ,  ressemble  à  celle  qu'ont  adoptée 
les  géographes  dé  nos  jours*  On  y  remarque 
une  autre  conformité  avec  nos  cartes  actuel- 
les. De  l'autre  côté  des  montagnes  qui  four- 
nissent les  sources  du  Niger ^  sort  une  autre 
rivière  qui  coule  en  sens  contraire,  se  dirige  au 
nord -est,  et  va  rejoindre  le  NiL  On  reconnaît 
là  le  Bahr-el'Abiad  ou  la  Rivière-Blanche ,  que 
les  renseignements  donnés  à  d'An  ville  lui  avaient 
fait  considérer  comme  le  véritable  Nil;  ce  qui  a 
été  depuis  confirmé  parBrowne,  et  même  aupa- 
ravant par  Bruce ,  quoique  celui-ci  ait  déguisé  ce 
fait  (i),  et  qu'il  ait  même  retranché  sur  sa  carte 
cette  branche  du  Nil  pour  n'y  faire  figurer  que 
le  Bahr-el'Azrek  ou  la  Riviere-Bleue  ^  dont  les 
sources  étaient  connues  avant  lui. 

Les  fleuves  dont  nous  venons  de  parler,  ne 

(i)  On  voit  d'après  la  dernière  édition  de  Bruce,  donnée 
pa»  Murray,  que,  dans  le  journal  manuscrit  de  Bruce,  ce 
voyageur  convenait  que  ce  bras,  qu'il  a  traverse,  est  plus 
considérable  que  Tautce*)  mais  comme  ce  n'est  pas  celui  qu'il 
a  suivî ,  il  avait  supprime  cela  dans  son  voyageûmpriraé. 


DEUXIEME     PARTIE.  20I 

sont  pas  les  seuls  qu'on  remarque  dans  Tinté- 
rieui*  de  \ Afrique  sur  cette  mappemonde  d'Or- 
télius  ;  le^  Nigir  et  le  Gir  de  Ptolémée  y  sont 
tracés  comme  dans  cet  ancien,  immédiatement 
au  sud  de  VA  tins ,  et  c'est  sur  les  bords  du  Gir 
que  le  Bornou  se  trouve  placé.  De  l'autre  côté, 
où  se  termine  le  G/r,  sort  une  autre  rivière,  qui 
représente  celle  du  Nubia^Palus  de  Ptolémée , 
et  qui  se  rend  dans  le  fleuve  qui  contribue  à 
former  le  Nil,  ou  dans  le  Bahr-el-Ahiad  des 
cartes  modernes-  Dans  cette  mappemonde  d'Or- 
télius,  Timbouctou  est  placé  plus  à  l'est  que  dans 
sa  carte  d'Afrique ,  et  il  est  au  nord  de  Gago ,  de 
même  que  le  royaqme  Aq  Tombotu  sur  cette 
dernière  carte. 

La  mappemonde  de  l'aîné  des  Mercator  est 
semblable  à  celle  d'Ortélius,  relativement*  au 
tracé  AaNiger  et  du  grand  fleuve  du  Soudan ^ 
et  à  celui  des  deux  fleuves  Nigir  et  Gz>,  que 
Ptolémée  trace  au  sud  de  V Atlas  :  elle  est  aussi 
semblable  à  celle  d'Ortélius ,  relativement  aux 
deux  rivières  qui  forment  le  Bahr-el-Abiad.  Mais 
la  communication  des  grands  fleuves  de  l'Afrique 
méridionale  avec  le  Nil  y  est  rétablie;  et,  comme 
dans  la  carte  de  Forlani,  c'est  encore  ici  d'un  lac 
unique  qui  sortent  le  iW/,  le  Zaïre  et  le  Cou- 
û7wa,qui,sur  la  carte  d'Orfélius ,  avait  pris  le 
nom  de  Zuaina, 


102  RECHERCHES     StIR    LAFRIQUE. 

Là  carte  d'Afrique  qiii  a  été  reproduite  dans 
tous  les  atlas  deMercator,  et  dans  ceux  de  Hon- 
dius,  depuis  1570  jusqu'en  1606,  et  peut-être 
plus  tard ,  a  été  dressée  par  Mercator  Ife  jeune , 
d'après  l'Afrique  de  la  mappéinotide  de  Mercator 
l'aîné,  et  offre  absolùilient  le  même  système. 
Tornbato  on  Tongitbutu  se  trouve  sur  cette  carte 
placé  dans  le  royaume  de  Tombât.  Cette  ville 
est  à  16  degrés  à  l'orient-  du  méridien  de  l'île 
de  Fer,  et  à  environ  i4  degrés  de  latitude  sud; 
Kabra  est  avec  raison  placé  sur  le  Niger  ^  tout 
près  de  Timboùctou ,  tandis  que  dans  la  carte 
d'Ortélius  il  se  trouvait  à  un  degré  plus  à  l'est 
Les  rivières  sans  nom  qui ,  dans  cette  carte , 
comme  dans  celles  de  Ramusio,  de  Forlani  et 
d'Ortélius,  et  dans  toutes  les  cartes  dont  nous  au- 
rons à  parier  par  la  suite ,  jusqu'à  celle  de  d' An- 
ville,  sont  supposées  grossir  le  Niger,  ont  pris 
dans  la  carte  de  Mercator  le  jeune  pliis  d'exten- 
sion, et  ont  un  coûtas  plus  prolongé.  C'est  sur  les 
bords  de  ces  fleuves  que  Mercator,  comme  Or- 
telius,  Forlani  et  Ramusio,  place  les  capitales  des 
peuples  du  Soudan,  dont  les  positiphs  sont  les 
tnêmes  que  sur  les  cartes  précédentes.  Seulement 
Ginna  ou  Guinea ,  dont  nous  avons  tant  parlé , 
omis  sur  la  carte  d'Ortélius,  se  trotttvè  sur  celle 
de  Mercator ,  à  quatre  ou  cinq  degrés  de  la  côte 
du  Cap'Fert,  sur  les  bords  d'une  rivière  qui 


BstriiiMS   PARTIE.  ao3 

eoule  au  sud-ouest ,  et  se  jette  dans  le  Sénégal* 
Par  ce  mélange  de  tous  les  systèmes,  pat  cette 
confusion  dé  toutes  leis  hotîotis ,  là  géographie 
de  l'Afrique  avait  jplutôt  rétrogradé  qu'elle  tté 
s'était  améliorée. 

Livio  Sânuto ,  dans  le  preriiièr  vblume  de  sa 
Géographie,  qui  partit  en  i588,  et  qui  ne  con- 
tenait cjue  les  principes  généraux  dé  la  science 
et  la  description  de  TAfrique  ^  s'était  efforcé  de 
réunir  tout  ce  que  l'on  savait  de  son  temps  sur 
cette  partie  du  iriôndè.  Sa  carte  mérite  de  fixer 
notre  attention  (  i) ,  parce  qu'elle  offre  un  système 
neuf  et  tout  différent  de  celui  des  géographes 
qui  l'avaient  précédé ,  relativement  au  Soudan. 

Entre  cinq  et  dix  degrés  de  latitude  sud,  Sâ- 
nuto a  tracé  un  vaste  lac  d'où  décotilént  au  nord^ 
à  l'ouest  et  au  sud,  lé  Niljle  Zaïre  tt  le  CûaJma^ 
ainsi  que  dans  Rarfaiisiô  et  dans  les  géographes 
qui  ont  suivi  celui-ci.  Mais  ce  système  de  fleuves 
est  entièrement  distinct  de  celui  An  Soudan  y  et 
en  est  séjparé  par  un^vaste  espace. 

Livio  Sanuto  admet  trois  grands  fleuves  dans 
le  Soudah  :  tous  trois  ont  leurs  sources  à  l'est, 
dans  dés  lacs  qui  portent  leurs  noms;  tous  trois 
coulent  directement  à  l'ouest,  presque  parai- 

(i)  Livio  Sanu  to,  Geografia ,  Venezia,  in  fol .  1 588,  Tab.  x, 
xjjxij;  ctliv.  Vm,  p.  97* 


204  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

lèlement;  tous  trois  se  déchargent  dans  la  mer 
Atlantique  :  les  noms  de  ces  trois  fleuves,  ainsi 
que  les  vastes  contrées  qu'ils  fertilisent ,  se 
trouvent  compris  entre  le  cinquième  et  le 
vingtième  degré  de  latitude  nord. 

Le  plus  septentrional  de  ces  fleuves  ^st  le 
Canaga  ou  Sanaga  (i),  vulgairement  nomou^ 
aujourd'hui  Sénégal.  Ses  sources  sont  les  plus 
éloignées  vers  l'orient,  et  il  est  formé  de  trois 
rivières  principales  :  la  première  est.  la  Gaoga^ 
qui  est  dans  le  royaume  de  ce  nom  ;  les  deux 
autreik  sont,  le  Canaga^  proprement  dit,  et  le 
Ghir;  ces  deux  rivières  sont  dans  le  royaume  de 
Bornou.  Les  deux  premières  dérivent  de  lacs 
qui  portent  leurs  noms;  la  dernière  n'a  point 
de  lac  à  sa  source  :  elle  sépare  le  Bornou,  à 
l'est ,  des  royaumes  de  Gouangara  et  de  Zanfara^ 
qui  sont  à  l'ouest.  Au  nord  du  Senega  sont  les 
royaumes  de  Casena^et  de  Cano,  et  au  midi  le 
royaume  de  Zegzegy  au  sud  du  Casena;  et  loin 
ensuite,  vers  l'ouest,  est  Je  royaume  de  Tom- 
boutoUy  dont  la  capitale  ainsi  que  Kabra^  son 
port ,  se  trouvent  situés  à  seize  degrés  cinquante 
minutes  de  latitude,  et  à  environ  dix-sept  degrés 
de  longitude,  à  IVt  du  Cap-Vert  (a).  A  l'orient,  de 

(i)  Sanuto,  liv.  viii,  p.  96. 

(i)  Le  premier  m^ridieii ,'  dans  les  cartes  de  Livio  Sanutc, 


DEUXIÈME    PARTIE.  ao5 

Timhouctou  y  le  Senega  porte  le  nom  ^Iza  :  k 
Touest  de  Timbouctou  ou  dans  la  contrée  de 
Bagana,  ce  fleuve  porte  le  nom  de  Zambala; 
plus  à  l'ouest,  celui  de  Gusitemba;  plus  à  l'ouest 
encore,  il  prend  le  nom  de  Maye:  ce  n'est  que 
près  de  la  côte  et  lorsqu'il  se  verse  dans  l'océan 
Atlantique  ,  au  tiord  du  Cap  -  Vert  ^  qu'on  le 
nomme  Canaga  ou  Senéga;  et  encore  une  portion 
vers  cette  embouchure  prend  ïe  nom  de  Dengueh. 
Tous  ces  noms  sont  tirés  de  Marmol  ;  mais 
Marmol  n'admet  qu'un  seul  fleuve  dans  le 
Soudan j  dont  les  deux  bras,  lorsqu'il  s«  jette 
dans  la  mer,  sont  nomniés  Senega  et  Oamber(i). 
Ramusio  donne  bien  aussi  pour  embouchure  au 
Èiger  le  Sénégal  et  le  Rio^ Grande  ;  rmjs  ces 
deux  fleuves  sont  aussi  les  deux  branches  ex- 
trêmes du  Delta  d'un  seul  fleuve  (a). 


se  trouve  à  ^3  degrés  à  Touest  du  Cap-Vert;  il  le  faisait 
partir  d'une  île,  nomoiée  \île  des  Oiseaux ,  ^aivce  qu'on 
croyait  que  dans  ce  liCu  Taiguille  de  la  boussole  n'avait  au* 
cunc  déclinaison,  et  marquait  le  nord  juste.  Voyez  Tabula  i. 
Ainsi  Timbouctou  y  sur  sa  carte,  Tabula  fxi^  se  trouvait 
à  4o  ^  de  longitude  orientale. 
(i)  Marmol,  Description  de  V Afrique ^  liv.  yni,  ch.  xii, 

t.  III,  p.  47. 

(a)  Yoyez  la  carte  dans  C.-Battista  ^Ramusio ,  Ratcolti 
dtUe  Naviga/zioni  e  Viaggi^  16-1 3,  t.  I,  p.  i;  et  p.  96  dans  la 
Préface  que  IRimusto  a  mise  e»4ét6  dasVoyagea  de  Cadamosto, 


206  RECHEBCHES    SUR    l'aB^IQUE. 

Le  secoiid  fleuve  du  Soudan  9  qui  coule  entre 
le?  deux  aufre^,  selon  Sanutd,  a  ^a  source  vingt 
dégrés  pl^is  à  rptiesl;  ;  il  soft  d'un  seul  lac 
pommé  Qambeq  pu  Gqmbrq.  C'est  sur  les  bords 
de  ce  fleuyiB  que  Sgnuto  place  1^  terre  AeGermia 
ou  de  Ghiriea.  R^ns  ceç  ^p^foit,  Je  fleuve  porte 
le  nom  de  fleuve  de  Genuifi.  Cette  contrée  dé 
Gennia  ou  de  Ghmça  est  s^insi  placée  au  sudr 
puest  de  T^r^l^OiUCtoa.  La  Gqmbie  de  Sanuto, 
f^omme  la  Gafnbie  des  çaFte§  niodemes,  se  dé- 
charge dans  }'océan  Atlantique,  près  du  cap 
SaipterM^rie  (Caput  Sqnçtfe-Mariei).  À  rembou- 
phure  de  ïa  Ga^ibffi^  au  nord,  entre  ce  fleuvç  et 
le  'S^negay  §^\.  la  terre  des  J^lok {Jaiofa-Terra). 

Aupup  de  p^s  depx  fleuves  n'est  considéré 
par  S^fiutp  cQippie  le  Nig^^i  et  chacun  des 
deux  ne  fornie  quup  Delta  très-resserré,  com- 
posé seulement  de  deux  embouchures. 

Le  véritable  Niger,  selon  Sanuto,  est  le  plus 
méridional  des  trois  fleuves  qu'il  a  tracés  dans  le 
Sçudan:  ce  fleuve  forme  up  iqjmense  Delta^dont 
l'un  des  bv^^  e^  le  Jtiq-Grm^ft  propreniènt  dit, 
et  l'autre,  qui  se  jette  sur  la  côte  sud,  est  nommé 
par  Sanuto,  Qstarum  fiusnus;  c'est  la  rivière 
voisine  du  cap  Meswnaday  vers  l'est,  qui,  sur  la 

oik  ses  idées  sur  les  emboudiorei^  du  Nigtr  «ont  pltt9  çlaine? 
ment  exprhnëes  qu'elles  ne  to^sont  sur  sa  G9A:fe. 


DEUXIÈME    |»A]IT|£.  ^CJ 

earte  de  d'Anyille,  porte  le  non!  de  JUa-Cestos, 
et  sur  celle  d'Arrpwsmitb  ,  de  -ffiVer  -  Sesteri, 
mais  à  laquelle  ces  deux  géographes  donneftit 
un  cours  très-borné ,  ou  plutôt  qu'ils  indiquent 
comme  n'étant  qu'un  petit  ruisseau.  C'est  vers 
rembouchu):*e  du  fleuve  JViger  ou  Magnus,  que 
Saniito  a  placé  le  QhtiwçrJltçgrmm ,  ou  le  royaume 
de  Guinée  j  qui  se  trouve  ^iusi  limitrophe  de 
Gennia-Terra ,  ou  du  territoire  de  Genm\  pu 
qui,  plutôt, n'eu  parait  être  que  la  continuation. 
La  côte  à^  Afrique  comprise  entre  les  deui^  bran- 
ches di}  Delta  formé  par  le  Nigçr^  ou  entre  le 
Rio-Grande  {Moffi^s^Fluvius^  et  le  Rip-Cestos 
{Cistarum  fiuvius\  est  uomm^e  par  3auuto 
Ghinea-Ora.  Dans  l'intérieur  de  ce  Delta,  et  vçrs 
sa  pointe ,  est  le  Mellum^Hegnum,  ou  royauuie 
de  Melli^  qui  confine  à  Test  au  royaume  de 
Gago ,  placé  au  sud  du  Niger.  Le  territoire  dei^ 
Mandingues  est  ^n  nord  de  ces. deux  royauuies 
et  du  Niger;  Gago  {Gagum-Regnum)  est  au 
sud*est  de  Mandingue^  et  au  sud  du  Niger; 
Cuber  est  au  nord-est  de  Gago  et  au  nord  du 
Niger  ;  Bitum-Regnum  occupe  les  c)f  ux  rives  de 
ce  flieuve;  Temianum-Regnum  est  sur  la  riye 
nord-,  et  à  l'est  de  J9zû</».  Enfm,  a  Test  dc^ 
Temianmnii)  entre  les  sources  du  Niger  et  du 

(i)  Il  7  a  beaucoup  d'analogie .entr»  ce  nou^de  Temùtn 


2o8  RECHERCHES    SUR    L'àFRIQUE. 

Ghir^ow  de  la  plus  méridionale  des  trois  rivièl'es 
qui  forment  Ylza  ou  le  Senega^  est  le  pays  le  plus 
abondant  en  or  :  Aurum  hic  est  copiosissimum , 
dit  la  carte.  Ce  pays,  représenté  par  Sanuto 
comme  entouré  de  montagnes ,  est  au  sud-est 
de  Guangara  ou  Ouangara ,  ainsi  que  l'indiquent 
les  géographes  arabes  pour  Belad^-èUTibr  ^  ou  la 
contrée  de  l'or  pur.  Sanuto  remarque ,  dans  son 
ouvrage,  que  le  Niger j  ou  plutôt,  pour  nous 
servir  de  ses  propres  expressions,  que  Rio^ 
Grande  y  nommé  Niger  par  les  anciens  (  Il  Rio- 
Grande  y  detto  dagli  antichi  Niger)  ^  déborde 
en  même  temps  que  le  Nil;  «  ce  qui  a  fait ,  dit-il, 
penser  à  plusieurs  géographes  que  ce  fleuve  est 
un  bras  du  Nil  y  quoique  ses  sources,  ajoute-t-il, 
soient  fort  éloignées  du  Nil;  mais  on  croit  que 
ce  fleuve  communique  par  un  embranchement 
souterrain  avec  le  RioGrande,  » 

On  ne  peut  qu'être  frappé  des  grandes  diffé- 
rences que  présente  la  carte  de  Livio  Sanuto 
avec  celles  de  tous  les  géographes  qui  l'ont 
précédé  ou  qui  l'ont  suivi ,  et  des  conformités 
qu'elle  offre,  sous  certains  rapports,  avec  les 
récits  faits  sur  le  Soudan  aux  voyageurs  qui 


et  celui  de  Tenmny  que ,  selon  M.  Bowdkh ,  porte  le  pays , 
iraversé  ^^jtX Ogouaouat  ou  la  rivière  qui  se  joint  au  Zaïre, 


DEUXIÈME    PARTIE.  2O9 

se  3ont  récemment  transportes  en  Afrique^  et 
notamment  à  Mungo-Park  et  à  M.  Bowdich. 

En  effet,  Sanuto  admet  trois  grands  fleuves 
dans  le  Soudan;  et  les  indications  données  à 
M.  Bowdich  nous  font  aussi  reconnaître  trois 
fleuves  dans  ces  contrées  :  de  sorte  qu'en  fai- 
sant abstraction  du  tracé  de  ces  fleuves  et  de 
la  direction  de  leurs  cours ,  et  ne  considérant 
que  la  probabilité  plus  ou  moins  grande  de 
leur  existence,  on  pourrait  croire  que  XtJoliba 
de  M.  Bowdich  est  Ylza  ou  Canaga  de  Sanuto; 
que  le  Gambarou  est  la  GMUfnbeUy  et  le  QuoIUl 
le  Niger.  Remarquons  aussi  que  Sanuto  est  le 
seul  qui  établit  une  communication  entre  le 
Niger  et  la  côte  méridionale  connue  aujourd'hui 
sous  le  nom  de  Côte  de  Guinée^  par  le  moyen 
d'un  fleuve  qui  se  décharge  dans  l'Océan^  près 
du  cap  Mesurada{i)\  et  que,  selon  la  manière 
dont  on  trace  aujourd'hui  le  Niger ^  d'après  les 
observations  de  Mungo-Park,  les  sources  de  ce 
fleuve  se  trouvent  tellement  près  de  celles  de 

(i)  lUmasio ,  de  même  que  Sannto,  faisait  bien  du  Rio* 
Grande  ane  des  emboucburfs  du  Niger;  mais  fiiXdlt^  selon 
loi,  Vemboachure  la  plus  méridionale  et  le  bras  sud  du  Delta 
de  ce  fleuve.  Pour  Sanuto,  le  Rio -Grande  est  le  bras  nord 
du  Delta  y  et  le  Cistarum  fluvius,  ou  Rie  diCestos,  est  le  bras 
s od.  Ramusio ,  au  contraire  »  donne  à  cette  rlTière  et  à  toiites 
celles  de  la  c6te  de  Guinée,  uu^iours  très-bortuk 

14 


aïO  RRCHCRCHES    SUR    LÀFRlQlTf. 

la  rivière  de  Mesurada^  que  la  communication 
par  eau  entre  ce  fleuve  et  la  cote  paraît  facile. 
M.  MoUien,  en  rapprochant  encore  les  sources 
du  Niger  de  trois  degrés  à  Fouest,  ou  vers  la 
cote ,  ajoute  beaucoup  à  la  vraisemblance  de  nos 
conjectures. 

N'oublions  pas  de  remarquer  aussi  que,  dans 
la  onzième  carte  de  son  Atlas  d'Afrique,  Sanuto 
donne  de  très  -  grands  détails  sur  la  côte  com- 
prise entre  le  Sénégal  et  le  cap  Formose;  qu'il 
parait  avoir  connu  toutes  les  rivières  qui  se 
versent  sur  cette  cote ,  et  qu'il  leur  donne  à 
toutes  un  cours  très -borné.  Il  n'y  a  que  k 
Cistarumfluvius^  ou  le  Rio^Cestos^  qu'il  prolonge 
jusqu'au  Niger;  il  ne  le  confond  pas  avec  la 
rivière  Mesuraday  qui  est  auprès;  car  il  a  aussi 
tracé  cette  dernière  à  Touest  du  Mesuradum 
caput,  qu'il  indique  :  il  nomme  cette  rivière 
Fluvius  DondTÙcuSj  et  place  ses  sources  dans  la 
chaîne  de  montagnes  qu'il  a  dessinée  à  peu  de 
distance  de  la  côte.  Il  serait  donc  utile ,  pour  le 
pr<^ès  des  découvertes ,  de  faire  reconnaître  le 
cours  du  BiO'Cestosy  afin  de  savoir  s'il  ne  com- 
munique pas  avec  le  Mesurada^  ou  s'il  ne  se 
prolonge  pas  plus  qu'on  ne  l'avait  soupçonné; 
si  enfin  il  ne  se  joint  pas  à  quelque  grande  ri- 
vière de  l'intérieur.  Les  indications  d'un  homme 
aussi  instruit  que  Sanuto  ne  doivent  pas  être 


y 


DEUXIEME    PARTIE.  3^11 

négligées.  Toutes  les  anciennes  relations  nous 
parlent  de  la  rivière  Cestos ,  comme  d'une 
rivière  remarquable,  et  même  comme  plus  con- 
sidérable que  celle  de  Mesurada  (i);  c'est  tout  le 
contraire  sur  nos  cartes  les  plus  récentes  :  on 
a  donné  un  très-long  cours  à  la  rivière  Mesu- 
rada ^  et  on  a  tracé  la  rivière  Cestos  comme  un 
ruisseau. 

Sanson,  qui  publia  sa  carte  d'Afrique  vers  le 
milieu  du  dix-septième  siècle,  la  chargea  d'une 
érudition  confuse,  et  montra  moins  de  connais- 
sances réelles,  de  discernement  et  de  critique 
que  Sanuto.  On  se  rappelle  quOrtélius,  pour 
les  grands  fleuves  de  cette  partie  du  monde,  a 
présentée  deux  systèmes ,  l'yn  dans  sa  mappe^ 
monde,  l'autre  dans  sa  carte  d'Afrique.  Saoson, 
qui,  à  cet  égard,  a  copié  Ortélius,  n'a  cependant 
suivi  en  entier  aucun  des  deux  systèmes  de  ce 
géographe  ;  mais  il  a  pris  l^juelque  chose,^  de 
chacun  d'eux.  Il  n'a  point  séparé  toutes  les 
grandes  rivières  du  sud  de  l'Afrique  du  lac  Zaïre ^ 
ou  des  sources  principales  du  Nil  d'Egypte^ 
comme  dans  la  mappemonde  d'Ortélius;  mais  il 

(i)  Brans,  Afiiha^  t.  IV,  p.  33i  et  S3a.  Il  paratt  que 
l'on  a  remonté  b  rivière  Ce»tos  Te^ce  de  60  mîHet 
géographiques,  et  qu'ensuite  cm  1!»  et^core  trouvée  oaji'- 
gabk  pour  des  bateaux. 

14. 


fkl!ï  RECHERCHES    SUR    l'a.FRIQUS. 

n'a  pas  non  plus  réuni  toutes  ces  rivières  au  lac^ 
comme  Ta  fait  ce  géographe  sur  sa  carte  d'Afri- 
que, Dans  Sanson ,  toutes  les  grandes  rivières  du 
Congo  communiquent  avec  ce  lac,  et  toutes  celles 
du  Monomotapa  s'en  trouvent  séparées.  Le  cours 
du  Nil  ainsi  que  celui  du  Niger  sont  tracés 
comme  dans  Ortélius.  Les  lacs  de  XAbjssirue 
et  tous -les  détails  relatifs  à  cette  contrée,  dé- 
placés et  agrandis ,  sont  disséminés  dans  le  sud 
du  continent  comme  dans  les  cartes  qui  avaient 
précédé.  Le  NigeTy  qui  a  ses  sources  particulières 
et  distinctes  du  NiU  se  perd  sous  terre  durant 
un  court  espace,  et  forme,  comme  dans  Ortélius, 
un  Delta  dont  le  Sénégal  et  le  Rio-Grande  sont 
les  deux  branches  extrêmes.  Les  rivières  de  la 
côte  de  Guinée  y  à  l'ouest  du  cap  des  Trois-Pointes  ^ 
se  rapprochent  beaucoup  d'un  des  affluents  du 
Niger  et  du  Rio^Grande;  mais  il  n'existe  aucune 
communication.  Tombuiestj  comme  dans  Ortélius 
et  Mercator,  placé  sur  le  Sénégal,  mais  à  quinze 
degrés  juste  de  latitude  nord,  et  à  sept  degrés 
de  longitude  à  l'orient  du  méridien  de  l'île  de  Fer. 
Enfin  le  Nigir  et  le  Gir  de  Ptolémée  se  trouvent 
tracés  au  sud  de  Vjitlas^  traversant  le  désert  de 
Sahara  et  le  BomoUy  et  ils  ont  leurs  sources  voi- 
sines d'un  fleuve  qui  «ouïe  dans  le  Nil,  ainsi 
que  dans  la  mappemonde  d'Ortélius  et  dans 
l'Afrique  de  Mercator.  Aucune  recherche  neuye, 


DEUXIÈME    PARTIÏ.  ^l3' 

aucune  notion  nouvelle ,  ne  se  remarque  sur  les 
cartes  et  dans  les  livres  mis  au  jour  sur  l'^A^frique 
p.ar  le  Géographe  d'Abbeville.  C'est  un  mé-» 
lange  de  Ptolémée,  d'Édrisi,  de  Sanuto  et  de 
Mercator  (x). 

La  carte  d'Afrique  de  Jacob  Meursius,  et  celle 
ii^  Nigritarum-Regio  ou  de  la  Nig!itie{^^  pro- 
bablement dressées  par  le  même  auteur,  qui 
accompagnent  la  savante  description  de  l'Afrique 
par  Dapper,  sont,  toutes  deux,  gravées  avec 
plus  de  soin  que  celles  de  Sanson,  et  offrent, 
près  des  côtes,  dès  détails  dessinés  avec  plus 
de  précision  et  d'exactitude  ;  mais,  pour  les  con- 
trées de  l'intérieur,  ces  deux  cartes  sont  copiées 
sur  celles  de  San^n.  Le  Niger ^  le  Gir  et  les  ri- 
vières du  Congo  s'y  trouvent  tracés  comme  dans 
les  cartes  du  Géographe  d'Abbeville,  et  par  con* 


(i)  Voyez  \ Afrique f  par  Nicolas  Sanson,  géographe  da 
roi ,  1 780,  une  feuille  in-folie  ;  et  \  Afrique  en  plusieurs  cartes 
et  divers  Traités  de  géographie  et  d'histoire  ^  -par  le  sieur- 
Sanson  d'Abbeville,  in-40,  i656,  ou  1662.  Jaillot  et  Mortier 
firent  graver  de  nouveau, -en  Hollande,  toutes  les  Cartes  de 
Sanson,  en  1696,  sous  un  format  beaucoup  plus  grand,  et 
en  comp'Qsèrent  un  Atlas  magnifique ,  en  deux  volumes  : 
c'est  an  chef-d'œuvre  de  gravure  pour  le  temps  ;  mais  il  n'y 
a  aucun  changement. 

(a)  Voyez  Dapper,  Description'  àe  V Afrique^  in-folip, 
Amsterdam,  1686,  p.  i  et  ai8. 


ai4  RECHERCHES    SUR    l'aI'RIQUE. 

séquent  comme  dans  l'Afrique  de  Mercator  et 
dans  la  mappemonde  d'Ortélius  (i).  Le  système 
de  ces  quatre  auteurs  est  absolument  le  même; 
et  la  longitude  et  la  latitude  de  Timbouctou 
sont  les  mêmes  dans  Jacob  Meursius  et  dans 
Sanson.  Les  descriptions  écrites  de  Dapper ,  de 
Sanson ,  d'Ortélius  et  de  Mercator  ne  renferment 
rien,  pour  l'intérieur  de  l'Afrique,  qu'on  ne 
trouve  dans  Léon-F Africain ,  dans  Marmol  ou 
dans  Édrisi  et  Sanuto  (a). 

S  IIL  Depuis  la  publication  de  la  Mappe- 
monde de  Guillaume  Delisle,  jusqu^à  nos 
jours. 

Les  observations  faites  dans  diverses  contrées 
du  globe ,  par  des  astronomes  envoyés  par  l'Aca- 
démie des  sciences  de  Paris,  nécessitaient  depuis 
long-temps  la  réforme  générale  du  système  géo- 
graphique. Delisle  vint;  et, sous  ses  mains  judi- 
cieuses et  savantes,  la  science  prit  une  nouvelle 
face.  L'Afrique,  plus  que  tout  autre  continent, 

(i)  Ceci  doit  servir  de  correctif  à  ce  qne  dit  M.  Bowdich , 
Mission  to  J^fJtanteCy  p.  ai 2,  en  note. 

(a)  Ia  carte  d'Afrique  qui  se  trouve  dans  la  Cosmo- 
graphie de  Peter  Heylin,  in  foKo,  London,  i68a,  est  copiée 
de  Sanson  ;  de  même  que  Belleforest ,  dans  sa  Cosmographie 
traduite  de  Sébastien  Munster,  a  reproduit  la  Carte  de 
ftamnsio. 


DEUXIÈME   PARTIE.  ai5 

se  ressentit  des  grandes  améliorations  qu'il  sut 
introduire  dans  toutes  les  parties  de  la  géo- 
graphie (i). 

Toutefois  ce  n'est  que  dans  sa  Mappemonde 
publiée  en  lyao,  et  dans  son  Afirique,  qui  parut 
en  172a,  que  nous  devons  étudier  le  système 
de  Delisle  sur  l'Afrique  :  dans  les  cartes  qu'il 
publia  en  1700  et  en  1707,  il  ne  l'avait  paô  en- 
core complété,  et  il  confondait,  comme  ses  pré- 
décesseurs, le  Sénégal  avec  le  Niger  (a). 

Le  plus  important  de  tous  les  changemeïits 
que  Delisle  fit  à  la  géographie  de  l'Afrique,  fut 
de  resserrer  XAhyssinie  dans  ses  véritables  limites. 
Les  observations  dès  Portugais,'  publiées  depuis 
long-temps,  auraient  dû  faire  corriger,  sous  ce 
rapport,  les  erreurs  énormes  de  Ramusio  et  de 


(i)  Après  la  mort  de  Nicolas  Sanson,  ses  fils  et  petits- 
fils  Moallard,  Guillaume,  et  Adrien  Sanson ,  reproduisirent 
ses  cartes  ayec  de  faibles  ckangements  de  détails ,  sans  au- 
cun égard  pour  les  observations  astronomiques  qui  se  mul- 
tipliaient de  jour  en  jour. 

(a)  Nous  parlons  ici  d'après  le  major  Rennell;  car  nous 
n*aTons  pas  sous  les  yeux  \ Afrique  de  Delisle,  publiée 
en  1707 ,  mais  seulement  la  Mappemonde  y  datée  du 
i5  %vril  1720,  et  \ Afrique  de  1722.  Voyez  |^enneirs 
Geographical  illustration  of  M*  Park's  Joumey  ^  dans 
Proceedings  of  the  Association  foi"  pmmoting,  etc.,  t.  I, 
p.  411,  édit.  in-8%  London,  1810. 


2l6    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Servet  ;  mais  on  avait  méconnu  ces  observa- 
tions, ou  plutôt  on  les  avait  employées  de  la 
manière  la  plus  étrange.  Delisle  remonta  la 
frontière  méridionale  de  XJbyssinie^  et  par  con- 
séquent les  sources  du  iW/,  de  vingt  degrés  vers 
le  nord.  Les  sources  du  Nil  n'eurent  alors  plus 
rien  de  commun  avec  les  rivières  du  Congo  et 
du  Monomotapaj  et  s*en  trouvèrent,  au  con- 
traire, séparées  par  un  immense  espace.  Tous 
les  fleuves  de  la  partie  méridionale  de  VJ/rique, 
non-seulement  n'eurent  plus  de  communication 
avec  le  Nily  mais  ils  ne  communiquèrent  pios 
entre  eux;  ils  eurent  leurs  sources  distinctes 
et  leurs  bassins  différents.  Il  en  fut  de  même 
du  Sénégal^  de  la  Gambie  y  du  Rio4jrande  et  du 
Niger.  Le  Sénégal  sortit  du  lac  Maberia,  près 
des  sources  du  Niger ^  et  coula  droit  vers  l'ouest. 
Le  Niger  eut  sa  source  dans  un  lac  voisin  du 
lac  MaberiUy  au  royaume  de  Tombât^  et  coula 
droit  au  nord,  jusqu'un  peu  au-delà  de  3Tam- 
bouctou  ou  Tombutj  d'où  il  se  détourna  vers 
l'est,  pour  couler  ensuite  dans  cette  direction 
J'espace  de  dix-sept  degrés  environ  :  il  se  perdit 
dans  le  lac  du  Bournou^  à  plus  de  douze  degrés 
à  l'ouest  da  Nil  t  avec  lequel  il  n'eut  plus  aucune 
communication.  Dans  lé  système  de  Delisle,  le 
Niger^  seul  grand  fleuve  du  Soudan,  se  trouve  isolé 
au  milieu  de  XJfrique;  et  aucune  des  rivières 


DEUXIÈME    PARTIE.  ^l'J 

qui  se  versent ,  soit  sur  la  côte,  occidentale  y  soit 
sur  la  côte  méridionale^  soit  dans  le  Nii^  à  Test , 
n  ont  de  communication  avec  lui. 

La  ville  et  le  royaume  de  Timbouciou,  ainsi 
que  Kabra,ïe  port  dé  Timbouctou^  se  trou- 
vèrent reportés  vers  l'est,  et  loin  de  la  côte 
occidentale  et  du  Sénégal.  Delisle  place  Tim- 
bouctou ,  qu'il  nomme  Tambut  ou  Tombut,  sous 
le  méridien  de  Paris ,  et  à  quinze  degrés  de 
latitude  nord. 

Au  nom  de  Niger  y  qui  n'est  que  l'application 
vraie  ou  fausse  des  notions  de  Ptolémée  sur 
l'Afrique ,  Delisle  ajouta  trois  autres  noms 
pour  désigner  le  fleuve  du  Soudan  selon  les 
différentes  parties  de  son  cours;  et  ces  trois 
noms ,  qui  sont  africains ,  méritent  une  grande 
attention.  Le  premier^  et  le  plus  voisin  de  la 
source,  est  Guien;  et  ici  on  reconnaît  le  Ginne 
ou  Ghinea  de  Léon-l'Àfricain  et  de  Mungo-Park, 
et  le  nom  du  royaume  le  plus  anciennement 
célèbre  de  cette  partie  du  Soudan.  Plus  à  Test, 
et  dans  la  partie  la  plus  considérable  de  son  cours, 
le  Niger  est  nommé,  par  Delisle,  Gambarou; 
et  nous  avons-  déjà  remarqué  que  Gumbarou  est 
précisément  le  nom  par  lequel  les  marchands 
maures  avec  lesquels  M.  Bowdich  a  conversé, 
à  Coumassie,  désignaient  la  plus  septentrionale 
des  rivières  du  Soudan ,  qui  coule  à  4^est  de 


ai8    HECHEUCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

Timbouctou.  Enfin  dans  le  Bornou ,  et  à  l'en- 
droit où  le  Niger  se  jette  dans  le  lac  Bour- 
nou  j  Delisle  nomme  le  Niger  j  Camodoou  : 
M.  Hutchinson,  qui  accompagnait  M.  Bowdich, 
entendit  parler  de  Koumoudou  -  Gaiguina, 
comme  d'une  rivière  du  Bornou  (i)  ;  et  nous 
savons,  par  M.  Burckhardt,  que  Kamadago^tn 
langage  de  Bornou  ^  signifie  rivière  (a).  Ceci 
prouve  combien  nous  avons  eu  raison  de  pré- 
sumer que  Delisle  avait  reçu  de  quelque  établis- 
sement européen,  sur  la  côte  de  Guinée  y  des 
renseignements  sur  l'Afrique  qui  n'ont  point 
été  publiés  ailleurs  :  cette  circonstance  donne 
un  grand  intérêt  à  sa  carte.  Certains  détails 
qu'elle  renferme  achèvent  de  confirmer  nos  con- 
jectures- Au  nord  du  Niger  y  Delisle  n'a  connu 
et  placé  qu'un  petit  nombre  de  peuples^  qui  sont 
BoumoUf  Ouangara  et  Zanfara;  à  l'ouest  de 
Bournou  est  Goubour  (Guber);  p]us  à  l'ouest, 
le*  royaume  de  Tombut,  que  le  Niger  traverse 
dans  son  milieu  du  sud  au  nord.  Mais  au  sud 
du  Niger  y  entre  Timbouctou  et  le  Bornou  ^ 
les  noms  de  peuples  sont  entassés,  et  on  en 
remarque  plusieurs  qui  sont  semblables  à  ceux 

(i)    Bowdich's    Mission  from    Capc-Coast  Castle ,    to 
Ashantee,  in-4°,  1819,  p.  ai3.  (  Voy.  ci-dessus,  p.  i35. } 
(2)  Barckhardt,  p.  /iga. 


DEUXIÈME    PAllTIE.  2jg 

dont  M.  Bawdich  a  entendu  parler  à  Coumassie; 
tels  sont  Yaourry-j  Bousa^  Nouffy.  Les  deux 
premiers  figurent,  ainsi  que  nous  Tavons  ob- 
servé, dans  la  relation  de  la  mort  de  Mungo- 
Park  ,  par  Amadi  Fatouma,  et  dans  le  récit  du 
chérif  Ibrahim.  D*autres  noms,  insérés  sur  la 
carte  de  Delisle ,  paraissent  être  les  mêmes  que 
ceux  de  M.  Bowdich,  défigurés  ou  prononcés 
différemment  :  tel  est  Gange,  sans  doute  le 
ttiême  royaume  que  le  Kong  de  M.  Bowdich, 
puisqu'il  se  trouve  placé  de  même  ;  Gaby,  qui 
semble  être  le  Kaybi  de  M,  Bowdich.  Par  la 
raison  que  Delisle  avait  reçu  ses  renseignements 
de  la  côte  de  Guinée  y  qui  est  au  sud  du  Niger  ^ 
il  Iraiisporte  aussi  au  sud  de  ce  fleuve  certaines 
contrées  que  les  géographes  antérieurs  plaçaient 
au  nord;  tels  sont  Cachine  et  Zaczac,  le  Gw- 
sena  et  \e  Zegzeg  de  Hamusio  (i). 

Delisle  a  fait  disparaître  de  sa  carte  le  Niger 
et  le  Ghir,  qu'on  traçait  dans  le  désert  de  Sahara , 
d'après  Ptolémée.  Le  Ghir  de  Delisle  n'est  plus 
qu'une  rivière  au  sud  de  Voilas  y  qui  coule  d'une 
vallée  à  l'est  du  Sidjilmessay  et  se  perd  dans  un 


(i)  Peut-être  le  Collega  de  Delisle  est-il  le  même  royaume 
que  XeKaUaghi  de  M.  Bowdich ,  transporté  loin  vers  le  sud. 
Gago  est  peut-être  Gauw^  et  Cormachy,  Coumassie,  reculé 
loin  vers  le  nord. 


%%0  ItECUERCH£.S    SUR    LAFRIQUE. 

lac.  Ce  nom  est  resté  d'après  les  anciennes  cartes, 
et  se  retrouve  dans  celle  de  d'Anville  et  dans  toutes 
les  cartes  modemesJ  Plusieurs  savants  modernes, 
qui  en  ont  ignoré  l'origine ,  s'en  sont  servis  pour 
appuyer  leurs  conjectures  sur  la  géographie  de 
Ptolémée;ils  ne  se  sont  pas  doutés  qu'ils  tour- 
naient  dans  un  cercle  vicieux,  et  qu'ils  citaient 
Ptolémée  pour  expliquer  Ptolémée. 

Delisle  plaça  les  différents  peuples  d'Afrique 
d'après  les  notions  qu'il  en  avait  puisées  dans 
les  relations  modernes,  dans  Léon  l'Africain  et 
dans  Marmol;  évitant  de  copier  aucun  de  ses 
prédécesseurs,  et  discutant  tout  par  hii-méme: 
il  a  ainsi  rempli  sa  carte  d'Afirique  de  noms  de 
pays  et  de  royaumes  dont  il  trace  même  les  limites, 
et  sans  distinguer  par  aucun  signe  ce  qui  était 
certain  d'avec  ce  qui  n'était  que  probable  ou 
simplement  conjectural. 

Quoi  qu'il  en  soit^  Delisle  fit  la  loi  ;  et  toutes 
les  cartes  d'Afi^ique^  publiées  depuis ,  ne  furent 
que  des  copies  plus  ou  moins  déguisées  de  la 
sienne,  jusqu'à  ce  que  d'Anville  eût  fait  paraître , 
en  1749»  sa  grande  carte  d'Afrique,  en  trois 
feuilles. 

D'Anville  avait  préludé  à  celte  carte  par  un 
ffSLTid  nombre  de  cartes  particolières  :  il  possé- 
dait, sur  presque  toutes  les  parties  de  l'Afrique, 
fréquentées  par  les  Européens,  beaucoup  de 


Deuxième   partie.  aai 


inat^riaux  que  Delisle  n'avait  pu  connaître;  il 
avait  dressé  et  publié  des  cartes  spéciales  de 
X Egypte  f  de  la  Sénégambie^  de  la  côte  de 
Guinée  y  du  Congo  ^  du  Mocaranga  ou  Mono* 
motapay  et  du  cap  de  Bonne-Espéranee. 

La  géographie  de  TAfrique  présentait,  dans  ses 
parties,  en  apparence  les  mieux  connues,  tant  d'er- 
reurs'de  détails  et  d'incertitudes ,  que  d'Anville, 
pour  mieux  assurer  au  domaine  delà  géographie 
positive  les  nouvelles  conquêtes  dont  ses  travaux 
l'avaient  enrichie,  résolut  de  n'admettre  sur  sa 
carte  générale  que  ce  qu'il  croyait  prouvé.  Cepen- 
dant les  portions  de  ce  continent  qu'on  pouvait 
dessiner  avec  quelque  degré  de  certitude,  quoique  » 
considérables  en  elles-mêmes,  étaient  peu  de  chose 
en  comparaison  de  sa  vaste  étendue;  et  il  résultait 
de  cette  méthode  rigoureuse  une  carte  d'Afrique 
presque  entièrement  blanche  dans  l'intérieur. 
D'Anville  osa  la  publier  aiitisi.  La  juste  réputation 
dont  il  jouissait  à  cette  époque,  ne  lui  laissait 
aucun  motif  de  craindre  qu'on  l'accusât  d'ignorer  * 
tout  ce  qu'il  avait  omis.  Cependant  le  cours  du 
,NU  vers  ses  sources,  et  celui  du  Niger  dans 
le  Soudan^  étaient  des  sujets  trop  importants 
et  d'une  trop  grande,  célébrité  géographiqtM 
pour  être  entièrement  passés  sous  silence.  D'An- 
ville lut  un  mémoire  à  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles* lettres,  pour  présente]^  ses.  idées  sur 


!2aa  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUli:. 

les  grands  fleuves  de  rintérieur  de  l'Afrique  (i). 
Dans  ce  mémoire ,  il  expose  d'une  manière  trop 
affirmative  des  conjectures  qui  ne  ^ont  nulle- 
ment démontrées  ;  mais,  sur  sa  carte,  il  fut  moins 
hardi,  et  il  grava  dans  l'intérieur,  presque  entière- 
ment vide  de  noms  et  de  positions ,  cette  légende 
modeste  :. 

«  La  Nigritie ,  depuis  la  partie  supérieure  du 
»  Senega  jusqu'à  la  frontière  de  la  Nubie ^  étant 
»  peu  connue,  on  croit  néanmoins  entrevoir  les 
»  circonstances  principales  du  local  de  ce  grand 
»  pays,  en  joignant  à  l'étude  du  géographe 
»  arabe  £1-Édrisi,  qui  écrivait  dans  le  douzième 
»  siècle,  et  de  Léon  d'Afrique,  les  notions  qu'il 
»  convient  encore  de  prendre  dans  Ptolémée, 
»  sur  quoi  même  quelques  connaissances  ré- 
»  centes  prêtent  aussi  quelques  secours.  U  y  a 
»  des  raisons  de  présumer  que  le  Niger^  qui 
)>  donne  le  nom  à  cettie  contrée,  coule  d'occi'* 
»  dent  len  orient,  au  contraire  de  l'opinion  com- 
»  mune  sur  ce  sujet.  » 

Nous  avons  vu  que  cette  opinion  sur  la  di^- 
rection  orientale  du  cours  du  Niger  n'était  pas 
nouvelle,  non  plus  que  l'e^mploi  des  notions  des 
9M:iens,  de  celles  des  Arabe^^^çomhinées  avec  les 

(i)  Mémoires  dç  V Académie  des  inscriptions  et  beUes- 


BEUXlàMS    PARTIE.  aâ3 

récits  des  Africains  modernes,  pour  suppléer  au 
vide  de  nos  connaissances  sur  l'Afrique.  j!(ousyer* 
rons  bientôt  ce  qu'en  bonne  critique  nous  devons 
penser  de  l'utilité  de  ce  mélange.  Mais  ce  qui 
était  vraim^it  remarquable,  dans  la  carte  de 
d'Anville,  c'était  l'emploi  plus  sobre  et  mieux 
entendu  des  notions  incertaines  ou  incom«- 
plètes  ;  c'était  l'abondance  des  détails  des  con^ 
trées  connues,  dessinées  avec  une  admirable 
clarté  ;  c'était  le  soin  judicieux  de  ne  pas  les 
étendre  au-^elà  de  leur  grandeur  réelle,  et  d'in- 
dicpier  l'endroit  précis  où  s'arrêtaient  les  coa<^ 
naisseunces  positives. 

Selon  d'Anville,  le'  Bàhr^el^Abiady  ou  la 
Rmcre-Blanchej  qui  sortait  de  deux  lacs  placée 
au  pied  des  montagnes  de  la  Lune ,  vers  le 
sixième  degré  de  latitude  nord,  était  le  vrai 
Nil  (i).  Ce  fleuve,  recevant  ensuite  de  l'est  les 
rivières  XAbyssinie^  formait  le  Nil.  Le  Bahr-^U 
Ahiad  ou  le  Nil  recevait  de  l'ouest  une  ri* 
vière  du  Soudan;  c'est  le  Bahr-el^Gazel y  qui 
arrosait  Bornou^  Kanem  et  Kaugka,  et  qui, 
dans  ce  dernier  royaume ,  se  jette  dans  un  lac 
de  même  nom,  pour  en  resscH'tir  ensuite  et  se 


(i)  Voyez  la  Dissertation  db  d'AnTtlle  sur  les  sources  du 
Nil ,  dans  le  Recueil  des  Mémoires  de  rjcadémie  des  in^^ 
tcripiiom  et  beUes-^leiires  ^  t.  XXVI»  p.  4^* 


!124  RfCHCRCHEl^    SUA    l'^FRIQUE. 

jeter  dans  le  Bahr-el-Abiad ;  mais  le  Bahr^el^ 
Gazel  s'écoule  dans  le  lac  Kaûgha  par  un  autre 
bras  vers  le  sud ,  qui ,  selon  d'Aaville ,  est  le 
Njil  des  Nègres  d'Édrisi  et  le  Gir  de  Ptolémée. 
Le  brais  qui  se  rend  dans  le  Bahr-eUAbind^  est 
nommé,  au  sortir  du  lac  Kaûgha  ou  Gaoga, 
Bahr-eUAzreky  ou  Rwière-Bleue.  Au  nord-est 
du  Bahr -el' Gazel ^  d'Anville  a  tracé  une  autre 
rivière  peu  considérable ,  qui  arrose  le  royaume 
de  Koukou  d'Édrisi ,  et  qui  se  rend  dans  un  lac 
que  d'Anville  prétend  être  le  marais  Cheh- 
mdes  ou  des  Tortues  de  Ptolémée.  Au  sud -est 
du  Fezzariy  d'Anville  a  encore  tracé  une  rivière 
ou  torrent,  qui  coule  au  midi,  se  partage  en 
deux  autres  rivières,  et  se  perd  au  pied  des 
montagnes  qui  traversent  le  Kawar.  Ces  mon- 
tagnes, nommées  Tantaneh^  sont  regardées  par 
d'Anville  comme  le  Girgiris  mons  de  Ptolémée; 
d'Anville  place  sur  le  bras  oriental  »de  cette 
rivière  le  Gherma  d'Édrisi ,  qui  est  pour  lui  l'an- 
cienne capitale  des  Garamantes  de  Ptolémée. 
Quant  au  courant  principal,  d'Anville  le  nomme 
ITadi  Quaham;  et  il  prétend  que  Ptolémée  l'a 
confondu  avec  le  Cinyphis  de  la  Tripolitane. 
Comme  Delisle ,  mais,  avec  bien  plus  de  pré- 
cision encore  dans  lés  détails,  d'Anville  a  tracé 
séparément  les  cours  du  Sénégal^  de  la  Gambie 
et  du  Rio 'Grandet  qu'où  avait  confondus  et 


DEUXIÈME     PARTIE.  .  !ia5 

réunis  pendant  plus  de  deux  siècles.  Le  Niger, 
ainsi  que  chez  Delisle,  coule  rers  Test,  entiè- 
rement  isole  dans,  l'intérieur   du  Soudan,  et 
n'ayant  aucune  communication  avec  les  fleuves 
de  la  Sénégambie  à   l'ouest,  ni   avec  le  Nil  à 
l'est.  Comme  dans  Delisle,  ce  fleuve  sort  d'un 
lac  voisin  du  lac  Mctberia,  qtii  est  une  des  sources 
du  Sénégal.  Ce  la(A)u  marais,  d'où  sort  le  Niger, 
est,  selon  d'AnvillIe,  le  Nigrites  Palus  de  Ptolé- 
mée.  Le  cours  du  Niger  se  dirige  d'abord  au  nord 
jusqu'à  Timbouctou:  il  tourne  ensuite  à  l'est;  et, 
en  décrivant  d'assez  grandes  courbes,  il  va  se 
perdre  dans  deux,,  lacs ,  ou  mers  douces  ^  qui 
sont  au  sud  du  Bomou ,  au  lieu  de  se  terminer 
dans  le  Bomou  même,  comme  sur  la  carte  de 
Delisle.   Ce  fleuve  porte  le  nom  de   Guin  on 
à'Iça  (i),  (Issa).  Mais  il  reçoit  du  sud  une 
rivière  qui  sort  de  l'autre  côté  de  la  chaîne  de 
montagnes  au  pied  desquelles  se  trouvent  les 
sources  les  plus  éloignées  du  Senega  ;  ces  mon- 
tagnes sont,  suivant  d'Anville,  les  monts  Capkas 
de  Ptolémée  :  le  fleuve  qui  en  découle  vers  l'est , 
et  qui  joint  le  Niger  ou  Guin  vers  la  moitié  de 
son  cours,  est  nommé  rivière  de  Lamlem,  pays 


(i)  M.  Ritchie  a  aussi  entendu  dire,  à  Tripoli,  que  le' 
"Niger  ou   le   grand  fleuve  du  Soudan  se  nommait  Jssa, 
Vovez  Quarterfy-RcPttw i  t.  XXill,  p.  281  ;  et  ci-après. 

i5 


2^6    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

peuplé  de  Juifs,  selon  Édrisi,  qui  avoue  que 
ses  connaissances  ne  s'étendent  pas  au-delà.  Mes 
lecteurs  se  rappelleront,  à  ce.sujet,  qu'un  grand 
nombre  de  témoignages  attestent  l'existence  d'un 
peuple  blanc  dans  l'intérieur  de  l'Afrique  (i). 
A  l'est  de  la  jonction  de  k  rivière  de  Lamlem 
avec  le  Niger^  ce  fleifve  reçoit  du  nord  l'eau  d^un 
grand  lac,  ou  mer  douce,  daift  lequel  coule  une 
rivière  qui  arrose  le  pays  de  Faran^  dont  Z«/ï- 
fara  est  la  capitale;  ce  lac,  ou  cette  mer  douce, 
est  dans  le  pays  de  Ghana  ou  Cano ,  au  sud 
duquel  (et  par  conséquent  aussi  au  sud  du 
Niger  )  sont  les  contrées  (jj^  Cassena  et  de 
Zegzeg.  Dans  le  pays  de  Ganah ,  où  d'Anville 
place  un  lac  qui  se  décharge  dans  \e  Niger,  de 
chaque  côté  de  l'embouchure  de  ce  lac  est  une 
ville  de  Ganah,  Plus  à  l'est,  le  Niger  se  divise 
en  deux  branches  qui  se  réunissent,  entourant 
ainsi,  comme  une  île,  un  vaste  pays ,  qui  est  le 
fFangara,  C'est  au  sud  de  ce  pays  que,  selon 
l'indication  de  tous  les  Africains,  d'Anville,  de 
même  que  plusieurs  des  géographes  qui  l'avaient 
précédé,  place  un  pays  riche  en  or,  qui  est  le 
vrai  Belad-el-Tibr  de&  auteurs  arabes  et  de 
Marmol.  Sur  le  bras  maridional  du  Niger,  qui 
forme  le  fTangara,  est  la  capitale  de  ces  con- 
trées, qu'on  nomme  Ghanara,  ville  fortifiée.  Au 

(i)  Voyez  çi-dessus,  p.   129. 


DEUXIÈME    PA.RTIE.  2^7 

sud-est  de  fFangara^  le  Niger  se  divise  encore 
en  deux  bras,  dont  l'un  coule  au  sud  dans  la 
mer  douce  appelée  Reghebil,  et  l'autre  à  l'est, 
se  perd  dans  la  mer  douce  nommée  Semegonda. 
En  nous  reportant  à  l'ouest  et  aux  sources  du 
Niger  y  nous  voyons  que  ce  fleuve  traverse  du 
sud  au. nord  le  pays  de  Guinbala;  c'est  toujours 
le  pays  de  Djennie  et  de  Guineva  ou  de  Guir^é 
de  Léon  l'Africain  et  de  ta^t  d'autres.  Ensuite, 
à  l'ouest  du  Niger ^  est  le  Bambara ,  puis  2b/w- 
bouctou  ou  Tombuty  au  nord  du  Niger,.  Voxxr 
remplir  les  indications  données  par  Léon  l'Afri- 
cain ,  d'Anville  a^  placé  Timboiiciou  à  quinze 
milles  géographiques  de  distance  duiV/^eretde 
Kabra,  son  port;  et  il  a  fait  traverser  cette  ville 
par  une  petite  rivière,  ou  plutôt  un  ruisseau, 
qui  coule  à  l'ouest,  et  se  perd  dans  le  Niger ^  à 
vingt-cinq  milles  de  son  enceinte  et  de  Kabra.  A 
l'est  de  l'état  de  Tombut  ou  de  Tombouctou^  et  des 
deux  côtés  du  Niger,  est  un  autre  état  limitrophe 
nommé  Meczara,  où  est  la  ville  de  Tocrour,  ca- 
pitale d'un  puissant  royaume  du  temps  d'Édrisi  ; 
puis,  assez  loin  vers  le  sud-est  et  vers  la  jonction 
du  Niger  et  du  Lamlem^  est  Guber,  Au  sud  de 
Meczara  et  vers  les  sources  dnLamlem,  à  l'ouest 
de  Guber  et  à  l'est  de  Guinbala,  est  Gogo.  Il 
existe  un  désert  entre  Tombut  et  Gogo,  et  entre 
Gago  et  Guber.  Vers  les  sources  de  la  rivière 

i5. 


!3LlS         RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

Lamlemy  sont  divers  petits  états,  tels  que  Cor- 
mai^kiy  Gingiro ,  Bourgou  ;  et  ensuite ,  à  l'orient 
de  ceux-ci,  sont  Bousa  et  Yaouri  (j),  puis 
Lamlem  et  enfin  Gabij  non  loin  de  la  jonction 
de  la  rivière  Lamlem  avec  le  Niger,  Tel  est  le 
résumé  des  détails  que  présente  la  carte  d'Afrique 
de  d'Anville,  relativement  au  Soudan. 

Mais  il  est  important  de  rOTciarquer  que  d'An- 
ville  changea  aussi  toutes  les  latitudes  convenues 
de  son  teinps  r  TimboucîoUy  qui,  sur  presque 
toutes  les  cartes  antérieures,  se  trouvait  toujours 
placé  entre  quatorze  et  seize  degrés  de  latitude 
nord,  fut  remonté  à  dix-neuf  ^degrés  et  demi  de 
latitude  ;  sa  longitude  fiit  déterminée  à  dix-sept 
degrés  à  l'orient  de  l'île  de  Fer ,  c'est-à-dire  trois 
degrés  plus  à  l'ouest  que  dans  Delisle,  qui  avait 
mis  Timbouctou  sous  le  méridien  de  Paris. 

D'An  ville  perfectionna  sa  carte  d'Afrique,  à 
mesure  qu'il  recevait  des  matériaux  plus  exacts 
ou  des  notions  plus  sures  et  plus  précises ,  et  il 
y  fit  des  changements  notables  en  175 1 ,  en  1770 
et  en  1777  (a);  mais  il  ne  toucha  point  à  l'in- 
térieur; ce  qui  prouve  que,  durant  tout  le  cours 

(i)  Sur  l'accord  de  ces  notions  avec  les  renseignements 
obtenus  par  les  voyageurs  naDdernes,  voyez  ci-dessus  ^ 
p.   104. 

(a)  Voyez  Barbie  du  Bocage,  Noti<^  des  ouvrages  de 
M.  d'Anville,  in-8%  i8oa,  p.  89.  - 


DEUXIÈME    PARTIE.  a^Q 

de  sa  longue  et  glorieuse  carrière  géographique, 
il  ne  reçut  à  cet  égard  aucun  nouveau  rensei- 
gnement. Sa  carte  fut  la  seule  que  Ton  reprodui- 
sit jusqu'à  ce  que  le  major  Rennell  se  fïH  chargé 
de  mettre  en  œuvre  les  renseignements  obtenus 
par  l'association  formée  à  Londres  pour  les  dé- 
couvertes en  Afrique,  et  eût  publié  une  suite  de 
cartes  qui  marquèrent  la  dernière  époque  de  la 
géographie  an  Soudan^  ou  de  l'intérieur  de 
l'Afrique  septentrionale. 

La  première  carte  de  Rennell  parut  en 
1790  (i)»  Déjà  elle  rectifie  plusieurs  positions 
dans  le  Fezzan  ;  et  elle  trace  trois  itinéraires 
sur  lesquels  on  avait  obtenu  des  renseigne- 
ments: d'abord  celui  du  chérif  Inhammed,  con- 
duisant à  Ganah  et  à  Gonjah  (a);  ce  dernier 
lieu  parait  être  le  Gonjé  de  Delisle,  le  Conche 
de  d'Anville,  le  Kong  de  M.  Bowdich,  placé  par 
tous  loin  au  sud  de  Timbouctou.  De  Gonjah^ 
le  chérif  Inhammed  se  dirigea  au  sud-ouest  jus- 
qu'à Gondufi^  ^^ffi  ^^  Kalanschi^  et  il  sut  qu'en 

(ï)  Cette  carte  est  intitulée  :  Sketch  oftke  Northern  part 
of  Africa  exhibiting  the  geographical  information  collected 
hy  the  Afiican  '  Society  y  compiled  by  J.  Rennell,  1790. 
Cette  même  carte  ne  se  troi^ve  pas  dans  la  dernière  édition 
Uti  Proceedings  y  etc. 

(a)  Bruce  {Trauels^  t.  VU,  p.  106,  édit.  i8i3,  in-8^) 
dit  que  le  Dar-Fom  se  nomme  aussi  Konjara. 


23o  RECHERCHES    SUR    l'afUIQUE. 

suivant  toujours  la  même  direction,  on  arrivait 
dans  le  TonoUivah  et  à  Assentaî^  qui  n'est  qu'à 
deux  degrés  et  demi,  ou  i5o  milles  géographi- 
ques, (K  la  Côte-d'or^  et  de  rétablissement  euro- 
péen de  Saint-George  de  las  Minas,  M.  Rennell 
a  supprimé  ces  détails  et  ces  dernières  positions 
dans  les  cartes  d'Afrique  qu'il  a  publiées  depuis, 
et  il  nous  semble  que  c'est  à  tort  ;  car  un  grand 
nombre  d'autres,  qu'il  a  admise^,  reposent  sur 
des  documents  encore  plus  incertains.  Le  JNiger^ 
sur  cette  carte  de  Rennell,  est,  comme  sur  celle  de 
d'Anville,un  fleuve  qui  coule  de  l'ouest  à  l'est, 
sans  aucune  communication  avec  d'autres  fleuves 
ou  rivières.  Le  fFadi-el-Gazel^  qui  aiTOse  le  Bor- 
noUf  communique  avec  le  ISiL  Au  reste ,  les 
cours  de  ces  deux  fleuves ,  le  Niger  et  le  fFadi^eU 
Gazel,  sont  indiqués  en  partie  par  une  ligne  de 
points;  réserve  utile,  et  que  l'âuleur  n'aurait 
pas  dû  négliger  depuis.  Au  nord  du  Niger^  Rennell 
place  deux  grands  royaumes  :  celui  de  Tint- 
bouctou  à  l'ouest,  celui  de  Cachenah  à  l'est; 
tous  les  autres  états  de  moindre  importance  n'y 
sont  indiqués  que  comme  des  subdivisions. 
Youriy  près  et  au  sud  de  Cachenah^  et  sur 
la  route  du  chérif  Inhammed ,  est  le  Yaouri  de 
Delisle  et  de  d'An  ville,  le  Yaourra  de  M.  Bow- 
dich ,  qui ,  tous  aussi ,  le  placent  au  sud  de 
Cachenah  :  mais  il  n'est  pas  biea  certain  que  ce 


•       DËUXlilME    PARTIE.  a3l 

soit  le  Yaour  de  la  seconde  relation  du  Voyage 
de  Mungo-Park ,  qui  semble  indiquer  ce  lieu  un 
peu  à  l'est  de  Timbouctou^  et  très -loin  vers 
l'ouest  de  Cachenah:  Kaffiiba^se  trouve  placé 
sur  la  route  d'Inbammed,  de  Cachenah  à  Congé 
ou  Kong  y  non  loin  de  ce  dernier  lieu,  et  au  sud 
du  Niger.  Kaffaba  parait  être  le  Kaybi  et  le 
Fo^/deM.  Bowdich.  Sur  une  route  d'Inhammed, 
qui  est  plus  au  sud,  entre  Cachenah  et  Congé ^ 
on  remarque  successivement ,  au  midi  du  Niger ^ 
trois  royaumes  avec  leurs  capitales  qui  portent 
les  mêmes  noms,  savoir  \  DomboUy  Nyhi^  Ko^ 
tokiliy  Komba  et  Degomba.  Dombou  paraît  être 
leToambeah  de  M.  Bowdich,  et  D/yÂi  se  trouve 
dans  l'itinéraire  d'un  Nègre  musulman  à  la 
Mecque  y  que  le  voyageur  anglais  a  publié  à 
la  fin  de  son  ouvrage. 

Remarquons  encore  que,  dans  cette  carte, 
Rennell  a  placé  Kombah  très-près  de  Degômba^ 
à  Test.  Alors  ce  Kombah  de  Rennell  ne  serait 
pas  le  Koumbah  de  M.  Bowdich,  ainsi  que  ce 
voyageur  le  croit  (i).  Le  Kombah  de  cette  carte 
de  Rennell  serait  le  Gambàhide  M.  Bowdich, 
placé  aussi  à  l'est,  et  à  peu  dç  distance  de 
Dag(vumbay  le  Degomba  de  Rennell.  Ces  deux 
états  sont  au  sud-est  ou  à  l'est  de  Kong  ou  de 

(i)  Mission  to  Àshantee^  p.  aoS.^ 


îi32  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQCE. 

Gonjah^  dans  l'un  et  Tautre  auteur,  tandis  que 
le  Koumbah  de  M.  Bowdicb  est  .Assez  loin  au 
nord-est  de  Kong,  Au  i^este,  ceci  indique  peut- 
être  une  erreur  ou  un  double  emploi,  relative- 
ment à  Koumbah  et  à  Gambah;  ce  qui  me  con- 
firmerait dans  cette  opinion,  c'est  que  Rennell, 
dans  le^  cartes  qu'il  a  publiées  depuis,  a  réuni 
sur  une  même  route  les  positions  entre  Cachenah 
et  Kong^  placées  dans  celle-ci  sur  deux  routes 
distinctes ,  et  qu'il  a  éloigné  davantage  vers  Test 
Komba  de  Degomba^  en  plaçant  entre  deux 
Kaffaba  (i). 

Sur  la  route  de  Mourzouk  à  TimbouctoUy  qu'a 
parcourue  Ben-Ali,  sont  Wergela,  Tugguri  et 
Jfnou.  \^eh  Zanhaga  à  l'ouest,  les  Tabou  dans 
le  centre,  et  les  habitants  de  Bournou  à  l'est, 
occupent  tout  le  Sahara  ou  le  Grand-Désert. 
La  ville  de  TimbouctoUj  dî^s  cette  carte,  reste 
à  peu  près  où  d'Anville  l'avait  placée,  et  ne 
s'en  trouve  éloignée  que  de  vingt  milles  géo-. 
graphiques  au  nord-ouest. 

(i)  Le  Bagharmé^  qui  n'était  pas  sur  la  carte  de  d* An- 
ville  ,  se  trouve  avec  sa  capitale  sur  celle  de  Rennell  ;  mais 
il  n'y  a,  ni  le  Dar-Four^  ni  Saley^  dont  Bruce  a  le  premier 
fait  connaître  les  noms ,  et  indiqué  les  positions.  Voyez 
Bruce's  Travels  ,  édit.  i8i3,  in-S*,  t.  IV,  p.  laS,  et  t.  VII, 
p.   loi ,   io6  et  112. 


J)El}XIÈME   PARTIE.  ^53 

Mais  *il  n'en  a  pas  été  de  même  dans  une 
nouvelle  carte  de  TAfrique  septentrionale ,  que 
le  major  Rennell  a  publiée  en  1798,  et  qu'il  a 
corrigée  en  180*2(1).  Sur  cette  carte,  les  décou- 
vertes de  Mungo-Park ,  de  Browne  et  de  Horne- 
mann  sont  arrangées  et  combinées  avec  tous  les 
renseignements  qu'on  avait  précédemment  ob- 
tenus; et  l'auteur,  mettant  de  côté  les  con- 
jectures de  d'Anville ,  trace ,  d'après  les  siennes 
propres,  le  cours  du  Niger  et  des  rivières,  ainsi 
que  les  lacs  du  Soudan  :  il  change  aussi  con- 
sidérablement la  latitude  de  Timbouctou^  qu'il 
met  à  seize  degrés  trente  minutes  au  nord  de 
Téquateur,  et  à  un  degré  trente-trois  minutes 
à  Porient  de  l'Observatoire  de  Greenwich ,  ou  à 
quarante  -  sept  minutes  à  l'occident  de  Paris. 
Ainsi  Timbouctou  et  la  partie  du  Niger  qui 
l'arrose ,  et  les  contrées  qui  l'avoisinent ,  ont 
été  replacés  sous  le  même  climat  ou  la  même 
région ,  en  latitude ,  qu'ils  avaient  dans  Delisle , 
Sanuto,  Ortélius,  Mercator,  Forlani,  Ramusio, 
les  éditeurs  de  Ptolémée,  pu  dans  tous  les 
géographes  antérieurs  à  d'Anville.  Rennell  traça 
le  cours  du  Niger ^  ou   du    grand    fleuve  du 

(0  Cette  carte  est  intitulée  :  A  Map  showing  the  Progress  ' 
of  Dîscos^ery  and  improvement  in  the.  geography  of  North- 
A/rica,  compiied  by  /.  Rennell,  1798,  corrected  in  i8oa. 


a34         RECHERCHES     SUR    l'aFHIQUE. 

Soudan  y  de  l'ouest  à  l'est,  et  presque  en  ligne 
droite,  sans  lui  faire  décrire  une  double  courbe, 
comme  l'avait  dessiné  d'Anville.  Il  le  fit  perdre 
dans  l'immense  marais  de  Ouangara^  qui  de- 
vient ,  suivant  lui ,  une  sorte  de  mer  intérieure 
dans  la  saison  des  pluies,  et  une  contrée  maré- 
cageuse pendant  la  saison  sèche.  Il  fait  com- 
muniquer ce  lac,  durant  la  saison  pluvieuse, 
avec  le  lac  Filtré^  dans  lequel  se  rend,  du  nord, 
comme  chez  d'Anville,  le  Bahr^el-^Gazel ,  et, 
du  sud,  le  Misseladf  qui  n'ont  aucune  commu- 
nication avec  le  NiL  Le  Misselad  incline  vers 
l'ouest  ;  c'est  aussi  vers  l'ouest  que  RenneU  feit 
couler  le  Bahf-Kulla  et  les  autres  rivières  qui 
arrosent  le  Dar-Kulla  ou  le  pays  de  Kulla. 
Pour  cette  partie  de  sa  carte,  le  major  RenneU 
a  suivi  M.  Browne  ;  mais  if  est  à  remarquer  que 
ce  voyageur  ne  s'explique  pas  d'une  manière 
positive  sur  la  direction  du  Bahr-Kulla  :  il  dit 
seulement  que,  sur  la  route  de  Wara^  ville  du 
Bergou^  à  Dar-^KuUuy  on  trouve- un  grand 
nombre  de  rivières  et  de  lacs.  «  3i  le  cours  de 
ce  ces  rivières,  ajoute-t-il,  a  été  donné  exacte- 
ce  ment,  elles  coulent  de  l'est  à  Touest  (i).  »  En 
admettant ,  comme  l'indique  M.  RenneU  sur  sa 
carte,  que  le  Bahr-Kidla  se  dirige  à  l'ouest,  ce 

'. — — — — — — — — > —  -,      ,^>fc.  ■ .  ■ ,  - 

(i)  BrowBte's  Trauels  inJ/rïca,  édit.^de  179^)  p.  449» 


DEUXIÈME    PARTIE.  !l55 

fleuve  ne  saurait  être  le  même  que  le  Quotla 
de  M.  Bowdich  (i),  s'il  est  vrai  que  le  Quolla 
coule  vers  Test.  Cependant  Muugo-Park  écri- 
vait à  lord  Cambden  que  le  Bahr-  Kullà  de 
M.  Browne  était  généralement  considéré  comme 
le  Niger f  ou  du  moins  communiquait  avec  ce 
fleuve  ;  mais  alors ,  si  le  Bahr-Kulla  de  Bi^owne 
est  le  NigeVy  il  ne  doit  pas  couler  vers  l'ouest , 
ou  'ce  n'est  pas  le  Niger  ïj^e,  Mungo-Park  a 
vu  à  Sego  et  à  SUla ,  puisque  ce  fleuve  coulait 
vers  Test.  Arrowsmith,  et  ^lelques  géographes 
français,  à  son  exemple, "concilient  assez  bien 
ces  apparentes  contradictions,  en  faisant  couler 
le  Bahr-Kulla  de  Test  au  nord-ouest,  comme 
Rennell,  mais  en  le  versant  dans  le  lac  Ouangara, 
qui  reçoit  aussi  le  Niger ^  lequel  coule  de  l'ouest 
à  r^st  ;  de  sorte  que  le  lac  Ouangara  est  alors 
considéré  comme  une  immense  concavité ,  où 
viennent  aboutir  les  rivières  qui  coulent  dans 
différentes  directions.  C'est  ainsi  que,  sur  ces 
mêmes  cartes ,  le  lac  Filtré  reçoit  également  le 
fTadi^el^Gazel  et  le  Misselad^  qui  s'y  rendent 
de  deux  directions  opposées.  Au  reste,  on  doit 
remarquer  que  Browne ,  qui  est  la  seule  au- 
torité pour  le  lac  Fittré ,  semble  en  faire  men- 
tion comme  d'une  rivière ,  et  non  comme  d'un 

/•       . • 

(i)  Bowdich's  Mission   to  Ashaniee^  p.  191. 


iè36  BECHEMCHES    SUR    LAFRIQUE. 

lac  (ï).  Les  sources  du  Nil  sont,. dans  la  carte 
de  Rennell ,  tracées  d'après  celle  de  Browne ,  et 
ce  fleuve  n'a  aucune  communication,  ni  directe 
ni  indirecte,  avec  le  Niger  ni  avec  aucun  des 
fleuves  du  Soudan  et  du  Bomou.  Ces  sources 
sont  placées  dans  le  pays  de  Donga,  où  sont 
les  Gebel'  al^  Koumri  ^  ou  les  Montagnes  de  la 
Lune,  vers  huit  degrés  de  latitude  nord  et 
vingt-trois  degrés  quarante  'minutes  de  longi- 
tude à  Torient  de  Paris. 

Timbouctou  et  Cachenah  ne  sont  plus,  sur 
cette  carte  de  Rennell ,  les  principaux  états 
du  Soudan  ;  ils  sont  remplacés  par  Bambarra  et 
Haoussa.  Ces  deux  grandes  régions  s'étendent 
des  deux  côtés  du  Niger  ou  Joliba ,  et  ont  au 
sud  Kong,  GagOj  Melli  ou  Lamlem  {t).  Les 
autres  régions  semblent  en  quelque  sorte  des 

(i)  Browne's  Traveh ,  p.  /|64-465.  Toutefois  le  mot 
Bahr,  qui  accompagne  le  nom  de  Filtre  y  a  un  sens  ambigu 
ici  comme  ailleurs ,  et  peut  signifier  un  lac. 

(!i)  Rennell  a-t-il  bien  raison  de  considérer  Melli  comvae 
syoonyme  de  Lamlem  ?  C'est  ce  qui  est  fort  douteux.  Selon 
Lcon  l'Africain,  MelU  est  sur  un  bras  du  Niger;  il  a  Gogo 
au  levant ,  le  désert  et  des  montagnes  arides  au  sud  ;  au 
couchant,des  bois  qui  vont  jusqu'à  l'Océan  (Ramusio,p.  78). 
Melli  est  peut-être  la  ville  de  Malel  d'Édrîsi  (Hartmann's 
£drisi,p.  39);  et  Lamlem,  le  Jemjem  d'Abd-Arrachman- 
Aga.  Voyez  ci-dessus,  p.  61 ,  71  et  7a. 


PEUXIÈME     PARTIE.  ^^J 

subdivisioilâ  de  celles-là.  Du  côté  du  BambarrUy 
au  nord  du  Niger,  sont  Birou^  Masina^  Tom-- 
bouctou;  au  midi  du  fleuve  sont  Kong  et  Gago^ 
qui  ont  âu  nord  Manliana  et  Kaffaha,  au  nord^ 
est  Baedou.  Du  côté  du  Haoussa  y  au  nord  du 
Niger j  est  le  petit  royaume  nommé  Cabi^  qui  ren- 
ferme les  villes  de  Houssa ,  de  Sala^  de  Toçrur: 
puis  vient  Nyffi,  qui  parait  être  le  Noufy  de 
Delisle ,  placé  par  ce  géographe  au  sud  du  Niger 
ou  du  GambaroUj  et  que  M.  Bowdich  met  aussi 
au  sud  àvaGambaroUy  mais  au  nord  du  Quolla 
on  Niger;  de  sorte  que  cetiM^  position,  dans  la 
carte  de  M.  Bowdich  y  n  est  contraire  ni  au  système 
de  Delisle  ni  à  celui  de  Rennell,  quoique  le& 
cartes  de  ces  deux  géographes  semblent  se  con^ 
trediresous  ce  rapport.  A  l'est  du  Nxfjfi  sont  Noro, 
Solarij  Caehenahj  et  Gana  ou  Kano ,  auprès  du- 
quel est  un  lac.  Comme  dans  la  carte  de  d'Anville, 
Ganah  s*étend  sur  les  deux  côtés  du  Niger,  et 
a  au  sud  Mekzara^eX  ensuite  Melli  ou  Lamlem: 
ce  dernier  pays  est  arrosé  par  une  rivière  peu 
considérable,  qui  coule  au  nord-est  dans  \t  Niger ^ 
et  sur  les  béfds  de  laquelle  se  trouve  Malei,  k 
capitale.  Au  nord  de  Cackénah  est  Jlgadez.  Le 
Zanfara  ou  le  Faran,  qui  figurait  dans  les  cartes 
de  Qelisle,  de  d'Anville,  d'Ortélius  et  de  tous  les 
autres  géographes,  ne  paraît  pas  sur  cette  carte 
de  Rennell;  mais  on  retrouve  la  m^e   con- 


a38  RECHERCHES    SÎjR    l'aFRIQUE. 

trée  inscrite,  sur  la  carte  de  M*  Bowdich,  au 
sud  du  Cachenah  et  du  Gambarou^  près  de 
Jaourray  et  au  nord  du  Quolla  ou  Niger  (i). 
A  l'est  de  Cachenah  est  Daoura^  le  Daouara 
de  M.  Lucas,  qui  est  le  Daura  (Daoura)  de 
M.  Bowdich.  A  l'est  de  Daoura  est*  la  vaste 
région  de  Bomou^  qui  a  au  sud  le  Baghermé^ 
dont  la  capitale  porte  aussi  le  nom  de  Mesna\ 
puis  le  BirgQUy  le  Dar-Four  et  le  Kordofan, 
Les  tribus  Touaricks  se  partagent  jusqu'au  Fez- 
zan  et^gadez  la  partie  occidentale  dn  Sahara  on 
Grand-Désert  ;  et  les  Tihous,  la  partie  orientale. 
Rennell  a  développé,  dans  deux  analyses  ou 
deux  dissertations,  les  motifs  qui  l'ont  guidé 
pour  le  tracé  de  sa  carte,  avec  toute  l'habileté 
qu'on  avait  droit  d'attendre  d'un  géographe  si 
justement  célèbre.  Nous  y  voyons  que  les  par- 
ties de  cette  carie  qui  comprennent  les  portions 
de  la  Sénégamhie^  <îu  Fezzan^  et  du  Dar-Four, 
du  désert  de  Barca  et  de  Nubie  j  parcourues  par 
Mungo-Park,  Hornemann  et  Browne ,  sont  les 
seules  qui  reposent  sur  des  notions  positives; 
mais  que  toutes  les  autres  n'ont  été  dessinées 
que-^d'après  des  combinaisons  plus  ou  moins 
incertaines,  puisque,  de  même  que  dans  la 
dissertation  qu'a  publiée  d'Anville  à  ce  sujet, 
~—^—  -  I 

(ï)  Mission  to  As/iantem^^p,  au. 


DEUXIEME     PARtIe.  23g 

elles  reposent  sur  des  rapports  plus  ou,  moins 
vagues ,  sur  des  conjectures  et  des  suppositions 
plus  ou,  moins  probables. 

Le  travail  de  Delisle  avait  fait  disparaître  celui 
de  Sanson,de  Mercator  et  de  tant  d'autres;  le 
travail  de  d'Anville  avait  remplacé  celui  de  De- 
lisle. De  même  les  géographes  qui  ont  publié 
des  cartes  d'Afrique,  pour  ce  qui  concerne  l'in- 
térieur de  cette  partie  du  monde ,  ont  copié 
Rennell. 

Arrowsmith  publia  le  premier,  en  novembre 
1802,  une  carte  d'Afrique,  en  quatre  feuilles , 
inférieure  sous  beaucoup  de  rapports  à  celle 
de  d'Anville ,  mais  qui  offrait ,  pour  la  première 
fois ,  les  découvertes  de  Bruce  ,  de  Browne  , 
àe  Mungo-Park  et  de  Hornemann  réunies  sur 
une  même  carte.  Les  contrées  intérieures  et  le 
Niger  s'y  trouvent  dessinés  d'après  les  combi- 
naisons et  les  conjectures  de  Rennell,  avec  les 
légers  changements  que  nous  avons  indiqués. 

Il  en  est  de  même  de  la  carte  d'Afrique  qu'a* 
publiée ,  en  octobre  1809,  M.  Purdy,  aussi  en 
quatre  feuilles.  Il  y  a  plus  d'érudition  et  de 
critique  dans  cette  carte  que  dans  celle  d'Ar- 
rowsmith  ;  mais  elle  est  copiée ,  pour  les  Con- 
trées de  l'intérieur,  sur  la  carte  de  Rennell. 
Seulement  M.  Purdy,  d'après  les  indications 
et   Touvrage   de    M.    Jackson ,  qui    venait    de 


s4o  RECHERCHES    9UR    LA'FRIQUE. 

paraître,  a  dessiné,  entre  Timboueêo^  et  Ga- 
nah  ^  un  vaste  lac ,  ou  mer  intérieure ,  qu'il 
nomme  mer  du  Soudan.  Delisle,  d'AnvilIe  et 
Arrowsmith  n'ont  point  admis  cette  mer  in- 
térieure sur  leurs  cartes.  livio  Sanuto  ne  Ta 
point  connue;  mais,  sur  les  cartes  de  Foriani, 
d'Ortélius,  de  Mercator  et  de  Meursius,  on 
trouve  de  même  un  grand  lac,  ou  mer  in- 
térieure, entre  Timboudou  et  Cachemzh.  Xi 
est  nommé  lac  Guber  sur  la  carte  d'Qrtélius, 
et  lac  Guarde  sur  la  carte  de  M^ursius  ;  mais 
ce  lac  est  placé  au  sxxA  x^ Agadez  ^  qui  est  au 
nord-ouest  de  Cimo.  Ce  dernier  pays,  d(mt  il 
est  fait  mention  dans  Léon  L'Africain  et  dam 
Marmol ,  paraît  évidemment  être  le  Ganak 
d'Édrisi  et  des  modernes  (  i  )  ;  et  sur  nos 
cartes  actuelles,  comme  dans  celles  des  géo- 
graphes du  seizième  siècle,  ce  pays  se  trouve 
au  sud -est  ôijégadezy  msas  non  aussi  reculé 
vers  l'ouest  ;  de  sorte  que  la  position  relative 
•du  grand,  lac  intérieur   est  la  même   sur  les 


{i)Y^nniamn'sÉtînsi^  p.  43,  46  et  47.  Ainsi  Tont  pensé 
Suiuto,  Orlélias,  Mercator  et  Mearnss,  qui.ae  font. pas 
mentioa  aur  leurs  ^cartes  de  Ganah^  mais  seulement  de 
Cano.  En  gén^ral^  c'est  Léon  l'Africain ,  platôt  qu'Ëdrisi 
qulls  connaissaient  peu ,  qui  a  été  leur  guide.  Tous  ont 
placé  Cachenah  à  l'est  de  Cano  ou  Ganah  :  c'est  le  con- 
traire sur  nos  cartes  actuelles.  * 


•      DEUXIÈME    PARTIE.  ilfl 

cai^es  modernes   et  sur  les  cartes  anciennes; 
celle  ^Jgadez  est  la  seu^e  qui  ait  varié. 

En  général,  la  carte  ^Afrique  d'Arrowsmith, 
et  sur -tout  celle  de  M.  Purdy,  ont  servi  de 
base  aux  cartes  que  M.  Lapie  et  M.  Brué  ont 
publiées  depuis  i8i4  jusqu'à  1820.  Cependant 
ces  deux  géographes,  d'après  l'idée  d'Aly-bey 
adoptée,  je  crois,  sur  quelques  cartes  alle- 
mandes, indépendamment  du  grand  lac  du 
Soudan  de  M.  Purdy,  ont  converti  une  partie 
du  marais  du  Ouangara  de  Rennell  en  une 
vaste  mer  intérieure,  qu'ils  nomment  Merdjuy 
ou  mer  de  Nigritie;  et  ils  placent  dans  cette 
mer  une  grande  île,  qu'ils  considèrent  comme 
nie  ^Ulil  des  Arabes.  Le  premier  auteur  de 
cette  idée  ^  certainement  eu  dessein  de  con- 
cilier nos  cartes  modernes  avec  le  système  des 
Arabes,  tel  qu'il  est  indiqué  dans  la  carte  com- 
parative de  la  Géographie  de  M.  Pinkerton(i). 
Seulement  M,  Lapie  et  M.  Brué,  dans  les  cartes 
que  nous  avons  citées,  fonj;  couler  le  Bahr-KoiiUa 
vers  l'est  ;  et ,  pour  satisfaire  aux  indications 
données  par  tous  les  Africains  que  l'on  a  con- 

(i)  Conférez  :  Carte  encyprotype  de  V Afrique^  4  feuilles, 
1814 ,  par  Bmé;L'J/rique,  en  une  feuille ,  18 17, par  Lapie; 
et  ïa  carte  qui  se  trouve  dansPinkerton's  Modern-Geography^ 
troisième  édition ,  tome  II ,  p.  769,  qui  offre  les  systèmes  de 
Ptoléméc  et  des  Arabes  comparés. 

16 


44a  RECHERCHES    SUR    l'aFRIq'uE. 

suites,  ils  prolongent  par  des  points  le  cours 
du  {ieu\eKoulla^  et  le  joignent  aux  sources  du 
JVilj  ou  Bahr^el-zibiad^  montrant  ainsi  que  ce 
fleuve  Koulla  est  le  même  que  le  Niger ^  qui  sort 
de  la  mer  de  Négritie  ^  et  le  même  que  le  Nil^ 
qui  se  tourne  au  nord  pour  se  verser  dans  la 
Méditerranée.  M.  Brué  cependant  a  changé  d'idée 
à  cet  égard;  et  dans  une  carte  d'Afrique,  pu- 
bliée en  1820,  en  une  feuille,  il  revient  aux 
cartes  de  Purdy,  4'Arrowsmith  et  de  Rennell, 
et  il  sépare  entièrement  le  cours  du  Nil  d'Egypte 
des  fleuves  du  Soudan;  il  fait  couler  le  Bah^- 
Koulla  vers  Fouest ,  et  le  verse  dans  la  grande 
mer  intérieure  du  Ouangara ,  à  laquelle  il  donne 
le  nom  de  lac  de  Ouangara  y  qu'il  a  prolongé 
assez  vers  l'ouest  pour  le  réunir  à  celui  de 
Ganah  :  celui-ci  en  était  distingué  par  les  géo- 
graphes précédents,  qui  lui  donnaient,  selon 
M.  Purdy,  le  nom  particulier  de  Sigisma. 
N'oublions  pas  de  remarquer  que  ,  dans  la 
partie  orientale ,  ou  dans  le  BornoUy  la  carte  . 
de  M.  Lapie,  de  181 7,  en  partie  reproduite 
dans  celle  de  M.  Brué  en  1820,  n'est  nullement 
copiée  des  cartes  anglaises,  mais  parait  com- 
binée d'après  les.  renseignements  recueillis,  par 
Seetzen  et  autres.  Deux  lacs,  qui  sont  dans  le 
Kaouar,  au  nord,  donnent  naissance  à  deux 
rivières,  VHalemm^  à  l'ouç^t,  et  la  Lemzoumr 


« 


^     DEUXIEME     PARTIE.  243 

kcullagisse  (i),  à  l'est.  Ces  deux  rivières  coulent 
au  sud,  se  réunissent ,.  puis  se  divisent  ensuite  : 
la  branche  occidentale,  qu'on  nomme  Zamfaray 
traverse  le  Ouangara^  et  se  rend  dans  le  Merdja 
ou  la  mer  de  Nigritie;  la  branche  orientale  se 
verse  dans  le  lac  Fittréj  en  ressort  sous  le  nom 
de  Belad  -  e/  -  Tibr  pour  se  diriger  à  l'ouest , 
et,  après  avoir  reçu  du  sud  plusieurs  petites 
rivières,  se  verse  aussi  dans  le  Merdja  ou  la 
grande  Mer  de  Nigritie.  Les  noms  de  Zamfara 
et  de  Belad^el-Tihr  peuvent  être  les  noms  des 
pays  que  traversent  ces  rivières  ;  mais  il  est 
bien  douteux  que  ce  soient  ceux  des  rivières 
mêmes.  Belad-eUTibr  est  ici  placé  au  sud  du 
Ouangara^  comme  dans  les  cartes  précédentes; 
mais  Zamphara  (  Zanfara  )  ,  qu'on  retrouve 
aussi  dans  la  même  position,  comme  nom  de 
pays ,  sur  la  carte  de  M.  Brué ,  n'est  pas  le 
Zanfara  des  auteurs  arabes  et  des  premiers 
géographes.  Du  moins  la  carte  de  M.  Lapie 
aditiet  un  second  Zanfara  dans  le  Daoura ,  au 
nord  de.  Ganah, 

(i)  Seetzen,daDS  les  Annales  des  F'oyages,X,  XIX,  p.  i65. 
Ce  nom  Lemzoumkoullagisse  ^  d*une  longueur  démesurée , 
un  peu  défiguré  sur  la  carte  de  M.  Lapie  ,  doit  être  la 
réunion  de^  plusieurs  9Utres  noms  :  on  remarque  Kaulla 
dans  sa  composition ,  qui  parait  être  le  même  mot  que  le 
Kulla  de  Browne ,  le  Quoila  de  M.  Bowdich. 

.       l6. 


244  KJECHERCHBS    StJR    L*AFRIQTJE. 

Les  routes  tracées  d'après  les  itinéraires  don- 
nés par  Brownc ,  sur  les  cartes  d' Arrowsmith  et 
de  Renneli,  ont  disparu  de  celle  de  M.  Lapie, 
parce  quelles  renseignements  précis  de  Browne, 
qui  offrent  entre  eux  un  arrangement  suivi, 
ne  pouvaient  plus  s'adapter  aux  notions  plus 
abondantes,  mais  plus  vagues,  qu'on  voulait 
présenter. 

Dans  la  carte  qui  accompagne  l'édition  don- 
.  née  par  M.  Murray,  en  1817,  de  l'oiï^xage  de 
Leyden,  intitulé  Histoire  des  Découvertes  en 
Afrique  (i),  on  a  aussi  dessiné  la  mer  du 
Soudan  à  l'est  de  Timbouctou;  mais  il  n'y  a 
point  de  Merdjç,^  ou  de  mer  de  Nigritie, 
L'auteur  a  rétabli  le  grand  marais  de  Ouangara; 
mais  le  Niger  y  au  lieu  de  s'y  perdre,  le  tra- 
verse ,  se  jette  dans  le  petit  lac  Heim'ad^  à  l'est 
de  Ouangara ,  d'où ,  selon  l'hypothèse  de  Hor- 
nemann  et  de  Jackson,  il  sort  sous  le  nom 
de  rivière  Salamat^  qui  coule  vers  l'est;  et 
ensuite,  sous  le  nom  de  Bahr-el-Ada)  iï  se 
jette  dans  le  Bahr-el-Abiady  ou  Rivière-Blanche j 
qui  est  le  Nil  d'Egypte,  Ainsi,  dans  cette  hypo- 
thèse, îa  rivière  qui  prend  sa  source  dans  le 
Gebel  Kumri^on  le  Bahr-el-Abiady  ney  serait  pas 
le  Nilf  mais  un  des  affluents  de  ce  fleuve.  Le 

(i")  Jfrica  including  tke  latest  discaveries^  181 7,  t  sh. 


DEUXIÈME    PARTIE.  ^45 

lac  Heimad  communique  par  une  rivière  avec 
le  lac  Cauga  d'Édrisi,  qui  est  peut-être  le 
même  que  le  lac  Fittréy  dans  le  Baghermé  ;  et 
ce  lac  Fittré  reçoit,  comme  dans  les  cartes  de 
Rennell  et  d'Arrowsmith,  la  rivière  du  Boumouy 
formée  de  deux  rivières,  le  Ouadi-el^Gazel 
à  Fouest,  et  le  Ku^u  à  Test,  qui  prennent  leur 
source  au  nord:  le  Misseiady  qui  vient  du  midi^ 
est  aussi  dessiné  comme  dans  Rennell.  On  a  in- 
diqué sur  cette  carte,  par  une  ligne  de  points, 
rhypothèse  de  M.  Reichard,  qui,  à  Fouest  du 
laç  Ouangara^  fait  retourner  le  Niger  au  sud- 
ouest,  pour  le  verser  dans  le  golfe  du  Bénin  ^ 
où  il  forme  un  vaste  Delta.  On  a  désigné  de  la 
même  manière  le  système  qu'on  attribue  à 
M.  Maxwell  et  à  Mungo-Park,  ^t  considérer 
le  Dar^KouUa  de  Browne  comme  la  branche 
principale  du  Niger  y  qui  -se  détourne  vers  le 
sud,  et  forme  la  rivière  de  Zaïre  ou  de  Congo; 
ce  ^ui  s'accorde  en  partie ,  ainsi  que  nous  Fa-- 
V0ns  déjà  reçiarqué,  avec  les  renseignements 
qui  ont  été  donnés  à  M.  Bowdich ,  lesquels  nous 
montrent  le  Quolla  oaNig^r.  en  communication 
avec  la  rivière^  du  cap  Lopez  et  le  grand  fleuve 
de  Congo,  par  le  moyen  de  la  rivière  Ogouaouai. 
M.  Lapie ,  dans  sa  Mappemonde  en  une  feuille , 
publiée  en  1817,  a  aussi  admis  la  possibilité' de 
Fhypothèse  de  M.  Reiehard  ;  mais  M.  Brué  Fa 


a46  RECHEHCHES    StJR    l'aFKIQUE. 

rejetée,  et  ne  l'a  indiquée  sur  aucune  de  ses 
cartes. 

Dans  toutes  ces  différentes  cartes,  Timbouc^ 
tou  conjserve  la  latitude  et  la  longitude  que  lui 
avait  assignées  le  major  Rennell.  Un  géographe 
américain  de  la  ville  de  New -York,  nommé 
Eddy,  qui  a  dressé  une  carte  de  la  partie  occi- 
dentale de  l'Afrique  (i),  est  le  seul  qui,  dans 
ces  derniers  temps ,  ait  changé  la  position  que 
Rennell  a  donnée  à  Timbouctou;  il  l'a  descendu 
un  de^é  plus  bas,  et  l'a  placé  vers  quinze  de- 
grés trente  minutes  de  latitude  nord  ;  il  Fa 
ainsi  rapproché  du  parallèle  sous  leqèel  Delisle 
l'avait  mis.  M.  Eddy  n'a  point  donné  fes  motifs 
de  ce  changement  ;  mais  le  récit  de  Sidi-Hamet 
dans  Riley  npus  explique  suffisamment  pour- 
quoi, après  avoir  conduit  le  Niger  dans  le  pays 
de  Ouangara ,  où  ce  fleuve  reçoit  plusieurs  ri- 
vières qui  viennent  de  l'est,  il  détourne  son 
cours  au  sud  pour  le  jeindre  à  celui  du  Congo. 

Les  renseignements  que  le  capitaine  Dundfc 
et  le  lieutenant -colonel  Fitz-Glarence  ont  ré- 
cemment obtenus,  {]^da0t  leur  séjour  à  Malte, 
de  Hadji-Taloub-Ken*»-Djalow.,  giCftiverneur  des 

(i)  ^  Mi^p  ofparîofAfrica  drawn  front  the  latest  autho- 
riHes  tù  illustrate  the  narratives  of  captain  Jfames  Riley ^  by 
John  H,  Eddy;  New-York,  1846. 


i>EUXi:àMB    PàBTiE.  a47 

princes  de  Maroc,  ne  peuvent  donner  lieu  à 
aucun  changement  dans  nos  cartes,  et  n'ajou- 
tent rien  aux  notions  déjà  acquises  sur  l'inté- 
rieur de  l'Afrique  ;  mais  ils  les  confirment  en 
bien  des  poinis.  Hadji-Taloub-Ben-Djalow  avait 
été  plusieurs  fois  à  Timbouctou,  (i);  selon  lui 
cette  ville  est  située  à  deux  journées  de  marche 
du  Niger ^  qui  coule  vers  l'est  dans  un  grand  lac 
d'eau  douce,  nommé  Bahar^ Soudan.  C'est  de 
ce  lac  que  le  Nil  d'Egypte  prend  sa  source.  Le 
Nigir  est  toujours  appelé  le  Nil;  cependant  un 
nommé  Hadji-Benala ,  qui  se  trouvait  aussi  à  la 
smte  des  princes  de  Maraq^  donnait  au  Nigir  le 
nom  de  Dan  (a) ,  et  assurait  aussi  qu'il  coulait 
à  Fest.  Il  y  a  des  crocodiles  dans  le  Niger,  Hadji- 
Taloub  asMire  aussi  que  l'on  trouve  dans  les 
environs  de  Timbouctoù  des  cocotiers  en  abon* 
dance.  Les  lecteurs  atteiîtifs  remarqueront  que 
c'est  la  Seconde  fois  que  le  récit  d'Adams,  sous 
ce  dernier  rapport ,  se  trouve  coigifirmé  (  3  )• 
Lfes  forets  ^des  environs  sont  pleîfnes  de  lions 
et  d^éléphauts.  Les  denrées  qui  se  vendent' 
le  mieux  à  Timhouctou  sent  le  se),  le  tabac, 

■  ^— *4 — *-= *^ ^ ■ — - 

(i)Fitz-Clarence*s  Journal of  a  route  àcross India^through 
Egypte  in  1S19,  în-4%  p.  49^ 

(2)  Le  nom  ^de  Soudan  n'aurait-il  pas  une  ëtyntologîe 
commune  avec  celui  'de  Dan  ?  , 

(3)  Voyez  ci- dessus,  p.  157. 


24H  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

les  draps  d'écarlate^  les  cotons  imprimés,  les 
pistolets  et  les  fusils.  Les  natifs  donnent,  en 
échange,  de  l'ivoire,  et  sur-tout  de  roF,qoi  vient 
du  sud-ouest.  Les  caravanes  qui  partant  de  Fez 
mettent  trois  mois  et  dix  jours  à  se  rendre  à 
Timbouctou;  mais  avec  des  ^cm^^,  ces  chameaux 
si  rapides,  on  peut  faire  ce  trajet  en  vingt-neuf 
jours.  Timbouctou^  selon  Hadji-Benata,  est  trois 
fois  grand  comme  Alexandrie  :  selon  *  Hadji- 
Taloub ,  cette  ville  a  soixante  mille  habitants. 
Houssa  est  une  ville  considérable ,  mais  très- 
loin  de  Timbouctou  vers  l'est  ;  et  à  vingt  jour- 
nées au  sud-est  de  Timbouctou  est  une  autre 
grande  ville  nommée  Massana^  qui  est  peut- 
être  la  capitale  de  l'état  de  Masina^  au  sud- 
ouest  de  Timbouctou  ;  mais  en  considérant 
comme  exacte  l'indication  donnée  par  Hadji- 
Taloub,  on  a  conjecturé  avec  raison  que  Massana 
était  la  même  ville  que  celle  dont  il  est  feit 
mention  soiA  le  nom  de  fTassanah  dans  la 
relation  de  Ryley  (r). 

Tel  est  le  résumé  des  notions  que  l'on  a 
acquise^,  des  conjectures  que  l'on  a  formées, 
des  systèmes  qu'on  a  enÊuités  sur  cette  partie 
importante  de  la  géographie. 

(i)  Ceci  doit  servir  à  rectifier  ce  que  nous  avons  dit  plus 
haut,  p.  117,  lig.  i5j  sur  la  foi  d'un  premier  rapport,  où 
le  nom  de  Oumstmah  se  trouvait  substitué  à  celui  de 
Massana, 


i 


TROISIÈME    PARTIE.  ^49 

TROISIÈME  PARTIE. 

ANALYSE    GEOGRAPHIQUE    DES    ITIITERAIRES 

DE  TRIPOLI  A  TIMBOUCTOU 
ET    DE    TRIPOLI    A    CACHENAH, 

PAR    LE    CHEYK-HAGG-CASSEM 
.ET      PAR     MOHAMMED,    FILS     D*ALI. 


Considérations  préliminaires. 

A.VAWT  de  commencer  l'analyse  géographique 
des  itinéraires  que  nous  nous  sommes  proposé 
d'éclaircir,  il  convient  d'exaniiner  si  les  docu- 
ments que  nous  avons  donnés  dans  les  deux 
premières  parties  de  cet  ouvrage  sont  suffisants 
pour  paiivoir  tracer,  avec  quelque  degré  de 
probabilité  9  une  carte  des  yastes  régions  du 
Soudan^  ou  des  parties  centrales  de  l'Afrique 
septentrionale. 

D'abord  il  doit  paraître  étonnant  que ,  dans 
l'exposé  des  notions  acquises  sur  l'intérieur  de 
l'Afrique,  nous  n'ayons  rien  dit  des  anciens ,  et 


aSo  AKCHEltCHES     SUR    L'AFRIQtfl:. 

sur -tout  de  Ptolémée,  dans  Touvrtge  duqtiel 
d'Anville  et  les  géographes  de  nos  jour^  ont  cru 
tKuver  les  moyens  d'expliquer'  et  d'arranger 
les  relations,  souvent  contradictoires,  des  mo- 
dernes, sur  ces  vastes  contrées.  Disons  quels  ont 
été  les  motifs  de  notre  silence  à  cet  égard. 

Le  géographe  peut,  lorsque  les  matériaux  lui 
manquent,  tirer  d'utiles  secours  des  anciens  pour 
tracer  la  carte  d'un  pays  sur  lequel  ils  don- 
nent des  détails  plus  nopbreux  et  plus  exacts 
que  les  modernes.  Il  y  en  a  d'illustres  exem- 
ples (i).  Mais  cela  n'est  possible  que  lorsqu'on 
connaît  déjà  les  traits  principaux  et  les  prin- 
cipales positions  des  contrées  dont  on  veut 
perfectionner  la  géographie; ,  et  qu'on  est  bien 
certain  de  la  correspondance  d'un  certain  nom* 
bre  de  noms  de  lieux  domïés  par  les  anciens , 
avec  les  noms  des  mêmes  lieux  qui  se  trouvent 
sur  les  caries  modernes  qu^^  s'agit  d'amélio- 
rer. Quand  oo  est  incefliain  même  sur  la  con- 

— — — -,^_^^. — ^__ — _  .^ —  ■  _^_  ■  _■■  ■  —  •  ^  ^ 

(i)  C'est  ahwi  <jtic  -Detisle  s'est  aidé  des  itinéraires  an- 
ciens pour  Ksserfor  ki  Méditcrranie  àe  trois  cent»  lieaes 
datw  le  9e%&  de  la  longitude  ;  qj^  d'Anville  a  aussi ,  par  le 
moyen  des  mesures  de  ces  mêmes  itinéraires ,  rétréci  d*un 
tiers  la  largeur  de  Tltalie,  et  qu'il  a  même  rectifié  la  longi- 
tude de  Lyon,  avant  qu'on  eût  déterminé  la  position  de 
cette  ville  par  des  observations  astronomiques  et  par  une 
triangulation  exactes. 


*     TBOISIÈME    PAllTIE.  sSi 

ûgêfSition  générale  que  présentent  les  con*- 
trées  dont  on  veut  dresser  la  carte;  quand  on 
n6  peut  s^assurer  ni  de  la  correspondance  d'utt 
seul  nom ,  ni  de  l'identité  d'une  seule  position , 
alors  toute  comparaison  devient  illusoire,  et  ne 
peut  avoir  aucun  résultat  déterminé.  On  cherche 
à  expliquer  l'inconnu  par  l'inconnu  ;  et  il  n'en 
peut  résulter  qu'un  amas  de  conjectures  vagues 
et  de  notions  confuses,  parmi  lesquelles  on  ne 
saurait  discerner  ce  qfii^  est  probable  d'avec 
ce  qui  est  faux  ou  impossible.  C'est  sur -tout 
le  cas  où  nous  nous  trouvons  à  l'égard  des 
anciens  pour  ce  qui  conc|me  l'intérieur  de 
rAfiique. 

Qui  pourra  déterminer  avec  certitude  si  ces 
cinq  jeunes  Nasamons  dont  nous  parle  Hêto- 
dote,  qui  s'avancèrent  très -loin  dans  le  déserl 
\ers  l'ouest ,  où  ils  trouvèrent  des  hommes  de 
petite  taille,  et  un  «fleuve  qui  coulait  de  l'ouest 
àrest,daas  lequel  étaient  des  crocodiles,  ont 
seulement  étendu  leurs  explorations  à  quelques- 
unes  de  ces  vallées  de  l'état  de  Maroc  ^  situées 
au  sud  de  VJtlaSy  et  en  efifet  très-éloignées  vers 
l'ouest  de  Çyrène,  ou  de  la  Grande-Syrie^  d'où 


(i)  Herodoti  Hist.  II ,  3a,  33^  tome  I,  p.   agS,  édiu 
Sch-weighaeuser,  in-8',  i8i6. 


aSa  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQ^E. 

ils  étaient  partis  (i)  ;  ou  si  leurs  découvertes  se 
sont  arrêtées  dans  le  BornoUy  ou  dans  quelques 
oasis  du  Grand -Désert  (a),  ou  enfin  s'ils  ont 
pénétré  jusque  dans  le  Soudan  ^  sur  les  bords 
du  Joliba  ou  Niger  (3)  ? 

Qui  de  même  nous  dira  si  le  Nigir  et  le  Gir 
de  Ptolémée,  et  les  détails  des  contrées  que  ces 
fleuves  arrosent ,  renfermés  dans  l'ouvrage  de 
cet  ancien ,  appartiennent  aux  provinces  méri- 
»    ■    I  Il"    i^>      ■         III  ii^i  II  ■■ 

(i)  Dn  temps  d'Édrisi ,  il  y  avait  des  caravanes  qui  se 
i^ndaient  de  Bahnessa^  en  Egypte ,  à  travers  les  déserts  qài 
sont  au  midi  de  rAtlas^  jusqu'à  Sidjilmessa.  Édrisi,p.2o6 
(  et  dans  Hartmann,  p.  147),  donne  de  ces  caravanes  un 
itinéraire  très-dé  taillé. 

(^)  Comme  l'ont  cru  M.  de  la  Barre  {Hérodote  de  Larcher, 
deuxième  éditîoii,  tome  II,  p.  22$),  et  M.  Heeren,  dans 
la  première  édition  de  son  ouvrage  intitulé  :  Idée  sur  les 
relations  des  anciens  peuples  en  Afrique  ,  tome  I,  p.  191  de 
la  traduction  française.  • 

(3)  Ainsi  que  l'ont  pensé  d'Anville,  Mémoires  de  l'Aca- 
démie des  inscriptions  et  belles-lettres,  t.  XXVI,  p.  70;  — 
Rennell's  Geographical-System  qfHerpdo^Sy  in-4^.  London, 
1800,  p.  43i  et  63i;  •—  Heeren ,  Ideen  uherdie  Politik ,  den 
Ferkehr  und  den  Handel  der  vornekmsten  FôlAer  der 
alten  fVelt ,  in-8**,  Gottîngen,  i8i5,  a*  Abtheil,  p.  206. 
Dans  cet  ouvrage,  M.  Heeren,  enhardi  par  l'autorité  du 
major  Rennell,  changea  d'avis,  et  étendit,  beaucoup  plus 
loin  encore  que  dans  son  premier  ouvrage ,  les  découvertes 
des  anciens  en  Afrique. 


^     TROISIÈME    PARTIE.  a53 

dionales  de  Maroc  et  X Alger  ^  qui  sont  au  sud 
de  X Atlas;  ou  si  on  doit  lés  transporter  dans 
le  Fezzan  ou  le  Bomou^  ou  dans  quelque  autre 
oasis  du  Grand -Désert,,  ou  bien  s'ils  n'appar- 
tiennent pas  à  plusieurs  de  ces  oasis;  si  enfin 
on  doit  les  placer  dans  le  Soudan^  et  reconnaître 
le  Nigir  dans  le  Sénégal  ou  la  Gambie  ^  et  le  Gir 
dans  le  Joliba;  ou,  le  ]Nigir  dans  le  Joliba^  et 
le  G/r  dans  un  fleuve  encore  plus  à  l'orient? 
Qui  pourra  décider  si  cm  doit  séparer  ces  deux 
fleuves,'  en  laisser  un  au  nord  du  Grand -Dé- 
sert, et  placer  l'autre  dans  le  Soudan^  en  sup* 
posant  que  Ptolémée  ait  coinmis  l'erreur  de  les 
rapprocher,  parce  qu'il  a  fait  abstraction  de 
toute  l'étendue  du  Grand -Désert,  où  il  ne  se 
trouvait  ni  ville,  ni  fleuve,  ni  aucun  objet  géo- 
graphique dont  il  eût  connaissance?  Toutes  ces 
opinions  ont  été  également  soutenues ,  mais 
aucune  n'a  été  démontrée  ;  et ,  dans  l'état  ac- 
tuel de  nos  connaissances,  aucune  ne  pouvait 
l'être  (i). 


(i)  Voyez  Sanson,  Delisle,  les  cartes  historiques  de  Hasius, 
et  les  caries  que  nous  avons  citées  dans  la  seconde  partie  de 
cet  ouvrage  ;  et  aussi  d'AnvîUe ,  Mémoires  de  VJcaâémie  des 
inscriptions  et  belles-lettres^  tome  XXVI,  pages  64-81.  -*• 
Renoeir».  Geography  of  Herodotus^  pag.  645  to  75a; 
ibid.  Geographical  illustrations  qfPark'sJournex,  dans  let 


a54  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQ^UE. 

Mais  supposons  pour  un  instant  que  quel- 
ques-unes fussent  susceptibles  d'acquérir  un 
grand  degré  d'évidence  ;  supposons  qu'il  fïit 
prouvé  que  les  Nasamons,  dès  le  temps  d'Héro- 

Proceedings  of  the  association  for  promoting  the  disco- 
veries  in  Africa  ,  t.  III ,  pag.  4o3  -  420.  —  Durandi , 
Osservazioni  sopra  il  paese  Gofammnti^  dana  les  Mémoires 
de  V Académie  royale  de  Turin  pour  les  années  i8o5  et  1808 , 
m-40;  1809,  p.  1-55.  —  Pinkerton's  Modem- Geography, 
y  édit.,  l.  II,  p.  772;  traduct.  franc.,  t.  VI,  p.  444.— 
Leyden  and  Murray,  Hist,  account^  etc.,  in-S",  1817, 
tome  II,  p.  382.  —  Durpau  de  la  Malle  fils.  Géographie 
physique  de  la  Mer  Noire  et  de  l'intérieur  de  l'Afrique, 
in-8°,  1809,  p.  72.  —  Latreille,  Dissertation  sur  l'expédition 
du  consul  Suétone  Paulin  en  Afrique^  et  sur  le  fleuve  Niger  de 
Pline,etleNigirdePtolomée^iSo^^in-%\  Une  pouvait  y  avoir 
aucun  doute  sur  retendue  de  Texpédition  de  Suétone  Paulin, 
et  fort  peu  sur  celle  de  Cornélius  Balbus  ;  mais  c'étaient  les 
deux  expéditions  et  les  marches  surprenantes  de  Julius 
Mafemus  et  de  Septimius  Flaccus ,  dont  il  est  fait  mention 
dans  les  Prolégomènes  de  Ptolémée,  qu'il  fallait  discuter: 
or  d'Anville  et  les  auteurs  que  nous  avons  cités  ne  les  ont 
point  connues ,  ou  n'en  ont  point  {stt  mention.  Voyez 
Ptolemeu«,  Ceographica^  lib.  I,  cap.  viii,  p.  10;  cap.  ix, 
p.  II  et  II,  edit.  Bertii;  voyez  aussi  de  quelle  manière 
nous  interprétons  ceci'dans  notre  Cosmologie^  ou  Description 
générale  de  la  Terre  y  p.  240.  Nul  autre  auteur  ancien  connu, 
que  Ptolémée,  n'a  parlé  de  Julius  Matefnus  et  de  Septimius 
Flaccus;  ce  qni  décèle  une  grande  lacune  dans  nos  éoca- 
siéntfi  historiques  :  ce  n'est  pas  la  seule. 


TUOISIÈMK    PARTIE.  ^55 

dote  9  ont  réellement  pénétré  jusqu'au  Joliba 
ou  Niger;  supposons  qu'on  n'eût  aucun  doute 
que  Je  Nigir  et  le  Gir  de  Ptolémée  ne  du|»sent 
appartenir  au  Soudan ,  et  ne  fussent  les  grands 
fleuves  dont  il  est  fait  mention  dans  les  rela- 
tions modernes  :  alors  on  aurait  acquis  par-là 
des  notions  importantes  sur  l'histoire  du  com- 
merce études  découvertes,  et  sur  le  mélange 
des  nations  dans  les  temps  antiques*;  mais  qu'en 
résulterait-il  pour  les  progrès  de  la  géographie 
poskive  ?  absolument  rien.  Le  voyage  des  Aa- 
samons  pourrait  nous  faire  soupçonner  l'exis- 
tence d'une  rivière  dans  le  centre  de  l'Afrique, 
qui  coule  vers  l'est  ;  mais  les  découvertes  de 
Mungo  •  Park  nous  révèlent  Fexistence  de  cette 
rivière  d'une  manière  plus  certaine  encore. 

Les  indications  de  Ptolémée ,  qui ,  dans  sa 
Géographie ,  se  contente  de  donner  la  latitude 
et  la  longitude  présumées  des  sources ,  des  em- 
bouchures et  des  principaux  points  de  partage 
des  rivières,  ne  sauraient  même  nous  faire  de- 
viner le  tracé  àt  ces  rivières.  Il  n'en  faut  pas 
juger  d'après  la  manière  dont  Mercator  a  dessiné 
celles  de  l'Europe  et  tles  parties  du  monde 
connu,  dans  les  cartes  qu'il  a  dressées  pour  le 
Ptolémée ,  parce  que ,  pour  ces  contrées ,  il  n'a 
pas  été  réduit  aUx  seules  tables  de  Ptolémée, 
et  qu'il  s'est  aidé  des  connaissances  modernes. 


^56         RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

Mais,  lors  même  qu'on  croirait  pouvoir ,  dia- 
prés les  tables  de  Ptolémée,  conh^tre  le  sys- 
tème général  des  rivières  de  l'intérieur  de  l'Afri- 
que, on  ne  saurait  encore  où  les  placer;  car  les 
positions  de  Ptolémée,  pour  ce  qui  <x>ncerne 
l'intérieur  des  diverses  contrées  dont  il  a  dressé 
des  tables,  ofIi*ent  des  erreurs  de  plusieurs  de* 
grés ,  tant  en  longitude  qu'en  latitude.  Les  po- 
sitions des  lieux  ne  sont  pas  toujours,  comme 
sûr  les  côtes,  rangées  dans  leurs  situations  res- 
pectives ;  et  telle  ville  se  trouve  souvent  mise 
loin  au  sud-ouest  d'une  autre,  tandis  qu'elle  est 
réellement  au  nord-est.  Un  coup-d'œil  jeté  sur 
la  carte  de  la  Gaule,  ou  sur  toute  autre  contrée 
qui  présente  des  positions  de  lieux  anciens  bien 
connus  des  modernes,  suffira  pour  convaincre 
de  cette  vérité  tout  lecteur  instruit. 

Enfin  quand  on  supposerait  encore  que  les 
longitudes  et  les  latitudes  des  lieux  que  Pto- 
lémée indique  sur  le  Nigir  et  le  Gir  seraient 
exactes,  et  s'appliqueraient  aux  contrées  du 
Soudan,  nous  ignorerions  À  qoels  noms  mo- 
dernes de  lieux  et  de  nations  ces  noms  anciens 
correspondent,  A  nous  serions  dans  l'impossi* 
bilité  d'en  fairfe  aucun  usage  pour  la  détermi- 
nation des  positions  modernes. 

Tels  sont  les  motifs  qui  nous  ont  fait  considérer 
les  notions  des  anciens  sur  rintérieur  de  l'Afrique, 


TROISIEME    PARTIE.  aSy 

et  en  particulier  l'ouvrage  de  Ptolémée,  domme 
mutiles  pour  l'objet  de  nos  recherches.  Il  n'en  est 
pas  tout-à-fait  de  même  relativement  aux  Arabes. 
Nous  sommes  certains  que  TimbouctoUy  Haoussa^ 
Cachenah^  Bqfnouy  et  tant  d'autres  noms  qui 
se  trouvent  dans  leurs  écrits,  désignent  bien  les 
mêmes  nations^  les  mêmes  peuples,  les  mêmes 
villes  qui  existent  encore  aujourd'hui,  sous  les 
mêmes  noms,  dans  le  Soudan^  et  dont  nous 
cherchons  à  déterminer  les  positions;  parce  que 
les  écrits  dés  géographes  et  des  historiens  arabes 
nous  prouvent  que  ces  noms,  illustrés  par  le 
commerce  depuis  huit  siècles, n'ont  pas  cessé  de 
retentir,  à  travers  les  déserts,  jusque  chez  les 
nations  civilisées.  Mais  les  écrits  de  ces  géo- 
graphes et  de  ces  historiens  ne  nous  donnent 
aucun, moyen  certain  de  fixer  l'emplacement 
des  lieux  dont  ils  parlent,  k  la  vérité ,  ils  ont 
bien  déterminé  les  positions  de  plusieurs  lieux 
par  des  distances  réciprciques  ;  mais,  comme  nous 
ne  connaissons  aucune  de  ces  positions,  nous 
ne  pouvons  faire  «sage  de  ces  distancés ,  parce 
que  Tious  manquons  d'un  point  fixe  de  départ. 
Qu'importe,  en  effet,  que  KÉdrisi  nous  ap- 
prenne qu'il  y  a  un  mois  et  demi  de  chemin  de 
Koukou  à  Ganahf  et  quarante  jours  de  marche 
de  Gànah  au  lac ,  dans  ïeqifl^i  se  trouve  l'île 
A' Util,  lorsque  nous  ignorons  où  est  Koukou^ 

17 


258  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

Ganah ,  et  ce  grand  lac  qui ,  dans  la  significa- 
tion vague  du  mot  arabe  Bahr,  peut  être  Tocéan 
Atlantique,  ou  simplement  un  lac  de  rintérieur. 
Les  divers  rapports  que  Ton  a  obtenus,  soit 
en  Egypte,  soit  dans  Tempire  de  Maroc,  soit  à 
Tripoli^soit  dans  laL SénégambiCy soit  sur  la  Côte- 
d'or,  soit  ailleurs,  nous  laissent  dans  un  vague 
encore  plus  grand ,  puisque  la  plupart  ne  nous 
donnent  que  des  noms,  sans  aucune  distance. 
Nous  avons  tâché  de  comparer  et  de  rappi^ocher 
ces  noms  entre  eux;  mais  combien  d'erreurs 
n  est-on  pas  sujet  à  commettre  dans  ces  com- 
paraisons et  ces  rapprochements  ?  Ne  savons- 
nous  pas  que,  dans  tout  Fintérieur  de  l'Afiri- 
que,  presque   tous  les  lieux,  les   montaignes, 

#  les  rivières ,  ont  au  moins  deux  noms ,  qui 
n'ont  entre  eux  aucune  ressemblance  :  le  nom 
arabe  ou  maure,  et  le  nom  nègre.  Ainsi  déjà 
nous  sommes  exposés,  par  cette  seule  raison, 
à  faû*e  plusieurs  lieux  d'un  seul,  à  augmenter 
sans  raison  la  nomenclature  géographique.  Dans 
quelles  erreurs  aussi  doit  nous  faire  tomber 
notre  ignorance  des  langages  de  jpès  vastes  con- 
trée^ 9  et  la  signification  si  large  et  si  vague 
de  certains  mots!  Ainsi,  comme  nous  l'avons 

*  déjà  observé,  le  mot  Gulbi  bu  Joliba,  bien  loin 
d'être  le  nom  particulier  d'un,  grand  fleuve, 
parait  être  un  mot  général  pour  désigner  tout 


TROISIÈME    PARTIE.  iSg 

grand  amas  d'eau ,  soit  fleuve ,  soit  lac ,  sôit  rivière. 
Le  mot  de  Komadou  ou  Kamadogo ,  qu'on 
croyait  être  le  nom  d'une  rivière  du  Bornou  y 
s'est  trouvé  signifier  rmère  dans  le  langage  de 
ce  pays.  A  combien  de  méprises  une  significa- 
tion aussi  étendue  nepeut-elle  pas  donner  lieu? 
Selon  Yakouti  Kolla  signifie  terre  brûlée  y  et  se 
joint  peut-être  aux  noms  de  tous  les  fleuves  du 
Soudan,  Le  nom  de  Kong,  donné  à  un  pays 
montagneux,  ou  au  peuple  qui  Tfeabite,  pa- 
raît signifier  montagne  dans  la  langue  mandin- 
gue,  selon  Mungo-Park.  Birney^  qu'on  croyait 
être  le  nom  de  la  capitale  de  Bornou^  désigne 
toute  ville  ou  village  fortifié.  Timbi  ou  Tim- 
hou^  qui  entre  dans  la  composition  du  mot 
TimbouctoUy  a  probablement  ime  signification 
de  même  nature.  Peut-être  en  êst-il  ainsi  de 
Haoussa  et  de  tant  d'autres  nomis  qui  se  re- 
produisent dans  la*  géographie  dé  fAfrique. 
Lors  même  que  nous  éviterions  les  erreurs  qui 
résultent  de  cette  cause,  les  notions  qui  nous 
sont  données  ont  tï'op  peu  de  précision,  ren- 
ferment trop  peu  de  détails,  sont  trop  peu  d'ac- 
cord, et  même  souvent  trop  contradictoires 
entre  elles,  pour  qu'on  puisse  s'en  servir  pour 
dresser  une  carte.  La  mémoire  doit  les  conserver 
précieusement  en  dépôt  dans  fe  classe  des  ren- 
seignements ;  ntfâis  la  science  n'a  pa^  encore  le? 

17, 


aGo  RECHERCHES     SUR     LAFRIQUE. 

moyens  nécessaires    pour   les   employer    avec 
sûreté. 

Il  n'en  est  pas  de  même  des  itinéraires  dressés 
pour  l'usage  des  caravanes  :  non  -  seulement 
tous  les  lieux  où  l'on  passe  s'y  trouvent  nom- 
més ,  mais  ils  contiennent  en  outre  le  nombre 
d'heures  ou  de  jours  de  marche  entre  chaque 
station;  et,  comme  le  sol  du  désert  se  ressemble 
considéré  dans  une  vaste  étendue,  que  l'allure 
des  chameaux  est  uniforme,  il  en  résulte  que  la 
distance  des  lieux  entre  eux  se  trouve  en  rapport 
assez  exact  avec  le  temps  qu'on  met  à  les  par- 
courir. Ici  rien  n'est  vague ,  rien  n'est  arbitraire. 
Les  voyages  dans  le  désert  se  faisant  toujours 
selon  la  ligne  la  plus  courte,  c'est-à-dire  la 
ligne  droite,  il  devient  facile  de  déterminer 
l'intervalle  qui  sépara  chacun  de  ces  lieux,  et 
leurs  positions  relatives,  d'après  l'ordre  selon 
lequel  ils  sont  nommés;  et,  dans  ces  itinéraires, 
le  nombre  de$  journées  qui  s'y  trouvent  in- 
diquées, les  positions  et  les  distances  respec- 
tives, sont  déjà  des  connaissances  précieuses  et 
im  commencement  de  science.  Mais  ce  ne  sont 
pas  les  seules  que  les  itinéraires  peuvent  nous 
procurer  ;  en  les  combinant,  nous  pouvons,  par 
le  croisement  de  plusieurs  d'entre  eux  qui  se  cou- 
peraient en  un  même  point,  fixer  avec  certi- 
tude les  positions  de  plùsieui's  lieux  sur  la  carte , 


TROISIÈME    PARTIE.  îl6f 

et  placer  ceux  qui  dépendent  des  mêmes  itiné- 
raires avec  une  exactitude  assez  grande.  C'est 
alors  que  des  positions  bien  déterminées  nous 
permettront  de  placer  quelques^-unes  de  celles 
dont  les  voyageurs  ont  parlé ,  et  qui  flottaient 
en  quelque  sorte  sur  nos  cartes  au  gré  des  ca- 
prices ou  de  l'ignorance  des  géographes» 

A  des  rapports  incertains,  à  des  notions  con- 
fuses, à  des  fictions  hasardées,  à  des  systèmes 
sans  base,  substituons  des  combinaisons  rai- 
sonnées,  des  discussions  exactes,  et  prédises; 
alors  nous  verrons  la  géographie  de  l'Afrique 
se  perfectionner  de  jour  en  jour ,  et  les  décou- 
vertes des  géographes  hâteront  les  progrès  de 
celles  des  voyageurs:  elles  guideront  ceux-ci  dans 
leurs  marches;  elles  protégeront  les  jours  de  ces 
hommes  courageux,  et  empêcheront  qu'ils  ne 
succombent  dans  leurs  entreprises;  tandis  que 
cet  amas  de  notions  confuses,  ce  vain  luxe  d'une 
fausse  science  et  dfune  érudition  compilatrice , 
que  nos  cartes  leur  présentent,  ne  leur  servent 
à  rien  s'ils  les  apprécient  à  leur  juste  valeur ,  et 
peuvent  leur  être  funestes  s'ils  en  font  une  trop 
grande  estime. 

Lorsqu'on  sera  parvenu  ainsi ,  par  l'accord 
de  beaucoup  d'itinéraires,  ^t  de  documents  cer- 
tains, à  fixer  la  position  de  plusieurs  lieux ,  à 
tracer  les  grands  traits  de  géographie  naturelle 


26t    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

de  quelques  régions  avec  les  seules  notîcos  mo* 
dernes,  sans  le  mélange  d'aucune  supposition 
ou  1  adoption  prématurée  des  descriptions  an- 
ciennes ou  du  moyen  âge^  alors  on  pourra  com- 
parer avec  fruit  cette  géographie  toute  moderne 
avec  celle  des  Grecis,  des  Romains  ou  des  Arabes. 
Jusque-là  il  faut  s'en  abstenir,  si  Ion  ne  veut 
tout  embrouiller. 

Ce  sont  ces  considérations  qui  m'ont  engagé 
à  publier  les  trois  itinéraires  arabes  dont  j'ai 
parlé  dans  le  commencement  .de  cet  ouvrage, 
et  à  les  fair^  précéder  d'une  analyse  géo- 
graphique. 

§.  II.  Appréciation  de  la  JQurnée  de  marche 
des  caravanes  dans  les  déserts  de  V Afrique. 

Mais,  avant  de  procéder  à  l'analyse  de  nos 
itinéraires,  il  faut  nous  saisir  du  fil  qui  doit 
nous  diriger  dans  l'espace ,  ou  de  l'instrument 
qui  doit  nous  servir  à  assigner  les  positions  des 
lieux.  11  consiste  tout  entier  dans  l'appréciation 
exacte  de  la  journée  de  caravane,  qui  est  tou- 
jours l'évaluation  habituelle  donnée  dans  ces 
itinéraires.  ^ 

En  effet,  lors  même  que  les  Arabes,  dans 
ces  itinéraires,  parlent  de  milles,  ce  n'est,  en 
quelque  sorte,  qu'une  traduction,  en  d'autres 
ternjies,  de  l'évaluation  de  la  longueur  du  che- 


TBOISlilME    PA.BTIE.  l63 

mm  parcouru  dans  une  journée  ou  une  partie 
de  journée  ;  car  les  Arabes  de  TAfirique  n'ont 
jamais  mesuré  de  route  que  par  les  pas  de 
leurs  chameaux.  La  marche  uniforme  de  ces 
animaux  est  susceptible  -d'offrir  une  mesure 
assez  régulière  pour  les  combinaisons  géogra- 
phiques; c'est,  d'ailleurs,  la  seule  dont  nous 
puissions  nous  servir  :  il  faut  donc  tâcher  d'en 
fixer  la  valeur. 

Le  major  Rennell  a  senti  toute  l'importance 
de  cette  recherche;  et  il  n'a  cessé  de  faire  de 
nombreux  rapprochements  pour  en  tirer  des 
résultats  exacts.  Les  variations  de  ses  opinions 
à  cet  égard  ont  été  les  principales  causes  des 
variations  de  certaines  positions  dans  les  cartes 
de  l'Afrique  septentrionale  qu'il  a  dressées. 
Il  avait  d'abord  établi  une  différence  dans  l'éva- 
luation de  la  journée  moyenne  de  caravane, 
relativement  à  la  longueur  totale  *  du  chemin 
parcouru  ;  mais  il  a ,  depuis ,  reconnu  lui-menfie 
que  cette  distinction  ne  devait  pas  être  faite  (i  J. 
£n  effet  les  caravane»,  dans  les  longs  voyages, 

(i)  RennelVs  Prjoceedings  oftfie  Association ^  etc.,  p.  217. 
RenneU  établissait  ainsi  le  taux  moyen  de  chaque  journée  de 
caraTane  : 

Pour  le  trajet  d'un  jour , 16   i/a  \ 

Pour  le  trajet  de  17  à  Qt5  jours,  i5  >  milles  géogr. 

Pour  le  trajet  de  40  jours,  .  . . .    i3  ' 


a64         REGHEIiCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

séjournent  en  plusieurs  endroits  plus  ou  moins 
long-temps  ;  et  ces  séjours  rie  sont  pas  comptés 
dans  le  nombre  des  journées  de  marche.  Lé  plus 
long  voyage  est  donc,  en  effet,  une  suite  de 
voyages  de  moyenne  longueur. 

Mais  Rennell  distingue,  avec  raison ,  la  journée 
de  caravane  légèrement  chargée,  d'avec  celle  de  * 
la  caravane  pesamment  chargée.  C'est  dans  cette 
dernière  classe  que  sont  toutes  les  caravanes 
qui,  des  états  de  MaroCy  de  Tripoli  on  du  Fezzan, 
se  rendent  dans  le  Soudan  pour  y  transporter 
des  marchandises.  C'est  donc  de  l'évaluation  du 
taux  moyen  du  chemin  parcouru  par  les  cara- 
vanes de  ce  genre,  que  nous  devons  nous  oc- 
cuper, pour  pouvoir  faire  usage  des  distances 
données  dans  nos  itinéraires. 

Après  bien  des  combinaisons  et  des  rapproche- 
ments-,1  détaillés  dans  un  mémoire  spécial  publié  * 
sur  ce  SBJet(^),  Rennell  trouve  que  le  taux  moyen 
du  ^îhemin  fait  par  une  caravane  pesamment 
cl^àrgée,  doit  être  évalua  à  dix-huit  mille»^  an- 
glais soixante-quatre  centièmes ,  ou  seize  n>illes 
géographiques  un  sixième  ;  mais  quand,  il  est 
question  d'appliquer  ces  résultats,  tirés,  de  com- 

(i)  ^ennelj*s  Memoir  on  tke  rçte  of  travelling  as 
performéd  bjr  ca  meis  ^  in--^^,  17  pages;  P^ilosophical- 
Transactions,  vol.  LXXXI ,  p.    144. 


TROISIEME   PARTIE.  265 

parâîsons  faites  en  Asie,  à  la  géographie  de 
l'Afrique,  où  les  haltes  sont  plus  fré<|uentes  et 
plus  longues,  Rennell  pense  que  l'on  doit  ré- 
duire le  taux  moyen  du  chemin  parcouru  à 
dix-sept  milles  anglais  quatorze  centièmes,  ou  ' 
quatorze  milles  géographiques  cinq  sixièmes. 

Et  en  effet,  même  en  Asie,  dans  unp  route 
tïiXxe  jilep  el  Rackama,  Rennell  n'a  trouvé  le 
taux  moyen  du  chemin  parcouru  que  de  quinze 
milles  géographiques  un  quart  ;  et,  entre  jilep 
et  Bussorah^  seulement  de  treize  milles  géogra- 
phiques huit  dixièmes  (i}.  .     . 

Mais,  pour  le  voyage  du  Ckiire  au  Fezzan^  le 
géographe  anglais  a  trouvé  un  taux  moyen  de 
seize  un  quart ,  ou  de  seize  milles  géographiques 
et  demi  (a).  En  effet,  ces  «aravanes  sont  moins 
nombreuses  et  moins  pesamixvent  chargeurs  que 
ceDes  qui  se  rendent  dans  le  Sdùidan, ,  Cepen- 
dant on  compte  cioquante-tro;^ jour^  de  marche 
entre  le  Fezzan  et  le  Caire;  ce  qui,  comparé  à 
la  dislance  parcourue,  {»«9Eid^e  ne  donner  que 

■''        '  ..iM bw,    I  I  I  .i^^  ■iiiliii  ■■  ■ III. ■ ■■m 

(i)  RennelVs  Memoir  on  ike  rate  of  travelling  as  per- 
formed  by  camelsy  in-A**,  p.  i5,  dans  des  exemplaires  tirés  à 
pari;  et  dans  les  PhUosophical- Transactions  y  vol.  LXXXI, 
p.  144.  " 

(2)  Rennell  datis  Horneman^s  Traveh,  p.  126;  et  delà 
traduct.  franc. ,  p.  187. 


a66     RECHERCHES  SUR  LAFRIQUE. 

quatorze  milles  géographiques  et  demi  pour  taux 
moyen, 

, L'itinéraire  de  Siout  au  Dar-Four^  dans  les 
Mémoires  sur  TÉgypte,  nous  fournil  un  taux 
'  moyen  de  quinze  milles  géographiques  et  demi 
par  jour. 

Les  caravanes  de  Tripoli^  dans  le  Soudan, 
doivent  être  encore  plus"^ chargées;  et  le  taux 
moyen  doit  être  moindre  pour  ces  longs  trajets. 

I^ous  avons  nous-mêmes  essayé  un  grand 
nombre  d'itinéraires  dans  l'intérieur  de  l'Afrique; 
et  nous  nous  sommes  convaincus  que  le  taux 
moyen  d'une  journée  de  caravane  pesamment 
chargée,  qui  traverse  le  Grand-Désert,  réduite 
en  mesures  prises  en  ligne*  droite  sur  la  carte, 
devait  être  estimé  ai  quinze  milles  géographi- 
ques,  ou  cinq  grandes  lieues  marines  par  joiu*. 

Ce  taux  moy^n  doit  souffrir  des  variations 
quand  on  est  arrivé  dans  le  Soudan^  e^ntrecoopé 
par  des  montagnes  et  des  rivières  ;  mais  il  nous 
paraît  être  une  mesure  exacte  pour  les  itiné- 
raires à  travers  le  Grand-Désert,  Seulement  il 
arrive  souvent  que  les  caravanes  qui  le  traversent, 
chargées  en  partant  d'un  plus  grand  nombre  de 
marchandises,' ou  accompagnées  de  gens  qui  se 
rendent  à  des  oasis  peu  éloignées  du  point  de 
départ,  ne  sont  pas  montées  sur  des  chameaux. 


TR*OlSlèME     PARTIE.  '  267 

et  ne  pa)*courent  par  jour  que  la  moitié  du  che* 
min  d'une  caravane  ordinaire  pesamment  chargée. 
Aussi  trouvons-nous  quelquefois ,  par  cette  raison, 
dans  les  itinéraires,  des  distances  exprimées  de 
deux  manières  différentes  :  Tune  d'elles  donne 
juste,  entre  deux  lieux,  la  moitié  du  nombre 
des  journées  de  l'autre. 

Les  itinéraires  que  nous  nous  proposons 
d'analyser,  nous  fournissent  des  exemples  de 
ce  genre  :  celui  de  Hdgg*Cassem,  qui  donne 
la  route  directe  de  Tripoli  à  Timbouctouy  ne 
nous  offre  qu\me  seule  sorte  de  mesure,  qui 
est  celle  de  quinze  milles  géographiques  par 
nombre  de  journées;  mais  il  est  évident,  d'après 
la  mention  exj^esse  qui  en  est  faite  dans  ces 
itinéraires,  et  d'après  leur  comparaison  avec 
d'autres  itinéraires ,  que  l'itinéraire  de  Tripoli  à 
Cackenah^  par  le  même  cheyk  Hagg-Cassem ,  et 
celui  de  Tripoli  à  Timbouctou  par -Mohammed , 
fils  de  Foui,  présentent,  par  le-ttombt^  de  jour- 
nées ,  deux  sortes  d'évaluations  4e  distances  dif- 
férentes ,  dont  Tune^est  exactement  le  double  de 
l'autre. 

D'après  les  divers  rapprochements  faits  par  le 
major  Rennel,  il  paraît  qu'en  Afrique  la  journée 
d'une  caravane  légèrement  chargée ,  après  toute 
réduction  faite,  doit  être  évaluée  à  vingt  milles 


208     RECHERCHES  SUR  L^AFRIQUE. 

angles  quatre  dixièmes,  on  à  dix -sept  milles 
géographiques  un  tiers  (i). 

Les  caravanes  composées*  d'erhellas,  ou  de 
chevaux  de  selle,  parcourent,  dans  le  royaume 
de  Maroc  y  trente -cinq  âiilles  anglais  par  jour 
dans  de  petits  trajets  et  quand  elles  vont  vite; 
mais  leurs  journées  ordinaires  sont  de  trente 
milles  anglais,  ou  vingt-six  milles  géographiques, 
dans  les  voyages  de  long  cours.  En  retranchant 
de  ce  trajet  ce  qui  est  nécessaire  pour  la  diffé- 
rence de  la  mespre  itinéraire  d'avec  celle  que 
donnent  les  cartes,  la  joinnée  des  caravanes 
composées  d'erhellas  se  trouvera  réduite  à  en- 
viron vingt-deux  milles  géographiques  et  une 
légère  fraction  de  mille  par  jour  (a). 

Il  existe  dans  le  désert,  et  sur-tout  dans  le 
pays  des  Touariks^  des  chameaux  d'une  telle 
vitesse ,  que  quelques-uns  parcourent  en  un  seul 
jour  le  chemin  qu'un  chameau  ordinaire  ne  par- 
courrait qu'en  trois;  d'autres  font  en  un  jour 
le  chemin  de  cinq  jours  ;  d'autres  enfin  «n  font 
six,  et  il  en  est  même  qui  en  font,  dit-on,  jus- 
qu'à dix.  Mais  ces  chameaux  ne  marchent  point 

(i)  Rennell,  On  the  rate  of  travelling  €ls  performed 
bjr  cameis^  p.  i5. 

(a)  Jackson's  Jn  accoUnt  of  the  empire  of  MaroccOy 
p.  aa,  edit.  1809,  in-4®. 


TROISIÈME    PARTIE.  269 

en  carqpranes  régulières;  ils  servent  pour  les 
excursions  guerrières  ;  leur  marche  ne  peut 
être  uniforme,  et  ne  sert  jamais  de  moyen 
d'évaluation  dans  les  itinéraires  dressés  par  les 
Arabes  pour  l'usage  4ie  leurs  caravanes  mar- 
chandes. 

Procédons,  d'après  ces  données,  à  l'analyse 
géographique  de  nos  itinéraires. 

§.  III.  Analyse  géographique  àe  Vitinéraire  de 
Tripoli  de  Barbarie  à  TimhouctoUy  par  le 
Chejk  Hagg'-Cassem, 

Tripoli  de  Barbarie  est,  selon  la  connaissance 
des  temps  ,  placé  à  trente  -  deux  degrés  cin- 
quante-trois minutes  quarante  secondes  de  la« 
titude  nord. 

Quant  à  Timbouctou^  ce  qu'il  y  â  de  moins 
incertain,  c'est  la  distance  de  cette  ville  à  Silla^ 
qui  est  le  terme  du  voyage  de  Mungo-Park. 
D'après  ce  qui  a  été  dit  à  ce  voyageur^  il  y  avait 
encore  quatorze  journées  de  màrehe  par  terre, 
en  ligne  directe,  entre  Silla  ^l  Timbouctou  (r). 
Suivant  notre  mode  d'évakiâlion  pour  les  cara- 
vanes du  désert ,  les  quatorze  journées  donne- 


(i)  ^çt^neWsGeographical  illustration  to  ParÂ'.s  fournejr, 
<'hap.  IV  ;  dans  les  Proceèdings ,  etc. ,  1. 1 ,  p.  459. 


ayO  RECHERCHES    SUR    LAPRIQUE. 

raient  deux  cent  dix  milles  géographique:  mais, 
dans  un  pays  fertile  et  coupé  par  des  bois,  on 
ne  peut  supposer  que  la  route  soit  tout*à-fait 
directe;  aussi  Mungo-Park  n'estime  ces  quatorze  \^ 
journées  qu'à  deux  cent^mailles  géographiques: 
Ronnell,  sur  sa  carte,  a  adopté  cette  évalua- 
tion; peut-être  pourrait -elle  être  considérée 
comme  sujette  à  réduction.  Toutefois,  comme 
Rennell  a  combiné  les  renseignements  donnés 
à  Mungo-Park  sur  la  position  de  Timbouctou 
relativement  à  Silla^  avec  ceux  que  les  Français 
avaient  reçus  du  Fort- Saint- Joseph  ^  nous  adop- 
terons son  évaluation  sans  y  rien  changer. 

Il  reste  actuellement  à  déterminer  la  position  | 
de  Silla.  Ici  nous  sommes  obligés  d'abandonner  I 
le  major  Rennell,  dont  l'analyse  n'est  relative 
qu'au  premier  voyage  de  Mungo-Park.  Dans  ce 
premier  voyage  ,  Mungo  -  Park  n'avait  qu'un 
petit  sextant  de  poche,  avec  lequel  il  ne  put 
faire  que  quelques  observations  imparfaites  de 
latitude:  enC(H*e,  à  partir  de  J orra  y  fut -il  dé- 
pourvu de  ce  moyen ,  parce  que  ce  Sextant  lui 
fut  enlevé,  avec  d'autres  objets,  et  il  ne  put  en- 
suite estimer  la  distance  des  lieux  que  par  les 
journées  de  marche  (i). 

(i)  Proceedings    of  the   association  for  promoting  the 


TROISIÈME    PA.RTIE.  SfJ  I 

A  son  second  voyage,  au  contraire,  devenu 
plus  habile  par  la  pratique  dans  l'art  de  faire 
des  observations  pour  la  détermination  des  la- 
titudes et  des  longitudes,  il  était,  en  outre, 
pourvu  d'un  bon  télescope,  d'une  excellente 
montre  marine  et  d'autres  instruments.  11  a  donc 
pu  déterminer  sa  route,  et  la  position  des  lieux 
qui  s'y  trouvaient,  avec  plus  de  précision.  11  a 
enfin,  cette  fois,  poussé  ses  observations  beau- 
coup plus  loin  vers  l'est,  et  jusqu'à  Samiy  près 
de  Sego.  C'est  donc  de  ce  second  voyage  que 
nous  devons  nous  servir. pour  déterminer  les 
positions  des  lieux  qui  conduisent  à  TimbouctQu 
d'occident  en  orient. 

Nous  allons  résumer  l'itinéraire  de  Mungo- 
Park  en  faisant  mention  des  lieux  où  il  a  fait  des 
observations:  nous  indiquerons  en  même  temps 
leurs  distances  en  journées  de  route  ;  parce  que 
c'est  au  moyen  de  ces  deux  éléments  que  nous 
sommes  parvenus  à  dresser  notre  carte. 

dUcoverj  in  thé  interior  of  Africa,  U  I,  p.  452.  — 
Foyages  dans  î intérieur  de  V Afrique  y.  |iar.  Mnngo-Park  > 
t.  I ,  p.  aog.  "<—  Rennell  remarque  avec  raison  qae  Jarra 
ou  Yarra  se  trouvait  marqué  sur  la  carte  de  Delisle ,  tandis 
que  d'AnvilIe  l'avait  omis  :  nouvelle  preuve  à  ajouter  à 
celles  que  nous  ayons  dëjà  données  que  Delisle  avait  reçu 
sur  l'intérieur  de  l'Afrique  des  renseignement»  que  d*An- 
ville  n'a  point  connus. 


^7^                    RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

• 

NOMS 

DIS     LIKUX. 

2:1 

K   m 

LATITUDE 

voao 
de  r^qaateur. 

LOKGITUDB 

k  l'ouest  de 

de  Paris. 

OBSBRVATIOVS. 

Kayi(i) 

' 

Faraba  (a) 

ï4 

14°  38' 46" 

Mandjalli  (3).... 

I 

« 

i3°  9'  45" 

Nerica    et     Jala- 

colta  (3) 

% 

lA""  4'  5i" 

Tambico  (4).... 
Southaba  (5).... 

•  5 

13*»  53' 
13^33' 33" 

• 

Ce  liea  dépend  de 

miQe  de  Tamiieo  eil 
une  arsses  grande  ville 
nommëe  Sud/. 

Soutinimma  à  Bee- 

crée  A ,  fFatering- 
P/ace(6) 

Badou  (7). ...... 

Mambari  (8) 

I 
2 
2 

i3*»32'45" 
i3°32' 

l3°22'40" 

i3°  19' 

r       C'est  dana  une  val- 
lée un  peu  à  l'ouest  de  | 
«ette  Tille  «jne Mungo- 
Park  a  TU  le  premier 
jc/i««  on  arbre  à  beurre.  ' 
La  rivière  Camiie  est  ' 
k  4  milles  au  sud  de  | 

Julifunda  (9).... 
Finkia  (10) 

I 
7 

i3°33' 

l3**22'30" 

i  Badou.                           1 

Ici    Muogo.Par<c 
quitta  l'ancienne  route  . 
qu'il  avait  parconme 
dans  son  i**"  voyage. 

37 

(1)  Mango-Park^s  Journal  of  a  Mission  to  ihe  interior  of  Africa  in  the 

year  i8o5,  în-4%  London,  i8i5,  p.   1.  Je  remarque  dans   ce  journal 

'  une  inadTertance  qui    a  échappé   à   l'auteur    et    aox  éditeurs  ;  il  7  « 

(p.    7  )  un  récit   de   ce   qoe  Mungo-Park    a  fait  le    3 1   avril  :  le  mois 

d'avril  u*a  que  3o  jours.  — (2)  /rf. ,  p.  «r.  —  (3)  /<^.,  p.  a3.  —  (4)^^» 

p.  33.  —  (5)  Id, ,  p.  35.  —  (6)  Id. ,  p.  39,  —  (7)  Id, ,  p.  41.  D«  ^«'^« 

il  n*j  a  que  trois  jours  de  marche  à  Lahy  ou  Lahé  dans  le  Fouta^Djalion; 

et  quelqu'un  de  la  suite  de  Mungo-Park  s'y  rendit  pour  acheter  des 

esclaves. —  (8)  Id. ,  p.  43.  —(9)  Id.,  p.  47.  — (10)  le/,,  p.  65. 

■H^MBi 

: 

' 

TROISIÈME     PARTIE.                                   27^ 

• 

LATITUDE 

2.0AG1TUDE 

il 

NOMS 

à  Ton  est  de 

S  «  2 

HOAD 

OBSERVATIONS. 

DES     LIEUX. 

0^*^ 

^S 

de  l'équateur. 

de    Paris. 

Report. . . 

37 

Fadjemmia  (ii). . 

4 

iS^SS' 

Secoba(ia) 

6 

li^ifie' 

Konkromo  (i3). . 

!1 

« 

10°  7i6*           f     AunejournéedemM- 
che  à  l'e«t  de  Sabou- 

Sabousira,auMal- 

1    «ira  est  Kimimoum  011 

Iabon(i4) 

9 

i3^5(f 

Maniakqrro,  viJle  for- 
tiJiëe ,  rntonr^e  d'une 
triple  muraille  et  d'un 

Passage  de  la  ri- 

\   fossé.  Voy.  p«g.  gS. 

vière  Ba-  Wou" 

lima  ^i5). . .  .  .  . 

7 

14**  i' 

7^   0'  33" 

Tombeau  de  Povvfl/ 

3fa/7na    «-st    i     six     1 

entlife  Marina  et 

■ , 

qaiUes     à    l'ouest    de    1 
Bengassi.                         | 

Bengassi{i%).., 

3 

14^ 

Toute  la  route,  de- 
puis Bengaisi  jusqu'i 

Séjonrdanslesbois 

' 

ce  lieu  ,  est    couverte 
de  villages  ruinés. 

entre  Koulihourrt 

A  partir  de  Kotani- 
Koumi ,  Mungo  -  Park 

Hranifarm(iy) 

10 

14^41' 

arriva  ,    après    quatre 
jours   de    marche,   à 

Koumi-Koumi(i8) 

6 

i3^i6'i9" 

Doumbila   ;     il     vint 
ensuite  à  Totsita^  où 

Marrabou(i9).  •• 

7 

12*^48' 

l'on  voir  le  Niger,  que 
l'on  joint  le  jour  d'en- 

Koulikorro(ao).. 

I 

I2<*52' 

- 

A  Bambakou  Mungo- 

Yamina  (ai) 

2 

i3*^  i5' 

Park   s'embarqua  ,  et 
voyagea  par  eau. 

Sami  (ai) 

Sansanding  n'est  qu'4 

I 

i3^  17' 

tirie  journée  de  navi- 

Total  .. 

i< 

gation  de  Sami. 

95 

(il) /^,  p.  6s 

..-(" 

)  /rf.,p.   76.  — (i3)  Af.,  p.    77. —  (14)  A/., 

P.ga.  — (i5)/^. 

4  p.  107. 

—  (i6)/<f.  ,  p.  ir5,  —  (17)  Id.y  p.  ifta.  — 

(i8)  Id.,  p.   i36. 

-(•9) 

/^.,  p.  145.  — (20)  Id.,  p.  lis.— '(ai)  M, 

p.  149.  —  (aa) 

W.  ,  p. 

i5o.                                                                           1 

^74  RECHERCHES     St^R    l'aPRIQUE. 

Après  Sami^  où  les  observations  astronomiques 
se  terminent  (i),  le  journal  du  second  voyage  de 
Mungo-Park,  qu'il  n'a  pu  revoir,  devient  in- 
cohérent et  obscur  ;  et  il  convient  de  se  servir 
dû  premier  voyage,  et  de  l'analyse  que  le  major 
Rennell  a  faite  des  documents  qu'on  y  puise. 
C'est  d'après  cette  analyse  que  nous  détermi- 
nons les  distances  de  Sami  à  Sego  et  de  Sego 
à  Silla,  et  la  distance  de  Timbouctou  à  Silla^ 
évaluée  par  le  major  Rennell  ,  et  par  nous, 
à  deux  cents  milles  géographiques,  en  ligne 
droite ,  comme  celle  de  Sami  à  Timbouctou 
l'est  à  deux  cent  quatre-vingt-cinq  mîltes. 
Mais  cette  ligne  de  distance  ne  peut  nous 
donner  seule  la  position  de  Timbouctou;  elle 
ne  peut  être  fixée  que  par  l'intersection  d'une 
ou  de  plusieurs  autres  lignes  dont  la  longueur 
nous  sera  donnée  par  les  itinéraires  qui  partent 
du  nord  et  nous  conduisent  dans  celte  capitale 


(i)  Mungo-r'ark  (p.  64)  fit  bien  encore  quelques  obser- 
vations, à  Sansandingy  pour  vérifier  la  bonté  de  ses  instru- 
ments \  mais  il  n'a  donné  que  celles  qui  concernent  la  va- 
riation de  Taigaille  aiâiantée,  et  il  n'a  marqué  ni  latitude  , 
ni  longitude.  II  a  été  fait  une  traduction  française  de  ce 
second  voyage  de  Mnngo-Park,  in-8**,  Paris*,  1820.  On  a 
retranché ,  comme  inutiles ,  toutes  les  observations  astrono- 
miques; c'est-à-dire  tout  ce  qu'il  y  avait  de  plus  important 
dans  le  livre. 


An  Soudan.  C'est  donc  de  l'exactitude  de  l'ana* 
lyse  de  ces^  itinéraires,  à  laquelle  nous  allons 
nous  livrer,  que  dépend  celle  de  la  détermi- 
nation de  la  latitude  et  de  la  longitude  de 
Timbouctou. 

L'itinéraire  de  Tripoli  à  Timbouctou ,  rédigé 
par  le  cbeyk  Hagg-Cassem ,  nous  donne  quatre- 
vingt-deux  journées  de  caravane  entre  Tripoli 
de  Barbarie ,  dont  la  position  est  connue ,  et 
Timbouctou  ;  ce  qui ,  d'après  notre  évaluation , 
fournit  une  distance  de  vingt  degrés  trente  mi- 
nutes, ou  douze  cent  trente  milles  géographiques. 
Si  la  route  était  en  ligne  droite ,  la  position  de 
Timbouctou  se  trouverait  de  stiite  déterminée 
par  l'intersection  des  deux  distances  données 
à  partir  de  Tripoli  et  de  Silla. 

Dans  l'évaluation  que  nous  avons  faite  de  la 
journée  de  caravane  pesamtftent  chargée ,  bous 
avons  pris  en  coifipensation  les  retards  occa- 
sionnés par  les  détours ,  les  difficultés  du  che- 
min et  les  haltes  ;  de  sorte  qu'il  semble  que 
nous  pourrions  évaluer,  en  ligne  droite»  la  dis- 
tance de  Tripoli  à  Timbouctou,  dont  nr)us  ve- 
nons de  parler,  sans  risquer  de  commettre  une 
erreur  bien  forte.  Mais,  si  les  caravanes  tendent 
vers  Timbouctou ,  qui  est  le  point  extrême ,  elles 
n'y  tendent  pas  en  ligne  droite.  Il  est  des  lieux 
où  elles  se  dirigent  auparavant  pour  les  affaires 

18. 


276  RECHERCHES    SUR    r'ilFRIQUEr 

de  leur  commerce;  et  ces  lieux  peuvent  être 
plus  ou  moins  détournés  de  la  route  directe  du 
point  extrême  qui  est  le  terme  de  la  caravane , 
et  faire  changer  plusieurs  fois  les  directions 
partielles- de  la  route  que  parcourt  la  caravane 
avant  d'arriver  au  terme  de  son  voyage.  Ce  sont 
donc  ces  directions  partielles  qu  il  faut  d'abord 
connaître ,  afin  de  déterminer  de  quelle  manière 
elles  influent  sur  la  distance  totale  en  ligne 
droite,  qu'elles  doivent  nécessairement  dimi- 
nuer. 

^otre  itinéraire  nous  conduit  d'abord  de 
Tripoli  k  Gadamès,  et  compte  treize  jour- 
nées de  distance  dans  cet  intervalle.  Le  major 
Rennell  (i) ,  d'après  les  informations  de  M.  Magra, 
consul  anglais,  place  Gadamès  à  vingt- trois 
journées  de  distance  de  Tunis;  et  il  compte 
aussi  Ui  journée  de  caravane  à  raison  de  quinze 
milles  géographiques.  La  combinaison  de  ces 
deux  distances  laisse  Gadamès  à -peu -près  à 
l'endroit  où  Rennell  la  placé ,  c'est  -  à  -  dire  à 
trente  degrés  trente -six  minutes  de  latitude 
nord,  et  à  huit  degrés  cinq  minutes  de  lon- 
gitude à  l'orient  de  Paris.  Cet  accord  doit  nous 


(i)  Rennell,  ProceeiUngs  of  the  association  for  promoting 
tke  dLscoveries  in  the  inttrior  parts  of  Jfrica  ,  1. 1,  p.  290 , 
et  tome  II,  p.  'kS^, 


TROISIÈMS   PARTIE.  ÎI77 

donner  quelque  confiance  dans  l'exactitude  de 
notre  itinéraire  et  dans  l'évaluation  que  nous 
avons  faite  de  la  journée  de  caravane;  il  assure 
les  positions  assignées  aux  distances  intermé- 
diaires. Ce  résultat  fait  d'autant  plus  d'honneur 
au  géographe  anglais,  qu'il  dit  lui-même  que  la 
position  de  Gadamès  doit  rester  incertaine 
jusqu'à  ce  que  l'on  connaisse  la  distance  de  ce 
lieu  avec  TripolL  Notre  itinéraire  nous  donne 
cette  distance,  et  elle  confirme  la  position  qu'il 
avait  assignée  (ij. 

Le  cheyk  Hagg-Casscm  ,  qui  a  dressé  notre 
itinéraire ,  donne  une  longue  et  intéressante 
description  de  Gadamès.  Il  nous  apprend  que 
cette  oasis  s'est  soustraite  à  l'obéissance  de  la 
régence  de  Tunis,  pour  tomber  sous  le  joug 
plus  dur  encore  de  Tripoli.  Du  temps  de  Léon 
l'Alncain  (a),  au  commencement  du  seizième 
siècle ,  ce  lieu  dépendait  de  Tunis.  A  cette  époque 
cette  ville  était  devenue  riche  par  son  commerce 

(i)  Je  veux  dire  dans  ses  dernières  cartes  dressées  en 
1798  et  en  iHoi;  car,  dans  celle  de  \'j^o,  Gadamès  est 
mal  placé. 

(ta)  Léon  TAfricain,  dans  Ramusio,  t.  I,  76  c.  Léon  dit 
que  Gddamès  est  à  trois  cents  milles  de  distance  de  la  côte. 
Il  doit  être  ici  question  d'un  petit  mille  des  Acabes  dont  il 
est  fait  mention  dans  Abaténie.  Voyez  d'Anville,  Mesures 
itinéraires  y  p.   61. 


278  RECH3:iRCHES~  StJI^    l'aFRIQUE. 

avee  le  Soudan  ou  le  pays  des  lAègres.  Du 
temps  de  Marmol,  Codâmes  s'alliait  souvent  aux 
Arabes  du  Désert  pour  se  soustraire  au  tribut 
imposé  par  les  Turcs  (i).  Aboul-Féda  fait  aussi 
mention  de  Gadamès  comme  d'un  lieu  célèbre 
par  le  commerce  de  la  Nigritie;  il  vante  beau^v 
coup  l'architecture  de  la  fontaine  qui  se  trouve 
au  milieu  de  la  ville ,  et  dit  que  c'est  un  mo- 
nument des  Romains  (2)» 

Après  vingt -quatre  jours  de  marche,  en 
partant  de  Gadamès ^  et  trente- sept,  en  par- 
tant de  Tripoli^  notre  itinéraire  nous  conduit 
dans  un  lieu  nommé  Agably,  indiqué-  comme 
la  capitale  d'un  grand  pays  nommé  ToiuU, 
qui  relève  de  l'empire  de  Maroc, 

Lemprière  dit  que  Touat  est  à  trente  journées 
de  Tafilet(y)\  mais  la  position  de  Tafilety  elle- 
même,  a  besoin  d'être  discutée;  car  nous  n'avons 
rien  de  certain  ni  de  déterminé  sur  la  position 
des  lieux,  ni  même  sur  le  cours  des  rivières  des 
contrées  situées  au  sud  de  \ Atlas. 

(1)  Marmol,  liv,  vu,  chap.  lix,  t,  III/p»  39  de  latrad. 
française. 

(1)  Abulféda,  Géogr. ,  dans  Biisching,  Magatin^  IV  Th., 
p.  ai  I  ;  et  Brun's  Afrika  ,  tome  VI,  p.  33o.  -^  Saàdifilitts, 
dans  Hartman's  Édrisi,  p.  i35. 

(3)  W.  Lemprière ,  A  tour  from  Gibraltar  io  Tangier , 
Satlee,  Mogodore,  etc.,  «-8^  i8i3,  a*c'dit.,  p.  355. 


TROISIÈME   PARTIE.  279 

M.  Jack^n  lious  dit  que  Tafilet  est  à  huit  jour- 
nées des  Ruines  de  Pharaon^  près  de  Mequinez, 
lorsqu'on  voyage  avec  des  erhellas  ;  et  nous  avons 
vu  plus  haut  que  les  journées  d'erhçUas  doivent 
être  évaluées  à  un  peu  pins  de  vingt-deux  milles 
géographiques;  ce  qui  donne  cent  quatre-vingts 
milles  géographiques  entre  les  Ruines  dites  de 
Pharaon,  près  de  MequineZj  et  JVj/f/e^, Pour  se 
rendre  des  Ruines  de  Pharaon  (i)  à  Tafilet, 
M.  Jackson  dit  qu  on  se  dirige  d'abord  à  Test  de 
ces  ruines;  qu'on  gravit  ensuite  le  VEiOxA  Atlas;  et 
qbe  le  troisième  jour  y  au  coucher  du  soleil ,  on 
atteint  la  plaipe  qui  est  de  l'autre  côté  de  cette 
montagne ,  plaine  stérile  dont  le  sol  se  compose 
d'une  craie  blanchâtre  qui,  lorsqu'elle  est  mouillée 
par  la  pluie,  ressemble  à  du  savon.  Une  rivière 
qui  prend  sa  source  dans  la  chaîne  de  \ Atlas, 
arrose  cette  vaste  plaine ,  et  coule  du  nord-ouest 
au  sud-est  (2).  Cette  rivière  est  aussi  large  que  la 
Morbeya  à  Azamor,  et  que  la  Tamise  à  Putney. 
Ses  eaux  ont  un  goût  saymàtre,  parce  qu'elles  tra- 
versent des  plaines  salées.  Son  cours  est  de  quinze 

■  I  I  '  I  <  <       I  II       ■■    ■■!  1^     .1  r  I     ■■»    mpwi       ■  ■  _■ 

(1)  il  7  a  un  dessin  de  ces  ruines  dans  Windhus ,  Journey 
to  Mequinezj  p.  88. 

(a)  M.  Jacksoa  {Account  of  Marocco^  édit  in-4**,  1809, 
p.  ^2)  dît  que  cette  rivière  c<»ule  du  sud-ouest  au  nord- 
est  ,  ce  qui  ne  p^ut  être.  C'est  probablement  une  faute  de 
copiste  ou  d'imprimeur. 


u8o  RKCriERCHKS    SUR    l'aFRIQUE. 

journéesd'erhellas  ou  de  trois  cent  soixïmte  milles 
géographiques.  M.  Jackson,  dans  sa  carte,  place 
Tajfilet  beaucoup  trop  près  des  Ruines  de  Pha- 
^a0n  ,  d  après  la  distance  qu'il  indique  dans 
son  texte.  Ces  contradictions  ne  doivent  pas 
nous  surprendre.  Ce  sont  les  habitants  du  pays, 
bien  instruits ,  qui  ont  fourni  à  M.  Jackson  les 
matériaux  de  ses  descriptions  ;  mais  ce  ne  sont 
pas  eux  qui  bnt  dressé  sa  carte. 

Nous  avons,  heureusement,  un  itinéraire  de 
Fez  à  Tafiletj  écrit,  en  1787,  par  Achmet- 
Ibn-Hassan ,  qui  jette  un  grand  jour  sur  la  géo- 
graphie de  cette  contrée.  U  a  été  traduit  d'arabe 
en  latin  par  M.  Panlus,  professeur  des  langues 
orientales  à  l'université  d'Iéna.  Nous  l'avons  tra- 
duit du  latin  en  français  pour  le  joindre  aux  iti- 
néraires de  Tripoli  à  Timbouctou  et  à  Cachenah. 
La  géographie  des  pays  peu  connus  ferait  plus 
de  progrès  réels  par  la  publication  d'un  seul 
volume  qui  réunirait  tous  les  itinéraires,  que 
par  des  centaines  de  voyages  qui  ne  renferment 
que  de  l<iM^e.$  et  vagues  descriptions. 

L'itinératfm  d'Achmet  nous  fait  compter  onze 
jours  dé  marche  de  Fez  à  Tàfilet{i),  Achmet 
marchait  avec  une  caravane,  mais  une  caravane 
légèrement  chargée,  comme  elle^  le  sont  toutes 

(i)  Paulus,   Memorabilien  ^  .1^  stuck  ,  p.  47-53. 


tboisièmï:  partie.  a8i 

pour  un  aussi  court  trajet.  La  journée  doit  donc 
être  évaluée  sur  la  carte  ^  et  après  toute  réduction 
faite ,  à  vingt  milles  anglais  un  quart ,  ou  à  dix- 
sept  milles  géographiques  un  tiers.  Il  en  résulte 
que  la  distance  de  Fez  à  Tafilety  selon  l'itiné- 
raire d'Achmet,  est  d'environ  cent  quatre-vingt- 
onze  milles  géographiques  ;  et ,  comme  la  route 
se  dirige  d'abord  à  l'est,  et  que  les  Ruines  de 
Pharaon  sont,  sur  la  carte  de  M.  Jackson  (i), 
placées  au  nord -est  de  Fez,  on  trouve,  rela- 
tivement à  la  distance  de  ces  deux  lieux  avec 
Tafilety  une  différence  d'environ  douze  à  quinze 
milles.  Ainsi  donc  les  renseignements  qu'a  ob- 
tenus M.  Jackson,  s^accordent  avec  ceux  de 
l'itinéraire  d'Achmet  relativement  à  la  position 
de  Tafilet. 

En  adoptant  la  position  de  Fez,  déterminée 
par  les  observations  d'Ali-Bey  à  trente -quatre 
degrés  six  minutes  de  latitude  et  à  Sjept  degrés 

(i)  La  route  qu'a  parcourue  M.  Jackson  passe  parles  Ruines 
de  Pharaon,  par  Fez  et  par  Mequinez  ;  sa  carte  mérite  donc 
attention,  relativement  à  la  position  de  ce^, lieux.  Cepen- 
dant il  ne  s'accorde  pas  avec  Ali-Bey  :  il  place  Fez  au  sud- 
est  de  Mequinez,  et  Ali-Bey  le  met  directehient  à  Test.  La 
route  d'Ali-Bey  ne  passe  pas  par  les  Ruines  de  Pharaon , 
et  il  ne  les  a  pas  placées  sur  sa  carte.  Jackson  place  ces 
Ruines  de  Pharaon  à  ai  milles  géographiques  à  l'ett  de 
Mequine'zy  et  à  ao  au  nord-est  de  Fez. 


9l8^         RECHERCHSS    SUR    l'àFRIQUE. 

dix-huit  minutes  de  longitude  à  l'ouest  de  Paris; 
et ,  en  plaçant  les  Ruines  de  Pharaon  à  vingt 
minutes  au  nord  et  à  dix  minutes  à  l'est  de  Fez^ 
conformément  à  la  carte  de  M.  Jackson,  les  deux 
distances  qui  nous  sont  données  pour  Tafilet 
placent  ce  lieu  à  trente  degrés  dix  minutes  de 
latitude  nord  et  à  quatre  degrés  cinquante-cinq 
minutes  de  longitude  à  l'ouest  de  Paris  :  mais 
alors  Tafilet  ne  se  trouve  plus  siu*  les  bords  de 
la  rivière  qui  porte  son  nom  sur  la  carte  de 
M.  d'Anville  et  sur  celles  de  tous  les  autres  géo- 
graphes, mais  sur  la  rivière  que  d'Anville  nomme 
Ziz,  sur  les  bords  de  laquelle  on  place,  d'après 
lui,  Sidjilmessa^  et  qui,  sur  toutes  les  cartes^ 
couk  dans  une  vallée  différente  de  celle  de 
Tafilet.  Il  est  certain ,  d'après  l'itinéraire  d'Ach*- 
met-Hassan,  que  la  ville  de  Tafilet  est  sur  le 
fleuve  Zizy  qui  porte  aussi  le  nom  de  Tafilet. 
Aehmet- Hassan  le  dit  en  deux  endroits  diffé- 
rents (i).  Ainsi  les  résultats  des  mesures  sont 
confirmés  par  le  récit  du  voyageur  arabe.  On 


(i)  Achmet-Hassan,  dans  Paalus,  MemorabiUen^  a*  sluck, 
p.  5i  :  Dividit  hos  pagos fluvius  Ziz  qui  est  T^fileti^  et  cum 
illo  continuavimus  viam  usque  eui  oppida  Tsalalin;  et  p.  53-: 
Exinde  transacto  flumine  Ziz  inter  complura  palmù  abun- 
damia  pf^pida  ad  mansipnem  régis  no^tri  victoriosi  perve- 
ni/nus. 


TROISIÈME   PA-RTIE.  a83 

ne  peut  supposer  ici  d'erreur  ni  de  double 
emploi  d'un  même  nom  :  le  Ziz  de  notre  itiné- 
raire est  bien  le  même  que  celui  que  d'Anvillc 
a  voulu  tracer  comme  fleuve  de  Sidjilmessa, 
distinct  de  celui  de  Tafilet^  puisqu'au  sixième 
jour  de  marche  Achmet-Hassan  passe  par  Gers^ 
qu'il  dit  être  placé  sur  le  Ziz;  et  au  dixième 
jour  il  passe  par  Betzeb,  situé  aussi  sur  le  Ziz. 
Ôr,  ces  deux  positions  se  trouvent  précisément, 
sur  la  carte  de  d'Anville ,  placées  sur  le  fleuve 
Zizj  dans  la  vallée  de  Sidjilmessa  :  donc  cette 
vallée  ne  doit  pas  être  distinguée  de  celle  de 
TafUet^  ainsi  qu'il  l'établit  sur  sa  carte  (i). 

M.  Jackson,  dans  sa  carte,  ne  distingue  pas  la 
vallée  de  Tafilet  de  celle  de  Sidjilmessa;  mais 
il  place  un  pays,  qu'il  nomme  Sidjin-Messa y  au 
sud-est  de  Tafilet,  et  dans  la  partie  inconnue 
du  Désert  :  nous  croyons  cette  position  erronée. 

Il  est  évident  que  d'Anville  a  tracé  son  fleuve 
Ziz  d'après  la  description  de  Léon  l'Africain, 
qui  met  aussi  sur  les  bords  de  ce  fleuve  la  ville 


(i)  Achmet-Hassan,  dans  Paulus,  MemorabiUen ,  p.  5i  : 
Ad  aliquos  pagos pervenimus  Gers  compellatos*.»,  dividU 
bos  pagos  fluvius  Ziz  y  qui  est  fluvius  Tafileti  \  et  ensuite 
à  la  page  $2  :  post  hune  fluvium  memoratum  Ziz  ,  propè 
illum  inier  palmas,  hortos ,  progredientes  intrayinms  in  re^ 
glionem  Relsebp 


284  RECHEBCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

de  Reteb  (i),  le  iîe(5e^  d'Achmct-Hassan.  Léon 
nous  dit  encore  qu'après  Reteb,  le  Ziz  entre 
dans  le  territoire  de  SidjUmessa. 

Mais  Édrisi  (2),  Ibn-el-Ouardi  (3),  Aboul- 
Feda  (4),  Ibn-Batouta  (5),  Léon  l'Africain  (6), 
font  tous  mention  de  Sidjilmessa  comme  de  la 
ville  d'où  l'on  se  rendait  dans  le  Soudan;  et 
aucun  de  ces  auteurs  n'a  connu  Tafilet^  qui  est, 
au  contraire,  la  seule  ville  dont  les  modernes  nous 
parlent.  Marmol  nous  apprend,  en  effet,  que 
Sidjilmessa  fut  ruinée  sous  le  rèjgne  de  Benimen- 
mis  y  et  que  les  habitants  se  retirèrent  dans  les 
châteaux  voisins  (7).  Il  parait  que  Tafilet,  dont 
il  n'est  point  Sxit  mention  lorsque  Sidjilmessa 
était  florissante,  a  remplacé  cette  ville  détruite. 
Chénier(8)  dit  que  Tafilet  et  Sidjilmessa  sont 
dans  le  même  territoire,  et  que  ce  n'est  que 
sous  les  chérifs  de  la  maison  régnante  que  ce 
pays  a  pris  le  nom  de  Tafilet 

(i)  Léon  r Africain  dansRamusio,p.  90, 78  e,f, et  74  «,  h. 
(a)  liartmann's  Ediisi,  p.  34,  35,  1^3,  i3oy  i45,  i49- 

(3)  Ibn-el-Ouardi ,  cité  par  Hartmann  dans  son  édition 
à*Edrisï\  p.  45-5o. 

(4)  Abulfeda  dans  Biisching ,  Magasin ,  IV  Th.  p.  209. 

(5)  Ibn-Batouta  dans  Kosegarten ,  p.  49- 

(6)  Léon  l'Africain  dans  Ramusio,  t.  I,  p.  73  /I 

(7)  Marmol,  Description  de  VJ/fique,  t.  III,  p.  20. 

(8)  Ciiénier,  Recherches  sur  les  Maures,  t.  III,  p.  79* 


TROISIÈME    PARTIE.  !l85 

Il   nous  est   facile   de  prouver  que  la  ville 
de  Tajilet  a  la  même  position  que  Fancienne 
Sidjilmessa  ^  ou    en    est    peu    éloignée.    Léon 
TAfricain,  qui  place  Sidjilmessa  sur  le  ZiZy  dit 
que  son  territoire  s'étend  le  long  de  ce  fleuve 
à  vingt   milles    de    distance  ;  il    nomme   trois 
châteaux  qui  s  y  trouvent  :  dans   ce  nombre , 
celui   qu'il  appelle  Mamoun  esl^  un   des   plus 
grands    et    des    plus   forts;   et,    précisément, 
Aclimet-Ibn- Hassan   fait  mention,  dans  son 
itinéraire,  du  château  de  Mamoun  sur  le  ZiZy 
comme  très-grand  et  très-fort ,  en  nous  appre- 
nant qu'il  n'est  qu'à   une  journée  de  marche 
de  Tajilet (i).  Enfin  Léon  l'Afrieain  et  Marmol 
ne  font  mention  que  de  trois  fleuves  dans  cette 
partie  de  l'Afrique,  savoir  :  le  Darah,  le  Ziz  et 
le  Ghir  {*i).  Aucun  d'eux  n'indique  de  fleuve 
partieulier  pour  Sidjilmessa.  Il  nous  paraît  donc 
démontré  que  d'Anville  a  eu  tort  de  placer  dans 
'  deux  vallées  distinctes ,  arrosées  par  deux  fleuves 
différents ,  Tajilet  et  Sidjilmessa,  Cette  dernière 
ville,  si  elle  existe  encore,  ne  peut  être  éloignée 


(  I  )  Achme  t  -  Ibn  -  Hassan  dans  Paul  us  ,  Mem'orabilien  , 
p.   53. 

(îi)  Léon  TAfricain  dans  Ramiuio\  t.  I,  p.  90  ,e,  — 
Marmol)  liv.  I,  ch.  xu. 


a86r  RECHERCHES    STTR    l'àFRIQITE. 

'de  Tafilet  L'Arabe  Ibn-Batouta,  dans  le  qua- 
torzième siècle ,  s'est  rendu  de  Tewat  ou  Touat 
à  Sidjilmessa  (i)  :  de  même  aujourd'hui  les  ca- 
ravanes se  rendent  de  Tafilet  à  Touat  (  2  )  ;  et 
Tafilet  paraît  ainsi  avoir  remplacé  en  tottt 
Sidjilmessa. 

La  position  de  Tafilet  se  trouvant  déterminée 
exactement  par  les  recherches  précédentes,  si 
maintenant  nous  combinons  les  trente  journées 
de  caravane  ou  quatre  cent- cinquante  milles 
de  distance  entre  Tafilet  et  Touat  y  qui  nous 
sont  donnés  par  Lemprière,  et  les  vingt-qtiatre 
journées  de  marche  ou  trois  cent-soixante  milles 
géographiques  de  distance  que  nous  donne  notre 
itinéraire  entre  Gadamès  et  Agably^  qui  est  la 
capitale  du  Touat  ^  nous  déterminerons  la  po- 
sition de  cette  dernière  ville ,  et  aussi  la  direc- 
tion de  la  route  que  parcourent  tes  caravanes 
qui  se  rendent  de  Gadamès  à  Timbotictou,  Par 
ces  recherches,  la  position  iSAgably  se  trouve 
fixée  à  vingt-six  degrés  quaf  ante*quatre  minutes 
de  latitude  nord,  et  à  trois  degrés  douze  minutes 
de  longitude  à  l'orient  de  Paris.  Ce  lieu  se 
trouve  ainsi  remonté  de  trois  degrés  plus  au 
nord,  et  est  placé  plus  à  l'ouest  que  sur  les  cartes 

(i)  Ifen-Ratouta  dans  Kopegarten^  p.  49. 

(a)  Voyez  Grey  Jackson,  Account  of  Marocco^  p.  a3. 


TROISIÈME   PARTIE.  !;i87 

de  Rennell,  d'Arrowsmith  et  sur  toutes  celles 
qui  ont  suivi. 

Léon  l'Africain  (i)  dit  que  Hair^  à  l'ouest , 
confine  à  Touai;  Marmol  (a),  que  Touat  est 
au  nord  A' Haïr  :  donc  Haïr  doit  être  placé  au 
sud -est  de  Touat;  et  il  est  placé  au  nord- ouest 
sur  la  carte  de  Rennell.  Notre  itinéraire  et  les 
combinaisons  qui  l'appuient,  en  mettant  Agahly 
sur  un  parallèle  plus»  élevé  que  le  désert  à^Haïr, 
se  trouvent  d'accord  avec  les  deux  grandes  auto- 
rités afîricaities. 

Ibn-Batouta  nous  dit  que  la  principale  ville 
du  pays  des  Touats  se  normiiftit  Bouda.  Il  est 
probable  que  c'est  le  même  lieu  K3^Agabljr^  que 
notre  itinéraire  nous  dit  être  k  capitale  d^ 
Touaty  et  avoir  été  bâtie  par  un  mahométan 
nommé  Bouna^Amehi^,  Sidi-Hamet,  dans  le 
récit  qu'il  fait  à  M.  Riley,  parle  de  Touatiy  où 
il  passa  en  revenant  de  TimhoUctou^  et  où  il 
séjourna  deux  jours  (4). 

(i)  Léon  l'Africain  dans  Ramusio^  t.  I ,  p.  76  ,  f. 
(a)  Marmol,  t.  III,  liv.  vm,  ch.  vi,  p.  5o. 

(3)  Ibn-Batouta  dans  Koàegarteny  p.  49.  Peut-être, 
d'après  ce  rapprodiement ,  doit-on  lire  Bouna  dans  Ibn- 
Batouta  ,  ou  Bouda  -  Âmeh  dans  l'itinéraire  de  Hagg- 
Cassem. 

(4)  Riley 's  Loss  of  the  American  Brig  Commercé^ 
p.  387. 


288  KEGHERCHES    SUR    l'àFRIQUE. 

Nous  avons  remarqué  précédemment  que 
M.  Einsiedel,  dans  les  renseignements  qu'il  a 
recueillis  à  Tunis  en  1785,  a  entendu  parler 
SÉkabli;  mais,  comme  les  informations  obte- 
nues par  lui  plaçaient  ce  lieu  dans  la  direction 
de  Cachenahy  et  qu'il  avait  au  sud  Yaouri^^t 
DIefi,  il  n'est  pas  certain  que  XÉkabli  de  M.  Ein- 
siedel  soit  XAgabli  de  notre  itinéraire,  quoique 
les  noms  soient  semblables.  Si  ce  sont  deux 
lieux  différents ,  ce  mot  àlÉkably  ou  ^Agably 
doit  avoir  une  signification  quelconque  dans  un 
des  langages  de  l'intérieur  ée  l'Afrique, 

M.  Brun,  qui  d'ailleurs  a  fait  une  assez  bonne 
compilation  sur  l'Afrique,  confond  Touat  avec 
Tatta^  qui  est  un  autre  lieu  dopt  nous  aurons 
occasion  de  parler  (i). 

M.  Grey- Jackson,  sur  la  carte  de  l'empire  de 
Maroc ^  qui  accompagne  sa  relation,  étend  les 
Arabes  Touats  jusqu'au  sud  de  Tafilet'et  aux 
confins  de  l'empire  de  Maroc;  et  notre  itiné- 
raire nous  dit  Q^Agably  relève  de  l'empire  de 
Maroc,  Ceci  tend  à  confirmer  les  résultats  donnés 
par  la  combinaison  des  distances^  puisqu'ainsi 
les  habitants  de  Touat  se  trouvent  beaucoup 
plus;  rapprochés  de  l'empire  de  Maroc  qu'ils  ne 
le  sont  sur  les  cartes  de  Rennell  et  d'Arrowsmith. 

(i)  Brun's  Afrika^  t.  V,  p.  aôa. 


TROISIÈME    PARTIE.  3189 

M.  Jackson  assure  qu'il  se  rend  annuellement  une 
caravane  à  Timbouçtou^  qui  part  de  Tafilet{})\ 
et,  comme  cette  caravane  se  dirige  sur  Touat^ 
les  relations  entre  les  habitants  de  ces  deux 
lieux  se  renouvellent  souvent. 

Lena  prière  (a)  nous  dit  que  de  Touat  les 
caravanes  se  rendent  directement  à  Timbouctou. 
La  position  de  cette  ville  doit  donc  dépendre 
de  la  distance  prise  du  nord  au  sud,  à  partir 
^Jgably^  combinée  avec  la  distance  de  l'ouest 
à  l'est ,  entre  Silla  et  Timbouctou,  La  première 
de  ces  deux  distances  est,  selon  notre  itinéraire^ 
de  quarante  -  cinq  journées  ou  de  six  cent 
soixante -quinze  milles  géographiques;  la  se- 
conde est  de  deux  cent  quatre-vingt-quinze  milles 
géographiques.  La  combinaison  de  ces  deux 
distances  place  Timbouctou  à  dix -sept  degrés 
trente  -  huit  minutes  de  latitude  nord ,  et  à 
deux  degrés  quarante-deux  minutes  de  longi- 
tude à  l'ouest  du  méridien  de  Paris. 

Mais,  avant  de  voir  si  cette  position  s'accorde 
avec  les  mesures  précédemment  données ,  il  est 
important  /le    parler   des   Touariks^  peuplade 


(i)  X^ckson ,  dans   les  Proceedings^  of  the  Society  for 
promoting  the  discoveries  in   Africa^  t.  II,  p.  867. 

(a)  Lemprière ,   A    Tour  from    Gibraltar  to   Tangier^ 
p.   355. 

19 


agO    RECHERCHES  SUR  LAFRIQUE. 

de  noirs,  sur  le  territoire  desquels,  selon  notre 
itinéraire,  on  entre,  après  six  jours  de  marche, 
en  partant  ê^Agably.  Le  cheyk  Hagg-Cassem 
nous  donne ,  dans  cet  itinéraire ,  une  longue 
description  de  ces  peuples ,  qui  ont  des  droma- 
daires d'une  rapidité  extrême,  et  qui,  par  leur 
moyen,  poussent  leurs  excursions  jusque  sur  le 
territoire  de  Tunis. 

Le  major  Rennelt  et  Arrowsmith  placent,  sur 
leurs  cartes ,  des  Touariks  à  l'ouest  et  au  sud  du 
FezzaUy  dans  l'oasis  ^Ashen  et  au  sud -ouest 
de  cette  oasis ,  et  au  nord  de  Touatj  mais  point 
du  tout  au  midi  de  ce  dernier  pays ,  où  précisé- 
ment notre  itinéraire  nous  les  indique. 

Dans  le  récit  fait  par  Abd-Arrachman-Aga  (r) 
à  Niebhur,  il  est  question  de  Touatik  comme 
d'une  ville  située  entre  le  Fezzan  et  Zanfara. 
Selon  ce  récit,  on  met  trois  mois  pour  aller  de 
Tunis  à  Zanfara;  et  les  jours  de  repos  de  la 
caravane  sont  au  Fezzan^  puis  dans  le  pays 
des  Touariks^  et  e;isuite  à  Cachenah, 

Touarik,  selon  le  même  récit  (a),  est  une 
ville  riche  et  commerçante  ;  elle  est  habitée  par 


(i)  Niebhur,  DeuUches  -  Muséum ,  A.  1790,  p.  96 3 
et  1004.  —  Bruns,  Afnka^  V  theil,  p.  aaS. 

(tt)  Niebhur,  Deutsches  -  Muséum  ,  A.  1790,  p.  963, 
«-Bruns  ,  Jfrika  ,  V  thcil,  p.   14  et  àa4. 


TROISIÈME     PARTIE.  IC^l 

beaucoup  de  marchands,  qui,  tous  les  ans, 
en  conduisent  un  grand  nombre  d'esclaves  en 
Egypte  et  en  Barbarie  ^  pour  les  y  vendre.  C'est 
par  ce  commerce  avec  les  Mahométans  blancs 
qu'ils  ont  appris  l'arabe.  Peint-être ,  continue  l'aga , 
les  Mahométans  blancs  se  seront  établis  dans  ce 
pays  ppur  y  faire  le  commerce,  et  pour  échapper 
à  la  tyrannie  des  gouvernements  barbaresques. 
Les  marchands  Touariks  ont  l'air  farouche  et 
sauvage;  mais  ils  sont  honnêtes  et  braves.  Les 
Mogrebins  voyagent  volontiers  avec  eux  dans 
YHedjaz^  quand -ils  craignent  d'être  attaqués  en 
allant  à  la  Mecque.  Ces  Touariks  n'ont  pour 
armes  qu'un  sabre,  un  are  et  des  flèches. 

Ce  ne  sqnt  pas  là  les  Touariks  de  notre  itiné- 
raire; les  moeurs  et  les  positions  sont  différentes. 
Ceux  dont  Abd-Arrachman-Aga  fait  mention, 
sont  adonnés  au  commerce,  et  ne  se  rendent  en 
Barbarie  que  pour  leur  trafic.  Ceux  de  notre 
itinéraire,  au  contraire,  n'y  sont  connus  que 
par  leurs  dévastations,  et  forment  des  peuplades 
essentiellement  guerrières.  D'ailleurs  les  Toua- 
riks de  l'aga  sont  dans  la  direction  de  la  route 
de  Tunis  à  Zanfara;  et  les  nôtres  dans  celle 
de  Ta/ilet  à  Timbouctow  ^  qui  ^st  beaucoup 
plus  ôccidtntale.  Notre  itinéraire  nous  dit  bien 
-qu'à  Bir-Ouellen  l'on  entre  sur  le  territoire  des 
Touariks  ;  mais  il  ne  fait  pas  motion  de.  ville 

19. 


292  RECHERCHES    SUR    LAFRIQCE. 

qui  porte  le  nom  de  ce  peuple;  au  lieu  que 
l'aga  qui  a  donné  à  Niebhur  ses  renseignements 
parle  d'une  ville  qui  porte  le  nom  même  de 
Touarik  :  il  est  évident  que  les  Touariks  de 
Faga  sont  ceux  que  le  major  Rennell  a  placés  au 
sud-ouest  de  l'oasis  àHAsben;  et  ils  ne  peuvent 
être  les  mêmes  que  les  nôtres,  qui  sont  sur  la 
route  de  Tafilet  à  Timbouctou, 

Examinons  donc  si  nous  ne  trouverons  pas 
qu'il  soit  fait  mention ,  dans  les  relations  des 
voyageurs  ou  dans  les  descriptions  des  géogra- 
phes, d'autres  tribus  de  Touariks^  qui,  par 
leurs  positions,  répondent  aux  indications  de 
notre  itinéraire. 

Hornemann ,  d'après  les  renseignements  qu'il 
avait  recueillis  à  Mourzouk^  nous  dit  :  «  La  nation 
»  la  plus  intéressante  de  l'Afrique  est  celle  des 
»  Touariks ,  que  Léon  l'Africain  nomme  Terga 
»  ou  Therdja  (i).  Ils  possèdent  tout  le  pays  qui 
»  est  entre  le  Fezzan,  le  Gadamès,  le  Timbouc- 
»  tou^  le  Soudan  y  le  BornoUy  et  la  contrée  des 
»  Tibbous.  Ils  sont  divisés  en  plusieurs  tribus, 
»  dont  les  principales  sont  les  Koloçvy  ou  Kolouv^y^ 
w  d'Asberiy  et  les  Hadjara^  voisins  du  Fezzan.  » 

Si  ces  Touariks  sont  les  mêmes  que  ceux 
■* »» -  ■  ■- 

(i)  Hornemann^s  Travels^  p.  119;  et  p.  171  de  la  tra- 
ductiob  de  M.  Ls^nglès. 


TROISIÈME    PARTIE.  agS 

que  Léon  rAfricain,  et  Marmol,  d'après  lui, 
nomment  Terga  ou  Therdja^  voyons  où  Léon 
rAfricain  et  Marmol  placent  ces  peuples  (i). 

Léon  l'Africain  nous  dit  que  le  peuple  Terga 
ou  Targa  habite  le  désert  ôiHaïr  (2) ,  qui ,  ainsi 
que  nous  l'avons  vu  précédemment,  est  limi- 
trophe de  Touaty  au  sud -est.  En  effet  notre 
itinéraire  nous  conduit  de  Touat  chez  les 
Touariks  ou  ceux  de  Therdja  ou  Terga  ^  et 
confirme  ainsi  l'exactitude  des  descriptions  de* 
Léon  l'Africain  et  de  Marmol. 

Le  récit  de  Sidi-Hamet,  dans  Riley,  nous 
explique  pourquoi  le  nom  diHaïr  ou  dUHahirah 
est  tantôt  employé  pour  désigner  le  désert,  et 
tantôt  pour  désj^ner  une  oasis.  Cet  Arabe ,  dans 
son  voyage  à  Ti^bouctouj  dit  qu'il  parvint  à 
une  fameuse  vallée  où  il  y  a  de  l'eau,  nommée 
Hahirah  ;  mais  il  y  trouva  tous  les  puits  des- 
séchés ,  et  sa  caravane  manqua  d'y  périr  (5). 
Nos  cartes  ont  donc  eu  tort  de  placer  le  désert 
diHaïr  au  nord -ouest  du  pays  de  Touat;  et 


(1)  Léon  rAfricain  dans  Ramusio,  VI  part.,  p.  76/,  et 
p.  ^45  de  la  trad.  lat.  —  Marmol»  t.  III,  p.  5o  de  la  trad. 
franc. 

(a)  Léon  rAfricain  àànsKamusio,  p.  76  6;  p.  145  de 
la  trad. 

(^)  Riley's  ,  Loss  of  the  American  Brig  Commerce  » 
p.   358.  V 


294  BECHERCHES    SUR     l'aFRIQUE. 

elles  doivent  être  rectifiées.  La.carte  de  Meursius, 
dans  la  description  de  l'Afirique  par  Dapper, 
qui,  d'après  Léon  FAfiricaio ,  place  ce  désert 
èiHaïr  au  sud  de  Touaty  était  sous  ce  rapport 
plus  exacte  que  ne  le  sont  celles  d'aujourd'hui. 

Les  autres  positions  dont  il  est  fait  mention 
dans  notre  itinéraire  se  trouvent  déterminées 
par  la  direction  de  la  route  qu'on  y  voit  in- 
diquée pour  arriver  à  Timhouctou» 

Le  cheyk  Hagg-Cassem  nous  apprend  que  le 
puits  nommé  Hassy-Moussy  e^t  dans  un  pays 
habité  par  des  Arabes  Berbères  ou  el-Barbarischj 
tandis  que  la  petite  ville  de  Mahrouk,  qui  est 
à  huit  jours  de  marche  au  sud,  se  trouve  au 
pouvoir  des  Touariks,  Ceci  s'accorde  avec  les 
renseignements  que  se  sontiprocurés  Jackson 
À  Maroc,  et  Mungo-Park  dans  le  Soudan.  Le 
premier  nous  dit  que  le  pays  qui  est  au  nord 
de  Timhouctou  est  occupé  par  la  tribu  des 
Arabes  Brabischa  (i);  et  le  second,  qu'il  existe 
des  Touariks  sur  les  bords  du  Joliba  ou  Niger. 

Le  cheyk  Hagg-Cassem  nous  apprend  aussi 
que  Mabrouk  fait  le  commerce  avec  l'oasis  de 
Touadeny-y  qui  dépend  de  l'empire  de  Maroc. 

Mabrouk  se  trouve  placé  sur  la  carte  d'Afrique 
de  Rennell,,  d'après  quelque  itinéraire  du  même 
»   ■  ■  ■  ■  »  I  II  '         ■  .         ■       -  "• 

(i)  Jackson's  ^<:c'0ii/7r  of  the  empire  ofMarocco^  p.  261. 


TROISIÈME     PARTIE.  2q5 

genre  que  le  nôtre,  mais  moins  détaillé ,  et  qui 
n'a  point  été  publié. 

Actuellement  examinons  si  la  position  de 
TimbouctoUi  telle  qu'elle  se  trouve  déterminée 
d'après  nos  recherches,  s'accosde  avec  les 
distances  qui  nous  sont  dcmnées  entre  cette 
ville  célèbre  et  différents  lieux. 

Les  caravanes  qui  se  rendent  de  Tempire  de 
Maroc  à  Timbouctou  se  réunissent  à  Tatta  et 
à  AkkUy  avant  de  traverser  le  désert  :  il  im- 
porte doûc  de  déterminer  ces  deux  positions; 
et,  comme  nos  cartes  ne  sont  point  d'accord 
relativement  à  ces  deux  lieux ,  il  est  nécessaire 
de  rechercher  les  données  d'après  lesquelles  , 
nous  pouvons  &ire  cesser  nos  incertitudes. 

Nous  apprenons  par  Ben -Ali,  dans  les  actes 
de  ia  Société  africaine  (i),  que  Tatta  est  à 
neuf  journées  et  demie  de  Maroc  y  et  à  douze 
journées  de  la  ville  de  Noun;  à  quatre  journées 
de  Tenjuelin ,  et  à  une  journée  de  Wah'-Drah, 

Maroc  est,  selon  les  observations  données  sur 
la  carte  d'Ali -Bey,  à  trente- un  degrés  trente- 
sept  minutes  et  demie  de  latitude,  et  à  neuf 
degrés  cimyiante-six  minutes  de  longitude  à 
l'ouest  du  méridien  de  Paris. 


(i)  Proceedings  of  the  Society  for  promoting  the  disca- 
\'eries  in  Africay-ptX^  p.  224,  225  et  469. 


298  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE, 

poli  et  passe  par  Gadamès  et  Haoussa^  nous 
donnera  aussi  quatrorvingt-huit  à  quatre-vingt- 
dix  journées  de  marche. 

M.  Jackson  (i)  nous  a  tracé  l'itinéraire  des 
caravanes  qui  partent  de  Fez ,  et  qui  se  rendent 
à  Timbouctou  en  passant  pBr^ÂÂa^  Tegazzaetle 
Pidts-d'jàroan;  mais  cet  itinéraire  contient  évi- 
demment quelque  omission,  puisque  les  distances 
qu'il  indique  ne  nous  présentent  que  cinquante- 
quatre  journées  de  marche  entre  Fez  et  Timbouc- 
tou,  et  trente- six  entre  Akka  et  cette  dernière 
ville.  D'après  ces  erreurs,  ou  ces  omissions, 
nous  n'avons  aucun  moyen  certain  de  déter- 
miner la  position  de  ces  différents  lieux.  Seu- 
lement ,  ce  que  dit  ici  M.  Jackson  nous  prouve 
que  T^gazza  doit  se  trouver  sur  la  route 
^Akka  à  Timbouctou  ^  et  beaucoup  plus  à  l'est 
que  ne  le  place  le  major  Rennel  (a)  ;  ou  plutôt 
alors  le  Tegazza  de  Jackson  et  des  auteurs 
n'est  pas  le  même  lieu  que  Tischit  ou  Tissheety 
comme  le  croyait  major  Rennell. 

Le   Tegazza    de    Jackson     se    trouve    dans 


fi)  Jac1ison*s  Account  of  the  empire  of  Maroccùj-^.  a 40. 

(2)  M.  Jackson ,  p.  a4Q  y  compte  ^Akka  à  Taggazza 
seize  joars  «^e  marcke  ;  de  Taggazza  k  Taudeny  sept 
jours  ;  de  Taudeny  an  Puits-tTAroan  sept  jours ,  et  du 
PuitS'd* Aroan   à    Timbouctou  six   jours. 


TROISIÈME     PARTIÏ.  agg 

Foasis.  Gualata  de  Rennell.  J'ai  tracé  cet  itiné- 
raire de  Jackson,  en  conservant  aussi  sur  ma 
carte  Tissheet  y  que  Rennell  avait  indiqué  à 
l'ouest;  mais  je  préviens  que  je  considère  les 
positions  des  lieux  qui  s'y  trouvent,  comme 
incertaines. 

Ce  que  le  cheyk  Hagg-Cassem ,  qui  a  dressé 
le  premier  de  nos  itinéraires,  nous  apprend 
sur  la  position  de  Timbouctou  et  le  cours  du 
fleuve,  est  digne  d'attention  : 

a  Timhout  ou  Timbouctou  ^  dit -il,  est  située 
dans  une  plaine ,  à  peu  de  distance  d'un  fleuve 
que  les  indigènes  appellent  Nil  y  qui  la  baignait, 
dit-on,  autrefois,  mais  dont  elle  est  éloignée 
aujourd'hui  de  trois  quarts  de  lieue.  Ce  fleuve, 
qui  coule  de  l'est  à  l'ouest,  est  navigable;  et  les 
gens  du  pays  forment  des  espèces  de  radeaux , 
composés  de  planches  attachées  les  unes  aux 
autres  avec  des  cordes  :  par  leur  moyen  ils  vont 
chercher  en  Guinée  ^  qu'ils  appellent  DjennjTy  le 
miel,  le  riz,  la  cassave,  la  toile  blanche,  la 
poudre ,  et  les  esclaves  nègres  ou  négresses, 
qu'ils  viennent  débarquer  à  un  petit  bourg 
nommé  Kobra  ou  Cabra  ,  situé  sur  jes  ri- 
ves de  leur  Nily  et  distant  de  Timbouctou 
comme  le  Caire  l'est  de  Boulac.  C'est  de  Cabra 
qu'on  les  transporte  dans  la  ^ille  de  Timbouctou^ 
d'où  ils  se  répandent  en  jisie  et  en  Europe,  La 


1 


3oO    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

ville  ou  l'endroit  où  ils  vont  ^charger  les  mar- 
chandises ci- dessus,  se  liomme  Ouangarayqui 
en  est  sans  doute  l'entrepôt  (i)   » 

On  ne  peut  qu'être  frappé  de  l'accord  de  la 
relation  du  cheyk  Hagg  -  Cassem  avec  Léon 
l'Africain  et  tant  d'autres  auteurs  qui  affirment 
que  le  fleuve  qui  coule  près  de  Timbouctou  se 
dirige  de  l'est  à  l'ouest  :  ce  que  dit  Hagg-Cassem 
de  la  navigation  de  Timbouctou  à  Djenny-y  par 
le  fleuve ,  au  moyen  de  radeaux  fabriqués  avec 
des  planches,  ne  laisse  aucun  doute  sur  l'exac- 
titude du  récit  de  Léon  l'Africain  (2),  qui  dit 
avoir  fait  cette  navigation.  Remarquons  enfin 
que  notre  itinéraire  nous  fournit  un-  témoignage 
formel  que  le  nom  de  Djenny  ou  Jinne  est  syno- 
nyme de  celui  de  Guinée. 

Cependant  nous  sommes  certains,  d'après 
les  découvertes  de  Mungo-Park,  qu'un  grand 
fleuve,  qui  arrose  le  Soudan  y  coule  de  l'ouest  à 
l'est;  et  cette  découverte  a  paru  tellement  dé- 
cisive et  contraire  aux  relations  de  Léon  l'Afri- 
cain et  des  Arabes,  qu'elle  les  a  fait  rejeter  en- 
tièrement. 

On  voit  dans  le  récit  de  Hagg-Cassem  même 
une  contradiction  qui  parait  affaiblir  son  témoî- 

(1)  Voyez  ci-après,  4ans  T Appendice. 
\%)  Léon  r Africain,  dans  Ramusio,  t.  I. 


TROISIÈME     PARTIE.  3oi 

gnage  ;  car  il  dit  que  la  ville  où  l'on  va  chercher 
les  marchandises^èn  Guinée  j  se  nomme  Ouan- 
gara;  et  nous  savons  que  le  Ouangara  est  une 
contrée  considérable  à  l'est  de  Timbouctou^ 
et  non  pas  un  lieu  de  la  Guinée  y  qui  est  à  l'ouest 
de  cette  ville. 

Tous  ces  rapprochements  nous  avaient  fait 
penser  depuis  long-temps  qu'il  existait  dans  le 
Soudan  j  ou  dans  le  voisinage  "de  TimbouctoUy 
deux  grands  fleuyes  coulant  dans  des  directions 
opposées.  Les  renseignements  que  M.  Bowdich 
a  obtenus  dans  sa  mission  chez  les  Aschantis 
nous  ont  confirmés  dans  cette  opinion.  Mungo- 
Park  dit  que  Djinbala^  indiqué  par  ks  itiné- 
raires comme  une  ville,  dans  le  voisinage  de 
Djennie ,  est  une  île  formée  par  deux  bras  du , 
Niger\  qui  sortent  du  lac  Dibbir^  et  qui  se 
réunissent  à  Cabra.  Nous  croyons  qu'un  de  ces 
bras  pourrait  bien  être  le  Gambarou  ou  le  Niger 
des  Arabes,  qui  alors  coulerait  vers  l'ouest;  et 
que  c'est  par  le  moyen  de  ce  fleuve  qu'en  par- 
tant de  Cabra f  l'on  navigue  à  Djenny,  tandis 
que  par  Quolla  ou  Quorra ,  ou  le  Niger  des 
Européens,  on  navigue  vers  l'est.  Dans  cette 
hypothèse,  on  concevrait  facilement  comment 
le  cheyk  Hagg-Cassem ,  qui  s'est  rendu  à  Tint* 
bouctou  par  l'intérieur  des  terres,  aura  Itouvé 
dans  cette  ville  des  esclaves  et  des  nègres  vernis 


3oi  RECHERCHAS     SV^R    XAFRIQTJE. 

de  Ouangara  dans  le  même  temps  que  d'autres 
marchands  revenaient  de  Djennfj  et  qu'il  aura 
confondu  ces  deux  contrées  en  une  seule. 

Nous  avons  dû,  dans  cette  section  qui  con- 
cerne l'analyse  géographique  de  Fi tinéraire  dressé 
par  le  cheyk  Hagg-Cassem ,  ne  pas  différer  d'ex- 
pliquer une  des  contradictions  qu'il  renferme; 
mais,  à  la  fin  de,cet,te  partie  de  notre  ouvrage, 
nous  développerons  plus  amplement  nos  idées 
et  nos  conjectures  sur  le  cours  des  grands  fleuves 
qui  arrosent  le  Soudan. 

§   IV.    analyse  géographique  de  t itinéraire  de 
Moltammedy  fils  d'Ali^  fils  d^e  FquL 

L'itinéraire  de  Mohammed,  fils  d'Ali,  fils  de 
Foui ,  qui  renferme  un  très-grand-nombre  de 
positions,  nous  fait  compter  cent  huit  à  cent 
dix  journées  de  marche  entre  Tripoli  et  Tim-- 
bouctou ;  et  comme  nous  savons,  par  l'analyse 
de  l'itinéraire  du  cheyit  Hagg-Gassem,  qu'il  ne 
faut  que  quatre-vingt-deux  journées  de  marche, 
par  la  route  directe ,  pour  faire  ce  trajet ,  il  en 
résulte  que  nous  devons  conclure  que  l'itinéraire 
de  Mohammed  nous  trace  utie  route  détournée, 
ou  que  les  distances  des  journées  ne  sont  pas 
évaluées  comme  dans  celui  du  cheyk  Hagg- 
Gaîisem. 


TROISIÈME    PARTIE.  3o3 

il  est  facile,  par  un  examen  attentif,  de  nous 
convaincre  que  l'une  et  l'autre  supposition  sont 
vraies,  et  que  ces  deux  causes  contribuent,  dans 
l'itinéraire  de  Mohammed,  à  augmenter  le 
nombre  de  journées  de  caravane  entre  Tripoli 
et  Timbouctou. 

En  effet,  nous  voyons  que  l'itinéraire  nous 
fait  compter  trente -quatre  jf^urnées  et  demie 
entre  Tripoli  et  l'extrémité  méridionale  du 
territoire  de  Gadamès;  mais  nous  savons  d'ail- 
leurs (i)  que  Gadamès  n'est  qu'à  treize  journées 
de  marche  de  Tripoli,  et  qu'il  ne  faut  pas  en- 
suite plus  de  quatre  journées  de  marche  pour 
atteindre  l'extrémité  méridionale  de  son  terri- 
toire. Nous  apprenons  par-là  que  les  journées 
de  marche,  dans  le  commencement  de  cet  itiné- 
raire, sont  de  celles  qui  ne  doivent  être  esti- 
mées que  la  moitié  des  journées  de  caravane 
du  désert  (2). 

Au-delà  de  Gadamès ,  il  n'y  a  aucune  raison 
pour  réduire  les  distances  des  journées,  puisque 
la  caravane,  traversant  les  déserts ,  ne  peut  plus 
être  suivie  par  des  hommes  à  pied,  et  s'arrange 
toujours  de  manière  à  n'être  pas  relardée  dans 
sa  marche;  cepenc^nt  le  nombre  de  soixante- 

(i)  Voyez  ci-dessus ,  p.  176. 
(a)  Voyez  ci-desfus,  p.  a(Ï7. 


3o4  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

seize  journées,  que  notre  itinéraire  indique , 
entre  la  limite  méridionale  du  territoire  de 
Codâmes  et  Timbouctou\  est  encore  trop  con- 
sidérable pour  concorder  avec  la  position  que 
nous  avons  assignée  à  cette  dernière  ville.  La 
route  que  parcourt  l'itinéraire  doit  donc  faire  un 
détour;  et  en  effet  nous  voyons  Haoussa  dans 
le  détail  des  positions  que  nous  donne  notre 
itinéraire.  Nous  savons  par  un  grand  nombre 
de  témoignages,  à  commencer  par  celui  de 
Léon  rAfricain ,  que  Haoussa.  est  assez  loin  à 
Test  de  Timhouctou.  Les  vingt-buit  journées  de 
marche,  que  cet  itinéraire  nous  fait  compter 
entre  Timbouctou  et  Haoussa^  doivent  donc  être 
mesurées  à  partir  de  Timbouctou  vers  l'est, 
et  déterminer  par  ce  moyen  le  détour  de  la 
route  parcourue  par  les  caravanes  qui  se  rendent 
de  Tripoli  à  Timbouctou  en  passant  i^vHaoussa. 
Par  ces  combinaisons,  la  position  de  Uaoussa 
se  trouve  fixée  à  dix^neuf  degrés  quihz^  minutes 
de  latitude  nord,  et  à  quatre  degrés  vingt  minutes 
de  longitude  à  l'orient  de  Paris;  et  Tareknah, 
lieu  où  l'itinéraire  nous  apprend  qu'une  autre 
route  se  détache  vers  Agadez^  se  trouve  placé 
à  vingt -et -un  degrés  trente- cinq  minutes  de 
latitude,  et  à  huit  degrés  quarante  minutes  de 
longitude-  à  l'orient  de  Paris.  Entre  Godâmes 
et  Haoussa  la    route  est  directe*,  et   conduit 


TROISIÈME     PARTIE*  3o5 

droit  au  sud  ;  et  entre  Tareknah  (  i  )  et  7Y/w- 
bouctou  elle  est  aussi  presque  en  ligne  droite;' 
mais  cette  ligne  se  dirige  à  l'ouest  en  inclinant 
vers  le  sud. 

Comme  l'itinéraire  de  Mohammed  est  très- 
confus  et  très-embrouillé ,  et  offre  le  détail  d'un 
grand  nombre  de  lieux  qui  ne  pourraient  être 
placés  sur  une  carte  générale  d'Afrique,  noua 
allons ,  pour  plus  de  clarté ,  le  réduire  aux 
principales  positions ,  en  indiquant  les  nombres 
des  journées,  qui  donnent  en  même  temps  les 
distances  de  ces  divers  lieux  et  marquent  leurs 
emplacements  sur  les  cartes. 

(i)  !Notre  itinéraire  nous  apprend  que  Tareknah  est  dans 
le  pays  des  Touariks;  c'est  la  branche  de  ces  peuples  que 
Hornemann  dit  être  désignée  sous  le  nom  de  Kollouvy^ 
et  qui  habite  Asben  et  les  contrées  environnantes  ;  tandis 
que  ceux  qui  sont  voisins  du  Fezzan  se  nomment  Hagara 
(HoraenHQin's  Journali^fage  119).  L'itinéraire  précédent 
nous  a  fait  connaître  des  Toimrihs  voisins  deis  Touats.  Aussi 
Hornemann ,  dans  un  passage  de  sa  relatipn  qu'il  a  écrite 
en  allemand,  parle  d'un  Touarik  de  Tottftt  (Voyage  de 
Hornemann ,  Paris ,  1 8o3 ,  in-8**^  p^e  467)  >  avec  lequel  il 
était  intimement  lié.  Le  traducteur  anglais  de  Hornemann 
a  supprimé  ces  mots  de  Touat^  parce  qu'il  a  cru  y  voir 
une  contradiction  :  ils  s'accordent  au  contraire  avec  nos* 
itinéraires  et  les  confirment. 

.    *  ao 


3o6  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 


NOMS 

M 

LATITUDE 

LONGITUDE 

O  B  B 

an  nord' 

U'est  et  à  l'ouest 

LIEUX. 

p 
o 

de  l'équatcur. 

de  Paris. 

Tripoli  ...» 

îa"  53'  4o". 

Il**      l'  f  OT, 

Gadamès 

lî 

So"  36'. 

8°  10'  orient. 

Bakardi 

3 

Puits  de  Shafamah. 

S 

* 

El-Kalaa, 

6 

Puits  d'£l-Za&af . 

a 

Sabhah  (i) 

la 

Goulh-el-Ahimich. 

6 

Tareknab,  ville  des 

Touariks  (ici  la 

route  se  divise). 

3 

ai'  4o'. 

7*  53'  orient. 

Haoussa 

i6 

WanonkijOuCaou- 

caou  (rilinérairc 

tourne  à  l'ouest) 

7 

iS?W 

**•  5a'.ori»it. 

Afnoa,  osBiraù. 

a 

.# 

T^MOU 

4 

Scholoki,  oaSou- 

dah 

5 

6 

Zanonzouki 

Tîmbouctou 

4 

17"  38' 

a^  4îi'  occid. 

84 

* 

(i)  Ce  Saèhah  par 

*h  êtra  le  Saumk  des  carte*  de  B.eiuieU  et  II 

â'Airoirsmith  ;  mais  i 

1  est  phoi  plus  an  adrd-cst.                        |l 

TROISliUfE    PARTIE.  307 

Mungo-Park,  dans  son  premier  voyage,  a 
entendu  dire  que  Haoussa  était  à  trente  jour- 
nées de  distance  par  terre  de  Timbouçtou ,  et  k 
quarante -cinq  journées  par  eau.  On  voit  que 
ces  données  ne  diffèrent  pas  sensiblement  de 
celles  de  notre  itinéraire  (i),  qui  compte  vingt- 
huit  joymées  pour  cette  distance.  Selon  ce  qui 
a  été  dit  à  M.  BovC^dich  (a)^  il  n'y  aurait  que 
vingt  journées  de  marche  entre  Timbouctou  et 
Haoussa,  Dans  les  trois  premiers  jours ,  en  par- 
tant de  Timbouctou^  on  traverse  une  contrée 
boisée,  et  l'on  suit  les  bords  du  Nige^yasqak 
Azzibie ,  ville  frontière.  Mais  cette  évaluation  de 
journées  est  probablement  faite  par  des  voya- 
geurs isolés ,  ou  qui  marchent  en  petites  troupes 
et  beaucoup  plus  rapidement  que  des  caravanes 
nombreuses  pesamment  chargées,  qui  comptent 
vingt -huit  journées  pour  cette  distance. 

Sur  la  route  de  Haoussa  à  Timbouctou  est 
Jf^anonkiy  grande  ville^que  notre  itinéraire  nous 
fait  connaître,  et  dont  aucun  auteur  n'a  fait 
mention ,  pi  sous  ce  nom  y  m  sous  celui  de 
Caoucaou ,  que  lui  donnent,  les  touariis  :  ce 
sont  les  Nègres  qui  la  nopiment  Wanonki.  La 

(i)  Brans  Afrika^  t.  V,  p.  3a4.  —  Bowdich's  Ashantee 
Mission^  p.  19S. 
(2)  Idem,  p.  196.  . 

âO. 


3o8       RECHEncHfS   SUR  l'Afrique. 

description  qu'en  donne  Mohammed  ,  porte- 
rait à  croire  que  cette  ville  est  plus  considé- 
rable que  Haoussa  et  Afnou ,  et  au  moins  aussi 
grande  que  Timbouctou.  fFanonki  ou  Caoucaou 
se  trouve  placé  sur  notre  carte  à  dix: -huit  de- 
grés quarante -cinq  minutes  de  latitude  ,  et  à 
deux  degrés  quarante -cinq  minutes  de  longi- 
tude à  l'orient  de  Paris. 

Hornemann  parle  d'une  tribu  d'Afrique  qui 
habite  dans  le  voisinage  du  Soud<m  et  de  Tim" 
bouctou^  qu on  nomme  7Vg'û/7ia(i),et  qui,  selon 
le  rapport  des  habitants  du  Fezzan^  sont  blancs 
et  infidèles  ;  ce  qui  appuierait  le  récit  de  ceux 
qui  prétendent  qu'il  y  a  des  chrétiens  dans  le 
voisinage  de  Timbouctou  ;  et  l'itinéraire  que 
nous  allons  analyser,  dit  qu'il  en  existe  beaucoup 
dans  le  pays  de  Cachenah. 

§  V.  Analyse  géographique  de  Titinéraire  de 
Tripoli  de  Barbarie  à  la  ville  de  Ctichenahy 
par  te  chejk  Hagg-  Cassent. 

La  Société  africaine,  dès  le  commencement 
de  ses  travaux ,  s'était  procuré  un  itinéraire  de 
Tripoli  à  Cachenah  y  à- peu- près  semblable  à 
celui  du  cheyk  Hagg-Cassem,  dont  nous  allons 


(i)  HornemaDii's  Trapels,  p.  iio ,  et  p.  281  de  I a  traduct. 
franc. 


TROISIÈME    PARTIE.  Sog 

nous  occuper.  L'itinéraire  qu'avait  reçu  la  So- 
ciété africaine  a  été  remis  au  major  Rennell, 
qui,  par  son  moyen,  a  enrichi  de  plusieurs  po- 
sitions intéressantes  la  géographie  de  l'intérieur 
de  TAfrique.  Malheureusement  il  ne  l'a  pas 
publié;  et  nous  n'en  connaissons  que  ce  qu'il 
a  cru  devoir  en  extraire  pour  réclaircissement 
de  sa  première  carte  du  nord  de  l'Afrique ,  qui 
accompagne  les  actes  de  l'Association  pour  les 
découvertes  en  Afrique  (i). 

Les  documents  que  le  major  Rennell  a  eus  entre 
les  mains  s'accordent  avec  notre  itinéraire  sur 
la  direction  que  suivent  les  caravanes  pour  se 
rendre  de  Tripoli  à  Cachenah.  Ces  caravanes 
commencent  d'abord  par  aller  à  Gadamès^  et^ 
après  avoir  ainsi  marché  au  sud ^ ouest,  elles 
changent  de  direction  pour  se  rendre  dans  le 
Fezzan^  soit  à  Mourzouk^  la  capitale,  soit  a 
Teghereîn^  qui  est  sur  les  limites  dé  cette  con- 
trée ;  ensuite ,  après  avoir  échangé  avec  les 
Fezzanais^  les  marchandises  qu'elles  ont  ap- 
portéfl^de  Tripoli ^  elles  traversent  le  désert,  et 
se  rendent  directement  à  Cachenah^  en  se  diri- 


(i)  Proceedings  of  the  Association  for  promoting  the 
discouery  of  the  interior  parts  of  Africa ,  1790  i  in -4**, 
chap.  17U,  p.  170-172.  —  Hornemann's/our/ia/,  1802,  in-4^» 
p.  180. 


SlO  RECHERCHES    «UA    e'aFRIQUE. 

géant  toujours  au  sud,' et  &x  traversant  Agmeh^ 
ou  r.oasis  diAsben. 

Nous  ne  pouvons  douter  que  le  major  Renneli, 
pour  tracer  cette  partie  de  la  carte  d'AÉPÎque, 
publiée  en  1798  et  corrigée  en  1802  (j),  n'ait  eu 
un  itinéraire  qui  lui  retraçait  la  Wkfxsst  route  que 
la  nôtre.  Il  est  facile  de  voir  qtie .  le '/e«e^  du 
major  Rennell,  sur  la  rotote  du  Wezzauy  est  le 
Jaiiel  de  notre  itinéraire  (a);  que  Teghereïny  sur 
les  confins  du  Fezzan^  est  Tai-gari  ou  Tegherjr(3iy 
Il  est  certain  que  tiotre  Tecbnent  est  la  même  po- 
sition que  celle  de  T'a  Je»^  dans  Rennell,  puisque 
notre  itinéraire  nous  apprend  que  7iwfc/2f  est  le 
nom  de  la  montagne  au  pied  de  laquelle  7W- 
ment  est  situé.  Açiou  est  Assiea  ;  Toghagii 
est  Tagazi  ;  Açoudi  est  Asouda  ;  Aoudercts  est 
(htataras.  Enfin  le  major  Rennell  a  tracé  sa 

(i)  Voyez  la  carte  insérée  dans  le  toiae  I ,  ^.  ^09  des 
Prçceedings  of  th^  Association  for  promoting  the  d^fco- 
very  in  Africa. 

(2)  Selon  M.  Langlès ,  on  devrait  écrire  Djenné ice  mot 
arabe  signifie  Jardin,  Voyez  la  traduction  françHsc  da 
Voyage  de  F.  Homemann ,  p.  280. 

(3)  Quoique  dans  Hornemann*s  Journal^  p.  i55,  le  ma- 
jor Rennell  dise  qu'il  est  probable  que  Taï-gari  est  le  même 
lieu  que  Teghery,  cependant  il  les  distingue  sur  sa  carte , 
et  en  fait  deux  lieux  différents.  Nous  pensons  qu'il  y  a 
double  emploi ,  et  que  Tegkereïn  ,  Taï-gari  et  Teghery 
désignent  le  même  lied. 


TAOlSliHJB    FARTIJB.  3ll 

roiM  par  Agadez^  où  notr€  itinéraire  nous  fait 
aussi  passer. 

Notre  itinéraire  nous  fournit  un  plus  grand 
nombre  de  noms  de  lieux ,  et  dé  distances', 
que  ceux  que  Rennell  parait  avoir  eus  à  sa 
disposition  :  mais  il  nous  présente ,  comme  Fiti»^ 
néraire  précédent ,  le  riiébnge  de  deux  mesures 
différentes;  et  les  journées  qu'il  nous  donne 
entre  Gadamès  et  le  Fezzan,  sont  évidemment 
de  celles  qui  sont,  quant  au  dhamin  parcouru^ 
moitié  moindres  cpie  les  journées  des  caravanee 
qui  traversent  le  désert.  En  effet,  entre  6a- 
damès  et  Djennetj  notre  itinéraire  nous  fait 
compter  trente-et-une  journées  de  caravane-^ 
la  carte  de  Rennell  n'en  admet  que  quatorze. 
Ce.géographe  a  placé  Tegherjrow  Taï-gari  d'après  ' 
un  itinéraire  de  Tunis  à  Cachenahy  communiqué 
par  M.  Magra,  qui  n'évalue  la  distance  de  es 
lieu  à  Gadamès  qu'à  quinze  journées  de  car»* 
vane  (i)  :  notre  itinéraire  en  donne  trente** sis; 
ce  qui  porterait  ce  lieu  loin 'du  Fezzan^  si  on 
évaluait  ces  journées  comme  celtes  dés  caravanes 
ordinaires^  au  lieu  de  les  évaluer  comme  celles 
des  caravanes  suivies  par  des  hommes  à  pied, 
et  de  3néduire  la  distance  à  moitié  :  en  opérant 

(i)  Hornemanii's  Journal,  p.  1 55,  et  p.  'i^^  rfe  k  tra- 
ductÛHi'frtiiçaise.  '' 


3l2  RECHERCHES    fitJR     l'aFRIQUE. 

cette  réduction,  Teghereïn  se  trouve  |dacé  à  deux 
cent  soixante-dix  railles  géographiques  de  Ga- 
damés;  et  c'est  là,  à  peu  de  chose  prèSj  la 
distance  qui  est  donnée  par  les  cartes  de  RenneK 
et  d'Arrowsmith,  soit  qu'ils  évaluent  les  jour- 
nées de  caravane  à  un  taux  plus  haut,  soit 
qu'ils  aient  reconnu  que  la  distance  de  quinze 
journées  était  insuffisante. 

Le  reste  de'iiotre  itinéraire  s'accorde  souvent 
avec  celui  dont  le  major  Rennell  a  fait  usage, 
ou  s'en  éloigne  peu.  Les  journées  de  caravane 
doivent  être  évaluées  selon  le  taux  que  nous 
avons  déterminé  :  ainsi  Tedment^  situé  au  pied 
de  la  montagne  Tadent^  et  où  l'on  recueille  une 
grande  quantité  de  feuilles  4^  sépé,  est,  selon 
notre  itinéraire,  à  trois  joiu'nées  de  marcha  4^ 
Teghereïn  y  c'est *à -dire  à  quarante-* cinq  milles 
géographiques  de  Teghery.  Le  major  Rennell 
met  ce  lieu  à  diic  milles  plus  au  sud ,  :  et  Ar- 
rowsmith  seulement  à  six  ou  sept  milles. 

Entre  Tedment  ou  Tadent ,  et  Açiou  ou 
Assieuy  notre  itinéraire  compte  huit. jours  de 
marche,  ou  cent -vingt  milles  -  géographiques  ; 
et  c^est  juste  la  distance  que  le  major  Rennell 
et  Arrowsmith  ont  établie  sur  leur»  cartes  entre 
ces  deux  lieux. 

Entre  Aciou  et  Toghâgit  notre  itinéraire 
compte  cinq  journées  de  marche ,  ou  ,•  selon 


TROISIÈME     PARTIE.  3l3 

notre  évaluation  habituelle,  soixante-et-quinze 
milles  géographiques  ;  et  c'est  exactement  la  dis* 
tance  que  le  major  Rennell  et  Arrowsœith  met- 
tent sur  leurs  cartes  entre  Assieu  et  TagazL 

De  Toghâgit  jusqu'à  Aqoudi^  la  capitale  du 
pays  diAhir  (i),  qui  trafique  directement  avec 
Cachenahy  notre  itinéraire  nous  fait  compter 
sept  jours  de  marche»  pu  cent -cinq  milles 
géographiques;  et  c'est  encore  la  distance  que 
Rennell  et  Arrowsmith  ont  établie  sur  leurs 
cartes  entre  Tagazi  et  Asouda, 

C'est  à  Açoudi  oïl  Asouda  que  les  caravanes 
qui  se  rendent  des  confins  du  Fezzan,  ou  de 
Teghery^  joignent  les  caravanes  qui  viennent 
directement  de  MourzouÂ,  la  capitale  du  Fez- 
zan^psLT  une  route  parallèle,  et  cependant  peu 
éloignée  de  cellç  que  nous  venons  de  tracer. 

Le  major  Rennell  a  eu  un  itinéraire  de  xrette 
route,  dont  il  a  heureusement  donné  un  extrait 
dans  les  premiers  actes  àe  la  Société  pour  les 
progrès  des  découvertes  en  Afrique  (2).  Nous 
allons  de  .nouveau  l'analyser;  et  le  soumettre  à 
nos  évaluations  habituelles  de  distances ,  afin  de 

(1)  Ahir  est  peat-êlre.  le  même  mot  que  Hair^  qui  eit 
un  désert  au  sud^ouest  de  Touat;  et  ce  mot  a  probable- 
ment une  signification  dans  une  des  langues  de  TAfrique. 

(2)  Rennell,  Proceedings  of  the  African  e^ssociation ^ 
1790,  iù-4°,  cb.   VII,   p.  160. 


3l4  KECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE.  ^ 

mieux  appuyer  la  position  ^Aqoudi^  placé  sur 
notre  carte  seulement  à  dix  milles  géographiques 
plus  au  sud  que  sur  les  cartes  de  Rennell  et 
d'Arrowsmith  ;  mais,  pour  cette  analyse,  nous 
emploierons  le  nombre  de  journées  de  marche 
de  cet  itinéraire,  et  non  celui  qui  se  trouve  porté 
sur  la  carte  même  du  major  Rennell ,  et  qui  ne 
s'accorde  pas  toujours  avec  l'extrait  que  ce 
géographe  a  donné  des  documents  sur  lesquels 
il  travaillait.  En  effet,  on  a  vivement  lieu  de  re- 
gretter que  le  géographe  anglais  n'ait  pas  publié 
pour  cette  partie  de  son  travail ,  comme  pour 
toutes  les  autres  parties  relatives  à  l'Afrique,  les 
documents  tels  qu'il  les  avait  reçus.  Les  extraits 
fragmentaires  et  souvent  confus  qu'il  en  donne , 
et  les  citations  qu'il  en  tire,iie  suffisent  pas  pour 
la  discussion  des  points  douteux,  et  pour  la 
comparaison  qu'il  est  nécessaire  d'établir  avec 
d'autres  documents  semblables.  Par  là ,  les 
progrès  de  la  science  sont  retardés,  et  ceux 
qu'elle  fait  sont  mis  en^  doute  ou  regardés 
comme  incertains,  parce  qu'ils  sont  dénués 
des  preuves  qui  devraient  les  appuyer.  "^ 
La  carte  du  major  Rennell,  gravée  en  1790, 
élahiil  cinq  journées  de  marche  entre  Mourzmuk 
et  Hiats;  mais,  comme  ritinéraire(i)nous  ap* 

(1)  Remell,  Procecdimgt,  ^tc.,^«790,  ili-4S  P-  x^^* 


T^ROISIÀME    PARTIE.  3l5 

prend  que  Hiats  est  un  pays  et  non  une  ville, 
et  que,  dans  sa  carte  postérieure ,  gravée  en  1 79^ 
et  corrigée  en  1802 ,  le  major  Rennell  a  appliqué 
cette  distance  à  Teghery^  et  qu'il  a  fait  disparaître 
le  nom  de  Hiats,  nous  devons  croire  qu'il  a 
des  motifs  pour  considérer  Teghery  comme  la 
capitale. 

Le  géographe  anglais  fait  deux  lieux  différentsr 
de  Teghery  et  de  Taî--  Gari,  que  nous  recon- 
naissons pour  le  même  lieu  que  le  Teghereïn 
de  notre  itinéraire  ;  et  ce  qui  nous  confirme 
dans  cette  pensée,  c'est  l'itinéraire  extrait  par 
le  major  Rénmell  (i)  :  il  nous  apprend  que 
les  caravanes,  en  partant  de  Mourzouk,  se 
dirigent  d'abowl  au  sud  sud-ouest.  Alors  les  cinq 
journées  de  marche,  à  partir  de  Motirzouk^ 
placent  Teghery  un  peu  à  l'ouest  de  T&ï-  Gari 
d'Arrow^smith',  et  précisément  où  les  cofiiibinai-^ 
sons  de  notre  itinéraire  le  portent. 

Il  est  dit  ensuite,  dans  l'itinéraire  de  Ren- 
nell, que  Ganat  est  à  six  journées  de  Hiats  ^ 
et  jésouda  à  dix -neuf  journées  de  Ganàt.  Si 
l'on  suivait  ici  le  major  Rennell ,  et  te  posi- 
tion qu'il  a  assignée  k  Teghery,  ce^e  d^jisûuda 
serat  descendre  ^  pier  cet|e  distance  de  vingt-^ 
cinq  journées,  à  un  diegré  et  demi  de  Isrtitude^ 
-  •'    '    -         ■        -    ■    •     ■  -    ■ 

(i)  Rennell ,  ibid, ,  in-4%  p.  160. 


3l6  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQITE. 

plus  au  sud  que  celle  qu'il  lui  a  assignée ,  et  se 
confondrait  avec  celle  SAgadez  :  aussi  le  géo- 
graphe anglais,  qui  s'est  aperçu  combien  ce  ré- 
sultat était  fautif,  n'a  point  suivi  les  distances 
données  par  son  itinéraire  ;  il  marque  sur  sa 
carte  six  jours  de  marche  entre  Ganat  et 
Asouda ,  et  également  six  jours  de  marche 
entre  Ganat  et  Teghery^  et  cinq  jours  entre 
Teghery  et  Mourzouk. 

Au  lieu  de  ces  suppositions,  de  ces  combi- 
naisons arbitraires,  nous  prenons  l'itinéraire  du 
major  Rennell,  tel  qu'il  le  donne;  et,  à  partir 
de  Thegereùiy  dont  la  position  est  fixée  par 
l'intersection  de  deux  distances,  nous  plaçons 
GaruU  à  six  journées  ou  quatre-vingt-dix  milles 
géographiques  au  sud  :  et  la  distance  entre  ce 
lieu  et  Açoudi  ou  Asouda  ^  tel  qu'il  est  placé  sur 
notre  carte,  et  tel  qu'il  a  été  déterminé  indépen- 
damment de  l'itinéraire  de  major  Rennell ,  se 
trouve  être  de  dix-huit  journées;  ce  qui  n'offre, 
avec  la  carte  de  Rennell,  que  la  différence  d'une 
seule  journée  ou  de  quinze  milles  géogra- 
phiques. 

Entre  Asouda  ou  Açoudi  et  Agkadez,  l'itiné- 
raire de  Rennell  compte  huit  journées  de  niar^ 
che.  Notre  itinéraire,  entre  Açoudi  ou  A hir 
et  Aghadez,  compte  jieuf  journées  de  niarche; 
et  Açoudij  étant  déjà  porté  sur  notre  carte  à 


TROISIÈME    PiLRTlE.  3l7 

une  journée  plus  au  sud,  Agadez  ^e  trouve, 
par  cette  dernière  distance,  placé  à  deux  journées 
ou  un  demi-degré  aussi  plus  au  sud  que  sur  la 
carte  de  Rennell,  et  occupe  la  raéme  position 
que  celle  de  Begzam  dans  la  carte. du  géographe 
anglais. 

Entré  A  godez  et  Cachenah,  la  récapitulation 
des  distances  partielles  de  notre  itinéraire  donne 
dix-neuf  journées  de  marche.  Celle  de  l'itiné- 
raire du  major  Rennell  n'en  fournit  que  dix- 
sept  (i)  ;  ce  qui  porte  encore  plus  au  sud  Car 
chenak,  qui  se  trouve,  par  la  combinaison  de 
toutes  ces  distances  réunies,  placé  sur  notre 
carte  à  quinze  degrés  dix  minutes  de  latitude 
nord ,  et  à  huit  degrés  trente-sept  minutes  de 
longitude  à  l'orient  de  Paris. 

(i)  Cet  itinéraire  est  ainsi  détaillé ,  p.  i63  et  164  des  Pro-- 
ceedings,  de  l'édition  de  17^  in-4®,  ou  1810  in-8**  : 
^  Journées. 

Agndez  . . .  '. 

Begzam 3  Begzam  est  une  petite  ville  où 

il  n'y  a  que  des  tentes  de  peaux. 

Tegomah a  Petite  ville. 

Hauteurs  et  désertsdont 

la  traversée  emploie. . .   5 
Cachenah 7 

Total...  17   journées  de  marche. 


3l8  REGHERCHBS    SUR    l'aVRIQUE. 

La  ville  de  Cachenah^  selon  notre  itinéraire, 
est  très-oontidérable ,  et  l'on  y  entre  par  sept 
partes. 

Nos  lecteurs   savent  déjà^  par  la  première 
partie  de  cet  ouvrage,  que^CacAe/zaA  est  une  viHe 
fort  ancienne.  Léon  TAfricain  la  décrit  très  au 
long  (f).   Marmol  (2)  n'a  fait  que  traduire   la 
description  de  Léon  l'Africain.  Selon  les  infor- 
mations  données   par  le    i\ègre  Abd-Arrach- 
màn  Aga  à  Niebuhr,  Cachenah  est   une  ville 
grande     et    commerçante ,    sur    la    route    de 
Zanfara  au  Fezzan;  elle  est  habitée  par  un 
sultan  vassal  du  roi  ^Afnou:  mais  il  ne  s'agit 
pas,  je  crois,  ici  de  la  ville  ni  du  pays  ^AfnoUj 
sur  la  route  de  Haoussa  à  Timhouctou.  Afnou 
est   ici   le  synonyme  de  Soudan^  qui    signifie 
noir  (3);  et  cela  voudrait  dire  que  le  sultan 
souverain  de  Cachenah  l'est  aussi  de  toute  la 
Nigritie.  Alors  ceci  ne  serait  qu'une  exagération 
patriotique  d'Abd-Arrachman.  Le  territoire  de 
Cachenah  y  selon  le  même,  renferme  les  villes 
suivantes  :  Khago  (  peut-être  le  Gago  de  Léon), 
Kankara^  Koutourkouschi  ^   Kiana^   Saghani, 

(i)  Léon,  r Africain  dans  Ramusio^  t.  I,  p.  79  b. 

(2)  Marmol,  t.  III,  liv.  ix,  ch.  xi,  page  (>8. 

(3)  Hornemann's  Travels  ^  p.  184.  Le  nom  de  Gnewa^ 
que  Ton  donne  au  Niger  à  Timbouctou ,  signifie  aussi 
noir.  Voy.  Proceedings ,  tome  I^  p.  124,  édit.  in-8**. 


TROISIEME    PARTIE.  3l^ 

Taghamez  (peut-être  le  Tegomah  de  Titinéraire 
de  Rennell),.et  Dandoudjighi.  Toili  ces  lieux 
sont  désignés  par  la  dénomination  de  Bemis, 
c'est- à- dire  forteresses. 

Selon  Inhammed  (i)  et  Ben -Ali,  le  Niger  est 
à  cent  milles  au  sud  de  Cachenah.  Ce  Niger 
doit  être  le  \Quolla  de  M.  Bowdich. 

Cachenak  est,  selon  les  mêmes, ^ur  le  chemin 
du  Fezzan  à  lat-Câie-d'or  et  au  pays  des  Aschan- 
tis.  \j^  royaume  de  Cachenah^^X.  borné  au  nord 
par  les  montagnes  ^Eyré^  au  sud  par  le  Niger  ^ 
à  l'est  par  le  Zanfara  et  l'empire  du  Bomou  (a). 
Il  y  a,  dit -on,  quatre-vingt-dix-sept  jours 
de  tnarche  de  Cachenah  à  Gondjah^  et  Gondjah 
est  à  quarante -six  journées  de  la  côte.  Ces  in- 
dications peuvent  servir  à  déterminel'  les  posi- 
tions des  lieux  qui  sont  entre  lés  ^ands  fleuve$ 
4»  foirrfrwi  -et  4a  i^âte-d'of  '  elles  soi^tent  des 
limites  de  notre  carte  et  du  plan  de  nos 
recherches  N,  et  concernent  celles  auxquelles 
M.  Bowdich  a  dû  se  livrer  pour  perfectionner 
l'essai  de  géographie  qu'il  a  publié  dans  son 
Voyage  chez  les  Aschantis,    y 

Revenons  à  notre  itinéraire:  le  lieu  le  plus 
important  qui  s'y  trouve ,  après  Tripoli  et  Cû* 

(i)  Proc^dingSy  p.  164,  édit.  in-4°. 
(a)  Ibid. 


320  RECHERCHES     SUR     l'aFRIQUE. 

chenah^  est  ^ godez.  Aussi  Hagg-Cassem  nous 
donnent- il*  des  détails  intéressants  sur  cette 
ville  :  selon  lui,  elle  est  plus  grande  que  Tripoli 
de  Barbarie ,  et  est  située  dans  une  plaine.  11  y 
a  un  marché  :  les  Touariks  y  font  commerce  de 
bœu&  et  de  moutons.  Les  hs()3itants  ôHJgadez 
tirent  leurs  vêtements  de  Cachenah,  de  Gouber 
et  de  Zenferanah^  qui  est  probablement  Zan- 
fara.  Us  donnent,  en  échange ,  du  sel,  qu'ils  se 
procurent  de  Bornou^  du  pays  de  Fizchy  et  de 
Belma{i).  Le  Belma  ou  Bilma  est  connu  des 
géographes  (2).  Cette  contrée ,  qu'habitent  les 
Tihbos^  est  placée  au  sud  du  Fezzan^  à  l'ouest 
de  Kaouar  :  mais  le  nom  de  Fachy  a  été 
jusqu'ici  inconnu  çn  géographie.  Selon  Hagg- 
Gassem,  le  grand  commerce  que  fait  Agadez 
rend  cette  ville  riche  et  florissante. 

D'après  les  renseignements  donnés  à  Horne- 
mann  et  à  M.  Magra  (3),  les  KoUouvy^  tribu  des 
Tbwan^j,  possèdent  le  pays  èiAgàdez;  et  il  sem- 


(i)  Voyez  ci-après,  dans  V Appendice, 

(a)  Voyez  Hornem'anrCs  Trat>els ,  j^,  178,  et  p.  267  de  la 
traduct.  fr.  Hornemann  divise  les  Tibbos  en  six  tribus  : 
1^  Rechaddy;  a*"  Fibabo;  3**  Birgou;  4*»  Ama;  5**  Bilma; 
6**  Tibbos  nomades. 

(3)  Voyez  Homemann's  Travels^  p.  iSi ,  et  p.  a8o  de  la 
traduction. 


TROISliUiE     PARTIE.  Sil 

faierait  qu*ils  l'ont  conquis  depuis  peu.  Ce  pays , 
avec  d'autres tprovinces  limitrophes,  forme  un 
état  qu'on  nomme  Ashen,  Du  côté  du  sud,  il 
touche  au  Ccichenah^  qui,  suivant  les  mêmes  ren- 
seignements ,  fait  partie  de  l'empire  de  Haoussa  ; 
et,  à  l'est,  il  confine  au  Bornou  :  sa  capitale  est 
Agadez^qui  est  aussi  grande  qu'un  faubourg 
de  Tunis.  Samfarat  ou  Zarifara  et  Gouber  sont , 
d'après  les  mêmes  informations,  contigusà^j- 
ben ,  et  lui  paient  tribut.  Peut-être  est-ce  là  unfe 
erreur,  due  au  commerce  que  Zanfara  et  Gouber 
font  ^yec  jésben ,  9xiis\  que  nous  l'apprend  notre 
itinéraire. 

Selon  les  renseignements  donnés  à  M.  Magra, 
Gazer  y  Tagazy^  Djennet,  ne  seraient  que  de 
très -petits  villages  ;  dispersés  sur  un  espace 
immense ,  et  possédés  par  les  Touariks,  Les 
plus  oïientaux  des  Touariks  sont  les  Khagara 
ou  Hagaruy  qui  sont  au  sud  du  Fèzzan,  et 
dont  Ganaty  ou  la  ville  des  Agary  y  est  peut- 
être  la  capitale  (i). 

L'itinéraire  que  nous  venons  d'analyser  con- 
duit de  Tripoli  à  Cachenah  par  \eFezzan,  Cepen- 
dant il  ne  passe  point  par  Mourzouk,  la  capitale 
de  ce  pays,  mais  par  Teghery  ou  Teghereïriy  qui, 


(i)  Homemann*s  TraveUy  p.  182,  et  p.  a8x  delatraduct. 
franc. 

îii 


322  BECHERGHES    SUA     l'aFRIQUE. 

d'après  les  renseignements  communiqués  à  là 
Société  des  découvertes  d'Afriqui^st  la  dernière 
ville  du  Fezzariy  du  coté  de  l'ouest  (i).  Pour 
tracer  Jes  routes  qui  conduisent  directement  de 
Tripoli  à  Mourzouk ,  nous  nous  sommes  servis 
de  l'itinéraire  d'un  vieux  Tripolitain,  qui  avait 
fait  deux  fois  ce  trajet.  Cet  itinéraire ,  traduit 
par  M.  Venture,  a  été  publié,  par  M.  Langlès, 
à  la  suite  du  voyage  de  Hornemann  (a).  Nous 
l'avons  combiné  avec  le  journal  d'une  expédition 
faite,  en  1810,  par  Sidy-Mohammed ,  fils  aine 
dîi  pacha ,  dans  les  montagnes  au  sud  de  Tripoli, 
Nous  n'entrerons  point  ici  dans  le  détail  des 
calculs  qui  assujettissent  chacune  de  nos  po- 
sitions, parce  que  cela  allongerait  trop  cette 
analyse.  D'ailleurs  cette  partie  de  notre  carte 
ne  §e  rallie  que  d'une  manière  indirecte  avec 
Godâmes  et  Tegherem,  et  a  moins  de  relation 
avec  l'objet  de  nos  recherches,  qui  ont  pour 
but  principal  l'intérieur  de  l'AMque.  Nous  ferons 
seulement  remarquer  que  la  combinaison  des 
distances  nous  a  permis  d'assigner  avec  assez  de 
certitude  la  position  d'une  ville  importante  de 
ces  contrées,  qui  avait  disparu  de  nos  cartes, 


(i)  Voyages  de  Hornemann ,  traduits  de  l'anglais  et  eutg- 
mentes  de  notes  par\M.  Langlès,  i8o3,  m-8**,  p.  45i. 
(a)  Ibid.,  p.  451-463.  \     ,-, 


TROISIÈME   PARTIE.  3îi3 

quoiqu'elle  existât  sur  la  carte  d'Afrique  de 
d'Anville  :  je  Teux  parler  de  Mezdah^  qui  est 
entourée  de  murailles,  et  l'entrepôt  de  com- 
merce entre  Gadamès,  Mourzouk  et  Timbouc^ 
tou  (i). 

La  position  de  Sokna  se  trouve  aussi,  par  le 
moyen  des  distances  qui  nous  sont  données  dans, 
l'itinéraire  du  vieux  Tripolitain,  portée  beauv 
coup  plus  au  sud  que  sur  la  carte  du  major 
Rennell ,  et  sur  toutes  celles  qu'on  a  publiées 
depuis. 

Sokna  est  la  première  ville  de  la  dépendance 
du  Fezzan ,  qu'on  trouve  sur  la  route  de  GAa- 
jyan.  Elle  est  peuplée  de  blancs  et  de  noirs , 
tous  Musulmans  ;  et  les  caravanes  de  Tripoli, 
qui  se  rendent  à  Mourzouk^  s'y  reposent  plu- 
sieurs jours.  De  Tripoli  aux  confins  du  désert 
de  Sahara,  par  les  montagnes  de  Gharyan^ 
on  ne  compte  que  trois  jours  de  marche;  et 
en  quittant  ces  montagnes,  on  se  dirige  vers  le 
sud,  et  l'on  rencontre  bientôt  un  lieu  nommé 
EUGaryeh  :  là,  des  monceaux  de  colonnes,  et 
des  tours  renversées ,  anfioncent  l'emplacement 
d'un  lieu  ancien ,  et  ont  fait  croire  à  l'existence 


(i)  Journal  de  VExpédidon  de  Sidy- Mohammed -Bey 
dans  les  montagnes  du  Gharjan  en  1811  (manuscrit). 

ai. 


3!i4    RECHERCHES  SUR  l'aFRIQUE. 

d'une  ville  pétrifiée  (i).  I^  Sebaâ  de  l'itinéraire 
du  vieux  Tripolitain  est  le  Sebati  'd'Abd-Ar- 
rachman(2).  Selon  le  Tripolitain,  Sebaâ  contient 
près  de  trois  mille  noirs,  parmi  lesquels  il  y  a 
quelques  Arabes  (3). 

Suivant  les  renseignements  donnés  à  la  suite 
jde  cet  itinéraire ,  il  n'y  a  que  vingt  journées  de 
marche  de  Bornou  à  Cachenah ,  ville  nègre, 
qifon  assure  être  située  à  l'est  de  Bornou, 
C'est  tout  le  contraire,  et.  c'est  à  l'ouest  qu'il 
fallait  dire. 

Ces  mêmes  renseignements  nous  apprennent 
que  les  esclaves  nègres  qu'on  trouve  au  Fezzan 
sont  amenés  de  Bornou ,  et  aussi  que  les  mar- 
chands de  ce  dernier  pays  tirent  la  poudre  d'or 
qu'ils  portent  kMourzouky  de  Goundjeh^yiile, 
ajoute  -  t  -  on ,  située  au  nord  de  la  Guinée. 
Godnd/'eh  est  évidemment  le  même  lieu  que  le 
Gondjcàt  de  la  première  carte  de  Rennell ,  pu- 
bliée en  1790  (4y,  lieu  qu'il  place  à  l'ouest  de 
Degumbà\  au- nord  Ae^Tounouwah  et  à^Assen- 
taïy  et  do»t  il  a,  depuis,  changé  le  nom  en 

(i)  Voyages  de  Fr.  Homemann  dans  V Afrique  septen- 
trionale y  trad.  franc.,  p.  454  et  455. 
(a)  Voyez  ci-dessus,  p.  73. 

(3)  Traduct.  franc,  des  Voyages  et  Homemann^  p.  456. 

(4)  Proceedings  of  the  Association^  etc.,  1790,  in-4'. 


TROISIEME    PARTIE.  3^5 

celui  de  Kong  :  ainsi  donc  Goundjeh  de  1-itiné* 
raire  de  Venture,  est  le  même  lieu  que  le  Kong 
du  major  Rennell ,  de  M.  Bowdich ,  et  probable- 
ment aussi  le  Congé  de  Delisle  et  le  Conche  de 
d'Anvillè  :  tant  il  est  vrai  que  tous  les  rensei- 
gnements concourent  à  prouver  l'active  et  fré- 
quente communication  des  peuples  de  la  côte 
de  Guinée  avec  le  Soudan  et  le  nord  de  l'Afrique. 

§  V.  Sur  un  Itinéraire  de  Gamba  à  Cachenah^ 
à  Bornou  et  à  la  Mecque. 

M.  Bowdich,  dans  son  ouvrage  sur  les  jds^ 
chantis,  regrettait  d'avoir  perdu  un  itinéraire  de 
Gamba  à  la  Mecque,  qui  lui  avait  été  donné 
par  un  chérif  nommé  Brahima.  Il  a  depuis  re- 
trouvé cet  itinéraire ,  et  nous  l'a  remis.  M.  de 
Sacy  a  bien  voulu ,  d'après  le  désir  que  nous 
lui  avons  témoigné,  en  faire  la  traduction.  Nous 
l'avons  jointe  aux  autres  itinéraires  que  nous 
avons  insérés  dans  notre  Appendice.  On  verra^ 
que  ce  n'est,  comme  tous  ceux  qu'a  déjà  publiés  * 
M.  Bowdich  dans  son  ouvrage,  qu'une  suite  de 
noms,  sans  indication  de  temps  ni  de  distance^.' 
Toutefois ,  comme  le  chérif  Brahima ,  et  tous 
ceux  qui  ont  remis  des  itinéraires  à  M.  Bowdich, 
lui  ont  assuré  qu'en  général  chaque  nom  cor- 
respondait à  une  halte  ou  à  une  journée  de 
route ,  il  a  supposé  qu'il  en  était  de  même  pour 


3^6  RECHERCHES    SUR    LAFRIQUE. 

tous  les  autres  itinéraires  qu'il  avait  publiés  ; 
et  il  a  entrepris  de  les  assujettir  tous  à  des  cal- 
culs géographiques. 

Au  moment  où  nous  terminions  Timpression 
de  nos  Recherches,  M.  Bowdich  nous  a  remis 
un  exemplaire  de  la  carte  qui  est  résultée  de  ce 
dernier  travail  (i),  et  les  trois  premières  feuilles 
de  l'ouvrage  qui  en  est  l'analyse,  et  qui  pré- 
sente ses  propres  vues  sur  l'intérieur  de  l'A- 
frique (îî). 

M.  Bowdich,  cédant  aux  observations  que  nous 
lui  avions, £aites  dans  une  de  nos  notes  (3),  a 
donné  à  part  une  carte  spéciale  du  pays  des 
Asçhantis^  basée  sur  ses  propres  observations,, 
sur  des  itinéraires  détaillés ,  sur  des  relevés 
exacts  des  cotes  qu'il  s'est  procurés ,  et  sur  la 
comparaison  qu'il  en  a  faite  avec  les  cartes  de 
*  d*Anville  et  les  relations  des  autres  voyageurs. 
Cette  partie  de  son  travail ,  ainsi  que  ce  qu'il  a 
donné  sur  les  environs  du  cap  Lopès^  sont  des 
«acquisitions  précieuses  pour  la  géographie ,  mais 

qui  ne  font  pas  partie  de  notre  sujet. 

■  .  ^  »■■■_■ 

(i)  ^  map  of  north  ivestem  Africa ,  4^dicated  to  the 
African  Association  and  constructed  from  original  itinera- 
ries  by  T.-E.  Bowdich,  i8ao  ;  deux  feuilles. 

(îà)  Essay  on  the  geography  of  north  western  Africa , 
in-S**,  Paris. 

(3)  Yoyaz  ci-dessus,  p.  128,  à  la  note. 


VROr  SI ÈHE -PARTIE.  3^7 

Le  reste  de  la  carte  de  M.  Bowdich  est  beau- 
coup plus  hypothétique,  et  se  fonde  sur  des 
documents  plus  incertains. 

On  comprend  en  effet  que ,  dans  des  itiné- 
raires rédigés  sous  la  forme  d  une  simple  liste 
de  noms,  sans  aucune  indication  de  temps  ni 
de  distances,  la  supposition  qui  fait  compter 
le  nombre  des  journées  par  celui  des  noms, 
doit  produire  un  nombre  de  journées  plus  con- 
sidérable que  celui  qu'il  a  été  nécessaire  d'em- 
ployer dans  les  pays  très -peuplés,  et  moindre 
que  celui  qu'on  a  réellement  employé  dans  les 
contrées  désertes.  Donc,  en  admettant  qu'il  y 
eût  compensation  à  cet  égard  sur  un  très-long 
itinéraire,  et  que  l'ensemble  pût  être  consi- 
déré comme  exact ,  les  positions  intermédiaires 
se  trouveraient  nécessairement  affectées  d^er- 
reurs  graves  par  l'effet  de  l'usage  de  docum^ts 
aussi  peu  précis.  Au  moyen  des  itinéraires  que 
nous,  avons  analysés,  dans  lesquels  les  lieux 
sont  non-seulement  indiqués ,  mais  décrits^  où. 
l'on  ^  fait' connaître  le  nombre  des  heures  de 
repos ,  et  celui  des  heures  de  voyage ,  nous 
avons  pu  espérer  de  mesurer  avec  quelque 
exactitude  la  marche  des  caravanes  dans  le 
Grand -Désert,  parce  que  cette  marche ,  sur 
cette  immense  surface ,  est  presque  nécessaire- 
ment uniforme,  et  que  les  caravanes  dans  ces 


3a8         RECHERCHES    SUR    l'aFI^IQUE. 

contrées  stériles  ont  un  intérêt  évident  à  suivre 
autant  que  possible  la  ligne  droite.  Notre  point 
de  départ,  qui  est  Tripoli^  se  trouvait  déjà  dé- 
terminé; et  les  lieux  voisins  de  Timbouctouj  où 
de  Fautre  extrémité  de  notre  .itinéraire ,  étaient 
aussi  déterminés  par  des  observations  astrono- 
miques et  précises;* ce  qui  nous  a  donné,  au 
moins  pour  un  de  nos  itinéraires,  la  direction 
exacte  de  notre  route.  M*  Bowdich ,  d'après 
les  itinéraires  détaillés  qu'il  s'est  procurés  à 
Coumassie  ^  a  pu  fixer  assez  bien  les  points 
de  départ  de  ces  divers  itinéraires;  mais,  comme 
les  pays  situés  entre  la  Côte  ^  d'or  et  le  Sou- 
dan^ que  traveisent  ces  itinéraires,  sont  très- 
peuplés;,  et  coupés  par  des  forets,  des  fleuves, 
des  QïMtagaes ,  la  marche  des  voyageurs  ne 
peut  être  unilbnne  comme  celle  des  caravanes 
du  désert;  et  lors  même  qu'on  aurait  le  nombre 
exact  des  journées  employées  dans  le  trajet ,  il 
devient  difficile  de  Sie  servir  de  ce  renseignement 
seul,  avec  quelque  espoir  de  succès,  pour  des 
combinaisonSigéographiques,  puisqu'on  n<(.peut 
apprécies^ien  même  temps  la  longueur  du  chemin 
parcouru  dans  chaque  journée,  et  qu'on  a  au 
contraire  la  certitude  que  cette  longueur  varie 
beaucoup  suivant  la  nature  du  pays,  sur  la- 
quelle ces  itinéraires  ne  donnent  pas  la  plus 
légère  indication. 


TROISIÈME   PàRTI£.   1  3^9 

M.  Bowdich  nous  dit  que,  dans  un  voyage  de 
quinte  jours,  la  valeur  en  ligne  droite  de  la 
journée  de  chemin  ne  peut  pas  être  estimée  à 
plus  de  dix  milles  géographiques  dans  les  pays 
boisés  et  couverts,  tels  que  ceux  qu'il  a  parcou* 
rus  en  se  rendant  de  la  Côte -d'or  à  Coumas-- 
^e;  a  et,  ajoute-t-il,  d après  les  renseignements 
que  j^ai  obtenus  des  Maures  et.des  Nègres,  on 
ne  peut  pas ,  dans  un  long  voyage ,  évaluer  la 
longueur  en  ligne  droite  du  chemin  parcouru 
à  plus  de  quinze  milles  géographiques  par 
jour  (i).  »  Mais,  dans  l'échelle  de  sa  carte,  il 
n^évalue  qu'à  douze  milles  géographiques  en 
ligne  droite  la  longueur  du  chaâfiin.  parcouru 
dans  ces  pays  découverts,  sans. que  je  trouve, 
dans  la  partie  de  son  texte  que  }'ai  sou9  tes 
yeux,  l'indication  des  motifs  qui  l'ont  po^té 
à  faire  cette  évaluation:  enfin  il^i'a  pu  savoir^ 
puisque  ses  itinéraires  ne  le  lui  apprenaient  pas, 
quand  la  nature  du  pays  devait  lui  faire  esti- 
mer la  journée  à  dix,  à  douze <,  ou  à  quinze 
milles  géographiques  en  ligne  dro^;  c'est-à-- 
dire quand  il  devait  alonger  ou  raoc^oirGir  ses 
distances  d'jun  tiers  ou  d'un  sixième.  A  toutes 
ces  causes  d'incertitude  s'en  joint   une  autre 


(i)  BowdicVs  Essaj-  on  the  geography  of  north  western 
Afnca ,  p.  6. 


33o  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE.     - 

plus  grande  encore  ;  c'est  celle  de  la  direction  à 
donner  aux  divers  itinéraires.  M.  Bowdich  dé- 
termine la  longitude  des  différents  lieux  situés 
jsur  le  Quolla  ou  le  Niger,  où  passent  ses  iti- 
néraires, par  les  distances  de  ces  lieux  à  7ï/7i<- 
bouctou  :  mais  comme  c'est  en  naviguant  sut  le 
Quolla  ou  Niger  qu'on  se  rend  de  Timbouctou 
aux  lieux  ou  régions  iqui  sont  à  l'est,  les  dis- 
tances de  ces  lieux  et  de  ces  régions  sont  tou- 
jours données  en  journées  de  navigation  ;  or, 
on  n'a  pas  le  tracé  du  cours  du  Quolla  ou  Niger^ 
et  il  peut  couler  en  ligne  presque  droite  comme 
le  Nilf  ou  faire  des  détours  très -considérables 
et  très  -  multipliés  :  il  s'ensuit  qu'il  devient 
presque  impossible  d'assujettir  ces  distances  à 
des  combinaisons  géographiques,  et  que  la  di- 
rection à  donner  aux  itinéraires  peut  se  trou- 
ver affectée  d'erreurs  de  plusieurs  degrés  à  l'est 
ou  à  l'ouest  (i). 

Malgré  tant  de  causes  d'imperfection,  la  carte 
de  M.  Bowdich  sera  utile ,  parce  qu'à  beau- 
coup de  sagacité  l'auteur  a  joint  une  profonde 
étude  de   son  sujet,  et.  qu'elle  offre   des  re- 


(i)  Je  ne  parle  qne  de  la  portion  de  la  carte  de  M.  Bow- 
dich qui  concerne  rintérienr  de  TAf rique ,  et  non  de  celle 
qui  donne  le  pays  des  Jschantis^  k  laquelle  ces  obsenra- 
tions  ne  s'appliquent  pas. 


TROISIÈME    PARTIE.  33i 

cherches ,  des  rapprochements  curieux ,  et  des 
conjectures  probables,  présentés  d'une  manière 
claire  et  méthodique.  Nous  allons  donc  en  peu 
de  mots  examiner  ce  qu'elfe  nous  fournit  de 
plus  remarquable  pour  notre  sujet. 

Nous  y  voyons  d'abord  l'emploi  de  deux 
noms  .généraux,  qu'on  ne  retrouve  sur  aucune 
carte  antérieure ,  du  moins  dans  un  sens  aussi 
général.  Au-delà  des  contrées  boisées  qui  s'éten- 
dent jusqu^aux  confins  des  états  qui  bordent  lé 
royaume  des  Aschantis,  il  existe  au  nord  une 
vaste  région  sans  forets  et  souvent  sablonneuse, 
nommée  Sarem^  qui  comprend  plusieurs  états  : 
plus  ail  nord^  tout  le  pays  compris  entre  le 
Quolla  et  le  Gambarou  se  nomme  Mallowa  ou 
Marrowa,  Ainsi  le  Mallowa  renferme ,  selon 
M. Bowdich,  les  royaumes  de Haoussà^-^t  Zam- 
farra  et  de  Cachenah  ou  Cassina. 

Pour  ce  qui  concerne  l'emploi  .Ai  nom  de 
Saremy  M.  Bowdich  s'appuie  sur  les  informations 
qu'il  a.  reçues  à  Coumassie  ;  et  il  ajoute  que 
s'il  n'avait  pas  résidé  long -temps  dans  cette 
ville,  et  s'il  s'en  était  rapporté  aux  premières 
réponses  qui  furent  faites  à  ses  questions,  il  se 
serait  tromQjé  sur  le  sens  du  mot  de  Sarem,  et 
l'aurait  pris  pour  le  nom  d'un  royaume. 

Quant  à  Malloiva  ou  Marrowa^  c'est,  selon 
M.  Bowdich,  le  Melli  reg^io  de  Léon  l'Africain  et 


333  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

de  Marmol  (i) ,  placé  à  tort  au  sud  du  Niger  y 
d'après  la  prétendue  ressemblance  de  ce  uom 
avec  le  mot  de  Lamlam  ;  tandis  qu'au  contraire 
ce  dernier  nom,  qui  est  très -différent,  signifie 
sel  dans  le  langage  des  Foulahs  (2).  M.  Bowdich 
se  fonde  encore,  pour  Teroploi  du  nom  de  Mal- 
towa  comme  dénomination  générale,  sur, la  lé* 
gendede  la  carte  dessinée  (3)  sur  bois  que  j'ai  rap- 
portée précédemment,  où  il  est  dit  que  le  INègre 
nommé  Musse-Melly  est  roi  de  tous  les/ Nègres 
de  la  Guinée;  ce  qui  s'accorde  avec  la  relation 
d'Ibn-Batouta,dans  laquelle  on  trouve  que  Tim- 
bouctou  est  une  ville  du  royaume  de  Maly  (4), 
et  avec  les  renseignements  donnés  à  M.  Hut- 
chison,  que  le  roi  de  Ma/la  réside  à  Haoussa^ 
qu'il  a  sous  lui  sept  rois  tributaires  (5),  et  que 
tout  le  pays  arrosé  par  le  Joliba  ou  le  QuoLla  est 


(ï)  Bowdîch's  iS'woj  on  tke  geography  of  north  western 
Jfrica^  p.  24. 

(2)  Vovex  le  Vocabulaire  donné  par  M.  Iftollien ,  Foyage 
en  Afrique  ^  t.  II,  p.  1*7  5. 

(3)  J*ai  dit  dessinée^  et  non  gravée  comme  le  ditM.Bow* 
dich ,  p.  a4,  ce  qai  donnerait  une  fausse  idée  de  ce  monu- 
ment géographique  qni  est  manuscrit.  Je  Tai  souvent  cité, 
et  je  le  ferai  connaître  plus  en  détail  paf  ufte  dissertation 
spéciale.  Voye^  ci-dessiis ,  p.  19. 

(4)  Burckliardt*8  TraveU  inJfubia^  p.  537. 

(5)  MUsion  to  Jshanêee^  p.  197» 


TROISr:feM£    IPARtlE.  333 

soumis  ao  sultan  de  Mali-SimieL  Léon  F  Africain 
remarque  que  Melli  s'étend  le  long  du  Nil  des 
Nègres  l'espace  de  trois  cents  milles  ;  et  l'Arabe 
Ader  a  dit  à  M.  Seetzen  que  Cano  et  Melli  sont 
situés  entre  les  deux  bras  du  grand  fleuve  (i). 

Ces  rapprochements  sont  ingénieux  ;  mais 
sont -ils  suffisants  pour  appliquer  le  nom  de 
Mallowa  à  une  région  aussi  vaste  que  celle 
que  M.  Bowdich  a  indiquée  sur  sa  carte?  Je 
remarquerai  à  ce  sujet  que,  dans  un  des  itiné- 
raires qu'il  a  précédemment  publiés ,  les  noms 
de  Mallaia  et  de  Maly  y  figurent  comme  rioms 
de  ville ,  et  ne  désignent  pas  une  région  (2). 

A  Coumassie^  l'on  a  dit  à  M*  Hutcfaison  que 
les  quatre  plus  grands  rois  connus  sur  les  bords 
du  Quolia  étaient  les  rois  de  BaharnoUj  de 
Santambou^  de  Maii-Simiel  et  de  Mâlla  (3);  et 
M^  Bowdich  remarque  sur  ce  passage  que-Malla 
est  Mallowa  ;  alors  Mali-Simiel  est  différent ,  et 
le  nom  de  J^a//ou^a  n'aurait  donc  pas  la  signi^ 
fication  étendue  que  lui  donne  M.  Bowdich.  Il 
s'était  contenté,  dans  son  premier  ouvrage,  de 
faire  considérer  ce  nom  cotnme  synonyme  de 
Haoussa;  et,  d'après  cette  idée,,  il  avait  même 
inscrit  ce  nom  au  nord  du  Gambarou ,  contre 

(i)  Adehnig,  ilf^Arà/aA»  S,  tfa.  i,abth.  i46^i4a. 

(2)  Bowdich*s  Mission  io  Mhantee  y  p.  4^4. 

(3)  Ibid,,  p,  196. 


334  RECHERCHES    SCR    I-'aFRIQUE. 

l'assertion  faite  à  M.  Hutchison,  qui  place  Mali- 
Simiel  et  Malla  ou  McHlowa  sur  les  bords  du 
Quolla  et  au  sud  du  Gàmbarou: 

Si  Mallowa  ou  Marrowa  est  synonyme  de 
Haoussa^  l'extension  à  donner  à  ce  nom  dé- 
pend des  limites  que  l'on  doit  donner  à  Haous- 
sa  ;  et  nous  n'avons  pas  sur  ce  point  des  rensei- 
gnements suffisants  (r).  Je  dis  plus  :  il  y  a ,  dans 
les  auteurs  qui  ont  parlé  de  HaoussUy  des  con- 
tradictions que  M.  Bowdich  ne  nous  paraît  pas 
avoir  pris  suffisamment  en  considération.  Il  a 
adopté  pour  la  ville  àeHcLoussa  la  position  que 
nous  lui  avons  assignée ,  en  partie  d'après  l'iti- 
néraire de  Mohan^med ,  fils  de  Foui ,  qui  nous 
donnait  les  combinaisons  les  moins  certaines 
des  trois  itinéraires  qu€  nous  possédons  :  nous 
n'aurions  même  pas  hasardé  d'analyser  cet  iti- 
néraire, si  notre  position  de  Timbouctou  n'a- 
vait été  'préalablement  déterminée  par  celui 
d'Hagg-Cassem  et  par  celui  de  Mungo-Park. 
Toutefois  ^itinéraire  de  Mohammed, fils  de  Foui, 
s'est  trouvé  d'accord  avec  d'autres  autorités,  et 
place  Haoussa  à  vingt  -  huit  ou  trente  journées 


(i)  Dans  le  récit  dlsaac  nous  voyons  Dacha,  le  roi  àeSego, 
envoyer  tine  armée  potif  idétruire  le  royaume  de  Haoussa; 
ce  qui  semblerait  prouver  ^ue  ce  royaume-  n'est  pas  très- 
puissant.  Mnngo-Park,  %^  ^oyage^  in-4%  i8i5,-pé  ai6. 


TROISIJEME    PARTIE.  335 

au  nord-est  de  Timbouetou;  mais  le  récit  d'A- 
madi  FatouCûa,  qui  fait  parvenir  Mungo-Park  à 
Haoussa  par  une  navigation  sur  le  Joliba ,  et 
celui  de  Shabeeny  ou  Chabiny,  semblent  con- 
cerner une  autre  ville  ou  un  autre  pays  de 
Housa  ou  Hcvoussa  >  qui  est  à  cinq  journées  de 
marche  (i)  et  à  dix  journées  de  navigation  au 
sud-est  de  Timbouetou. 

Il  est  probable  que  les  membres  de  la  Société 
des  découvertes  en  Afrique  n'ont  gardé  vingt  ans 
le  récit  de  Shabeeny  sans  le  publier,  que  parce 
qu'ils  y  ajoutaient  peu  de  foi  ;  cependant  Rennell 
l'a  fréquemment  cité.  Si  le  récit  de  Shabeeny 
était  exact ,  il  mériterait  une^ande  attention^ 
Il  dit  que  la  langue  et  les  caractères  d'écriture 
de  Housa  diffèrent  beaucoup  de  l'arabe  ;  que  ces 
caractères  sont  les  mêmes  qu'à  Timbouetou  ^  et 
ont  près  d'un  pouce  de  hauteur  ;  qu'enfin  on  y 
écrit  de  droite  à  gauche.  Selon  Shabeeny,  Housa  ' 
serait  aussi  le  centre  du  commerce  de  l'or;  et  le 
canton. d'où  oi\  le  tire,  ne  serait  éloigi»é  de  la 
ville  que  de  seize  milles  (2).  Ce  renseignement 
contredit  néanmoins  le  témoignage  unanime  des 
auteurs  arabes,  qui  placent  le  pays  de  l'or  dans 
leOuangarah  ou  fTangarah^  contrée  qui  doit 

(i)  Shabeeny's  account  ofTimbouctoo  and  Haussa  ^  p.  38. 
(a)  Id.ibid.,  p.  5i. 


336         RECHERCHES     SUR    l'aFRIQIJE. 

êXve  assez  éloignée  de  Housa ,  et  même  de 
^  HaoussUf  si  ce  sont  deux  lieux  différents. 

M.  Bowdich,  considérant  Haaussa  comme 
synonyme  de  Melli,  remarque  que  le  récit  de 
Cadamosto,  en  i455,  se  trouve  d'accord  avec 
Içs  indications  modernes,  puisqu'il  porte  que 
l'on  compte  trente  journées  de  caravane  de 
Timbouctou  kMelli[i).  / 

J'ajouterai  que  si  Haoussa  et  Melli  sont  les 
mêmes  lieux,  le  récit  de  Shabeeny  se  trouve  con- 
firmé par  celui  deCadamosto;  car  ce  dernier  fait 
aussi  de  Melli  le  centre  du  commerce  de  l'or. 

Le  passage  où  Gadamosto  parle  des  routes 
que  suivait  ce  commerce ,  est  remarquable ,  et 
nous  prouve  que  les  chemins  *  des  caravanes 
étaient  les  mêmes  qt^aujourd'hui.  ce  L'or,  dit  ce 
célèbre  navigateur,  que  l'on  se  procure  à  MMi^ 
se  partage  en  trois  portions ,  et  prend  trws 
routes  différentes.  Une  première  portion  s'en 
va  pKar  un  lieu  nommé  Cochia ,  et  se  dirige  sur 
le  Cmre  et  sur  la  Syrie:  la  seconde  ;et  la  troi- 
sième portion  vont  à  Timbouctou;  mais  une  de 
ùQ%  portions  en  sort  pour  se  diriger  sur  Toety 
et  de  ce  lieu  est  transportée  à  Tunis  ebsur  toute 
la  côte  :  enfin  la  troisième  portion  se  dirige  sur 
Uoden ,  et  de  là  à  Oran  et  dans  le  détroit  de 

(i)  Ramusio,  édit.  de  i6i3,  p.  loo  A4 


TROISIEME   PARTIE.  337 

Gibraltar,  et. SLUSsi  à  Fez  et k  Maroc;  c'est  dani 
ces  différents  lieux  que  les  Chrétiens  et  les 
Maures  se.  procurent  ce  métal  (i).  » 

Ce  passage  important  vient  à  l'appui  de  Titi- 
Qéraire.  de  Mohammed ,  fils  de  Foui ,  que  nous 
avons  analysé ,  et  prouve  que  dans  le  quinzième 
siècle  les  caravanes  qui  se  rendaient  à  Melli  ou 
Haoussa^  se  dirigeaient  ensuite  sur  Timbouc-- 
tou,  que  de  là  elles  retournaient  directement 
au  nord,  à  Tunis  ow  k  Tripoli^  en  passant  par 
Touat  ou  Toët ,  ou  qu'elles  se  dirigeaient  à 
l'QCcident  par  \oasis  à'Hoden^  dans  laquelle  les 
Portugais  avaient  une  factorerie;  ou  bien,  elles 
se  rendaient  à  Noun  et  à  Akka^  ou,  tournant 
à  l'ouest,  elles  allaient  à  Arguin^  près  du  Cap- 
Blanc  y  dans  les  ports  des  Portugais.  D'autres 
caravane^  se  rendaient  directement  de  Melli 
au  Caire  y  en  passant  par  Cochia,  c'est -à*- dire 
'  que,  suivant  nous,  ces  caravanes  se  dirigeaient 
à  l'est ,  passaient  par  Cachenah ,  et  arrivaient 
dans  le  pays,  de  Cauka  de  nos  cartes'/le  Co^ 
ckùt  de  Cadamosto  :  ce  pays ,  sur  les  cartes  de 
Purdy  et  de  Rennell ,  est  le  même  que  celui  de 
F&tri  et  de  Baghermé. 

-Derlà  ces  caravanes  marchaient  drdit  au  Caire 
par  le  chemin  des  oasis;  et  cette  route  rep|*é- 
■j ■  ' 

(i)  Ramusio,  t.  I,  p.  xoo  verso  e.    - 


338  RECMBacHXS  sek  lafrique. 
^ente  tn  partie  eeUe  qn'radiqae  Titinéraire  ana- 
lysé par  M«  Bowdîch.  Si  lou  admettaiil:  que  son 
lac  Caudi  ou  Caoudi^es^  le  roéme  que  le  Cauga 
d'Edmi,  et  donne  s<m  nom  mu  pays  de  CàuÂa 
ou  de  Cocfiia ,  comvbe  M.  Bcrwdkh  a  baisfté  ee 
)w  de  quatre  degrés  plus  au  sud  ^  k  route 
indiquée  par  Gadamosto  aurait  traversé  le  Dar^ 
Four  et  te  ^adey-y  et  sirait  la  ménie  que  celle 
qui  est  indiquée  par  l'itinéraire  du  ehérif  Bra* 
hinia;  mais  il  faut  avouer  que  cette  rouie  eut 
été  beaucoup  moins  directe  que  Tautt^»  et  que 
l'indication  de  Gadamosto  s'accorde  mieux  avec 
les  cartes  qui  placent  le  lac  CuougA  ou  Càuga^ 
et  le  pays  de  Cùuka  ou  Cochia^  plus  au  no^d 
que  ne  le  fait  M.  Bowdich^  et  qui  recoiitlaissent 
une  seconde  ville  de  hoUsa,  plus  méridionale 
que  celle  de  Hnoussa  de  la  carte  de  ee  v<^g6«l'. 
Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  réflei^ions ,  la  carte 
de  M.  Bowdîch  nous  offre  d'abord ,  avec  l'iti- 
néraire du  ohérif  Brahima  ,  ceux  que  M^  Bow- 
dich  avait  publiés  dans  son  préoédeHKouvra^, 
conduisant  de  la  contrée  nommée  Safem  dans 
celle  de  MaB»^^  ;  ce  qui  forme  en  tout  que^e 
itipéraires  qui  coupent  le  ÇuoUa  ou^tffiget  en 
'quatre  endroits  difBérents,.  et  abôutiss^tlt  .ou 
nord  à  Haoussa  j  ou  à  l'est  à  Cachenêài ,  et  de 
ce  lieu,  par  une  seule  route,  au  Bomou  et  dans 
le  Baghermé, 


Le  pliits  occidâatal  de  pm  iiinérsMTes  part  de 
MuntouhQUy  au  oord-oiiest  de  Coumas^e^  dans 
k  pays  de  Gaman,  et  passe  par  Kong^  Kaybi^ 
Kajrriy  Garou  elDouwara,  et  aboutit  à  Djennij 
sur  le  QuoUa. 

lies  iTQÎs  autrea  itinéraires  p9rtent  de  YahnA^ 
cfiipHal^  célèbre  de  l'élat  de  Dagwum^a ,  qu^ 
M.  Bowdich,  sur  sa  nouyellé  carte,  p)ace  à  vingl 
i|iiqi»t<ei9*  p}u$>ati  nord  que  dans  celle  de  son 
Toy{ig^«2  \^  plua  oecidehtal  de  ees  "tvois  itiné- 
raires atl^nt  enauite ,  par  deux  routes  diffé^ 
r^tes,  Gaurouma;  celle  de  Touest,  par  Irigwa 
et  Fobi;  celte  de  Test,  par  Ensoko  ou  Sokoquo 
et  Matcka-w^quàdi.  De  Gcmvouma^  qui  est,  siii^ 
VJHit  M.  Bowdic^ ,  le  Gourma  de  l'Arabe  fellata 
de  M.  Scetiep  (i),  cet  itinéraire  passe  par  Doul- 
huiy  et  afctoint  le  Quoila  à  Test  de  Oaw^  de  ?b- 
kogirri  et  de  jf/iè/. 

Lie  troisième  itinéraire ,  qui  est  celui  du  chërif 
B^abima,  passe  par  OanAa^  TounoumayKùmbm^ ' 
Gouiel ,  '  imrÂan ,  Mahmx^i^  Bargon  ;  puis ,  tra- 
versant; le  fleuvf^  Çuollpij  il  se  sépare  en  deux 
branches,  dont  l'une  conduit  droifà  l'est,  à  Ca- 
chenak^  l'autre  droit  vers  le  nord,  à  Haoussa, 
ça  passant  par  Qamkaeli.  Cette  branche ,  et  une 
autre  petite  qui  est  au  nord^est,  conduisent, 


(i)  Essay^  p.  20. 


34o  RKCHERCHSS    SÛR    l'aFRIQUE. 

par  Fillaniy  le  FuUan  de  Ben -AU,  à  Kalla" 
ghi,  lé  Coiiega  de  DeUttle;  ces  deux  lH*anches 
traversent  la  rivière  Gambarou  et  en  déterrai-' 
nent  le  cours. 

De  Gamhadij  qui  est  à  deux  journées  du 
QuoUa  ou  du  Nigeryyi^cpikHaaussa^  on  compte 
quinze  journées  :  on  traverse  le  Gambarou  le 
neuvième  jour  ;  et  *  le  petit  état  de  Zessà  se 
trouve  entre  cette  dernière  rivière  et  Haoussa  (i). 

Le  quatrième  itinéraire ,  ou  le  plus  oriental 
de  ceux  qui  traversent  le  Quolla^  passe  éga-^ 
lement  par  Gamba  ^  conduit  à  Gourousiéj  k 
ZougoUj  à  Barrjogou  et  à  Toumbea.  A  cette 
ville,  cet  itinéraire  est  joint  par  un  autre,  qui 
forme  un  cinquième  itinéraire,  plus  oriental  que 
tous  les  autres,  venant  de  Dahomey^  et  traversant 
le  pays  de  Yarriba.  De  Toumbea^  l'itinéraire,  en 
iK>us  faisant  traverser  lès  pays  de  Kaiama  et  de 
ff^awawaw  ou  Ouaouaoua  (a),  passe  le  QuoUa 
ou  Niger  à  l'endroit  où  est  la  petite  île  ée  Congé 
ou  Go/i£^V,  position  importante,  parce  qu'elle  est 
connue  pour  être  à  vingt -cinq  jours  de  navi- 
gation de  Kabra  ou  du  port  de  Timbouctou. 
Déjà  l'itinérafire, traversant  le  pays^lel^a^ottrâ, 
et  laissant  à  Touest  Goubirri  et  Zamfara ,  et  à 

(i)  Essaj^  p.  2*5. 

(a)  Certains  rapports  donnent  à  croire  «|ue  c'est  dsi^ns  ce 
pays  qn  a  péri  Mungo-Park. 


TROISIEME   PARTIE.  34l 

Test  Noufie^  Boussah^  Rakkah\,  Atùzgaràh  et 
Koufi^  conduit  droit  à  Caçhencûi ,  que  les  cal- 
culs de  M.  Bowdich,  d'accord  avec  les  nôtres, 
placent  un  peu  plus  au  sud  que  ne  l'avait  fait 
le  major  Rennell. 

La  position  de  YaoïHmra  ou  Yawouri  se  trouve 
identifiée  avec  celle  de  Condji,  et  est  à  vingt- 
cinq  jours  de  navigation  de  Kabrn,  à  quarante^ 
deux  journées  de  Dagwumba  ou  de  Yahndi^  et 
à  dix-huit  de  Cachenah  (i). 

De  Cachenah  au  Bomou  nous  n'avons  plus 
qu  UB .  seul  itinéraire ,  celui  du  chérif  Brahima , 
qui,  traversant  Successivement  Tétat  de  Da^ 
woura^  de  Kano^  de  On/i^oi^ra,  aboutit  à  Bor^ 
nou ,  et  sur  les  bords  du  Djad  et  du  Shary  réu- 
nis ,  dans  le  Ba^iermé. 

La  ville  -de  Bornou  (a) ,  d'après  les  résultats 
qu'on  t  donnés  l'itinéraire  et  les  calculs  de  M.  Bow- 
dich,,est  placée  à  vingt  degrés  à  l'est  du  méri- 
dien  de  Gre^iwich  (vingt -deux  degrés  vingt 

M        w  I  I     I  II    I  : 

(i)  Bssay^  p.  35k 

(a)  M.  Èowdich  (  Essay ,  p.  Su  )  remarque  qu'Edriii 
Bonime  dfiXthanJiaL  capitale  do  Bornou;  d'AnTille^  Carne ^ 
d'après  les  informations  qu'il  avait  reçues  ;  £iasie  Jel  la 
nomme  iRfoX-OM^/ ;  BurcUiardt,  Bemi^  et  d'autres  \^or/ioif  : 
mais  est-il  bien  certain  qu'il  soit  toujours  question  de  la 
même  ville,  ef  que  l'emplacement  de  la  capitale  de  Bomou 
n'ait  pas  varié  Mepnis  des  siècles  ?    ^ 


34b         RCCBSRCRSS    tVH    l^APRIQUE. 

minlttefl  <k  Paris  )^  et . Jirès  xJe  d«û^  d^rés  trente 
riiînii^^  pitis  ^  sud  <|ue  dans  Bro^vqae. 

Vé^t  ^è  Sorn&u  est  à  Tdaést  cke  Biigkenhé^ 
tt  &  au  siid  ie  rojrvuhie'deiilfef^oiMfozi^t  «ïelïii  ^ 
Quolla  ou  Quorra^  qui  est,  selon  M.Bôf^dîok^iè 
gsQuata  dé  Al.  Seët!aenv^'(f^'^^^  ^  ï)ixpuis ,  et 
Utittiid  de  Bttrckl«a<dt^  Le  ^«rte>(>ttoàSii«à)«ri^9e 
ce  pajFs ,  qui  d  ^mtctt^  au  Msidt  i[â>im2  M  iP«^/. 
TH  est  rmsettible  d«âON»tftc$»  q<i^dffl^b<là  i^tttfe 
de  M.  Bowdich. 

«IRefatironi^iit  ^u  premier  de  étoitte^âii^ls ou 
a«i  plus  oœkSetotail^  BJI.  Bo^iok'Hi^tle  ^xM  eit 
le  <|)Ius  inscérthin  «de  I0ti»,  ixitigxidii  ^qm^  isfi  etm- 
iMtfésàiiK^ès  gëogrophiqu\^  iA^%  ^^^dkimtis  ^td  ^^ 
qèlé  «e  Mrfmnient  i  Ife^^g^-,  «  iqt»  hiircMite^^ 
conduit  de  ce  dernier  psfy^^^tiJVigét  eVi'piê&Jiû 
^ctA  ^rt^neniierit'pea^quée,  à  tc»cmè  <to»  fHHiit^es 
-qn^  &t>t  t](*avèner^  H;ideftfie«)ls  pi$U|dès  'itiife- 
<ripHiiés?qlii  les  hailHtènt(i)^  au»m«tièt^»i  ^osi^ 
irante-sèpt  ^  jburs*  piemt*  ^  («rmitl^r  0(&  ^tri^è  t.  ^Ooâmie 

Tji7x>'W  "itTtixtr  VDX'  *ri  sffnxfc  tWii    iti  tjiii  iv  Tttï  xW..  UUW" 

dich  qui  aboutisse  à  TimhouctoH ,  il  en  Y^éâudte 
-qii-a^iî'a'eu'ftfttfun'ïhoyen  dfe^vérffier^a  positk>n 
HÎè  fcètfé  i^ftlë.  îl  a  adopté  idèlté^que  RennéB 
avait  dèfetniiiiêe  pour  lè  premier  voyage  de 
Mupgp-rPark;  tandis  que  nos  combinaisons  pla- 

■  I        ff  i  II"  I     iif.     J.i wi>  !■»<■■         »i   I     ■iiii^li         illi  II 

(i)  Essay^  p.  6. 


TAOISliUE    PARTIS.  343 

c^il  Timbouetou  un  degré  ânquaale  minutes 
plus  à  l'ouït,  et  un  de^é  :$ix  minutes  plus  au 
iifdrd.  La  mîèire  Coumba ,  .qu£  l'an  trayerse  çur 
cette  route,  nommée  Zamma  par  les  Maures, 
est ,  dit^<wi ,  large  et  profonde  ;  pei^-^tre  est-ce 
une  branche  du  BùhQrand^^  fleuve  que  les  ha-r 
hkant&des  pays  qu'il  arrose,  nommenl;  Comba^ 
selon  MoUien  (i). 

Ainsi  Jes  renaeigawiQiits  qu«  M.  ,Boiydich  a 
obtenus,  aufisi^bien  que  les  divers  itinéraires  que 
sa  /earle  nous  préftente,>€caacourent  également 
à  /prouvisr  cpe  le  connuerce  4a  k  Coterd'jor 
«yec  Finléiiaur  de  l'Afiicpie  ^  lieu  avec  les  con- 
trées fiitiiées  au  tuord-est ,  et  noa  a-vec  celles  du 
aord-oueat  :  et  il  est  ^obable.  qu'il  sersiit  plus 
Êioile,  &0L  parts»^  éeCoumMsie  ou  de  Y&ndhi^ 
de  pavrasar  à  Cacàûnah ,  à  Bomou ,  et  même 
au  CéMCj  .qu'à  TJmbo^aou;  car,  quatid  on  s'é^ 
bifides  iKMites ^babituellôs  du  comi^erçe , Jes 
<U£fictdtés  et  les  dangers  6e  multiplient. 

^Vevs4'eat,^/Bowdich .^ôk a^ec «oin  les  traces 
du  ÇuaUa^  qu'on  <traveme,  ainsi  que  je  l'ai  dii:, 
à'  Gandji  ou  Yawoura ,  à  ivingtjîKinq  joi^  de 
nairigaliîon  de  Kabr»;  puis,  en  descendant  ce 
fleuve  toujours  vers  J'est^  après  un  jour  de 
navigation,  on   trouve  Noufi^  de  Noufi^  après 


(i)  MoUien ,  Voyage  dans  Vm^rifiurde  l*4fnque. 


344  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQTJE. 

trois  jours  de  natation ,  on  traverse  Boussa;  de 
Boussa  le  QuoUa  arrose  successiveiiieiit  Hous-- 
sa  y  RcJikah  et  Atagara  :  cette  nav^tion  em- 
ploie douze  jours.  H' Atagara  au  royaume  de 
Quolla^Robba  ou  Quolla^lJffa^  on  compte 
trente  jours  de  navigation*  Après  six  autres  jours 
de  navigation,  encore  à  Test,  on  arrive  à  Mafi- 
goudou  (i). 

De  Mafigoudou  on  navigue  encore  treize 
jours,  et  Fon  parvient  aux  montagnes  qui  sé- 
parent le  QuoUa  du  lac  Caudi^  qui  est  à  deux 
journées  de  marche  au  nord  de  ce  fleuve. 
Tous  ceux  que  |f .  Bowdich  a  interrogés  Im 
ont  affirmé  que  le  QuoUa  ^  à  mesure  qu'il  s'ap- 
proche de  ces  montagnes,  devient  moins  con- 
sidérable. Ces  renseignements  se  trouvent  con- 
firmés par  ceux  qullornemann  a  <^enus  au 
Fezzan.  Nonobstant  cela^  M.  Bowdich  incline  à 
penser  que  le  Quoila  ou  JViger  s'écoule  dans  le 
Misseladj  qui  conje  du  nord  au  sud,  et  que 
le  JUîsselad  communique  avec  le  Bahr^el-uâda 
ou  le  Nil  par  quelques  rivières  peu  navi- 
gables. Cependant  M.  Bowdich  n'a  tracé  sur 
sa  carte  que  la    première  de  ocs  cOmmuni* 

(i)  M.  Bowdich  conjecture  qne  Jlfo/f^oiM/otf  ^  pourrait 
bien  être  la  province  de  Borgouj  que  Browne  nomme  Monr 
dagOj  et  Burckhardt  Modjo. 


TROISIÈRTE   PARTIE.  345 

cationfi  ;  il  ne  présente  l'au^^e  que  comme 
une  conjecture.  Il  croit  devoir  même  réfuter 
les  objections  qu'on  lui  a  faites ,  et  que  nous 
ignorons  :  pour  repousser  le  ridicule  qu'il  pré- 
tend qu'on  a  voulu  verser  sur  lui  à  ce  sujet, 
il  se  &it  un  rempart  de  toute  l'antiquité ,  des 
Africains  modernes,  et  des  géographes  de  nos 
jours  qui  ont  pensé ,  ainsi  que  lui ,  que  le  Niger 
communique  avec  le  Nil. 

Tout  ice  que  M.  Bowdich  écrira  sur  l'intérieur 
de  l'Alnque ,  bien  loin  d'être  sujet  au  ridicule  , 
sera  toujours  au  coptraire  un  o^et  d'attention 
pour  tout  homme  instruit;  encore  moins  pour- 
rait-on le  critiquer  d'émet^e  uae  opinion  att^Sr 
tée  comm^  un  £ait  par  tous  les  Arabes  d'Afrique, 
et  partagée  par  des  hommes  émineuts  par  leur 
savoir.  Il  y  a  peut-être  plus  de  danger  de  s'ex- 
poser à  une  censure  sévère  en  soutenant  contre 
tant  de  témoignages  l'opinion  contraire.  Toute- 
fois, comme  la  vérité  est  notr^  seul  but,  nous 
allons  examiner  s'il  est  vrai  qu'aucua  ancien  ait 
jamais  (à\t  que  le  Niger  communiquait  avec  le 
Nili  et  jusqu'à  quel  point  l'assertion  des  Arabes 
et  des  autres  hpi)itants  de  l'Afrique,  et  les  rai- 
sons alléguées  par  plusieurs  savants  d'Ëuropie, 
prouvent  que  cette  communication  existe. 


346  RECHElCHE-ft    StTm    ^AFRIQUE. 

§  VI.  Sur  retendue  et  les  limites  des  connais- 
sances  des  Anciens  relativejnent  à  V intérieur 
de  V Afrique. 

ViÀ  fittt  voir  piPécéckimneiil:  ^les  kiccmvéaiefits 
^i  {>ouVai^At  résulter  4e  mêler  les  notions  des 
aneiens  «ttr  l'Âiiique  avec  celles  epi'ont  obtenues 
les  modenaues  ;  fai  tâché  4tt  rdémonlrer  que  celle 
méthode  était  plutôt  propre  à  r^arder  qu'à 
avancer  les  progr^  de  'la  géographie.  Mais, 
qUféîquUl  Mit  vrai  qu'on  «le  peut  avec  quelque 
degi^é  de  certitude  fixer  la  position  d  aucun  lieu 
dans  rhitérieur  de  l'Afrique  d'2qf>rès  4es  anci^is, 
puisque  ci'eat  vouloir  espliqil^r  'l'iuednnu  par 
l'itKConnu ,  on  peut  cependaiit  déterminer  jus- 
qU'OÙ  ^  ^oiït  étendues  les  explorattonstdes  peu- 
ples de  Faixtfquitë  dans  cette  partie  du^monde. 
Oette  redierehe  n'est  pas  sens  ulâité,  puis- 
qù'éHe  aéhève  f  his^tow^  de  ;touiies«^les  décou- 
vertes feites  ju^qfu'ii  ce  jour  ^  «t  qu'elle  complète 
les  renséignemeirfis  que  l'on  a  obtenus  sur  ce 
sujet ,  et  que  nous  ârrons  eherdié  à  réunir  dans 
cet  ouvrage.  Mais  nous  avuns^enrec  )Ui9l?e  raison , 
différé  cet  %ycèmt^T^  jusqu'à  ee  qtie  nous  ^eusrions 
mifi  jMus  les  yeux  des  lecteurs  toui  les  docu- 
ments nUKlemês  qui  doivent  leur  seri^ir  de  base, 
et  donner  de  la  précision  et  de  la  clarté  à  nos 
interprétations. 


TROISliME    PA.YTfB.  347 

11  <M  «ne  chroonstanoe  qui  'oprpose  actuelle'^ 
ment  de  gnnids  obslaoles  aux  penptes  >  éclairés 
tfoi  seffaMent  <iie  ipënétner  dans  lUntétieur  de 
l'Afi^qoe^  c'e^t  qû  aucun  d'eux  ne  possède,  dans 
celle  partie  de  1-anciea  monde,  asses  de  terri- 
toire et  asseB  de  farces  miliftaîres  pour  faire  resr 
petier  son  nom  et  sa  ipuis^ance.  LesMiations  ies 
plos  tiishes  et  ies  pivs  dnrilîsées  de  l'Àntiquiilé 
oirt,  au  omtraîre,  fondé  de  vastes  états. dans  le 
jiovd  de  rAfrique,  et  ont  pemiant  long-*  temps 
Saàt  fleurir  daios  KB  Dégious  ies  sciences,  les  arts 
et  le  oommeiice.  ^Ues  ont^donc  eu,  sous  ce  rap- 
port, de  gnùds  amantages  -sur  las  modernes. 
On  aundt  toit  nëannoiiis  de  '  conclu w  de;là 
que  leurs  «onnaissanoes  sur  J'JntéiwuF  de  ue 
vaato  commooC  <mt  été  pltu»  «tendues  que  Mes 
notres.L4»  notions  de  l'antiquîiliéont  été  gr^iades 
et  fAiissantcs  leti  ^Europe  et  en  Asie;  t^t  cepen**- 
<fent 'plns((db  AariRoitîé  de  l'Ënrâpe  «et  plus- des 
trois: quarts  de  d'Asie  leur  fiHKnt  «oujouj^iin^- 

rfiToamiiions  vdonc  ks^réeits  des  iûstorieiiis,  et 
ies^  deaGripli<msf  des^ogvapbesgnees  et  ndmaîns, 
Jes  seuls  qui  nous  «restent,* et  'voyons; jusqu'où 
ife  'semblent  porter  ies  'lÎMoàtes  des  décoiftwéi^tes 
dans  l'intérieur  de  l'Afrique. 

Kous  nous  arrêterons  peu  au  passage  d'Es- 


348  REGHFBCffES    S0&    l'aFRIQUE. 

chyle  dans  Pvométhée  (i),  qu'on  a  Méguéf 
parce  que  son  interprétation  géographique,  n'a 
jamais,  fait  difficulté  parmi  les  savants.  Lorsque 
Prométhée,  enScjrihie  et  dans  la  région  du  Cau- 
case, dit  à  lo  de  traverser  d'abord  la  mer  mu- 
gissante ,  de  franchir  le  détroit .  qui  sépare  les 
deux  continents,  et  le  séjour,  des  villes  filles 
de  Phorcys,  qui  n'ont  jamais  aperçu  les  rayons 
du  soleil ,  ni  l'astre  de  la  nuit,  séjour  qui  est  aus» 
celui  des  Gorgones,  des  Gryphes  et  des  Arimaspes.» 
il  est  évident  que  le  détroit  désigné  par  le  poète 
est  le  Bosphore  Cimmérien.  Quand  Prométhée 
dit  enccM'e  à  lo  :  «  Tu  passeras  dans  une. terre 
éloignée,  chez  un  peuple  noir,  fixé  proche  les 
sources  du  jour,  aux  lieux  d'où  sort  le/leune 
d'Ethiopie,  »  il  est  évident  encore  qu'il  entend 
lui  prescrire  d'aller  trouver  les  «ources  du  Nil, 
qui  coulent  eu  Ethiopie,  et  qu'Eschyle  faisait 
venir  d'orient,  des  lieux  où  nait  le  jour,  et  non 
pas  d^oecident  Ainsi  ce  poète  parait  avoir  eu  une 
connaissance  confuse  de  Vjdstapus  ou  Bahr^d- 
jâzreky  et  de  ÏAstabùras  ou  Atabwa  des  mo- 
dernes; mais  il  a  ignoré  l'exislence  du  Bahr^- 
Abiad,qui  vient  de  l'ouest.  Prométhée,  dans 
Eschyle ,  ajoute  immédiatement  :  «  Tu  suivras 

(i)  Prom.  rinc,  806-811. 


TROiSi:àM£    PARtIE.  34^ 

les  bords  du  Nil  jusqu'à  la  cataracte,  où,  du 
haut  du  mont  Byblis,  il  précipite  ses  eaux  ma- 
jestueuses et  solitaires  ;  son  coui*s  te  conduira 
dans  Tile  triangulaire  di  Egypte,  n  II  fallait  èXrt 
bien  prévenu  de  Tidée  du  Niger  ^  pour  forcer 
le  sens  d-£schyle  au  point  de  faire  dire  à  Pro- 
métfaée  qu'il  était  nécessaire  que  lo  tra:^ersat 
le  détroit  de  Gibraltar  pour  arriver^  aux  cata- 
ractes du  Nil  et  au  Delta  d'Egypte;  et  qu'elle 
allât  chercher  les  sources  du  jour  aux  lieux  où 
le  soleil  se  couche. 

L'éclaircissement  géographique  de  tout  ce 
passage-  curieux  d'Eschyle  nous  mènerait  trop 
loin;  mais,  je  le  répète,  pour  l'objet  qui  nous 
occupe^  il  suffit  de  remarquer  qu'il  ne  présente 
aucun  doute  (i). 

Ajoutons  aussi  que  le  Nil,  soit  parce  qu'il 
traversait  des  contrées  fertiles  et  à  sol  noirâtre, 
soit  parce  qu'elles  étaient  habitées  par  des  peu- 
ples noirs ,  est  quelquefois  désigné  chez  les  an- 
ciens par  le  nom  de  Mêlas  ou  Niger  :  on  en  a 

(i)  La  fausse  interprétation  de  ce  passage,  qne  je  com- 
bats ici^  est  d*abord  due  à  M.  Dureau  de  La  Malle ,  dans  le 
cliapitre  xiit  de  sa  Géographie  physique  de  la  mer  -Noire 
et  de  V intérieur  de  V Afrique,  p.  97.  Cest'dans  cet  ouvrage 
que  M.  Bowdich  parait  Tavoir  puisée.  Voy.  Essay  on  the 
Geography  of  north'western  AJrica y  p9g®4l* 


3.521  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

\Atbara  ou  Tacazzé  et  du  Bar-el-^jébiad^  ou 
jusque  près  de  Shendjr^  où  l'on  met  Fantique 
Meroe  avec  beaucoup  ^de  vraisemblauce  (i);  et 
ensuite,  depuis  ce  point  jusqu'au  pays  de  Don- 
goia,  où,  selon  Browne  et  nos  cartes  modernes, 
sont  les  sources  du  Nil,  on  trouvera.que  Shendy 
ou  Meroè  est  placée  juste  au  milieu  de  cette 
navigation  (a). 

On  peut  donc  conclure  de  ceci  que  dès-lors 
Hérodote  et  les  Égyptiens  savaient  très -bien 
que  des  deux  rivières  qui  formant  le  NflflsL  plus 
considérable  est  celle  qui  vient  de  Fouest.  Ils 
connaissaient  imparfaitement  peut-être,  mais 
enfin  ils  connaissaient  le  cours  de  cette  rivière 

by  M.  Leake;  dans  Burckhardt's  TraveU  in  Nuhia,  p.  i63. 

(i)  Strabon  (lib.  xvii,  p.  1177  ^)  et  Josèphe  {Antîq. 
jud.^  lib.  II,  cap.  10  ^  p.  io3)  disent  que  Meroè  était  dans 
le  yoisînage  de  trois  fleuves;  ce  sont  le  Tacazzé  ou  VAtbara 
qui  est  V  Àstatl^ras  ;  VAbawi^  où  XAstapus  y  et  le  Bahr-el- 
Abiad  qui  est  le  Nil,  —  Voyez  la  carte  de  Leake  dans 
Bnrckhardt*s  Travels ,  p.  i63. 

(2)  Je  remarquerai,  en  passant,  que  le  .^naji»'  RefHiell, 
snr  sa  car^e^  établit  quarante  jours  de  marcbe  en  ligne 
directe  entre  Schilluck  et  Donga ,  et  qu'il  a  été  .suivi  en 
cela  par  M.  Purdy  et  M.  Bowdich  {Map  of  north  western 
uifiicay,a  shuts,  i8ao);  mais  Browne,  qui  est  la  seule 
aatortCé,ne  met  qne  trente  jours  de  marcbe  entre  ces  deux 
lieux,  royez  Browne*s  Travels\  p,  473. 


TROISIÈME   PARTIE.  353 

jusque  vers  les  lieux  où  nous  plaçons  Donga , 
où  s'étaient  réftigîés  les.Jlutamoles  ou  émi- 
grants,  qui  avaient  fui  la  domination  de  Psam- 
métichus  (i),  et  qui  se  nommaient  euxr mêmes 
Asmach,  Il  parait  qu'on  n'ignorait  pas  que  les 
sources  du  iVi7  étaient  eilcore  plus  au  sud;  et 
rien  ne  nous  prouve  le  contraire^  puisque  nous 
n'avons,  pour  placer  ces,  sources ,  que  les  seuls 
renseignements  obtenus. par  Brownè  au  Bar- 
Four. 

Il  résulte  de  ceci  queJes  Égyptiens  du  temps 
d'Hérodote  en  savaient  autant  sur. le  cours  du 
Wil  que  les  modernes;  et  il  n'y  a  pas  lieu  de 
s'en  étonner,  quand  on  considère  depuis  com- 
bien de  siècles  ce  peuple  était  établi  sur  ce 
fleuve,  le  culte  qu'il  lui  rendait,  le  haut  de- 
gré de  civilisation  et  la  nombreuse  population 
de  XEgfpte  dans  les  temps  ancietis.  Pour  recon- 
naître  le  cours  du  iW/,  il  n'y  avait  pour  les 
Égyptiens  ni  déserts  à  traverser,  ni  dangers  à 
courir- 

Il  en  était  autrement  pour  les  cinq  jeunes  Nasa- 
mons ,  qiii ,  selon  le  récit  d'Hérodote ,  seraient 
partis"^  du  voisinage  de  la  Gronder  Syrie ,  ou  du 
golfe  de  Sfdre^  et  qui ,  après  avoir  voyagé  à 


■F 


(i)  Hei«dot.,lib.  U,f^JL-  396- 

a3 


354  RECHERCHES    SUR    L'iiFRlQUE. 

Touest  et  traversé  des  déserts,  aq:ivèrent,  dit- 
on,  dans  une  ville  peuplée  par  de  petits  hoixiMes 
noirs  :  ils  virent  aussi  une  rivière,  dans  hu 
quelle  il.  y  avait  des  crocodiles;  elle  coulait 
le  long  de  cette  ville  de  l'ouest  à  F^est.  Les 
jeunes  Nasamons  retoiirnèretit  sains  ^  sau& 
dans  leur  pays,  et  l'acontèrent  ce  qu'ils  avaient 
vu.  Hérodote  ne  'donne  pas  d'autre  détail,  et 
n'indique  *ni  la  longueur  du  chemin  parcouiru , 
ni  la  quantité  de  temps  employée*  dans  ce 
voyagé  ;  ce  qui  laisse  un  champ  libre' aux  con- 
jectures. Le  major  Renneli,  Heeren,  et  plusieurs 
autres  savants  à  leur  exemple,  faisant  l'applfca- 
tion  des  renseignements,  obtenus  par  les  mo- 
dernes sm*  l'intérieur  de  rA6ique,onl  prbnoncë 
que  la  ville  où  s'étaient  rendu!  les  jeunes  Na- 
samons  était  dans  l'emplacement  du  Cachehah 
des  modernes,  et  que  le  fleuve  qu'ils  avaient  tu 
était  le  Niger  on  Joliba^  qui  coule  de  l'omet  à 
l'est.  Mais  on  ne  s'est  pas  aperçu  qu'indép^i- 
dàmment  de  l'invraisemblance  d'un  pareil  tra- 
jet, exécuté  par  tinq  jeunes  gens,  dans  des 
déserts  inconnus ,  l'on  contredisait ,  par  cette 
explication ,  le  .seul  renseigoemeat  positif  qui 
nous  est  donné  par  Hérodote  ;  ^est  la  direction 
du  voyage  vers  Touesl!.  Si  donc  ce  voyage  n'est 
pas  une  fable  inventée  par  ces  mêmes  Nasa- 


TBOISIÈHE   PARTIEt  "S^S 

ipons,  qui,'  après  s'être  rendus  dans  quelque 
oaiis  yoisine  de  IstGramle-Sjrriê^  auront  eiltendu 
parler  du  J\iger  et  des  contrées  situées  au-delà 
du  Grand*Désert,  nous  devons  chercher  la  ville 
où  ils  se  rendirent,  à  l'ouest  du  Golfe  de  ^dre^ 
et  au  s^  de  V Atlas ^  dans  les  vallées  de  Tafilety 
de  Darah  ou  autres,  où  sotit  des  fleiives  qui 
coulent  en  efifet  de  louest  à  Test.  Il  pouvait 
alors  y  exister  'des  Nègres ,  que  les  progrès  de 
la  population  des  colonies  asiatiques  et  euro- 
péenne ont  fait  disparaître,  et  repoussés  au- 
delà  du  Gçand-Désert.'  Abouiféda  place  à  Tex- 
irrité  de  la  Mauritanie  un  Lac  des  Nègres  (i). 
Qi^ant  aux  crocodiles,  Strabon  avait  entendu 
diire  que  4e  son  teipps  il  en  existait  dans  ces 
contrées  ;  et  eQes  nous  sont  encore  trop  peu 
connues  pour  pouvoir  assurer  qu'il  n'en  existe 
pas.  encore  aujourd'hui.  Strabopi  dit  aussi  que 
qi^ques  -  uns  pensent  que  les  sources  du  Nil 
ne  sont  pas  éloignées  de  l^Maurusie  (a).  Or, 
on  sait  que  la  Maunusie  ou  Mauritanie  étAit  À 
l'extrémité  nord -ouest  de  l'Afrique,  où  est  ac* 


(i)  Lacus  Nigrorum  est  in  uUimd  Mauriûinid,  in  fer  Kasr 
jfbdei  J^arimi  et  inter  3al»,  .magnus  lacus.  Abnlfed.  Geogr. 

(a)  Slrab. ,  li.  xvu  ^  p.  8a6  5  tradncté  franeaifte ,  t.  V, 

p.  454. 

a3- 


X 


3S6         RECHSRCHES    StTR    L^^RIQVE, 

tueNetnent  Je  royaume  de  Maroc ,  eu  j  compre^ 
nant  les  vallées  de  Darah  et  de  Tafilet^cpk  sont 
au  sud  de  VMlas;  peut-être  même  cette  croyance, 
qui  a  été  très-générale  dans  Fantiquité  y  que  le 
Nil  avait  sa  source  dans  la  Mauritanie ,  vient- 
elle  du  récit  d'Hérodote  sur  les  Nasamons. 

En  effet  Thistorien  grec,  après  avoir  dit  que  les 
Cyténéens  qui  lui  racontèrent  ce  voyage  des  cinq 
Nasamons^  le  tenaient  d'Etéarque,  roi  du  pays 
où  est  le  temple  de  Jupiter  Ammon^  ajoute: 
«  Quant  au  fleuve  qui  passait  le  long  de  cette 
ville  9  Étéarque  conjecturait  qiie  c'était  le  Nily 
et  la  raison  indique  que  cela  est  ainsi  :  en  effet 
le  Nil  vient  de  la  Libye  et  la  coupe  par  le  mi- 
lieu; et  (s'il  est  permis  de  former  des  conjec- 
turest  sur  les  choses  inconnues  d'aptes  celles  qui 
^ont  coniïues)  son  cours  est  paraUèle  au  cours 
de  Xlstef.  Ce  dernier  fleuve,  qui  traverse  aussi 
l'Europe  etia  coupe  par  le  milieu ,  a  sa  source 
près  de  la  ville  de  /^nè/î^/dans  le  pays  des 
Celiei.  Les  Celtes  habitent  au^elà  des  Chiennes 
d'Hercule^  près  des  CynésienSj  qui  sont  de  tous 
les  peuples  de  l'Europe  les  plus  reculés  vers 
l'occident.  » 

•'■  -  ' - 

(i)  Herodot  Màt,,  lib.  II,  cap.  33,  p.  3oi.  — £wcher 
(trad.  d'Hérodote,  t.  II,  f^.  27)  a  paraphrasé  ce  passage  en 
le  traduisant;  il  a  fait  passer  soû  confnentaire  dans  le 
texte. 


TROISIÈME   PARTIE.  •  JSy 

Nous  nous  arrêterons  un  instant  ^ur  ^e  ^^- 
sagë  important.  To,ut  le  système  géographique 
d'Hérodote,  pour  la  partie  occideQtale  de  Faiir 
cien  monde*,  s'y  trouve  renfermé  :  et , .  comme , 
suivant  nous,  ce  système  a  été,  relativetnent 
à  cet  objet ,  mal  compris  et  mal  exposé  par 
le  major  Rennell  (i),  nous  allons  essayer  de 
réclaircir  en  peu  de  mots.  Nous  trouverons 
d'ailleurs,  dans  cette  explication,  une  preuve 
évidente  qu'HérodoteMui- même  savait  que  les 
Nasamqps  s'étaient  dirigés  a  l'ouest,  et  que  la 
rivière  qu'ils  avaient  observée  était  à  l'extrémité 
nordrouest.  de  l'Afrique. 

Nous  voyons,  par  les  descriptions  d'Hérodote, 
qu'on  ne  connaissait  que  très -imparfaitement 
de  son  temps  la  partie  mpérieure  du  cours  du 
Danube  et  an  Nil.  Ces  deux  grands  fleuves, 
en  Europe  et  en.  Afrique ,  séparaient  alors  les 
contrées  inconnues  et  barbares  des  coaitrées  con- 
nues et  civilisées.  Cependant  Hérodote  croyait 
avoir  des  renseignements  plus  certains  sur  le 
Danube;  il  fait  surgir  ce  fleuve  des  lieux  voi- 
sins d'une  ville  de  Pjrène. ,  située  dans  le  .pays 
des  Celtes.  Il  ajoute  que  ces  Celtes  habitent  au- 
4elà  de^olonnes  d'Hercule,  près  des  Cynésiens: 

mm,         t  ■  I  I. .1  ■    I.  ^ III  ■  Il    .1    il   I  ,  •      ■ 

0 

(i)  Renneirs  Geography  ofRerodotus,  i8oo,  in-4*'. 


3Sft  ItJBCHEReHBS    SUR    l'a.FRIQUE« 

il  e&t  certain  par  là  que  lesCjmésienshBbitSiieut  la 
province  de  Portugal  la  plus  voisine  du  détroit 
de  Gié^/tor,G-est-à-dire  les  Jllgarves.  Avieuus 
et  Justin  confirment  ceci,  lorsque  Fun  nous 
apprend  que  le  fleuve  Anus ,  le  Guaâiana  des 
modernes  9  arrosait  le  pays  des  Cynètes^  et  que 
Tauttë  nous  dit  que  les  Çynètes  sont  voisins  des 
Tàriesses.  D'ailleurs  le  nom  de  Çuneus,  qui  est 
demeuré  à  cette  partie  de  Vlbérie,  ne  paraît  être 
qu'une  altération  de  celui  de  Cynètes  (i). 

Le3  Celtes  y  qui  sont  voisins  des  Çynètes  j  et 
qu*Hérodote  indique  au-delà  des  Colonnes  d^Her- 
cw/e,  étaient  donc  les  Celtes  dé  VIbérie  dont  par- 
lent Strabon  et  Éphore,  et  qu'ils  mettent  près  du 
Bœtis  ou  Guadalgumry  près  de  la  Giiûdiana  et 
près  du  Tage  (a).  Ceci  prouve  qu'Hérodote, 
dans  l'ignorance  absolue  où  il  était  de  la  j^tie 
occidentale  de  l'Europe,  confondait  ensemble 
et  dans  une  même  chaîne  les  Alpes ^  les  Pyré- 
néen et  les  hauts  sommets  des  montagnes  de 
V Espagne ,  et   qu'il   prolongeait  cette   grande 


(i)  Avienus,  Ora  maritima^  vers  «oo.  —  Justin.  Ifislor., 
XLiv,  cap.  IV.  —  Schiichthorst,  Ueber  den  Wohnsiz  der^y- 
nesier,  179H ,  in-ia,  Gottingen.  Le  major  Rennell  contredit 
foimeUement  Hérodote  et  tonte  l'antiquité  quand  il  place 
les  Çynètes  dans  la  Gaule.' 

(a)  Strab.,  lib.  m,  aft3  b,  et  lib.  iv,  3o4  b. 


TROIS^IÈHE     PARTIE.  ÏSg 

chaîne  jusqu'à  la  Sierra  Nevada ,  près  des  Co^ 
formes  d'ffercule  (i).  Hérodote  ensuite  raisonne 
ainsi:  Si  le  Danube j  qui  vient  de  Fouest,  et  qui 
divise  l'Europe  en  deux  portions,  a  ses  sources 
dans  les  montagnes  voisines  des  Colonnes  d'Heh 
cale,  et  les  plus  occidentales  de  FEuropé,  leiVï/, 
qui  vient  aussi  de  Touest,  et  qui  coupls.  aussi 
la  Ubjre  par  le  milieu  ^  doit  venir .  également 
des  montagnes  voisines  des  Colonnes  d'Hercule, 
et  les  plus  occidentales  de  \ Afrique.  Hérodote 
croyait  donc  que  la  portion  du  Nd  visitée  par 
les  Nasamons^  était  à  l'extrémité  nord-ouest  de 
l'Afrique,  et  dans  une  des  vallées  méridionales 
du  royaume  de  Maroc  d'aujourd'hui  ;  et  nous 
en  devons  conclure  que  ces  vallées  étaient  de 
ce  côté  la  limite  des  connaissances  de  son  temps 
sur,  l'intérieur  de  l'Afrique. 

Plus  à  l'orient,  Hérodote  parle  àiAugilès  (i), 
où  les  Nasamons  menaient  leurs  troupeaux  : 
c'est  ÏAugela  des  modernes.  Hérodote  fait  aussi 
mention   du   pays   de  Jupiter  Ammon ,  qu'on 


(i)  Le  nom  de  Pyrène  a  été  donné  aussi  dans  Tantiquité 
«nx  AJpes^  et  pentrêtre  il  signifie  montagrie  dans  quelques- 
nnes  des  langues  des  s^Y^vages  primitif^  de  FEnrope. — ^Voy. 
jinalect.  veteK  poëtar,  Grœc^^  t.r  H,  p.  4o8«  —  Arist.  Me- 
kioroiogic,^  Kb.  ii,  cap.  iB,  p«  545  d, 

(a)  Herodot.  Hisi^j  lib.  iy,  17^;  ^  II9  p- 3i4. 


36o  RECHERCHJES    SUK   x'aFRIQUE. 

croit  être  Siwahj  et  enfin  du  pays  des  Gara-- 
mantes  (i),  sur  lequel  nous  reviendrons,  vais 
qu'on  ne  doit  pas  placer  plus  au  sud  que  le 
Kaouarj  entre  les  oatâi  proprement  dites  et  le 
Fezzan.  Telles  me  paraissent  avoir  été  l'étendue 
et  les  limites  des  connaissances  dans  Tintérieur 
de  rAfrique  au  temps  d'Hérodote. 

Je  n'ai  point  à  m'occuper  de  l'expédition  de 
Ptoléroée  Évei^ète ,  dont  on  a  voulu  étendre 
le  théâtre  d'une  manière  démesurée  (a).  M.  Sait 
a  très -bien  démontré  que  la  portion  àt  l'ins- 
cription XAdulis  (3),  qui  a  &it  croire  à  cette 
expédition  de  Ptolémée  Évergète,  n'est  point 

(i)  Herod.  HUt.^  lib.  iv,  17$  ;  t.  H,  p.  366. 

(*)  Carte  représentant  V intérieur  de  V Afrique  et  les  routes 
qu'ont  suivies  dans  leurs  expéditions  les  conquérante  grecs  et 
romains^  par  J.-N.  Bnaclie  ;  et  Géographie  physique  de  la 
mer  Noire,  de  l'intérieur  de  V Afrique  et  de  la  Méditerranée, 
.par  M.  Dnrean  de  La  Malle  fils ,  chap.  xii,  p.  88. 

(3)  Cette  célèbre  inscrîptioii  fat  d*abord  pnbliée  par 
Léon  AUatius,  d'après  on  manuscrit  da  Vatican;  Rome, 
i63i,  in-4*  de  hnit  pages.  Berkelias  en  1672,  et  Spon  en 
i685,  la  réimprimèrent  d'après Allatius.  Meldiîsedecb  The- 
Tcnot  la  donna  dans  sa  Collection  de  voyages,  d'après  npe 
copie  faite  par  Bigot,  dans  le  mannscrit  de  Coamas,  qai 
se  trouvait  à  la  biblîolbèqne  de  Florence.  Enfin  Montfan- 
con  imprima,  en  1706,  tout  Tonvrage  de  Costnas,  on  elle 
se  trouve ,  dans  sa  CoUectio  nova  Patmm. 


TAOISIÈME    PAÏTIK.  36i 

relathe  à  ce  roi; qu'elle  est  d'une  date  beaucoup 
plus  récente  (i),  et  qu'elle  retrace  les  conquêtes 
d'un  roi  d'Abyssinie,  sous  le  règne  de  l'empe- 
reur Constance ,  vers  le  milieu  du  quatrième 
siècle';  enfin  les  recherches  de  M.  Vincent  (i),* 
aussi-bien  que  celles'de  M.  Sait  (3),  ont  prouvé, 
d'une  manière  irréfragable,  que  ces  conquêtes, 
quel  qu'en  soit  l'auteur,  ne  se  sont  pas  étendues 
au-delà  de  XAbys$ime\  et  des  montagnes  qui 

(i)  Spanheim  ,yo8siu8  ,  Vaillant  ^  ont  cru  à  ranthenticité 
de  ceUe  inscription.  Valckenaer  (i/z  CatuUi  Caîlimachum^ 
p.  90)^  et  M.'Gossellin  {Recherches  sur  la  Géographie  sys^ 
tématique  et  positive  des  Anciens^i.  n,p»  aa7-a3a),ont  tous 
les  deux  pensé  qu'elle  était  supposée.  Le  premier  a  fondé  son 
opinion  snr  le  pen  de  correction  du  siyle  ;  le  second  a  vn 
un  anachronisme  dans  la  date  qui  la  termine.  Ayant  que 
M.  Sait  eât  trouvé  une  inscription  semblable  au  second 
fragment  de  Tinscription  à!AduUs^  on  ne  pouvait  soup- 
çonner que  ce  fragment  appartenait  à  une  inscription  -toute 
différente  du  premier  et  beaucoup  plus  récente;  ce  qui  % 
fait  disparaître  Tanacbronisme,  et  fait  connaître  la  cause  dé 
rincorrection  du  langage. 

(2)  Vincent ,  The  Commerce  and  Nangatîon  ofthe  An- 
dents  in  the  indian  Océan  y  1807,  ÎB-A***  t.  I,  pag.  3  et 
53i  à  55o. 

(3)  Sait,  dansTalentia,  Voyages  and  travels ^  1809,  in-4®, 
p.  181.  —  H.  Salt's  Voyage  to  Ahyssinia^  p.  4"  à  4^3.  — 
Lettre  de  M.  Sylvestre  de  Sacy  dans  \ts  Annales  des  Voyages^ 
t.  XII,  p.  ^lo.-^  Voyages  en  Abyssinie,  par  M. Sait,  i8xa, 
in-8%  Genève,  t.  II,  p.  aa5. 


36l  RECHERCHES    SUR    l'a^ERIQUE. 

la  bornent  au  sud  et  à  Fouest,  puisqu'on  re- 
trouTê  encore  Rnjourd'hui  renfermés  da^  ces 
limites,  et  presque  sans  altération,  l^s  non»», des 
lieux  dont  il  est  fait  mention  dans  l'inscrip- 
tion (i). 

Le  récit  de  la  navigatien  d'Hannon  le  long 
des  cotes  occidentale^  d'Afrique  est  peut-être 
trop  vague  -pour  être  'assujetti  à  une  analyse 
rigoureuse  ;  mais  quelle  que  soit  l'étendue  qu'on 
veuille  lui  donner ,  il  est  bien  certain  que  les 
résultats  en  furent  oubliés  après  la  cbqte  de 
l'empire  des  Carthaginois  :  les  exploratiôos  des 
Romains  de  ce  côté  ne  s'étendirent  pas  au-delà 
;de  la  rivière  de  ISoun^  ou  le  Bamhotus  fiuvius  ^ 
et  sur  la  cô(e  orientale  jusqu'au  cap  Braya  ou 
rPrasum  PrmnorUorium  (2).  2e  n'ai  point  d'ail- 
leurs à  m'occuper  des  découvertes  par  mer, 

y 

■     >  I       ■   I      '  * ■■      I   ■■    ■■■  ■  ■■lHllWll  I    ■ 

(1)  Ces  rapprochements  solkt  indubitable^  :  Seménéy 
que  rinscription  nous  indiqne  au  milieu  de  hauts  somniets 
toujours  couverts  de  neige  «  se  re€rottT:e  ^ans  }^  mputagiies 
de  Samen ,  que  M.  Sait  a  vues  lors  4^  son  second  voyage. 
Ag0me  est  encore  aujourd'hui  un  district  imp<^rtant  de  la 
province  de  Tigré»  Ava  est  Adewa^  près  du  district  à^Axum» 
Tziamo  se  retrouve  dans  le  Tzama  de  la  carte  de  I^dC;  — 
Voyez  Sait  dans  Yalentia^  t.  III,  p.  197;  et  Vincent»  t.  I, 
p.  541. 

(a)  Gossellin,  Recherches  sur  la  Géographie  ^siémaiique 
et  positive  des  Anciens  ^  t.  I,  p.  119  et  198. 


TROJSlà]krB    PAETIE.  363 

dont   les  progrès  rapides  n'exercent   souTent 
qu'uiie  influence  indirecte  sur  celles  del'inté- 
riepr.  C*ést  par  cette  raison  que  je  n'ai  rien  dit 
du  voyage  des  Phéniciens  qui,  partis  de  la  naer 
Rouge,  auraient   Êiit  le  tour  de  l'Afrique,  et 
seraient  retournés  en  Egypte  en   passant  par 
le  détroit  de  Gibraltar,  Hérodote  (i),  qui  fait 
mention  de  ùette  navigation,  ne  la  regarde  pas 
comme  croyable  ;  et ,  soit  qu'on  la   considère 
comme   réelle,  soit  qu'on  la   regarde  comme 
suppos^ée,  elle  n'eut  aucune  influence  stir  les 
découvertes  futures ,  et   sur-  tout  elle  ne  fait 
rien    à   i^otre    sujet.    Les   Portugais,  dans  le 
quinzième   siècle  ^  avaient   exploré    toutes  les 
càtes  .d'Afrique ,  et  en  avaient  tracé  des  cartes 
assfez  exactes^  et  l'intérieur  restai  et  reste  en- 
core à  décoiiyrir.  Les  côtes  de  la  Notasie  on 
NouveUe ' Hollande  soiit  peut-être  dessinées 
avec  plujs»  d'exactitude  et  de  soin  que  celles  de 
l'Afrique,  et  même  que  celles  d'Eittape;  et, 
cpioiqne  la  plus-  riche  et  la  phis  puissante  des 
nations  du  globe  y  domine  depuis  long-^mps 
seule  et  sans  rivale,  cependant  on  peut  dire, 
qqe,  malgré   quelques  découvertes  récentes, 
l'intérieur  de  cet  unique  continent  du  Monde 
maritime  est  totalement  inconnu. 
-  ^    '  .       ■■       . 

(i)  Herodot.  HisU ,  lib.  it,  4^  ;  t.  II ,  p.  aS3. 


364  RECHEBCHES    SlTR    l'aFRIQUE. 

Depuis  Hérodote  jusquà  Strabon,  c'est-à-dire 
pendant  quatre  siècles  et  demi*,  les  connaissan- 
ces géographiques  dans  Tintérieur  de  l'Âfinque 
paraissent  n'avoir  £aiit  aucun  progrès. 

Strabon  (i)  décrit  assez  bien,  d'après  Éra- 
tosthène ,  la  partie  supérieure  du  cours  du  Nil; 
mais  au  sud  il  ne  nomme  rien  au-delà  des 
Exilés  dont  Hérodote  a  parlé,  et  qui,  même 
au  temps  d'Ératosthène ,  semblent  s'être  rap- 
prochés ai  Egypte^  et  n'étaient  pas  seulement 
désignés  sous  le  nom  àiAvtomoles^  mais  aussi 
sous  celui  de  Sembrites  (a).  Strabon  (3)  définit 
bien  -les  aucLsis  ou  oasis  :  «  Les  Égyptiens , 
dit-il  j  donnèrent  ce  nom  à  des  cantons  ha- 
bités qui,  environnés  par  de  vastes  déserts, 
ressemblent  à  des  îles  au  milieu  de  la  mer. 
Ces  auasis  sont  nombreuses  en  Zi^e;  il  y  en 
a  trois  voisiifes  de  Y  Egypte^  rangées  sous  son 
gouvernement.  »  Ces  oasis  ^  quoique  moins  bien 
connues  des  modernes  qu'elles  ne  l'étaient  des 
anciens,  sont  cependant  indiquées  sur  nos  car* 
tes,  ^  plusieurs  Européens  y  ont  pénétré.  L'in- 
scription  trouvée  récemment  par  M.  Caillaud 

* 
(i)  Strab.  Geogr.  y  lib.  xtu,  p.  786;  trad.  française, 
t.  V,  p.  3o6. 

(a)  Ihiél.y  lib.  xwiij  p.  786  ;  tiad.  t.  V,  p.  307. 
(3)  Ibid.^  ?•  791  >  trad.  franc.,  t.  V,  p,  3a7- 


TAOISIÈHE   PARTIE.  365 

dans  Tune  d'elles  (i),  est  un  décret  relatif 
à  l'administration  de  V Egypte  en  général,  et 
confirme  ce  que  Strabon  a  dit  ;  mais  ^  ainsi  que 
le  passage  du  géographe  grec  que  nous  venons 
de  rapporter ,  elle  ne  contient  yien  qui  supposé 
dés  connaissances  étendues  dans  l'intérieur  de 
rAfrique  (â).  Les  Éthiopiens  de  Strabon  sont 
donc  évidemment  des  peuples  de  la  Nubie  et  de 
YAhyssinie  modernes  (3); 

Examinons  avec  soin  sa  description  de  la 
Libye ,  parce  que.  c'est  dans  cette  partie  qu'on 
doit  trouver  toutes  ses  connaissances  sur  Fin* 
térieur  de  l'Afrique ,  puisque  la  Libye  y  dans  Stra- 
bon et  chez  la  plupart  des  anciens ,  signifie 
toute  l'Afrique ,  hors  X Egypte  (4). 

A  Toccideot,  les  peuples  les  plus  reculés  de 
l'intérieur  dont  il  fas^  mention  sont  les  Nigrites 

(i)  Cette  inscription  est  gravée  sur  le  pylône  du  grand 
temple  de  Toasis  de  Khardjé,  et  donne  à  cette  oofis  le  nom 
A*Om&  de  la  TAéharde.  Strabbn  dit  que  ce^te  oasis  est  la 
première  des  trois  qu'on  trouve  en  Libye.  Geogr.y  life.  xvii, 
p.  8i3;  trad.  t.V,  p.  416. 

(p)  M.  Letronne ,  qui  prépare  un  grand  travail  sur  cette 
inscrîjption^  m'a  affirmé  ce  fait. 

(3)  Strab.  Geogr.y  lib.  xvii,  SaS;  traduct.  franc,,  t.  V; 

p.  443-     . 

(4)  Jbid.y  lib.  xvu,  p.  S26;  tnid.  franc.,  t.  T,  p.  453, 


366         RECHERCIIBS    SUR    l'aERIQUE. 

et  les  Pharusiensj  qui,  selon  la  tradition ,  dé- 
truisirent les  établissements  que  les  Tyriens 
avaient  fonnés  sur  la  cote  d* Afrique.  Ces  peu- 
ples, d'api:ès  Strabon,  soht  à  trente,  journées  de 
Unx  ouiLm^^^que  toutes  les  distances  données 
par  les  anciens,  et  surtout  par  ritinëraire  d'An- 
tonin  (i),'  démontrent  avoir  été  àMè  sur  la 
oftje  de  l'état  de  Jifaroc,  ou  est  actadlelneat 
EUArvisch  ou  Larache^  sur  la  rivière  Lotos, 
La  distaoce  donnée  par  SUabon  .^tre  ce  lieu 
et  les  Nigriie^  on  les  Phamsims^  prise,  au  sud- 
ouest  ou  au  sud-est ,  nous  porterait;  soit  à  TûM 
ou  Jàha^siQùX.  dans  Tétat  de  Sm^  soit  \  Tafikt^ 
ou  tout  au  plus  à  Draha  :  et  ce  v[ai  confime 
que  ces  peuples  ne  peuv^it  être  placés  plus  an 
sud,  cest  que  Strabon  dit  que  les  Phmvsiens 
et  les  Nigrites  sont  voisins  des  Mauru$iens  et 
des  Éthiop0fns  occidentaux»  c'est-à-dire  de 
Maroc  et  de  la  rivière  de  Noun.  A  la  véiité  il 
ajoute  que  ces  peuples  ne  communiquent  avec 
les  Maurusiens  que  par  le  déseM^  qu'ils  traver- 
sent en  suspendant  sous  Je  ventre  de  leurs  die- 
vaux  des  outres  pleines  d'eau.  Mais  les  com- 
munications entre  Maroc ^  TafUet^Tatîa^Akka^ 

(i)  Antonini  Itmeretna\  edit.  Westfeling,  p.  8,  7,  6,  3 
el  a.  —  Sirab. ,  lib»  xvu,  p.  %%']  -  939. 


TROISliVE   PARTIE.  ^67 

et  suT^Mu:tDr4ihb^sant  encore  aujourd'hui  assez 
rares  :  elles  n'ont  guère  lieu  que  par  le  moyen 
des  caravanes ,  et  l'oirest  obligé  de  traverser  des 
espaces  stériles  et  de  se  pourvoir  d'eau  douce. 

Ainsi'  dbnc  les  connaissances  géographiques, 
du  teiDp»*^e  Strabon,  paraissent  s'être,  arrêtées 
sur  les  linûtes  septentrionales  du  Grand -Désert 
de  Sàknrày  ou  ont  franchi  de  bien  peU  céfle 
limite.    *. 

Possidon^is  dit  que  la  Lihjre  n'e^t  arrosée  que 
par  de  petites  rtitièl^es^  et  quencgre  elles  sont 
en  petit  nombre  (i);  et  Strabon  remarque  que 
cetf^  assertion  doit  surtout  s'entendre < de. l'in- 
térieur, preuve  bien  certaine  qu'on  ne  soup*- 
çonhait  pas  alors  l'existence  du  Jpliba  ou  du 
Niger  et  des  grands  fleuves  qui  arrosent  le 
Soudan.  • 

,Du  côté  de  l'orient,  les  peuples  les  plus  re- 
culés de  la  Libye  dont  Strabon  fasse  mention , 
sont,  comme  dans  llérodote,  les  Garamantes^ 
d'où  l'on  apportait  les  pierres  nomihées  cartha- 
ginoises, qui  paraissent  avoir  été  des  grenats. 
Strabon  s'exprime, au  sujet  de  ces  peuples,  àe  la 
manière  suivante  :  »  On  dit  que  les  Garamanêes 
sont  éloignés  de  neuf  à  dix  jouri^s  de  route 

(i)  Strabu,  lib.  xvu,  p.  8^9  ;  trad,  franc.,  t.  V,  p.  464. 


366  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQDE. 

des  Éthiopiens  qui  habitent  4e  long  de  l'Océan , 
et  de  quinze  journées"  du  Temple  de  Jupiter 
Amman  (i).  »  '   '■ 

Strabon  précédemment  a  soin  de  nous  ap- 
prendre qu'au-delà  des  contrées  qui  bordent  la 
Méditerranée ,  l'intérieur  des  terres  4^n  Afiique 
est  montagneux  et  désert,  et  qu'il  est  occupé  par 
lés  Gétules  (21)  ;  puis  après  il  dit  (3)  :  «  L'intérieur 
des  terres,  pays  stérile,  au-dessus  de  la  Grande- 
Syrie  et  de  la  Çjrrénaiqite ,  est;<lu^té  par  les 
Libyens  :  on  ^ouve  d'abord  |ts  Nasamons ,  puis 
quelques  tribus  de  Psylles^  dé'  Gaules  et  de 
Garmmantes.  Plus  à  l'orient  encore  soi^q|es  Jfor- 
maridesy  voisiçs  en  grande  partie  de  la  Cyré^ 
naiquey  et  s'étendant  jusqu'au  Temple  d* Am- 
man. »  Il  dit  encore':  «  Ceux  qui  habitent  au 
fond  de  la  Grande-Syrte  ne  mettent  que  quatre 
jours  pour  se  rendre  au  Jardin  des  Hespérides^ 
en  suivant  la  direction  du  levant  d'hiver.  <7^t 
au-dessus  de  ce  canton  qu'est  le  pays  qui  pro- 
duit le  silphium  ;  et  plus  loin  est  119e  contrée 
inhabitée,  puis  celle  des  Gommantes.  »  Enfin 
il  ajoute  (4)  :  «  Nous  ne  pouvons  connaître  la 

(i)  Stndb. ,  lib.  xtu,  p.  fôS  ;  trad.  franc. ,  c  V^  p.  480. 

(2)  làid,^  lib.  XYii ,  p.  829;  trad.  t.  T,  p.  464. 

(3)  Ibid.,  lib.  XVII,  p.  838;  trad.  t.  V,  p.  489. 

(4)  16û/.y  lib.  xYUy  p.  8^1  trad.  t.  Y,  p.  490. 


^  ^*       TAOïsiilHE  fartïï:.    •  369 

tqtalité  dé  ces* pays,  à  cause  de  plusieurs  déserts 
qui  les  séparent.  Par  la  mém^  raison,  on  ne 
connut  pas  les  contrées  au-dessus  du  Temple 
d'Amman  et^  des,  oasis  jusqu'à  VÉthippie  :  aussi 
ne  saurions -nous  dire  *tiettement  quelles  sont 
tes  boixie^  de  Y  Ethiopie  et  celles  d*e  la  Libye , 
pas  même  de  la  partie  quj  avoisine  X Egypte yk 
plus  Jorte- raison^ de  celle  que  baigne  l'Océan.  » 
C^  passage  éclaircit  très-bien  ce  qu'il  y  a  «n 
apparence  (|k)bicur  et  de  contradictoire  dans  le 
premier  sur  les  GOrafnàntes,  Si'^'O'^  suppose , 
comme  cela* ^st  probable,  que  Siivah  est  \ Oasis 
i^^mmàh^  la  mesure  de  quihze  journées  nous 
porte  dans  le  Kapuar,  pour  le  pays  des  Gara-- 
mantes  j  qui  i^t^dront  jusque  près  du  pays  du 
Zalahj  des  géographes  arabes ,  lequ.el  convient 
à  la  position  du  Jardin  des  Héspérides  (i);  mais 
coiipne  y  dans  l'idée  de  Strabon ,  tout  le  pays  au 
sud  de  la  Libye  et  de  YÉgypte  étsàlV Ethiopie, 
contrée  inconnue,on  plaçait  les jé/A/o/?2e/w  ocei" 
dentaux  au  sud'  des  Maurusiens  et  «{es  Gétuîes, 
et  \t%  Éthiopiens  orientaux  dans  la  Nubie  et  au 
sud  de  VÉgypte:\je  Kaouar  se  trouvait  environ  à 
dix  journées  de  distance  vers  Toùest,  op  est  utie 
autre  oasis,  habitée  aujourci'hui  par  les  Tibbous. 

(i)  Voy.  la  Carte  d Afrique- àe  M.  Purdy,  1814. 
«  24 


3<70         REGHtRCHES    fttfft    LAFRIQXfc. 

Stnibon  désigtie|Ces  peuples  par  le  nom  ^EihUh 
piem  ;  et  pour  qu'on  ne  les  confonde  pas  avec 
les  Éihiopienfj  plus  cÎTilisés ,  pihs  connus  et  plu» 
célèbres  dy  midi  dé  X Egypte yA  dit  en  parlant 
de  la  situation  des  GaAimantes  :  Ils  sont  à  dii 
journées  des  Éthiopiens  qui  habitent  le  long 
de  l'Océan  ou  des  Éthiopiens  occidentàast. 

De  toute  cette  ^îseussiop  il  ^résulte  bieiii  évi* 
dtmment  que  les  connaissances  géographigues 
au  temps  de  Strabon  n'ont  pas  ^nchi  de  beau- 
coup  les  liati|^s  du  Grand-Bésert,  et  qu'on  ne 
parait  même  pgs  alors  avoir  soupçonné  l'exis* 
tence  des  contrées- du  Soudan.  Pour  tèule  {^- 
sonne  familiarisée  avec  la'géo^pMe  ancienne, 
cette  vérité  ressort  du  seul  rapprodiement  des 
textes  dont  nous  avons  rapporté  hi  traduction; 
et  le  peu  que  dit  Pomponius  Mêla  sur  oé. sujet 
confiitne  l'nposé  fait  par  Strabon  ^f  ).         ^ 

Afek  place  aussi  les  sources  du  Nil  chez  les 
Ethiopiens  occidentaux.  Ils  appellent,  selon  lui, 
'■>■"■■■        ■  i.  ■  ■■    ■■  .^  ■         I 

(x)  Po«ii{>o]iu  Mêla ,  de  Situ  oMs,  lib.  i^  cap.  4  et  cap.  6, 
edit.  Tachackii,  1. 1«  p.  6  et  17.  Les  Gar^muntes  sont  tou- 
jours mentionnés  par  ce  géographe  comme  peu  éloignés  des 
^ugilœ^qm  est  VAugela  des  Modernes.  \je%Blemui^  sont 
sans  tête ,  et  dont  le  visage  est  sur  la  poitrine ,  étaient  pro- 
bableiriimt  les  habitants  de  cette  partie  du  d^^ert  aojonr- 
d'hui  nommée  BUma.  Au  liy.  ix,  chap  10,  p.  X07,  Mêla 
place  les  Nigrùes  non  loin  des  rivages  de  la  Mauritanie. 


1 


TROISlÈi[£    PAÏITIE.      '  371 

ce  fleuve  Nuchus^  ce  qui  ^ajoiHe-Ml,  parait  être 
le  mime  nom  que  Nilus  diffëreitiment  prbtiôncé 
•par  ces  barbare!$  (î);  et  selon  !e  témoigtiage 
d'Ethicus  ce  fleuve  à  sa  source  se  nomme  Dora. 
Chi  sait«qu'une  rivière  c<5ïinue  desliioderfaeft  sous 
ce  tioni  existe  immédiatement  au  sud  de  Vj4tîas^ 
c'est  ^- dire  dans  fancieiine  Ethiopie  occiden- 
tale (a). 

Cependant  .les  Romains ,  à  qui  l'espace  man- 
quait pour  cb«quérir,  portèrent  leurs  armes 
jusque  dans  les  br&lantes  solitudes  de  l'Afrique 
et  au-delà  du  mont  Mtas;  mais  leurs  invasions 
ne  s'éteridirent  pas  plus  loin  que  les  contrées 
déjaf  eoniiués^  et  doni  nous  ai^ins  fixé  les  situa- 
tions stir  la  limite  septentrionale  du 'Grande 
Désert!  Fliiie  e&t  le  seul  qui  nous  ait  transmis 
quelques  détails  sur  des  expéditions  des  Romains 
dans  rintéHeur  de  l'Afrique;  et  ce  qu'il  nous  dît 
est  si  clair,  qu'il  ^st  difficile  de  concevoir  com- 
ment son  texte  ^^eul  n'a  pas  suffi  pour  rectifier 
les  idées  des  savants,  que  la  comparaison  des" 
découvertes  modernes  des  Arabes  et  des  Euro- 
péens avec  leB  textes  des  anciens  a  égarés. 
»  f —  '   ■ 

(r)  Pomponius Mela^  de  Situ  orbis^  Itb. m,  cap.  9;  t.^I^ 
p.  Î06. 

(2)  Aethici  Cosmographia^ààii%Vomj^omM%Mi^^  çdit. 
Varior.,  i72a,p.  726. 

.      -  ^4. 


37a  RBCQERGHES    StTR    l'aFRIQUE. 

Viitie  nous  apprend  que  Sueïonius  Paulinus, 
qui^ut  consul  romain  en  Fan  61  de  ISère  j^iré- 
tieime ,  est  le  premier  des  généraux  romains  qui 
ait  franchi  XAtUts  :  parvenu 'à  son  *sominet, 
ce  général  éprouva  un  grand  froiâ;  ensuite, 
après  dix  campements,  il  arriva  sur  lei  bords 
d'un  fleuve  qu'on  *nomme  Ger^  ou  (seloir  q[uel- 
ques  manuscrits)  Niger  (i^  Il  pénétra  ainsi  chez 
les  Canariens  et  les  Perorses,  qiji  sont  voisins 
des  Éthiopiens, 

Mes  lectetrrs  savent  déjà ,  d'après  Ibn-Batouta 
et  Ibn-Hassan,  qu'on  prouve  un  grand  £roid 
sur  le  sommet  du  mont  Atlas,  sur-tout  da  côté 
de  la  vallée  de  Tafilet  ou  de  Sidjilmessai  et  l'iti- 
néraire dlbn-Hassan  nous  apprend  qu'il  existe 
au  pied  du  mont  Atktë  un  limi  nonimé  G€ts\ 
situé  sur  le  fleuve  Z/z,  qui  arrose  la  vallée  de 
Tafilet.  On  pourrait  donc  conjecturer,  avec 
beaucoup  de  vraisemblance,  que  le  fleuve  Ger 
ou  Niger  de  Pline  n'est  que  le  fleuve  Ziz;  mais, 
dans  tous  les  cas,  il  n'est  pas  possible  ^'étendre 
très-loin,dans  l'intérieur,  le  pays  dés  peuples  chez 
lesquels  Saetonius  Paulinùs  pénétra  après  dix 
jours  de  marche.  Aussi  Pline  a-t-il  soin  de  nous 
dire  que  Suètonius  Paulinùs  ne  s'avança  au-delà 
du  xaovX  Atlas  que  de  quelques  milles  seulement- 
Ci)  G.  Plin.  Nat,  Hist, ,  lib.  v ;  I,  p.  a6o. 


*     TIlOISIÈ]|^E    PARTIE.  SyS 

Transgrçssus  quoqûe  Aîlantem  aliquot  miUmm 
spaim  (i)  ;  "et  dans  un  autre^passage  qui  précjpde, 
il  place  les  Perorses  près  des  Pharusiens^qm  sont 
voisins  des  Gétules Duras  de  l'intérieur  des  terres  k 
ces  derniers  paraissent  être  les  habitants,  du  pays 
de  Dawah  de»  modernes.  Pline  ajoute  qu'ils  ont 
pour  yoimk'&\e%EthiopïemDar{Uites€\px  habitent 
le  rivage  de  la  mer  et  les  rives  dfi  ûeavé Bttmbotus 
ou  la  rivière  de  JVoun  (a).  Indépendamment  du 
nom  de  Daràh ,  donné  par  les  modernes  à  une 
vallée  au  sud  de  l'Atlas,  Ëdrisi  et  Aboulfeda 
donnent  les  noms  de  Qaran  à  toute  la  partie 
du  mont  Atlas  qui  est  au  3nd  de  l'empire  de 
Maroc  {y).  '  '      . 

Les  Nigrites  sont  aussi  placés  par  Pline  près 
des  Daratites^  des  Pharusii  .et  des  Éthiopiens  4 
et  le  Nigris  fluvius  du  naturaliste  romain  y  qui 
borne  la  Qémlie  au  sud,  et  qui  divise  l'Afrique 
de  YEtikiopie\f  ne  peut  se  trouver  que  dans  la 
rivière  du  Darah^  ou  toute  autre  «au  midi  du 
mont  jàdas  :  en  efiet,  quoique  Pline  fasse-sortir 


(i)  Ibid.^  lib.  y,  cap*  i,  1. 1,  p.  ^60,  edit.  ]Pranzii,  1778 , 
Lipsise. 

(a)  Voy.  Gossellin ,  Recherches  sur  là  Géographie  syS'^ 
témaiique  et>po$itive .des  Afidèfts^^.ly  p.  lia  à  11 3. 

(3)  Ëdrisi  Geogr,  Nubiens.,  part.  I,  qliiii.at.  ta,  ]»;  75. 
—  Abulfed.  Geogr,  i/z  JBiiach. il/<d^a;s. ,4't.  lY,  p.'i78. 


374  RECHXIieH£3    SPR    L'Aj^RlQIf £. 

k  NU  de  cette  rivière  ^41  dit  cepeadatft  qu'elle  a 
seé  ftotuces-dans  le»  mootagoes  de  Jf<icinâa/2i^  (i). 

Tout  prouve  donc  que  }es  coRuaisssoices  géo- 
g^rapfaiquto  de»  Romains,  au  te^ips  de  Pliue,  joe 
se  sont  paa  ét«llduee,au  nord-oiiest  de  l'Afrique^ 
beaucoup  au-delà  do,  mont  :é^$lé^  et  dea  eRtré- 
initéa  sepAentrioBales  du  Grand-Disert 

Yera  fest,  le  texte  de  Mii^e  détefmîne  jes 
bmitea  de  oes  ecmnaissancès  d^alie  manière  au«$i 
•  précise.  En  effet,  il  nous  afqprend  Ijue  Cornélius 
Balbus  porta  la  g^^re  chez  les  Gar€mianies^ 
et  s'empara  de  Gca^na^  leu^  capitale,, 'et,  sw 
sa  route,  de  Cydarnum  et  de  Pkasania  (tl).  Quel- 
ques pages  auparavant,  Pline  nous  appMnd  que 
ks  G^ramctnies  soQt  à 'douze  jours  de  mardie 
^  ^jiH^ies  (3).  Une^  route  traeée  droit  au  mi^, 
sur  la  carte  de  M.  Purdy^  et  qui  part  d'^^y- 
gehj  colfipt0  dix  journéea  de  rçute  fti^u'à  Bçwr- 
gouj  che^ieu  des  Tibbous;  deux  jpurs  de  maiN^ke 
de  plus  conduiraient  dans  le  K^oué^r^  où  I(éro- 
dote  et  Strabon  m&m  ont  t^ja  feit  cçi^^ectaFer 


(i)  Plin»  ]S[ai.  Hist.,l\k.  V ,  4;  tvW»  p.  «94^  Plwc  pro- 
longeait ces  montagnes  jusque  chez  les  Blemii,  dwa*  U 
êésert  AeBUtHi^  y  iih.  y  y  i, 

(2)  Pliaii,  jAb/.  Mist.^^*  rf%.  U,  pu  3j|i^,  e4iu  FT9mà^ 
Lipsift,  1778,  mrd^. 

(3)  Plmii,  iViii.  ifïjr.>  l*w  V I  4 >  t.  II,  p.  i$5. 


qu'on  doii  placer  la  j^gion  d»&  Cw^mamies.,  La 
carte  de  M.  Purdy  s^asque  9ur  cc^te  route  utik 
va^e  forêt  et  eo^Ue  ua  désert.  Pline  dit  que 
quaiyl  on  ae  rend  à'jlugiies  chez  les  Garamante^^ 
on  *traverie  des  forets  reixi{>lies  4e  bétes  féroces 
et  eB3Pite  des-  déserjts*  Mais  ces  circon^an^ea 
ne  sont^pas  les  seules  qui  démontrent  les  limites 
iflf^  uoiA»  assignons  de  ce  côté  aux  compa^fiances 
géographiques  dea  Bomains.  Lorsqu'on  esl  fa* 
onlinrisé;  aveè  la  géographie  de  cette  partie-  de^ 
l'Afrique,  on  reconnaît  facilement  CydamW9t 
dans  Gàdomès  des' modernes^  PAa5a.^i4i  re^o 
dans  la  contrée  du  Fezzan ,  et  dans  TahiâÀurn 
i^p^m  la  viUe  de  Tibes^  chez  les  Tabous 
du  Fezmn.  Le  Mons  Ater  àe  Pline  (i)  nest 
pas  le  désert  du  Haroudjé  qm'a  traversé  Hoiv 
awaann,  comme  le  oroit  Rennell  (a),  mais  les 
monts  i^re,  qw  sont  \m  prolongement  de  yjt^ 
ias  au  midi  d\Fez»,an.  Le  mont  Gj^ris  de  Pline, 
ou  le  Gfrgiris  de  Ptolémée ,  est  la  prolongation 
4^  cette  même  chaîne  au  sud  des  Tibbaus  et  du 
pajs  diJugeUk.  La  ville  de  Garajim  n'est  pas 
Yerrrmh  du  Fezztm^  comme  le  croyait  le  major 
Eennell ,  mais  Qherma  d'Édnsi  placé  plus  au 

(i)  Mons  JMr  nostri^èittus,  ^Kn.iVbr.  BisU^  lib/v,  9. 
(2)  Rennell  dans  UorrtemanrCs  Travèls* 


i'JO  RECHSRCPEft    SUR    LABftt^^^E.     • 

midi  et  dans  le  Kaouar^que  je  crois ,  avec  M.-  Dur 
Andi  (i),  plus  rapproché* du  côté  de  Fouest  qu^ 
ne  l'indiquent  nos  cartes,  et  qu'on  doit  mettre 
immédiatem^ent  au  sudest  du  /(0zzâ^(i).  Enfin 
le  Gjrr  qui ,  dans  Ptolémée ,  arrose  le  pays  des 
Garamantes,  le  Gjrrnotfssùnus  ctmms, Ethiopum 
de  Claudien,  qui,  né  et  élevé  en  Egypte,  était 
Csimiliarisé  avec  la  géographie  d*Afiique,  nous 
parait  être  la  rivière  GugUy  dont  oous  né  con- 
naissons pas  Uen  le  cours ,  mais  qui  ^st  men- 
tionnée par  Édrisi  comme  coulant  vers  lé  sud, 
et  ayant  sa  source  dans  les*montagnes  qui  sont 
au  sud  âi^ugelak  (2).  Eiïfln ,  au-delà  du  pays  die 
KcLouar  ou  des  Gar amantes ^'Wlxï^  ne  connaissait 
que  les  Blemiij  ou  les  habitants  du  désert  de 
Bilma;  et  on  peut  dire  quHl  ne  les  coanaissait 
que  de  nom ,  puisque,  avec  Mêla,  il  les  dépeky; 
comme  ayant  le  visage  sur  la  poitrine.  Ces  contes 
absurdes  marquent  que  là  s'arrej^aient  les  con- 
naissances réelles. 

Lors  même  qu'on  prouverait  que  je  me  suis 
trompé  dans  plusieurs  des  noms  anciens  et  mo- 
dernes que  j'ai  fait  correspondre ,  il  n'en  sera 
pas  moins  démontré,  par  l'ensemble  de  ces  rap- 

.(i).Durandi  «Uns.  \é&  Mémoires  de  V Académie  de  Turin 
pour  les  années, idioS  à  1808  ,10-4°^  18 19,  p.  si8. 
(a)  fidrisi  daos  Hartman,  p.  iB?. 


'      TROISIÈME    PARTIE.  377 

pA>dheinents,que  les  connaissances  des  anciens, 
'dans  Tintérieur  de  FAfrique^  ne  s'étendaient  pas 
au-delà  des  limites  que  je  leur  ai  assignées. 
'  En  effet,  Pline  ne  parle  des  conquêtes  de 
Sueibnius  Paulinus  que  dans  une  sorte  d'aj^- 
pendice  à  la  description  de  la  Mtmriianie;  et 
il  met  les  conquêtes  de  Cornélius  Balbus  au 
nombre  des  dépendances  de  la  Cyrénaîque. 

Nous  lisons  dans  Tacite  et  dans  Florus  ( i)  que 
tè&  Garamantes  s'unirent  aux  Qétules  et  aux 
Numides  d'un  côté,  et  de  l'autre  attx  Ma^tma-- 
rides ,  pour  £sâre  la  guerre  aux  Romains  ;  donc 
A&s  Garamantes  étaient  situés  entre  ces  peuples, 
c'est-à-dire  dans  leRaouar:  et  comme  les  Ro- 
mains ,  ainsi  que  nous  l'apprennent  Strabon ,  la 
Notice  àt  l'empire  (a)  et  les  monuments  récem- 
ment découverts,  avaient  soumis  \es  oasis  de 
Baknasa  et  de  Khardjé,  ou  les  oasis  proprement 
dites ,  au  gouvernement  de  V Egypte ,  les  dispo- 
sitions hostiles  des  Marmarides^  des  Garamantes 
et  des  Gétules,  empediaient  les  communica- 
tions directes ,  et  entravaient  le  commerce  entre 
l'Egypte  supérieure,  la  Cjrrénaîque  et  l'Afrique 
proprement  dite  ,  la  Numidie^  et   les  autres 

(x)  Tacid  AnnaL\  lib.  m  et  lié.  iv.  — rFlor.,  lib.  iv^  c.  la* 
(a)  Strab:,lib.  xvn,p.  791.  —  V^ncïtjù^ ^  Notkia  dignit. 
utriuêq.  io^rii^  ïaMio^  i6aS,  p..3o4i- 


378         R£CH£&CH£^    «UR    LAFRIQUE. 

parties  de  l'empiré  romain  (i).  Sous  ce  rappcori 
les  conquêtes  (}e  Coro^ins  BaUw^i^ur  ce$  tribus 
sauvages  étaient  d'iHie  graad^  m^KHta&ce,  et;  1^ 
valurent  les  honneurs  de  ee  trioniphe  dontptine 
a  décrit  la  splendeur  (a).  Cetl^  ro^e  du  Om»* 
inerce  entre  la  Hautes gjrpte  et  les  parties  4m&ar 
taies  et  septtratrionales  4e  T Afrique  étaif  conjaiie 
et  pratiquée  depuis  bien  lQng*tenfps,puisqu'^lU^ 
est  décrite  par  Hérodote»  qui  dit  que  de  la  pfo* 
vince  de  Thèbes-  en.  Egypte  on  Ivaver^î^ît^^pi^ 
dix  joors  de  marche ,  lé  pays  des  /émmoniens, 
d'où  Ton  se  repdait  à  udugiks^  habité  par  les 
'  Nasamons;  ensu^e^  après  dix  jours  d^r^^aietbci» 
chez  les  Garufnantes^  et  de  là,  plu$  à  l'ouest^ 
chez  les  Troglodites  éthiopiem  y  hs  Jttarofit^ 
et  les  filantes.  Ce  passage  d'Hérodo^  ccyiifir* 
merait  au  besoin  tout  ce  ^e  ncms  v^ioi^s  de 
déxnontror  sw  lies  limites  des  connais^^aiiçe^  à 
l'époque  où  Pline  a  écrit  (3). 

.■»■■■■„■■  —  ,■     .1.      <    ■■.>.i  ii»..wi..n»i,  m»  »  inni      j     wf».  ,.  ,1  I.  ■  1  ,      mfft»mt** 

(i)  Le  commerot  ^H/m^  t^ciît  Hw^  par  h  i^oj^q^  àfi^ 
caravanes.  Siliiia  Itali^us  garle  i^Jlmmon  le  Comuy  plaoi 
parmi  les  tristes  Geunmantes  (lib.  lu ,  vers  11),  et  Lacain 
(lib.  ix)  donne  à  Japiter  Aminon  le  titre  de  Garamantique; 
ce  qui  me  fait  présumer  que  Voasis  d*Ammon  notait  pas  à 
$Ù¥ah,  laa^  qa^on  trotirera  im  jour  son  empiaceiBisst  sur 
là  roule  ikt  ooià  .d'Égypêt  an  il^aauêw. 

{%)  Plia, ,  loc.  tffoat. 

(3)  Herodoti  HisL^  liiu  vfy  aSi  -  i^ô  ^  t.  II ,  p«»  Syi.  €s 


TROI$Iji(M£    PARTIS.  3)^ 

On  pourrak  objecter  encore  que  Pline,  aussi* 
bien  qû'^ér^ote,  fait  mention  de  crocodiles^ 
d'hi{^K)potaiïies  et  d'élépbants,  et  que  ces  wi- 
^laiix ,  {aujourd'hui  si  coroKUfis  ^aafi  la  Sémé^ , 
gambie  fi  le  Soudan ,  ne  se  trouvent  plus  dans 
1^  contrées  que  j'ai  désignées.  Je  répondi^i  d# 
nouveau  qu€i  ces  contrées  noua  scoat  trop  peu 
ooD&ues  4>our  pouvoir  -asjsurér'  qu'il  ne  s'y 
ttouve  pas  encore  des  hippopotames  et  de$ 
éléphants  ij'&k  rapporté  des  témoi^ages  qui 
preuve&t  que  ces  ai^maux  existaient  au  noixl 
même  du  mont  ^*^&i^,  dans  des  siècles  pos^ 
térîeàrs  aux  Romains;  et  lorsqu'il  n'y  en  au* 
rait  pïhiâ  aujoutd'huî,  cela  prouverait  seulement 
que  l'invention  des  armes  à  feu ,  et  les  cojoi** 
quêtes  des  Arabes ,  chasseun  et  guerriers  par 
nature ,  et  moins  renfermés  dans  les  villes  que 
les  peuples  di'ongiire  phémcienoe,  ^eeque  ou 
romaine,  les  auront  fait  disparaître  entière* 
loent.  'César  (  i  )  nous  est  t^émotn  que  l'élan 
el  >FauFoohs  étaient  commims  dans  les  feréis 
de  Ja  Gaule  et  de  la  Germanie.  D'après  un  pas»- 


qu'ttérodote  dit  des  Ammoniens  semble  démontrer  aussi  » 
eotatae  nous  mettons  de  le  dire,  que  Voasis  d'Amman. nt 
devrait  point  être  placée  à  Sif^çÂ^:  mais  cette  diacussion 
n^est  pas  de  notre  sujet.. 

(i)  Csesar,  De  belio  Gat&co^  lib.  ti,  cap»  7,'j  et  28.  * 


J» 


38o  RECHERCHES    ftCa    l'aF/IIQUE. 

sage  de  Gaston  Phébus,  il  paraîtrait  que.  le  pre- 
mier de  ces  animaux  se  trouvait  eécore  au  dou- 
zième siècle  sur  les  sommets  neigeux  des  Pj/ré- 
.  nées ,  et  aujourd'hui  il  ne  se  voit  plus  ^  qu'eo 
Laponie  :  l'aurochs*  est  rare  même  en  jÇologne, 
et  aura  dans  quelques^  années  peut-fstre  dispahi 
pour  toujours  du  sol  européen. «Lorsqu'on  se 
rappelle  la  quantité  prodigieuse  de.  lions  et^  de 
léopards^  que  les  Romains  tiraient  de  la  C/ré- 
naïque^  de  l'-^d^/h'^rwe  proprement  dite,  et  dç  la 
Numidie^  et  le  peu  d'animaux  de  ce  genre  que 
Ton  trouve  dans  les  mêmes  rég^ns,  on  ne  peut 
douter  un  instaitf  que  les  espèces  d'animaux 
féroces  n  y^  aient  considérablemenl;  diminué.  La 
giraffe  paraît  aussi  avoir  été,  par  lesméiiies 
causes ,  expulsée  des  régions  voisines  de  ^Egypte  ' 
et  .de  X AbyssiniB  ;  ^X.  cette  espèce  a  été  reCcwilée 
dans  les  déserts  du<:entre  et  du  midi  de  XAfn^ 
que.  Par  cette  raison,  ce  grancji  quadrupède iut 
long -temps  inconnu  aux  peuples  modernes, 
quoique  clairement  décrit  dans  les  écrits  .des 
anciens  (1).  ^ 

D'ailleurs  il  suffisait  que  les  Anciens  crussent 
qu'un  des  fleuves  de  la  Mauritanie  était  le  Nil^ 
et  qu'ils  eussent  trouvé  dans  ce  fleuve  le  pçfjXT^^i 

(i)  Voy.  Plin. ,  lib.  viii ,  cap-  27. 


I^INROISIÈME    f»4LRTI£.  38l 

Icf  htus^t  les  autres  planles  particulières  au  IViif 
pour^qu'ils  ifiiaginassent  aussitôt, qu'on  y  trou* 
vait  aussi  le  crocodile,  l'hippopotame  et  les  au- 
tres animaux  du  Nil! 

^  Ainsi  tlont,  je  le  répète,  il  est  prouvé  que  les 
connaissances  géographiques  dans  l'intérieur  de 
FÂfriqu^ç  ne  dépassaient  pas,  au  siècle  de  Pline, 
les  lîtfiitesv  qu*elles    avaient    du  -temps   d'Hé- 

rodqjp. 

*  Mais,  soixante-dix  ans  après  Pline ,  on  aper- 
çoit à  cet  égard,  dans  l'ouvrage  de  Ptolémée, 
un  perfectionneîfaent  notable.  Pour  en  apprécier 
toute  l'importance,  il  faut  se  rappeler  qu'il  est 
dans  certaines  sciences  des  erreurs  qui  se  repro- 
duisent, et^qui  renaissent  en  quelqpue  sorte  dans 
tous  les  .  siècles ,  parce  qu'elle?  tiennent  à  la 
nature  de  l'homme,  à  la  faiblesse  dé  ses  moyens, 
à  la  marche  de  son  esprit.  Lorsque  les  continents 
ne' sont  encore  peuplés  que  par  des  tribus  sau- 
vages et  éparses,  et  qUe*,  sans  culture,  ils  sont 
encombrés  de  leurs  forét$  primitives,  les  seuls 
moyens  àe  communication  entre  des  pays  éloi- 
gnés, les  seules  routes  praticables^  sont  les  fleu- 
"^es  et  les  rivières.  Oïl  peut  dire  avec  vérité  que 
ce  sont  les  fleuves  et  les  rivières  qui  ont  civilisé 
le  monde.  ]\(Iais  il  n'existe  dans  chaque  conti- 
nent qu'un  très-petit  nombre  de  grands  fleuves , 


38a       recherckjb's   sur  i/afri^ue. 

dans  lesquels  viennent^ se  rendra  tous  lesauCres 
fleuves  et  rivières,  et  qui,  dérivant  tot^  des 
monts  les  plus  élevés  de  ces  continents,  ne  sont 
séparés  à  leurs  sources  que  par  des  intervalles 
peu  éloignés,  quoique  souvent  difiSciles  à  fran- 
chir. De  là  il  est  résulté  que,  dans  tous  les  temps 
et  dans  tous  les  pays,  on  a  commuée  p^  croire 
4}ue  tous  l0B  grands  *  fleuves  communiquaient 
entre  eux,  et  qu'op  ^  joint  ainsi  touées  les  mers, 
entre  elles.  Les  écrits  des  anciens  foQt  foi  que 
tels  ont  été  les  premiers  «systèmes  géographi- 
ques ;  et  lors  même  que  les  progrès  des  décou- 
vertes démontraient  qu'il  existait  une  séparation 
entre  les  rivières,  on  ne  rectifiait  pas  les  idées 
que  l'on  avait  conçues  à  pet  égard  j  on  croyait 
que  la  rivière  que  l'on  venait  de  quitter,  était  la 
même  que  ctHe  qu'on  re^ouvait  à  quelque  dis- 
tance, et  qu'elle  avait  coulé^sôus  terre.  Lés  er- 
reurs se  maintenaient  malgré  les  faits  les  mieux 
avérés.  Ainsi ,  après  la  conquête  de  Vlllyrie  par 
les  Romains,  Pomponiu,3  Mêla  fait  communi- 
quer eniii^mble  la  mer  Noire  et  la  imçr  Adria- 
tique ,  par  le  moyen  du  Danube;  et  ^ri^  au 
treizième  siècle  de  l'ère  elirétiehne  ,"* maintint 
^ur  le  globe  qu'il  a  Jracé',  cette  même  comnau- 
nication. 

..  lad^endamment  de  cette  tendance  natiu'elle 
des  esprits  â  réunir  entre  eux  les  grands  fleuves, 


TIlOlSliMB    9^^RTI£.  383 

des  circonstanceft  particulières  concouraient  à 
fsûre  iîonforidre  le*  NU  avec  d'aulres  fleuves ,  et  à 
produire  une  illusion  dont  il  était  difficile,  de  se 
garantir.  Le  Nil  fut  le  premier,  et  pendant  long-. 
temps  le  seul  fleuve  connu  des  anciens  et  de 
tous  les  peuples  tivilisés^  où  Ton  trouvât  des 
crocodiles  ,ides  hippopotames ,  du  papirus  et 
d'autres  plantes  des  régions  de  la  zone  torride.^ 
On  crut  donc  voir  le  Nil  partout  où  se  voyaient 
ses  productions;  on  le  fit  sortir  de  \2i  Mauritanie, 
on  le  retrouva  dans  VInde  (i)  ;  il  arrosait  le 
pays  des  Éthiopiens,  il  pénétrait^dans  celui  d^s 
Sèreif  (2)5  et  l'on  ne  pouvait  déterminer,  comme 


(i)   Usque  coloratis  amt^is  devenus  ab  Indis, 

(Virg.  G€org.^\ïh.  IV,  y.  293.) 
C*est  par  ceUe  raison  qae  Josèphe,  lib.  U,  cap.  1%  ^ 
dit  que  TÉgypte  toUcb»  à  Tlnde. 

(a)"  Cifrsus  in  occaifum  Jtexu  torquêtur,  et  ortus 

Nunc  Arabum  popuUs  Libycii  nunc  œquus  arenis; 
Teque  vident  primi^  qifœruni  tamen  ki  quoque  Se^es, 
(Lucan.  Pharg.j  lib.  X,  290-293.) 
Je  sais  </be  Ses  savants ,  peu  familiarisés  aVèc  les  systè- 
mes géogipafp&fqiiea  des  ancieaa,  seSoatJmagiu/é  que  Yir- 
gUe,  ^r  thdkuSi  désignait  les  Éthiopiens  ou  les  habitanrs 
de  Ja  HaMte-^Égypte,  et  guejes  Seres  étalent  les  habitants 
de  cette  portion  du  Nil  nommée  Siris ,  selon  Denys  le  Pe- 
riègètes  {dMf  Description  v.  223);  nais  la  manière  dont 
s'expriment  les  deux  poètes^  prouve  bien  qu'ila  veulent 


384         RECHERCHES    SUR    L'ÂFRK^tTE.  „ 

le  dit  énergiquem^nt  Lucain,  à  quelle  partie  du 
monde  il  appartenait  :  \  ''    .  * 

,     ♦    Ei  te  Terrarum  nescit  cui  debeat  orbis. 

C'est  donc  urte  chose  très-remarquable,  et  qui 
marque  des  progrès  prodigieux  en  géographie, 
de  voir  dans  Ptolémée  les  sources  du  IVii  pla- 
cées en  Ethiopie,  dans  i4ne  chaîne  de  mon- 
*tagnes,  qui  s'étend  de  l'est  à  l'ouest^,  nommées 
les  Montagnes  de  la  Lune  ;  de  trouver  ce  fleuve 
entièrement  distinct  des  rivières  de  Ja  -Mau- 
ritanie et  de  l'intérieur  de  l'Afrique,  coulant 
naturellement  du  sud  au  nord,  et  dérivé  dé 
deux  rivières,  qui  sont  évidemment  Ig  Bafir-^l- 
Abiad  et  le  Maleg  des  modernes;  puis  recevoir 
de  l'est  deux  autres  fleuves,  XAstapus  et  YAsta* 
boraSj  qui  sont  XAbawi  ou  Bahr-el-Azrek^tt 
XAtbara  (i)*ou  Tacazzé  de  nos  cartes  ;  de  voir 


désigner  les  contrées  éloignées  et  non  voisines  de  l'Egypte. 
Ces  interprétations  forcées  ne  peuvent  obscurcir  un  ins- 
tant le  sens  fort  claire  dé  ces  passages.  Virale,  conséquent 
avec  lui-même,  fait  les  habitants  des  bords  du  iViV  voi- 
sins des  Perses  :  Quaque  pharettatœ  vicmia  PerMis  urget, 
{Georg, ,  lib.  IV,  v.  290.  )  Huet  et  Fréret  ne  4'y  sont  pas 
trompés.     _  « 

(i)  Sur  ce  ùom  ^Athara  donné  au  Tàcazzéy  voyez  Mofi' 
ofihe  coursé  of  the  Nile  and  adjacent  coutiies^dsiDS  Burck- 
hardfs  Travels,  p.  i63  ,  et  Bruce*s  TraveU,  t.  VIL 


TROISIEJUS     PARTIE.  385 

enfin  deux  fleuves  principaux  arroser  le  pays 
au  sud  de  V^tlaSj  sans  aucune  communication 
entre  eux,  ni  avec  les  rivières  qui  s^coulent 
dans  l'Océan  atlantique  ou  la  Méditerranée,  ni 
avec  le  Nil.  Un  exposé  si  clair,  si  conforme 
à  l'ordre  naturel,  et  quç  confirment  toutes  les 
découvertes  modernes,  ne  peut  être  dû  qu'à  des 
connaissances  fondées  sqji*  des  relations  exactes 
et  des  observations  précises.  Il  me  paraît  évident 
que  les  conquêtes  de  Suetonius  Paulinus  et  de 
Cornélius  Balbus  ouvrirent  un  accès  facile  aux 
habitants  éclairés  de  YÉgxpte  et  des  côtes  de 
Y  Afrique  proprement  dite,  de  1^  Numidie  et  de 
la  MauriUinie^  chez  les  Garamantes^  les  Phau- 
rusii^  et  les  autres  peuplés  qui  sont  au  midi  de 
XAtlasi  et  que  la  carte  de  Ptolémée  est  le  résuU 
tat  de  toutes  les  connaissances  qui  en  furent  la 
suite. 

Si  Fou  fait  abstraction  des  erreurs  de  longi« 
tude  et  de  latitude  qui  existent  dans  Ptolémée , 
jusque  dans  les  pays  les  mieux  connus  de  lui 
et  des  anciens^  et  qui  tiennent  à  la  méthode 
qu'il  a  employée  pow  dresser  ses  tables ,  on 
trouvera  que  la  carte  d'Afirique  qui  résulte  de 
cesTnêmes  tables,  dans  les  idées  générales  qu'elle 
présente  relativement  au  NiU  est  plus  conforme 

(i)  Ptolemaei  Africœ  tabula ,  iv. 


386         RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

à  ce  qui  nous  est  tracé  par  la  nature  dans  les 
autres  cantinents,  que  tout  ce  que  la  plupart  des 
géographes -ont  exposé  avant  lui,  ou  après  lui, 
sur  ce  sujet.  En  effet,  Ptolémée  a  fait  disparaître 
ces  étranges  communications  des  grands  fleuves 
de  l'Afrique  entre  eux,  auxquelles  croyaient  Stra- 
bon,  Pline,  Mêla  et  presque  tous  les  géographes 
de  l'antiquité;  communications  qu ont  admises, 
en  les  multipliant, les  géographes  arabes  aux  xiv^, 
XV®  et-  XVI®  siècles ,  et  les  géographes  modernes 
au  xvn®  «iècle  ;  dont  presque  tous  les  habitants 
de  l'ignorante  Afe'ique  affirment  encore  l'exis- 
tence, et  qui  sont  de  nos  jours  le  rêve  favori 
de  plusieurs  géographes  recommandables  de 
l'Europe  savante  (i). 

De  même  que  les  anciens  voyséent  le  I>/il 
par-tout ,  les  Africains  de  l'intérieur ,  nos  voya- 
geurs et  nos  géographes  trouvent  en  Afrique' 


(i)  Voy.  la  Carte  d'Afrique  de  d'Anville  ;  la  Géographie 
physique  de  la  mer  Noire  efde  Vinténeur  de  V Afrique  par 
Burean  de  là  Malle ,  ch.  xiii  .^  p.  j6 ,  et  la  carte  d«  cet 
ouTrage,  dressée  par  II.  Boa  due  ;  la  carte  de  TouTrag^  de 
M.  Bowdich,  dans  TouTrage  intitulé  Missàin  to  Ashantee^ 
qni  établit  une  cûrain^unication  non  interrompue  depuis  les 
embouchures  du  Nil  à  Alexandrie  jusqu'à  l'embouchure 
du  Zaïre  ou  fleuve  de  Congo  ;  la  carte  de  l'auteur  de 
l'extrait  du  Voyage  de  M.  Mollien  dans  le  Quarterty  Réviewî 
mai  1820,  p.  aaS,  vol.  XXIII,  n**XLV. 


TROISIÈME    PARTIE.  '       387 

par-tout  le  Niger  :  et  il  faut  que  l'esprit  de  sys^ 
tème  exerce 'une  bien  forte  influence  sur  les 
meilleures  têtes ,  pour  que  .les  homnies  les  plus 
Smineata  ^ea  géo^aphie,  tels  que  d'Anville  et 
plusieurs  autres,  se  soient  mépris  aussi  forte* 
ment  dans  l'applicatiofL  qu'ils  ont  faite  des  no* 
fioFEis  générales  de  Ptolémée  sur  rAfriqoe  aux 
connaissances  des  moderaes^et  pour  qu'ils  aient 
transporté  k  trois  cents  lieues  au  sud  et  dans  le 
Soudan ,  les  fleuves  de  Nigir  et  de  Gir^  que  le 
g^graplie  ^grec  a  tracés  immédiatement  au  sud 
de  Yu^tlas. 

Cependant  le  Nigir  de  Plolémée  arrose  le 
pays  des  noirs  Gétules  {Melano-OetuU)^  des 
JVigrites,  placés  au  nord  des  Phaurusii  ^  qui 
sont  à  Yml  des  Daradœ  ;  et  nous  savons , 
d'afO^ès  Pline  (i),  que  ce  sont -là  les  peuples 
que  l'expédition  de  Suetonius  Paulmus  fit  con* 
nakre^  au  sud  de  V^tkfs.  Le  JVigir  de  Ptolé- 
mée est  donc  tk  même  fleuve  que  le  Niger  ou 
le  Ger  de  Pline ,  et  sur  les  bords  duquel  Suelo* 
nius  Paulinus  parvint' au  dixi^e  campement, 
à  partir  de  Tangis  ou  «dé  limas  ^  où  de  quelque 
autre  ville  de  4a  Jftzi/r/^^zme  soumise  auxBromains 
dand^  cette  portion  du  royaume  'de  Maroc  des 

(\)  Plinil  lib.  v,  cap.  i  ,  et  cUdessus  p.  373. 

,        a5. 


388  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

modernes ,  qui  est  au  nord  ou  à  Fouest  de 
VJtlas. 

De  même  vers  l'ost,  le  Gir  fluvius  arrose  le 
pays  de,s  Garamantes^  qui,  nous  le  savons,  n'est 
qu  a  dix  journées  de  route  èiAugila  ou  d'^«- 
^^/a  des  modernes;  et  nous  avons  déjà  vu  que 
le  pays  des  Garamantes  est  le  Kaivar  ou  Kaouar 
et  le  pays  de  Bilma  des  modernes ,  au  que  du 
moins  il  ne  s'étendait  pas  plus  au  sud. 

Ainsi  donc  le  tracé  du  Nigir  et  du  Gir 
de  Ptolémée  ne  prouverait  pas  que  les  con- 
naissances géographiques  dans  l'intérieur  de 
l'Afrique ,  au  second  siècle  de  l'ère  chrétienne, 
fussent  plus  étendues  qu'au  temps  d'Hérodote, 
de  Strabon  et  de  Pline,  si  le  géographe .  grec 
n'indiquait  rien  au  sud  de  ces  deux  fleuves. 
Mais  au  contraire  il  a  placé  loin  au  midi  un 
grand  nombre  de  noms  de  peuples*  que  nous 
ne  retrouvons. point  dans  lejj  géographes  anté- 
rieurs; et  enfin  encore  plus  au ^ midi,  et  au-delà 
d'un  vaste  désert ,  séjour  des  éléphants ,  des 
rhinocéros  et  des  tigres,  il  met  un  Niphe  Mons^ 
un  Mesche  MonSj  un  Barditus  Mons  ^  dans  le 
pays  ^Agisymba^  vaste  région  à' Ethiopie  {Agi- 
symha  regio^  jEthiopum  latissimè  extenso).  Ici 
nous  voyons  des  noms  et  des  notions  dont  les 
auteurs  aq|érieurs  ne  nous  dévoilent  pas  l'ori- 
gine ;  il  faut  donc,  pour  jiiger  de  leur  étendue 


TROISIEME    PARTIE.  SSp 

et  des  limites  de  ces  nouvelles  connaissances,  * 
tâcher  de  découvrir,  d'où  elles  proviennent. 

Dans  ses  prolégomènes,  Ptolémée  (i),  discu- 
tant les  longitudes  et  les  latitudes  de  A^arin  de 
Tyr,  nous  apprend  qu'il  a^ trouvé,  dans  l'ouvrage  v 
de  ce  dernier,  que  Septimius  Flaccus  porta  la 
guerre  dans  JaZr/^e,  et  qu'il  employa  trois  mois 
pour  aller  du  pays  des  6^arâ(/72â;/z^^^  dans  celui 
des  Éthiopiens;  que,  de  plus,  Julius  Maternus 
avait  employé  quatre  mois  lorsqu'il  alla  de  Lèptis 
M€igna  rejoindre  les  Garamantes  k  Garama^  et 
de  là  porter  la  guerre  en  Ethiopie  et  an  pays 
S^Agisymba^  où  l'on  trouve •  les  rhinocéros; 
quoique  cependant  Julius. Maternus  eut  toujours 
dirigé  sa  route  vers  le  midi.  . 

Il  est  vrai  que  Ptolémée  fait  contre  ce  récit  des 
objections  et  le  regarde  comme  impossible  :  d'a- 
bord, dit-il,  parce  que  \t%  Éthiopiens  intérieursne 
sont  pas  tellemenU6éparés  du  pays  des  Garamàn- 
tesj  q[^'il  faille  marcher  pendant  trois  mois  pour 
arriver  de  l'un  à  l'autre,  puisque  les  Garamantes 
sont  eux-mêmes  Éthiopiens;  ensuite, parce  qu'il 
est  ridicule  de  croire  wjue  l'incursion  d'un  roi 
contre  ses  sujets  ait  pu  se  faire  en  suivant  une 
direction  précise  du  nord  au  mid^tioindis  que  ées 
nations  s'étendent  l'une  et  l'autre  fort  avant,  tant 

. , — 9, u 

(1)  Vtoy^mxi  Prolegomena  y  cap.  tiii. 


SgO    RECHERCHES  SUR  l'aPRIQUE. 

vers  Forient  que  vers  l'occident  ;  et  parce  qu'en- 
fin il  n  est  pas  probable  que  dans  ses  courses 
le  roi  n'ait  fait  aucun  séjour  doht  il  soit  néces- 
saire de  tenir  compte.  Il  est  donc  vraisemblable , 
ajoute  Pïolémée  ♦  que  ceux  qui  ont  rapporté  ces 
fkits  en  ont  parlé  iropai^faitement ,  en  disant  que 
la  route  se  dirigeait  au  ïnidi ,  au  lieu  .de  dire 
seulement  qu'eUe  tendait  ters  le  midi. 

On  voit  que  les  objections  de  Ptoiémée  ne 
portent  pas  sur  la  réalité  des  incursions'  de  Sep- 
.  timius  Flaccus  et  de  Jtilius  Matemus,  mi^is  sur 
le  plus  ou  moins  d'extension  qu'on  doit  donner 
à  ces  înciiirsioBS  du  sud  an  nord.  En  admettant 
comme  justes  pluisieurs  des  objections  de  Pto- 
iémée, et  en  réduisant  d'après  sed  propres  bases 
la  longueur  du  trajet  pavcoulii  dans  cai  dieux 
expéditions,  il  reste  toujours  certain ,  d^'a^irès  le 
temps  qu'on  y  a  employé,  qu'elles  ont  dû  fran- 
chir les.lijmtes  des  conuaissaiiées  géographicpies 
et  le  pays  de^  Kàouar^  et  s'étendre  assez  avant 
dans  le  Déseiiu  Mais-  quel  est  le  terme  e:s(tapénie 
où  eHes  se  sont  arrêtées?  Je  n'en  sais  riefr; 
seul^nentje  puis:  affirmer  avec  certitude  qu'elles 
ne  se  sont  pas  étendues  ju^u'an  Niger  ni  jus- 
qu'au Soudan  ,if6rtilisé  par  de  nonibveux  cours 
d'eau  :  j'en  tire  la  preuve  de  Marin  de  Tyr,  ou 
de  Ptolém4e  même,  puisque  dans  la  région 
diAgisymba  il  n'est  pas  fait  mention  d'uHie  seule 


TROISIÈME   PA.RTIE.  39T 

rivière,  d'un  seul  Uc,  d'un  seul  marais.  Le  géo- 
graphe grec  n'indique  que  le  Q.om  de  la  con- 
trée, celui  de  deux  ou  trois  montagnes^  et 4es 
genres  de  biétes  féroces  qui  l'habitent  ;  ce  qui  dé- 
montre évidemment  que  cette  incursion  eut  lieu 
dans  certaines  oasis  du  Grand-Désert,  où  l'on 
ne  trouve  que  des  puits  e%  des  spwces.  JuUus 
Maternus  et  Septimius  Flaccus  d^ns  kurs  ]:^pldes 
expéditions,  n'entendirent  même  pas  parler  de 
la  région  du  Soudan  y  ni  des.  grands  jQeuvës  qui 
l'arrosent ,  car  ils  n'^^rf^ient  pas  maoaqué  d'en 
faire  mention  dans  kur  relation;  et  Ms^rin  de 
Tyr,  et  après  lui  Ptoléonée,  n'auraient  p;is  qu- 
blié  d'en  enrichir  leurs  traités  de  géographie. 

Dans  un  ouvrage  précédent  j'ai  dit  (t)  que  je 
pensais  cpjL  Agisymba  était  l'oasis  actuelle  d^Js- 
èe«:(2),  où  s'arrêtent  encore  auj^ourd'hui  la.plu- 
part  des  caravane^v  Dans  ce  cas^  Septimius  Flac- 
cus et  Julius  Matprnus  auraient  suivi  la  route 
que  prennent  encore  les  caraVanes  qui  se  ren- 
dent <à  C^ch^nah  ;  les  montagnes  de  Megrem  de 

notre  seeond  itinéraire  seraient  le  Mesche  Mans 

•  'a  • __^ 

(1)  Cosmologie,  où  Description  gêner,  de  la  Terre ^  p.  289. 

(a)  Agadez^hi  capitale  à'Asben,  est  une  sorte  d'entrepôt 
du  commerce  pour  le  Soudan  :  cette  -ville  est  entièrement 
habitée  par  des  Mahomëtans;  et  les  marchands  da  Fezzan 
s'y  arrêtent  souvent  et  ne  poussent  pas  plus  loin  leurs 
caravanes.  Voy.  Proceedings,  p.  164. 


392  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

de  Ptoléinée;"et  le  Barditus  Mons  est  peut-être  la 
chaîne  de  monts  au  sud  $Ashen  et  au  nord  de 
Cachenah.  Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  conjectures, 
il  est  démontré ,  d'après  tout  ce  que  nous  avons 
dit,  que  le  Nigir  et  le  Gir,  tracés  sur  la'  carte 
de  Ptolémée ,  n'appartiennent  pas  au  Soudan , 
mais  aux  contrées  qui  sont  immédiatement  au 
sud  de  \ Atlas  ^  et  qu'on  ne  peut  tirer  aucune 
lumière  de  ce  géographe,  ni  d'aucun  auteur 
ancien,  pour  ce  qui  concerne  le  Joliba  ou  Niger, 
ou  les  autres  rivières  An  Soudan^  puisque  cette 
région  a  été  inconnue  à  toute  l'antiquité,  et  fut 
réellement  une  découverte  des  Arabes  (i). 

§  VII.   Résumé^  Conjectures^  et  Conclusion, 

Après  avoir  lu  l'analyse  de  nos  itinéraires, 
on  nous  objectera,  peut-être,  que  des  journées 
de    caravane ,    en    supposant    leur    évaluation 

(i)  L'erreur  commise  sur  le  Gir  et  le  Nigir  de  Ptolémée 
n'a  été  générale  qtie  depuis  d'Anville  ;  et  encore  elle  a  été 
quelquefois  combattue.  M.  Latreille,  dans  une  dissertation 
publiée  en  1807,  explique  bien  ce  qui  concerne  le  Gir  et 
le  Nigir  ;  mais  il  ne  parle  pas  à^Agisymba ,  ni  des  incur- 
vons de  Septimius  Flacciis  et  de  Julius  Maternus.  Hasius, 
dans  sa  petite  carte  intitulée  Imperium  Romanum  sub  fus- 
tiniano ,  place  le  Gir  et  le  Nigir  au  sud  de  Y  Atlas  ;  mais  il 
met  VAgisymba  regio  dans  le  Soudan,  et  7  trace  un  grand 
fleuve ,  oubliant  que  la  carte  de  Ptolémée  oet  sur-tout  re- 


TROISIÈME,  PARTIE.  SqS 

exacte ,  sont  encore  un  moyen  très  -  imparfait 
pour  mesurer  des  distances  et  fixer  des  posi- 
tions. Nous  en  convenons  :  mais  c'est  le  seul 
qui  soit  en  notre  disposition  ;•  et'  tout  imparfait 
qu'il  est,  il  suffit^  pour  resserrer  l'espace  des 
erreurs  possibles  dans  des  limites  assez  étroites. 

Nous  croyons  sur-tout  avoir  obtenu  ce  résul- 
tat par  le  premier  de  nos  itinéraires,  qui  nous  a 
servi  à  déterminer  la  position  de  Timbouctou; 
c'était  le  seul  que  nous  nous  étions  proposé  d'a- 
bord de  soumettre  à  l'analyse ,  et  il  a  été  l'oc- 
casion comme  le  but  principal  dé  notre  ouvrage. 

L'itinéraire  de  Tripoli  à  Cachenuh^  qui  est 
aussi  rédigé  par  le  cheyk  Hagg-Kassem^  s'ac- 
corde si  bien  avec  ceux  que  le  major  Rennell  a 
obtenus ,  qu'il  ne  nous  laisse  non  plus  aucun 
doute  sur  son  exactitude ,  relativement  aux  dis- 
tances des,  lieux  qui  s'y  trouvent  mentionnés  ; 
mais ,  pour  le  tracer  sur  la  carte ,  il  faut  sup- 
poser la  longitude  de  Cachenah  déjà  connue,, 
et  nous  n'avons  pas,  pour  la  fixer,  les  mêmes 
moyens  que  pour  Timbouctou. 

Quant  à  l'itinéraire  de  Mohammed ,  fils  de 
Foui,  nous  devons  dire  qu'il  s'y  trouve  beaucoup 

marquable  en  ce  qu'elle  ne  met  pas  un  seul  cours  (Veau, 
ni  un  seul  lac,  dans  une  région  qu'il  représente  comme 
immense. 


394  RECHERCHES    SUR     L  AFRIQUE. 

d'incertitudes  et  d'obscurkés.  ConiiQe  il  ne  nous 
trace  point  Hne  route  directe ,  et  qu'il  passe  par 
Haoussa ,  dont  la  position  n'est  point  connue, 
nous  n  avonsi  pu  lui  domner  de  direction  que 
d'après  les  conjeetures  qm  nous  ont  paru  les 
plus  probables. 

Dans  tous  les  cas  ^  le  soin  que  nous  avons  eu 
de  n'inscrire  sur  notre  carte  que  les  noms  et 
les  positions  que  nos  itinéraires  contiennent,  et 
qui  étaient  les  résultats  de  nos  recherches ,  don- 
nera plus  de  facilité  pour  &ire  les  rectificatiços 
que  de  nouvelles  découvei^és  foraient  juger 
nécessaires  ;  tandis»  que  cela  devient  difficile  ou 
impossible  sur  de&  cartes  en  apparenee  fixis 
riches  d'érudition,  œais  où  l'on  a  mêlé  et  con- 
fondu les  nodEQS  et  Les  erreurs  de  «cmis  les  au- 
teurs et  de  toutes  les  époques. 

Quel  que  soit,  au  reste,,  le  jugement  qu'on 
porte  de  Texaciâtudâ  de  nos  analyses  et  de  la 
réalité  de  nos  con^etiires  (i),  nous  osom  es- 
pérer que  la  scietiee  irecueiUera  de  grands  avan- 
tages de  la  réunion  de  tons  les  renseîgiienteQts 


(i)  Quelquefois  ces  conjectures  ont  varié,  parce  que  les 
renseignements  Tagnes  qm  6n  étaient  l'objet  ne  sent  pas 
toujours  .présentés  de  la, même  manière  par  les  dâfférents 
auteurs  où  nous  avons  puisé.  Aiiisi  dans  la  coi|Eiparaison  de 
la  carte  de  M.  Bowdich  ayec  les  relations  antécédentes , 


TROISIÈME     K^AETIE.  3g5 

Fetifermés  dans  notre  ouvrage  sur  l'intérieur  de 
VAfricfae  et  sur  les  contrées  du  Soudan,  Sous 
ce  rapport,  liarAt  qu'il  restera  dies  découvertes  à 
foire,  Bos  recherches  pourront  être  consuhées 
avec  fruit;  et  quand  tout  sera  connu,  elles  cif- 
fiiront  encore  l'histoire  complète  et  exacte  dies 
progrès  de  la  géo^aphie  pour  cette  partie  du 
globe ,  qui  fut  toujours  rohjet  de  la  curiosité 
ou  de  l'ambition  des  peuples  les  plus  éclairés. 

I>aiis  les  tentatives  que  l'on  a  faites  pour 
éclaîtcir  eette  partie^  de  la  géographie ,  au  lieu 
de  rémnir  les  faits  et   de  les  ootnparer  entre 

-I       .  .  '      I  <i  I  .      .        ■■>>    I  .1   ■  »  .1  ■  I  ,       m ^.i'  !■     <  ■  ^  .  ■  .-  I  ■        I     I  I  «  !■■. 

BOUS  avons  ootigecCuré ,  p«  iW^  (faele^Huara-ûé  l'Arabe 
feliata  de  M.  Seetzen  poiirrak  bien  aveir  dn,  rapport  »yé^ 
le  paya  de  Quolla  ou  du  Dar-KuUa,  N-ous  pensons ,  d'apcès 
un  examen  plus  attentif,  qiie  le  Kuara  de  TAral^e  fellata 
est  le  Kawar  ou  Kaouar  au  sud  du  Fezzan ,  ainsi  que  nous 
l'avions  dit  à  la  p.  86.  Abd-Arrachman  Aga  {F,  p.  78)  a  fait 
menrfk>n  du  ménié  pays  sons  Be  nom-^  de  Kouar  et  à  côté  dé 
Bulma^  qnrêstBélmOi  Ce  nonm  de- Koaar  ou  JKouara  pamit 
aToiif  une  sîgnifioation;  etil  y  a  une  province  de  JQsuara 
au  sud  de  YAbyssinie.  Bruce  ,^  qui  la  décrit  {Trav^^ls  to 
discover  the  source  ofthe  Nile ,  181 3 ,  iuT8*',  t.  IV,  p.  44?  )  » 
dit  qae ,  dans  le  langage  des  ChangaUas ,  le  mot  Kouara 
signifie  soleil.  Le  même  auteur,  p  446,  dit  que  la  pro- 
vince de  2)«//?^<?a  est 'nommée  Atte-^Kolla;  ce  qui  signifie 
la  noiarritupe  du  roi.'  Toutei  ces  significations ,  et  toiites 
ces  ressemblances  de  mots,  doivent.,  ainsi  que, je  l'ai  fait 
remarquer ,  être  la  cause  de  beaucoup  d'erreurs  et  de  con- 
fusion. 


ig6  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQIÎE. 

eux,  on  s'est  hâté  de  multiplier  les  supposi- 
tions, et,  ne  pouvant  parvenir  à  conftaître, 
on  a  voulu  deviner. 'Telle  est,  dans  toutes  les 
sciences,  la  marche  de  l'esprit  humain.  Elle 
tient  à  une  des  plus  nobles  propriétés  de  sa 
nature ,  au  désir  violent  qu'il  éprouve  d'at- 
teindre la  vérité.  Lorsqu'elle  se  dérobe  à  lui, 
il  cherche  à  se  créer  des  illusions  qui  puissent 
lui  en  tenir  lieu. 

On  a  su  qu'il  existait  un  ou  plusieurs  fleuves 
dans  le  Soudan ,  et  l'on  a  formé  différents  sys- 
tèmes pour  suppléer  à  l'ignorance  où  l'on  était 
sur  le  cours  de  ces  fleuves.  Nous  avons  fait 
connaître  tous  ces  systèmes.  Il  nous  reste  à 
exposer  en  peu  de  mots  notre  opinion  à  cet 
égard  :  auparavant  nous  devons  foire  remarquer 
à  nos  lecteurs  que ,  quoique  l'analogie  soit  sou- 
vent en  géographie  un  guide  trompeur,  c'est 
cependant  le  seul  qui  emprunte  au  flambeau  de 
la  science  quelques-unes  de  ses  clartés,  et  qui 
puisse  rendre  nos  conjectures  utiles.  Mais,  lors- 
que les  idées  que  nous  allons  offrir  sur  l'inté- 
rieur de  l'Afrique  obtiendraient  l'assentiment 
des  lecteurs ,  nous  desirons  qu'elles  ne  soient 
pas  tracées  sur  les  cartes,. parce  qu'alors  il  sem- 
blerait que  nous  avons  voulu  les  exposer  comme 
des  vérités  démontrées,  tandis  que  notre  but 


TROISIÈHE    PAR7:iE.  3g'j 

est  seulement  de  les  présenter  comme  des  pro- 
babilités plus  ou  moins  fondées. 

Quoique  les  progrès  des  découvertes  réelles 
se  soient  arrêtés  dans  la  partie  orientale  du 
Soudan^  à  Cobbé,  dans  le  Darfour,  cependant 
on  peut  regarder  comme  prouvée  l'existence 
d'une  ou  de  plusieurs  rivières  qui,  sous  le  nom 
de  Misselad  ou  de  Djyi\  coulent  du  sud  au  nord 
ou  du  nord  au  sud,  ce  qui  est  attesté  de  ma- 
nière à  ne  pas  laisser  lieu  d'en  douter.  De  même 
à  l'occident,  quoique  les  découvertes  de  Mungo- 
Park  s'arrêtent  pour  nous  à  Silla^  cependant  *H  a 
reçu  dans  ses  deux  voyages  des  informations 
semblables  sur  l'existence  des  deux  Iwas  de  rivière 
qui  forment  l'île  /^«èa/a,  à  l'ouest  du  méridien 
de  Timbquctou;  et  on  doit  également  considé- 
rer l'existence  de  cette  île  et  des  bras  de  fleuves 
qui  la  forment  comme, démontrée.  Mais  à  l'est 
de  l'île  de  Djinbala  ou  Jinbala^  comme  à  l'ouest 
du  Misselad^  les  cours  des  grands  fleuves  du 
Soudan  sont  ignorés;  tout  est  doute,  incertitude 
et  contradictions  dans  les  renseignements. 

Ces  contradictions  ne  sont  peut-être  nulle 
part  plus  frappantes  que  sur  '  la  direction  du 
fleuve  qui  coule  à  Timhouctou  :  il  semble  cepen- 
dant que ,  d'après  les  caravanes  qui  se  rendent 
tous  les  ^âus  dans  cette  ville ,  ce  fleuve  devrait 
être  parfaitement  connu. 


^9^  K£GU£UCH£S     SUR    l'a.FRIQU£. 

Nous  avons  tu  que  Léon  rAfricain  et  beau- 
coup d  autres  affirment  que  ce  fleuve  coule  i 
l'ouest,  et  (}u'on  se  rend  de  TimbouctoukJinne 
ou  Djenni  en  descendant  son  cours.  D'autres,  au 
oontraire,  disent  que  ce  fleuve  coule  à  Test  (i), 
et  qu'à  partir  de  Timbouctou ,  en  descendant 
son  cours 9  on  nsrvigue  vers  l'orient  jusqu'au  Nil 

CesrfippoPtSy  si  contradictoires  en  î^arence, 
s'expliquent  tout  naturellement  si  l'on  suppose 
que  le  Gambarou ,  qui  coule  de  l'est  à  l'oued, 
contribue  à  former  deux  côtés  de  Itle  Jinhala 
paf  deux  de  ses  bras,  dont  l'un  se  décharge 
dans  le  lac  Dibbie^  et  l'autre  dans  le  Quolla  ou 
Niger j  qui  coule  vers  l'est;  alors  de  KéAra  oa 
commencerait  par  naviguer  à  Fouest,  par  le 
moyen  d'un  de  ces  bras,  pour  se  rend|^  kJinne: 
et  en  partant  aussi  de  Kabra  l'on  naviguerait 
au  sud -est  pour  se  rendre  dans  le  Quolla  et 
dans  les  contrées  orientales,^  vers  lesquelles  ce 
derni^  fleuve  se  dirige  :  et  cependant  le  Gam- 
barou  seul  doimerait  le  moyen  de  suivre  ces 
deux  directions  difSérentes.  De  là  viendraient 
les  contradictions  qui  existent  entre  les  auteurs, 
et  les  incertitudes  qui  en  sont  les  suites. 

(i)  Voyez  cudessus,  pag.  71, 106,  ^29,  i3o,  299,  a35, 
où  il  est  dit  qu'il  conle  à  Touest  9  et  aux  pages  97 ,  11 3, 
i3o,  i54,  i58,  t6o,  161  et  247,  où  il  est  dit  qu'il  coule 
\'çrs  Test. 


TROISIÈME    PARTIE.  $99 

Mais  en  admettant  cette  supposition  comme 
vraie,  il  rcfste  encore  à  expliquer  ce  que  devient 
le  Qaolia  on  le  Niger,  ou  le  fleave  qui  coule 
à  l'est,  le  seul  dont  l'existence  soit  prouvée  par 
des  observations  positivés. 

Les  deux  conjectures  qui  ont  trouvé  le  plus 
de  partisans  sont  :  que  le  Niger,  ou  le  fleuve  du 
Soudan ,  qui  coule  vers  l'est ,  se  décharge  dans 
le  Nil 9  ou  qu'il  retourne  au  sud  pour  se  replier 
à  Touest,  formant  la  rivière  du  Bénin  ou  celle 
du  Congo  j  <m  toute  autre ,  p^mi  celles  qui 
versent  ieiurs  eaux  dans  l'Océan  atlantique. 

Auoune  de  ces  deux  con}ectui«es  ne  nous  pa^ 
rait  probable;  et  la  première,  qui  est  la  plus 
universellement  adoptée,  qui,  ainsi  que  je  l'ai 
dit,  e^t  a£^rmée  cointne  un  fait  par  les  habitants 
d'Afrique,  esl,  suivant  nous,  encore  moins  pro* 
bable  qnt  la  seconde. 

Pour  comprendre  les  raisons  de  notre  opinion 
à.  cet  égard ,  il  est  ¥i^oessaire  que  nous  rappe* 
lions  ^ne  loi  de  la  n^are  que  beaiico«ip  de^géo- 
graphes  paraissent  avoir  seti(?ie,  mais  que  nous 
croyons  avoir  exposée  le  premier  d'une  manière 
claire  et  précise  (i)  :  c'est  que  les  chiunes  de  mon- 

(î)  Cosmologie,  ou  Description  générale  de  la  Terre, 
considérée  sous  ses  rapports  astronomiques ,  physiques  ^  Mr- 
toriquesy  politiques  et  ci\fiÊf  ^i^xS^ia-W^-!^.  lOÔ.         * 


^. 


400  AECHERGHES     SUA     LAFAIQUE. 

tagnes  les  mieux  liées ,- les  plus  hautes, les  plus 
étendues,  et  où  sont  les  points  culminants  de 
tous  les  plateaux ,  se  dirigent  toujours  dans  le 
'  sens  des  plus  grandes  dimensions  des  continents, 
ou  des  îles,  ou  des  presqu'îles,  auxquels  elles  ap- 
partiennent; et  que  les  moindres  chaînes  ou  hau- 
I  teurs,  où  sont  les  points  culminants  des -plateaux 

secondaires  ou  tertiaires,  se  dirigent  de  même 
dans  le  sens  des  plus  grandes  dilatations  des  terres 
ou  des  presqu'îles  qui  terminent  ces  continents 
ou  ces  îles.  Comme  les  hauteurs  des  terres  cir- 
conscrivent les  divers  bassins  des  cours  d'eau, 
il  peut  bien  arriver  que  les  fleuves  et  les  rivières 
qui  ont  leurs  sources  dans  la  chaîne  principale, 
ou  dans  les  points  culminants  d'un  continent 
ou  d'une  île ,  franchissent  ou  traversent  les 
chaînes  secondaires ,  quoique  celles  -  ci  soient 
cependant  fort  étendues  et  fort  élevées  ;  mais 
jamais  ils  ne  traversent  les  hauteurs  qui  s'éten- 
dent dans  le  sens  de  la  plus  grande  dimension, 
et  ces  hauteurs  forment  toujours  une  séparation 
absolue  entre  les  divers  bassins  des  fleuves  d'un 
continent  ou  d'une  île  quelconque. 

On  trouvera  dans  l'ouvrage  que  j'ai  cité  les 
preuves  de  cette  proposition  démontrée  par  l'exa- 
men des  principales  chaînes  de  montagnes  et  des 
grands  plateaux  des  continents  que  nous  con- 
«laissons ,  savoir ,  l'Asie ,  i^Ëurope  et  les  deux 


TROISIEME     PARTIE.  4^1 

Amériques.  Ainsi  ^  sans  m'arréter  à  des  dévelop- 
pements que  je  regarde  comme  superflus,  je 
passerai  de  suite  à  l'application  de  cetjte  loi  au 
continent  d'Afrique ,  dont  l'intérieur  nous  est 
inconnu,  mais  dont  les  cotes ^  et  par  conséquent 
les  dimensions  des  terres  en  sens  divers,  sont 
aussi  bien  connues  que  celles  de  tout  autre 
continent. 

La  plus  grande  dimension  de  l'Afrique  se 
trouve  entre  le  Cap  Bon  et  le  Cap  de  Bonne- 
Espérance  :  donc  le  système  général  d'exten- 
sion des  plus  grandes  hauteurs  de  ce  conti- 
nent ,,  doit  être  entre  le  nord  et  le  sud ,  dans 
la  direction  des  terres  où  se  trouvent  ces  deux 
caps,  c'est -à -dire  entre  Tunis  et  la  région  du 
Cap  de  Bonne  ^Espérance:  ces  hauteurs  sépa- 
rent entre  eux  les  bassins  du  7W/,  du  Misselad 
ou  du  Djrr^  d'avec  ceux  des  fleuves  du  Soudan  ^ 
ou  du  Joliba  ou  Quolla  et  du  Gambaroui  et  si 
la  loi  que  nous  avons  indiquée  est  vraie ,  il  ne 
peut  exister  entre  ces  fleuves  aucune  communi* 
cation.  Nous  avons  donc  eu  raison  àe  dire  que 
l'opinion  qui  suppose  cette  communication ,  est 
la  moins  probable  de  toutes. 

Après  le  système  des  hauteurs,  qui  s'étend  de 
la  région  du  Cap  de  Bonne-Espérance  à  celle 
de  Tunis  y  la  chaîne  de  montagnes  ou  la  ligne 
d'élévation  la  plus'longue ,  la  plus  émifiente, 

26 


4oa  REGHB&CHES     S€R    l'aFRIQU£. 

doit  être  celle  qoi  est  indiquée  par  la  dilatation 
de  r Afrique  entre  Fouest  et  Test,  on  entre  le 
Cap  Vert  et  le  Cap  Guardafui^  extension  qui 
est  la  plus  grande  après  celle  dont  nous  venons 
de  parler.  Coinme  cette  chaîne  n'est  en  quelque 
sorte  que  secondaire ,  il  ne  serait  pas  contraire 
à  la  loi  que  nous  avons  signalée^  de  la  voir  tra- 
verser par  un  grand  fleuve  ;  c'est  ainsi  que  les 
Alleghanys  dans  les  États-Unis  d'Amérique 
sont  traversés  par  des  cours  d'eau  qui  ont  leurs 
sources  dans  les  rameaux  àe%  Monts  RooheuXy  ou 
Siony  Mountains ^  plus  à  l'ouest;  c'est  ainsi  que 
les  Momts  Altai  en  Asie  sont  aussi  traversés  par 
des  rivières  qui  sortent  des  flancs  des  Alpes  du 
Thibet  :  mais  il  faudrait ,  pour  que  Fanalogie  fât 
exacte  ^  que  le  fleuve  auquel  on  fait  travei^ser  la 
grande  cbame  centrale  d'Afrique  eût  de  même 
ses  sources  dans  le  système  des  montagnes  les 
plus  élei^é^,  ou  dans  celui  qui  marque  la  phrs 
grande  longueur  du  ixmtinent;  et  c'esit  tout  le 
contraû'e  :  le  Miba^  ou  QuoUa,  iWk  Niger ,  qu'on 
veut  feire  replojrer  au  sud-ouest,  vient,  d'a]ȏs 
tous  les  renseignasieots  que  l'on  a  obtenu»,  du 
groupe  de  montagnes  formé  par  la  réunion  de 
deux  chaînes^  la  premi^  qui  marque  la  dila- 
tation du  continent  de  l'ouest  à  Fest,  entre  te 
Cap  Vert  et  le  Cap  Guardafui^  et  la  seconde 
qu'indique  la  dilatatkm  entre  k  Cap  des  PaU 


TROISIÈME    PARTIS.  4^3 

mes  et  le  Cap  Bon  et  Ceuta,  qui  est  inférieure 
en  longueur  à  la  première.  On  ne  peut  donc 
pas  supposer  que  le  fleuve  qui  coule  vers  l'est 
puisse,  en  se  détournai^t  au  sud,  franchir  cette 
chaîne  transversale  qui  lui  fournit  ses  sources , 
puisque  cette  même  chaîne  doit  augmenter  en 
élévation  et  en  épaisseur  à  mesure  qu'elle  se 
rapproche  plus,  vers  l'orient,  du  système  princi- 
pal des  hauteurs  de  tout  le  continent  d'Afrique. 
L'exemple  de  la  communication  de  XOrénoqué 
avec  X Amazone^  par  le  Cassiquiaré^  que  Ton  a 
si  souvent  cité  (i)  pour  établir  k  supposition 
de  la  communication  des  rivière^  du  Soudan 
avec  celles  qui  se  déchargent  dans  X Océan  At- 
lantique ,  au  lien  de  contredire  ce  que  nous 
avons  avancé ,  en  est  plutôt  une  confirmation  ; 
car  XOrénoque,  aussi-bien  que  X Amazone^  dé- 
rivent tous  deux  de  la  grande'  chaîne  des  Cor^ 
éUl/ières,  on  du  système  général  de  hauteurs  mar- 
qué par  la  plue  grande  extension  du  continent 
qu'ils  arrosent.  Nous  ne  devons  donc  pas  nous 
étonner  de  voir  que  leurs  eaux  franchissent  les 
points  les  plus  élevés  du|f>latean  qui  sépare 


(i)  Dureau  de  Lamalle,  Géographie  physique  de  la  mer 
Noire  et  de  l* intérieur  de  V Afrique ,  p.  io3  ;  et  Bowdich, 
Essay-tm  the  Geographj  of  north- western  Africdy  Paris, 

1821,  m-8%  p.  39. 

26. 


4o4  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

leurs  bassins  respectifs,  et  communiquent  en- 
semble. Un  tel  fait  est  cependant  si  rai*e ,  que 
peut-être  même  on  ne  pourrait  en  trouver  un 
second  semblable  sur  la  surface  du  globe;  mais 
enfin ,  bien  loin  d'avoir  rien  de  contraire  à.  la 
loi  que  nous  avons  reconnue ,  il  en  fournit  une 
nouvelle  preuve.  Il  n'en  serait  pas  de  même 
du  Quolla  ou  du  Niger  j  qu'on  veut  faire  des- 
cendre d'une  chaîne  secondaire,  pour  lui  faire 
traverser  cette  même  chaîne  dans  des  contrées 
où  elle  se  rapproche  du  nœud  central  de  toutes 
les  hauteurs  du  continent ,  et  où  elle  doit  aug- 
menter en  élévation. 

Toutes-  ces  raisons  nous  font  aussi  regarder 
comme  impossible  l'opinion  que  les  eaux  du 
Niger  se  versent  dans  V  Océan  Atluntique  ;  et  par 
les  mêmes  causes  il  serait  encore  plus  difficile 
d'imaginer  comment  elles  pourraient  continuer 
toujours  vers  l'est  pour  se  décharger  sur  la  côte 
orientale  d'Afrique  ou  dans  XOcéan  Indien. 

La  chatae  primordiale  du  continent  africain , 
en  se  prolongeant  vers  le  sud  jusqiïe  près  de  la 
région  du  Cap  de  ^nne^Eq>érance ,  doit  aussi 
séparer  d'une  manière  absolue  le  bassin  des 
fleuves  du  GQngo  et  du  Mocaranga ,  ou  de  ceux 
qui  ont  leurs  embouchures  dans  V  Océan  In- 
dien ^  d'avec  ceux  qui  débouchent  dans  la  mer 
Atlantique. 


TBOISIÈME    PARTIE.  4^5 

Mais  alors,  dira -t- on,  que  devient  ce  fleuve 
considérable  dont  Mungo-Park  a  deux  fois  cons- 
taté le  cours  vers  l'orient  ?  Il  me  semble  que 
nous  n'en  sommes  pas  réduits  sur  ce  point  à  de 
simples  conjectures,  et  que,  sans  pouvoir  dé- 
terminer les  traits  particuliers  de  l'intérieur  de 
l'Afrique ,  il  existe  de  grands  faits  généraux  qui 
sont  actuellement  démontrés. 

La  petite  dilatation  de  l'Afrique  entre  la 
Grande-Sjrrte  et  le  Cap  Boyador  est  marquée 
par  la  chaîne  de  V^itlas^  qui,  quoique  fort  éle- 
vée ,  n'est  qu'un  système  tertiaire  d'élévation 
dans  l'Afrique  septentrionale.  Les  rivières  qui 
coulent  au  sud  de  cette  chaîne  s'arrêtent  et  se 
perdent  dans  des  lacs,  parce  que  le  désert  de 
Sahara  est  un  vaste  plateau  :  les  hauteurs  de  ce 
plateau  s'abaissent  vers  l'est  et  vers  le  sud  ^  et 
bornent  les  contrées  de  Bomou  et  celles  du 
Soudan.  A  l'ouest ,  des  groupes  de  montagnes 
formés  par  la  réunion  du  système  de  hauteurs 
qu'indiquent  les  deux  dilatations  entre  le  Cap 
des  Palmes  y  le  Cap  Bon  et  le  Cap  Guardafui^ 
séparent  les  bassins  des  fleuves  de  la  côte ,  de 
ceux  de  l'intérieur,  ou  les  cours  de  la  Gambie 
et  du  Sénégal,  dix  Joliba,  du.  Banimma  et  autres. 

La  chaîne  transversale  manquée  pour  la  plus 
grande  extension  entre  le  Cap  Vert  et  le  Cap 
Guardafui^  a  ^té  observée  du  côté  de  l'ouest  ; 


4o6  RECHERCHES    SUR    L'àFRIQUE. 

et  Ton  sait  qu'elle  porte  le  nom  de  Momagne 
de  Kong{\).  Du  côté  de  Test,  les  observations  et 
les  renseignements  que  l'on  a  obtenus,  d'accord 
avec  la  loi  de  la  nature  que  nous  avons  £itt  con* 
naître.,  indiquent  par  des  pics  d'une  élévation 
extraordinaire,  par  des  sommets  qui, sous  le  del 
ardent  des  tropiques,sont  éternelionent  couverts 
de  neige,  par  plusieurs  rangées  de  montagnes,  la 
réunion  des  deux  plus  longues  diaînes  de  hau- 
teurs ou  d'élévations  de  tout  le  continent  afri- 
cain (a).  Bruce  a  eu  connaissance  d'une  pre- 
mière rangée  de  ces  montagnes,  qui,  vers  les 
dixième  et  onzième  degrés  de  latitude,  sous  le 
nom  de  Fazuelo^  de  Djir  et  de  Tegla  (3),  cou- 
rent de  l'est  à  i'ouest,et  fournissent  pr<Àablement 
les  sources  des  rivières  qui  coulent  dans  le  jQar- 
Four^  et  le  Bornou;  elle  sépare  ainsi  les  bassins 

(t)  PmceedmgSy  t.  I,  p.  424,  et  ci -dansas,  p.  349.  Le 
loot  KQng  sigtiifîe  monta^pte  d^ns  la  laiigue  de»  IUbt 
dîngnesr 

(a)  Sait,  Voyage  to  Abyssinia ,  in-4%  London,  i8i4# 
p.  35o  -  352. 

(3)  Bruce's  Travels ,  181 3,  in-8^  t.  VII,  p.  11  a.  —  On 
trouTe  beaucoup  d*ar  dans  la  pnmnce  de  Foza^ÂT/Les 
habitante  sont  noie»;  mais  les  bords  du  NU  sont  babîtés 
par  des  Arabes  qui  sont  venus  du  Senna^^  et  de  la  tribu  de 
Rifa  :  quoiqu'établis  dans  ces  lieux  depuis  des  siècles  ,  ils 
n'ont  pas  changé  de  couleur ,  et  se  distinguent  facilement 
des  natifs. 


TJIOISIÈME     PARTIE.  ^Qn 

de  ces  divers  courants  d'eau,  de  ceux  des  rivières 
qui  forment  le  iVi7,  lesquels  dérivent  d'une  aut^e 
rangée  plus  au  sud,  désignée  par  les  Arabes 9 
comme  du  temps  des  aiicieas,par  le  nom  de 
Cebel'^l'-Kumr  ou  Montagnes  de  la  Lune,  Cette 
rangée  paraît  également  se  diriger  de  l'e^  à 
l'ouest 9  et  se  joindre  wx  montagnes  de  Kong, 
qui,  suivant  nous,  sont  plus  au. midi  et  se  rap- 
prochent plus  de  la  €ôie  de  Guinée  que  nos 
cartes  ne  l'indiquent. 

Nous  savons  que  le  fleuve  principal  qui  arrose 
le  Soudan^  toujours  désigné  par  le  nom  deJVil 
ou  de  Quolia,  ou  autre,  dkainue  de  plus  en 
plus  de  largeur  t  et  devient  d'autant  moins  con* 
sîdérable  qu'on  s'avance  davantage  vers  Test  (1); 
qu'enfin  une  chaîne  de  montagnes  sépare  ce 
fl^ive  du  lac  Caudi  et  du  Misselad^  que  l'on 
trouve  à  l'est  de  cette  même  chdilie  ;  et  on 
aous  apprend  qu'une  rivière  nommée  Scharjr  a 
sa  source  du  coté  occidental  de  ces  montagaes, 
et  que ,  dirigeant  son  cours  à  l'ouest ,  elle  verse 
ses  eaux  dans  k  Quolla  ou  le  JSil  du  Soudan  (a). 
Nous  savons  encore  qu'il  existe  à  l'est  de  Tim-- 

(i)  Voyez  ci-dessus,  p.  344;  et  Bowdich,  Essay  on  the 
ficography  et  nord-western  Jfiica,  p.  87. 

(a)  Bowdicfa's  Essay^  p.  19;  Mission  to  Askantee,  p.  1204  ; 
Bnrckhardt^  Traveis^  in-4*,  p.  47^5  «*  Quarterly  Review , 
t.  XXIII,  1820,  p.  aa5  -  240. 


4o8  RECHERCHES    SUR    l'aFRIQUE. 

bouctoUj  mais  à  une  distance  incertaine,  un  vaste 
lac,  connu  sous  le  nom  de  Bahr Soudan,  ou  de 
Mer  de  Soudan  (i),  que  Ton  traverse  lorsqu'on 
navigue  de  l'est  à  l'ouest ,  ou  de  l'ouest  à  l'est , 
pour  aller  di  Egypte  à  Timhouctou,  ou  pour  se 
rendre  de  Timbouctou,  en  Egypte, 

Ces  faits  étant  constants,  il  nous  paraît  aussi 
certain,  d'après  la  marche  ordinaire  de  la  na- 
ture dans  la  formation  des  continents,  qu'au 
sud-ouest  de  XAhyssinie  se  trouve  le  groupe  de 
montagnes  qui ,  comme  les  Alpes  de  la  Suisse 
en  Europe ,  renferment  les  sources  de  plusieurs 
grands  fleuves  coulant  dans  des  directions  dif* 
férentes  ;  et  que  les  rivières  qui  vont  au  sud 
pour  former  le  Zébé  ou  Quilmanci  et  le  Ma^ 
gadoxoy  celles  qui  se  dirigent  vers  le  nord  et 
qui  fournissent  les  eaux  du  Nil  et  du  Misselad, 
et  celles  ^i  courent  à  l'ouest  et  se  jettent  dans 
ia  mer  intérieure  du  Soudan  ou  dans  l'Océan 
Atlantique ,  ont  *  toutes  leurs  sources  dans  la 
même  région  montagneuse,  quoique  ces  fleuves 
se  dédfiargent  dans  des  mers  diffiéréntes ,  et  sur 
des  côtes  séparées  entre  elles  par  des  distances 
immenses  :  par  conséquent  les  sources  de  ces 

^  (i)  Voyez  ci-dessus,  p.  94  et  97;  et  Shabeeny,  Account 
of  Timbouctou  ^  p.  349.  —  Jackson's  Marocco^  p.  899,  der- 
nière édition. 


TROISlÈMfi    PARTIE.  409 

diJfféreiits  fleuves  sont  peu  éloignées  les  unes 
des  autres.  C'est  ainsi  que  les  sources  dnUkiny 
du  Rhône,  du  Danube  et  du  Pô  ^  dans  notre 
Europe ,  se  trouvent  fort  rapprochées  entre 
elles,  quoique  ces  fleuves  aient  leurs  embou- 
chures dans  des  régions  différentes  et  très- 
éloignées  les  unes  des  autres. 

De  même  à  l'autre  extrémité  de  la  chaîne  et 
vers  l'ouest,  se' trouve  encore  une  autre  région 
montagneuse ,  moins  élevée ,  parce  qu  elle  est  la 
réunion  de  deux  expansions,  dont  l'une  est  moins 
considérable  que  celle  de  l'est.  Cette  région  mon- 
tagneuse de  l'ouest  fournit  les  sources  des  fleuves 
du  Sénégal^  de  la  Gambie ^  du  Rio  Grande j  qui 
coulent  à  l'occident,  et  les  sources  ànMesurada 
et  des  autres  rivières ,  qui ,  de  ce  côté,  se  déchar- 
gent dans  la  mer  Atlantique ,  en  coulant  vers  le 
sud  :  des  flancs  orientaux  de  ce  mèwn^  groupe  de 
montagnes  découlent  aussi  le  Joliba  ou  le  Quolla 
et  les  rivières  qui  s'y  jettent.  Le  Bahr  Soudan , 
ou  la  grande  mer  intérieure  du  Soudan ,  dont  la 
position  n'élit  pas  bien  connue,  et  que  nous 
soupçonnons  être  située  plus  à  l'est  de  T/Vw- 
bouctou  que  ne  l'indique  la  mesure  donnée  par 
ÂlirBey  et  Jackson,  d'après  laquelle  nous  l'avons 
placée  sur  notre  carte,  reçoit  également  le  Nil 
ou  Quolla  y  qui  vient  de  l'ouest,  comme  la  rivière 
qui   vient  de  l'est,  à  laquelle  on  a  donné  le 


4lO  RECHEftCHES    %VR    l'aFRIQUE. 

même  nom  :  seulement  la  {M*emière  rivière,  qu 
celle  qui  prend  sa  source  dans  les  monts  de 
Guinée j  est  plus  considérable  que  la  seconde, 
parce  qu'avant  de  se  verser  dans  la  mer  inté- 
rieare^  elle  a  reçu,  par  les  deux  bras  du  Gam^ 
barou ,  le  tribut  des  eaux  qui  découlent  des 
rameaux  les  plus  septentrionaux  de  la  chaune 
orientale  ou  dé  la  chaîne  primordiale  ;  de  celle 
enfin  qui  surpasse  toutes  les  autres  en  élévatioD 
comme  en  étendue. 

Telle  est,  suivant  nous,  la  solutkm  de  ce  grand 
problème  ;  et  si  les  lecteurs  veulent  se  donner 
la  peine  de  se  rappeler  les  diverses  opinions  qui 
ont  prévalu  et  les  systèines  que  Ton  a  formés 
sur  les  fleuves  de  l'Afrique.,  depuis  Hérodote 
jusqu'à  Pline,  depuis  Pline  jusqu'à  Ëdrisi,  de- 
puis ]Édrisi  jusqu'à  Léon  l'Africain,  et  depuis 
Léon  l'Africain  jusqu'à  nos  jours,  ib  verront  que 
tous  s'expliquent  par  la  manière  dont  nous  con- 
cevons le  cours  des  grands  fleuves  de  l'Afri- 
que; et  quand  les  géographes  et  les  taf<»tnaticm$ 
des  voyageurs  nous  les  représei4tent  comme 
tantôt  réunis,  tantôt  séparés,  c'est  que  ieurs 
sources  se  trouvent  rapprodiées  entre  elles^  et 
qu'en  naviguant  le  long  de  leurs  cours,  oa  ar- 
rive toujours  dans  une  région  riche  en  er  (i), 

— '■    ■'■'  lin»  I      ii.ii.     Il    iiM.i.    iii.iii^M>— g— — r«l^iiiMiiiiiii«  1^— Mp^^— ^^^a^^^M^a^ 

(i)  Bnice  {Travelsy  Appemâi»  to  iw>i  tu  et  vin,  n®  3, 


TROISIÈME    PARTIS.  411"^ 

OU  dans  la  fertile  Egypte^  qui  est,  et  qui  fat  de 
temps  immémorial,  le  centre  de  la  civilisation , 
du  commerce  et  des  richesses  de  toute  l'A- 
frique. 

Si,  en  Asie,  nous  ignorions  l'existence  de  la 
mer  Caspienne  et  de  la  mer  d'Aral^  et  que  nous 


t.  VII,  p.  lia,  ëdit.  i8i3,  iii-8**)  nous  apprend  que  l'or, 
qu'on  apporte  en  Ahyssinie  vient  d'un  lieu  nommé  Scky- 
gourriy  qu'on  nomme  aussi  Schankala  au  Kordofan.  €e  lieu , 
selAn  Bruce  ^  ett  à  quarante^cinq  journées  de  route  du 
Dfaf^Four^  Il  payait  être  le  B|éme  que  edui  qa«  Br^wne 
indique  dans  son  voyage  (  Browue's  Travels  y  p«  4Ç0,  461, 
462),  sous  le  nom  de  Sheibon^  et  pour  lequel  il  donne  un 
curieux  itinéraire  à  partir  à'Ibeït ,  la  capitale  du  Kordofan, 
D'après  toutes  ces  indications  et  d'autres  que  donne  Bruce, 
cette  ]^rovince  de  Shygoum  ou  Shetbon ,  d'où  l'on  tire  l'or, 
doit  être  située  dans  un  des  baaaias  d'une  des  rivières  qui 
ço^lribuent  à  former  ^i¥i7,  et  bo|i  loin  des  aources  de  ce 
fleuve.  Les  Aral>es  indiquent  u;nie  contrée  riclu»  en  ùt,^  à  re9t 
du  Ouangara ,  ou  vers  les  sources  du  Gambarou  y  ou  de  la 
partie  du  Quolla  qui  coule  à  Test.  Il  sVn  trouve  aussi 
beaucoup  dans  Bambouky  ou  dans  Tes  rivières  qui  donnent 
naîssttïice  au  Sénégal  et  à  la  Gambie  :  on  en  trouve  encore 
àfijm  fe  OtJMssekmy  et  d«i»s  les  c<»tréas  qui  sont  au  sud  dt 
T^pouc0Uy  on  dans  les  bais^ins  àê^  rivières  qui  affluent 
danSvle  /oliba  ou  le  Quol/a^  q^i  CQulç  à  l'est:  de  sorte  qufe 
les  quatre  bassins  principaux  du  centre  de  l'Afrique  sont 
abondant^  en  or,  et  qu'en  remontant  tous  les  grands  fleuves 
de  cette  partie  dii  moiide ,  a  l'ouest ,  à  l'est  ou  au  sud,  on 
arrive  toujours  dkins  un  payiriclie  en  or. 


4ll  RECHERCHES     SUR    l'aFRIQUE. 

ne  connussions  qu'une  portion  du  cours  du 
Wolga^  de  V  Oural  et  du  Sirr^  qui  se  jettent 
dans  des  mers  intérieures,  combien  de  fausses 
suppositions  ne  formerait-on  pas  sur  les  direc- 
tions du  cours  de  ces  fleuves  avant  de  rencon- 
trer la  vérité  ? 

Nous  terminerons  ici  ces  recherches,  dans  les- 
quelles nous  nous  sommes  proposé  de  traiter 
à  fond  la  question  la  plus  importante  que  la 
science  géographique  nous  présente  dans  son 
état  actuel ,  et  de  faciliter  les  progrès  des  dé- 
couvertes dans  des  contrées  riches  et  peuplées. 
Nous  osons  dire  que  les  résultats  de  ces  dé- 
couvertes seraient  immenses ,  et  auraient  une 
influence  grande  ,  prompte  et  sabitaire ,  non- 
seulement  sur  toute  l'Afrique,  mais  aussi  sur 
l'Europe ,  dont  ces  contrées  sont  beaucoup  plus 
rapprochées  que  l'Inde  ou  l'Amérique.  Cette  en- 
treprise, qui  a  tant  de  fois  été  tentée  depuis  plu- 
sieurs siècles,  qui  promet  la  gloire  et  l'immortalité 
à  ceux  qui  l'achèveront,  ne  nous  paraît  ni  très- 
difficile,  ni  très-dispendieuse;  mais,  comme  toutes 
les  autres,  elle  ne  peut  réussir  par  le  courage 
seul ,  et  elle  a  besoin  d'être  préparée  avec  pru- 
dence et  exécutée  avec  habileté.  Le  nombre  de 
ceux  qui  ont  échoué  ne  prouve  rien  contre  la 
probabilité  du  succès  :  si  des  milliers  de  bateaux 
avaient  été  lancés  isolément  des  parts  d'Europe 


TllOlsiÈME    PARTIE.  J^l'i 

pour  traverser  l'Océan  Atlantique,  il  est  pro- 
bable que  tous  auraient  péri;  mais  il  a  suffi  d'un 
seul  vaisseau,  dirigé  par  un  Christophe  Colomb, 
pour  aborder  dans  le  Nouveau-Monde. 

La  découverte  du  Soudan ,  et  Taccroissement 
de  commerce  qui  peut  en  être  la  suite,  me  pa- 
raissent être,  dans  l'état  actuel  de  la  civilisation, 
l'objet  le  plus  digne  de  l'ambition  des  nations 
dé  l'Europe.  En  offrant  une  carrière  illimitée  à 
ces  esprits  aventureux  et  hardis,  dont  le  nombre 
s'est  multiplié  à  l'infini  par  les  chances  des 
guerres  et  les  catastrophes  politiques ,  elle  peut 
contribuer  à  la  tranquillité  actuelle  des  élats, 
comme  à  leur  prospérité  future;  et  ses  efFets 
seraient  tels,  qu'aucune  classe  d'hommes  ne  s'y 
trouverait  entièrement  étrangère. 

En  efiPet,  lorsque  les  peuples  ont  fait  de  grands 
progrès  dans  la  naviganon ,  qu'ils  ont  étendu  au 
loin  leurs  relations  commerciales ,  que  les  scien- 
ces, les  lettres  et  les  arts  ont  jeté  parmi  eux 
un  grand  éclat;  lorsque  toutes  les  routes  que 
Thomme  p/eut  parcourir  sont  illustrées  par  des 
noms  qui  rayonnent  d'une  véritable  glaire  ; 
lorsque  la  perfection  toujours  croissante  des 
arts  industriels  semble  augmenter  indéfiniment 
les  besoins  des  individus  de  toutes  les  classes, 
et  a  fait  nakre  le  goût  du  luxe '^  de  la  mollesse, 
même  parmi  les  plus  misérables;,  lorsqu'enfin 


4i4  reghbuchës  sur  *l'afriqu£. 
des  catastrophes  rapides  et  successives  ont  reu- 
Tcrsé  tant  de  projets,  dissipé  tant  d'illusions, 
frustré  tant  d'espérances,  alors  la  possibilité  de 
la  découverte  de  contrées  inconnues,  riches  et 
fertiles  excite,  même  au  milieu  des  plus  grands 
événements ,  une  attention  universelle. 

Le  géographe  espère  soulever  encore  une 
portion  du  voile  qui  dérobe  à  ses  yeux  cette 
grande  énigme  de  la  connaissance  du  globe, 
l'objet  de  ses  travaux  et  le  but  de  ses  médita- 
tions. Le  physicien  et  le  naturaliste  s'attendent 
à  contempler  la  nature  sons  de  nouvelles  faces, 
à  scruter  ses  secrets  dans  de  nouveaux  pbéno^ 
mènes,  à  étudier  dans  des  rdppcrls  jusque -^ là 
inaperçus  les  lois  qui  la  régissent;  et,  par  l'ana- 
lyse et  la  description  de  productions  inconnues, 
à  faire  disparaître  les  imperfections  des  mé- 
thodes et  les  lacunes  oes  systèmes.  Le  philo- 
sophe est  satinait  de  pouvoir  considérer  l'espèce 
humaine  modifiée  par  d'autres  climats,  d'autres 
[déjugés,  d'autres  mœui^,  que  ceux  qu'il  lui  a 
été  donné  jusqu'ici  de  comparer.  L'érudit  se 
complaît  dans  l'accroissemetit  des  traditions  et 
des  monuments  qui  lui  permettront  de  ratta- 
cher quelques-uns  des  chatnons  de  lliistoire 
que  le  temps  a  rompus ,  ou  qm  loi  révéleront 
les  fortunes  divel^s  de  royaumes  et  d'empires 
dont  les  noms  ne  lui'  étaient  pas^  même  connus. 


TROISIÈME   PAKtlE.  4l5 

Le  poète  et  .l'artiste  voient  avec  plaisir  s'agran- 
dir le  domaine  réel  de  l'imagination,  pour  la- 
quelle aucun  univers  n'est  trop  vaste,  et  qui 
aime  à  varier  ses  nuances  et  ses  couleurs.  Le 
riche  et  le  voluptueux  sourient  à  l'espjérance  de 
voir  se  réaliser  ua  jour  de  nouveaux  moyens 
de  jouissance.  Celui  que  la  misère  obsède^  se 
transporte  au  contraire  en  idée  sur  ce  sol  bien- 
faiteur, où  le  travail  de  ses  bras  lui  fournirait 
une  subsistance  que  tous  ses  efforts  ne  sont  pas 
toujours  certains  d'obtenir  dans  nos  sociétés 
perfectionnées. 

Mais  ceux  qu'un  pareil  événement  intéresse 
plus  immédiatement ,  c'est  le  spéculateur  qui 
aspire  à  s'ouvrir  de  nouvelles  sources  de  ri- 
chesses^ c'est  enfin  l'homme  d'état  qui  apprécie 
lès  changements  futurs  qu'une  semblable  dé- 
couverte peut  produire  dans  les  destinées  des 
peuples,  et  qui  songe  à  préparer,  avec  une  pru- 
dence savante  et  une  sage  vigueur,  les  moyens 
de  le  mettre  à  profit  pour  la  prospérité  de  la 
nation  dont  les  intérêts  lui  sont  confiés. 


APPENDICE 


CONTENANT 


DIVERS    ITINÉRAIRES 

QUI    ONT   ÉTÉ   ANALTSÉS,  OU   DOITT   IL  A  ÉTÉ   FAIT 
,  MENTlOir^OAirS   CET   OUVRAGE. 


>7 


APPENDICE.     ,  4'9 

I. 

ITINÉRAIRE 

DE   TRIPOLI    DE   BARBARIE 

▲  LA    VILLE 

DE    TOMBOCTOU,    '     * 

PAR    LE    CHETK    H AGG- K.ASS EM . 


PREMIERS    JOURNÉE. 


J3é  Tripoli  de  Barbarie  à  Zaméh.  Zawiéh  est  un 
village  dans  le  genre  de  celui  dit  Coraïm,  dans  la 
Basse -Egypte.  Ce  sont  des  maisons  et  de  grands 
jardins.  Il  y  a  un  collège. 


a*   JOURNÉE. 


De  Zawiéh  on  va  passer  la  nuit  à  un  lieu,  dit  Bir^ 
Ghanam^  ainsi  nommé  d'un  puits  q^l  s'y  trouve. 

•    a7.    . 


4^0  APPENDICE. 

y    JOURNÉE. 

De  fiir-Ghanam  on  se  rend  à  fFadletel^  ainsi  nommé 
d  une  rivière  où  Ton  voit  des  tamariscs  ;  Wadletel 
signifiant  la  rivière  des  tamariscs. 

4*  JOURNÉE. 

De  Wadletel  on  se  rend  à  Rogeban ,  pom  d  une 
tribu  arabe  qui  y  séjourne. 

5* 7*   JOURNÉES. 

De  Rogeban  on  se  met  en  route;  et,  après  trois 
jours  de  marche^  on  vient  passer  la  nuit  à  Dorgy, 

8^   JOURNÉE. 

DeDorgj  on  se  rend  à  un  puits  àitBir^Temâd^  où 
Ton  fait  la  couchée. 

9* — l3*   JOUÉKÉES. 

De  Bir-Temâd  on  passe  cinq  journées  au  sein  de 
déserts  sans  eau ,  après  lesquelles  on  arrive  à  la  ville 
de  Gedâmes  ou  Godâmes ,  qui  est  l'ancienne  Cadmus. 
Gadâmès  est  une  ville  assez  grande,  bâtie  à  côté  de 
lancienne  Cadmus ,  dont  il  reste,  dil-on;  des  ruines 
intéressantes.  Cette  ville  est  lentrepôt  du  commerce 
de  l'intérieur  de  l'Afrique.  On  y  apporte  le  séné  ,  la 
follicule,  la  poudre  d'or,  les  gommes,  les  nègres  et 
négresses,  qu Qft  a  achetés  àCachna,  Boumou,  Tom- 
boctou ,  et  qui  de  là  se  répandent  dans  les  régences 


A.PPENDICE.  /ictl 

de  Barbarie,  dans  le  Levant,  et  en  Europe,  par  Mar- 
seille et  Livourne.  Gadâmès ,  qui  relevait  autrefois  de 
la  régence  de  Tunis,  dépend  aujourd'hui  de  celle  de 
Tripoli ,  qui  en  tire  de  très-grands  droits  sur  les  mar- 
chandises que  les  caravanes  qui  font  le  commerce  de 
l'intérieur  y  déposent ,  et  qui  en  accable  les  habitants 
d'impôts.  Le  pacha,  chef  de  cette  régence,  a  forcé 
dernièrement  les  Gadamèsins  d'amener  à  Tripoli  tout 
le  commerce  qu'ik  faisaient  avec  plus  d  avantage  avec 
Tunis;  et  cela,  afin  que  ses  douanes  y  profitassent 
plus.  C'est  de  Gadâmès  qu'on  apporte  les  dattes  du 
Fezzan,  l'antique  Phazania.  Gadâmès  est  entourée 
de  jardins  de  palmiers  ,  de  dattiers  et  d'autres  arbres 
arrosés  par.  une  seule  source  dont  l'eau  est  léga- 
lement répartie.  Le  gouvernement  de  la  ville  est 
entre  les  mains  des  trois  plus  anciens  cheiks  ou  no- 
tables du  pays ,  qui  veillent  à  la  police ,  rendent  la 
justice ,  et  veillent  à  la  répartition,  de  l'eau.  Les  Ga- 
damèsines,  ou  les  femmes  de  Gadâmès,  ne  sortent 
jamais  par  les  rues;  elles  se  visitent  par -dessus  les 
terrasses  des  maisons ,  qui  ont  toutes  la  même  éléva- 
tion. Gadâmès  a  soutenu  plusieurs  sièges  contre  la 
régence  de  Tunis,  au  joug  de  laquelle  elle  s'est  sous- 
traite pour  tomJ)er  sous  celui ,  encore  plus  dur,  de  la 
régence  de  Tripoli. 

l3*' — l5*    JOURNÉES. 

De  Gadâmès  on  marche  pendant  trois  jours ,  après 
lesquels  on  vient  se  reposer  au  puits  nommé  Teri" 
Yakken, 


4»  APPENDICE. 

l6* l8*   JOURNÉES. 

De  Ten-Yakken,  qui  signifie  en  la  langue  dii  pays 
le  puits  de  Yakken,  on  marche  durant  trois  jours; 
après  quoi  on  trouve  un  autre  puits  nommé  Bir-d» 
Tabbéjed. 

19* 22*   JOURNEES. 

De  Bir-el-Tabbéyed  on  fait  quatre  journées ,  se  re- 
posant dans  les  déserts  ;  et  le  quatrième  jour  on  at- 
teint un  endroit  dit  EUMossegguem. 

22* 25*   JOURNÉES, 

D'El-Mosseguem  on  fait  encore  quatre  journées, 
ne  s'arrétant  que  dans  des  lieux  incultes,  après  les- 
quels on  trouve  un  puits  creusé  dans  un  bois,  et 
qui ,  par  cette  raison ,  se  nomme  Bir-el^Gâbah. 

26* — ag*  JOURNÉES. 

De  Bir-el-Gâbah  on  fait,  durant  quatre  jours,  halte 
daiïs  des  endroits  déserts ,  et  Ton  vient  se  reposer 
à  un  lieu  nommé  Hassi-Farslk, 

30*—— 33*   JOURNÉES. 

^  De  Hassi-Farsik,  après  avoir  fait  quatre  stations  au 
sein  des  déserts,  on  vient  pemoctumer  à  un  lieu 
nommé  Ain-e/'^Salâkk ,  c'est-à-dire  la  fontaine  des 
saints,  à  cause  d%  saints,  ou  musulmans  religieux» 
qui  y  font  leurs  demeures  et  y  ont  leurs  tombeaux. 


APPENDICE.  4^3 

34* 35*   JOUBNÉES. 

D*Aïn-el-Salâhh ,  après  deux  stations ,  on  arrive  à  la 
ville  dite  Agably^  capitale  d*un  grand  pays ,  nommé 
Toiiaty  qui  contient  une  infinité  de  villes  ou  cam- 
pements ,  dont  les  habitants  se  nourrissent  de  dattes , 
de  lait ,  et  dé  fatrine  de  cassave.  Cette  ville  a  été 
bâtie  par  un  mahométan,  nommé  Bounaàméh.  Elle 
relève  de  l'empire  de  Maroc,  On  y  trouve  beaucoup 
d'eau. 

36* 39*    JOURNÉES. 

D'Agably  on  voyage  pendant  quatre  jours  entre 
des  montagnes  ;  et  le  quatrième  jour  on  vient  se 
reposer  à  un  puits  nommé  Bir-Ouellen ^  c'est-à-dire 
dans  un  pays  habité  par  des  Arabes  qui  logent  sous 
des  tentes  de  cuir.  Le  chef  des  Arabes  Ouetten^ 
appelé  Kâoù,  fait  payer  à  toutes  les  caravanes  qui 
passent  sur  ses  terres,  un  droit  de  péage.  Le  terri- 
toire d'Ouellen  est  fertile  en  pâturages  où  paissent 
des  chameaux. 

4o" 44*   TOURNÉES. 

De  Bir-Ouellen  on  arrive,  après  cinq  jours  de 
marche,  au  pays  des  To^reks,  peuplade  de  noirs. 
Les  Touâi'-^^ks  se  couvrent  la  figure  jusqu'aux  yeux 
de  la  même  couverture  ou  baracan,<pie  recouvrent 
des  tuniques  de  lin  calendrées ,  qu'ils  teignent  en 
noir.  Si  les  Touâreks  hommes  se  couvrent  la  figure 
jusqu'aux  yeux,  les  Touâreks  femmes,  au  contraire, 


4a4  APPENDICE.    . 

contre  la  coutume  des  Orientaux,  vont  découvertes. 
On  les  dit  d'une  grosseur  démesurée ,  et  aussi  indo- 
lentes ou  paresseuses  qu'elles  sont  monstrueuses. 
Les  Touâreks  prennent  leurs  femmes  au  poids  :  plus 
une  femme  pèse ,  plus  elle  est  belle.  Une  Touârek 
de  dix  quintaux  est  une  Vénus.  Les  montures  or- 
dinaires des  Touâreks  sont  des  dromadaires  extrê- 
mement vîtes ,  qui ,  en  raison  de  leur  vitesse ,  sont 
divisés  en  plusieurs  classes.  Il  y  en  a  qui,  faisant 
en  un  jour  cinq  journées  de  chameaux  ordinaires, 
sont  nommés  Kammassi^  que  je  rends  en  français' 
par  pentadiurnaires  ;  d  autres  qui ,  faisant  six  jour- 
nées en  un  jour,  sont  appelés  Saddassy\  hexadiur^ 
naires;  d'autres  qui,  faisant  dix  journées  en  un  jour, 
se  nomment  Achchary  ^  décadiumaires.  11  y  en  a 
aussi  qui  ne  sont  que  Tallâtiy  triadiurnaires  ^  parce 
qu'ils  ne  font  que  trois  jours  de  marche  en  un  seul 
jour.  Dans  l'empire  de  Maroc,  plusieurs  tribus  arabes 
ont  de  pareilles  montures.  Les  armes  des  Touâreks 
sont  des  sabres ,  des  lances  tout  en  fer ,  et  des  bou- 
cliers recouverts  de  la  peau^  d'un  animal  nommé 
Ekiir-Ainda ,  qui  ressemble  au  bœuf.  Ils  sont  venus , 
il  y  a  trois  ou  quatre  ans ,  faire  une  incursion  sur 
le  territoire  de  Tunis,  dans  le  voisinage  de  l'île  de 
Gerbi,  l'ancienne  Méninx,  et 'se  sont  retirés.  On  a 
voulu  les  poursuivre;  mais  on  n'a  pu  les  atteindre, 
vu  la  célérité  de  leurs  dromadaires.  On  trouve,  dans 
le  pays  é»^  T<>uàreks ,  de  l'eau  et  des  pâturages.  On 
dit' que  les  Touâreks  manient  très^bien  le  sabre. 


APPENDICE.  ^a5 

45* 49^   JOURNÉES. 

Du  paj«  des  Touâreks  on  se  rend,  après  cinq 
jours  de  marche,  à  un  puits  nommé  Bir^Mossa^ 
quem. 

5o* .54*   JOURNÉiBS. 

De  Bir  -  Mossaquem  on  met  cinq  jours  de  marche 
pour  arriver  à  un  autre  puits ,  que  les  gens  du  pays 
nomment  Hassj'Touaber. 

55*— *-6l*    JOURNÉES. 

De  Hassy  -  Tpuaber  on  arrive  ,  après  sept  jours 
d'une  marche  pénible  à  travers  des  déserts  sans  eau , 
au  puits  dit  Hassj-Moussj- ^  c'est-à-dire  dans  un  pays 
habité  par  des  Arabes  dits  El  »  Barabich  ^  qui  font 
commerce  de  bétail  avec  les  Touâreks. 

62* 70*    JOURNB-ES. 

De  Hassy-Moussy  on  arrive ,  après  huit  jours  de 
marche,  à  la  ville  de  Mabrouk.  Le  pays  où  cette 
ville  est  située ,  est  habité  par  des  Touâreks.  On  y 
trouve  beaucoup  de  bestiaux.  Les  gens  de  ce  pays 
font  le  commerce  de  sel  avec  Touadermî^  ville  qui 
dépend  de  Tempire  de  Maroc, 

71* 75*   JOURNÉES. 

,  / 

Se  Mabrou]L  on  se  met  en  route,  et,  après  cinq 
jours  de  marche,  on  arrive  à  Bir^Tmgent^  c est-à-dire 


4^6  APPENDICE. 

à  ua  puits  qui  se  trouve  au  milieu  de  terrains  cou- 
verts de  pâturages,  et  habités  par  des  Arabes  qui  font 
le  commi^ce  avec  la  ville  de  Tomboctou. 

76* 78*   JOUaifEES. 

De  Bir-Tagent  on  marche  durant  trois  jours ,  après 
lesquels  on  arrive  à  la  petite  ville  de  Mamoun, 

79* 81*   JOURNÉES. 

De  Mamoun,  après  trois  autres  journées  de  mar» 
che,  oa  arrive  enfin  à  TomBoctau.  Tomboctou  (7ïm- 
bocty  ou  Timboctou)  est  une  grande  viDe  ouverte, 
sans  muraiUe  ;  grande  trois  fois  comme  Tripoli  de 
Barbarie,  mais  mal  bâtie  en  briques,  recouvertes  de 
plâtre  ou  de  chaux.  Les  maisons  7  sont  basses,  et 
jointes  les  unes  aux  autres.  Quelques-unes  ont  un 
étage  ;  celles-ci  sont  les  habitations  des  gens  aisés ,  des 
principaux  du  pays  et  des  négociants.  Les  habitants 
de  Timboctou  sont,  en  majeure  partie,  ou  mar- 
chands ,  ou  tisserands  ,  ou  tailleurs ,  ou  forgerons , 
ou  joailliers.  Timboct  est  située  dans  une  plaine ,  à 
peu  de  distance  d'un  fleuve  que  les  indigènes  ap- 
pellent iVr/,  qui  la  bs^îgnait,  dit -on,  autrefois,  mais 
dont  elle  est  éloignée  aujourd'hui  de  trois  quarts 
de  lieue.  Ce  fleuve,  qui  coule  de  IVsf  à  X ouest  y  est 
navigable;  et  les  gens  du  pays  forment  des  espèces 
de  radeaux ,  composés  de  planches  attachées  les  une^ 
aux  autres  avec  des  om*des,  sur  lesquels  ik  vont  en 
Guinée^  qu'ils  appellent  Djtnnjy  chercher  le  miel. 


APPENDICE.  4^7 

le  riz,  la  cassave,  la  toile  blanche,  la  poudre,  et  les 
esclaves  nègres  ou  négresses,  qu'ils  viennent  débar- 
quer à  un  petit  bourg  nommé  Kobra  on»  Gabra^ 
situé  sur  les  rives  de  leur  Nil,  et  distant  de  Tim- 
boctou  comme  le  Kaire  l'est  de  Boulac ,  et  qui  se 
transportant  dans  la  ville  de  Timboctou,  d'où  ils  se 
répandent  en  Asie  et  en  Europe.  La  ville  ou  l'en- 
droit où  ils  vont  charger  les  marchandises  ci-dessus , 
se  nomme  Ouangara ,  qui  en  est  sans  doute  l'entrer 
pot.  Les  habitants  de  Ouangara  ou  Wangara  se  nour- 
rissent de  la  graine  d'une  espèce  de  plante  qu'ils 
nomment  Awaggac  ^  qui  vient  d'elle-même  dans  le 
temps  des  pluies.  On  la  récolte  avant  l'automne  ;  sa 
graine  sert  de  nourriture  aux  hommes,  et  sa  paille 
aux  animaux.  On  réduit  cette  graine  en  poudre, 
que  l'on  mêle  avec  du  lait;  et  c'est  la  nourriture 
ordinaire  des  gens  du  pays,  avec  du  fromage  et  la 
viande  de  leurs  troupeaux ,  qui  sont  nombreux.  Cette 
graine  ne  serait-elle  pas  ce  qu'on  appelle ,  dans  tout 
le  reste  de  l'Afrique,  Bichnah^  dont  les  Arabes  font 
une  espèce  de  poudding ,  et  qui  est  leur  principale, 
nourriture  ?  ^ 

Cet  itinéraire ,  et  les  renseignements  qui  s'y  trou- 
vent consignés,  faisaient  partie  d'un  ouvrage  que  je' 
composai  dans  le  temps  sur  la  régence  de  Tripoli 
de  Barbarie,  ayant  pour  titre  :  Tableau  général  de 
la  Régence  de  Tripoli  de  Barbarie  pour  Vannée  i8o7j> 
qui  est  parvenu  au  ministère  des  relations  extérieures 
en  1810,  et  qui  a  été  égaré.  Ils  m'ont  été  dictés  par 


428  APPENDICE. 

le  cheik  Hàgg-Cassenfi ,  homme  d'âge,  qui  servait  de 
guide  aux  carayanes  de  marchands  qui  se  rendaient 
du  royaume  de  Tripoli  à  Tomboctou ,  et  qui  a  fait 
lui-même  toute  sa  vie  le  commerce  de  Tripoli  et 
de  Gadâmès ,  d'où  il  est  originaire ,  avec  cette  ville 
de  Timboctou. 

Fait  à  Rabat-lez-Salë,  le  i3  juin  de  Tan  1807. 
Signé  DelaportB}  chancelier. 


APPENDICE.  4^9 


^/%/%%»%<%<m/%/%'»/%/%%'%>%»%»%/%%.'%^%.-<^>.^>^»»»%^%«^^%»%%^%»^^%/^<»/»»%%<%%»<W%< 


II. 

ITINÉRAIRE 


OB 


TRIPOLI   A   TOMBOCTOU, 


MOHAMMED,  FILS    DE    FOtTL  , 


TKADUIT    DE     LAUÀBE 


PAR    M.    LE    BAR019    SYLVESTRE    DE    SAGY. 


JJs  Tripoli,  en  se  dirigeant  à  Fouest,  par  le  chemin 
des  Hamamii^' f  }usqusiu  lieu  nginmé  RaS'Alnakhl 
(Tête  des  palmiers),  deux  milles. 

De  la  porte 'de  la  ville  on  va  camper  à  Djenzour: 
la  distance  est  de  dix*huit  milles  ou  trois  heures. 

Quant  aux  puits  qui  se  trouvent  dans  cet  inter- 
valle jusqu'à  Ras  -  Âlnakhl  des  Hamamidj ,  deux 
milles;  de  Ras-Alpakhl  à  Querkaresch^  quatre  milles; 
de  Querkaresch  à  Djenzour  y  douze  milles  ;  «n  tout 
dix -huit  miUes. 


43o  APPENDICE. 

De  Djenzour  on  va  coucher  à  El^Zaivieh  de 
l'ouest,  distance  neuf  heures  ou  cinquante  milles. 

Les  puits  sont  :  i**  Sayyad^  à  la  distance  de, cinq 
milles;  2^  El^Majeh^  douze  milles  ou  deux  heures; 
3^  iEZ-Tbaii/^èA,  quinze  milles  ou  deux  heures  et 
demie  (Entre  El-Mayeh  et  El-Touibiyèh  il  y  a  en- 
core deux  puits ,  dont  l'un  est  sur 

et  Tautie  à  l'ouest).  D'El-Touibiyèh  à  El^Zcwvieh^ 
vingt-tro«r  milles  ou  quatre  heures. 

Pour  nous  résumer  :  de  Tripoli  à  El-Zawièh  de 
l'ouest,  il  y  a  un  jour  de  route  à  marcher  depuis 
le  lever  du  seleir  jusqu'à  son  coucher. 

'D'El*Zawièh  à  Ezwagah  (Zewaga)  qui  est  aussi 
éloignée  d'El-Zawièh,  que  Tripoli  l'est  de  Menschieh 
d^El  '  Zaçpieh,  Distance  d'El-Zawièh  à  Ezwagah, 
soixante-dix  milles.  Puits  :  i®  du  côté  d'Elzawièh,  le 
puits  de  Dendanhh;  2°  â  douze  milles  de  Dendanèh, 
le  puits  de  Zaratv^  à  l'est  d'Ezv^ragah  ;  3**  le  puits 
nommé  le  PuUs  JtAlkharbeh  d^Ezwagâh. 

D'Ezwagâh  la  cavavane  va  camper  à  CasT^el-Alla" 
frah ,  éloignée  de  Tripoli  de  deux  journées  de  mar- 
che ,  ou  cent  soixante -dix  milles  ,  ou  vingt -sept 
heures." 

De  Casr-el-Allakah  on  .va  camper  à  Zowarah 
Ainsi  les  distances  entre  Tripoli  et  El  -  Zawièh  ,  El- 
Zawièh  et  Ezwagah,  Ezwagah  et  Zo\mrah,  sont  clia- 
cune  d'un  jour,  ni  plus,  ni  moins  :  en  tout  trois 
jours  de  marche,  ou  deux  cents  milles,  ou  trente- 
tleux  heures. 

De   ce   lieu   on  va  camper  k'  Scheîkh'Sidi^Bowh 


APPENDICE.  4^1 

djéileh  ( Bouojeïlèh ).  Distance,  une  journée,  comme 
pour  les  distances  précédentes,  depui^i  lé  lever  jus- 
qu'au coucher  du  soleil,  ou  douze  heures. 

De  Bouodjdflèh  on  va  camper  à  El^Khattabah^ 
Distance,  une  journée.  Puits  :  i^  le  puits  de  Dikda' 
cah ,  à  rextrémité  du  territoire  de  Bouodjeïlèh ,  et  9 
la  distance  de  douze  milles  ou  deux  heures  ;  2?  le 
puits  de  Wakhoum^  distant  du  précédent  de  vingt 
milles.  /  • 

De  cette  ville  (i)  vous  faites  une  journée  de  mar-< 
che,  puis  vous  entrez  dans  des  montagnes  par  une  - 
gorge  qui  est  entre  ces  montagnes ,  et  qui  est  rem- 
plie de  sources  d'eaux  courantes.  Vous  en  êtes' ac- 
compagné dans  votre  marche  jusqu'à  la  vallée  de 
Zenthân.  '  ^ 

Résumé.  Toute  cette  route ,  depuis  Tripoli  jusqu'à 
Fossato^  n'est  quCs.  sable  et  cailloux.  Après  Fossato, 
vous  ne  marchez  plus  que  sur  des  pierres,  ayant 
une  montagne  à  droite  et  une  montagne  à  gauche^ 
et  cette  marche  dure  un  jour  et  une  nuit ,  c'est-à- 
dire  vingt -quatre  heures,  jusqu'à  ce  que  vous  en- 
triez à  Zentân.  Depuis  la  porte  de  Tripoli  jusqu'à 
Zentàn ,  on  se  dirige  toujours  à  l'ouest.  On  nomme 
les  habitants  de  cette  vallée  les  Zénata^  qui  sont  de 
la  postérité  de  Hélai;  mais  la  vallée  elle-même  se 
nomme  Zenthân-  (a). 


(x)  Sans  doute  Boao^eïlèh. 

(a)   Ceci  est  fort  louche  dant  le  texte. 


43a    .  APPKlYDiCE. 

La  caravane  couche  à  Tentrée  de  la  vallée;  ensuite 
elle  part,  et  iiKirehê  dans  le  milieu  (i)  de  la  vallée 
pendant  douze  heures,  puis  elle  passe  la  nuit  .dans 
^ine  partie  de  la  vallée.  Au  lever  de  l'aurore,  elle 
part,  et  continue  encore  à  marcher  sans  interruption 
(|ans  le  milieu  de  la  vallée,  durant  six  heures.  En- 
suite, on   sort  de  la  vallée,  et  on  couche   en  face 

Depuis  ia  porte  de  Menschièh  de  TripoU,  on  a 
toujours  marché  vers  Fouest,  ayant  TripoU  à  l'est; 
mais,  depuis  celui-ci,  le  chemin  se.  sépare,  et  vous 
allez  vers  le  sud. 

D'El  -  Rodjeban  on  va  à  la  vallée  d^El-Sian.  La 
distance  entre  ces  deux  endroits  est  la  même  que 
celle  qui  sépare  les  autres  (2).  Puits  :  i**  le  puits  de 
NakouA  (3),  à  cinq  heures  de  distance  d*£l-Rodjel>an  ; 
2**  le  puits  de  Schahamnah ,  vis-à-vis  la  vallée  d'El- 
Siân ,  distant  du  précédent  de  cinq  heures  et  un  tiers. 

En  partant  le  lendemain  de  cette  vallée, on  marche 
de  même  pendant  dou^e  heures ,  et  on  vient  coucher 
dans. la  vallée  de  LcUkman. 

On  en  part  au  lever  de  l'aurore;  et,  après  uno 
marche  de  douze  heures  pleines  ^  on  vient  camper 
près   d'une   eau   appelée   le   puits  de  Sammam,  De 


(i)  Oa  a  écrit  en  marge  du  maftusccit,  wUattc  ;  mais  ce  mot 
Tcnt  dire  le  milieu ,  et  nVst  pas  on  nom  p'^pre. 

(a)  Sans  doute  nne  jonmée  on  donze  heures^ 

(3)  Ce  doit  être  par  inadvertance  qoe  M.  Delaporte  a  écrit  «n 
marge  Blr  Nafoita, 


APPENDICE.  '    435 

'  quelque  côté  qu'on  dirige  sa  marche,  on  ne  trouve 
point  d'eau  ayant  ce  puits. 

On-  y  passe  la  nuit;  et  au  lever  du  jour  o»,  ei^ 
part,  après  avoir  rempli  des  outres  d'eau  autant  qu'il 
en  faut  pour  quatre  journées  de  marcha.  On  ne 
trouTC  dans  sa  route  que  des» pierres,  et  il  n'y  à 
pas  la  moindre  terre. 

Après  quatre  journées  de  marche  complètes,  on 
tçouTe  un  puits,  nommé  le  puits  de  Quercabah,  On 
y  passe  cette  nuit -là. 

Le  lendemain  on  quitte  ce  lieu,  et  on  marche 
douze  heures  pleines.  Au  bout  de  six  heures  de 
marche,  à  midi,  on  trouve  un  puits,  nommé  le  puits 
de  Rahmaneh.  On  dîne  près  de  ce  puits  ;  on  con- 
tinue ensuite  sa  route,  et,  à  la  fin  du  jour,  après 
avoir  complété  les  douze  heures  de  marche,  on  cou- 
che au  lieu  appelé  SedrauHelâL  * 

Lç  lendemain  matin  on  se  remet  en  marche  ;  oft 
ne  trouve  point  d'eau  pendant  deux  journées.  Apre» 
douze^  heures  de  marche,  on  couche  à  Gouth^el- 
Radjranah  (i)  :  ce  lieu  n'est  que  sable  et  gravier. 
L'étendue  de  ce  Gouth  est  de  trois  jours  et  trois 
nuits.  Il  n'y  à  point  d'eau  :  on  ny  trouve  que  des 
autruches  et  dçs  bêtes  féroces.  On  marche  dans  ce 
Gôuth  sans  trouver  ni  eau,  îfii  pâturage.  Le  qua- 
trième jour  au  matui,  une  heure  après  le  lever  du 
soleil,  #n  trouve  trois  puits,  qui  se  communiquent  (2) 


(i)  Gouéh  signifie  une  plaine  basse. 
(a)  Le  sens  de  ces  mots  est  hasardé. 


**    • 


434      *  APPEWDICB, 

ensemble.  L'eau  de  ces  puits  est  plus  douce  que  celle 
de  la  fontaine  de  Mavrah^  daus  Ist  ville  de  Tripoï. 

La  carayane  fait  halte,  près  de  ces  puits,  jusqu'à 
midi.  On  j  abreuve  les  chameai^x;  on  y  dîne,  et  Ton 
8  j  baign#.  On  en  part  à  midi,  et  on  marche  dam 
le$  sablfs  jusque  vefs  le  soir.  On  couche  au  lieu 
nommé  les  Puits  (TAlsidr  (i)  :  on  en  a  une  rangée 
d'un  côté  et  une  rangée  de-lautre,  c'est-à-dire  à 
droite  et  à  gauche. 

Après  avoir  passé  la  nuit  en  ce  lieu,  on  en  part 
et  on  marche  toute  la  journée  jusqu'au  coucher  du 

soleil ,  et'  on  arrive  à  un  puits  nommé  le 

puits  diEl'Djetlaoudah^  qui  est  au  milieu,  des  restes 
d*u!iaie  ville  ruinée;  on  j  passe  la  niiit.  Dqmi^  ce 
lieti  on  ne  trouve  point  d'^^au  pendant  n«uf  journées. 
On  prend  donc  une  provision  d'eau  suffisante,  et  on 
marche  pendant  vin^- quatre  heures,  sans  que  les 
.chameaux  ni  les  hommes  preonent  aucun  repos, 
jusqu'au  lieu  nommé  El^Keliat.  On  y  passe  la  nuit, 
et  on  s'y  repose  la  moitié  du  jour  :  ensu^  on 
marche  encore  un  joui»  et  une  nuit,  sans  que  les 
chameaux  ni  les  hommes  prennent  aucun  repos  ;  et , 
après  un  jour  et  une  nuit  pleins ,  on  campe  à  Mad^ 
joumy  lieu  où  il  y  a  des  arbres,  et  moie  rivière,  qfui 
ne  coule  que  quand  il  pleut. 


(i)  Le  mot  qne  je  tradais  par  ies  puits  signifie  nue  réanion  de 
plnsienrs  pnita  dans  en  même  lien.  Je  sonpconiie  tootefois  que  ce 
même  mot  peut  signifier  un  bois  touffu,  Coaam«  sitir  \9nt  àktm.  le  iotm^ 
^e  sens  serait ,  un  kois  tot^u  de  l«itu. 


#  ' 


APPEITDICE.  -*      4^5 

On  couche  la  nuit  eli  cet  endroit;  puis  on  maxche 
encore  un  jour  et  une  nuit  cqnune  aujiarayant,  et 
on  campe  dans  une  plaine  bas&e,  nommée  Goiuh  dr 
Canoudj. 

Après  une  nouvelle  marche  de  vingt-qua^trt}  l^eures, 
on  campe  dans  la  vallée  de  S^nad,;  on  y  passais 
rtuit ,  puis  on  en  part  le  matin ,  et  on  marche  deux 
jours  et  une  nuit,  ap^  quoi  on  campe  à  lextrémitë 
d'un  terHtoire  nopoimé  Albesat  (  c'est>à-dire  la  plaine,) 
des  Enfants  de  Hammam  ;  on  y  passe  la  nuit ,  et , 
apfès  douze  heures  de  ihanehe  pleines,  on  campe 
près  des  Puits  de  Ben^Déradj. 

La  nuit  se  passe  en  ce  lieu  ;  le  matin  on  prend 
u^  provision  d'eau  pour  deux  journées ,  on  abcv^uve 
les  chameaux,  on  boit,; on  se  baigne  si  l'on  veut, 
puis  on  so^  met  en  marche. 

Après  avoir  marché  un  jour  et  une  ntiit,  on  campe 

dans  le  territoire  de  Godâmes ,  du  côté  du  midi 

Entre  elle  (i)  et  la  plaine  basse ,  où  est  campée  h 
caravane,  et  qu'on  appelle  Gouth  de  Barkac^ ^  il  y 
a  t^ois  journées  de  marche. 

•  Revenoq»  à  la  marché  de  la  caravane*  Après  avoir 
pa^ë  la  nuit  au  can^emes^t  dont^nous  avons  parlé, 
elle  Iç  quitte  le  matin  du  jour  suivant,  et  marche 
pendant  vingt-quatre  heures,  au  bout  desquelles  elle 
campe  au  )ksp.  ^mmé  Gouth  de  Cordollah,  On  y 
passe  \S  nuit. 

Le  matin  oh  se  remet  en  marche,  on  fait  route 


(i)  Sans  donte  Gadamèa^ 

a8. 


^  ^  %. 


436        *  APPENDICE.   ^ 

peiûlant  vîngt.^ quatre  heures,  et  on  campe  ^u  lieit 
appelé  Goùth'de  Sadész^  où  il  j  a  un  puits  nommé 

le  puita  de  Schafannah On  y  tait  provision 

d*eau  pour  huit  journées. 

On  paît  de  ce  puits  au  matin;  et  en  vingt-quatre 
iHînres  de  marche  o{(  vient  camper  au  Gouth  de 
Zenzan, 

Après  y  avoir  couché  et  avQÎr.  marché  yingt-quatre 
*  heures  >  on  arrive  au  Gouth  de  BfiraklmeK.   On   y 
^    passe  la  nuit. 

.   On  se  remet  en  »f  ouïe  Ife  matin  ;  on  marche  vingt- 
"    quatre  heures,  et  on  campe  à  El '^ Kakaa y  du.  côté 
du  couchant  :  on  y  reste  jusqu'au  matin. 

Làe^la  route  se  sépare,  on  se  dirige  au  mi(}i,  et 
on  marché  au  milieu  de  Teau  et  des  puits.  Après 
vingt-quatre  heures  de  marche,  on  camp»  aupisps  du 
4  puits  d'El'Zafzqf,  dont  Teau  ne  tarit  en  aucane  sai- 
son ,  et  sort  toujours  avec  murmuré. .  On  y  'fait  sa 
provision  d'eau  pour  douze  journées. 

Parti  de  ce  lieu,  on  arrive,  après  une  route  d'un 
jour  et  d'une  nuit,  à  Karkotifii^  ph  on  passe  la  nuit'. 
^  De  là,  après  une  marche'  d,e  vingt^uatre  heures.,- 
on  campe  dans  le  Gouth  éPEl'-Zarahnak.  Après^^a^ 
nouvelle  Toute  de  vingt -jquatre  heures,  on'  Cj^mfii 
d«ns  le  Gouth  d^Elc^h.  6n  en  repart  au^^atiti^  et 
en  vingt-quatre  heures  on  arrive  au  Gouth  dhidjri^ 
neh.  On  y  passe  cette  nuit; puis  en  vîngt-quatrê  heures 
on  arrive  à  un  Gouth  nommé  ^i>z  fc'esteà-dire  la  fon- 
taine)  d-^/-I^bttr,  dont  l'eau  est  excellente,  et  que 
ie  sable  ne  gâte  point.  On  s'y  repose  vingt -quatre 


H 


APPEiyOICË.  -        •        437 

heuces;  De  là  on  voit  Fèzzan^  entre' le'midi  et  le.... 

Il  y  a  deux  journée»  de  mj^^che  pleines  entre  Feazai?  * 

et  cette  source.       •  ,    ^  # 

On  part  de  là  ;  on  marche  depuis   le   matin  jus-  "^ 
qu'au   coucher   du  soleil,  puis  on   couche  dans  le 
pays  de  Djina  :  on  y^  passe  la  nuit.  Le  matin  suivant 
on  quitte  ce  lieu,  et,  après  douze  heures  de  marche, 
on  vient  cracher  à  nti  pays  nommé  Sabha,  • 

De  là  ,   eii  vingt  -  quatrç   heures   de    marche ,  on 
arrive  à  Maragnah;  on  en  rt?part  au  matin  suivant; 
on'  marche  vingt-quatre  heures ,  et ,  après  un  jour  et 
une  nuit ,  on  vient  coucheç  au  Gouth  d^EInadjnadj^^ 
où  il  n'y  a  point  d'eau.  On  y  passe  la  nuit» 

"Parti  de  là  au  matin ,  on  marche  un  jpur  ef  une 
nuit ,  et  on  couche  dans  le  Gouth  cTAdhindsch. 

Au  lever  de  laurore  on  fait  sa  provl^on  d eau 
pour  six  journées ,  et  on  entre  dans  le  pays  des  Ta^ 
wareks.  Ici  la  route  se  partage. 

On  marche  un  jour  et  une  nuit ,  puis  on  couche 
dans  le  Gouth  de  Sarrafeh.  Reparti  le  matin  suivant, 
^près  vingt-quatre  autres  heures  de  marche,  on  vient 
coucher  ^u  Gouth  de  Scharschoum.  Le  lendemain 
iHmii  on-  décampe,  on*  marche  jusqu'au  coucher  du' 
solèir,  et  on  entré  dans^a  ville  de  Tareknah  ^  i^2lJ% 
deiCT<2M^«^tfA*5. 

De  là  ia  roilfe  ge  divise,  et  se  dirige  vers  l'ouest. 
On  marche  deax  jours  et  deux  nuits  après  être  sorti 
de  Tarekvah ,  sans  que  les  hommes  ni  les  chameaux 
prennent  aucun  repos  ;  et  après  les  traites  (  de  douze 
heures)  on  entre  sur  le  terrain  d'£/-Z)û/^//i ,  qui  «p- 


438       •        '  APPENDICE. 

.     partient  tu   pays  des  Nègres  (i),  et  on  y  passe  la 

*  nWt  près  du  Puits  de  Ptndi^ 

Etant  parti  d^El-Damn^  après  •un  jour  de  marche 
plein,  on  arrive,  au  coucher  du  soleil,  à  une  vallée 
nommée*  en  langue  des  Nègres  Sanindi,  C'est  un  lieu 
charmant,  on  i}  y  a  abondance  d'arbres;  de  fruits  et 
de  toutes  sortes  de  biens.  Cette  vallée  a  une  étendue 

•  de  vingt*quatre  heures  de  maf^e,  d'^n  matin  à  un 
••    matin.  Après  vingt -quatre  heui^s  'de  marche,  on  y 

trouve  sept  réservoirs  ,^ongs  chacun   de  cent  pieds 
environ ,  et  pleins  d'eau  pendant  les  douze  mois  de 
^l'année.  Rien  n'est  plus  merveilleux  que  cette  vallée, 
^  après  1^  Nil.  ^ 

On  y  fait  une  provision  d  eau  pour  quatre  jour- 
nées, puis  on  se. met  en  route  au  matin;  et  au  bout 
d'un  jour  et  d'une  nuit  on  campe  dafis  un  Gouth 
nommé  dans  l'idiome  des  Nègres  Bourouki,  et  dans 
"  celui  des  Tawareks  Saddjanah. 
t  *  On  passe  la  nuit  en  ce  lieu,  et,  après  une  nouvelle 
maivhe  de  vingt-quatre  heures,  on  vient  camper  dan» 
un  Gouth  appelé  dans  la  kmgue  des  Nègres  KaninU^ 
et  dans  Tidiome  arabe  des  Tawareks  Buikomnah, 

Parti  de  là 'le  matin  ,  on  amve,  en  vingt •  qualtre 
heures  de  marche,  à  un  Goùth  nommé  par  les  Nègres 
Coundji^  et  (>ar  les  Tawareks  Boklischam  (ou  Fohh-^ 
scham).  On  y  passe  ia  nuit  et  le  jour  suivant  jus- 
qu'à midi.  On  y  Èàt  sa  provision  d'eau  pour  une 
journée,  on  y  abreuve  les  <;hanieaux,\oii  s'y  baigne, 
t  ■      ' 

(f)  Par- tout  oà  j'ai  mis  Nègres  le  texte  ptWle  alubid,  tes  esclave*. 


APPENJJICE.  ^     4^9 

De  là  on  marche  un  jour  et  une  nuit,  sans  que  les 
hontmes  m  les  hameaux  s^ apposent ,  et  sans  foire 
paître  les  montures;  et  on  arrive,  après  cette  traite, 
à  un.  Gouth  nommé  par  les  Kègres  Cabiciy  et  par  les 
Tawareks  Schahatah. 

On  couchç  là  ;  puis  en  douze  heures  de  marche , 
depuis  le  lever  du  soleil  jusqu'à 'son  coucher ,  on  ar» 
rive  à  la  vjjle  de  Ha,p^sa ,  ville  du  pays  des  Nègres. 
Là  se  tient  un  marché.  Ceux  qui  veulent  y 'acheter 
des  provisions,  en  achètent.  Qn  se  r^^se,  et  on  feit 
reposer  les  chameaux  ;  on  y  vend,  si  Ton  veut,  les 
marchandises  qu'on  a  apportées. 

En  quittant  cette  ville,  on  marche  un  jour  et  une 
nuit ,  et  on  vient  coucher  dîin%  u4ié  vilie  des  Nègres , 
nommée  en  leur  idiome  Baçouknokiy  et  dantf  celui 
des  Tawareks  Bakermi.  Ce  n'est  point  une  ville  ifïdé- 
pendanfiie  (c'est-à-dire  un  ébef-Iieu),  mais  seulement 
un  lieu  comme  Mzwarah  (  qui  dépend  de  Tripoli  )  et 
autres  semblables. 
.  Oïl  prend  là  de  l'eau  pour  deux  journées ,  et,  par- 
tai|t  dès  le  mjtin ,  on  mai^e  jasque  fort  tard  entre 
le  coucher  du^ soleil  ^t  la  nuit  close;  on  viei>t  coucher 
à  Sarreifeh.^  comme  on  fait  de  Djenzour  (i).  Ce  lieu 
f^  nomme  en  lan^e  nègre  Sckakniri^  et  dans  le  lan- 
gage des  Tawareks  Wananên,  On  passe  la  nuit  près 
de  ce  puits,  et  on  y  rfeste  vîngt.-quatre  heures. 


(f)  Ceci  est  t^ès-^ot>scnT.  Je  crois  que  Fantenr  vent  dire  qu« 
Baçouknoki  est  éloigné  de  la  ville  de  Sarreîfièh  comnie  Dîensonr 
l'est  de  Tripoli  ^ 


44o    ^  APPENDICE. 

Après  une  nouvelle  marcha  d'un  jour  et  d'une  nuit, 
on  s'arrête  dans  une  vjlle  que  les -IVègres*'  nomment 
Kiki^  et  les  Tawareks  Caouaz.  Ce  n'est  point  un  chef- 
lieu  y  mais  c'est  comme  la  montagne  des  ^Djebatis.  On 
quitte  ce  lieu  au  matin ,  et  on  marche  jusqu'au  cou- 
cher du  soleil  ;  on  va  coucher  à  une  ville  des  Nègres 
nommée  par  eux  Canindiy  et  par  les  Tawareks  Cor- 
rirah. 

Là  on  passe  la  nuit ,  on  en  part  au  matin ,  et  on  . 
,  vient  \  au  coucher  dmsoleil ,  à  une  ville  nommée  en 
langue  des  Nègres  Wanonld^  et  en  langue  des  Ta* 
wareks  Caoucaou,  Il  n'y  a  pas  de  ville  plus  grande 
que  cette;  ville  :  les  habitants  sont  aussi  nombreux 
que  des  sauterelles;  ils* croient  en  Dieu  et  en  son 
prophète  Mahomet.  On  trouve  là  toutes  sortes  de 
biens  et  de  marchandises.  On  n'en  trouve  pas  le  quart 
à  Tripoli.  On  y  vend  cent  ce  qui  vaut  dix  (i).  On 
passe  la  nuit  à  l'entrée  de  la  ville;  le  matin ,  lorsque 
les  troupes  paraissent  avec  leurs  flèches ,  on  ouvre  les 
verroux,  et  on  leur  donne  un  ordre  de  leur  prince 
pour  la  caravane.  Personne  ne  peut  entrer  dans  cette 
7)ille  (2)  sans  un  ordre  d*El'Mai\  c'ést-à-dire  en  arabe 
du  Sultan. 

En /quittant  ce  lieu  on  «va  coucher  à  une  ville  que 
les  Nègres  nomment  Coumû^  et  les  Tawareks '£2-£i>-- 
kak.  Il  lit  (3)  l'ordre  de  ^n  pacha  ;  il  s'assied  sur  ses 


(i)  Le  sens  du  texte  est  fort  louche.  * 

(2)  Je  mets  ces  mots  aa  hasard;  le  texte  est  iniutelUgihle. 

(3)  Le  snjet  da  vecbe  est  ainsi. 


APPEWDJCE.  s  .    44' 

genoux,  il  étend  ses  deut  mains,  et  il  les  agite,  pour 
témoigner  son  ob^sançe  à  cette  lettre  de  leur  El-Maî. 

On  passe  cette  nuit  dans  labondance ,  et  on  part 
au  matin  ;  et  après  avoir  marché  depuis  le  matin  jus- 
que vers  le  milieu  de  Taprès-midi ,  on  entre  dans  une 
ville  nommée  par  les  Nègres  Birzizziy  et  par  les  Ta- 
wareks  Àfnou.  La  caravane  y  eât  reçue  par  les  gens 
du  vice-roi,  qui  est  soumis  à  lobéissai^e  de  celui 
^dont  la  caravane  a  obtenu  un  ordre  (i).'  On  prend  * 
cet  ordre;  on  le  présente  à  Iwr  chef;  qui  .se  pose 
sur  se&  genoux ,  étend  ses  deux  mains  et  les  agi^'e. 

La  caravane  passe  la  nuit  dans  labondance;  on  lui 

donne  à  souper  du des  cannes  (à.5ucre)  et 

des  dattes.  On  réduit  les  daEes  ei^  •  farine ,  en  sorte 
qu  elles  ne  forment  plus  un  corps  dont  les  pa^es 
'  adhèrent  les  unes  aux  autres;  alors  on  pile  la  canne 
jusqu'à  ce  qu  elle  perde  toute  son  aspérité  (2),  puis 
on  mêle  le  tout  avec  du  lait  doux  ;  on  &it  ^e  mélange 
avec  la  main  le  mieux  du  monde.  Pendant  les  danzfe 
mois  de  Tannée  ils  n'ont  point  d'autre  nour^:ii*iée  que 
des  cannes  et  du  lait  frais. 

Après  avoir  jpasié  la  nuit  dans  l'abondance,  on 
part  au  matin  de  cette  ville  y.  et  vers  le  miMea  de  l'a- 
près-midi on  arrive  à  une  ville  appelée  par  les  Nègres 
Sarkiy  et  par  les  Tawareks -5<?rco».  Les  troUp^s^de 
cette  ville  viennent  au-devaftt  des  voyageurs,  pren- 
nent l'ordre  du  chef.  s^prJme,  et,  foat/cotoïkie'^ceux 
dont  noijs  avons  déjà  parlé.    .  •,  . 

(i)  Cest-à-dire  d'El-MaJÙ   . 

(2)  Le  sens  de  font  ceci  est  fort  incertain. 


44^  APB£N]>ICE. 

La  c^^aTane  passe  la  nuit  dans  îabondance.  Le  len- 
demain au  matin  y  on  1  approYtsionne  d'eau  pour  trois 
journées,  parce  que  cette  ville  est  la  dernière  des 
états  du  prince  dont  nous  avons  parlé.  La  caravane 
se  met  en  route  de  bon  matin,  et,  marchant  jusqu'au 
coudier  du  soleil,  efle  couche  dans  la  foret  d'£'A 
Degarfkh,  Toute  la  journée  suivante  on  marche  dan* 
la  forêt  ;  e%  au  coucher  du  soleil  on  campe  à  lextré- 
mité  de  la  même  forêt.  La  terre  de  cette  forêt  est  une 
argile  noire. 

On  décampe  au  matin ,  et  au  coucher  du  soleil  on 
arrive  à  une  ville  nommée  Tabaou^  ou  il  y  a  de  l'eau. 
Cette  viHe  et  ses  habitants  l'emportent  sur  le  Caire,  et 
les  habitants  du  Caire.' 

Le  matin  suivant  on  quitte  cette  ville ,  et  on  vient 
loger  dans  une  ville  nommée  par  les  Nègres  Zantou , 
et  par  les.Tawareks  Zancoulah.  On  y  passe  la  nuit. 

Le  lendemain  matin  on  fait  sa  provision  d*eâu  pour 
quatre  journées ,  et,  après  une  marche  de  vingt-quatre 
heures,  on  s'arrête  dans  une  ville  que  les  Nègres  ap- 
pellent Tirriy  et  les  Tawareks  Tirrin. 

On  y  passe  la  nuit.  Le  lendematn  ^après  une  route 
de  vingt-quatre  heurfes ,  on  arrive  à  une  ville  nommée 
par  les  Nègres  Schohkiy  et  p'ar  les  Tawareks  SoudaL 

De  la  porte  de  Menschdeh  de  Tripoli  on  va>à'Vouest 
jusqu'au  pays  des  Tawareks.  Là',  la  route  se  divise ,  et 
on  se  cKrige  au  midi  ;  après  ^.ela  elle  se  divise  une 
seconde  fois,  et  se  dirige  à  Fouest  en  pleîÉ'  jusqu'à 
Zantdaj  qui  est  un  des  districts  du  domaine  du  prince 
de  Bornou, 


APPENDICE.  ^.    443 

Après  être  entre  dans  le  territoire  des  Sowadin  (i), 
vous  prenez  ,  avant  de  quitter  la  ville  susdite  ,  de 
l'eau  et  des  vivres  pour  quatre  journées ,  puis  vous 
marchez  un  jour  entier ,  et  vous  campez  dans  le  pays 
des  Soudans,  C'est  un  pays  désert  :  on  le  nomme  AU 
Soudan;  mais  il  na  pas  été  nommé  ainsi  parce  que 
son  sol  est  noir  et  de  couleur  de  charbon  (2).  Il  y  a 
une  foret  qui  est  abandonnée  et  déserte. 

Le  lendemain  on  marche  depuis  l'aurore  jusqu'au 
coucher  du  soleil,  puis  on  campe  dans  un  lieu  nommé 
le  Gouth  de  Caraoudi  :  son  sol  est  du  gravier. 

On  couche  là  ;  le  lendemain  on  quitte  ce  lieu ,  et , 
après  avoir  marché  jusqu'au  couc%r  du  soleil,  on 
campe  dans  un  heu  nommé  le  Gouth  de  Wanikdi  :  il 
porte  le  même  nom  dans  la  langue  des  Tawareks.  ^ 

Parti  de  là  le  lendemain  matin ,  on  marthe  jusqu'au 
coucher  du  soleil ,  et  on  couche  dans  une  ville  qui  se 
nomme ,  dans  la  langue  des  Nègres  Me  Tombouctou , 
CanikischL 

On  quitte  ce  lieu ,  et  on  arrive  à  midi  à  une  ville 
appelée  CaouJcisi. 

Après  y  avoir  couché,  on  en  part  le  matin ,  et  vers 
midi  on  entre  dans  une  ville  comitie  la  nôtre  (Tripoli)  : 
elle  se  nomme  Zanonzouki.    -*      .  ^     ,    » 

On'  y  passe  la  nuit.  Le  lendemain  matfn'  on  ne  fait 


(1)  Je  p|&#e  que  c'est  la  même  chose  qae  Soudan  ou  habitants 
de  Sotidah.  '  ^ 

(1)  L'auteur  a-t-il  dit  ce  qu'il  voulait  dire  î^* Peut  -  être  faut -il 
snpprimer  la  négation. 


444  APPENDICE. 

que  traverser  des  lieux  habités ,  jusqu'à  ce  que ,  fers 
le  milieu  de  laprès-midi ,  on  arrive  à  une  autre  ville 
appelée  CasehikUki, 

Après  y  avoir  couché,  on  se  remet  en  route  le  jour 
suivant  au  matin  ,  et  traversant  toujours  des  lieux 
habités,  on  arrive  à  midi  à  la  ville  de  TonsoU'Ankîy 
ville  iiAïkatatis  d'AUZabd. 

On  part  de  là ,  et ,  traversant  des  Ueux  habités  qui 
ressemblent  à  QuakareSjDjenzourjAl-Menschiehjetc, 
on  arrive  au  bout  de  vingt -quatre  heures,  environ 
une  demi-heure  après  le  lever  du  soleil,  à  la  susdite 
ville  (de  Tomhouctou) ^  la  plus  grande  des  villes  que 
Dieu  ait  crééeAoù  les  étrangers  trouvent  toutes 
sortes  de  biens,  ville  remplie  de  commerçants. 

Composé  par  moi  Mohammed  ,  fils  d'Au ,  fils  de 
FotiL.  Mon  père  était  libre  citoyen,  ma  mère  une 
esclave  noire  ;  mon  pays  est  Teraoubes  et  Tombouctou. 


APPEICDICE.  44s 

III. 
ITINÉRAIRE 

DE   TRIPOLI    DE    BARBARIE 

A     LA     VILLE  '^ 

DE    CACHENAH, 

PAR    LE    CHEYK    H  A  GG  -  KASS  E»I. 


l" —  l3*  JOURNÉES. 

A  la  treizième  journée,  après  être  sorti  AéTr^oU  de 
Barbarie,  on  arrive  à  Gdames.  (Voir  pour  la  route  et 
les  renseignements,  sur  cette  ville  l'itinéraire  de  Tri- 
poli à  Tomboctou.) 

14*' 16*    JOURNÉES^ 

Après  avoir  quitté  Gdâmès ,  on  marche  durait  trois 
jours  aui^ud,  et  on  arrive,  à  un  puits  appelé  Tent- 
MeUoulen^  qui  peut-être  signifie  dans  le  langage  du 
pays'le/?Mïr5  du  palmier  ^^k  cause  du  seul  palmier  qui 
s'y  trouve.  Quand  la  caravaii'e ■  est  pressée,  elle  ne 
met  que  deux  jours,  et  même  tm  seul,  ^«  Gdâmès  à 
T«nt-Melloûlen.  / 


446  APPENDIClL. 


17* 19*   JOURNBBS 


De  Tent-Mellçulen ,  après  trois  jours  de  marche, 
on  parvient  à  Zourdnit, 


De  Zouràntt  on  atteint,  après  six  jours  de  marche, 
le  torrent  d'Jçawdn. 

!iy^   JOURNÉE. 

Du  torrent  d'Açawan,  on  fait  une  journée,  et  on 
s'arrête  au  torrent  de  Tahamalt,  dont  les  environs 
sont  ombragés  d'une  grande  quantité  d'arbres. 

28* 3o**   JOURNEES. 

De  Tahamalt  à  Tanout'Melien ^  qui,  dans  la  langue 
du  pays,  signifie  le  puits  blanc ^  on  compte  trois  jour- 
nées de  chemin. 

3l* 33*   JOPRN^ES. 

Die  Tanout-Mellen ,  ou  du  puits  blanc ,  on  fait  trois 
journées ,  après  lesquelles  on  arrive  à  Ten^Gacem ,  ou 
ptuts  du  mouton» 

34* 36*    JOURNEES. 

De  Ten-Gacem  on  marche  trois  jours  de  suite,  et 
on  arrive  à  Oatz.  C'est  dans  ce  lieu  qu'on  recueille 
les  feuilles  et  follicules  de  séné,  qui  viennent  à  Tri- 
poli et  Tunis,  et  qui  de  là  se  répandant  dans  toutes 
l^s  pharmadies  de  l'Europe. 


APPENDICE.  44? 

I     37* —  39®   JOURNEES. 

Après  trois  jours  de  marche  de  Gatz ,  on  vient  s  ar* 
rêter  à  un  lieu  nommé  Egguagant  :  c'est  le  nom 
d'une  rivière  qui  baigne  le  pied  d'une  montagne  que 
les  Africains  nomment  Agroûh, 

4o* 4^*    JOURNÉES. 

D'Egguagant  on  parcourt  trois  autres  journées ,  et 
on  fait  halte  à  la  rivière  de  Maise,  qui  a  donné  le 
nom  à  l'endroit. 

43® 47*   JOURNÉES. 

On  quitte  Maïss;  on  fournit  quatre  journées  de 
chemin,  et  on  finit  par  arriver  à  la  ville  que  Ton 
nomme  Janet,  qui  est  bâtie  au  pied  de  la  montagne 
du  même  nom. 

48^^ 52**    JOURNEE  à. 

De  la  ville  de  Janet  on  va ,  en  cinq  jours ,  se  ra- 
fraîchir au  puits  de  Téghéreïn, 

¥ 
Sa® 54*    JOURNÉES. 

De  Téghéreïn  à  Tedment^  trois  jours.  Tedment  se 
trouve  au  pied  d'une  montagne  di^e  Tadent^  011  Kon 
recueille  du  séné  en  quantité.  '  , 

55** '  62®    JOURNÉES. 

De  Tedment,  après  huit  jours  de  marche,  pendant, 
lesquels  on  ne  rencontre  ni  eau,  ni  végétation,  on 
^ient   se   repp&er   au   lieu  /lommé  Açiov^y  oà   il   se 
trouve  un  graad  nombre  de  puits.         ' 


44ii  APPENDICE. 

63* 68*    JOURNEES. 

Après  avoir  quitté  les  puits  d'Açioû,  on  passe  cinq 
jours  au  milieu  de  montagnes  derrière  lesquelles  est 
un  endroit  nommé  Toghâgït, 

6q^ 73*    JOURNÉES. 

De  Toghâgït  on  marche  cinq  autres  journées  pour 
atteindre  Tedek.  La  route  se  fait  toujours  au  milieu 
de  montagnes,  et  sans  trouver  d*eau. 

74* 7^*   JOURNÉES. 

Après  avoir  été  deux  jours  en  rout« ,  on  arrive  de 
Tedek  à  jihxr.  Ahîr  est  un  pays  dont  la  capitale  se 
nomme  AçoûdL  Les  habitations  sont  construites  d^ 
nattes  faites  d'une  herbe  nommée  borâi  au  royaume 
de  Maroc.  C'est  une  espèce  de  papyrus  ou  roieau 
mou,  dont  les  Arabes  de  Syrie  et  ceux  de  Maroc  se 
servent  dans  la  composition  des  nattes  *dont  ils  font 
les  parois  de  leurs  cabanes  et  de  leurs  tentes,  et  dont 
ils  couvrent  leurs  chaumières. 

Les  habitants  d'Ahîr  vivent  de  cassaves  qu'ils  vont 
chercher  à  Gachenah.  Le  territoire  d'Ahîr  est  ombragé 
par  des  forêts  de  ces  palmiers ,  que  les  Égyptiens  et 
les  Maroquins  nomment  doumah;  les  gens  de  Gdâ- 
mès ,  palmiers  de  Pharaon ,  et  les  Espagnols ,  palnùta. 
On  broie  le  fruit  de  cette  espèce  de  palmier ,  on  en 
mêle  la  farine  avec  celle  de  la  cassave  ^t  au  fromage; 
et  ce  ittélange  est  leur  nourriture  habiti}elle. 

Il  se  trouve  au  pays  d'Ahîr  une  gi'ande  quantité 


APPENDICE.  449 

de  chèvres,  des  lions  et  des  singes  sur-tout,  qui  peu- 
plent les  bois.  Sa  population  peut  s'élever  à  douze 
mille  âmes,  qui  sont  Touâreks. 

76* 78*    JOURNÉES. 

.  Après  avoir  quitté  Ahir  on  va  faire  halte,  après 
trois  jours  de  chemin ,  à  une  rivière  nommée  Aoudé' 
ras ,  qu'on  passe  ayant  de  Feau  à  mi-jambe.      "^ 

79* 80*   JOURNÉES. 

D'Aoudéras ,  on  marche  deux  jours ,  et  on  va  s'ar- 
rêter à  une  montagne  dite  Megzem, 

81* —  82*   JOURNÉES. 

Du  mont  Megzem  oh  arrive,  après  deux  jours  de 
chemin ,  à  une  rivière  qui  coule  à  travers  un  bois  de 
dattiers.  Cette  rivière  se  nomme  Inn^Ouallem. 

83* 84*   JOURNÉES. 

Dlrîn  -  Ouallem  on  marche  deux  jours  de  suite  ^ 
après  lesquels  on  a  atteint  jiguades, 

Aguadès  ou  A  godes  est  une  ville  plus  grande  que 
Tripoli  de  Barbarie ,  située  dans  une  plaine.  Il  s'y 
trouve  un  marché.  Les  Touâreks  y  font  commerce  die 
bœufs  et  de  moutons.  Les  habitants  d'Agâdès  tirent 
leurs  vêtements  de  Cachenah^  Gouber^  Zenfèranah. 
Ils  donnent  en  échange,  du  sel,  qu'ils  se  procurent  de 
Bornou ,  du  pays  de  Fachj  et  du  Belma,  Le  prince 

^9 


45o  APPENDICE. 

qui  règne  à  Agâdès  se  nomme  Bàguir.  Il  a  succédé  à 
Ouadelah.  Le  grand  commerce  que  fait  cette  ville,  la 
rend  riche  et   firissante. 

85* 90*   JOURN  ÉBS. 

En  quittant  Agâdès  on  traverse,  pendant  sept  jours 
de  marche ,  des  forets  immenses  ,  et  Ton  ne  boit 
d'autre  eau  que  celle  que  les  pluies  procurent.  On 
parvient,  après  cela,  à  Tedlaq  ,  puits  extrêmement 
profond ,  dont  on  ne  peut  obtenir  l'eau  que  par  le 
moyen  de  chameaux  qu'on  y  amène  exprès  pour  les 
caravanes. 

91* — 97*  journées: 

Après  qu'on  s'est  rafraîchi  au  puits  de  Tedlaq,  on 
iiadt  huit  autres  journées  de  chemin ,  et  l'on  arrive  à 
un  endroit  nommé  Kerfechi. 

98*   JOU&NBfi. 

Après  avoir  marché  tour  un  jour ,  on  atteint  un 
lieu  nommé  Tsaouah, 


99*   JOURNÉE. 


De  Tsâouah  à  Madaouah  un  jour. 


iOO     JOURNEES. 


De  Madaouah  on  marche  toute  la  journée,  et  1« 
soir  on  vient  se  reposer  k  Takmdkoumah. 


A.PPENDICE.  4^1 

loi*   JOURNEB. 

De  Takmâkoumah,  après  une  journée  de  chemin, 
on  arrive  enfin  à  Cachenah  ou  Kasnah. 

La  ville  de  Cachenah  est  très -considérable.  On  y 
entre  par  sept  portes.  Un  intervalle  de  deux  milles 
sépare  une  porte  de  l'autre.  Le  roi  qui  commandait 
à  Cachenah  vient  de  mourir  ;  il  se  nommait  Kaling^ 
Uwah. 

Le  cheyk  Hagg-Cassem-Guarem ,  qui  m*a  donné  les 
renseignements  ci-dessus,  et  qui  m'a  dicté  l'itinéraire 
de  Tripoli  de  Barbarie  à  Tombouctou ,  a  fait  avec  le 
roi.Kalinghîwahle  commerce  de  draps  et  de  chevaux. 
Il  m'a  rapporté  que  la  monnaie  courante  de  Cachenah 
esc  une  espèce  de  coquillage  que  les  Arabes  nomment 
oudoa^  et  que  nous  appelons  trivialement  pucelages. 
Il  m'a  assuré  que  beaucoup  dliabitants  étaient  chré- 
tiens de  religion ,  et  que  la  plupart  portaient  pendues 
à  leur  cou,  ou  sur  eux,  de  grandes  croix  de  bois. 
Les  naturels  du  pays  se  nomment  Heznah.  Ils  pou- 
drent leurs  cheveux. 

Le  territoire  de  Cachenah  fourmille  de  vers ,  dont 
on  est  subitement  couvert  si  l'on  se  couche  sur  la 
terre  nue.  C'est  pour  éviter  cet  inconvénient  qu'on 
étend  des  nattes  sur  le  sol;  et  Ton  dort  ainsi  tran- 
quillement ,  sans  crainte  d'être  inquiété  par  ces  rep- 
tiles importuns  et  même  dangereux. 

Après  m'avoir  dicté  cet  itinéraire ,  le  cheyk  Hagg* 
Cassem  finit  par  me  dire  :  Pour  se  rendre  à  Cachenah 

29. 


452  APPEICDlCfi. 

en  partant  de  Tripoli  de  Barbarie,  on  a  le  soleil  qui, 
le  matin,  vous  frappe  à  la  tempe  gauche,  et  le  soir  à 
la  tempe  droite,  c'est-à-dire  que  le  voyage^  se  fait  en 
allant  toujours  au  sud. 

N,  B.  Le  présent  itinéraire  et  celui  de  Tombouctou 
m*ont  été  donnés  en  1807,  pendant  Tété  de  cette 
même  année,  c'est-à-dire  pendant  les  trois  mois  de 
séjour  que  la  caravane  fait  à  Tripoli  de  Barbarie. 

Copié  à  Tanger,  le  26  juin  1808. 

Signe  Dblaporte,  chancelier. 


AP-PEMDICE.  453 

IV. 

ITINÉRAIRE 
De  gaudja  a  haoussa, 

DE    HÀOUSSA    A    LA    MECQUE  (i) , 

TRADUIT    DE    L*À&ABE 
PAR   M.    LE    BAKON    SYLVESTRE    DE    SACY. 

Au  nom  du  Dieu  clément  et  miséricordieux, 
:  Route   de  Gaudja   a  Haoussa.     . 

v^uAND  on  sort  de  la  ville  du  sultan  (2),  on  va 
coucher  à  l'extrémité  d'un  lac  (3)  nommé  Bazaou  ou 
Baraou, 


(i)  Dans  cet  itinéraire,  il  n'y  a  entre  Gandja  et  Haoossa^DÎ 
distances  ni  directions  ;  et  aYcc  ce  sccoars  il  e«t  di£6cile  de  côns* 
traire  nne  carte  :  récriture  de  ^original  est  si  maaToîse  que  je  ne 
réponds  pas  d*aToîr  bien  lu  tous  les  noms  :  no  grand  nombre  de 
ces  noms  est  entièrement  dépoarvu  de  Toyelles  ;  dans  ce  cas  j'ai 
toojoars  mis  des  a,  par  exeaiple  dans  Samar,  Nak,  Djabal^  Magadj, 

(Note  du  traducteur.  J 

{1)  Ou  de  la  capitale. 

(3)  Partout   où  j'ai  mis  /«c  ,  il  y  a  dans  farabe  hahr^  qui  peut 


454'  APPEWDl-CÏ. 

De  Bazaou  à  Cayakschi;  de  Cayakschi  à  Droou; 
de  Droou  (ou  Drouv)  à  Maschoukony;  de  Maschou- 
kony  à  Bougou;  de  Bougou  à  Tounoum;  de  Tounoum 
à  Yadjour  ;  de  Yadjour  à  Djabdxgo  ;  de  Djabdzgo  à 
Kimba;A.e  Rimba,  le  puits  (i),  on  va  coucher  à  Textré- 
mitë  du  lac  nommé  Cadarco;  deCadarco  au  lac  appelé 
Dzodzreba;  de  Dzodzreba  au  lac  novojné  Aschavanca, 
Quand  on  est  arrivé  au  puits  (2)  d*Aschavanca,  on  passe 
ensuite  à  Goufl  (ou  Goufal),  où  les  hommes  sont  nus 
et  les  femmes  vêtues  :  de  Goufl  on  va  à  Samr  (ou  Sa- 
mar);  de  Samr  à  Yarcou^^oix  les  hommes  sont  nus  ;  de 
Yarcou  à  Dzag,  où  les  hommes  sont  nus  ;  de  Dzag  à 
Bananou;  de  Bananou  à  Dongoï;  de  Dongoï  au  puits 
nommé  Goudh  (ou  Goudha);  de  Goudh  à  Salamou; 
de  Salamou  à  Djanbodou  ;  de  Djanbodou  kSosou;  de 
Sosou  à  Coriri  ;  de  Coriri  à  Couk  ;  de  Couk  à  Ma» 
cravi;  de  Macravi  à  la  ville  de  Nak ,  qui  est  la  rési- 
dence du  sultan  (  3  )  de  Bargou  ;  de  Nak  au  lac  de 
Vadh;  de  Vadh  à  DJwugh;  de  Dhough  à  Mazam; 
de  Ma^am  à  Cal;  de  Cal  à  Djabal;  de  Djabal  à  Mor 


signifier  mer  et  rÎ9ièrt.  Je  crois  qa'il  doit  être  pris  plas  d*one  foii 
ea  ce  dernier  sens. 

(x)  n  y  a  dans- le  texte  alhar  an  albir  :  comme  ces  feuilles  sont 
trèi-mal  écrites,  i*ai  supposé  qa*il  y, avait  nne  fànte  d'orthograpbe, 
et  qn*2l  fallait  lire  albir,  le  puits  :  il  serait  possible  qa*on  dût  lire 
àlbary  et  que  cela  vonlàt  dire  le  désert. 

(a)  Le  sens  est  ici  fort  douteux. 

(3)  On  le  i^yaume. 


AP^PENDICE.  455 

gadj ;  de  Magadj  au  puits  nommé  Tafàkat;  de  Ta- 
fiakat  à  Albar  (ou  au  puits);  d'Albar  (ou  du  puits) 
à  Schal  :  c'est  le  lac  qu on  nomme  Coudh ,  sur  lex- 
trémité  duquel  est  un  grand  royaume ,  qu'on  nomme 
le  royaume  de  Your. 

Ici  se  termine  la  route  de  Gaudja  a  Haoussa, 
De  Coudha  à  la  ville  de  Cathir  (ou  Cathin) ,  vingt- 
cinq  jours;  de  Cathir  à  la  ville  de  Cau  (ou  Caï,  ou 
Car  ) ,  neuf  jours  ;  de  la  ville  de  Cau  à  la  ville  de 
Bomou  ,  un  mois.  Le  royaume  (i)  de  Bornou  est  le 
royaume  (2)  de  tout  l'univers  ;  il  n'y  en  a  pas  comme 
celui-là  dans  le  monde.  De  Bornou  au  lac  nommé 
Schar^  trente-un  jours  ;  de  Schar  au  lac  appelé  Schad; 
quatre  jours  :  l'eau  de  Coudha  y  entre,  et  c'est  la 
mère  (apparejnment  la  branche  principale)  de  Coudh. 
De  Schad  à  Far  (ou  Fou),  sept  jours;  de  Fou  à  f^a- 
daï^  einq  jours  ;  de  Vadaï  à  la  ville  de  Masr  (le  Caire), 
cinquante  -  trois  jours  ;  de  Masr  à  la  ville  du  monde 
(la  capitale  du  monde) ,  la  Mecque^  quarante  jours, 
en  marchant  jour  et  nuit  :  c'est  là  qu'est  la  maison 
de  Dieu,  et  cette  maison  est  le  milieu  du  monde. 
De  la  Mecque  à  la  ville  de  Médine^  vingt  jours,  en 
marchant  jour  et  nuit  ;  de  la  ville  de  Médine  à  la 
ville  de  Schant  (  Damas  ) ,  vingt  jours  ;  de  la  ville  de 
Scham  (Damas)  à  Bazi^Almokadas  (Jérusalem),  dix 
jours  :  c'est  là  qu'est   la   montagne  nommée   Tour 


(x)  Ou  le  sultan. 
(ay  Idem. 


45b  APPENDICE. 

Sinaï  ;  c'est  sur  le  sommet  de  cette  montagne  que 
Dieu  a  parlé  à  Moïse,  et  à  cause  de  cela  on  appelle 
Moïse  Kalim  aliah  (celui  qui  a  conversé,  avec  Dieu)  : 
sous  la  montage  de  Tour  Sinai  est  le  tombeau  de 
Moïse. 


APPElfDICE.  457 

V. 

ITINÉRAIRE 

DACHMET    IBN-HASSAN, 

OE 

FEZ  A  TAFILET  (i). 


Louange  à  Dieu  ;  il  ny  a  de  puissance  et  de 
vertu  qu*en  Dieu.         , 

iTirrÉRAlRE    DE    LA    VILLE    DE    FeZ    A   TaFILET. 

AcHMED  BEN  El  -  Hassan  EL  MpTSYouvi ,  Thumble 
esclave  du  Très- Haut,  auquel  Dieu  soit  propice,  a 
parcouru  cette  route  sous  le  règne  du  Prince  des 
Croyants,  Mohammed,  notre  monarque,  fils  de  Mou- 
lai Abdalla ,  fils  de  Moulana  Ismaïl  chérif  el  Hassany, 


(i)  Cet  itinéraire  se  '^troQTe  dans  nn  nccaeil  de  M.  Paalus ,  in- 
titnlé:  Afemorahilien  fin-9i^^  Leipsig,  1791,  t.  I,  p.  47.  M.  Paulns 
l'a  traduit  de  l'arabe  en  latin  ;  et  comme  il  n*a  point  pubKé  Tori- 
ginal,  nons   le  donnoni  ici  en  français  d*après  sa  version  ladnr. 


458  APPENDICE. 

pen<hint  les  calendes  du  mois  dgioumadit ,  l'an  1201  (i) 

•  1787)- 

I*^*    JOURNEE. 

Nous  partîmes  de  U  ville  de  Fez,  et  en  continuant 
notre  chemin  nous  arrivâmes  à  la  station  tiommëe 
Daroudabibagh ,  qui  appartient  à  notre  souverain  ci 
dessus  mentionné  :  là  nous  avons  passé  sur  le  pont 
nommé  Kantora^Sebou;  et,  après  avoir  traversé  des 
lieux  arides  et  pierreux ,  nous  sommes  parvenus  dans 
un  pays  abondant  en  oliviers ,  où  se  trouve  la  vUle 
de  Safrou ,  que  ses  jardins  et  la  belle  végétation  de 
ses  environs  rendent  très-agréable.  Le  fleuve  qui  la 
traverse  et  qui  lui  fournit  de  Teau ,  fait  aussi  tourner 
plusieurs  moulins. 


Nous  sortîmes  de  la  ville  de  Salrou ,  et  nous  par- 
vînmes, par  des  chemins  escarpés  et  pierreux,  à  une 
montagne,  au  pied  de  laquelle  se  trouvent  une  colline 
nommée  MouMou  Fp-aoun^  et  une  plaine  connue 
sous  le  nom  de  Zogari  Ahmar,  Nous  arrivâmes  en- 
suite au  lieu  nommé  Scheb-Ettsoubn  ;  et ,  après  avoir 


«(i)  U  7  a  mensis  gemaditsania  dans  la  tradoction  de  Paalas; 
mais  il  j  a  deax  mois  y  gemadii  ou  dgioumadit^  dams  le  calendrier 
mahométaii  :  si  cest  le  premier,  comme  l'aonée  laox  cominençait 
aa  la  ou  i3  octobre,  cette  date  nous  porte  rers  le  nilien  00 
la  fin  de  février  ;  si  c'est  le  second ,  vers  le  milieu  on  la  fin  dt 
mars. 


APPENDICB.  459 

passé  près  du  fleuve  Vaugiel^  nous  entrâmes  dfins  le 
lieu  nommé  Oujvuri'el-Asna^  où  nous  passâmes  la 
nuit.  Dans  cet  endroit  est  une  plaine  qui  fornie  un 
pré  abondant  en  herbe ,  et  d'une  végétation  tellement 
belle  qu  elle  passe  toute  description.  Nous  ne  fîmes 
que  peu  de  chemin  dans  cette  journée ,  et  cependant 
nous  avons  voyagé  depuis  laurore  jusqu à  midi. 


Après  avoir  franchi  des  montagnes  pierreuses  et 
arides ,  et  après  avoir  traversé  plusieurs  fleuves ,  nous 
parvînmes  à  un  lieu  appelé  Nehr^Merdou ,  habité  par 
le  peuple  nommé  Aitschagrou^h  ;  nous  avons  des- 
cendu la  montagne  de  Tseniets^Elbaks  ^  et  de  là  nous 
sommes  arrivés  sur  les  bords  du  fleuve  Dgigou ,  près 
duquel  se  trouve  la  forteresse  de  Tsagouts^  habitée 
par  la  famille  des  Berbers,  nommée  Eitdjoi^sL  Nous 
nous  arrêtâmes  dans  ce  lieu,  et  nous  y  passâmes  la 
nuit. 

4*   JOURNÉE. 

Nous  partîmes,  et  nous  traversâmes  encore  un  pays 
pierreux ,  aride,  rempli  de  montagnes  et  de  précipices  ; 
et  nous  parvînmes  à  Koubour-EtsuatSy  ou  les  Zb//z- 
beaux  cTEtsuatSj  ainsi  nommés  parce  que  vingt-trois 
hommes  périrent  dans  la  neige  sur  le  mont  Oummour 
Djianiba,  Ce  mont  est  très-élevc,  et  il  y  tombe  beau- 
coup de  neige.  A  ses  pieds  sont  plusieurs  villes  ;  celle 
qu'on  nomme  Kousour  ^  Etsiousi  est  entourée  dun 


46a  .       APPENDICE. 

pas  par  la  longueur  du  chemin  que  Ton  parcourut, 
mais  parce  que  ce  chemin  est  difficile  et  escarpé. 

9^    JOURNEE. 

Nous  partîmes,  et  au  sortir  de  ce  lieu  nous  entrâmes 
dans  la  région  qu'on  nomme  EhMedghara ,  et  ensuite 
nous  arrivâmes  aux  châteaux-forts  nommés  Essouk- 
Kasrigedid  ^  Kasr-Mouley'-Addallah^en'Aly.  On  voit 
dans  ces  lieux  les  plus  beaux  palmiers  et  les  plus  belles 
roses  du  monde.  Les  cultivateurs  de  ce  pays ,  lors- 
qu'ils '  labourent  pour  semer ,  font  tremper  leur  se- 
mence dans  des  piscines  semblables  à  celles  qui  ser- 
vent à  faire  le  sel;  et  par  la  bénédiction  de  Dieu  cette 
semence  leur  procure  des  moissons  abondantes. 
I 

lO*   JOURNÉE. 

Après  avoir  passé  ces  châteaux-forts,  nous  trou- 
vâmes une  source  nommée  tantôt  Aïn-Miski^  tantôt 
Aïn^TutugeH;  à  peine  pourrait -on  trouver  son  égal 
pour  la  douceur  et  labondance  de  ses  eaux  ;  aussi 
on  s'en  sert  pour  bâtir,  pojir  arroser  le  blé,  les  pal- 
miers et  toutes  les  plantes.  De  là  nous  arrivâmes  à  ce 
fleuve  Ziz  y  dont  npus  avons  déjà  fait  mention  ;  et  en 
nous  avançant  le  long  de  ses  rives ,  à  travers  les  bos- 
quets de  palmiers  et  les  vergers ,  nous  entrâmes  dans 
le  district  de  Retseb.  Nous  vîmes  dans  ce  jour  plu- 
sieurs châteaux-forts,  savoir  :  Kasr-^EouJiadirlsa^  Kasr' 
Eouladi^Amjrray  Kasr^'Tfatehiameti  et  Kasr'Elmona- 


APPENDICE.  463 

nkayquai  bâtis  le  roi  de  Maroc  dont  nous  avons  parlé. 
Nous  Times  encore  dans  cette  région  un  château-fort 
nommé  Kasr'Moulay*Mamoun^  qui  est  le  plus  beau  et 
le  plus  curieux  de  tous  ceux  que  nous  avons  rencon- 
trés. On  trouve  aussi  dans  ce  lieu  des  palmiers,  et  des 
champs  cultivés ,  et  fertilisés  par  des  canaux  d'irriga- 
tion. La  distance  du  chemin  parcouru  dans  cette 
journée  fut  peu  considérable. 


II*  JOURNÉE. 


Ensuite  nous  traversâmes  uiie  plaine  unie ,  stérile , 
sans  palmiers ,  sans  eau ,  sans  plantes ,  sans  habitants , 
séjour  des  antilopes ,  des  autruches  et  autres  animaux 
sauvages.  C^  trajet  est  dangereux  à  cause  des  brigands. 
Nous  arrivâmes  ensuite  à  un  village  nommé  Tzetzimi; 
c'est-là  que  commence  le  territoire  de  Tcffilet  :  en- 
suite nous  parvînmes  à  des  châteaux-forts,  nommés 
Sabbah  par  les  habitants ,  et  qui  sont  situés  dans  une 
vaste  plaine.  Nous  traversâmes  ensuite  le  fleuve  Ziz; 
et,  après  avoir  passé  par  plusieurs  villes,  dont  les 
environs  abondent  en  palmiers ,  nous  parvînmes  au 
beau  palais  nommé  Daroubbeida ,  que  notre  roi  vic- 
torieux par  la  grâce  de  Dieu  a  bâti.  Non  loin  de  ce 
palais  est  la  forteresse  nommée  Erisani^  qui  porte 
aussi  le  nom  èiEbou^Amm. 

Tels  sont  tous  les  lieux,  toutes  les  régions  et  les 
déserts  que  nous  avons  vus  au  temps  ci-dessus  men- 
tionné  du  règne   de   notre  prince,  et  en  implorant 


464  APPENDICE. 

pour  nous  et  pour  tous  les  Mahométans  b  miséri* 
corde  de  Dieu. 

Cet  itinéraire  a  été  composé  le  neuvième  jour  du 
mois  de  dgioumadit,  Fan'  i2o3  (c'est-à-dire  1789). 


APPENDICE.  l\6j 


JOURNAL 

D'UNE   EXPÉDITION  FAITE  EN  i§io, 

PJlR    SIDT    MOHAMED    BET, 
Fiis  atné  du  pacha  chef  de  la  régence  de  TripoU  de  Barbarie , 

CONTR3E    SoLTAN , 

*■ 
Village  de  la  morUagne  de  Ganan,  à  VO.  S.  Q,  de  la  régence; 

*     % 

T«irU   TÀ.K  Vtf    DES    ESCLA.TES   XTA-POLITAXCrS    BE    CE   1£T; 

COPIÉ    ET   TRADUIT    DE    l'iDIOME    NAPOLITAIN   (l). 


a5  janvier  1810.         Korami^sH. 

ApRÂs  avoir  inicoqu.é  le  nom  de  Djeu,  nou§  sommes 
partis  de  ^Tripoli  à  huit  heures  du  matfa  ;  noi\s  avons 
mari:hé  trois  heures,  et  nl>us  sommes  lirpivés  à  un 
li«u  appelé  Kommîéif^  où  nouâ^  avoua  trouvé  les  telles 
dressées.  Ce  lieu  n'est  pas  habité;  il  y  avait  à  peine 
de^J'herbe  pour  faîre.paître  le*  anima||ix.  • 


({)  L'ori^al  porte   une  TerMtfki  ilaKenne  ;  l*4rabe  est  écrit  en 
noglitebla. 


466  Al  A  iiiNDicij. 

a6  id.  ,  Qestah. 

On  commence  la  marche  nine  heure  après  le  soleil 
levé;  on  marche  jusqu'au  soir,  et  on  parvient  à  un 
lieu  nommé  P^iroA,,  entouré  de  monticules  de  sable  ^ 
où  Ton  passe  la  nuit.  ^    « 


4 


«7  rrf.  KiSLESA.  • 

Nous  sommes  partis  deux  heures  après  le  lever  du 
soleil;  et,  à  la  suite  d*une  marche  de  sept  heures, 
nous  sommes  venus  cahiper  pi*oche  d*un  monticule  de 
sable,  sur  lequel  est  Une  masure  qui  sert  de  logement 
à  u|o  marabout  où  saint  de  l'endroit  ^  et  nou9  j  avons 
passé  la  nuit.  Ce  lieu  se  nomme  Kislesa,  txs  y  trouve? 
quelque  peu  d'herbage  et  quelques  plantes  de  safem. 


a8  id.  EtOQtAH. 

Partis  à  l'aube  du  ÎQur,  nous  avons  traversé  toutes 
pkines ;  et,  après  cinq  heures  de  marche,  n<fUs  avons 
«ité  "rejoints ,  à  ufi  lieu  nommé  Éloqiah,  qui  est  au  bas 
d'une  moatagi^e  épouvantable^  où  il  y  a  Jle  l'eau, 
par  eavirqn  mille.Mauçes^^ui  nous  j  attendaient  gour 
aUtr  avec  uc^  ^u^iéu^ou  nous^yi^  eombattre. 


•  • 


2^  id.  *         GlADOUBAH. 


--.r 


Nous  nous  sommes* qns  es  coûte :4ious  avons  tra- 
verse  un  torrent qui^ était  avec.;  nous  Sommes  ari^ive» 


APPENDICE.  467 

à  une  grosse  montagne,  sur  la(|^elle  il  y  avait  un  petit 
village,  habité  par  trois  cents  Maures;  nous  l'avons 
gi*avie  à  pied,  et,  ajiï'ès  trois  lieurès  de  peines,. nous 
nous  sommes  trouvés  dans  une  très-vasté  plaine ,  ou 
BOUS  avons  cainpé  à  un  lieu  nommé  Oladoubah,  On 
y  compte  cinquante  tentes  occupées  par  des  Maures 
qui  y  ont  leurs  famille:».  Il  n'y  avait  pas  deau,*ni 
aucun  herbage  pour  nos  animaux. 


3o  «/.  Qasser-Beni-Aichau.  9 

Nous  nous  somm^  mis  encroûte  à  "deux  heures 
de  soleil ,  et  ne  nous  sommes  arrêtés  qu'à  la  fin  du 
jour.  Nous  avons  vu,  chemin  faisant ,^ quantité  de 
lièvres;  Nous  nous  sommes  campés,'  et  nous^  sommes 
restés  deux  jours  à  Qasser^Beni^Aichah, 


* 
i*'^  février.  Attariah. 

Nous  sommes  partis  à  la  même  heure  qu'hier  ;  nous 
avons  ^it  foute  par  dés  plaipe^  de  sabl<&  sans  eau 
et  sans  \ierbage ,  et  à  l'heufe  habituelle  notis  âv6n« 
cailipé  dans   u«   lieu  Inhabité,  qu'en  nomme  Attà^ 

tiah*  .  «  * 

I         y.       ■  JL   ♦  '  * 

.1  ». 

a  /^.  '       ,^  SojwAN. 

Trois  heures  après  te  lever  du  soleil,  iiou»  nous 
«omhies  inis"enlroutê' à" travers'*  des  campagnes  rem- 
•  3o.  * 


'  4G8  APPENDICE, 

plies  de  lièvres,  11  ^({pfBa  un  vent  si  extraordinaire 
•  que  nous  manquâmes  de  perdre  la  vue,  à  causer  des 
touii)iilons  de  povssière  qu*fl  .souleva ,  et  qui  étaient 
tellement  épais ,  que  nous  ne  nous  distinguions  pas 
les  uns  les  autres.  Nous  campâmes-  sous  SoUan ,  c'est- 
à-dire  au  lieu  que  nous  devions  attaquer.  Il  s  y  trouve 
Ij^aticoup  d'oliviers,  qui  enV>urent  cinq  villages  forti- 
fiés à  la  manière  des  chrétiens  ;  Tun  d  eux  ,  qui  con- 
tenait environ  trois  cents  homm^,  était  dans  une 
position  sf  difficile ,  à  tause  des  précipices  qui  Tenvi- 
rt>nnent,  qu  on  ne  peut  s'en  approcher,  ni  à  pied,  ni 
à  cheval.  Il  est  ceint  d*une  muraille  percée  de  canar- 
•  dières  de  qViatre  -doigts  d'oui^rture ,  où  les  canons 
de  liisjl  {ïeuvent  à  peine  s'introduire. 

Le  lendemain  de  notre  arrivée,  à  une  heure  et 
demie  du  jonr  ù- peu*- près,. nous  avons  commencé 
l'attaque.  Le  feu  a  di^ré  six  heures  de  sidte ,  après 
lesquelles  noys  nous  sommes  emparés  de  quatre  vil- 
lages. La  position  du  quatrième ,  qu  on  ne  peut  pp* 
procher  que  par  un  hovau  qui  ne  tient  tout  au^Ius 
**que  trob  cavaliers  de  front  ^  nous  aya^t  empêchés  de 
le  pi;endre.,  nous  l'avons  abandonné,  et  nous  nous 
SQfmines^etirés  avec  le  j?rand  nombre  «de  troupes  de 
ligne  que  nous  v  avions  menées. 

A  la  première  attaque,  un  de^  ptetnîers  officiers 
de  notre  camp^  qui  s'était  trop  avancé,  fut  Uessé  au 
côté,  d'une  balle,  dont  il  mourut  ^e\x!L  jours  après. 
Nous  avons  encore  perdu  huit  personnes.  L^^^nemi 
a^  eu  de  tués  douze  homnies  >qui  c^etchaient  à  fi»r. 

Ce^te  nuit,  un  gr^d  cri  se  fit  -éniendre*^  qui  nous 


AÎ>PENDICE.  .         4  469  • 

fit  ^sortir  de  ïâ  tente,  tenahttnos  arm«s  en  main. 
Mais  cette  alarme  provenait*  seulement  de  voleurs 
qui  s'étaient  introduits  dans  le  camp,  et  qui  prirent 
la  ftiite. 

Après  être  demeurés  trois  jours  à  Soltan ,  oii  now 
avons  trouvé  un  puits  d*eau  de  pluie,  nous  en  sommes 
partira  midi.  Nous  maichions  depuis  une  heure, 
quand  un  courrier  expédié  de  Trip<^  vint  annoncer 
des  secours  en  |M)tre  ^faveur ,  qui  arriveraient  sous, 
deux  heures.  Nous  campâmes  donc;  et  aii^^temps  d^ 
signé  tious  vîmes  paraître  dans  notre  calnp  25oo 
hommes ,  tant  infanterie,  que.  cavalerie»,  qui  se  mirent 
à  crier  vive  le  hacha,!  vive  le  bey  !  l.eS*principau3^, 
officîiers  fiirent  introduits  dans  la  tente  du  lTey,jqu'ils 
vinrent  saluei*,  et  à  qui  ils  baisèrent  la  main* 

Ce  même  jour,  ledit  bey,  s  amusant  à  faire  voltîgei* 
*on  sabre  nu  autour  dçs  têtes  de  ses  esdnves  chré- 
tiens, fendit,  par  maladresse,  ou  à  dessein ,  l'oreille 
dfun  de  mes  compagnons ,  <f&i  heureii^ement  en  ïxxxt 
gu^i  huit  jours  après. 


6  février  lâ  10.     •*,    Tou'rnjlh. 

Partis  au  point  du  jour,  itous  marchames*dans,  des 
plaines  coii;^ertês  de  lierre,  et  vînmes  à  quatre  heures 
camper  à  TounUih. 


7  "'r  ^  OuAMi's. 

Nous  nous  mîmes  en  yt>%xé^  après  qu'un  vent  très- 
violent,  qui  souffla,  et  qui  remplit  Fair  de  sajble  au 


,4;^         %  APPÊrflTlCE. 

point  de  ne  pas  se  voir ,  ,eut  cessé  ;  nous  mardiAoïes 
quatre  heures,  et  nous  nolis  reposâmes  à  Ouamis, 
où  nous  avons  trqjivé  de  Teau  et  des  p&turages^  et 
où  nous  avons  demeuré  trois  jours. 


lo  ùi.  Sressah.  • 

Nous  sommes*  partis  deux  heures  après  le  lever  du 
soleil;  nous  en  marchâmes  sepi:,  et  nous  vînmes  cam- 
per kSk^ssak^  lieu  ou  nous  trouvâmes  de  Feau. 


•  11    id,  •'  Me  2  D  AH. 

On  comptait  une  heure  de  soleil  quand  nous  nous 
sommes  mis  en  route.  Nous  atteignîmes  une  mon- 
tagne, que  nous  passâmes  à  pied,  et  que  nous  mîmes 
trois  heures  à  gravir.  Unepetite,plalne,  qui  se  trouve 
derrière  elle^.ilous  cçgaéifîsit.  à  une  autre  montagne 
plus  difficile,  et  si  rapide,  que  ce  fut  avec  toutç|^es 
peines  possibles  que  nous  (esclaves)  et  deux  personnes 
qu  on  nou3  adjoignit,  pûm^l  soutenir  \ek  caisses  que 
les  mules  portaient,  et  les  empêcHer  de  tomber.  Au 
pied  de  cette  montagne,  était  un  bas -fond,  entouré 
d'autres'nfohtagnes.Nous  avons  enfin  attellàt  Mezdah^ 
ville  entourée  de. murailles,  et  dont  lés  maisons  sqnt 
de  chaux. On  y  resta  quatre  jours,  à  l'effet  dy  perce- 
voir le  tribut  des  chameaux  et  des  nègres.  ^ 

Je  vis,  chemin  faisant,  un  édffice  chrétien  de  c<ms- 
tructio^  ai^ique,  qui  a  la  forme  d'une  lanterne  j^lces 


APPENDICE.  47* 

pierres  en  ont  un  pas  de  large ,  çt  sont  longues  d'une 
brasse. 

N. B,  Mezdah  est  lentrcpôt  du  commerce  de Gdâ-     ^ 
mes  et  de  Tomboctou. 


i5  «Vf.  £l-Atàfah-di*Lofghid. 

Nous  partîmes ,  le  soleil  haut  de  trois  heures ,  par 
un  vent  violent  et  une  poussière  qui  aveuglait,  et 
vînmes  camper  dans  l'après-midi  à  un  endroit  sans 
eau,  dit  EUAtafah^dULofghid, 


16  id.  NfiSMAH. 

Nous  avons  marché  entre  des  montagnes  et  dans 
une  gt)rge  tout  au  plus  large  dun  mille  ;  et,  après 
sept  heures  de  route,  nous  assîmes  notre  camp  à 
Nesmah;  nous  y  trouvâmes  *à%  Veau,  ^es  terres  se- 
m^,  et  7  demeurâmes  trois  jours. 


19  id*  MODD-BL-TOUIL. 

Partis  a|^rès  deux  heures  de  soleil,  notre  marche  * 

s'est  continuée  dans  la  même  gorge  ■,  oii  j'ai  vu  une 

tour  bgitie  par  les  chrétiens,  mais  inhabitée;  et  elle 

s'est  terminée  à  Modd-  el-  TouU^  lieu  ensemencé  en 

,  quelques  endroits,  iftais  saiis  pâturage.  ^ 


47î^  *  APPEIfÛICE. 

20  id,  Mf  S^SAOUQUI. 

Nous  sommes  partis  une  heure  après  le  lever  du  soleil, 
et  nous  avons  marché  sur  le  roc  vif  par  un  chemin 
qui  nous  a  conduits  dans  un  petit  champ  ensemencé, 
au  mflieu  duquel  est  un  édifice  antique,  construit  par 
les  chrétiens.  II  a  cinq  hauteurs  d*homme  d'élévation, 
ot  quatre  brasses  de  longueur.  On  y  voit  des  figures 
chrétiennes  sculptées ,  et  on  y  lit  des  caractères  espa- 
gnols.. Il  semblait,  dans  Téloignement ,  quil  était  de 
briques  ;  mais  ,  m'en  étant  approché  ,  j'ai  reconnu 
q^'il  était  bâti  de  pierres  rouges.  Sa  façade  est  soute- 
nue par  deux  colonnes ,  qui  ont  une  stature  d*homme 
de  hauteur.  Nqus  avons  campé  dans  son  voisinage, 
c'est-à-dire  dans  un  lieu  sans  eau,  qu'on  nomme 
MessuouquL 


%i  id.  Mechaal. 

A  deux  heures  après  le  soleil  levé  ,  nous  xubmé 
sommes  remis  en  route.  Nous  avons  passé  un  grand 
torrent  satts  ej^u,  qui  serpente  à  travers  un  grand 
nombre  de  vallons,  peuplés,  au  dire  des  Arabes,  par 
^  des  bêtes  féroces.  Nous  avons  descendu  une  mon- 
tagne noire  y  et-jious  sommes  venus  nous  camper 
dans  la  petite  plaitie  de  Mechàùl^  qui  est  inhabitée, 
mais  où  nous  avons  trouvé  irois  puits,  qui  ont  servi 
à  faire  boire  nos  animaux. 


APPENDICE.  '  47^ 

%'à  id.  ElFAOUI. 

Nous  partîmes  de  Mechaal ,  à  deux  heures  de 
soleil;  nous  marchâmes  six  heures,  après  lesquelles 
nous  Yinihes  asseoir  nos  tentes  à  Elfaoui^  oix  Ton 
compte  trois  fontaines  d'eau  de  pluie^  Les  terres 
d'Ëlfaoui  sont  ensemencées ,  ombragées  de  grands 
arbres,  d*oii  il  découle  de  la  gomme  qui  paraît  de 
l'encens ,  et  tapissées  d'herbages.  Nous  avions  vis-à- 
vis  de  nous  une  très-belle^ontagne ,  où  il  y  a  une 
grande  quantité  de  gazelles ,  de  lièvres ,  de  loups  et 
(le  singes.  Nous  avons  tué  un  de  ces  derniers  à  coups 
de  fusil ,  et  nous  en  avons  mangé  la  chair ,  qui  avait 
le  goût  de  celle  du  poisson  épée. 

Chemin  faisant ,  nous  reçûmes  de  Tripoli  un  cour- 
rier qui  m'a  rendu  votre  agréable  lettre ,  à  laquelle  je 
réponds  par  le  présent  journal  que  je  vous  adresse. 

Nous  restons  ici  pour  retirer  le  tribut  des  trois  vil- 
lages au  milieu  desquels  nous  sommes  campés. 


a  mars. 

Le  bey  me  dérangeant  à  toute  minute,  excusez  si 
je  ne  puis  vous  doni)er  des  renseignements  aussi 
amples  que  je  le  désirerais,  Je  vous  écris  comme  je 
peux,  et  je  le  fais,  à  la  hâte,  parde  que  je  suis  acca- 
blé de  travail.  * 

Pour  traduction  de  l'idiome  napolitain  du  présent 
journal ,  adressé  par  un  esclave  du  bey  au  très-révé- 


474 


APPENDICE. 


rend  père»  Pacifique  "de  Montecassiano ,  récoUet,  et 
préfet  apostolique  de  la  mission  de  Tripoli  de  Bar- 
barie ^  qui  me  Ta  communiqué. 
i 
Tanger,  le  7  mai  1818. 

Signé  DcLAPORTE,  chancelier. 


APPENDTCt.  475 

VII. 
ÉxTRJiT  d'IBN-HAURAL  (i), 

Manuscrit  de  Leyde,  p.  34- 


Tas  (Fes),  jolie  ville,  partagée  en  deux  par  «un 
fleuve  ;  les  deux  côtés  ont  chacun  un  gouverneur 
particulier.  Il  y  a  une  haine  perpétuelle  entre  les  ha- 
bitants ,  qui  se  livrent  souvent  des  combats  très-san- 
glants. Le  fleuve  a  beaucoup  deau,  et  il  fait  aller  une 
grande  quantité  de  moulins.  Cette  ville  est  dans  un 
canton  fertile:  elle  est  pavée  avet  des  pierres;  et  tous 
les  jours  de  Tété  on  fait  passer  le  fleuve  dans  ses 
tnarchés ,  pour  qu'il  en  lave  les  pierres  et  en  emporte 
les  immondices. 
De  Fas  à  Sadjalmâsah  il  y  ai-treize  stations. 
Il-         '■ -    >       .  ■  I.  i  ■     Il     .1. .  1^    .11    1^,  1 1  » 

(i)  Toate  cette  partie  d'IbiirHankal  ne  se  trooTe  pas  dans  Tex- 
trait  qoe  l|^.  Oaseley  a  donné  de  sa  Géographie.  Il  est  d'ane  grande 
importance ,  patrce  qnjl  démontre  'les  connaysances  étendnes  des 
Arabes  relativement  an  Sondan ,  &  nne  époque  très  -  recalée.  Ibn- 
Haakal ,  selon  M.  LaAglès  (  Biographie  universelle  ,  t.  XIX «  p.  493  ), 
a  écrit  vers  Tan  970  de  notre  ère.  Je  dois  la  traduction  de  ce 
morceau  dlbn-Hankal  à  Tobligeance  de  M.  de  Saint-Martin. 

W— R. 


'J 


476  APPENDICE. 

Sadjalmàsah  est  lyie  belle  ville,  située  sur  un 
fleuve ,  qui  s'enfle  périodiquement  comme  le  Nil. 

Sur  ]e  côté  de  la  route  qui  conduit  de  Fais  à  Sad- 
jalmâsah,  on  trouve  le  pays  ôiAghmât,  Entre  Aghmât 
et  Sadjalmàsah  la  distance  est  d'environ  huit  stations; 
il  y  en  a  autant  entre  Aghmât  et  Fas ,  et  autant  encore 
jusqu'à  la  hier. 

De  Sous  à  Sadjalmàsah,  et  de  là  à  Aoudaghast^  il 
y  a  deux  mois  de  chemin.  Aoudaghast  est  une  belle 
ville ,  située  comme  la  Mecque  entre  deux  montagnes. 

De  cette  ville  à  Ghanah  il  y  a  dà^n  journées  de 
marche  ,  et  pas  plus  ; 

iDe  Ghanah  à  Kaughahy  et  de  là  à  Samah^  moins 
d^un  mois  ; 

Pe  Samah  à  Ka:^am ,  aussi  environ  un  mois  ; 

De  Kazam  à  Koukou^  deux  mois  ; 

De.Koukou  à  Marandaf^.  un  mois  :    " 

De  Marandah  à'  2aw^'lah ,  deux  mois  ; 

De  Zawjrilah  à  Adjoudabiah^  -dix  stations  ;. 

D'Adjoudabiak  à  i^i^2e^^. quinze^ stations ^ 

De  Fezïan  à  j^aghàwah,  deux  mèîs  ; 

D/Aoudaffhàst  à  Ou/il ^  où  sont  des  mines  de  sel> 
uir  mois  ;  *      /  . 

D'Oulii  k  Saêjalmâsah  ^  un  mois  et  demi. 


APPENDICE.  477 

VIII. 

ITINÉRAIRE 

D'HABJI-BOUBEKER, 

FILS    DS    HOHAMMCDf  FILS     DE    T^RONj 

DIE.    SpNO'P A  LEL  y 
!  VILLE     DE     fÔUTjf-TORO, 

A    LA   MECQUE, 

«N     181O    ET    l8il  i  V 

Hecueitti  et  rédigé  au  Sénégal  y  en  i^ao, 
par  M. -P.  RouzÉE. 


L'iMPRÈ^àioN  de  cet  ouvrage  était  pfesque  termînée^ 
lorsque  nous  avons  eu  connaissance  de  l'itinéraire 
d'Hadji-Boubeker  ,  nègre  du  Fouta^Toro  (i);  il  est 
d'auta.nt  plus  intéressant  d'en  présenter  à  nos  lec- 
teurs une  analyse  rapide  ^  qu'il  confirme  en  plusieurs 
points  qiielques-uns  des  résultats  principaux  de  nos 
recherches. 

__ '* 

*■         i»    '  ' .  ■■j"-"     ~  '  II.  -     ,, 

{t)  Annales  làarUimei  et  coloniales  <,  aan.  x8ao,  ji*  partie,  p.  937. 


478  APPEïTDICE. 

Boubeker  est  de  Seno^Palel ,  dans  le  FoutOrToro  ; 
M.  Mollien  a  passé  dans  ce  lieu ,  et  le  nommé  Seno- 
paie  (i).  Ce  voyageur  y  rit  aussi  un  maraboilt,  qui, 
comme  Boubeker,  avait  fait  le  pèlerinage  de  la  Mec- 
-yue  (2). 

De  SenO'Pa/el  Boubeker  se  rendit  à  Ojaha ,  et  de 
là  à  la  grande  ville  de  TUogn^  capitale  du  Fouta^ 
Toro.  Ojaia  est  peut-être  le  lieu  que  M.  Mollien 
nomme  Diaba  ;  mais  il  lie  fait  point  mention  de 
Tilogn^  que  Boubeker  nous  dit  être  la  capitale  de 
FoutO'Toro.  11  est  possible  au  i^ste  q^  dans  ce  pays , 
comme  dans  le  Souaan  et  Vlans  le  Désert ,  chaque  liet 
ait  deux  noms,  Fun  nègre,  et  Tautre  arabe.  Boubeker, 
qui  a  donné  son  itinéraire  en  arabe ,  n  aura  indiqué 
que  ce  dernier. 

Boubeker.  franchit  les  limites  du  routa ,  et  se 
trouva  dans  le  rQjaunœ  du  Cagffaga^  habité  par  les 
Serraoç^dais^  La  relation  d*Houghton  nous  apprend 
que  l^nom  de  Sera-Coles  signii^e  rivière  de  For  (E),  et 
est  le  même  que  porte  la  rivière  qui  arrose  le  Bambouk; 
«t  dans  la  Carte  de  ta  partie  occidentale  rf«  i\Afriqme 
câmprise  entre- jfi^uin  et  Sierra  »  Leone  ^  dfessëe  par 
d'Anville  en  1727 ,  nous  trouvons  au  nord  du  Bam- 
£011^ le  royaume  de  GayagiJ^,  hdhité^ par  les  Saracolez, 


(i)  MoLLtSN,  Voyage  dans  F  intérieur  de  F  Afrique  ei'fttx  sources 
du  Sénégal  et  de  la  Gambie;  Patis,  i8ao,  îii-8**,  t.  î,  p.  182,  a  19; 
et  la  carte.  '  •'     •     * 

fi)  U  est  dit  daps  les  NouhéUcs  ^finales  des  Voyages^  que  ce 
fnaraboat  était  Boabcker  lui-même. 

{%)  Proceedingf  of  tke  As^oéiatiûn ,  181  d ,  in-.8%  t.  I ,  p.  a/îo. 


I 


▲  PPEiroiCE.  479 

f 

Il  est  donc  ,certaiii  que  le  royaume  du  Çagnaga  de 
Boubeker  est  le  «  même  que  celui  de  Gayaga  ou 
Kayargqi,  de  d'Anville  et  de  Rennell;  c'est,  la  partie 
di^  royauine  de  Galam  ,  située  au  sud  du  Sénégal,: 
et  le  nom  même  de  Cagnaga  nous  paraît  être  le 
même  qi^e  celui  de  Cahaga,  dont  on  a  £iit  Sénégal. 
Boubeker  $'arré;ta  quelques  s^emaines  à  DJawarp 
une  «des  principales  villes  du  pays  de  Càgnaga,  U 
n  arriva  qu'environ  trois*  mois  après  son  départ  de 
SenO'^  Palely  à  Jarra  ou  Djarra^  capitale  du  pays 
de  Bagoiuiy  gr^inde  ville,  située  au  nord  de  Djdrra. 
Jarra  nous  est  bien  connue  par  le  voyage  de  Mungo* 
Park  9  maisL  Bagona  comfiie  nom  de  ipyaume  est 
nouveau  (i).    Djarra  (2),  dit  Boubeker,   apparte* 

nait  autrefois  au  roi  de  Karta  ^  mais  actuellement 

*  If 

eUe  obéit  aux  Maures  ^  et  sa  poptilation  se  com- 
pose en  partie  •  des^  marcl&ands  de  cette  nation  :  il 
sy  iait  un  très -grand  commerce;  on  y  porte  beau* 
coup  de  sel  de  la  ville  de  Tischit ^  iprès  de. laquelle  il 
y  a  des  salines  considérables; ce  qui  se  trouve  confirmé 
par  Mungo»Par|jL^  qui  apprit  à  Jarra  q|ie  ce  fut  par 
des  Maures  j  qui  se  rendaient  à  Tisckit  pour  acheter 
du, sel,  que  le  major  Houghton  fut  dépouillé  de  tout 
«e  qu'il  possédait  (3).  .     x 

De  Jarra  Boubeker  se  rendit  à  Segou  ou  SegOy  «n 
wn  mois  et  quelques  jours;  la  route  qu'il  a  suivie 

(1)  Selon  MangoxParl^j  Jarra  est  la  caDÎIale   du  royanme  de 

(a)  Proceedings  jof  the  Association ,  t.  I,  p.  345. 
(3)  ibid.^  p.  356. 


48o  APpSlfDICEr 

traverse ,  dit-il ,  une  contrée  remplie  de  forets  ,  peii 
cuhiyée  et  pea  peuplée.  Segou ,  capitale  du  Bambarra, 
est  située  à  Test  de  DjpTaj^svi  les  deux  rives  du 
Vjaliba  on'Joliba.  be  pays  4®  Bambarra  é6t  presque 
partout  fertile;  les  cantons  cultivés  par  \e&  FouUes, 
sont  eugénécal  )es  plus  productifs.  La'  nati<;pi  là  plus 
nombreuse  dans  ce^pays  e|t  celle  qui  lui  donne  son 
nom  :  ensuite  viennent  les  Foidles  ou  Foulahs^  qui 
3ont  dispersés  datjp  tout  le'  royaume  et  possèdent  à 
eux  seuls  des  provinces  entières  ;  les  Meifires  ne  se 
rericonti^nt  guère  que  dans  les  grqjades  villes.  De 
^ego^y  Bouheker  alla  directemcïnt  à  Tùnbouctou  par 
terre,  en  ^vingt-sept  jours;  Cette  ville  est  située  au 
nord-èst  de  Segou  à  peu  de  distance  du  Cailoum , 
flèuVe  considérable ,  qu*iLcroit  être  une  branche  du 
Djaliba.  "*  »  * 

Arrêtons-'noiis  ,à  cette  partie  ^  inkportante  de  la 
relation  defic^beker,  qui  ecm  fi  raie  les  résultats  de 
,nos  recherches.  En  effet,  il  paus  dit  que  TKmbouctou 
est  situé  au  nopd*est^de  Sâgo ,  et  plus  bas,  ai^^i  que 
nous  le  verrons  ;  il  ajoute  qùè  Timifiuciou  est  sous  le 
même  méridien  que  Jenni  ou  Djenm  .,•  ce  '  qui  est 
une  nouvelle  preuve  que  la  route  de  Sega  et  de  Djenni 
à  Timbouctou  doit  être  dirigée  vers  *  le  nord ,  et  non 
vers  lest,  comme  dans  les  cartes  deiLennélÇet^ceux 
qui  lont  suivi,    .  . 

De  plus  Boiïheker  ne  nous  dit  point  que  Tïmbouctou 
soit  situé  près  de  Djalibà  ou  JoUba ,  comme  l'avait 
dit  Mungo-iPark ,  mais  que  cette  ville  est  à  peu  de 
distance  d  une  grande  riAière,  qui  est  un  brasdu  ZJf<?- 


APPENDICE.  484    • 

liba.  VoiR  doDc  encçKe  ^'existence  de  deux  grandes  • 
riviètes  dans  le  Soudan  ^  confirmée  ;  et  cet  exposé 
s  accorfj^  aisec  notre  carte ,  ^i  glace  Timbouctou  pç «s 
du  Gaf^arou,  lequel  probablement  dans  eet  endroit  sa 
nomme  Cailoum ,  tandis  qu^  dans  le  BoUrnou,  ou. plus 
à  l'est,  il  porte  le  nom  de  Gambarou. 

Timbouctou^  dit   Botibeker,  est    aussi   grand    et 
aussi  peupltë  que  Segou'^  ^t  plus  commerèant  et  plu* 
riche.  l«es  Maures  forment  la  ufojeùre  partie  de  la     ♦ 
population  ;  les  Tmiricks^^  ou   Touariks  f  sont   au$si 
très-nombreux,  et  disputent  contimiellement  le  pou-4 
voir  aux  Maures.  Boubeker  donne  tort  aux  Touariks 
dans  ces   dhseitsions  ;   il    les    regarde    jfomme    dès 
homifies  injustes  et  oppresseurs  :  ceux  que  f  op  voit  » 
k  Timbouctou  ,   sont   originaires  d#  Tivart^^  côiftrëe  ' ,, 
aride  dont  la.  capitale,  nommée  El^Oualin^  est  la  de-     *^ 
meure  d'un  sultan*  Twar^  très-redouté. 

Il  eftt  évident  que»  Twart  est  le  pays  des  Touats  de 
notre  itinéraire  f  pays  célèbre  avant^r  le  xiv*  siècle; 
purs^li'il  ^n  fst  question  dans  Ibn^Batouta;^l  le  nom 
i^^fFalin,  ou  fH^Oualin^  se  reconnaît  dans  celui* 
de  Bir-Oualleh^  que  porte  la  station  qui  dans  notre 
itinéraire  se  trouve  immédiatement  apj*ès  Àgablj-^^X^ 
capitale  des' 7b/4«^5. 

L'inteatkHi  de  Boubeker  était  de  traverser  ce 
•  royaume  de  T^art  $itué  au  nord  de  Timbouctou^  .■ 
d'aller  atteindre  dans  le  F^zzau  la  caravane  des  pèle- 
rins àe  Barbarie  y  et  de  se  rendre  avec  elle  à  la  Mecque 
par  V Egypte  ;  mais ,  comme  il  ne  pouvait  subsister 
dans  sa  route  cpie  des  aumônes  qu'il  recevais    de? 

3i 


48»     ^  ^  APPENDICE. 

pieux  Musulmans ,  il  changea  1h  résolution,  des  qu'il 

eut  co|}nu  le  peu  de  charité  des  Touariks  et^  pau- 

'  n*été  de  letif  pays.  <«es  Belliqueux  nomades  profes- 
sent presqtie  tous  |ictuellenient  Tislamisme,  mais  sont 
en  général  peu  attachés  à  ses  dogmes;  et  l«urs  cœurs, 
ditBoubeker,  sont  encore  Kasin.  Il  se  d^ida  dqnc 
à  revenir  sur  les  bords  du  DjaHba  ,  et  arrîVk  à 
Djenné  dix  jours  après  anrfric  quitté  Timhouctou. 

Remarquons  ici  que  ce  nombre  de  dix  journées 
entre    Timèouetou  et  Djenné  s'ac^rde  juste,  ayec  ce 

»qui  a  été  ti^t  par  Mohammed  à  ]V(.  Cahill  (i)^  et  que 
Boubekex  dit  qu'il  quitta  Timbouctou  pour  revenir  sur 
les  bords  du  bjaliba  à  DjennL  Donc  Djef^  est  Sur 
le%*b<W(&  dû  Dj&Bba^n  JoUka^  et  Timbouctou  nj  est 
pas. 

Boubeker  continue ,  et  dît  que  Jlmboudou  et 
Djenné  sont  à*  peu -près  sous  le  même  méridien. 
Djenné  est  très-commercailte  ;  1^  Noirs  y  soift  {dus 
nombreux  que  les  Maures;  mais  ce  sont  les  derniers 
qui  ont  U>ute  l'autorité.  De  Djenné^  en  se  ctirigéant  à 
lest,  il  se  renàil k  Haoussa^  grande  ville  à  ^feui  joar- 
nées  de  Djaliba  ;  il  a'  fait  la  première  partie  de  la  nEnite 
dans  un  canot  sur  lé  fleuve,  et  le  reste  à  pied,à^ 
travers  les  royaumes  de  Kabi  et  AeJfouJfL 

Les  trente  jours  de  distance  entre  Haoussa  et  7W- 
iouctou  s  accordent  à-peu-près  ayec  notre,  itinéraire, 
qui  donne  environ  vingt- huit  jours  entre  ces  deux 


(i)  Conférez  Bowdi^*8  Essay  on  the  Geôgraphjr  of  north-wesêern 
in  Àfricti^  p.  ii. 


•   * 


"^  APPENDICE.   *  ^   .489 

villes;  mais  nous  neillëyons  pas  ^guiser  que  c«  que 
dit  ici  poubeker  .semblerait  devoir  porter  Haoussa 
plus  au  mkK  qui)  n  est  sur  n<;^re  carte.  Nous  avofis 
déjà  dit  que  cet  itinéraire  dit  Mokaipmed ,  âls  de  Foui, 
ne  poujirait  donner  que  des  combinaâons  incei;taines  ; 
a^ssi  Aes^-ce  pas  d'après  lui  que  nous  avons  déter« 
minék position  A^Timbouctou:Éabiet]^bî^  sont con-* 
nues  des  géograplps.  CoiitinuoRS  le  récit  de  Baubekei;; 

Le  pftys  qu€?  !  on  nomme  Haoussa ,  conipraid  aussk 
cinq  o^*  six  autres  élats.  Un  était  habité  autrefois  que 
par  lè«  Haoussîehs  ;  mais  maintenant  les  Touaricks^  et 
les  Fouiles^en  possèdent'  la  plus  grande  ^partie  :  on  y, 
voit  atia«i  ^aucdup  die  Maures.  L«6  Foul&s  occupent 
presqu  à  eux  seuls  la  partie  occidentale,  qu'on  appelle 
souvAit  par  cette  raison  Foullan, 

Ainsi,  tout  semble  confirmer  que  les  «  noms  de 
Haoussa^  de  FouUah  et^de  Malo^va^  sont  synonymes,  et 
désignent  une  vaste  '  région ,  et  non  un  seul  pays  ou 
royaume.  Le  nom  de  Foullan  est  peut-être  le  niéioe 
que  celui  du  royaume  de  Fillani\  placé  sur  la  der- 
nière carte  de  M.  Bowdich,  au  sud  des  états  de 
Haoussa  et  de  KaUaghL        - 

Quoi  i|u'il  en  soit,  selon  ©ôubeker,  les  Foidles 
qui  habitent  le  Foullan  ont  la 'même  couleur  et  les 
mémies  traits^  et  parlent  absolument  la  même  langue 
que  ceux  du  Fouta-^Toro;  ils  se  donnent  eux-mêmes 
le  nom  de  DhpmanL  Les  Haoussiens  sont  noirs  comme 
les  Johfs  et  les  Sérracoûlais^  ils  sont  ^eu  habiles  à 
cultiver  la  terre  et  à  soigner  les  troupeaux  :  les 
Foullep^  au  contraire  ,  sont,   suivant  Boûbeker,  les 

'If. 


■     4*^4      •  APPENDICE..  * 

laboureurs  et  les  pasteurs  le$yus  intelligents  qu'il 
j  ait  au  moi^e.  Le  pays  de  Foullan  est  xm  des 
n^eux  cultivés  quil  ait  vÂs;  il  le  place,  floua  ce  rap- 
port ^  immédiatement  aprèl  TÉgypte.  Les  animaux 
domfsùques  y  sont  en  plus  grand  noo^re  t^t^miéux 
soignés  que  partout  ailleurs.  Il  n*y  a  ni   cannes   à 

'    &ucre,  ni  une  grande  variété   de  fraits   cbmme  en 

'  Egypte. et  en  Syrie;  mais  on  y  tr<Mre  en  abondance 
deux  espèces  de  mais,  du  froment  et  de  Iprge.  "On  y 
cukiVe  avec  sdin  le  chanvre  et  lé  coton,  qui  «servent 

^  tous  4®wx  à  fabriquer  des  étoffes, *tet  Tindigo  aviec 
^uol  on  les  t^int.  La  ville  de-Haomsa  entretient  moins 

^  de  relations  commerciales  ai\ec  .TinSouetûÙ  et  Vjenné 
qu'avec  les  pays  situés  à  l'est. 

Notre  pèlerin ,  étant  parti  de  Haoussa ,  continua  sa 
route  vers» Test,  et  arriva, au  bout  dun  mois,  kKassi-- 

*  nah  où  Cackenah ;  c'est,  suivant  Boubeler,  la  plus 
considérable  de  toutes  les  vtHes  situées  le  long  du 
Djaliba  ou  Joliba.  Elle  est  la  capitale  de  la  partie 
orientale  de  Haoussa;  et  elle  a  donné  son  nom  à  tout 
ce'pays.  Ceci  s'accorde  avec  la  carte  de  M.  Purdy  et  avec 
le  noiu.de  Beb^Haoussa^  ou  porte  de  Haoussa^  donné 
au  pays  de  Cachenah,  Boubeker  vit,  à  Caohsnah,  des 
»Turcs  et  des  Tripolitains.  Les  Haoussiens ,  anciens  ha- 
bitants du^  pays ,  sont  plus,  nombreux  dans  le  pays  de 
Cackenah  que  dans  le  Foullan. 

De  Cachenak  BoubeLer  se  rendit  à  Bamou^  qui, 
selon  lui,  est  à 'l'orient  de  Cacheflakj  et  qui  est  tra* 
versé  dans  toute  sa  longueur  par  le  Djaliba.  Les 
naturels  de  Borr^oà  iont  noirs  comme  les  Haoussiens  :  ils 


•  • 


APPENDICE.  ^  485 

leur  jessemUent  besiiteoup  sous  le  rapport  des  mœurs  ;  * 
raàis4èur  langue  est  différente.  Leur.syïtan  ^sfrtres-  ♦ 
puissant,,  et   possède  une  cavalerie    nombreiJise   et 
^uerrie.         »  *   . 

De  la  "ville  de  Bomour^Bif^uheker  s'est  rendu  dans 
le  WmdaL  Ceci  %)nfirme  l'itinéraire  du  .chérit.  Bra- 
hima^  et  les  com}>inaisons  de  M.  Bjpiwdich,  qui,  sur 
sa  dernière  carte,  a  placé  plus  au  $ud  la  latitude  de^ 
Bomçu ,  et  qui  mef  ce,  royaume  et  celui  de  Wcèdey. 
nommé  aussi  Sal&r  et  Borgoù^  à  lest  de  Kasstna  oa^ 
Çachenak.  ^  *     ^ 

Parvenu  dans  Ce  roya«|ime,  Boubekér  a  cessé  •/la-' 
voir  le  Djfdiba  à  peu  d^  distance «de^ sa  droite.  Il» a 
interrogé  plusieurs  personnes  sur  le  Ueu^où^ce  grgifd  * 
fleuve  se*^  termine;  tdus  \và.  ont  assuré  qu'iteommoni^ 
quajk  ayec  le  NU,,  Suivant  les  uns ,  il  se  jette  dans  le 
iVï/;' suivant  les  autres,  c'est  au  contraire  une  branphe 
du  NUcpk  se  jette  dai\s  le  Ejaliba;  d  autres  enfin,  sans 
nier  l'existence  d'une  commui^ication  quelconque  en- 
tre ces  deux  fieuves^  Uii  ont  assuré  que  le  Djaliba* 
prolonge  ^an  cours  fort  loin  dans  le  sud ,  et  se  ter- 
mine dans  WUabeehech  (FAb^ssinie). 

Remarquons  que  le  système  qu'expose  ici  Boube- 
W^  sur  la  communication  du  Djaliba  ou  du  iV//,  est 
à-]peu-*près  celui  qui  prévaut^  dans  le  village  où  il  est 
né.  Lorsque  M.  Mojlien  y  passa  (i),  il  alla  voir  un 
marabout  qui  avajf  fait  le  |>élerinage  de  la  Mecque: 
ïiotre  jeune  voyageur,  avec  le  secours  d'un  interprète, 

{ i)  Mollien  ,  Voyage ,  tom.  I ,  p.  a  1 9. 


u  » 


486  ^APPEBTDICE. 

»  ■  » 

^  consulta  ce  prêtée  sur  le  cours  d«  N^er.  Celni-ci  Ini 

'  répondit  ^*ên-deçà  et  au-delà  de  Tombouetou  du  rén* 

cootr«it  des  états  entièrement  %abit^  pur  les  Pouls, 

»    que  le  Djaliba  ou  Joliha  se  fêtait  dans  4e  JV^^,  et  que 

ses  eaux ,  ^rès  *  &  être  mêlées  à  celles  du  fleuve  de 

rÉgypte ,  Se  rendaient  dans  la  ni^r.  On  a  dit  ^ue  le 

marabout  qu*a(vjût  visité  M.  Mollien  était  Bbubeker 

Jui-mème;  cependant  le  récit  du  liiavabout  diffère  de 

^elui  de  Boubeker,  en  ce  qu'il  ddnne  Heu  de  penser 

i.que  le  Djaliba^  quoique  se  joi)gnant  au  NU^  abouùt 

dans  un  lac  situé  dans  les  régions  pôntagneuses  de 

.la  partie  orientale  de  TAirique. 

*Boul>eker  dit^qnele  Wadaîes&X  an*osé  par  plusieurs 
rivières  qui  ie  jettent  dans  le  E^aUbai  Après  tvmr 
traversé  c^  royaume  du  sud-oueët  au  nord-est,  'Bou<- 
bekèr  se  trouva  dans  celui  de  Begarmé^  II  se  remit  à 
maycher  à  lest,  et  arriva'bientôtau  grand  lac  de  Kouk^ 
dont  les  eaux  sont  grossies  par^une  tivièie  tiès4arge 
qui  vient  du  sud.  Ce  \ès^Kouk  parait  être  le  IsfkFittré 
''d'Hornnman ,  près  duqifel  est  Dar^Kouka  ou  le  pays 
de  Kàuka;  e(  ceci  semblerait  confirmer  ropiriôn  de 
Rennell ,  qui  le  regarde  comme  le  Couga  d'£drisi , 
et  vient  à  lappui  de  ce  que  nous  av6ns  dit  |»récé- 
demment  au  sujet  du  Cochia  de  Cadamosto  (i):  mais 
si  le  lac  Caudi  de  M.  Bowdich'^est  le  Kaugha  d'É-* 
drisi,  il  devrait  être  placé  plus  au  nord  qtie^JI.  Bovr- 
dieh  ne  l'indique  sur  sa  carte.  ^ 
Boubeker   ne   confond  pas  le  royaume,  de  B€Lg^ 

(i)  Voyez  ci-dessas,  p.   338. 


APPENDICE.    ^»  487     ' 

* 

henni  arec    celui  de  Kouk  ;  il  indiaue    ce  -dernier 
coifinie  étant  ^\ns  vers  Forieilt ,  et  il  dif  :  Le  sultan     » 
de  Kouk  est  souvent  en  guerre  avec  celui  de  Bagarmé 
ea^àe^q^i.  *         ^.         *  .  - 

Ce  fut  environ  deux    mois    aprè§  *son    âépart  de 
-  Coffiefêàh  que  Boikiibeker  atteignit  les  montagnes  de 
Four  ow  du  Umr^Four  /  sans  avoir  vu  une  grande    - 
ville  depuis  Bomm.  "^ 

Du  pays  "fle  four  Boubeker  pas^a  à  lest  dailç  cdiui  * 
A^^Kordofan^  qui  nest   habité  que  par  des  Arabes.. 
Après  avoir  côtoyé  pendant  deux  oii  trots  iours  lâriv^ 
gauche  du  Nil ,  il  traversa  ce  fleuve  vis*à*vis  Tjondi^  ^ 
ville  ^assez  considérable ,  d'où  il   etttra  dans  le  pays 
des  Barbara,  Il  n'y  a ,  je  crois ,.  pa«  lieu  d«  douter  que    . 
Tjondi,  lie  soit  le  Sfiendi  que  l^Qwne  et  Biirckhardt  * 
■ont  visité.  f 

Dans  le  pa^s   de   Barbara    Boubeker    trouva    up 
pfeuple    cultivatedr  ,   assez    semblable   aux    Fouîtes     * 
pour  lest  traits  et  pom:  la-  couleur,  et  qui  est  assu- 
^^etti  -à  des  tribas  arabes. 

De  Tjond^  ou  Shendi  Boubeker  se  reuflUt  en  quinze 
jours   k  Sou(ikemy  sur  le   golfe  Àrajbique.    C'est  de 
cette  \41te  qu'il  fit  voile  pour  Djeddah ,  port  »  de   la  - 
Mecque^  environ  quatorze vinois*  après  son  départ. 

Boubeker  visita  ensuite  Médine,  Jérusalem,  Acre ,  le 
Kaire ,  et  Alexandrie,  Il  séjourna  dans  cette  dernière 
.  ville  ;  il  passa  ensuite  à  Alger ,  '►où  ,il  est  demeuré  . 
plusieurs  années.  Il  est  enfin  revenu  dans  le  Fouta^ 
ToropAT  Telemeçans  [Tremcen), Fez^  Meq^inez^ Maroc ^ 
^adinoux    (probablement    Wadinoun)^  le   Grande 


/|88  ♦  ^    APPENDICE. 

Désert, et  le  pays  des  Maurex Èraoianaï.Le^  Brackg^iSy 
comme  on  *  sait ,  habitent  le  pays  de  -Ouala  sùr'^lés 
bords  du  Sénégal,  immédiatement  au  nord<*est  du 
port  Saint-Louis  (i).  ^         -    /  ^     ' 

Tel  est  le  rP€i|  de  Boubeker;  il  ajouta  (jue  lé'mot 
TéiXz^ir  signifiait  dains  plusieurs  «langues  nègres.  le  - 
pays  4es  Noirs,  comme  Somdan  en^r&be.  il  a  en- 
tendu pau-ler  des  royaumes  de  Cano  ettde  Grubpurg 
(peut-éti-e  Guèer)^et  d'un  pays  riche  en  cm*,  nommé 
fVakofo  pr4^  de  Bornouf  c  est  peut-être  le  fFankara 
des  auteurs  arabes. 

,  ■  ■  1 1, "  , 

(i)  Bran*s  Afrieay  t.  V,  p.  3oo,  et  I^miral,  p#  88. 


f  '/'•    ■ 


I 


appejs-i>i<5e.  ^         489 

« 

.  IX. 
RELATIOJN 

'    DE  SCOtT. 

\J  N  a  fait  paraîtm  la  relatiân  d'un  nommé  Ale^nclre 
Scott)  qui  s'embarqua  en  octpbre  1810,  comme  ap- 
prenti, syr  le  vaisseau  le  Montezuma^ïecfael  fit  nau- 
frage le  23  novembre  de  la  même  année,  entre  \^  cap 
de  ffoun  et  le  cap  Bojador,  Alexandre  Scott,  fait 
prisonnier  par  les  Arabes  du  désert,  retta  six  ans 
captif  parmi  eux^  et  quoiqu'on  ne  dissimule  pas  que 
son  état  moral  a  été  ^fiecté  par  sa  longue  captivité,  on 
a  cru  devoir  publier  les  réponses  aux  questions  qui 
lui*6nt  été,  faites  sur  ses  voyagea  dans  l'intérieur  de 
l'Afrique.  Les  renseignements  qu'il  a  donnés  sont  tout 
aussi  incertains  et  incohérents  que^  ceux  du  matelot 
Adam;  toutefois,  comme  on  assure  qu'ils  ont  attii'é 
l'attention  du  major  Eennell ,  qui  doit ,  dit^on ,  publiet 
une  dissertation  géographique  à  ce  sujet,  nous  croyons 
devoir  en  extraire  tout  ce  qui  peut  servir  à  éclaircîr 
nos  recherches.  .  - 

Scott  fut  fait  prisonnier  pai;  des  hommes  apparte- 


490  APPENDLCE. 

.  nant  à  la  VnbttToborlee  :  «près  huit  ou  neul"  heures 
de  marche,  il  arriva  dans  la  yallëe  Zerr&hah;  il  (iit 
ensuite  ommenë  dans  Fintàôeur  dudésept,et  il  estime 
à  quinze  miUes  le  chemin^  <}u'il  pa^tstyiTait  chaque 
jdur.  Il  arriva,  après  qujme  jours  de  marche,  dans 
ilne  'Vallée  nommée  JVadf^Sèjrghi,  Après  avoir  marche 
ensuite  pétidant' dix-sept  jours,  il  parfintli  un  camp 
ce  treBte«-trois  lentes-,  qui  fatsuit  partie  <d  un  distx'ict 
nommé  El'Ghiblah^  boraié  à  Touest  parla  mer.  U  resta 
plusieurs  mois  à  El-Gh^uh^  et  il  n'était  éloigné  de 
la  mer  que  de  vingt  milles.  Vers  le  mois  de  juin,  oti 
dit  à  Scott  qujp  la  tribu  allait  entreprendre  un  grand 
voyage  à  Hez-el^Hêzsh ,  et  qu'il  i|^it  qu'il  y  allât  et 
qu'il  y  changeât  d^  religion ,  sc^s  peine  de  mort.  On 
se  mit  en  route  ^  et  l'on  traversa  un  district  sablon- 
Dcui^,  nommé  El^Busckarah^oti  3  n'y  avait  de  l'eau 
que  dans* un  puits  profond.  Oa  âra versa  ensuite. une 
ibrét ,  dani  laquelle  on  rencontra  uiie  caravane  qui 

^  avait  un  oléphant  privé:  fait  remarquable;  car  l'habi- 
tant d'Afrique  donne  la  chasse  à  l'éléphrat,  mais  ne 
sait  pas  l'apprivoiser.  Lès  gens ,  de  cette  caravane 
étaient  plus  noir»  que  ceux  d^El^Ghiblah;  ils  apparte- 
naient à  la  tTihu  Or^GAebit  ^  :fit  venaient  d'iS/*ScAar- 
h  rag.  Dans  ce  boj^  il  y  avait  des  cocptiers,  des  dat- 

.  tiers  et  .des  orangçrs  non  cultivés.  Cette  forêt  ren-' 
ierme  des  sauvages  noirs  très-dangereux,  nommés 
Baurbarras.  La  caravane  don^  Alexahére  Scott  faisait 
partie ,  arriva  à  ElScharnfig;  et  {êprès  avoir  contiïjué 

♦  sa  route  à -travers  des  déserts ,  elle  parvint,  à  un  vaste 
lac  nommé  Bahar-^TUbi  mots,  qui  signifient,  selon 


APl^ENDICE.  49* 

Scott,  Mep'  d*eau  douce.  Sd^tt  a  franchi  dj^s* monta- 
gnes et  vu  (Jçs  rivières  avant*d  arriver  a«t  lac  :  ^ais, 
près  du'fec,  il  ne  vit  ni  Avière  ni.  montagpe;  il  n'y 
avait  que  des .  rdisse^ux'  guéables.  La  earafVatiÇ)  dftns 
ce  trajet ,  faisait  quinze  inilïes  par  jour  au  moins  ,*  et  * 
jamais  moins  de  vingt.  C^  sont  toujours  des  milW 
^glais  dont  il  lest  questioj».  On  traversa  ce  lac  dans 
de  grands  bateaux  >  qui  pouvîs^ient  tenir  d«ux*  cents 
personii^es  ;  ces  bftteaux^  se  nomment  Zenirgê^  en  lafi- 
gne  arabe  :  mais  les  naturels  de  Eh^chafrag  -et  de 
EUHêzsh  les  àj^Uent  Flouk.  ^    ■ 

LeBakar  n'a  pas  de  courant  sensible:  on  y  trouve 
des  tortues  as^ez  «embkbles  à  ceUes  des  Indes.  Ses 
eaux  sont  douces  en  comparaison  de  celles  du  Désert, 
•ïnais^ne  ptourraient  passer  pour  telles^  dans  nos  con* 
trées.  On  ftit  vingj-neuf  hei^éS  à  le  traverser.  On  pré- 
sume que  cette  partie  qui  fiit  .traversée ,  et  qui  forme 
1  extrémité  occidentale ,  est  la  moins  large ,  et  elle  pré- 
sente cependant  une  étendue  de  soixante  milles.  Il  y 
a  beaucoup  de  bateaux  pêcheurs  sur  ce  Bahar.  Il  y  a, 
dans  la  partie'  nord  du  Bahar,  des  gens  de  -petite 
*3ille,  et  dune  race  différente  des  Arabes,  qu'on 
^omme  Zackah; ils  sont  idolâtres:  ils  naviguent  sans 
cesse  sur  le  lac ,  et  y  font  le  métier  de  corsaire. 

Les  gens  du  bateau  où  se  trouvait  Scott,  lui  ont 
dit,  en  montrant  du  doigt  le  midi,  que  dans  cette 
direction  îl  y  avait  une  grande  mer  d'eau  salée;  que 
la  mer  sur  laquelle,  ils  étaient,  y  communiquait;  que 
eette  grande  mer  n'avait  pas  de  fin  ;  quelle  était 
pleine  de  Sqff,nareUKahir^  ou    de  grands  vaisseaux, 


et  qu  ils*  l'appelaient  Bakm^l^Kabir.  Ils  prétendaient 
.qu'au  sud^il  y  avait  tin  port  appelé . I^om^or^,  où 
il  venait  un  grand  nombi'e  de  vaisseaux.  .Ces  gens 
dissiient  encore  que  bien  loin  au  midi ,  et  avant  leur 

*  naissance ,  if  s*était  donné  de  grandes  batailles ,  tant 
sur  le  Bahar-el-Kabir  qt^  sur  terre,  entre  lés  Fran- 
çais et  les  Anglais,  et  que,  depuis  les  batailles  données 
à  terre,  les  os  des  motls  étaient  encore  sur  la* place. 
Quand  Scott  fut  interrogé  sur  c^  point,  il^^soutint 
être  bien  sûr  qu'ils  aVaieht  prononcé  Francese  et  //i- 
glese.  Ces  nègres  étaient  sans  doute  des  esclaves  ame- 
nés de  très-loin.  Oa  a  conjeetàré  de' là,  ç*e  Bam- 
bary  pourrait  bien  être  Bamba  dans .  le  Congo,  ou 
Calbary^  autrement  Caldbar^  au  fond  du  golffe  de 
Guinée.  Ce  récit  sur  le  Bahar-^S^ina  ^  s*acoorde^telle» 
ment  avec  ce  que  rapporte  Mungo*Parfc  dans  son 
second  voyage ,  qu'il  est  à  craindre  qu'on  1  ait  tiré  de 
là(i).  Si  cela  n'est  pas,  il  en  est  une  confirmation 
bien  précieuse,  et  confirme  aussi  l'existence  de  la  Mer 

^intérieure  que  j*ai  admise  sur  ma  parte ,  et  même  en 
partie  la  position  que  je  lui  ai  assignée. 

Après  avoir  traversé  le  lac,  Scott  arriva  au  Keu 
de  sa  destination,  à  EUHezsh^  vallée  habitée  par  la 
tribu  El'Tahsi-'del'Hezsh.  Ce  sont  des  mahométans 
qui  demeurent  daqs  des  huttes  construites  avec  des 


(i)  Voyez  Jackson  daus  Shabeeny's  aecount  of  Tùnbouctou  and 
Housa ,  p.  45o  ;  —  Mongo-Park's  Journal  of  a  Mission  ,  i8q5  ,  m-4*, 
p.  x6S,  et  ci-dessQfl  p.   lo^. 


^  APPEKDICE.  •  493 

tronct  d'arbre  lié^  par  dès  baçibous^  et  récouyerte» 
de  joncs  cueillis  sur  les  bord$  du  Bahar  ;  ils  se  nour*. 
ris  jent  de  pain  d'orge  et  de  datttp.    * 

Tout  ce  récit  de  Scott  est,  comme  celui  d*Adam, 
beaucofip  trop  vague  pour^qu'on  puisse  former  des 
conjectures  probables  3urla  rpute  qu'il  a  parcourue  (i). 


(i)  Nouvelles  Annales  des  Voyages  ^  t.  VTII ,  p.  Sai-SSB,  traduites 
à'si^ti^'^VEilinbiirgk  philosophtcal  journal.  Il  n'y  a  encore  qu*ane 
partie  de  cette  relation  pabliçe.  . 


• 


494  AlPPBirlJlCE. 

r  "*  • 

f   ♦ 


RELATION 

DU   CAPITAINE  LYON 

S  ■•  .SUR  .       " 

L'AFRIQUE  SEPTENTRidNAIJE  (i). 


IVous  avons  rendu  compte  des  informations  sur 

•  l'Aftique,  obtenues  par  M.  Ritchié,  d  après  ce  qu'en 
a  dit  le  rédacteur  dun  des' meilleurs  journaux  pério- 

^diques  d'Angleterre  (2).  Depuis  que  cette  partie  de 

notre  ouvrage  a  été  imprimée,  et  au  moment  où  nous 

^      alUons  le  terminer,  le  capitaine  Lyon,*compagnon  de 

ce  jeune  infortuné  Ritchie,  a  publié  sa  relation.  En 

finissant ,  nous  devons  faire  connaître  ce  qu  elle  ren- 

♦  fejfme  relativement  à  l'objet  qui  nous  occupe. 

'. 1— ,,1 J5;-- ; 

(i)  A  Narreaivè  of  traveU  in  northem  Afi^ta  in  ikc  ytars  1818  . 
1819  and  i8ao,  etc. ,  in-4%  London ,  z8ao. 
(a)  Voye£  ci-dessus,  p.  1 55  k  i65. 


*    * 


• 


•  •     •  .  ^ 

M.  iyon  a  voyagé  ju^u  aux  extrémités  niéridio^ 
nales  du  Fezzan^  qiii  finit  de  ce  côté  à  Tegerry;  ce 
lieu,  qmi  est presqtie som  le  viilgmquàtrièine  Aegré  de 
latitude,  est  beàriicoup  pluir  au  sud  que  ne  le^plaçait 
le  majoF.Rennell,  et  ne  doit  pas  être  confondu,  comme  •  ^  -^ 
je  Tai  fait  précédemm^t  (i)^  avee  Tcugari^  qui  ,esj  '  é  * 
le  Tegheréiri  de  notre  itinéraire  de  Tripoli  à  Cçcàc" 
nah  par  le  cheyl  Hag-Cassem.  Au  nord  de  Mour^    ^  « 

zouky  la  latitude  que  nous  avons  assignée  à  Sochnah{^\ 
se  trouve^confinnée  par  une  observation  asti'ononlique*  ^ 

de  M.  Ritchie  (3),  et  par  la  route  qii'il  a  parcourue  '  ** 

avec  M.  Lyon  :/seuIement ,  la  chaîne  ^  des  Montages        ♦  # 

noire'Sy  ï^v- Montagnes  de  Soudah^  'e$;t  a«  sud  et  non  au  .  •     ' 

nord  dé  cette  ville.  Une  autre  ville  importante  du  Fez-  • 

zan  est  Gatràne^  entre  Hdourzouk  et  Tegerrjr  :  GoM-one  et  *  » 

Tegerry  sont  les*  deux  villes  -de  Catrone  et  de  Tegerty^y  " 
des  cartes  de  Delisle  et  de  d'Anville;*'et  lé  prerûiel'  .  *^ 

géographe  a  aussi  au  sud  le  royaume  de  Gïbadou^  qui 
est  nommé  Tibedou  sur  -  la  carte  de  d*Anville  ;  c'est 
le  pays  des  Tibbous  deRennell  et  de  nos  darte&  mo-  .  ♦ 

dernes.  Enfin ,  au  sud  de   Gibelou ,  Delisle  ,  mieux 
instruit  que  d'Anville',  {^lace  les  Touargues^  qui  ?ont   *^ 
les  Touaricks  des  cartes  modernes.  A  l'est  de  Mour^ 
^uk  est  Zuela.  A  Touest  de  la  .ville  de  Sebha  est  une 


-(*)  ^070  ci-déssQs  ,  p.  3x1.         . 
[%)  Gi-deMoa,  p.  3a3. 

(3)  II  la  ûxe  k    29  deg.  5  mm.  36   otc.   Voye«  Captain  J^on\ 
Narrative ,  1^.  3#/- 


^- 


» 


** 
^ 


496  ,  APPENBIGl^    • 

réunion  àe  Wade/s  ou  de  ^léesfertues,  formées  par 
ks  Uts  deiséchés  d^s  torrents  (i).  Ces  vallées  .font  pa- 
»  rallèles  )fts  unes  au^i^  ^utres  ;  à  re«.trémitë  d^  l'une 
d*eUes  ou  du  fVad^^GhroMbjr^  est  Glurma ,  VancienDc 
capitale  <ffi  Fezzan.  Renuell  place  Gherma  du  JFeZ' 
zan  au  sud-est  de^  Mourzouk^  tandis  *qu%lle  est  au 
noadouest  de  cette  ville,  et  sur  la  route  suivie  par  les 
caravanes  qui'^.se  rendit  k  TouateVk  Timbouctou. 
Ce  pays'  gémissant  sous  le  d^dtisme  cruel  def  Mukni, 
paratl^  trèai^déchu.  La  c^îtale,  Mourzouky  i|e^  ren- 
ferme au' plus  que  deux  *niille  cinq  cents  habitants ,  qui 
soïkl  noirs.  O9  considère  le  Fezsmn  comme  une  oasis 
«t  par  conséquent  comtne^  très«*fertile  :  c  est  au  con- 
tV^ire  une  contrée  sablonneuse ,  stérile  f  qui  n^  dift'ère 
un  peiir  du  reste  du  désert  que  llgns  le  voisinage  des 
villes ,  où  l'on  cultive  ^vec  peine  .cpielques  dattes 
et  qitelquBs  palmiers.  II.  opt  brûlant  ert  f'te  ,  et 
froid  en  hiver.  Pendant  le  séjour  de  M.  Lyon  , 
le  a  janvier,  le  thermomètre  ^  y  descendit  à  deux  de- 
grés trente  minutes  au-dessous  de  zér»  (échelle  de 
Réauraur).  Aussi,  selon  M.  Lyon,  les  pigeons  émi- 
grent  du  Fezzaa  en  octobre*  et  en  novembre ,  ^  se 
rendent  ^ans  Kawar^  le  Biima  et  le  Borgou,  Le  Fezzaii 
est  habité  par  des  nations''  diftérentes,  qui  se  mêlent 
peu  entre  elles.  Indépendamment  des  arabes  et  des 


(i  J  Capt.  Lyouft*  Narrative,  p.  3oo.  Ces  Wadey  sont  aa  nombre  4e 
trois,  savoir,  El-Schirghi ,  Ei-Jgraal  et  El'Ghrarbi  :  ils  renferiheat 
chacun  plasienrs  ailles  oa  villages. 


^   ♦  •  / 

APPENDICE.  497 

Fezzaniens  proprement  dits ,  on  trouve  à  Gatrone  des 
Tibboas^  et  à  Sokruitràe^  Touanks  qui  parlent  un 
langage  que  leurs  Voisins,  de  Houn  et  de  IVadan^  ne 
comprennent  pas.  Les  Touariks  nomment  eux-mêmes 
leur  langage  Ertaiia;  et  il  pai:aît  que  c'<pst  le  même 
dialecte  quelle  ^erber,  si  répandu  au.  niprd  du  Mont- 
Atlas.  Mourzi^ukestj  selon  "M.Lyon,  à  vingt-cinq  de- 
grés cinquante -quatre  minutes  de  latitude  nord,  et 
à  treize  degrés  trénj;e  -  (leux  minutes  de  longitude  à 
Torient  de  jParis  (r).  ^  ^ 

.  Une  des  parties  les  plus  curieuises  de  1»  relation  de 
M.  lijon ,  est  celle  où  il  nous  fait  <;onDatti:e  une  ville  et 
une  contrée  nommée  (îAraaf  jusqu'ici  ^inconnue  aux 
géographes,  du  moins  sous  ce  nom.  Ghraaf  est  une  ' 
ville  .murée,  qui  a. des  maisons  en  pierpé^  et  en  pisé; 
^le  est  à  cinq  journées  de  route  de  Gdnat^  à  sept 
journées  au  sud-oùest  de  Sebhâ  dans  le  Fezzan ,  à 
dix  journées  de  Mourzouk^  à  vingt  journées  au  sud* 
est  de  Ghadaniesy  et  aussi  à  vingt  journées  de  Toi^at. 
A  six  milles  de  Ghraat  est  une  autre  ville  murée, 
nommée  EUBerkaaty  célèbre  par  l'abondance  et  la 
beanité  des  raisins  que  ses  environs  produisent.  Le» 
habitants  de  Ghraat^  se  nomment  Ghrâtia ;  ils  sont 
Touariks  :  ils  font  un  commerce,  régulier  avec  .  k 
Soudan ,  et  sont  très-riches.  Il  y  a  chez  eux ,  au  prin- 
temps ,  une  foire  générale  ;  ceux  de  Ghadames  y  ap- 
portent des  épées,  des  fusils,  des  pierres  à  fusil,  du 


(i)  Lyoa*8  Narrative,  p«  375. 

■  Sa 


498  APlPElfDICE. 

{)loiâb  à  tirer,  de  la  poudre  et  quelques  vétenfients  ; 
ceux  4u  Soudan ,  des  esclaves ,  de  Vor,  des  étoffes  de 
coton,  des  peaux,  des  fourreaux  depée ,  des  poi- 
gnards, des  outres  en  cuir,  d^s  noix  de  Gourou  t  les 
»  marchands  du  Fezzan  y  transportent  diverses  mar- 
chandises d'Egypte  et  de  Tripoli.  • 

De  Tegerrjr  à  Textréniité  sud  du  Fezzan  jusqu'à 
Sibfut^  grande  ville  et  capitale  du  pays  de  ce  nom) 
on  compte  dix-huit  journées  de  huit  à  neuf  heures  de 
marche;  on  ^asse  par  El^Haat,  Mischràu,  TenÂa^ 
Ëi'fffatay'El-ff^arry  El-Hammer,  Mqffrus,  ZAai, 

•  El-Mara,  tiatcsk^el^Domiy  Ouguira  qui  est  une 
grande  ville  de  JCaH'ar,  habitée  aussi  par  les  Tibbous; 

*  Kesbi  autre  ville  considérable^  Dirki^  qu'on  dit  être 
encore*  une  grande  ville ,  laquelle  n\BSt  qu'à  deux  jour- 
nées àeSitma,  Tout  ce  pays  de  Bilma  eit  en  blanc  srA 
nos  cartes,  et  figure  comme  un  désert  :  il  est  au  con- 
trahre  très-peuplé.  M.  Lyon  n'a  vu  personne  qui  con- 
ntit  les  lacs  salés  de  Dombou  qu'indiquent  nos  cartes; 
m'aià  on  lui  a  beaucoup  parlé  du  sel  que  Von  tire 
d^un  grand  lâc  nommé  A^ram'y  à  quatre  journées  à 
fouest-sud-oùest  de  Bilma*  Il  est  probable  que  ce  lac 
est  le  même  que  celui  de  Dombou^  sous  un  autre  nom. 
Tibesfy-,  au  sud  dju  Fezzan,  est  sur  là  route  de  ^adejr^ 
route  qui  se  dirige  à  Test  de  celle  de  Sornou  (i). 

Selon  les  informations  prises  pat*  M.  Lyon ,  le  Sor^ 
nou  est  à  quarante  journées  de  marche,  ou  à  sept 


(1)  Lyon*»  Narrative^  p.  343  «  a 45. 


etnts  mifies,  du  Fezzan,  l\  e%i  borné  à  Test  par 
le  Ba^hetnd^  au  fioid  pAr  Kanerny  à  loujest  par 
Kcmo  ou  Céuio.  On  ne  s^^acoorde  pas  bien  suir  ce 
qui  ooncertie  la  capital^  de  ce  pays,  nommée  Bîrftie^ 
Djididy  ou  \à  NouveUe-Bimiey  pour  la  di^nguer  dé 
Birnie^Djidîm^  ou  la  FieUie''Birme.  Ces  deux  villes 
5<H)t  à  cinq  journées  de  distance  de  Xe^  à  Touest;  la 
ftTière  de  Tzad  ou  TVc^i^a^^  coule  près  de  Tune  et  de 
FautKe.  (Bette  rivière  ^  du  gud»ouest  au  nord-e^t  (i);. 
eHe  est  fort  large,  «t  traverse  ie  Uarfowr  :  après  avf^r 
passé  Bima ,  tile  se  «lomme  Gamtarro  et  Nil.  O  autres 
Avabes  ont  assuré  que  le  T&cKad  éta^;  uq  kftmense  lac 
pendant  la  saî^aa  des  plmes,  et  que,  pen^nt  la  sai-- 
•son  sèdie,  il  ne  reste  ^quune  petite  rivière,  qui  s^^-' 
jrigede  f ouest  et'^ouie  à  T^t.  Le  Tschad,  api^ès  avoir 
traversé  le .AiA-/<P2^r^  se  rend,  dit*on ,  en  Ëgj^e.  ^ 

iStot^est  un  grand  kc,  plein;  de  poîssoiis^que 
l'on  sèche,  et.  que  Xou  envoie  k  une  .grande  dis* 
tance.  On  p  a  pas  qaD|iaisi$aiice  qu'attcu]i|er  rivière 
cofmnunique .  avec  ce  ke.  l^&.T^mi^BengoUy  dan# 
les  montagne^de  Të&^^^pfès.du  FezzaUy  on  se  read 
à  W^sera  ou  Ouam^  oxfktûe  «de  ff^adeyy^  lieu;.d» 
la^ré&ide^oe  d  un  suittQEi.  Ce  traj^  est  ^de  qiûnze  jour» 
Bées.  Gb»  marche d')abord«u.&ud-sud^iest  j^usqu  au  pusis 


(i)  Lyoii*«  JKbmirzVe,  p.  ^  iTVi  si^.  C«lte  ^ficectioB  donuce  iel  an 
Tzad  e»t  contraire  â   ce  que   disent  d^autres  relations ,  qui  le  font 
«oâler  da  nord-ouest  jin  snd-est  :  et  «i  le  Tzââ  est  4e  Oambaro»,  il  ne 
doit  pas  couler  à  Test  ;  mats  nous  rapportons  fidèlement  ce  que  dît  ■ 
Vanlenr.  Voyex  ci-après  p.  So»). 

•ia. 


SOO  APP£NDI££. 

de  Kkarma,  en  passant  par  Kermedjr,  Bôkalda  et 
Bouchaehiniy  où  il  y  a  un  grand  lac  pendant  la  saisoK 
des  pluies.  De  Khatma  on  se  dirige  droit  au  &udrest 
par  SobboUy  qui  est  une  Ville  àe.Tibbou;  et  ensuite 
par  Emharadju  ef  Kermedjr^  qui  sont  des  villes  de 
Wadey^lVara  n'est  qu'à  deux  journées  de  Kermedy^ 

Wura  est  à  cinq  ou  six  journées  de  marche^  au 
sud  du  Uc  Fittri;  à  cinq  jours  de  Moudago^  au  sud- 
ouest;  à  sep^  de  jBahr-'el'Ghazel^  au  nord -ouest;  à 
six,  sept  ou  huit  jours  de  Kcuigha^  au  sud-oue«t. 
Moudago  est.  le  ndm  d'une,  très -haute  montagiiey 
composée  de  pierres  noires.  RattaU  est  à  Xxxt  consi- 
«déré 'comme  une  rivière  ;  e  est  ^  comns^  le  Bahr^el^ 
Ghazely  un  immense  <orrent  desséché ,  qui  en  est  à 
cinq  journées  de  (HsCance ,  et  qui  s  y  trouvait  i:éuni« 
Battaii  n'en  conserve  pas  moins  le  nom  de  Bahr, 
Tous  les  esclaves  qu'on  apporte  de  Wad^  lîennent 
de  Kouka  qu  Kaougha,  de  Kolaj  Tama^  njounga,  et 
d'autres  petits  <^tats  du  voisinage  (i). 

Pe  Bimie  à  Bagkçi^ni  on  compte  dix  jouBi»  de 
«arche  ;  Loggan ,  ville  de  Bornou ,  estji  moitié  «he-^ 
iDÎn  y  et  «on  traverse  le  Tsokad  sur  cette  route.  Au 
nord  de  Bornou  sont  les  divearses  tribus  de  Tibbous , 
i^ommées  Wandela  ^  Gùnda  et  Traka  :  elles  sont 
idolâtres  et  nomades. 

A  l'est  de  Bornou ,  et  près  de  Baghennî^  est  une 
contrée  nommée  Mandra  ^  tributaire  de  BçrnoB. .  I^e 


(i)  hyotk"*  l^arrativc  f  p.  a 3-1. 


APPENDICE.  Soi 

peuple  de  Wadey  apportait  du  poisson  desséché  à 
^ar^,  leur  capitale;  et  Ton  pèche  ce  poisson  dans 
une  grande  rivière  à  l'est  de  Baghermi  (i). 

Voici,  d'après  les  renseignement*  pris  par  M.  Lyon*, 
les  distances  de  diverses  contrées  relativement  à  Birnie- 
Djidid  :  de  cette  capitale  du  Bornôu  à  Baghermi^  à 
Test-sud-est ,  on  compte  dix  journées  ;  à  iifa<72/^  capitale 
de  Kanem^SLU  nord -nord -est,  quinze  journées;  à 
Kano ,  à  l'ouest ,  dix  journées  ^  ^  Kouka ,  au  sud-^t ,  * 
quinze  journées  ;  à  Kattagoum^  à  Touest-sud-ouest , 
quatre  journées  ;  à  Ringherriy  à  l'ouest -sud  -  oueSt , 
neuf  journées  ;  à  ifcAai'Arow ,  à  l'ouest,  deux  jouiftiées; 
à  Kaouary  au  nord -est,  dix  journées  f  k'  BUmay  au 
nord-est,  quinze  journées;  à  Makdri ^  à  l'ej^t-sud-est , 
huit  journées;  à  Ongoumouy  au  sud -est,  qtfôttôrze 
journées  5  à  Zegzeg^  au  «ud-ouest,  quinze  journées; 
kZàkarij  à  l'oueit,  huit  journées;  à  Wadeyy\  l'est, 
seize  journées  ;  à  Bahr^el^Ghazel ,  dans  sa  partie  mé- 
ridionale à  l'est-nord-est,  dix  journées  ;  à  Gachenah, 
à  l'ouest,  seize  journées  ;'à  Mourzouhy  au  nord,  qua- 
rai^  journées  (12), 

A  Kattagoamy  selon  ce  qui  a  été  dit  à  M.  Lyon, 
est  ui^e  rivière,  appelée  le  Nil  par  les  natifs ,  qui  coule 
au  nord*est,  et  traverse  la  route  de  Bûrnou  à  Cache- 
nah  :  elle  est  considérable,  et  a,  comme  le  Nil^  des 
inondations    périodiques.    Mais    comme    Kattagount 


(t)  Lyou's  N^itrative^^.  i5i. 

(a)  Lyon*»  AarrflftVe ,  ]p.  laô  «t  127," 


5oa  APPEITDICt. 

ii*e3t  qu'à  quatre  jouniées  de  la  capitale  du  Bornau , 
il  nous  semble  que  cette  ririère  doit  être  la  même 
que  celle  dont  il  a  été  questiôtt  préeédemment  scnis 
le  nom  de  Tschad% 

Ongornou^  qui  est  peut-être -le  Wangasra  des  au- 
teurs arabes ,  n*est  qu  a  une  journée  de  marche  de 
fCouka.  Ce  pays ,  habité  par  des  Mabométans ,  est 
tributaire  de  Bomou  ;  la  riTÎère  qui  le  trarerse,  cotde 
'  vers  Test.  Ce  pays  paraît  bien  être  évidemment  le 
même  que  YOungourou  ou  Ougourra  de  la  carte  et 
des  itinéraires  de  M.  Bowdich  (i);  mais  i!  est  placé 
par  te  voyageur  à  louest,  et  non  au  sud-est  de  Bor^, 
nou  y  comme  l'indique  M.  Lyon. 

Le  Bahr^el'^Ghazel  est  un  immense  wadey^  ou 
vallée  formée  par  des  rivières  ou  torrents  desséchés , 
rempli  de  forêts,  d éléphants,  de  rhinocéros^  de  lions 
et  autï'es  bêtes  sauvages.  On  y  trouve  aussi  la  girafife 
dominée  djimel  aîlah ,  ou  chameau  de  Dieu,  par  l«s 
Arabes.  Ce  pays  est  habité  par  des  tribus  de  Nègres 
idtdâtres,  ou  du  moins  Cafres,  c'est-à^ire  qu'ib  ne 
croient  pas  à  Mahomet.  Ils  parlent  un  arabe  çar<- 
rompu;  tnais  ils  ont  aussi  un  ou  deux  dialectes  qui 
4ëur  sont  partÎGuliers. 

Le  sultan  de  Bornoù  paraît  être  actueUement  sous 
la.  dépendance  d'un  de  ses  vassaux,  le  cheyk  de 
Kanenty  qui  réside  à  Maou,  A  un  jour  de  marche  de 

(z,)  Bowdich' s  Jlfûiion  to  Ashemtee^  p.  4^3.  ^—Ihid.y  An  Esstry 
•n  Geographf  of  north-western  jéfiiea\  p.  17  »  «i  Map  of  nortk- 
western  A frica  ^  iSao.  ^ 


«APPEICDICE.  5o3 

cette  dernière  ville  est  une  grande  rivière ,  qui  coule 
du  sud-ouest  au  uord^est.  Le  peuple  de  Kançm  la 
nomme  Yaou;  mais  les  marchands  lui  donnent  le 
nom  de  Nil  (i).  Il  est  probable  que  cette  rivière  est 
encore  le  Tschadj  ou  la  .rivière  de  Bornoa.  Mukni, 
le  sultan  de  Fezum^^t  une  excursion  dau^  le  Kanem, 
et  emmena  dix-huit  cents  esclaves. 

M.  Lyon  a  donné  un  itinéraire  détaillé  de  Mour^ 
zouk  à  C(ichenah.  Il  y  a  cinquante-six  jours  de  mar- 
che, à  vingt  milles  par  jour:  ce  sont  probablement 
des  milles  anglais.  Aghad^z  est  plus  grand  (|ue  Mowr 
zaaA:;  les, maisons  y  sont  de  même  cp^struites'^en 
terre.  Oîi  compte  trente  -  six  jours  de .  majche  de 
Mourzouk  à  Aghadei^y  en  été,  et  quarante -cinq  en 
hiver.  De  Ghraat  à  Jghofh^  il  y  a  trente  journées 
de  marche  en  été,  et  trente-cinq  ou  quarante, en 
hiver,  Aghadez-  egt  habité  par  des  Touc^riks  de  la 
tribu  de  Keilem.  Ils  sont  mahométans,  et  forment 
un  état  indépendant. 

Cachenah  est  à  vingt  JQurs  de  mi^rche  4i^.  Noijfi. 
Les  villes  ou  pays  qu'on  rencontre  sur  cette  route,' 
sont  :  Yandekka yDo^gfroumaki ^  Zqurmiy  trè^-gr^nide 
ville  ;  Fcumchi  ou  Ztmfara^  DouJfa^MafQrd^  Thor 
lata^ N^ma^  Ba^oura ^  Gandi^  Bçmm^Dangçda ; 
Sakkatou,  grande  ville,  habitée  par  des  Fellata;  Mif- 
feradaa^ {7).0xL  traverse  ensuite  encore  d'autres  villes, 


(r)  Caj^.  Lyon's  iV(«r/wii»« ,  p.  129. 

(a)  Cette  ronte   a   été  foomio  par  Vaml  d^Hornemann  (p.  x33); 


\ 


5o4  APPENDICE.» 

avant  d'arriver  à  Noufiy  qui  est  sur  les  bords  du 
Nil  y  c'est-à-dire  du  Quolla  ou  Niger.  La  capitale  de 
Noufi  se  «omme  Bakkani.  C'est  dans  cette  ville,  et 
dans  la  maison  d'un  nommé  Ali-el-Felatni ,  qu'Hor- 
nemann  a  succombé  à  la  maladie.  Son  projet  était  de 
se  rendre  par  le  Dagivumba  au  pays  des  Asckantisy 
qui  n'est  qu'à  quarante  journées  de  marche  de  Noufi. 
On  dit  fc[u'il  existe  un  commerce  régulier  entre  ceux 
de  Noufi  et  les  blancs  qui  habitent  les  côtes  de  la 
grande  mer  ;  et  un  de  ceux  qui  ont  donné  des  ren- 
seignements à  M.  Lyon ,,  Tassnra  même  qu  a  Noufi  il 
y  avait  un  ou  deux  habitants  qui  entendaient  le  lan- 
gage des  blancs.'  Il  ne  vit  aucune  rivière  entré  Kano 
et  Zeg'^'Zeg;  et  ce  pays  est  à  sec,  même  en  hiver  ; 
mais  en  été  le  sol  est  couvert  d'eau  dans  plusieurs  en- 
droits, ce  qui  donne  à  toute  la  contrée  l'apparence  d'un 
grand  lac:  cette  eau,  suivant  l'informateur  de  M.  Lyon  \ 
était  formante,  et  provenait,  à  ce  qu'il  croyait,  du 
Nil  de  Cnchenah.  Il  resta  à  Zeg^Zeg  jusqu^à  ce  que 
rinondatioH  eut  cessé,  et  conclut  pendant  ce  temps 
des  marchés  avantageux 5  car,  pour  sept  aunes  de 
drap  rouge,  il  eut  sept  femmes.  Il  en  aiôntra  trois 
à  M.  Lyon;  ddes  étaient  grandes,  jeunes  et  bdles,  et 
avaient  été  prises  à  YagoOba.  " 


nais ,  ^elqaes  pages  après  (p.  140),  M.  Lyon  en  donae  iiii«  anire, 
également  à  roae^t ,  qni  se  termine  à  5'aiAatou,  passe. par  Cttch^nmh  . 
Zowmna ,  Jfalawa ,  GaJçjra  ,  Karari  e|  Tekamourafa. 
(i)  Lyon's  Nqrraûf€t  p.  i5j       ' 


APPENDICE.  5ô5  • 

Entre  iVloj^  et  le  pays  des  Ascheintis,^  les  mar- 
chands traversent  un  pays  nommé  Gonja:  -près  de 
Dagomba  ,  on  *  trouve  des.  montagiles ,  mais  elles  rie 
portent  pas  le  nom  de  Kong, 

Un  nommé  Moustapha,  fils  d*un  mamelouk  qui 
s  était  enfui  au  Soudan ,  a  dit  à  M.  Lyon  qu'il  y  avait 
trois  rivières  qui  coulaient  près  àe  Cachenah.  Il  croit 
que  toutes  se  dirigent  de  Test  à  l'ouest ,  sans  «cepen- 
dant en  être  bien  certain.  La  plus  petite  est  celle  de 
Ringheni^  qui  est  à  sept  journées  de  distance  de  Ca^ 
chenah^  du  côté  de  Test.  Quelques  pages  après,  cepen- 
dant, M.  Lyon  nous  dit  au  contraire  que  la  ville  et^la 
^  rivière  de  Ringhem  sont  à  trois  journées  au  nord ,  et 
qu'on  passe,  pour  s'y  rendre,  à  Gajzaa  et  kZ^f^ari  (i). 
A  une  journée 'à  Test  de  cette  rivière  e$|  une  ville 
appelée  Sankarà.  La  seconde  rivière  du  C0ehenç,h , 
nôvamè^Doudrou^  est  à  six  journjées  de  martîheau  sud 
de  Cachenah,  La  grande  ri'vière,  qui  $e  nomme*  A*^- 
tago^m^  en  est  à  dix  journées  au  sudrest.  Cette  rivière 
est  en  tout  tempsr  fort  lAx^e,  et,  comme  le  Nil  d'Egypte, 
elle  est  Mjette  à  des  inonderions  ^périodiques.  En 
effet ,  bientôt  appès ,'  M.  Lyon^  noHS  appreiul  que 
la  rivièFe  Kattagoum  e^t  nommée  Goidbi  ou  iV/7, 
c'est-à-dire  qtie  c'est  le  Jolibm^  où  le  Nigir,  oii.le 
Çuoiié^  :  dans  cet  eildroit  il  sfpu^^  qu'elle  coulé  à 
treize  journées  au  sud^  de  Cachenah ,  et  elle  tourne 


.    5o6  APPENDICE. 

eosaite  au  nord<-est  (i).  Ailleurs  M.  Lyon  répète  ce 
qui  a  déjà  été  dit,  que  Goulbi  ou  JoUba ,  en  langage 
du  Soudan  j  est  un  terme  générique  pour  signifier 
un  grand  yolume  d'eau  (2);  et  il  dit  plus  loin  (3): 
«  Les  mots  Nil ,  Gonibi^  Kattagoum ,  désignent  le 
même  fleuve.  Ce  fleuve  coule  de  TimboUctou^  à  tra- 
vers le  pays  de  Mellij  dans  la  contrée  habitée  par 
les  Fellata;  de  là  il  coule  à  Kebti,  qui  est  à  trois 
jours  au  nord  de  Noufi:  au-delà  de  ce  pays  ou  de 
oette  ville ,  il  coule  à  Yaour^  qui  est  à  sept  journées 
à  Test;  de  là  à  Fendéhy  autre  pays  habité  par  des 
F^laUtjÇpÀ  est  au  sud-ouest  àkiMachenah.  Il  traverse 
ce  dernier  royaume  à  treize  journées  au  sud  de  sa 
capitale  ;  il  reparait  ensuite  à  Kattagoum ,  à  quatre 
journées  à  Touest-sud-ouest  de  la  capitale  de  Barnou^ 
où  il  CQiile  dans  un  lac  nommé  Tschad*  Au-delà  de 
ce  lac  une  grande  rivière  traverse  le  Baghermij  on 
rappelle  Gamèarro,  et  Kftmadakou,on  NU{^),On  ne 
sait  rien  du  Nil  au  «-delà  ;  mais  on  s  accorde  à  dire 
que  ce  fleuve  joint  le  Nil  d'£gypte  au  sud  de  Oon-- 
gola,  »  Quant  à  JVangara  ou  Oiiangarai\\  est  impos- 
sible y  selon  M. .  Lyon ,  d*obt#nir  des  renseigaernents 
certains  sur  ce  pays,  el  de  s  assurer  même  s*il  existe; 
'on  croit  néanmoins  généralement  que  ce  nom  désigne 
un  pays  dont  le  soliest  bas  et  souvent  inondé*  Quel- 
ques-uns placent  ce  pays  à  vingt  journées  au  sud  de 

(i)  Ijyoïtk'êNartxUÎve^.^.  14».  —  (a),l6id,j^  i45.  —  (3)Mid.y 
p*.  x4S;  < —  (4)  Précédemment' (voyes  çî-deM»,  pagt  499)  TaQlenr 
dît  qae  le  Gamharro  est  U  même  rivière  que  le  Tzad,         , 


APPENDICE.  5o7 

IHmbouctou;  d'autres  le  mettent  au  sud  de  Cachenahy 
et  quelques-uns  même  au-delà  de  fFadey  (i).  Le 
lecteur  aura  remarque  les  noms  de  Gambarro  et  de 
Kamadakou  ou  Koumoudou,  déjà  connus  pour  dési- 
gner un  fleuve  p^  Delisle  et  par  M.  Bowdich  ;  mais , 
selon  ces  renseignements,  le  Gambarou  coulerait  à 
l'est,  cpmme  l'indiquait  M.  Bowdich  dans  son  voyage., 
Alors  ce  Gambarro  serait  différent  du  Gambarou  qui 
coule  près  de  Timbouctou  et  a  son  cours  v^rs  Touest. 
Tout  porte  à  croire  qae  Gambaro}^^  comme  Kama* 
flakou^  nest  pas  mn  nom,  mai»  un  mot  qui  signifie 
fleuve  ou  rivière. 

La  ville  de  Binghem  est  à  une  journée  de  Gonja  ; 
et  Gonja  n'est  qu  a  trois  journées  de  Kattagoum.  Ce 
Gonga  paraît  élre  File  de  Gongou  d'Inhammed  et 
Ben-Ali  (a),  qui  est,  selon  leur  information,  une  île 
sur  le  NU^el^KibiTy  ou  le  grand  NU  des  Nègres ,  à 
cent  milles  au  sud  de  Cack^ifxah  :  ce  serait  aussi^  le 
Gonjeh  de  la  carte  de  M.  Bowdich ,  et  le  lieu  où  l'on . 
traverse  le  QuoUa  pour  se  rendre,  du  Malioç^a  dans 
le  Sarem^  ou  du  Soudan  sur  la,(7o/e-^W  (3).  Il  résul- 
■ r;  I  ,  ,»        .  ,  M  t        ■     ■ 

(i)  &dji-Hamed  a  donné  d'aatres  reAieigaernents  i*^.  Rhchie  ; 
et  ceaz*U  8*a€cor4ent  avec  les  aatenn  afabe$. 

(2)  Praceedings  of  tha  association  t  tXc.  ^  tom.I,  p.  xa4. 

(3)  Bowdich'a  Map  of  north'western  Africa  and  mission  to  Ashaniee, 
p.  a  10.  Peut-être  le  Goundjeh  da  Tripoli  tain  qui  a  donné  k  M.  Yen* 
tare  l'itiaéraire  dn  FelimiH ,  est-il  le  Oàngak  de  fil  Ly^n ,  le  QoMgou 
de  BettrAU,  1«  Gonjth  de  H.Sowdîcb^  anlioa  d^èttie,  «ovnm  |e  l'ai 
supposé'  p.* 3^5  y  le  Congé  de  J)«Ilrie,  le  Carnée  de  d*Anvilfe,  «t 
le  Kot^  des  aniears  postérieurs.  r 


5o8  ÀPPÉTTDICB. 

ferait  de  ceci  que  Rùigkem  ne  serait  qu'une  branche 
du  Kattagoum  ou  du  NU  des  Nègres ,  ou  une  petite 
rivière  qui  se  verse  dans  ce  fleuve  près  de  l'île  Gonjeh, 
On  trouve  encore  une  autre  rivière,  nommée  Ring- 
hem  j  AU.  nord  de  Cachenah^  en  passant  par  Gaj-zaa 
et  Zakari.  Ce  nom  de  Rùighem  signifie  peut-être 
rmere  dans  quelques-unes  des  langues  de  ce  pays. 

En  allant  de  Caehenak  au  Bornou^  on  se  dirige 
vers  r^st;  et  l'on  passe  par  Sctbongari^  Roma,  Boscki, 
'et  Kano.  A  Test  «fe  la  ville  de  Kattagojujn  sont ,  à  peu 
de  distance,  les  villes  Gizzra  et  à'Ibrakùn''Zui&o;  et 
non  loin  de  cette  dernière  ville,  au  nord,  sont  Dowra 
et  Kalawa;  puis,  à  Test  de  Kalawa^  Btyrankalawa  et 
' Demitro.  A  trois  journées  de  distance  à  louest  de  k 
ville  de  Sàkatou^  est  la  ville  de  Gouberr^  habitée  par  des 
Fellata ,  qui  paraît  être  la  capitale  du  Gouher  de  Léon 
l'Africain  -,  du  Goubirri  de  Delisle  et  de  M.  Bowdiçh. 

Maradi  est  un  pays  situé  entre  Cachenah  et  Gou" 
berry  dont  les  habitants  sont  cafres  ou  non^^croyants, 
et  vont  presque  nus.  Il  a  été  presque  dépeuplé  par 
les  incursions  des  Felta^a. 

Cachenah  ^st  à  cinq  ou  six  journées  de  distance ,  à 
Test ,  de  Zanfarak. 

A  trois  journées  de  marche  au  nord-est'dc  Cache* 
nah  est  un  pays  (non  pas  une  vitte)  nominé  Daoura^ 
dont  les  habitants  sont  cafres  -ou  non  croyants,  et 
continudkaieQt  attaqués  et  réduits  en  esclavage  par 
les  FeUata,  Kebbiest  à  trois  journées  au  nord-est  de 
Bakani^  la  principale  ville  de  Notifi.  Kouka  ou  Cauga 
est  à  treijte  journées  k  l'est  de  Cachennh^  en  inclinant 


•        *  APPENDICE.  5o9 

Ters  le  sud.  Z^gzeg  (  mentionné  par  Léon  F  Africain 
et  d'autres  auteurs)  est  à  quatre  ou  cinq  jouriîées  au  - 
sud-ouest  de  Çackenah,  Remarquons  en  passant  que 
Zegzeg  sur  la  carte  de  d'Anville ,  et  Zaczaa  sur  celle 
dé  Delisle ,  sont  au  oentraire  à  Test  de  Cassine  ou  Ca^ 
c/ienah.  *  .   ^ 

Yagouha^  s^n  M.  Lyon,  est  à  six  journées  au  sud 
de  Çackenah,  Yagouba  est  finnitrophe  de  Yemypn ,  le 
Lamlam  d'Edrisi  (i)  et^  de  nos  cartes.  Ce  pays,  qui 
est  à  six  journées^  au  sud  de  Zegzfg^  est  habité  par 
des  peuples  idolâtres  et  cannibales.  En  général  toutes 
les  nations  qui  sont  au  sud  des  fleuves  qui  arrosent  ' 
le  Soudan  y  sont  dépeintes  comme  vivant  dans  Tétat 
de  naUxre^  et  plus  semblables  à  des  bétes  férooes  qu  a'^  • 
des  hommes  (a); 

Il  y  a  quatre-vingt-dix  journées  de  route  de  Moiur* 
zouk  à  Tirnkouctou  ;  on  passe  par  Touat,  On  a  dit  à 
M.  Lyon  que  Tafiiet  était  à  dix  journées  au  nord- 
ouest  ;de  Touat ;  md\s y  û  ce  n'est  pas  ^ne  erreur, 
ceci  ne  pourrait  s'entendre  que  des  ^  froBgtières  des 
deux  pays.  Selon  les  renseignements  qui  ont  été  don- 
nés par  des  nmrchan4s  à  notre  voyageur^  on  aurait . 
beaucoup  exagéné  l'importance  de  TimioucUfU.  Plu- 
sieurs même  assurent  que  cette  ville  si  célèbre  n'est 
pas  pkis  grande  ^ue  Mourzofik.  Elle  est  entourée  de 
xn^rs  'y  mais  les  maisons  $ont  basses  .et  bâties  irrégu- 
lièrement,  4  Texceptlon  d'une  ou  *deux  petites  rues. 

'  '     '    >  if    ■■■**    ■      "      ■  '      ■ '  '  '   '  — ■  

(i)*HartiiKmii,  J?</rm^//ott,  p.  S6, 
''(a)  Lyopi's  Ifqrrativef  p.  13.9.  .  , 


5fO  APPENDICE. 

Quand  H  arrive  de  nombreuses  caravanes ,  on  bâtit 
des  cabanes  à  la  hâte  ;  et  la  population  ordinaire  de 
la  Fille  se  trouve 'augmentée  de  dix  à  quinze  mille 
âmes  (i).  Delà  viennent  les  récits  exagéfés  quon  fiûi 
sm*  la  grandeur  de  cette  ville  et*sa  nombreuse  popu- 
lation. Nous  remarquerons  que  ces  renseignements 
jdoivent  paraître  bien  suspects  y  s^il  ipgt  vrai ,  comme 
rassure  quelque  part  Mungo-Pai'k ,  que  Sansandrng^ 
une  des  villes  du  Bambarra  où  il  s'est  embarqué, 
renferme  onze  niiHe  liabitants ,  et  que  Sego  «n  con- 
tienne trente  miHe. 

M.  Lyon  donne  ensuite  la  distance  de  plnsieun 
lieiix  relativement  à  Timbcuctou.  KaBra ,  son  port , 
en  est  à  douze  miHes  ;  c'est  plutôt  un  rassemblement 
de  magasins  qu'une  ville.  De  grands  bateatix,  qui 
viennent  de  Djenniy  Chargés  de  marchandises ,  les 
déchargent  à  Kabra.  La  rivière  dans  ce  heu  ^st  très- 
large,  tîoule  lentement  et  vient  de  Fouest.  Dans  la 
saison  sèche ,  un  chameau  ]^t  la  passer  à  f^jué^  mais, 
après  les  .pluies ,  elle  devient  profonde ,  rapide  et  dan* 
gereuSQ.  Dfenni  est^  dit -on,  le  lieu  d'oa  vient  l'or; 
et,  par  cette  raison.  Ton  nomme  ce* pays  BUd^^dr 
TiMr^  an  I^l  Contrée  de  For.  A  une  'Journée  et  demie 
à  l'est  de  Tïmbouctou  est  une  grande  ville ,  ou  un 
district^  qu'on  nomme  Downa.  Aro^ati  est  une  autre 
tîDe  importante,  à  sept  journées  au  nord  de  Tm» 
boucton,  La  ville  9iEzawen^  qui  est  aussi  fort  grande  » 


<i)  Lyon's  Narrative  y  p.  t/|5. 


j 

i 


APPENDICÇ.  Slî 

en  est  éloignée  dcTifigt  journées  de  marche^vers  lest, 
Taudennjr  ou  Tavudermyy  d  où  viennent  les  grandes 
,caratanes,  qui  apportent  annuellement  du  sel  à  Tïm- 
bouctou,  én^est  âoigné  de  vingt-quatre  journées  vers 
le  nord.  Tekmsen  est  à  moitié  chemin  de  cette  route  ; 
on  traversé  pour  y  arriver  un  désert ,  où  Ton  est  dix 
jours  sans  trouirer  d'eau ,  et  qu'on  homme  pour  cette 
raison  Adckireà,  Mabrouk  e3t  à  trois  journées  au  nord 
de  ce  lieu ,  à  dix  au  and  de  Taoudennf^  à  dix  jours  à 
Test  diArowan^  à  di^-huit  jours  au  sud  dUjivQlef^  diass 
le  pays  de  T<mat. 
Sakt  est  sur  le  Nil^  k  trois  jo«LrtîéeA  à  l'est  d«  Tïim- 

Au-dcfe  tte  TimbamatoU  est,  dit -on  ,  une  contrée 

d'où  Ion  tire  beaucoup  d'or, et  dont ,les  liabitaolis  ne 

soht  pas  visibles.  On  ne  trafique  avec  eux  que  k  nuit. 

CVst  pendant  là  nuit  qu'on  dépose  da[hs  des  lieux 

;   partictiliers  les  marchandises  qu'on  veut  vendra^  et 

le  tttatîn   on  trouve  qu'elles   ont  été  "emportées^  et 

rcïpplôrcéc»  pa*  l'or  qui  en  est  Ic^rix  (t):    , 

D'après    les  informations  qui  om  été  années  à 

;  M.Lyon,  tiaûmsti  ne  serait  point  un  nom  de  v^^mais 

'  de  pays  :  les  nt>ms  de  Haoussuy  A'A/kou  ou  ée^Scadàn^ 

j  sont  syttonymes,et  renferment  toute»l'é|endue  de  parys 

;  comprise  entre  Knno^  qui  e«  k  quatre  journées  à.r«st 

;  àeCachenah^  et  les  i'rontières  de  Timfi&iihtou.  Le  nom 

^^  général  de /Ttzou^^a  ne  s'applique  qu'au  pays  arrosé  par. 


(i)  tyofc's  Narrative  f  p.  149. 


'        5ia  *         APPENDICE. 

le  graiid  fleuve, et  s*étend  beaucoup  de  Fe^  à  louest, 
et  fort  peu  du  ^ud  au  nord  :  car  Aghadesy  qui  est 
au  nord  de  Ctichenah^  n*est  phis  du  Soudan;  et 
Yemjremy  au  sud,  nen  fait  pas  non  plus  partie.  Cette 
détermin^âition  de  limites  xentre  dans  celle  que  M.  Bow- 
dich  donne  à  MaUo\pa  4an$  sa  dernière  cslrte. 

Soudan  est  un  mot  arabe,  qui  signifie  le  Pays  des 
noirs;  on  le  remplace  aussi  par  les  mots  Ber^eUAbià^ 
ou  Terre  des  esclaves.  Dans  le  langage  ^Haoussa^  le 
mo^  gari  signifie  contrée  (i). 

Les  Touariks  sont  presque  toujours  en  guerre 
aveé  les  peuples  du  Soudan ,  et  emmènent  de  ce  pays 
une  grande  quantité  d'esclaves.  Les  femmes  du  Sou* 
dan  sont  renommées  par  leur  talent  poui^  le  chant: 
elles  sont  mieux  partagées ,  'sous  le  ra|)port  de  la 
beauté,  que  celles  de  Bornou*  Outre  les  esclaves,  on 
apporte,  du  Soudan  à  Mourzouk  de  IW,  dont  le  sultan 
acHiel  cherche  à  empêcher  Texportation  ;  diverses 
étoffes  en  coton;  des  peaux  de  brebis  et  de  chèvres  j 
maroquioiées  et  teintes  en  jaune,  en  ^ooge  et  en  noir. 

Ainsi  que, nous   lavons  dit,  M.   Lyon  donne    un 

itinéraire  de  Mourzouk  à  Cachenah,  dans  le  Soudan: 

il  est  nécessaire  A  de  le    faire  connaître  pour    quon 

puisse  le  'comparer  au  nôtre,  jet   avec  celui   de  la 

'   Société  airicaitïe  rapporté  précédemment  (2). 


(i)  Lyon's  Narrative,  p.  j5o. 

-  (2)  Voyee   ci-dq^sot,  p.    3174  Proeeedings,  p.  ^163    et.  x04  ;  et 

Kriiu's   Afrika  ,  t.  V,  p.   a«x.  *; 


APPENDICE.  5l3 

Itinéraire  de  Mourzouk  a*  Cachenah. 

LA  ROUTE  SE  DIRIGE  AU  SUD-SUD-OUESÏ. 

.  ♦ 

NoBss  àtt  lieaz.  Nombre  dés  joaméet 

parcourue». 

•       Mourzou]^:. o 

Akraf , . .  • , ï4 

Felezlis , • , 4 

Tadent .' , .,  4 

Assioju ,.;....  € 

Tradjit ,. 4 

Siloufia f '  2. 

Agh^dès >  •^»  .  • % 

Begzam^  ••.•••••,••..• 3 

Ghroulghiwa .....,, 3 

Tagama. .  • *..»•...  7 

Cstchenab.  .•;.•.. • .  • . .  7 

56  joum.  cle 
march.(i) 

Cacftenah  e$t .9;€tueUcfnent  sousla  dépendance  de 
Bello,  fils  du  célèbre^  chef  feU^  Hatmaa  Danfodio, 
qui  réside  à  Sakkatou^  Le  gouvierneuf  actuel  de  Ça- 
chAnah  %%  ucnnme  MellonaAùhanfuDeladgi^.  Il  prend 


(i)  Lf  on*»  Narrtktifte^  p.  z3i.  M*  Lyon  «itive  le  trajet  de  la  josmée 
à  vingt  milles  par  jour  ;  il  entend  des  milles  «n^lais ,  «e  ^ni  fiiit  na 
{len  plus  d«' dix-sept  ioilles  géographiques. 

•    .         33         . 


5j4  appendice. 

le  titre  de  sultan  en  l'absence  de  son  maître  :  sa  fa- 

mille  consiste   en   deux   cents   négresses^  et  en  un 

nombre  égal   d*eniants    qu'il   a   eus   de  ces  mêmes 

n^resses. 

Dans  ce  qae  dit  M.  Lyon  du  pays  de  ^huatyhaibhé 
par  lep  Touariksj  et  d'jH'n'el^Salah  (la  Fontaine  de 
tous  les  Saints),  un  de  leurs  principaux  lieux,  jai 
remarqué ,  avec  une  satisfaction  infinie ,  l'accord  des 
renseignements  qu'il  nous  fournit,  avec  ma  carte, 
dressée  bien  avant  que  sôh  voyage  fiit  imprimé, 
et  même  avant  qu'il  fat  de  retour  en  Europe.  En 
effet  M.  Lyon  nous  donne,  entre  Touat  et  Mourzouk^ 
un  itinéraire  détaillé ,  d'ôii  il  résulte  qu'il  y  a  entre 
ces  deux  lieux  trente-neuf  journées  et  demie  de  rpute; 
ce  qui ,  selon  notre  évaluation  de  joutnée  à  raison  de 
quinze  ihiUes  géographiques ,  présente  un  total  de  six 
cent  cinq  milite  géographiques.  Notre  caifte  en  ligne 
droite  donne  ènvitôn  cinq  cent  quarante'  milles  ; 
anais,^  comme  la  route  passe  par  Oubari^  ou  l'ancienne 
Germa  ^  et  qu'il  faut  remonter  jusqu'à  Sebha^  au 
n«rd  dm  Mourzouk  y  avant  de  se  diriger  droit  à 
travers  le  désert  jusquà  Aïn^el^Salahj  où  est  le 
•pays  des  Touariks^  ce  qui  consomme  trois  jours ,  il 
en  résulte  qu'îl  n'y  a  plus  que  trente-six  journées  de 
ï-outc,  où  cinq  cent  quarante  milles  ,*  en tr«  Oubari^ 
ou  l'anciei^ne  Gherma^  ou  Touat;  ce  qui  s'accorde 
juste  avec  notre  carte ,  sur  laquelle  on  pourrait  tra- 
cer ,  "sans  y  rien  déranger  ,  ritinérâire  qu'a  donné 
M.  Lyon;  c'est  ce  ^jui  nous  engage  à  Iç  transcrire 
4cL        .  • 


APPETTDICE. 


6l5 


Itinéraire  de  Mourzouk  au  pays  des 

TOUATS. 

Noms  des  lieux.  Nombre  des  joamées. 

/  Mourzouk o 

Pans  le      Tessowa,  ville  avec  un  vieux 

Fezzan           <;hâteau.  .••••• \ 

^  pubari, . , 2' 

Hagki.  ••.••.•«••• 2 

Kaïbo  •  • •  •  •  .4 

Bengheh • .  6 

Doukaraat 2 

Tadera ••.  5 

'  Am^ghi..,.,  .^ 7 

Temadraati.  ^ .  /. . , 3 

^  Houhaned i  et  demi. 

Ounabraghri , 4 

,   ,       Âïn-el-SaUh,  ville  des  Touats,  2 

39  et  demi. 

Ainsi  cet  itinéraire,  en  confirmant  la  position  d'M/u- 
tl'Salah^  telle  que  nous  Tavions  indiquée,  sur  notre 
carte ,  appuie  aussi  celle  de  TafUet ,  ex  les  combinai- 
sons par  lesquelles  nous  sommes  parvenui^à  déter- 
miner la  position  4^  Timbow^tcm^  but  primitif  de  no$ 
recherches. 

Nous  terminerons  cette  analyse  en  faisant  con? 
nakre  les  tei:mes  dont  les  Arabes  d'Aliique.  se  ser- 
vent pour  désigner  les  différentes  natures  du  sol  et 

33. 


5l6  APPENDICE. 

le»  différents  aspects  du  Désert.  L'ignorance  de  ces 
mots  peut  donner  lieu  à  des  erreurs  en  géographie. 

Sahar  exprime  un  désert  de  sable  sans  pierre  et 
Sans  eau  ;  Grhoud,  des  collines  de  sable  stériles ,  ou 
n*ayknt  que  quelques  palmiers,  et  difficiles  à  fran- 
chir (i).  Sirir'sont  des  plaines  de  gravier  ou  caillou- 
teuses ,  dont  le  sable  a  été  enlevé  par  les  vents  ; 
c'est  dan%  ce  gçnre  de  désert  seulement  qu'on  trouve 
des  collines  de  sable,  ff^arr  ou  Ouarr  sont  des  plaines 
ou  des  plateaux  de  montagnes,  dont  la  surface  eât 
inégale  et  couverte  de  grosses  pierres  détachées ,  qui 
les  rendent  difficiles  à  traverser.  Haïtia  est  un  sol 
qui ,  par  places ,  est  susceptible  d'un  léger  degré  dé 
végétation,  et  oà  l'on  aperçoit  ça  et  la  quelques  buis- 
sons, ff^ischek  sont  des  plaines  ou  des  collines  dé 
sable,  qui  portent  des  dattes  sauvages,  auxquelles  on 
donne  le  même  nom.  Ces  sortes  de  terrains  ont  pres- 
que toujours  été  autrefois  ce  qu'on  appelle  des  ghraba^ 
c'est-à-dire  des  terrains  cultivés,  dont  les  palmiers  pro- 
duisent des  fruits,  mais  près  desquels  il  n'y  a  point  de 
villes ,  et  oh.  le  propriétaire  ne  vient  que  dans  la  saison 
des  dattes  pour  faire  sa  récolté.  Les  Feizanais  se  ser- 
vent du  mot  dddzira  comme  synonyme  de  ghrada, 
Soubkir  sont  des  plaines  de  sel,  qui  sont  marécageuses 
en  hiver,  et  dont  la  surfoce  se  dessèche  et  se  perd  en 
été.  Wddey  désigne  liiie  vallée  arrosée  par  un  ruis- 
seau ou  un  torrent,  <jui  n'existe  que  pendant  Je  temps 
des  pluies  et  où  il  croît'des  buissons;  La  signification 
du  mo>  ^ihel  est   connue,* et  tout   le  monde   sait 


APPEITDICjE^  5l7 

que  ce  mot  signifié  montagne.  Le  désert  ne  s  étend 
pas  toujours  en  plaine  ;  et  les  gihel^u  montagnes  y 
sont  plus  fréquentes  quon  ne  le  croit  communé- 
ment (i), 

(x)  M.  Lyon*»  Narrative,  p.  346. 


FIN. 


TÇAM-E  AWALYTIQUE. 


519 


TABLE  ANALYTIQUE 

DES    MATIÈRES 

CONTENUES  DANS  LES  RECHERCHES  SUR  L'INTÉRIEUR 
DE  L'AFRIQUE  SEPTENTRIONALE. 


Introduction... PAGE    x 

Des  cartes  modernes  d*Afriqae.  Id. 

De  celles  des  XVI*  et  XVIl* 
siècles a 

Les  détails  qu'elles  préseiltent 
ponr  rintérienr  sont  erronés.     3 

Nécessité  de  recherches  ap- 
profondies snr  ce  snjet. . .  Id, 

On  envoie  à  Facadémie  des 
Inscriptions  et  Belles*LettreSy 
nn  itinéraire  de  Tripoli  à 
Timboncton 4 

L'Antent  est  chargé  de  Texa- 
miner Id. 

M.  de  Sacy  Ini  en  remet  nn 
antre,  traduit  de  Tarabe. . .      5 

M.  de  la  Porte  lui  en  remet  nil 
3*9  de  Tripoli  à  Cachenah.      6 

Divisions  des  recherches  faites 
à  ce  snjet ,  en  trois  parties.     7 

PREMIÈRE  PARTIE. 

DES  PROGRÈS  DES  DECOUVERTES 
GEOGRAPHIQUES  DÀKS  I.  IN- 
TERIEUR DE  I.A.  PA.RTIE 
OrCIDElTTÀLE     DE    L^AFRIQUE 

sRPTEirTRioiri.i.E .  :'. ,..,..     9 


S  I*'.  Depuis  rînvasion  des  Mtt' 
hométans  en  Jfrique ,  jus- 
qu'à la  chute  de  l'empire  des 
Maures  en  Espagne, ......      9 

Les  Arabes  enval^îssent  l'A- 
frique ...^....., Id, 

Ds  pénètrent  4f94  rintérienr.  10 
Y  établissent  des  colonies ...  11 
Convertissent  les  Nègres  k  la 

religion  de  Mahomet xa 

Nouveaux   états  formés  dans 

l'intérieur  de  l'Afrique ....    1 3 
Fondation  de  Timboncton ...    14 
De  l'époque  à  laquelle  le  com- 
merce de  rintérienr  de  l'A- 
frique a   été  le  plus.  Koris- 

sant 1 5 

S  II.  Jbepuis  Vexpulsion  des 
Maures  d'Espagne ,  jusqu'au 
commencement  du  seizième 
siècle ,  lors  de  la  publication 
de  l'ouvrage  de  Léon  Vj4fri^ 

cain 17 

Le  commerce  de  l'întérîenr  de 
.  l'Afrique    attire    Tattention    . 
de  l'Europe /</, 


5ao 


TABLE    ANALYTIQUE 


D*EdrUi 17 

Dca   coicnographe»  da  XIY* 

8iècl« ^  Id, 

Xoyagra  d7bn-BatoaCa.  .  •  . .  •  19 

Voyages  des  Pôrtagtis 3e 

Deroavngede  Schqhab-Eddm- 

Ahmet. 33 

§  III.  Depuis  ie  commence^ 
ment  du  Xyj*  siècle  et  la 
publication  de  Vouwage  de 
lÀon  l'Africain  ,  jusqu'à  la 
formation  de  la  société  éta- 
blie à  Londres  en  17H8  , 
j)Our  ^s  progrès  des  décou- 
vertes  dans  Vintérieurde  VA' 
friqttg 35 

De  Léon  l* Africain. .  «^ Id, 

RcTolation  dans  ]e  commerce 

de  TimboQCton ,  a  la  fin  da 

XV*  siècle 37 

Conquêtes     d'Abonbakre  -  Is- 

chi<i 39 

Marmol 41 

Antoine  Dassel  recoeijle  ét%  r^n- 

seigif eoîents  anrTimbonctoiL  43 
Dmits  exagérés  des  richesses 

de  rinterienr  de  F  Afrique.  Id. 
De  ce  qn*en  a  dit  Ibn  al  Onardi  Id, 
U  se    forme   nne   compagnie 

d'Afrique  ,    sous   le    règne 

d'Elisabeth 44 

Voyages  de  George  Thompson.  4  5 

—  de  Jobson 46 

Entreprises  des  Français  dans 

rintériear  de   l'Afrique...  Id. 

Voyage  de  De  Bme 47 

Itinéraire  donné  par  De  Bme, 

mal  interprété  par  d'AnvilJe.  48 

Moyens  de  le  rectifier 49 

Antres  itinéraires  de  Taipoli  à 

Tiraboocton ,  recueillis  par      '  | 

De  Brue 5o  I 

.Voyage    de  Paul  Imbert,  de        j 

Tripoli  à  Timboncton.  ...  Si  \ 
Expéditions  de  Sidi-Alî  et  de        ' 


Mal«3f  bmael  a  Timbone- 
tou * 5a-54 

Voyages  des  Anglais  A»iis  rin- 
terienr; voyages  de  Sdbbs, 
deMoor,  de  Jobson  et  Job- 
Ben-Salomon 54 

Voyages  des  Français  dans  Tin- 
térieur  de  l'Afrique. . . .   56-59 

Voyage    de     Compagnon    au 

pays  de  Bambouk 56 

de  Flandre 5? 

—  d'Adanson .' .  Id. 

Société  formée  pour  les  dé- 
couvertes en  Afrique,  dont 
d'Anville  faisait  partie  —  58. 

Naufrages  de  Foffie ,  de  San- 
gnier  et  de  Brisson ^9 

Renseiginements  obtenus  par 
M.  Von  IÇinsiedel 60 

Yoyage  de  l^ubanlt  a  Gàlam , 
et  de  Picard  à  Fouta-Toro .  63 

Projet  de  voyage  formé  par  M. 
deBoafflers,  gouverneur  du 
Sénégal 64 

§  IV.  Depuis  rétablissement  de 
ia  société  pour  les  progrès 
des  découvertes  en  Afrique  j 
jusqiià  nos  jours Id. 

Formation  et  but  de  la  société 
formée  à  Londres  en  1788 , 
pQUr  les  progrès  des  décoa- 
vertes  dans  Tintérienr  de 
l'Afrique. 65 

On  cherche  k  Timiter  en  France , 
voyez  la  note Id. 

Voyages   de  Ledyard. 67 

—  de  Lucas 68 

—  deMH.  Watt  et  Winter- 
bottom.. ; . . . .  69 

Renseignement  donnés  à  M. 

Niebhnr ,  par  Abd-Arrach- 

man  Aga 70-74 

Renseignements   donnés  à  la 

sœur  de  M.  Tully,  et  à  M. 

de  Beanfois ,  par  Scbaabeny.  74 


DES  Matières. 


52  ï 


Voyage  da  major  Hough ton .  74 
Premier   voyage    de  Mnngo- 

Park 75«78 

Voyage  de  M.  Browne  a  a  Dar- 

Four 78-82 

Reoselgnements   obtenus    eu 

Egypte,  par  M.  Hamfltoti.    82 

—  par  M.  DenoB ....;...   83 
-^  par  M.  Lapaxioase S4 

—  par  M.  Seetsen 84-87 

IHs  conf  radictionç  apparvutea 

qa^dffrent   les   témoignages 
de  divers ,  sur  le"" cours  da 

Niger ........    84 

Voyages    de    Hornemann,    à 
MouEzonk 87 

—  de  M.  NichoUs,  aa  Ca- 
labar \. . . .   90 

—  de  Rœntgen ,  à  Mogador  9 1 
flenseîgnements  donnés  par  le 

chérîf-Hadji-Mohammed.. .   92 

—  par  M.  Grcy  Jaekflon. .   93 
Renseignements    donnés  par 

Badia  ou  Aly-Bey,  d'après 

Bouhlal 96 

•Second  voyage  de  Mungo- 
Park 98-X03 

Voyage  d'Isaac  et  d'Amadi- 
Fatonma ,  à  la  recherché  de 
Mnngo-Park io3*io4 

Voyage  du  colonel  Boutin . .    io4 

Naufrage  du  matelot  Rohert- 
Adams ,   io5-io6 

Renseignements  sar  les  rela- 
tions commerciales,  éta- 
blies entre  Haoïjissa  et  la 
côte  de  Bénin 107 

Contestés  par  M.  Bowdich.    xo8 

Renseignements  donnés  par 
nn  nègre  de  Timbofictoa , 
snr  la  nation  de  Gallo 
on  Quallo 109 

Naufrage   de  Riley ^,  .     Id. 

Voyages  de  Sidi-Hamet ,  dans 
rintétieur  de  TAfrique  et  4 
Timboucton 1 09-1  ai 


Navigation  du  capitaine  fnc- 
key^  sûr  le  Âeuve  2ayre.    i2i 

Autres  tentatives  des  Anglais 
sur  la  Gambie Id. 

Tentatives  du  gouvernement 
français,  qtfi  eùvoîe  Aly- 
Bey  en  Egypte  et  M.  Mol- 
lien  au  Sénégal i22-t&3 

Voyage  de  M.  Ritchie  àMonr- 
ïouk i«4 

Voyage  de  M.  Bowdich  à 
Conmassie \   12  7-1 41 

Notes  sur  T Afrique  «  de  M. 
Robertson 142-146 

Voyages  de  M.Barckhardt.  i47-i5o 

Voyage  de  M.  Mollien. .    i5o-i55 

Notions  obtenues  par  M.  Rit- 
chie ,  à  Monrzouk. . .  i5S-i64 

Expédition  du  major  Gray 
an  Sénégal i65 

Itinéraire  de  Scfaabeeny  ,  on 
de  Chabiny ,  et  fragments 
sur  TAfrique ,  par  M.  Jack- 
s»n 166-173 

Limites  des  connaissanoçs 
réelles ly^'fjS 

Description  du  désert  de 
Sahara 175-180 

Description  dn  Soudan .    1 8 1- 1 84 

DEUXIÈME  PARITE. 

DES  CARTES  DE  lVvRIQUE  RE- 
X^kTlYEMXST  A.n  TRACE  DES 
COITTRÉES  IffTBRIEtTRKS  DE 
Uk  PARTIE  SEPTEUTRIOITALE 
DE   CE    COirrlHElTT l85 

5  I".  Des  cartes  de  Vintérieur 
de  V  Afrique  septçntriohaie^ 
depuis  la  publication  de  la 
Mappemonde  de  Rujrseh  en 
1 5o8  ,  jusqu'à  Ortelius  en 
iS'jo Id. 

De  la  carie  de  Jean  Ruysch 
dans  rédition  de  Ptolémée, 
de  i5o8  . . .  / 187 


52!> 


TABLE    AWALYTIQÙK 


De  Jean  Scot  dint  le  Ptolc- 

mée  <le   iSao 189 

Des  cartes  de  Gryneas  et  de 

RarooMO,  eni535et  enx55o   791 
Carte  de  Forlafti,  eif  z562.    197 

S  II.  Depuis  la  publieadon  de 
la  première  édition  de  tAt' 
las  ttOnélius  en  1570,  /  «> 
^u'à  celle  de  la  Mappemonde 
de  Delisle  en  lyao Id. 

De  la  carte  d*Ortéliiis 198 

< —  de  Mercator 201 

—  de  livio  Sanato ao3 

~—  de  Sanson 211 

—  de  Jacob  Mearsîas ...  2x3 

§  III.  Depuis  la  publication  de 
la  Mappemonde  de  Guil' 
laume  Delisle  y  jusqu'à  nos 
jours 214 

De  la  carte  de  Delisle 2i5 

—    de  d*Anville 220 

De  la  première  carte  de  Ren-     '* 

nell ,  en  1 790 ^29 

De  la  seconde  carte  de  Ren- 

nell  en  1798  ,  corrigée  en' 

1802 233 

De  la  carte  d*Arrowsmith,  en 

1802 239 

—  de  Pnrdj,  en  1809  on 
1814 240 

Des  cartes  de  MM.  Lapie  et 

Braé. 241 

De  la   carte  de    Morray,  en 

18x7 >44 

—  d'Eddy,  en  1816 246 

Derniers  renseignements  snr 

Timboncton,   donnés    par 

le  colonel  Fitz-rClarcnce.  .    247 

THOISIÈMK  PARTIE. 

AiriXTSE  GÉOOaiLPBIQUE  DES 
ITlirEEÀXRBS  DE  TRIPOLI  ▲ 
TIMBOUCTOtJ  ET  DE  TRIPOLI 
A  CA.CHRirJLH  ,  PAR  LE  CMETK 


XÀGG-C1.SSEM   ET    PJlS    KQ.- 
HAMIUD^  FILS    D*1.LI 24<) 

S  1*'.  Considémtions  prélimi- 
naires  Id. 

Inutilité  des  antears  anciens 
pour  le  perfectionnement 
de  la  géographie  de  Tinté- 
rieor  de  TAfrique. . .    25o-»58 

Utilité  des  itinéraires  moder- 
nes ponreette  reclieTch.  258-s6s 

S  II.  Appréciadon  de  la  jour- 
née de  marche  des  cara- 
vanes dans  les  déserts  de 
V Afrique 262»a69 

S  III.  Anafyse  géographique 
de  l'itinéraire  de  Tripoli  à 
Timbouctou ,  par  le  cheyk 
Hagg'Cassem 369 

Recherclies  ponr  fixer  la  po- 
sition de  Timboncton. ...     Id, 

Distance  de  Timboncton  à 
SîUa . 270 

Tableau  de  la  position  des 
lieux  de  Kayi  i  Ssmi.  272-273  * 

Distance  deSami  à  Timbonc- 
ton     274 

Recherches  ponr  déty^miner 
la  latitude  et  la  longitude 
de  Timboncton 3^5 

Position  de  Gadamès «7  7 

Distance  de  Touat  à  Tafilet.    278 

Analyse  géographique  de  Titi- 
néraîre  d'Achmet  -  Ibn- 
Hassan,  de  Fez  à  Tafilet.    380 

Que  la  vallée  de  Tafilet  est  la 
même  que  celfe  de  Sidjil- 
messa ^85 

Positions  de  Tafilet,  de  Touat, 
d'Agably '286 

Snr  la  position  du  désert 
d*HaÏP ^ '. a87 

Sur  Bouda  d*f bn-Batouta ...      Id. 

Snr  l'Ekably  de  M.  Einsiedcl.  aSS 


PES   MATIERES. 


5a3 


Erreàr  8,9  M.  Bran  sar  Tonat.  288 
Fixation   de   la  position  de 

Timboncton 289 

Sur  les  Tonariks  an  pied  d*A.r 

g»Wy 290 

Sar  le  peaple  de  Terga  on 

Therdja,  deLéonrAfricàin.  29} 
Sur  les  Arabes  Berbères ....   294 

Sur  Tatta 295*296 

Sur  Akka 296 

Vérification  des  distances  de 

Timboncton   à  Tatta....   297 

—  à  MonrKoak Id. 

—  à  Akka. . .  i 298 

—  à  Tegazsa 299 

Contradictions  des  antenrs  snr 

la  rivière  qui  conle  près  dé  . 

Timboncton 3oo 

Car  Tezistencede  deax  grands 
flenves  dans  le  Scndan. ...   3oi 

$  IV.  Ànafyse  géographique 
de  Finnéraire  de  Moham^ 
med^fils  d'Ali  ,fiU  de  Foui.  3o2 

Distances  de  Tripoli  à  Ga- 

damès 3o3 

Distance   es^re   Haonssa  et 

Timboncton 3o4-3o5 

De  Tareknah 3o5 

Tableau    des'  positions     de 

l^itinétaire 3o6 

Snr  Wanonki  on  Caoncaon .   307 
Snr  Tegama  et  lès  habitants 
blancs  da'iis  llntéHénr  de 
l'Afrique 3o8 

S  V.  Anafyse  géographique 
de  l'itinéraire  de  Tripoli 
de  Barbarie  à  la  ville  de 
Cachenah Id, 

Eonte  de  Tripoli  à  Gadamès 
et  de  Gadamès  an  Fezzan .   309 

Coïncidence  de  cet  itinéraire 
aTec  celui  du  major  Rennell  3 1  o 

Sur  la  position  de  Tegbery 
on  Taiwan i . .   3x  i-3i  5 


Star  celle  de  Tedment  on  Ta« 

dent .  • 3x2 

Sur   Açoudi    on    Abir    on 

Asouda 3x3 

Snt  Ganat 3x6 

Snr  A|^adez 3x6-32o 

Sur  Cachenah' 3 1 7-3x9 

Sur  la  distance  de  Cachenah 

à   Gondjah 3x9 

Sur    la   route   de  Tripoli  à 

Mourzonk 32X-323 

Sur  Sokna 323 

Sur  Goundjeh,  Kong,  Gon- 

che ^ 325 

§  Y  bis.  Sur  un  itinéraire  de 
Oamba  à  Cachenah ,  à  Bor» 
nou  et  à  la  Mecque* Id. 

Observations  sur  une  analyse 
géographique  de  cet  itiné- 
raire, par  M.  Bowdich.  325-33r 

Snr  Mallowa  et  $arem. .   33x-335 

Sur  le  Honsa  on  le  Haonssa 
qui  est  près  de  Timbonc- 
ton    335 

Snr  Haonssa  synonyme  de 
Melly Id 

Snr  les  routes  des  caravanes 
dans  rintérieur  ^e  TAfri- 
que  ,  indiquées  par  Cada» 
raosto 336 

Des  cinq  itinéraires  trouvés 
sur  la  nouvelle  carte  de 
M.  Bowdich ...   ^38-343 

Cours  du  QnoUa  y  seton  M. 
Bowdich  . . ....   343-346 


Inii 


ites  des  ,eontlMissantes  des 
anciens  dans  V intérieur  de 
r Afrique 346 

Examen  des  connaissances 
d'Eschyle 3/,8 

Nom  de  Mêlas  oci  Niger 
donné  an  Nil. 349 

Examen    des    connaissances 


TABLE   AlfALTTIQBE 


5a4 


d*Herodote  sur  le  coors  da 
Nil 35o 

Do  Toyage  des  cîoq  jeoaes 
NaMimons 353 

Observations  sur  le  système 
géographiqae  d'Hérodote 
relativement  à  la  partie  oc- 
cideu  ule  de  Tancien  M  onde  357 

Snr  les  Cynètea  et  les  Celtes 
d'Hérodote 358 

Sur  le  pays  des  Garamantes .   36o 

Sar  Texpédition  de  Prolé~ 
inée  Evergète 36o-36a 

Snr  la  navigation  autour  de 
TAlriqae  dans  les  temps 
ancieas 56a 

Des  limites  des  connaissattces 
anr  rintérieur  de  1* Afrique 
au  temps  de  Strabon.    364-371 

—  au  temps  de  Pline.  371-3S1 

—  an  temps  dePtolémée.    38 1 
Expéditions     de     Septimins 

Flaccus  et  de  Julias  Ma- 

ttrnns '38g 

Les  limites  des  connaissances 
anciennes  'dans  l'intérieur 
de  TAfrique  ne  se  sont  pas 
étendues  jusque  dans  le 
Soudan 391-392 

S  VII.  Résumé  t  conjectures 
et  condusiom S^ft 

Sur  lea  divers  itinéraires  qui 
ont  été  analysés ^g% 

Snr  l'utilité  qu*on  peut  re- 
cueillir de  cet  ouvrage.  .*.    394 

Des  contradictions  qui  cmmb'     . 
tent  sur  le  cours  du  Niger 
près  de  Tiiobouct<ni. .  1 . .   3^ 

Cotfipieot  on  peut  les  conci- 
lier  .• 398 

De»  conjectures  qu'on  a  for- 
mées sur  le  courses  fleu- 
ves du  Soudan 399 

Toutes  sont  improbables ...     Id. 

Preuves  de  cette  assertion.  4oo-4o5 


Conjectures  de  l'Auteur.  4o5-4i5 
Importances    et    effets    des 
découvertes  dans  le  Sou- 
dan      4xa*4i5 

APPENDICE  GOHTiLirAVT 
DiYKRS  iTiiriRA.iaisqin  okt 
ira  AVALTsÉs,  ou  noire  il 

À.  BTi  VÀXT  MEKTIOH  lïÂMt 
CET   OUTRAOB é  .,    417 

I.  Itinéraife  de  TripoH  de  Sar- 
bariè  àda  ^iiie  de  Tombœ- 
tou  ,  p€tr  le  eheyk  Hagg» 
Kassem 4^9 

Description  d«  Ctdamès. . .  4^0 

Description  d' Agably A^l 

Déuilt  sur  lea  TooAreks.. . .  4*4 
Descriptioa     de     Tiadbotto- 
ton ,> 426-4^7 

II.  Itinéraire  de  Tripoli  à  thm- 
boctOH  ,  par   Mohammed , 

fils  d'Jfy.  fils  de  Fmtl^ 
traduit  de  tarabe  par  H*  U 
baron  ^hestre  de  facjr.  .   4ap 

De  Haonssa ,  ville 439 

Wanonki ,    ou     Caouoaou  » 

grande  ville 44o 

A/non 441 

Soudab 44* 

Arrivée  à  Tknboacton 444 

III.  Itinéraire  de  Tripoli  de 
Barbarie  à  la  ville  de  Ca- 
ckenah,par  le  cheyk  Bmgg" 
Kassem 445 

Descriptioa  d*Ahir 448 

—  Agadès 449 

—  de  CachcBah 4^^ 

IV.  Itinéraire  de  Gaudja  à 
Haoussa  et  de  Haoussa  à 
la  Mecque ,  traduit  de  ta~ 

K    rahe 453 


DES    MATIÈRES. 


525 


V.  Itinéraire  éTMhmet^Ibn- 
Hassan ,  de  Fez  à  Tafilet.  457 

ba  flenve  Zîz 46 1 

De  Tafilet 463 

VI.  Journal  d'une  expédition 
faite   en    i8io  ,  par  Sidi 

Mohammed  -  Bejr  ,    contre 
Soitan ,  ville   de  la  mon* 

tagne  de  Garian 465 

i)e  So]taa 46^ 

Mezdah • .   470 

VII.  Extrait  d'Ibn  Haukal.   47^ 

VIII.  Itinéraire  d'Hadji  Bon- 
heker  ',  de  Seno  -  Palel  à  la 
Mecque ;.....    477 

Dé  Jarra.  .  ; 479 

De  Sego. ' 480 

De  Timboactoa 481 

De  HaoQSsa  . .  . .  ; 483 

De  Cachenali 484 

De  Bornoa. 485 

Du  Djaliba Id, 

De  Wadaî. 486 

De  Kouka Id. 

De  Baghermi Id. 

Da   DaC'Four 48^ 

IX.  Relation  de  Scott. .....    489 

De  Wad  Seyghi ;  . .  ♦  490 

D'ElGhiblah Id. 

D^I-Scbarrag 491 

Dn  Bahar-Tieb,  on  Mer  d'eau 

douce Id. 

Du  Bahar-el-Kabir,  où  la 

grande  mer 49a 

Conjecturea Id. 

X.  Relation  du  capitaine  Lyon 

sur  l'Afrique  septentrionale.  494 


Sur  T'egcrry. 495 

Sur  Gherma,  rancienne  capi- 
tale du  Fezsan 496 

De  la  contrée  nommée  Ghraat.   497 
Route  de  Tegerry  à  Bilema . .    498 

Sur  Bornou  et  Kanem 499 

Sur  Tschad ,  rivière.  ..*....     Id. 

Sur  le  lac  Fittri 5oo 

Route  de  Birnie  à  Bagbermi .     Id. 

Snr  Mandra Id* 

Sur  Wadey 5oi 

Sur  Kattagoum Id,^ 

Sur  OuDgaouron 5oa 

Snr  Bahr-el-Ghazel Id. 

Snr  Yaon,  capitale  deKanem.  5o3 
Itinéraire  de  Mourzook  à  Ca- 

cbenab  * Id, 

Sur  Nonfi  et  sa  capitale  Ba- 

kani.  k 5o4 

Snr    la     communication    de 

Notifî  avec  la  mer Id* 

Sur  Ringbem  ,  Kattagoum  , 
Gambarou  ,  Kamadakou  , 

le  Joliba ,  etc.% 5o5-5o7 

Sur  Gonjeb. ; .    567 

Rente  de  Cachenah  au  Bor- 
nou     5o8 

Sur  Gouber.  ;  ...  ; Id. 

Sur  Zamfara Id, 

Daoura >« Id. 

Zegzcg. 5o9 

Yemjem  et  Lamdam.  ..*...    Id. 

Sur  Timbouctou Id. 

Sur  Haoussa,  Afnou  et  Soudan  5 1  x 
Itinéraire  de  Mountouk  à  Ca- 
chenah     5]3 

Itinéraire  de  Monrzouk    au 

pays  des  Tonats 5i  5 

Termes  arabes  poor  exprimer 
les  différents  aspects  dil 
Désert SiO 


FIN     DE     LA     TABLS. 


HAOCSSA  ,^ 


H)CR 


CHKRCIIES 


r  NT  ERIK  Lit 


DE 


1*ÏE>T1U0>  VI.H. 


-I.  niiUlŒNAKR. 


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liiques  de  Go  au  cle«:ré 


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Serét pur LaMemmnJ .  me  de* Xmftr^  ^'4lft- 


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