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Full text of "Recherches sur les origines de l'égypte"

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AT  THE 


UNIVERSITY  OF 
TORONTO  PRESS 


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in  2010  witii  funding  from 

Universityof  Ottawa 


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T 


RECHERCHES 


SUR 


LES  OUIGINES  DE  L'EGYPTE 


ANGERS,  IMPRIMERIE  ORIENTALE  DE  A.  BURDIN 


REGllEllClJES 


SUK  LES 


OUIGINES  DE  L'EGYPTE 


L'AGE  DE  LA  PIEUliE  ET  LES  MÉTAUX 


PAU 


J.  DE  MORGAN 


DIRECTEUIl    GÉNÉKAL    UES    ANTICJUITES    DE    L  EGYPTE 


m 


PARIS 
ERNEST    LEROUX,    ÉDITEUR 

28,     RUE     BON.VPAIÎÏE,     28 

1896 


PRÉFACE 


La  recherche  des  origines  de  l'hoinme  en  Ég-ypte  est  un 
problème  très  complexe,  faisant  autant  partie  du  domaine 
de  la  géologie  que  de  celui  de  l'archéologie.  En  efl'et,  les 
premiers  témoins  que  nous  possédons  de  l'industrie  hu- 
maine dans  cette  partie  de  l'Afrique  remontent  à  une  anti- 
quité si  reculée  qu'ils  doivent  plutôt  être  considérés  comme 
des  fossiles  que  comme  des  documents  archéologiques. 
Ce  sont  des  silex,  très  grossièrement  travaillés,  qu'on  ren- 
contre roulés  à  la  surface  du  sol,  parmi  les  galets  de  l'épo- 
que quaternaire  ou  pléistocène. 

En  Europe,  en  Amérique,  en  Asie,  les  dépôts  analogues 
sont  fréquents;  il  suffira  de  citer  ceux  de  Ghelles,  près  de 
Paris,  de  Saint-Acheul  et  de  Moulin-Quignon  (Somme),  de 
Thuringe,  d'Ecosse,  de  Trenton  (Etats-Unis),  etc.,  pour  que 
de  suite  l'esprit  se  reporte  aux  âges  où  les  grands  pachy- 
dermes vivaient  sous  nos  latitudes  et  pendant  lesquels 
l'homme,  encore  plongé  dans  la  barbarie  la  plus  profonde, 
éclatait  grossièrement  le  silex  pour  en  faire  ses  armes  et 
ses  outils. 

Mais  en  Europe,  où  les  études  ont  été  plus  approfondies 
qu'en  Egypte,   où    de    nombreux   savants   se  livrent  sans 


PREFACE 


relâche  à  ces  travaux,  "nous  ne  connaissons  plus  seulement 
aujourd'hui  les  instruments  paléolithiques  ramassés  dans 
le  diluvium,  nous  possédons  aussi  de  véritables  gisements 
en  place,  qui,  tels  que  ceux  de  l'abri  sous  roche  du  Mous- 
tier  (Dordogne  ,  ont  fourni  la  plupart  des  documents  dont 
nous  disposons  sur  les  origines  humaines. 

En  Egypte,  les  recherches  ontété  moins  suivies  et  les  ren- 
seignements recueillis  avec  moins  de  méthode.  Il  est  bien 
rare  que  le  savant  s'aventure  en  dehors  de  la  vallée  du  Nil, 
aussi  le  désert  reste-t-il  presque  tout  entier  à  explorer.  Ce 
sont  les  falaises  bordant  le  grand  fleuve  qui  nous  ont 
décelé  tout  ce  que  nous  connaissons  de  ce  pays  :  ses  temples, 
ses  villes  antiques,  sont  situés  dans  la  vallée;  les  nécro- 
poles ne  s'avancent  jamais  au  delà  de  quelques  kilomètres 
au  plus  de  la  limite  des  cultures.  On  comprend  aisément 
que,  dans  ces  conditions,  les  savants,  retenus  par  la  richesse 
prodigieuse  des  documents  voisins  du  Nil,  découragés  par 
l'aridité  du  désert,  par  les  espaces  immenses  qu'on  doit 
parcourir  pour  le  visiter,  se  soient  cantonnés  dans  les 
champs  d'exploration  plus  facile.  Là,  ils  rencontrent  des 
textes,  des  inscriptions  plus  ou  moins  longues,  plus  ou 
moins  intéressantes,  qui  font  les  délices  de  leurs  veillées 
d'Europe,  leur  procurent  des  sujets  de  travaux  linguisti- 
ques, des  motifs  de  discussion  sur  d'infimes  détails  histo- 
riques d'un  pays  qu'ils  ont  traversé,  mais  que,  malheureu- 
sement, ils  ne  connaissent  souvent  que  bien  peu. 

D'autre  part,  c'est  toujours  en  bateau  qu'on  remonte  le 
(leuve,  et  ce  mode  de  locomotion,  tout  en  présentant  de  très 
grands  avantages  au  point  de  vue  nuitériel,  rend  très  diffi- 
cile l'examen  de  la  vallée  elle-même  :  le  visiteur  s'arrête 
généralement  là  où  ses  guides  le  conduisent,  dans  les  loca- 
lités où  s'élèvent  de  grands  monuments;  mais  il  passe  par- 


PRIOFACR 


tout  ailleurs  sans  rien  remarquer  d'autre,  sans  faire  ees 
mille  obse-'valiops  do  détail  qui  précèdent  toujours  les 
grandes  découvei-tes  et  sans  l(\sqnclles  il  n'<'sL  pas  possible 
de  les  faire. 

C'est  ainsi  que  nous  voyons  la  bibliographie  égyptienne 
surchargée  de  mémoires  spéciaux  sur  les  monuments  les 
plus  faciles  à  visiter,  sur  ceux  où  s'arrêtent  seulement  les 
touristes,  tandis  que  la  plupart  des  localités  antiques  de 
seconde  importance  au  point  de  vue  des  ruines  restent 
inconnues  et  que,  pour  retrouver  leur  position,  nous  devons 
encore,  dans  la  plupart  des  cas,  nous  reporter  aux  cartes 
dressées  par  la  Commission  qui  accompagnait  les  soldats 
de  Bonaparte. 

Avec  de  tels  procédés  d'investigation  on  ilevait  forcé- 
ment délaisser  des  points  très  importants  dans  l'histoire 
de  l'antiquité  égyptienne  et  surtout  négliger  la  connais- 
sance physique  de  ce  pays  dont  il  faut,  avant  d'en  parler, 
posséder  les  moindres  détails,  apprécier  les  qualités  et  les 
défauts  naturels. 

Aucune  région  ne  ressemble  moins  que  l'Egypte  aux 
autres  pays  du  monde;  aucune  ne  présente  un  caractère 
personnel  plus  net,  plus  tranché;  chaque  village  est  un 
monde  spécial,  chaque  vallon  un  univers  où  la  vie  s'est 
développée,  où  l'homme  a  ressenti  des  impressions  locales 
bien  particulières,  et  même  dans  les  temps  modernes,  quoi- 
que tous  les  villages  égyptiens  présentent  le  môme  aspect, 
quoique  le  fellah  semble  partout  être  le  même  homme 
d'Assouan  au  Caire  et  du  Caire  à  Damiette,  chaque  localité 
possède  ses  caractères  propres,  personnels.  Pour  qui  sait 
voir,  pour  qui  observe  les  gens  et  les  choses,  les  différences 
sont  considérables.  Ecoutez  un  fellah  de  Silsileh,  il  ne 
parlera  pas  comme  un  paysan  de  Qeneh,  de  Farchout  ou 


vni  PRÉFACE 

d'Akmim.  Causez  avec  un  pécheur  du  lac  Menzaleh,  il  est 
absolument  étranger  aux  usages  et  aux  goûts  d'un  haln- 
tant  de  Tantali  ou  de  Siout.  Ces  différences  sont  impercep- 
tibles pour  celui  qui  ne  fait  que  traverser  l'Egypte  en 
bateau,  mais  pour  le  véritable  explorateur,  pour  celui  qui 
séjourne  dans  les  villages,  elles  sautent  aux  yeux.  11  semble 
que  l'air  qu'on  respire  dans  les  diverses  provinces  de 
l'Egypte  soit  A'arié.  Et  cependant,  c'est  le  même  arabe  que 
parlent  tous  ces  gens,  c'est  la  même  Ijrise  du  désert  qui 
frappe  le  visage. 

Ces  dissimilitudes,  que  nous  constatons  aujourd'hui  dans 
la  vallée  du  Nil,  sont  aussi  anciennes  que  l'Egypte  elle- 
même  :  elles  ont  existé  de  tout  temps  et  furent  d'autant 
plus  intenses  que  les  communications  de  district  à  district 
étaient  jadis  plus  difficiles.  Aujourd'hui  que  la  vapeur  à 
chassé  du  bas  Nil  les  crocodiles  et  les  hippopotames,  que 
les  journaux  pénètrent  partout,  que  d'Assouan  au  Caire  on 
ne  compte  plus  que  huit  jours  de  voyage,  un  nivellement 
général  s'accomplit,  le  fellah  perd  peu  à  peu  ses  caractères 
provinciaux,  nous  assistons  aux  dernières  palpitations  de  la 
vie  locale  en  Egypte. 

Ces  différences  sont  dues  aux  conditions  ph^'siques  spé- 
ciales à  chaque  village,  aux  vents  régnants,  à  la  forme  et  à  la 
nature  des  montagnes,  à  l'étendue  des  terres  cultivables,  à 
la  ([uantitédeseaux.  Car  en  Egypte,  l'eau  est  partout  la  môme  : 
c'est  le  Nil  qui  la  donne;  la  terre  ne  varie  pas  de  qualité,  le 
fleuve  la  distribue  aux  hommes  avec  une  justice  absolue; 
le  sable  du  désert  ressemble  autant  à  lui-même  par  toute 
l'étendue  des  immensités  qu'il  remplit  que  la  terre  d'Egypte 
au  limon  du  Nil. 

Dans  nos  pays  d'Europe  les  différences  sont  bien  plus 
sensibles  tant  dans   les    conditions  d'habitat  que  dans  la 


PREFACE  IX 

ii;iliiro(l(>s  peuples.  Elles  nous  saiileiil  aux  V('U\|)iirc(M|ir('lles 
soiil  violentes,  laiidis  (pTen  l*]jn\  [)le,  à  pi'(Miiièr(^,  vue,  loul 
semble  copié  sur  un  uièiiic  nu)dèlc  et  ce  n'est  ([u'à  l'exanu'ii 
attentif  que  la  variété  se  révèle. 

Il  serait  de  première  importance  d'étudier  eu  détail  le  pays 
avaul  d'entreprendre  l'examen  de  l'histoire  égTl)tienne.  Cha- 
que ville,  chaque  nome, avait  autrefois  sa  divinité  spéciale, 
ses  usag-es  particuliers;  sommes-nous  bien  certains  que 
dieux  et  coutumes  n'ont  pas  été  imposés  par  les  conditions 
locales? 

A  Ombos,  deux  dieux  ennemis,  Aroëris  et  Sébek,  étaient 
adorés  dans  le  même  temple;  ne  devons-nous  pas  chercher 
dans  ce  fait  un  souvenir  de  l'hostilité  qui,  de  tout  temps,  a 
régné  entre  les  habitants  des  deux  rives  du  lleuve  et  se  con- 
tinue de  nos  jours  encore? 

Mais  avant  de  rechercher  ces  détails  qui  ont  eu  tant  d'in- 
fluence sur  la  civilisation  égyptienne,  avant  d'étudier,  nome 
par  nome, les  anciens  usag-es  et  leurs  causes  naturelles,  les 
traces  qui  ont  persisté  jusqu'à  nous,  il  est  nécessaire  de  dis- 
siper les  ténèbres  cjui  cachent  à  nos  yeux  les  premiers  pas  de 
l'humanité  dans  la  vallée  du  Nil,  d'examiner  comment  vécut 
l'homme  à  ses  débuts,  depovisser  plus  avant  même  dans  les 
âges  et  de  prendre  l'Egypte  au  moment  oii  son  continent  sor- 
tit des  mers,  de  suivre  les  évolutions  de  ce  sol  qui  devait 
être  un  jour  l'I'^gypte  et  de  savoir  comment  il  s'est  formé. 

Les  annales  géologiques  de  l'Egypte  sont  écrites  dans  ses 
montagnes;  les  stratifications  nous  montrent  le  domaine 
futur  des  Pharaons  encore  situé  sous  les  eaux,  recevant 
jusqu'à  la  fin  de  la  période  éocène  des  dépots  marins,  puis 
sortant  de  la  mer  pour  se  couvrir  de  forets,  de  lacs  et  de 
rivières,  en  même  temps  que  la  Palestine,  la  Syrie  et  une 
grande  partie  de  l'Afrique  centrale. 


PREFACE 


Des  tremblements  de  terre,  des  affaissements  et  des  bou- 
leversements viennent  changer  entièrement  la  face  des  con- 
tinents d'alors  :  la  mer  se  précipite  jusqu'aux  environs 
d'Assouan,  vient  battre  les  montagnes  de  la  chaîne  Arabi- 
que, la  Palestine  s'abaisse,  la  mer  Rouge  se  crée,  sur  l'em- 
placement d'une  ancienne  vallée. 

Dès  lors  un  nouveau  régime  des  eaux  s'établit  :  les  glaciers 
disparaissent  du  centre  de  l'Afrique,  les  lacs  trouvent  vers 
le  nord  un  épanchement  et  le  Nil  prend  naissance.  Son  lit 
indécis  coule  dans  le  désert,  dans  les  plaines  du  Bahr-Bala- 
Mâ,  pendant  la  période  des  érosions  seulement;  puis  le  sys- 

r 

tème  définitif  s'établit  et  le  fleuve  sacré  de  l'Egypte  prend 

son  cours  d'aujourd'hui. 

C'est  au  moment  du  creusement  de  cette  vallée,  ou  peu 

après,  que  l'homme  nous  apparaît  pour  la  première  fois, 

l'homme  paléolithique  que  nous  ne  connaissons  que  par  de 

e-rossiers  silex  taillés  rencontrés  dans  les  alluvions. 
o 

Après  la  période  de  creusement  de  la  vallée  vient  celle 
de  remplissage  par  les  limons,  travail  lent  qui  se  continue 
de  nos  jours  encore. 

L'homme  se  montre  à  nous  de  nouveau,  par  ses  sépultures 
et  les  ruines  de  ses  villages,  par  les  kjœkkenmœddings 
qu'il  a  laissés  tlans  ses  habitations  de  briques  crues,  dans 
ses  campements. 

Mais  alors  il  est  plus  civilisé  :  il  taille  le  silex  avec  une 
habileté  que  rien  ne  surpasse  dans  le  néolithique  d'Europe; 
il  fait  des  vases  en  pierre  et  en  argile,  les  couvre  de 
peintures  grossières,  sculpte  en  forme  d'animaux  des  pla- 
ques de  schiste,  porte  des  colliers  de  coquilles  et  de  pierres 
du  pays. 

Puis  survient  un  peuple  étranger  qui  s'empare  de  l'Egypte, 
apporte  avec  lui  la  connaissance  des  métaux,  de  l'écriture 


i'Ki;i\\(:i':  xi 

hiéroglypliique,  do  la  poinLure,  de  la  scuIpUiru,  des  indus- 
tries nouvelles,  des  arls  qui  n'ont  rien  de  commun  avec 
ceux  des  peuples  qu'il  a  envahis:  c'est  l'Ancien  Empire  pha- 
raonique qui  commence,  peut-être  même  le  règne  des  dy- 
nasties dites  divines.  Les  hommes  aux  outils  de  pierre  sont 
les  autochtones,  les  autres  sont  les  Égyptiens  conquérants 
et  civilisateurs. 

Peu  à  peu  la  vie  pharaonique,  ses  coutumes,  ses  usages, 
ses  industries,  ses  arts  pénètrent  chez  les  peuples  soumis, 
l'arme  de  bronze  remplace  la  hache  et  la  lance  de  pierre. 
Mais  les  Egyptiens  eux-mêmes  conservent  peut-être  pour 
certains  usages  spéciaux  le  silex,  et  il  n'est  pas  impossible 
que,  jusqu'au  début  de  notre  ère,  la  phase  néolithique, 
réduite  aux  pratiques  religieuses,  n'ait  pas  entièrement 
cessé  dans  la  vallée  du  Nil. 

Rien  de  plus  intéressant  que  de  mettre  en  parallèle  les 
arts  des  autochtones  et  ceux  des  Egyptiens  des  premières 
dynasties.  Presque  tous  les  caractères  diffèrent.  Il  est  im- 
possible de  leur  reconnaître  une  origine  commune  et  cepen- 
dant quelques  formes  indigènes  persistent  jusqu'aux  der- 
niers temps  de  la  puissance  pharaonique. 

Ces  autochtones  appartenaient  à  une  race  aujourd'hui 
éteinte.  Ils  se  sont  fondus  dans  la  masse  des  Egyptiens  et 
des  Nubiens  au  milieu  desquels  ils  vécurent  :  c'est  de  ces 
mélanges  qu'est  né  le  fellah  de  l'antiquité. 

Quant  aux  débuts  des  Égyptiens  eux-mêmes,  il  est  bien 
difficile,  en  l'état  actuel  de  nos  connaissances,  de  les  préciser . 
Peut-être  ce  peuple  est-il  venu  d'Asie.  Dans  ce  cas  il  au- 
rait, à  l'origine,  été  apparenté  aux  Sémites  de  la  Ghaldée. 
Les  preuves  en  faveur  de  cette  opinion  sont  très  nombreuses  : 
on  les  trouve  dans  la  comparaison  des  grammaires  sémi- 
tique et  égyptienne,  dans  les   analogies  entre  les   signes 


PRÉFACE 


hiéroglyphiques  et  cunéiformes,  dans  la  communauté  des 
débuts  artistiques,  des  mesures,  enfin  dans  des  textes  qui 
montrent  que  trois  mille  ans  environ  avant  notre  ère  il  exis- 
tait des  relations  suivies  entre  les  Chaldéens  et  l'Egypte. 

A  côté  des  origines  ethniques  des  Égyptiens  se  pose  le 
problème  des  débuts  de  leurs  connaissances  métallurgiques, 
question  très  vaste  qui  embrasse  le  monde  entier  et  com- 
prend les  premiers  pas  de  la  civilisation  humaine.  J'ai  dans 
un  autre  ouvrage'  traité  ce  point  si  important,  et  mes  déduc- 
tions m'ont  amené  à  penser  que  c'est  de  la  Chine  centrale 
que  nous  sont  venus  les  premiers  principes  des  arts  métal- 
lurgiques. 

La  découverte  du  bronze  fut  unique,  tout  s'accorde  à  le 
prouver,  et  c'est  peut-être  de  Chine  que  les  Égyptiens  reçu- 
rentleurs enseignements.  Cette  supposition  ouvre  des  hori- 
zons nouveaux  sur  les  premiers  pas  de  nos  civilisations  et 
sur  leur  prodigieuse  antiquité. 

C'est  à  Tétude  de  ces  questions  complexes  que  j'ai  consa- 
cré le  présent  volume.  .Je  n'ai  pas  la  prétention  d'avoir  donné 
à  chacune  sa  juste  solution,  au  moins  ai-je  accumulé  les 
documents,  afin  de  présenter  au  lecteur  toutes  les  données 
des  divers  problèmes.  J'ai  tenu  à  dessiner  moi-même  la 
plupart  des  objets,  afin  de  pouvoir  certifier  l'authenticité  des 
reproductions.  J'ai  exploré  la  majeure  partie  des  pays  dont 
je  traite,  j'ai  visité  le  Bahr-Bala-Mà  et  la  péninsule  sinaiti- 
que,  afin  de  n'en  parler  qu'en  connaissance  de  cause. 

Dans  la  préparation  de  cette  étude  j'ai  apporté  le  plus 
grand  soin  à  recueillir  les  moindres  documents,  notant  tous 
les  détails,  observant  les  plus  petits  indices:  en  un  mot, 
traitant  les  recherches   archéologiques  comme  je  l'eusse 

I.  J.  dp  Morgan,  Recherches  sur  les  origines  des  peuples  du  Caucase,  1889. 


PRKFACE  xiir 

l'ail  d'cliKles  d'histoire  naliirclle  dans  lesqiicllc^s  les  circons- 
tances secondaires  soiil,  d'une  si  i^i'ande  valeiic. 

Cette  niiniilie  dans  le  relevé  des  doeiinuMils  n'élail  <^'uère 
en  honnenr  en  l']g-ypt(;  avani  mon  arrivée,  et  sauf  les  re- 
cherches de  M.  Flinders  l'etrie,  ([ui  toujours  ont  été  menées 
méthodiquement,  et  celles  de  quelques  rares  archéologues, 
les  fouilles  étaient  g-énéralemeut  faites  sans  contrôle  scien- 
tifique, et  dans  le  seul  but  de  se  procurer  des  objets  ou  dos 
textes. 

Une  semblable  manière  d'agir  réduisait  de  beaucoup  la 
valeur  des  découvertes;  aussi  bien  souvent  la  confusion  des 
objets  a-t-elle  causé  de  très  graves  erreurs  :  le  Musée  de 
Guizeh  ne  renferme-t-il  pas  des  milliers  de  monuments 
dont  l'intérêt  scientifique  est  nul  parce  qu'on  ne  connaît  pas 
les  conditions  dans  lesquels  ils  ont  été  rencontrés  ? 

En  Egypte,  plus  que  partout  ailleui  s,  il  est  nécessaire  de 
relever  avec  une  précision  scrupuleuse  les  moindres  indi- 
ces :  car  les  débris  résultant  de  milliers  d'années  sont  en- 
tassés les  uns  par  dessus  les  autres  et  souvent  mélangés. 
Ce  n'est  pas  dans  le  cabinet,  par  la  seule  étude  des  textes, 
qu'il  est  possible  de  faire  dans  tous  ces  objets  la  part  de 
chaque  époque;  c'est  seulement  sur  le  terrain,  par  des  obser- 
vations de  détail  relevées  plus  spécialement  et  quand  on  a 
la  bonne  fortune  de  découvrir  des  gisements  de  date  certaine. 
L'Egypte,  comme  tous  les  autres  pays  du  monde,  a  connu 
le  progrès;  sa  civilisation  s'est  modifiée,  et  juger  de  ce  qu'é- 
taient les  habitants  du  Nil  sous  l'Ancien  Empire,  d'après  les 
monuments  laissés  par  les  Ramessides,  serait  commettre  la 
même  erreur  que  d'apprécier  l'état  social  de  la  France  au 
moment  de  la  féodalité,  d'après  les  mœurs,  les  usages  et  la 
littérature  de  l'époque  de  Louis  XIV. 

Ces  différences,  déjà  très  sensibles  dans  les  textes,  sont 


"''  PRÉFACE 

bien  plus  importantes  si  l'on  considère  les  objets.  Aussi  le 
principal  but  d'une  fouille  doit-il  ôtre  la  constitution  de 
séries  homogènes  comme  provenance  et  comme  date;  c'est 
par  Ik  seulement  que  nous  pénétrerons  dans  la  vie  intime 
des  Eg-yptiens  aux  diverses  époques. 

Deux  branches  de  mes  découvertes  sortaient  du  ressort 
de  mes  connaissances  :  l'anthropologie  et  les  inscriptions 
hiéroglyphiques.  J'ai  prié  deux  spécialistes  de  vouloir  bien 
me  communiquer  leurs  observations  :  M.  le  D''  D.  Fouquet 
s'est  livré  à  l'examen  des  crânes  et  des  squelettes  préhisto- 
riques; je  donne  in  e.vtenso  son  savant  mémoire  en  appen- 
dice de  mon  travail;  M.  G.  Jéquier  a  complété  mon  livre  par 
une  série  de  notes  ég-yptologiques  du  plus  haut  intérêt, 
dans  lesquelles  souvent  il  traite  de  questions  toutes  nou- 
velles. Qu'il  me  soit  permis  d'exprimer  ici  à  ces  Messieurs 
ma  vive  gratitude'. 

Ce  livre  sera,  je  le  sais,  discuté  dans  ses  moindres  dé- 
tails; mais  si  mes  explications  sont  parfois  sujettes  à  des 
rectifications,  les  observations  que  je  publie  doivent  être 
envisagées  comme  des  documents  positifs,  car  elles  sont 
l'expression  sincère  de  la  vérité.  J'ai  vu  ce  dont  je  parle,  et, 
parmi  les  objections  qui  ont  jadis  été  posées  contre  l'opi- 
nion de  ceux  qui  admettent  l'existence  de  l'homme  préhis- 
torique dans  la  vallée  du  Nil,  j'en  connais  un  grand  nombre 
qui  ne  reposent  que  sur  des  affirmations  sans  base  sé- 
rieuse. 

J.  DE  Morgan. 


I.  Cl 
auleur 


.aque  note  de  MM.     Fouquet  et   Jéquier  est   accou.p.guée  des  iuitiales  de   leur 


[{ECIIEKCUKS  SUR  LES  ORIGINES  DE  L'ÉGYPTK 


GHAPITRI^   PREMIER 

Formation  de  l'Egypte.  Creusement  de  la  vallée 

du  Nil. 


Il  serait  impossible  de  parler  des  origines  géologiques  de  l'Egypte, 
sans  comprendre  dans  le  même  exposé  toutes  les  régions  qui,  voi- 
sines de  ce  pays,  ont  partagé  ses  vicissitudes  et  pris  part  aux  phéno- 
mènes qui  lui  donnèrent  naissance.  Les  actions  sédimentaires  et 
orogéniques,  dont  on  retrouve  à  chaque  pas  les  résultats  dans  la 
vallée  du  Nil,  ne  furent  pas,  en  effet,  restreintes  aux  pays  pharaoni- 
ques :  elles  s'étendirent  sur  la  majeure  partie  de  l'Asie  antérieure  et 
sur  l'Afrique  é([uatoriale  ;  de  telle  sorte  que  l'Egypte  ne  doit  être 
considérée  que  comme  un  district  faisant  partie  de  cet  ensemble  de 
contrées  qui  connut  les  mêmes  transformations.  Il  est  donc  néces- 
saire, pour  parvenir  à  des  vues  d'ensemble,  d'examiner  en  même 
temps  la  Judée,  la  Syrie,  l'Arabie,  l'Egypte,  la  Nubie  et  la  région  des 
grands  lacs  '. 

Les  mers  éocènes  couvrirent  la  majeure  partie  du  nord  de  l'Afrique; 
elles  s'étendirent  aussi  sur  l'Asie  antérieure,  la  Perse,  le  Turkestan 
et  les  Indes.  Les  nummulites  qu'on  rencontre  dans  ces  pays,  celles 
que  renferment  les  roches  des  plus  hauts  sommets  de  l'Himalaya  ne 
laissent  aucun  doute  à  ce  sujet.  A  ces  époques,  les  eaux  marines 
couvraient  la  majeure  partie  des  continents  d'aujourd'hui,  l'Egypte 
n'était  pas  encore  formée. 


I.  Cf.  L.  Lartet,  Note  sur  la  formation  du  hassiit  de  la  nier  Morte.  {Bull,  de  la  Soc, 
^éol.  de  France,  2°  série,  t.  XXII,  p.  43i-434). 


16 


FORMATION  DE  L'EGYPTE 


Ces  océans  de  réorène  ont  laissé  clans  la  vallée  du  Nil  de  nom- 
breux témoins  de  leur  existence';  on  rencontre  leurs  dépôts  soli- 
difiés dans  les  environs  mêmes  du  Caire,  aux  Pyramides  de  Gui/.eh, 


Fig.  I.  —  Carte  des  lambeaux  éoccnes  dans  l'Asie  antérieure. 


au  Mokattam.  En  Haute-Egypte,  près  de  Béni-Hassan  et  sur  une 
quantité  d'autres  points,  ils  sont  remplis  de  nummulites,  de  ces  fora- 
minifères  si  caractéristiques  du  tertiaire  inférieur  etqui  permettraient 

I.  Coupe  de  l'éocène  en  Egypte  : 

(/l).  Couches  de  Sinuli  it  Nummulites  Fichleli,  Orhitoïdes  pnpyracea  (Eq.  Bartonien). 

(3).  Etage  du  Mokattam  à  Ninnm.  Gizehpnsis,  N.  ciiirispira  (Eq.  Lutétien). 

(2).  Etage  libyen  supérieur,  formé  des  couches  à  Cnllianassa  de  Sint  et  du   calcaire 

Alveolina  ohlonga  (Eq.  éocène  inférieur), 
(i).  Etage  libyen  inférieur  (5oo  mètres)  à  Niimm.Tiiarrilzensis,  N.  Tlnmondi,  Oper- 

cuUna  Liliycu,  Graphularia  desertorum  (Eq.  éocène  inférieur). 
(o).  Calcaire  glauconieux  à   Vêlâtes  Scluiiidelinna  (Mokattam)  (Eq.  éocène  inlVrieur) 
[d'après  M.  Mayer  Eymar]. 

(A.  do  Lapparent,  Traité  de  Géologie,  1893,  p.  I258.) 


CREUSEMENT  DE  I.A  VALT.ÉE  DU  ML 


17 


presque  aujourd'hui  de  li'iucr  sur  les  <:u'les  le  littoral  des  mers  où 
ils  vivaient. 

^r  Ce  n'est  que  plus  tard,  avec  Tapparilion  de  la  faune  miocène  dans 
les  mers,  que  s'est  constitué  lecoutinenl  (|ui  lut  l'origine  de  l'Egypte'. 
Cette  terre  s'étendait  alors  depuis  les  conlins  septentrionaux  de  la 
Palestine  jus(|u'au  haut  cours  du  /amhèse.  Klle  comprenait  la  Syrie, 


J 


T.  Granitique.      T.  Jurassique.      T.  Crétacé.         T.  Eocène.  T.  Miocène.         T.  t'iiocéne.      T.  Quaternaire. 

Fig.  2.  —  Carie  géologique  des  pays  égyptiens. 

la  Judée,  l'Arabie,  l'Egypte,  la  Nubie,  le  Soudan,  une  partie  de 
l'Abvssinie,  la  région  des  grands  lacs  et  de  grandes  étendues  dans 
l'Afrique  australe.  La  mer  Rouge  n'existait  pas  encore,  la  Palestine 
présentait  une  altitude  supérieure  de  501)  mètres  environ  à  celle  que 
possède  aujourd'hui  la  mer  Morte'.  Cet  état  de  choses  se  prolongea 
pendant  toute  la  durée  de  la  période  miocène  et  une  partie  du  plio- 
cène. 

Ce  continent  possédait  ses  montagnes,  ses  fleuves  et  ses  lacs,  de 


1.  TrisU-am,   The  Fituna  and  Flora  of  Ptilestlne  {iSH';). 

2.  A.  de  Lapparent,  Traité  de  Géologie,  iSg'S,  p.  i54i. 


18  FORMATION  DE  LKGYPTE 

vastes  forêts  s'y  développèrent  et  nous  trouvons  en  Egypte  leurs 
restes  pétrifiés  par  des  geysers  ';  de  nombreux  mollusf|ues  vécurent 
également  dans  ses  marais.  Dans  la  faune  de  la  Palestine  et  du  Wadi- 
Arabah  on  n'observe  qu'une  seule  espèce  appartenant  aux  rivières 
méditerranéennes;  tandis  que  deux  espèces  se  retrouvent  dans  le 
Nil,  que  dix-sept  appartiennent  au  sud-ouest  de  l'Asie  et  que  seize 
espèces,  bien  que  spéciales  à  ce  bassin,  présentent  de  grandes  analo- 
gies avec  la  faune  de  l'Afrique  centrale".  Cette  faune  malacologique 
présente  donc  des  caractères  communs  avec  celle  des  contrées  qui 
aujourd'hui  sont  voisines  de  l'Egypte;  elle  tenait  en  même  temps  de 
l'Afrique  et  de  l'Asie  :  fait  naturel,  puisqu'à  cette  époque  ces  deux 
grands  continents  étaient  reliés  entre  eux. 

Au  nord,  le  littoral  ne  correspondait  pas  à  la  côte  actuelle  ;  les 
couches  à  Clypeasler  que  nous  rencontrons  dans  la  partie  basse  de  la 
vallée  du  Nil,  près  de  Suez,  aux  lacs  de  Natron,  à  Guizeh,  à  l'oasis 
d'Ammon(Sivvah),  etc.,  montrent  qu'àl'époque  miocène  toute  la  Basse- 
Egypte  et  les  déserts  voisins  étaient  encore  plongés  sous  les  eaux 
marines.  Il  existait  donc  en  amont,  entre  le  Caire  et  Assouan,  un  seuil 
très  élevé  qui  empêchait  toute  communication  des  eaux  entre  la  mer 
et  le  bassin  lacustre  de  la  Palestine  et  des  grands  lacs. 

Ce  soulèvement,  qui  appartient  à  l'âge  tongrien,  fut  suivi,  après 
l'époque  pliocène,  d'un  affaissement  momentané  delà  majeure  partie 
de  l'Egypte  ;  il  se  forma  alors  un  golfe  profond  et  les  flots  de  la  mer 
s'avancèrent  jusqu'à  Assouan. 

La  mer  saharienne,  dont  l'existence  se  poursuivit  jusqu'aux  débuts 
de  l'ère  quaternaire', laissa  de  nombreuses  traces  de  son  passage  dans 


I.  La  pôlrificatioa  do  ces  forcis  semble  due  à  des  geysers  qui  se  seraient  fait  jour 
à  l'époque  saharienne  (K.  Fourtau,  Et.  géol.  sur  te  Gebel-Altmar,  dans  Bull,  de  Vins- 
litut  égyptien,  3*  série,  fascicule  n"  8,  déc.  i8g4).  Cf.  Mayer  Eymar,  Tongrien  et 
Ligiirie/i  d'Egypte  {Bull.  Soc.  géol.  Fr,,  3«  série,  t.  XX,  189a);  Comptes  rendus  de 
l'Institut  égyptien,  décembre   i8c)3. 

2.  Ed.  Hull,  Mount  .Seïr,  Sinai  and  Western  Palestine,  London  (iSgiS). 

3.  La  chaîne  d'Assouan  séparant  la  Nubie  de  l'Egypte  se  prolonge  en  se  retournant 
vers  le  nord  parallèlement  au  golfe  Arabique,  forme  l'épine  dorsale  de  l'Egypte  et 
donne  naissance  aux  massifs  du  Sinaï  et  de  l'Arabie  Pétrée,  de  manière  à  fournir  les 
traits  principaux  du  relief  actuel  de  ces  contrées.  Ces  roches,  qui  ont  fait  éruption  à 
des  époques  dilTéreutes,  se  pénétrant  les  unes  dans  les  autres,  appartiennent  au  por- 
phyre feldspathique,  au  granit,  à  la  syéuite,  au  gneiss,  aux  micaschistes,  aux  diorites 
porphyro'ides  et  grauito'ides,  aux  roches  amphiboliques,  talcschisteuses  et  serpenti- 
neuses,  et  même  aux  volcaniques  comme  le  trachyte  et  le  basalte  (P.  Cazalis  de  Fon- 
douce,  liech.  sur  la  géol.  de  VEgjpte,  1868,  p.  17).  Le  Haut-Soudan  est  formé  de 
roches  ignées,  granit  et  gneiss  qui  ont  soulevé  des  micaschistes,  des  grauwackes,  des 
grès  quarizeux,  des  argiles  bigarrées,  des  marues  compactes  et  des  agrégats  de   gros 


rHi:i:si:MKNT  nr,  r,A  vat.lkf  nu  ml  io 

le  pays  ontro  Io  Fayoum  et  la  mer  dans  le  désert  Libyqiic,  ainsi  ([n'aii 
pied  (Ida  chaîne  Aral)i(|iie,pays  où  Ton  rencontre  des  dépôts  sahariens 
renfermant  des  molliis(|iies  dont  plusieurs  espèces  vivent  encore  de 
nos  jours  dans  la  Méditerranée  et  la  mer  Rouge'. 

Entre  Assouan  ol  Ombos,  sur  la  rive  droite  du  Nil,  on  voit  encore 
de  véritables  falaises  jadis  battues  |)ar  les  vagues.  Leur  pied  est  en- 
combré de  blocs  usés  par  les  tempêtes.  Ces  rochers  portent  des  colo- 
nies nombreuses  de  mollusques,  parmi  lesquels  VOslrea  ciinillala 
est  fort  abondante.  Dans  les  sables  et  les  graviers  qui  jadis  formaient 
la  plage,  on  voit  en  quantité  les  débris  des  Cardium,  Conus,  Volula, 
Nalica,  etc.,  dont  la  présence  accuse  l'ancien  rivage. 

L'affaissement  de  la  partie  septentrionale  de  la  vallée  du  Nil  à  la 
fin  de  l'époque  pliocène  n'était  (jue  le  prélude  des  mouvements  qui, 
dès  le  début  du  pléistocène,  devaient  donner  à  cette  partie  du  globe 
les  grandes  lignes  de  sa  configuration  moderne.  En  effet,  c'est  vers 
cette  époque  que  la  mer  Rouge  se  forma  sur  l'emplacement  d'une 
vallée  antérieure  dont  le  fleuve  coulait  vers  le  nord,  que  les  plateaux 
de  Palestine,  dont  l'altitude  dépassait  500  mètres  environ,  s'abaissè- 
rent jusqu'à  394  mètres  (mer  Morte)  au-dessous  du  niveau  moyen 
des  mers,  que  le  golfe  saharien  de  l'Egypte  s'exhaussa,  que  les  chan- 
gements de  niveau  survenus  dans  les  régions  de  l'Afrique  centrale 
modifièrent  à  tel  point  le  régime  des  eaux  que  dès  lors  leur  écoule- 
ment se  lit  vers  le  nord". 

cailloux  siliceux  dans  lesquels  on  trouve  la  cornaline,  le  jaspe  et  l'onyx  (Figari-Bey). 
Au  Scnnaar,  au  Kordofan,  au  Darfour  et  à  la  frontière  de  l'Egypte  ou  rencontre  des 
grès  siliceux  secondaires  supportant  des  calcaires  tuffacés  crétacés  auxquels  suc- 
cèdent des  assises  tertiaires  et  notamment  un  grès  calcaire  d'eau  douce  que  Figari-Bey 
n'hésite  pas  à  considérer  comme  pliocène.  On  y  rencontre  des  bois  silicifiés  analogues 
à  ceux  de  la  Basse-Egypte,  ce  qui  permettrait  de  penser  qu'ils  appartiennent  aussi  au 
tongrien.  En  Abyssinie,  les  terrains  secondaires  et  tertiaires  sont  très  développés. 

1.  Le  Mokattam,  composé  d'assises  appartenant  aux  étages  de  l'éocène  inférieur  et 
supérieur,  montre,  à  sa  base,  des  restes  de  littoral  postérieur  et  des  pholades 
(G.  Schweinfurth,  Uebev  die  geologische  SchichtengUedcrung  des  Mokattam  heï  Cairo 
dans  Bull.  Soc,  géol.  d'Allemagne,  janv.  i883). 

2.  M.  R.  Fourtau,  qui  depuis  plusieurs  années  s'est  spécialisé  dans  l'étude  géolo- 
gique de  l'Egypte,  a  bien  voulu  résumer  pour  ce  volume  ses  opinions  sur  la  mer  sa- 
liarieune  et  m'a  donné  la  note  suivante,  qui  présente  un  grand  intérêt  parla  nouveauté 
des  interprétations  :  «  Tout  dernièrement,  à  Alexandrie,  M.  Karl  Abel  dans  un  forage  fait 
sur  les  bords  du  canal  Mahmoudieh,  entre  Hadra  et  Nouzha,  a  rencontré,  après  avoir 
traversé  une  couche  d'environ  27  mètres  de  sables  sahariens,  une  couche  d'argile  con- 
tenant quelques  débris  de  poterie  très  grossière  et  de  nombreux  échantillons  de  Cor- 
bicula  consohrina,  bivalve  actuellement  vivant  dans  les  eaux  du  Nil.  On  en  a  conclu 
peut-être  un  peu  trop  légèrement,  selon  moi,  que  le  Nil  coulait  déjà  dans  le  Delta 
avant  l'époque  saharienne.  A  mon  avis,  nous  devrions  interpréter  autrement  cette  trou- 
vaille. 


20  FORMA.Ï10X  DK  L'EGYPTE 

C'est  à  ce  dernier  bouleversement  que  l'Egypte  doit  son  origine;  le 

«  Eq  effet,  entre  la  période  paléolithique  et  la  période  néolithique,  la  science  observe 
dans  les  régions  tempérées  un  profond  hiatus  ou  lacune,  que  dernièrement  M.  Piette 
s'est  efforcé  de  combler  avec  l'assise  à  galets  coloriés  de  la  grotte  du  Mas-d'Azil,  assise 
récemment  découverte  et  étudiée  par  ce  savant.  Néanmoins  ce  retrait  dans  les  régions 
tempérées  de  l'homme  préhistorique  ne  peut  être  attribué  qu'aux  rigueurs  du  climat 
de  l'époque    glaciaire. 

«  Or,  cette  époque  glaciaire  ne  doit-elle  pas  son  origine  précisément  à  la  submer- 
sion de  la  zone  tropicale.  L'espace  qu'occupe  actuellement  le  Sahara,  au  lieu  de  former 
une  région  de  sables  arides  et  brûlants,  cause  de  la  chaleur  ardente  et  de  la  séche- 
resse des  vents  du  sud  actuel,  constituait  une  vaste  plaine  marine,  s'étendant  sur 
plusieurs  centaines  de  kilomètres  du  nord  au  sud  et  de  l'est  à  l'ouest.  Le  vent  du 
sud.  à  cette  époque,  absorbait  l'humidité  de  cette  immense  surface  et,  saturé  de  va- 
peurs aqueuses,  venait  se  briser  sur  les  Alpes  où,  repoussé  dans  les  hautes  régions 
de  l'atmosphère,  il  se  débarrassait  de  son  fardeau  humide  sous  forme  de  neiges.  Cette 
submersion  du  Sahara  correspondrait  ainsi  à  la  dislocation  de  la  grande  plate-forme 
indo-africaine  et  à  l'ouverture  de  la  mer  Rouge.  Les  traces  sahariennes  relevées  par 
MM.  Schweinfurth,  Johanncs  Walther,  Rikenberger  et  Mayer  Eyraar  dans  leurs  ex,- 
plorations  géologiques  en  Egypte,  traces  qui  remontent  .jusque  sous  le  parallèle  d'Ed- 
fou  dans  la  vallée  du  Nil,  et  il  semblerait  que  seul  le  massif  archéen  de  1  Etbaye  ait 
subsisté  dans  la  chaîne  Arabique,  les  limites  de  la  nier  saharienne  seraient  alors 
tracées  par  la  grande  vallée  de   fracture  de  l'Ouady  Kéneh. 

('  La  dislocation  du  bombement  archéen  dont  la  mer  Kouge  forme  l'axe,  correspond 
évidemment  avec  l'affaissement  qui  s'est  produit  contre  le  bord  plissé  de  l'Atlas  sa- 
harien, et  l'ouverture  de  la  mer  Rouge  aurait  inauguré  1  époque  glaciaire,  au  lieu  de 
lépoque  pliocène,  comme  le  prétend  M.  de  Lapparent  [Gcographip physique).  L'isole- 
ment du  massif  bartonien  et  pliocène  de  la  Marmarique  et  du  Mariout  aurait  été  pro- 
duit, à  cette  époque,  de  même  que  le  golfe  du  Delta. 

ti  La  concordance  de  la  faune,  ajoutée  à  la  découverle,  sous  a^  mètres  de  sables  saha- 
riens, de  la  couche  d'argile  à  Corhicula  consohrina,  nous  permet,  d'établir  que  l'unité 
du  grand  territoire  de  dislocation  était  encore  intacte  avant  la  période  glaciaire.  Et 
si  le  Polyptenis  Bicliei,  caractéristique  du  Nil  actuel,  se  trouve  encore  dans  le  lac  de 
Tibériade,  si  le  crocodile  vit  encore  de  nos  jours  aux  environs  de  Césarée,  de  même 
qu'une  espèce  de  tortue  égyptienne  aux  environs  de  Beyrouth  (Blanckeuhorn,  Richto- 
fen's  Festschrift),  nous  trouvons  en  revanche  le  Spalax  typhlus  du  Liban  dans  les 
plaines  du  Mariout  et  les  Cyprinodon  des  bords  de  la  mer  Morte  dans  les  sources  de 
la  côte  ouest  du  Sinaï,  et  peut-être  aussi,  d'après  les  dires  des  Bédouins,  dans  celle  de 
la  chaîne  Arabique  qui  confine  à  la  mer  Kouge.  La  présence  actuelle  des  mollusques 
d'eau  douce  du  Nil,  tels  que  la  Corhicula  consobiinci  et  la  Melania  tuberculata,  dans 
les  lacs  de  l'Arabie  Pétrée,  n'ajoute  pas  grand'chose  à  l'affirmation  précédente,  étant 
donné  le  grand  nombre  d'oiseaux  migrateurs  qui  fréquentent  ces  régions  et  la  faible 
distance  qui  sépare  j^our  ces  grands  voiliers  les  rives  du  Nil  des  marais  du  Hedjaz 
et  du  Sinaï.  Mais  de  là  à  en  conclure  à  l'ancienneté  de  la  présence  du  Nil  dans  la 
vallée  d'Egypte,  il  y  a  encore   loin, 

«  Le  Nil  n'est  entré  dans  la  vallée  d  Egypte  qu'après  l'époque  saharienne;  il  serait 
facile  de  le  démontrer,  si  le  cadre  d'une  simple  note  ne  s'y  opposait,  et  les  débris  de 
la  faune  d'eau  douce  pré-saharienne  qu'il  contient  encore  sont  ceux  qui  ont  sub- 
sisté dans  le  Soudan  supérieur  et  l'Abyssinie,  après  la  grande  dislocation  de  la  plate- 
forme indo-africaine.  » 


CKKUSEMENT  DE   I.A  VAI.I.Hl'    I)i:  .MI. 


Fiii;.  3.  —  Carie  du  cours  acluel  i!u  Nil  et  du  Bahr-Bala-Mà 


22  FORMATION  DE  L'EGYPTE 


Nil,  encore  indécis  sur  la  direction  définitive  qu'il  prendrait  ',  coula 
peut-être  pendant  quelque  temps  plus  à  l'ouest  et  creusa  un  lit  au- 
jourd'liLii  aljandonné  que  les  Arabes  désignent  sous  le  nom  de  Balir- 
Bala-Mà  ',  ou  fleuve  sans  eau,  puis  ajant  rompu  le  barrage  granitique 


I.  Le  cours  du  Nil  est  semé  d'obstacles  que  le  fleuve  dut  briser  les  uns  après  les 
autres  pour  creuser  sa  vallée.  Voici,  d'après  Linand  de  Bellefond,  la  liste  des  cata- 
ractes qui  se  trouvent  entre  Assouan  et  Khartouni  :  i^Assouan  (5", 85,  de  pente  sur  loki- 
lomctres  de  parcours);  2°  Wadi-Kalfa  (8  mètres);  3°  Semné  ;  4°  Amboucot;  5°  Tan- 
gouri  ;  6°  Cheikh-Okaché  ;  -"  Dal  ;  8°  Caybar  ;  çf  Fareg  et  Ali-Bersi  ;  io°  Ilannek  ;  1 1°  pays 
des  Chakiehs;  12°  Mclek-Dafasir;i3<>Boni  ;  14°  Mograte  près  d'Abou-Akhmed  ;  iSoAbra- 
chim  ;  16°  Baguerré  ;  17"  Driki  ;  iS"  El-Homar;  ig°  entre  Berber  et  Kharloum.  — 
Tous  ces  rochers  sont  de  l'ormalion  cruplive  (granit,  porphyre,  basalte). 

2.  «   Sortant  des  lacs  du  plateau  central  de  l'Afrique,   le  Nil  trouva  dès   sou  origine 
une  barrière  dans  la  chaîne  syéuitique  d'Assouan,  qui  s'étend  entre  le  3o«  et  le  32'  de- 
gré de  longitude  est.  Retenu  ainsi   à  un  niveau    bien  supérieur  à  son  niveau  actuel,  ce 
fleuve  s'est  dévié  vers  l'occident   et   coulait   à    travers    la  Libye.  Il  fécondait  alors  de 
ses  eaux  bienfaisantes  cette  région   aujowrd  hui  déserte  et   dans  laquelle  la  ligne  plus  . 
ou  moins  continue   des  oasis    est  la   seule  trace  de  son  passage,  avec  le  lit  desséché 
du  Bahr-Bala-Mà,    nom  expressif  qui  signifie   «   fleuve  sans   eau    «   (Cazalis   de  Fon- 
douce.  Rech.  sur  la  géol.  de  l'Egypte,   p.  2:t).  C'est  probablement   à  la  fin  de  l'époque 
saharienne  que  le  Nil  a  commencé  de  couler  dans  son  lit  actuel  et  peut-être  bien  que, 
pendant  longtemps,   les  eaux  se  partagèrent,  surtout   à  l'époque  de   la  crue,  entre  les 
deux  lits,  mais  bien  antérieurement  à  l'époque  historique,  le  cours  oriental  avait  pré- 
valu. Toutefois  on  trouve  encore  dans  les  rochers  de  la  cataracte  des  traces  du  passage  du 
fleuve  à  un  niveau  bien  supérieur  à   celui  qu'il  possède   aujourd'hui.   C'est   ainsi   que 
certaines  anfractuosités  renferment,  à  10  mètres  de  hauteur  au-dessus  des  eaux  de  la 
crue,    des  limons    et  des   coquilles  uilotiques   telles  que    VEtheria.  Mariette   [Instit. 
égypt.,  séance  du  5    déc.  1873)  croyait  que  le  Bahr-Bala-Mà  avait   été   habitable,  et  il 
attribuait  à  la  ferlililé   qu'il   lui  supposait,  si  jamais  elle  a  existé,   une  antiquité    bieu 
moins  reculée  qu'elle  ne  le   fut  en  réalité  :  11    L'Egypte   serait  de  formation  beaucoup 
plus  récente    (que    le    Bahr-Bala-Mà)   et    aussi    M.   Mariette    ne  pense-t-il  pas  qu'on 
puisse  y  rencontrer  des   antiquités    préhistoriques   :   car    relativement   à  elle,  c'est  le 
Bahr-Bala-Mà    qui    représente   l'âge     auté-historique,   et   c'est  là  seulement,   dans    la 
vallée  primitive  du   Nil,   qu'on  pourra   rencontrer  les   restes  de  cet  âge.  »   Il  se  peut 
qu  on  rencontre  un  jour  des  traces  de  la  période  néolithique  dans   la  haute  vallée  du 
fleuve  sans  eau,  bien  que,  pour  ma  part,  je  ne  le  pense  pas;  mais  les  assertions  si  po- 
sitives de  Mariette  sont  loin  d'être  justifiées  et   1  antiquité  de  la  vallée  actuelle  du  Nil 
est  si  reculée  que  les  âges  historiques  ne  sont  rien  en  comparaison  de  son  ancienneté. 
Pendant  le  cours  d^uu  récent  voyage  (iG  mars-4  avril  i8g6) que  j'ai  fait  au  Bahr-Bala- 
Mà  dans  le  but  d'étudier  les  conditions  dans  lesquelles  cette  dépression  s'est  formée, 
j'ai  parcouru  200    kilomètres  environ    de   cette  vallée,  entre  le    Fayoum   et  l'oasis  de 
Baharieb,    nulle  part   je    n'ai  rencontré  île  limons   renfermant  des   mollusques   fluvia- 
tiles,  ni  de  traces    de  l'existence  humaine.  Malgré   des  recherches    très   suivies,  je  ne 
me  suis  jamais  trouvé  qu'en  face  des  couches   sédimeutaires  marines   (éocène  et  mio- 
cène) et  des  alluvions  du  diluvium.  J'y  ai  relevé  les  deux   coupes  que  je  douue  ci-après 
(fîg.  4et5). 

Le  fond  du  Bahr-Bala-Mà,  se  trouvant  sensiblement  au-dessous   du   niveau   moyeu 
des  pays  voisins,  est  flanqué  sur   ses    deux  rives   de   ravins   profonds   qui,  à  l'époque 


CKIX'SEMENT  DlC   F, A  VALLEE  DU  ML 


23 


de  Sj'ène,  il  s'élança  dans  la  vallée.  (iiTii  suit  encore  de  nos  jours,  la 
creusa,  fixa  son  lit  et  en  apportant  les  limons  des  hauts  [lays  créa 
rÉgyple(ng.3). 


Fig.  4  et  5.  —  Coupes  de  la  valide  du  Bahr-Bala-Mà,  prises  à  environ  loo  kilomètres 
au  nord  de  l'oasis  de  Baharieh. 

E,    sédiments    éocènes.    —    </,    alluvions    caillouteuses    du    diluvium.   —    L,    limons 
apportés  par  les  pluies.  —  e,  éboulis  des  falaises.  — s,  sables  apportés  par  le  veut. 

Je  n'ai  pas  à  entrer  ici  dans  le  détail  des  causes  qui  déterminèrent 
au  début  de  l'époque  pléistocène  les  courants  intenses  auxquels  sont 


Désert  Libyque. 


C/iaine    araôique. 


ValUe  du  NU 


Fig.  6,  — •  Coupe  transversale  de  l'Egypte,  d'après  Figari-Bcy. 

(/,  Alluvions  nilotiques.  —  p,  pliocène.  —  m.  miocène.  —  e,  éocène.  —  c,  crétacé.  — 
J,  jurassique.  —  <,  grès  rouges,  marnes  bigarrées  et  marnes  irisées.  —  ;■(?,  roches 
éruptivos  (eurite,  diorite,  syénite,  etc.).  —  T'a-,  euphotides,  diallages,  mélaphyres, 
talschistes,  etc.  < 

dues  les  érosions  de  la  vallée  du  Nil.  On  admet  généralement  que  les 
inondations  successives  du  quaternaire  lurent  dues  à  la  fonte  des  gla- 


des  crues  diluviennes,  permettaient  aux  eau\  de  se  réunir  dans  son  chenal.  Grâce  à 
cette  importante  différence  de  niveau,  une  humidité  relative  persiste  toujours  au  fond 
de  l'ancien  cours  d'eau  et  l'on  y  voit  des  espaces  considérables  couverts  de  brous- 
sailles. Malgré  cela,  la  vallée  de  Bahr-Bala-Mà  ne  semble  pas  avoir  été  suivie  par 
des  courants  lents  analogues  à  ceux  du  Nil  et  apportant  des  limons.  L'homme  n'a 
donc  jamais  pu  y  vivre,  et  l'opinion  de  Mariette,  au  sujet  des  âges  préhistoriques,  doit 
être  rejetée.  Peu  de  temps  après  les  érosions  diluviennes,  le  Bahr-Bala-Mà  s'est 
trouvé  à  sec,  tout  au  moins  dans  la  partie  basse  de  sa  vallée;  les  pluies,  entraînant  les 
roches  délitées  des  ravins,  sont  venues  ensuite  couper  de  monticules  le  fond  de  la 
vallée;  les  dunes  ont,  à  leur  tour,  apporté  de  nouveaux  obstacles  à  l'écoulement  des 
eaux,  et,  de  nos  jours,  le  Bahr-Bala-Mà  se  décompose  eu  une  infinité  de  petits  bassins 
où  se  réunissent  les  eaux  pluviales  et  dont  les  lacs  sont  à  sec  pendant  tout  I  été. 


24  FOKMATIO.X  DE  I, 'EGYPTE 

ciers.  11  iinpoiie  sculoniciit  pour  l'Egypte  d'en  constaler  les  effels'. 
Lors  du  creusement  des  vallées,  le  débit  des  cours  d'eau  était  jjien 
plus  considéral:)le  qu'il  n'est  aujourd'hui".  Pour  la  Seine,  il  était  dix  fois 
plus  fort;  pour  les  autres  fleuves,  la  proportion  est  souvent  plus  consi- 
dérable. Ce  débit  était  loin  d'atteindre  la  régularité  qu'il  possède  de 
nos  jours.  Les  crues  étaient  très  intenses,  très  fréquentes  et  par  suite 
le  travail  tles  eaux  eut  une  action  incomparablement  plus  puissante 
qu'il  ne  l'aurait  aujourd'hui  '. 


1.  M.  Roland,  combattant  les  théories  de  M.  Pomel  sur  les  dépôts  sahariens,  s'ex- 
prime ainsi  au  sujet  des  alluvions  qui  couvrent  les  pays  du  sud  du  Maroc,  de  l'Algé- 
rie et  de  la  Tunisie  :  «  Malgré  leur  extension  et  leur  puissance,  laquelle  dépasse 
peut-être  3oo  mètres  dans  certaines  régions,  osl-il  impossible  d'expliquer  leur  for- 
mation par  des  phénomènes  purement  diluviens?  Il  suffit  d'admettre,  à  cette  époque, 
au  Sahara,  une  grande  abondance  de  précipitations  atmosphériques,  dont  il  serait  sans 
doute  difficile  de  trouver  l'équivalent  dans  les  phénomèmes  actuels,  mais  dont  les 
chutes  de  pluies  torrentielles,  qui  ont  lieu  dans  certaines  régions  tropicales,  peuvent 
donner  une  idée  »  (La  mer  saharie.ine,  par  G.  Roland,  dans  la  Revue  scientifique  du 
6  déc.  i884). 

2.  Quantité  annuelle  dus  pluies  dans  le  bassin  du  Nil  : 

Kilni.  carrés.         ftauteur  de  pluie.  Cube  de  pluie, 

m  m.  cub. 

1"  Au  sud  de  l'équateur  .      .      .      .  l[\n.hl{i  0,47  (>i).'i[\!\.-l-] 0.000 

2»  Equateur 34'>.o3i  1,90  658.408.900.000 

3"  Abyssinie  et  Gondokoro  .     .     .         6G3.33i  1,90  1.260.328.900.000 

4°  Kassala  et  Balir-Gazcl.     .     .     .         409.824  0,94  385.234. 560. 000 

5"  Khartoum 487.180  0,47  228.974.600.000 

6°  Nord  de  Khartoum 593.176  0,24  142. 362. 240.000 

y°  Nubie  et   Egypte 8.")n.O')n  0,00  000.000.000.000 

Totaux  .     .     .     3.497.583  Moïekke  0,78  2.744.6S3.470.f)oo 

(D'après  Wilcocks,  Egypt  irrig.,  p.  3o.) 

3.  «  A  la  fin  du  miocène,  tout  le  nord  du  continent  africain,  à  très  peu  près,  était 
immergé,  et  depuis  lors,  pendant  le  pliocène  et  le  quaternaire,  les  contours  du  littoral 
méditerranéen  n'ont  pas  sensiblement  varié.  —  A  partir  de  cette  époque,  l'histoire 
de  la  géologie  de  ce  continent  n'est  autre  eu  quelque  sorl3que  l'histoire  de  son  climat. 
En  effet,  la  grande  formation  qui  recouvrit  ensuite  une  partie  des  étendues  saha- 
riennes «  dont  l'immensité,  dit  M.  Pomel,  confond  l'imagination,  >>  n'est  autre  qu'une 
formation  d'atlerrissement  d'origine  continentale.  Qu'il  s'agisse  de  dépôts  de  transport 
ou  de  dépôts  lacustres,  ils  sont  dus  à  des  eaux  diluviennes.  Leur  cube  énorme  in- 
dique, comme  agents  d'ablation,  de  transport  et  d'alluvionnement,  des  volumes  d'eau 
également  énormes,  et,  par  suite  des  précipitations  atmosphériques  d'une  extrême 
aboudauce.  Un  climat  très  humide  régnait  alors  au  Sahara,  aujourd'hui  la  partie  la 
plus  sèche  du  globe.  — Lors  de  l'avènement  de  ce  régime  climatérique,  non  seulement 
le  massif  montagneux  de  l'Atlas  était  émergé,  mais  encore  les  traits  les  plus  impor- 
tants du  relief  du  nord  du  continent  africain  étaient  déjà  esquissés,  ainsi  que  les 
grands  bassins  entre  lesquels  se  répartit,  à  cette  époque,  l'écoulement  des  eaux  dilu- 
viennes. La  grande  période  humide  de  l'Atlas  et  du  Sahara  s'est  ensuite  poursuivie 
jusqu'à  la  fin  des  temps  quaternaires  »  (La  mer  saharienne,  par  G.  Roland,  dans  la 
Revue  scientifique  du  6  décembre  i884]. 


CREUSEMENT  DE   LA  VAI.T,|-,I-    DT  XU, 


25 


Le  désert,  les  plus  haiils  |>l:il('aii\,  srmt  couvcrls  de  galets  roiilcs, 
déljris  des  rochers  I)risés  loi's  du  t-i'eusemcnl  des  vallées.  Parfois  ces 
graviers  sont  recouverts  de  sable  fin,  laissé  après  chaque  inondation 
par  les  couranis  dont  l'intensilé  décroissait  rapidemcmt.  Mais  dans  la 
plupart  des  cas  ces  sai)lcs  ont  été  arracliés  par  h;  vcnl.  (>e  sont  eux 
qui  forincnl  aujourd'hui  les  dunes  mobiles  du  désert.  Ce  sont  (-es 
mêmes  sables  qui,  a[)rès  avoii' été  produits  par  les  eaux,  obéissent  au- 
jourd'hui au  moindre  souffle  de  brise  et  parcourent  des  espaces  im- 
menses. 

Bien  que  le  travail  violent  des  eaux  soit  terminé  en  Egypte,  il  est 
cependant  des  cas  où  l'on  peut  juger  de  l'activité  et  de  la  puissance 
des  courants  dans  le  désert.  Cha(|ue  année  il  tombe  au  Caire  ou  dans 
les  environs  des  pluies  d'orage  plus  ou  moins  violentes  et  pendant 
l'une  d'elles  j'ai  eu,  en  novembre  1895,  l'occasion  de  me  trouvera 
Dahchour. 

Depuis  trois  jours,  la  ville  du  Caire  avait  été  littéralement  noyée 
sous  un  déluge.  Quand  je  la  quittai  pour  me  rendre  au  désert,  celte 
pluie  reprit  encore  plus  violente  que  les  jours  précédents.  Les  collines 
de  Dahchour  furent,  pour  ainsi  dire,  vernies  par  une  couche  d'eau 
épaisse  de  deux  ou  trois  centimètres  qui  n'avait  pas  le  temps  de 
s'écouler  pendant  que  d'autres  gouttes  venaient  l'alimenter.  Chaque 
ravin  était  devenu  un  torrent  impétueux,  chaque  vallon  un  véritable 
fleuve  transportant  des  galets  de  plusieurs  kilogrammes. 

L'une  de  ces  vallées,  située  entre  le  mastaba  El-Faraoun  et  la  pyra- 
mide de  Pepi,  présentait  un  courant  large  de  400  mètres  environ  et 
profond   de   O^jSO.   L'inondation  ne    dura   que  quelques  heures,  et 


Kig.  n.   —  Coupe  longilud'inalo  d'un  couc  de  sable  produit  par  les  pluies  et  recouvrant 

les  limons  du  Nil. 


C,  cône 


!_,,  limons.  —  H,  couches  miocènes. 


cependant,  à  l'embouchure  du  vallon,  il  se  forma  un  cône  de  sables 
et  de  graviers  couvrant  plus  de  30  hectares.  Les  cultures,  les  jar- 
dins furent  enterrés  sous  plus  d'un  mètre  de  débris  (fig.  7). 

Ailleurs,  dans  la  nécropole,  des  ravins  profonds  se  creusèrent;  les 
momies,  arrachées  du  sol,  furent  transportées  au  loin  ;  des  puits  an- 
tiques se  trouvèrent  comblés,  les  murailles  en  briques  crues  s'écrou- 


26  FORMATION  DE  T/EGYPTE 

lèrent  et  leurs  déljris  enlraînés  par  les  eaux  dessinèrent  de  longues 
traînées  noires  sur  le  sable  jaune  du  désert. 

La  pluie  avait  atteint  une  abondance  extrême,  je  ne  saurais  mieux 
la  comparer  qu'à  celle  des  orages  tropicaux,  et  cependant  le  dé- 
sert était  à  peine  mouillé  :  en  creusant  de  0"',20  ou  0",25  dans  le 
sable  on  retrouvait  la  sécheresse  habituelle.  Les  effets  de  la  pluie 
avaient  été  d'une  extrême  violence  à  la  surface,  ils  n'avaient  rien  pro- 
duit en  profondeur.  Les  infiltrations  avaient  été  insignifiantes,  l'éva- 
poration  presque  nulle  par  suite  de  la  rapidité  des  courants.  La 
quantité  d'eau  tombée  avait  donc  agi  sur  la  surlace  avec  toute  l'in- 
tensité dont  elle  était  capable. 

Cet  exemple  récent  montre  avec  quelle  force  durent  travailler  les' 
courants  du  pléistocène  lorsqu'à  chaque  inondation  ils  se  précipi- 
tèrent dans  la  vallée  inachevée  du  Nil.  11  explique  également  la  pré- 
sence dans  un  pa^'s  oii  il  pleut  si  rarement  des  gorges  profondes  et 
abruptes  qui  bordent  sui-  les  deux  rives  la  grande  vallée. 

C'est  de  la  destruction  desrocliessituéesenamontdupoint  où  on  les 
examine  que  les  galets  diluviens  onttiré  leur  origine.  Les  sédiments 
friables,  tels  que  les  calcaires,  les  marnes,  les  argiles,  ont  été  réduits 
à  l'état  pulvérulent,  tandis  que  les  nodules  siliceux  se  sont  seuls  con- 
servés. C'est  ainsi  que  se  sont  formés  les  graviers  du  diluvium 
d'Europe,  d'Asie,  d'Amérique;  c'est  aux  mêmes  causes  que  nous  de- 
vons ceux  de  l'Egypte.  Et  de  même  que  les  alluvions  quaternaires  des 
autres  parties  du  monde  renferment  des  restesde  l'industrie  humaine, 
de  même  ceux  de  l'Egypte  contiennent  des  instruments  en  pierre 
taillée. 


CHAPITRE    II 


Formation  des  parties  fertiles  de  l'Egypte. 


La  vallée  du  iNil,  creusée  par  les  courauts  dont  il  vient  d'être  parlé 
était  loin  de  présenter  l'aspect  qu'elle  nous  offre  aujourd'hui.  Le  lit  du 
fleuve,  comprenant  toute  la  largeur  de  l'érosion  pendant  les  crues, 
n'était  plus,  aux  basses  eaux,  qu'un  chenal,  encombré  de  blocs  déta- 
chés des  montagnes,  de  galets  et  de  cailloux  roulés,  au  milieu  duquel 
le  Nil  s'étendait  sans  rives  nettement  tracées,  sans  persistance  dans 
le  détail  de  la  direction  de  son  cours. 

Les  inondations  périodiques  devaient  achever  l'œuvre  que  les 
grands  écoulements  d'eau  avaient  commencée,  d'abord  en  égalisant 
les  pentes,  ensuite  en  déposant  des  sédiments  plus  fins  dans  les  cavi- 
tés et  entre  les  galets,  et  enfin,  quand  le  lit  du  fleuve  futdéfinitiveinent 
établi,  en  apportant  ses  limons'  qui  depuis  des  milliers  d'années 
surélèvent  le  solde  la  vallée  et  donnent  à  l'Egypte  sa  fertilité'. 


r.  L'examen  des  limons  du  Nil  comimuiiqués  à  Sclilœsiiig  (^Biill.  Iristilut  égypi., 
1887,  p.  75)  a  fourni  les  résultats  suivants  : 

(Par  traitement  mécanique)  :  cailloux  et  graviers,  néant;  gros  sable,  20  pour  100; 
sable  fin,  Sg  pour  100;  Argile,  ar  pour  100. 

(Par  traitement  chimique)  :  silice,  5o,4o  ;  potasse,  1,10;  soude,  i,2o;  chaux,  f^.jo: 
magnésie,  3, 20;  alumine,  19,80;  sesquioxjdede  fer,  ir.70  ;  acide  carbonique,  0,91  ;  acide 
phosphorique,  0,08;  eau  combinée  et  matières  organiques  8,20.  (Total  :  101,29.) 

2.  Altitudes  principales  de  la  vallée  du  Nil  depuis  son  embouchure  à  Damictte  et 
Rosette  jusqu'aux  grands  lacs  :  Beni-Souef,  23  mètres  ;  Minieh,  3,5  ;  Siout,  45  ;  Louxor, 
76  ;  Assouau,  82  ;  PhiL-e.  lor  ;  Wadi-Iîalfa,  128;  El-Ordeh,  2o3  ;  Vieux-Dongolah,  2/|0  ; 
Berber,  35o;  (Bahr-el-Abiad)  Khartoum,  385;  Lado,  4f)o  ;  Bedden,  5oo  ;  Doufile,  620; 
Wadelaï,  670;  Albert-Nyanza  (lac),  700;  'Victoria-Nyanza  (lac),  1200;  (Bahr-el-Azrek) 
Sennaar,  43o  ;  Roseres,  45o  ;  Famaka,  5oo;  lac  Tana,  1,750  mètres. 


28  FORMATION  DES  PARTIES   FERTILES 

Le  golfe  dans  lequel  le  Nil  déhouchait  alors  à  la  mer  sétait  formé 
dès  l'époque  de  la  mer  saharienne.  Avant  même  que  le  fleuve  eût 
commencé  de  couler,  ce  golfe  devint  son  estuaire  qui,  comblé  par 
les  alluvions,  se  transforma  en  delta.  Il  y  a  donc  dans  la  vallée  du 
Nil  deux  parties  distinctes  à  étudier  :  la  vallée  proprement  dite  et  le 
delta.  Toutes  deux  doivent  à  la  même  cause  leur  existence;  elles  l'ont 
reçue  des  limons  du  Nil,  mais  dans  la  première  les  alluvions  se  dépo- 
sèrent librement  dans  un  chenal,  tandis  que  dans  la  seconde  elles 
eurent  à  lutter  contre  la  mer,  à  remplir  le  golfe  du  Caire. 

La  succession  qu'on  observe  quand  on  vient  à  couper  les  alluvions 
anciennes  d'une  rivière  est  en  général  la  suivante  :  à  la  base,  on  trouve 
une  nappe  plus  ou  moins  épaisse  de  gros  gravier  qui  représente  le  tra- 
vail du  cours  d'eau  pendant  la  période  d'égalisation  de  sa  pente,  après 
le  creusement  principal;  puis  viennent  des  bancs  de  sable  maigre 
entremêlés  de  lits  de  galets,  c'est  l'œuvre  de  la  rivière  alors  que  sa 
pente  était  déjà  fort  réduite  ;  ces  sables  maigres  sont  recouverts  d'une 
couche  plus  ou  moins  épaisse  de  sables  gras  apportés  par  les  crues 
alors  que  le  régime  des  eaux  était  établi;  enfin  viennent  les  limons  de 
débordement,  dépôts  très  fins,  jamais  zones,  dus  à  la  précipitation  des 
flocons  tenus  en  suspension  dans  l'eau  plutôt  qu'à  la  sédimentation. 
Leurs  éléments  résultent  de  la  trituration  des  matières  arrachées  à 
la  <nivette  de  la  rivière. 

Dans  une  section  de  la  vallée  il  est  à  remarquer  que  si  le  lit  du 
fleuve  n'a  pas  cliangé  de  place  depuis  l'époque  des  érosions,  les 
alluvions  placées  aux  environs  de  l'axe  du  cours  d'eau  sont  toutes 


Fit:;.  S.   —  Coupe  tliéorique  de  la  vallée  du  Nil  à  l'état  actuel. 

N,  lil  du  Nil.  —  a,  limons  fins.  —  \>,  sables  argileux.  —  c,  sables  maigres.  —  d, 
graviers  et  galets  du  fond.  —  s,  kom  (butte)  de  sébakh  (ruines  de  ville  antique). 
—  e,  canal  naturel.  — •  r,  assises  sédimenlaires. 


sédimentaires,  c'est-à-dire  composées  de  sables  fins,  tandis  que,  sur 
les  rives,  au  pied  des  montagnes,  se  trouvent  les  dépôts  par  précipi- 
tation, les  limons  les  mieux  triturés  (fig.  8). 

11  résulte  de  ce  dispositif  que  le  lit  du  fleuve  s'élève  plus  rapide- 
ment que  les  alluvions  des  bords  de  la  vallée  et  que  par  suite  il  se 
crée  à  droite  et  à  gauche  deux  bandes  de  marais  dont  le  comblement 


FORMATIOX   DI'S  l'AKTIl'.S  ll'.KTIT.KS 


•29 


nu  se  l'iiiL  ([u'avcc  une  exti-ônie  lenteur,  parfois  môme  il   se  «tcm!  des 
bras  latéraux  au  pied  îles  iiionlaniies  (lig.  ',•)'. 


piir_  q.  Coupo  UM'Hiriciuo  Je  la  vallée  (lu  Nil  pendanl  la    période  de  son   remplissage 

par  les  allnvioiis. 

E,  lit  du  fleuve.  —  m,  marais.  —  c,  galets  et  graviers  du  fond.  —  rf,  sahles  maigres 
et  sables  argileux.  —  li.  lits  successifs  de  sables  lins  et  de  limons.  —  /(,  lits  suc- 
cessifs du  fleuve.  —  a,  limons  fins  des  marais  avec  plantes  et  mollusques  la('uslres. 
r,  assises  sédlmenlaires  (cuvette  de  la  vallée). 

Les  bords  des  cours  d'eau  à  grands  débordements  ne  se  couvrent 
presque  jamais  de  végétation  sous  nos  latitudes,  c'est  dans  les  marais 
latéraux  que  se  développent  les  plantes  lacustres;  leur  présence  est 
un  facteur  puissant  clans  le  comblement  de  ces  dépressions. 

Les  lois  que  je  viens  d'exposer  sont  celles  qui  ont  régi  la  création 
des  parties  fertiles  dans  la  vallée  du  Nil.  Les  sondages  eU'ectués  stir 
plusieurs  points  en  donnent  la  preuve.  Restent  à  citer  quelques 
exemples  pris  dans  l'Egypte  même  et  à  calculer  la  vitesse  avec 
laquelle  le  phénomène  s'est  accompli. 

Bien  que,  parla  règlemenlatiim  artificielle  de  l'inondation,  parla 
création  des  innombrables  canaux  qui  couvrent  l'Egypte,  la  vallée 
du  Nil  ait  depuis  des  milliers  d'années  perdu  ses  caractères  naturels 
que  ses  eaux  endiguées  soient  contraintes  à  transporter  leurs  limons 
sur  tels  ou  tels  districts,  nous  n'en  trouvons  pas  moins  au  pied  des 
montagnes  les  dépressions  dont  je  viens  de  parler.  Au  nord  du  vil- 
lage d'Abou-Sir,  au  sud  de  celui  de  Saqqarah,  ces  terrains  conservent 
de  l'eau  pendant  neuf  mois  de  l'année.  Entre  les  villages  de  Mencliiyeh 
(Dahchour)  et  de  Maharraq  (Licht)  sont  encore  de  véritables  marais 
qui  ne  s'assèchent  jamais.  Jadis,  bien  certainement,  ils  étaient  beau- 
coup plus  étendus,  et  au  début  du  remplissage  de  la  vallée  par  les 
limons  ils  occupaient  la  majeure  partie  de  l'espace  compris  entre 
les  deux  montagnes. 


i.  A  partir  de  Silsileli  la  vallée  renferme  à  l'ouest,  au  pied  de  la  chaîne  Libyque,  les 
restes  d'une  branche  latérale  du  fleuve.  Ce  canal  naturel  porte  divers  noms,  suivant  le 
point  de  la  vallée  qu'il  arrose.  Du  village  deDéroùt  au  Fayoum  qu'il  alimente,  il  porte 
le  nom  de  Bahr-Youssef  ;  en  aval  ce  n'est  plus  qu'une  dépression  qui,  restant  à  sec 
pendant  la  moitié  de  l'année,  passe  entre  les  ruines  de  Memphis  et  sa  nécropole,  longe 
les  collines  de  Guizeh  et  va  se  perdre  dans  le  Delta. 


30  1  OlîMATION  DKS  PARTIES   FERTIF.ES 

«  Les  prêtres,  qui  connaissaient  par  tradition  l'état  primitif  du  pays, 
croyaient  pouvoir  déterminer  avec  certitude  l'espace  de  temps  qui 
avait  suffi  au  fleuve  pour  accomplir  ce  travail.  Ils  racontaient  à  Héro- 
dote '  que  Mènes,  le  premier  des  rois  de  race  humaine,  avait  trouvé 
l'Egypte  presque  entière  j)longée  sous  les  eaux  :  la  mer  pénétrait 
jusqu'au  delà  de  l'emplacement  de  Mcmphis,  en  pleine  Heptanomide 
et  le  reste  du  pays,  moins  le  nome  de  Thèbes,  n'était  qu'un  marais 
malsain  °.  » 

Ils  avaient  conservé  la  bonne  tradition,  les  prêtres  égyptiens,  car, 
six  ou  sept  mille  ans  avant  nous,  les  marais  latéraux  du  Nil  occu- 
paient bien  certainement  des  surfaces  considérables;  la  plupart  des 
villes  s'élevèrent  au  début  sur  des  îlots  ou  sur  des  langues  de  terre, 
qui,  peu  à  peu,  furent  reliées  au  reste  du  pays  par  l'exhaussement  du 
sol  et  le  remplissage  des  marais. 

Mais  avant  d'envisager  les  débuts  de  la  période  historique  et  de 
nous  baser  sur  les  affirmations  des  anciens  auteurs,  mieux  est  de  faire 
usage  des  documents  positifs  dont  nous  disposons  pour  le  calcul  de 
la  surélévation  séculaire  du  fond  de  la  vallée. 

Les  limons  du  Nil  ne  se  déposent  pas  d'une  manière  régulière  en 
tous  les  points  de  la  vallée  et  à  chaque  crue  du  fleuve,  car  chaque 
année  la  quantité  des  matières  tenues  en  suspension  dans  les  eaux 
est  variable,  de  même  que  le  courant  et  la  quantité  d'eau  ^  de  même 


r.  Hérodote,  II,  xvn. 

2.  G.  Maspero,  Hist.  crue,  des peuplos  de  l'Orient,  i(S86,  p.  7. 

3.  Dans  le  haut  Nil,  les  pluies  toraboat  à  dilTérentes  époques  de  l'année  dans  les 
diverses  régions.  Ainsi,  au  sud  du  lac  Victoria,  elles  sont  abondantes  de  novembre  à 
juillet;  au  nord  du  même  lac,  c'est  en  décembre  et  janvier  qu'elles  sont  les  moins 
fortes  ;  chez  les  Niam-Niams,  il  pleut  d'avril  en  novembre  ;  sur  le  Bahr-el-Ghazal,  c'est, 
au  sud,  du  la  avril  au  i5  septembre,  et  au  nord,  du  i.")  juillet  au  3o  septembre,  que  se 
montre  la  saison  des  pluies,  tandis  qu'au  Kordofan  elle  a  lieu  du  1^'  juillet  au  i5  sep. 
tembre.  Ces  tombées  diverses  régularisent  quelque  peu  le  débit  du  fleuve.  Mais  ce 
sont  les  grands  lacs  qui  jouent  le  rôle  le  plus  important  comme  régulateurs.  Le  Nil 
Bleu  reçoit  les  eaux  qui  tombent  en  Abyssinie  depuis  le  mois  de  mai  jusqu'au  i5  sep- 
tembre. En  i86r-6a,  Samuel  Baker  (Mém.  lu  à  la  session  de  l'Association  britannique 
pour  l'avancement  des  sciences,  tenue  à  Nottingham  en  1866),  constata  que  le  Nil  Bleu 
et  l'Atbarah  sont  complètement  à  sec  pendant  une  portion  de  l'année.  Le  23  juin  1861, 
le  voyageur  vit  arriver  le  flot  causé  par  le  commencement  de  la  saison  des  pluies  en 
Abyssinie  et  le  lit  desséché  quelques  jours  auparavant  se  transforma  en  une  im- 
mense rivière  de  7  mètres  environ  de  profondeur  et  de  ."loo  mètres  de  largeur.  A  Gou- 
razah,  S.  Baker  atteignit  le  pays  où  l'Atbarah  enlève  par  ses  érosions  une  partie  des 
limons  qu'il  dépose  en  Egypte.  Son  eau  est,  dit-il,  aussi  épaisse  que  de  la  crème.  Ce 
sont  ces  boues  qui  produisent  le  phénomème  du  Nil  rouge,  tandis  que  le  Nil  vert  qui 
le  précède  est  causé  par  1  écoulement  des  eaux  marécageuses  du  Nil  Blanc.  Puis  après 
Je  Nil  rouge,  la  crue  se  régularise   et   les    eaux  présentent  à   peu   de   chose  près  une 


FORMATION  DF.S  PARTIES  l'KRTII.r.S  31 

que  l'espace  où  les  eaux  cliiKiiidalion  peuvent  se  répandre.  11  n'est 

teneur  eoiislaiite  en  limons.  —  On  rcm.Trque  souvcnl  que  la  crue  présonlo  deux 
maxima  plus  ou  moins  distants  l'un  de  l'aulre.  Ce  fait  est  dû  an  défaut  de  coïnci- 
dence dans  la  saison  des  pluies  au  Nil  Bien  cl  au  Nil  lîlanc. 

La  liste  suivante  des  hauteurs  maxima  et  miuinia  observées  au  barrage,  de  184G  à 
1878,  montre  combien  les  crues  du  Nil  sont  variables  comme  hauteur  et  comme 
intensité. 

T.cs  hauteurs  d'oan  cjui  suivent  (ml  été  prises  au  barraj^e  situé  en  aval  du  Caire, 
le  o  du  niloraètre  correspondant  à  i;>."',ori  au-dessus  du  niveau  do  la  Méditerranée 
(cf.  Mémoires  de  l'Institut  égyptien,  p.  ii.i). 

Maxima.  Minima. 


1846  —  7,a4 

i5  octobre 

—  o,5o 

io-i5  juin. 

1847  —  ''.43 

5  octobre 

—  0,Gr 

5  juillet. 

1848  —  7,53 

10  octobre 

—  o,3i 

3i  mai. 

1849  -  7,3,'-, 

10  octobre 

—   0,41 

i5-ao  juin. 

i85o  —  0,9.5 

25  septembre 

—   o,5o 

3i  mai. 

i85i  —  7, -55 

5  octobre 

—  o,3i 

a5  juin. 

i85a  —  (),oi 

5  octobre 

—  o,5o 

5  juin. 

i853  —  7,67 

5  octobre 

—  o,25 

i5-3o  juin. 

1854  —  7,5o 

10  octobre 

—  0,1  S 

20  juin. 

i855  -   5,94 

10  septembre 

—  0,88 

ao  juin. 

1806  —  7,46 

5  octobre 

—  0,35 

10  juin. 

1857  —  6,09 

i5  septembre 

—  ",4(5 

25  mai-io  juin . 

i858  —  6,07 

5  septembre 

—  0,06 

3i  mai-5  juin. 

1859  —  5,90 

3i   octobre 

—  0,00 

ao   mai. 

1860  —  7,27 

20  octobre 

—  0,00 

lO  juin. 

1861  —  7,63 

5  octobre 

—  o,5o 

10  juin. 

1862  —  6,65 

25  octobre 

—    1,25 

20  juin. 

i863  —  7,73 

25  septembre 

—   i,3o 

3i  mai. 

1864  -    "1,80 

20  septembre 

—   i,4o 

3i  mai. 

iSGS  —  6,52 

25  septembre 

—   0,88 

3i  mai. 

1866  —  7,76 

3o  septembre 

—  0,70 

25  mai. 

1867  —  6,38 

25   septembre 

—  0,66 

i5  mai. 

18G8  —  5,83 

35  octobre 

—  o,6->. 

i5  mai. 

1869   —  7,85 

i5  octobre 

—  0,4a 

i5  juin. 

187,,  —  7,50 

i5   octobre 

-  o,5i 

25  juin. 

1871  —  7,48 

20  octobre 

-  ".74 

to  juin. 

1872  -  7,32 

a5   septembre 

—     0,/|0 

t5  juin. 

1873  —  6,45 

ao  octobre 

—  0,49 

20  juin. 

1874  -   7,98 

3o  septembre 

-  o,a3 

5  juin. 

1875  —   7,i5 

20   septembre 

—  0.45 

20  juin. 

1876  —  7,5o 

a5  septembre 

-  0,4s 

25  juin. 

1877  —  5,i8 

3i   août 

-  0,54 

i5  juin. 

1878  —  8,20 

10  octobre 

-  0,1', 

ao  juin. 

Les 

minima  varient  entre  le 

r5  mai  et   le  ag  j 

iuin  et  les 

;    maxima  entre  1 

bre  et 

le  20  octobre. 

32 


FORMATION  DES  l'ARTIES  FERTILES 


donc  pns  possible  d'établir  une  loi  pouvant  s'appliquer  aussi  bien  à 

Thèbes  qu'à  Memphis,  à 
Syène  qu'à  Tanis  ou  à  Sais 
dans  le  Delta.  La  surélévation 
du  sol  est  variable,  mais  il  est 
aisé  d'établir  une  moyenne 
approximative,  d'après  la 
hauteur  au-dessous  des  eaux 
du  dallage  des  divers  monu- 
ments que  nous  a  laissés  l'an- 
tiquité '. 

La  salle  hypostyle  du  tem- 
ple d'Esneh,  construite  sous 
les  empereurs  romains,  est 
adossée  à  la  façade  d'un  édi- 
fice plus  ancien  bâti  par  les 
Ptolémées  ;  le  niveau  de  son 
dallage  fut  donc  fixé  tout  au 
plus  deux  ou  trois  siècles 
avant  notre  ère,  et,  à  cette 
époque,  il  devait  être  situé  à 
une  assez  grande  hauteur  au- 
dessus  des  hautes  eaux.  Or, 
aujourd'hui,  les  infiltrations, 
chaque  année,  l'inondent.  En 
1887,  la  hauteur  de  l'eau  l'ut 
de  l™,35;en  1891,  elle  n'attei- 
gnait que  O^jBO,  et  pendant 
l'automne  de  1894  elle  dé- 
passa quelque  peu  1  mètre. 
Le  temple  tout   entier  est  au- 


Equateur 


SoohI  sud 


F  it;.   10.  —   Carte  moiiti-aiit   It'S  quanlitcs 
annuelles   des  pluies  dans   le  bassin  du  Nil. 


I.  D'après  Cazalis  de  Fondouce  (lïccherclies  sur  la  géologie  de  VÉgypte,  i8G8),  le 
Nil,  à  l'époque  de  ses  basses  eaux,  débite  de  6  à  700  mètres  cubes  par  seconde,  et  de 
9  à  10,000  à  l'époque  de  ses  plus  hautes  eaux.  Son  débit  annuel  est  de  90  kilomètres 


cubes,   son    apport   en    limons  de 


de  ses  eaux,  dont  quatre  cinquièmes  sont  em- 


portés à  la  mer.  La  surélévation  séculaire  du  Delta  est  de  o™,i2  à  o",i/|  corres- 
pondant à  36  millions  de  mètres  cubes  de  dépôts  en  cent  ans.  D'après  les  travaux 
plus  récents  du  Service  des  irrigations  (Rapports  annuels),  le  débit  exact  du  Nil  au 
Caire  est  de  92, gif), 000, 000  mètres  cubes  par  an.  Le  maximum  se  trouvant  pendant 
les  mois  de  septembre  et  d'octobre  (675,000,000  mètres  cubes  par  24  heures)  et  le  mi- 
nimum en  mai  et  juin  (34,000,000  mètres  cubes  par  \>.\  heures). 


FORMATION  DES  PARTIES  FERTILES 


33 


rig.   II.  —  Carte   de    l'Égyplo   montraut  les   points  où  ont  été  faites  les  observations 
relatives  à  raccroissemeut  du  niveau  dans  la  vallée  du  Nil. 


34  FORMATION  DES  PARTIES  FERTILES 

jourd'liLii  enfoui  sous  les  couches  de  sébahh  '  des  diverses  époques; 
les  maisous  actuelles  de  la  ville  sont  construites  sur  ses  terrasses. 

Les  étangs,  dus  aux  inlUlrations,  on  le  sait,  ne  s'élèvent  jamais  à  la 
hauteur  des  eaux  de  la  crue,  seule  riiumidité  dépasse  ce  niveau  par 
capillarité.  Il  est  donc  impossil^le  de  tirer  des  données  fournies  par 
le  temple  d'Esneh  des  conclusions  exactes,  la  constatation  du  niveau 
des  eaux  dans  ses  salles  permet  seulement  de  reconnaître  d'une  façon 
générale  le  fait  de  la  surélévation  du  sol. 

A  Thèljes,  dans  la  vaste  plaine  qui  s'étend  à  droite  et  à  gauche  du 
Nil,  le  niveau  des  terres  s'est  aussi  sensiblement  relevé,  et  comme 
les  diverses  j)arties  des  monuments  sont  datées,  les  renseignements 
que  nous  fournit  la  hauteur  actuelle  des  eaux  sont  fort  précis. 

Le  dallage  le  plus  ancien'  que  nous  connaissions  dans  le  temple 

1.  Le  séhakh,  ])roJuil  résultaut  de  l'accumuLitiou  des  issues  dans  les  villages,  pré- 
seule  une  compositiou  variable  suivaut  les  localités  où  il  esl  examiné.  Il  renferme  :  de 
la  silice,  provenant  des  poussièi-es  amenées  par  le  vent,  des  briques  crues  faites  de 
boue  du  Nil,  du  passage  des  hommes  et  des  animaux;  de  l'alumine,  la  plupart  du  temps 
de  même  origine  que  la  silice;  de  la  chaux,  de  la  magnésie,  de  l'acide  phosphorique 
et  de  l'azote,  causés  par  les  déjections  animales.  La  teneur  en  chaux  varie  de  i  à  20 
pour  100.  Celle  en  magnésie  de  3  à  4  pour  100,  celle  en  azote  deo,i5à2,i7.  Le  sébakh 
renferme  en  outre  des  débris  de  bois,  de  pierres  et  des  tessons  de  pots.  Il  comjjose  en 
presque  totalité  les  honis  ou  ruines  de  villes  antiques  tels  que  ceux  de  Memphis  (à 
Mit-Rahineh),  de  Médinet-Habou,  d'Esneh,  etc.  Dans  ces  koms  sont  en  même  temps 
que  les  ruines  des  grands  édifices  celles  des  simples  maisons  qui,  construites  les  unes 
au-dessus  des  autres  par  suite  de  la  surélévation  graduelle  du  sol,  ont  parfois  atteint  le 
niveau  supérieur  des  temples  les  plus  élevés  (Louxor,  Médinet-Habou,  Esneh,  Aby- 
dos,  etc.).  Au  moyeu  Age  il  s'est  formé  aux  approches  du  Vieux-Caire  de  véritables 
montagnes  de  sébakh  provenant  de  la  ville.  Aujourd'hui  encore  chaque  village  produit 
annuellement  une  quaulité  considérable  de  sébakh  qui  relève  son  niveau.  —  Les  koms 
sont  utilisés  par  les  fellahs  pour  l'engi'ais  des  terres  :  le  sébakh  tamisé  est  répandu 
sur  le  sol.  Tous  les  koms  sont  ainsi  exploités  ;  à  Mit-Rahineh,  entre  autres,  on  voit  par- 
fois défiler  jusqu'à  mille  chameaux  chargés  de  sébakh.  Ces  fouilles  mettent  à  nu  les 
divers  étages  de  constructions  dans  les  ruines  des  villes  ;  elles  se  font  pendant  les  mois 
qui  suivent  la  crue  et  sont  descendues  jusqu  au  niveau  des  eaux.  —  k.  Memphis,  les 
maisons  les  plus  anciennes  dont  on  rencontre  les  ruines  au-dessus  des  eaux  appar- 
tiennent tout  au  plus  à  l'époque  sa'ite.  Les  étages  plus  anciens  sont  aujourd'hui  hors 
d'aUeinte,  entre  2'",5o  et  '3",5o  au  dessous  du  niveau  des  eaux,  pour  la  période  des  Ra- 
messides, entre  ^'"jSoet  T)  mètres  pour  le  Moyeu  Empire,  entre  6  et  10  mètres  pour  les 
premières  dynasties  et  l'époque  préhistorique. 

2.  Altitudes  absolues  des  temples  de  Louxor  et  de  Karuak  :  m. 
Louxor.  Dallage  devant  l'entrée  du  temple  de  Louxor '4''^4 

—       de   la  cour  dite   «  des  statues  »  de   Ramsès   II,  entre    les 

deux  pylônes 74j73 

—  de  la  cour  d'Auiénophis  III,  nord 75,56 

—  —  sud yfi.^g 

—  Salle  liypostyle 7^.96 


FORMATION  DES  PARTIES  Kl'.lîTU.ES  35 

de  Loiixor  est  celui  des  conslriictions  dues  au  roi  Amenhotep  III  de 
la  XVIII"  d\  nastie  ;  on  le  trouve  dans  les  salles  du  sud,  dans  la  salle 
liyposlylo  et  dans  la  grande  ctdonnade.  Or,  aujourd'hui  les  eaux  du 
Nil  entrant  librement  s'élèvent  de  ()"',SU  à  0"','JÔ  dans  les  salles  méri- 
dionales, de  0"',85  à  1">,00  dans  la  salle  hyposlyle,  et  de  2"', 35  à  2™, 75 
dans  les  deux  extrémités  de  la  grande  colonnade. 

Dans  la  cour  des  statues,  bâtie  par  Ramsôs  II  (XIX"  dynastie),  l'eau 
monte  jusqu'à  2™, 85,  tandis  que  dans  le  petit  temple  de  la  même  épo- 
que le  niveau  supérieur  des  inondations  est  de  2™, 08  au-dessus  du 
dallage. 

En  restaurant  le  sanctuaire  et  en  y  posant  les  dalles  sous  Alexan- 
dre II  jEgos,  on  tint  compte  de  la  surélévation  des  terrains;  aussi 
n'avons-nons  aujourd'hui  que  U'",48  d'eau  au  dessus  du  dallage  placé 
trois  siècles  avant  notre  ère. 

Il  en  fut  de  même  lorsque,  au  début  du  christianisme,  le  sanc- 
tuaire païen  fut  transformé  en  église  chrétienne;  le  dallage  copte  qui 
rej^ose  sur  les  dalles  d'époque  pharaonique  n'est  aujourd'hui  (^ouvert 
que  de  0"',10  d'eau. 

Au  temple  de  Karnak,  les  eaux  ne  pénètrent  pas  directement  dans 
le  temple,  elles  y  parviennent  par  infiltrations,  leur  niveau  est  va- 
riable suivant  les  années.  En  1894,  elles  se  sont  tenues  à  0'",47  au- 
dessous  du  niveau  relevé  en  1887. 

Les  diverses  salles  du  temple  de  Karnak  présentent  à  peu  de  choses 
près  les  mêmes  hauteurs  d'eau  pendant  les  inondations;  ce  fait  sem- 
blerait iudicjuer  que,  lors  des  dernières  constructions,  les  inhltrations 
n'avaient  pas  encore  atteint  le  dallage  des  parties  les  plus  anciennes. 
Voici  les  hauteurs  des  infiltrations  dans  les  salles  principales  du  mo- 
nument : 

Pylône  des  obélisques  de  Thoutmès  P'"  (XVIII^  dynastie),  l'°,57. 
Promenoir  de  Thoutmès  III  (XVIIP  dynastie),  1"',02. 
Salle  hypostyle  de  Séli  P'' (XIX"  dynastie),  1"",45. 
Temple  de  Séli  II  (XIX=  dynastie),  O", 69. 
Pylône  de  la  XIX'^  d-ynastie,  l^jGB. 
Grand  pylône  de  l'ouest  (XVIP  dynastie),  U"',00. 
Grande  cour  de  Taharka  (XXV  dynastie),  1™,55. 
La  partie  la  moins  ancienne  du  temple  qu'atteigne  l'inondation  est 
située  aux  chambres  de  granité  dues  à  Philippe  Ht  Aridée  :  l'eau  s'y 
élève  à  l'",30.  Nous  pouvons  compter  qu'à  l'époque  de  leur  construc- 

lU 

Karnak.  Repère  B  à  l'entrée  du  grand  temple  de  Karnak  (ouest)      .     .     .  y8,i5o 

Dallage  de  la  cour  entre  le  premier  et  le  deuxième  pylône.     .      .  7-'(,25 

Terrains  de   culture  voisins  du  temple 77,250 

(D'après  Ventre- Pacha.) 


36  FORMATIOX  DF.S  PAUTIFS  FERTILES 

lion  In  niveau  moyen  des  eaux  était  à  0°',70  au  moins  au-dessous  du 
dallage,  ce  qui  nous  iournirait  pour  les  2000  ans  qui  nous  séparent 
de  sa  pose  une  surélévation  niinima  de  2  mètres  par  mille  ans,  c'est- 
à-dire  de  O^jOOi  par  an. 

Le  même  coefficient,  étant  adopté  pour  les  autres  parties  du  temple, 
fournirait  la  hauteur  au-dessus  des  hautes  eaux  à  laquelle  le  dallage 
de  chaque  salle  aurait  été  posé. 

Ainsi,  le  pylône  des  obélisques  qui  fut  construit  par  Thoutmès  I", 
3600  ans  avant  nous,  aurait  eu  son  dallage  placé  à  2", 03  au-dessus  des 
eaux  de  la  crue. 

Pour  le  promenoir  de  Thoutmès  III  nous  trouvons  2"',58. 

Pour  la  salle  hypostyle  de  Séti  I",  1",90. 

Pour  le  temple  de  Séti  11,  2°', 06. 

Pour  le  pylône  de  la  XIX"  dynastie,  1"',69. 

Pour  la  grande  cour  de  Taharka  (XX V*"  dynastie),  l'^^OB. 

Les  mêmes  calculs,  faits  sur  les  données  fournies  par  le  temple, 
montrent  que  les  dallages  les  plus  bas  posés  à  la  XVHP  dynastie 
l'eussent  été  à  0'",85  seulement  de  hauteur  au-dessus  des  hautes  eaux 
et  ceux  de  la  XIX°  dynastie  à  0°',40.  Ces  résultats  semblent  démontrer 
que  l'évaluation  de  O^jOOl  par  an'  pour  la  surélévation  du  sol,  tout  en 
étant  proche  de  la  vérité,  lui  est  quelque  peu  inférieure,  car  il  n'est 
guère  admissible  que  les  architectes  égyptiens,  qui  avaient  connais- 
sance de  la  surélévation  de  la  vallée,  eussent  placéà0'°,40  seulement 
au-dessus  des  eaux  de  leur  époque  le  dallage  d'un  monument  aussi 
important". 

Sur  la  rive  gauche  du  Nil,  dans  la  plaine  de  Gournah,  le  même  phé- 
nomène est  à  observer.  Les  colosses  de  Memnon,dus  à  Amenholcp  III, 
s'élèvent  pendant  les  mois  d'août  et  de  septembre  au  milieu  de  l'im- 
mense lac  que  forme  alors  la  plaine.  La  base  parée  de  leur  socle  est 
aujourd'hui  à  3"', 25  au-dessous  des  plus  hautes  eaux  du  Ail  et  les 
terres  ont  atteint  1"','J0  au-dessus  du  niveau  oii  se  trouvait  autrefois 
le  dallage. 


1.  Lo  fond  du  fleuve  subit  un  exhaussement  moindre  que  celui  des  terrains  de  cul- 
ture. Ce  fait  tient  au  dépôt  lent  des  limons  qui  pendant  la  crue  du  Nil  se  tait  dans  les 
bassins  où  les  eaux  sont  retenues.  Ventre-Paclia  trouve  pour  celle  élévation  du  fond 
du  Nil  o™,og6  par  siècle  à  Thèbes,  et  pour  l'exhaussement  des  terrains  de  culture 
o",i43.  Ces  calculs  l'amènent  à  déduire  que  le  sol  naturel  de  Karnak,  2800  ans  avant 
nous,  se  Irouvail  à  i  mètre  au-dessous  du  niveau  du  dallage  du  grand  temple. 

2.  Les  derniers  travaux  effectués  au  temple  de  Karnak  ont  mis  a  jour  un  quai  an- 
tique situé  à  l'extrémité  de  l'avenue  des  Sphinx  de  la  grande  salle  hypostyle.  Sur  la 
muraille  verticale  faisant  face  au  Nil  sont  graves  les  divers  niveaux  atteints  par  la 
crue  entre  les  années  960  et  (547  avant  notre  ère.  Voici,  d'après  M.   G.  Legrain,  qui  a 


FoisMATinx  i)i:s  i-AirriKS  ffhtim'S  37 

Jndis  r.'s  colosses   oiiiaieiit   l'cnln-c    d'im    Icmple    oonslinil     par 


i-elevc  et  traduit  ces  insciiplioiis.  le  liiljlc.ui  ilos  clilIVrL'iilcs  liaiilciirs  ;illoiiilcs  parles 
eaux.  Ces  observations  montrent  eoniiiicn  dans  l'antiquité  les  inondations  étaient 
variables  d'inlensilé  el  aussi  couihieii  p(<u  l'accroissement  des  limons 
par  les  anciens. 

(JiKii  (le  h'm iiii/..  Coli-s  di;s  <-rui'.s. 
\.v   o  est  le  dalla},'e  de  la  salle  hyposivie. 


iivait  été  prévu 


Aï.  J.-C.     XoM  m:  ROI 


(j(îo 

Slieslianq   l"'". 

;)2i 

Osorkou  I"'. 

«<)5 
«63 

Takhelot  I". 
Osorkon  II. 

8(ii 

860 

854 
854 
85.3'? 

845 
844 
838 

837 

Aouaroli. 

Suiendès. 

Un  fils  d'Osorkoii. 

Id. 

7!)'l 

Sheshanq  II. 
Sheshanq  III. 

Sheshanq  .r. 

760 

747 

Padoubast. 

747 
743 
698 

Shabaka. 

(iS; 
(>87 
G8(i 
(iS(i 
1)84 
656 
655 

649 
647 


Shabatoka 
Tahraka. 


Ps 


ametiqne. 


Osorkou  ?? 
Osorkon. 
Id. 


A.N.M 

VI 

XII 

V 

VI 

III 

V 

VI 

XII 

XII 

x  +  III 

XXI 

XXII 

XXVIII 

XXIX 

x 

V 

VIII 

XIV 

X 

X 
X 

XXXIX 

VI 

XII 

VI 

XVI 

XIX 

XIX 

XXIII 

II 


III 

VI 
VI 
VII 
VII 
IX 
X 
XI 
XVII 
XIX 

III 

a;  + VI 
X  +  .r 


+ 

m 
0,07 
0,0j) 

0,785 
0,1 85 
o,i5 
0,25 
0,1 5 

0,27 

0.715 

0,16 


0,67 
0,10 
0,20 
0,09 

0,23 


0,29 

0,23 
0,04 
0,395 
0,84 

0.77 
0,22.1 
0.28 
0,28 
0.46 
0,285 
0,1 55 
0,25 
Douteux 


0,2  I 
0,355 


o>i9 

0,29 

0.2G 
0,345 

0,38 
o,5o 
0,92 


o ,  [  5 

0,33 
0,18 
0,435 
0,42 


0,185 

0,24 

o,325 


peut-être  Osorkon. 


ri  o  u  t  (_' 


Premiers    prophètes 
irAuiouetlilsd'Osorkon. 


20    coudées,   I    palme, 
I  doigt. 

2o  coudées,  ■>,  palmes. 


20  coudées,  5  doigts. 


Observation.  —  La  chronologie  de  cette  époque  est  loin  d'élre  solidement  établi.'. 
Nous  donnons  les  dates  que,  dans  The  Nile,  M.  Budge  assigue  aux  didérents  souverains 
sans  vouloir  en  tirer  aucune  conclusion  relativement  à  leur  valeur  absolue. 


38  FORMATIOX  Dl'S  l'AUTIKS  FERTILES 

Amciiholop  III.  Ce  monument  est  aujourd'hui  totalement  détruit  et 
son  dallage  demeure  profondément  enfoui  sous  les  terrains  de  cul- 
ture. 

Au  temple  de  Ramsès  III,  l'inondation  atteint  O'^jiBS  au-dessus  du 
dallage.  Quant  aux  autres  édifices  dedournah,  aux  temples  de  Thout- 
mès,  d'Amenhotep  III,  de  Gournah,  de  Médinet-IIabou,  de  Déïr-el- 
Bahri,  ils  sont  encore  en  dehors  de  l'atteinte  des  crues. 

Les  divers  monuments  de  Thèbes  n'avaient  pas  été  construits  au 
même  niveau,  de  sorte  que,  malgré  les  nombreuses  données  qu'ils 
nous  fournissent,  il  n'est  pas  possible  de  déterminer  d'une  manière 
précise  l'exhaussement  du  sol.  Toutefois  si  nous  acceptons  comme 
un  minimum  0",001  par  an,  épaisseur  qui  se  montre  satisfaisante 
pour  le  temple  de  Karnak,  nous  voyons  que  les  constructions  les  plus 
anciennes,  celles  de  la  IV°  dynastie,  si  toutefois  il  en  a  jamais  existé 
à  Thèbes,  doivent  se  trouver  sous  au  moins  6  mètres  de  limons. 

Des  observations  analogues  à  celles  que  je  viens  d'exposer  au  sujet 
de  la  Thébaïde  peuvent  également  être  faites  dans  les  ruines  de 
Momphis.  Le  niveau  des  eaux  dans  le  temple  de  Ptah  nous  fournit  une 
indication  précieuse  sur  la  valeur  des  dépôts  dans  les  environs  du 
Caire.  Ledallage,  quifut  placé  environ  3200  ans  avant  nous,  est  aujour- 
d'hui à  1",20  au-dessous  des  plus  hautes  eaux,  nous  pouvons  suppo- 
ser que,  lors  de  sa  construction,  il  se  trouvait  à  2  mètres  au  moins 
au-dessus  du  niveau  des  crues,  ce  qui  nous  donne,  à  Memphis  comme 
dans  la  plaine  thébaine,  un  accroissement  séculaire  de  G™, 10. 

Hérodote  lui-même  nous  fournit  une  preuve  foi't  ancienne  de  l'ex- 
haussement delà  vallée  du  Nil.  Il  nous  apprend  queSabacos  (Shabakou 
de  la  XXV  dynastie)  employa  les  forçats  à  relever  le  niveau  de  la  ville 
de  Buljaste,  alors  menacée  par  les  eaux.  Or  Bubaste,  au  dire  de  Ma- 
néthon,  existait  déjà  sous  le  roi  Kakôou  de  la  II®  dynastie,  c'est- 
à-dire  G500  ans  avant  nous  environ,  et  4000  ans  avant  Sabacos.  L'ex- 
haussement du  sol  avait  été  de  4  mètres  au  moins  pendant  le  laps  de 
temps  qui  sépare  la  IL  de  la  XXV  dynastie,  on  comprend  que  les 
eau.x  soient  devenues  menaçantes  pour  la  ville. 

Après  avoir  examiné  la  structure  des  alluvions  dans  la  vallée  du 
Nil,  leur  mode  de  dépôt  et  le  temps  nécessaire  pour  ce  travail  lent,  il 
reste  à  étudier  la  formation  du  Delta  qui  représente  le  type  le  plus 
simple  de  remplissage  d'un  estuaire'. 

I.  Ou  voit  eucore  près  de  Beuha  dos  restes  de  dunes  fort  ancieuuss  qui  marquent  la 
limite  d'un  des  premiers  deltas  de  l'Egypte.  Il  existe  probablement  un  grand  nombre 
de  ces  cordons  littoraux,  mais  leurs  dernières  traces  sont  aujourd'hui  cachées  sous  les 
limons.  Les  sondages  exécutes  près  de  Tantah  en  1896  par  M.  Kar  Alhal  ont  donné  la 
coupe  suivante  :   («)   limon   lin,  y^Syï   (niveau    actuel  de   la   Méditerranée  à   7"',58  au 


FORMATION   DKS  l'ARTIKS  rRRTHJ'S 


39 


l'aiini  timles  les  ibfinalioiis  de  cegeni't'  il  n'en  esl  aiicimc  c(iii  ait  un 
dessin  pins  régidier  :  c'est  un  Iriangh^  à  Inise  eonvexe  dont  le;  som- 
met, centre  de  dii'anialion  du  llcu\e,est  situé  près  du  Caire,  à  200  ki- 
lomètres   de    la   cùte.  Tout  cet   espaci',    aujourd'hui   coml)lè  pai-  les 


Fig.  13.  —  Carte  du  delta  du  Nil. 

alluvions',  esl  parcouru  par  une  infinité  de  dérivations  dont  deux  seu- 
lement sont  importantes,  la  branche  de  Rosette  à  l'ouest  et  celle  de 
Damiette  à  l'est". 

Dans  l'antiquité,  le  Nil  portait  ses  eaux  à  la  nier  Méditerranée   et  à 


dessous  de  la  surface);  (i)  sable  composé  de  grains  variant  de  o""",io  à  :i  niiUiuiélres 
cl  graviers  de  a  à  6  millimètres,  i3™,49;  (c)  terre  argileuse,  2™,o6;  (d)  sable  jaunàiro 
renfermant  des  grains  de  o™™,io  à  a  millimèlres  et  graviers  de  2  à  25  millimètres, 
II™, 3o  (profondeur  totale  3u  sondage  26'", 70).  Ces  résultats  semblent  démontrer  qu'il 
existait  autrefois  près  de  Tantah  des  dunes  (/()  ou  une  plage  qui  par  suite  de  l'allais- 
sement  du  sol  a  commencé  de  se  recouvrir  de  limons  environ  yooo  ans  avant  nous.  Ces 
données  n'ont  rien  de  surprenant  quand  on  songe  que  Lyell  assigne  à  la  formation  du 
delta  du  Mississipi  une  durée  d'environ  100,000  ans  et  à  l'antiquité  de  l'homme 
5o,ooo  ans.  —  Des  sondages  exécutés  dans  la  plaine  de  Guizeh  ont  amené  la  découverte 
des  sédiments  pliocènes  marins  à  Ci  pieds  de  profondeur  sous  les  limons  et  les 
sables. 

1.  A  l'époque  d'Hérodote  (II,  xv,  xvii,  xcvii)  le  centre  de  diramatiou  du  Delta  se 
trouvait  au  bourg  de  Kerkasore,  à  (ï  kilomètres  environ  du  site  actuel  de  la  ville  du 
Caire.  Depuis,  il  s'est  déplacé  vers  le  nord  de  i5  kilomètres  environ. 

2.  A.  de  LapparenI,  Traite  de  Céoli)i;i(',  iSf|3,  p.  218. 


40 


FORMATION  DES  PARTIES  EERTILES 


la  mer  Rouge  '  par  sept  branches  au  moins,  suivant  Hérodote  '',  v\  qua- 
torze, d'après  Pline^  selon  les  époques.  Presque  tous  ces  canaux 
naturels  sont  aujourd'hui  oblitérés;  la  branche  Pélusiaque  elle-même, 
l'une  des  plus  importantes,  a  cessé  d'atteindre  la  mer;  elle  débouche 


Suac/ri.    Jf    fie 


:':-iim 


Fig.  i3.  —  Courbes  des  hauteurs  dans  le  delta  du  Nil. 

dans  le  lac  Menzaleh  à  f|uelques  kilomètres  en  aval  de  San-el-Hagar 
(Tanis). 

Le  littoral  du  delta  l'orme  une  courbe  convexe,  sur  un  quart  seule- 


1.  Une  bi-anclie  du  Nil  débouchait  autrefois  à  Chalouf  dans  le  golfe  formé  par  la 
raer  Rouge  (lacs  Amers  d'aujourd'hui).  On  trouve  eu  elTet  près  d'ismaïliah  des  couches 
d'eau  douce  renfermant  VEtheria  Ciiilliaudi  et  des  Cyclostomidés.  Lepère  est  d'avis 
qu'à  l'époque  d'Hérodote  les  lacs  Amers  n'existaient  pas  encore.  Quant  à  l'existence 
au  début  de  notre  période  d'une  communication  entre  la  mer  Rouge  et  la  Méditerra- 
née par  l'isthme  de  Suez,  elle  était  autrefois  admise.  D'après  Filippi  (Atti  délia  So- 
cielà  italiana  di  se.  nainrali,  vol.  VII,  p.  aSo,  Milan,  i86't),  la  proportion  des 
mollusques  communs  entre  les  deux  mers  est  de  2.S  pour  loo  pour  les  bivalves  et  de 
i6  pour  100  pour  les  gastéropodes.  Le  seuil,  pensait-on,  s'était  formé  à  l'époque  his- 
torique et  l'on  supposait  même  qu'à  l'époque  de  l'Exode  la  marée  de  la  mer  Rouge 
se  faisait  encore  sentir  dans  les  lacs  Amers.  Ce  seuil  est  composé  de  sédiments  pléis- 
locènes.  Les  récentes  études  semblent,  au  contraire,  prouver  que  cette  communication 
n'eut  jamais  lieu,  car,  à  l'époque  des  rivages  soulevés,  la  faune  de  la  mer  Rouge  était 
tout  à  fait  différente  de  celle  de   la  mer  Méditerranée. 

2.  Hérodote,  II,  xvii. 

3.  Pline,  Hi.st.  liai  ,  V,   lo. 


FORMATION  DES  PARTri'S  l^ERTIF.ES  Vl 

meiil  (le  son  c-lendiie,  c'est-à-dire  depuis  le  cap  Koiirlos  jusqu'à  Da- 
niielte,cettecôte  est  appuyée  contre  les  alluvions  du  fleuve. Partout  ail- 
leurs elle  se  compose  uiiicpicuneiit  de  dunes  peu  épaisses  séparant  de 
la  mer'  les  lagunes  dites  lacs  Mareolis,  d'Edkou,  liourlos  et  M(>n/.aleh. 

Vers  Alexandrie,  cette  liande  de  terre  est  composée  de  roclu;s  cal- 
caires d'origine  marine,  recouvertes  |)ar  places  de  dunes.  Mais  au  nord 
des  lacs  Bourlos  etMenzaleh,  le  cordon  littoral  est  très  nettement  ca- 
ractérisé. 

Les  eaux  du  Nil  n'entrent  dircuiement  à  la  mer  que  par  deux 
bouches,  celles  de  Damiette  et  de  Rosette,  cpii,  malgré  la  (juaiUité 
énorme  des  boues  (|ui  les  traversent,  ne  semblent  pas  avancer  de 
plus  de  400  mètres  par  siècle.  Les  autres  bras  du  Nil  déversent 
leurs  eaux  dans  les  lagunes,  ([u'elles  combleraient  peu  à  peu  si  cette 
partie  du  Delta  n'était  soumise  à  un  mouvement  très  leni  d'afTais- 
sement'. 

Raz-el-Balir  (la  tète  du  fleuve)  est,  sur  la  rive  gauche  de  la  branche 
de  Damiette,  la  pointe  extrême  de  l'estuaire  de  ce  bras  du  fleuve.  Les 
eaux  douces  y  ont  formé  une  barre  qui,  disposée  en  arc  de  cercle,  oc- 
cupe toute  l'embouchure  à  '.\  kilomètres  environ  de  la  côte.  Plus 
loin,  sont  d'autres  barres  plus  profondes,  régulièrement  espacées  sur 
une  pente  générale  qui  descend  vers  les  grandes  profondeurs. 

l 
Les  eaux  du  Nil,  à  son  embouchure,  transportent  environ  ^^^r^  *  de 

2500 

leur  poids  en  limons.  Ces  matières  se  déposent  avec  une  rapidité  ex- 
trême dès  que  les  eaux  troubles  se  sont  mélangées  avec  celles  de  la 
mer'.  Elles  sont  alors  entraînées  par  les  courants  sous-marins  et  ne 


I.  Les  plaines  qui  s'étendcnl  au  noid  de  Saii-el-Hagar  et  d'Ebkou  sont  couvertes  par 
les  eaux  lors  de  la  crue.  Leur  niveau  est  de  très  peu  de  chose  supérieur  à  celui  du 
lac  Menzaleh.  On  rencontre  à  leur  surface  un  grand  nombre  de  coquilles  nilotiques 
et  aucuue  trace  de  mollusques  vivant  dans  les  eaux  saumàtres  ou  salées,  comme  le 
fait  eut  dû  avoir  lieu  si  ces -terrains  de  surface  avaient  été  gagnés  sur  la  mer.  Il  est  à 
supposer  que  cette  région  de  la  Basse-Egypte,  suivant  le  mouvement  général  du  lit- 
toral, s'enfonce  graduellement,  et  que  jadis,  à  l'époque  des  Pasteurs,  les  conditions  de 
culture  dans  ces  pays  étaient  toutes  dill'érentes  de  ce  qu'elles  sout  aujourd'hui.  Si  l'on 
n'admet  pas  cette  hypothèse,  il  est  impossible  d'expliquer  le  choix  fait  par  les  Hyksos 
de  Tanis  comme  centre  du  vaste  camp  retranché  d'où  pendant  trois  siècles  ils  impo- 
sèrent leur  joug  à  l'Egypte. 

a.  Le  Gange  pendant  les  crues  porte  en  suspension  dans  ses  eaux de  leur  poids, 

II' 
le  Mississipi  ,1e  Danube  — ^  le  Rhône 


1700  2400  10,000 

3.  La  précipitation  des  limons  dans  l'eau  salée  est  quinze  fois  plus  rapide  que  dans 
les  eaux  douces  (Dana,  Man.  of  Geol.,  3"  édit.,  p.  677). 


42  FORMATIOX  DES  PARTIES  FERTILES 

profitent  que  (ort  peu  à  l'avancement  du  Delta  sur  la  mer;  toutefois  on 
suit  aisément  les  couibes  de  la  partie  sous-marine  du  delta  qui 
s'avance  au  loin  dans  la  direction  de  l'île  de  Chypre. 


Fig.  i/|.  —  Cnrli'  niarino  nioiilrnnt  riivniicfiiienl  du  (lcll;i  du  Nil. 


D'autre  pari,  je  l'ai  dit,  le  littoral  du  Delta  obéit  à  des  actions  oro- 
géniques lentes  qui  l'abaissent.  Nous  en  trouvons  la  preuve  dans 
l'existence  à  Alexandrie  de  tombeaux  d'époque  grecque  aujourd'hui 
situés  au-dessous  du  niveau  de  la  Méditerranée,  dans  les  ruines 
nombreuses  de  constructions  qui  se  voient  au  travers  des  eaux  sur 
toute  la  côte  entre  Aboukir  et  Alexandrie;  enfin  dans  la  situation  ac- 
tuelle des  koms  situés  dans  les  lacs  :  les  ruines  de  Tennis  entre  autres 
s'étendent  au  loin  sous  les  eaux  du  Menzaleh. 

La  dispersion  des  limons  par  les  courants  sous-marins  et  l'affais- 
sement du  sol  sont  les  principales  causes  pour  lesquelles  le  littoral 
du  Delta  n'a  pas  varié  d'une  manière  sensible  depuis  des  milliers 
d'années. 

('/est  cet  affaissement  qui  a  produit  le  lac  Menzaleh,  car  jadis  la 
branche  Pélusiaque  du  Nil  passait  près  de  Tennis  et  aujourd'hui  son 


FOliMATlON  Ui:S  l'AUTIES  l'ERTir,ES  1:j 

ancien  chenal  est  situé  à  1 '",50  de  profondeur  environ  sous  les  eanx 
du  lac.  II  en  est  de  môme  pour  la  branciie  Tanitique'. 

Il  serait  bien  difficile  de  préciser  l'époque  à  laquelle  commença 
ce  mouvement  lent,  car  les  témoins  de  ce  phénomène  font  aujourd'hui 
iléfaut;  la  seule  chose  que  nous  puissions  affirmer  est  qu'à  l'époque 
romaine  Péluse  avait  cessé  d'être  arrosé  par  le  fleuve  :  c'est  en  effet 
vers  le  m"  siècle  de  notre  ère  qu'on  établit  à  Tennis  les  citernes  que 
nous  voyons  encore  dans  les  ruines,  les  eaux  saumâtres  avaient  donc 
succédé  aux  eaux  douces  dans  la  région  du  Menzaleh.  Privée  d'eau 
douce,  la  ville  de  Tennis  n'avait  plus  de  raison  d'être;  elle  disparut 
peu  à  peu,  mais  son  abandon  complet,  si  j'en  juge  par  les  débris 
ramassés  dans  les  ruines,  ne  date  que  des  premiers  temps  arabes  \ 

Dans  les  débuts  delà  formation  du  Delta  l'alluvionnement  présenta 
bien  certainement  des  caractères  tout  différents  de  ceux  qu'il  offre 
aujourd'hui,  chaque  bras  du  Nil  créa  sur  ses  rives  deux  digues  irré- 
gulières qui  s'avancèrent  graduellement  dans  la  mer  jusqu'au  littoral 
actuel,  les  boues  formèrent  une  multitude  d'îlots  qui  peu  à  peu 
se  joignant  les  uns  aux  autres  constituèrent  le  sol  de  la  Basse-Egypte. 
Mais  dès  que  les  limites  de  l'estuaire  furent  atteintes,  dès  que  les 
alluvions  rencontrèrent  les  courants  sous-marins,  l'avancement 
rapide  cessa  et  le  régime  actuel  s'établit.  Pendant  combien  de  milliers 
d'années  dura  ce  travail,  il  est  impossible  de  le  dire  ;  les  évaluations 
récentes  semblent  prouver  que  dans  la  Basse-Egypte  l'exhaussement 
du  sol  dû  aux  limons  des  crues  est  de  0'", 00126  par  an'.  Quoi  qu'il 
en  soit,  le  comblement  fut  très  lent,  les  marais  ne  disparurent  que 
peu  à  peu  et  c'est  le  souvenir  de  cet  état  de  choses  qui  faisait  dire 
par  les  prêtres  à  Hérodote  qu'à  l'origine  l'Egypte  était  entièrement 
sous  les  eaux.  Les  compagnons  de  Menés  la  trouvèrent  bien  certaine- 


1.  Les  lacunes,  qui,  au  nord,  terminent  le  Delta,  se  remplissent  de  vases  dont  les 
origines  sont  de  deux  natures  différentes.  D'une  part,  le  Nil  apporte  chaque  année, 
lors  de  la  crue,  son  contingent  de  limous  ;  d'autre  part,  les  animaux  qui  vivent  dans 
les  lacs  contribuent  par  leurs  déjections  et  par  la  destruction  de  leur  corps,  un 
apport  très  sérieux  qui  modifie  sensiblement  la  oonipositiou  chimique  des  vases  ; 
c'est  ainsi  que  dans  le  lac  Menzaleh  ou  a  reconnu  (vase  sèche)  jusqu'à  i,25  pour  loo 
d'azote  et  2,5o  pour  loo  de  phosphate  de  chaux.  Les  6  pour  loo  de  sel  marin  qui  ont 
été  trouvés  sont  dus  à  l'entrée  des  eaux  de  la  Méditerranée  dans  les  lagunes.  Dans 
le  lac  Menzaleh,  la  salure  des  eaux,  très  faible  pendant  la  crue  du  Nil,  dovieut  consi- 
dérable lors  des  basses  eaux. 

2.  J'ai  moi-même  rencontré  à  Tennis  des  fragments  de  poteries,  de  médailles  et 
divers  débris  datant  de  l'époque  des  khalifes  et  dénotant  de  la  part  des  habitants  do 
Tennis  des  mœurs  trop  raffinées  pour  qu'il  soit  possible  d'attribuer  ces  restes  aux  pé- 
cheurs du  Menzaleh. 

3.  A    de  Lapparent,  Traite  dr  Crulogie,  i8():i,  p.  2iS. 


4'.  FORMATIOX  DES   PARTIES  FERTILES 

ment  composée  d'îlots  et  de  marais,  car  c'est  au  moins  7000  ans  avant 
nous  qu'ils  en  firent  la  conquête  et  à  cette  époque  le  niveau  moyen 
du  Delta  clait  à  *J  mètres  environ  au-dessous  de  C(dui  (juil  occu|)o 
de  nos  jours. 

J'ai  dit  plus  haut  que  le  seuil  de  Sycne  avait  oijligé  dans  les  ori- 
gines, au  début  de  la  période  de  creusement  des  vallées,  les  eaux  de 
l'Afrique  centrale  à  se  répandre  dans  le  désert  et  à  creuser  le  Bahr- 
Bala-Mà.  Ce  lit,  aujourd'hui  desséché,  prend  naissance  en  amont  de 
Philaî,  à  mi-chemin  environ  entre  les  deux  jjremières  cataractes,  sur 
la  rive  gauche  de  la  vallée  du  Nil,  mais  il  n'a  jamais  servi  qu'aux  eaux 
d'érosions  et  ne  renferme  pas  de  limons'. 

A  l'époque  antéhistorique  oii  les  eaux  coulaient  dans  le  désert,  la 
barrière  naturelle  de  Syène  les  avait  obligées  à  ce  détour  vers  l'ouest. 
Ces  collines,  composées  de  granité  et  de  ses  variétés,  de  diorite,  de 
grunstein,  de  pétrosilex,  de  serpentine,  de  dialage,  de  mélaphyre  et 
d'autres  roches  ignées  d'une  grande  dureté,  n'étaient  peut-être  pas 
jjour  le  Nil  un  barrage  absolu;  on  est  en  droit  de  supposer  cju'une 
partie  des  eaux  tombait  en  cascades  au  milieu  de  ces  montagnes, 
tandis  que  la  majeure  partie  creusant  son  lit  dans  les  roches  plus 
tendres  du  trias  et  des  formations  postérieures  s'écoulaient  par  le 
Bahr-Bala-Mà  et  le  désert. 

Ce  n'est  que  très  lentement,  ])ar  des  efforts  continus,  que  le  Nil  est 
parvenu  à  se  frayer  dans  le  massil'  éruptif  de  Syène  un  passage  suf- 
fisant pour  que,  même  à  l'époque  des  crues,  toutes  les  eaux  trouvent 
la  place  d'y  passer.  Dès  lors,  le  Bahr-Bala-Mà,  qui  probablement  tenait 
lieu  de  déversoir  pendant  les  inondations,  cessa  d'être  utile,  son  lit 
s'assécha,  il  devint  véritablement  le  fleuve  sans  eau. 

()uantàrépoque  à  laquelle  s'établit, au  Chellal  d'Assouan,  le  régime 
actuel,  elle  est  fort  ancienne  et  à  coup  sûr  antéhistorique.  Les  nom- 
breux graffiti  cju'on  rencontre  sur  les  rochers  granitiques  de  la  cata- 
racte, à  la  bailleur  des  plus  basses  eaux,  nous  démontrent  que  le  niveau 
inférieur  ne  s'est  pas  modifié  sensiblement  depuis  les  premières 
dynasties.  C'est  peut-être  à  la  période  néolithique  de  l'Egypte,  à  celle 
qui  servit  de  transition  entre  les  industries  chelléennes  du  diluvium 
et  la  pierre  polie,  que  nous  devons  ranger  ce  phénomène  dont  l'im- 
portance fut  si  grande  pour  l'Egypte,  mais  peut-être  aussi  devons- 
nous  l'attribuer  à  une  époque  antérieure  à  l'apparition  de  l'homme 
sur  la  terre.  Cette  donnée  coïncide  avec  ce  que  nous  savons  du  creu- 


1.  Zittel  [Bull.  Iiistit.  ICgyptien,  3  avril  1874)  est  d'avis  que  le  Nil  n'a  jamais  coulé 
par  la  dépression  du  Balir-Bala-.Mà;  et  tandis  que  Cailliaud  a  cité  l'existence  des 
coquilles   iiilo!iqiios  daus  ses  alluvious,  Zittel  déclare  n'eu  avoir  jamais  rencontré. 


rOHMATlO.N  DKS  PARTIIOS  !•  KKTII.ES  -iS 

seinoni  de  la  vallée  du  Nil  ol  de  son  remplissage  |)ai'  les  limons.  Ouc 
de  milliers  d'années  durent  s'écouler  entre  l'époque  où  l'homme  vivait 
sur  les  plateaux  au  jourd'luii  arides  daus  lesquels  le  (leuve  creusa  son 
lit  et  celle  où  les  fonction uaires  de  l'Anci eu  E m |)ire  gravèrent  leur  nom 
sur  le  rocher  au  passage  do  la  cataracte,  ou  iirent  tailler  dans  la  mon- 
tagne de  la  rive  gauche  du  Nil  leur  sépulture  et  leur  temple  lunéraire! 
Cette  période  fut  prodigieusement  longue  et  pendant  ce  laps  de  temps 
rÉgyptc  ne  cessa  d'être  peuplée;  les  autochtones  y  perfectionnèrent 
l'art  d'éclater  la  pierre  et  de  la  polir,  ils  devinrent  peu  à  peu  ces 
hommes  presque  civilisés  que  les  «  Serviteurs  d'Korus  »  rencon- 
trèrent dans  leur  conquête.  Lors  de  l'arrivée  des  premiers  Egyptiens 
le  cours  du  Nil  était,  dans  ses  lignes  principales,  ce  qu'il  est  encore 
aujourd'hui,  si  ce  n'est  toutefois  qu'il  n'avait  pas  encore  renoncé 
complètement  à  la  fougue  et  aux  débordements  violents  de  sa  jeu- 
nesse, qu'au  moment  des  crues  ses  eaux  folles  couraient  d'un  coteau 
à  l'autre  remplissant  de  débris  son  lit  de  l'année  précédente  pour  en 
créer  un  nouveau. 


/ 


C  i'  l-'-  <^/v 


/ 


CHAPITRE    III 

Historique  des  études  sur  l'âge  de  la  pierre 

en  Egypte. 


En  1873  Chabas,  dans  ses  Études  sur  V Antiquité  historique,  s'ex- 
primait ainsi  au  sujet  des  peuplades  qui  antérieurement  à  la  connais- 
sance des  métaux  habitèrent  la  vallée  du  Nil  : 

«  Aucune  trace  d'une  race  inférieure  à  celle  des  Nègres,  des  Bo- 
schimans  et  des  Australiens  de  nos  jours  ne  s'est  révélée  à  nous;  rien 
ne  nous  a  parlé  de  peuplades  même  (-omparaliles  aux  Garamantes  de 
Libye  qui,  cinq  siècles  avant  notre  ère,  si  l'on  en  croit  Hérodote,  ne 
connaissaient  pas  l'usage  des  armes  et  ne  savaient  pas  se  défendre'; 
aucun  texte  ne  nous  fait  connaître  un  état  social  qui  serait  antérieur  à 
la  découverte  des  métaux  et  pendant  lequel  les  hommes  n'auraient  eu 
d'autres  armes  que  la  pierre,  le  bois,  la  corne  ou  l'os*.  » 

«  Cependant  l'emploi  d'armes  et  d'instruments  de  cette  espèce  nous 
apparaît  à  toutes  les  époques  historiques  et  même  de  nos  jours,  mal- 
gré l'usage  des  métaux'.  » 

Partant  de  ce  principe,  Chabas  cherche  l'explication  de  la  présence 
des  couteaux  de  silex  en  Egypte  dans  l'usage,  signalé  par  Hérodote' 
et  Diodore^  de  lames  de  pierre  pour  l'ouverture  du  corps  lors  de  la 
momification.  H  cite  à  l'appui  de  son  hypothèse  deux  couteaux  en  silex 
pyromaque  conservés  au  Musée  de  Turin,  deux  autres  du  Musée  de 
Leyde,  deux  du  Musée  de  Berlin  (ces  six  pièces  sont  munies  de  leur 

I.  Liv.  IV,  CLxxiv.  — Ala  vérité,  l'historien  grec  dit  ua  peu  plus  loin  que  les  Garamantes 
font  la  chasse  aux  Troglodytes   sur  des  chars  à  quatre  chevaux!!!   (Note  de  Cliabas.) 
•2.  Chabas,  p.  323. 
3.  Chabas,  p.  33o. 
/(.  Hérodote,  I,  lxxxvi. 
5.  Diodore,  I,  xci. 


iS  ETUDES  SUR  L'AGE  UE  UA  PIERRE  EX  EGYPTE 

luanclie  ménagé  dans  la  j)ierre),  et  une  pointe  de  lance  qu'il  prend  pour 
un  couteau  et  qui  figure  dans  les  collections  du  Musée  tle  Berlin. 

Nous  verrons,  en  examinant  les  nécropoles  antérieures  aux  pre- 
mières dynasties,  où  ces  inslruments  sont  fréquents,  qu'ils  n'ont  pu 
être  usités  pour  l'ouverture  des  corps  puisqu'à  ces  époques  les  cada- 
vres n'étaient  pas  momifiés;  d'autre  part,rexamen  des  incisions  opé- 
rées sur  les  cadavres  semble  tlémonlrer  que  les  instruments  employés 
étaient  faits  de  métal. 

Continuant  son  examen  des  silex  taillés  d'Egypte,  Gliabas  écrit'  : 
((  Mais  l'Egypte  historique  n'a  pas  seulement  fait  usage  du  silex  sous  la 
forme  des  instruments  ])erfeclionnés  que  nous  venons  de  décrire;  elle 
nous  livre  épars,  au  voisinage  des  villes,  des  excavations  pratiquées 
dans  les  rochers,  des  nécropoles,  quelquefois  autour  des  coffres  funé- 
raires et  même  dans  l'intérieur  de  ces  coffres,  tous  les  genres  de  si- 
lex éclatés,  retravaillés  ou  non,  qui  se  rencontrent  en  France  et  ail- 
leurs dans  les  stations  dites  do  l'âge  de  la  pierre  :  hachettes,  couteaux, 
perçoirs,  percuteurs,  grattoirs,  flèches,  etc.  Ces  instruments,  ainsi 
que  l'a  constaté  M.  Mariette,  sont  encore  plus  abondants  à  l'époque 
des  Lagides  et  des  Romains,  au  moins  en  ce  qui  concerne  les  tom- 
beaux, qu'aux  anciennes  époques;  seulement  le  travail  du  silex  est  de 
moins  en  moins  soigné.  » 

Ghabas  cite  ensuite  à  l'appui  de  ses  dires  les  découvertes  de  Rosel- 
lini,  de  Passalaqua  etde  Lepsius  qui  rencontrèrent  dans  des  tombeaux 
lies  éclats,  des  couteaux,  une  scie  et  un  grattoir*. 

Ces  données,  dont  Chabas  tire  des  conclusions  exagérées,  concor- 
dent cependant  avec  celles  fournies  par  mes  propres  fouilles;  elles 
sont  une  preuve  en  faveur  de  la  persistance  pendant  quelques  siècles 
au  moins  de  l'usage  du  silex  dans  l'Egypte  historique  et  en  possession 
des  métaux.  Cependant  je  dois  faire  observer  que  je  n'ai  jamais  ren- 
contré, dans  les  tombes  postérieures  à  la  III"  dynastie,  que  des  cou- 
teaux, les  autres  instruments  se  trouvaient  au  milieu  des  sables,  dans 
le  voisinage  des  sépultures;  leur  gisement  ne  pouvait  donc  me  fournir 
de  renseignements  précis  sur  leur  époque.  Sommes-nous  bien  cer- 
tains que  les  silex  taillés  que  cite  Chabas,  et  sur  l'existence  desquels 
il  base  son  opinion,  aient  été  trouvés  dans  des  conditions  permettant 
de  préciser  leur  époque  d'une  manière  absolue?  Je  ne  le  pense  pas; 
pour  ma  part,  je  crois  plutôt  que,  dans  la  plupart  des  cas,  on  a  jugé  de 
leur  âge  par  les  antiquités  qui  les  avoisinaient. 


1.  Cliabas,  p.  SSy. 

2.  Chabas,  p.  338  et  339   :  iigures  représentant  sLil  instruments  de  sile.\  du    Musée 
de  Berlin. 


ETUDES  SUR  F/AGE  DE   F, A  PIERRE  EN   EGYPTE  ',9 

Mariette,  comme  Ghabas,  pensait  que  tous  les  silex  rencontrés  sur 
le  sol  rrÉgyple  appartenaient  à  la  période  liislori(|ue,  il  indiquait  pour 
leur  gisement  : 

1°  Le  voisinage  des  terres  cultivées,  principalmicnl  celui  des 
ruines  de  villes  ; 

2°  Les  environs  de  toutes  les  grandes  excavations  pratiquées  dans 
le  rocher  et  en  particulier  à  Bab-el-Molouk,  près  des  grottes  pro- 
fondes de  Samoun,  et  à  l'entrée  des  immenses  souterrains  consacrés 
à  la  sépulture  des  Apis. 

Les  instruments  figurés  par  Ghabas',  d'après  une  photographie  com- 
muniquée par  Mariette,  proviennent  d'Hélouan,  de  Girgeh,  d'Esneh 
et  de  Bab-el-Molouk;  certains  des  couteaux  ont  été  rencontrés,  dit-on, 
dans  une  tombe  de  la  XXIP  dynastie,  les  autres  ont  été  ramassés  sur 
le  sol;  une  pointe  de  flèche  provient  de  Tell-Balamoun  dans  la  Basse- 
Egypte. 

Près  d'Hélouan,  du  vivant  de  Mariette,  le  D'^  Reil  avait  ren- 
contré une  véritable  station  de  la  pierre,  qui  fournit  environ  un  mil- 
lier d'instruments;  mais  du  fait  que  ces  silex  se  rencontrent  près  de 
ruines  arabes,  Ghabas  conclut  qu'ils  ont  pu  n'être  taillés  qu'à  l'époque 
des  sultans.  11  ne  semble  pas  utile  de  réfuter  cette  hypothèse,  car  il 
tombe  sous  le  sens  que  les  constructions  arabes  ont  pu  s'élever  là 
où  des  milliers  d'années  auparavant  des  hommes  des  temps  néolithi- 
ques avaient  établi  leur  campement.  D'ailleurs  ce  fait  de  rencontrer 
dans  une  m'ème  localité  des  vestiges  d'époques  très  différentes  est 
très  fréquent  en  Egypte. 

Le  26  juin  1869,  M.  Arcelin  avait  adressé  au  Ministère  de  l'Instruc- 
tion publique  un  rapport  que  Mariette  signala  plus  tard^  et  dans 
lequel  il  abordait  pour  la  première  fois  la  question  du  préhistorique 
égyptien;  plus  tard,  lors  de  leur  voj^age  en  Haute-Egypte,  Fr.  Lenor- 
mant  et  le  D'  Hamy  recueillirent  à  liabel-^Nlolouk.  sur  le  sommet  d'une 
colline,  bon  nombre  de  silex  grossièrement  éclatés  dont  l'antiquité  fut 
mise  en  doute  par  Lepsius';  le  savant  allemand  attribuait  à  beaucoup 
d'entre  eux  une  taille  naturelle  causée  par  la  chaleur  solaire. 

Il  est  certain  que,  dans  le  désert,  les  silex  s'éclatent  souvent  par 
l'effet  du  soleil,  j'en  ai  rencontré  de  nombreux  exemples  (cf.  lig.  16, 
p.  58)  ;  mais  il  est  également  hors  de  doute  que  la  plupart  de  ces 
pierres  n'eussent  été  taillées  inteuticinnellement  et  ne  remontent  à 
l'époque  quaternaire. 

1.  Cliabiis,  p.  343. 

2.  Mariette,  Sur  l'âge  de  pirrie  en  Egypte,  dans  Recueil  de  travaux  relatifs  à  la  phi- 
lologie et  à  l'archéologie  égyptiennes  et  assyriennes ,  vol.  VII,  année  i.SSli,  p.  i3'5. 

3.  Lepsius,  Journ.  égypt.   de  Berlin,  1871 


50  ETUDES  SUR  L'AGE  DE  LA  PIERRE  EN  EGYPTE 

En  1889-90,  M.  Flinders  Pétrie  fouillant  à  Kahoun,  localité  située  à 
l'entrée  du  Fayoum  près  de  la  pyramide  d'Illahoun,  découvrit  une 
ville  qu'avec  raison,  d'après  les  oljjets  qu'elle  renfermait,  il  attribua 
principalement  à  la  XII'  dynastie.  Dans  les  ruines  il  rencontra  bon 
nombre  d'instruments  de  silex  '  présentant  fréquemment  de  grandes 
analogies  avec  les  objets  du  même  genre  faits  de  bronze  ;  des  haches, 
des  couteaux,  des  grattoirs  et  tout  un  mobilier  destiné  aux  usages 
courants  de  la  vie  et  non  à  des  cérémonies  religieuses  spéciales  '. 
Avec  ces  silex  taillés  M.  Pétrie  a  rencontré  un  grand  nombre  de  frag- 
ments  de  poterie  ornée  à  la  pointe  et  couverte  de  dessins  grossiers. 

Bien  que  les  documents  relatifs  à  l'époque  où  la  ville  posséda  son 
plus  grand  développement  soient  de  date  précise,  il  semble  diffrcile 
d'admettre  que  ce  site  fut  resté  absolument  désert  jusqu'au  Moyen 
Empire  et  que  la  ville  de  la  XII'-'  dynastie  ne  puisse  avoir  recouvert 
des  ruines  soit  appartenant  à  l'Ancien  Empire,  soit  même  antérieures. 
Il  se  peut  donc  qu'une  partie  des  silex  travaillés  dérouverts  à  Kahoun 
par  M.  Flinders  Pétrie  soient  d'une  époque  Ijeaucoup  plus  ancienne 
qu'on  ne  l'a  supposé  et  n'existent  dans  les  ruines  qu'à  l'état  de  rema- 
niement. 

Quant  à  la  poterie  ornée  à  la  pointe,  elle  me  semble  plutôt  appar- 
tenir à  l'Ancien  Empire  qu'au  Moyen.  J'en  ai  rencontré  dans  les 
tombes  les  plus  anciennes,  tandis  que  dans  les  sépultures  de  la 
XIP  dynastie,  dont  j'ai  ouvert  un  nombre  considérable,  je  n'en  ai  pas 
vu  la  moindre  trace.  Quelques  fragments  île  Kahoun'  portent  des 
dessins  grossiers  se  rapprochant  beaucoup  des  ornementations  céra- 
mi(|ues  de  Toukli,  d'Aljydos,  de  Gebelein,  etc.  D'autres*  sont,  il 
est  vrai,  plus  perfectionnés,  mais  rentrent  dans  le  même  type. 

Pour  les  poteries  peintes  je  ferai  la  même  observation.  La  planche  I 
de  l'ouvrage  de  M.  FI.  Pétrie  renferme  des  types  qui  ne  peuvent 
être  rangés  à  la  XII°  dynastie,  les  uns  (fig.  1,  3,  5,  6),  parce  qu'ils  ne 
trouvent  leurs  semblables  qu'à  l'Ancien  Empire,  les  autres  parce  qu'ils 
sont  de  beaucoup  postérieurs  au  règne  d'Usertesen  II.  Rien  ne 
prouve  que  la  ville  de  Kahoun  n'ait  été  habitée  antérieurement  et 
postérieurement  à  la  construction  de  la  pyramide  d'Illahoun,  et  vou- 
loir classer  méthodiquement  les  restes  de  poteries  trouvés  dans  les 
ruines  d'une  cité  égyptienne  anti(jue  est  s'exposer  à  de  graves  mé- 
comptes. C'est  dans  les  tombeaux  seulement,  dans   les  sépultures 


1.  W.  M.  Flinders  Pétrie,  Illahun,  Kalnin  and  Guvui,  iSSG-iSyo,  pi.  VII. 

2.  W.  M.  Flinders  Pétrie,  op.  cit.,  p.  5i,  chap.  XI,  par  F.  C.  I.  Spurrell. 

3.  FI.  Pétrie,  op.  cit.,  pi.  V,  fig.  2,  4,  5,  6  et  7. 

4.  FI.  Pétrie,  op.  cit.,  pi.  V,  fig.  i  et  3. 


ETUDES  SUR   F>AGE  DE  T,A  PIERRE  EN  EGYPTE  51 

Mon  spoliées,  (m'il  Caul  ;i1I(M'  clirrclier  les  documents  précis,  ot  non 
dans  des  couches  dont  on  no  pcuL  apprécier  l'âge  d'une  inanirrc 
certaine. 

Je  n'insisterai  pas  sur  la  puhlicalion  de;  M.  l'Mindci's  Pétrie  au  sujet 
de  ses  travaux  à  Kahoun,  car  elle  ne  peut  en  rien  l'aire  avancer  la  so- 
lution du  problème  relatif  au  préliistorique  égyptien.  Elle  fournitdes 
indications  utiles  sur  la  persislancc;  de  l'usag-e  du  silex  dans  les 
temps  historiques,  mais  ces  renseigncMnents  ne  peuvent  être  utilisés 
que  s'ils  s'appuient  sur  des  observations  plus  j)réeises. 

C'est  en  1892  que  M.  Pétrie  nous  a  donné  les  résultats  de  ses  re- 
cherches à  Meïdoum'  qui,  comme  on  le  sait,  appartient  aux  Ages  les 
plus  anciens.  La  pyramide  fut  vraisemblablement  construite  par  Sné- 
frou,  dernier  souverain  de  la  III"  dynastie. 

Les  objets  trouvés  par  l'archéologue  anglais  sont  bien  de  ceux 
(ju'on  rencontre  dans  les  tombeaux  de  l'époque  de  Snéfrou,  et  moi- 
même,  en  explorant  un  grand  nombre  de  sépultures  de  cette  époque 
à  Dahchour,  je  me  suis  trouvé  en  présence  de  mobiliers  du  même 
genre.  La  céramique  dans  ces  deux  localités  est  parfaitement  carac- 
térisée; elle  n'a  rien  de  commun  avec  celle  du  Moyen  Empire  et  se 
rapproche  plutôt  de  celle  des  tombes  archaïques  d'Abydos,  de 
Toukh,  de  Gebel-el-Tarif  et  des  autres  localités  de  la  Haute-Egypte. 

M.  FI.  Pétrie  rencontra  peu  de  silex  taillés  à  Meïdoum,  de  même 
que  j'en  ai  trouvé  fort  peu  dans  les  tombes  de  la  IIP  dynastie  à 
Dahchour.  Le  cuivre  à  cette  époque  était  déjà  d'un  usage  courant  et 
la  plupart  des  instruments  étaient  faits  de  ce  métal. 

D'après  mes  observations  personnelles,  on  ne  rencontre  dans  les 
tombes  de  la  IV°  à  la  XIP  dynastie  ([ue  fort  peu  de  silex  travaillés. 
Ce  sont  des  haches  plates  d'une  forme  spéciale,  des  couteaux  dont 
quelques-uns  sont  polis  sur  une  face,  et  des  pointes  de  flèches;  encore 
dois-je  ajouter  que  les  têtes  de  ces  projectiles  sont  toujours,  à  ces 
époques,  tranchantes  et  non  pointues.  A  ^leïdoum  nous  voyons  appa- 
raître les  haches,  les  ciseaux,  les  scies  de  bronze  et  rien  ne  prouve 
que  les  grattoirs  et  les  instruments  de  pierre  autres  que  ceux  dont  je 
viens  de  parler  ne  soient  pas,  dans  cette  localité,  de  beaucoup  anté- 
rieurs à  l'époque  de  Snéfrou. 

Jusqu'en  1894  les  renseignements  que  nous  possédions  sur  l'usage 
de  la  pierre  taillée  en  Egypte  se  composaient  seulement  de  quelques 
observations  particulières  portant  sur  des  objets  le  plus  souvent 
difficiles  à  dater,  quand  un  spécialiste,  M.  Lajard  -,  vint  mettre  sous 

1.  W.  M.  Fiindeis  Pétrie,  Medum. 

2.  Bull,  de  l'Itistilut  égyptien,  Ille  séiic,  n°  5,  p.   155,  séance  du  2  mars  1894. 


52  ETUDES  SUR  L'AGE  DE  LA  PIERRE  EN  EGTPTE 

les  yeux  des  membres  de  Tlnstitut  égyptien  bon  nombre  de  silex 
ramassés  dans  diverses  localités  de  l'Egypte. 

La  première  localité  qu'examine  ^I.  Lajard  dans  son  intéressant 
compte-rendu  est  celle  de  Ouadi-Sel  près  du  village  d'Abou-Roach  : 
le  gisement  occupe  une  longueur  d'environ  20  kilomètres.  Les  silex 
taillés  s'y  rencontrent  à  la  bordure  du  désert,  près  des  terres  cul- 
tivées. 

Les  silex  ramassés  dans  cette  station  sont  des  couteaux,simples  éclats 
droits  très  Ijien  caractérisés,  et  des nucléi,  présentant  ce  caractère  spé- 
cial,déjà  signalé  par  Schweint'urt  au  sujet  des  nucléi  desOuady-Ouareg 
etSanour,  que  les  lames  n'ont  été  enlevées  que  d'un  seul  côté,  l'autre 
conservant  encore  sa  gangue.  Pour  M.  Lajard,  ces  silex  sont  préhis- 
toriques*. 

Pour  la  station  de  Dîmeh,  M.  Lajard  est  plus  affirmatif.  Selon  lui, 
ce  gisement  de  silex  taillés  est  un  vaste  atelier  contemporain  des 
ruines  de  la  ville,  c'est-à-dire  d'époque  romaine. 

Je  suis  loin  de  partager  cette  opinion,  car  les  objets  qu'on  rencon- 
tre à  la  surface  du  sol  sur  la  rive  occidentale  du  Birket-el-Karoun 
présentent,  sans  en  excepter  un,  les  types  si  abondants  dans  les  sta- 
tions deZawaïdeh,Toukh,  Khattarah,El-Mahasnah,  EI-Ragagnah,Om- 
el-Gaab(Abydos),El-Karnak,  El-Cheikh-Salam  (au  sud  d'Abydos),etc., 
tant  dans  les  tombeaux  qu'à  la  surface  du  sol.  Il  est  certain  que  de 
([uelques  objets  isolés  il  serait  impossible  de  déduire  l'antiquité  des 
documents,  de  se  livrera  des  comparaisons;  mais,  lorsque  dans  les 
diverses  stations,  la  série  complète  des  outils  est  toujours  la  même, 
comment  ne  pas  leur  attribuer  le  même  âge? 

Je  citerai  en  outre,  à  l'appui  de  mon  opinion,  l'existence  à  Dimeh  de 
véritables  pointes  de  flèches  en  silex  qui,  on  le  sait,  d'après  les  reliefs 
aussi  bien  que  d'après  les  représentations,  cessèrent  d'être  employées 
dès  les  débuts  des  temps  historiques. 

La  station  néolithique  de  Dimeh  n'a  rien  de  commun  avec  les  ruines 
romaines  de  cette  localité  ;  la  ville  s'éleva  sur  le  bord  du  lac  où  des  mil- 
liers d'années  auparavantse  trouvaient  des  campements  ou  des  villages 
mais  jamais  un  atelier  de  taille. 

Pour  en  terminer  avec  l'historique  sommaire  de  cette  intéressante 

I.  «  Les  opinions  sont  très  part.Tgces  sur  l'existence  d'un  âge  de  la  pierre  eu 
Egypte.  La  querelle  date  de  loin.  Les  prétiisloriciens  sont  en  général  pour  une  origine 
reculée  avec  leD"'  Reil,  Gaillardot-Bey,  Henri  Haynes,  Burton,Greg,  Hamy,  deNogué. 
Jolin  Lubbocli,  John  Evans,  labbé  Richard,  Montelius,  de  Mortillet;  les  égyptologues 
avec  Mariette,  Chabas,  Lepsius,  Ebers,  Southell,  Brugsch,  Dawson,  Virchow,  incli- 
nent plutôt  de  ce  côté  :  Schweinfurth  est  hésitant  »  (Lajard,  Hiill.  Inxtit.  égyptien, 
3°  série,   n"  ,S,  p.  iSy). 


irruDES  si'K  L'A(ii'  Dic  LA  i'ii;i;i;i:  i'\  kgypte  53 

qiiestioi),  il  me  reste  à  [)arlcr  des  lra\'aiix  de  M.  Flindors  Pétrie  en 
1894-95  dans  les  nécropoles  de  la  Haute-Egypte.  Quelques  articles  pu- 
bliés dans  les  journaux  par  M.  FI.  Pétrie  lui-niènie  nous  fout  connaîlre 
son  opinion  sur  les  nécropoles  de  la  Ilaute-Egyptc  avant  (|uc  son 
compte  rendu  complet  ne  soit  publié.  L'explorateur  anglais  attribue 
ces  sépultures  à  des  populations  vivant  à  l'étatsporadique  pendant  la 
période  historique,  au  nord  de  Thèbes.  Je  ne  discuterai  pas  ici  cette 
question;  mon  livre  tout  entier  étant  une  réfutation  complète  de  cette 
opinion,  on  en  trouvera  les  détails  dans  les  chapitres  quisuivent. 

Comme  on  le  voit,  depuis  trente  ans  environ,  un  grand  nombre 
de  découvertes  isolées,  relatives  aux  âges  préhistoriques,  furent 
faites  en  Egypte,  et  les  documents  étaient  déjà  nombreux  quand  je  me 
suis  moi-même  occupé  de  cette  étude. 

Ces  découvertes  et  cette  abondance  de  documents  ne  firent  cepen- 
dant pas  avancer  la  solution  du  problème,  car  dans  son  Ilisloirc  an- 
cienne des  peuples  de  T  Orient,  pujjliée  en  1894,  M.  Maspero  s'exprime 
en  ces  termes  :  «  Rien  ou  prescpie  rien  ne  nous  reste  des  gém-rations 
primitives  :  la  plupart  des  armes  et  des  outils  en  silex  taillés  qu'on  a 
découverts  en  différents  lieux  ne  sauraient  jusqu'à  présent  leur  être 
attribués  d'une  façon  authentique  '.  Les  habitants  de  l'Egypte  ont 
continué  d'employer  la  pierre  où  d'autres  peuples  usaient  déjà  des 
métaux.  Ils  fabriquaient  des  pointes  de  flèches,  des  marteaux,  des 
couteaux,  des  grattoirs  en  pierre  sous  les  Pharaons,  sous  les  Romains, 
pendant  toute  la  durée  du  moyen  âge,  et  la  mode  n'en  a  pas  cessé 
entièrement  :  ces  objets  et  les  ateliers  oii  on  les  façonnait  peuvent 
donc  être  moins  anciens  que  la  plupart  des  monuments  hiéroglyphi- 
ques'. »  D'autre  part,  M.  Flinders  Pétrie,  s'inspirantde  l'opinion  géné- 
ralement admise  malgré  ses  découvertes  personnelles,  est  aussi  affir- 
matif  en  ce  qui  concerne  la  non-existence  de  restes  préhistoriques  en 
Egypte  \ 

1.  La  question  soulevée  pour  la  première  fois  par  Hamy  et  Fr.  Lenormant  {^Décou- 
vertes de  restes  de  l'âge  de  pierre  en  Egypte,  dans  les  Comptes  rendus  de  l'Académie 
des  sciences,  a'>.  nov.  18(19)  ■''  donné  lieu  à  une  longue  polémique  à  laquelle  la  plupart 
des  savants  de  l'Europe  ont  pris  part.  La  bibliographie  en  est  donnée  presque  com- 
plète par  Salomon  Reinach,  Description  raisonnée  du  Musée  de  Saint-Germain,  t.  I, 
p.  87-88.  L'examen  des  lieux  me  porte  à  croire,  comme  Mariette,  que  nul  des  ateliers 
signalés  jusqu'à  présent  n'est  antérieur  à  l'époque  historique  (Note  de  M.  G.  Maspero). 

2.  P.  49. 

3.  «  Besidc  ihe  worked  fliMts,whose  position  indicates  their  âge,  large  quautities  ot' 
flint  flakes  aud  scrapers  are  to  be  found  lying  about  on  the  surface  of  the  désert. 
Thèse  must  not  be  supposed  to  be  prehistoric  in  ail  cases,  or  perhaps  in  any  case. 
Flints  were  used  side  by  side  with  copper  tools  from  the  fourth  to  the  twelfth  dy- 
nasty  (Medum  and  Kaluui)  ;  they  wer-e  still  used  for  siklos   iu    the  eighteonth  dynasty 

4 


54  ETUDES  suit  L'AGE  DE  LA  PIERRE  EN  EGYPTE 

Depuis  mon  arrivée  en  Egypte  (1892),  je  m'étais  vivement  préoc- 
cupé de  cette  question  :  j'avais  réuni  tous  les  documents  épars,  re- 
cherché dans  un  grand  nomljre  de  localités,  acheté  presque  tous  les 
instruments  en  silex  qui  se  trouvaient  chez  les  marchands.  C'est  ainsi 
que  peu  à  peu  je  me  suis  trouvé  amené  à  penser  que,  s'il  est  possible 
d'admettre  que  quehpies  silex  taillés  appartiennent  à  l'époque  histo- 
rique, nous  devons  attribuer  à  la  plupart  une  antiquité  l)eaucoup  plus 
reculée,  et  (|ue  les  témoins  du  véritable  âge  néolithicjue  sont  dans  la 
vallée  du  .\il  |)lus  abondants  qu'on  ne  le  pense  généralement. 

(Tcll-el-Aiiiariui)  ;  and  large  quantities  of  flint  flakes  lie  mingled  willi  roraaa  pottery  and 
glass  around  llie  tower  soutli  of  El  Heibi.  Hence  the  undaled  sites  of  flint  flakes  must 
be  of  small  liistorical  value.  Large  quantities  of  worked  flints,  mostly  sinall  flakes, 
sometimes  chipped  at  the  edge,  hâve  been  found  at  Helwan,  many  occur  at  Guizeh, 
and  at  the  back  of  the  Birket  Qurun  and  Medinet  Mahdi,  in  the  Fayum;  at  Tell-el- 
Amarna  on  ihe  top  of  the  désert  plateau,  where  are  rudely  chipped  pebbles,  which 
from  their  extrême  \veathering  may  be  even  palaeolithic  ;  on  varions  parts  of  the  foot 
hills  along  the  Nile,  at  Abydos,  at  Qournah,  at  the  south  of  Medinet  Habu,  and  at  El- 
Kab  are  places  where  the  ground  is  strewn  with  flint  flakes  and  imperfect  tools.  The 
finest  examples  of  flint  working  are  in  the  magniliceut  knives,  chipped  with  exquisite 
regularity,  in  a  smooth  horny  flint.  Thèse  are  found  in  tombs  at  Abydos;  but  ail  of 
them  hâve  boen  plundered  bv  natives,  and  no  record  exists  of  their  âge.  They  are 
perhaps  a  pricslly  survival,  for  fuueral  purposes,  of  the  flint  working  of  the  Xlith  dy- 
nasty,  lasting  perhaps  till  the  XVIIIlli.  The  most  distinct  use  of  flint  was  for  sickles  ; 
parlicular  forms  were  made  to  ht  the  curves  of  the  sickles,  and  were  notched  to  eut 
the  straw.  Such  flints  can  be  recognised  by  the  polisli  ou  the  saw  edge,  while  the  rest 
is  dull,  or  even  retains  some  of  the  cemeut  by  which  it  was  fastened  iu  the  wooden 
sickle-back  —  of  other  remains  of  prehistoric  man  no  trace  bas  been  found  in  Egypt. 
His  dwelling  would  be  upou,  or  close  to,  the  Nile  soil  ;  and  as  now  twenty  feet  of  de- 
posits  overlie  the  levai  of  that  âge,  it  is  hopeless  to  search  there  for  any  trace  of  his 
works  11  (W.  M.  Flinders  Pétrie,  A  Uistory  of  Egypt,  Londou,  1894,  p.  7). 


CHAPITRE    IV 
L'homme  paléolithique. 


Les  premiers  témoins  positifs  de  l'existence  humaine  qui  soient 
parvenus  jusqu'à  nous  sont  les  silex  taillés  qu'on  rencontre  dans  le 
diluvium  quaternaire  de  presque  toutes  les  contrées  du  monde. 

Dans  les  pays  qui,  comme  l'Europe  et  quelques  parties  de  l'Améri- 
que, ont  été  explorés  méthodiquement,  l'homme  quaternaire  a  été  re- 
connu ;  pour  ceux  dans  lesquels  sa  présence  n'est  pas  encore  signalée, 
c'est  à  l'insuffisance  de  nos  recherches  que  nous  devons  attribuer 
notre  défaut  d'informations  ;  car  partout  il  s'est  armé  de  pierres  quand 
les  mains,  les  ongles  et  les  dents  ne  suffirent  plus  pour  sa  défense. 

Arma  antiqua  maniis,  nngiies  denlesque  fuerunt 
Et  lapides  et  item  sylvaj'um  fragmina  rami^ , 

Dans  l'esprit  de  beaucoup,  l'antiquité  historique  de  l'Egypte,  les 
âges  presque  fabuleux  jusques  auxquels  remonte  sa  civilisation,  sem- 
blaient défier  l'histoire  des  autres  contrées,  et  la  terre  des  Pharaons, 
repoussant  toute  comparaison  chronologique,  apparaissait  au  milieu 
du  monde  comme  un  exemple  unique  il'un  sol  que  n'aurait  jamais 
foulé  la  sauvagerie. 

Et  cependant  que  sont  les  siècles  qui  s'écoulèrent  depuis  la  cons- 
truction des  pyramides,  depuis  que  Menés  civilisa  l'Egypte  à  peine 
sortie  des  eaux?  Que  sont  ces  milliers  d'années  dont  nous  pouvons 
estimer  la  durée,  pour  lesquels  nous  trouvons  des  points  de  compa- 
raison, à  côté  de  ces  incalculables  laps  de  temps  qui  se  sont  écoulés 
depuis  que  l'homme  s'étant  élevé  au-dessus  des  animaux  a  commencé 
la  conquête  du  monde,  depuis  que  les  grands  glaciers  des  débuts  de 
notre  ère  géologique  se  sont  dissipés  et  que  les  eaux  creusant  nos 
vallées  firent  le  monde  moderne. 

I.  Lucrèce,  De  iiatura  rerum,  liv.  V,  v,  1282. 


56  L'HOMME  PALÉOLITHIQUE 

Ces  âges  défient  toute  appréciation  et  l'antiquité  de  l'Egypte  n'est 
qu'un  atome  en  leur  présence.  Les  huit  mille  années  de  l'ère  pharao- 
nique sont  bien  peu  de  chose  quand  on  les  compare  à  l'antiquité  ab- 
solue de  l'homme. 

Ces  premiers  habitants  de  l'Egypte,  nous  étions  en  droit  d'en  sup- 
poser l'existence,  nous  la  connaissions  même  d'une  manière  vague, 
car  déjà  quelques  témoins  de  sa  vie  avaient  été  rencontrés,  deux 
haches  chelléennes  ayant  été  ramassées  sur  le  sol  du  désert,  l'une  à 
Esneh,  l'autre  près  des  pyramides  de  Guizeh. 

Aujourd'hui,  nous  devons  affirmer  de  la  manière  la.  plus  positive 
(|ue  l'homme  quaternaire  a  vécu  dans  les  pays  qui  sont  aujourd'hui 
l'Egypte  et  qui  alors  se  préparaient  seulement  à  l'être.  Quatre  sta- 
tions paléolithiques  ont  été  déjà  découvertes  à  Thèbes,  à  Toukh,  à 
Abydos  et  à  Dahchour.  Joignons-y  les  localités  d'Esneh  et  de  Guizeh 
où  des  pièces  isolées  furent  trouvées,  nous  aurons  ainsi  la  géogra- 
phie do  ce  que  nous  savons  aujourd'hui  de  l'homme  chelléen  dans  la 
vallée  du  Nil. 

Nul  doute,  pour  moi,  que  des  recherches  suivies  n'amènent  la  dé- 
couverte d'un  grand  nombre  d'autres  gisements  paléolithiques,  car 
les  stations  que  nous  connaissons  aujourd'hui,  je  les  ai  rencontrées 
dans  les  points  où  il  m'a  été  donné  de  séjourner  et  je  n'ai  pu  me  livrer 
à  des  explorations  continues  dans  toute  la  partie  du  désert  voisine  du 
Nil. 

C'est  dans  les  graviers  du  diluvium,  sur  sa  surface  caillouteuse, 
qu'on  rencontre  les  instruments  chelléens  ;  ils  ont  été  remaniés  et 
probablement  très  dispersés,  mais  certains  points  présentent  les  si- 
lex taillés  en  plus  grande  abondance  que  les  autres.  Ces  points  cor- 
respondent probablement  à  d'antiques  ateliers,  à  d'anciens  campe- 
ments, au  moment  où  l'Egypte,  privée  de  sa  vallée,  mais  formée  de- 
vallons  nombreux,  nourrissait  dans  ses  forêts  les  précurseurs  des 
hommes  qui  nous  ont  légué  ces  ruines  devant  lesquelles  nous  sommes 
frappés  de  stupeur. 

A  Deïr-el-Medinet,  j'ai  rencontré  moi-même  un  assez  grand  nom- 
bre d'éclats;  à  la  vallée  des  Reines,  M.  G.  Daressy,  conservateur  ad- 
joint du  Service  des  Antiquités,  a  trouvé  sur  le  sol  un  coup-de-poing 
chelléen  absolument  caractérisé  et  d'un  travail  aussi  parfait  que  le  sont 
les  spécimens  les  plus  complets  de  Clielles,  de  Saint-Acheul  ou  de 
Moulin-Quignon.  Plus  au  sud,  sur  la  colline  qui  sépare  la  vallée  des 
Rois  de  celle  de  Deïr-el-Bahri,  MM.  liamy  et  Fr.  Lenormant  avaient 
rencontré  des  éclats  qui  ont  donné  lieu  aux  polémiques  les  plus  vives. 
J'ai  moi-même  ramassé  un  grand  noinln'e  de  ces  lames  intentionnel- 
lement taillées,  au  milieu  d  une  ioule  d'autres  produites  par  l'action 


i.'iiOMMi;  l'Ai, 1:01, nillQUE 


57 


des  agents  atmosphériques.  MM.  Hamyel  Vv.  Lcnormant  ne  s'étaient 
pas  trompés  quand  ils  assignaient  à  la  forme  de  ces  pierres  une  ori- 
gine artificielle  et  ceux  qui  soutinrent  (ju'elles  étaient  rœuvi(!  du  so- 
leil étaient  dans  l'erreur. 

Il  est  f'ré([uent  de  rencontrer  dans   le  désert  des  galets  qui,  sous 
l'action  solaire,  se  sont  éclatés.  J'eu  ai  mémo  renconti'é  qui,  par  un 


Fig.   i5.  —  Coup-de-poing  chelléen    en  silex  jaune, 'recueilli  par  M.  G.  Daressy  dan> 
la  vallée  des  Reines  (Gournah),  3/4  grandeur  naturelle. 

curieux  hasard,  ont  naturellement  pris  la  forme  d'une  hache  néoli- 
thique parfaite.  Mais,|JOur  un  œil  exercé,  il  est  toujours  aisé  de  recon- 
naître la  cause  de  l'éclatement. 

Dans  les  silex  intentionnellement  taillés,  chaque  éclat  porte  les 
traces  du  coup  qui  Ta  levé;  il  possède  un  talon  et  présente  à  la  hase 
de  sa  partie  plate  im  hidbe  caracléristi(|ue,  dit  bulbe  de  percussion  ; 
l'autre  face  montre  toujours  une  ou  plusieurs  arêtes,  traces  laissées 
par  les  éclats  levés  au  début  du  travail. 

Les  galets  éclatés  au  soleil  non  seulement  ne  présentent  pas  ces 
caractères,  mais  montrent  une  série  de  cavités  sphériques  laissées  par 
le  départ  de  l'éclat;  dans  ces  silex,  quelle  que  soit  la  forme  générale 
donnée  par  la  nature,  on  ne  voit  jamais,  sur  les  tranches,  de  traces 


58 


L'HOMME   PALEOUTHIQUE 


régulières  de  coups.  S'il  en  existe,  elles  sont  peu  nombreuses  et  dis- 
posées d'une  manière  quelconque.  La  confusion  entre  ces  deux 
modes  d'éclatement  n'est  pas  possible  '. 

Il  est  fréquent  de  rencontrer  dans  le  désert,  parmi  les  nombreux 
galets  qui  le  couvrent,  des  silex  qui,  éclatés  par  l'action  du  soleil,  ont 


ris-  i().  —  Silex  en  forme  de  hache,  éclalë  par  la  chaleur  solaire  et  ne  portant  aucune 
trace  de  taille  artificielle  (Toukh).  3/4  grandeur  naturelle. 


été  brisés  par  un  choc  accidentel,  les  deux  cassures  sont  alors  placées 
côte  à  côte,  et,  dans  la  même  matière,  l'une,  causée  par  le  choc,  est 
lisse,  brillante,  plane,  et  montre  le  point  où  fut  frappé  le  coup,  l'autre, 
due  à  l'action  solaire,  présente  une  surface  rugueuse  et  est  concave. 
Ces  caractères  généraux  suffisent  pour  déterminer,  à  première  vue, 
quelles  ont  été  les  causes  de  l'éclatement. 


I.  Cf.  Johannes  Walther,  Die  Denudation  in  der  Wtiste  iind  ihre  geologische  Bedeu- 
tii/ig  dans  Ahhandliingen  der  malheinatisch-phyaischen  Classe  der  K.  Sàchsischen  Ge- 
sellschaft  der  Wissenschaften,   Leipzig,   1891. 


L'IIOMMI';   I'AI>i:oi.n'HIQUE 


59 


Le  gisement  de  Toukh  se  Irouvo  sur  les  iiionliculi^s  d'alliivions  (al- 
titude eiivir'on  .i.")  mètres  au-dessus  du  fond  de  la  valli'e)  qui  s'élen- 
deiil  au  [)i('d  de  la  iiKinlayiie,  eiitiH^les  ruines  ilu  leniple  [)liar'aoni(|ue 
et  une  petite  butte  de  sébakli  noir  située  presque  au  pied  tl(;s  (alaises. 

Les  alluvions  se  composent  de  silex  arrachés  à  la  craie  ;  elles  sont 
mélangées  de  sable  calcaire  qui,  dans  les  ravins,  donne  aux  coupes 
une  couleur  blanchâtre,  tandis  que  les  parties  ex[)osées  au  soleil  de- 
puis longtemps  sont  devenues  foncées  et  brunes. 

C'est  dans  les  ravins  et  sur  le  dos  des  collines  qu'on  rencontre  les 
silex  travaillés;  ils  sont  épars  au  milieu  d'une  infinité  de  galets  de 


Fig.  17.  —  Coup-de-poing  chelléen  en  silex  blanchâtre,  ramassé  à  la  surface 
du  diluvium,  à  Toukh.  3/4   grandeur  naturelle, 

toutes  les  grosseurs  ;  leur  nombre  est  peu  considérable,  mais,  en 
quelques  heures  de  recherches,  on  réunit  aisément  une  série  pré- 
sentant des  haches  (coups-de-poing),  des  grattoirs,  des  pointes,  des 
lames  simples  et  un  grand  nombre  de  galets  portant  des  traces  indis- 
cutables de  travail,  mais  ne  présentant  pas  de  formes  précises. 

Tous  ces  instruments  sont  taillés  à  grands  éclats,  avec  une  grande 
sûreté  de  main;  on  ne  voit  jamais  de  pièces  finement  retouchées. 


60 


L'HOMME   PAT.l'OLITHIQUE 


J'ai  Iroiivc  à  Toukh  plusieurs  haches  appartenant  au  type  chelléen. 
Mais  je  n'en  décrirai  que  deux,  c'ar  toutes  présentent  les  mêmes 
formes,  le  même  mode  de  travail. 

La  première  (fig.  17),  faite  de  silex  blond,  mesure  ()"',12  de 
longueur.  Elle  est  terminée  en  pointe  à  l'une  de  ses  extrémités, 
ronde  à  l'autre.  C'est  par  grands  éclats  qu'elle  a  été  faite  ;  l'un  d'eux 


Fig.   l'S.   —  Conp-de-poiug  cliellcon  on  silex  jaune,  portant  des  traces  d'éclalemenl 
par  la  chaleur   solaire  (Tonkli).   3//|  grandeur  naturelle. 


ne  présente  pas  moins  de  0"',09  de  longtienr.  Les  coups  ont 
été  frappés  sur  la  tranche,  sur  tout  le  pourtour  de  l'instrumenl  cl 
chaque  éclat,  en  partant,  a  laissé  en  creux  la  trace  de  son  Lulbe  de 
percussion. 

La  seconde  (fig.  18)  est  en  silex  brun,  ou  plutôt  est  couverte  d'une 
patine  brune  et  luisante  causée  par  la  chaleur  solaire.  Elle  est  d'une 
exécution  beaucoup  plus  grossière  que  la  précédente    et  présente 


i;hommk  l'Ai.iioiji'niQiMc 


fil 


0n>,152  (lo  longueur.  Son  mode  de  Iravail  ik^  dillÏTo  pas  de  ce  qu'il  osl 
dans  les  autres  pièces,  les  éclats  sur  h's  deux  laces  ontélé  largiMiiciil 
enlevés.  H  reste  par  places  des  traces  de  la  gangu  edenii-silicMMise, 
dcnii-crayeuse  qui  enveloppait  le  silex  alors  qu'il  se  trouvait  dans  les 


Fi 


.' ig.    i().    —    Pointo    chelléennu  en   silex  jaune,   ramassée   à     la   surface   du    diluviuui, 
à  Toukh.  1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  20.^  Pointe  clielléenne  en  silex  jaune  (Abydos).  i/;>  granrleur  uaUirellc. 


'W/' 


Fig.  2f.  —  Eclat  chelléea  de  silex  jaune,  ramassé  à  la  surface  du  ■diluviiiin,  à  Toukii. 

3/4  grandeur  naturelle. 
Fig,  22.  —  Racloir  chelléen  en  sile.x  jaune,  ramassé  à  la  surface  du  diluviinn,  à  Toukii. 

1/2  grandeur  naturelle. 

bancs  de  calcaire  où  il  s'est  formé.  Près  de  la  pointe,  on  remarque 
une  dizaine  de  cavités  qui  marquent  la  place  d'éclats  enlevés  par  la 
chaleur  solaire. 

A  côté  des  haches  sont  les  pointes  (fig.   19  et  20),  bien  caracléris- 


62 


T.'HOMMi:   PAT.KOI.ITHIQIE 


tiques  des  gisements  européens,  mais  qui,  en  Egypte,  semblent  avoir 
été  en  usage  pendant  plus  longtemps.  J'ai  rencontré  bon  nombre  de 
ces  instruments  mélangés  avec  des  outils  plus  modernes;  mais  je  ne 
puis  dire  si  leur  présence  au  milieu  de  gisements  néolithiques  ne 
résulte  pas  de  remaniements.  Quoi  qu'il  en  soit,  ces  formes  se  trou- 
vent également  dans  le  diluvium  avec  les  haches  et  les  autres  ins- 
truments paléolithiques. 

A  Toukh,  les  grattoirs  sont  relativement  abondants.  Celui  dont  je 
donne  le  dessin  (fîg.  22)  est  un  silex  brun,  il  a  été  taillé  à  grands 
éclats  sur  tout  son  pourtour;  seule,  la  partie  tranchante  de  l'instru- 


'm 


'M 


•  ^* 


Fig.  23.    —    Coup-de-poing    chelléen,    ramassé  à   la    surface    du    diluvium,  à  Abydos. 

3/4  grandeur  naturelle. 


ment  a  été  moins  grossièrement  travaillée.  Toutefois  la  taille  de  ce 
ofrattoir  ne  ressemble  en  rien  à  celle  des  nombreux  instruments  de 
ce  genre  qu'on  rencontre  dans  le  gisement  néolithique,  situé  à 
2,000  mètres  environ  au  sud  de  la  station  chelléenne. 

Il  serait  aisé  de  citer  et  de  figurer  un  plus  grand  nombre  de  pièces 
quartenaires  provenant  de  cette  localité,  mais  je  pense  en  avoir  dit 


L'HOMME  PALEOMTIIIOUE 


63 


assez   pour   iiioiitrer  coinhicii  l(!S  iiislniiiiciUs  qu'on  v  renconlro  dif- 
f'ôrent  par  la  taille  de  ceux  (|ii'oii  esl  habitué  de  trouver  en  l'Egypte. 

Le  gisement  d'Abydos  occupe  tout  le  fond  du  cirque  qui,  situé 
derrière  les  ruines  de  la  ville,  renferme  la  nécropole  pharaonique; 
on  rencontre  les  objets  très  disséminés  à  la  surface  des  alluvions, 


m 


My^î  "'^ 


/>t- 


Fig.  '24.  —  Coup-de-poioa;  clielléen  en   sitex  jaune,  ramassé  à  la  surface  du  dikiviuiii, 
à  Abydos.  3/4  grandeur  naturelle. 


accompagnés,  comme  à  Toukh,  d'éclats  et  de  galets  éclatés  par  l'ar- 
deur du  soleil. 

Tels  sont  tous  les  documents  que  nous  possédons  aujourd'hui  sur 
l'homme  quaternaire  en  Egypte.  Ils  suffisent  à  en  prouver  l'existence 
mais  montrent  que  les  recherches  en  ce  sens  ne  sont  qu'ébauchées  et 
que  l'avenir  réserve  bien  des  découvertes. 

La  vie  humaine,  en  Egypte,  à  l'époque  quaternaire,  se  trouvant 
prouvée,   et  étant  admise  même  par  ceux  qui  nient  l'existence  d'un 


L'HOMME  PALKOI.ITHIQUE 


Fig.  :>-.').  —  Coufi-Je-poiiig  clielléen  en  silex  j;iiine,  ramassé  à  la  surface  du  diluviuin, 
à  Abydos.  3/4  graudeiir  naturelle, 


Fig.  9.C\  —  Coup-dp-poing  chelléea,  ramassé  à  la  surface  du  diluvium,  à  Dîmeli  (Fayoum). 

3//|  grandeur   nalurclle. 
Fig. 27. —  Pointe  chelléenne  en  silex  brun,  ramassée  à  la  surface  du  diluvium, à  Abydos. 

3/4    grandeur  naturelle. 


L'HOMM)'    l'AMOOl.nilKHMC 


65 


Age   iu'i)lillu([U(' ',   commciil    pcul-oii  adnicllrc  (iii'il   n'ail    ii(Mi  existé 
enire   les  contemporains   des   grands   pachydermes   et   les  |)remi(!rs 


28 


29 


Fig.  aS  el  2f|.   —  Coups-(!e-poiiig  chellcciis  on  silex  jaune  (lig.  ■',8  :  Ahydos.  cl  (ig.  •.>.;)  : 
ïoukli).  1/2  grandeur  naturelle. 


Kig.  3o  et  3i.   —  Racloirs  ehelléens  en  silex  jaune,  ramassés  à  la  surface  du  diluviuui, 
à  Toukh.   1/2  grandeur  naturelle. 

Égyptiens  possédant  l'usage  de  la  métallurgie.  Comment  comblerait- 
on,  pour  l'Egypte,  cette  lacune  qui  correspond  en  Europe  à  l'époque 
des  cavernes  et  à  la  période  robenhausienne?  Doit-on  penser  que 
cette  longue  suite  de  siècles  laissa  l'Egypte  sans  population  ou  que  ce 
sont  les  derniers  hommes  paléolithiques  qui  reçurent  de  l'extérieur 


I.  «  La  plus  ancienne  trace  de  l'homme  connue  jusqu'à  ce  jour  en  Egypte  appar- 
tient à  la  période  de  la  grande  submersion  de  la  terre,  à  l'époque  pliocène  ou  pléis- 
tocène,  qui  succéda  au  phénomène  de  creusement  de  sa  surface  actuelle.  Les  dépôts 
situés  sur  les  collines  montrent  que  la  mer  s'étendait  à  au  moins  cinq  cents  pieds  au- 
dessus  de  son  niveau  actuel,  et  c'est  à  cet  âge  que  doit  être  attribué  le  silex  roulé 
présentant  le  type  ordinaire  du  paléolithique  qui  a  été  trouvé  sur  les  collines,  der- 
rière Esneh  >>  (W.  M.  Flinders  Pétrie,  A  Ilistoij  of  Egypt,  t.  I,  p.  5).  Il  n'y  a  pas  à 
insister  sur  la  valeur  de  ce  passage  au  point  de  vue  géologique.  Il  montre  seulement 
quelle  est  l'opinion  de  l'aulcur  au  point  de  vue  du  chelléen  d'Egypte. 


66 


L'HOMME   PALEOLITHIQUE 


la  connaissance  des  métaux?  Dans  Tiin  et  l'autre   cas  la  thèse  n'est 
pas  soutenable. 


}Èii^li 


l' ig.  32.  —  Eclat  chellcen  de  silex  jaune,  l'amassé  à  la  surface  du  diluvium,  à  El-'Amrali, 

3/4  grandeur  naturelle. 


CHAPITRE   V 

Les  autochtones  de  l'Egypte. 
(L'homme  néolithique.) 


Avant  d'entrer  dans  le  détail  de  la  description  des  objets  qui  nous 
ont  été  laissés  par  l'iiomme  néolithique  en  Egypte,  j'indiquerai  toutes 
les  localités  qui  m'ont  fourni  les  documents  sur  lesquels  j'ai  basé 
mon  élude,  les  décrivant  sommairement,  en  insistant  surtout  sur  les 
données  qui  permettent  de  se  rendre  compte  de  l'époque  à  laquelle 
l'usage  de  la  pierre  était  encore  florissant  dans  toute  l'Egypte. 

Ensuite  je  passerai  en  revue  les  divers  instruments  et  les  armes 
de  silex  taillé  qui,  à  quelques  exceptions  près,  sont  les  mêmes,  quelle 
que  soit  la  localité  qui  les  ait  fournis,  qu'on  la  prenne  dans  la  Haute- 
Egypte,  dans  la  Basse  ou  au  Fayoum. 

Les  objets  divers,  poinçons  d'os,  colliers,  bracelets,  etc..  et  la  céra- 
mique, formeront  ensuite  la  fin  de  mon  étude,  que  vient  compléter 
l'appendice  de  M.  le  D"'  D.  Fouquet  sur  les  ossements  humains  ren- 
contrés dans  les  nécropoles.  Je  tirerai  de  ces  données  des  conclusions 
qui  peut-être  seront  combattues,  mais  que,  dans  tous  les  cas,  il  sera 
facile  de  vérifier,  car'les  stations  préhistoriques  de  l'Egypte  sont 
encore  à  peine  connues.  Elles  sont  fort  nombreuses  et  chaque  saison 
de  recherches  en  fera  découvrir  de  nouvelles. 

Les  gisements  préhistoriques  dont  je  donne  la  description  sont 
situés  entre  le  Caire  et  Thèbes.  Elles  occupent  donc  dans  la  vallée 
du  Nil  une  longueur  de  800  kilomètres  environ.  Ce  fait  seul  est 
d'une  grande  importance,  car  il  prouve  que  l'usage  du  silex  taillé 
fut  autrefois  répandu  dans  la  totalité  des  pays  aujourd'hui  égyptiens. 
Il  n'y  a  donc  pas  lieu  d'attribuer  l'emploi  de  la  pierre  taillée  à  des 
populations  vivant  en  Egypte  à  l'état  sporadique. 


r,s 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


Fig.  33.  —  Ciirlf  (Us  piiiicipalt's  sl;ilioiis  ucolitliiqucs  de  l'Égyple. 


L'HOMMK  NÉOLITHlQUi;  60 

SUdioiis  (le  1(1  lidssc-l-'.gjjpic. 

Anou-Ro,vcii.  —  A  S  kiloiiièlrcs  euviidii  au  nord  de»  pyramides 
de  Guizeh  est  la  localité  d'Ahoii-Roach,  comiiie  de  tous  les  égyptn- 
logtios  par  les  deux  p^'ramides  qui  jadis  s'élevaient  sur  son  plalcîau. 
Autdur  de  ces  toinl)es  royales  s'étend  une  nécropole  assez  vaste, 
composée  de  tombes  de  loules  les  épo(|U(ïS  k\  renfermant  des  sou- 
terrains creusés  tians  le  rocher,  dont  la  destination  primitive  est 
encore  inconnue  malgré  mes  fouilles  de  1894. 

Au  pied  de  la  montagne,  dans  la  partie  du  désert  voisine  des  cul- 
tures, on  trouve  en  abondance  les  silex  taillés. 

Le  gisement,  large  de  200  mètres  à  peine,  long  de  20  kilomètres 
environ,  borde  la  vallée  et  s'étend  vers  le  nord.  Il  n'entre  pas  dans 
la  montagne,  et  les  alentours  des  pyramides  et  de  la  nécropole  no 
présentent  aucun  vestige  néolithique.  Dans  ces  conditions,  il  n'y  a 
pas  lieu  de  supposer  une  relation  d'époque  entre  la  station  des  silex 
taillés  et  les  monuments  historiques. 

Le  gisement  d'Abou-Roach  n'est  peut-être  que  la  trace  d'un  vaste 
atelier  de  taille,  car,  d'une  part,  les  nucléi,  les  percuteurs  et  les 
éclats  y  abondent;  d'autre  part,  les  roches  voisines  qui  appartiennent 
aux  terrains  crétacés  fournissent  en  (juantilé  le  silex  de  ([ualilé  par- 
faite. 

Je  dois  ajouter  qu'au  déljut  de  notre  siècle,  les  silex  d'AIjou-Hoach 
furent  utilisés  pour  la  fabrication  des  pierres  à  fusil  ;  mais  la  distinc- 
tion est  très  aisée  entre  les  objets  et  les  éclats  anciens  et  ceux  dus 
au  travail  moderne. 

Guizeh.  —  Près  des  pyramides  de  Khufu,  Ivhafra  et  de  Menkauhor, 
on  trouve  en  petit  nombre  des  fragments  de  silex  travaillé,  mais  aucun 
gisement  spécial  n'a  encore  été  découvert  dans  ces  parages. 

S.VQQ.\it\H  ET  Auou-SiR.  — Dans  la  partie  centrale  de  la  nécropole 
memphite,  on  rencontre  parfois  sur  le  sol  des  fragments  de  silex 
taillé,  mais  ces  débris  semblent  avoir  été  jetés  ou  perdus  jadis,  aucun 
gisement  régulier  ne  se  présente. 

Près  du  Sérapéuin  cependant,  Mariette  dit  avoir  recueilli  un  plus 
grand  nombre  d'éclats  que  partout  ailleursà  Saqcjarah,  et  j'en  ai  trouvé 
moi-même  quelques-uns.  S'a|)puyant  sur  l'opinion  qu'il  s'était  faite, 
qu'en  Egypte  les  silex  taillés  appartiennent  tous  à  l'époque  historique, 
Mariette  pensa  que  ces  instruments  devaient  leur  existence  aux  tra- 
vaux importants  que  nécessita  le  creusement  des  galeries  du  Séra- 
péum. 


"0  L'HOMME  NÉOLITHIQUE 

S'il  on  (Jlait  ainsi,  ce  n'eslpas  setilement  près  de  la  tombe  des  Apis 
qu'on  rencontrerait  des  traces  de  l'usage  de  la  pierre,  mais  les  innom- 
brables ouvriers  qui  travaillèrent  à  la  construction  des  vingt  ou  vingt- 
cinq  pyramides  de  cette  nécropole  et  des  millions  de  toml)eauxde  tous 
les  âges  qui  la  couvrent  auraient  laissé  des  amas  considérables  d'é- 
clats et  d'instruments  rebutés,  nous  rencontrerions  à  chaque  pas  des 
silex  taillés.  Or  il  n'en  est  rien  et,  bien  que  j'aie  passé  trois  années  à 
l'étude  de  ce  vaste  champ  des  morts,  jamais  je  n'y  ai  trouvé  de  preuves 
sérieuses  en  faveur  de  la  théorie  qui  suppose  que  l'usage  du  silex 
taillé  se  soit  perpétué  d'une  façon  générale  pendant  toute  la  durée 
de  l'époque  historique. 

Dahchour.  —  Le  sud  de  la  nécropole  memphite  n'est  pas  plus  riche 
en  silex  taillés  que  la  partie  centrale.  J'y  ai  ramassé,  il  est  vrai,  quelques 
rares  fragments,  mais  jamais  je  n'y  ai  rencontré,  soit  près  des  huit  py- 
ramides qui  s'y  élèvent,  soit  en  tout  autre  point,  de  ces  concentrations 
de  silex  taillés  qui  seules  autoriseraient  à  penser  que  les  ouvriers  em- 
ployés à  la  construction  des  grands  monuments  en  faisaient  usage. 

Sur  les  huit  pyramides  que  renferme  la  nécropole  de  Dahchour, 
six  appartiennent  au  Moyen  Empire,  deux  doivent  probablement  être 
attribuées  à  l'Ancien.  Or,  près  de  chacun  de  ces  monuments,  on  voit 
encore  l'amas  de  vases  brisés  qui  signale  le  point  où  vivaient  les  ou- 
vriers et  aucun  de  ces  huit  hal)itats  n'offre  la  moindre  trace  de  silex 
travaillé. 

En  dehors  des  pierres  égarées  de  la  surface,  j'ai  rencontré  dans  deux 
ou  trois  cas  des  silex  taillés  dans  des  monuments  datés. 

La  première  fois, c'était  dans  la  tombe  violée  d'un  grandprêtre  du  roi 
Snéfrou'  ;  les  autres,  c'est  dans  un  monument  daté  de  laXIP  dynastie  ^ 
Mais,  comme  on  le  voit,  c'est  par  exception  fort  rare  que  j'ai  trouvé 
des  silex  datés  et  l'on  ne  saurait  en  déduire  qu'à  ces  époques  ils 
étaient  encore  d'un  usage  courant.  Probablement  devons-nous  attri- 
buer leur  jjrésence  dans  ces  tombes  à  des  coutumes  religieuses,  car 
leur  nombre  est  extrêmement  restreint^. 

Hklouan.  —  Sur  le  rive  droite  du  Nil^dans  la  plaine  qui  s'étend  entre 

I.  J.  de  Morgan,  Fouiltex  à  Dahchour,  mars-juin  i8ç)4i  p.  io>  ûg-  ^■ 
u.  J.  (le  Morgan,  Fouilles  à  Dahchour,  mars-juin  1894,  p.  80,  fig.  198. 
3.  Si,àl;iXII=  dynastie,  les  silex  avaient  encore  été  employés  d'une  manière  cour.inte  . 
on  en  trouverait  dans  les  sépultures  spoliées,  car  les  fouilleurs  ne  pouvant  en  tirer  parti 
ne  les  auraient  pas  emportés.  Or,  sur  quatre-vingts  tombes  environ  du  Moyen  Empire 
que  j'ai  explorées  .1  Dahcliour,  il  n'en  est  qu'une  qui  renfermait  quelques  couteaux  de 
pierre,  simples  éclats  à  peine  retouchés. 


L'HOMME  NKOIJTlllnUK  7t 

la  villi'  (riléldiiaii  oL  l(;  IIcmin  i',  ou  lioiixc!  en  aljoiidaiice  les  silex  taillés'. 
Ils  se  rencoiilreiil  soit  à  la  surface  du  sol, soit  dans  une  couche  mince 
de  séhakii  cachée  sous  le  sable.  Ces  débris  sont  de  véritables  kjo'k- 
kenmœddings  seiiil)Iabl(^s  à  ceux  de  la  Ilaule-Egyple.  Quant  aux 
ruines  arabes  qui  avoisinent  la  slalion,  elles  n'ont  rien  de  commun 
avec  les  silex  taillés. 

La  slalion  d'IIélouan  esl  reniar(|uable  par  la  petite  tailh;  des  [)ièces 
qu'on  y  rencontre,  par  la  fiuessedes  retouches,  ainsi  que  par  lesTormes 
spéciales  que  présentent  les  têtes  de  flèches  (cf.  p.  130,  lig.  226  à  231). 

LicHT.  —  Le  plateau  de  Licht,  près  du  village  de  Maharraq,  porte; 
deux  pyramides  :  l'une,  celle  du  sud,  fut  construite  par  le  roi  Amen- 
emhat  I"  de  la  XII"  dynastie;  l'autre,  celle  du  nord,  par  son  successeur 
Usertesen  I".  Ces  deux  monuments  ont  été  élevés  au  xxvui'  siècle 
environ  avant  notre  ère. 

Or  dans  ses  recherches  (1894  à  1896)  dans  cette  localité,  M.  J.-E. 
Gautier  a  rencontré  un  grand  nombre  de  silex  taillés  près  de  la  pyra- 
mide du  nord  et  n'en  a  pas  trouvé  la  moindre  trace  près  de  celle  du 
sud. 

Le  gisement  originel  de  ces  instruments  ne  put  être  retrouvé,  car 
les  deux  j)yramides  sont  entourées  de  constructions  remontant  à  toutes 
les  époques,  on  y  a  rencontré  des  murailles  et  des  fragments  appar- 
tenant à  l'Ancien  Empire  et  un  grand  nombre  de  sépultures  romaines 
et  byzantines.  Ce  n'est  donc  pas  sur  des  observations  relatives  aux 
niveaux  qu'il  y  a  lieu  de  baser  des  évaluations,  mais  bien  sur  la  pré- 
sence des  silex  taillés  près  de  l'une  des  pyramides,  alors  que  ces  Ins- 
truments font  totalement  défaut  près  de  l'autre. 

Si  les  ouvriers  qui  travaillèrent  à  la  construction  de  ces  tombes 
royales  avaient  fait  usage  du  silex  taillé  pour  leurs  besoinsjournaliers, 
nous  trouverions  ces  objets  aussi  bien  près  de  l'un  que  de  l'autre  de 
ces  monuments.  Il  en  serait  de  même  si  l'usage  de  la  pierre  s'était 
perpétué  pendant  toute  la  durée  des  temps  pharaoniques.  Ces  condi- 
tions n'existant  pas,  il  es't  plus  rationnel  d'admettre  que  la  [)yramide 
du  nord  fut  construite  sur  l'emplacement  d'une  ancienne  station  pré- 
historique, tandis  que  celle  du  sud  s'éleva  sur  un  point  qui  jamais 
n'avait  été  habité. 

Cette  opinion  est  confirmée  par  ce  fait  que  les  silex  se  rencontrent 
pai*mi  les  constructions  de  toutes  les  époques  où  des  terrassements 
successifs  les  ont  apportés. 

I.  Cli.ibas,  Eludes  hist.,  p.  344  e'  345,  cite  les  silex  taillés  trouves  à  Hélouan  par 
le  D''  Reil  ;  il  insiste  sur  le  fait  qu'ils  ont  été  rencontrés  près  des  ruines  de  construc- 
tions arabes. 


'2  L'HOMME  >'I-:OLrrHIQUE 

Dans  la  pyramide  d'Usertesen  I"'  elle-même,  le  sable  qui  tient  lieu 
de  mortier  entre  les  pierres  renferme  des  silex;  ce  sable  fut  ramassé 
à  la  surface  du  sol  lors  delà  construction  du  monument  et  les  objets 
qui  gisaient  sur  le  terrain  furent  pris  avec  lui. 

A  Licht,  les  nucléi  et  les  percuteurs  sont  rares,  on  rencontre  plutôt 
des  objets  usagés  et  brisés,  observation  ([ui  vient  à  l'appui  de  l'opi- 
nion dans  laquelle  une  station  préhistoiitiue  aurait  jadis  existé  sur  la 
butte  où  s'élèvent  aujourd'hui  les  ruines  du  tombeau  d'Usertesen  P''. 

Meïdoum.  —  M.  W.  M.  Flinders  Pétrie  signale  de  Meïdouni  quel- 
ques silex  taillés,  sans  qu'il  soit  possible  de  fixer  leur  époque  d'une 
manière  bien  certaine.  Selon  l'égyptologue  anglais,  ils  seraient  con- 
temporains de  la  pyramide  (IIP  dynastie)  '. 

Kahoun  et  Gourob.  —  Ces  deux  localités  renferment  des  gise- 
ments importants  que  M.  Flinders  Pétrie  atti-ibue  à  la  XII  dy- 
nastie '. 

Nous  connaissons  aujourd'hui  bon  nombre  de  localités  renfermant 
des  ruines  du  Moyen  Empire.  Les  principales  sont  :  Dahchour,  Licht, 
Hawarah,  Kahoun,  Gourob,  Beni-Hassan,  Siout,  Gournahet  Assouan. 
Or,  de  tous  ces  points,  aucun  de  ceux  oii  il  m'a  été  possible  de  suivre 
les  recherches  n'a  présenté  un  nombre  important  de  silex  taillés 
appartenant  d'une  manière  certaine  au  Moyen  Empire  et  constituant 
de  véritables  gisements.  Si  les  conclusions  de  M.  Flinders  Pétrie  au 
sujet  de  Gourob  et  de  Kahoun  sont  justes,  ces  localités  constituent 
des  exceptions  uniques  en  leur  genre.  Je  suis -plutôt  porté  à  croire 
que,  comme  à  la  pyramide  septentrionale  de  Licht,  les  monuments 
de  la  XIP  dynastie  ont  été  construits  à  Kahoun  et  à  Gourob  sur  le  site 
d'anciennes  stations  néolithiques.  La  nature  et  le  grand  nombre  des 
objets  qui  y  ont  été  trouvés  sont  en  laveur  de  cette  hypothèse. 

Stations  du  Fayoïim. 

DîMEii.  —  La  station  préhistorique  de  Dîmeh  se  trouve  située  à 
.1  kilomètres  environ  au  sud  des  ruines  de  la  ville  romaine,  dans  une 
cuvette  dont  le  fond  est  h  100  mètres  d'altitude  au-dessus  du  niveau 
actuel  du  Birkct-el-Karoun  et  où  jadis  les  eaux  du  lac  p(''nétrèrent.  Ce 
golfe  était  alors  bordé  de  collines  dont  la  hauteur  ne  dépasse  guère 
30  mètres  au-dessus  des  anciennes  plages. 

1.  Meduin,  par  W.  M.  Flindei-s  Pétrie,  Londres,  1892. 

2.  Kaliun,  Gitroh  and  /lan'ara,  par  W.  M.  Flinders  Pétrie,  I^ondres,  1890;  Hlalum, 
Kahuii  iinâ  Guroh,  du  même  auteur,  Londres.  i8[)i. 


I.'UOMMi:   .M'OIJTHMJIE  73 

Les  collines  sont  composées    d'assises  niiocciics  niaiMiics,  larulis 
que  le  Ibiul  de  la  ciiv(!lte,  couvert  de  limons  modernes  d'eau  <iouc(> 
est  formé  des  couches  supérieures  de  réocène. 

C'est  antérieurement  au  séjour  de  l'homme  dans  (;elle  localité  nue 
le  Birket-el-Karoun  s'étendit  jusqu'aux  aHleurements  mioc-ènc^s,  car 
c'est  sur  les  limons  du  lac  que  se  renconirent  l(!s  silex  travaillés. 

(les  dépôts  lacustres  renl'erment  en  al)ondan(;e  les  restes  des  ani- 
maux <|ui  vécurent  dans  le  lac  et  sur  les  bords  ;  j'y  ai  Irouvé  en  eÛ'et 
un  <:;rand  nondjre  de  mollusc|ues  '  et  dans  la  parlic  nu'iidionale  du 
goli'e  une  abondance  extrême  de  restes  de  vertébrés,  parmi  lesqutds 
j'ai  reconnu  le  crocodile,  des  tortues,  des  hippopotames,  des  os  d'an- 
tilopes, des  vertèbres  de  poissons  et  bien  d'autres  scjucleltes  ([u'ij  ne 
m'a  pas  été  possible  d'identifier. 

L'examen  de  ce  gisement  présente  le  plus  haut  intérêt  ;  les  osse- 
ments y  sont  très  abondants  et  leur  date  est  déterminée,  car  on  sait 
que,  postérieurs  aux  grandes  alluvions  du  (juaternaire,  ils  ont  pré- 
cédé l'établissement  de  l'homme  néolithique  sur  ce  point.  En  y  opé- 
rant des  ibuilles  on  retrouverait  bien  certainement  tous  les  éléments 
nécessaires  pour  reconstituer  la  faune  de  l'Egypte  aux  premiers 
temps  de  notre  période. 

La  station  néolithique  présente  une  superficie  de  4  à  500  hectares  ; 
les  silex  y  sont  répandus  à  la  surface  du  sol  avec  une  grande  régu- 
larité et  en  abondance.  Il  n'y  existe  que  peu  de  percuteurs,  de  nucléi 
et  d'éclats;  presque  tous  les  objets  sont  des  pièces  cassées  ou  hors 
d'usage. 

Comme  le  fait  a  toujours  lieu  dans  les  stations  préhistoriques,  les 
silex  taillés  rayonnent  ([uelque  peu  aulour  du  centre  principal;  on  en 
rencontre  en  petit  nombre  sur  certains  jjoints  situés  à  2  ou  -i  kilo- 
mètres de  la  station.  L'un  de  ces  gisements  secondaires,  situé  entre 
les  ruines  de  la  ville  et  le  Birket,  à  une  altitude  moyenne  de 
100  mètres  également,  a  été  la  cause  de  l'erreur  dans  laquelle  sont 
tombées  les  personnes  qui  ont  parlé  des  silex  de  Dîmeh. 

Ce  gisement  secondaire  est  bien  moins  riche  que  la  station  iirinci- 
pale,  on  y  rencontre  quelques  pièces  brisées,  des  pointes  de  llcches  et 
des  objets  rebutés.  Il  semblerait  que  quelques  familles  soient  venues 

I.  Les  limons  sur  lesquels  repose  la  station  préhistorique  de  Dîmeh  renferment,  en 
outre  des  ossements  de  poissons,  de  tortues,  d'antilopes,  d'hippopotames,  etc.,  les 
mollusques  nilotiques  suivants  :  Lanistes  carinaius  (Oliv.),  Planorhis  Ruppeli  (Dkr.), 
P.  costulalus  (Krauss.),  P.  sp.,  Segmentina  angusta  (Jick.),  Isidora  conlorta  (Mich.), 
Mcliinia  tuherculata  (Mull.),  Cleopalra  huUmoïiles  (Oliv.),  Bylhinia  cf.  ruliescens, 
Vals'/iln  nilolica  (Jick.),  Liniiuvi  sp.;  ers  limons  sout  presque  ciitièrcincnt  composés 
de  diatomées. 


74  I/HOMME  NÉOLITHIQUE 

habiter  sur  les  rives  du  lac  qui  alors  s'étendait  jusqu'au  niveau  où  se 
trouvent  les  instruments  néolithiques.  Plus  à  Tinlérieur,  dans  la  di- 
rection des  ruines  historiques,  les  silex  font  défaut  et  dans  les  koms 
eux-mêmes  on  n'en  rencontre  pas  la  moindre  trace.  La  ville  s'est  éle- 
vée en  un  point  voisin  d'une  ancienne  slalion  préhistorique,  mais  ces 
deux  gisements  des  restes  humains  ne  possèdent  entre  eux  aucune 
relation  chronologique. 

A  Dimeh,  lorsque,  partant  du  centre  du  gisement  préhistorique,  on 
s'avance  vers  le  rivage  actuel  du  lac,  on  rencontre  quelques  silex  jus- 
qu'à une  altitude  de  90  mètres  environ;  puis  lès  éclats  disparaissent 
absolument  et  l'on  ne  remarque  plus  que  les  racines  des  arbres  qui, 
suivant  à  peu  de  distance  le  cordon  littoral,  se  sont  desséchés  quand 
graduellement  le  niveau  du  lac  baissa.  Aujourd'hui  des  arbres  de 
même  essence  croissent  le  long  du  rivage  et  les  sables  de  leur  pied 
ne  dépassent  guère  une  altitude  de  10  mètres  au-dessus  des  eaux. 

Ce  mouvement  lent  du  Birket-el-Karoun,  qui  chaque  jour  baisse  de 
niveau  et  diminue  sa  surface,  saute  aux  yeux  lorsqu'on  visite  le 
pourtour  du  lac  et,  grâce  aux  ruines  qui  l'entourent,  il  serait  aisé  de 
retrouver  d'une  façon  absolue  le  niveau  des  eaux  aux  diverses  épo- 
ques (fig.  34). 


Fig.  34-  —  Coupe  du  Fayoum  et  de  la  vallée  du  Nil. 

J'ai  fait  observer  qu'au  dessous  de  90  mètres  d'altitude  relative,  je 
n'avais  jamais  trouvé  de  silex  taillés.  Celte  observation  montre  qu'à  la 
fin  de  l'usage  de  la  pi  erre  travaillée  les  eaux  occupaient  un  niveau  voisin 
de  cette  altitude.  D'autre  part,  les  ruines  romaines,  qui  parfois  s'élèvent 
sur  des  terrains  plus  élevés  que  les  stations  préhistoriques,  sont  sou- 
vent situées  à  20  et  même  15  mètres  de  hauteur  seulement  au-dessus 
du  Birket.  Il  en  résulte  que,  les  silex  taillés  faisant  absolument  défaut 
entre  les  cotes  0  et  90,  l'usage  de  la  pierre  taillée  n'a  pu  être  contem- 
porain des  constructions  romaines,  et  que,  remontant  à  des  âges 
beaucoup  plus  reculés,  il  a  cessé  brusquement  avant  l'époque  ro- 
maine. 

M.  Lajard,  dans  son  étude  sur  l'âge  de  pierre  en  Egypte,  suppose 
que  la  station  de  Dîmeh  n'est  autre  qu'un  atelier  de  taille  d'où  les 
silex  façonnés  auraient  été  exportés  pour  les  besoins  des  hommes 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE  75 

d'époque  histori([iic,  et  que  les  silex  de  Goiiroh,  entre  autres,  n'au- 
raient pas  d'aiilre  oi'in'ine. 

Cette  sii|q)osilioii  serait  fondée  si  le  gisement  de  Dînieli  j)résenlail 
les  deux  conditions  néeessaires  pour  la  constatation  d'un  atelier  : 
d'abord  si  le  silex  brut  abondait  naturellement  dans  le  pays;  ensuite, 
si  le  sol  de  la  station  était  couvert  de  nucléi,  de  percuteurs  et  d'éclats. 

Or,  dans  le  diluvium  des  environs  de  Dîmeh,  les  silex  sont  fort  rares 
et  petits,  et  dans  les  couclies  éocènes  et  miocènes  qui  forment  le  pays 
il  n'existe  pas  un  seul  rognon  de  cette  matière.  De  plus,  je  l'ai  dit,  1(îs 
objets  qu'on  ramasse  à  Dimeh  ne  présentent  aucun  des  caractères  des 
instruments  rebutés  à  la  taille.  Ce  sont  des  pièces  finies  et  générale- 
ment mises  hors  d'état  par  l'usage.  Quant  aux  nucléi  et  aux  percu- 
teurs, ils  sont  si  rares  que  c'est  à  peine  si  en  plusieurs  jours  de  recher- 
ches j'ai  pu  m'en  procurer  quelques  spécimens. 

Dans  l'examen  que  je  viens  de  faire  du  gisement  de  Dîmeh,  je  crois 
avoir  démontré  que  les  silex  taillés  de  cette  localité  sont  de  beaucoup 
antérieurs  à  l'époque  romaine  qu'on  leur  avait  attribuée,  et  ensuite  que 
leur  présence  en  cette  localité  est  due,  non  pas  à  l'existence  d'un  atelier 
de  taille,  mais  bien  à  un  centre  d'habitation.  Quant  à  l'époque  précise 
des  silex,  les  observations  ne  permettent  pas  de  la  déterminer,  mais 
l'altitude  élevée  qu'occupent  les  gisements  oblige  à  la  reporter  fort 
loin. 

KoM-AcHiM.  —  Dans  cette  localité,  sur  un  plateau  rocheux  qui  do- 
minait autrefois  le  lac,  s'étendent  les  restes  d'une  importante  ville 
romaine;  son  temple  ruiné  porte  des  inscriptions  grecques  aux  noms 
des  empereurs.  Plus  au  nord,  entre  le  kom  et  le  désert,  à  4  kilomè- 
tres environ  des  ruines,  sont  les  restes  d'une  station  préhistorique 
n'ayant  aucun  lien  commun  avec  les  ruines  de  la  ville  qui  ne  renfer- 
ment pas  la  moindre  trace  de  silex  travaillé. 

A  l'ouest  sont  encore  deux  autres  tells  romains  nommés  aujourd'hui 
Ariet-el-Rosas  et  El-Gedaïdah.  Il  n'existe  pas  dans  ces  deux  localités 
de  silex  taillés. 

O.m-el-'Atl.  — Localité  située  au  nord  du  village  de  Tamiyeh,  dans 
une  plaine  aujourd'hui  stérile,  jadis  largement  cultivée  ;  on  y  voit  un 
tell  important  renfermant  des  ruines  romaines.  Je  n'ai  pas  rencontré 
dans  ces  koms  la  moindre  trace  de  silex  travaillé. 

A  3  kilomètres  à  l'est  de  Om-el-'Atl  et  à  4  kilomètres  au  nord, 
sont  deux  stations  préhistoriques  assez  importantes;  on  y  rencontre 
en  abondance  les  instruments  et  les  armes  hors  d'usage.  L'absence 
presque  complète  de  silex  naturels  dans  ces  localités  fait  exclure 
l'idée  que  ces  stations  peuvent  avoir  été  des  ateliers  de  taille. 


76  t;hommi-:  néolithique 

MEDiNET-EL-M\Hni.  —  Localité  située  au  sud  tlu  Fayouni,  clans  le 
district  de  Gharak;  on  y  voit  un  tell  romain  cl  non  loin  une  station 
néolithique  de  peu  d'importance. 

Qash-Kaiioun.  —  Ruines  de  ville  el  temple  situés  près  de  l'extré- 
mité occidentale  du  Birket-Karoun.  Les  édifices  sont  tous  d'époque 
romaine.  Je  me  suis  rendu  dans  cette  localité,  afin  d'y  vérifier  l'exis- 
tence d'un  gisement  néolithique  qui  m'avait  été  signalé.  Dans  les 
ruines  comme  aux  environs  de  la  ville  je  n'ai  pas  rencontré  la  moindre 
trace  de  silex  taillé.  Cette  constatation  est  une  preuve  très  concluante 
en  faveur  de  la  haute  antiquité  des  instruments  de  pierre  en  Egypte. 

Stations  de  la  Haute-Egypte. 

II  ne  m'a  pas  été  possible  de  rechercher  les  stations  néolithiques 
entre  Beni-Souef  et  les  limites  septentrionales  de  la  province  de  Gir- 
geh;  cette  étude  réclamait  un  temps  que,  inalheureusement,  je  n'ai 
pu  lui  consacrer.  C'est  donc  par  Abydos  et  les  localités  voisines  que 
je  continuerai  l'énumération  des  gisements  de  silex  taillé  que  nous 
connaissons  aujourd'hui. 

El-Mahasnah.  —  Localité  du.  nord  d'AJjydos;  on  y  rencontre,  dans 
la  partie  située  au  pied  des  montagnes  qui  à  gauche  bordent  la  vallée 
du  Nil,  des  tombeaux  creusés  à  même  le  sol,  oii  le  mort,  placé  sur  le 
flanc,  les  membres  repliés,  est  entouré  de  poteries  grossières,  d'ar- 
mes de  silex  et  de  figurines  animales  en  schiste.  Je  n'ai  pas  exploré 
cette  localité  et  ne  puis  en  parler  que  d'après  quelques  objets  qui 
m'ont  été  apportés. 

El-Ragagnah.  —  Localité  distante  d' Abydos  d'environ  20  kilomètres 
au  nord.  On  y  rencontre  une  nécropole  analogue  à  celle  d'Ei-Mahas- 
nah. 

Om-el-Ga'ab.  —  Localité  d'Abydos  renfermant  une  nécropole  de 
l'époque  néolithique  et  les  tombes  royales  découvertes  en  1895  par 
M.  E.  Amélineau. 

Abydos.  —  Depuis  longtemps,  dans  la  nécropole  d'Abydos,  on  ren- 
contrait des  silex  merveilleusement  taillés,  et  on  les  attribuait  à  la 
XII»  ou  à  la  XXVIP  dynastie,  suivant  l'époque  des  tombeaux  près  des- 
quels on  les  trouvait.  Celte  opinion  était  tellement  ancrée  dans  l'es- 
prit des  archéologues  que,  de  même  qu'on  s'appuyait  sur  la  taille 
prétendue  romaine  du  silex  à   Dimch,  de   même   on  invoquait   les 


L'HOMMK   M.Ul.rnUQUl'  77 

iastriimciils  d'Abyclos  pour  pi-oiivcr  rori^iiic  liisloriqiie  de  rEgypIo. 

C(!lle  année,  M.  E.  Amélineau,  exécutant  des  Ibuilles  dans  la  né- 
cropole, détouvril  une  série  de  tombes  très  singulières,  violées  il  est 
vrai,  mais  reni'crtnant  avec  des  vases  grossiers  des  silex  taillés  sem- 
blaljles  à  ceux  qui  abondent  dans  les  collections  de  l'Europe  et  qu'on 
pensait  d'époque  relativement  basse. 

J'assistai,  moi-même,  à  l'ouverture  de  plusieurs  de  ces  sépultures; 
elles  se  composent  d'une  fosse  rectangulaire  profonde  do  4  ou 
5  mètres,  large  de  5  ou  6  et  longue  de  G  à  10.  Les  spoliateurs 
avaient  tout  enlevé  dans  ces  tombeaux  et  souvent  môme  y  avaient 
allumé  de  véritables  brasiers  dont  les  charbons  existaient  encore 
en  énorme  quantité.  On  ne  trouvait  plus  alors  que  des  fragmcnits 
de  pierres,  de  vases,  de  silex  taillés  et  des  ossements  (-alcinés.  Par- 
fois, une  stèle  renversée  dans  le  puits  offrait  quelques  caractères 
aux  formes  archaïques,  ou  une  bannière  royale,  parfois  aussi  des  cô- 
nes d'argile  crue  portaient  imprimés  au  cylindre'  quelques  inscrip- 
tions et  les  mômes  bannières  royales. 

Tout  dans  ces  monuments  dénote  une  très  haute  antiquité.  Doit-on 
les  attribuer  à  des  souverains  des  premières  dynasties,  ou  même  aux 
dvnasties  dites  divines  ?  Je  ne  saurais  me  prononcer.  D'ailleurs  M.  Amé- 
lineau nous  a  fourni  lui-même  la  solution  de  cette  question  difficile 
dans  le  travail  qu'il  a  publié  sur  ses  remarquables  recherches. 

Le  savant  égyptologue  lisait  dernièrement"  un  compte-rendu  de 
ses  travaux  d'Abydos  à  l'Académie  des  inscriptions  et  ])elles-lettres 
et  peu  après  livrait  au  pulilic  une  notice  explicative  plus  étendue^ 
réfutant  un  grand  nombre  d'objections  qui  lui  avaient  été  posées. 
J'extrais  de  cette  notice  la  partie  descriptive  des  découvertes,  la  seule 
qui  concerne  les  études  sur  les  origines;  elle  présente  un  intérêt 
considérable. 

«  Ayant  exploré  cette  première  butte,  je  passai  à  un  plateau  long 
d'environ  200  mètres  qui  séparait  la  première  de  la  seconde  butte  et 
je  fis  faire  des  sondages.  Les  sondages  révélèrent  l'existence  de 
tombes,  et  dans  la  première  (jue  je  fouillai  étaient  cinq  statuettes  en 
calcaire  très  belles  et  intactes,  sauf  une.  ÎNIalheureuseinent  ce  fut 
tout  ce  que  je  découvris  d'objets  artistiques  dans  les  tombes  de  ce 

1.  II  est  intéressant  de  remarquer  au  sujet  des  cylindres  que,  dans  les  temps  pha- 
raoniques, les  cacliets  furent  presque  exclusivement  obtenus  à  l'aide  de  scarabées 
gravés  et  que  l'emploi  du  cylindre  fut  presque  complètement  abandonné.  L'usage  du 
cylindre  aux  époques  archa'iques  fait  songer  à  celui  quiMi  faisaient  vers  les  mèm.îi 
époques  les  habitants  de  la  Chaldée. 

2.  29  mai  1896. 

3.  Les  Nouvelles  fouilles  d'Ahydus,  par  E.  Amélinoaii,  Anijei's,  189G. 


78  L'HOMME  NÉOLITHIQUE 

plateau  au  nombre  d'environ  cinquante.  Ils  ne  m'offrirent  tous  que 
des  fragments  de  vases  brisés  et  des  vases  de  poterie  grossière  aux- 
quels je  n'atlacbai  pas  d'abord  une  grande  importance.  Ces  tombes 
étaient  construites  toutes  de  la  même  manière  et  consistaient  dans 
une  chamljre  unique  creusée  dans  la  molasse  et  revêtue  de  briques 
crues  et  grossières.  Ceux  qui  les  avaient  construites   étaient  encore 
fort  novices  dans  l'art  de  construire  ;  ils  ne  savaient  ni  mettre  un  mur 
d'aplomb  ni  le  mettre  d'équerre  avec  un  autre  déjà  construit.   Les 
murs  étaient  tout  à  fait  irrégnliers,  rentraient  ou  ressortaient,  un  peu 
au  petit  bonheur.  Quelquefois  cette   unique  chambre  était  bordée, 
sur  un,  deux  ou  trois  côtés,  d'une  série  de  petites  loges  aussi  irré- 
gulièrement construites  que  la  chambre  principale,  si  étroites  que  je 
me  demandais  à  quoi  elles  avaient  pu  servir,  car  on  aurait  à  peine  pu  y 
loger  deux  vases  comme  ceux  que  je  trouvais  déjà.  La  réponse  à  la 
question  que  je  me  posais  me  fut  fournie  par  ce  fait  qu'un  jour  on 
découvrit  un  cadavre  échappé  à  la  dévastation  :  il  n'était  point  mo- 
mifié, était  couché  nu  sur  le  côté,  les  genoux  ramenés  à  la  hauteur 
de  la  poitrine,  les  deux  bras  par  devant  le  visage,  dans  la  posture  de 
l'enfant  dans  le  sein  de  sa  mère  et  je  compris  alors  qu'il  n'était  pas 
besoin  d'un  grand  espace  pour  le  contenir.  Malgré  tout,  certaines 
loges  étaient  encore  trop  étroites  pour  contenir  un  cadavre  dans  cette 
position  et  l'usage  m'en  est  resté  inconnu  parce  que  je  n'y  ai  rien 
rencontré  qui  me  l'apprît.  Je  pourrais  ajouter  ici  d'autres  détails  que 
j'ai  eu  le  loisir  d'ojjserver,  mais  dont  la  simple  mention  m'entraîne- 
rait dans  des  considérations  trop  longues  pour  être  exposées  dans 
cette  communication  et  que  j'exposerai  tout  au  long  dans  le  mémoire 
qui  paraîtra  sur  les  fouilles.  Je  dois  dire  cependant  que  sur  les  vases 
de  terre  grossière  que  je  trouvai  dans  quelques  sépultures  je  recon- 
nus des  dessins  tout  à  fait  primitifs,  dessinés  par  des  hommes  qui 
en  étaient  encore  à  essayer  leur  calame  et  qui  faisaient  leur  éducation 
artistique.  A  mesure  que  j'approchai  de  la  seconde  butte,  je  com- 
mençai de  trouver  quelques  caractères  inscrits  sur  des  fragments  de 
vases  en  pierre  dure  brisés  :  ces  caractères  me  semblèrent  étranges 
de  forme  et  de  gravure.  Je  trouvai  en  outre  d'autres  fragments  avec 
des  caractères  grecs  et  je  ne  savais  comment  les  uns  et  les  autres 
pouvaient  se  rencontrer  ensemble.  Ce  n'est  que  plus  tard  que  la  lu- 
mière se  fit  dans  mon  esprit.   Je  sus  en  effet  que  des  sépultures 
semblaljles  avaient  été  trouvées  à  Qeft  par  le  très  habile  explorateur 
anglais,  M.  Flinders  Pétrie,   mais  qu'il  n'avait  trouvé  aucune  trace 
d'écriture.  Dans  la  dernière  tombe  de  ce  plateau,  j'eus  le  bonheur  de 
rencontrer  une  stèle  dont  le  caractère  archaïque  était  évident. 

t(  La  seconde  et  la  troisième  butte  étaient  de  très  petites  dimensions 


L'HOMME    NEOLITHIQUE  79 

cl  1res  peu  éloignées  l'uiK^  dc^  raiilr'(\  Très  peu  éhîvéos,  elles  ne  sem- 
blaient devoir  exiger  qu'un  1res  couri  espace  de  temps,  mais  les  tom- 
beaux qn'ellfis  recouvraient,  au  licMi  d'être  petits,  étaient  très  vastes 
et  dcniandèriuil  un  temps  considérable.  Tout  y  était  ravagé,  détruit 
avec  la  plus  rare  fureur,  et  quand  les  moyens  ordinaires  de  ravage 
n'avaient  pas  paiMi  suffisants  on  avait  employé  le  feu.  Les  auteurs  de 
ces  crimes  abominables  avaient  même  trouvé  le  moyen  de  signer 
leur  œuvre  :  sur  des  fragments  de  vases  d'albâtre  ils  avaient  dessiné 
au  charbon  des  caractères  coptes  et  l'un  d'entre  eux  avait  écrit  son 
nom  tout  entier:  il  s'appelaitJean.  Ce  sont  donc  les  chrétiens  qui  ont 
détruit  les  tombeaux  de  cette  partie  de  la  nécropole  et  je  ne  me  trom- 
perai pas  beaucoup  en  disant  que  les  moines  d'Abydos,  contempo- 
rains ou  disciples  postérieurs  du  fanatique  jMoyse  dontl'image  souille 
les  murs  du  temple  de  Séli  P'',  sont  les  auteurs  de  ces  horribles  spo- 
liations. Ils  n'ont  laissé  aucun  objet  intact  et  ont  agi  avec  lenteur, 
prenant  toutes  les  précautions  nécessaires  pour  qu'il  ne  leur  arrivât 
aucun  mal,  bâtissant  même  des  murs  pour  prévenir  les  éboulements 
qui  auraient  pu  empêcher  leur  œuvre  de  sauvage  destruction.  L'un 
des  tombeaux  de  la  seconde  butte  avait  été  totalement  incendié  : 
comme  il  était  entièrement  pave  en  bois,  j'y  rencontrai  environ  deux 
cents  kilos  de  charbon  de  bois,  car  les  spoliateurs  ayant  allumé  l'in- 
cendie et  ayant  jeté  du  sable  par  dessus,  le  feu  consuma  lentement  sa 
proie.  Je  commençai  à  trouver  sous  ces  deux  buttes  des  silex  d'une 
beauté  extraordinaire,  admirablement  polis  et  taillés  et  le  tombeau 
aux  deux  cents  kilos  de  charbon  de  l)ois  me  fournit  à  lui  seul  324  pointes 
de  flèches  en  silex,  travaillées  avec  une  habileté  extraordinaire,  de 
toutes  formes  et  déjà  barbelées.  Les  roseaux  des  flèches  avaient  été 
dévorés  par  l'incendie  et  les  pointes  en  silex  étaient  restées  éparpil- 
lées dans  le  sable.  J'ai  aussi  rencontré  dans  ce  môme  tombeau  deux 
gros  morceaux  de  bois  de  sycomore  avec  des  mortaises  ou  des  trous  à 
chevilles,  et  dans  ces  trous  étaient  passés  des  fils  de  bronze,  té- 
moignage du  moyen  par  lequel  les  diverses  pièces  du  pavé  étaient 
assemblées  ensemble.  J'avais  trouvé  déjà  des  morceaux  de  métal  ou 
des  fils  de  métal  dont  je  me  demandais  l'emploi  :  la  solution  du  pro- 
blème m'était  ainsi  fournie. 

«  La  quatrième  butte  était  énorme  et,  quoiqu'elle  fût  large  de 
80  mètres  environ,  je  ne  pouvais  un  seul  moment  espérer  y  occuper 
d'un  seul  côté  les  450  ouvriers  que  j'employais  alors.  Je  pensai  à  l'at- 
taquer méthodiquement  de  trois  côtés  à  la  fois,  au  nord,  à  lest  et  à 
l'ouest,  mais  pour  cela  il  fallait  déblayer  le  terrain  afin  de  pouvoir 
rejeter  toujours  en  arrière  les  déblais  qui  seraient  retirés.  Gomme 
du  côté  ouest  était  un  autre  plateau  d'environ  147  mètres  de  largeur 


80  T. 'HOMME  NÉOLITHIQUE 

sur  123  de  longueur,  je  reportai  mes  ouvriers  de  ce  côté.  Dès  les 
premiers  travaux  qui  furent  exécutés,  je  me  trouvai  en  présence  de 
nomljreux  tombeaux  dont  ([uelques-uns  avaient  des  dimensions  énor- 
mes. C'est  ainsi  que  je  trouvai  un  tombeau  composé  d'une  grande 
salle  ayant  15", 05  de  long,  <S"',UO  de  large  et  6°", 24  de  hauteur;  la  pro- 
fondeur des  murs  de  revêtement  n'avait  pas  moins  de  4'", 33.  Ce  tom- 
beau était  celui  du  j)haraon  Den.  L'incendie  qui  y  fut  allumé  fut  tel- 
lement violent  (|u'il  convertit  sur  toute  l'épaisseur  du  mur  les  briques 
crues  en  Ijriques  cuites  dont  on  pouvait  l'aire  le  ciment  que  les  indi- 
gènes appellent  'o/iira/t.  On  y  accédait  par  deux  étages  d'escalier 
contenant  chacun  vingt  et  une  marches.  La  salle  était  entièrement 
pavée  de  granit  rose  et  les  dévastateurs  avaient  réussi  d'abord  à  dé- 
placer, ensuite  à  Ijriser  au  prix  de  grands  efforts  quelques-unes  des 
pierres  énormes  du  pavé.  Je  n'y  rencontrai  que  des  objets  cassés  et 
une  stèle  en  granit  sans  inscription.  Sur  les  côtés  de  cette  grande 
tomlîe  étaient  des  constructions  plus  petites,  les  unes  ayant  servi  da 
tombeau  et  encore  pavées  en  bois,  les  autres  de  magasins  et  remplies 
de  grandes  jarres,  de  zifs  énormes  el  d'autres  vases  en  terre  ou  en 
pierre  dure.  De  ceux-ci  je  ne  rencontrai  que  des  fragments,  mais 
comme  j'avais  soin  de  faire  ramasser  tous  les  fragments,  j'ai  pu  réi>s- 
sir  à  reconstituer  des  vases  entiers,  et  de  plus  les  fragments  conte- 
nant des  inscriptions  se  multipliaient.  C'est  alors  qu'apparut  le  pre- 
mier nom  des  souverains  de  cette  époque.  Il  était  enfermé  dans  un 
rectangle  et  surmonté  d'un  épervier,  dans  la  forme  ordinaire  de  ce 
qu'on  appelle  les  bannières  royales.  Depuis  j'en  découvris  quinze 
autres,  avec  tous  les  titres  usités  depuis,  comme  ura>us  de  la  Basse- 
Egypte,  vautour  de  la  Haute-Egypte,  roi  souleii  de  la  Haute-Egypte 
et  roi  net  delà  Basse-Egypte,  ce  qui  fait  que  j'ai  actuellement  au  moins 
seize  noms  de  rois  ayant  gouverné  l'Egypte  entière  à  cette  époque 
reculée.  Quelques-uns  de  ces  noms  sont  écrits  d'un  seul  signe, 
d'autres  de  deux,  d'autres  de  trois  ;  la  lecture  de  quelques-uns  de  ces 
signes  est  encore  inconnue.  De  môme  les  stèles  de  simples  particu- 
liers se  multipliaient  :  j'en  ai  recueilli  environ  une  trentaine,  pendant 
que  je  n'avais  que  trois  stèles  royales,  plus  un  mortier  en  granit  oii 
était  la  bannière  d'un  roi  nommé  Den.  Les  premières  stèles  avaient 
été  respectées  par  les  dévastateurs,  sans  doute  comme  étant  de  vil 
prix  :  elles  ne  contiennent  que  le  nom  de  l'individu  avec  son  titre  qui 
m'est  inconnu,  mais  c[ui  avait  rapport  au  culte  du  rfo^ôZe  après  la 
mort,  car  le  signe  qui  désigne  le  double  se  rencontre  presque  sur 
toutes  avec  le  même  oiseau.  Elles  étaient  formées  par  des  pierres 
rencontrées  dans  la  montagne,  à  peine  polies  pour  recevoir  la  gravure 
et  qui  s'effritent  malheureusement  dès  qu'elles  voient  le  jour.  Les 


I/HOMME   NKOLITIIIQUl-  Kl 

trois  stèles  royales  au  contraire  étaient  en  granit  ou  en  beau  calcaire. 
Les  caractères  gravés  sur  le  elianip  di;  la  stèle  déjà  cintrée  sont  ar- 
chaïques au  premier  cIk;!'  :  évideniinent  sur  les  deux  stèles  en  granit, 
l'artiste  a  été  gêné  par  la  matières  qu'il  avait  à  tailler;  aussi  son 
œuvre  est  loin  d'èlre  aussi  parlaite  que  la  stèle  en  calcaire  où  il  a  l'ait 
preuve  d'une  véritable  maîtrise.  Le  champ  de  la  stèle  est  évidé  de 
2  centimètres  et  demi  environ,  de  manière  à  l'aire  mieux  ressortir 
les  caractères  à  sculpter  et  en  effet  l'épervier  qui  surmonte  le  rec- 
tangle et  le  serpent  qui  y  est  renfermé  et  qui  forme  le  nom  du  roi  se 
détachent  de  la  pierre  avec  une  vigueur  majestueuse  qui  n'a  rien  à 
envier  aux  belles  œuvres  des  temps  plus  rapprochés  de  nous.  Ces 
trois  stèles  étaient  fort  hautes  et  elles  ont  été  brisées  en  plusieurs 
morceaux  :  la  dernière  compte  trois  morceaux  d'inégale  longueur, 
mais  elle  est  complète.  Le  bas  du  rectangle  dans  les  trois  est  occupé 
par  une  maison  rudimentaire  sur  les  stèles  de  granit,  et  sur  la  stèle 
de  calcaire  par  une  maison  dontle  dessin  est  exactement  le  même  que 
sur  le  sarcophage  de  Mycérinus  ou  sur  les  tombeaux  de  l'Ancien  Em- 
pire à  Saqqarah. 

«  Ce  ne  sont  pas  seulement  les  stèles  ou  les  fragments  de  vases 
qui  m'ont  fourni  des  noms  de  pharaons  ;  mais  encore  les  grands  vases 
trouvés  dans  les  magasins  dont  j'ai  parlé.  Sur  le  flanc  de  ces  vases  se 
lisent  des  inscriptions  et  sur  quelques-uns  les  inscriptions  con- 
tiennent la  mention  du  propriétaire  du  vase.  Bien  plus,  presque  tous 
étaient  surmontés  d'immenses  bouchons  en  terre  mélangés  avec  des 
fibres  de  palmier  que  les  ouvriers  avaient  d'abord  pris  pour  du  poil 
de  chameau,  ([ue  j'avais  cru  moi-même  être  du  poil  de  chèvre  ou 
de  gazelle  et  dont  l'examen  au  microscope  a  démontré  la  nature.  Ces 
bouchons  étaient  tous  estampillés  au  nom  du  propriétaire,  et  ce  pro- 
priétaire était  toujours  un  pharaon.  Ces  grands  vases  contenaient  les 
matières  les  plus  diverses,  des  dattes,  des  céréales,  des  fruits  de 
napéca,  des  matières  grasses  en  abondance,  de  l'encens,  etc.;  leur 
contenu  s'est  à  peu  près  conservé  intact  et  les  matières  grasses 
brûlent  pendant  des  journées  entières  ,  comme  j'en  ai  fait  l'expé- 
rience. 

«  Les  œuvres  d'art  étaient  abondantes  à  cette  époque,  car  la  civili- 
sation était  déjà  très  avancée.  Tout  d'abord  on  savait  faire  des  pote- 
ries déjà  remarquables,  les  orner  avec  des  serpents  disposés  tout  au- 
tour du  vase  iMi  peu  au-dessus  de  la  panse  :  toutes  les  formes  usitées 
à  cette  époque  le  sont  encore  de  nos  jours  en  Egypte.  Le  tour  du 
potier  était  déjà  connu  vraisemblablement.  Les  vases  en  pierre  dure 
étaient  excessivement  nombreux  :  ma  chambre  était  remplie  des 
fragments  que  j'avais  fait  ramasser  et  je  ne  crois  pas  être  exagéré  en 


82  L'HOMME  NÉOLITHIQUE 

disant  que  j'avais  réuni  des  fragments  d'un  millier  de  ces  vases.  Les 
pierres  les  plus  dures  y  étaient  représentées,  l'albâtre  d'abord,  l'al- 
bâtre rubané,  l'onyx,  le  porphyre,  la  serpentine,  des  pierres  volca- 
niques en  grand  nombre  et  d'autres  pierres  en  grand  nombre  encore 
dont  j'ignore  le  nom.  Ces  vases  affectaient  des  formes  assez  variées, 
notamment  le  vase  à  vin,  dont  je  ne  connais  pas  d'exemples  et  dont 
je  crois  que  la  forme  est  considérée  comme  archaïque  et  que  j'ai  re- 
trouvé assez  fréquemment.  Ils  étaient  san-s  doute  taillés  avec  le  silex, 
creusés  avec  un  instrument  tournant  mu  par  une  sorte  de  violon,  car 
on  voit  encore  les  cercles  concentriques  tracés  en  quelques-uns  par 
l'instrument  dont  on  se  servait,  puis  polis  par  frottement.  J'ai  trouvé 
un  certain  nombre  de  polissoirs  dont  on  se  servait.  Il  arrivait  quel- 
quefois pendant  la  taille  qu'une  veine  malencontreuse  et  mauvaise 
faisait  briser  la  matière  :  l'ouvrier  la  recollait  alors  tranquillement 
et  j'ai  des  vases  qui  sont  encore  collés  de  cette  manière.  Quelcjues- 
uns  de  ces  vases  portent  des  caractères  gravés,  et  ces  caractères  sont 
exactement  semblables  à  ceux  des  stèles  particulières  :  ils  trahissent 
donc  la  même  époque.  Certains  de  ces  vases,  encore  en  assez  grand 
nombre,  puisque  j'en  ai  une  centaine  de  fragments,  étaient  ouvragés 
et  décorés,  ou  taillés  en  forme  d'animaux  avec  des  parties  du  corps 
humain.  Ces  décorations  ont  un  caractère  archaïque  très  prononcé, 
je  n  en  ai  jamais  vu  de  semblable,  quoique  je  connaisse  un  certain 
nombre  des  musées  les  plus  importants  d'Europe;  quelques-unes 
d'entre  elles  sont  très  fines  et  vraiment  artistiques.  Elles  ne  sont  pas 
sporadiques,  car  la  même  décoration  est  répétée  encore  assez  fré- 
quemment :  elles  sont  prises  en  général  des  choses  de  la  nature,  des 
coquilles,  des  paquets  de  jonc  retenus  par  une  attache  ;  un  grand 
nombre  sont  formées  j)ar  de  simples  lignes  irrégiilières  ou  régulières, 
la  plupart  du  temps  striées.  Les  vases  complets  en  albâtre  portaient 
généralement,  un  peu  au  dessous  du  col  ou  du  rebord,  une  ligne  très 
simple,  avec  des  sortes  de  coches  du  plus  gracieux  effet.  Deux  de  ces 
fragments  ont  une  véritable  importance  artistique  :  l'un  représente 
une  main  taillée  avec  beaucoup  d'art,  ayant  tous  les  caractères  archaï- 
ques désirables;  les  doigts  effilées  se  détachent  admirablement  avec 
toutes  leurs  particularilés  de  la  pierre  calcaire  sur  laquelle  ils  ont  été 
sculptés  :  cette  main  devait  servir  de  couvercle  à  un  vase  quelconque 
que  je  n'ai  pas  et  qui  lui  était  adhérent;  elle  était  brisée  en  deux  mor- 
ceaux et  j'ai  retrouvé  le  second  à  huit  jours  et  à  plus  de  30  mètres  de 
distance  du  premier.  Le  second  fragment  est  l'œuvre  d'un  grand  ar- 
tiste :  il  représente  une  léte  de  canard  d'un  réalisme  incroyaljle  et  qui 
semble  encore  vivante  :  la  tôte  était  attenante  à  un  corps  d'homme  ou 
de  femme,  de  femme  plus  vraisemblablement.  J'ai  trouvé  dans  un  de 


I/IIOMMIÎ  Nl'OLITHIQUE  83 

ces  toiiihcaiix  une  sorU;  de  vase  donl  je  ne  vois  pas  très  bien  la  forme 
qui  avait  une  feuille  d'or  applitpiée  de  chaf|uc  côté. 

«  Les  hommes  de  celte  époi[ue  étaient  donc  déjà  très  avancés  dans 
les  arts  de  la  civilisation  :  leur  art  préféré,  celui  dans  lequel  ils  réus- 
sissaient le  mieux,  était  la  sculpture,  ainsi  que  je  l'ai  déjà  dit.  J'ai 
trouvé  de  cette  époipie,  à  plus  de  10  mètres  sous  terre,  des  pieds  de 
tabouret  en  ivoirtî  qui  me  semblent  étonnants  de  facture  :  on  n'aiii'ait 
pas  mieux  fait  dix  siècles  plus  tard,  à  (lueique  époque  qu'on  doive 
rapporter  ces  tombeaux.  Ils  représentent  tous  (j'en  ai  trouvé  sept)  un 
pied  d'hippopotame,  avec  tous  les  caractères  spéciaux  aux  pieds  de 
ce  pachyderme  :  ils  ont  été  sculptés  avec  une  hardiesse  étonnante  et 
sont  au  nombre  des  plus  beaux  objets  que  j'aie  rencontrés.  J'ai  trouvé 
de  même  un  petit  lion  en  ivoire,  long  à  peu  près  d'un  décimètre,  d'une 
expression  extraordinaire.  Galion,  je  l'ai  vu  trouver  devant  moi  dans 
un  tombeau,  à  plus  de  6  mètres  sous  terre,  dans  les  décombres  du 
tombeau  (pii  avait  i™,10de  profondeur,  à  l'ouest  delà  quatrième  butte 
d'Om-el-Ga'ab.  Mais  la  preuve  la  plus  étonnante  de  l'art  des  habitants 
d'Abydos  à  cette  époque  me  semble  fournie  par  deux  petits  objets  en 
l)oisd'ébène.  Le  premier  a  été  trouvé  dans  la  tombe  du  roi  Serpent  : 
c'était  le  haut  d'une  petite  statuette  admirablement  sculptée,  avec  les 
seins  proéminents,  les  yeux  saillants,  la  bouche  épaisse  et  la  cheve- 
lure partagée  en  nombreuses  tresses  retombant  derrière  la  tête  et 
terminées  par  une  sorte  de  tire-bouchon  des  femmes  nubiennes.  Le 
type  est  incontestablement  nubien  :  les  femmes  Bischaris  pour- 
raient offrir  des  types  semblables  avec  une  chevelure  semblable.  Le 
second  est  peut-être  plus  étonnant  encore,  c'est  un  morceau  de  bois 
qui  faisait  sans  doute  partie  d'un  cofTret  et  qui  a  été  trouvé  dans  le 
tombeau  d'un  roi  qui  s'appelait  peut-être  Ç''''^-  H  est  décoré  des  deux 
côtés  :  du  côté  intérieur,  la  décoration  consiste  en  paquets  de  jonc  re- 
tenus par  des  attaches;  et  cette  décoration  se  trouve  de  chaque  côté 
d'un  espace  qui  contient  une  bannière  royale  avec  l'épervier  sur  le 
sommet,  soutenue  par  le  signe  ka  et  ayant  de  chaque  côté  le  signe 
de  la  puissance  pastorale  passé  dans  le  signe  de  la  vie.  » 

Cet  ensemble  de  sépultures  rentre  dans  la  catégorie  de  celles  que 
je  range  sous  le  nom  de  tombes  de  la  transition  :  elles  signalent  le 
passage  de  l'usage  de  la  pierre  polie  à  celui  des  métaux.  Leur  ar- 
chaïsme est  indiscutable,  leur  origine  royale  n'est  pas  moins  certaine. 
Quant  à  leur  âge  précis,  il  est  bien  difficile  de  le  fixer.  Car  on  peut 
aussi  bien  les  attribuer  à  des  rois  autochtones  qu'à  des  souverains 
rentrant  dans  la  I"  et  la  IP dynastie.  Il  se  peut  que  la  grande  invasion 
pharaonique  ait  été  précédée  par  des  avant-coureurs  qui  auraient 
alors  apporté  dans  la  vallée  du  Nil,  chez  les  aborigènes,  l'usage  des 


81  L'HOMMli  M'.OIJIHIQri- 

métaux  et  bon  nombre  de  coiitiunes  égyptiennes.  Il  se  peut  aussi 
que,  lors  de  la  conquête,  les  premiers  rois  pharaoniques  n'aient  pas 
été  en  possession  de  coutumes  irrévocablement  fixées  et  que  le  dé- 
veloppement se  soit  complété  dans  la  vallée  du  Nil.  Ces  questions 
sont  fort  complexes,  leur  solution  dépend  d'un  grand  nombre  de 
faits  que  nous  ne  connaissons  encore  pas.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  est 
impossible  de  nier  que  des  analogies  frappantes  existent  entre  les 
tombeaux  archaïques  d'El-'Amrah,  de  Kouft,  etc.,  et  les  sépultures 
royales  d'Om-el-Ga'ab;que  les  moliiliers  funéraires  dénotent  une  com- 
munauté de  civilisation  entre  les  derniers  hommes  de  la  pierre  polie 
et  les  habitants  d'Abydos  à  ces  époques  reculées.  Les  usages  pharao- 
nicpies  font  seulement  leur  apparition  ;  ils  sont  encore  souvent  rudi- 
mentaires  et  se  montrent  concurremment  avec  les  anciennes  coutumes 
autochtones.  Les  prochaines  fouilles  de  M.  E.  Amélineau  jetteront 
bien  certainement  un  jour  nouveau  sur  beaucoup  de  ces  points. 

Non  seulement  à  cette  époque  le  bronze  était  connu,  mais  l'or  fai- 
sait partie  des  ornements,  car,  peuaprèsles  fouilles  de  M.  Amélineau 
à  Abydos,  on  m'apportait  au  Musée  de  Guizeh  un  lot  de  silex  taillés 
présenté  par  un  marchand  et  dont  l'une  des  lames  est  garnie  d'une 
feuille  d'or  repoussé  représentant  des  animaux  et  des  Heurs.  Gomme 
de  juste,  les  fellahs  qui  découvrirent  cette  admirable  pièce  se  gardè- 
rent bien  d'en  fournir  la  localité,  mais,  par  la  nature  de  la  matière 
comme  par  les  ca.ractères  du  travail,  je  ne  puis  douter  que  cet  objet  ne 
provienne  des  environs  d'Abydos.  M.  Amélineau  est  d'avis  que  ces 
oljjets  lui  ont  été  volés  au  cours  de  ses  fouilles  à  Abydos.  M.  E. 
Brugsch-bey  pense  qu'elles  proviennent  de  Sagel-el-Baglieh.  Dans 
tous  les  cas  elles  ont  certainement  été  trouvées  dans  le  district  d'A- 
bydos. 

Les  tombes  archaïques  d'Abydos  furent,  pendant  des  milliers 
d'années,  l'objet  de  la  vénération  publique.  Elles  disparaissent  au- 
jourd'hui sous  de  véritables  montagnes  de  vases  brisés  qui  jadis  ren- 
fermèrent des  offrandes.  Gette  partie  de  la  nécropole  n'est  encore 
qu'effleurée  et  certainement  fournira  des  documents  bien  précieux 
sur  ces  époques  qu'on  soupçonnait  à  peine. 

El-'Amrah.  —  A  6  kilomètres  environ  au  sud  d'Abydos  est  la  né- 
cropole d'El-'Amrah  où,  l'hiver  dernier,  j'ai  fait  quelques  sondages. 

En  ce  point  de  la  vallée  du  Nil,  les  terres  fertiles  sont  séparées 
du  pied  de  la  montagne  par  un  vaste  plateau  bas  d'alluvions  caillou- 
teuses ;  c'est  dans  cette  plaine  ([ue  se  trouvent  les  sépultures  ar- 
chaïques accompagnées  de  sépultures  d'époque  historique  et  relative- 
ment moderne. 


I/HOMME    NKOIJTIHOUE 


85 


Les  loinljcs  aicliui(|ues  soiiL  Loulcs  du  mr-iiu!  inodèle;  elles  seeoin- 
posent  d'une  simple  fosse  ovale  creusée  dans  les  alluvions  el  pro- 
fonde de  l'",50  à  2  mètres  au  plus.  Le  corps  a  été  déposé  sur  le  côté 
gauche,  les  jambes  sont  repliées  de  telle  sorte  que  les  genoux  soient 
à  la  hauteur  du  sternum,  les  avant-hras  sont  allongés  en  avant  et 
les  mains  placées  l'une  sur  l'autre  devant  la  face,  la  tête  est  légèrement 
penchée  en  avant. 


yc^ 


Fig.  35.  —  Sépulture  préhistorique  (nécropole  de  El-'Amrah). 
i/ao  grandeur   naturelle'. 

Autour  du  mort  sont  les  vases,  grandes  urnes  de  fabrication  gros- 
sière souvent  remplies  de  cendres  ou  d'ossements  d'animaux;  plus 
près  du  corps  on  rencontre  des  vases  peints  et  d  autres  rouges  dont 
les  bords  sont  noircis  et  briuiis,  des  vases  de  pierre  grossièrement 
creusés,  des  figurines  de  schiste  représentant  des  poissons  ou  des 


I.   Les  figures  36  à  5o  ont  été  reportées   plus  loin    dans    le    volume,    l'auteur  ayant 
jugé,  au  dernier  moment,   plus  à   propos  de  les  classer  avec  leur  texte  explicatif. 

6 


86  L'HOMME  NÉOLITHIQUE 

quadrupèdes,   des  silex  taillés  et,  plus  rarement,  des  massues  d'al- 
bâtre,  des  colliers  et  des  bracelets  de  coquilles. 

Le  bronze  est  fort  rare  dans  ces  tombeaux.  Quand  on  le  rencontre, 
il  se  trouve  le  plus  souvent  à  l'étal  de  petits  instruments,  tels  que  des 
aiguilles,  des  poinçons,  menus  objets  qui  montrent  coinbicn  cet 
alliage  était  encore  précieux. 

Nous  trouvons  donc  à  El-'Amrah  à  la  fois  des  lombes  purement 
néolitbiques  et  aussi  des  sépultures  qui  montrent  le  passage  aux  mé- 
taux. Cette  constatation  n"a  rien  ((ui  doive  surprendre,  car  il  tombe 
sous  le  sens  que  les  bommesde  l'âge  néolithique  conservèrent  leurs 
usages  funéraires  el  autres,  Jjien  des  siècles  encore  après  que  l'em- 
ploi des  métaux  leur  eût  été  enseigné. 

Le  fait  le  plus  remarquable  dans  ces  sépultures  est  la  position 
du  cadavre,  qui  ne  se  retrouve  jamais  dans  les  âges  pharaoniques. 

Les  tombes  égyptiennes  les  plus  anciennes  nous  montrent  invaria- 
riablement  le  mort  placé  sur  le  dos,  les  jambes  allongées,  les  mains 
généralement  croisées  à  la  hauteur  de  la  naissance  des  cuisses. 
Cette  disposition  ne  varia  jamais  tant  que  dura  la  religion  égyptienne, 
et  les  momies  de  l'époque  romaine  garnies  de  bitume  affectent  abso- 
lument la  même  pose  que  celles  de  l'Ancien  Empire,  qui  simplement 
étaient  desséchées  au  natron. 

Dans  les  tombeaux  d'époque  pharaonique,  la  tète  du  mort  est  inva- 
riablement tournée  vers  le  nord  ;  dans  les  sépultures  archaïques, 
l'orientation  est  quelconcjue. 

Ces  différences  sont  remarquables,  surtout  dans  un  pays  où,  comme 
en  Egypte,  les  usages  se  sontconservés  avec  tant  de  perfection;  elles 
permettent  d'affirmer(|ue  leshommes  d'El-'Amrah  différaienldcsprc- 
miers Égyptiens  autant  par  leurs  coutumes  et  leurs  croyances  que  par 
leurs  caractères  physiques  dont  il  sera  question  plus  loin  (cf.  l'Appen- 
dice anthropologique,  par  le  C  Fouquet). 

El-K.vhn.vk.  —  Localité  voisine  d'Abydos  oii  se  rencontrent  des  tom- 
bes semblable^;  à  celles  de  El-'Amrah. 

El-Gheik-S.vl.vm.  — Localité  près  d'Abydos  renfermant  une  nécro- 
pole néolithique. 

Gebel-el-T.\rif. —  Localité  située  en  face  d'Abydos,  sur  la  rive  droite 
du  Nil,  où  des  fouilles,  exécutées  par  mon  ordre  en  avril-mai  1896, 
ont  amené  la  découverte  d'une  nécropole  semblable  à  celle  d'El-'Am- 
rah. Les  tombes  y  présentent  tous  les  caractères  des  sépultures 
archaïques  et  renferment  en  outre  des  silex  taillés,  un  grand  nombre 
de  vases  en  pierre  dure,  des  poteries  peintes,  des  œufs  d'autruche. 


I.'IIOMMK   NKOr,rniIQUE  -  87 

des  figurines  humaines  vA   animales  et  pas    le   moindre    objet    de; 
bronze  ou  de  cuivre. 

Sachul-el-Bacilikh.  —  Nécroj)(>Ie  ar(haï(|ue  située  sur  la  rive  droite 
du  Nil,  en  l'aee  d'Abydos,  et  renfermant  les  mêmes  mobiliers  funé- 
raires que  celles  déjà  décrites.  Des  sondages  y  ont  été  exécutés  par 
le  Service  des  Anti(juités  en  avril  1896.  Ils  ont  amené  la  découverte 
de  nombreux  silex  laillés,  de  vases  couverts  de  peintures  grossières  et 
de  quelques  instruments  de  bronze. 

Zawaïdah.  —  Village  situé  au  pied  de  la  montagne,  sur  la  rive 
gauche  delà  vallée.  Son  territoire  relève  de  Négadab.  On  y  rencontre, 
sur  la  lisière  du  désert,  des  kjœkkenmœddings  ou  couches  de  sé- 
bakh  renfermant  en  grand  nombre  des  silex  taillés.  Plus  loin,  au  |)i('d 
des  falaises,  est  la  iK'cropob^  archaï(|ue. 

TouKH.  —  \'illage  dépendant  aussi  de  Negadalî.  Au  nord,  près  des 
terrains  de  cidlure,  est  un  kom  renfermant  les  ruines  d'un  temple  de 
l'époque  des  Ramessides;plus  au  sud,  sous  les  sables,  on  trouve  une 
surface  importante  couverte  de  sébakh  sur  une  épaisseur  de  0"\50  à 
l'",50.  Des  cousiruclions  eu  bri(|ues  crues  très  simples  couvraient 
tout  cet  espace. 

(i'est  dans  le  sébakh  (|u'on  rencontre  les  silex  taillés;  ils  sont  ex- 
trêmement alîondants  et  se  Irouvenl  là  mélangés  avec  des  os  brisés 
d'animaux,  des  fragments  de  vases  semblables  à  ceux  qu'on  voit  dans 
les  nécropoles  archaïques,  de  petits  poinçons  d'os,  des  coquilles  ma- 
rines et  nilotiques,  des  nucléi,  des  percuteurs  et  une  foule  d'éclats. 

Les  objets  de  bronze  sont  d'une  extrême  rareté,  ils  forment  géné- 
ralement de  très  petits  outils.  Je  n'ai  pas  rencontré  dans  ces  couches 
d'objets  dûment  datés  d'époque  pharaonique. 

Je  ne  sais  si  les  constructions  de  briques  crues  (jui  remplissent  ces 
buttes  doivent  être  attribuées  à  l'époque  de  la  taille  des  silex;  je  suis 
très  porté  à  le  croire,  car  dans  les  tamisages  que  j'ai  fait  exécuter  à 
Toukh,  je  n'ai  jamais  trouvé  de  fragments  étrangers  aux  âges  néoli- 
thiques ou  au  début  de  l'usage  des  métaux. 

Ces  buttes  de  Toukh  sont  de  véritables  kjœkkenmœddings;  elles 
en  renferment  tous  les  éléments  et  sont  les  derniers  restes  du  vil- 
lage où  vivaient  les  gens  qui  reposent  dans  la  nécropole  située  non 
loin  de  là,  au  sud-ouest  près  des  montagnes. 

Le  terrain  compris  entre  l'ancien  village  et  la  nécropole  est  cou- 
vert de  silex  taillés  et  constituerait  à  lui  seul  une  véritable  station 
préhistorique,  si  nous  ne  possédions  les  ruines  des  habitations. 


88  LHOMME  .M'OLITHIQUE 

Le  tell  du  nord  qui,  comme  je  l'ai  dit,  renferme  des  ruines  dues  aux 
Ramessides,  ne  contient  pas  de  silex  taillés.  Il  se  compose  d'un  mé- 
lange de  sébaivh,  de  débris  de  constructions  et  de  briques  estampil- 
lées au  cartouche  royal. 

La  nécropole  est  très  vaste;,  elle  couvre  environ  30  ou  40  hectares. 
M.  Flinders  Pétrie  l'a  exploitée  en  presque  totalité,  mais  il  restait  en- 
core assez  de  tombeaux  pour  (|ue  je  puisse  me  rendre  compte  qu'ils 
appartiennent  tous  au  type  de  El-'Amrah. 

l\ii\TTAHAii.  —  Cette  localité  est  située  au  pied  de  la  montagne, à 
I)  kilomètres  environ  du  village  de  Toukh,  et  comme  lui  possède  ses 
kjœkkenmœddings  et  sa  nécropole. 

Entre  Gamala  et  Demfiq  sont  d'autres  nécropoles  de  même  nature; 
leur  jirésence  m'a  été  signalée  tout  dernièrement. 

TiiKiiKs.  —  Les  silex  taillés  sont  j)eu  abondants  à  Thèbes  ;  on  en 
rencontre  parfois  à  Gournah,  dans  la  nécropole.  Mais  les  remanie- 
ments nombreux  auxquels  le  sol  de  cette  localité  a  été  soumis  ne 
permettent  pas  de  leur  assigner  une  date. 

Gebelein.  —  Je  cite  cette  localité  parce  qu'on  y  a  rencontré  des 
vases  semblables  à  ceux  des  nécropoles  néolithiques;  ces  objets  furent 
trouvés  j)rcs  de  tombeaux  du  Moyen  Empire.  Aussi  a-t-on  cru  devoir 
les  attribuer  à  cette  époque.  Mais  je  suis  porté  à  croire  que  si  des  ob- 
servations précises  avaient  été  faites  sur  ce  point  on  aurait  reconnu 
la  présence  de  sépultures  néolithiques. 

El-Kab. — Les  ruines  de  la  ville  renferment  un  grand  nombre  de 
percuteurs  et  de  galets  ronds  qui  ont  été  employés  comme  projectiles 
de  fronde.  Ils  ont  ])robablementété  ramassés  dans  une  station  préhis- 
toricpie  voisine. 

CiiELLAL  (cataracte).  —  Bien  que  j'aie  exploré  avec  le  plus  grand 
soin  les  environs  d'Assouan,  lorsque  j'en  dressai  la  carte  en  1893,  je 
n'y  ai  jamais  rencontré  de  station  préhistorique;  toutefois,  dans  l'île 
de  Sehel,  j'ai  trouvé  un  fragment  de  hache  polie. 

Ce  n'est  pas  seulement  en  Egypte  qu'on  rencontre  la  pierre  taillée 
dans  cette  partie  de  l'Afrique.  Le  capilaine  Lyons  en  a  rapporté  de 
Nubie,  Gordon-Pacha  a  envoyé  de  Kharloum  à  l'Institut  égyptien  trois 
haches  en  hématite  qui  venaient  du  pays  des  Niam-Niams;  Schwein- 


/         .     ;  L'UOiM.MI':    MlOl.iniKM  i:  89 

l'urth  et  CIiaillé-Long  en  ont  l'cMiconlré  ;iii  Soinliiii'.  Enfin,  le  D'' Joiis- 
seaiinie  vient  d'en  trouver  clie/  les  Çonialis  (;t  les  Danakils*. 

Dans  l'éniiinéralion  que  je  viens  de  l'aii'e,  je  n'ai  cité  que  les  loca- 
lités les  plus  importantes;  beaucoup  d'autres  déjà  ont  été  signalées  et 
sans  nul  doute  on  en  rencontrera  encore  un  très  grand  nombre.  Je  lu; 
prétends  pas,  dans  celte  élude,  donner  un(>  monographie;  ilc.  l'Age  île 
la  pierre  polie  clans  la  vallée  du  Nil  :  il  sul'lit  dr.  prouver  (|u'il  a  existé 
et  joué  un  rôle  important  dans  les  origines  de  l'Egypte. 

Iiistriniiriits  cl  armes  tiéolilJil(iiirs. 

Bien  que  nous  ne  connaissions  encore  qu'un  nombre  relativement 
petit  de  stations  néolithiques,  nous  constatons  cependant  ce  fait  qu'à 
peu  d'exceptions  près,  les  formes  sont  les  mêmes  dans  les  diverses 
localités,  que  les  procédés  de  taille  sont  identiques  et  que,  sur  un 
parcours  de  800  kilomètres  environ,  dans  la  vallée  du  Nil,  il  existe 
une  homogénéité  presque  parfaite  dans  la  nature  des  objets. 

Comparées  aux  séries  de  la  pierre  en  Europe,  les  colleclions  égyp- 
tiennes présentent  cette  particularité  singulière  qu'on  rencontre  à  la 
fois  des  types  appartenant  à  des  époques  considérées  comme  très  di- 
verses dans  les  autres  pays;  on  trouve  en  même  temps  dans  les  mêmes 
gisements  des  pièces  qui  en  France  seraient  attribuées  au  solutréen, 
au  magdalénien,  au  moustérien  et  au  robenhausien;  ces  silex  gisent 
côte  à  côte  avec  des  formes  spéciales  à  la  vallée  du  Nil  et  tous  sem- 
blent avoir  été  contemporains. 

Peut-être  à  un  moment  donné  sera-l-il  nécessaire  de  créer  dans 
l'âge  de  pierre  égvptien  une  série  de  subdivisions,  d'établir  des  Iran- 
sitions  entre  le  chelléeii  et  la  j)ierre  polie,  mais  à  présent  il  n'est 
pas  possible  d'entrer  dans  tant  de  détails,  d'autant  que  j'ai  toujours 
jusqu'ici  rencontré  un  mélange  intime  des  diverses  formes.  11  se 
peut  qu'un  jour  bien  des  pièces  que  je  publie  aujourd'hui  sous  le  nom 
de  néolithiques  doivent  être  rangées  dans  le  quaternaire;  mais  je  le 
répète,  dans  l'état  actuel  de  nos  connaissances,  Userait  prématuré  de 
s'aventurer  dans  des  classifications  de  détail. 

Je  décrirai  donc  les  objets  non  chelléens  en  admettant  pour  tous 
une  môme  antiquité,  je  les  rangerai  suivant  les  formes  qu'ils  présen- 

1.  Insiit.  égypt.,   i3  jnnv.  1877,  p.  110;  note  du  D'' Gaillardot. 

2.  Au  pays  des  Çoraalis,  M.  le  D"'  Jousseaunie  a  rencontre  quelques  silex  taillés  de 
forme  indécise,  sans  retouches,  dont  la  présence  permet  de  croire  qu'on  découvrira 
dans  ces  pays  des  stations  de  l'âge  de  pierre,  soit  paléolithiques,  soit  néolithiques 
(D'  Jousseaume,   Réflexions  anlhiopologiques  h  propos    des  lumuliis  et  silex   taillés 

des  Çomalis  et  des  Danalils,  dans  V Anthropologie,  1.  Vf,  n"  '|,  juillel-aoùt  iSi|4). 


90 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


tent,  partant  des  simples  pour  arriver  aux  plus  compliquées,  car  il  im- 
porte avant  tout  d'établir  dans  ce  volume  l'existence  d'un  âge  de  pierre 
en  Egypte  et  non  de  créer  des  divisions  dans  cette  civilisation.  Mon 
travail  est  destiné  à  réfuter  l'opinion  de  ceux  qui,  attachant  plus  d'im- 
portance aux  textes  qu'à  -toute  autre  nature  de  documents,  sans  pos- 
séder les  connaissances  nécessaires  pour  en  traitei',  ont  réfuté  a  priori 
l'existence  en  Egypte  d'une  civilisation  antérieure  à  celle  des  métaux. 
Il  ne  s'adresse  pas  aux  géologues,  auxanlliropologistes  ou  auxpréliis- 
toriciens,  car  pour  ceux-là,  la  démonstration  n'est  plus  à  faire:  quelques 
indices  ont  suffi  pour  leur  i'aire  toucher  du  doigt  la  vérité. 

Mes  descriptions  jetteraient  certainement  du  trouble  dans  les  re- 
cherches postérieures  sur  le  détail  des  époques,  si  je  n'avais  soin 
d'indiquer  très  minutieusement  les  gisements,  les  localités  et  les 
ressemblances  que  présentent  les  silex  taillés  d'Egypte  avec  ceux  des 
autres  régions.  Les  stations  d'ailleurs  sont  loin  d'être  épuisées,  àpeine 
ont-elles  été  eflleurées.  Il  sera  facile  de  reju'endre  leur  examen  et  par 
leur  étude  complète  de  se  rendre  compte  de  la  nécessité  ou  de  l'inu- 
tilité d'admettre  des  subdivisions  dans  l'âge  de  la  pierre  en  Egypte. 

NicLÉi.  — -  Les  nucléi  sont  très  abondants  en  Egypte;  on  en  ren- 
contre dans  toutes  les  localités,  depuis  le  Caire  jusqu'à  Thèbes.  Ils 
se  présentent  sous  deux  formes  différentes. 

Dans  la  première  (hg.  51,  .52,   5.3),  les  éclats  ont  été  enlevés  sur 


—  NucIlI  on  silcv  (kjakkeiiinœddings  de  Toukii). 


tout  le  pourtour  du  noyau  de  silex,  dont  une  face,  celle  destinée  à  re- 
cevoir les  coups,  a  été  enlevée  d'un  seul  éclat.  Il  ne  reste  presque 
jamais  de  gangue  sur  ces  nucléi. 

Dans  la  seconde  (fig.  54,  55),  le  nucléus  présente  la  forme  dite 
«  pied  de  cheval  ».  Il  offre  toujours  un  plan  de  frappe,  mais  les  éclats 
n'ont  été  enlevés  que  d'un  seul  côté  sur  la  moitié  environ  du  périmètre 
de  la  pierre. 

Ces  deux  variétés  sont  communes  dans  toutes  les  localités  voisines 


I/HOMME    NEOF.nilKHK 


91 


dti  gisemenls  iialurtils  th;  silex  ;  le  <(  pied  de  cheval  •>  mIjoihIc  ù  Toiikli 
et  à  Aboii-Rtjacli,  landis  qu'au  Fayouin  je  n'en  ai  l'encoiili'i-  que  de  très 
rares  spécimens. 


Fig.    5/1  et   55. 


lex  jaune  (kjopkkenmœddings   de  Toukii).   i[-?.  grandeur 
naturelle. 


En  France,  les  nucléi  n'apparaissent  qu'avec  la  pierre  polie;  ils 
présentent  très  fréquemment  les  formes  que  nous  rencontrons  en 
Egypte;  toutefois,  dans  la  vallée  du  Nil,  je  n'ai  jamais  trouvé  de  longs 
nucléi  semblables  à  ceux  du  drand-Pressigny  (Indre-et-Loire),  de 
Praslong  (Vienne)  et  de  la  Belgique  méridionale.  Cette  forme  ne 
semble  pas  avoir  existé  en  Egypte  et  les  nucléi  sont  tous  plus  ou 
moins  coniques. 

Percuteurs.  —  Les  galets  avec  l'aide  des([uels  les  ouvriers  des  pre- 


56  37  53 

Fig.  56   et  58,  —  Percuteurs   en  silex  gris    jaune   (kjœkkenmœddings    de    Toukh). 

i/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  5-.  —  Percuteur  en   silex  gris  (El-Kab).    i/a  grandeur  naturelle. 

miers  âges  façonnaient  le  silex  sont  tous  des  pierres  à  peu  de  chose 
près  sphériques,  couvertesde  tracesdeschocs  reçus  (fig.Sf),  .'>7,  nS)  :  on 


92 


I,  HOMME  NEOLITHIQUE 


en  trouve  un  grand  nombre  clans  les  stations  tle  la  vallée  du  Nil  et 
dans  certaines  localités.  Les  pei'culeurs  scnihlenl  avoir  été  employés, 
entre  antres  à  El-Kab,  comme  pierres  de  fronde  dans  les  temps  his- 
toriques. 

Ces  o])jets  sont  faits  de  toutes  les  matières  dures  du  pays  :  silex, 
serpentine,  diorite,  basalte,  granité,  grès,  etc.  Ils  présentent  tous 
environ  la  grosseur  du  poing. 

Les  percuteurs,  si  communs  en  Egypte,  le  sont  dans  toutes  les  loca- 
lités néolithiques  du  globe  ;  il  n'y  a  donc  pas  à  chercher  des  compa- 
raisons. 

Haches.  —  Dans  la  vallée  du  Nil,  comme  partout  ailleurs,  les  haches 
jouèrent  un  très  giand  rôle  dans  l'armement  de  l'homme  préhisto- 
rique; on  en  rencontre  dans  toutes  les  stations,  où  elles  présentent 
les  mêmes  formes,  et  passent  de  la  hache  grossièrement  éclatée  à 
la  pièce  finement  polie. 


"^M  ^ 


Fig.  .Sç)  à  (ij.  —  Hachcltcs  (fit;'._:>i)  :  silex  j:iuno,  kjœkkenmœddiiigs  di-  Kliatlarali;  — 
lig.  Co,  Gi,  (ia  et  GJ  :  silex  brun,  kjœkkenmœddings  de  Toukii).  1/2  grandeur 
naturelle. 


Si  nous  classons  ces  objets  suivant  la  nature  de  leur  taille  et  sui- 
vant leur  forme,  sans  nous  préoccuper  de  ce  fait  que  dans  les  gise- 
ments tous  les  types  se  trouvent  mélangés  nous  voyons  à  Khattarah 
(fig.  59),  à;El-ToukIi  (fig.  GO,  61,  62,   63,   64,  65)  "des  types  qui  se 


L  HOMMK  XÉOI.IIHIOUH 


93 


rapprochent  l)oaiicoiip  d(is  haches  chelléeiiiies  d'Egypte  et  de 
rEurope'.  La  taille  eu  esl  haliih;;  bien  que  grossière,  elle  esl  faite  à 
grands  éclals  enlevés  sur  les  deux  faces.  Ces  haches  sont  plus  on 
moins  allongées,  largement  renllées  en  lenr  milicMi.  Elles  se  ren- 
contrent en  même  temps  que  les  haches  polies,  mais  rien  ne  prouve 
qu'elles  ne  soient  pas  antérieures  aux  pierres  néolithiques,  et  que 


,^1^* 


I 


/ 


y 


Fig.  64  et  65.  —  Hachettes  eu  silex  biniii  (kjœkkenmœddings  de  Tovikli).   i:-ï  grandeur 

naturelle. 

Fig.  66  et  67.  —  Hachettes  dégrossies  (kjœkkenmœddings  de  Khattarah)  (fig.  66  :  silex 

brun  ;  fig.  67  :  silex  gris).  1/2  grandeur  naturelle. 

des  stations  d'âges  divers  ne  se  soient  pas  superposées  à  Zawaïdah,  à 
Khattarah  et  à  El-Tdukh. 

Au  Fayoum,  à  Dimeh,  Kom-.\chim,  Ùm-el-'All,  etc.,  je  n'ai  jamais 
rencontré  de  haches  taillées  d'une  façon  aussi  rudimentaire. 

Les  mêmes  localités,  voisines  de  Négadah,  fournissent  un  type  de 
haches  plus  allongé,  également  taillé  à  grands  éclats  et  renflé  en 
son  milieu,  mais  se  rapprochant  plus  des  instruments  dégrossis  pour 
être  polis  (fig.  66,  67,  68,  69);  puis,  dans  d'autres  spécimens,  le  tail- 


f.  Comparez  avec  les  objets  du  Musée  de  Saint-Germain,  n"  18112  :  Douris  (Vienne)  ; 
id.,  n"  II 623  (Vienne). 


94 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


lant  s'élaro-it  (fig.  70),  bien  que  l'objet  demeure  très  grossièrement 
travaillé. 


Hif.   68.   —   Hache   en    silex  jaune    veiné  de   Ijrun   (kjcekkeuinœdiiings   de   Zawaïdali). 

if'l  grandeur  naturelle, 
''•a    *'9-  —  Hache  en  silex  brun  (kjœkkenmccddings  de  Tuukh).  1/2  grandeur  naturelle. 


'«fe^ 


Fig.    yo.    —  HacheUe   en    silex   jaune   (kjifkkenmœddings   de   Toukh).    1/2   grandeur 

naturelle 


Fi 


g.  71.  —  HacheUe  en  silex  jaune  clair  (kjakkenœœddings  de  Toukh).   i/a  grandeur 

naturelle. 


Les  haches  éclatées  à  large  tranchant  sont  fréquentes  à  Toukh.  Il 
en  est  même  un  grand  nombre  quijprésentent  des  retouches  relative- 


L'HOMME  iXKOT.I'rrirQt'F 


95 


nient   fines  et  qui  ollVent    Ions  les  caraclrrcs  (riiiu'  antiqiiit»'  moins 
reculée  (fig.  71,  72,  l'3). 


Fig.  72  el  73.  —  Hachettes  ea  silex  (lig.  ~9.  :  silex  grisj;  fig.  73  :  silex'jaune) 
(kjœkkenraœddings  de  Toukh).   1/2  grandeur   naturelle. 


Fig.  7'(.  —  Hachette  eu  silex  jaune  (kjœkkenmœddingsdeToukh).  i/2  grandeur  naturel 


V  ( 


Fig.  7.5.  —  Hachette  en  silex  brun  d  un  côté,  jaune  de  l'autre  (kjœkkenmœddings 
de  Khattarah).  1/2  grandeur  naturelle. 

Je  ne  connais  rien  d'analogue  aux  formes  que  je  viens  de  décrire, 
dans  l'âge  de  pierre  européen;  tant  que  dure  en  France  le  quater- 


96 


1,  HOMME  MIOMTHIQUE 


naire,  c'est-à-dire  pendant  les  périodes  des  cavernes,  la  hache  semble 
avoir  été  abandonnée,  et  lorsqu'à  l'âge  moderne  elle  apparaît  avec  la 
pierre  polie,  elle  est  tellement  modifiée  et  perfectionnée  qu'il  est 
impossible  de  suivre  le  passage  entre  le  coup-de-poing  de  Chelles  et 


^'n-  ?''•    — H;iche  en  silex  jaune  (Akhmim.  Musée  de  Guizoh).  1/2  grandeur  naturelle 


w 


X 


^-')^ 


\\\ 


;^\^ 


Fig.  77.  —  Haclie    en 'silex  jaune  (Hoou,  Haute-Égypie).   1/2  grandeur  naturelle. 

la  hache  des  stations  robenhausiennes.  En  Egypte,  au  contraire,  nous 
♦     rencontrons  toutes  les  transitions  et  peut-être  même  la  plupart  de 
ces  instruments  doivent-ils  être  rangés  dans  le  quaternaire. 

A  la  suite  de  ces  types  archaïques,  on  voit  apparaître  des  formes 


I,  IIOMMIL  NKdUniKH'E 


97 


beaucoup  plus  allongées  cl  si;  raj)procliaiiL  des  liaelies  plus  récentes 
(fig.  74,  75),  mais  le  procédé  tie  laille  csl  toujours  le  même  et  ne 
difl'ère  pas  des  moyens  les  |)liis  arcluiï<iues. 


mmâ 


80 


79 


Fig.  78  à  So.  —  Hachettes  en  silex  (fig.  78  :  sile.M  juuue  ;  fig.  79  :  silex  brun  poli  an  tran- 
chant; (ig.  80:  silex  noir)  (station  de  Kom-Achim).  i/a  grandeur  naturelle. 


81  h 


Fig.  81  et  82.  —  Haclies  en  silex  brun  polies  au  tranchant  (fig.  81  :  station 
de  Kom-Achim  ;  fig.  82  :  station  de  Dînieh),  1/2  grandeur  naturelle. 


Les  haches  qui  d'une  manière  certaine  appartiennent  aux  derniers 
âges  néolithiques  présentent  deux  types  différents. 

Dans  l'un,  l'instrument  est  plat  d'un  côté,  légèrement  bombé  de 


98 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


l'autre  (fig.  76,  77),  bien  que  les  deux  faces  soient  taillées  à  grands 
éclats,  le  tranchant  est  large,  l'extrémité  destinée  à  pénétrer  dans  le 
manche  est  plus  étroite  et  les  bords  sont  retouchés  avec  une  finesse 
relative. 

Le  second  type  est  celui  qui  donne  naissance  à  la  hache  polie, 
l'instrument  est  simplement  dégrossi  (fig.  78,  79);  son  tranchant  est 
préparé  avec  soin,  souvent  même  il  a  reçu  un  commencement  de 
polissage  (fig.  80,  81,  S2). 


Fig.  83  et  84.    —  Haches   polies    (iig.    S3    :   en   dioi-ile,   kjœkkemnœddings   de   Toukh  ; 
fig.  84  :  en  serpentine,  localité  inconnue.  Musée  de  Guizeh).  4/")  grandeur  naUirelle. 

Je  ne  connais  pas  en  Egypte  de  haches  en  silex  qui  soient  entière- 
ment polies;  le  travail  très  soigné  semble  avoir  été  réservé  pour  les 
matières  plus  précieuses,  telles  que  la  diorite  (fig.  8.3,  85,  88),  la  ser- 
pentine (fig.  84),  l'hématite  (fig.  86,  87)  et  d'autres  substances  très 
dures  qui  se  prêtaient  admirablement  au  poli  et  à  l'usage. 

Les  hachespolies  sont  rares  en  Egypte,  ou  du  moins  jusqu'ici  il  n'en 
a  été  trouvé  qu'un  petit  nombre;  elles  sont  semblables  aux  haches 
qu'on  rencontre  dans  l'Europe  centrale,  sont  étrangères  aux  types 
de  Scandinavie  et  d'Amérique  du  Nord.  Ces  haches  plates,  au  con- 
traire (fig.  76,  77),  semblent  être  spéciales  à  l'Egypte'. 


I.   Le  Musée   d'Alexandrie   jjossède   une    hachette   polie  trouvée   par  M.    le  docteur 
Botti  dans  les  couches  remaniées  situées  au  nord-est  de  la  ville. 


T/noMMF  ^'l■•or,n•^l(^['F■ 


99 


Après  avoir  décrit  les  formes  présenlaiit  tous  les  caractères  des 
istriiments  néolithiques,  il  est  intéressant  <le  citer  quelques  types 


FiL'    .H^  et  86.  —  Ilacheltes  (11g.  8;j  :  ou  lioiuatitc,  localito  inconnue  ; 
iW.  86  :  ci,diorite,  achetco  à  Thèbcs  :  Musée  de  Guizeh).   i/'i  srandeur  naturelle 


Fig  87  et  88  —Haches  polies  (localités  inconnues,  Musée  de  Guizeh)  (6g.  87  ; 
hématite;  fîg.  88  :  diorite).  ■ij'i  grandeur  naturelle. 

particuliers  à  la  vallée  du  Nil  et  qui  peuvent  être  attribués  aux  âges 
préhistoriques  aussi  bien  qu'aux  époques  historiques. 


100 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


L'une  des  pièces  les  plus  curieuses  est  une  longue  hache  elliptique 
dont  une  extrémité  brisée  ne  permet  pas  de  dire  si  elle  possédait  deux 
tranchants  ou  un  seul.  Cetolîjel  provient  de  la  station  de  Licht  (flg.89). 
Je  ne  connais  rien  (|ui  lui  soit  comparalde  dans  les  pierres  taillées 
d'Europe. 


Fig.  S()  et  1)0.  —  Haches  eu  sile.x  jaune  (station  de  Licht).   1/2  graudeur  nalurelle. 

Une  autre  forme  spéciale  se  rencontre  à  Licht  et  à  Kahoun  (fig.  90, 
91,  92).  11  semble  qu'elle  ait  été  inspirée  par  les  haches  de  bronze  du 
MoyenEmpire  (fig.  93),  si  toutefois  ce  n'est  pas  l'inverse  qui  a  eu  lieu 
et  si  les  fondeurs  égyptiens  n'ont  pas  copié  en  métal  un  type  de  pierre 
plus  ancien. 

Je  pencherai  plutôt  pour  la  première  de  ces  deux  opinions,  m'ap- 
puyant  sur  ce  fait  que  dans  les  stations  où  l'on  ne  rencontre  que  des 


I.  lliiMMK  NF,f)I.I'llll()ll': 


101 


iiistriuueiits  n6olithi(|ii('s  cl  on  Uis  lciii[)s  liisl()ri(|iius  n'oiil  pas  laissé 
(le  vestiges,  ces  Ibnnes  n'exisloiil  pas.  Ainsi  dans  les  localités  de  Di- 
ineli,  Koni-Acliiiii,  Om-el-'vVll,  TouUli,  ZawaVdali,  clc,,  je  iTcii  ai  jamais 
rencontré. 


Ja^ 


Fig.  gi.  —  Hache  en  silc.K  jauuo  (station  de  Liclit).  1/2  grandeur  naturelle. 


Fig.  i|>.  —  Hache  en  siloK  (Kahouu, 
d'après  FI.  Pclrie,  Illahiin,  Kaliuu 
(ind  Gitroh,  pi.  VII,  fig.  4)-  1/2  gran- 
deur naturelle. 


Fig.  f)3.  —  Hache  en  bronze  (Kahoiin, 
d'après  FI.  Pétrie,  /llaliini,  Kiilniii 
(iiid  (iuiuh,  pl  Vil,  lin'.  Ml)'  ''''■  i^ran- 
deur  naturelle. 


l\ii-i'ois,  toujours  à  Liclit,  on  rencontre  des  haches  du  même  genre 
(fig.  94),  mais  manies  d'une  sorte  de  queue  ou  pédoncule  destiné  à 
pénétrer  dans  le  manche.  Je  ne  puis  rien  dire  de  l'époque  de  ces  ins- 
truments, qui  |ieut-être  appartiennent  aux  débuts  de  la  période  histo- 
ri(|ue. 

Avant  d'en  terminer  avec  la  description  des  haches  de  pierre,  je 
citerai  un  grand  racloir  qui  probablement  a  servi  de  hache  et  que  j'ai 


102 


LllOMMli  iNKOLITHIQUE 


rencontré  dans  le  puits  du  maslaha  d'un  prêtre  de  la  pyramide  de 
Snéirou,  à  Dahchour*.  Ce  curieux  in-strumeni,  qui  semble  avoir  été 
taillé  sous  la  iU"'  ou  la  IV'  dynastie,  est  unique  en  son  genre. 


Fig.  (ff^.  —  Haclie  on  silex  jaune  (staliou  de  Liclil).  1/2  grandeur  naUirclle. 

Gomme  on  le  voit,  les  formes  les  plus  remarquables  de  haches 
égyptiennes  appartiennent  à  une  époque  qu'il  n'est  pas  permis  de 
préciser,  mais  qui  probablement  est  historique.  Quant  aux  autres 
haches,  elles  présentent  à  peu  de  chose  près  les  types  de  celles  du 
sud  et  du  centre  de  l'Europe,  du  nord  de  l'Afrique  et  de  la  Syrie. 

(Couteaux.  —  Les  éclats  (lig.  95)  et  les  lames  sans  retouches  (fig.96) 
abondent  dans  les  stations  néolithiques  de  l'Egypte;  fréquemment 
elles  sont  de  très  grandes  dimensions  et  n'ont  pas  été  utilisées  lors 
de  la  taille  des  grandes  pièces. 

Les  lames  retouchées  sont  également  très  nombreuses,  elles 
présentent  des  formes  diverses  suivant  les  usages  auxquels  elles 
étaient  destinées. 

Les  unes  ont  les  exti'émités  finement  retaillées  en  forme  de  racloir 
(fig.  97,  98,  99),  les  autres  ont  été  retouchées  des  deux  côtés  et  ne  pré- 
sentent ni  tranchant  ni  pointe  :  leur  mode  d'emploi  nous  est  inconnu 
(fig.  100,  101,  102)  ;  d'autres  enfin  sont  de  véritables  couteaux  pointus 
à  l'une  des  extrémités,  ronds  à  l'autre  et  munis  d'un  dos  carré  obtenu 


I.  J.  de  Morgan,  Fouilles  il  Dcihchour  en    tS<)'|,  p.  lo,  tig.  8. 


I,  HOMME  NEOI.IIIII()i;i': 


10:i 


Fie 


9&, 


—  Eclat  de  silex  brun 


foncé  (Tell-cl-Y;ihoudi,  près 
d'Héliopolis).  i/3  graudeur 
Daturelle. 


Fin.  y"-  ~"  Lame  eu  silex  jauuc  (kjd'kken- 
mœddiugs  do  Toukii).   1/2  gr.Tudeui'  naturelle 


Fit 


99.    —   Lames   retouchées. 


97.  —  Silex  jaune  veiné  de  brun  (nécropole  d'Abydos).  t/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  98.  —  Silex  jaune  (station  de  Kom-Acliiui).   1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  99.  —  Silex  noir  (station  de  Kom-Achini).  1/2  grandeur  naturelle. 


Kl'. 


L'HOMME  NHOLlTllKjl'E 


]iai-  renlévpnient  d'un  graïul  noinbic  du   |)clils  étinis  (lig.   U).{,  104, 
105,  106,  107,  108).  Quelques-uns  de  ces  instruments  sont  extrrme- 


Fis;-.  loo  et  loi.  —  Couleaiix  en  silex  brun  (station  de  Kora-Achim,  Fayouin). 

i/"i  grandeur  naturelle. 

Fis.  >i>2-  —  Couteau  eu  silex  brun  (station  de  Dimeli,  Fayouin).  i/'j  grandeur  naturelle. 


Fig.  io3     —  Couteau  en  ^ilex  jaune  (El-'Anirali).  1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.   104  et  io5.  —  Couleaux  en  silex  jaur.o  (Toukh).    1/2  grandeur  naturelle. 


I/HOMME  M;01,lTllIQri' 


105 


ment  i-(MTiiU(|ual)l('s  par  la  lK»i'(licss(^  de  la  laiilr,  <|ui  l'oiirnit  l'éclal  pri- 
mitif, aussi  bien  que  par  la  précision  des  reloiiclies.  Il  en  est  (pii 
atteignenl  ()"',2l  de  longueur  :  le  Iranc  liant  est  très  aigu  el  parlaile  ■ 
nientrégulier.  C'esliiTouUli,à  l'M-'Amrali  et  Ahydos  (|ue  j'ai  r(;nenntic> 
le  plus  grand  nombre  de  ces  instrnmenls  ;  il  semble  (|U<!  le  silex  du 
pavs  se  soit  très  bien  prèle  à  la  taille  d'un  seul  jet  d'éclats  aussi  longs; 
ce  silex  est  jaune  clair,  corné,  il  se  brise  avec  facilité  et  rappelle 
beaucoup  par  son  aspect  la  pitn-re  du  drand-Pressigny  (Indre-et- 
Loire)  . 


106c 


107  6 


lot;  h 


Fig.   io()  et   T07,  —  Conleaux  en  silex   j.iuiie  (kjœlvlcrnmœtidinus   de  Idnkli)- 
i/s  grandeur  nulurelle. 

Les  stations  néolithiques  de  FEurope  ne  fournissent  rien  de  com- 
parable à  ces  grands  couteaux,  tandis  que  le  magdalénien  de  la  Dor- 
dogne  présente  des  éclats  retouchés  en  tout  semblables  à  ceux  de 
l'Egypte'. 

Il  ne  faudrait  pas  conclure  de  ces  analogies  que  le  magdalénien 
exista  dans  la  vallée'  du  Nil,  car  les  procédés  de  taille  du  quaternaire 
peuvent  s'être  perpétués  jusqu'à  l'âge  de  la  pierre  polie.  jNInis  le  fait 
même  de  la  persistance  des  usages  est  très  intéressant  en  lui-même 
et  concorde  avec  tout  ce  que  nous  savons  des  coutumes  dans  TEgypIe 
historique,  contrée  dans  laquelle  les  habitudes  et  les  usages  se  sont 
conservés  mieux  que  partout  ailleurs. 

A  côté  des  lames  plus  ou  moins  simples,  mais  montrant  l'emploi 
direct  des  grands  éclats,  on  rencontre  des  couteaux  de  facture  plus 


I.    Cr.  Musée  de   Saint-Germain,  n»!^  33/13,   i54Gr,  if»););,  îoo.îa,  i/jfiS;,  33'r'|,  etc. 


hk; 


I, HOMME  NEOIJTIIIQUE 


compliquée,  dans  lesquelles  la  l'orme  n'a  été  donnée  aux  instruments 
qu'à  l'aide  de  retouches. 

L'une  de  ces  lames  (lig.  109),  taillée  en  amande  et  tranchante  des 
deux  côtés,  présente  dé  grandes  analogies  avec  celles  du  roben- 
hausicn  d'Europe  '. 


W<^- 


108  109 

Fig,  loS.  —  Couteau  en  silex  jauue  (nécropole  de  Saghel-el-Baglieh,  Musée  de  Gnizeli 

i/'j  grandeur  naturelle. 
Fig.  log.   —  Lame  en  silex   jaune  (nécropole  U'Abydos).    i/u  grandeur  naturelle. 


Puis  vient  une  série  de  couteaux  aux  formes  diverses,  munis  d'une 
queue  pour  l'emmanchement  (fig.  110,  111,  112,  113,  114,  115, 
116,  117),  ou  même  d'un  manche  façonné  dans  le  silex  (fig.  118,  119, 
120,  121,  122,  125).  Quelques-uns  de  ces  instrumeiits  sont  d'une  rare 
perfection  de  travail  (lig.  124,  125,  126).  Chaînas  suppose  qu'ils  ont 
servi  pour  l'ouverture  des  momies  %  mais  je  ne  me  reiads  pas  compte 
des  données  sur  lesquelles  il  appuie  cette  supposition. 

1.  Musée  de  Saint-Germain,  n°  i495o  :  Vignacourt  (Somme). 

2.  Chabas,   Etudes  siii-  rnulii/iiité  hist.,   p.    'J'J/|    :    Couteaux   en   silex    qui,    suivant 


I,  iioMMi-;  .\K<»i,iriii()i;i'; 


107 


Fig.  iio.  —  Couteau  en  silex  bruu    (station   de   Kom-Achim,    Fayouui).   i/a  grandeur 

naturelle. 
Fig.     rir.    —    Couteau    en    silex    blond    (station  do    Diaicli,    Fayoum).     i/'j    grandeur 

naturelle. 


//3 


Fig.  ip'.à  II'),  —  Couteaux  on  silex  (fig.  1 12  :  silex  gris,  station  de  Liclit;  fi,g.  ii3  : 
silex'gris foncé,  kjœkkenuiœddings  de 'l'oukli  ;|fig,  ii^  :  silex  blanc,  kjœkkcnma'ddings 
de  Zawaïdah  ;  (!g.  iiâ:  silex  jaune,  station  de  Licht).  1/2  grandeur  naturelle. 


KIS 


L'HOMME  M'Ol.rniTQUE 


U6a 


117  b 


116  h 


Fig.  ii6.  —  Couteau  en  jaspe  sanguin  (IIoou).  1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.    117.    —    Couteau   en   silex  jaune   (kjakkenmœddings    de   Toukh).    1/2   grandeur 


naturelle. 


Fig.    118    à    120.   —  Couteaux    en   silex  (fig.    nS  :    jaune    foncé,  [station    de    Dîmeli  ; 

iig.  iif)  :  silex  gris  opaque,  station  de  Kom-Achim  ;  fig.  i2o:Jsilex  gris  clair, 

station  de  Kom-Achim).    1/2  grandeur  naturelle. 


r/IIOMME  M-OMTIIIQUK 


109 


A  mon  sens,  ces  coiilc.uix  soiil  des  insi  iiinnnls  employés  jadis 
pour  les  usages  coiiranls  de  la  \ie;  on  les  lioiue  en  1res  j^rand 
nombres  dans  les  slalions,  Icdh^s  (|ue  rvWc  de  Dinudi,  ipii  n'ont  aucun 
rapport  avec  les  nécrojioles  d"ài;'e  postérieur,  <lans  les  localités  ou 
il  ne  se  rencontre  pas  la  moindre  trace  d'industrie  pharaonicpie.  La 
théorie  de  Chabas  à  ce  sujet  ne  saniail  être  soutenue:  elle  part  de  ce 
princi])e  faux  f|ue,  pour  lui,  tous  les  silex  ap[)artiennent  à  l'ère  histo- 
ri(|ue. 


123 


Fig.   ru.  —  Couteau  en  silex  brun  veiné  (station  de  Dîmeli).   i/a  grandeur  naliircllc, 

Fig.   ii>.  i .   —  Couteau  en  silex  gris  usé  par  les  sables  [station  de  Kom-AcliiiM). 

1/2  grandeur  naturelle, 

H'ig.   123.  —  Couteau  en   silex  brun  (station  do  Dimcli).   i/a  grandeur  nalurelte. 

Parmi  ces  lames  obtenues  à  l'aide  d'un  grand  nombre  de  retotiches, 
la  station  de  Dimeh  nous  offre  entre  antres  un  spécimen  de  couteau- 
poignard  (fig.  127)  obtenu  en  enlevant  les  éclats  sur  un  silex  naturel- 
lement plat  et  allongé.  Le  milieu  de  la  pièce,  sur  les  deux  faces,  est 
encore  garni  de  sa  gangue. 

Abydos,  Saghel  elBaglieh,  Gebel-Tarif,  El-'Amrah  et  les  localités 
voisines  des   gisements  de  silex  jaune,  etc.,  fournissent  des  lames 


T^epsius  [Journ.  égyp.  de  Berlin,  1870,  p.  120),  auraient  élc  trouvés  par  Passalacqua 
dans  des  tombeaux  de  la  nécropole  mempliite.  Ces  couteaux  sont  aujourd'hui  déposés 
au  Musée  de  Berlin,  Il  en  existe  également  dans  les  Musées  de  Leyde,  de  Turin  et  de 
Londres, 


110 


[/HOMME  .NÉOLITHIQUE 


criin  li-avail  très  remarquahle  (fig.  128,  129,  130,  131),  variables  de 
formes,  mais  obtenues  toutes  par  les  mêmes  moyens  de  taille.  Les 
éclats  sont  parfois  d'une  régularité  parfaite  et  ne  le  cèdent  en  rien 
aux  plus  belles  armes  du  Danemaric  et  de  la  Scandinavie.  La  matière 
première  se  prêtait  admirablement  à  la  taille  et  les  ouvriers  ont  fait 
preuve  d'une  habileté  consommée. 


.^^«r>- 


Fig.   ia4.  —  Couteau  en  silex  jaune  brun  (Abydos  (?),  Musée  de  Guizeli).   1/2  grandeur 

naturelle. 
Fig.  125.  —  Couteau  en  silex  jaune  (nécropole  d'Abydos).   i/a  grandeur  naturelle. 

Parfois  ces  lames  soni  courbées  (fig.  132)  et  affectent  la  forme 
générale  d'une  faucille. 

Sans  contredit,  les  pièces  les  plus  remarquables  qu'on  rencontre 
en  Egypte  sont  les  grands  couteaux  polis  sur  une  face  et  retaillés 
sur  l'autre.  Leur  usage  n'est  pas  déterminé,  on  en  rencontre  surtout 
dans  les  sépultures  archaïques  des  environs  d'Abydos,  bien  que  j'en 
connaisse  des  fragments  provenant  de  toutes  les  stations  préhisto- 
riques qu'il  m'a  été  donné  d'examiner. 


1,  IIOMMK    M'.OlJTlIliM  K 


111 


Ces  inslniiiu'iits  soni  phils,  ronds  à  l'ime  des  extrémités,  taillésen 
noinlc  à  i'aiili'c;  l'un  des  bords,  le  Iraiichanl,  [)réseute  une  courbe 
convexe;  il  est  muni  de  petites  (bMils  d'une  grande  finesse;  l'autre, 
le  dos,  est  à  courbe  concave  (liy.  loii). 


^^    .'K«ï 


Fig.  126.  —  Couteait  eu  silex  jaune  (Abydos).   i/a  grandeur  naturelle. 

Fig.  127.  —  Couteau-poignard  en  silex  brun  avec  gangue   blanchâtre  (slallon 

deDîmeh).   1/2  grandeur  naturelle. 


Les  éclats  ont  été  enlevés  sur  ces  objets  avec  une  précision  telle 
que  les  nervures  de  la  pierre  laissées  par  le  travail  sur  le  taillant  et 
le  dos  sont  symétriquement  disposées  et  correspondent  entre  elles. 
La  rencontre  des  éclats  forme  une  coitrbe  très  régulière  et  médiane 
de  la  lame. 

Parfois,  mais  rarement,  l'exécution  est  moins  soignée  (iig.  134). 
Quant  à  la  forme  générale,  elle  varie  peu  (fig.  13.^),  ce  qui  indique  que 


112 


r/HOMME  M'OLITIIIQLI' 


ces    outils    avaieni    une    desliiiation    parraitemeiil    délinie    et    poiir 
laquelle  leur  forme  était  im|)Osée. 

Ces  couteaux  sont  de  graiule  taille  :  le  Musée  de  Gui/eli  en  possède 
qui  présenicul  une  longueur  de  0"'.2;!.)  et  de  0"',250.  J'ai  reiuonti'é 
moi-même  des  fragments  qui  bien  certainement  avaieni  fait  partie  de 
lames  plus  grandes  encore. 


Fig.  laS. — Coulcau  en  silex  corné  (localité  inconnue.  Ha ute-Égyple(?), Musée  deGuizeli). 

i/a  grandeur  naturelle. 

Fig.  i2g  et  i3o.  —  Couteaux  courbes  (nécropolede  Saghel-el-Baglieh.  MuséedeGuizeh) 

(fig.  I2()  :  silex  jaune  clair;  fig.    i3o;  silex  brun),   i/a  grandeur  naturelle. 

Dernièrement'  le  Musée  de  Guizeh  a  fait  l'acquisition  d'une  pièce 
fort  remarquable:  c'est  un  couteau  semblable  à  ceux  que  je  viens 
de  décrire  et  recouvert  sur  une  lono'ueur  de  ()'",10  d'une  feuille 
d'or  estampé.  Ce  curieux  objet  se  trouvait  dans  le  commerce;  il 
avait  été  trouvé  par  des  fellahs  en  même  temps  qu'un  lot  important 
de  silex  taillés  dans  les  environs  d'Abydos,  peut-être  à  vSaghel-el- 
Baglieh  ou  à  Abydos  même.  M.  E  Brugsch-bey,  sur  mon  autorisa- 
tion, en  lit  l'acquisition. 


I.  Avril  iSç/i. 


I,  iioMMi;  Msoiriiiiori: 


113 


De  suil(!  (|iH'I([iies  collccliomu'urs  du  (kiiit',  (l('Sii|(|i()iiil<'s  de  n'avoir 
pu  se  proiiirer  cet  oljjet  imi(|iie,  rcpaiidircnl  le  l)iuil  (ju'il  était  l'aux 
()\\  (juedu  moins  la  feuille  d'or  avait  élé  rajoutée  sur  la  laiiie<Ie  silex. 
Mais  cette  opinion  est  erronée  cl  loulcs  les  prcu\cssnnt  en  laveur 
d<^  son  authenticité. 


Fig,  i3i.  —  Couteau  en  silex  corné  (nécropole  d'Abytlos).  i/a  grandeur  naturelle. 

La  feuille  d'or  est  cousue  à  l'aide  d'un  fil  du  môme  métal  et  non 
soudée;  le  travail  de  gravure,  très  primitif,  ne  présente  aucun  anachro- 
nisme; il  concorde  parfaitement  avec  les  données  artisticjues  que  nous 
rencontrons  dans  tous  les  objets  de  cette  époque  et  plus  spéciale- 
ment dans  les  peintures  des  vases  archaïques. 


^  ^w„i.c_. 


Fig.    i32.  —  Couteau  en  silex  blond  (néeropole  d'Abydos).   i/li  grandeur  naturelle. 


L'importance  de  cet  objet  n'est  que  d'ordre  secondaire,  puisque  par 
ailleurs  nous  possédon's  la  plupart  des  renseignements  qu'il  fournit. 
Cependant  je  crois  devoir  insister  sur  son  authenticité^  d'autant  plus 
que  je  sais  de  source  certaine  que  des  copies  en  sont  faites  en  ce  mo- 
ment par  des  faussaires  de  la  Haute-Egypte. 

Sur  l'une  des  faces,  la  feuille  d'or  porte  gravés  à  la  pointe  deux  ser- 
pents enroulés  et  des  rosaces;  sur  l'autre,  on  voit  la  représentation 
de  huit  animaux  ;  deux  groupes  représentent  des  lions  chassant  des 
gazelles  et  des  antilopes,  les  autres  quadrupèdes  sont  moins  faciles  à 
identifier  (fig.  136). 

L'usage  dégarnir  d'or  la  partie  du  couteau  de  silex  qui  se  trouvait 


114 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


eu  main  est  prouvé  d'une  manière  irréfutable  par  l'existence  'd'une 
pièce  découverte  dernièrement  par  le  Service  des  Antiquités  dans  la 
nécropole  de  Saghel-cl-Baglieh.  On  a  rencontré,  dans  une  tombe,  en 
même  temps  que  bon  nombre  de  silex  travaillés,  une  lame  couverte 


Fis;.  l'i'i.  —  Couleaii  cii  silex  jnune,  poli  sur  une  face  (nécropole  de  Toukii). 
i/a  griindcur  naturelle. 

Fig.  i34.  —  Couleau  en  silex  jaune  (Haute-Egypte),  i/a  grandeur  naturelle. 

Fig.  iSfi.  —  Couteau  en  silex  jaune,  retaillé  sur  une  face,  poli  sur  l'autre 

(Saghel-el-Baglieh,  nécropole),  i/a  grandeur  naturelle. 

sur  le  tiers  environ  de  sa  longueur  d'une  couche  de  chlorure  d'or 
produite  par  l'action  sur  le  métal  des  sels  renfermés  dans  la  terre. 
Cette  couleur  avait  à  la  longue  pénétré  dans  la  pierre.  La  feuille  d'or 
avait  disparu,  mais  les  traces  en  étaient  restées. 


L'HOMME  NKOrJTHIQUE 


115 


Je  no  puis  (lire  si  ces  inslruinenls  ornés    d'or  a|)parti(MinenL  à  la 
période  préhistori<iii(!  ou  à  l'Age  historique,  les  termes  d'appréciation 


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^/x'ilS 


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[36.  —  Couteau  de  silex  blond,  orné  d'une   feuille  d'or  (nécropole 
de  Saghel-el-Bac;lieh  (?)).  4/5  grandeur  naturelle. 


lie 


1,  HOMME  NI-:OI,1TIIIOLIE 


mv  inaïKiueiit.  Ouoi  qu'il  en  snil,  par  la  nature  même  des  sépulliires 
(|ui  les  renferment,  je  jniis  al'lirmer  (|ue  ces  instruments  remontent 
tout  au  moins  aux  premiers  temps  tles  dynasties  pharaoniques  et  ont 
été  fabriqués  par  les  autochtones. 

Avant  d'en  terminer  avec  les  lames  et  les  couteaux,  je  décrirai  quel- 
ques instruments  de  formes  spéciales  dont  l'usage  m'est  inconnu 
mais  qui  semblent  devoir  être  rangés  à  côté  des  lames. 


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133 


Fig.   iSy  à  iSg.  —  Couteaux  en  silex  poli  ((iouruati).  2/3  grandeur  naturelle. 


Les  plus  singuliers  de  ces  instruments  sont  des  sortes  de  couteaux 
entièrement  polis  (fig.  137,  138,  139)  qu'on  rencontre  parfois  épars 
sur  le  sol  à  Gournah  et  dans  les  sépultures  autochtones  d'El-'Amrah  ; 
le  silex,  taillé  avec  soin,  a  ensuite  été  poli  sur  toutes  ses  faces,  de  telle 
sorte  (|ii'il  ne  reste  plus  de  tranchant. 


L'HOMME  Nl'.Ul.iriliyUl' 


117 


l/ol)jel  |)i'()\i'ii;nit  d'Iijl-'yVmrali  (lig.  14(3)  n'csl  nuire  (lu'uii  coulcim 
du  typu  de  ceux  (|iii  aboudcul  à  Ahydos  (fig.  143),àLiiht  el  dans  plii- 
sioiu'S  auli'cs  lin'alili's,  c[  (lui,  au  lii'u  de  rester  siinplemeiil  (''{dalé,  a 


Fig.   i/|i)  à   i4'j.  —  •.oulL'aiix  L'u  silex  jauuu  (uécropolc'  d'Ahyiios). 
i/.>.  grandeur  uaturelle. 


été  poli.  Ces  petits  instruments  sont  munis  d'une  pointe  très  aiguë  à 
l'une  de  leurs  extrémités;  ils  sont  généralement  arrondis  à  l'autre 
(fig.  14U,  141);  d'autres,  plus  longs  (fig.  142,  143,  144,  145,  140,  147), 
sont  taillés  en  racloirs  aux  deux  bouts. 


Fij^.  143  à  lt^^/■  —  Couleaux  t'u  silex  jiuiuf  (lig.  i43  el  i44  ■  iiéci'Opole  d'Aliyilos  ; 
fig.  145  et  i47  :  kjœkkemiiœddiugs  do  Toukh;  fig.  14I)  :  nécropole  d'El-'Auirnli  ; 
fig.  143  nel  1436:  extrémités  grandeur  naturelle  de  la  fig.  i43).  1/2  grandeur  naturelle. 


Enfin,    dans    toutes   les   stations   néolithiques,    on    rencontre   de 
curieuses  lames  (fig.   148,  14'J,   1.50),  courbées,  obtenues  d'iui  seul 

s 


118 


.'iioMMii  m:oijtiiique 


coup  sur  leur  partie  concave  et  retaillées  sur  leur  lace  convexe.  11 
semi)le,  par  la  nature  des  éclals,  que  le  travail  de  retaille  eût  été  fait 
avant  de  donneur  le  coup  qui  produisit  la  l'ace  concave.  Ces  oljjets  sont 
absolument  spéciaux  à  la  vallée  du  Nil. 


^ 


ISO 


Fig.  148   à   i.')o.  —  Coute.iux  couibes  en  silex  jaune  (kjœkkenmœddings  de  Khattarali). 

1/2  grandeur  naturelle. 


lÎACLOiHS.  —  Les  racloirs  égypliens  présentent  toutes  les  Ibrmes 
des  instruments  du  même  genre  de  l'Europe.  On  rencontre  à  Abydos 
le  type  le  plus  régulier  (fig.  151,  152),  absolument  identique  à  celui  du 


151  a  152  a  Ml  c  152  //  151  h 

Fig.   i5i  et  l'.rl.  —  Racloirs  en  silex  jaune  (Abydos).   i/a  grandeur  naturelle. 

solutréen'    découvert    dans    la    grotte    de    l'Église   à    Saint-lMartin 
d'Exideuil  (Dordogne)  et  à  ceux  qu'on  trouve  dans  le  magdalénien 
Ce  sont  des  racloirs  doubles  taillés  dans  une  lame  à  deux  arêtes. 
D'autres  racloirs  sont  simples,  ou  retaillés  sur  tout  leur  pourtour 


I.  Musée  de  Saiut-Gerniaiu,  n"  ig8()3. 


I.  iioM.MM  m;oi.i  riiu)i:E 


119 


(lig.    153,    la-'i,    J.")."),    15(i,   157,    158,  15il,  KIO),   et  proscnlciit    luiis  los 
mômes  caractères  que  ceux  d'Europe.  D'aulres  eiifin^  plus  abondants 


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Fig.  i53  à  i55.  —  Racloirs  en  silex  (fig.  i53  :  silex  gris,  kjœkkenmœddings  de  Toukli  ; 
lig.  i54  :  silox  gris,  kjiekkenmœddings  de  Zawaïdah  ;  fig.  155  :  silex  grisâtre, 
kjœkkenmœddings  de  Toukh).  1/2  grandeur  naturelle. 


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150 


100 


Fig.  i56  à  iGo.  —  Racloirs  en  silex  fûg.  i56,  i58  à  i()o  :  silex  jaune,  kjirkkcnmœd- 
dings  de  Toukli  ;  Kg.  157  :  silex  jaune,  kjœkkenmœddings  de  Zawaïdah).  1/2  grandeur 
naturelle. 


à  Dîmeh,  à  Kom-Achini  et  à  Lichl  (fig.  Ifil,  162,  1G3,  IG4,  165),  alTec- 
IcMil  une  forme  triangulaire. 


120  L  IIO.MMII  NÉOIJTHI()UE 

Je  range  également  sous  le  nom  de  racloirs  des  éclats  soi^neiise- 


m 


ent   retouchés  et  munis  d'une  échancrure  qui  semblerait  avoir  été 


Fig.   i6i  et  liri.  —  Racloirs   triangulaires  (fig.   i(ii    :   silex   brun,    station    de    Dinieh; 
Gg.  i(!i!  :  silex  noir,  station  de  Kom-Achim).  1/2  grandeur    naturelle. 


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Fig.    i63  à  iGô.    —    Kacloirs    triangulaires     eu    silex    jaune    (station    de    Licht). 

1/2  grandeur  uaturelle. 


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167  b 


11.6  b 


Fig.   i6(;  et  167.  —  Racloirs    échancrés  en  silex  blond    (k'jœkkcuinu-ddings  de  Toulvhj. 

1/2  grandeur  naturelle. 

destinée  à  polir  des  baguettes  telles  que  des  bois  de  flèches.  Ces  ins- 
trunients  sont  Ibrt  rares  (fig.  IGCI,  1G7).  J'en  ai  rencontré  quehjues- 
uns  dans  les  kjœkkenmœddings  de  Toiikh. 


I,  iiOiMMi:  Mcoi.niiK^x:!': 


121 


Les  racloirs  d'Egypte  no  présentent  aiiciin  Irait  caractéristique;  ils 
ne  (biirnissent  que  des  Tonnes  eonniies  dans  les  stations  de  l'iMiropc, 
depuis  le  solutréen  jus(|u'aux  derniers  temps  de  la  pierre  polie. 


IJA-' 


171  „ 


71   6 

■ 


170  h 


Fig.  i68.  - — Tétc  de   lance  en  silex  jaune    (nécropole   d'El-'Amrah).     i/>,   grandeur 

naturelle. 

Fig.  iG().  —  Tète  de   lance  en   silex  jaune   (station  de  Liclit).  i/a   grandeur  naturelle. 

Fig.    170  cl  171.  —  Tètes  de  lances,  nécropole  de  Saghel-el-Baglieli.  Musée  de  Guizeli 

(fig.   170  :  silex  jaune  clair;  fig,  171  :  silex  brun).   1/2  grandeur  naturelle. 


LHOMME  NEOLITHIQUE 


Tétks  de  lances.  —  Dans  le  préhistorique  d'Europe,  tant  à  l'époque 
quaternaire  (solutréen)  qu'à  la  période  de  la  pierre  polie,  la  lance 
joua  un  grand  rôle  dans  l'armement,  et  les  cavernes  du  Périgord, 


i..j  /;//7?ia 


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pit.,m 


173 


/74 


y^  /75 


Fig.    172.   —  Tète   de   lauce  en  silex  bnm   (nécropole   d'El-'Amrah).     i/a   grandeur 

naturelle. 

Fig.  173  à  175.  —  Tètes  de  lances  en  silex  (fig.   lyi  :  jaune  clair.  Abydos  ;  lig.   174  : 

gris  jaune,  Abydos  ;  fig.  175  :  brun  vert,  EI-'Amrah).  4/5  grandeur  naturelle. 


1,  IIDMMi:   NKOl.rniK)!'!- 


Vî-J 


comme  les  slalions  roI)eiihaiisienii(!S  des  |)ays  du  iNord,  nous  (biirnis- 
sent  un  très  grand  nombre  de  tôtes  de  ces  armes. 

La  plus  importante  de  l'époque  solutréenne  est  un(>  pièce  longue 
de  0"",348  et  qui,  trouvée  dans  la  Saône-et-Loire,  est  aujourd'iiui  con- 
servée dans  les  galeries  du  Musée  de  M Acon  ;  sa  forme  générale  est 
celle  d'une  feuille  de  laurier  :  elle  est  mince,  plate,  et  taillée  à  petits 

éclats. 

En  Egypte,  nous  rencontrons  le  mèm(!  type  ((ig.  168),  égalemeni 
fort  sorgné  de  travail  et  qui  atteint  parfois  O"  ,;50  de  longueur 
(fîg.  170).  Toutefois,  ces  pointes  présentent,  aveccelles  ilu  solutréen, 
cette  différence  essentielle  que,  dans  celles  du  quaternaire,  le  tran- 
chant est  droit,  tandis  que  dans  celles  d'Egypte  il  est  garni  de  dents 


170 

Fig.    176.    —    Pointe   d<>  javelot  eu    silex    jauue    (station    de  Dimeli).    i/a    grandeur 

naturelle. 
Fig.    177    à    179.    —  Têtes  de   javelots   (Gg.    177    :    silex  jaune,    station   de   Lielit; 

Cg.  178  et  179  :  silex  brun   veiné  de  jaune,   station   de  Kom-Achim).  4/5  grandeur 

naturelle. 

de  scie  très  fines  (fig.  172),  fait  qu'on  ne  rencontre  en  Europe  ni  dans 
les  stations  quaternaires,  ni  dans  celles  postérieures. 

Ce  type  toutefois  est  courant  dans  la  Scandinavie  et  le  Danemark  ', 


I.  Musée  de  Saint-Germain,  u"'  2732,  238. 


12'. 


L'HOMME  NEOfJTHIQUE 


oii  les  pointes  présentent  de  grandes  analogies  avec  celles  du  solu- 
tréen de  France. 

Parfois,  en  Egypte,  on  rencontre  aussi  des  tètes  de  lances  dont  la 
ibrnio  générale  en  feuille  de  laurier  s'est  modifiée;  les  unes  (fig.  169) 
sont  absolument  elliptiques,  d'autres  (Tig.  171)  sont  renflées  en  leur 
milieu. 

A  côté  des  tètes  de  lances  au  lype  solutréen,  l'Egypte  fournit  aussi 
des  pointes  (fig.  173,  174,  17ô,  176)  munies  de  dents  plus  fortes  qui 


Fig.    r8o.   —  Tcle   de    lanco    en    silex  jaune    (nécropole    d'El-'Amrati).    r/2    grandeur 

naturelle. 

Fig.   i8i  el  182.  —  ïèles  de    lances  en    silex  jaune   (nécropole   d'Abydos,   Musée 

de  Guizeh).  1/2  grandeur  naturelle. 

les  font  ressembler  à  des  scies,  et  se  rapprochent  beaucoup  de  cer- 
tains objets  danois  <  à  bords  fortement  dentelés,  appartenant  aux 
dernières  phases  de  l'âge  de  la  pierre  dans  les  pays  du  Nord. 

Si  la  forme  courante  des  pointes  de  lance  européennes  est  la  feuille 
de  laurier,  il  n'en  est  pas  de  même  en  Egypte  où  ce  type  est  moins 


I.   Musée  de  Saint-Germain,  n°  aSS. 


I,  IIOMMI'    .NKOl.ITllIorF  125 

al)(in(I;ml  (\uc:  celui  qui,  prcscMilaiil  im  pcdoiiciilc,  rcprndiiil  on  plus 
grand  la  hMc;  de  llèclie  [Hg.  177,  I7S,  l7'.M.r,('s  acmes  sont  1res  idjon- 
danles  à  l^iehl,  à  Dinieh,  à  Kom-Aeliini  cl.  dans  loutcs  les  stalions 
de  la  Basso-I'^gyptc,  tandis  que  dans  le  sud  c'est  la  feuille  de  saule 
qui  prédomine.  En  l'rance,  cependant,  nous  on  connaissons  quelques 
spécimens  '  et,  bien  (|ue  la  laille  ne  soit  pas  identique  dans  les  deux 
pays,  il  est  aisé  de  voir  que  ces  armes  ont  toutes  été  inspirées  par 
les  mêmes  nécessités.  L'Amérique  (dlc-mèmo  en  fournit  bon  nombre 
de  types ^ 


)83 


Fig.  i83.  —  Tète  de  flèche  en  silex  brun  (ToU-el-Balainoun,  Musée  de  Guizeh). 

Grandeur  naturelle. 
Fig.   iS'i.  —  Tète  do  flèche  en  silex  jaune  (Haute-Egypte).  Grandeur  naturelle. 

Les  têtes  de  lances  les  plus  curieuses  et  en  même  temps  les  plus 
caractéristiques  des  nécropoles  delà  Haute-Egypte  (Abydos,  El-'/Vm- 
rah,  etc.),  sont  munies  de  deux  pointes  (fig.  180,  181,  182)  et  appar- 
tiennent au  groupe  de  celles  qu'on  rencontre  en  abondance  dans  les 
cimetières  de  Tàge  du  fer  au  Caucase  ^ 

Ces  armes  se  terminent  en  pointe  dans  la  partie  qui  était  destinée 
à  l'emmanchement.  Jusqu'à  la  moitié  de  leur  longueur,  les  côtés  sont 
réguliers;  plus  haut,  dans  la  partie  destinée  à  pénétrer  dans  les 
chairs,  les  bords  sont  taillés  en  scie  et  munis  de  dents  très  fines.  Je 


1.  Musée  de  Saint-Germain,   n"  iS'iyo  ;  Coucourés  (Aveyron). 

2.  Musée  de  Saint-Germain,  n"  i2ra8  :  Washington  (Etats-Unis);  n»  aofiiG,  État  de 
Xew-York  ;  n"  24044,  Pensylvauic. 

3.  B.  Wyroubofl",  1877.  Ohjets  d'anlii[uilé  du  Musée  de  Tiflis,  pi.  IV,  p.  iG  :  fig.  i, 
pointe  de  lance  en  fer  trouvée  dans  le  village  de  Moukhravane  près  do  Tiflis  ;  (ig.  3, 
poinlo  de  lance  en  fer  trouvée  en  Ossèthie  près  de  Béeome. 


126 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


Fi 


ii>.  iiSô  à  195.  —  Pointes  do  flèches. 


r  li"-.   100  a  i()o.  —   r  oimes  ae  iiecnes. 

g.   iS5  :  silex    brun,    Dimeh;   —  fig.    186  :    silex  brun   rouge,   Dîmeh  ;  —  fig.  187  : 

silex  violacé,  Kom-Achim  ;  —  (ig.   188  :  silex  brun  jaune,  Dimeh;  —  fig.    i8q  :  silex 

nOIPrnrnn       Flinmii   ■    (ttv       r,.,.    ■    cilnv    l-ifnn      i..3i'ti.'.    Aa    r..^i..       T»' ^ ,«      A  ..  Il  î  m  •    (tty  xnr     • 


noir  corné,  Dimeh;  —  fig  lyo  :  silex  brun,  veiné  de  noir,  Kora-Achim;  —  fig.  191 
silex  jaune,  Dimeh;  —  fig.  192  :  silex  gris  brun,  Dîmeh;  —  fig.  19?  :  silex  violacé 
veiné  de  noir,  Dimeh  :  —  fig.  ig4  :  silex  bruu,  Dimeh  ;  —  fig.  195  :  silex  jaune, 
Dîmeh. 


T, HOMME  NKOT.rriTIQI'F 


127 


ne  connais  pas  d'objets  découverts  lui  Eiiiopc  qui  puissent  être  com- 
parés à  ces  têtes  de  lances. 


197 


-   ton 


Fig.  ig6  à  ig8.  —  Pointes  de  flèches. 

Fig.  io6  :  silox  jaunâtre,  IToukli  ;  —  fig.   icjy:  silex  brun  rouge,  KholLirali;  —  (ig.  198: 

silex  gris  jaune,  Toukh. 


Ma 


Fig.  igy  à  aoi.  —  Pointes  de  flèches. 

Fig.  igg  ;  silex  brun  jaune,  Toukh;  —  fig.   200  :  silex  jaune,  Abydos  ;   —  fig.  aoi   : 

silex  jaune    et  gris,  Khaltarali. 


TÊTES  OU  POINTES  DE  FLÈCHES.  —  Les  sile.x  taillés,  à  l'aide  desquels 
les  autochtones  de  l'Egypte  armaient  l'extrémité  de  leurs  flèches, 


128 


L'HOMME  NKOrJTlIIOl' 


présentent  une  très  grande  variété  de  forme.  Les  unes  (fig.  183)'  sont 
larges  et  inunies  d'un  pédoncule,  la  taille  en  est  rudimentaire  ; 
d'autres  (lig.  184)  son-t  plus  fines  de  travail,  mais  présentent  les  mêmes 
caractères  généraux. 

Dans  les  stations  de  Dîmeli,  Kom-Achim,  Toukii,  Kliatlarah, 
Zawaïdah,  etc.,  les  pointes  tie  flèches  sont  généralement  de  fortes 
dimensions  (fig.  185  à  105  et  196  à  201).  Les  unes  (fig.  196,  197,  198) 
sont  de  simples  pointes  triangulaires  sans  pédoncule  ni  barbelures, 
d'autres  {iig.  188,  190^  191)  sont  grossièrement  barbelées  ou  (fig.  195) 


I: 


■tfZ£IZ2> 


208 


20D 


210 


Fig.  O.02  à  210.  —  Poinles  de  flèclies  (nécropole   d'Abydos).  Grandeur  naturelle. 

Fig.  ao2  :  cornaline  avec  inclusions  noirâtres;  —  fîg.  2o3  :  silex  jaune  opaque;  — 
fig.  2o/|  :  silex  jaune  rose  ;  —  fig.  2o5  :  silex  blond  opaque;  —  fig.  2o(î  :  silex  jaune  ; 
—  fig.  207  :  silex  brun;  —  fig.  208  :  silex  noirâtre;  —  fig.  209  :  silex  corné;  — 
fig.  210  :  silex  blanc  opaque. 

composées  seulement  d'un  éclat  retouché  légèrement.  On  en  voit 
aussi,  mais  plus  rarement,  en  feuille  de  saule  (fig.  193)  ou  formées 
d'un  silex  taillé  à  trois  faces  (iig.  102  et  104). 

Le  type  le  plus  abondant  dans  ces  localités  est  celui  dans  lequel  le 
pédoncule  fait  défaut  et  les  barbelures  sont  très  longues  (fig.  185, 
187,  189,  199,  200,  201);  elles  affectent  toutes  les  formes,  parfois 
même  le  corps  de  la  flèche  semble  disparaître  devant  l'importance 
des  crochets  (fig.  189).  Il  en  est  aussi  dont  les  bords  sont  dentelés 
(fig.  186). 

Dans  les  sépultures  d'Abydos,  les  tètes  de  flèches  sont  beaucoup 
plus  petites  que  dans  les  stations  dont  il  vient  d'être  question.  Leur 


I.   Tell-BalamouQ  en  Basse-Egypte,  tête  de  flèche  apportée  par  un  Arabe  à  Mariette 
(Musée  de  Guizch),  figurée  par  Chabas,  Jiiliij.  hist.,  p.  3^3. 


i/iiOMMK  ,m:()i.iiiii()i;I': 


iii'j 


longiuMu-  inoycniu'  varie  c-iilrc  ()"',U55  et  ()"V,030  (lig.  202  à  223). 
Parl'ois,  cepemiaiit,  on  en  rencoiili'e  (ie  [)liis  grandes  {(ig.  224,  225) 
(longueur  maxinia  0"',0G0),  mais  elles  sont  Ijeaiicoiii)  plus  rares. 

Les  pointes  de  flèches  d'Abydos  affectent  tontes  les  ibnnes;  elles 
sont  à  pédoncule  et  ont  été  taillées  en  silex,  en  C[uarl/.,  en  jaspe,  en 
cornaline  et  dans  toutes  les  nialièros  dures  du  |)ays.  Leur  travail  est 
d'une  extrême  finesse. 


Fig.  "jii  à  223.  —  Pointes  de  flèches   en  silex  (nécropole   d'Abydos).  Grandeur 

naturelle. 
Fig.  ai  I   :  silex  brun  ;  —  l!g.  212  :   silex  rougeàtre  ;  —  fig.  ai"?  et  ai'i  ;  silex  blond  ; 
£ig     21,5  :  silex  gris;   —  fig.    216  :  silex   gris    foncé;    —   fig.    ;U7  :  jaspé   rouge; 
fig.  2i8  :  silex  blond;  —   fîg.  219  :  silex  jaune  ;  —  fig.    220  et  a2i   :  silex   corné; 
lig.  222  :  silex  violet;  —  fig.  223  :  silex  brun  jaune. 


La  station  d'Hélouan  présente  quelques  particularités  sous  le  rap- 
port de  la  forme  des  pointes  de  flèches.  Je  dois  à  l'obligeance  de. 
M.  Lombard  la  communication  de  celles  que  je  figure  (fig.  226  à  237). 
Les  unes  sont  desimpies  lames  retaillées  au  pédoncule,  mais  souvent 
munies  de  deux  encoches  c(ui  détachent  les  barbelures  et  que  je  crois 
destinées  au  passage  des  liens  qui  retenaient  le  silex  au  bois  de  la 
flèche. 

D'autres,  et  ce  sont  les  plus  curieuses  (fig.  229  à  231),  se  composent 
simplement  d'ini  croissant  taillé  dans  le  silex.  L'emmanchement  de 
ces  pointes  était  fort  simple  (i'ig.  232),  si  nous  le  supposons  du 
même  genre  que  celui  dont  font  encore  usage  certaines  peuplades  de 


130 


L'HOMME  XEOLITHIQUE 


rOcéanie,  ou  tel  qu'il  a  été  trouvé  dans  la  palafitte  de  Saint- Aubin  '  :  le 
silex  formait  en  même  temps  la  pointe  et  la  barbelure  de  la  flèche. 

11  est  à  remarquor  que  les  types  que  je  viens  de  décrire  comme 
provenant  de  la  station  d'Hélouan  se  rencontrent  en  même  temps  que 
des  pointes  semblables  à  celles  d'Abydos. 

Il  n'y  a  pas  de  comparaisons  à  faire  entre  les  pointes  de  flèches  de 
l'Egypte  et  celles  qu'on  rencontre  dans  les  autres  pays  ;  les  types  sont 
presque  identiques  et  appartiennent  au  robenhausien;  seules  les  têtes 
d'Hélouan  sont  caractéristiques  et  semblent  jusqu'ici  n'exister,  tout 
au  moins  en  abondance,  que  dans  la  vallée  du  Nil. 


f^'Ary'i'ftf'i'T'^"" 


£p"h* 


>^ 


230 


231 


l'ie;.  224  et  225.  —  Pointes  de  flèches  en   silex  (nécropole  d'Abydos).  Grandeur 

naturelle. 
Fig.  224  :  silex  jaune;   —  flg.  226   :  silex  noir. 

Fig.  226  à  23i.  — •  Poinles  de   flèches  (station    d'Hélouan;  récolle  A.  Lombard). 

Grandeur  naturelle. 

Fig.  226  :  silex  noir;  —  fig.  227  :  silex  jaune  ;  —  fig.  228  :  silex  violet;  —  fig.  2()2  : 
silex  résinite  ;  —  fig.  23o  :  silex  jaune;  —  fig.  23i  :  silex  brun. 

]\Iais  le  grand  intérêt  que  présentent  ces  armes  est  relatif  à  l'Egypte 
elle-même,  car  dans  tous  les  monuments  datés  nous  ne  voyons  ja- 
mais apparaître  de  pointes  de  flèches  présentant  la  forme  des  objets 
que  je  viens  de  décrire. 

Les  flèches,  dans  l'Egypte  historique,  sont  généralement  armées 
de  silex,  mais  par  leur  forme  diffèrent  totalement  des  armes  sem- 
blables employées  par  les  aulochtones.    La  flèche  pharaonique  est 


I.  Gross,  pi.  Il,  fig.  ij,  .seplième  liajiporl  Kellei'. 


I,'IIOMME  NHOl  rniUUMÎ 


i:il 


tranchante  ((ig.  233  à  236),  le  silex  qui  l'arme  est  extrèmemeni,  pelil 
el  n'a  pas  été  laillé  spécialement  pour  le  but  qu'il  remplit,  c'est  un 
simple  éclat  qui  n'a  rien  de  commun  avec  les  léles  de  llèclies  plus  an- 
ciennes, et  si  nous  voyons  parfois  apparaître  une  pointe  (fig.  238),  elle 
est  en  métal  et  de  date  relativement  récente. 

Ces  flèches,  d'é|)oque  hislorique,  nous  les  connaissons  par  les 
nombreuses  trouvailles  qui  en  ont  été  faites.  Les  plus  anciennes  qui 
soient  parvenues  jusqu'à  nous  appartiennemt  au  Moyen  Empire,  les 


Fig.  23?..  —  Mode  d'ernmauclicmeut  des  poiules  de  flèches  de  lu  station  d'tlélouan. 

Fig.  ?.33  à  238.  —  Têtes  de  flèches  d'époque  historique  (Musée  de  Guizeh). 

i/2  grandeur  naturelle. 


plus  récentes  sont  de  fort  peu  antérieures  à  notre  ère  ;  d'autre  part 
nous  savons,  par  les  nombreuses  représentations  d'archers  qui  ligu- 
rentsur  les  monuments,  que  la  flèche  tranchante  fut  toujours  en  usage, 
tandis  que  la  pointe  ne  semble  pas  avoir  été  employée  par  les  Egyp- 
tiens longtemps  après  les  débuts  de  l'Ancien  Empire. 

Cette  distinction  très  nette  entre  la  flèche  des  stations  préhisto- 
riques et  celle  des  tom!)es  et  des  monuments  pharaoniques  sul'lirait, 
si  nous  ne  possédions  un  grand  nombre  de  documents,  à  prouver 
l'existence  en  Egypte  d'un  état  de  civilisation  néolithique;  elle  dé- 
montre clairement  que  les  silex,  qui  jadis  passaient  pour  grecs  et  ro- 


132 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


mains,  sont  bien  piéliistori(|iies;  car,  alors  qu'on  rencontre  en  abon- 
dance les  pointes  de  flèches  de  forme  archaïque  daus  les  stations,  on 
n'en  rencontre  pas  une  seule  dans  les  nombreuses  ruines  de  villes 
pharaoniques,  grecques  et  romaines,  qu'exploitent  chaque  année  les 
chercheurs  de  sébakh.  Dans  les  tamisages  effectués  par  ces  gens,  les 
moindres  objets  sont  letrouvés,  et  jamais  on  ne  recueille  non  seule- 
ment de  pointes  de  flèches  en  pierre,  mais  même  de  silex  travaillés. 

Scies  et  faucilles.  — J  ai  réuni  sous  le  même  titre  ces  deux  genres 
d'instruments,  parce  que  dans  la  plupart  des  cas  il  est  presque  impos- 
sible de  distinguer,  parmi  les  nombreuses  lames  dentelées  qu'on 
trouve  dans  toutes  les  stations  néolithiques  de  l'Egypte,  quelles  fu- 


Scies  eu  silex  jauue   (kjœlikeiiuKcddiugs    do  Tuuklii.     1/2    grandeur 

naturelle. 
Scie  ou  partie  de  faucille  en  silex  jauue  (Tell-el-Yalioudi  près 
d'Héliopolis).  1/2  grandeur  naturelle. 


rent  celles  destinées  à  la  moisson  et  celles  employées  pour  cou|)er 
le  bois  ou  les  os. 

Le  type  le  plus  commun  (iig.  239  à  246)  se  compose  d'une  lame  par- 
fois pointue  à  l'une  de  ses  extrémités,  parfois  taillée  carrément  aux 
deux  bouts  et  garnie  sur  l'un  de  ses  côtés  d'une  série  de  dents  plus 
ou  moins  fines;  les  silex  qui  armaient  les  faucilles  étaient  enchâssés 
dans  un  instrument  de  bois  (fig.  247)  ,  muni  d'un  manche  et  dont 
M.  Flinders-Pelrie  a  retrouvé  un  exemplaire  bien  conservé  à  Kahoun, 
Les  lames  pointues  garnissaient  la  pointe  de  la  l'aucille,  celles  taillées 
carrément  étaient  ajustées  les  unes  à  la  suite  des  autres,  de  telle  sorte 
qu'il  n'y  eut  pas  de  discontinuité  dans  la  ligne  dentelée. 

Les  instruments  de  ce  genre  qu'on  trouve  dans  les  stations  néoli- 


L'HOMME  NEOLnniQUE 


133 


thiqiies  ont  tous  ét(';   cmployt's,   car  ils   porleiit  encore  le   poli  dû  à 
l'usage. 

La  forme  des  faucilles,  telhï  (|u'elle  a  été  retrouvée  à  Kahoun,nous 
était  déjà  connue  par  les  hiéroglyphes  ;  en  effet  les  inscriptions  peintes 


Fig.  247.  —  Mode  do  monture  des  faucilles  armées  de  silex,  d'après  les  résultais  des 

touilles  de  M.  \\'.  M.  Flinders  Pétrie  .\  Kahoun  (cf.  FI.  Peliie,  lllahun,  Kahun  and 

Gurob,  pi.  VII,  lig.  27). 
Fig.  2/|S.  —  Signe  hiéroglyphique  représentant  une  faucille  année  de  silex  (?),  d'après 

une  fresque  de  Meïdoum  (111°  dynastie).  (Le  manche  est  peint  eu  vert  et  les  dents  sont 

blanchâtres.) 


Fig.  249  à  25i.  —  Lames  et  scies  eu  silex,  1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  24y  et  200  :  silex  jaune  (kjœkkenmœddings  do  Toukh)  ;  —  lig.    25i   :  silex   blond 
(kjcekkenniœddings  de  Khallarah). 

de  Meïdoum  nous  en  fournissent  des  dessins  de  la  111°  dynastie 
(fig.  248).  On  remarquera  que,  dans  ces  représentations  archaïques,  le 
tranchant  de  l'outil  est  indiqué  comme  composé  d'une  aulre  matière 


134 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


(le  silex)  que  l'ensemble  de  rinstriiment.  Ce  n'est  que  plus  tard  que 
l'outil  tout  entier  fut  fait  de  métal;  les  hiéroglyphes  postérieurs  ne 
montrent  d'ailleurs  aucune  distinction  de  matière  entre  le  tranchant 
et  le  manche. 


/^ 


r^asxes^^ 


252  253  2j-*  253  236 

Fig.  232  à  2r)fi.  —  Lames  et  scies  en  silex.   1/2  grandeur  naturelle. 

Fig.  252  :  silex  gris  (Khatlarah)  ;  —  fig.   253  :  silex  jaune  (Toukh);  —  fig.  254  ■  silex 

jaune  (Khattarah);  —  fig.  255  :  silex  gris  (Toukii);  —  fig.  256  :  silex  brun  (Toukh). 


Fig.  267  à  260.  —  Scies    en  silex  jaune    (kjoekkenmœddings  de  Toukh).  1/2  grandeur 

naturelle. 

Fig.  2G1.  —  Scie  en  silex  dans  un  long  manche  de  bois  provenant  des  palafittes  du  lac 
de  Mooseedorf  (canton  de  Berne,  Suisse).  1/2  grandeur  naturelle.  Coll.  Uhlmann  à 
Munchenbuchsee  (G.  de  Morlillet.  Musée  préhistoi-ique,  pi.  XXXVI,  fig.  aSi). 

Parmi  ces  lames  il  en  est  un  grand  nombre  de  dentelées,  mais  on 
en  rencontre  également  qui,  tout  en  présentant  la  forme  générale  des 
scies  destinées  aux  faucilles,  ne  sont  pas  munies  de  dents  (fig.  249 


r.'IIOMME  Ni:OLITHIQUE 


l:t5 


à  257);  rommnnrhomontde  ces  pièces  étaitbien  certainement  le  môme 
que  celui  des  l'aucilles,  mais  leur  usage  nous  reste  inconnu. 

Quelques-uns  des  instrumenls  dentelés  étaient  de  véritables  scies 
destinées  à  couper  le  bois  ou  Fos,  mais  il  est  impossible  d'établir  une 


262  a 


6ib 


Fig.  2G2  à  268.  —  Scies  en  silex.  1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  2G2  :  silex  jaune  clair  (slalion  de  Toukh):  —  fig.  263  :  silex  brun  avec  patine 
blanche  (station  de  Dinioh);  — fig.  364  ■  silex  brun  veiné  (station  de  Koiu-Aehiui)  ; 
—  fig.  265  :  silex  brun  (station  de  Kom-Acliirn)  ;  —  fig.  266  :  silex  rouge  brun 
(station  de  Kom-Achim)  ;  —  fig.  267  :  silex  brun  (station  de  Dimeh)  ;  —  fig.  268  : 
silex  brun  (station  de  Toukh). 


269 


^ 


273 


Fig.  269  à  271.  —  Scies.  1/2  grandeur  naturelle. 

Fig.  26g  :  silex  brun  (station  de  Kora-Achiml  :  —  fig.  270  ;  silex  .jaune  (station 

de  Dîmeh):  —  fig.  271  :  silex  noir  (station  de  Koiu-Achim). 

Fig.  272  et  273.  —  Racloirs-scies   en  silex  jaune  (nécropole  d'Abydos).  1/2  grandeur 

naturelle. 


136  LllOMME  NKOLlïHIQt'E 

distinction;  nous  connaissons  des  cités  lacustres  d'Europe  quelques 
scies  emmanchées  (fig.  261),  tandis  (ju'en  Egypte  je  n'en  ai  jamais  ren- 
contré. 

Les  objets  qui  peuvent  être  considérés  comme  de  véritables  scies 
sont  bien  moins  abondants  que  les  lames  de  faucilles  ;  on  en  rencontre 
dans  toutes  les  stations  préhistoriques  d'Egypte;  elles  sont  souvent 
courbes  (fig.  2(32  à  268),  parfois  même  munies  d'un  manche  en  silex 
(lig.  261);  d'autres  sont  droites  lûg.  269  à  271).  Dans  tous  les  cas  ces 
instruments  sont  d'un  travail  fort  soigné. 

Avant  d'en  terminer  avec  la  description  des  lames  dentelées,  je  dois 
signaler  des  racloirs  doubles  taillés  en  scie  très  fine  sur  les  côtés 
(fig.  272,  273)  et  une  scie  en  os  de  j)rovenance  inconnue  et  conservée 
au  Musée  de  Guizeh  (fig.  274). 


Fig.  27'|.  ^  Scie  en  os.  2/3  grandeur  naturelle  (localité  inconnue.  Musée  de  Guizeh). 

La  grande  abondance  des  lames  dentelées  qu'on  rencontre  dans 
certaines  stations  égyptiennes  prouve  que,  dès  les  temps  les  plus 
anciens,  la  culture  des  céréales  prit  une  très  grande  extension.  Les 
gisements  de  Toukh,  Zawaïdah,  Khattarah,  Abydos,  etc.,  en  renfer- 
ment des  milliers^  parce  qu'ils  sont  situés  dans  des  pays  propres  aux 
cultures,  tandis  qu'à  Dîmeh,  station  de  pêche,  ils  sont  beaucoup  plus 
rares. 

L'usage  des  faucilles  armées  de  silex  se  continua  fort  probablement 
longtemps  après  l'apparition  des  métaux  :  le§  hiéroglyphes  semblent 
le  prouver;  cependant  nous  ne  pouvons  en  admettre  l'emploi  après  le 
Moyen  Empire,  car  dans  les  ruines  des  villes  et  des  bourgades  plus 
récentes  on  n'en  rencontre  jamais  la  moindre  trace.  Quant  à  la  haute 
antiquité  de  la  culture  des  céréales  dans  la  vallée  dti  Nil,  elle  n'a  rien 
qui  doive  nous  surprendre,  car  le  Ijlé  vit  aborigène  dans  cette  partie 
de  l'Afrique. 

En  Europe  et  en  Amérique  les  scies  sont  beaucoup  plus  rares  qu'en 
Egypte.  Quant  aux  faucilles,  leur  existence  n'a  pas  été  démontrée;  ce 
fait  est  probablement  dit  à  ce  que,  dès  les  débuts,  l'Egypte  fut  livrée 
à  la  culture  des  céréales,  qui  croissent  naturellement  dans  cette  partie 
de  l'Afrique,  tandis  qu'ati  milieu  des  forêts  de  l'Europe  et  du  Nouveau 
Monde,  l'homme  primitif,  chasseur  et  pêcheur,  s'adonna  fort  peu  à  la 
culture. 


I/MOMME  NKOLrniIOUE 


137 


Pointes.  —  Dans  le  cliapitre  n^lalif  à  l'hoinmo  [laléolilhiqiic,  j'ai 
décritdes  pointes  troiivi-cs  dans  h;  (liltiviiim  ('i^vplicii  (fig.  10  et  20)  et 
semblables  à  celles  qu'on  rcMicontre  eoiiiimméiiient  dans  les  graviers 
d'iiiirope.  Ces  nièincs  instruments,  on  les  trouve  en  assez  grande 


J^ 


:;jS!SS»*:.i*-'  ',i2^ 


Fig.  275  et  2-6.  —  Poiîilcs  en  .dlex.  1/2  graiidoiir  iialiirelle. 

Fig.    275   :    silex  jaune   (kjœkkenmœddiiigs    de    Zawaïdah);    —    fig.   27(1  :    siU'X   jaune 
(kjœkkenraœddings  de  Toukli). 


278  a 


Fig.  277  et  278.  —  Pointes  en  silex  (kjœkkenmœddings  de  Toiikli).  2/3  grandeur 

naturelle. 
Fig.  277  :  silex  noir;  — fig.  278  :  silex  jaune. 


abondance  dans  les  kjn'kkeninceddings  de  Tnukli  (fig.  275,  276). 
Appartiennent-ils  à  l'époque  de  la  pierre  polie,  ou  devons-nous 
admettre  que  c'est  fortuitement  seulement  qu'ils  existent  dans  ces 
gisements?  Je  ne  saurais  le  dire,  mais  il  est  intéressant  de  les  signaler, 


138 


L  HOMME  NKOLITHIQUI' 


car  leur   usage   fut  peut-être  perpétué  jusqu'à  la  tin  de  la  période 
néolithique. 

Il  n'en  est  pas   de   même  des   pointes    d'un   travail   plus   soigné 
(fig.  277  à  285),    qu'on  rencontre  communément  dans  les  diverses 


P%['--^ 


/ 


281  6 


Fig.  2-9  à  281.  —  Pointes  en  silex.   1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  279  :   silex  gris    avec  inclusions   calcaires   (kjœkkenmœddings   de  Zawaïdah);   — 
fig.  280  :  silex  gris  tacheté  de  noir,  patine  calcaire  (kjœkkenmœddings  de  Toukh);  — 
ùg.  281  :  silex  gris  (kjœkkenmœddings  de  Khattarah). 


Fig.  282  à  28(i.  —  Pointes  en  silex.  1/2  grandeur  naturelle. 
Fig.  282  et  286  :  silex  jaune  (station  de  Koni-Achim)  ;  —  fig.  283  à  285  :  silex  brun 

et  jaune  (station  de  Dîmeli). 


stations  et  qui,  présentant  un  grand  nombre  de  formes  diverses,  ont 
été  employées  à  des  usages  très  différents;  les  unes  (fig.  282,  286)  se 
rapprochent  des  couteaux,  d'autres  (fig.  277,  278)  semblent  avoir  été 
uniquement  destinées  à  percer. 


L'HOMME  NftOTJTHIQUE 


139 


Quelques  pièces  de  ce  genre  (fig.  287,  288),  poinlues  d'un  côlé,  sont 
façonnées  en  grattoirs  de  l'autre  elollrciil  la  l'orme  générale  de  hachettes 
dégrossies,  tandis  (|uo  d'autres  sont  tcriniuées  en  pointe  aux  deux 
extrémités  (lig.  289,  290). 


287  a  2S7  h 

Fig.  287  et  288.  —  Pointes  on  silex.  1/2  grandeur  uatnrcllc 

Fig.  287  :  silex  j.iune  veiné  de  noir  (station  de  Dîmeh)  ;  —  fig.  288  :  s 
avec  gangue  brune  (station  de  Kom-Achim). 


ilox  jaune 


■289  n  iSQ  6  290 

Fig.  289  et  ago.  —  Pointes  en  silex.  4/5  grandeur  naturelle. 
Fig.  289  :  silex  jaune  (station  de  Dimeh)  ;    —   fig.  290  :  silex  jaune  avec   patine   noire 

(station  do  Kom-Achim). 

Perçoirs.  —  Ces  instruments  (fig.  291  à  295),  en  tout  semblaljles  à 
ceux  qu'on  rencontre  en  Europe",  sont  assez  rares  en  Egypte.  Ils  sont 
formés  d'une  lame  retaillée  sur  ses  deux  côtés  à  l'une  des  extré- 
mités et  rendue  ainsi  parfois  fort  aiguë.  Dans  la  plupart  des  stations 
la  pointe  de  ces  outils  s'est  trouvée  brisée  par  l'usage. 


I.  Musée  de  Saint-Germain,  a"^  2i528,  2i529,  23871,  75o2,  etc. 


140 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


TuANCiiETS.  — ■  Nous  116  trouvons  pas  en  Egypte  de  tranchets  sem- 
blables à  ceux  des  stations  robenliausiennes  d'Europe  '.  Les  kjœk- 


u 


294 


'>g-  agi  à  2Ç|5.  —  Poinçons  en  silex  (kjœkkenmœddings  de  Toukh).  1/2  grandeur 

naturelle. 


Fig.  aç)6  à  299.  —  Tranchets  en  silex. 

Fig.  2gG,  297  et  299  :  silex  brun  (station  de  Kom-Achim);  —  fig.  298  :  silex  brun 

(station  de  Dîmeh).  1/2  grandeur  naturelle. 

kenmœddings  de  la  Haute-Egypte,  comme  les  stations  du  Fayoum, 
fournissent  des  instruments  retouchés  sur  leurs  deux  faces,  parfois 


I.  Musée  de  Saint-Germain,  n"'  2'5,  S,    19814,   18188,  2i5i8,  8454,  6827,  17547,  etc  . 


i;iIOMMR  NKOLITHIOiri.; 


141 


triangulaires  (fig.  29G),  souvent  rétrécis  un  peu  au-dessous  du  tran- 
chant (fig.  297,  299)  qui  rn'(|U(Mnin(Mil  csl  oblique  (fig.  278).  Ces  ins- 
truments semblent  ôtrc  spéciaux  à  la  vallée  du  Nil. 


Fig.  3oo.  —  Silex  gris  jaune  (kjœkkenmœddings   de  Toiikh).   i/2  grondeur  naturelle. 
Fig.  3oi  et  3o2.  —  Retouchoirs  en  silex  jaune  (kjœkkenmœddings  deToukh). 

i/a  grandeur  nainrellc. 


Fig.  3o3  à  309.  —  Poinçons  en  os.   i/a  grandeur  naturelle. 

Fig.  3o3  à  307  :  os  (kjœkkenmœddings  de  Toukh)  ;   —  fig.   3o8  et  3o()  :  ivoire 

d'hippopotame  (station  de  Dimeh). 


L'HOMME  XEOLITHIQUE 


Retouciioirs.  —  Ces  outils  (fig.  300,  30i,  302),  ou  du  moins  ceux  que 
je  désigne  sous  ce  nom  par  comparaison  avec  les  objets  de  l'Europe  ', 
sont  abondants  dans  les  stations  de  l'Egypte.  J'en  ai  rencontré  tant 
au  Fayoum  que  dans  les  environs  d'Abydos  et  de  Négadali. 


Poinçons  en  os  et  en  ivoire.  —  Nous  retrouvons  dans  les  kjœkken- 
mœddings  de  la  Haute-Egypte,  comme  dans  les  tombeaux,  un  grand 
nombre  de  petits  instruments  d'os  et  d'ivoire  travaillé.  Les  uns,  les 
plus  simples,  sont  des  perçoirs  obtenus  en  usant  un  os  brisé;  ils  sont 


3W 


CI3  a  313  i 


3ISa  315  b 


Fig.  3io  à  3i5.  —  Instruments  en  os. 
Fig.  3io  à  3i2  :  uccrojjole  d'El-'Amrah;  —  fig.  3i3   à  3i5  :  Sagliel-el-Baglieli. 


semblables  à  ceux  du  robenhausien  d'Europe'  (fig.  303  à  307), 
parfois  même  (fig.  308,  309)  beaucoup  plus  grossiers.  Les  autres 
(fig.  310  à  315),  plus  soignés,  sont  souvent  ornés  de  gravures  gros- 
sières faites  à  la    scie  de  silex. 

Masses.  —  Ces  armes  présentent,  dans  les  nécropoles  néolithiques, 
deux  formes  très  différentes  :  les  unes  (fig.  316  à  318),  faites  d'albâtre 
ou  de  pierre  dure,  se  sont  conservées  en  usage  pendant  toute  la 
durée  de  l'époque  pharaonique  et  se  retrouvent  aussi  bien  dans  les 


1.  Musée  de  Saint-Germain,  n°»  18189,  1S763,  aoSijo,  2i523,  igSoS,  549,  ^''^• 

2.  Musée  de  Saint-Germain,  u"'  22706,  iSgSS,   lyôSS,  etc. 


L'HOMMK  \KO[.rniiQur: 


l'.3 


toml)uauxd(!  la  Xll"  dynastie  '  que  sur  les  bas-reliefs  d'époque  plo- 
lémaïque.  Les  autres  (fig.  321,  ;{22)  sont  plus  spéciales  et  rappellent 
certaines  lornies  du  néolithique  européen^. 


Fig.  3 16 

Fig. 


à  3ao. 
3i6  à  3 


—  Masses  en  pierre  (El-'Ararati).  1/2  grandeur  naturelle. 
18  :  albâtre;  —  fig,  319  et  32o  :  type  d'emmancliement. 


322 


Fig.  321  et  322.  —  Masses  d'albâtre.  1/2  grandeur  naturelle  (nécropole  d'El-'Amr-ih). 
Fig.  323.  —  Mode   d'emmanchement  des  masses  d'albâtre. 


1.  J.  de  Morgan,  Fouilles  à  Dnlichour  m  nS;)').  p.  io<),  fig.  254- 

2.  G.  et  A.  de  Morlillet,  Musée  préhislorii/ue,  pi.  LIII,no  500. 


144 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


-  --m 


Pilons.  —  Ces  instruments  (fig.  324)  furent  abondants  à  toutes  les 

époques,  on  les  retrouve  aussi  bien  dans 
les  stations  néolitliiques  que  dans  les 
ruines  de  basse  époque  et  ils  sont  encore 
employés  de  nos  jours  pour  piler  le  sel. 
Aux  mines  du  Sinai  les  ouvriers  en  fai- 
saient usage  pour  écraser  les  grès  tendres 
renfermant  les  turquoises. 


Moulins  a  bras.  —  L'usage  d'écraser  le 
grain  entre  deux  pierres  date  en  Egypte 
des  temps  les  plus  reculés  et  a  persisté 
jusqu'à  notre  temps  dans  la  Nubie.  Les 
restes  des  moulins  à  bras  sont  abondants 
dans  les  stations  préhistoriques  et  à  l'An- 
cien Empire  cet  appareil  était  courant. 
Une  statuette  de  bois,  découverte  dans  un 
mastaba  de  la  IIP  dynastie,  à  Dahchour 


Fig.  3?4-  —  Pilon   en  calcaire 

(kjœkkenmœddiners  de  Toiikh). 

1/2  grandeur  naturelle. 


Fig.  325.  —  Moulin  à  bras  (statuette  de  Dahchour,  III^  dynastie). 

(fig.  325)',  montre  une   personne  agenouillée  écrasant  du  blé  entre 
deux  pierres  taillées  à  cet  effet. 


I.   Fouilles  de   iSqS. 


I/IIOMME  NKOI.ITHTOrK 


145 


Coi.LiicHs.  —  Chez  les  auloclitonos  do  riii>ypte  la  parure  était  fort 
simple  :  elle  se  composait  de  colliers  et  de  bracelets  de  pierre  ou  de 
coquilles,  ou  du  moins  jusqu'ici  n'avons-nous  pas  encore  rencontré 
de  matières  j)récieusos. 

le  coquilles  de  mer  ou 


Les   colliers   sout  généralement   formés    de 


Fig.   326  et  327.  —  Colliers. 

Fig,  326  ;  collier  formé  d'oursins  fossiles;  —  Cg.  327  :  collier  en  perles  de  serpentine 

(nécropole  d'El-Toukh).  1/2  grandeur  naturelle. 


Fig.   33i  :  terre  cuite 


Fig.  32S  à  332.  —  IVtIcs. 

-  (Ig.   32S   à  33o   et   332    :    calcaire 

de  ïoukh).  1/2  grandeur  naturelle. 


blanc    (kjakkenmœdings 


d'eau  douce,  péchées  dans  le  Nil  ou  dans  la  mer  Rouge  ;  les  premières 
se  trouvaient  en  abondance  dans  les  marais  de  la  vallée,  les  secondes 
étaient  apportées  des  côtes'.  Il  esta  remarquer  que  parmi  les  coquilles 
servant  de  parure,  que  jusqu'à  ce  jotir  j'ai  rencontrées  dans  les  nécro- 


I.  Les  colliers  de  coquilles  rencontres  dans  les  tombes  préhistoriques  de  la  Haute- 
Egypte  sont  formés  des  espèces  suivantes.  Espèces  de  la  mer  Rouge  :  Conus  pusillus 
(Cliemn.),  Purpura  tuberculata  (Blainv.),  Nerila  polila  (Linné),  Sistriim  anaxares 
(Duel.).  Espèces  nilotiques  :  Un io  cf.  teretiiisculus  (IMiil,),  U,  jJ!gyptiacus  {Ver.), 
Ch'opalra  huUmoides  (Oliv.),  Liinnea  sp.  (cette  espèce,  voisine  de  la  L.  stagnalis  du 
sud  de  l'Europe  et  de  la  Syrie,  ne  vit  plus  aujourd'hui  dans  les  eaux  du  Nil  ;  quelques 
conchyliologues  supposent  qu'elle  s'est  éteinte  en  Egypte,  d'autres  qu'elle  a  été  im- 
portée). 


146  L'HOMME  NKOLITIIIQUE 

pôles  et  les  stations  |)réhistoriques,  il  n'est  pas  une  seule  espèce  ma- 
rine qui  appartienne  à. la  faune  de  la  mer  Méditerranée'. 

En  dehors  de  ces  ornements  de  coquilles  j'ai  trouvé  dans  la  station 
de  Toukh  deux  colliers  qui  méritent  d'être  signalés.  L'un  (fig.  326) 
est  composé  de  petits  échinides  fossiles  transformés  en  silex  et  qu'on 
rencontre  communément  dans  les  alluvions  voisines  des  affleure- 
ments crétacés;  ces  oursins  ont  été  percés,  puis  réunis  en  chapelet; 
l'autre  se  compose  (fig.  327)  de  neuf  petites  pierres  du  groupe  des 
serpentines,  taillées  et  polies  et  imitant  grossièrement  la  forme  des 
nérites  de  la  mer  Rouge. 

Dans  les  tombes  qui  signalent  le  passage  de  la  pierre  polie  aux 
métaux,  on  rencontre  aussi  parfois  quelques  perles  grossières  de 
cornaline,  mais  je  n'ai  que  très  rarement  trouvé  de  perles  d'émail, 
bien  qu'au  début  de  l'Ancien  Empire  ce  genre  d'ornement  fût  d'un 
usage  courant. 

A  Toukh  également,  et  dans  quelques  autres  localités  de  la  Haute- 
Egypte,  on  trouve  de  grosses  perles  faites  de  calcaire  (fig.  328,  329, 
330,  332)  ou  de  terre  cuite  (fig.  331). 

Bracelets.  —  Gomme  les  colliers,  les  bracelets  sont  fréquemment 
composés  de  coquilles  ou  de  perles  de  pierre,  mais  on  rencontre 
aussi  des  anneaux  taillés  d'un  seul  morceau  dans  le  calcaire,  l'albâtre 
(fig.  333),  la  nacre  (fig.  335),  le  schiste  ou  même  le  silex  (fig.  .334). 

Les  bracelets  de  silex  sont  à  coup  sûr  les  pièces  les  plus  curieuses 
du  préhistorique  égyptien,  et  l'on  se  demande  avec  raison  comment 
il  a  été  possible  de  tailler  par  éclats,  sans  briser  l'objet,  des  anneaux 
de  0",07    de  diamètre  extérieur  et  de  0°',005  seulement  d'épaisseur. 

En  examinant  avec  soin  un  de  ces  bijoux,  on  voit  que  l'ouvrier,  em- 
ployant une  lame  large  et  mince,  l'évida  en  son  milieu  à  l'aide  de  coups 
n'enlevantquede  fortpetits  éclats, qu'ilarronditl'extérieur  parlemême 
procédé  et  lui  donna  la  forme  circulaire.  Mais  la  grande  difficulté, 
semljle-t-il,  dut  être  de  percer  le  Irou  initial  au  milieu  de  la  lame,  et 
je  suis  porté  à  croire  que  ce  trou  fut  fait  par  usure  au  moyen  d'un 
bâton  pointu  et  de  sable  quartzeux. 

I.  J  ai  rencontré  dans  les  kjœkkcnmœddiugs  de  Toukh  les  mollusques  suivants  : 
Espèces  de  la  mer  Rouge  ;  Arabica  {Cyprxa)  reticulata  (Ginel.),  Nerita  [odontostoma) 
polita  (^Linnc),  Cadium  pomui»  [Linné),  Stromhus  fasciatus  (Bovn),  madrépores  et  po- 
lypiers. EspiiCEs  NiLOTFQUEs  :  Sputha  Ciiilliaadi,  Unio  JEgyptiacus  {Fer.),  U.  teretiuscu- 
lus  [VhW.],  Cleopatra  bulimoides  (OViw),  Etheria  Cailliaudi  (Fer.),  Paludina  unicolor^ 
Ces  coquilles  accompagnaient,  dans  les  kjœkkenmœddings,  les  débris  de  toute  nature 
parmi  lesquels  se  trouvaient  en  grande  abondance  les  os  brisés  de  boeufs,  d'antilopes, 
de  gazelles  et  de  ruminants  appartenant  à  un  grand  nombre  d'espèces.  Un  manche  d'ou- 
til était  fait  de  corne  de  rhinocéros. 


I/IIOMMK  NICOT.ITIIIQUE  i',7 

Quand  la  taille  du  bracelet  était  terminée,  l'ouvrier  polissait  la  sur- 
face externe,  laissant  aj)|)araître  à  l'intérieur  les  traces  du  dégrossis- 
sement. 

Ces  bracelets  sont  très  fragiles;  cependant  j'en  connais  un  certain 
nombre;  le  Musée  de  Guizehcn  possède  plusieurs,  M.  Amélineau  en  a 
rencontré  un  à  Abydos,  M.  U.  Bouriant,  directeur  de  l'Institut  fran- 
çais d'archéologie  orientale  au  Caire,  en  a  acquis  deux  dans  la  Ilaute- 


Fig.  333  à   335.  —  Bracelets  (fig    333 
silex  jaune,    nécropole    d'Abydos  :    - 
1/2  grandeur  naturelle 


3:î4  335 

albâtre,  nécropolo  dEl-'Amrah;    —  Cg.  33'|  : 
-   fig.    335   :  nacre,    nécropole  d'El-'Amrah). 


Egypte.  Tous  semblent  provenir  de  la  région  située  entre  Abydos 
et  Thèbes,  et  j'explique  ce  fait  par  la  présence  dans  les  montagnes 
de  ce  pays  de  silex  crétacé  d'une  qualité  parfaite  pour  la  taille. 


Fig.  336  à  342.  —  Peignes  d'os  et  d'ivoire  (fig.  330  :  kjœkkenmœddings  de 
Toukh  ;  Cg.  337  :  kjœkkenmœddings  de  Zawaïdali;  fig.  338  à  3/(2  :  nécropole  de 
Saghel-el-Baglieh,  Musée  de  Guizeli).  i/3  grandeur  naturelle. 

Nous  connaissons  en  Europe  un  grand  nombre  de  bracelets  de 
pierre  et  de  nacre;  on  m'a  signalé  des  anneaux  préhistoriques  de 
jade  découverts  à  Java'.  ^lais  je  ne  connais  pas  un  seul  bracelet  de 
silex  étranger  à  la  vallée  du  Nil,  et  ce  seul  fait  suffirait  pour  qu'il  soit 

I.  Collection  de  feu  A.  Daubrée,  inspecteur  général  des  mines,  membre  de  l'Aca- 
démie des  sciences. 


148 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


permis  de  considérer  les  autochtones  de  l'Egypte 
comme  les  plus  habiles  ouvriers  de  l'antiquité  dans 
la  taille  du  silex. 


Peignes.  —  Dans  les  nécropoles  de  Toukh,  Zawaï- 
dah,  Khattarah,  El-'Amrah,  Saghel-el-Baglieh,  etc., 
on  rencontre  souvent  des  peignes  d'ivoire  grossiè- 
rement travaillés  (fig.  336  à  343)  ;  ces  ornements 
affectent  des  formes  très  diverses  :  les  uns  sont 
munis  d'un  manche,  d'autres  sont  coupés  carrément, 
mais  la  plupart  portent  des  représentations  animales, 
telles  que  des  oiseaux,  des  antilopes,  etc.,  très  rudi- 


.1 


WS  347 

Fig.  345.  —  Pointe  en   bois  (kjoekkenmœddings 
de  ïoukh).  2/3  grandeur  naturelle. 
Fig.  34G  et  347.  —  Petites  cuillères  (fig.  346  :  nacre  ; 
lîg.  347  :  os,  Saghel-el-Baglieh).  2/3  grandeur  na- 
turelle. 

l'ig.  34^.  —   Pommeau   d'arme  en  ivoire  (Saghel-el- 
343    ^'  344  Baglich).  2/3   grandeur  naturelle. 

Fig.  343.  —  Peigne  en  ivoire  (nécropole  de  Saghel-el-Baglieh,  Musée  de  Guizeh). 

1/3  grandeur   naturelle. 

Fig.  344.  —  Épingle  eu  ivoire   (nécropole  de  Saghel-el-Baglieh,  Musée  de   Guizeh). 

2/3  grandeur  naturelle. 


i.'iioMMr:  m:()I, 11111(^)1  y.  l'.g 

ineiilairus  eL  qui   ne   pi'csciilciil   aucun  caraclcrc  coMiriiiin    avec   les 
Ibi-mes  les  plus  archaïques  de  l'art  éo-yptieu. 

Quelques  personnes,  qui  de  parti-pris  nient  l'existence  du  prdiis- 
lorique  égyptien,  s(!  trouvant  en  présence  de  semblables  (d)jels,  sont 
allées  jus(pi'à  prétendre  (pi'ils  apj)arlenaient  à  la  période  byzantine 
(copte),  mais  cetle  supposition  ne  mérite  même  pas  d'être  discutée, 
étani  données  les  conditions  si  |)récises  dans  lescpielles  on  rencontre 
ces  instruments. 

Épingles.  —  Ces  objets  sont  peu  communs  dans  les  nécropoles 
comme  dans  les  kjœkkenmœddings  ;  ils  sont  faits  d'os,  d'ivoire 
((ig.  344)  ou  de  bois  (fig.  345);  parfois  ils  sont  ornés  de  figurines  ani- 
males. 

Ob.iets  Divicus.  —Je  range  sous  cette  désignation  une  foule  d'objets 
communs  dont  l'usage  est  généralement  inconnu  ;  ce  sont  des 
coquilles  marines  et  des  coquilles  d'eau  douce  ',  de  petites  cuil- 
lères de  nacre  (fig.  346)  ou  d'os  (fig.  347),  des  pommeaux  d'armes 
en  ivoire  et  en  corne  de  rhinocéros  (fig.  348),  des  pieires  polies  sur 
une  face  et  comparables  à  des  brunissoirs,  de  petits  galets  de  corna- 
line ou  d'agate  polis,  des  fragments  de  minerais  parmi  lesquels  j'ai 
reconnu  de  la  galène,  des  carbonates  de  cuivre,  de  l'hématite  et  du 
fer  oligiste.  Ces  objets  se  rencontrent  dans  les  kjcekkenmœddings 
en  môme  temps  qu'une  énorme  quantité  d'os  brisés  et  fendus  pour 
en  extraire  la  moelle,  et  de  tessons  de  vases  appartenant  tous  à  la 
poterie  des  nécropoles  néolithiques. 

Figurines. — Dans  les  sépultures  des  autochtones,  on  ne  trouve 
jamais  la  moindre  trace  d'objets  ayant  quelques  rapports  avec  le  culte 
pharaonique.  Les  statuettes  et  les  divinités  funéraires  sont  rempla- 
cées par  de  grossières  figurines  représentant  des  animaux  et  taillées 
dans  un  schiste  verdàtre  dont  les  gisements  se  rencontrent  dans  la 
chaîne  Arabique. 

Ces  sculptures  (fig.  349  à  371),  très  rudimentaires,  représentent  des 
tortues,  des  poissons,  dont  les  yeux  sont  parfois  ornés  de  pierre 
dure  ou  de  nacre,  des  oiseaux  et  une  foule  de  signes  dont  l'origine  ne 
nous  est  pas  connue.  Il  semblerait  qu'ils  eussent  été  autrefois  consi- 
dérés comme  fétiches  ou  comme  divinités'. 


1.  V.  les  notes,  p.  73,  i!fô  et  146. 

2.  Nous  savons  par  ailleurs  qu  en  Europe,  à  l'époque  de  la  pierre  polie,  les 
croyances  religieuses  étaient  déjà  très  développées.  On  en  rencontre  des  traces  dans 
presque  tous  les  gisements  préhistoriques  de  la  Gaule. 

10 


150 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE 


Je  ne  niélendrai  pas  |)his  loiigueiiient  sur  les  traces,  que  nous  ren- 
controns dans  presque  loulcs  les  lombes,  de  croyances  religieuses 
chez  les  peuples  autochtones,  me  contentant  de  faire  observer  que 
ce  que  nous  en  connaissons  ne  présente  aucun  caractère  commun 
avec  la  religion  des  époques  ])haraoniques. 

Le  Musée  de  Guizeh  et  bien  des  collections  de  l'Europe  renfer- 
ment depuis  de  longues  années  des  représentations  animales  en 
schiste.  Quelques  égyptologues,  qui  se  croyaient  mieux  renseignés 
que  les  autres,  attribuaientà  la  XI''  ou  à  la  XXIIe  dynastie  la  plupart  de 
ces  objets,  mais  généralement  on  ne  s'en  occupait  même  pas.  Or,  c'est 


■-tW«lafeJL?_,J"' 


Kig.  349  :'i  371.  —  Figurines  en  schiste  (nëcropoles  d'El-'Amrali,  d'Abydos  et  de  ïoukh). 

i/io  grandeur  nalurelle. 

seulement  dans  les  tombeaux  des  autochtones  qu'on  les  rencontre; 
le  fait  ne  comporte  aucun  doute,  car  c'est  sous  mes  yeux  que  les 
découvertes  ont  été  faites,  et  je  dois  ajouter  ([ue,  même  dans  les 
tombes  les  plus  archaïques  de  l'Ancien  Empire,  jamais  je  n'en  ai 
rencontré  le  moindre  fragment. 

L'antiquité  très  reculée  de  ces  pièces  est  garantie  par  ce  que  je 
viens  de  dire;  elle  l'est  aussi  par  la  nature  même  des  objets  et  par  le 
travail  dont  on  retrouve  les  traces.  La  taille,  le  polissage,  les  gravures, 
])eu  nombreuses  d'ailleurs,  sont  obtenus  par  des  moyens  d'une 
grande  simplicité  et  les  outils  de  silex  taillés  étaient  bien  suffisants 
pour  l'exécution  de  ces  sculptures  rudimentaires. 

Dans  la  nécropole  de  Geljel-el-Tarif,  j'ai  rencontré  '  deux  repré- 
sentations en  calcaire  de  rhip|)opotame  (dg.  .372),  sculptures  très 
grossières   faites  en  usant  la  pierre,  et  une  statuette  de  terre  cuite 


I.   Fouilles  du  mois  de  mai  iSi)(). 


I,  iioMMi';  Ni:o[,rnii(,)ui'; 


i:>i 


(lig.  373)  d'un  personnage  assis.  Cette  curieuse  figurine  ne  rappelle 
que  (l'une  manière  bien  vague,  par  la  position  générale  du  corps,  les 
représentations  du  même  genre  qui  nous  sont  l'oui'nies  par  ri<]gyptc 
histori(|ue.  Elle  ligure  un  personnage  à  genoux,  les  bras  collés  au 
corps  et  les  mains  sur  les  cuisses. 


Fig.   372.  —  Figurine  d'hippopolnme  en  calcaire  (nécropole  de  Gebel-el-ïarif). 

4/5  grandeur  naturelle. 

Fig.  373.  —  Figurine  en  terre  cuite   jaune,  découverte  dans  la  nécropole 

de  Gebel-el-Tarif  (Musée  de  Guizeh).  4/-'>  grandeur  naturelle. 


CÉRAMIQUE.  —  Ce  sont  surtout  les  nécropoles  de  la  Haute-Egypte  qui 
fournissent  les  collections  céramiques  les  plus  importantes.  Parfois 
on  trouve  quelques  vases  archaïques  dans  les  kjœkkenmœddings  et 
des  fragments  dans  les  stations  préhistoriques.  Mais  il  est  souvent 
difficile  de  préciser  d'une  manière  certaine  l'époque  de  ces  objets  et 
il  serait  prématuré  de  baser  sur  leur  étude  des  conclusions  précises 
au  sujet  de  la  céramique  archaïque  en  Egypte. 

C'est  donc  des  vases  tirés  des  tombeaux  d'El-'Amrah,  de  Toukh  et 
d'Abydos  et  des  localités  voisines  que  je  parlerai,  de  ceux  qui  ont  été 
trouvés  en  ma  présence.  J'y  joindrai  la  description  de  quelques  pote- 
ries de  même  nature  renfermées  dans  les  vitrines  du  Musée  de  Guizeh 
et,  à  titre  de  comparaison,  les  vases  découverts  dans  les  mastabas  de 
Dahchour,  contemporains  du  roi  Snéfrou,  qui,  on  le  sait,  sont  les  plus 
anciens  spécimens  de  céramique  connus  dans  les  âges  historiques.  La 


J52 


T,  ROMMI-.  m:oi  riiiKM"!-: 


comparaison  (^ntre  les  vases  pn'historif|iies  el  ceux  apparlenanl  aux 
premières  dynasties  montre  quels  lurent  les  débuts  de  la  céramique 
en  Egypte  et  éloigne  de  l'esprit  toute  pensée  de  rapporter  les  tom- 
beaux des  autochtones  aux  périodes  historiques  postérieures  au 
début  de  l'Ancien  Empire. 

Les  matières  premières  pour  la  fabrication  de  la  poterie  en  Egypte 
sont  de  deux  natures  différentes';  on  peut  employer  les  limons  du  Nil, 
qui  fournissent  une  pâte  riche  en  sable,  ou  les  argiles  sédimentaires, 
qui  sur  bien  des  points  afileurent  dans  les  coteaux  '. 


Fig.  3-4  à  388.  —  Viises  en  lerre  (lig.  'i-!^  :  terre  rouge  lissée  (El-'Amrah);  lîg.  SyS  : 
terre  rouge  très  grossière  (Toiikhi;  fig.  Byt),  877  :  terre  rouge  lissée  (El-'Amrah); 
flg.  378  :  terre  rouge  grossière  (Er-Anirali)  ;  fig.  379,  38o  :  terre  rouge  lissée  (El- 
'Amrah);  fig.  38i  :  terre  noire  lissée  (Toukh)  ;  fig.  38a  :  terre  rouge  lissée  (Toukh)  ; 
lig.  383  :  terre  rouge  lissée  et  noire  à  rintérieur(El-'Anirah)  ;  fig.  384  ■  terre  rouge 
clair  lissée  (Toukh)  ;  fig.  385  :  terre  rouge  lissée,  noire  à  l'intérieur  (El-'Amrah); 
lig.  386  :  terre  rouge  très  grossière  (El-'Amrah);  fig.  386  liis  :  terre  rouge  lissée, 
noire  à  l'intérieur  (Toukh);  fig.  387  :  terre  rouge  lissée  (El-'Amrah);  fig.  388  : 
ferre  brune  très  grossière  (Toukh).  1/8  grandeur  naturelle. 

A  la  cuisson,  les  limons  du  Nil  donnent  des  poteries  jaunâtres  ou 
rougeâtres  suivant  la  température  a  latjuelle  la  terre  est  soumise.  Les 
argiles  sédimentaires  fournissent  des  pâtes  rouge  vif.  Quant  aux 
poteries  itruncs  ou  noires,  elles  ont  été  obtenues  en  mélangeant  à  la 


1.  Les  poteries  émaillées  appartiennent  toutes  aux  périodes  relativement  récentes. 
Leur  pâte,  d'après  les  analyses  de  M.  Le  Chatellicr,  contient  généralement  97  pour  100 
de  silice  et  3  pour  100  de  fer,  chaux  et  alumine. 

2.  11  existe  à  Assouan,  sur  la  rive  gaucho  du  Nil,  eu  face  de  l'ile  d'Eléphantiue,  de 
vastes  argilières  souterraines  creusées  dès  la  haute  antiquité. 


L'HOMME  m;oi  11  mon-: 


153 


p;\te  dos  matières  colorantes,  telles  ([iic  des  hioxvdes  de  manganèse 
dont  les  j^ilcs  naliiiuds  soni  ahoiidaiils  au  Sinaï.  Les  kaolins  gris  et 
blancs  ti'Assoiian  '  ne  semblent  jtas  avoir  elc  connus  dès  In  liant(!  nn- 
ti([uité. 


Fig,  389  à  !\i!\.  —  Vases  en  terre  {Cg.  389  :  terre  lissée  noircie  au  feu  (El- 
'Amrah);lig.  390  :  terre  rouge  clair  lissée  fToukh);  fig.  3c)i  :  terre  rougeàlre  (El- 
'Amrah)  ;  lig.  392  :  terre  bruue  grossière  (El-'Amrali)  ;  iig.  393  :  terre  noire  (El- 
'Amrah)  ;  fig.  394  :  terre  rouge  grossière  (El-'Amral  )  ;  fîg.  395  :  terre  rouge  lisse, 
noire  à  l'intérieur  (Toukli)  ;  fig.  396:  terre  rouge  (El-'Aiurah)  ;  lig.  397  :  terre  noire 
(El-'Anirah);  fig.  398  :  terre  rouge  lissée,  bords  noirs  (Toukii)  ;  fîg.  399  :  terre 
rouge  lissée  (El-'Amrah)  ;  fig.  4oo  :  terre  rouge  (EI-'Amrali)  ;  (ig.  /|oo  bis  :  terre 
rouge  (Toukli)  ;  Ug.  4oi  :  terre  rouge  lissée  à  bords  noirs  (Toukh);  fig.  40a  :  terre 
rouge  lissée  (El-'Auirali)  :  fig.  4o3  :  terre  rouge  (Toukh);  fig  4o4  '■  terre  rouge  à 
bord  noir,  fait  à  la  main  (El-'Amrah);  fig.  40.')  :  terre  rouge  lissée,  fond  de  vase 
coupé  (Toukh);  lig.  4oG  :  terre  gris  clair  (Zawaïdah);  fig.  407  :  terre  rouge  lissée 
(El-'Amrah);  fig.  4o8  :  terre  noire  (El-'Anirah)  ;  fig.  409  :  lerro  grossière,  fait  à  la 
main  (Toukh);  fig.  410  :  terre  rouge  lissée  (Toukh);  ilg.  4ii  :  terre  rouge  gros- 
sière (Toukh).  1/8  graudeur  naturelle. 

Les  figures  374  à  417  représentent  les  principales  formes  de  vases 
que  fournissent  les  nécropoles  des  autochtones.  Elles  sont  extrême- 
ment variées  et  quelques  rares  types  seulement  rappellent  de  loin 
les  vases  d'époqtie  [)liis  récente. 


I.  Les  gi'anils   décomposé.'^  qui   forment  les   collines  du  Chcllal,  en    face   de  Tile  de 
Sehel,  sur  la  rive  droite  du  Nil.  fournissent  dos  kaolins  d'assez  médiocre  ipialllé. 


154 


LHOMME  NEOLITHIQUE 


Ce  qui  domine  surtout  dans  les  tombeaux  archaïques,  c'est  la  pote- 
rie grossière  (fig.  415  à  422),  dont  la  pâte  serait  bien  dit'licile  à  dis- 


Fig.  4i5  •'  h'i'-i-  —  Vases  en  terre  grossière  (fig.  !^lG,  418,  4iy>  42i  :   nécropole 
d'EI-'Amr.ili  ;  (ig.   !^^^,  417.  420,  422  :   nécropole  de  Toukh). 


I,  IIOMMK  iNEOIITIIloll'; 


155 


lingLicr  (le  cclh!  des  vases  de  même  naliirc  ([u'oii  i-eii(onlr(;  dans  les 
maslabas  des  débiils  de  l'Ancien  Empire  (li^-.  423  à  450).  Ces  jarres 
sont   rangées  en  grand   nondirc  autour  du  nn)rl;   elNîs  renfermaient 


■i2« 


429 


42(1 


Fig.  42'î  à  4^'-  —  Vases  eu  terre  grossière  des  masUibiis  île  la  iiécn)|)ole  de   Dahclii 
(IIP  dynastie).  'ViS  grandeur  iiaturello. 


15  G 


I,  lIOMMli   XKOMTIlIQn- 


jadis  de  l'eau,  des  cendres  ou  de  la  iariiie,  et  semblent  avoir  été 
affectées  aux  mêmes  usages  que  celles  ([u'on  trouve  dans  les  sé- 
pultures des  premières  époques  hislori((ues. 

Dans  ces  mêmes  tombeaux  on  rencontre  également  des  urnes  et 


43» 


437 


Fig.  /l'ia  :'i  f\f\o. —  Vases  on  terre  grossière  des  mastabas  de  la  nécropole  de  Uahrhoiir 
(111°  dynastie).  a/i5  grandeur  naUirellc. 


I,  IHi.MMK   M'.OI.n  IIHH  H 


157 


(les  vases  île    loiiles  les   formes,  en  lerre   roiinc',   soil  sirii|)leiiieiiL 
lissée  (fig.  451  à  460),  soit  eoloive  sur  1rs  bords  en  noir  (lig.  'i<il   a 


4i4 


445 


446 


447 


448 


449 


Fig.  44'  •"'  449-  —  Vases  en  terre  grossière  des  mastabas  de   la  nécropole  de  Ual 
(III"  dynastie).  3/?,o  grandeur  uatnrelle. 


I.  M.  le  Dr  U.  Fouquet  m'a  communiijué  Irois  petits  vases  eji  terre  rouge  prove- 
nant de  la  Haute-Egypte  ot  qui,  bien  qu'appartenant  il  l'époque  historique,  rentrent 
dans  le  type  des  poteries  archaïques.  Deux  de  ces  vases  figurent  des  femmes  portant 
sur  leur  dos  un  enl'anl,  l'autre  représente  une  antilope.  La  facture  en  est  très  grossière 
et  tendrait  à  prouver  la  persistance  des  formes  archaïques  pendant  les  âges  pharao- 
niques. Ces  vases  semblent  devoir  être  attribués  au  Moyen  Empire. 


15K 


1,'HOMME  NÉOLITHIQUE 


480  et  pi.  ]).  Ces  deux  dernières  variétés  auraient,  paraît-il,  été  encore 
en  usage  vers  le  milieu  du  Moyen  Empire,  car  les  poteries  de  cette 
nature  conservées  au  Musée  de  Guizeh  sont  étiquelécs  comme  appar- 
tenant à  la  XP  dynastie. 


"^^^ 


Fig.  45o.  —  Pctils  vases  en  terre  grossière  découverts  dans  les  mastabas  de  l'époque 
de  Snofroii  (III"  dynastie)  à  Dalichour.  2/3  grandeur  naturelle. 


Je  donne  sous  toutes  réserves  cette  appréciation  des  personnes  qui 
ont  déposé  ces  objets  au  Musée  de  Guizeh,  cardans  les  nombreux 
tombeaux  du  Moyen  Empire  qu'il  m'a  été  donne  d'explorer,  je  n'ai 
jamais  rencontré  de  céramique  de  ce  genre. 


Planche  I , 


'fi  ff  I. 


I  r 


'.'y.'V 


iir 

'".*Tt  4 


i 


^ 


^M. 


CÉRAMIQUE 

N°-'I  et  2  ,  Abydos  ,  N"'-'3,4-,5  et  6,El'Amrah 

N?7,  Khattarah . 


/at/',  Man»0C9 .  "AIHt 


Planche  II 


_JM-. 


CÉRA7VUQU£ 

Gébeleïn. 


tMf.MONneet.rA»tt. 


Planche  111. 


CÉRAMIÇUE 
N?l,2  et  3  .  Gébeleïn-,  N°  4,5  et6,El'Amrali. 


JIVL^ 


^.j>tanncc»f*»'S. 


1, HOMME  Ni:oi.riiii()ri': 


ir,<) 


Les  vases  de  tiîrre  rouge  soiil  parfois  ornés  de  dessins  peints  en 
blanc  et  représcnlanl  soit  des  lignes  géométriques  (pi.  II,  lig.  2, 
3  et  4;  pi.  111,  lig.  'i,  5  et  6),  soit  des  animaux  (pi.  II,  lig.  1  et  5; 
pi.  III,  fig.  2  et  3),  soit  des  personnages  (pi.   111,  fig.  1).  Ces  pein- 


tures sont  très  grossières. 


Fig.  45i  à  i(>o.  — Vases  en  terre  rouge  lisse  (nécropole  d'El-'Amrah).  i/ia  grandeur 

naturelle. 


Fig.  46i  à  /iyo.  —  Vases  en  terre  rouge  lisse  avec  bords  noirs  (nécropole  d'El-'Amrah). 

2/i5  grandeur  naturelle. 

Sans  contredit,  la  céramique  la  plus  intéressante  des  temps  préhis- 
toriques en  Egypte  est  la  classe  des  vases  jaunes  ornés  de  peintures 
rouges.  Ces  poteries  sont  fort  abondantes  dans  les  nécropoles  d'A- 
bydos,  de  Toukh,  d'El-'Amrah,  de  Gebel-el-Tarif,  de  ZaAvaïdah,  etc. 


IGO 


LHOMME  NEOLITHIQUE 


Elles   allecleut  les  formes  les  plus  diverses  (pi.  IV  à  X)  et  parfois 
même,  mais  plus  rarement,  représentent  des  animaux  (fig.  481). 
Les  vases  de  ce  genre  les  ])lus  aliondants  sont  tiès  larges  et  bas; 


i7S 


Eig.  /171  il  l\^o.  —  Vases  en  terre  rouge  avec  bord  noir  (fig.  471  i  47^>  kl'^  ■'  477> 
479  el  480  :  nécropole  de  Toukh;  fig.  474  '■  kjœkkeumœddings  de  Toukli;  fig.  478  : 
kjirkkeiiniœddings  de  Khattarnh).  '^|•>J\  grandeur  naturelle. 


Fig.  481.  —  Vase  en  terre  jaune  orné  de  peintures  rouges  (nécropole  de  Gebel-el-Tarif, 
Musée  de  Guizeli).  ;!/5  grandeur  naturelle . 


ils  portent,  peints  en  rouge,  des  ornements  très  simples,  tels  que  des 
spirales, des  lignes  brisées  ou  ondulées, des  palmes,  etc.,  et  quelque- 
fois aussi  des  animaux  ("pi.  ^^  fig.  3),  gazelles  ou  autres.  Les  vases  de 


-JM^ 


CÊRA^AIQUE 
N°let2,ErAmrah;    N°3,Abydos. 


^ 


Plar,cT-ie  V. 


JNL 


CÉRAMIQUE 
N?l  et  2,  £  l 'Amrah ,    N?  3 ,  Abydos . 


Planche  VI. 


y>c_ 


;*».  «n««o(j  r»*jt 


CÉRAMIQUE 

N"letitJoulch;N°'  2,5.5,6,7et8,ErAiiirah. 


Planche  Vil. 


_yA{_ 


CÉRAMIQUE 
N"Iet2,Tou]<h;N-3el/t,ErAmrah. 


'    fAMMBC*.  ^«n* 


Plan  crie  '/in. 


yiVL_ 


CÉRAMIQUE 

N°  1 , Abydos  ;  N°  2 .  Gébelem . 


Planche  IX. 


lia 


yML. 


CÊRA^\IQUE 
N"l  et  3 ,  Haute  Egypte ,  N?2,  Gébelein. 
N"  4,  Localité  inconnue. 


CE]. 
N°l,  Localité  incoii 


Planche  X 


MIQUE 
ue;N"2et3.Abydos. 


^M^ 


iMfi.  MOftMûp  . 


1,'IIOMMH  MCOI.I  Tlllini'. 


ini 


lorino  (liircr<'nl(;  sont  niissi  oiiirs  de  dessins  du  im-me  «^^eiirc.  Dans 
toutes  CCS  peintures  on  reeonnail  l(>  niènic  ^oùt  artistique,  les  mêmes 
traditions. 

Une  grande  urne,  découverte  à  Ahydos  et  exposée  dans  la  salle  de 
la  Céramique  au  Musée  de  Gui/.eli,  i)résenle  des  représculalions  très 
compliquées  ipl.  X).  Deux  l)ai'(|ues  se  suivent,  sépai-écs  entre  elles 
par  des  autruches  et  de  petits  trianolcs,  des  antilopes  courent  ça  et 
là  dans  le  champ  des  tableaux.  Les  harcpies  sont  munies  de  leurs 
avirons  et  portent  à  la  proue  des  palmes;  en  leur  milieu  s'élèvent 
deux  pavillons  carrés  sur  lescpicls  se  tiennent  des  hommes  armés  de 
bâtons  et  des  femmes  <lansant. 

Cette  curieuse  peinture  ne  renferme  pas  un  seul  signe  hiérogly- 
phi(|ue.  pas  un  seul  détail  qui  puisse  faire  songer  aux  arts  égyp- 


\ç^- 


Vis.  '|N'.'.  ot  '|S3 


—  Fraguiculs  do   v^ises  (I<j(rkl<ciinueddings  do  Toiilili).    i/'J 
naturelle. 


grandeur 


Fig.  '(84  à  /|(Sf).  —  Objets  divers  en  terre  cuile  (fig.  484  et   4S5  :   Icjœlikenmœddings 
de  Toiikti;  fig.  4'*'''  :  nécropole  d'El-'Anirah).   i/a  grandeur  naturelle. 

tiens.  Elle  est  entièrement  originale  et  semble  avoir  été  exécutée  par 
des  hommes  qui  n'avaient  rien  de  commun  avec  ceux  qui,  plus  tard, 
leur  succédèrent  dans  la  vallée  du  Nil. 

C'est  seidement  en  Haute-Egypte  quej'ai  rencontré  les  vases  jaunes 
ornés  de  peintures  rouges,  mais,  de  même  que  les  poteries  gros- 
sières sont  communes  au  nord  et  au  midi  de  l'Egypte,  de  même  j'ai 
trouvé,  dans  les  kjœkkenmœddingsde  Toukh,  un  fragment  de  vase  de 
terre  brune,  plus  soigné  que  ne  le  sont  en  général  les  terres  de  ce 
genre,  présentant  idcnti([uement  les  mêmes  caractères  qu'un  plat 
découvert  dans  un  mastaba  de  la  III''  dynastie,  à  Dahchour. 

Ces  deux  poteries  sont  eu  terre  noire  assez  grossière  ;  les  ornements 
ont  été  gravés  à  la  pointe  profondément,  puis  remplis  d'une  pâte 
blanche.  Le  vase  de  Dahchour  (pi.  XI)  est  couvert  d'arabesques,  le 
fragment  de  Toukh  (lig.  482)  est  orné  de  dents.  Mais  dans  les  deux 
cas  le  procédé  d'exécution  est  le  même. 


i 


ir,2 


r/lIOMME  M^OIJTHIQl'E 


Jamais  on  n'a  rencontré  de  vases  de  ce  genre  dans  les  tomlieaiix 
postérieurs  au  début  de  l'Ancien  Empire,  jamaisnon  plus  onn'a  trouvé 
de  céramique  présentant  quelque  analogie  avec  les  pâtes  jaunes  à 
peintures  rouges,  tandis  que,  dans  les  tombes  préhistoriques,  cette 
dernière  classe  surtout  est  fort  abondante.  Nous  devons  donc  admettre 
que  cette  catégorie  de  vases,  très  usitée  par  les  autochtones,  cessa 


^IJ^r^ 


Fi^.  fff'fj .  —  Craffiii  gravés  sur  les  rochers  de  Gebel-Heteinat  (Haule-Égypte). 
{Découverts  et  dessillés  par  M.  G.  Legrain.) 


Fig.  'iSS.  —  Craffili  gravés  sur  les  rochers  :  ii»'  2J,  'îG,  !4()  et  3S.  KhÔÈ--es-Sahiii 
les  autres  numéros,  El-H6sch.  (Décoin'erts  et  dessinés  par  M.  <:.  Legrain.) 


d'être  employée  quand  les  Égyptiens  pharaoniques  eurent  étendu  à 
toute  l'Egypte  leur  civilisation  et  leurs  arts. 

Peut-être  certains  potiers  continuèrent-ils  encore  longtemps  après 
la  conquête  leurs  méthodes  de  fabrication;  la  tradition  ne  s'éteignit, 
bien  certainement,  pas  d'un  seul  coup  chez  les  autochtones;  aussi 


I,  iioMMi';  MXJMTiiiQn': 


1(53 


sotnmes-nous  exposés  à  ronconlrer  des  spcciincns  ilc  la  cciaiiii(|iie 
archaïque  dans  des  tombeaux  datés  de  l'époque  historique,  à  voir 
figurer  dans  l'ornenientalion  des  vases  au  type  autochtone  desincrip- 
tions  hiéroglyphiques.  Mais  ces  découvertes  n'infirmeraient  en  rien 
les  résultats  de  mes  dernières  fouilles. 


a  ^ 


A- 


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,n 


^ 


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"ItT 


^^^è» 


Fig.  489.  —  Graffiti  gravés  sur  les  rochers  :  n°'  i  à  7,  à  Raoualièh  ;  n°"  8  à  i\,  à  Gebel- 
Rechidi  ;  n"'  i.'i  à  25,  à  El-Hôsch  (Haute-Egypte).  [Découverts  et  dessinés  par  il.  G. 
Le  grain.) 


Fig.  490.  —  Graffiti  tracés  sur  les  rochers  de  Gebel-Hetemat.  (Découverts  et  relevés 

par  M     G.  Legrain.) 


Les  figurations  humaines  et  animales  que  portent  les  vases  ar- 
chaïques font  penser  aux  nombreux  graffiti  sans  inscriptions  que 
portent  les  rochers  de  la  Haute-Egypte.  M.  C>.  Legrain,  inspecteur  du 
Service  des  Anticjuités,  en  a  découvert  un  grand  nombre  dans  son 
exploration  du  désert  entre  Edfou  el   Silsilis    J'en  donne  quelques- 


165 


L'IIOMMI'    XKOlJTinoUE 


uns  afin  de  permettre  les  comparaisons  (tig.  487  à  492)    e„  faisant 
obse™  touteibis  c,ne  beaucoup  de  ces  devins  appartiLnl.f  ^  1 
poque  h.stonque,   certains  même  sont  accompagnés  d'inscriptions 
canennes,  ma.s  que,  bien  certainement,  il  en  eit  d'antérieurs"  î'. 
vee  des  Egyptiens  pharaoniques  dans  la  vallée  du  Nil. 


Kig.  4f,r.  —  Craffiti  gravés  sur  les  roeliers  •  n»=  i  à  8   ,Ip  T»),»!  m     -i  .    r. 


Fi 


g-  49 


/in'>. 


r;™/A"  g>-avés  sur  les  rochers  de  Chalt-el-Rigal  (Haule-Égyple) 
{Decoiiv,'i-ts  et  dessinés  pu,-  M.  G.  Legrain.)  SyP'^'-j 


Je  n  insisterai  pas  plus  longtemps  sur  la  céramique  archaïque  en 
Egypte  ;  les  iaits  que  je  viens  d'exposer  sont  nouveaux  pour  la  science 
et  ce  n  est  pas  au  moment  même  où  ils  viennent  d'être  découverts 
qu  il  serait  prudent  de  pousser  plus  loin  les  considérations  de  détail 
et  les  déductions, 


Fig.  493  à /,,j(; 

lig.  494  :  terre  brune  foncée 


i<H  495 

Fusaïoles   (dg.  4,,3    :    fragmenl    de    vase   en   terre    très   grossière- 

-ouge  orné   d'un    Zj^Z^-^^^'u^^'^^â'^    ^''  '  '''^T'  ''  ^"^"^ 
jaunes,   kja.kkenn.œddings  de  fouk^i!).  i/B  gf'd'u.  IXell  °'''"   ''"  ''""''"''' 

Fusaïoles.  —  Un  trait  caractéristique  des  nécropoles  archaïques 
et  des  kjœkkenmœddings,  est  la  présence  d'un  grand  nombre  de  fu- 
saïoles, so.t  faites  de  terre  et  peintes  (fig.  494),  soit  simplement  tail- 
lées dans  un  fragment  de  vase  (fig.  493,  495,  496).  Les  fusaïoles, 
SI  abondantes  dans  les  stations  autochtones,  font  absolument  défaut 
dans  les  ruines  d'époque  historique.  Elles  correspondaient  à  des  be- 


PI  anche  XI 


^M_ 


CÉRAMIQUE 
Vase   décotiverL  dans   xm  Mastaba 
de   Tépoque  du  roi    Snéfrou  (  niUynastie) 


'M^.  *'OJv»ocp  ^*^'a 


L'HOMME  NÉOLITHIQUE  1(35 

soins  fini  cessèrent  d'exister  vers  l'époque  de  l'apparition  des  mé- 
taux-. Il  est  intéressant  d'observer  à  ce  sujet  que  les  fusaïoles  sont 
fort  communes  dans  les  stations  préliistoriques  de  l'Europe  et  de 
l'Asie,  et  que,  dans  ces  régions,  leur  usage  s'est  perpétué  jusqu'à 
l'âge  du  bronze  et  parfois  aussi  du  Cor. 

Vases  de  piehre.  -  Toutes  les  collections,  publiques  ou  privées, 
renferment  en  grand  nombre  des  vases  de  pierre  égytiens,  mais  dans 
la  plupart  des  cas  on  ne  connaît  ni  l'époque,  ni  la  localité  de  ces  ob- 
jets. On  admet  généralement  que,  depuis  les  premiers  temps  de  l'An- 
cien Empire  jusqu'au  règne  des  Ptolémées,  leur  usage  fut  constant 
en  Egypte  et  j'ai  moi-même  constaté  ce  fait  en  mainte  occasion. 

Toutefois,  mes  observations  m'ont  amené  à  conclure  que  c'est  sur- 
tout aux  âges  les  plus  reculés  que  ces  sortes  de  vases  furent  le  plus 
employés,  c'està  Toukh,  Zawaïdah,  El-'Amrah,  à  Abydos,  et  plus  com- 
munément encore  à  Gebel-el-Tarif,  qu'on  les  rencontre  en  plus  grand 
nombre.  Dans  la  partie  méridionale  de  la  nécropole  d'Abydos,  aux 
alentours  des  tombes  archaïques  découvertes  dernièrement  par  M.  E. 
Amélineau,  les  débris  de  vases  de  pierre  sont  d'une  abondance  ex- 
trême, et  sur  l'autre  rive  du  fleuve,  à  Gebel-el-Tarif,  presque  chaque 
sépulture  en  renferme  plusieurs. 

Que  l'usage  de  ces  vases  se  soit 
continué  à  travers  les  âges,  j'en  suis 
certain,  mais  aussi  je  pense  que  c'est 
aux  autochtones  que  sont  dus  les 
premiers  essais  de  cette  fabrication. 
La  méthode  employée  par  les  ou- 
vriers, et  figurée  sur  les  mastabas 
(fig.  497),  est  d'une  telle  simplicité 
qu'il  n'était  pas  nécessaire  d'être  en 
possession  des  métaux  pour  la  dé- 
couvrir. 

Le  Musée  de  Guizeh  possède  une  série  très  nombreuse  de  ces  vases, 
mais  dans  la  plupart  des  cas  leur  époque  est  indécise.  Il  est  cependant 
aise  de  remarquer  quelles  sont  les  formes  les  plus  anciennes  et  de  les 
distinguer  de  celles  appartenant  au  Moyen  et  au  Nouvel  Empire. 

Dans  mes  dernières  fouilles  en  Haute-Egypte,  à  El-'Amrah  entre 
autres  {hg.  498  à  502),  j'ai  rencontré  un  assez  grand  nombre  de  vases 
de  pierre  dure,  dans  des  sépultures  ne  renfermant  que  des  instru- 
ments de  silex,  et  tout  récemment,  à  Gebel-el-Tarif,  en  face  d'Abydos, 
on  en  a  découvert,  dans  des  fouilles  exécutées  sur  mes  ordres,  une 
série  considérable  dans  les  mêmes  conditions. 

11 


Fig.  /l97.  —  Bas-relief  du  tombeau 
de  Mera,  à  Saqqarali,  représeulant 
la  fabrication  des  vases  de  pierre 
(VI«  dynastie). 


166 


L'HOMME  NEOLITHIQUE 


Je  ne  veux  pas  dire  que  tous  les  vases  qu'on  rencontre  dans  les 
sépultures  des  autochtones  soient  antéhistoriques ,  car  bien  des 
tombes  renferment  des  objets  de  bronze  en  même  temps  que  des 
vases  de  pierre,  mais,  parmi  les  sépultures  antérieures  à  l'arrivée  des 
Éo-yptiens  pharaoniques,  il  en  est  beaucoup  qui  contiennent  dés  vases 
de  cette  nature. 


iSOb 


Fig.  ^98  à  502.  —  Vases  do  pierre  (nécropole  d'El-'Amrali). 

Quant  aux  matières  employées  pour  leur  fabrication,  elles  sont  très 
nombreuses;  seule  la  nécropole  de  Gebel-el-Tarif  en  a  fourni  en 
schiste  et  en  grès  siliceux,  en  diorite,  en  basalte,  en  serpentine,  en 
brèche  calcaire  ou  siliceuse,  en  granité,  en  albâtre,  etc.  La  dureté  de 
la  matière  n'effrayait  donc  pas  les  tourneurs,  et,  de  môme  que  les 
tailleurs  de  silex  parvenaient,  avec  les  moyens  les  plus  simples,  à 
faire  un  bracelet  de  silex,  de  môme  les  artisans  des  vases  creusaient 
les  roches  les  plus  dures. 

Pour  bien  des  personnes,  le  mot  préhistorique  est  sj'nonyme  de 
barbarie  complète,  de  civilisation  rudimentaire,  d'ignorance  absolue. 
On  croit  volontiers  que  l'homme  sans  le  secours  des  métaux  ne  put 
jamais  faire  de  grands  progrès,  et  c'est  cette  erreur  qui,  dans  bien 
des  cas,  a  fait  attribuer  aux  temps  historiques  des  objets  fabriqués 
aux  âges  préhistoriques  :  on  les  trouvait  d'une  exécution  trop  parfaite  ; 
ils  ne  portaient  pas  les  traces  de  l'industrie  rudimentaire  qu'on 
accorde  généralement  aux  temps  néolithiques.  Et  cependant  il  n'est 
pas  besoin  de  remonter  jjien  loin  dans  l'histoire  pour  trouver  des 
peuples  très  avancés  dans  la  civilisation,  bien  que  ne  possédant  pas 
les  métaux.  L'Amérique  centrale,  le  Pérou,  le  Chili  n'étaient-ils  pas, 
longtemps  avant  la  conquête  espagnole,  des  pays  d'une  civilisation 
très  avancée?  Le  Mexique  ne  possédait-il  pas  ses  annales  écrites,  sa 
littérature,  son  architecture  et  tous  ses  arts?  Pourquoi  refuserions- 
nous  aux  hommes  qui  précédèrent  les  Egyptiens  dans  la  vallée  du 
Nil,  des  notions  que  d'autres  peuples  purent  acquérir  en  se  dévelop- 
pant sur  eux-mêmes?  Pourquoi  enfin  chercherions-nous  à  faire  ren- 


L'HOMMIÎ  NKOlJTllIQUi;  iC,7 

trer  dans  le  cadre  étroit  de  nos  connaissances  actuelles  les  phéno- 
mènes que  nous  ne  savons  comment  expliquer?  Mieux  vaut  chercher 
à  élargir  ce  cadre,  car  ce  que  nous  savons  aujourd'hui  est  bien  peu  de 
chose  en  comparaison  de  ce  qui  a  existé.  11  est  irrationnel  d'ad- 
mettre que  rÉgyptieu  fut  le  premier  homme  qui  vécût  dans  la 
vallée  du  Nil,  qu'avant  lui  le  pays  était  inhabité:  une  telle  supposi- 
tion est  contraire  aux  lois  générales  de  la  nature.  On  a  nié  la  présence 
d'un  Age  de  pierre  en  Egy|)te,  j'espère  avoir  prouvé  que  non  seule- 
ment il  a  existé,  mais  qu'il  a  joué  un  très  grand  rôle  dans  la  civilisa- 
tion pharaonique  elle-même. 


CHAPITRE    VI 
La  vallée  du  Nil  lors  de  la  conquête  égyptienne. 


Sinous  nous  en  rapportons  aux  chronologies  généralementadmises, 
c'est  au  xLvni"  siècle  avant  J.-C.  que  Menés',  le  premier  roi  de  la 
I"  dynastie,  prit  le  pouvoir  en  Egy[)te.  Or  devons-nous  considérer 
ce  souverain  comme  ayant  opéré  par  lui-même  la  con((Liôte  de  la 
vallée  du  Nil,  ou  nous^est-il  permis  de  supposer  que  ce  sont  les  rois 
des  dynasties  dites  divines  qui  s'emparèrent  de  l'Egypte,  et  que  ^lenès 
fut  le  premier  qui,  centralisant  dans  ses  mains  tous  les  territoires, 
devint  réellement  souverain  d'un  pays  que  ses  congénères  occu- 
paient depuis  déjà  des  milliers  d'années  ? 

Dans  la  première  hypothèse,  l'arrivée  des  Egyptiens  sur  les  bords 
du  Nil  remonterait  à  soixante-huit  siècles  environ.  Dans  la  seconde 
il  faudrait  la  reculer  jusqu'à  dix  mille  ans  au  moins. 

Or  depuis  dix  mille  années  la  vallée  du  Nil  a  singulièrement  changé 
d'aspect.  Le  lit  du  (leuve  s'est  relevé  de  10  mètres  environ,  les  marais 
latéraux  se  sont  comblés  peu  à  peu  et  le  delta  est  en  grande  partie 


I.  11  est  difficile  ,  étant  donné  l'état  actuel  de  la  science,  de  fixer  exactement  la  date 
du  début  de  la  monarchie  égyptienne.  Les  appréciations  des  savants  qui  ont  étudié 
la  question  ne  concordent  guère  les  unes  avec  les  autres  et  nous  donnent  même  des 
écarts  de  plus  de   deux  mille  ans  : 

Champollion-Figeac,  Egypte  ancienne 5867 

Mariette .     .     .      , 5oo4 

Pétrie,  History  of  Egypt ...     4777 

Brugsch,  Geschichte  jEgyptens  .....  ...  ...     44oo 

Lauth,  Aus  Xgyptens  Vorzeit    ....  l\iij 

Lepsius,  Chronologie  des  JEgypter 38g2 

Meyer,  Geschichte  des  alten  JEgyplens  .      .     3 180 

Bunsen,  Mgypiens  Stelle  . 3o5c) 

Comme  Cliabas  {^Etudes  sur  l'antiquilé  historique,  p.  iG),  qui  lait  remonter  Menés 
au  delà  du  .XL' siècle,  nous  croyons  préférable  de  ne  pas  préciser  davantage  et  de  placer 
la  I"  dynastie  égyptienne  entre  5ooo  et  45oo.  —  [G.  .T.] 


170 


LA  VALLKE  DU  NIL 


sorti  des  eaux;  la  faune  et  la  flore  se  sont  également  modifiées,  et  le 
climat  lui-même  a  peut-être  changé  dans  des  conditions  qu'il  est  bien 
difficile  d'apprécier  aujourd'hui. 

Abandonné  à  lui-même,  le  Nil,  capricieux  dans  son  cours,  flottait 
encore  entre  les  deux  coteaux  qui  le  bordent,  tantôt  coulant  sur  une 


Fig.  5o3  ù  Soy.  —  Oiseaux  égyptiens   figurés  sur  les  hiéroglyphes  dos  fresques 

de  Meïdoum  (III"  dynastie). 

Fig.  5o8.  — Scène  de   chasse  au  boumerang  dans  les  marais.  Bas-relief  du  tombeau 

de  Mera,  à  Saqqarah  (VI<^  dynastie). 


rive,  tantôt  se  portant  sur  l'autre,  comblant  les  marais  d'un  côté,  en 
creusant  d'autres  par  ailleurs,  et  chaque  année,  lors  des  hautes  eaux, 
modifiant  du  lout  au  tout  les  conditions  d'équilibre  de  la  saison  pré- 
cédente. 


LOHS  DE   LA  CONQUÊTE  ÉGYPTIENNE 


171 


Les  pays,  inondés  en  été,  conservaient  pendant  le  reste  de  l'année 
l'huniidilc  nécessaire  à  la  croissance  des  arbres,  et  des  forêts,  épaisses 
par  places,,  clairsemées  en  d'autres,  souvent  déracinées  sur  bien  des 


Fig.  Sog.  —  Le  bétail  à  l'Ancien  Empire   :  antilopes.  Bas-relief  du  tombeau  de  Mera, 

ù  Saqqarah   (VI°  dynastie). 

points  par  la  violence  des  eaux,  couvraient  la  majeure  partie  des 
terres  émergeant  des  marais  '. 


I .  Le  professeur  Schwcinfurth  est  d'avis  qu'autrefois  l'Egypte  était  couverte  de  la 
même  végétation  que  nous  rencontrons  aujourd'hui  sur  le  haut  Nil,  très  en  amont  de 
Khartoum  {Bull.  Inst.  égyptien,  19  déc.  iSyS,  p.  200).  Il  croit  que  le  climat  de  l'E- 
gypte se  modifia  peu  à  pou  et,  s'éloignant  des  climats  tropicaux,  se  rapprocha  de  celui 
des  pays  méditerranéens.  Les  plantes  dont  la  culture  s'est  perpétuée  dans  l'Egypte, 
sont  celles  qui,  spontanées  autrefois,  ont  été  conservées  comme  plantes  utiles  (Georgio 
Schweinfurth,  Le  piante  ulili  delVEritrea,  dans  BoU.  Soc.  Africana  d'Ilalia.  Neapoli, 
iSgr).  Il  est  intéressant  de  citer,  d'après  Schweinfurth,  quelques-unes  des  plantes  les 
plus  remarquables  de  l'Egypte  antique  ou  moderne  : 

Acacia  nilotica  (saut  des  Arabes).  Croit  sponlauémeut  sur  le  Nil  Blanc,  où  il 
forme  des  forêts.  En  Egypte,  il  ne  croît  qu'autour  des  habitations. 

Lablab  vulgaris.  Légumineuse.  Croît  spontanément  sur  le  Nil  Blauc  et  le  Nil  Bleu. 

Dolichos  liiliia.  Croît   spontané  dans  l'Afrique  centrale. 

Vigna  sinensis  (haricot  de  Chine).  Abondant  en  Afrique  centrale  où  il  croît  sponta- 
nément. Spontané  en  Asie  iutertropicale, 

Cajanus  flaviis  (^cayaa  des  Arabes).  Spontané  sur  le  Nil  Blanc  et  dans  les  pays  des 
Nègres. 

Chorchorus  tAitoriiis  (mcloukhieh  des  Arabes).  Croît  spontané  dans  les  forêts  de 
l'Afrique  tropicale,   au-dessus  du  12°  degré  de  latitude  nord. 

Ricinus  cownM/Hs. -Spontané  en  Afrique  centrale,  abondant  eu  Egypte  où  il  est  d'o- 
rigine très  ancienne. 

Hibiscus  cannabinus.  Spoiila.aé  en  Afrique  centrale,  cultivé  en  Egypte  pour  la  fabri- 
cation des  cordes. 

Abelmoschns  esculentus  (bahmia).  Spontané  dans  les  steppes  qui  bordent  le  Nil 
Blanc  au-dessus  du  12"=  degré  de  latitude  nord;  le  bahmia  est  un  des  témoins  les  plus 
caractéristiques  de  l'ancienne  végétation  de  l'Egypte. 

Ziziphus  spina  Christi    (nebek  de  l'Egypte). 

Ciirulus  vulgaris  (pastèque).  Sauvage  au  Khordofàn,  sur  le  Nil  Blanc  et  chez  les 
Niam-Niams. 

Cucumis  chate  (adjour).  Spontané  sur  tout  le  haut  Nil. 

Luffii  cylindrica  (louf).  Spontané  dans  les  forêts  vierges  d'Afrique. 

Vitis  vinifera,  espèce  voisine  de  la  Vilis  abyssinien  qui  croît  spontanée  dans  l'A- 
frique centrale.  La  vigne  est  très  ancienne  en  Egypte  (Tombeau  des  vignes,  à  Thèbes). 

Capsicum  fructescens  (chiseta  des  Arabes).  Spontané  en  Afrique  tropicale. 


172 


LA  VALLÉE  DU  NIL 


Près  des  montagnes,  aux  limites  du  désert,  s'étendaient  de  véri- 
tal)les  lacs  aux  rives  boueuses,  couvertes  de  lotus,  de  papyrus,  de 

joncs,  de  roseaux,  où  se  cachaient  les  oi- 
seaux, les  tortues,  pendant  que  l'hipopo- 
tame  et  le  crocodile  en  peuplaient  les 
aljords. 

Dans  les  forêts,  l'hyène,  le  chacal,  la 
panthère,  probablement  aussi  le  lion,  guet- 
taient les  cerfs  et  les  antilopes,  peut-être 
aussi  le  bœuf  sauvage,  précurseur  des 
animaux  domestiques  que  nous  voyons 
ligures  sur  les  mastabas'. 


Fig.  5io  à  5i2.  —  Antilopes, 
d'après  une  fresque  de  Meï- 
douni  (III'  dynastie). 


Olea  Europa^a.  Rare  au  temps  d'Homère  dans  les 
îles  grecques,  croît  spontané  sur  les  bords  de  la  mer 
Rouge  et  au  pays  des  Bicharis. 

Ficus  sycomorus.  Se  retrouve  en  Afrique  centrale, 
dans  le  S.  trachyfilla , 

Cucifera  thehaica  (palmier-doum).  Sauvage  dans 
les  vallées  de  la  Nubie  méridionale  à  partir  du 
iti'^  degré  de  latitude  nord.  En  Haute-Egypte  et  dans 
la  Nubie  inférieure  il  est  cultivé. 

Phœnix  dactilifcra  (dattier).  On  trouve  dans  toute 

l'Afrique    centrale   le   dattier    sauvage   (Ph,  spinosa) 

qui  diffère  par  sa  petitesse  ;   modifié  par  la   culture, 

il  devint  le  dattier  actuel. 

Papyrus.  Cette  plante,  autrefois   abondante  dans   le  Delta  et   toute    la  vallée  du  Nil, 

ne  dépasse  pas  aujourd'hui  le    lo'   degré   de   latitude  nord.  Elle  s'est   retirée    vers   le 

sud. 

Nymph.va  lotus  (lotus  blanc).  Encore  vivant  en  Basse-Egypte. 
Nymphxa  cœrulea  (lotus  bleu).  Vit  encore  en  Basse-Egypte. 

Neluhium  speciosus.  N'existe  pas  à  l'état  spontané  en  Afrique.  C'est  une  plante  asia- 
tique qui  semble  avoir  été  apportée  par  les  Perses. 

I.    Parmi  les   animaux  connus    des   Égyptiens   dès   les  premières  dynasties,  il  esta 
citer: 

Lion. 

Loup. 

Chacal. 

Chat  sauvage. 

Hyène. 

Léopard. 

Guépard. 

Renard. 

Hippopotame. 

Crocodile. 

Serpent  (plusieurs  sp.). 

Grenouille. 


Bœuf  (2  sp.). 

Chèvre. 

Ane. 

Lièvre. 

Gazelle  (plusieurs  sp.). 

Algazelle. 

Defassas. 

Antilope  (a  sp.). 

Chèvre  de  montagne. 

Singe  (2  sp.). 

Ichneumon. 

Chien  (plusieurs  sp.). 


Oie. 

Canard  (plusieurs  sp.). 

Cygne  blanc. 

Caille. 

Hirondelle. 

Ibis,  blanc  et  noir. 

Bécassine. 

Moineau. 

Huppe. 

Perdrix. 

Tourterelle. 

Pigeon. 


LORS  DE  I,A  CONQUÊTn:   KGYPTIENNK 


17,-î 


Les  poissons  abondaient  dans  les  marais  comme  dans  les  eaux  du 
Nil,  et  le  désert,  alors  aride  comme  aujourd'hui,  nourrissait  de  ses 
plantes  épineuses  la  gazelle,  l'autruche  et  les  animaux  des  sables 
africains  de  nos  jours. 


Fig.  5i3.  —  Le  bétail  à  l'Ancien  Empire  :  antilopes,   gazelles,   hyènes,  chacals,  etc. 
Bas-relief  du  tombeau  de  Mera,  à  Saqqarah  (VI=  dynastie). 


Fig.  5i4.  —  Lions  et  chiens  eu  chasse.  Bas-relief  du  tombeau  de  Mer; 

(VI°  dynastie). 


a   ûaqqarali 


Le  Delta  n'était  point  alors  cette  plaine  régulière  que  nous  voyons 
aujourd'hui,  des  digues  naturelles  s'élevaient  sur  les  rives  des  divers 
bras  du  fleuve,  des  dunes  de  sable  côtier  le  traversaient  en  tous  sens, 


Oxyrrynque. 

Torpille. 

Raie. 


Pie.  Cormoran.  Mulet  ordinaire. 

Aigle.  Hibou. 

Epervier.  Demoiselle  de  Numidie. 

Faucon.  Tortue  (plusieurs  sp.). 

Vautour.  Rouget. 

Pélican.  Mulet  tacheté. 

L'autruche  semble  avoir  vécu  en  Egypte,  aux  époques  anté-historiques  ;  on  en 
trouve  des  œufs  dans  les  tombes  archaïques.  Le  nom  du  chameau  n'apparaît  qu'avec 
les  Ptolémées  (Mariette,  Institut  égyptien,  lo  déc.  1875).  Le  cheval  n'existe  pas  en 
Egypte  avant  la  XVIIIi=  dynastie.  Le  cochon  fut  importé  par  les  Grecs  sous  la 
XXV"  dynastie  (cf.  d'Aubusson,  laatitut  égrplie/i,  5  mai  iSgj  :  Esquisse  de  lu  faune 
égyptienne). 


174 


LA  VALLEE  DU  NIL 


des  îles  plus  ou  moins  étendues  s'étaient  déjà  formées,  et  les  marais 
couvraient  le  reste  du  pays,  lacs  d'eaux  douces  ou  saumâtres  suivant 
leur  position,  suivant  aussi  les  saisons,  car  le  littoral  actuel  du  Delta 
n'était  pas  encore  formé  en  entier,  le  Nil  n'avait  pas  conquis  son 
estuaire  sur  la  mer. 

Et  ce  grand  triangle  de  marais,  d'îles  et  de  cours  d'eau,  était  lui 
aussi  couvert  de  végétation;  les  plantes  s'y  développaient  à  l'envi, 
car,  grâce  à  l'élargissement  de  la  vallée,  les  eaux  y  étaient  plus  calmes 
lors  des  crues. 

L'air  chaud  et  humide,  les  brouillards  de  la  nuit,  les  rosées  du 
matin,  venaient  encore  ajouter  à  la  fei'tilité  de  la  vallée  du  Nil  qui, 

sans  les  hôtes  dangereux  de 
ses  forêts  et  de  son  fleuve,  eût 
été  un  véritable  paradis. 

Ce  tableau  de  la  vallée  du  Nil 
dix  mille  ans  avant  nous,  on 
le  conçoit  aisément  lorsqu'on 
compare  les  conditions  natu- 
relles dans  lesquelles  elle  se 
trouvait  primitivement  à  celles 
qui  régissent  la  vie  dans  les 
pays  vierges  où  les  fleuves  cou- 
lent sans  contrainte,  où  l'homme  n'est  pas  venu  rapetisser  la  nature. 
Au  milieu  de  ce  dédale  de  végétation,  parmi  ces  marais,  ces  lacs, 
ces  rivières,  ce  désert,  se  mouvait  l'homme,  entouré  d'une  foule 
d'ennemis,  il  est  vrai,  mais  jouissant  sans  contrainte  des  biens  que 
la  nature  lui  prodiguait.  La  pèche,  la  chasse,  les  plantes  des  marais 
lui  fournissaient  les  éléments  d'une  vie  facile,  le  désert  lui  donnait 
le  sel,  il  trouvait  partout  autour  de  lui  l'eau  et  le  bois. 

Vivant  soit  dans  les  îles,  soit  sur  le  bord  du  désert,  à  peine  avait-il 
besoin  de  s'abriter  contre  les  ardeurs  du  soleil.  Jamais  les  intem- 
péries ne  venaient  troubler  son  repos,  car  il  ne  pleut  pas  en  Egypte, 
et  s'il  allumait  des  feux,  c'était  plutôt  pour  la  cuisson  de  ses  aliments 
que  pour  combattre  les  froidures. 

De  vêtements,  c'est  à  peine  s'il  en  avait  besoin;  quelques  peaux 
d'animaux  suffisaient  pour  former  son  pagne  dans  un  pays  au  climat 
iloux,  à  la  nature  si  clémente  que  les  chefs  seuls  se  couvraient  les 
épaules  d'une  peau  de  bête.  Les  mastabas  ne  nous  montrent-ils  pas, 
dans  leurs  bas-reliefs,  l'homme  presque  nu,  considérant  comme  un 
luxe  de  gi-and  seigneur  de  porter  sur  les  reins  une  peau  de  léopard'. 


ig.  .'ii5.  —  Scènes  de  cliassc.  d'après  les 
fresques  des  mastabas  de  la  nécropole 
de  Meïdoum  (III''  dynastie) , 


I.  Le   pagne  court,  qui  est  resté  jusqu'aux  derniers  siècles  de  la  civilisation  égyp- 
tienne le  costume  classique  des  habitants  du  pays,  doit  être  le  seul  qu'aient  connu  les 


I.ORS  nr,  LA  CONQUETE  EGYPTIENNE 


175 


176 


LA  VALLEE  DU  ML 


I.OliS  DE   r.A  CONQUÊTE  EGYPTIENNE 


177 


Mais  riioiniiuï  était  sans  cesse  exposé  aux  attaques  des  bôtesféroces. 
Le  crocodile  attendait  son  approche  au  bord  des  marais,  Thippopo- 
tam(^  cherchait  à  le  chasser  des  lacs  lorsqu'il  s'adonnait  à  la  pêche,  le 
lion  cl  le  lé()[)ard  en  faisaient  leur  proie  dès  (jn'il  pénétrait  dans  les 
Ibrôts.  Quant  au  désert,  aux  sables  brûlants  maudits  et  voués  plus  tai'd 
à  Typhon,  l'homme  néolilhicjue  ne  s'y  aventurait  guère,  il  en  redoutait 
les  chaleurs  et  la  soif  leur  compagne,  les  serpents  et  tous  les  hôtes 

520 


Fig.  5iq.  —  Débarquement  du  poisson  après  la 
pèche.  Fresque  du  tombeau  de  Aui  Snéfrou  Mert-f, 
à  Dahchour  (III'=  dynastie). 

Fig.  520.  —  Séchage  et  transport  du  poisson, 
d'après  une  fresque  de  Meïdoum  (III"  dynastie). 


Fig.  521,  —  Le  bétail  à  l'Ancien  Empire  :  bœufs.  Bas-relief  du  tombeau  de  Mera, 
à  Saqqarah   (VI*    dynastie). 

venimeux  qu'il  nourrit;  d'ailleurs  qu'eût-il  tiré  de  ces  solitudes  im- 
productives? 

Pour  lutter  contre  ses  ennemis  naturels,  pour  s'emparer  des  ani- 
maux de  la  chair  desquels  il  s'alimentait,  l'hoinme  avait  inventé  des 


premières  populations  de  la  vallée  du  Nil.  C'était  très  probablement  aussi  un  insigne 
de  leurs  chefs,  que  cette  peau  de  pauthère,  costume  distinctif  de  certains  prêtres  à 
toutes  les  époques  ;  en  effet,  on  voit  presque  toujours  les  usages  très  anciens  passer 
peu  à  peu  complètement  dans  le  domaine  religieux.  Il  n'y  aurait  rien  d'étonnant  à  ce 
que  cet  insigne,  qui  est  encore  celui  de  bien  des  chefs  des  peuplades  nègres,  ait  été 
celui  des  priuces  sauvages  qui  ont   précédé  les  Égyplieus     —  [(1.  J.] 


178 


LA  VALLEE  DU  NIL 


armes;  c'est  l'arc  à  la  main  ou  la  lance  sur  l'épaule  qu'il  s'aventurait 
dans  la  jungle;  le  silex  de  la  montagne  lui  avait  fourni  la  matière  pre- 
mière de  ses  instruments,  les  forêts  et  les  marais  lui  en  donnaient  la 
hampe.  Les  pré-Égyptiens  étaient  chasseurs,  le  grand  nombre  de 
pointes  de  flèches  que  nous  rencontrons  aujourd'hui  dans  les  stations 
préhistoriques  nous  le  prouve;  il  était  aussi  pécheur,  car  ses  premiers 
instruments  de  bronze  sont  l'hameçon. 

Peu  à  peu  Ihomme  apprit  à  domestiquer  les  animaux  :  il  eut  des 
troupeaux  de  gazelles  et  d'antilopes;  il  engraissa  les  hyènes  et  les 
chacals,  réduisit  le  chien  à  l'obéissance  et,  passant  de  l'état  nomade  à 
la  phase  agricole  de  la  civilisation,  contraignit  le  bœuf  au  labour,  sema 
et  moissonna  les  blés. 


Fig.  ï>2->.  —  Construction  d'une  meule  de  blé,  d':i|jrès  les  fresques  d'un  mastaba 
de  la  nécropole  de  Dahchour  (III»  dynastie). 

Fig,  523  et  Sa'i.  —  Porteurs  d'offrandes.  Bas-reliefs  du  tombeau  de  Mera,  à  Saqqarah 

(VI"  dynastie). 


Tous  ces  progrès  s'eftectuèrent  lentement;  toutefois  ils  eurent  lieu 
avant  l'arrivée  des  Egyptiens  pharaoniques  dans  la  vallée  du  Nil,  car 
les  stations  préhistoriques  nous  fournissent  en  très  grande  abondance 
les  restes  de  faucilles,  car  aussi  les  seuls  animaux  que  nous  voyons 
à  l'état  domestique  dans  les  bas-reliefs  de  l'Ancien  Empire  appar- 
tiennent tous  à  des  espèces  égyptiennes  qui,  dans  la  plupart  des  cas, 
vivent  encore  de  nos  jours  dans  les  mêmes  régions. 

J'ai  vu  l'iiomme  chasseur  et  pêcheur  dans  les  pays  sauvages  de  la 
Malaisie,  l'homme  ne  connaissant  pas  la  métallurgie,  sachant  à  peine 
la  culture  de  quelques  plantes,  ne  possédant  pas  d'animaux  domesti- 
ques. Je  l'ai  retrouvé  ailleurs  en  Asie  vivant  à  l'état  pastoral,  je  l'ai  vu 
enfin  devenir  sédentaire.  Ces  transformations  sont  présentes  à  mes 
yeux,  il  me  semble  les  suivre  chezles  pré-Egyptiens  dix  ou  quinze  mille 
ans  avant  nous.  Dans  tous  les  pays,  les  mêmes  progrès  ont  eu  les  mê- 
mes effets  :  l'habitant  de  la  vallée  du  Nil,  tout  comme  celui  de  la  pres- 
qu'île Malaise,  devenu  agriculteur,  a  coupé  la  forêt,  l'a  incendiée  et  dans 


LORS  DE  LA  CONQUÊTE  ÉGYPTIENNE  i:'J 

les  cendres  à  peine  refroidies  a  j('lé  les  premières  semailles;  les  arbres 
sauvages  ont  peu  à  peu  ([uitlé  les  terrains  les  [)lus  ierlilcs  el  le 
domaine  de  ragricuJlure  s'est  élargi  jus(|u'à  couvi'ir  tout  le  sol  de 
rÉgyple. 

Mais  avec  la  disparition  des  forêts,  la  sécheresse  est  bientôt  venue 
paralyser  l'efFort  de  la  végétation  ;  il  a  fallu  amener  les  eaux  dans  les 
champs,  et  pendant  que  d'une  part  l'homme  cherchait  à  gagner  sur  les 
marais  pour  étendre  son  dt)niaine,  de  l'autre  il  luttait  pour  retenir  les 
eaux  bienfaisantes  du  Nil  dans  ses  cultures. 

Certainement,  lorsque  l'Egyptien  pharaonique  parut,  l'aborigène  en 
était  arrivé  à  ce  degré  de  civilisation.  Les  villages  étaient  entourés  d'a- 
nimaux domestiques  paissant  l'herbe  qui  croissait  dans  les  bois  et  les 
clairières,  étranges  troupeaux  si  nous  les  comparons  à  ceux  qui  brou- 
tent aujourd'hui  dans  les  mêmes  lieux.  L'autochtone  possédait  des 
champs,  récoltait  le  blé  et  peut-être  aussi  une  foule  d'autres  plantes 
dont  il  faisait  son  aliment.  Mais  à  peine  sorti  de  la  sauvagerie,  n'ayant 
que  des  notions  très  vagues  de  tout  ce  (lui  n'est  pas  matériel,  le  pré- 
Égyptien  vivait  encore  de  la  vie  animale.  La  population  de  la  vallée 
du  Nil  était  probablement  divisée  en  un  grand  nombre  de  petites  tri- 
bus qui, bien  certainement,  guerroyaiententre  ellespour  lapossession 
des  terres  et  des  pêcheries. 

L'organisation  définitive  de  l'Egypte,  l'institution  des  lois,  le  par- 
tage des  terres,  la  répartition  équitable  des  eaux  fut  la  première  grande 
œuvre  des  conquérants  égyjitiens.  Ils  s'y  adonnèrent  entièrement  et 
ne  travaillèrent  pour  la  postérité,  n'élevèrent  les  monuments  que  nous 
admirons  encore,  cju'alors  que  la  vie  était  à  jamais  assurée  dans  la 
vallée  du  Nil,  que  le  même  sceptre  avait  réuni  toutes  les  tribus  d'au- 
trefois, que  le  fleuve  coulait  pour  un  peuple  homogène.  Et  depuis  sept 
mille  ans  l'Egypte  n'a  cessé  de  suivre  la  loi  de  Menés  '. 


I.  La  population  actuetle  de  l'Egypte  est  de  5,602,627  habitants  (Rap.  d"Amici-Bey, 
3i  déc.  1877),  composée  de  5,517,627  indigènes  et  de  85,ooo  Européens,  soit  228  lia- 
bitants  par  kilomètre  carré  de  terre  cultivée  (5,4  hab.  par  kilomètre  carré  de  surface 
géographique).  L'Egypte  est  de  beaucoup  le  Jîays  du  monde  le  plus  peuplé,  car  la  po- 
pulation des  divers  pays  par  kilomètre  carré  est  la  suivante  :  Hollande,  117,9; 
Grande-Bretagne,  io5;  Belgique,  iSi;  Suède  et  Norvège,  8,6;  Russie  d'Europe,  t6|/). 
L'Egypte  renferme  4,479)9°i  dattiers;  r,i45,o48  arbres  divers.  Elle  produit  annuelle- 
ment pour  un  milliard  de  francs  de  blé  ;  la  superficie  de  ses  cultures  est  de  890,699  fed- 
dans. 


CHAPITRE    VII 


Les  premiers  Égyptiens. 


Il  n'existait  pas  au  Musée  de  Guizoli  et  dans  les  colhîclions  de 
l'Europe,  avant  les  récentes  fouilles  d'Abydos,  un  seul  objet  (pii 
puisse,  d'une  manière  certaine,  être  attribué  à  la  1"  ou  à  la  11°  dy- 
nastie ',  tandis  que  pour  la  IIP  on  en  voit  un  bon  nombre  et  que  pour 
les  IV%  V'^  et  VP,  les  séries  sont  considérables.  Cette  constatation 
tendrait  à  faire  penser  soit  que  les  premiers  souverains  égyptiens  ' 
exercèrent  un  pouvoir  restreint  et  local,  soit  c[ue  la  civilisation  fut 
alors  trop  peu  répandue  dans  la  vallée  du  Nil  pour  ijue  les  traces 
s'en  retrouvent  aujourd'hui  en  abondance. 


1.  Les  fouilles  de  M.  Auiéliueau,  à  Abydos  (iSy')  yG),  ont  fourni  bon  nombre  de  docu- 
ments très  archaïques,  qui  probablement  doivent  être  attribués  aux  deux  premières 
dynasties,  si  toutefois  ils  ne  leur  sont  pas  antérieurs. 

2.  Voici  ta  liste  des  trois  premières  dynasties  égyptiennes  : 

I"  dynastie  (Thinite). 

5.  Housapaiti  (OCuayotiSo;). 

6.  Miribi  (Mi£6t5o;). 

7.  Semson  (i;£(ié(j. ■}>»];). 

8.  Qobhou  {Xrj\jêii^r,i?  Uifii-/-!);). 


t.  Mini  (MtJvïi;,  MvsCi;) 

2.  Teti  ("AOum;  a'). 

3.  Athôti("AOwTi«p'). 
KENKErUS. 


4.  Ata 


0TENE<I>1IS. 


1.  Bouziou  (Borj9o;). 

2.  Kakoou  (Kaié/wç). 

3.  Binoutîrou  (BivioOpi;). 

4.  Ouzuas  (TXS;). 

5.  Soudou  (i;ôf)|vr,;). 

1.  Bibi,  Zazi  (N;-/Ep(isr,;). 

2.  Nibka  (TôaopOpoç)- 

3.  Zosor  (TûpEiî). 

4.  Zosertiti  (Ssaw^pi;). 

5.  Sozes  (Sioûçt;), 


11°  dynastie  (Thinite). 

«.         ?        (Xaipr,;). 

7.  Nolirkeri  (Nsysp/épr,;)- 

8.  Noflrkasokari  (iilowxp'.;)- 
9-         ?  (X-vÉp/),'). 

Ill"  dynastie  (Mcniphite). 

G.  Nolirkeri  (Toalpixatc). 

7.  Nibkari  ("A'/r,;). 

8.  Houni  (i:r)yo-jpi;). 
.j.  Snofrou  (K;pyÉp/;;)- 


12 


182  I.ES  l'KKMIKIÎS  KGYPTIENS 

Nous  connaissons  de  la  III"  dynastie  un  assez  grand  nombre  de 
monuments  pour  qu'il  soit  possible  de  nous  rendre  compte  de  l'état 
des  connaissances  humaines  à  ces  époques.  Les  uns  se  rencontrent 
aux  environs  de  la  plaine  memphite,  comme  à  Saqqarah,à  Dahchour, 
à  Meïdoum,  les  autres  au  Sinaï,  près  des  mines,  ou  sur  les  rochers 
de  la  Cataracte,  à  Assouau  '.  Snéfrou  et  ses  prédécesseurs  avaient 
donc  déjà  conquis  l'Egypte  entière,  ils  étendaient  leur  pouvoir  sur 
toute  la  basse  vallée  du  Nil  et  sur  les  territoires  asiatiques  voisins 
du  golfe  de  Suez. 

Les  gisements  de  cuivre  du  Sinaï,  où  les  mineurs  égyptiens  gra- 
vèrent les  noms  de  leurs  souverains,  ils  en  connaissaient  la  valeur 
dès  la  plus  haute  antiquité,  et  bien  certainement  ce  ne  sont  pas 
Djezer  '  et  Snéfrou  qui  les  premiers  firent  ouvrir  les  mines;  ils 
suivirent  simplement  les  traditions  de  leurs  ancêtres  et,  comme  leurs 
prédécesseurs,  tirèrent  du  Sinaï  la  matière  première  de  leurs  armes 
et  de  leurs  joyaux.  C'est  d'Asie  (jue  leur  venaient  ces  ressources  ;  car, 
il  est  intéressant  de  le  remarquer,  la  péninsule  Sinaïtique  est  située 
sur  la  rive  orientale  de  la  mer  Rouge,  dans  un  pays  qui  n'est  pas  na- 
turellement en  relations  avec  la  vallée  du  Nil  et,  bien  que  les  gise- 
ments cuprifères  soient  abondants  en  Nubie  et  dans  la  chaîne  Arabi- 
que, ce  sont  les  mines  du  groupe  de  Wadi-Maghara  qui,  les  premières, 
ont  été  exploitées.  Les  connaissances  des  Egyptiens  étaient  donc,  au 
début,  beaucoup  plus  étendues  vers  l'Orient  que  vers  l'Afrique. 

Quant  aux  monuments  et  aux  manifestations  de  l'art  qui  nous  ont 
été  légués  par  les  hommes  de  la  III'  dynastie,  ils  sont  d'une  remar- 
quable perfection  et  dénotent,  de  la  part  de  leurs  auteurs,  une  éduca- 
tion très  avancée  et  luie  pratique  consommée.  La  statuaire  se  montre 
à  nous  plus  belle  qu'elle  ne  sera  jamais  en  Egypte  ;  la  peinture  est 
maîtresse  de  tous  les  procédés  et  a  déjà  reçu  tout  le  développement 
qu'elle  doit  atteindre  sous  les  souverains  postérieurs  ;  l'architecture 
est  extrêmement  savante,  tantpar  ses  conceptions  que  par  l'exécution  ; 
et  si  les  rois  de  l'Ancien  Empire  ^  se  construisirent  des  pyramides 
aux  Ibrnies  simjdes  qui  en  imposent  encore  par  leur  masse,  c'est  qu'ils 
cherchaient  à  se  créer  une  demeure  éternelle  et  que,  pour  en  assurer 
la  durée,  ils  avaient  renoncé  à  toutes  les  dispositions  élégantes,  aux 


1.  La  stèle  de  la  Famine,  gravée  sur  un  rocher  dans  l'ile  de  Sehel.esl  de  facture  pos- 
térieure à  l'époque  du   roi  Djezer  dont  elle  mentionne  le  nom. 

2.  G.  Bénédite,  Le  nom  d'Epervier  du  roi  Djezer  {Sozir)  au  Sinaï  [Recueil,  etc.,  t.  XV], 
p.  io4,   i.S<yi). 

3.  Pour  |)lusieurs  des  pyramides  du  nome  niemphile,  on  n'a  pas  encore  pu  découvrit' 
quel  roi  les  avait  eonslruiles,  mais  la  plupart  et  les  plus  importantes  ont  été  identi- 
fiées . 


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184  LBS  PKEMIliKS  EGYPTIENS 

détails  fragiles  c(uelc  temps  abat  si  aisément  '.  Mais  ilsavaient  apporté 
tous  leurs  soins  clans  rcxécution,  cardans  la  construction  de  ces  co- 
losses lie  pierre,  la  technique  du  travail  est  merveilleuse  et  la  préci- 
sion des  assemblages  dépasse  tout  ce  (|ui  a  été  fait  d'analogue  par 
ranli(|uité. 

Cette  simplicité  des  formesgénérales  était  voulue,  caries  architectes 
de  cette  époque  avaient  à  leur  disposition  tous  les  procédés  dont  les 
Grecs  et  les  Romains  firent  usage  plus  tard.  Us  connaissaient  la 
voûte  '  et  remployaient  j)our  les  édifices  d'importance  secondaire  ; 
bien  que  certainement  aussi  ils  fissent  un  usage  courant  de  la  colonne 
puisque,  à  la  V  dynastie,  sous  le  roi  Sahou-Ra,  Ptah-Chepsès'  ornait 
son  tombeau  des  colonnes  les  plus  gracieuses,  les  plus  artistiques, 
(|ui  jamais  aient  été  sculptées  en  Egypte. 

Dès  qu'elle  nous  apparaît,  la  civilisation  égyptienne  est  donc  en- 
tièrement formée,  et,  qui  plus  est,  dans  beaucoup  de  branches  elle 
surpasse  ce  qu'elle  seia  jamais.  Nous  devons  donc  lui  supposer  une 
durée  d'incubation  bien  considérable  pour  expliquer  son  existence 
aussi  parfaite,  et  M.  G.  Maspero  adnu't  (|ue  celte  périod<'  fut  aussi 
longue  f|ue  celle  de  la  décadence  îles  arts  en  Egypte,  c'est-à-dire 
de  4,000  ans  environ. 


1.  Voici  la  liste  des  priiicijjales  pyramides,  en  reniontaiit  du  uord  au  sud  : 

Ahou-Roash,  Trois  pyramides,  non  identifiées. 

Giiizeh,  Pyramides  de  Chéops,  de  Cliel'reii  et  de  Mycérinos. 

Za\\'iet-el-Ar'uin  i!l  Ahoii-d:-  rah.   Deux  pyramides,  non  idenlilîées. 

AI>ou-Sir.   Pyramides  de  Saliou-Ra  et  d  Ouser-en-Iîa  (?). 

Saqqavah  (groupe  nord).   Pyramides  de  Djeser,  Ounas  et  Teli. 

Saqqarah  (groupe  sud).  Pyramides  de  Pepi  I",  Pepi  II  et  Mereura. 

Dahchour.  Pyramides  deSnéfrou  (?),  Âmenemliat  II,  Ousertesen  II,  Amenenihal   III. 

Liclit.  Pyramides  d  Ameuemliat  I"  et  Ousertesen  \" . 

Pour  plusieurs  de  celles  des  groupes  d'Abou-Sir,  Saqqarah  et  Ualichour.  les  cons- 
tructeurs sont  encore  inconnus. 

Plus  au  sud,  on  trouve  encore  les  pyramides  iIl; Meïdouiii  (Suéfrou),  et  à  l'entrée  du 
Fayoum.  celles  de  Ilanarah  (Xlle  dyn.)  et  d'IUahoun  (Ousertesen  II);  enlin,eu  Haute- 
Egypte,  celle  de  KouUah . 

De  nombreuses  études  ont  été  faites  sur  les  pyramides  depuis  le  commencement  du 
siècle,  par  divers  savants;  le  travail  le  plus  complet  est  celui  qui  u  été  publié  en 
i8/|o  par  le  colonel  Howard  Vyse  :  Opérations  carried  on  at  the  Pyramides  of  Guizeh 
in  iS'iy.  Il  tant  citer  eLicore  Lepsius,  Ucher  den  liau  der  Pyramiden  (Berlin,  iS43),  et 
Pétrie,  Tlie  Pyriiinids  and  Temples  of  Guizeh  (iSSî). 

2.  Tous  les  mastabas  de  Dahchour,  contemporains  de  Suéfrou,  sont  composés  de 
chambres  voûtées  en  briques  crues  (J.  de  Morgan,  Fouilles  à  Dahchour,  1894-95-96). 

3.  Revue  archéologique,  i8g4  '■  J-  Je  Morgan,  Découverte  du  mastaba  de  Ptah- 
Chcpsès  dans  la  nécriipotc  d'.thou-Sir,    lir'age  à  part,  ]>.    il.  fig.  G, 


i.ics  i'iii:Mii;i;s  i:(ivi'rii;.\s  is.') 

P(nit-ôtrc  est-il  oxcessil' d'ail  ri  huer  aux  piv'micïps  pasdcs  En^ypliens 
une  pareille  anti([uit('',  ear  lous  les  peuples  se  soni  dév(>l<)[)pés  en 
moins  de  siècles  ;  rpioi  «piil  en  soit,  ees  làlouiieiiietils  eur(Hit  licni,  et 
cerlainement  produisirent  des  œuvres  moins  parl'ailes  que  celles  qui 
sont  parvenues  jus(|u'à  nous.  II  est  un  l)ays  où  lurent  laits  ces  pre- 
miers essais  de  l'art  égyptien  et  les  vestiges  en  sont  probablement 
encore  apparents,  ce  pays  ne  semble  pas  être  l'Egypte. 

D'après  les  auteurs  grecs,  cliaque  dynastie  portait  le  nom  du  pavs 
dont  elle  était  originaii'e,  la  troisième  était  mempliile  o.t  ses  rois  onl 
élevé  leurs  pyramides  près  deMemphis,  dans  cette  vasti;  nécropole  qui 
sur  80  kilomètres  d(^  longueur  s'étend  du  nord  au  sud  entre;  .Ahou- 
Roacli  et  l'entrée  du  Fayoum.  Les  deux  premièi-es  dynasties  furent 
thinites  :  c'est  donc  aux  environs  de  Girgeli,  au  pied  de  la  chaîne 
Libyque,  là  même  où  j'ai  rencontré  des  vestiges  si  nombreux  des 
|)opiilations  autochtones,  qu'il  faut  chercher  les  traces  des  premiers 
Egyptiens;  c'est  dans  les  territoires  mêmes  où  M.  E.  Amélineau  a 
fait  ses  belles  découvertes. 

Mais  ces  précurseurs  des  souverains  qui  construisirent  les  pyra- 
mides, ces  prédécesseurs  des  rois  puissants  qui  régnèrent  sur 
l'Egypte  depuis  la  Cataracte  jusqu'aux  marais  du  Delta,  depuis  les 
sables  de  l'ouest  jusqu'à  la  vallée  d'Arabah,ne  nous  ont  pas  laissé  de 
grands  monuments  analogues  à  ceux  de  leurs  successeurs.  On  serait 
tenté  de  croire  que;  ces  monarques, absorbés  j)ar  les  soins  de  la  con- 
quètf;  et  de  l'organisation  du  pays,  négligèrent  d'être  constructeurs, 
et  que  plus  tard  seulement,  alors  que  l'Egypt»^  entière  était  asservie, 
les  rois  donnèrent  leurs  soins  à  leurs  tombeaux  et  élevèrent  ces  mon- 
tagnes artificielles  dont  la  grandeur  étonne  de  nos  jours  encore. 

Menés  ou  Mini',  pour  les  Egyptiens,personnifie  l'origine  de  l'Egypte; 
c'est  lui  qui  régla  les  usages,  créa  les  lois,  organisa  la  vallée  du  INil, 
développa  la  civilisation  et  fonda  le  plus  vieil  empire  dont  le  souve- 
nir soit  parvenu  j.usqu'à  nous.  Menés  n'est  peut-être  qu'une  existence 
légendaire,  comme  propose  de  le  supposer  M.  Krall  ;  mais  ^lenès, 
en  tant  que  personnification  d'une  force  créatrice  de  l'Égvpte  civilisée, 
a  existé.  Menés  a  trouvé  la  vallée  du  Nil  livrée  à  la  plus  affreuse  bar- 
barie; Menés  a  organisé  cette  région  sauvage,  mélange  de  marais  et 
de  déserts,  d'où  plus  tard  sortirent  les  conquérants  de  l'Asie. 

Les  Egyptiens  avaient  conservé  le  souvenir  d'une  conquête  dans 
laquelle  leurs  ancêtres  venus  de  l'extérieur  s'étai(>nt  emparés  de  la 
vallée  du  Nil  et  y  avaient  prospéré.  Il   n'est  jamais  question  des  ha- 

r.  Le  nom  de  Menés  Q  U-.ichiit  littér.ilement  signifie  «  ei  »  nnportot-,  «mon  n  la 

stabilité. 


186  LES  PREMIERS  EGYPTIENS 

bitants  qu'ils  rencontrèrent  en  entrant  dans  la  vallée  du  Nil.  La  cause 
de  ce  silence  n'est  que  le  mépris  jjroibnd  dans  lequel  les  envahis- 
seurs tenaient  les  peuples  vaincus;  de  même  les  Aryens,  conquérant 
les  Indes,  ont  assimilé  les  noirs  aborigènes  à  des  singes  et  n'ont 
retenu  d'eux  que  les  exploits  grotesques  d'Hanouman  et  de  Sou- 
grivah  dont  ils  chantent  encore  les  prouesses;  de  même  les  Romains 
tenaient  pour  barbares  toutes  les  races  qui  n'étaient  pas  latines;  de 
même  les  com|)agnons  de  Cortcz  prenaient  à  peine  pour  des  hommes 
les  Indiens  du  Mexique,  malgré  leur  civilisation  avancée;  de  même 
enfin  les  Européens  considèrent  souvent  encore  les  natifs  de  leurs 
colonies  comme  des  gens  de  race  inférieure.  Il  ne  faut  donc  pas 
chercher  dans  les  annales  de  l'Egypte  écrites  par  des  Égyptiens  la 
moindre  trace  des  peujilesqui  avant  l'invasion  vivaient  sur  les  rives 
marécageuses  du  Nil.  L'Egyptien  du  début  fut  l'homme,  l'autochtone  , 
se  vit  réduit  en  esclavage,  et  ses  jours  furent  employés  aux  grands 
travaux  d'aménagement  du  pays,  à  la  construction  des  palais  de 
l'autre  vie  pour  les  rois  leurs  maîtres. 

En  Egypte,  l'aborigène  vaincu,  subjugué, exécuta  les  ordresdu  do- 
minateur; mais  ce  n'est  certainement  pas  dans  la  vallée  du  Nil  que 
ce  maître  se  développa,  qu'il  dépensa  les  siècles  pour  son  éducation. 
C'est  ailleurs,  car  malgré  toutes  nos  découvertes  pendant  un  siècle 
de  rechei'ches,  jamais  nous  n'avons  rencontré  la  moindre  trace  d'un 
essai  d'art  pharaonique  dans  les  monuments  archaïques,  et  le  sol  de 
l'Egypte  est  trop  généreux  pour  ne  pas  livrer  les  témoins  des  âges 
qui  ont  précédé  Snéfrou,  s'il  les  renfermait. 

Lorsque  la  civilisation  pénètre  d'une  manière  brutale  dans  un  pays 
sauvage,  elle  se  concentre  sur  certains  points  des  territoires  nouvel- 
lement envahis,  s'y  développe  sur  elle-même,  créant  ainsi  des  cen- 
tres qui,  par  leur  position,  correspondent  aux  besoins  stratégiques 
ou  commerciaux  des  conquérants,  mais  elle  ne  pénètre  que  fort  len- 
tement dans  la  masse  des  indigènes.  Il  fallut  des  milliers  d'années 
pour  que  l'autochtone  de  la  vallée  du  Nil,  abandonnant  ses  anciens 
usages,  adoptât  ceux  de  ses  maîtres.  C'est  ainsi  que  les  hommes  à 
peau  cuivrée  taillaient  encore  l'obsidienne  au  Mexique,  alors  que 
depuis  des  siècles  les  seigneurs  espagnols  avaient  apporté  de  Ma- 
drid tout  le  luxe  de  l'Europe  et  l'étalaient  dans  la  capitale  du  Nouveau 
Monde. 

La  plupart  des  archéologues  se  sont  ]jasés,pour  nier  l'existence  en 
Egypte  il'un  âge  de  la  pierre,  sur  ce  fait  ([ue  pendant  toute  la  période 
pharaonique  les  Égyptiens  firent  usage  de  silex  taillés.  C'est  juste- 
ment dans  la  persistance  de  cette  coutume  (continuation  d'usages  qui 
d'ailleurs  restent  encore  à  prouver)  qu'ils  eussent  dû  puiser  les  docu- 


T,i:S   l'KEMIi:l!S   I:GVI>'|-IKXS  187 

ments  les  plus  posiliCs  sur  rexisUMiccdu  l'homino  à  l'état  iu';oIitiiif[iie, 
clans  ces  usages enrai-inés  à  tel  |)oiut  chez  les  populations  qu'il  aurait 
fallu  (les  milliers  d'années  pour  les  détruire.  D'où  serait  venue  aux 
Égyptiens  pharaoniques  l'iilée  de  tailler  le  silex,  si  toutefois  nous 
admettons  qu'ils  en  aient  fait  usage,  s'ils  n'avaient  reçu  celte  notion 
de  leurs  ancêtres  ou  de  leurs  prédécesseurs  dans  la  vallée  du  Nil, 
s'ils  n'étaient  restés  pénétrés  des  couluines  qui  régnaient  autrefois 
sur  tout  le  nord  de  l'Afrique?  Les  hommes  ([ui  donnèrent  les  plans 
des  pyramides,  ceux  qui  commandèrent  les  grands  travaux  d'irriga- 
tion et  d'assainissement  de  la  vallée  du  Nil,  ceux  qui  sculptèrent  les 
statues  de  Rànotpou,  de  Nofrît,  de  Rânopir,  etc.,  et  les  panneaux 
d'Hosi,  avaient  depuis  longtemps  renoncé  à  l'usage  de  la  pierre, 
alors  que  leurs  esclaves,  les  autochtones,  taillaient  peut-être  encore 
quelques  lames  de  silex  pour  leurs  besoins  journaliers,  pendant 
(|u'ils  construisaient  sous  le  Moyen  Empire  les  pyramides  de  Ilawa- 
rah  et  de  Licht. 

Au  cours  des  premiers  siècles  qui  suivirent  la  conquête,  le  cuivre 
fut  un  métal  fort  cher  pour  les  habitants  de  l'Egypte  ;  peut-être  même 
les  premiers  pharaons  empêchèrent-ils  les  aborigènes  de  s'en  pro- 
curer, car  c'est  parles  métaux  qu'ils  avaient  (;onquis  leur  empire,  c'est 
par  la  supériorité  des  armes  métalliques  sur  la  pierre  taillée  ([ii'ils 
s'étaient  assurés  de  la  suprématie;  il  ne  serait  donc  pas  surprenant  de 
voir  que  les  aborigènes  continuèrent  de  tailler  le  silex,  et  que,  pour 
leurs  usages  journaliers,  ils  l'eussent  préféré  aux  lames  brillantes 
de  leurs  maîtres.  Les  archers  de  Marathon  et  de  Trasiniène  ne  tiraient- 
ils  pas  des  flèches  armées  de  silex;  les  pharaons  du  Nouvel  Empire 
eux-mêmes,  dans  leurs  campagnes  de  Syrie,  ne  percaient-ils  pas  l'en- 
nemi de  traits  rendus  aigus  par  un  éclat  de  pierre  ?  Mais,  je  l'ai  dit, 
cette  persistance  est  loin  d'être  prouvée,  bien  au  contraire.  Je  n'en 
connais  que  trop  peu  d'exemples  et  que  des  témoignages  trop  peu 
importants  poureju'il  soit  possible  de  l'admettre  aujourd'hui. 

L'Egypte  semble  avoir  vécu  de  deux  vies  différentes  :  l'une,  la  plus 
ancienne,  commence  avec  les  origines  pour  cesser  au  moment  de  l'in- 
vasion des  Pasteurs  ;  l'autre  date  de  l'expidsion  des  Hyksos  pour  s'é- 
teindre lors  de  la  conquête  macédonienne,  car  sous  les  Ptolémées  et 
les  Romains,  ce  n'est  plus  qu'une  agonie  lente  des  mœurs,  des  usages, 
de  la  religion  et  des  arts  de  cette  civilisation  si  spéciale  qui  caracté- 
rise la  vallée  du  Nil. 

Jusqu'à  la  venue  des  Pasteurs  dans  le  Delta,  l'Egypte  semble  avoir 
vécu  sur  elle-même,  sansque  desinfluences  extérieuressoient  venues 
troubler  d'une  manière  notable  son  existence  intime  ;  elle  modifia 
graduellement  ses  connaissances  et  ses  coutumes,  acquit  d'un  côté, 


188  LF.S  PRRMIl'.RS  KGYPTIENS 

pordil  (le  l'autre,  mais  le  même  esprit  présida  toujours  à  ses  arts,  aux 
formes  de  sa  céramique  et  à  ses  tombeaux.  Les  deux  caractéristiques 
de  cette  période  sont,  d'une  part,  la  rareté  de  la  figuration  des  dieux, 
d'autre  part,  les  usages  funéraires  et  la  construction  de  ces  pyramides 
colossales  qui  dominent  le  désert. 

Si  nous  entrons  dans  les  détails,  nous  voyons  un  grand  nombre  de 
points  communs  entre  la  VP  dynastie,  par  exemple,  el  la  XIl''.  Les 
scènes  des  tombeaux  sont  les  mêmes,  les  bijoux  figurés  sur  les  bas- 
reliefs  ne  diffèrent  sensiblement  pas,  les  armes  sont  semblables. 

Dès  ((u'apparaît  le  Nouvel  Empire,  bien  que  le  faciès  général  des 
bas-reliefs  soit  le  même,  nous  trouvons,  dans  le  détail,  des  modifica- 
tions profondes.  Les  pharaons  ont  connu  les  revers,  l'Egypte  a  été 
envahie,  ils  tenteront  désormais  des  expéditions  lointaines  et  leurs 
usages  se  sont  modifiés  au  contact  des  étrangers.  La  tlivinité,  autre- 
fois plus  mystérieuse,  revêt  une  fouie  d'aspects,  les  animaux  sont 
universellement  employés  dans  la  figuration  des  images  divines.  Je 
ne  suis  pas  apte  à  juger  des  cjuestions  pliilosophiques  égyptiennes, 
nuiis  si  je  me  reporte  seulement  aux  représentations  ties  scènes  reli- 
gieuses, je  suis  forcé  d'admettre  (pi'à  la  philosophie  pure,  au  dogme 
primilif,  s'est  substituée,  dès  la  XVIP  dynastie,  une  sorte  de  féti- 
chisme qui  forcément  eut  son  l'cflet  sur  tous  les  actes  dans  la  vie  des 
Egyptiens. 

Quand  on  visite  sommairement  la  vallée  du  Nil,  on  croit  aisément 
à  l'homogénéité  dans  la  civilisation  pharaonique,  mais  en  étudiant 
avec])liis  tle  soin  les  monuments,  on  voit  de  suite  que  l'Egypte  a  vécu 
de  deux  vies  différentes.  Dans  la  première  de  ces  existences,  elle 
conserva  ses  traditions;  dans  la  seconde,  elle  abandonna  sa  haute  phi- 
losophie et  devint,  par  rapport  au  culte  et  aux  usages  d'antan,  ce  que 
furent  les  chrétiens  byzantins  par  rapport  à  l'Église  primitive  des  ca- 
tacombes de  Rome. 

Ce  n'est  donc  (pie  la  première  vie  de  l'Egypte  que  nous  devons 
considérer,  si  nous  voulons  nous  rapprocher  le  plus  possible  de  c(> 
(|ue  furent  les  usages  des  compagnons  de  Menés.  Ces  croyances, 
ces  coutumes, ces  arts  de  l'origine,  nous  les  connaissons  aujourd'hui, 
de  telle  sorte  qu'il  est  possible  de  reconsliluer  par  la  pensée  d'une 
manière  générale  ce  que  furent  les  conquérants  de  la  vallée  du  Nil, 
quand  ils  y  parvinrent,  alors  (pi'elle  n'était  peuplée  que  de  sauvages 
armés  de  pierres  taillées. 

Dès  le  début  nous  vovons  un  mélange  des  formes  égyptiennes  et 
de  celles  usitées  par  les  autochtones,  et  c'est  principalement  dans  la 
céramic{iie  que  cette  observation  |)eut  être  faite  d'une  manière  plus 
frappante.  Les  vases  renconirés  dans   les  mastabas  de  l'époque  de 


i.ns  PRFMri'iis  iGvrrrKxs  iso 

SiK-froii,  à  Dalichour,  soni  icloiiliciucs  à  ceux  des  tombes  pré-liislo- 
riqiies.  Ils  sont  laits  de  la  même  |)àle,  pclris  avec  les  mêmes  proccWlês 
et  présentent  les  mêmes  formes. 

Tant  que  dura  l'Ancien  Empire,  l'ail  du  policT-  se  dévcdoppa  jxmi  ;  au 
^loyeii  Empire,  les  formes  furent  (''puic'cs,  la  terre  micuix  clioisic,  la 
cuisson  plus  soio-iiêe.  On  rpmar(|ue  que  les  ouvricu's  ont  pericclionné 
graduellemeni  leur  Iravail,  mais(|ue  ce  développement  s'esl  |)ro(liiil 
(■liez  les  habitants  de  l'EiJvpte  eux-mêmes,  sans  (pie  des  iniluences 
étrangères  soient  venues  apporter  des  données  nouvelles. 

La  pâte  émaillée,  si  comnuine  dans  les  tombes  de  l'époque  pha- 
raonique, fait  complètement  défaut  dans  les  sépultures  vraiment  pré- 
historiques et  n'apparaît  chez  les  autochtones  qu'alors  que  les  Egvp- 
tiens  étaient  déjà  installés  dans  la  vallée  du  Nil. 

Enfin  l'un  des  caractères  les  plus  nets  permcllanl  de  distinguci'  les 
autochtones  des  Egyptiens  se  trouve  dans  la  nature  même  des  sépul- 
tures. Chez  les  aborigènes,  le  mort  est  placé  sur  le  côté,  les  bras  et 
les  jambes  repliés;  il  est  simplement  déposé  dans  la  terre  dans  un 
sens  quelconque  et  entouré  de  ses  vases.  Chez  l'Égyptien,  au  contraire, 
le  cadavre  est  posé  sur  le  dos,  les  membres  allongés,  la  tète  placée 
invariablement  au  nord. 

Quant  à  la  momification,  à  rem|>!oi  du  bitume  pour  conserver  les 
corps,  leur  usage  ne  semble  pas  remonter  aux  premiers  âges,  ou  du 
moins  cette  opération  ne  se  faisait-elle  pas  au  début  d'une  manière 
aussi  complète  que  dans  les  derniers  temps  pharaoniques.  Les  momies 
les  plus  anciennes  que  nous  connaissions  semblent  avoir  été  prépa- 
rées dans  une  solution  de  natron,  mais  ne  portent  aucuiu^  trace  d'en- 
duit bitumineux.  Ce  n'est  que  plus  tard,  au  Moj'en  Empire,  que  cet 
usage  fut  répandu  pour  les  grands  personnages;  il  devint  presque 
général  sous  les  rois  du  Nouvel  Empire. 

La  position  donnée  aux  cadavres  dans  les  tombeaux  est  dans  tous 
les  pays  très  caractéristique.  En  Europe,  elle  permet  d'assigner  une 
époque  aux  sépultures  qui  ne  renferment  pas  d'objets.  En  Egypte, 
il  y  a  lieu  d'en  tenir  compte  d'une  manière  toute  spéciale,  car  elle 
dénote  des  usages  qui,  bien  certainement,  n'ont  pas  appartenu  en 
même  temps  aux  deux  peuples  en  présence,  autochtones  et  Égyp- 
tiens. 

Les  usages  funéraires,  de  même  que  l'emploi  de  la  pierre  taillée, se 
continuèrent  peut-être  chez  les  aborigènes  pendant  bien  des  siècles, 
alors  que  les  Égyptiens  représentant  l'aristocratie  du  pays  étendaient 
de  plus  en  plus  leur  domination  et  leurs  coutumes.  Aussi  ne  devons- 
nous  pas  être  surpris  de  rencontrer  dans  certains  tombeaux  indigènes 
des  perles  de  fabrication  égyptienne,  du  bronze  et  parfois  même  peut- 


190  LES  PREMIERS  EGYPTIENS 

être  des  objets  datés  permettant  de  rapporter  ces  sépultures  jusqu'au 
Moyen  Empire.  C'est  que  réellement  elles  appartiennent  à  cette 
époque,  mais  il  est  certain  qu'elles  ne  sont  pas  dues  à  des  popula- 
tions ethnographiqucment  égyptiennes. 

En  ce  qui  concerne  l'usage  du  silex  taillé,  pendant  les  temps  pha- 
raoniques, les  observations  sont  fort  peu  nombreuses  et  il  existe 
bien  des  doutes  à  cet  égard.  Mariette  avait  remarqué  que  |)lus  un  silex 
travaillé  est  ancien,  plus  sa  taille  est  perfectionnée.  Celte  observation 
vient  justement  à  l'appui  de  mon  opinion,  car  elle  prouve  que  peu  à 
peu  l'art  d'éclater  la  pierre  disparut  en  Egypte  au  fur  et  à  mesure  que 
l'usage  des  métaux  pénétra  d'une  manière  plus  intime  chez  la  popu- 
lation; la  tradition  seperpétua, dit-on,  jusqu'auxtempsmodernes,  mais 
bien  que  l'usage  du  silex  ait  peut-être  persisté  pour  certaines  céré- 
monies du  culte,  ou  certain(!S  pratiques  chirurgicales  ',  ilne  se  trouva 
plus,  dans  les  derniers  temps,  d'ouvriers  assez  habiles  pour  donnera 
la  pierre  la  précision  et  la  finesse  de  taille  qu'elle  possédait  autrefois. 
Et  encore  cette  explication  n'est-elle  qu'une  hypothèse  découlant  des 
idées  que  s'étaient  faites  Mariette  et  Lepsius  sur  l'usage  de  la  pierre 
taillée.  Si  je  ne  la  rejette  pas  d'une  manière  définitive,  c'est  unique- 
ment parce  que  je  n'ai  pas  été  à  même  de  vérifier  l'exactitude  de  toutes 
les  assertions  de  ces  savants. 

Tous  les  documents  que  nous  possédons  concordent  donc  pour 
prouver  qu'à  des  époques  extrêmement  reculées,  la  vallée  du  Nil,  alors 
habitée  par  des  populations  spéciales,  réduites  à  l'usage  de  la  pierre 
polie  et  ne  connaissant  pas  les  métaux,  fut  envahie  par  une  race  dif- 
férente, peuple  très  civilisé,  familier  avec  l'usage  de  la  métallurgie,  de 
l'écriture,  des  lois  de  l'architecture,  des  arts,  ayant  sur  la  religion 
des  idées  philosophiques  très  étendues.  Devons-nous  placer  la  con- 
quête de  l'Egypte  à  l'époque  de  Menés  ou  à  celle  des  dynasties  dites 
divines?  11  est  impossible  d'en  rien  dire,  mais  le  fait  lui-même  de  l'in- 
vasion ne  saurait  être  nié,  il  suffit  à  prouver  que  la  vallée  du  Nil  a 
connu  la  phase  néolithique  de  la  civilisation. 

Quant  au  pays  d'où  vinrent  les  Egyptiens',  c'est  un  problème  que 
tous  les  savants  ont  abordé  sans  que  jusqu'ici  ils  soient  tombés  d'ac- 
cord. Dernièrement,  M.  le  vicomte  Jacques  de  Rougé,  dans  un  très 


1.  Bien  qu'Hérodote  l'affirme,  il  n'est  pas  prouvé  que  les  Égyptiens  aient  pratiqué 
les  incisions  sur  les  corps  à  momifier  à  l'aide  de  couteaux  de  pierre. 

2.  G.  Schweinfurth  [Sur  certains  rapports  entre  l'Arabie  Heureuse  et  l'Ancienne 
Egypte,  résultant  de  son  dernier  voyage  au  Yémen,  1890)  établit,  par  des  considérations 
géologiques  et  botaniques,  que  des  rapports  très  suivis  exisluieut  dans  l'auliquité  entre 
ces  deux  pays. 


T,ES  PREMIERS   EGYPTIENS  191 

intéressant  mémoire',  a  repris  l'examen  de  ce  problème  compliqué  et  a 
Iburni  dey  preuves,  à  mon  sens  très  concluantes,  en  faveur  de  l'origine; 
asialique  des  Égypiiens.  Je  ne  saurais  mieux  l'aire  que  d'(>mprunler  au 
travail  du  savant  égyplologue  ses  |)iiH(ipaux  arguments  cl  d'y  join- 
dre mes  observations  personnelles,  qui  toutes  viennent  appuyer  son 
opinion. 

«  Dans  son  mémoire  sur  les  monuments  qu'on  [)eut  attribuer  aux  six 
premières  dynasties',  mon  père  avait  déjà  mis  en  lumière  les  points  de 
contact  si  nombreux  qui  reliaient  la  langue  égyptienne  aux  dialectes 
syro-araniéens  :  analogies  qui  se  retrouvent  aussi  bien  dans  la  gram- 
maire que  dans  le  lexi(jue.  La  démonstration  en  a  été  faite  d'une  fa- 
çon si  rigoureuse  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'y  revenir  en  ce  moment,  et  ce 
phénomène  est  si  frappant  que  M.  Maspero,  après  avoir  indiqué,  comme 
cela  a  été  dit  plus  haut  ',  la  probabilité  de  l'origine  africaine,  ne  peut 
s'empêcher  d'écrire  les  lignes  suivantes,  qui  peuvent  en  paraître  une 
condamnation  sans  appel  *.  «  La  langue,  dit-il,  paraît  tenir  aux  idiomes 
«  sémitiques  par  beaucoup  de  ses  racines.  Elle  construit  comme  eux 
«  ses  pronoms  de  personnes,  suffixes  ou  absolus.  L'un  des  temps  de  la 
«  conjugaison,  le  plus  simple  et  le  plus  archaïque,  est  composé  avec  des 
«  suffixes  identiques  de  part  et  d'autre.  Sans  insister  sur  ces  rappro- 
«  chements  qui  laissent  prise  au  doute,  on  peut  presque  affirmer  que 
«  la  plupart  des  procédés  grammaticaux  en  usage  dans  les  langues  sé- 
«  mitiques  se  retrouvent  dans  l'égyptien  à  l'état  rudimentaire.  On  dirait 
«  que  le  parler  des  habitants  de  l'Egypte  et  ceux  des  peuples  sémites, 
«  après  avoir  appartenu  à  un  même  groupe,  se  sont  séparés  de  très 
«  bonne  heure,  dans  un  temps  où  leur  vocabulaire  et  leur  système  gram- 
«  matical  flottaient  encore.  Soumises  à  des  influences  différentes,  les 
«  deux  familles  auraient  traité  de  façon  diverse  les  éléments  qu'elles 
«  possédaient  en  commun.  » 

«  Que  pourrait  dire  de  plus  convaincant  un  partisan  de  l'origine 
asiatique  de  la  race  égyptienne  ^?  » 

I.  Vicomte  J.  de  Rougô,  Origine  de  la  race  égyptienne,  Aams  Mém.  de  la  Soc.  nation. 
des  Antiquaires  de  France,   t.  LIV,  ig5. 

a.  Vicomte  E.  de  Rougé,  Recherches  sur  les  monuments  qu'on  peut  attribuer  aux  six 
premières  dynasties  de  Manéthon,  p.  a  (1886). 

3.  Vicomte  J.  de  Rougé,  op.  cit.,  p.  •!;  G.  Maspero,  Uist.  anc.  des  peuples  de 
l'Orient,  p.  45  {1894-95)- 

4-  G.  Maspero,  Uist.  ancienne,  p.  41Î. 

5.  Pour  les  origines  linguistiques  égyptiennes,  cf.  Maspero,  Petite  histoire,  p.  i5  ; 
Benfey,  Ueher  das  Verhaltniss  der  .Egyptischen  Sprache  zum  semitischen  Sprach- 
stamm.,  Leipzig,  1847;  Schvvartze,  Das  aile  .Egypten,  t.  I,  2  ïhcil,  p.  2oo3  ;  E.  de 
Rougé,  Recherches  sur  les  monuments,  p.  2-4;  Lepsius,  Zeitschrifl,  1870,  p.  91-92; 
G.  Maspero,  Mém.  delà  Soc.  linguistique  de  Paris,  t.  II,  p.  t-8. 


192  T.l-S  PREMIERS  EGYPTIENS 

Lorsqu'il  s'agit  des  origines  d'un  peuple,  les  données  linguistiques 
sont  de  beaucoup  les  sources  les  plus  sûres  d'information;  j'en  ai  fait 
grand  usage  dans  mes  études  sur  les  peuples  du  Caucase  '.  C'est  par 
la  grammaire  et  le  lexique  que  j'ai  réfuté  l'opinion  de  ceux  qui  croyaient 
voir  dans  les  Ossèthesdes  blancs  Allophyles;  c'est  par  la  linguistique 
que  j'ai  pu  classer  les  peuples  de  la  Perse  et  du  Kurdistan.  Mais  en  ce 
(jui  concerne  les  Egyptiens,  ces  preuves  ne  sont  pas  les  seules  que 
nous  possédions  sur  leur  origine  asialif[ue.  En  effet,  dans  leur  écri- 
lui'e,  dans  leurs  arts,  nous  retrouvons  une  foule  d'indications  pré- 
cieuses qui  nous  mettent  ton  tes  sur  la  voie  delaChaldée  onde  l'Arabie. 

Les  monuments  les  plus  anciens  c[ue  nous  connaissions  jusqu'ici 
senties  stèles  des  rois  Djezer  et  Snéfrou  au  Sinaï,  et  ces  inscriptions 
sont  situées  en  Asie,  sur  le  chemin  qui  conduit  des  plaines  du  Tigre 
et  de  l'Euphrate  à  la  vallée  du  Nil.  Elles  nous  prouvent  qu'au  l°  siècle 
avant  notre  ère  les  Egyptiens  étaient  en  possession  du  cuivr(\ 

Or  nous  savons  que  jamais  il  n'a  existé  en  Afrique  orientale  et  aus- 
trale de  phase  dans  la  civilisalion  correspondant  à  notre  âge  du  bronze 
en  Europe,  que  les  Africains  sont  passés  directement  de  l'usage  de  la 
pierre  polie  à  celui  du  fer  '.  Ce  n'est  donc  pas  sur  le  continent  noir 
que  les  premiers  Égyptiens  eussent  pu  acquérir  des  connaissances 
métallurgiques;  c'est  en  Asie  qu'ils  les  ont  puisées,  tout  comme  c'est 
en  Asie  cju'ils  exploitèrent  les  mines  dès  le  déliut. 

Les  arts  dans  l'Ancien  Etnpiic  nous  fournissent  également  des  do- 
cuments précieux  sur  l'oi'igine  ethnique  des  hommes  qui  les  exécu- 
tèrent. «  Quelques  tombes  de  personnages  importants  datent  égale- 
ment de  la  IIP  dynastie,  et  parmi  elles  il  y  a  lieu  de  citer  les  tombes 
du  prince  Ra-holpou  et  de  la  princesse  Nofri,  découvertes  du  temps 
de  jMariette,  <à  Meïdoum.  Les  statues  de  ces  deux  personnages  ont  été 
retrouvées  intactes  et  elles  dénotent  un  art  déjà  consommé  :  celle  de 
la  femme  surtout,  oii  le  corps  se  moule  chastement  sous  le  tissu  léger 
de  la  robe,  peut  être  considérée  comme  un  chef-d'œuvre  delà  statuaire 
égyptienne.  Le  bandeau  qui  serre  la  coilTure  de  la  princesse  égyptienne 
mérite  une  attention  particulière  :  il  est  orné  de  motifs  que  l'on  dirait 
directement  venus  des  bords  du  Tigre  et  de  l'Euphrate;  c'est,  à  ma 
connaissance,  le  seul  exemple  en  Egypte  de  ce  mode  d'ornementa- 


1.  J.  (le  Morgan,  Recherches  sur  les  origines  des  peuples  du  Caucase  (i88p). 

2.  n  Quant  à  1  âge  du  bronze  (en  Afrique)  il  paraît  manquer,  du  moins  il  n'a  pas  été 
signalé.  De  l'âge  de  pierre  on  passe  directement  à  1  âge  de  fer.  En  effet,  1  usage  du  fer, 
comme  je  l'ai  établi  dans  ma  leçon  précédente,  a  été  découvert  en  Afrique.  C  est  de 
là  qu'il  s'est  répandu  dans  le  monde  entier  »  (G.  de  Mortillet,  Nègres  et  cii'ilisation 
égxplienne,  dans  Matériau.)  piiiir  I  liisi,  pritii.  et  uni.  de  l'homme.  3'  série,  t.  I,  p.  ii<)). 


LES  l'IiKMlKliS   i;(.VrilK.\S  l'JS 

lioa  ".  »  M.  Georges  PcmtoI,  dans  sou  Histoire  de  l'Ail,  a  cl'ailloui-s 
i'oinar(|iié  combien  le  profilde  ces  statues,  ainsi  ([ue  celui  d'un  person- 
nage de  la  même  épocjue  ^  nommé  Hosi,  rappellent,  avec  leur  nez 
aquiliii  et  leurs  lèvres  minces,  la  race  sémiti(|ue  plutôt  (jue  la  race 
égyptienne,  telle  que  nous  la  connaissons  par  les  autres  monu- 
ments '. 

Mes  fouilles  de  Dahchour  eu  I8!)'i-9r)  ont  mis  au  jour  uu  grand 
nombre  de  mastabas  a|)partenaut  à  ré[)0([ue  de  Snél'rou,  c'est-à-dirt; 
contemporains  des  statues  dont  il  vient  d'être  question.  Les  objets  y 
étaient  relativement  nombreux,  tant  en  céramique  (|u'eu  bas-reliefs 
et  en  statuettes  de  bois.  Quel(|U('s  murailles  portaient  des  fresques 
importantes;  de  telle  sorte  qu'a  uj  ou  rd'luii  no  us  sommes  devenus  riclies 
en  documents  de  cette  époque. 

L'impression  qui  domine,  quand  on  examine  avec  soin  lesdernières 
trouvailles,  est  que  les  arts  à  la  IIP  dynastie  avaient  déjà  atteint  leur 
apogée  et  que  les  hommes  figurés  sur  les  bas-reliefs  et  les  fresques 
ne  peuvent  être  des  Africains.  Ils  sont  de  couleur  jaune  (les  l'emmes 
surtout),  ont  le  nez  et  les  lèvres  minces  et  présentent  une  pin  siono- 
mic  d'une  grande  finesse.  Mes  observations  concordent  donc  pleine- 
ment avec  celles  de  M.  le  vicomte  J.  de  Rougé  relatives  aux  décou- 
vertes faites  en  Egypte  avant  moi.  M.  Maspero*  trouve  des  analogies 
frappantes  entre  les  arts  clialdéens  les  plus  anciens  et  ceux  de 
l'Egypte  à  la  IIP  dynastie.  «  Le  D'  Fritz  Homniel",  de  Munich,  a  été 
entraîné  plus  loin  encore  par  l'étude  de  ces  comparaisons  :  à  son 
avis,  la  civilisation  égyptienne  tiériverait  directement  de  la  Chaldée  : 
il  est  frappé  non  seulement  tles  ressemblances  étonnantes  de  la  sta- 
tuaire, des  constructions  j)yramidales  de  l'Egypte,  dont  il  rattache  la 
genèse  aux  temples  à  degrés  de  la  Chaldée  antique,  mais  il  croit 
même  retrouver  des  analogies  intimes  dans  les  noms  et  les  rôles  des 
divinités  principales  de  ces  deux  ])euples.  II  rapproche  enfin  d'une 
façon  curieuse  le  système  hiéroglyphique  égyptien  du  mode  d'écri- 
ture des  insci-iplious  primitives  de   la  Chaldée.  Sans   admettre  les 


1 .  CI  M.  Maspero  m'a  dit  loulefois  counaître  l'emploi  sur  d'auU'cs  moniiraents  égyp- 
licas  de  rosaces  analogues  à  celles  du  baudeau  de  la  princesse  Nofrit  >i  (Vicomte  J.  de 
liougo).  La  couronne  d'or  de  la  princesse  Kluioumit  (XII'' dyu.),  découvorle  à  Dalichour 
en  r8<)5,  porte  des  rosaces  semblables  (J.  de  M.). 

2.  L'époque  des  bois  sculptés  de  Hosi  est  incertaine,  tout  ce  qu'où  eu  peut  dirj  est 
qu'ils   appartiennent  à  uae  époque  très  arclia'i'que. 

i.  Vicomte  J.  de  Rou,'é,  op.  cit.,  p.  ii. 


.  G.  Maspero,  Recueil,  vol    XV,  p.  65,  iSgi. 


5.   Fritz  Homracl,  Der    Bahylonische  Ursprung  der  .Egtptisclum    Kiiltiii;  .\liuu-lieu, 
iS;)a. 


19'j  LES   PREMIERS  ÉGYPTIENS 

conclusions  du  D'  Hommel,  dont  la  preuve  i-este  à  faire,  il  y  a  lieu 
d'enregistrer  les  comparaisons  intéressantes  (|ui  ressortent  de  son 
travail  '.  » 

Une  autre  coïncidence  frappante  est  celle  signalée  par  M.  C.  Mauss* 
qui,  dans  ses  travaux  sur  les  monuments  de  la  Palestine,  ayant  été 
amené  à  étudier  les  étalons  de  mesure  en  usage  chez  tous  les  peuples 
de  l'antiquité,  a  constaté  que  la  coudée  égyptienne  est  identique  à 
celle  employée  anciennement  dans  la  Chaldée  et  il  constate  les  mêmes 
rapports  entre  les  mesures  de  capacité  des  deux  peuj)les.  Cette  obser- 
vation est  de  la  plus  haute  importance,  car  elle  prouve  une  commu- 
nauté d'idées  dans  la  conception  des  mesures,  fait  qui  ne  se  serait 
pas  produit  fortuitement  si  les  deux  peuples  n'avaient  pas  été  à  l'ori- 
gine mélangés  ou  en  contact. 

Les  monuments  du  bas  Euphrate  sont,  on  le  sait,  tous  construits  en 
briques  crues,  simplement  séchées  au  soleil;  ces  briques  sont  fréT 
quemment  reliées  entre  elles  par  des  pièces  de  bois  ou  des  roseaux, 
quand  le  massif  prend  une  certaine  importance.  Nous  retrouvons  en 
Egypte  le  même  mode  de  construction,  à  El-Kab  entre  autres  dans  les 
murailles  de  la  forteresse.  Quant  aux  mastalias  les  plus  anciens,  ils 
sont  faits  de  briques  crues,  tout  comme  les  maisons  deTell-Loh  et  des 
autres  cités  chaldéennes.  Ce  rapprochement  ne  manque  pas  d'intérêt, 
car  en  Chaldée  la  teri-e  étant  la  seule  ressource  pour  les  construc- 
tions, l'usage  de  la  brique  crue  s'impose,  tandis  qu'en  Egypte,  contrée 
où  abonde  la  pierre  calcaire,  son  emploi  est  anormal. 

Les  récentes  découvertes  de  M.  E.  Amélineau,à  Abydos,  ont  montré 
que,  dans  les  temps  archaïques,  c'est  à  l'aide  de  cylindres  et  non  de 
scarabées  qu'étaient  obtenus  les  cachets  dont  les  vases  étaient  scellés, 
et  nous  savons  qu'aux  époques  plus  récentes  l'usage  des  cylindres 
fut  abandonné;  ne  devons-nous  pas  voir  dans  l'emploi  de  ces  cylin- 
dres une  nouvelle  preuve  en  faveur  de  la  communauté  des  usages 
entre  la  Chaldée  et  l'Egypte  primitive? 

Il  serait  aisé  de  citer  un  bien  plus  grand  nombre  de  preuves  à 
l'appui  de  la  théorie  qui  fait  venir  d'Asie  les  Égyptiens,  d'en  tirer  de 
la  Bible,  de  la  matière  dont  sont  faites  les  statues  archaïques  chal- 
déennes, etc.  Mais  mon  but  n'est  pas,  dans  ce  travail,  de  suivre  les 
Egyptiens  jusqu'à  leur  pays  d'origine.  Je  me  borne  à  rechercher  les 
traces  de  la  vie  en  Egypte,  antérieurement  à  la  venue  dans  la  vallée 
du  Nil  des  Egyptiens  pharaoniques. 


I.  Vicomlc  J.  de  Rongé,  op.  cit.,  p.  il. 

■>.  C.  Mauss,   L'église   Saiid-Jcrrmie   h  Abou-Gosch.  Mesure    théorique  des  piliers 
de  Telle,  iS()1. 


[,i'S  puRMir.RS  i''(;yptirns  195 

Bien  que  les  Égypliens  aient  apporlé  avec  eux  les  principaux  élé- 
ments de  leur  civilisation,  ils  ont  sûrement  mis  à  profit  les  usai^es  des 
peuples  sauvaj^es  qu'ils  trouvèrent  vivant  sur  les  bords  du  fleuve  et 
tirani  parti  des  ressources  locales.  Bien  certainement  les  autoch- 
tones,quoi([ue  peu  avancés,  possédaientdéjà  une  civilisationspéciale, 
propre  au  pays  qu'ils  habitaient  et  toute  diflerente  de  celle  des  en- 
vahisseurs. Cette  civilisation  rudimentaire  profita  aux  Égyptiens,  et 
c'est  du  mélange  de  ces  connaissances  si  diverses  que  naquit  la  véri- 
table vie  pharaonique  pendant  les  premières  dynasties  et  le  Moyen 
Empire.  On  trouverait  aisément  dans  les  colonies  modernes  des 
exemples  de  coutumes  empruntées  aux  indigènes  par  les  conqué- 
rants et  adoptées  par  les  hommes  les  plus  c-ivilisés  :  ce  fait  naturel  eut 
lieu  dans  rEgy|)t(>  antique  comme  il  se  ren(:ontre  de  nos  jours. 

M.  G.  de  Mortillet  s'exprime  en  ces  termes  lorsqu'il  parle  des 
origines  égyptiennes  : 

«  La  civilisation  initiale  de  l'Egypte  provient  de  l'Afrique.  Pour  le 
prouver,  il  suffit  de  rappeler  l'emploi  du  fer'  et  les  animaux  domes- 
tiques de  l'Ancien  Empire.  —  Le  premier  chien  des  Égyptiens  est  un 
grand  et  beau  lévrier  qui  n'est  autre  que  le  cabéru  d'Abyssinie  do- 
mestiqué. —  Dès  la  plus  haute  antiquité  les  Égyptiens  ont  possédé 
le  chat  domestique.  C'était  non  seulement  l'hôte  sacré  des  habitants, 
mais  on  l'employait  encore  à  la  chasse,  comme  le  montrent  diverses 
peintures.  C'est  le  chat  ganté  de  Numidie  apprivoisé  et  domestiqué. 
Longtemj)s  il  est  resté  confiné  en  Egypte.  C'est  de  là  qu'il  s'est  ré- 
pandu un  peu  partout,  mais  assez  lentement.  En  Europe,  le  chat 
domestique  ne  date  que  du  commencement  de  notre  ère.  Brehm 
dit  :  «  Dans  l'Europe  occidentale  on  ne  le  connaissait  pour  ainsi  dire 
«  pas  avant  le  x=  siècle  de  notre  ère.  »  —  Parmi  les  ruminants,  les 
Égyptiens  avaient  des  troupeaux  d'antilopes  d'espèces  diverses  toutes 
africaine*;.  —  L'âne,  animal  éminemment  africain,  était  le  seul  équidé 
employé  en  Egypte  pendant  tout  l'Ancien  Empire;  on  le  voit  très  fré- 
quemment représenté  ;  tandis  que  le  (dieval,  originaire  d'Asie,  n'appa- 
raît en  Egypte  (|u'après  les  Pasteiu-s,  au  commencement  de  la 
XVIIP  dynastie.  Ce  pauvre  âne,  si  utile,  fut  alors  méprisé  et  consi- 
déré, ainsi  que  nous  l'apprend  Plutarque,  comme  un  animal  impur 
consacré  à  Typhon.  —  L'âne  venait  du  désert,  il  fut  voué  à  Ty[)hon, 
dieu  du  désert".  » 


r.  Je  no  partage  pas  l'opinion  do  M.  G.  de  Mortillel  en  ce  qui  eoucerno  l'usage  du 
fer. 

2,  G.  de  Mortilict,  Nègres  ut  civilisation  égyptienne,  dans  Matériaux  pour  l'histoire 
de  l'homme,  3°  série,  t.  I,  p.  iic). 


lyC)  LES  PRKRUKKS  EGVPTIEXS 

Lors  tic  leur  arrivée  dans  la  vallée  du  Nil  les  pré-Egyptiens  ne  eon- 
naissaient  probablement  pas  encore  Tart  de  dresser  les  animaux,  ou 
tout  au  moins,  s'ils  en  avaient  ([ucdques  notions,  elles  étaient  fort  res- 
treintes, sans  quoi  ils  eussent  apporté  avec  eux  des  espèces  étran- 
gères à  l'Egypte,  et  jusqu'ici  nous  ne  connaissons,  parmi  les  animaux 
domestiques  figui-és  sur  les  mastabas  et  dans  les  signes  hiérogly- 
phiques, que  des  espèces  indigènes  de  la  vallée  du  Nil. 

M.  G.  de  Mortillet  va  plus  loin  dans  cet  ordre  d'idées  :  il  range,  dans 
les  connaissances  que  les  Egyptiens  reçurent  d'Afrique,  l'usage  du 
i'er.  Je  ne  partage  pas  son  opinion  à  cet  égard  et  je  crois  plutôt  que  si 
les  Africains  passèrent  directement  de  la  pierre  polie  au  fer  sans  tran- 
sition par  le  bronze,  c'est  que  les  Égyptiens  leur  enseignèrent 
l'usage  des  métaux  qu'ils  connaissaient  tous  lors  de  leur  venue.  La 
conquête  de  la  vallée  du  Nil  par  un  peuple  venant  du  nord  fut  pour 
l'Afrique  l'ouverture  d'une  ère  nouvelle.  Dans  les  premiers  siècles 
(|ui  suivirent  roccu))ation  militaire,  les  pliaroons  furent  absorbés  par 
la  création  de  leur  royaume;  plus  tard,  quand  ils  furent  assurés  de  la 
paix  intérieure,  ils  tournèrent  l'activité  de  leur  peuple  vers  les  terri- 
toires (jui  limitaient  leur  puissance. 

Ce  fut  pour  eux  l'ère  de  la  colonisation,  de  l'extension  extérieure, 
et  l'Egypte  n'aurait  pas  atteint  une  richesse  aussi  considérable  dès 
l'Ancien  et  le  Moyen  Empire,  si  elle  n'avait  tiré  des  pays  voisins  une 
grande  partie  de  ses  ressources.  A  celte  époque  d'extension  corres- 
pond probablement  celle  de  la  diffusion  des  métaux,  dont  l'apparition 
en  Afrique  succéda  directement  à  l'âge  de  la  pierre.  Plus  tard,  quand 
les  nègres  connurent  le  fer,  ils  le  fabriquèrent,  employant  les  mine- 
rais qui  abondent  dans  l'Atrique  centrale  ;  il  en  résulta  un  véritable 
foyer  de  production  de  ce  métal,  (|u'il  ne  faut  pas  confondre  avec  un 
centre  d'invention. 

«  Sans  le  fer,  la  civilisation  égyptienne  n'aurait  jamais  pu«atteindre 
le  haut  degré  de  développement  où  elle  est  parvenue.  Les  roches  de  la 
Haute-Égypte  sont  fort  dures,  le  fer  était  indispensable  pour  les  tail- 
ler; donc,  sanslui,  l'architecture  et  la  sculpture  égyptiennes  n'auraient 
pas  pu  prendre  leur  brillant  essor  et  atteindre  la  perfection  qu'elles 
ont  acquise  dès  les  premières  dynasties'.  » 

On  a  supposé  que  les  Egyptiens  employaient  le  diamant  pour 
couper  les  roches  dures  dont  ils  faisaient  un  grand  usage.  Cette  ex- 
plication mérite  d'être  signalée,  non  pas  par  son  côté  scientifique, 
elle  n'en  possède  aucun,  mais  à  cause  même  de  la  singularité  d'une 


I.  G.   de   Morlillet,   Aèi^res   et   cisHlisation  égyptienne,    dans   Mat,   pour  l  liist.    de 
ritonimc,  3''  série,  I.  I.  ]).    i'>(). 


I,i:s  PKEMIKKS  MCYPTIEXS  197 

pareille  siipposilion.  Il  suiïit  tic  visilci'  les  carrières  d'Assoiian,  de 
l'egardcr  avec  soin  les  ébauches  de  statues  qui  sont  exposées  dans 
le  Musée  de  Gui/eh,  pour  se  rendre  compte  de  l'inanilé  d'uiu;  sem- 
blable thèse.  Les  tailleurs  de  [)icrre  éi^yptiens  cnle\aieiit  dans  les 
roches  les  |ilus  ilures  des  copeaux  de  grandes  dimensions  avec  des 
instruments  qui  rorc('m(Mit  fuirent  d'une  extrême  dureté.  Quant  aux 
vases,  ils  purent  être  faits  au  tour  en  employant  comme  outil  de  sim- 
ples morceaux  de  bois  et  de  la  poudre  de  quartz  ou  le  sable  du  désert. 
Il  n'est  donc  pas  nécessaire  d'aller  au  loin  chercher  les  procédés 
qu'employèrent  les  Egyptiens,  le  sol  du  désert  les  fournit  et  bien  cer- 
tainement même  ils  étaient  dès  longtemps  en  usage  avant  l'arrivée 
des  conquérants  civilisateurs. 

Dans  les  pages  qui  précèdent,  je  crois  avoir  démontré  non  seule- 
ment que  les  anciens  habitants  de  l'Egypte,  ceux  qui  précédèrent 
la  conquête,  étaient  parvenus  à  un  degré  de  civilisation  tléjà  fort 
avancée,  quoique  ne  possédant  pas  l'usage  des  métaux,  et  que  si  les 
Egyptiens  à  leur  arrivée  étaient  déjà  civilisés,  ils  n'emj)runtèrent  pas 
moins  aux  races  qu'ils  dominèrent  une  l'oule  d'usages  et  de  connais- 
sances pratiques  <[u'ils  ne  pouvaient  tenir  de  leur  pays  d'origine, 
tant  ils  sont  spéciaux  à  la  vallée  du  Nil. 


Fig.  526.  —  Totes  liLjuriies  sur  les  fresques  de  l'époque  du  roi  Snéfroii  (III'-  dynastie), 
à  Dahcliour  (Dessin  d'après  nature  de  M.  G.  Legrain.) 

«  De  ce  que  les  nègres  sont  inférieurs  aux  blancs,  cela  ne  veut  pas 
dire  qu'ils  soient  incapables  d'arriver  par  eux-mêmes  à  une  civilisa- 
tion assez  avancée.' —  En  Afrique  nous  trouvons  tout  d'abord,  comme 
en  Europe,  un  âge  de  la  pierre.  Cet  âge  débute,  comme  en  France, 
en  Angleterre,  en  Espagne,  par  le  coup-de-poing  chelléen,  gros 
instrument  en  pierre,  taillé  en  pointe  et  se  tenant  directement  à  la 
main.  Il  en  a  été  recueilli  en  Algérie  en  Egypte  et  jusque  dans  le 
pays  des  Touareg.  Les  silex  taillés  abondent  dans  toute  la  région 
nord,  aussi  bien  qu'au  Gap  de  Bonne-Espérance.  Enfin  des  haches 
polies  ont  été  indiquées  sur  plusieurs  points,  même  dans  l'Afrique 
centrale'.  » 


I.    G.   de   Mortillet,  Nègres  et  civilisation  égyptienne,  daus  Matériaux  pour  t'Iiisl. 
priui.  et  nat.  de  l'homme,  V  série,  t.  I,  p.  iiç). 

13 


198  LES   PREMIERS   EGYPTIENS 

Il  V  a  donc  à  considérer  dans  la  civilisation  égyptienne  deux  sources 
différentes,  Tune  probablement  asiatique,  l'autre  africaine.  Dans 
bien  des  cas  il  est  aisé  de  retrouver  les  traces  de  ces  deux  foyers; 
Tétude  minutieuse  des  objets  les  plus  anciens  permettra  un  jour  de 
faire  la  part  de  chacune  de  ces  origines. 


CIIAPITHE    VIII 


Les  Métaux. 


Nous  avons  vu  dans  les  pages  qui  précèdent  à  (|uol  degré  d  habi- 
leté dans  la  ialji-ication  de  leurs  ustensiles  étaient  parvenus  les  pré- 
Egyptiens,  quand  les  étrangers  se  présentèrent  dans  la  vallée  du  Nil 
pour  la  conquérir.  L'examen  des  instruments  de  silex,  de  même  que 
l'étude  à  laquelle  s'est  livré  M.  le  docteur  D.  Fouquet  sur  les  sque- 
lettes d'El-'Amrah,  nous  prouvent  que  peu  à  peu  la  l'ace  dominante  se 
mélangea  avec  celle  îles  autochtones,  ([ue  les  usages  anciens  furent 


Fig.  527.  —    Bas-relief  du  tombeau  de    Mcra    fVI"  dyuastic),    représentant  le  travail 

des  métaux  précieux. 

lentement  délaissés  pour  faire  place  à  des  coutumes  plus  raffinées, 
que  dans  la  nature  ethnique  des  habitants  de  la  vallée  il  s'opéra  des 
transformations  très  importantes,  teiulant  à  faire  disparaître  les  ca- 
ractères si  nets  des  premiers  hommes  pour  se  rapprocher  de  ceux 
des  Égyptiens  pharaoniques  et  constituer  ainsi  le  fellah  de  l'anliquité. 
C'est  bien  certainement  au  nioTuenl  seuh'nuuit  où  les  Égyptiens  en- 
trèrent en  contact  avec  les  autocitlones,  ([ue  les  indigènes  apprirent 


200 


LES  METAUX 


l'usage  des  métaux  et  comnienrr'rent  à  les  employer.  Il  est  certain 
(|iie  les  maiti-es,  ceux  qui  étaient  en  |)ossession  de  la  grande  civilisa- 
tion, étaient  depuis  longtemps  accoutumés  aux  opérations  métallur- 
giques (llg.  527),  et  qu'ils  connaissaient  les  alliages  du  cuivre  et  de 
l'étain.  Peut-être  même  doit-on  penser  que  le  1er  et  l'acnerleur  étaient 
l'amiliers.  Dans  tous  les  cas,  ils  tirèrent  des  métaux  dont  ils  dispo- 
saient un  parti  extraordinaire,  car  les  roches  les  plus  dures,  les  ma- 
tières les  plus  résistantes  cédèrent  sous  les  coups  de  leurs  outils  et 
furent  travaillées  avec  une  précision  mathématique  telle  qu'il  est 
encore  aujourd'hui  difllcile  de  la  surj)asser. 

Les  instruments  métalliques  les  phis  anciens  ([u'on  connaisse  en 
Egypte  sont  de  petits  outils  de  bronze  (ju'on  rencontre  dans  les  tom- 
beaux archaïques  d'Abydos,  d'El-'Amrah,  de  Toukh,  de  Zawaïdah,  etc. 


532 


5'j8  à  535.  —  Objets  divers  en  cuivre  et  en  bronze  {ûg.  528  à  533  et  535  :  nécropole 
[l'El-'Amrati  ;  —  lig.  534  :  lijœklienmœcidiags  de  Toukh).  2/3  grandeur  naturelle. 


Ils  sont  fort  rares,  se  trouvent  dans  des  sépultures  contenant  en 
même  temps  des  silex  taillés  et  semblent  avoir  été  placés  dans  ces 
tombeaux  à  titre  d'objets  fort  précieux. 

Ce  sont  de  petits  couteaux  courbés,  rappelant  par  leur  forme 
certaines  grandes  lames  de  silex  (fig.  528),  des  poinçons  (fig.  529, 
530,  531)  dont  une  extrémité  est  aiguë,  tandis  que  l'autre  est  garnie 
d'une  tète  formée  par  l'enroulement  de  la  lige,  tout  comme  nous 
avons  encore  coutume  de  faire  pour  beaucoup  de  nos  épingles 
modernes.  Ce  sont  aussi  des  ciseaux  (fig.  532,  533),  de  petites  pin- 
cettes (fig.  534)  et  des  hameçons  (fig.  535).  Ces  divers  instruments, 
très  petits,  dénotent,  de  la  part  de  ceux  cjui  les  fabriquaient  et  en  fai- 
saient usage,  une  grande  économie  de  la  matière. 


I.I'S  MK'IAIX 


201 


PnrCois  aussi,  on  rencontre,  dans  les  tonibus  (|iii  signalont  la  tran- 
sition de  la  pierre  aux  métaux,  ((uciquos  armes  plus  im[)orlantcs.  Je 
citerai  particulièrcmenl  une  lame  Iriani^ndaire  (fig.  53C}\,  trouvée  tout 
dernièrement',  dans  la  nécro|)()le  de  Sao-liel-el-Baglieh,  en  compagnie 
de  silex  très  liahilemenl  travaillés. 


L.\  âù': 


l'ig.  530.  —  Tète  do   lancr  en  bronze  (nécrnpoli 

de  Sagticl-cl-Baglioh,    Musée   de   Guizch). 

?.;'3  grandonr  nalurclle. 

Fig.  :')3y  à  .")3c).  —  Instninicnls  en  Ijronze 

(nécropole  d'EI-Cheikh-Mebadcr. 

XVIII"  à  XX"  dynastie).   1/2  grandeur  uaUir<'lle. 


Cette  pièce,  (|ui  peut  aussi  bien  être  considérée  comme  une  lame 
de  poignard  court  ou  comme  une  tête  de  lance,  dénote,  par  la  nervure 
qu'elle  porte  en  son  milieu,  des  connaissances  déjà  très  élcTulues 
dans  l'usage  des  métaux.  Elle  est  percée  d'un  trou  unique  (jui  per- 
mettait jadis  de  la  fixer  à  la  hampe  ou  dans  la   poignée,  et  rappelle 


r.  Avril    iSi)(). 


202 


LES  MKTAUX 


I 


i 


J- 


n 


:Uh 


f: 


l)eaiiron|)  les  lypes  les  jjIus  archaïques  de  l'âge  du  bronze  en  Europe, 
types  qu'on  est  convenu  de  ranger  dans  le  niorgien  '. 

Les  lames  de  cette  nature  sont  fort  rares  en 
Egypte.  La  seule  qui,  d'une  manière  certaine, 
appartienne  aux  époques  les  plus  anciennes, 
est  celle  que  je  viens  de  citer.  Le  Musée  de 
Guizeh  en  |)ossède  |)lusieurs  autres,  mais  elles 
ont  été  trouvées  par  des  fellahs  et,  ne  portant 
aucune  indication  de  provenance,  sont  perdues 
pour  la  science. 

Dans  les  tombes  de  l'époque  de  Snéfrou  je 
n'ai  rencontré  que  fort  peu  de  traces  de  cuivre, 
mais  toutes  les  sépultures  avaient  été  spoliées 
et,  sauf  en  ce  qui  concerne  leur  composition 
chimique,  ces  fragments  ne  présentaient  aucun 
intérêt. 

Au  Moyen  Empire  les  instruments  de  bronze 
deviennent  beaucoup  plus  abondants  que  sous 
les  premières  dynasties  :  on  en  a  rencontré 
dans  un  grand  nombre  de  localités,  telles  que 
llawarah,  Gourol),  Licht,  Dahchour,  etc.  Ils  se 
présentent  sous  toutes  les  formes  dans  les 
tombeaux  et  au  milieu  des  décombres  qui  en- 
combrent les  constructions  de  cette  époque. 
Le  travail  des  armes  %  des  vases  ',  des  objets 
votifs,  est  d'une  rare  perfection  ;  d'ailleurs  les 
l)ijoux  qui  les  accompagnaient  dans  les  sépul- 
tures montrent  à  quel  degré  de  civilisation  les 
Egyptiens  du  Moyen  Empire  étaient  parvenus. 
■^f-'fM  ^^  poignard  de  bronze  (fig.  540)  trouvé  dans 


I 


Ô"^: 


h 


il 


'ii 


Fig.  540.   —  Poignard 
d'Userteson  HI 
(XII'  dynasiic). 


I.  Les  lames  de  ce  genre  sont  communes  en  Europe  occi; 
dentale.  Ex.  :  Poignard  de  bronze  provenant  d'un  tumulus  à 
Brigmilston  (Wiltshire,  Angleterre),  cf.  John  Evans,  Petit 
alhuin  du  hronze,  pi.  XIII,  fig.  2.  —  Poignard  à  lame  trian- 
gulaire, muni  d'une  poignée  en  bronze,  Castione  dei  Mar- 
chesi  (Parmesan,  Italie),  cf.  Chierici,  BiiUetlino  di  paletnologia,  1876,  pi.  I,  fig.  a.  — 
Lame  triangulaire:  Héréchède  à  Baroussc  (Hautes-Pyrénées,  France),  cf.  G.  et  A.  de 
Mortillet,  Musée  préhistorique,  p].hX\lU,ùg.  694.  —  Lame  triangulaire,  palaiiUe  de 
Gerolin,  lac  de  Bienne  (Suisse),  cf.  Coll.  Gross.  —  On  rencontre  également  de  ces 
poignards  en  Allemagne,  en  Scandinavie,  etc. 

2.  J.  de  Morgan,  Fouilles  à  Dnhchmir  en  18;)'^  (1S95,  sous  presse). 

3.  Brûle-parfums  des  princesses  Ita  et  Ivbuoumit,  à  Dahchour. 


LES  MirrAix 


2o:i 


la  pyramide  du  roi  Userleseii  111,  cl  celui  ((ue  renfermait  la  sépul- 
ture de  la  princesse  Ita,  présentent  tous  deux  des  caractères  Iran- 
chement  égyptiens  et  foui-nissent  les  modèles  qu'on  retrouve  dans 
tous  les  bas-reliefs  de  la  période  pharaonique.  La  première  de  ces 
armes  est  entièrement  en  bronze,  elle  porto  un  pommeau  d'ivoire; 


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Fig.  54 r.  —   Instruments   en  bronze.   Tombeau   dos   princesses  (XII°  dynastie, 

Araenemhal  IF). 
Fig.  542.  —  Hache   en   bronze    (localité   inconnue,  Musée    de    Guizeh).    1/2    grande 

naturelle. 


la  seconde,  beaucoup  plus  riche,  est  garnie  d'une  poignée  d'or 
incrustée  de  pierreries,  tandis  que  son  pommeau  est  formé  d'une 
pièce  de  lapis-lazuli. 

Les  vases  métalliques  de  la  XIP  dynastie  sont  des  briile-parfums 
munis  de  leur  plateau  et  de  leur  couvercle,  ustensiles  légers  et 
minces,  en  cuivre  martelé  avec  beaucoup  d'adresse  et  sans  soudures. 


20 'i 


T,ES  METAUX 


La  tomlie  de  In  ])riii(csse  Kliuouinit  reiilernuiit  un  grand  noinhre 
de  petits  outils  de  l)rori/,e  (fig.  5Vl)  :  hachettes,  couteaux,  ciseaux, 
gouges,  etc.,  qui  semblent  être  plutôt  des  objets  votifs  que  des  ins- 
truments ayant  réellement  servi  pour  des  travaux.  Parmi  ces  outils, 
seuls  les  ciseaux  se  rapprochent  par  leur  forme  de  ceux  trouvés  dans 
les  sépultures  archaïques,  les  autres,  et  spécialement  les  liachettes, 
offrent  des  caractères  franchement  pharaoniques 

Pendant  la  durée  du  Nouvel  Empire,  le  bronze  apparaît  comme  d'un 
usagetrès  répandu,  on  le  trouve  employé  dans  la  fabrication  des  armes 
et  des  outils  de  tout  genre.  11  compose  les  gonds  des  portes  dans  les 
temples  et  semble  avoir  tenu  lieu  du  fer  dans  la  plupart  des  cas.  Les 
trouvailles  de  statuettes  de  bronze  de  Sa-el-Hagar,  du  Sérapéum  de 
Saqqarah,  de  Memphis  et  d'un  grand  nombre  d'autres  localités,  mon- 
trent à  quel  point  cet  alliage  était  alors  a])ondant  dans  le  commerce 
de  la  vallée  du  Nil,  mais  lusage  de  mouler  en  bronze  remonte  beau- 
coup plus  haut  que  le  Nouvel  Empire. 


Fig.  543.   —    Haclio   en  bronze  de  hi  Xlle  dynastie  (mastabas  do  làcht).  i/a  grandeur 

natui'elle  . 

La  statuette  en  bronze  la  plus  ancienne  qui  jusqu'ici  soit  parvenue 
à  notre  connaissance  est  une  ligurine  trouvée  dans  la  nécropole  de 
Meïr;  elle  appartient  dûment  à  la  XV  dynastie,  taudis  que  beaucoup 
d'autres  qu'on  suppose  très  archaïques  doivent  être  reportées  au  Nou- 
vel Empire,  celles  du  Louvre  (collection  Posno)  entre  autres.  L'art  de 
mouler  en  métal  des  représentations  artistiques  est  donc  fort  ancien,  et 
il  est  à  penser  que  l'Ancien  Empire  lui-même  en  fournira  un  jour  des 
spécimens,  caria  perfection  que  nous  constatons  dans  l'exécution  de 
la  statuette  de  :Meïi'  ne  permet  pas  de  douter  qu'à  la  XP  dynastie  cette 
branche  de  l'art  ne  fût  déjà  parvenue  à  son  apogée. 

Le  Musée  de  Guizeh  renferme  un  grand  nombre  d'instruments  et 


r.F,S  MKTAUX 


20-S 


d'nnncs  de  I)roir/.c,  in;\llicuireiiseuicnl  la  pluiiarl  de  ces  oljjels  pro- 
viennent de  localités  inconnues;  leur  époque  ainsi  (|ue  lescondilioiis 
dans  lesquelles  on  les  a  rencontrés  n'ont  pas  été  notées.  Quoi  qu'il 
en  soit,  bien  que  leur  étude  présenle  peu  d'intérél  au  point  de  vue  de 
la  progression  suivie  par  les  Egyptiens  dans  l'usage  des  mélaux,  il 
est  bon  de  les  citer,  car  ils  fournissent  des  iudiealions  nombreuses 
sur  les  formes  adoptées  dans  l'Egypte  anli(|uc. 


Fig.    5/14    à   il\(i.    —    Hnclies    en     bronze  (locnlilcs     inconnues,    Musée     de    (inizeli). 

i/4'gi"i>Ddeiii'  naturelle. 


Le  type  de  hache  qui  semble  être 
le  plus  archaïque  est  un  lingot 
long  de  bronze'  (fig.  542)  qui,  s'il 
n'a  pas  été  moulé  sur  une  hache 
de  pierre  polie,  présente  du  moins 
tous  les  caractères  des  outils  de  ce 
genre  employés  autrefois  par  les 
autochtones.  La  provenance  de  cet 
instrument  unique  ne  s'est  mal- 
heureusement pas  conservée. 

La  forme  la  plus  fréquente  est 
celle  qui  nous  est  l'ournie  par  les 
hachettes  votives   de   la  princesse  '*'  3. s 

KhnOUmit  (fig.  .^41).  On  la  retrouve  Fig-  rily   et    r)'i8-    —     tiaches     en    hronzi- 

di         1        ,           ,,  (localités  inconnues,   Musée  de  Ciuizeli) 

ans      une     grande     hache     deCOU-  (f.g.  547  :    ./4    grandeur  naturelle;    - 

verte  à  Licht   par   M.  J.-E.    Gautier  *'J?-  5'|S  :    1/2  grandeur   nalurelle). 

(fig.  54.3)  ;  la  lame,    élargie  à  son 

tranchant,  est  évidée  sur  les  côtés  dans  la  |)arlie  médiane  et  miniie 

de  deux  forts  ailerons  destinés  à  la  maintenir  dans  rcmmanchement. 

Le  Musée  de  Guizeh  possède  bon  nombre  de  haches  de  ce  modèle 


I.  Musée  de  Guizeh,  Invenltiire,  u"  '278(1'!. 


20f, 


I,KS  Ml-TArx 


(fig.  rii/i,  545,  5^V,),  dont  la  forme  et  les  dimensions  sont  variables,  il 
est  vrai  (lig.  547,  54S),  maiscjui  renlrcnt  toujours  dans  le  même  type; 


Kig.  549.  —  Hache  en  bronze  emman- 
chée (Deïr-el-Bahri,  Musée  de  Gui- 
zeh).  1/4  grandeur  naturel 

Fig.  55o.  —  Hache  en  bronze  emman- 
chée (localité  inconnue.  Musée  do 
Guizeti).    1/2  grandeur  naturelle. 


l'ig.    STii    à    xiU.i.    —    Instruments   en   bronze  (localités   inconnues.   Musée    de    Guizeh. 

1/2  grandeur  naturelle. 


T-RS  MKTAUX 


207 


on  passe  ainsi  aux  insliiiments  du  Nouvel  Empire,  datés  par  les  ins- 
criptions (|irils  portent  (fig.  549^  550). 

Si  nous  suivons,  sui'  les  statues  et  les  has-reliefs,  les  Lransfomia- 
tions  qui  s'opèrent  avec  les  siècles  dans  la  l'orme  des  haches,  nous  la 


S 


Fig.   .S50.    —   Haclie    en    bronze   à    deux   tranolianls    (Gcbelein,    Musée    de    Guizehl. 

i/a  grandeur  naturelle. 
Fig.    557    à    55s.    —    Poignards    en    bronze    (localité    inconnue,    Musée    de    Guizeh}. 

1/3  grandeur  natui-elle. 


trouvons  conforme  à  ce  (pie  je  viens  d'exposer.  Toutefois,  dans  cer- 
tains cas,  le  sculpteur  s'étant  inspiré  de  modèles  archaïques,  il  y  a  lieu 
de  faire  une  sélection  dans  les  monuments  qu'on  étudie.   Dans  tous 


208 


LKS  METAUX 


les  cas  et  à  tous  les  âges,  les  haches  égyptiennes  ne  présentent  aucune 
analogie  avec  celles  des  diverses  localités  de  TEurope  et  demeurent 
spéciales  à  la  vallée  du  Nil. 

A  côté  des  haches  proprement  dites  sont  des  outils  de  bronze  longs 
et  plats,  munis  d'un  tailhint  élargi,  et  dont  quelques-uns  sont  datés 
par  des  textes  (fig.  ^51  à  555).  Ces  instruments  semblent  avoir  servi 


Fig.  .^.')9  à  r)()4-  —  Couloauxcu  brouze  d'époque  liislor'iquo  (lig.  5ôc)  et  TiGo  :  i/4g''''in- 
dciir  naturelle;  dg'.  .")(ii  à  ."ifia  :  1/2  grandeur  natui'ello,  localités  inconnues,  Musée  de 
Guizeh  ;  (ig.  564  •  Tell-el-Ctiorab,  Fayoum,  XIX"  dynastie).   i/4  grandeur  naturelle. 


de  ciseau  à  main.  L'un  d'eux,  provenant  de  Gebelein  (fig.  556),  est  à 
double  tranchant. 

Les  poignards  (fig.  557,  558)  présentent  la  même  forme  que  ceux 

dont  il  a  été  parlé  plus  haut  ;  ils  rencontrent  des  analogies  dans  les 

armes   de  même  nature  usitées  à  l'âge  du  bronze  dans  toute  l'Europe. 

Les  lames  des  couteaux  (fig.  551)  à  504)  présentent  une  grande 


LES  MirrAix: 


209 


variété  de  formes  :  très  simples  au  début  et  indépendantes  de  leur 
manche,  elles  sont  plus  tard  fondues  d'une  seule  pièce  avec  lui,  mais 
ne  présentent  aucuns  caractères  spéciaux  à  rEgypte. 

Aux  temps  archaïques,  les  tètes  de  lances  sont  composées  d'une 
siinj)lc  lame  de  I)ron/.o  entrant  dans  rextrémité  di;  hi  liampe  (fig.  565), 
tout  comme s'eniiiiancheiit  les  silex  taillés;  mais,  dès  le. Moyen  Empire, 
nous  voyons  apparaître  la  douille  (fig.  566),  et  les  lances  prennent  dès 
lors  une  l'orme  analogue  à  celles  de  l'âge  du  bronze  européen. 


Fig.  .S(),").  —  ïéle  de  lance  on  bronze   (localilo  iucouiuip.  Musée  de  Guizeli). 
I,  4  grandeur  naturelle. 
Fiif.  !)6(i.  —  Tète  de  lance  en  bronze,  XII''  dynasiie  (mastabas  de  Licht). 
2/3  grandeur  untnrclle. 


Les  pointes  de  llèches  métalliques  alfectent  toutes  les  formes  qui 
nous  sont  fournies  par  l'antiquité  préhistorique  et  historique  dans  les 
autres  pays  ;  les  unes  sont  en  feuille  de  saule  (fig.  5()8,  570,  578..  579), 
ou  en  losange  (fig.  509)  et  dépourvues  de  douille;  d'autres  (fig.  571, 
572)  sont  triangulaires.  Enfin  les  plus  abondantes  étaient  destinées  à 
recevoir  l'extrémité  du  bois  et  non  à  la  pénétrer.   Ces  divers  types 


210 


LES   MKTAUX 


appartiennent  à  toutes  les  époques  depuis  les  débuts  du  Nouvel 
Empire;  ils  furent  usités  en  môme  temps  que  les  tranchants  de  silex  ; 
mais  je  ne  pense  pas  qu'on  en  ait  rencontré  jusqu'à  ce  jour  apparte- 
nant d'une  manière  certaine  à  l'Ancien  ou  au  Moyen  Empire.  Le 
manque  absolu  de  renseignements  sur  les  conditions  dans  lesquelles 
furent  trouvées  celles  qui  figurent  dans  les  galeries  de  Guizeh  ne  per- 
met pas  de  se  prononcer  d'une  manière  absolue  sur  l'époque  à  laquelle 
les  pointes  de  llèches  métalli({ues  furent  mises  en  usage  dans  la  vallée 
(lu  Nil.  Mais  je  puis,  pour  ma  part,  affirmer  ce  fait  que  jamais  je  n'en 
ai  rencontré  dans  les  sépultures  de  la  XII«  dynastie. 


Fig.  567  à  571).    —  Pointes  de  flèches  eu  bronze  dépoque  historique  (localités  diverses, 

Musée  de  Guizeh). 


Si  mes  suppositions  se  justifient,  et  que  les  premières  tètes  métal- 
liques de  flèches  doivent  être  attribuées  auNouvel  Empire,  il  y  aurait 
lieu  d'envisager  trois  phases  diverses  dans  l'emploi  de  la  flèche  dans 
la  vallée  du  Nil. 

Dans  la  première,  qui  correspond  aux  temps  antéhistoriques,  les 
tètes  de  flèches  sont  faites  de  silex  et  présentent  les  mêmes  formes 
que  celles  des  stations  j)réhistoriques  de  l'Europe. 

Dansla  seconde,  qui  renferme  rAncienetleMoyenEmpire,les  Egyp- 
tiens faisaient  uniquement  usage  de  têtes  de  flèches  tranchantes  et 
en  silex,  les  types  archaïques  ayant  été  complètement  aljandoiuiés. 

Enfin  dans  la  troisième,  qui  commence  avec  le  début  du  Nouvel  Em- 
pire, les  pointes  métalliques  furent  employées,  sans  exclure  toutefois 
les  tètes  de  silex  tranchantes  des  époques  antérieures. 


Ll'S  METAUX  Jll 

I']ii  (l(!hors  dos  armes  (il  dos  oiilils  do  l)i'oii/,e  doiiLjo  viens  do  parler, 
lo  Miisé(!  d(!  Gui/.oh  renlei-mo  hon  nombre  d'inslrumenls  de  formes  va- 
riées lois  que  des  spatules  (lig.  580  à  582),  dos  rasoirs  (iig.  583],  des 
liarpons,  des  croehets,  dos  l'onrchos,  olc,  mais  cos  oijjets  dont  l(!s 
formes  sonl  peu  caraolorisli(|iies,  donl  la  dalo  oL  la  [jiovonance  sonl 
souvent  inconnues,  appartiennent  |)iQbablemont  aux  basscîs  épo({uos 
et  leur  étude  ne  jetterait  aucune  lumière  sur  les  origines  île  l'usage 
des  métaux  en  Egypte. 

Après  avoir  examiné  les  formes  des  objets  d(!  bronze,  il  est  intéres- 
sant d'en  étudier  la  composition,  et  les  remarcjuables  travaux  de 
M.  Berthelotsur  les  échantillons  que  je  lui  ai  adrtissés  du  Musée  de 
Guizeh  donnent  à  ce  sujet  les  éclaircissomenls  les  plus  précieux. 


Fig.  58o  à  582.  —  Spatules  eu  bronze,  Musée  de  Guizeh  (II;,'.  Ti.So  :  Kahoun  ;  Iig.  SSi  : 
Tell-el-Cliorab.  Fayouin,  XIXe  dynasUe  ;  iig.  582  :  localité  inconnue).  1/2  grandeur 
naturelle. 

Fig,  583.  —  Rasoir  eu  bronze  (localité  iucounue,  Musée  de  Guizeh).  1/4  grandeur 

naturelle. 

Un  vase  découvert  à  Dahchour  en  1894,  dans  le  mastaba  d'un  |)rètre 
de  la  pyramide  de  Snéfrou,  etqtii  par  suite  est  quelque  peu  postérieur 
à  la  fin  de  la  III"^  dynastie,  était  composé  de  cuivre  pur'.  Ce  fait  n'a 
rien  qui  doive  surprendre  et  n'implique  pas  qu'en  Egypte  il  ait  existé 
comme  dans  quelques  autres  régions  un  âge  du  cuivre,  car  cet  oi)jet 
étant  très  mince  et  ayant  été  façonné  au  marteau,  il  est  nalurol  (|u'on 


I.  Berthelot  daus  Fuudies  à  Dnltcliuur  en  i8<)4i  P-  '■i'J- 


212  LES  METAUX 

ait  employé  le  cuivre  rouge,  tout  comme  nos  chaiulronniers  le  font 
encore  aujourd'hui. 

Un  anneau  nK'tallique  découvert  dans  le  même  tombeau  renfermait 
70,71  pour  100  de  cuivre  et  8,2  |)our  100  d'élain,  tandis  qu'un  autre 
fraoment,  dûment  daté  de  la  VP dynastie,  conU^nait  86,23  [jour  100  de 
cuivre  el  5,68  pour  100  d'étain'. 

Cette  double  constatation  de  la  présence  de  l'étain  dans  les  alliages 
du  début  de  l'Ancien  Empire  présente  le  plus  grantl  intérêt,  car  elle 
j)rouve  (jue  dès  ces  âges  reculés  il  existait  des  relations  commerciales 
très  suivies  entre  les  peuples  de  la  vallée  du  Nil  et  ceux  occupant  les 
foyers  de  production  de  l'étain. 

Parmi  les  échantillons  de  bronze  appartenant  au  Moyen  Empire, 
analysés  par  le  savant  chimiste,  nous  voyons  des  objets  ayant  été  faits 
pour  des  usages  très  divers  et  par  suite  ayant  peut-être  renfermé  in- 
tentionnellement des  proportions  variables  tl'élain*.  Ce  sont: 

Un  miroir  de  la  XI°  dynastie,  ne  contenant  (jue  du  cuivre  pur. 

Un  IVagment  de  bracelet  de  la  XIP  dynastie,  composé  de  68,39 
pour  100  de  cuivre  el  de  16,31  pour  100  d'étain. 

Un  crochet  de  bronze  de  la  XIP  dynastie  :  cuivre,  69,23  pour  100; 
étain,  9,82  pour  100. 

Un  clou  de  bronze  trouvé  dans  le  cercueil  du  roi  Hor-Ra-Fou-Ab 
(XII"  dynastie)  :  cuivre,  8.5,02  pour  100;  étain,  0,97  pour  100. 

Ces  {juatre  analyses  fournissent  des  compositions  très  diverses, 
mais  n'en  prouvent  pas  moins  qu'au  Moyen  Empire  comme  aux  temps 
antérieurs,  l'étain  entrait  d'une  façon  courante  dans  les  alliages  égyp- 
tiens. 

Quant  aux  objets  du  Nouvel  Empire,  l'intérêt  de  leur  composition 
est  moins  grand  en  ce  qui  concerne  l'étude  des  origines  '.  Nous  savons 

1.  Bertliplol,  /.  f.,  p.  l'îS  et  i3t). 

2.  Les  proportious  de  l'Otain  el  du  cuivre  renfermés  dans  les  objets  de  bronze  de 
l'Europe  sont  elles-mêmes  très  variables;  voici  à  ce  sujet  les  résultats  des  analyses 
publiés  par  John  Evaus  [L'âge  du  bronze,  trad.  française,  1882,  p.  4'>o)-  Celts  :  St, 
12, .'Sy;  9,82,  9,20;  18, 3i;  12, 3o;  7,/|4;  11,02;  10,92;  /f,^6;  i3,ii. —  Poignards  :  St. 
i'(,2o;  II, 3ô.  — Epécs  :  SI.  9,59;  9,3o  ;  8,17;  10, o3;  8,54;  f^iiS.  —  Pointes  de  lances  ; 
12,74;  14,01;  11.29.  — Hallebarde  :  St.  2,78.  —  Bouclier,  11,62;  11,72.  —  Trompette  : 
St.  10,87.  — Chaudrons  :  St.  5,i5;  7,19;  9,46-  Comme  on  le  voit,  les  proportions 
d'étain  sont  des  plus  variables,  même  pour  des  alliages  destinés  à  des  usages  identiques. 
Ces  difl'éreuces  peuvent  être  attribuées  à  l'inexpérience  des  fondeurs. 

3.  Les  objets  analysés  par  M.  Bcrthelot  ont  fourni  les  résultats  suivants  ;  Bague  de 
Dauaqla  (XIX"  dyu.)  (n"  i)  :  Cu.  77,61;  St.  9,6.').  —  Bague  de  Uanaqla(XIXi=  dyu.)  (n»  2)  : 
St.  75, ()G;  Cu.  16,23.  —Vase  (XX"  dyn.)  :  Cu.  76,79;  St.  i5,iS.  —  Pointe  de  flèche 
(XX-  dyn.);  Cu.  81,93;  St.  12,17.  —Tablette  de  fondation  (ïanis)  (XXV  dyn.):  Cuivre 
pur.  —  Socle  de  statue  (XXII"  dyn.)  :  Cu.  77,86;  St.  5, 00.  —  Pointe  de  flèche  d'époque 
inccilalue  ;  Cu.  68,12;  St.   5,92;   —  Miroir  (époque  incertaine)  :  Cu.  78,07;  St.  11,27. 


i.i'.s  MiriAi  \  2ia 

mi  eflel,  pai'dos  ilociimcnls  (■()iil<'iii|iui;iiiis  de  ces  cpcxiiics,  (juc  l'Jil- 
gyplc  possédait  alors  (l'iiniiuîiiscs  tcirilniics  en  Asie  et  en  Europe  et 
(|ii(!  ses  reliilioiis  étaient  fort  éleiuiiies.  Les  moycnis  de  eoniiniiniealion 
étaient  donc  Jjeaueoiip  plus  aisés  et  le  transport  de  l'étain  rentrait 
dans  les  conditions  ordinaires  du  commerce. 

Le  bronze  semble  à  première  vue  avoir  été  la  matière  première  do 
toutes  les  armes  et  de  tous  les  instruments  dans  TEo-ypte  antique  : 
cependant  si  nous  nous  en  rapportons  aux  travaux  elIVu'tués  par  les 
anciens,  à  la  taille  des  pierres  dures  et  à  la  pré(-ision  de  sculpture 
obtenue  dans  les  matériaux  les  plus  résistants,  tels  (|ue  le  granile,  la 
diorite,  la  serpentine,  le  basalte,  etc.,  il  est  bien  difficile  d'admettre 
que  les  Egyptiens  ne  se  soient  pas  trouvés  en  possession  de  l'acier. 

La  matière  première,  le  minerai  de  l'er,  abonde  dans  toute  la  vallée 
du  Nil  tant  en  Egypte  qu'en  Nubie,  on  en  rencontre  des  amas  énormes 
au  Sinaï  sous  l'orme  d'bc'uuatite  tenant  70  pour  100  (b;  métal.  11  serait 
surprenant  tle  voir  que  les  Egyptiens,  qui  à  tant  cb;  points  de  vue,  pos- 
sédaient une  civilisation  très  avancéo",  qui  avaient  atteint  dans  l'art  du 
fondeur  comme  dans  celui  du  joaillier  une  pratique  aussi  consomméi', 
n'eussent  pas  utilisé  les  richesses  minérales  qu'ils  avaient  entre;  les 
mains.  Ils  employaient  comme  couleur  la  limonite  jaune  et  rouge  ;  ils 
sculptai<'nt  des  statuettes  dans  l'hématite,  comment  n'auraient-ils  pas 
su  ce  que  pouvaient  donner  sous  l'action  du  feu  ces  matières  qu'ils 
maniaient  chaque  jour? 

Chabas  '  a  fait  une  étude  linguisticpie  détaillée  du  nom  du  fer  chez 
les  anciens  Egyptiens;  il  fait  remarquer  avec  justesse  qu(!  «  ni  sous 
les  Perses,  ni  sous  Psametik,  ni  sous  les  Macédoniens,  ni  même  sous 
les  Romains,  on  ne  rencontie  dans  les  textes  écrits  aucune  indication 
d'im  métal  inconnu  ou  inusité  dans  Fanticpiité,  et  que  la  question  de 
l'emploi  (lu  fer  reste  aussi  complexe  par  rapport  à  ces  époques  rela- 
tivement modernes  qu'aux  temps  les  plus  anciens.  «  Toujours,  dit-il, 
ce  sont  les  mème-s  groupées  ([ui  désignent  les  métaux...  Cependant  on 
ne  peut  douter  que  le  fer  n'ait  été  employé  par  les  Grecs  et  les  Romains 
d'Egypte;  qu'il  ait  été  regardé  comme  sacré  ou  profane,  nous  devons 
nécessairement  en  rencontrer  le  nom  dans  les  hiéroglyphes  ;  or  nous 

ne  voj'ons  que  le  groupe      1  {\  *^^  ^"o  /^«^' '  qi''  puisse  \v  représenter 

dans  les  textes  de  tous  les  âges  '.  » 

I.  Jilinles  sur  ['(inliijiiilc  historirjui',  p.   \:'\. 

..    O,.   pIuUM,    Jojq^^;^    O^'    '^■.-    a.  ci..,).   I..    ."ot  J(|^^ 

qu'on  rencontre  sur  quelques  stèles  de  Serabit-i'l-Ivliaileni  jjour  désigner  la  contrée  des 
mines,  paraît,  d'après  Brugsch,  indiquer  un  pays  de  pierres  très  dures,  sjîécialement  de 
grès  (Brugsch,  Dict.  hiérogl.,  Il,  37'}). 

3.   Chahas,  fitiidi'H  sur  r(iiili(iiilt(-  hittorit/iic,  p.   '17.  ! '1 


214 


T. ES  METAUX 


Les  objets  en  1er  soiil  extièmemeiit  rares  en  Egypte.  M.  G.  Daressy 
a  trouvé,  dans  la  nécropole  de  Gournah,  à  Thèbes,  un  cercueil  de  la 
XX!!""  dynastie  dont  les  diverses  parties  étaient  reliées  entre  elles  par 
des  chevilles  de  fer.  Ces  clous  sont  les  plus  anciens  spécimens  connus 
de  ce  métal.  Ils  remontent  au  x-^  siècle.  Leur  existence  prouve  que, 
bien  que  tous  les  égyptologues  ne  soient  pas  d'accord  sur  la  signifi- 
cation du  groupe  hua,  le  fer  était  en  usage  vers  le  milieu  du  Nouvel 
Empire.  Son  extrême  rareté  trouvera  un  jour  son  explication,  mais  il 
semble  difficile  de  ne  pas  admettre  qu'il  futde  touttemps  connu  dans 

l'Egypte  phai'aonique. 

Parmi  les  rares  instruments  de  fer  qu'on 
rencontre  parfois  emmanchés,  je  dois  citer 
une  herminette  (fig.  584),  trouvée  dans  les 
déblais  qui  encombraient  jadis  le  temple 
de  Déïr-el-Bahri,  à  Thèbes,  et  le  fer  d'un 
instrument  semblable  rencontré  dans  les 
environs  d'Akhmim  (fig.  .585);  malheureu- 
sement nous  ne  possédons  aucune  indica- 
tion chronologique  relative  à  ces  instru- 
ments. 

L'or'  est  de  tous  les  métaux  celui  que 
l'homme  connut  d'abord;  il  se  rencontre  à 
l'état  natif  dans  les  alluvions  et  sa  couleur 
brillante  le  fit  remarquer.  En  Amérique 
centrale  et  méridionale,  il  fut  employé  et 
travaillé,  alors  (|ue  les  indigènes  en  étaient 
encore  réduits  aux  instruments  en  pierre; 
en  Europe,  il  accompagne  les  premiers 
essais  dans  la  métallurgie  du  bronze. 
En  Egypte  et  dans  l'Afrique  centrale  l'or  alluvial  est  abondant  et 
rien  ne  prouve  que  les  autochtones  n'aient  pas  connu  son  usage 
avant  l'arrivée  des  Égyptiens  dans  la  vallée  du  Nil.  Nous  ne  pouvons 
pas  préciser  l'époque  du  poignard  en  silex  (fig.  136)  orné  d'or  que  tout 
nouvellement  le  Musée  de  Gui/.eh  vient  d'acquérir;  nous  ne  pouvons 
dire  si  ce  précieux  objet  est  aniérieur  ou  postérieur  à  la  conquête.  Il 
est  donc  nécessaire  de  réserver  la  cpiestion,  mais  constatons  cepen- 


Fig.  .')84.  —  HerraineUe  cii  fei 
L'ininanchée  en  bois  (Deïi--el- 
Biiliri,  Musée  de  Guizcli). 
\l\'i  grandeur  naUirelle. 

Fig.  .')S5.  —  Ijame  d'hermineUe 
en  ter  (Akhmiin,  Musée  de 
Guizeh).  1/12  grandeur  na- 
lurelle. 


I.    En    hiérogly])lies    '         '    iwu\> ,    l-es    Égyptiens   distiiiguaieut    encore    le    kelein 
000 

M    "_  r™*l    ou  or  Un,   le  iiouli  hedj    '         '  Y  O      or  blanc,  et  enfin   l'éleclruni  rwi. 


LES  MiriAlX  215 

danl  (]iio  rien  ne  s'oppose  à  ce  ((u'il  ait  été  faljrii|ue  bien  longtemps 
avant  l'apparition  des  Egyptiens  et  du  bronze. 

Les  bijoux  les  plus  anciens  connus  jusqu'à  ce  jour  sont  ceux  de 
Dahchour.  Ils  remontent  à  la  XII°  dynastie.  C'est  donc  de  leur  compo- 
sition que  nous  devons  chercher  à  tirer  quelques  conclusions,  et  les 
analyses  de  M.  Berthelot  en  fournissent  les  éléments. 

Perles  d'or  de  la  princesse  Noub-Hotep  (XIP  dynastie)  :  Or,  82,94; 
argent,  13, .56;  cuivre,  0,50. 

Feuilles  d'or  du  cercueil  du  roi  RaFou-Ab  :  Or,  8,5,92;  argent, 
13,78;  cuivre, 0,30'. 

Tous  les  objets  d'or  renferment  donc  une  forte  proportion  d'argent  : 
ils  sont  en  électrum  et  non  en  métal  pur.  D'autre  part,  ils  contiennent 
une  faible  quantité  de  cuivre. 

Nous  devons  probablement  attribuer  la  présence  de  l'argent  à  l'af- 
finage incomplet  du  métal,  car,  on  le  sait,  dans  les  pépites,  les  deux 
métaux  sont  mélangés.  Quant  au  cuivre,  il  est  à  penser  que  les  fon- 
deurs l'ajoutaient  dans  le  creuset  afin  de  rendre  l'alliage  plus  dur, 
car  l'or  pur  et  les  alliages  d'or  et  d'argent  sont  d'une  extrême  mal- 
léabilité. 

Je   ne    parlerai    ni  de   l'argent,   Y  i  *™*1     p^"   hedi    ni  du  plomb 

^^  X    t   ou  c^s  Q       ",(^67/.//,  ni  de  l'antimoine  ou  du  manganèse,  leur 

étude  sortirait  du  cadre  ([ue  je  me  suis  tracé.  Je  me  contenterai  de 
faire  observer  que  ces  métaux  étaient  connus  des  Egyptiens  qui,  dès  le 
Moyen  Empire  tout  au  moins,  en  firent  usage,  soit  à  l'état  métallique, 
soit  à  celui  de  sels.  Les  connaissances  mélallurgiques  et  chimiques 
étaient  donc  dès  cette  époque  fort  développées,  et  il  semble  bien 
difficile  d'admettre  que  les  chimistes  qui  composaient  les  collyres  - 
eussent  ignoré  la  préparation  du  fer  et  de  l'acier. 

Aux  premiers  temps  de  la  monarchie  égyptienne  les  seuls  giscmenls 
de  cuivre  exploités  furent  ceux  du  Sinaï.  On  rencontre  encore  dans 
celle  péninsule  de  nombreux  travaux  antiques  et  les  inscriptions  qui 
les  accompagnent  ne  laissent  aucun  doule  sur  l'époque  et  sur  le  but 
de  l'ouverture  des  mines. 

Avantde  retracer  l'historique  de  ces  exploitations,  les  plus  anciennes 


t.  Bei'lliclot,  dans  Fouilles  à  Dahchour  en  1894,  p.  i'|5. 

2.  Composition  du  collyre  noir  (lombeau  de  la  princesse  Xoub-Ilotep,  \11°  dynas- 
tie, Dahchour)  :  Sulfure  de  plomb,  23  pour  100;  argile  fortement  ferrugineuse,  5  pour 
100;  bioxyde  de  manganèse,  3  pour  100;  fer  oxydulé,  i  pour  100;  sulfure  d'anliiuoine, 
I  pour  100;  oxyde  de  cuivre,  i  pour  100.  Le  collyre  vert  semble  être  de  la  cliryso- 
oollc  pure  (V.  Loret,  dans  Fouilles  à  Dahchour  en  iSç)4.  P-  lôGet  suiv.). 


21 G 


LES  mi:tai'x 


(lu  iiiuiidr,  il  esl  nt'cessairc  d'exposer  en  qiiehjiies  mots  les  princi- 
paux caractères  des  gisements,  leur  position  géographique  et  géolo- 
gic|uo,  ainsi  c[ue  la  nature  des  minéraux  (|u'on  y  rencontre. 

La  péninsule  Sinaïticjue  doit  son  origine  à  une  éruption  granitique 
d'une  grande  importance  qui,  perçant  les  couches  sédimentaires  et 
les  relevant  sur  ses  bords,  a  l'orme  le  massif  montagneux  principal 
où  s'élèvent  les  monts  Serbal  et  de  Sainte-Catherine,  pics  les  plus 
importants  de  la  région. 


Fig.  58().  —  Carte  de  la   péuinsule  Siiiaïlique. 


Le  souèvement  esl  postérieur  a  l'époque  éoccnc,  car  nous  voyons 
les  assises  de  cette  période  relevées  tout  comuie  les  couches  du  sé- 
nonien  et  du  grès  qu'elles  recouvrent.  Il  est  en  connexion  avec 
les  mouvements  du  sol  qui  en  Egypte  ont  déterminé  la  formation  de  la 
vallée  du  Nil.  D'épais  filons  dioritiques  traversent  les  granits,  et  la 
matière  éruptive  s'étant  largement  épanchée  au  dehors  recouvre  fré- 
quemment les  terrains  sédimentaires  et  les  granits  eux-mêmes. 


T,i:S  MKTAIX  217 

La  région  des  mines,  le  pays  de  Mafck^  des  anciens  Eg-yptiens,  est 
située  à  la  limite  des  terrains  granitiques,  au  nord-ouest  de  la  pres- 
qu'île ;  elle  comprend  tous  les  affleurements  des  terrains  dits  i^rès 
sinaïtiqucs',  qui,  ne  renfermant  pasde  l'ossiles,  n'ont  pu  jusqu'ici  être 
rangés  chronologiquement  mais  appartiennent  probahlement  au  ter- 
rain permien.  Ce  district  s'étend  du  nord  au  sud  suivant  le  .il"  degré 
de  lono-itude  est(méridien  de  Paris)  sur  une  dislance  de  40  kilomètres 
environ  entre  Cebel-Mokatteb"'  et  Serabil-cl-Khadem.  Cette  contrée 
présente  à  peu  près  C  kilomètres  de  largeur  (fig.  586). 


I.  M((frk  ou  Mafkat  (    1^\     a^-x   "  "  "  .    V\      t    j  %  t^-^^    I   est  le  nom  li- plus  gûnc^- 

ralemoiU  donné  dans  les  inscriptions  liiOroglyphiques  à  la  région  des  mines.  Ce  nom 
n'est  autre  que  celui  de  la  matière  précieuse  qu'on  y  exploitait,  ta  turquoise.  Les 
Égyptiens  donnaient  ce  nom  de  mafi'k  à  toutes  tes  pierres  de  couleur  verte,  tant  à 
fémeraude  et  à  ta  malachite  qu'à  la  tuiquoise,  mais  ici  c'est  nécessairement  de  cette 
dernière  qu'il  s'agit;  ils  distinguaient  de  ces  pierres-tà,  qu'ils  appelaient  le  maffk 
vrai,  une  autre  substance  verte  qu'ils  fabriquaient  eux-mêmes,  le  mafck  faux,  qui 
n'est  autre  que  l'émail  dont  sont  enduits  beaucoup  de  statuettes  et  autres  petits  mo- 
numents. 

Comme  tous  les  pays  soumis  aux  lîgypiiens  et  colonisés  par  eux,  la  terre  de  Mafek,  qui 
du  reste  porte  encore  d'autres  noms  sur  lesquels  je  reviendrai  plus  loin,  avait  ses  dieux 
particuliers.  C'est  surtout  Hathor  qui  y  est  adorée,  la  déesse  bien  connue  aux  cornes  de 
vactie,  dont  la  forme  locale,  particulière  à  ce  pays,  porte  le  titre  de  «  dame  de  Mafek  » 

I    Ç\   I  V\  t      j      "^     |.  C'est  à  elle  que  s'adressent,  au  nom  du  roi  régnant, 

pour  ta  réussite  de  leur  entreprise,  les  tiauts  fonctionnaires  chargés  de  l'exploitation 
des  mines,  qui  nous  ont  transmis  sur  des  stèles  le  récit  de  leur  expédition.  A  cùté 
d'Hathor,   nous  voyons  quelquefois  paraître  un  autre   dieu,  Sopd,   le  dieu    de   l'Orient 

j  A  ^\^^ '  '^    \]  )•  4'"  "  '"St  autre  qu'une  forme  d'Horus;  dans  les  textes  égyp- 

tiens, ce  dieu  symbolise  souvent  l'est,  le  soleil  levant,  tandis  que  sous  la  forme  fémi- 
nine, Sondit.  il  représente  l'étoile  Sothis  ou  Sirius.  En  outre  de  la  déesse  locale  et  du 
dieu  de  l'Orient,  nous  rencontrons  parfois  encore  le  dieu  des  lettres,  Tliot  à  tète 
d'ibis,  à  qui  l'on  attribuait  sans  doute  la  découverte  des   mines.  —  [G.  J.] 

3.  Il  ne  faut  pas  confondre  tes  grès  nubiens  avec  ceux  du  Sinaï,  leur  faciès  est  très 
difléreul.  Ces  deux  formations  ne  contiennent  pas  de  fossiles,  cependant  il  est  permis 
de  supposer  que  les  grès  nutiiens  doivent  être  rangés  dans  lépoque  ccnomanienne, 
tandis  que  les  grès  sina'itiques  appartiennent  à  la  formation  permienne. 

3.  T,e  Wadi- Mokatteh  ou  Vallée  écrite  tire  son  nom  des  inscriptions  dites  sinaïtiqucs 
qui  sont  gravées  sur  les  rochers,  sur  les  routes  menant  d'Arabie  en  Egypte,  et  qui  se 
trouvent  là  en  beaucoup  plus  grand  nombre  que  partout  ailleurs.  La  plupart  sont  écrites 
en  nabatéen,  la  langue  des  peuples  du  nord  de  lArabie.  ou  en  arabe  préislamique, 
d'autres  en  grec  ou  en  copte.  Ces  dernières  ont  généralement  été  gravées  par  des  pèle- 
rins chrétiens,  tandis  que  les  autres,  beaucoup  plus  nombreuses,  proviennent  des  habi- 
tants païens  de  ta  contrée,  qui  adressent  des  invocations  au  soleil,  à  la  lune  et  aux 
étoiles  En  général,  ces  inscriptions,  très  courtes,  ne  contiennent  guère  que  des  noms; 
les  plus  anciennes  ne  doivent  pas  remonter  au  delà  du  ii"  siècle  de  notre  ère.  Sur  ces 
mêmes  rochers  se  trouvent  aussi  beaucoup  de  représentations  d'hommes  et  d'animaux 
naïvement  gravées  (v.  Ebers,  Diirch  Coieii  zuiti  Sinaï,  p.  174)' —   ti.  J.] 


218 


LES  Ml'.TAlX 


Plus  au  siul,  près  du  mont  Serbal,  il  existe  encore  quelques  gise- 
ments, mais  leur  importance  semble  avoir  toujours  été  secondaire  par 
rapport  à  celle  des  mines  du  nord. 

C'est  dans  les  assises  des  orès  sinaïtiques  que  se  rencontrent  les 
parties  métallisées;  elles  sont  en  couches  pour  le  fer,  en  veines  et  en 
imprégnations  pour  le  cuivre.  La  coupe  suivante,  passant  par  les 
mines  de  Wadi-Maghara  (fig.  587)  ',  montre  quelle  est  dans  cette  ré- 
gion la  position  des  couches  et  les  conditions  dans  lesquelles  on  y 
rencontre  les  parties  métallifères. 

Les  grès  affleurent  à  Wadi-Maghara,  ils  présentent  dans  cette 
localité  une  légère  pente  vers  l'ouest,  mais,  bientôt  recoupés  par  de 
nombreuses  failles,  ils  plongent  rapidement  au  Wadi-Boudrah  sous 
les  assises  crétacées  et  disparaissent. 


WacJi  Badrah 


Wadi  Maff/iara 


G.Farh'a 


Fig.  ScSy.  —  Coiipp  du  la  l'ogion  minière  de  Wadi-Maghara. 
GR,  granit   rouge;  —  GG,  granit  gris;  —  d,  diorite  ;  — q,  quartz;  —  m,  marnes  ;  — 
gn,  grès  sinaïtiquc;  —  S,  couches  sénouiennes  (Fossilifères)  ;  —   E,  couches  éocènes  ; 
—  /(,  couclios  d'hématite;  —  c,  couches  cuivreuses. 

Au  nord,  Serabit-el-Khadem*  et  Wadi-Nasb  présentent  également 
des  gîtes  miniers  situés  dans  les  mêmes  couches.  Les  assises  sont 
presque  horizontales,  mais  les  affleurements  apparaissent  très  nette- 
ment dans  les  ravins  profonds  et  abrupts  qui  déchirent  en  tout  sens 
ce  massif  montagneux. 

Entre  Serabit-el-Khadem  et  Wadi-Maghara  les  grès  sinaïtiques  se 
continuent,  mais  leur  étude  présente  de  réelles  difficultés,  car  non 
seulement  le  pays,  très  accidenté,  ne  renferme  pas  d'eau,  mais  les  Bé- 
douins mettent  tous  les  obstacles  pour  en  empêcher  la  visite  ;  c'est  là 
qu'ils  ont  leurs  mines  de  turquoises  les  plus  importantes  et  ils  crai- 
gnent toujours  que  le  gouvernement  égyptien,  venant  à  connaître 
leurs  ressources,  ne  les  frappe  d'une  redevance  ^ 


1.  Ce  nom  signifie  «  Vallée  des  grottes  »  ;  le  vrai  nom  est  Wadi-Ginne. 

2.  Mol  signifiant  hauteurs  fortifiées  (v.  Ebers,  Durch  Gosen  zum  Sinaï,  p.  fio7). 

3.  Bien  que  les  Bédouins  cachent  avec  grand  soin  la  production  des  mines,  il  est 
constant  qu'ils  vendent  cliaque  année  pour  environ  25o,ooo  francs  de  turquoises  et  que 
ces  pierres  re|)résentent  une  valeur  supérieure  à  un  million  de  francs.  C'est  à  Suez 
qu'est  le  marclié  des  turquoises. 


LES  MÉTAUX  219 

Coite  région,  encore  inexplorée,  renl'crnie  bien  certainement  dos 
exploitations  antiques,  car  les  conditions  géologiques  s'y  prêtent,  et 
tout  nie  porte  à  croire  qu'elle  contient  aussi  beaucoup  tie  textes  du 
plus  haut  intérêt  pour  l'histoire  des  mines  et  de  l'Egypte. 

A  Serabit-el-Khadem,  comme  à  VVadi-Maghara,  les  métaux  se 
trouvent  dans  les  grès,  mais  toutes  les  couches  ne  renferment  pas 
en  égale  abondance  les  tur(|uoises  et  les  minerais  ;  les  bancs  riches 
sont  les  mêmes  dans  les  deux  localités.  Voici  la  coupe  relevée  dans 
les  ravins  du  nord  à  Serabit-el-Khadem  : 

1°  Grès  jaune  clair,  plus  de  l5  métros. 

2°  Bioxyde  de  manganèse*  en  masse  compacte  et  hématite.     .  o^iSo  à  o">,8o 
3°  Marnes  blancliàtres  avec  veines  do  minerais  de  fer,  de  man- 
ganèse et  de  cuivre^ o™,2o  à  o">,5o 

4°  Grès  brun  ou  gris  en  lames  avec  veines  de  minerai  cuivreux  .  i)™,8o  à   iu',50 

5°  Grès  blanc,  très  lin,  en  couches  minces o"',8o  à  2™,oo 

6°  Grès  jaune  en  bancs  épais 3'",5o  à  4™,oo 

y"  Grès  jaune  avec  bancs  riches  on  turquois, 'S.      .....  3'",,'')0   à  4'",oo 

8°  Grès  jaune  compact  en  bancs  épais 3o   à  4o  mètres. 

Les  iDancs  n"  2  et  n"  3  fournissent  des  minerais  de  fer  d'une  qualité 
parfaite.  Ils  ne  semblent  pas  avoir  été  très  largement  exploités;  ce- 
pendant on  voit,  non  loin  du  temple  de  Serabit-el-Khadem,  cjuelcjues 
tranchées  ouvertes  dans  la  masse  et  des  indices  d'exploitation  sou- 
terraine. L'hématite  était  très  employée  par  les  Egyptiens  pharaoni- 
ques pour  la  fabrication  des  statuettes  el  de  menus  objets  funéraires  : 
celle  du  Sina'i  est  d'une  qualité  parfaite. 

L'aspect  noir  et  scoriacé  de  ces  couches  de  fer  et  de  manganèse,  la 
position  qu'occupent  certains  lambeaux  sur  le  sommet  des  plateaux,  a 
fait  croire  à  Lepsius  qu'il  avait  affaire  là  à  des  restes  de  fourneaux  qu'il 
nomme  sur  sa  carte  de  détail  Sclilnckcnhaufen  ou  scories.  Cette 
erreur,  partagée  depuis  par  tous  les  voyageurs  qui  ont  écrit  sur  le 
Sinai,  a  fait  penser  que  les  Égyptiens  avaient  établi  sur  les  hauteurs 
leurs  usines  métallurgiques,  alors  que  c'est  dans  la  vallée  seulement 
qu'ils  traitèrent  les  minerais. 

Les  couches  n°^  3  et  5  ont  été  l'objet  d'une  exploitation  très  active 
sur  certains  points:  les  roches  étaient  arrachées  des  affleurements, 
puis  écrasées  à  la  main  à  l'aide  de  pilons  et  triées.  C'est  auprès  de 
ces  gisements  que  se  rencontrent,  à  Serabit-el-Khadem ,  les  silex  taillés 
et  les  indices  les  plus  archaïques. 

1.  Ces  minerais  analysés  par  M.  Le  Chatellior  ont  fourni  56  pour  loo  de  manga- 
nèse. 

2.  Ces  minerais  se  composent  de  carbonate  de  cuivre  et  de  phosphate  de  cuivre 
mélangés  de  phosphate  de  chaux  (Analyses  de  M.  Le  Chatellior). 


220  LES  M1:TAUX 

Dans  les  conciles  n"  7  sont  toutes  les  grandes  exploitations  anti- 
ques ;  les  grès  }•  sont  jaunes  et  tendres  par  places,  rouges,  bruns  ou 
violacés  et  durs  dans  d'aulros.  T^a  roche  friable  contient  les  rognons 
de  turquoise  entourés  d'une  gangue  ferrugineuse  ;  dans  les  grès 
rouges  ou  brans,  on  rencontre  la  pierre  précieuse  à  l'état  de  veinules 
plus  ou  moins  épaisses. 

La  méthode  d'exploitation  usitée  par  les  anciens  était  fort  simple, 
elle  consistait  en  une  attaque  à  la  pointe  des  affleurements  des  bancs 
riches.  L'usage  avait  amené  les  ingénieurs  de  cette  époque  aménager 
dans  les  exploitations  des  piliers  plus  ou  moins  rapprochés,  suivant 
que  les  assises  exploitées  se  trouvaient  [dus  ou  moins  chargées  parles 
couches  substratiliées.  Ainsi  à  Serabit-el-Khadem,  où  les  grès  exploi- 
tables occupent  presque  les  sommets  des  hauteurs,  les  vides  sont 
beaucoup  plus  grands  qu'à  Wadi-Maghara  où  ces  mômes  couches  sont 
recouvertes  de  100  mètres  environ  de  roches.  Dans  les  mines  du 
nord,  les  vides  sont  laissés  sans  remblais,  tandis  que  dans  celles  du 
sud  les  cavités  ont  été  comblées  à  l'aide  des  matériaux  stériles  jns- 
f|u'à  5  ou  (i  mètres  du  front  de  taille,  et  d'étroites  galeries  ont  été 
ménagées  pour  donner  accès  dans  les  chantiers. 

Lorsque  les  affleurements  étaient  solides,  l'ouverture  des  mines  se 
faisait  sur  toute  l'étendue  des  ])ancs  en  ménageante  à  et  là  quelques 
piliers.  Quand,  au  contraire,  la  roche  était  fissurée  et  menaçante,  les 
travaux  étaient  commencés  en  galeries  étroites  et  ne  s'élargissaient 
qu'alors  (]u'on  avait  atteint  les  parties  plus  sûres. 

Aujourd'hui,  que  les  Bédouins  ont  brisé  à  la  poudre  la  plupart  des 
entrées  des  mines,  qu'ils  ont  SLipprimé  là  beaucoup  des  piliers  laissés 
par  les  anciens  pour  soutenir  le  toit  du  gite  et  les  toits  secondaires 
des  divers  étages,  bien  des  mines  antiques  se  sont  écroulées  et  il  est 
souvent  malaisé,  si  ce  n'est  impossible,  de  les  visiter. 

Les  cavités  sont  parfois  considérables  ;  à  Serabit-el-Khadem  entre 
autres,  il  en  est  de  très  vastes  (fig.  588);  elles  communiquent  avec  la 
surface,  non  seulement  par  des  galeries  horizontales  d'accès,  mais 
aussi  par  des  puits  rectangulaires  destinés  à  l'aérage  aussi  bien  qu'à 
l'extraction. 

Quant  aux  outils  employés  pour  couper  la  roche,  leur  nature  est 
indiquée  par  les  traces  laissées  sur  les  parois  des  mines.  Il  semblerait 
f[ue,  dans  les  travaux  les  plus  anciens,  le  silex  ait  été  employé  etque 
les  Ijlocs  aient  été  détachés  au  moyen  d'une  série  de  trous  destinés  à 
provoquer  des  plans  de  rupture.  Plus  tard,  sous  la  XII°  dynastie, 
c'est  la  pointeiole  UKUallique  seide  qui  était  en  usage  (fig.  592).  J'ai 
rencontré  un  fragment  d  instrument  de  ce  genre  dans  les  maisons 
des  mineurs,  à  Wadi-Maghara,  et  la  largeur  et   la  forme  du  tran- 


I.KS  Ml/IAl  X 


■22\ 


Kis;     .'iSS.  —  Croquis  (opoiri-aphiquo  ilc  Wadi-Maghara. 


222 


LES   METAUX 


chant  correspondenl  absolument  aux  traces  laissées  dans  la  pierre. 

Les  grès  riches  extraits  des  mines  étaient  transportés  au  jour,  puis 

écrasés  à  l'aide  de  pilons  de  pierre  duie  :  la  roche  friable  se  trans- 


3S9(, 


Eig.  58()  et  590.  — ■  Ciseaux  en  silex  jaune  rouge  (Serabit-el-Khadem,  Sinaï), 
:/2  grandeur  naturelle. 


mal 


k^^/ASies.  l  iL    ^     ^-^ 


> 


'y- 


.</ 


/ 


392 


Fig  5(|i.  —  Hache  grossière  en  silex  brun  rouge  (Serabit-el-Khadem,  Sinaï). 
.  1/2  grandeur  naturelle. 

Fig.  5c)2.  —  'rèt("  de  pointcrolle  en  bronze  trouvée  dans  les  ruines  de  Wadi-Maghara 

(Sinaï). 


forme  aisément  en  sable  et  les  rognons  de  turquoise  sont  dès  lors 
aisément  reconnaissables  à  leur  couleur  brune  foncée. 

Je  ne  sais  quelle  est  la  richesse  des  gisements  situés  dans  l'in- 
térieur du  massif  montagneux,  je  n'ai  pu  les  parcourir  ;  mais  ce 
qu'on  peut  voir  à  Wadi-Maghara  et  à  Scrabit-el-Khadem  ne  dénote 


I.n:S  METAUX  2-2:i 

pas  une  grande  al)on<lance  de  nialièr(!rt  ciiivruiis('s.  f^iîs  |)i('ri-os  pré- 
cieuses y  sont  rares,  de  qualilé  iiiCéiicure  et  perdent  ia|)id(!ni<>nt  leur 
couleur.  Les  gemmes  provenant  des  gisements  voisins  du  nu)nt 
Serbai  présentent  des  qualités  bien  supérieures  à  celles  des  mines 
du  nord'. 

I.  Dans  un  travail  récent  dont  M.  Bortlielot  a  rendu  compte  à  l'Académie  des 
sciences,  le  savant  chimisie  donne  toutes  les  indications  qui  lui  ont  été  fournies  par 
les  échantillons  que  j'ai  rapportés  du  Siuaï.  Le  lecteur  me  saura  fi^ré  de  reproduire 
in  extenso  cette  remarquable  étude. 

«  HisTorKE  DES  sctENCEs.  —  Sur  les  mines  de  cuiyic  du  Sinai,  exploitées  par  les  an- 
ciens Égyptiens.  Xote  de  M.  Berthelot  (Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des 
sciences;  19  août  1896). 

«  Les  mines  de  cuivre  du  Sinaï  sont  les  plus  anciennes  dont  l'histoire  fasse  mention. 
D'après  des  documents  authentiques,  elles  ont  été  exploitées  depuis  le  temps  de  la 
III"  dynastie  égyptienne  (5ooo  ans  environ  avant  notre  ère)  jusqu'à  la  fin  des  Ra- 
messides  (vers  i3oo  à  1200  avant  notre  ère).  Leur  possession  a  été  l'objet  de  plu- 
sieurs guerres;  mais  elles  sont  complètement  abandonnées  depuis  U'ois  mille  ans, 
abandon  que  justifie  la  pauvreté  de  leurs  minerais  actuels.  C'est  assurément  de  ces 
mines  que  provient  le  sceptre  de  Pépi  I",  roi  de  la  VI'  dynastie,  sceptre  en  cuivre 
pur,  conservé  au  British  Muséum  et  dont  j'ai  fait  l'analyse  (voir  mon  ouvrage  :  La 
Chimie  au  moyen  âge.  Premier  volume  ;  Transmission  de  la  Science  antique,  p.  36C, 
1890.) 

Cl  En  raison  de  l'intérêt  qui  s'attache  à  l'histoire  des  métaux,  dans  la  civilisation 
humaine,  et  à  celle  de  la  métallurgie  antique,  il  m'a  semblé  utile  d'avoir  des  rensei- 
gnements précis  sur  les  mines  du  Siuaï  et  sur  les  procédés  suivis  à  leur  époque  dans 
l'exploitation  du  cuivre. 

«  M.  de  Morgan,  dont  on  connaît  la  haute  compétence  et  les  belles  découvertes,  a 
bien  voulu  aller  lui-même  visiter  ces  mines,  et  en  rapporter  des  échantillons,  qu'il 
m'a  confiés.  M.  Lacroix,  le  savant  professeur  de  minéralogie  du  Muséum  d'Histoire 
naturelle,  s'est  mis  à  ma  disposition  pour  m'aider  dans  leur  examen.  Ce  sont  les  ré- 
sultats de  ces  études  que  je  viens  présenter  aujourd'hui  à  l'Académie. 

«  Les  mines  du  Sinaï  sont  voisines  de  la  côte  du  golfe  de  Suez.  Doux  gisements  ont 
été  exploités  :  celui  de  Wadi-Maghara  (Ancien  et  Moyen  Empire)  ;  et  celui  de  Serabit- 
el-Khadem,  un  peu  plus  récent. 

«  Ces  mines  sont  situées  dans  la  région  des  grès,  et  non  dans  celle  dos  porphyres, 
qui  forment  la  masse  principale  de  la  montagne.  On  y  trouve  des  minerais  de  cuivre, 
dont  il  va  être  question,  dos  minerais  de  fer,  spécialement  de  l'hématite  et  des  grès 
ferrugineux.  On  y  trouve  aussi  du  gypse. 

«  On  assure  qu'il  n'y  a  pas  de  couche  calcaire  proprement  dite  dans  la  région. 

«  Les  grès  que  j'ai  examinés  ne  contiennent  en  effet  que  des  traces  de  carbonate  de 
chaux.  Cependant,  j'ai  trouvé  un  morceau  de  calcaire  compact  dans  mes  échantillons, 
et  les  scories  et  débris  de  four  renferment  aussi  du  carbonate  de  chaux  en  dose  no- 
table, par  places. 

«  Les  galeries  existent  encore,  ainsi  que  les  débris  des  fours,  des  creusets,  les  sco- 
ries, les  restes  des  habitations  des  mineurs,  quelques  fragments  de  leurs  outils,  etc. 

«  Je  vais  indiquer  les  observations  faites  sur  les  dilférents  objets  qui  m'ont  élé  re- 
mis. 

«  I.   —  Miserais. —  Trois  minerais  de  cuivre  oxisLont  dans  ces  échanlillons,  savoir; 


224  LES  METAUX 


Il  est  à  supposer  que  les  Égyptiens  ne  tiraient  pas  seulement  du 
pays  de  Mai'ek  les  turquoises,  mais  qu'ils  en  exportaient,  en  même 
temps   que  la  pierre  précieuse,  les  matières  colorantes  dérivées  du 


«.  Des  turquoises,  un  hydrosilicote  de  cuivre  et  des  grès  imprégnés  de  sels  de  cuivre 
(carljonale  el  hydrosilicate).  On  n'y  trouve  ni  sulfures  de  cuivre,  ni  cuivre  natif,  ni 
cuivre  oxydulé  natif.  Il  est  probable  que  les  minerais  actuels  sont  superdcicls  et  cons- 
tituent un  chapeau,  en  langage  Icchniquo,  lequel  provient  de  l'allération  de  gisements 
pyriteu.\  profonds,  que  l'exploilalinn  n'a  pas  atteints.  Les  inliltrations  des  eaux  sou- 
terraines les  ont  attaqués  et  ont  ramené  à  la  surface  des  produits  oxydés,  comme  il 
arrive  en  général.  Les  anciens  mineurs  se  sont  bornés  à  gratter  ce  qui  se  trouvait  à 
la  surface  du  sol,  à  l'aide  des  insiruments  dont  je  donne  plus  loin  l'analyse.  En  tous 
cas,  ces  trois  rainerais  ont  été  ramassés  près  des  fours,  à  Wadi-Maghara  notamment, 
el  c'est  sur  eux  que  portait  l'exploitation . 

((  I .  Turquoises.  —  Les  turquoises  sont  au  nombre  des  pierres  précieuses  que  l'on 
retrouve  dans  les  tombeaux  et  qui  sont  désignées  sous  le  nom  de  cliesbet,  commun  à 
diverses  substances  bleues  que  les  Égyptiens  confondaient  sous  une  même  dénomina- 
tion. Ces  turquoises  se  présentent  soit  à  l'étal  isolé,  soit  disséminées  dans  des  grès 
ferrugineux,  où  elles  forment  parfois  de  simples  mouchetures,  ainsi  qu'en  témoignent 
certains  des  échanlillons. 

c.  Ces  turquoises  ont  une  densilé  de  2,8'5  environ.  Les  acides  les  attaquent  aisément 
et  la  dissolution  contient  de  1  acide  phosphorique,  de  l'alumine  et  du  cuivre.  Leurs 
propriétés  sont  celles  de  la  turquoise  classique  :  phosphate  d'alumine  hydraté,  avec 
petites  quantités  de  cuivre.  Les  analyses  des  traités  de  minéralogie  indiquent  de  a,;) 
à  3,6  d'oxyde  de  cuivre.  Celle  de  Wadi-Maghara  (en  veine  dans  un  porphyre)  a  d'ail- 
leurs été  analysée  parFrenzel  : 

Acide  phosphorique 28, 4o 

Alumine 38, 61 

Oxyde  de  cuivre 3,32 

Chaux ^tÇI^ 

Magnésie o,i5 

Silice •  '1,37 

Acide  sulfurique 0,66 

Eau 2o,(>() 

Densilé 2  71) 

<(  2  et  3,  Les  grès  imprégnés  de  sels  de  cuivre  sont  également  pauvres.  Le  minei*ai 
qu'ils  renferment,  sous  forme  de  couches  minces  interposées  et  de  petits  nodules,  est 
un  mélange  de  carbonate  et  d'hydrosilicate  de  cuivre  :  on  sait  que  les  minéralogistes 
désignent  aujourd  hui  ce  dernier  sous  le  nom  de  chrysocolle,  nom  qui  a  été  employé 
avec  des  sens  très  dilférents  chez  les  auteurs  anciens.  Les  modernes  l'ont  détourné 
de  sa  signillcation  antique,  -suivant  un  usage  très  répandu  parmi  les  minéralo- 
gistes du  commencement  de  ce  siècle,  mais  très  fâcheux  jiour  l'intelligence  des  textes 
et  pour  l'histoire  de  la  science;  car  les  gens  non  prévenus  s'imaginent  que  le  minéral 
moderne  est  le  même  que  le  minéral  antique,  dont  il  a  usurpé  le  nom. 

c(  Quelques  fragments  de  cet  hydrosilicalc,  tr'ouvés  à  ^Vadi-^L[ghara,  commencent  à 
blanchir  à  la  surface,  par  suite  de  leur  déshydratation. 

'<  M.  de  Morgan  a  rapporté  également  des  tombeaux  d'El-  Anirah,  en  Egypie,  un 
minerai  conslilué  précisément    par   cet    hydrosilicate   de  cuivre,  avec  sa  densilé  nor- 


r,KS  MI'TAUX  225 

(Hiivrc  (!l  du  ciiivi'd  niétallit|ue  ol)tonii  parle  traitement  métalluini(|iio 
des  produits  de  l'e.\[)loilalion  i|ui  demeuraient  sans  valeur  p<jur  la 
joaillerie  et  la  labrication  des  coideurs.  (]'est  ainsi  ipTafin  de   trailer 

maie;  3,3.  Celui-ci  :i  élu  reconnu  toi'l  l'iclii'  en  cuivr-e  ;  ce(|ui  l'i'iioncl  aux  analyses  <lii 
mèiuc  minerai  renconIrO  dans  d'and'es  ré<;ioiis  dn  niunde  do  et  .'lo  ccnlièrnes  d'oxyde 
de  cuivre) . 

((  Los  minerais  de  Seraljil-('l-K!iadem  rentermenl  ét;ali'ment  de  l'iiytli-osllicale  de 
cuivre,  ramassé  auprès  des  fours,  el  des  grès  in)pri''tj;nés  à  divers  degrés  decarbonale 
et  d'iiydrosilicale  de  cuivre.  Certains  do  ces  grès  sont  en  même  temps  ferrugineux. 
Le  carbonate  de  cuivre  qui  les  imprègne  moule  l'hématite,  qui  sert  de  ciment  à  ces 
gi'és  ;  ce  qui  prouve  que  la  veine  cuivreuse,  provenant  sans  doute  de  la  décomposition 
des  pyrites,  est  consécutive  à  la  formatiou  de  l'iiémalile  el,  par  conséquent,  à  celle 
des  grès  qui  constituent  la  roche  principale.  Dans  tous  les  cas,  ces  roches  sont  très 
pauvres  en  minéraux  cuivreux  L'extraction  de  ceux-ci  devait  demander  un  grand  tra- 
vail de  triage.  Mais,  à  ces  époques  reculées,  la  main-d'iruvre,  fournie  par  des  caplifs 
el  des  esclaves  que  l'on  traitait  avec  une  extrême  cruauté,  ne  comptait  pas.  Agathar- 
chide  nous  a  transmis  à  cet  égard  des  détails  épouvantables. 

«  4.  Hémulite.  —  Elle  a  été  trouvée  à  Wadi-Maghara  en  gros  morceaux,  semblables 
à  ceux  qui  forment  les  statuettes  des  tombeaux  égyptiens;  statuettes  dont  la  matière 
peut  d  ailleurs  provenir  d  autres  localités,  1  hématite  étant  un  minéral  fort  répandu. 
A  Serabit-el-Khadem,  on  la  trouve  aussi  à  l'état  fibreux.  La  roche  de  grés  elle  même 
renferme  des  veines  d'hématite  bien  distinctes.  Dans  d'autres  parties,  l'hématite  dissé- 
minée joue  le  rôle  de  ciment. 

«  5.  Bioxyde  de  manganèse.  -—  K  ^Vadi-Magllara,  un  échantillon  de  pyrolnsite  cris- 
tallisé a  été  recueilli  dans  un  morceau  de  calcaire.  Nous  avons  trouvé  également  de 
loxyde  de  manganèse  dans  les  matières  rapportées  de  Serabit-el-Khadem.  Une  hé- 
matite  manganésifère  vient  de  cette  localilé. 

«  6.  Grès.  —  Les  grès  constituent  les  roches  principales  de  Wadi-Maghara.  Cer- 
taines sont  blanchâtres  ;  d'autres,  colorées  en  brun  ou  en  vert,  sont  formées  par  des 
grains  de  quartz  de  calibres  variés.  A  peine  agglomérés  dans  certains  grès,  ces  grains 
sont,  au  contraire,  fortement  cimentés  par  l'hématite  dans  les  échanlillons  compacts, 
avec  toutes  sortes  d'états  intermédiaires.  Le  microscope  y  décèle  quelques  fragments 
de  mica,  de  rutile,  de  zircou.  Les  grès  blancs,  pas  plus  que  les  grès  bruns,  ne  ren- 
ferment de  ciment  calcaire  en  dose  notable.  Les  grès  do  Serabit-el-Khadem  sont  à 
grains  fins,  extrêmement  imprégnés  d'oxyde  de  fer,  qui  leur  donne  une  coloration 
noirâtre,  avec  des  portions  rouillées.  Dans  certaines  places,  ils  alternent  avec  de 
minces  lits  ferrugiueux.  Ailleurs  1  oxyde  de  fer  s'y  trouve  concentré  en  granules,  ou 
en  petits  points. 

«  Ces  grès  sont  [larfois  schisteux.  Ils  sont  par  place  imprégnés  de  sels  de  cuivre,  à 
des  degrés  divers. 

«  On  rencontre  dans  mes  échantillons  des  fragments  brisés  de  quartz  transparent, 
de  petits  cailloux  roulés  de  quartz,  ovoïdes;  enfin  de  uombreux  fragments  de  silex, 
éclatés  et  brûlés  du  fait  de  l'cxphiilation. 

«  7.  Calcaire.  —  Quoique  le  calcaire  n'ait  pas  été  signalé  sous  forme  de  couches 
dans  cette  région,  les  échantillons  contiennent  des  fragments  de  calcaire  compact, 
avec  trace  de  fer;  cette  substance  figure'  aussi  dans  les  scories  et  débris  de  fours.  Je 
signalerai,  pro  meinurid,  quelques  petits  morceaux  de  nacre,  provenant  de  bivalves, 
probablement  d  eau  douce,  et  une  coquille  de  néritine  fluviatile. 


226  LES  METAUX 

sur  place  ces  minerais,  ils  établirent  au  voisinage  des  exploitations 
les  plus  importantes  tle  petites  usines  composées  de  quelques  fours 
rudimentaires  où  les  roches  cristallines  jouèrent  le  rôle  de  briques 

<i  8.  Coinhiistihle.  —  Le  combustible,  destiné  à  réduire  le  métal,  était  constitué  par 
du  bois,  dont  on  retrouve  des  fragments  carbonisés  à  différents  degrés,  avec  des 
morceaux  d'hématite  à  côté.  Ce  bois  est  trop  altéré  pour  que  l'on  puisse  en  déterminer 
l'espèce.  Il  devait  être  apporté  d'une  certaine  distance,  le  Sinaï  n'étant  pas  boisé. 

«  Les  données  du  problème  métallurgique  étant  ainsi  définies,  par  la  nature  des 
minerais  et  par  celle  des  roches  accompagnant  le  gisement  et  qui  ont  pu  et  dû  être 
employées  dans  les  opérations,  je  vais  examiner  les  produits  et  les  résidus  de  ces 
dernières,   recueillis  sur  place,  après  plusieurs  milliers  d'années. 

«  IL  —  Produits  métallurgiques.  —  Ces  produits  sont  les  suivants  : 

(I  Parois  des  fours  et  des  creusets  ;  laitiers   et  scories;  fragments  d'outils. 

«  On  n'a  pas  rencontré  de  fragments  de  mattes  ;  ce  qui  parait  exclure  l'exploitation 
des  pyrites,  substances  dont  les  minerais  n'offrent  d'ailleurs  point  de  vestiges.  Il  ne 
semble  pas  non  plus,  d'après  l'examen  des  matières,  que  les  mineurs  aient  employé 
de  fondants,  autres  que  ceux  tirés  des  roches  et  minerais  rencontrés  sur  place. 

«  Scories  et  laitiers.  —  A  Wadi-Maghara  on  a  ramassé  des  scories  lourdes  et 
noires,  ou  brun  foncé,  et  des  scories  blanches  et  légères,  ainsi  que  des  grès  impar- 
faitement vitrifiés .  Ces  grès  plus  ou  moins  ferrugineux,  et  sans  doute  additionnés 
d'hématite,  ont  servi  de  fondants,  le  calcaire  n'étant  intervenu  qu'à  titre  accessoire. 
En  tout  cas,  les  mélanges  sont  mal  fondus,  remplis  d'incuits,  formés  de  matériaux 
difficilement  fusibles  et  dont  l'homogénéité  ne  devait  pas  être  très  grande  :  ce  sont  là 
les  indices  d'une  fabrication  imparfaite. 

«  Certaines  scories  étaient  très  fusibles;  car  elles  ont  enveloppé  et  saisi  un  fragment 
d'os,  appartenant  à  un  petit  animal,  fragment  qui  ne  manifeste  pas  les  signes  d'une 
calcination  violente. 

((  Les  laitiers  sont  constitués  par  des  matières  denses,  compactes,  renfermant  peu 
de  bulles,  et  d'apparence  cristalline  par  places.  D'après  l'examen  microscopique,  ils 
appartiennent  à  deux  groupes.  Les  mieux  cristallisés  renferment  en  abondance  des 
cristaux  de  péridot  ferrugineux  (fayalite,  aFeO.  SiO')  et  des  octaèdres  de  magnélite. 
Ce  genre  de  laitiers  se  forme  dans  toutes  les  opérations  métallurgiques  où  le  fer  et 
la  silice  sont  en  proportions  convenables. 

«  Le  second  groupe  est  constitué  par  des  pyroxènes  verdàtres,  mélangés  par  places 
de  magnélite  et  de  quelques  cristaux  de  feldspaths. 

K  Ces  laitiers  sont  moins  basiques  que  les  précédents;  ils  renferment  de  la  chaux, 
provenant  de  gangues  calcaires,  dont  j'ai  retrouvé  quelques  échantillons  à  la  surface 
des  laitiers  et  des  débris  de  fours. 

c<  Un  échantillon  de  laitier  contient  en  abondance  de  la  cuprile,  ou  protoxyde  rouge 
de  cuivre,  en  octaèdres  bien  nets  et  mélangés  de  cuivre  métallique.  C'est  là  un  pro- 
duit accidentel  du  traitement  des  minerais  de  cuivre. 

Il  En  somme,  ces  laitiers  contiennent  les  mêmes  produits  et  offrent  les  mêmes  par- 
ticularités que  les  laitiers  modernes. 

v  Signalons  encore  quelques  gouttes  de  métal  tombées  des  fours,  avec  produits 
oxydés  noirs,  verts  et  bleus  par  places,  et  avec  scories  périphériques. 

((  Fours  et  creusets,  —  Aucun  de  ces  instruments  de  fabrication  n'a  été  retrouvé 
entier;  mais  M.  de  Morgan  en  a  apporté  de  nombreux  débris.  Les  fragments  des  fours 
et  des  creusets,  tels  qu'ils  m'ont  été  remis,  ne  se  distinguent  pas  très  bien  les  uns  des 


i,i:s  .\ii:tai;.\  227 


réi'ractaircs.  J'ai  rcU-ouvé  los  traces  de  ces  usines  à  Wadi-Mayhara, 
dans  la  vallée  (fig.  592)  ;  on  en  rencontre  au  pied  des  montagnes  de 
Serabit-el-Kliadem  et  dans  le  Wadi-Nasb  où,  semble-t-il,  fui  le  sièsre 
principal  de  la  métallurgie  pour  les  exploitations  du  nord. 


aulres.  Cepciuhuil,  d'apros  l'oxanien  des  lames  minces,  étudiées  par  M.  l^acroix,  il 
semble  que  les  parois  des  fours  aient  été  construites  de  préférence  à  l'aide  de  blocs 
des  grès  signalés  plus  haut;  les  creusets  ayant  été  fabriqués  avec  un  sable  quartzeux, 
cimenté  par  de  l'argile.  Mais,  dans  l'état  actuel  de  ces  débris,  en  partie  vitrifiés,  la 
nature  des  matières  originelles  est  difficile  à  préciser.  C'étaient  surtout  des  grès, 
mais  avec  certaines  portions  calcaires.  Ces  échantillons  sont  en  partie  compacts,  en 
partie  bulleux  et  renferment  des  grains  de  quartz  arrondis  et  en  voie  de  fusion  sur  les 
bords.  Çà  et  là  on  retrouve  des  cristaux  de  rutile  et  de  zircon,  provenant  des  grès,  et 
qui  ont  résisté  à  l'action  des  fondants  et  de  la  chaleur.  Ils  sont  associés  avec  des  ai- 
guilles de  pyroxcne  ferrugineux  et  d'anorthite  (feldspath  Iriclinique,  silicate  d'alumine 
et  de  chaux),  le  tout  englobé  dans  un  verre  incolore,  ou  jaune  foncé  (en  lames  minces). 

«  Ces  divers  produits  d'ailleurs  sont  ceux  que  l'on  observe  d'ordinaire  dans  les  pro- 
duits similaires  de  l'iudustrie  moderne. 

«  III.  —  Fragments  d'outils.  —  Les  fragments  d'outils  offreul  un  intérêt  particulier, 
car  ils  représentent  les  produits  incontestables  de  la  fabrication  et  ils  ont  été  trouvés 
dans  les  restes  des  habitations  des  mineurs,  à  Wadi-Maghara.  Ils  sont  au  nombre  de 
trois. 

«  I»  Pointerolle  (fig.  592).  —  Elle  a  servi  à  travailler  la  roche.  Elle  est  recourbée  à  son 
extrémité  eu  forme  de  biseau,  et  la  forme  de  cette  extrémité  corresjjond  à  celle  des  stries 
du  rocher.  La  pointerolle  est  cassée,  à  l'extrémité  opposée.  Le  morceau  actuel  est 
long  de  Sy™",  large  de  iG™">  et  son  épaisseur,  égale  à  10™™  dans  la  masse  principale, 
diminue  peu  à  peu  jusqu'à  3"™,  vers  le  biseau.  Cet  outil  a  été  fondu,  mais  peu  régu- 
lièrement et  dans  un  moule  assurément  grossier.  Il  est  constitué  par  du  cuivre,  ne 
contenant  pas  d'étain  en  dose  sensible;  il  est  fortement  arsenical.  Je  rappellerai  que 
la  présence  de  l'arsenic  durcit  le  cuivre.  Les  alchimistes  grecs  et  égyptiens  s'en  servent 
continuellement  pour  le  blanchir.  L'origine  minéralogique  de  l'arsenic  contenu  dans 
l'outil  actuel  et  le  procédé  par  lequel  il  y  a  été  introduit  sont  obscurs.  En  elfet,  je  n'ai 
retrouvé  d'arsenic  ni  dans  les  minéraux  (chrysocolle,  turquoise,  grès  imprégnés  de 
sels  de  cuivre),  ui  dans  les  grès  ferrugineux,  employés  comme  fondants.  En  raison  de 
ces  observations,  il  est.probable  que  l'arsenic  a  été  introduit  à  part  dans  la  fonte  de 
l'outil,  peut-être  par  une  addition  de  mispickcl;  mais  cette  dernière  substance  n'a  pas 
été  retrouvée.  La  patiné  est  verdàtre  et  renferme  du  chlore  (atakamite  dérivée  du 
chlorure  de  sodium  des  eaux  d'infiltration). 

«  2°  Fragment  de  burin.  —  Je  désigne  sous  ce  nom  uu  fragment  d'outil,  plus  petit 
que  le  précédent  et  moins  rouge  :  il  est  également  cassé.  Le  fragment  est  long  de 
2^mm  ;  sa  largeur  varie  de  6™"  à  4°'°'>5,  son  épaisseur  de  l\^™  à  3"".  La  pointe  semble 
avoir  été  taillée  à  quatre  pans  :  mais  elle  est  émoussée  et  en  partie  détruite.  Le  métal 
est  très  dur.  C'est  un  bronze,  très  pauvre  en  étain  d  ailleurs,  et  exempt  d'arsenic 
(à  dose  appréciable).  La  patine  jaune  brun  contient  du  carbonate  de  chaux,  du  fer  et 
un  peu  de  cuivre. 

«  3»  Aiguille.  —  Elle  est  recouverte  d'une  épaisse  patine,  formée  de  carbonate  de 
chaux  el  de  cuivre.  Celte  patine  se  détache  aisément  par  le  choc.  Il  reste  une  aiguille, 
longue  de  54™™,  et  dont  le  diamètre  est  voisin  de  i™".  L'axe  est  plein  et  métallique. 
L'aiguille  est  munie  de  son  chas.  Le  métal  est  tendre,  tenace,  facile  à  plier.  C'est  du 


•228  IJ'-.S  MI'.TAIX 


Les  scories  qiiou  leiiconti'e  dans  ces  localités  sont  brunes,  peu 
compactes  et  renferment  de  nombreuses  grenailles  de  cuivre.  Avec 
elles  sont  souvent  des  fragments  de  minerai  cru,  f|ui  par  la  diversité 


cuivre,  exempt  d'él;iin  —  l'Iomlj '.'  —  Il  y  ;i  une  pelilL"  ([luuililr  d'arsenic,  avec  une 
trace  imperceptible  d'autiiuoiue. 

((  La  présence  de  l'arsenic  et  celle  de  l'étain,  dans  certains  des  uutils,  leur  absence 
dans  d'autres,  indiquent  que  les  Egyptiens  de  cette  époque  reculée  savaient  déjà  mo- 
dilier  à  volonté  les  propriétés  de  leurs  métaux,  par  l'introduction  de  certaines  ma- 
tières étrangères. 

i<  M.  de  Morgan  m'a  également  remis,  comme  termes  de  comparaison  et  produits 
dérivés  probablement  des  mines  du  Sinaï  : 

«  1°  Une  couleur  verte,  en  morceaux  amorpbes,  vitreuse  à  1  intérieur,  trouvée  dans 
les  tombeaux,  à  El-"Amrah,  près  d'Abydos.  C'est  de  la  clirysocolle  (nom  moderne): 

«  a'^  Deux  aiguilles  et  une  épingle,  qu'il  a  ramassées  lui-même  dans  la  très  ancienne 
nécropole  (préhistorique  ?)  de  Toukli  (entre  Tlièbes  et  Abydos).  L'épingle  a  deux 
pointes.  Elle  est  longue  de  82"".  Le  diamètre,  patine  comprise,  est  de  2°""  environ. 
Elle  se  rompt  aussitôt  par  la  flexion  ;  ce  qui  met  en  évidence  un  axe  central  métallique 
plein,  rouge,  brillant,  entouré  d'abord  de  protoxyde  de  cuivre  mat,  compris  lui-même 
dans  une  gaine  vord.ître.  Jje  métal  est  du  cuivre,  avec  une  petite  quantité  d'étain  et  une 
dose   sensible  d'arsenic. 

«  Les  deux  aiguilles  sont  munies  de  leur  chas.  L'une,  longue  de  32™",  présente  une 
structure  analogue  à  la  précédente.  L'autre  est  longue  de  92""",  altérée  plus  profondé- 
ment, et  également  fragile;  le  cuivre  étant  changé  en  partie  en  protoxyde.  La  patine 
vcrdàtre  contient  une  trace  de  chlore. 

«  La  structure  intérieure  de  cette  aiguille  est  remarquable.  En  elTet,  l'axe  est  cana- 
liculé  :  un  vide  central  étant  entouré  successivement  par  du  cuivre,  en  grande  partie 
oxydé,  le  tout  enveloppé  de  patine.  Une  semblable  disposition,  qui  ne  se  retrouve  ni 
dans  l'autre  aiguille,  ni  dans  l'épingle,  semblerait  l'indice  de  quelque  procédé  spécial 
de  fabrication  ;  par  exemple,  on  a  dû  fabriquer  cette  aiguille  avec  une  feuille  de  métal 
enroulée,  au  lieu  d'arrondir  une  bande  découpée  dans  une  lame,  au  marteau  ;  car  la 
lilière  était  inconnue  alors.  Le  moulage  ne  s'appliquerait  guère  à  de  si  petits  objets  et 
d'une  telle  forme.  Le  chas  est  d'assez  grande  dimension. 

(c  Le  métal  de  cette  aiguille  est  rouge,  constitué  par  du  cuivre,  avec  un  peu  d'étain 
et  une  dose  sensible  d'arsenic  :  pas  de  phosphore. 

«  Ce  sont  là  des  alliages  pauvres  en  étain,  tels  qu'on  en  rencontre  dans  les  anciens 
outils  des  régions  de  l'ancien  continent  et  de  l'Amérique,  où  ce  dernier  métal  était 
rare  et  difficile  à  obtenir. 

«  En  résumé,  les  minerais  de  cuivre  du  Sinaï  sont  des  minerais  pauvres  et  peu 
abondants,  constitués  par  des  grès,  renfermant  des  silicates  et  carbonates  basiques  de 
cuivre  et  des  turquoises.  Leur  récolte  devait  être  pénible  et  exiger  une  main-d'œuvre 
considérable. 

«  A  ces  époques  reculées,  où  les  Egyptiens  se  servaient  encore  des  armes  de  bois 
et  do  pierre,  dont  on  a  retrouvé  les  restes,  le  cuivre  était  un  métal  rare  et  précieux, 
dont  la  possession  justifiait  de  semblables  travaux.  La  période  postérieure,  où  se  ré- 
pandit l'usage  du  bronze,  plus  précieux  encore,  a  dû  débuter  par  des  temps  où  l'étain, 
apporté  de  contrées  lointaines,  était  mis  en  œuvre  avec  une  extrême  parcimonie,  ainsi 
que  l'attestent  nos  échantillons. 

«   En  tout  cas,  l'extraction  du  métal  se  taisait  pai'  des  méthodes  semblables  à  celles 


LES  MKTAIX 


229 


do  leur  iialiii-o  pi'dUViMiL  ([iie  les  inoiiidres  I'ra<i,-in(',iils  éUiicuL  mis  à 
profit  et  que  les  ouvriers  recueillaient  les  minerais  dans  lentes  les 
parties  des  gisements. 

Les  opérations  se  faisaient  au  eharbon  de  bois  dont  on  retrouve 
d'abondants  morceaux  sui- remplacement  des  usines  antiques.  Quant 
à  la  forme  et  aux  dimensions  des  fours,  je  lu;  puis  en  parler,  car  les 
restes  qu'il  m'a  été  donné  d'examiner  ne  présentaient  plus  de  maté- 
riaux en  place. 

La  production  en  cuivre  métallique  des 
mines  du  Sinaï  semble,  d'après  la  teneur 
des  gisements,  d'après  Textension  des 
vides  produits  par  les  anciens  et  aussi 
d'après  le  peu  d'importance  des  scories, 
avoir  été  très  faible  ;  c'est  à  peine,  bien 
certainement,  si  ces  exploitations  fourni- 
rent annuellement  quelques  tonnes  de 
métal,  quantité  insignifiante  pour  les  be- 
soins de  l'Egypte;  aussi  devons-nous  cher- 
cher ailleurs  que  dans  la  péninsule  Sinaï- 
tique  l'origine  des  ressources  métalliques 
dont  disposaient  les  pharaons.  Sans  aucun  doute,  ces  mines  four- 
nirent un  appoint  dans  l'importation  du  cuivre  en  Egypte  ;  mais 
si  l'on  tint  à  leur  possession  dans  la  vallée  du  Nil,  c'est  bien  pro- 
bablement parce  qu'elles  permettaient  d'obtenir  du  métal  quand  les 
routes  de  la  véritable  importation  du  cuivre  se  trouvaient  coupées. 
D'autre  part,  les  turquoises  étaient  fort  estimées  des  Égyptiens,  les 
bijoux  de  Dahchour  en  font  foi,  et  le  Sinaï  était  la  seule  région  d'où 
l'on  pouvait  les  tirer  alors;  à  moins  que  nous  admettions  que  par  le 
commerce  ces  gemmes  venaient  des  mines  de  Khoraçân,  ce  qui  est 
fort  possible. 

L'exploitation  des  mines  commença  dès  les  temps  les  plus  reculés, 


tig.  SgS.  —  Moule  pour  couler 
les  lames  de  bronze  (Wadi- 
M.ighara).  1/2  grandeur  na- 
turelle . 


que  la  métallurgie  du  cuivre  a  suivies  pour  les  minerais  analogues,  depuis  l'antiquité 
jusqu'à  ces  derniers  temps  :  je  veux  dire  par  l'emploi  du  bois,  comme  réducteur, 
combiné  avec  celui  de  fondants  siliceux,  ferrugineux  et  calcaires.  Ces  mines  ont  été 
abandonnées  il  y  a  3ooo  ans,  à  cause  de  la  pauvreté  des  minerais,  de  leur  raréfaction, 
et,  sans  doute  aussi,  à  cause  des  difficultés  de  l'exploitation  et  des  transports  dans 
une  région  éloignée  de  l'Egypte  proprement  dite.  Il  n'en  est  pas  moins  intéressant  de 
constater  que  l'on  était  arrivé,  probablement  dès  le  début  de  l'exploitation  des  mines 
du  Sin.a'i,  c'est-à-dire  il  y  a  près  de  7000  ans,  aux  procédés  suivis  jnscju'à  nos  jours  ; 
procédés  fondés  sur  un  empirisme  dont  l'origine  est  facile  à  concevoir  et  qui  n'exigeaient 
la  connaissance  d'aucune  théorie  proprement  dite,  telle  que  celles  qui  Iraiisl'ormeul  en 
ce  moment  la  métallurgie  traditionnelle.  » 


230  LES  METAUX 

nntérieiiremeiit  peut-être  à  l'arrivée  des  Egyptiens  pharaoniques  dans 
la  vallée  du  Nil.  Les  gisements  sont  d'un  accès  difficile.  Ils  ne  pré- 
sentent pas  ces  caractères  saillants  (jui,  de  prime  abord,  les  font  re- 
connaître. Il  n'est  donc  pas  admissible  que  ce  soit  là  que  pour  la  pre- 
mière fois  les  Egyptiens  aient  connu  le  cuivre,  bien  plutôt  serions- 
nous  en  droit  de  penser  que,  possédant  déjà  des  notions  précises  sur 
les  gisements  cuivreux,  ils  rencontrèrent  ceux  du  Sinai  dans  leur 
mouvement  vers  l'ouest  et  en  tirèrent  de  suite  parti,  tout  comme  leurs 
ancêtres  exploitaient  dans  leur  pays  d'origine  des  mines  tle  la  même 
nature. 

Quelle  que  soit  l'origine  de  ces  exploitations,  il  n'en  est  pas  moins 
certain  qu'elles  remontent  aux  premiers  temps  de  l'Egypte  pharaoni- 
que, car  parmi  les  stèles  qui  se  sontconservéesjusqu'à  nos  jours  sur 
les  rochers  de  Wadi-Maghara  et  de  Serabit-el-Khadem,  il  en  est  qui 
portent  les  noms  et  les  titres  de  souverains  des  plus  anciens. 

Le  monument  le  premier  en  date  dont  nous  ayons  connaissance 
est  une  stèle  du  roi  Djézer',  pharaon  de  la  IIP  dynastie.  Cette  inscrip- 
tion, c|ui  survécut  jusqu'à  ces  dernières  années,  est  probablement 
aujourd'hui  détruite,  car  je  n'ai  pu  la  retrouver.  Rien  ne  prouve 
qu'elle  soit  la  première  qui  fut  gravée  à  l'entrée  des  mines  et  l'on  est 
on  droit  de  supposer  que  Djézer,  comme  ses  successeurs  dont  les 
noms  sont  également  parvenus  jusqu'à  nous,  ne  fit,  en  exploitantles 
gisements  du  Sinaï,  que  suivre  la  tradition  laissée  par  ses  prédé- 
cesseurs. 

Nous  ne  pouvons,  en  l'état  actuel  des  mines,  que  constater  la  pré- 
sence des  jalons  chronologiques  qui  n'ont  pas  été  emportés  par  les 
siècles,  et  Ihistoire  du  Sinaï,  telle  que  nous  pouvons  l'écrire  aujour- 
d'hui, est  et  sera  toujours  remplie  de  lacunes.  Il  semblerait,  d'après 
les  textes,  que  l'exploitation  ne  fut  jamais  continue,  qu'elle  corres- 
pondit à  des  besoins  intermittents,  et  cependant  nous  ne  pouvons 
nous  prononcer,  car,  je  l'ai  dit,  la  plupart  des  feuillets  de  ces  annales 
ont  été  arrachés,  il  ne  reste  plus  aujourd'hui  que  des  lambeaux  épars 
du  livre. 


I.  Djézer    [   \^  _"-^  I    ost  K'    plus   ancien    roi    d'Égyple   dont    nous   ayons    des 

niouumculs  ;  c'est  lui  qui  conslruisil  la  pyramide  à  degrés  de  Saqqarali.  IjO  bas- 
relief  du  Wadi-Maghara  qui  le  représente  (v.  lîhers,  Durch  Goscil  zum  Sinaï,  p.  56^) 
a  été  découvert  parPalnier;  le  l'oi  n'est  désigné  que  par  son  nom  de  bannière  lu  par 
M.  Bénédite(ifec.rfe  Ti-av.,  XVI,  p.  io4).  Ce  pharaon  est  resté  célèbre  assez  tard  pour 
que  les  prêtres  de  l'époque  ptoléma'ique  qui  gravèrent  la  stèle  des  sept  années  de  fa- 
ne, à  Sehel,  aient  placé  cette  tradition  sous  son  règne.  —  [G,  J.] 


nu 


LES  METAUX  231 

Snéfrou  '  est  le  second  roi  doul  nous  rencontrons  lu  nom  près  des 
mines  ;  il  fit  graver  une  stèle  à  Wadi-Maghara  au  cours  d'une  expé- 
dition ordonnée  contre  les  étrangers'. 

Puis  vient  Choufbu  '  qui,  également  à  VVadi-Maghara,  laissa  deux 


I.  Snéfrou    I    ll<r::>^   l  ,  lo  prcuiior  loi  rlr  la  lY"  dynastie  (quelques  égyplologues 

en  font  le  deruier  de  la  III"),  doit  avoir  vécu  aux  euvirons  du  xl«  siècle  avant  J.-C.  S'il 
nous  est  parvenu  fort  peu  de  chose  datant  de  ses  prédécesseurs,  les  monuments 
de  son  règne  sont  nombreux.  On  lui  attribue  la  construction  de  deux  pyramides,  celle 
de  Meïdoum  et  une  des  deux  grandes  pyramides  de  Dahchour  ;  aux  environs  de 
ces  deux  monuments  ont  été  trouvés  beaucoup  de  tombeaux  des  hauts  personnages 
de  sa  cour  et  même  des  membres  de  sa  famille  (v.  Pétrie,  Mrduiii,  et  J.  de  Morgan, 
Fouilles  à  Dahchour,  1895).  —  La  stèle  du  Wadi-Ma^-hara  (Lepsius,  JJeii/iiiialrr, 
II,  2,  a),  que  nous  reproduisons  ici  (lig.  5g4).  le  représente  massacrant  un  person- 
nage au  type  sémite  très  prononcé,  qui  est  certainement  un  habitant  du  pays,  ancêtre 
des  Bédouins  d'aujourd'hui.  Autour  du  roi  sont  sculptés  ses  titres  au  complet  et  une 
inscription  disant  :  «  Il  terrasse  les  peuples  étrangers.  »  Son  activité  ne  s'est  sans  doute 
pas  bornée  aux  mines  du  Wadi-Maghara,  et  il  doit  avoir  été  le  premier  roi  d'Lgypto 
qui  ait  fait  exploiter  sur  une  grande  échelle  les  mines  du  Sinai,  car  son  souvenir  s'est 
perpétué  longtemps  encore  dans  ce  pays,  au  point  que  les  mines,  tant  celles  de  Se- 
rabit-el-Khadem   que  celle   du   Wadi-Maghara   portent  encore,  à  la  XII'   dynastie,    le 

nom  de  mine  de  Snéfrou        j     11     C\    (  Po^  1    ('''^P^'"'*>  •'^'''"'^■'""''■'',    H,     l'J/,    ^').  Au 

Wadi-Nasb  il  doit  exister  une  autre  stèle  de  ce  pharaon,  sur  laquelle  nous  n'avons 
aucun  document  (Baedeker,  Unter  .Egypten,  p.  a4'i).  —  [G.  J.] 

3.  Les  plus  anciens  monuments  du  Siua'l  nous  montrent  les  habitants  du  pavs  ;  le 
type  sémiledu  personnage  que  le  roi  va  massacrer  est  fort  bien  caractérisé.  Celaient, 
comme  aujourd'hui  encore,  des  Arabes,  des  Bédouins  nomades,  qui  cherchaient  à  s'op- 
poser à  l'extension  de  la  puissance  égy|iliriiue  ;  ces   nomades,   tant  ceux-ci  que    leurs 

voisins  de  Syrie  et  d'Arabie,  sont  les  Sati  (     jT^    *^.      f-—^  )    les  archers,  chez  lesquels 

Sinouhit,  fuyant  l'Egypte  ù  la  mort  d'Amenemhat  1er,  trouve  un  refuge  (papyrus  de  Ber- 
lin, n"  I  ;  sa  tiaduction  dans  Maspero,  Conlex  populaires,  p.  yo).  Sur  les  monuments, 
nous  ne  trouvons  ce  nom  de  Sitti  qu'à   partir  de  la  XI1«  dynastie;  auparavant   ils  sont 

désignés  par  le  terme  général  de    j^^nj  ,  Setou,  les  peuples  étrangers,  nii_)td,ius  lequel 

il  faut  peut-être  voir  une  simple  variante  phonétique  du  mot  Sati,  ou  plutôt  une  forme 
plus  ancienne  de   ce   nom.  — •  Nous   rencontrons   aussi    très   souvent    celui    do  Mentoa 

ô::::::::^  V\,    qui    désigne  sans  doute  une  des  tribus    bédouines,  celle   (|ui   occupait  cette 

région  du  désert  sinaitique  et  contre  les  incur-sions  de  la{[uelle  les  mineurs  ,i\airiit 
surtout  à  se  défendre.  Presque  toutes  les  stèles  nous  parlent  d'eux  ;  une  si-ule,  celle  de 

Chéops,  mentionne  une  autre  peuplade,  les  Anou  [|  |  |  ,  les  habitants  des  mon- 
tagnes, qui  étaient  probablement  une  tribu  voisine  (v.  .'i  ce  sujet  Mùller,  Asien  und 
Europa,  p.  18-24).  —  [G.  J.] 

3.  Choufou  f,!®_\\  o"  [  O  ^5?,^^^  J.  lo  Chéops  des  Grecs,  successeur  im- 
médiat de  Snéfrou,  devint  bc.uicoup  plus  célèbre  que  sou  père  et  de  nombreuses  légendes 


232  LES  METAUX 

stèles  au  moins  ;  dans  l'une  d'elles  il  est  représenté  massacrant  les 
Anou  en  face  du  dieu  Thoth. 

Sahou-Ra',  Ou.ser-en-Ra',  Meidcaou  Hor^  et  Dadkara  *  sont  les  sou- 

coururenl  sur  sou  compte  jusqu'aux  plus  basses  époques  de  l'empire  égyptien.  La  raison 
de  celte  réputation  tient  à  la  conslruction  du  plus  monumental  des  tombeauxroyaux,  la 
grande  pyi'aniide  de  Guizeh.  Les  deux  bas-reliefs  sculptés  l'un  à  côté  de  l'autre,  sous  son 
règne,  au  Wadi-Maghara  (v.  Lepsius,  Denkiiidler,  II,  2,  i.  c,  et  la  photographie  dans 
l'Ordonnance  Survey,  reproduite  dans  Maspero,  Histoire  ancienne,  I,  p.  365),  ne  nous 
donnent  pas  grand  renseignement  sur  lui-même  ni  sur  son  activité  dans  les  mines  : 
l'un  de  ces  deux  tableaux  ne  donne  que  les  titres  et  noms  du  roi,  tandis  que  l'autre  le 
représente  massacrant  un  personnage  abaitu  devant  lui,  qui  personnifie  le  peuple  des 

Anou,  par  devant  le  dieu  Thoth  ;  cette  peuplade    n'esl   mentionnée  nulle   part 

ailleurs  dans  les  textes  du  Siuaï  ;  c'est  probablement  une  tribu  de  Bédouins  comme 
les  Menton.  M.  Mùller  (Asien  und  Europa,  p.  22  et  24)  en  fait  des  Troglodytes. — [G.  J.] 

i.  Siihou-I{<i  \       O  ^\    ^>        I     ''^  second  roi  de  la  V"  dynastie  élépliantiue,  monta 


^ahou-Ru  Çq'^  %>  ^ 


sur  le  li'ùno  tuviron  deux  cents  ans  après  Chéops,  donc  vers  l'au  Syoo  avant  uotre  ère. 
11  régna  peu  de  temps  et  nous  a  laissé  peu  de  monuments;  il  fut  enseveli  dans  une  des 
pyramides  d'Abou-Sir.  Au  Siuaï,  son  bas-relief  (v.  flg.  og.')  et  Lepsius,  Denkniàler,  II, 
39  f)  le  représente  trois  fois  :  d'abord  debout,  tenant  à  la  main  le  sceptre  et  la  massue, 
et  portant  d'un  côté  la  couronne  de  la  Haute-Egypie,  de  l'autre  celle  de  la  Basse. 
Plus  loin  il  lève  sa  masse  d'armes  au-dessus  de  la  tèle  d'un  barbare  à  demi  renversé, 
qu'il  va  massacrer.  Cette  dernière  scène  est  accompagnée  de  deux  ligues  de  texte 
signiiiant,  l'une  «  Le  dieu  bon  (le  roi)  frappe  les  Menlou  »,  l'autre  a  II  subjugue  les 
peuples  étrangers.  »  Enlre  les  deux  parties  du  tableau  se  dresse  une  enseigne  repré- 
sentant un  chacal,  probablement  celle  de  la  troupe  qui  accom])agnait  l'expédition 
aux  mines;  c'est  la  même  qui  se  trouve  déjà  sur  un  des  bas-reliefs  de  Chéops,  mais 
il  n'est  guère  possible   de  dire  à  quel  dieu  elle   était  dédiée.  —  [G.  J.) 

2.  Les  successeurs  immédiats  de  Sahou-Ra  sont  très  peu  connus  et  n'ont  pas  laissé 
de  monuments  dans  le  district  miuicr  du  Siuaï,  sauf  peut-être  Kaka  (Ebers,  Durch 
(iozenzitm  Sinai,  i/|S). Nous  retrouvons  an  A^  adi-Ma<>hara.  au  moins  un  demi-siècle  après 

Sahou-Ha,  le  roi   Ouscr-en-lid  {        „v>aaa   |  ^~~^       1  ■  aussi  nommé  sur  d'autres  mo- 

uuuu^uts  de  son  second  nom,, 47(  1  U^""*^  J.  D'a])rès  Manélhon,  il  régna  quarante- 
quatre  ans;  sa  pyramide  doit  être  unede  celles  d'Abou-Sir,  ou  bien  celle  d'Abou-Garab  , 
Surlebas-reliefque  nous  avonsde  lui  au  Sina'l,  au-dessous  des  inscriptions  qui  donnent 
tous  ses  titres,  nous  le  voyons  couronné  de  la  mitre  blanche  de  la  Haute-Egypte, 
massacrant  un  euuemi  renversé  :  c'est  la  même  scène  que  sur  la  stèle  de  Sahou-Ra,  et 
elle  est  accompagnée  des  mêmes  inscriptions  (Lepsius,  Denkinâler,  II,  i52  a).  —  [G.  J.] 

3.  Successeur  du  précédent.  Menkdou-Hor,  le  Mencheres  de  Manéthon  régna  huit 
ans  ;  nous  ne  savons  pas  grand'chose  de  plus  sur  lui.  Le  fragment  qui  nous  reste  de  la 
slèle  gravée  sous  son  règne  du  Wadi-Maghara  est  malheureusement  fort  incomplet 
(Lepsius,  Denkmàler,  II,  3g,  e);  après  avoir  énumcré  les  titres  du  roi,  1  inscription 
devait  parler  de  l'expédition  envoyée  par  lui  aux  mines,  autant  qu  on  peut  en  juger 
d  après  les  deux  mots  qu'il  eu  reste.  —  [G.  J.] 

4.  Sous  ce  roi,  qui  régna  plus  longtemps  et  nous  a   laissé   plus  de  monuments  que 


LES  METAUX 


233 


C^l 


G.J. 


Fig.   r)Ç)4-   —   Sièle   tiioniphale  du    roi  Snéfrou  (IIl^"  dynastie),  gravée  sur  les   rochers 
de  Wadi-Magliara  (Sinaï).   {Dessin  d'nprps  nature  de  M.  G,  Jé/juier.) 


Fie;.   595.  —  Stèle  triomphale  du  roi  Sahou-Ka  (V^  dynastie),  gravée  sur  les  rochers 
de  Wadi-Maghara  (Sinaï).  {Dessin  d'après  nature  de  M.  G.  ■/ér/uier.') 


234  l'ES  METAUX 

verains  de  la  V'^  chnastie  qui  semblent  avoir  attaché  le  plus  d'impor- 
tance aux  mines  du  Sinaï.  La  VP  dynastie  n'est  représentée  que  par 
Pepi  P"-'  elPepi  II'. 

Dès  le  début,  l'activité  s'était  portée  aussi  bien  sur  les  gisements 

son  proiU'cesseur,  1  oxploilalioii  îles  mines  du  Wudi-Maghara  parait    avoir  élé   mené 
sur  une  plus  grande  échelle.  On  y  a  U-ouvé  trois  stèles  au  nom  de  ce  souverain,  stèles 
qui,     comme  beaucoup    d'autres,    doivent    avoir   disparu    aujourd  hui.    L'une    d'elles 
(Ebers,  Durcli  Gosen  zuiti  Sinnï,  p.  147  et  îi.5o)  portait  l'un  à    côté  de  l'autre  les  deux 


noms   du   roi,  D(idhar(( 


(    Q%A    1"'    -'■'*"    (      ll'Tj]     j:uneautr. 


e    malheu- 


reusement ti'ès  fragmentée  (Lepsiu  s,  11,  Sgf/j.parled  une  expédiliou  royale.  La  troisième, 
|)lus  im]iortanle,  est  datée  de  la  4^°  année  du  roi  (Birch,  /Eg.  Zeitschrift,  1869,  p.  26- 
•iy)  :  en  dehors  des  noms  royaux,  nous  y  voyons  d'abord  une  phrase  fort  obscure  qui 
|iarail  aUribuer  la  découverte  des  mines  à  l'interventioud'un  dieu,  grâce  à  une  tablette 
écrite  par  lui-même.  Le  reste  de  1  inscri])lion  est  plus  clair  :  il  s'agit  d'une  expédition 
confiée  par  le  roi  à  un  fonclionnaire  nommé  Khent-Khili-Ankh;  la  mention  d'un  bateau 
accompagnant  les  mineurs  nous  montre  qu'ils  prenaient  à  cette  époque  la  voie  de 
la  lier  jusqu'à  pioximité  immédiate  des  mines.  Le  chef  de  l'expédition  porte  un  litre 
qui  revient   très   souvent   dans    les   inscriptions   trouvées   au    même    endroit,  celui    de 


f 


,  qui  ])arait    signifier  pilote  ou   c/ipiliiine  de  vfiisseaii  (v.  Brugsch,  jUgyptolo- 
gir,  p.  'iGo).  —    [(i    J.i 

I.  A  parlii-  de  ce  roi.  les  textes  des  stèles  du  Sinaï  commencent  à  être  jjlus  complets 
et  à  nous  donner  ipielqucs  détails  sur  les  expéditions  elles-mêmes.  Pepi  I"'  nous  a  laissé 
du  rosie  de  nombreuses  inscriptions  en  Egypte  même;  il  régna  un  demi-siècle,  vers 
!i.")oo  avant  J.-C  ;  sous  sadomination.les  mines  furent  exploitées  avecaclivité,  enparliculier 
li^s  mines  d'or  du  Jl'ddi-nainmniiiat  (Lepsius,  Di'ttkmâler,  II,  1 15),  ainsi  que  les  carrières 
d'.ilbàtre  de  Hal-Nouh  (Moyeune-Égyple) .  L'inscription  que  nous  reproduisons  ici 
(fig.  596,  V.  Lepsius,  Denkmaler,  II,  iiG,  a)  nousreporte  à  une  expédition  datant  du  8  Me- 
sori  de  l'an  18  de  son  règne,  sous  les  ordres  de  deux  généraux  qui  paraissent  avoir  eu 
sous  leurs  ordres  un  assez  grand  nombre  d'hommes  ;  les  noms  des  trois  capitaines  de 
vaisseau  et  des  fonclionuaires  civils  qui  faisaient  partie  de  l'expédition  sont  gravés  au 
bas  de  la  stèle,  tandis  que  le  haut  nous  montre  les  scènes  bien  connues  du  roi  Pepi- 
Meriia  terrassant  les  Menlou  et  écrasant  les  peuples  étrangers. 

3.  Fils  de  Pepi  I"^'',  Nofeikara  Pepi  est  un  des  rois  qui  régnèrent  le  plus  longtemps 
sur  l'Egypte,  une  centaine  d'années  à  peu  près.  Monté  fort  jeune  sur  le  trône,  c'est  sa 
mère,  la  reine  Ankhs-n-Merira,  qui  exerça  la  régence  pendant  son  enfance:  tel  est  au 
moins  le  rôle  qu'elle  parait  jouer  dans  notre  stèle  du  Wadi-Maghara,  datée  de  l'an  2 
du  roi  (v.  lig.  .')()-,  it  Lepsius.  Di'iikmiïli'r.  II.  i[().  n)  où  elle  occupe,  avec  tous  ses 
titres  d'épouse  roy.ile  de  Pépi  l<",  mère  royale  de  Pépi  II,  une  place  prépondérante  à 
côté  de  son  fils.  Un  fait  intéressant  à  noter  ici  est  que  les  deux  rois  sont  désignés  ici  non 
]iar  leurs  noms,  mais  j^ar  le  nom  de  leurs  pyramides,  deux  des  monuments  découverts 
il  y  a  quelques  années  à  Saqqarah  et  dont  les  inscriptions  qui  couvrent  les  chambres 
intérieures  nous  ont  donné  les  plus  précieux  renseignements  sur  la  religion  de  l'An- 
cien Empire  (publiés  par  M.  Maspero  dans  le  Recueil  de  Trayaux).  —  Comme  pour  l'ex- 
pédition précédente  à  la  recherche  de  la  turquoise,  nous  avons  dans  celle-ci  les  noms 
de  tous  les  fonctionnaires  qui  y  prirent  part,  entre  autres  un  certain  nombre  de  capi- 
taines de  vaisseau;  le  chef  était  un  trésorier  royal  (?)  nommé  Htipi.  — [G.  J.j 


T.Ks  aii:tau\ 


235 


du  nord  (jiio  sur  ceux  du  sud,  los  stèles  de  Sin'ahil-ei-Khadom,  de 
Wadi-.Xasb  et  de  Wadi-Magliara  en  font  loi;  sous  le  Moyen  Empire, 
l'exploitation  se  continua  sur  toute  l'étendue  du  district.   Ouserle- 


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Fiif.  5f|6.   —  Stèle  Iriomphalclu  roi  Pepi  I'"''  (VI'  dynaslie],  çravéesui-  los  rochors 
de  Wadi-Maghara  (SinaïJ.  {Dessin  d'après  natuie  de  M.   (!.  Jéi/i(iei\) 

sen  P^  Amenemhat  II,  Amenemhat  III  et  Amenendiat  IV  sont  fré- 
quemment mentionnés  dans  les  diverses  localités.  Quelques  mines 
furent  même  ouvertes  et  entièrement  exploitées  sous  le  règne  de  ces 
souverains  '. 

I.  C'est  avec  le  Moyen  Empire,  on  plulôt  avec  la  XII°  dyiiaslie.  la  période  la  pins 
glorieuse  et  la  plus  connue  du  Moyen  Empire,  que  nous  trouvons  des  traces  d'une  ex- 
ploitation régulière  des  mines  à  Serabit-el-KIiadem,  taudis  qu'au  Wadi-Maghara  le 
travail  continue,  semble-t-il,  à  être  iutermitteut.  Dans  le  premier  de  ces  deux  endroits, 
la  colonie  établie  commence  à  ériger  un  temple  dès  l'époque  d' Oitsertesen  7"'  (le 
second  roi  de  la  Xll"  dynastie,  vers  aSoo  av.  J.-C);  on  en  a  retrouvé  quelques  débris 
dans  les  constructions  restaurées  par  Menephttih  de  la  XIX"  dynastie  (v.  le  plan  dresse 
par  M.  Benedite,  dans  Maspero,  Histoire  ancienne  de  l'Orient.  I,  p.  474)-  Sur  les  hau- 
teurs environnantes  se  dressent  encore  des  stèles  très  abîmées  portant  les  cartouches 
du  même  pharaon.  II  semble  avoir  aussi  fait  exécuter  des  travaux  au  Wadi-Maghara 
(Brugsch,  Geschichte  xEgyptens,  p,  i32).  —  Sous  son  successeur  Amenemhat  II.  une 
grande  mine  fut  ouverte  à  Serabit-el-Khadem,  ainsi  que  le  prouvent  deux  inscriptions, 
encore  inédites,  datées,  l'une  de  l'an  7,  l'autre  de  l'an  •>.\  de  son  règne.  —  Si  nous  n'a- 
vons au  Sina'i  aucun  document  sur  les  travaux  qu'ont  pu  y  faire  exécuter  Oitsertesen  II 
et  Ouserlesen  III.  l'aclivité  paraît  avoir  été  très  grande  sous  le  règne  A' Anieneiiihiit  III. 


236  LES  METAUX 

Au  Nouvel  Empire,   après  l'expulsion  des  Pasteurs,  les  travaux 


-ê  -t     ^ 


G.J 


Fig.  5f,7. 


—  Slèle   du  roi   Pcpi  II  (YI=  dynasiie),  gravée  sur  les  rochers  de  Wodi- 
Maghara  (Sinaï).  [Dessin  d'après  nature  de  M.  G.  Jéquier.) 


à  en  jugei'par  le  nombre  considérable  d'insciiplions  de  ceUe  époque  qu'on  ya(rouvées. 
Dès  le  commenccmenl  de  sou  règne,  les  liauls  fonclionnaires  chargés  de  la  direction 
des  mines  firent  agrandir  le  temple  de  Serabil-el-Khadem  et  creuser  le  sanctuaire  dans 
le  rocher  (le  pilier  qui  se  trouve  au  centre  de  cet  hypogée,  daté  de  l'an  2,  est  repro- 
duit dans  Lepsius,  Denkinâler,  II,  iSy,  a)  ;  ils  dressèrent  tout  autour  de  hautes  stèles 
dont  la  plupart  sont  encore  debout,  sorte  de  stèles  votives  disant  parfois  quelques 
mots  de  leur  mission,  mais  ne  renfermant  le  plus  souvent  que  des  formules  funéraires 
adressées  aux  divinités  protectrices  du  pays,  spécialement  Hathor  de  Mafkat  et  Sopd. 
l'iiisiiurs  stèles  gravées  sur  le  rocher  se  trouvent  au  même  endroit,  à  côté  d'ouvertures 
de  miiies,  datant  des  années  44  <-'t  45'    '■''  pli"*  importante  est  celle   qui  a   été   sculptée 


par  le  chef  du  cabinet  secret  (  ^^\  '\rT['      Il  )    Soltoh-ltcr-keh  à  l'entrée  de  la  mine  d'A- 

nienemhat  11  {ChanipoUion,  Notices  descriptives,  II,  G;|i  ;  la  traduction  dans  Palnier, 
Sinai,  ro3).  C'est  en  effet  ce  litre  de  chef  de  cabinet  que  portent  les  directeurs  des 
mines,  employés  supérieurs  du  trésor  royal  ;  nous  le  retrouvons  dans  les  cinq  stèles 
gravées  sous  le  même  roi  au  ^Yadi-Maghara  (Lepsius,  Denkmiiler,  II,  iSy,  c,  f,  g,  h,  i), 
dont  la  plus  iutéressaute,  datée  de  l'an  2,  parle  d'une  expédition  de  y34  hommes  à 
la  recherche  de  turquoises  et  de  cuivre,  sous  la  direction  du  chef  de  cabinet  hhent- 
/.liiti -hiilrp.  —  Sous  le  dernier  roi  de   la  dynaslic-,   .liiieiii'iiilitit    IV,  les  travaux   furent 


LES  METAUX  237 

l'urent  repris.  Hatasou  et  Tlioiilinos  III  o;ravrreiil  leurs  noms  à  Wadi- 
Maghara.  Ranisès  II,  Setnekht,  Uaiiisès  lll  el  Ramsès  IV  avaient  aussi 
leurs  stèles  près  des  mines  '. 

Quelques  établissements  lixes  avaient,  dès  le  début,  été  Ibndés  au 
Sinaï  :  l'un,  à  Serabit-el-Khadem,  possédait  son  temple,  dont  le  sanc- 
tuaire, creusé  sous  le  Moyen  Empire,  avait  été  complété  plus  tard  et 
orné  de  stèles  rappelant  les  diverses  expéditions  dirigées  par  les 
pharaons  vers  le  pays  de  Mafek. 

A  Wadi-Maghara,  une  colline  abrupte  avait  été  fortifiée  et  renfer- 
mait les  halîitations  des  ouvriers.  Çà  et  là,  près  des  mines  les  plus 
productives,  on  avait  (construit  les  usines. 

Les  difficultés  d'exploitation  étaient  accrues  encore  par  la  nature 
aride  du  pays  et  par  le  voisinage  dangereux  des  nomades  Sati  et 
Menti,  contre  lesquels  les  rois  durent  sans  cesse  guerroyer.  Aussi  les 
travaux  ne  furent-ils  pas  menés  avec  continuité,  et  si  nous  en 
croyons  les  textes  qui  sont  parvenus  jusqu'à  nous,  furent-ils  fréquem- 
ment abandonnés  pour  être  repris  ensuite. 


poursuivis  avec  la  luème  activité  ;  trois  stèles  sont  datées  des  années  6  et  y  de  son  règne 
au  Wadi-Maghara  (I>e2isius,  Den/siiiàlcr,  II,  iSy  «,  e;  i4o.  "),  tandis  qu'on  continuait, 
à  Serabit-el-Kliadcm,  à  orner  le  petit  temple  de  ces  hautes  stèles  qui  lui  donnent  un 
aspect  si  particulier.  —  [G.  J.] 

I.  Ce  n'est  qu'avec  la  XYlIIe  dynastie  (de  1700  à  i^oo  environ)  que  nous  retrou- 
vons des  traces  de  l'exploitation  des  mines,  mais  les  travaux  semblent  avoir  été  menés 
avec  beaucoup  moins  d'ardeur  qu'à  la  (in  de  la  Xlle  dynastie.  Serabit-el-Khadem  fut 
de  nouveau  occupé  par  une  colonie  dont  les  chefs  tinrent  à  honneur  d'agrandir  et  d'or- 
ner le  temple,  comaie  leui's  prédécesseurs,  dès  le  règne  de  Thoutmès  III,  sous  lequel 
plusieurs  salles  nouvelles  furent  construites  et  ornées  de  grandes  stèles,  comme  ou  avait 
1  habitude  de  le  faire  au  Moyen  Empire  à  cet  endroit.  Une  stèle  de  lui  est  aussi  gravée 
sur  un  rocher,  près  des  mines.  Sous  Aiucnliutcp  II.  son  successeur,  une  salle  nouvelle 
fut  bâtie  et  ornée  de  colonnes  à  chapiteaux  hatliorieus,  et  on  en  termina  deux  autres 
commencées  sous  le  règne  précédent.  Toutes  ces  chambres  sont  presque  complètement 
en  ruines  maintenant.  Dès  ce  moment  la  construction  du  temple  est  presque  achevée 
et  sous  les  rois  suiv.inls  on  ne  fit  guère  que  d'ajouter  quelques  stèles  et  de  faire  quel- 
ques bâtisses  de  peu  d'importance  pour  réunir  en  un  tout  homogène  ce  qui  existait  déjà. 
Nous  trouvons  ainsi  les  noms  de  Thoutmès  IV  et  d'Amenholep  ///.puis,  plus  tard,  après 
les  rois  hérétiques  qui  n'ont  laissé  aucune  trace  au  Siuai,  les  grands  rois  delà  XIXo  dy- 
nastie, Séti  I"'  et  Ranisès  II,  ainsi  que  Menophtnh,  et  enûn,  sous  la  XX°,  Ramsès  IV 
et  Ramsès  VI.  Ce  roi  est  le  dernier  dont  nous  ayons  des  documents  monumentaux 
dans  la  région  minière  du  Sinaï.  —  Au  Wadi-Maghara,  les  mines  devaient  être  à  peu 
près  épuisées,  car  c'est  à  peine  si  nous  y  voyons  deux  stèles  de  cette  époque,  l'une 
du  règne  commun  à' Hatasou  et  de  Thoutmès  III,  l'autre  de  Ramsès  II.  —  Toutes  ces 
inscriptions,  tant  à  ^Yadi-Magharah  qu'à  Serabit-el-Khadem,  ne  nous  donnent  aucun 
détail  sur  le  mode  d'exploitation;  elles  nous  disent  les  noms  des  chefs  des  travaux, 
avec  des  formules  religieuses  pour  rendre  propices  à  ceux-ci  les  dieux  du  pays.  — 
[G.  J.] 


238  I,ES  MÉTAUX 

Ramsès  IX  '  est  le  dernier  souverain  mentionné  dans  les  textes  du 
Sinai  et  les  mines  semblent  avoir  été  définitivement  abandonnées  sous 
la  XX"  dynastie.  Vers  le  xie  siècle  avant  J.-C,  les  pharaons  venaient 
d'étendre  leur  domination  sur  la  majeure  partie  de  l'Asie  antérieure 
et  de  l'Afrique  ;  d'autres  gisements  plus  avantageusement  exploitables 
s'offraient  dès  lors  aux  Égyptiens,  les  voies  commerciales  étaient 
ouvertes  et  d'énormes  quantités  de  métal  s'étaient  entassées  dans  les 
arsenaux  à  la  suite  des  campagnes  à  l'étranger. 

Mais,  je  l'ai  dit,  les  gisements  du  Sinaï  ne  fournirent  jamais  à 
l'Egypte  une  quantité  de  cuivre  répondant  aux  jjesoins  de  sa  consom- 
mation; l'étranger  envoyait  le  métal  dans  la  vallée  du  Nil  et  tout  porte 
à  croire  que  c'est  de  l'Asie  que  les  premiers  Egyptiens  tirèrent  la 
majeure  partie  du  cuivre  dont  ils  faisaient  usage;  mais  si  le  cuivre  ne 
nous  fournit  que  des  indications  très  vagues  au  sujet  des  relations 
commerciales  de  l'Egypte,  du  moins  l'étain  qu'on  rencontre  employé 
dans  les  alliages  de  la  111°  dynastie  prouve-t-il  d'une  manière  certaine, 
par  sa  présence,  que  les  Egyptiens  entretenaient  avec  l'Asie  des  re- 
lations très  suivies. 

J'ai  exposé  dans  un  autre  ouvrage^  qu'en  ce  qui  concerne  l'inven- 
tion du  bronze,  c'est  vers  l'Asie  centrale,  vers  la  Chine  méridionale, 
que  nous  devons  tourner  nos  regards  pour  trouver  le  véritable  foyer. 
Je  ne  reviendrai  pas  ici  sur  cette  question,  me  contentant  de  faire 
remarquer  l'impossibilité  dans  laquelle  se  trouvèrent  les  Egyptiens 
des  premiers  âges  de  recevoir  l'étain  de  l'Espagne,  de  l'Angleterre, 
de  l'Europe  centrale,  de  Malacca  ou  des  régions  du  Gap  de  Bonne- 
Espérance. 

Au  cinquantième  siècle  avant  notre  ère,  les  métaux  n'étaient  pas 
encore  apparus  dans  ces  divers  pays,  alors  que  l'Egypte  et  la  Chaldée 
les  connaissaient  déjà:  ces  deux  peuples,  qui  dans  leurs  débuts  présen- 
tent tant  de  caractères  communs  et  qui  paraissent  avoir  été  liés  par  une 
communauté  d'origine,  étaient  alors  les  seuls  détenteurs  de  la  civili- 
sation. Ils  communiquaient  forcément  entre  eux,  bien  que  les  pays  où 
ils  s'étaient  fixés  fussent  éloignés.  Us  entretenaient  aussi  des  relations 
avec  les  foyers  dont  la  civilisation  leur  était  parvenue  avec  les  métaux. 

Malheureusement  les  régions  traversées  par  ces  courants  primitifs 
sont  encore  trop  peu  étudiées.  Entre  l'Egypte  que  nous  commençons 
à  connaître  et  la  Chaldée  s'étendent  les  déserts  d'Arabie  et  des  pays 
plus  riches  que  le  fanatisme  musulman  empêche  d'explorer.  LaChaldée 


1.  Le    nom  de   Ramsès   IX   a    été   renconlré    sur  un  vase  provenant  du  temple   (H. 
Spencer  Palmer,  Sinaï,  1892,  p.  106). 

2,  J.    de  Morgan,  Recherches  sur  les  origines  des  peuples  du  Caucase    (1889). 


LRS  MF.TAI'X 


239 


ello-môme,  l'Elam  sont  fort  peu  comiiis  an  ])oint  do  vue  archéolof-^ique, 
la  Perse,  l'Aff^hanislan,  le  Pamir,  l'yVsie  centrale,  la  Chine  sont  toujours 
les  pays  du  mystère  ;  aussi  ne  pouvons-nous  qu'esquisser  à  grands 
traits  les  premiers  pas  de  l'humanilé  vers  cette  civilisation  qui,  après 
des  milliei's  d'années  hors  d'Egypte  et  dans  la  vallée  du  Nil,  se  répan- 
dit sur  le  monde  entier. 

L'étude  des  origines  égyptiennes  touche  à  tous  les  problèmes  des 
débuts  du  genrehumain.  La  plupartdes  questions  restent  sans  solution 
par  suite  de  l'insuflisance  de  nos  connaissances.  J'espère  cependant 
avoir,  dans  ce  volume,  présenté  un  grand  nombre  de  documents 
inédits,  de  considérations  nouvelles;  avoir  ouvert  une  voie  jusqu'ici 
inexplorée  et  si  mon  travail  doit  unjour  être  rectifié  sur  bien  des  points, 
du  moins  puis-je  conserver  l'espoir  qu'il  aura  fait  faire  un  pas  à  la 
science,  en  posant  franchement  la  question  des  origines.  Les  docu- 
ments sont  nombreux,  tant  dans  les  textes  hiérogivphiques  que  dans 
les  observations  archéologiques  faites  par  les  divers  savants.  La  terre 
du  Nil  renferme  encore  bien  des  trésors  scientifiques  et  chacjue  jour 
apporte  de  nouvelles  découvertes.  Il  est  à  souhaiter  que  ceux  qui, 
chaque  année,  viennent  explorer  l'Egypte  recueillent  les  documents 
avec  une  précision  qui  jusqu'ici  a  souvent  fait  défaut;  car  en  ce  qui 
concerne  les  origines,  c'est  uniquement  à  l'aide  de  faits  en  apparence 
insignifiants  qu'on  parviendra  aux  vues  d'ensemble,  aux  conclusions 
générales. 


Kig     5gS.  —  Cercle  de  piei-res  tGebel-Genamieli  dans  le  désci-l  ù  l'est  d'Edt'ou). 
(Desxiri  d'après  nature  de  M.  G.  Legrain.) 


APPENDICE 


Note  sur  les  squelettes  d'El-'Amrah. 

Par    m.    le    D'  FOUOUET. 


Parmi  les  découvertes  résultant  des  fouilles  exécutées  par  M.  de  Mor- 
gan d'abord  et  M.  Amélineau  ensuite  dans  la  nécropole  d'El-'Amrah 
se  trouvent  vingt  squelettes  qui  ont  été  envoyés  au  Musée  de 
Guizeh.  M.  de  Morgan,  directeur  général  du  Service  des  Antiquités 
en  Egypte,  m'écrivit,  dans  les  premiers  jours  d'avril,  en  me  priant  de 
les  étudier  et  de  rédiger  une  note  de  mes  observations.  Je  me  mis 
aussitôt  à  l'œuvre,  consacrant  à  ces  attrayantes  recherches  anthropo- 
logiques mes  rares  instants  de  libei'té.  Malheureusement,  l'épidémie 
cholérique  survint,  j'ai  dû  interrompre  mon  travail  et  quand,  tout 
dernièrement,  j'ai  pu  le  reprendre,  talonné  par  les  délais  qui  m'é- 
taient accordés',  j'ai  restreint  mes  observations  aux  seuls  squelettes 
qui  étaient  dans  un  suffisant  état  de  conservation  et  ne  nécessitaient 
pas  trop  de  réparations  préalables  pour  recoller  les  pièces  plus  ou 
moins  brisées,  soit  au  moment  des  fouilles,  soit  dans  le  transport.  — 
Je  dois  pourtant  rendre  justice  à  M.  Amélineau,  de  loyaux  efforts 
avaient  été  faits  pour  obtenir  de  bons  résultats.  Cha(|ue  squelette  avait 
sa  caisse  spéciale  et  les  os  étaient  séparés  par  des  lits  de  coton,  mais 
les  ossements,  vieux  de  plusieurs  milliers  d'années,  sont  souvent  bien 
friables  et  les  Egyptiens  chargés  de  porter  les  caisses  sont  toujours 
très  négligents.  En  résumé,  sur  vingt  caisses,  dont  dix  neuf  seule- 
ment contenaient  des  ossements  humains  (la   vingtième   renfermait 


242  APPENDICE 

une  amphore  brisée  dans  laquelle  se  trouvaient  des  os  d'un  mammi- 
fère, très  probablement  une  gazelle),  j'ai  pu  mettre  de  côté,  pour  les 
mesurer,  onze  squelettes  qui  l'ont  l'objet  de  cette  étude  préliminaire. 
Le  sujet  me  semble  d'une  telle  importance  que  j'espère  bien  y  re- 
venir, reprendre  un  jour  les  fragments  et  ne  laisser  de  côté  aucune 
pièce  capable  de  fournir  un  renseignement  utile. 

J'ai  vivement  regretté  qu'un  nettoyage  un  peu  trop  exact  des  os 
et  des  crânes  m'ait  fait  perdre  des  renseignements  qui  eussent  été 
de  la  plus  grande  importance  pour  me  fournir  des  éclaircissements  : 
sur  le  mode  de  sépulture;  les  procédés  de  conservation  quand  il  y  en 
avait  eu  d'employés;  sur  la  race  des  sujets,  par  l'examen  des  cheveux, 
de  la  peau,  etc.  ;  —  sur  lépoque,  grâce  aux  débris  de  toiles,  de  cor- 
des, etc.  —  Quoi  qu'il  en  soit,  réduit  à  l'examen  des  os  tels  qu'on 
me  les  a  remis,  je  me  suis  forcé  d'être  exact.  Trop  heureux  si  je  puis 
intéresser  quelques-uns  de  ceux  (|ui  consacrent  leur  vie  à  la  difficile 
et  attachante  étude  de  l'anthropologie,  souhaitant  bien  sincèrement 
qu'il  leur  prenne  un  jour  l'envie  de  continuer  ou  de  refaire  ce  travail 
à  peine  ébauché,  tout  prêt  à  reconnaître  mes  erreurs  et  à  renier  mes 
hérésies  (|uand  elles  me  seront  démontrées.  Je  m'efforce  d'ailleurs 
d'éviter,  autant  que  possible,  de  recourir  aux  hypothèses,  me  conten- 
tant des  constatations  et  des  faits  contrôlables.  Presque  dépourvu 
de  bilîliothèque  spéciale,  absolument  privé  de  collections  de  compa- 
raison et  surtout  n'étant  pas  moi-même  un  spécialiste,  ma  conduite 
m'était,  à  ce  point  de  vue,  toute  tracée.  —  Faute  de  place  pour  faire 
un  triage  et  une  mise  en  place  complète  des  différents  squelettes 
pour  les  classer  d'emblée  par  catégories,  j'ai  ouvert,  au  hasard,  les 
caisses  les  unes  après  les  autres,  mettant  sur  chacune  un  numéro  cor- 
respondant à  la  fiche  d'étude.  —  Mes  remarques  faites,  les  os  étaient 
replacés  dans  la  caisse,  sauf  le  crâne  numéroté,  lui  aussi,  avec  soin  et 
mis  à  part  dans  une  armoire,  autant  pour  lui  éviter  de  nouvelles 
chances  de  brisures,  que  pour  me  permettre  de  1^  comparer  avec  ses 
voisins. 

Avant  l'hiver,  ces  crânes  et  les  principaux  ossements,  les  pièces 
remarquables,  seront  exposés  au  Musée  de  Guizeh  dans  les  salles 
d'anthropologie  en  voie  de  formation. 

Pour  les  mesures  j'ai,  suivant  les  instructions  de  la  Société  d'an- 
throj)ologie,  employé  la  planche  osléométrique  de  Broca  pour  les  os 
longs,  le  compas  d'épaisseur  pour  les  diamètres  du  crâne,  le  compas 
glissière  pour  les  petits  diamètres  (orbites,  trou  occipital,  nez,  palais, 
etc.),  et  le  ruban  métrique  pour  les  courl^es. 

Pour  le  choix  des  points  de  repère,  je  me  suis  efforcé  de  me 
conformer  aux  instructions  fournies   par  les  excellents  articles   de 


APPENDICE  2i3 

M.  !\Iaiioiivrier  dans  le  Dictionnaire  des  sciences  anthropologiques 
de  Berlillon,  Goiidereau,  etc.  Les  mesures  ont  été  groupées  en 
tableaux  pour  en  faciliter  la  lecture.  J'ai  aussi  placé,  en  regard  de 
la  série  des  indices  cépiudiqucs  de  mes  onze  sujets,  les  moyennes 
fournies  ])ar  des  crânes  égyptiens  d(î  différentes  époques  et  de 
diverses  j)rovenances. 

Six  dessins  aideront  le  lecteur  à  se  l'airtî  une  idée  des  principales 
pièces.  Ces  figures  ont  été  exécutées  à  la  plume  par  M.  Ricordi, 
avec  une  grande  sincérité,  d'après  les  piiotographies  que  je  dois  à 
l'obligeance  et  au  talent  de  mon  excellent  ami  Jéquier,  membre  de 
la  Mission  archéologique  au  Caire.  .Je  le  prie  d'agréer  tous  mes  remer- 
cîments. 

vVprès  les  tableaux  qui  donnent  une  vue  d'ensemble,  j'ai  fait  une 
description  sommaire,  mais  aussi  exacte  que  j'ai  pu,  de  chacun  des 
squelettes,  en  m'arrètant  surtout  à  l'analyse  des  crânes  dont  l'étude 
importe  avant  tout  pour  déterminer  la  l'ace.  Dans  un  dernier  paragra- 
phe, pour  éviter  des  redites,  j'ai  groupé  quelques  remartiues  com- 
munes à  plusieurs  des  sujets  composant  la  série. 

Le  lecteur  trouvera  peut-(Mi'e  que  j'ai  beaucoup  trop  insisté  sur  des 
particidarités  tle  minime  importance,  telles  que  les  lésions  traumati- 
ques  et  pathologiques.  Je  pouvais  d'autant  moins  les  passer  sous  si- 
lence que  la  plus  commune  d'entre  elles,  celle  que  j'ai  notée  le  plus 
grand  nombre  de  fois,  la  périostite  alvéolo-dentaire,  a  été  indiquée 
par  Pruner  comme  un  des  caractères  accessoires  de  la  race  égyp- 
tienne. 

Je  ne  crois  point  que  l'on  puisse,  de  ce  fait,  tirer  une  objection  sé- 
rieusebienqueje  tende  àconsidérerlessqueleltes  d'El-'Amrah  comme 
n'appartenant  pas,  pour  la  plupart,  à  la  race  égyptienne.  C'est  en  effet 
le  milieu  et  le  régime  alimentaire  qu'il  faut  incriminer  ici.  Quinze  an- 
nées de  pratique  médicale  au  Caire  m'ont  appris  que  cette  affection 
est  pour  le  moins  aussi  commune  chez  les  étrangers  de  toutes  les  ra- 
ces, fixés  en  Egypte,  que  chez  les  Egyptiens. 

J'ai  été  aussi  très  frappé  du  nombre  des  lésions  traumatiques  qui 
semblent  indiquer  des  hommes  l^eaucoup  plus  belliqueux  que  ne  le 
furent  les  nombreux  Égyptiens,  de  toutes  les  époques,  ([ue  j'ai  eu 
l'occasion  d'examiner  en  dix  années  de  recherches  portant  sur  |)lus 
de  deux  cents  sujets. 

Je  ne  puis  terminer  ce  chapitre  sans  adresser  tous  mes  remercî- 
ments  à  M.  de  Morgan,  directeur  du  Service  des  Antiquités,  qui 
a  bien  voulu  me  confier,  après  les  crânes  historiques  de  Dahchour, 
l'étrange  série  d  El-'Amrali. 


APPENDICE 


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APPENDICE 


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I.leau     V. 

CKANES 

d'el-'amkah 

TERMES  DE 

COMPARAISONS 

Iiiilicc 

Moyennes 

X"» 

coplia- 
li(Hii' 

ludiealioii   de 

a  soui'ce 

Indice 

cépha- 

lique 

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7-.V1 

Crânes  di:  Daiiclituir 

i      Hf.unnies  ['j  sujets) 

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2 

70.  Ï3 

(fouilles  de  M.  de  Moi-gnii) 

(      Femmes  (7  sujets) 

7<).53 

3 

7'l/|(i 

Prèlres  d'Ainmon 
(cléi-ouverle  de  M.  Grébaul) 

} 

;     (10  sujets)   .     . 

7,'),  40 

4 

71,7a 

Egyptiens  type  fin 

Hoiumes 

7l),oo 

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()1).0() 

(Pruiiei'-bey) 

1      Femmes. 

7(i.o'j 

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llijypiiens  lype  ,t;rossier.  Hommes  (Pruner-bev)     . 

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l'^gyptlens.  d'après  Morlon 

7'|.3o 

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75,58 

1 1 

Coptes,  Ej3;yplicns  modernes  (Broca) 

7fi.3;, 

IM    1 


Squelette  il'mi  adolescent  dont  les  épipli^'ses  des  os  longs  ne  sont 
pas  encore  soutlées. 

Beaucoup  de  parties  manquent  ou  sont  écrasées.  Le  crâne  est 
incomplet.  La  partie  écailleuse  du  temporal,  l'os  maiaire,  la  branche 
montante  du  maxillaire  supérieur  oanche  ont  disparu.  L'arcade  zygo- 
matique  droite  est  brisée. 

Malgré  le  jeune  âge,  le  crâne,  symétrique,  est  bien  développé.  Les 
dentelures  des  sutures  sont  très  compliquées. 

Pas  d'os  ^^ormiens,  ni  d'anomalies  anatomiques. 

Inion  lisse,  insertions  musculaires  peu  marquées.  Il  en  est  de 
même  dans  la  fosse  temporale  qui,  peu  profonde,  s'étend  en  arrière 
jusqu'à  la  région  mastoïdienne.  —  Saillies  de  la  glabelle  et  des  arca- 
des sourcilières  peu  marquées.  Ptérion  articulé  avec  le  pariétal'  sur 
une  longueur  de  0"',010. 

Le  plan  du  trou  occipital  aboutit,  à  la  face,  à  0"',00.5  au-dessus  de 
l'épine  nasale. 


AIMTXDICK  219 

Le  IVonI  est  dioil,  lisse,  sans  l)osseliires. 

La  coui-bo  oranioiino,  régiiliri-i',  altiMiil  son  point  culrninnnl  au 
breiiina;  elle  pri-sentc  aussitôt  aprrs  une  trôs  li-gèro  dépression,  puis 
se  iM'gularise  jus(|u'à   la  sulure  lambdoïclo  qui  l'ait  une  légère  saillie. 

La  voûte  tend  vers  l'ogive. 

Lacourl)ure  |)ostérieui'e  forme  une  saillie  globuleuse  peu  aoeenluée. 

La  courbure  sous-iniaque  est  assez  prononcée  pour  que  les  (;on- 
dyles  et  les  apophyses  niastoïdes  ne  puissent  pas  loucher  la  table  sur 
laquelle  le  crâne  est  posé. 

Les  apophyses  mastoïdes  sont  peu  développées. 

Face. — Os  malaire  peu  saillant,  rejeté  en  arrière.  —  Les  os  propres 
du  nez  sont  jjresque  droits,  articulés  sous  un  angle  aigu.  —  Il  existe 
un  léger  prognathisme  du  maxillaire  supérieur  et  des  dents;  orthogna- 
thisme  complet  du  maxillaire  intérieur. 

Le  menton  est  légèrement  proéminent.  Denture  absolument  com- 
plète, sans  aucune  carie  dentaire. 

.\u  maxillaire  supérieur,  les  dents  sont  très  rég:ulièrement  rano-ées  • 
au  maxillaire  inférieur  la  première  incisive  droite  fait  saillie  en  avant. 

Non  seulement  il  n"y  a  pas  de  perforation  de  l'ethmoïde,  mais  encore 
les  cornets  sont  intacts,  d'une  régularité  rare,  volumineux  et  sans 
aucune  déviation  de  la  cloison.  La  face,  détériorée  à  droite,  semble, 
malgré  cela,  absolument  symétrique. 

Le  squelette  est  léger  et  friable,  très  incomplètement  conservé, 
sans  traces  d'embaumement.  —  Sur  le  côté  droit  de  la  face  et  du 
crâne,  on  observe  des  taches  l)rnnes,  résidus  des  masses  charnues 
qui  se  sont  lentement  détruites. 

De  nombreux  cristaux  de  chlorure  de  sodium,  assez  volumineux, 
atteignant  souvent  0™,00lj  de  hauteur  sur  une  largeur  an  moins  égale, 
hérissent  la  surface  des  os. 

Les  dents  sont  usées  comme  chez  un  homme  de  vingt-cin(|  à  vingt- 
sept  ans,  sans  doute  à  cause  du  mode  d'alimentation. 

Malgré  cela,  l'examen  des  sutures  du  crâne,  le  manque  de  consoli- 
dation de  toutes  les  extrémités  supérieures  des  os  longs  me  portent 
à  attribuer  au  sujet  vingt-un  à  vingt-deux  ans. —  Aux  deux  hunK'rus 
les  cavités  olécraniennes  sont  perforées;  la  droite  surtout. 

N"  2. 

Squelette  de  femme.  —  Crâne  sans  déformation.  —  Complet  et  bien 
conservé.  La  moitié  droite  du  maxillaire  inférieur  manque;  brisée 
récemment,  elle  n'a  pas  été  retrouvée  dans  la  caisse. 


250  APPENDICE 

Dissyméirie  très  marcjiiée  de  la  boîte  crânienne,  le  pariétal  droit 
étant  beaucoup  plus  développé  que  le  gauche  à  sa  partie  postérieure 
et  l'occipital  formant,  du  côté  gauche,  une  saillie  très  nette  depuis  la 
suture  lambdoïde  jusqu'au  trou  occipital.  Lorsque  les  deux  condyles 
reposent  sur  le  plan  de  la  table,  la  tête  penche  fortement  vers  la 
droite,  la  deuxième  molaire  droite  se  trouve  sur  le  même  plan  que 
les  condyles,  la  molaire  correspondante  gauche  est  à  une  hauteur  de 
0'»,0()0.  ' 

La  glabelle  ne  forme  qu'une  dépression  peu  marquée.  Les  arcades 
sourcilières  sont  légèrement  saillantes,  le  front  bas,  plutôt  fuyant,  la 
courbe  médiane  se  continue  sans  aucune  dépression.  —  Les  fosses 
temporales  sont  peu  profondes.  —  Les  insertions  musculaires  à  peine 
marquées,  L'inion  ne  fait  pas  de  saillie. 

La  synostose  est  nettement  faite  au  niveau  de  l'obélion,  sur 
plusieurs  points  de  la  suture  lambdoïde,  ainsi  qu'aux  extrémités  de 
la  coronale,  mais  n'est  pas  faite  au  niveau  du  bregma. 

L'apophyse  styloïde,  de  chaque  côté,  est  volumineuse  et  longue- 
Bien  que  les  dents  soient  relativement  peu  usées  et  saines,  on  doit 
attribuer  au  sujet  cinquante  ans. 

Face.  —  Légèrement  aplatie,  asymétrique.  Le  nez  un  peu  camus,  les 
os  propres  soudés  à  angle  obtus.  La  cloison  est  déviée  à  gauche.  Le 
cornet  moyen  droit  est  très  hypertrophié.  L'orifice  de  la  cavité  est 
ovale,  plus  long  de  O^.OOS  à  droite  qu'à  gauche,  la  hauteur  étant  la 
même  des  deux  côtés.  Le  plan  du  trou  occipital  vient  aboutir  à  la  lace 
à  0«,004  au-dessous  de  l'épine  nasale 

Prognathisme  du  maxillaire  supérieur  —  qui  n'existe  pas  à  l'infé- 
rieur. —  Les  dents  sont  petites,  bien  rangées,  à  usure  plate.  Les  inci- 
sives sont  aplaties.  Les  troisièmes  molaires  (dents  de  sagesse) 
manquent  depuis  longtemps.  On  ne  voit  aucune  trace  d'absorption 
des  alvéoles  au  niveau  des  autres  dents.  Le  menton  est  légèrement 
saillant.  Aucune  trace  d'embaumement.  Nombreux  cristaux  de  chlo- 
rure de  sodium  du  côté  droit  seulement. 


N°  3  (Fig.   599   et  GOO). 

Squelette  d'homme.  —  Le  crAne  et  l'ensemble  des  os  sont  très  re- 
marquables à  plus  d'un  point  de  vue. 

On  ne  trouve  plus,  comme  dans  les  squelettes  précédents,  de 
dépôts  de  cristaux  de  sel  marin. 

Le  corps  était  desséché  et,  malgré  le  nettoyage  fâcheux  qu'il  a 
subi,  on  voit  encore  par  places  des  fragments  de  peau  et  de  mem- 
branes l)runis  par  le  temps  et  sur  lesquels  se  trouvent  épars  quelques 


APPENDICE 


251 


cheveux  blancs,  lins  cl  dioils,  (|ni  lonihent  en  poussière  au  moindre 
contact.  —  L'examen  attentif  l'ait  reconnaître  sur  la  peau  des  fragments 
(le  matières  végétales  finement  pulvérisées  et  mélangée  à  des  résines 
dont  l'odeur  est  encore  apjU'éciahle.  —  Malgré  toutes  mes  recherches, 
je  n'ai  pu  retrouver  aucun  vestige  de  bandelettes.  |{ien  (pi'il  soit 
vide,  le  cr;\ne  est  lourd  et  massif.  Sans  délbrnuilions  |)atli()logi(pies. 
Il  existe  du  côté  droit,  en  arrière  de  l'apopliyse  masloide,  un  petites 
wormien  de  O^iOlO  de  large  sur  0"", 012  de  long. 

Le  trou  pariétal  existe  à  gauche,  presque  oblit(>ré;  il  n'existe  pas  à 
droite. 

Les  sutures  c/'t/ ii ieiuics  présentent  des  dentelures  très  compliquées 
dans  les  points  où  elles  sont  encore  visibles.  La  synostose  est  corn- 


T^'T- 


Fig.  Sgo  et  Hoo,  —  Crâne  du  squeleUe  d'homme  N°  3  (EI-'Amrali). 

plète  dans  toute  la  longueur  de  la  suture  sagittale  et  dans  la  presque 
totalité  de  la  suture  lambdoïde.  Les  côtés  du  frontal,  la  partie  pos- 
térieure des  temporaux  sont  envoie  d'ossification.  L'aile  du  sphé- 
noïde s'articule  directement  avec  le  temporal  sur  une  longueur 
de  0°',009.  Le  plan  du  trou  occipital  aboutit  à  la  face  au  niveau  de 
l'extrémité  inférieure  des  os  propres  du  nez,  c'est-à-dire  ici  à  0",036 
au  dessus  de  l'épine  nasale. 

Les  parois  latérales  du  crâne  sont  légèrement  bombées  (fig.  600). 
La  fosse  temporale  est  très  étendue  bordée  par  un  relief  osseux  ac- 
centué à  la  partie  antérieure.  Toutes  les  insertions  musculaires  sont 


252  APPENDICE 

extrêmement  marquées.  La  saillie  de  la  glabelle  et  celle   des  arcades 
sotircilières.  dans  leur  moitié  interne,  est  très  forte  (fig.  GOO). 

Le  front  est  bas,  un  peu  fuyant.  Après  le  bregma  on  observe  une 
légère  dépression,  puis  la  courbe  se  continue,  régulière,  jusqu'à  la 
ligne  courbe  supérieure  au  dessous  de  laquelle  les  insertions  mus- 
culaires sont  marquées  par  une  forte  dépression.  La  ligne  courbe 
inférieure  est  rude,  mamelonnée.  A  cette  hauteur  la  courbure  sous- 
iiiiaque  fait  une  saillie  qui  empêche  les  condyles  de  poser  siu"  le 
plan  de  la  table  dont  ils  sont  distants  de  0°.010. 

Pacr.  — Les  os  malaires  sont  bien  développés,  faisant  une  légère 
saillie.  Les  os  propres  du  nez  (fig.  ."199  et  (')00)  sont  adossés  sous 
un  ane-le  très  aigu.  Ils  se  détachent  du  front  suivant  une  courbe 
très  marquée.  —  La  cloison  du  nez  est  verticale,  les  cornets  bien 
développés  sont  encore  recouverts  en  partie  de  la  muqueuse  des- 
séchée. —  L'épine  nasale  est  saillante.  —  Les  orbites  sont  vastes  et 
affectentla  forme  d'un  quadrilatère  aux  angles  arrondis. 

Les  dents  incisives  fortes  et  obliquement  portées  en  avant  ont  été 
malheureusement  cassées  pendant  le  voyage. 

Tja  canine  supérieure  droite  est  saillante  et  nue,  l'alvéole  ayant  été 
résorbé  dans  presque  loute  sa  hauteur.  Les  bords  alvéolaires  portent 
dans  Iciute  leur  étendue  des  traces  très  manifestes  de  périostite  avec 
exostoses  nombreuses.  Il  existe  au  maxillaire  inférieur,  à  la  place 
des  incisives,  une  destruction  complète  du  l)ord  antérieur  de  l'al- 
véole par  suite  d'abcès. 

Les  molaires,  au  complet,  sont  creusées  en  forme  de  cuvette,  sauf 
en  bas  et  à  droite.  Presque  toute  l'épaisseur  de  la  couronne  est  usée. 
Au  niveau  de  la  deuxième  petite  molaire  inférieure  gauche,  à  ()'",00^ 
au  dessus  du  trou  du  nerf,  on  voit  l'orifice  d'un  abcès  alvéolo-den- 
taire. 

Par  l'examen  des  sutures  crâniennes  et  des  dents  on  doit  attriijuer 
au  sujet  l'âge  de  soixante-cinq  à  soixante-dix  ans. 

licinarqiies  sur  le  sqiicletip.  —  Le  fémur,  dans  ses  trois  cinquièmes 
supérieurs,  porte  une  énorme  ligne  âpre  très  rugueuse,  s'étalant  en 
deux  lignes  parallèles  (jui  tendent  à  former  un  pilastre  large,  épais, 
rugueux. 

heti/ji'r/,  sur  sa  face  postérieure,  présente  une  ligne  rugueuse,  obli 
que,  débutant  à  0^,03  au  dessous  de  l'articulation  du  péroné  et  rejoi- 
gnant le  bord  interne  au  niveau  du  trou  nourricier  au  dessous  duquel 
elle  va  en  s'efTacant.  Sa  hauteur  maxima  est  de  0"',004  et  sa  largeur 
de  0™,00.5,5. 

Le  sternum,  complètement  ossifié,  présente  une  longueur  maxima 
de  0'",l'i.'');  à  sa  base,  du  côté  gauche,  il  est  développé  obliquement  de 


Ari'i:.\i)[Ci-;  25:! 

l'ncnii  ;i  coiiiixMiser  le  rjian([iie  de  longueur  de  la  claviciiU;.  (^et  os,  en 
effet,  présente  à  son  tiers  externe  un  épaississement,  Iraee  d'une  an- 
cienne fi-aetiire. 

ViOinopldtc  présente  une  lénèlie  ovale  près  du  bord  supérieur  à  la 
base  de  Tapophyse  coraooïde. 

Le  cubitus  a  l'apophyse  styloïde  grêle  longue  de  O^jOl.']  et  retournée 
en  forme  de  crochet.  Le  rpiart  supéricui-  est  incurvé.  Au  tiers  infé- 
rieur il  présente  une  fracture  vicieusement  consolidée,  dans  laqutdle 
le  fragment  inférieur  fnil  une  saillie  de  0"',()0r)  au  dessus  dn  cal  volu- 
mineux, affectant  une  l'orme  olivaire. 

Le  sacrujn  mesure  0"',111  de  longueur  maxima,  l'eflritement  de 
ses  bords  n'a  pas  permis  de  prendre  sa  largeur  maxima. 

Le  tibia,  très  platycnémique,  a  pour  indice  .'S5,0i!. 

N°4. 

Squelette  d'un  adolescent. 

Le  crâne  et  la  face  sont  les  seules  parties  en  état  de  conservation 
suffisant  pour  cpie  r(''tude  en  puisse  être  faite.  Sur  toute  la  surface  on 
observe  des  cristaux  fins  de  sel,  et  l'imprégnation  était  telle  que  les 
cristaux  nouveaux,  en  se  formant  depuis  que  le  sujet  a  été  retiré  de 
la  terre,  font  sauter  en  plusieurs  points  la  table  externe  de  l'os.  — 
Aucune  trace  d'embaumement.  —  Le  fond  des  orbites,  l'arcade  zvgo- 
matique  gauche,  un  partie  de  ptérion  du  même  côté,  la  moitié  droite 
de  la  voûte  palatine  et  le  bord  dentaire  droit  manquent.  —  Pas  d'os 
wormiens;  le  crâne  est  régulièrement  développé. 

A  O^.Oi  de  la  ligne  médiane,  à  0"', 056  de  l'arcade  sourcilière  gauche, 
on  ol)serve  une  dépression  ovale  légèrement  oblique  de  dehors  en 
dedans  et  de  bas  en  haut,  intéressant  la  table  externe  de  l'os  et  une 
partie  du  diploé.  Il  s'agit  évidemment  d'une  perte  de  substance  due 
à  un  coup  ou  à  une.  nécrose  en  voie  de  réparation  au  moment  de  la 
mort  du  sujet. 

La  glabelle  est  bombée,  les  arcades  sourcilières  peu  marquées. 
Le  front  droit,  un  peu  étroit,  sans  dépression  sur  aucun  point;  il  suit 
une  courbe  régulièrement  ascendante  jusqu'à  la  suture  fronto-parié- 
tale.  A  partir  de  ce  point  la  courbe  se  continue  avec  une  régularité 
parfaite  jusqu'à  la  suture  lambdoïde.  Le  lambda  l'orme  un  renllenient 
léger.  —  L'inion  a  une  saillie  à  peine  marquée. 

Le  trou  occipital  est  petit,  mais  les  condyles  sont  larges  et  peu  sail- 
lants. —  Les  apophyses  mastoïdes  sont  fortes. 

Les  parois  du  crâne  sont  légèrement  renflées.  Il  existe,  de  chaque 


25i  APPENDICE 

côté,  dans  l'angle  du  pariétal,  au-dessus  du  Ijurd  de  la  grande  aile  du 
sphénoïde,  un  trou  de  O^jOOS  de  diamètre.  Le  ptérion  s'articule  direc- 
tement avec  le  pariétal,  presque  horizontalement,  sur  une  longueur  de 
0'",012  à  gauche  et  de  0'",015  à  droite.  Le  plan  du  trou  occipital  vient 
aboutir  juste  au  niveau  de  l'épine  nasale. 

Les  sutures  du  crâne  ne  sont  pas  encore  très  formées;  elles  sont 
relativement  simples  dans  la  sagittale,  plus  compliquées  sur  les  autres 
points. 

La /«ce,  avec  les  mutilations  déjà  mentionnées,  a  beaucoup  pei'du 
de  ses  caractères  importants.  —  Les  os  malaires  sont  un  peu  saillants. 
L'échancrure  du  nez  est  faiblement  marquée.  Les  os  propres  sont 
adossés  suivant  un  angle  aigu.  — La  cloison  et  les  cornets  manquent. 
Les  orbites  sont  rectangulaires  avecles  angles  arrondis.  — Des  dents, 
il  ne  reste  que  cinq  du  côté  gauche,  les  deux  petites  et  les  deux 
grosses  molaires  sans  aucune  usure,  et  la  troisième  grosse  molaire 
encore  incluse  dans  l'alvéole,  mais  prête  à  faire  son  évolution.  On 
peut  attribuer  au  sujet  l'âge  de  dix-huit  à  vingt  ans. 

Sur  le  front  il  existe,  tout  près  de  l'orbite,  une  perte  de  substance 
de  l'os  moins  régulière  que  celle  déjà  décrite  plus  haut  :  elle  semble 
de  même  nature. 


N"  5  (Fig.  r,()l). 


Squelette  d'homme,  mauvais  état  de  conservation. 

Pas  de  traces  de  sel.  —  Les  os,  en  plusieurs  points  et  surtout  ceu  x 
du  crâne,  du  côté  droit,  sont  tachés  en  brun. 

Le  crâne,  séparé  de  la  face,  n'est  même  pas  complet.  Une  partie  du 
sphénoïde,  l'apophj'sebasilaire,  le  corpsderoccipital,lamoitié  antéro- 
supérieure  du  temporal  droit  manquent,  les  os  sont  légers  et  friables. 

Ce  qui  reste  est  encore  fort  intéressant  et  mérite  d'être  conservé, 
car  ce  crâne,  par  ses  grandes  lignes,  diffère  absolument  de  ce  que 
l'on  rencontre  en  Egypte  habituellement. 

On  n'observe  ni  anomalies  anatomiques,  ni  déformation  artificielle. 
Il  existe  une  certaine  dissymétrie,  la  bosse  pariétale  droite  étant 
plus  saillante  et  la  partie  gauche  de  la  région  lambdoïde  plus  déve- 
loppée. 

Les  sutures  sont  très  compliquées  même  au  niveau  du  frontal, 
principalement  sur  les  côtés,  mais  la  complication  des  dentelures 
atteint  son  maximum  au  niveau  de  la  suture  lambdoïde.  —  La  fosse 
temporale  est  peu  profonde,  mais  très  étendue  en   longueur.  Dans 


APPENDICE 


255 


cette  région  la  paroi  du  crâne  est  ixMnhét?  à  droite,  aplatie  à  gauche. 
La  glabelle  est  également  plate,  les  arcades  sonrcilières  un  peu  sail- 
lantes; en  dessus  d'elles  un  sillon  traverse  le  front.  Tjcs  bosses  fron- 
tales sont  peu  marquées,  la  partie  verticale  du  (Vont  est  peu  élevée. 
Du  niveau  des  bosses  frontales,  juscju'à  la  partie  moyenncï  de  la  su- 
ture sagittale,  la  courbe  s'élève  en  suivant  une  marche  régulière  et 
redescend  ensuite  en  pente  rapide  jusqu'au  lamljda.  L'écaillé  de  l'oc- 
cipital est  bombée.  L'inion  présente  une  série  de  petits  tubercules  os- 
seux au  niveau  des  insertions  musculaires.  La  partie  postérieure  de 
la  suture  sagittale  présente  une  synostose  complète.  —  La  soudure 
est  très  avancée  à  la  suture  lambdoïde,  commence  sur  les  côtés  du 


Fig.  fioi.   —  Crnne  du  squeleUe  d'iioninip  N°  5  (El-'Aiiirah). 

frontal,  débute  môme  sur  les  temporaux.  Grâce  à  cet  état  des  su- 
tures et  aux  quelques  signes  relevés  sur  les  fi'agments  des  maxil- 
laires dont  les  dents  molaires  sont  creusées  en  cuvette  dans  toute  l'é- 
paisseur de  l'émail,  on  doit  attribuer  au  sujet  soixante-cinq  ans  au 
moins.  L'intérieur' du  crâne,  presque  vide,  contenait  seulement  des 
traces  de  sable  fin. 

Les  quelques  fragments  des  deux  maxillaires  que  j'ai  pu  recueillir 
indiquent  qu'il  n'y  avait  pas  de  prognathisme. 

Le  tibia  a  pour  indice  71,82;  il  est  très  loin  de  la  platycnémie.  La 
taille  du  sujet  est  tout  à  fait  exceptionnelle  :  c'est  la  plus  élevée  que 
j'aie  jusqu'à  ce  jour  rencontrée  sur  une  momie'.  Le  crâne,  dont 
la  face  est  malheureusement  brisée  et  les  parties  du  squelette  qui 
restent,  sont  d'une  rare  élégance. 


I.   Voir  T.nblpiiu  IV,  p.   :>.4~. 


2r,(; 


APPENDICE 


N    6 


Fig. 


602). 


Squelette  d'iiomme  Agé.  Ossements  massifs  et  lourds.  En  plusieurs 
points,  surtout  à  droite,  on  trouve  des  cristaux  de  chlorure  de  so- 
dium. 

Pas  d'os  wormiens.  —  II  existe  sur  le  pariétal  droit  une  déforma- 
tion pathologique  située  à  0'",020  de  la  suture  frontale  et  à  O^jOlO  de 
la  suture  sagittale.  Elle  consiste  en  une  dépression  circulaire,  creusée 
en  cuvetle,  un  peu  plus  profonde  à  sa  partie  antéro-interne  et  mesu- 
rant dans  tous  ses  diamètres  ()"',01.5.  II  y  a  eu  à  cette  place  une  perte 
de  substance  osseuse  réparée  bien  des  années  avant  la  mort. 

S'agit-il  d'une  trépanation  suivie  de  guérison?  C'est  ce  qui  semble 


EiR.  fioi..  —  CriioL-  du  S(|iielpnc  d'hommo  X°  fi  (F.l-'.\iiirali). 

le  plus  probajjle,  mais  un  enfoncement,  causé  par  un  coup  de  casse- 
téte  de  forme  conique,  pourrait,  après  la  réparation,  donner  une  ci- 
catrice osseuse  ayant  aussi  ces  caractères. 

Dans  ce  crâne,  les  dentelures  des  sutures  étaient  modérément 
compliquées  autant  que  l'on  peut  en  juger  actuellement,  la  synostose 
étant  complète  sur  les  sutures  sagittale  et  lambdoïde  ainsi  que  sur 
les  côtés  du  frontal.  Elle  n'existe  pas  aux  temporaux. 

L'inion  fait  une  saillie  très  marquée  sans  que  pourtant  on  observe 
le  crochet  osseux,  que  j'ai  eu  souvent  l'occasion  d'étudier  sur  des 
crânes  d'Egyptiens  bien  musclés.  La  glabelle  estprescpie  plane,  mais 


APIM;M)ICIC  257 

les  arcades  sourcilières  sonl  exlrèinemcnt  inar(|iiécs  et  se  relèvent 
brusquement  en  haut  et  en  dehors.  Les  bosses  frontales  sont  très 
eiracées.  Le  Iront  fuyant  suit  une  courbe  régulièrement  ascendante 
jusqu'à  l;i  sulun-  iionto-pariétale.  La  courbe  reste  en  plateau  sur 
une  lonyiieur  de  (J™,0.i5;  puis  descend  rapidement  juscpi'à  la  suture 
lambiloiile.  En  ce  [)oint  elle  s'infléchit  légèrement  en  avant  j)our 
s'arrêter  brusquement  à  l'inion.  l^a  région  sous-iniaque  est  remar- 
(juablement  plane  et  se  ra|)proche  de  l'horizontale.  Les  fosses  tem- 
[)orales  sont  vastes  en  surface,  peu  profondes  et  les  {)arois  du  crâne 
sont  arrondies.  Les  apophyses  mastoïdes  sont  très  volumineuses,  les 
arcades  zygomatiques  bien  tIéveloj)pées. 

Le  plan  du  trou  occipilal  in'olongé  passe  à  ()'",0().^  au-dessus  de 
l'épine  nasale. 

La  grande  aile  du  sphénoïde  est  en  rapport  direct  avec  le  pariétal 
sur  une  longueur  de  0"',01'i. 

Face.  —  Les  os  malaires  sont  massifs;  légèrement  saillants,  ils  pré- 
sentent à  la  partie  supérieure  de  leur  bord  postérieur  une  épine  qui 
fait  une  saillie  de  O^jOOB  à  gauche  et  de  0"',0U7  à  droite. 

IjCS  orbites  sont  petites,  à  rebord  épais.  Celle  de  gauche  est  en 
partie  défoncée.  On  trouve  dans  la  cavité  crânienne  les  débris  d'une 
poudre  Jjrunâtre,  agglomérés  en  grumeaux  au  milieu  desquels  on 
aperçoit  une  substance  noire,  brillante,  de  nature  bitumineuse,  qui 
brûle  très  facilement  et  répand  un  odeur  caractéristi([ue. 

L'échancrure  du  nez  est  très  marquée.  Les  os  propres,  articulés  à 
angle  aigu,  forment  une  même  saillie  et  sont  légèrement  busqués  à 
leur  partie  inférieure.  La  cloison  était  sensiblement  verticale;  elle 
est  en  partie  brisée,  les  cornets  sont  très  développés  et  bien  conser- 
vés. L'épine  nasale  forme  une  saillie  de  U'",004. 

Les  dents  incisives  sont  brisées  au  niveau  de  l'alvéole,  il  existe  un 
prognathisme  léger.  Les  dents  de  sagesse  man(juaient  depuis  peu  de 
temps,  les  molaires  sont  usées  en  plateau. 

Le  maxillaire  inférieur,  dont  la  branche  montante  droite  man([ue, 
avait  toutes  ses  dénis  solides,  non  cariées,  mais  encroûtées  île  tartre. 
Le  menton  forme  une  saillie  marquée. 

Le  côté  droit  de  l'arcade  poit(;  à  sa  face  externe  des  cristaux  de  sel 
f[Lie  l'on  retrouve  à  la  face  interne  du  côté  gauclie,  tandis  (|ue  la  face 
externe  gauche  est  lisse. 

Le  squelette  est  loin  d'être  bien  C(jnservé,  les  insertions  muscu- 
laires ne  sont  pas  très  marquées.  Le  tibia  a  pour  indice  63,63;  il  est 
platycnémique  à  un  degré  modéré.  On  peut  attribuer  à  cet  homme  de 
soixante  à  soixante-cin(|  ans. 


258  APPIÎNDICE 


N"  7. 


Squelette  de  femme  de  conservation  médiocre.  Sur  le  crâne  il 
existe  des  lambeaux  de  peau  desséchée  sur  laquelle  on  voit  des  che- 
veux noirs,  fins  et  lisses^  nullement  ondulés.  On  trouve  des  traces  de 
matières  aromatiques  et  bitumineuses  finement  pulvérisées.  Le  fond 
des  orbites  et  l'ethmoïde  sont  intacts,  bien  qu'il  y  ait,  dans  l'intérieur 
du  crâne,  un  magma  de  ])oudres  conservatrices.  Il  n'y  a  pas  de  cris- 
taux de  sel  sur  les  os  et  sur  le  crâne;  la  partie  la  mieux  conservée 
est  la  droite. 

Le  côté  droit  de  la  tête,  face  et  crâne,  est  plus  développé  que  le 
gauche.  —  Les  parois  latérales  sont  légèrement  renflées.  L'os  pariétal 
s'articule  directement  avec  l'aile  du  sphénoïde  sur  une  longueur  de 
quelques  millimètres  (0"',004). 

Le  front  large,  pas  fuyant,  a  des  arcades  sourcilières  peu  marquées  ; 
il  en  est  de  même  des  bosses  frontales.  La  courbe  est  régulière,  le 
crâne  développé.  Le  plan  du  trou  occipital  aboutit  à  0'°,  010  au-dessus 
de  l'épine  nasale. 

Les  dentelures  des  sutiu'es  sont  marquées,  la  synostose  est  pro- 
noncée en  plusieurs  points  (vertex  et  suture  lambdoïde). 

La  face  est  ravagée,  les  dents  qui  restent  sont  très  peu  nombreuses, 
usées,  cariées.  Il  existe  presque  partout  des  traces  de  périostite 
alvéolo-dentaire.  L'échancrure  du  nez  est  faible,  les  os  propres  du  nez 
sont  droits,  accolés  à  angle  aigu.  Les  cornets  un  peu  déviés,  les  or- 
bites arrondies  sont  assez  larges  et  contrastent  avec  la  brièveté  de 
la  ligne  spino-alvéolaire. 

D'après  les  sutures  et  les  dents  le  sujet  parait  avoir  environ  une 
soixantaine  d'années,  bien  que  les  cheveux  ne  soient  pas  grisonnants  ; 
—  je  n'ai  pas  pu  me  rendre  compte  s'ils  étaient  teints. 

L'indice  du  tiljia  est  de  64,28,  ce  qui  donne  une  platycnémie  très 
légère,  à  peine  marquée. 

N°  8  (Fig.  603  et  604). 

Squelette  d'homme.  —  Aucune  trace  d'embaumement.  Quelques 
très  petits  cristaux  de  sel  épars  sur  les  parois  du  crâne.  Le  côté  droit 
en  trois  points  :  fosse  temporale,  partie  supérieure  du  frontal,  partie 
supérieure  du  pariétal,  porte  encore  la  peau  fine,  amincie  et  desséchée, 
recouverte  de  cheveux  très  fins,  très  drus,  blonds  et  grisonnants, 
longs  de  0™,03   environ.  —  Il  existait,  au  dessous  du  nez,  un  frag- 


APrEMJICE 


259 


ment  (le  peau  avec,  qiuslqiies  poils  de  mouslache  grisonnants  longs  de 
0"',015.  — Je  les  ai  recueillis  et  mis  à  pari,  avec  une  petite  partie  des 
cheveux  (pii  seront  ultérieurement  examinés  par  un  spécialiste. 

Le  crâne  est  léger,  très  volumineux  et  difTère  essentiellement  de 
tout  ce  que  j'ai  eu  l'occasion  d'observer  jusqu'à  ce  jour  en  Egypte.  — 
Morton  [Crania  /Egypliaca)  qui  a  réuni,  en  diverses  nécropoles,  et 
à  Abydos  même,  de  si  belles  séries  de  crânes,  n'a  rien  publié  de  sem- 
blable. Quelques-unes  des  particularités  qu'il  présente  me  semblent 
relever  de  la  pathologie.  Ce  sont  des  traces  probables  d'hydrocéphalie 
ancienne,  caractérisée  par  le  développement  exagéré  de  la  région 
occipitale.  —  Je  donne  à  ce  crâne  une  place  à  part. 


F'ig.  fJo3  et  (io4.  —  Crâne  du   squelette  d'homme  N"   (j  (El-'Amrah). 

Du  côté  gauchç,  dans  la  suture  lambdoïde,  à  O-njOSS  au-dessus  de 
l'articulation  temporo-pariétale^  existe  un  os  wormien  étroit  (0™,006  de 
large)  enclavé  d'un  centimètre  dans  chacun  des  os  occipital  et  tempo- 
ral. —  Ce  qui  reste  des  sutures  indique  des  dentelures  peu  compli- 
quées. La  synostose  est  complète  au  niveau  de  la  suture  sagittale, 
partielle  sur  les  côtés  du  temporal  et  au  niveau  de  la  suture  lamb- 
doïde. 

\jinion  fait  une  légère  saillie  très  rugueuse. 

he ptérioii  s'articule  directement  avec  le  pariétal  sur  une  longueur 
de  0'", 011. 


■2f,o  Al'PKNDlCE 

L'endroit  de  la  i'ate  où  aboutit  le  plan  du  trou  occipital  correspond 
à  0"',002  au-dessus  de  l'insertion  du  cornet  inférieur,  0"°,017  au-des- 
sus de  l'épine  nasale.  Les  parois  du  crâne  sont  déprimées  au  niveau 
du  ptérion,  mais  se  bombent  légèrement  dans  toute  la  i)arlie  posté- 
rieure. 

La  courbe  de  la  ligne  temporale  se  prolonge  en  arrière  jusqu'à  la 
partie  moyenne  de  la  région  mastoïdienne,  s'écartant  de  pins  en  plu.s 
de  la  sntture  sagittale. 

La  glabelle  et  les  arcades  sourcilières  sont  légèrement  bombées.  • — 
Au-dessus  d'elles  on  observe  une  faible  dépression,  bientôt  suivie 
d'un  renflement  formant  une  courbe  qui  se  poursuit  très  régulière- 
ment jusqu'au  bregma,  après  lequel  existe  une  nouvelle  dépres- 
sion, suivie  elle-même  d'un  renflement,  puis  encore  une  dépression 
beaucoup  plus  forte  allant  jusqu'au  lambda. 

Toute  la  région  lambdoïde  prend  une  forme  globuleuse,  entourée 
d'un  large  sillon  analogue  à  ce  qui  a  été  décrit  sur  les  crânes  de  Cro- 
Magnon  et  que  l'on  a  regardé  comme  du  à  une  poussée  d'iiydrocépha- 
lie  dans  l'enfance'. 

Les  bosses  frontales  sont  peu  marquées,  le  front  déjà  étroit  se 
rétrécit  rapidement  et  la  partie  antérieure  du  crâne  ])résente  la  forme 
d'une  carène  de  barque  (scapbocéphalie)^  A  part  la  légère  dépression 
de  sa  partie  moyenne,  le  front  est  droit  dans  son  ensemble. 

Dans  la  région  sous-iniaque  les  condyles,  larges  et  peu  saillants, 
sont  entourés  d'un  vaste  sillon,  strié  de  profondes  dépressions  dues 
aux  insertions  musculaires.  Les  apophyses  mastoïdes  sont  très  déve- 
loppées. 

Les  apophyses  zygomatiques  sont  de  forme  élégante  et  elles  parais- 
sent minces  auprès  du  développement  excessif  de  la  partie  posté- 
rieure du  crâne. 

Fdce,  —  Les  os  malaires  sont  bombés  et  comme  globuleux  au 
centre.  —  Ils  ne  font  qu'une  saillie  très  légère  en  dehors. 

Les  os  ])roj)res  du  nez  se  détachent  de  la  base  du  front  en  formant 
une  encoche  très  prononcée.  Leur  saillie  en  avant  est  bien  marquée. 
Ils  s'adossent  l'un  à  l'autre  suivant  un  angle  aigu.  L'épine  nasale  est 
bien  développée,  légèrement  bifide.  Le  nez  et  sa  cloison  sont  d'une 
symétrie  remarquable.  La  hauteur  de  la  face  est  très  grande,  etprise 
dans  son  ensemble,  on  peut  dire  que  la  tête  ne  manque  pas  d'une 
certaine  harmonie  imposante  par  son  excessif  développement. Certains 


1,  TupiiKÉi-d,   VAiitliiojjulogit',i',iv\s.   1871). 

■4.  IjaciissiLgiK',   Vddu-nieciini  du  nii'cli'ciii  expert.  Lyon,   iiSç)4. 


Al'l'll.NDlCt:  2(il 

crânes  extraits  d'un  dolmen  de  l'Anjou  (au  Bois-Brard,  près  Saumur) 
m'ont  laissé  celte  impression,  cpie  je  note  à  titre  de  simple  rensei- 
gnement jiiscju'à  plus  ample  examen. 

L'orthognathisme  est  presque  parfait.  Les  dents,  saines,  brillantes, 
bien  rangées,  étaient  au  grand  complet.  Les  quatre  dernières  molaires, 
la  première  incisive  supérieure  gauche,  les  quatre  incisives  et  les 
deux  canines  inférieures  ne  sont  pas  arrivées  jusqu'à  moi.  Les  dents 
(pii  restent  sont  usées  jus([u'à  moitié  de  la  couronne.  L'usure  est  sen- 
siblement plate  au  maxillaire  supérieur  et  ne  présente  la  forme  en 
cuvette  oblique,  de  dehors  en  dedans,  que  pour  les  deux  premières 
grosses  molaires  supérieures. 

Le  maxillaire  inférieur  est  remarquable  surtout  par  la  saillie  du 
menton  qui  a  de  l'analogie  avec  la  partie  correspondante  du  crâne  de 
Cro-Magnon.  L'examen  des  synostoses  et  des  dents  me  porte  à  attri- 
buer à  ce  sujet  de  cinquante-cinq  à  soixante  ans.  —  La  cavité  crâ- 
nienne contenait  la  masse  cérébrale  desséchée  dont  j'ai  recueilli 
les  fragments;  sur  lun  d'eux  on  voit  encore  des  traces  de  circon- 
volutions. 

La  conservation  de  ce  crâne  et  de  la  plus  grande  partie  du  squelette 
est  ])arfaite.  Les  os,  de  coideur  blanche,  ont  encore  une  certaine  élas- 
ticité. Le  tibia,  au  niveau  du  trou  nourricier,  donne  les  mesures  sui- 
vantes :  1"  diamètre  antéro-postérieur  0™,0341  ;  diamètre  transverse 
0m,0198;  indice  58,06;  platycnémie  forte.  —  Le  péroné  est  nettement 
cannelé.  —  La  couleur  blonde  des  cheveux  implique  une  origine  du 
nord.  —  A  part  l'anonyme  de  Deïr-el-Bahri,  découvert  par  M.  Mas- 
pero  en  même  temps  que  les  momies  royales,  je  n'ai  jamais  trouvé 
d'autre  échantillon  de  cheveux  de  cette  couleur.  On  ne  peut  d'ail- 
leurs, entre  ces  deux  sujets, faire  aucun  autre  rapprochement.  La  taille 
relativement  faible  de  notre  n°  8  :  1"\C5,  devait  contraster  singuliè- 
rement avec  ce  crâne  volumineux  et  donner  à  cet  homme  une  appa- 
rence étrange. 


N°9. 

Squelette  d'un  homme  âgé,  portant  des  traces  de  momification. 
Outre  la  teinte  jaune  roux  des  os,  on  trouve  en  plusieurs  points,  et  par- 
ticulièrement sur  les  parois  latérales  droites  du  crâne,  des  dépôts  de 
matières  bitumineuses  mêlées  à  des  fragments  très  fins  de  véo-étaux. 

Le  crâne  est  très  beau  et  presque  symétrique,  sauf  au  front,  côté 
droit,  à  cause  d'une  blessure  ancienne  formant  une  dépression  en 
forme  de  V  très  aigu,  long  de  0°,0;3  et  large  à  sa  partie  supérieure  de 


262  APPENDICE 

0'",01.  Cette  lésion  de  l'os  n'avait  pas  dû  être  profonde,  on  n'en  voit 
aucune  trace  à  la  face  interne  du  crâne.  T^es  sutures  ont  des  dente- 
lures extrêmement  compliquées  surtout  sur  les  côtés  du  frontal  et  de 
l'occipital.  —  La  synostose  est  faite  aux  deux  tiers  moyens  de  la  saggit- 
lale.sur  les  côtés  du  lambda  et  au-dessus  (\v\ plérion  qui  s'insère  direc- 
tement avec  le  pariétal  sur  une  longueur  de  0",015. 

L'iiiioii  forme  une  légère  saillie  sur  laquelle  les  insertions  muscu- 
laires sont  très  mar(|uées. 

Le  plan  du  trou  occipital  passe  à  0"',()()6  au-dessus  de  l'épine  nasale. 
Les  parois  du  crâne  sont  légèrement  renflées. 

ha  glabelle  fst  déprimée,  l'arcade  sourcilière  gauche  très  saillante. 

La  courbe  temporale  s'i'loigne  de  |)lus  en  plus  de  la  ligne  mé- 
diane ;  elle  s'arrête  un  p(>u  en  avant  de  l'apophyse  mastoïde. 

La  courbe  sous-inia(|ue  est  creusée  sur  la  ligne  médian(^  —  Les 
eondyles  sont  très  développés  et  très  saillants.  Les  apophyses  sty- 
1  oïdes  sont  volumineuses,  longues  de  ()"',02.5. 

La  courbe  du  crâne  est  régulière,  depuis  la  glabelle  jusqu'au 
bregma,  après  lequel  se  trouve  une  légère  dépression.  La  partie  sus- 
iniaque  de  l'occipital  est  légèrement  renflée. 

Léehanciure  de  la  racine  du  nez  est  très  marquée.  Les  os  propres 
sont  adossés  sous  un  angle  aigu. 

De  la  face,  avec  la  Éuoitié  supérieure  des  os  du  nez,  il  ne  reste 
qu'une  partie  des  deux  maxillaires  supérieurs.  Les  dents  molaires 
sont  usées  en  forme  de  cuvette,  la  première  grosse  molaire  droite 
«■tait  cariée  et  cette  carie  avait  amené  un  abcès,  avec  perte  de  sub- 
stance de  l'os  sur  une  largeur  de  0'°,0().5.  —  Les  incisives  sont  arron- 
dies. —  Les  lebords  alvéolaires  ont  des  traces  d'inflammation  chro- 
ni(|ue.  Pas  de  prognathisme,  ni  au  maxillaire  supérieur  ni  à  la 
m'ichoire  inférieure.  Celle-ci  avait  toutes  ses  dents,  mais  les  incisives 
et  les  canines  ne  sont  plus  en  place  actuellement.  La  première  grosse 
molaire  droite  est  cariée  comme  sa  correspondante  en  haut.  L'usure 
de  la  couronne  est  en  plateau  à  toutes  les  dents  d'en  bas.  L'examen 
des  sutures  et  des  dents  indiqu»^  que  cet  homme  était  aux  environs 
de  la  soixantaine. 

IjC  squelette  est  incomplètement  conservé;  l'humérus  n'est  perforé 
ni  d'un  côté  ni  de  l'autre.  L'indice  tibial  est  de  67,  hors  des  limites 
de  la  platycnémie,  si  l'on  considère  que  celle-ci  finit  à  65. 


A1'I'1:M)IC1-,  263 


N,,  10. 


SqiioloUiî  d'homme.  —  La  oavito  cranioiinc;  couliciiL  clos  amas  de 
matière  brune  à  cassure  l)rillante,  qui  présente  tous  les  caractèriîs  du 
lilliime  employé  pour  les  (îml);uiiuemeuts,  mélangé  à  des  poudi'cs 
al)sori)anles,  comme  cela  se  taisait  aux  «'[jociues  anciennes. 

Sur  le  côlé  droit,  nomi)reu\  cristaux  de'  ciiloruredc  sodium;  sur  le 
Iront,  sur  les  pariétaux,  mince  couche  brune,  r(>sl(î  du  périerLinc  et 
de  la  peau  desséchés.  —  Aucune  trac(!  de  cheveux,  ou  de  poils,  au- 
cune Irace  d'étoile.  Les  deux  orbites  sont  défoncées,  mais  comme 
tous  les  crânes  que  nous  avons  examinés  dans  cette  série,  l'ethmoïde 
est  intact  ainsi  que  les  cornets  du  nez.  —  Les  sutures  du  crâne,  saut 
au  niveau  de  la  suture  lamhdoïde,  sont  très  peu  compliquées.  La  sa- 
gittale commence'  à  se  souder  à  sa  partie  moyenne.  11  y  a  un  com- 
mencement de  syuostose  également  sur  les  côtés  du  temporal. 
Uinion  est  très  développé,  saillant,  rugueux.  Le  plan  du  trou  occi- 
pital aboutit  à  O'",008  au  dessus  de  l'épine  nasale. 
Les  parois  latérales  du  crâne  sont  droites. 

La  ligne  courbe  temporale  est  très  marquée  ;  elle  débute  par  un 
bourrelet  saillant  qui  va  en  s'affaissant  au  niveau  de  la  suture  fronto- 
pariétale.  —  Ti'im  pression  massétérienne  est  visible  jusqu'aux  der- 
nières limites  de  l'apophyse  mastoïde. 

Le /;/e/7'o7;,  eou|)é  horizontalement,  ne  touche  l'angle  du  pariétal 
<[ue  sur  une  largeur  de  O^jOOS. 

La  glabelle  est  saillante,  ainsi  que  les  arcades  sourcilières. 
Le  front  est  bas,  un  peu  fuyant,  traversé  par  une  dépression  trans- 
versale qui  s'élargit  et  se  creuse  sur  les  côtés.  Les  bosses  frontales 
sont  plus  marquées  que  sur  tous  les  autres  crânes  do  la  série.  A 
partir  des  bosses,  la  courbure  du  crâne  est  régulière,  son  point  cul- 
minant correspond  avec  la  suture  fronto-pariétale.  Elle  descend  sans 
dépression  jusqu'au  lambda  et,  à  partir  de  ce  point,  elle  fait  légère- 
ment saillie  jusqu'à  l'inion.  Les  condyles  sontvolumineux,  le  trou  oc- 
cipital grand,  les  apophyses  styloïdes  longues  et  grêles.  La  région 
sous-iniaque  est  aplatie. 

A  la  face,  les  os  malaires  sont  saillants  en  dehorset  en  avant,  etleur 
saillie  est  encore  plus  apparente,  à  cause  du  retrait  de  la  région  sous- 
orbitaire  du  maxillaire. 

Les  orbites  sont  grandes,  arrondies. 

L'échancrure  du  nez  est  bien  marquée.  Les  os  propres,  étroits  à  la 
base,  accolés  à  angle  aigu,  se  dirigent  en  bas,  en  avant  et  à  droite, 


264  APPENDICE 

d'une  façon  très  marquée.  La  cloison  esl  l'ortement  inclinée  sur  la 
gauche  dans  toute  sa  partie  supérieure,  en  bas  elle  revient  presque  à 
la  ligne  médiane.  L'épine  nasale  est  bien  développée.  —  Il  existe  un 
prognathisme  marqué. 

La  voûte  du  palais  n'est  pas  bombée.  —  De  chaque  côté  de  la  ligne 
médiane,  à  environ  0'",005,  il  existe  une  perte  de  substance  de  l'os, 
circulaire,  de  O^.OOO  à  gauche,  de  0"',006  seulement  à  droite.  —  Ces 
deux  trous,  faits  très  longtemps  avant  la  mort  du  sujet,  traversent 
le  bord  alvéolaire  du  maxillaire  supérieur  au  niveau  des  racines  des 
premières  petites  molaires  tlroite  et  gauche.  Les  orifices  internes 
de  ces  perforations  sont  arrondis  et  sur  les  bords  l'os  s'est  organisé 
et  l'aspect  est  celui  d'un  oi'ifice  naturel.  Les  orifices  externes,  au  con- 
traire, sont  irréguliers.  11  y  a  une  large  perte  de  substance,  à  droite 
elle  a  0"',015.  Elle  a  entraîné  la  chute  de  la  première  petite  molaire, 
de  la  canine  et  d'une  incisive. 

A  gauche,  la  canine  seule  est  tombée,  et  la  première  petite  molaire, 
qui  reste  comme  suspendue,  a  des  racines  irrégulières,  rongées  par 
la  longue  suppuration.  —  En  bas,  du  côté  gauche,  au-dessous  de  la 
perloration,  on  voit  la  marque  d'un  aljcès  au  niveau  de  la  canine,  la 
deuxième  grosse  molaire  gauche  est  rongée  par  la  carie.  En  haut, 
toutes  les  autres  dents  sont  tombées,  ou  bien  ne  restent  qu'à  l'état 
de  racines,  entourées  d'un  alvéole  malade  et  atrophié.  —  Il  est 
évident  qu'un  anneau,  aujourd'hui  disparu,  avait  dû  être  placé  de  fa- 
çon à  permettre  de  tenir  à  l'attache  l'homme  qui  en  était  porteur.  Le 
maxillaire  inférieur  sans  prognathisme  est  remarquable  par  les  sail- 
lies des  insertions  musculaires  sur  les  deux  faces  des  branches  mon- 
tantes et  au  niveau  du  menton. 

Le  sujet  devait  être  un  homme  d'une  très  grande  force  musculaire 
et  l'examen  de  son  squelette  confirme  cette  idée. 

La  cavité  olécranienne  de  l'humérus  est  imperforée;  le  cubitus 
est  fortement  incurvé  dans  son  quart  supérieur. 

Le  tibia  a  pour  indice  65,7,  Il  est  par  conséquent  sur  les  limites  de 
la  platycnémie.  L'examen  des  dents  qui  restent  et  celui  des  sutures 
du  crâne  donnent  l'idée  d'un  homme  d'iuie  cinquantaine  d'années. 
Par  son  indice  céphalique  le  sujet  serait  égyptien  (75,55). 

L'aspect  de  son  crâne  un  peu  lourdement  taillé  le  rapprocherait  du 
iype  grossier  de  Pruner-bey. 

Certaines  déformations  de  la  face  peuvent  être  imputées  d'ailleurs 
à  la  mutilation  et  au  long  supplice  dû  à  l'anneau.  On  peut,  en  effet, 
difficilement  admettre  qu'il  s'agisse  d'un  de  ces  usages  curieux  dont 
on  trouve  encore  des  exemples  chez  les  négresses  portant  un  an- 
neau dans  l'aile  du  nez  —  ou  les  Botocudos  se  distendant  les  lèvres 


APPENDICE  265 

d'une  façon  incroyaljle.  — Rien,  dans  tous  les  cas,  ne  rapproche  notre 
N"  10  du  type  nègre  et  l'anneau  qu'il  portail  lui  avait  été  probable- 
ment mis  comme  instrument  de  torture  et  d'humiliation. 


N    11. 

Squelette  d'homme.  Le  crâne,  la  l'ace  et  une  partie  des  ossements 
sont  dans  un  bon  état  de  conservation.  Pas  de  cristaux  de  sel,  en 
aucun  point.  —  Sur  le  crâne  on  trouve  des  taches  brunes  causées 
par  les  matières  putrescibles.  —  Pas  de  trace  d'embaumement  par 
les  procédés  connus.  L'ethmoïde  et  le  fond  des  orbites  sont  intacts  et 
cependant  la  cavité  crânienne  contenait  des  amas  de  matières  bitu- 
mineuses et  aromatiques. 

Le  crâne  est  très  beau,  il  ne  présente  qu'un  peu  de  dissymétrie 
en  faveur  du  côté  gauche,  le  plus  développé.  —  Les  sutures  étaient 
bien  dentelées,  mais  il  faut  un  examen  attentif  pour  les  voir,  car 
presque  partout  les  synostoses  sont  complètes.  Celle  du  frontal 
avec  les  pariétaux  est  la  mieux  marquée. 

Le  ptérion  venait  juste  butter  dans  l'angle  des  pariétaux  sans 
s'articuler  avec  eux,  sauf  sur  O"», 1)02  à  On',003,  un  simple  contact. 

Le  plan  du  trou  occipital  vient  aboutir  à  0°',020  au-dessus  de  l'épine 
nasale. 

Les  parties  latérales  du  crâne  sont  bombées.  La  ligne  courbe  d'in- 
sertion du  muscle  temporal  est  très  inarquée  et  saillante  au  niveau 
du  frontal;  elle  se  prolonge  en  arrière  jusqu'aux  limites  de  l'apo- 
physe mastoïde. 

La  glabelle  est  légèrement  saillante,  les  arcades  sourcilières  peu 
marquées.  —  Le  front  est  large,  lesbosses  peu  saillantes  et  la  courbe 
se  continue,  remontant  progressivement  en  arrière,  sans  change- 
ment brusque  de  plan,  jusqu'à  la  suture  corono-sagittale.  En  ce 
point,  sur  trois  centimètres  de  longueur,  il  existe  une  dépression 
faible  ayant  environ  un  millimètre  de  flèche,  puis  la  courbe  se  révèle 
suivant  une  nouvelle  série  de  courbes  analogues  à  celles  que  nous 
avons  relevées  pour  le  crâne  n"  8,  mais  avec  moins  de  profondeur 
dans  les  dépressions.  —  h'iiiioiine  fait  pas  de  saillie,  le  receptaculum 
cerebelli  est  bombé.  Les  condyles  sont  bien  développés  en  surface, 
mais  peu  saillants.  Quand  la  tête  repose  sur  le  plan  de  la  table,  ils 
en  sont  séparés  par  une  hauteur  de  O^.OOS.  Le  trou  occipital  est  grand, 
arrondi. 

La  face  est  bien  développée  et  en  harmonie  avec  le  crâne.  Les  ar-. 
cades  zygomatiques  sont  un  peu   saillantes.  Les  os  malaires  se  por- 


266  APPENDICE 

tciit  iinmédialement  en  arrière  et  en  dehors.  Le  bord  postérieur  de 
leur  ])ranche  montante  est  renflé  en  tubercule  comme  dans  le  crâne 
N»  0. 

Les  orbites  ont  une  forme  quadrangulaire  légèrement  oblique  de 
bas  eu  haut  et  de  dehors  en  dedans.  L'échancrure  nasale  est  bien 
marquée,  les  os  propres  sont  articulés  sous  un  angle  peu  aigu.  Ils 
sont  larges,  très  développés,  projetés  en  avant  etn'ontrien  de  ce  qui 
pourrait  rappeler  la  race  nègre.  —  L'épine  nasale  est  bifide.  Le  ne/ 
est  dévié  légèrement  de  gauche  à  droite.  —  Les  dents  étaient  saines, 
au  grand  complet.  Les  molaires  creusées  en  cuvette  peu  profonde 
et  très  réoulière.  Toutes  ont  un  émail  brillant  et  d'une  blancheur 
remarquable;  —  pas  de  traces  de  périostite  alvéolo-dentaire. — Le 
maxillaire  inférieur,  très  solide  avec  toutes  ses  dents  régulièrement 
plantées  et  saines,  forme  luie  arcade  un  peu  rétrécie  en  avant.  —  La 
branche  montante  gauclu;  a  été  brisée  au  moment  des  fouilles,  elle 
manque.  —  Malgré  Tàge  du  sujet  (on  doit  lui  attribuer  de  soixante-dix 
à  soixante-quinze  ans)  le  trou  mentonnier  se  trouve  à  0"',014  du  bord 
inférieur  de  l'os  et  seulement  à  0'",011  du  bord  de  l'alvéole  qui  est 
cependant  sain.  Les  incisives  ne  sont  pas  arrondies  comme  dans  les 
crânes  égyptiens'. 

Il  n'y  a  pas  de  prognathisme.  Les  os  sont,  en  général,  assez  bien 
conservés.  —  Les  insertions  musculaires,  sauf  celles  des  masséters, 
sont  7uoins  marquées  (|uc  dans  la  moyenne  des  sujets.  Cet  homme 
devait  être  un  intellectuel  plutôt  (ju'un  homme  d'action. 

Le  tibia  a  pour  indice  :  56,64;  il  est  fortement  platycnémique,  ce 
qiù  l'éloigné  de  la  moyenne  des  Egyptiens  et  surtout  de  ceux  qui  ont 
été  découverts  à  Dahchour  par  M.  de  Morgan  en  1894  et  1895;  leur 
indice  tibial  oscille  autour  de  80. 


Remarques. 

La  ])résence  du  sel,  sui-  une  partie  des  squelettes  doit  arrêter  un 
instant  notre  attention,  il  ne  s'agit  pas  là  du  procédé  de  conservation 
qui  fut  plus  tard  en  usage  à  l'époque  copte  et  marque  la  dernière 
étape  de  l'embaumement  en  Egypte.  —  Le  sel  que  nous  trouvons  ici 
revêt  la  forme  de  cristaux  développés  sur  place  aux  dépens  du  chlo- 
rure de  sodium  contenu  dans  le  sol  et  entraîné  par  l'eau,  non  pas  à 
l'époque  où  les  corps  furent  enterrés,  mais  à  celle  où,  réduits  à  l'état 

1,    Pnni(i-l)c\  ,    Oiigiiu'  Je  l'iiiicienni'   nirr  rnyplieiiiu',  |i.  f\iif\. 


APPK.NDicr:  2r,7 

de  squelcltc  poreux,  le  tissu  osseux  al)sorl)ant  une  j)ai'lie  de  l'eau  de 
la  solution  saline,  celle-ci  concentrée  se  cristallisait.  Le  phénomène 
S(>  produit  dans  la  len'o  d'Egypte  sur  tous  les  corps  poreux;  on 
peut  l'dljserver  sur  certains  ])ois,  mais  il  se  reproduit  exacicment 
c<unmc  tianslecasde  nos  scpudelles  sur  les  terres  cuites  du  Fayoïim, 
surtout  (|uand  les  |)ores  n'ont  pas  élé  colmatés  par  un  enduil.  — Je 
possède,  dans  ma  cnllrclidn,  de  liés  licaux  spécimens  de  terres  per- 
meltanl  d'étudier  cette  j)articidarité. 

Les  cristaux  sont  plus  abondants  sur  la  parti(î  droite  des  crâne- 
qu'à  gauche,  parce  que  couchés  sur  la  gauche  la  déclivité  ne  pcsmicls 
lail  pas  aux  gouttes  de  la  solution  saline  de  s'évaporer  surplace  el 
surtout  parce  ([ue  la  |)arlie  droite,  étant  ccdle  qui  regardait  la  surface 
du  sol,  recevait  directement  les  liquides  inliltrés.  —  l^a  |)i'ésence  ou 
l'absence  du  sel  tient  à  un  simple  hasard  de  position. 

Il  n'en  est  pas  de  même  pour  les  substances  absorbantes  et  bilu- 
mineuses  que  l'on  trouve  sur  les  N"' 3,  6,  7,  9,  10,  11.  Il  i'aut  ici  dis- 
tinguer deux  cas  :  celui  où  les  matières  reposent  uniquement  à  la 
surface.  Nous  devons  voir  là  une  première  tentative  de  préservation, 
une  aide  apportée  au  sol  qui,  dans  certains  points,  peut,  à  lui  seul, 
dessécher  les  corps.  Un  enduit  imperméable,  une  sorte  de  gou- 
dronnage extérieur,  devait  être  déjà  efficace.  Je  note  en  passant  que 
les  traces  observées  par  moi  indicjuent  luie  recherche  attentive  dans 
le  choix  des  matières  etdans  leur  préparation. 

Chez  les  N"^  3,  7,  11,  on  trouve,  dans  la  cavité  crânienne,  du  bi- 
tume, des  poudres  absorbantes  et  des  traces  de  matière  cérébrale 
desséchée. 

L'introduction  des  matières  conservatrices  a  dû  être  faite  par  la 
voie  du  trou  occipital.  —  Je  me  suis  assuré  qu'il  n'y  avait  pas  d'autre 
entrée,  que  l'orifice  de  l'oreille  notamment  n'était  pas  perméable.  Il 
fallait  donc,  pour  cette  opération,  pratiquer  un  chemin  dans  les  par- 
ties molles,  séparer  l'une  des  vertèbres,  très  probablement  l'atlas, 
et  pénétrer  dans  le  cerveau.  L'opération  se  faisait-elle  par  la  bouche 
ou  par  la  nuque?  En  l'absence  de  toute  trace  de  parties  molles  et  de 
toute  lésion  apparente  des  os  de  la  région,  il  m'est  impossible  de  con- 
clure. Admettre  que  tous  ces  squelettes  ont  eu  la  tête  tranchée  pour 
un  supplice,  qu'elle  a  été  ensuite  replacée  avec  leur  corps,  ne  me 
semble  pas  le  moins  du  monde  défendable.  C'est  pourquoi  la  présence 
d'un  gâteau  résineux  homogène,  que  l'on  ne  peut  extraire  du  crâne  par 
letrou  occipital  qu'en  le  brisant  parfragments,commepar  exemple  chez 
le  N°  11,  entraîne  l'idée  que  ce  gâteau  est  entré,  liquide,  par  ce  môme 
trou  occipital.  Ce  serait  un  premier  perfectionnement  de  l'embaume- 
ment. —  La  pénétration  dans  le  crâne  par  le  fond  des  orbites,  ce  que 


268  APPENDICE 

l'on  observe  pour  le  N°  10,  eût  été  un  procédé  de  transition.  Sous  la 
XIl«  dynastie  déjà,  l'enlèvement  du  cerveau  par  la  voie  de  l'os 
ethmoïde  était  déjà  en  usage,  ainsi  que  j'ai  pu  m'en  rendre  compte 
sur  les  momies  de  Dahchour  mises  au  jour  par  les  fouilles  de  M.  de 
Moro-an  (1894-95).  Les  squelettes  d'El-'Amrah  présenteraient  donc  une 
des  Cormes  primitive  de  l'embaumement,  et  ce  serait  un  argument 
nouveau  en  faveur  de  leur  extrême  ancienneté. 

En  dehors  des  remarques  ([ui  précèdent,  un  autre  fait  curieux  a  bien 
vite  attiré  mon  attention.  Sur  mes  onze  sujets,  dont  deux  femmes 
N"^  2  et  7)  et  deux  adolescents  (N°'  1  et  4),  je  trouve  quatre  squelettes 
ayant  des  lésions  traumatiques  (N»"  3,  9,  6, 10).  Deux  autres  ont  des  lé- 
sions pathologiques  (4  et  8).  Les  lésions  du  N°  4  peuvent  avoir  eu 
aussi  une  origine  traumatique.  Gela  nous  donne  plus  de  50  pour  100 
de  lésions  du  système  osseux,  pourcentage  infiniment  supérieur 
à  tout  ce  que  j'ai  pu  observer  sur  les  deux  cents  momies  dont  j'ai  eu 
l'occasion  de  faire  l'examen  depuis  dix  années. 


Résumé. 


Un  coup  d'œil  jeté  sur  le  tableau  des  indices  montre  que,  sur  onze 
crânes,  deux  sont  des  dolichocéphales  exagéi'és  (N"'  5  et  8). 

Quatre  des  dolichocéphales  très  marqués  (N°' 2,  4,  1,  11). 

Quatre  dolichocéphales  vrais,  mais  moins  marqués  (N°'  7,  3,  9,  6). 

Enfin  un  mésaticéphale  (N°  10),  qui  présente  à  peu  de  choses  près 
l'indice  moyen  attribué  par  Broca  aux  Egyptiens  anciens.  —  Le 
tableau  mis  en  regard  indique  que,  pour  certaines  séries  particulières 
de  cri\nes  trouvés  en  Egypte,  l'intlice  moyen  peut  être  beaucoup  plus 
élevé.  D'ailleurs  il  n'est  pas  mauvais  de  faire  remarquer  ici  que  Broca, 
Pruner,  Morton  et  tant  d'autres,  ont  presque  toujours  discuté  d'après 
des  séries  dont  l'unité  était  douteuse,  les  provenances  étant  souvent 
mal  connues.  Morton  se  rapproche  pourtant  plus  de  la  vérité  en  clas- 
sant ses  séries  par  nécropole. 

Pour  les  crânes  d'El-'Amrah  il  y  a  unité  de  lieu,  unité  dans  le  mode 
de  sépulture,  variété  très  grande  dans  la  physionomie  des  crânes  et 
dans  leurs  mesures,  puisque  celle  de  leur  indice  parcourt  toute  la 
gamme  de  la  dolichocéphalie,  sans  qu'un  seul  de  ces  indices  s'arrête 
vers  le  chiflre  73,  c'est-à-dire  au  degré  qui  a  été  attribué  aux  hommes 
de  la  pierre  taillée  et  de  la  pierre  polie.  Malgré  cela,  nos  squelettes 
présentent,  dans  la  série  complète,  un  assez  grand  nombre  des  signes 
qui  ont  été  attribués;')  l'homme  préhistorique  :  voûte  crânienne  exhaus- 


APPKNDICn:  269 

sce,  belle  courbure  régulière  (N"  5,  1,  9,  11).  —  Le  prognathisme 
manque  on  général;  pourtant  il  est  bien  marqué  surlcN-G,  un  peu 
moins  chez  le  N°  3,  fort  pour  le  N"  10,  mais  ici  la  présence  de  l'anneau 
déjà  décrit  peut  avoir  été  une  cause  perturbatrice. 

La  platycnémi(;  (|ui  n'est  pas  absolument  rare  en  Egypte,  aussi  bien 
lie  nos  jours  que  clans  l'anticpiité,  a  été  trouvée  cinq  fois  sur  sept 
sujets  qui  ont  été  mesurés  à  ce  point  de  vue.  Ce  pourcentage  est 
énorme  et  dépasse  de  beaucoup  la  moyenne  habituelle  des  momies 
que  j'ai  pu  observer.  Je  ne  l'ai  jamais  trouvée  dans  la  série  de 
Dahchour.  —  Deux  cas  de  la  série  d'El-'Amrah  ontle  fémur  en  pilastre 
et  le  péroné  cannelé  (3  et  6),  une  fois  le  cubitus  est  courbé  (3).  Telle 
qu'elle  se  présente,  cette  série  est  très  diflerente  de  tout  ce  que  j'ai 
pu  observer  jusqu'à  ce  jour. 

A  quelle  race  doit-on  rapporter  ces  ossements  ?  La  question  ne  laisse 
pas  que  d'être  embarrassante,  au  moins  pour  moi.  —  J'écarte  pour- 
tant dès  le  premier  abord  la  race  nègre,  en  faisant  certaines  réserves 
pour  le  crâne  de  femme  qui  porte  le  iN"  2.  En  effet,  bien  que  les 
autres  signes  ne  concordent  pas,  l'abaissement  du  plan  du  trou  occi- 
pital, la  forme  du  nez  ne  peuvent  manquer  de  donner  l'idée  qu'il 
s'agit  d'un  échantillon  de  la  race  noire.  Tout  le  reste  de  la  série  des 
dolichocéphales,  si  l'on  ne  considérait  que  leur  indice,  pourrait  nous 
faire  penser  aux  races  du  sud  de  l'Afrique,  mais  tous  les  échantillons 
de  cheveux  lisses  (3,  7,  8),  et  même  blonds  (N"  8)  ne  permettent  pas 
de  s'arrêter  un  seul  instant  à  cette  hypothèse  que  la  forme  générale 
du  crâne  condamne  aussi. 

Le  mieux  est  donc  de  suspendre  son  jugement  pour  l'instant,  lais- 
sant à  de  plus  compétents  le  droit  de  se  prononcer  s'ils  le  jugent 
convenable.  On  doit  ajouter  pourtant  que,  s'il  y  a  unité  de  lieu  et  de 
mode  de  sépulture,  il  y  a  diversité  de  race.  Ce  problème  très  com- 
pliqué appelle  de  nouvelles  recherches  faites  sur  des  séries  plus 
nombreuses. 

En  ce  qui  concerne  l'époque,  je  n'hésite  pas  à  considérer  ces  restes 
comme  très  anciens. 

Je  ne  puis  m'empêcher  d'attribuer  une  grande  importance  à  de 
faibles  traces  d'un  embaumement  rudimentaire,  mais  réel  pour  beau- 
coup des  sujets.  Cet  essai  de  conservation  a  pu  exister  pour  tous, 
puisque  la  présence  du  sel  semble,  en  général,  être  en  raison  inverse 
de  la  quantité  de  traces  de  conservation  par  les  aromates,  on  peut 
dire  que  dans  ce  cas  l'eau  salée  a  entraîné  le  bitume  et  les  poudres. 
Ce  n'est  qu'une  simple  hypothèse,  mais  elle  est  plausible.  —  Malgré 
toutes  mes  recherches,  môme  à  la  loupe  je  n'ai  pu  trouver  l'impres- 
sion d'un  seul  fragment  de  bandelettes  et,  au  contraire,  les  matières 


270  AIMMCNDICK 

aromaliques  semljlt'iil  (Hrc  du  plus  grand  prix  :  il  ne  s'agit  donc  pas 
d'un  embaumement  tle  pauvre,  mais  d'un  procédé  qui  n'avait  pas 
encore  atteint  toute  sa  perfection.  —  j\Ia  conviction  est  absolue  sur 
ce  point. 

Du  reste,  le  dernier  mot  est  loin  d'être  dit,  je  pense,  sur  les  carac- 
tères anthroj)ologiques  des  races  primitives  et,  pour  |)rogresser  dans 
cette  voie,  il  vaut  mieux  se  reporter  d'abord  aux  signes  tirés  du  gise- 
ment di's  tomijes,  de  leur  orientation,  de  la  |)i>silion  du  cadavre,  de 
la  natui'e  tlu  mobilier  funéraire,  etc.  Telle  n'était  pas  ma  tâche,  beau- 
coup plus  modeste  et  se  limitant  à  la  description  des  ossements. 

Si  l'extrême  ancienneté  de  ces  sépultui'es  est  démontrée,  ce  cpii  me 
semble  au  moins  probable,  il  faudra  reculer  de  beaucoup  l'époque  à 
laquelle  les  mélanges  de  races  reconnus  en  Egypte  par  divers  au- 
teurs (Bunsen,  Lepsius,  Prisse,  Morton,  etc.)  et  attribués  par  Pruner 
à  une  époque  antérieure  à  la  IV°  dynastie,  ont  pu  s'etfectuer. 

(]e  n'est  que  par  la  multiplicité  des  recherches  menées  méthodi- 
quement, et  en  ne  négligeant  aucun  détail,  que  le  problème  pourra 
être  enfin  résolu  en  entier.  Il  résulte  déjà  de  mes  |)roj)res  recherches, 
encore  inédites,  que  l'Asie  a  fourni,  vers  la  fin  de  l'Ancien  Empire 
un  appoint  importantà  l'Egypte, quiparait.aveclescrànesd'El-Amrah. 
avoir  fait  des  emprunts  à  l'ouest  de  l'Afrique  et  à  l'Europe  même. 

Le  Cuire.  8  tioi'it  iNijli. 

D'    FOUQUKT. 


TABLE  Di:S  M  ATI  EUES 


l'itiirACE V 

Cii.vPiTKE  piiii.Mii;]i.  ■ —  Koriiiatioii  do  ri'.gyplc.  (^l'oiisoiiioiil  île  la  vallér  du   .\il,      .  i.') 

CnAiMiKE  II.  —  Foriiialiou  des  paiiies   fcriilos  de   ri-'gypte '.'.7 

Oh.vpitke  III.   —  llistnriqiu'  des  éUuU-s   sur   l'àgi'   de   la    piLTri'   eu  l\<,'ypli'.      .      .  ]~ 

Chapitre  W  ,  —  f/honiinc  pidi-nlilluipir .'1') 

(!ii.vprïRE  V,  —  I.es  aiilôclitoaes  de   riOgsple  M.'liiiiniiïe    ni'Dlilhitjiie) {iy 

Sldlions  de  la  Basse-Egypte.  —  Aboii-Roaili.   -  (iiiizi'li.  —  ,Sai|q.ii'ali  li  Alioii-Sir.  (li) 

Dahcliour.  —   Ilclouaii ^o 

Licht yi 

Meïdoum.  —  Kalidiin  el  Goiirob j:>. 

Slalions  itit  hayoum.  —  Diineli y.> 

Koin-Achim.  —  Om-el-'All yf» 

.Médinet-el-Malidi.  • —  Qasr-Karoim  .      .            yfi 

Stations  delà  Haute-Egyptr.  —  El-Mahasiiali.  —  El-Kagagnali.  —  Om-el-Ga'al). 

—  Abydos yli 

El-'Amrali 85 

El-Karnak.  —  El-Cheikh-Salam.   —  Uebel-el-Tai-if Sfi 

Saghel-el-Baglieh.  —  Zawaïdah.  —  Toukh Sy 

Khattarah.  —  Galaina  et  Deiulig.  —  Tlièbes.  —  Gebeleiu.  —  El-Kab.  —  Chellal 

(cataracle).      .      .   _ 88 

liistnimeiils    et  armes    iK'nlilliii/iies 89 

Mucléi  .      .      .      .      ■ t)o 

Percuteurs (|i 

Haches    et  hachettes ()•>, 

Couteaux 10;) 

Kacloirs iiJS 

Têtes  de  hiiiccs. x2i 

Têtes  ou  pointes  de  flèches  . laS 

Scies  et  faucilles i3.> 

Pointes.    .                      .....  r<- 

Pei-eoirs -i,.j 


272  TABLE  DES  MATIERES 

Pages. 

Traiicliels i4o 

Retouchoirs.   —  Poinçons  en  os  et  en   ivoire.  —  Masses 142 

Pilons.  —  Moulins   à  bras i44 

Colliers i45 

Bracelets lt^6 

Peignes • .      .  i48 

Epingles.  —  Objets  divers.   —  Figurines i49 

Céramique  et  graffiti i5i 

Vases  de  pierre iG5 

Chapitre  YI.  —  T. a  vallée  du  Nil  lors  de  la  conquèle  égyptienne 169 

Chapitre   VII.    —   Les   premiers    Egyptiens 181 

Chapitre  VIII.  — Les  métaux 199 

Appendice.  —  Note  sur  les  squelettes  d'El-'Amrah,  par  M.  le  D''  Fouquet     .     .  241 


TABLE  DES  ILLUSTRATIONS 


CONTENUES   DANS   CE  VOLUME 


Pages. 

Fig.  I.  — Carte  des  lambeaux  éocèues  dans  l'Asie  antérieure 16 

Fig.  2.  —  Carte  géologique  des  pays  égyptiens 17 

Fig.  3.  — Carte  du  cours  actuel  du  Nil  et  du  Bahr-Bala-Mà '.îi 

Fig.  4  et  5.  —  Coupes  de  la  vallée  du  Bahr-Bala-Mà,  prises  à  euvirou   100  kilo- 
mètres au  nord  de   l'oasis  de  Baharieh u3 

Fig.  6.  —  Coupe  transversale  de  l'Egypte,  d'après  Figari-Bey n3 

Fig.  7.  —  Coupe  longitudinale  d'un  cône  de  sable  produit   par    les  pluies  cl    re- 
couvrant les   limons  du  Nil lïf) 

Fig.  8.  — Coupe  théorique  de   la  vallée  du  Nil   à  l'ùtat  actuel. s8 

Fig.  9.  — Coupe  théorique  de  la  vallée  du  Nil  pendant  la    période  ilu    son   rem- 
plissage par  les  alluvions. îij 

Fig.    10.  —  Carte  montrant  les  t|uanlilés  annuelles  des  pluies   dans  le  bassin  du 

Nil 32 

Fig.  II. —  Carte  de  l'Egypte  montrant  les  points  où  ont  été  laites   les  observa- 
tions relatives  à  l'accroissement  du  niveau  dans  la  vallée  du  Nil 33 

Fig.  i2.  —  Carte  du  delta  du  Nil U) 

Fig.  i3.  —  Courbe   des   hauteurs   dans  le  delta  du   Nil .        4° 

Fig.  i4.  —  Carte  marine  montrant  l'avancement   du  delta  du  Nil 4'- 

Fig.  i5.  — Coup-de-poing  chelléen  en  silex  jaune,  de  la  vallée  des  Reines  (Gour- 

nah).  3/4  grandeur  naturelle .ly 

Fig.  iG.  —  Silex  en  forme  de  hache,  éclaté  par  la   chaleur   solaire  et   ne  porlaut 

aucune  tr-ace  de  taille  artiilcielle  (Toukh).  i/4  grandeur  naturelle.      ...       58 
Fig.  17.  —  Coup-de-poing  chelléen  en  silex  blanchâtre,  ramassé  à  la  surlace  du 

diluviuui,  à  Toukh.  3/4  grandeur  naturelle 5i) 

Fig.  18.  —  Coup-de-poing  chelléen  en  silex  jaune,  portant  des  traces  d'éclate- 
ment par  la  chaleur   solaire  (Toukh).    3j\  grandeur  naturelle lio 

Fig.  19.  —  Pointe  chelléenne  en  silex  jaune,  ramassée  a  la  surface  du  diluviuni,   à 

Toukh.    1/2  grandeur   naturelle (ii 

Fig.  20    —  Pointe  chelléenne  en  silex  jaune  (Abydos).    1/2    grandeur  naturelle.        (3i 
Fig.   21.  —  Eclat  chelléen  de  silex  jaune,  ramassé   à   la    surface    du  diluvium,  à 

Toukh.  1/2  grandeur  naturelle 61 

Fig.  22.  —  Racloir  chelléen  en  silex  jaune,  ramassé  à  la    surface   du  diluvium,  à 

Toukh.  1/2  grandeur  naturelle Gi 


274  TABLE  DES  ILLUSTRATIONS 

Pages. 

Fig,  23.  —  Coup-de- poing  cliellécn,  ramasse  :i  la  surfiice  du  diluviiiin,  à  Abydos. 

3/4  g'"''>"c'p'i'"  "^lurelle. (ia 

Kig.  a4.  —  Coup-de-poing  chelli'cn  en   silex  jaune,  ramassé  à  la  surface  du  dilu- 

viuni,  à   Abydos.  3/4   grandeur  naturelle G> 

Fig.  T.").  —  Coup-de-poing  chelléen  en  silex  jaune,  ramassé  à  la  surface  du  dilu- 

vium,  à  Abydos.  3/4  .çi^indeur   nalurelle.      .....  (i'| 

Fig.  lifi.  — Coup-de-poing  chelléen,  ramassé   à  la  surface  du  diluvium.  à  Dimoli 

(Fayoum).  3/4  grandeur  naturelle (i'i 

Fig.  27.  — ■  Pointe  chelléennc  en  silex  brun,  ramassé  à  la  surface  du   diluvium,  à 

Abydos.  3/4  grandeur  nalurelle. G'i 

Fig.  aS  et  29.  —  Coups  de-poing   cliclléens   en    silex  jaune   (Abydos  el  Toukh). 

1/2  grandeur   nalurelle (î,') 

Fig.  3o  et  3i.  —  Racloirs  chelléeus  en  silex  jaune,  ramassés  à  la  surface  du  dilu- 
vium,  à  Toukh.   12  grandeur  nalurelle li.') 

Fig.  32.  —  Eclat  chelléen   de  silex   jaune,  ramassé    à    la   surface   du   diluvium,  à 

EI-"Ararah.    3/'^  grandeur  nalurelle Gfi 

Fig.  33.  —  Carte  des  principales  stations  néolilliii:|ues  de  l'Egypte GS 

Fig.  34.  —  Coupe  du  Fayoum  et  de  la  vallée  du  Nil y'i 

Fig.  35.  —  Sépulture  pi-éhistorique  (nécropole  de  El-' Amrah).  1  20  .grandeur  nalu- 
relle      85 

Fig.Si,  52  et  53.  —  Nucléien  silex  (kjo'kkeumœddings  de  Toukh) 30 

Fig.  54  et  55.  — •  Nucléi  en  silex  jaune  (kjœkkenraœddings  de  Toukh).   1/2  gran- 
deur naturelle <)  i 

Fig    56  et  5S.  —  Percuteurs   en   silex  gris  jaune  fkjœkkenm  r  I  lings   de  foukh). 

1/2  grandeur  naturelle.      .      .  gi 

Fig.  5-.  —  Percuteurs  en  silex  gris  (El-Kab).  1/2  grandeur  naturelle    ....        gr 

Fig.   5(1  à  I)!.  —  Hachettes  en   silex  jaujie  et  en  silex  bruu  (kjœkkenraœddings  de 

Khaltarah  et  de  Toukh).    i/2grandeui-  naturelle ga 

Fin-.   ()'(  el  (Î5.  — Hachettes  en  silexbruD  (kjickkennHcddings  deToukh).  1/2  gran- 
deur natui'elle gT 

Fig.  (3IÎ  et  67.  —  Hachettes   dégrossies  en  silex  brun  el  en  silex  gris  (kjrtkken- 

raœddings  de  IChattarah).  1/2  grandeur  naturelle g 3 

l'ig.  GS.  —  Hache  eu  silex  jaune  veiné  de  brun  (kjœkkenmœddings  de  Zawaïdah) 

I  '2  grandeur  naturelle g') 

Fig.  ()C).  —  Hache  en  silex  brun  (kjiekkenmccddings  de  Toukh).   1/2  grandeur  na- 
lurelle  94 

Fi"-,  -o.  —  Hachclleen  silexjauiK'(kjœkkeum(eddings  de  Toukh).  1/2  grandeur  na- 
turelle  g') 

Fig.  ni.  —  Hachelle   en  silex  jaune  clair  (kjoîkkenmo'ddings  deToukh).  i    2  grau 

ileur  naturelle -      .        g'( 

Fig.  72  et  73.   —  Hachettes  en  silex  gris  et  en  sile.x  jaune  (kjœkkenraœddings  de 

Toukh).   1/2  grandeur  nalui-elle . y5 

Fig.  7'| ,  —  Hachette  en  silex  jaune  (kjcikkenmœddings  de  Toukh)     i/2graudeur 

deur  naturelle     . g5 

Fig,   75.   —  Ilarhelte  en  silex  brun  d'un  coté,  jaune  de  l'autre  (kjojkkenmn.>ddings 

de  Kliattarah).   1/2  grandeur  naturelle gS 

Fig.  76.  —  Hache  en  silex  jaune    (Akhmim,  Musée  de  Guizeh).  r/2  grandeur  na- 
turelle  \fi 

Fig.   -y.  —    Hache    eu    sihx  jaune   (llociu,    llaule-Egypte).     i '2   grandeur    iialu- 

i-plle. g7 


1 1)  [ 


loi 
lo! 


TAiii.r,  î)i".s  HJ.rsi  r.ATioxs  275 

l'.igcs. 

Kig.  78  à  cSo.    —  lliiclieltes  en  silex  jaune,  en  silex  hniii   |>i)li  an   liajirliaiit  il   c-m 

silex  noir    (stalion  do  Kom-AcliimV    i   ■>.  giandenr- nalnrcll.' ç)- 

Fig.  Si  et  8a.  —  Haches  en  silex  hiiin  |M)li  au    li-auclianl  (slaliori  de    Koui-Ac-Iiiin 

et   de  Oinioh).   i/'>,  grandeur  nalurelle c)7 

Fig.  8Î  el  8'|.    -     Haches    polies  en  diorile  el  en    serpcnliue   l'IiidkkcniriciMlilings 

de  Toukli  ri  localilô  inconnue.  Musée  de  Gnizeh)    /('T'  grandeur  naUirello      .        ()8 

Fig.    8.")     et     811      —     llaclielles    en    hématite    et    ou   diorile  (localilé  inconnue  l'I 

achelée  à  Tlièlics,   .Musée  de  (iuizeli).    \;  !  ni'audfur  nalurelle c|i) 

Fig.  87  et  88.  —    Haches  polies   en    héniatilc    el     eu     diorile  (localilés  inconnues, 

Musée  de  (iuizeli).  2/ j  grandeur  nalurelle (|i| 

Fig.  8g  et  f)0.  —  Haches  en  silex  jaune  (station  de  Lichl).  i/->.  gramleur  natu- 
relle  roii 

Fig.  91.  — Haches  en    silex  jaune  (station  de  Llclil).  1/2  grandeur  natui-elle    . 

Fig.  ,j;,     —  Hache    en  silex  (Kahoun,  d'après    Fi.  l'cirie.    Illiiliiiii,    A'nlu.ii    inicl 

Ciiroh,  pi.  VIII,  (ig.  4).  1/2  grandeur  naturelle 10 

Fig.  ai.  —  Hache  en  bronze  (Kahoun,  d'après  l'I.  l'elrie,  J/liiliiiii,  Kii/iini  iiinl 
Giiioh,  p\.  \lï,  Rg.   19).  I '2  grandeur  naturelle. 

Fig.  94.  — Hache  en  silex  jaune  (stalion  de  Lichl).  12  giandeur  nalurelle. 

Fig.  9').  — •  Éclat  de  silex  brun  foncé  (Tcll-el-'i'ahoudi.  près    d'iléliopolis)       i    ! 

grandeur    naturelle i03 

Fig.  9G.  —  Lame  en    silex   j.iune    (kjœkkenrnn'ddings    de    Tonkh).    1/2   grandeur 

nalurelle lo'î 

Fig.  97  à  99.  —  Lames  relouchées  en  silex  jaune  veiné  de  brun,  eu  silex  jaune  et 
en  silex  noir  (nécropole  d  .Vbydos  et  station  de  Kom-Achiiu).  1/2  grandeur 
naturelle jo'l 

Fig.   100   et   loi.   —    Couteaux  en  silex    biun  (slalion   de    Koiu-Achim,   l'ayoum). 

1/2  grandeur  naturelle io'| 

Fig.     102.  —  Couteau  en  silex  brun  (slatiou    de    Uimeli,  Fayoum).    12    grandeur 

naturelle io'| 

Fig.   io3.  —    Couteau  en  silex  jaune     (Ll-Amrach).  1 /:>.  grandeur  naturelle .      .      .      lo'i 

Fig.   io4  et  io,">.    —  Couteaux  eu  silex  jaune  (Toukh).  1/2  grandeur  naturelle   .      .      104 

Fig.  loti  et  107.  —  Couteaux  en    silex  jaune  (kjtcUkenniœddings  de   Toukh).   12 

grandeur  nalurelle lo.î 

Fig.  108.  —  Couteau  en  silex  jaune    (nécropole  de  Saghel-el-Baglieh,  Musée  de 

Guizeh).  1/2  grandeur  naturelle 106 

l'"ig.   109    —  Lame  en  silex  jaune  (nécropole  d'Abydos)    12  grandeur  naturelle   .      106 

Fig.  iio.  — Couteau  en  silex  brun  (slatiou  de  Kom-Achim,  Fayoum).  12  gran- 
deur naturelle       .... 107 

l'ig  III. —  Couteau  en  silex  blond  (slalion  de  Dimeh,  l'ayoum).  1/2  grandeur  na- 
lurelle    107 

Fig.  Ii2  à  ii5.  — Couleaux  en  silex  gris,  en  silex  gi-is  foncé,  en  silex  blanc  et 
en  silex  jaune  (station  de  Lilch  et  kjœkkenmo'ddings  de  Toukh  et  de  Zawaï- 
dah).  1/2  grandeur  naturelle 107 

Fig.   ii(5.  —  Couteau  en  jaspe  sanguin  (Hoou).    i/->.   grandeur 108 

Fig,   117,  — Couteau  en  silex  jaune  (kjœkkeumœddings  de  Toukh).  1,2  grandeui- 

naturelle 108 

F'ig.  118  à  120  —  Couteau  en  silex  jaune  foncé,  en  silex  gris  opaque  et  en  si- 
lex gris  clair  (stations  de  Dîmeh  et  de  Kom-Achim).  1/2  grandeur  naturelle.      108 

Fig.  121.  —  Couteau  en  silex  brun  veiné  (station  de  Dîmeh).  1/2  grandeur  natu- 
relle  i,i<| 


276  TABLE  DES  ILLUSTRATIONS 

rages. 
Fig.  12Î.  —  Couteau  eu  silex  gris   use    par  les   sables    (slalion   de  Kom-Achim). 

1/2  grandeur  naturelle lo;) 

Fig.  123.  —  Couteau  ensiles  brun  (station  de  Dîmeh).  i/'.>.   grandeur    naturelle.      10;) 
Fig.   124.  —  Couteau  en  silex  jaune  brun  (Abydos,  Musée  de  Guizeh).   i/a  gran- 
deur naturelle 1 10 

Fig.  12."),  —  Couteau  en  silex  jaune  (nécropole  d'Abydos).    1/2    grandeur  natu- 
relle       110 

Fig.  126.  —  Couteau  en  silex  jaune  (Abydos).  1/2  grandeur  naturelle  ....  11 1 
Fig.   127,  —  Couteau-poignard  en  silex  brun  avec   gangue  blanchâtre  (station  de 

Dinieh).    1/2  grandeur  naturelle m 

Fig.  128. — Couteau  en  silex  corné  (localité  inconnue,  Haute-Egypte  (?),  Musée 

de  Guizeh).   1/2  grandeur  naturelle 112 

Fig.  129  et  i3o,   — Couteaux  courbes  eu  silex  jauue  clair  et  en  silex  br«n  (nécro- 
pole de  Saghel-el-Baglieh).   1/2  grandeur  naturelle 112 

Fig.  i3i. — Couteau  en  silex  corné  (nécropole  d'Abydos).  1/2  grandeur  naturelle.  ii3 
Fig.  i32.  —  Couteau  en  silex  blond  (nécropole  d'Abydos).  1/2  grandeur  naturelle  ii3 
Fig,  i33. —  Couteau  en  silex  jaune,  poli   sur  une    face    (nécropole    de  Toukh). 

1/2  grandeur  naturelle ii4 

Fig.  i34>  —  Couteau  en  silex  jaune  (Haute-Egypte).  1/2  grandeur  naturelle  .      .      ii4 
Fig.  i35.  —  Couteau  en  silex  jaune  retaillé  sur  une  face,  polisur  l'autre  (nécro- 
pole de  Saghel-el-Baglieh).  1/2  grandeur  naturelle ii4 

Fig.  i3G.  —   Couteau  en  silex  blond,  orné   d'une   feuille    d'or  (nécropole    de  Sa- 
ghel-el-Baglieh ('?)).  4/5  grandeur  naturelle 11') 

Fig.  i37ài3g.  —  Couteaux  en  silex  poli  (Gournah).  2/3  grandeur  naturelle.  .  116 
Fig.  140  à  142.  —  Couteaux  en  silex  jauue  (nécropole    d'Abydos).  1/2   grandeur 

naturelle 117 

Fig,  143  à  147.  —  Couteaux  eu  silex  jaune  (nécropoles  d'Abydos  et  d'El-'Amrah 

et  kjœkkenraœddings  de  Toukh).  1/2  grandeur  naturelle 117 

Fig.  i48  à   i4o.    —    Couteaux    courbes  en   silex    jaune    (kjœkkenmœddings    de 

Khattarah).     1/2   grandeur  naturelle 118 

Fig.  i5i  à  152.  — ^  Racloirs  en  silex  jaune  (Abydos).  1/2  grandeur  naturelle  .  ,  118 
Fig.  i53  à  i55.  —  Racloirs  en  silex  gris  et  en  silex  grisâtre  (kjœkkenmœddings 

de  Toukh  et  de  Zawaïdah).   1/2  grandeur  naturelle iig 

Fig.   i5tJ  à  160.  —  Racloirs  eu  silex   jaune  (kjœkkenmœddings   de  Toukh    et    de 

Zawaïdah) 

Fig.  iGi  et  i()2. —  Racloirs  triangulaires  en  silex  brun  et  en  silex   noir  (stations 

de  Dimeh  et  de  Kom-Achim).  1/2  grandeur  naturelle 120 

Fig.    i63   à   i65.   —  Racloirs  triangulaires   en   silex   jaune    (station    de  Licht). 

I '2  grandeur    naturelle 120 

I'"ig.   166  à  167.  —   Racloirs    échancrés   en    silex    blond  (kjœkkenmœddings   de 

Toukh).  1/2  grandeur  naturelle 120 

Fig.   168.   —  Tête  de  lance  en  silex  jaune  (nécropole  d'El-'Auirah).   1/2  grandeur 

naturelle 121 

Fig.  169.  — Tête  delance  en  silex  jaune  (station  de  Licht).  1/2  grandeur  naturelle,      121 
Fig.    170   et   171.   —  Tètes  de  lances  eu  silex  jaune  clair  et  eu  silex  brun  (nécro- 
pole de  Saghel-el-Baglieh,  Musée  de  Guizeh).  1/2  grandeur  naturelle.     .     .      121 
Fig.  172,  —  Tète  de  lance  en  silex  brun  (nécropole    d'El-'Ararah).  1/2  grandeur 

naturelle 122 

Fig.  173  à  175.  —  Têtes  de  lances   eu   silex  jaune  clair,  en  silex  gris  jaune  et  en 

silex  brun  vert  (Abydos  et  El-'Amrah).  4/5  grandeur  naturelle 122 


TAiii.i:  i)i:s  ii.i.rsriiAi'in.vs  277 

I'"ig.    lyli.  —  l'oinlr   ilc  jjxc-lnl    ru   sili'X    jinnic   (slalimi  ili'    IJi'incli  ),  i/v.    griindi'ur 

nalui-i'llc     .......  ...  l'î'J 

Kig.    177  à   17;).  —  rOU's  (le  javelots  cii  si!r\  jauiio  eti'U  silex  bi'iiu  vciiiù  de  jaune 

(slalioiis  (le  l.icht  <U    de  Koni-Ai'liini).    'i/')   grandeur  naliirelle i23 

l'ig.    iHo.  —  Tê(e  de  lance  en  sile.\  jaune  (uécropole  (riîl-'Amrali)     i/'>.  j^i'andeur 

iialurolle i'>.\ 

i'ig.   181  el    1S2.  —  Tètes   de  lauces  eu   sile.v  jaune  (nérrojiole    d'Abydos.  Musée 

de    Guizeli).    i/:>.   ffrandeur   naturelle i24 

Fig.  iS'i.  —  Tèle  de  flèclie  en  silex  brun    (Tell-el-Balaniouu,  Musée  de  Gnizeh). 

Grandeur  naturelle laS 

Fig.  l84i    —  Tèle  de  flèche  eu   silc.K  jaune   (llaute-l'lgyple).    (irainleur    naturelle.      12.') 

Fig.  185  à  II)!).  —  Pointes  de  flèches  en  sile.vbrun,  en  silex  brun  rouge,  en  sile.x 
violacé,  en  silex  brnn  jaune,  en  silex  noir  corné,  en  silex  brun  veiné  de  noir, 
eu  silex  jaune,  en  silex  gris  brun  et  en  silex  viobicé  veiné  de  noir  (l)inieh  el 
Kora-Achini) ...      126 

Fig.  igt)  à  2111. —  Pointes  de  flèches  en  silexjaunàtre,  en  silex  brun  rouge,  en  silex 
gris  jaune,  en  silex  brun  jaune,  eu  silex  jaune  et  en  silex  jaune  el  gris(Toukh, 
Khattarah   et   Abydos) 137 

Fig.  202  .i  210.  —  Poijiles  de  flèches  en  cornaline  avec  inclusiojis  noiiàlres. 
eu  silex  jaune  opaque,  en  silex  jaune  rose,  en  silex  blond  opaque,  en  silex 
jaune,  en  silex  brun,  en  silex  noirâtre,  en  silex  corné  et  en  silex  blanc 
opaque  (nécropole  d'Abydos).  Grandeur  naturelle 12.8 

Fig.  211  il  223.  —  Pointes  de  flèches  en  silex  brun,  en  silex  rougeàtre,  en  silex 
bJond,  en  silex  gris,  eu  silex  gris  foncé,  eu  silex  jaspé  rouge,  en  silex  jaune, 
en  silex  corné,  en  silex  violet  et  en  silex  brun  jaune  (nécropole  d'Abydos). 
Grandeur  naturelle i2i) 

Fig.  224  et  22,ï.    -    Pointes  de  flèches  en  silex  jaune  el  en  silex  noir    (uécropole 

d'Abydos).  Grandeur  naturelle. i3o 

Fig.  226  à  23i.  —  Pointes  de  flèches  en  silex  noir,  en  silex  jaune,  en  silex  violet, 
en  silex  résinite  et  en  silex  brun  (station  d'Hélouan;  récolte  A.  Lombard). 
Grandeur  naturelle i3o 

Fig.  232.—  Mode  d'emmauchement  des  pointes  de  flèches  de  la  station  d'Hélouan.      t3i 

Fig.  233  à  237.  —  Tètes   de    flèches    d'époque     historique    (Musée  de    Guizeh). 

1/2  grandeur  naturelle i3i 

Fig.     289   à   245.    —   Scies   en   silex   jaune     (kjoukkcnmœddings  de   Toukh).    1/2 

grandeur  naturelle i32 

Fig.  246.  —  Scie  ou  partie  de  faucille  en  silex  jaune   (Tell-el-Youdi,  près  d'ilélio- 

polis).   1/2  grandeur  .naturelle ij.^ 

Fig.  247.  —  Modèle  de  mouture  des  faucilles  années  de  silex,  d'ai>rès  les  résul- 
tats des  fouilles  de  M.  W.  M.  Flinders  Pétrie,  à  Kahoun  i33 

Fig.  248.  —  Signe  hiéroglyphique  représentant   une  faucille    armée   de  silex  (i") 

d'après  une  une  fresque  de  Me'idoun  (III"  dynastie) i33 

Fig.  24ç)  à  2.")i.   —   Lames  et  scies   en    silex    jaune  et    eu  silex   blond   (kjœkken- 

mœddings  de  Toukh   et  de  Khattarah).   r/2  grandeur  naturelle  i33 

Fig.  262  à    2.'J6.  —  Lames  et  scies   en   silex  gris,  en   silex  jaune  et  en   silex  brun 

(Khattarah  et  Toukh).  i|2  grandeur  naturelle i34 

Fig.  267  à  2G0.  —  Scie  en  silex  jaune  (kjœkkenmœddings  de  Toukh).  1/2  gran- 
deur naturelle. 13/, 

Fig.  261.  —  Scie  en  silex  dans  un  long  manche  de  bois,  proveuant   des  palatiltes 

du  lac  de  Mooscedorf  (canton  de  Berne,  Suisse).    1/2  graudeur  naturelle.  134 

IS 


278  TABLE  JJES  ILLISTUATIONS 

Pages. 

Fig.  aOa  à  i!(iS.  ■ —  Scies  eu  silex  jiiuiio  clair,  en  silex  bruu  avec  paliue  blanche, 
en  silex  bi-iin  veine,  en  silex  bi'nn  et  en  silex  rouge  brun  (stations  de  ïoukh, 
de  Dîniehetde  Kom-Achim).   1/2  grandeur  naturelle '^o 

Fig.  26c)  à  271.  —  Scies  en  silex  brun,  eu  silex  jaune  et  eu  silex  noir  (stations  de 

Kom-Achini  et  de  Dimeh).  1/2  grandeur  naturelle i^' 

Fig.  27a  et  273.  —  Racloirs-scies  en  silex  jaune  (nécropolo  d'Abydos).  grandeur 

naturelle .     .      i35 

Fig.  274.  —  Scie  eu  os  (localité  incouuue,  Musée  de  Guizeh).  2/3  grandeur  natu- 
relle  i36 

Fig.  275  à  ayli.  —  Pointes   eu  silex  jaune  (kjœkkeuiuceddiugs    de  Zuwaïdali  et  de 

Toukii).  1/2  grandeur  naluroUe •      1^7 

Fig.  277  et  278.  —  Pointes  en  silex  noir  et  eu  silex  jaune  (kjœkkenmœddings  de 

Toukh).2/3  grandeur  naturelle 1^7 

Fig.  279  à  281.  —  Pointes  eu  silex  gris  avec  inclusions  calcaires,  eu  silex  tacheté 
de  noir  avec  patine  calcaire  et  en  silex  gris  (kjœkkenmœddings  de  Zawaïdah, 
Toukh  et  de  Khattarah).  1/2  grandeur  naturelle i38 

Fig.  282  à  286.  —  Pointes     en  silex  jaune  et  en  silex   bruu  et  jaune  (statious  de 

Kom-Achim  et  de  Dîmeh),  1/2  grandeur  naturelle i38 

Fig.  287  et  288.  —  Pointes  en  silex   jaune  veiné   de  noir    et  eu   silex  jaune    avec 

gangue  brune  (stations  de  Dîmeh  et  de  Kom-Achim).  1/2  grandeur  naturelle.      i39 

Fig.  289  et  290.  —  Pointes  eu  silex  jaune  et  en  silex  jaune  avec  patine  noire  (sta- 
tions de  Dîmeh  et  de  Kom-Achim).  4/5  grandeur  naturelle i39 

Fig.  291  à  agS. —  Poinçons  en  silex  (kjœkkenmœddings  de  Toukh).  1/2  grandeur 

naturelle i4o 

Fig.  296  à  299.  —  Tranchets  eu  silex  brun  (stations  de  Kom-Achim  et  de  Dîmeh). 

1/2  grandeur  naturelle i4o 

Fig.  3oo.  —  Silex  gris  jaune    (kjcckkeumœddiiigs    de  Toukh).  i/a  grandeur  uatu- 

i-ellc i^i 

Fig.   3oi  et  3o2    — Retouchoirs  eu  silexjauue  (kjœkkenmœddings  de  Toukh).  1/2 

grandeur  naturelle i4i 

Fig.  3o3  à  3oy.  —  Poinçons  en  os  et  en  ivoire  d'hippopotame  (kjokkenmœddings 

de  Toukh  et  station  de  Dimeh).  1/2  grandeur  naturelle i^i 

Fig.  3ro  à  3i5.  —  Instruments  eu  os  (nécropoles  d'El-'Amrah  et  de  Saghcl-el-Ba- 

glieh) 142 

Fig.  3i(;  à  3iS.  —  Massues  eu  pierres  et  eu   albâtre   (El-'Amrah),   1/2  grandeur 

naturelle i45 

F^ig.  319  et  32o.  —  iypo  d'emmauchement  des  massues i43 

Fig.  321  et  332.   —   Massues  en  alb.àtre   (nécropolo  d'El-'Amrah).    1/2  grandeur 

naturelle i43 

Fig.  SaS.  — Mode  d'emmauchement  desmassues  on  albâtre i'|3 

Fig.  3a4.  —  Pilon  en  calcaire  (kjœkkenmœddings  de  Toukh).  1/2  grandeur  natu- 
relle  i44 

Fig.  325.  — Moulin  à  bras  (statuette  de  Dahchour) i44 

Fig.  326  et  327.  —  Colliers  formés  d'oursins  fossiles  et  collier  de  perles  de  ser- 
pentine (nécropole  d'El-Toukh).  1/2  grandeur  naturelle i4I3 

Fig.  3a8  à  332.  —  Perles  en  terre  cuite  et  en  calcaire  blanc  (kjœkkenmœddings  de 

Toukh).  1/2  grandeur  naturelle i45 

Fig.  333  à  335.  —  Bracelets   on   albâtre,   ou  silex   jaune  et  eu    nacre  (nécropoles 

d'El-'Amrah  et  .d'Abydos).   i/a  grandeur  naturelle 14/ 

F'ig.  336  à  342.  —  Peignes   d'os  et  d'ivoire  (kjœkkenmœddings  do   Toukh  et   de 


l'ABIJ-:  Ul'S   ir.IX'STRATIO-XS  279 

l'.l(,'08. 

Zawaïdiili  cl  m'ciopolc  de  Satflii'l-rl-I5:mlicli,  Musée  dcGui/.oli),  i  '.îgriiiKlcnr 
naturelle i\y 

l'iR.  34'}.   l'eif^iie  en  ivoire?   (néer'opoli'  do  Sai^licI-cl-Bat^rlieli.    iVIuséo   do  Giiizeli). 

i/'J  grandeur  naturelle .      ,      i'|8 

l''ig.  344-  —  Epingle  en  ivoire  (néorupole  de  Sagliel-el-Baglieli,  Musée  dcGuizeli). 

2/3  grandeur  naturelle i4S 

Fig.  345.  —  Pointe  eu  hois  (kja'kkcunueddins^s  de  Toukii).  2/3  grandeur-  natu- 
relle  1 48 

l'ig.  34'J  et  347.  —  Petites  cuillères  en  nacre  et  os  (Saghel-el-Baglieh).  2/3  gran- 
deur naturelle i  '(«H 

Fig.  348.  —  Pommeau  d'armes  en  ivoire  (Saghel-el-Baglieh).  i/3  grandeur  natu- 
relle  i'|8 

F'ig.  349  à  Syr.  —  Figurines  en  schiste  (nécropoles  d'El-'Amrah,  d'Abydos  et  de 

Toukh).  i/io  grandeur  naturelle iSo 

Fig.  372.   —  F'igurine  d'hippopotame  en  calcaire  (nécropole  de   Gebel-el-Tarif). 

4/5  grandeur  naturelle i.'>i 

Fig.  373.  —  Figurine  en  terre  cuite  jaune,  découverte  dans  la  nécropolo  de  Ge- 
bel-el-Tarif (Musée  de  Guizeh).  4/5  grandeur  naturelle I.'ii 

Fig.  374  à  388.  —  Vases  en  terre  rouge  lissées  en  terre  rouge  très  grossière, 
en  terre  rouge  grossière,  en  terre  noire  lissée,  en  terre  rouge  lissée  et  noire 
à  l'intérieur,  en  terre  rouge  clair  lissée  et  en  terre  brune  très  grossière 
(EI-'Amrah  etToukh).  1/8  grandeur  naturelle i52 

Fig.  389  à  4o4.  —  Vases  en  terre  lissée  noircie  au  feu,  en  terre  rouge  clair  lis- 
sée, enterre  rougeàtre,  en  terre  brune  grossière,  en  terre  rouge  lisse  noire 
à  l'intérieur,  eu  terre  rouge,  en  terre  rouge  lissée  à  bords  noirs,  en  terre 
rouge  lissée,  en  terre  rouge  à  bord  noir  fait  à  la  main,  en  terre  rouge  lissée 
et  fond  de  vase  coupé,  en  terre  gris  clair  et  en  terre  grossière  fait  à  la  main 
(El-'Amrah,  Toukh  et  Zawa'idah).  r/8  grandeur  naturelle.  ir)3 

Fig.  4i5   à   423.   —   Vases    en    terre    grossière   (nécropoles     d'El-'Amrah    et   de 

Toukh) i54 

Fig.   42^  ''  4^i' —  Vases  enterre  grossière   des    mastabas    de    la   nécropole   de 

Dahchour  (III"  dynastie).  2/i5   grandeur   naturelle i55 

Fig.  432   à  440'  —  Vases   en  terre  grossière  des   mastabas    de    la    nécropole  de 

Dahchour  (III"  dynastie).  2/1 5  grandeur  naturelle i.îfi 

Fig.  44'  ''  449-  —  Vases   en   terre    grossière    des    mastabas   de   la   nécropole  de 

Dahchour  (IIP  dynastie).  3/2o  grandeur  naturelle i.'iy 

Fig.    ![ôo.  —   Petits  vases   en    terre  grossière,  découvert  dans   les    mastabas    de 

l'époque  de  Snéfrou  (IIP  dynastie),  à  Dahchour.  2/3  grandeur  naturelle.      .      i.')8 

PI.  I.  —  Vases  en  terre,  Nos  ,  à  y  (Abydos,  El-'Amrah  et  Khattarah)     .      .      .      .      iTiH 

Fig.  4*'i  à  470.  —  Vases  en  terre  rouge  lisse  avec  bords  noirs  (nécropole  d'El- 
'Amrah).  2/i5   grandeur   naturelle 169 

PI.   II.  —  Vases  en  terre.  Nos  [  à  5   (Gébelein). i.'k) 

PI.  III.  —  Vases  en  terre,  Nos  ,  à  fi  (Gébelein  et  El-'Amrah) iTip 

Fig.  471  ^  480.  —  Vases  en  terre   rouge  avec  bord   noir  (nécropole  de  Toukh  et 

kjœkkenmœddings   de   Toukh  et  de  Khattarah).  3/24  grandeur  naturelle.      .      ifio 

Fig.  481.  — Vases  en  terre  jaune  orné  de  peintures  rouges  (nécropole  de  Gebel- 
el-Tarif,  Musée  de  Guizeh).  2/5    grandeur   naturelle. ifio 

PI.  IV.  —  Vases  en  terre,  Nos  ,  ;,  3  (El-'Amrah  et  Abydos) 160 

PI.  V.  —  Vases  en  terre,  Nos  j   à  3  (El-'Amrah  et  Abydos) 160 

PI,  VI.   —  Vases  en  terre,  Nos  1   à  S  (Toukh   et    El-'Amrah) iCm 


280  TABLE  Dl-S  ILLUSTRATIONS 

Pages. 

PL  vu.    -  Vases  en  terre,  N"-^  I  à  4  (Toukh  et  EI-'AiihmIi) i6o 

l'L  Vin.  —  Vases  en  terre,  iV"s  ,  et?.  (Abydos  et  Gébelein) ifio 

PI.  I.X^.   —  Vases  en  terre,  Nos  là  .4  (Haute-Egypte,  Gébelein  et  loralité  ineonnue).      iGo 
Fig.  482  et  4^^-—  Fragments  de  vases  (kjœkkenmreddings  de  Toukii).   1/2  gran- 
deur natui'elle .      .      .      lOi 

Fig.  484  à  485-  — ■  Objets  divers  en  terre  cuitte  (kjœkkenmœddings    de   Tonkh  et 

nécropole  d'El-'Amrah).     1/2  grandeur   naturelle 161 

PL   X.    —  Vases  en  terre,  Nos  i  à  3  (localité  inconnue  et  Abydos) 161 

PL  XI.  — Vase  découvert  dans  un  mastaba  de  l'époque  du  roi  Snéirou  .  .  .  l'Ji 
Fig.  487.  —  Graffiti  gravés  sur  les  rochers  de  Gebcl-lletemat  (Haute-Egypte)  .  itîa 
Fig.  488.  —  Graffiti  gravés  sur  les  rochers,  à  Khôr-es-Salam  et  EI-Hôsch     .  ifi2 

Fig.  489.  —  Graffiti  gravé  sur  les  rochers,    à   Raoualièh,  à   Gebel-Recliidi  et  à 

El-Hôsch  (Haute-Egypte) .      .      iG'i 

Fig    4;)0'  —  Grrt/Tî'î  tracés  sur  les  rochers  de  Gebel-Hetemat lG3 

Fig.  491 .   —  Graffiti  gravés  sur  les  rochersde  Gebel-Cheikh  Roama  et  de  Chatt- 

el-Rigal  (Haule-Égypte) 164 

Fig.   492.  —  Graffiti  gravés  sur  les  rochersde  Chatt-el-Rigal  (Haute-Egypte)     .      164 
Fig.  493  à  49'' •  —  Fusaïoles  :  fragment  de  vases  en  terre  rouge   très    grossière, 
en  terre  brune  foncée  avec  dessins  peints  en  rouges,  fragment  de  vase  rouge 
orné   d'un  bord    noir,    fragment    de    vase  jaune   orné   de   peintures    jaunes 

(kjœkkenmœddings  de  Toukh) 1(54 

Fig.  497-  —  Bas-relief  du  tombeau  de    Mera,  à  Saqqarah,  représentant  la  fabri- 
cation des  vases  de  pierre  (VI*  dynastie) lO.'S 

Fig.  498  à  5o2.    —  Vases  en  pierre  (nécropole  d'El-'Anirah)     . itîfi 

Fig.  5o3  à   507.  —  Oiseaux  égyptiens  figurés  sur  les  hiéroglyphes  des  fresques 

de  Mcïdoum  (III'  dynastie) 170 

Fig.  .'J08.  —  Scène  de  chasse  au  boumerang  dans  les  marais.   Bas-relief  du  tom- 
beau de  Mera,  à  Saqqarah    (VI«  dynastie) 170 

Fig.  .'iog.    —  Le  bétail  à  l'Ancien  Empire  :  antilopes.   Bas-relief  du    tombeau  de 

Mera,  à  Saqqarah  (VI°   dynastie) 171 

Fig.  ,5io  à  5i2.  —  Antilopes,  d'après  une  fresque  de  Meïdoum  (III*  dynastie)  172 

Fig,   ."SiS.    —  Le  bétail  à  l'Ancien  Empire  :   antilopes,  gazelles,  hyènes,  chacals, 

etc.  Bas-relief  du  tombeau  de  Mera,  à  Saqqarah  (VI*  dynastie) 173 

Fig.  .'S14.   —  Lions  et  chiens  en  chasse.  Bas-relief  du  tombeau  de  Mera,  à  Saq- 
qarah   (VI"  dynastie) 173 

Fig.  5i5.  —   Scènes  de  chasse,  d'après  les  fresques   des  mastabas    de  la   nécro- 
pole de  Meïdoum  (III"  dynastie) 174 

Fig.  5ilî  et  617.  —  Bas-relief  du  mastaba  de  Mera,  VI'  dynastie  (Saqqarah)  .      .      17.") 
Fig.   !Si8.   —  Scènes  de  pèche.  Bas-relief  d'un  tombeau    de    Mera,     à    Saqqarah 

(VI*    dynastie) 176 

Fig.  fiig.  —  Débarquement  du  poisson  après  la  pêche.  Fresques  du  tombeau  de 

Ani-Suéfrou  Mert-f,  à  Dahcliour  (III"  dynastie) 177 

Fig.   ,')2o.  —   Séchage  et  ti'ansjiort  du  poisson,  d'après  une  fresque   de  Me'i'doum 

(III»  dynastie) 177 

Fig.  .S21.    —    Le  bétail   à    l'Ancien    Empire  :    bœufs.  Bas-relief   du  tombeau  de 

Mera,  à   Saqqarah  (VI*    dynastie). 177 

Fig,    522.  —  Construction  d'une  meule  de  blé,    d'après  les    fresques  d'un  mas- 
taba de   lu  nécropole  de  Dahchour  (III*  dynastie) 178 

Fi"^.  523  et  524.  —   Porteurs  d'offrandes.   Bas-reliefs    du   tombeau   de  Mera,    .à 

Saqqarah    (VI*  dynastie) 178 


TABLE  DES  ITJ.USTRATIONS  281 

Page». 
Fig.  52r>.    —  Mastab:\s    de    naliclionr  (Siu-froii,  III*  dynaslii').  ....      )83 

Fig.  S'iG.  —  Tèles  huniaiiH'S  ('il;ui-lts  sur  los  fri'scpios  ilo  rc'|io'[iii'  du   loi  Siii'frou 

(III»  dynastie),  à  Dalicliour r<)7 

Fig.  5a7.   —  Bas-i'olinf  du  tombi-aii    de    Mera  (VI°    dynastie),    repi-és(>nlaMt   le 

travail  des  métaux  précieux 19'' 

Fig.  528  à  535.  — Objets  divers  en  i-uivre  el  eu  hi-ouzc  (uécropole  d'El-'Aïui-ali. 

kjœkkenniœddings  de  ïoukh).  v./'i  grandeur  uat'urolle .      200 

Fig.  536.  —  Tète  de  lance  en  bronze  (nécropole  de  Saghel-el-Baglieh,  Musée  de 

Guizeh).  2/3  grandeur  naturelle 2(>i 

Fig.  537   à   539.    —   Instruments    en    bronze    (nécropole    d'ICl-Clieikli-Mebader, 

XVIII»  à  XX»  dynastie),  r/2  grandeur   naturelle.     . aoi 

Fig.  5/10.  —  Poignard  d'Usertescn  III  (XII"  dynastie).     . 202 

Fig.    541.    —   Instruments   en    bronze.    Tombeau    des    princesses    à     Dahchour 

(XII°  dynastie,  époque  d'Amenemliat  II) 2o3 

Fig.  542.  —  Hache  en  bronze  (localité  inconnue.  Musée  de  Guizeh).  1/2  grandeur 

naturelle . 2o3 

Fig.   543.  —   Haches  eu  bronze  de  la  XII°  dynastie  (mastabas  de  Licht).  1/2  gran- 
deur naturelle     ...... 2o4 

Fig.  544  ■'  540.  —  Haches    en   bronze   (localités  inconnues,    Musée  de    Guizeh). 

1/4  grandeur  naturelle 20:) 

Fig.  547  et  548.  —  Haches    en  bronze    (localités  inconnues,   Musée  de  Guizeh). 

1/4  grandeur  naturelle  et  1/2  grandeur  naturelle 2o5 

Fig.    549.   —  Hache  en  bronze   emmanchée    (Deïr-el-Bahri,  Musée  de  Guizeh). 

1/4  grandeur  naturelle ,     2(>fi 

Fig.   55o.  —  Hache  en  bronze  emniaucliée  (localité  inconnue,  Musée  de  Guizeh). 

r/2   grandeur  naturelle 206 

Fig.  55i  à  555.  —  Instruments  en  bronze  (localités  inconnues,  Musée  de  Guizeh). 

1/2  grandeur  naturelle 2ofi 

Fig.  556.   —  Hache  en  bronze  à   deux  tranchants  (Gébelein.    Musée   de   Guizeh). 

1/2  grandeur  naturelle 207 

Fig.  557    à    558.   —    Poignards    en    bronze    (localité   inconnue.    Musée   Guizeh). 

1/3  grandeur  naturelle 207 

Fig.  559  à  564.  —  Couteaux  en  bronze  d'époque  historique  (localités  inconnues, 
Tell-el-Chorab  et  Fayoum,  XIX»  dynastie,   Musée  de  Guizeh).   i/4  grandeur 

naturelle  et  1/2  grandeur  naturelle     . 208 

Fig.  565.  —  Tète  de  lance  en   bronze  (localité   inconnue,  Musée  de  Guizeh).  i/4 

grandeur   naturelle aoç) 

Fig.  566.    — Tète    de   lance  en   bronze,   XII»    dynastie  (mastabas  de  Licht).  2/3 

grandeur  naturelle ooi) 

Fig.,  567  à  579.  —  Pointes   de   flèches  en  bronze   d'époque    hislorique  (localités 

diverses,   Musée  de  Guizeh) 2rn 

Fig.  58o  à  582.    —  Spatules    en    bronze,    Musée    de    Guizeh    (Kahoun,    Tell-el- 
Chorab,     Fayoum,     XIX»     dynastie     et    localité     inconnue).     1/2    grandeur 

naturelle 21  r 

Fig.  583.   —  Rasoir  en  bronze  (localité  inconnue).  i/4  grandeur  naturelle.      .      .      211 
Fig.  584.   —  Herminette  en   fer    emmanchée    en    bois  (Deir-el-Bahri,  Musée  de 

Guizeh).  1/2  grandeur  naturelle .214 

Fig.  585.  —  Lame  d'herminetle  en  fer  (Akhmim,  Musée   de  Guizeh).   1/12  gi-an- 

deur  naturelle 21 4 

Fig.  586.    —    Carte    de    la   péninsule    sina'itique -216 


282    ■  TABLE  DES  ILFX'STRATIOiNS 

Pages. 

Fig.  5*^7.  —  Coupe  de  la  région  minière  de  Wadi-Magliar.i 2r8 

Fig.  588.  —  Croquis  topographique  de  Wadi-Maghara 22 r 

Fig.  589  et  590.  —  Ciseaux  en  silex  jaune  rouge    (Serabit-el-Kliadom,   Sinaï).    t/a 

grandeur  naturelle 22a 

Fig.  bç)i.  —  Hache  grossière    en  silex   hrun   rouge   (Serabit-el-Khadem,   Sinaï). 

1/2  grandeur  nalurellc. 222 

Fig.  5q2.  —  Tête  de    pointerollc    eu    bronze  trouvée  dans  les    ruines  de   Wadi- 
Maghara  (Sinaï) 222 

Fig.  593.  —  Moule  pour  couler  les  lames  de  bronze   (Wadi-Maghara).   1/2   gran- 
deur naturelle     . 229 

Fig.  .S94.  —  Stèle  triomphale  du  roi  Snéfrou  (III^  dynastie),  gravée   sur  les   ro- 
chers de  Wadi-Maghara  (Sinaï) 233 

Fig.  ^()h.   —  Stèle  triomphale  du  roi  Sahou-Ra  (V"  dynastie)  gravée  sur  les  ro- 
chers de  W  adi-Maghara  (Sinaï) 233 

Fig.  5g6.  —  Stèle  triomphale  du  roi  Pepi  !'"'•  (VI'=  dynastie), gravée  sur  les  rochers 

de  Wadi-Maghara  (Sinaï) 253 

Fig.  Sgy.  —  Stèle  du  roi  Pepi  II  (Vl^  dynastie),  gravée  sur  les  rochers  de  Wadi- 
Maghara  (Sinaï)  . 236 

Fig.  59S. —  Cercle  de  pierres  (Gebel-Geuamieh,  dans  le  désert  à  l'est    d'Edfou).     236 
Fig.  Sgg  et  600.  —  Crâne  du  squelette  humain  N°  3  (El-'Amrah)    .....  25i 

Fig.  601.  —  Crâne  du  squelette  humain  IN"  5  (El-'Amrah) .      255 

Fig.  fio2     —  Crâne  du   squelette  humain  No  6  (El-'Amrah) .     258 

Fig.  (;o3  et  f!o4.  —  Crâne  du  squelette  humain  ÎV»  S  (El-'Amrah)       .....      259 


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